(1767) Salon de 1767 « Sculpture — Vassé » pp. 323-324
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(1767) Salon de 1767 « Sculpture — Vassé » pp. 323-324

Vassé

Je n’aime pas Vassé ; c’est un vilain ; mais rappellons-nous notre épigraphe, sine ira et studio. soyons justes, et louons ce qui le mérite, sans acception de personne.

une Minerve appuyée sur son bouclier, et prête à donner une couronne. figure de 6 pieds de proportion.

Elle est assise et de repos, la jambe droite croisée sur la jambe gauche, le bras gauche nu, tombant mollement, et la main allant se poser sur le bord de son bouclier ; le bras droit aussi nu, amené avec le même naturel, la même grâce, la même mollesse et presque parallèlement au premier, vers la cuisse où la main tient négligemment une couronne. Elle a son casque et sa cuirasse ; elle regarde au loin, comme si elle y cherchait un vainqueur à couronner. La draperie simple, à grands plis, marque bien le nu aux cuisses et aux jambes.

Elle est sévère de caractère, belle, mais plus belle de face que de profil ; le profil est petit.

Plus on s’y arrête, plus on aime cette figure. Il y a de la souplesse dans les membres. Elle est peut-être un peu trop ajustée ; une Minerve plus simple de vêtement en serait encore plus noble. C’est un beau morceau, sage et non froid, excellent, à mon gré, de position. La position en général étant donnée, il y a un certain enchaînement dans le mouvement de toutes les parties, une certaine loi qu’elles s’imposent les unes aux autres, qui les régit et qui les coordonne, qu’il est plus aisé de sentir que de rendre. La Minerve de Vassé, la baigneuse d’Allegrain ont supérieurement ce mérite dont je ne pense pas qu’un morceau de sculpture puisse se passer, et dont plusieurs artistes n’ont pas la première idée. C’est la nécessité de cette sympathie générale des membres qui fait qu’une femme assise l’est de la tête, du cou, des bras, des cuisses, des jambes, de tous les points du corps et sous tous les aspects ; ainsi d’une figure debout, d’une figure nue, d’une figure occupée de quelque manière que ce soit. Cette Minerve est svelte, sa tête est bien coëffée et son casque de bonne forme. la comédie. du même.

Figure petite, faite avec peu de soin et d’expression. une nymphe endormie. du même.

Très-médiocre. Je n’ai point apperçu ces deux morceaux. Mauvais signe. le comte De Caylus en médaillon. du même.

Le comte De Caylus est beau, vigoureux, noble, fait avec hardiesse, bien modelé, bien ressenti, chair, beaux méplats, le trait pur, les peaux, les rides, les accidens de la vieillesse à merveille. La nature a été exagérée, mais avec tant de discrétion que la ressemblance n’a rien souffert de la dignité qu’on a surajoutée.

Il reste encore dans les longs plis, dans ces peaux qui pendent sous le menton des vieillards une sorte de mollesse, ce n’est pas du bois, c’est encore de la chair. C’est dommage que Vassé n’en ait pas fait la remarque. le portrait en relief de feu l’impératrice de Russie . du même.

Le médaillon d’élisabeth est moins beau, mais il était aussi plus ingrat. Le ciseau y est un peu sec ; les cheveux sont bien attachés sur sa tête, qui n’est pas sans majesté. Mais pour en dire mon avis, ce vêtement qui étale et fait bouffer cette énorme paire de tétons aura toujours à mes yeux un air barbare et de mauvais goût. Eh ! Qu’on les laisse se soutenir d’eux-mêmes dans la jeunesse, ou s’en aller librement dans l’âge avancé. Nature !

Nature ! C’est la contrainte qu’on te fait souffrir, pour te montrer comme tu n’es pas, qui gâte tout. Vérité de costume, fausseté de nature.

La bordure de ce médaillon d’élisabeth est un chef-d’œuvre de grand goût de dessin, et d’excellente exécution.