(1761) Salon de 1761 « Peinture —  Chardin  » p. 143
/ 1972
(1761) Salon de 1761 « Peinture —  Chardin  » p. 143

Chardin

On a de Chardin un Bénédicité ; des animaux ; des vanneaux ; quelques autres morceaux. C’est toujours une imitation très fidèle de la nature, avec le faire qui lui est propre ; un faire rude et comme heurté ; une nature basse, commune et domestique. Il y a longtemps que ce peintre ne finit plus rien. Il ne se donne plus la peine de faire des pieds et des mains. Il travaille comme un homme de qualité qui a du talent, de la facilité et qui se contente d’esquisser sa pensée en quatre coups de pinceau. Il s’est mis à la tête des peintres négligés, après avoir fait un grand nombre de morceaux qui lui ont mérité une place distinguée parmi les artistes de la première classe. Chardin est homme d’esprit, et personne peut-être ne parle mieux que lui de la peinture. Il y a au salon de l’Académie, un tableau de réception qui montre qu’il a entendu la magie des couleurs. Il a répandu cette magie dans quelques autres compositions où se trouvant jointe au dessin, à l’invention, et à une extrême vérité, tant de qualités réunies en font dès à présent des morceaux d’un grand prix. Chardin a de l’originalité dans son genre. Cette originalité passe de sa peinture dans la gravure. Quand on a vu un de ses tableaux, on ne s’y trompe plus ; on le reconnaît partout. Voyez sa Gouvernante avec ses enfants, et vous aurez vu son Bénédicité.