GALLAND, [Antoine] né dans la Picardie en 1646, mort en 1715.
La Traduction des mille & une Nuits, est le fruit de son habileté dans les Langues Orientales. Ces Contes, faits pour amuser des enfans, ne laissent▶ pas d’être lus avec avidité, parce que tous les hommes s’enflamment aisément pour le merveilleux, & que la fécondité qui caractérise l’imagination arabesque, y a répandu certains traits capables de flatter un moment les esprits. Malgré cela, ils sont diffus, foiblement écrits, & insipides. La lecture de ces bizarreries n’a pas été cependant inutile à plusieurs Gens de Lettres. Les uns y ont puisé le sujet d’une Comédie ou d’un Opéra comique ; les autres, le sujet d’une Fable, d’une Nouvelle ou d’un Roman.
Les Contes des deux premiers volumes commençoient tous par ces
mots : Ma chere Sœur, si vous ne dormez pas,
faites-nous un de ces beaux Contes que vous savez. Des jeunes
gens, ennuyés de cette éternelle répétition, en firent une critique, où
la
plume n’entra pour rien, & qui
corrigea l’Auteur. Ils allerent une nuit d’hiver frapper à la porte de
M. Galland, qui courut en chemise à la fenêtre pour
savoir ce qu’on vouloit. Après l’avoir ◀laissé se morfondre pendant
quelque temps, en lui demandant toujours s’il étoit M. Galland lui-même, Auteur des mille & une Nuits, &
celui-ci leur ayant répondu qu’oui : Monsieur Galland
, lui dirent-ils,
si vous ne dormez pas,
faites-nous un de ces beaux Contes que vous savez
.
Ces mille & une Nuits nous ont attiré un déluge d’autres Contes, qui, pour la plupart, sont si insipides, qu’on pourroit dire, au contraire, à leur Auteur : Dormez, & ne nous faites point de Contes.