(1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Louÿs, Pierre (1870-1925) »
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(1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Louÿs, Pierre (1870-1925) »

Louÿs, Pierre (1870-1925)

[Bibliographie]

Astarté (1899). — Les Poésies de Méléagre (1893). — Léda (1893). — Chrysis (1893). — Scènes de la vie des courtisanes, de Lucien (1894). — Ariane (1894). — La Maison sur le Nil (1894). — Les Chansons de Bilitis (1894). — Aphrodite (1896). — La Femme et le Pantin (1898). — Les Aventures du roi Pausole (1900).

OPINIONS.

A.-Ferdinand Hérold

Pierre Louÿs, qui devait plus tard traduire les poésies de Méléagre, l’auteur de la première anthologie grecque, s’est d’abord fait connaître comme directeur de la Conque, anthologie des plus jeunes poètes où lui-même publia des poèmes exquis. Ces poèmes, joints à quelques autres, forment maintenant le recueil intitulé : Astarté, qui est l’œuvre d’un artiste très subtil et très délicat.

[Divers : Les Portraits du prochain siècle ().]

Camille Mauclair

Bilitis a chanté par son caprice des mélodies si admirables, que, les ayant notées, il s’est trouvé faire un livre auprès duquel il n’avait rien écrit. L’érudition, le détail technique de reconstitution ne blessent jamais ici. Le côté « bouquin » si odieux et presque inévitable est évité. C’est avec une netteté de composition absolue, dans la langue la plus savoureuse, la plus concise, la plus transparente sur les sensations aiguës que se déroule la vie, apparue par aspects familiers ou passionnels, de la petite courtisane grecque. Tout le séjour à Mytilène est plein de perversité et de la poésie saphique la plus étrange et la plus pleine de justesse dans l’observation de l’anormal que j’aie lue. Toute une psychologie troublante de l’interversion sexuelle se dessine là. Il faudrait citer toute cette période. M. Pierre Louÿs est tout à fait un poète : sa forme savante qui gênait l’émotion a soudain pu l’enserrer. Il a écrit là un des meilleurs livres d’art que cette génération ait donnés. Ce modeste recueil de chansons d’une petite morte est une œuvre.

[Mercure de France (avril ).]

François Coppée

« Vous n’avez pas lu Aphrodite ! Alors qu’est-ce que vous faites entre vos repas ? Sachez qu’on n’a rien écrit de plus parfait en prose française depuis le Roman de la Momie et depuis Salammbô. Soyez sûrs que les cendres de Gautier ont frémi de joie, à l’apparition de ce livre, et que, dans le paradis des lettrés, l’ombre de Flaubert hurle, à l’heure qu’il est, des phrases de Pierre Louÿs, les soumet à l’infaillible épreuve de son gueuloir, et qu’elles la subissent victorieusement… Enfin voilà donc un jeune, un vrai jeune — Pierre Louÿs n’a pas vingt-six ans — qui nous donne un beau livre ; un livre écrit dans une langue impeccable, avec les formules classiques et les mots de tout le monde, mais rénovés et rajeunis à force de goût et d’art ; un livre très savant et où se révèle, à chaque page, une connaissance approfondie de l’antiquité et de la littérature grecque, mais sans pédantisme aucun et ne sentant jamais l’huile et l’effort ; un livre dont la table contient sans doute un symbole ingénieux et poétique, mais un symbole parfaitement clair ; un livre, enfin, qui est vraiment issu de notre tradition et animé de notre génie et dans lequel la beauté, la force et la grâce se montrent toujours en plein soleil, et inondées d’éclatante lumière !… »

[Le Journal (16 avril ).]

Paul Léautaud

Nous rappellerons également le succès du deuxième roman de M. Pierre Louÿs, la Femme et le Pantin, et des Chansons de Bilitis, où s’amusa si parfaitement son érudition. Seul, en effet, le génie charmant qui habite son front a inspiré à M. Pierre Louÿs ces poèmes à la fois luxurieux et tendres ; et si, les donnant comme traduits du grec, il les attribua dédaigneusement à

Bilitis tant aimée et qui, pourtant, n’exista jamais, ce ne fut guère que par amusement de lettré, ou peut-être parce que ce nom aux syllabes chantantes l’emplissait de douceur. Pourtant, quand parurent les Chansons de Bilitis, on n’en crut pas moins à une traduction. Et M. Pierre Louÿs lui-même, en guise d’avant-propos aux Lectures antiques, que depuis quelque temps il publie régulièrement dans le Mercure de France, nous a conté qu’un savant professeur de faculté, ancien élève de l’École d’Athènes, et à qui il avait envoyé son ouvrage, lui répondit qu’il avait, avant lui, lu l’œuvre de Bilitis. Mais il nous faut achever cette notice. Après avoir admiré le romancier, on va pouvoir juger du poète. L’un et l’autre, d’ailleurs, se complètent et ne font qu’un. Et ceux-là qui ont aimé les romans de M. Pierre Louÿs ne pourront qu’étendre cet amour à ses poèmes, tant l’harmonie et la grâce sensuelle des phrases d’Aphrodite s’y retrouvent, avec le même souci de la forme et la même évocation aussi d’une beauté dont le culte semble s’être perdu.

[Les Poètes d’aujourd’hui ().]