(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 326-327
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(1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 326-327

MOINE, [Pierre le] Jésuité, né à Chaumont, Capitale du Bassigni, dans la Champagne, en 1602, mort à Paris en 1672.

Une imagination trop impétueuse & trop féconde, une verve sans regle & sans frein, un style trop brillant & sans correction ; joignons à cela le mauvais goût de son Siecle, qui sortoit à peine de la barbarie ; l’ont empêché d’être un des premiers Poëtes de notre Nation. Ces excès sont sans doute condamnables, mais ils n’en supposent pas moins les germes précieux du génie, germes si rares aujourd’hui ! & qui l’eussent rendu capable d’illustrer notre Parnasse dans l’Epopée, s’ils eussent été dirigés par l’étude des bons Modeles. Le Poëme de Saint Louis, ou la Couronne reconquise sur les Infideles, offre des richesses, qui, quoique barbares, ne laissent pas de faire naître la surprise & l’admiration. Quel dommage, que ce Génie poétique ne soit pas né un Siecle plus tard ? La lecture des Vers de Racine & de Boileau, lui auroit inspiré ce goût qui manquoit à ses talens ; & à en juger par les morceaux d’élévation & de force, qu’on admire dans son Poëme, il occuperoit un des premiers rangs parmi les Poëtes sublimes.

Ses autres Ouvrages poétiques offrent les mêmes beautés & les mêmes défauts. Son Ode à Louis XIII est pleine de métaphores trop hardies, d’expressions trop guindées, comme tout ce qui est sorti de sa plume ; mais elle a des Strophes, dont l’enthousiasme & l’élévation le rendent égal, & quelquefois supérieur à Malherbe.