Schuré, Édouard (1841-1929)
[Bibliographie]
Histoire▶ du lied en Allemagne (1868). — L’Alsace (1871). — Le Drame musical (1875). — Les Chants de la montagne (1877). — Mélidona (1879). — La Légende de l’Alsace, vers (1884). — Les Grands Initiés (1889). — Vercingétorix, 5 actes, en vers (1887). — La Vie mystique, vers (1894). — L’Ange et la Sphynge (1896) : — Sanctuaires d’Orient (1898).
OPINIONS.
Remy de Gourmont
Il a plu à M. Schuré de mettre en vers ses impressions et ses rêveries religieuses, que son plaisir soit respecté. Le sujet qu’il a choisi « prête à la poésie » et, en effet, il y a de la poésie dans ce tome, de la plus haute, de la plus mystérieuse, — mais la forme en est impersonnelle. C’est de la versification souvent heureuse, pleine, harmonieuse, mais qui manque de relief, de vie originale. Une connaissance sûre des mythes anciens, des idées, de l’enthousiasme, de l’éloquence : tels, je pense, les mérites de cette Vie mystique, œuvre d’un philosophe, sinon d’un poète.
Henry Bérenger
Visiblement, le symbolisme légendaire où atteignit Wagner dans ses plus belles œuvres
a été l’atmosphère génératrice du symbolisme historique réalisé par Schuré dans son Théâtre de l’âme. Édouard
Schuré a fait sur l’◀histoire▶ un travail de sublimation analogue à
celui que Richard Wagner
avait fait sur la légende. De même que « Richard Wagner n’est pas entré
dans la légende en savant ou en curieux, mais en créateur »
, de même que
Richard Wagner,
« rejetant les aventures sans fin et tous les accessoires du roman, se
place du premier bond au centre même du mythe et de ce point générateur recrée
de fond en comble les caractères et l’organisme de son drame »
, de même
enfin « qu’en restituant au mythe sa grandeur primitive, son coloris
original, il sait y approprier les passions et les sentiments qui sont les
nôtres, parce qu’ils sont éternels, et subordonner le tout à une idée
philosophique »
, — de même Édouard Schuré dégage d’une époque historique ses éléments
essentiels, lui recrée une émouvante jeunesse, et la fixe en cet état dans
l’imagination humaine. Et si, dans cette résurrection créatrice par le symbole,
Édouard Schuré s’avance
plus loin que Richard
Wagner, s’il invente des personnages-types alors que Richard Wagner transfigure
seulement les types légendaires, c’est que la légende se prête plus directement
que l’◀histoire▶ au symbolisme. « Dans l’◀histoire▶, en effet, rien ne
s’achève, rien n’est complet. L’homme, bon ou mauvais, y agit rarement selon sa
vraie nature ; mille liens l’étouffent, mille hasards l’éparpillent. Dans le
mythe, au contraire, de grands types se dessinent en traits plastiques, leurs
actions glorifient l’essence de l’humanité, et les vérités profondes reluisent à
travers le merveilleux comme sous un voile étincelant de lumière. »
Pour
extraire de l’◀histoire le même diamant que de la légende, pour en dégager
« l’essence de l’humanité », il faut donc des alambics plus puissants, un foyer
plus concentré, une transmutation plus énergique…
Il n’y a donc pas lien de confondre le symbolisme historique du Théâtre de l’âme avec le symbolisme légendaire du drame wagnérien. L’un et l’autre ont leur empire, leur raison, leur beauté. Ce sont des frères qui se complètent sans se confondre. Et si l’un est venu après l’autre, il ne lui ressemble que pour s’en mieux distinguer.