Solignac, [Pierre-Joseph de la Pimpie, Chevalier de] Secrétaire perpétuel de l'Académie de Nancy, Correspondant de celle des Inscriptions & Belles-Lettres de Paris, Membre de celles de la Rochelle, de Montpellier, de Rome, de Berlin, de Lyon, &c. né à Montpellier en 1687, mort à Nancy en 1773.
La maniere dont il a composé les Eloges de quelques Membres de l'Académie qui l'avoit choisi pour son Secrétaire, & à l'établissement de laquelle il avoit eu beaucoup de part, obtiendra ceux de quiconque les lira comme Philosophe & comme Littérateur. Ces Discours portent l'empreinte d'un esprit cultivé, d'une ame honnête, uniquement occupée du désir d'honorer les talens, de relever l'éclat des vertus, & de faire sentir la perte des Académiciens dont il rappelle le souvenir. Les Eloges de Fontenelle & de Montesquieu sont des plus instructifs & des mieux écrits : le style en est simple, sans la moindre recherche, & presque toujours animé par le sentiment. Il fait aimer le premier, par l'adresse avec laquelle il présente, d'un côté, la douceur & la politesse ingénieuse de ses mœurs, & de l'autre, les divers agrémens de son style ; il fait admirer Montesquieu, en le représentant sous les traits précieux qui caractérisent l'Homme bienfaisant, le Moraliste profond, le Philosophe conséquent, & le Législateur des Nations.
Un Panégyriste si estimable, si zélé pour la gloire des Lettres, méritoit
                            lui-même un Panégyrique. M. l'Abbé Ferlet, ancien
                            Professeur de Belles-Lettres en l'Université de Lorraine, s'est chargé
                            de ce soin, 
& l'on peut dire qu'il s'en
                            est acquitté avec honneur. Pour juger du talent & de la sagesse de
                            ce jeune Littérateur, il suffit de rapporter le commencement de cet Eloge historique, un des plus intéressans que nous
                            connoissions. « De tout temps, la reconnoissance publique
                                accompagnant le nom des Grands Hommes au delà du trépas, leur rendit
                                des honneurs avoués de l'Envie même, soit pour les dédommager, par
                                une gloire qui leur survit, des fatigues qu'elle leur avoit coutées,
                                soit pour encourager les autres à supporter les mêmes travaux par
                                l'espoir des mêmes récompenses. La Grece leur dressoit des Autels,
                                Rome leur élevoit des Statues ; dans nos Gouvernemens modernes,
                                l'Eloquence leur paye un tribut dont ils ne s'enorgueilliroient pas
                                moins, s'il n'étoit réservé qu'au vrai talent, & si le grand
                                nombre d'hommes obscurs qui le partagent, ne l'avoient, pour ainsi
                                dire, avili.
            
               « Dans un Siecle aussi stérile que le nôtre en hommes supérieurs,
                                on diroit 
que nos villes ne sont peuplées
                                que de Héros en tout genre. La mort des personnes les moins connues
                                est bientôt suivie d'une espece d'apothéose, & le moindre
                                Artiste, sur le point de finir une carriere ignorée, pourroit
                                presque dire comme Vespasien : Voici le temps où
                                    je vais devenir un Dieu. Semblable à ces femmes qui
                                faisoient profession de pleurer aux funérailles des Anciens, &
                                qui regrettoient avec de grands cris ceux même qu'elles n'avoient
                                jamais vus, l'Eloquence gémit indistinctement sur toute sorte de
                                tombeaux, &, confondant le Génie dans la médiocrité, veut
                                quelquefois consacrer à celle-ci des monumens dont on a privé
                                jusqu'à ce jour la cendre des Corneille & des
                                    Racine, &c. »
               *
            
Au reste, l'Histoire de Pologne passe pour le meilleur Ouvrage de M. de Solignac, & seroit une excellente Histoire aux yeux de tout le monde, si le naturel, la simplicité & la correction étoient les seules qualités qu'on dût exiger d'un Historien ; mais ces qualités, pour être précieuses, ne sont pas les seules nécessaires, & malheureusement M. de Solignac n'en a pas connu d'autres.