(1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Le stile. » pp. 145-146
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(1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Le stile. » pp. 145-146

Le stile.

De toutes les disputes littéraires, les plus importantes peut-être, ce sont celles qui regardent le stile. C’est lui qui décide la réputation des grands écrivains, lorsqu’il se trouve joint à l’élévation dans les pensées, à la noblesse dans les sentimens, à la justesse & à la force dans les raisonnemens, à une belle & brillante imagination. C’est lui qui met cet intervalle immense d’eux aux écrivains médiocres. Les hommes pensent & sentent à peu près de même : mais ce qui distingue l’homme de génie, c’est la manière de démêler ses idées & de les rendre. Ce mérite, en quoi consiste principalement l’art d’écrire, a suffi pour mettre le sceau de l’immortalité à la réputation de Démosthène & de Cicéron, de Bossuet & de Pascal. Ils sont encore moins lus pour les choses qu’ils disent, que pour le talent avec lequel ils les présentent. Ces disputes sur le stile peuvent, à force d’objections faites avec jugement de part & d’autre, devenir aussi lumineuses qu’utiles, & mettre sur la voie pour s’en former un.