M. Caro.
Le Pessimisme au XIXe siècle
I
Quand le professeur M. Ribot publia, comme on vient de le voir, une espèce de traduction du système de l’allemand Schopenhauer, non seulement j’ai dit sur ce système les quelques mots de mépris qu’il méritait, mais je crus que ce ne serait là qu’un système de plus à mettre au tas de tous ceux que produit l’Allemagne et qui font l’effet, dans sa littérature, des amoncellements du sable, au désert. En quelques coups de vent, ces amoncellements disparaissent ; en quelques années, ces systèmes… Demandez-vous quelle grande place tiennent, maintenant, dans le respect intellectuel des hommes, tous ces capucins de cartes philosophiques tombés les uns sur les autres : Kant, Fichte, Schelling, Hégel, qui étaient pourtant, comme on dit au whist, les honneurs du jeu. Ils sont à peu près, dans le train actuel de l’esprit humain, comme s’ils n’avaient jamais existé. Quelques curiosités spéciales s’en occupent encore, mais comme on s’occupe d’une mécanique qu’on démonte et qui ne va plus. C’est là tout… Schopenhauer, qui n’est certainement pas de la force dans la chimère de ceux-là que je viens de nommer, devait, selon moi, durer moins qu’eux. Je m’imaginais qu’il fondrait comme un flocon de neige. Eh bien, je me trompais, pour trop bien penser de mon temps ! Le flocon s’est cristallisé. Schopenhauer a sa gloire comme les autres l’ont eue… et il la perdra, comme les autres. Il est à présent une influence ; il peut être une puissance demain. L’Allemagne, chez qui tout est possible dans le désordre du rêve ; l’Allemagne, ce pays de M. de Bismarck, qui ne rêve pas, lui, et qui doit avoir sur Schopenhauer une opinion que je voudrais lui entendre exprimer ; l’Allemagne, et même la Prusse, prennent au sérieux Schopenhauer. Il s’y est implanté et il lui pousse des disciples. Il y en a un qui s’appelle Hartmann, qui a fait un livre comme son maître, d’une insanité semblable et différente. Et, en France, après M. Ribot, le traducteur, M. Caro, le commentateur, nous a introduit à toute une nouvelle philosophie intitulée : Le Pessimisme au xixe siècle, — le pessimisme, qui n’était qu’un sentiment individuel autrefois, et que voilà transformé maintenant en théorie métaphysique !
Assurément, un esprit plus mâle que M. Caro aurait, en trois mots, mis à ses pieds ce qui doit y être foulé. Mais il a mieux aimé écrire tout un livre. Mais M. Caro est philosophe. Mais M. Caro est professeur et croit à la philosophie. Malgré cela, pourtant, M. Caro, qui est une claire intelligence française, répugnant de nature aux obscurités des Lycophron allemands, lesquels ne sont clairs que quand ils sont fous, et répugnant aussi à leurs extravagances, a pu penser que la philosophie était compromise par les systèmes de Schopenhauer et de Hartmann et il s’est inscrit en faux contre eux, pour la sauvegarde et pour l’honneur de la Philosophie. Or, il y avait deux manières de traiter Schopenhauer et Hartmann : ou c’était avec le rire le plus vibrant d’un mépris gai, ou avec la cruauté d’un mépris atroce ; car leurs systèmes valent ces deux mépris, selon le point de vue d’où on les regarde. En eux-mêmes, ils sont risibles, insensés, ridicules. Mais dans les conséquences qu’ils peuvent avoir en ce monde si niaisement scientifique du xixe siècle, ils sont capables d’exercer une influence momentanément tragique, et ils commencent de l’avoir déjà.
Mais M. Caro n’est organisé ni pour l’un, ni pour l’autre de ces deux mépris. Non ! c’est un esprit doux, tempéré et même timoré, comme nous pouvons le voir dans plus d’un endroit de son livre. Il n’a ni la verve brûlante, ni la redoutable force d’expression qu’il faudrait pour faire, détaillée ou sommaire, une terrible exécution de l’Erreur, et pour la laisser sur la place, foudroyée ou déshonorée à jamais ! Fin, lucide, fluide, élégant, d’un spiritualisme resté pur, je le reconnais, au milieu de toutes les souillures d’un matérialisme à peu près maintenant universel, mais sans une idée supérieure dont il se réclame et sur laquelle il s’appuie, M. Caro a certainement le sentiment des monstrueux sophismes et des monstrueux ridicules dont il s’est avisé de nous tracer l’histoire, mais il l’a dans la proportion de son âme et avec le caractère de son esprit. Eh bien, franchement, cela n’est pas suffisant !… Pour toucher à de pareilles énormités, sa plume est évidemment trop légère. Son ironie, quand il se permet d’être ironique, est trop contenue et trop sobre. Lorsque les temps sont arrivés à ce point de produire, avec toutes les prétentions à la science et à la vérité absolue (il faut bien dire le mot, quoiqu’il répugne), de ces gigantesques sottises que M. Caro a prises, pour les analyser, dans ses petites pincettes philosophiques, il ne s’agit plus uniquement d’être un charmant philosophe, adroit, poli et joli comme un cœur…
Car, savez-vous de quoi il retourne aujourd’hui ?… Il ne retourne, ni plus ni moins, que du fakirisme indien comme de la philosophie définitive du monde actuel et du monde de l’avenir, comme du dernier pas de la science sous ce ciel constellé qui a mêlé la lumière de dix-neuf cents ans de Christianisme à la lueur de ses étoiles ! Il ne retourne de rien moins que de l’anéantissement comme de la dernière ressource de la sagesse suprême ; — de l’anéantissement, non pas seulement de l’homme, mais de l’univers ! du suicide en masse du Cosmos tout entier à exécuter tout à l’heure !… Si M. Caro avait dit cela comme je le dis là, naïvement, brutalement, sur la première page de son livre, il n’aurait pas eu la peine de l’écrire… Personne ne serait allé plus loin !
II
Mais il fallait un livre. Il faut toujours des livres, et c’est toujours un malheur, quand ce ne sont pas des chefs-d’œuvre. Seulement, rendons cette justice à M. Caro, puisqu’il s’agit de la construction qu’on appelle un livre, il n’a pas trop mal fait le sien. Il l’a presque agréablement combiné… Il nous a doré et allégé l’affreuse pilule de son sujet. Il ne l’a pas pris du pied des prodigieuses sornettes de Schopenhauer et de Hartmann, de ces deux immenses bouffons désespérés qui veulent, de désespoir, le suicide de l’homme et de l’univers ! Il a été plein de prudence. Pour être lu, il a caché tout d’abord la face de ces deux sinistres Pierrots philosophiques, — sinistres, mais amusants pour ceux-là qui se paient de tout avec le ridicule dont ils rient, — prévoyant bien que pour nous amener à ces deux gaillards, inouïs d’extravagance, qui sont, au fond, le but de son livre, il était nécessaire de faire un détour, et il a ouvert son crochet jusqu’aux premiers jours de la création. Il a tirebouchonné sa voie depuis Job jusqu’à Homère, depuis Homère jusqu’à Lucrèce, et depuis Lucrèce jusqu’à Leopardi, en passant par tous les Mélancoliques intermédiaires et séculaires qui ont souffert de la vie et qui ont poussé leur cri contre la douleur ! Et je parle du cri littéraire, — car le cri qui ne s’écrit point, c’est le cri de l’humanité tout entière, qui n’a jamais, parce qu’elle souffre, été désespérée de vivre ! Ce pessimisme de quelques esprits qui nous conduit à ce que M. Caro appelle : « Le Pessimisme au xixe siècle », il commence par en faire l’histoire sentimentale avant d’arriver à la théorie scientifique de ces deux Enragés du néant qu’il nous serait impossible d’admettre deux minutes, eux et leurs idées, s’ils étaient seuls, si nous n’étions pas préparés, par cette précaution d’une histoire, à une théorie de métaphysique qui n’en reste pas moins, malgré cette histoire préliminaire, de la plus incompréhensible absurdité !
Cette histoire cependant du Pessimisme au xixe siècle n’est pas très complète. L’auteur y semble pressé, il a hâte d’arriver à ce qui est pour lui la grande affaire : — la philosophie. Il n’y nomme, certes ! pas tous ceux qui, dans le xixe siècle, ont titanisé contre Dieu et maudit l’existence parce que la douleur y tient plus de place que le bien-être et que la joie… Il en cite quelques-uns, et se trompe sur d’autres. Par exemple, il se trompe sur Joseph de Maistre, qui n’a nullement maudit la vie parce qu’il a voulu que l’Expiation rachetât, aux yeux de Dieu, tout un monde en chute ! Superbe idée, que M. Caro, l’auteur de l’Idée de Dieu, aurait dû comprendre, si, en vivant avec les philosophes, son spiritualisme ne s’était pas essuyé des dernières lueurs du Christianisme qui l’éclairait encore… Or, entre tous, il a choisi, parmi ceux qui concentrent et qui résument la haine et le mépris d’une vie réputée inexplicablement douloureuse, le poète Leopardi, auquel il donne l’importance exagérée d’un talent qu’il n’eut jamais, et il le dresse à côté de Schopenhauer et de Hartmann comme étant le poète de l’idée dont ils sont les métaphysiciens. Il les précède comme s’il les annonçait, et qu’il n’y eût plus, après lui, qu’à faire une théorie absolue et élever à la hauteur d’une loi le désespoir impie de l’odieux poète de l’Athéisme et de la Mort.
III
Et, en effet, il est odieux ! Ce n’est, certes ! pas moi qui partagerai jamais l’admiration facile de M. Caro pour le poète Leopardi. On lui a fait une gloire récente dans ce siècle impie, mais je ne sache rien de plus aveugle, de plus stupide et d’une inspiration plus basse et plus sensuelle, que le désespoir de Leopardi, de ce Thersite contre Dieu même, de ce bossu qui, sans sa bosse, aurait peut-être aimé la vie, et à qui, quand il nie et blasphème, on pourrait dire ce que les renards disaient à celui qui avait perdu sa queue :
Mais tournez-vous, de grâce ! et l’on vous répondra.
Ah ! sachez-le bien, les poètes, avant tout, sont des âmes ! Pope aussi était contrefait, mais, pris dans l’étau de son corset de fer, il n’envoya jamais, du fond de cette torture, d’injure à Dieu et de crachat sur la vie, dont Dieu, qui veut qu’on se soumette à sa Providence, a toujours gardé le secret ! Parmi ces maudisseurs du don de la vie, j’aime encore mieux la femme que M. Caro cite, dans son livre, à côté de Leopardi, cette madame Ackermann, qui, dans ces derniers temps, plus panthère, elle ! qu’il n’était léopard, lui ! avait du moins quelque chose d’ardent dans le ventre et était violemment révoltée contre Dieu ! Mais Leopardi, ce glaçon de vanité souffrante que le soleil de l’Italie ne put jamais fondre, ses blasphèmes et ses vers sont froids comme la lime qui a servi à les limer. Leopardi, ce n’est pas un poète ! C’est un lettré, c’est un savant, si on veut ; c’est un archaïste, c’est un pédant en grec comme Vadius ; mais, certes ! ce n’est pas un poète. Il n’en a jamais eu la flamme ! Il avait ses raisons pour aimer la mort. Et cependant, tel qu’il fut, et non pas tel que l’a surfait M. Caro, il vaut cent fois mieux encore que ces deux Allemands dont il a été, selon M. Caro, le précurseur dans la négation absolue, dans l’inepte mépris de l’existence, dans l’impiété tenace et raisonnée. Il est, dans l’ordre du talent, et presque, si on ose le dire, dans l’ordre de la moralité, très au-dessus de Schopenhauer et de Hartmann, de ces deux Chimères bobynantes dans le vide d’une métaphysique laborieusement et logiquement imbécile, et qui n’ont pas dans la poitrine de quoi se faire pardonner le crime intellectuel de leurs misérables têtes, contre la vie et contre Dieu !
Ah ! eux, n’ont rien d’humain. — Les blessés de la vie qui saignent, qui ont reçu blessures sur blessures ; — les pessimistes sensibles qui s’acharnent contre la vie, dont ils souffrent, comme la bête mord le fer qui la frappe, sont au moins des hommes. Ils peuvent manquer de force, de résignation, de courage, mais après tout, ce sont des hommes toujours ! Mais les pessimistes de la science et de la pensée, qui veulent supprimer le mal absolu, le mal ontologique de la vie, sont je ne sais quels êtres innommables, abstraits, sans principes, sans entrailles, des espèces de boîtes à logique comme il y a des boîtes à musique !… Et ce sont ces boîtes à logique que M. Caro nous a ouvertes dans son livre, faisant là-dedans, très proprement et très consciencieusement, une besogne que, par respect pour le bon sens humain, moi, qui ne suis pas philosophe, je dédaigne de recommencer… M. Caro, qui a charge de philosophie, compte et recompte, comme un horloger les ressorts brouillés ou cassés de ses montres, les inconséquences, les hiatus, les contradictions, les impossibilités de ces deux systèmes, dont l’un est basé sur le tout-un, l’autre sur l’inconscient, mais, tous les deux, sous ce pédantesque et exécrable jargon, pour arriver à la conclusion Indoue, qui est l’anéantissement du monde par des moyens différents. L’un, — celui du grotesque mysogine Schopenhauer, — par la suppression de l’amour, avec ou sans opération ; c’est la philosophie de la chanson fameuse :
Oui, pour un rien,Oui, pour un rien,Nous laisserions finir le monde,Si nos femmes le voulaient bien !
Et l’autre, celui de Hartmann, — moins intelligible, qu’il appelle l’inanition, qui n’est pas, comme on pourrait le croire, l’action vulgaire de mourir de faim, — et qui, bien plus expéditif que celui de Schopenhauer, finirait le monde à un moment donné et à la même minute. Serait-ce exquis ?… M. Caro, en sa qualité de philosophe, se garde bien de rire en discutant un tel sujet, mais, français, il ne peut s’empêcher de couper sa gravité de philosophe par de petits sourires que je trouve spirituels. Et quand les systèmes de Schopenhauer et de Hartmann se cassent mutuellement la figure avec les soufflets de la contradiction, « cela rassure la critique », dit-il naïvement, comme s’il n’était pas très sûr de la sienne…
C’est qu’il ne l’est pas. Il est inquiet. Et pourquoi non ?… Il y a de quoi l’être. Et l’inquiétude qu’il éprouve n’est pas seulement pour ses propres raisonnements ou pour la destinée d’un livre qui peut paraître la plus mauvaise des plaisanteries à ceux qui prennent les choses par le côté plaisant, mais c’est une inquiétude plus haute, plus nette et plus fondée… La pudeur du philosophe qui rougit de ces vésanies d’une ignominieuse extravagance, ne l’empêche pas de jeter sur le temps où ces vésanies courent le monde et ambitionnent de le dominer le regard inquiet de l’homme pénétrant que le philosophe ne peut abuser… C’est ici le côté profond de cette Étude sur le Pessimisme au xixe siècle. Il est certain, en effet, que cette philosophie du Pessimisme, sensuelle et athée, qui ne comprend rien à la douleur et qui ne veut ou ne peut plus la supporter, est dans la logique exacte de toutes les philosophies qui l’ont précédée· Il est certain qu’elle est, scientifiquement, la dernière marche de cet escalier infernal qui s’enfonce et disparaît dans les abîmes de la folie et dans le désir forcené de l’anéantissement. Il est, enfin, non moins épouvantablement certain que cette philosophie de lâche est aussi dans la sensation recherchée des peuples abêtis et énervés qui n’ont ni Dieu pour couronnement de leurs civilisations, ni devoir, ni sens moral, ni rien de la substance qui fut une âme, et qu’ils sont dégoûtés jusque de porter le poids de leurs dernières corruptions ! L’affreuse pensée de l’avortement hante les filles perdues… La pensée non moins affreuse de l’anéantissement hante les nations perdues à leur tour !
IV
Et voilà où nous en sommes, pour l’heure, de l’aveu même de M. Caro ! — Et quoique rien de bien fort n’agite jamais cette nature gracieusement tempérée, on croit voir, serait-ce une illusion ? à certaines places de
son livre, un petit frémissement qui n’est pas tout à fait de plaisir… Il y fait du Pessimisme en Europe une assez effrayante statistique. Ce Pessimisme filtre partout. Il est en Russie, où il a produit la secte sanglante des Mutilés, des Skoptzy, et enfanté le Nihilisme, qui est l’anéantissement social en attendant l’anéantissement total du genre humain. Il est en Allemagne, son lieu de naissance et son territoire, où ses livres se multiplient avec la plus dévorante rapidité. Il est en Prusse. « En attendant — dit M. Caro — cette Apocalypse de la fin du monde et en vue de la préparer, on dit qu’à Berlin, — à Berlin même, — il existe une sorte de société schopenhaueriste qui travaille activement à la propagande de ses idées et qui se reconnaît à certains rites, à certaines formules, quelque chose comme une franc-maçonnerie vouée par des serments et des pratiques secrètes à la destruction de l’amour, de ses illusions et de SES ŒUVRES. On assure que la secte publie des brochures mystérieuses, pleines d’informations et d’instructions du plus haut intérêt au point de vue de la pathologie morale, mais de l’effet le plus bizarre sur les lecteurs qui ne sont pas initiés. L’apostolat, évidemment dévié (non !) de quelques prosélytes, va jusqu’au degré de folie devant lequel
la plume et la pensée s’arrêtent… Quand la théorie d’une chasteté de ce genre, toute négative (je retiens le mot), se produit dans les esprits et dans les cœurs qui ne sont
pas chastes, en vue de desseins chimériques comme la destruction du monde, elle aboutit dans la pratique à un système de compensations qui ne sont autre chose que des dérèglements sans nom… »
Enfin, en France, le voilà qui perce, le Pessimisme, dans les idées ! « Il s’y développe — dit encore M. Caro — par la discussion (alors, pourquoi discute-t-il ?), et il s’y propage, par une contagion subtile, dans un certain nombre d’esprits qu’elle trouble ; c’est une sorte de maladie, mais de maladie privilégiée, concentrée jusqu’à ce jour dans les sphères de la haute culture intellectuelle… »
Que de tortillements pour nous dire que c’est M. Renan, ce grand M. Renan pour M. Caro, qui, en France, est attaqué de cette démence, et qu’il a ajouté — ridiculus mus — dans ses Dialogues philosophiques la carie des idées de Schopenhauer à sa propre carie naturelle ! Eh bien, je sais gré à M. Caro de m’avoir indiqué ce symptôme du Pessimisme en France, car pareille chose a dû lui coûter. Seulement, — ajoute-t-il avec une tendre espérance, — il espère bien que M. Renan guérira…
Je n’en suis pas si certain que lui. Mais qu’importe ! Finissons. Je ne veux pas aller plus loin. J’ai plus signalé que discuté le livre de M. Caro : littérairement, M. Caro y montre ce talent qui est le sien et qui arrondit les angles de tout. Mais pourquoi peser sur ce détail ? La question d’ici est plus haute que la littérature. Ce qui importe, ce n’est pas la discussion qu’on peut faire du livre de M. Caro. C’est l’avertissement qu’il nous donne… Nous sommes avertis ! J’ai dit que je voudrais savoir ce que M. de Bismarck, cette fière intelligence casquée, comme aurait parlé saint Jérôme, pense de Schopenhauer et de sa métaphysique ? Je me demande encore ce qu’aurait dit Napoléon, qui n’aimait pas les philosophes, s’il avait vécu du temps de ces nouveaux après lesquels on peut espérer qu’on n’en reverra plus, et si M. l’académicien Caro les lui avait présentés ?…