III. (Suite et fin.)
Une existence aussi large, aussi répandue, aussi inventive en bien des sens, et aussi aventurée que celle de Beaumarchais, ne saurait se resserrer en peu de mots. On a besoin d’en prendre idée et de la suivre tant soit peu dans les diverses directions où elle s’est risquée, pour arriver à une conclusion équitable sur la nature de l’homme et sur celle du talent. Cela est surtout vrai lorsqu’on tient à associer le lecteur à ses jugements, et à faire que, par le seul exposé des faits, il en vienne à prononcer comme nous-même.
Ce ne fut point certes Beaumarchais qui perdit le plus à cet odieux et
ridicule emprisonnement à Saint-Lazare, si inopinément survenu vers la
soixante-et-onzième représentation du Mariage de Figaro.
Le mystificateur, sans doute, se trouvait pour la première fois mystifié ;
les rieurs se partagèrent. « Le public a beaucoup ri de cet
esclandre, nous dit un témoin judicieux : on s’en est plus occupé que
d’une bataille ou d’un traité de paix. »
Pourtant, quand on vit
le prisonnier sortir après cinq ou six jours sans qu’on articulât aucune
cause précise à cet acte de rigueur qui touchait à l’ignominie, on se
retourna sur ceux qui l’avaient ordonné.
Le
pouvoir, honteux de ce qui s’était fait dans un moment de dépit, recula. Les
réparations arrivèrent. Les représentations de Figaro
reprirent leur cours ; la soixante-douzième n’attira pas moins de monde que
la première. On remarqua que presque tous les ministres y assistaient. On
citait une lettre du contrôleur général, M. de Calonne, à Beaumarchais, par
laquelle ce ministre lui annonçait que le roi agréait sa justification. Par
une délicatesse qui égalait et surpassait toutes les excuses, Le Barbier de Séville fut joué au Petit Trianon par la société
intime de la reine, le 19 août (1785), et les acteurs étaient la reine
elle-même dans le rôle de Rosine, le comte d’Artois dans celui de Figaro,
M. de Vaudreuil faisant Almaviva, etc. L’auteur eut la faveur d’assister à
cette exquise représentation. Enfin, si Beaumarchais rentrait dans une
partie de ses fonds comme négociant, et touchait à titre d’arriéré plus de
deux millions, il se refusait comme homme de lettres à recevoir une pension
sur la cassette de plus de cent livres. On la lui offrait
plus forte ; il crut devoir la réduire lui-même à ce chiffre modique, ne
voulant y voir et y laisser subsister que la légère attache de l’obligation
et du bienfait.
Cependant Beaumarchais allait avoir affaire à des adversaires plus dangereux
que le pouvoir même. Comme tous les hommes arrivés à un grand renom et très
redoutés, mais qui ne se gouvernent pas avec prudence, il allait, se trouver
en présence d’hommes de talent, plus jeunes, hardis, énergiques, avides de
célébrité aussi, ayant leur réputation à faire, et pour qui il devenait,
s’il n’y prenait garde, une proie très appétissante. Avoir raison de
Beaumarchais, qui avait eu raison de tant d’adversaires, était une ambition
et une gloire qui devaient tenter de plus jeunes, et il l’éprouva. Mirabeau,
déjà connu par d’énormes scandales, et très
peu
encore à des titres honorables, entassant brochures sur brochures, en fit
une contre la compagnie dite des Eaux de Paris. Les frères Perrier,
moyennant l’établissement de la pompe à feu, avaient entrepris de fournir
Paris d’eaux salubres, abondantes, et à plus bas prix qu’on ne le faisait
jusqu’alors ; chaque maison qui s’abonnait recevait par des conduits et
tuyaux toute l’eau nécessaire, ce qui était très utile et très digne
d’encouragement. Les actions de la société avaient été portées fort haut, et
peut-être d’une manière artificielle. Mirabeau, poussé par son ami, le
banquier Clavière, combattit l’entreprise pour faire baisser les actions.
Beaumarchais entra dans la lice, défendant la société et les
administrateurs ; je crois qu’au fond il avait complètement raison. Mais il
voulut rire de Mirabeau et de ses objections ; rappelant les critiques
qu’avaient eu à essuyer de tout temps les entreprises nouvelles :
« Quand elles étaient bien amères, disait-il, on les nommait des
Philippiques ; peut-être un jour quelque mauvais
plaisant coiffera-t-il celles-ci du joli nom de Mirabelles, venant du comte de Mirabeau, qui
mirabilia fecit. »
Le faiseur de calembours oubliait
trop ici à qui il se jouait. Après une longue et lucide discussion, qu’il
concluait en se demandant quel motif avait pu porter un homme d’un aussi
grand talent que le comte de Mirabeau à « soumettre sa plume
énergique à des intérêts de parti qui n’étaient pas même les
siens »
, Beaumarchais avait soin pourtant de terminer par
quelque expression atténuante :
Notre estime pour sa personne, disait-il, a souvent retenu l’indignation qui nous gagnait en écrivant. Mais si, malgré la modération que nous nous étions imposée, il nous est échappé quelque expression qu’il désapprouve, nous le prions de nous la pardonner… Nous avons combattu ses idées, sans cesser d’admirer son style…
Mirabeau était atteint ; il le désirait peut-être : il s’élança. Énonçant les motifs, réels ou non, qu’il avait eus pour entrer dans la discussion, il alla droit, avant tout, à l’adversaire, et le frappant de l’épée au visage, selon le conseil de César, il le raillait sur cette prétention au patriotisme, au désintéressement et au bien public, de laquelle Beaumarchais aimait (et assez sincèrement, je le crois) à recouvrir ses propres affaires et ses spéculations d’intérêt :
Tels furent mes motifs, s’écriait-il déjà en orateur, en maître puissant dans la réplique et dans l’invective ; et peut-être ne sont-ils pas dignes du siècle où tout se fait pour l’honneur, pour la gloire, et rien pour l’argent ; où les chevaliers d’industrie, les charlatans, les baladins, les proxénètes n’eurent jamais d’autre ambition que la gloire sans la moindre considération de profit ; où le trafic à la ville, l’agiotage à la Cour, l’intrigue qui vit d’exactions et de prodigalités, n’ont d’autre but que l’honneur sans aucune vue d’intérêt ; où l’on arme pour l’Amérique trente vaisseaux chargés de fournitures avariées, de munitions éventées, de vieux fusils que l’on revend pour neufs, le tout pour la gloire de contribuer à rendre libre un des mondes, et nullement pour les retours de cette expédition désintéressée… ; où l’on profane les chefs-d’œuvre d’un grand homme (allusion à l’édition de Voltaire par Beaumarchais), en leur associant tous les juvenilia, tous les senilia, toutes les rêveries qui, dans sa longue carrière, lui sont échappées ; le tout pour la gloire et nullement pour le profit d’être l’éditeur de cette collection monstrueuse ; où pour faire un peu de bruit, et, par conséquent, par amour de la gloire et haine du profit, on change le Théâtre-Français en tréteaux, et la scène comique en école de mauvaises mœurs ; on déchire, on insulte, on outrage tous les ordres de l’État, toutes les classes de citoyens, toutes les lois, toutes les règles, toutes les bienséances…
Voilà donc Mirabeau devenu le vengeur des bienséances et des bonnes mœurs contre Beaumarchais, et Figaro passant mal son temps entre les mains du puissant athlète, qui le retourne et l’enlève de terre au premier choc. Puis il demande à Beaumarchais ce qu’il pense maintenant des Mirabelles. Jamais calembour ne fut plus rudement payé. La péroraison par laquelle Mirabeau terminait sa brochure est restée célèbre dans le genre de l’invective :
Pour vous, monsieur, qui, en calomniant mes intentions et mes motifs, m’avez forcé de vous traiter avec une dureté que la nature n’a mise ni dans mon esprit ni dans mon cœur ; vous, que je ne provoquai jamais, avec qui la guerre ne pouvait être ni utile ni honorable ; … croyez-moi, profitez de l’amère leçon que vous m’avez contraint de vous donner… Retirez vos éloges bien gratuits ; car, sous aucun rapport, je ne saurais vous les rendre ; retirez le pitoyable pardon que vous m’avez demandé ; reprenez jusqu’à l’insolente estime que vous osez me témoigner…
Et il finit par ce conseil terrible et le plus incisif, entre
hommes avides avant tout de la popularité : « Ne songez désormais
qu’à mériter d’être oublié. »
Beaumarchais, sous le coup de l’outrage, se tut : il avait rencontré un jouteur encore plus osé que lui, et à plus forte carrure ; il était dépassé et vaincu. Son règne dans l’opinion finit véritablement à ce moment-là (1785-1786).
Un nouvel adversaire se préparait : c’était l’avocat Bergasse, qui, jeune aussi, éloquent et ardent, avait sa réputation à faire. Beaumarchais était prédestiné aux procès, et aux procès avec des Alsaciens, avec des noms de physionomie allemande. Cette fois, ce n’était plus le conseiller Goëzman ; il y avait par le monde un M. Kornman, homme de finances, mari d’une jeune et jolie femme, née à Bâle, qu’il maltraitait, dont il avait autorisé d’abord les relations irrégulières, et qu’il finit par faire enfermer à Paris, dans une maison de force, rue de Bellefonds, au moment où elle était enceinte et près d’accoucher. Un jour que Beaumarchais dînait chez la princesse de Nassau-Siegen, on parla de cette infortunée, qui avait écrit du fond de sa prison une requête touchante ; on la lui donna à lire, ainsi qu’un paquet de lettres du mari, et qui étaient très peu à l’honneur de ce dernier :
Je passai sur une terrasse, dit Beaumarchais, où je les lus avidement. Le sang me montait à la tête. Après les avoir achevées, je rentre et dis avec chaleur : « Vous pouvez disposer de moi, messieurs ; et vous, princesse, me voilà prêt à vous accompagner chez M. Le Noir (le lieutenant de police), à plaider partout vivement la cause d’une infortunée, punie pour le crime d’autrui. Disposez entièrement de moi. »… — Mes amis m’embrassèrent.
Toute cette société se mit donc en mouvement pour la pauvre femme, et Beaumarchais en tête, un peu Don Quichotte de philanthropie, on le voit :
J’offris la main, ajoute-l-il, à Mme la princesse de Nassau pour aller chez M. Le Noir ; elle mettait à ses démarches l’activité la plus touchante. Encore chaud de ma lecture, je fis chez le magistrat un plaidoyer brûlant qui bientôt l’échauffa lui-même : il donna les plus grands éloges à la malheureuse détenue, à sa douceur, à sa douleur, au ton pénétrant de ses plaintes…
Tout cela se passait en 1781 et se termina alors par la sortie
de la pauvre femme à qui Beaumarchais, qui avait couru à Versailles chez
tous les ministres, était venu annoncer lui-même la délivrance. Mais
quelques années après (1787), dans un procès que le mari poursuivait contre
elle, Bergasse, avocat et conseil de Kornman, rencontrant le nom de
Beaumarchais et cette quantité de grands personnages qui s’étaient
intéressés pour la belle coupable, en tira parti dans son Mémoire, et fit, contre Beaumarchais notamment, une sortie
violente qui amena celui-ci à porter plainte en diffamation. On a retenu,
entre autres, un mot de Bergasse parlant de Beaumarchais comme d’un homme
« qui sue le crime »
. Ce n’était
pas seulement une exagération, c’était une absurdité et une folie. Dans
toute cette affaire, Beaumarchais avait surtout cédé à la manie du siècle, à
ce mouvement de chevalerie errante en faveur du sexe sensible et faible, et
des pauvres victimes cloîtrées et opprimées. Mais l’opinion était si bizarre
que, cette fois, lasse à la fin de suivre si longtemps Beaumarchais,
elle se retourna vivement contre lui, et se prit
à l’insulter. S’il gagna ce procès-là devant le Parlement, il le perdit
devant le public :
Beaumarchais est accablé de libelles et généralement haï en ce moment, écrivait Mallet du Pan à cette date (1787). Son Tarare n’attire pas moins la foule, et la vindicte publique est oubliée. Cela peint l’esprit de Paris, où le mépris et l’opinion sont impuissants ; où il suffit d’amuser pour couvrir tout.
On racontait alors de Beaumarchais et de sa vie intérieure mille singularités vraies ou fausses, mais qui visaient au scandale ou au ridicule : celle-ci, par exemple, qui est assez piquante, et que je donne pour ce qu’elle vaut :
Beaumarchais a une pantoufle en or clouée sur son bureau, c’est celle de sa maîtresse ; avant de travailler, il la baise, et cela l’inspire. — Il embrasse tout et se croit propre à tout.
Tarare, qui avait peut-être été écrit sous
l’inspiration de la pantoufle merveilleuse, et qui se jouait en concurrence
avec le procès Kornman, était un opéra de Beaumarchais, très fou, très
bizarre, mais très à propos, un opéra soi-disant philosophique, politique et
déjà révolutionnaire, préludant à la Déclaration des droits, et où
« la dignité de l’homme était le point moral que l’auteur avait
voulu traiter, le thème qu’il s’était donné »
, disait-il
sérieusement dans son Discours préliminaire. On peut juger
de ce que peut être la dignité de l’homme mise en
musique ; mais les contemporains s’en accommodaient fort, et Beaumarchais
essayait par tous les moyens de ressaisir la popularité qui lui
échappait.
La Révolution de 89, dès le début, apprit à Beaumarchais combien il était impuissant devant ce flot immense qu’il avait été des premiers à provoquer, et qui débordait en le menaçant. Figaro avait, certes, préparé et présagé cette révolution ; mais, quand le succès de la tragédie de Charles IX, par Marie-Joseph Chénier, en donna le signal et en sonna comme le tocsin, Beaumarchais s’effraya. Il adressait aux Comédiens-Français de très judicieuses et très prudentes observations à ce sujet (9 novembre 1789) :
La pièce de Charles IX, disait-il, a certainement du mérite ; elle est dans quelques scènes d’un effet terrible et déchirant, quoiqu’elle languisse dans d’autres et n’ait que peu d’action… Mais, en me recherchant sur sa moralité31, je l’ai trouvée plus que douteuse. En ce moment de licence effrénée où le peuple a beaucoup moins besoin d’être excité que contenu, ces barbares excès, à quelque parti qu’on les prête, me semblent dangereux à présenter au peuple, et propres à justifier les siens à ses yeux. Plus Charles IX a de succès, plus mon observation acquerra de force ; car la pièce aura été vue par des gens de tous les états. Et puis quel instant, mes amis, que celui où le roi et sa famille viennent résider à Paris, pour faire allusion aux complots qui peuvent les y avoir conduits ! Quel instant, pour prêter au clergé, dans la personne d’un cardinal, un crime qu’il n’a pas commis, etc.
Et il insiste sur les inconvénients et les dangers si flagrants dans les circonstances. On voit qu’il arrive à Beaumarchais comme à nous tous : nous devenons prudents et sages, du moment que nos passions s’apaisent, que nos intérêts (y compris les intérêts de nos talents et de nos facultés les plus chères) sont hors de cause ; celui qui a mis au monde Figaro, qui l’a poussé envers et contre tous, et qui n’a plus grand-chose de nouveau à ajouter, voudrait dire holà ! à Charles IX.
Il y avait, en un mot, chez lui infiniment moins de parti pris de révolution que chez Mirabeau, Chamfort, et beaucoup d’autres. Sa force d’impulsion étant épuisée, il atteignait à l’âge où tout lui aurait paru assez bon, pourvu qu’il pût faire jouer ses pièces, être gai et heureux dans son jardin.
Vers ces années, d’assez grands changements s’étaient accomplis et dans l’existence et dans la manière de sentir de Beaumarchais. Il était devenu vieux d’assez bonne heure ; bien portant encore, mais sourd, d’ailleurs bon homme et naïf à mesure qu’il rentrait et s’enfermait davantage dans le cercle des amis et dans celui de la famille. Sa vie s’était, jusqu’à un certain point, régularisée. Un fils qu’il avait eu de son second mariage n’avait pas vécu ; mais il avait une fille qu’il aimait tendrement, nommée du nom d’Eugénie, et que tout annonce avoir été charmante. Il s’était remarié en effet, le 8 mars 1786, à Marie-Thérèse-Émilie Willermawla, et il avait droit désormais de dire, en terminant son troisième Mémoire contre Kornman :
Ces débats ne troublent plus la paix de mon intérieur. Heureux dans mon ménage, heureux par ma charmante fille, heureux par mes anciens amis, je ne demande plus rien aux hommes, ayant rempli tous mes devoirs austères (entendez cet austères, sans trop d’austérité) de fils, d’époux, de père, de frère, d’ami, d’homme enfin, de Français et de bon citoyen ; ce dernier, cet affreux procès m’a fait du moins un bien, en me mettant à même de rétrécir mon cercle, de discerner mes vrais amis de mes frivoles connaissances.
En 89, il habitait encore la Vieille-Rue-du-Temple ; mais, dès ce temps, il avait son beau jardin et sa maison qu’il faisait bâtir sur le boulevard, à l’angle, en face de la Bastille, et que nous avons tous pu voir dans notre jeunesse. Il alla s’y installer vers 1790, pour en sortir fugitif et menacé en 92. Ce fut miracle, en vérité, si cette maison échappa au flot dévastateur qui descendait journellement du faubourg, et qui s’y brisait comme à un cap avancé. C’étaient sans cesse des visites domiciliaires, des menaces de pillage et d’incendie ; on accusait Beaumarchais d’être accapareur de blés, puis d’être accapareur d’armes cachées, et de les entasser dans des souterrains qui n’existaient pas :
Quant à moi, disait-il dans ces espèces de mémoires et pétitions à la Convention qu’il faudrait toujours mettre en regard du monologue de Figaro, quant à moi, citoyens, à qui une vie si troublée est devenue enfin à charge ; moi qui, en vertu de la liberté que j’ai acquise par la Révolution, me suis vu près, vingt fois, d’être incendié, lanterné, massacré ; qui ai subi en quatre années quatorze accusations plus absurdes qu’atroces, plus atroces qu’absurdes ; qui me suis vu traîner dans vos prisons deux fois pour y être égorgé sans aucun jugement ; qui ai reçu dans ma maison la visite de quarante mille hommes du peuple souverain, et qui n’ai commis d’autre crime que d’avoir un joli jardin, etc.
Depuis les premiers jours de 89, Beaumarchais fut constamment sur le pied de l’apologie et de la défensive. On voulait l’exclure de la première Commune de Paris dont il était membre ; il dut se défendre par une Requête où il parlait magnifiquement de lui-même et de ses services rendus pendant la guerre d’Amérique. En rabattant de l’exaltation bien naturelle à un vieillard, plein d’imagination, qui se souvient de son plus beau moment de gloire, on sent en plus d’un passage l’accent de la conviction et d’une sincérité persuasive Beaumarchais, dans ses souvenirs, oubliait sans doute bien des détails qui eussent apporté de l’ombre au tableau, mais il avait raison en parlant de cet intérêt public, de cet aspect patriotique et général sous lequel avait toujours eu soin de placer et de voir même son intérêt particulier. Il avait surtout raison quand il parlait de sa facilité à obliger et de sa bienveillance, lui avait fait tant d’ingrats.
Ce besoin d’activité et d’entreprises qui survivait encore chez lui à tant de
mécomptes, le fit s’engager en mars 1792 dans une affaire qui avait couleur
de patriotisme et qui l’abreuva d’ennuis. Il ne s’agissait de rien moins que
de soixante mille ou même de deux cent
mille
fusils à acheter en Hollande et à
procurer au gouvernement français, qui, aux approches de la guerre, en avait
grand besoin. Il en parla successivement à quatorze
ministres qui se succédèrent en peu de mois, et ne rencontra chez tous
qu’inattention et temporisation continuelle, quelques hommes dans les
bureaux ayant intérêt, non à faire manquer l’affaire, mais à la tirer des
mains de Beaumarchais pour y trouver eux-mêmes leur profit. Ici.
Beaumarchais n’échappa point à l’un des inconvénients que les gens du plus
grand esprit subissent quelquefois dans leur vieillesse. Dans les mémoires
qu’il adressa à ce sujet à la Convention, et qu’il divisa en six Époques, il lui arrive (chose inattendue et singulière !) de
devenir ennuyeux. Beaumarchais ennuyeux ! il est évident qu’il le fut ; il
l’est pour les lecteurs aujourd’hui ; il l’était dès lors pour les ministres
mêmes qu’il poursuivait de ses sollicitations incessantes et qui ne savaient
plus à la fin comment se dérober à ses rendez-vous obstinés. Aux environs de
la journée du 10 août, il est en danger d’être massacré et obligé de fuir.
N’importe ! il ne pense qu’à ses fusils, il en fait son point d’honneur ;
c’est son tic. Il revient à Paris exprès pour en conférer. Il est mis en
prison à l’Abbaye ; quelques heures avant les massacres du 2 septembre, il
en est tiré par la générosité de Manuel, qui vient lui dire :
« Sortez à l’instant de ce lieu. »
— Je lui jetai mes bras au corps, s’écrie dramatiquement Beaumarchais, sans pouvoir lui dire un seul mot : mes yeux seuls lui peignaient mon âme ; je crois qu’ils étaient énergiques s’ils lui peignaient tout ce que je pensais ! Je suis d’acier contre les injustices, et mon cœur s’amollit, mes yeux fondent en eau sur le moindre trait de bonté. Je n’oublierai jamais cet homme ni ce moment-là. Je sortis.
Il sort, mais il va suivre au ministère l’affaire des fusils. Dans une discussion du Conseil à laquelle il est admis, il a peine à entendre Danton, qui pourtant parlait assez fort et assez haut :
M. Danton était assis de l’autre côté de la table ; il commence la discussion ; mais, comme je suis presque sourd, je me lève et demande pardon si je passe auprès du ministre (parce que j’entends mal de loin), en faisant, selon mon usage, un petit cornet de ma main.
Cela fait rire les ministres et Danton lui-même ; mais Beaumarchais ne rit pas ; il ne rit plus. Il veut que la nation ait ses fusils, qu’elle les ait même malgré elle. On ne revient pas de cette obstination-là.
« Je suis un triste oiseau, dit avec raison Beaumarchais, car je n’ai
qu’un ramage, qui est de dire, depuis cinq mois, à tous les ministres
qui se succèdent : Monsieur, finissez donc l’affaire des
armes qui sont en Hollande ! Un vertige s’est emparé de la tête
de tout le monde. »
Il aurait pu ajouter : « Et de la mienne
aussi. »
Sourd comme il l’est devenu, il ne paraît pas même se rendre très bien compte
de la situation générale. À Londres, où il s’est réfugié à la fin de 1792,
il reçoit pourtant une lettre de son commis et fondé de pouvoir, qui lui dit
qu’il s’est présenté dans les bureaux de la guerre et qu’on l’a adressé à un
sieur Hassenfratz (le savant) : « J’ai débuté lui demandant si
j’avais l’honneur de parler à M. Hassenfratz, qui, l’œil hagard, le
teint enflammé, le poing fermé, m’a dit d’une voix de tonnerre, et avec
l’expression de la fureur : “Tu n’as point l’honneur, je ne
suis point monsieur ; je m’appelle Hassenfratz.” »
— C’est dans cet état de choses que Beaumarchais a la bonhomie de revenir de
Londres et de se remettre aux mains de la Convention pour plaider cette
affaire, et avoir raison de la dénonciation de Lecointre, dont il démontre
surabondamment l’erreur et l’injustice. On lit à la fin de sa sixième Époque ou de son sixième mémoire, après un quatrain digne
de Pibrac,
cette signature pleine d’innocence :
« Le citoyen toujours persécuté, Caron
Beaumarchais. — Achevé pour mes juges, à Paris, ce 6 mars 1793, l’an second de la République. »
Tout rempli de
son unique objet, il ne se représente pas au juste ce que c’est que la
Convention nationale ; ce qui étonne, c’est qu’il y ait sauvé sa tête.
Sorti encore une fois de France et réfugié à Hambourg pendant les années suivantes, il y vécut dans la détresse jusqu’au point (me dit M. de Loménie) de devoir ménager une allumette et en réserver la moitié pour le lendemain. La pensée de sa famille et de sa fille chérie le soutenait. Il la revit en 1796 et rentra bientôt après dans sa maison, dans ce joli jardin qu’il avait peuplé de statues, de cénotaphes, de souvenirs, et où il avait mis toutes sortes d’inscriptions selon le goût du temps. Les lettres qu’il écrit à ses amis, et qui sont de cette date, sont tout aimables. À sa fille et à sa famille, dans les grands moments, il parle trop avec la solennité et l’emphase d’un père de mélodrame ; à ses maîtresses (car il en eut toujours), il écrit sur un ton qui fait reculer d’étonnement les moins scrupuleux et qui condamne ce coin de sa correspondance à ne jamais sortir du tiroir ni du cabinet des curieux ; mais avec ses amis, dans le tous-les-jours, il redevient uniment le gai, le bon et facile Beaumarchais :
Je viens de revenir, écrit-il à l’un d’eux (6 juin 1797), dans ma maison du boulevard, dont le séquestre n’était pas levé quand je suis rentré dans Paris. Le triste motif qui m’y ramène est l’opposé de celui qui me la fit construire, le besoin d’économie. Ma fortune, aux trois quarts détruite par une persécution de quatre années, ne me permet pas de payer un autre loyer, pendant que ma maison dépérit faute d’être habitée… Je cours après tous mes débris, car il faut laisser du pain à mes enfants… Quand on a tout savouré, l’existence presque entière est dans les souvenirs. Heureux celui chez qui le bien peut compenser le mal !
Il venait de marier sa fille à « un bon jeune
homme »
,
comme il disait, à un homme
honorable, plein d’amour pour elle, et qui, à l’heure où nous écrivons, vit
encore.
Il eut une dernière jouissance d’amour-propre, lorsque, le Théâtre-Français
ayant repris son drame de La Mère coupable qu’il avait
fait en 1791, il se vit appelé à grands cris et entraîné sur le théâtre, où
il lui fallut paraître entre Molé, Fleury et Mlle Contat. Il savoura avec douceur ce suprême applaudissement, et se
dit que sans doute le public était devenu plus moral, puisqu’il accueillait
un si excellent ouvrage. Après avoir tiré tout son feu d’artifice d’esprit,
Beaumarchais était insensiblement revenu à ses premiers penchants de Grandisson ; un singulier Grandisson
toujours ! et, comme quelqu’un l’a appelé, « un Grandisson un peu
polisson »
. Mais la paternité l’avait ramené d’instinct et en
idée au drame moral et vertueux, et il répétait souvent dans sa vieillesse
« que tout homme qui n’est pas né un épouvantable méchant, finit
toujours par être bon quand l’âge des passions s’éloigne, et surtout
quand il a goûté le bonheur si doux d’être père ! »
Dans une de ses lettres finales, nous surprenons de lui un espoir ou du moins un désir sur l’immortalité de l’âme :
Je n’aime pas, disait-il à un ami, que, dans vos réflexions philosophiques, vous regardiez la dissolution du corps comme l’avenir qui nous est exclusivement destiné ; ce corps-là n’est pas nous ; il doit périr sans doute, mais l’ouvrier d’un si bel assemblage aurait fait un ouvrage indigne de sa puissance s’il ne réservait rien à cette grande faculté à qui il a permis de s’élever jusqu’à sa connaissance ! Mon frère, mon ami, mon Gudin, s’entretient souvent avec moi de cet avenir incertain ; et notre conclusion est toujours : Méritons au moins qu’il soit bon ; s’il nous est dévolu, nous aurons fait un excellent calcul ; si nous devons être trompés dans une vue si consolante, le retour sur nous-mêmes, en nous y préparant par une vie irréprochable, a infiniment de douceur.
Nous voudrions, par cette impression, effacer celle que laissent d’autres lettres publiques de Beaumarchais, écrites dans le même temps, et où il s’est oublié, par un dernier retour, à d’indignes irrévérences. Nous n’espérons pas, toutefois, faire oublier jamais à ceux qui les ont vues d’autres lettres de même date, très secrètes, et où la licence déborde. Mettons cela sur le compte du siècle. Il était plus fidèle à sa nature quand il écrivait à Collin d’Harleville qui lui avait envoyé un poème allégorique sur Melpomène et sur Thalie :
Pour lire un joli poème, s’amuser d’un charmant ouvrage, il faut, mon cher citoyen, avoir le cœur serein, la tête libre ; et bien peu de ces doux moments sont réservés à la vieillesse. Autrefois, j’écrivais pour alimenter le plaisir ; et maintenant, après cinquante ans de travaux, j’écris pour disputer mon pain à ceux qui l’ont volé à ma famille. Mais j’avoue que je suis un peu comme la Claire de Jean-Jacques, à qui même, au travers des larmes, le rire échappait quelquefois.
Ce rire venait de source et circulait en quelque sorte à la
ronde dans toute la famille Beaumarchais ; l’une de ses sœurs, Julie, non
mariée, dans sa dernière maladie se chansonnait elle-même par de gais
couplets des plus badins, auxquels chacun des assistants ajoutait le sien ;
et Beaumarchais, relisant après la mort de sa sœur ce singulier testament,
ajoutait de sa main, au bas, avec une naïveté de tendresse qui fait
sourire : « C’est le Chant du Cygne de ma pauvre
sœur Julie. »
Il mourut lui-même à Paris, dans la nuit du 17 au 18 mai 1799, d’une attaque d’apoplexie, dit-on, que rien n’avait annoncée ; il s’endormit de la mort pendant son sommeil. Il n’avait que soixante-sept ans. Quelques personnes, parmi lesquelles je citerai Esménard, auteur de l’article Beaumarchais dans la Biographie universelle, M. Népomucène Lemercier et M. Bouchot, paraissaient très convaincus que Beaumarchais s’était délivré lui-même (avec le poison dit de Cabanis) d’une vie qui lui était devenue trop à charge à force de gêne, et trop pénible. La famille et les amis ont démenti ce bruit et cette opinion qui avait trouvé dans le temps assez de crédit. Ceux qui n’y apportent d’autre intérêt que celui de la vérité ne feront aucune difficulté d’admettre l’apoplexie, en se réservant tout au plus un léger doute.
Au milieu de tout ce que j’ai dû omettre sur Beaumarchais, je serais heureux si j’étais parvenu à laisser se dessiner d’elle-même, dans l’esprit de mes lecteurs, sa figure si libre et si naturelle, telle que je la conçois, sans la forcer en rien, sans trop la presser, et en y respectant même les inconséquences. J’ai évité jusqu’ici de traiter la question de moralité positive en Beaumarchais, et je dirai simplement pourquoi : il appartient à cette famille d’esprits que nous connaissons très bien pour l’avoir déjà étudiée chez Gourville et chez d’autres encore, famille en qui la morale rigide tient peu de place, et qui, dans l’âge de l’activité et des affaires, se sert du oui ou du non, selon l’occasion, et sans trop de difficulté. Si j’avais voulu entrer dans le détail de certaines négociations où fut mêlé Beaumarchais, dans celles particulièrement qu’il mena à Londres, tant avec le chevalier d’Éon qu’avec le gazetier Morande, on l’aurait surpris dans des manèges peu grandioses, et qu’il vaut mieux ignorer. Pour m’en tenir au point de vue littéraire et à celui du goût, je ne puis m’empêcher de remarquer à quel point l’argent prend d’importance dans sa manière de prouver et de raisonner. Entreprend-il de se justifier auprès de la Commune de Paris des sots griefs qu’on lui impute, comme d’avoir accaparé des armes, d’avoir des souterrains dans sa maison du boulevard, même d’avoir trompé autrefois les Américains par ses fournitures, il dira ingénument, en imitant les gageures et les défis à l’anglaise :
Je déclare que je donnerai mille écus à celui qui prouvera que j’aie jamais eu chez moi, depuis que j’ai aidé généreusement l’Amérique à recouvrer sa liberté, d’autres fusils que ceux qui m’étaient utiles à la chasse ;
Autres mille écus si l’on prouve la moindre relation de ce genre entre moi et M. de Flesselles…
Je déclare que je paierai mille écus à qui prouvera que j’ai des souterrains chez moi qui communiquent à la Bastille…
Que je donnerai deux mille écus à celui qui prouvera que j’aie eu la moindre liaison avec aucun de ceux qu’on désigne aujourd’hui sous le nom des aristocrates…
Et je déclare, pour finir, que je donnerai dix mille écus à celui qui prouvera que j’ai avili la nation française par ma cupidité quand je secourus l’Amérique…
Cette façon de tout évaluer en argent me paraît déceler un
ordre de sentiments et d’habitudes qui était nouveau en littérature, et qui
s’y naturalisa trop aisément. Maintenant, j’accorderai volontiers que, dans
toutes les occasions où il le put, Beaumarchais chercha à concilier son
intérêt particulier avec l’intérêt public, à les confondre en quelque sorte
pour en tirer du même coup profit, honneur, popularité. C’était la forme de
charlatanisme en usage au xviiie
siècle : on
y avait le charlatanisme patriotique et philanthropique. « Ce qui
m’anime en tout objet, dit Beaumarchais, c’est l’utilité
générale. »
— « À chaque événement important, disait-il
encore, la première idée qui m’occupe est de chercher sous quel rapport
on pourrait le tourner au plus grand bien de mon pays. »
Dans le
courant de la guerre d’Amérique, il conçut plus d’une fois de telles idées
et les mit en circulation avec bonheur ; comme, par exemple, le jour (1779)
où, pour relever le courage des négociants et armateurs, il proposa au
ministre de déclarer les protestants désormais admissibles dans les chambres
de commerce, d’où ils étaient jusqu’alors exclus ; ou comme ce jour encore
où, après la défaite navale de M. de Grasse (1782), il eut l’idée que chaque
grande ville offrît au roi un vaisseau de ligne, portant le nom de la cité
qui lui en ferait hommage. Dans toutes
ces
circonstances, il obéissait franchement à la tournure de son imagination,
ainsi qu’au vent de son siècle. Beaumarchais, si attaqué, si calomnié, n’eut
jamais de haine ; si l’on excepte Bergasse, qu’il a personnifié dans
Bégearss avec plus de mauvais goût encore que de rancune, il avait raison de
dire et de répéter :
J’ai reçu de la nature un esprit gai qui m’a souvent consolé de l’injustice des hommes… Je me délasse des affaires avec les belles-lettres, la belle musique et quelquefois les belles femmes… Je n’ai jamais couru la carrière de personne : nul homme ne m’a jamais trouvé barrant ses vues ; tous les goûts agréables se sont trop multipliés chez moi pour que j’aie eu jamais le temps ni le dessein de faire une méchanceté.
Si la conversation roulait sur ses ennemis, d’ordinaire il coupait court :
Nous avons, disait-il à son ami Gudin, un meilleur emploi à faire de nos conversations : elles deviendraient tristes, au lieu d’être amusantes ou instructives. — Ils font leur métier, faisons le nôtre, disait-il encore. Soyons sages ; surtout tenons-nous gais, car ils ne veulent que nous fâcher ; ne leur donnons pas cette joie.
C’est bien là l’homme qui fut aimé de tous ceux qui
l’approchèrent, qui mêlait un fonds de bienveillance à la joie, un fonds de
simplicité à la malice, qui avait écrit sur le collier de sa chienne :
« Beaumarchais m’appartient ; je m’appelle Florette ; nous demeurons Vieille-Rue-du-Temple »
; et
de qui son biographe et son fidèle Achate, Gudin, a écrit
naïvement : « il fut aimé avec passion de ses maîtresses et de ses
trois femmes. »
Et ce n’est pas seulement Gudin qui parle ainsi, c’est La Harpe, peu suspect
de trop d’indulgence, et qui dit, en nous montrant le Beaumarchais de la fin
et au repos, tel qu’il était assis dans le cercle domestique et dans
l’intimité : « Je n’ai vu personne alors qui parût être mieux avec
les autres et avec lui-même. »
C’est
Arnault encore, qui, dans ses Souvenirs, lui a consacré
des pages pleines d’intérêt et de reconnaissance ; c’est Fontanes enfin,
qui, trouvant qu’Esménard l’avait traité bien sévèrement dans le Mercure, écrivait une lettre où on lit
(septembre 1800) :
Quant au caractère de Beaumarchais, je vous citerai encore sur lui un mot de Voltaire : « Je ne crois pas qu’un homme si gai soit si méchant » ; et ceux qui l’ont vu de près disent que Voltaire l’avait bien jugé. Ce Beaumarchais qu’on a généralement regardé comme un Gil Blas de Santillane, un Gusman d’Alfarache, le modèle enfin de son Figaro, ne ressemblait, dit-on, nullement à ces personnages : il portait plus de facilité que d’industrie dans toutes les affaires d’argent32. Il y était bien plus trompé que trompeur. Sa fortune, qu’il dut à des circonstances heureuses, s’est détruite, en grande partie, par un excès de bonhomie et de confiance dont on pourrait donner des preuves multipliées. Tout homme qui a fait du bruit dans le monde a deux réputations : il faut consulter ceux qui ont vécu avec lui, pour savoir quelle est la bonne et la véritable.
Tel est, ce me semble, le point actuel où en est la critique sur Beaumarchais, à la veille des documents nouveaux que M. de Loménie doit y introduire. Le simple coup d’œil qu’il m’a été donné de jeter sur ces papiers me permet de dire que, le jour où le spirituel biographe en aura fait l’usage qu’il est capable d’en faire, bien des doutes seront éclaircis, et que l’on saura dorénavant son Beaumarchais comme on sait maintenant son Rousseau et son Voltaire33.