Sophie Arnould
Sophie Arnould d’après sa correspondance, par MM. Jules et Edmond de Goncourt.
I
Ce n’est pas un livre nouveau, mais la reproduction d’un livre ancien déjà, mais qui n’a point vieilli. De combien de livres de cette époque flétrissante et sitôt flétrie peut-on dire qu’ils n’ont pas vieilli, qu’ils sont restés ce qu’ils étaient dans la splendeur du premier jour ?… Eh bien, celui-ci n’a point passé ! Sa couleur tient bon. Il vaut réellement l’édition qu’on vient d’en faire, — et cette édition est, par l’exécution typographique et l’ornementation, par la gravure, le luxe et la coquetterie des détails, très digne de la courtisane dont il est question dans ce livre, — de la courtisane la plus courtisane de l’époque la plus courtisane aussi, et dont MM. de Goncourt sont les courtisans… Les courtisans, il faut bien le dire, oui ! bien plus que les historiens. Il y a du juge dans l’historien, et MM. de Goncourt aiment bien trop le xviiie siècle pour le juger. Il faut qu’un homme soit fièrement organisé pour juger sa maîtresse, et MM. de Goncourt n’ont pas cette faculté supérieure et cruelle du jugement. Ils s’abandonnent… Ils ont, pour le xviiie siècle, l’amour, comme on le représentait précisément au xviiie siècle, avec le bandeau mythologique qu’on lui nouait alors autour de la tête, — ce bandeau à travers lequel on voit ce qu’on aime et on ne voit pas ce qu’on n’aimerait plus, si on le voyait ! MM. de Goncourt n’ont pas le cœur d’être des historiens d’un siècle qu’ils adorent… ils n’en sont que les éblouissants chroniqueurs. Ils n’en sont que les peintres, et encore dans la manière des peintres de ce xviiie siècle qui les a faits ce qu’ils sont… Ils peignent comme Fragonard, ils peignent comme Chardin, ils peignent comme Boucher, ils peignent comme les deux frères Le Nain, ces deux frères de Goncourt ! Ils peignent sur toile, ils peignent sur soie, ils peignent sur ivoire, ils peignent sur porcelaine, ils peignent sur tout. Ce sont des merveilles de peinture que leurs livres sur le xviiie siècle, dans lesquels ils rappellent si bien, littérairement, les peintres de cette époque, dont ils fondent la couleur et la manière dans une couleur et une manière à eux. Cela rosoie, verdoie, chatoie et flamboie. Mais le pinceau qui a peint tout cela est idolâtre et sa peinture est une flatterie. Même dans cette Sophie Arnould, dont ils nous donnent la chronique… scandaleuse, ces courtisans du xviiie siècle courtisent encore trop la courtisane et ils oublient qu’avec de pareilles coquines on ne fait pas des Assomptions.
La Correspondance qu’ils ont publiée — car leur livre s’appelle Sophie Arnould d’après sa correspondance — aurait dû les dégriser pourtant, ces grisés charmants qui voient en beau, quand ils sont gris. Pour mon compte, je ne la trouve intéressante, cette Correspondance, que parce qu’elle dépoétise et déshonore Sophie Arnould, le Voltaire femelle, pour l’esprit sur place, dont les de Goncourt font l’histoire comme si elle ne vivait pas assez dans les mots qu’elle a laissés derrière elle, puisqu’elle avait le don de ces étincelles qui ne s’éteignent pas, et qu’il fallût la chercher dans le détail, les misères et les turpitudes de sa vie ! La Correspondance de Sophie Arnould donne un démenti à tout ce qu’on savait d’elle, — du moins à tout ce qu’on en imaginait ; car elle avait tant d’esprit qu’elle faisait l’effet d’être altière, d’avoir la fierté de cet esprit terrible, et la Correspondance nous apprend qu’au contraire elle ne l’avait pas, et qu’avant de mourir, la misérable s’est aplatie.
Évidemment, MM. de Goncourt, ces aimables flatteurs du xviiie siècle, se sont trompés sur cette correspondance et ils auraient pu ne pas l’exhiber. Nous n’y aurions guères perdu, et Sophie Arnould y aurait gagné ; car cette Correspondance est abominablement humiliante pour elle, l’héroïne de leur livre ! Il y a des choses, il est vrai, dans cette Correspondance, qu’il est impossible même à MM. de Goncourt de ne pas voir… En leur qualité de peintres, d’ailleurs, et de peintres recherchant des effets de peinture, ils ont peut-être trouvé frappant et pathétique de montrer les vices et la misère, fille de ces vices, chez la plus brillante et la plus spirituelle courtisane du xviiie siècle, morte de misère après l’éclat et les bonheurs du talent et de la fortune, le triomphe, l’enivrement, toutes les gloires sataniques de la vie, et de faire de tout cela un foudroyant contraste, une magnifique antithèse… Mais s’ils ont montré — hardiment pour eux — la fameuse Sophie Arnould, qui naturellement devait tenter la sensualité de leur pinceau, dégradée de cœur, de mœurs, de fierté, de talent et de beauté, au déclin cruel de la vie, ils n’ont pas osé aller jusqu’à la vérité tout entière. Ils lui ont épargné la dégradation qui, pour elle, aurait été la plus affreuse. Ils ne l’ont pas dégradée de son esprit, ils l’ont proclamée spirituelle jusqu’à sa dernière heure, — et sa dernière heure l’avait abêtie. La Correspondance que voici l’atteste et ils ne s’en aperçoivent pas ! Ces éblouissants éblouis ont gardé dans les yeux l’impression des éclairs de cet esprit qui en avait tant lancé dans sa vie, et ils croient toujours en voir briller, dans ses lettres éteintes, quand, de fait, il n’y en a plus.
Elles sont, en effet, le contraire de ce qu’on attendait, ces pitoyables et tristes lettres… et personne n’aura d’admiration à leur service, personne excepté MM. de Goncourt, qui phrasent de ces marivaudages sur elles : « Ces lettres de Sophie avec leur tour, leur franchise et leur premier coup, leur agrément libre et poissard, leurs larmes de si belle humeur, leur philosophie en chansons, leur coquetterie à la diable, leur esprit au petit bonheur, leurs charmes à l’aventure, leurs grâces salées… peuvent être le mets des plus délicats. »
Ah ! Montesquieu avait raison, les gens d’esprit font les livres qu’ils lisent. Dans ces lettres de Sophie Arnould, excepté la poissarderie, je ne vois pas un mot de cela ! Je n’y retrouve qu’épuisée, ramollie, finie, cette formidable Sophie Arnould qui faisait tout trembler devant son esprit, devant cette furie de mots coupants et vibrants que personne n’eut au même degré qu’elle, dans un temps où l’esprit dominait le génie et où les hommes de génie étaient encore plus des hommes d’esprit, comme Voltaire et Montesquieu… Allez ! il n’y a plus ici de Sophie Arnould, de ce Caquet Bon Bec sublime qui n’était plus un bec de pie, mais un bec d’aigle ; il n’y a plus ici d’Aspasie de l’épigramme qui se serait moquée de Périclès ; il n’y a plus de Vénus, impudique et armée : Venus armata. Je n’y trouve plus qu’une vieille mendiante, sans poésie et sans pittoresque, tendant la main à tout le monde ; affligée d’un squirre qui la punit par où elle a péché ; cynique quand elle parle de ses infirmités physiques, — de l’ébrèchement de son Cuvier ; concubine sentimentale après avoir été une concubine débauchée ; mettant le sentiment qu’affectait aussi son corrompu de siècle par-dessus sa corruption. Le sentiment dans la corruption ! tout ce qu’il y a au monde de plus hideux ! Cette Sophie Arnould, dont le nom de Sophie — dérision ! — signifie sagesse, n’a plus de sagesse à l’extrémité d’une vie folle que de vivre en bonne intelligence avec les femmes que ses anciens amants ont épousées ; n’ayant plus même l’énergie ou la délicatesse d’une jalousie qui reste quelquefois aux femmes les plus perdues ; pourrie de cœur dans un corps pourri, — ce qui n’étonne guères dans une courtisane, — mais pourrie jusque dans son esprit même, cet esprit par lequel elle avait bien plus régné que par son corps et que MM. de Goncourt voudraient nous faire croire immortel ! Je ne sache rien de plus honteusement lamentable. C’est Gavarni, l’implacable Gavarni qu’il faudrait ici, au lieu de MM. de Goncourt. Mais c’est elle-même, la malheureuse ! qui, sans s’en douter, dans ses lettres, a été à elle-même son Gavarni.
II
Jamais chute plus profonde après une montée plus rapide… Une autre coquine de ces temps de coquines heureuses qui ont cependant fini par tomber, la Dubarry, eut l’honneur d’être guillotinée avec le même couperet que Marie Antoinette, mais la fin, dans la destinée de Sophie Arnould, rien n’en a diminué ou n’en a relevé la bassesse. Cet oiseau chantant de la volière de Madame de Pompadour et de la princesse de Conti, dont la Reine disait, comme d’un oiseau, avec le mépris naïf qu’elle avait pour la nature humaine, cette charitable Marie Leczinska : « Vous me la donnerez, n’est-ce pas ? je la veux ! »
, s’est élancé, comme un oiseau, dans le plus bleu de la vie. Cantatrice plus de nature que d’art, elle avait une voix qui faisait pleurer, en attendant que les mots plaisants ou cruels, dits par elle au lieu d’être chantés, fissent rire la gaieté ou saigner l’amour-propre. Sophie Arnould commença par chanter dans les églises, à la Cour, puis à l’Opéra, où cette voix expressive, cette voix d’esprit, lutta contre la vraie musique, — la musique de Gluck qu’elle avait appelée « une bête »
et contre laquelle elle se brisa. Ce fut encore l’esprit qui fit le succès et la beauté de cette voix, dont Galiani disait : « Jamais asthme n’a si bien chanté ».
L’asthme déchanta. Le Rossignol, qui avait charmé, ne plana plus. Ce fut l’esprit, l’esprit tout seul :
L’esprit, l’aigle vengeur qui plane sur la vie,
comme a dit un poète de ma connaissance, — et qui la vengea ! Elle devint alors une autre puissance, non moins applaudie, non moins retentissante. Elle fut la Bacchante d’esprit de toutes les orgies de ce temps d’orgies que fut le xviiie siècle. Elle était de force à peloter avec les plus forts esprits de cette époque, où la conversation était adorée. Elle avait, à elle seule, la grâce bonne enfant du délicieux prince de Ligne, l’image opulente de Rivarol et la morsure de Chamfort. Elle avait fait un nœud de tout cela et c’était là son nœud d’épaule ! Pendant des années et jusqu’à la Révolution, qui a tué l’esprit comme elle a tué tant d’autres choses, elle régna par les mots, la plus jolie manière de régner en France, quand on y régnait ! Elle fut la Sagittaire, au carquois inépuisable, qui cribla son siècle des flèches d’or de ses mots et qui, maintenant, à l’exception de quelques-unes, sont pour la plupart égarées ou perdues. J’aurais mieux aimé les voir ramasser à MM. de Goncourt que les pauvres lettres qu’ils ont ramassées. Ils leur auraient redonné un carquois qu’ils étaient très capables de peindre et de ciseler. Je me suis laissé dire qu’il y avait un Arnouldiana quelque part, mais j’aurais préféré le leur. De cela seul qu’ils étaient hommes de lettres, Voltaire, le prince de Ligne, Rivarol et Chamfort, ont pu sauvegarder beaucoup de leur esprit, puissancialisé par la causerie et qu’ils ont jeté dans leurs livres. Mais Sophie Arnould, qui ne savait pas l’orthographe, n’était qu’une jouisseuse en toute chose, et elle laissait perdre la mousse de son esprit comme la mousse du vin de Champagne, sur le pied du verre, à souper…
Spirituelle, n’étant que spirituelle en tout, cette diablesse d’esprit n’était pas jolie, et même le portrait qu’en donnent MM. de Goncourt, à la tête de leur ouvrage et d’après un dessin du xviiie
siècle, nous la crache fort laide. Elle y est représentée les yeux en l’air, pâmés sous un front sans sourcils, la bouche ouverte (chantant probablement), et il est impossible d’être moins que dans ce portrait la Sophie Arnould que l’imagination se figure. L’imagination a peut-être tort… Les cheveux soulevés sont retenus dans le cercle d’un ruban ; le visage est long et maigre. On sent les os sous la peau, aux pommettes. La bouche, aux commissures trop relevées, fait un trou noir désagréable. C’est par là que l’asthme chantait. C’est par là que sortait ce souffle dont le marquis de Louvois, blessé certainement par quelque épigramme de Sophie, disait, avec la haine qui trouve le mot comme le génie : « Savez-vous pourquoi elle sent si mauvais, Sophie Arnould ? C’est qu’elle a son cœur sur ses lèvres. »
Les livres, les mémoires, — les espions du temps, — nous disent tous qu’elle avait l’haleine infecte, l’haleine de ses mœurs. Mais cela n’a pas empêché les baisers de toute une époque de pleuvoir sur cette bouche empoisonnée, qui se purifiait peut-être une minute au feu de l’esprit et de la passion qui y passait. Cette horreur dite d’elle est-elle vraie, d’ailleurs ? Sophie Arnould, parce qu’elle était une puissance, a été traitée comme toutes les puissances, qui sont, un jour, vilipendées par ceux qui les ont le plus lâchement subies… Elle était un prodige d’esprit : on en a fait un monstre moral et physique. Mais si réellement elle en fut un, il faut s’étonner d’autant plus de l’empire d’une fille qui fut la Ninon de son temps, bien plus dépravé que le temps de Ninon, et qui n’avait que la moitié de ce qu’avait Ninon pour vaincre dans les luttes olympiques de son métier de courtisane, — car Ninon avait sa beauté.
III
C’est cet empire de l’esprit seul et réduit à lui-même, exercé si souverainement et si longtemps par une coquine méprisée, honnie, exécrée et laide, qu’il fallait détacher, pour l’expliquer, de tout ce qui n’était pas cet empire. C’est cette gloire de l’esprit qu’il fallait faire sortir de cette infamie et en arracher !…
Or, c’est ce que MM. de Goncourt n’ont pas fait. Ils ne discutent pas l’étrange puissance de Sophie Arnould sur une société qui avait des courtisanes plus belles qu’elle et tout aussi débauchées ; ils la prennent en bloc, cette puissance, et ils ne l’analysent pas. Pour ces amoureux des personnes et des choses du xviiie siècle, Sophie Arnould est peut-être jolie et même belle, malgré la laideur osseuse et mortifiée du portrait qu’ils nous en ont donné. Pour eux, qui sait ? Sophie Arnould n’est peut-être pas que le phénomène d’esprit que réellement elle était, mais un phénomène bien plus complexe ; car ils la font, dans leur livre, charmante de toutes les manières dont une femme puisse être charmante, comme ils l’ont faite spirituelle dans ces misérables lettres où elle ne l’est plus et qui inspirent à qui les lit, excepté eux, plus de dégoût encore que de pitié.
Tels sont les deux défauts du livre de MM. de Goncourt. Le regard qu’ils jettent sur cette étincelante et étrange personnalité qui fut Sophie Arnould n’est ni assez froid, ni assez profond. C’est le regard d’un enthousiasme enivré qui n’a pas vu le peu de valeur de ces lettres vantées par eux outre mesure, et qui leur a fait intituler leur livre : Sophie Arnould d’après sa correspondance. L’opinion, erronée, selon moi, de MM. de Goncourt, sur l’esprit et le talent de ces lettres, les a empêchés de mesurer l’immense abjection de celle qui les a écrites. Accablantes pour la mémoire de Sophie Arnould, elles ajoutent au mépris qu’elle mérite. Qu’ils ne l’aient pas vue comme je la vois, moi, cette abjection, je n’en suis pas surpris. Ils sont peintres bien plus que moralistes, MM. de Goncourt. Le côté extérieur, pittoresque, esthétique des choses leur semble le grand côté de la vie, et voilà leur excuse ! Quand on est ce qu’ils sont, l’abjecte, dans Sophie Arnould, on peut ne pas la voir sous les roses de la courtisane et dans les fulgurations d’un esprit qui mit tout son siècle à feu ; mais l’imbécillité, tard venue, — mais enfin venue, — pouvait-elle échapper à qui aime tant les choses de l’esprit et se connaît tant aux choses de l’esprit ?… Sophie Arnould est morte imbécile. Elle est morte ruinée d’esprit comme de cœur et de corps. Elle est morte en radotant de sa misère et dans l’écroulement complet, définitif, de l’être entier… Cette courtisane exceptionnelle, qui avait le génie du mot, de l’aperçu, de la répartie, et qui régnait sur la pensée autant que sur les sens des hommes, est morte aussi bête que les autres courtisanes vivent !… Il est véritablement incroyable que MM. de Goncourt n’aient pas vu une chose si facile à voir, — et cela est d’autant plus regrettable que, s’ils l’avaient vue et s’ils l’avaient dite, leur livre y aurait gagné au moins un accent de tristesse, qui l’aurait rendu plus éloquent et plus beau !
Il l’est déjà beaucoup, mais il ne l’est pas assez. Leur Sophie Arnould, telle que la voilà, est certainement l’un des livres les plus brillants qu’ils aient jamais écrits, ces esprits brillants qui aiment tant ce qui brille qu’ils ne peuvent voir ce qui ne brille plus… Seulement, ce livre, tout de passion, n’a pas d’autorité. Eh bien, je m’imagine qu’il pouvait avoir une portée plus grande que celle des rayons du talent qui y brille !… mais pour la lui donner, cette portée, il fallait se mettre au-dessus de son sujet, non pas rester à son niveau. Il ne fallait pas se laisser absorber par cette courtisane dangereuse encore, après sa mort, et qui a des séductions d’outre-tombe… Quand MM. de Goncourt publièrent cette chronique, hardie et quelquefois effrontée comme elle, de Sophie Arnould (c’était en 1857), ils étaient jeunes, — et dans la fougue et la flamme d’un talent qu’ils avaient allumé à tous les candélabres du xviiie siècle. Ils vivaient la tête, le cœur et la main, dans ce siècle… Ils soupaient tous les soirs avec les Revenants de ce siècle qu’ils faisaient revivre sous leur plume, Cagliostros plus magiciens que Cagliostro ! Celle-là qui s’appela un soir Iphigénie en Champagne, leur avait versé du sien… Depuis ce temps-là, les années sont venues, avec les mélancolies qu’elles apportent. L’un des deux enthousiastes du xviiie siècle est parti. Il n’y en a plus qu’un, qui aurait pu revoir le livre, et le livre est resté ce qu’il était. J’ai admiré, au commencement de ce chapitre, qu’il ait conservé son bel éclat de vie et de jeunesse, — car les livres sont parfois plus heureux que les hommes, — mais si, à cet éclat de jeunesse et de vie qui n’a point pâli, M. Edmond de Goncourt avait ajouté de ces choses qu’inspire la vie et qui nous font la mieux comprendre, à mesure que nous la perdons, le livre, œuvre éclatante et charmante, aurait pu devenir un chef-d’œuvre. Je l’aurais souhaité pour la gloire du Goncourt qui reste, et — puisqu’ils ont été toujours un, ces deux frères ! — pour celle du Goncourt qui n’est plus.