Hallé
Hallé est toujours le pauvre Hallé. Cet homme a la rage de choisir de grands sujets, des sujets qui demandent de l’invention, des caractères▶, du dessin, de la noblesse, toutes qualités qui lui manquent.
Abraham reçoit les anges qui annoncent à Sara qu’elle sera mère, malgré sa vieillesse.
On voit dans ce tableau les anges assis autour d’une table. Abraham est debout devant eux. Sara écoute derrière une porte.
L’Abraham est très mal drapé. On ne sent nulle part le nu sous cet amas d’étoffe lourde et de couleur de terre. Monsieur Hallé, où est ce beau ◀caractère céleste que Raphaël et Le Sueur ont su donner à leurs anges ? Les vôtres sont trois polissons déguisés. Votre Abraham est un vieux paillard qui a le souris indécent, le nez recourbé, la physionomie grimacière et rechignée d’un faune ; il ne lui manque que les oreilles pointues et les petites cornes. Et cette figure mesquine de femme derrière la porte, c’est une servante que vous ne me ferez jamais prendre pour une Sara. Et puis, vos couleurs sont sales et crues ; vous êtes d’une fadeur de monotonie insupportable. Vous m’ennuyez, Monsieur Hallé ; vous m’ennuyez.
Personne ne sait ce que c’est que votre Vierge avec son enfant, vos deux petites Pastorales, votre Abondance répandue sur les arts, ni votre Combat d’Hercule, et d’Achéloüs. Tout cela est misérable.