Gustave D’Alaux20
I
L’Histoire a quelquefois l’air de mystifier ceux qui la lisent. Il s’est rencontré de très bons esprits, peu philanthropes et ne se faisant pas grande illusion sur les puissances de méchanceté ou de sottise qui sont dans cette aimable créature qu’on appelle l’homme, qui croyaient que Suétone et même le grave Tacite s’étaient moqués de la postérité en écrivant leurs histoires. Et de fait, les annales de la décadence (non pas seulement celles de Tacite) ont les proportions d’une fable énorme, arrangée par l’imagination antique pour terrifier, en l’instruisant, l’univers. Voici une histoire qui n’est ni de Tacite ni de Suétone, mais d’un de nous, d’un moderne, à l’esprit sobre, aux besoins de vérité positive, sagace, de bon sens, et surtout de bonne humeur, ce que n’étaient ni Suétone ni Tacite, et qui de sa plume sans prétention, mais non pas, certes ! sans énergie et sans verve, nous raconte à son tour une histoire… incroyable, une histoire affreuse et bouffonne, qui a lieu depuis quelques années et qui continue, à la barbe du monde civilisé, sous le ciel de Dieu, de l’autre côté de l’Atlantique, jusqu’en cette année de Notre-Seigneur Jésus-Christ 1856.
Il ne s’agit pas de l’univers, il est vrai, ni de ce prodigieux phénomène de la décadence. Il s’agit, au contraire, d’une poignée d’hommes, d’un peuple organisé d’hier, et qui n’en est encore qu’à la première marge de son progrès. Il s’agit de nègres, de ceux qui furent longtemps le rebut du genre humain, et qui n’en sont pas l’honneur encore ! Enfin, il est question d’Haïti et de Soulouque, « de cette étrange majesté de chrysocale et d’ébène qui a nom Faustin Ier », comme dit Gustave d’Alaux. Évidemment, si nous en croyons son histoire : L’Empereur Soulouque et son Empire 21, il y a, dans l’extravagance cruelle de cette caricature d’empereur et la faculté de tout souffrir de cette caricature de peuple, des choses qui rappellent à leur façon les folies et les furies des vieux monstres connus, solennels et sérieux, et la patience ou l’enthousiasme plus incompréhensible encore, du monde qui les acclama. Cela se ressemble… Avec les différences de rabougrissement, de race et de peau, comme le crapaud, dont Lavater faisait Apollon, ressemble à la tête de Méduse ; car les nègres donnent à tout leur profil. Est-ce à cause de cette ressemblance avec les blancs dans l’insensé et dans l’atroce, que le nègre, cet enfançon vagissant et informe de la barbarie, et dont, grâce à Papa Soulouque, la tétrelle de sang est toujours pleine, pourra passer un jour de pied en cap à l’état d’homme ?… On fait de la chair avec du marbre, et du marbre avec de la chair, disait Diderot !
Et l’incroyable de l’histoire de d’Alaux, quoique tout nouveau et tout frais, est encore plus fort que l’incroyable antique. Sur l’antiquité nous avons une masse de témoignages, des livres de tout genre, une critique faite ; mais sur les faits rapportés par D’Alaux, où sont les livres contradictoires ? Où sont les sources ouvertes à tous, où l’on puisse largement puiser ? Que disons-nous ? Nous nous trompons. Il y a le Moniteur d’Haïti, que d’Alaux invoque souvent. Eh bien, nonobstant cette autorité, quand l’historien de Soulouque nous étale les hideuses et sanguinaires bêtises qui se prélassent là-bas dans des oripeaux de gouvernement ou un gouvernement d’oripeaux, le fameux mot du sceptique revient involontairement à la pensée : « Je crois à l’histoire, mais je n’y étais pas ! » Gustave d’Alaux y était-il ?… Est-il allé à Haïti pour écrire son livre ? S’il n’y est pas allé pour l’écrire, il y est du moins allé après l’avoir écrit. C’est un aplomb superbe ! Mais cela fait-il une sûreté de plus ?…
II
Quand l’historien est le contemporain de son histoire et qu’il est, de plus, éloigné du théâtre sur lequel elle s’est produite, il n’y a plus que sa parole et ses renseignements particuliers. Il paraît que ceux-ci ont été nombreux. Pour notre compte, nous sommes assez disposé à les accepter, parce qu’ils rentrent dans toutes les notions générales et incontestables sur la race nègre recueillies par les meilleurs observateurs. D’un autre côté, d’Alaux est un esprit qui nous plaît. Il est net, ferme, précis, sans fausse sentimentalité, sans déclamation, diagnostiquant hardiment, à travers Soulouque, les caractères de la race dont il est sorti… Malheureusement, comme beaucoup de braves, la chose faite, Gustave d’Alaux a été pris d’une peur rétrospective et il a attaché à un livre franc et plein de vaillance une préface de précaution qui nous étonne. Excellent tout le temps qu’il n’est qu’historien et peintre, il n’a plus la même valeur quand, des faits qu’il décrit avec une si pénétrante ironie, il veut monter dans les généralités philosophiques et, dominant Soulouque et son empire, regarder plus haut que cette tête crêpue et ce globe impérial fait avec une boule de jongleur. La philanthropie, qu’il avait jusque-là évitée, emboîte le pas tout à coup à cet écrivain rapide et pratique qui marchait plus vite qu’elle, et on le regrette. Il ne sied pas à cet esprit viril, qui n’hésite jamais devant un fait, et pour les formes détachées duquel nous nous sentons une vive sympathie, de demander ainsi presque pardon aux préjugés actuels du mordant de sa plume ou de son sujet. Qui croirait, en lisant cette préface, que l’homme qui l’a écrite pût peindre Soulouque et sa race avec cette énergie de ressemblance, ou, ayant lu le livre, que l’auteur de ce livre en eût pu penser la préface ? Contradiction qui n’est qu’une ruse peut-être ; car il répugne profondément d’admettre que d’Alaux, dans toute la lucidité de son bon sens, et après avoir retracé avec un mépris si sincère ce règne de Soulouque auquel on est tenté de ne pas croire, conclue en faveur de l’homme de ce règne inouï et voit en lui le fondateur possible d’une future nationalité ! Que si, du reste, par hasard ou par inconséquence, c’était là le fond vrai de sa pensée, nous aurions la preuve une fois de plus que l’étude de l’Histoire est quelquefois stérile, et que savoir correctement les faits et les reproduire avec éloquence n’est pas tout.
La nature vraie du nègre aurait échappé à ce rude peintre, qui en fait saillir si admirablement les grimaces quand elles s’individualisent dans quelqu’un, et, comme tant d’autres, cet esprit, qui semblait n’avoir rien de commun avec les badauderies contemporaines, y échouerait… ce ne serait rien de plus qu’un homme à la mer ! L’histoire de Soulouque, qui est bien le type de sa race, n’aurait pas appris à son historien que le nègre, à cela près de quelques exceptions, d’ailleurs superficiellement observées, n’a guères que les vertus et que les vices de l’enfance et de la domesticité, et que ce n’est ni avec ces vices ni même avec ces vertus que l’on peut fonder des empires ! Eunuque spirituel, même quand il semble posséder le plus de qualités cérébrales, ayant les vaines rages de l’eunuque, le nègre appartient-il à une de ces races déchues comme il en est plusieurs dans la grande famille humaine, et que la Bible, ce livre de toute vérité, a désignées comme devant servir les autres et porter les fardeaux à leur place, ainsi qu’elle s’exprime dans son style imagé et réel ? Gustave d’Alaux n’aurait pas osé l’assurer. En proie aux titubations modernes, la plus triste maladie de ce temps, il n’aurait pas osé prendre sur la responsabilité de sa pensée d’affirmer qu’il y a des hiérarchies politiques et des hiérarchies de nations ! Parmi nous, pourtant, les plus maniaques d’égalité relèvent à la frontière, pour l’honneur de la France, l’inégalité dont ils ne veulent pas à l’intérieur, et ils appellent avec raison la première des nations du monde le pays des vainqueurs de Sébastopol. Or, s’il y a une première parmi les nations, il y a forcément une dernière. Les races qui servent sont aussi nécessaires dans l’ordre universel que celles qui commandent ; et, d’ailleurs, servitude n’a jamais voulu dire oppression. Cherchant à s’appuyer sur des explications plus vulgaires, Gustave d’Alaux parle d’imitation intelligente ; mais l’imitation du nègre, comme celle des enfants et des domestiques, est beaucoup plus l’imitation des défauts que des qualités de leurs supérieurs et de leurs maîtres, et la vie tout entière de Soulouque, qui avorte même à parodier Napoléon, est la preuve sans réplique de cette imitation aveugle, grotesque et fatale ! Ah ! l’histoire du nègre, pour qui sait la lire, a un sens plus profond que toutes ces imitations dont la civilisation ne sortira jamais, parce qu’elle n’en est jamais sortie ! Quand on ne croit pas au hasard, aussi bête que les couleuvres africaines adorées par Soulouque et dont d’Alaux se moque avec juste raison, lorsqu’on a le bon sens d’admettre la variété providentielle des fonctions pour tous les peuples, les nègres, qui probablement ont leurs origines comme les autres races, semblent avoir été mis particulièrement dans le monde pour montrer combien est pesant aux créatures humaines le fardeau de la liberté. Les malheureux en sont les ilotes. Quand Dieu veut dégoûter le monde de liberté, il lui offre en spectacle les nègres essayant de s’en faire une, comme ils ont fait depuis plus de soixante ans, rejetant la règle, créant des républiques et des empires, toujours d’imitation, et toujours aussi, en raison de leur nature même, retombant de leurs premiers maîtres sous la main de maîtres plus durs ! Aujourd’hui, avec leur Soulouque qui les égorge comme ils ont toujours été égorgés, ils ne sont ni plus opprimés ni plus libres qu’ils n’étaient sous ce collier de tyrans, Boyer, Christophe, Dessaline ; mais la domination du dernier venu n’aura pas plus de durée que la domination des autres… Gustave d’Alaux a-t-il tu sciemment ou n’a-t-il pas seulement entrevu ces idées ? Quoi qu’il en soit, elles frappent sa préface d’une lueur funeste, car elles en font soupçonner la moralité ou l’intelligence. À son choix !
Pour peu qu’il les eût aperçues, en effet, il en fût passé dans son livre quelque chose qui ne s’y trouve pas. Avec elles, s’il les avait eues, il ne serait pas moins un historien qui renvoie les horoscopes à ses préfaces et qui n’a souci que d’enlever exactement les faits historiques dans un daguerréotype brûlant. Mais ces idées, même inexprimées, auraient influé sur son ouvrage et lui auraient communiqué des mérites de plus. Gustave d’Alaux a de la force dans la raison, et il l’a bien prouvé en peignant sobrement le monde noir, ce monde que l’imagination conçoit seule, et qui emporterait, le mors aux dents, tout écrivain de quelque pente vers la fantaisie. Mais, quelles que soient la force de la raison de l’historien et la justice de sa raillerie quand il s’agit d’un pays où les pantalonnades se jouent dans le sang et où le Congo de la barbarie se mêle au Congo de la civilisation, — car on y vénère également des fétiches, des serpents, des journaux et des constitutions démocratiques, — Gustave d’Alaux nous fait toujours l’effet, en peignant le chef de ce monde noir qui le résume si bien dans tous les détails de sa personne, d’un artiste croquant un bourgeois. Quoique, après tout, l’éclat de rire soit le coup de fouet final et mérité qu’on puisse appliquer sur le râble de ce singe féroce qui a l’ingénuité de ses instincts puérils ou monstrueux, cependant la raillerie de l’écrivain serait plus noblement limitée et l’accent général de son livre y gagnerait si, au lieu de voir uniquement dans Soulouque le masque d’une individualité singulière, il voyait davantage en lui la nature et la destinée de sa race. La gaîté du mépris ne vaut pas sa miséricorde. Rien dans le livre de d’Alaux ne nous autorise à ne pas croire l’auteur chrétien. Rappelons-lui donc, à propos de nègres, le mot sublime de saint Vincent de Paul en parlant des pauvres : « Les pauvres — disait cet homme céleste — sont grossiers, sales, obscènes et répugnants, mais il faut s’efforcer de voir Jésus-Christ à travers cette affreuse enveloppe. » Or, même à travers le nègre le moins ou le plus mal développé, à travers Soulouque, on peut voir encore Jésus-Christ.
III
Et c’est ici la solution définitive et suprême d’une question, de l’inévitable question qu’un livre qui touche par un bout ou par un autre à l’histoire du monde noir soulèvera toujours. Le christianisme, qui a déjà une fois modifié ces natures bestiales et enfantines, mais qui n’a pas — les doux maîtres partis — gardé sa conquête, tant le nègre redevient incorrigiblement ce qu’il était dans l’espace d’une génération, le christianisme, avec ses influences surnaturelles, pourrait seul constituer un état de civilisation relatif pour ces nègres, en pleine réaction, à l’heure qu’il est, de barbarie africaine, et dont Soulouque est bien plus l’instrument que la tête ; car un pareil homme n’est la tête de rien.
Ce n’est pas un Toussaint Louverture, qui, du moins, avait les grands instincts de ruse et de force d’un animal puissamment développé, ni un Christophe, doué de tant de persistance et de tenue dans ses facultés imitatrices, ni un Richer, qui réalisa un moment, dit d’Alaux, l’idéal du gouvernement Haïtien, en maîtrisant l’élément barbare sans écraser sous la même pression l’élément éclairé. C’est un de ces nègres vulgaires, comme tant d’autres chefs d’un instant de la barbarie noire, et qui n’a dû son élévation qu’à de chétives circonstances de taille avec sa petitesse, et, depuis, aux passions qui, comme celles des masses, ont une manière de faire des chefs de certains hommes qu’elles poussent devant elles en attendant qu’elles leur passent par-dessus. Si nous en croyons les dépositions curieuses et terribles de l’histoire d’Alaux, Soulouque, ce vieil enfant, car il avait plus de soixante ans quand il fut élevé à la présidence de la République d’Haïti ; Soulouque, « ce formidable poltron qui voit dans toute ombre un fantôme et dans tout silence un guet-apens », cet être absurde, fanatique, dévoré par des superstitions de sauvage, méfiant, fanfaron, cruel, mais apathique après que le sang, dont il a des soifs vraiment physiques, est versé ; Soulouque, ou, pour l’appeler du nom d’empereur qu’il s’est donné dans une farce officielle qu’aucun gouvernement n’a eu d’intérêt à empêcher, Faustin, est très au niveau, si ce n’est très au-dessous, du premier Cafre venu qui va s’éteindre sur la Côte d’Ivoire. Devenu président parce qu’entre deux candidats significatifs à chance égale il était, lui, insignifiant, et par là ne divisait personne, Soulouque était alors (en 1847), nous dit d’Alaux, avec sa poignante familiarité de récit, « un bon gros et pacifique nègre qui, depuis 1804, époque à laquelle il était domestique du général Lamarre, avait traversé tous les événements de son pays sans y laisser de trace en bien ou en mal. En 1810, le général Lamarre fut tué en défendant le Môle contre Christophe, et Soulouque, qui était déjà devenu quelque chose comme l’aide de camp de son maître, fut chargé de porter son cœur à Pétion. Pétion le nomma lieutenant dans la garde à cheval, et le légua plus tard à Boyer comme un meuble du palais de la présidence. Boyer, à son tour, le nomma capitaine et l’attacha au service particulier de madame Joute, une Diane de Poitiers au teint d’or qui avait été la présidente de deux présidents. Soulouque resta ensuite complètement oublié jusqu’en 1843, mais, depuis cette époque, chaque révolution l’avait aidé d’une poussée à gravir ce mât de cocagne d’où il ne s’attendait pas à décrocher une couronne. Sous Hérard il devint chef d’escadron ; sous Guerrier, colonel ; sous Richer, commandant supérieur de la garde du palais. » Tels étaient Soulouque et son passé, et son historien nous raconte avec infiniment de précision, d’information et de justesse, ce que ce bonhomme ingénu, qui balbutie de timidité en parlant et qui rougit aimablement devant tout inconnu, pour qui sait voir la rougeur de la peau sous son ébène, devint bientôt pour les nègres et pour les mulâtres. Dans le détail de cette histoire, qui ressemble à un conte d’Edgar Poe, l’auteur nous fait parfaitement toucher du doigt ce qui fit tout de suite la puissance du nouveau président de la République et lui versa sur le front une couronne. L’illuminisme nègre, le culte du Vaudoux, son initiation, cette espèce de franc-maçonnerie africaine à laquelle Soulouque était affilié, tout cela est analysé avec une entente merveilleuse. De cet illuminisme qui domine la tête de Soulouque, et de la vanité du nègre (la vanité du nègre est quelque chose de sans nom) blessée par les classes éclairées, qui se moquèrent de son fétichisme dès les premiers moments de son avènement, l’historien fait sortir le Soulouque méchant enté sur le bon nègre, l’espèce de Tibère cafre qui, tout omnipotent qu’il soit, et féroce, sacrifie au préjugé des procédés judiciaires, et, trait de caractère, se sert un jour, pour condamner à la mort qu’il a résolue, de commissions militaires qu’il pourrait ne pas invoquer dans l’état absolu de sa puissance, mais qu’il invoque, nous dit d’Alaux avec une profondeur spirituelle, « pour ne pas être volé d’une seule de ses prérogatives ». Voilà, selon d’Alaux, l’explication et la clef de ce phénomène, qui s’appelle pour l’heure Faustin Ier, de la tyrannie indurée de cet homme, arrivé au pouvoir en se frottant les yeux, comme l’Éveillé de la comédie, sans parti pris, sans intention que d’imiter Richer, non parce qu’il était le plus intelligent de ces souverains de pas sage, mais parce qu’il était le dernier passé, et qui trouve tout à coup dans sa religion de barbare, dans sa terreur des sorciers et dans son fétichisme méprisé, une initiative qui fait de lui le représentant le plus pur qu’ait jamais eu à Haïti le parti ultra de la réaction africaine !
C’est donc, à sa manière, une idée générale que Soulouque. Comme tous les pouvoirs politiques qui durent deux jours, — et le pouvoir de Faustin Ier peut durer davantage, — Soulouque représente une force qui n’est pas en lui, et qui donne à sa marionnette, si ridicule ou si stupide qu’elle puisse être, un sérieux avec lequel l’Histoire doit compter. Gustave d’Alaux a justement saisi et marqué ce qui fait l’ascendant actuel de Soulouque sur la société de noirs, de mulâtres et de sang-mêlés qu’il gouverne, si cela peut s’appeler gouverner. Mais comment un esprit si positif et si renseigné a-t-il pu placer sur cet ascendant une espérance ? Comment a-t-il pu écrire, même dans une préface, que le despotisme de la majorité noire était une transition nécessaire, et que si la crise était actuellement plus violente, c’était tant mieux ?… Encore une fois, ceci demandait à être plus appuyé, à être plus prouvé que dit en passant du bout de la plume ou des lèvres. Règle générale en cette matière : pour tout historien dont l’intention est plus profonde que de raconter des excentricités risibles ou effrayantes et des histoires… grotesques et arabesques, comme dirait Edgar Poe, toute histoire de nègres ou sur des nègres doit être précédée d’une étude à fond sur la race, et Gustave d’Alaux était digne de la faire, cette étude sans laquelle toute histoire quelconque, même celle qu’il vient d’écrire, manque de flambeau. C’est la seule critique que nous voulions faire d’un livre très curieux et très amusant, — curieux comme la vérité et amusant comme l’invention ; c’est la seule, mais elle suffira.