(1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « A. Grenier » pp. 263-276
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(1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « A. Grenier » pp. 263-276

A. Grenier

À travers l’Antiquité : la vie joyeuse au pays latin.

I

À travers l’Antiquité ! Bon titre et bonne chose ! La plume qui a écrit ce livre l’a, en effet, traversée, mais comme une épée traverse un ennemi. En restera-t-elle sur la place ?… Je ne sais. La vieille drôlesse est bien forte encore, malgré les dix-neuf cents ans de Christianisme qu’elle a sur la gorge et dont elle aurait dû mourir. Elle remue toujours sous ce poids terrible ; et c’est à faire croire, même à ceux qui le maudissent, que le paganisme est éternel. Cette dernière flèche achèvera-t-elle l’antiquité ?… car ce livre-ci, court, léger, vibrant, est une flèche dont le coup s’ajoute à d’autres coups qu’elle a reçus. Seulement, qu’elle en meure ou non, je vais m’occuper de la flèche ; et, comme nous allons le voir, elle est aiguë, elle est d’acier fin, elle est joliment et joyeusement empennée, — et elle s’est gaillardement plantée où celui qui l’a lancée avait visé.

Elle part d’un arc dont je ne me serais guères douté, du reste, — d’un arc fait avec du bois de professeur, destiné plutôt à faire des flûtes en l’honneur de l’antiquité que des arcs contre elle… A. Grenier, l’auteur de ce livre, fut un professeur, et il nous l’a dit : « C’est dans dix années de douce vie provinciale et « collégiale qu’il lut tous les auteurs anciens », et qu’il forgea et aiguisa la petite sagette que voici. A. Grenier, professeur, a fait exception à la règle. Les professeurs de notre temps ont trop d’antiquité dans la tête pour ne pas se payer, en la vantant, de la peine de l’avoir étudiée. Ces messieurs sont, pour la plupart, trop sceptiques, trop éclectiques, trop philosophiques, — ces trois choses qui n’en font qu’une, comme la sainte Trinité à laquelle ils ne croient pas, — pour ne point placer le monde antique, fils du paganisme, bien au-dessus du monde moderne, fils de l’Église, et pour ne pas reprendre et ne pas recommencer incessamment son apothéose dans l’histoire. Cette question de la préexcellence de l’antiquité et de sa supériorité sur la société chrétienne, ce n’est pas d’hier qu’elle a été posée. Ivre de grec et de latin, la Renaissance, cette Érigone, l’a résolue, avec cet affolement que lui inspirait cette antiquité retrouvée. Au xviie  siècle, sous un régime d’idées et de mœurs· redevenues chrétiennes, la grande question revint, mais par un angle. Elle ne se présenta que littérairement, et fut strangulée entre Boileau et Perrault, comme, plus tard, entre Lamotte et madame Dacier. Mais, depuis le xviiie  siècle, qui nous a déchristianisés, autant dans nos idées que dans nos mœurs, la question de l’antiquité a repris toute son envergure historique, et la Révolution, qui survint, la résolut à son tour avec encore plus d’idolâtrie que la Renaissance. Elle voulut, en effet, la recommencer, cette antiquité finie. Elle s’en dit, avec orgueil, issue, et de fait elle l’était… et si elle n’en prit pas les Dieux, c’est qu’elle était plus athée qu’elle ! Mais elle n’en fit pas moins, dans un anthropomorphisme plus hideux que le sien, des déesses de la Liberté avec des femmes qu’elle monta sur des autels, païenne jusque-là ! Païenne jusqu’à l’heure où Napoléon le Grand réenterra ce paganisme ressuscité, qui s’entête à toujours reparaître et qui s’est glissé dernièrement, sous des formes adroites, dans de cauteleuses publications. Rappelez-vous le livre de Μ. Gaston Boissier : La Religion romaine, d’Auguste aux Antonins ! Μ. Gaston Boissier était un normalien et un professeur, et son livre, en un tour de main, le fit de l’Académie.

A. Grenier est de l’Université et de l’École Normale, comme Μ. Boissier ; mais s’il n’a pas d’autre recommandation pour l’Académie que son livre, il n’en sera jamais ! Les bonshommes de l’endroit, scandalisés, diront, comme le Mercure de Molière :

Avec quelle irrévérence
Parle des dieux ce maraud !

Les dieux, c’est, pour l’Académie, ouverte aux professeurs, l’antiquité et le paganisme, et le maraud, c’est l’auteur du livre où l’antiquité est bernée. Maraud que j’estime et que j’aime ! « Maraud vaut Taupin », dit le proverbe. Mais ce maraud-ci, à mon sens, vaut mieux, à lui seul, que tous les Taupins de l’Académie !

II

Il a du talent, et du talent vivant. Il a le plus net, le plus sain, le plus vigoureux, le plus français de langue et de tour, et d’inspiration salée et plaisante, le plus gaulois. De tous les professeurs de cette époque qui ont brillé en dehors de leur enseignement, c’est un de ceux que je place le plus haut… On a beaucoup vanté About, qui a les mauvaises qualités françaises sans en avoir les bonnes, — qui est un esprit sans profondeur, sans consistance, sans élévation ; qui se donne des airs de Voltaire, mais qui n’en a pas les grâces. Eh bien, qu’on mette par la pensée About, assez vulgaire pour être populaire, — l’un donne l’autre toujours, — à côté de Grenier, qui n’a peut-être contre lui que ses préjugés d’universitaire dus à ses premières impressions, et on jugera ! Parmi les journalistes de ce temps, où (malheureusement) la forme du journal s’impose à tous les écrivains, Grenier est, pour moi, sans conteste, un des premiers. Il vient avec Veuillot et de Pêne. Il a moins de morsure que Veuillot, et moins de noblesse que de Pène, qui en a une incomparable ; mais de quelle force n’est-il pas doué dans la discussion, de quelle poussée irrésistible ! En polémique, c’est un sanglier qui va droit devant lui, tête baissée, et qui, brusquement, vous découd son homme. Avec cette différence, pourtant, que le sanglier n’est pas un animal très gai, et que Grenier, ce gaulois, ce fils de Montaigne, est plein de rondeur et de bonhomie et de bonne humeur, alors même qu’il vous expédie ! Cette fois, il expédie l’antiquité, et comme il n’est pas tenu, dans un livre, ainsi que dans les journaux, de garder une gravité sans laquelle l’abonné ne vous écouterait pas, il l’expédie avec une gaieté qui rend son livre la plus amusante des lectures, et qui, dans un pays aimant encore la plaisanterie, est une certitude de succès.

Il y est, dans ce livre, ce qu’on attend le moins d’un professeur. Il y est un rieur d’esprit qui a pris l’histoire officielle, l’histoire majestueuse, par le bas bout, pour nous la montrer, comme il faut la voir, cul sur tête. Il a fait comme le normand avec le pied de Charles-le-Simple. Ce n’est, en effet, que quand elles sont par terre, qu’on peut juger de la grandeur des sociétés, comme de celle des hommes : « Je ne le croyais pas si grand ! » disait Henri III en présence du duc de Guise renversé, et, pour toutes choses, nous sommes des Henri III, tous, tant que nous sommes. L’antiquité n’est pas si grande, allez ! sous la plume de Grenier, qu’on pouvait le croire… avant qu’il eût écrit. Quelques esprits, sublimement intuitifs, comme de Maistre et Bonald, avaient bien vu synthétiquement ce qu’il en était de cette société païenne, de ces Grecs et de ces Romains tués par des sophistes, des rhéteurs et des grammairiens, leur maladie pédiculaire ! Mais le mépris en bloc de ces grands esprits n’était compris que de quelques-uns, tandis qu’après le livre de Grenier il le sera, en détail, par tout le monde, — qui ne croit qu’au détail, qui a besoin qu’on lui mette une multitude de petits faits, toute une poussière de petits faits dans les yeux, pour l’éclairer, en l’en aveuglant !! L’auteur d’À travers l’Antiquité a voulu faire ce qu’on n’avait, jusqu’à lui, jamais fait sur l’antiquité. Il lui a appliqué cette chose basse, flânière et portière, si chère au monde actuel, que l’on appelle le reportage. Il a boulevardisé à Rome et à Athènes, comme on boulevardise à Paris. Il est entré dans l’histoire et il a parlé comme on entre et on parle au café de Madrid ; et cette façon sans cérémonie d’être historien, ce lâché, ce débraillé, ce cure-dents aux lèvres, devront paraître très piquants dans une société qui ne se gêne plus et où les hommes, dégingandés dans leurs ganaches, mettent leurs pieds sur la cheminée de leurs maîtresses. Cette originalité dans la forme, cherchée et réfléchie, n’appartient pas en propre à Grenier, et modestement il l’avoue. Politesse d’universitaire ! Il en fait honneur à Renan, qui jamais n’a rien inventé de sa vie ; car pour inventer il faut croire à quelque chose, ne fût-ce qu’à ce qu’on invente ! puis à de Champagny, dans ses Douze Césars, lorsque, pour être juste, il fallait peut-être remonter au prince de Ligne, qui, dans son adorable dictionnaire de ses grands hommes, se servit des formes de la langue moderne pour exprimer des choses antiques, avec le laisser-aller, le caprice et les familiarités d’un prince. Il est vrai que depuis le prince de Ligne, et même depuis de Champagny, nous· avons vécu, ce qui a permis à l’auteur d’À travers l’Antiquité d’employer une langue plus verte et plus crue… Seulement, langue à part, ce que ne pouvaient avoir ni Renan, le Brid’oison du doute, ni de Champagny, du faubourg Saint-Germain, où l’on n’est guères Gaulois, si on y est Français, c’est la plaisanterie ! et notre reporter de nouvelle espèce l’a mêlée à son reportage. D’ordinaire, ils ne sont pas gais, les reporters. Ils pointent des notes et font des pointes. Je n’en ai connu qu’un seul qui eût la verve du rire et de l’esprit, c’était « Frou-Frou », obligé de ne plus être maintenant qu’un « Monsieur de l’Orchestre ». Eh bien, le reporter actuel et rétrospectif d’Athènes ou de Rome, est un esprit joyeux comme Hercule ! Il ne se garderait pas de rire en ce grave sujet : il rit, au contraire. Il a à lui la plaisanterie, qui déshonore le mieux les choses contre qui on l’emploie, et dont, en nous racontant ses pauvretés, ses ridicules et ses vices, il déshonore l’antiquité !

Et rien de mieux réussi. Ce qui fait la valeur du livre de Grenier et ce qui augmente sa portée, c’est encore plus le ton dont il l’anime que les faits qu’il y articule. Les faits rendent impossible toute dénégation mais le ton de l’auteur, plus puissant que les faits, rend tout enthousiasme impossible pour les nations où les choses se passaient comme il prend la peine de les raconter. Il va partout, ce reporter d’une société qu’on ne connaît que par le sommet et qu’il faut éclairer à la base. Il va aux écoles, aux assemblées, aux conférences, aux thermopoles, qui étaient des cafés (sans café) et des lieux publics ; il va partout, enfin, où l’histoire des Universités, des Instituts et des enseignements officiels n’a jamais mis un pied, qu’elle respecte trop pour l’y risquer… Et de tout ce qu’il regarde et recueille, en mille citations étonnantes et en mille anecdotes inouïes, ce qui se dégage uniquement, c’est ce honteux et misérable résultat que ce monde de l’antiquité, traité de sublime, a péri moins par l’épée des Barbares que par les phrases et sous les phrases de la plus bavarde des civilisations. Ce n’est pas de l’action, ce sont des mots qui ont tué Rome et la Grèce ! Words ! words ! words ! comme dit Hamlet. L’auteur du livre intitulé : À travers l’Antiquité, nous donne de ces rhéteurs, qui furent d’abord des Grecs, et qui devinrent des Romains, une idée qu’aucun livre n’en avait donnée, même approximativement. Il dit la toute-puissance magique de ces rhéteurs sur l’opinion, fanatisée jusqu’à la bêtise la plus incompréhensible, le pullulement innombrable de ces rhéteurs, la frénésie d’admiration qu’ils inspiraient, les sommes effroyables qu’ils gagnaient à débiter leurs discours, le vide immense ou la honteuse puérilité de ces discours artificiels, les mises en scène de toute espèce de ces trafiquants de paroles, qui péroraient à la minute et au commandement et qu’écoutaient respectueusement les empereurs, drapés dans leur pourpre, quand ils n’en étaient pas jaloux ! Il dit tout cela, Grenier, avec sa verve spirituelle et railleuse, et jamais la lamentable histoire d’une société, imbécilisée tout entière par une rhétorique inepte, et que d’hypocrites historiens admirent et regrettent, n’a été racontée avec plus de bonne humeur dans le mépris, — ce qui est le mépris suprême. Le mépris qui ne rit pas, le mépris sérieux, est moins le mépris.

III

Telle est cette exécution si bien faite de l’antiquité, tel est ce livre, si bien tourné et troussé contre elle par un esprit assez élevé pour se mettre au-dessus, pendant toute la durée de son livre, des préjugés des professeurs, ses confrères, en matière d’histoire. Pour mon compte, il me satisfait à la fois dans ma double conscience de moderne et de chrétien. Je ne crois pas Grenier aussi tranché et absolu que moi dans ses opinions religieuses, mais je lui sais gré de cette phrase écrite par lui : « Le catholicisme est au-dessus de tout honneur. » Son livre me satisfait, mais peut-être aurais-je voulu un peu davantage. Pendant qu’il était en train de si bien faire en nous montrant l’antiquité, cette vaine parolière, descendant du sophiste au rhéteur et du rhéteur au grammairien, ces trois marches qui l’ont conduite au gouffre, je souhaitais que l’esprit qui voyait si clair en histoire tirât des faits, si curieux et si nombreux qu’il avait colligés, des conséquences plus circonstanciées et plus hardies, et qu’il osât des rapprochements entre des époques de décadence dont il est impossible de ne pas voir l’analogie… À certaines pages du livre en question, la décadence de l’antiquité, livrée à la phrase et aux mots pour les mots, rappelait à l’auteur d’autres décadences ; des rhéteurs grecs lui mettaient en mémoire d’autres rhéteurs, qui n’étaient pas grecs. Il est même allé jusque-là d’opposer l’un à l’autre, comme des Ménechmes de la même corruption littéraire, « qui semblent se copier, tant ils se ressemblent ! », un rhéteur du ive  siècle, le rhéteur Aristide, et le rhéteur-poète du xixe , Théophile Gautier. Assurément, je ne suis pas de ceux qu’un tel rapprochement peut offenser ; car j’ai toujours regardé la poésie matérialiste, travaillée, byzantine de Théophile Gautier, comme une poésie de décadence et d’épuisement, venant après celle de Lamartine qui a tant d’âme. Mais ce rapprochement m’en faisait espérer de plus grands… non plus entre deux rhéteurs isolés, mais entre l’antiquité et la France moderne, par exemple, — la France, qui commence d’avoir le mal des Grecs et des Romains, et qui, si ce mal oratoire, sophistique et cabotin, dont elle est la proie, continue, périra par les mots, comme l’antiquité !

Eh bien, cette espérance a été trompée !… et c’est la seule critique que je ferai de ce livre charmant, qui ne donne pas (malheureusement) tout ce qu’il promet, et même, le croira-t-on ? qui nous l’ôte, après nous l’avoir donné, dans cet inconcevable épilogue dont je suis bien obligé de parler, et dont je ne m’explique ni la nécessité, ni la présence !

IV

Cet épilogue, auquel il est impossible de s’attendre, est, en effet, la chose la plus surprenante du volume de Grenier ; car le volume fait, il le supprime… Sensation horriblement désagréable, venant après les plus agréables sensations ! Puisque j’aime le livre, je ne veux pas qu’on le supprime. Il m’importe qu’on n’y touche pas. Je ne veux point qu’on vienne me dire : Vous m’aviez cru ; vous avez eu tort de me croire ; je crois maintenant que moi-même je ne me crois plus. Scepticisme tardif ! Je veux, moi, défendre son livre, qui me plaît, contre Grenier, à qui son livre ne plaît plus. Écoutons-le et répondons-lui : « En relisant cet opuscule, — nous dit-il, — perpétré, il y a quinze ans, j’éprouve le remords d’avoir été trop dur envers les Grecs et les Romains. » (Mais le remords aurait dû détruire le livre, et ne pas le publier en le dégradant !) « En ces temps heureux, — continue Grenier, — le commerce obligatoire avec les classiques me portait à un excès d’intolérance. » (Comme si on n’était pas toujours intolérant, quand on croit à la vérité !)

« Assurément, — dit-il toujours, — il vaut mieux avoir de l’esprit franc et simple que de l’avoir entortillé et précieux, mais mieux l’avoir entortillé et précieux que de ne pas en avoir du tout. » (D’abord, ce n’est pas la question.) « Voiture n’a pas empêché Molière. Dorat et le marquis de Bièvre sont les contemporains de Jean-Jacques. » (Mais où est le Molière qui a suivi les Voiture de la décadence de l’antiquité, quel est le Jean-Jacques, qui d’ailleurs n’était qu’un rhéteur aussi, qui ait été le contemporain des Dorat et des de Bièvre de cette vieille société païenne ?) « Ce que je ne ferais pas aujourd’hui, — ajoute encore Grenier, — c’est de si fort réprouver les rhéteurs grecs. Leur éloquence à la Robert-Houdin me transportait dans des courroux véritablement puérils. » (Pourquoi puérils, puisque cette éloquence, qui escamotait la pensée, était fausse, charlatane, saltimbanque, ridicule ? Il n’y a rien de puéril à sentir vivement le ridicule et la fausseté !)

Voilà pourtant toutes les raisons de l’espèce d’amende honorable que fait, sans torche, sans-corde au cou et sans escalier de Palais de Justice, l’auteur d’un livre qui n’avait qu’à le signer pour en tirer l’honneur qu’il mérite, et qui ne craint pas d’avilir son livre, en le condamnant… L’auteur d’À travers l’Antiquité ressemble, dans son épilogue, à l’homme qui a peur d’un pétard qu’il vient d’allumer. Mais peu nous importe, à nous ! Nous tenons le pétard, et il éclatera dans les jambes des historiens dévoués — par horreur de l’Église et de la civilisation qu’elle a faite — au paganisme dans l’histoire. La critique, qui a constaté les mérites du livre de Grenier, n’a pas à s’occuper d’autre chose. Elle n’a pas à entrer dans l’examen de conscience fait bien indiscrètement, selon moi, dans son épilogue expiatoire… dans la peur du reproche — immérité, dit-il, — d’avoir critiqué l’enseignement moderne à travers l’enseignement ancien, et d’avoir écrit « une satire, historiquement allégorique », du corps enseignant actuel. La preuve — affirme-t-il — qu’une telle satire n’est pas possible, c’est que, par leur prédominance intellectuelle, les professeurs contemporains sont en voie de tout envahir parmi nous, comme, parmi les Anciens, d’autres professeurs avaient tout envahi, et comme si ce n’était pas ce mal même que, dans son livre, Grenier a si admirablement signalé !

Certes ! il faut que l’esprit de corporation soit bien fort pour exiger de pareilles choses d’une intelligence si ferme et si lucide, et qui se paie si peu de préjugés. L’Université passe donc de ces tuniques de Nessus à ceux-là qu’elle élève pour son service ? Les tuniques de Nessus universitaires ne brûlent pas, mais elles collent… et c’est tout de même diablement difficile de les arracher !