(1889) Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie : Compte-rendu du service des enfants idiots, épileptiques et arriérés de Bicêtre pendant l'année 1888
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(1889) Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie : Compte-rendu du service des enfants idiots, épileptiques et arriérés de Bicêtre pendant l'année 1888

RECHERCHES

SUR

L'ÉPILEPSIE : L'HYSTÉRIE

ET

L'IDIOTIE

PUBLICATIONS DU PROGRÈS MÉDICAL

RECHERCHES

CLINIQUES ET THÉRAPEUTIQUES

SUR

L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE

ET

L'IDIOTIE

COMPTE RENDU DU SERVICE .

DES ENFANTS IDIOTS, ÉPILEPTIQUES ET ARRIÉRÉS DE BICÊTRE

PENDANT L'ANNÉE 1888

PAR

BOURNEVILL E

MÉDECIN DE 13[CÊTIIE

COURBARIEN, RAOULT, SOLLIER

INTERNES DU SERVICE

Volume IX avec 25 figures dans le texte.

PARIS

Aux Bureaux du PROGRÈS MÉDICAL

14, rue dos Carmes, 14

E. LECROSNIER et BABÉ

LIBRAIRES-EDITEURS

Place de l'École-de-Médecine

1889

PREMIERE PARTIE f

Histoire du service pendant l'année 1888.

BOURNEVILLE, 1888 s

PREMIERE PARTIE.

Histoire du service pendant l'année 1888.

Nouveaux pavillons de dortoirs.

Pavillon des cellules.

SITUATION DU SERVICE. - ENSEIGNEMENT PRIMAIRE.

La section des enfants comprend trois groupes :

l° les enfants idiots, gâteux, épileptiques ou non,

mais invalides ; 2" les enfants idiots, gâteux ou

non galeux, épileptiques ou non, mais VALIDES;-

3° les enfants propres, valides, imbéciles, arriérés,

épileptiques et hystériques ou non.

I. Enfants idiots, gâteux, épileptiques ou non,

mais invalides. On sait qu'ils se subdivisent en deux

catégories : la première est composée d'enfants gâteux

invalides, dont la plupart sont susceptibles d'améliora-

tion ; l'autre, d'enfants tout à fait incurables ou d'en-

fants atteints d'épilepsie ou de méningo-encéphalite,

devenus gâteux sous l'influence des accès ou des pous-

sées congestives qui les compliquent. Ces derniers ne

sont plus que l'objet de soins hygiéniques. Quant aux

premiers, ils sont soumis à un certain nombre d'exer-

cices que nous avons décrits précédemment et sur

lesquels nous ne reviendrons pas. Nous nous borne-

rons à dire que, aussitôt qu'ils sont capables de mar-

IV ENFANTS GATEUX INVALIDES.

cher (fig. 1), ils sont envoyés à la petite écolo le matin,

puis toute la journée.

II. Enfants idiots, gâteux ou non yîteuw, épile2ti-

ques ou non, mais VALIDES. - Ces enfants fréquentent

' Fi. modèle de l'un des chariots.

Fit. 2.

Fia. 3.

PETITE ÉCOLE. v

la petite école, confiée exclusivement à des femmes.

203 y ont été inscrits dans l'année. Sur ce nombre,

7 sont décédés ; 9 sont sortis définitivement ; 3 ont été

transférés. Tous les enfants sont exercés à la petite

gymnastique (système Pichery) ; 172 exécutent los

mouvements plus ou moins bien ; 5 les exécutent très

bien et prennent part en outre aux exercices de la grande

gymnastique ; 45 se servent de la cuiller seulement ;

70 de la cuiller et de la fourchette ; 62 se servent de

la cuiller, de la fourchette et du couteau ; 7 enfants gâ-

teux sont devenus propres (1), grâce au procédé em-

ployé qui consiste à les placer, à des heures régulières,

sur les sièges d'aisances que nous avons décrits (2),

au lever, au coucher, après chaque repas. 36 enfants

de la petite école vont aux ateliers une demi-heure par

jour (menuisier, 1 ; cordonniers, 6 ; rempailleurs, 3 ; 1

vanniers, 6 ; tailleurs, 20). Les leçons de toilette (lavage

de la figure, desmains, propreté de la chevelure, etc.),

les leçons de choses, les promenades avec interroga-

os, l'educao ? T.desse.s forment, comme toujours,

la base de l'enseignement.

Nous croyons devoir entrer cette année dans quel-

ques développements, surtout au sujet de cette dernière

partie de l'enseignement. Tout d'abord un mot de la

petite gymnastique. Nous avons dit naguère (3) com-

ment nous l'avions introduite à Bicêtre, et rappelé le

bienveillant concours que nous avait donné M. Pichery,

inventeur du système que nous employons. Les appa-

reils se composent : 1° d'échelles doubles en cordes,

avec traverses cylindriques en bois ; 2° do ressorts il

boudin double, avec poignée cylindrique.

(1) Ce sont les enfants. Char..., Dun ? Gin..., Lor..., Robin...,

Ros...

(2) Voir Comp/c-¡'cnrlu de flicÔIJ'c p011l' 18Sa, p. X.\"I.

(3) Voir Compte-rendu de 131cÔIJ'c pour 1880, p. XIX.

VI GYMNASTIQUE PICHERY.

f ! ? .-4.

P,y.5.

Fit. 6. 6.

Fig.7 7

GYMNASTIQUE PICHERY.

Fig. 8.

Fig. 9.

1"'9. lu.

rcg, n.

VIII ÉDUCATION de la main.

Exercices des échelles. La figure 2 représente

l'enfant en position ; la figure 3, l'enfant marchant

en avant;-la figure 4, l'enfant marchant en arrière ?

les figures 5 et 6, l'enfant déployant le corps en avant

et appuyé sur la pointe des pieds, et, en arrière, appuyé

sur les talons; la figure 7, l'enfant assis ; la figure 8

représente l'enfant tenant une échelle de la main

gauche, étendant l'autre échelle de la main droite élevée, 1

la jambe correspondante fléchie, le pied droit placé per-

pendiculairement au pied gauche; le même mouvement

s'exécute dans la position inverse, c'est-à-dire le bras

gauche allongé et la jambe gauche fléchie ; la figure '.)

fait voir l'enfant monté aux échelles et déployant le corps

en arrière ; le même exercice se fait en déployant le

corps en avant (1-ig. 10).

Exercices avec les ressorts. Sauf l'ascension, les

exercices sont les mêmes qu'avec les échelles : en posi-

tion (fig. 11), assis (fig. 12), extension alternative de

l'un et l'autre bras en avant (fig. 13).

Ces exercices, ainsi que nous l'avons déjà dit, nous

rendent de très grands services. Ils apprennent aux en-

fants à mieux saisir les objets, à bien opposer le pouce

aux autres doigts (préhension des échelons), à com-

prendre et à exécuter certains mouvements, en po-

sition, en avant, en arrière, assis, etc. Enfin, ils contri-

buent à développer leur système musculaire.

L'éducation de la main, et partant, du .sens du

toucher, est complétée par les exercices des plan-

chettes, des petits cylindres en bois, des sphères en

bois (1) (fig. 14), du livre cles étoffes (2). Dans le cours

de cette année, nous avons ajouté deux autres procédés

aux précédents : le premier consiste en un cadre en bois

0) Voir Compte-rendu pour l'année 188G, p V.

f) Voir Compte-rendu pour l'année 188'i. p. IT.

ÉDUCATION DE la MAIN. IX

de 11 cent. de largeur sur 0 m. 31 cent. de longueur,

dans lequel sont disposées une série de plaques de 0,10

centimètres sur 0,05 centimètres, constituées par une

plaque métallique à grosses saillies, par conséquent

très rugueuse, comme une râpe; par une autre plaque,

métallique, avec des saillies moitié plus petites, par-

Fig. 1 1.

Ft6.1 : 1.

Fig. 14.

X ÉDUCATION DU TOUCHER.

tant moins rugueuses ; puis du drap, de la soie, du

velours et enfin une plaque de bois lisse. On commence

par promener les doigts sur les deux plaques extrêmes,

c'est-à-dire la plus rugueuse et la plus lisse. Lorsque

l'enfant distingue les deux extrêmes (très râpeuse et très

lisse) (fig. 15), on lui fait toucher les intermédiaires.

Le second procédé consiste en des sphères de 4 cen-

timètres de diamètre, faites en fer, cuivre, verre, agathe,

caoutchouc, plâtre, balle de son, bois, pesant 2G9 gr.,

201 gr., 92 gr., 87 gr., 49 gr., 3 gr., 22 gr., 20 gr. et

destinées à leur apprendre la notion des poids.

Enfin, nous devons à l'obligeance de lI'°n Bru, femme

du commis principal de la direction et professeur de

dessin des écoles de la ville de Paris, de grandes plan-

ches représentant les différents solides et les différentes

figures planes correspondant, comme dimensions, aux

Fig. 15. .

GYMNASTIQUE DE LA PAROLE. XI

solides et aux surfaces planes en bois dont nous nous

servons depuis longtemps. Les enfants sont exercés à

placer les objets en bois sur les figures qui leur cor-

respondent. Ils arrivent de la sorte à se rendre compte

de la signification des dessins géométriques.

Nous insistons toujours, pour les idiots qui ne parlent

pas, sur les différents exercices décrits par Seguin dans

le chapitre de son livre admirable (1) consacré à la

gymnastique de la parole, dont nous estimons utile de

reproduire la plus grande partie.

Premier exercice. Quand l'enfant a déjà [acquis des

habitudes mimiques assez précises à l'aide des exercices d'imi-

tation, on attire son attention sur les traits de la face; on lui

en fait toucher les diverses parties, et l'on finit par concentrer

son attention sur l'appareil vocal. D'abord, ce sera l'index mis

en croix sur les lèvres, ensuite placé horizontalement, puis

introduit légèrement dans la bouche, puis deux et trois doigts

qui ouvriront largement les lèvres : on fera alors entendre

quelques cris joyeux que l'enfant répétera.

Ensuite on lui fait serrer longtemps une règle entre les

lèvres, si on les trouve pendantes ou naturellement écartées

ainsi que les mâchoires; si les lèvres ne se contractent pas, on

augmente progressivement le poids et le volume de ce corps.

Sont-elles seulement trop écartées l'une de l'autre, on diminue

l'épaisseur de cette règle dans la même proportion, jusqu'à ce

que, pour la retenir, les lèvres s'appliquent exactement l'une

sur l'autre et longtemps. Le même exercice se répète pour

obvier au tremblement et au resserrement des mâchoires, mais

alors en sens inverse dans une progression toujours croissante.

On a soin aussi de faire mâcher des substances résistantes,

comme du pain rassis, très rassis : puis on abandonne ces

moyens purement mécaniques et l'on fait répéter tous ces

mouvements d'écartement des mâchoires, de rapprochement

ou d'arrondissement des lèvres sur simple imitation, ainsi que

tous ceux que les lèvres devront faire pour émettre les voyelles

et les syllabes labiales.

Quand l'inaptitude tient au défaut de proportions et à l'absence

de rapports entre la langue et le palais, comme ce dernier n'est

susceptible de contraction que dans sa paroi postérieure ou

(1) Traitement, hygiène et éducation des idiots; Paris, 1846.

XII GYMNASTIQUE DE LA PAROLE.

musculaire, et que sa partie antérieure est immobile ; comme

la voûte palatine concourt avec la langue à former un grand

nombre d'articulations, et comme, en définitive, le palais ne

peut venir trouver la langue, il faut bien que celle-ci soit arti-

ficiellement mise en jeu ; pour cela, faire la gymnastique

suivante est de rigueur : on montrera à mouvoir la langue

hors de la bouche en avant, en haut et en bas ; l'aider de la

main si l'enfant ne peut la faire mouvoir volontairement ; en

relever la pointe et la tenir longtemps comme appendue aux

régions antérieure, moyenne, postérieure et latérales du palais.

Si, par l'imitation, par la direction et par l'indication, on ne

parvient pas à faire exécuter ces divers mouvements, on les

produit à l'aide d'un couteau de bois ou d'une cuiller d'ivoire

qui dirige et soutient mieux la langue. Quand le timbre de la voix

est altéré, mais il est rare que cola soit, on doit faire imiter iL

l'enfant les sons de la voix humaine et stimuler l'organe vocal

en lui donnant à entendre les sons d'un instrument à vibrations

rapides et entraînantes ; on place alors avec avantage le sujet

au milieu de choeurs, et on le provoque, par le commandement

et l'imitation, à des émissions de voix longues et répétées :

c'est ce que j'ai fait avec succès à Bicêtre.

Deuxième exercice. Quand ces résultats préliminaires,

qui consistent à faire mouvoir facilement et intentionnellement

les organes de l'articulation et à faire émettre des sons longs

et purs de la voix humaine, sont obtenus, on peut s'occuper

directement du développement de la parole.

Quelque savantes que soient les théories modernes sur le

développement de la parole, celles surtout qui ont été exposées

par les personnes qui se sont occupées des sourds-muets, on

ne trouvera sans doute pas étonnant que moi, parti d'un prin-

cipe tout à fait opposé au leur, je sois arrivé il des conclusions

un peu différentes. Par exemple, dans les essais d'enseigne-

ment de la parole aux sourds-muets, on compte bien moins,

et l'on a peut-être raison, sur la mimique que sur le tact ; en

outre, plusieurs professeurs, préoccupés de la fusion qui

s'opère entre la voix proprement dite et l'articulation dos

mots dans la formation de la parole, n'hésitent pas à enseigner

d'abord les lettres gutturales comme les plus faciles. Mais en

supposant le premier principe vrai (et il est précieux pour les

sourds-muets, dont le tact est ordinairement exquis), peut-il

être admis pour l'idiot, chez qui nous avons vu ce sens, lo

tact, présenter si souvent toutes sortes d'incapacités ? Quant

an second, il ne serait applicable à mes élèves dans aucun cas,

parce qu'eux n'ont pas conscience des phénomènes producteurs

GYMNASTIQUE DE LA PAROLE. XIII

de la parole, qui consistent dans l'émission de la voix et de

l'articulation réunies. Les autres idées qu'on a formulées,

d'ailleurs, sur l'éducation de la parole, ne m'ont pas semblé

plus applicables dans l'espèce, et, réduit à mes propres res-

sources, j'ai suivi longtemps les indications que me présentait

la nature de l'infirmité de chaque sujet avant d'être en état

de compléter ma méthode à cet égard.

Maintenant que de nombreuses expériences m'ont éclairé,

tant sur les exceptions que sur les principes, le résultat de

mes expériences est qu'on doit commencer cette étude par les

syllabes simples terminées par une voyelle, et non par les

voyelles isolées, comme cela se pratique d'ordinaire. C'est,

je le sais bien, renverser les opinions reçues à cet égard ;

mais, dans la voie que je me suis frayée, toutes les modifica-

tions que j'ai été amené à introduire pour la pratique de l'en-

seignement, sont les conséquences d'observations rigoureuses

faites sur nature, dans le but direct que je poursuis ; et je m'y

tiens. Ainsi on admet généralement que l'émission des voyelles

est plus facile que celle des consonnes ; qu'il est plus aisé à

un enfant de dire 0 que MO, I que BI, etc. S'il en était

ainsi, il faudrait, après avoir enseigné l'émission des voyelles,

apprendre l'articulation des syllabes composées d'une voyelle

d'abord et d'une consonne ensuite, afin de passer du connu à

l'inconnu, du facile au difficile. Or, c'est ce dont personne ne

s'est jamais avisé, parce qu'on sent fort bien qu'il est plus aisé

de dire MA, BO, NI, que AM, OB, IN ; mais on n'en savait pas

la raison, et l'on était même si éloigné de la connaître, que l'on

ignorait encore que l'émission de certaines consonnes dût pré-

céder celle des voyelles. Je dis certaines, parce que les con-

sonnes ne peuvent être prises indistinctement pour intro-

duction à l'art de la prononciation. Il y a entre elles un ordre,

ordre insensible pour les gens qui parlent comme écrivait le

Bourgeois gentilhomme, mais appréciable pour les personnes

qui ont étudié le mécanisme du langage. J'en exposerai la

théorie à propos de la lecture, où elle aura une application plus

saisissable que dans ce moment.

Je me contente d'avancer ici :

1 Que l'étude de la parole doit commencer par les con-

sonnes, et non par les voyelles ; -,

2 Que les syllabes composées d'une consonne et d'une

voyelle doivent être articulées les premières ; .

3° Que les labiales, entre celles-ci, doivent précéder toutes

les autres ; .;

4° Et j'ajoute que les syllabes isolées sont moins faciles à

articuler que les syllabes répétées.

XIV GYMNASTIQUE DE LA PAROLE.

Comme tout ceci est plus ou moins opposé à ce qu'on en-

seigne, il n'est peut-être pas inutile de corroborer mes idées

à cet égard par quelques observations.

A l'appui de ma première assertion, je ferai remarquer que

tant qu'un enfant n'émet que les sons A, I, 0, il ne parle pas, il

crie ou chante.

Pour la seconde, je rappellerai que le même enfant ne com-

mence pas par dire : AP, Lai, OB, mais bien PA, ME, BO.

A l'appui de la troisième, je dirai que ces mêmes syllabes

sont toutes des labiales, en commençant par les plus douces :

MA ou BO, selon la disposition relative des lèvres, PA n'étant

articulé le premier que par les enfants chez lesquels une suc-

cion énergique, ou quelque cause analogue, a développé la

force contractile des lèvres d'une façon exceptionnelle.

La preuve de la 4e est que les enfants répètent toutes leurs

syllabes. Il y a de cette dernière habitude des enfants, qui passe

pour une bizarrerie ou une singularité, des analogues auxquels

personne ne pense et qui justifient ce premier langage que

nous avons tous parlé ; parmi ces analogues, je citerai comme

incontestables : le redoublement, cette beauté des idiomes an-

ciens; la rime, première richesse des poésies modernes ; le re-

frain, si électrique dans les chants populaires de France,

d'Angleterre et d'Allemagne, toutes répétitions qui) sont for-

mulées dans cet adage si connu : « Bis 7'epl'/iln placent. » Je

pourrais encore donner nombre de preuves de la puissance des

analogies de consonnance dans le langage des enfants et dans

celui des peuples : cette forme a toujours précédé l'antithèse,

qui procède par les contrastes.

Si un homme s'était jamais rencontré, assez bon observateur

en même temps que physiologiste et psychologiste éminent, et

si cet homme avait daigné se donner la peine de suivre le dé-

veloppement d'un enfant, l'anthropologie ne serait plus une

science à faire, ce serait une science aussi certaine que toutes

les branches de la mathématique réunies. Et pour ne consi-

dérer ici que l'origine et la formation du langage dans les en-

fants, en étudiant les premiers accents de leurs voix et la suc-

cession de leurs articulations, n'eût-on pas, sans autre peine

qu'un peu d'attention, trouvé la méthode de faire parler Ici

muets ? J'aime à croire que Péreire ne procéda pas autrement,

car les grandes découvertes ne sont autre chose que des naïvetés

dépeuillées de leur enveloppe naturelle ou de leur écorce

pédantesque.

Pour faire parler un muet, peut-être môme un sourd-muet,

n'entassez donc pas les dissertations sur les méthodes, et les

méthodes sur les prophylactiques ; faites faire à votre élève ce

GYMNASTIQUE DE LA PAROLE. XV

que fait l'enfant ordinaire, celui-ci à dix mois, celui-là à 10 ans.

En effet, est-ce l'âge qui parle ? ... Ce sont les organes ; et, si

rebelles qu'on les suppose, on doit admettre, avant toute dis-

sertation, toute méthode, tout remède, qu'ils exécuteront pre-

mièrement et le plus facilement les sons que les organes des

petits enfants exécutent les premiers.

Je sais que cette méthode naturelle répugne à la vanité

humaine ; je sais que, non seulement on ne se donne pas la

peine de l'étudier pour pouvoir en faire profiter les individus

mal doués naturellement, mais encore que nombre de raffinés

intellectuels des deux sexes entrent dans le sanctuaire de la

famille avec la ferme résolution de supprimer en leur progé-

niture toutes les manifestations de ce langage dont la musique

fait ressembler les enfants à des petits anges.

Le père ne veut pas que son fils dise : dada; la mère n'entend

pas que son enfant demande un coco, cheval, oeuf, et à la bonne

heure... ! Les malheureux I savent-ils où ce système les condui-

rait, si l'enfant plus intelligent qu'eux ne repoussait leurs

leçons empoisonnées ? Lui, incapable de prononcer la plupart

des consonnes, les double, les triple même pour ajouter à l'éner-

gie de son expression, et, limité à la connaissance d'un petit

nombre de mots ayant tous un sens matériel, il supplée les

mots absents ou impossibles par la variété de l'intonation qui

est.son langage passionnel et métaphysique; c'est seulement

ainsi que pour lui une joie, un désir, une douleur, une colère,

une interrogation, un doute ont pour expression naturelle et

possible l'intonation.

Et puis, en supposant que l'enfant puisse parler comme nous,

croyez-vous qu'il trouverait dans toute la langue des mots qui

représentent vraiment ses idées et ses sentiments puérils ?

Edouard escalade à grand peine plusieurs coussins et du plus

haut qu'il puisse atteindre, avant de rouler jusqu'en bas (et

il y a une Providence pour ces chutes de tous les instants), il

crie : A-dé-dé ! ! trouvez-moi, messieurs les puristes, des mots

français pour exprimer une pareille joie, un tel triomphe !

après tant d'efforts ! et l'instant d'après, sa mère lui refuse le

sein ou un gâteau; Edouard répète sur mille tons, mais avec

les mille nuances d'un accent désespéré : 11-né-né I jusqu'à ce

que sa bouche se close de fatigue ou de sommeil. Allons, phi-

lologues, remplacez-moi vite ce doux langage par des mots

tirés du grec. Et que feraient-ils les parents et les philologues,

si l'enfant leur obéissait jusqu'à attendre qu'il pût exprimer

en bonne prononciation, en bon français, ses passions et ses

idées ? ils arrêteraient à l'instant, pour plusieurs années, pour

toujours, le développement physiologique et psychologique de

1\'I GYMNASTIQUE DE LA PAROLE.

leur enfant, ils feraient un idiot. Or, en assistant à de pareilles

extravagances, n'est-on pas tenté d'admettre le foudroyant

paradoxe de J.-J. Rousseau : Tout estbien, sortant des mains de

l'auteur des choses; tout dégénère dans les mains de l'homme.

Non, heureusement non, cet anathème lancé sur les oeuvres

de l'homme en tête d'une des plus belles oeuvres humaines, se

réfute de lui-même, par lui-même, et ne reste vrai que dans

son acception la moins générale ; et pareillement de presque

tout ce qu'a écrit le Genevois, retranchez-en le dogmatisme,

la forme absolue, genevoise enfin, et vous serez en plein bon

sens, en pleine vérité.

Puis, pour en revenir à mes élèves, après avoir rompu une

lance en l'honneur de ceux qui ont trop d'esprit pour l'être,

et si toutes ces raisons ne suffisent pas à justifier la marche

que j'ai adoptée, (et il ne faut, pour tomber d'accord avec moi

sur tous ces points capitaux, que se tenir, comme je l'ai fait.

quelque temps penché sur un berceau), les observations qui

m'ont été fournies par les sujets que j'ai traités, auront sans

doute plus de valeur aux yeux des gens positifs.

L..... ne pouvait émettre les sons E, O, I, U, et commence à

dire M A, B I, P O, etc. 5..... n'émettait aucune voyelle correc-

tement, et prononce bien un certain nombre de syllabes la-

biales terminées par ces mêmes voyelles.

Les premiers sons vocaux rendus par G.... sont PA, MI, BO,

etc. A.... produit les mêmes sons, mais il faut les lui faire dou-

bler : ne disant pas BO, il dit : BO-BO, il ne peut dire MI, mais

il articule très bien etc. M... a donné également raison

à ma méthode. Ne pouvant dire I, il l'a prononcé comme fi-

nale des syllabes MI, PI, TI, etc. Cet enfant se fait très bien

comprendre maintenant.

Voilà ce que j'ai à dire sur les principes; maintenant, si l'on

veut tenir compte des exceptions, et il le faut bien quand on

veut appliquer une méthode d'enseignement à tous les idiots,

on trouve que chez certains sujets il est bon de ne pas suivre

rigoureusement l'ordre que j'indique plus haut. Ainsi, j'ai

déjà fait observer que les enfants qui n'émettaient pas natu-

rellement de sons vocaux longs et purs, devaient y être incités,

par l'imitation, avant toute tentative ayant l'articulation pour

objet; je ferai également remarquer qu'il n'est pas rare de

voir des idiots chez lesquels les sphincters entrent si difficile-

ment en contraction que l'on doit commencer leur faire pro-

noncer des syllabes linguales avant les labiales, sous peine de

les voir (rebutés qu'ils sont tout d'abord par la difficulté, par-

ticulière en eux, de prononcer ces dernières) s'obstiner dans

leur mutisme plutôt que de vaincre la paresse do leurs or-

GRANDE ÉCOLE. XVII

ganes. Au contraire, en leur enseignant d'abord les syllabes

qui leur sont les plus faciles, on encourage leur timidité, on

stimule leur vanité, on les complimente sur leurs progrès et

on les tient dans une salutaire excitation, sans laquelle ils ne

sortiraient pas de leur isolement.

Ce que je propose est donc une gymnastique fixe en prin-

cipe, mais qui doit être modifiée selon chaque sujet ; car, à

moins que l'incapacité de parler ne soit absolue, il est fort

rare qu'elle offre des analogies complètes. Ainsi, à part les

principes posés plus haut, pas de règle spéciale à chaque su-

jet : je n'en prescris aucune dans la pratique, sinon l'observa-

tion des phénomènes et une patience à toute épreuve... »

Ce sont ces préceptes que depuis 1879 nous cherchons

à inculquer à notre personnel enseignant et qui, quoique

encore imparfaitement appliqués, rendent de. réels ser-

vices à nos malades.

III. Enfants propres et valides, imbéciles, arriérés,

instables, épileptiques et hystériques ou non. Grande

école. La population de cette école était, le 1er jan-

vier 1888, de 145, et le 31 décembre, de 168. Le per-

sonnel enseignant est resté le même. L'instituteur en

chef, M. Boutillier, assimilé aux commis de l'Adminis-

tration, a vu son traitement élevé de 2.700 à 3.000 (1).

La Commission de l'Assistance publique», du Conseil

général a reconnu l'insuffisance du personnel ensei-

gnant et nous a promis d'appuyer la demande que nous

avons faite d'un troisième instituteur. Cette augmenta-

tion du personnel enseignant est d'autant plus néces-

saire que les instituteurs font le soir l'école primaire

aux infirmiers et aux infirmières de l'établissement.

Malgré cette insuffisance, nous continuons à obtenir des

résultats encourageants qui devraient décider l'Admi-

nistration à nous donner satisfaction.

(1) Le second instituteur, M. Boyer, est entré en fonctions au

mois de mars 1886 ; il aurait dû avoir une augmentation à partir

du mois de mars 1889. Nous regrettons que cette augmentation,

méritée par son zèle et son dévoument, ait été ajournée.

BOURNEVILLE, 1888. **

XVIII MATERIEL SCOLAIRE.

Le 19 mai, 2 enfants, 6 infirmiers et 9 infirmières

ont obtenu le certificat d'études.

Nous déplorons toujours de ne pas avoir de bons in-

firmiers garçons de classe. Alors que le Directeur de

l'hospice devrait avoir soin de choisir les infirmiers et

les infirmières les plus instruits, afin de concourir à

l'enseignement, il nous envoie trop souvent des per-

sonnes illettrées qui ne peuvent nous être d'aucun

secours : c'est là, pourtant, une sélection facile à

faire. Nous devons dire toutefois que M. Peyron a bien

voulu encourager le meilleur de nos garçons de classe

en l'élevant au grade de suppléant.

L'enseignement a toujours pour base les leçons de

choses, soit à la classe même, soit dans les jardins de

la section, soit dans le champ des céréales et dans le

champ des plantes fourragères, soit dans le bois ou

enfin durant les promenades au dehors (1).

La matériel scolaire comprend une grande partie

des objets employés à la petite école, mais un peu plus

compliqués, et ceux qui sont en usage dans les écoles

primaires ordinaires. De plus, nous avons fait exécuter

par nos instituteurs, d'après les indications du traité de

Séguin, un certain nombre de planches destinées à l'en-

seignement.

1° Un tableau des couleurs divisé en deux parties sembla-

bles (une pour l'élève, l'autre pour le maître), comprenant

chacune six couleurs (violet, bleu, vert, jaune, orangé, rouge)

avec un exemple en regard (prune violette, myosotis, feuille

d'arbre, citron, orange, cerises).

2o Un tableau divisé également en deux parties semblables

et destiné à fixer l'attention de l'enfant en l'amenant à poser

le doigt, ainsi que le fait le maître, dans la partie correspon-

dante, sur des carrés où sont représentés des points, des

nombres, des couleurs, des lignes et des figures géométriques.

(1) Voir Compte rendu de pour 1887, p. VIII.

PROMENADES ET DISTRACTIONS. XIX

Cet exercice est très utile pour les plus arriérés, dont la vie

indifférente et passive s'habitue peu à peu à comparer deux

images de forme ou de couleur semblables et se change, par

imitation, en un regard attentiF qui leur permet de suivre les

mouvements du maître et de les reproduire avec le doigt.

3° Un tableau des lignes et de leurs applications. Par exem-

ple en regard de la ligne horizontale et de la ligne verticale

sont représentés des poteaux et des fils télégraphiques, etc.

4m Un tableau des figures géométriques et de leurs appli-

cations. C'est ainsi qu'on face du carré se trouve un damier, etc.

5° Un tableau des solides géométriques et de leurs applica-

tions. En face de la figure d'une pyramide quadrangulaire est

dessiné un clocher de village, etc.

Go Un tableau de lettres (majuscules, minuscules et manus-

crites), classées d'après les difficultés d'articulation (voyelles

labiales, dentales, gutturales, etc.).

7 Un tableau des sons équivalents où les syllabes homo-

nymes sont représentées sous des couleurs semblables.

Exemple : é, ed, er, et, ez, etc.

o, au, eau, etc.

En face de chaque syllabe isolée se trouve un exemple choisi

parmi les mots usuels, dans lequel cette syllabe se distingue

des autres lettres du mot par la couleur. Exemple : Si les

syllabes équivalentes isolées é, ed, er, et, ez, sont dessinées

en bleu, en face, dans les exemples été, pied, manger, violet,

nez, ces mêmes syllabes seront représentées en bleu.

Promenades et distractions. Les enfants de la

grande école et ceux de la petite école qui sont propres

ont continué à faire, sous la conduite de leurs maîtres

et de leurs maitresses,de nombreuses promenades, soit

dans les environs de l'hospice ou à Paris même : pro-

menades multipliées au Luxembourg, au Jardin des

Plantes, au parc de Montsouris, aux fêtes des environs

(Villejuif, Gentilly, place de la Nation, etc.), au Jardin

d'Acclimatation. Les maîtres et les maîtresses profitent

do ces promenades pour donner des leçons de choses

aux enfants. Jamais ces promenades, même dans des

lieux très fréquentés, n'ont donné lieu à des accidents

capables d'attirer sérieusement l'attention et de troubler

la tranquillité publique.

XX VISITES ET CONGÉS.

Mentionnons enfin les distractions diverses, commu-

nes à tous les enfants valides : distribution de jouets,

l'occasion du 1 cr janvier, par l'Administration et par

M. Meyer, rédacteur en chef de la Lanterne ; distribu-

tion de beignets et de gâteaux ; déguisements du Mardi-

Gras ; séances de lanterne magique, projections; concert

des frères Lionnet ; participation des enfants de la

Grande Ecole au défilé du bataillon scolaire de Gentilly,

etc., etc. Citons enfin de petites représentations théâ-

trales organisées par M. Boyer, instituteur, qui, de

plus, a pris l'initiative de la création d'une société mu-

sicale à laquelle un certain nombre d'enfants s'intéres-

sent vivement.

Visites, permissions de sortie, congés. Les en-

fants ont reçu 8.268 visites. Les visiteurs ont été au

nombre de 11.693. Voici maintenant la statistique des

permissions de sortie et des congés :

BAINS, HYDROTHÉRAPIE, ETC. XXI

Vaccinations et revaccinations. Elles ont été au

nombre de 29. Elles ont été faites sous notre direction et

celle de nos internes par les élèves de l'Ecole d'infir-

mières (1).

Service dentaire. - Notre ami, le Dr Cruet, ancien

interne des hôpitaux, continue ses visites bi-mensuelles

aux enfants de Bicêtre et de la i-alpêtrière. Les résultats

obtenus au point de vue de l'hygiène de la bouche et

d'une meilleure dentition des enfants sont excellents.

Bains et hydrothérapie. - Les bains et les douches,

joints à la gymnastique et à l'emploi des bromures, sur-

tout de l'élixir polybromuré de Yvon, du bromure de

camphre du Dr Clin et aux médicaments anti-scrofuleux

ont fait la base du traitement pendant l'année.

XXII COUCHAGE DES GATEUX.

fants et la transformation des traversins qui ont été

faits en crin et un peu plus volumineux ; deux tables en

marbre pour les réfectoires ont été installées à titre d'essai,

afin de voir s'il n'est pas possible défaire la, substitu-

tion partout ; deux fontaines avec filtres pour les ré-

fectoires. Nous avons réclamé de nouveau l'aménage-

ment d'un sous-sol pour le cirage des souliers et

l'installation d'un magasin de chaussures, désirant que

les enfants aient deux paires de souliers ; l'organisation

d'un trousseau pour chaque enfant avec un numéro

d'ordre ; la modification des chemises qui n'ont ni cols

ni poignets. Les enfants gâteux couchaient sur une

paillasse revêtue d'une toile cirée ; nous avons modifié

le couchage de la façon suivante : à la tête et aux pieds

un petit matelas de laine ; au centre un matelas de laine

de tourbe, ou de tannée, ou de warech, ou de paille.

Nous ne pouvons encore apprécier la valeur compara-

tive de ces essais. Nous nous bornerons à dire que,

d'après M. Muntz qui a étudié comparativement le pou-

voir absorbant de ces différentes substances, la paille

d'avoine absorberait 228 litres d'eau par 100 kilo-

grammes ; la tannée 4 à 500 kilogrammes ; la tourbe

500 à 700. Nous ignorons la différence qui existe à ce

point de vue entre la tourbe et la laine de tourbe. Nous

ignorons également quel est exactement le pouvoir

absorbant du warech. S'il est vrai qu'une litière est

d'une qualité d'autant meilleure que le pouvoir d'imbi-

f bition est plus élevé c'est la laine de tourbe qui devrait

être préférée (1).

Visites du service." Commission de surveillance

des asiles d'aliénés delà Seine, composée de MM. Uar-

bier, président à la Cour de cassation, Bailly, Huart,

Pothier, Puteaux, E. Richard, Thulié; Dr A. Regnard,

inspecteur général des Etablissements de bienfaisance,

(1) Muntz et 1.-Ch. Girard. -- Les Engrais, p. °I1-36' ? .

VISITEURS DU SERVICE. XXIII

Dr Taule, directeur de l'Asile clinique, Dr Donnet, sé-

nateur, directeur de l'asile de Vaucluse, D'' Paté, di-

recteur de Ville-Evrard ; Babut, chef de division,

Leclère et Louvart, chefs de bureau à la Préfecture de

la Seine ; une partie de la Commission de la Chambre

des députés chargée d'étudier le nouveau projet de loi

sur les aliénés (MM. Camescasse, Clauzel, Cochery, Du-

coudray et ucdueti ; MM. Chassaing, Champoudry,

conseillers municipaux; Dr Christian; - A. Harler ;

Coffignon, publiciste ; Dr Coutinho ; - D'' Bétous,

médecin consultant à Barèges ; Dr Biaute, médecin

on chef du quartier d'aliénés de l'hospice de Nantes ;-

Brueyre, ancien chef de division à l'Assistance publique;

Dr Buissen (de Madrid) ; Desjardins, chef de bu-

reau au Ministère de l'Instruction publique ; Dr Do-

mingo Cabreo, délégué de la République Argentine ;

Dr J. Flores, directeur de l'hôpital grec de Constan-

tinople ; Dr Forhas (de Buda-Pesth) ; Frédéric de

Mocata (de Londres) ; Goupy, membre du Conseil de

surveillance de l'Assistance publique : Dr Guilbert,

directeur de l'Asile de Bordeaux ; Guillemin ;

1 Ila-\-art - Dr Hallage (Danemark) ; M. et Mue

I-Iolst-crn ; - D'' Horteloup, membre du Conseil de sur-

veillance de l'Assistance publique ; -Dr Keraval, mé-

decin de Ville-Evrard ; D' Ladame (de Genève) ;

Lavy, conseiller municipal ; D''Magnan, médecin de

l'Asile clinique ;M. Marcelin(de Neuilly) ; M. Moussu,

professeur ; ;-Mercier, contrôleur principal des Douanes;

- Nicolo,-Pansot, professeur; D'Picquet, Dr J.-A.-

Prieur (Canada) ; - Proust, professeur d'hygiène à la

Faculté de médecine de Paris, accompagné de MM. le

Dr Meynet, A.-J. Martin et d'une trentaine de ses élèves ;

- 111"'e de Eue ; - M. Schmoulen, attaché au Ministère

de la Justice (Russie) ; professeur Seguin (de New-

York) ; Dr Sellier (de Versailles), inspecteur du

service des aliénés de Seine-et-Oise ; M. Simon ;

M. le D'' Siredey, ; Dr Stemerz ; Dr Tixier, directeur

XXIV VISITEURS DU SERVICE.

de l'Ecole de médecine d'Alger ; Et. Tinioux, attaché

à l'ambassade de Roumanie; D1' Toso-Antonio,

Dr Wladimir de Tchichs ; NI ? Marie Waltzky,

membre de la Société de psychiatrie de Pétersbourg ;

Dr Widmer (de Lausanne) ; Dr J. Weight-Putmann.

' Nous devons une mention spéciale à la ,visite faite

par DII`° Matrat au mois de novembre et au rapport

qu'elle a adressé à M. le Directeur de l'Enseignement

primaire. Dans sa visite, un peu superficielle et faite en

dehors de l'heure des classes, elle ne semble pas s'être

rendu compte ni des transformations opérées à Bicêtre

ni de la méthode employée, ni des résultats obtenus.

Elle prétend entre autres qu'à Bicêtre on ne reçoit pas

d'idiots ou à peu près pas, mais surtout des épileptiques.

En réalité, les idiots, imbéciles et arriérés sont, au con-

traire, plus nombreux que les épileptiques. Elle pré-

tend n'avoir vu ni images (1), ni jeux, alors que tous

les ans l'Administration en achète ou en reçoit de géné-

reux donateurs un grand nombre, et que l'atelier de

menuiserie des enfants en confectionne une grande

quantité. Nous n'avons cessé de les multiplier depuis

dix ans : Jeux de tonneau, de boules, de quilles, de

crocket, de billard, de balles, de billes, de dominos, de

loto, de toupies, de passe-boules, etc. (2). (Voir plus

haut, Distractions, p. xix).

Elle n'a pas vu, ou on ne lui a pas dit, que la base de

l'enseignement reposait sur les leçons de choses et les

leçons d'action ; que les enfants reçoivent régulière-

ment des leçons de gymnastique, de danse, d'escrime ;

que tous les jardins ont été disposés pour l'enseigne-

ment des enfants. Elle a daigné cependant reconnaître

que « au point de vue matériel, au point de vue hospi-

(1) A l'époque de sa visite, il y avait 244 images.

(2) A l'époque de sa visite, il y avait 3 jeux de tonneaux,

5 passe-boules, 2 jeux de quilles, 60 cerceaux, etc. Inutile de dire

que les enfants en détruisent un grand nombre.

ÉPIDÉMIES ; TEIGNE. XXV

talier, c'est incomparablement ce qu'elle a vu de plus

beau. » Elle ajoute encore ce passage : « Tout le per-

sonnel est laïque et je suis heureuse de dire que, venue

absolument à l'improviste, j'ai vu malgré tout, avec

l'oeil de l'inspectrice, toutes ces jeunes femmes à leur

devoir, toutes séparées les unes des autres, occupées

des enfants, sans ostentation et sans précipitation.

L'ordre le plus parfait règne partout. D 112'e Matrat s'est

étonnée d'apprendre que la direction de la section était

confiée à un médecin ; elle ignore que les nombreux

asiles consacrés aux enfants idiots, en Angleterre, aux

Etats-Unis, etc., sont dus à des médecins et dirigés par

eux.

Maladies épidémiques. - Nous n'avons eu que

quatre cas de rougeole dans le courant de l'année. Le

pavillon d'isolement pour les maladies contagieuses a

reçu, en outre, un certain nombre d'enfants atteints de

maladies des yeux.

De tout temps, probablement depuis que Bicêtre

existe et qu'il renferme des enfants, la teigne y a tou-

jours régné. Cela s'explique par l'impossibilité où l'on

était de les isoler. Au commencement de l'année 1888,

nous en avions une cinquantaine. Le pavillon d'isole-

ment ne contenant que 16 lits, nous avons pris les me-

sures suivantes : nous en avons mis 10 au pavillon

d'isolement (1), réservant les six chambres pour les

maladies épidémiques ; nous en avons mis 12 dans l'une

des salles de l'infirmerie et les autres ont été confinés

dans un seul dortoir où, malheureusement, ils étaient

en contact avec d'autres enfants. Les 10 enfants du pa-

villon d'isolement passaient leur journée soit en prome-

nade, soit dans le sous-sol-rez-de-chaussée du pavillon

d'isolement; mais les 12 enfants de l'infirmerie et les

(l) Voir, pour la description de ce pavillon, le Compte rendu

pour 1887, p. XXXIII.

XXVI MUSÉE PATHOLOGIQUE.

autres étaient réunis, durant le jour, dans le réfectoire

de l'infirmerie, et, par conséquent, se trouvaient souvent

en contact avec les convalescents de l'autre salle. De là

la production de nouveaux cas de teigne. Nous avons

demandé et obtenu l'aménagement du sous-sol de l'infir-

merie et nous y avons rassemblé tous les teigneux, il

l'exception de ceux qui habitent le pavillon des conta-

gieux. Le sous-sol a été mis à la disposition des enfants

le 19 juillet, servant de réfectoire à ces derniers et,

dans une certaine mesure, de salle d'école. Grâce à cet

isolement, au zèle de nos internes et du personnel, ! i0 enfants ont été guéris de la teigne et il n'en restait

plus que 15 à la fin de l'année 1888.

Musée pathologique. Le Musée, placé sous la di-

rection de notre ami le Dr P. Bricon, s'est enrichi de

nombreuses pièces, ainsi que le montre le tableau com-

paratif suivant :

MUSÉE PATHOLOGIQUE. XXVII

indéterminées, lorsqu'il survient des modifications im-

portantes en bien ou en mal. Quand un malade meurt,

toutes ses photographies sont déposées au Musée, et

comme nous faisons réunir en volumes, à la fin de

l'année, toutes les observations des malades décédés,

il s'ensuit que toutes les pièces pathologiques, bustes,

crânes, etc., ont leur histoire complète et peuvent

servir à des recherches sérieuses ; elles ne sont pas là

simplement à titre d'objets curieux. Nous rappellerons

enfin que les photographies des cerveaux forment au-

jourd'hui cinq volumineux Albums (1).

Le crédit affecté au Musée de l'hospice de Bicêtre

était de 3.200 fr. Grâce à l'intervention de notre ami

M. Hovelacque, en décembre 1888, le crédit a été

augmenté de 1.000 fr., ce qui nous permettra de réaliser

des améliorations et d'utiliser quelques-unes de nos

photographies les plus intéressantes.

Bien que suffisante pour le moment, répéterons-nous,

l'installation du Musée devra être transformée ultérieu-

rement. Il faudra en profiter pour organiser un service

scientifique convenable à l'hospice de Bicêtre. A cet

égard, nous ne pouvons que reproduire ce que nous di-

sions en 1885 : « Nous pensons qu'il conviendrait de

choisir un emplacement peu éloigné de l'infirmerie gé-

nérale et de la division des aliénés, et d'y construire le

service des morts et des autopsies, le musée, les labo-

ratoires, l'atelier de photographie et de moulage. Cet

emplacement existe... » · .

(1) Nous profitons de l'occasion pour remercier de nouveau

nos collaborateurs, MM. Hubert et Hure), qui apportent le plus

grand zèle il l'exécution des photographies et des moulages.

XXVIII FONCTIONNEMENT DES ATELIERS.

II.

ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL.

Durant toute l'année 1888, cet enseignement a été

dirigé par MM. Leroy, pour la menuiserie ; Alêne,

pour la couture; - Bénard, pour la serrurerie. -

Nous avons eu le regret de perdre, le 7 janvier 1889,

M. Baudet, chargé de l'atelier de vannerie et de nu-

paillage de chaises, il a été remplacé par M. Morin.

Nous avons perdu également, le 19 décembre, M. Perche,

maître cordonnier depuis le 8 octobre 1883; il a été

remplacé pendant sa maladie, puis définitivement par

M. Dumoulin. Le 26 novembre 1888, nous avons

obtenu l'ouverture de l'atelier do brosserie confié à

M. Mercier. Nous n'avons eu qu'à nous louer du zèle

que les maitres apportent dans leurs fonctions. Le

tableau suivant met en évidence les résultats obtenus.

ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL. XXIX

4.241 fr. L'année 1886 a donné 1.747 fr. de plus que

l'année 1885. L'année 1887 a donné 257 fr. de plus que

l'année 1886. L'année 1888 a donné 3.146 fr. 70 de plus

que l'année 1887. Ajoutons que l'excédent aurait été

plus considérable si l'atelier de brosserie, ouvert seule-

ment à la fin novembre, n'avait entraîné une dépense

(214 fr. 50) très insuffisamment compensée (38 fr.).

L'évaluation du travail des enfants est faite par

l'inspecteur du service d'architecture et d'après le

tarif de la Ville pour la menuiserie et la serrurerie ;

par M. l'économe de l'hospice, d'après les tarifs du

Magasin central, pour la couture, la vannerie et le

rempaillage de chaises, et d'après le tarif de la Société

anonyme pour la cordonnerie.

Ces chiffres montrent que le travail des enfants, non

seulement couvre la dépense occasionnée par le salaire

de leurs maîtres, mais encore qu'il couvrira bientôt

l'intérêt du capital engagé dans la construction des

ateliers. C'est là d'ailleurs, à nos yeux, une considéra-

tion secondaire, et il en sera de même aux yeux de toutes

les personnes sérieuses qui s'occupent avec un esprit

un peu généreux des questions d'assistance. En effet,

l'enseignement professionnel rend des services d'un

ordre bien autrement supérieur. Il permet de donner à

un certain nombre d'enfants un métier qui, à leur sortie,

les mettra en mesure de gagner leur vie. Quelques-uns

ont déjà quitté l'hospice et sont placés; d'autres le seront

aussitôt que les circonstances le permettront. Il nous

aide à donner à un plus grand nombre d'enfants le moyen

d'atténuer, dans une proportion variable, les sacrifices

que la Société s'impose pour eux. Précisons par un

exemple : Nous avons à l'atelier de couture 24 hémi-

plégiques, c'est-à-dire des malheureux condamnés

presque certainement à passer toute leur existence à

l'hospice. 5 sont déjà de bons tailleurs, la plupart des

autres le deviendront. Autrefois, ils ne savaient rien

faire ; maintenant, grâce à l'enseignement qu'ils reçoi-

XXX ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL*

vent, une fois passés aux épileptiques adultes s'ils ont

encore des accès, ou passés dans les divisions de

l'hospice s'ils n'en ont plus, ils pourront travailler à

l'atelier commun de la maison et leur travail compen-

sera en partie, et pendant de longues années, les dé-

penses de leur entretien, en même temps qu'il leur

fournira quelques ressources personnelles.

Chaque année, l'habillement et la chaussure des

enfants sont notablement améliorés et l'amélioration

sera encore plus grande, car nous avons enfin obtenu

que le maître tailleur fut autorisé à faire la coupe des

effets d'habillement. Nous espérons arriver un jour il

faire que chaque enfant ait son trousseau numéroté.

Ainsi que nous l'avons vu précédemment, l'atelier de

brosserie a été installé le 26 novembre. Nous avions ré-

clamé en même temps l'organisation de l'atelier cl'i1n-

primerie, mais, malheureusement, l'année s'est écoulée

sans nous donner satisfaction.

Le tableau suivant fait voir que le nombre des enfants

qui profitent de l'enseignement professionnel est allé

en progressant depuis huit ans.

PATRONAGE DES ALIÉNÉS. XXXI

du jour. Trois fois par semaine, il est interrompu de

8 heures à 9 heures du matin par la leçon de gymnas-

tique. Les enfants sont divisés en deux séries : une

du matin, une du soir et, afin que l'enseignement soit

à peu près égal pour tous, tant à l'école qu'à l'atelier,

la série d'élèves du matin, dans la première semaine du

mois, devient la série du soir durant la seconde semaine.

Les jeunes travailleurs reçoivent tous les samedis des

récompenses variant de 10 à 40 centimes et dont ils dis-

posent les jours de promenades. A cet effet, l'Adminis-

tration a mis chaque semaine une somme de 15 fr. à la

disposition des chefs d'atelier.

Nous laissons les enfants choisir eux-mêmes autant

que possible leur métier. Nous dirigeons de préférence

les plus intelligents vers les ateliers de menuiserie et de

serrurerie et les plus faibles vers l'atelier de vannerie

et de rempaillage. Quant aux hémiplégiques, ils sont

naturellement dirigés sur l'atelier de couture. Le plus

souvent, quand il s'agit des enfants idiots, les séances

d'atelier ne dépassent pas une demi-heure au début.

Puis, progressivement, nous augmentons la durée de

leur travail manuel.

III.

PATRONAGE DES ALIÉNÉS ET EN PARTICULIER DES

ENFANTS IDIOTS ET ARRIÉRÉS.

A propos de l'enseignement professionnel, nous de-

vons signaler une lacune importante dans l'organisa-

tion de l'Assistance publique, non seulement à Paris,

mais dans la France presque tout entière : il s'agit du

patronage des aliénés convalescents ou guéris, et en

particulier des enfants ou des adolescents. Bien des

XXXII PATRONAGE DES ENFANTS.

fois, depuis plusieurs années, nous avons appelé l'at-

tention de l'Administration, de la Commission d'Assis-

tance publique, du Conseil général et delà Commission

de surveillance des Asiles de la Seine, sur la nécessité

de la création d'une Société de patronage pour les enfants

qui sortent de notre service. Jusqu'ici il n'y a pas eu

de solution. Le nombre de nos sortants augmentant, la

question devient plus urgente. Elle se présente sous

deux aspects : ou bien les enfants rentrent dans leur

famille, ou bien, étant âgés de plus de 18 ans et non

guéris, ils passent dans les sections d'adultes, soit aux

épileptiques, soit aux aliénés ordinaires. Bien que,

pour les enfants de cette dernière catégorie, il ne s'agisse

pas d'un véritable patronage, nous pensons utile de

dire un mot de la situation qui leur est faite.

Pendant quelque temps, nous avons obtenu du direc-

teur de l'hospice, que ces malades, auxquels nous

avions fait apprendre un métier, continuassent à venir à

nos ateliers, afin de perfectionner leur instruction pro-

fessionnelle et afin qu'ils puissent atténuer, par leur

modeste travail, les dépenses que la Société s'impose

pour eux. Il ne nous avait pas échappé que cette pra-

tique pouvait avoir des inconvénients, par exemple

l'introduction du tabac ou d'objets défendus dans la

section des enfants. Malgré cela, nous avons voulu faire

l'essai, y voyant des avantages compensateurs ; mais,

soit par indifférence du directeur, soit par défaut de

bonne volonté du personnel des sections d'adultes,

obligé de conduire les malades aux ateliers et de venir

les y chercher, cette pratique est tombée en désué-

tude. D'autre part, quelques petits accidents s'étant

produits par suite du contact des enfants avec des ado-

lescents devenus adultes (1), nous nous trouvions un

peu embarrassés pour intervenir de nouveau.

(1) Voir plus loin (p. 61) l'observation de Court..., que nous

publions avec M. Raoult.

PATRONAGE DES ENFANTS. XXXIII

Nous avons alors insisté pour que nos anciens ap-

prentis fussent envoyés aux ateliers de l'hospice. Là,

nous nous sommes butté contre la même indifférence du

directeur et contre la résistance des chefs d'ateliers, qui .

préfèrent à nos apprentis, et même aux aliénés adultes,

les vieillards, qui n'exigent pas la même surveillance

et ne les exposent à aucun danger; car, il faut le dire,

quelques-uns des chefs d'ateliers, quelques-unes des

surveillantes et sous-surveillantes des services géné-

raux, ont peur des aliénés et ne tiennent pas à les

occuper. Il en résulte de grands dommages pour la mai-

son. Ces craintes, ces résistances, disparaîtraient si,

conformément à nos réclamations persistantes, l'Admi-

nistration prenait soin de faire passer sans exception le

personnel secondaire dans tous les services, avant de

les spécialiser dans un des services généraux. Si la sur-

veillante de la buanderie ou de la lingerie, et même les

chefs d'atelier avaient passé quelque temps dans un

service d'aliénés, les uns et les autres sauraient com-

ment il faut se conduire avec ce genre de malades; ils

distingueraient les signes qui annoncent les périodes

d'excitation ou les accès, et se rendraient compte des

moments durant lesquels on peut les utiliser et de ceux

où il convient de les laisser au repos ; ils ne s'offusque-

raient pas outre mesure de leurs écarts de langage et

sauraient prendre les précautions pour éviter les acci-

dents. Malheureusement, il est loin d'en être ainsi, et,

souvent, ou les malades ne sont pas reçus dans les

ateliers ou les services généraux, ou ils en sont ren-

voyés pour les motifs les plus futiles. Comme exemple

à l'appui, nous dirons que trois de nos apprentis

menuisiers les plus habiles, passés aux épileptiques

adultes à la fin de 1887, Georg..., Jaune... etSalm..., ont

été refusés à l'atelier de menuiserie de l'hospice pen-

dant toute l'année 1888.

En ce qui concerne nos apprentis qui sortent guéris

BOURNEVILLE, 1888. u*

S r 1 V STATISTIQUE.

ou très améliorés, la situation n'est guère meilleure.

Parmi les parents, il en est qui, comprenant ce qu'on a

réalisé pour leurs enfants, font tous leurs efforts pour

leur faire continuer leur métier au dehors. D'autres

essaient, se lassent vite, car la sortie de Bicêtre n'est pas

Une recommandation; alors, pour diminuer les charges

d'entretien de leur enfant, ils essaient de l'utiliser

n'importe comment, ou bien ils viennent nous retrouver,

nous demandant de le placer. Il nous est arrivé d'en

mettre quelques-uns dans deux ateliers de menuiserie

dont nous connaissions les patrons,mais notre interven-

tion est insuffisante et ne peut faire face à tous les

besoins. C'est là, d'ailleurs, une tâche qui incombe

surtout à l'Administration et qui pourrait être conve-

nablement remplie par elle avec l'aide d'une Société de

patronage bien organisée.

IV.

STATISTIQUE. MOUVEMENT DE LA POPULATION.

Le 1 cr janvier 1888, il restait dans le service 331 en-

fants se décomposant ainsi : 308 idiots, imbéciles,

épileptiques, etc., aliénés ; 23 idiots, imbéciles, épilep-

tiques, etc., réputés non aliénés. On sait qu'il s'agit là

d'une division purement administrative. Voici le mou-

vement de la population en 1888 :

MOUVEMENT DE LA POPULATION. XXXV V

XXXVI DÉCÈS.

DÉCÈS. XXXVII

XXXVIII DÉCÈS.

DÉCÈS. xxxix

XL DÉCÈS.

DÉCÈS. XLI

XLII DÉCÈS.

DÉCÈS. XLIII

q

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en

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Id

H

en

LA NOUVELLE SECTION. XLVII

Personnel du service en 1888. Le personnel se

composait ainsi : 1° pour le service médical : d'un interne

titulaire, M. Durand (1) et d'un interne provisoire,

M. Mathon ; de M. lu Dr Bricon, conservateur du Musée

pathologique de l'hospice; 2° pour le service sco-

laire : a) Grande école : d'un instituteur, M. Boutillier,

et d'un instituteur adjoint, M. Boyer ; d'un professeur

de chant, M. Peny ; d'un professeur de gymnastique,

M. Goy; de deux moniteurs (administrés de l'hospice);

d'un maître d'escrime et d'un maître de danse; et de

4 garçons de classe ; b) Petite école : de 111"e Blanche

Agnus, surveillante, MUes Berthe Lenglet et Amandine

Bohain sous-surveillantes, MUe Ferret, suppléante, et

d'une infirmière de classe ; pour l'enseignement profes-

sionnel, de six maîtres dont nous avons donné les

noms plus haut ; 3" pour le service hospitalier de

M. Agnus, surveillant; de M. Siégel, sous-surveillant ;

de 1M"e Jolliot, chargée de la surveillance de l'infirmerie

du bâtiment des gâteux invalides et du pavillon des

maladies contagieuses ; de Mme Bié, suppléante ; de

22 infirmiers de jour et de nuit; de 28 infirmières de

jour et de nuit; d'un baigneur (suppléant) ; d'un barbier

et d'un portier. Total du personnel secondaire : 66.

V.

LA NOUVELLE SECTION. CONSTRUCTION D'UN NOUVEAU

PAVILLON DE DORTOIRS ET DU PAVILLON

DES CELLULES.

Dans notre dernier Compte rendu, nous terminions

le chapitre consacré à la Nouvelle section en disant que

(1) M. Durand, appelé à faire son service militaire, a été rem-

placé du 15 novembre 1888 au 1er février 1889, par M. Renault,

interne provisoire.

XLVIII NOUVEAU PAVILLON DE DORTOIRS.

le Conseil municipal avait voté, dans sa séance du

30 décembre 1887,1e projet présenté par l'Administration

de l'Assistance publique relatif à la construction d'un

nouveau pavillon de dortoirs et du pavillon des

cellules.

L'adjudication de ces deux bâtiments a eu lieu le

24 mars. Les devis montaient à 245.179 fr. 53 c., que

les rabais faits par les adjudicataires ont réduit à

176.007 fr. 46 c. Les travaux ont commencé le 19 avril.

Sur la somme de 27.505 fr. réservée pour imprévus, il

a été prélevé :

Pavillon des Cellules. XLIX

Le pavillon des cellules doit nous arrêter plus long-

temps. Il est situé à l'extrémité ouest de la section, en

arrière de l'espace libre compris entre l'infirmerie et

le pavillon d'isolement pour les maladies contagieuses,

faisant face à l'avant-corps du bâtiment des gâteux. Ce

pavillon (Fig. 16), un peu exhaussé au-dessus du sol,

est précédé d'une cour devant servir de préau, dont la

clôture se compose d'un grillage en fil de fer à grosses

mailles, recourbé à sa partie supérieure de manière à

empêcher les enfants de la franchir. Des arbustes et des

plantes grimpantes, lierre, vigne-vierge, chèvrefeuille,

etc., empêcheront plus tard la vue du dehors. Ainsi que

le montre le plan (Fig. 17), le vestibule ouvre sur une

galerie qui court tout le long du bâtiment. Au centre se

trouvent : 1° L'office comprenant un petit fourneau à

gaz, une pierre d'évier et un réservoir d'eau chaude

pour les bains ; 2° Salle de bains ; 3° Les water-

closets se composant de deux cabinets.

De chaque côté de ce petit service central, il y a

quatre chambres d'isolement, ou cellules, et une cham-

bre d'infirmier. Quatre chambres d'isolement ont 3'u 55

de longueur, 2°e2U de largeur, 3m65 de hauteur. Elles

sont éclairées par une fenêtre de 0m80 sur 2m30 placée

à lm07 au-dessus du sol. La fenêtre, protégée par un

grillage intérieur, est munie, à l'extérieur, d'un

volet plein permettant à volonté la suppression de

la lumière. Les angles situés de chaque côté de la

porte ont été remplacés par des pans coupés, de façon

à empêcher les enfants de se dissimuler dans ces deux

angles. Les murs ont été crépis avec du ciment gris

jusqu'à une hauteur de 2m20, ce qui s'opposera aux

inscriptions habituelles aux malades.

Le chauffage se fait par des bouches de chaleur situées

à 2m30 au-dessus du parquet : de la sorte, les enfants

ne pourront les souiller ni les obstruer. Ces bouches de

chaleur proviennent de quatre poêles placés dans le

couloir et dont le chargement se fait par l'extérieur des

BOURNEVILLE, 1888. H"

L PAVILLON DES CELLULES.

cellules.* La porte est en chêne, d'une épaisseur de

54 millimètres, avec une forte serrure encastrée dans le

bois et ne faisant aucune saillie. Il n'y a pas non plus de

verrous extérieurs; aussi, la porte des cellules ressemble-

t-elle extérieurement à une porte ordinaire et ne

rappelle pas les portes de prison qu'on observe souvent

dans les quartiers cellulaires d'aliénés. A l'intérieur,

la porte est complètement lisse et peinte en gris de fer

pour rendre aussi difficiles que possible les dessins.

Dans le panneau du haut de la porte, pour la sur-

veillance, on a pratiqué une ouverture circulaire munie

d'une glace de 2 centimètres d'épaisseur ayant 5 centi-

mètres de diamètre, encastrée dans un châssis en cuivre.

En raison de sa largeur, on peut très bien voir tout ce

qui se passe dans la cellule (1). Cette glace est munie

d'un obturateur en cuivre à coulisse. Pour la surveillance

de nuit, au-dessus de la porte, une imposte vitrée, garnie

d'une trappe en tôle jouant à l'aide d'une corde, permet,

quand cette trappe est levée, d'éclairer l'intérieur de la

cellule par un bec de gaz placé devant la vitre.

Quatre cellules sont munies de sièges d'aisances ren-

fermant un pot dont l'enlèvement se fait par le couloir.

Quatre cellules diffèrent des autres : deux destinées

aux malades agités et furieux sont, l'une, capitonnée sur

toutes ses faces, porte et murs ; la seconde a les parois

des murs en linoléum formant un revêtement et une

sorte de capitonnage. Dans ces deux cellules la fenêtre

( ! ) Nuus avons employé pour l'une des portes le judas inventé

par M. Palu, serrurier à Neuilly-sur-Marne, et adopté pour les

cellules de quelques asiles de la Seine. Ce système, très compliqué

et coûteux, manque aussi de commodité. Nous en avons essayé un ici

autre consistant en une plaque en cuivre, de 12 centimètres de coté,

percée de trous de 5 millim. de diamètre, et appliquée tout à fait

contre une plaque en verre, afin d'empêcher les malades de passer

des cordons entre les trous, et fermée par deux petits volets exté-

rieurs, maintenus par un verrou. Mais c'est le système que nous

avons adopté définitivement et que nous venons de décrire qui

nous a paru offrir le plus d'avantages (simplicité, résistance, facilité

de surveillance).

PAVILLON DES CELLULES. LI

est située à une hauteur plus grande que dans les

chambres d'isolement (2m20) . Tout le long du bord

supérieur du linoléum ou du capitonnage, court un

chanfrein en bois, oblique, de manière que les enfants,

même en sautant, n'ont aucune prise sur le bord supé-

rieur du capitonnage. La troisième cellule, peinte

entièrement en ton bleu cobalt, est destinée à des essais

de traitement de certains cas d'aliénation mentale. La

quatrième est réservée pour un aménagement ultérieur.

Dans ces quatre cellules, les portes et les angles voisins

sont disposés comme dans les quatre chambres d'isole-

ment. En outre, elles ont une fenêtre en tabatière, placée

sur le toit, et le châssis à tabatière est muni, au droit

du plafond, d'une trappe en fer se levant à volonté, pour

réaliser l'obscurité la plus complète.

Le coucher consiste en paille ou en paillasse pour les

cellules d'agités ; pour les autres en une caisse en bois

ou en fer, pleines, sans aucun orifice permettant d'y

passer des liens, comme cela existe encore dans les

cellules d'un grand nombre d'asiles. Les caisses-lits sont

fixes et disposées de telle sorte que les enfants ne puis-

sent s'en servir pour atteindre soit la fenêtre, soit la

bouche de chaleur.

Quatre cellules ou chambres d'isolement sont pourvues

d'un siège d'aisances, demi-circulaire, placé dans l'angle

à gauche de la porte, voûté afin d'empêcher les enfants

de monter dessus. Trois sont en ciment recouvert d'une

solide planche en bois, disposée de façon à n'offrir au-

cune prise. L'un des sièges est entièrement en bois et

offre une disposition spéciale copiée sur le modèle que

nous a fait voir M. le Dr Bécoulet, médecin-directeur de

l'asile d'aliénés de St-Ylic, près Dôle. Le support du

siège se compose de morceaux de chêne enchevêtrés les

uns dans les autres et maintenus à l'aide de fortes vis. Le

tout est fixé au mur et au plancher par des liteaux très

solidement fixés eux-mêmes.

Dans tous, le vase vient s'adapter exactement à la face

LII PAVILLON DES CELLULES.

inférieure du siège proprement dit ; il est plus large que

le trou du siège, par lequel il ne peut point passer. On

le retire du couloir des cellules en le faisant glisser sur

deux rails à l'aide d'un crochet qui s'adapte à la poignée

du vase.

En résumé, ces cellules diffèrent de la plupart des

autres : 1° par l'aspect des portes et par l'oculaire;

2° par leur mode d'éclairage ; 3° par les pans coupés

et le revêtement des murs en ciment ; 4° par leur lit;

5° par l'absence de tout moyen de suicide, etc.

Le 8 novembre 1888, dans une lettre à M. Pcyron,

directeur de l'Assistance publique, après l'avoir prié de

hâter l'ameublement du nouveau pavillon de dortoirs

dont nous avons parlé, nous réclamions l'achèvement

de la section des enfants, c'est-à-dire la construction

des trois derniers pavillons de dortoirs. Nous nous

appuyions : 1° sur ce fait que le règlement des comptes

des travaux antérieurs à 1888 donnait un boni de plus

de 150.000 fr., boni qui naturellement devait être

appliqué à la suite de l'entreprise ; -2° sur la présence

de 60 enfants dans l'ancienne section où ils détiennent

la place d'épileptiques ; 3° sur la présence dans les

dortoirs de la nouvelle section de nombreux lits supplé-

mentaires. Nous rappellions la même demande à la fin

du même mois. Se rendant un compte exact de la situa-

tion, M. Peyron a fait préparer les devis de cette der-

nière opération et nous a promis de soumettre l'affaire

à son Conseil de surveillance dans le courant du mois

de janvier 1889. Tout nous fait donc espérer que, dans

notre prochain Compte rendu, nous annoncerons l'a-

chèvement de cette section dont les plans et l'organisa-

tion ont été votés en juin 1883.

ASSISTANCE DES ALIÉNÉS. Mil

VI.

ASSISTANCE DES ALIÉNÉS. LKS CABANONS DANS LES

HÔPITAUX-HOSPICES DE PROVINCE.

Nous avons toujours pensé que les médecins avaient

non seulement le devoir de mettre toute leur science,

tout leur dévouement à soulager ou guérir leurs ma-

lades, mais encore celui de vulgariser les réformes re-

latives à l'hygiène et à l'assistance publiques. C'est pour

cela que, le plus souvent possible, nous appelons l'at-

tention de nos lecteurs, que nous voudrions voir partout

à la tête du mouvement réformateur, sur la situation

des établissements hospitaliers. Dans ces dernières

années, nous avons insisté sur la nécessité de transfor-

mer complètement l'hospitalisation des vénériennes.

Aujourd'hui, nous abordons une autre question d'assis-

tance : celle des aliénés dans les hôpitaux-hospices

de province.

En juillet 1887, nous avons montré (1) la déplorable

organisation des Cabanons où ils sont déposés dans les

hôpitaux ou hospices de Château-Thierry, Epernay, Lu-

néville, Saint-Dié, Remiremont, Epinal, Belfort, Lan-

gres, Bar-sur-Aube, Troyes. Nous blâmions le séjour

prolongé des aliénés dans les cabanons (cachots de ces

établissements) ; nous demandions au ministre de l'in-

térieur d'exiger de ses préfets et sous-préfets le transfert

immédiat des malades à l'asile départemental ; enfin,

nous réclamions la transformation des cabanons en

chambres ou en cellules convenablement disposées et

ne rappelant plus en rien l'emprisonnement.

Le 1" août 1887, M. Fallières adressait aux préfets

une circulaire les invitant : 1° à visiter périodiquement

les asiles publics et privés, consacrés aux aliénés;

(1) de Neurologie, 1RR7. t. XIV, p. 1 ? xx. :

ïf ? >p

LIV ASSISTANCE DES ALIENES.

2° à examiner les conditions d'installation des cellules

dans les hospices ; 3° à procéder « sans tarder » au

transfert des aliénés dans les asiles. L'intention était

excellente. Malheureusement les préfets, encore trop

peu au courant des questions d'assistance, à part quel-

ques exceptions, ne paraissent pas avoir tenu un compte

sérieux des prescriptions de la circulaire ministérielle.

Et, en 1887, nous avons pu voir que la situation des

cabanons était aussi défectueuse, pour employer une

expression modérée, dans l'Ouest (Cholet, Bressuire,

Rochefort, Saumur), que nous l'avions constatée en 1886

dans l'Est (1). Au mois d'avril 1888, nous avons vu à

l'hôpital Si-André de Bordeaux quatre cabanons aussi ^

mauvais que possible, dotés de tous les moyens de pen-

daison (2), servant à la fois aux hommes et aux femmes.

Nous avons poursuivi notre enquête sur ce sujet pen-

dant nos vacances de septembre dernier et nous avons

eu le triste regret de déclarer que le Centre et le Sud-Est

ne sont pas mieux partagés que l'Est et l'Ouest. On en

jugera par les renseignements qui suivent :

A l'hôpital-hospice de Tonnerre, il y a deux cabanons,

dans le sous-sol, un du côté des hommes, un du côté

des femmes. Ils sont assez vastes mais avec des angles,

des barreaux la fenêtre, au lit, au judas, barreaux qui

constituent autant de moyens de pendaison : c'est ce

qui a eu lieu il y quelques années. A côté de la porte,

il y a un trou par lequel on passe la nourriture au ma-

lade. Ces cabanons ont encore l'inconvénient d'être loin

de toute surveillance. Les aliénés y restent 2, 3, 4 jours

au plus et sont envoyés à l'asile d'Auxerre. Toutefois,

nous avons vu dans l'une des salles de femmes, plusieurs

aliénées, entre autres une lypémaniaque qui refusait de

manger depuis deux mois et une autre admise pour un

rhumatisme chronique avec déformation des jointures ,

(1) Archives de Neurologie, 1888, t. XVI, p. 137.

(2) Un nouveau malade s'y est pendu en juillet 1888.

CABANONS DES HÔPITAUX DE PROVINCE. LV

atteinte de délire de persécution, avec périodes d'exci-

tation : ces malades ne devraient pas rester à l'hospice.

Les cabanons de l'hôpital général de Dijon sont si-

tués dans un bâtiment à rez-de-chaussée bordant la pre-

mière cour à gauche. Leur aménagement est imparfait;

mais leur principal défaut est d'être isolés. On nous a

assuré que, quand il y avait des malades, on faisait

coucher un infirmier ou une infirmière dans le cabanon

voisin.

L'hospice départemental de Besançon possède cinq

cabanons, très mal disposés mais dont le directeur ac-

tuel ne se sert pas. Il place les aliénés dans les salles

destinées aux vieillards ou aux infirmiers. S'ils sont agi-

tés on leur met la camisole (nous avons vu une aliénée

camisolée et fixée sur une chaise). Les malades restent

en observation de 1 à 15 jours, très rarement 15 jours

et sont dirigés sur l'asile de Dôle.

A l'hôpital du Saint-Sépulcre de Salins, les cabanons

sont placés au fond d'un jardin, à une très grande dis-

tance de toutes les autres salles. Double porte, triple

grillage à la fenêtre, etc.

L'hôpital d'Arbois se compose de deux parties sépa-

rées par une rue : d'un côté est l'hôpital, de l'autre les

dépendances. Ces dépendances comprennent entre au-

tres la vacherie (2 vaches et 1 âne) et le cabanon.

Cette disposition le condamne. (Nous avons vu à l'hos-

pice de Lunévillc des cabanons à côté d'une porcherie ;

ici, c'est à côté des vaches et de l'âne) (1).

Les cabanons de l'hôpital-hospice de Poligny sont

installés clans un bâtiment a. gauche de l'entrée, au-

dessus d'un sous-sol assez élevé. Ils sont très mal amé-

nagés et assez loin de tout secours.

(1) Voir A1'eh. de Neurologie, 1887, p. 173. Cet article est

reproduit plus loin, p. 88.

LV ! ASSISTANCE DES ALIÉNÉS.

Situation encore plus déplorable à motel-Dieu de

Lons-le-Saulnier. Les cabanons se trouvent dans le

sous-sol qui est profond et ressemble plutôt à des caves.

Portes solides, doublement verrouillées ; à gauche, ou-

verture transversale avec une petite porte en fer par

laquelle on passe les aliments qu'on dépose sur le re-

bord intérieur de cette ouverture. Au-dessous de celle-

ci, au ras du sol, deuxième ouverture par laquelle on

tire le vase aux déjections, répondant à un siège en bois,

de forme carrée. Petite fenêtre transversale, grillée, à

la hauteur du sol de la basse-cour (un malade s'est pendu

il y a quelque temps aux barreaux). Le lit consiste en

une caisse en bois solide, pleine, à demi-enfoncée clans

le sol et qu'on remplit de paille. Les autres sous-sols,

qui sont vastes et courent sous tout l'hôpital, servent

de caves, de magasins, de bûcher « ce qui est mauvais,

nous dit naïvement la supérieure, car le bois n'est pas

aéré et sèche mal. » J'ai vu dans l'un des cabanons, un

vieillard inoffensif, atteint de démence, qui y a été mis

parce qu'il tourmente les autres malades. Il est évident

que la surveillance est absolument nulle, car un homme

sain d'esprit, ne consentirait pas à coucher dans ces

caveaux.

Nous avons vu, il l'hôpital thermal d'Aix, un aliéné

dans une chambre dont le plancher est à près de deux

mètres au-dessous du niveau du sol de la rue. Cette

chambre, mal éclairée, étroite, est loin de toute surveil-

lance.

A l'hôpital de Grenoble, les cabanons sont disposés

dans une partie du rez-de-chaussée du pavillon des

vénériennes. Disposition médiocre; mais ils peuvent

être dans une certaine mesure surveillés par les infir-

mières des vénériennes. Nous avons vu dans un des

cabanons un aliéné qui y est depuis douze jours et dans

le cabanon voisin un matelot qui l'habite depuis trois

jours.

CABANONS DES HOPITAUX DE PROVINCE. LVII

Il existe quatre cabanons à l'hôpital de Valence ; ils

sont disposés dans un sous-sol, quand on s'y rend, et

c'est la pratique ordinaire, par la galerie longeant la

cour intérieure, au rez-de-chaussée si l'on s'y rend

par le jardin. Le sous-sol est parcouru par un couloir

longitudinal. Le sol des cabanons est plus bas que le sol

des couloirs. Portes garnies de plaques de fer et de

verrous, avec judas par lequel on introduit les aliments.

Au-dessus de la porte, ouverture avec cinq barreaux

verticaux, sans carreaux, laissant pénétrer l'air froid et

humide du couloir en communication avec l'escalier. Du

côté du jardin, fenêtre grillée verticalement sans car-

reaux, avec auvent métallique ouvert en haut, surmonté

d'une planche verticale pouvant combler le vide entre le

bord supérieur de l'auvent et celui de la fenêtre. Les

cabanons sont voûtés. Aucun meuble, de la paille. Pas

de chauffage. Ces cabanons, où on descend par un

escalier obscur de 23 marches, constituent de vrais

cachots. Les pièces voisines sont plus élevées que les

cabanons et leur sol est de niveau avec celui du couloir.

Autrefois, on conduisait les aliénés aux cabanons par

un escalier de 18 marches donnant sur ce jardin, qui est

très bien, et on les introduisait par une porte donnant sur

ce jardin. Cette pratique était meilleure, car elle évitait

les inconvénients de l'escalier actuel qui font que les

malades sont effrayés par l'aspect de cet escalier sans

éclairage qui semble les conduire (et c'est vrai) dans

une cave. Il y a deux mois, un malade y a séjourné

quatorze jours.

A l'hôpital du Puy,nous avons vu dans les salles des dé-

ments des deux sexes,sujets à des périodes d'excitation

et dont la véritable place est dans un asile d'aliénés. En

revanche, on n'y reçoit que « le couteau sur la gorge»,

les épileptiques et les idiots. Il y a deux catégories de

cabanons. Les plus anciens constituent de véritables

cachots. Ils sont voûtés, sans air et sans lumière. La

LV111 ASSISTANCE DES ALIÉNÉS.

vieille religieuse ( 35 ans de services ) qui nous ac-

compagne, nous dit y avoir soigné naguère dans l'un

d'eux une folle pendant 15 ans. L'un de ces cachots

lui sert encore à mettre les vieilles femmes qui troublent

le repos des autres. Plusieurs de ces cabanons, servent

de débarras. Les cellules, dit la supérieure, n'étaient

pas commodes pour le service, mais les malades pou-

vaient y vivre. Les trois cabanons actuels sont situés

au rez-de-chaussée du bâtiment principal de l'hospice,

derrière la cuisine, en contre-bas du sol, dans une cour

isolée, loin de la surveillance. Ils sont précédés d'un

couloir. Ils ne reçoivent de jour que par une imposte

grillée en long et en travers, ouvrant sur le couloir. On

passe la nourriture aux malades par le guichet de la

porte, richement pourvue de verrous. Les malades,

nous fait-on remarquer, ne pourraient y rester long-

temps, car leurs jambes enflent. La durée ordinaire

du séjour est de 10, 12, 15 jours et même 3 semaines.

Nous ajouterons le récit d'un fait déjà ancien, mais que

nous n'avons pas encore utilisé et qui mérite d'être

connu, car il met bien en relief les inconvénients des

pratiques actuelles : il concerne l'hospice des Andelys,

dans l'Eure :

1° Les aliénés sont admis à l'hospice aux mêmes conditions

que les malades, mais à titre temporaire seulement, en atten-

dant que les formalités d'admission à l'Asile spécial soient

remplies. La durée est variable selon l'empressement apporté

par l'administration communale et départementale pour de-

mander le transfert et aussi suivant les conditions d'admission

à l'Asile, soit aux frais de la famille, de la commune ou du

département; en résumé, on peut compter un minimum de 20

jours ; ce délai est toujours trop long, attendu que le service

des hôpitaux n'est pas organisé pour exercer une surveillance

continue et qu'il serait inhumain d'enfermer dans les cabanons

des personnes atteintes seulement de démence. 2° En ce qui

concerne l'événement survenu en 1881 iL l'hospice, voici ce que

j'en ai recueilli : 111e Jobey, Marie-Victorine, âgée de 66 ans,

entrée à l'hôpital le 23 Novembre 1881 sous la rubrique : dé-

ASSISTANCE DES ALIÉNÉS. til

mence sénile, paraissait calme quoique divaguant, mais rien

dans ses actes n'indiquait que l'on devait observer une sur-

veillance absolue, elle circulait dans les corridors comme les

malades ; le 2') nuvembre, vers midi, pendant le déjeûner des

soeurs, elle a disparu sans que l'on sache où elle était passée,

on se mit alors à faire des recherches dans la maison, mais

inutilement; comme il était venu plusieurs personnes visiter

des malades, on a pensé qu'elle avait dû profiter que la porte

était restée ouverte pour sortir, alors on fit des recherches

dans les bois voisins et on sonda les bords de la Seine, mais en

vain.

Comme elle avait été domestique dans un château aux en-

virons de Rouen, on pensa qu'elle avait pu s'y rendre, mais

c'était encore une fausse piste; enfin, au bout de 4 semaines,

une domestique ayant besoin de monter dans un grenier inoc-

cupé, trouva la porte fermée en dedans, on l'ouvrit de force,

et, dans un coin du grenier, on découvrit le cadavre en décom-

position de Mil. Jobey, debout, adossé à une échelle dressée au

mur. Est-elle morte de congestion ou d'inanition ? cela n'a pas

été établi ! Depuis on n'a jamais retrouvé la clef de cette porte.

Tout cela prouve que les premières recherches avaient été

mal faites, mais c'est un peu excusable, car tout le monde

pensait qu'elle avait dû sortir de l'Etablissement.

Ce fait se passe de commentaire !

Comme conclusion, nous ne pouvons que répéter ce

que nous écrivions ailleurs il y a six mois, et insister

encore une fois auprès de M. le ministre de l'intérieur

« pour qu'il se fasse renseigner d'urgence sur les condi-

tions matérielles des cabanons de tous les hôpitaux et

hospices de province ; pour qu'il exige des transforma- J

tions radicales de ces cachots, et surtout pour que les

malades soient dirigés immédiatement, ou au moins

dans les 24 heures, sur les asiles du département. C'est

là une réforme qui peut être réalisée en quelques jours,

réforme modeste, il est vrai, mais qui rendrait d'incon-

testables services à un grand nombre de malheureux. »

BOURNEVILLE.

DEUXIÈME PARTIE

Clinique.

Rooawvr.r,r, 1888.. 1 .

1.

Nouveaux cas d'idiotie avec cachexie

1 pachydermique

(IDIOTIE CHRÉTINOÏDE OU IDIOTIE MYXOEOÉllATEUS;);

Par " 00 ICJ 1-. 1'V )a %7 X Ir- IC, IE .

Les cas d'idiotie avec cachexie pachydermique sont beau-

coup plus communs qu'on ne pourrait le croire, si l'on en

jugeait d'après le petit nombre des malades de cette catégorie

qui sont admis dans les asiles. Cette rareté s'explique d'ailleurs

par la difficulté qu'opposent les administrations à la réception

des malheureux enfants atteints d'imbécillité et d'idiotie. Il y a

quelques mois, notre ami, M. le D'' P. Marie, nous a donné la

photographie, prise parle garçon de laboratoire de la clinique

de la Salpêtrière, d'une jeune fille de Bonneval (Eure-et-Loir)

atteinte d'idiotie crétinoïde 1. Un autre de nos amis, M. le

D'' Guillaumin, médecin à Nogent-le-Roi, dans le même dépar-

tement, nous a fait voir à la fin de septembre deux autres cas

tout à fait caractéristiques. Ce sont ces cas que nous allons

rapporter, bien qu'il ne nous ait été possible de prendre que

des notes sommaires.

Ouservation I. Vas... (Georges), cinq ans, habitant la com-

mune de Pinthières. Père, grand, fort, physionomie régulière,

intelligent. Mère, assez grande, bien portante.-Deux frères en

bonne santé. Aucun des membres de la famille ne présente un

aspect rappelant celui de l'enfant. Un cousin germain est faible

d'esprit et fait des fugues fréquentes (épilepsie larvée ? ). Pas de

consanguinité.

Vas... a 76 centimètres de hauteur; il marche seul, lourdement,

lentement. Sa physionomie est tout à fait caractéristique; sa tète

1 Nous publions plus loin l'observation de cette malade.

4 IDIOTIE.

ressemble a celle du Pacha et de Gray ? dont nous avons publié

l'histoire (voir Arclt. de New'olog., 1886, tome XII, p. 142, 143 et

2( ? et Compte -rendu de Bicêtre, pour 1886.) Les cheveux, peu

abondants sur la moitié postérieure du crâne, sont rares en avant

et ont une coloration rousse. Le cuir chevelu est le siège de crasses

etd'uneéruplion eczémateuse qui se reproduisent sans cesse. La fon-

tanelle antérieure persiste et est encore large. Les sourcils sont peu

fournis, les cils assez abondants; le nez est camus; les lèvres sont

très épaisses ainsi que la langue qui sort souvent de la bouche.

La dentition est en retard; les canines viennent seulement de

percer. Les joues sont épaisses.

Le cou est court et ni M. le Dr Guillaumin, ni nous-même, n'a-

vons pu sentir la glande thyroïde. 11 existe des paquets pseudo-

lipomateux dans Jes creux sus-claviculaires et dans les aisselles.

Les membres supérieurs et inférieurs sont courts et gros. Les

mains sont épaisses, pseudo-oedémateuses, ainsi que les pieds, mais

ceux-ci à un moindre degré. Le ventre est large, volumineux. Il

n'y a pas de hernie inguinale, mais nous avons trouvé une petite

hernie ombilicale. Les testicules ont la dimension d'un oeuf de

passereau.

La parole est limitée à quelques mots simples. La voix est éraillée,

rauque, stridente. Le regard est hébété. V. ne s'aide en rien ; il

tient un peu les objets avec les mains. Il est gâteux, frileux,

résiste au mouvement et aime beaucoup le lit. La peau est pâle,

cireuse.

Observation IL Pih... (Pauline), vingt-sept ans, réside dans

la commune de Croisilles. Ses parents sont bien portants; pas de

goitreux, pas de consanguinité; inégalité d'âge de deux ans. Elle

est la cinquième et dernière enfant; les autres sont en bonne

santé. Elle n'a pas eu de convulsions et on ne sait à quoi attribuer

la maladie. Sa taille n'est que de 89 centimètres.

Cheveux longs, d'un brun roux, peu abondants en arrière et

sur le bas des tempes, très rares sur les régions pariétales et tem-

porales supérieures. Crasses presque généralisées du cuir chevelu,

se reformant très rapidement. Tête grosse, surtout eu arrière ;

pariétaux très fuyants; fontanelle antérieure non oblitérée : on sent

une rainure large de cinq à six millimètres et longue de plusieurs

centimètres. Front bas, ridé, peau delà face jaune, cireuse;

paupières supérieure et inférieure pâles, bleuâtres, bouffies,

comme oedémateuses. Sourcils assez maigres, cils peu fournis.

En raison de la bouffisure des paupières, les yeux sont enfoncés

et paraissent petits. Le regard est sans expression. Nez camus très

prononcé, épaté : lèvres très épaisses, entr'ouvertes; bouche large;

double rangée de dents comme chez le Pacha (1° dentition et

2° incomplète). Langue très épaisse. Bajoues volumineuses et

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. O

tremblottantes. Prognathisme très accusé qui, avec les autres ca-

ractères du visage et du crâne, lui donnent un aspect simien tout

à fait hideux.

Le cou est court et ni M. Guillaumin, ni nous, n'avons pu perce-

voir la glande thyroïde. Masses pseudo-lipomaleuses sus-clavicu-

laires très nettes; celles des aisselles sont moins prononcées.

Thorax déformé par une déviation du rachis (rachitisme); seins

flasques, de la grosseur d'une moitié de mandarine; mamelons

déprimés. Ventre large et très gros.- Hernie ombilicale ? Fesses

assez grosses, baloltantes.- Grandes lèvres assez développées avec

un bouquet de poils assez longs mais rares; rien au pénil. Pih...

n'a jamais été réglée ; elle aurait rendu une fois dn sang par la

bouche. Les membres supérieurs et inférieurs sont gros, courts ;

les mains et les pieds offrent les caractères classiques. La parole

estlimitée à quelques mots. La voix est. stridente, rauque, éraillée.

Pih... reconnaît ses parents, ses voisines, sait expliquer surtout

par signes, ce qu'elle veut; elle mange seule, ne gâte pas, est

sujette à la constipation. Sa démarche est très lourde, très lente,

dandinante. Pih... est très sensible au froid. Sa peau est jaunâtre.

cireuse ; eczéma des lombes, du dos et un peu des bras.

Ces deux malades présentent dans l'ensemble et dans les

détails tous les caractères de nos anciens malades, atteints

d'idiotie avec cachexie pachydermique. Aussi nous contenterons-

nous de quelques remarques. Tous deux ont le nez camus

(c'est la règle), bien que leurs parents aient des nez aquilins.

De même que nos autres malades, ils ont : lu des cheveux

brun-roux ou blond-roux, gros, rudes et rares, principale-

ment sur la région moyenne de la moitié antérieure de la tète;

2° le cuir chevelu est le siège d'une éruption eczémateuse ;

3° la fontanelle antérieure est persistante' ; 4° la denti-

tion défectueuse et en retard ; à" la peau cireuse, un peu

jaunâtre, luisante, eczémateuse; 61 la partie inférieure des

joues épaissie, comme tremblottante; 7° les creux sus-clavi-

culaires et les aisselles sont gonflés par des masses pseudo-lipo-

mateuses ; 8" les mains et les pieds sont épais, boursouflés,

comme oedémateux, bien que nulle part, la pression du doigt

ne laisse d'empreinte ; 9" la voix est rauque, stridente, érail-

' Chez Then..., dit le Pacha, mort, il 2-Í ans, la fontanelle persistait. 11

en est de même chez Gra ? (le 30 ans, qui est encore dans noire

service. Il en était encore ainsi chez un autre enfant dont nous publierons

prochainement l'observation dans le Progrès médical. Même chose chez

un malade de Curling', de M. Bouchaud, etc., etc.

Ci IDIOTIE.

lée : c'est le caractère qu'elle avait chez tous les idiots cl'éti-

noïdes que nous avons observés, caractère que nous n'avons

pas suffisamment mis en relief; 10° nous avons vu que le

Pacha et Gra... avaient des hernies inguinales, nos deux nou-

veaux malades ont des hernies ombilicales ; cette fréquence des

hernies inguinales et surtout ombilicales mérite d'être relevée ;

'11° notons enfin l'absence probable de la glande thyroïde qui,

ainsi que nous l'avons démontre dans notre travail avec

M. Bricon, parait être la caractéristique anatomo-pathologique

de l'idiotie crétinoïde '.

La note qui précède a paru dans le numéro 48 des Archives

de neurologie (p. 431). Dans le numéro suivant nous avons

publié l'observation de la malade deBonneval, àlaquelle nous

avions fait illusion. Nous la devons à l'obligeance de M. le Dl'

Camuset, médecin-directeur de l'asile de Bonneval, à qui nous

avions signalé son existence. Voici cette intéressante observa-

tion.

Observation III. Père alcoolique et grand-père violent. Oncles

et tantes paternels ivrognes. Aucun antécédent maternel. Ter-

reur et coups durant la grossesse.

Aspect normal à la naissance. Marche ci cinq ans. Parole

vers six ou sept ans. - Ecoulement vulvaire sanguinolent et leu-

eoft'AfçMe.Dcsc ? 'tp<tOH de la malade. Caractères de la cachexie

pachydermique. Fonctions organiques. Etat psychique.

Amélina F... est une idiote atteinte de cachexie pachvder-

mique à un très haut degré. Elle est âgée de vingt-quatre ans.

Elle habite un petit village d'Eure-et-Loir, Vrainville, où elle est

née. Elle vit chez ses parents, qui la soignent assez bien. Sa mère

s'est toujours efforcée de développer son intelligence, et il est

certain qu'elle est arrivée à relever un peu son niveau intellectuel.

Antécédents héréditaires Il n'y aurait pas d'aliénés ni d'épi-

leptiques dans la famille paternelle, non plus dans la famille

maternelle. Le père et la mère sont bien portants. La mère

paraît exempte de toute tare névropathique, mais elle est rhu-

matisante et issue de rhumatisants. Le père, d'ailleurs bien

portant, est un ivrogne endurci très méchant après ses excès. Il

appartient à une famille nombreuse : six frères, une strur, tous

ivrognes. Leur père était également buveur.

' Nous avons constaté cette absence de la glande thyroïde à l'autopsie

d'un nouveau malade, nommé Bourg...

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. I

La mère prétend que, pendant qu'elle était enceinte, son mari

étant ivre l'a menacée et frappée, et que c'est la terreur qu'elle a

éprouvée qui a été cause de la difformilé de son enfant. Il ne

faut retenir de cette histoire qu'une chose, c'est que le père est un

ivrogne et qu'il entre en fureur quand il est ivre. Amélina F... a

eu deux frères, ses aînés. Ils sont morts en bas âge, l'un du croup,

l'autre de la dysenterie.

Antécédents personnels. -Votre idiote n'a jamais eu de maladie

sérieuse. Asa naissance elle n'offrait rien d'anormal, ce n'est que

plus tard qu'on s'est aperçu qu'elle devenait grosse et qu'elle se

développait mal. Elle a marché très tard, a cinq ans. Vers douze

ans, elle marchait seule, aujourd'hui elle ne peut plus le faire

1";g.. AU

8 IDIOTIE, z

elle n'a commencé à parler que vers six ou sept ans. Nous verrons

qu'est, chez elle, la faculté du langage.

Vers l'âge de quatorze ans, elle aurait perdu par la vulve quel-

ques gouttes de sang avec beaucoup de liquide glaireux. Depuis,

on n'a jamais observé le moindre écoulement sanguin, mais sou-

vent, à des intervalles irréguliers, il s'établit un écoulement vagi-

nal glaireux qui dure plusieurs jours. Pendant ces périodes, la

face deviendrait plus colorée, les lèvres plus livides encore

qu'elles ne le sont à l'état normal, enfin le sujet serait souffrant

et mangerait mal.

Etat actuel l'Amélimc F... Une tôle relativement énorme, aux

traits boursouflés et sans expression, aux lèvres épaisses, cyano-

sées et renversées en dehors, la langue très grosse faisant ordi-

nairement saillie, aux yeux très écartés et bridés par des paupières

bouffies, au teint jaune cireux. Cette tête hideuse, qui seule suffit

à faire reconnaître une cachexie pachydermique prononcée, sur-

monte un corps tout petit, un corps d'un enfant de deux ans,

mais d'un enfant difforme, bossu et à gros ventre (Tg. 18).

La taille du sujet est de 0m86, et le corps mesuré à partir de la

clavicule, c'est-à-dire sans la tête ni le cou, a On,60 de hauteur.

Il existe partout, sous la peau, un pseudo-oedème plus ou moins

abondant, selon les régions. Cette couche sous-cutanée est très

épaisse à la face, au-dessus des clavicules, aux aisselles, aux par-

ties inférieures des joues et sous les oreilles (bajoues), aux extré-

mités, mains et pieds. En pressant la peau avec le doigt, on

éprouve une sensation sui generis, celle que donnerait une subs-

tance molle cédant sous la pression, mais, le doigt enlevé, il ne

subsiste pas d'empreinte. Ce sont là les caractères du pseudo-

oedème de la cachexie pachydermique.

La peau est jaune cireux à la face, sauf au milieu des joues où

elle est rouge foncé. Ailleurs, la teinte cireuse est moins pro-

noncée ; aux cuisses et au dos, la peau est même rosée. La

peau est en général rugueuse. Aux bras, il existe une sorte d'ic-

thyose léger ; aux cuisses, elle est au contraire douce. Aux mains

et aux pieds, elle est particulièrement dure et épaisse. A la partie

inférieure du dos et sur une partie du ventre, elle est sillonnée

par de nombreuses veines très marquées.

Tète. Le crâne est symétrique, ou, du moins, la voûte du

crâne est symélrique.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. ! )

crasseux et eczémateux, surtout en avant. A cet endroit, les che-

veux sont très rares, l'alopécie presque complète. Plus en arrière,

les cheveux sont assez fournis, ils sont très courts, secs et de cou-

leur châtain-roux. Les oreilles sont grandes, épaisses, mais régu-

lières, le lobule détaché, elles sont très inclinées en bas et en avant.

Face. Elle est un peu asymétrique et bien plus large que le

crâne. Les yeux ne sont pas sur le même plan, le gauche est plus

haut que le droit. Si donc la voûte du crâne est symétrique, la

base ne l'est pas. Le front est très bas et sillonné de rides

horizontales profondes. Les sourcils sont à peine marqués.

Les yeux peu ouverts sont bridés par les paupières pseudo-oedé-

mateuses. L'iris en est bleu. Ils sont très éloignés l'un de l'autre.

Il Il a 4 4 centimètres entre l'angle interne des paupières d'un côté

et l'angle interne des paupières du côté opposé.

Le nez est fortement camard. Saillie des os propres presque

insensible à la naissance de l'organe; narines très écartées. La

respiration par le nez est difficile et bruyante, la muqueuse est

sans doute épaissie.

La bouche est très grande, un peu oblique de gauche à droite.

Les lèvres sont épaisses, bleuâtres, renversées en dehors. La

langue est énorme et reste presque toujours, en partie, hors de la

bouche. Elle est rouge bleuâtre comme les lèvres, comme toute la

muqueuse buccale, du reste.

Les dents sont en partie gâtées. La première dentition a per-

sisté. Il y a dix dents, ou débris de dents, à la mâchoire supé-

rieure et autant à la mâchoire inférieure. En plus, quatre dents

permanentes ont poussé à la mâchoire inférieure, quatre inci-

sives. Il y a donc à la partie médiane de la mâchoire inférieure

une double rangée de dents.

Cou. Le cou est très court; sa circonférence est de 0- 33;

il est très myxoedémateux, surlout au-dessus de chaque clavicule.

On ne peut percevoir la thyroïde. Cette glande n'existe pas, autant

qu'on peut être affirmatif sur ce point en l'absence d'autopsie.

Tronc. - Très myxoedémateux, surtout au niveau des aisselles.

La colonne vertébrale est déviée à la région dorsale; la convexité

tournée à droite fait une saillie assez prononcée. Le ventre est

très gros, sa circonférence =0'" 60. -IIe1'1lie inguinale droite qui

reste ordinairement réduite sous bandage, mais qui sort au

moindre effort. Une hernie ombilicale aurait guéri spontané-

ment. Elle ne sort plus depuis plusieurs années. Chute du

rectum fréquente. La mère est habituée à réduire le rectum en

prolapsus.

Membres. Ils sont gros, potelés par le fait du pseudo-oedème.

Les attaches sont épaisses. Les membres supérieurs égaux ont

om 22 de longueur, les inférieurs, également égaux, ontOm31.

'10 IDIOTIE.

La peau du bras est, nous l'avons déjà dit, très rugueuse, icthyo-

sique. Aux mains et aux pieds, la peau est épaisse, rude et un

peu eczémateuse. Les extrémités rappellent celles des gros pachy-

dermes. C'est, on le sait, cette analogie, notée depuis longtemps,

qui a servi à M. Charcot pour dénommer l'affection. Les ongles

sont difformes et cassants.

Organes sexuels. La vulve est celle d'une petite fille de trois

ou quatre ans. La muqueuse est bleuâtre, mais moins que celle

des lèvres. Au moment de l'examen, il n'y avait pas trace d'écou-

lement vaginal. Il n'y a pas de poils au pubis. Aux grandes

lèvres, on voit quelques poils follets courts et blonds.

Les mamelles ne sont pas développées. On ne sent pas trace de

glande sous les mamelons. La partie antérieure du thorax est

recouverte d'une couche pseudo-oedémateuse épaisse.

Viscères. Autant qu'il nous a semblé, ils sont sains et ne

présentent rien de particulier. Le coeur, que l'état cyanosique

des muqueuses pouvait faire supposer lésé, n'offre à la percussion

et à l'auscultation rien d'anormal.

Digestion. Amélina F... mange peu, mais régulièrement.

Son régime consiste presque exclusivement en pain et en lait;

ce sont les aliments qu'elle préfère; elle aime aussi les sucreries.

Les digestions sont ordinairement bonnes, F... est cependant

sujette à la diarrhée. Il est à propos de noter qu'elle a été

longtemps gâteuse. Sa mère avoue qu'elle n'est arrivée à la

rendre propre qu'en employant des moyens brutaux, en la

fouettant.

Circulation. Respiration. La respiration est normale.

Quand elle se fait par le nez, elle est bruyante et un peu gênée ;

ce qui tient sans doute au pseudo-oedème de la muqueuse nasale.

La circulation est peut-être défectueuse, aux extrémités au

moins; la température des extrémités est, en effet, relativement

trop basse. Les bruits du coeur sont bien rythmés et réguliers.

Le pouls bat 9 pulsations à la minute. La température axillaire

est de 33°,5. Mais les examens du pouls et de la température

ont été trop peu nombreux, la malade n'étant pas dans un service

d'hôpital ou d'asile, pour que nous puissions, sous ce rapport,

présenter les résultats d'une observation sérieuse.

Marche. - La malade ne peut marcher sans s'appuyer sur les

meubles ou sur la muraille ou sans être tenue par la main. Elle

parvient alors à faire quelques pas lourds et pénibles. Elle peut

se tenir pendant quelque temps debout, immobile, sans point

d'appui. 11 paraît qu'autrefois elle marchait seule et sans

soutien.

Voix. Elle est rauque, le timbre en est très bas. Les paroles,

presque inintelligibles, sont lentement prononcées; le vocabulaire

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 11

est, du reste, très restreint. La tonalité et la raucité de voix

dépendent probablement de la présence du m3-xoedème sous la

muqueuse du larynx et des cordes vocales.

Etat psychique. Les facultés mentales sont très rudimentaires.

Amelina F... passe sa vie assise sur un fauteuil-lit, à jouer avec

une poupée ou avec des chiffons qu'elle pique avec une aiguille,

mais elle est incapable de coudre. Son faciès est alors absolument

impassible, sa bouche entr'ouverte, son énorme langue à moitié

tirée. Si on lui offre un bonbon, elle sourit, ce qui donne passa-

gèrement un peu d'expression à sa physionomie. Elle ne répond

guère qu'à sa mère et par monosyllabes : oui, non. Parfois elle

prononce quelques mots que sa mère traduit. La mémoire est

relativement plus développée que les autres facultés. Elle nous

reconnaissait quand nous allions la voir et elle nous nommait

dans les intervalles de nos visites, sans doute dans l'attente de

quelques sucreries,. Elle est douce et se met rarement en colère.

M. le D'' Camuset accompagne son observation des ré-

flexions suivantes :

« Somme toute, idiotie prononcée; un degré de plus, la vie

serait absolument végétative, et ce degré, elle l'eût atteint

sans les soins affectueux de sa mère qui trouve en elle, il faut

bien le dire, une source de profit en la promenant dans les

marchés et dans les foires de la région. Dans les fêtes de nos

campagnes, comme dans celles des faubourgs de Paris, un

beau cas tératologique a toujours du succès. -

« Nous pensons que la cachexie pachydermique s'estdéclarée

quelque temps après la naissance et qu'elle a provoqué l'arrêt

de développement du sujet. L'idiotie est la conséquence

de cet arrêt de développement et de la cachexie pachyder-

mique elle-même. Cette affection, on le sait, produit toujours,

même chez l'adulte, une lésion par défaut des fonctions psychi-

ques. Comme nous l'avons dit au début, Amélina F... présente

l'état crétinoïde au degré le plus avancé. Aucun des signes

énumérés par M. Bourneville ne fait défaut. »

Nous avons pu ajouter à l'observation très intéressante de

M. le Dl' Camuset la fig. 18, d'après une photographie, prise,

comme nous l'avons dit, à titre de curiosité par le garçon de

laboratoire de la clinique de M. Charcot. De plus, nous don-

nons une figure représentant la malade Pih... de Croisilles

dont nous avons rapporté l'observation plus haut. Cette

figure 19 est faite d'après une photographie due à un artiste de

12 IDIOTIE.

passage, qui nous a été envoyée par notre ami le D'' Guil-

laumin 1.

Si l'on veut bien comparer ces figures à celles que nous

avons insérées dans notre ancien travail', on verra que tous

ces malades ont une physionomie tout à fait semblable et

caractéristique ; l'état du cou, des membres et, en particulier,

des pieds et des mains est toujours le même.

Dans le n° 51 du Bulletin de la Société de médecine mentale

de Belgique (1888), M. le D'' G. CousoT a publié un cas

1 Ces figures ne sont point parfaites. En pareil cas, il faut bien mon-

trer les pieds, les mains, la tète, le cou, etc.

'Archives de Neurologie, 1886, t. XII, p. 137, 292.

1--ig, 19.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. '13

très intéressant d'idiotie avec cachexie pachydermique. Con-

trairement à certains auteurs français, notamment MM. Ball,

Arnozan et Régis qui affectent d'ignorer les travaux que nous

avons publiés sur cette question, soit seul, soit en collabo-

ration avec notre ami le Dl' Bricon, ainsi que nous aurons

l'occasion de le démontrer, le médecin belge rappelle nos tra-

vaux et déclare que c'est après leur lecture qu'il a pu porter

un diagnostic exact. Voici son observation :

Observation. Père, éléphantiads de la jambe gauche. - Saur

hémiplégique. Rien de particulier ci la naissance. Premiers

signes de cachexie pac/t</dft' ? )M</Me. Etat intellectuel et phy-

sique de la malade ci trente et un ans. Absence probable de

la glande thyroïde. Mort dans le marasme ci trente-deux ans.

Elisa X..., de Lesse (Dinant), avait trente et un ans à l'époque

où nous l'avons examinée; elle ne mesurait pas un mètre de hau-

teur. Son père a. souffert longtemps d'un éléphantiasis de la

jambe gauche ; il mourut épuisé à soixante-huit ans. La mère est

une femme énergique, bien portante; elle a eu neuf enfants : deux

garçons vigoureux et sept filles. Parmi celles-ci, l'une est morte

jeune, succombant à une affection que l'on n'a pu m'indiquer,

une autre est hémiplégique, une troisième, l'enfant cadet de la

famille, est le sujet de cette communication.

A la naissance, Elisa X... était un bel enfant, sain et bien por-

tant : à cet égard il ne doit subsister aucun doute, la mère dont

nous tenons ce renseignement, étant, par profession, habituée à

juger des enfants nouveau-nés. Vers l'âge de six mois, la figure

de l'enfant commença à manquer d'expression, la langue devint

volumineuse et sortait souvent de la bouche : la croissance fut

entravée. A l'âge de deux ans, Elisa X... subit une légère atteinte

de variole.

On éprouvait un sentiment de répulsion quand on approchait

de ce pauvre être pour la première fois. Bourneville et Bricon

rapportent l'observation du « crétin des Batignolles » et celle d'un

idiot pachydermique que ses compagnons d'asile surnommaient

le Pacha. Les voisins de Elisa X... ne mettaient pas le même

esprit, ni la même charité dans leurs appellations ! 1

Elisa X... présente un air bestial, sa figure est repoussante; la

peau est pâle, mate, bouffie ; les paupières, atteintes de blépha-

rite chronique, sont dépourvues de cils; les paupières supérieures

sont très gonflées, comme dans un cas d'anasarque très prononcé ;

les yeux ne se découvrent jamais complètement; le nez est très

aplati à sa racine et largement implanté, les ailes du nez sont

grosses et les narines largement ouvertes (nez camus); les lèvres

sont épaisses ; la lèvre inférieure est retroussée vers le menton ;

14 IDIOTIE.

la langue énorme sort constamment de la bouche d'où s'écoule un

flot de salive qui mouille la partie inférieure du visage et les

vêtements; la partie inférieure du visage s'avance (en museau) ;

les oreilles sont bien ourlées, les mâchoires en partie dégarnies

supportent des dents noires, cariées, irrégulières de forme et

d'implantation ; la chevelure noire, peu abondante, est formée de

cheveux courts, gros et raides : la face entière est bouffie et les

joues pendantes; le teint du visage est blême.

Le crâne ne présente aucun caractère particulier ; en voici les

principales dimensions prises sur le vivant :

CACHEXIE PACHYDERMIQUE hui

différents modes, ne présentent aucune anomalie. Le coeur, le

foie, la rate, sont dans les limites habituelles.

L'intelligence ne s'est jamais développée : pour tout langage,

Elisa X... possède quelques grognements de mécontentement ou

de satisfaction ; il n'existe aucune mémoire : peut-être reconnait-

elle sa mère qui la soigne. En dehors de cela, elle reste apa-

thique, indifférente atout ; elle ne parait avoir aucun désir; elle

remue de ses doigts inhabiles tout ce qu'on place devant elle

comme un enfant de quelques mois fait d'un hochet. La sensibilité

est obtuse, car il faut irriter assez fortement la peau pour susci-

ter un cri de mécontentement. Elle entend, car elle se retourne

parfois à la voix de sa mère ; et elle voit les objets qu'on place

sur la tablette de sa chaise, ou la nourriture qu'on lui présente.

Elle ne peut marcher et ne se tient debout qu'en s'appuyant à un

meuble, à un mur.

Elle mange malproprement et gloutonnement. Elle est très

constipée, au point de rester des semaines entières sans garde-

robes. Souvent elle urine au lit.

Le pouls est petit, bat environ quatre-vingts fois à la minute.

A l'auscultation du coeur, il n'y a pas de différence entre les

deux bruits qui sont réguliers et égaux. Il existe une lenteur cir-

culatoire évidente : constamment elle est un peu cyanosée sur-

tout aux extrémités ; au moindre effort la cyanose augmente

considérablement. Sur toute la surface du corps, on éprouve une '

sensation désagréable de froid.

L'oedème des pieds et de toute la surface du corps ne conserve

pas l'empreinte du doigt. Les urines ne renferment pas d'albu-

mine. A quatre reprises différentes de vingt à trente ans

Elisa X... a présenté un écoulement vaginal sanguinolent mani-

feste.

Celte pauvre enfant est morte dans le marasme, âgée de trente-

deux ans. L'ouverture du cadavre a été obstinément refusée.

Nous retrouvons là tous les caractères que nous avons rele-

vés dans nos précédentes observations, et en particulier dans

les nIs i-8 (p. lI31) et 49 (p. 8â) des Archives de Neurologie : .-

physionomie bestiale, face pâle, mate, bouffie; lésions chroni-

ques des paupières qui sont gonflées ; nez camus ; lèvres

épaisses, langue volumineuse; dents cariées, irrégulières de

forme et d'implantation ; joues pendantes ; cheveux peu

abondants, courts, gros et raides ; cou court; glande thy-

roïde imperceptible au palper ; poitrine globuleuse ; dos

voûté; ventre énorme, proéminent, hernie ombilicale; mem-

bres supérieurs et inférieurs gros; mains et pieds élargis, gon-

Ilés, épais; cyanosés; froids; absence de poils aux aisselles et

'16 IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE.

au pénil; peau cireuse, blafarde, avec un peu de desquama-

tion ; taille d'un mètre; enfin, au point de vue intellectuel,

tous les symptômes de l'idiotie complète.

Ce fait, joint à ceux que nous avons rapportés précédem-

ment, nous parait justifier la création d'une forme particu-

lière d'idiotie, sous le nom d'idiotie avec cachexie pachyder-

mique, liée à l'absence de la glande thyroïde'.

Une étude attentive de ces nouvelles observations montre

aussi que les malades offrent tous les mêmes symptômes et

que ces symptômes sont absolument analogues à ceux que

nous avons minutieusement décrits.

Chez aucun des malades vivants dont nous avons publié

l'observation, ainsi que chez nne autre, dont nous

parlerons plus tard, il n'a été possible de sentir la glande

thyroïde : il ne paraît y avoir rien entre la peau et les car-

tilages de la trachée. Les deux autopsies pratiquées par

Curling, celle de M. Fletcher Beach, celle de M. Bouchaud,

les nôtres, au nombre de trois, ont démontré que dans ces

cas, la glande thyroïde n'existait pas.

Aujourd'hui, il nous semble donc indiscutable que la forme

d'idiotie que nous avons décrite sous le nom d'idiotie avec

cachexie pachydermique est parfaitement constituée, qu'elle

a ses symptômes particuliers et une lésion anatomique

constante.

1 M. Régis a publié dans l'Encéphale (1888, p. GJi), un cas de crépi-

nisme sporadique, qu'il rapproche des cas de Curling, Hilton Fagge,

Flechter Beach, etc., cas dont « aucun auteur français n'aurait encore

parlé ». En cela, il se trompe complètement. Nous avons en effet

publié la traduction complète de leurs observations en 1886, dans les

Archives de Neurologie et dans notre Compte-rendu de lücilre, potcr 188G.

.NI. Régis met en doute la réalité de l'idiotie crélinoïde avec cachexie

pachydermique. « Quant au mçscoedème qu'on aurait observé chez les

enfants, j'avoue, dit-il, n'être pas bien sur qu'il ne s'agit pas là préci-

sément de crétinisme sporadique. » La proposition inverse est au con-

traire la vérité. Il suffit de se reporter nos observations personnelles et

il celles que nous avons reproduites pour en avoir la preuve. On

pourrait faire rentrer dans ce groupe, si elle ne présentait pas quelques

lacunes, une observation communiquée par M. Baillarger à la Société

médico-psychologique. (Annales méd¡"co-ps,ljch., 1857, p. 598.) Voir aussi :

Langdon Down. On some of llre mental affections of Childhood and

1-outh, etc. London, 1887, p. 82-88. Nous rappellerons que nos idées

sur l'idiotie avec cachexie pachydermique, ont été exposées avec détail

en 1885 dans le mémoire déposé par notre ami Bricon, pour le prix

Belhomme, ainsi que le constate d'ailleurs le rapport de M. Féré.

(Annales médico-psychologiques, 1880.)

DE LA CONSANGUINITÉ. 17

] I.

Note statistique sur le rôle de la consanguinité

dans l'étiologie de l'épilepsie, de l'hystérie, de

l'idiotie et de l'imbécillité ;

Par BOUIINEVILLE et COURBAIUEN.

Nous n'avons pas pour objet d'exposer l'état actuel

de la question si intéressante au point de vue social de

la Consanguinité. Nos lecteurs trouveront des indi-

cations suffisantes sur l'historique et la bibliographie à

l'article correspondant du Dictionnaire de médecine de

M.Jaccoudet du Dictionnaire des sciences médicales

de Dechambre. Nous nous proposons seulement de faire

connaître, dans cette courte note statistique, les résul-

tats du dépouillement de 926 observations recueillies

dans les services consacrés aux épileptiques, aux hysté-

riques et aux idiots, tant à Bicêtre qu'à la Salpêtrière.

Dans toutes ces observations, l'absence ou la présence

de parenté entre le père et la mère des malades a tou-

jours été exactement notée. Le tableau suivant donnera

une idée d'ensemble du résultat de nos recherches.

BOURNEVILLE, 1888. 2

18 ÉTIOLOGIE DE ^'EPILEPSIE. DE 1,'HY.TÉ[ilE ETC.

Tableau des Consanguinités.

DE LA CONSANGUINITÉ. 19

sanguinistes ou anticonsanguinistes s'accordant à re-

connaître que la parenté au delà du 6c degré n'a plus

d'effets nuisibles. - En nous contentant d'éliminer ces

trois dernières observations, nous ne trouvons plus que

3,7G 0/0 de mariages consanguins, chiffre qui diffère

peu de celui, 2 0/0, indiqué par Boudin pour la propor-

tion des mariages consanguins aux mariages entre

étrangers (Statistique générale de France de 1853 à

1859). Cet auteur a du reste évalué arbitrairement le

nombre des mariages entre cousins issus de germains.

Il n'est pas fait davantage mention de cette catégorie

de mariages dans la statistique produite par M. Lacas-

sagne d'après les relevés du ministère du Commerce

et des Travaux publics et portant sur 14 années. C'est

pour cette raison, que le chiffre de 1, 2 donné par cet au-

teur comme un maximum est trop faible.-Ces relevés,

établis d'après les actes de l'état civil jusqu'en 1873,

ne nous paraissent mériter du reste aucune confiance ;

ils doivent être incomplets, soit que l'officier de l'état

civil ne pose pas cette question, soit que les parents ne

tiennent pas à déclarer leur qualité pour échapper aux

dispenses exigées par l'Eglise, alors que l'état civil n'en

exige point même pour les mariages entre cousins ger-

mains. Ces chiffres doivent être, à notre avis, fortement

relevés; et la proportion, variable de 1,5 à 4,5 0/), in-

diquée parDarwin,dans sa statistique pour l'Angleterre

et pour les mariages entre cousins germains seulement,

se rapproche davantage delà vérité. - Voici, du reste

comment se décomposent nos 38 cas, d'après le degré

de parenté.

20 ÉTIOLOGIE DE L'ÉPILEPSIE, DE L'IDIOTIE, ETC.

mariages entre cousins issus de germains est presque

égal à celui des unions entre cousins germains.

Sans vouloir insister davantage sur ce point, nous

concluons qu'il faut accorder peu de foi aux statistiques

officielles qui ont cherché à établir la proportion des ma-

riages consanguins aux mariages entre étrangers. Cette

proportion doit être doublée par l'addition des mariages

entre cousins issus de germains, dont ces relevés ne

tiennent pas compte. Enfin, même en admettant ces

données, un si faible écart entre ce chiffre douteux et

la proportion de nos mariages consanguins nerveux ne

peut pas permettre d'affirmer l'efficacité de cette cause

dans la production des maladies nerveuses.

Ce n'est pas tout. Il nous a paru intéressant de recher-

cher dans les antécédents des malades issus de mariages

consanguins les autres causes capables de produire, à

l'exclusion de la consanguinité, les maladies nerveuses

dont nous nous occupons.

Nous avons été frappés de cette remarque, que ces

malades relèvent autant que les autres, sinon plus en-

core que les autres, de l'hérédité. En tenant compte delà

moindre influence étiologique ou d'une cause isolée, il

n'est pas un de nos malades chez lequel nous ne puis-

sions invoquer la succession d'une tare nerveuse ac-

quise ou héréditaire. Or, dans le tableau dressé par

M. Déjerine dans les mêmes conditions, 700 malades de

notre service de Bicêtre ou de la Salpêtrière, il en reste

en moyenne 31 0/0 pour lesquels pareille démonstration

n'a pu être faite. La gravité des antécédents relevés

étant du reste très inégale, nous avons cru devoir divi-

ser nos observations en deux séries.

A. Malades A antécédents héréditaires PEU

MARQUÉS.

1 Paring..., Catherine. Hystérie. Parents : cousins issus

de germains. Père alcoolique et colère. Début de la maladio à

3 ans.

DE LA CONSANGUINITÉ. 21 1

2° Kesle... Epilepsie. Parents : cousins issus de germains.

Père colère. Mère nerveuse. Début de la maladie à 40 ans.

3° Caille... Délire des persécutions. Parents : cousins

germains. Père alcoolique et syphilis douteuse. Début de la

maladie à 4 ans, à la suite d'un traumatisme.

4° Charin...Epilelsie et idiotie. Parents : cousins germains.

Père arthritique. Mère migraineuse, nerveuse et impression-

nable, fatigues de la mère durant la grossesse. L'enfant est

venu au monde avant terme et en état d'asphyxie (1).

5° Motte... Epilepsie tardive. Parents : cousins germains.

Père sujet à de violents accès de colère. Début de la maladie

à 36 ans.

fit Blac... Idiotie complète, symptomatique . Parents :

cousins issus de germains. Début de la maladie à la suite

d'une rougeole à 19 mois.

7° Boucher... Imbécillité symptomatique de nénizgo-ezcé-

phalite. Parents : cousins germains. Père colère et désé-

quilibré. Début congénital.

Il ne nous parait pas douteux que l'alcoolisme ou l'ir-

·itabilité extrême d'un des ascendants ne soit une cause

suffisante de maladie nerveuse. Bien des fois du moins,

dans d'autres cas, nous n'avons rien trouvé de plus.

Nous faisons des réserves pour le développement tardif

de l'épilepsie. Dans les observations II et V, à 40 ans et

à 36 ans, l'hérédité du mal comitial, dans ces deux cas,

est plus difficile à soutenir. Dans l'observation VI, il

n'existe aucun antécédent familial; mais la maladie peut

être imputable à la rougeole ( ? ) et ce n'est pas le seul

exemple que nous ayons d'une semblable étiologie; dans

l'observation V, les renseignements sont signalés comme

vagues, la personne qui les fournit n'ayant connu qu'in-

suffisamment la famille du malade.

Dans les observations suivantes, il existe des anté-

cédents marqués, non seulement chez le père et la mère,

mais aussi le plus souvent chez les grands -parents, les

oncles, tantes ou cousins des malades. L'existence d'an-

(11 L'asphyxie à la naissance nous paraît l'une des causes les

plus communes de l'idiotie.

22 ÉTIOLOGIE DE L'ÉPILEPSIE, DE L'HYSTÉHIE, ETC.

técédents chez les collatéraux, en l'absence de tout vice

nerveux chez les générateurs, prouve que la famille doit

être incriminée. Nous avons quelques exemples d'héré-

dité collatérale.

B. Malades A antécédents héréditaires très

MARQUÉS.

Ce groupe embrasse 28 cas :

1° I'arr... Epilepsie. Parents : cousins issus de germains.

Père apoplectique. Mère très nerveuse et colère. Grand-père

maternel apoplectique. Début de la maladie à 10 ans.

2° lliontcout... Epilepsie. Parents : cousins germains. Père

alcoolique et olie rhumatismale. Grand-père paternel alcoo-

lique mort du delirium lremens. Grand-oncle paternel alcoo-

lique. Deux cousins germains morts à Bicêtre. Grand-père

maternel aliéné. Une tante maternelle suicidée. Début de la

maladie à 17 ans.

30 Sabat... Epilepsie. Parents : cousins issus de germains.

Pore alcoolique, migraineux et colère. Mère migraineuse. Tante

maternelle hystérique. Début de la maladie à 1G ans.

4° Cousi..., L. Epilepsie. Consanguinité à un degré non

indiqué. Père très nerveux et suicidé ( ? ). Début de la maladie

18 ans.

5" Breha... Méningite. Parents : cousins germains. Grand'

mère paternelle hémiplégique. Petite-cousine (cousine ger-

maine de sa mère), folie puerpérale. Début congénital.

G Denoy... Epilepsie. Consanguinité à un degré non indi-

qué. Père alcoolique migraineux et colère. Grand-père pater-

nel apoplectique. Cousine germaine paternelle épileptique.

Mère migraineuse, impressionnable et nerveuse. Grand'mère

maternelle migraineuse. Début de la maladie it 4 ans.

7° Maupi... Manie. Parents : cousins issus de germains.

Père aliéné. Grand'mère paternelle, démence précoce (60 ans).

Début à 12 ans, à la suite d'une fièvre typhoïde.

8° Doubl... Imbécillité. Parents : cousins issus de germains.

Père colère et migraineux. Grand-père paternel alcoolique avec

accès de delirium tremcns. Petit-cousin du père mort idiot à

Bicêtre. Mère migraineuse. Grand - père maternel aliéné.

Bisaïeule maternelle, attaques d'hystérie. Un oncle maternel,

crises nerveuses de nature indéterminée. Maladie congénitale.

9° Eug... Epilepsie. Parents : cousins germains. Père rhu-

matisant. Cousin germain du père, sourd-muet. Grand'mère

DE LA CONSANGUINITÉ. 23

paternelle morte d'apoplexie. Mère migraineuse. Grand-père

maternel alcoolique et mort d'ivresse comateuse. Début de la

maladie à 14 ans.

10" Parina... Epilepsie. Parents : cousins issus de ger-

mains. Mère arthritique. Grand -père maternel alcoolique.

Grand'mère maternelle rhumatisante. Tante maternelle ner-'

veuse. Emotion forte de la mère au début de la grossesse..

Début de la maladie à 18 mois.

11° Brun... Epilepsie. Parents : cousins germains. Père

colère. Grand-père paternel alcoolique et mort d'apoplexie.

Grand'mère maternelle morte subitement. Oncle paternel para-

lytique, général. Mère très nerveuse, migraines et fièvre ty-

phoïde. Grand'mère maternelle, parésie des jambes. Tante

maternelle excentrique. Début de la maladie à 8 ans.

12" Jacq... Epilepsie et idiotie. Parents : cousins germains.

Père migraineux et impressionnable. Grand-père paternel rhu-

matisant. Mère nerveuse et migraineuse; attaques d'hystérie.

Grand-père maternel alcoolique. Grand'mère maternelle très

nerveuse. Bisaïeul maternel aliéné. Début congénital,

13" Thei... Epilepsie. Parents : cousins germains. Père,

fièvre typhoïde et alcoolisme ; accidents syncopaux. Grand-

père paternel alcoolique. Mère, accidonts cérébraux à 3 ou

4 ans, impressionnable ; palpitations nerveuses; rhumatisante.

Grand'mèro maternello asthmatique. Petite-cousine mater-

nelle démente. Potit-cousin maternel suicidé. Brutalités du

mari; rapports sexuols dans l'ivresse et syncopes de la mère

durant la grossesse. Début de la maladie à 8 mois.

- [/10 Gordi... Epilcpsie. Parents : cousins germains. Père,

convulsions. Mère, attaques d'hystérie. Grand'mère mater-

nelle aliénée. Début de la maladie à 2 ou 3 mois.

15° Trib... Epilepsie. Parents : cousins germains. Père sa-

turnin. Tante paternelle morte aliénée. Mère migraineuse et

accidents hystériformes. Cousin maternel condamné pourvoi.

Asphyxie à la naissance. Début congénital.

- 160 Idiotie. Parents : cousins issus de germains.

Père, enfant naturel. Oncle paternel imbécile. Mère, attaques

d'hystérie. Grand'mère maternelle très nerveuse. Cousine ma-

ternello traitée dans un asile. Huit oncles ou tantes morts de

convulsions. Ennuis et troubles intellectuels de la mère durant

la grossesse. Début de la maladie à 4 mois.

17° Fargi... Epilepsie et idiotie. Parents : cousins germains.

Père alcoolique et excentrique Mère, migraines, fièvre ty-

phoïde, attaques d'hystérie. Grand'père maternel suicidé.

Tante maternelle migraineuse. Cousin maternel paralysé.

Grancl'mèro maternelle, deux grossesses gémellaires. Crises

24 ÉTIOLOGIE DE L'ÉPILEPSIE, DE L'IDIOTIE, ETC.

nerveuses de la mère au septième mois de la grossesse. Début

de la maladie 14moins.

18' Ram... Idiotie symptomatique de mnizgo-encé2ha-

lite. Parents : cousins germains. Père migraineux et nerveux,

quelques excès alcooliques. Cousin paternel mort de convul-

sions. Mère migraineuse et nerveuse. Asphyxie de l'enfant à

la naissance. Début de la maladie iL 14 mois.

)9" Wath... Imbécillité. Parents : cousins germains. Père

impaludique. Grand-père paternel apoplectique. Grand-mère

paternelle alcoolique. Cousine germaine paralysée; une autre,

attaques d'hystérie. Mère, intelligence faible. Grand-père ma-

ternel apoplectiqne. Grand'mère maternelle alcoolique. Oncle

mort subitement. Tante aliénée. Début congénital.

20° Bul... Idiotie. Parents : cousins germains. Père, ma-

riage tardif, alcoolique et absinthique, suicidé. Grand'père pa-

ternel alcoolique. Mère attaques d'hystérie et migraines. Début

de la maladie à 7 mois.

21° Buvel... Idiotie. Parents : cousins germains. Mère mi-

graineuse. Grand'mère maternelle asthmatique. Oncle mater-

nel imbécile, cousin aliéné, cousine arriérée. Début de la ma-

ladie à 3 mois.

220 Berna... Imbécillité et excitation maniaque. Parents :

cousins germains. Père arthritique, colère et très impression-

nable. Grand'père paternel asthmatique. Grand-oncle paternel

imbécile. Oncle paternel suicidé. Tante paternelle démente.

Une cousine séquestrée dans un asile, une autre imbécile. Un

cousin suicidé. Mère, attaques d'hystérie. Oncle maternel im-

bécile. Début congénital de la maladie.

23° Sali... Epilepsie hémiplégique. Parents : cousins

issus de germains. Père migraineux. Grand'mère paternelle

nerveuse. Oncle paternel, méningite. Mère, attaques d'hys-

térie. Grand'mère maternelle nerveuse. Crise nerveuse de

la mère au 7e mois de la grossesse. Début congénital de la

maladie.

24° Lefèv... Idiotie symptomatique de méningo-encépha-

lite. Consanguinité, degré non indiqué. Père, caractère em-

porté, tentatives de suicide. Oncle paternel, convulsions. Cou-

sin paternel suicidé. Mère très nerveuse. Grand-père paternel

arriéré, idées de suicide et alcoolisme. Grand'mère alcoolique.

Oncle arriéré. Cousin germain imbécile. Grand oncle aliéné.

Crise nerveuse de la mère au troisième mois de la grossesse,

suivie d'une métrorrhagie. Arrêt de développement, rougeole

à 2 ans, méningite à 7 ans.

25° Duva... Imbécillité. Parents : cousins issus de germains.

Père très alcoolique et migraineux. Mère nerveuse, accidents

DE LA CONSANGUINITÉ. 25 ..

hystériformes. Tante maternelle paralysée et démente. Gros-

sesse accidentée. Début de la maladie à 6 mois.

26° Pigne... Méningite. Parents : cousins issus de ger-

mains. Père, convulsions dans l'enfance. Grand-père /paternel

alcoolique. Mère nerveuse. Début de la maladie à 14 ans.

27° Dol... Epilepsie idiopathique. Parents : cousins issus

de germains. Père eczémateux. Grand-père paternel arriéré.

Grand-père maternel alcoolique. Grand'tante (tante paternelle

du père et cousine issue de germain) épileptique. Début de la

maladie à 6 ans.

28° Faur... Idiotie symptomatique. Epilepsie. Parents :

cousins issus de germains. Père alcoolique. Grand'mère et

oncle paternels dartreux. Cousine germaine colère. Grand'père

maternel aliéné et alcoolique. Bisaieule maternelle, oncle et

tante paralysés. Début de la maladie à 4 mois.

On le voit donc, si on tient compte de la plus banale

des causes pouvant produire l' hérédité névro]Jathique,

pas un de nos malades n'échapperait à cette présomption

que c'est une victime de l'hérédité ; si ce n'est qu'une

présomption pour les malades de notre première série,

c'est une certitude au contraire pour ceux de la seconde.

Dans les observations de cette dernière, en effet, nous

avons relevé des antécédents héréditaires graves, tant

chez les ascendants directs ou éloignés que chez les

collatéraux. Nous ne trouvons qu'un exemple d'héré-

dité directe, et c'est l'observation VII de la seconde

série qui nous le fournit. Dans les observations de

Paring... et Bail... ) la mère est signalée comme très ner-

veuse, sans qu'il s'agisse sans doute des accidents con-

vulsifs de l'hystérie.

Au contraire, nous rencontrons à chaque instant les

divers états qui, en retentissant sur le système nerveux

des générateurs, peuvent influencer l'état mental du

produit. C'est ainsi que nous avons relevé chez le père

la colère, l'alcoolisme, l'a.rth·itisne, 1'ï«i)-tpaliidisite,

la migraine, le suicide, le saturnisme, l'apoplexie;

chez la mère, l'impressionnabilité, le nervosisme, les

attaques d'hystérie, la chorée, la migraine, les acci-

26 ÉTIOLOGIE DE L'ÉPILEPSIE. DE L'HYSTÉRIE, ETC.

dents et fatigues de la grossesse, les rapports sexuels

dans l'ivresse. L'hérédité collatérale s'affirme chez les

autres parents par ces mêmes accidents, l'asthme, les

convulsions,l'aliénation -n-tei-ttaleil'idiotiel'épilepsie,

l'hystérie, le suicide, l'apoplexie, la démence. Il n'est

pas jusqu'aux antécédents personnels du malade, son ?

france durant la vie utérine, asphyxie ci. la naissance,

maladies infectieuses qui ne puissent être invoqués

dans quelques cas comme cause de la maladie

Ce qui nous parait évident, c'est qu'il n'est pas besoin

de faire appel à la consanguinité, c'est-à-dire aux

alliances entre parents sains pour expliquer les cas

d'épilepsie, d'idiotie et d'imbécillité que nous venons

d'examiner. Ici, il s'agit, comme dans la plupart des cas

du reste, de descendants tarés au point de vue nerveux,

d'héréditaires, de victimes de l'hérédité névropa-

thique.

Loin de nous, du reste, l'idée do dissimuler ou d'atté-

nuer les effets de la consanguinité morbide. Nous

croyons, au contraire, que la transmission des défec-

tuosités nerveuses d'un des générateurs au foetus est

d'autant plus sûre qu'il s'y joint des dispositions sem-

blables chez l'autre procréateur.

L'état nerveux du foetus, qui dépend sans doute du

conflit entre les prédispositions héréditaires identiques

des deux parents et les modifications acquises indivi-

duelles, et par conséquent différentes de chacun d'eux,

sera plus sûrement défectueux. L'atavisme de la fa-

mille est prédominant dans ces cas. Les 35 malades

dont nous avons résumé l'observation plus haut, ne

sont pas, du reste, les seuls produits défectueux do nos

alliances consanguines. Nous devons y ajouter 117 frères

ou soeurs et 9 fausses couches ; sur ce nombre, 32 ont

présenté les accidents suivants :

DE LA CONSANGUINITÉ. 27

28 ÉPILEPSIE.

III.

Epilepsie et asymétrie fronto-faciale ;

Par BOURNBVILLE et mut S0T.1.TEIt.

Il y a longtemps qu'on a remarqué la fréquence de

l'asymétrie faciale chez les épileptiques, et M. Delasiauvc,

à la Salpêtrière, avait soin de la noter dans ses observa-

tions bien avant que Lasègue n 'indiquât cette particularité

comme un signe distinctif de l'épilepsie idiopathique,

qui même d'après lui en était la conséquence. C'est

en 1877 que Lasègue formula cette nouvelle théorie

pathogénique de l'épilepsie dite essentielle. Il admet

tout d'abord, d'après son expérience personnelle et pour

l'avoir vérifié sur des centaines d'épileptiques, que tous

les épileptiques idiopathiques présentent de l'asymétrie

fronio-faciale. Comme d'autre part cette asymétrie pro-

vient d'un vice dans la consolidation définitive des os

de la base du crâne, laquelle se produit de dix à dix-

huit ans, il rapproche ces deux faits, et voit dans leur

coïncidence un rapport de cause à effet, l'asymétrie

fronto-faciale entraînant l'épilepsie essentielle. Cette

idée de faire d'une maladie, dont la nature nous échap-

pait et que par ignorance on qualifiait d'idiopathique,

une affection symptomatique d'une malformation du

système osseux du crâne était séduisante. L'épilepsie

essentielle disparaissait du cadre nosologique et il

n'y avait plus dès lors que des épilepsies symptomati-

ques. Malheureusement cette conception n'éclaire en

rien le problème de l'épilepsie idiopathique, et en ad-

mettant même que la malformation crânienne soit la

ASYMÉTRIE FRONTO-FACIALE. 29

véritable cause première de l'épilepsie, le mécanisme

par lequel elle agit pour la produire ne nous en échappe

pas moins complètement. Lasègue, du reste, s'est bien

gardé d'aller au fond de sa théorie et d'en donner

l'explication.

Laissons donc de côté la question de pathogénie pour

ne nous occuper que du fait clinique, l'existence de

l'asymétrie fronto-faciale chez les épileptiques idiopa-

thiques. Quoique venant d'un homme aussi distingué

que Lasègue, ce caractère de l'épilepsie essentielle n'at-

tira pas une grande attention et fut admis ou rejeté

sans contrôle. Un seul auteur, M.Garel, en 1878, entre-

prit des recherches dans ce sens sur un assez grand

nombre d'épileptiques, et en même temps sur un nom-

dre égal d'individus normaux. Les résultats auxquels il

est arrivé semblent devoir lui permettre de rejeter l'opi-

nion de Lasègue. Mais deux causes d'erreur entachent

complètement ses conclusions. D'une part, en effet, les

épileptiques qu'il a examinés ne sont pas que des idio-

pathiques, et d'autre part il semble vouloir faire dire

à Lasègue ce qu'il n'a jamais prétendu : que tous les

asymétriques étaient épileptiques. Lasègue s'est con-

tenté de dire que tous les épileptiques idiopathiques

étaient asymétriques, mais nous ne pensons pas qu'il

ait jamais voulu renverser la proposition.

Mais les assertions de Lasègue aussi bien que celles

de M. Gard ne sauraient juger définitivement la question,

car tous deux se sont servis pour leurs recherches de

procédés défectueux et insuffisants, et Lasègue en

convient lui-même en regrettant de ne pouvoir appli-

quer la méthode graphique à cette étude. Il ne se ser-

vait, en effet, pour apprécier l'asymétrie que de la vue

et du toucher, et dans ces conditions de nombreuses

causes d'erreur peuvent se glisser quand il s'agit sur-

tout d'asymétries peu accusées. Nous avons au contraire

cherché à appliquer dans ces nouvelles recherches la

méthode des graphiques.

30 EPILEPSIE.

C'est dans ce but que l'un de nous, tant à la Salpêtrière

qu'à Bicêtre, a pris l'habitude de faire mouler les

bustes de tous les malades décèdes. On a ainsi une

grande collection de bustes d'épilcptiques sur lesquels

il est toujours facile de faire porter ses recherches et ses

vérifications. A cette manière de faire il y a deux avan-

tages considérables. Le premier et le plus important,

c'est que l'épileptique qu'on étudie ayant été autopsié

on est certain du diagnostic d'épilcpsic non symptoma-

tique, ce qui est indispensable, et qu'on ne saurait affir-

mer cependant sans preuve anatomique. Le second avan-

tage, c'est qu'on peut appliquer sur ces moulages, qui

reproduisent fidèlement la nature, des appareils qu'on

ne pourrait employer avec des individus vivants. C'est

sur trente bustes d'épileptiques idiopathiques que nous

avons entrepris de vérifier l'idée de Lasègue, sans pré-

vention aucune d'ailleurs dans un sens ou dans l'autre.

Ce sont les résultats de ces recherches commencées

l'an dernier, qui viennent d'être exposés dans la thèse

récente de M. le Dr Pison (1), faite sous notre direction

à l'hospice de Bicêtre.

L'appareil que nous avons employé a été imaginé par

l'un de nous, les divers crâniomètres ou stéréographes

habituellement employés ne pouvant s'appliquer dans s

les conditions où nous opérions. Ce petit appareil, du

reste fort simple, se compose d'une planchette horizon-

tale Jixée sur quatre pieds et percée d'un trou circulaire

de 30 centimètres de diamètre, pour permettre à la tête

du buste de passer. Au-dessous se trouve un piédestal

pouvant à volonté s'élever ou s'abaisser, sur lequel on

place le buste de façon à faire passer le plan de la plan-

chette à des niveaux différents de la tête. Pour obtenir

maintenant la projection d'un plan passant par un

(1) Pison. -- De l'asymétrie fronto-faciale dans l'épilepsie.

Th., Paris, 1888. `

ASYMÉTRIE FRONTO-FACIALE. 31

niveau quelconque du crâne ou de la face, voici com-

ment on procède. Sur la planchette se trouve tracé un

cercle divisé en un grand nombre de rayons également

inscrits et de plus numérotés. Le cercle est représenté

par une rainure dans laquelle se meut un curseur qui

supporte une tige métallique divisée en millimètres

pouvant glisser en restant toujours parallèle aux rayons

du cercle. On peut donc amener successivement le cur-

seur sur chaque rayon numéroté de la planchette, puis

on fait glisser la tige jusqu'au contact avec le crâne ou

la face, On lit alors le nombre de millimètres obtenus

entre le point de contact et le cercle. Il suffit alors do

reporter cette mesure sur une feuille de papier où se

trouve tracé un cercle identique avec des rayons numé-

rotés comme sur la planchette. En réunissant par une

ligne continue tous les points ainsi obtenus sur les dif-

férents rayons, on obtient une figure qui est la projec-

tion exacte du crâne ou de la face au niveau où on a

placé la planchette. Pour les recherches actuelles, il

suffisait de prendre les graphiques du front et de la

face seulement. Au front nous avons fait prendre les

mensurations au niveau des bosses frontales, à 25 milli-

mètres environ au-dessus de l'arcade sourcilière, et

pour la face au niveau des saillies malaires. Dans ce

dernier cas, le plan de la planchette passait au niveau

même du conduit auditif externe, et le diamètre trans-

versal du cercle par les deux conduits auditifs ; tandis

que dans le premier cas il réunissait les deux perpendi-

culaires passant par les conduits auditifs. De cette façon

les différents graphiques sont tous comparables entre

eux, les points de repère étant identiques.

Nous ne saurions ici donner en détail les particula-

rités que cette méthode a mises en relief et nous ren-

voyons à la thèse de M. le Dr Pison, mais nous voulons

attirer seulement l'attention sur quelques points inté-

ressants au point de vue de l'asymétrie en général et

32 EPILEPSIE.

surtout de son rapport pathogénique avec l'épilepsie

essentielle.

Comme Lasègue, nous avons été frappés de la fré-

l'i. ? 0.

ASYMÉTRIE FRONTO-FACIALE. 33

BOURNE'11,Llt 1888. 3

FIg.2\ 1

34 EPILEPSIE.

Fig, 22,

ASYMÉTRIE rnONTO-rACfALE. 35

Fil}. 2 : 1.

36 EPILEPSIE.

quence excessive avec laquelle se montre l'asymétrie

fronto-faciale chez les épileptiques idiopathiques. Sur

30 cas, il n'y en a qu'un seul dans lequel il n'y ait pas

d'asymétrie véritable, le front seul présentant une

saillie un peu plus prononcée à droite qu'à gauche.

Dans tous les autres cas, au contraire, l'asymétrie

existe, soit frontale, soit faciale, soit fronto-faciale, en-

traînant avec elle très fréquemment de l'asymétrie du

nez, de la bouche, du menton. L'observation de Lasè-

gue, au point de vue clinique, nous parait donc exacte.

Mais ce qui, dès le début, avait vivement attiré notre

attention, c'est ce fait que de jeunes épileptiques idio-

pathiques, décédés bien avant la période de consolidation

de la base du crâne, présentaient déjà de l'asymétrie et

souvent à un degré très marqué. A moins d'admettre

que la consolidation définitive du crâne se fait beaucoup

plus tôt que de 10 à 20 ans, on est bien obligé de cher-

cher une autre cause à l'asymétrie, qu'un vice de con-

solidation de la base. Ce qui semble le plus vraisem-

blable à une époque où tout l'organisme, et surtout

le orâne, se développe, c'est qu'il y a eu arrêt de

développement. Mais reste à savoir si c'est l'arrêt de

développement du crâne qui réagit sur le cerveau et y

détermine l'épilepsie, ou si c'est au contraire le cer-

veau malade, dont les modifications se traduisent par

l'épilepsie, qui retentit sur le développement du crâne

et lui imprime un ralentissement ou un arrêt. Il nous

semble bien plus naturel d'admettre que c'est le

crâne, dont le développement est soumis à celui du

cerveau, et qui n'a pas lieu de s'accroitre si l'organe

qu'il est destiné à contenir cesse d'augmenter. Pour

nous donc, l'asymétrie crânienne n'est pas la cause de

l'épilepsie idiopathique. Elle en est au contraire la

conséquence. Elle lui est consécutive, ou tout au plus

concomitante, mais ne la précède jamais.

Toutes deux, du reste, relèvent peut-être d'une même

cause, l'arrêt ou l'irrégularité dans le développement

ASYMÉTRIE FRONTO-FACIALE. 37

concomitant du cerveau et du crâne. Ce qui parait

rendre cette idée plus probable, c'est que l'on observe

très fréquemment une inégalité de poids entre les hémis-

phères cérébraux, ce qui montre bien cet arrêt de dé-

veloppement. Un autre fait aurait une grande valeur

s'il pouvait être constaté exactement, c'est de savoir le

rapport des convulsions épileptiques, au point de vue

de leur siège ou de leur intensité plus grande dans un

côté du corps, avec l'hémisphère ainsi atteint.ll2alheureu-

sement, cette constatation est très difficile à faire, le

médecin ne se trouvant que rarement là au moment des

accès épileptiques.

Dans les quelques cas où la chose a été notée d'une

façon précise, nous n'avons constaté aucun rapport

constant. Nous ne saurions cependant rien affirmer

de définitif à cet égard, le nombre de nos cas étant trop

restreint.

Quoi qu'il en soit de la relation pathogénique entre

l'asymétrie fronto-faciale et l'épilepsie, il n'en reste pas

moins un fait clinique intéressant, c'est que, dans l'im-

mense majorité des cas, les épileptiques idiopathiques

présentent de l'asymétrie fronto-faciale. Cette notion

peut donc, dans une certaine mesure, aider au diagnostic

souvent délicat de l'épilepsie idiopathique et de l'épi-

lepsie symptomatique, lorsque surtout l'épilepsie date

de l'enfance et qu'il n'y a pas de signes manifestes de

sclérose ou d'atrophie cérébrales. D'une façon géné-

rale, nous dirons donc que lorsqu'on se trouve en pré-

sence d'une épilepsie survenue avant 20 ans, sans

traumatisme, on a les plus grandes chances pour avoir

affaire à de l'épilepsie essentielle, ce qui n'est pas indif-

férent pour le pronostic, sinon pour le traitement.

Le graphique représenté sur la figure 20 est celui

d'un malade dont voici, en quelques mots, l'histoire :

Lefèv..., âgé de 24 ans, épilepsie idiopalhiq1te.- Sa grand'-

mère maternelle était alcoolique ; un cousin germain mater-

38 ASYMÉTRIE FItoNTO-FACIAL1 : .

nel est alcoolique et aliéné. Quant à lui, il a eu des convul-

sions dans l'enfance, et son premier accès à G ans, sans cause

connue. Il n'y avait pas de prédominance des convulsions

dans un des côtés du corps. A l'autopsie, pas de lésions en

foyer, mais une différence de 70 grammes entre les deux hé-

misphères cérébraux, à l'avantage de l'hémisphère droit.

L'observation résumée du malade dont le graphique

est représenté dans la figure 21, est la suivante :

Plous..., 41 ans, épilepsie idiopathique. Grand'mère

maternelle, attaques de nerf ; frère mort à 3 ans de fièvre

cérébrale avec convulsions ; un neveu idiot. Quant lui,

il a parlé et marché tard. Crises de colère jusqu'à 7 ans ; ona-

nisme ; à 13 ans, premier accès à la suite de la peur de la

foudre qui tomba près de lui; pas de prédominance des accès

d'un côté; accès fréquents do 13 à 18 ans. Suppression des

accès de 18 à 20 ans. Rien à l'autopsie de l'encéphale.

La figure 22 représente le graphique du nommé Doud...

Epilepsie 'idiopathique, 15 ans. Père, paludéen ; tante

maternelle, épileptique; grand' tante, paraplégique. Dans ses

antéoédents personnels, on trouve : premières convulsions

à 5 mois, jusqu'à 2 ans. Premier accès à 5 ans sans cause

connue. Etat de mal à 14 ans ; nouvel état do mal et mort à

15 ans; pas de lésions en foyer.

La figure 23, enfin, est le graphique du malade dont

voici l'histoire résumée :

De Bus..., 24 ans, épilepsie idiopathique. Père, diabétique;

mère, hystérique ; deux cousins germains paternels épilep-

tiques. Vertiges à 18 mois; premier accès à 1; ans ; pyromanie

et kleptomanie ; état de mal à 22 ans ; méningite guérie ; mort

dans un accès; pas de prédominance dos secousses d'un côté;

pas de lésions en foyer de l'encéphale ; hémisphère gauche

pesant 22 grammes de plus que le droit, et plus long que lui

d'un centimètre.

EPILEPSIE IDIOPATHIQUE. 3D

IV

Epilepsie idiopathique. Bromure de nickel ;

Par BOURNEVILLE.

L'observation ci-après nous a paru présenter plu-

sieurs particularités intéressantes susceptibles de

mériter l'attention de nos lecteurs. Elle nous fournira

d'ailleurs l'occasion de dire un mot de l'emploi du

Bromure de nickel.

SOMMAIRE. Grand'mère paternelle alcoolique. Mère

nerveuse. Grand'père maternel mort d'une affection

nerveuse. - Grand'mère maternelle hystérique. - Bisaïeul

maternel mort des suites d'une attaque d'apoplexie.

Oncle maternel alcoolique. Soeur morte d'accidents cé-

rébraux. Développement physique et intellectuel régu-

lier jusqu'il treize ans. - A treize ans, peur. Début de

l'épilepsie le lendemain. - Marche des accès ; troubles in-

tellectuels et propulsion. - Description du malade, des

accès et des troubles intellectuels qu'ils amènent à leur

suite. Plaie du cuir chevelu de 13 centimètres sur 9 :

greffes èpidermiques. Accès sériels. - Etat de mat. -

Agitation maniaque post-épileptique. Bromure de

nickel. Mort par asphyxie dans un accès. Autopsie :

Ecchymoses et congestions viscérales. Description des

circonvolutions; - deux noyaux de sclérose dans l'hé-

misphère gauche.

Bon..., Edouard, né à Paris, le 3 septembre 1870, est entré à

Bicêtre dans notre service le 18 août 1883.

Renseignements fournis par sa mère (22 août 1883).

Père, 49 ans, tourneur en bois, grand, fort, bien portant, fume

très peu, sobre, pas de migraines, mais assez souvent dou-

leurs de tête ; un peu violent, marié à 25 ans. On assure qu'il

n'a jamais offert d'indices do maladies vénériennes : « Nous

40 EPILEPSIE IDIOPATHIQUE : ANTÉCÉDENTS.

nous connaissons depuis l'âge de 14 anis : c'est un garçbn très-

régulier. » On ne sait s'il a eu des convulsions dans l'enfance.

Père, anglais, cocher de maison, écrasé par sa voiture ; sobre.

Mère, morte à 73 ans, il y a 6 mois, on ne sait de quoi,

faisait des excès de boissons. Pas de détails sur les grands-

parents.- Un frère, marin, et deux soeurs sont bien portants;

ils n'ont pas d'enfants. Ni aliénés, ni épileptiques, ni apo-

plectiques, ni paralytiques, ni difformes, ni suicidés, ni cri-

minels dans la famille qui est anglaise.

Mère, 46 ans, plumassière, bien portante, petite, brune, assez

intelligente; pas de convulsions dans l'enfance; réglée à 14 ans,

l'est encore; elle est assez nerveuse, n'a pas d'attaques de

nerfs ni de migraines, mais est sujette à des névralgies

céphaliques depuis 4 à 5 ans ; pas de maladies de peau ; mariée

à 22 ans ; aucune maladie depuis le mariage. [Père, mort

en 8 jours d'une affection cérébrale, à 73 ans; tourneur en

cuivre ; n'avait pas eu le choléra. Mère morte à 34 ans, pro-

bablement de phthisie, après une couche ; elle était sujette à

des attaques de nerfs consécutives à une peur (20 ans), sur-

venant après contrariétés; mariée à 21 ans; les attaques au-

raient continué après son mariage. - Grand-père paternel

mort vers 30 ans, on ne sait de quoi.- Grand'mère paternelle

morte à 80 ans; elle était en enfance. - Grand-père maternel

mort à 69 ans des suites d'une attaque de paralysie. -

Grand'mère maternelle, pas de détails. Un frère est mort

phthisique à 25 ans, à la suite d'excès de tous genres. Deux

soeurs, une morte d'une chute du haut des fortifications,

l'autre est bien portante et a eu 14 enfants, dont neuf sont

morts jeunes en nourrice, on ne sait de quoi. Ni aliénés, ni

épileptiques, etc.] Pas de consanguinité. (Père né à Bordeaux

de parents anglais; mère, de Paris.) Inégalité d'âge de

3 ans. (La mère du malade ne vit plus avec son mari depuis huit

ans. Bien qu'elle n'ait pas «quitté la ligne droite, » il l'a aban-

donnée pour retourner en Angleterre ; elle croit qu'il vit avec

une autre femme. Pendant trois ans, il lui a envoyé régulière-

ment de l'argent; elle ne reçoit plus rien depuis cinq ans.)

Huit enfants : 10 Garçon né à 8 mois, mort à 4(i jours; pas

de convulsions. 2° Fille née à 7 mois, morte au bout d'une

heure; pas de convulsions. 3° Fille née à terme, morte en

naissant. 4° Fille, morte à 28 mois, d'accidents cérébraux

comateux, qui ont duré 8 jours ; pas de convulsions. 5° Gar-

çon, 17 ans, bien portant, intelligence ordinaire; violent; pas

de convulsions. 6° Fille morte à 1S ans, cette année, de la

fièvre typhoïde, à l'hôpital Beaujon ; pas de convulsions, pas

d'attaques ; intelligente. 7° Garçon mort d'une cholérino à

DÉBUT DES ACCÈS. 41

7 mois; était né avant terme ; n'aurait pas eu de convulsions.

8° Notre malade. A la conception, les deux époux vivaient en

bonne intelligence; jamais de discussions (1). Grossesse bonne;

pas de coups, de chutes, de constriction, d'émotions, d'alcoo-

lisme, etc. Accouchement àterme, naturel, sans chloroforme.

A la naissance, très bel enfant, venu au monde sans accidents

ni asphyxie. Elevé au sein en nourrice ; sevré à 10 mois. Il a

marché et commencé à parler vers 10 mois; à 20 mois, il par-

lait librement. Il n'a été propre qu'à 20 mois, ce qu'on

attribue « à ce que la nourrice lui laissait faire tout ce qu'il

voulait. »

Jusqu'en avril 1883, il s'est bien porté, allait à l'école, où il

apprenait très bien; il savait lire, écrire, compter, mais n'avait

que peu de dispositions pour l'arithmétique et les quatre rè-

gles ; au contraire, il avait bonne mémoire et avait du goût

pour l'histoire, la grammaire et les chansons. Il manquait ra-

rement l'école et n'avait fait que deux ou trois fois l'école

buissonnière. Il était en outre affectueux, obéissant et ne va-

gabondait point.-Pas d'onanisme. Pas de cauchemars, ni d'é-

tourdissements, pas de céphalalgie, ni de secousses. L'en-

fant n'était pas très hardi.

En avril 1883, en allant faire une commission, il a eu peur

d'être écrasé et a été si saisi qu'il ne pouvait plus faire un mou-

vement pour se garer. Il n'a pourtant pas perdu connaissance.

Il a eu cette frayeur le jeudi. Le premier accès est survenu

dans la nuit du vendredi au samedi. Il s'était couché comme

d'habitude. A deux heures du matin, sa mère fut réveillée par

le bruit que faisait son enfant en respirant. Elle se leva et le

trouva raide «se tirant les mains et les pieds, » sans se débattre.

L'accès a duré peut-être dix minutes. L'enfant est retombé

dans le sommeil sans se réveiller. Il n'avait pas d'écume, n'a-

vait pas uriné, mais il s'était mordu la langue. Le lendemain,

au réveil, il était triste, et n'avait aucune conscience de ce

qui s'était passé.

Le second accès, survenu dans la nuit du dimanche au lundi,

a été semblable au premier. Mais le lendemain matin, il était

(1) Depuis bien des années, tant à la Salpêtrière qu'à Bicêtre,

nous avons toujours suivi la même méthode au point de vue des

renseignements si importants, concernant la conception, la gros-

sesse, l'accouchement et l'état de l'enfant à la naissance

(asphyxie, etc.). Il y aurait dès maintenant, même en ne se ser-

vant que des observations que nous avons publiées, les éléments

nécessaires à une étude de cette partie de l'étiologie des diverses

formes d'idiotie.

42 z2 DESCRIPTION DU MALADE.

« fou ». Il voulait tout briser et faisait le simulacre de se jeter

par la fenêtre. Dans la journée, pendant une absence qu'a faite

sa mère pour aller chercher un aide, il a attaché une corde,

s'est laissé glisser et a fait une chute sans aucun mal.

Les jours suivants, il avait repris son état normal. A partir

de là, jusqu'au milieu du mois de mai, accès presque toutes les

nuits, et, pendant le jour, absences fréquentes et impulsions :

« Il entrait dans la chambre et ne pouvait s'empêcher de cou-

ril', mais cela ne durait qu'une seconde. » - Traitement par le

bromure de potassium.

Pendant le mois de mai, il n'a plus eu d'accès ; mais les ab-

sences ont persisté; il est retourné à l'école. En juin, les crises

ont reparu avec plus d'intensité; il en avait jusqu'à six pendant

le jour et huit pendant la nuit. Il écumait, se mordait la lan-

gue et urinait dans son lit. Après l'accès, qui était de courte

durée, « il ne se souvenait do rien » et les jambes restaient,

pour peu de temps du reste, plus faibles. Vers le milieu du mois

de juin, état qualifié parla mère de « méningite. » Il ne sentait

plus rien, ne se plaignait de rien, avait une très forte fièvre et

restait comme anéanti. Cet état, traité par un vésicatoire sur

la tête, n'a duré que trois ou quatre jours.

Après un intervalle très bon d'un mois, retour des accès avec

la même fréquence et la môme intensité qu'en juin. Le 10 août,

retour des troubles intellectuels : « Il montait sur les toits et

allait nettoyer les gouttières (1). » Pendant la nuit, fréquents

accès qui ne le réveillaient pas. L'intelligence et la mémoire n'au-

raient pas diminué, cependant il ne savait plus écrire. Les per-

sonnes de la maison habitée par la mère l'ont obligée à le

mettre à l'Asile clinique (Sainte-Anne) où il est entré le 14 août.

On ne sait rien de son séjour dans cet Asile, si ce n'est qu'il y

aurait eu un grand nombre d'accès. Varioloïclc iL 9 ans.

Quelques ascarides vers 3 ans. Aucune autre maladie.

Etat actuel. Taille, te32; poids, 27 kil. 10.

Tête. Crâne symétrique. Bosses pariétales prononcées.

Bosse occipitale saillante, surmontée d'un léger méplat. Les

cheveux sont rares et commencent à repousser. Sur la région

moyenne fronto-pariétale, plaie irrégulière en voie do cicatri-

sation, de 13 centimètres d'avant en arrière, sur dans le sens

transversal ; elle est recouverte do bourgeons charnus assez

saillants. Front moyen; bosses frontales peu développées; nez

droit, menton rond, arcades sourcilières assez saillantes, cils

(1) Ces impulsions à grimper se rencontrent également chez les

hystériques, les idiots et les instables. Nous les avons souvent

notées dans nos observations.

DESCRIPTION DU MALADE. 43

longs, châtains, blépharite ciliaire chronique, iris gris bleuâtre,

lèvres et bouche normales. Douze dents bien rangées sur la

mâchoire supérieure, dont deux canines de lait. Treize dents

permanentes à la mâchoire inférieure. La deuxième petite mo-

laire droite a été arrachée. L'articulation do la mâchoire infé-

rieure est normale, ainsi que la voûte palatine. Les gencives

sont en bon état. Oreilles bien ourlées, surtout à leur partie

supérieure. Le lobule est bien développé, non adhérent.

44 MARCHE DE LA MALADIE.

22 août. Accès nombreux hier soir, dans la nuit et ce matin.

Ce matin le malade ne répond pas aux questions ; il esquisse

à peine un sourire ; la commissure labiale gauche semble alors

un peu tirée en haut et s'écarte unpeu plus de la ligne médiane.

La plaie du cuir chevelu, signalée plus haut, se couvre de

bourgeons exubérants qu'on est obligé de réprimer par la

cautérisation.

28 août. Les accès ont cessé depuis trois ou quatre jours,

mais il persiste un peu d'agitation maniaque. Chloral 1 gr. 50.

La plaie de tête commence à se cicatriser. Greffe épidermique.

Conjonctivite oculo-palpébrale double, surtout marquée à

gauche avec léger chémosis. Scarifications légères de la con-

jonctive et application de collyre au sulfate de zinc.

31 août et 1er septembre. La première greffe épidermique

parait avoir pris, on en applique une seconde. L'enfant est

moins agité et commence à comprendre ce qu'on lui dit, mais

dans la nuit il a enlevé son pansement et avec lui les deux

greffes.

4 septembre. Retour à l'état normal. L'enfant est tout à fait

calme; il répond convenablement à toutes les questions, mange

avec appétit, dort bien. La conjonctivite persiste mais peu in-

tense. Au bout de quelque jours, B... se lève, redevient très

gai et n'a plus d'accès.

15 octobre. Depuis quatre jours, nouvelle série d'accès. Les

questions restent sans réponse; légère excitation; le malade

cherche à mordre quand on approche la main de son visage.

Langue blanche ; sécrétion muco-purulente des conjonctives

La connaissance ne revenant plus entre les accès, l'état de

mal est constitué. Du 10 au 15 juillet inclusivement, 60 accès.

La température rectale oscille pour cette période, autour

de 38°, les 10, 11, 12 et 13 ; elle atteint 3J°,3 le 14 au soir, et se

maintient à 40° environ les 15, 16 et 17. Le 18 au matin, elle

est encore à 40°,G, le soir à 39°,3 et à partir de là elle continue

à redescendre (voir fig. 25).

17 octobre. Les accès ont diminué, il n'y en a eu que deux

hier. B... a parlé un peu cette nuit et crié. Aujourd'hui, il

est immobile et on ne peut en tirer aucune réponse. Le 18,

2 accès ; le 19, 3. La plaie est complètement cicatrisée.

22 octobre. Pas d'accès aujourd'hui, ni le 20 et le 21. L'en-

fant est très calme. Suppression du bromure de potassium.

25 octobre. L'enfant se lève.

27 novembre. B... va à la petite école ; il ne gâte pas, sait se

laver et se vêtir lui-même; il peut cirer ses souliers, mais

avec beaucoup de lenteur. Il mange proprement, en se servant

de la cuiller, de la fourchette et du couteau. Il parle difficile-

BROMURE DE NICKEL. 45

ment. Lecture courante. Ecriture ordinaire, mais parfois

illisible. Il fait les trois premières opérations de calcul assez

exactement, connaît quelques-uns des principaux faits de l'his-

toire et a quelques notions de géographie. Mémoire assez

bonne. Caractère doux.

9 décembre. Nouvelle série d'accès. Retour à l'infirmerie.

Vacciné sans succès le 17 décembre au bras droit avec du

vaccin de génisse.

1884. Janvier. Revient à la petite école dans les premiers

jours de ce mois. On est frappé du changement de son carac-

tere. Il est violent et ne supporte pas que ses camarades crient

autour de lui; il se dispute souvent et cherche à mordre.

4 mars. Série d'accès qui continue jusqu'au 18 mars (du 14

mars au 18 mars, 98 accès). - '27 mai. Autre série.

15 juin. Agitation à la suite des accès. L'enfant ne parle pas,

mais remue constamment dans son lit, au point d'avoir sur les

membres inférieurs, surtout aux genoux, des excoriations et

des contusions. Il se lève continuellement et cherche à quitter

son lit sitôt qu'on lui a enlevé ses attaches. Purgatifs.

17 juin. Même état. Bains d'une heure, etc.

18 juin. L'agitation se calme.

21 juin. Le malade est tranquille. Ecoulement visqueux, em-

pesant le linge, au niveau de la plaie du cuir chevelu, 'guérie

depuis longtemps.

28 juin. L'enfant est calme et commence à parler, à manger

depuis quelques jours.

16 juillet. Aspect hébété. Regard vague et sans expression.

Pupilles dilatées, égales, contractiles. Pas de tremblement delà

langue ni des lèvres. Parole très lente. Conceptions lentes.

Affaiblissement des jambes plus prononcé à la suite des séries

d'accès.

Description fl'L172<'ICCS.-8... s'affaisse lentement en arrière.

Il est à demi-assis, le tronc appuyé contre l'infirmier, ratatiné,

les jambes fléchies, les bras dans la demi-flexion. La face,

d'abord pâle, ruugit et regarde 11 droite. Les pupilles qu'on

venait d'examiner se sont dilatées et sont devenues moitié

plus grandes. Au bout d'une demi-minute environ, retour de

la coloration normale de la face. Regard étonné. On le lève ; il

a de la peine à se tenir debout. Les pupilles ont repris les di-

mensions qu'elles avaient au début de l'examen. Les accès

ont diminué en nombre dans les mois de juin et juillet.

Août. - Poids 29 kilog. 50. Taille 1 m. 33.

30 août. Bromure de nickel, 2 cuillerées jusqu'au 10 sep-

tembre ; 3 cuillerées jusqu'à la lin de septembre.

Il () MARCHE DE LA MALADIE ; MORT.

17 novembre. Onanisme après ses accès. Engourdissement

intellectuel et affaiblissement physique. On est obligé de le

laisser au lit parce qu'il ne peut se tenir sur les jambes. Il no

peut marcher que soutenu des doux côtés, qui paraissent égale-

ment faibles : pas de tremblement de la langue. La parole est

très libre, mais on a beaucoup de peine à obtenir quelques

réponses. -

1885. Il descend de l'infirmerie vers le 20 décembre pour y

remonter le 10 janvier. Il a eu, à partir de cette date, une série

d'accès. Il paraissait se remettre de cette série lorsque, dans la

nuit du 22, sont survenus les faits suivants :

Vers quatre heures du matin, le veilleur s'aperçut que cet

enfant était pâle et qu'il avait les yeux fixes ; il aurait fait deux

ou trois mouvements. On fit des lotions vinaigrées pendant

qu'on envoyait chercher l'interne de garde qui trouva l'enfant

mort. Le veilleur a prétendu quo l'enfant était couché sur le

dos et qu'il n'aurait pas eu d'accès dans la nuit ( ? ). L'autopsie,

comme on va le voir, permet au contraire de penser que l'en-

fant a été asphyxié dans un accès. Voici le Tableau des accès

depuis l'entrée à Bicêtre jusqu'à la mort.

AUTOPSIÉ. 47

Autopsie faite trente-deux heures après la mort. Sur l'ab-

domen, plaque verdâtre répondant à la fosse iliaque droite. Du

côté gauche, tout l'espace s'étendant depuis l'hypochondre

gauche jusqu'au tiers antérieur et supérieur de la cuisse pré-

sente une coloration brun-verdâtre, coloration-rouge brun de

toute la partie interne de la cuisse, de la jambe et du pied du

côté droit, sauf au niveau de la partie saillante du genou. Du

côté gauche, au contraire, cette coloration ne manque qu'en

dedans sur les mêmes parties. On les retrouve sur le côté

gauche seulement du thorax, en avant et surtout en arrière.

A droite, ecchymoses à la partie antéro-externe et au tiers

supérieur de la cuisse, sur la crête du tibia et au tiers moyen;

du côté gauche, sur la face antérieure de la cuisse et au tiers

inférieur. Sur la partie antéro-interne de la jambe où elles sont

nombreuses ; enfin, sur la face externe du bras droit. Rigidité

cadavérique peu prononcée, sauf aux mains et aux pieds.

Parois abdominale et thoracique normales. Pannicule adi-

peux épais. Muscles bien développés et de couleur normale.

Les intestins occupent leur place ordinaire. Epiploon un peu

remonté, sans adhérences. Côlon transverse légèrement dilaté.

Le diaphragme remonte à droite jusqu'au bord supérieur de la

quatrième côte et à gauche jusqu'au bord inférieur de la même

côte. Pas de liquide dans la cavité abdominale. Péritoine

pariétal et viscéral lisse et intact. Ganglions mésentériques

normaux. La vessie, rétractée, contient un peu d'urine.

A l'ouverture du thorax, on constate que le thymus persiste,

atrophié, sauf dans sa partie supérieure qui a encore un certain

volume (1). Adhérence totale du poumon gauche, excepté au

niveau du lobe inférieur qui reste libre. Pas de liquide anormal

dans ce qui reste de la cavité pleurale gauche. Adhérences avec

le péricarde du même côté. A droite, poumon rétracté, libre.

Pas de liquide anormal.

Le coeur, dans sa situation ordinaire, est en systole, sa pointe

est formée par les deux ventricules. Une seule petite plaque

laiteuse sur le ventricule droit. Le péricarde ne contient que

la quantité ordinaire de sérosité. A la section du coeur in situ,

un peu de sang noir liquide s'échappe surtout des oreillettes.

A l'enlèvement de cet organe, les gros vaisseaux laissent échap-

per une grande quantité de sang noir contenant quelques cail-

lots cruoriques. Le myocarde, les valvules, l'endocarde, les

auricules ne présentent rien de particulier.

La bronche gauche, incisée, ne contient aucun liquide. Plè-

(1) Nous avons très souvent constaté la persistance du thymus

chez les malades de notre service, surtout chez les idiots.

48 ' AUTOPSIE.

vre costale saine. Trois ou quatre très petites ecchymoses sous-

pleurales de la plèvre pulmonaire gauche et en arrière. Le

poumon gauche pèse 240 gr. et présente une congestion très

intense des deux lobes, mais surtout du lobe inférieur. Pas

d'atélectasie. Les bronches contiennent une bouillie claire et

sanguinolente; elles paraissent normales et présentent, après

lavage, une couleur verdatre généralisée. Le poumon droit

pèse 270 gr. et présente, ainsi que les bronches, les mêmes

lésions que le poumon gauche, mais moins prononcées. Em-

physème du lobe supérieur, du bord postérieur et de la face

interne. La plèvre pulmonaire droite est lisse et polie.

Rate, 85 gr., quelques adhérences aux organes voisins; hypé-

rémie, consistance augmentée. Capsules surrénales normales.

Uretères un peu dilatés des deux côtés. Les reins se décor-

tiquent facilement, surface hyperémiée (étoiles de Verheyen

visibles). Hypérémie par places de la substance corticale et

plus prononcée de la substance médullaire. Rein gauche 70 gr.

Rein droit 80 gr. Ces altérations sont moins marquées 1\ droite.

L'estomac contient un peu de liquide; quelques petites ecchy-

moses de sa muqueuse. Adhérence très étendue entre le dia-

phragme et le foie, qui est normal; non posé; pas de calculs. Un

peu de mousse sanguinolente dans le larynx et la trachée.

Les testicules sains, se dévident bien. Intestin grêle, gros

intestin, pancréas, rien.

Tête. Cuir chevelu peu développé, hypérémié surtout à

gauche et en arrière. Boite crânienne symétrique. Les sutures

persistent, non ossifiées, sauf la suture frontale. Les deux tables

sont hypérémiées, surtout l'externe. Diploé mince. Encéphale

1270 gr. Cervelet et isthme, 130gr. I'ie-merr, très finement

vascularisée partout; elle a une teinte un peu ecchymotique sur

le lobe temporal gauche et sur les lobes temporal et frontal

droits. Elle est mince des deux côtés; adhérences rares. Elle

s'enlève assez facilement. Les nerfs et les artères n'offrent

rien de particulier. Quantité du liquide céphalo-rachidien un

peu augmentée. Les hémisphères cérébraux et cérébelleux

sont égaux. La décortication du cervelet est facile. La coupe

de cet organe ne présente rien de particulier.

Hémisphère droit. - Face convexe. La première circonvo-

lution frontale, Fi, est très sinueuse et composée dans sa

moitié antérieure de petits plis transversaux dont un envoie

un prolongement au fond du sillon qui la sépare de la deuxième

frontale. Un autre pli de passage, sinueux, va s'insérer de ni-

veau sur cette dernière ; elle est antéro-postérieure et dédou-

blée dans sa seconde moitié. Son insertion sur la frontale as-

cendante figure un crochet, F2. La deuxième circonvolution

ÉPILEPSIE : AUTOPSIE. 49

frontale est très sinueuse et bien développée; elle envoie deux

plis de passage à la troisième et prend sur la frontale ascen-

dante une large insertion coupée par un petit sillon. La troi-

sième circonvolution frontale, Fa, est très sinueuse et s'in-

sère de niveau sur l'extrémité inférieure de la frontale ascen-

dante, F A, qui est aussi sinueuse et bien développée. Le sillon

de Rolando est large et profond. La pariétale ascendante,

P A, sinueuse, assez large, envoie un pli de passage au pli

pariétal inférieur et deux autres au pli supérieur. Le pli parié-

tal supérieur, P, volumineux et sinueux, envoie un pli de pas-

sage au lobe occipital et un autre au pli courbe. Le pli parié-

tal inférieur, P2, volumineux, envoie un pli de passage à la

première temporale et un autre au pli courbe, P C. Ce dernier

est peu développé, mais entre lui et le lobe occipital, il existe

une circonvolution composée de trois replis (lobule du pli

courbe).

Le lobe occipital, LO, est composé de circonvolutions assez

plissées. Le lobule de l'insu la offre trois digitations, dont les

deux premières sont trifurquées. La première circonvolution

temporale, sinueuse, envoie un long prolongement au fond de

la scissure de Sylvius et un pli de passage volumineux à la

deuxième temporale. La deuxième et la troisième temporales

T, T3, sont en grande partie confondues.

Face interne. -Première circonvolution frontale bien dé-

veloppée, avec des plis assez profonds. Sillon calloso-marginal

assez profond. Circonvolution du corps calleux, CCCa, assez

large, mais non plissée. Lobe quadrilatère, LQ, volumineux et

plissé. Lobe 1,P, bien développé, avec deux sillons

dont un assez profond et l'autre superficiel. Le coin, LC, est

sinueux, avec des plis superficiels. Lobe occipital assez bien

développé et plissé. La circonvolution de l'hippocampe, CII,

est unie et envoie un prolongement à la quatrième temporale.

La corne d'Ammon, les masses centrales, le ventricule laté-

ral, etc., n'offrent rien de particulier.

Face orbitaire bien plissée, large. Les sillons principaux

(scissures) et les sillons intermédiaires sont généralement pro-

fonds.

Hémisphère gauche. - Face convexe. FI sinueuse, bien

développée, envoie à son origine un pli de passage assez volu-

mineux à Fs; plis transversaux en avant, double pli antéro-pos-

térieur et volumineux en arrière. Elle prend une seule inser-

tion un peu en retrait sur l'extrémité supérieure de la frontale

ascendante, Fa est volumineuse, sinueuse, s'insère de niveau sur

la partie moyenne de la frontale ascendante et envoie deux plis

BOURNEVILLE, 1888. 4

50 EPILEPSIE : RÉFLEXIONS.

de passage à F3, dont un de niveau et l'autre au fond du sillon.

>â : ; est sinueuse, bien développée et s'insère de niveau sur l'ex-

trémité inférieure de FA, qui est, elle aussi, volumineuse et

sinueuse. Le sillon de Rolando est larrce et profond. PA, éga-

lement bien développée envoie un pli de passage au pli parié-

tal supérieur. Celui-ci, formé de deux replis sinueux, envoie en

arrière un pli de passage au lobe occipital. P2,non dédoublée,

envoie un pli de passage assez sinueux au pli courbe, bien dé-

veloppé, et qui envoie deux plis de passage au lobe occipital

composé de circonvolutions assez petites, présentant dessillons

superficiels. Le lobule de l'ittsula a trois digitations : la pre-

mière est bifurquée. 2 ? plissée, envoie un pli de passage bi-

furqué à sa base, au fond de la scissure de Sylvius et un autre

à T2, qui interrompt la scissure parallèle à 1 centimètre il"2 de

son origine, Ta, Ti, en partie confondues en avant, sont plus

distinctes en arrière.

Face interne. Fi, très plissée h son origine, reçoit de la cir-

convolution du corps calleux un pli de passage sinueux; en

arrière, elle est incomplètement séparée du lobe paracentral.

A l'origine de cette circonvolution, on trouve deux noyaux de

sclérose situés entre l'extrémité antérieure du corps calleux

et l'extrémité correspondante de l'hémisphère. Les portions

sclérosées ont une consistance beaucoup plus ferme, forment

relief et ont une coloration différente, légèrement jaunâtre

après macération. Le noyau postérieur mesure 1 centimètre 1/2

de longueur; l'autre 2 centimètres. LP, très irrégulier, présente

un sillon bifurqué; pas d'encoche du sillon de Rolando. CCCa

lisse, relativement peu développée. LQ très sinueux, ainsi que

le coin. LO est au contraire peu développé. Sillon calloso-

marginal et scissures parièlo-occipitale, calcarine, perpen-

diculaire assez profondes, ainsi que les sillons secondaires.

Corps calleux normal. Le ventricule latéral, le corps strié,

la couche optique n'offrent rien de particulier, si ce n'est une

sorte de sillon assez creux, qui sépare le corps strié de la cou-

che optique. Face orbitaire : Circonvolutions régulières.

I. - Nous avons à relever dans les antécédents héré-

ditaires : 1° les excès alcooliques de sa grand'mère pa-

ternelle ; 2° les névralgies de sa mère ; 3° l'affec-

tion cérébrale à laquelle a succombé son grand-père

maternel;- 4° les attaques de nerfs de sa grand'mère

maternelle ; 5° l'apoplexie de l'un de ses arrière-

EPILEPSIE : RÉFLEXIONS. ' 51

grands-pères maternels; 6° les accidents cérébraux

qui ont enlevé l'une de ses soeurs.

II. Jusqu'à l'âge de 13 ans, l'enfant, qui était intel-

ligent, n'a été atteint d'aucune affection nerveuse. C'est

alors que, 24 heures après une vive frayeur, il a eu son

premier accès d'épilepsie, suivi 48 heures plus tard

d'un second accès avec délire violent, consécutif..

Les accès se sont reproduits fréquemment et ont été

souvent compliqués de troubles intellectuels, d'auto-

mutisme, d'accidents procursifs et de traumatismcs

de la tête. De plus, il s'y est ajouté des absences ; les

facultés intellectuelles ont baissé et le caractère est de-

venu de plus en plus violent.

En général, les accès se sont montrés par séries; c'est

à la suite d'une de ces séries que l'enfant a succombé

dans un accès, probablement par asphyxie. C'est là un

accident qu'on observe chaque année une ou plusieurs

fois dans les services d'épileptiques soit au lit, soit aux

travaux de jardinage, les malades ayant la face collée

Fig. 24.

52 EPILEPSIE.

contre l'oreiller ou enfoncée dans la terre fraîchement

remuée.

III. - Nous devons insister sur la marche de la

température durant l'une des séries, celle du mois de

janvier et sur celle de l'un des états de mal. Dans le

premier cas, ainsi que le montre la fig. 24, la tempé-

rature ne dépasse guère que d'un degré la température

normale. Entre les accès, le malade reprend entière-

ment connaissance. Dans le cas du véritable état de

mal, la connaissance ne revient pas et la température

s'élève jusqu'à 40°,3. Elle baisse pendant ? 4 heures

puis monte jusqu'à 40°,6 (congestion méningitique) ;

enfin, les accès ayant disparu et la conscience étant

revenue, la température s'abaisse rapidement (Fig. 25).

IV. Nous n'avons noté aucune lésion macros-

copique qui puisse expliquer la cause de l'épilepsie.

Nous n'avons pas non plus trouvé, ici, les lésions de

méningite ou de méningo-encéphalite qu'on rencontre

chez une catégorie de déments épileptiques. Les lésions

constatées du côté des organes respiratoires nous pa-

raissent indiquer que l'enfant a succombé par asphyxie

dans un accès.

V. Bon.... a pris 0 gr. 25 de bromure de nickel,

du 3 mars au 31 août; 0 gr. 50 du 1er au 10 sep-

tembre et 0 gr. 75 du 16 au 30 septembre. Si l'on veut

bien se reporter au tableau des accès, on verra que

durant cette période, loin de diminuer, les accès n'ont

fait que se multiplier ; il n'y a plus eu de rémissions,

comme on en avait vu précédemment en septembre et v

novembre 1883, janvier et février 1884.

VI. Nous allons, à ce propos, exposer succinctement

les résultats que nous avons relevés sur 17 autres ma-

lades qui, en 1884-85, ont été mis en traitement par ce

médicament sur lequel notre attention avait été appelée

BROMURE DE NICKEL. 53

par une note de M. Da Costa, insérée dans le Médical

News de Philadelphie (1883, XLIII, p. 337) et dont

nous avons trouvé l'analyse dans l'Union médicale : 11.

Canada (1883, p. 505).

54 EPILEPSIE.

Suivant M. Da Costa, le bromure de nickel n'avait

pas encore été employé avant lui. Son action sur le

système nerveux serait plus évidente que celle du sul-

fate de nickel, également expérimenté par lui. Il est

déliquescent et soluble dans l'eau. A dose ordinaire, il

est très bien toléré par l'estomac. On le prescrit sous

forme de pilules ou mieux en sirop. Le bromure de

nickel produit les effets ordinaires des bromures, mais

à doses beaucoup plus petites. Ainsi, la dose ordinaire

est de 5 à 7 grains et demi (0 gr. 33 à 0 gr. 46) ; dix

grains (0 gr. 66) constituent une pleine dose

L'action du bromure de nickel sur le système nerveux

se manifesterait, au dire de M. Da Costa, dans le fait que

ce sel soulage la céphalalgie, surtout quand elle est de

forme congestive, et calme les convulsions, etc. En ce

qui concerne l'épilepsie, M. Da Costa aurait trouvé quo

ce sel agit aussi bien que les autres bromures et il cite

des exemples à l'appui. Le fait que la dose de bromure

de nickel nécessaire à produire les effets désirés est tou-

jours moindre que celle des autres bromures est très re-

marquable et doit être rapportée à une action spéciale de

ce sel. Ainsi qu'on va le constater, nos essais sont

loin d'avoir été aussi satisfaisants.

OBs. I. Epilepsie idiopathique. - Desaut..., L. IL, né le

22 novembre 1835. Débuta 35 ans, à la suite d'une vive émotion

(accident de chemin de fer). Du 3 mars 1884 au 10 août, il a

pris 0 gr. 25 de bromure de nickel ; 0 gr. 50 du 10 au 20 août ;

0 gr. 75 du 20 août au 31 janvier 1885 ; enfin, un gramme

du 1 cr au 28 février 1885.

BROMURE DE NICKEL. 55

de nickel du 3 mars 1884 au 4 septembre. Durant cette période,

il a eu 159 accès et 46 vertiges. Durant la période correspon-

dante de 1883, il avait eu 82 accès et pas de vertiges, et, pen-

dant celle de 1885, il a eu 119 accès et un vertige. D'où il suit

que le bromure de nickel semble avoir exercé une action dé-

favorable.

Ons. III. Epilepsie idiopathiques Chiqu..., G. L., né

le 12 mai 1873.- 0 gr. 25 de bromure de nickel du 3 mars au

15 septembre 1884; 0 gr. 50 du 16 septembre jusqu'au

21 juillet 1885. Pendant les 17 mois de traitement on a noté

21 accès, tandis que dans les 5 mois précédents il n'y en avait

eu que six et que dans les 17 mois suivants (hydrothérapie), il

n'y en a eu que onze (août 1885 -fin 1886). En 1887 (hydrothé-

rapie), 3 accès; en 1888 (hydrothérapie), 0 accès. D'où il

ressort que le bromure de nickel semble avoir accru les accès

qui ont disparu sous l'influence de l'hydrothérapie.

OBs. IV. Epilepsie idiopathique. - Metta..., L..., né le

28 octobre 1871. 0 gr. 25 de bromure de nickel, du 3 mars

au 15 septembre 1884; 0 gr. 75, du 16 septembre au

31 juillet 1885.

Du 1er mars 1884 au 31 juillet 1sus5...., 36 accès, soit 2 accès

en moyenne par mois ; durant les six mois précédents, il n'a

eu que 5 accès, soit moins d'un par mois. Le bromure de

nickel ayant été supprimé, on a compté, dans les 5 mois sui-

vants, 8 accès, soit 1 accès 6 par mois (1).

OBS. V. Epilepsie idiopathique. Lecorn..., F.-V.,

né le 2 décembre 1866. 0 gr. 25 de bromure de nickel, du

3 mars au 31 août 1884.

56 ÉPILEPSIE.

BROMURE DE NICKEL. 57

58 EPILEPSIE.

bromure de nickel du 3 mars au 15 septembre 1884; 0 gr. 50

jusqu'au 17 janvier ; puis 0 gr. 75 jusqu'au 27 juillet 1885. En

1883, avant le traitement, 109 accès et 1 vertige; en 1884

(traitement pendant 10 mois), 123 accès ; en 1885 (traitement

pendant près de 7 mois), 160 accès et 13 vertiges. Le malade

a pris 230 r. de bromure de nickel. Le poids, qui était de

55 kilogr. 400 le 31 janvier 1884, était de 56 kilogr. 100 le

31 janvier 1885. La taille a augmenté d'un centimètre. En

somme, la nutrition ne paraît pas avoir souffert, mais le nom-

bre des accès s'est sensiblement accru.

Ons. XIII. Epilepsie symptomatique ; imbécillité.

Auberg..., Pierre, né le 12 juillet 1866. 25 centigr. de bromure

de nickel du 3 mars 1884 au 31 août ; 0 gr. 50 à partir du

1er septembre ; 0 gr. 75 du 10 au 31 janvier 1885.

BROMURE DE NICKEL. 59

60 BROMURE DE NICKEL.

nickel; les seuls effets physiologiques que nous ayons

à relever ont consisté en des nausées fréquentes, parfois

des vomissements et chez deux malades en un embarras

gastrique.

Formules. Nous avons employé un sirop renfer-

mant 0 gr. 25 de bromure de nickel pour une cuillerée

à soupe. Voici les formules de M. Da Costa :

PERVERSION DES INSTINCTS.

V.

Imbécillité légère. Instabilité mentale

avec perversion des instincts et impul-

sions génitales.

( KLEPTOMANIE, ONANISME, SODOMIE, SYPHILIS );

Par ]80tJttI]E][)L]L t : t BAOULT.

OBSERVATION. - Grand-père paternel alcoolique. - Cousine pater-

nelle idiote et épileptique. - Mère nerveuse, névralgies, céphal-

algies. - Grand'mère maternelle, paralysie faciale. - Tante ma-

ternelle et arrière-grand-père aliénés. - Frères et sreurs morts

de convulsions. - Pets de consanguinité. - Inégalité d'(tge d'un an.

Impression maternelle. - Hémorrhagie du cordon. - Parole et

marche vers dix-huit mois. - Incontinence d'urine jusqu'à quatre

ans. - Défécation involontaire jusqu'à douze ans. - A/Tét de

développement intellectuel. - Instabilité mentale. - Lymphatisme,'

salacité. - Idées de moquerie. - Actes de violences envers les

autres enfants. - Mise en correction. - Tremblement léger des

mains. - Crises nerveuses, épileptiques (1). - Accès de colère. -

Impulsions génitales.

Etat du malade en 1881. - Nystagmus; léger tremblement des

paupières; hypospadias. - Sodomie : syphilis; balano-postltÍte;

adénite suppurée.

Evasion; réintégration. - Caractère violent, grossier. - Ona-

nisme, actes et paroles obscènes; pédérastie. - Kleptomanie. -

Plaie de la cuissc; érysipèle, phlegmon. - Développement du

poids, de la taille, de la puberté. - Excès. - Actes de violences,

placements divers, impulsions génitales pendant sa mise en liberté.

- Réintégration. - État au commencement de 1887.

Court... (Charles), né le 28 janvier 18G7, est entré le 2r juin L881

à l'Hospice de Bicêtre (service de M. Boowewt).

Renseignements fournis par samère. Père, trente-six ans, garde

républicain, grand, fort, bien portant d'ordinaire, sans aucuti

IiULn\E'1LLE, 1888. O

6.) IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE.

accident nerveux; rhumatisant. [Père, nombreux excès de bois-

son, surtout d'absinthe et d'eau-de-vie. Mère, d'habitude bien

portante a seulement des douleurs rhumatismales; elle est ner-

veuse mais n'a jamais eu d'attaques. Grand-père, mort d'un

cancer delà face. Cousine, idiote épileptique, gâteuse, morte en

1880, âgée de 36 ans, à l'Asile de Dole. Pas d'aliénés, pas

d'autres épileptiques, ni de paralytiques, etc., dans la famille.]

Mère, trente-cinq ans, assez grande, brune intelligente ; se plaint

de névralgies intercostales, sujette de temps en temps à des céplwl-

algies. Pas de migraines,pas d'attaques nerveuses. [Père, soixante-

six ans, cultivateur, n'a jamais eu d'accidents nerveux et jouît

d'une bonne santé. Mère, a eu il y a trois ans une paralysie faciale

unilatérale, qui persiste, à la suite d'un voyage, durant lequel elle

aurait eu froid. 3 soeurs dont l'une, aliénée, est à l'Asile de Dôle

depuis 4 ans (lypémanie avec hallucinations, idées d'empoisonne-

ment). Cette femme a un fils jusqu'ici bien portant. Un grand-

père serait devenu fou au dire de la mère de l'enfant. Pas d'au-

tres aliénés, pas d'épileptiques, etc., dans la famille.] Pas de con-

sanguinité.

Sept enfants : 1° garçon, né avant terme (forceps), mort à

deux jours après avoir eu quelques convulsions ; 2° fille morte à

trois ans de convulsions; 3° notre malade ; 4° garçon né

à terme, chétif, mort à six semaines on ne sait de quoi ;

5° garçon âgé de onze ans, bien portant, n'a jamais eu de convul-

sions, intelligent; 6° garçon mort à l'âge de huit jours;

7° fille bien portante, intelligente, âgée de six ans et demi pas de

convulsions.

Notre malade. La grossesse a été accompagnée de maux de

reins très douloureux. Durant tout ce temps la mère habitait la

même maison que sa cousine idiote et épileptique. Celle-ci venait

sans cesse la trouver en poussant des cris. C'était toujours avec

déplaisirqu'elle la voyait, et elle craignait de contrarier ses parents

en larepoussant. Pendant les autres grossesses, les mêmes faits ne se

seraient pas présentés. Accouchement à terme, naturel, sans chloro-

forme '. Rien de particulier <i la naissance si ce n'est une hémorrhagie

abondante du cordon qui avait été mal lié, et qui s'est produite

une heure après la délivrance. L'enfant a été élevé au sein par sa

mère jusqu'à neuf mois seulement, elle a été obligée alors de

cesser parce qu'il était fort et la fatiguait beaucoup. C... a com-

mencé à parler et k. marcher à l'âge de dix-huit mois. Mais ce

n'est qu'à deux ans qu'il a réellement parlé. A quatre ans, il

Nous avons toujours eu soin de noter ce détail, parce que des auteurs

ont pensé, a tort suivant nous, que l'administration du chloroforme pen-

dant l'accouchement exerce une influence au point de vue de la pro-

duction de l'idiotie. (B.)

INSTABILITÉ MENTALE. 63

cessa d'uriner au lit ou dans son pantalon, mais jusqu'à douze

ans il a toujours laissé aller sous lui ses matières fécales. A quatre

ans il fut envoyé à l'école où il apprit difficilement à lire et à

écrire et d'où il fut renvoyé à différentes reprises. De quatre à

sept ans il fut placé à l'asile de Mont-sous-Vaudrey : on le ren-

voya parce qu'il était sale, turbulent, agaçait ses camarades, fai-

sait des grimaces et des contorsions. Deux fois il s'est enfui de

l'école, mais il rentrait deux heures après.

A dix ans, il fut placé aux enfants de troupe à Argentan. Il y

resta onze mois. Au bout de ce temps on le renvoya, parce qu'il

faisait encore sous lui. Là, lorsqu'il avait été sale, on le faisait

déshabiller et les autres enfants allaient, sur l'ordre de leur gar-

dien, lui donner chacun un coup de martinet. Puis il était mis au

cachot, au pain et à l'eau.

Ensuite il alla chez un oncle dans le Jura, il y resta deux

mois : il avait, dit sa mère, mis toute la ville en révolution

par ses excentricités. Il injuriait tout le monde, criait, accusait

son oncle de le battre. Il fut alors pris par son grand-père pater-

nel, qui le garda six semaines; là il eut de grandes crises pour la

première fois, crises qu'un médecin aurait qualifiées d'épileptiqztcs.

Revenu à Paris, il retourna à l'école, puis fut placé en appren-

tissage chez un cordonnier. Il y resta peu de temps, il perdit pour

soixante francs de marchandises à son patron : quand on l'en-

voyait faire des commissions, il ne revenait que le soir. Il fut mis

chez un autre cordonnier où il ne resta que trois ou quatre jours,

puis chez un robinetier qui ne le garda que deux jours. Partout il se

montrait maladroit et ne pouvait supporter aucune observation,

croyant qu'on se moquait de lui. Dans l'intervalle de ces essais d'ap-

prentissage il restait chez ses parents où il faisait les commissions.

En janvier 1881, il fut chassé de la caserne parce qu'il avait

battu des enfants de quatre à six ans, il les bousculait sans motif,

leur disait des grossièretés. Placé chez sa tante il y est resté trois

semaines, il faisait du tapage, criait. Il fut mis chez des amis qui

ne le gardèrent qu'un mois et demi. Plus tard il fut envoyé à

Villepreux où il resta six semaines et d'où il fut rendu, parce

qu'il s'était masturbé avec d'autres enfants. Ensuite, il entra en

correction à la petite Roquette ; il y est resté un mois, il s'v trou-

vait bien traité. A sa sortie des Jeunes Détenus, il fut placé chez

un marchand de vins : il donnait à boire aux clients sans se faire

payer; il laissait tomber les bouteilles qu'il tenait à la main' à

cause du léger tremblement dont il est atteint. 11 n'aurait pas eu

d'accès d'épilepsie depuis son retour de llont-sous-Vaudrey; mais

il était sujet à des crise* nerveuses pendant lesquelles il étend les

bras, crie, à les yeux saillants, et qui ressemblent plutôt à des

accès de colère; il ne tombe pas par terre. Souvent, C... ne voulait

pas faire certaines choses, prétendant qu'on se moquait de lui. Il

64 IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE.

n'a guère d'afléctioirque pour sa mère; il déteste son père qui

bien des fois l'a corrigé. Ses accès de colère le prenaient quand il

était contrarié et surtout quand on le battait.

Sa mère pense qu'à la maison il ne se masturbait pas. On a

prétendu à la caserne qu'il avait essayé d'avoir des rapports avec

une petite fille de six ans; il n'a jamais essayé d'en avoir avec

sa soeur.

Cour... était indifférent à tout, se moquait des reproches qu'on

lui faisait. Si on l'envoyait faire une commission, il se trompait,

ne rendait pas compte de l'argent qu'on lui avait donné, il laissait

la monnaie chez le marchand, on était obligé de lui écrire les

commissions à faire. Le sommeil est assez bon et lourd. C...

s'endort de suite, il est difficile à réveiller. Il n'est pas peureux et

ne semble pas se rendre compte du danger. Il mange seul, mais

malproprement; pas de vomissements, pas de salacité : à l'âge de

six ans on l'a vu toutefois à plusieurs reprises manger des escar-

golfs vivants.

A quatre ans, une scarlatine, avec otite consécutive ; à huit ans,

rougeole. Pas d'autres maladies, sauf quelquefois des croûtes

dans les cheveux avec des adénites cervicales et un écoulement

léger de l'oreille gauche.

Etat actuel. Tète assez forte, haute, en forme de toit, sans

saillies exagérées. La région occipitale est aplatie. Inclinaison

très rapide, du vertex au front. La bosse pariétale gauche semble

plus proéminente et située plus en arrière que la droite. - Front

bas, déprimé latéralement, sans saillie des bosses frontales.

Saillie assez prononcée des arcades sourcilières. -- Léger nys-

tagmus et léger tremblement des paupières; pas de strabisme; iris

brun, pupilles égales; cils longs, pas de lésions oculaires. Régions

malaires symétriques, cependant la joue gauche est un peu plus

creuse que l'autre. Ne ? assez volumineux, aquilin. Narine gauche

un peu relevée. Menton en pointe, à fossette un peu déprimée à

gauche. - Face triangulaire. - Regard terne, sans expression.

Diamètre occipito-frontal... 17 centimètres.

Diamètre transverse 14 centimètres.

Circonférence horizontale... ;i3 centimètres.

heures épaisses; arcade dentaire inférieure complète, régulière.

Au niveau de l'arcade dentaire supérieure, les deux incisives laté-

rales manquent, les incisives médianes sont larges et séparées

l'une de l'autre par un intervalle de deux millimètres; entre elles

et les canines existe aussi un espace. Voûte palatine profonde,

ogivale, symétrique. Luette, piliers, amygdales, langue nor-

maux. Fonctions digestives normales. Rien du côté de la

respiration, de la circulation, ni du coeur.

Cheveux châtains, abondants, sourcils et cils un peu plus foncés.

Le corps est complètement glabre.

INSTABILITÉ MENTALE; SODOMIE. 6§

Organes génitaux et puberté. Poils naissant au niveau des

organes génitaux. Testicules descendus. Verge assez volumi-

neuse. Le gland est en partie découvert. Le méat semble s'ouvrir

au sommet du gland mais en l'entr'ouvrant, on remarque qu'il

est ouvert à la face inféro-postérieure un peu en bec de Ililte

(hypospadias). La partie antérieure du sillon est un trou borgne.

Sensibilité générale normale.- Réflexe tendineux à peu près nul.

- Odorat, légère perversion, ainsi il trouve que l'asa-foetida sent

bon. Vue, ouïe et goût normaux.

La parole est libre, relativement facile avec un léger zézaiement.

Il lit bien, écrit assez facilement, sait ses quatre règles, le sys-

tème métrique. L'orthographe est assez bonne.

Dynamomètre à droite, 33, à gauche 32. Poids : 44 kilogr. 700.

Taille 4 ? 48.

1881. Six jours après son entrée, il a été pris masturbant un

enfant : envoyé vingt-quatre heures à la Sûreté'. Il est peu

docile à l'école. lise développe bien. A la fin de juillet : poids,

44 kil.85; taille, 1 ? i0.

1 cr octobre. - L'enfant avoue avoir eu des rapports n posteriori

avec un infirmier renvoyé il y a quatre jours pour sodomie

exercée sur plusieurs autres enfants de la section. L'enfant pré-

tend que ces rapports n'ont eu lieu pour la première fois que le

2 : i septembre. Certainement ils ont dû être commis déjà aupara-

vant, car l'enfant présente à la région anale une exulcération de

la largeur d'une pièce de 0 fr. : i0 allongée entourée d'une plaque

d'érythème de la largeur d'une pièce de francs. Le sphincter est

resté intact. Voici, d'après ce que raconte C..., comment les

choses se sont passées. Vers 11 heures et demie du soir le garçon,

rentrant de permission, se déshabillait au dortoir lorsque l'enfant

revint des cabinets ; il le prit à bras le corps, et le coucha dans

son lit. D'après ce que dit C..., sur trois tentatives une seule fut

couronnée de succès. Il ne resta qu'un quart d'heure dans le lit

du garçon ( ? ). Quinze jours auparavant, ce dernier aurait essayé

d'avoir des rapports avec lui dans les circonstances suivantes : il

était monté pour changer de linge au dortoir, quand il fut tout nu

l'infirmier sortit sa verge et l'embrassa. Cet individu donnait à

C... et aux enfants, du chocolat, du fromage, des fruits, etc. C...,

pour s'excuser, dit que c'est par crainte qu'il n'a pas dénoncé la

première tentative, l'infirmier menaçant les enfants de les battre

s'ils en parlaient.

13 octobre. L'ulcération anale s'améliore peu, elle est entourée

d'une vive inflammation surélevée et ressemble à une plaque

muqueuse. Douleur vive.-Traitement : onguent styrax, cautérisa-

tion au nitrate d'argent.

11 n'y a pas de cellules on de chambre d'isolement dans la section.

(j(Í IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE.

14 octobre. Suppression du nitrate d'argent, rien au cuir

chevelu. Polyadénite inguinale.

21 octobre.- Roséole à l'état naissant. L'ulcération anale a tou-

jours le même aspect, elle est peu indurée. Erythème de la gorge.

4 novembre. Quelques croûtes dans les cheveux. Pâleur très

prononcée. Une petite ulcération à fond jaunâtre sur l'amygdale

droite. L'éruption papuleuse a augmenté. Quelques petits gan-

glions dans les aines. Syphilides plus nombreuses à la partie

antérieure du tronc qu'à la face postérieure. La plaque végétante

de l'anus a environ quatre centimètres de diamètre, elle occupe

la moitié droite de l'anus dans ses deux tiers inférieurs. Une

autre plaque végétante existe du côté gauche. Traitement :

pilules de Sédillot, sirop d'iodure de potassium, vin de gentiane,

cautérisation des plaques muqueuses avec une solution de nitrate

d'argent à 1/30.

14. Pas de croûtes dans les cheveux ; petites adénites cer-

vicales ; larges plaques muqueuses sur les deux amygdales. -

L'éruption cutanée a un peu diminué; les papules sont moins

nombreuses. Les plaques anales s'améliorent ; la défécation est

moins douloureuse. Même traitement; gargarisme au chlorate de

potasse.

2. La peau reste marbrée; les adénites inguinales persis-

tent. La marge de l'anus présente toujours une ulcération végé-

tante, surélevée, d'un rose clair, baignée par un peu de pus

sanieux, blanchâtre. Il n'y a plus rien à la gorge.

27.- A la surface du tronc et sur les cuisses, éruption dis-

crète de papules arrondies, un peu surélevées, de teinte chair de

saumon. Cette éruption est plus accusée à la partie antérieure de

la poitrine, qu'en arrière. Sur l'amygdale gauche, petite plaque,

2 déc. Pas de croûtes dans les cheveux. Quelques ganglions cer-

vicaux. Quelques macules sur la peau. Les plaques muqueuses de

l'anus ont bien diminué d'étendue. Petite plaque muqueuse

opaline sur l'amygdale droite. C... continue toujours à se mas-

tnrber, et à exciter les autres à la masturbation.

13. Il continue à attirer près de lui les autres enfants, les

embrasse, et cherche à les toucher et à se faire toucher par eux.

Il est insolent, méchant, se mêle à toutes les discussions entre

les enfants. A l'école, il est dans la première classe, mais fait

peu de progrès.

1882. 6 janvier. La veille, il s'est couché avec mal de tête,

frissons, courbature, raideur du cou. Ce matin il présente des

plaques d'un aspect rubéolique sur la face ; les bras, le dos, et

surtout les jambes, Pas de bronchite, ni de coryza, ni de lar-

moiement. Rougeur de la gorge, niais à peine marquée. Déglu-

tition un peu douloureuse. Langue saburrale. Rien à l'auscultation

INSTABILITÉ MENTALE; SYPHILIS. 67 1

de la poitrine. Soif, anorexie, diarrhée. Traitement : infusion

de 4 grammes de jaborandi ; limonade vineuse. T. R. 40°, 2.

Soir : T. R. 390, 2.

7. Les plaques ont presque disparu; il n'en reste que quel-

ques-unes dans le dos, et sur les avant-bras. Un peu de desqua-

mation à la face. T. R. 38°,2. Soir : T. R. 39°.

8. T. R. 38°, 5. Soir : T. R. 38°, 6.

9. T. R. 38°, 4. Soir : T. R. 38°.

10. Encore quelques rougeurs sur les avant-bras ayant l'as-

pect de la roséole syphilitique. T. R. 38°. Soir : T. R. 38°, 8.

13. Syphilides des lèvres en diminution. Petite plaque mu-

queuse sur le pilier antérieur droit du voile du palais. Stomatite

mercurielle. Grandes plaques de roséole sur les lèvres, les régions

scapulaires ; aspect marbré de la poitrine; quelques plaques

dans le sillon interfessier. Quelques croûtes dans les cheveux.

Syphilides anales ulcérées, persistantes (plaque muqueuse hyper-

trophique). - Traitement : suppression des pilules de Sédillot, à

cause de la stomatite sirop d'iodure de fer; douches; chlorate

de potasse; cautérisation au nitrate d'argent.

17. Cautérisation des plaques de la gorge. Même état de la

gingivite. Les syphilides de la face diminuent d'étendue.

27. Syphilides pustulo-crustacécs, très confluentes du cuir

chevelu ; syphilides squameuses cuivrées, par larges plaques sur

le front, le pourtour des narines, les commissures palpébrales,

le menton. Rien sur le tronc. Sur les bras, syphilides papulo-

squameuses, surtout près des coudes. Papules de 8 millimètres

de diamètre avec collerette. Plaques muqueuses ulcérées de

5 millimètres de diamètre environ à la face interne de la joue

gauche, au niveau des dernières molaires, sur la lèvre inférieure,

en dedans de la commissure et sur la lèvre supérieure en face de

la canine gauche. D'autres plaques muqueuses sur la voûte pala-

tine en arrière de la dernière molaire gauche, sur la luette et sur

les amygdales. Paroi postérieure du pharynx rouge. Gencives fon-

gueuses, saignantes, avec un liséré rouge. Les syphilides anales

persistent; syphilides papuleuses du scrotum.

2 février. La bouche va mieux. A la suite de masturbations

énergiques, l'enfant a été pris d'une balano-posthite intense, avec

oedème du prépuce. Injections entre le gland et le prépuce

avec de l'eau phéniquée, puis du vin aromatique.

10 zttctrs. - Rien au cuir chevelu. Adénites cervicales. Papules .

brunâtres sur les bras, les avant-bras, le tronc, les membres infé-

rieurs. Elles prédominent entre les seins et à la face interne des

genoux. Petites adénites inguinales. Gingivite encore assez pro-

noncée, haleine fétide. Ulcération superficielle sur la face interne

de la joue gauche entre les deux arcades dentaires ; langue

gonflée ; ulcération superficielle du pilier antérieur droit du voile

(38 IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE.

du palais ; le reste du voile est rouge, comme oedém ? lié. Exulcé-

ration de la partie inférieure du gland et dans le sillon balano-

préputial. Syphilide fissurée à l'anus. Même traitement; cautérisa-

tion à l'acide chlorhydrique.

17.-Amélioration notable de la stomatite etde la balano-posthite.

28. La balano-posthite est guérie. Hier C... a volé à un autre

enfant une tablette de chocolat et bien qu'on en trouve la moitié

encore dans sa poche, il nie son vol. A la suite de cette décou-

verte, il a été pris d'un accès de colère, a cassé deux carreaux à

coups de poing, et fendu une porte à coups de pied, adressant en

même temps des expressions obscènes aux infirmières, et mena-

çant de poursuivre ses dévastations. On le prive de vin et on

l'envoie à la Sûreté pendant vingt-quatre heures.

13. Guérison complète de la bouche et de la gorge. C... re-

tourne en classe.

21. Adénite axillaire douloureuse.

29. Fluctuation au niveau de l'aisselle : incision, drainage.

Mai. - Les notes de classe sont meilleures : C... devient docile,

attentif, la lecture est bonne ainsi que l'écriture. Mémoire assez

facile.

16. -Il existe encore de l'alopécie, plusieurs taches brunâtres

dans les cheveux ; quelques ganglions cervicaux ; une légère éro-

sion du pilier antérieur gauche du voile du palais, deux rhagades

à l'anus. Traitement : Continuer le sirop d'iodure de fer et les

douches.

7 juin. C... s'est enfui le 4 juin avec six autres de ses cama-

rades. L'un d'eux Filh..., ayant été puni avait formé le projet de

s'évader; il avait entraîné dans son complot, Court... ainsi que

Fer... et Auch... Après le diner ils ont préparé des échelles pour

s'enfuir. A ce moment Lem... et Goux... sont venus les rejoindre

et plus tard Gauh... qui était couché dans la cour, les apercevant

est venu avec eux. Après être sortis, ils se sont séparés en deux

bandes. La première composée de Filh..., Auch..., Ferr... et Cour-

tois a traversé Paris, est allée à Pantin chez le parrain d'Auch...

qui l'a gardé, et a renvoyé les trois autres. Ceux-ci ont pris le

tramway car ils disposaient à eux trois de deux francs. Ils sont

allés chez le père de Ferr..., se sont cachés dans une cave où ils

auraient passé la nuit. Le lendemain matin, le père de Ferr... les

a trouvés, a gardé son fils et renvoyé les deux autres. Ceux-ci ont

bu du vin chez le « troquet », acheté du pain et fumé des ciga-

rettes. Ils se sont séparés boulevard Sébastopol. Alors Court...

serait allé chez son père qui l'aurait fait manger puis lui aurait

intimé l'ordre de rentrer à Bicêtre. Il est revenu seul le ;i à une

heure.

17. Aujourdhui il avoue qu'il a menti, qu'il n'est pas allé

chez son père, mais est revenu spontanément â l;ic8lre.

INSTABILITÉ MENTALE ; IMPULSIONS GÉNITALES. 69

2o juillet. Refuse de travailler au dortoir, sous prétexte que

sa mère le lui a défendu.

26 ? Injures grossières contre ses maîtres. Privation de vin

et de promenade.

31 août. Quelques ganglions cervicaux et inguinaux. Rien aux

organes génitaux, ni dans la gorge.

22 novembre. Encore quelques ganglions cervicaux à gauche.

Aucune syphilide. Prend régulièrement ses douches.

D'après les notes de classe, Court... se montre assez intelligent,

mais est très emporté, colère, grossier; son jugement est

erroné. 11 travaille assez bien, devient plus docile. Il fait des pro-

grès en gymnastique. Le développement physique s'opère régu-

lièrement. Le poids de Cour ? qui était de 44 kilog. 700 à l'entrée

est actuellement de 51 kilog. 80. Sa taille de lm48 en 1881, est à

la fin de 1882 de III, 55. Il a cessé les douches le 30 novembre.

1883. -- 2 janvier. Frisson violent avec fièvre. T. R. 40°, 7.

Soir : T. R. 38°, 5.

3. T. R. 37°, 7. Soir : T. R. 41°.

4. Langue sale, nausées. Rate grosse. Rien à l'auscultation

de la poitrine. T. R. 38°, 1. - Traitement : Eau de sedlitz; sulfate

de quinine, 1 gramme. Soir : T. R. 37°, 2.

5. - T. R. 3J°, 3. -Soir : 38°, 4.

6. T. R. 37°, 3. Soir : 37". Langue toujours sale; pas de

selle depuis la purgation ; deux verres d'eau de sedlitz.

7. - Amélioration, appétit. T. R. 3în, 2. - Soir : T. R. 37°.

Exeat le 8 janvier.

9 juillet. - Court... est en punition à l'infirmerie, faute de cellules

et par manque de places à la Sûreté pour avoir battu des enfants

plus jeunes que lui. Selon son habitude, Court... est allé dans les

cabinets avec Rem... et Vign... et a essayé d'avoir des rapports a

posteriori avec le premier.

22 août. Pas d'accidents syphilitiques nouveaux. Verge volu-

mineuse ; testicules bien développés. Masturbateur effréné ; il dit

qu'il ne peut s'en dispenser. On est obligé de lui mettre le manchon

la nuit. Traitement : Hydrothérapie qui a commencé au mois

d'avril et se continuera jusqu'au mois de février 1884.

26 décembre. Les notes de classe nous apprennent que Court...

s'est amélioré, qu'il est moins emporté, qu'il devient courageux et

docile. De même, au point de vue physique, il s'est développé; son

poids a augmenté de 9 kilogrammes (60 kilogr. 900) en un an et sa

taille de 8 centimètres CI m. 63). Au dynamomètre Mathieu : «

3 : i kilogrammes à droite et 20 à gauche.

Puberté. Il porte de nombreux poils noirs frisés abondants

au pénil, à la racine des bourses, à l'anus. Il avoue se masturber

mais moins fréquemment.

70 IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE.

1884. 27 février. Eruption pustulo-crustacée au visage qui

disparait vers le milieu d'avril sans traitement général.

3 avril. On lofa pris la main dans la braguette d'un enfant. 0 n

l'interroge et il répond qu'il demande à passer aux adultes, qu'il

ne peut rester aux enfants et qu'avec eux <t il no pense qu'à ça ».

Depuis quelque temps, on était assez content de lui, de son travail

et de sa conduite. Il a obtenu le certificat d'études primaires, il

commence à apprendre sérieusement son métier de cordonnier.

Décembre. Les notes de classe et d'atelier sont bonnes ;

l'écriture devient courante. A la gymnastique, il est docile et est

moniteur d'un groupe d'idiots. 11 fait presque seul un soulier.

1883. Janvier. La taille a augmenté de deux centimètres

(ln,G5) en un an. Il présente des moustaches naissantes. Il a l'in-

tention de s'engager comme soldat.

6 mari. - Ses parents ont rempli les formalités nécessaires pour

son engagement. Refusé à la revision parce qu'il a un léger trem-

blement des paupières.

2,1 juillet. II est souvent brutal avec les enfants, surtout à la

gymnastique où il est moniteur. Hier il a bousculé l'enfant Carl...

qui ne voulait pas se mettre en rang. Les impulsions génitales ont

diminué. Il ne met plus les autres enfants sur ses genoux pour

s'entre-masturber. Parfois encore il lui arrive d'embrasser, en le

mordant légèrement à la nuque, l'enfant Leu... Lorsqu'il bruta-

lise les autres, ceux-ci lui disent des injures et font allusion à ses

anciennes histoires.

36 août. - Hier, ayant été privé de vin pour avoir fumé, C... a

cassé son verre à boire, puis trois carreaux et s'est blessé légère-

ment à l'avant-bras. Consigné pour deux mois; huit jours à la

Sûreté.

45 octobre. - Accès de violence parce qu'on l'avait fouillé pour

trouver le tabac qu'il cachait. Il a dit des grossièretés et a refusé

de travailler.

30 novembre. Embarras gastrique avec courbature.

'14 décembre. Il y a quatre jours les enfants étant réunis au

gymnase le soir, à une séance de lanterne magique, C... a attiré

l'enfant Leu..., l'a embrassé, l'a masturbé et s'est fait masturber

par lui. Il continue à embrasser les autres enfants. Il assure ne pas

avoir de rapports sodomiques ( ? ).

Puberté. La moustache est encore naissante. Les poils com-

mencent à gagner la partie interne des cuisses et sont abondants

à l'anus. Les testicules, égaux, sont de la dimension d'un gros

oeuf de pigeon. La verge a 95 mm. de circonférence et 75 mm.

de longueur. La taille n'a pas augmenté depuis l'an dernier(l ? 65),

mais le poids est de 5 kilogrammes en plus (64 kil.) (janvier 1886).

Au dynamomètre 55 des deux côtés.

INSTABILITÉ MENTALE. 71

1886. 10 janvier.- C... avoue avoir volé 25 francs à ses parents,

lors de sa dernière sortie et les avoir dépensés avec des amis et

des femmes.

4 février. C... se plaint de faiblesse générale et de maux de

tête; remis après quelques jours de repos.

24 juin.- Il travaille à la cordonnerie où on est content de lui,

et va à l'école des adultes'. Son caractère devient meilleur, il est

poli; pas de plaintes, ni d'impulsions.

10r décembre. - C... s'est piqué il y a quatre jours avec une

alène, à la partie supérieure et externe de la jambe gauche.

2. Plaque érysipélateuse s'étendant depuis la plaie jusqu'à la

partie moyenne du mollet. Inappétence.

4. - La jambe est très enflée; la rougeur érysipélateuse qui a

disparu au-dessus du genou, s'étend de la partie supérieure du

creux poplité jusqu'au tiers inférieur de la jambe. Douleurs vives

la nuit avec élancements. La palpation est très douloureuse au

niveau de la saphène externe, surtout vers la malléole externe;

langue sale, anorexie, nausées. Pouls rapide. Traitement : appli-

cation d'onguent mercuriel; eau-de-vic allemande 15 grammes;

sirop de morphine ; sulfate de quinine.

6. P. 88. Aspect général meilleur, C... mange avec assez

d'appétit. La jambe est tuméfiée; l'empâtement s'est étendu de

haut en bas. La peau a toujours une teinte érysipélateuse, pas de

bourrelet; phlyctène. La jambe est moins douloureuse; à la pal-

pation, sensation de fausse fluctuation. Deux incisions sont faites

à la partie interne et à la partie externe de la jambe jusqu'à l'apo-

névrose. Il ne sort pas de pus; mais le tissu cellulaire sous-cutané

est infiltré, dur, lardacé. Pansement phéniqué.

7. La température est toujours élevée. L'état général reste le

même. On trouve un peu de pus dans la partie interne de la

plaie qu'on fait sourdre par la pression. Le pus siège évidemment

sous l'aponévrose celle-ci est incisée et laisse écouler une grande

quantité de pus. Drainage; pansement phéniqué.

10. Pas de fièvre, la douleur a disparu, la peau ne se recolle

pas.

12. La fièvre reparait ainsi que la douleur de la jambe. Rou-

geur et douleur à la pression au niveau du creux poplité. Issue

abondante de pus.

14. Fièvre. Etat général mauvais. Douleurs vives et empâte-

ment au niveau du creux poplité.

15. On chloroformise le malade, le sommeil se produit facile-

ment sans période d'excitation. On constate qu'il existe un clapier

rempli de pus au niveau du creux poplité, et un décollement se

dirigeant en bas vers le tiers inférieur de la jambe, profond et

1 J'avais alors organisé des cours pour les épileptiques adultes(B.).

72 IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE; IMPULSIONS GÉNITALES.

long de 25 centimètres environ. On fait une contre-ouverture au

niveau du premier, mais on ne peut le faire pour le second,

qu'on se borne à drainer. Au bout de vingt-cinq minutes, le

malade se réveille. Il est loquace, parle avec vivacité et même une

certaine éloquence. Il demande qu'on l'achève « pour qu'il puisse

aller rejoindre ses vieux camarades, dont il a vu la tête au

musée, etc. ».

23. Un peu de diarrhée, coliques assez violentes. Potion avec

extrait thébaïque.

26. Guérison complète du phlegmon de la jambe.

1887. Janvier. - A l'école, C... devient plus docile. Il travaille

assez bien à la cordonnerie. 11 est toujours emporté mais plus

poli. Poids : 64 kil. 200 ; taille : {m,61 : i.

Puberté : Moustache assez fournie, duvet assez abondant sur les

joues; bouquet de poils de chaque côté du menton. Poils moyen-

nement abondants sous les aisselles; poils très rares autour des

seins. Rien sur la poitrine ni sur le ventre. Poils longs, châtains,

bouclés, abondants sur le pénil et à la racine des bourses. Quelques-

uns seulement sur les aines et à la partie supérieure des cuisses.

Verge : circonférence 9b millimètres; longueur 95 millimètres.

Gland découvert. Testicules du volume d'un petit oeuf de poule.

Poils assez abondants à l'anus et à la partie inférieure des fesses.

Février. Quoique étant aux adultes, il continue venir tra-

vailler à l'atelier de cordonnerie des enfants. Le b avril il quitte

son atelier dans l'après-midi, vers une heure et demie, et entraîne

le petit Via... dans les cabinets et le déculotte. Il y a quelques

jours, il a fait des propositions du même genre à un autre

enfant. Ces impulsions génésiques ne s'étaient pas manifestées

depuis longtemps. Il cherche le plus possible à rester avec les

enfants; mais il ne se précipite plus sur eux comme autrefois,

pour les embrasser jusqu'à les mordre aux joues et au cou.

21 avril. xi. Féré, qui a pris le service des adultes au mois de

février, renvoie C... Il rcvient nous voir à ce moment, il cherche

à s'occuper non comme cordonnier, mais comme homme de

peine.

Puberté. - Moustaches fines, assez fournies; un bouquet de

poils de chaque côté du menton; duvet peu abondant aux joues.

Poils moyennement abondants sous les aisselles; une dizaine

autour des mamelons. Rien sur la poitrine ni sur le ventre. Poils

longs châtains, bouclés, abondants sur le pénil et à la racine des

bourses; quelques-uns seulement sur les aines et il la partie supé-

rieure des cuisses. La circonférence de la verge et sa longueur

sont de 9b mm. Gland découvert. Bourses rétractées. Testicules du

volume d'un petit oeuf de poule. Poils assez nombreux à l'anus et

à la partie inférieure des fesses.

6 juillet. Nous voyons la mère du malade ; elle nous raconte

INSTABILITE MENTALE. I.i ,">

que son fils n'a pu rester à la caserne où son père est maréchal

des logis, parce qu'on l'en avait expulsé jadis (à quatorze ans).

Elle l'a placé chez sa soeur à Montreuil ; il faisait les commissions

de sa tante. Il lui arrivait parfois de refuser de se lever et de

l'aider aux soins du ménage. Il battait les poules, les enfermait

dans la cave, adressait des injures à sa tante. Il avait là deux

cousines, l'une de vingt, l'autre de vingt-un ans, il n'a pas essayé

d'avoir des rapports avec elle, et il n'a pas même, dit-il, été tenté

d'en avoir. Celles-ci le craignaient, le fuyaient, car il les insultait.

Il cachait les objets appartenant à sa tante, pour le plaisir de la

faire chercher. Une de ses cousines a prétendu qu'il lui avait volé

une bague, ce qu'il nie formellement. Cette histoire l'aurait fait

renvoyer par sa tante. Cette dernière a dit à sa mère, qu'il pas-

sait son temps fréquemment dans le bois de Vincennes, et elle

croit qu'il était accompagné d'une femme. Quant à lui, il nie ce

fait, et prétend qu'il allait dans les bois pour lire, dessiner, et

qu'il était toujours seul.

De Alontreuil, il est revenu à Paris; sa mère a tenté de le gar-

der près d'elle, essayant en même temps de le placer. Dans toutes

les maisons de cordonnerie, où l'avait envoyé son chef d'atelier

de Bicêtre, il n'a pu entrer, car il n'avait pas les capacités pro-

portionnées à ses prétentions Il a ensuite cherché une place de

garçon marchand de vins ; il a échoué, parce qu'il n'avait pas de

certificat; il en a été de même pour des emplois de courtier,

d'homme de peine. D'après sa mère, on ne peut lui conGeraucun

paquet, il l'oublie, où le laisse sur un banc, ou sur l'omnibus.

Elle prétend qu'en trois ou quatre endroits, où il a été présenté

pour faire des courses, on en a pas voulu, « quand on a vu la

façon dont il tourne les yeux ». Pendant tout ce temps il est allé

plusieurs fois avec des femmes. Il nous dit lui-même : « Quand je

suis libre, que j'ai de l'argent, je vais avec des femmes; mais

quand je suis renfermé, je suis porté pour les petits garçons.

Néammoins, cette excitation a bien diminué. » Pourtant sa mère

nous dit qu'il embrasse toujours violemment les enfants.

Sa mère se décida à l'envoyer à l'Orphelinat de Saint-Fiacre,

près de Meaux, où on le prit à l'essai, pour le faire travailler à la

terre. Le directeur en avait fait un moniteur, et lui avait confié

vingt enfants, il s'est fait masturber par trois ou quatre d'entre

eux, mais il nous assure n'avoir pas essayé de se livrer sur eux,

à des actes de pédérastie. Les enfants questionnés ont fait des

aveux, et il a été renvoyé le 26 juin. Depuis ce temps sa mère le

loge dans une petite chambre de la rue Geollroy-Lasnier. Il se

'Il est difficile de faire comprendre aux parents que leurs enfants, étant

des malades, sont au-dessous des apprentis ordinaires. De là, des

obstacles à leur placement.

74 IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE.

lève tard, sous prétexte qu'il est fatigué, et il ne fait rien ; il reste

dans les escaliers, sans se préoccuper s'il gêne le passage, ce qui

fait crier les voisins; ou bien il s'assied sur le trottoir, rassemble

des enfants autour de lui. Il nie ce fait, et nous assure ne s'être

porté sur aucun enfant à des « actes malpropres mais il aime

toujours à les embrasser. Sa mère craint qu'il ne se rende cou-

pable de quelque délit contre les moeurs. La logeuse trouve qu'il

est malade, indolent, et que souvent il répond d'une façon inco-

hérente. 11 ne fait rien, cherche de l'ouvrage, aux Halles, à la

voirie, au débardage, dans plusieurs hôpitaux, et ne peut rien

trouver. Son linge est toujours taché, dit sa mère; si on lui en

fait la remarque, il répond qu'il ne peut faire autrement. Il est

insolent, grossier à la moindre observation.

Il porte quelques ganglions indurés dans les aisselles et dans les

aines, et quelques taches pigmentées à la région lombaire gauche.

Taille : 1 il, 67 ; poids : 60 kilogrammes.

Il juillet. Rentre à Sainte-Anne d'où il est envoyé le

j 3 juillet dans le service de M. Féré, à Bicêtre.

4 août. Mis en liberté. Pendant son séjour dans le service de

M. Féré, il a été soigné pour une blennorrhagie.

- 13 octobre. Depuis son départ de Bicêtre, il a remplacé un de

ses amis, garçon de magasin chez un teinturier, pendant trois

semaines. A partir de là il travaille aux Halles, où il fait des cor-

vées. Il arrive à gagner de 1 franc 50 à 3 francs. L'après-midi, il

a camelotte D, vend des épingles, des indicateurs. Il n'a pas

essayé de continuer son métier, on ne trouve rien : dit-il. n'a pas

tenté de se livrer à des actes de p édérastie, ni de se faire mas-

turber par des enfants. Il va souvent avec des femmes « pour

trente sous, pour un demi-setier quelquefois ». Il n'est pas assez

bon ouvrier, pour exercer le métier de cordonnier, et « je n'ai,

dit-il, d'autre certificat que celui de sortie de Bicêtre ».

Réflexions. I. -L'hérédité nous paraitpouvoir être invo-

quée avec raison : du côté paternel nous trouvons l'alcoolisme

et l'idiotie compliquée d'épilepsie; du côté maternel, le ne ?

vosisme et l'aliénation mentale. Notons aussi la mort par

convulsions de plusieurs frères et soeurs.

IL Dans les antécédents personnels, nous devons relever

en premier lieu l'impression pénible et persistante éprouvée

par sa mère durant la grossesse et occasionnée par la vue d'une

parente idiote et épileptique. C'est là une cause dont l'influence

est difficile à apprécier, mais que nous avons soin de toujours

mentionner dans nos observations, espérant pouvoir plus tard

faire la part de la réalité et de l'exagération. Notons ensuite une

INSTABILITE MENTALE. 0

hémorrhagie abondante du cordon, l'incontinence d'urine jus-

qu'à quatre ans et celle des matières fécales jusqu'à douze ans.

III. C'est à partir de son envoi à l'école qu'on s'aperçut

que son intelligence n'était pas aussi développée que celle des

enfants de son âge. Il apprit difficilement à lire et à écrire; sa

turbulence, ses taquineries, ses grimaces, ses contorsions, le

font renvoyer successivement de plusieurs écoles. On ne se

rendait pas compte qu'il était malade. Il en fut de même d'ail-

leurs à l'Ecole d'enfants de troupes où l'on attribuait son

incontinence des selles à sa malpropreté volontaire. Pour l'en

corriger, on exerça sur lui des sévices blâmables, pratique

malheureusement trop fréquente et qui n'a d'autre résultat

que d'aggraver l'état mental.

IV. Placé à quatorze ans en apprentissage, son instabi-

lité mentale devint de plus en plus évidente : il fut renvoyé

successivement de plusieurs maisons. Au lieu de le faire soi-

gner, ses parents le mirent en correction. C'est là une mesure

qui ne devrait être prise qu'après réflexion et après un examen

médical sérieux. Si les médecins de ces établissements exami-

naient avec soin cette catégorie d'enfants, ils s'apercevraient

bien vite qu'ils ont affaire à des malades et ne les garderaient

pas en prison, mais les feraient diriger sur les hôpitaux spé-

ciaux. Ajoutons qu'à son imbécillité et à son instabilité men-

tale, se joignaient des troubles psychiques consistant en des

interprétations erronées : il s'imaginait qu'on se moquait de

lui. Rappelons en passant que, à une époque, vers douze ans,

il fut atteint de crises convulsives qu'un médecin aurait quali-

fiées d'épileptiques. Jamais ses parents ni nous-mêmes, durant

son séjour à Bicêtre n'avons constaté d'accidents comitiaux.

En revanche, nous avons observé assez fréquemment de violents

accès de colère.

V. Les accidents dont nous venons de parler et la perver-

sion des instincts sur laquelle nous allons revenir tout à

l'heure étaient compliqués de stigmates physiques multiples

que nous nous bornerons à énumérer : Nystagmus, tremble-

ment des paupières et des mains, irrégularité de la voûte pala-

tine qui est ogivale à un degré prononcé, vice de la prononciation

(zézaiement), malformation des organes génitaux(hypospadias).

VI. Nous devons tout particulièrement insister sur les

impulsions génitales très accusées chez ce malade. De bonne

heure il se livra à l'onanisme, et essaya d'avoir des rapports

i 6 IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE ET INSTABILITÉ MENTALE.

avec des petites filles, puis il excita les autres enfants à se livrer

à la masturbation personnelle ou réciproque. Pendant son

séjour à Bicètre, nous avons observé des périodes de calme et

des périodes durant lesquelles ces impulsions devenaient vio-

lentes. Alors il cherchait sans cesse à attirer les autres enfants

vers lui, à les toucher, se faire toucher, àpratiquer sur eux la

pédérastie, les embrassant sur la bouche, leur mordant le cou.

Aussi n'y a-t-il rien d'étonnant qu'il ait été une des premières

victimes de l'infirmier pédéraste qui lui communiqua la syphilis.

Il ne s'agit pas ici d'une véritable inversion du sens sexuel.

En effet, contrairement aux malades types de cette catégorie,

avant son entrée à Bicêtre et après sa sortie, il rechercha les

femmes et vola de l'argent à ses parents pour avoir des rapports

avec elles et contracta même une blennorrhagie.

VIL- Nous avons cru devoir réunir dans le tableau suivant

le développement du poids et de la taille de notre malade,

de 1881 à 1888.

APPENDICE

IiOI R1VILLG, 1888. si

I.

R : 11'PULtT SUR l'organisation d'un concours pour l'admission aux

EMPLOIS DE MÉDECINS ADJOINTS DES ASILES D'ALIENES, au Hou de la

Commission spéciale composée de MM. BOURNEVILLE, médecin de

Bicêtre, député de la Seine, président; Donnet, médecin direc-

teur de l'Asile de Vaucluse, et GIRAUD, médecin directeur de

l'Asile S'-Yon1. 'IIIiIIi\

Monsieur le Ministre,

Par un arrêté en date du G mars dernier, et conformément à

un avis du Conseil des inspecteurs généraux des établissements de

bienfaisance et des asiles d'aliénés, vous nous avez chargés d'étu-

dier le meilleur mode de concours à organiser pour l'admission

aux emplois de médecins adjoints des asiles publics d'aliénés.

La commission s'est réunie lesamedi 17 mars. Elle a pris connais-

sance aussitôt après son installation par M. Monod, directeur de

l'Assistance publique et des institutions de prévoyance, des docu-

ments mis à sa disposition par l'Administration et elle a retenu

comme base de sa discussion le rapport fait au Conseil des ins-

pecteurs qui l'accompagne. Elle n'avait pas à se préoccuper de la

question de principe, c'est-à-dire du recrutement des médecins

adjoints par le concours, puisque ce mode de recrutement est

admis dès maintenant par vous. C'est en effet le meilleur moyen

d'apprécier l'intelligence et les connaissances des candidats. Il

y a longtemps d'ailleurs que le Conseil général de la Seine en a

réclamé le rétablissement pour le recrutement du personnel mé-

dical de ses asiles. Nous disons le rétablissement et non pas l'ins-

titution, car le Concours a existé jusqu'en 189 pour les quartiers

d'hospice de Bicêtre et de la Salpêtrière qui ont constitué durant

une longue période les seuls asiles consacrés aux aliénés dans le

département. Le Concours, supprimé par l'Empire, a été réiabt

en 1879 par M. Herold, préfet de la Seine, pour ces deux éla

blissements. De plus, M. Herold avait ultérieurement décidé que

la place de médecin adjoint de l'Asile clinique (Sainte-Anne) serait

donnée à lasuite d'un Concours analogue à celui des médecins des

quartiers d'aliénés de Bicêtre et de la Salpêtrière. 11 n'avait pas

voulu étendre ce mode de nomination au recrutement des médecins

Afin de dégager notre responsabilité au sujet de l'arrêté ministériel

qui lise les conditions du concours pour les places de médecins adjoints

dans les asiles, nous publions le rapport que nous avons été chargé de

l'aire sur cette réforme.'

80 APPENDICE.

en chef de Sainte-Aune', Vaucluse, et Ville-Evrard, malgré son vif

désir, parce que la question était soumise à l'étude de la Commis-

sion ministérielle chargée d'étudier les réformes que peuvent com-

porter la législation et les règlements concernant les asiles d'aliénés.

Le cinquième groupe de cette commission, ainsi que le rappelait

M. Regnard, avait formulé ce voeu que les médecins adjoints et

les médecins en chef des asiles fussent nommés au concours 2.

Ceci rappelé, voyons comment il convient d'organiser le con-

cours. Les uns ont proposé de faire un concours central et unique

pour toute la France; les autres de faire des concours régionaux,

et en particulier de faire un concours spécial pour les asiles du

département de la Seine. Le Conseil des inspecteurs généraux

s'est rallié au Concours régional. Voici, d'après le rapportde M. Re-

gnard, les raisons qui ont motivé la décision de ce Conseil :

« La première condition pour rendre le con cours efficace, dit-il,

est évidemment de s'assurer un nombre suffisant de candidats.

Or, un examen rapide de la question en fait apercevoir de suite

toutes les difficultés. Etablir à Paris le siège du Concours pour tous

les départements, en distribuant les candidats heureux de Lille à

Marseille et de l'aris à Nancy, suivant les vacances, parait d'abord

une tentative bien risquée. D'une façon générale, et en mettant à

part les hommes qui ont l'ambition de faire leur chemin à Paris,

les médecins désireux d'entrer dans les asiles tiennent à rester,

sinon dans leur département d'origine, au moins dans une loca-

lité qui n'en soit pas trop éloignée. Et, comme les places vacantes

ne seraient pas déterminées dans le système d'un concours central

et unique, beaucoup déjeunes gens seraient certainement détournés

de l'idée de concourir par la crainte d'être envoyés à cent lieues

de leur pays. On ne peut songer d'autre part à instituer le con-

cours par département : il est trop certain que dans beaucoup de

cas, les candidats ne se présenteraient qu'en nombre insuffisant.

« Pris entre les difficultés d'un Concours central et unique, et

l'impossibilité du système par département, vous avez pensé avec

moi, Messieurs, que l'établissement d'un Concours par région pou-

vait résoudre le problème. On prendrait pour centre des villes

possédant des facultés de médecine ou des Ecoles préparatoires,

comme Nancy, Lyon, Lille, Bordeaux, Caen ou Rennes, Angers

ou Nantes, etc. Ce serait l'affaire d'une commission spéciale de

déterminer ces centres, qui, d'ailleurs, ne devraient pas être trop

multipliés. »

« S'il m'était permis d'ajouter mon opinion personnelle, ajoute

.NI. Regnard, j'émettrais le voeu que le département de la Seine

1 Arrêté du 3 mars 1879.

, Bourneville. Rapport sur le personnel médical el administratif des

asiles d'aliénés.

APPENDICE. - 81

formât une région à lui seul, tant en raison du nombre de ses

asiles, qu'à cause de sa situation spéciale. Les objections soulevées

contre cette opinion ont été réfutées d'une façon péremptoire, à

mon avis, par le D'' Bourneville, dans le rapport auquel je faisais

allusion plus haut. »

« On a objecté, dit-il, la crainte de créer une oligarchie médicale

et aussi celle d'éloigner plutôt les jeunes médecins de la spécialité

des maladies mentales. Mais cette oligarchie médicale existe dès

maintenant pour les médecins des hôpitaux de Paris, pour les mé-

decins des hôpitaux et les professeurs des facultés de médecine

de toutes les grandes villes. Cette suprématie d'ailleurs est juste,

puisqu'elle repose en général sur la valeur scientifique démontrée

par des Concours répétés et par des publications souvent nom-

breuses. Loin d'éloigner les candidats, le Concours spécial en crée-

rait, car beaucoup d'internes des hôpitaux qui se font inscrire

pour le Concours de médecins ou de chirurgiens se dirigeraient

sur celui des asiles, et cela parce qu'ils pourraient demeurer à

Paris ou dans le voisinage, et rester dans le courant scientifique,

tandis qu'ils ne prendront jamais part à un Concours qui aurait

pour conséquence, s'il se termine en leur faveur, de les éloigner

pour longtemps des asiles de la Seine 1. »

« Dans tous les cas, messieurs, reprend M. Regnard, si l'on n'ac-

cepte pas la spécialisation de la Seine, en raison du caractère.

insolite que pourrait avoir cette mesure en apparence, vous serez

certainement d'accord avec moi, pour reconnaître qu'on ne peut

joindre aux asiles de ce département, pour former la région dont

il sera le centre que les deux établissements les plus rapprochés,

ceux de Clcrmont et d'Evreux. »

La discussion s'est engagée sur le premier article de l'Avis du

Conseil des inspecteurs, article ainsi conçu :

« Le Concours devrait être établi par régions, en prenant pour

centre de chacune d'elles soit une faculté, soit une Ecole prépara-

toire de médecine. »

M. Donnet, après avoir rappelé que, suivant le nouveau projet

de loi sur les aliénés, adopté par le Sénat, les médecins adjoints

seront nommés sur une liste de présentation dressée à la suite

d'un concours public, déclare qu'on pourrait peut-être, dans l'in-

térêt de l'élude des maladies mentales dans les Facultés de pro-

vince, organiser au siège de ces facultés, un concours pour les

places de médecins adjoints vacantes dans les asiles du ressort de

chacune de ces Facultés. Il écarte les écoles préparatoires. Enfin,

' Rapport sur l'organisation du personnel médical et administratif des

asiles d'aliénés, présenté à la Commission chargée d'étudier les réformes

que peuvent comporter la législation et les règlements concernant les

asiles d'aliénés, par l3ounxFwo.vs (1SS3).

82 APPENDICE.

il estime que les médecins adjoints d'une région pourront être

nommés médecins en chef ou médecins directeurs dans toutes les

autres régions.

M. Giraud est partisan d'un concours unique pour toute la

France. Il croit que l'objection tirée de ce que les candidats pour-

raient reculer devant les frais d'un déplacement, lorsqu'ils rést-

dent loin de Paris ne lui paraît pas fondée. En pratique, les jeunes

docteurs qui désirent devenir médecins d'asile ne se conten-

tent pas de faire une demande écrite; ils viennent faire des

démarches à Paris. En second lieu, il soutient avec M. Donnet

que l'avancement des médecins adjoints ne devrait pas être limité

à la région dans laquelle ils ont été nommés. « Il n'y a pas lieu,

dit-il, de tenir compte des circonscriptions pour la nomination

des chefs de service, car ce serait créer des inégalités parmi les

médecins adjoints. » On serait même amené à retarder l'avance-

ment des uns au profit des autres moins méritants, si le hasard

veut que des vacances aient lieu dans telle ou telle région, et l'on

produirait ainsi du découragement.

Il y a dans les asiles des postes de début pour les chefs de ser-

vice. Ce sont les asiles de médiocre importance et loin des grands

centres de population. Si l'on supprime le roulement des chefs de

service au début de leur carrière, on nuira au bon recrutement

des médecins aliénistes, parce que ceux qui acceptent volontiers

une résidence peu agréable avec la perspective d'avoir un poste

plus important quand ils auront acquis de l'expérience et fait

leurs preuves se récuseront s'ils doivent passer toute leur carrière

dans ces postes qui sont aujourd'hui des postes de début. Ces

asiles ne seront plus demandés que par des médecins ayant des

intérêts dans le pays, et souvent n'ayant pas réussi à avoir une

clientèle. »

M. Bourneville a insisté vivement en faveur d'un concours régio-

nal. C'est un excellent moyen d'exciter l'émulation au sein de

chacune des Facultés, sans compter qu'on est ainsi assuré d'avoir

des candidats en nombre suffisant. Beaucoup d'anciens internes

des hôpitaux de Paris, de Lyon, de Bordeaux, etc., prendront

part à des concours qui ont lieu sous les yeux de leurs maîtres,

de leurs camarades, et qui leur permettront de rester dans le

voisinage de leur pays.

Beaucoup d'anciens internes des hôpitaux hésiteront à prendre

part à des concours qui les exposent à aller comme médecins

adjoints à l'autre extrémité de la France. L'institution du con-

cours et sa spécialisation par régions auront pour résultat d'éle-

ver le niveau du corps médical des asiles d'aliénés.

A la suite de cette discussion, la commission a voté les résolu-

tions suivantes :

Le concours pour les places de médecins adjoints des asiles d'alié-

APPENDICE. 83

nés de France devra être établi par régions, en prenant pour centre

de chacune d'elles les villes qui possèdent une Faculté de médecine

de l'Etat.

Les candidats devront être docteurs en médecine de l'une desdites

Facultés de l'Etat et de nationalité française. Ils seront admis ri

concourir dans toutes les régions, suivant leur convenance.

Les médecins adjoints pourront être nommés médecins en chef ou

médecins-directeurs dans toute la France.

La Commission a ensuite examiné s'il y avait lieu de faire un

concours spécial pour les asiles du département de la Seine, on

raison du nombre et de l'importance des asiles qu'il renferme, ou

si, conformément à l'avis du conseil des inspecteurs, « on ne

devra joindre au département de la Seine, pour la région dont

Paris sera le centre, que les deux établissements les plus rappro-

chés, ceux de Clermont et d'Evreux ».

M. Bourneville a rappelé les raisons qu'il avait données autre-

fois en faveur d'un concours spécial pour les asiles du départe-

ment de la Seine : Multiplicité des asiles (Bicêtre, la Salpêtrière,

Sainte-Anne, Vaucluse, Ville-Evrard, Villejuif, sans compter la

création d'un second asile sur le domaine de Ville-Evrard) ;

population considérable des aliénés (plus de 10,000) ; candidats

nombreux fournis par l'internat des hôpitaux et l'internat des

asiles; nécessité de relever l'enseignement scientifique de la méde-

cine mentale à Paris et d'avoir dans les asiles d'aliénés un per-

sonnel instruit et aussi capable que celui des hôpitaux. Il a ajouté

que si, conformément à l'article 3 de la loi du 10 janvier 1849,

l'administration de l'Assistance publique avait conservé la tutelle

des aliénés, elle aurait procédé pour la nomination des médecins

de Sainte-Anne, Ville-Evrard et Vaucluse, comme elle l'a fait pour

les médecins des quartiers de Bicêtre et de la Salpêtrière et que

les chefs de service de ces asiles seraient médecins des hôpitaux

comme l'étaient ou le sont : MM. Trélat, Archambault, Baillarger.

Delasiauve, Moreau (de Tours), .1. Voisin, Bourneville, Charpen-

tier, Deny, Ch. Féré, Séglas et Chaslin.

Cette opinion avait été soutenue énergiquement par M. Herold,

devant la commission ministérielle. 11 avait signalé la nécessité

d'avoir dans les asiles d'aliénés de la Seine des chefs de service

dans la force de l'âge et capables par leurs travaux scientifiques

de contribuer à la bonne renommée de la Faculté de médecine de ' i

Paris.

Ces raisons n'ont pas été acceptées dans leur intégrité par la :

majorité de la commission. Mais elle a été unanime pour ad-

mettre que, dans l'intérêt de l'enseignement, il y avait lieu de

demander un concours spécial pour la nomination des médecins- z

$4 APPENDICE.

aliénistes chefs de service dans les asiles les plus voisins de

chacune des Facultés, c'est-à-dire :

Pour Paris, les asiles de Sainte-Anne, Bicêtre et la Salpêtrière;

Pour Bordeaux, l'asile de Bordeaux ou du Château Picon ;

Pour Montpetlier, le quartier des aliénés de l'hospice Saint-Eloi;

Pour Nancy, l'asile de Maréville.

Il a été convenu aussi que les conditions de ce concours seraient

équivalentes, autant que possible, à celles des concours pour le

recrutement des médecins ordinaires des hôpitaux. A Paris, par

exemple, les conditions pour les places des médecins, chefs de

service de l'Asile clinique (Sainte-Anne) seraient les mêmes que

celles qui ont été établies pour les concours des médecins alié-

njstes de Bicêtre et de la Salpêtrière, lesquelles sont calquées sur

les conditions du concours des médecins des hôpitaux. Il va de

soi que les médecins de Bicêtre, de la Salpêtrière et de Sainte-

Anne, nommés au concours, auront la faculté de choisir leurs ser-

vices, comme les médecins des hôpitaux, et au sur et à mesure

des vacances et jouiront des mêmes prérogatives. Il en est de

même pour les Facultés de province où il y avait deux asiles. La

Commission pense que, de cette façon, on excileraitl'émulation des

médecins adjoints et on rendrait d'incontestables services à

l'enseignement de la médecine mentale'. '.

La Commission a ensuite abordé l'examen des conditions spé-

ciales du concours et elle a adopté les résolutions ci-après :

Un concours sera ouvert, au chef-lieu de la région, toutes les fois

que le nombre des places vacantes ou des vacances à prévoir sera de

deux au moins. Le nombre des places données sera supérieur d'une

à celui des places vacantes.

Cette proposition subsidiaire a été adoptée à la suite de re-

marques présentées par M.Giraud, au sujet des inconvénients que

peut présenter, pour le service, la vacance prolongée d'un poste

de médecin adjoint dans les asiles où il n'y a qu'un médecin de

ce grade. Dès que le médecin disponible serait placé et qu'il se

produirait une vacance, on procéderait à un concours pour deux

places. Le premier médecin nommé occuperait la vacance et le

second resterait à la disposition de l'administration.

L'avis du conseil des inspecteurs porte « que le jury désigné par

M. le ministre de l'intérieur se composera de médecins en chef

des asiles et d'un inspecteur général des établissements de bien-

faisance, » et il ajoute que « un professeur de la Faculté ou de

l'Ecole préparatoire de médecine, suivant le cas, pourra être dé-

signé aux lieu et place d'un des médecins des asiles d'aliénés » et z

que les juges seraient au nombre de cinq.

4 Le jury du concours des médecins aliénistes de Bicêtre et de la Sal-

pêtrière se compose de trois médecins ordinaires des hôpitaux et de

quatre médecins aliénistes tirés au sort. ·

APPENDICE. 85

La Commission a, été unanime pour modifier cet article, ainsi

qu'il suit : .

« Le jury sera composé : 1° de trois médecins en chef des asiles de

la région ; - 20 d'un inspecteur général, docteur en médecine ?

3° d'un professeur désigné par la Faculté de médecine ; 4° d'un

juge suppléant. Les médecins en chef et le juge suppléant seront

tirés au sort parmi tous les médecins en chef des asiles de la région.

L'avis des inspecteurs généraux indique qu'il y aura deux

épreuves : 1° une question écrite, éliminatoire dans le cas où le

nombre des candidats serait supérieur à trois pour une place;

2° une épreuve orale, comprenant : a) une question de pathologie

interne ou externe ; 6) une question portant sur la pathologie

mentale et la médecine légale des aliénés.

La Commission a été unanime à modifier ainsi cet article :

Les épreuves seront au nombre de quatre : 1° une question écrite,

portant sur l'anatomie et la physiologie du système nerveux, pour

laquelle il sera accordé trois heures au candidat. Le maximum des

points sera de trente;

2° Une question orale portant sur la médecine et la chirurgie ordi-

naires, pour laquelle il sua accordé vingt minutes de l'éflexion et

quinze minutes pour la dissertation. Le maximum des points sera de

vingt. Cette seconde épreuve sera éliminatoire dans le cas où le nombre

des candidats serait supérieur à trois pour une place;

3° Une épreuve clinique sur deux malades aliénés. Il sera accordé

trente minutes pour l'examen des deux malades, quinze minutes de ré-

flexion et tl'enteminutes d'exposition. L'un des deux malades devra être

examiné plus spécialement au point de vue médico-légal. Le maximum

des points sera de trente.

- La plupart des concours actuels présentent une lacune regret-

table et sur laquelle nous avons Souvent appelé l'attention. C'est

qu'on n'y tient aucun compte des travaux antérieurs des candi-

dats. Aussi ne pouvons-nous qu'approuver l'innovation que de-

mande l'avis du Conseil des inspecteurs. Sur ce sujet, la Commis-

sion s'est arrêtée à la rédaction suivante : ..

4° Les travaux scientifiques antérieurs des candidats seront exami-

nés et appréciés par le jury et feront l'objet d'un rapport qui pourra

être communiqué aux candidats sur leur demande. Le maximum des

points sera de dix. Ils devront être donnés au début de la première

séance de lecture des compositions écrites..

La Commission a pensé que le concours pour les places de mé-

decins adjoints devrait être supérieur aux concours habituels de

l'internat et qu'il était indispensable de se rendre compte si les

candidats avaient étudié non seulement la pathologie mentale,

mais encore et surtout la clinique mentale.

86 APPENDICE.

Tel est, monsieur le Ministre, le résultat des travaux de IaCom-

mission que j'ai été chargé par elle de vous transmettre. Elle es-

père que vous accepterez les propositions qu'elle vous soumet et

que, dans un délai très rapproché, vous voudrez bien organiser le

concours pour le recrutement des médecins adjoints de tous les

asiles de France et un concours spécial pour les places de méde-

cins-chefs de service dans les asiles d'aliénés, situés dans le voisi-

nage des six Facultés de médecine de France.

La Commission s'est réunie le mercredi, 9 mai, pour entendre

la lecture du rapport qui précède. Elle en a approuvé les termes

et en a adopté toutes les conclusions que nous reproduisons

ci-après.

CONCLUSIONS.

I. -Le concours pour les places de médecins adjoints dans les

asiles d'aliénés de France, devra être établi par régions, en pre-

nant pour centre de chacune d'elles, les villes qui possèdent une

Faculté de médecine de l'Etat. Les candidats devront être docteurs

de l'une desdites Facultés de l'Etat et de nationalité française.

Ils seront admis à concourir dans toutes les régions, suivant leur

convenance.

11.- Les médecins adjoints pourront être nommés médecins

en chef ou médecins-directeurs dans toute la France.

111. Il sera installé un concours pour la nomination des mé-

decins aliénistes chefs de service dans les asiles les plus voisins de

chacune des Facultés, c'est-à-dire pour Paris, les asiles de Sainte-

Anne, Bicêtre et la Salpêtrière ; pour Lyon,.l'asile de Bron;

pour Bordeaux, l'asile de Bordeaux ; pour Lille, l'asile d'Ar-

mentières; - pour Montpellier, .le quartier d'hospice ; pour

Nancy, l'asile de Maréville.

Les conditions de ce concours seront équivalentes à celles des

concours pour le recrutement des médecins ordinaires des hôpi-

taux. Dans le cas où il y aurait deux asiles ou quartiers d'asile, il

sera établi un roulement à l'unanimité entre tous les chefs de

service nommés au concours.

IV. Un concours sera ouvert au chef-lieu de la région toutes

les fois que le nombre des places vacantes de médecins adjoints,

ou des vacances à prévoir, sera de deux au moins. Le nombre des

places données sera supérieur d'une à celui des places vacantes.

V. - Le jury sera composé : Io de trois médecins en chef des

asiles de la région ; 2° d'un inspecteur général, docteur en

médecine ; 3° d'un professeur désigné par la Faculté de méde-

cine ; 4° d'un juge suppléant. Les médecins en chef et le juge

APPENDICE. Si -1

suppléant seront tirés au sort parmi tous les médecins en chef de

la région.

VI. Les épreuves seront au nombre de quatre : 1° une quels-

tion écrite portant sur l'anatomie et la physiologie du système

nerveux, pour laquelle il sera accordé trois heures au candidat.

Le maximum des points sera de trente.

2° Une question orale portant sur la médecine et la chirurgie

ordinaires, pour laquelle il sera accordé vingt minutes de ré-

flexion et quinze minutes pour la dissertation. Le maximum des

points sera de vingt. Cette seconde épreuve sera éliminatoire dans

le cas où le nombre des candidats serait supérieur à trois pour une

place.

3° Une épreuve clinique sur deux malades aliénés. Il sera accordé

trente minutes pour l'examen des deux malades, quinze minutes

d'exposition. L'un des deux malades devra être examiné et dis-

cuté plus spécialement au point de vue médico-légal. Le maximum

des points sera de trente.

4° Une épreuve sur titres. Les travaux scientifiques antérieurs

des candidats seront examinés parle jury etferont l'objet d'un rap-

port qui pourra être communiqué aux candidats sur leur demande.

Le maximum des points sera de dix. Les points devront être don-

nés au début de la première séance de la lecture des compositions

écrites.

9 mai 1888.

Le rapporteur, Bourneville.

II.

Assistance publique : les aliénés dans LES hôpitaux et hospices

de province.

On croirait qu'après la réforme dont Ph. Pinel a été le promo-

teur, après les améliorations réclamées par Esquirol, Ferrus et

leurs élèves, après les transformations rendues nécessaires par la

loi du 30 juin IS38, l'assistance publique des aliénés est parfaite.

Eh bien ! il n'en est malheureusement pas ainsi et il y a encore

bien des réformes à opérer. Voici quelques faits à l'appui :

1° A l'Hôtel-Dieu de Château-Thierry, les deux cabanons sont

situés au premier étage de l'ancien bâtiment de la boulangerie,

au-dessus de « l'ensevelissoir», très loin de l'hôpital et loin de tout

secours. Chaque cabanon possède une demi-fenêtre et une porte

munie de deux forts verrous et percée d'un judas. Dans l'un des

cabanons, sont disposés quatre montants en bois avec traverse,

servant à recevoir une paillasse ; dans l'autre il y a un lit en fer,

mobile. Les aliénés sont conservés quinze jours et quelquefois

davantage. Les médecins de l'hôpital se plaignent d'autant plus

vivement de cet état de choses qu'il n'y a personne pour garder

ces malades. ,

2° L'Hôtel-Dieu d'Epernay dispose de deux cabanons, sans sur-

veillance, éclairés par une ouverture pratiquée dans le toit, rap-

pelant la forme d'une cheminée et dont la porte est munie de

verrous et de barreaux. La fenêtre qui existait dans chaque cel-

lule a été supprimée à la suite de la pendaison d'un aliéné. On

envoie les malades au bout de deux ou trois jours, rarement plus,

à l'asile de Chatons.

3° La Maison des vieillards et des orphelins de Lunéville possède

deux cellules, situées dans un petit bâtiment de la basse-cour,

contiguës d'un côté à la porcherie, de l'autre à la salle des morts,

loin de toute surveillance. Ces cellules ont été construites en

1885-188G. Les malades sont gardés 4, b ou G jours.

4" A l'hôpital civil et militaire de Saint-Dié, le cabanon unique

est placé dans un petit bâtiment isolé situé dans un coin du clos, à

côté d'un ancien cabanon transformé en salle d'autopsie. Le ma-

ladey est abandonné à lui-même. Le cabanon a une porte pleine,

sans judas, et est éclairé par une toute petite fenêtre munie de

barreaux, percée immédiatement au-dessous du plafond. Les alié-

nés n'y séjournent que 24 ou 43 heures. Ils sont envoyés à

l'hôpital d'Epinal et de là ùAfaréville.

5° Les trois cabanons de l'hôpital-hospice de Remiremont se

APPENDICE. 89

trouvent dans un petit pavillon isolé situé dans la cour de labuan-

derie, des chantiers et de la salle des morts. Le jour provient d'une

petite fenêtre, de 20 centimètres sur 50 environ, située au voi-

sinage du plafond. On ne peut s'en servir en hiver, parce qu'ils

ne sont pas chauffés. En général, les malades sont dirigés sur

l'hôpital d'Epinal au bout de deux ou trois jours. On a l'habitude,

qui est loin d'être exempte de dangers, de conserver les aliénés

tranquilles; nous en avons vu deux au mois de septembre dernier.

6° L'hôpital Saint-Maurice d'Epinal est doté d'un pavillon d'un

étage, isolé de l'hôpital, placé dans un vaste jardin potager. Il

est divisé en deux parties par un couloir et l'escalier. A droite

sont les hommes et gauche les femmes. Le rez-de-chaussée

comprend les cellules avec préau extérieur, un cabinet avec bai-

gnoire, un réfectoire, le bureau des gardiens, etc. Le premier

étage est divisé en deux dortoirs. Le service est fait par un infir-

mier etune infirmière. Le pavillon reçoit les autres aliénés des

autres hôpitaux du département. On les garde durant dix à

quinze jours en observation, puis on les renvoie s'ils sont guéris,

ou, en cas contraire on les dirige sur Maréville.

7° A Belfort, les cabanons sont au rez-de-chaussée d'un bâtiment

dont le premier étage, dans un état misérable, est consacré à une

autre catégorie de malades déshérités, les vénériennes. Ces caha-,

nons qui servent de cachot à ces derniers sont auprès de la buan-

derie et séparés par une cour du reste de l'hospice. Les aliénés y

séjournent deux, trois semaines, parfois un mois avant d'être en-

voyés à l'asile de Dôle.

8° L'hôpital de la Charité de Langres possède deux cabanons si-

tués dans le sous-sol, à côté des bains. Les aliénés n'y resteraient

pas plus d'un jour ou deux.

9° A l'hôpital Saint-Nicolas de Bar-sur-Aube, les aliénés sont

logés dans deux cabanons situés dans un des bâtiments de la

basse-cour où on les garde une, deux ou trois semaines avant

de les envoyer à l'asile de Saint-Dizier.

10° A Troyes,les cabanons sont dans un bâtiment isolé qui leur l'

est coumun avec les vénériennes. A cause de cette disposition, la

surveillance laisse moins il désirer. On les conserve huit, quinze

ou vingt jours avant de les envoyer à l'asile de Saiut-Dizier.

Tous ces faits montrent combien l'assistance des aliénés laisse

encore à désirer et que toute trace d'emprisonnement est loin

d'avoir disparu. On doit blâmer la mauvaise organisation des

cabanons ou plutôt des cachots ; leur situation dans des bâti-

ments éloignés du reste de l'hôpital, dans des communs, à côté

d'écuries, de telle sorte que le malade est absolument en dehors

1 Cette pratique existe dans d'autres hôpitaux^

00 APPENDICE.

de toute surveillance. On doit blâmer le séjour prolongé des aliénés

dans des cabanons-cachots et parfois aussi leur transfert d'un hô-

pital dans un autre, alors qu'il y aurait le plus grand intérêt à

diriger le malade de suite sur l'asile de la circonscription.

Pour remédier cette triste situation, il y aurait à réaliser trois

réformes, dont deux n'entraîneraient aucune dépense.

Le Ministre de l'intérieur peut exiger de ses préfets et sous-

préfets que les malades aliénés soient transférés dans les vingt-

quatre heures à l'asile départemental. On ne conçoit pas qu'avec

le télégraphe qui permet d'avoir vite une réponse sur les forma-

lités administratives et avec les chemins de fer qui existent

presque partout et ont rendu les communications rapides et com-

modes, on abandonne les malades dans des cabanons, sans soins,

sans traitement, exposés à des accidents de tout genre. Nulle

difficulté non plus, au sujet de l'interdiction du transfert succes-

sif des aliénés dans deux hôpitaux : un ordre formel aux préfets et

ces voyages dispendieux, et non sans périls, seraient supprimés.

Reste la transformation des cabanons en chambres d'isolement

convenablement disposées et ne rappelant plus en rien le souvenir

de ['emprisonnement. Nous estimons qu'elle pourrait s'opérer faci-

lement par l'intermédiaire des préfets donnant des instructions

précises aux maires, présidents des commissions hospitalières,

aussi par l'intermédiaire des inspecteurs des établissements de

bienfaisance, qui verraient comment et dans quelle mesure les

prescriptions ministérielles ont été exécutées. Bourneville.

THÈSES ET MÉMOIRES DE 1888

CLOl'ATT (A.). Études sur l'hystérie infantile. Helsiufors.°188b.

1 vol. in-4".

PENASSE (l;.). Contribution à l'étude des méningites chroniques

et spécialement d'une terminaison fréquente chez les enfants, l'idiotie.

Thèse de Paris.

Pison (V.). De l'asymétrie fronto-faciale dans l'épilepsie. Thèse

de Paris.

TRIBAL (J.). Contribution à l'élude de la sclérose tubéreuse ou

hypertrophique du cerveau. (Idiotie symptomatique.) Thèse de Paris.

TABLE' DES MATIÈRES

. PREMIÈRE .PARTIE

HISTOIRE DU SERVICE PENDANT L'ANNEE 188.8

92 ) TABLE DES MATIÈRES.

DEUXIÈME PARTIE

clinique

Fig. 17. Plan du pavillon des cellules.

Fig. 18. -Vue du pavillon des cellules, du préau et de la clôture.