RECHERCHES
SUR
L'ÉPILEPSIE : L'HYSTÉRIE
ET
L'IDIOTIE
PUBLICATIONS DU PROGRÈS MÉDICAL
RECHERCHES
CLINIQUES ET THÉRAPEUTIQUES
SUR
L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE
ET
L'IDIOTIE
COMPTE RENDU DU SERVICE .
DES ENFANTS IDIOTS, ÉPILEPTIQUES ET ARRIÉRÉS DE BICÊTRE
PENDANT L'ANNÉE 1888
PAR
BOURNEVILL E
MÉDECIN DE 13[CÊTIIE
COURBARIEN, RAOULT, SOLLIER
INTERNES DU SERVICE
Volume IX avec 25 figures dans le texte.
PARIS
Aux Bureaux du PROGRÈS MÉDICAL
14, rue dos Carmes, 14
E. LECROSNIER et BABÉ
LIBRAIRES-EDITEURS
Place de l'École-de-Médecine
1889
PREMIERE PARTIE f
Histoire du service pendant l'année 1888.
BOURNEVILLE, 1888 s
PREMIERE PARTIE.
Histoire du service pendant l'année 1888.
Nouveaux pavillons de dortoirs.
Pavillon des cellules.
SITUATION DU SERVICE. - ENSEIGNEMENT PRIMAIRE.
La section des enfants comprend trois groupes :
l° les enfants idiots, gâteux, épileptiques ou non,
mais invalides ; 2" les enfants idiots, gâteux ou
non galeux, épileptiques ou non, mais VALIDES;-
3° les enfants propres, valides, imbéciles, arriérés,
épileptiques et hystériques ou non.
I. Enfants idiots, gâteux, épileptiques ou non,
mais invalides. On sait qu'ils se subdivisent en deux
catégories : la première est composée d'enfants gâteux
invalides, dont la plupart sont susceptibles d'améliora-
tion ; l'autre, d'enfants tout à fait incurables ou d'en-
fants atteints d'épilepsie ou de méningo-encéphalite,
devenus gâteux sous l'influence des accès ou des pous-
sées congestives qui les compliquent. Ces derniers ne
sont plus que l'objet de soins hygiéniques. Quant aux
premiers, ils sont soumis à un certain nombre d'exer-
cices que nous avons décrits précédemment et sur
lesquels nous ne reviendrons pas. Nous nous borne-
rons à dire que, aussitôt qu'ils sont capables de mar-
IV ENFANTS GATEUX INVALIDES.
cher (fig. 1), ils sont envoyés à la petite écolo le matin,
puis toute la journée.
II. Enfants idiots, gâteux ou non yîteuw, épile2ti-
ques ou non, mais VALIDES. - Ces enfants fréquentent
' Fi. modèle de l'un des chariots.
Fit. 2.
Fia. 3.
PETITE ÉCOLE. v
la petite école, confiée exclusivement à des femmes.
203 y ont été inscrits dans l'année. Sur ce nombre,
7 sont décédés ; 9 sont sortis définitivement ; 3 ont été
transférés. Tous les enfants sont exercés à la petite
gymnastique (système Pichery) ; 172 exécutent los
mouvements plus ou moins bien ; 5 les exécutent très
bien et prennent part en outre aux exercices de la grande
gymnastique ; 45 se servent de la cuiller seulement ;
70 de la cuiller et de la fourchette ; 62 se servent de
la cuiller, de la fourchette et du couteau ; 7 enfants gâ-
teux sont devenus propres (1), grâce au procédé em-
ployé qui consiste à les placer, à des heures régulières,
sur les sièges d'aisances que nous avons décrits (2),
au lever, au coucher, après chaque repas. 36 enfants
de la petite école vont aux ateliers une demi-heure par
jour (menuisier, 1 ; cordonniers, 6 ; rempailleurs, 3 ; 1
vanniers, 6 ; tailleurs, 20). Les leçons de toilette (lavage
de la figure, desmains, propreté de la chevelure, etc.),
les leçons de choses, les promenades avec interroga-
os, l'educao ? T.desse.s forment, comme toujours,
la base de l'enseignement.
Nous croyons devoir entrer cette année dans quel-
ques développements, surtout au sujet de cette dernière
partie de l'enseignement. Tout d'abord un mot de la
petite gymnastique. Nous avons dit naguère (3) com-
ment nous l'avions introduite à Bicêtre, et rappelé le
bienveillant concours que nous avait donné M. Pichery,
inventeur du système que nous employons. Les appa-
reils se composent : 1° d'échelles doubles en cordes,
avec traverses cylindriques en bois ; 2° do ressorts il
boudin double, avec poignée cylindrique.
(1) Ce sont les enfants. Char..., Dun ? Gin..., Lor..., Robin...,
Ros...
(2) Voir Comp/c-¡'cnrlu de flicÔIJ'c p011l' 18Sa, p. X.\"I.
(3) Voir Compte-rendu de 131cÔIJ'c pour 1880, p. XIX.
VI GYMNASTIQUE PICHERY.
f ! ? .-4.
P,y.5.
Fit. 6. 6.
Fig.7 7
GYMNASTIQUE PICHERY.
Fig. 8.
Fig. 9.
1"'9. lu.
rcg, n.
VIII ÉDUCATION de la main.
Exercices des échelles. La figure 2 représente
l'enfant en position ; la figure 3, l'enfant marchant
en avant;-la figure 4, l'enfant marchant en arrière ?
les figures 5 et 6, l'enfant déployant le corps en avant
et appuyé sur la pointe des pieds, et, en arrière, appuyé
sur les talons; la figure 7, l'enfant assis ; la figure 8
représente l'enfant tenant une échelle de la main
gauche, étendant l'autre échelle de la main droite élevée, 1
la jambe correspondante fléchie, le pied droit placé per-
pendiculairement au pied gauche; le même mouvement
s'exécute dans la position inverse, c'est-à-dire le bras
gauche allongé et la jambe gauche fléchie ; la figure '.)
fait voir l'enfant monté aux échelles et déployant le corps
en arrière ; le même exercice se fait en déployant le
corps en avant (1-ig. 10).
Exercices avec les ressorts. Sauf l'ascension, les
exercices sont les mêmes qu'avec les échelles : en posi-
tion (fig. 11), assis (fig. 12), extension alternative de
l'un et l'autre bras en avant (fig. 13).
Ces exercices, ainsi que nous l'avons déjà dit, nous
rendent de très grands services. Ils apprennent aux en-
fants à mieux saisir les objets, à bien opposer le pouce
aux autres doigts (préhension des échelons), à com-
prendre et à exécuter certains mouvements, en po-
sition, en avant, en arrière, assis, etc. Enfin, ils contri-
buent à développer leur système musculaire.
L'éducation de la main, et partant, du .sens du
toucher, est complétée par les exercices des plan-
chettes, des petits cylindres en bois, des sphères en
bois (1) (fig. 14), du livre cles étoffes (2). Dans le cours
de cette année, nous avons ajouté deux autres procédés
aux précédents : le premier consiste en un cadre en bois
0) Voir Compte-rendu pour l'année 188G, p V.
f) Voir Compte-rendu pour l'année 188'i. p. IT.
ÉDUCATION DE la MAIN. IX
de 11 cent. de largeur sur 0 m. 31 cent. de longueur,
dans lequel sont disposées une série de plaques de 0,10
centimètres sur 0,05 centimètres, constituées par une
plaque métallique à grosses saillies, par conséquent
très rugueuse, comme une râpe; par une autre plaque,
métallique, avec des saillies moitié plus petites, par-
Fig. 1 1.
Ft6.1 : 1.
Fig. 14.
X ÉDUCATION DU TOUCHER.
tant moins rugueuses ; puis du drap, de la soie, du
velours et enfin une plaque de bois lisse. On commence
par promener les doigts sur les deux plaques extrêmes,
c'est-à-dire la plus rugueuse et la plus lisse. Lorsque
l'enfant distingue les deux extrêmes (très râpeuse et très
lisse) (fig. 15), on lui fait toucher les intermédiaires.
Le second procédé consiste en des sphères de 4 cen-
timètres de diamètre, faites en fer, cuivre, verre, agathe,
caoutchouc, plâtre, balle de son, bois, pesant 2G9 gr.,
201 gr., 92 gr., 87 gr., 49 gr., 3 gr., 22 gr., 20 gr. et
destinées à leur apprendre la notion des poids.
Enfin, nous devons à l'obligeance de lI'°n Bru, femme
du commis principal de la direction et professeur de
dessin des écoles de la ville de Paris, de grandes plan-
ches représentant les différents solides et les différentes
figures planes correspondant, comme dimensions, aux
Fig. 15. .
GYMNASTIQUE DE LA PAROLE. XI
solides et aux surfaces planes en bois dont nous nous
servons depuis longtemps. Les enfants sont exercés à
placer les objets en bois sur les figures qui leur cor-
respondent. Ils arrivent de la sorte à se rendre compte
de la signification des dessins géométriques.
Nous insistons toujours, pour les idiots qui ne parlent
pas, sur les différents exercices décrits par Seguin dans
le chapitre de son livre admirable (1) consacré à la
gymnastique de la parole, dont nous estimons utile de
reproduire la plus grande partie.
Premier exercice. Quand l'enfant a déjà [acquis des
habitudes mimiques assez précises à l'aide des exercices d'imi-
tation, on attire son attention sur les traits de la face; on lui
en fait toucher les diverses parties, et l'on finit par concentrer
son attention sur l'appareil vocal. D'abord, ce sera l'index mis
en croix sur les lèvres, ensuite placé horizontalement, puis
introduit légèrement dans la bouche, puis deux et trois doigts
qui ouvriront largement les lèvres : on fera alors entendre
quelques cris joyeux que l'enfant répétera.
Ensuite on lui fait serrer longtemps une règle entre les
lèvres, si on les trouve pendantes ou naturellement écartées
ainsi que les mâchoires; si les lèvres ne se contractent pas, on
augmente progressivement le poids et le volume de ce corps.
Sont-elles seulement trop écartées l'une de l'autre, on diminue
l'épaisseur de cette règle dans la même proportion, jusqu'à ce
que, pour la retenir, les lèvres s'appliquent exactement l'une
sur l'autre et longtemps. Le même exercice se répète pour
obvier au tremblement et au resserrement des mâchoires, mais
alors en sens inverse dans une progression toujours croissante.
On a soin aussi de faire mâcher des substances résistantes,
comme du pain rassis, très rassis : puis on abandonne ces
moyens purement mécaniques et l'on fait répéter tous ces
mouvements d'écartement des mâchoires, de rapprochement
ou d'arrondissement des lèvres sur simple imitation, ainsi que
tous ceux que les lèvres devront faire pour émettre les voyelles
et les syllabes labiales.
Quand l'inaptitude tient au défaut de proportions et à l'absence
de rapports entre la langue et le palais, comme ce dernier n'est
susceptible de contraction que dans sa paroi postérieure ou
(1) Traitement, hygiène et éducation des idiots; Paris, 1846.
XII GYMNASTIQUE DE LA PAROLE.
musculaire, et que sa partie antérieure est immobile ; comme
la voûte palatine concourt avec la langue à former un grand
nombre d'articulations, et comme, en définitive, le palais ne
peut venir trouver la langue, il faut bien que celle-ci soit arti-
ficiellement mise en jeu ; pour cela, faire la gymnastique
suivante est de rigueur : on montrera à mouvoir la langue
hors de la bouche en avant, en haut et en bas ; l'aider de la
main si l'enfant ne peut la faire mouvoir volontairement ; en
relever la pointe et la tenir longtemps comme appendue aux
régions antérieure, moyenne, postérieure et latérales du palais.
Si, par l'imitation, par la direction et par l'indication, on ne
parvient pas à faire exécuter ces divers mouvements, on les
produit à l'aide d'un couteau de bois ou d'une cuiller d'ivoire
qui dirige et soutient mieux la langue. Quand le timbre de la voix
est altéré, mais il est rare que cola soit, on doit faire imiter iL
l'enfant les sons de la voix humaine et stimuler l'organe vocal
en lui donnant à entendre les sons d'un instrument à vibrations
rapides et entraînantes ; on place alors avec avantage le sujet
au milieu de choeurs, et on le provoque, par le commandement
et l'imitation, à des émissions de voix longues et répétées :
c'est ce que j'ai fait avec succès à Bicêtre.
Deuxième exercice. Quand ces résultats préliminaires,
qui consistent à faire mouvoir facilement et intentionnellement
les organes de l'articulation et à faire émettre des sons longs
et purs de la voix humaine, sont obtenus, on peut s'occuper
directement du développement de la parole.
Quelque savantes que soient les théories modernes sur le
développement de la parole, celles surtout qui ont été exposées
par les personnes qui se sont occupées des sourds-muets, on
ne trouvera sans doute pas étonnant que moi, parti d'un prin-
cipe tout à fait opposé au leur, je sois arrivé il des conclusions
un peu différentes. Par exemple, dans les essais d'enseigne-
ment de la parole aux sourds-muets, on compte bien moins,
et l'on a peut-être raison, sur la mimique que sur le tact ; en
outre, plusieurs professeurs, préoccupés de la fusion qui
s'opère entre la voix proprement dite et l'articulation dos
mots dans la formation de la parole, n'hésitent pas à enseigner
d'abord les lettres gutturales comme les plus faciles. Mais en
supposant le premier principe vrai (et il est précieux pour les
sourds-muets, dont le tact est ordinairement exquis), peut-il
être admis pour l'idiot, chez qui nous avons vu ce sens, lo
tact, présenter si souvent toutes sortes d'incapacités ? Quant
an second, il ne serait applicable à mes élèves dans aucun cas,
parce qu'eux n'ont pas conscience des phénomènes producteurs
GYMNASTIQUE DE LA PAROLE. XIII
de la parole, qui consistent dans l'émission de la voix et de
l'articulation réunies. Les autres idées qu'on a formulées,
d'ailleurs, sur l'éducation de la parole, ne m'ont pas semblé
plus applicables dans l'espèce, et, réduit à mes propres res-
sources, j'ai suivi longtemps les indications que me présentait
la nature de l'infirmité de chaque sujet avant d'être en état
de compléter ma méthode à cet égard.
Maintenant que de nombreuses expériences m'ont éclairé,
tant sur les exceptions que sur les principes, le résultat de
mes expériences est qu'on doit commencer cette étude par les
syllabes simples terminées par une voyelle, et non par les
voyelles isolées, comme cela se pratique d'ordinaire. C'est,
je le sais bien, renverser les opinions reçues à cet égard ;
mais, dans la voie que je me suis frayée, toutes les modifica-
tions que j'ai été amené à introduire pour la pratique de l'en-
seignement, sont les conséquences d'observations rigoureuses
faites sur nature, dans le but direct que je poursuis ; et je m'y
tiens. Ainsi on admet généralement que l'émission des voyelles
est plus facile que celle des consonnes ; qu'il est plus aisé à
un enfant de dire 0 que MO, I que BI, etc. S'il en était
ainsi, il faudrait, après avoir enseigné l'émission des voyelles,
apprendre l'articulation des syllabes composées d'une voyelle
d'abord et d'une consonne ensuite, afin de passer du connu à
l'inconnu, du facile au difficile. Or, c'est ce dont personne ne
s'est jamais avisé, parce qu'on sent fort bien qu'il est plus aisé
de dire MA, BO, NI, que AM, OB, IN ; mais on n'en savait pas
la raison, et l'on était même si éloigné de la connaître, que l'on
ignorait encore que l'émission de certaines consonnes dût pré-
céder celle des voyelles. Je dis certaines, parce que les con-
sonnes ne peuvent être prises indistinctement pour intro-
duction à l'art de la prononciation. Il y a entre elles un ordre,
ordre insensible pour les gens qui parlent comme écrivait le
Bourgeois gentilhomme, mais appréciable pour les personnes
qui ont étudié le mécanisme du langage. J'en exposerai la
théorie à propos de la lecture, où elle aura une application plus
saisissable que dans ce moment.
Je me contente d'avancer ici :
1 Que l'étude de la parole doit commencer par les con-
sonnes, et non par les voyelles ; -,
2 Que les syllabes composées d'une consonne et d'une
voyelle doivent être articulées les premières ; .
3° Que les labiales, entre celles-ci, doivent précéder toutes
les autres ; .;
4° Et j'ajoute que les syllabes isolées sont moins faciles à
articuler que les syllabes répétées.
XIV GYMNASTIQUE DE LA PAROLE.
Comme tout ceci est plus ou moins opposé à ce qu'on en-
seigne, il n'est peut-être pas inutile de corroborer mes idées
à cet égard par quelques observations.
A l'appui de ma première assertion, je ferai remarquer que
tant qu'un enfant n'émet que les sons A, I, 0, il ne parle pas, il
crie ou chante.
Pour la seconde, je rappellerai que le même enfant ne com-
mence pas par dire : AP, Lai, OB, mais bien PA, ME, BO.
A l'appui de la troisième, je dirai que ces mêmes syllabes
sont toutes des labiales, en commençant par les plus douces :
MA ou BO, selon la disposition relative des lèvres, PA n'étant
articulé le premier que par les enfants chez lesquels une suc-
cion énergique, ou quelque cause analogue, a développé la
force contractile des lèvres d'une façon exceptionnelle.
La preuve de la 4e est que les enfants répètent toutes leurs
syllabes. Il y a de cette dernière habitude des enfants, qui passe
pour une bizarrerie ou une singularité, des analogues auxquels
personne ne pense et qui justifient ce premier langage que
nous avons tous parlé ; parmi ces analogues, je citerai comme
incontestables : le redoublement, cette beauté des idiomes an-
ciens; la rime, première richesse des poésies modernes ; le re-
frain, si électrique dans les chants populaires de France,
d'Angleterre et d'Allemagne, toutes répétitions qui) sont for-
mulées dans cet adage si connu : « Bis 7'epl'/iln placent. » Je
pourrais encore donner nombre de preuves de la puissance des
analogies de consonnance dans le langage des enfants et dans
celui des peuples : cette forme a toujours précédé l'antithèse,
qui procède par les contrastes.
Si un homme s'était jamais rencontré, assez bon observateur
en même temps que physiologiste et psychologiste éminent, et
si cet homme avait daigné se donner la peine de suivre le dé-
veloppement d'un enfant, l'anthropologie ne serait plus une
science à faire, ce serait une science aussi certaine que toutes
les branches de la mathématique réunies. Et pour ne consi-
dérer ici que l'origine et la formation du langage dans les en-
fants, en étudiant les premiers accents de leurs voix et la suc-
cession de leurs articulations, n'eût-on pas, sans autre peine
qu'un peu d'attention, trouvé la méthode de faire parler Ici
muets ? J'aime à croire que Péreire ne procéda pas autrement,
car les grandes découvertes ne sont autre chose que des naïvetés
dépeuillées de leur enveloppe naturelle ou de leur écorce
pédantesque.
Pour faire parler un muet, peut-être môme un sourd-muet,
n'entassez donc pas les dissertations sur les méthodes, et les
méthodes sur les prophylactiques ; faites faire à votre élève ce
GYMNASTIQUE DE LA PAROLE. XV
que fait l'enfant ordinaire, celui-ci à dix mois, celui-là à 10 ans.
En effet, est-ce l'âge qui parle ? ... Ce sont les organes ; et, si
rebelles qu'on les suppose, on doit admettre, avant toute dis-
sertation, toute méthode, tout remède, qu'ils exécuteront pre-
mièrement et le plus facilement les sons que les organes des
petits enfants exécutent les premiers.
Je sais que cette méthode naturelle répugne à la vanité
humaine ; je sais que, non seulement on ne se donne pas la
peine de l'étudier pour pouvoir en faire profiter les individus
mal doués naturellement, mais encore que nombre de raffinés
intellectuels des deux sexes entrent dans le sanctuaire de la
famille avec la ferme résolution de supprimer en leur progé-
niture toutes les manifestations de ce langage dont la musique
fait ressembler les enfants à des petits anges.
Le père ne veut pas que son fils dise : dada; la mère n'entend
pas que son enfant demande un coco, cheval, oeuf, et à la bonne
heure... ! Les malheureux I savent-ils où ce système les condui-
rait, si l'enfant plus intelligent qu'eux ne repoussait leurs
leçons empoisonnées ? Lui, incapable de prononcer la plupart
des consonnes, les double, les triple même pour ajouter à l'éner-
gie de son expression, et, limité à la connaissance d'un petit
nombre de mots ayant tous un sens matériel, il supplée les
mots absents ou impossibles par la variété de l'intonation qui
est.son langage passionnel et métaphysique; c'est seulement
ainsi que pour lui une joie, un désir, une douleur, une colère,
une interrogation, un doute ont pour expression naturelle et
possible l'intonation.
Et puis, en supposant que l'enfant puisse parler comme nous,
croyez-vous qu'il trouverait dans toute la langue des mots qui
représentent vraiment ses idées et ses sentiments puérils ?
Edouard escalade à grand peine plusieurs coussins et du plus
haut qu'il puisse atteindre, avant de rouler jusqu'en bas (et
il y a une Providence pour ces chutes de tous les instants), il
crie : A-dé-dé ! ! trouvez-moi, messieurs les puristes, des mots
français pour exprimer une pareille joie, un tel triomphe !
après tant d'efforts ! et l'instant d'après, sa mère lui refuse le
sein ou un gâteau; Edouard répète sur mille tons, mais avec
les mille nuances d'un accent désespéré : 11-né-né I jusqu'à ce
que sa bouche se close de fatigue ou de sommeil. Allons, phi-
lologues, remplacez-moi vite ce doux langage par des mots
tirés du grec. Et que feraient-ils les parents et les philologues,
si l'enfant leur obéissait jusqu'à attendre qu'il pût exprimer
en bonne prononciation, en bon français, ses passions et ses
idées ? ils arrêteraient à l'instant, pour plusieurs années, pour
toujours, le développement physiologique et psychologique de
1\'I GYMNASTIQUE DE LA PAROLE.
leur enfant, ils feraient un idiot. Or, en assistant à de pareilles
extravagances, n'est-on pas tenté d'admettre le foudroyant
paradoxe de J.-J. Rousseau : Tout estbien, sortant des mains de
l'auteur des choses; tout dégénère dans les mains de l'homme.
Non, heureusement non, cet anathème lancé sur les oeuvres
de l'homme en tête d'une des plus belles oeuvres humaines, se
réfute de lui-même, par lui-même, et ne reste vrai que dans
son acception la moins générale ; et pareillement de presque
tout ce qu'a écrit le Genevois, retranchez-en le dogmatisme,
la forme absolue, genevoise enfin, et vous serez en plein bon
sens, en pleine vérité.
Puis, pour en revenir à mes élèves, après avoir rompu une
lance en l'honneur de ceux qui ont trop d'esprit pour l'être,
et si toutes ces raisons ne suffisent pas à justifier la marche
que j'ai adoptée, (et il ne faut, pour tomber d'accord avec moi
sur tous ces points capitaux, que se tenir, comme je l'ai fait.
quelque temps penché sur un berceau), les observations qui
m'ont été fournies par les sujets que j'ai traités, auront sans
doute plus de valeur aux yeux des gens positifs.
L..... ne pouvait émettre les sons E, O, I, U, et commence à
dire M A, B I, P O, etc. 5..... n'émettait aucune voyelle correc-
tement, et prononce bien un certain nombre de syllabes la-
biales terminées par ces mêmes voyelles.
Les premiers sons vocaux rendus par G.... sont PA, MI, BO,
etc. A.... produit les mêmes sons, mais il faut les lui faire dou-
bler : ne disant pas BO, il dit : BO-BO, il ne peut dire MI, mais
il articule très bien etc. M... a donné également raison
à ma méthode. Ne pouvant dire I, il l'a prononcé comme fi-
nale des syllabes MI, PI, TI, etc. Cet enfant se fait très bien
comprendre maintenant.
Voilà ce que j'ai à dire sur les principes; maintenant, si l'on
veut tenir compte des exceptions, et il le faut bien quand on
veut appliquer une méthode d'enseignement à tous les idiots,
on trouve que chez certains sujets il est bon de ne pas suivre
rigoureusement l'ordre que j'indique plus haut. Ainsi, j'ai
déjà fait observer que les enfants qui n'émettaient pas natu-
rellement de sons vocaux longs et purs, devaient y être incités,
par l'imitation, avant toute tentative ayant l'articulation pour
objet; je ferai également remarquer qu'il n'est pas rare de
voir des idiots chez lesquels les sphincters entrent si difficile-
ment en contraction que l'on doit commencer leur faire pro-
noncer des syllabes linguales avant les labiales, sous peine de
les voir (rebutés qu'ils sont tout d'abord par la difficulté, par-
ticulière en eux, de prononcer ces dernières) s'obstiner dans
leur mutisme plutôt que de vaincre la paresse do leurs or-
GRANDE ÉCOLE. XVII
ganes. Au contraire, en leur enseignant d'abord les syllabes
qui leur sont les plus faciles, on encourage leur timidité, on
stimule leur vanité, on les complimente sur leurs progrès et
on les tient dans une salutaire excitation, sans laquelle ils ne
sortiraient pas de leur isolement.
Ce que je propose est donc une gymnastique fixe en prin-
cipe, mais qui doit être modifiée selon chaque sujet ; car, à
moins que l'incapacité de parler ne soit absolue, il est fort
rare qu'elle offre des analogies complètes. Ainsi, à part les
principes posés plus haut, pas de règle spéciale à chaque su-
jet : je n'en prescris aucune dans la pratique, sinon l'observa-
tion des phénomènes et une patience à toute épreuve... »
Ce sont ces préceptes que depuis 1879 nous cherchons
à inculquer à notre personnel enseignant et qui, quoique
encore imparfaitement appliqués, rendent de. réels ser-
vices à nos malades.
III. Enfants propres et valides, imbéciles, arriérés,
instables, épileptiques et hystériques ou non. Grande
école. La population de cette école était, le 1er jan-
vier 1888, de 145, et le 31 décembre, de 168. Le per-
sonnel enseignant est resté le même. L'instituteur en
chef, M. Boutillier, assimilé aux commis de l'Adminis-
tration, a vu son traitement élevé de 2.700 à 3.000 (1).
La Commission de l'Assistance publique», du Conseil
général a reconnu l'insuffisance du personnel ensei-
gnant et nous a promis d'appuyer la demande que nous
avons faite d'un troisième instituteur. Cette augmenta-
tion du personnel enseignant est d'autant plus néces-
saire que les instituteurs font le soir l'école primaire
aux infirmiers et aux infirmières de l'établissement.
Malgré cette insuffisance, nous continuons à obtenir des
résultats encourageants qui devraient décider l'Admi-
nistration à nous donner satisfaction.
(1) Le second instituteur, M. Boyer, est entré en fonctions au
mois de mars 1886 ; il aurait dû avoir une augmentation à partir
du mois de mars 1889. Nous regrettons que cette augmentation,
méritée par son zèle et son dévoument, ait été ajournée.
BOURNEVILLE, 1888. **
XVIII MATERIEL SCOLAIRE.
Le 19 mai, 2 enfants, 6 infirmiers et 9 infirmières
ont obtenu le certificat d'études.
Nous déplorons toujours de ne pas avoir de bons in-
firmiers garçons de classe. Alors que le Directeur de
l'hospice devrait avoir soin de choisir les infirmiers et
les infirmières les plus instruits, afin de concourir à
l'enseignement, il nous envoie trop souvent des per-
sonnes illettrées qui ne peuvent nous être d'aucun
secours : c'est là, pourtant, une sélection facile à
faire. Nous devons dire toutefois que M. Peyron a bien
voulu encourager le meilleur de nos garçons de classe
en l'élevant au grade de suppléant.
L'enseignement a toujours pour base les leçons de
choses, soit à la classe même, soit dans les jardins de
la section, soit dans le champ des céréales et dans le
champ des plantes fourragères, soit dans le bois ou
enfin durant les promenades au dehors (1).
La matériel scolaire comprend une grande partie
des objets employés à la petite école, mais un peu plus
compliqués, et ceux qui sont en usage dans les écoles
primaires ordinaires. De plus, nous avons fait exécuter
par nos instituteurs, d'après les indications du traité de
Séguin, un certain nombre de planches destinées à l'en-
seignement.
1° Un tableau des couleurs divisé en deux parties sembla-
bles (une pour l'élève, l'autre pour le maître), comprenant
chacune six couleurs (violet, bleu, vert, jaune, orangé, rouge)
avec un exemple en regard (prune violette, myosotis, feuille
d'arbre, citron, orange, cerises).
2o Un tableau divisé également en deux parties semblables
et destiné à fixer l'attention de l'enfant en l'amenant à poser
le doigt, ainsi que le fait le maître, dans la partie correspon-
dante, sur des carrés où sont représentés des points, des
nombres, des couleurs, des lignes et des figures géométriques.
(1) Voir Compte rendu de pour 1887, p. VIII.
PROMENADES ET DISTRACTIONS. XIX
Cet exercice est très utile pour les plus arriérés, dont la vie
indifférente et passive s'habitue peu à peu à comparer deux
images de forme ou de couleur semblables et se change, par
imitation, en un regard attentiF qui leur permet de suivre les
mouvements du maître et de les reproduire avec le doigt.
3° Un tableau des lignes et de leurs applications. Par exem-
ple en regard de la ligne horizontale et de la ligne verticale
sont représentés des poteaux et des fils télégraphiques, etc.
4m Un tableau des figures géométriques et de leurs appli-
cations. C'est ainsi qu'on face du carré se trouve un damier, etc.
5° Un tableau des solides géométriques et de leurs applica-
tions. En face de la figure d'une pyramide quadrangulaire est
dessiné un clocher de village, etc.
Go Un tableau de lettres (majuscules, minuscules et manus-
crites), classées d'après les difficultés d'articulation (voyelles
labiales, dentales, gutturales, etc.).
7 Un tableau des sons équivalents où les syllabes homo-
nymes sont représentées sous des couleurs semblables.
Exemple : é, ed, er, et, ez, etc.
o, au, eau, etc.
En face de chaque syllabe isolée se trouve un exemple choisi
parmi les mots usuels, dans lequel cette syllabe se distingue
des autres lettres du mot par la couleur. Exemple : Si les
syllabes équivalentes isolées é, ed, er, et, ez, sont dessinées
en bleu, en face, dans les exemples été, pied, manger, violet,
nez, ces mêmes syllabes seront représentées en bleu.
Promenades et distractions. Les enfants de la
grande école et ceux de la petite école qui sont propres
ont continué à faire, sous la conduite de leurs maîtres
et de leurs maitresses,de nombreuses promenades, soit
dans les environs de l'hospice ou à Paris même : pro-
menades multipliées au Luxembourg, au Jardin des
Plantes, au parc de Montsouris, aux fêtes des environs
(Villejuif, Gentilly, place de la Nation, etc.), au Jardin
d'Acclimatation. Les maîtres et les maîtresses profitent
do ces promenades pour donner des leçons de choses
aux enfants. Jamais ces promenades, même dans des
lieux très fréquentés, n'ont donné lieu à des accidents
capables d'attirer sérieusement l'attention et de troubler
la tranquillité publique.
XX VISITES ET CONGÉS.
Mentionnons enfin les distractions diverses, commu-
nes à tous les enfants valides : distribution de jouets,
l'occasion du 1 cr janvier, par l'Administration et par
M. Meyer, rédacteur en chef de la Lanterne ; distribu-
tion de beignets et de gâteaux ; déguisements du Mardi-
Gras ; séances de lanterne magique, projections; concert
des frères Lionnet ; participation des enfants de la
Grande Ecole au défilé du bataillon scolaire de Gentilly,
etc., etc. Citons enfin de petites représentations théâ-
trales organisées par M. Boyer, instituteur, qui, de
plus, a pris l'initiative de la création d'une société mu-
sicale à laquelle un certain nombre d'enfants s'intéres-
sent vivement.
Visites, permissions de sortie, congés. Les en-
fants ont reçu 8.268 visites. Les visiteurs ont été au
nombre de 11.693. Voici maintenant la statistique des
permissions de sortie et des congés :
BAINS, HYDROTHÉRAPIE, ETC. XXI
Vaccinations et revaccinations. Elles ont été au
nombre de 29. Elles ont été faites sous notre direction et
celle de nos internes par les élèves de l'Ecole d'infir-
mières (1).
Service dentaire. - Notre ami, le Dr Cruet, ancien
interne des hôpitaux, continue ses visites bi-mensuelles
aux enfants de Bicêtre et de la i-alpêtrière. Les résultats
obtenus au point de vue de l'hygiène de la bouche et
d'une meilleure dentition des enfants sont excellents.
Bains et hydrothérapie. - Les bains et les douches,
joints à la gymnastique et à l'emploi des bromures, sur-
tout de l'élixir polybromuré de Yvon, du bromure de
camphre du Dr Clin et aux médicaments anti-scrofuleux
ont fait la base du traitement pendant l'année.
XXII COUCHAGE DES GATEUX.
fants et la transformation des traversins qui ont été
faits en crin et un peu plus volumineux ; deux tables en
marbre pour les réfectoires ont été installées à titre d'essai,
afin de voir s'il n'est pas possible défaire la, substitu-
tion partout ; deux fontaines avec filtres pour les ré-
fectoires. Nous avons réclamé de nouveau l'aménage-
ment d'un sous-sol pour le cirage des souliers et
l'installation d'un magasin de chaussures, désirant que
les enfants aient deux paires de souliers ; l'organisation
d'un trousseau pour chaque enfant avec un numéro
d'ordre ; la modification des chemises qui n'ont ni cols
ni poignets. Les enfants gâteux couchaient sur une
paillasse revêtue d'une toile cirée ; nous avons modifié
le couchage de la façon suivante : à la tête et aux pieds
un petit matelas de laine ; au centre un matelas de laine
de tourbe, ou de tannée, ou de warech, ou de paille.
Nous ne pouvons encore apprécier la valeur compara-
tive de ces essais. Nous nous bornerons à dire que,
d'après M. Muntz qui a étudié comparativement le pou-
voir absorbant de ces différentes substances, la paille
d'avoine absorberait 228 litres d'eau par 100 kilo-
grammes ; la tannée 4 à 500 kilogrammes ; la tourbe
500 à 700. Nous ignorons la différence qui existe à ce
point de vue entre la tourbe et la laine de tourbe. Nous
ignorons également quel est exactement le pouvoir
absorbant du warech. S'il est vrai qu'une litière est
d'une qualité d'autant meilleure que le pouvoir d'imbi-
f bition est plus élevé c'est la laine de tourbe qui devrait
être préférée (1).
Visites du service." Commission de surveillance
des asiles d'aliénés delà Seine, composée de MM. Uar-
bier, président à la Cour de cassation, Bailly, Huart,
Pothier, Puteaux, E. Richard, Thulié; Dr A. Regnard,
inspecteur général des Etablissements de bienfaisance,
(1) Muntz et 1.-Ch. Girard. -- Les Engrais, p. °I1-36' ? .
VISITEURS DU SERVICE. XXIII
Dr Taule, directeur de l'Asile clinique, Dr Donnet, sé-
nateur, directeur de l'asile de Vaucluse, D'' Paté, di-
recteur de Ville-Evrard ; Babut, chef de division,
Leclère et Louvart, chefs de bureau à la Préfecture de
la Seine ; une partie de la Commission de la Chambre
des députés chargée d'étudier le nouveau projet de loi
sur les aliénés (MM. Camescasse, Clauzel, Cochery, Du-
coudray et ucdueti ; MM. Chassaing, Champoudry,
conseillers municipaux; Dr Christian; - A. Harler ;
Coffignon, publiciste ; Dr Coutinho ; - D'' Bétous,
médecin consultant à Barèges ; Dr Biaute, médecin
on chef du quartier d'aliénés de l'hospice de Nantes ;-
Brueyre, ancien chef de division à l'Assistance publique;
Dr Buissen (de Madrid) ; Desjardins, chef de bu-
reau au Ministère de l'Instruction publique ; Dr Do-
mingo Cabreo, délégué de la République Argentine ;
Dr J. Flores, directeur de l'hôpital grec de Constan-
tinople ; Dr Forhas (de Buda-Pesth) ; Frédéric de
Mocata (de Londres) ; Goupy, membre du Conseil de
surveillance de l'Assistance publique : Dr Guilbert,
directeur de l'Asile de Bordeaux ; Guillemin ;
1 Ila-\-art - Dr Hallage (Danemark) ; M. et Mue
I-Iolst-crn ; - D'' Horteloup, membre du Conseil de sur-
veillance de l'Assistance publique ; -Dr Keraval, mé-
decin de Ville-Evrard ; D' Ladame (de Genève) ;
Lavy, conseiller municipal ; D''Magnan, médecin de
l'Asile clinique ;M. Marcelin(de Neuilly) ; M. Moussu,
professeur ; ;-Mercier, contrôleur principal des Douanes;
- Nicolo,-Pansot, professeur; D'Picquet, Dr J.-A.-
Prieur (Canada) ; - Proust, professeur d'hygiène à la
Faculté de médecine de Paris, accompagné de MM. le
Dr Meynet, A.-J. Martin et d'une trentaine de ses élèves ;
- 111"'e de Eue ; - M. Schmoulen, attaché au Ministère
de la Justice (Russie) ; professeur Seguin (de New-
York) ; Dr Sellier (de Versailles), inspecteur du
service des aliénés de Seine-et-Oise ; M. Simon ;
M. le D'' Siredey, ; Dr Stemerz ; Dr Tixier, directeur
XXIV VISITEURS DU SERVICE.
de l'Ecole de médecine d'Alger ; Et. Tinioux, attaché
à l'ambassade de Roumanie; D1' Toso-Antonio,
Dr Wladimir de Tchichs ; NI ? Marie Waltzky,
membre de la Société de psychiatrie de Pétersbourg ;
Dr Widmer (de Lausanne) ; Dr J. Weight-Putmann.
' Nous devons une mention spéciale à la ,visite faite
par DII`° Matrat au mois de novembre et au rapport
qu'elle a adressé à M. le Directeur de l'Enseignement
primaire. Dans sa visite, un peu superficielle et faite en
dehors de l'heure des classes, elle ne semble pas s'être
rendu compte ni des transformations opérées à Bicêtre
ni de la méthode employée, ni des résultats obtenus.
Elle prétend entre autres qu'à Bicêtre on ne reçoit pas
d'idiots ou à peu près pas, mais surtout des épileptiques.
En réalité, les idiots, imbéciles et arriérés sont, au con-
traire, plus nombreux que les épileptiques. Elle pré-
tend n'avoir vu ni images (1), ni jeux, alors que tous
les ans l'Administration en achète ou en reçoit de géné-
reux donateurs un grand nombre, et que l'atelier de
menuiserie des enfants en confectionne une grande
quantité. Nous n'avons cessé de les multiplier depuis
dix ans : Jeux de tonneau, de boules, de quilles, de
crocket, de billard, de balles, de billes, de dominos, de
loto, de toupies, de passe-boules, etc. (2). (Voir plus
haut, Distractions, p. xix).
Elle n'a pas vu, ou on ne lui a pas dit, que la base de
l'enseignement reposait sur les leçons de choses et les
leçons d'action ; que les enfants reçoivent régulière-
ment des leçons de gymnastique, de danse, d'escrime ;
que tous les jardins ont été disposés pour l'enseigne-
ment des enfants. Elle a daigné cependant reconnaître
que « au point de vue matériel, au point de vue hospi-
(1) A l'époque de sa visite, il y avait 244 images.
(2) A l'époque de sa visite, il y avait 3 jeux de tonneaux,
5 passe-boules, 2 jeux de quilles, 60 cerceaux, etc. Inutile de dire
que les enfants en détruisent un grand nombre.
ÉPIDÉMIES ; TEIGNE. XXV
talier, c'est incomparablement ce qu'elle a vu de plus
beau. » Elle ajoute encore ce passage : « Tout le per-
sonnel est laïque et je suis heureuse de dire que, venue
absolument à l'improviste, j'ai vu malgré tout, avec
l'oeil de l'inspectrice, toutes ces jeunes femmes à leur
devoir, toutes séparées les unes des autres, occupées
des enfants, sans ostentation et sans précipitation.
L'ordre le plus parfait règne partout. D 112'e Matrat s'est
étonnée d'apprendre que la direction de la section était
confiée à un médecin ; elle ignore que les nombreux
asiles consacrés aux enfants idiots, en Angleterre, aux
Etats-Unis, etc., sont dus à des médecins et dirigés par
eux.
Maladies épidémiques. - Nous n'avons eu que
quatre cas de rougeole dans le courant de l'année. Le
pavillon d'isolement pour les maladies contagieuses a
reçu, en outre, un certain nombre d'enfants atteints de
maladies des yeux.
De tout temps, probablement depuis que Bicêtre
existe et qu'il renferme des enfants, la teigne y a tou-
jours régné. Cela s'explique par l'impossibilité où l'on
était de les isoler. Au commencement de l'année 1888,
nous en avions une cinquantaine. Le pavillon d'isole-
ment ne contenant que 16 lits, nous avons pris les me-
sures suivantes : nous en avons mis 10 au pavillon
d'isolement (1), réservant les six chambres pour les
maladies épidémiques ; nous en avons mis 12 dans l'une
des salles de l'infirmerie et les autres ont été confinés
dans un seul dortoir où, malheureusement, ils étaient
en contact avec d'autres enfants. Les 10 enfants du pa-
villon d'isolement passaient leur journée soit en prome-
nade, soit dans le sous-sol-rez-de-chaussée du pavillon
d'isolement; mais les 12 enfants de l'infirmerie et les
(l) Voir, pour la description de ce pavillon, le Compte rendu
pour 1887, p. XXXIII.
XXVI MUSÉE PATHOLOGIQUE.
autres étaient réunis, durant le jour, dans le réfectoire
de l'infirmerie, et, par conséquent, se trouvaient souvent
en contact avec les convalescents de l'autre salle. De là
la production de nouveaux cas de teigne. Nous avons
demandé et obtenu l'aménagement du sous-sol de l'infir-
merie et nous y avons rassemblé tous les teigneux, il
l'exception de ceux qui habitent le pavillon des conta-
gieux. Le sous-sol a été mis à la disposition des enfants
le 19 juillet, servant de réfectoire à ces derniers et,
dans une certaine mesure, de salle d'école. Grâce à cet
isolement, au zèle de nos internes et du personnel, ! i0 enfants ont été guéris de la teigne et il n'en restait
plus que 15 à la fin de l'année 1888.
Musée pathologique. Le Musée, placé sous la di-
rection de notre ami le Dr P. Bricon, s'est enrichi de
nombreuses pièces, ainsi que le montre le tableau com-
paratif suivant :
MUSÉE PATHOLOGIQUE. XXVII
indéterminées, lorsqu'il survient des modifications im-
portantes en bien ou en mal. Quand un malade meurt,
toutes ses photographies sont déposées au Musée, et
comme nous faisons réunir en volumes, à la fin de
l'année, toutes les observations des malades décédés,
il s'ensuit que toutes les pièces pathologiques, bustes,
crânes, etc., ont leur histoire complète et peuvent
servir à des recherches sérieuses ; elles ne sont pas là
simplement à titre d'objets curieux. Nous rappellerons
enfin que les photographies des cerveaux forment au-
jourd'hui cinq volumineux Albums (1).
Le crédit affecté au Musée de l'hospice de Bicêtre
était de 3.200 fr. Grâce à l'intervention de notre ami
M. Hovelacque, en décembre 1888, le crédit a été
augmenté de 1.000 fr., ce qui nous permettra de réaliser
des améliorations et d'utiliser quelques-unes de nos
photographies les plus intéressantes.
Bien que suffisante pour le moment, répéterons-nous,
l'installation du Musée devra être transformée ultérieu-
rement. Il faudra en profiter pour organiser un service
scientifique convenable à l'hospice de Bicêtre. A cet
égard, nous ne pouvons que reproduire ce que nous di-
sions en 1885 : « Nous pensons qu'il conviendrait de
choisir un emplacement peu éloigné de l'infirmerie gé-
nérale et de la division des aliénés, et d'y construire le
service des morts et des autopsies, le musée, les labo-
ratoires, l'atelier de photographie et de moulage. Cet
emplacement existe... » · .
(1) Nous profitons de l'occasion pour remercier de nouveau
nos collaborateurs, MM. Hubert et Hure), qui apportent le plus
grand zèle il l'exécution des photographies et des moulages.
XXVIII FONCTIONNEMENT DES ATELIERS.
II.
ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL.
Durant toute l'année 1888, cet enseignement a été
dirigé par MM. Leroy, pour la menuiserie ; Alêne,
pour la couture; - Bénard, pour la serrurerie. -
Nous avons eu le regret de perdre, le 7 janvier 1889,
M. Baudet, chargé de l'atelier de vannerie et de nu-
paillage de chaises, il a été remplacé par M. Morin.
Nous avons perdu également, le 19 décembre, M. Perche,
maître cordonnier depuis le 8 octobre 1883; il a été
remplacé pendant sa maladie, puis définitivement par
M. Dumoulin. Le 26 novembre 1888, nous avons
obtenu l'ouverture de l'atelier do brosserie confié à
M. Mercier. Nous n'avons eu qu'à nous louer du zèle
que les maitres apportent dans leurs fonctions. Le
tableau suivant met en évidence les résultats obtenus.
ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL. XXIX
4.241 fr. L'année 1886 a donné 1.747 fr. de plus que
l'année 1885. L'année 1887 a donné 257 fr. de plus que
l'année 1886. L'année 1888 a donné 3.146 fr. 70 de plus
que l'année 1887. Ajoutons que l'excédent aurait été
plus considérable si l'atelier de brosserie, ouvert seule-
ment à la fin novembre, n'avait entraîné une dépense
(214 fr. 50) très insuffisamment compensée (38 fr.).
L'évaluation du travail des enfants est faite par
l'inspecteur du service d'architecture et d'après le
tarif de la Ville pour la menuiserie et la serrurerie ;
par M. l'économe de l'hospice, d'après les tarifs du
Magasin central, pour la couture, la vannerie et le
rempaillage de chaises, et d'après le tarif de la Société
anonyme pour la cordonnerie.
Ces chiffres montrent que le travail des enfants, non
seulement couvre la dépense occasionnée par le salaire
de leurs maîtres, mais encore qu'il couvrira bientôt
l'intérêt du capital engagé dans la construction des
ateliers. C'est là d'ailleurs, à nos yeux, une considéra-
tion secondaire, et il en sera de même aux yeux de toutes
les personnes sérieuses qui s'occupent avec un esprit
un peu généreux des questions d'assistance. En effet,
l'enseignement professionnel rend des services d'un
ordre bien autrement supérieur. Il permet de donner à
un certain nombre d'enfants un métier qui, à leur sortie,
les mettra en mesure de gagner leur vie. Quelques-uns
ont déjà quitté l'hospice et sont placés; d'autres le seront
aussitôt que les circonstances le permettront. Il nous
aide à donner à un plus grand nombre d'enfants le moyen
d'atténuer, dans une proportion variable, les sacrifices
que la Société s'impose pour eux. Précisons par un
exemple : Nous avons à l'atelier de couture 24 hémi-
plégiques, c'est-à-dire des malheureux condamnés
presque certainement à passer toute leur existence à
l'hospice. 5 sont déjà de bons tailleurs, la plupart des
autres le deviendront. Autrefois, ils ne savaient rien
faire ; maintenant, grâce à l'enseignement qu'ils reçoi-
XXX ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL*
vent, une fois passés aux épileptiques adultes s'ils ont
encore des accès, ou passés dans les divisions de
l'hospice s'ils n'en ont plus, ils pourront travailler à
l'atelier commun de la maison et leur travail compen-
sera en partie, et pendant de longues années, les dé-
penses de leur entretien, en même temps qu'il leur
fournira quelques ressources personnelles.
Chaque année, l'habillement et la chaussure des
enfants sont notablement améliorés et l'amélioration
sera encore plus grande, car nous avons enfin obtenu
que le maître tailleur fut autorisé à faire la coupe des
effets d'habillement. Nous espérons arriver un jour il
faire que chaque enfant ait son trousseau numéroté.
Ainsi que nous l'avons vu précédemment, l'atelier de
brosserie a été installé le 26 novembre. Nous avions ré-
clamé en même temps l'organisation de l'atelier cl'i1n-
primerie, mais, malheureusement, l'année s'est écoulée
sans nous donner satisfaction.
Le tableau suivant fait voir que le nombre des enfants
qui profitent de l'enseignement professionnel est allé
en progressant depuis huit ans.
PATRONAGE DES ALIÉNÉS. XXXI
du jour. Trois fois par semaine, il est interrompu de
8 heures à 9 heures du matin par la leçon de gymnas-
tique. Les enfants sont divisés en deux séries : une
du matin, une du soir et, afin que l'enseignement soit
à peu près égal pour tous, tant à l'école qu'à l'atelier,
la série d'élèves du matin, dans la première semaine du
mois, devient la série du soir durant la seconde semaine.
Les jeunes travailleurs reçoivent tous les samedis des
récompenses variant de 10 à 40 centimes et dont ils dis-
posent les jours de promenades. A cet effet, l'Adminis-
tration a mis chaque semaine une somme de 15 fr. à la
disposition des chefs d'atelier.
Nous laissons les enfants choisir eux-mêmes autant
que possible leur métier. Nous dirigeons de préférence
les plus intelligents vers les ateliers de menuiserie et de
serrurerie et les plus faibles vers l'atelier de vannerie
et de rempaillage. Quant aux hémiplégiques, ils sont
naturellement dirigés sur l'atelier de couture. Le plus
souvent, quand il s'agit des enfants idiots, les séances
d'atelier ne dépassent pas une demi-heure au début.
Puis, progressivement, nous augmentons la durée de
leur travail manuel.
III.
PATRONAGE DES ALIÉNÉS ET EN PARTICULIER DES
ENFANTS IDIOTS ET ARRIÉRÉS.
A propos de l'enseignement professionnel, nous de-
vons signaler une lacune importante dans l'organisa-
tion de l'Assistance publique, non seulement à Paris,
mais dans la France presque tout entière : il s'agit du
patronage des aliénés convalescents ou guéris, et en
particulier des enfants ou des adolescents. Bien des
XXXII PATRONAGE DES ENFANTS.
fois, depuis plusieurs années, nous avons appelé l'at-
tention de l'Administration, de la Commission d'Assis-
tance publique, du Conseil général et delà Commission
de surveillance des Asiles de la Seine, sur la nécessité
de la création d'une Société de patronage pour les enfants
qui sortent de notre service. Jusqu'ici il n'y a pas eu
de solution. Le nombre de nos sortants augmentant, la
question devient plus urgente. Elle se présente sous
deux aspects : ou bien les enfants rentrent dans leur
famille, ou bien, étant âgés de plus de 18 ans et non
guéris, ils passent dans les sections d'adultes, soit aux
épileptiques, soit aux aliénés ordinaires. Bien que,
pour les enfants de cette dernière catégorie, il ne s'agisse
pas d'un véritable patronage, nous pensons utile de
dire un mot de la situation qui leur est faite.
Pendant quelque temps, nous avons obtenu du direc-
teur de l'hospice, que ces malades, auxquels nous
avions fait apprendre un métier, continuassent à venir à
nos ateliers, afin de perfectionner leur instruction pro-
fessionnelle et afin qu'ils puissent atténuer, par leur
modeste travail, les dépenses que la Société s'impose
pour eux. Il ne nous avait pas échappé que cette pra-
tique pouvait avoir des inconvénients, par exemple
l'introduction du tabac ou d'objets défendus dans la
section des enfants. Malgré cela, nous avons voulu faire
l'essai, y voyant des avantages compensateurs ; mais,
soit par indifférence du directeur, soit par défaut de
bonne volonté du personnel des sections d'adultes,
obligé de conduire les malades aux ateliers et de venir
les y chercher, cette pratique est tombée en désué-
tude. D'autre part, quelques petits accidents s'étant
produits par suite du contact des enfants avec des ado-
lescents devenus adultes (1), nous nous trouvions un
peu embarrassés pour intervenir de nouveau.
(1) Voir plus loin (p. 61) l'observation de Court..., que nous
publions avec M. Raoult.
PATRONAGE DES ENFANTS. XXXIII
Nous avons alors insisté pour que nos anciens ap-
prentis fussent envoyés aux ateliers de l'hospice. Là,
nous nous sommes butté contre la même indifférence du
directeur et contre la résistance des chefs d'ateliers, qui .
préfèrent à nos apprentis, et même aux aliénés adultes,
les vieillards, qui n'exigent pas la même surveillance
et ne les exposent à aucun danger; car, il faut le dire,
quelques-uns des chefs d'ateliers, quelques-unes des
surveillantes et sous-surveillantes des services géné-
raux, ont peur des aliénés et ne tiennent pas à les
occuper. Il en résulte de grands dommages pour la mai-
son. Ces craintes, ces résistances, disparaîtraient si,
conformément à nos réclamations persistantes, l'Admi-
nistration prenait soin de faire passer sans exception le
personnel secondaire dans tous les services, avant de
les spécialiser dans un des services généraux. Si la sur-
veillante de la buanderie ou de la lingerie, et même les
chefs d'atelier avaient passé quelque temps dans un
service d'aliénés, les uns et les autres sauraient com-
ment il faut se conduire avec ce genre de malades; ils
distingueraient les signes qui annoncent les périodes
d'excitation ou les accès, et se rendraient compte des
moments durant lesquels on peut les utiliser et de ceux
où il convient de les laisser au repos ; ils ne s'offusque-
raient pas outre mesure de leurs écarts de langage et
sauraient prendre les précautions pour éviter les acci-
dents. Malheureusement, il est loin d'en être ainsi, et,
souvent, ou les malades ne sont pas reçus dans les
ateliers ou les services généraux, ou ils en sont ren-
voyés pour les motifs les plus futiles. Comme exemple
à l'appui, nous dirons que trois de nos apprentis
menuisiers les plus habiles, passés aux épileptiques
adultes à la fin de 1887, Georg..., Jaune... etSalm..., ont
été refusés à l'atelier de menuiserie de l'hospice pen-
dant toute l'année 1888.
En ce qui concerne nos apprentis qui sortent guéris
BOURNEVILLE, 1888. u*
S r 1 V STATISTIQUE.
ou très améliorés, la situation n'est guère meilleure.
Parmi les parents, il en est qui, comprenant ce qu'on a
réalisé pour leurs enfants, font tous leurs efforts pour
leur faire continuer leur métier au dehors. D'autres
essaient, se lassent vite, car la sortie de Bicêtre n'est pas
Une recommandation; alors, pour diminuer les charges
d'entretien de leur enfant, ils essaient de l'utiliser
n'importe comment, ou bien ils viennent nous retrouver,
nous demandant de le placer. Il nous est arrivé d'en
mettre quelques-uns dans deux ateliers de menuiserie
dont nous connaissions les patrons,mais notre interven-
tion est insuffisante et ne peut faire face à tous les
besoins. C'est là, d'ailleurs, une tâche qui incombe
surtout à l'Administration et qui pourrait être conve-
nablement remplie par elle avec l'aide d'une Société de
patronage bien organisée.
IV.
STATISTIQUE. MOUVEMENT DE LA POPULATION.
Le 1 cr janvier 1888, il restait dans le service 331 en-
fants se décomposant ainsi : 308 idiots, imbéciles,
épileptiques, etc., aliénés ; 23 idiots, imbéciles, épilep-
tiques, etc., réputés non aliénés. On sait qu'il s'agit là
d'une division purement administrative. Voici le mou-
vement de la population en 1888 :
MOUVEMENT DE LA POPULATION. XXXV V
XXXVI DÉCÈS.
DÉCÈS. XXXVII
XXXVIII DÉCÈS.
DÉCÈS. xxxix
XL DÉCÈS.
DÉCÈS. XLI
XLII DÉCÈS.
DÉCÈS. XLIII
q
>
t
m
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c
M
en
cn
0
Id
H
en
LA NOUVELLE SECTION. XLVII
Personnel du service en 1888. Le personnel se
composait ainsi : 1° pour le service médical : d'un interne
titulaire, M. Durand (1) et d'un interne provisoire,
M. Mathon ; de M. lu Dr Bricon, conservateur du Musée
pathologique de l'hospice; 2° pour le service sco-
laire : a) Grande école : d'un instituteur, M. Boutillier,
et d'un instituteur adjoint, M. Boyer ; d'un professeur
de chant, M. Peny ; d'un professeur de gymnastique,
M. Goy; de deux moniteurs (administrés de l'hospice);
d'un maître d'escrime et d'un maître de danse; et de
4 garçons de classe ; b) Petite école : de 111"e Blanche
Agnus, surveillante, MUes Berthe Lenglet et Amandine
Bohain sous-surveillantes, MUe Ferret, suppléante, et
d'une infirmière de classe ; pour l'enseignement profes-
sionnel, de six maîtres dont nous avons donné les
noms plus haut ; 3" pour le service hospitalier de
M. Agnus, surveillant; de M. Siégel, sous-surveillant ;
de 1M"e Jolliot, chargée de la surveillance de l'infirmerie
du bâtiment des gâteux invalides et du pavillon des
maladies contagieuses ; de Mme Bié, suppléante ; de
22 infirmiers de jour et de nuit; de 28 infirmières de
jour et de nuit; d'un baigneur (suppléant) ; d'un barbier
et d'un portier. Total du personnel secondaire : 66.
V.
LA NOUVELLE SECTION. CONSTRUCTION D'UN NOUVEAU
PAVILLON DE DORTOIRS ET DU PAVILLON
DES CELLULES.
Dans notre dernier Compte rendu, nous terminions
le chapitre consacré à la Nouvelle section en disant que
(1) M. Durand, appelé à faire son service militaire, a été rem-
placé du 15 novembre 1888 au 1er février 1889, par M. Renault,
interne provisoire.
XLVIII NOUVEAU PAVILLON DE DORTOIRS.
le Conseil municipal avait voté, dans sa séance du
30 décembre 1887,1e projet présenté par l'Administration
de l'Assistance publique relatif à la construction d'un
nouveau pavillon de dortoirs et du pavillon des
cellules.
L'adjudication de ces deux bâtiments a eu lieu le
24 mars. Les devis montaient à 245.179 fr. 53 c., que
les rabais faits par les adjudicataires ont réduit à
176.007 fr. 46 c. Les travaux ont commencé le 19 avril.
Sur la somme de 27.505 fr. réservée pour imprévus, il
a été prélevé :
Pavillon des Cellules. XLIX
Le pavillon des cellules doit nous arrêter plus long-
temps. Il est situé à l'extrémité ouest de la section, en
arrière de l'espace libre compris entre l'infirmerie et
le pavillon d'isolement pour les maladies contagieuses,
faisant face à l'avant-corps du bâtiment des gâteux. Ce
pavillon (Fig. 16), un peu exhaussé au-dessus du sol,
est précédé d'une cour devant servir de préau, dont la
clôture se compose d'un grillage en fil de fer à grosses
mailles, recourbé à sa partie supérieure de manière à
empêcher les enfants de la franchir. Des arbustes et des
plantes grimpantes, lierre, vigne-vierge, chèvrefeuille,
etc., empêcheront plus tard la vue du dehors. Ainsi que
le montre le plan (Fig. 17), le vestibule ouvre sur une
galerie qui court tout le long du bâtiment. Au centre se
trouvent : 1° L'office comprenant un petit fourneau à
gaz, une pierre d'évier et un réservoir d'eau chaude
pour les bains ; 2° Salle de bains ; 3° Les water-
closets se composant de deux cabinets.
De chaque côté de ce petit service central, il y a
quatre chambres d'isolement, ou cellules, et une cham-
bre d'infirmier. Quatre chambres d'isolement ont 3'u 55
de longueur, 2°e2U de largeur, 3m65 de hauteur. Elles
sont éclairées par une fenêtre de 0m80 sur 2m30 placée
à lm07 au-dessus du sol. La fenêtre, protégée par un
grillage intérieur, est munie, à l'extérieur, d'un
volet plein permettant à volonté la suppression de
la lumière. Les angles situés de chaque côté de la
porte ont été remplacés par des pans coupés, de façon
à empêcher les enfants de se dissimuler dans ces deux
angles. Les murs ont été crépis avec du ciment gris
jusqu'à une hauteur de 2m20, ce qui s'opposera aux
inscriptions habituelles aux malades.
Le chauffage se fait par des bouches de chaleur situées
à 2m30 au-dessus du parquet : de la sorte, les enfants
ne pourront les souiller ni les obstruer. Ces bouches de
chaleur proviennent de quatre poêles placés dans le
couloir et dont le chargement se fait par l'extérieur des
BOURNEVILLE, 1888. H"
L PAVILLON DES CELLULES.
cellules.* La porte est en chêne, d'une épaisseur de
54 millimètres, avec une forte serrure encastrée dans le
bois et ne faisant aucune saillie. Il n'y a pas non plus de
verrous extérieurs; aussi, la porte des cellules ressemble-
t-elle extérieurement à une porte ordinaire et ne
rappelle pas les portes de prison qu'on observe souvent
dans les quartiers cellulaires d'aliénés. A l'intérieur,
la porte est complètement lisse et peinte en gris de fer
pour rendre aussi difficiles que possible les dessins.
Dans le panneau du haut de la porte, pour la sur-
veillance, on a pratiqué une ouverture circulaire munie
d'une glace de 2 centimètres d'épaisseur ayant 5 centi-
mètres de diamètre, encastrée dans un châssis en cuivre.
En raison de sa largeur, on peut très bien voir tout ce
qui se passe dans la cellule (1). Cette glace est munie
d'un obturateur en cuivre à coulisse. Pour la surveillance
de nuit, au-dessus de la porte, une imposte vitrée, garnie
d'une trappe en tôle jouant à l'aide d'une corde, permet,
quand cette trappe est levée, d'éclairer l'intérieur de la
cellule par un bec de gaz placé devant la vitre.
Quatre cellules sont munies de sièges d'aisances ren-
fermant un pot dont l'enlèvement se fait par le couloir.
Quatre cellules diffèrent des autres : deux destinées
aux malades agités et furieux sont, l'une, capitonnée sur
toutes ses faces, porte et murs ; la seconde a les parois
des murs en linoléum formant un revêtement et une
sorte de capitonnage. Dans ces deux cellules la fenêtre
( ! ) Nuus avons employé pour l'une des portes le judas inventé
par M. Palu, serrurier à Neuilly-sur-Marne, et adopté pour les
cellules de quelques asiles de la Seine. Ce système, très compliqué
et coûteux, manque aussi de commodité. Nous en avons essayé un ici
autre consistant en une plaque en cuivre, de 12 centimètres de coté,
percée de trous de 5 millim. de diamètre, et appliquée tout à fait
contre une plaque en verre, afin d'empêcher les malades de passer
des cordons entre les trous, et fermée par deux petits volets exté-
rieurs, maintenus par un verrou. Mais c'est le système que nous
avons adopté définitivement et que nous venons de décrire qui
nous a paru offrir le plus d'avantages (simplicité, résistance, facilité
de surveillance).
PAVILLON DES CELLULES. LI
est située à une hauteur plus grande que dans les
chambres d'isolement (2m20) . Tout le long du bord
supérieur du linoléum ou du capitonnage, court un
chanfrein en bois, oblique, de manière que les enfants,
même en sautant, n'ont aucune prise sur le bord supé-
rieur du capitonnage. La troisième cellule, peinte
entièrement en ton bleu cobalt, est destinée à des essais
de traitement de certains cas d'aliénation mentale. La
quatrième est réservée pour un aménagement ultérieur.
Dans ces quatre cellules, les portes et les angles voisins
sont disposés comme dans les quatre chambres d'isole-
ment. En outre, elles ont une fenêtre en tabatière, placée
sur le toit, et le châssis à tabatière est muni, au droit
du plafond, d'une trappe en fer se levant à volonté, pour
réaliser l'obscurité la plus complète.
Le coucher consiste en paille ou en paillasse pour les
cellules d'agités ; pour les autres en une caisse en bois
ou en fer, pleines, sans aucun orifice permettant d'y
passer des liens, comme cela existe encore dans les
cellules d'un grand nombre d'asiles. Les caisses-lits sont
fixes et disposées de telle sorte que les enfants ne puis-
sent s'en servir pour atteindre soit la fenêtre, soit la
bouche de chaleur.
Quatre cellules ou chambres d'isolement sont pourvues
d'un siège d'aisances, demi-circulaire, placé dans l'angle
à gauche de la porte, voûté afin d'empêcher les enfants
de monter dessus. Trois sont en ciment recouvert d'une
solide planche en bois, disposée de façon à n'offrir au-
cune prise. L'un des sièges est entièrement en bois et
offre une disposition spéciale copiée sur le modèle que
nous a fait voir M. le Dr Bécoulet, médecin-directeur de
l'asile d'aliénés de St-Ylic, près Dôle. Le support du
siège se compose de morceaux de chêne enchevêtrés les
uns dans les autres et maintenus à l'aide de fortes vis. Le
tout est fixé au mur et au plancher par des liteaux très
solidement fixés eux-mêmes.
Dans tous, le vase vient s'adapter exactement à la face
LII PAVILLON DES CELLULES.
inférieure du siège proprement dit ; il est plus large que
le trou du siège, par lequel il ne peut point passer. On
le retire du couloir des cellules en le faisant glisser sur
deux rails à l'aide d'un crochet qui s'adapte à la poignée
du vase.
En résumé, ces cellules diffèrent de la plupart des
autres : 1° par l'aspect des portes et par l'oculaire;
2° par leur mode d'éclairage ; 3° par les pans coupés
et le revêtement des murs en ciment ; 4° par leur lit;
5° par l'absence de tout moyen de suicide, etc.
Le 8 novembre 1888, dans une lettre à M. Pcyron,
directeur de l'Assistance publique, après l'avoir prié de
hâter l'ameublement du nouveau pavillon de dortoirs
dont nous avons parlé, nous réclamions l'achèvement
de la section des enfants, c'est-à-dire la construction
des trois derniers pavillons de dortoirs. Nous nous
appuyions : 1° sur ce fait que le règlement des comptes
des travaux antérieurs à 1888 donnait un boni de plus
de 150.000 fr., boni qui naturellement devait être
appliqué à la suite de l'entreprise ; -2° sur la présence
de 60 enfants dans l'ancienne section où ils détiennent
la place d'épileptiques ; 3° sur la présence dans les
dortoirs de la nouvelle section de nombreux lits supplé-
mentaires. Nous rappellions la même demande à la fin
du même mois. Se rendant un compte exact de la situa-
tion, M. Peyron a fait préparer les devis de cette der-
nière opération et nous a promis de soumettre l'affaire
à son Conseil de surveillance dans le courant du mois
de janvier 1889. Tout nous fait donc espérer que, dans
notre prochain Compte rendu, nous annoncerons l'a-
chèvement de cette section dont les plans et l'organisa-
tion ont été votés en juin 1883.
ASSISTANCE DES ALIÉNÉS. Mil
VI.
ASSISTANCE DES ALIÉNÉS. LKS CABANONS DANS LES
HÔPITAUX-HOSPICES DE PROVINCE.
Nous avons toujours pensé que les médecins avaient
non seulement le devoir de mettre toute leur science,
tout leur dévouement à soulager ou guérir leurs ma-
lades, mais encore celui de vulgariser les réformes re-
latives à l'hygiène et à l'assistance publiques. C'est pour
cela que, le plus souvent possible, nous appelons l'at-
tention de nos lecteurs, que nous voudrions voir partout
à la tête du mouvement réformateur, sur la situation
des établissements hospitaliers. Dans ces dernières
années, nous avons insisté sur la nécessité de transfor-
mer complètement l'hospitalisation des vénériennes.
Aujourd'hui, nous abordons une autre question d'assis-
tance : celle des aliénés dans les hôpitaux-hospices
de province.
En juillet 1887, nous avons montré (1) la déplorable
organisation des Cabanons où ils sont déposés dans les
hôpitaux ou hospices de Château-Thierry, Epernay, Lu-
néville, Saint-Dié, Remiremont, Epinal, Belfort, Lan-
gres, Bar-sur-Aube, Troyes. Nous blâmions le séjour
prolongé des aliénés dans les cabanons (cachots de ces
établissements) ; nous demandions au ministre de l'in-
térieur d'exiger de ses préfets et sous-préfets le transfert
immédiat des malades à l'asile départemental ; enfin,
nous réclamions la transformation des cabanons en
chambres ou en cellules convenablement disposées et
ne rappelant plus en rien l'emprisonnement.
Le 1" août 1887, M. Fallières adressait aux préfets
une circulaire les invitant : 1° à visiter périodiquement
les asiles publics et privés, consacrés aux aliénés;
(1) de Neurologie, 1RR7. t. XIV, p. 1 ? xx. :
ïf ? >p
LIV ASSISTANCE DES ALIENES.
2° à examiner les conditions d'installation des cellules
dans les hospices ; 3° à procéder « sans tarder » au
transfert des aliénés dans les asiles. L'intention était
excellente. Malheureusement les préfets, encore trop
peu au courant des questions d'assistance, à part quel-
ques exceptions, ne paraissent pas avoir tenu un compte
sérieux des prescriptions de la circulaire ministérielle.
Et, en 1887, nous avons pu voir que la situation des
cabanons était aussi défectueuse, pour employer une
expression modérée, dans l'Ouest (Cholet, Bressuire,
Rochefort, Saumur), que nous l'avions constatée en 1886
dans l'Est (1). Au mois d'avril 1888, nous avons vu à
l'hôpital Si-André de Bordeaux quatre cabanons aussi ^
mauvais que possible, dotés de tous les moyens de pen-
daison (2), servant à la fois aux hommes et aux femmes.
Nous avons poursuivi notre enquête sur ce sujet pen-
dant nos vacances de septembre dernier et nous avons
eu le triste regret de déclarer que le Centre et le Sud-Est
ne sont pas mieux partagés que l'Est et l'Ouest. On en
jugera par les renseignements qui suivent :
A l'hôpital-hospice de Tonnerre, il y a deux cabanons,
dans le sous-sol, un du côté des hommes, un du côté
des femmes. Ils sont assez vastes mais avec des angles,
des barreaux la fenêtre, au lit, au judas, barreaux qui
constituent autant de moyens de pendaison : c'est ce
qui a eu lieu il y quelques années. A côté de la porte,
il y a un trou par lequel on passe la nourriture au ma-
lade. Ces cabanons ont encore l'inconvénient d'être loin
de toute surveillance. Les aliénés y restent 2, 3, 4 jours
au plus et sont envoyés à l'asile d'Auxerre. Toutefois,
nous avons vu dans l'une des salles de femmes, plusieurs
aliénées, entre autres une lypémaniaque qui refusait de
manger depuis deux mois et une autre admise pour un
rhumatisme chronique avec déformation des jointures ,
(1) Archives de Neurologie, 1888, t. XVI, p. 137.
(2) Un nouveau malade s'y est pendu en juillet 1888.
CABANONS DES HÔPITAUX DE PROVINCE. LV
atteinte de délire de persécution, avec périodes d'exci-
tation : ces malades ne devraient pas rester à l'hospice.
Les cabanons de l'hôpital général de Dijon sont si-
tués dans un bâtiment à rez-de-chaussée bordant la pre-
mière cour à gauche. Leur aménagement est imparfait;
mais leur principal défaut est d'être isolés. On nous a
assuré que, quand il y avait des malades, on faisait
coucher un infirmier ou une infirmière dans le cabanon
voisin.
L'hospice départemental de Besançon possède cinq
cabanons, très mal disposés mais dont le directeur ac-
tuel ne se sert pas. Il place les aliénés dans les salles
destinées aux vieillards ou aux infirmiers. S'ils sont agi-
tés on leur met la camisole (nous avons vu une aliénée
camisolée et fixée sur une chaise). Les malades restent
en observation de 1 à 15 jours, très rarement 15 jours
et sont dirigés sur l'asile de Dôle.
A l'hôpital du Saint-Sépulcre de Salins, les cabanons
sont placés au fond d'un jardin, à une très grande dis-
tance de toutes les autres salles. Double porte, triple
grillage à la fenêtre, etc.
L'hôpital d'Arbois se compose de deux parties sépa-
rées par une rue : d'un côté est l'hôpital, de l'autre les
dépendances. Ces dépendances comprennent entre au-
tres la vacherie (2 vaches et 1 âne) et le cabanon.
Cette disposition le condamne. (Nous avons vu à l'hos-
pice de Lunévillc des cabanons à côté d'une porcherie ;
ici, c'est à côté des vaches et de l'âne) (1).
Les cabanons de l'hôpital-hospice de Poligny sont
installés clans un bâtiment a. gauche de l'entrée, au-
dessus d'un sous-sol assez élevé. Ils sont très mal amé-
nagés et assez loin de tout secours.
(1) Voir A1'eh. de Neurologie, 1887, p. 173. Cet article est
reproduit plus loin, p. 88.
LV ! ASSISTANCE DES ALIÉNÉS.
Situation encore plus déplorable à motel-Dieu de
Lons-le-Saulnier. Les cabanons se trouvent dans le
sous-sol qui est profond et ressemble plutôt à des caves.
Portes solides, doublement verrouillées ; à gauche, ou-
verture transversale avec une petite porte en fer par
laquelle on passe les aliments qu'on dépose sur le re-
bord intérieur de cette ouverture. Au-dessous de celle-
ci, au ras du sol, deuxième ouverture par laquelle on
tire le vase aux déjections, répondant à un siège en bois,
de forme carrée. Petite fenêtre transversale, grillée, à
la hauteur du sol de la basse-cour (un malade s'est pendu
il y a quelque temps aux barreaux). Le lit consiste en
une caisse en bois solide, pleine, à demi-enfoncée clans
le sol et qu'on remplit de paille. Les autres sous-sols,
qui sont vastes et courent sous tout l'hôpital, servent
de caves, de magasins, de bûcher « ce qui est mauvais,
nous dit naïvement la supérieure, car le bois n'est pas
aéré et sèche mal. » J'ai vu dans l'un des cabanons, un
vieillard inoffensif, atteint de démence, qui y a été mis
parce qu'il tourmente les autres malades. Il est évident
que la surveillance est absolument nulle, car un homme
sain d'esprit, ne consentirait pas à coucher dans ces
caveaux.
Nous avons vu, il l'hôpital thermal d'Aix, un aliéné
dans une chambre dont le plancher est à près de deux
mètres au-dessous du niveau du sol de la rue. Cette
chambre, mal éclairée, étroite, est loin de toute surveil-
lance.
A l'hôpital de Grenoble, les cabanons sont disposés
dans une partie du rez-de-chaussée du pavillon des
vénériennes. Disposition médiocre; mais ils peuvent
être dans une certaine mesure surveillés par les infir-
mières des vénériennes. Nous avons vu dans un des
cabanons un aliéné qui y est depuis douze jours et dans
le cabanon voisin un matelot qui l'habite depuis trois
jours.
CABANONS DES HOPITAUX DE PROVINCE. LVII
Il existe quatre cabanons à l'hôpital de Valence ; ils
sont disposés dans un sous-sol, quand on s'y rend, et
c'est la pratique ordinaire, par la galerie longeant la
cour intérieure, au rez-de-chaussée si l'on s'y rend
par le jardin. Le sous-sol est parcouru par un couloir
longitudinal. Le sol des cabanons est plus bas que le sol
des couloirs. Portes garnies de plaques de fer et de
verrous, avec judas par lequel on introduit les aliments.
Au-dessus de la porte, ouverture avec cinq barreaux
verticaux, sans carreaux, laissant pénétrer l'air froid et
humide du couloir en communication avec l'escalier. Du
côté du jardin, fenêtre grillée verticalement sans car-
reaux, avec auvent métallique ouvert en haut, surmonté
d'une planche verticale pouvant combler le vide entre le
bord supérieur de l'auvent et celui de la fenêtre. Les
cabanons sont voûtés. Aucun meuble, de la paille. Pas
de chauffage. Ces cabanons, où on descend par un
escalier obscur de 23 marches, constituent de vrais
cachots. Les pièces voisines sont plus élevées que les
cabanons et leur sol est de niveau avec celui du couloir.
Autrefois, on conduisait les aliénés aux cabanons par
un escalier de 18 marches donnant sur ce jardin, qui est
très bien, et on les introduisait par une porte donnant sur
ce jardin. Cette pratique était meilleure, car elle évitait
les inconvénients de l'escalier actuel qui font que les
malades sont effrayés par l'aspect de cet escalier sans
éclairage qui semble les conduire (et c'est vrai) dans
une cave. Il y a deux mois, un malade y a séjourné
quatorze jours.
A l'hôpital du Puy,nous avons vu dans les salles des dé-
ments des deux sexes,sujets à des périodes d'excitation
et dont la véritable place est dans un asile d'aliénés. En
revanche, on n'y reçoit que « le couteau sur la gorge»,
les épileptiques et les idiots. Il y a deux catégories de
cabanons. Les plus anciens constituent de véritables
cachots. Ils sont voûtés, sans air et sans lumière. La
LV111 ASSISTANCE DES ALIÉNÉS.
vieille religieuse ( 35 ans de services ) qui nous ac-
compagne, nous dit y avoir soigné naguère dans l'un
d'eux une folle pendant 15 ans. L'un de ces cachots
lui sert encore à mettre les vieilles femmes qui troublent
le repos des autres. Plusieurs de ces cabanons, servent
de débarras. Les cellules, dit la supérieure, n'étaient
pas commodes pour le service, mais les malades pou-
vaient y vivre. Les trois cabanons actuels sont situés
au rez-de-chaussée du bâtiment principal de l'hospice,
derrière la cuisine, en contre-bas du sol, dans une cour
isolée, loin de la surveillance. Ils sont précédés d'un
couloir. Ils ne reçoivent de jour que par une imposte
grillée en long et en travers, ouvrant sur le couloir. On
passe la nourriture aux malades par le guichet de la
porte, richement pourvue de verrous. Les malades,
nous fait-on remarquer, ne pourraient y rester long-
temps, car leurs jambes enflent. La durée ordinaire
du séjour est de 10, 12, 15 jours et même 3 semaines.
Nous ajouterons le récit d'un fait déjà ancien, mais que
nous n'avons pas encore utilisé et qui mérite d'être
connu, car il met bien en relief les inconvénients des
pratiques actuelles : il concerne l'hospice des Andelys,
dans l'Eure :
1° Les aliénés sont admis à l'hospice aux mêmes conditions
que les malades, mais à titre temporaire seulement, en atten-
dant que les formalités d'admission à l'Asile spécial soient
remplies. La durée est variable selon l'empressement apporté
par l'administration communale et départementale pour de-
mander le transfert et aussi suivant les conditions d'admission
à l'Asile, soit aux frais de la famille, de la commune ou du
département; en résumé, on peut compter un minimum de 20
jours ; ce délai est toujours trop long, attendu que le service
des hôpitaux n'est pas organisé pour exercer une surveillance
continue et qu'il serait inhumain d'enfermer dans les cabanons
des personnes atteintes seulement de démence. 2° En ce qui
concerne l'événement survenu en 1881 iL l'hospice, voici ce que
j'en ai recueilli : 111e Jobey, Marie-Victorine, âgée de 66 ans,
entrée à l'hôpital le 23 Novembre 1881 sous la rubrique : dé-
ASSISTANCE DES ALIÉNÉS. til
mence sénile, paraissait calme quoique divaguant, mais rien
dans ses actes n'indiquait que l'on devait observer une sur-
veillance absolue, elle circulait dans les corridors comme les
malades ; le 2') nuvembre, vers midi, pendant le déjeûner des
soeurs, elle a disparu sans que l'on sache où elle était passée,
on se mit alors à faire des recherches dans la maison, mais
inutilement; comme il était venu plusieurs personnes visiter
des malades, on a pensé qu'elle avait dû profiter que la porte
était restée ouverte pour sortir, alors on fit des recherches
dans les bois voisins et on sonda les bords de la Seine, mais en
vain.
Comme elle avait été domestique dans un château aux en-
virons de Rouen, on pensa qu'elle avait pu s'y rendre, mais
c'était encore une fausse piste; enfin, au bout de 4 semaines,
une domestique ayant besoin de monter dans un grenier inoc-
cupé, trouva la porte fermée en dedans, on l'ouvrit de force,
et, dans un coin du grenier, on découvrit le cadavre en décom-
position de Mil. Jobey, debout, adossé à une échelle dressée au
mur. Est-elle morte de congestion ou d'inanition ? cela n'a pas
été établi ! Depuis on n'a jamais retrouvé la clef de cette porte.
Tout cela prouve que les premières recherches avaient été
mal faites, mais c'est un peu excusable, car tout le monde
pensait qu'elle avait dû sortir de l'Etablissement.
Ce fait se passe de commentaire !
Comme conclusion, nous ne pouvons que répéter ce
que nous écrivions ailleurs il y a six mois, et insister
encore une fois auprès de M. le ministre de l'intérieur
« pour qu'il se fasse renseigner d'urgence sur les condi-
tions matérielles des cabanons de tous les hôpitaux et
hospices de province ; pour qu'il exige des transforma- J
tions radicales de ces cachots, et surtout pour que les
malades soient dirigés immédiatement, ou au moins
dans les 24 heures, sur les asiles du département. C'est
là une réforme qui peut être réalisée en quelques jours,
réforme modeste, il est vrai, mais qui rendrait d'incon-
testables services à un grand nombre de malheureux. »
BOURNEVILLE.
DEUXIÈME PARTIE
Clinique.
Rooawvr.r,r, 1888.. 1 .
1.
Nouveaux cas d'idiotie avec cachexie
1 pachydermique
(IDIOTIE CHRÉTINOÏDE OU IDIOTIE MYXOEOÉllATEUS;);
Par " 00 ICJ 1-. 1'V )a %7 X Ir- IC, IE .
Les cas d'idiotie avec cachexie pachydermique sont beau-
coup plus communs qu'on ne pourrait le croire, si l'on en
jugeait d'après le petit nombre des malades de cette catégorie
qui sont admis dans les asiles. Cette rareté s'explique d'ailleurs
par la difficulté qu'opposent les administrations à la réception
des malheureux enfants atteints d'imbécillité et d'idiotie. Il y a
quelques mois, notre ami, M. le D'' P. Marie, nous a donné la
photographie, prise parle garçon de laboratoire de la clinique
de la Salpêtrière, d'une jeune fille de Bonneval (Eure-et-Loir)
atteinte d'idiotie crétinoïde 1. Un autre de nos amis, M. le
D'' Guillaumin, médecin à Nogent-le-Roi, dans le même dépar-
tement, nous a fait voir à la fin de septembre deux autres cas
tout à fait caractéristiques. Ce sont ces cas que nous allons
rapporter, bien qu'il ne nous ait été possible de prendre que
des notes sommaires.
Ouservation I. Vas... (Georges), cinq ans, habitant la com-
mune de Pinthières. Père, grand, fort, physionomie régulière,
intelligent. Mère, assez grande, bien portante.-Deux frères en
bonne santé. Aucun des membres de la famille ne présente un
aspect rappelant celui de l'enfant. Un cousin germain est faible
d'esprit et fait des fugues fréquentes (épilepsie larvée ? ). Pas de
consanguinité.
Vas... a 76 centimètres de hauteur; il marche seul, lourdement,
lentement. Sa physionomie est tout à fait caractéristique; sa tète
1 Nous publions plus loin l'observation de cette malade.
4 IDIOTIE.
ressemble a celle du Pacha et de Gray ? dont nous avons publié
l'histoire (voir Arclt. de New'olog., 1886, tome XII, p. 142, 143 et
2( ? et Compte -rendu de Bicêtre, pour 1886.) Les cheveux, peu
abondants sur la moitié postérieure du crâne, sont rares en avant
et ont une coloration rousse. Le cuir chevelu est le siège de crasses
etd'uneéruplion eczémateuse qui se reproduisent sans cesse. La fon-
tanelle antérieure persiste et est encore large. Les sourcils sont peu
fournis, les cils assez abondants; le nez est camus; les lèvres sont
très épaisses ainsi que la langue qui sort souvent de la bouche.
La dentition est en retard; les canines viennent seulement de
percer. Les joues sont épaisses.
Le cou est court et ni M. le Dr Guillaumin, ni nous-même, n'a-
vons pu sentir la glande thyroïde. 11 existe des paquets pseudo-
lipomateux dans Jes creux sus-claviculaires et dans les aisselles.
Les membres supérieurs et inférieurs sont courts et gros. Les
mains sont épaisses, pseudo-oedémateuses, ainsi que les pieds, mais
ceux-ci à un moindre degré. Le ventre est large, volumineux. Il
n'y a pas de hernie inguinale, mais nous avons trouvé une petite
hernie ombilicale. Les testicules ont la dimension d'un oeuf de
passereau.
La parole est limitée à quelques mots simples. La voix est éraillée,
rauque, stridente. Le regard est hébété. V. ne s'aide en rien ; il
tient un peu les objets avec les mains. Il est gâteux, frileux,
résiste au mouvement et aime beaucoup le lit. La peau est pâle,
cireuse.
Observation IL Pih... (Pauline), vingt-sept ans, réside dans
la commune de Croisilles. Ses parents sont bien portants; pas de
goitreux, pas de consanguinité; inégalité d'âge de deux ans. Elle
est la cinquième et dernière enfant; les autres sont en bonne
santé. Elle n'a pas eu de convulsions et on ne sait à quoi attribuer
la maladie. Sa taille n'est que de 89 centimètres.
Cheveux longs, d'un brun roux, peu abondants en arrière et
sur le bas des tempes, très rares sur les régions pariétales et tem-
porales supérieures. Crasses presque généralisées du cuir chevelu,
se reformant très rapidement. Tête grosse, surtout eu arrière ;
pariétaux très fuyants; fontanelle antérieure non oblitérée : on sent
une rainure large de cinq à six millimètres et longue de plusieurs
centimètres. Front bas, ridé, peau delà face jaune, cireuse;
paupières supérieure et inférieure pâles, bleuâtres, bouffies,
comme oedémateuses. Sourcils assez maigres, cils peu fournis.
En raison de la bouffisure des paupières, les yeux sont enfoncés
et paraissent petits. Le regard est sans expression. Nez camus très
prononcé, épaté : lèvres très épaisses, entr'ouvertes; bouche large;
double rangée de dents comme chez le Pacha (1° dentition et
2° incomplète). Langue très épaisse. Bajoues volumineuses et
CACHEXIE PACHYDERMIQUE. O
tremblottantes. Prognathisme très accusé qui, avec les autres ca-
ractères du visage et du crâne, lui donnent un aspect simien tout
à fait hideux.
Le cou est court et ni M. Guillaumin, ni nous, n'avons pu perce-
voir la glande thyroïde. Masses pseudo-lipomaleuses sus-clavicu-
laires très nettes; celles des aisselles sont moins prononcées.
Thorax déformé par une déviation du rachis (rachitisme); seins
flasques, de la grosseur d'une moitié de mandarine; mamelons
déprimés. Ventre large et très gros.- Hernie ombilicale ? Fesses
assez grosses, baloltantes.- Grandes lèvres assez développées avec
un bouquet de poils assez longs mais rares; rien au pénil. Pih...
n'a jamais été réglée ; elle aurait rendu une fois dn sang par la
bouche. Les membres supérieurs et inférieurs sont gros, courts ;
les mains et les pieds offrent les caractères classiques. La parole
estlimitée à quelques mots. La voix est. stridente, rauque, éraillée.
Pih... reconnaît ses parents, ses voisines, sait expliquer surtout
par signes, ce qu'elle veut; elle mange seule, ne gâte pas, est
sujette à la constipation. Sa démarche est très lourde, très lente,
dandinante. Pih... est très sensible au froid. Sa peau est jaunâtre.
cireuse ; eczéma des lombes, du dos et un peu des bras.
Ces deux malades présentent dans l'ensemble et dans les
détails tous les caractères de nos anciens malades, atteints
d'idiotie avec cachexie pachydermique. Aussi nous contenterons-
nous de quelques remarques. Tous deux ont le nez camus
(c'est la règle), bien que leurs parents aient des nez aquilins.
De même que nos autres malades, ils ont : lu des cheveux
brun-roux ou blond-roux, gros, rudes et rares, principale-
ment sur la région moyenne de la moitié antérieure de la tète;
2° le cuir chevelu est le siège d'une éruption eczémateuse ;
3° la fontanelle antérieure est persistante' ; 4° la denti-
tion défectueuse et en retard ; à" la peau cireuse, un peu
jaunâtre, luisante, eczémateuse; 61 la partie inférieure des
joues épaissie, comme tremblottante; 7° les creux sus-clavi-
culaires et les aisselles sont gonflés par des masses pseudo-lipo-
mateuses ; 8" les mains et les pieds sont épais, boursouflés,
comme oedémateux, bien que nulle part, la pression du doigt
ne laisse d'empreinte ; 9" la voix est rauque, stridente, érail-
' Chez Then..., dit le Pacha, mort, il 2-Í ans, la fontanelle persistait. 11
en est de même chez Gra ? (le 30 ans, qui est encore dans noire
service. Il en était encore ainsi chez un autre enfant dont nous publierons
prochainement l'observation dans le Progrès médical. Même chose chez
un malade de Curling', de M. Bouchaud, etc., etc.
Ci IDIOTIE.
lée : c'est le caractère qu'elle avait chez tous les idiots cl'éti-
noïdes que nous avons observés, caractère que nous n'avons
pas suffisamment mis en relief; 10° nous avons vu que le
Pacha et Gra... avaient des hernies inguinales, nos deux nou-
veaux malades ont des hernies ombilicales ; cette fréquence des
hernies inguinales et surtout ombilicales mérite d'être relevée ;
'11° notons enfin l'absence probable de la glande thyroïde qui,
ainsi que nous l'avons démontre dans notre travail avec
M. Bricon, parait être la caractéristique anatomo-pathologique
de l'idiotie crétinoïde '.
La note qui précède a paru dans le numéro 48 des Archives
de neurologie (p. 431). Dans le numéro suivant nous avons
publié l'observation de la malade deBonneval, àlaquelle nous
avions fait illusion. Nous la devons à l'obligeance de M. le Dl'
Camuset, médecin-directeur de l'asile de Bonneval, à qui nous
avions signalé son existence. Voici cette intéressante observa-
tion.
Observation III. Père alcoolique et grand-père violent. Oncles
et tantes paternels ivrognes. Aucun antécédent maternel. Ter-
reur et coups durant la grossesse.
Aspect normal à la naissance. Marche ci cinq ans. Parole
vers six ou sept ans. - Ecoulement vulvaire sanguinolent et leu-
eoft'AfçMe.Dcsc ? 'tp<tOH de la malade. Caractères de la cachexie
pachydermique. Fonctions organiques. Etat psychique.
Amélina F... est une idiote atteinte de cachexie pachvder-
mique à un très haut degré. Elle est âgée de vingt-quatre ans.
Elle habite un petit village d'Eure-et-Loir, Vrainville, où elle est
née. Elle vit chez ses parents, qui la soignent assez bien. Sa mère
s'est toujours efforcée de développer son intelligence, et il est
certain qu'elle est arrivée à relever un peu son niveau intellectuel.
Antécédents héréditaires Il n'y aurait pas d'aliénés ni d'épi-
leptiques dans la famille paternelle, non plus dans la famille
maternelle. Le père et la mère sont bien portants. La mère
paraît exempte de toute tare névropathique, mais elle est rhu-
matisante et issue de rhumatisants. Le père, d'ailleurs bien
portant, est un ivrogne endurci très méchant après ses excès. Il
appartient à une famille nombreuse : six frères, une strur, tous
ivrognes. Leur père était également buveur.
' Nous avons constaté cette absence de la glande thyroïde à l'autopsie
d'un nouveau malade, nommé Bourg...
CACHEXIE PACHYDERMIQUE. I
La mère prétend que, pendant qu'elle était enceinte, son mari
étant ivre l'a menacée et frappée, et que c'est la terreur qu'elle a
éprouvée qui a été cause de la difformilé de son enfant. Il ne
faut retenir de cette histoire qu'une chose, c'est que le père est un
ivrogne et qu'il entre en fureur quand il est ivre. Amélina F... a
eu deux frères, ses aînés. Ils sont morts en bas âge, l'un du croup,
l'autre de la dysenterie.
Antécédents personnels. -Votre idiote n'a jamais eu de maladie
sérieuse. Asa naissance elle n'offrait rien d'anormal, ce n'est que
plus tard qu'on s'est aperçu qu'elle devenait grosse et qu'elle se
développait mal. Elle a marché très tard, a cinq ans. Vers douze
ans, elle marchait seule, aujourd'hui elle ne peut plus le faire
1";g.. AU
8 IDIOTIE, z
elle n'a commencé à parler que vers six ou sept ans. Nous verrons
qu'est, chez elle, la faculté du langage.
Vers l'âge de quatorze ans, elle aurait perdu par la vulve quel-
ques gouttes de sang avec beaucoup de liquide glaireux. Depuis,
on n'a jamais observé le moindre écoulement sanguin, mais sou-
vent, à des intervalles irréguliers, il s'établit un écoulement vagi-
nal glaireux qui dure plusieurs jours. Pendant ces périodes, la
face deviendrait plus colorée, les lèvres plus livides encore
qu'elles ne le sont à l'état normal, enfin le sujet serait souffrant
et mangerait mal.
Etat actuel l'Amélimc F... Une tôle relativement énorme, aux
traits boursouflés et sans expression, aux lèvres épaisses, cyano-
sées et renversées en dehors, la langue très grosse faisant ordi-
nairement saillie, aux yeux très écartés et bridés par des paupières
bouffies, au teint jaune cireux. Cette tête hideuse, qui seule suffit
à faire reconnaître une cachexie pachydermique prononcée, sur-
monte un corps tout petit, un corps d'un enfant de deux ans,
mais d'un enfant difforme, bossu et à gros ventre (Tg. 18).
La taille du sujet est de 0m86, et le corps mesuré à partir de la
clavicule, c'est-à-dire sans la tête ni le cou, a On,60 de hauteur.
Il existe partout, sous la peau, un pseudo-oedème plus ou moins
abondant, selon les régions. Cette couche sous-cutanée est très
épaisse à la face, au-dessus des clavicules, aux aisselles, aux par-
ties inférieures des joues et sous les oreilles (bajoues), aux extré-
mités, mains et pieds. En pressant la peau avec le doigt, on
éprouve une sensation sui generis, celle que donnerait une subs-
tance molle cédant sous la pression, mais, le doigt enlevé, il ne
subsiste pas d'empreinte. Ce sont là les caractères du pseudo-
oedème de la cachexie pachydermique.
La peau est jaune cireux à la face, sauf au milieu des joues où
elle est rouge foncé. Ailleurs, la teinte cireuse est moins pro-
noncée ; aux cuisses et au dos, la peau est même rosée. La
peau est en général rugueuse. Aux bras, il existe une sorte d'ic-
thyose léger ; aux cuisses, elle est au contraire douce. Aux mains
et aux pieds, elle est particulièrement dure et épaisse. A la partie
inférieure du dos et sur une partie du ventre, elle est sillonnée
par de nombreuses veines très marquées.
Tète. Le crâne est symétrique, ou, du moins, la voûte du
crâne est symélrique.
CACHEXIE PACHYDERMIQUE. ! )
crasseux et eczémateux, surtout en avant. A cet endroit, les che-
veux sont très rares, l'alopécie presque complète. Plus en arrière,
les cheveux sont assez fournis, ils sont très courts, secs et de cou-
leur châtain-roux. Les oreilles sont grandes, épaisses, mais régu-
lières, le lobule détaché, elles sont très inclinées en bas et en avant.
Face. Elle est un peu asymétrique et bien plus large que le
crâne. Les yeux ne sont pas sur le même plan, le gauche est plus
haut que le droit. Si donc la voûte du crâne est symétrique, la
base ne l'est pas. Le front est très bas et sillonné de rides
horizontales profondes. Les sourcils sont à peine marqués.
Les yeux peu ouverts sont bridés par les paupières pseudo-oedé-
mateuses. L'iris en est bleu. Ils sont très éloignés l'un de l'autre.
Il Il a 4 4 centimètres entre l'angle interne des paupières d'un côté
et l'angle interne des paupières du côté opposé.
Le nez est fortement camard. Saillie des os propres presque
insensible à la naissance de l'organe; narines très écartées. La
respiration par le nez est difficile et bruyante, la muqueuse est
sans doute épaissie.
La bouche est très grande, un peu oblique de gauche à droite.
Les lèvres sont épaisses, bleuâtres, renversées en dehors. La
langue est énorme et reste presque toujours, en partie, hors de la
bouche. Elle est rouge bleuâtre comme les lèvres, comme toute la
muqueuse buccale, du reste.
Les dents sont en partie gâtées. La première dentition a per-
sisté. Il y a dix dents, ou débris de dents, à la mâchoire supé-
rieure et autant à la mâchoire inférieure. En plus, quatre dents
permanentes ont poussé à la mâchoire inférieure, quatre inci-
sives. Il y a donc à la partie médiane de la mâchoire inférieure
une double rangée de dents.
Cou. Le cou est très court; sa circonférence est de 0- 33;
il est très myxoedémateux, surlout au-dessus de chaque clavicule.
On ne peut percevoir la thyroïde. Cette glande n'existe pas, autant
qu'on peut être affirmatif sur ce point en l'absence d'autopsie.
Tronc. - Très myxoedémateux, surtout au niveau des aisselles.
La colonne vertébrale est déviée à la région dorsale; la convexité
tournée à droite fait une saillie assez prononcée. Le ventre est
très gros, sa circonférence =0'" 60. -IIe1'1lie inguinale droite qui
reste ordinairement réduite sous bandage, mais qui sort au
moindre effort. Une hernie ombilicale aurait guéri spontané-
ment. Elle ne sort plus depuis plusieurs années. Chute du
rectum fréquente. La mère est habituée à réduire le rectum en
prolapsus.
Membres. Ils sont gros, potelés par le fait du pseudo-oedème.
Les attaches sont épaisses. Les membres supérieurs égaux ont
om 22 de longueur, les inférieurs, également égaux, ontOm31.
'10 IDIOTIE.
La peau du bras est, nous l'avons déjà dit, très rugueuse, icthyo-
sique. Aux mains et aux pieds, la peau est épaisse, rude et un
peu eczémateuse. Les extrémités rappellent celles des gros pachy-
dermes. C'est, on le sait, cette analogie, notée depuis longtemps,
qui a servi à M. Charcot pour dénommer l'affection. Les ongles
sont difformes et cassants.
Organes sexuels. La vulve est celle d'une petite fille de trois
ou quatre ans. La muqueuse est bleuâtre, mais moins que celle
des lèvres. Au moment de l'examen, il n'y avait pas trace d'écou-
lement vaginal. Il n'y a pas de poils au pubis. Aux grandes
lèvres, on voit quelques poils follets courts et blonds.
Les mamelles ne sont pas développées. On ne sent pas trace de
glande sous les mamelons. La partie antérieure du thorax est
recouverte d'une couche pseudo-oedémateuse épaisse.
Viscères. Autant qu'il nous a semblé, ils sont sains et ne
présentent rien de particulier. Le coeur, que l'état cyanosique
des muqueuses pouvait faire supposer lésé, n'offre à la percussion
et à l'auscultation rien d'anormal.
Digestion. Amélina F... mange peu, mais régulièrement.
Son régime consiste presque exclusivement en pain et en lait;
ce sont les aliments qu'elle préfère; elle aime aussi les sucreries.
Les digestions sont ordinairement bonnes, F... est cependant
sujette à la diarrhée. Il est à propos de noter qu'elle a été
longtemps gâteuse. Sa mère avoue qu'elle n'est arrivée à la
rendre propre qu'en employant des moyens brutaux, en la
fouettant.
Circulation. Respiration. La respiration est normale.
Quand elle se fait par le nez, elle est bruyante et un peu gênée ;
ce qui tient sans doute au pseudo-oedème de la muqueuse nasale.
La circulation est peut-être défectueuse, aux extrémités au
moins; la température des extrémités est, en effet, relativement
trop basse. Les bruits du coeur sont bien rythmés et réguliers.
Le pouls bat 9 pulsations à la minute. La température axillaire
est de 33°,5. Mais les examens du pouls et de la température
ont été trop peu nombreux, la malade n'étant pas dans un service
d'hôpital ou d'asile, pour que nous puissions, sous ce rapport,
présenter les résultats d'une observation sérieuse.
Marche. - La malade ne peut marcher sans s'appuyer sur les
meubles ou sur la muraille ou sans être tenue par la main. Elle
parvient alors à faire quelques pas lourds et pénibles. Elle peut
se tenir pendant quelque temps debout, immobile, sans point
d'appui. 11 paraît qu'autrefois elle marchait seule et sans
soutien.
Voix. Elle est rauque, le timbre en est très bas. Les paroles,
presque inintelligibles, sont lentement prononcées; le vocabulaire
CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 11
est, du reste, très restreint. La tonalité et la raucité de voix
dépendent probablement de la présence du m3-xoedème sous la
muqueuse du larynx et des cordes vocales.
Etat psychique. Les facultés mentales sont très rudimentaires.
Amelina F... passe sa vie assise sur un fauteuil-lit, à jouer avec
une poupée ou avec des chiffons qu'elle pique avec une aiguille,
mais elle est incapable de coudre. Son faciès est alors absolument
impassible, sa bouche entr'ouverte, son énorme langue à moitié
tirée. Si on lui offre un bonbon, elle sourit, ce qui donne passa-
gèrement un peu d'expression à sa physionomie. Elle ne répond
guère qu'à sa mère et par monosyllabes : oui, non. Parfois elle
prononce quelques mots que sa mère traduit. La mémoire est
relativement plus développée que les autres facultés. Elle nous
reconnaissait quand nous allions la voir et elle nous nommait
dans les intervalles de nos visites, sans doute dans l'attente de
quelques sucreries,. Elle est douce et se met rarement en colère.
M. le D'' Camuset accompagne son observation des ré-
flexions suivantes :
« Somme toute, idiotie prononcée; un degré de plus, la vie
serait absolument végétative, et ce degré, elle l'eût atteint
sans les soins affectueux de sa mère qui trouve en elle, il faut
bien le dire, une source de profit en la promenant dans les
marchés et dans les foires de la région. Dans les fêtes de nos
campagnes, comme dans celles des faubourgs de Paris, un
beau cas tératologique a toujours du succès. -
« Nous pensons que la cachexie pachydermique s'estdéclarée
quelque temps après la naissance et qu'elle a provoqué l'arrêt
de développement du sujet. L'idiotie est la conséquence
de cet arrêt de développement et de la cachexie pachyder-
mique elle-même. Cette affection, on le sait, produit toujours,
même chez l'adulte, une lésion par défaut des fonctions psychi-
ques. Comme nous l'avons dit au début, Amélina F... présente
l'état crétinoïde au degré le plus avancé. Aucun des signes
énumérés par M. Bourneville ne fait défaut. »
Nous avons pu ajouter à l'observation très intéressante de
M. le Dl' Camuset la fig. 18, d'après une photographie, prise,
comme nous l'avons dit, à titre de curiosité par le garçon de
laboratoire de la clinique de M. Charcot. De plus, nous don-
nons une figure représentant la malade Pih... de Croisilles
dont nous avons rapporté l'observation plus haut. Cette
figure 19 est faite d'après une photographie due à un artiste de
12 IDIOTIE.
passage, qui nous a été envoyée par notre ami le D'' Guil-
laumin 1.
Si l'on veut bien comparer ces figures à celles que nous
avons insérées dans notre ancien travail', on verra que tous
ces malades ont une physionomie tout à fait semblable et
caractéristique ; l'état du cou, des membres et, en particulier,
des pieds et des mains est toujours le même.
Dans le n° 51 du Bulletin de la Société de médecine mentale
de Belgique (1888), M. le D'' G. CousoT a publié un cas
1 Ces figures ne sont point parfaites. En pareil cas, il faut bien mon-
trer les pieds, les mains, la tète, le cou, etc.
'Archives de Neurologie, 1886, t. XII, p. 137, 292.
1--ig, 19.
CACHEXIE PACHYDERMIQUE. '13
très intéressant d'idiotie avec cachexie pachydermique. Con-
trairement à certains auteurs français, notamment MM. Ball,
Arnozan et Régis qui affectent d'ignorer les travaux que nous
avons publiés sur cette question, soit seul, soit en collabo-
ration avec notre ami le Dl' Bricon, ainsi que nous aurons
l'occasion de le démontrer, le médecin belge rappelle nos tra-
vaux et déclare que c'est après leur lecture qu'il a pu porter
un diagnostic exact. Voici son observation :
Observation. Père, éléphantiads de la jambe gauche. - Saur
hémiplégique. Rien de particulier ci la naissance. Premiers
signes de cachexie pac/t</dft' ? )M</Me. Etat intellectuel et phy-
sique de la malade ci trente et un ans. Absence probable de
la glande thyroïde. Mort dans le marasme ci trente-deux ans.
Elisa X..., de Lesse (Dinant), avait trente et un ans à l'époque
où nous l'avons examinée; elle ne mesurait pas un mètre de hau-
teur. Son père a. souffert longtemps d'un éléphantiasis de la
jambe gauche ; il mourut épuisé à soixante-huit ans. La mère est
une femme énergique, bien portante; elle a eu neuf enfants : deux
garçons vigoureux et sept filles. Parmi celles-ci, l'une est morte
jeune, succombant à une affection que l'on n'a pu m'indiquer,
une autre est hémiplégique, une troisième, l'enfant cadet de la
famille, est le sujet de cette communication.
A la naissance, Elisa X... était un bel enfant, sain et bien por-
tant : à cet égard il ne doit subsister aucun doute, la mère dont
nous tenons ce renseignement, étant, par profession, habituée à
juger des enfants nouveau-nés. Vers l'âge de six mois, la figure
de l'enfant commença à manquer d'expression, la langue devint
volumineuse et sortait souvent de la bouche : la croissance fut
entravée. A l'âge de deux ans, Elisa X... subit une légère atteinte
de variole.
On éprouvait un sentiment de répulsion quand on approchait
de ce pauvre être pour la première fois. Bourneville et Bricon
rapportent l'observation du « crétin des Batignolles » et celle d'un
idiot pachydermique que ses compagnons d'asile surnommaient
le Pacha. Les voisins de Elisa X... ne mettaient pas le même
esprit, ni la même charité dans leurs appellations ! 1
Elisa X... présente un air bestial, sa figure est repoussante; la
peau est pâle, mate, bouffie ; les paupières, atteintes de blépha-
rite chronique, sont dépourvues de cils; les paupières supérieures
sont très gonflées, comme dans un cas d'anasarque très prononcé ;
les yeux ne se découvrent jamais complètement; le nez est très
aplati à sa racine et largement implanté, les ailes du nez sont
grosses et les narines largement ouvertes (nez camus); les lèvres
sont épaisses ; la lèvre inférieure est retroussée vers le menton ;
14 IDIOTIE.
la langue énorme sort constamment de la bouche d'où s'écoule un
flot de salive qui mouille la partie inférieure du visage et les
vêtements; la partie inférieure du visage s'avance (en museau) ;
les oreilles sont bien ourlées, les mâchoires en partie dégarnies
supportent des dents noires, cariées, irrégulières de forme et
d'implantation ; la chevelure noire, peu abondante, est formée de
cheveux courts, gros et raides : la face entière est bouffie et les
joues pendantes; le teint du visage est blême.
Le crâne ne présente aucun caractère particulier ; en voici les
principales dimensions prises sur le vivant :
CACHEXIE PACHYDERMIQUE hui
différents modes, ne présentent aucune anomalie. Le coeur, le
foie, la rate, sont dans les limites habituelles.
L'intelligence ne s'est jamais développée : pour tout langage,
Elisa X... possède quelques grognements de mécontentement ou
de satisfaction ; il n'existe aucune mémoire : peut-être reconnait-
elle sa mère qui la soigne. En dehors de cela, elle reste apa-
thique, indifférente atout ; elle ne parait avoir aucun désir; elle
remue de ses doigts inhabiles tout ce qu'on place devant elle
comme un enfant de quelques mois fait d'un hochet. La sensibilité
est obtuse, car il faut irriter assez fortement la peau pour susci-
ter un cri de mécontentement. Elle entend, car elle se retourne
parfois à la voix de sa mère ; et elle voit les objets qu'on place
sur la tablette de sa chaise, ou la nourriture qu'on lui présente.
Elle ne peut marcher et ne se tient debout qu'en s'appuyant à un
meuble, à un mur.
Elle mange malproprement et gloutonnement. Elle est très
constipée, au point de rester des semaines entières sans garde-
robes. Souvent elle urine au lit.
Le pouls est petit, bat environ quatre-vingts fois à la minute.
A l'auscultation du coeur, il n'y a pas de différence entre les
deux bruits qui sont réguliers et égaux. Il existe une lenteur cir-
culatoire évidente : constamment elle est un peu cyanosée sur-
tout aux extrémités ; au moindre effort la cyanose augmente
considérablement. Sur toute la surface du corps, on éprouve une '
sensation désagréable de froid.
L'oedème des pieds et de toute la surface du corps ne conserve
pas l'empreinte du doigt. Les urines ne renferment pas d'albu-
mine. A quatre reprises différentes de vingt à trente ans
Elisa X... a présenté un écoulement vaginal sanguinolent mani-
feste.
Celte pauvre enfant est morte dans le marasme, âgée de trente-
deux ans. L'ouverture du cadavre a été obstinément refusée.
Nous retrouvons là tous les caractères que nous avons rele-
vés dans nos précédentes observations, et en particulier dans
les nIs i-8 (p. lI31) et 49 (p. 8â) des Archives de Neurologie : .-
physionomie bestiale, face pâle, mate, bouffie; lésions chroni-
ques des paupières qui sont gonflées ; nez camus ; lèvres
épaisses, langue volumineuse; dents cariées, irrégulières de
forme et d'implantation ; joues pendantes ; cheveux peu
abondants, courts, gros et raides ; cou court; glande thy-
roïde imperceptible au palper ; poitrine globuleuse ; dos
voûté; ventre énorme, proéminent, hernie ombilicale; mem-
bres supérieurs et inférieurs gros; mains et pieds élargis, gon-
Ilés, épais; cyanosés; froids; absence de poils aux aisselles et
'16 IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE.
au pénil; peau cireuse, blafarde, avec un peu de desquama-
tion ; taille d'un mètre; enfin, au point de vue intellectuel,
tous les symptômes de l'idiotie complète.
Ce fait, joint à ceux que nous avons rapportés précédem-
ment, nous parait justifier la création d'une forme particu-
lière d'idiotie, sous le nom d'idiotie avec cachexie pachyder-
mique, liée à l'absence de la glande thyroïde'.
Une étude attentive de ces nouvelles observations montre
aussi que les malades offrent tous les mêmes symptômes et
que ces symptômes sont absolument analogues à ceux que
nous avons minutieusement décrits.
Chez aucun des malades vivants dont nous avons publié
l'observation, ainsi que chez nne autre, dont nous
parlerons plus tard, il n'a été possible de sentir la glande
thyroïde : il ne paraît y avoir rien entre la peau et les car-
tilages de la trachée. Les deux autopsies pratiquées par
Curling, celle de M. Fletcher Beach, celle de M. Bouchaud,
les nôtres, au nombre de trois, ont démontré que dans ces
cas, la glande thyroïde n'existait pas.
Aujourd'hui, il nous semble donc indiscutable que la forme
d'idiotie que nous avons décrite sous le nom d'idiotie avec
cachexie pachydermique est parfaitement constituée, qu'elle
a ses symptômes particuliers et une lésion anatomique
constante.
1 M. Régis a publié dans l'Encéphale (1888, p. GJi), un cas de crépi-
nisme sporadique, qu'il rapproche des cas de Curling, Hilton Fagge,
Flechter Beach, etc., cas dont « aucun auteur français n'aurait encore
parlé ». En cela, il se trompe complètement. Nous avons en effet
publié la traduction complète de leurs observations en 1886, dans les
Archives de Neurologie et dans notre Compte-rendu de lücilre, potcr 188G.
.NI. Régis met en doute la réalité de l'idiotie crélinoïde avec cachexie
pachydermique. « Quant au mçscoedème qu'on aurait observé chez les
enfants, j'avoue, dit-il, n'être pas bien sur qu'il ne s'agit pas là préci-
sément de crétinisme sporadique. » La proposition inverse est au con-
traire la vérité. Il suffit de se reporter nos observations personnelles et
il celles que nous avons reproduites pour en avoir la preuve. On
pourrait faire rentrer dans ce groupe, si elle ne présentait pas quelques
lacunes, une observation communiquée par M. Baillarger à la Société
médico-psychologique. (Annales méd¡"co-ps,ljch., 1857, p. 598.) Voir aussi :
Langdon Down. On some of llre mental affections of Childhood and
1-outh, etc. London, 1887, p. 82-88. Nous rappellerons que nos idées
sur l'idiotie avec cachexie pachydermique, ont été exposées avec détail
en 1885 dans le mémoire déposé par notre ami Bricon, pour le prix
Belhomme, ainsi que le constate d'ailleurs le rapport de M. Féré.
(Annales médico-psychologiques, 1880.)
DE LA CONSANGUINITÉ. 17
] I.
Note statistique sur le rôle de la consanguinité
dans l'étiologie de l'épilepsie, de l'hystérie, de
l'idiotie et de l'imbécillité ;
Par BOUIINEVILLE et COURBAIUEN.
Nous n'avons pas pour objet d'exposer l'état actuel
de la question si intéressante au point de vue social de
la Consanguinité. Nos lecteurs trouveront des indi-
cations suffisantes sur l'historique et la bibliographie à
l'article correspondant du Dictionnaire de médecine de
M.Jaccoudet du Dictionnaire des sciences médicales
de Dechambre. Nous nous proposons seulement de faire
connaître, dans cette courte note statistique, les résul-
tats du dépouillement de 926 observations recueillies
dans les services consacrés aux épileptiques, aux hysté-
riques et aux idiots, tant à Bicêtre qu'à la Salpêtrière.
Dans toutes ces observations, l'absence ou la présence
de parenté entre le père et la mère des malades a tou-
jours été exactement notée. Le tableau suivant donnera
une idée d'ensemble du résultat de nos recherches.
BOURNEVILLE, 1888. 2
18 ÉTIOLOGIE DE ^'EPILEPSIE. DE 1,'HY.TÉ[ilE ETC.
Tableau des Consanguinités.
DE LA CONSANGUINITÉ. 19
sanguinistes ou anticonsanguinistes s'accordant à re-
connaître que la parenté au delà du 6c degré n'a plus
d'effets nuisibles. - En nous contentant d'éliminer ces
trois dernières observations, nous ne trouvons plus que
3,7G 0/0 de mariages consanguins, chiffre qui diffère
peu de celui, 2 0/0, indiqué par Boudin pour la propor-
tion des mariages consanguins aux mariages entre
étrangers (Statistique générale de France de 1853 à
1859). Cet auteur a du reste évalué arbitrairement le
nombre des mariages entre cousins issus de germains.
Il n'est pas fait davantage mention de cette catégorie
de mariages dans la statistique produite par M. Lacas-
sagne d'après les relevés du ministère du Commerce
et des Travaux publics et portant sur 14 années. C'est
pour cette raison, que le chiffre de 1, 2 donné par cet au-
teur comme un maximum est trop faible.-Ces relevés,
établis d'après les actes de l'état civil jusqu'en 1873,
ne nous paraissent mériter du reste aucune confiance ;
ils doivent être incomplets, soit que l'officier de l'état
civil ne pose pas cette question, soit que les parents ne
tiennent pas à déclarer leur qualité pour échapper aux
dispenses exigées par l'Eglise, alors que l'état civil n'en
exige point même pour les mariages entre cousins ger-
mains. Ces chiffres doivent être, à notre avis, fortement
relevés; et la proportion, variable de 1,5 à 4,5 0/), in-
diquée parDarwin,dans sa statistique pour l'Angleterre
et pour les mariages entre cousins germains seulement,
se rapproche davantage delà vérité. - Voici, du reste
comment se décomposent nos 38 cas, d'après le degré
de parenté.
20 ÉTIOLOGIE DE L'ÉPILEPSIE, DE L'IDIOTIE, ETC.
mariages entre cousins issus de germains est presque
égal à celui des unions entre cousins germains.
Sans vouloir insister davantage sur ce point, nous
concluons qu'il faut accorder peu de foi aux statistiques
officielles qui ont cherché à établir la proportion des ma-
riages consanguins aux mariages entre étrangers. Cette
proportion doit être doublée par l'addition des mariages
entre cousins issus de germains, dont ces relevés ne
tiennent pas compte. Enfin, même en admettant ces
données, un si faible écart entre ce chiffre douteux et
la proportion de nos mariages consanguins nerveux ne
peut pas permettre d'affirmer l'efficacité de cette cause
dans la production des maladies nerveuses.
Ce n'est pas tout. Il nous a paru intéressant de recher-
cher dans les antécédents des malades issus de mariages
consanguins les autres causes capables de produire, à
l'exclusion de la consanguinité, les maladies nerveuses
dont nous nous occupons.
Nous avons été frappés de cette remarque, que ces
malades relèvent autant que les autres, sinon plus en-
core que les autres, de l'hérédité. En tenant compte delà
moindre influence étiologique ou d'une cause isolée, il
n'est pas un de nos malades chez lequel nous ne puis-
sions invoquer la succession d'une tare nerveuse ac-
quise ou héréditaire. Or, dans le tableau dressé par
M. Déjerine dans les mêmes conditions, 700 malades de
notre service de Bicêtre ou de la Salpêtrière, il en reste
en moyenne 31 0/0 pour lesquels pareille démonstration
n'a pu être faite. La gravité des antécédents relevés
étant du reste très inégale, nous avons cru devoir divi-
ser nos observations en deux séries.
A. Malades A antécédents héréditaires PEU
MARQUÉS.
1 Paring..., Catherine. Hystérie. Parents : cousins issus
de germains. Père alcoolique et colère. Début de la maladio à
3 ans.
DE LA CONSANGUINITÉ. 21 1
2° Kesle... Epilepsie. Parents : cousins issus de germains.
Père colère. Mère nerveuse. Début de la maladie à 40 ans.
3° Caille... Délire des persécutions. Parents : cousins
germains. Père alcoolique et syphilis douteuse. Début de la
maladie à 4 ans, à la suite d'un traumatisme.
4° Charin...Epilelsie et idiotie. Parents : cousins germains.
Père arthritique. Mère migraineuse, nerveuse et impression-
nable, fatigues de la mère durant la grossesse. L'enfant est
venu au monde avant terme et en état d'asphyxie (1).
5° Motte... Epilepsie tardive. Parents : cousins germains.
Père sujet à de violents accès de colère. Début de la maladie
à 36 ans.
fit Blac... Idiotie complète, symptomatique . Parents :
cousins issus de germains. Début de la maladie à la suite
d'une rougeole à 19 mois.
7° Boucher... Imbécillité symptomatique de nénizgo-ezcé-
phalite. Parents : cousins germains. Père colère et désé-
quilibré. Début congénital.
Il ne nous parait pas douteux que l'alcoolisme ou l'ir-
·itabilité extrême d'un des ascendants ne soit une cause
suffisante de maladie nerveuse. Bien des fois du moins,
dans d'autres cas, nous n'avons rien trouvé de plus.
Nous faisons des réserves pour le développement tardif
de l'épilepsie. Dans les observations II et V, à 40 ans et
à 36 ans, l'hérédité du mal comitial, dans ces deux cas,
est plus difficile à soutenir. Dans l'observation VI, il
n'existe aucun antécédent familial; mais la maladie peut
être imputable à la rougeole ( ? ) et ce n'est pas le seul
exemple que nous ayons d'une semblable étiologie; dans
l'observation V, les renseignements sont signalés comme
vagues, la personne qui les fournit n'ayant connu qu'in-
suffisamment la famille du malade.
Dans les observations suivantes, il existe des anté-
cédents marqués, non seulement chez le père et la mère,
mais aussi le plus souvent chez les grands -parents, les
oncles, tantes ou cousins des malades. L'existence d'an-
(11 L'asphyxie à la naissance nous paraît l'une des causes les
plus communes de l'idiotie.
22 ÉTIOLOGIE DE L'ÉPILEPSIE, DE L'HYSTÉHIE, ETC.
técédents chez les collatéraux, en l'absence de tout vice
nerveux chez les générateurs, prouve que la famille doit
être incriminée. Nous avons quelques exemples d'héré-
dité collatérale.
B. Malades A antécédents héréditaires très
MARQUÉS.
Ce groupe embrasse 28 cas :
1° I'arr... Epilepsie. Parents : cousins issus de germains.
Père apoplectique. Mère très nerveuse et colère. Grand-père
maternel apoplectique. Début de la maladie à 10 ans.
2° lliontcout... Epilepsie. Parents : cousins germains. Père
alcoolique et olie rhumatismale. Grand-père paternel alcoo-
lique mort du delirium lremens. Grand-oncle paternel alcoo-
lique. Deux cousins germains morts à Bicêtre. Grand-père
maternel aliéné. Une tante maternelle suicidée. Début de la
maladie à 17 ans.
30 Sabat... Epilepsie. Parents : cousins issus de germains.
Pore alcoolique, migraineux et colère. Mère migraineuse. Tante
maternelle hystérique. Début de la maladie à 1G ans.
4° Cousi..., L. Epilepsie. Consanguinité à un degré non
indiqué. Père très nerveux et suicidé ( ? ). Début de la maladie
18 ans.
5" Breha... Méningite. Parents : cousins germains. Grand'
mère paternelle hémiplégique. Petite-cousine (cousine ger-
maine de sa mère), folie puerpérale. Début congénital.
G Denoy... Epilepsie. Consanguinité à un degré non indi-
qué. Père alcoolique migraineux et colère. Grand-père pater-
nel apoplectique. Cousine germaine paternelle épileptique.
Mère migraineuse, impressionnable et nerveuse. Grand'mère
maternelle migraineuse. Début de la maladie it 4 ans.
7° Maupi... Manie. Parents : cousins issus de germains.
Père aliéné. Grand'mère paternelle, démence précoce (60 ans).
Début à 12 ans, à la suite d'une fièvre typhoïde.
8° Doubl... Imbécillité. Parents : cousins issus de germains.
Père colère et migraineux. Grand-père paternel alcoolique avec
accès de delirium tremcns. Petit-cousin du père mort idiot à
Bicêtre. Mère migraineuse. Grand - père maternel aliéné.
Bisaïeule maternelle, attaques d'hystérie. Un oncle maternel,
crises nerveuses de nature indéterminée. Maladie congénitale.
9° Eug... Epilepsie. Parents : cousins germains. Père rhu-
matisant. Cousin germain du père, sourd-muet. Grand'mère
DE LA CONSANGUINITÉ. 23
paternelle morte d'apoplexie. Mère migraineuse. Grand-père
maternel alcoolique et mort d'ivresse comateuse. Début de la
maladie à 14 ans.
10" Parina... Epilepsie. Parents : cousins issus de ger-
mains. Mère arthritique. Grand -père maternel alcoolique.
Grand'mère maternelle rhumatisante. Tante maternelle ner-'
veuse. Emotion forte de la mère au début de la grossesse..
Début de la maladie à 18 mois.
11° Brun... Epilepsie. Parents : cousins germains. Père
colère. Grand-père paternel alcoolique et mort d'apoplexie.
Grand'mère maternelle morte subitement. Oncle paternel para-
lytique, général. Mère très nerveuse, migraines et fièvre ty-
phoïde. Grand'mère maternelle, parésie des jambes. Tante
maternelle excentrique. Début de la maladie à 8 ans.
12" Jacq... Epilepsie et idiotie. Parents : cousins germains.
Père migraineux et impressionnable. Grand-père paternel rhu-
matisant. Mère nerveuse et migraineuse; attaques d'hystérie.
Grand-père maternel alcoolique. Grand'mère maternelle très
nerveuse. Bisaïeul maternel aliéné. Début congénital,
13" Thei... Epilepsie. Parents : cousins germains. Père,
fièvre typhoïde et alcoolisme ; accidents syncopaux. Grand-
père paternel alcoolique. Mère, accidonts cérébraux à 3 ou
4 ans, impressionnable ; palpitations nerveuses; rhumatisante.
Grand'mèro maternello asthmatique. Petite-cousine mater-
nelle démente. Potit-cousin maternel suicidé. Brutalités du
mari; rapports sexuols dans l'ivresse et syncopes de la mère
durant la grossesse. Début de la maladie à 8 mois.
- [/10 Gordi... Epilcpsie. Parents : cousins germains. Père,
convulsions. Mère, attaques d'hystérie. Grand'mère mater-
nelle aliénée. Début de la maladie à 2 ou 3 mois.
15° Trib... Epilepsie. Parents : cousins germains. Père sa-
turnin. Tante paternelle morte aliénée. Mère migraineuse et
accidents hystériformes. Cousin maternel condamné pourvoi.
Asphyxie à la naissance. Début congénital.
- 160 Idiotie. Parents : cousins issus de germains.
Père, enfant naturel. Oncle paternel imbécile. Mère, attaques
d'hystérie. Grand'mère maternelle très nerveuse. Cousine ma-
ternello traitée dans un asile. Huit oncles ou tantes morts de
convulsions. Ennuis et troubles intellectuels de la mère durant
la grossesse. Début de la maladie à 4 mois.
17° Fargi... Epilepsie et idiotie. Parents : cousins germains.
Père alcoolique et excentrique Mère, migraines, fièvre ty-
phoïde, attaques d'hystérie. Grand'père maternel suicidé.
Tante maternelle migraineuse. Cousin maternel paralysé.
Grancl'mèro maternelle, deux grossesses gémellaires. Crises
24 ÉTIOLOGIE DE L'ÉPILEPSIE, DE L'IDIOTIE, ETC.
nerveuses de la mère au septième mois de la grossesse. Début
de la maladie 14moins.
18' Ram... Idiotie symptomatique de mnizgo-encé2ha-
lite. Parents : cousins germains. Père migraineux et nerveux,
quelques excès alcooliques. Cousin paternel mort de convul-
sions. Mère migraineuse et nerveuse. Asphyxie de l'enfant à
la naissance. Début de la maladie iL 14 mois.
)9" Wath... Imbécillité. Parents : cousins germains. Père
impaludique. Grand-père paternel apoplectique. Grand-mère
paternelle alcoolique. Cousine germaine paralysée; une autre,
attaques d'hystérie. Mère, intelligence faible. Grand-père ma-
ternel apoplectiqne. Grand'mère maternelle alcoolique. Oncle
mort subitement. Tante aliénée. Début congénital.
20° Bul... Idiotie. Parents : cousins germains. Père, ma-
riage tardif, alcoolique et absinthique, suicidé. Grand'père pa-
ternel alcoolique. Mère attaques d'hystérie et migraines. Début
de la maladie à 7 mois.
21° Buvel... Idiotie. Parents : cousins germains. Mère mi-
graineuse. Grand'mère maternelle asthmatique. Oncle mater-
nel imbécile, cousin aliéné, cousine arriérée. Début de la ma-
ladie à 3 mois.
220 Berna... Imbécillité et excitation maniaque. Parents :
cousins germains. Père arthritique, colère et très impression-
nable. Grand'père paternel asthmatique. Grand-oncle paternel
imbécile. Oncle paternel suicidé. Tante paternelle démente.
Une cousine séquestrée dans un asile, une autre imbécile. Un
cousin suicidé. Mère, attaques d'hystérie. Oncle maternel im-
bécile. Début congénital de la maladie.
23° Sali... Epilepsie hémiplégique. Parents : cousins
issus de germains. Père migraineux. Grand'mère paternelle
nerveuse. Oncle paternel, méningite. Mère, attaques d'hys-
térie. Grand'mère maternelle nerveuse. Crise nerveuse de
la mère au 7e mois de la grossesse. Début congénital de la
maladie.
24° Lefèv... Idiotie symptomatique de méningo-encépha-
lite. Consanguinité, degré non indiqué. Père, caractère em-
porté, tentatives de suicide. Oncle paternel, convulsions. Cou-
sin paternel suicidé. Mère très nerveuse. Grand-père paternel
arriéré, idées de suicide et alcoolisme. Grand'mère alcoolique.
Oncle arriéré. Cousin germain imbécile. Grand oncle aliéné.
Crise nerveuse de la mère au troisième mois de la grossesse,
suivie d'une métrorrhagie. Arrêt de développement, rougeole
à 2 ans, méningite à 7 ans.
25° Duva... Imbécillité. Parents : cousins issus de germains.
Père très alcoolique et migraineux. Mère nerveuse, accidents
DE LA CONSANGUINITÉ. 25 ..
hystériformes. Tante maternelle paralysée et démente. Gros-
sesse accidentée. Début de la maladie à 6 mois.
26° Pigne... Méningite. Parents : cousins issus de ger-
mains. Père, convulsions dans l'enfance. Grand-père /paternel
alcoolique. Mère nerveuse. Début de la maladie à 14 ans.
27° Dol... Epilepsie idiopathique. Parents : cousins issus
de germains. Père eczémateux. Grand-père paternel arriéré.
Grand-père maternel alcoolique. Grand'tante (tante paternelle
du père et cousine issue de germain) épileptique. Début de la
maladie à 6 ans.
28° Faur... Idiotie symptomatique. Epilepsie. Parents :
cousins issus de germains. Père alcoolique. Grand'mère et
oncle paternels dartreux. Cousine germaine colère. Grand'père
maternel aliéné et alcoolique. Bisaieule maternelle, oncle et
tante paralysés. Début de la maladie à 4 mois.
On le voit donc, si on tient compte de la plus banale
des causes pouvant produire l' hérédité névro]Jathique,
pas un de nos malades n'échapperait à cette présomption
que c'est une victime de l'hérédité ; si ce n'est qu'une
présomption pour les malades de notre première série,
c'est une certitude au contraire pour ceux de la seconde.
Dans les observations de cette dernière, en effet, nous
avons relevé des antécédents héréditaires graves, tant
chez les ascendants directs ou éloignés que chez les
collatéraux. Nous ne trouvons qu'un exemple d'héré-
dité directe, et c'est l'observation VII de la seconde
série qui nous le fournit. Dans les observations de
Paring... et Bail... ) la mère est signalée comme très ner-
veuse, sans qu'il s'agisse sans doute des accidents con-
vulsifs de l'hystérie.
Au contraire, nous rencontrons à chaque instant les
divers états qui, en retentissant sur le système nerveux
des générateurs, peuvent influencer l'état mental du
produit. C'est ainsi que nous avons relevé chez le père
la colère, l'alcoolisme, l'a.rth·itisne, 1'ï«i)-tpaliidisite,
la migraine, le suicide, le saturnisme, l'apoplexie;
chez la mère, l'impressionnabilité, le nervosisme, les
attaques d'hystérie, la chorée, la migraine, les acci-
26 ÉTIOLOGIE DE L'ÉPILEPSIE. DE L'HYSTÉRIE, ETC.
dents et fatigues de la grossesse, les rapports sexuels
dans l'ivresse. L'hérédité collatérale s'affirme chez les
autres parents par ces mêmes accidents, l'asthme, les
convulsions,l'aliénation -n-tei-ttaleil'idiotiel'épilepsie,
l'hystérie, le suicide, l'apoplexie, la démence. Il n'est
pas jusqu'aux antécédents personnels du malade, son ?
france durant la vie utérine, asphyxie ci. la naissance,
maladies infectieuses qui ne puissent être invoqués
dans quelques cas comme cause de la maladie
Ce qui nous parait évident, c'est qu'il n'est pas besoin
de faire appel à la consanguinité, c'est-à-dire aux
alliances entre parents sains pour expliquer les cas
d'épilepsie, d'idiotie et d'imbécillité que nous venons
d'examiner. Ici, il s'agit, comme dans la plupart des cas
du reste, de descendants tarés au point de vue nerveux,
d'héréditaires, de victimes de l'hérédité névropa-
thique.
Loin de nous, du reste, l'idée do dissimuler ou d'atté-
nuer les effets de la consanguinité morbide. Nous
croyons, au contraire, que la transmission des défec-
tuosités nerveuses d'un des générateurs au foetus est
d'autant plus sûre qu'il s'y joint des dispositions sem-
blables chez l'autre procréateur.
L'état nerveux du foetus, qui dépend sans doute du
conflit entre les prédispositions héréditaires identiques
des deux parents et les modifications acquises indivi-
duelles, et par conséquent différentes de chacun d'eux,
sera plus sûrement défectueux. L'atavisme de la fa-
mille est prédominant dans ces cas. Les 35 malades
dont nous avons résumé l'observation plus haut, ne
sont pas, du reste, les seuls produits défectueux do nos
alliances consanguines. Nous devons y ajouter 117 frères
ou soeurs et 9 fausses couches ; sur ce nombre, 32 ont
présenté les accidents suivants :
DE LA CONSANGUINITÉ. 27
28 ÉPILEPSIE.
III.
Epilepsie et asymétrie fronto-faciale ;
Par BOURNBVILLE et mut S0T.1.TEIt.
Il y a longtemps qu'on a remarqué la fréquence de
l'asymétrie faciale chez les épileptiques, et M. Delasiauvc,
à la Salpêtrière, avait soin de la noter dans ses observa-
tions bien avant que Lasègue n 'indiquât cette particularité
comme un signe distinctif de l'épilepsie idiopathique,
qui même d'après lui en était la conséquence. C'est
en 1877 que Lasègue formula cette nouvelle théorie
pathogénique de l'épilepsie dite essentielle. Il admet
tout d'abord, d'après son expérience personnelle et pour
l'avoir vérifié sur des centaines d'épileptiques, que tous
les épileptiques idiopathiques présentent de l'asymétrie
fronio-faciale. Comme d'autre part cette asymétrie pro-
vient d'un vice dans la consolidation définitive des os
de la base du crâne, laquelle se produit de dix à dix-
huit ans, il rapproche ces deux faits, et voit dans leur
coïncidence un rapport de cause à effet, l'asymétrie
fronto-faciale entraînant l'épilepsie essentielle. Cette
idée de faire d'une maladie, dont la nature nous échap-
pait et que par ignorance on qualifiait d'idiopathique,
une affection symptomatique d'une malformation du
système osseux du crâne était séduisante. L'épilepsie
essentielle disparaissait du cadre nosologique et il
n'y avait plus dès lors que des épilepsies symptomati-
ques. Malheureusement cette conception n'éclaire en
rien le problème de l'épilepsie idiopathique, et en ad-
mettant même que la malformation crânienne soit la
ASYMÉTRIE FRONTO-FACIALE. 29
véritable cause première de l'épilepsie, le mécanisme
par lequel elle agit pour la produire ne nous en échappe
pas moins complètement. Lasègue, du reste, s'est bien
gardé d'aller au fond de sa théorie et d'en donner
l'explication.
Laissons donc de côté la question de pathogénie pour
ne nous occuper que du fait clinique, l'existence de
l'asymétrie fronto-faciale chez les épileptiques idiopa-
thiques. Quoique venant d'un homme aussi distingué
que Lasègue, ce caractère de l'épilepsie essentielle n'at-
tira pas une grande attention et fut admis ou rejeté
sans contrôle. Un seul auteur, M.Garel, en 1878, entre-
prit des recherches dans ce sens sur un assez grand
nombre d'épileptiques, et en même temps sur un nom-
dre égal d'individus normaux. Les résultats auxquels il
est arrivé semblent devoir lui permettre de rejeter l'opi-
nion de Lasègue. Mais deux causes d'erreur entachent
complètement ses conclusions. D'une part, en effet, les
épileptiques qu'il a examinés ne sont pas que des idio-
pathiques, et d'autre part il semble vouloir faire dire
à Lasègue ce qu'il n'a jamais prétendu : que tous les
asymétriques étaient épileptiques. Lasègue s'est con-
tenté de dire que tous les épileptiques idiopathiques
étaient asymétriques, mais nous ne pensons pas qu'il
ait jamais voulu renverser la proposition.
Mais les assertions de Lasègue aussi bien que celles
de M. Gard ne sauraient juger définitivement la question,
car tous deux se sont servis pour leurs recherches de
procédés défectueux et insuffisants, et Lasègue en
convient lui-même en regrettant de ne pouvoir appli-
quer la méthode graphique à cette étude. Il ne se ser-
vait, en effet, pour apprécier l'asymétrie que de la vue
et du toucher, et dans ces conditions de nombreuses
causes d'erreur peuvent se glisser quand il s'agit sur-
tout d'asymétries peu accusées. Nous avons au contraire
cherché à appliquer dans ces nouvelles recherches la
méthode des graphiques.
30 EPILEPSIE.
C'est dans ce but que l'un de nous, tant à la Salpêtrière
qu'à Bicêtre, a pris l'habitude de faire mouler les
bustes de tous les malades décèdes. On a ainsi une
grande collection de bustes d'épilcptiques sur lesquels
il est toujours facile de faire porter ses recherches et ses
vérifications. A cette manière de faire il y a deux avan-
tages considérables. Le premier et le plus important,
c'est que l'épileptique qu'on étudie ayant été autopsié
on est certain du diagnostic d'épilcpsic non symptoma-
tique, ce qui est indispensable, et qu'on ne saurait affir-
mer cependant sans preuve anatomique. Le second avan-
tage, c'est qu'on peut appliquer sur ces moulages, qui
reproduisent fidèlement la nature, des appareils qu'on
ne pourrait employer avec des individus vivants. C'est
sur trente bustes d'épileptiques idiopathiques que nous
avons entrepris de vérifier l'idée de Lasègue, sans pré-
vention aucune d'ailleurs dans un sens ou dans l'autre.
Ce sont les résultats de ces recherches commencées
l'an dernier, qui viennent d'être exposés dans la thèse
récente de M. le Dr Pison (1), faite sous notre direction
à l'hospice de Bicêtre.
L'appareil que nous avons employé a été imaginé par
l'un de nous, les divers crâniomètres ou stéréographes
habituellement employés ne pouvant s'appliquer dans s
les conditions où nous opérions. Ce petit appareil, du
reste fort simple, se compose d'une planchette horizon-
tale Jixée sur quatre pieds et percée d'un trou circulaire
de 30 centimètres de diamètre, pour permettre à la tête
du buste de passer. Au-dessous se trouve un piédestal
pouvant à volonté s'élever ou s'abaisser, sur lequel on
place le buste de façon à faire passer le plan de la plan-
chette à des niveaux différents de la tête. Pour obtenir
maintenant la projection d'un plan passant par un
(1) Pison. -- De l'asymétrie fronto-faciale dans l'épilepsie.
Th., Paris, 1888. `
ASYMÉTRIE FRONTO-FACIALE. 31
niveau quelconque du crâne ou de la face, voici com-
ment on procède. Sur la planchette se trouve tracé un
cercle divisé en un grand nombre de rayons également
inscrits et de plus numérotés. Le cercle est représenté
par une rainure dans laquelle se meut un curseur qui
supporte une tige métallique divisée en millimètres
pouvant glisser en restant toujours parallèle aux rayons
du cercle. On peut donc amener successivement le cur-
seur sur chaque rayon numéroté de la planchette, puis
on fait glisser la tige jusqu'au contact avec le crâne ou
la face, On lit alors le nombre de millimètres obtenus
entre le point de contact et le cercle. Il suffit alors do
reporter cette mesure sur une feuille de papier où se
trouve tracé un cercle identique avec des rayons numé-
rotés comme sur la planchette. En réunissant par une
ligne continue tous les points ainsi obtenus sur les dif-
férents rayons, on obtient une figure qui est la projec-
tion exacte du crâne ou de la face au niveau où on a
placé la planchette. Pour les recherches actuelles, il
suffisait de prendre les graphiques du front et de la
face seulement. Au front nous avons fait prendre les
mensurations au niveau des bosses frontales, à 25 milli-
mètres environ au-dessus de l'arcade sourcilière, et
pour la face au niveau des saillies malaires. Dans ce
dernier cas, le plan de la planchette passait au niveau
même du conduit auditif externe, et le diamètre trans-
versal du cercle par les deux conduits auditifs ; tandis
que dans le premier cas il réunissait les deux perpendi-
culaires passant par les conduits auditifs. De cette façon
les différents graphiques sont tous comparables entre
eux, les points de repère étant identiques.
Nous ne saurions ici donner en détail les particula-
rités que cette méthode a mises en relief et nous ren-
voyons à la thèse de M. le Dr Pison, mais nous voulons
attirer seulement l'attention sur quelques points inté-
ressants au point de vue de l'asymétrie en général et
32 EPILEPSIE.
surtout de son rapport pathogénique avec l'épilepsie
essentielle.
Comme Lasègue, nous avons été frappés de la fré-
l'i. ? 0.
ASYMÉTRIE FRONTO-FACIALE. 33
BOURNE'11,Llt 1888. 3
FIg.2\ 1
34 EPILEPSIE.
Fig, 22,
ASYMÉTRIE rnONTO-rACfALE. 35
Fil}. 2 : 1.
36 EPILEPSIE.
quence excessive avec laquelle se montre l'asymétrie
fronto-faciale chez les épileptiques idiopathiques. Sur
30 cas, il n'y en a qu'un seul dans lequel il n'y ait pas
d'asymétrie véritable, le front seul présentant une
saillie un peu plus prononcée à droite qu'à gauche.
Dans tous les autres cas, au contraire, l'asymétrie
existe, soit frontale, soit faciale, soit fronto-faciale, en-
traînant avec elle très fréquemment de l'asymétrie du
nez, de la bouche, du menton. L'observation de Lasè-
gue, au point de vue clinique, nous parait donc exacte.
Mais ce qui, dès le début, avait vivement attiré notre
attention, c'est ce fait que de jeunes épileptiques idio-
pathiques, décédés bien avant la période de consolidation
de la base du crâne, présentaient déjà de l'asymétrie et
souvent à un degré très marqué. A moins d'admettre
que la consolidation définitive du crâne se fait beaucoup
plus tôt que de 10 à 20 ans, on est bien obligé de cher-
cher une autre cause à l'asymétrie, qu'un vice de con-
solidation de la base. Ce qui semble le plus vraisem-
blable à une époque où tout l'organisme, et surtout
le orâne, se développe, c'est qu'il y a eu arrêt de
développement. Mais reste à savoir si c'est l'arrêt de
développement du crâne qui réagit sur le cerveau et y
détermine l'épilepsie, ou si c'est au contraire le cer-
veau malade, dont les modifications se traduisent par
l'épilepsie, qui retentit sur le développement du crâne
et lui imprime un ralentissement ou un arrêt. Il nous
semble bien plus naturel d'admettre que c'est le
crâne, dont le développement est soumis à celui du
cerveau, et qui n'a pas lieu de s'accroitre si l'organe
qu'il est destiné à contenir cesse d'augmenter. Pour
nous donc, l'asymétrie crânienne n'est pas la cause de
l'épilepsie idiopathique. Elle en est au contraire la
conséquence. Elle lui est consécutive, ou tout au plus
concomitante, mais ne la précède jamais.
Toutes deux, du reste, relèvent peut-être d'une même
cause, l'arrêt ou l'irrégularité dans le développement
ASYMÉTRIE FRONTO-FACIALE. 37
concomitant du cerveau et du crâne. Ce qui parait
rendre cette idée plus probable, c'est que l'on observe
très fréquemment une inégalité de poids entre les hémis-
phères cérébraux, ce qui montre bien cet arrêt de dé-
veloppement. Un autre fait aurait une grande valeur
s'il pouvait être constaté exactement, c'est de savoir le
rapport des convulsions épileptiques, au point de vue
de leur siège ou de leur intensité plus grande dans un
côté du corps, avec l'hémisphère ainsi atteint.ll2alheureu-
sement, cette constatation est très difficile à faire, le
médecin ne se trouvant que rarement là au moment des
accès épileptiques.
Dans les quelques cas où la chose a été notée d'une
façon précise, nous n'avons constaté aucun rapport
constant. Nous ne saurions cependant rien affirmer
de définitif à cet égard, le nombre de nos cas étant trop
restreint.
Quoi qu'il en soit de la relation pathogénique entre
l'asymétrie fronto-faciale et l'épilepsie, il n'en reste pas
moins un fait clinique intéressant, c'est que, dans l'im-
mense majorité des cas, les épileptiques idiopathiques
présentent de l'asymétrie fronto-faciale. Cette notion
peut donc, dans une certaine mesure, aider au diagnostic
souvent délicat de l'épilepsie idiopathique et de l'épi-
lepsie symptomatique, lorsque surtout l'épilepsie date
de l'enfance et qu'il n'y a pas de signes manifestes de
sclérose ou d'atrophie cérébrales. D'une façon géné-
rale, nous dirons donc que lorsqu'on se trouve en pré-
sence d'une épilepsie survenue avant 20 ans, sans
traumatisme, on a les plus grandes chances pour avoir
affaire à de l'épilepsie essentielle, ce qui n'est pas indif-
férent pour le pronostic, sinon pour le traitement.
Le graphique représenté sur la figure 20 est celui
d'un malade dont voici, en quelques mots, l'histoire :
Lefèv..., âgé de 24 ans, épilepsie idiopalhiq1te.- Sa grand'-
mère maternelle était alcoolique ; un cousin germain mater-
38 ASYMÉTRIE FItoNTO-FACIAL1 : .
nel est alcoolique et aliéné. Quant à lui, il a eu des convul-
sions dans l'enfance, et son premier accès à G ans, sans cause
connue. Il n'y avait pas de prédominance des convulsions
dans un des côtés du corps. A l'autopsie, pas de lésions en
foyer, mais une différence de 70 grammes entre les deux hé-
misphères cérébraux, à l'avantage de l'hémisphère droit.
L'observation résumée du malade dont le graphique
est représenté dans la figure 21, est la suivante :
Plous..., 41 ans, épilepsie idiopathique. Grand'mère
maternelle, attaques de nerf ; frère mort à 3 ans de fièvre
cérébrale avec convulsions ; un neveu idiot. Quant lui,
il a parlé et marché tard. Crises de colère jusqu'à 7 ans ; ona-
nisme ; à 13 ans, premier accès à la suite de la peur de la
foudre qui tomba près de lui; pas de prédominance des accès
d'un côté; accès fréquents do 13 à 18 ans. Suppression des
accès de 18 à 20 ans. Rien à l'autopsie de l'encéphale.
La figure 22 représente le graphique du nommé Doud...
Epilepsie 'idiopathique, 15 ans. Père, paludéen ; tante
maternelle, épileptique; grand' tante, paraplégique. Dans ses
antéoédents personnels, on trouve : premières convulsions
à 5 mois, jusqu'à 2 ans. Premier accès à 5 ans sans cause
connue. Etat de mal à 14 ans ; nouvel état do mal et mort à
15 ans; pas de lésions en foyer.
La figure 23, enfin, est le graphique du malade dont
voici l'histoire résumée :
De Bus..., 24 ans, épilepsie idiopathique. Père, diabétique;
mère, hystérique ; deux cousins germains paternels épilep-
tiques. Vertiges à 18 mois; premier accès à 1; ans ; pyromanie
et kleptomanie ; état de mal à 22 ans ; méningite guérie ; mort
dans un accès; pas de prédominance dos secousses d'un côté;
pas de lésions en foyer de l'encéphale ; hémisphère gauche
pesant 22 grammes de plus que le droit, et plus long que lui
d'un centimètre.
EPILEPSIE IDIOPATHIQUE. 3D
IV
Epilepsie idiopathique. Bromure de nickel ;
Par BOURNEVILLE.
L'observation ci-après nous a paru présenter plu-
sieurs particularités intéressantes susceptibles de
mériter l'attention de nos lecteurs. Elle nous fournira
d'ailleurs l'occasion de dire un mot de l'emploi du
Bromure de nickel.
SOMMAIRE. Grand'mère paternelle alcoolique. Mère
nerveuse. Grand'père maternel mort d'une affection
nerveuse. - Grand'mère maternelle hystérique. - Bisaïeul
maternel mort des suites d'une attaque d'apoplexie.
Oncle maternel alcoolique. Soeur morte d'accidents cé-
rébraux. Développement physique et intellectuel régu-
lier jusqu'il treize ans. - A treize ans, peur. Début de
l'épilepsie le lendemain. - Marche des accès ; troubles in-
tellectuels et propulsion. - Description du malade, des
accès et des troubles intellectuels qu'ils amènent à leur
suite. Plaie du cuir chevelu de 13 centimètres sur 9 :
greffes èpidermiques. Accès sériels. - Etat de mat. -
Agitation maniaque post-épileptique. Bromure de
nickel. Mort par asphyxie dans un accès. Autopsie :
Ecchymoses et congestions viscérales. Description des
circonvolutions; - deux noyaux de sclérose dans l'hé-
misphère gauche.
Bon..., Edouard, né à Paris, le 3 septembre 1870, est entré à
Bicêtre dans notre service le 18 août 1883.
Renseignements fournis par sa mère (22 août 1883).
Père, 49 ans, tourneur en bois, grand, fort, bien portant, fume
très peu, sobre, pas de migraines, mais assez souvent dou-
leurs de tête ; un peu violent, marié à 25 ans. On assure qu'il
n'a jamais offert d'indices do maladies vénériennes : « Nous
40 EPILEPSIE IDIOPATHIQUE : ANTÉCÉDENTS.
nous connaissons depuis l'âge de 14 anis : c'est un garçbn très-
régulier. » On ne sait s'il a eu des convulsions dans l'enfance.
Père, anglais, cocher de maison, écrasé par sa voiture ; sobre.
Mère, morte à 73 ans, il y a 6 mois, on ne sait de quoi,
faisait des excès de boissons. Pas de détails sur les grands-
parents.- Un frère, marin, et deux soeurs sont bien portants;
ils n'ont pas d'enfants. Ni aliénés, ni épileptiques, ni apo-
plectiques, ni paralytiques, ni difformes, ni suicidés, ni cri-
minels dans la famille qui est anglaise.
Mère, 46 ans, plumassière, bien portante, petite, brune, assez
intelligente; pas de convulsions dans l'enfance; réglée à 14 ans,
l'est encore; elle est assez nerveuse, n'a pas d'attaques de
nerfs ni de migraines, mais est sujette à des névralgies
céphaliques depuis 4 à 5 ans ; pas de maladies de peau ; mariée
à 22 ans ; aucune maladie depuis le mariage. [Père, mort
en 8 jours d'une affection cérébrale, à 73 ans; tourneur en
cuivre ; n'avait pas eu le choléra. Mère morte à 34 ans, pro-
bablement de phthisie, après une couche ; elle était sujette à
des attaques de nerfs consécutives à une peur (20 ans), sur-
venant après contrariétés; mariée à 21 ans; les attaques au-
raient continué après son mariage. - Grand-père paternel
mort vers 30 ans, on ne sait de quoi.- Grand'mère paternelle
morte à 80 ans; elle était en enfance. - Grand-père maternel
mort à 69 ans des suites d'une attaque de paralysie. -
Grand'mère maternelle, pas de détails. Un frère est mort
phthisique à 25 ans, à la suite d'excès de tous genres. Deux
soeurs, une morte d'une chute du haut des fortifications,
l'autre est bien portante et a eu 14 enfants, dont neuf sont
morts jeunes en nourrice, on ne sait de quoi. Ni aliénés, ni
épileptiques, etc.] Pas de consanguinité. (Père né à Bordeaux
de parents anglais; mère, de Paris.) Inégalité d'âge de
3 ans. (La mère du malade ne vit plus avec son mari depuis huit
ans. Bien qu'elle n'ait pas «quitté la ligne droite, » il l'a aban-
donnée pour retourner en Angleterre ; elle croit qu'il vit avec
une autre femme. Pendant trois ans, il lui a envoyé régulière-
ment de l'argent; elle ne reçoit plus rien depuis cinq ans.)
Huit enfants : 10 Garçon né à 8 mois, mort à 4(i jours; pas
de convulsions. 2° Fille née à 7 mois, morte au bout d'une
heure; pas de convulsions. 3° Fille née à terme, morte en
naissant. 4° Fille, morte à 28 mois, d'accidents cérébraux
comateux, qui ont duré 8 jours ; pas de convulsions. 5° Gar-
çon, 17 ans, bien portant, intelligence ordinaire; violent; pas
de convulsions. 6° Fille morte à 1S ans, cette année, de la
fièvre typhoïde, à l'hôpital Beaujon ; pas de convulsions, pas
d'attaques ; intelligente. 7° Garçon mort d'une cholérino à
DÉBUT DES ACCÈS. 41
7 mois; était né avant terme ; n'aurait pas eu de convulsions.
8° Notre malade. A la conception, les deux époux vivaient en
bonne intelligence; jamais de discussions (1). Grossesse bonne;
pas de coups, de chutes, de constriction, d'émotions, d'alcoo-
lisme, etc. Accouchement àterme, naturel, sans chloroforme.
A la naissance, très bel enfant, venu au monde sans accidents
ni asphyxie. Elevé au sein en nourrice ; sevré à 10 mois. Il a
marché et commencé à parler vers 10 mois; à 20 mois, il par-
lait librement. Il n'a été propre qu'à 20 mois, ce qu'on
attribue « à ce que la nourrice lui laissait faire tout ce qu'il
voulait. »
Jusqu'en avril 1883, il s'est bien porté, allait à l'école, où il
apprenait très bien; il savait lire, écrire, compter, mais n'avait
que peu de dispositions pour l'arithmétique et les quatre rè-
gles ; au contraire, il avait bonne mémoire et avait du goût
pour l'histoire, la grammaire et les chansons. Il manquait ra-
rement l'école et n'avait fait que deux ou trois fois l'école
buissonnière. Il était en outre affectueux, obéissant et ne va-
gabondait point.-Pas d'onanisme. Pas de cauchemars, ni d'é-
tourdissements, pas de céphalalgie, ni de secousses. L'en-
fant n'était pas très hardi.
En avril 1883, en allant faire une commission, il a eu peur
d'être écrasé et a été si saisi qu'il ne pouvait plus faire un mou-
vement pour se garer. Il n'a pourtant pas perdu connaissance.
Il a eu cette frayeur le jeudi. Le premier accès est survenu
dans la nuit du vendredi au samedi. Il s'était couché comme
d'habitude. A deux heures du matin, sa mère fut réveillée par
le bruit que faisait son enfant en respirant. Elle se leva et le
trouva raide «se tirant les mains et les pieds, » sans se débattre.
L'accès a duré peut-être dix minutes. L'enfant est retombé
dans le sommeil sans se réveiller. Il n'avait pas d'écume, n'a-
vait pas uriné, mais il s'était mordu la langue. Le lendemain,
au réveil, il était triste, et n'avait aucune conscience de ce
qui s'était passé.
Le second accès, survenu dans la nuit du dimanche au lundi,
a été semblable au premier. Mais le lendemain matin, il était
(1) Depuis bien des années, tant à la Salpêtrière qu'à Bicêtre,
nous avons toujours suivi la même méthode au point de vue des
renseignements si importants, concernant la conception, la gros-
sesse, l'accouchement et l'état de l'enfant à la naissance
(asphyxie, etc.). Il y aurait dès maintenant, même en ne se ser-
vant que des observations que nous avons publiées, les éléments
nécessaires à une étude de cette partie de l'étiologie des diverses
formes d'idiotie.
42 z2 DESCRIPTION DU MALADE.
« fou ». Il voulait tout briser et faisait le simulacre de se jeter
par la fenêtre. Dans la journée, pendant une absence qu'a faite
sa mère pour aller chercher un aide, il a attaché une corde,
s'est laissé glisser et a fait une chute sans aucun mal.
Les jours suivants, il avait repris son état normal. A partir
de là, jusqu'au milieu du mois de mai, accès presque toutes les
nuits, et, pendant le jour, absences fréquentes et impulsions :
« Il entrait dans la chambre et ne pouvait s'empêcher de cou-
ril', mais cela ne durait qu'une seconde. » - Traitement par le
bromure de potassium.
Pendant le mois de mai, il n'a plus eu d'accès ; mais les ab-
sences ont persisté; il est retourné à l'école. En juin, les crises
ont reparu avec plus d'intensité; il en avait jusqu'à six pendant
le jour et huit pendant la nuit. Il écumait, se mordait la lan-
gue et urinait dans son lit. Après l'accès, qui était de courte
durée, « il ne se souvenait do rien » et les jambes restaient,
pour peu de temps du reste, plus faibles. Vers le milieu du mois
de juin, état qualifié parla mère de « méningite. » Il ne sentait
plus rien, ne se plaignait de rien, avait une très forte fièvre et
restait comme anéanti. Cet état, traité par un vésicatoire sur
la tête, n'a duré que trois ou quatre jours.
Après un intervalle très bon d'un mois, retour des accès avec
la même fréquence et la môme intensité qu'en juin. Le 10 août,
retour des troubles intellectuels : « Il montait sur les toits et
allait nettoyer les gouttières (1). » Pendant la nuit, fréquents
accès qui ne le réveillaient pas. L'intelligence et la mémoire n'au-
raient pas diminué, cependant il ne savait plus écrire. Les per-
sonnes de la maison habitée par la mère l'ont obligée à le
mettre à l'Asile clinique (Sainte-Anne) où il est entré le 14 août.
On ne sait rien de son séjour dans cet Asile, si ce n'est qu'il y
aurait eu un grand nombre d'accès. Varioloïclc iL 9 ans.
Quelques ascarides vers 3 ans. Aucune autre maladie.
Etat actuel. Taille, te32; poids, 27 kil. 10.
Tête. Crâne symétrique. Bosses pariétales prononcées.
Bosse occipitale saillante, surmontée d'un léger méplat. Les
cheveux sont rares et commencent à repousser. Sur la région
moyenne fronto-pariétale, plaie irrégulière en voie do cicatri-
sation, de 13 centimètres d'avant en arrière, sur dans le sens
transversal ; elle est recouverte do bourgeons charnus assez
saillants. Front moyen; bosses frontales peu développées; nez
droit, menton rond, arcades sourcilières assez saillantes, cils
(1) Ces impulsions à grimper se rencontrent également chez les
hystériques, les idiots et les instables. Nous les avons souvent
notées dans nos observations.
DESCRIPTION DU MALADE. 43
longs, châtains, blépharite ciliaire chronique, iris gris bleuâtre,
lèvres et bouche normales. Douze dents bien rangées sur la
mâchoire supérieure, dont deux canines de lait. Treize dents
permanentes à la mâchoire inférieure. La deuxième petite mo-
laire droite a été arrachée. L'articulation do la mâchoire infé-
rieure est normale, ainsi que la voûte palatine. Les gencives
sont en bon état. Oreilles bien ourlées, surtout à leur partie
supérieure. Le lobule est bien développé, non adhérent.
44 MARCHE DE LA MALADIE.
22 août. Accès nombreux hier soir, dans la nuit et ce matin.
Ce matin le malade ne répond pas aux questions ; il esquisse
à peine un sourire ; la commissure labiale gauche semble alors
un peu tirée en haut et s'écarte unpeu plus de la ligne médiane.
La plaie du cuir chevelu, signalée plus haut, se couvre de
bourgeons exubérants qu'on est obligé de réprimer par la
cautérisation.
28 août. Les accès ont cessé depuis trois ou quatre jours,
mais il persiste un peu d'agitation maniaque. Chloral 1 gr. 50.
La plaie de tête commence à se cicatriser. Greffe épidermique.
Conjonctivite oculo-palpébrale double, surtout marquée à
gauche avec léger chémosis. Scarifications légères de la con-
jonctive et application de collyre au sulfate de zinc.
31 août et 1er septembre. La première greffe épidermique
parait avoir pris, on en applique une seconde. L'enfant est
moins agité et commence à comprendre ce qu'on lui dit, mais
dans la nuit il a enlevé son pansement et avec lui les deux
greffes.
4 septembre. Retour à l'état normal. L'enfant est tout à fait
calme; il répond convenablement à toutes les questions, mange
avec appétit, dort bien. La conjonctivite persiste mais peu in-
tense. Au bout de quelque jours, B... se lève, redevient très
gai et n'a plus d'accès.
15 octobre. Depuis quatre jours, nouvelle série d'accès. Les
questions restent sans réponse; légère excitation; le malade
cherche à mordre quand on approche la main de son visage.
Langue blanche ; sécrétion muco-purulente des conjonctives
La connaissance ne revenant plus entre les accès, l'état de
mal est constitué. Du 10 au 15 juillet inclusivement, 60 accès.
La température rectale oscille pour cette période, autour
de 38°, les 10, 11, 12 et 13 ; elle atteint 3J°,3 le 14 au soir, et se
maintient à 40° environ les 15, 16 et 17. Le 18 au matin, elle
est encore à 40°,G, le soir à 39°,3 et à partir de là elle continue
à redescendre (voir fig. 25).
17 octobre. Les accès ont diminué, il n'y en a eu que deux
hier. B... a parlé un peu cette nuit et crié. Aujourd'hui, il
est immobile et on ne peut en tirer aucune réponse. Le 18,
2 accès ; le 19, 3. La plaie est complètement cicatrisée.
22 octobre. Pas d'accès aujourd'hui, ni le 20 et le 21. L'en-
fant est très calme. Suppression du bromure de potassium.
25 octobre. L'enfant se lève.
27 novembre. B... va à la petite école ; il ne gâte pas, sait se
laver et se vêtir lui-même; il peut cirer ses souliers, mais
avec beaucoup de lenteur. Il mange proprement, en se servant
de la cuiller, de la fourchette et du couteau. Il parle difficile-
BROMURE DE NICKEL. 45
ment. Lecture courante. Ecriture ordinaire, mais parfois
illisible. Il fait les trois premières opérations de calcul assez
exactement, connaît quelques-uns des principaux faits de l'his-
toire et a quelques notions de géographie. Mémoire assez
bonne. Caractère doux.
9 décembre. Nouvelle série d'accès. Retour à l'infirmerie.
Vacciné sans succès le 17 décembre au bras droit avec du
vaccin de génisse.
1884. Janvier. Revient à la petite école dans les premiers
jours de ce mois. On est frappé du changement de son carac-
tere. Il est violent et ne supporte pas que ses camarades crient
autour de lui; il se dispute souvent et cherche à mordre.
4 mars. Série d'accès qui continue jusqu'au 18 mars (du 14
mars au 18 mars, 98 accès). - '27 mai. Autre série.
15 juin. Agitation à la suite des accès. L'enfant ne parle pas,
mais remue constamment dans son lit, au point d'avoir sur les
membres inférieurs, surtout aux genoux, des excoriations et
des contusions. Il se lève continuellement et cherche à quitter
son lit sitôt qu'on lui a enlevé ses attaches. Purgatifs.
17 juin. Même état. Bains d'une heure, etc.
18 juin. L'agitation se calme.
21 juin. Le malade est tranquille. Ecoulement visqueux, em-
pesant le linge, au niveau de la plaie du cuir chevelu, 'guérie
depuis longtemps.
28 juin. L'enfant est calme et commence à parler, à manger
depuis quelques jours.
16 juillet. Aspect hébété. Regard vague et sans expression.
Pupilles dilatées, égales, contractiles. Pas de tremblement delà
langue ni des lèvres. Parole très lente. Conceptions lentes.
Affaiblissement des jambes plus prononcé à la suite des séries
d'accès.
Description fl'L172<'ICCS.-8... s'affaisse lentement en arrière.
Il est à demi-assis, le tronc appuyé contre l'infirmier, ratatiné,
les jambes fléchies, les bras dans la demi-flexion. La face,
d'abord pâle, ruugit et regarde 11 droite. Les pupilles qu'on
venait d'examiner se sont dilatées et sont devenues moitié
plus grandes. Au bout d'une demi-minute environ, retour de
la coloration normale de la face. Regard étonné. On le lève ; il
a de la peine à se tenir debout. Les pupilles ont repris les di-
mensions qu'elles avaient au début de l'examen. Les accès
ont diminué en nombre dans les mois de juin et juillet.
Août. - Poids 29 kilog. 50. Taille 1 m. 33.
30 août. Bromure de nickel, 2 cuillerées jusqu'au 10 sep-
tembre ; 3 cuillerées jusqu'à la lin de septembre.
Il () MARCHE DE LA MALADIE ; MORT.
17 novembre. Onanisme après ses accès. Engourdissement
intellectuel et affaiblissement physique. On est obligé de le
laisser au lit parce qu'il ne peut se tenir sur les jambes. Il no
peut marcher que soutenu des doux côtés, qui paraissent égale-
ment faibles : pas de tremblement de la langue. La parole est
très libre, mais on a beaucoup de peine à obtenir quelques
réponses. -
1885. Il descend de l'infirmerie vers le 20 décembre pour y
remonter le 10 janvier. Il a eu, à partir de cette date, une série
d'accès. Il paraissait se remettre de cette série lorsque, dans la
nuit du 22, sont survenus les faits suivants :
Vers quatre heures du matin, le veilleur s'aperçut que cet
enfant était pâle et qu'il avait les yeux fixes ; il aurait fait deux
ou trois mouvements. On fit des lotions vinaigrées pendant
qu'on envoyait chercher l'interne de garde qui trouva l'enfant
mort. Le veilleur a prétendu quo l'enfant était couché sur le
dos et qu'il n'aurait pas eu d'accès dans la nuit ( ? ). L'autopsie,
comme on va le voir, permet au contraire de penser que l'en-
fant a été asphyxié dans un accès. Voici le Tableau des accès
depuis l'entrée à Bicêtre jusqu'à la mort.
AUTOPSIÉ. 47
Autopsie faite trente-deux heures après la mort. Sur l'ab-
domen, plaque verdâtre répondant à la fosse iliaque droite. Du
côté gauche, tout l'espace s'étendant depuis l'hypochondre
gauche jusqu'au tiers antérieur et supérieur de la cuisse pré-
sente une coloration brun-verdâtre, coloration-rouge brun de
toute la partie interne de la cuisse, de la jambe et du pied du
côté droit, sauf au niveau de la partie saillante du genou. Du
côté gauche, au contraire, cette coloration ne manque qu'en
dedans sur les mêmes parties. On les retrouve sur le côté
gauche seulement du thorax, en avant et surtout en arrière.
A droite, ecchymoses à la partie antéro-externe et au tiers
supérieur de la cuisse, sur la crête du tibia et au tiers moyen;
du côté gauche, sur la face antérieure de la cuisse et au tiers
inférieur. Sur la partie antéro-interne de la jambe où elles sont
nombreuses ; enfin, sur la face externe du bras droit. Rigidité
cadavérique peu prononcée, sauf aux mains et aux pieds.
Parois abdominale et thoracique normales. Pannicule adi-
peux épais. Muscles bien développés et de couleur normale.
Les intestins occupent leur place ordinaire. Epiploon un peu
remonté, sans adhérences. Côlon transverse légèrement dilaté.
Le diaphragme remonte à droite jusqu'au bord supérieur de la
quatrième côte et à gauche jusqu'au bord inférieur de la même
côte. Pas de liquide dans la cavité abdominale. Péritoine
pariétal et viscéral lisse et intact. Ganglions mésentériques
normaux. La vessie, rétractée, contient un peu d'urine.
A l'ouverture du thorax, on constate que le thymus persiste,
atrophié, sauf dans sa partie supérieure qui a encore un certain
volume (1). Adhérence totale du poumon gauche, excepté au
niveau du lobe inférieur qui reste libre. Pas de liquide anormal
dans ce qui reste de la cavité pleurale gauche. Adhérences avec
le péricarde du même côté. A droite, poumon rétracté, libre.
Pas de liquide anormal.
Le coeur, dans sa situation ordinaire, est en systole, sa pointe
est formée par les deux ventricules. Une seule petite plaque
laiteuse sur le ventricule droit. Le péricarde ne contient que
la quantité ordinaire de sérosité. A la section du coeur in situ,
un peu de sang noir liquide s'échappe surtout des oreillettes.
A l'enlèvement de cet organe, les gros vaisseaux laissent échap-
per une grande quantité de sang noir contenant quelques cail-
lots cruoriques. Le myocarde, les valvules, l'endocarde, les
auricules ne présentent rien de particulier.
La bronche gauche, incisée, ne contient aucun liquide. Plè-
(1) Nous avons très souvent constaté la persistance du thymus
chez les malades de notre service, surtout chez les idiots.
48 ' AUTOPSIE.
vre costale saine. Trois ou quatre très petites ecchymoses sous-
pleurales de la plèvre pulmonaire gauche et en arrière. Le
poumon gauche pèse 240 gr. et présente une congestion très
intense des deux lobes, mais surtout du lobe inférieur. Pas
d'atélectasie. Les bronches contiennent une bouillie claire et
sanguinolente; elles paraissent normales et présentent, après
lavage, une couleur verdatre généralisée. Le poumon droit
pèse 270 gr. et présente, ainsi que les bronches, les mêmes
lésions que le poumon gauche, mais moins prononcées. Em-
physème du lobe supérieur, du bord postérieur et de la face
interne. La plèvre pulmonaire droite est lisse et polie.
Rate, 85 gr., quelques adhérences aux organes voisins; hypé-
rémie, consistance augmentée. Capsules surrénales normales.
Uretères un peu dilatés des deux côtés. Les reins se décor-
tiquent facilement, surface hyperémiée (étoiles de Verheyen
visibles). Hypérémie par places de la substance corticale et
plus prononcée de la substance médullaire. Rein gauche 70 gr.
Rein droit 80 gr. Ces altérations sont moins marquées 1\ droite.
L'estomac contient un peu de liquide; quelques petites ecchy-
moses de sa muqueuse. Adhérence très étendue entre le dia-
phragme et le foie, qui est normal; non posé; pas de calculs. Un
peu de mousse sanguinolente dans le larynx et la trachée.
Les testicules sains, se dévident bien. Intestin grêle, gros
intestin, pancréas, rien.
Tête. Cuir chevelu peu développé, hypérémié surtout à
gauche et en arrière. Boite crânienne symétrique. Les sutures
persistent, non ossifiées, sauf la suture frontale. Les deux tables
sont hypérémiées, surtout l'externe. Diploé mince. Encéphale
1270 gr. Cervelet et isthme, 130gr. I'ie-merr, très finement
vascularisée partout; elle a une teinte un peu ecchymotique sur
le lobe temporal gauche et sur les lobes temporal et frontal
droits. Elle est mince des deux côtés; adhérences rares. Elle
s'enlève assez facilement. Les nerfs et les artères n'offrent
rien de particulier. Quantité du liquide céphalo-rachidien un
peu augmentée. Les hémisphères cérébraux et cérébelleux
sont égaux. La décortication du cervelet est facile. La coupe
de cet organe ne présente rien de particulier.
Hémisphère droit. - Face convexe. La première circonvo-
lution frontale, Fi, est très sinueuse et composée dans sa
moitié antérieure de petits plis transversaux dont un envoie
un prolongement au fond du sillon qui la sépare de la deuxième
frontale. Un autre pli de passage, sinueux, va s'insérer de ni-
veau sur cette dernière ; elle est antéro-postérieure et dédou-
blée dans sa seconde moitié. Son insertion sur la frontale as-
cendante figure un crochet, F2. La deuxième circonvolution
ÉPILEPSIE : AUTOPSIE. 49
frontale est très sinueuse et bien développée; elle envoie deux
plis de passage à la troisième et prend sur la frontale ascen-
dante une large insertion coupée par un petit sillon. La troi-
sième circonvolution frontale, Fa, est très sinueuse et s'in-
sère de niveau sur l'extrémité inférieure de la frontale ascen-
dante, F A, qui est aussi sinueuse et bien développée. Le sillon
de Rolando est large et profond. La pariétale ascendante,
P A, sinueuse, assez large, envoie un pli de passage au pli
pariétal inférieur et deux autres au pli supérieur. Le pli parié-
tal supérieur, P, volumineux et sinueux, envoie un pli de pas-
sage au lobe occipital et un autre au pli courbe. Le pli parié-
tal inférieur, P2, volumineux, envoie un pli de passage à la
première temporale et un autre au pli courbe, P C. Ce dernier
est peu développé, mais entre lui et le lobe occipital, il existe
une circonvolution composée de trois replis (lobule du pli
courbe).
Le lobe occipital, LO, est composé de circonvolutions assez
plissées. Le lobule de l'insu la offre trois digitations, dont les
deux premières sont trifurquées. La première circonvolution
temporale, sinueuse, envoie un long prolongement au fond de
la scissure de Sylvius et un pli de passage volumineux à la
deuxième temporale. La deuxième et la troisième temporales
T, T3, sont en grande partie confondues.
Face interne. -Première circonvolution frontale bien dé-
veloppée, avec des plis assez profonds. Sillon calloso-marginal
assez profond. Circonvolution du corps calleux, CCCa, assez
large, mais non plissée. Lobe quadrilatère, LQ, volumineux et
plissé. Lobe 1,P, bien développé, avec deux sillons
dont un assez profond et l'autre superficiel. Le coin, LC, est
sinueux, avec des plis superficiels. Lobe occipital assez bien
développé et plissé. La circonvolution de l'hippocampe, CII,
est unie et envoie un prolongement à la quatrième temporale.
La corne d'Ammon, les masses centrales, le ventricule laté-
ral, etc., n'offrent rien de particulier.
Face orbitaire bien plissée, large. Les sillons principaux
(scissures) et les sillons intermédiaires sont généralement pro-
fonds.
Hémisphère gauche. - Face convexe. FI sinueuse, bien
développée, envoie à son origine un pli de passage assez volu-
mineux à Fs; plis transversaux en avant, double pli antéro-pos-
térieur et volumineux en arrière. Elle prend une seule inser-
tion un peu en retrait sur l'extrémité supérieure de la frontale
ascendante, Fa est volumineuse, sinueuse, s'insère de niveau sur
la partie moyenne de la frontale ascendante et envoie deux plis
BOURNEVILLE, 1888. 4
50 EPILEPSIE : RÉFLEXIONS.
de passage à F3, dont un de niveau et l'autre au fond du sillon.
>â : ; est sinueuse, bien développée et s'insère de niveau sur l'ex-
trémité inférieure de FA, qui est, elle aussi, volumineuse et
sinueuse. Le sillon de Rolando est larrce et profond. PA, éga-
lement bien développée envoie un pli de passage au pli parié-
tal supérieur. Celui-ci, formé de deux replis sinueux, envoie en
arrière un pli de passage au lobe occipital. P2,non dédoublée,
envoie un pli de passage assez sinueux au pli courbe, bien dé-
veloppé, et qui envoie deux plis de passage au lobe occipital
composé de circonvolutions assez petites, présentant dessillons
superficiels. Le lobule de l'ittsula a trois digitations : la pre-
mière est bifurquée. 2 ? plissée, envoie un pli de passage bi-
furqué à sa base, au fond de la scissure de Sylvius et un autre
à T2, qui interrompt la scissure parallèle à 1 centimètre il"2 de
son origine, Ta, Ti, en partie confondues en avant, sont plus
distinctes en arrière.
Face interne. Fi, très plissée h son origine, reçoit de la cir-
convolution du corps calleux un pli de passage sinueux; en
arrière, elle est incomplètement séparée du lobe paracentral.
A l'origine de cette circonvolution, on trouve deux noyaux de
sclérose situés entre l'extrémité antérieure du corps calleux
et l'extrémité correspondante de l'hémisphère. Les portions
sclérosées ont une consistance beaucoup plus ferme, forment
relief et ont une coloration différente, légèrement jaunâtre
après macération. Le noyau postérieur mesure 1 centimètre 1/2
de longueur; l'autre 2 centimètres. LP, très irrégulier, présente
un sillon bifurqué; pas d'encoche du sillon de Rolando. CCCa
lisse, relativement peu développée. LQ très sinueux, ainsi que
le coin. LO est au contraire peu développé. Sillon calloso-
marginal et scissures parièlo-occipitale, calcarine, perpen-
diculaire assez profondes, ainsi que les sillons secondaires.
Corps calleux normal. Le ventricule latéral, le corps strié,
la couche optique n'offrent rien de particulier, si ce n'est une
sorte de sillon assez creux, qui sépare le corps strié de la cou-
che optique. Face orbitaire : Circonvolutions régulières.
I. - Nous avons à relever dans les antécédents héré-
ditaires : 1° les excès alcooliques de sa grand'mère pa-
ternelle ; 2° les névralgies de sa mère ; 3° l'affec-
tion cérébrale à laquelle a succombé son grand-père
maternel;- 4° les attaques de nerfs de sa grand'mère
maternelle ; 5° l'apoplexie de l'un de ses arrière-
EPILEPSIE : RÉFLEXIONS. ' 51
grands-pères maternels; 6° les accidents cérébraux
qui ont enlevé l'une de ses soeurs.
II. Jusqu'à l'âge de 13 ans, l'enfant, qui était intel-
ligent, n'a été atteint d'aucune affection nerveuse. C'est
alors que, 24 heures après une vive frayeur, il a eu son
premier accès d'épilepsie, suivi 48 heures plus tard
d'un second accès avec délire violent, consécutif..
Les accès se sont reproduits fréquemment et ont été
souvent compliqués de troubles intellectuels, d'auto-
mutisme, d'accidents procursifs et de traumatismcs
de la tête. De plus, il s'y est ajouté des absences ; les
facultés intellectuelles ont baissé et le caractère est de-
venu de plus en plus violent.
En général, les accès se sont montrés par séries; c'est
à la suite d'une de ces séries que l'enfant a succombé
dans un accès, probablement par asphyxie. C'est là un
accident qu'on observe chaque année une ou plusieurs
fois dans les services d'épileptiques soit au lit, soit aux
travaux de jardinage, les malades ayant la face collée
Fig. 24.
52 EPILEPSIE.
contre l'oreiller ou enfoncée dans la terre fraîchement
remuée.
III. - Nous devons insister sur la marche de la
température durant l'une des séries, celle du mois de
janvier et sur celle de l'un des états de mal. Dans le
premier cas, ainsi que le montre la fig. 24, la tempé-
rature ne dépasse guère que d'un degré la température
normale. Entre les accès, le malade reprend entière-
ment connaissance. Dans le cas du véritable état de
mal, la connaissance ne revient pas et la température
s'élève jusqu'à 40°,3. Elle baisse pendant ? 4 heures
puis monte jusqu'à 40°,6 (congestion méningitique) ;
enfin, les accès ayant disparu et la conscience étant
revenue, la température s'abaisse rapidement (Fig. 25).
IV. Nous n'avons noté aucune lésion macros-
copique qui puisse expliquer la cause de l'épilepsie.
Nous n'avons pas non plus trouvé, ici, les lésions de
méningite ou de méningo-encéphalite qu'on rencontre
chez une catégorie de déments épileptiques. Les lésions
constatées du côté des organes respiratoires nous pa-
raissent indiquer que l'enfant a succombé par asphyxie
dans un accès.
V. Bon.... a pris 0 gr. 25 de bromure de nickel,
du 3 mars au 31 août; 0 gr. 50 du 1er au 10 sep-
tembre et 0 gr. 75 du 16 au 30 septembre. Si l'on veut
bien se reporter au tableau des accès, on verra que
durant cette période, loin de diminuer, les accès n'ont
fait que se multiplier ; il n'y a plus eu de rémissions,
comme on en avait vu précédemment en septembre et v
novembre 1883, janvier et février 1884.
VI. Nous allons, à ce propos, exposer succinctement
les résultats que nous avons relevés sur 17 autres ma-
lades qui, en 1884-85, ont été mis en traitement par ce
médicament sur lequel notre attention avait été appelée
BROMURE DE NICKEL. 53
par une note de M. Da Costa, insérée dans le Médical
News de Philadelphie (1883, XLIII, p. 337) et dont
nous avons trouvé l'analyse dans l'Union médicale : 11.
Canada (1883, p. 505).
54 EPILEPSIE.
Suivant M. Da Costa, le bromure de nickel n'avait
pas encore été employé avant lui. Son action sur le
système nerveux serait plus évidente que celle du sul-
fate de nickel, également expérimenté par lui. Il est
déliquescent et soluble dans l'eau. A dose ordinaire, il
est très bien toléré par l'estomac. On le prescrit sous
forme de pilules ou mieux en sirop. Le bromure de
nickel produit les effets ordinaires des bromures, mais
à doses beaucoup plus petites. Ainsi, la dose ordinaire
est de 5 à 7 grains et demi (0 gr. 33 à 0 gr. 46) ; dix
grains (0 gr. 66) constituent une pleine dose
L'action du bromure de nickel sur le système nerveux
se manifesterait, au dire de M. Da Costa, dans le fait que
ce sel soulage la céphalalgie, surtout quand elle est de
forme congestive, et calme les convulsions, etc. En ce
qui concerne l'épilepsie, M. Da Costa aurait trouvé quo
ce sel agit aussi bien que les autres bromures et il cite
des exemples à l'appui. Le fait que la dose de bromure
de nickel nécessaire à produire les effets désirés est tou-
jours moindre que celle des autres bromures est très re-
marquable et doit être rapportée à une action spéciale de
ce sel. Ainsi qu'on va le constater, nos essais sont
loin d'avoir été aussi satisfaisants.
OBs. I. Epilepsie idiopathique. - Desaut..., L. IL, né le
22 novembre 1835. Débuta 35 ans, à la suite d'une vive émotion
(accident de chemin de fer). Du 3 mars 1884 au 10 août, il a
pris 0 gr. 25 de bromure de nickel ; 0 gr. 50 du 10 au 20 août ;
0 gr. 75 du 20 août au 31 janvier 1885 ; enfin, un gramme
du 1 cr au 28 février 1885.
BROMURE DE NICKEL. 55
de nickel du 3 mars 1884 au 4 septembre. Durant cette période,
il a eu 159 accès et 46 vertiges. Durant la période correspon-
dante de 1883, il avait eu 82 accès et pas de vertiges, et, pen-
dant celle de 1885, il a eu 119 accès et un vertige. D'où il suit
que le bromure de nickel semble avoir exercé une action dé-
favorable.
Ons. III. Epilepsie idiopathiques Chiqu..., G. L., né
le 12 mai 1873.- 0 gr. 25 de bromure de nickel du 3 mars au
15 septembre 1884; 0 gr. 50 du 16 septembre jusqu'au
21 juillet 1885. Pendant les 17 mois de traitement on a noté
21 accès, tandis que dans les 5 mois précédents il n'y en avait
eu que six et que dans les 17 mois suivants (hydrothérapie), il
n'y en a eu que onze (août 1885 -fin 1886). En 1887 (hydrothé-
rapie), 3 accès; en 1888 (hydrothérapie), 0 accès. D'où il
ressort que le bromure de nickel semble avoir accru les accès
qui ont disparu sous l'influence de l'hydrothérapie.
OBs. IV. Epilepsie idiopathique. - Metta..., L..., né le
28 octobre 1871. 0 gr. 25 de bromure de nickel, du 3 mars
au 15 septembre 1884; 0 gr. 75, du 16 septembre au
31 juillet 1885.
Du 1er mars 1884 au 31 juillet 1sus5...., 36 accès, soit 2 accès
en moyenne par mois ; durant les six mois précédents, il n'a
eu que 5 accès, soit moins d'un par mois. Le bromure de
nickel ayant été supprimé, on a compté, dans les 5 mois sui-
vants, 8 accès, soit 1 accès 6 par mois (1).
OBS. V. Epilepsie idiopathique. Lecorn..., F.-V.,
né le 2 décembre 1866. 0 gr. 25 de bromure de nickel, du
3 mars au 31 août 1884.
56 ÉPILEPSIE.
BROMURE DE NICKEL. 57
58 EPILEPSIE.
bromure de nickel du 3 mars au 15 septembre 1884; 0 gr. 50
jusqu'au 17 janvier ; puis 0 gr. 75 jusqu'au 27 juillet 1885. En
1883, avant le traitement, 109 accès et 1 vertige; en 1884
(traitement pendant 10 mois), 123 accès ; en 1885 (traitement
pendant près de 7 mois), 160 accès et 13 vertiges. Le malade
a pris 230 r. de bromure de nickel. Le poids, qui était de
55 kilogr. 400 le 31 janvier 1884, était de 56 kilogr. 100 le
31 janvier 1885. La taille a augmenté d'un centimètre. En
somme, la nutrition ne paraît pas avoir souffert, mais le nom-
bre des accès s'est sensiblement accru.
Ons. XIII. Epilepsie symptomatique ; imbécillité.
Auberg..., Pierre, né le 12 juillet 1866. 25 centigr. de bromure
de nickel du 3 mars 1884 au 31 août ; 0 gr. 50 à partir du
1er septembre ; 0 gr. 75 du 10 au 31 janvier 1885.
BROMURE DE NICKEL. 59
60 BROMURE DE NICKEL.
nickel; les seuls effets physiologiques que nous ayons
à relever ont consisté en des nausées fréquentes, parfois
des vomissements et chez deux malades en un embarras
gastrique.
Formules. Nous avons employé un sirop renfer-
mant 0 gr. 25 de bromure de nickel pour une cuillerée
à soupe. Voici les formules de M. Da Costa :
PERVERSION DES INSTINCTS.
V.
Imbécillité légère. Instabilité mentale
avec perversion des instincts et impul-
sions génitales.
( KLEPTOMANIE, ONANISME, SODOMIE, SYPHILIS );
Par ]80tJttI]E][)L]L t : t BAOULT.
OBSERVATION. - Grand-père paternel alcoolique. - Cousine pater-
nelle idiote et épileptique. - Mère nerveuse, névralgies, céphal-
algies. - Grand'mère maternelle, paralysie faciale. - Tante ma-
ternelle et arrière-grand-père aliénés. - Frères et sreurs morts
de convulsions. - Pets de consanguinité. - Inégalité d'(tge d'un an.
Impression maternelle. - Hémorrhagie du cordon. - Parole et
marche vers dix-huit mois. - Incontinence d'urine jusqu'à quatre
ans. - Défécation involontaire jusqu'à douze ans. - A/Tét de
développement intellectuel. - Instabilité mentale. - Lymphatisme,'
salacité. - Idées de moquerie. - Actes de violences envers les
autres enfants. - Mise en correction. - Tremblement léger des
mains. - Crises nerveuses, épileptiques (1). - Accès de colère. -
Impulsions génitales.
Etat du malade en 1881. - Nystagmus; léger tremblement des
paupières; hypospadias. - Sodomie : syphilis; balano-postltÍte;
adénite suppurée.
Evasion; réintégration. - Caractère violent, grossier. - Ona-
nisme, actes et paroles obscènes; pédérastie. - Kleptomanie. -
Plaie de la cuissc; érysipèle, phlegmon. - Développement du
poids, de la taille, de la puberté. - Excès. - Actes de violences,
placements divers, impulsions génitales pendant sa mise en liberté.
- Réintégration. - État au commencement de 1887.
Court... (Charles), né le 28 janvier 18G7, est entré le 2r juin L881
à l'Hospice de Bicêtre (service de M. Boowewt).
Renseignements fournis par samère. Père, trente-six ans, garde
républicain, grand, fort, bien portant d'ordinaire, sans aucuti
IiULn\E'1LLE, 1888. O
6.) IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE.
accident nerveux; rhumatisant. [Père, nombreux excès de bois-
son, surtout d'absinthe et d'eau-de-vie. Mère, d'habitude bien
portante a seulement des douleurs rhumatismales; elle est ner-
veuse mais n'a jamais eu d'attaques. Grand-père, mort d'un
cancer delà face. Cousine, idiote épileptique, gâteuse, morte en
1880, âgée de 36 ans, à l'Asile de Dole. Pas d'aliénés, pas
d'autres épileptiques, ni de paralytiques, etc., dans la famille.]
Mère, trente-cinq ans, assez grande, brune intelligente ; se plaint
de névralgies intercostales, sujette de temps en temps à des céplwl-
algies. Pas de migraines,pas d'attaques nerveuses. [Père, soixante-
six ans, cultivateur, n'a jamais eu d'accidents nerveux et jouît
d'une bonne santé. Mère, a eu il y a trois ans une paralysie faciale
unilatérale, qui persiste, à la suite d'un voyage, durant lequel elle
aurait eu froid. 3 soeurs dont l'une, aliénée, est à l'Asile de Dôle
depuis 4 ans (lypémanie avec hallucinations, idées d'empoisonne-
ment). Cette femme a un fils jusqu'ici bien portant. Un grand-
père serait devenu fou au dire de la mère de l'enfant. Pas d'au-
tres aliénés, pas d'épileptiques, etc., dans la famille.] Pas de con-
sanguinité.
Sept enfants : 1° garçon, né avant terme (forceps), mort à
deux jours après avoir eu quelques convulsions ; 2° fille morte à
trois ans de convulsions; 3° notre malade ; 4° garçon né
à terme, chétif, mort à six semaines on ne sait de quoi ;
5° garçon âgé de onze ans, bien portant, n'a jamais eu de convul-
sions, intelligent; 6° garçon mort à l'âge de huit jours;
7° fille bien portante, intelligente, âgée de six ans et demi pas de
convulsions.
Notre malade. La grossesse a été accompagnée de maux de
reins très douloureux. Durant tout ce temps la mère habitait la
même maison que sa cousine idiote et épileptique. Celle-ci venait
sans cesse la trouver en poussant des cris. C'était toujours avec
déplaisirqu'elle la voyait, et elle craignait de contrarier ses parents
en larepoussant. Pendant les autres grossesses, les mêmes faits ne se
seraient pas présentés. Accouchement à terme, naturel, sans chloro-
forme '. Rien de particulier <i la naissance si ce n'est une hémorrhagie
abondante du cordon qui avait été mal lié, et qui s'est produite
une heure après la délivrance. L'enfant a été élevé au sein par sa
mère jusqu'à neuf mois seulement, elle a été obligée alors de
cesser parce qu'il était fort et la fatiguait beaucoup. C... a com-
mencé à parler et k. marcher à l'âge de dix-huit mois. Mais ce
n'est qu'à deux ans qu'il a réellement parlé. A quatre ans, il
Nous avons toujours eu soin de noter ce détail, parce que des auteurs
ont pensé, a tort suivant nous, que l'administration du chloroforme pen-
dant l'accouchement exerce une influence au point de vue de la pro-
duction de l'idiotie. (B.)
INSTABILITÉ MENTALE. 63
cessa d'uriner au lit ou dans son pantalon, mais jusqu'à douze
ans il a toujours laissé aller sous lui ses matières fécales. A quatre
ans il fut envoyé à l'école où il apprit difficilement à lire et à
écrire et d'où il fut renvoyé à différentes reprises. De quatre à
sept ans il fut placé à l'asile de Mont-sous-Vaudrey : on le ren-
voya parce qu'il était sale, turbulent, agaçait ses camarades, fai-
sait des grimaces et des contorsions. Deux fois il s'est enfui de
l'école, mais il rentrait deux heures après.
A dix ans, il fut placé aux enfants de troupe à Argentan. Il y
resta onze mois. Au bout de ce temps on le renvoya, parce qu'il
faisait encore sous lui. Là, lorsqu'il avait été sale, on le faisait
déshabiller et les autres enfants allaient, sur l'ordre de leur gar-
dien, lui donner chacun un coup de martinet. Puis il était mis au
cachot, au pain et à l'eau.
Ensuite il alla chez un oncle dans le Jura, il y resta deux
mois : il avait, dit sa mère, mis toute la ville en révolution
par ses excentricités. Il injuriait tout le monde, criait, accusait
son oncle de le battre. Il fut alors pris par son grand-père pater-
nel, qui le garda six semaines; là il eut de grandes crises pour la
première fois, crises qu'un médecin aurait qualifiées d'épileptiqztcs.
Revenu à Paris, il retourna à l'école, puis fut placé en appren-
tissage chez un cordonnier. Il y resta peu de temps, il perdit pour
soixante francs de marchandises à son patron : quand on l'en-
voyait faire des commissions, il ne revenait que le soir. Il fut mis
chez un autre cordonnier où il ne resta que trois ou quatre jours,
puis chez un robinetier qui ne le garda que deux jours. Partout il se
montrait maladroit et ne pouvait supporter aucune observation,
croyant qu'on se moquait de lui. Dans l'intervalle de ces essais d'ap-
prentissage il restait chez ses parents où il faisait les commissions.
En janvier 1881, il fut chassé de la caserne parce qu'il avait
battu des enfants de quatre à six ans, il les bousculait sans motif,
leur disait des grossièretés. Placé chez sa tante il y est resté trois
semaines, il faisait du tapage, criait. Il fut mis chez des amis qui
ne le gardèrent qu'un mois et demi. Plus tard il fut envoyé à
Villepreux où il resta six semaines et d'où il fut rendu, parce
qu'il s'était masturbé avec d'autres enfants. Ensuite, il entra en
correction à la petite Roquette ; il y est resté un mois, il s'v trou-
vait bien traité. A sa sortie des Jeunes Détenus, il fut placé chez
un marchand de vins : il donnait à boire aux clients sans se faire
payer; il laissait tomber les bouteilles qu'il tenait à la main' à
cause du léger tremblement dont il est atteint. 11 n'aurait pas eu
d'accès d'épilepsie depuis son retour de llont-sous-Vaudrey; mais
il était sujet à des crise* nerveuses pendant lesquelles il étend les
bras, crie, à les yeux saillants, et qui ressemblent plutôt à des
accès de colère; il ne tombe pas par terre. Souvent, C... ne voulait
pas faire certaines choses, prétendant qu'on se moquait de lui. Il
64 IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE.
n'a guère d'afléctioirque pour sa mère; il déteste son père qui
bien des fois l'a corrigé. Ses accès de colère le prenaient quand il
était contrarié et surtout quand on le battait.
Sa mère pense qu'à la maison il ne se masturbait pas. On a
prétendu à la caserne qu'il avait essayé d'avoir des rapports avec
une petite fille de six ans; il n'a jamais essayé d'en avoir avec
sa soeur.
Cour... était indifférent à tout, se moquait des reproches qu'on
lui faisait. Si on l'envoyait faire une commission, il se trompait,
ne rendait pas compte de l'argent qu'on lui avait donné, il laissait
la monnaie chez le marchand, on était obligé de lui écrire les
commissions à faire. Le sommeil est assez bon et lourd. C...
s'endort de suite, il est difficile à réveiller. Il n'est pas peureux et
ne semble pas se rendre compte du danger. Il mange seul, mais
malproprement; pas de vomissements, pas de salacité : à l'âge de
six ans on l'a vu toutefois à plusieurs reprises manger des escar-
golfs vivants.
A quatre ans, une scarlatine, avec otite consécutive ; à huit ans,
rougeole. Pas d'autres maladies, sauf quelquefois des croûtes
dans les cheveux avec des adénites cervicales et un écoulement
léger de l'oreille gauche.
Etat actuel. Tète assez forte, haute, en forme de toit, sans
saillies exagérées. La région occipitale est aplatie. Inclinaison
très rapide, du vertex au front. La bosse pariétale gauche semble
plus proéminente et située plus en arrière que la droite. - Front
bas, déprimé latéralement, sans saillie des bosses frontales.
Saillie assez prononcée des arcades sourcilières. -- Léger nys-
tagmus et léger tremblement des paupières; pas de strabisme; iris
brun, pupilles égales; cils longs, pas de lésions oculaires. Régions
malaires symétriques, cependant la joue gauche est un peu plus
creuse que l'autre. Ne ? assez volumineux, aquilin. Narine gauche
un peu relevée. Menton en pointe, à fossette un peu déprimée à
gauche. - Face triangulaire. - Regard terne, sans expression.
Diamètre occipito-frontal... 17 centimètres.
Diamètre transverse 14 centimètres.
Circonférence horizontale... ;i3 centimètres.
heures épaisses; arcade dentaire inférieure complète, régulière.
Au niveau de l'arcade dentaire supérieure, les deux incisives laté-
rales manquent, les incisives médianes sont larges et séparées
l'une de l'autre par un intervalle de deux millimètres; entre elles
et les canines existe aussi un espace. Voûte palatine profonde,
ogivale, symétrique. Luette, piliers, amygdales, langue nor-
maux. Fonctions digestives normales. Rien du côté de la
respiration, de la circulation, ni du coeur.
Cheveux châtains, abondants, sourcils et cils un peu plus foncés.
Le corps est complètement glabre.
INSTABILITÉ MENTALE; SODOMIE. 6§
Organes génitaux et puberté. Poils naissant au niveau des
organes génitaux. Testicules descendus. Verge assez volumi-
neuse. Le gland est en partie découvert. Le méat semble s'ouvrir
au sommet du gland mais en l'entr'ouvrant, on remarque qu'il
est ouvert à la face inféro-postérieure un peu en bec de Ililte
(hypospadias). La partie antérieure du sillon est un trou borgne.
Sensibilité générale normale.- Réflexe tendineux à peu près nul.
- Odorat, légère perversion, ainsi il trouve que l'asa-foetida sent
bon. Vue, ouïe et goût normaux.
La parole est libre, relativement facile avec un léger zézaiement.
Il lit bien, écrit assez facilement, sait ses quatre règles, le sys-
tème métrique. L'orthographe est assez bonne.
Dynamomètre à droite, 33, à gauche 32. Poids : 44 kilogr. 700.
Taille 4 ? 48.
1881. Six jours après son entrée, il a été pris masturbant un
enfant : envoyé vingt-quatre heures à la Sûreté'. Il est peu
docile à l'école. lise développe bien. A la fin de juillet : poids,
44 kil.85; taille, 1 ? i0.
1 cr octobre. - L'enfant avoue avoir eu des rapports n posteriori
avec un infirmier renvoyé il y a quatre jours pour sodomie
exercée sur plusieurs autres enfants de la section. L'enfant pré-
tend que ces rapports n'ont eu lieu pour la première fois que le
2 : i septembre. Certainement ils ont dû être commis déjà aupara-
vant, car l'enfant présente à la région anale une exulcération de
la largeur d'une pièce de 0 fr. : i0 allongée entourée d'une plaque
d'érythème de la largeur d'une pièce de francs. Le sphincter est
resté intact. Voici, d'après ce que raconte C..., comment les
choses se sont passées. Vers 11 heures et demie du soir le garçon,
rentrant de permission, se déshabillait au dortoir lorsque l'enfant
revint des cabinets ; il le prit à bras le corps, et le coucha dans
son lit. D'après ce que dit C..., sur trois tentatives une seule fut
couronnée de succès. Il ne resta qu'un quart d'heure dans le lit
du garçon ( ? ). Quinze jours auparavant, ce dernier aurait essayé
d'avoir des rapports avec lui dans les circonstances suivantes : il
était monté pour changer de linge au dortoir, quand il fut tout nu
l'infirmier sortit sa verge et l'embrassa. Cet individu donnait à
C... et aux enfants, du chocolat, du fromage, des fruits, etc. C...,
pour s'excuser, dit que c'est par crainte qu'il n'a pas dénoncé la
première tentative, l'infirmier menaçant les enfants de les battre
s'ils en parlaient.
13 octobre. L'ulcération anale s'améliore peu, elle est entourée
d'une vive inflammation surélevée et ressemble à une plaque
muqueuse. Douleur vive.-Traitement : onguent styrax, cautérisa-
tion au nitrate d'argent.
11 n'y a pas de cellules on de chambre d'isolement dans la section.
(j(Í IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE.
14 octobre. Suppression du nitrate d'argent, rien au cuir
chevelu. Polyadénite inguinale.
21 octobre.- Roséole à l'état naissant. L'ulcération anale a tou-
jours le même aspect, elle est peu indurée. Erythème de la gorge.
4 novembre. Quelques croûtes dans les cheveux. Pâleur très
prononcée. Une petite ulcération à fond jaunâtre sur l'amygdale
droite. L'éruption papuleuse a augmenté. Quelques petits gan-
glions dans les aines. Syphilides plus nombreuses à la partie
antérieure du tronc qu'à la face postérieure. La plaque végétante
de l'anus a environ quatre centimètres de diamètre, elle occupe
la moitié droite de l'anus dans ses deux tiers inférieurs. Une
autre plaque végétante existe du côté gauche. Traitement :
pilules de Sédillot, sirop d'iodure de potassium, vin de gentiane,
cautérisation des plaques muqueuses avec une solution de nitrate
d'argent à 1/30.
14. Pas de croûtes dans les cheveux ; petites adénites cer-
vicales ; larges plaques muqueuses sur les deux amygdales. -
L'éruption cutanée a un peu diminué; les papules sont moins
nombreuses. Les plaques anales s'améliorent ; la défécation est
moins douloureuse. Même traitement; gargarisme au chlorate de
potasse.
2. La peau reste marbrée; les adénites inguinales persis-
tent. La marge de l'anus présente toujours une ulcération végé-
tante, surélevée, d'un rose clair, baignée par un peu de pus
sanieux, blanchâtre. Il n'y a plus rien à la gorge.
27.- A la surface du tronc et sur les cuisses, éruption dis-
crète de papules arrondies, un peu surélevées, de teinte chair de
saumon. Cette éruption est plus accusée à la partie antérieure de
la poitrine, qu'en arrière. Sur l'amygdale gauche, petite plaque,
2 déc. Pas de croûtes dans les cheveux. Quelques ganglions cer-
vicaux. Quelques macules sur la peau. Les plaques muqueuses de
l'anus ont bien diminué d'étendue. Petite plaque muqueuse
opaline sur l'amygdale droite. C... continue toujours à se mas-
tnrber, et à exciter les autres à la masturbation.
13. Il continue à attirer près de lui les autres enfants, les
embrasse, et cherche à les toucher et à se faire toucher par eux.
Il est insolent, méchant, se mêle à toutes les discussions entre
les enfants. A l'école, il est dans la première classe, mais fait
peu de progrès.
1882. 6 janvier. La veille, il s'est couché avec mal de tête,
frissons, courbature, raideur du cou. Ce matin il présente des
plaques d'un aspect rubéolique sur la face ; les bras, le dos, et
surtout les jambes, Pas de bronchite, ni de coryza, ni de lar-
moiement. Rougeur de la gorge, niais à peine marquée. Déglu-
tition un peu douloureuse. Langue saburrale. Rien à l'auscultation
INSTABILITÉ MENTALE; SYPHILIS. 67 1
de la poitrine. Soif, anorexie, diarrhée. Traitement : infusion
de 4 grammes de jaborandi ; limonade vineuse. T. R. 40°, 2.
Soir : T. R. 390, 2.
7. Les plaques ont presque disparu; il n'en reste que quel-
ques-unes dans le dos, et sur les avant-bras. Un peu de desqua-
mation à la face. T. R. 38°,2. Soir : T. R. 39°.
8. T. R. 38°, 5. Soir : T. R. 38°, 6.
9. T. R. 38°, 4. Soir : T. R. 38°.
10. Encore quelques rougeurs sur les avant-bras ayant l'as-
pect de la roséole syphilitique. T. R. 38°. Soir : T. R. 38°, 8.
13. Syphilides des lèvres en diminution. Petite plaque mu-
queuse sur le pilier antérieur droit du voile du palais. Stomatite
mercurielle. Grandes plaques de roséole sur les lèvres, les régions
scapulaires ; aspect marbré de la poitrine; quelques plaques
dans le sillon interfessier. Quelques croûtes dans les cheveux.
Syphilides anales ulcérées, persistantes (plaque muqueuse hyper-
trophique). - Traitement : suppression des pilules de Sédillot, à
cause de la stomatite sirop d'iodure de fer; douches; chlorate
de potasse; cautérisation au nitrate d'argent.
17. Cautérisation des plaques de la gorge. Même état de la
gingivite. Les syphilides de la face diminuent d'étendue.
27. Syphilides pustulo-crustacécs, très confluentes du cuir
chevelu ; syphilides squameuses cuivrées, par larges plaques sur
le front, le pourtour des narines, les commissures palpébrales,
le menton. Rien sur le tronc. Sur les bras, syphilides papulo-
squameuses, surtout près des coudes. Papules de 8 millimètres
de diamètre avec collerette. Plaques muqueuses ulcérées de
5 millimètres de diamètre environ à la face interne de la joue
gauche, au niveau des dernières molaires, sur la lèvre inférieure,
en dedans de la commissure et sur la lèvre supérieure en face de
la canine gauche. D'autres plaques muqueuses sur la voûte pala-
tine en arrière de la dernière molaire gauche, sur la luette et sur
les amygdales. Paroi postérieure du pharynx rouge. Gencives fon-
gueuses, saignantes, avec un liséré rouge. Les syphilides anales
persistent; syphilides papuleuses du scrotum.
2 février. La bouche va mieux. A la suite de masturbations
énergiques, l'enfant a été pris d'une balano-posthite intense, avec
oedème du prépuce. Injections entre le gland et le prépuce
avec de l'eau phéniquée, puis du vin aromatique.
10 zttctrs. - Rien au cuir chevelu. Adénites cervicales. Papules .
brunâtres sur les bras, les avant-bras, le tronc, les membres infé-
rieurs. Elles prédominent entre les seins et à la face interne des
genoux. Petites adénites inguinales. Gingivite encore assez pro-
noncée, haleine fétide. Ulcération superficielle sur la face interne
de la joue gauche entre les deux arcades dentaires ; langue
gonflée ; ulcération superficielle du pilier antérieur droit du voile
(38 IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE.
du palais ; le reste du voile est rouge, comme oedém ? lié. Exulcé-
ration de la partie inférieure du gland et dans le sillon balano-
préputial. Syphilide fissurée à l'anus. Même traitement; cautérisa-
tion à l'acide chlorhydrique.
17.-Amélioration notable de la stomatite etde la balano-posthite.
28. La balano-posthite est guérie. Hier C... a volé à un autre
enfant une tablette de chocolat et bien qu'on en trouve la moitié
encore dans sa poche, il nie son vol. A la suite de cette décou-
verte, il a été pris d'un accès de colère, a cassé deux carreaux à
coups de poing, et fendu une porte à coups de pied, adressant en
même temps des expressions obscènes aux infirmières, et mena-
çant de poursuivre ses dévastations. On le prive de vin et on
l'envoie à la Sûreté pendant vingt-quatre heures.
13. Guérison complète de la bouche et de la gorge. C... re-
tourne en classe.
21. Adénite axillaire douloureuse.
29. Fluctuation au niveau de l'aisselle : incision, drainage.
Mai. - Les notes de classe sont meilleures : C... devient docile,
attentif, la lecture est bonne ainsi que l'écriture. Mémoire assez
facile.
16. -Il existe encore de l'alopécie, plusieurs taches brunâtres
dans les cheveux ; quelques ganglions cervicaux ; une légère éro-
sion du pilier antérieur gauche du voile du palais, deux rhagades
à l'anus. Traitement : Continuer le sirop d'iodure de fer et les
douches.
7 juin. C... s'est enfui le 4 juin avec six autres de ses cama-
rades. L'un d'eux Filh..., ayant été puni avait formé le projet de
s'évader; il avait entraîné dans son complot, Court... ainsi que
Fer... et Auch... Après le diner ils ont préparé des échelles pour
s'enfuir. A ce moment Lem... et Goux... sont venus les rejoindre
et plus tard Gauh... qui était couché dans la cour, les apercevant
est venu avec eux. Après être sortis, ils se sont séparés en deux
bandes. La première composée de Filh..., Auch..., Ferr... et Cour-
tois a traversé Paris, est allée à Pantin chez le parrain d'Auch...
qui l'a gardé, et a renvoyé les trois autres. Ceux-ci ont pris le
tramway car ils disposaient à eux trois de deux francs. Ils sont
allés chez le père de Ferr..., se sont cachés dans une cave où ils
auraient passé la nuit. Le lendemain matin, le père de Ferr... les
a trouvés, a gardé son fils et renvoyé les deux autres. Ceux-ci ont
bu du vin chez le « troquet », acheté du pain et fumé des ciga-
rettes. Ils se sont séparés boulevard Sébastopol. Alors Court...
serait allé chez son père qui l'aurait fait manger puis lui aurait
intimé l'ordre de rentrer à Bicêtre. Il est revenu seul le ;i à une
heure.
17. Aujourdhui il avoue qu'il a menti, qu'il n'est pas allé
chez son père, mais est revenu spontanément â l;ic8lre.
INSTABILITÉ MENTALE ; IMPULSIONS GÉNITALES. 69
2o juillet. Refuse de travailler au dortoir, sous prétexte que
sa mère le lui a défendu.
26 ? Injures grossières contre ses maîtres. Privation de vin
et de promenade.
31 août. Quelques ganglions cervicaux et inguinaux. Rien aux
organes génitaux, ni dans la gorge.
22 novembre. Encore quelques ganglions cervicaux à gauche.
Aucune syphilide. Prend régulièrement ses douches.
D'après les notes de classe, Court... se montre assez intelligent,
mais est très emporté, colère, grossier; son jugement est
erroné. 11 travaille assez bien, devient plus docile. Il fait des pro-
grès en gymnastique. Le développement physique s'opère régu-
lièrement. Le poids de Cour ? qui était de 44 kilog. 700 à l'entrée
est actuellement de 51 kilog. 80. Sa taille de lm48 en 1881, est à
la fin de 1882 de III, 55. Il a cessé les douches le 30 novembre.
1883. -- 2 janvier. Frisson violent avec fièvre. T. R. 40°, 7.
Soir : T. R. 38°, 5.
3. T. R. 37°, 7. Soir : T. R. 41°.
4. Langue sale, nausées. Rate grosse. Rien à l'auscultation
de la poitrine. T. R. 38°, 1. - Traitement : Eau de sedlitz; sulfate
de quinine, 1 gramme. Soir : T. R. 37°, 2.
5. - T. R. 3J°, 3. -Soir : 38°, 4.
6. T. R. 37°, 3. Soir : 37". Langue toujours sale; pas de
selle depuis la purgation ; deux verres d'eau de sedlitz.
7. - Amélioration, appétit. T. R. 3în, 2. - Soir : T. R. 37°.
Exeat le 8 janvier.
9 juillet. - Court... est en punition à l'infirmerie, faute de cellules
et par manque de places à la Sûreté pour avoir battu des enfants
plus jeunes que lui. Selon son habitude, Court... est allé dans les
cabinets avec Rem... et Vign... et a essayé d'avoir des rapports a
posteriori avec le premier.
22 août. Pas d'accidents syphilitiques nouveaux. Verge volu-
mineuse ; testicules bien développés. Masturbateur effréné ; il dit
qu'il ne peut s'en dispenser. On est obligé de lui mettre le manchon
la nuit. Traitement : Hydrothérapie qui a commencé au mois
d'avril et se continuera jusqu'au mois de février 1884.
26 décembre. Les notes de classe nous apprennent que Court...
s'est amélioré, qu'il est moins emporté, qu'il devient courageux et
docile. De même, au point de vue physique, il s'est développé; son
poids a augmenté de 9 kilogrammes (60 kilogr. 900) en un an et sa
taille de 8 centimètres CI m. 63). Au dynamomètre Mathieu : «
3 : i kilogrammes à droite et 20 à gauche.
Puberté. Il porte de nombreux poils noirs frisés abondants
au pénil, à la racine des bourses, à l'anus. Il avoue se masturber
mais moins fréquemment.
70 IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE.
1884. 27 février. Eruption pustulo-crustacée au visage qui
disparait vers le milieu d'avril sans traitement général.
3 avril. On lofa pris la main dans la braguette d'un enfant. 0 n
l'interroge et il répond qu'il demande à passer aux adultes, qu'il
ne peut rester aux enfants et qu'avec eux <t il no pense qu'à ça ».
Depuis quelque temps, on était assez content de lui, de son travail
et de sa conduite. Il a obtenu le certificat d'études primaires, il
commence à apprendre sérieusement son métier de cordonnier.
Décembre. Les notes de classe et d'atelier sont bonnes ;
l'écriture devient courante. A la gymnastique, il est docile et est
moniteur d'un groupe d'idiots. 11 fait presque seul un soulier.
1883. Janvier. La taille a augmenté de deux centimètres
(ln,G5) en un an. Il présente des moustaches naissantes. Il a l'in-
tention de s'engager comme soldat.
6 mari. - Ses parents ont rempli les formalités nécessaires pour
son engagement. Refusé à la revision parce qu'il a un léger trem-
blement des paupières.
2,1 juillet. II est souvent brutal avec les enfants, surtout à la
gymnastique où il est moniteur. Hier il a bousculé l'enfant Carl...
qui ne voulait pas se mettre en rang. Les impulsions génitales ont
diminué. Il ne met plus les autres enfants sur ses genoux pour
s'entre-masturber. Parfois encore il lui arrive d'embrasser, en le
mordant légèrement à la nuque, l'enfant Leu... Lorsqu'il bruta-
lise les autres, ceux-ci lui disent des injures et font allusion à ses
anciennes histoires.
36 août. - Hier, ayant été privé de vin pour avoir fumé, C... a
cassé son verre à boire, puis trois carreaux et s'est blessé légère-
ment à l'avant-bras. Consigné pour deux mois; huit jours à la
Sûreté.
45 octobre. - Accès de violence parce qu'on l'avait fouillé pour
trouver le tabac qu'il cachait. Il a dit des grossièretés et a refusé
de travailler.
30 novembre. Embarras gastrique avec courbature.
'14 décembre. Il y a quatre jours les enfants étant réunis au
gymnase le soir, à une séance de lanterne magique, C... a attiré
l'enfant Leu..., l'a embrassé, l'a masturbé et s'est fait masturber
par lui. Il continue à embrasser les autres enfants. Il assure ne pas
avoir de rapports sodomiques ( ? ).
Puberté. La moustache est encore naissante. Les poils com-
mencent à gagner la partie interne des cuisses et sont abondants
à l'anus. Les testicules, égaux, sont de la dimension d'un gros
oeuf de pigeon. La verge a 95 mm. de circonférence et 75 mm.
de longueur. La taille n'a pas augmenté depuis l'an dernier(l ? 65),
mais le poids est de 5 kilogrammes en plus (64 kil.) (janvier 1886).
Au dynamomètre 55 des deux côtés.
INSTABILITÉ MENTALE. 71
1886. 10 janvier.- C... avoue avoir volé 25 francs à ses parents,
lors de sa dernière sortie et les avoir dépensés avec des amis et
des femmes.
4 février. C... se plaint de faiblesse générale et de maux de
tête; remis après quelques jours de repos.
24 juin.- Il travaille à la cordonnerie où on est content de lui,
et va à l'école des adultes'. Son caractère devient meilleur, il est
poli; pas de plaintes, ni d'impulsions.
10r décembre. - C... s'est piqué il y a quatre jours avec une
alène, à la partie supérieure et externe de la jambe gauche.
2. Plaque érysipélateuse s'étendant depuis la plaie jusqu'à la
partie moyenne du mollet. Inappétence.
4. - La jambe est très enflée; la rougeur érysipélateuse qui a
disparu au-dessus du genou, s'étend de la partie supérieure du
creux poplité jusqu'au tiers inférieur de la jambe. Douleurs vives
la nuit avec élancements. La palpation est très douloureuse au
niveau de la saphène externe, surtout vers la malléole externe;
langue sale, anorexie, nausées. Pouls rapide. Traitement : appli-
cation d'onguent mercuriel; eau-de-vic allemande 15 grammes;
sirop de morphine ; sulfate de quinine.
6. P. 88. Aspect général meilleur, C... mange avec assez
d'appétit. La jambe est tuméfiée; l'empâtement s'est étendu de
haut en bas. La peau a toujours une teinte érysipélateuse, pas de
bourrelet; phlyctène. La jambe est moins douloureuse; à la pal-
pation, sensation de fausse fluctuation. Deux incisions sont faites
à la partie interne et à la partie externe de la jambe jusqu'à l'apo-
névrose. Il ne sort pas de pus; mais le tissu cellulaire sous-cutané
est infiltré, dur, lardacé. Pansement phéniqué.
7. La température est toujours élevée. L'état général reste le
même. On trouve un peu de pus dans la partie interne de la
plaie qu'on fait sourdre par la pression. Le pus siège évidemment
sous l'aponévrose celle-ci est incisée et laisse écouler une grande
quantité de pus. Drainage; pansement phéniqué.
10. Pas de fièvre, la douleur a disparu, la peau ne se recolle
pas.
12. La fièvre reparait ainsi que la douleur de la jambe. Rou-
geur et douleur à la pression au niveau du creux poplité. Issue
abondante de pus.
14. Fièvre. Etat général mauvais. Douleurs vives et empâte-
ment au niveau du creux poplité.
15. On chloroformise le malade, le sommeil se produit facile-
ment sans période d'excitation. On constate qu'il existe un clapier
rempli de pus au niveau du creux poplité, et un décollement se
dirigeant en bas vers le tiers inférieur de la jambe, profond et
1 J'avais alors organisé des cours pour les épileptiques adultes(B.).
72 IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE; IMPULSIONS GÉNITALES.
long de 25 centimètres environ. On fait une contre-ouverture au
niveau du premier, mais on ne peut le faire pour le second,
qu'on se borne à drainer. Au bout de vingt-cinq minutes, le
malade se réveille. Il est loquace, parle avec vivacité et même une
certaine éloquence. Il demande qu'on l'achève « pour qu'il puisse
aller rejoindre ses vieux camarades, dont il a vu la tête au
musée, etc. ».
23. Un peu de diarrhée, coliques assez violentes. Potion avec
extrait thébaïque.
26. Guérison complète du phlegmon de la jambe.
1887. Janvier. - A l'école, C... devient plus docile. Il travaille
assez bien à la cordonnerie. 11 est toujours emporté mais plus
poli. Poids : 64 kil. 200 ; taille : {m,61 : i.
Puberté : Moustache assez fournie, duvet assez abondant sur les
joues; bouquet de poils de chaque côté du menton. Poils moyen-
nement abondants sous les aisselles; poils très rares autour des
seins. Rien sur la poitrine ni sur le ventre. Poils longs, châtains,
bouclés, abondants sur le pénil et à la racine des bourses. Quelques-
uns seulement sur les aines et à la partie supérieure des cuisses.
Verge : circonférence 9b millimètres; longueur 95 millimètres.
Gland découvert. Testicules du volume d'un petit oeuf de poule.
Poils assez abondants à l'anus et à la partie inférieure des fesses.
Février. Quoique étant aux adultes, il continue venir tra-
vailler à l'atelier de cordonnerie des enfants. Le b avril il quitte
son atelier dans l'après-midi, vers une heure et demie, et entraîne
le petit Via... dans les cabinets et le déculotte. Il y a quelques
jours, il a fait des propositions du même genre à un autre
enfant. Ces impulsions génésiques ne s'étaient pas manifestées
depuis longtemps. Il cherche le plus possible à rester avec les
enfants; mais il ne se précipite plus sur eux comme autrefois,
pour les embrasser jusqu'à les mordre aux joues et au cou.
21 avril. xi. Féré, qui a pris le service des adultes au mois de
février, renvoie C... Il rcvient nous voir à ce moment, il cherche
à s'occuper non comme cordonnier, mais comme homme de
peine.
Puberté. - Moustaches fines, assez fournies; un bouquet de
poils de chaque côté du menton; duvet peu abondant aux joues.
Poils moyennement abondants sous les aisselles; une dizaine
autour des mamelons. Rien sur la poitrine ni sur le ventre. Poils
longs châtains, bouclés, abondants sur le pénil et à la racine des
bourses; quelques-uns seulement sur les aines et il la partie supé-
rieure des cuisses. La circonférence de la verge et sa longueur
sont de 9b mm. Gland découvert. Bourses rétractées. Testicules du
volume d'un petit oeuf de poule. Poils assez nombreux à l'anus et
à la partie inférieure des fesses.
6 juillet. Nous voyons la mère du malade ; elle nous raconte
INSTABILITE MENTALE. I.i ,">
que son fils n'a pu rester à la caserne où son père est maréchal
des logis, parce qu'on l'en avait expulsé jadis (à quatorze ans).
Elle l'a placé chez sa soeur à Montreuil ; il faisait les commissions
de sa tante. Il lui arrivait parfois de refuser de se lever et de
l'aider aux soins du ménage. Il battait les poules, les enfermait
dans la cave, adressait des injures à sa tante. Il avait là deux
cousines, l'une de vingt, l'autre de vingt-un ans, il n'a pas essayé
d'avoir des rapports avec elle, et il n'a pas même, dit-il, été tenté
d'en avoir. Celles-ci le craignaient, le fuyaient, car il les insultait.
Il cachait les objets appartenant à sa tante, pour le plaisir de la
faire chercher. Une de ses cousines a prétendu qu'il lui avait volé
une bague, ce qu'il nie formellement. Cette histoire l'aurait fait
renvoyer par sa tante. Cette dernière a dit à sa mère, qu'il pas-
sait son temps fréquemment dans le bois de Vincennes, et elle
croit qu'il était accompagné d'une femme. Quant à lui, il nie ce
fait, et prétend qu'il allait dans les bois pour lire, dessiner, et
qu'il était toujours seul.
De Alontreuil, il est revenu à Paris; sa mère a tenté de le gar-
der près d'elle, essayant en même temps de le placer. Dans toutes
les maisons de cordonnerie, où l'avait envoyé son chef d'atelier
de Bicêtre, il n'a pu entrer, car il n'avait pas les capacités pro-
portionnées à ses prétentions Il a ensuite cherché une place de
garçon marchand de vins ; il a échoué, parce qu'il n'avait pas de
certificat; il en a été de même pour des emplois de courtier,
d'homme de peine. D'après sa mère, on ne peut lui conGeraucun
paquet, il l'oublie, où le laisse sur un banc, ou sur l'omnibus.
Elle prétend qu'en trois ou quatre endroits, où il a été présenté
pour faire des courses, on en a pas voulu, « quand on a vu la
façon dont il tourne les yeux ». Pendant tout ce temps il est allé
plusieurs fois avec des femmes. Il nous dit lui-même : « Quand je
suis libre, que j'ai de l'argent, je vais avec des femmes; mais
quand je suis renfermé, je suis porté pour les petits garçons.
Néammoins, cette excitation a bien diminué. » Pourtant sa mère
nous dit qu'il embrasse toujours violemment les enfants.
Sa mère se décida à l'envoyer à l'Orphelinat de Saint-Fiacre,
près de Meaux, où on le prit à l'essai, pour le faire travailler à la
terre. Le directeur en avait fait un moniteur, et lui avait confié
vingt enfants, il s'est fait masturber par trois ou quatre d'entre
eux, mais il nous assure n'avoir pas essayé de se livrer sur eux,
à des actes de pédérastie. Les enfants questionnés ont fait des
aveux, et il a été renvoyé le 26 juin. Depuis ce temps sa mère le
loge dans une petite chambre de la rue Geollroy-Lasnier. Il se
'Il est difficile de faire comprendre aux parents que leurs enfants, étant
des malades, sont au-dessous des apprentis ordinaires. De là, des
obstacles à leur placement.
74 IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE.
lève tard, sous prétexte qu'il est fatigué, et il ne fait rien ; il reste
dans les escaliers, sans se préoccuper s'il gêne le passage, ce qui
fait crier les voisins; ou bien il s'assied sur le trottoir, rassemble
des enfants autour de lui. Il nie ce fait, et nous assure ne s'être
porté sur aucun enfant à des « actes malpropres mais il aime
toujours à les embrasser. Sa mère craint qu'il ne se rende cou-
pable de quelque délit contre les moeurs. La logeuse trouve qu'il
est malade, indolent, et que souvent il répond d'une façon inco-
hérente. 11 ne fait rien, cherche de l'ouvrage, aux Halles, à la
voirie, au débardage, dans plusieurs hôpitaux, et ne peut rien
trouver. Son linge est toujours taché, dit sa mère; si on lui en
fait la remarque, il répond qu'il ne peut faire autrement. Il est
insolent, grossier à la moindre observation.
Il porte quelques ganglions indurés dans les aisselles et dans les
aines, et quelques taches pigmentées à la région lombaire gauche.
Taille : 1 il, 67 ; poids : 60 kilogrammes.
Il juillet. Rentre à Sainte-Anne d'où il est envoyé le
j 3 juillet dans le service de M. Féré, à Bicêtre.
4 août. Mis en liberté. Pendant son séjour dans le service de
M. Féré, il a été soigné pour une blennorrhagie.
- 13 octobre. Depuis son départ de Bicêtre, il a remplacé un de
ses amis, garçon de magasin chez un teinturier, pendant trois
semaines. A partir de là il travaille aux Halles, où il fait des cor-
vées. Il arrive à gagner de 1 franc 50 à 3 francs. L'après-midi, il
a camelotte D, vend des épingles, des indicateurs. Il n'a pas
essayé de continuer son métier, on ne trouve rien : dit-il. n'a pas
tenté de se livrer à des actes de p édérastie, ni de se faire mas-
turber par des enfants. Il va souvent avec des femmes « pour
trente sous, pour un demi-setier quelquefois ». Il n'est pas assez
bon ouvrier, pour exercer le métier de cordonnier, et « je n'ai,
dit-il, d'autre certificat que celui de sortie de Bicêtre ».
Réflexions. I. -L'hérédité nous paraitpouvoir être invo-
quée avec raison : du côté paternel nous trouvons l'alcoolisme
et l'idiotie compliquée d'épilepsie; du côté maternel, le ne ?
vosisme et l'aliénation mentale. Notons aussi la mort par
convulsions de plusieurs frères et soeurs.
IL Dans les antécédents personnels, nous devons relever
en premier lieu l'impression pénible et persistante éprouvée
par sa mère durant la grossesse et occasionnée par la vue d'une
parente idiote et épileptique. C'est là une cause dont l'influence
est difficile à apprécier, mais que nous avons soin de toujours
mentionner dans nos observations, espérant pouvoir plus tard
faire la part de la réalité et de l'exagération. Notons ensuite une
INSTABILITE MENTALE. 0
hémorrhagie abondante du cordon, l'incontinence d'urine jus-
qu'à quatre ans et celle des matières fécales jusqu'à douze ans.
III. C'est à partir de son envoi à l'école qu'on s'aperçut
que son intelligence n'était pas aussi développée que celle des
enfants de son âge. Il apprit difficilement à lire et à écrire; sa
turbulence, ses taquineries, ses grimaces, ses contorsions, le
font renvoyer successivement de plusieurs écoles. On ne se
rendait pas compte qu'il était malade. Il en fut de même d'ail-
leurs à l'Ecole d'enfants de troupes où l'on attribuait son
incontinence des selles à sa malpropreté volontaire. Pour l'en
corriger, on exerça sur lui des sévices blâmables, pratique
malheureusement trop fréquente et qui n'a d'autre résultat
que d'aggraver l'état mental.
IV. Placé à quatorze ans en apprentissage, son instabi-
lité mentale devint de plus en plus évidente : il fut renvoyé
successivement de plusieurs maisons. Au lieu de le faire soi-
gner, ses parents le mirent en correction. C'est là une mesure
qui ne devrait être prise qu'après réflexion et après un examen
médical sérieux. Si les médecins de ces établissements exami-
naient avec soin cette catégorie d'enfants, ils s'apercevraient
bien vite qu'ils ont affaire à des malades et ne les garderaient
pas en prison, mais les feraient diriger sur les hôpitaux spé-
ciaux. Ajoutons qu'à son imbécillité et à son instabilité men-
tale, se joignaient des troubles psychiques consistant en des
interprétations erronées : il s'imaginait qu'on se moquait de
lui. Rappelons en passant que, à une époque, vers douze ans,
il fut atteint de crises convulsives qu'un médecin aurait quali-
fiées d'épileptiques. Jamais ses parents ni nous-mêmes, durant
son séjour à Bicêtre n'avons constaté d'accidents comitiaux.
En revanche, nous avons observé assez fréquemment de violents
accès de colère.
V. Les accidents dont nous venons de parler et la perver-
sion des instincts sur laquelle nous allons revenir tout à
l'heure étaient compliqués de stigmates physiques multiples
que nous nous bornerons à énumérer : Nystagmus, tremble-
ment des paupières et des mains, irrégularité de la voûte pala-
tine qui est ogivale à un degré prononcé, vice de la prononciation
(zézaiement), malformation des organes génitaux(hypospadias).
VI. Nous devons tout particulièrement insister sur les
impulsions génitales très accusées chez ce malade. De bonne
heure il se livra à l'onanisme, et essaya d'avoir des rapports
i 6 IMBÉCILLITÉ LÉGÈRE ET INSTABILITÉ MENTALE.
avec des petites filles, puis il excita les autres enfants à se livrer
à la masturbation personnelle ou réciproque. Pendant son
séjour à Bicètre, nous avons observé des périodes de calme et
des périodes durant lesquelles ces impulsions devenaient vio-
lentes. Alors il cherchait sans cesse à attirer les autres enfants
vers lui, à les toucher, se faire toucher, àpratiquer sur eux la
pédérastie, les embrassant sur la bouche, leur mordant le cou.
Aussi n'y a-t-il rien d'étonnant qu'il ait été une des premières
victimes de l'infirmier pédéraste qui lui communiqua la syphilis.
Il ne s'agit pas ici d'une véritable inversion du sens sexuel.
En effet, contrairement aux malades types de cette catégorie,
avant son entrée à Bicêtre et après sa sortie, il rechercha les
femmes et vola de l'argent à ses parents pour avoir des rapports
avec elles et contracta même une blennorrhagie.
VIL- Nous avons cru devoir réunir dans le tableau suivant
le développement du poids et de la taille de notre malade,
de 1881 à 1888.
APPENDICE
IiOI R1VILLG, 1888. si
I.
R : 11'PULtT SUR l'organisation d'un concours pour l'admission aux
EMPLOIS DE MÉDECINS ADJOINTS DES ASILES D'ALIENES, au Hou de la
Commission spéciale composée de MM. BOURNEVILLE, médecin de
Bicêtre, député de la Seine, président; Donnet, médecin direc-
teur de l'Asile de Vaucluse, et GIRAUD, médecin directeur de
l'Asile S'-Yon1. 'IIIiIIi\
Monsieur le Ministre,
Par un arrêté en date du G mars dernier, et conformément à
un avis du Conseil des inspecteurs généraux des établissements de
bienfaisance et des asiles d'aliénés, vous nous avez chargés d'étu-
dier le meilleur mode de concours à organiser pour l'admission
aux emplois de médecins adjoints des asiles publics d'aliénés.
La commission s'est réunie lesamedi 17 mars. Elle a pris connais-
sance aussitôt après son installation par M. Monod, directeur de
l'Assistance publique et des institutions de prévoyance, des docu-
ments mis à sa disposition par l'Administration et elle a retenu
comme base de sa discussion le rapport fait au Conseil des ins-
pecteurs qui l'accompagne. Elle n'avait pas à se préoccuper de la
question de principe, c'est-à-dire du recrutement des médecins
adjoints par le concours, puisque ce mode de recrutement est
admis dès maintenant par vous. C'est en effet le meilleur moyen
d'apprécier l'intelligence et les connaissances des candidats. Il
y a longtemps d'ailleurs que le Conseil général de la Seine en a
réclamé le rétablissement pour le recrutement du personnel mé-
dical de ses asiles. Nous disons le rétablissement et non pas l'ins-
titution, car le Concours a existé jusqu'en 189 pour les quartiers
d'hospice de Bicêtre et de la Salpêtrière qui ont constitué durant
une longue période les seuls asiles consacrés aux aliénés dans le
département. Le Concours, supprimé par l'Empire, a été réiabt
en 1879 par M. Herold, préfet de la Seine, pour ces deux éla
blissements. De plus, M. Herold avait ultérieurement décidé que
la place de médecin adjoint de l'Asile clinique (Sainte-Anne) serait
donnée à lasuite d'un Concours analogue à celui des médecins des
quartiers d'aliénés de Bicêtre et de la Salpêtrière. 11 n'avait pas
voulu étendre ce mode de nomination au recrutement des médecins
Afin de dégager notre responsabilité au sujet de l'arrêté ministériel
qui lise les conditions du concours pour les places de médecins adjoints
dans les asiles, nous publions le rapport que nous avons été chargé de
l'aire sur cette réforme.'
80 APPENDICE.
en chef de Sainte-Aune', Vaucluse, et Ville-Evrard, malgré son vif
désir, parce que la question était soumise à l'étude de la Commis-
sion ministérielle chargée d'étudier les réformes que peuvent com-
porter la législation et les règlements concernant les asiles d'aliénés.
Le cinquième groupe de cette commission, ainsi que le rappelait
M. Regnard, avait formulé ce voeu que les médecins adjoints et
les médecins en chef des asiles fussent nommés au concours 2.
Ceci rappelé, voyons comment il convient d'organiser le con-
cours. Les uns ont proposé de faire un concours central et unique
pour toute la France; les autres de faire des concours régionaux,
et en particulier de faire un concours spécial pour les asiles du
département de la Seine. Le Conseil des inspecteurs généraux
s'est rallié au Concours régional. Voici, d'après le rapportde M. Re-
gnard, les raisons qui ont motivé la décision de ce Conseil :
« La première condition pour rendre le con cours efficace, dit-il,
est évidemment de s'assurer un nombre suffisant de candidats.
Or, un examen rapide de la question en fait apercevoir de suite
toutes les difficultés. Etablir à Paris le siège du Concours pour tous
les départements, en distribuant les candidats heureux de Lille à
Marseille et de l'aris à Nancy, suivant les vacances, parait d'abord
une tentative bien risquée. D'une façon générale, et en mettant à
part les hommes qui ont l'ambition de faire leur chemin à Paris,
les médecins désireux d'entrer dans les asiles tiennent à rester,
sinon dans leur département d'origine, au moins dans une loca-
lité qui n'en soit pas trop éloignée. Et, comme les places vacantes
ne seraient pas déterminées dans le système d'un concours central
et unique, beaucoup déjeunes gens seraient certainement détournés
de l'idée de concourir par la crainte d'être envoyés à cent lieues
de leur pays. On ne peut songer d'autre part à instituer le con-
cours par département : il est trop certain que dans beaucoup de
cas, les candidats ne se présenteraient qu'en nombre insuffisant.
« Pris entre les difficultés d'un Concours central et unique, et
l'impossibilité du système par département, vous avez pensé avec
moi, Messieurs, que l'établissement d'un Concours par région pou-
vait résoudre le problème. On prendrait pour centre des villes
possédant des facultés de médecine ou des Ecoles préparatoires,
comme Nancy, Lyon, Lille, Bordeaux, Caen ou Rennes, Angers
ou Nantes, etc. Ce serait l'affaire d'une commission spéciale de
déterminer ces centres, qui, d'ailleurs, ne devraient pas être trop
multipliés. »
« S'il m'était permis d'ajouter mon opinion personnelle, ajoute
.NI. Regnard, j'émettrais le voeu que le département de la Seine
1 Arrêté du 3 mars 1879.
, Bourneville. Rapport sur le personnel médical el administratif des
asiles d'aliénés.
APPENDICE. - 81
formât une région à lui seul, tant en raison du nombre de ses
asiles, qu'à cause de sa situation spéciale. Les objections soulevées
contre cette opinion ont été réfutées d'une façon péremptoire, à
mon avis, par le D'' Bourneville, dans le rapport auquel je faisais
allusion plus haut. »
« On a objecté, dit-il, la crainte de créer une oligarchie médicale
et aussi celle d'éloigner plutôt les jeunes médecins de la spécialité
des maladies mentales. Mais cette oligarchie médicale existe dès
maintenant pour les médecins des hôpitaux de Paris, pour les mé-
decins des hôpitaux et les professeurs des facultés de médecine
de toutes les grandes villes. Cette suprématie d'ailleurs est juste,
puisqu'elle repose en général sur la valeur scientifique démontrée
par des Concours répétés et par des publications souvent nom-
breuses. Loin d'éloigner les candidats, le Concours spécial en crée-
rait, car beaucoup d'internes des hôpitaux qui se font inscrire
pour le Concours de médecins ou de chirurgiens se dirigeraient
sur celui des asiles, et cela parce qu'ils pourraient demeurer à
Paris ou dans le voisinage, et rester dans le courant scientifique,
tandis qu'ils ne prendront jamais part à un Concours qui aurait
pour conséquence, s'il se termine en leur faveur, de les éloigner
pour longtemps des asiles de la Seine 1. »
« Dans tous les cas, messieurs, reprend M. Regnard, si l'on n'ac-
cepte pas la spécialisation de la Seine, en raison du caractère.
insolite que pourrait avoir cette mesure en apparence, vous serez
certainement d'accord avec moi, pour reconnaître qu'on ne peut
joindre aux asiles de ce département, pour former la région dont
il sera le centre que les deux établissements les plus rapprochés,
ceux de Clcrmont et d'Evreux. »
La discussion s'est engagée sur le premier article de l'Avis du
Conseil des inspecteurs, article ainsi conçu :
« Le Concours devrait être établi par régions, en prenant pour
centre de chacune d'elles soit une faculté, soit une Ecole prépara-
toire de médecine. »
M. Donnet, après avoir rappelé que, suivant le nouveau projet
de loi sur les aliénés, adopté par le Sénat, les médecins adjoints
seront nommés sur une liste de présentation dressée à la suite
d'un concours public, déclare qu'on pourrait peut-être, dans l'in-
térêt de l'élude des maladies mentales dans les Facultés de pro-
vince, organiser au siège de ces facultés, un concours pour les
places de médecins adjoints vacantes dans les asiles du ressort de
chacune de ces Facultés. Il écarte les écoles préparatoires. Enfin,
' Rapport sur l'organisation du personnel médical et administratif des
asiles d'aliénés, présenté à la Commission chargée d'étudier les réformes
que peuvent comporter la législation et les règlements concernant les
asiles d'aliénés, par l3ounxFwo.vs (1SS3).
82 APPENDICE.
il estime que les médecins adjoints d'une région pourront être
nommés médecins en chef ou médecins directeurs dans toutes les
autres régions.
M. Giraud est partisan d'un concours unique pour toute la
France. Il croit que l'objection tirée de ce que les candidats pour-
raient reculer devant les frais d'un déplacement, lorsqu'ils rést-
dent loin de Paris ne lui paraît pas fondée. En pratique, les jeunes
docteurs qui désirent devenir médecins d'asile ne se conten-
tent pas de faire une demande écrite; ils viennent faire des
démarches à Paris. En second lieu, il soutient avec M. Donnet
que l'avancement des médecins adjoints ne devrait pas être limité
à la région dans laquelle ils ont été nommés. « Il n'y a pas lieu,
dit-il, de tenir compte des circonscriptions pour la nomination
des chefs de service, car ce serait créer des inégalités parmi les
médecins adjoints. » On serait même amené à retarder l'avance-
ment des uns au profit des autres moins méritants, si le hasard
veut que des vacances aient lieu dans telle ou telle région, et l'on
produirait ainsi du découragement.
Il y a dans les asiles des postes de début pour les chefs de ser-
vice. Ce sont les asiles de médiocre importance et loin des grands
centres de population. Si l'on supprime le roulement des chefs de
service au début de leur carrière, on nuira au bon recrutement
des médecins aliénistes, parce que ceux qui acceptent volontiers
une résidence peu agréable avec la perspective d'avoir un poste
plus important quand ils auront acquis de l'expérience et fait
leurs preuves se récuseront s'ils doivent passer toute leur carrière
dans ces postes qui sont aujourd'hui des postes de début. Ces
asiles ne seront plus demandés que par des médecins ayant des
intérêts dans le pays, et souvent n'ayant pas réussi à avoir une
clientèle. »
M. Bourneville a insisté vivement en faveur d'un concours régio-
nal. C'est un excellent moyen d'exciter l'émulation au sein de
chacune des Facultés, sans compter qu'on est ainsi assuré d'avoir
des candidats en nombre suffisant. Beaucoup d'anciens internes
des hôpitaux de Paris, de Lyon, de Bordeaux, etc., prendront
part à des concours qui ont lieu sous les yeux de leurs maîtres,
de leurs camarades, et qui leur permettront de rester dans le
voisinage de leur pays.
Beaucoup d'anciens internes des hôpitaux hésiteront à prendre
part à des concours qui les exposent à aller comme médecins
adjoints à l'autre extrémité de la France. L'institution du con-
cours et sa spécialisation par régions auront pour résultat d'éle-
ver le niveau du corps médical des asiles d'aliénés.
A la suite de cette discussion, la commission a voté les résolu-
tions suivantes :
Le concours pour les places de médecins adjoints des asiles d'alié-
APPENDICE. 83
nés de France devra être établi par régions, en prenant pour centre
de chacune d'elles les villes qui possèdent une Faculté de médecine
de l'Etat.
Les candidats devront être docteurs en médecine de l'une desdites
Facultés de l'Etat et de nationalité française. Ils seront admis ri
concourir dans toutes les régions, suivant leur convenance.
Les médecins adjoints pourront être nommés médecins en chef ou
médecins-directeurs dans toute la France.
La Commission a ensuite examiné s'il y avait lieu de faire un
concours spécial pour les asiles du département de la Seine, on
raison du nombre et de l'importance des asiles qu'il renferme, ou
si, conformément à l'avis du conseil des inspecteurs, « on ne
devra joindre au département de la Seine, pour la région dont
Paris sera le centre, que les deux établissements les plus rappro-
chés, ceux de Clermont et d'Evreux ».
M. Bourneville a rappelé les raisons qu'il avait données autre-
fois en faveur d'un concours spécial pour les asiles du départe-
ment de la Seine : Multiplicité des asiles (Bicêtre, la Salpêtrière,
Sainte-Anne, Vaucluse, Ville-Evrard, Villejuif, sans compter la
création d'un second asile sur le domaine de Ville-Evrard) ;
population considérable des aliénés (plus de 10,000) ; candidats
nombreux fournis par l'internat des hôpitaux et l'internat des
asiles; nécessité de relever l'enseignement scientifique de la méde-
cine mentale à Paris et d'avoir dans les asiles d'aliénés un per-
sonnel instruit et aussi capable que celui des hôpitaux. Il a ajouté
que si, conformément à l'article 3 de la loi du 10 janvier 1849,
l'administration de l'Assistance publique avait conservé la tutelle
des aliénés, elle aurait procédé pour la nomination des médecins
de Sainte-Anne, Ville-Evrard et Vaucluse, comme elle l'a fait pour
les médecins des quartiers de Bicêtre et de la Salpêtrière et que
les chefs de service de ces asiles seraient médecins des hôpitaux
comme l'étaient ou le sont : MM. Trélat, Archambault, Baillarger.
Delasiauve, Moreau (de Tours), .1. Voisin, Bourneville, Charpen-
tier, Deny, Ch. Féré, Séglas et Chaslin.
Cette opinion avait été soutenue énergiquement par M. Herold,
devant la commission ministérielle. 11 avait signalé la nécessité
d'avoir dans les asiles d'aliénés de la Seine des chefs de service
dans la force de l'âge et capables par leurs travaux scientifiques
de contribuer à la bonne renommée de la Faculté de médecine de ' i
Paris.
Ces raisons n'ont pas été acceptées dans leur intégrité par la :
majorité de la commission. Mais elle a été unanime pour ad-
mettre que, dans l'intérêt de l'enseignement, il y avait lieu de
demander un concours spécial pour la nomination des médecins- z
$4 APPENDICE.
aliénistes chefs de service dans les asiles les plus voisins de
chacune des Facultés, c'est-à-dire :
Pour Paris, les asiles de Sainte-Anne, Bicêtre et la Salpêtrière;
Pour Bordeaux, l'asile de Bordeaux ou du Château Picon ;
Pour Montpetlier, le quartier des aliénés de l'hospice Saint-Eloi;
Pour Nancy, l'asile de Maréville.
Il a été convenu aussi que les conditions de ce concours seraient
équivalentes, autant que possible, à celles des concours pour le
recrutement des médecins ordinaires des hôpitaux. A Paris, par
exemple, les conditions pour les places des médecins, chefs de
service de l'Asile clinique (Sainte-Anne) seraient les mêmes que
celles qui ont été établies pour les concours des médecins alié-
njstes de Bicêtre et de la Salpêtrière, lesquelles sont calquées sur
les conditions du concours des médecins des hôpitaux. Il va de
soi que les médecins de Bicêtre, de la Salpêtrière et de Sainte-
Anne, nommés au concours, auront la faculté de choisir leurs ser-
vices, comme les médecins des hôpitaux, et au sur et à mesure
des vacances et jouiront des mêmes prérogatives. Il en est de
même pour les Facultés de province où il y avait deux asiles. La
Commission pense que, de cette façon, on excileraitl'émulation des
médecins adjoints et on rendrait d'incontestables services à
l'enseignement de la médecine mentale'. '.
La Commission a ensuite abordé l'examen des conditions spé-
ciales du concours et elle a adopté les résolutions ci-après :
Un concours sera ouvert, au chef-lieu de la région, toutes les fois
que le nombre des places vacantes ou des vacances à prévoir sera de
deux au moins. Le nombre des places données sera supérieur d'une
à celui des places vacantes.
Cette proposition subsidiaire a été adoptée à la suite de re-
marques présentées par M.Giraud, au sujet des inconvénients que
peut présenter, pour le service, la vacance prolongée d'un poste
de médecin adjoint dans les asiles où il n'y a qu'un médecin de
ce grade. Dès que le médecin disponible serait placé et qu'il se
produirait une vacance, on procéderait à un concours pour deux
places. Le premier médecin nommé occuperait la vacance et le
second resterait à la disposition de l'administration.
L'avis du conseil des inspecteurs porte « que le jury désigné par
M. le ministre de l'intérieur se composera de médecins en chef
des asiles et d'un inspecteur général des établissements de bien-
faisance, » et il ajoute que « un professeur de la Faculté ou de
l'Ecole préparatoire de médecine, suivant le cas, pourra être dé-
signé aux lieu et place d'un des médecins des asiles d'aliénés » et z
que les juges seraient au nombre de cinq.
4 Le jury du concours des médecins aliénistes de Bicêtre et de la Sal-
pêtrière se compose de trois médecins ordinaires des hôpitaux et de
quatre médecins aliénistes tirés au sort. ·
APPENDICE. 85
La Commission a, été unanime pour modifier cet article, ainsi
qu'il suit : .
« Le jury sera composé : 1° de trois médecins en chef des asiles de
la région ; - 20 d'un inspecteur général, docteur en médecine ?
3° d'un professeur désigné par la Faculté de médecine ; 4° d'un
juge suppléant. Les médecins en chef et le juge suppléant seront
tirés au sort parmi tous les médecins en chef des asiles de la région.
L'avis des inspecteurs généraux indique qu'il y aura deux
épreuves : 1° une question écrite, éliminatoire dans le cas où le
nombre des candidats serait supérieur à trois pour une place;
2° une épreuve orale, comprenant : a) une question de pathologie
interne ou externe ; 6) une question portant sur la pathologie
mentale et la médecine légale des aliénés.
La Commission a été unanime à modifier ainsi cet article :
Les épreuves seront au nombre de quatre : 1° une question écrite,
portant sur l'anatomie et la physiologie du système nerveux, pour
laquelle il sera accordé trois heures au candidat. Le maximum des
points sera de trente;
2° Une question orale portant sur la médecine et la chirurgie ordi-
naires, pour laquelle il sua accordé vingt minutes de l'éflexion et
quinze minutes pour la dissertation. Le maximum des points sera de
vingt. Cette seconde épreuve sera éliminatoire dans le cas où le nombre
des candidats serait supérieur à trois pour une place;
3° Une épreuve clinique sur deux malades aliénés. Il sera accordé
trente minutes pour l'examen des deux malades, quinze minutes de ré-
flexion et tl'enteminutes d'exposition. L'un des deux malades devra être
examiné plus spécialement au point de vue médico-légal. Le maximum
des points sera de trente.
- La plupart des concours actuels présentent une lacune regret-
table et sur laquelle nous avons Souvent appelé l'attention. C'est
qu'on n'y tient aucun compte des travaux antérieurs des candi-
dats. Aussi ne pouvons-nous qu'approuver l'innovation que de-
mande l'avis du Conseil des inspecteurs. Sur ce sujet, la Commis-
sion s'est arrêtée à la rédaction suivante : ..
4° Les travaux scientifiques antérieurs des candidats seront exami-
nés et appréciés par le jury et feront l'objet d'un rapport qui pourra
être communiqué aux candidats sur leur demande. Le maximum des
points sera de dix. Ils devront être donnés au début de la première
séance de lecture des compositions écrites..
La Commission a pensé que le concours pour les places de mé-
decins adjoints devrait être supérieur aux concours habituels de
l'internat et qu'il était indispensable de se rendre compte si les
candidats avaient étudié non seulement la pathologie mentale,
mais encore et surtout la clinique mentale.
86 APPENDICE.
Tel est, monsieur le Ministre, le résultat des travaux de IaCom-
mission que j'ai été chargé par elle de vous transmettre. Elle es-
père que vous accepterez les propositions qu'elle vous soumet et
que, dans un délai très rapproché, vous voudrez bien organiser le
concours pour le recrutement des médecins adjoints de tous les
asiles de France et un concours spécial pour les places de méde-
cins-chefs de service dans les asiles d'aliénés, situés dans le voisi-
nage des six Facultés de médecine de France.
La Commission s'est réunie le mercredi, 9 mai, pour entendre
la lecture du rapport qui précède. Elle en a approuvé les termes
et en a adopté toutes les conclusions que nous reproduisons
ci-après.
CONCLUSIONS.
I. -Le concours pour les places de médecins adjoints dans les
asiles d'aliénés de France, devra être établi par régions, en pre-
nant pour centre de chacune d'elles, les villes qui possèdent une
Faculté de médecine de l'Etat. Les candidats devront être docteurs
de l'une desdites Facultés de l'Etat et de nationalité française.
Ils seront admis à concourir dans toutes les régions, suivant leur
convenance.
11.- Les médecins adjoints pourront être nommés médecins
en chef ou médecins-directeurs dans toute la France.
111. Il sera installé un concours pour la nomination des mé-
decins aliénistes chefs de service dans les asiles les plus voisins de
chacune des Facultés, c'est-à-dire pour Paris, les asiles de Sainte-
Anne, Bicêtre et la Salpêtrière ; pour Lyon,.l'asile de Bron;
pour Bordeaux, l'asile de Bordeaux ; pour Lille, l'asile d'Ar-
mentières; - pour Montpellier, .le quartier d'hospice ; pour
Nancy, l'asile de Maréville.
Les conditions de ce concours seront équivalentes à celles des
concours pour le recrutement des médecins ordinaires des hôpi-
taux. Dans le cas où il y aurait deux asiles ou quartiers d'asile, il
sera établi un roulement à l'unanimité entre tous les chefs de
service nommés au concours.
IV. Un concours sera ouvert au chef-lieu de la région toutes
les fois que le nombre des places vacantes de médecins adjoints,
ou des vacances à prévoir, sera de deux au moins. Le nombre des
places données sera supérieur d'une à celui des places vacantes.
V. - Le jury sera composé : Io de trois médecins en chef des
asiles de la région ; 2° d'un inspecteur général, docteur en
médecine ; 3° d'un professeur désigné par la Faculté de méde-
cine ; 4° d'un juge suppléant. Les médecins en chef et le juge
APPENDICE. Si -1
suppléant seront tirés au sort parmi tous les médecins en chef de
la région.
VI. Les épreuves seront au nombre de quatre : 1° une quels-
tion écrite portant sur l'anatomie et la physiologie du système
nerveux, pour laquelle il sera accordé trois heures au candidat.
Le maximum des points sera de trente.
2° Une question orale portant sur la médecine et la chirurgie
ordinaires, pour laquelle il sera accordé vingt minutes de ré-
flexion et quinze minutes pour la dissertation. Le maximum des
points sera de vingt. Cette seconde épreuve sera éliminatoire dans
le cas où le nombre des candidats serait supérieur à trois pour une
place.
3° Une épreuve clinique sur deux malades aliénés. Il sera accordé
trente minutes pour l'examen des deux malades, quinze minutes
d'exposition. L'un des deux malades devra être examiné et dis-
cuté plus spécialement au point de vue médico-légal. Le maximum
des points sera de trente.
4° Une épreuve sur titres. Les travaux scientifiques antérieurs
des candidats seront examinés parle jury etferont l'objet d'un rap-
port qui pourra être communiqué aux candidats sur leur demande.
Le maximum des points sera de dix. Les points devront être don-
nés au début de la première séance de la lecture des compositions
écrites.
9 mai 1888.
Le rapporteur, Bourneville.
II.
Assistance publique : les aliénés dans LES hôpitaux et hospices
de province.
On croirait qu'après la réforme dont Ph. Pinel a été le promo-
teur, après les améliorations réclamées par Esquirol, Ferrus et
leurs élèves, après les transformations rendues nécessaires par la
loi du 30 juin IS38, l'assistance publique des aliénés est parfaite.
Eh bien ! il n'en est malheureusement pas ainsi et il y a encore
bien des réformes à opérer. Voici quelques faits à l'appui :
1° A l'Hôtel-Dieu de Château-Thierry, les deux cabanons sont
situés au premier étage de l'ancien bâtiment de la boulangerie,
au-dessus de « l'ensevelissoir», très loin de l'hôpital et loin de tout
secours. Chaque cabanon possède une demi-fenêtre et une porte
munie de deux forts verrous et percée d'un judas. Dans l'un des
cabanons, sont disposés quatre montants en bois avec traverse,
servant à recevoir une paillasse ; dans l'autre il y a un lit en fer,
mobile. Les aliénés sont conservés quinze jours et quelquefois
davantage. Les médecins de l'hôpital se plaignent d'autant plus
vivement de cet état de choses qu'il n'y a personne pour garder
ces malades. ,
2° L'Hôtel-Dieu d'Epernay dispose de deux cabanons, sans sur-
veillance, éclairés par une ouverture pratiquée dans le toit, rap-
pelant la forme d'une cheminée et dont la porte est munie de
verrous et de barreaux. La fenêtre qui existait dans chaque cel-
lule a été supprimée à la suite de la pendaison d'un aliéné. On
envoie les malades au bout de deux ou trois jours, rarement plus,
à l'asile de Chatons.
3° La Maison des vieillards et des orphelins de Lunéville possède
deux cellules, situées dans un petit bâtiment de la basse-cour,
contiguës d'un côté à la porcherie, de l'autre à la salle des morts,
loin de toute surveillance. Ces cellules ont été construites en
1885-188G. Les malades sont gardés 4, b ou G jours.
4" A l'hôpital civil et militaire de Saint-Dié, le cabanon unique
est placé dans un petit bâtiment isolé situé dans un coin du clos, à
côté d'un ancien cabanon transformé en salle d'autopsie. Le ma-
ladey est abandonné à lui-même. Le cabanon a une porte pleine,
sans judas, et est éclairé par une toute petite fenêtre munie de
barreaux, percée immédiatement au-dessous du plafond. Les alié-
nés n'y séjournent que 24 ou 43 heures. Ils sont envoyés à
l'hôpital d'Epinal et de là ùAfaréville.
5° Les trois cabanons de l'hôpital-hospice de Remiremont se
APPENDICE. 89
trouvent dans un petit pavillon isolé situé dans la cour de labuan-
derie, des chantiers et de la salle des morts. Le jour provient d'une
petite fenêtre, de 20 centimètres sur 50 environ, située au voi-
sinage du plafond. On ne peut s'en servir en hiver, parce qu'ils
ne sont pas chauffés. En général, les malades sont dirigés sur
l'hôpital d'Epinal au bout de deux ou trois jours. On a l'habitude,
qui est loin d'être exempte de dangers, de conserver les aliénés
tranquilles; nous en avons vu deux au mois de septembre dernier.
6° L'hôpital Saint-Maurice d'Epinal est doté d'un pavillon d'un
étage, isolé de l'hôpital, placé dans un vaste jardin potager. Il
est divisé en deux parties par un couloir et l'escalier. A droite
sont les hommes et gauche les femmes. Le rez-de-chaussée
comprend les cellules avec préau extérieur, un cabinet avec bai-
gnoire, un réfectoire, le bureau des gardiens, etc. Le premier
étage est divisé en deux dortoirs. Le service est fait par un infir-
mier etune infirmière. Le pavillon reçoit les autres aliénés des
autres hôpitaux du département. On les garde durant dix à
quinze jours en observation, puis on les renvoie s'ils sont guéris,
ou, en cas contraire on les dirige sur Maréville.
7° A Belfort, les cabanons sont au rez-de-chaussée d'un bâtiment
dont le premier étage, dans un état misérable, est consacré à une
autre catégorie de malades déshérités, les vénériennes. Ces caha-,
nons qui servent de cachot à ces derniers sont auprès de la buan-
derie et séparés par une cour du reste de l'hospice. Les aliénés y
séjournent deux, trois semaines, parfois un mois avant d'être en-
voyés à l'asile de Dôle.
8° L'hôpital de la Charité de Langres possède deux cabanons si-
tués dans le sous-sol, à côté des bains. Les aliénés n'y resteraient
pas plus d'un jour ou deux.
9° A l'hôpital Saint-Nicolas de Bar-sur-Aube, les aliénés sont
logés dans deux cabanons situés dans un des bâtiments de la
basse-cour où on les garde une, deux ou trois semaines avant
de les envoyer à l'asile de Saint-Dizier.
10° A Troyes,les cabanons sont dans un bâtiment isolé qui leur l'
est coumun avec les vénériennes. A cause de cette disposition, la
surveillance laisse moins il désirer. On les conserve huit, quinze
ou vingt jours avant de les envoyer à l'asile de Saiut-Dizier.
Tous ces faits montrent combien l'assistance des aliénés laisse
encore à désirer et que toute trace d'emprisonnement est loin
d'avoir disparu. On doit blâmer la mauvaise organisation des
cabanons ou plutôt des cachots ; leur situation dans des bâti-
ments éloignés du reste de l'hôpital, dans des communs, à côté
d'écuries, de telle sorte que le malade est absolument en dehors
1 Cette pratique existe dans d'autres hôpitaux^
00 APPENDICE.
de toute surveillance. On doit blâmer le séjour prolongé des aliénés
dans des cabanons-cachots et parfois aussi leur transfert d'un hô-
pital dans un autre, alors qu'il y aurait le plus grand intérêt à
diriger le malade de suite sur l'asile de la circonscription.
Pour remédier cette triste situation, il y aurait à réaliser trois
réformes, dont deux n'entraîneraient aucune dépense.
Le Ministre de l'intérieur peut exiger de ses préfets et sous-
préfets que les malades aliénés soient transférés dans les vingt-
quatre heures à l'asile départemental. On ne conçoit pas qu'avec
le télégraphe qui permet d'avoir vite une réponse sur les forma-
lités administratives et avec les chemins de fer qui existent
presque partout et ont rendu les communications rapides et com-
modes, on abandonne les malades dans des cabanons, sans soins,
sans traitement, exposés à des accidents de tout genre. Nulle
difficulté non plus, au sujet de l'interdiction du transfert succes-
sif des aliénés dans deux hôpitaux : un ordre formel aux préfets et
ces voyages dispendieux, et non sans périls, seraient supprimés.
Reste la transformation des cabanons en chambres d'isolement
convenablement disposées et ne rappelant plus en rien le souvenir
de ['emprisonnement. Nous estimons qu'elle pourrait s'opérer faci-
lement par l'intermédiaire des préfets donnant des instructions
précises aux maires, présidents des commissions hospitalières,
aussi par l'intermédiaire des inspecteurs des établissements de
bienfaisance, qui verraient comment et dans quelle mesure les
prescriptions ministérielles ont été exécutées. Bourneville.
THÈSES ET MÉMOIRES DE 1888
CLOl'ATT (A.). Études sur l'hystérie infantile. Helsiufors.°188b.
1 vol. in-4".
PENASSE (l;.). Contribution à l'étude des méningites chroniques
et spécialement d'une terminaison fréquente chez les enfants, l'idiotie.
Thèse de Paris.
Pison (V.). De l'asymétrie fronto-faciale dans l'épilepsie. Thèse
de Paris.
TRIBAL (J.). Contribution à l'élude de la sclérose tubéreuse ou
hypertrophique du cerveau. (Idiotie symptomatique.) Thèse de Paris.
TABLE' DES MATIÈRES
. PREMIÈRE .PARTIE
HISTOIRE DU SERVICE PENDANT L'ANNEE 188.8
92 ) TABLE DES MATIÈRES.
DEUXIÈME PARTIE
clinique
Fig. 17. Plan du pavillon des cellules.
Fig. 18. -Vue du pavillon des cellules, du préau et de la clôture.