(1887) Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie : Compte-rendu du service des épileptiques et des enfants idiots et arriérés de Bicêtre pendant l'année 1886
/ 200
(1887) Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie : Compte-rendu du service des épileptiques et des enfants idiots et arriérés de Bicêtre pendant l'année 1886

RECHERCHES

SUR

L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE

ET

L'IDIOTIE

PUBLICATIONS DU PROGRÈS MÉDICAL

RECHERCHES

CLINIQUES ET THÉRAPEUTIQUES

SUR

L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE

ET

L'IDIOTIE

COMPTE RENDU DU SERVICE DES ÉPILEPTIQUES

ET DES ENFANTS IDIOTS ET ARRIÉRÉS DE BICÊTRE

PENDANT L'ANNÉE 1886

PAR

BOURNEVILLE

MÉDECIN DE BinÈTRE

ISCH-WALL, BAUl41(xAI3,TEN, PILLIET, COURBARIEN

INTERNES DU SERVICE

ET

Le Dr BRICON

CONSERVATEUR DU MUSÉE

Volume VII avec 3 pions, 25 figures et 5 planche

PARIS

AUX BUREAUX DU

PROGRÈS MÉDICAL

14, rue des Carmes, 14

A. DELAHAYE & E. LECROSNIER

ÉDITEURS

Place de l'Ecole de Médecine.

1887

PREMIERE PARTIE

Historique. Statistique.

La nouvelle section.

Séparation des adultes et des enfants.

BOURNEVILLE. 4856.

PREMIÈRE PARTIE

Histoire du service pendant l'année 1886. »

Le pavillon d'isolement pour les mala-

dies contagieuses de la nouvelle section.

I.

SITUATION DU SERVICE. - ENSEIGNEMENT PRIMAIRE.

Durant toute l'année 1886 et jusqu'au 1 er février 1887,

la troisième section de la division des aliénés, dont nous

avions la direction, comprenait comme les années pré-

cédentes : 1° les épileptiques adultes ;- 2° les enfants

atteints de maladies nerveuses. Les premiers se divi-

sent en épileptiques réputés aliénés, la charge du

.département, placés par l'intermédiaire du Bureau

d'admission de l'Asile clinique (Sainte-Anne) et en épi-

septiques dits non aliénés à la charge de la Ville de

Paris et internés par les soins de l'Assistance publique.

Les seconds, les enfants, comprennent trois catégo-

ries principales : 1° les enfants idiots, gâteux, épi-

leptiques ou non, mais invalides; 2° les enfants

idiots, gâteux ou non gâteux, épileptiques ou non,

mais valides; 3° les enfants propres, valides, im-

béciles, arriérés, épileptiques et hystériques ou non.

. Laissant de côté, pour le moment, tout ce qui a trait

IV V IDIOTS GATEUX INVALIDES.

aux épileptiques adultes et à leur séparation des enfants,

nous y reviendrons plus loin (p. lLIV), nous allons

exposer tous les faits relatifs au fonctionnement de la

partie du service consacrée aux enfants. Ils ont occupé

et occuperont encore : 1° deux dortoirs des anciens

bâtiments (40 lits et 18 lits); 2° deux des ateliers du

bâtiment des ateliers (23 lits); - 3° Dans la nouvelle

section : a) quatre pavillons dortoirs (160 lits); b) le bâ-

timent des gâteux (80 lits); c) l'infirmerie (24 lits).

I. Les enfants de la première catégorie se subdivi-

sent en deux groupes : le premier, composé d'enfants

gâteux invalides, dont la plupart sont susceptibles

d'amélioration; l'autre, d'enfants tout à fait incurables

ou d'enfants atteints d'épilepsie ou de méningo-encé-

phalite devenus gâteux sous l'influence des accès ou des

poussées congestives qui en sont la conséquence. Ces

derniers ne peuvent plus être que l'objet de soins hygié-

niques. Quant aux premiers, on leur apprend à se tenir

sur les jambes à l'aide des barres parallèles, à marcher

soit en lès tenant sous les bras ou à la main, soit au

charriot ; on essaie de les rendre propres en les pla-

çant, à des heures régulières, sur les sièges d'aisances

et de leur apprendre à se servir de leurs mains pour

manger, etc. Au 31 décembre 1886, il y avait dans ce

groupe 16 enfants ne marchant pas du tout et 4 enfants

commençant à marcher avec le secours d'un aide. Aus-

sitôt que ces enfants marchent seuls ils sont envoyés à

la petite école.

Les enfants idiots, gâteux invalides, en dehors des

instants trop courts durant lesquels ils sont exercés à

marcher, restent assis sur de petits fauteuils percés

d'un large trou au-dessous duquel nous avions fait au-

trefois disposer une plaque métallique sur laquelle

était placé un vase en faïence destiné à recevoir les dé-

jections. Dans le cours de l'année, nous avons rem-

placé 14 des anciens fauteuils par 14 fauteuils en fer,

IDIOTS GATEUX VALIDES. PETITE ÉCOLE. V

fermés sur les côtés et agencés, pour le reste, comme

les anciens.

IL Enfants idiots, gâteux ou non, épileptiques ou

non, valides.-Ces enfants fréquentent la petite école,

confiée exclusivement à des femmes. 164 y ont été

inscrits dans l'année. Sur ce nombre, 2 sont passés aux

adultes, 7 sont décédés, 4 sont sortis définitivement.

Aucun n'est passé à la grande école; 6 ont été transfé-

rés. Sur les 150 restant à la petite école le 31 décem-

bre : 48 mangent avec la cuillère; 61 avec la cuillère

et la fourchette; 41 se servent de la cuillère, de la four-

chette et du couteau.

8 enfants suivent les exercices de la grande gym-

nastique ; 142 les exercices de la gymnastique Pi-

chery ; trois enfants gâteux sont devenus tout à fait pro-

pres ; un certain nombre d'enfants sont améliorés sous

ce rapport, sans pouvoir encore être mis en pantalon.

Le matériel scolaire s'est enrichi de différents objets

destinés à l'éducation des sens et, en premier lieu, du

sens du toucher : 1° de planchettes en bois de 6 cen-

timètres de largeur sur 10 centimètres de hauteur et

d'une épaisseur variable : 5, 10, 15, 20, 25 et 30 milli-

mètres, destinées à être saisies entre le pouce et les

autres doigts; 2° de petits cylindres en bois de

6 centimètres de longueur et d'un diamètre variable :

5, 10, 15, 20, 25 et 30 millimètres, destinés à être pris

à pleine main; 3° De sphères en bois de diamètre

également décroissant : 5, 10, 15, 20, 25 et 30 milli-

mètres, destinées à être prises soit à pleine main, soit

avec l'extrémité des doigts. Ces différents objets per-

mettent en même temps d'enseigner aux enfants à faire

la différence entre le degré d'épaisseur et de volume de

ces objets ; un escabeau de 5 marches, ayant pour

but d'apprendre aux enfants à monter les escaliers et à

sauter, etc. Sept enfants de la petite école sont ap-

prentis tailleurs et un est apprenti cordonnier.

VI IMBÉCILES; ARRIÉRÉS; ÉPILEPTIQUES. GRANDE ÉCOLE.

Pour développer le sens de l'ouïe nous nous servons.

depuis plusieurs années de sonnettes de timbre diffé-

rent ; pour l'éducation de l'odorat de flacons contenant

des teintures odoriférantes diverses et, en été, des

fleurs; - pour l'éducation du goût, du sel, du sucre,

des poudres amères, etc.

Citons encore de grands cartons alphabétiques,

composés de lettres de 12 centimètres de hauteur, les

voyelles en rouge,les consonnes en noir, et des cartons

de gros chiffres, les chiffres pairs en rouge, les in-

pairs en noir.

III. Enfants propres et valides, imbéciles, arriérés,

instables, épileptiques et hystériques ou non. -

Grande école. La population de cette école était de

140 le 1er janvier 1886 et de 150 le 31 décembre. Nos

réclamations réitérées au sujet de l'amélioration de

l'enseignement ont enfin obtenu satisfaction. M. le Dr

Peyron, directeur de l'Assistance publique, nous a en-

voyé le 1e mars un instituteur adjoint, M. Boyer, ba-

chelier ès lettres, et auparavant maître répétiteur au

lycée Saint-Louis (1). De plus, le maître de gymnas-

tique, M. Goy, qui venait en quelque sorte comme l'em-

ployé du professeur de gymnastique dans les hôpitaux,

M. Laisné a été, sur notre demande, nommé professeur

de gymnastique à l'Ecole des enfants de Bicêtre et les

leçons, qui n'avaient lieu que tous les deux jours, se font

maintenant quotidiennement.

Le personnel de l'école est donc devenu moins in-

suffisant et, à la rigueur, pour le moment, la situation

serait passable, si nous avions des garçons de classe-

intelligents, actifs et ne changeant pas à chaque instant.

Malheureusement il est loin d'en être ainsi et leur rôle-

(1)Sur les conseils judicieux de M. le Directeur de l'Assistance

publique, M. Boyer a subi l'examen pour l'obtention du brevet

élémentaire et a été reçu.

PROMENADES ET DISTRACTIONS. VU

se borne à surveiller les enfants, à prendre soin d'eux

dans leurs accès, à les nettoyer, etc., mais ils ne con-

courent que d'une manière presque nulle à l'enseigne-

ment. Peut-être parviendrons-nous un jour à les fixer

et à en faire d'utiles auxiliaires, si l'Administration

consent à accroître leur traitement sur place.

Malgré ces conditions défectueuses, nous obtenons

des résultats encourageants, grâce au zèle et au dévoue-

ment de l'instituteur, M. Boutillier qui s'efforce d'entrer

de plus en plus dans nos vues en recourant beaucoup

plus à l'enseignement par les leçons de choses, sui-

vant nos indications sans cesse renouvelées, soit à l'école

même, soit dans les jardins de la section organisés en

vue de cet enseignement, soit dans les promenades bi-

hebdomadaires (1). Enfin, pour perfectionner cet en-

seignement, M. Gallois, l'architecte si dévoué de Bicêtre,

a procédé dans le gymnase aux installations nécessaires

pour les projections à la lumière oxydrique.

Le 7natériel s'est enrichi de tous les objets que nous

avons énumérés en parlant de la petite école. De plus,

l'enseignement de la géographie qui, depuis longtemps,

avait pour point de départ le plan de Bicêtre, la com-

mune de Gentilly, le canton de Villejuif et l'arron-

dissement de Sceaux, a été complété par le plan de

l'Ecole et le plan de la Section, éléments du plan de

Bicêtre.

Promenades et distractions, a) Adultes. - Grâce à

une importante innovation sur laquelle nous revien-

drons plus loin, les promenades des épileptiques

adultes ont été beaucoup plus nombreuses que les

années précédentes. En voici l'énumération qui, croyons-

nous, paraîtra très instructive aux yeux des personnes

compétentes : .

(1) M. Boutillier, déjà pourvu du brevet de capacité, a passé

avec succès l'examen pour le certificat d'aptitude pédagogique.

VIII PROMENADES ET DISTRACTIONS.

Auril : la promenades dans les cours et les jardins de l'hos-

pice ; une en dehors, avec 38 malades.

,liai : 10 promenades dans la maison ; 4 aux environs, ü, 2, 3,

4 kilomètres (avec 23, lui2, 67, et 37 malades).

Juin : 5 dans les cours; 6 aux environs, dont l'une au parc

de Montsouris.

Juillet : 3 dans la maison et 4 au dehors. - Août : 7 et 7.

Septembre : 9 dans l'hospice et 2 aux environs. Octobre : 4

et 3.

Novembre : 4 au dehors avec 50 à 62 malades chaque fois. -

Décembre : 2 promenades au dehors (50 et 40 malades).

Enfin, en janvier 1887, il a été fait trois promenades dans les

environs.

Nous devons ajouter que tous les adultes assistent une

fois par semaine au concert dirigé par M. Peny, le maître

de chant des enfants; qu'une partie des adultes,

beaucoup plus restreinte que nous ne l'aurions voulu

(19 à 28) ont suivi les leçons de l'un des instituteurs

des enfants, qui vient faire l'école pendant une heure,

cinq fois par semaine. Ces cours ont lieu dans la petite

bibliothèque dont nous avons parlé dans nos précé-

dents comptes rendus.

b) Enfants. Les enfants de la grande école et ceux

de la petite école, qui sont propres, ont fait, sous la

conduite de leurs maîtres et de leurs maîtresses, de

nombreuses promenades, soit dans les environs de

l'hospice ou de Paris, ou à Paris même : nous mention-

nerons seulement les promenades multiples au Jardin-

des- Plantes, au Luxembourg, au Palais de l'Industrie,

à la foire de la place de la Nation, au Jardin d'Acclima-

tation (1), etc., etc.

Jamais, et nous tenons à le répéter, ces promenades,

(II Nous devons remercier M I. Geoffroy-St-Ililaire, directeur

du Jardin d'acclimatation et notre ami M. le Dr Yves Menard,

sous-directeur, de l'obligeance qu'ils mettent chaque année à nous

donner des cartes prour les enfants de Bicêtre et de la Salpe-

trière.

VISITES, PERMISSIONS DE SORTIE. IX

même dans les lieux très fréquentés, n'ont donné lieu

à des accidents capables d'attirer sérieusement l'atten-

tion et de troubler la tranquillité publique. Cette ré-

flexion s'applique également aux promenades des

adultes.

c) Enfants de la petite école. Tous les idiots va-

lides et propres, c'est-à-dire en pantalon, ont parti-

cipé, comme nous venons de le dire, à la plupart (les

promenades de leurs camarades de la grande école ;

mais tous ceux qui marchent ont fait de fréquentes

promenades dans les jardins de la section, dans les

cours et les jardins de l'hospice, aux environs de l'éta-

hlissement, etc. Les hémiplégiques participent aux

longues promenades, tantôt marchant, tantôt montées

dans une grande voiture, construite exprès pour eux (1).

Citons enfin les distractions diverses, communes à

tous les enfants valides : distribution de jouets (Ier jan-

vier), de beignets et de gâteaux, et les déguisements

(carnaval), les séances de lanterne magique et de pro-

jections, dans le gymnase, et surtout le concert que

MM. Lionnet frères organisent chaque année avec un

zèle et un dévouement au-dessus de tout éloge (2).

Visites, permissions de sortie, congés. Les ma-

lades adultes ont reçu 2.966 visites et les enfants 7.139,.

Les visiteurs ont été au nombre de 12.092. Voici main-

tenant la statistique des permissions de sortie ët ? d 's ?

congés : \ iï '-

(1) Voir Compte rendu de Bicêtre pour 1883, p. XXIII. \1.

(') Voici le nom des artistes qui ont si gracieusement prêter

leur concours à MM. Lionnet : M1"8 Mole-Truffier et ]\Ille Che

valier (de TOpéra- Comique) ; NI-' Desclauzas (du Gymnase) '-

Mlle Magdeleine Godard, violoniste; - M. et Mme Rivière- (des

Folies Bergères); - MM. Truffier (de la Comédie - Française) ;

Auguez et Lallier (de l'Opéra) ; Fougère et Lubert (de l'Opéra-

Comique); M. Legrand et son fils; )J. Lermotle, organiste.

x CONGÉS. REVACCINATIONS.

SERVICE DENTAIRE. BAINS ET HYDROTHÉRAPIE. M

que, avons-nous ressassé, devrait être suivie dans tous

les services hospitaliers. On diminuerait ainsi le champ

laissé, par une insouciance regrettable, aux épidémies

de variole, et on rendrait peut-être inutile la construc-

tion coûteuse d'un ou de plusieurs hôpitaux de vario-

leux. L'Administration de l'Assistance publique devrait

mieux comprendre que si elle a le devoir de secourir les

malades de chaque jour, elle a non moins le devoir de

s'efforcer de prévenir les maladies. Il est vrai qu'il

s'agit là d'une question d'hygiène, science encore peu

connue au chef-lieu de l'Assistance publique. » Il est

bien à craindre que nos réflexions passent inaperçues

et qu'on ne préfère suivre les conseils de ceux qui

poussent à la création d'hôpitaux que seuls l'ignorance,

l'incurie et des intérêts particuliers rendent nécessaires.

Les vaccinations ou revaccinations (vaccin de génisse),

ont été au nombre de 64.

Service dentaire. Notre ami le Dr CI;uT, ancien

interne des hôpitaux, continue ses visites bi-mensuelles

aux enfants de Bicêtre et de la Salpêtrière. Les résul-

tats obtenus, grâce à son zèle et à son savoir, justifient

pleinement la création de ce service.

Bains et hydrothérapie. Les bains et les douches

ont été donnés aux enfants dans le nouveau service et

dans l'ancienne section aux adultes.

XII VISITES DU SERVICE.

Soit, au total, 23.646 bains et 3G-888 douches, sans

compter 5.847 bains do pieds aux enfants (1). Le

traitement hydrothérapique, seul ou combiné avec le

bromure de potassium, l'élixir polybromuré ou parfois

d'autres agents médicamenteux, commence le 1° avril

et finit le le novembre ; mais, dans l'intervalle, nous le

continuons pour tous les malades qui y consentent :

c'est ainsi qu'il a été donné en janvier, février et mars,

par exemple, 102, 146 et 165 douches aux adultes ;

161, 127 et 155 aux enfants (2).

Visites du service. En 1886, la nouvelle section

a. été visitée par MM. les D'S Aigre, Alaber.y (Jose), Anker

Prado Bamussen, Aya, Balestre (de Nice), Bambas

(d'Athènes), Basora, Bobeuf, Bonnefoy, Casler Baldivin,

Dekhtereff, Delasiauve, Denombré et deux médecins

espagnols ; Du Mesnil, Farabeuf, Ferrera, Gérente, mé-

decin-directeur de l'asile d'Alger ; Gombault, médecin

des hôpitaux; Gregorio, Hall, Jakouveho, Kardine,

Mairet (de Montpellier), P. Marie, Moll, Ovion, Phoelipe,

Alb. Regnard, inspecteur général ; Paul Regnard, Rey-

naud, Rouma Ridgeray Barker et trois médecins de

l'Amérique espagnole ; Seguin fils (de New-York), Sola,

Staidrer-Zun, Susini, Taule, Topinard, etc.

Sous la conduite de leurs maîtres, M. le Dr Richard,

professeur d'hygiène au Val-de-Grâce et M. le profes-

seur Laveran, une vingtaine d'élèves du service de santé

militaire sont venus visiter la section.

Parmi les autres visiteurs nous citerons les membres

de la Commission de l'Assistance publique du Conseil

général (MM. Rousselle, Cattiaux, Curé, Levraud,

Piperaud, Robinet) ; les membres de la Commission de

surveillance des Asiles et le président M. Barbier,

(1) Janvier 1887 : 441 bains et 115 douches aux adultes.

(2) Il y a eu plusieurs suspensions dans le courant de l'année

soit par défaut de linge, soit pour cause de réparations.

VISITES DU SERVICE. XIII

premier président de la Cour de cassation, qui dépuis

de longues années s'occupe avec un dévouement et une

compétence indiscutables de l'assistance des aliénés (1).

MM. Alphand, directeur des travaux de Paris ; les

directeurs des Asiles d'aliénés de Québec (Canada), de

Lommelet (Nord), de la Maternité de Paris ; M. Le Bas,

directeur de la Salpêtrière ; Alphandery , conseiller

général (Algérie) ; Jouvaski, onze membres de l'associa-

tion polytechnique ; Anatole France, rédacteur au

Temps ; M. Du Bled, publiciste, auteur d'articles inté-

ressants sur les aliénés ; le comte Grolier, le baron

d'Aleschete, etc., etc.

Nous devons une mention spéciale à la visite faite par

MM. Strauss et Brueyre, et à celle de l'un des adver-

saires les plus acharnés de la nouvelle section, M. E.

Ferry, membre du Conseil de surveillance de l'Assis-

tance publique (2). Débarrassons-nous de ce dernier.

Voici en quels termes cet administrateur ( ? ) a rendu

compte à ses collègues de ce qu'il avait vu :

Ce service, installé dans les bâtiments nouveaux que vous

connaissez tous, est admirablement organisé. Les ateliers sont

bien tenus et dirigés par des contre-maîtres pleins d'attention

et de sollicitude pour leurs élèves. Les enfants alternent les

travaux manuels avec ceux de l'école. Pour eux, la journée est

ainsi coupée en deux. On fait quelques bons élèves profession-

nels. On leur enseigne la menuiserie, la serrurerie, la cordon-

nerie, les états de tailleurs, de vanniers et de rempailleurs de

chaises. Ils sont dirigés vers telle ou telle profession selon

leurs aptitudes et aussi après un stage d'observation qui leur

permet de choisir l'état qui leur convient le mieux. - On ob-

tient d'assez bons résultats. Les élèves dits arriérés, dont

l'intelligence se développe tardivement, deviennent assez gé-

néralement de bons ouvriers. Ils sont employés dans l'indus-

trie et peuvent vivre de leur métier. On obtiendrait encore de

meilleurs résultats chez les épileptiques, dont quelques-uns

(1) Ces deux commissions étaient accompagnées des membres de

l'Administration, MM. Roux, directeur des affaires départemen-

tales ; Bahut, chef de division ; Leclère, chef de bureau, etc.

(2) Voir son rapport dans le Compte-rendu de 1a84, p. xxvn.

XIV VISITES DU SERVICE.

sont très heureusement doués. Mais ces malheureux jeunes

gens tombent souvent au milieu de leur travail ; ils sont un

objet de trouble dans les ateliers. Aussi, en général, les em-

ploie-t-on avec peine ou répugnance dans les établissements

industriels; par cela même, leur existence par le travail est

assez précaire.

L'enseignement scolaire est bien organisé. Les classes sont

bien disposées : on y travaille. Quelques élèves, notamment

parmi les épileptiques, possèdent une intelligence remarquable

et profitent largement des leçons qui leur sont données. Beau-

coup d'autres travaillent machinalement; s'ils profitent peu

de l'enseignement, pour eux, l'école possède au moins l'im-

mense avantage de les occuper pendant une forte partie de la

journée, d'éviter lo désoeuvrement avec toutes ses consé-

quences. Les leçons de choses jouent un grand rôle dans les

programmes. Les jardins intercalaires des bâtiments ont été

utilisés d'une façon très judicieuse. On y a planté ou semé une

grande collection de plantes potagères et alimentaires, des

spécimens do céréales et plantes diverses appartenant à la

grande culture, une collection d'arbres spéciaux à la sylvicul-

ture, d'arbres fruitiers et d'arbustes dits d'agrément; l'horti-

culture y est largement représentée.

Chaque carré ou chaque espèce porte une étiquette très ap-

parente indiquant les noms vulgaires ou scientifiques de cha-

que plante. Les enfants sont promenés tous les jours dans ces

jardins, de sorte qu'ils s'habituent presquo machinalement à

reconnaître les produits naturels de la terre. L'infirmerie est

très bien organisée ; elle contient très peu de malades, une

dizaine tout au plus; la salle des teigneux en contient 7 ou 8.

Il y a une salle spéciale pour les enfants gâteux malades : la

plupart d'entre eux sont idiots et complètement inconscients.

Ils sont tenus aussi bien que possible (1).

C'est, animés de tout autres sentiments que, sur l'avis

de notre ami le Dr H. Thulié, M. Strauss, conseiller mu-

nicipal et M. Brueyre, chef de la division des enfants

assistés, sont venus revoir la section et provoquer nos

explications sur les voies et moyens à employer pour

l'organisation d'un service destiné au redressement

, (1) Procès verbal du Conseil de surveillance de l'Assistance

publique, 1SG, 8 juillet, p. 7. Peut-être eut-il été convenable de

se rencontrer avec 1-. chef de service, qui aurait pu redresser

quelques erreurs.

ENFANTS PERVERS ET INDISCIPLINÉS. XV

physique, moral et intellectuel de cette catégorie d'en-

fants que, administrativement, on appelle les enfants

indisciplinés et qui, pour quelques médecins et pour

nous, sont des enfants malades, atteints de lésions ner-

veuses plus ou moins profondes ou de dégénérescences :

imbéciles, arriérés, instables, impulsifs, etc.

Nous avons montre à MM. Strauss et Brueyre plu-

sieurs enfants de 13 à 18 ans, qu'ils ont interrogés.

« Mais, nous ont-ils dit, ces enfants ne sont pas des

idiots, ils sont intelligents, se tiennent bien ; pourquoi

sont-ils ici ? » Alors nous leur avons lu leur observa-

tion : antécédents héréditaires nombreux et graves,

alcoolisme des parents ; antécédents personnels :

convulsions, méningite, perversion des instincts, manie

du vol, de la destruction, arrestations multiples, ona-

nisme, pédérastie, tentatives d'homicide, de suicide, etc.,

etc. Tous ces phénomènes qui, chez ces enfants, sont

sans aucune complication, se voient sur d'autres enfants

joints, soit à l'idiotie ou à l'imbécillité, soit à l'épilepsic

ou à l'hystérie. « Vos malades de la première catégorie,

a fait remarquer M. Brueyre, ce sont nos enfants de

Porquerolles. » Oui, avons-nous répondu. Main-

tenant pourquoi sont-ils ici, pourquoi ne sont-ils pas à

Porquerolles ou à la petite Roquette ou dans une maison

de correction, affaire de hasard. Peut-être ont-ils eu la

chance d'avoir été arrêtés par un agent intelligent,

humain, qui, remarquant chez eux des bizarreries, les a

signalées, ce qui a conduit à les faire examiner par le

médecin du Dépôt de la Préfecture ; ou à un juge d'ins-

truction habile et bienveillant qui a vu on eux des enfants

malades plutôt -que des criminels. Ce sont vos enfants

de Porquerolles, dites-vous. Oui ; et ce sont des malades

et vos enfants de Porquerolles sont, comme eux, des

malades dans la proportion d'au moins 80 pour 100. Et

comme M. Brueyre se récriait, nous avons ajouté : prenez-

leur histoire, comme nous, ayons recueilli- celle de- nos-

XVI ENFANTS PERVERS ET INDISCIPLINES.

malades, scrutez leurs antécédents de famille, leur vie

personnelle, observez-les minutieusement et vous arri-

verez à notre conclusion.

Puis, à la question qui nous était posée : quels sont les

moyens à employer pour la réformation des enfants de

ce genre, désignés sous le nom d'indisciplinés, nous

avons résumé ainsi notre pensée : créer un asile spécial

pour les garçons et un pour les filles; en confier la

haute direction non à un administrateur, mais à un

médecin, instruit, capable, dévoué, convaincu de la

possibilité du redressement moral et intellectuel de ces

enfants ; payez-le convenablement et laissez-lui la plus

grande latitude d'action ; organisez les écoles, les

ateliers de ces établissements comme ceux de Bicêtre ; -,

multipliez les promenades, les distractions; occupez

les enfants sans cesse depuis le matin jusqu' 'au soir ;

surveillez-les de la façon la plus scrupuleuse et en même

temps la plus bienveillante, et vous aurez sûrement des

résultats excellents et auxquels on ne croit guère.

Mais, nous ont fait remarquer MM. Strauss et Brueyre,

ces enfants commettent quelquefois des actes qu'on ne

peut laisser passer sans répression. Quelles sont les puni-

tions que vous employez ? La réprimande, la privation

de vin, la suppression de promenade, des séances de dis-

traction, de la visite des parents, des permissions de

sortie, des congés, enfin la cellule. Mais, chaque fois que

l'enfant montre quelque repentir, si son actif n'est pas

trop chargé, nous nous bornons à la réprimande. Tou-

jours, dans l'après-midi, le surveillant, l'instituteur,

dans certains cas nos internes, ont mission de revoir les

coupables, de les encourager à mieux se conduire et si

le repentir même passager paraît sincère, la puni-

tion est supprimée en partie ou en totalité et, le len-

demain, les enfants viennent renouveler leur promesse

devant nous. Voilà à quoi se bornent nos moyens de

répression. Bien appliqués, ils sont très suffisants. Tel

MUSÉE PATHOLOGIQUE. XVII

est, en résumé, le plan général que nous vous con-

seillons pour l'Etablissement de réformes qu'il s'agit de

fonder.

Diphthérie. L'un des enfants, dont on trouvera

plus loin l'observation (p. 143), entré le 7 juin à l'hôpital

des Enfants-Malades, nous est arrivé souffrant, le 12 et

le 13 on constatait qu'il était atteint de diphthérie. Il a

succombé le J 6 juin. Quelques jours plus tard, un autre

enfant, Corb..., a été pris du croup et a succombé. Les

deux malades ont été placés dans l'une des chambres

d'isolement du bâtiment des gâteux. Grâce à cette me-

sure il n'y a pas eu do véritable épidémie, comme nous

l'avons observé en 1882 (1).

Musée pathologique. - Le Musée, placé sous la di-

rection de notre ami le D' P. BRICON, s'est enrichi de

nombreuses pièces, ainsi que le montre le tableau com-

paratif suivant :

XVIII MUSÉE PATHOLOGIQUE.

L'installation du musée s'est poursuivie dans le cours

de l'année. Une nouvelle vitrine, fabriquée par les en-

fants, a été mise à la disposition de M. le Dl' Deny, mé-

decin de la 2° section.

Nous avons continué à faire prendre la photographie

de nos malades à l'entrée d'abord, puis à des époques

indéterminées lorsqu'il survient des modifications im-

portantes, en bien ou en mal. Quand le malade meurt,

ses photographies sont déposées au musée et, comme

nous faisons réunir en volumes, à la fin de chaque année,

toutes les observations des malades décédés, il s'en-

suit que toutes les pièces pathologiques, bustes, crâ-

nes, etc., ne sont pas là à titre d'objets curieux mais

ont une histoire complète et peuvent être utilisées à

des recherches sérieuses. Nous rappellerons enfin que

les photographies des cerveaux forment aujourd'hui

trois gros albums (1).

Bien que suffisante pour le moment, l'installation du

Musée devra être transformée ultérieurement. Et alors

il faudra en profiter pour organiser un service scientifi-

que convenable à l'hospice de Bicêtre. A cet égard nous

ne pouvons que reproduire ce que nous disions l'an

dernier : « Nous pensons qu'il conviendra de choisir un

emplacement peu éloigné de l'infirmerie générale et de

la division des' aliénés, et d'y construire le service des

morts et des autopsies, le musée, les laboratoires,

l'atelier de photographie et de moulage. Cet empla-

cement existe... »

(1) Nous devons remercier nos collaborateurs MM. Hubert et

IIurcl qui apportent le plus grand zèle à l'exécution des photo-

graphies et des moulages.

. ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL.

XIX

11.

ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL.

Durant toute l'année 1886, cet enseignement a été

dirigé par les maîtres qui en ont été chargés dès le

début : MM. Leroy, pour la menuiserie ; -Alène, pour

la couture ; Bénard, pour la serrurerie ; Perche,

pour la cordonnerie; - Marchai, pour la vannerie et

le rempaillage de chaises. De même que les années

passées, nous n'avons qu'à nous louer du concours

qu'ils nous ont apporté. Le tableau suivant met en

évidence les résultats obtenus, grâce à leur zèle et à

leur dévouement :

XX ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL.

l'excédent avait été de 4.241 fr. L'année 1886 a par

conséquent donné 1.747 fr. de plus que l'année 1885.

L'évaluation du travail des enfants est faite par l'ins-

pecteur du service d'architecture et d'après le tarif de

la Ville pour la menuiserie et la serrurerie ; par

M. l'économe de l'hospice, d'après les tarifs du Magasin

central, pour la couture, la vannerie et le rempaillage

de chaises, et d'après le tarif de la Société anonyme pour

la cordonnerie.

Ainsi que le montrent ces chiffres, le travail des en-

fants, non seulement couvre la dépense occasionnée par

le salaire de leurs maîtres, mais encore il couvrira

bientôt l'intérêt du capital engagé dans la construction

des ateliers. C'est là d'ailleurs, à nos yeux, une considé-

ration secondaire, il en sera de même aux yeux de toutes

les personnes sérieuses qui s'occupent avec un esprit

un peu généreux des questions d'assistance. En effet,

l'enseignement professionnel rend des services d'un

ordre bien autrement supérieur. Il permet de donner à

un certain nombre d'enfants un métier qui, à leur sortie,

les mettra en mesure de gagner leur vie. Quelques-uns

ont déjà quitté l'hospice et sont placés; d'autres le seront

aussitôt que les circonstances le permettront. Il permet

de donner à un plus grand nombre d'enfants le moyen

d'atténuer, dans une proportion variable, les sacrifices

que la Société s'impose pour eux. Précisons par un

exemple : Nous avons à l'atelier de couture 15 hémi-

plégiques, c'est-à-dire des malheureux condamnés

presque certainement à passer toute leur existence à

l'hospice. 5 sont déjà de bons tailleurs, la plupart des

autres le deviendront. Autrefois, ils ne savaient rien

faire; maintenant, grâce à l'enseignement qu'ils re-

çoivent, une fois passés aux adultes, s'ils ont encore des

accès, ou passés dans les divisions de l'hospice s'ils n'en

ont plus, ils pourront travailler à l'atelier commun de

la maison et leur travail compensera en partie, et pen-

dant de longues années, les dépenses de leur entretien.

ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL. XXI

Nous devons ajouter qu'aujourd'hui l'habillement et

la chaussure des enfants, bien qu'ils laissent beaucoup

à désirer, ont été notablement améliorés. Enfin, cet en-

seignement fournit à tous une occupation utile, moralisa-

trice et contribue à assurer le bon ordre et la discipline

dans la section. Le tableau suivant fait voir que le nombre

des enfants qui profitent de cet enseignement est allé en

progressant depuis six ans.

XXII ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL.

avons dû y ajouter une petite augmentation de 5 francs,

qui a été administrativement régularisée le 1" janvier

1887.

Nos réclamations, relativement aux retards apportés

à la fourniture des matières premières, ont été moins

fréquentes. Cependant le travail a dû être suspendu à

plusieurs reprises, tantôt dans un atelier, tantôt dans un

autre. Il est un point sur lequel nous n'avons pas encore

reçu satisfaction : il s'agit de l'autorisation, pour le tail-

leur, d'apprendre la coupe à ses élèves. Jusqu'ici on lui

envoie les vêtements tout préparés. Lorsque nous aurons

obtenu gain de cause sur ce point, comme nous l'avons

eu pour la coupe des chaussures, outre que l'enseigne-

ment professionnel sera meilleur, les enfants auront

des vêtements confectionnés exprès pour chacun d'eux.

STATISTIQUE. XXIII

III.

STATISTIQUE. MOUVEMENT DE LA POPULATION.

Le le' janvier 1886, la section contenait 403 malades

ainsi répartis : 170 adultes épileptiques (79 aliénés et

71 réputés non aliénés) et 253 enfants (épileptiques,

hystériques, idiots, arriérés, instables, pervers, etc.).

Voicile résumé du mouvement delapopulation en 1886 :

xxiv

DÉCÈS.

DÉCÈS.

xxv

NXVI

DECÈS,

DÉCÈS. XXVII

xxviii

DÉCÈS.

DÉCÈS. XXIX

11111 PERSONNEL DU SERVICE.

le dirons tout à l'heure, nous avions réclamé pour

le 1" janvier i 88G, la division de notre service en

deux : l'un comprenant les adultes épileptiques,

l'autre les enfants de toute catégorie. Cette sépara-

tion n'ayant pu avoir lieu, malgré la bonne volonté

de l'Administration, M. Pcyron nous a donné un

second interne titulaire et un second interne provisoire,

de telle sorte que du 1" février 1886 jusqu'au le, février

1887 le personnel se composait : 1° pour le service mé-

dical : de 2 internes titulaires, MM. Conzette et Isch

Wall ; de 2 internes provisoires, MM. Baumgarten et

Pilliet; de M. le Dr Bricon, conservateur du Musée

pathologique de l'hospice, mais qui veut hien continuer

à nous prêter le concours le plus dévoué; 2° pour le

service scolaire : a) grande école : d'un instituteur,

M. Boutillier, et d'un instituteur adjoint, M. Boyer,

aidés d'un professeur de chant, M. Peny, d'un professeur

de gymnastique, M. Goy, de trois administrés de l'hos-

pice, faisant fonction de moniteurs et de 4 garçons de

classe. b) petite école : Mlle Blanche Agnus, surveil-

lante (1) ; Mlles Berthe Langlet et A. Bohain, sous sur-

veillantes, deMlle Breuillard, suppléante ;-3° pour le

service hospitalier : a) service des enfants : de M.

Agnus, surveillant; de M. Petit, sous surveillant; de

l\1rce Jolliot, sous-surveillante de l'infirmerie et du bâti-

ment des gâteux invalides ; de Mlle Carmouin, sup-

pléante ; de 2 infirmières de 1`° classe ; de 19 infirmières

do 2e classe et de 21 infirmiers; un baigneur, un barbier

et un portier ; b) service des adultes : M. Lenglct,

surveillant; M. Labelle, sous-surveillant; 1\lme Prat,

sous-surveillante, 17 infirmiers et une infirmière.

(I) Mlle Bl. AGNUS, désireuse de se rendre de plus en plus apte

à bien nous seconder, a passé avec succès l'examen pour le certi-

ficat d'aptitude à la direction des Picoles maternelles.

NOUVELLE SECTION. XXXIII

IV.

LA NOUVELLE SECTION. = CONSTRUCTION DU PAVILLON

d'isolement J'OUR LES maladies contagieuses.

CLOTURE DE LA SECTION.

Dans le Compte rendu de 1885 (p. LI), nous disions

que le règlement des mémoires des entrepreneurs était

suffisamment avancé pour qu'on pût être assuré d'avoir

près de 200.000 fr. à employer à la continuation de la

section et nous exprimions l'espoir que l'année 1886 ne

se terminerait pas sans voir la section des enfants, pour-

vue des deux derniers organes qui lui sont indispen-

sables : le pavillon d'isolement pour les maladies

contagieuses et le pavillon des cellules. Bien qu'il ne

s'agît là que de constructions relativement peu impor-

tantes par rapport à l'oeuvre réalisée, nous n'avons

obtenu qu'une demi satisfaction : seul, le pavillon

d'isolement a été édifié. Voici l'exposé sommaire des

démarches et des formalités à la suite desquelles cette

affaire a été résolue.

5 janvier 1886 : Sachantqu'il restaitun disponible sur

le crédit de 1.540.000 fr. voté par le Conseil municipal,

nous avons écrit à M. le Directeur de l'Assistance publi-

que pour le prier de l'affecter à la construction du

pavillon d'isolement seul, ou de ce pavillon et des cel-

lules si cela était possible. 19 et 26 janvier : Nou-

velles réclamations. 18 mars : lettre à M. Alphand

pour lui demander de faire examiner le projet envoyé

par l'administration de l'Assistance publique. 23

avril : vote favorable du Conseil. Lettres à M. le

Préfet de la Seine pour le prier de faire remplir prompte-

BOURNEVILLE, 1886. ?

XXXIV PAVILLON D'ISOLEMENT,

ment les formalités administratives et donner les auto-

risations nécessaires. 14 mai : M. Peyron ordonne

l'exécution des travaux du pavillon d'isolement qui ont

commencé quelques jours après. Bien qu'il restât encore,

au31 décembre, différents travaux d'intérieurà exécuter,

nous avons cru devoir placer la description de ce pa -

villon dans le Compte rendu de 1886.

Le pavillon d'isolement de la nouvelle section des en-

fants idiots et épileptiques de Bicêtre, est situé à l'extré-

mité nord-ouest de l'emplacement occupé par les services

de jour (ateliers, gymnase, réfectoires, écoles, bains, etc.)

et par les quatre premiers bâtiments de dorloirs et le bâ-

timent des gâteux invalides. Il se trouve à la partie infé-

rieure du terrain affecté à cette section, quoique cepen-

dant à une altitude encore très élevée et supérieure à la

route stratégique qui contourne l'hospice à cet endroit.

Il est complètement isolé des autres constructions, mais

cependant à proximité du bâtiment des enfants gâteux in-

valides et déments épileptiques, ainsi que de l'infirmerie qui

en est distante d'une vingtaine de mètres. Il est orienté

de l'est à l'ouest de même que tous les autres bâtiments

de la section.

L'infirmerie, le bâtiment des gâteux invalides, le pa-

villon des contagieux, auxquels viendra sans doute s'ad-

joindre prochainement le pavillon dés cellules, si l'Admi-

nistration actuelle de l'Assistance publique y met la bonne

volonté sur laquelle nous croyons pouvoir compter, cons-

tituent, en quelque sorte, l'hôpital de la section.

Le mode de construction du pavillon d'isolement est le

même que celui de tous les autres bâtiments de la section;

le soubassement est en meulière et l'étage destiné aux

malades, édifié en fer et briques, est couvert en tuiles à

emboîtements. Par le fait de la déclivité très grande du sol,

la partie nord de l'étage en soubassement a été distribuée

de manière à former six chambres avec dépendances pour

le logement du personnel, afin de s'opposer aussi complè-

tement que possible à la propagation des maladies conta-

gieuses. La partie centrale de cet étage renferme, du côté

de l'entrée, l'escalier d'accès au service. En arrière de

l'escalier, largement ouvert sur la cour, se trouvent le

caveau des calorifères et le caveau du linge sale, qui

s'ouvre extérieurement du côté de l'ouest. Le côté gauche

de ce soubassement est utilisé mi-partie comme réfectoire,

mi-partie comme école et comme préau couvert pour les

enfants teigneux.

Le service des malades, qui, par suite de la déclivité du

sol, est pour ainsi dire au premier étage, se divise,

comme le fait voir la figure 1, en deux moitiés absolu-

ment distinctes et semblables, séparées par une partie

centrale qui comprend la cage de l'escalier, le cabinet de

la surveillante (façade Est), l'office avec une baignoire, et,

de chaque côté de celle-ci, les cabinets d'aisance et les vi-

doirs (fCg. l, c). Un grand couloir longitudinal, interrompu

au centre par le cabinet de la surveillante, se termine, à

chaque extrémité, par une large fenêtre. Sur son côté

Ouest, existent, à gauche et à droite, deux dortoirs de

chacun cinq lits. Sur le côté Est, à gauche et à droite de

l'escalier, se trouvent trois chambres à un lit, qui n'ont

d'ouverture que sur une galerie saillante, couverte en vi-

trage, et qui règne sur toute la face Est du pavillon, de

manière à obtenir l'isolement le plus complet (fig. 1 et 2).

Par une disposition spéciale, le vitrage de cette galerie,

tout en offrant un abri suffisant, n'entrave pas l'aération

des chambres.

Nous devons faire remarquer qu'en vue de permettre la

surveillance la plus parfaite, toutes les cloisons de distri-

bution sont en vitrage, sauf celles qui limitent en deux

sens les cabinets d'aisance (fig. 1, wc.), de telle sorte

que, de son cabinet, la surveillante peut voir ce qui se passe

dans toutes les localités dont se compose le service.

Le plafond des dortoirs et des chambres des malades,

ainsi que les parois autres que les cloisons vitrées, sont stu-

cées ; les angles sont arrondis et le' sol est carrelé en grès

XXXVI

PAVILLON D'ISOLEMENT.

cérame, pour que les lavages effectués soient aussi efficaces

que possible. Dans chaque chambre et dans chaque salle,

il y a, sur le sol, une bonde mobile pour l'évacuation des

eaux, après les lavages.

PAVILLON D'ISOLEMENT. XXXVII

Le chauffage des salles et des chambres est assuré à

l'aide de deux calorifères jumeaux, construits en sous-sol,

2

fi"

3

"

S

CJ

"o

.

-3

a

o

,;

rt

t

I

ci

C !

comme nous l'avons dit plus haut, afin de ne chauffer que

la moitié seulement du service, si le nombre des malades

n'exige pas davantage.

XXXVIII PAVILLON D'ISOLEMENT, 1

La ventilation se fait par des prises d'air placées en

nombre convenable dans chaque pièce, et qui aboutissent

à un grand coffre central vertical (fig. 1, v.) dans lequel

passe le tuyau de fumée (fig. 1, f.) du fourneau d'office.

Une couronne de becs de gaz, placée dans ce colfre, per-

met d'activer le tirage et, par suite, d'augmenter le renou-

vellement de l'air, dans les chambres et dans les salles.

La ventilation se fait encore par les impostes à soufflet des

fenêtres.

Les dortoirs à cinq lits sont pourvus d'un lavabo en

marbre, composé de trois cuvettes à bascule, en porcelaine,

avec robinet, cuvette d'évacuation, syphon, etc. (fig. 1,

L, L). Chaque chambre isolée renferme une cuvette fixe,

en faïence, avec robinet d'alimentation à clef. (Cette pré-

caution était indispensable en raison de la catégorie spé-

ciale des malades de la section). Le système d'évacuation

est muni d'un syphon. (Fig. 1, D, D.)

L'once renferme le fourneau, servant en même temps

à chauffer l'eau de la baignoire, qui est mobile, et peut

être transportée, le cas échéant, auprès du lit des malades.

L'office contient aussi une pierre d'évier , une ar-

moire, etc.

Le linge sale est jeté dans un caveau spécial, par deux

ouvertures placées près des cabinets d'aisances et aussi

loin que possible de l'habitation des malades. Le sol de ce

caveau et la partie inférieure des murs sont revêtus en

ciment pour en rendre le lavage facile. Le linge est

reçu dans un bassin en maçonnerie rempli d'eau phé-

niquée. Ce caveau est ventilé d'une façon perma-

nente, par un conduit s'élevant au-dessus du toit. Un

réservoir spécial, d'une contenance de 3.000 litres, reçoit

les eaux destinées au service et tous les conduits de distri-

bution partent de ce réservoir. Les différentes parties de

ce pavillon sont éclairées au gaz. - La figure 3 repré-

sente la coupe du bâtiment suivant la ligne A B du plan.

Le nombre total des lits est de 22. >ân cas de nécessité, il

PAVILLON p'ISOLEMENT.

XXXIX

pourra être porté à 24 (1). Les chambres isolées ont un

cube d'air de 48 mètres, les dortoirs, tout près de 15Q mè-

tres, soit 25 mètres cubes par lit.

Les infirmières prendront leurs repas dans l'office et n'au-

ront aucune communication régulière avec le personnel des

autres parties de la section. C'est par ce, pavillon, que de-

vra se terminer la visite médicale.

Fin. 3. Coupe sur la ligne A B du plan (fig. 1;.

Le crédit autorisé se montait à 106.660 fr. Le total des

mémoires en demande sera, à peu de chose près, de

95.000 fr. et, après révision, ces mémoires descendront à-

environ 85.000. En outre, les travaux de consolidation du

sol, qui correspond à d'anciennes carrières, ont été réglés

(1) Six lits dans chaque dortoir, soit 12; 6 lits dans les chambres;

6 lits pour le personnel. Le cube d'air des chambres du personnel

est de 32 m. c.

XL PAVILLON D'ISOLEMENT. 1

à 3.195 fr. Les travaux de construction ont nécessité le

forage de 4 puits placés sous les points les plus exposés du

mur extérieur. Ces puits ont été remplis de béton, et, à

leur base dans la carrière, on a fait des enrochements pour

soutenir le toit de cette carrière. De plus, et dans le mémo

but, vu la mauvaise nature du sol et les nombreux fontis

qui s'y produisaient, on a dû faire huit piliers en maçon-

nerie et quelques bourrages qui ont exigé près de deux

mois à cause de l'état des anciennes carrières existant

à cet endroit. Ces travaux extraordinaires expliquent L

le prix relativement élevé du pavillon d'isolement. Le plan

de ce pavillon a été conçu d'un commun accord entre

M. Gallois, architecte, M. Imard, inspecteur général et

nous.

Nous ajouterons que la séparation entre la nouvelle

section et le Marais de l'hospice a été établie à l'aide

d'une clôture de 2 50 de hauteur en grillage avec

montants en fer. Cette clôture simple, économique, est

suffisante pour empêcher les évasions et ne nuit en rien

à la vue des malades sur le vaste jardin maraîcher con-

tigu à la section.

L'ANCIENNE SECTION. XLI

V.

AMÉLIORATIONS DIVERSES DANS L'ANCIENNE SECTION DES

ADULTES.-SÉPARATION DES ENFANTS ET DES ADULTES.

Nous avons vu plus haut que nous avions espéré voir

séparer la 3e section, composée d'enfants et d'adultes,

en deux sections pour le commencement de l'année.

Des difficultés inattendues ayant surgi, nous avons ré-

clamé et obtenu, ainsi que nous l'avons déjà dit, un

second interne titulaire et un second interne provisoire,

puis un second surveillant et un second sous-surveillant.

Ces nominations constituaientune sérieuse amélioration;

c'était, en outre, une bonne préparation à la division du

service. Aussi avons-nous pu faire face, sans trop de

difficulté, aux obligations du service et profité du trans-

fert des enfants dans la nouvelle section pour faire réa-

liser dans le quartier des adultes plusieurs des amélio-

rations réclamées depuis longtemps , tant par nos

prédécesseurs dans le service que par nous au Conseil

général.

Le rez-de-chaussée du Pavillon de la Force qui

composait autrefois toute la section comprend, ainsi

que nous l'avons indiqué naguère (1) : le cabinet du sur-

veillant, les lavabos, les escaliers, puis le chauffoir et

un dortoir. Nous avons profité de ce que les enfants

abandonnaient le 1er étage : 1° pour faire descendre à

cet étage l'infirmerie des adultes qui était au second ;

2° pour évacuer le dortoir du rez-de-chaussée et

installer les malades dans l'ancienne infirmerie du 2°

étage. Quant au dortoir du rez-de-chaussée devenu

(1) Voir Compte rendu pour 1880, p. 1 i.

XLI ! AMÉLIORATIONS DIVERSES.

libre, nous l'avons fait diviser en deux parties. Dans la

première , on a aménagé quatre cellules, dont le

service était autrefois absolument dépourvu, ce qui

obligeait ou à faire usage de la camisole, à notre vif

regret, ou à envoyer les malades soit à la Sûreté, soit

dans le quartier des cellules de la 1" et de la 2e section,

pratique détestable.

La seconde partie du dortoir, contiguë à l'ancien

chauffoir, dont nous avons signalé l'insuffisance no-

toire (1), a été affectée à une salle de réunion pour les

malades tranquilles, en particulier les déments et quel-

ques idiots ou imbéciles épileptiques, sans cesse en butte

aux taquineries et même aux mauvais traitements des

épileptiques.

La salle qui servait de réfectoire des enfants a été

transformée on réfectoire pour les adultes épilepti-

ques, déments, gâteux qui, auparavant, prenaient leurs

repas dans l'infirmerie des adultes. Grâce à ces mesures,

les déments épileptiques ayant une salle do réunion et

un réfectoire, n'encombrent plus l'infirmerie pendant

le jour. Malheureusement, par suite de la disposition

dos locaux, on est obligé de les faire coucher dans l'in-

firmerie. Peut-être pourrait-on diviser la grande salle

qui sert d'infirmerie dans le sons longitudinal, ce qui

serait d'autant plus facile qu'il y a, à l'une des extré-

mités, deux portes correspondant chacune à un esca-

lier (2).

L'ancienne école des enfants a été nettoyée, repeinte

(t) Compte rendu pour 1880, p. 1h, etc..

(2) Cette salle est coupée transversale-mont par une cloison située

aux 3/4 de sa longueur. Les deux petites salles qu'elle limiterait

avec le prolongement do la cloison longitudinale pourraient être

affectées : celle qui répond à l'infirmerie on un réfectoire ou sallo

de réunion pour les convalescents de l'infirmerie, l'autre en un

service de propreté pour les déments gâteux, analogue à celui du

service des enfants gâteux. On pourrait aussi donner comme

préau à ces malades le jardin, (fit de l'Infirmerie, qui est inutilisé.

TRAVAIL DES MALADES. XLIII

et transformée on école primaire pour les infirmiers

et les infirmières.

Lorsque nous avons eu notre instituteur adjoint, nous

en avons profité pour essayer d'organiser - ou mieux

de réorganiser une écolo pour les adultes épilepti-

ques. Tous les jours, à partir du 16 mars, l'instituteur

adjoint a fait une heure d'école dans la petite salle de

la bibliothèque (1). Le nombre des malades qui ont fré-

quenté l'école a varié de 19 à 28 (2).

La vigilance, l'activité et le dévouement du surveil-

lant des adultes, M. Langlet, nous ont permis de faire

travailler un plus grand nombre do malades que par le

passé. Le relové mensuel du nombre des travailleurs

est instructif : avril, 80 ; mai, 83 ; juin, 88 ; juillet, 96 ;

août, 99 ; septombro, 100 ; octobre, 86 ; novembre, 75

ot décembre, 69, sur une population qui a varié do 150

à 155. Voici à quelles occupations étaient utilisés les

malades travailleurs durant le mois d'août :

XLIV SÉPARATION DES ADULTES ET DES ENFANTS.

Ces résultats remarquables montrent dans quelle pro-

portion considérable il est possible d'utiliser les malades

lorsqu'on a le concours dévoué d'un surveillant habile.

M. Langlet, d'ailleurs, a rendu encore d'autres services :

pendant presque toute l'année, il a exercé ses infirmiers

aux pansements, aux bandages, à faire les cahiers de

visite, les feuilles de vivres, le mouvement de la popu-

lation, etc.

Nous signalerons encore, parmi les améliorations

réalisées dans le service des adultes, l'adjonction de dif-

férents meubles fabriqués par les enfants (buffet pour

le réfectoire, casier pour les observations, vitrine pour

les instruments, etc., etc.) ; le nettoyage et la pein-

ture de toutes les salles, des bains, des réfectoires,

des escaliers, etc. Aussi, lorsque le 10r février 1887

nous avons cédé le service des adultes à notre succes-

seur, M. le Dr Ch. Féré, était-il dans des conditions aussi

parfaites que possible et bien différentes de celles dans

lesquelles nous l'avions trouvé en octobre 1879.

Là finirait notre compte rendu si nous ne croyions

utile, à propos d'un incident pénible, survenu entre

M. Féré et nous, de rappeler tout ce que nous avons

fait pour obtenir la séparation des épileptiques adultes

des enfants et partant la création d'une nouvelle

place de médecin à Bicêtre.

L'amitié qui nous unissait de longue date à M. Féré

nous avait inspiré le désir non seulement de lui laisser

le service dans de bonnes conditions matérielles, mais

encore de lui faciliter la connaissance rapide des mala-

des en mettant nos observations à sa disposition, en lui

donnant le tableau complet des malades, avec le diag-

nostic, les traitements, etc., et, en particulier, la liste

nuer. Il en résulte par conséquent la nécessité de songer à la créa-

tion d'un asile pour les idiots adultes des deux sexes, pourvu

'd'une école et d'ateliers.

SÉPARATION DES ADULTES ET DES ENFANTS. XLV

des malades pouvant être renvoyés prochainement, sus-

ceptibles d'être placés soit dans les autres sections d'a-

liénés (imbéciles ou idiots n'ayant plus d'accès), soit

dans l'une des divisions de l'hospice (malades n'ayant

plus d'accès mais étant atteints d'infirmités les mettant

hors d'état de gagner leur vie au dehors).

Grâce à ces précautions et aussi à ce fait que nous n'a-

vions pas voulu combler les vacances de lits qui s'étaient

produites dans les dernières semaines (huit), M. Féré

était assuré d'avoir successivement, dans le courant de

l'année, un nombre convenable de nouveaux malades.

Ce travail, joint aux certificats semestriels de plus de

400 malades, nous avait pris plus de temps que nous ne

le pensions, et nous n'avions pu terminer l'examen

d'une partie des adultes, les 72 épileptiques dits non

aliénés. Nous étions persuadé que rien ne s'opposerait à

ce que nous examinions une dernière fois ces malades,

que nous suivions depuis des années (beaucoup depuis

1879), afin de nous assurer que leur observation était en

ordre et constater pour la plupart les effets des traite-

ments auxquels ils étaient soumis. Nous en avons pré-

venu M. Féré en lui demandant la permission de les

voir une dernière fois. Il accéda à notre supplique; -,

mais quand, le surlendemain, nous avons demandé

qu'on nous amenât la première série, il nous a été ré-

pondu que, auparavant, M. Féré désirait en causer

avec nous. Nous nous sommes rendu auprès de notre

successeur dans le service. M. Féré nous a déclaré qu'il

refusait absolument de nous laisser voir ses malades ;

que nous avions eu assez de temps pour les examiner,

puisque, suivant lui, nous avions tout fait pour retarder

la division de notre service. Après lui avoir répété

qu'il s'agissait d'un dernier examen, que nous n'avions

pu faire, parce que nous avions cherché à lui être agréa-

ble en lui préparant un tableau exact des épileptiques

aliénés, - que nous voulions compléter d'ailleurs en

passant la revue des épileptiques non aliénés, nous

XLVI DÉDOUBLEMENT DU SERVICE.

avons exprimé notre surprise de l'accusation qu'il por-

tait contre nous d'avoir retardé le dédoublement du ser-

vice et, à l'appui, nous lui avons rappelé nos efforts ré-

pétés pour hâter la solution. Cet incident ayant été rendu

public et présenté sous un jour inexact, nous nous

trouvons dans la nécessité de citer des documents qui

démontreront que notre conduite a été absolument

loyale et exempte de toute critique.

L'extrait suivant du procès-verbal de la séance du

8 avril 1886 de la Commission de surveillance des asiles

(p. 84-85), relatant la visite de la Commission à l'hos-

pice de Bicêtre, résume très bien tout ce qui avait été

fait, jusqu'à cette date, au point de vue qui nous occupe.

a A la sortie de la troisième section confiée à ses soins (Epi-

leptiques adultes et enfants), M. le Dr Bourneville rappelle que

la construction do la Nouvelle section, réclamée par le Conseil

général, est due entièrement au Conseil municipal; que les

deux conseils ont décidé, par des votes réitérés (1) que, lorsque

la section dos enfants serait édifiée, il y aurait lieu de la

confier à un médecin et de confier l'ancienno section à un

autre médecin. Au mois de décembre dernier le Conseil mu-

nicipal, sur la proposition de M. le Dr Robinet (2), a invité

l'administration de l'Assistance publique à se conformer à ces

votes et à procéder à bref délai, par lo concours, à la nomina-

tion d'un nouveau médecin. M. le directeur de l'Assistance a

soumis la question à son Conseil de surveillance qui a déclaré,

sans avoir daigné visiter le service et se rendre un compte

exact de la situation, qu'il n'y avait pas lieu de faire la division

réclamée par le Conseil municipal et le Conseil général (3).

M. le D' Bourneville pense que la visite de ce jour aura permis

aux membres de l'Administration, qui, eux, se sont dérangés,

(1) Tous ces votes ont été exprimés sur notre proposition (voir

nos Rapports sur le budget des asiles de 1878 à 1883).

(2) Nous avions écrit à notre ami M. G. Robinet pour appeler

son attention sur ce fait (21 décembre 1885). Nous avons adressé,

sur le même objet, trois lettres à M. Peyron (5, 23, 26 janvier 1886) ; -P

- une nouvelle à M. G. Robinet (24 janvier 188G) et une à

M. Goupy (26 janvier 18rU) en leur qualité do membres du Conseil

de surveillance.

(3) Ce sont MM. E. Ferry et Moutard-Martin qui ont fait préva-

loir cette opinion.

SÉPARATION DES ADULTES ET DES ENFANTS. XLVII

de constater que la distance qui sépare les bâtiments des

adultes de l'infirmerie dos enfants, la multiplicité des occupa-

tions imposées au médecin par le service des enfants ; enfin,

ce fait que M. le D1' Bourneville a 463 lits, dont 425 sont occu-

pés, alors que ses deux collègues réunis n'en ont que 477 ;

toutes ces circonstances ont permis à tous d'apprécier le bien

fondé de la décision dos deux Conseils élus ; ils sont par con-

séquent tout à fait en mesure de renseigner exactement M. le

préfet do la Seine sur l'urgence qu'il y a à séparer la

3° section en deux, et de procéder à bref délai au concours

pour la nomination d'un cinquième médecin aliéniste à

Bicêtre. »

Peu après cette visite, et à notre prière, notre ami,

M. G. Robinet, a soulevé de nouveau la question du dé-

doublement de notre service devantle Conseil de surveil-

lance (1) qui s'est rendu, cette fois, aux raisons données

et par M. Robinet et par M. Peyron, directeur de l'Assis-

tance publique (2). Un arrêté conforme, c'est-à-dire dé-

doublant notre service, a été rédigé et envoyé le 31 juil-

let 1886 à la signature de M. le Préfet de la Seine. Nous

en avons mis la copie sous les yeux de M. Féré dès

le mois d'août. Nous sommes intervenu à la préfecture

de la Seine pour que cet arrêté futvite approuvé par 1. le

Préfet et reçut une exécution immédiate. L'arrêté fut

signé le 6 septembre 1886.

Depuis, en maintes circonstances, nous avons invité

M. le Directeur de Bicêtre etM. Imard à rappeler à l'Ad-

ministration la nécessité de procéder à l'exécution de cet

arrêté et, en dernier lieu, le 28 décembre 1886, en pré-

sence de M. le Dr Séglas, médecin suppléant de Bicê-

tre, allant même jusqu'à déclarer que, à partir du

1" février, époque du changement des internes, nous

refuserions de faire le service des adultes s'il ne nous

était donné satisfaction. Quelques jours plus tard,

(1) Procès-verbal du Conseil de surveillance, 1886, 20 mai,

p. Il.

('2) Procès-verbal, 1886, 22 juillet, p. 11.

XLVIII SÉPARATION DES ADULTES ET DES ENFANTS.

avant même que sa nomination ne fut signée) (1) (27 jan-

vier) M. le 1)' Féré recevait l'avis qu'il pouvait pren-

dre possession du service des épileptiques adultes

de Bicêtre. Voilà ce que nous avons fait et il est bien

évident que si nous avions eu l'idée de conserver les

deux services qui comptaient ensemble, le 31 décembre

dernier, 475 malades, nous n'avions qu'à nous désinté-

resser de la question après le vote défavorable du Con-

seil de surveillance.

(1) En effet, ce n'est que le 31 janvier 1887 que M. le Directeur

de l'Assistance publique a adressé à M. le Préfet de la Seine un

rapport dans lequel il lui demandait de présenter au Ministre de

l'intérieur M. le D1' Fore comme médecin du quartier des aliénés

de Bicêtre. L'arrêté ministériel a été signé le 4 mars 1887 par

M. Gobelet. Le 24 mars l'Administration de l'Assistance publique

informait M. le Dr Féré qui a pris rang à partir du 1 Cr février.

DEUXIÈME PARTIE

Clinique

Bourneville, 1886. 1

De l'Idiotie

Compliquée de cachexie pachydermique

(IDIOTIE CRÉTINOïDE) 1;

Par ]Q01EJJEMSr)H/ï]L]L]E At P. BRICON.

Parmi les formes déjà nombreuses que l'on peut

distinguer dans l'idiotie, l'une des plus curieuses et

des moins connues est assurément celle qui a été dési-

gnée par quelques auteurs anglais, entre autres par

MM. Fletcher Beach et Ireland, sous le nom d'idiotie

crétinoïde et que, nous fondant sur la découverte d'une

maladie nouvelle, le my.x'oee ou cac/lexie pac/lydel'-

mique, nous proposons de désigner sous le nom d'idiotie

avec cachexie paclaydernaique.

Les cas authentiques que nous avons recueillis

et peut-être y en a-t-il qui nous ont échappé sont

assez rares et plus rares encore sont ceux dans les-

quels l'autopsie a été pratiquée. Ceux-ci se réduisent, en

effet, à sept, et, fait capital, dans les cinq seuls cas

où les organes du cou ont été l'objet d'une recherche

anatomique on a relevé l'absence de la glande thyroïde.

D'où il suit, d'après ces faits, qu'il paraît y avoir une

' Cette étude sur l'idiotie crétinoïde est un extrait revu et complété du

mémoire présenté par l'un de nous en décembre 1885 à la Société mé-

dico-psychologique pour le prix Belhomme relatif à l'idiotie et de préfé-

rence -aux lésions des centres nerveux dans l'idiotie.

4 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

relation évidente entre l'absence de cette glande et

l'existence du myxoedème, ou de la cachexie pachy-

dermique. Ce qui ajoute encore de l'intérêt à ces cons-

tatations, c'est que, chez un certain nombre d'indivi-

dus ayant subi la thyroïdectomie totale, on a vu se

produire un myxoedème opératoire'.

La physiologie expérimentale, ainsi que cela résulte

des expériences de M. Horsley, vient également

appuyer la corrélation entre l'absence de la glande

thyroïde et l'existence de la cachexie pachydermique

décelée par la clinique et l'anatomie pathologique.

Nous sommes donc amenés, naturellement, à diviser

notre travail en deux parties : la première sera consa-

crée à l'exposé des observations d'idiotie avec cachexie

pachydermique ; la deuxième, à l'examen des cas

d'extirpation de la glande thyroïde, suivie de cachexie

pachydermique.

I. IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE

Les deux premières observations eu date, et non

les moins intéressantes, sont dues à Curling : nous les

traduisons textuellement.

Observation I. Aspect crétinoïde. - Gonflements sur les parties

latérales du cou et en avant des aisselles. - Persistance des fon-

tanelles. - E1, ? /sipéle. - Phlegmon de la cuisse. Mort.

Autopsie. - Composition et texture des gonflements. - Absence

de corps thyroïde.

En juillet \819, le Dr Litle, dit Curling, m'invita à examiner un

1 D'après les faits qui nous ont été communiqués par M. J. Reverdin,

ce myxoedème aurait une allure particulière et tendrait à s'atténuer; l'un

de nous a pu voir à Genève une des malades de M. Reverdin chez

laquelle, à part une certaine lenteur corporelle et intellectuelle, on ne

retrouvait plus les autres symptômes de la cachexie pachydermique.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 5

malade, qu'il considérait comme un crétin, à l'asile des idiots de

Highgate et d'examiner plusieurs gonflements situés de chaque

côté du cou, dont la nature était douteuse, mais que l'on croyait

devoir.attribuer à une hypertrophie de la glande thyroïde ou des

ganglions lymphatiques. L'enfant, âgée de dix ans, était née à

Lancashire ; elle était grosse, rabougrie, mesurait deux pieds six

pouces (63 c. 54); son corps était épais, ses membres dispropor-

tionnellement larges et longs. Les membres et le dos étaient poi-

lus. La tête était grosse; les fontanelles n'étaient pas fermées. Le

front était plat. L'expression était désagréable et celle d'une

idiote. La bouche était large, la langue épaisse et protubérante.

De chaque côté du cou, en dehors des muscles sterno-cleïdo-

mastoïdiens, il existait deux gonflements sensiblementsymétriques

qui donnaient à la palpation une sensation molle, pâteuse,

dépourvue d'élasticité. Des gonflements semblables, mais plus

petits et moins difformes, existaient en avant des aisselles. On ne

constatait aucun gonflement au devant du cou et la glande thyroïde

ne pouvait être trouvée à la palpation. L'enfant ne marchait que

très peu et ne pouvait aller de chaise en chaise qu'avec l'assis-

tance d'une autre personne. La parole était nulle, mais l'enfant

reconnaissait ses parents et manifestait quelques signes de volonté;

elle cherchait à se faire asseoir sur les genoux du médecin rési-

dent et s'y aidait elle-même. Durant son séjour à l'asile, elle fut

atteinte d'un premier érysipéle; son intelligence parut plus déve-

loppée à la suite de cette affection 1. Soignée ensuite pour un

phlegmon considérable de la cuisse, phlegmon qui suppura forte-

ment durant plusieurs semaines, elle fut de nouveau atteinte, après

la guérison de la plaie, d'un nouvel di-ysipèle accompagné de glos-

site et de stomatite. Elle mourut dans le marasme six mois après

le début de la maladie et environ quinze mois après son entrée à

l'asile.

Autopsie (vingt-quatre heures après le décès, faite par M. Cal-

laway). - Le corps était très émacié. Les gonflements cervicaux

avaient beaucoup diminué de volume; ils étaient composés de

graisse et occupaient le triangle postérieur de chaque côté du

cou; ils s'enfonçaient en bas sous les clavicules, remplissaient les

aisselles et pouvaient être suivis jusque sous les muscles sous-

scapulaires et vers l'angle inférieur de l'omoplate ; ils n'étaient/

pas enkystés. La graisse qui les composait paraissait, au micro^

cope, formée de tissu connectif et de cellules adipeuses. Il nm.

avait pas la plus légère trace de glande thyroïde 2. ' , .

\

1 On verra que Th..., dont nous rapportons l'observation plus loin,

fut également atteint d'érysipèle, mais son état intellectuel ne parut nul-

lement modifié par cette maladie intercurrente. \

2 Voir plus loin les observations de Th... et de Gra...

6 ' IDIOTIE CRÉTINO1D

Observation II. Idiotie. Gonflements anormaux de la région

cervicale. - Convulsions. - Mort.

Autopsie.- Composition des gonflements cervicaux. -.Absence

de glande thyroïde.

En 849, on m'adressa un enfant de six mois pour quelques

gonflements anormaux de la région cervicale. Les parents étaient

. sains; la mère, âgée de vingt-huit ans, avait eu une autre enfant.

Cette enfant était forte, elle présentait une expression marquée

d'idiotie; la face était large, le front fuyant et la tête petite. La

.langue large pendait eu dehors de la bouche. De chaque côté du

cou, en dehors des muscles sterno-cleido-mastoidiens, il existait

deux gonflements symétriques, obliques de forme ovale, durs au

toucher et dépourvus d'élasticité. Ils s'étendaient des bords du tra-

pèze au milieu des clavicules. Je fus frappé de la ressemblance de

ce cas avec celui du crétin de Highgate. La mère me dit que

l'enfant était inhabile à se servir de ses membres inférieurs,

qu'elle n'était pas aussi forte que son autre enfant. Elle tomba ma-

lade quelque temps après, refusa toute nourriture, et mourut dans

les convulsions le 7 décembre 1849.

Autopsie. - Le cerveau ne présentait d'autres anomalies qu'un

arrêt de développement des lobes antérieurs. Malgré un examen

très attentif de la région cervicale, on ne trouva pas de glande

thyroïde; on ne put en découvrir aucune trace. Les gonflements

cervicaux consistaient en amas superficiels et non enkystés de

graisse lâchement unie aux parties environnantes.

M. Curling attribuait le développement des boules

graisseuses anormales à l'absence du corps thyroïde et,

par suite, à l'imperfection des processus d'assimilation.

II exprimait l'espoir que ces faits pourraient diriger

les recherches futures sur les fonctions de la glande

thyroïde. Ces deux cas sont, sans aucun doute, deux

cas types d'idiotie crétinoïde, ou mieux d'idiotie compli-

quée de cachexie pachydermique avec absence du corps

thyroïde.

Vingt ans plus tard, M. Hilton Fagge publiait dans

les ((fe'eo-c/rM ? zca/.T'raMco ? M') de 1871 un autre

cas de cachexie pachydermique chez un enfant idiot.

' liston Fagge. On spol'orlie crelinism, occuring in England(p. 155)

CACHEXIE PACHYDERMIQUE 7

Observation III. - Idiotie avec arrêt de développement du corps et

type crétineux de la face d'origine congénitale ( ? ). -Pas de goitre.

- Tumeurs molles et mobiles de chaque côté du cou en dehors des

muscles sterno-cléido-mastoidiens.

Edmond D..., âgé de huit ans, est entré le 20 novembre 1870

à l'hôpital des enfants malades Evelina (service de M. Fagge).

Il avait déjà été vu à la consultation externe par le Dr Baxter. Le

père et la mère étaient bien portants; sobres, ils menaient une vie

régulière, et une enquête sérieuse n'a pu révéler d'excès de bois-

son soit habituels, soit même occasionnels. Leurs autres enfants

étaient bien portants.

Fig. 1.

L'accouchement eut lieu au forceps. -A la naissance, l'enfant

était fort; - il perça ses premières dents'à deux ans; - il n'es-

8 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

saya de marcher pour la première fois qu'à trois ans et demi. -

Pendant sa première enfance, on n'observa aucun autre phéno-

mène anormal chez cet enfant. Mais, plus tard, sa mère s'aperçut

qu'il voulait toujours s'asseoir où qu'il fût, et que, silencieux, il

gardait souvent la même position plusieurs heures de suite. La

croissance s'arrêta, et la mère prétend qu'il n'a pas grandi depuis

deux ans et demi. Actuellement, quoique âgé de huit ans, il a

l'apparence d'un enfant de deux à trois ans. Il pèse 25 livres

(9 ? 73) et mesure 2 pieds 7 pouces 3/1 (environ Om·,76). Il est tran-

quille ; il s'assied et reste immobile à quelque place qu'on le

mette. Il se tient rarement debout de son propre mouvement. Un

air de contentement stupide le caractérise généralement; parfois

sa face s'illumine d'un sourire passager. Depuis qu'il est habitué

aux choses et aux personnes du service, il sourit toujours dès que

l'on fait attention à lui; il sourit sans motifs si on le lui commande.

Il parle peu et semble ne connaître que quelques mots; mais il

nomme correctement divers objets qu'on lui présente. Il estpropre

et paraît susceptible d'affection (Fiq. 4 .)

La tête est grosse et ronde; la face large; les yeux sont très

écartés; le nez à sa naissance est plat et large; son extrémité est

relevée; les ouvertures des narines sont arrondies. La bouche est

grande et ordinairement ouverte, mais il n'y a pas d'écoulement

de salive. Les lèvres sont épaisses. L'enfant possède toutes ses

dents de lait. La langue est de grandeur naturelle.

De chaque côté du cou, juste au-dessus des clavicules, il existe des

gonflements mous, mobiles et dépourvus d'élasticité. Ces masses

peuvent être attirées à une certaine distance en bas au-delà des

clavicules, elles semblent faire corps avec les tissus sous-cutanés

plutôt qu'avec les tissus sous-jacents. Il n'y a aucune prolongation

de ces masses vers les aisselles.

11 n'existe pas de goitre; on 'ne peut percevoir à la palpation

aucune trace de glande thyroïde.

Le thorax est bien conformé. Les membres sont courts et gros ;

les tibias, quelque peu courbés, mais on ne constate pas d'épais-

sissements rachitiques des épiphyses. Les mains et les doigts sont

très larges, courts, épais; il en est de même des pieds et des or-

teils. La peau, sauf celle de la face, est rugueuse et présente par

places des parties dures, de peu de dimension, de couleur

brillante gris brun; les cheveux et les cils sont longs, noirs et

abondants.

Telle est la troisième observation publiée sur l'idio-

tie crétinoïde; les symptômes se rapportent exactement

à la cachexie pachydermique.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 9

Le quatrième cas est dû à M. Fletcher Beach '.

Observation IV. - Crétinisme sporadique. - Absence de glande

THYROÏDE.

Il s'agissait d'une enfant de quinze ans du poids de 11 kil. 530

(taille : 38 pouces (0 m. 78). Elle était très grasse ; la tête, aplatie

au vertex, était très large latéralement (voir la fig. 2) : diamètre

Fiv. 2.

longitudinal : 14 pouces (0 m. 23); circonférence : 19 pouces)

(0 m. 40). Les dents étaient régulières et bien conformées. L'en-

fant ne parlait presque pas; elle était d'un caractère enjoué, et

se livrait avec plaisir à différents amusements.

E.ivoyée à l'école de l'asile, elle apprit l'alphabet, put épeler

quelques mots de trois lettres et écrire deux lettres sous la dictée;

elle additionnait jusqu'à 5, comptait jusqu'à 50, multipliait par 2

jusqu'à 12; elle pouvait distinguer trois couleurs. Elle apprit un

peu à ourler. Elle possédait donc une certaine intelligence. Elle

était propre; l'appétit et le sommeil étaient bons, elle avait été

menstruée deux à trois fois. z

A l'autopsie on constata que le trou occipital était plus'petit qu'à

4 Fletcher Beach. - Notes of a case of spol'adic cretinisna with an

account of the Autopsie (The Journal of mental Science, vol. XXII, 1876,

p. 261).

10

IDIOTIE CRÉTINO1DE.

l'état normal; il présentait sur ses bords une petite saillie de

forme circulaire. La suture sphéno-basilaire était encore cartila-

gineuse. Le cerveau pesait 34 onces (434 gr. 06). Les circonvolu-

tions étaient très distinctes et grossières mesurant un demi-pouce

de largeur. A l'examen histologique d'une circonvolution on ne

découvrit ni dégénérescence totale ni inflammation. Les vaisseaux

étaient tortueux; la substance corticale était plus épaisse qu'à

l'état normal.

Il n'y avait pas traces de glande thyroïde. Les tumeurs grais-

seuses cervicales n'étaient pas enkystées; elles se prolongeaient

sous lessterno-cléido-mastoïdiens et les clavicules. (Voir fiy. 3).

Fig. 3. - Figure montrant la trachée, la langue, l'absence de corps

thyroïde, et les masses graisseuses. '

Nous nous abstiendrons de consigner ici les autres

cas d'autopsie de myxoedème parce qu'ils ne se rap-

portent pas au myxoedème congénital ou de la pre-

mière enfance, le seul que nous voulons étudier dans

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. il t

ce travail Nous donnons de suite les deux cas d'i-

diotie crétinoïde qu'il nous a été donné d'observer. De

ces deux malades l'un Gr... est encore vivant, l'autre

Th... Et le Pacha, a succombé il y a quelques mois.

Observation V. - Père : incontinence nocturne d'urine jusqu'à dix-

huit ans ; - Alcoolisme, colère, tuberculeux. - Tante paternelle

. tuberculeuse. - Mère migraineuse et tuberculeuse ; oncle [maternel

alcoolisme et suicide. - Frère et SOE111' un peu arriérés. - Etat

, crétinoïde; symptômes de cachexie pachydermique.

Gr... (Emile), né le 13 avril 4858 à Strasbourg, est entré le

25 mars 1874 à l'hospice de Bicêtre. (Service de M. BOURNEVILLE.)

Renseignements fournis par une tante paternelle (12 mars 4880).

- Père né à Strasbourg 2, mort en 1878 de la poitrine, à l'âge de

quarante-neuf ans; s'était engagé à dix-sept ans, avait sa retraeit

depuis un an dans la garde républicaine. Alcoolisme, absinthisme;

se mettait souvent en colère; n'a jamais monté en grade; a pissé

au lit jusqu'à dix-huit ans. [Son père, journalier aux champs, ne

savait ni lire ni écrire; il était sobre, bien conformé et est mort

d'une fluxion de poitrine; sa mère, de taille ordinaire est morte

à soixante-quinze ans « de vieillesse ». Une soeur qui nous donne

les renspignements est intelligente; une deuxième morte poitri-

naire. Pas de nerveux ni de difformes, etc., dans la famille.]

111ère, née à Lille, morte en 1877, à trente-neuf ans, de tuberculose

pulmonaire, très intelligente, de taille assez élevée, était sujette

aux migraines. [Père ? - Mère serait encore vivante et habite-

rait Lille; deux frères, l'un d'eux se serait jeté à l'eau à la suite

d'alcoolisme et de chagrins; deux soeurs bien portantes. Pas de ner-

veux, ni de difformes dans la famillede consanguinité.

Cinq enfants : I Louis, vingt-deux ans, de taille élevée, peu in-

telligent, employé aux chemins de fer, pas de convulsions, a des

migraines; - 20 notre malade ; - 3° une fille de dix ans, grosse,

ne grandissant pas, peu intelligente, n'a marché qu'à trois ans,

pas de convulsions, a pissé au lit jusqu'à neuf ans et y pisse encore

quelquefois; - 4° et 5° d'autres enfants morts, l'un du croup,

l'autre de la rougeole.

1 Les autopsies de cas de cachexie pachydermique ne sont du reste

actuellement qu'au nombre de 13 : 2, de Curling (1850); 1, de rletcber-

Beach (1876); 1, de Charpentier; 1, de Bouchaud; 1, de Bail; 3, de Ord;

1, de Lloyd; 1, deGreenfield; 1, de Henrot; 1, de Brandes (ts8a). Ceux de

Curling et de rletcher-Beacl, ceux de Charpentier, de Bouchaud, de Bail,

et le nôtre appartiennent à des idiots crétinoïdes.

' Il y a quelques goitreux à Strasbourg.

12 2 IDIOTIE CRÉTINO1DE.

Notre malade, Gr... (Ernest), est né à Strasbourg le 13 avril 1858

où sa mère était allée faire ses couches, bien qu'habitant Paris de-

puis son mariage ; la grossesse n'avait rien eu d'extraordinaire; né

à terme. - A la naissance, il était gros, mais paraissait difforme;

la tête surtout était « horrible voir». Il a été élevé au biberon

à Strasbourg et avait plus de quatre ans lorsqu'il a commencé à

marcher : vers cette époque il eut la rougeole. Il est venu à Paris à

l'âge de cinq ou six ans, et n'a pas été trop tardif à parler. Il a

pissé assez tard au lit. Il n'est jamais allé à l'école, les autres en-

fants se moquaient de lui. Il restait à la caserne, faisait des com-

missions, car sa mémoire est bonne ; il était assez affectueux, et

se chagrinait facilement; il dormait bien et n'était pas peureux.

Point de kleptomanie, de pyromanie, d'onanisme; ni descrofulides.

48S0. 17 mars. - Tête très volumineuse, le crâne est assez ré-

gulièrement conformé et symétrique ; le front est bas, très large

et semble se continuer directement avec la face. Les arcades

sourcilières sont peu marquées et au dessous d'elles se trouve une

encoche facilement perceptible.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE.

13

cariée; la troisième est en voie d'apparition. A gauche, la deuxième

petite molaire et la première grosse molaire manquent, la deuxième

et la dernière sont cariées.

Fig. 4. - Cette figure représente trois cas d'idiotie : le premier (à

gauche) avec goitre, les autres accompagnés de cachexie pachydermique.

- Le sujet de droite est Gr...

La voûte palatine est large, a sa profondeur habituelle, mais le

voile du palais n'est pas symétrique, la luette est un peu reportée

vers la gauche, l'arcade qui la sépare du pilier gauche est beau-

coup plus étroite que l'arcade du côté droit.

1 ré IDIOTIE CRÉTINOÏDE..

Le thorax est constitué d'une façon particulière. Vu de face, on

remarque que les dernières côtes forment, au niveau des hypo-

chondres, une saillie marquée en dehors, la base de la poitrine

est ainsi latéralement élargie; le sternum n'offre pas de saillie

anormale, mais les attaches des côtes à cet os, surtout les plus

inférieures, sont très saillantes; elles semblent s'articuler au ster-

num de la même manière que les clavicules.

La colonne dorsale au niveau de la base du thorax, forme une

dépression très marquée ; lorsque l'enfant est debout, il existe à

ce niveau un sillon vertical assez profond pour contenir le doigt.

lIIemb1'es. - Etant donnée la taille exiguë de Gr.. les

membres tant supérieurs qu'inférieurs sont réguliers, égaux, pro-

portionnés, ainsi que le montrent les mensurations ci-après :

Longueur du bras mesurée de l'acromion à l'épicondyle, 19 cent.

Longueur de l'avant-bras de cet épicondyle à l'apophyse styloïde

du radius, 19 cent.

Longueur de l'apophyse styloïde du radius à l'extrémité du

médius, 4 : 5 cent.

Longueur de la cuisse, de l'épine iliaque antéro-supérieure au

bord externe du plateau tibial, 3 cent, et demi.

Longueur de la jambe au bord extérieur du plateau tibial à la

pointe de la malléole externe, 27 cent. et demi.

De la malléole externe à l'extrémité de l'orteil médian, 16 cent.

Gr... mange assez proprement, se sert de la cuiller, de la four-

chette et du couteau; l'appétit est bon, les digestions sont nor-

males, les selles régulières; il n'y a pas de vomissements.

Respiration et circulation. - Auscullation du poumon et du coeur

normale. Pouls à 78 au moment de l'examen avec des inégalités

très grandes, il n'est pas perceptible au nheau de la radiale, on

ne le sent qu'au niveau de l'humérale.

La peau présente sur les membres et la plus grande partie du

tronc des altérations qui rappellent un peu l'icthyose. Elle est

rugueuse au toucher et couverte de fines squames épidermi-

ques. Sa couleur générale est basanée. A la face, on remarque de

très nombreuses taches de lentigo, principalement sur le nez et

le front, ainsi que sur les paupières inférieures. Il n'existe aucune

pigmentation ni des organes génitaux, ni du mamelon; pas de poils

au pubis ou sous les aisselles. Les cheveux sont assez fournis. Ils

sont durs, jaune rougeâtre, secs et gros. Ils descendent très bas

sur le front; les sourcils sont à peine marqués, les cils fins et peu

épais; pas le moindre poil de barbe bien que Gr... ait vingt-deux

ans. On remarque, en outre, diverses tuméfactions mollasses

semblables à de petits lipomes diffus ( ? ). L'une d'elles est située

à la partie droite de la base du cou, au niveau même de la clavi-

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 15

cule. Elle a le volume d'une petite orange, une consistance gélati-

niforme et se déplace avec la peau; du côté gauche, il en existe

une deuxième analogue à la première remontant en arrière jus-

qu'au bord antérieur du trapèze, mais moins volumineux que celle

de droite. Au niveau du creux axillaire et sur la paroi thoracique,

le tégument présente une disposition analogue.

Organes génitaux. - Le testicule droit est rendu au fond des

bourses; il est de la grosseur d'une noisette. A gauche, le scrotum

est vide, on sent à une certaine distance, dans le canal inguinal,

une petite tumeur assez dure, mais non douloureuse à la pression

qui parait être le testicule droit. A droite, au-dessus du testicule,

sur le trajet du cordon, on sent une tumeur du volume d'un oeuf

de pigeon sous laquelle bute ce testicule quand il remonte vers

l'anneau (hernie inguinale). - La verge ne semble pas anormale-

ment conformée; toutefois, il est impossible de découvrir le gland.

Le prépuce est fort long, et, quand on essaie de le repousser en

arrière, on détermine une vive douleur.

La sensibilité cutanée paraît normale dans ses différents modes.

0 ? -gaiesdes sens.-Yeux normaux; pupilles régulières, iris jaune

brun foncé et contractile; Gr... dit voir mieux de l'oeil gauche

que de l'oeil droit. En effet, on remarque, sur la cornée de ce

dernier, une petite tache d'albugo qui couvre la région inférieure

de la pupille. Il raconte du reste qu'il aurait eu, à une époque

qu'il ne peut préciser, une maladie de l'oeil pour laquelle il serait

resté dix-huit mois à l'hôpital des Enfanls. 11 connalt les cou-

leurs. - Ouïe, odorat, goût normaux.

1880. Si juin. - Le caractère est d'une susceptibilité extrême :

Gr... se considère comme un homme et ne tient plus aucun

compte des observations, il se met facilement en colère; il

demande à passer aux hommes, aux vieillards.

46 septembre. - Poids : 30kilog. Taille : lu,20.

Octobre. Vient à l'école depuis quatre ans; sous tous les rap-

ports ses progrès sont presque nuls; n'a pas de mémoire, ne peut

faire ni gymnastique, ni escrime.

21 septembre. - Ne vient à l'école que par contrainte et ne fait

aucun progrès; il est convaincu qu'à son âge on doit lui laisser

une entière liberté, ne sait pas encore lire, mais écrit un peu;

stationnaire sous tous les rapports ; il est très frileux.

4881. 4 juillet.- Gr... ne fait à l'école que des apparitions dont

le résultat est nul au point de vue des progrès : à la gymnastique;

il connaIt maintenant tous les mouvements d'ensemble.

31 juillet. - Poids : 29 kilog. 900. Taille, 1m,2l.

6 novembre. Gr... apris cette année régulièrementles douches,

qu'il prenait et cessait alternativement depuis deux ans; et, tan-

16 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

dis qu'autrefois il essayait de s'échapper, maintenant il les prend

seul. Il cherche à s'occuper un peu, aide au réfectoire à essuyer la

vaisselle et semble un peu moins lourd : on supprime les douches.

28 décembre. - Nous voyons le frère et la soeur de Gr... le

premier, qui a été soldat, a vingt-sept ans, mesure 4m,67, est

élancé, intelligent; sa soeur est âgée de treize ans, mesure 4m,40,

pèse 39k500; traits réguliers , elle est assez intelligente.

1882. 24 janvier. - A fait un peu de progrès en classe et en

gymnastique. Lecture courante, mais peu intelligente, calcul et

mémoire, néant. Poids : 31ki00. Taille : lm,21.

9 mai.- Lecture courante, mais peu expressive; calcul, ne con-

naît que l'addition et la soustraction; mémoire presque nulle, ne

peut apprendre ni histoire, ni géographie ; a quelques notions très

usuelles; en résumé, progrès peu appréciables ; il prend assez de

plaisir à l'escrime, mais ne peut pas apprendre à danser. Il va à

l'école une heure, matin et soir; le reste du temps, il est occupé

au réfectoire à balayer et à laver la vaisselle.

Juin. - Poids : 31 k800. Taille : je,22.

7 juillet. - Sorti en permission le 4, on lui a surpris, le 6, un

flacon d'eau-de-vie que ses parents lui avaient donné.

25 juillet.-Les deux testicules sont dans le scrotum. Le gauche

rentre facilement dans le canal inguinal; le droit ne peut pas

rentrer par suite d'une hernie qui descend dans les bourses et est

assez difficilement réductible. Les deux testicules sont gros

comme des billes. Pas de poils au pubis.

7 décembre.- Le teint a une coloration jaune cireux de plus en

plus prononcée; les paupières sont toujours légèrement bouffies.

Gr.. a delà répugnance au mouvement, surtout à la marche; ainsi

il n'aime pas les promenades, sauf celles où la voiture suit, ce

qui semble indiquer une fatigue rapide.

1883. Janvier. Poids : 33Jr.IOO. Taille : 4 ? 3.

30 juin. - Poids : 33k 300. Taille : lm,23 fort.

1884. 16 janvier. Entré à l'infirmerie pour des douleurs du

côté de sa hernie (inguinale droite) et des douleurs aussi du côté

opposé. La hernie parait réductible. Bain d'une heure. Soir : T.

R.37°,7.

47 janvier. - Les douleurs ont disparu. T. R. 370,5. - G... se

plaint de tousser un peu; voix enrouée; rien à l'auscultation.

20 janvier. - Poids : 3t kilog. Taille : 4 -23.

Juillet. Poids : 34k500; Taille : 1 m;a.

488. Janvier. - Poids : 35k.250; - Taille : 4m24.

Juin. - Poids : 36k200; Taille : 4m.25.

16 décembre. Il est procédé à un nouvel examen du malade.

La peau du cuir chevelu est sèche, couverte d'écailles brunâtres,

principalement depuis le vertes jusqu'au voisinage du front qui

CACHEXIE Y : 1CHYDLIt\ItQUE, 17 7

est ridé. Entre le tiers moyen du crâne, dans toute cette par-

tie, les cheveux, un peu roux, sont plus clair-semés. Les sour-

cils sont noirs, larges, assez bien fournis; les cils sont ! long ? ,

assez abondants par place; paupières supérieures très bouffies

diminuant considérablement l'ouverture des yeux, sans trace

d'oedème , mais rappelant les gonflements des paupières des

albuminuriques. Patte d'oie très prononcée. - La peau de la

face est sèche, squameuse, rugueuse au toucher d'une pâleur ci-

reuse avec de nombreuses macules. Amygdales petites; mu-

queuse buccale pâle; langue un peu épaissie. Gr... dit qu'il ne

peut sortir la langue. La parole est très pâteuse, lente, monotone.

De chaque côté du cou, qui est très court, dans le creux sous-

claviculaire, existent des masses adipeuses', comme gélatini-

formes, tremblante ? au toucher. La glande thyroïde, si elle existe,

serait très peu développée. - Les aisselles sont complètement

glabres; à leur partie antérieure on trouve des masses adipeuses

tremblotantes se prolongeant jusqu'au sein que l'on croirait tout

d'abord très développé, mais on ne sent pas la glande.

Organes génitaux. Bourses pendantes, de niveau; testicules de

la dimension d'un petit oeuf de pigeon. Le testicule droit parait

un peu plus gros que le gauche, mais de ce côté il existe une

hernie assez volumineuse qui, lorsqu'elle n'est pas réduite, fait t

descendre la bourse plus bas. Pénil glabre, mais au-dessus

quelques poils et de chaque côté une touffe. - Verge- Prépuce

long, verge déviée à gauche (hernie); circonférence, 90 millim.,

longueur, 90 millim. environ, car elle est assez difficile à appré-

cier à cause du tire-bouchon formé par le prépuce et du phimosis

qu'on ne peut pas réduire. -Quelques poils à la partie inférieure

de l'anus.

Sensibilité très vive au froid; même à l'atelier il se couvre beau-

coup et vient se placer le plus près possible du poêle.

Langueur corporelle; il fait tout avec lenteur. Il range avec

ordre toutes ses affaires; s'habille seul, assez bien, mais très len-

tement. La démarche est lourde ; parfois il court, mais très lour-

dement ; depuis quelque temps il a pris la manie de s'aider d'un

bâton pour marcher. Pas de céphalalgie ; mémoire très médiocre;

il ne peut rien apprendre par coeur; sa mémoire est conservée

pour les faits et les choses usuelles. Entré à l'atelier de tailleur

en 1883, il y a fait des progrès, mais lents; actuellement il fait

bien les coutures et sait se servir du fer.

20 déc. - L'urine contient 25 gr. 62 d'urée par litre.

22. - Gr... est souffrant depuis ce matin; vers neuf heures et

demie, frisson assez violent; en arrivant à l'infirmerie vomisse-

ment de glaires, de lait coagulé, etc., il n'a pas mangé ce matin

et se plaint d'une douleur siégeant au niveau de la fosse iliaque

l3uU1\NEVILL, 1886. 2

18 IDIOTIE CRI·TIN01DE.

droite. Partout ailleurs le ventre est médiocrement douloureux; il

existe un tympanisme léger. - Langue légèrement saburrale;

deux garde-robes ce matin. - La hernie se réduit avec une grande

facilité; pas de céphalalgie, ni d'épistaxis. - Teint bouffi et jau-

nâtre, coloration normale des conjonctives. Traitement : deux

verres d'eau de Sedlitz.

29. - L'urine examinée de nouveau contient 16 gr. 65 d'urée

par litre.

1886. 17 février. - Angine très légère.

Juin . - Poids : 37 kil. ; taille : 1 m. 26.

9 août. - T. R., 37°,4. - Soir : 37°,6.

10. - T. R. 37°,6. -Soir : 37°,4.

11. - T. R. 37°,4. - Soir : 3 i°,4.

12. - T. R. 37°,4. Soir : 37°,8.

13. - T. R. 37°,8. -Soir : 37°, 8.

14. - T. R. 37°,4. - Soir : 37°,4.

15. T. R. 37°,6. - Soir : 3î°,6.

16. - T. R. 37°,4.

23 août. - Un nouvel examen du malade montre peu do chan-

gements dans son état. Les paupières gauches sont plus bouffies

qu'à droite, aussi l'oeil droit est-il plus ouvert. A la lèvre supérieure,

aux extrémités, il existe un léger duvet; aux joues, rien. Les ais-

selles et le pénil sont glabres; à la racine des bourses se trouvent

quelques poils longs disséminés sur une hauteur d'un centimètre

et demi. Les bourses sont très pendantes. un peu plus à gauche

bien qu'il y ait une hernie signalée à droite. Le méat est normal.

Les organes génitaux ne présentent aucune autre particularité

qui n'ait déjà été signalée. Le pouls, un peu mou, est à 80; la

respiration à 24.

La sensibilité générale parait 1101 male sous toutes ses formes.-

L'ouie parait plus développée à droite; l'odorat est un peu obtus;

le goût est normal, et Gr... distingue les couleurs également des

deux côtés. c

Gr... s'occupe dans le service, nettoie les boutons des portes,

les cuivres des bains. Il travaille, en outre, toujours à l'atelier

du tailleur; il sait faire n'importe quelle couture, mais non les

rabattements, il sait repasser les boutonnières. Dans une séance

de quatre heures il peut faire un mètre cinquante de couture , ce

qui vaut à peu près quinze centimes; parfois il boude le maitre

tailleur parce qu'il n'est pas assez payé; on lui donne dix centimes

de récompenses chaque samedi pour son travail à l'atelier. Il

est du reste avare, ne dépense rien et, avec les quelques sous

qu'on lui donne, il a accumulé 9 fr. 511, plus tard il s'achètera des

vêtements pour sortir; en attendant, sa grande préoccupation est

de passer aux hommes.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 19

A l'école, Gr... a fait quelques progrès ; il écrit mieux ; sa lec-

ture est peu près courante; il sait additionner, mais connait

peu la soustraction ; sa tenue est bonne, et il est propre. Son ca-

ractère est toujours un peu irascible, grognon, ronchonneur,

parfois grossier dans son langage.

24. - Poids : 37 kil. fort; taille : 1 ru. 27 fort. - L'urine est

claire, ne contient ni sucre, ni albumine. - La température prise

sur chaque cuisse avec un thermomètre de surface est de 3 ? t,

à droite comme à gauche.

Le cas de Gr... est un exemple de myxoedème a

forme légère se rapprochant sous beaucoup de rap-

ports, comme nous le verrons plus loin, des formes

observées à la suite de l'extirpation totale de la glande

thyroïde. Nous appellerons dès maintenant l'attention

sur l'absence probable de la glande thyroïde, sur les boules

graisseuses cervicales et sur le développement tardif

et encore imparfait de lapuberté; il semble toutefois que

uotre malade continue encore à se développer, quoique

lentement, ainsi que le montrent les mensurations se-

mestrielles de la taille : z0 en 1880; li,22 en 1882;

1 ? 3 en 1884; li,25 en 1885; 1m,27 en août 1886.

L'état intellectuel de Gr... s'est aussi amélioré; la

mémoire paraît meilleure, il semble un peu plus vif,

surtout en été, et il a fait des progrès tant à l'école

qu'à l'atelier.

L'observation suivante a déjà été publiée par l'un

de nous, dans le n° 36 du Progrès médical de 1880;

elle a été ensuite reproduite dans la thèse de M. Ridel

Saillard', communiquée à la Société de biologie (1882)2;

enfin le malade qui en fait l'objet a été montré à leurs

cours par M. Charcot et par M. Magnan.

1 Voir le Compte rendu de Bicêtre pour 1880.

2 Communication faite avec M. Gilles de la Tourette.

20 IDIOTIE CRÉT1 : V01DE.

Observation VI. - Idiotie et crétinisme. - Arrêt de développe-

ment. - Etat oedémateux et rénitent de la peau (cachexie pachy-

dermique) avec tumeurs myxoetiémateuses disséminées. - Exercices.

- Amélioration. - Erysipèles. - Refroidissement. Tym-

panite. - Atonie. Mort.

Autopsie : OEdème pulmonaire. -- Hydrothorax et hydro-

péricarde. Dilatation considérable du ccecum; absence du

corps thyroïde; dédoublement du cap de la troisième circonvolu-

tion frontale gauche; irrégularités et anomalies des circonvolu-

tions et des scissures ; petite tumeur siégeant sur un pli passage

allant dela deuxième à la troisième circonvolution frontale gauche.

Thén... (Eugène), né le 20 août 1861, placé à plusieurs

reprises par sa mère à l'infirmerie des idiots de Bicêtre, est entré

en dernier lieu le 16 juin 1879 (service de M. Bourneville), et y

est décédé le 18 novembre 1885.

Renseignements fournis par sa mère (22 octobre 4 879).- Père,

architecte, présentait une malformation du bras gauche, qui était

moins développé que le droit ; ce bras se terminait par un moi-

gnon formé par la région métacarpienne et une portion des

doigts rudimentaires. Il travaillait beaucoup, même de nuit, ne

faisait pas d'excès de boisson, il n'était pas migraineux, n'avait

jamais eud'affectionscutanées; d'une santé habituellementbonne,

il éprouvait parfois des étourdissements et avait des épistaxis qui

ont cessé à quarante-huit ou quarante-neuf ans. 11 est mort en

1871, à l'âge de cinquante-deux ans, des suites d'une hémiplégie

consécutive à une attaque d'apoplexie survenue dix-huit mois

auparavant. [Père, mort vers soixante-treize ans, d'une attaque

d'apoplexie. - Mère, morte jeune du choléra. Un frère bien

portant, pas d'aliénés, pas d'épileptiques, pas d'autres difformes

ni d'alcooliques dans la famille.]

Mère, quarante-cinq ans, couturière, bien portante, n'offrant

aucune trace de goitre, n'a jamais eu qu'une fièvre typhoïde dans

l'enfance ; elle n'est pas migraineuse, mais depuis, quelques

années, elle est sujette à des céphalalgies qu'elle attribue aux

chagrins; elle est très impressionnable et pleure facilement. Il

ne parait pas que le goitre et le crétinisme soient endémiques

dans son pays (Courancelle). Elle a une cousine au troisième degré

porteuse d'un goitre très gros, intelligente, qui serait la seule goi-

treuse du village. Dans son pays, elle auraitvu autrefois un homme

ressemblant à son fils. [Père, cultivateur, sobre, mort à quatre-

vingts ans, d'une chute; il n'était pas en enfance. - Mère, morte

d'une bronchite à soixante-douze ans ; intelligente, n'était pas

nerveuse ; un frère bien portant. intelligent, a deux enfants sains,

bien portants et intelligents ; deux soeurs jouissant d'une bonne

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 21 1

santé, non nerveuses, ont l'une, trois garçons, l'autre, un garçon,

tous bien portants. - Pas d'aliénés, etc.. dans la famille.]

Pas de consanguinité. Le père est né à Paris, la mère est de

Courancelle (Meuse).

Trois enfants : 1° garçon, mort à quinze mois, (la nourrice était

devenue tuberculeuse), n'a pas eu de convulsions; 20 notre ma-

lade ; 30 fille, bien développée, dix-sept ans, intelligente, s'exprimant

très nettement; traits réguliers, figure agréable, pas de goitre;

elle ne présente aucun accident nerveux '.

Notre malade. Durant la grossesse, à trois mois, la mère fut

renversée par une voiture ; cet accidenlsans conséquences graves

lui causa seulement peur ; elle était triste parce qu'elle n'était

pas encore mariée à cette époque ; il n'y aurait jamais eu de

scènes violentes; le père était marié et ne l'a épousée qu'après la

mort de sa femme. Elle n'aurait pas vu de crétins pendant qu'elle

était enceinte. - Accouchement à terme (à Neuilly-sur-Seine),

assez long; on aurait cassé un bras de l'enfant, le droit, croit-on,

et démis un poignet. A la naissance, l'enfant était très gros.

Il fut confié jusqu'à un an à une nourrice de Rambouillet, non

goitreuse, qui l'éleva au sein dans des conditions hygiéniques dé-

plorables (logement humide, etc.), et la 'mère soupçonne qu'il

Fig. 5. - Th... à l'âge de 4 ans.

aurait eu à cette époque quelques convulsions. Quoi qu'il en soit,

elle le reprit chez elle et, vers quinze mois, il commença à mar-

'Elle s'esl mariée à 19 ans, fait une fausse couche; en 1883, elle était

bien portante.

22 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

cher; il ressemblait alors, affirme-t-elle, à tous les enfants de

son âge; il était affectueux, donnait quelques signes d'intelligence

et prononçait un petit nombre de mots. C'est à cette époque

qu'il aurait fait une chute dans un escalier et depuis lors, au dire

de la mère, il aurait complètement changé. Deux ans après cet ac-

cident, il pouvait encore marcher assez convenablement, tenu par

la main; il n'aurait que rarement marché seul dans l'appar-

tement, et rarement sorti dehors. Bien qu'aucune nouvelle atta-

que de convulsions ne soit survenue, néanmoins, la parole

n'avait fait aucun progrès. C'est dans ces conditions que l'enfant

fut amené pour la première fois à Bicêtre, où il fit un séjour

d'un mois (juillet-août 1865). La mère ne voulut pas le laisser

davantage, parce que, dit-elle, il s'ennuyait et que, d'ailleurs,

il était devenu gâteux depuis son entrée. 11 marchait aussi moins

bien, mais était toujours très affectueux. La dentition se fit lente-

ment ; elle n'était pas complète à sept ans. En 981 I, sa soeur lui

fit par imprudence de fortes brûlures à la figure et aux mains. Il

fut alors ramené à Bicêtre, d'où il ne sortit qu'en octobre 1878

pour y rentrer l'année suivante, comme il a été dit plus haut.

État actuel (6 janvier 4880). - L'enfant reste pendant tout le

jour assis devant une table, dans un état d'inertie et d'obtusion

intellectuelle complète; sa position habituelle, à l'extrémité de

la table qu'il a l'air de présider, son regard indifférent et son

extrême apathie lui ont fait donner par les malades le sobriquet

de Pacha, sous lequel il est connu dans la maison.

La tête, légèrement fléchie sur le thorax, est volumineuse et

irrégulière et sa forme rappelle grossièrement celle d'un pain

de sucre. L'occipital forme en arrière une saillie notable du côté

gauche; en avant, on note, au contraire, un développement plus

considérable de la bosse frontale droite; vu d'en haut, le crâne

présente ainsi une plagiocépltalie assez marquée. La partie posté-

rieure du crâne est très développée, les sutures fronto-pariétales

sont saillantes 1 et les dépressions sus-sourcilières très pronon-

cées. Le cuir chevelu est atleint d'une calvitie presque'complète

et présente sur toute son étendue une desquamation analogue à

celle du pityriasis capitis. Les cheveux sont courts, volumineux,

secs, presque noirs ; ce sont des cheveux d'adulte et leur rareté

contraste tristement avec la physionomie enfantine du malade.

Le visage est hideux; le front et la racine du nez sont couverts

de rides, les sillons naso-labiaux sont très accusés, le nez est ca-

' Voir à l'autopsie la description du crâne.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 23

mard, très déprimé à sa racine comme chez la plupart des petits

enfants; sur toute l'étendue de la face, la peau est mate, d'une

couleur blanc jaunâtre et bouffie; cette bouffissure, surtout mar-

quée au niveau des joues qui sont pendantes, des lèvres et des

paupières, contribue à accuser les rides et donne à la physionomie

un air vieillot, contrastant encore avec l'apparence fine et cireuse

de la peau qui est absolument glabre; les sourcils sont à peine

/t'ig. 6. - Th... à l'à-e de 20 ans.

marqués et les cils rares; les yeux restent constamment à demi

fermés et les paupières sont collées chaque matin par suite d'une

blépharite ciliaire double. - Ajoutons, pour terminer ce portrait,

qu'il existe sous le menton une vaste cicatrice de brûlure s'éten-

dant d'une oreille à l'autre, à la manière d'une jugulaire; la

surface de cette cicatrice, qui présente une couleur violacée, est

parsemée de brides dont quelques-unes, insérées au niveau du pli

mento-labial, produisent le renversement de la lèvre inférieure,

l'écoulement presque continuel de la salive et achèvent ainsi de

donner à la physionomie l'air bestial qui la caractérise. L'enfant

peut néanmoins fermer la bouche quand il le veut, mais un elfort

parait nécessaire pour cela et il ne le fait guère qu'au moment

de la déglutition. Pendant la mastication, la lèvre inférieure reste

pendante et laisse s'écouler au-dehors une partie de la salive et

24 IDIOTIE CRTINOÏDE.

des aliments. Les dents sont, pour la plupart cariées et usées jus-

qu'au niveau des gencives; en haut, les deux incisives médianes

de lait persistent en avant des dents définitives correspondantes.

Fig, 7. - Cette figure représente trois cas d'idiotie : le premier (à

gauche) avec goitre, les autres accompagnés de cachexie pachydermi-

que. - Le Pacha est tenu par les deux autres idiots.

Il ne parait pas exister d'asymétrie de la voûte palatine, ni de

malformation du voile du palais. Les oreilles sont régulièrement

ourlées, symétriques et présentent un lobule bien développé;

elles s'écartent fortement de la tête en arrière.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 25

La bouffissure de la face, mentionnée ci-dessus, ne paraît pas

avoir existé toujours au même degré; il semble y avoir eu un

temps, d'après les renseignements fournis par la mère, où la

physionomie de l'enfant reflétait assez exactement ses sentiments.

Fig. S. - Th... à l'âge de 21 ans (mai 1882).

Aujourd'hui, la face bouffie paraît avoir perdu beaucoup de sa

mobilité et les rares phrases qui sont comprises n'excitent aucun

jeu de physionomie; la joie s'exprime par un sourire grossier et

disgracieux. La douleur et souvent une légère contrariété suffi-

sent à provoquer des larmes et des cris. La parole est réduite à

quelques monosyllabes; ajour pour bonjour, teuu pour gâteau, ci

pour merci et quelques autres. La voix est enrouée, nasillarde, la

prononciation confuse et ce n'est ordinairement qu'en pressant

l'enfant de questions ou en lui présentant le bonbon attendu

qu'on obtient une réponse lente à venir et comme traînée.

26 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

L'habitus général du tronc et des membres est assez remar-

quable. Outre le défaut de taille déjà signalé, on remarque une

extrême brièveté du cou qui est en même temps très élargi, mais

ne porte aucune trace de tumeur thyroïdienne. On sent distinc-

tement le larynx sur la ligue médiane en plaçant la tête dans

l'extension et en déprimant fortement les téguments, notablement t

épaissis à ce niveau. Tout au plus peut-on sentir, sur le côté droit

du cartilage thyroïde, quelques nodules roulant sous le doigt et

appartenant peut-être au corps thyroïde, qui serait par conséquent

extrêmement atrophié.

Sur toute l'étendue du tronc, la peau est fine, d'un blanc mat,

assez résistante sous le doigt, comme infiltrée et paraît recouvrir

une épaisse couche de tissu cellulaire lâche; au devant du thorax

elle est sillonnée de petites veines et de nombreux capillaires.

Ainsi que l'a fait remarquer M. Iladden, la transpiration est

insensible et l'excrétion de la matière sébacée paraît complète-

ment suspendue.

Au niveau des régions sus-claviculaires, au-dessous des aisselles

et en divers points du thorax, on la trouve soulevée par des

tumeurs molles, tremblotantes, d'apparence oedémateuse. Ailleurs,

elle est tendue, résistante sous le doigt et comme bouffie de

graisse. On ne constate pas à la main d'abaissement notable de

la température. Le thermomètre appliqué sur le devant de la

poitrine, puis sur une des tumeurs cervicales, a marqué successi-

vement 3 : i°,6 et z,2, la température extérieure étant de : 250.

La température rectale, prise matin et soir pendant huit jours

consécutifs, est restée invariablement à 37 ? le soir. Il parait

donc exister un léger abaissement de la température centrale.

Le ventre est volumineux.

Les membres sont gros, courts, empâtés, et la peau y présente

les mêmes caractères que sur le tronc; toutefois, on y observe

un abaissement de température, sensible même à la main; le

thermomètre, appliqué sur la face externe des bras, marque à

droite 33°,8, à gauche 34", I .

La main droite est déformée par une brûlure dont la cicatrice

a produit la rétraction des trois derniers doigts. La préhension

est encore possible avec le pouce et l'index dont le malade se

sert encore assez adroitement pour saisir les pièces de monnaie

ou les bonbons qu'on lui présente. Sur le dos de celte main, la

peau, comme oedémateuse, forme une pelotte épaisse, mais ce

gonflement résiste sous le doigt et ne disparaît pas par la pres-

sion. La main gauche offre un état analogue, bien qu'à un

degré moins marqué.

Aux membres inférieurs, la bouffissure est surtout prononcée

aux jambes et aux pieds dont la peau est plus ou moins cyanosée.

Les deux membres sont de longueur égale. La voûte plantaire est

CACHEXIE PACHYDERMIQUE.

27

à peine marquée; la marche est difficile, lourde, mais cependant

possible lorsque l'enfant est tenu par la main.

Il est intéressant de remarquer ici que le Pacha a fait à cet

égard de réels progrès depuis le mois d'octobre : tandis qu'il

avait alors beaucoup de peine à exécuter quelques pas; que, pour

cela, il restait confiné au lit une grande partie de la journée, il

parvient aujourd'hui, après avoir été exercé pendant huit mois à

faire le tour de la salle, à marcher presque sans aide. Il peut

également se tenir debout pendant un temps assez long, en s'ap-

puyant aux barreaux d'une chaise ou d'un lit.

Les organes génitaux ne présentent pas de vice de conformation,

mais un arrêt de développement complet; la peau y est épaisse

Fig. 9. - Th... à l'âge de 21 ans (mai 1882).

et pseudo-oedémateuse, comme dans les autres régions; les deux

testicules sont dans les bourses et ont à peine le volume d'une

noisette. Pas d'onanisme.

28 IDIOTIE CRET1NO1DE.

L'urine, examinée à plusieurs reprises et avec soin par M. Barré,

interne en pharmacie du service, est claire, citrine et ne contient

ni albumine, ni glycose. L'enfant est grand gâteux et la difficulté

.où l'on se trouve de recueillir isolément la quantité d'urine

rendue dans les vingt-quatre heures, n'a pas permis de doser

l'urée éliminée de ce côté.

Sur le tronc et les membres, la peau est absolument glabre,

même aux aisselles et au pubis, bien que le malade soit entré dans

sa vingtième année. D'après les renseignements recueillis dans le

service, elle était, l'année dernière, le siège d'une desquamation

continuelle, analogue à celle qui persiste encore sur le cuir che-

velu. Cette desquamation, surtout marquée aux membres, au

tronc et à la face, était furfuracée. Elle a disparu sous l'influence

de soins hygiéniques mieux entendus et des bains salés, adminis-

trés deux fois par semaine depuis octobre 1879.

La sensibilité générale est conservée, mais peut-être légèrement

émoussée ; le chatouillement n'est généralement pas perçu. La

sensibilité au froid est très marquée. Quant aux sensibilités spéciales,

la vue et l'oUle paraissent égales des deux côtés. Le goût semble

intact. Then... n'est pas salace, il écarte les saletés qu'il rencontre

dans son assiette. Il mange sa soupe seul, avec une cuiller qu'il

tient de la main gauche et les autres aliments avec ses doigts. 11

boit également seul en tenant le gobelet avec ses deux mains.

Appareil digestif. - Il n'existe ni vomissements après les repas,

ni constipation exagérée. Une chute du rectum, qui s'est produite

il y a quelques mois, a pu être réduite et maintenue par (fers cau-

térisations au galvanocautère. '

Nous avons déja indiqué, chemin faisant, l'étatde l'intelligence ;

notons encore que Then... reconnaît sa mère, sa soeur et les

diverses personnes du service ; parfois, sa physionomie semble

s'éveiller un moment à la vue de la nourriture ou des bonbons.

Une poupée qu'il a eu pendant quelques semaines paraissait lui

procurer quelque plaisir.

Le sommeil est tranquille, l'après-midi tout entière se passe

dans un état de demi-somnolence et d'immobilité. Jamais depuis

qu'il est à Bicêtre, cet enfant n'a présenté de phénomènes d'exci-

tation, ni d'accès convulsifs.

1880.8 décembre. - T. R. 370,4. - Soir : 37",4;resp.9; pouls 88.

9. -T. R. 37"; pouls 84.

. 1881. 24 février. - Etat fongueux des conjonctives, cautérisation

au nitrate d'argent.

23 mars. - On constate à la partie antérieure du cuir chevelu,

laquelle est glabre, une teinte rosée ; cette région est légèrement

furfuracée; la rougeur et le gonflement se prolongent sur le front

et presque jusqu'à la racine du nez et l'arcade sus-orhitaire où

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 29 9

elle se limite par un léger bourrelet. L'état des téguments (par

suite de la cachexie pachydermique) empêche d'explorer les gan-

glions.-Peau chaude, état saburral des premières voies digestives.

24. - Le malade paraît un peu abattu, la rougeur s'est

étendue ainsi que le gonflement, qui va latéralement jusqu'à

l'antitragus et en avant envahit les paupières supérieures. T. R.

39°,8. - Soir : 40°,3 (érysipéle).

25. Hier dans l'après-midi, après la purgation, selles abon-

dantes ; nuit tranquille. Le cuir chevelu est dégagé; le front est

encore un peu gonflé ainsi que les paupières; le gonflement per-

siste au niveau delà portion moyenne de la joue droite ainsi que

dans la région temporale du même côté ; l'oreille droite est rouge,

les lèvres ne sont pas noires. T. R., 39°,2. - Soir : 40,8.

26. L'érysipèle progresse du côté de la face, la joue droite est

beaucoup plus gonflée, plus rouge. T. R. 39°,6. -Soir : 40°,3.

27. - T. R. 39°,4. -Soir : 40°,3.

28. - Le cuir chevelu et la région faciale supérieure sont

redevenus normaux ; l'oreille droite, la lèvre inférieure et le bas du

visage couvert de cicatrices, de brûlures à droite, restent tuméfiées,

une phlyctène pleine de sérosité recouvre le menton à gauche. Le

malade ne boit que du lait et du vin de quinquina. - Traitement :

huile de ricin, compresses d'eau de sureau, etc.

29. - La rougeur est moins vive; la tuméfaction persiste, les

paupières sont gonflées et lesbords sont agglutinés. Thén... boit du

lait avec plaisir. T. R., 390. -Soir : 40°,2.

30. - Le bas du visage n'est plus tuméfié ; la peau desquame

par place ; les paupières restent gonflées, les yeux larmoyants.

- L'érysipèle a quitté la face pour devenir ambulant; il occupe,

en effet la partie postérieure du cou et de l'épaule droite. La

plaque d'érysipèle est rouge ; le bourrelet n'est pas franc ; les

bords vont en se perdant vers l'avant-bras, la pression digitale

laisse une empreinte blanche très fugace. Le malade semble gai,

mais il n'a pas d'appétit. T. R. 39°,2. - Soir : 39°,6.

31. - L'érysipèle commence à gagner la région pectorale ; il

est descendu jusqu'au tiers inférieur de l'avant-bras ; pas d'abat-

tement. - Potion : extrait de quinquina, 3 gr.; rhum, 50 gr. ;

huile de ricin, 30 gr. T. R. 39 ? Soir : 39°,8.

fer avril. - L'érysipèle a pâli au niveau de l'épaule et du bras,

il prend un aspect rouge-clair moucheté ; le bourrelet fait défaut;

la peau n'est ni chaude, ni résistante. La peau du bras est le siège

d'une desquamation furfuracée. Le malade boit du lait, dort bien, 1

est gai, et répond dans la mesure de son possible. T. R., 39o. J

Soir : 39°,8.

2. - Envahissement de la partie inférieure du bras et supérieure

de l'avant-bras droit par l'érysipèle; faible rougeur de la paroi

antérieure de la poitrine ; en arrière, rougeur légère de la région

30 IDIOTIE CRÉTINO1DI3.

scapulaire droite; rien à la face, si ce n'est une desquamation

légère et furfuracée. T. R. 39 ? - Soir : 40".

3. - T. R. 38°,G. Soir : 39 ? 2.

4. -Il existe encore un peu de gonflement à l'avant-bras droit,

mais la rougeur a disparu. A l'avant-bras du côté gauche, l'érysipèle

n'existe que sur la face dorsale en arrière du cubitus et dépasse

de deux centimètres j'olécrâne en haut. T. R. 38°. - Soir : 38,4.

19. - L'enfant est levé et est assez gai ; on recommence à le

faire marcher.

1or juin. - Hier, il était mal en train ; il semble que la peau du

côté droit de la tête, tempe, et région pariétale, est rosée et un peu

oedématiée ; la pression du doigt laisse une empreinte. On ne peut

que présumer l'érysipèle, vu l'état ordinaire de la peau; pas d'ap-

pétit ; un vomitif. - T. R. 40°.

2. - La rougeur occupe aujourd'hui toute la partie inférieure

de la joue droite, le menton, la partie inférieure de la joue

gauche etle lobule de l'oreille gauche ; rien aux lèvres. L'érysipèle

marche de droite à gauche; langue humide; nuit tranquille; pas

d'agitation. - Soir : T. R. 40°.

4. - L'érysipèle descend, il quitte progressivement la face pour

suivre la nuque et le dos; toute la portion dorsale est prise. La

rougeur se limite à la première lombaire en avant et latéralement

à gauche de la ligne axillaire verticale. A droite, elle empiète

un peu sur le creux de l'aisselle. La rougeur de la face a disparu,

mais elle persiste encore dans la région précédemment indiquée;

de plus, elle descend en arrière, jusqu'à l'articulation sacro-verté-

brale environ. Du côté gauche, elle dépasse la ligne axillaire et

gagne le mamelon. Du côté droit, elle atteint seulement le mame-

lon ; de plus, elle a envahi tout le bras et l'avant-bras, s'arrêtant

brusquement par une ligne circulaire àcinq centimètres du poignet.

Constipation, lait, lavement purgatif. T. Ii. 40°,2. - Soir : 40n,8.

5. - T. R. 40°,1. - Soir : 40°,8.

6. - Th... est plus gai, et ne parait pas être accablé parla

fièvre. La rougeur de la face a disparu; elle persiste encore dans

les autres régions et de plus descend en arrière jusqu'à l'articula-

tion sacro-vertébrale environ; du côté gauche, elle gagne la ligne

axillaire antérieure et le mamelon ; du côté droit elle atteint éga-

lement le mamelon, a envahi tout le bras et l'avant-bras, s'arrê-

tant brusquement par une ligne circulaire à cinq centimètres du

poignet. Pas de vomissements; constipation. - T. R. 39°.

Traitement : Lavement purgatif, lait, etc.

7. - Des deux côtés, l'érysipèle dépasse le mamelon, tendant à

gagner la ligne médiane. De même, la rougeur descend sur le

côté droit jusqu'au poignet; l'état général estbon. -'1·. R. 38°,6.

- Soir : 38°,6.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 31

8. - La rougeur a gagné la main droite; en même temps elle

disparait en arrière, elle est moins nette sur le dos en avant ;

légère rougeur de l'abdomen. T. R. 38°,2. -Soir : 38°,8.

9.- La rougeur est limitée à la main et au poignet droits, les

autres parties atteintes sont en voie de desquamation. T.R., 38°,4.

- Soir : 38°,6.

10. - Les doigts sont envahis par l'érysipèle, l'état général est

bon. T. R. 380 ? - Soir : 38°6.

Fig. 10. - Th... l'ââe de 22 ans (octobre 1883).

Il. - T. R. 3Sa,2. - Soir : 38°,2.

12. - T. R. 38o. - Soir : 38°.

13. - T. R. 37°,6. - Soir : 37°,6.

14. - T. R. 37°,6. - Soir : 37°,4.

15. T. R. 37°.6. - Soir : 37°,4.

16. - T. R. 3 ? 4.

17. - L'érysipèle est en voie de desquamation totale; la peau

a repris sa coloration et sa rénitence habituelles, la température

est stationnaire.

32 IDIOTIE C12R'rINOIDE.

27. Th... est revenu à son état habituel, et est très gai.

1881. Juillet. - Poids : 20 kilogr. 100.

1882. Janvier. - Poids : 19 kilogr. 50.

1883. Janvier. - Poids : 19 kilogr. 800.

14 novembre. - Th... n'a rien présenté de particulier dans le

courant de l'année. On l'exerce à marcher, ce qu'il fait, tenu par

la main. La mémoire parait exister; il reconnaît les personnes

qui fréquentent le service, et même celles qui, ne venant que

rarement, lui donnent des sous. Le 14 juillet 1883, les enfants

ayant reçu un supplément de la centilitres de vin de Bagnols, il a

volé et bu la part de son voisin. Cet excès l'ayant excité, il cher-

chait à parler spontanément, chantonnant « Nicolas » et « l'Amant

d'Amanda". Depuis, il se montre très satisfait, si on lui parle de e

bagnols, il en boit avec plaisir, et, posant son verre avec satisfac-

tion sur la table, il dit : « Ça y est » ; « hon, ça ! ».

1 884. 31 janvier. Poids : 20 kilogr. 700.

2 février. - Dentition. Mâchoire supérieure. Permanence des

racines de la plupart des dents de lait sur lesquelles on ne trouve

que deux dents permanentes, les deux incisives centrales entières;

elles sont sorties en arrière des racines des dents de lait; très

inclinées en arrière; les molaires permanentes du fond de la

bouche sont profondément cariées; il ne reste plus que des débris

de racines.

Mâchoire inférieure. - On ne trouve comme dents permanentes

que les deux incisives centrales entières, une petite molaire droite

et une gauche; ces dents sont sorties en arrière des dents de

lait qui persistent. La canine de lait gauche persiste; les autres

dents de lait sont tombées sans être remplacées, peut-être cepen-

dant des dents permanentes cariées ont-elles été arrachées. L'ar-

ticulation du maxillaire est défectueuse; la mâchoire inférieure

est portée un peu en avant et les dents viennent mordre sur le

milieu des racines des dents de lait sans tomber au niveau de la

gencive.

Les gencives, un peu décollées, mais relativement en assez bon

état, forment un bourrelet autour des dents et des racines.

Août. - Poids : 20 kilogr. 300. Taille : Om,90.

9 octobre. - On constate une tuméfaction du volume d'un petit

oeuf de pigeon entre les deux sourcils; à la palpation, cette tumeur

donne la sensation de l'oedème; elle présente à sa surface une

rougeur érysipélateuse; les paupières sont tuméfiées. T. R. 3 ? 3.-

Soir : 37°, 5.

10. - La tuméfaction' notée hier a considérablement diminué ;

CACHEXIE PACHYDERMIQUE.

33

mais les joues, surtout la gauche, sont oedématiées et présentent

une rougeur uniforme sans bourrelet périphérique; la peau n'est

ni chaude, ni douloureuse à la pression ; les ganglions sous-iiiaxii.

laires ne sont ni tuméfiés, ni douloureux. T. R. 371,6. - Soir

37°,6.

11. - Même état. T. R. 37°,4 . - Soir : 37°,7.

12. - La tuméfaction des joues a diminué, la rougeur est loca-

lisée surtout au niveau du menton et de la lèvre inférieure; ni

douleur ni adénite. L'appétit a été conservé pendant toute la durée

de l'affection.

13. - T. R. 37°,5, - Soir : 37o,r;,

14. - T. R. 37°,4. - Soir : 3î°,5.

15. - T. R. 37°,6. - Soir : 37°,7.

16. La face a repris son aspect habituel. Le malade est levé.'

T. R. 31°,4.

Fig. II. Th... à l'âge de 23 ans (novembre 1884).

lo décembre. Le malade, jusqu'ici en robe, a été habillé avec

un pantalon; il ne gâte plus durant le jour; depuis longtemps,

il a une selle tous les deux jours.

Bourneville, 1886. 3

34 IDIOTIE CR);TINO1DE.

1885. Janvier. Poids : 20 kil. 500. - Juin. Poids : 20 kil. 700.

Juin. - Amélioration au point de vue de la marche ; il est plus

solide sur les jambes, mais manifeste toujours une grande répu-

gnance à se mouvoir, et on y parvient en lui promettant soit une

friandise, soit surtout du vin de Bagnols. On lui fait fabriquer

une canne afin d'arriver à ce qu'il marche seul. Th... s'est amé-

lioré sous le rapport de la propreté et nous sommes parvenus à

remplacer la robe par le pantalon (fig. 21). Il est sujet à être

constipé et est très sensible au froid.

13 novembre. - Tb..., n'ayant pas été à la selle depuis quatre

jours (il ne mangeait pas depuis deux jours et paraissait souffrir),

est amené à l'infirmerie. Lavement.

d4. - La constipation persiste; ventre très ballonné, sonore;

le lavement de la veille n'ayant produit aucun effet, il lui en est

administré deux autres dont l'un purgatif, qui restent de même

sans effet.

15. - Le matin, purgatif, aucun résultat. Le soir, nouveau

lavement suivi d'une selle très abondante. Th... ne prend que du

lait. Gonflement très marqué de la lèvre supérieure et de la joue

droite, qui est rouge et luisante. Tympanite considérable. T. R.

390; à 3 heures du soir : 3S°,8. - Soir : 40 ?

46. - Le malade tousse un peu; l'auscultation, très difficile à

pratiquer, ne dénote rien de saillant; la lèvre inférieure est le

siège d'un gonflement assez marqué; à l'inspection du thorax, du

reste très difficile, il ne semble avoir rien d'anormal. T. R. z

- Soir : 380,8.

47. - Pas de changement notable, pas d'évacuation : eau-de-vie

allemande, 20 grammes. Le soir, Th... n'ayant pas eu de garde-

robe, on lui administre un lavement purgatif. T. R. 38",4. -

Soir : 380,2.

18. - L'eau-de-vie allemande et le lavement purgatif n'ont

produit aucun effet. Le matin, Th... a demandé le vase, mais il a

fait des efforts inutiles. - L'abdomen est ballonné, tympanique ;

les lèvres sont cyanosées, la respiration est plus courte et plus

fréquente ; à la palpation, on croit sentir une tumeur assez dure,

de l'S iliaque irrégulière, bosselée et garnie probablement par

un amas de matières stercorales (2).- L'examen est très difficile

par suite du ballonnement du ventre. Refroidissement notable ;

pas de vomissements. Deux lavements simples donnés presque

coup sur coup ne sont pas rendus. Un lavement à la glycérine

amène des scybales dures. Pas d'émission de gaz. Le soir, deux

syphons d'eau de Seltz sont donnés par le rectum au moyen de

la sonde oesophagienne, ils ne produisent aucune évacuation.

Mort à 10 heures 35 du soir. Avant de mourir, le Pacha a

ouvert les yeux tout grands et a poussé plusieurs soupirs. T. R.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 35

38 ? - Soir : 40°, 2. Un quart d'heure après le décès : 36°,4. Une

heure après le décès : 32°,3. Deux heures après le décès : 30°.

Poids après décès : 21 kilogr. 100.

Note complémentaire. - Les cheveux sont noirs, moyennement

abondants à la région occipitale; ils vont en diminuant sur la

partie inférieure des pariétaux et la partie antérieure du tem-

poral. Sur la ligne médiane, ils s'avancent sur le milieu du frontal

en formant unehoupette; entre cette houpette médiane et les

parties latérales il existe une calvitie presque complète.

Le cuir chevelu, pâle, présente des rides nombreuses, des squames,

quelques croûtes sèches assez grosses, et d'autres petites en assez

grand nombre. Les sourcils sont peu fournis ; les poils sont

implantés verticalement de bas en haut et de dedans en dehors.

Les cils sont assez rares à la paupière supérieure, très rares à la

paupière inférieure.

On constate une absence complète de poils sur tout le reste du

corps : aisselles, dos, thorax, anus, lèvres supérieures, joues. La

peau a un aspect cireux, pâle. Les ongles sont assez minces,

courts; on n'a besoin de les couper qu'à des intervalles très éloignés.

La peau des bourses est épaisse, ridée et, au premier .abord,

parait oedématiée, mais l'empreinte des doigts ne s'y dessine pas.

Il existe quelques poils rares et courts au pénil ; la peau de la

verge et surtout du prépuce est épaisse, ridée, comme boursoufflée,

sans oedème.

Le prépuce est allongé et sa moitié inférieure forme une sorte

de tablier qui dépasse la moitié antérieure de la largeur d'un

centimètre. La verge, relativement grosse, a cinq centimètres et

et demi de longueur et cinq centimètres de circonférence ; le gland

est découvrable, le méat est normal. Les testicules ont la dimen-

sion d'une assez grosse noisette. Pas d'onanisme.

Crâne. - Il appartient au type brachycéphale ; voici les princi-

pales dimensions :

36 IDIOTIE CRETINOÏDE.

Digestion. - Th... mangeait et buvait seul assez proprement;

la mastication était à peu près nulle ; il bavait continuellement à

cause du prolapsus de la lèvre inférieure, consécutif à la brûlure

dont il a été question. L'abdomen est toujours volumineux. Les

selles se faisaient tous les deux jours et étaient souvent dures.

Th... était devenu propre et demandait « Pot », «chier».

Voici quelques mensurations supplémentaires :

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 37

partie du ligament suspenseur du foie, qui constitue la grande faulx

du péritoine, a acquis un grand développement en hauteur; à la

partie moyenne, elle mesure 5 centimètres de largeur, sa lon-

gueur est de 13 centimètres.

A l'ouverture de la cavité abdominale, le coecum se présente

tout d'abord ; il est très dilaté, recouvre une partie du colon ascen-

dant, du colon transverse et de l'estomac; à 7 centimètres au-

dessus de l'appendice vermiforme, le colon ascendant est tordu

sur lui-même de façon que la surface antérieure du coecum se

trouve postérieure, et réciproquement, l'extrémité ceecale d'infé-

rieure est devenue supérieure. Le tout forme une tumeur qui

atteint une largeur de 11 centimètres in. Le reste du colon

ascendant et le colon transverse dans sa partie droite ne sont

pas dilatés. La partie gauche du colon transverse, le colon descen-

dant et l'S iliaque sont assez dilatés, on y sent des matières

molles moulées; l'intestin grêle, non dilaté, occupe sa situation

normale; le grand épiploon est remonté ; il n'est pas surchargé

de graisse, l'estomac est dilaté. Au niveau de la torsion et

ailleurs, on ne constate ni oedème, ni inflammation, niecchymo-

ses, etc. Le coecum ponctionné laisse échapper une grande quan-

tité de gaz présentant l'odeur ordinaire, sans exagération. - La

vessie est presque vide. - Le foie atteint le rebord costal ; le

diaphragme remonte au bord supérieur de la quatrième côte à

droite, au bord inférieur de la même côte à gauche.' Les muscles

pectoraux sont très décolorés, et ont presque l'apparence de

muscles de grenouille; ils sont peu développés.

Cavité thoracique. A l'ouverture du thorax, on constate la

présence de brides longues et résistantes entre le sternum, les

cartilages costaux et le poumon droit. Le tissu cellulo-adipeux

qui recouvre le péricarde est oedématié, tremblotant. Le poumon

gauche est refoulé en haut; quelques brides relient sa face externe

aux côtes; la cavité pleurale gauche contient un liquide citrin

clair. Adroite, on constate de même quelques brides lamelli-

formes, assez longues et assez résistantes; on trouve le même

liquide citriu clair dans la cavité pleurale. Au devant des vais-

seaux du cou, on trouve un peloton graisseux s'étendant jusque sur

la partie antéro-supérieure du péricarde, ce peloton adipeux a la

forme du lobe droit du thymus dont il semble occuper la place.

La cavité du péricarde contient une assez grande quantité (un

verre environ) de liquide jaune citrin. Le coeur en systole est

petit; sa pointe est formée par le ventricule gauche; on trouve

sur la face antérieure, près de la pointe, une petite plaque lai-

teuse ; le ventricule droit est affaissé ; sur sa face antérieure se

trouve également une petite plaque laiteuse; les deux oieillettes

sont dilatées. La graisse qui se trouve à l'état normal dans les

sillons est ici beaucoup moins abondante que d'habitude. L'oreillette

38 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

droite renferme du sang liquide noir et quelques caillots fibri-

neux. Le ventricule gauche contient un peu de sang liquide. Les

deux orifices auriculo-ventriculaires admettent avec peine la pulpe

des deux doigts index et médius réunis de la main gauche. Les

valvules sont suffisantes et saines. Le myocarde est pâle, mais

cette pâleur est moins accentuée que celle des muscles de l'abdo-

men (épaisseur à droite, 12 mill.; à gauche, 3 mill. 1/2. Le trou

du Botal est obturé. Sur la crosse de l'aorte, au-dessus des

valvules, on trouve quatre larges plaques athéromateuses ; il en

existe une autre petite dans l'espace sous-aortique.

Poumons. - A la coupe des bronches, il s'écoule un liquide

muco-spumeux. A la partie postérieure du lobe inférieur gauche

existe quelques petites ecchymoses sous-pleurales. Le tissu pulmo-

naire, très compacte au lobe inférieur, l'est moins au lobe'supérieur

et est partout très oedématié. Les bronches sont légèrement hype-

rémiées, on les poursuit très facilement jusqu'à la périphérie.

- Le poumon droit possède ses trois lobes ordinaires, mais sur le

lobe inférieur on rencontre une scissure profonde. On constate

sur ce dernier lobe quelques petites ecchymoses ponctuées. Les

lésions sont les mêmes qu'à gauche. Sur la plèvre pariétale

droite sont disséminées quelques petites ecchymoses. - La mus-

culature du diaphragme est pâle, mais moins que celle du thorax.

Cavité abdominale. - Rate (300 grammes), rien de particulier.

- Pancréas, normal. - Uretères normaux, le gauche sinueux.

- Capsules surrénales, saines. - Reins. Le tissu cellulaire péri-

néphritique est comme oedématié. Le rein gauche, entouré d'une

épaisse couche de graisse, se décortique facilement (quelques

étoiles de Verrlieyeu),; il parait au toucher plus dur que d'habi-

tude, sans qu'on puisse y constater à l'oeil nu de lésions de

néphrite interstitielle (épaisseur de la couche corticale : 4 millim.).

- Le rein droit se décortique facilement; il est très lobulé, beau-

coup plus petit que le gauche, plus ferme à la coupe. Sur la sur-

face externe, on constate deux petites dépressions et un petit kyste.

Le duodénum contient un liquide renfermant des grumeaux

blanchâtres. - L'estomac est rempli d'une masse coagulée pro-

venant du lait; rien de particulier. - Le canal cholédoque est

perméable ; il s'en écoule par la pression une bile claire, peu

visqueuse. - Vésicule biliaire normale. -- Le tissu hépatique

semble un peu plus ferme que normalement. Les intestins ne

présentent rien à relever ; leur tunique interne, loin d'être hyper-

trophiée et infiltrée, parait d'épaisseur normale et plutôt sèche.

Pas de surcharge graisseuse du mésentère.

Le bassin est petit ; il mesure, dans le diamètre antéro-posté-

rieur, 6 centim.; dans le diamètre transverse, 6 centim. 4 ?

Dans l'aine gauche, on trouve deux paquets ganglionnaires, et un

ganglion isolé dans une masse graisseuse.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 39

Le larynx est étroit et présente un léger oedème des cordes

vocales. - Le pharynx n'offre rien de particulier. Malgré une

recherche minutieuse, on ne peut trouver trace du corps thyroïde.

Les nerfs grands splanchniques, les ganglions semi-lunaires, la

partie inférieure du grand sympathique paraissent absolument

normaux; les parties supérieure et dorsale du grand sympa-

thique sont de même normales; peut être, cependant, sont-elles

un peu plus volumineuses qu'à l'ordinaire ( ? ).

Cavité crânienne. - Encéphale : 4 075 gr. - Cervelet et isthme :

4 15 gr. - Isthme : 15 gr. - Protubérance assez petite, symé-

trique, ainsi que le bulbe. - Hémisphères cérébelleux, égaux. - La

glande pinéale a 4mm environ de diamètre. Le corps pituitai1e

a lo à '<6 ? de largeur et 1 centim.de hauteur; il est assez épais;

paraît sensiblement hypertrophié. Lorsqu'on enlève le cerveau, il

s'écoule une assez grande quantité de sang et de liquide céphalo-

rachidien. La partie qui reste au fond de la calotte est d'environ

40 à 60 gr. - La dure-mère est assez adhérente au crâne : elle est

gorgée de sang. - La pie-mère de la base est légèrement vascu-

larisée; celle de la convexité, surtout dans une largeur de 3 ou

4 centim. au voisinage de la grande scissure, l'est au contraire à

un degré très notable, d'un rouge bleuâtre et un peu oedémateuse.

Il n'y a pas de différence entre les deux côtés.

Lorsqu'on examine la base du cerveau, on constate une difiérenca

très sensible de longueur entre les deux hémisphères : l'hémis-

phère cérébral gauche mesure 18 centim., l'hémisphère droit

déborde le gauche un peu en avant et davantage en arrière. -

Les artères, nerfs, tubercules mamillaires, pédoncules, sont symé-

triques, ainsi que les nerfs olfactifs. Les deux hémisphères céré-

belleux sont égaux. -Pas de traces d'athérome.

La pie-mère est mince et s'enlève pattout sans entraîner de

substance corticale, sauf en quelques points très rares; sur un des

plis de passage allant de la deuxième à la troisième circonvolu-

tion frontale, on trouve une petite tumeur de la grosseur d'une

lentille, faisant une saillie d'un à deux millimètres.

Sur l'hémisphère droit, la pie-mère s'enlève facilement; elle est

très mince, en quelques points principalement; le long de la

grande scissure, on entraine un peu de substance grise; à l'extré-

mité antérieure dela troisième frontale, on trouve une ecchymose

superficielle de la substance grise. L'aspect des circonvolutions

est luisant et rappelle, principalement sur les lobes temporaux et

occipitaux, l'aspect du cerveau des nouveau-nés, sorte d'aspect

gélatiniforme. Pas de lésion en foyer; pas d'induration de la corne

d'Ammon ; pas de dilatation des ventricules. - Rien aux plexus

choroïdes. Les deux hémisphères cérébraux décortiqués sont

égaux.

Crâne, - Aucune suture de la voûte n'est ossifiée, sauf la

40 IDIOTIE CRÉTINOÏDE..

suture bi-frontale, dont on voit encore distinctement la trace,

surtout sur la table externe; son tiers supérieur n'est pas ossifié

et forme la plus grande partie de la fontanelle. Les sutures sont

très apparentes; au niveau des sutures fronto-pariétales, et,

latéralement, les pariétaux sont quelque peu plus proéminents

que le frontal. - L'occipital proémine de même sur les pariétaux.

- La fontanelle antérieure est persistante, son angle postérieur

est cependant beaucoup réduit, elle a de ce fait une apparence

presque triangulaire. Les pariétaux sont minces, hyperémiés; le

frontal est d'une épaisseur moyenne, les deux tables sont peu

développées, le diploé l'est davantage. L'occipital est peu

développé. Vue par sa face interne, la calotte présente une

ossification incomplète, au point de réunion des pariétaux et du

frontal, correspondant à toute la fontanelle antérieure; sur les

côtés on note une ossification incomplète, en arrière des sutures

fronto-pariétales sur un espace d'environ un centimètre de lar-

geur ; l'artère méningée moyenne s'y est creusée des sillons

profonds. Sur le frontal, à droite et près de la suture bi-frontale

et à 4 centim. environ au-dessous du pariétal, on remarque une

dépression arrondie de I centim. environ de diamètre.

Hémisphère gauche.- La scissure de Sylvius (l'r.. II, Sc. S.) laisse

à l'état frais une partie de l'insula à découvert; après un séjour de

plusieurs mois dans l'alcool tout l'insula et les plis de passage du

lobe temporal se trouvent à découvert. Elle possède deux rameaux

antérieurs ascendants (ai, nt) et un rameau antérieur horizontal

très profond et un peu sinueux. Le rameau postérieur horizontal

(a3) est très profond, large et se termine dans le lobule pariétal

inférieur après un trajet de 18 millimètres le long de son bord

inférieur. '

Le sillon deRolando (S. R.), profond et sinueux,prend son origine

dans la scissure de Sylvius et est interrompu vers son quart infé-

rieur par un pli de passage allant de la frontale ascendante à la

pariétale ascendante.

La scissure perpendiculaire externe (Sc. p. e.) n'est séparée du pli

courbe que par un pli de passage se dirigeant du lobule pariétal

supérieur à la première circonvolution occipitale; son extrémité

inférieure se trouve située à un centim. de l'extrémité postéro-

supérieure de la scissure parallèle.

Lobule orbitaire. - La scissure olfactive est profonde. La scissure

orbitaire assez profonde figure deux Il accolés par l'un de leurs bords

et possédant deux barres transversales. - Legyrus rectus est peu

volumineux. Les première etdeuième circonvolutions orbitaires sont

bien développées. La partie moyenne du lobule orbitaire, surtout

au niveau des deux branches transversales du double H, est très

concave. L'incisurc qui sépare le lobule orbitaire de la deuxième

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 41

circonvolution frontale est très profonde, mais est séparée du sillon

fronto-marginal par une portion isolée de la deuxième circonvo-

lution frontale et atteint à peine la partie antérieure de la

scissure surcilière.

Lobe frontal. La scissure parallèle frontale (PL. II, Se. p. f.)

coupe la première circonvolution frontale près de la fente

interhémisphérique; elle est irrégulière, sinueuse, interrompue par

un pli de passage allant de la deuxième circonvolution frontale à

la circonvolution frontale ascendante; elle se continue en bas

avec un sillon oblique qui va se jeter dans le sillon de Rolando.

La scissure frontale inférieure (Se. f. i.) sinueuse est interrompue

en avant par deux plis de passage reliant la deuxième circonvolu-

tion frontale à la troisième. - La scissure frontale supérieure

(Sa. f. s.) est très irrégulière, très sinueuse, interrompue par de

nombreux plis de passage se rendant de la première circonvolu-

tion frontale à la deuxième.

La première circonvolution frontale (PL. II, F,), très irrégulière,

est découpée par des sillons enchevêtrés et il est par suite assez

difficile d'établir la limite exacte entre elle et la deuxième circon-

volulion frontale; elle semble toutefois être dédoublée dans ses

trois quarts postérieurs, mais ce dédoublement est très irrégulier,

très sinueux, très sillonné et relié à la deuxième circonvolution

frontale par quelques plis de passage.

Cette première circonvolution s'insère à la circonvolution fron-

tale ascendante par un pli de passage à niveau, mais étroit, bor-

dant la fente interhémisphérique.

La deuxième circonvolution frontale (F2), qui s'insère à la circon-

volution frontale ascendante par un pli de passage à niveau est

elle-même très sinueuse, irrégulière, comme découpée en plu-

sieurs tronçons par des sillons transversaux et obliques profonds ;

un pli de passage (pp.) la relie vers son tiers antérieur à la

branche postérieure du V antérieur de la troisième circonvolu-

tion frontale. C'est sur ce pli de passage que se trouve une petite

tumeur de la grosseur d'une lentille (t.), tumeur un peu surélevée,

énucléable et à la partie supérieure de laquelle la pie-mère est

adhérente. La troisième circonvolution frontale (F3) est remar-

quable par son développement, et le dédoublement de son cap;

en effet celui-ci représente un double assez développé, coïncidant

avec les deux rameaux ascendants antérieurs de la scissure de

Sylvius, dont nous avons déjà parlé plus haut.

La circonvolution frontale ascendante (F A) assez maigre, sauf f

vers sa partie médiane, est coupée par deux sillons antéro-posté-

rieurs. Celte partie médiane isolée est reliée à la. deuxième cir-

convolution frontale par un pli de passage à niveau et semble la

continuer; il en résulte que celle-ci parait s'insérer par un pli de

42 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

passage à niveau, qui interrompt la continuité du sillon de Ro-

lando, sur la circonvolution pariétale ascendante. La partie infé-

rieure de la circonvolution frontale ascendante est accolée au

pied dela 3e circonvolution frontale, fait corps avec lui, 1, et ne

s'en distingue que par un pli vertical à peine marqué. - La cir-

convolution pariétale ascendante (P A) est assez maigre.

Le lobule pariétal supérieur (P,) est sinueux, bien développé;

un pli de passage à niveau le relie au lobe occipital.

La scissure interpariétale (Sc. i) prend son origine dans la profon-

deur de la scissure de Sylvius tout près du lobule de l'insula et

atteint presque par son extrémité supérieure et verticale sa fente

interhémisphérique; cette extrémité estbifide et les deux branches

ne sont distantes de cette fente que de 8 millimètres. La branche

ascendante de la scissure représente un Y et forme ainsi une

sorte de scissure parallèle pariétale. La scissure interpariélale

après avoir décrit sa courbe normale se continue ensuite presque

dans le lit du premier sillon occipital.

Le lobule pariétal inférieur (P2) et le pli courbe (P,) sont sinueux,

assez bien développés; un pli de passage relie celui-ci au lobule

pariétal inférieur.

Le lobe occipital (L 0) nettement séparé du lobe temporal est

relié au lobule pariétal supérieur par un pli de passage à niveau

et au pli courbe par un autre petit pli de passage allant à la par-

tie inférieure et antérieure de la deuxième circonvolution occipi-

tale. Tous les sillons et toutes les circonvolutions de ce lobe, de

forme normale, occupent leur position ordinaire, et sont assez

bien développés.

Le lobe temporal est assez volumineux, sauf dans son quart

postérieur, où la deuxième et surtout la troisième circonvolution

temporales se trouvent en retrait, c, sur le lobe occipital et les

parties antérieures du lobe temporal. - La première circonvolution

temporale (T,) se confond avec la parlie postérieure du lobule

pariétal inférieur. La scissure parallèle (Se. p.) est sinueuse et très

profonde. La deuxième circonvolution temporale (T.) est bien déve-

loppée dans sa partie antérieure. - La deuxième scissure tempo-

rale (Sc. t2.) sinueuse, irrégulière, est interrompue par trois plis

de passage se rendant de la deuxième à la troisième circonvolu-

tion temporale qui, elle aussi, est assez bien developpée dans ses

parties antérieures. L'incisure préoccipitale (In. pré.) se réunit à la

partie la plus postérieure de la deuxième scissure temporale,

séparant ainsi nettement le lobe temporal du lobe occipital.

On trouve encore quatre circonvolutions temporales transverses,

3, ou plis de passage temporo-pariétaux qui, se dirigeant vers le

fond de la scissure de Sylvius en arrière de l'insula, viennent se

perdre dans le lobule pariétal inférieur.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 43

La première scissure temporo-occipitale (Pr,. 1, Se. to) est sinueuse,

peu profonde, irrégulière, interrompue par un pli de passage se

rendant de la troisième circonvolution temporale au lobule fusi-

forme (T 0,) peu développé, mais non atrophié. La deuxième

scissure temporo-occipitale (Sc. to.) est sinueuse, assez profonde,

interrompue également par un pli de passage allant du lobule

fusiforme au lobule lingual (TO.) en sorte que la'partie postérieure

de la deuxième scissure semble se continuer directement avec la

partie antérieure de la première scissure.

Face interne. - La scissure calloso-marginale (Sc. c.m.) est assez

profonde, normale dans ses différentes parties. La première cir-

convolution frontale interne (F,) est bien développée, très sinueuse.

Le lobule paracent7-al(LP), moyennement développé surtout à sa par-

tie supérieure, présente vers son tiers inférieur un petitsillon super-

ficiel et horizontal de 4 millimètres, relié à la scissure calloso-

marginale par un petit sillon également superficiel partant de son

extrémité antérieure. La circonvolution du corps calleux (C. C. C.)

est bien développée, normale. - Le lobe quadrilatère (L U) est très

développé, en continuité par les plis de passage pariéto-limbiques

antérieur (p. p. a) et postérieur (p. p. p.) avec la circonvolution du

corps calleux, dont il est séparé à sa partie médiane par une scis-

sure sous-pariétale (Se. sp.). - La scissure perpendiculaire interne

(Sc. p. i.) est très profonde, béante. - Le coin (C) parait peu

développé. - La fissure calcarine (F. ca), décrit une courbe à con-

vexité supérieure.

Le corps calleux, le corps strié, la couche optique, ne présentent

rien de particulier.

Hémisphère droit.- La scissure de Sylvius (PL. IV, Se. S.), dont les

deux lèvres très écartées, laisse voir comme à gauche toutes les

circonvolutions de l'insula et les plis de passage temporo-parié-

taux. Elle est bifide à son extrémité postérieure. Les deux rameaux

antérieurs ascendant (a) et horizontal sont normaux et circons-

crivent le cap simple, normal, de la troisième circonvolution fron-

tale.

Le sillon de Rolando (S. R.), sinueux, assez profond, est inter-

rompu vers son quart inférieur par un pli de passage allant de la

circonvolution frontale ascendante à la circonvolution pariétale

ascendante.

La scissure perpendiculaire externe (Sc. p. e) est complète et va

se perdre dans le lit de la scissure parallèle.

Lobule orbitaire. - La scissure olfactive est profonde. La scissure

orbitaire est simple, le lobule à son niveau est concave; on ren-

contre en outre sur les circonvolutions orbitaires de nombreux

plis irréguliers; la branche interne de l'incisure en H va se perdre

4 le IDIOTIE CItETIN01DE.

dans un petit sillon marginal antérieur. Les circonvolutions du

lobule orbitaire ne présentent rien autre chose de particulier.

Lobe frontal. - Il existe de ce côté une scissure parallèle fron-

tale (PL. IV, Se. p. t.) complète, ininterrompue, commençant à

4 millimètres de la grande scissure interhémisphérique pour

s'arrêter à 4 millimètres de la lèvre supérieure de la scissure de

Sylvius. La scissure frontale supérieure (Se. f. s.) est sinueuse,

assez profonde, ainsi que la scissure frontale inférieure (Sc. f. i.),

séparée de la scissure parallèle frontale par un pli de passage

allant de la deuxième circonvolution frontale à la troisième ;

cette scissure frontale inférieure est encore interrompue dans son

trajet par un autre pli de passage se rendant de la deuxième e

circonvolution frontale au centre du cap de la troisième circon-

volution frontale. La première circonvolution frontale (F,) est peu

développée; la seconde (1<',), très irrégulière par suite des nom-

breux plis qui la sillonnent, parait dédoublée et bien développée.

En avant du lobe frontal se trouve un pli de passage transversal,

réunissant les trois circonvolutions frontales et laissant en avant

de lui une petite portion des première et deuxième circonvolutions

frontales. La troisième circonvolution frontale (F3)' sinueuse, est

assez bien développée. - La circonvolution frontale ascendante

(F A) également assez bien développée et sinueuse.

La circonvolution pariétale ascendante (P. A.) est maigre, surtout

à sa partie médiane. Le lobule pariétal supérieur (P,), irrégulier,

est très découpé; des plis de passage transversaux le rattachent

au lobule pariétal inférieur. La scissure interpariétale (Sc. i.)

prend son origine dans la scissure de Sylvius et s'arrête à 12 mil-

limètres de la scissure inter-hémisphérique; elle est bifide à

son extrémité supérieure et verticale et forme un )., représentant

une sorte de scissure parallèle pariétale. Au niveau de sa courbe.

puis à sa partie médiane, elle est interrompue par les plis trans-

versaux dont nous venons de parler; elle se prolonge ensuile

presque dans le sillon occipital transverse. - Le lobule pariétal

infétiew' (P,), est sinueux, très découpé, irrégulier; le sillon ver-

tical (b) qui le sépare du pli courbe se prolonge en haut au delà

de la scissure inter-hémisphérique. Le pli courbe (P3), irrégulier,

est divisé par le prolongement de la scissure perpendiculaire

externe (c) qui va se jeter dans la scissure parallèle.

Le lobe occipital (L, 0), nettement séparé des lobes pariétal et

temporal, est par suite dépourvu de plis de passage se rendant à

ces deux lobes ; il est assez irrégulier, peu développé, mais on \

retrouve les formes de ses scissures et de ses trois circonvolutions :

enfin, il est un peu en retrait sur le lobe temporal.

Le lobe temporal est bien développé; sa première circonvolzt-

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 45

lion (T,) se confond avec la partie postérieure du lobule pariétal

inférieur.-La scissure parallèle (Sc. p.) est sinueuse et très pro-

fonde. Les deuxième et troisième circonvolutions temporales (T" T3),

sont bien développées, mais à leur partie postérieure elles sont

un peu chagrinées et en retrait comme de l'autre côté. -

La deuxième scissure temporale (Se. t,) est sinueuse, irrégulière,

interrompue par des plis de passage allant de la deuxième à la

troisième circonvolution temporale; en arrière, une de ses por-

tions isolées (sillon occipital antérieur (d) sépare nettement en se

réunissant à l'incisure préoccipitale (In. pré.) le lobe temporal

du lobe occipital. - Il existe trois circonvolutions temporales (3;,

transverses ou plis de passage temporo-pariétaux, situées à la

partie postérieure de l'insula, dont les circonvolutions sont bien

développées.

La première scissure tempor·o-occipitale (PL. III, Se. to) est

interrompue vers son milieu par des plis de passage se dirigeant

de la troisième circonvolution temporale à la première circonvolu-

tion temporo-occipitale (1' 0,) sinueuse; un sillon oblique réunit

cette scissure à la moitié postérieure de la deuxième scissure tem-

para-occipitale (Sc. to,.). Un pli de passage relie le lobule fusi-

forme au lobule lingual (T. 0, ; ces deux lobules sont assez bien

développés.

Face interne. - La scissure calloso-marginale (Sc. c. m.), assez

profonde, est normale dans ses différentes parties; elle communi-

que par un sillon avec l'extrémité de la branche verticale de ri

grec qui se trouve sur le lobule paracentral : elle se trouve isolée

par un pont de substance nerveuse de l'incisure préovalaire (e),

limitant en avant le lobule paracentral. La première circonvo-

lution frontale interne (F,) est bien développée, sinueuse. - Le

lobule paracentral (L P) est plus large, plus développé qu'à

gauche, déborde en avant et en arrière les circonvolutions fron-

tale et pariétale ascendantes. On remarque un peu en avant de

sa partie médiane un sillon en y grec assez profond, et en arrière

un autre petit sillon transversal assez superficiel. - La circonvo-

lution du corps calleux (C. C. C.) est bien développée, normale.

Le lobe quadrilatère (L. Q.), très développé, présente en avant un

sillon transversal profond, communiquant avec la scissure sous-

pariétale (Se. s. p.) en avant et en arrière de laquelle se trouvent

les plis de passage pariéto-limbiques antérieur et postérieur

(p. p. a.-p. p. p.).-Lascissure perpendiculaire interne (Se. p. i.)

profonde se termine à 2 centimètres du bord supérieur de la

fente interhémisphérique, sans aller rejoindre la scissure calca-

rine dont elle est séparée d'un centimètre. En arrière et paral-

lèlement à elle, sur le coin, se trouve une autre scissure (d) plus

profonde qui va se jeter dans la scissure calcarine. Le coin (C.) est

46 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

assez développé. - La fissure calcarine (F. ca.), en dehors des

anomalies 'déjà signalées, est assez profonde.

Le corps calleux, le corps strié, la couche optique, sont normaux.

Cervelet. - Les hémisphères cérébelleux paraissent normaux.

Analyses de la peau. - Nous avons fait faire deux

analyses de fragments de la peau; voici les notes qui

nous ont été transmises :

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 47

Dans les antécédents héréditaires de Th..., nous

ne trouvons aucun idiot ou épileptique; le père, intelli-

gent, présentait seul une malformation du bras gauche,

et, sauf une cousine de la mère au troisième degré, on

n'aurait jamais connu de goitreux dans la famille.

Jusque vers l'âge de quinze mois, le Pacha se serait

développé normalement; il marchait un peu, était

affectueux et prononçait quelques mots. Il ne peut

donc être question chez lui de crétinisme congénital

proprement dit. Peut-on faire intervenir dans l'étiologie

de la maladie son séjour jusqu'à un an dans un loge-

ment humide, les convulsions ( ? ) et la chute qu'il aurait

faite vers quinze mois ? C'est ce que nous ne saurions

dire. Toujours est-il que c'est vers cette dernière époque

que semble remonter le début de l'affection; la marche,

la parole, etc., loin de progresser, diminuèrent et, en

1880 (à près de vingt ans), nous le trouvons à Bicêtre,

présentant tous les signes de l'idiotie avec cachexie

pachydermique.

Durant le temps où il a été soumis à notre obser-

vation, Th... a été atteint à diverses reprises d'érysi-

pèle, de même que la première malade de Curling;

mais, contrairement à ce qui a eu lieu chez la malade

de Curling, ces érysipèles n'ont nullement amélioré

son état intellectuel. Le traitement (toniques, bains

salés, exercices) auquel il fut soumis permit cependant

d'obtenir une amélioration relativement assez accusée.

En 1879, lorsque l'un de nous a pris possession du

service, le Pacha était gâteux, atteint d'une chute du

rectum déjà ancienne et il demeurait confiné au lit sur

les recommandations de sa mère, sous prétexte qu'il

était très sensible au froid. Aussi avait-il désappris

48 IDIOTIE CRÉTINOÏDE..

à marcher. A l'époque de sa mort, il était propre,

marchait tenu simplement à la main; il était devenu,

au moins par moments, plus expansif, mais son état

intellectuel ne s'était pas sensiblement modifié; son

répertoire de mots restait toujours à peu près aussi

pauvre; souvent il fallait une excitation forte, c'est-à-

dire élever la voix et répéter les questions, pour attirer

son attention, pour le faire regarder; les réponses ne

se produisaient qu'avec lenteur et paresse. Parfois, a

la visite, lorsqu'il était bien disposé, si on ne s'arrê-

tait pas à lui, il regardait, puis poussait un cri pour

attirer l'attention.

Nous ajouterons que tout signe de puberté faisait

défaut et que Th..., tant au point de vue intellectuel

que physique, avait subi un véritable arrêt de dévelop-

pement.

Voilà pour le côté clinique. Si maintenant nous

examinons les faits principaux qui nous sont fournis

par l'autopsie, nous constaterons l'absence de toute

trace de glande thyroïde, la présence de différents

épanchements séreux dans les plèvres, le péricarde,

un météorisme intestinal en rapport avec l'atonie

musculaire des fibres lisses de l'intestin et des libres

striées musculaires de la paroi abdominale.

Le tissu adipeux sous-cutané, abondant dans toutes

les régions, comme oedémateux, luisant, mais en réalité

non oedémateux, sur la paroi antérieure du thorax,

formait aux aisselles et au-dessus des clavicules ces

masses ou tumeurs mollasses, d'aspect lipomateux, que

nous avons décrites. Ces masses ne présentaient pas

de limites tranchées et se confondaient à leur péri-

uhérie d'une façon diffuse avec le tissu adipeux sous-

C.1CHN : XIIS PACHYDISRMIQUK. 49

cutané environnant. Elles avaient tous les caractères

qui sont représentés dans la figure 3 (p. 10).

Enfin, comme dans un certain nombre d'observa-

tions du même genre, celle de Curling entre autres,

nous trouvons la fontanelle antérieure persistante .

En ce qui concerne le cerveau, la description minu-

tieuse que nous avons donnée nous dispense de faire

de longues réflexions. Toutefois nous devons signaler,

d'une façon spéciale, les points suivants :

1° Les circonvolutions sont en général petites, et, en

particulier les circonvolutions frontales et pariétales

ascendantes. Nous insisterons spécialement sur la troi-

sième circonvolution frontale gauche dont le cap est

dédoublé, cette circonvolution est, du reste, bien dé-

veloppée sauf le pied qui fait corps avec la frontale

ascendante et ne s'en distingue que par une scissure

très superficielle. Ce dédoublement n'avait encore été

signalé jusqu'ici que sur certains cerveaux d'hommes

distingués, entre autres sur celui de Gambetta; chez

celui-ci, le cap antérieur était plus développé, au con-

traire du Pacha où le cap postérieur est plus déve-

loppé; on voit que ce dédoublement du cap peut aussi

se rencontrer sur des idiots à parole presque nulle.

Ce fait démontre une fois de plus que, si la forme des

circonvolutions est importante, leur structure intime

l'est encore davantage, et que ces deux choses ne

peuvent être séparées.

Nous appellerons encore l'attention sur les plis de

passage se rendant de la deuxième circonvolution fron-

tale à la frontale ascendante et qui, en allant par l'in-

termédiaire de celle-ci s'insérer à la pariétale ascendante

semblent continuer la deuxième frontale jusqu'à la

Bourneville, 18%0 4

50 IDIOTIE CRTINO1D);.

pariétale ascendante. Cette disposition, qui est loin

d'être très rare, est tantôt complète, tantôt incomplète.

Enfin nous trouvons quatre plis de passage temporo-

pariétaux à gauche, et trois à droite.

1° Les sillons sont remarquables par leur irrégu-

larité ; la scissure interpariétale se continue de chaque

côté dans le premier sillon temporal, et la scissure

perpendiculaire externe descend, comme chez la singe,

jusqu'au lobe temporal. La scissure de Sylvius laisse

des deux côtés le lobule de l'insula à découvert. z

Les petites scissures sont également très irrégulières,

sinueuses, et ne permettent souvent que de limiter avec

peine les parties appartenant à,telle ou telle circon-

volution. Nous appellerons seulement l'attention sur

la forme étoilée de la scissure sous-pariétale gauche.

3° Enfin le corps pituitaire paraissait sensiblement

hypertrophié.

Nous reprenons maintenant l'exposé des cas d'idiotie

crétinoïde avec cachexie pachydermique publiés par les

auteurs. Voici un cas de M. Bouchaud', paru en 1884,

et que nous reproduisons complètement en raison de

l'intérêt qu'il présente.

Observation VII. Crétinisme sporadique compliqué de nanisme.-

Pas d'antécédents héréditaires. Coqueluche et rougeole à sept

mois; arrêt de développement physique et intellectuel consécutif.

Etat du malade à seize ans et demi. - Aucun signe de puberté. -

Idiotie : parole limitée à quelques monosyllabes; défaut d'at-

tention ; marche très difficile; gâtisme ; inertie physique. - Ery-

thème; refroidissement progressif ; mort.-Autopsie : péricardite ;

absence du corps thyroïde.

W... (François), âgé de seize ans et demi, est admis à l'asile

de Lommelet, le 22 avril 1882. Son dossier ne contenant d'autres

1 Journal des sciences médicales de Lille, 1883, 5 et 20 décembre.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 51

renseignements que ceux qui concernent son état actuel, 111. Lalo,

étudiant en médecine, qui a bien voulu se charger de prendre

des renseignements sur les lieux, est parvenu à nous fournir les

documents suivants : Né à BétUune, W... a vécu dans une maison

qui est établie dans de bonnes conditions hygiéniques; elle est

aérée et propre ; il n'y a pas de marais dans les environs. Dans

la ville et le pays voisin, on ne rencontre pas de crétins; le goitre

y est rare et la population est saine. - Le père, âgé actuellement

de quarante-cinq ans, parait très intelligent; il est d'une consti-

tution robuste et sa taille est de 9 m. 70. - La mère est morte à

l'âge de 40 ans, dix-huit mois après être accouchée de son dernier

enfant, à la suite d'une maladie dont il n'estpas possible de savoir

le nom. -Il ya eu cinq enfants ; quatre filles et un garçon. Ils

sont tous vivants. Tous sont forts et bien constitués, sauf la fille

cadette, âgée de quinze ans, qui est un peu délicate. La fille ainée,

âgée de vingt-deux ans, qui a été nourrice à Paris, est,ur le point

d'accoucher de son deuxième enfant et se propose encore de

redevenir nourrice. Le troisième enfant est un garçon, âgé de

treize ans, et les deux autres sont des filles, âgées de huit et cinq

ans. Rien à noter du côté des autres parents; les ascendants du

côté du père et de la mère sont morts à un âge avancé.

W..., né à terme, est venu au monde bien développé ; il aurait

pesé, s'il faut en croire le père, 12 livres à sa naissance, ce qui

est assurément une exagération, mais donue une idée de la force

dusujet. La croissance fut normale jusqu'à l'âge de sept mois; à

celte époque l'enfant aurait eu la coqueluche et la rougeole, et, à

partir de ce moment, il aurait cessé de grandir d'une manière

sensible. L'intelligence a subi le même arrêt de développement

que le corps.

Etat actuel. - W... ressemble beaucoup à un petit enfant; il en

a le caractère et la taille ; on lui donnerait deux à trois ans, si sa

face n'offrait un air vieillot, bien différent de celui de cet âge, et

si la grosseur des diverses parties du corps, de la tête, du tronc,

des membres, n'était démesurément exacérée. La tête, en effet,

est volumineuse, le col est court, le tronc est trapu, et les membres

sont fort gros. - Le crâne n'est pas sensiblement déformé ; il est

symétrique et un peu aplati de haut en bas. La fontanelle anté-

rieure persiste ; on sent un espace membraneux à travers lequel

on pourrait passer le bout du doigt. La chevelure ezt blonde, peu

abondante. - La face est large, le front peu élevé; viciiez, déprimé

à son origine est très large à sa base. Les lèvres sont très épaisses

et l'ouverture buccale, ordinairement béanle, donne issue à la

langue, qui est très volumineuse et semble ne pouvoir se loger

que très difficilement dans la bouche, aussi est-elle habituellement

en partie hors de cette cavité. Les dents sont petites, mal confor-

mées, il en manque plusieurs et la plupart de celles qui existent t

52 IDIOTIE CRÉTINOÏDE

sont cariées. Le ventre est saillant, arrondi, volumineux. Pas de

poils au pubis. La verge est celle d'un enfant; les testicules ont la

grosseur d'une petite noisette.

La peau est pâle, lisse et peu tendue ; elle est mobile sous les

tissus sous-jacents qui sont mous et flasques. On sent qu'il existe

une légère couche de graisse sur toute la surface du corps. Les

mains et les pieds sont potelés comme ceux d'un enfant; la peau

y est même tendue et d'une teinte foncée, légèrement rougeâtre,

on dirait de l'oedème des nouveau-nés. La muqueuse des lèvres

et des conjonctives est également pâle ; les paupières supérieures

sont légèrement gonflées.

L'intelligence a subi un arrêt complet de développement, c'est celle

d'un enfant qui commence à parler, avec moins de vivacité et

plus de lenteur dans ses manifestations. Aussi les traits du visage

sont-ils peu mobiles et presque sans expression. Parfois cepen-

dant l'enfant sourit ; il devient même gai dans certaines circons-

tances ; ainsi quand on lui met un chat entre les mains, il le

caresse et prend une figure riante et pousse quelques cris de joie;

il est toujours calme et habituellement silencieux ; il fait à peine

entendre par moment un bruit inarticulé, une espèce de gémisse-

ment (heen...), rarement il profère quelques mots faciles à pro-

noncer, tels que cat (chat), faim, etc. Il prête une faible attention

à ce qui se passe autour de lui et ne comprend que quelques

expressions très simples, comme celle de donner la main, quand

on le lui demande, et autres semblables. Ces désirs sont très bor-

nés et peu nombreux. Il indique avec le doigt ce qu'il veut ob-

tenir ; s'il éprouve, par exemple, l'envie de monter sur sa chaise

ou en descendre. Il est dénué de sentiments affectueux, il ne s'at-

tache à personne et ne paraît pas reconnaître ceux qui lui don-

nent des soins.

La sensibilité physique est également fort obtuse; il se montre

très peu impressionnable quand on irrite la peau. Les sens sont

intacts ; il voit et il entend ; l'odorat et le goût paraissent cepen-

dant peu développas. - Il est faible et très apathique, aussi

reste-t-il la plus grande partie du temps assis et immobile. Il

peut à peine marcher seul, on est obligé de lui donner la main et

encore n'est-il capable de faire que quelques pas. Outre qu'ils

sont peu énergiques, tous ses mouvements se font remarquer par

leur peu d'activité.

L'appétit est médiocre, il mange peu et très lentement; l'em-

bonpoint est cependant relativement considérable. Incapable

d'avertir quand il a un besoin à satisfaire, il est naturellement

gâteux ; c'est à peine s'il mange seul les aliments qu'on lui sert.

Les battements du pouls sont extrêmement petits et faibles ; on

les sent ditficilement au poignet. Ceux du coeur sont également

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 53

très faibles, mais réguliers. Quant aux bruits cardiaques, ils sont

nets, mais profonds, sourds. La respiration et la température

axillaire sont sensiblement normales. Voici les chiffres obtenus :

P. 80; n. 18 ; T. ax. 36°,9.- Le poids du corps et les dimensions

de quelques-uns des organes les plus importants se résument

ainsi :

h\ le IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

pérature centrale ; hier seulement elle a été prise et on a trouvé :

1 h. de l'après midi, T. ax. 3>°,4.. La température atmosphérique

est assez froide. Celle nuit le thermomètre est descendu vers 4 ou

5° au-dessous de zéro, mais dans les salles de l'infirmerie, la tem-

pérature est toujours assez élevée et ne parait pas descendre au-

dessous de 15°.

Ce matin, la peau est encore froide et le thermomètre placé sous

l'aisselle nous donne : à S Il. du matin, T. 33°; P. 64, il 1 Il. du

soir, T. 33°. L'inappétence persiste, W.... ne prend aucun aliment

solide; il accepte simplemenlun peu de lait. Il est affaissé, reste

couché sur le côté droit ou à demi assis dans son lit.

Il ne tousse pas, la respiration est un peu gênée. À l'ausculta-

tion, affaiblissement du murmure vésiculaire en arrière et en bas;

pas de râle; bruits du coeur sourds, profonds, difficilement per-

çus. Pouls presque insensible.

15. - L'érythème a à peu près entièrement disparu, mais

l'abattement est considérable. T. ax., le matin, à 8 Il., 34°; le

soir, à 6h. 1/2, 34°. Respiration lente et inégale.

16. - Même état. Le malin, à 8 h., T. ax. 34° 6. Le soir, à

7 h., 74°, I . - Mort dans la nuit, à 5 heures du matin.

Autopsie. - Nous procédons à l'examen cadavérique avec le

concours de deux de nos collègues. Des incisions faites à la peau

niellent à découvert une épaisse couche de tissu cellulo-graisseux.

Nulle part on ne trouve d'infiltration oedémateuse, ni aux mains,

ni aux pieds, ni à la face. On enlève la partie antérieure du tho-

rax et une poche globuleuse, d'un volume considérable, apparaît

sur la ligne médiane. C'est le péricarde distendu par une grande

quantité de liquide. Il présente 11 centimètres dans le sens de la

hauteur et dans le sens de la largeur. Une ponction faite à l'aide

d'un trocart permet de retirer 1,50 gr. de sérosité claire, transpa-

rente, de couleur légèrement citrine où le refroidissement ne fait

naître aucun nuage; mais qui, sous l'influence de la chaleur et

de l'acide nitrique, se coagule en masse. Le péricarde, incisé et vu

par sa face interne, parait légèrement opaque et un peu grisâtre.

Sur la crosse de l'aorte on remarque quelques petits vaisseaux

dilatés et gorgés de sang et même de petites ecchymoses. Le

cceur est distendu par une grande quantité de caillots sanguins

qui remplissent les cavités droites et gauches. La valvule milrale

est légèrement opaque, grisâtre et un peu épaissie. Les valvules

sigmoïdes de l'aorte, leurs bords libres surtout, sont très épaisses,

légèrement rosées et demi-transparentes. On dirait une infiltration

de matière gélatineuse, dégelée de pommes; mais la consistance est

assez ferme; on trouve une certaine résistance quand on les com-

prime avec les doigts. A l'intérieur de l'aorte, dans toute son

étendue, près du coeur surtout et dans l'intérieur des carotides à

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 55

un degré moindre, on trouve une multitude de petites saillies, du

volume d'un petit grain de mil, d'un gris jaunâtre, non dures

comme les dépats crétacés, mais demi molles.

Le foie, la rate, les reins, les poumons ne présentent pas de

lésions qui méritent d'être notées. Cependant, du côté droit, la

plèvre est le siège de nombreuses adhérences, déjà anciennes et

assez résistantes.

Les testicules sont de la grosseur d'une petite noisette. La.langue

est relativement énorme; de l'extrémité du V lingual à lapointe,

elle mesure 7 cent. Sa largeur est de 5 cent. et son épaisseur de

2 à 3 cent. Le larynx et la trachée ayant été enlevés en même

temps que les poumons et l'oesophage, après une incision de la

peau pratiquée sur la ligne médiane, on recherche le corps Tux-

ROIDE entre la trachée et les muscles qui ont été assez bien con-

servés et on n'en trouve aucune trace.

Le grand sympathique de la région thoracique parait normal ;

au cou, on ne trouve que deux ganglions; l'inférieur a une lon-

gueur d'un centimètre et demi; le supérieur est beaucoup plus

volumineux : il a une longueur de 2 centimètres environ et une

largeur de 5 à 6 millimètres.

Les enveloppes du crâne s'enlèvent facilement. La boite crâ-

nienne ayant été sciée, il devient impossible de le décoller de la

dure-mère. Celle-ci adhère très fortement aux sutures osseuses et

surtout à la fontanelle antérieure qui, n'étant pas ossifiée, est cons-

tituée par une membrane fibreuse, forte et étendue. Le cerveau

parait régulièrement développé et semblable à celui d'un adulte.

Les principale : ) circonvolutions sont bien dessinées et volumineuses;

les sillons sont profonds et étroits.

La dentition est très défectueuse. Nous trouvons : Incisive,

- 2 -1 ; canine, première molaire, ? 2 2;; deuxième molaire,

-t"-o L'extraction de ces dents nous apprend que ce sont des

dents de la seconde dentition; les premières n'ont qu'une racine

conique très longue, les grosses molaires sont plus ou moins

cariées; de quelques-unes il ne reste plus que la racine.

Les principaux organes ont été pesés et nous ont donné les

chiffres suivants :

56 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

On fait macérer le squelette et on trouve, au bout de peu de

temps, quêtons les os du crâne se sont séparés les uns des autres,

ce qui indique que la soudure des articulations était' fort ii,com-

plète. Les épipbyses des os longs se séparent également de la

diaphyse avec une grande facilité.

M. Bouchaud, après avoir rapporté ce cas qu'il rat-

tache au crétinisme sporadique, croit devoir rejeter

l'hypothèse du myxoedème en se basant sur ce qu'il n'a

trouvé à l'autopsie ni sérosité, ni substance colloïde,

mais simplement une épaisse couche de graisse sous-

cutanée. Il esta noter, du reste, que l'examen chimique

de cette peau n'a pas été pratiqué et que la présence

de la mucine a paru faire défaut dans un certain nom-

bre de cas de myxoedème. Tous les autres symptômes

observés par M. Bouchaud sont bien ceux de l'idiotie

crétinoïde avec cachexie pachydermique. L'auteur en a

lui-même le sentiment, car, à plusieurs reprises, il in-

siste sur le rapprochement qui peut être établi entre le

crétinisme et le myxoedème. Il est probable que, s'il

avait eu l'occasion de voir auparavant quelques cas

types de myxoedème, il n'aurait pas hésité. Nous ajou-

terons que l'absence de la glande thyroïde fournit un

argument puissant en faveur de notre interprétation.

Le Progrès Médical a publié, le 4 février 1882\ un

autre cas d'idiotie crétinoïde, observé par M. Char-

pentier dans le service de Legrand du Saulle. Nous le

relatons tel qu'il a paru à cette époque.'

Observation VIII. - Oncle paternel aliéné; tante maternelle rachi-

tique. -- Carie lombaire à cinq mois, puis convulsions jusqu'ci

onze mois; affaiblissement physique et intellectuel. - Idiotie com-

plète ; alitement; gâtisme; marche et parole nulles ; bouffissure de

' Charpentier. Nouveau cas de rnyxoedème ou cachexie pachyder-

mique.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE.

57

la face; tuméfaction des paupières; épaississement de la langue ,

bave; oedème sur les mains ; cheveux rares ; absence de goitre.

La nommée Sacbse (Elise), quatre ans, admise en février 1881,

présente un ensemble de symptômes qui rappellent la cachexie

pachydermique, expression heureuse de AI. le professeur Charcol,

pour désigner le myxoedème des auteurs anglais ou une forme de

l'état crétinoïde de M. Baillarger.

La physionomie de la malade attira notre attention par la res-

semblance qu'elle offrait avec le Pacha, idiot de Bicêtre, dont t

M. Bourneville a publié l'observation, comme cas de cachexie

pachydermique. En effet, elle a le visage bouffi, arrondi transver-

salement, en forme de boule ; les paupières sont tuméfiées, immo-

biles, les yeux à peine ouverts, chassieux, le regard est triste,

l'air pleurard ; le nez épaté est épaissi ; les joues violacées, froides,

tendues et bombées contrastent avec le fond blanc jaunâlre du

teint qui a une couleur de miel ; la langue, épaissie pend presque

constamment entre les dents et les lèvres qui laissent baver la

salive. La bouffissure de la face nous conduisit à l'examen général

de l'enfant, et nous constatâmes le même état de la peau sur

les membres supérieurs et inférieurs, à l'abdomen et aux ieins,

mais nullement à la région thoracique ; partout mêmes carac-

tères : sensation de froid désagréable au toucher de la peau qui

n'est ni sèche, ni écailleuse, ni gluante; teinte violacée surtout

aux lombes, aux fesses et aux extrémités ; celles-ci sont déformées

et massives. Aux mains, le creux palmaire est remplacé par une

surface bombée, la peau est épaissie, le pli que l'on y produit en

la prenant entre les doigts mesure plus d'un centimètre, l'im-

pression du doigt ne s'y marque pas comme dans l'oedème, mais

donne une sensation de résistance, mollasse et élastique à la fois.

Pas d'adhérences de la peau aux organes sous-jacents sur lesquels

on parvient à la faire glisser; pas de troubles appréciables de la

sensibilité cutanée. Les caractères pathologiques de la peau dimi-

nuent à mesure que l'exploration remonle vers les parties supé-

rieures de l'abdomen et n'existent plus au thorax qui, ainsi que

le cou, présente une peau normale; l'empâtement signalé des

régions sus-claviculaires comme caractéristique du crétinisme

congénital est nul.

Les cheveuxsont rares, les ongles normaux, les dents jaunâtres ;

absence des molaires; les narines sont à peine visibles ; rien aux

appareils digestif, respiratoire, circulatoire, biliaire et rénal;

rien au coeur, pas d'albumine dans les urines. Le cri est guttural,

enroué, d'ailleurs rare. Pas de goitre; pas de déformation crâ-

nienne, ni des oreilles; pas de déformation rachitique, sauf les

vestiges d'une carie lombo-sacrée, ainsi qu'en témoignent des ci-

58 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

catrices anciennes de cautérisation. Pas d'autres phénomènes

scrofuleux, pas de manifestations syphilitiques.

Quant aux troubles intellectuels, qui sont des plus manifestes,

ce sont ceux de l'idiotie complète. La malade reste couchée dans

son lit, grande gâteuse, immobile, dans un état de mutisme

absolu, triste et silencieuse ; elle ne sait pas diriger son regard,

ne peut tenir la tête, remue les membres, mais sans les diriger,

ne peut se tenir debout. Depuis son entrée aucun changement ne

s'est produit, aucun trouble n'est survenu.

Voici le= renseignements que nous avons pu nous procurer.

L'enfant est née à Paris, de parents bien portants, ni crétins ni

goitreux. Dans la famille, un oncle paternel aliéné à Ville-Evrard,

une soeur maternelle rachitique; l'enfant a deux soeurs plus jeunes

qu'elle et bien portantes, sans vice de conformation. A la naissance,

l'enfant, de bonne santé, n'offrait rien d'extraordinaire et ressem-

blait aux autres enfants, le corps se développa régulièrement, une

chevelure assez forte apparut; mais, à cinq mois, elle fut traitée

pour une carie lombaire qui se compliqua de crises convulsives,

répétées cinq fois par jour et qui durèrent six mois. C'est sur

ces entrefaites que la mère remarqua la bouffissure de la peau

qui, depuis, n'a pas diminué.

Ce ne fut que plus tard qu'elle remarqua l'empâtement des

membres inférieurs, qu'elle rapportait d'ailleurs à la carie verté-

brale. C'est aussi à la même époque que les cheveux commen-

cèrent à tomber, que le cri devint plus rauque et plus sourd, que

le regard perdit de sa vivacité, et que l'apathie et l'abattement se

manifestèrent. Voyant qu'aucun phénomène intellectuel ne se dé-

veloppait, la mère prit le parti de faire admettre son enfanta la

Salpêtrière.

La malade est morte un mois après la publication

de cette observation d'un érysipèle avec broncho-

pneumonie double. L'autopsie n'a pu malheureuse-

ment qu'être faite d'une façon imparfaite par suite de

circonstances particulières. L'attention de M. Char-

pentier n'ayant pas été attirée sur la glande thyroïde,

cet org : me n'a pas été examiné. On constata un amin-

cissement très prononcé de la voûte crânienne, une

méniugo-encéphalite( ? ). Le tissu adipeux sous-cutané

criait sous le scalpel, était plus développé sur la

moitié droite du corps; à la région lombaire il avait

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 59

deux centimètres d'épaisseur à droite, un centimètre

à gauche.

L'enfant dont il s'agit était évidemment atteinte de

myxoedème ; ce diagnostic avait été confirmé par

M. Charcot. Nous ajouterons que l'observation cli-

nique constate l'absence de tout goitre, et que Legrand

du Saulle avait porté le diagnostic de crétinisme.

Les deux cas suivants sont empruntés aux journaux

anglais. Le premier appartient à M. Coxwell et a été

présenté à la Société clinique de Londres comme étant

celui d'un enfant présentant des symptômes ressemblant

à ceux du myxoedème i .

Observation IX. - Développement physique et intellectuel normal

jusyzc'ci l'âge de huit ans ; puis somnolence, perte de la mémoire,

parole pâteuse et indistincte, démarche incertaine; gonflement des

paupières inférieures.-Diminution de la glande thyroïde ; (tuais-

sement de la température; insomnie : cris ; perte du langage arti-

culé ; affaiblissement des facultés intellectuelles.

Il s'agit d'une enfant de treize ans présentant des symptômes

ressemblant à ceux du myxoedème. Jusqu'à l'âge de huit ans, elle

ne différait en aucune façon des autres enfants et elle pouvait lire

un chapitre de la Bible ou une histoire aussi bien que sa mère ;

elle savait écrire et apprenait l'arithmétique. Survint alors un

grand changement; elle tombait souvent de sommeil, même en

mangeant ;sa mémoire devint défectueuse, et si on l'envoyait

faire quelque commission, elle errait sans but. Dernièrement sa

parole devi nt épaisse et indistincte ; elle souffrait de maux de tête,

sa tête s'inclinait sur la poitrine; les mains et les pieds devinrent

très froids, les jambes très faibles et la démarche incertaine. Elle

fut admise dernièrement à l'hôpital national des paralytiques et

épileptiques, dans le service du D° Hughliugs Jackson. Son facies

donnait l'idée du myxoedème, sa peau était translucide avec une

tache circonscrite de rougeur au centre des joues; les paupières

inférieures étaient enllées; le nez large, les yeux proéminents et

bien formés. La glande thyroïde semblait diminuée, et il n'y

avait aucune tumeur graisseuse anormale, au cou ou ailleurs. La

' The British médical Journal, 20 janvier 1883.

60 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

température tomba fréquemment à 33 ? 4. Elle restait souvent

sans repos la nuit et elle avait souvent des attaques de cris. La

force du langage diminua, au point de, en dernier lieu, ne pouvoir

articuler un son ; on voyait les lèvres remuer sans résultat pen-

dant qu'elle essayait de parler. Elle ne pouvait embrasser sa mère

ou ne pouvait gonfler ses joues et la nourriture restait quelquefois

sept ou huit minutes entre les dents et les lèvres. On constata

enfin une obnubilation générale de l'intelligence.

Il nous paraît inutile d'insister sur les symptômes

présentés par cet enfant qui sont ceux du myxoedème,

il nous suffira d'appuyer sur la constatation faite par

l'auteur de la diminution de la glande thyroïde.

Le second cas est dû à M. Armand Routh, qui l'a

publié dans le Médical Press and Circula ? ', sous le

titre de « Un cas de crétinisme sporadique, avec appa-

rence de myx'oedème »'.

Observation X. - Rachitisme; absence probable du corps thyroïde,

tuméfactions lipomateuses sus-claviculaires et axillaires; marche

lente, indécise et chancelante ; parole lente et monotone; idéation

lente; lecture et écriture, nulles; mémoire seulement des faits an-

térieurs à l'âge de sept ans; absence de signes de puberté.

Elise H..., âgée de vingt-cinq ans, est une pensionnaire de la

maison des femmes incurables, Marylebone Road, elle est née

près de Southampton, dans le tlampshire. Elle était l'aînée de

quatre enfants dont les parents, âgés respectivement de vingt-

quatre et vingt-deux ans, étaient en pleine santé au moment de

sa naissance. Le père cependant mourut douze ans et la mère

seize ans plus tard de pllthisie, maladie qui a causé aussi lamort

de la soeur de la malade à dix-sept ans et de la soeur de sa mère

à vingt-sept ans. Le père était né dans le Hampsphire etla mère

dans le Berkshire et il n'y avait aucune consanguinité entre

eux.

Jusqu'à l'âge de sept ans, la malade était comme les autres

enfants, mais plus grasse que d'ordinaire et on la comparait à

un « grand gâteau blanc » parce qu'elle était grasse, flasque et

couleurde pâte blanche. Pendant qu'elle était enceinte d'elle, sa

mère fut effrayée par un taureau. A sept ans, celte fille ces-.a de

1 Médical Presse and Circulai; H mai 1885.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 61

grandir, mais elle devint plus grosse et plus flasque, lente dans

ses mouvements et si stupide que toutes les tentatives pour lui

apprendre à lire et à écrire furent vaines. A huit ans, elle vint

à Londres et devint moins habile à se conduire et plus niaise. Ses

amis disent que depuis il n'y avait eu peu ou point de change-

ments, excepté que dernièrement elle commença à maigrir.

Antécédents héréditaires. - A l'exception de l'apparente héré-

dité de tuberculose, il n'y avait aucuns antécédents héréditaires

de maladies, tels que syphilis ou mal de Bright, aucun antécé-

dent d'alcoolisme, ni de folie ou de crétinisme dans la famille.

Une soeur de la malade, âgée de vingt-trois ans,jouit d'unebonne

santé, est bien développée, mais 'quelque peu anémique. Elle

présente une hypertrophie de la glande thyroïde, qui a diminué

par le traitement et un souffle systolique à la pointe se propageant

dans l'aisselle, endocardite valvulaire consécutive à une attaque

de rhumatisme articulaire dont elle fut atteinte. La malade a

aussi un frère bien portant âgé de dix-neuf ans, actuellement

soldat; tous les enfants sont nés dans le Hampshire.

Etat actuel. Taille : im05, taille moyenne d'un enfant de cinq

ans. Poids : 35 kilogr. 240. Elle est arrêtée dans sa croissance et

sou squelette est altéré par le rachitisme. Il existe une lordose

bien marquée. Les tibias sont courbés. Les épiphyses des os des

membres inférieurs sont quelque peu hypertrophiées, agrandies.

A leur union avec leur cartilage, les côtes présentent un chapelet

rachitique; dolichocéphalie.

La face est absolument sans expression et les traits effacés ;

elle est gonflée; les lèvressont épaisses, très colorées et informes;

la bouche est généralement ouverte, le nez est épaissi et élargi

entre les yeux, les narines dilatées, les oreilles grandes et plates.

La tête ne pend pas en avant, mais le cou semble raccourci,

perdu dans la tuméfaction sus-claviculaire.

La peau est pâle et couleur de cire, excepté à la face où il y a

une légère rougeur, absente quelquefois; sur les joues pendantes

et flasques et sur les pieds et sur les jambes, où la circulation est

si pauvre qu'il y a un état chronique d'engelures. La .'peau est

sèche et dure par places, mais la paume des mains est quelque-

fois moite. Les mains ont la forme d'une bêche. 11 n'y a pas de

véritable oedème. Les cheveux sont couleur de jais, assez épais,

mais durs.

Sa température en moyenne est de 37° dans le rectum, mais la

température de la surface est toujours subnormale 35° ou 3G°dans

l'aisselle et dans l'aine; une fois seulement elle s'est élevée à 37°,

mais après un séjour de quelques heures sous les couvertures du

lit.

Le corps thyroïde ne peut pas être senti. Au-dessus de la clavi-

62 IDIOTIE CRETINOÏDE.

cule de chaque côté, immédiatement au-dessus de l'os, il y a les

tuméfactions bien marquées, qui glissent sous la pression et,

quoique donnant aux doigts la sensation du tissu lipomateux ou

myxomateux, rappellent également la sensation éprouvée en

saisissant un varicocèle.

Au-dessous des tuméfactions on entend un murmure respiratoire

claire, sans aucun bruit morbide. On trouve de pareilles tuméfac-

tions sous-cutanées sur la ligne axillaire postérieure. L'abdomen

est pendant, ce qui est dû en partie au bassin qui est très bas.

L'ombilic fait saillie et les droits de l'abdomen n'adhèrent pas à

la ligne médiane.

La malade peut marcher lentement et en chancelant pendant une

petite distance, mais souvent elle tombe subitement; aussi elle e

ne marche jamais sans appui à sa portée. Les jambes semblent

incapables de porter le poids du corps et cèdent tout d'un coup

aux chevilles ou aux genoux. Les mouvements des bras sont

libres, mais elle fait tout lentement et avec méthode quoique sans

hésitation. Elle ne s'habille pas elle-même, parce qu'elle prendrait t

toute la matinée pour le faire, mais elle peut mettre et enlever

ses habits si on lui laisse tout son temps.

La parole est lente et monotone, mais sur un ton très élevé. Elle

répond assez correctement aux questions, mais lentement. Elle

parait mettre plus de temps que d'habitude pour comprendre une

question et, par suite, encore plus de temps pour formuler la

réponse.

Système nerveux.-La malade ne peut ni lire, ni écrire, et tout

essai pour lui apprendre quelque chose a échoué ; en fait il est

impossible de fixer son attention. Elle ne peut se rappeler les

faits récents', mais se souvient des faits arrivés avant son dé-

part de llampslirre à sept ans, la croissance et l'intelligence

semblant s'être arrêtée à cette époque. Le sommeil est bon et

lourd ; quoique presque Illditlérente à la douleur, elle se plaint

souvent du froid. Les réflexes rotuliens sont exagérés. Rien ne

paraît l'intéresser plus longtemps que quelques secondes, mais

quand on lui parle gaiment, une lueur de plaisir traverse sa

ligure. Autrement sa physionomie est sans mouvements, dure et

quelque peu triste. La vue est bonne et l'examen opthalmosco-

pique ne décèle rien d'anormal. Ses pupilles sont un peu dilatées

et paresseuses.

Appareil urinaire. - La malade rend en moyenne z08 gr. d'u-

rine (25 onces) en 24 heures. Poids spécifique, 1.015. Ni sucre, ni

albumine, ni dépôts. Quantité d'urée faible, à peu près Il de la

1 Il est à observer que le même phénomène se produit chez le vieillard

dont les facultés intellectuelles déclinent.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 63

quantité normale 40,b grammes. Ce résultat est obtenu par la

méthode des U9 Russell et West.

Digestion.- La langue n'est pas notablement agrandie et pas

entamée par les dents. L'angle facial est grand, les dénis sont

mauvaises et plusieurs ont été enlevées, par carie. Les alvéoles

sont extraordinairementproéminentes et lamuqueuse des gencives

est très épaisse. L'appetit est bon; l'haleine est généralement

mauvaise ; constipation. La malade se plaint continuellement

d'avoir la bouche amère.

Circulation. - Pouls, 72. 11 est très difficile de sentir le pouls

au poignet, à cause de sa distance de la surface et de sa faiblesse.

Bruits du coeur normaux mais faibles.

Sang. - Le sang examiné par le Dr Montagu-Murray au moyen

de l'hoemocytomètre et de l'hoemodynamomètre de Gowers et au

microscope, le D' Murray dit que la proportion des globules

blancs ou globules rouges estde i à : i0; que les globules rouges

du sang en proportion à l'échelle normale est de 86 p. 100, tandis

que l'hémoglobine est de 77 p. -100. Il n'y avait aucune altération

morbide dans l'aspect des globules rouges ou blancs.

Respiration. - Tout à fait normale à tous les points de vue. -

Foie et rate, normaux; peu sensiblement hypertrophiés.

Organes génitaux. - Pas de règles. Pas de leucorrhée, organes

génitaux externes développés et dépourvus de poils. Petites

lèvres allongées et épaissies, faisant saillie à quelque distance de

la vulve. Les mamelles sont tout à fait enfantines. Vagin et col de

l'utérus normaux. Par le rectum, on constate que le bassin est

comme celui d'une enfant, quant à la forme et la position, et

l'utérus est la moitié de la grosseur normale, mais est normal

quant à la forme et la position. Les ovaires sont situés sur les

côtés du bassin plus bas et plus en arrière que normalement, et

enfin ils sont doubles de la grosseur normale; ils sont plus mous

que d'habitude et ne causent aucune douleur lorsqu'on les saisit

entre le doigt dans le rectum et la main placée sur l'abdomen.

Il est probable que les ovaires ont subi des altérations semblables

au myxoedème qui rendraient compte de la persistance de l'amé-

norrhée et de l'état infantile des organes génitaux externes et

internes.

M. Routh a porté le diagnostic de crétinisme spora-

dique avec myxoedème, diagnostic qui fut confirmé

successivement par MM. Gowers, Ord, Barlow et

Houth père. Il insiste sur les aualogies nombreuses

61 fi. IDIOTIE CRE'L'lNOÏDIL

qui existent entre son cas et ceux de MM. W. Gull et

Hilton Fagge. « Les rapports exacts entre le myxoe-

dème et le crétinisme sporadique, écrit l'auteur, n'ont

pas encore été fixés. MM. W. Gull et Hilton Fagge

ont montré que le crétinisme sporadique était inva-

riablement associé à la présence de tumeurs symé-

triques dans la région sus-claviculaire et dans d'autres

régions, mais la priorité relative de ces accidents

pathologiques est inconnue. Dans les quatre cas de

M. Hilton Fagge, ceux dans lesquels le crétinisme a

duré le plus longtemps, ces gonflements symétriques

étaient le moins marqués et vice versa. De là il sem-

blerait que le myxoedème, si c'en est un, décroît lors-

que le crétinisme augmente». Ce rapport inverse entre

le degré de l'idiotie et le degré du myxoedème est

loin d'être démontré.

M. Routh termine en déclarant que, dans son opi-

nion, il est difficile de préciser la date du début de

l'atrophie de la glande thyroïde; toutefois, il lui paraît

vraisemblable que, dans son cas, on avait affaire à une

absence du développement congénital de la glande :

c'est à cette absence qu'il faut rattacher le myxoedème

d'abord, ensuite l'état crétinoïde.

Eu 1882, M. Bail a présenté à différentes sociétés

médicales un malade dont il a publié l'observation

dans ['Encéphale (1882, p. 253) sous ce titre : Le crétin

des Batignolles. L'un de nous a eu l'occasion de voir ce

malade qui lui a paru être un bel exemple d'idiotie

crétinoïde avec cachexie pachydermique. La véritable

nature de l'affection paraît avoir échappé à M. Bail.

Une circonstance particulière nous ayant mis en rela-

tion avec la famille de ce malade, nous avons fait une

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 65

enquête minutieuse auprès d'elle; de cette enquête et

de l'examen de la photographie qui accompagne la

publication de M. Bail, il nous semble résulter d'une

manière évidente que ce cas appartient à la catégorie

des idiots crétinoïdes avec myxoedème {fig. 12). L'ob-

servation qui suit a été rédigée d'après nos renseigne-

ments personnels et d'après la note de M. Bail. Nous

y ajouterons, malgré les nombreuses et regrettables

lacunes qu'elle présente, un résumé de la relation de

l'autopsie communiquée à la Société d'anthropologie

en 1883.

Observation XI. -Père : quelques rares excès alcooliques ; hémi-

plégie droite en 1886. - Grand-père paternel mort paraplégique.

- Mère plus âgée de dix ans que son mari. -Ni goitreux ni cré-

tins. Deux soeurs du malade mortes jeunes de convulsions.

Conception à quarante et un ai2s ; dentition tardive; convulsions

générales quotidiennes de onze mois à quatre ans. - Abolition de

la parole et de la marche.; Retour de la parole à trois ans, et de la

marche à cinq ans. - Coqueluche, rougeole. - Langue et lèvres

épaisses; gonflement des pieds et des mains; intelligence et mé-

moire presque nulles ; inaptitude manuelle pour les soins de pro-

preté, l'habillement, etc. - Pénil glabre; sensibilité au froid. -

Hémorroïdes. Mort des suites d'une opération ( ? ) ou d'albumi-

nurie. - Autopsie.

Chrest... (Victor), né à Paris-Batignolles, le 8 mars 1851, est

entré à Sainte-Anne le 4 mars 1882 (service de M. BALL) et y est

décédé le 4°l août 1882.

Renseignements fournis par son père et sa mère (4 1 octobre 1886).

- Père, soixante-sept ans, a été pendant onze ans cocher du

chemin de fer, et pendant vingt ans cocher d'omnibus. Il est né

à Bavan (Calvados, à trois lieues de Caen), pays sain, situé à deux

lieues de la mer, et où n'existent ni goitreux, ni crétins. Il n'a

pas eu de convulsions dans l'enfance ; il a éprouvé parfois des

céphalalgies, mais pas de migraines; ni syphilis, ni rhuma-

tisme. etc. En 1878, coup de pied de cheval qui a laissé de la rai-

deur du genou gauche. - Le 2 février 1886, hémiplégie droite avec

trouble de la parole qui était devenue indistincte ; la paralysie a

persisté pendant deux mois ; actuellement, il marche en traînant

un peu la jambe droite, soulève le bras droit, peut mettre la

Bourneville, 1886. 5

66 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

main derrière la tête, mais les mouvements sont lents ; la parole

est redevenue distincte. Dans les dix dernières années, il a été

sujet à des étourdissements l'obligeant à s'asseoir pendant 5 à

10 minutes.- Quelques excès alcooliques très légers et très rares.

Il boit un litre de vin par jour ; accidentellement un petit verre

d'eau-de-vie le matin. Deux ou trois fois par an, il rentrait un peu

excité, jamais en ivresse complète. Sa femme, interrogée à part,

affirme la rigoureuse exactitude de ces renseignements. Cet

homme a la tête un peu forte, mais régulière, nez aquilin'. -

L'intelligence est ordinaire, les réponses sont précises ; il est un

peu emporté ; jamais de violences envers sa femme ou ses en-

fants. Il s'est marié à vingt et un ans. [Père, mort hydropique

à cinquante- sept ou cinquante-huit ans, journalier, sobre;

taille au-dessus de la moyenne; pas de maladies nerveuses, ni

de goitre. - Mère, morte à quatre-vingt-sept ans, on ne sait de

quoi; elle n'était ni paralysée, ni démente ni goitreuse. - Grand-

père paternel, mort vers soixante-dix-huit ou quatre-vingts ans.

journalier, sobre. On ne peut donner de détails sur la grand' mère

paternelle. - Grand-père maternel, mort à quatre-vingt-deux

ans, était paraplégique depuis vingt-sept ans, charpentier, sobre.

- Grand'mère maternelle, morte paralysée à soixante-dix-huit

ans, ménagère, sobre. - Un frère mort à l'âge de six ans, du

croup. - Une soeur morte à quarante-trois ans, on ne sait de

quoi, a eu trois enfants dont on n'a pas eu de nouvelles depuis la

mort de la mère en 1877. -Pas de maladies nerveuses, pas d'a-

liénés, pas d'épileptiques, pas d'idiots, pas de goitreux, de cré-

tins, de criminels, dans la famille.]

Mère, soixante-dix-huit ans, domestique, puis raccommodeuse ;

assez grande, maigre, intelligente; physionomie régulière, rien

du type crétineux. Elle est née à Vannes; a été réglée à treize ans

facilement, s'est mariée à trente et un ans; la ménopause est

arrivée à cinquante et un ans sans accidents. Pas de convulsions,

pas d'attaques de nerfs, pas de névralgies, pas de migraines

(quelquefois des céphalalgies); aucune affection cutanée. [Père,

couvreur, mort d'une chute à cinquante-huit ans, sobre; était

né à Vannes et n'a jamais présenté d'accidents nerveux. - Mère,

ménagère, sobre, morte à quatre-vingt-huit ans sans paralysie, ni

démence. - Grands parents paternels et maternels pas de rensei-

gnements. - Deux frères, morts de trois à quatre ans, on ne sait

de quoi. - Deux suceurs bien portantes, sans goitre, l'une a deux

enfants, l'autre quatre qui n'ont rien présenté de particulier. [Pas

de goitreux, etc., dans la famille.]

1 La physionomie du malade se rapproche beaucoup plus de celle du

père que de celle de la mère.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 67

Pas de consanguinité.

Cinq enfants : Il garçon bien conformé, né à terme, mort à

six mois, en nourrice, de convulsions; 2° fille, née à terme, bien

conformée, intelligente, morte à trois ans de convulsions; 3° fille

mort-née à terme (présentation des pieds), bien conformée;

4° fille, morte à treize ans d'un abcès du foie ; elle était née

à terme, était bien conformée, intelligente et ne paraissait que

son âge, contrairement à ce qu'écrit M. Ball.

5° Le malade, Victor Chré... Lors de la conception la mère avait

quarante et un ans et le père trente et un ; ils étaient tous deux

bien portants et la conception n'a pas eu lieu durant l'excitation

alcoolique la plus légère.- Grossesse bonne, sans aucun accident.

- Accouchement à terme, naturel, sans chloroforme. A la nais-

sance, l'enfant était fort et n'offrait pas le moindre signe d'as-

phyxies. Elevé au sein par sa mère, il venait bien, était frais,

rose, n'avait rien ni aux pieds ni aux mains, ressemblait aux

enfants de son âge. Victor commençait à marcher le long des

murs, était propre, gazouillait, disait « papa et maman ». Alors

qu'il avait près de onze mois, sa mère eut des abcès aux seins et

dut le sevrer. Pendant sa maladie, elle le mit chez une garde qui

l'aurait maltraité., mal soigné, et même fait jeûner. Quand, au

bout de vingt jours, sa mère le reprit, il avait considérablement

maigri et présentait des excoriations du siège. C'est quelques

jours après qu'il survint, pour la première fois, des convulsions

générales qui durèrent deux à trois heures. A partir de là jusqu'à

quatre ans, il a eu presque quotidiennement, assure-t-on, des

convulsions générales analogues, d'une durée d'une à deux

heures.

La première dent est sortie à l'âge de onze mois2, les autres

apparurent vite, mais se cassaient dans les convulsions. Il a recom-

mencé à parler vers deux à trois ans, il avait les lèvres épaisses

et la langue très grosse; celle-ci pendait alors en dehors de la

bouche; ii a marché vers cinq ans. De six à sept ans, coqueluche,

puis rougeole. - Pas d'ophtalmie, d'adénite, d'otite, de maladies

cutanées, etc.. - Vers neuf ans, les mains et les pieds épais et courts

se seraient gonflés davantage ; on fut obligé de lui faire faire des

chaussures spéciales.

Mis à l'asile de six à huit ans, Victor n'y arien appris, pas même

ses lettres; il n'aimait pas à jouer avec les autres enfants, dans

la crainte de tomber; il était affectueux. - Il bavait un peu,

avait un appétit régulier, mangeait seul avec la cuiller et la four-

1 L'asphyxie à la naissance est l'une des causes peut-être las plus fré-

quentes des lésions qui aboutissent à l'idiotie. (B.)

- Les autres enfants avaient eu des dénis avant onze mois.

68

IDIOTIE CRÉTINO1DE.

chette, mais ne savait pas se servir de couteau, il n'offrait aucune

lésion du tube digestif, sauf des hémorroïdes. Il ne pouvait

s'habiller, se boutonner, lacer ou nouer, ni se déshabiller, se laver

la figure ou les mains. Il était très sensible au froid; les mains

et les pieds, surtout ceux-ci, étaient bleus et froids.

Les organes génitaux sont assez développés (fiÿ. 12); le pénil

était glabre, ainsi que le visage et les aisselles. Pas d'onanisme,

Fig. 22. - Le crétin des Batignolles.

r

pas de tics ni de grimaces, pas de grincement des dents, de

balancement; bave légère.

Etat du malade (1882), d'après 111. Ball. - La figure est sans

expression, bouffie, terreuse ; le front est ridé, le nez aplati, les

yeux très écartés l'un de l'autre; les paupières, volumineuses et

plissées, tendent à maintenir les yeux à demi-fermés. La bouche,

largement fendue, offre des lèvres tuméfiées et pendantes, surtout

l'inférieure. La langue, très volumineuse, semble prête à s'échap-

per entre les arcades dentaires. V... Ch. ne possède que 19 dents,

CACHEXIE l'ACHYDERMIQUE. 69

dont 9 à la mâchoire supérieure et 40 à l'inférieure. Elles sont

d'ailleurs absolument ravagées par la carie. Deux d'entre elles

appartiennent à la deuxième dentition; ce sont les deux inci-

sives moyennes, à la mâchoire supérieure; les autres sont des

dents de lait1.

Le visage est complètement imberbe. Par contre, la tête est

couverte d'une chevelure abondante et d'un châtain foncé. La

tête est grosse et irrégulière. Le front, fuyant en arrière, contri-

bue à rétrécir le diamètre antéro-postérieur du crâne. La réunion

de l'occipital avec les pariétaux est marquée par un sillon qui pa-

rait correspondre à la suture lambdoïde, et qui est surmonté, en

arrière, par une espèce de crête qui ressemble, pour me servir

d'une comparaison familière, au rebord que fait un peigne im-

planté dans les cheveux d'une femme. Malgré cette espèce de

chevauchement, l'occipital fait une certaine saillie en arrière, et

les fontanelles sont complètement ossifiées-. Nous indiquons plus bas

les chiffres qui correspondent aux diverses mensurations prati-

quées sur le crâne. Le sujet est manifestement dolichocéphale,

contrairement à ce que l'on voit habituellement chez les crétins,

qui sont brachycéphales. Les oreilles sont moyennes comme

grandeur, mais le pavillon est replié sur lui-même, comme le

serait une feuille de papier qu'on aurait entr'ouverte après l'a-

voir pliée en deux. Le contour est un peu festonné, sans offrir

d'autre irrégularité.

Le menton est court et la disposition des dents qui sont placées

en éventail augmente la saillie des lèvres la brièveté apparente

de la mâchoire inférieure. Les joues sont flasques et pendantes,

etla nuque, très forte pour la taille du sujet, présente deux plis

profonds séparés par un bourrelet de chair. A ce niveau, la troi-

sième vertèbre cervicale forme une saillie exagérée en arrière, ce

qui explique peut-être un raccourcissement extrême du cou.

La physionomie du malade est douce, bienveillante, mais sans

caractère, et présente un peu l'expression d'un foetus conservé

dans un bocal. Quand il sourit, des plis extraordinaires viennent

creuser le visage, les yeux se ferment, les paupières s'allongent,

les lèvres s'écartent et deviennent plus saillantes, la langue s'é-

chappe et la bouche se fend jusqu'aux oreilles. En somme, on

voit à ce moment que les téguments de la face sont trop larges

dans tous les sens pour les os qu'ils recouvrent.

L'examen du corps présente d'autres particularités intéres-

santes. La taille est extrêmement cambrée, et l'on pourrait

presque prononcer à cet égard le nom de cyphose. Le ventre est

' C'est ce que nous avons noté chez le Pacha.

2 On verra plus loin à l'autopsie que l'osificatioii était, au contraire,

loin d'être complète. (B. et P. B.)

70 IDIOTIE CRÉTINOïDE.

proéminent, mais la poitrine est normale et les bras sont bien

faits; les mains sont petites, ramassées, les doigts sont courts, et

les rides de la peau, plus abondantes sur ce point que partout

ailleurs, dénotent encore cette laxité des téguments que nous

avons déjà signalée. Les jambes sont assez bien conformées, mais

les genoux sont rapprochés. La région du cou-de-pied est empâtée

et présente des rides transversales ; le pied est gros, court et t'a-

massé, mais il est assez cambré, la jambe est plus longue que le

fémur et l'avant-bras est plus long que le bras. Les orteils ne

présentent rien de particulier, si ce n'est le volume un peu exa-

géré du deuxième.

Les organes génitaux sont très volumineux et semés de quelques

poils. Le gland est énorme, il est en forme de massue et entière-

ment découvert; le testicule droit est plus fort que son congénère

et descend jusqu'au niveau du bord supérieur de la rotule.

Absence de l'instinct génital (Pas d'onanisme).

La peau est terreuse, blafarde, écailleuse et sèche. Elle est com-

plètement glabre, sauf au niveau du pubis. Comme infirmité pro-

prement dite, nous ne trouvons à noter que des hémorroïdes

externes qui datent de loin. - L'appétit est excellent, le sommeil

est bon et toutes les fonctions de la vie végétative s'accomplissent

avec régularité.

Tous les sens spéciaux paraissent être à l'état normal et la

sensibilité tactile ne laisse rien à désirer. V. Chr... comprend

assez bien ce qu'on lui dit, mais éprouve beaucoup de difficulté

à s'exprimer. Il reconnaît les personnes de son entourage, sait

apprécier les bons et les mauvais procédés. Il est affectueux,

doux et paisible. Ses goûts sont ceux d'un jeune enfant; il

s'amuse avec un fouet qu'il fait claquer sans cesse.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 71

72 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

CACHEXIE PACHYDERMtQUK. 73

de la Société d'anthropologie de Paris, t. V, p. 509.)

Victor Ch..., par sa taille et par l'absence de presque

tout signe de puberté; par son développement intellec-

tuel et physique, l'aspect de la face, du cou, des pieds

et des mains qui, d'après le récit des parents et d'après

la photographie, semblent avoir été atteints de pseudo-

oedème dur', par l'état de la dentition, delà peau, la sen-

sibilitéau froid, etc., présente tous les signes d'un idiot

crétinoïde; il est vivement à regretter qu'une obser-

vation aussi intéressante n'ait pas été prise avec tout

le soin désirable et que les symptômes du myxoedème

n'aient pas attiré l'attention de M. Ball.

M. Bail à la fin de sa seconde communication à la

Société d'anthropologie avait relevé deux points pour

lui d'une importance capitale : ,

« Le premier, disait-il, c'est qu'il s'agissait d'un cerveau de

crétin et non pas du cerveau d'un idiot. En effet, nous ne trou-

vons pas ici de ces vastes lacunes, de ces malformations carac-

téristiques, qui sont les stigmates de l'idiotie. Il s'agit d'un cer-

veau normal, mais engourdi, et par conséquent susceptible

d'éducation. C'est la grande différence qui sépare, au point de

vue moral, les crétins des idiots. « -

Il nous suffit de citer ces quelques lignes pour

montrer que M. Bail ne paraît pas être au courant

des travaux publiés sur l'idiotie soit en France, soit à

l'étranger. L'idiot est loin de présenter toujours des

lésions macroscopiques grossières^beaucoup ne sont

atteints que de lésions structurales, ne se décèlant

quelquefois à l'oeil nu que par des nuances délicates

de coloration, de consistance, etc. : nous citerons en

passant l'aspect gélatiniforme des circonvolutions noté

à l'autopsie dans un certain nombre de cas.

74 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

M. Ball s'appuie pour séparer les crétins des idiots

sur ce fait que les crétins sont susceptibles d'éduca-

tion, tandis que, à son avis, les idiots ne le seraient

pas. C'est là une opinion étrange chez un homme

chargé d'un enseignement officiel, car elle montre

que M. Ball ignore complètement tout ce qui se

fait dans les asiles consacrés aux idiots en Angleterre,

en Amérique, où depuis longtemps on applique les

méthodes d'enseignement dus à Edouard Seguin.

M. Bail paraît ignorer les résultats très sérieux obte-

nus dans ces pays et dans des établissements un peu

moins éloignés, à Bicêtre et à la Salpêtrière.

« Le second point, ajoute M. Bail, se rattache à l'état d'ossifi-

cation des parois crâniennes. D'après Virchow, l'ossification pré-

maturée des sutures, la synostose, serait l'une des principales

causes du crétinisme. Or, nous avons affaire, ici, à un état abso-

lum,ent inverse : il y a défaut d'ossification et arrêt de dévelop-

pement. »

Justement, dirons-nous, parce que dans le cas spé-

cial, à supposer que le crétinisme vrai ne se rapproche

pas de l'état myxoedémateux, il s'agit d'un crétinisme

spécial, crétinisme sporadique, ou mieux d'idiotie

crétinoïde avec cachexie pachydermique.

Dans la discussion qui suivit la présention du mou-

lage de V. C... à la Société d'anthropologie, MM. Bor-

dier et de Mortillet ont fait observer avec juste raison

que le sujet présenté ne ressemblait nullement à un

crétin ordinaire et qu'il se rapprochait des idiots.

M. Delasiauve rapporta alors, en quelques mots,

l'histoire d'un malade qu'il eut dans son service de

Bicêtre et qui présentait encore plus, peut-être, que

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 75

celui deM. Bail, les attributs caractéristiques de l'idiotie

crétinoïde avec cachexie pachydermique.

Observation XII. Coloration cachectique chez, la mère et une

soeur,. - Idiotie complète; surdi-mutité; taille petite; brachy-

céphalie; épaississement des lèvres; absence de signes de puberté ;

marche nulle.

11 s'agit d'un nommé Pot..., né à la Chapelle-Saint-Denis

(Seine), le 25 août 1839, entré à Bicêtre le 25 septembre 1861,

décédé le 2 janvier 4873. Tous ses parents jouissaient d'une excel-

lente santé. Seules, la mère et une soeur offraient une teinte

cachectique prononcée de toute la surface cutanée. Sa taille était

de om96 cent. La tête était assez volumineuse, plutôt brachycé-

phale, avec aplatissement notable de la région occipitale; les

cheveux étaient rares, le visage pâle, les paupières plissées, le

nez écrasé, les lèvres légèrement épaisses laissant sortir la langue

de temps à autre. Il avait un tic particulier consistant en une

sorte de grimace produite par des mouvements des lèvres et des

ailes du nez. L'abdomen était volumineux et flasque; les membres

étaient grêles, la peau était lâche; aucune force. Ce malade restait

assis dans un fauteuil, ne parlait pas, était sourd ; il se montrait

hargneux si on le contrariait et aimait qu'on s'occupât de lui. Il

existait un léger empâtement. Au dire des personnes du service

encore à Bicêtre qui l'ont connu, ce malade était un type absolu-

ment semblable au Pacha.

Les différents certificats inscrits sur les registres portent les

diagnostics suivants : Idiotie avec arrêt de développement (Marcé,

Lasèrue). - Idiotie avec arrêt de développement et rachitisme ;

aspect demi-crétineux (Magnan). - Crétinisme (Falret).

En novembre 4872, le malade s'affaiblit et mourut en janvier

1873, d'une congestion pulmonaire.

Nous pouvons encore citer, parmi les cas de créti-

nisme sporadique avec myxoedème que nous avons

réunis, un cas de M. Goodhart'.

Observation XIII. - Absence d'antécédents héréditaires. - Idiotie

complète; parole et marche nulles; teinte cachectique de la peau;

brachycéphalie ; retard de la dentition; langue épaisse et pendante;

1 Goodhart. Sporadic crélinism and myxoedema. (Médical Times and

Gazette, May, 1880, p. 474.)

76 IDIOTIE CRI·;TII\O1DE.

développement exagéré du tissu adipeux sous-cutané ; pseudo

lipomes sus-claviculaires; existence douteuse de la glande thy-

roide; hernie inguinale.

X..., âgée de quatre ans; pas de consanguinitéentreles parents;

cinq frères ou soeurs en pleine santé, dont un bébé de seize mois

marchant déjà.

La peau, d'une pâleur jaunâtre, a attiré aussitôt l'attention.

Les viscères abdominaux étaient normaux. La tête était large et

d'une forme particulière; le front était petit et saillant, dans

chaque région frontale latérale et aussi au-devant de la fontanelle

antérieure. La partie postérieure de la tête était petite. Les traits

étaient lourds et épais; la face ronde et sans expression. Cette

petite fille ne pouvait parler, mais elle émettait desbruits inintel-

ligibles, la vue et l'ouïe étaient normaux. Elle était incapable de

marcher et tombait dès qu'elle était sur ses jambes. Les tibias

étaient courbés en dehors quoique sans élargissement notable

des extrémités osseuses; elle avait une hernie ombilicale'. Le

palais était très arqué, la dentition était retardée ; les deux inci-

sives du haut et du bas étaient coupées, et il y avait une dent

double dans la mâchoire supérieure du côté gauche, la dent cor-

respondante du côté opposé apparaissait.

L'état de la langue était remarquable. Elle était trop grande

pour la bouche et faisait saillie entre les dents; à part cette lar-

geur exceptionnelle, elle était normale. Le corps était en bon état,

mais un peu petit. Ce bon état paraissait être dû à un excès de la

graisse sous-cutanée sans oedème. On constate dans les régions sus-

claviculaires deux masses lipomaleuses. Pour le goitre, l'existence

même de la glande thyroïde est douteuse. Il n'y a pas d'apparence

d'hypertrophie des glandes médiastines. Il y avait un remar-

quable agrandissement des éminences thénar et hypothénar de

chaque main, ce qui leur donnait un aspect large et déformé,

cet élargissement semble dû à l'hypertrophie musculaire et non

à un excès de graisse. Les muscles de la cuisse sont bien déve-

loppés, contrairement à ceux du mollet. Le fond de l'oeil est nor-

mal. Mentalement, c'était une enfant lourde, ne prêtant que peu

d'attention aux objets environnants ; elle reconnaissait cependant

ses parents et les objets brillants placés devant elle.

M. Goodhart pense que les symptômes présentés par

la malade sont suffisants pour justifier le diagnostic

de crétinisme sporadique qu'il considère comme dû à

1 Nous avons relevé chez nos deux malades l'existence de hernies

inguinales.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 77 l

un développement défectueux du cerveau, mais sur-

tout à un développement irrégulier et asymétrique des

diverses parties du corps dont les unes se développent

avec excès, tandis que les autres subissent un arrêt de

développement.

L'auteur, tout en faisant ressortir la ressemblance de

son cas avec le myxoedème de l'adulte, ne croit pas à

l'état crétinoïde avec cachexie pachydermique. Le

diagnostic de myxoedème nous paraît cependant

devoir être posé assez clairement, si l'on considère

l'état intellectuel et physique de la malade, les masses

lipomateuses sus-claviculaires, l'absence probable du

corps thyroïde, etc.

Aux cas de crétinisme avec myxoedème paraîtrait

aussi devoir se rapporter l'observation de M. A. Voisin

publiée dans la Revue photographique sous le titre de

Crétinisme chez une enfant née à Paris de parents pari-

siens. La taille de cette enfant était de 4m, 30; le cou

était large, gros; la peau comme oedématiée; les mains

ramassées; les doigts épatés étaient rouges, cyanosés,

comme infiltrés; l'abdomen était très gros. Il n'existait

pas de goitre ; les mouvements étaient lents, lourds;

la sensibilité et la force musculaire étaient diminuées;

la parole était lente, indistincte ; l'enfant était idiote.

Quant au cas de M. Baillarger il paraît plutôt s'agir

d'un myxoedème opératoire; nous aurons lieu d'en

reparler plus loin. Le crétin de Charonne, observé

par Ferrus 2, semble appartenir au crétinisme avec

1 A. Voisin. - Revue photographique. 46 année, 182, p. 353.

2 Ferrus. - Comptes rendus de l'Académie de médecine, 1860-51

78 IDIOTIE CRFTINO1DE.

goitre, quoiqu'il soit difficile de dire exactement ce

que Ferrus entendait par la tumeur volumineuse du

cou que présentait ce malade.

Cet état crétinoïde des idiots myxoedémateux per-

met de penser que sous la dénomination decrétinisme

sans goître et surtout sous celle de crétinisme spora-

dique', il doit se rencontrer encore en grand nombre

d'idiots myxoedémateux. Les observations anciennes

de Curling, de Fagge, de Fletcher-Beach, et celles plus

récentes de MM. Bouchaud, Charpentier, Coxwell,

Routh, Bail, Goodhart, etc., et que nous avons rap-

portées plus haut, paraissent en fournir la démonstra-

tion2.

Il ressort des observations précédentes que chez

tous les idiots crétinoïdes, l'absence ou l'atrophie de la

glande thyroïde paraît constante. Les quelques autopsies

de sujets atteints de cachexie pachydermique sans

accompagnement d'idiotie nous montrent aussi que

souvent, dans ces cas, le fonctionnement de la glande

thyroïde était rendu impossible par suite de son atro-

phie. En voici quelques exemples.

Dans le cas de M. Brandes, il s'agit d'un homme

de quarante ans dont le myxoedème paraissait remonter

1 La question de crétinisme mériterait du reste d'être remise à l'étude ;

il serait intéressant de s'assurer de l'état de la glande thyroïde chez les

crétins complets, ainsi que chez les crétineux où la dégénérescence de la

glande peut avoir eu une marche et une distribution inégales; il va de

soi que surtout pour ces derniers, on ne pourrait tirer de conclusion

sans de nombreuses autposies.

2 Il va s'en dire que nous n'avons pas la prétention d'avoir relaté toutes

les observations de crétinisme sporadique, compliqué de myxoedème.

Il nous a même été impossible de reproduire un certain nombre d'obser-

vations publiées sous le nom de myxoedème et se rapportant à des

enfants (cas de Shattock, etc.).

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 79

à l'âge de quatorze ou quinze ans. A l'autopsie, outre

une atrophie glomérulaire des reins, il fut constaté

que la glande thyroïde était très atrophiée \ Il est éga-

lement à noter que la thyroïde était très atrophiée dans

le cas de Hale White et qu'elle était dégénérée= dans

les cas de Ord, Greenfield, Cushier 3. 3.

L'atrophie de la glande thyroïde est de même signa-

lée dans beaucoup d'observations publiées du vivant

des malades; nous citerons les observations de Dyce-

Duckworth \ Ord, Millets, Hamilton6, Oliver', Abbott8,

Hadden9, etc.; dans quelques cas, l'atrophie était si

accusée que la glande ne pouvait être sentie à la pal-

pitation ; enfin, dans d'autres, l'existence même de la

1 Brandes. - Un cas de myxoedème. (Extrait des comptes rendus du

Congrès international de Copenhague.)

2 Hale White. - A case of myxoedema with a post mortem Exami.

nation. (The British médical journal, 1885, p. 381.) Follicules clos atro-

phiés.

3 Cushier. Case of myxoedema. (Archives of médecine, 1882, p. 203.)

a glande thyroïde, plus petite qu'à l'ordinaire, présentait une atrophie

avec sclérose; absence de follicules clos; vaisseaux oblitérés.

4 Dans un autre cas du même auteur, le corps thyroïde paraissait nor-

mal. - Dans l'autopsie du cas de Ord, faite par Greenfield, il est noté

que les cellules de la glande thyroïde sont comprimées par du tissu de

nouvelle formation. (Dyce-Duckworth. Two cases of myxoedema, Tmn-

sactions of the clinical Society of London, 1ti81, p. 53.)

6 Miller. - A case of myxoedema (The British médical Journal, 28 fé-

vrier 1885, p. 429).

a Hamilton. - A case of myxoedema with three illustrations (The me-

dical Record, New-Pork, 1882, 9 décembre, vol. XXII, p. 645).

1 Oliver. - Clinical lecture on myxoedema (The British médical Journal,

17 mars 1883).

8 Abbott. A case of myxoedema (The British médical Journal,

juin 1886).

9 Hadden. A case of nxyxoedema (Transactions of the clinical So-

ciety, 1885, p. 58). - La glande thyroïde était considérablement dimi-

nuée de volume.

80 IDIOTIE CItCTINO1D1's.

glande a paru douteuse (Goodhart, Ilidel-Saillard,

Ord, Gowans', Lunn 2, Semon3).

Il faut ajouter que, dans nombre de cas de myxoe-

dème, l'observation est incomplète; souvent, par

exemple, il n'y est fait aucune mention de l'état de la

glande thyroïde. Parmi les observations que nous avons

pu consulter, nous n'en avons trouvé que très peu où le

corps thyroïde ait été signalé comme normal, du moins

quant à son volume 4 (Edes \ Wadsworth e, Lane'). -

II. - DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE OPÉRATOIRE.

Les faits avec autopsie que nous avons rapportés,

montrant l'absence de glande thyroïde et les observa-

I Gowans. - History of a case of nzyxcedema (The British medica

Journal, 1882, I, p. 772).

2 Lann. - Cases of myxoedema (Tite British médical Journal, 24 dé-

cembre 1881, p. 1017).

3 Semon. - A case of myxoedema (Transactions of the clinical Society

of London, 1881, p. 61).

4 Nous ferons remarquer que, parmi les observations publiées sous le

nom de myxondème, il en est qui se rapportent à d'autres affections, telles

que la néphrite, etc. (le cas de M. Fraser, par exemple).

t Edes. - Clinical Lectures on a case of rny : r;oedema (The Boston med.

and Journal, 24 avril 1884, p. 385).

a Wadsworth. - A case of myxoedema with atrophy of the optic Ner-

ves (The Boston med. and Surg. Journal, 1885, p. 5).

7 Lane. - Myxoedema with remarks upon the etiology ofthe disease.

(The Lancet, 14 juillet 1883, p. 56). -Le cas de M. Henrot, où lavande

thyroïde est notée comme ayant 4 à 5 fois son volume normal. doit être

réservé, car le diagnostic de myxoedème nous parait discutable.

Dans les cas de M. Morvan. il n'est pas fait mention de la glande thy-

roïde : deux des malades de ce médecin, à ce qu'il nous écrit, examinés

à nouveau récemment à ce point de vue, ne présentent rien d'anormal

dans la région thyroïdienne; il en résulterait, en tout cas, que si l'ab-

sence ou l'atrophie de la glande thyroïde n'existe pas, ce qui est difficile

à vérifier sur le vivant, ces malades ne présentent en tout cas pas d'hy-

pertrophie du corps thyroïde.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE OPÉRATOIRE. 81

tions de malade encore vivants chez lesquels l'absence

de la glande thyroïde a été constatée ou dont l'existence

a paru très douteuse, semblent établir une relation évi-

dente entre la cachexie pachydermique et l'absence ou

l'atrophie de la glande thyroïde '. Nous sommes donc

conduits naturellement à examiner les conséquences

de la thyroïdectomie.

Les cas d'extirpation totale de la glande thyroïde sont

déjà nombreux; si beaucoup d'opérés n'ont présenté

aucun phénomène se rattachant à la cachexie pachy-

dermique, il n'en n'est pas moins vrai que le chiffre

des thyroïdectomisés atteints de myxoedème est assez

considérable, et encore est-il juste de faire observer

qu'un certain nombre d'opérés ont souvent été perdus

de vue. Nous donnerons ci-dessous la statistique de

tous les cas qui sont parvenus à notre connaissance,

mais auparavant nous croyons nécessaire de relater,

en quelques lignes, un des rares cas de myxoe-

dème opératoire suivi d'autopsie 2 : il appartient à

MM. Bruns et Grundler3, et offre un grand intérêt

par suite de la constatation de lésions identiques à

celles qui ont été rencontrées dans les autopsies des

myxoedémateux idiopathiques.

1 L'atrophie du corps thyroïde, accompagnée de la destruction de ses

cellules, équivaut, foiietionnellement parlant, à son absence ; a la même

conséquence l'hypertrophie avec altération cellulaire de toutes les par-

ties de la glande.

2 Deux autres cas ont été suivis d'autopsies, mais ces autopsies, ma

faites ou dans des circonstances défavorables, ne présentent aucune

valeur. - M. W. Stokes vient de publier un nouveau cas avec autopsie

que nous analyserons plus tard.

3 Grundler. - Contribution à l'étude de la cachexie crétinoïde. (Zur,

Cachexia strunzipriva in B.·ztrcige zur hlirzischen Chirurgie de P. Bruns'

Tubingen, 1885, t. I, p. 420.)

BOURNEVILLE, 1886. 6

82

IDIOTIE CRETIN()1DE.

Observation IV.- Goitre colloïde accompagné de dyspnée.-ExLir-

pation totale en 4 886 : guérison de la plaie en deux mois. -

Diminution de l'intelligence dès le troisième mois de l'opération;

arrêt de développement et symptômes de cachexie pachydermique

de plus en plus accentués.

Il s'agit d'un adulte opéré à l'âge de dix ans, par M. P. Sick (de

Stuttgard), décédé le 13 août 1884, d'une attaque apoplectiforme

à la clinique de Tubingue à l'âge de vingt-huit ans. Il mesurait

1 m 27 ; pesait 45 kil. et avait t'habitus crétinoïde. A I'autopsie,

pratiquée par 11. Nauwerk, on constata les faits suivants :

Fig. 13. - Malade opéré par M. Sick.

Rigidité cadavérique; sugillations sanguines étendues du

.dos; peau assez pâle. - Les veines des extrémités et du tronc

sont visibles; face cyanosée; l'épiderme desquamme partout,

(excepté sur la face), et surtout aux parties latérales du tronc. -

Le corps parait atteint d'anasarque généralisé moyen.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE OPÉRATOIRE. 83

Les extrémités supérieures et inférieures sont déformées; les

parties molles de la face sont épaissies, celle-ci a un aspect cré-

tinoïde caractérisé. Au cou, on trouve une cicatrice ancienne, allant

de l'os hyoïde au sternum. Ongles bleuâtres un peu recourbés en

griffe, organes génitaux bien développés avec poils fins et foncés

à la base du pénis ; quelques poils rares et plus forts, au scrotum;

quelques hémorroïdes au rectum, la peau du thorax et de l'ab-

domen n'est pas modifiée, le tissu adipeux sous-cutané est bien

développé, un peu oedématié, musculature du thorax oedématiée,

très pâle, presque grise. Tissu graisseux sous-séreux de l'abdomen

fortement développé ; dans l'abdomen, environ 100 gr. de liquide

jaune, très peu trouble. Entre les muscles, il y a encore beaucoup

de graisse. Les veines du cou sont gorgées de sang. ,

Les intestins sont météorisés. La séreuse de l'intestin grêle est

un peu injectée. Le mésentère et l'épiploon sont riches en graisse.

Le foie occupe sa position normale. Graisse du médiastin abon-

dante, poumons libres.

Dans les plèvres, 100 à 150 gr. de liquide clair, séreux; pou-

mons normaux. Le péricarde est très découvert, et contient 4 00 gr.

de liquide séreux, clair. Coeur volumineux, pointe formée par

le ventricule gauche surtout, mesurant de la pointe à la base

13 cent. ; largeur à la hauteur des orifices auriculo-ventriculaires,

44 1 cent. ; coeur droit mou, le gauche plus ferme; panicule adipeux

du coeur faiblement développé. -- Dans le coeur gauche, beaucoup

de sang liquide, masses cruoriques rares, foncées. A droite, on

trouve en outre quelques caillots fibrineux mous. Les orifices

auriculo-ventriculaires sont normaux; les valvules intactes à

droite. Myocarde pâle, d'épaisseur normale. Le cône formé par

l'artère pulmonaire présente un épaississement. circonscrit de

l'endocarde, pénétrant jusque dans le myocarde d'un millimètre

environ. La mitrale est peu modifiée; quelques tendons sont un

peu épaissis. Le myocarde gauche est d'épaisseur normale, de

couleur brun jaunâtre. Valvules aortiques intactes, mais avec

quelques taches graisseuses et des épaississements scléreux. Artères

coronaires minces. Poumon gauche, rougeur légère de la mu-

queuse bronchique. Dans les bronches, un peu de liquide spu-

meux, légèrement teinté de rouge; le poumon contient de l'air,

est oedémateux, assez riche eo sang. Quelques sugillations pleu-

rales. - Poumon droit, mêmes lésions.

Rate : longueur : 8 c. et demi, poids 75 gr. - La pulpe est de

coloration cerise foncée, résistante ; les trabécules sont visibles ;

les corpuscules de Malpighi petits. - Rein gauche (125 gr.) forte-

ment entouré de graisse, de grandeur normale; capsule non adhé-

rente; surface gris foncé, violette; parenchyme très épais.

L'écorce et surtout les pyramides sont injectées de sang veineux.

84 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

La substance corticale est par-ci par-là trouble et gris jau-

nâtre. - Rein droit (1415 gr.), mêmes lésions.

Langue hypertrophiée avec plusieurs impressions dentaires

présentant quelques petites hémorrhagies fraîches, sans cicatrices

profondes. La luette et les piliers sont gonflés, infiltrés, injectés.

Amygdales agrandies, la droite pâle, la gauche plutôt gris vio-

lette paraissant atteinte d'hyperplasie chronique. - OEsophage,

estomac, duodénum, pancréas, rien de bien particulier. - Foie

un peu petit (1,200 gr.), normal. ,

La trachée est couverte inférieurement de mucosités. Muqueuse

un peu injectée, la partie inférieure de la trachée est rétrécie un

peu latéralement et déviée un peu à droite. - L'aorte est relati-

vement étroite. Circonférence : 3, 4 cent., au-dessus du dia-

phragme, taches graisseuses et épaisissement scléreux ; il en est

de même des gros troncs descendants; aucune trace de tissu thy-

roidien.

Sur le cuir chevelu, nombreuses croûtes ; cheveux rares. L'épais-

sissement de la calotte est surtout produit par le tissu adipeux

oedÉmatié. - Dure-mère sans grands changements ; à gauche,

adhérences nombreuses avec la voûte crânienne, surtout près de

la suture frontale, sinus longitudinal libre. - Voûte crânienne

d'épaisseur moyenne, sutures visibles, sillon de la méningée

moyenne, profond à gauche; du reste, pas de phénomènes de

résorption appréciables sur la table interne, asymétrie légère

des diamètres. Vaisseaux de la base sans grands changements à

gauche. La configuration interne du cerveau ne présente rien de

spécial.

Les circonvolutions sont un peu maigres, les sillons sont très

accentués par suite de l'oedème des méninges. Quantité de sang

moyenne dans la dure-mère. L'arachnoïde est brillante, surtout

épaissie et tendineuse le long de la scissure interhémisphérique

et cela d'une façon diffuse. On y constate, en outre, beaucoup

d'épaississements miliaires atteignant quelquefois le volume d'une

tête d'épingle, en partie confluents, scléreux ; il y en a aussi bien

sur les sinus qu'au-dessus des circonvolutions. Les ventricules

latéraux sont peu dilatés. La substance cérébrale est légèrement

hyperémiée sans autres modifications. Poids avec la pie-mère,

après ouverture des ventricules : 4,43 gr. -.Ganglions de la base,

corps quadrijumeaux, normaux.

Testicules peu développés, hyperémiés. - Prostate, vésicules

séminales normales. - L'humérus droit enlevé est normal. -

On distingue encore la limite des épiphyses. Il en est de même

pour l'extrémité supérieure du fémur. L'épiphyse du grand tro-

chanter est encore cartilagineuse.

Examen microscopique des organes fait par le Dr Nauverk. -

CACHEXIE PACHYDERMIQUE OPÉRATOIRE. 85

4° Sang normal, autant qu'un en peut juger sur le cadavre;

globules rouges de taille et couleur normales, pas d'augmenta-

tion des leucocytes. - 1° Musculature normale au tronc et aux

extrémités; pas d'hyperplasie conjonctive. - 3° Musculature de

la langue également normale : pas d'hypertrophie des fibrilles

musculaires; tissu adipeux interstitiel abondant. - 4° La peau

des diverses parties du corps (tête, tronc, membres, scrotum), est

normale, sauf un fort pannicule adipeux et un peu d'oedème. Pas

d'hyperplasie conjonctive ou de changement dans la distribution

des nerfs. Pas de transformation mucoide même en présence de

l'acide acétique. - 5° Grand sympathique et nerfs périphériques

normaux. - 6° Rate, foie, reins, sans prolifération conjonctive.

On remarque une infiltratiou marquée des cellules hépatiques

surtout dans les parties centrales des lobules, par des granula-

tions pigmentaires grises jaunâtres, souvent avec dépôt graisseux;

7° Sur le cerveau soit frais, soit durci, on constate de la leptomé-

ningite chronique ordinaire, avec faible participation de la subs-

tance corticale. Le tissu de l'arachnoïde et surtout de la pie-mère

paraît fortement épaissi, mais en intensité variable, à fibres plus

fortes que d'ordinaire; il y a souvent des corpuscules pigmen-

taires et beaucoup de noyaux. Les parties périphériques de l'écorce

sont par place, surtout autour des vaisseaux, très riches en

noyaux. Les espaces périvasculaires lymphatiques sont souvent

élargis, et contiennent parfois des granulations laiteuses. A l'état

frais, les vaisseaux corticaux, enlevés à la pince sont souvent

couverts de granulations graisseuses fines.

M. Grundler croit que l'extirpation de la glande

thyroïde amène des troubles du sytème nerveux cen-

tral surtout en ce qui concerne son rôle dans les

échanges nutritifs.

Les premiers cas de myxoedème opératoire c'est-à-dire

consécutif à l'extirpation totale de la glande thyroïde,

ont été signalés par M. J. Reverdin en octobre 1882 '.

Ce n'est que six mois plus tard (4 avril 1883), que

M. Kocher communiquait au Congrès de chirurgie de

Berlin le résultat de 102 opérations de goitre prati-

' J. Reverdin. - Revue médicale de la Suisse Romande, 15 octobre 1882,

p. 539 et 540. - Communication à la Société médicale de Genève, 13 sep-

tembre 18s2.

86 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

quées par lui, travail qui ne fut publié que plus tard'

dans les « Arch. f. klin. Chirurgie, Bd. XXIX, H. 2 ».

Nous ne saurions donc nous élever avec trop d'éner-

gie contre le déni de justice fait à MM. Reverdin par

la plupart des auteurs d'autant plus que, en Alle-

magne, l'opinion a été égarée par le fait de la commu-

nication de M. Kocher, ce qui explique qu'on ait à

tort attribué à ce chirurgien une découverte qui n'était

pas sienne, ainsi que le démontrent les dates des pu-

blications.

MM. J. et A. Reverdin' ont complété peu après

(avril 1883) leur premier travail en faisant connaître,

les résultats des autres opérations pratiquées par eux,

confirmant d'ailleurs les précédentes. Dans la même

année M. Julliardg en publia brièvement deux nou-

veaux cas.

Il faut noter que la cachexie paraît d'autant plus

à craindre que l'opéré est dans la période de crois-

sance. Le myxoedème de nature traumatique semble

tellement sous la dépendance de l'extirpation totale de

la glande thyroïde que les chirurgiens contemporains

condamnent cette extirpation totale et ne pratiquent t

plus que des extirpations partielles'.

Nous donnons ci-après le tableau des cas de ca-

chexie pachydermique observés à la suite de l'extir-

pation totale de la glande thyroïde :

' J.-L. et A. Reverdin.- Du myxoedème par extirpation de la thyroïde.

(Revue médicale de la Suisse Romande, 15 avril, 15 mai et 15 juin 1883).

. Julliard. - Trente et une extirpations de goitre. (Revue de chirurgie,

1883, p. 585.)

3 On a signalé, cependant, quelques cas de cachexie à la suite d'extir-

pations partielles; mais, outre leur rareté, on peut se demander si, dans

ce cas, les parties de la glande abandonnée étaient suffisamment saines

pour remplir leur rôle physiologique. ,

CACHEXIE PACHYDERMIQUE OPÉRATOIRE. 87

10 Baillargert. - Fille de vingt-quatre ans; extirpation pro-

bable de la glande thyroïde vers l'âge de six ans, suivie d'idiotie

crétinoïde.

. 20 Reverdin. Pauline C..., vingt ans; goitre kystique. Extirpation

totale le 4 mars 1881. En juin 1881, on constate déjà une anémie

marquée; face, lèvres pâles, pas d'oedème; dyspnée avec plusieurs

accès. A l'examen laryngoscopique, rétrécissement de la glotte.

La malade ne peut plus parler ; on diagnostique de l'hystérie.

Traitement par les courants constants. La dyspnée et la parole

s'améliorent. Règles très irrégulières et douloureuses. Rien] n'a

pu améliorer l'anémie2.

30 reverdit. - Henri 0..., vingt-quatre ans; goitre kystique,

extirpation totale le 6 octobre 1880. En mars 1881, symptômes de

cachexie pachy dermique commençante, qui se développe en un an.

La force des mains diminue, surtout à droite; la marche s'appe-

santit, face vultueuse. Jambes infiltrées; sensation de froid; culo-

ration jaunâtre de la face; aspect crétinoïde; langue dure, lourde,

gênant la parole. - Eu 1882, tuberculose, abcès des ganglions

lymphatiques cervicaux. Matité aux sommets.

4° Reverdin. - Mms F..., vingt-sept ans; goitre kystique, extir-

pation totale, 9 novembre 1880. A la suite de l'opération, fai-

blesse générale avec syncopes commençantes, anémie; coloration

de la face, non oedématiée, plus pâle qu'avant l'opération. Fatigue

et crampes dans les jambes oedématiees; absence de mémoire de

plus en plus marquée; inattention; règles peu après l'opération

régulières.

5° Reverdin. - Mme S..., trente-trois ans, goitre kystique, extir-

pation totale le 15 novembre 1880. Deux mois après, fatigues,

anémie, perte de forces, mains lourdes, peu agiles, surtout pour

les travaux fins. La voix se perd tout à coup. En février 1881,

anémie prononcée, faiblesse de la mémoire, mains engourdies.

En lévrier 1883, les symptômes s'amendent, sauf pour la mémoire

et la voix.

6° Reverdin. - Arthur 13..., quarante ans, goitre pa1'enhyma-

teux ; extirpation totale le 17 décembre 1880. - Fin mars 1881,

cachexie pachydermique, faiblesse des jambes. Le malade fait

avec peine 2 kilom. L'anémie s'accentue, le visage s'infiltre, les

mains sont entlées, sans albuminurie; diminution de l'appétit,

de la soif et du goût, maladresse des mains, lourdeur des jambes.

1 Annales médico-psychologiques, mars 1884, p. 124.

2 Cette malade, d'abord améliorée à tel point qu'il était difficile de

constater les symptômes du myxoedème,, à ce que nous rapporte

M. Reverdit, présente à nouveau (octobre 1886) des symptômes

de cachexie pachydermique.

88 IDIOTIE CRBTINO1DE.

7° Kocher. - Femme, trente-six ans; tumeur colloïde, extirpa-

tion totale le 25 mars 1881 ; guérison en trois semaines. Le mari

rapporte, le 19 février 1883, que sa femme n'a plus été un instant

bien portante. Le corps est gonflé, les membres sont anesthésiés ;

elle a toujours froid; périodes menstruelles très irrégulières.

8o Kocher. - Femme, trente-huit ans; tumeur colloïde, extirpa-

Fig. 14. - Elle représente une opérée (cas 9) de M. Kocher

et sa soeur jumelle.

tion totale le 3 juillet 1879; guérison en quinze jours. L'examen

microscopique fait croire peut-être à un carcinome. Le mari dit

en mars 1883 : u Ma femme ne peut écrire elle-même par suite

de douleurs nerveuses des pieds et des mains. Le cou est guéri,

CACHEXIE PACHYDERMIQUE OPÉRATOIRE. 89

mais elle est comme paralysée des extrémités, surtout depuis sa

dernière couche ; en 1881, sa santé n'a fait que décliner. »

9° Kocher. - Marie B..., onze ans, tumeur folliculaire, extirpa-

tion totale le 8 janvier 187; guérison en trois semaines. - En

février 1883, cachexie crétinoïde très prononcée.

Neuf ans après l'opération, c'est-à-dire en 1883, après que l'at-

tention de M. Kocher eût été attirée sur la question du myxoe-

dème par les communications de MM. Reverdin, cette malade a

été photographiée à côté de sa soeur cadette (voir Fig. 14). Avant

l'opération les deux soeursse ressemblaient tellement, que leur mise

ne pouvait les distinguer l'une de l'autre. La simple inspection de

la photographie permet de se rendre compte dessuites de l'extirpa-

tion totale de la glande thyroïde. Il est regrettable que l'on ait cru,

dans la photographie, masquer les régions les plus importantes

au point de vue du myxoedème, ce qui ne permet que difficile-

ment dese rendre un compte exact de l'état du cou, des pieds, etc.

Toutefois, cette photographie met bien en évidence que si

M. Kocher n'avait reconnu qu'imparfaitement à cette époque la

nature de l'affection dont était atteinte son opérée, il n'en a eu

une nolion exacte qu'à la suite de la communication orale

que lui fit M. J. Reverdin, lors du Congrès d'hygiène de Genève,

en septembre 1882. Depuis, M. Kocher a pu constater le myxoe-

dème sur un certain nombre de ses malades anciens ou nou-

veaux. Il semble du reste que M. Kocher n'ait pas bien dès

l'abord saisi le mécanisme de l'étiologie du myxoedème opéra-

toires, puisqu'en janvier 1883, il pratiquait encore des extirpa-

tions totales.

10' Kocher. - Jean R..., dix-sept ans, goitre hyperplasique,

extirpation totale le 21 juillet 1877; guérison en six semaines, ré-

cidive naturelle en 1882; diminution des facultés mentales et

physiques.

- t 1 ° Kocher. - Anna D..., vingt-trois ans, goitre colloïde, extir-

pation totale le 1 er novembre 1879; guérison en cinq semaines.

- En février 1883, cachexie crétinoïde très prononcée.

12» Kocher. - Jacques M..., quarante-cinq ans; goitre fibreux,

extirpation totale le 26 mars 1880. - Rapport médical du 22 fé-

vrier 1883; bonne santé jusqu'à la fin de 1881. Alors oedème pal-

pébral et des jambes jusqu'aux genoux, avec albuminurie passa-

gère. En mars 1883, cachexie crétinoïde très prononcée.

130 Kocher. - Elisa K..., douze ans; goitre colloïde, extirpation

totale le 14 novembre 1881. - En mars 1883, commencement de

la cachexie, attaques épileptiques nombreuses.

14° Kocher. - Rodolphe R..., dix-huit ans, goitre colloïde kys-

90 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

tique, extirpation totale le 19 février 188 ? En mars 1S83; cachexie

crétinoïde moyenne.

i° Kocher. - Elisa W..., vingt-trois ans, goitre colloide, extir-

pation totale le 26 juillet 1882. - Le 19 juin 1882, respiration et

déglutition libres; douleurs dans les épaules, 18 mars 1883 ; lèvres

et nez uu peu gros; ni idiotie, ni cachexie.

16° Kocher. - Adolphe R..., quatorze ans, goitre fibreux, extir-

pation totale le 5 mai 1882. En mars 1883, anémie, gonflement,

cachexie crétinoïde.

17u Kocher. - Rosine B..., vingt-six ans, goitre hyperplasique,

extirpation totale le 31 mai 1882. - En février 1885, symptômes

très marqués de cachexie pachydermique.

18o Kocher. - Anna G..., vingt-six ans, goitre hyperplasique,

extirpation totale le .¡or juin 1882. - En février 1883, hydro-

anémie.

19- Kocher. - Christian W..., seize ans, goitre folliculaire, extir-

pation totale le la juin 1882. - En février 1883, hydroanémie.

20° Kocher. Elisa R..., douze ans, goitre folliculaire, extirpa-

tion totale le 19 juin 1882; en mars 1883, cachexie crétinoïde.

2 1 Rocher. - En faut P..., fille de quinze ans, goitre kystique,

extirpation totale le 3 juillet 1882 ; en février 1883, cachexie pachy-

dermique commençante.

22° Kocher. -Marie K..., vingt-huit ans; goitre folliculaire,

thyroïde gauche enlevée autrefois ; excision de la thyroïde droite, le

27 septembre 1882. En mars 1883, cachexie crétinoïde commen-

çante.

23° Kocher. - Emma G..., seize ans ; goitre folliculaire, extir-

pation totale le 17 novembre 1882. Le 16 mars 4883, cachexie

crétinoïde modérée '.

24° Julliard. - Caroline B..., soixante-six ; goitre colloïde, extir-

pation totale cinq à six mois après, forte anémie, pâleur de la

peau, faiblesse très grande et oedème des jambes ; au bout de

quelques mois, amélioration.

250 Julliard. -Joseph C..., dix-sept ans ; goitre parenchyma-

teux, extirpation totale en 1880. En janvier 1881, faiblesse, fatigue.

Le malade, autrefois gai et vif, devient taciturne et craintif; il

aime la solitude, ne grandit plus; frileux, il n'a même plus la

force de travailler, visage infiltré, pas d'albuminurie ni

* Nous n'avons pas de détails sur un autre cas de Kocher remontant à

l'époque de sa première communication, ainsi que sur quelques autres

cas qU11 aurait observés depuis.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE OPÉRATOIRE. 91

d'oedème marqué, mais épaississement de la peau du visage et

des mains.

26'' Baumjdrtner 1. Fille de seize ans, extirpation totale

d'un goitre de 166 gr. en octobre 1881. Un an après, visage

infiltré; mains et pieds épais, dyspnée ; alourdissement corporel

et intellectuel; six mois après, l'état est encore plus marqué, la

dyspnée plus forte nécessite la trachéotomie; rapide améliora-

tion consécutive de l'état général. En 1886, les symptômes de la

cachexie persistent.

27° Baumgürtner. - Femme de cinquante-six ans ; extirpation

totale en août 1881. Au bout d'un an, cachexia strumipriva consi-

dérable, puis dyspnée, trachéotomie suivie d'amélioration rapide.

En 1886, elle se plaint encore d'affaiblissement des facultés intel-

lectuelles et physiques.

28o .Baum<y<ï ? '<Kef. Fille de vingt-trois ans ; extirpation totale

d'un goitre de 160 gr. en août 1882 ; quelques mois après, lour-

deur et froid dans les membres ; pâleur et idéation ralenties,

visage infiltré, paupières épaisses, mains enflées le soir, pas d'al-

buminurie, paralysie de la glotte et aphonie qui cède à un traite-

ment électrique ; cachexie pachydermique considérable. Au bout

d'un an, le malade respire bien. Elle a succombé depuis à une

hémorrhagie pulmonaire.

29° Baumgàrtner. Fille de vingt-deux ans ; extirpation totale

d'un goitre de 390 gr. ; hémorrhagie très forte en octobre 1882 ;

six mois après, dyspnée en montant l'escalier, visage infiltré, ma-

ladresse des mains; elle ne peut plus tenir son aiguille; mains et

pieds enflés ; difficulté de parole et d'idéation. Au laryngoscope,

abduction des arythénoïdes difficille; électricité, ferrugineux ;

amélioration de l'état général. Elle peut reprendre son travail de

couturière. En 1886, l'amélioration continue.

30° Koenig 2. - Extirpation totale pour cause de dyspnée chez

un garçon ; peu après, la dyspnée reparait; trachéotomie. Un an

après, le père écrit « qu'on renvoie tous les jours l'enfant de

l'école, car il devient toujours plus stupide ».

31° Bruns 3. Homme de vingt-quatre ans, opéré depuis six

mois, présentait en 1885, lors de la publication du travail de l'au-

teur, les symptômes initiaux de la cachexie pachydermique.

. Baumgartner. - Zur Cachexia strumiprlVa (XIIIe Congrès des chi-

rurgiens allemands, Beilage Zur Centralbl. sur Chirurgie, 1884, n° 23,

p. 57.)

2 2 Kônig. - sm. Congrès des chirurgiens allemands (loc. cit.), p. 58.

3 Loc. cit. - Relaté par Grundler (p. 422).

92 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

32° Bruns. Fille de vingt-six ans, opérée depuis quatre ans,

présentait en 1885 des symptômes très graves myxoedémateux '.

33° Bruns. - C'est le cas dont l'autopsie a été relatée plus

haut (p. 355).

34° Kùster 2. - Garçon de douze ans ; extirpation totale; trois

ans après l'opération, on note l'arrêt de la croissance, la pâleur

du teint, un oedème dur des mains, la décoloration des muqueu-

ses ; l'abdomen est ballonné, les testicules petits ; absence de poils

au pénil ; cheveux rares, secs ; parole lente, physionomie stupide,

perte de la mémoire, lenteur des mouvements, etc. Trachée

réduite de volume ; en 1886, le malade est toujours cachectique.

35° Gordon 3. - Femme de cinquante-deux ans, opérée il y a

onze ans par Lister; symptômes myxoedémateux très accentués;

l'intelligence est cependant en partie conservée.

36° Pietrzikowski-Gussenbauer *. - Garçon, âgé de neuf ans

goitre parenchymateux ; extirpation totale le 9 mai 1882, tétanie

légère, guérison en 14 jours. Deux ans et quatre mois et demi

après l'opération, il présentait les principaux symptômes de la

cachexie pachydermique.

31o Pietrikowski-Gussenbauer. - Fille, âgée de dix-sept ans,

goitre colloïde kystique; extirpation totale le 17 janvier 1883,

tétanie, guérison en quatre semaines. - En 1884, début de la

cachexie pachydermique.

38° Pietrzikowski-Gussenbauer. - Fille, âgée de dix ans, goitre

vasculaire; extirpation lotale, le 29 août. - Trois ans après

l'examen de la malade permettait de constater des symptômes

de cachexie pachydermique.

39° Baumgàrtner 5. - Fille de vingt-cinq ans; goitre circu-

laire ; extirpation totale; deux mois après, cachexie6.

' Un troisième cas de thyroïdectomie totale, relaté par Grundler et ap-

partenant à Bruns, n'avait été suivi quatre mois après d'aucun accident.

' Hans Schmidt. - Ein Fall von Cachexia strumipriva. (Berliner kli-

nisc4e Wochenschrift, 2 août 1886).

3 Gordon. Myxoedema following upon removal of the tltyroïd gland.

(The Lancet, 1886, no 11).

1 Pietrzikowski. - BeitrCtge zur Kropfeystirpation : ebsl Beilrdgen

zur Cachexia strumipriva. (Prager Wochenschri ft, 1884, n, 48 et suivants

et 1885 n" 1 et 2).

5 Baumgârtner. - Congrès des naturalistes allemands, Berlin, 1886.

6 On a encore signalé quelques autres cas de myxoedème opératoire,

(W. Stokes; 1 cas avec autopsie), dont quelques-uns sans aucun détail

(cas d'Occhini, de Ruggi, etc.).

CACHEXIE PACHYDERMIQUE OPÉRATOIRE. 93

Si la plupart des chirurgiens admettent que le

myxoedème peut être une conséquence de la thyroï-

dectomie totale, il se trouve encore quelques auteurs

pour contester ces résultats. Ainsi M. Mikulicz' ne

croit pas que l'étiologie opératoire de la cachexie pachy-

dermique soit complètement élucidée; quelques-uns

de ses malades présentaient, en effet, avant la thyroï-

dectomie soit un arrêt de croissance, soit l'aspect cré-

tinoïde. Ces derniers, au nombre de trois, étaient âgés

de dix-sept à vingt ans. L'auteur pense que si on les

avait opérés avant l'apparition de l'état crétinoïde,

celui-ci aurait été attribué à l'opération. L'objection

soulevée par M. Mikulicz perd beaucoup de sa valeur

du fait qu'il ne donne aucun détail sur l'état des corps

thyroïdes extirpés; on comprend très bien qu'une

glande thyroïde dont toutes les parties sont affectées

puisse, fonctionnellement parlant, amener les mêmes

modifications organiques que l'extirpation totale.

La cachexie pachydermique aurait encore, dans de

très rares cas, été observée à la suite de thyroïdectomies

partielles, mais ces observations sont souvent suscep-

tibles des mêmes critiques que celles de M'. Mikulicz.

Les cas parvenus à notre connaissance appartiennent

à MM. Tassi, Occhini et Poncet (de Lyon), celui-ci

aurait observé une cachexie pachydermique fruste à

la suite d'une résection de l'isthme. Ces cas se trou-

vent en partie expliqués par l'observation que vient

de rapporter M. J. Reverdin d'un de ses malades chez

qui l'extirpation du lobe gauche de la thyroïde fut

1 Mikulicz. - Beitrag zur Opération des Kropfes. (Wicnermed. Woch-

enschi-ilt, 2, 9, 16, et 23 janvier l8tG,.

94 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

suivie de l'atrophie du lobe droit '; toutefois 11. Pon-

cet dit ne pas avoir constaté l'atrophie de la glande

chez son opéré.

Sur 24 cas d'extirpation totale, Kocher aurait observé

18 fois la cachexie pachydermique; sur 11 cas,

MM. Reverdin ont noté 5 cas de cachexie; Baum-

gartner a eu 5 myxoedémateux sur 11 1 opérés ;

M. Julliard 2 cas également sur 11 opérés;

Kùster 1 cas sur 4 thyroïdectomies totales; - Pietrzi-

kowski-Gussenbauer, 3 cas sur 9 extirpations totales.

etc. Soit en tout 39 cas, dout 13 hommes et 26 femmes

(en retranchant un cas de Kocher sur lequel les détails

nous manquent). Le tableau suivant donne la

proportion selon l'âge :

CACHEXIE PACHYDERMIQUE OPÉRATOIRE. 95

malades de MM. Reverdin, quatre de leurs opérés

atteints consécutivement de myxoedème ont été revus

par eux en décembre dernier. Chez tous, l'amélioration

était notable; chez deux (mye F... et M"° S...), on

constata le développement tardif d'un lobule thyroï-

dien aberrant. Depuis le mois de décembre, une des

opérées (M"° Crott...) a été revue par l'un de nous avec

M. J. Reverdin, qui nous écrivait peu après « que

l'amélioration est de plus en plus marquée' ». Tous ces

malades ont été opérés dans le courant des années

1880 et i 881 .

Baumgârtner a également constaté l'amélioration de

deux de ses cinq opérés atteints de myxoedème. 11

semble donc résulter de ces faits que le pronostic du

myxoedème opératoire est plus favorable que celui du

myxoedème médical dont la marche paraît fatalement

progressive, si l'on en juge par les cas que nous avons

rassemblés.

De toutes les hypothèses émises jusqu'à ce jour sur

l'étiologie de la cachexie pachydermique, l'atrophie ou

l'absence de la glande thyroïde était celle qui rencon-

trait le plus grand nombre d'adversaires. Mais les cas

de myxoedème observés par MM. Reverdin, Kocher,

etc., à la suite de l'extirpation totale du corps thyroïde,

le cas du Pacha, ceux de Curling, de H. Fagge, etc.,

que nous avons rapportés plus haut, viennent donner

une grande valeur à la théorie qui fait dépendre le

1 Voir plus haut note 2, p. 360.

» Voir, pour plus amples détails : Note sur vingt-deux opérations de

goitre par.T.-L, et A. Reverdin, Genève, 1885, et le travail que M J. Re-

verdm vient de présenter sur ce sujet au Congrès français de chirurgie.

96 IDIOTIE CRÉTINOÏDE.

myxoedème d'une lésion grave ou de l'absence de la

glande thyroïde. La révision des cas publiés par les

auteurs permet du reste d'affirmer que dans presque

tous ceux où il est fait mention de l'examen de la

glande thyroïde, celle-ci était lésée, que, dans les

observations non suivies d'autopsie il est souvent noté

qu'elle n'a pu être reconnue à la palpation.

Cooper', puis Schiff2 semblent les premiers avoir

entrevu autrefois les effets physiologiques de la glande

thyroïde; et récemment les nouvelles recherches des

physiologistes sont venues confirmer ce qu'avait du

reste démontré la clinique; on peut au surplus consi-

dérer la thyroïdectomie comme une expérience phy-

siologique pratiquée sur l'homme. Des expériences

faites sur les animaux, les plus concluantes et les

mieux conduites nous paraissent être celles de

M. Horsley, tant à cause de l'espèce animale à

laquelle il s'est adressé que par la façon dont elles

ont été dirigées. Dès le mois le décembre 1884,

M. Horsley publiait dans le British medical Journal

(p. 910) le résultat de l'extirpation du corps thyroïde

chez le singe. Chez ce primate l'extirpation de la glande

thyroïde, opérée avec les précautions antiseptiques (la

guérison de la plaie fut complète en trois jours) produit

des troubles nerveux généraux : convulsions, paralysie

fonctionnelle, hébétude mentale et enfin idiotie com-

plète, de la leucocytose, un abaissement de la tem-

' Medoel's Archiv f. d. Physiologie, 1820, p. 185.

1 Sclnff. - Untersuchungen aber die Zuckerbildung in der Lebel' und

der Einfluss des Nerven-systems auf die Erzeugung des Diabètes. Würz-

burg, 1885, p. 61.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE EXPÉRIMENTALE. 97

pérature, etc., tous les symptômes enfin observés dans

le myxoedème. On pouvait constater de plus l'accu-

mulation de la mucine dans le tissu conjonctif.

Les nouvelles recherches de M. Horsley, entreprises

sur le chien, le chat et le singe, paraissent démontrer

que la glande thyroïde est d'autant plus nécessaire au

fonctionnement normal de l'animal, que celui-ci est

plus jeune ; c'est ce que l'anatomie pathologique avait

déjà fait reconnaître sans qu'il eût été donné, jusqu'à

ces derniers temps, une explication satisfaisante du

développement plus considérable de la glande thyroïde

dans le jeune âge et de son atrophie et de sa dégéné-

rescence chez le vieillard, qui, lui aussi, par certains

caractères, est myxoedémateux. Depuis longtemps déjà

notre attention a été appelée sur l'état de la glande

thyroïde chez les idiots, et sans pouvoir encore établir

de relation certaine (ce qui serait prématuré) entre les

faits trouvés à l'autopsie et quelques symptômes obser-

vés du vivant du sujet ; nous avons pu constater que

chez la plupart de nos idiots la glande thyroïde est

petite et le plus souvent dégénérée. Les singes opérés

par M. Horsley ne survivent guère plus de six ou sept

semaines à l'opération. M. Horsley est cependant par-

venu à obtenir chez ses opérés une survie de quatre à

cinq mois et même plus en les maintenant dans un

milieu porté artificiellement à une température élevée :

M. Horsley rapporte les symptômes observés par lui à

trois états successifs : 1° période nerveuse; 2° période

mucoïde; 3° période atrophique.

D'après l'auteur, cette évolution expliquerait pour-

Bourneville, 1886. 7

98 IDIOTIE CRÉ1'InOIDR.

quoi, chez certains idiots crétinoïdes ou dans les cas

très chroniques de myxoedème, la dégénérescence

mucoïde est peu apparente; c'est, en effet, ce que nous

avons observé chez le Pacha.

Les expériences de M. Horsley montrent encore

que l'ablation de la glande thyroïde a une action évi-

dente sur les centres nerveux et expliquent les phé-

nomènes nerveux observés à la suite de la thyroïdec-

tomie totale, par exemple, le tétanos; que, de plus,

c'est avec raison que cette glande avait été classée (on

ne sait trop pourquoi) parmi les organes hématopoié-

tiques '.

Nous regrettons de ne pouvoir nous appesantir plus

longuement sur les recherches physiologiques de

M. Horsley qui trouveraient mieux leur place dans une

étude complète sur le myxoedème. Nous avons cru

cependant devoir les mentionner brièvement parce

qu'elles expliquent suffisamment les symptômes obser-

vés dans l'idiotie crétinoïde ou à la suite de la thyroï-

dectomie ; il reste toutefois à expliquer pourquoi,

chez l'homme, la thyroïdectomie semble produire un

état myxoedémateux susceptible d'amélioration, dont

il ne nous est pas même possible de déterminer la

durée exacte.

Le rôle physiologique de la glande thyroïde a encore

donné, dans ces dernières années, naissance à de

nombreux travaux que nous ne ferons qu'analyser très

1 La veine thyroïdienne inférieure contiendrait un plus grand nombre de

corpuscules rouges.

GLANDE THYROÏDE : PHYSIOLOGIE. 99

brièvement. M. Schiff ', un des premiers, a démontré

que les rongeurs supportent très bien la thyroïdecto-

mie totale et simultanée, au contraire des carnivores

(chiens et chats) qui succombent après avoir présenté

des symptômes plus ou moins comparables à ceux qu'on

observe dans les cas de myxoedème ; opérés toutefois

à un intervalle de quinze jours, ces mêmes carnivores

peuvent survivre indéfiniment 2.

Il a été opposé aux expériences de M. Schiff un cer-

tain nombre d'objections dont les principales se trou-

vent contenues dans le travail de M. Kauffmann2, fait

sous la direction de M. Klebs. Qu'il nous suffise de

dire que cet auteur, si sévère envers les autres, sauf

envers M. Kocher à qui il attribue la découverte du

myxoedème opératoire, a basé ses critiques sur de

prétendues extirpations de corps thyroïdes chez le

chien qui se trouvent n'être que des extirpations des

glandes sous-maxillaires, ainsi qu'il ressort de son

travail même et des figures qui y sont annexées.

MM. Albertoni et Tizzoni', Herzen, Fuhr5 confirment

1 Schiff. Résumé d'une série d'expériences sur les effets et l'ablation

des corps thyroïdes. (Revue médicale de la Suisse Romande, na 2, 15 février

1885, p. 65, et n S, 15 août 1884.)

M. Niehans (de Berne) aurait observé deux cas de cachexie pachy-

dermique à la suite de l'extirpation du goitre en deux temps éloignés

(état qui se i approcherait de ce qui se passe dans le myxoedème médical).

* Kauffmann . Die Schildl'usenexstÎ1'Pation beim Blmde und ihre Folge.

(drch. f. exp. Pathologie und Pharnzakologie, septembre 1884, p. 361,

Bd. XVIII, III et IV, H.).

a Albertoni et Tizzoni. - Sugli effetti dell' estiipazioize délia tyroide.

(Arçh. per le Scienze mediche, t. X, no 1, 1886) et Archives italiennes de

Biologie, VII, fasc. 2.)

à Herzen. -A quoi sert la thyroïde (Semaine méd., H août 1886).

- Kuhr. - Die Exstirpation der Schildrüse (Archiv. f. Exp. Pathologie u.

100 IDIOTIE CRÙTINOÏDE.

en partie les expériences de M. Schiff. Les auteurs ita-

liens n'auraient observé aucune influence de l'âge et

du sexe des animaux opérés dont la survie aurait atteint

plusieurs mois et même un an soit après des ablations

simultanées, soit après des extirpations successives;

les résultats seraient comparables dans les deux cas.

Selon eux, il résulterait de leurs recherches que la

thyroïde aurait pour fonction de permettre à l'hémo-

globine de fixer l'oxygène '. Les chiens éthyroïdés de

M. Herzen n'ont succombé qu'après une période plus

longue que celle observée dans les premières expé-

riences de M. Schiff (ablation totale et simultanée).

Chez un des chiens opérés par M. Herzen, on nota une

survie de cinquante-deux jours; un autre chien dont

nous ignorons l'état ultérieur, ne présentait encore

aucun phénomène morbide lors de la publication de

ces expériences (quarante-deux jours après l'observa-

tion). M. Herzen admet que les effets de la thyroïdec-

tomie dépendent bien réellement de l'absence de la

thyroïde et qu'ils sont l'expression d'une affection céré-

brale probablement corticale.

Parmi les auteurs qui ont obtenu des résultats con-

traires à ceux de M. Schiff, nous devons encore citer

M. Philipeaux '. Après avoir rappelé que, quinze ans

l'harmakologie, 5 août 1886, p. 373 à 460). - Nous avons eu connais-

sance de ce travail trop tardivement pour l'analyser d'une façon complète ;

on y trouvera des renseignements bibliographiques intéressants en ce

qui concerne la physiologie de la glande thyroïde.

1 Bruns admet que le corps thyroïde joue un rôle dans la formation du

sang, soit en éliminant des substances nuisibles, soit en produisant des

substances nécessaires à la nutrition du système nerveux.

* Philipeaux. De l'extirpation des corps thyroïdes des chiens. (Compte

rendu de la Société de Biologie, 8 novembre 1884, p, 606.)

GLANDE THYROÏDE : PHYSIOLOGIE 101

auparavant, il avait montré l'innocuité de l'extirpation

de la glande thyroïde chez le rat albinos, cet auteur

prétend avoir éthyroïdisé huit chiens sans qu'il s'en

soit suivi aucun trouble fonctionnel. Ces chiens avaient

été opérés les 1" et 15 septembre 1884 et M. Phili-

peaux donnait le résultat de ses expériences dès le

8 novembre de la même année. Les résultats obtenus

par M. Schiff seraient dus, selon lui, à des complica-

tions opératoires.

Pour M. Rogowitsch ', dont les expériences confir-

ment celles de M. Schiff en ce qui concerne les résul-

tats opératoires, les animaux succomberaient avec des

symptômes rappelant l'empoisonnement par le phos-

phore, l'arsenic, etc. Il aurait noté à l'autopsie une

encéphalonayélite parenchymateuse subaiguë résultant de

l'action d'un produit toxique (inconnu) de l'organisme

dont la neutralisation s'opérerait à l'état normal, dans

la glande thyroïde. La théorie toxique semble, du

reste, être actuellement adoptée par un grand nombre

de physiologistes. M. Schiff, qui d'abord considérait

avec Liebermeister, Zésas, Wagner, Sanquirico et Ca-

nalis, Colzi, la glande thyroïde comme un organe ré-

gulateur de la circulation cérébrale, s'y est rallié après

avoir montré, dans ses dernières expériences 2, que

la santé des animaux est conservée si on laisse un

petit morceau de la glande thyroïde 3, ou, si l'on

1 Rogowitsch, - Zur Physiologie der Schildruse ;Centralbl f. die med.

YVisenschaften, 24 juillet 1886.)

= Zésas. - D. med. Zeitung., nos 55, 56, 18S6. -

3 M. Cambria (Ueber die Schilddrusen-Resektion nach Mickvlicz) pré-

tend que les chiens supporteraient aussi bien que l'homme la résection

de la thyroïde si on a soin de laisser un petit morceau de la glande ( ! Vie ?

102 IDIOTIE CRÉTlNOïDE,

fait la thyroïdectomie totale, après avoir greffé dans la

cavité péritonéale un petit morceau d'une glande

thyroïde.

M. AHara' soutient que chez le poulet l'extirpation

totale de la glande thyroïde n'amène aucun des trou-

bles remarqués chez le chien. Il attribue ce résultat à

la situation de la glande chez le poulet, qui permet de

les éthyroïdiser sans léser aucun rameau du grand

sympathique. On sait, en effet, que MM. Reverdin,

Baumgartner, etc., avaient cru pouvoir faire dé-

pendre les phénomènes myxoedémateux observés chez

leurs opérés de la section de nombreux ramuscules de ce

nerf.

Plusieurs auteurs (Sanquirico, Canalis, Ughetti et Di

lUattei 2) ont cherché s'il existait quelque relation fonc-

tionnelle entre la glande thyroïde et la rate; les expé-

riences sont jusqu'ici restées négatives.

Un grand nombre d'hypothèses ont été émises au

sujet de la nature du myxoedèmef chaque observateur

a donné la sienne; nous ne croyons pas devoir nous y

arrêter; nous signalerons seulement les théories attri-

buant le myxoedème à l'anémie due à une dénutrition

med. loch., 31 juillet 1836.) - Les résultats contradictoires obtenus

dans les expériences sur les chiens seraient du reste souvent expliqués

par l'existence d'une glande thyroïde aortique, accessoire fréquemment

observé chez cet animal.

4 Allara. - Sulla estirpazione délia froide. (Lo Sperimentale, mars

1885, p. 281).

Ughetti et Di Mattei. - Sulla spleno-liroïdectomia nel cane et nel

coniylio. (Arch. pcr le scienze medlche, vol. IX, iio il).

GLANDE THYROÏDE : PHYSIOLOGIE. 103

consécutive au rétrécissement de la trachée, etc. (liga-

ture des artères thyroïdiennes inférieures , Kocher),

à l'anémie consécutive à la paralysie des dilatateurs

de la glotte, à une lésion des rameaux du grand sym-

pathique, à l'altération du corps pituitaire etde la glande

pinéale, à l'action de l'acide phénique pendant l'opé-

ration, à une lésion des troncs nerveux, situés dans le

voisinage de la glande thyroïde, à l'action de la mu-

cine sur les centres nerveux, etc., etc.

Si la physiologie de la glande thyroïde est encore

quelque peu obscure, il n'en reste pas moins établi

que son absence ou les altérations pathologiques, dont

elle peut être le siège, en empêchant totalement son

fonctionnement, produisent un état crétinoïde assez

voisin du crétinisme avec ou sans goitre.

Le myxoedème a pu être confondu avec un certain

nombre d'autres affections, la néphrite, la lipomatose

généralisée, les lipomes symétriques , la sclérodermie.

L'oedème néphrétique se différencie facilement par sa

nature, sa mobilité, son siège, par les caractères tirés

de l'examen des urines, etc., et enfin par l'absence

de signes importants rencontrés dans le myxoedème.

La lipomatose généralisée est également facile à dis-

tinguer du myxoedème, nous ne nous y arrêterons pas

non plus qu'aux lipomes symétriques qui ne peuvent

prêter à confusion que lorsqu'ils siègent dans les fosses

sus-claviculaires, mais alors l'absence des autres

signes myxoedémateux permet de faire facilement le

diagnostic.

104 IDIOTIE CRÉTINOÏDE

Le diagnostic entre le myxoedème et la sclérodermie

s'établit sans difficulté; dans la sclérodermie oedéma-

teuse la peau, inégalement dure, offre dans certaines

parties une résistance nullement comparable à celle du

myxoedème, ou est parfois franchement oedémateuse.

TUBERCULOSE DE Li PROTUBÉRANCE. 105

II.

Tuberculose de la protubérance chez un enfant;

Par bourneville et isch-wall.

\

Noua avons eu l'occasion d'observer à Bicêtre un bel

exemple ? de tuberculose de la protubérance annulaire

que nouiî8 avons cru devoir publier en le faisant suivre d'un

résumé -lte quelques autres cas, qui appartiennent égale-

menv'it des enfants.

,

Observation. Mère névropathe, idées noires. Grand-

z° père paraplégique; oncle, convulsions; frère, convul-

. sio ? is. -Ta7,te cancéreuse.-Grand'mère rhumatisante;

tante convulsions ; cousin aliéné. -Chagrins pendant la

grossesse. Bronchite, scarlatine, variole. Peur et crise

nerveuse à trois ans. Cauchemars, changement de ca-

ractère, perte d'appétit. -Etourdissements, strabisme,

fièvre cérébrale, rémission,- Titubation, divagations,

paralysies ft contractures, dysphagie, constipation,

perte de la parole, cris. Amaigrissement, signes de

tuberculose pulmonaire, eschares. Alternatives d'hy-

perthermie et d'hypothermie. - Coma et mort.

Autopsie. Oblitération incomplète du trou de Bo-

tal. Tubercules crétacés au sommet des poumons.-

Cauerne. - Thymus persistant. Description des cir-

convolutions cérébrales. - Tubercules de la protubé-

rance. Examen histologique,

IIoël... (Pierre-Charles), âgé de cinq ans, est entré le

2 avril 1886 à l'hospice de Bicêtre (service de M. Boume-

ville.)

Renseignements fournis par sa mère (12 mai). Père :

32 ans, mécanicien, bien portant, très fort. N'a jamais eu

de convulsions, ne fume que très peu et ne fait jamais

d'excès de boisson ; caractère doux. Pas de migraines,

mais céphalalgies temporales fréquentes, sans vomisse-

Boun : OEvILLE, 18S6. 8

lOG ANTÉCÉDENTS Héréditaires.

ments, durant deux ou trois heures ; pas de rhumatismes.

Il a eu une maladie de peau qui a duré trois ans, s'ac-

compagnant de démangeaisons. Il a été guéri par des lo-

tions phéniquées. [Père : employé de chemin de fer, mort 7

à quarante ans, écrasé entre deux wagons; il avait été /

longtemps soldat; on ne lui a jamais connu de maladies.

- 1\1 ère : soixante ans, bien portante, mais sujette à des

douleurs rhumatismales dans les bras; pas de migraines.

- Grand'mère maternelle : morte presque centenaire

avait eu des douleurs rhumatismales ; pas de nodosités·des

mains. Soeur : morte à sept ans de co ? t'UMSïo ? s ? Frr ? g.

vingt-huit ans, très rangé, n'a pas de maladies. plu-

sieurs oncles et tantes sont vivants et en bonne sa^^ -

Un cousin germain a été aliéné pendant deux ails à la

suite de chagrins; il est actuellement guéri. Pas .-d'autres

aliénés, pas d'épileptiques, etc., dans le resfe de la

famille]. . '

Mère : trente ans, domestique, ménagère; blonde, r'1Ïn-

ce, type lorrain ; pas de convulsions dans l'enfance, nas

d'accidents nerveux; ni migraines, ni céphalalgies, ni rh

matismes. Depuis la naissance de son dernier enfant, c'est-

à-dire depuis trois ans, elle a des pertes de sang qui l'af-

faiblissent beaucoup. Avant, elle était très bien portante.

Mariée à vingt-cinq ans, elle n'a jamais eu de crises de nerfs ....

ni de syncopes. Depuis ses pertes, elle s'émotionne facile-

ment, a des tremblements lorsqu'elle éprouve une contra-

riété ; il y a un an, elle avait des « crises d'idées noires, »

elle pensait à mourir. Cet état durait depuis la naissance

de son dernier enfant, qui avait coïncidé avec la perte do

son fils ainé, qu'elle aimait beaucoup. En ce moment, elle

est atteinte de chloro-anémie et aurait, de plus, suivant son

médecin, une métrite. [Père : tué dans une bagarre (frac-

ture du crâne). Il était très fort et très nerveux, sans avoir

pourtant jamais de crises de nerfs. Très intelligent, dit-on.

A l'âge de vingt ans, à la suite d'un bain froid, il resta

deux ans sans pouvoir bouger, avec les jambes raides ; la

partie supérieure du corps était saine. Cette paraplégie

guérit à l'âge de vingt deux ans, et il put reprendre son

métier de chauffeur. Mère : soixante ans, n'a jamais eu

de maladies et n'a jamais présenté d'accidents nerveux. -

Sept frères et soeurs au inoins (de deux mères), cinq sont

vivants et bien portants, ainsi que leurs enfants ; un est

mort à vingt mois de convulsions de la dentition. Une

soeur aînée est morte d'un cancer utérin]. Pas de con-

sanguinité -

antécédents personnels. 107

Deux fausses couches et deux enfants : 1° Un fils, né

avant le mariage, est mort âgé de deux ans, de convulsions

après dix jours de maladie. Il était très intelligent, très

fort et très coléreux. Un jour qu'on voulait le forcer à

manger sa soupe il se mit dans une telle colère qu'il se

trouva mal et qu'on dut aller chercher un médecin ;

2° fausse couche de deux mois, sans cause connue;-3° no-

tre malade ; - 4° fausse couche de cinq mois et demi.

Notre malade. Conception pendant que la mère était

chagrine et fatiguée par suite de la mort d'un enfant qui

avait eu lieu trois jours avant ? Grossesse pénible ; la mère,

très faible, se condamnait au repos dans la crainte d'un

avortement ; sa santé devint meilleure à partir du 4e mois;

ni chutes, ni traumatismes, ni oedèmes.

Accouchement à terme, facile, sans chloroforme. A la

naissance, l'enfant était très maigre, mais ne présentait

pas de signes d'asphyxie. Elevé au sein par sa mère jusqu'à

onze mois. A cette époque, il eut une bronchite très forte

qui dura quinze jours. Il a marché vers 16 mois, a parlé à

plus de deux ans, a été propre de très bonne heure. La

première dent a percé à cinq mois, les autres dents vinrent

très vite sans amener de convulsions.

A4 ans,scarlaline et six mois après, petite vérole volante

presque sans éruption. Il y a deux ans, entendant des

voisins qui se disputaient, il eut peur et fut pris d'une

« crise de nerfs ». Pendant plus d'un quart d'heure il

tourna les yeux et se cacha. Depuis ce temps, cauchemars

et peurs nocturnes, perte d'appétit, changement de carac-

tère ; l'enfant devenait nerveux, poltron, tout l'effrayait ; la

nuit il se cachait sous les couvertures, même lorsqu'il était

couché avec sa mère ; sa respiration était haletante : « il

respirait à s'étouffer, » parfois il se mettait à crier qu'il

avait peur. Après six mois passés dans cet état, il eut des

étourdissements le prenant deux fois par jour, à midi et le

soir. Il disait que le plancher tournait, devenait rouge,

mais il ne tombait jamais. Huit jours après le début de ces

vertiges, survinrent des envies de vomir. Un médecin con-

sulté alors lui trouva le regard égaré et lui prescrivit du

bromure de potassium. Depuis ce temps, les vertiges ces-

sèrent et furent remplacés pal' de lacéphalalgie,desn : : wsécs

le matin,et par des moments d'agitation. Huit mois après la

peur, on le mena à l'école et le premier jour il revint lou-

chant de l'oeil gauche « parce qu'il avait trop regardé le

tableau», dit la mère.Le lendemain l'oeil n'avait plus rien,

mais le soir on remarqua que l'enfant avait de la fièvre.

108 TUBERCULOSE DE la protubérance.

Cette fièvre, que le médecin appela fièvre cérébrale,

dura huit jours. Pendant les trois premiers, l'enfant parlait

bien et était gai, mais les jours suivants il devint triste,

ses yeux étaient égarés et cet état dura jusqu'à la fin de la

fièvre. Quand celle-ci fut finie et que I-Ioi;l... se leva, on

remarqua qu'il allait de droite à gauche, titubai ! , parlait

toujours de bêtes et de serpents, dont on l'avait entretenu à

l'école. Pendant six semaines, il eut une légère rémission

après laquelle les accidents reprirent plus forts que jamais.

Il se tenait mal sur ses jambes, se cognait à droite et à

gauche, était très gêné pour avaler.A ce moment, ni étour-

dissements, ni crises nerveuses, les nuits étaient bonnes.

L'enfant était habituellement constipé, il fallait chaque

jour lui donner un lavement.

Avant sa maladie, son intelligence était assez déve-

loppée, il était obéissant, ne se mettait pas en colère, avait

le caractère affectueux et franc, mais il était très turbulent.

Pas d'onanisme, pas de convulsions, pas de gourmes,

d'ophthalmies, ni d'écoulements d'oreilles. Ni dartres, ni

teigne. Jamais de traumatismes sur la tête, pas de vers.

Etat actuel (21 avril 1886). Crâne ovoïde, bosses parié-

tales et occipitales moyennement développées et symé-

triques. Bosses frontales peu saillantes; le front est étroit

et peu élevé, les rebords orbitaires sont saillants et sur-

montés de dépressions assez prononcées.

Diamètre antéro-postérieur maximum 17,8

Diamètre transverse 14,3

Circonférence horizontale au niveau des oreilles. 50,5

Demi-circonférence allant d'une oreille à l'autre . 28,»

Longueur de la racine du nez à la protubérance

occipitale externe en passant par le sommet.. 30,0

Face arrondie, symétrique ; nez petit, très large vers sa

racine, ailes du nez de niveau ; bouche grande, lèvres

minces; voûte palatine moyennement excavée et symé-

trique ; voile, luette, amygdales rien de particulier;

menton petit et arrondi ; oreilles bien détachées et bien

ourlées, lobule adhérent; largeur 6 centimètres à droite,

5 centimètres à gauche.

Cou, court ; circonférence à la partie moyenne 24 centi-

mètres. Thorax bien conformé, symétrique; circonférence

sous l'aisselle 53 centimètres; au niveau des mamelons

55 centimètres ; à la base 57 centimètres. Dos, lombes et

rachis normaux. Abdomen souple n'offrant rien de parti-

culier.

SYMPTÔMES. ion

Membres supérieurs bien conformés, bien muscles,

symétriques. Les dimensions sont les mêmes des deux

côtés.

Membres inférieurs symétriques, égaux, normaux, sauf

les articulations du genou qui sont trop grosses; pieds

bien conformés.

Organes génitaux : Pénil glabre, bourses pendantes,

testicules de la dimension de toutes petites noisettes, gland

découvrable, méat normal. Longueur de la verge 5 cent. ;

circonférence 4 cent. 5.

Foie et rate normaux à la percussion. Ganglions

lymphatiques non hypertrophiés. Peau bistrée, assez

épaisse; duvet assez abondant à la partie supérieure du

dos; quelques poils à la partie externe des jambes. Che-

veux châtains ; sourcils peu épais ; cils longs et noirs ; front

couvert de duvet.

Sensibilité générale assez bien conservée car l'enfant

retire ses membres dès qu'on les pique, mais comme il ne

cesse de crier pendant qu'on l'examine et qu'il ne dit pas

un mot, il est assez difficile d'être bien renseigné sur les

sens ; c'est ainsi qu'on ne peut apprécier l'état de la vue ;

les yeux sont grands, l'iris est brun foncé, les pupilles

sont égales, un peu contractées; il y a un strabisme in-

terne très accusé de l'oeil gauche. - L'ouïe semble nor-

male ; en effet, l'enfant tourne la tête quand on l'appelle ;

il se détourne aussi quand on approche un flacon d'ammo-

niaque de ses narines, ce qui dénote une certaine inté-

grité de l'olfaction. Quant au g oui, on ne peut appré-

cier sa sensibilité.

Les mouvements des bras s'exécutent librement, mais

ceux des jambes sont plus difficiles et l'enfant, à certains

moments, est très faible sur ses jambes. On ne note rien

de particulier du côté des grands appareils splanchniques

sauf aux poumons. La respiration est rude et soufflante

aux deux sommets ; de plus, à droite, on entend des râles

humides, caverneux. Submatité sous chaque clavicule. ,.

Dentition. A la mâchoire supérieure dix dents de lait'

et première molaire ; à la mâchoire inférieure : première^,

molaires droite et gauche et deux incisives comme de t

permanentes, les autres dents sont des dents de lait. t

Chaque fois qu'on l'examine, Hoël... ne cesse pas fia',

pleurer. é

Poids, 17 kilog. Taille, 1 m. 06. \-

8 nai. - Hoël... entre à l'infirmerie. Il est devenu

t.èi faible et on le signale comme ne se tenant pas sur ses

no TUBERCULOSE DE LA PROTUBÉRANCE.

jambes. A son entrée dans le service, le malade marchait

seul et prononçait quelques mots.

12 mai. Depuis trois jours, le malade est abattu. Si l'on

essaie de le mettre debout, ses jambes fléchissent et ne

peuvent le porter [paralysie complète). Précédemment il

disait quelques mots, maintenant il ne parle pas du tout.

Le regard reste très vif. Il n'y a pas d'anesthésie apprécia-

ble des jambes ni du reste du corps. - Le réflexe rotulien

est exagéré mais égal des deux côtés. Pas de trépidation

épileptoide des pieds. Incontinence urinaire et fécale.

Plaintes continuelles, pleurs fréquents, parfois cris.

-- Caractère irritable, sommeil mauvais.-Battements du

coeur fréquents ; rien à l'auscultation. Pouls dur et ré-

gulier. - Respiration à peu près normale. Les signes

sthétoscopiques ne se sont pas modifiés depuis le dernier

examen.

Appétit nul, langue blanche, constipation opiniâtre. Ab-

domen ni ballonné, ni rétracté. Peau légèrement jaunâ-

tre. Le foie ne déborde pas les fausses côtes. Traite-

ment : Huile de ricin ; potion de Todd avec 2 gr. extrait de-

quinquina.

14 mai. Quand on approche de son lit, Hoël... se met

toujours à pleurer et à crier. Depuis plusieurs jours la dé-

glutition était devenue impossible, l'enfant ne faisait au-

cun mouvement pour avaler quand on lui mettait des ali-

ments dans la bouche ; aujourd'hui, il avale mieux. Les

bras sont à demi fléchis. Si on essaie de les étendre on

constate une contracture manifeste assez facile à vaincre

et cette manoeuvre semble déterminer une certaine souf-

france. L'enfant agite faiblement les bras et n'exécute ja-

mais de grands mouvements. La sensibilité cutanée pa-

raît diminuée. Les membres inférieurs sont d'habitude

étendus, l'enfant les remue, mais l'étendue des mouvements

est assez restreinte. En essayant de les fléchir, on pro-

voque aussitôt une contracture plus marquée qu'aux bras.

La sensibilité cutanée des jambes est également amoindrie.

Pas de mouvements fibriliaires.

La teinte jaunâtre de la peau est moins accusée que les-

jours précédents. Face très rouge, yeux mi-clos, bouche

ouverte. Le malade parait se plaindre de la tête ; quand on la

lui soulève il se met à pleurer. Il ne prononce pas un mot.

15 mai. P. 64, très irrégulier, filiforme, avec des inter-

mittences fréquentes. Strabisme convergent des deux yeux.

Hyperesthésie cutanée. Dès qu'on le touche, Hoël... pousse-

des cris. Raie méningitique. L'enfant pleurant constam-

ment, il est impossible d'étudier avec soin la respiration..

SYMPTÔMES. 111 1

Cou flexible, mais les mouvements de la tête semblent

toujours pénibles. La contracture a notablement diminué.

Depuis hier, l'enfant avale mieux et la constipation a cessé.

17 mai. Aujourd'hui Hoël... ne crie pas, ne s'agite pas;

il remue les lèvres, tourne parfois la tête. Si on approche

trop de son lit, il se plaint. Il continue à prendre du lait et

du bouillon. En résumé, légère rémission.

18 mai. Même état ; Hoël... est assez tranquille, sauf quand

on veutl'examiner. Pouls irrégulier, filiforme, incomptable.

19 mai. Contracture et raideur des bras très diminuées;

strabisme interne, surtout à l'oeil gauche, constipation.

Hier soir, on a donné un lavement sans résultat.

20 mai. La mère du malade est venue le voir; elle dit

qu'il l'a reconnue. Aujourd'hui, II... se laisse approcher sans

crier. La respiration est facile et régulière, le pouls fort,

rapide, irrégulier. Le faciès est peu modifié : bouche ou-

verte, strabisme interne double très marqué, hyperesthé-

sie générale. L'enfant prend du lait à la cuiller. Pas de

vomissements, constipation persistante.

25 mai. L'enfant n'avale que si on lui enfonce les aliments

liquides dans la bouche avec une cuiller. Le strabisme

domine à gauche. Quand on dérange les mains, elles exé-

cutent de très faibles mouvements.

26 mai. Abattement très accusé, mâchonnement.. Hoël...

pleure dès qu'on l'approche. Pas de cris pendant la nuit.

Pouls très fréquent, régulier, petit, dur. Amaigrissement

sensible, abdomen légèrement rétracté et ridé. Constipa-

tion persistante, souvent même les lavements sont rendus

tels qu'ils ont été pris (huile de ricin, 15 grammes.)

29 ? nai. L'état de Hoël... ne s'est pas modifié, l'abatte-

ment persiste, l'amaigrissement augmente. Bouche cons-

tamment ouverte, langue blanche et sèche, pas de muguet.

Ni vomissements, ni fièvre, ni convulsions. Pouls toujours

fréquent, mais régulier et plus ample.

2 juin. Même état, pas de garde-robes depuis quatre jours

malgré les lavements purgatifs.

7 juin. Pas de modification; on a noté seulement que

l'enfant urine très peu; l'examen montre que la vessie n'est

pas distendue.

11 juin. Pouls petit, irrégulier, incomptable. Pas de

selles, ventre rétracté, urines toujours peu abondantes. Pas

de fièvre ; on note un abaissement de la température.

Raideur de la nuque.

19 juin. L'état du malade ne s'est guère modifié : même

aspect extérieur. Contracture du bras droit, réductible

avec peine. Membre inférieur droit ni contracturé, ni pa-

112 TUBERCULOSE DE LA PROTUBÉRANCE.

ralysc, Membre inférieur gauche contracture légèrement

et d'une fa.çon intermittente. Membre supérieur gaucho

flasque, les doigts cependant serrent légèrement les objets.

Hier l'enfant n'a rien mangé, pas de mouvement de déglu.

tition. Cris. Respiration très irrégulière. Pouls, régu-

lier, 75. (Pour la température, voy. Planche V.)

22 juin. La mère assure qu'aujourd'hui encore son fils

l'a reconnue.

26 juin. Des eschares commencent à se former à la région

sacrée. Déglutition toujours impossible.

30 juin. L'enfant va de. plus en plus mal. Il ne bouge pas,

n'avale pas, grimace quand on le remue. Bouche ouverte,

langue sèche, clignottement des paupières, inégalité pupil-

laire (pupille droite plus rétrécie quelagauche). Hyperémie

des conjonctives oculaire etpalpébrale. Ronchus trachéaux.

De temps en temps, plaintes faibles. L'enfant ne fait au-

cun mouvement et ne reconnaît personne.

2 juillet. Hoël est en résolution; respiration un peu

stertoreuse ; pouls rapide, incomptable. Température

de la peau assez élevée. Strabisme persistant, regard fixe,

cornées fermes. La sensibilité cutanée a presque tout à fait

disparu. L'enfant ne réagit plus au pincement, La face

présente des plaques rouges. Coma. Mort à onze heures

du soir. Température un quart d'heure après la mort,

42°,3 ; une heure après, 41°,4 : deux heures après 38°. -

Poids après le décès. 10 kil. 500. Perte de poids : G k. 500.

Autopsie le 4 juillet 188G, à six heures du matin, trente

et une heures après la mort. Le corps est très amaigri, la

rigidité cadavérique n'existe plus. A l'ouverture du corps,

on constate tout d'abord que les viscères occupent leur

place normale. Coeur (40 gr.) en systole, sans lésions, ex-

cepté que le trou de Botal n'est pas complètement oblitéré.

Plèvres : pas de liquide, adhérences au niveau du som-

met droit. Poumons (160 gr. de chaque côté). Les deux

sommets présentent quelques tubercules dont un certain

nombre sont crétacés. Il existe de plus, à droite, une petite

caverne grosse comme une noisette, remplie d'un pus épais.

OEdème des lobes inférieurs. Rate (90 gr.) adhérente aux

organes voisins, mais saine d'ailleurs. - Foie (520 gr.)

sain. quelques adhérences au diaphragme.- Uretères, cap-

sules surrénales, rien. - Reins (50 gr. à droite; 40 gr. à

gauche), légèrement lobules, se décortiquant bien, hype-

rémiés. -Estomac oesophage, pancréas : rien de particu-

lier. Péritoine, ganglions mésentériques, sains.

AUTOPSIE. 113

Larynx et Pharynx normaux. Thymus persistant, mais

peu développé. - Testicules infantiles.

Tête. - A l'ouverture du crâne, il ne s'écoule que très

peu de liquide. Les artères, les nerfs et les autres parties

de la base de l'encéphale sont symétriques et sans lésions.

Nulle part la pie-mère n'offre de granulations tubercu-

leuses, elle s'enlève assez facilement sauf sur le lobe pa-

riétal (tiers inférieur de la pariétale ascendante) et sur le

tiers inférieur de la frontale ascendante droite où l'on en-

traîne avec elle une partie de la substance grise. En-

céphale : 1270 gr.Cerueau : hémisphère droit, 560 gr.,

hémisphère gauche, 540 gr. Cervelet et isthme, 170 gr.

Hémisphère gauche. La scissure de Sylvius est

sinueuse, profonde, elle s'arrête à 5 millim. de la scissure

interpariétale. Le sillon de Rolando très sinueux, assez

profond, communique en haut avec la scissure frontale

supérieure. La scissure perpendiculaire externe ne pré-

sente qu'un court trajet sur la face convexe.

Le lobule orbitaire possède un gyrus rectus bien déve-

loppé. La scissure olfactive rectiligne est très profonde ; à

quelques millimètres en dehors d'elle, le lobule orbitaire

se présente dans ses autres parties sur un plan beaucoup

plus élevé; la partie la plus profonde se trouve entre les

deux branches de l'incisure en II.

Lobe frontal. - La première frontale qui s'insère par

un pli de passage à niveau sur la frontale ascendante est

dédoublée ; ce dédoublement est beaucoup plus net dans

la partie moyenne. La scissure frontale supérieure, si-

nueuse, assez profonde, va se jeter dans le sillon de

Rolando. La deuxième frontale s'insère à la frontale

ascendante par deux plis de passage profonds; elle est

également dédoublée sur presque tout son parcours. La

scissure frontale inférieure est très sinueuse, assez pro-

fonde. La première frontale est moins développée que les

deux autres, son pied est maigre, contourné et en retrait

sur les parties environnantes, le cap relevé est également

peu développé.

A la partie antérieure, les trois frontales sont réunies

entre elles par des plis de passage formant entre eux et les

frontales une suite de circonvolutions bordant le lobule

orbitaire. 11 existe une scissure frontale parallèle com-

plète, prenant son origine à la scissure frontale supérieure

et se terminant à 3 millimètres de la scissure de Sylvius.

La frontale ascendante, peu développée, très sinueuse,

114 TUBERCULOSE DE LA PROTUBÉRANCE.

est coupée profondément à son cinquième supérieur

par le sillon qui fait communiquer la scissure fron-

tale supérieure avec le sillon de Rolando, de telle sorte

qu'on croirait qu'elle finit là, d'autant plus qu'elle envoie

dans la scissure frontale supérieure, en avant, une sorte

de crochet. La pariétale ascendante est assez développée

dans ses trois quarts inférieurs, très amaigrie dans son

quart supérieur. Elle est sinueuse, nettement séparée du

pli pariétal supérieur, elle communique à 1 centim. environ

de la scissure de Sylvius, par un large pli de passage,

avec le pli pariétal inférieur. Ce pli de passage interrompt

lacontinuité de la scissure interpariétale,laquelle prend son

origine au fond de la scissure de Sylvius, est sinueuse et

va se jeter dans le premier sillon occipital; au niveau de

sa courbe, un rameau ascendant, qui longe la pariétale

ascendante jusqu'à la fente interhémisphérique,forme une

sorte de scissure parallèle pariétale. Vers le milieu de sa

courbe, un rameau descendant va de la scissure interpa-

riétale à la scissure parallèle. Le pli pariétal supérieur est

assez développé, très découpé dans ses parties antérieures ;

sa partie la plus postérieure est très maigre, comme atro-

phiée, en retrait sur les parties voisines; il en est de même

du pli de passage qui se rend du pli pariétal supérieur au

lobe occipital. Le pli pariétal inférieur est assez bien déve-

loppé, ainsi que le pli courbe.

La première circonvolution temporale, maigre et si-

nueuse en avant,est assez volumineuse dans sa partie pos-

térieure. La scissure parallèle est sinueuse, profonde,

bifurquée à ses parties supérieure et postérieure et com-

munique en bas avec un sillon qui va presque rejoindre

l'incisure préoccipitale et sépare le lobe temporal du lobe

occipital.

La deuxième temporale est sinueuse, bien développée,

découpée par un sillon allant de la scissure parallèle à la

deuxième scissure temporale qui est interrompue par plu-

sieurs plis de passage se rendant de la deuxième tempo-

rale à la troisième. Celle-ci est également assez bien déve-

loppée. - Le lobe occipital présente son aspect ordinaire,

mais ses circonvolutions sont un peu maigres, et il paraît

un peu en retrait sur les parties environnantes.

Face interne. - La première frontale interne est assez.

bien développée, sinueuse. La scissure calloso-marginale,

sinueuse, est interrompue par un petit pli de passage en

retrait, allant de là première frontale à la circonvolution

du corps calleux. Le lobule paracentral, irrégulier, nette-

ment séparé des parties environnantes est peu développé,.

CIRCONVOLUTIONS CÉRÉBRALES. 115

possède qne petite scissure horizontale et trois scissures

plus profondes, perpendiculaires; la médiane appartient au

sillon de Rolando.

Le lobe quadrilatère est bien développé, a une scissure

sous-pariétale très prononcée et des plis pariétaux lim-

biques, antérieurs et postérieurs, nettement séparés par des

sillons assez profonds.

La scissure perpendiculaire interne ne présente rien de

particulier. Le coin est assez gros, un peu en retrait. La

scissure calcarine, profonde, est normale. La circonvo-

lution du corps calleux est assez développée et sinueuse

sur son bord supérieur.

Les scissures et les circonvolutions temporo-occipitales

sont bien développées; un pli de passage se rend de la

deuxième temporo-occipitale à la troisième temporale, et

un sillon profond revient vers la partie antérieure de la

première scissure temporo-occipitale.

Le ventricule latéral, les masses centrales, la corne

d'Ammon ne présentent rien de particulier.

Hémisphère droit. La scissure de Sylvius est norma-

lement conformée. Le sillon de Rolando est sinueux, pro-

fond. La scissure perpendiculaire externe est comme

dédoublée ; un rameau, le plus postérieur, est la continua-

tion directe de la scissure perpendiculaire interne, il est

très court et ne représente qu'une encoche ; l'autre, plus

antérieur, part horizontalement et un peu obliquement de

la scissure perpendiculaire interne, sur la face interne,

pour se diriger après un trajet d'un centimètre, sur cette

même face interne, vers la face externe où elle se termine

après un trajet d'un centimètre.

Sur le lobule orbitaire, on trouve, comme à gauche, les

mêmes parties situées sur un plan plus élevé, mais à un

degré moins prononcé ; ce lobule est, du reste, plus large

qu'à gauche.

Lobe frontal. - La première frontale s'insère à la fron-

tale ascendante par un large pli de passage à niveau ; elle

est nettement dédoublée dans ses trois cinquièmes posté-

rieurs ; dans sa partie antérieure, un pli de passage allant

à la 28 circonvolution interrompt la continuité de la scis-

sure frontale supérieure qui est sinueuse et prend son

origine dans le sillon de la frontale ascendante. La 2e fron-

tale, très développée, est irrégulière, très sillonnée,

comme dédoublée en avant; elle s'insère à la frontale

ascendante par un pli de passage à niveau, juste au-dessus

du pied de la 3° frontale. La scissure frontale inférieure

11G TUBERCULOSE DE L1 PROTUBÉI\o\Xt : 8.

est très sinueuse, assez profonde. La 3e frontale, dont le

pied semble confondu avec la frontale ascendante, est très

irrégulière, peu développée; son cap,en partie, est comme

relevé. A la partie antérieure, les trois frontales sont net-

tement séparées du lohe orbitaire par un sillon assez pro-

fond et s'étendant, du bord interne à la partie la plus an-

térieure de la scissure de Sylvius. Il existe deux scissures

parallèles frontales : l'une, plus postérieure, longe la fron-

tale ascendante entre les deux plis do passage des 1 ? et 2e

circonvolutions ; l'autre, antérieure, séparée par un pli

des 2e et 3e frontales, de la frontale ascendante, coupe la

scissure frontale inférieure et descend presque jusqu'à la

lèvre supérieure de la scissure de Sylvius. La frontale

ascendante est sinueuse, peu développée, rétrécie sur

deux points ; il en est de même de la pariétale ascendante.

La scissure interpariétale forme en arrière de la pariétale

ascendante une scissure parallèle, prenant son origine

près de la fente interhémisphérique et se termine à

quelques millimètres de la scissure de Sylvius. La scis-

sure interpariétale proprement dite, après un trajet un peu

sinueux, va aboutir au sillon occipital transverse. Le pli

pariétal supérieur très sinueux, très découpé, est assez

bien développé ainsi que le pli pariétal inférieur et le pli

courbe. Le lobe occipital est moins volumineux qu'à gau-

che ; il est un peu en retrait sur la face convexe et sur les

parties environnantes.

La première circonvolution temporale présente les

mêmes particularités qu'à gauche. La scissure parallèle

sinueuse, profonde, est bifurquée à sa partie postérieure et

communique également avec un sillon qui va rejoindre

l'incisure préoccipitale. La 2e temporale, un peu sinueuse,

est très développée et envoie deux plis de passage à la 3e,

qui est également bien développée; la 2e scissure tempo-

rale est presque rectiligne et profonde.

Face interne. - La première frontale plus développée

qu'à gauche est sinueuse. La scissure calloso-marginale

est sinueuse, un sillon oblique d'arrière en avant et de haut

en bas la relie vers le milieu de son parcours au sillon du

corps calleux ; le lobule paracentral, médiocrement dé-

veloppé, est peu élevé et ne présente pas d'incisures ; l'in-

cisure médiane est à peine ébauchée, elle est limitée en

avant par une incisure ovalaire.

Le lobe quadrilatère est très développé, parcouru par

trois sillons irrégulièrement verticaux qui lui sont com-

muns avec la circonvolution du corps calleux qui est mal

LÉSIONS DE LA PROTUBÉRANCE.

117

délimitée. La scissure perpendiculaire interne est très pro-

fonde. Le coin est bien développé, limité en arrière par la

scissure calcarine normale.

Les circonvolutions temporo-occipitales sont assez bien

développées, à l'exception de la moitié postérieure de la

première, les deux scissures sont profondes et réunies à

leur partie la plus antérieure par un sillon transverse.

Le ventricule latéral, la couche optique, le corps strié,

la corne d'Ammon, le corps calleux ne présentent pas de

lésions. Les coupes pratiquées sur divers points des hé-

misphères ne font rien découvrir d'anormal.

Cervelet. L'hémisphère gauche, examiné sur ses deux

faces, parait plus petit que le droit. Les deux hémisphères

sont séparés sur la ligne médiane. Cette coupe, ainsi que

plusieurs autres pratiquées sur chacun des hémisphères

ne laissent voir aucune lésion. Les deux hémisphères sont

égaux, malgré l'inégalité qui semblait exister à la vue.

Fig. 15.- Réduction d'un tiers.

Protubérance. Elle est notablement élargie, augmen-

tée de volume(38 gr.), molle, presque fluctuante. Elle a une

teinte rosée et même rougeâtre vers la partie moyenne

(fig. 15). c

La moitié droite est plus volumineuse d'un tiers que la

moitié gauche et présente plusieurs bosselures : l°à sa partie

supérieure un renflement de la grosseur d'un noyau de

cerise ; 2° à sa partie inférieure, près de la ligne médiane,

un renflement analogue; 3° au-dessus de la pyramide

droite, végétation grisâtre, de la dimension d'une forte

lentille. La moitié gauche de la protubérance est plus égale,

sauf à sa partie inférieure où l'on remarque deux noyaux

saillants, gros comme des petits pois, très rapproches l'un

de l'autre.

118 TUBERCULOSE DE LA PROTUBÉRANCE.

A la coupe, on remarque que, à part une mince écorce de

tissu nerveux, la protubérance est remplie par une masse

d'aspect encéphaloïde, composée d'amas de matières d'un

blanc jaunâtre, friables, résistants et durs sur certains

points, très mous sur certains autres, disséminés dans une

substance rougeâtre et glutineuse. Le raclage de la tumeur

donne un suc lactescent assez clair, sauf au niveau des

points ramollis où il est blanc et épais. Outre les amas

néoplasiques répondant aux bosselures superficielles, on

en trouve d'autres dans la profondeur (fit. 16). Un d'eux. de

la dimension d'un noyau de cerise,occupe le centre même

Fig. 16. - Réduction d'un tiers.

de la protubérance; il est entouré d'une zone rouge sombre,

brunâtre, un peu ramollie, qui s'étend jusque vers le quart

environ de l'épaisseur de l'organe, en présentant des teintes

de plus en plus claires. On remarque encore profondément

deux gros noyaux à gauche, un moins volumineux vers la

ligne médiane et enfin un autre, à droite, du volume d'un

gros pois.

Examen histologique fait par M. PILLIEZ, aide-prépara-

teur au laboratoire des travaux pratiques. Cet examen a

montré que la tumeur de la protubérance est constituée par

du tubercule massif à l'état caséeux. Les masses caséeuses,

irrégulières, sont dispersées au sein d'un tissu spécial,com-

posé d'un grand nombre de petites cellules ramifiées avec

EXAMEN HISTOLOGIQUE. 119

des fibrilles abondantes, séparées par une substance inter-

cellulaire qui a disparu sur les préparations et qui donnait

l'aspect de gliome à certains points de la coupe. Tout au-

tour des points caséeux sont dispersées des cellules géantes,

arrondies et opaques.

La moelle cervicale est légèrement asymétrique, le côté

gauche étant plus petit que le côté droit. Dans la substance

blanche, on remarque une lésion descendante des divers

cordons latéraux, les faisceaux cérébelleux étant respectés.

Cette lésion est plus étendue du côté gauche. La pie-mère

y est aussi un peu plus épaisse. La sclérose a respecté les

faisceaux les plus internes, contigus à la substance grise;

il y a une ligne de démarcation brusque entre le tissu sclé-

rosé et le tissu sain. La lésion est très avancée. Il n'existe

à peu'près plus de tubes nerveux; les quelques rares

cylindres d'axe que l'on retrouve sont tuméfiés. Le tissu

scléreux est peu vascularisé. Dans la substance grise, on

trouve une grande diminution de nombre des cellules des

cornes postérieures.- Les cellules des cornes antérieures

sont plus nombreuses, mais beaucoup sont en voie de trans-

formation hyaline et sur un certain nombre d'entre elles

on ne peut plus suivre de prolongements ni retrouver de

noyaux ; celles-ci présentent nettement la nécrose de coa-

gulation que Weigert a signalée dans les myélites. Il existe

pourtant un assez grand nombre de cellules intactes. Le

canal de l'épendyme est normal et son épithélium conservé.

La moelle dorsale présente les mêmes altérations des

cordons, mais plus diffuses. La zone de démarcation entre

le tissu sain et le tissu sclérosé est très large; enfin, dans

la moelle lombaire, on ne retrouve qu'un épaississement

peu marqué de la névroglie autour des tubes, ce léger

épaississement, qu'il faut chercher, est, à ce niveau, le seul

signe de la lésion descendante des cordons. Tout le long

de la moelle, on trouve des cellules nerveuses altérées,

comme il a été dit ci-dessus, mais de moins en moins nom-

breuses à mesure que l'on descend.

RÉFLEXIONS. - I. Les' observations de tuberculose pro-

tubérantielle chez l'enfant ne sont pas très nombreuses.

Nous en avons réuni un certain nombre que nous allons

résumer, étant bien entendu que nous n'avons la prétention

ni d'avoir rassemblé tous les cas, ni de faire une monogra-

phie.Nous essaierons ensuite, en faisant ressortir les points

principaux de notre observation, d'ébaucher le tableau cli-

nique de cotte lésion.

120 TUBERCULOSE DE LA PROTUBÉRANCE.

OBSERVATION Il (Parrot, Sur un cas de tumeurs slrumeu-

ses de l'enci.pliale.llrcl2. de Pliysiol.,IS'I 0, p. 4Gl).-·Achille

M... Un an... Disymétrie faciale, le côté droit est plus petit

que le gauche. Bouche déviée droite. Ptosis avec tuméfaction

de la paupière supérieure droite. Strabisme externe et dilatation

de la pupille de l'oeil droit. Rien à gauche. Sensibilité normale

des deux côtés. Quand on met le malade debout, sa tête tombe

en arrière. Hémiplégie avec contracture du côté gauche du

corps. Cinq jours avant le décès, apparition de vomissements,

diarrhée. Amaigrissement. Accentuation de la paralysie faciale

et des contractures. Mort.

Autopsie. Quelques granulations dans les méninges et dans

la substance grise. On voit saillir dans l'espace interpédon-

culaire une tumeur, grosse comme un oeuf de pigeon, repous-

sant à droite et en bas la protubérance; à la surface, le pédon-

cule cérébral droit est étalé. Vers la protubérance, la tumeur est

recouverte d'une mince couche de tissu nerveux, en avant, elle

arrive au contact des méninges. Le nerf moteur oculaire com-

mun droit est atrophié.

En faisant une coupe, on remarque que la tumeur occupe

tout le pédoncule, qu'elle s'étend en avant jusqu'à la couche

optique et s'enfonce un peu en arrière dans la protubérance ;

en haut, elle atteint le trigone et les tubercules quadrijumeaux.

Elle est formée d'une matière caséeuse, jaune verdàtre, ramollie

au centre, entourée de substance nerveuse, ramollie et violacée

par places. Une tumeur semblable, grosse comme une noix, se

trouve à la face supérieure du lobe gauche du cervelet. -

Tuberculose pulmonaire, ulcérations intestinales, etc.

Cas. II. (Martin, Bull. de la Suc. Anat., 1877). -L... Jean,

6 ans, présente de l'affaiblissement dans tous ses membres,

troubles de la sensibilité. Ptosis léger de la paupière supérieure

gauche; strabisme interne de l'oeil correspondant. Pupilles

égales. Peu après, parésie faciale gauche, puis hémiplégie

faciale complète. Mort.

Autopsie. Masse caséeuse remplissant presque le lobe

gauche du cervelet. Un tubercule gros comme une aveline dans

la moitié gauche de la protubérance.

Cas. III (thèse de Koechlin). Garçon de 2 ans '1/2, ayant pré-

senté de l'exopl2tl2almie avec strabisme interne et paralysie

faciale du côté gauche. Hémiplégie droite du corps. Sensibilité

générale normale. Dysphagie. - A l'autopsie, tubercule cru de

la protubérance et du bulbe. Paralysie du facial et du moteur

oculaire externe du côté droit.

OBS. IV (Ibicl.). - Garçon de 2 ans 1j2. Hémiplégie faciale

FAITS CLINIQUES. 121

et strabisme interne du côté droit, ramollissement de la cornée

de ce côté. Hémiplégie gauche du corps avec un peu de con-

tracture du membre supérieur. Assoupissement, toux, dys-

phagie. Sensibilité générale normale. Quelquesvomissements

avant la mort. - A l'autopsie : méningite granuleuse ; hydro-

pisie ventriculaire; tubercule dans l'hémisphère cérébral droit;

un gros tubercule cru occupant la moitié droite du pont de

Varolo.

>

Cas. V (Candellé, Observations pour servir à l'histoire des

tubercules de l'encéphale, Paris 1871). - Garçon de 3 ans.

Tuberculose abdominale présentant tous les symptômes clas-

siques de ce genre d'affection. Rien autre à noter. Mort de

diphthérie. - A l'autopsie : tuberculose intestinale et mésen-

térique ; dans la moitié gauche et à la partie supérieure de la

protubérance un tubercule cru, gros comme une noisette.

ans. VI (Ibid.). Enfant de 12 ans, mort do péritonite

tuberculeuse. Pas de symptômes de tumeur de la protubérance

bien qu'on en ait trouvé une à l'autopsie.

OBs. VII (Ibid.). - Enfant (sans indication d'âge ni de sexe)

observé dans le coma. Avait eu huit jours avant de la fièvre et

des convulsions. Ptosis droit, face non déviée ; constipation,

ventre en bateau ; pas de plaintes ; parfois, petites secousses

convulsives dans les quatre membres, résolution dans l'inter-

valle de ces secousses. Pouls petit, régulier, rapide, face un

peu rouge surtout aux pommettes. Pupilles égales et dilatées,

ne se contractant pas. Il semble y avoir conservation de la

sensibilité générale et abolition de la vision. Tête balante.

Le lendemain de l'entrée de l'enfant, disparition du ptosis. Le

surlendemain, même état, sueurs, mort. '

A l'autopsie : méningite de la base. Sur le plancher du 4e ven-

tricule, on trouve un tubercule enclavé par sa base dans l'é-

paisseur de la protubérance, hydropisie du 4e ventricule.

Cas. VIII (Ibid.). - Fille, 6 ans. Amaigrissement et change-

ment de caractère, quelques vomissements. Six semaines après :

Constipation, cris continuels. Céphalalgie. Contracture passa-

gère des quatre membres. Trois jours après, coma presque

absolu et résolution. Peau sèche, pouls petit, lent. - Pupilles

dilatables. Aneathésie. Le lendemain, strabisme, le pouls

s'accélère. Contracture des quatre membres, stertor, sécheresse

de la langue et des lèvres. Mort.

A l'autopsie : Congestion méningée, foyer hémorrhagique,

gros comme un pois vers la corne d'Ammon. Un tubercule

dans l'épaisseur de la protubérance, en haut et un peu à droite.

BOURNEVILLE, 1886. 9

122 TUBERCULOSE DE la protubérance.

Un autre à la surface inférieure du lobe droit du cervelet et un

peu en avant. - Tuberculose viscérale.

OBs. IX (Ludwig Bruns. Ein Fall von Ponstuberkel in

Neurologisches Centralblatt., ii° 8, Avril 1886). - Arthur

Gloeckner, 2 ans 1/2. - Mère morte de tuberculose pulmo-

naire ; une soeur coxalgique. Pas de maladies précédemment;

a marché à 6 mois. Depuis quelque temps écoulement purulent

des deux oreilles; il y a 5 ou 6 mois apparition d'un strabisme

convergent gauche bientôt suivi de maux de tête. Plus tard,

faiblesse paralytique du bras et de la jambe droite : le malade

ne pouvait plus marcher.

Depuis un mois, contracture du bras droit, mastication dif-

ficile, pas de vomissements, pas d'évanouissements, pas do

crampes. La faiblesse générale augmente depuis quelque

temps et l'enfant tousse beaucoup.

13 août 1885. Crâne normal. Au repos l'oeil droit ne louche

pas et l'oeil gauche regarde en dedans. La mobilité des deux

yeux vers la gauche est très limitée. Les autres mouvements du

globe de l'oeil sont conservés, mais l'oeil droit ne peut se tourner

que très peu vers la droite. Pupilles égales et saines.

. Ophthaltnoscopie. - La papille fait un relief plus accusé à

gauche qu'à droite.

Tuberculose de l'oreille moyenne des deux côtés avec perfo-

ration du tympan. Pas de troubles du nerf facial. Excitation

électrique normale. Bouche toujours ouverte. Sensibilité delà

cornée et de la conjonctive diminuée à gauche. Affaiblisse-

ment des muscles du cou et de la nuque, la tête tombe en ar-

rière dès qu'on asseoit l'enfant. '

Extrémités supérieures . Le bras droit est rapproché du

corps, fléchi au coude; l'avant-bras est en pronation, le poing

est fermé. Mouvements du bras droit presque abolis ; pas d'a-

trophie musculaire ; excitabilité électrique normale. Le bras

gauche est sain.

Extrémités inférieures. - Jambe droite étendue, pied-bot

équin, raideur moins accusée qu'au bras, mouvements con-

servés mais mous et peu prononcés. Sensibilité normale. Ré-

flexe rotulien conservé à droite, moins accusé à gauche. Pas

d'atrophie. Excitabilité musculaire. normale. Rien de patholo-

gique à gauche. Impossibilité de se tenir debout ou de marcher.

Rien aux autres organes et spécialement rien aux poumons.

Parole remplacée par un cri étouffé. Le malade gâte. Quand

on le remue il s'agite et résiste. Quand on le laisse en repos il

reste somnolent.

En résumé, paralysie de l'abducteur à gauche; paralysie du

droit interne, des muscles moteurs de l'oeil vers la gauche,

FAITS CLINIQUES. ' 123

surtout prononcée pour l'oeil gauche, anesthésie de la cornée

et de la conjonctive surtout à gauche. Douleurs dans le reste

du domaine du trijumeau. Faiblesse des masticateurs, des

muscles du cou et de la nuque; paralysie avec contracture et

augmentation des réflexes des extrémités droites sans troubles

de la sensibilité, maux de tête, somnolence, faiblesse gé-

nérale.

30 août. Le bras gauche commence à se contracturer; même

état général. Le malade n'est plus observé.

11 octobre. Depuis hier, crampes, pleurosthotonos. Tempé-

rature du soir 3Sa,5. Pouls 132. Cornées dépolies. Contracture

des extrémités plus accusée à droite. Coma profond.

20 octobre. Aucun trouble à la face, les yeux ne présentent

aucune modification. Coma persistant mais moins profond,

l'enfant sent le3 piqûres et réagit. Quelques râles au sommet

gauche. Diarrhée. T. R. 38°,S. P. 144. Resp. 30. Cheyne-Stoc-

kes. Le malade meurt le 28 octobre.

Anatomie pathologique. - Le corps de l'enfant est maigre

et chétif, les fontanelles ne sont pas accusées. Le thorax est

aplati et étroit en haut. On trouve du pus dans l'oreille droite.

Les muscles des bras sont également développés des deux

côtés. La voûte crânienne est symétrique, mais très mince. La

.dure-mère est mince, mais pas adhérente. Sa surface est lisse,

elle n'est pas transparente. Ses artères sont pleines et ses vei-

nes à moitié vides. Dans le sinus longitudinal est un caillot

fibrino-sanguin solide, se perdant au niveau des veines posté-

rieures de la pie-mère, dans une masse plus ancienne, grise,

friable, thrombotique. La pie-mère est blanchâtre, au niveau

du chiasma des nerfs optiques. Ses veines sont remplies de sang

frais. Les hémisphères cérébraux sont symétriques. La paroi

inférieure du troisième ventricule est très mince, presque trans-

parente.

La moitié droite du pont de Varole est aplatie, tandis que

la moitié gaucho est très proéminente et forme une tumeur

.que contourne l'artère basilaire. L'artère cérébelleuse supérieure

gauche pénètre très profondément dans le pont de Varole.

.Les origines nerveuses et les artères de la base de l'encéphale

n'offrent rien d'anormal. La moelle allongée est saine, mais

l'olive gauche arrive au contact de la protubérance, tandis que

la droite en reste séparée par un fossé.

L'écorce cérébrale présente une coloration jaune et un aspect

caséeux. Sur le bord postérieur do l'hémisphère gauche du

cervelet, on voit deux tumeurs arrondies, irrégulières, ayant

1 centimètre do diamètre, se touchant l'une l'autre, entourées

.d'une zone d'un gris rougeâtre et d'aspect vitreux. Sur l'hé-

124 TUBERCULOSE DE LA PROTUBÉRANCE.

misplière droit, au même niveau, est une tumeur, grosse comme

une lentille.

A la pointe du lobe occipital gauche du cerveau, on remar-

que une tumeur large comme une pièce de dix sous, et, à

4 centimètres en avant d'elle, est une autre tumeur. Ces tu-

meurs ne soulèvent pas la première, et cette dernière ne pré-

sente pas de granulations miliaires.

Lorsqu'on ouvre le quatrième ventricule, on voit, à 3 centi-

mètres en avant du calamus scriptorius, le fond de ce ventri-

cule soulevé sur une étendue large comme une pièce de 2 cen-

times (5pf.). Cette surface est tourmentée, de couleur gris-rouge

sombre. Elle est résistante au toucher. Cette tumeur s'étend

jusqu'à 3 centimètres en aval de l'entrée de l'aqueduc de Syl-

vius, en avant. En arrière, elle atteint les premières stries mé-

dullaires. A environ 3 centimètres en aval de l'extrémité posté.

rieure de la tumeur, on fait une section et on voit que presque

tout le pont de Varole est transformé en une masse caséeuse.

A droite est une zone libre au niveau de la partie extérieure

du pont et du fond du quatrième ventricule. De chaque côté,

une partie des pyramides et du stratum superficiel du pont est

libre. La tumeur, vue dansson ensemble, est arrondieetgrosse

comme une châtaigne.

Les tumeurs du cerveau sont des tubercules solitaires. Les

ventricules cérébraux sont dilatés, la moelle est saine. Enfin

on trouve des tubercules aux sommets des poumons.

OBS. X. (Macgregor. The Lancer 11 déc. 18S6). -G. M...,

âgé de 7 ans, né d'un père pthisiqueet d'une mère saine, présente

en ce moment de la paralysie des 6e et 7e paires droites. De ce

côté : surdité marquée, protusion du globe de l'oeil et stra-

bisme interne. Tête inclinée sur l'épaule droite,- la face regar-

dant à gauche (spasme tonique du sterno-mastoidien). En n

même temps céphalalgie, nausées et vomissements fréquents.

T. R. 35°,â à 36', l. Rien dans les viscères. Urines normales.

L'affection de cet enfant débuta il y a trois semaines au mi-

lieu de la nuit. Il s'éveilla en criant et en se plaignant de souf-

frir de la tête. Le lendemain, il avait de la paralysie faciale et

un état nauséeux avec vomissements. Depuis quelque temps

déjà l'enfant était indisposé, mais il ne présentait pas de symp-

tômes bien définis.

26 avril. Pupille droite contractée, pupille gauche dilatée.

L'examen ophthalmoscopique montre le fond de l'oeil pâle et la

papille mal dessinée à droite. La cornée est insensible de ce

côté. Plus tard apparut à la partie inférieure de la cornée

droite une opacité qui se transforma en ulcère. Cet ulcère

amena une perforation pénétrant dans la chambre antérieure.

FAITS CLINIQUES. 125

10r mai. La préhension se fait mal de la main gauche. La

marche s'accompagne de titubation avec tendance à tomber

du côté droit. La tête est droite. Lestrabisme divergent de l'oeil

gauche a disparu, mais le strabisme convergent de l'oeil droit

s'est accusé davantage. Parésie de la moitié droite du palais.

L'hémiplégie devient graduellement presque complète, mais

la sensibilité tactile n'est que superficiellement affaiblie. C'est

ainsi qu'au-dessous du genou le malade ne sent ni le chaud ni

le froid. Sur le reste du corps, la sensibilité à la chaleur est

seulement diminuée. Le goût et l'odorat sont normaux.

4 juin. L'état de l'enfant s'aggrave. Il éprouve de la diffi-

culté à articuler ses paroles.

5 juin. Articulation des sons, normale.

6 juin. Réapparition de la difficulté d'articuler.

7 juin. Perte de connaissance. Rigidité spasmodique du mem-

bre supérieur gauche. Disparition des vomissements.

12 juin. Coma et mort précédée de deux vomissements. Au

moment de la mort la température s'élève de 380 à 39°, 2.

La température pendant la première semaine d'hôpital est

constamment restée à 90o Fahrenheit (3 ? o,2) ( ? ) et le pouls à

116. Dans la quinzaine suivante la température a oscillé entre

9E° et 99". F. (35°,5 à 37° c.). A partir de là la température, le

matin, était de 3G,,1 et le soir de 100°. F. (37°,7).

Nécropsie. La dure-mère est tendue, le cerveau est di-

laté. Les vaisseaux de la pie-mère sont gorgés de sang.

Au niveau du vertex, l'espace sous-arachnoïdien est rempli

par un liquide laiteux. Les nerfs olfactifs sont ramollis, le

droit plus que le gauche. Les nerfs optiques et ceux de la 3'' et

de la 4e paire sont sains. La partie sensitive de la 5° paire est

moins blanche à droite qu'à gauche. La 6e paire est saine,

mais un peu petite à gauche, complètement atrophiée à droite.

La 7e paire, normale dans sa partie molle, est atrophiée et

gélatineuse dans sa portion dure, du côté droit. Le glossopha-

ryngien droit est gris et gélatineux. Les autres nerfs ne pré-

sentent rien de particulier.

Le pont de Varole et la moelle allongée sont déformés, le

côté droit, plus gros d'un tiers que le gauche, est noueux, ir-

régulier. Le côté gauche est peu altéré, pourtant l'olive de

ce côté est un peu plus grosse que normalement.

L'examen microscopique des nerfs montre une dégénéres-

sence graisseuse complète des portions altérées. On trouve, at-

tachée aux bulbes olfactifs, une matière gélatineuse formée de

petites cellules rondes analogues à celles du sarcome. Les tu-

meurs protubérantielles sont caséeuses et formées de petites

cellules rondes, recoquevillées et cassées.

H6 TUBERCULOSE DE LA PROTUBÉRANCE.

II. Revenons maintenant à notre observation et essayons

d'en faire ressortir les points p; incipauz.IIoël... ne présen-

tait dans ses antécédents aucune tare tuberculeuse, mais

il avait une hérédité nerveuse très évidente : des tantes,

des oncles, des frères, ont eu des convulsions ; sa mère est

névropathe et mélancolique; un grand-père a été para-

plégique durant deux ans ; enfin un cousin a été aliéné.

Ajoutons à ces affections des ascendants des cas de rhu-

matisme et de cancer.

Comme antécédents personnels, IIoël... n'offre rien do

bien spécial; une bronchite, des fièvres éruptives sont les

seules maladies dont il ait souffert. A l'âge de trois ans,

après une peur qui semble de peu d'importance, étant don-

née sa cause, l'enfant change brusquement de caractère,

il a des frayeurs nocturnes, il perd l'appétit. Ce début par

des troubles gastriques et un changement de caractère est

signalé dans I'Observatiox VIII empruntée à M. Candellé.

Bientôt d'autres symplômes apparurent chez notre ma-

lade, sa respiration devint embarrassée, haletante, il eut.

des étourdissements et, huit mois après le début de son af-

fection, il présenta un épisode aigu qui commença par du

strabisme passager de l'oeil gauche et se continua par un

état fébrile sur lequel nous manquons de renseignements.

Toujours est-il qu'un médecin dit que l'enfant était atteinte

de fièvre cérébrale. Huit jours plus tard, les accidents fé-

briles disparurent, mais consécutivement on nota qu'il ti-

tubait en marchant, indice d'un affaiblissement des mem-

bres inférieurs. L'intelligence de l'enfant baissait et il di-

vaguait parfois. Une rémission de six semaines, qui sur-

vint à ce moment,fut suivie de la réapparition des troubles

précédents auxquels s'ajoutèrent de la dyspnée et du stra-

bisme interne de l'oeil gauche.

A son arrivée à Bicêtre (2 avril), IIoël... pouvait encore

prononcer quelques mots et il marchait, quoique avec-

peine ; mais bientôt (8-15 mai) son vocabulaire se restrei-

gnit de plus en plus, il perdit tout à fait la parole; sa phy-

sionomie réflétait un air de souffrance et, de fait, il parais-

sait souffrir, et poussait presque constamment des cris

plaintifs; enfin, son sommeil devint très agité et il se pro-

duisit une paralysie complète des membres inférieurs

qui entraient en contracture dès qu'on voulait les fléchir..

RÉFLEXIONS ; TEMPÉRATURE. ' ' 127

Le réflexe rotulien était exagéré. Les membres supérieurs

étaient contractures ; les mouvements du cou étaient dou-

loureux. L'enfant avait un strabisme interne double, de

la dysphagie ; il n'avait pas de vomissements, mais une

constipation opiniâtre. Le pouls était très irrégulier et la

température un peu élevée (38°,8).

L'état du malade s'aggrava presque constamment, c'est

à peine si, de l'entrée à la mort,on nota quelques rémis-

sions durant au plus une journée. Nous devons signaler

surtout les intermittences, les modifications presque jour-

nalières des symptômes : la paraplégie qui existait un jour

ne se retrouvait plus le lendemain ; on voyait se succéder

de l'hyperesthésie et de l'anesthésie cutanée ; la tempéra-

ture, qui pendant 11 jours s'était maintenue vers 37°,7 en.

moyenne, s'éleva en l'espace de deux jours jusqu'à 39°,6,

retomba à 38° en une nuit, remonta à 39° : 2 et redescendit

à 37° où elle se maintint jusqu'au 6 juin. A partir de là,

jusqu'au 30 juin, on note une période d'hypothermie qui

mérite d'attirer l'attention : la température oscille entre

37° et 36°. Alors, tout d'un coup, la fièvre s'alluma et, en

deux jours, la température atteignit 41° et monta même â

42°, au moment de la mort. Les irrégularités du pouls

ne sont pas moins remarquables que celles de la tempéra-

ture, qu'elles ne suivaient d'ailleurs pas d'une façon régu-

lière. (La Planche V donne une idée très exacte de la mar-

che de la température; c'est peut-être le premier tracé de

ce genre qui ait été publié. (Société anatomique, juillet

1886). L'hypothermie qui existait dans ce cas a été signalée

dans le cas ultérieur de Macgregor.

Quoi qu'il en soit, dans les jours qui précédèrent la

mort, l'aggravation de l'état de IIoël... se traduisit par un

amaigrissement notable, de la rétraction de l'ahdomen,

une diminution de la quantité des urines. Les symptômes

préexistants : dysphagie,constipation, raideur de la nuque,

parésie et contracture des membres, s'accentuèrent. La

respiration perdit la régularité de son rythme, des trou-

bles vaso-moteurs apparurent (rougeur de la face, etc.),

les pupilles devinrent inégales et enfin on nota la forma-

tion d'escharres. La mort eut lieu dans le coma.

III. En comparant cette observation à celles que nous

128 TUBERCULOSE DE la protubérance.

avons citées, l'on voit combien sont variables les signes

des tumeurs protubérantielles. La, paralysie croisée, bien

que très fréquente,peut faire défaut comme dans notre ob-

servation. Les vomissements, souvent notés, sont incons-

tants. Le strabisme est peut-être le moins infidèle des

symptômes : on le retrouve dans la plupart des cas.

On pourrait, à la rigueur, faire trois catégories des tu-

bercules de la protubérance au point de vue de la marche :

1° Tubercules évoluant sans symptômes jusqu'au moment

de la mort,qui est souvent produite par une autre manifes-

tation de la tuberculose (Obs. V et VI). 2° Tuberculose

protubérantielle à marche intermittente, évoluant lente-

ment et par poussées successives comme chez notre ma-

lade. - 3° Tubercules à marche continue et progressive.

Quelle que soit d'ailleurs la marche, la symptomatologie

est extrêmement variable et mériterait presque une étude

spéciale pour chaque cas. La variabilité des symptômes

nerveux et leur inconstance pourraient même, peut-être,

faire songer, chez un tuberculeux, à une tumeur protubé-

rantielle.

MÉNINGITE TUBERCULEUSE. - 129

III.

Imbécillité et hémiplégie droite symptomati-

ques de méningite tuberculeuse ; Tuber-

culose généralisée; Mal de Pott;

Par BOURNEVILLE et PILI.IET.

L'observation que nous rapportons offre un intérêt au

point de vue de la généralisation de la tuberculose, au point t

de vue de la marche insidieuse de la méningite tubercu-

leuse, et aussi de l'histoire de l'une des formes de l'idiotie.

Observation. Père mort tuberculeux. Oncle paternel

paralysé. - Mère cancéreuse. Grand-père maternel,

excès de boisson.

Enfant bien portant jusqu'à 6 ans. Mauvais trai-

tements.Parasie droite légère. -Affaiblissement de

l'intelligence ; gâtisme passager. Amélioration.

Nouveaux accidents de méningite et tuberculose pul-

1) ? ,onaire. - Mort.

Autopsie : Tuberculose généralisée. Méningite chro-

nique tuberculeuse. Nodules caséeux volumineux des

méninges. Nodules calcifiés et granulations miliaires

dans les poumons, le foie, le péritoine et la rate. Mal 1

de Pott dorsal au début.

Sema..., Charles-Auguste, né à Paris le 24 décembre

1879, est entré à Bicêtre (service de M. Bourneville), le 1"

février 1886.

Renseignements fournis par une cousine materneile du

malade. - Père, employé à la préfecture de la Seine, mort

en 1885, à 33 ans, d'une pleurésie. On ne sait s'il faisait des

excès de boisson ou autres. Il s'était toujours bien porté

jusqu'en 1881 ; à partir de là, accidents de bronchite avec

amaigrissement et diarrhée. Il était intelligent , pas ner-

veux, jamais de rhumatisme ni de dermatoses. [Père, 70

ans, sobre, bien portant; mère morte on ne sait de quoi,

130 IMBÉCILLITÉ ; ANTÉCÉDENTS.

nia quel âge. Frère intelligent, assez sobre; robuste, non

nerveux. Une tante, 40 ans, en bonne santé, non nerveuse.

Un oncle paralysé de naissance.]

Mère, 40 ans, couturière, grande, n'a pas eu de convul-

sions dans l'enfance. Fièvre typhoïde à 15 ans, variole à 18

ans, réglée à 20 ans. Elle est morte à l'hôpital le 23 mai

1886, d'un cancer de l'uténis (1). [Père, 70 ans, tonnelier,

excès de boisson fréquents. Il n'était pas nerveux, jamais

de maux de tête ni de rhumatismes.- Mère, 76 ans, bien

portante, non nerveuse. Quatre frères et une soeur, vivants,

bien portants. Un oncle maternel, 65 ans, une tante ma-

ternelle, 70 ans, n'ont jamais été malades. Pas de rensei-

gnements sur le côté paternel. La cousine qui nous rensei-

gne est bien portante ; n'a jamais eu de maladies, a quatre

enfants en bonne santé, sans convulsions. Ni difformes,

ni aliénés, ni criminels, ni suicidés dans la famille.] Pas de

consanguinité.

Trois enfants : 1° Un frère, mort en naissant; 2° une

SL&U)', âgée de 10 ans, bien portante, sans convulsions.

3° Notre malade. Pas de renseignements sur la grossesse,

ni sur l'accouchement. Elevé au sein en nourrice, il est re-

venu à trois ans ; alors il était bien portant, il mangeait

beaucoup, parlait bien, marchait seul, était intelligent. Il

n'aurait jamais eu de convulsions ( ? ). Jusqu'à l'année der-

nière, l'enfant s'est toujours bien porté ; mais, le père

étant mort, la mère malade, il a souffert de la misère. Sa

mère, paraît-il, no le laissait pas s'asseoir. Pendant 15

jours, en juin 1885, la cousine qui nous renseigne, l'a pris

chez elle. Ses pieds étaient violacés comme par des enge-

lures. A ce moment, il était sale, gâtait, digérait mal et

vomissait.

Quelques jours avant son départ de chez sa mère, il est

tombé tout d'un coup par terre, et quand on l'a relevé, il

était paralysé. On ne sait si l'enfant a eu des maladies du

jeune âge (rougeole, etc.) ; il a eu la gourme ; mais ni

ophthalmie ni otite (sa soeur a souvent mal aux yeux). Il

ne toussait pas; n'était pas sujet aux diarrhées. On assure

qu'il était doux; sa mère, au contraire, disait qu'il était

vicieux et \oleur. Sa cousine ne l'a jamais vu sous cet as-

pect ; il a été deux semaines à l'asile d'Ivry et appre-

nait comme les autres enfants.

Il nous a été impossible d'avoir des renseignements de la

(1) C'est pour cela que nous n'avons que des renseignements de

seconde main et partant insuffisants.

HÉMIPLÉGIE DROITE INCOMPLÈTE. 131

mère, qui, comme nous l'avons vu, est entrée à la Pitié

peu après l'admission de l'enfant à Bicêtre. L'un de nous

s'est rendu à son domicile et a recueilli les renseignements

suivants : Après la mort de son mari, la mère de l'enfant

était dans une situation misérable, élevant péniblement ses

deux enfants : la petite fille, retournée aujourd'hui dans-

le pays de sa mère qui paraissait l'affectionner assez, et

notre malade qu'elle n'aimait guère, et auquel elle ne pas-

sait rien, le corrigeant manuellement pour la.faute la plus

légère. C'était même au joint que les voisins s'en sont

plaints plusieurs fois, et c'est même sur leurs plaintes que

le commissaire de police est intervenu ; il a fait une en-

quête et lui a enlevé l'enfant pour le faire placer à Sainte-

Anne. Il paraît qu'un jour sa mère le laissa enfermé seul

toute la journée. Elle ne le sortait que très rarement.

A l'entrée (1er février 1886), on constate que l'enfant est

atteint d'imbécillité, etjugeant d'après les apparences, en

dehors de tout renseignement, on pense qu'il est suscep-

tible d'amélioration. Il marche en traînant la jambe droite,

qui est raide.

Etat actuel. Poids 14 kil. 10 ; taille Om,97. Crâne ovoide,

occiput allongé, extrémité antérieure pointue. Bosses oc-

cipitales prononcées et symétriques ; bosses pariétales très

accentuées.

Diamètreantéro-postérieur maximum.. 178 mm.

transverse maximum .... 150 -

Circonférence du crâne à la base.... 51 cent.

D'une oreille à l'autre ........ 29 - '

De la racine du nez à la protubérance

occipitale - 30

Front très étroit, peu élevé, aplati latéralement sur les-

tempes ; face ovale ; arcades sourcillières peu prononcées,

yeux légèrement enfoncés, pupilles égales, iris brun, nez

petit, courbé ; joues assez pleines ; bouche petite ; voûte

palatine un peu ogivale, symétrique. Lèvres minces, lan-

gue normale, dentition régulière, menton rond. Oreilles pe-

tites, symétriques, bien ourlées, lobule détaché. Cou grêle,

circonférence 24 cent.

Thorax maigre, peu développé, sans voussure ni défor-

mation. Sa circonférence aux aisselles est de 49 cent. ; T

au niveau des mamelons, 51 cent. ; à la base, 49 cent. ? 2.

132 MÉNINGITE TUBERCULEUSE : IMBÉCILLITÉ.

Membres supérieurs maigres et longs, épaules angu-

leuses, saillio des clavicules.

Circonférence du bras : Droit Gauche

A l'aisselle 13 c. 1/2 14 c.

A 5 cent. au-dessus de l'olécrâne . 12 13

Id. au-dessous id. 13 14

Au poignet 10 1/2 11

Rachis sans déviation.

Membres inférieurs très grêles, sans déformation. Ils

ont tous deux les mêmes dimensions. Articulations libres ;

rien de spécial aux extrémités.

Organes génitaux. Pénil glabre, bourses pendantes,

testicules de la grosseur d'une petite noisette, égaux, le

gauche descendant plus bas que le droit. Prépuce long,

gland découvrable, méat normal.

Peau fine, bistrée, surtout sur l'abdomen. Cicatrice à la

face interne de la partie inférieure de la jambe gauche

(brûlure probable). Poils relativement abondants sur les

membres. Cheveux châtains, clairsemés, descendant

comme un duvet jusqu'aux sourcils. Sourcils noirs assez

épais ; cils longs et noirs. Quelques ganglions lymphati-

ques se sentent sous le doigt à la nuque ; rien ailleurs.

La sensibilité générale est conservée, le réflexe rotu-

lien exagéré à droite. La circulation et la respiration

n'ont rien de spécial.

L'enfant sait se servir de la fourchette et de la cuiller,

mange avec appétit, sans voracité. La digestion est bonne,

les selles régulières et volontaires ; pas de rumination, de

vomissements, de diarrhée. L'abdomen est un peu gros.

- Le foie, la rate, etc., paraissent normaux.

Pas de bave, de succion, d'onanisme, ni de tics.-L'en-

fant est caressant, il a l'air souffrant et un peu triste. La

parole est développée, mais présente une sorte de bégaye-

ment. Il connaît bien les lettres et les chiffres, commence

à faire des bâtons, sait compter jusqu'à 50, connaît les

couleurs et les objets usuels.

Traitement. Huile de foie de morue, sirop d'iodure de

fer, bains salés, petite école; gymnastique.

. Un mois après son entrée, on note de la bonne volonté

à travailler, et des progrès en gymnastique. Puis, en avril,

TUBERCULOSE GÉNÉRALISÉE. 133

on constateque l'enfant se ralentit et paraît de plus en plus

souffrant. On l'envoie à l'infirmerie le 1 avril parce qu'il

ne mange pas, dort toute la journée et qu'il a la face rouge.

Il ne se plaint pas.

19 avril. L'enfant a pris du lait et n'a pas vomi. La lan-

gue est large, humide, saburrale; le ventre est un peu

gros, légèrement tendu, indolore; pas de diarrhée; rien à

la gorge. On ne trouve rien à la percussion ni à l'auscul-

tation, pas de toux ni d'oppression. L'enfant se plaint de la

tête qui est chaude partout, il a l'air un peu abattu. T. R.

38°,G matin et soir.- Traitement : Ipéca, bains de pieds,

lotions vinaigrées, huile de ricin.

20 avril. T. H. 3 ? - Soir : 39,,2.

21 avril. Le pouls est à 80, un peu irrégulier, la phy-

sionomie abattue, la peau chaude. L'enfant se plaint tou-

jours de la tête. Langue saburrale, soif vive, ventre sou-

ple. Trois selles infectes. Pas d'épistaxis. Raies méningi-

tiques faciles à provoquer. La nuit a été mauvaise ; l'en-

fant a pleuré. Pas de grincements de dents ni de délire.

T. R. 390.

Traitement. Lav. au sulfate de quinine, 0,40 cent., etc.

22 avril. T. R. 38°,8. - Soir : 39°.

23 avril. Céphalalgie continue ; l'enfant vomit tout ce

qu'il prend, est abattu, somnolent. Il montre pourtant un

peu de gaité le soir. T. R. 38°,G. - Soir : 38°, 4.

24 avril. Nuit très agitée, l'enfant appelle sa mère. T. R.

38°. - Soir : 380,6.

25 avril. T. 1%. 380,6 matin et soir.- 26 avril. T. Ii,.3S°,4

matin et soir.

27 avril. Foie douloureux, débordant d'un travers de

doigt les fausses côtes ; abdomen mou et rétracté. A 2 tra-

vers de doigt au-dessous de l'ombilic, on sent, sous la pa-

roi abdominale, une petite tumeur mobile, assez dure, du

volume d'une bille, et qui semble être une nodosité tuber-

culeuse de l'épiploon. L'enfant n'a rien voulu prendre ; il

est très abattu. Pas de diarrhée, mais miction et selles

involontaires ; aspect comateux, raideur du cou et de la

nuque. Submatité à la percussion au niveau du sommet

droit, en avant. T. R. 38°,2. - Soir : 39°,2.

28 avril. Les traits sont un peu grippés; l'enfant est en

état de demi-conscience; quand on l'interpelle, il regarde

vaguement; il incline la tête quand on lui dit « bonjour »;

on parvient à lui faire ouvrir la bouche, ce qui était im-

possible hier. P. 28; R. 48. On essaye de faire boire du lait

à l'enfant avec la cuiller; mais il ne déglutit pas et rejette

134 MÉNINGITE TUBERCULEUSE.

les liquides par le nez. Selles molles et involontaires. Pas

de grincements de dents. Un peu de raideur persistante

de la jambe droite et du bras droit; raideur du tronc. Ins-

piration rude et soufflante à l'auscultation; expiration un

peu granuleuse au sommet gauche. On continue le sulfate

de quinine, etc. T. R. 39°.

28 avril, soir. T. R. 40°,2. L'enfant est dans le coma;

raideur de la nuque, strabisme,- Mort le 29 avril, à qua-

tre heures du matin. T. R. un quart d'heure après la mort : "

=ti°,2;- une heure après 39°,6;- deux heures après 38°,4.

(I1 ig. 17).

Autopsie le 30 avril au matin. - Rigidité cadavérique

nulle au cou et au bras droit; presque nulle à la jambe

droite; assez prononcée au coude gauche; plus marquée

encore au membre inférieur gauche.

Crâne pou épaiset présentant encore des traces de trans-

parence à la partie moyenne et supérieure du frontal,

à la partie supérieure et antérieure des pariétaux. La base

est symétrique. - La dure-mère apparaît assez fortement

injectée; écoulement de liquide céphalo-rachidien en

quantité un peu plus grande qu'à l'état normal. Quelques

petites adhérences avec la dure-mère de la base. Poids de

l'encéphale, 1,280 gr. - La pie mère présente à la base

une vascularisation fine très prononcée; de plus, toute

la partie de la pie-mère située en avant de la protubé-

rance (autour du chiasma et de l'origine des nerfs opti-

tiques) est infiltrée de pseudo-pus fibrineux. Le dégage-

ment des artères et des veines de la pie-mère est difficile à

cause de son épaississement. Quand on écarte les lèvres de

la scissure de Sylvius, on trouve a gauche, sur la pie-mère,

des granulations tuberculeuses ; à droite, il n'y a pas de

points semblables. Sur la base des deux lobes frontaux, la

pie-mère est très injectée et couverte d'un semis de gra-

nulations. Elle est beaucoup plus épaissie sur le lobe droit

que sur le gauche, et la décortication au niveau du lobe

olfactif ne peut se faire qu'en entraînant une assez forte

couche de substance grise. -Autant qu'on peut le voir par

suite de l'épaississement de la pie-mère, les artères de

la base et les nerfs seraient symétriques. La pie-mère de la

convexité présente une vascularisation très fine et plus

prononcée sur la partie moyenne des hémisphères. Aspect

louche d'un certain nombre d'espaces inter-circonvolulion-

naires ; injection assez prononcée de la surface des deux

hémisphères.

Cervelet et isthme, 155 grammes. La pie-mère du cervc-

LÉSION DE LA PARIÉTALE ASCENDANTE GAUCHE. 135

let se décortique assez bien. Elle est très épaissie au niveau

de laface inférieuredcla protubérance; à la face supérieure

du cervelet, elle devient plus mince, sans granulations.

L'hémisphère cérébral droit pèse 10 grammes de plus

- que le gauche, ce qui peut être dû à l'épaississement de la

pie-mère ou à l'inégale répartition du liquide céphalo-

rachidien. Sur l'hémisphère gauche, à la partie inférieure

du lobe carré, en arrière du corps calleux, la pie-mère est

très épaissie. Il y a là plusieurs granulations dépassant le

volume des granulations miliaires, opaques, jaunâtres,

dures. Une, du volume d'un pots moyen, est enlevée, lais-

sant dans la substance corticale une petite cavité, mais

sans entraîner aucune portion de l'écorco grise. Un sem-

blable nodule, du volume d'une amande de noisette, à

surface mamelonnée, est laissé en place. Il occupe juste le

milieu de la pariétale ascendante.

Cerveau. - Hémisphère gauche. Face convexe. - F,,

très sinueuse, envoie deux plis de passage à F2 et s'insère

sur F A à sa partie supérieure. - 1<'2' aussi très sinueuse,

offre deux insertions sur FA. F3 est assez volumineuse

et s'insère à l'extrémité inférieure de F A. F A est volu-

mineuse, mais présente une encoche profonde, transver-

sale, à sa partie moyenne. Sur l'extrémité postérieure de

cette encoche, un tubercule de la pie-mère, de 3 à 4 mm.

de diamètre a creusé une dépression. P A est sinueuse et

assez volumineuse, mais est interrompue à la partie infé-

rieure de son tiers moyen, au-dessous du tubercule dont il

vient d'être question par une dépression profonde due au

nodule tuberculeux de la pie-mère décrit plus haut. P,,

P2' assez plissées, pli courbe irrégulier. LO, sinueux.-

1\, 1\ : T3, sont assez plissées et s'envoicntplusieurs plis de

passage ; T, envoie un pli assez volumineux à l'extrémité

postérieure du lobule de l'insula. - Lia quatre digita-

-lions assez volumineuses (t). -

Face interne. - P, présente des plis assez profonds en

avant, superficiels en arrière.- L P volumineux, reçoit un

gros pli de passage de Ft et offre un sillon en forme de V.

- CCCa sans aucun pli.- L Q plissé avec des sillons su-

perficiels ; L 0 très plissé. C II assez sinueuse.

Hémisphère droit. - Face convexe. - Les trois circon-

volutions frontales sont aussi sinueuses qu'à gauche.

(1) Les lettres ont la même signification que sur les Planches

1 IV...

136 tuberculose généralisée.

L'insertion de la première se fait également au niveau

du bord supérieur; la seconde s'insère sur F A par deux

insertions, non pas de niveau avec la surface de l'hémis-

phère, mais au fond du sillon. Il en est de même de l'in-

sertion de 1<'3' F A sinueuse, bien développée. P A est très

sinueuse, mais comparativement maigre. Les plis parié-

taux sont volumineux; l'inférieur moins plissé qu'à gau-

che. Pli courbe situé bien au sommet de la scissure

parallèle, qui, de ce côté, n'est pas interrompue, alors

qu'elle l'est à gauche plusieurs fois. Le lobe occipital est

assez développé mais moins plissé qu'à gauche. T,, T2 et

T3 sont assez distinctes; tandis que de l'autre côté, les plis

de passage plus nombreux les confondent en quelque

sorte. L I reçoit en arrière un volumineux pli de passage

de T,; il est formé de trois gros plis dont l'antérieur seul

est bifurqué, ainsi qu'à gauche.

Face interne. F, est assez sinueuse, mais ses plis sont

plus allongés, au lieu d'être transversaux comme à gauche.

L P est très sinueux et présente un pli en forme d'Y ; L Q,

L C, n'ont rien de particulier. L 0, plis plus volumineux

qu'à gauche. C II, rien. Des deux côtés, les sillons, sauf

sur les points sus-indiqués, sont en général assez profonds.

Les masses grises, les cornes d'A mmon ainsi que les lo-

bes orbitaires sont normaux. Les ventricules latéraux

sont légèrement dilatés.

De cette description des circonvolutions, il ressort nette-

ment que les deux hémisphères cérébraux, sur leurs deux

faces, présentent des asymétries nombreuses.

Cou et thorax. Le larynx et les cordes vocales

n'offrent rien d'anormal; le corps thyroïde est en crois-

sant, assez petit; le thymus n'a pas été examiné.

Le poumon droit présente de nombreuses adhérences

au sommet, surtout en avant et sur les parties latérales.

Le gauche est également adhérent au sommet, mais sur-

tout en arrière. Là on trouve un noyau, en. partie crétacé,

mesurant 7 à 8 mm. de diamètre. Sur la plèvre qui sépare

les lobes, on voit des granulations tuberculeuses assez

rares. On en trouve également quelques-unes en prati-

quant des coupes dans le poumon. Le lobe inférieur offre

plusieurs petits noyaux caséeux récents. Poids, 140 gram-

mes. Dans le poumon droit, on découvre une masse ca-

séeuse sous-pleurale à la partie moyenne du lobe supérieur.

Elle a 2 cent. sur 1 cent. 1/2, s'énuclée facilement, laissant

alors une cavernule. II existe un certain nombre d'autres

noyaux sous-pleuraux plus petits; un peu de congestion,

TUBERCULOSE GÉNÉRALISÉE.

137

aux deux bases pulmonaires. Deux ganglions bronchi-

ques sont hypertrophiés et caséeux. Poids du poumon

droit, 151 grammes.

Le coeur (80 grammes) est sans lésions ; orifices nor-

maux. Péricarde sain.

Abdomen.- Sur le péritoine, petits amas framboisés de

tubercules caséeux. Dans les épiploons, très vascularisés,

adhérents entre eux par des brides nombreuses, il en existe

un certain nombre. Sur le péritoine pariétal, plaques ca-

séeuses lenticulaires et irrégulières, surtout dans les fosses

iliaques. Les ganglions du mésentère sont hypertrophiés,

rosés sur une surface de section, non caséeux. La surface

interne de l'estomac est saine; les intestins sont vascula-

risés, sans tubercules ni ulcérations.

Foie (470 grammes). Sa face supérieure est légèrement

adhérente au diaphragme. Elle est parsemée de marbrures

jaunes, graisseuses. On y voit un très grand nombre de

tubercules, les uns miliaires, demi-transparents, très clairs,

espacés à environ 1 cent. de distance les uns des autres;

d'autres, d'aspect louche ou opaque, et enfin, un certain

nombre de contour irrégulier, caséeux. La face inférieure

présente les mêmes caractères. Sur une coupe, on les

retrouve dans toute l'épaisseur du parenchyme. Les vais-

seaux sont béants, remplis de sang; le tissu du foie est

pâle et jaunâtre, les lobules sont dessinés par un cercle rose.

Rate (60 grammes), très adhérente au diaphragme; on

l'en détache difficilement. La capsule est flasque et ridée,

soulevée par un grand nombre de masses caséeuses, du

volume d'une tête d'épingle et plus. Le parenchyme est

parsemé des mêmes masses et de tubercules miliaires.

Pancréas volumineux, d'une coloration jaune marquée,

sans tubercules.

Reins (60 grammes chacun), petits, très pâles; la capsule

se détache sans difficulté ; la substance corticale est très

amincie, pas de tubercules apparents. Vessie et testi-

cules normaux.

Rachis. Au niveau des 4° et 5e vertèbres dorsales, le

surtout antérieur du rachis est soulevé par un relief d'un

centimètre de hauteur, faisant une saillie bilatérale. Cette

bosselure excisée laisse échapper un. pus granuleux qui

s'écoule difficilement. La paroi interne de la poche a un

aspect pultacé. Quand on a vidé ce pus, on tombe sur la

face antérieure des vertèbres. Le disque intervertébral est

un peu détruit, et l'os à son contact est mis à nu.

BOURNEVILLE, 1886. 10

138 TUBERCULOSE GÉNÉRALISÉE : RÉFLEXIONS.

L'examen histologique a été fait au laboratoire d'histo-

logie de la Faculté. Les nodules remarqués dans le cerveau

présentaient la structure du tubercule fibro-caséoux. Ils

étaient développés à la face interne de la dure-mère, sans

participation du tissu cérébral. A leur périphérie, on voit

une mince couche de cellules embryonnaires, dont les plus

internes sont fusiformes et s'organisent en un tissu fibroide

calcifié. Quelques cellules géantes sont répandues dans

cette couche. La zone centraleest composée de tissu calci-

fié, sans élément distinct. Los nodules de la pie-mère sont

disposés autour des artérioles sous forme d'amas à centre

caséeux; c'est la forme anévrysmatique des tubercules,

comme l'appelle Kicner.Lefoieprésente des nodules mi-

.liaires avec la constitution typique, cellules géantes très

rares, cellules épithélioides à type fusiforme, se transfor-

mant presque immédiatement en tissu calcifié, en sorte

que le tubercule est réduit à un amas do cellules embryon-

naires à centre caséeux. On retrouve des infiltrations de

cellules embryonnaires en amas ou en îlots. Dans tous les

espaces de Kiernan, on voit un certain nombre de ces

îlots se caséifieràleur centre.Il y a donc tuberculose infil-

trée de toutle foie, indépendamment des granulationsadul-

tes. Dans la rate, les lésions sont semblables, mais il y a

beaucoupplus de noyaux formés de follicules agglomérés et

caséeux.- Enfin, la paroi del'abcès ossifluent nous amon-

tré, sur une coupe, de dehors au dedans, du tissu fibreux,

puis une zone de tissu de granulations richement vascula-

risées, enfin une couche de cellules embryonnaires, sans

vaisseaux, parsemée d'un grand nombre de cellules géantes

développées. Les cellules les plus internes de cette couche

subissent la transformation granulo-graisseuse, et contri-

buent à accroître le contenu de l'abcès. C'est donc bien

d'un abcès tuberculeux qu'il s'agit dans ce cas.

Réflexions. -I. Les renseignements que nous avons re-

cueillis sur la famille du malade sont incomplets : nous en

avons dit la cause. Du côté paternel, le fait le plus impor-

tant, c'est la tuberculose à laquelle a succombé son père

et l'existence d'une paralysie chez l'un de ses oncles. Du

côté maternel, il ne semble pas y avoir eu de névropathes

ni de tuberculeux. Rappelons que la mère est morte d'un

cancer de l'utérus.

Les antécédents personnels de l'enfant paraissent indi-

quer que jusqu'à 5 ans, il était intelligent, bien portant, et

ne différait pas sensiblement des enfants de son âge.

MARCHE DE LA TEMPÉRATURE. z

IL C'est dans le cours de la sixième année que les pre-

miers accidents seraient survenus. En quoi ont-ils exacte-

ment consisté ? nous l'ignorons. Ce que nous savons, c'est

qu'il aurait eu une paralysie du côté droit, qu'il serait

devenu gâteux et qu'il aurait eu des vomissements. C'est

alors qu'il a été l'objet de mauvais traitements de la.part

de sa mère qui, dit-on, le laissait enfermé, le battait, lui

donnait une nourriture insuffisante.

III. A l'entrée (février 1886), nous notons que l'intelli-

gence est affaiblie -(imbécillité), que la parole est un peu in-

correcte, bégayante ; que l'enfant est propre,et,en l'absence

de renseignements sur la cause de la déchéance intellec-

tuelle, nous le considérons comme susceptible d'améliora-

tion. Disons enfin que, dès cette époque, nous mentionnions

un affaiblissement paralytique du côté droit, avec amai-

grissement du bras, rendu très évident par les mensura-

tions, données dans le cours de l'observation.

IV. Les accidents auxquels a succombé l'enfant ont eu

une marche insidieuse. Durant la première quinzaine

d'avril, on remarque que l'enfant travaille de moins en

moins et qu'il paraît souffrant. Ces phénomènes s'accusant,

il est envoyé à l'infirmerie le 17 avril. A dater de ce jour,

nous voyons se manifester successivement divers symp-

tômes annonçant le développement d'une méningite

(céphalalgie, raies méningitiques, raideurs musculaires,

délire léger et transitoire, vomissements, fièvre, abatte-

ment, somnolence, etc.). C'est seulement dans les derniers

jours que sont apparus quelques phénomènes qui ont per-

mis de soupçonner l'existence d'une tuberculose pulmo-

naire et péritonéale et fait penser que la méningite était

de nature tuberculeuse.

La température a suivi une marche ascensionnelle dont

les caractères sont bien mis en évidence par la figure 17.

Signalons l'élévation thermique après la mort et le lent

refroidissement du corps.

V. Au point de vue anatorrzo ? atyeologidue, nous devons

rappeler que la tuberculose intéressait les méninges, la

plèvre, les poumons, le péritoine, le foie, la rate, les

ganglions et enfin la colonne vertébrale. Laissant de côté

140 RELATION ENTRE LES symptômes et LES lésions.

les organes thoraciques et abdominaux, nous ne relèverons

que les particularités relatives aux méninges.

Là, les lésions tuberculeuses se sont présentées sous

l'aspect de granulations miliaires et de tubercules assez

l;'i[J, 17. température un quart d'heure après la mort. + tempéra-

ture une heure après la mort. X température deux heures après la

mort.

volumineux. Parmi les symptômes les plus caractéristiques,

nous devons rappeler la paralysie ancienne des membres

du côté droit, ayant laissé des traces sérieuses, affaiblisse-

ment de la jambe droite et amaigrissement du bras.

INCURABILITÉ. 141 1

correspondant. Or, nous avons trouvé, à l'autopsie, des

granulations tuberculeuses abondantes au niveau de la

scissure de Sylvius gauche, un volumineux nodule tuber-

culeux sur la pariétale ascendante gauche et un autre

moins volumineux sur la partie moyenne de la frontale

ascendante du même côté. Par conséquent, il y a une cor-

rélation très nette entre le siège prédominant des lésions s

et les symptômes les plus saillants. Les lésions méningiti-

ques, qui avaient déterminé une légère hydrocéphalie des

ventricules, étaient plus prononcées à la base qu'à la con-

vexité, ce qui explique la présence des phénomènes coma-

teux et le faible degré du délire.

VI. Comme on le voit, il s'agissait là d'un cas d'imbécil-

lité symptomatique de méningite, dont le diagnostic pré-

cis a une véritable importance au point de vue du pronos-

tic et du traitement. Il est certain, en effet, que, dans les

cas de ce genre, on a peu de chance d'obtenir une modifi-

cation des facultés intellectuelles sous l'influence de l'édu-

cation, puisqu'il s'agit non pas d'une lésion qui a produit

tous ses effets, mais d'une lésion en voie d'évolution et

parfois, comme ici, tout à fait au-dessus de nos ressour-

ces.

142 '2 alcoolisme CHEZ UN ENFANT.

Alcoolisme chez un enfant de 4 ans. Démence

et épilepsie symptomatiques de méningo-en-

céphalite. - Diphthérie ;

Par BOURNEVILLE et BAU\IGAItTGN.

Le titre seul de cette note indique, d'une manière trop

frappante, l'intérêt du cas qui suit, pour que nous ayons

besoin d'aucun préambule.

Sommaire. - Grand'mère maternelle rhumatisante .

Mère, fièvre typhoïde à 19 ans, avec délire.- Soeur,

morte de convulsions internes consécutives il la coque-

luche. - Rachitisme. - Intelligence normale jusqu'à

3 ans. Alcoolisme (vin blanc) à partir de 4 ans.

Premières convulsions à 4 ans (mai 1885) : affaiblisse-

ment consécutif de l'intelligence ; irritabilité.

Deuxièmes convulsions 15 jours après les premières.-

Accès d'épilepsie. Prédominance des convulsions

à gauche. - Nouvelles convulsions (juillet et août).

Vertiges (novembre 1885). Paralysie (novembre

1885).- Tremblement choréifornze.- Epilepsie symp-

tomattque ; accès de plus en plus rapprochés ;

gâtisme; accès de colère. - Plaies dans les chutes

convulsives ; cicatrisation rapide.- Diphthérie ; mort.

Méningo-encéphalile.

Enderl..., Charles, né à Paris, le 27 mai 1881, est entré

le 12 juin à Bicêtre (service de M. BOUnNt : .VILLt : ).

Renseignements fournis par le père et par la mère.

- Père, 29 ans, cuisinier dans un hôtel particulier, grand,

châtain ; a toujours été bien portant, sobre, il n'a jamais eu

d'accidents nerveux (migraines, etc.), ni de rhumatismes,

de dermatoses ou de syphilis. [Père, 62 ans, cultivateur,

bien portant, sobre. Mère, 64 ans, ménagère, est

atteinte d'un rhumatisme articulaire chronique ; les

quatre membres sont pris et ne fonctionnent plus.

ANTÉCÉDENTS. 143

Rien du côté des grands parents paternels. - Trois frères

et deux soeurs jouissant d'une bonne santé; ni les uns ni

les autres n'ont d'enfants. - Trois oncles paternels ne pré-

sentent aucune maladie ; l'un d'eux a eu une dizaine d'en-

fants parfaitement sains. Une <y)'a ? 7d'tan<e,âgée de 87 ans,

est en enfance depuis 3 ans. Ni aliénés, ni épileptiques, ni

difformes, ni idiots, ni suicidés, ni condamnés dans la

famille.]

Mère, 29 ans, couturière, bien portante, blonde, physio-

nomie régulière, intelligente. Depuis 4 ou 5 mois, elle a

des douleurs de tête. Pas de convulsions dans l'enfance,

ni de maladies nerveuses, de dermatoses, do rhumatismes.

Elle est impressionnable, mais elle n'a jamais ou d'attaques

ni de syncopes. Elle a eu une fièvre typhoïde à 19 ans, ac-

compagnée de délire intense et non suivie de troubles

intellectuels. [Père, mort d'une affection cardiaque vers

42 ans ; forgeron, sobre ( ? ). Pas de renseignements sur

les grands parents paternels et maternels. - Deux frères,

l'un mort des suites d'une opération dont on ignore la

nature à l'hôpital Beaujon, sans enfants ; l'autre est bien

portant ainsi que sa fille. Pas d'aliénés, pas d'idiots ni

d'arriérés, ni de malformations]. - Pas de consanguinité.

Deux enfants : 1° notre malade ; 2° une fille morte à

9 mois, de convulsions internes,à la suite d'une coqueluche

accompagnée de l'évolution de 4 dents ; ces convulsions ont

duré 4 jours.

Notre malade. La conception a eu lieu trois mois

après le mariage. les parents étaient bien portants. La

grossesse a été absolument normale, aucun accident n'est

survenu. L'accouchement s'est fait à terme, sans diffi-

culté, sans chloroforme. A la naissance, l'enfant ne

présentait pas de signes d'asphyxie. - Elevé au sein, en

nourrice dans la Mayenne, il n'est revenu qu'au bout de

2 ans. Première dent à 4 mois, les autres ont poussé

promptement ; il marchait à 8 mois et, de bonne heure, il

parlait le patois du pays. L'enfant venait bien en nourrice,

toutefois il avait du rachitisme des jambes qui étaient

« en cerceau. » A 2 ans seulement, il a commencé à

être propre. A cet âge, il était intelligent, caressant, très

nerveux et n'avait pas eu encore de convulsions.

Ses parents l'ont repris à 3 ans, en bonne santé et, après

l'avoir gardé une semaine, ils l'ont envoyé à Altkirch chez

ses grands parents paternels avec lesquels il est resté de

3 ans à 4 ans 1/2. C'est à 4 ans que se sont manifestées les

premières convulsions qui auraient duré une heure. Entre

144 EXCÈS ALCOOLIQUES : CONVULSIONS.

les crises, il ne reprenait pas connaissance et paraissait être

mort. Ces convulsions ont été attribuées à l'abus du vin

blanc. Les grands parents, en effet, tenaient une auberge et

les consommateurs faisaient boire, en cachette, l'enfant du

vin blanc pour lequel il avait beaucoup de goût ; il descen-

dait même furtivement à la cave, et là il buvait. On pense

que plusieurs fois il aurait été ivre. La veille du jour où

sont survenues les premières convulsions, il s'était enivré

au point qu'on avait été obligé de le coucher.

Quoiqu'il se soit relevé le jour même où il a eu ses con-

vulsions, on s'est aperçu que l'intelligence était atteinte :

il parlait mal, ne pouvait fixer son attention, n'écoutait pas

ce qu'on lui disait (mai 1885). Quinze jours plus tard, nou-

velles convulsions qui ont duré une demi-heure ; puis,

pour la troisième fois, convulsions six semaines après les

précédentes. En juin, les troubles intellectuels ont paru

s'améliorer et l'attention paraissait plus facile à fixer. Les

convulsions ont reparu à diverses reprises en juillet et

août. L'enfant, qui auparavant était propre, cessa de

l'être et devint gâteux.

Pendant G semaines (septembre et octobre), les convul-

sions ont disparu pour revenir de nouveau à la fin d'oc-

tobre. En novembre, l'enfant est devenu incapable de

marcher. En novembre et en décembre, les convulsions,

qui avaient pris l'allure d'accès d'épilepsie, se montraient

chaque jour variant de 1 à 8 ; elles prédominaient à gauche.

Ace moment, En... a cessé de manger seul. Des vertiges se

sont manifestés un peu avant l'apparition de l'affaiblisse-

ment paralytique.

La mère a repris son enfant en janvier 1886. A cette

époque, il ne marchait plus, ses jambes, ses bras étaient

mous, incapables de déployer la moindre force. Les, mou-

vements des membres supérieurs s'accompagnaient de

tremblement; il pouvait parler, mais la parole était mal

articulée; souvent, on ne le comprenait pas; il ne pouvait

prononcer que des mots; il était incapable d'articuler une

phrase entière. Il était resté affectueux et reconnaissait bien

son père et sa mère.

Depuis janvier, les accès venaient à peu près tous les

quinze jours; ils duraient à peine cinq minutes. Toujours

le côté gauche a été plus atteint; il était rigide, mais on

n'a pas observé de secousses cloniques. Le côté droit n'était

pas raide.

Plusieurs fois par jour, l'enfant avait des vertiges, on en

a compté une dizaine en moyenne; ils duraient quelques

secondes : la tête se penchait, les paupières se fermaient et

PARALYSIE, IMBÉCILLITÉ, EPILEPSIE. 145

tout était fini. Enfin,deux ou trois fois par jour, il avait des

secousses du tronc.

Pendant les cinq mois qu'il est resté chez ses parents, il

ne s'est produit aucune modification de l'intelligence, ni

progrès, ni déchéance plus accentués. La parole est restée

également stationnaire. Le plus souvent, il demandait par

signes. Il bavait fréquemment; il n'a pas eu de grincements

de dents, de balancements, de tics, ni d'onanisme. On n'a

pas observé de strabisme : il fixait bien ses yeux; on a re-

marqué cependant que lorsqu'il voulait saisir un objet, il

dirigeait sa main à côté ; on attribue ce manque de préci-

sion dans les mouvements, soit à la maladresse due au

tremblement, soit à une faiblesse de la vue.

Aucune manifestation strumeuse, aucune fièvre éruptive,

ni coqueluche, ni bronchite, etc.

Il est entré à l'hôpital des Enfants-Malades le 7 juin et à

Bicêtre le 12 juin. En l'amenant dans cet hospice, son père

a remarqué qu'il avait la fièvre. Le lendemain, sa mère l'a

trouvé calme et moins énervé que de coutume (1) ; il n'a

mangé qu'un très petit morceau du gâteau qu'elle lui avait

apporté. Il a toussé une fois; sa toux était rauque; on au-

rait dit qu'il allait étouffer. Notons en passant qu'il n'existe

aucun cas de diphtérie dans la maison.

Etatactuel (13 juin). Poids, 16 kil. 70; - taille, 1 mè-

tre 04. - Tête assez grosso, un peu carrée, développement

modéré de l'occipital; bosses pariétales un peu saillantes,

la droite un peu plus que la gauche; front, moyenne-

ment élevé ; bosses frontales assez saillantes, dépression

latérale sur les tempes ; arcades sourcillières déprimées.

146 DIPHTHÉRIE.

d'entre elles ont la forme papuleuse. - Les amygdales

sont couvertes de larges plaques diphthériques, grisâtres,

sanieuses. Une d'elles s'est détachée spontanément; on dé-

tache les autres facilement avec un pinceau. Elles laissent

au-dessous d'elles des surfaces ulcérées, saignantes; la

bouche est remplie d'une sanie infecte.

Cou normal, circonférence 30 centimètres. Epaules bien

conformées. Le thorax est bien musclé, symétrique, sa

circonférence sous les aisselles est de 53 centimètres et de

55 centimètres au niveau des mamelons, et, à la base, de

54 centimètres. L'abdomen et le rachis n'offrent rien de

particulier.

Membres supérieurs, normalement conformés; leurs

dimensions sont semblables des deux côtés. - Membres

inférieurs, bien musclés, symétriques, sans déformation ;

articulations libres.

Organes génitaux : Pénil glabre, bourses pendantes ;

testicules de la grosseur de très petites olives ; prépuce

assez long; pas de phimosis ; méat normal.

Peau blanche et fine, pas de cicatrices; cheveux châtains,

abondants ; sourcils peu accusés; cils noirs, assez abon-

dants.

14 juin. - Faciès pâle, plombé ; ganglions sous-maxil-

laires très augmentés de volume; oedème du cou. La res-

piration est fréquente, avec le type costal supérieur, la

voix est extrêmemeut sourde, voilée. La toux peu fréquente

a un timbre voilé; on n'a pas noté d'accès de suffocation.

A l'auscultation, rien au poumon ; les bruits du coeur

sont indistincts, formant une sorte de murmure continu.

Dans la soirée la dyspnée augmente ; il y a des signes

d'asphyxie : lèvres bleues, extrémités froides, tirage abdo-

minal et sus-claviculaire; sifflement respiratoire; pas

d'accès de suffocation.

La trachéotomie est pratiquée à 9 heures du soir

(M. Baumgarten). Issue de fausses membranes par la

canule, Légère amélioration après l'opération; l'enfant

boit avec avidité à plusieurs reprises et semble respirer

plus librement.

15 juin. - L'asphyxie continue, refroidissement des

extrémités, cyanose légère des lèvres et du nez. A la base

du poumon gauche, râles sous-crépitants disséminés.

T. R. 38°,5. - Soir : 38°,6.

16 juin. - Mort dans le collapsus à 10 heures du soir.

T. R. un quart d'heure après la mort 38°; une heure

après, 36°; deux heures après, 3'i°. *

LÉSIONS DIPHTHÉRITIQUES. 147

Autopsie le 18 juin, à 8 heures du matin. Sujet bien

développé; coloration verdâtre de l'abdomen non ballonné ;

situation normale des organes de l'abdomen; la troisième

côte présente un dédoublement de son cartilage costal.

Péricarde, rien de particulier. - Coeur, en systole;

caillots fibrineux dans l'oreillette et le ventricule droits ;

rien dans le coeur gauche. Persistance du trou de Botal ;

valvules, endocarde, normaux.

Poumons. Le gauche pèse 205 gr. et offre de l'oedème

et des noyaux disséminés de broncha-pneumonie; les

bronches ne renferment pas de fausses membranes. Le

droit est normal. Le thymus persiste. Les amygdales, la

glotte, l'épiglotte sont couvertes de pseudo-membranes;

les fausses membranes ne descendent pas au-dessous de la

glotte, sauf à droite de l'incision trachéale, où l'on re-

marque une petite plaque diphthérique.

Abdomen. Rate petite, 55 gr., normale. Tous les autres

organes sont normaux. Chaque rein pèse 55 gr. ; le

foie, 570 gr.

Tête. A l'ouverture du crâne, la dure-mère paraît adhé-

rente aux os; le sinus longitudinal supérieur renferme du

sang et des caillots. La calotte et la base du crâne parais-

sent symétriques, cependant la fosse pariétale droite

semble un peu plus développée que la gauche ; les sutures

sont normales.-Cerveau. La pie-mère est injectée; les dif-

férents organes de la base de l'encéphale sont symétriques

(nerfs, pédoncules, protubérance, artères, sauf la commu-

nicante postérieure droite qui est d'un calibre plus petit).

Les deux hémisphères pèsent chacun 430 gr. Le cervelet

et l'isthme pèsent 95 gr. Dans son ensemble, l'encéphale

(955 gr.) est mou et lourd. Pas de lésions en foyer. On

trouve des adhérences delà pie-mère extrêmement pronon-

cées avec la substance cérébrale qui est très molle. La dé-

cortication ne s'opère qu'en entraînant des morceaux de

la substance cérébrale. Le cervelet se décortique avec faci-

lité ; il paraît plus dur au toucher qu'à l'ordinaire.

Hémisphère droit. - Ce qui frappe tout d'abord, c'est

que le lobe frontal, la moitié postérieure de la région

pariétale et le lobe occipital sont moins développés que

les parties centrales et que le lobe temporal.- Sur toute la

partie postérieure de l'hémisphère, depuis la scissure inter-

pariétale jusqu'à la scissure parallèle, la pie-mère a em-

porté avec elle une portion de la substance grise. La môme

lésion se retrouve sur la pariétale ascendante, la frontale

148 ! IlÉl\INGO-ENCÉPHALITE.

ascendante, la partie postérieure de la deuxième circonvo-

lution frontale, la partie antérieure de la troisième cir-

convolution frontale, mais disséminées en petites plaques

irrégulières.

La première circonvolution frontale est maigre dans sa

moitié antérieure et assez développée dans sa moitié posté-

rieure. Elle s'insère de niveau sur la frontale ascendante.

Elle envoie deux plis de passage à la deuxième circonvo-

lution frontale. - La deuxième circonvolution frontale,

plus amaigrie encore que la précédente, est sinueuse et

s'insère à mi-hauteur sur la frontale ascendante. Elle en-

voie trois plis de passage à la troisième circonvolution

frontale. - La troisième circonvolution frontale est

maigre à sa partie moyenne et postérieure, atrophiée dans

sa partie antérieure. Les sillons sont assez profonds. La

scissure parallèle frontale est profonde dans toute sa

hauteur, excepté au niveau de l'insertion de la deuxième

circonvolution frontale. - La frontale ascendante est bien

développée, très sinueuse. -- Le sillon de Rolando est

profond. - La pariétale ascendante est très large dans

son quart supérieur, maigre à sa partie moyenne, atrophiée

dans son quart inférieur. Le pli pariétal supérieur est

atrophié ; le pli pariétal inférieur, au contraire, est assez

développé.- Le pli courbe, assez volumineux en avant,est

atrophié en arrière. L'atrophie porte aussi sur tout le

lobe occipital et sur les parties postérieures de la première

et de la deuxième circonvolution temporale.

La première circonvolution temporale est atrophiée

dans sa partie antérieure ; elle n'est bien développée qu'à

sa partie moyenne. Elle envoie un pli de passage à la

deuxième circonvolution temporale et deux au lobule de

l'insula au fond de la scissure de Sylvius. La scissure

parallèle est profonde et sinueuse. La deuxième circonvo-

lution temporale est bien développée et envoie deux plis

de passage à la troisième circonvolution temporale. - Le

lobule de l'insula présente trois digitations assez maigres.

- La scissure de Sylvius n'offre rien de particulier. -

Sur le lobe orbitaire les circonvolutions sont sinueuses, la

scissure en II est bien dessinée. - La circonvolution du

lobe olfactif est normale.

Face interne. La première circonvolution frontale,

sinueuse, un peu irrégulière, envoie un pli de passage à la

circonvolution du corps calleux et deux au lobule para-

central. Le lobule paracentral est long et coupé pro-

fondément par le prolongement du sillon de Rolando.

Le lobule quadrilatère est peu développé dans son ensemble

ATROPHIE CONSÉCUTIVE DES CIRCONVOLUTIONS. HO 9

et surtout en arrière. - La circonvolution du corps cal-

leux est uniforme, non sinueuse. Le coin, atrophié, a

un aspect vermiculé.

Le lobe occipital est atrophié comme sur la face externe.

La circonvolution de l'hippocampe est régulière, mais

non plissée. - La corne d'Ammon, le ventricule latéral,

le corps calleux, la couche optique, le corps strié, n'offrent

rien de particulier.

Hémisphère gauche. Toute la face externe est tomen-

teuse, comme déchiquetée, car presque partout une couche

assez épaisse de la substance grise a été entraînée avec la

pie-mère; nulle part cependant la substance blanche n'est

mise à nu. - Les portions les moins malades sont : la

partie inférieure de la troisième circonvolution frontale, la

moitié inférieure de la frontale ascendante, les deux tiers

supérieurs de la pariétale ascendante, la moitié antérieure

de la temporale et le lobule de l'insula.

La première circonvolution frontale, sinueuse, s'insère

par une sorte de crochet sur la frontale ascendante et en-

voie deux plis de passage à la deuxième circonvolution

frontale. - Celle-ci, très sinueuse, donne un pli de pas-

sage à la troisième frontale. Les sillons qui séparent ces

trois circonvolutions sont profonds. La scissure paral-

lèle frontale est tortueuse, profonde, ininterrompue sur

presque toute la hauteur de l'hémisphère. La frontale

ascendante est très sinueuse et assez maigre. - Le sillon

de Rolando est profond. La pariétale ascendante n'est

pas plus développée que la frontale ascendante, mais très

sinueuse. Le lobule pariétal supérieur est composé de

circonvolutions très grêles. - Le lobule pariétal inférieur

et le pli courbe sont peu développés. La scissure per-

pendiculaire externe, à peu près ininterrompue, est très

profonde. - Le lobule orbitaire est petit, mais se dis-

tingue facilement. - La première circonvolution tem-

porale envoie deux prolongements au fond de la scissure

de Sylvius ; elle est plus développée à sa partie postérieure

qu'à sa partie antérieure. La deuxième circonvolution

temporale communique par deux plis de passage volumi-

neux avec la troisième circonvolution temporale. - Celle-

ci est irrégulière, mais assez grosse, coupée en quelque

sorte par le sillon qui sépare les deux plis de passage dont

il vient d'être question. - La scissure parallèle est pro-

fonde ; le même caractère se remarque sur tous les autres

sillons. La scissure de Sylvius et le lobule de l'insula

n'offrent rien de particulier.

150 MÈNINGO-ENCÉPHALITE.

Lobe orbitaire.-La circonvolution du lobe olfactif est L

grêle, le reste du lohe peu plissé.

Face interne. - La première circonvolution frontale

est large et très sinueuse. - Le lobule paracentral est

long. Il présente un sillon vertical, profond, en forme de

T, ainsi qu'une encoche, terminaison du sillon de Rolando.

- La circonvolution du corps calleux est large et unie ;

le sillon calloso-marginal est profond. Le lobe quadrf-

latère est borné par des sillons larges et profonds. La

scissure calcarine et la scissure perpendiculaire interne

sont très distinctes. Le coin est petit.

Sur cette face, il n'existait d'adhérences qu'au niveau de

la partie antérieure de la première frontale, de la partie

supérieure du lobe quadrilatère, et un peu sur le bord du

coin.

La corne d'Azzzmon, le ventricule latéral, la couche

optique, le corps calleux sont normaux.

Examen histologique fait par M. PILLIET, aide préparateur

d'histologie. - a) Lobe frontal de l'hémisphère gauche.

Les méninges sont restées adhérentes sur les coupes ; et on

les voit constituées surtout par des vaisseaux très dilatés et

remplis de sang ; les veines sont particulièrement énormes ;

les capillaires qui plongent dans la substance cérébrale sont

aussi très gonflés et parfaitement visibles, quelques-uns sont

rameux. Dans la substance grise, la couche superficielle de né-

vroglie a son épaisseur normale, peut-être les noyaux des cel-

lules sont-ils un peu plus abondants que chez un enfant sain

du même âge. La seconde couche, celle des petites cellules

pyramidales, présente des altérations dans le nombre de ces

éléments qui est extrêmement diminué, et dans leur disposition

réciproque. Au lieu de former un mur do cellules serrées, vi-

sibles au premier coup d'oeil, elles sont assez dispersées, par

groupes de trois à cinq, en sorte qu'on ne retrouve pas à un

faible grossissement l'aspect connu de cette couche, et qu'il en

faut chercher les éléments. Dans les deux couches suivantes,

couche des cellules pyramidales moyennes et couche des

grosses cellules, on observe, vu la grosseur des éléments, des

lésions plus nettes. Les cellules sont diminuées de nombre ; en

revanche, les noyaux petits et sphériques qui révèlent les

cellules névrogliques sont augmentés et dispersés. Les cel-

lules au lieu d'être disposées en séries régulières, bout à bout,

limitées parles fibres d'origine de la substance blanche, pré-

sentent les mêmes séries morcelées par disparition de cellules

intercalaires; en sorte qu'on ne voit que des groupes continus de

plusieurs cellules en nombre assez restreint, ressemblant à des

EXAMEN HISTOLOGIQUE. 151

capsules allongées de cellules de cartilage. Les cellules situées

àlalimite des deux couches intermédiaires aux grandes cellules

pyramidales et aux moyennes, présentent à son maximum une

altération dont on retrouve des états différents sur toutes les

couches. Elles sont d'abord gonflées, hyalines, avec une accu-

mulation considérable de granules jaune ambré autour des

noyaux; puis restant toujours hyalines, elles sont beaucoup

plus petites, ont une forme en fuseau, et n'offrent pas de pro-

longements distincts. Enfin, à un troisième état, on ne voit

qu'un noyau sphérique, avec un petit amas de granules ré-

fringents autour de lui. La plupart des cellules sus-mention-

nées, présentent les différents degrés de cette altération, avec

cette particularité que la plupart des cellules que l'on voit

dans un même champ du microscope, sont à peu près aumême

état; tandis que, plus loin, on rencontre des groupes de cel-

lules à autre état. Les capillaires dans ces deux couches sont

ramifiés et dilatés, mais leur développement n'est pas excessif.

Dans la couche suivante de la substance grise et dans la

substance blanche, ce qui domine c'est l'accumulation des

noyaux des cellules interstitielles. Il n'y a qu'un petit nombre

de corps granuleux. En résumé, on constate la congestion

vasculaire, la multiplication des cellules de la névroglie et la

disparition des cellules nerveuses, disparition qui nous est

expliquée par les différents états aboutissant à l'atrophie que

l'on peut observer sur les coupes.

Sur une coupe du lobe pariétal, les lésions sont absolument

du même ordre, mais plus avancées, et paraissent avoir mar-

ché du centre à la périphérie. En effet, si nous reprenons

l'étude des couches en sens inverse, nous voyons d'abord la

substance blanche très vascularisée et présentant les figures

connues sous le nom d'éléments araignées. La couche intermé-

diaire, couche des fibres arquées, et la couche des grandes

cellules pyramidales ne se composent plus que de faisceaux

fibrillaires descendants avec de nombreuses cellules intersti-

tielles, et c'est dans la couche des cellules pyramidales moyen-

nes que l'on retrouve l'évolution des lésions cellulaires telles

que nous venons de l'indiquer. Au-dessus, la sériation des

cellules a tout à fait disparu. La couche la plus superficielle

de la substance grise a été en partie enlevée avec les méninges,

surtout aux points de pénétration des capillaires.

Sur une coupe du lobe occipital, une portion assez considé-

rable de substance grise a été enlevée avec la pie-mère, ce qui

en reste présente une diminution portée à l'extrême des élé-

ments pyramidaux. A la limite de la substance blanche, l'accu-

mulation des noyaux petits et sphériques des cellules intersti-

tielles est très marquée. Dans les portions périphériques, au

152 ALCOOLISME CHEZ UN ENFANT.

contraire, les éléments cellulaires sont rares et dispersés au

milieu d'un tissu cellulaire abondant.

b) Cervelet, Hémisphère droit, rien à noter. Les cellules du

Purkinje sont admirablement conservées. En résumé, les lé-

sions paraissent plus marquées sur les régions postérieures

de l'hémisphère et se composent toujours des deux mêmes

éléments, sclérose interstitielle et lésion des cellules pyrami-

dales, évoluant parallèlement.

c) Moelle cervico-dorsale. Les cordons blancs sont symé-

triques ; dans la substance grise, tuméfaction hyaline assez peu

accentuée dans les cellules des cornes antérieures; les cornes

sont égales; le canal de l'épendyme est intact.

d) Moelle lombaire. - Même aspect, congestion intense des

méninges.

e) Amygdales. - Il existe des traînées embryonnaires nom-

breuses dans le tissu de l'amygdale, un certain nombre de

points do mortification sur la paroi des cryptes.

f) Glandes sous-maxillaires. - Pas de suppuration ; mais

les cellules petites, cubiques, non granuleuses, remplissent les

culs-de-sac et paraissent revenues à l'état indifférent.

I. L'existence d'une intoxication alcoolique est indu-

bitable chez le jeune Enderl..., car, d'une part, nous ne

trouvons dans ses antécédents ni épilepsie ni aucune autre

maladie nerveuse et, d'autre part, lorsqu'il a été envoyé en

Alsace, à l'âge de trois ans, il marchait, parlait, était propre

et avait l'intelligence des enfants de son âge. Ce n'est

qu'après une année passée chez son grand-père, auber-

giste, et à la suite de libations répétées qu'apparurent de

graves accidents.

La nature des symptômes et leur évolution appartiennent

bien à l'alcoolisme. Les premières convulsions se mon-

trèrent le lendemain d'un jour où l'enfant s'était complè-

tement enivré. Elles prédominèrent sur le côté gauche du

corps et cette prédominance se remarqua durant les états

de mal convulsifs qui survinrent à des intervalles plus ou

moins longs, jusqu'à l'apparition des accès d'épilepsie

symptomatique (nov. 1885). Ces accès ne se montrèrent

d'abord qu'une fois par mois, puis se rapprochèrent rapi-

dement et bientôt on en compta plusieurs par jour.

En môme temps, Enderl... éprouva des vertiges, du

tremblement, des secousses, accidents susceptibles d'être

rattachés aux lésions produites par l'alcoolisme.

Les troubles intellectuels ont suivi une marche rapide

MÉNINGO-ENCÉPHALITE GÉNÉRALISÉE. ! 53

et progressive, car un an après le départ de l'enfant pour

l'Alsace, lorsqu'il fut repris par sa mère, il ne parlait plus,

était incapable d'attention, ne pouvait plus marcher; les

membres supérieurs étaient agités de tremblements, enfin

il gâtait : la déchéance était complète.

Notons que les symptômes, une fois établis, n'ont pas

rétrocédé, bien que l'enfant ait été soustrait par sa mère à

l'influence de l'alcool, peu après l'apparition des premières

convulsions. Ces particularités sont probablement dues

à l'âge tendre du buveur, l'alcool ayant produit, sur

son cerveau en voie d'évolution, des lésions définitives.

Dans ces conditions le pronostic était absolument grave,

les chances d'amélioration par le traitement médical, hygié-

nique et pédagogique-si utile dans d'autres cas - deve-

naient presque complètement nulles.

II. La diphtérie, contractée dans un court séjour à

l'hôpital des Enfants-Malades et qui a revêtu la forme

toxique, n'a rien présenté de remarquable ; elle a entraîné

la mort, malgré la trachéotomie. La fièvre n'a point dé-

passé 38°,6 (1); aussi est-ce plutôt à la diphthérie qu'à la

fièvre qu'il faut attribuer l'absence d'accès convulsifs chez

Enderl... depuis son entrée à Bicêtre.

III. Les lésions trouvées à l'autopsie sont celles d'une

méningo-encéphalite, étendue à presque tout le cerveau,

prédominant sur les lobes occipitaux et pariétaux, mais

ayant aussi atteint les lobes frontaux. La sclérose céré-

brale, lésion ordinaire de l'alcoolisme, explique bien les

troubles de l'intelligence et de la motilité, la déchéance

profonde et incurable observée chez cet enfant (2) et rend

bien compte de la prédominance des convulsions sur le

côté gauche du corps. -

(1) Le 15 juin : matin, 3Sa,5; -soir, 38°,6 ; un quart d'heure

après la mort, 38° ; une heure après. 36° ; - deux heures

après, 3h.

(2) La présentation des pièces, faite à la Société anatomique,

a été complétée par la présentation de la photographie de l'en-

fant et du moulage de sa tête, ainsi qu'il en a été pour toutes les

présentations, provenant du service des enfants de Bicêtre depuis

1880.

BOURNEVILLE, 1885. 11

15 i IDIOTIE COMPLÈTE.

V.

Idiotie complète symptomatique d'une atrophie

cérébrale double;

Par bourneville et BRICON.

Il s'agit, dans le cas que nous allons exposer, d'une ma-

ladie nerveuse assez commune de l'enfance, l'atrophie

cérébrale. Elle est, ici, consécutive à des lésions aiguës

graves ayant détruit complètement les lobes temporaux et

en grande partie les lobes occipitaux et les lobules do

l'insula. Nous serions heureux si, en attirant l'attention

sur les faits de ce genre, nous parvenions à engager nos

lecteurs à étudier minutieusement la période aiguë de ces

affections si intéressantes et dont l'histoire clinique offre

encore tant de lacunes.

OBSERVATION.- Père : convulsions dans l'enfance, peu in-

telligent, sujet à un tic, eczéma, ouvrier manipulant le

sulfure de carbone, migraines consécutives. Grand-

père paternel et arrière-grand' mère maternelle, alcoo-

liques.- Oncle paternel mort de convulsions.

Mère : aliénée. - Grand-père maternel : excès de

boissons.

Grossesse un peu tourmentée. Pas de convulsions

dans l'enfance. Impétigo, ophthalmie, strabisme

divergent. - Dentition de lait, gingivite ulcéreuse.-

Balancement; grincements de dents; parole nulle ;

- marche à 4 ans ; salacité ; - phimosis ; gâ-

tisme ; insomnie ; - accès de colère ; - recoque-

villement des membres inférieurs ; stomatite ; diar-

rhée ; escharres ; amaigrissement progressif

bronchite ; mort.

Autopsie : Perméabilité du trou de Botal; conges-

tion des poumons ; bronchite ; - calcul rénal. - En-

céphale : Destruction complète des lobes temporaux et

occipitaux, des lobules de l'insula remplacés par deux

pseudo-hystes ; pseudo-kystes plus petits sur les lobes

antécédents héréditaires. 155

frontaux. Isp/meh'ze et inégalité do poids des hémis-

phères ; atrophie de certaines circonvolutions. Sots : -

sure transversale des frontales ascendantes.

Ren ? Auguste, né le 10 juin 1880, est entré le 27 no-

vembre 1884, à Bicêtre (service 4e M. DouRNEVthLE) et y

est décédé le 29 mars 1885.

Renseignements fournis par sa mère (8 décembre 1884).

- Père, 29 ans, homme de peine, grand, peu intelligent,

aurait eu dans l'enfance un eczéma et des convulsions, n'a

jamais pu apprendre à lire, est un peu emporté, Il a tra-

vaillé 5 ans dans une fabrique de caoutchouc; c'est là

qu'il aurait commencé à avoir des migraines, qui sont

devenues moins fréquentes depuis qu'il en est sorti. Enfin,

il serait atteint d'un tic : Il roule toujours quelquechose

dans les mains (mouchoir, pain, ou n'importe quel autre

objet) dès qu'il ne travaille pas. [Père, homme de peine,

bien portant, fait do fréquents excès de boissons ; il n'offre

pas d'accidents nerveux. - Mère morte du charbon.

Grand-père paternel mort on ne sait de quoi. Grand'mère

patern ! 3lle : excès de boissons fréquents. - Grand-

père et grand'mère maternels, pas de détails. Un

frère a été enlevé à 3 ans par des convulsions, Une soeur,

26 ans, n'a pas eu de convulsions, a fait des fausses

couches et a eu des enfants morts jeunes. Pas d'idiots,

d'aliénés, d'épileptiques, de difformes, de suicidés ou de

criminels dans la famille].

Mère, 28 ans, de petite taille, blonde-châtain, a une

physionomie régulière, est intelligente, bien portante. Elle

n'a pas eu de convulsions, de migraines ou d'attaques de

nerfs, mais elle est un peu coléreuse. A l'âge de 18 ans,

elle a quitté sa mère pour vivre pendant trois semaines

avec un amant dont elle n'a pas eu d'enfant ; elle fut prise

de folie et enfermée à Sainte-Anne où elle est restée deux

ans, elle y travaillait tantôt au raccommodage pour la mai-

son, tantôt au crochet pour les soeurs. Depuis sa sortie,

elle n'aurait plus ressenti aucun trouble psychique.

[Père, mort à 47 ans d'un asthme; il faisait,dit-on, quelques

excès de boissons. - Mère morte, à l'âge de 63 ans, d'une

maladie du coeur.- Pas de détails sur les grands parents.

Un frère jouit d'une bonne santé, ainsi que deux soeurs,

l'une est mariée, a des enfants qui n'ont jamais eu de

convulsions. Pas d'aliénés, etc., dans la famille].

Pas de consanguinité.

Deux enfants ; ¡il notre malade; 2° une fille, âgée de dix

156 ANTÉCÉDENTS PERSONNELS.

mois, qui parait intelligente, prononce quelques mots, et

n'a pas eu de convulsions.

Notre malade. A l'époque de la conception, le père de

l'enfant travaillait déjà dans une fabrique de caoutchouc,

et souffrait de fréquentes céphalalgies. - Grossesse tour-

mentée par le chagrin provenant de ce que sa belle-mère,

concierge dans sa maison, lui reprochait souvent de ne pas

avoir dit qu'elle avait été internée à Sainte-Anne; elle eut

des discussions avec sa soeur et sa belle-soeur qui vint un

jour pour la battre. Le temps de la grossesse s'écoula sans

aucun autre accident, sans syncopes, ni envies de

boire, etc. Accouchement naturel, à terme, sans chloro-

formisation.-A la naissance, l'enfant n'était pas asphyxié,

paraissait normal. Elevé au sein par sa mère, il a

été sevré à 18 mois.

C'est vers l'âge de 8 à 9 mois, que la mère de l'enfant a

constaté les premiers signes de l'idiotie; elle s'étonnait de

ce qu'il ne se tenait pas sur les jambes, de ce qu'il ne riait

pas comme les autres enfants (il n'a jamais ri); « mais, dit-

elle, il avait la figure tellement malade par le fait de la

gourme, qu'on ne s'occupait pas de le faire rire. » En effet,

du troisième jour de la naissance, à trois ou quatre mois,

il eut mal aux yeux et, à partir de deux mois, de l'eczéma

impétigineux du cuir chevelu, de la face, des mains et des

aisselles. Enfin, l'enfant ne devenait pas propre et n'ap-

prenait pas à parler.

Ren... a eu sa première dent à 15 mois seulement; les

autres sont ensuite venues rapidement. Il n'a marché qu'à

4 ans; à la maison on le laissait courir dans la chambre,

ou couché dans son lit ; si on l'asseyait, il restait en place

sans chercher à se lever. Depuis un an, il crie beaucoup,

ce qu'il ne faisait pas auparavant.

Ren... présente plusieurs tics : il grinçait beaucoup des

dents, grince moins maintenant, en dehors de ses colères;

il aime à se frotter les mains l'une contre l'autre (son père

fait souvent de môme) : il est atteint d'un balancement

antéro-postérieur du tronc ; au lit, il aime à se bercer lui-

même. Il tousse par moments ; ni bave, ni succion. Il est

capable de saisir le verre et de boire seul; il peut porter son

pain à la bouche, mais il ne sait pas se servir de la cuiller,

de la fourchette, etc. Il est salace, mange tous les débris

qu'il trouve, ses excréments qu'il roule et dont il se bar-

bouille; ni vomissements, ni rumination, parfois constipa-

tion, surtout il y a un an ou deux. Il a toujours été gâteux.

- Après le sevrage, il ne voulait boire que du lait; puis du

DESCRIPTION DE L'ENFANT. 157

lait et de l'eau sucrée et chaude ; il refusait de boire froid.

L'enfant prend tout ce qu'il trouve, le jette et le brise. Il

est inconscient du danger, est méchant, aime à griffer et à

mordre. Il se serait livré, mais rarement, à l'onanisme vers

deux ans ; maintenant il aurait perdu cette habitude.

Le sommeil est toujours mauvais depuis l'âge de 12

mois ; auparavant étant au sein, R... dormait mieux,

actuellement il pousse des cris sauvages » la nuit pen-

dant plusieurs heures, et on a beaucoup de peine à le ren-

dormir. Depuis qu'il marche, il crie moins la nuit, mais

continue à crier durant le jour.

R... n'aurait jamais eu de convulsions, ni de chorée, ni

devers, etc. ; il n'aurait eu non plus aucune fièvre éruptive,

aucune maladie infectieuse. Le traitement aurait con-

sisté uniquement en agents toniques et antiscrofuleux.

1884. 28 £ \ Novembre. Eczéma du cuir chevelu, de la face,

des oreilles. - Poids : 9 kil. 500. Taille : 0°'82. Traite-

ment : huile de foie de morue, sirop d'iodure de fer, bains

salés.

12 Décembre. Plaie contuse de la région temporale

droite, consécutive à une chute déterminée par un autre

enfant.

1885. 31 Janvier. - Poids : 9 kil. 200 gr. Taille : 0 m.

82 centim. L'amaigrissement est très prononcé. L'alimen-

tation est difficile, les forces déclinent, l'abdomen est gros;

les jambes sont grêles. Croûtes d'impétigo du cuir chevelu

et des oreilles que l'enfant fait saigner en se grattant. Blé-

pharite ciliaire. - Traitement : vin phosphaté, poudre de

viande, etc.

Etat actuel (Février 1885).- Tête, un peu petite ; bosses

frontales assez bien dessinées; région occipitale saillante;

protubérance occipitale peu marquée. Front étroit, légère

ligne en gouttière au niveau de la suture bi-frontale,

réseau veineux bien dessiné sur les tempes; oreilles bien

ourlées, très écartées du crâne, lobule petit.

J68 IDIOTIE COMPLÈTE.

bouche est un peu grande, les lèvres sont minces ; pas do

bave. Dentition de lait : les gencives présentent une ulcé-

ration sur leur bord formant bourrelet; elles ont une teinte

rouge vineuse, sont saignantes et ramollies, il existe des

languettes gingivales hypertrophiées et détachées des

dents surtout à la mâchoire supérieure. Voûte palatine

assez large et peu profonde.

Cou, 18 cent. et demi. Chapelets ganglionnaires. Le

thorax est conique, évasé à la base; sa circonférence, au

niveau du mamelon, est de 44 cent. et demi. Les espaces

intercostaux sont saillants. Le sternum a uno forme apla-

tie sans projection en avant; chapelet thoracique pro-

noncé. Le rachis est régulier, les apophyses épineuses

sont très saillantes.

L'auscultation et la percussion des différents organes

no révèlent aucune anomalie, mais sont rendues difficiles

par les cris poussés par l'enfant durant l'examen.

L'abdomen est rétracté avec un réseau veineux superfi-

ciel bien dessiné.-Digestion. Ren.... repousse et rejette les

aliments solides et prend volontiers du lait. Quand il a bu

ou fini de manger, il jette les objets. Il suce ses mains ;

cette succion a été constatée dès son entrée (1). Une vomit,

ni ne rumine; de temps en temps il est atteint de diarrhée

avec selles décolorées presque blanches. Gâtisme conti-

nuel.

Organes génitaux : Phimosis; verge très courte et reco-

quevillée ; les bourses sont rétractées, érythémateuses ; les

testicules sont de la dimension d'un petit haricot.

Membres supérieurs : très grêles et très amaigris. Deux

cicatrices de vaccin à chaque bras; les doigts à leur extré-

mité sont rouges.

Membres inférieurs '. Ils sont également très grêles et

ramenés sur l'abdomen, Les ongles présentent des crêtes

longitudinales alternant avec des dépressions. Le réflexe

tendineux rotulien est exagéré. L'enfant qui marohait en-

core seul à son entrée à Bicêtre (fin novembre) ne marche

plus. La peau est recouverte d'un duvet fin et abondant,

Erythème des fesses. '

L'ouïe paraît'normale : lorsqu on réprimande Ron...,on

attire momentanément son attention. Les autres sens

n'ont pu être examinés d'une façon sérieuse.

R..... aime à se balancer et chez lui le balancement est

non seulement antéro-postérieur, mais encore latéral.

(1) Contrairement au renseignement donné par la mère.

TICS, ACCÈS DE COLÈRE, ETC. ib9

Assis, il balance le tronc d'avant en arrière et la tête laté-

ralement ; debout, il balance la tête en tournant le corps,

ou bien encore il tourne la tête. L'habitude de griffer qu'il

avait à son entrée a diminué, ce qu'on attribue à ce que

les autres enfants en se défendant l'ont jeté à terre. Il porto

continuellement les mains à la tête, s'égratigne les oreilles

et les lèvres, mais no grince pas des dents. Le sommeil est

toujours agité ; R..... pousse des cris la nuit.

IL..... n'a jamais articulé aucun mot, aucune syllabe. Il

n'a à son service aucun geste pour exprimer ses désirs. Il

est sujet à des accès de colère qui se déclarent dès qu'on

le touche. Il frappe le sol des pieds. Il ne sait ni s'habiller,

ni se laver, etc.

11 Février : - L'amaigrissement est plus prononcé ; les

forces déclinent de plus en plus. Le cri est presque éteint.

Abdomen rétracté en bateau depuis hier, diarrhée très

abondante, séreuse. Peu do fièvre, pouls imperceptible.

Rem ne prend presque exclusivement que des aliments

liquides.

17 Février. Amélioration notable. La diarrhée a disparu.

Le sommeil est bon. Pas de fièvre.

19 Février. Même état, mais à l'inspection de la

bouche on trouve des plaques assez nombreuses de sto.

matite. - Badigeonnage au jus de citron.

14 Ml1.1's.- Toux quinteuse, fréquente; auscultation im-

possible.

20 Mars. - Amaigrissement général très prononcé ; les

os sont saillants ; rides en V au-dessus de la racine du nez;

les sillons naso-labiaux sont très-prononcés.

Los membres inférieurs ont l'attitude suivante : 1° à

gauche, cuisse fléchie directement et verticalement et

jambo fléchio en travers de l'abdomen de telle sorte crue le

genou vient s'appliquer juste au-dessous du sein gauche,

tandis que le talon vient reposer sur la partie supérieure

et interne do la cuisse droite et répondre à la partie

moyenne de l'aine droite ; 2° à droite la cuisse est

fléchie obliquement et en dehors du corps. La jambe est

complètement fléchio sur la cuisse et le talon repose sur le

grand trochanter. Légère raideur des genoux permettant

d'allonger facilement les membres.

Membres supérieurs : Le plus souvent, Ren... place les

deux mains sur la nuque, appliquées l'une sur l'autre.

Sur la bourse droite, on constate une légère excoriation

et des eschares du sacrum, des crêtes iliaques en arrière ;

do l'érythèmo des grands trochanters, de la malléole ex-

terne droite, enfin une plaquo cyanosée au coude droit.

1G0 IDIOTIE COMPLÈTE.

A la sertissure des dents, on trouve un léger liseré rou-

geâtre et saignant au moindre contact. Sur les joues, à la

face interne, se trouve une plaque un peu déprimée et gri-

sâtre, large comme une pièce de 50 centimes. A l'auscul-

tation, râles sous-crépitants, moyens, nombreux et dissé-

minés. Submatité de la fosse sus-épineuse. - Pouls

petit, filiforme, régulier. Le foie ne déborde pas le rebord

costal.

27 Mars. - Le cri faiblit de plus en plus ; l'enfant ne

prend plus que du lait. Toux faible, étouffée, fréquente.

Peu de diarrhée. Escharre du grand trochanter et de la

partie supérieure de la crête sacrée.

29 Mars. Décédé à 11 heures du soir. - Poids après

décès : 6 kil. 100 gr.-Si l'on compare les différents poids,

on voit que du 28 novembre 1884 au 31 janvier 1885, l'en-

fant, loin décroître, a maigri de 300 gr.,et que cet amaigris-

sement, qui n'a fait qu'augmenter jusqu'à la mort, s'est

traduit par une diminution de 3,400 gr.

Autopsie pratiquée le 1er avril.- L'abdomen est excavé.

Le tissu adipeux sous-cutané a complètement disparu.

Les muscles sont atrophiés, ont une coloration rouge sau-

mon. Pas de liquide dans la cavité abdominale. Le foie

remonte à deux travers de doigt au-dessus du rebord cos-

tal ; le diaphragme atteint à droite le bord supérieur de

la quatrième côte, à gauche le bord supérieur de la cin-

quième côte.

Les cavités pleurales ne contiennent pas de liquide.

Dans la cavité du péricarde, il existe environ deux cuille-

rées d'un liquide presque complètement clair. Le cccur

(30 gr.) en systole contient peu de sang liquide et quelques

caillots noirâtres. Le trou de Botal est perméable. Toutes

les autres parties du coeur et du péricarde sont normales

(valvules, myocarde, endocarde, etc.). Le poumon droit

(30 gr.) présente un peu de congestion à la base; les bron-

ches contiennent du muco-pus; les lésions sont les mêmes

sur le poumon gauche (25 gr.).

Rate normale. L'uretère gauche estdilaté; le droit un

peu moins. Les capsules surrénales n'offrent rien de par-

ticulier. Les reins sont lobulés ; le gauche contient dans

son bassinet un petit calcul et quelques graviers. Le rein

droit pèse 20 gr.

Le canal cholédoque est perméable. Leduodézicm n'offre

rien d'anormal. - L'estomac est recouvert d'un dépôt

muqueux très abondant et épais. - Foie (205 gr.), vési-

cule biliaire, intestins, ganglions mésentériques et pan-

ATROPHIE CÉRÉBRALE; PSEUDO-KYSTE. 161

créas (25 gr.), rien de particulier. Vessie dilatée. Les

testicules ne sont pas descendus, ils se trouvent dans le

canal.

La glande thyroïde est normale, mais très petite.

Larynx normal. - Sur la muqueuse buccale de la joue

gauche on trouve une ulcération en plaque, allongée, repo-

sant sur le tissu sous-jacent induré et répondant à l'espace

situé entre les deux arcades dentaires. A droite, au point

correspondant, il paraît avoir existé une môme lésion ac-

tuellement cicatrisée. La plupart des viscères contien-

nent très peu de sang.

Tête. - Le cuir chevelu n'offre rien de notable, sauf la

disparition complète du tissu adipeux sous-cutané. Les

différentes parties du crâne paraissent symétriques. Le

trou occipital, les fosses occipitales et la gouttière basilaire

forment un entonnoir beaucoup plus prononcé que d'ordi-

naire. - La calotte est assez mince; les sutures ne sont

pas ossifiées, sauf la bi-frontale. - On y trouve de nom-

breuses surfaces transparentes, surtout au niveau des pa-

riétaux, et à gauche.

On recueille 125 grammes de liquide céphalo-rachidien.

La dure-mère présente des adhérences aux os assez faciles

à détruire. Après l'incision de la dure-mère, on aperçoit

immédiatement une destruction complète des lobes tem-

poraux remplacés par un pseudo-kyste qui laisse voir par

transparence une coloration ocreuse du foyer. Au niveau

de l'extrémité antérieure des première et seconde circon-

volutions frontales gauches,une poche irrégulière de 3 cen-

timètres sur 2 centimètres, tremblotante, d'aspect rappe-

lant une hydatide, mais n'étant qu'un pseudo-kyste. A un

centimètre en arrière de ce pseudo-kyste,se trouve un petit

foyer occupant le troisième quart de la deuxième circon-

volution frontale gauche (un centimètre carré).

Le cerveau, reposant sur sa face convexe, on voit que

l'hémisphère gauche est en retrait de près d'un centimè-

tre sur l'hémisphère droit. La base du lobe frontal est

moins large à gauche qu'à droite. En arrière, le lobe occi-

pital gauche est en retrait de plus d'un centimètre au ni-

veau du bord convexe. Après macération prolongée dans

l'alcool, on trouve que l'hémisphère gauche mesure en

longueur 12 centimètres 7, le droit 12 centimètres 1/2.

Les deux hémisphères ont 7 centimètres de hauteur au ni-

veau de la pariétale ascendante; la largeur est de 3 centi-

mètres pour le gauche, de 3 centimètres 7 pour le droit.

On note également que les deux nerfs olfactifs ont une co-

162 INÉGALITÉ CROISEE DU CERVEAU ET DU CERVELET.

loration ocreuse et que le droit est d'un quart plus petit

que le gauche. La bandelette optique droite est de moitié

plus petite que la gauche. La pie-i2ère s'enlève facilement,

sauf Sur les surfaces kystiques. L'encéphale pèse 560 gr.-

Le cerveau 460 gr. - L'hémisphère cérébral droit pèse

278 gr., le gauche 187 gr.

Cervelet, GG gr. ; bulbe et protubérance, 14 gr. L'lzé-

misphère cérébelleux gauche pèse 7 gr. de moins que lo

droit.

Description des circonvolutions. Hémisphère gau-

che. Scissures ; La scissure de Sylvius est presque

entièrement comprise dans le pseudo-kyste le plus volumi-

neux, elle est réduite à une partie de la lèvre antéro-supé-

rieure du lobule orbitaire à l'extrémité postérieure et infé-

rieure de la pariétale ascendante. Le sillon de Rolando

est normal. La scissure parallèle frontale est complète.

La scissure interpariétale est réduite à sa lèvre anté-

rieure et supérieure, sa lèvre postérieure formant de oe

côté la limite du grand pseudo-kyste. Son rameau ascen-

dant existe et est régulier. - La scissure perpendiculaire

externe est réduite à sa lèvre supérieure. - La scissure

parafe est comprise entièrement dans le pseudo-kyste.

Sur la face interne, sauf la scissure perpendiculaire in-

terne, toutes les autres scissures sont normales.- La scis-

sure perpendiculaire interne est, à son extrémité posté-

rieure et inférieure, légèrement comprise dans le pseudo-

kyste ; à son extrémité inférieure et antérieure elle fait

partie, sur un centimètre environ, du même pseudo-kyste.

Face convexe. - Lobe frontal. Nous avons déjà

décrit les deux pseudo-kystes qui occupent l'extrémité an-

térieure des première et deuxième circonvolutions fron-

tales et celui qui est situé un peu en arrière à la partie

médiane de la seconde frontale. La première frontale

est bien développée, sinueuse dans toute la partie située

en dehors du kyste ; elle envoie deux plis de passage à la

seconde frontale. La scissure frontale supérieure ost dé-

doublée dans son tiers postérieur. La seconde frontale

est bien développée dans sos deux quarts postérieurs,

atrophiée dans la partie compriso entre les deux kystes

qui siègent à sa partie antérieure. - La scissure frontale

inférieure est normale, elle communique avec la première

non seulement par la scissure parallèle frontale, mais en-

core par une autre scissure parallèle et plus antérieure

qui sépare le troisième quart du quatrième quart de la

deuxième frontale. Le lobule orbitaire est assez bien

ATROPHIE CÉRÉBRALE. 163

développé et sinueux dans sa partie externe, mais le gyrus

rectus est atrophié surtout à sa partio antérieure qui est

effilée et présente une teinte mi-partie jaunâtre, mi-par-

tie transparente. - Toutes les circonvolutions ont l'air de

converger vers la scissure en H. - La frontale ascendante

est bien développée, coupée vers son milieu par une scis-

sure transversale profonde qui semble continuer la scis-

sure frontale supérieure (1), dont elle est séparée par un pli

de passage transversal allant en avant de la scissure paral-

lèle frontale de la seconde à la première frontale. La

pariétale ascendante est assez volumineuse et assez si-

nueuse.- Le lobule pariétal supérieur est peu développé;

quelques points voisins de la scissure interpariétale sont

atrophiés et font partie de la lésion sous-jacente. - Le

lobule pariétal inférieur, le pli courbe, les lobes tempo-

ral et occipital, le lobule de l'insu la sont entièrement com-

pris dans la lésion qui a donné lieu à la formation du grand

pseudo-kyste, sillonné comme les autres par de minces

filaments, squelette du tissu conjonctif.

Face interne. - La première circonvolution frontale,

dans sa partie antérieure, est comprise dans le pseudo-

kyste de cette région, ou atrophiée ; dans ses trois quarts

postérieurs, cette circonvolution est bien développée et

sinueuse. La circonvolution du corps calleux parait atro-

phiée dans son ensemble et est, en tous cas, moins déve-

loppée que celle de l'autre hémisphère. Ses extrémités

antérieure et postérieure sont manifestement lésées; celle-

ci est réduite en bas à un squelette mince de substance

blanche et au-dessus présente,sur une hauteur d'un demi-

centimètre, de l'atrophie avec coloration grise un peu

ardoisée. Le lobule paracentral est assez bien développé

avec une incisure en forme de croissant, dont l'ouverture

regarde en haut et un peu en arrière. - Le lobule qua-

drilatère est bien développé, sinueux, il n'est atteint, et

encore superficiellement, que sur la face qui forme la

lèvre antérieure de la scissure perpendiculaire interne. Lo

coin est, par ses différents bords, compris dans le grand

pseudo-kysto ou dans la lésion environnante ; il est, par

ses autres parties, presque réduit à une simple coque do

substance grise. Le pli de passage pariéto-temporal izfé-

(1) Cette incisure de la frontale ascendante est loin d'être rare ;

parfois môme, comme chex Schah..., malade décédé en janvier

1886, cette incisure est double, de telle sorte que la deuxième cir-

convolution frontale semble so continuer jusqu'à la frontale ascen-

dante.

164 DESCRIPTION DES CIRCONVOLUTIONS.

rieur est complètement compris dans la lésion kystique.

Le lobe temporo-occipital n'existe pas et fait partie du

kyste.- Le corps calleux est peu développé, présente une

coloration grise un peu ardoisée; son extrémité postérieure

(bourrelet) est comprise dans le kyste. Le corps strié, la

couche optique, n'offrent rien de particulier. Le ventricule

latéral, normal en avant, communique en arriére large-

ment avec la poche du grand pseudo-kyste dont il forme

une partie de la paroi.

Hémisphère droit. - a) Scissures. La scissure de Syl-

vius, en grande partie comprise dans le kyste du lobo

temporal, présente toutefois sa constitution normale à sa

terminaison, sur une longueur de deux centimètres envi-

ron. Le sillon de Rolando est normal, sinueux, assez

profond. La scissure parallèle frontale est presque com-

plète, simplement interrompue par un pli de passage, à

niveau, allant de la deuxième frontale à la frontale ascen-

dante. La scissure interpariétale est assez profonde,

sinueuse, possède un rameau ascendant. La scissure per-

pendiculaire externe, assez profonde, limite par sa lèvre

inférieure la lésion siégeant sur le lobe occipital. La scis-

sure parallèle est comprise dans le kyste du lobe temporal.

Les différentes scissures delà face interne assez profondes

et sinueuses paraissent normales,

b) Face convexe. La première circonvolution fron-

tale, assez volumineuse, surtout à sa partie postérieure, est

dédoublée dans ses quatre cinquièmesantérieurs et présente

un aspect un peu chagriné à son extrémité antérieure. La

scissure frontale supérieure est profonde et sinueuse. La

deuxième circonvolution frontale, sinueuse, bien déve-

loppée à sa partie postérieure, grêle à sa partie moyenne

et un peu chagrinée à son extrémité antérieure, présente

à son tiers moyen, au niveau de la lèvre inférieure de la

scissure frontale supérieure, un petit kyste allongé le long

de cette lèvre sur une longueur d'un peu moins d'un cen-

timètre (2 à 3 mill. de largeur). - Cette circonvolution

envoie vers le tiers moyen deux plis de passage de niveau à

la troisième frontale,et en arrière unplidepassagc deniveau

à la pariétale ascendante. La troisième circonvolution

frontale est bien développée, sinueuse ; son extrémité

antérieure est très légèrement chagrinée. Le lobule orbi-

taire est sinueux; le gyrusrectus paraît normal ; les autres

circonvolutions de ce lobule semblent un peu atrophiées

surtout à la partie antérieure où elles ont un aspect cha-

grincé. La frontale ascendante, assez grosse et sinueuse,

présente la même scissure transversale que nous avons

ATROPHIE CÉRÉBRALE. 165

signalée sur l'autre hémisphère; cette incisure transver-

sale communique avec la scissure frontale supérieure. Le

lobule pariétal supérieur, assez volumineux dans son

ensemble, est un peu grêle et légèrement chagriné dans la

partie située au-dessus de la lèvre supérieure de la scis-

sure perpendiculaire externe. Le lobule pariétal inférieur

et le pli courbe, surtout ce dernier, sont atrophiés et cha-

grinés ; la partie du lobule pariétal inférieur située direc-

ment en arrière de la pariétale ascendante parait cepen-

dant à peu près naturelle. Tout le lobe occipital est atro-

phié et montre à sa surface une coloration lie de vin. A la

coupe, on constate que cette coloration est superficielle ;

en dessous, la substance cérébrale est fortement colorée en

jaune ocreux et est aréolaire. Le lobe temporal est réduit

à une languette de la première circonvolution temporale;

tout le reste du lobe, ainsi que le lobule de l'insula, sont

englobés dans le pseudo-kyste que l'on trouve dans cette

région, pseudo-kyste de même nature et aspect que celui

signalé sur l'autre hémisphère.

c) Face interne. - La première circonvolution frontale

est assez sinueuse et bien développée ; à son origine, sur

une longueur d'environ un centimètre, elle a une colora-

tion grise ardoisée et est plus ferme. La circonvolution du £

corps calleux est bien nourrie, ainsi que les lobules para-

central, quadrilatère et le coin. Le lobe temporo-occipital

n'existe pas et fait partie du kyste.

Le corps calleux a le même aspect qu'à gauche, mais

moins accentué peut-être ; son extrémité postérieure est

comprise dans le kyste temporal. Le corps strié paraît

normal, ainsi que la couche optique.

Le ventricule latéral ne paraît pas en connexion avec

le kyste. L'hémisphère cérébelleux gauche est notablement

atrophié. La protubérance et le bulbe n'offrent rien de

particulier à l'oeil nu.

RÉFLEXIONS. - I. L'hérédité a exercé, dans ce cas, une

influence notable qu'explique l'état nerveux du père, et

l'aliénation antérieure de la mère.

II. Une autre cause peut encore être invoquée, c'est la

profession insalubre exercée par le père à l'époque do la

conception. On sait, en effet, que le maniement du sulfure

de carbone, employé dans la fabrication du caoutchouc,

exerce une action nocive sur la santé. Nous avons eu déjà

l'occasion, en' maintes circonstances, de relever l'action

166 IDIOTIE. COMPLÈTE CONGÉNITALE.

des professions insalubres sur la production de l'idiotie.

Nous résumerons un jour tous les faits que nous possé-

dons sur ce sujet (1). -

III. A quelle époque s'est produite la lésion dont l'au-

topsie nous a révélé les cicatrices, nous l'ignorons. Peut-

être est-on en droit de penser que c'est durant la vie intra-

utérine, s'il est exact, comme la mère l'a affirmé, que l'on

n'a jamais observé de convulsions chez son enfant. Cette

opinion s'appuie encore sur ce fait que, à aucun moment,

il n'aurait présenté le moindre indice d'intelligence. C'est

seulement vers l'âge de 8 ou 9 mois que sa mère aurait

songé à la possibilité d'un arrêt de développement : R ? ne

se tenait pas sur les jambes ; il n'avait pas encore de dents ;

il ne riait ni ne gazouillait. Ces soupçons ne se trans-

formèrent en certitude qu'à partir d'un an. Alors elle

s'aperçut que le sommeil devenait mauvais, était inter-

rompu par des « cris sauvages », que la parole était nulle,

la marche impossible ; enfin elle vit s'ajouter à tous ces

signes des grincements de dents, le balancement, d'autres

tics, etc. (2).

IV. Le diagnostic clinique était facile à porter : il s'a-

gissait là d'un cas d'idiotie complète. Quant à la cause,

c'est-à-dire à la lésion anatomique qui l'avait déterminée,

nous avouons être restés indécis. C'estde ce côté, pourtant,

qu'il faut diriger ses investigations, car cette connais-

sance seule peut permettre de porter un pronostic sérieux

et, par conséquent, de dire au moins approximativement

dans quelle mesure l'enfant est perfectible.

V. Les lésions découvertes à l'autopsie ont été décrites

plus haut trop minutieusement pour qu'il soit utile d'y re-

venir. Nous rappellerons seulement que les deux foyers

principaux avaient détruit plus ou moins complètement les

lobes temporaux et occipitaux, les lobules pariétaux infé-

rieurs et les lobules de l'insula; qu'il existait plusieurs

autres foyers (pseudo-kystes) de moindre étendue sur les lo-

(1) Voir aussi F. Roque. Des dégénérescences hél'éclilail'es

produites par l'intoxication saturnine lente. Paris, 1872.

() Nous publierons prochainement une note sur les premiers

signes de l'idiotie.

ATROPHIE CÉRÉBRALE CONGÉNITALE. 167

bes frontaux ; - que les circonvolutions ou les parties de

circonvolutions avoisinantes étaient atrophiées ; que

quelques-unes avaient un aspect chagriné ; - que les lé-

sions étaient plus accusées sur l'hémisphère gauche qui

pesait 91 gr. de moins que le droit; que l'hémisphère cé-

rébelleux gauche était un peu atrophié; qu'enfin il y avait

une atrophie de la bandelette optique droite. La multipli-

cité des lésions, la formation consécutive de pseudo-kystes

nous font penser que la lésion primitive était un ramollis-

sement probablement de nature inflammatoire (1).

Dans sa remarquable monographie, M. Cotard a signalé

une opinion qui nous semble contredite par notre observa-

tion : «Si, dit-il, les lésions se produisaient des deux côtés,

une mort prompte s'ensuivrait nécessairement, et l'on

n'observerait pas ce ratatinement du cerveau, cette dimi-

nution de volume, ces pertes de substance qui sont le ré-

sultat d'un développement imparfait ou d'un long travail

de résorption de la substance cérébrale, » On a yu, en ef-

fet, que chez Ren... il existait des lésions très étendues,

portant non seulement sur l'un des hémisphères mais sur

les deux. Relevons, on terminant, que l'enfant était par-

venu à se servir de ses quatre membres, ce qu'explique

l'intégrité des régions motrices (2).

(1) Comparer avec deux observations que nous avons publiées il y

a deux ans et se reporter aux planches qui l'accompagnent. (A 1'chi-

ves de neurologie, 1885, t. IX, p. 320 et Compte rendu de Bicê-

tre pour 1884, p. 13 et 56).

(2) Nous avons présenté le cerveau à la Société anatomique et

montré, comme dans toutes les communications du service faites

depuis 1880, le moule de la tôle et les photographies du malade.

168 IDIOTIE ET SCLÉROSE CÉRÉBRALE.

VI.

Idiotie symptomatique de sclérose cérébrale

diffuse ;

Par BOURNEVILLE et PILLIET.

SOMMAIRE. - Idiotie : crises convulsives ; contractures ;

gâtisme; marche, parole, mastication nulles. Mo-

7oi-cltidie ; phimosis. Mort.

Autopsie. Broncha-pneumonie; sclérose intersti-

tielle et parenchymateuse diffuse subaiguë des deux

hémisphères ; atrophie prononcée des cellules motrices

des cornes antérieures de la moelle épinière.

Reb..., Emile, né à Voreppe (Isère), le 24 novembre 1874,

est entré à Bicêtre (service de M. BOURNEVILLE), le 3 février

1886 et il y est mort le 20 février suivant.

Les renseignements, fort incomplets ont été fournis par

une personne chez laquelle la mère de l'enfant était femme

de ménage. Elle y est restée deux ans, et en est sortie ma-

lade, fatiguée, pour se rendre dans son pays ; du-

rant son séjour, elle n'a jamais eu de maladie ; elle n'a-

vait pas d'habitudes d'intempérance; elle était très intelli-

gente.-Le père était intelligent, sobre et rangé ; la mère

aurait dit souvent qu'il n'y avait pas d'idiots dans sa fa-

mille.- Elle a un autre enfant, ouvrier gantier, qui serait

intelligent. Souvent elle a répété que son enfant n'était

pas né tel qu'il était, mais, que son idiotie était survenue à

la suite d'une maladie, à deux ans.

Lorsque la mère est entrée au service de M. J..., notre

malade avait 9 ans ; il ne pouvait ni marcher, ni parler ; il

poussait des cris inarticulés; ne connaissait pas sa mère ;

passait ses journées couché ou assis sur une chaise ; ne

pouvait manger seul ; était gâteux. Il avait souvent des

attaques ( ? ) pendant lesquelles les membres se tordaient et

qui se terminaient par l'apparition d'écume aux lèvres.

Pendant deux ans, son état est resté à peu près le même.

DESCRIPTION DU MALADE. 169

Etat actuel (février). Tête volumineuse, symétrique, le

front est droit et assez haut, les cheveux châtain-clair. Il

n'y a sur le cuir chevelu, ni croûtes, ni cicatrices; les

sourcils sont châtains et peu fournis ; les yeux gris bleus ;

le nez est droit et régulier; les oreilles sont larges, très

décollées, l'ourlet est développé, la conque prononcée. La

dentition est irrégulière; les dents sont crénelées dans le

sens vertical. Voici les dimensions de la tête :

170 ACCIDENTS MÉNINGITIQUES.

le volume d'une petite olive ; léger phimosis ; méat nor-

mal.

Nombreux ganglions des deux côtés du cou, surtout à

gauche, avec cicatrices en avant et en arrière du sterno-

cléido-mastoidien. - Escharres superficielles dans la ré-

gion lombaire et aux fesses; l'enfant est couché dans lo

décubitus latéral gauche. Les réflexes cutanés sont exa-

gérés. L'exploration spéciale de chaque sens est impos-

sible.

L'enfant ne manifeste par aucun signe le désir de man-

ger ; il ne prend que des aliments, légers et il ne paraît pas

savoir mâcher. Ni vomissements, ni rumination, ni diar-

rhée ; gâtisme complet ; grincement fréquent des dents.

- -- Reb... ne prononce aucune parole et est incapable de

s'aider en quoi que ce soit (habillement, toilette, etc.l. Il

reste toute la journée dans son lit, dans la position où on

l'a mis le matin.

15 février. L'enfant est couché dans le décubitus dorsal;

les cuisses et les jambes fléchies ; il en est de même pour

les avant-bras. Il a les yeux fermés comme s'il craignait la

lumière; il refuse son lait; râle trachéal; toux. P. 11G :

T. R. 39°, 2.

16 février. Hier, il a bu un peu de lait; ce matin, il est

dans l'état suivant : les sourcils sont froncés, les paupière ?

fortement fermées. L'oeil droit est en strabisme conver-

gent ; les pupilles sont moyennement dilatées. Le sillon

naso-labial est accusé des deux côtés, sans irrégularité ;

la bouche est entr'ouverte; l'expiration s'accompagne

presque constamment d'une plainte douce. Râle trachéal ;

de temps en temps, l'enfant a quelques secousses d'une

toux grasse, pendant lesquelles il projette sa langue hors

de la bouche. En avant et en arrière, on entend dans les

deux poumons des ronchus disséminés qui couvrent le

mouvement respiratoire. Pas de matité. Les inspirations

sont assez lentes, saccadées; pouls petit, serré, rapide, à

124. La nuque est raide ; on a noté quelques cris durant

la nuit du 15 au 16 février. Mâchonnement et grincement

des dents par intervalle ; pas d'épistaxis ; pas de vomisse-

ments. Ventre plat, rétracté sans diarrhée. L'examon pa-

raît pénible à l'enfant qui contracte ses sourcils et pousse

de légers cris. En plus des contractures et des attitudes

fixes déjà constatées à l'entrée, on observe une légère con-

tracture des masséters.- T. R., matin 38°,6. Soir : 39°,8.

- Traitement : Lotions vinaigrées, eau-de-vie allemande

15 gr., sulfate de quinine 0,60 centigr.

17 février. Cinq selles verdâtres avec le purgatif; la nu'it

ACCIDENTS MÉNINGITIQUES. 171

a été bonne ; l'enfant ne s'est pas plaint ; le matin, il est

dans le même état et dans la même attitude ; somnolence

continuelle, entre-coupée de plaintes, de'mâchonnements

et de grincements de dents. Pouls 97, irrégulier; respira-

tion irrégulière ; toux fréquente. La température oscille

entre 37° et 38°.

18 février. Ce matin T. R. 38°,4; le malade ouvre les

yeux; il tousse beaucoup moins; le mâchonnement est

devenu constant. Les deux avant-bras sont beaucoup plus

difficiles à étendre qu'il y a trois jours; du côté droit, les

mouvements provoqués de l'épaule sont difficiles. La tête

est inclinée sur l'épaule droite. Elle peut être ramenée

sans trop d'efforts à sa situation normale. D'une manière

générale, les contractures paraissent avoir augmenté, les

pupilles réagissent mal à la lumière.

19 février. Après une nuit calme, le malade a eu ce ma-

tin subitement une petite crise. Il est devenu pâle, puis les

yeux se sont déviés en haut et à gauche; les ailes du nez

se sont pincées ; la bouche était toute grande ouverte sans

déviation. Cet état aurait duré 3 à 4 minutes, d'après la

surveillante. On n'a remarqué aucune convulsion des

membres. Le malade prend du bouillon et du lait, et

refuse les autres aliments. Le mâchonnement est continuel.

T. R. Matin : 38°.4. - Soir : 39°,G.

20 février. L'enfant est dans un coma profond ; les cor-

nées sont vitreuses, mais encore sensibles. La nuque est

raide ; exagération manifeste des réflexes cutanées.- Pouls

140, petit, régulier; respiration régulière; T. R. 410,6.

Mort à 8 heures et demie du soir. Aussitôt après la mort;

T. R. 42° ; - une heure après 40° ; - deux heures après

38°,2. Poids après décès, 12 kil. 200.

Autopsie faite le 22 février, à 10 heures du matin. -

Cour normal ainsi que le péricarde et l'aorte. Poumons :

droit : 180 gr. ; gauche : 170 gr. Les ganglions bronchi-

ques forment des masses caséeuses assez volumineuses,

rétrécissant la lumière des bronches. Quelques adhé-

rences du poumon droit et entre les deux lobes pulmo-

naires du côté gauche; pas de granulations dans le poumon,

mais une congestion intense et des noyaux de broncho-

pneumonie dans la partie inférieure du lobe droit.

Abdomen : foie, 645 gr.; quelques adhérences de la face

convexe au diaphragme ; rien d'anormal. Rate, 45 gr. ,

- Estomac dilaté; muqueuse saine en apparence, ainsi

que colle de l'intestin. Canal thoracique sans dilatation.

Reins et uretères normaux, posant ensemble z0 gr.- *

172 DESCRIPTION DES CIRCONVOLUTIONS.

Testicules égaux, petits. Corps thyroïde sain ; trachée

normale ; thymus persistant.

Tête. Cuir chevelu, rien. La face convexe de la

calotte crânienne ne présente pas d'hypérémic. La suture

frontale est persistante, mais en voie d'ossification ; les

sutures sont normales ; le diploé assez développé ; le crâne

symétrique. - Il y a une hypérémie assez prononcée de

la face interne. La base du crâne est symétrique et nor-

male. La quantité de liquide céphalo-rachiclien est légère-

ment augmentée. L'encéphale pèse 1.145 gr. La pie-

mère présente des taches laiteuses des deux côtés de la

grande scissure, à la base, elle offre une vascularisation

très fine qui est beaucoup plus prononcée à la convexité.

La décortication s'opère facilement. -- Les artères de la

base sont symétriques, sauf que la communiquante posté-

rieure gauche est un peu plus fortequeladroite.Les bande-

lettes optiques, les tubercules mamillaires, les pédoncules

cérébraux, etc. , sont symétriques. Cervelet et isthme

170 gr.

Les deux hémisphères cérébraux sont égaux ainsi que

les hémisphères cérébelleux. Il n'y a point, dans toutes

ces parties, de différence de coloration.

' Cerveau. Hémisphère droit. - Face convexe. - La

première frontale est sinueuse, bien développée, se ter-

minecns'insérant directement sur la frontale ascendante et

en envoyant un pli de passage grêle à la deuxième fron-

tale ; elle est double dans presque toute sa longueur. La

deuxième frontale, également large et fortement contour-

née, envoie à son origine deux plis de passage à la troi-

sième frontale, et cesse brusquement au moment de s'in-

sérer sur la troisième frontale dont elle est séparée par

une incisure profonde. - La troisième frontale, courte,

très flexueuse, s'insère largement sur le pied delà frontale

ascendante; elle offre sur son trajet une incisure moyenne,

immédiatement avant cette insertion. La pariétale ascen-

'tante est très marquée dans sa portion inférieure, se ren-

fle un peu dans son tiers moyen et s'amincit de nouveau

dans sa partie supérieure. Le pli pariétal supérieur est

sinueux et assez gros. - Le pli pariétal inférieur est as-

sez gros, mais moins que le premier. Le pli courbe est

sinueux, doublé en arrière d'une circonvolution recourbée

qui s'anastomose en bas avec l'extrémité de la deuxième

.temporale. Le lobe occipital est d'aspect assez maigre.

- La scissure de Sylvius n'est pas très ouverte ; le lobule

DESCRIPTION DES CIRCONVOLUTIONS. 173

de l'insula a trois digitations très saillantes et reçoit en

arrière deux plis de passage de la première temporale.

La première temporale envoie à la deuxième un volumi-

neux pli de passage, interrompant la scissure parallèle.-

La deuxième temporale envoie deux plis de passage à la

troisième, qui communique avec la quatrième par deux

plis de passage formant une sorte de masse à la partie

moyenne. Les sillons qui séparent les circonvolutions

frontales, la scissure frontale parallèle, le sillon de Ro-

lando et tous les sillons postérieurs sont sinueux et pro-

fonds.

Face interne. La première frontale est sinueuse, as-

sez volumineuse. Le lobule paracentral est bien déve-

loppé, avec un sillon en Y, et présente deux courbes si-

nueuses, répondant, l'une à la scissure frontale parallèle,

l'autre au sillon de Rolando. - La circonvolution du

corps calleux est volumineuse, avec des sillons superfi-

ciels. Le lobe carré est composé de circonvolutions

étroites, assez maigres. Le coin est petit et régulier.

Le lobe occipital est formé par des circonvolutions un peu

plus volumineuses que sur la face convexe. - Le lobe or-

bitaire est développé. - Les sillons calloso-marginal,

perpendiculaire interne et la scissure calcarine, sont

profonds. La circonvolution de l'hippocampe est volu-

mineuse en avant, un peu moins en arrière, à peu près

lisse. La corne d'Ammon, le corps calleux, la couche

optique, le corps strié ne présentent rien de particulier.

Hémisphère gauche. Face convexe,- La première cir-

convolution frontale est large, bien développée, renflée à

son extrémité postérieure, s'insérant sur la frontale as-

cendante par une portion assez large, rejetée en dedans,

vers le lobe paracentral. Elle se dédouble vers le tiers an-

térieur de son trajet pour fournir un pli assez long et si-

nueux qui va s'insérer sur la deuxième frontale, près de la

terminaison de cette dernière. - La deuxième frontale

est sinueuse, un peu amincie sur deux ou trois points de

son trajet, et a son insertion sur la frontale ascendante.

La troisième frontale, fortement flexueuse, présente éga-

lement des traces d'amaigrissement léger en quelques

points, surtout au niveau de ses courbures. Les trois fron-

tales s'insèrent de niveau sur la frontale ascendante.- La

frontale ascendante, un peu grêle à sa portion inférieure,

se renfle à partir de l'insertion de la deuxième frontale.

La pariétale ascendante est grêle également, son origine

et près de sa terminaison. Le pli pariétal supérieur est

174 EXAMEN HISTOLOGIQUE.

volumineux, sinueux, avec quelques sillons superficiels.

Le pli pariétal inférieur est également volumineux,

mais moins sinueux. Le pli courbe, très sinueux, com-

posé de circonvolutions grêles, offre en arrière deux cir-

convolutions recourbées qui vont se rendre au lobe occipi-

tal. - La première temporale, très sinueuse, envoie à son

origine un pli de passage à la deuxième et deux digita-

tions au fond de la scissure de Sylvius; la scissure paral-

lèle est sinueuse et très profonde. - La deuxième tempo-

rale, également très sinueuse, envoie deux plis de passage

à la troisième temporale qui est volumineuse, ainsi que la

quatrième, avec laquelle elle communique par un pli de

passage assez large. Le lobule de l'insula se compose

do trois digitations tortueuses et un peu moins saillantes

que celles du côté droit. - Les scissures frontales, la Ro-

landique, la scissure de Sylvius, etc., sont, en général,

très profondes et flexueuses. -Le lobe orbitaire présente

à peu près la même disposition que du côté opposé.

Face interne. - La première circonvolution frontale

est volumineuse, dédoublée dans presque tout son par-

cours. Le lobule paracentral est curviligne, avec un

petit sillon droit, et une seule encoche due au sillon de Ro-

lando. - Le lobe carré est étroit, le coin un peu plusgros

qu'à droite. Le lobe occipital est composé de circonvo-

lutions maigres. La circonvolution de l'hippocampe est

assez volumineuse, non plissée. La circonvolution du

corps calleux, le ventricule latéral, la couche optique,

n'offrent rien de particulier.-Les scissures de cette face

interne sont également profondes et en général assez si-

nueuses.

Il existe sur la portion la plus convexe des circonvolu-

tions quelques adhérences, la partie la plus superficielle

de la substance grise a été enlevée avec la pie-mère. Ces

adhérences sont surtout marquées sur les faces latérales

des deux côtés, on en trouve aussi sur les lobes frontaux

et occipitaux ; mais elles sont beaucoup plus restreintes.

L'examen histologique a été fait au laboratoire des travaux

pratiques delà Faculté. Le cerveau avait été durci par l'alcool,

la moelle par le liquide de Muller ; des coupes ont été faites en

différentes régions, tant à gauche qu'à droite, sur chaque hé-

misphère.

La première frontale gauche, à sa naissance, montre un cer-

tain nombre de corps granuleux répandus dans la substance

blanche et qui se colorent en noir sur une coupe exposée aux

vapeurs d'acide osmique. On voit aussi do fines gouttelet'es

encéphalite; POROSE cérébrale. 175

graisseuses exister dans la substance grise. Sur des coupes

colorées, on constate que la vascularisation paraît normale; les

cellules nerveuses sont nombreuses, disposées en séries; beau-

coup ont leur forme pyramidale et des prolongements nets. En

somme, les cinq couches de la substance grise ne présentent

pas de lésions nettes; la substance blanche offre des lésiuns

de désintégration.

Sur le milieu de cette première frontale gauche, la substance

blanche a le même aspect; les corps granuleux y sont nom-

breux, le tissu est sillonné par des bandes fibrillaires nombreu-

ses qui rayonnent dans la substance grise. Du côté de celle-ci,

les lésions sont les mêmes pour les cinq couches; la vasculari-

sation est exagérée; les capillaires, au lieu de s'enfoncer tout

droit dans la substance grise s'y ramifient, la morcellent; l'as-

pect normal des cellules nerveuses placées bout à bout n'existe

plus dans les couches moyennes; les cellules nerveuses, surtout

dans la couche des petites cellules pyramidales 1,2° couche de

Meynert), sont devenues rares ; pourtant les grandes cellules

existent encore, mais nulle part elles ne sont groupées par nids

comme on les trouve à l'état normal dans les régions motrices,

ainsi que l'a indiqué Betz; elles sont, au contraire, assez

clair-semées. D'autre part, les cellules interstitielles à petits

noyaux sphériques ne paraissent pas multipliées dans la subs-

tance grise, mais le sont évidemment dans la substance blan-

che.

La coupe d'une circonvolution du lobe occipital gauche à

la face externe de l'hémisphère, au-dessus du corps calleux,

montre la substance grise un peu réduite d'épaisseur, mais

avec ses couches reconnaissables. Il existe un certain nombre

de foyers de désintégration assez pauvres en cellules, ou pres-

que toute la trame de l'écorce grise s'est enlevée avec la pie-

mère, ou est tombée. Le réseau fibrillaire de la névroglie y est

comme tassé, ces foyers se colorent plus vivement par les

réactifs, mais les mailles très larges de la névroglie circons-

crivent un grand nombre de vacuoles, d'espaces vides, qui

constituent de véritables pertes de substance. Ces foyers inter-

rompant la disposition des fibres nerveuses qui gagnent la

substance blanche, comprennent en général les trois premières

couchesdel'écorce. On les retrouve dans la plupart descerveaux

en voie d'atrophie ; ils nous paraissent constitueruneébauche,

un début microscopique, de ce qu'ont décrit MM. Bizzozero et

Golgi, sous le nom de porose cérébrale. Dans la substance

blanche, il n'y a que peu ou pas de corps granuleux, mais toute

la ligne de transition, entre les deux substances, est infiltrée

d'une quantité considérable de petites cellules interstitielles. Il

y en a moins dans la substance blanche elle-même.

176 SCLÉROSE diffuse DE la MOELLE.

L'hippocampe du côté gauche a les mêmes lésions que la

première frontale; il existe des foyers de désintégration dans

la substance grise, des amas considérables de corps granuleux

dans la blanche. Les cellules géantes de la région sont éparses

au milieu de la névroglie, leurs dimensions sont au-dessous

de celles qu'on s'attend à rencontrer la ; la ligne de grandes

cellules du corps bordant ne paraît pas altérée.

La lèvre inférieure de la scissure de Sylvius droite a aussi

une vascularisation très prononcée, beaucoup plus accusée que

partout ailleurs; les cellules interstitielles paraissent abondan-

tes ; à part cela, l'aspect est également le môme que dans les

régions motrices gauches. La première frontale et le lobe oc-

cipital droits sont à peu près semblables aux gauches sur les

points correspondants. Sur le cervelet, examiné du côté gau-

che, on trouve une raréfaction des éléments nerveux de la cou-

che des cellules de Purkinjo ; une diminution d'épaisseur de la

couche des myélocytes, et un certain degré de sclérose de la

substance blanche, parsemée de corps granuleux.

La moelle cervicale a ses parties symétriques, mais il y a

disparition à peu près complète des cellules motrices dans les

deux cornes antérieures. Il existe encore des cellules nerveu-

ses en assez grand nombre dans les cornes postérieures. Les

cordons blancs ne présentent qu'une lésion diffuse, un épais-

aissement du tissu interstitiel qui se colore fortement par le

carmin. Cet aspect de sclérose diffuse est bien plus accentué

Y,ur les cordons blancs de la moelle lombaire; de plus, les

cornes antérieures, symétriques, contiennent un certain nom-

bre de grandes cellules, relativement très peu abondantes, se

colorant mal par le carmin. Il y en a beaucoup moins encore

dans les cornes postérieures.

Sur des fragments du biceps gauche, on voit do l'épaissis-

sement des grosses travées conjonctives qui cloisonnent le

muscle, les petites travées nesont pas modifiées. Les faisceaux

musculaires eux-mêmes ne paraissent pas altérés.

I. Nous n'avons pu recueillir que des renseignements

tout à fait vagues sur les antécédents héréditaires et per-

sonnels de ce petit malade. De plus, il est mort moins d'un

mois après son entrée. Aussi n'aurions-nous pas publié son

observation si elle n'avait présenté un intérêt réel au point

de vue anatomo-pathologique.

II. Au point de vue anatomo-pathologique, nous avons

vu que, dans l'encéphale, il existe une inflammation

chronique (encéphalite) à différents degrés ; dans la moelle,

encéphalite. 177

le même processus paraît plus avancé encore, et l'atrophie

des éléments nerveux portée très loin. Ces lésions sont

générales et diffuses. Il n'y a nulle part d'état pigmentaire

des cellules, ni rien d'analogue à l'état hyalin si développé

que l'on observe à la période de tuméfaction des cellules

dans la paralysie générale. '

L'atrophie des circonvolutions et de la moelle résulte

donc de l'atrophie des éléments nerveux eux-mêmes et est

masquée en partie à l'oeil nu par la prolifération scléreuse.

Ce processus parait s'être fait d'une façon chronique pour

l'ensemble et subaiguë sur certains points diffus; ce qui

coïncide avec la prédominance de quelques symptômes à

gauche. Malgré l'atrophie plus marquée du côté gauche du

corps, il n'y a pas de lésions en foyers à droite, ceci n'est

pas rare dans les cas semblables. Les lésions assez légères

d'ailleurs observées du côté des méninges, les adhérences

de la pie-mère, sont beaucoup trop faibles .pour pouvoir

rendre compte des phénomènes observés et sont évidem-

ment consécutives aux désordres de la substance grise.

IÎH IDIOTIE COMPLÈTE.

VII.

Idiotie complète symptomatique d'une encé-

phalite avec foyers de ramollissement;

Par BOUIINEVILLE et PILLIET.

Les observations qui précèdent ont trait à des enfants

frappés d'un arrêt de développement intellectuel allant de

l'imbécillité à l'idiotie complète, reconnaissant pour cause

anatomique une méningite tuberculeuse, une méningo-

encéphalite, une sclérose interstitielle diffuse; l'observa-

tion suivante, curieuse à divers titres, va nous montrer

des lésions aussi de nature inflammatoire, mais offrant

des particularités que nous croyons encore peu connues.

SOMMAIRE. - Grand'mère paternelle rhumatisante et épi-

leptique. Grand'mère maternelle migraineuse. -

Premières convulsions à trois mois.- Premières dents

à deux ans. - Ophthalmic. - Rougeole. - Parole et

marche nulles; gâtisme ; marche impossible ; grima-

ces ; strabisme; balancement; tics multiples, etc. -

Conjonctivite granuleuse(\882). Pemphigus à petites

bulles (1883).- Entérites. - Accidents méningitiques ;

affaiblissement progressif; mort.

Autopsie. - Foyers petits et multiples de ramollisse-

ment de couleur ocreuse sur les circonvolutions ; lé-

sions consécutives de la substance blanche ; lésions

diffuses d'encéphalite chronique ; lésions de la subs-

tance grise et de la substance blanche de la moelle épi-

nière.

Portel...., Jacques Henri, né à Paris, le 30 mars 1879,

est entré à l'hospice de Bicêtre (service de M. BOURNEVILLE)

le 19 septembre 1882.

Renseignements fournis par ses père et mère. Père,

31 ans, professeur de piano, petit, d'apparence délicate : -,

ne tousse pas; intelligent; sobre; d'un caractère emporté;

antécédents. 179

n'est sujet ni aux migraines, ni à aucun accident nerveux;

pas de dermatose. [Père, peintre en tableaux, sobre, mort

d'une affection de poitrine vers 40 ans. Mère, 60 ans,

rhumatisante et sujette à des crises nerveuses que l'on

croit être de l'épilepsie. Deux soew's; l'une expatriée au

Brésil; l'autre mariée, sans enfants, bien portante. Pas d'a-

liénés, pas d'autres épileptiques, de paralytiques, de ner-

veux, etc., dans le reste de la famille]. J.

Mère, 28 ans, couturière; taille un peu au-dessous de la

moyenne; constitution délicate et chétive ; physionomie

agréable ; sobre, intelligente; pas de convulsions; de mi-

graines ni d'attaques. [Père, tailleur, sobre, mort d'une

pleurésie. - Mère, 55 ans, sujette à des migraines, avec

vomissements, mais pas d'attaques ni d'accès. Trois

frères : l'un officier de marine, bien portant, ainsi que les

deux autres (21 ans et 19 ans). - Une soeur, âgée de

16 ans, d'une bonne santé.- Pas de détails sur les grands

parents paternels. - Grand-père maternel mort de vieil-

lesse à 84 ans. Grand'mère maternelle morte asthmati-

que à 64 ans. Pas d'aliénés, de nerveux, etc.].

Pas de consanguinité (père et mère de Paris).

3 enfants et une fausse-couche (en premier lieu) à

5 mois 1/2 à la suite d'un effort : 1° notre malade;-2° un

garçon mort en nourrice de cholérine; pas de convulsions ;

3° une fille de 21 mois, bien portante, sans convulsions.

Notre malade. A la conception, le père et la mère

étaient bien portants, n'avaient pas de chagrins, vivaient

en bonne intelligence. Grossesse bonne; la mère a eu

des envies de boire du vin. mais toujours dans des limites

raisonnables. Accouchement à terme, naturel, sans

chloroforme, rapide. - A la naissance, rien do spécial,

pas d'asphyxie; c'était un bel enfant. -Élevé au biberon

et au sein par cinq nourrices successivement jusqu'à

3 ans et demi, car il refusait de prendre d'autres aliments

que du lait et des panades. A trois mois, convulsions

sur lesquelles on n'a pas eu de détails, toutefois on sait

que leur durée n'aurait point dépassé 15 minutes. Il

n'en n'aurait pas eu d'autres. Il ne marchait pas, se tenait

à une chaise. A 2 ans et demi, repris chez ses parents, il a

prononcé pendant un mois les mots : « papa » « maman » ;

et depuis, rien. Première dent seulement à deux ans ; elle

a percé sans douleurs ni convulsions. L'enfant était d'un

caractère très caressant, mais ne reconnaissait pas ses pa-

rents. Pas d'accès de colère ou de cris ni de grincements de

dents; pas de bave ni de succion; pas d'onanisme; som-

180 PEMPHIGUS; TICS.

meil bon. - Pas de salacité; il ne se nourissait chez ses

parents que de soupe; pas de vomissements ni de rumina-

tion. Gâteux; constipation. Porte.... a eu en nourrice

une ophthalmie double qui a duré un mois. Pas d'otite, de

dartres, etc. Rougeole à 2 ans et demi ; pas d'autres

maladies de l'enfance. - Il passait son temps chez sespa-

rents à jouer sur une chaise avec son biberon.

1882. Etat à l'entrée. Poids 8 kilog. 500 ; taille : 0"'78.

- Enfant maigre, chétif ; ne parlant pas ; ne marchant pas ;

gâteux ; sans troubles prédominants d'un côté du corps.-

Traitement : Sirop d'iodure de fer; sirop antiscorbutique ;

bains salés; exercices de marche.

24 octobre. Revacciné sans succès.

25 octobre. Conjonctivite granuleuse double intense ; la

cornée est intacte. Traitement : Solution de nitrate

d'argent à -^ en cautérisations.

25 novembre. Amélioration notable; on continue le ni-

trate d'argent.

30 novembre. L'enfant commence à marcher un peu.

1883. Janvier. Poids : 9 kil. 30 ; - taille : ou,78 c.

18 août. Eruption huileuse à contenu louche, les bulles

de 2 à 4 mil. de diamètre siègent surtout : 1° en arrière

entre les extrémités inférieures des omoplates, à la base

du sacrum ; 2° sur l'épaule droite et le thorax. L'enfant est

maussade et ne paraît pas souffrir localement.

20 août. L'éruption est en voie de dessication (1). La con-

jonctivite persiste mais très améliorée. L'enfant est gai ;

quand on le tient par les mains, il fait des mouvements du

tronc comme s'il voulait sauter. On le renvoie à la petite

école où il avait été envoyé dans le courant du mois de

juin et qu'il avait quittée momentanément pour aller à l'in-

firmerie. Il marche encore avec une certaine difficulté. Qn

est obligé de le faire manger en le prenant sur les genoux,

car il ne sait se tenir à table. Il ne veut prendre que de la

panade très claire, du lait, des oeufs. Il ne prend des ali-

ments que si on lui tient la tète renversée, et si on les lui

donnepar petites gorgées; illes suce avant de les avaler. La

parole est nulle, l'enfant ne reconnaît personne. Il a de

nombreux tics : il saute, il tappe ses mains sur ses yeux,

secoue fortement la tête ; il élève les bras et tourne vive-

ment les mains; il roule les yeux en haut et,en même temps

(1) Nous avons eu l'occasion d'observer plusieurs fois ce genre

d'éruption (pemphigus à petites bulles) chez les enfants idiots.

progrès DE l'enfant. 181

qu'il exécute tous ses mouvements ; il plie et relève alter-

nativement le corps et pousse de petits cris de joie.

8 septembre. Port... commence à manger des légumes,

principalement des pommes de terre bien claires et bien

écrasées; il mange un peu de pain émietté dans de la

sauce. Il se tient assez bien sur une chaiso. Il est plus gai

et reconnaît un peu les personnes qui le soignent.

18 septembre. Depuis quelques jours, l'enfant est triste,

ne veut pas se lever. Il est pâle, refuse toute autre nour-

riture que du lait, du bouillon et un peu de bagnols. Diar -

rhée légère; selles vertes très liquides. Traitement : eau

de chaux ; lavements amidonnés et laudanisés ; bismuth.

21 septembre. La diarrhée a cessé,mais l'état général est

le môme. Traitement : Bagnols et poudre de viande, etc.

10 novembre. L'état de la dentition est le suivant : dents

de lait, couvertes de tartre et de mucus ; gencives molles

et fongueuses ; mouvements de la mâchoire libres.- L'en-

fant quitte l'infirmerie le 15 décembre et retourne à la pe-

tite école.

1884. Janvier. Poids : 10kil.60; taille 0,82 c.- Port...

cherche à prendre lui-même le gobelet et à boire seul. Il

devient plus fort et sa marche est plus assurée. On lui a en-

tendu prononcer deux fois le mot « maman. »

10 mars-11, avril. Séjour à l'infirmerie pour une enté-

rite.

22 juillet. L'enfant sait courir maintenant ; il mange; il

fait de petites grimaces avec clignotement des yeux et stra-

bisme. Pas de voracité ni de rumination; il est diarrhéi-

que de temps en temps; gâteux. Balancement. Aime beau-

coup la musique et la danse.- Pas d'onanisme. La verge

est un pou longue; le prépuce très large; le gland décou-

vrable ; les testicules du volume d'un haricot. Exeat le

le' septembre.

Décembre. - L'enfant accepte à peu près tous les ali-

ments. Il sait se servir maintenant de la cuiller et ne veut

pas qu'on l'aide, trouvant que cela ne va pas assez vite. Il

prend part aux exercices de la petit'] gymnastique. L'at-

tention est toujours difficile à fixer. Le gâtisme persiste,

mais P... reste mieux qu'autrefois sur le siège d'aisances.

1885 Janvier. Poids : 12 kil. 70 ; taille 0,86 c.

4 mars. Depuis quelques jours un peu de bronchite et

de diarrhée qui ont cessé en quelques jours. Exeat le 11

avril. -

3 octobre. Tuméfaction des deux joues, surtout de la

182 ACCIDENTS MÉNINGITIQUES.

droite, mais sans rougeur ni chaleur appréciables; pas de

fièvre. Guéri le 10 octobre.

Décembre. L'appétit est exagéré et on doit surveiller at-

tentivement l'enfant qui, sans cette précaution, mangerait

outre mesure; ses digestions sont bonnes et la diarrhée est

moins fréquente depuis qu'il mange seul et de tout. lia a

plus de connaissance ; il va seul au réfectoire, peut accom-

pagner les autres enfants à la promenade. A la gymnasti-

quo,il exécute bien le mouvement en avant, mais il se re-

tourne quand il s'agit d'aller en arrière; il aime beaucoup

la balançoire; prend plaisir au concert et écoute.

1886. Janvier. Poids : .10 kil. ; taille 0,86 c.

Mai. La voracité et le gâtisme n'ont pas diminué.

L'attention est plus facile à fixer. Par exemple, lorsqu'on

veut qu'il vous regarde, il suffit do lui tenir les mains, de

bien le regarder et de dire plusieurs fois de suite : maman.

Alors ses yeux se fixent sur ceux de la maîtresse et il se

met à rire. Il comprend quand on l'appelle, il devient ca-

ressant. Il répète les airs des chansons qu'il a entendues

et en le prenant sur les genoux on parvient à le faire

chanter avec soi. A la classe, il so tient passablement sur

le banc; parfois il monte sur la table et chantonne. Il a ap-

pris et aime à brouetter et cherche à imiter ce qu'il voit

faire aux autres, c'est ainsi qu'il tourne comme l'enfant

Carter...

le, juin. Est envoyé à l'infirmerie parce qu'il ne mange

pas ; est assoupi et a des convulsions et des soubresauts

pendant son sommeil.-2 2 juin. T. R. 37°,5. Soir : 37°,G,

3 juin. L'enfant reste couché ; a l'air assez maussade et

refuse toute nourriture solide. La situation est à peu

près la même les jours suivants; la température reste

normale jusqu'au 7 juin, ce jour-là on note une légère hy-

pothermie (1) ; constipation marquée. Traitement : lave-

ments nutritifs, lait, etc.- Mort le 8 juin à 11 heures 1/2

du matin ; un quart d'heure après : T. R. 37°,3 ; une heure

après : 3G°,2; deux heures après : 35°. Poids : 9 kil. 60.

Autopsie (9 juin). Rigidité cadavérique persistant aux

membres inférieurs.

(I) Le 3 juin, matin : T. IL 370,3 3 et le soir : 37°,G; le 4, matin :

37",2 et le soir : 37°,6. - Le 5, malin : 37°,4 et le soir : 37 ? -

le G, matin : 37°,2 et le soir : 370; - le 7, malin : 37° elle soir :

3G°,8; le 8, au matin : 360,5. (L'urine n'a pu être recueillie en

raison du gâtisme et on a omis de sonder l'enfant).

encéphalite. 183

Cou et thorax. Le larynx et la trachée n'olfrent aucune

lésion. Le thymus persiste en partie. - COi'PS thyroïde

normal. -Poumons sains (gauche 75 gr. ; droit, 80 gr.).

Péricarde normal ; pas de liquide. - Coeur sain, trou de

Botal oblitéré. Le diaphragme remonte à droite au bord

supérieur de la 4e côte; à gauche, au bord inférieur do la

même côte. - Estomac, vide, rien de particulier.

Abdomen. Foie (510 gr.).- Pancréas ; - Reins (45 gr.

chacun); Rate (30 gr.); -Vessie, pas do lésinns.- Tes-

ticules très petits. Intestins un peu injectés ; hypertrophie

des plaques do Peyer sans ulcérations ; tuméfaction légère

des ganglions mésentériques(l).

Tête. Le cuir chevelu offre une épaisseur normale,

pas d'ecchymoses. Base du crâne symétrique. Les ro-

chers sont inégalement avancés en ossification. -Dure-

mère adhérente à la voûte crânienne, au niveau des sutu-

res, les adhérences sont très prononcées et le décollement

est à peu près impossible. Les sinus sont presque vides.

Voûte crânienne assez volumineuse, d'épaisseur

moyenne ; sutures ossifiées. A l'ouverture du crâne, écou-

lement sanguin très peu abondant; la quantité du liquide

céphalo-rachidien n'est pas exagérée. Encéphale

(1.190 gr.).

Les différentes parties de la base de l'encéphale (artères,

nerfs, etc.) sont symétriques. Sur la convexité des deux

côtés, la pie-mère est épaissie, finement vascularisée, avec

des taches laiteuses principalement au niveau do la scis-

sure de Sylvius, du sillon de Rolando et des lobes fron-

taux. A la base, vascularisation générale très fine.

L'hémisphère gauche pèse 30 gr. de moins que le droit.

Vu par la base, il parait un peu plus court, surtout en ar-

rière. La pie-mère s'enlève facilement àla surface interne.

Sur la face convexe, la pie-mère entraîne une partie de

la substance grise qui se soulève par places comme une

paroi kystique affaissée et plissée. A ce niveau, il existe

autant do petits foyers de couleur jaune ocreuse, allongés,

occupant le milieu d'une circonvolution, déprimés à leur

centre, ayant de 5 à 15 m.m. dans leur plus grand diamè-

tre. Ils ne semblent intéresser que la substance grise. Ils

siègent sur la partie postérieure de la seconde et de la

troisième frontale, sur l'insertion de la première frontale,

(1) Comme on le voit, les troubles intestinaux, observés à dif-

férentes reprises pendant la vie, n'ont pas déterminé de lésions

bien prononcées de la muqueuse intestinale.

184 PETITS foyers DE ramollissement.

à l'extrémité de la frontale ascendante; sur la partie

moyenne de la troisième frontale et sur le pli pariétal infé-

rieur. Ils ont l'aspect de très petits foyers de ramollisse-

ment et semblent correspondre à une lésion plus avancée

que l'état chagriné qui coexiste sur l'hémisphère.

Sur l'hémisphère droit, notons un aspect chagriné peu

prononcé sur la circonvolution du corps calleux et sur la

face convexe six foyers analogues à ceux du côté gauche,

moins étendus, situés sur la partie moyenne des première et

deuxième frontale et à l'extrémité inférieure de la frontale

ascendante dont le pied offre sur une largeur de 5 à G mil-

limètres un piqueté vasculaire très fin. Etat un peu chagri-

né de la frontale ascendante.

Cervelet et isthme (135 gr.). Les deux hémisphères céré-

belleux sont égaux; la décortication de la pic-mère s'opère

avec facilité. - Protubérance et bulbe, rien.

Hémisphère droit. Face convexe. La première cir-

convolution frontale envoie vers le milieu de sa longueur

un pli de passage à la seconde; au delà de ce pli de pas-

sage elle est interrompue par une incisure profonde ; en-

suite, elle se dédouble légèrement et s'insère de niveau sur

la frontale ascendante par une insertion très grêle, à 1 c. 1;2

au-dessous du bord supérieur de l'hémisphère, de telle

sorte que, entre ce bord et l'insertion, il existe une incisure

profonde. La seconde est dédoublée dans ses deux tiers

inférieurs, elle est très contournée dans son tiers postérieur

et s'insère de niveau sur la frontale ascendante. La

troisième, née du lobe orbitaire d'une forte anastomose

avec la seconde, est irrégulièrement flexueuse et s'arrête

au pied de la frontale ascendante dont elle est séparée par

une incisure très longue et presque rectiligne. - Entre le

sommet d'une flexuosité de la troisième frontale et au des-

sous de la base d'une des flexuosités de la deuxième frontale,

il existe un creux d'un centimètre de diamètre qui se trouve

comblé en partie par un mamelon sphérique dépendant de

la deuxième circonvolution frontale. - La frontale ascen-

dante, large à sa base, maigre dans son milieu et large en

haut, est très flexueuse. Sur tout le lobe frontal, indé-

pendamment des foyers qui ont été signalés, on remarque

des sillons transversaux nombreux et des dépressions

légères qui donnent un aspect chagriné, marqué surtout à

la partie inférieure du lobe frontal.

La pariétale ascendante est assez grêle à sa base,chagri-

née et très flexueuse à sa portion supérieure. - Le pli

pariétal supérieur est volumineux ; l'inférieur est, au

DESCRIPTION DES CIRCONVOLUTIONS. 185

contraire, assez peu développé. Le pli courbe est assez

gros, sinueux et doublé par une circonvolution très tor-

tueuse, communiquant en haut avec le lobe pariétal supé-

rieur, en arrière, avec le lobe occipital ; elle est séparée du

lobe temporal par une incisure profonde.

La première temporale, assez maigre, flexueuse, envoie

deux plis de passage au lobule de l'insula, elle est coupée

par des sillons qui lui donnent un aspect mamelonné; elle

envoie aussi, en bas, deux plis de passage à la deuxième

temporale qui est flexueuse, coupée de sillons, chagrinée

dans toute son étendue, et projette deux plis de passage à

la troisième. Celle-ci est très sinueuse dans sa partie

antérieure et communique avec la quatrième temporale par

un pli de passage très étroit. - Le lobule de l'insula

présente trois digitations saillantes.- Les circonvolutions

du lobe occipital sont amaigries et tassées ; leurs sillons

sont très profonds.

La scissure de Sylvius, le sillon de Rolando et tous les

autres sillons sont assez marqués sur cette face, l'aspect

chagriné assez prononcé sur le lobe temporal, l'est davan-

tage et d'une façon typique sur le lobe occipital ; cet aspect

est dû, on le sait, à des sillons superficiels à direction gé-

nérale transverse qui s'entre-croisent, dessinant de petites

figures quadrangulaires plus ou moins irrégulières. Rap-

pelons aussi que quelques circonvolutions sont amaigries,

mais inégalement, sur différents points.

Face interne. La première circonvolution frontale est

sinueuse. Le lobule paracentral est très irrégulier et

présente un sillon en Y ; il se confond par sa partie

moyenne avec la première circonvolution frontale. - Le lobe

carré est très développé. Le coin présente des circon-

.volutions amaigries et chagrinées. Le lobe occipital est

assez développé. - La circonvolution du corps calleux

est flexueuse, surtout en arrière où elle a un aspect cha-

griné marqué. La circonvolution de l'hippocampe est un

peu chagrinée et amaigrie par places.

Le sillon calloso-marginal est assez développé et assez

large. La scissure perpendiculaire interne et la scissure

calcarine sont profondes, mais tous les autres sillons

de cette face sont, au contraire, superficiels, sauf sur la

partie antérieure de la circonvolution frontale. - Le ven-

tricule latéral, la couche optique, le corps strié et la conie

d'Ammon paraissent normaux.

Lobe orbitaire. Les scissures sont peu profondes, les

circonvolutions ont un léger aspect chagriné.

BOURNEVILLE, 1886. 13

186 foyers jaunes ; aspect chagriné.

Hémisphère gauche, face convexe. - La première cir-

convolution frontale, simple à son origine, présente un

premier pli supérieur qui va s'insérer sur la frontale ascen-

dante dont il est séparé par un sillon léger, un second pli

plus flexueux que le premier,qui s'insère aussi sur la fron-

tale ascendante au-dessous du premier, un troisième en

forme d'S, qui s'insère par un trajet rétrograde sur la

deuxième frontale. - Celle ci est contournée ; envoie un

pli de passage irrégulier à la troisième et s'avance jusqu'au

contact de la frontale ascendante, où elle cesse brusque-

ment ; puis elle se relève pour s'insérer sur la fron-

tale ascendante. La troisième frontale, semblable

aux branches d'un N, est interrompue en arrière du pli de

passage qu'elle reçoit de la deuxième par une grande in-

cisure ; elle se reconstitue au delà pour aller s'insérer sur

le pied de la frontale ascendante. La frontale ascen-

dante, très sinueuse, est interrompue dans son tiers infé-

rieur par une incisure incomplète et dans son tiers supérieur

au-dessous des insertions de la première frontale par une

incisure plus complète. - Le lobe frontal est coupé en

tous sens do sillons superficiels plus ou moins accentués ;

on note l'aspect chagriné sur la troisième frontale et le

pied de la frontale ascendante qui présente, de plus, quatre

foyers jaunes, à parois déprimées et molles, dont deux

sont assez considérables.

La pariétale ascendante, très irrégulière, donne un fort

pli de passage au pli pariétal supérieur, puis elle s'amaigrit,

se recourbe en avant pour se confondre avec l'extrémité

supérieure de la frontale ascendante et interrompre le sillon

de Rolando,. - Le pli pariétal supérieur est flexueux et

assez développé. Le pli pariétal inférieur, de forme

triangulaire, est séparé par un sillon profond du pli courbe

avec lequel il communique en haut par un pli de passage

assez maigre. Le pli courbe est assez volumineux et fournit

en arrière un pli de passage au lobe occipital. Tout le lobe

pariétal a un aspect chagriné et à un degré plus marqué

que le lobe frontal. - La scissure de Sylvius, bien des-

sinée, laisse voir le lobule de l'insula composé de quatre

circonvolutions.

La première temporale est très tortueuse et présente

trois incisures qui la coupent incomplètement; elle est

amaigrie inégalement, ce qui lui donne sur certains points

un aspect mamelonné ; elle envoie deux plis de passage au

lobule de l'insula. elle envoie aussi à la deuxième temporale

deux plis qui s'entre croisent avec deux plis semblables

venus de cette deuxième temporale ; celle-ci est flexueuse

asymétrie ET ASPECT chagriné DES CIRCONVOLUTIONS. 187

au milieu de son trajet, elle est amaigrie et mamelonnée et

offre uno surface irrégulière qui paraît être due à l'état

chagriné poussé à l'extrême et dont le centre est occupé

par un petit foyer; dans sa portion antérieure, elle est

aussi très chagrinée et projette un autre pli de passage à

la troisième temporale, qui fait corps avec la quatrième.

Le lobe temporal est, comme on le voit, très chagriné

sur presque toute son étendue.

Le lobe occipital, composé de circonvolutions peu dé-

veloppées, est assez semblable à celui du côté opposé, ses

circonvolutions sont coupées de sillons transversaux, su-

perficiels,assez nombreux,et il paraît, à cause de cela,cou-

vert de hachures. Les sillons frontaux, le sillon de

Rolando, le sillon parallèle et la scissure de Sylvius sont

en général profonds, mais la plupart des sillons secondaires

sont au contraire très superficiels.

Face interne. La première frontale est flexueuse et

large,double dans presque toute sa largeur,avec des sillons

transverses qui lui donnent un aspect mamelonné.» Elle

communique en bas seulement avec le lobe paracentral.

Celui-ci est large, coupé en bas et en haut par un sillon

oblique. Le lobe carré est moitié plus petit que celui du

côté opposé et communique par un pli de passage avec 1.;

lobe paracentral. - Le coin est, lui aussi, peu volumineux.

La circonvolution du corps calleux est semblable à celle

de droite. -- Les circonvolutions du lobe occipital sont

amaigries, mais moins que du côté opposé. La scissure

perpendiculaire externe est très profonde. - La circon-

volution de l'hippocampe est courte. Le ventricule

latéral, la corne d'Ammon, les corps opto-striés n'offrent

rien à noter.

Le lobe orbitaire a des scissures assez profondes. La cir-

convolution du nerf olfactif est rectiligne et moitié moins

développée que celle du côté opposé, la scissure en II plus

marquée qu'à droite.

Examen histologique des centres nerveux fait au Laboratoire

des travaux pratiques de la Faculté. - L'hémisphère droit n'a

pas été examiné, les lésions étant d'apparence semblable des

deux côtés. Les coupes ont été colorées à l'hématoxyline et au

carmin et montées soit au baume de Canada, soit à la liqueur

de Farrant, pour conserver les corps granuleux. Sur la pre-

mière frontale, à sa naissance, enun point qui ne contient pas

de foyer à l'oeil nu, il existe une vascularisation anormale très

prononcée dans toute la substance grise ; les vaisseaux sont

ramifiés dans toutes les directions. Le nombre des éléments

188 EXAMEN HISTOLOGIQUE.

paraît sensiblement accru, et il existe une série de points ou

taches de désintégration se touchant presque et formant une

vaste bande entre la première et la troisième couche de la

substance grise, et comprenant ainsi la moitié environ de la

hauteur de la substance grise. Ces foyers sont caractérisés par

la rareté des éléments à leur niveau, l'épaississement du tissu

interstitiel qui se colore davantage par le carmin et sa friabi-

lité ; car il tombe assez souvent des portions de tissus sur les

coupes, malgré le soin apporté au montage. A un fort grossisse-

ment, on constate que les capillaires sont très nombreux et

dilatés; les cellules nerveuses ne sont pas disposées en séries,

mais dispersées et globuleuses. Celles des couches profondes

sont allongées, granuleuses et très fortement colorées. La

substance blanche offre une quantité 'considérable de petits

noyaux sphériques appartenant aux cellules interstitielles. Sur

certains points, il existe des corps granuleux on assez grande

quantité.

La deuxième frontale, à son insertion sur la frontale ascen-

dante, portait sur sa partie moyenne un foyer ocreux, allongé,

parfaitement caractérisé. Sur une coupe à ce niveau, on constate

une dépression en entonnoir do la substance grise, une perte

de substance qui s'étend jusqu'à la substance blanche et est

recouverte par une paroi flottante, transformant ce foyer en un

petit kyste. L'espace libre est sillonné par des filaments fibril-

laires allant de la paroi superficielle à la substance grise res-

tante. Cette paroi est composée, de dehors en dedans, detrois

couches : la plus superficielle, mince et homogène, formée

de faisceaux parallèles de fibres fines, avec de petits noyaux

sphériques très peu abondants, s'amincit aux points extrêmes

do la lésion et disparait dans la couche superficielle de la subs-

tance grise normale. Au-dessous apparaît une couche deux à

trois fois plus épaisse. Cette couche est composée surtout de

cellules rondes assez volumineuses à noyau sphérique, dont la

plupart sont remplies de granulations jaunes de pigment san-

guin à la manière des cellules interstitielles de l'ovaire. Ce

sont elles qui donnent au kyste sa couleur ocreuse ; elles sont

dispersées dans un tissu fibrillaire dont les fibrilles convergent

en bas par faisceaux distincts. La troisième couche est occupée

parces faisceaux et un certain nombre de cellules. Ces masses

de faisceaux fibrillaires accompagnent les vaisseaux et forment

à la face interne de la paroi du petit kyste un certain nombre

de masses pédiculées, composées de ce tissu fibrillaire feutré,

de rares vaisseaux et contenant des cellules à noyaux ronds ou

allongés, dont quelques-rues sont encore chargées de granu-

lations jaunes.

Autour de certains capillaires, la gaine adventice se remplit

EXAMEN HISTOLOGIQUE. 189

de ces cellules, de façon à former des renflements en massue

libres dans la cavité. Si l'on suit cette paroi, ainsi constituée

sur les parties latérales, on voit que les couches se perdent

successivement dans la couche externe névroglique de la subs-

tance grise ; c'est donc entre cette couche externe et la deuxième

couche de Meynert que s'est opérée la scissure qui a donné

lieu à la cavité que nous étudions. La substance grise qui forme

les parois de l'entonnoir est recouverte par une couche fibril-

laire névroglique. Au-dessous, elle se montre sous deux états

différents : sur certains points, la sériation longitudinale delà

substance grise est encore assez visible, mais ces séries sont

occupées par des cellules interstitielles en très grande abon-

dance. Sur d'autres points, beaucoup plus nombreux, le pro-

cessus est beaucoup plus avancé ; les cellules ne sont plus dis-

posées en séries, mais elles sont dispersées, raréfiées et isolées ;

elles sont petites, globuleuses; on ne peut suivre leurs prolon-

gements sous la surface libre. Autour de ce foyer, il existe un

certain nombre de taches ou points très clairs à un faible gros-

sissement et qui sont composés uniquement par un réseau très

fin d'une dentelle de fibrilles grêles avec des cellules à noyaux

sphériques, à corps cellulaires ramifiés aux points nodaux. Les

mailles de ce tissu sont occupées par une substance intercellu-

laire qui a disparu des coupes. On n'y rencontre pas une seule

cellule nerveuse et cela dans plusieurs champs du microscope.

A la périphérie de ces points, on rencontre les corps granuleux,

principalement autour des vaisseaux. Ces vaisseaux sont très

ramifiés; l'espace périvasculaire est largement dilaté autour

de la plupart d'entre eux; ils morcellent la substance grise.

Lésions de la substance blanche. - Dans la substance blan-

che, il existe une large traînée descendante, correspondant à la

perte de substance, de la substance grise et dans laquelle les

fibres n'existent pas; tout autour, ces fibres sont entourées

d'une grande quantité de petites cellules interstitielles et sur

les pièces traitées successivement par l'acide osmique et la li-

queur de Farraut, on voit que la myéline émulsionnée forme

un certain nombre de petites gouttelettes noires et des amas

plus gros ayant l'aspect connu des corps granuleux.

Pariétale ascendante gauche. - Elle porte en son milieu

un foyer plus récent ; on voit nettement que le centre de la

dépression est formé par un vaisseau ramifié; les parois sont

constituées par lo même tissu fibrillaire que dans la précédente;

les lésions de la substance grise au pourtour du foyer sont

moins avancées, quoique très étendues.

La première couche, couche névroglique de Meynert, est

très mince, avec de fins capillaires rameux assez nombreux et,

190 EXAMEN HISTOLOGIQUE.

de plus, sur certains points des taches grises où la névroglie

s'est raréfiée, qui forment autant d'espaces clairs.

Dans la deuxième couche, celle des petites cellules pyrami-

dales, on voit que presque toutes ces cellules sont petites et

globuleuses, et qu'elles ne sont plus placées bout à bout, mais

dispersées; leurs rapports normaux sont détruits et leur nom-

bre diminué. Dans la troisième couche, celle des cellules

moyennes, on voit les colonnettes dueformentces cellules bout

à bout beaucoup plus distantes les unes des autres qu'à l'état

normal et séparées par du tissu névroglique àpeu près dépourvu

d'éléments interstitiels. Même vascularisation ramifiée. Les

cellules nerveuses sont globuleuses, leur noyau volumineux,

clair, nucléolé, remplit presque toute la cellule. Le prolonge-

ment inférieur est le plus distinct.

Dans la couche suivante des grandes cellules, les altérations

sont les mêmes pour les cellules nerveuses, dont le corps cy-

toplasmique est pâle et effacé, quelques-unes sont atrophiées,

pourtant elles sont encore en nombre considérable. Dans les

espaces qui séparent ces rangées de cellules, espaces par où £ t

descendent les fibrilles qui vont former la substance grise, on

voit de plus que dans les couches précédentes un assez grand

nombre de noyaux de cellules interstitielles, petits, sphériques

et fortement colorés. Dans la substance blanche, on voit les

mêmes lésions que dans les préparations précédentes; les vais-

seaux sont très dilatés, les corps granuleux sont très abon-

dants.

Lobe occipital. - Les coupes du lobe occipital, au niveau

d'un foyer plus étendu que celui que nous avons décrit sur lo

frontal, montrent des lésions absolument semblables, mais

la traînée descendante dans la substanco blanche au-dessous

du foyer, est très large et remplie de globules sanguins avec

un certain nombre de leucocytes et do cellules fusiformes; au

pourtour de ces masses, un grand nombre de capillaires sont

aussi remplis de globules rouges; il semble donc que l'on ait

affaire à de véritables foyers hémorrhagiques en ce point.

Les lésions d'encéphalite au voisinage présentent les mêmes

caractères que ci-dessus, elles sont seulement plus marquées,

avec des cellules interstitielles très abondantes et des capillaires

dont les plus volumineux sont entourés d'une paroi fibrillaire

nette. Mômes lésions que plus haut dans la substance grise.

Cervelet, - Dans la substance grise, la couche de névroglie

est fibrillairo dans le sens longitudinal ; les cellules interstitiel-

les y sont très nombreuses, les cellules de Purkinje sont abon-

dantes, mais elles se colorent assez inégalement, surtout à

l'hématoxyline; on peut pourtant suivre très loin les prolonge-

RÉFLEXIONS : HÉRÉDITÉ. 191

ments de la plupart. La couche des cellules névrogliques n'offre

rien de particulier. Dans la substance blanche, corps granu-

leux nombreux, aspect fibrillaire, grosses fibrilles anastomo-

sées.

Moelle cervicale. - La substance grise a des altérations

cellulaires importantes.

Dans les cornes antérieures^, le tissu interstitiel forme des

faisceaux fibrillaires volumineux et entre-croisés autour des

cellules nerveuses. Celles-ci, nettement diminuées de nombre,

se colorent bien par le carmin sur certains points, mais beau-

coup ne se colorent que faiblement et présentent un refletjau-

nâtre et hyalin comparable à celui des cellules de la paralysio

générale, elles sont tuméfiées et leurs prolongements n'existe

que peu ou point. Par l'hématoxyline, ces cellules se colorent

en gris de lin et leur réfringence apparaît beaucoup plus nette-

ment. Même aspect des cornes postérieures. Le canal de l'épen-

dyme est conservé. Son épithélium est intact; on y distingue

sur certains points les cils des cellules. La trame conjonctive

des cordons blancs est notablement épaissie, le nombre des

tubes diminué, mais lalésion est la même sur tous les cordons.

Il n'y a pas de systématisation. Les vaisseaux sont dilatés.

Moelle dorsale. - L'aspect est le même de tout point.

Moelle lombaires Les lésions sont les mêmes, la tuméfac-

tion des cellules et leur raréfaction sont encore plus visibles, à

cause du grand nombre des cellules motrices en ce point (1).

RÉFLEXIONS.- Cette observation nous paraît justifier les

réflexions suivantes :

I. Un mot d'abord des antécédents au point de vue héré-

ditaire. Nous rappellerons que l'une des grand'mères pa-

ternelles de l'enfant était épileptique; que l'une des grand'-

mères maternelles était migraineuse. Au point de vue

personnel, on nous a dit que l'enfant n'aurait eu qu'une

seule fois des convulsions, à l'âge de trois mois et d'une

durée de quinze minutes seulement. Mais l'enfant étant

resté en nourrice, chez des étrangers, jusqu'à deux ans et

demi, on peutse demander s'il n'a pas eu d'autres accidents

convulsifs qui auraient été dissimulés.

(1) Les autres organes, larynx, estomac, foie, rate,coeur, ont OU.

examinés sur des coupes et ne présentaient pas d'autres lésions

que leur état légèrement alrophique, semblable 1 celui qu'on trouve

dans les lésions do dénutrition.

192 RÉSULTATS DU TRAITEMENT.

Notons, comme maladies ordinaires, une ophthalmie

double, la rougeole, une conjonctivite granuleuse, un

pemphigus à petites bulles, de fréquentes entérites et, en-

fin, les symptômes de méningo-encéphalite qui ont enlevé

le malade à l'âge de 7 ans.

II. L'état de P..., à l'époque de son admission dans le

service, pourrait se résumer ainsi : marche et parole nul-

les, nécessité de l'habiller, de le déshabiller, de le faire

manger, car il ne savait aucunement se servir de ses

mains, - appétence exclusive pour le lait et la soupe ; -

impossibilité de fixer l'attention ; gâtisme ; tics mul-

tiples, etc. Aussi le diagnostic clinique : idiotie complète,

se posait-il de lui-même. Quant au diagnostic anatomo-

pathologique nous déclarons être demeurés tout à fait in-

décis et si l'on veut bien se souvenir de l'insuffisance des

renseignements recueillis sur les accidents de l'enfance,

on comprendra notre indécision.

Malgré cette situation, rendue encore plus fâcheuse par

de fréquents accidents ayant nécessité des séjours souvent

assez prolongés à l'infirmerie ; malgré des tics multiples

figurés sur des photographies, dont quelques-unes ont été

présentées à la Société, le traitement médical et physiolo-

gique avait donné, chez cet enfant, des résultats importants

qui autorisaient l'espoir d'une amélioration plus sérieuse.

On lui avait appris à se tenir debout, à marcher, à cou-

rir, à brouetter, à se servir de la cuiller, à saisir le go-

belet, à se tenir assis, etc. On était parvenu à fixer assez

bien son attention, à le maintenir sur le siège de propreté,

ce qui faisait présager la possibilité de la disparition du

gâtisme. Il reconnaissait ses maîtresses d'école ; il prenait

goût à la musique et retenait les airs. Les photographies

que nous avons fait passer sous les yeux de la Société met-

tent en évidence ses progrès : la première (octobre 1882) le

représente assis et soutenu par les bras d'un fauteuil; la

seconde, assis sur une chaise (octobre 1883) ; la troisième,

debout, sans soutien, et partant à une époque où il avait

appris à marcher (septembre 1884).

III. Au point de vue aoalomo-patl : ologidue, à part les

foyers ocreux multiples, sur lesquels nous allons revenir,

nous constatons dans tout l'axe cérébro-spinal les lésions

ENCÉPHALITE. 193

diffuses, portant à la fois sur les éléments nerveux et sur

le tissu interstitiel, qu'on a coutume de trouver chez les

idiots, sans qu'il soit possible de montrer par quels élé-

ments le processus morbide a débuté.

La substance grise montre ses vaisseaux très ramifiés,

mais sans bandes fibreuses épaisses autour d'eux. Ces lé-

sions péri-vasculaires sont,en effet, assez rares chez des en-

fants aussi jeunes ; les cellules nerveuses sont plus ou

moins diminuées de nombre ; sur beaucoup d'endroits on

observe, comprenant la portion superficielle' de la subs-

tance grise, des taches grisâtres plus claires, visibles à

l'oeil nu par transparence, atteignant 1 à 2 millim. de dia-

mètre où les cellules nerveuses ont disparu; il n'y a plus

qu'un réseau plus ou moins tassé de fibrilles, réseau dans

les mailles duquel est interposé un liquide qui donne au

tout un peu de l'apparence du tissu muqueux. Ces taches,

que nous avons décrites comme des points de désintégration

et qu'on retrouve dans les cas semblables, sont ici très

marquées. Il existe de plus un certain nombre de foyers

allongés dans le sens des circonvolutions, comprenant une

paroi superficielle, une paroi profonde, un contenu. La

paroi superficielle, brunâtre, doit cette coloration à un

grand nombre de cellules tuméfiées, chargées de granula-

tions pigmentaires dont l'origine est évidemment sanguine.

Elle est constituée par la couche la plus superficielle de la

substance grise, épaisse, feutrée, vascularisée. Le contenu

nous rappelle les taches décrites plus haut; ce sont des fi-

brilles peu abondantes formant un réseau à mailles très

larges avec un liquide séreux interposé ; nous disons sé-

reux parce que ce liquide n'a pas été coagulé par l'alcool.

La paroi profonde est formée par la substance grise dans

laquelle les taches grises sont très abondantes et pronon-

cées, le tissu névroglique y est aréolaire, comme nous l'a-

vons dit. Au-dessus de chaque foyer, existe une traînée de

dégénérations descendantes dans la substance blanche ;

enfin, dans quelques foyers, on trouve encore des globu-

les de sang épanché ; le pigment de ces globules rouges a

été repris par les cellules interstitielles de la paroi du

foyer que nous avons vues tuméfiées et chargées de granu-

lations jaunes. C'est ce qui se passe, par exemple, autour

d'un follicule de De Graef après la ponte ovulaire. Ces

194 PLAQUES JAUNES ; PSEUDO-KYSTES.

foyers ne sont pas apoplectiques ; à la coupe, ils ont la

forme comme d'un coin à base périphérique, et les parois

no sont pas dilacérées. Ce sont donc des foyers de ramol-

lissement. Sont-ils emboliquos ? Nous ne le pensons pas ;

d'abord, l'examen détaillé du coeur et des autres organes ne

nous a point montré de lésions vasculaires, ni d'autres

foyers hémorrhagiques; ensuite leur distribution sur les

hémisphères est irrégulière et ne correspond au cercle do

distribution d'aucune branche artérielle importante. Nous

croyons donc que l'on doit rattacher pathogéniquement ces

foyers à une forme plus rare : au ramollissement par

thrombose qui s'observe chez les vieillards déments (pla-

ques jaunes, de Durand-Fardel), dans des conditions assez

voisines de celles que nous avons sous les yeux. Ces foyers

sont situés aux points du cerveau les plus altérés, il y a

donc un rapport entre leur présence et celle des taches

grises ; mais nous ne pouvons préciser quelle est l'influence

de cette seconde lésion sur la première.

Dans la moelle, l'altération des cellules nerveuses est

bien nette, c'est la nécrose de coagulation de Weigert, que

cet auteur avait signalée d'abord, notons-le : précisément

dans les myélites les cellules qui meurent de cette façon

nous ont montré les trois états successifs de tuméfaction

hyaline, d'état granuleux et de désintégration moléculaire

complète; après quoi, les débris de la cellule s'éliminent.

Los lésions de la substance blanche, tant dans le cerveau

que dans la moelle, sont naturellement diffuses, comme

celles de la substance grise qu'elles suivent. Nous ne re-

viendrons pas sur leur description.

IV. L'intérêt de ce cas réside surtout dans la constatation

de ces plaques jaunes ou de ces petits pseudo-hystes mul-

tiples, distribués sur les hémisphères. Nous pensons que

cette lésion, qui a été rarement signalée à cet âge, les ra-

mollissements multiples appartenant aux vieillards et aux

cardiaques, peut être interprétée de façon à expliquer

d'autres formes également curieuses de lésions trouvées

chez les idiots.

TÉRATOLOGIE. 195

VIII.

Ectromélie unilatérale.- Rein unique. - Inclu-

sion de la verge. - Cloaque vésico-rectal. -

Tumeur mixte (fibro-sarcome) du périnée ;

Par BOURNEVILLE et P. biucon.

Nous devons à l'obligeance d'une sage-femme distin-

guée de Gentilly,112 ? l' oalNO, d'avoir pu étudier un monstre

ectromèle atteint en outre de différentes autres anomalies

dont nous allons rapporter l'observation.

Observation. - Deux oncles paternels ont eu des con-

vulsions. Grand-père maternel, excès alcooliques.

Grand'mère maternelle, suicide. - Frère âgé de 30

mois, ne prononce que quelques mots. - Vive émotion

au troisième mois de la grossesse.

Ectromélie abdominale unilatérale. Rein et ure-

tère uniques.- Difficulté apparente de la détermina-

tion du sexe. Inclusion de la verge, scrotum

inhabité simulant une petite verge. Urèthre imper-

méable clans une partie de son parcours. Cloaque

(communication de la vessie avec le rectum). -- Tu-

meur congénitale du périnée et des parties environ-

nantes (fibro-sarcome).

Rat..., né le 7 mars' 1886, est décédé le 20 mars.

Renseignements fournis par sa mère. Père, 37 ans,

charpentier, d'une constitution robuste, bien portant, ne

fait aucun excès de boissons ; il fume et chique d'une

façon modérée. Marié à 32 ans, il n'a été atteint d'aucune

affection nerveuse ou syphilitique. [Père, bien portant,

cultivateur, sobre, pas d'accidents nerveux. - Mère, sobre,

morte à 61 ans,en 8 jours,d'une affection cérébrale dont le

diagnostic n'a pas été porté. - Grand-père maternel,

8') ans, et grand'mère maternelle, 80 ans, en bonne santé.

Deux frères ayant eu des convulsions dans l'enfance ;

l'un infirmier, atteint de tics oculaires, a eu trois enfants,

196 IMPRESSIONS MATERNELLES : MALFORMATIONS.

dont deux sont morts on ne sait de quoi. Pas d'aliénés,

d'épileptiques, ni de difformes (pieds-bots, malformation

des membres, sourds-muets) dans la famille.]

Mère, 30 ans, bien portante, n'a pas eu de convulsions

dans l'enfance, n'est pas migraineuse, mais a eu, pendant

les cinq premiers mois de sa première grossesse, des

céphalalgies avec vomissements, et pendant la seconde,

des douleurs névralgiques ; elle n'a jamais eu d'attaques

de nerfs, maiscst très impressionnable. [Père, mort à66 ans

d'une maladie de coeur; il fit, à partir de l'âge de 45 ans,

de nombreux excès de boissons - Mère, s'est suicidée

par le vitriol. Grand-père paternel mort subitement

vers l'âge de 40 ans, on ne sait de quoi. Grand'mère

paternelle morte à un âge avancé sans qu'on puisse préci-

ser de quelle affection. - La grand'mère maternelle est

également morte âgée; on ne peut fournir aucun rensei-

gnement sur le grand-père paternel. - Deux frères bien

portants, ainsi que les enfants de l'un d'eux ; une soeur,

sans enfants, est de même en bonne santé. Ni aliénés, ni

épileptiques, ni difformes, etc., dans la famille].

Pas de consanguinité.

Trois enfants : a) D'un premier mari : 1° un enfant, âgé

de 9 ans, bien portant et intelligent ; aurait eu une con-

vulsion légère lors de l'éruption d'une molaire. b) Du

deuxième mari, deux enfants; 2° l'un âgé de 30 mois, bien

portant, comprendrait tout ce qu'on lui dirait, mais ne

prononce que quelques mots tels que papa, maman, et

quelques autres ; il a marché à 10 mois et a été propre à

1 an.

3° Notre malade. - Lors de la conception, les parents

étaient tous deux bien portants et vivaient en parfait

accord (ni chagrins, ni ennuis). - Grossesse : la mère est

venue de Besançon, son pays, où elle était domestique,

enceinte de trois mois, sans avoir connaissance de son état,

car elle avait eu ses règles aux époques ordinaires. Le

jour de son arrivée, elle vint voir son beau-père, marié à

une surveillante de Bicêtre. En traversant la seconde cour

de l'hospice, elle fut vivement impressionnée à la vue du

malade B..., atteint d'un tic convulsif violent de la tête

(chorée ? ) ; elle en aurait été «bouleversée, retournée, »

mais n'eut ni syncope, ni tremblement, et n'éprouva rien

de particulier du côté de l'abdomen. Elle alla déjeuner

chez sa belle-soeur, no repensa pas à ce malade; mais dans

la soirée, l'aspect de ce pensionnaire lui revint : « Je le

voyais toujours, la nuit il était devant moi, si je me réveil-

1 CARACTÈRES SPÉCIAUX DES MOUVEMENTS DU FOETUS. 197

lais ». Chaque fois qu'elle venait à Bicêtre (et elle y venait

tous les jours) elle était reprise d'un sentiment de compas-

sion à la vue de cet homme. Pendant tout le cours de la

grossesse, elle a été hantée par l'idée que l'enfant qu'elle

portait pourrait être mal conformé et ce fut la première

chose qu'elle demanda à la sage-femme lors de l'accou-

chement. En dehors de cette émotion, elle n'eut durant la

grossesse, ni céphalalgies, ni névralgies, ni coups, ni

chutes, etc. ; nous signalerons toutefois des vomissements

qui semblent avoir été dénature peu grave, et jusqu'au

troisième mois des envies de boire qu'elle satisfaisait en

buvant de l'eau; ni eau-de-vie, ni autres liqueurs, etc.

Dans le deuxième mois de la grossesse seulement, elle eut

un peu d'oedème des membres inférieurs.

Les premiers mouvements de l'enfant se sont manifestés

vers le cinquième mois; ces mouvements ressemblaient,

selon elle, à une boule qui remue et non à des petits coups

comme ceux qu'elle avait sentis quandelle était enceinte de

ses deux premiers enfants. Il me semble, disait-elle à son

mari, que ses membres ne remuent pas comme chez les

autres, et qu'il est situé sous les côtes. o L'accouchement

eut lieu environ trois semaines avant terme ; il fut très

rapide, d'une durée totale de 10 à 15 minutes.

Etat actuel (13 mars 188G). Tête bien conformée; pas

d'indice d'hydrocéphalie ; cheveux assez abondants.

Face régulière. - Le thorax est déprimé vers l'extrémité

inférieure du sternum, qui forme une espèce de fossette.

L'appendice xyphoïde est saillant. Les membres supé-

rieurs sont bien conformés.

La colonne vertébrale est régulière à la région cervico-

dorsale, mais à la région lombaire, qui est très concave, il

y a une déviation vers la droite. Le bassin, en arrière,

forme une saillie considérable qui est moins large que le

diamètre qui répond au flanc. La moitié droite du bassin

est arrondie, la gauche un peu déprimée. - La peau est

saine sur la moitié droite, qui est irrégulière; elle est

ulcérée sur la moitié de son étendue. L'ulcération est

irrégulière, présente une coloration rouge foncée. Sur la

ligne médiane, il existe une dépression infundibuliforme,

où aboutissent quatre sillons. C'est là que se trouve une

fente d'où sortent, assure-t-on, les excréments. Egalement t

sur la ligne médiane, à la partie la plus saillante, on trouve

une petite eschare qui a débuté avant-hier. La masse

arrondie, qui répond au bassin, se termine sous la forme

d'un cône tronqué, au sommet duquel existe une fente en

198 ECTROMÉLIE UNILATÉRALE.

V dont l'ouverture est d'environ 8 à 9 millimètres. Les

lèvres du V sont d'aspect cutané. Dans la fente, répondant

à la branche gauche du V, semble être l'orifice uré-

thral. ( ? ) Entre les branches du V, on trouve une saillie

rosée. (Fig. 18, Il,)

Membre inférieur droit. La hanche droite paraît

normale; toutefois ses mouvements sont un peu limités,

surtout dans le sens de l'abduction. Le fémur droit est un

peu incurvé ; la jambe droite est fortement courbée en

dedans et se termine par un pied bot varus assez pro-

noncé.

Membre inférieur gauche. De ce côté, il existe, en

Fin. 18.

apparence, une amputation congénitale (ectromélie) de la

cuisse au niveau de l'union du tiers moyen avec le tiers in-

férieur. Le membre inférieur gauche est donc représenté

par un moignon qui mesure 7 centim. de longueur, 11

centim. de circonférence à la base et 8 centim. de circonfé-

rence à l'extrémité inférieure. Il existe quelques mouve-

ments très limités dans la hanche, qui est fortement dépri-

mée. Le moignon est dans l'adduction et ne peut être porté

dans l'abduction. Il est en même temps fléchi obliquement

sur l'abdomen, de tellesorloquo son extrémité libre répond

AFFAIBLISSEMENT PROGRESSIF; MORT ; AUTOPSIE. 199

à peu près à la ligne médiane du corps. Sur sa face infé-

rieure et externe, le moignon présente une série de petits

mamelons arrondis ou elliptiques ; les uns, répondant à

l'extrémité libre, sont fermes; les autres, situés à la racine

du membre, sont mollasses, ont une coloration légère-

ment bleuâtre, rappelant l'aspect de certaines phlyc-

tènes. (Fig. 18, A.)

L'abdomen est très large, mesure plus de 31 centimètres

dans sa plus grande dimension, alors que le thorax mesure

à sa base 27 cent. 1/2. La peau est épaissie, principalement

sur le tiers médian, dans le sens de la hauteur; elle est

ridée transversalement et longitudinalement; les rides

longitudinales sont plus profondes. A 3 centimètres au-

dessous du nombril, se trouvent quatre rides cutanées qui

se réunissent; l'une des rides ou sillons cutanés descend

entre les deux cuisses et répondrait à peu près à une fente

simulant vaguement une vulve ( ? ). Cette région interfé-

morale, qui a 2 centimètres à peine de largeur, descend

en bas en s'élargissant pour venir se confondre avec la

saillie conique dont nous avons parlé, au sommet de la-

quelle se trouve l'orifice présumé de l'urèthre. La saillie

conique mesure à son extrémité près de 4 centimètres.

Immédiatement au-dessous du pli cruro-génital gauche,

existe un mamelon qui a 7 à 8 millimètres de hauteur.

Cette saillie a tout à fait l'aspect d'un bout de sein sans

orifice et ne rappelle nullement l'aspect de la verge. Sa

consistance est analogue à celle d'un mamelon.

La peau du dos, dans sa partie supérieure, est souple ;

à la région lombaire, elle est dure, comme scléreuse, ainsi

que sur la cuisse droite en dehors; sur la jambe, elle pré-

sente le même caractère. Elle est souple sur la région tho-

racique antérieure, ainsi qu'aux aisselles, un peu scléreuse

sur les épaules, très scléreuse sur les bras.

On constate une cyanose très prononcée à la jambe,

mais surtout du pied et des avant-bras.

.L'enfanta rendu son méconium; les selles commencent

à être jaunes ; il téte et ne vomit pas.

Du 13 au 20 mars, il s'est affaibli progressivement, et

il est mort le 20 mars.- Grâce à l'habile intervention de

il11"1 Forino, nous avons pu pratiquer l'autopsie, mais par-

tiellement. car les parents se sont opposés à ce que nous

touchions à la tête.

Autopsie. Les organes de la cavité thoracique sont

normaux. Il en est de même de la plupart des organes de

la cavité abdominale, à l'exception des reins, du rectum,

200

REIN UNIQUE.

de la vessie et des organes génitaux, qui présentent des

anomalies.

Fig. 19. 6, Gland ; le prépuce est ramené en arrière ; une sonde est

introduite dans l'urèthre. - 7, Mamelon représentant le scrotum inha-

bité (1).

Organes génitaux. - Dans la fente médiane dont il est

question plus haut, on constate l'existence d'un gland bien

Fig. 20. - 1, Coupe transversale du rectum. - 2, Vessie ouverte sur

sa paroi postérieure.- 8, Moignon et cuisso gaucho.- 9, Testicules. -

10, Rein droit. - 11, Uretère droit sinueux et dilaté. - 12, Capsule

surrénale droite. - 13, Capsule surrénale gauche.

conformé, situé profondément; les lèvres de cette fente

sont formées par le prépuce, que l'on parvient à refouler

(I) Cette figure et les suivantes ont été dessinées par M. Isch-

V11, interne du service.

INCLUSION DE la VERGE.

201

en arrière du gland (Fig. 19).Une sonde introduite dans le

canal de l'urèthre ne parvient pas jusqu'à la vessie; elle

se trouve arrêtée au niveau du pubis. Une section opérée

d'avant en arrière et sur le trajet de l'urèthre, permet de

constater que cette interruption est due à une tumeur

qui a envahi une grande partie du pénis, et sur laquelle

nous reviendrons tout à l'heure. Le mamelon situé un peu

au-dessus et sur le côté du pénis, dont nous avons parlé,

est incisé et n'est autre qu'un scrotum inhabité.

Fin. 21. -Elle montre les rapports du cloaque avec la vessie et le rectum.

- 1, Rectum par lequel passe une sonde qui ressoit par le cloaque.

- 2, Vessie ouverte antérieurement et postérieurement. - 3, Tumeur.

- - 4, Pubis. - 5, Cloaque vésico-rectal. - G, 6, Fente au fond de laquelle

on voit l'orifice de l'urèthre et le gland. - 7, nlamelon scrotal. - 8,

Cuisse gauche.

Le rein gauche est complètement absent; malgré des

recherches très attentives, nous n'en découvrons aucun

vestige ; la capsule surrénale gauche existe. Le rein droit

paraît normal, mais son uretère est très sinueux, dilaté,

de la grosseur d'une plume d'oie (Fig. 20, 11). Les deux

testicules (Fig. 20, 9) se trouvent sur les côtés du bassin.

La vessie, ouverte postérieurement, montre une large

communication avec une sorte de cloaque (Fig. 21, 5) qui

lui est commun avec l'extrémité inférieure du rectum.

Sur la paroi interne du rectum, autour du rectum et de

Bourneville, 1886. 14

202

fibro-sarcome.

la vessie, se trouve une tumeur bourgeonnante (Fig. 21

et 22, 1,3), d'aspect sarcomateux. Cette tumeur a envahi

toute la partie gaucho du bassin, les faces latérale et posté-

rieure de la cuisse gauche. Elle est blanchâtre, ferme au

toucher, et crie sous le couteau. Elle contourne le pubis à

sa partie inférieure, envahit tout le périnée ; elle dépasse

de 2 à 3 centimètres la fente dorso-anale qu'elle enveloppe

complètement; en avant, elle s'éLcnd jusqu'au bord infé-

rieur du prépuce, puis gagne la partie inférieure do la

cuisse; elle présente, du pubis au gland, une épaisseur de

plus de 3 centimètres. La tête du fémur est à peu près nor-

Fig. 22.- 1, Rectum ouvert montrant les végétations de la tumeur (3) sur

sa paroi interne. - 2, Vessie. - 3, Tumeur. 4, Pubis. - G, Fente-

dans laquelle se trouve inclus le gland. - 7, Mamelon scrotal.

maie située dans une cavité cotyloïde bien conformée. Le

bassin à gauche n'est représenté que par une portion car-

tilagineuse supportant la cavité cotyloïde. Le fémur se

termine par une surface cartilagineuse, simulant les con-

dyles et entouré d'une bourse séreuse ; cette extrémité in-

férieure a l'aspect d'une extrémité fémorale inférieure; on

y trouve du reste, en avant et un peu en dehors, un petit

noyau cartilagineux qui rappelle la rotule.

Examen histologique. - Dans les parties de la tumeur

siégeant autour du pubis on trouve, à l'examen histologi-

que, unstroma fibreux épais et abondant,circonscrivant des.

PSEUDO -hermaphrodisme. 203

alvéoles irrégulières qui contiennent des cellules embryon-

naires ; ce tissu fibreux se rencontre dans toutes les par-

ties de la tumeur, mais prédomine dans les endroits

d'apparence fibreuse ; il diminue, et même cède le pas aux

cellules embryonnaires dans les parties molles, jeunes, de

la tumeur, telles que sur le rectum. - La nature des cel-

lules, la disposition des travées fibreuses ne permet pas à

un examen attentif de s'arrêter à l'idée d'un carcinome, ce

que nous avions pensé au début après un examen hâtif et

superficiel. En résumé, nous avons ici affaire à un sar-

come, à un fibro-sarcome.

Réflexions. I. Nous signalerons l'absence complète

de tout néoplasme et de malformations quelconques chez

les ascendants directs ou collatéraux, la bonne santé des

père et mère. Nous ne trouvons chez les ascendants ni épi-

leptiques, ni aliénés (sauf un suicide) ; l'alcoolisme existe

chez un aïeul maternel et aucun membre de la famille ne

paraît avoir été atteint d'affections nerveuses graves, en

dehors des convulsions de l'enfance pour quelques-uns

d'entre eux. La mère elle-même n'est ni migraineuse, ni

à proprement parler nerveuse ; elle semble être atteinte

simplement de cet état nerveux encore peu défini décrit

sous le nom de neurasthénie.

Comme on le voit, nous ne trouvons dans les antécédents

aucun fait qui précise, explique, la déviation ou lape7-ue ? ,-

sion du développement, dont a été atteint l'enfant Rat....

Il semble que la tumeur se soit développée dans les trois

premiers mois de la grossesse. Doit-on en accuserdeschocs

qui auraient pu être subis pendant des vomissements de

ces trois premiers mois ?

Quel rôle a pu jouer ici l'émotion ressentie,vers le troi-

sième mois de la grossesse, par la mère à la vue d'un ma-

lade atteint d'un tic particulier de la tête, émotion qui

se serait prolongée d'une façon constante jusqu'à l'accou-

chement ? Nous ne saurions dire si cette émotion a été

pour quelque chose dans l'étiologie des arrêts de dévelop-

pement et des malformations que nous avons observées

chez notre malade. Sa persistance a pu jouer un rôle. Sans

insister davantage et nous lancer dans des hypothèses plus

ou moins hasardées, nous allons relever en quelques mots

les points les plus importants.

204 ECTROMÉLIE ABDOMINALE.

II. Rein unique. - Les observations du roin unique ne

sont pas d'une extrême rareté (1), mais il est douteux

qu'elles se rapportent à des cas d'absence rénale congéni-

tale ; la plupart doivent être attribuées à des atrophies, et

des recherches suffisantes eussent peut-être fait décou-

vrir, dans bien des cas, les vestiges du rein. Il n'en est

pas de même dans notre cas où la constatation de l'absence

du rein gauche est appuyée par la disposition sinueuse de

l'uretère droit de calibre excessif (Fig. 20) qui semble s'être

ainsi développé en compensation de l'absence de toute

trace d'uretère gauche. Rappelons que la capsule surré-

nale gauche, correspondant au rein absent, existait et était

normale.

III. Poeudo-hermaphrodtS ? e. Les cas d'hermaphro-

disme apparent sont assez fréquents , la plupart se rap-

portent à des hypospades très prononcés. Chez Rat..., au

contraire, le gland et le canal de l'urèthre (dans son trajet

antérieur) sont bien conformés,- l'inclusion seule du gland

dans la peau du périnée, par suite du développement de

la tumeur d'arrière en avant, avait pu faire penser à l'exis-

tence d'une vulve dont les lèvres étaient simulées par la

face interne du prépuce ; d'autre part, le scrotum inhabité,

petit et allongé, a pu être pris pour une verge mal confor-

mée. Ces différents aspects ne pouvaient toutefois résister

à un examen plus approfondi.

IV. Ectromélie abdominale unilatérale. Les cas

d'ectromélie bi-thoracique ou bi-abdominale sont assez

fréquents, mais l'ectromélie abdominale unilatérale est

très rare, et, dans la plupart des cas publiés, cette ano-

malie s'accompagnait d'éventration. Nous devons faire re-

marquer ici l'absence dans le moignon d'os rudimentaircs,

la disposition normale des nerfs, des vaisseaux et des

muscles, non intéressés par la tumeur. Cette ectromélie

paraît être due à la tumeur; nous ne pouvons être plus

affirmatifs, les centres nerveux n'ayant pu malheureuse-

(1) Consulter à ce sujet l'article Rein (physiologie) publié par

M. Daniel nlollière, dans le Dictionnaire encyclopédique des

sciences médicales, 38 série, t. III, p. 154, 1876.

TUMEUR SARCOMATEUSE. 205

ment être examinés. La constatation, par Mme Forino, de

l'état normal du placenta, des membranes, de la situation

également normale du cordon ne permet guère de faire

jouer un rôle à ces organes dans la production de la mal-

formation (1).

V. Tumeur sarcomateuse périnéale et des organes en-

vironnants.- Les cas de sarcomes congénitaux sont assez

rares et on n'en trouve que quelques exemples rapportés

par Virchow dans sa Pathologie des tumeurs et dans l'ar-

ticle Sarcome du Dictionnaire encyclopédique.

La genèse des malformations et de la tumeur observées

sur l'enfant Rat... reste encore en partie obscure; si l'on

s'explique assez facilement les anomalies rencontrées du

côté des appareils génito-urinaires par le fait du dévelop-

pement de la tumeur, il est moins facile de comprendre

comment celle-ci a pu produire l'ectromélie, et l'on ne

saurait établir de relation entre elle et l'absence du rein

gauche.

(1) Dans une observation précédemment publiée par Mme Fo-

rino (Médecin praticien, 30 septembre 1sus ? , p. 460), on note une

amputation spontanée du bras par suite sans doute d'un circu-

laire du cordon (présentation du siège) ; l'avant-bras détaché fut

retrouvé dans les membranes.

20G EPILEPSIE IDIOPATHIQUE.

IX.

Epilepsie idiopathique.- Démence paralytique.

- Obstruction des voies respiratoires par

les aliments : crico-trachéotomie. Ancien-

nes fractures des septièmes cartilages cos-

taux ;

Par BOUBNEVILLE, P. B1UCON et

L'histoire des vieux épileptiques offre souvent une série

de particularités intéressantes, non seulement au point de

vue de la pathologie nerveuse, mais encore au point de vue

et de la pathologie médicale ordinaire et même de la chi-

rurgie : telle est l'observation suivante :

Observation. - Hérédité nulle ( ? ). Pas de consan

guinilé. Premières convulsions à 3 ans. - Accidents

convulsifs revenant 4 à 6 fois chaque année jusqu'à

6 ans. - Rémission de 8 ans. - Retour des accès à

14 ans. - Affaiblissement de l'intelligence (29 ans);

idées religieuses : cruci(¡I'11wnt. - Congestions ménin-

gotiques. Tentative de suicide (1865). - Démence

(1880) s'aggravant de plus en plus (1881-1882); gâtisme,

embarras de la parole, etc. - Attitude spéciale.

Nombreuses cicatrices consécutives aux chutes con-

vulsives. - Introduction d'aliments dans les voies res-

piratoires : crico-trachéotomie. Bro2zcho- ? ozeu2nonie

consécutive. - Mort.

Autopsie : .' B)'oncho-pneu ? on : e. Fracture double

et symétrique des 7es cartilages costaux. - Artère

vertébrale droite moitié plus petite que la gauche.

- Pie-mère un peu épaissie, sans adhérences. - Asy-

métrie des circonvolutions. Scissure Ze2°pe2zdicu-

laire externe simienne.

111énag......, Charles-Théophile, tourneur sur cuivre, en-

tré à Bicêtre pour la troisième fois (1) le 22 décembre 1871

(1) Il était entré une première fois le JO décembre 1863, une

seconde fois le G février 1868.

DÉLIRE RELIGIEUX : CRUCIFIEMENT. 207

(service de M. Bourneville), est décédé le 20 mars 1885,

à l'âge de 43 ans.

Antécédents. - Les renseignements détaillés tels qu'on

les prend d'habitude dans le service, à chaque entrée,

manquant, nous relevons seulement dans les notes qui

nous ont été obligeamment communiquées par notre vénéré

maître, M. DELASIAUVE, médecin de la section jusqu'à la fin

de 1864, les indications suivantes fournies par le père du

malade en décembre 1863.

La santé de Ménag... aurait été bonne jusqu'à l'âge de

3 ans; dès cet âge, accidents convulsifs; les premiers au-

raient duré une demi-heure. Ces accidents sont revenus

jusqu'à 6 ans, séparés par des intervalles do deux ou trois

mois. Les convulsions étaient générales; il n'y avait pas

d'écume. A partir de 6 ans, disparition des crises, amélio-

ration de la santé jusque-là chancelante et développement

régulier de l'intelligence, qui était même assez vive; il a

suivi les exercices de l'école et fait son apprentissage.

A 14 ans,est survenu un accès au milieu de la rue, en

plein jour. A partir de là, les accès sont revenus tous les

deux ou trois mois pendant trois ans, tantôt le jour, tantôt

la nuit; ils se sont rapprochés ensuite et surviennent main-

tenant la nuit, suitout depuis un an, et dans le sommeil,

sans que M... en ait conscience. Il en a quelquefois deux

ou trois en douze heures et reste affaissé à leur suite pen-

dant deux ou trois jours.

La mémoire a diminué beaucoup. Son caractère s'est

modifié aussi; il est devenu morose. irritable et difficile.

- Presque chaque mois, retour d'idées délirantes reli-

fjieu.3es : il prie Dieu, se croit envoyé de lui pour guérir

les épileptiques; il en a ressenti toutes les souffrances, et

il ne veut plus qu'il y ait de ces malades sur terre. Ces

jours passés, il se mettait en croix, disait être Jésus-Christ

et voulait bénir son père et sa mère.

Au début, les accès étaient annoncés par un état de ma-

laise, d'abattement et de tristesse qui durait deux jours.

Maintenant, on le surprend souvent mâchonnant dans son

sommeil ; c'est la terminaison de la crise, qui est encore

révélée plus sûrement par des morsures de la langue, sinon

constantes, au moins fréquentes. Céphalalgie à la suite

des accès. - Contusions nombreuses de la tête et du men-

ton. - Cause de la maladie, inconnue; pas d'hérédité. -

Traitements antérieurs : arsenic, valériane, applications

fréquentes de sangsues, sans autre résultat que celui d'af-

faiblir la santé du malade.

208 TRAUMATISMES MULTIPLES.

Depuis le 10 décembre 1863 (date de la première entrée),

jusqu'en juillet 1865, nous relevons le traitement par le

sulfate de cuivre, l'apparition d'un urticaire fugace, de

l'agitation avec hallucinations, menaces, etc., et de fré-

quentes congestions méningitiques.Le 12 mars 1865, dans

un accès d'agitation, Ménag... se donne un coup de cou-

teau sans gravité au côté. - Pour cette même période, le

nombre des accès, par mois, a varié entre 1 et 7; celui des

vertiges est plus élevé. En juin 1865, pas d'accès, 4 ver-

tiges.

Etat actuel (17 mars 1885).-Tête de forme un peu carrée,

élargie transversalement à sa partie supérieure, avec saillie

considérable des deux bosses pariétales. La protubérance

occipitale et les bosses frontales font une saillie moyenne.

Nombreuses cicatrices à la racine des cheveux et à la par-

tie postérieure de l'occipital, dont deux courbes, linéaires

et très allongées. Léger sillon transversal répondant à l'ar-

ticulation du frontal avec les pariétaux. Front étroit,

couvert de nombreuses cicatrices, les unes anciennes, les

autres récentes ; une autre linéaire, de 2 centimètres, à la

partie supérieure de la tempe gauche. Les arcades orbi-

taires, effacées dans leur moitié interne, sont au contraire

larges et saillantes dans leur moitié externe; à ce nheau,

la peau est épaissie, couturée de cicatrices, privée d'un

grand nombre des poils des sourcils, mais glisse facile-

ment sur l'os. Bourrelet cutané, saillant, verticalement

dirigé, s'étendant de la racine du nez sur le front et long

de 1 cent. 1/2. Yeux un peu enfoncés. - Pupilles con-

tractiles très resserrées. Iris gris. Pas de lésion oculaire.

La fente palpébrale gauche parait légèrement oblique en

bas et en dehors.- Le nez, large à sa base, présente quel-

ques cicatrices à sa partie supérieure. Bouche grande,

lèvres épaisses. Face arrondie et symétrique. Oreilles

moyennes, égales, bien ourlées; lobule distinct.

DÉMENCE. 209

tées ; testicules volumineux et durs. La racine de la bourse

droite paraît plus grosse que celle de la gauche. Pas

d'onanisme constaté. Membres supérieurs ordinaire-

ment fixés dans la demi-flexion (contracture cédant à une

traction faible); il est plus difficile d'étendre horizontale-

ment le bras. Muscles grêles : deux cicatrices de vaccin

sur le bras gauche et une sur le droit. - Les membres in-

férieurs présentent de nombreuses cicatrices avec quel-

ques ulcérations récentes, dont une sur la face antérieure

de la cuisse droite et l'autre sur la malléole externe du

même côté. Au niveau des deux trochanters, nombreuses

cicatrices. En explorant le tibia gauche, on trouve sur la

face interne une saillie très accusée, creusée d'une rainure

oblique de haut en bas et d'arrière en avant, et située à

5 centimètres de l'extrémité inférieure de la malléole in-

terne : c'est un cal vicieux consécutif à une fracture sur-

venue en 1869, qui a mis plusieurs mois à se consolider et

s'est reproduite à plusieurs reprises, Mén... se levant avec

son appareil.

(jour : Battements sourds et mal frappés; pouls, 112

par minute. - Sensibilité générale, paraît normale. Sen-

sibilité spéciale, d'une exploration impossible. - Peau et

poils : Cheveux clair-semés noir foncé, quelques-uns gris ;

calvitie du sommet de la tête. Poils longs assez abondants

sur le devant de la poitrine. Poils grêles sur les bras et les

membres inférieurs.

1880. 7 avril. Accès comme d'habitude; mais depuis le

4, abattement. Une dit rien,ouvre les yeuxquand ilentend

parler de son père; appétit conservé. Pupilles légèrement

contractées. Sensibilité émoussée aux membres supé-

rieurs ; grimaces et mouvements, au contraire, quand on

pique les membres inférieurs avec une épingle. Gâtisme

intermittent. Démence assez prononcée. 16

15 décembre. Incohérenco absolue, aucune réponse sen-

sée à aucune question. Ne peut dire les noms des gens de

service qu il voit tous les jours, ni le jour de son entrée,

son âge, etc ; sait seulement son nom. Embarras considé-

rable de la parole.

1881. Avril. Revacciné sans résultat. Ne gâte que la

nuit. Très violent, parfois cherche à mordre. Nombreuses

contusions, plaies contuses et cicatrices résultant de chutes

dans les accès.

1883. 11 décembre. Après beaucoup d'insistance, Mén...

finit par répondre : « Ça..... va... a... a... » On lui dit :

210 démence; attitude spéciale.

« Bonjour. » « Oui... », répart-il, et c'est tout. Il est in-

capable de s'habiller et de se déshabiller. Quelquefois il

reste immobile devant son déjeuner sans y toucher, ou

bien il mange salement avec la main et parfois essaie de

prendre son bouillon avec une fourchette. Gâtisme ab-

solu. Le plus souvent, il reste immobile dans un coin. -

Parésie passagère des jambes après les accès et durant

deux ou trois jours. Pupilles contractées, mais égales. Il y

a deux jours, sans motif appréciable, il est arrivé près de

l'infirmier et a cherché à le mordre.

1884. ler juillet. Pas de tremblement de la langue ni des

lèvres. Forces affaiblies.

24 décembre. Frémissement des lèvres; hésitation mar-

quée de la parole, « tou... toutou... alors vous vou... ou...

dre... driez ». On arrive difficilement à lui faire ouvrir la

bouche, mais on no peut lui faire sortir la langue, qui

tremble légèrement.- Mén... égratigne parfois ses camara-

des quand ils le contrarient. Dynamométrie impossible.-

D'habitude le malade tient la tête penchée; ses mains sont

ramenées en avant de la poitrine, l'une sur l'autre; il mar-

che en traînant les pieds et en inclinant le corps assez

fortement en avant.

1885. 15 mars. Pendant qu'il mangeait, un morceau de

pain ou de viande s'est engagé dans les voies respiratoires

et menace de l'asphyxier. Le doigt porté profondément

dans le fond de la gorge arrive presque à la partie supé-

rieure du larynx sans avoir la sensation du corps étranger.

L'inspiration est pénible et accompagnée d'un bruit de

cornage intense. A la percussion, diminution de l'élasticité

du thorax, mais sonorité à peu près normale. Le murmure

respiratoire s'entend encore des deux côtés, mais affaibli,

presque supprimé à gaucho, où on entend en revanche la

propagation du bruit laryngo-trachéal. Pas ou peu de

tirage sus-sternal. La dépression épigastrique est plus ac-

cusée. - Par moments, la dyspnée devient plus intense;

il se produit des quintes de toux qui rejettent des muco-

sités filantes et visqueuses; à chacune de ces quintes, la

face blémit davantage, les extrémités sont froides, le pouls

reste plein et fort.

Vers midi et demi, la dyspnée et la cyanose sont extrê-

mes, et l'interne de garde pratique d'urgence la section

des parties molles au thermocautère et, au bistouri, l'in-

cision de la membrane crico-thyroidienne, du cartilage

cricoïde et du premier anneau de la trachée (c1'ico-lrJ.chéo-

CORPS ÉTRANGER. 211

tomie). La respiration se rétablit lentement après l'opéra-

tion, le pouls devient plus petit et filiforme à plusieurs

reprises; sous l'influence d'excitations directes de la tra-

chée par des attouchements de la muqueuse et de maneeu-

vres de respiration artificielle prolongées pendant une

demi-heure environ, les mouvements respiratoires se réta-

blissent, se régularisent.

A sept heures du soir, rejet par la bouche de petits

fragments de viande d'abord, puis de deux gros mor-

ceaux en partie tendineux, nullement mâchés, sans traces

d'altération. Le plus gros est aplati et mesure 4 centimè-

tres dans les deux sens ; le plus petit est allongé et a 4 cen-

timètres de longueur sur 2 de largeur. T. R. 38°,8.

17 mars. Respiration fréquente. Pouls accéléré, petit.

Face rouge, lèvres un peu cyanosées. Des sécrétions abon-

dantes, visqueuses, opalines sont rejetées sans trop de

peine par la canule. A l'auscultation, respiration exagérée,

ronflante, avec transmission des bruits qui se passent dans

la canule. - Traitement : potion de Todd, lait, potages,

bagnols. Le lait n'est avalé qu'avec difficulté et rejeté en

petite quantité par la canule. - T. R. M. 39°,8. - Soir :

T. R. 40".

18 mars. Nuit assez bonne. La rougeur de la face et la

chaleur de la peau ont diminué et presque disparu. La

peau est moite. Les sécrétions sont aussi moins abon-

dantes. A la percussion, submatité des deux bases ; en ce

point, murmure vésiculaire peu distinct et souffle léger.

En avant, respiration ronflante. P. 80; T. R. 39°.

Du côté de la plaie, léger gonflement et rougeur des

bords. La plaie elle-même est grisâtre, mais suppure peu.

Hier, tentative d'enlèvement de la canule; mais la plaie

étant fermée, la respiration est devenue si fréquente, avec

production d'un bruit laryngé intense, qu'on a dû la re-

mettre. Soir : T. R. 40°. Vésicatoire à la base droite;

lavement purgatif.

19 mars. Respiration fréquente, plaques de rougeur

sur les joues. A l'auscultation, râles nombreux sous-cré-

pitants. Peau très chaude, sèche. Nuit dernière très

agitée, avec mouvements désordonnés. 1/4 lavement avec

1 gramme de sulfate de quinine. T. R. 39°,8.

20 mars. Le malade est décédé à cinq heures du matin.

Tableau des accès depuis 1871 jusqu' la mort.

' FRACTURES DES CARTILAGES COSTAUX. 213

Autopsie (vingt-huit heures après la mort). - Abdomen

plat, sans coloration cadavérique. Rigidité assez pronon-

cée, surtout au bras gauche. Tissu adipeux assez abon-

dant. Musculature normale. Pas d'emphysème du cou. A

l'ouverture de l'abdomen, le péritoine paraît sain ; un peu

de liquide rougeâtre dans le petit bassin. L'intestin occupe

sa place normale; le grand épiploon est remonté et com-

plètement recouvert par les anses intestinales. Le foie ne

dépasse pas les fausses côtes. Le diaphragme remonte au

bord inférieur de la troisième côte à droite et de la qua-

trième à gauche. L'estomac est dilaté et déborde les

fausses côtes de la largeur de la main. Dans la cavité pleu-

rale gauche, un demi-verre environ d'un liquide roussâtre;

adhérences entre les deux plèvres, en arrière, s'étendant du

sommet à la base du poumon gauche et sur un espace plus

large en haut qu'en bas. Le poumon droit est presque

complètement adhérent, tant à la plèvre qu'au péricarde.

Péricarde normal; sa cavité contient environ trois

cuillerées d'un liquide rougeâtre, sans fausses mem-

branes.

Thorax. L'examen du plastron thoracique, enlevé pour

l'ouverture de la cavité, fait découvrir une fracture double

symétrique des 7es cartilages costaux, fractures anciennes

dont nous ignorons la date, car nous n'avons trouvé au-

cune indication sur les registres de la section. La poignée

du sternum est réunie au corps par une articulation, tandis

que l'appendice xyphoide est en grande partie cartilagi-

neux ; le cartilage de la 7e côte s'insère sur cette partie

cartilagineuse. Ce cartilage mesure 11 cent. 1/2. A 3 cent.

1/2 de son extrémité costale se trouve de chaque côté une

fracture transverse à bords nets; ses fragments chevau-

chent l'un sur l'autre de 1 cent. 1/2 à 2 cent.; le fragment

costal est situé en avant. Entre les deux fragments et au-

tour d'eux, on voit de chaque côté du tissu osseux dur et

compact, se montrant sur les différentes surfaces du carti-

lage, sans union intime avec lui; ce tissu osseux est sur-

tout abondant entre la face externe du fragment sternal et

la face interne du fragment costal. Les cartilages parais-

sent normaux, sans traces d'ossification.

Coeur (280 grammes), surchargé modérément de graisse,

surtout à la pointe et en arrière ; normal, on trouve seule-

ment un peu d'athérome autour des orifices des artères

coronaires. Endocarde un peu épaissi dans la cavité

ventriculaire gauche, dur et presque calcaire dans l'espace

sous-aortique. - Plèvre lisse et normale dans les parties

214 ' autopsie.

où on ne trouve pas d'adhérence. Ganglions du médias-

tin postérieur mélaniques, sans augmentation de volume.

Bronches et trachée hypérémiées. Poumon droit

(900 grammes) très congestionné et très oedématié; sur les

bords, plusieurs zones de 1 centimètre d'épaisseur, dures,

grisâtres (broncho-pneumonie). - Congestion et oedème

du poumon gauche (780 grammes), prédominant à la base.

Aspect gris sale de la plaie trachéale; celle-ci intéresse

seulement le cartilage cricoïde et le ligament crico-thyroi-

dien. Les cordes vocales qui touchent immédiatement par

leur insertion antérieure à l'angle supérieur de la plaie

sont gonflées^ mais ne paraissent pas avoir été atteintes.-

Pharynx et oesophage normaux.

Abdomen. Foie (1230 grammes). Pancréas, uretères,

capsules surrénales, rate (140 grammes), rein droit (105

grammes) normaux. Rein gauche (115 grammes) lobulé T

deux petits kystes, un de 5 millimètres environ, l'autre de

2, font une légère saillie sur son bord convexe. Bile, vési-

cule biliaire, canal cholédoque, rien de particulier. Le

canal inguinal droit est très dilaté. Les testicules sont

normaux.

Tête. Cuir chevelu normal. Les os du crâne durs, mais

peu épais, sont symétriques. Le trou vertébral est nor-

mal. Dure-mère et liquide céphalo-rachidien, rien de

particulier. Encéphale : 1270 grammes.

La pie-mère, non injectée, mais un peu épaissie., s'en-

lève très facilement des deux côtés, sur le cerveau et le

cervelet. Les nerfs, le chiasma. les pédoncules cérébraux £

sont symétriques. Les hémisphères cérébraux sont égaux.

Les ventricules latéraux et. la corne d'Ammoo n'offrent

rien de particulier. Les artères de la base sont symétri-

ques, mais l'artère vertébrale droite est au moins de

moitié plus petite que la gauche. Cervelet et isthme : 140

grammes. Les hémisphères cérébelleux sont égaux.

Hémisphère gauche, a) Face convexe. La première

frontale, très sinueuse, s'insère directement sur la frontale

ascendante ; de la base de son point d'insertion part une

scissure parallèle au sillon de Rolando ; elle descend pres-

que au niveau do la scissure frontale inférieure, longe pa-

rallèlement dans son tiers inférieur, et à 1 centimètre en

avant, une seconde scissure parallèle frontale plus infé-

rieure, qui va jusqu'à l'insertion de la troisième frontale.

La deuxième frontale est très sinueuse, envoie dans son

description des circonvolutions. 215

tiers moyen deux plis de passage à la première frontale,

s'insère indirectement par un pli de passade au tiers infé-

rieur de la circonvolution frontale ascendante, entre les

deux scissures parallèles dont nous avons parlé. La troi-

sième frontale est aussi très sinueuse; elle ne s'insère à la

frontale ascendante qu'au fond de la vallée de Sylvius. Les

sillons du lobe frontal sont profonds. La scissure de Syl-

vius est normale. La frontale ascendante, assez large

dans son tiers inférieur, est moins développée dans ses

deux tiers supérieurs, grêle vers sa partie moyenne. Le

sillon de Rolando est profond et sinueux. La pariétale

ascendante est sinueuse et assez grêle. La scissure inter-

pariétale, très sinueuse et profonde, est interrompue au

niveau de sa courbure par un mince pli de passage, allant

du pli pariétal inférieur à la partie médiane de la parié-

tale ascendante; elle possède un rameau ascendant assez

sinueux, un sillon vertical descendant (Sulcus interme-

clius de Jensen) qui va se confondre avec la scissure pa-

rallèle, puis va se perdre dans le lit de la première scissure

occipitale, elle-même très sinueuse, en coupant la scissure

perpendiculaire externe qui, ici, est complète et profonde;

cette dernière, interrompue à son tiers supérieur par un

pli de passage grêle, allant du lobule pariétal supérieur à

la première circonvolution occipitale, se continue ensuite

presque jusqu'à la scissure parallèle dont elle n'est séparée

que de 4 millimètres. Le lobule pariétal supérieur est

sinueux, bien développé, ainsi que le lobule pariétal infé-

rieur et le pli courbe.

La première circonvolution temporale est bien déve-

loppée, sinueuse, elle est nettement séparée du lobule pa-

riétal inférieur par une scissure profonde, horizontale; la

scissure parallèle est sinueuse et profonde, communique

par trois larges et profondes scissures avec la seconde

scissure temporale, très sinueuse et irrégulière, inter-

rompue par plusieurs plis de passage allant de la troisième

temporale à la deuxième; il en résulte que ces deux cir-

convolutions, bien développées, sont très sinueuses et très

irrégulières. Toutes les circonvolutions du lobe temporal

sont nettement séparées (il est même très rare de les voir

aussi nettement) de celles du lobule pariétal inférieur

d'une part et de celles du lobe occipital d'autre part; une

scissure verticale, dérivée de la première scissure tempo-

rale, très zigzaguée et séparée de la scissure interpariétale

par un pli de passage à niveau de 9 millimètres, descend vers

le lobule fusiforme, semble constituer en partie la première

scissure temporo-occipitale, très sinueuse et irrégulière.

216 DESCRIPTION DES circonvolutions.

Cette scissure verticale, interrompue seulement dans sa

profondeur par un pli de passage grêle allant de la seconde

temporale à la troisième occipitale, est formée à la face

convexe parle sillon occipital, antérieur (de Wernicke),

l'incisure préoccipilale (de Schwalbe) et forme, en s'en-

trecroisant avec la partie antérieure de lapremière scissure

temporale, une sorte de confluent.

Le lobe occipital, nettement séparé par les sillons précé-

demment décrits du lobe temporal et du lobule pariétal

inférieur, est constitué par trois circonvolutions bien dé-

veloppées et sinueuses. La scissure occipitale transverse

coupe la scissure occipitale supérieure, puis l'inférieure,

et n'est séparée de la scissure parallèle que par un pli de

passage à niveau de 3 millimètres. Une seconde scissure

occipitale transverse se trouve en arrière, part de la scis-

sure occipitale supérieure et coupe la scissure occipitale

inférieure. Ces deux scissures transverses constituent, avec

une partie de la seconde scissure occipitale, une scis-

sure en H.

Le lobule orbitaire et les circonvolutions de l'insula

sont bien développés, normaux. La première temporale

envoie à la partie postérieure du lobule de l'insula un

volumineux pli de passage.

b) Face interne. La scissure calloso-marginale est

sinueuse, profonde; le sillon paracentral est bien déve-

loppé et aboutit à la scissure calloso-marginale. Les scis-

sures fronto-pariétale interne, perpendiculaire interne

et calcarine sont profondes, la dernière assez sinueuse.

La première circonvolution frontale est très sinueuse,

découpée par do nombreux sillons parallèles et perpendi-

culaires. Le lobe paracentral est bien développé, de forme

triangulaire, avec un sillon curviligne assez profond.

La circonvolution du corps calleux est aussi bien déve-

loppée, présente des scissures assez marquées à sa partie

postérieure et envoie deux plis de passage (antérieur et

postérieur) à l'avant-coin normal, dont elle est séparée

vers le milieu par une scissure sous-pariétale. Le coin,

les circonvolutions temporo-occipitales, ainsi que le lobule

de l'hippocampe, sont bien développés et normaux. Le

corps calleux, le corps strié, la couche optique et le ventri-

cule latéral ne présentent rien de particulier.

Hémisphère droit. a) Face convexe.- La première

frontale, sinueuse et irrégulière, s'insère par un petit pli

de passage grêle au sommet de la frontale ascendante; elle

DESCRIPTION DES CIRCONVOLUTIONS. 217

est dépassée de celle-ci par une scissure parallèle analogue

à celle décrite à gauche et vers le milieu de laquelle on

remarque un pli de passage se rendant du tiers moyen de

la frontale ascendante au fond du sillon vers la première

frontale. La deuxième frontale,qui s'insère par un pli de

passage sur la frontale ascendante, est séparée oblique-

ment de son tiers postérieur par une scissure irrégulière;

elle est très sinueuse, irrégulière et envoie un pli de pas-

sage vers son milieu, à la première frontale. La scissure

parallèle frontale, la troisième circonvolution frontale

présentent les mêmes particularités qu'à gauche. Les sil-

lons sont de même profonds. La scissure de Sulvius est .

normale. La frontale ascendante paraît assez bien déve-

loppée, elle est sinueuse et irrégulière. La pariétale

ascendante est moins bien développée et sinueuse. Le

sillon de Rolando est profond et sinueux.

La scissure interpariétale présente les mêmes particu-

larités qu'à gauche, sauf qu'elle est interrompue par un

pli de passage transversal (de Gromier) assez grêle, allant

du lobule pariétal supérieur, bien développé et très sinueux

à la deuxième circonvolution de passage du lobe occipital

et qu'il n'existe pas de pli de passage allant, au niveau de

sa courbure, du lobule pariétal inférieur à la pariétale

ascendante ; de plus le sillon vertical descendant n'atteint

pas tout à fait la scissure parallèle. La scissure perpendi-

culaire externe se prolonge jusqu'à la scissure parallèle

interrompue seulement par un pli de passage allant du pli

courbe à la seconde circonvolution occipitale.

La scissure verticale provenant de la seconde scissure

temporale est beaucoup moins développée qu'à gauche. Il

existe deux scissures occipitales transverses, mais elles no

coupent pas la scissure occipitale inférieure.

Los lobules pariétal supérieur et inférieur, le pli

courbe, les circonvolutions des lobes occipital et temporal

sont bien développées et ont le même aspect qu'à gauche.

b) Face interne. La scissure calloso-marginale est

sinueuse, profonde ; le sillon paracentral n'atteint pas la

scissure calloso-marginale ; le lobe paracentral est bien

développé et tout à fait différent par son sillon bifurqué et

profond, du lobe paracentral gauche. Toutes les autres

scissures de cette face sont profondes, sinueuses et n'offrent

rien de particulier. Toutes les autres circonvolutions de

la face interne présentent, à très peu de chose près, la

môme configuration qu'à gauche. il en est de même du

corps calleux, du corps strié, de la couche optique et du

ventricule latéral.

BOURNEVILLE, 1886. 15

218 ÉPILEPSIE ; rémission.

Le cervelet, la protubérance, le bulbe, etc., ne mon-

trent rien d'anormal.

Cette observation nous semble comporter les remarques

suivantes :

I. La marche de l'épilepsie mérite d'attirer l'attention.

Nous avons àrelever d'abord une rémission assez longue,

s'étendant de 6 à 14 ans, puis à signaler le chiffre annuel

des accès de 1871 à 1885. Le tableau que nous avons donné

montre que les accès ont atteint leur maximum en 1872,

qu'il y a eu ensuite, sous une influence que nous ne con-

naissons pas, une diminution assez sensible (1876-1877) et

qu'enfin les accès ont augmenté et se sont à peu près main-

tenus au même chiffre jusqu'à la mort (1878-1885).

II. Durant les dernières années de la vie du malade,

nous avons pu suivre les progrès de la démence. L'affai-

blissement, puis la perte complète de la mémoire, l'em-

barras de la parole, le tremblement des lèvres, etc. ; la cé-

phalalgie consécutive aux crises convulsives et les conges-

tions méningitiques mentionnées dans les notes de M.

Delasiauve; enfin l'hébétude prolongée qui suivait les ac-

cès, nous avaient fait penser que, à l'autopsie, nous trouve-

rions des lésions plus ou moins profondes, et, en particu-

lier des altérations des méninges, des adhérences entre

elles et la substance grise. Notre hypothèse ne s'est pas

réalisée ; nous avons bien trouvé un épaississement des

méninges, mais modéré; il n'y avait d'ailleurs aucune

adhérence et, au moins àl'ocil nu, la substance grise n'of-

frait pas d'altérations. En résumé, il n'y avait pas de rap-

port entre les symptômes cliniques et les altérations ana-

tomiques (1).

III. Parmi les autres particularités qu'a offertes le ma-

lade, nous relèverons le caractère mélancolique et reli-

gieux du délire bien mis en évidence par les idées de sui-

cide et par l'attitude du crucifiement, commune dans les

attaques d'hystérie, n'existant pas dans les accès d'épilepsie

et rare dans le délire épileptique. Nous relevons aussi les

nombreuses cicatrices disséminées sur la face, le front et

(1) Voir : Bourneville et d'Olier.- De la démence épileptique.

(Archives de Neurologie, 1880, t. I, p. 213).

CRUCIFIE,NIENT; attitude spéciale.

219

l'occipital (1) et enfin l'attitude spéciale prise par le corps

tout entier au sur et à mesure que la démence progressait,

cette attitude est fréquente chez les déments épileptiques

et nous aurons l'occasion d'y revenir (2).

IV. La double fracture symétrique, des septièmes carti-

lages costaux mérite de nous arrêter quelques instants.Les

fractures des cartilages costaux, sont, en effet, assez rares;

constatées pour la première fois par Zwinger sur le cada-.

vre (1698), elle ont été depuis lors observées par plusieurs

auteurs, soit sur le cadavre, soit sur le vivant. Nous avons

cru intéressant de relever les cas signalés dans les traités

spéciaux (3) et nous avons indiqué les points principaux

dans le tableau suivant. ' * , -

220

FRACTURE DES CARTILAGES COSTAUX.

FRACTURE DES CARTILAGES COSTAUX.

221

222

FRACTURE DES CARTILAGES COSTAUX.

FRACTURE DES CARTILAGES COSTAUX.

223

224 FRACTURE DES CARTILAGES COSTAUX.

Nous avons omis à dessein les fractures associées à des

fractures multiples soit des côtes, soit de différentes au-

res parties du squelette ainsi qu'il arrive fréquemment

dans les grands traumatismes (tamponnement, passage sur

le corps de roues de voiture, chute d'un lieu élevé, etc.).

Nous avons de même laissé de côté les cas où le diagnostic

est resté indécis entre une luxation ou une fracture près

de l'articulation costo-sternale.

Le nombre des cas de fractures des cartilages costaux,

cette élimination faite, s'élève donc à une cinquantaine en-

viron, si nous y comprenons un certain nombre de cas dont

nous n'avons pu consulter les observations originales,

telles que celles de Monteggia, Chaussier, Foulis, Hol-

mes, Bennet, etc., dont l'indication simple se trouve dans

quelques-uns des travaux que nous avons cités. Nous n'a-

vons trouvé mentionné aucun exemple de fracture siégeant t

symétriquement sur un même cartilage de chaque côte.

Notre cas serait donc, sauf erreur, le premier exemple

d'une fracture symétrique d'un même cartilage (1).

On remarquera que la fracture des cartilages costaux

siège plus fréquemment sur les 6°, 7° et 8« cartilages, ce

dernier paraît être plus souvent atteint que les autres. Le

chevauchement a lieu indifféremment dans un sens ou

dans l'autre.

Dans notre cas la lésion siège sur les septièmes cartila-

ges costaux droit et gauche, à 3 centim. et demi de l'arti- ·

culation costale. Le fragment costal chevauche de 1 cen-

tim. et demi à 2 centim. sur le fragment sternal conformé-

ment à la loi Delpech-Malgaigne. Comme dans la plupart

des autres cas les fragments sont réunis par un cal osseux,

dur et compact (1), sans que leurs extrémités participent

au travail de réparation. Nous noterons que chez Ménag...

les cartilages costaux étaient absolument normaux, sans

traces de calcification.

Les fractures des cartilages costaux sont produites par

(1) La réunion par cal osseux se produit également chez les

grands animaux. Gurtl (loc. cit.) dit qu'il existe au musée de l'école

vétérinaire do Berlin, sous le n° 805, 7 cas différents de fracture

de cartilages costaux provenant de chevaux, tous avec cal osseux.

FRACTURE DES CARTILAGES COSTAUX. 225

cause directe ou par cause indirecte (1) comme celles des

côtes. Dans notre cas nous croyons qu'il s'agit d'une frac-

ture de cause directe par excès de redressement ; la cause

vulnérante, probablement les mains appliquées avec vio-

lence et symétriquement à la base de la cage thoracique

aurait dépassé la limite d'élasticité et produit la fracture

symétrique du 7° cartilage costal (2).

Nous croyons donc devoir attribuer notre double fracture

symétrique à des manoeuvres violentes pour maintenir le

malade qui, comme nous l'avons dit, était sujet après ses

accès, à des périodes d'excitation maniaque. II ne s'agit là

que d'une hypothèse, l'accident remontant à une date an-

térieure à 1879 (3).

(1) On a signalé quelques exemples de fractures (8 cas) de car-

tilages costaux par suite de l'action musculaire (Voir Gurtl. -

l.oc. cit., t. I, p. 249, observ. 119 et 120), et Paulet, loc. cit.,

p. 83.)

(2) Ce cartilage est un des plus fréquemment atteints ; c'est celui

qui mesure la plusgrande largeur (12 à 14 centim., selon Sappey),

le 8e cartilage ne mesurant que 10 centim. - Luschka a trouvé

sur un homme bien constitué 13 centim. 8, pour le 7e cartilage et

13 cent. 1/2 pour le 8e. Chez Ménag..., le 7° cartilage mesurait

11 cent. 1/2.

(3j A titre de renseignement nous citons encore la thèse de

Vierthaler : Uber die Bruche der Rippen und ihrer Kno1pel.

Wùrzburg, 1847.

226 TEMPÉRATURE dans LES ACCÈS isolés d'épilepsie.

X.

De la température dans l'épilepsie ;

Par bourneville.

I. Température dans LES accès isolés d'épilepsie.

En 1870, dans notre thèse inaugurale (1), nous avons

cité quelques observations thermométriques montrant

que les accès isolés d'épilepsie déterminaient une légère

élévation de la température centrale. Deux ans plus tard,

dans nos Etudes cliniques et thermométriques sur les

maladies du système nerveux, nous rapportions de

nouveaux faits, confirmant les premiers. Ces faits, pour

la plupart, avaient été recueillis à la Salpêtrière dans le

service de notre maître, M. Charcot. Depuis cette époque,

nous avons pu bien des fois, soit à la Salpêtrière, dans

les services de MM. Charcot et Delasiauve, soit à Bicêtre

dans notre service, vérifier l'exactitude de la règle posée

par nous, à savoir que l'accès d'épilepsie augmente la

température et, à l'occasion, dans les observations

publiées par nos élèves et par nous, nous avons cité

d'autres exemples. Nous n'avions pas cru indispensable

de revenir spécialement sur un fait qui nous semblait

démontré et que M. Charcot avait d'ailleurs rendu clas-

sique par son enseignement. Nous nous étions trompé,

parait-il, car aujourd'hui, un auteur allemand, M. Wit-

kowski conteste l'exactitude de la règle que nous avions

posée.

(1) Etudes de thermométrie clinique dans l'hémorrhagie cé-

rébrale et dans quelques maladie-ode l'encéphale. Paris, 1870.

TEMPÉRATURE DANS LES ACCÈS ISOLÉS D'ÉPILEPSIE. 227

tion est erronée. Comparées aux mensurations thermiques,

extrêmement nombreuses que, depuis des années, j'ai recueil-

lies sans interruption, les recherches de la Salpêtrière fort

clairsemées d'après les indications mêmes de Bourneville, ne

sauraient entrer en ligne de compte, et l'on doit rattacher à

des conditions exceptionnelles ceux des résultats qui pouvaient

passer pour positifs, si tant est qu'on soit autorisé à donner

ce nom à des formules représentant bien moins la règle, la

généralité des cas que l'on devait être tenté de le conclure des

argumentations do Bourneville. Or, non seulement chaque

accès pris individuellement n'exerce généralement aucune

action sur la température du corps du patient, mais les séries

d'accès répétés, dont cependant les effets devraient s'addi-

tionner, peuvent évoluer sans déterminer de fièvre, surtout

lorsque leur chiffre n'est pas élevé et que le trouble de la con-

naissance n'est ni profond ni prolongé (1) ». '

Les faits seuls, rigoureusement observés, peuvent

trancher la question et montrer qui,de M. Witkowski et

de nous, est dans la vérité. En conséquence, nous allons

étudier successivement la tempé1'ature dans les accès

isolés d'épilepsie, puis durant et après les petites séries.

Cette tâche accomplie, nous examinerons les singulières

assertions de l'auteur relativement à l'état de mal épi-

leptique et nous ferons voir qu'il s'est donné beaucoup

do peine pour découvrir des faits bien connus de tous

les médecins un peu au courant de la littérature médi-

cale, en ce qui concerne les maladies du système

nerveux.

(1) Witkowski (L.). De la fièvre épileptique et de quelques

autres questions cliniques concernant l'épilepsie. (Berliner

Klin. 1Yochel1schl'i(t, n9 43 et 44, octobre 1886.)

228 TEMPÉRATURE DANS LES ACCÈS ISOLÉS D'ÉPILEPSIE.

TEMPÉRATURE DANS LES ACCÈS ISOLÉS D'ÉPILEPSIE. 229

230 TEMPÉRATURE DANS L'ÉPILEPSIE.

Au début de son travail, M. Witkowski exprime le

regret que l'existence « des hautes températures qui

s'observent souvent chez les épileptiques dans des cir-

constances où, en dehors de la névrose, on ne peut

constater aucune autre cause de fièvre » n'ait jusqu'à

présent trouvé que « peu d'accès dans le bagage général

d'expérience du médecin. » Il continue ainsi :

« Et cependant ce fait mérite qu'on y consacre toute son

attention. Et cela non seulement parce que, le sachant, le

médecin devient capable d'interpréter avec toute l'exactitude

désirable, bien des hyperthermies, demeurées jusque-là énig-

matiques et par suite d'en tirer des conclusions diagnostiques

et thérapeutiques légitimes, mais encore parce, qu'il fournit

des indications pronostiques dont l'appréciation permet au

praticien de prédire, en présence de certains processus, avec

toute la certitude et toute la circonspection qu'exige la situa-

tion devant le public. Aucun des traités de pathologie,de neu-

rologie, de psychiatrie parus, certes, en abondante quantité,

dans ces dernières années n'a traité la question et ses rapports

d'une manière satisfaisante... Si l'on a négligé ce sujet,

ajoute-t-il, la faute en est en partie probablement, aux indi-

cations exagérées des auteurs français et en particulier à

l'Ecole de Charcot... »

En d'autres termes les médecins, confiants dans les

indications données par l'Ecole de laSalpêtrière, ont eu

le tort de ne pas procéder à de nouvelles recherches et

la conséquence enest d'autant plus grave que M. Charcot.

et nous, nous leur avons fait accepter des indications

exagérées et que de la sorte nous avons nui aux progrès

de la science. Eh bien, n'en déplaise à M. Witkowski,,

nous avons la conviction que nous n'avons pas démé-

rité. Sur le premier. point : augmentation de la tem-

pérature centrale sous l'influence des accès isolés

d'épilepsie, les soixante faits que nous venons de

placer sous les yeux de nos lecteurs répondent à ses

critiques de la manière la plus démonstrative (1). Nous

(1) Les exceptions à la règle sont extrêmement rares. Nous

n'en avons rencontré que quatre sur 61 malades : 1° Derou ?

3 ? ° et deux heures après 37°,3 ; une autre fois : 370,2

TEMPÉRATURE DANS LES ACCÈS SÉRIELS D'ÉPILEPSIE. 231

espérons faire, toujours en nous appuyant sur des faits

précis, une démonstration aussi nette, en ce qui con-

cerne les petites séries d'accès et l'état de mal épilep-

tique.

Conclusions. 1° Les accès isolés d'épilepsie

augmentent la température centrale; 2° Cette

augmentation varie entre un dixième de degré et un

degré quatre dixièmes ; elle est en moyenne de 5 à 6

dixièmes de degré.

II. Température dans LES accès SÉRIELS d'épilepsie.

Les accès d'épilepsie se présentent tantôt à l'état isolé,

tantôt sous forme de séries. Dans ce dernier cas, durant

la même journée, séparés par des intervalles plus ou

moins longs, mais pendant LESQUELS la connaissance

revient, le malade peut avoir 2, 3, 4.... 10 accès ou

davantage et, contrairement aux épileptiques sujets à

des accès isolés quipeuvent se reproduire tous les jours,

les malades de ce groupe peuvent rester 2, 3, 4 semaines

ou même plus longtemps sans avoir de nouvelles séries.

Nous avons vu que les accès isolés déterminaient une

augmentation de la température oscillant de quel-

ques dixièmes de degré à un degré et quelques dixièmes

et les 60 cas que nous avons rapportés plus haut con-

firment ce que nous avons écrit précédemment (1869,

1870, 1873, etc.).

Comment se comporte la température dans les accès

sériels ! Absolument de la même façon que dans les

accès isolés, c'est-à-dire qu'ils n'occasionnent qu'une

légère augmentation de la température centrale. Nous

l'avons démontré dans notre thèse en 1870 et dans d'au-

37°,1 ; 37o,3 - - 2° Marq... : 37°,3 et deux heures après 37°,5;-

3° Gach... : 37(),.1 et deux heures après 37°,2 ; - 4° Franco... :

3G ? 7; 37°, 5 ; - 3 ï °,S. - Cliez le malade Cliédev... (n° 57),

nous avons noté une autre fois : 37°,9 au bout de deux heures.

232 TEMPÉRATURE DANS LES ACCÈS SÉRIELS D'ÉPILEPSIE.

tres publications (1). Les faits que nous n'avons cessé

de recueillir depuis plus de dix ans, confirmant nos an-

ciennes conclusions, nous n'avions pas cru nécessaire

de revenir sur cette question, pas plus que sur la tempé-

rature dans les accès isolés d'épilepsie. Mais M. le Dr

Witkowski contestant ce que nous avons dit sur la

marche de la température dans les accès sériels, comme

il a contesté ce que nous avons écrit sur la tempéra-

ture dans les accès isolés, nous allons rapporter, non

pas tous les faits que nous possédons,ce qui nous entraî-

nerait trop loin, mais quelques faits en nombre suffi-

sant, nous le pensons, pour prouver à tout lecteur im-

partial que, sur ce second point, comme sur le premier,

il n'a pas mal placé sa confiance en acceptant comme

l'expression de la réalité, l'enseignement de l'Ecole de

la Salpêtrière. Voici en quels termes s'exprime notre

contradicteur :

« Or, dit-il, non seulement chaque accès pris individuelle-

ment n'exerce généralement aucune action sur la température

du corps du malade, mais les séries d'accès répétés, dont ce-

pendant les effets devraient s'additionner, peuvent évoluer

sans déterminer de fièvre, surtout lorsque leur chiffre n'est

pas élevé et que le trouble de la connaissance n'est ni profond,

ni prolongé. »

C'est exactement l'opinion que nous soutenons de-

puis plus de quinze ans et, sur ce point encore, 1\1. \Vit-

kowski n'a rien inventé. Ceci dit, citons quelques faits :

1° Debarg... : Premier accès à 9 h. 35 : T. R. 37°,8 ; Se-

cond accès à 10 h. 15 : T. R. 37°,7 ; un quart d'heure après :

37°,6; - deux heures après : 3 7 ?

2° Boulang.. : Après le premier accès : T. R. 38a; - unquart

d'heure plus tard : 37",5; - deux heures plus tard : 37 ? ? . -

t1) Eludes cliniques et thermométriques sur les maladies du

système nerveux. Paris, 1872-1873. Recherches cliniques et

thérapeutiques sur l'épilepsie et l'hystérie, pages 1 à 9h. Paris.

1876. - De l'état de mal épileptique, thèse de A. Leroy ; Paris,

1880, passim. - Revue phologr. des hôpitaux de Paris, 1869,

p. 165, et Bulletin de la Société analomique, 1869.

TEMPÉRATURE DANS LES ACCÈS SÉRIELS D'ÉPILEPSIE. 233

Second accès cinq heures après lo premier : 38°,2 et doux

heures plus tard : 370,6.

3° Ren... : Premier accès à 3 h. 30 : T. R. 38°, 6 ; - un quar

d'heure après : 38 ? Second accès à 4 heures : 38°,2; à

6 heures du soir : 37°,8; le lendemain à 6 heures du matin :

37°,8.

110 Boulan.. : Premier accès à 6 heures du matin : T. R. 38°;

- un quart d'heure après : 37°,6; - deux heures après : 37°.

- Second accès à 11 h. 20 : T. R. 3Sa,7 ; - un quart d'heure

après : 37°,9 ; deux heures après : 37°,2. - Troisième accès

à 2 h. 30 : 38°; - un quart d'heure après : 37°,8; - deux

heures après : 37 ?

50 Cont... : Premier accès à 7 heures du matin. - Second

accès à 10 heures : T. R. au moment du ronflement, 38°,5; -

un quart d'heure après l'accès, 38°,3 ; deux heures aprè3

midi : 37°,5. - Troisième accès (très fort) à 2 heures et demio

de l'après-midi : 3S°,6; un quart d'heure après : 38°,3; deux

heures après : 37°,9. Le lendemain à 6 heures sans nouvel

accès : T. R. 37°,5.

6° Vass... : Après le quatrième accès d'une série : T. R. 37°,9;

un quart d'heure après : 37°, 6.

7. Courch... : Premier accès à 9 h. 30 : T. R. 37°,7. - Second

accès à 10 h. 20 : 37ï°,8. Troisième accès à 1 h. 15 : 37°,7.

Quatrième accès à 2 h. 30 : 37°,9. - Cinquième accès à 5 heu-

res : 37°,8. A 6 heures du soir : 37°,S. Le lendemain à

6 du matin : 37°,7.

8o Boulan... : Premier accès à 11 h. 30 : 3S° ; - Second accès

à midi 45 : T. R. 38° ; - Troisième, quatrième et cinquième

accès do 2 heures à 2 h. 30 : 38° ; Sixième accès à 5 h. 30;

- Septième accès à 6 heures : T. R. 38°,5. Le lendemain matin :

37°,6.

Dans toutes ces séries variant de 2 à 7 accès, nous

avons noté une légère augmentation de la température,

ne différant guère de celle qui s'observe après les accès

isolés. Nous devons dire que chez tous les malades,

chaque accès a été séparé du suivant par un retour de

la connaissance. C'est là un phénomène important sur

lequel nous avons fréquemment insisté,car il contribue,

avec l'absence d'hyperthermie, à distinguer les séries

d'accès de l'état de mal épileptique.

Bourneville, 1886. 16

234 TEMPÉRATURE DANS L'ÉTAT DE MAL.

III. DE LA TEMPÉRATURE DANS L'ETAT DE MAL ÉPI-

LEPTIQUE.

En nous appuyant sur des faits nombreux et rigoua

reusement observés, nous avons fait voir que les accès

isolés d'épilepsie augmentaient la température centrale

de quelques dixièmes de degré à un degré et demi en-

viron ; que les accès sériels déterminaient une élévation

oscillant dans les mêmes limites. Nous avons ainsi dé-

montré, sur ces deux points, l'erreur commise par

M. Witkowski. Il ne nous reste plus, pour terminer notre

réponse, qu'à examiner les notions nouvelles, qu'il pré-

tend ajouter à nos connaissances actuelles sur l'état de

mal épileptique.

« D'ordinaire, écrit M. Witkowski,. les hyperthermies sont an-

noncées par un assez grand nombre d'accès isolés qui ouvrent la

marche (1) : et c'est tantôt au cours de ces accidents convulsifs,

tantôt lorsqu'ils ont cessé pt sont devenus plus rares qu'apparait

une fièvre de 40° et davantage. S'il est assez rare d'observer alors

une accumulation proprement dite des accès (atteignant par exem-

ple le chiffre de 50 et davantage en 24 heures), il est de règle de

constater qu'ils augmentent de nombre quoique dans une pro-

portion modérée

« En ce qui concerne la durée et l'évolution de l'hyperthermie,

il est à remarquer qu'il s'agit en général d'une manifestation assez

éphémère. Elle peut ne durer que peu d'heures, voire même en-

core moins ; c'est en tout cas à peine si elle dépasse jamais 4 à

5 jours au maximum. La règle dans les formes graves et absolu-

ment pures est une durée de 2 à 3 jours. On y relève alors deux

sommets qui ne coïncident pas toujours du reste avec les heures

du soir, dont l'un correspond fréquemment à la phase d'acmé de

la série des accès et l'autre à la période maxima du sopor. Au

surplus les rémissions sont incomplètes ; elles n'atteignent que

rarement deux degrés, mais par exception elles peuvent des-

cendre plus bas. Parfois, on assiste à doux et mémo trois séries

nettement séparées, la courbe de la température alors est d'ordi-

naire, quoique non toujours, modifiée conformément à cet état do

chose L'ascension demande généralement quelques heures;

il est plus rare qu'elle soit subite, tout à fait brusque ; il est encore

moins ordinaire qu'elle se déroule lentement en plusieurs jours.

(1) Ceci est vrai pour quelques cas, mais souvent l'état de mal

débute brusquement.

OPINION DE M. WITKOWSKI. 235

On a généralement attribué à l'affection fébrile la plus connue des

épileptiques, à ce qu'on a appelé l'état de mal épileptique, une

invasion invariablement etploinemect aiguë. Celte allure s'applique

en effet à la pluralité des cas, mais non absolument à tous, ainsi

que je m'en suis convaincu dans ces derniers temps ... ? .

La défervescence n'est pas non plus tout à fait rapide ; elle a

coutume de se répartir en plusieurs heures et jours.... Invariable-

ment la défervescence fébrile se fait sentir entièrement sur le

trouble psychique. Dès qne la connaissance récupère sa liberté,,

les températures élevées disparaissent 1

Les lignes précédentes ont mis en lumière que le fond immuable

en question, l'élément qui invariablement, sans exception, repa-

rait, je l'ai placé à juste titre dans le trouble profond et persis-

tant de la connaissance... (1) »

Ces citations, mieux qu'un résumé, donneront au

lecteur une idée exacte des opinions de M. Witkowski,

et, en comparant son tableau do l'état de mal épileptique

à la description que nous avons tracée, et qui a été re-

produite dans divers mémoires et dans plusieurs jour-

naux (2), il verra que cet auteur n'a rien ajouté d'essen-

tiel aux connaissances dès longtemps acquises. La défi-

nition que nous avons donnée et que nous répétons, en

fournira une première démonstration.

« L'état de mal épileptique, avons-nous dit, est ca-

ractérisé : 1° Par la répétition., en quelque sorte inces-

sante, des accès, qui souvent deviennent subintrants;

2° par un collapsus, variable en degré, pouvant arriver

jusqu'au coma le plus absolu, sans retour de la luci-

clité; 3° par une hémiplégie plus ou moins complète et

paysagère; 4° par la fréquence du pouls et de la respi-

(1) Nous devons la traduction de ce travail à notre ami le D1' P.

Keraval.

(2) Le premier en date a été consigné dans les Bulletins de la

Société anatomique, mars 1869, p. 159.. En 1872, nous avons

publié dans le Mouvement médical, une série d'articles sur ce

sujet (juillet-septembre) qui résumaient tout ce que nous avions

écrit précédemment. Notre mémoire, d'ailleurs beaucoup plus com-

plet, est antérieur au travail de M. Crichton Browne paru seulement

dans le cours de 1873 (The West Riding Lunatic Asvlum mcd.

Reports, 1873, p. 166). Voyez aussi, pour l'énumération de nos

travaux sur ce sujet, les notes des pages 2 ? 6 et 232.

236 TEMPÉRATURE DANS L'ÉTAT DE MAL. -

ration.; 5° et surtout par une élévation considérable de

la température, élévation qui persiste dans les inter-

valles, d'ailleurs brefs, des accès, et s'accroît même

quand ils ont cessé. » .

Nous avons distingué, dans l'état de mal épileptique,

deux périodes, comme le fait, un peu après nous,

Flg. 23. - Tracé de la température rectale dans un cas d'état de mal type,

terminé par la guérison. -, T. prise 2 heures après le début (12 accès), ?

rémission ; un seul accès dans les 5 dernières boutes.

M. Witkowski : une période convulsive et une période

méningitique. Nous avons exposé soigneusement les

caractères de ces deux périodes en nous appuyant sur

des observations rigoureuses. Nous avons insisté sur la

TEMPÉRATURE DANS L'ÉTAT DE MAL.

237

marche, la durée, le traitement et l'anatomie pathol9,.

gique de l'état de mal. De même que M. Witkowski,

mais encore avant lui, nous avons vu que l'état de mal

pouvait être constitué uniquement par la période con-

Fi r. 35.-Tampératnre dans un

état de mal limité à la péiiode

convulsive. - , T. aussitôt

après la mort.+ T. 8 heures

après la mort.

Fig. 25.-Tempéralure dans un état de mal

terminé par la mort à la période méningiti-

que ? T. une 1/2 h. avant la mort. + , T

1/4 d'heme après la mort. T, une Heure

après. T. deux heures après, 40°,2.

vulsive ; - que, dans certains cas,

durant la période méningitique;

la mort survenait

enfin que dans

'23H 8 TEMPÉRATURE DANS l'ÉTAT DE MAL.

d'autres circonstances l'état de mal se terminait par .la

guérison.

Nous avons rapporté, en 1870, l'observation d'une

malade, Chevall..., qui a eu un état de mal épileptique

dans son type le plus parfait. La figure 23, qui repré-

sente la marche de la température centrale, nous offre

deux ascensions : l'une qui répond à la période convul-

sive, l'autre à la période méningitique. Quelque temps

après, cette malade a été prise d'un nouvel état de mal,

limité à la période convulsive et auquel elle a succombé

en 30 heures. La figure 24, inédite, nous montre une

seule ascension do la température centrale, celle de la

période convulsive.

Un exemple de l'état de mal terminé par la mort du-

rant la période méningitique, nous est fourni par un en-

fant âgé de 12 ans. L'enfant a eu 10 accès consécutifs ( 1 ),

sans le moindre indice du retour de la connaissance, en

une heure. Après le dernier, alors que l'enfant était dans

un état comateux, la température rectale était à 41°. Les

accès disparaissent, la connaissance revient assez vite

et, en même temps, au sur et à mesure, la température

baisse jusqu'à 38". Mais bientôt la scène change; un

accès survient, des symptômes de congestion méningi-

tique apparaissent, le malade tombe dans un assoupis-

sement de plus en plus profond, la température subit

une nouvelle ascension, qui s'élève jusqu'à 42°,4, ctcot

ensemble de symptômes se termine parla mort. (fin. 25).

L'observation suivante, relative à un état de mal qui,

comme le second état de mal de Chevall..., a eu une

issue fatale, permettra de suivre dans ses détails l'évo-

lution de là période convulsive.

(1) Le nombre des accès qui constituent l'état do mal est très

variable; il peut être inférieur à 10, mais il peut atteindre des

chiffres élevés, 50, ion, 190 et davantage.

OBSERVATION. 239

OBSERVATION. - Père, quelques excès de boisson. Oncle

paternel, atteint de crises nerveuses. - Mère, sujette à des

faiblesses jusqu'à vingt ans. -- Arrière grand'mère mater-

nelle, apoplectique. -Inégalité d'âge (6 ans) entre les père

et mère. - Emotion vive au huitième mois de la grossesse.

- Asphyxie légère à la naissance.-Premières convulsions

à six mois (état de mal).- De six mois à onze ans, fréquents

retours des crises convulsives. Rémission de quinze

mois à onze-douze ans. Coups sur la tête à douze ans :

retour immédiat des accès. Marche ascendante de là

maladie. - Suspension des accès durait une fièvre ty-

phoïde grave. - Aura. Secousses limitées à droite.

Etourdissements. Accès sériels suivis parfois d'excita-

tion avec hallucinations de la vue. -Ascarides et oxyures.

Onanisme. - Malformation des organes génitaux; arrêt

de développement des testicules.-Adhérences du prépuce.

Varicocèle. - Etat de znàl épileptique : température.

Mort.

Autopsie : Congestion du poumon droit) splénisation de la

base. - Noyaux de broncho-pheumonie à la base du pou-

mon gauche. Plaques ecchymotiques de la pie-mère.

Lelon... (Louis), né à Paris le 30 décembre 1869, est entré

dans notre service, à l'hospice de Bicêtre, le 7 décembre 1885.

Renseignements fournis par sa mère (23 déc.) - Père :

grand, fort, bien portant, ne fumant pas, n'ayant ni accidents

nerveux, ni maladies de la peau, marchand de vin, ne faisant,

assuro-t-on, aucun excès de boisson, marié à 28 ans, mort en

137 : i, âgé de 37 ans, d'une fluxion de poitrine. [Père, maçon,

mort on ne sait de quoi. - Mère, tricoteuse, décédée à 70 ans.

à la suite de vomissements. Tous les deux étaient sobres et

n'auraient eu aucune affection nerveuse. On déclare qu'il en a

été de même chez les grands parents, sur lesquels on manque

de détails. Deux frères : l'un est mort sans enfants de la rup-

ture d'un anéurysnze; l'autre, après son mariage, a été pris, à

la suite d'une peur, de crises nerveusesise produisant toujours

durant le sommeil (soit dd jour, soit de nuit) et qui persistent

encore ; ses trois enfants ont une bonne santé. Une soeur,

qui a trois enfants, n'a, ainsi qu'eux, jamais eu aucun trouble

nerveux. Pas d'aliénés, d'épileptiques, de paralytiques, de dif-

formes, de suicidés, de criminels, de débauchés, etc.]

Mère, 41 ans, c'est-à-dire âgée de six ans de moins quo

son mari, couturière, d'une physionomie plutôt agréable,

240. OBSERVATION.

intelligente, a été réglée à 17 ans et a eu, jusqu'à 20 ans, des

a faiblesses » qui venaient tous les mois. Elle n'a ou aucune

autre maladie nerveuse, ni manifestations rhumatismales ou

cutanées. [Père, chauffeur, sobre, mort de fatigue ( ? ). - Mère

en bonne santé. - Grands parents paternels, pas de rensei-

gnements. - Grand-père maternel, mort en deux ou trois

jours, vers 80 ans. -G ? -a ? td')ière maternelle, décédée à 70 ans

d'une attaque de paralysie. Deux frères et deux soeurs,

ainsi que leurs enfants, n'ont eu rien de particulier. Pas d'a-

liénés, etc.]

Pas de consanguinité. (Père, de la Manche ; mère, du Loi-

ret.)

1° Une fausse-couche; 2° notre malade; - 3° une fausse-

couche (cette dernière grossesse provient d'un second miri.)

Notre malade. A la conception bien portants tous deux ;

pas d'interposition probable. - Grossesse, bonno jusqu'au

8 ? 9'' mois, époque où elle a éprouvé, à l'occasion d'une dispute,

une émotion vive avec perte de connaissance pendant quatro 'IL

cinq minutes; elle s'est promptement remise ? Iccouc/tement

à terme, naturel, bien qu'il s'agît d'une présentation des pieds.

- A la naissance, légère asphyxie : la sage-femme a dû fouetter

l'enfant, qui bientôt s'est mis à crier. Elevé au sein par sa

mère ; sevré à 14 mois. Première dent à 12 mois ; les autres

ont poussé lentement, la dernière à 2 ans. Lel... a marché à

11 mois 1/2, a été propre vers 1 an et a commencé à parler seu-

lement à 2 ans : « Bien qu'il fût en retard pour les dents et la

parole, dit sa mère, il était intelligent. »

Premières convulsions à 6 mois, pendant une demi-journée.

Les secousses, croit-on, étaient les mêmes des deux côtés du

corps ; on n'a pas remarqué de paralysie consécutive. Deux

mois plus tard, nouvelles convulsions, qui se sont dissipées

au bout de quelques minutes. Après plusieurs mois de

répit, troisièmes convulsions, également de courte durée.

De 1 an à 12 ans, Le... a eu des convulsions une ou deux fois

par mois, se présentant tantôt sous forme do grandes convul-

sions, tantôt sous forme de convulsions internes, qui ont dé-

buté au commencement de la seconde année.

A 12 ans, est survenue une rémission qui s'est prolongée

pendant quinze mois. La mère de Lel... l'attribue à ce qu'il

prenait beaucoup de bromure de potassium. Vers 13 ans 1/2,

un marchand de bric-à-brac lui ayant donné plusieurs coups

sur la tête, Lel... fut pris sur le champ d'un accès convulsif.

Depuis lors, les accès n'ont plus discontinué et sont devenus

plus forts. Les plus longs intervalles, jusqu'à 9h ans, ont été

OBSERVATION. 241

d'un ou deux mois. De 14 ans jusqu'à l'entrée à Bicêtre, les

accès se sont encore rapprochés et viennent au moins toutes

les semaines. Ils sont nocturnes et surtout diurnes; leur

maximum en 24 heures a été de 10.

Lel... aurait parfois une aura : il se plaint de souffrir du

ventre, principalement autour du nombril : « j'ai mal au ventre,

dit-il. » Lo regard est brillant ; le blanc des yeux et la peau du

visage deviennent « jaunes » ; la parole est suspendue ; puis

l'accès éclate ; d'autres fois, les accidents s'arrêtent la ; la

face devient rouge et Lel... revient à lui disant : oc c'est redes-

cendu. »

Les accès auraient les caractères suivants : cri sourd, rauque

depuis 4 ou 5 mois seulement ; rigidité générale, égale ;

secousses seulement dans le côté droit ; pas d'agitation, ni de

ronflement, ni d'écume ; bave rare ; parfois miction involon-

taire. Lel... s'endort durant quelques minutes après les crises

qui n'ont jamais été précédées ou suivies de folie ou d'actes

automatiques. - Outre les accès, il a, depuis quatre mois, des

ètourdissements. Le traitement a consisté uniquement en

bromure de potassium.

Lel... a été envoyé à l'asile à 3 ans, puis à l'école; on l'a

gardé jusqu'à t3 ans et demi parce qu'il apprenait bien; à cette

époque, les -accès étant devenus plus fréquents, ses parents

ont dû le garder. Il était obéissant, affectueux, très peureux,

d'un caractère doux qui ne se serait pas modifié. « Il est un peu

nargueur, dit sa mère, mais toujours il reçoit des coups et

jamais il ne les rend. » Elle n'aurait pas constaté directement

l'onanisme, mais son mari, beau-père de l'enfant, a fait avouer

à celui-ci qu'il se touchait.

A partir d'un an, Lel... qui mangeait un peu de tout, quoi-

qu'il no fut pas sevré, a eu souvent, jusqu'à 14 ans, des asca-

rides lombricoïdes et des oxyures ; il rendait quelquefois 8 ou

10 ascarides dans la même journée. C'est à leur présence qu'on

attribue les douleurs abdominales dont il se plaignait. - z

Croûtes du cuir chevelu à 5 ou 6 mois ; pas d'autres manifes-

tations lymphatiques; pas d'autres traumatismes que les coups

signalés plus haut. - Rougeole à 16-17 mois; - fluxion do

poitrine à 4 ans; - fièvre typhoïde avec troubles cérébraux

à 14 ans, durant laquelle les accès ont été suspendus. D'ha.

bitude, le sommeil était bon, sans cauchemars.

Etal actuel. Poids : 41 kilogr. 700; taille : 1 m. 56.

L'enfant, comme le montre ces chiffres, est bien développé pour

son âge. La tête est assez régulièrement ovoïde.

242 OBSERVATION. '

ÉTAT DE MAL ÉPILEPTIQUE. 243

Traitement : Ecole, gymnastique, bains ; atelier do me-

nuiserie.

20 mars. Revacciné sans succès.

27 mars. Série d'accès pour laquelle il entre à l'infirmerie.

Exeat lo lendemain.

3 1 ? na ? 's . Nouvelle série d'accès pour laquelle il rentro à l'in-

firmerie. Cette série a déterminé un peu d'excitation, avec

hallucinations de la vue : il voit des rats et fait des gestes

comme pour les chasser. Stupeur assez prononcée. - Exéat lo

6 avril.

z10 avril. Hydrothérapie. (Les douches ont été continuées

jusqu'au 31 octobre).

Juillet. Poids, 44 kilogr.; taille, 1 m. 57. La mémoire di-

minue tous les jours. Les connaissances de Lel... deviennent

confuses ; son caractère s'assombrit. En résumé, tendance à la

déchéance.

15 nu. Lel... a eu dans la nuit 21 accès et deux autres en

arrivant à l'infirmerie. T. R. ce matin à 8 heures et à midi 38°.

- Soir : 38°,6. (Fig. 26).

16 nov. La journéo d'hier a été assez bonne. Dans la nuit, on

a relevé 9 accès. A la visite, on trouve l'enfant dans la situa-

tion suivante : décubitus dorsal, membres dans la résolution,

retombant lourdement quand on les soulève. Face un peu pâle,

paupières mi-closes, yeux excavés et un peu convulsés en haut,

nystagmus, pupilles égales, contractiles, moyennementdilatécs,

narines pulvérulentes. Bouche un peu entre ouverte, lèvres

sèches, langue assez bonne, mâchonnement. Pas de roideur do

la nuque. Sensibilité générale conservée : Lel.. retire ses bras

et ses jambes lorsqu'on les pince. Réflexe rotule)), exagéré, au

mémo degré, des deux côtés Respiration à 40 ; râles dissé-

minés à l'auscultation; pouls petit, dépressible, à 130; batte-

ments du coeur un peu vibrants. Abdomen normal. Peau modéré-

ment chaude, sans sécheresse. Extrémités froides et cyanosées,

surtout les supérieures. Perte de connaissance complète. A 8

heures du matin, T. IL 38°,6. A midi : 3S°,8 ; - à 2 et 4 heures :

38o, - à 6 heures : 39° ; - à 8 heures : 39°,2 ; - à 10 heures et

à minuit : 40°. A la visite du soir : coma, dj spnée, nombreux

râles ronflants et sibilants ; nausées sans vomissements. P. à

120 ; miction involontaire. La peau, principalement à la face,

est couverte d'une sueur froide et visqueuse.

17 nou. A 3 heures du matin : T. R. 39° ; - à 6 heures : 38°, 8 ;

à 9 heures : 39°. Décubitus dorsal, tête tournée à droite ainsi

que les yeux ; coma; respiration haute, fréquente, bruyante;

persistance du réflexe cornéen , nystagmus intermittent ;

pupilles moyennement dilatées, la gauche un peu plus que la

Fig. 26. Température dans un état de mal terminé par la mort. , T. 1/4 d'heme ,il). la mort. 0, T. une heure ap.-f-,T.9 heures ap.

AUTOPSIE. 245

droite Légère raideur do la nuque et du coude droit. Parfois,

secousses du poignet gauche. Peau moite, mains cyanosées.

Traitement : Sangsues derrière les oreilles, inhalations

d'ammoniaque ; 2 quarts de lavement avec 0 gr. 50 de sulfate

de quinine ; lotions vinaigrées, sinapismes ; 40 ventouses

sèches sur la poitrine dans l'après-midi, et le soir vésicatoire à

la nuque.

A midi : T. R. 39»,2 ; à 3 et à 6 heures : 39°,8 ; - à 9 heures :

40°; à minuit : 40°,4. (Fig. 26).

18 nov. Malgré le traitement, le coma n'a pas cessé; on a

observé quelques secousses dans les membres, en particulier

dans le poignet gauche ; de la' rigidité du côté gauche et, à 4

heures du matin, après avoir eu de fortes secousses de tout le

corps, Lel... a succombé. - A 3 heures du matin : T. R. 40», 4 ;

un quart d'heure après la mort : 41°,2 ; une heure après :

390,8; deux heures après : 380,4. - Poids après décès :

37 kilogr. 500.

Autopsie faite le 19 novembre. La rigidité cadavérique,

nulle au cou et au bras gauche, légère à la jambe gauche et

au bras droit, est très marquée à la jambe droite. Sugilla-

tions violettes au niveau des flancs et de la racine des cuisses.

Plastron sternal normal ; appendice xyphoide bifurqué.

Cou et thorax. - Le thymus a disparu. La glande thy-

roïde (14 gr.) est saine ainsi que le larynx. - Le poumon

droit (450 gr.) est très congestionné; le lobe inférieur est splé-

nisé. Les lésions de broncho-pneumonie sont surtout marquées

à la base. Le poumon gauche (375 gr.) présente des noyaux

de broncho-pneumonie mieux dessinés. Aux sommets des

deux poumons, il y a quelques adhérences celluleuses. Pas de

tubercules, pas d'ecchymoses. Le péricarde contient peu de

sérosité. La surface du coeur (215 gr.) offre une surcharge

graisseuse assez prononcée. Le myocarde est sain et on ne

trouve pas de lésions valvulaires, ni de taches ecchymotiques.

Abdomen. La muqueuse de l'estomac est parsemée de petits

points ecchymotiques. Légère congestion de la muqueuse de

la partie moyenne de l'intestin. - Le foie (1.055 gr.) présente

quelques taches graisseuses. La vésicule biliaire, distendue, et

les canaux biliaires ne sont le siège d'aucune altération. - Rien

à noter sur la rate (110 gr.), ni sur le rein gauche; le rein

droit (100 gr.) porte un kyste de la grosseur d'une petite noi-

sette. Prostate, vésicules séminales, etc., rien.

Tête. Cuir chevelu sans ecchymoses. Os minces; sutures en

partie ossifiées. Pas d'asymétrie de la base du crâne. Dure-

246 AUTOPSIE.

mère modérément congestionnée. La pie-mère, d'une façon gé-

nérale, est modérément vascularisée. On trouve seulement doux

plaques ecchymotiques sur la face convexe du lobe frontal et

une autre sur sa face inférieure, entourée d'une zone vascu-

laire. Notons encore do petites plaques ecchymotiques sur la

face inférieure du lobe frontal droit, sur le lobe temporal

gauche, sur le lobe occipital droit et le cervelet. - Les artères

et les nerfs de la base ainsi que les tubercules mamillaires, les

pédoncules, etc., sont symétriques. L'encéphale pèse 1.345 ;

l' hémisphère cérébral droit 580 gr.; le gauche 585 ; - le cer-

velet et l'isthme 170. (La différence de 10 gr. est due au sang

et au liquide céphalo-rachidien).

Hémisphère droit. a) Face convexe, - La scissure de 5-

vius est normale, profonde, toutefois son rameau postérieur,

horizontal, s'arrête brusquement sans so bifurquer et sans

pénétrer aussi loin que d'habitude dans le pli pariétal inférieur;

son rameau antérieur, horizontal, profond, sinueux, se pro-

longe à travers les trois circonvolutions frontales et se termine

v deux millimètres environ de la fente inter-hémisphérique,

formant ainsi une sorte de scissure parallèle frontale anté-

rieure. - Le sillon de Rolando est sinueux, très profond. -

La scissure perpendiculaire externe est également très pro-

fonde et s'arrête au niveau do la scissure inter-pariétalo où elle

se jette.

Lobe frontal. - La première circonvolution frontale est

bien développée,plissée,corume dédoublée à sa partie antérieure;

elle s'insère à la circonvolution frontale ascendante par un pli

de passage à niveau et envoie deux autres plis de passage à la

deuxième circonvolution frontale. - La scissure frontale suc-

rieure, sinueuse, profonde, est interrompue par les deux der-

niers plis de passage dont nous venons de parler.

La deuxième cil'convolution (¡'olltale,sinueuse,est confondue

dans ses parties antérieure et moyenne avec la troisième cir-

convolution frontale. -La scissure frontale inférieure n'existe

que dans sa partie la plus postérieure où elle forme une enco-

che profonde d'environ 1 centimètre 1/2. La troisième cir-

convolution frontale est relativement peu développée ; son

pied surtout est grêle ; son cap, d'un développement moyen,

est, en avant, complètement isolé de la partie antérioure par

le rameau horizontal antérieur de la scissure de Sylvius, dont

nous avons parlé plus ha . t. Il existe une scissure frontale

parallèle, interrompue seulement vers sa partie moyenno par

un pli de passage un peu en retrait, allant de la deuxième cir-

convolution frontale à la circonvolution frontale ascendante;

AUTOPSIE. 247 Î

elle est très profonde, sinueuse et irrégulière. - La circonvu-

lution frontale ascendante est assez volumineuse, très si- :

nueuse. - La circonvolution pariétale ascendante est très

grêle.- Le lobule orbitaire est bien conformé, normal dans

toutes ses parties, scissures et circonvolutions ; il paraît plus

large dans son ensemble que celui du côté gauche.

Lobe pariétal. La scissure interpariétale, très creuse et

sinueuse, forme, en arrière de la circonvolution pariétale as-

cendante, une sorte de scissure pariétale parallèle; au-delà de

son coude, elle fournit : 1° en haut, un sillon profond, divisant

le pli pariétal supérieur en deux parties; 2° en bas, un sillon

qui se bifurque près de son origine en deux branches, dont

l'une, l'antérieuro, est peu profonde et semble continuer la

direction de la scissure de Sylvius; la scissure interpariétalo

poursuit ensuite son trajet jusquo dans lo lit du premier sillon

occipital. Le pli pariétal supérieur et le pli pariétal inférieur

sont bien développés, nettement séparés des parties environ-

nantes auxquelles ils sont reliés par des plis de passage à ni-

veau, allant du pli pariétal supérieur et du pli pariétal inférieurà 11-

lacirconvolution pariétale ascondante, etdu pli pariétal inférieur

à la première circonvolution temporale; tous les autres plis de

passage sont situés très profondément au niveau des sillons.

Le pli courbe est difficile à bien délimiter, car la scissure pa-

rallèle se confond en haut avec la scissure interpariétale, divi-

sant ainsi le pli courbe en uno partie antérieure et en une partie

postérieure, plus développée. Les circonvolutions occipitales

sont assez régulières, ainsi que leurs scissures.

Lobe temporal. La première circonvolution temporale,

peu sinueuse, présente un développement normal. La scissure

parallèle, très profonde, se continue, interrompue seulement

par des plis de passage très profonds, jusque dans la scissure

interpariétale. - La deuxième circonvolution temporale, bien

développée, sinueuse, envoie des plis de passage à niveau à la

troisième temporale et au lobe occipital. Le deuxième scissure

temporale, très profonde, est interrompue par un de ces plis

do passage. - Les circonvolutions temporo-occipitales pré-

sentent un développement moyen, sont très sinueuses, un peu

irrégulières. La première offre à sa partie moyenne une sur-

face en retrait et chagrinée; ello paraît un peu moins déve-

loppée qu'à gauche. Les scissures temporo-occipitales sont

profondes et sinueuses.

b) Face interne. -La scissure calloso-marginale, sinueuse,

assez régulière, est interrompue dans son quart inférieur par

un pli do passage à niveau, allant de la première circonvolution

frontalo à la circonvolution du corps calleux. La première

248 AUTOPSIE.

circonvolution frontale est bien développée. Le lobule pa-

racentral a un peu la forme d'une virgule, dont la pointe est

dirigée en avant, vers la scissure calloso-marginale ; il est un

peu moins développé qu'à gauche. - La circonvolution du

corps calleux ne présente rien de particulier. Le lobule

quadrilatère est un peu plus large qu'à gauche. La scissure

sous-pariétale a la forme d'un lambda X ; il existe deux plis do

passage pariéto-limbiques, antérieur et postérieur. La

scissure perpendiculaire interne est très profonde. Lo coin

est plus développé qu'à gauche. La scissure calcarine est ré-

gulière, profonde.

Hémisphère gauche. - a) Face convexe. - La scissure de

Sylvius est normale, profonde. Il en est de même du sillon de

Rolando et de la scissure perpendiculaire externe.

Lobe frontal. - Il existe une scissure frontale parallèle

complète, partant du pied de la troisième circonvolution fron-

tale, qu'elle divise en deux parties, pour se terminer dans la

scissure frontale supérieure, qui est sinueuse et profonde. A

son quart postérieur, cette dernière communique, par un sillon

profond, avec la scissure frontale inférieure, très profonde,

irrégulière ; celle-ci est interrompue par deux plis de passage

à niveau, allant de la deuxième à la troisième circonvolution

frontale. La première circonvolution frontale, plissée,

bien développée, s'insère par deux plis de passage grêles, à la

circonvolution frontale ascendante. - La deuxième circonvo-

lution frontale, très développée, présente une partie postérieure

isolée par les scissures de la région et le sillon faisant commu-

niquer les deux scissures frontales supérieure et inférieure ;

un pli de passage grêle à niveau interrompt, vers sa partie

moyenne, la continuité de la scissure frontale supérieure; deux

autres plis de passage à niveau, larges, situés à la partie an-

térieure de la deuxième et troisième circonvolutions frontales,

réunissent ces circonvolutions, qui se trouvent ainsi confon-

dues. - La troisième circonvolution frontale est médiocre-

ment développée. - La circonvolution frontale ascendante

est sinueuse et peu volumineuse.

Lobule orbitaire. Ses scissures et ses circonvolutions

sont normales et bien conformées.

Lobe pariétal. - La scissure inter-pariêtale part du fond

de la scissure de Sylvius, est interrompue à son quart inférieur

par un pli de passage à niveau allant de la pariétale ascendante

au pli pariétal inférieur, forme ensuite une scissure pariétale

parallèle, qui se termine à un centimètre de la fente interhémis-

phérique, à peu de distance du début de sa courbe ; cetto scis-

TEMPÉRATURE DANS L'ÉTAT DE MAL. 249

sure est de nouveau coupée par un pli de passage à niveau

allant du pli pariétal supérieur au pli courbe ; plus loin, elle se

confond avec la scissure perpendiculaire externe, le sillon

transverse occipital et le premier sillon occipital. Le pli pa-

riétal supérieur est bien développé ; un pli de passage profond

le fait communiquer aussi avec la première circonvolution

occipitale. - Le pli pariétal inférieur est moins bien déve-

loppé ; le pli courbe est normal.

Le lobe occipital présente des circonvolutions très sinueuses,

découpées par de nombreux sillons irréguliers.

Lobe temporal. - La première circonvolution temporale,

assez développée, est sinueuse ; vers sa partie moyenne, sa

continuité est interrompue par un sillon profond, bordant

postérieurement un pli de passage à niveau qui traverse pro-

fondément la scissure de Sylvius pour aller se jeter dans le

pli pariétal inférieur. La scissure parallèle est coupée par un

pli de passage à niveau, large, allant de lapremière à la deuxième

circonvolution temporale. Le deuxième sillon temporal est

oblique et presque transverse ; il se jette en avant dans la

scissure parallèle, en arrière dans la première scissure tempo-

ro-occipitale.-La deuxième circonvolution temporale, bien

développée, est irrégulière, dédoublée en deux plis secondaires

à sa partie antérieure, simple en arrière et séparés nettement du

lobe occipital. - Les circonvolutions temporo-occipitales et

leurs scissures ne présentent rien de particulier.

b) Face interne. La scissure calloso-marginale est si-

nueuse, irrégulière. - La première circonvolution frontale

est dédoublée. - Le lobule pariétal est moyennement déve-

loppé. - Le lobule quadrilatère, assez gros, plissé, ne possède

que le pli de passage pariéto-limbique postérieur.-La scissure

perpendiculaire interne est très profonde. Le coin et la

scissure calcarine sont normaux.

Le corps calleux, le corps strié et la couche optique, le ven-

tricule latéral, la corne d'Ammon (des deux côtés), le bulbe,

la protubérance, ainsi que le cervelet ne présentent rien de

particulier. Le lobule de l'insula possède, de chaque côté,

quatre digitations.

La température centrale a été prise à des intervalles

rapprochés dans ce cas d'état de mal, dont la marche a

un peu différé des cas ordinaires, ce qu'il est peut-être

possible d'attribuer, dans une certaine mesure, au traite-

ment employé. Quoi qu'il en soit, le tracé considéré dans

Bourneville, 188G. 1 ? -1

250

.TEMPÉRATURE DANS L'ÉTAT DE MAL.

son ensemble nous présente une élévation rapide do la

température (Fig. 26).

Nous rapprocherons de ce tracé celui que représente

la fig. 27 ; il montre la marche de la température dans

un état de mal qui s'est terminé en trente heures. La

malade, nommée Lanib..., a eu 190 accès dans les

23 premières heures et n'en a plus eu dans les sept der-

nières heures qui ont précédé la mort. L'abaissement

Fig. 27. - Température dans un état do mal épileptique limité la période

convulsive et terminé par la mott. T. au moment de la moit ? T, une

heure après la mort.

relatif de la température (.40°) a suivi une application

de sangsues (1).

Nous n'insisterons pas davantage. Les tracés que nous

avons reproduits permettent d'avoir une idée exacte do

la marche de la température dans les principales formes

de l'état de mal épileptique (2).

(1) Voir : Bourneville. - Rech. clin, et thél'ap, sur 'ëpeps : 6

et l'hystérie, 1876, p. 1-4u.

(2) Nous n'avons voulu répondre, dans le Progrès médical, que

d'uno manière sommaire à M. le Dr Witkowski ; mais nous lui

répondrons plus longuement, en citant un certain nombre do faits,

dans les Archives de neurologie.

TABLE DES MATIERES

252 TABLE DES MATIÈRES.

TABLE DES MATIÈRES. 253

254 EXPLICATION DES PLANCHES.

PLANCHE I.

. Face interne de l'hémisphère gauche.

Sc. c. m., Scissure calloso-marginale.

Se. s. p., Scissure sous-pariétale.

Se. p. i., Scissure perpendiculaire interne.

F. ca., Fissure calcarine.

Sc. <0)., 1. ru scissure temporo-occipitale.

Se. to2., 2* scissure temporo-occipitalo.

Fui, lre circonvolution frontale interne.

C. C. C., Circonvolution du corps calleux.

C. C., Corps calleux.

L. P., Lobule paracentral.

L. Q., Lobule quadrilatère ou avant-coin.

C, Coin.

Toi, 1° circonvolution temporo-occipitale.

Toi, 2e circonvolution temporo-occipitale.

T3, 3' circonvolution temporale.

p. p. a., Pli pariéto-limbique antérieur.

p. p. p., Pli pariéto-limbique postérieur.

C. A., Corne d'Ammon.

N. B. - Les deux lettres O. C. placées en avant du bourrelet du

corps calleux doivent être remplacées par les lettres C. C.

PI.. I

Pr.. II

EXPLICATION DES PLANCHES. 255

PLANCHE II.

Face externe ou convexe de l'hémisphère gauche.

Se. S., Scissure de Sylvius dont les deux lèvres écartées laissent

voir les circonvolutions de l'Insula (L. I) et les plis temporo-

pariétaux (3, 3).

a., Rameau antérieur ascendant de la scissure de Sylvius.

al, Rameau antérieur ascendant supplémentaire de la même

scissure.

a3, Rameau antérieur horizontal de cette scissure.

1, ligne marquant la démarcation entre la 3c frontale et la pariétale

ascendante.

S. R., Sillon de Rolando.

Se. p. c., Scissure perpendiculaire externe.

Se. p. f., Scissure parallèle frontale.

Se. f. s., Scissure frontale supérieure. '

Se. f. i., Scissure frontale inférieure.

Se. ip., Scissure interpariétale.

Se. p., Scissure parallèle.

Se. ts-t 2° scissure temporale.

In. pr., Incisure préoccipitale.

L. O., Lobule orbitaire.

Fi, 1" circonvolution frontale.

F2, 2e circonvolution frontale.

F3, 3° circonvolution frontale.

F- A., Circonvolution frontale ascendante.

P. A., Circonvolution pariétale ascendante.

P1, Pli pariétal supérieur.

P2, Pli pariétal inférieur.

Ps, Pli courbe.

i,· 0. C., Lobe occipital.

Ti, 1" circonvolution temporale.

T2, 2" circonvolution temporale.

T3, 3e circonvolution temporale.

N. B. - On remarquera sur chaque face convexe la séparation

bien nette du lobe occipital des parties environnantes. Les

lettres Sc. p. p. doivent être remplacées par les lettres Se. p. e. et

reportées à un centimètre en avant près de la scissure.

256 explication DES planches.

PLANCHE III.

Face interne de l'hémisphère droit.

Les lettres ont la même signification que celles de la planche 1,

sauf les suivantcs :

e., Incisure préovalaire.

d., Sillon parallèle à la scissure perpendiculaire interne allant se

jeter dans la fissure calcarine.

1 ? 13 ? Les lettres Se. c. m. placées à la partie antérieure de

L. Q. doivent être reportées à l'extrémité postérieure de la scisute e

c.vlloso-marginale..

PL. 111

Par. IV

EXPLICATION DES PLANCHES. 257

PLANCHE IV.

Face externe ou convexe de l'hémisphère droit.

Les lettres on ! . la même signification que celles de la planche Il,

à l'exception des suivantes :

d., Sillon occipital antérieur.

b., Sillon intermédiaire au pli pariétal inférieur et au pli courbe.

c., Sillon divisant le pli courbe.

p. p., Pli de passage allant de la 2e à la 3" frontale gauche sur

lequel se trouve la petite tumeur T.

N. B. Sur le pli de passage reliant inférieurement FA à F3

au lieu de S il faut lire Se. S. Les lettres placées sur le bord

supérieur de Tl doivent être lues Sc. S. au lieu de Se. Se.

258 EXPLICATION DES PLANCHES.

TLANCHE V.

Tracé de la température dans un cas de tuberculose de la

protubérance annulaire.

h.1a15. - 111'. V. GOUPY ET JOU11DAN, ItUE DE -dl

P

Température rectale dans un cas de tuberculose de iii ottibératice annulaire.