(1886) Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie : Compte-rendu du service des épileptiques et des enfants idiots et arriérés de Bicêtre pendant l'année 1885
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(1886) Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie : Compte-rendu du service des épileptiques et des enfants idiots et arriérés de Bicêtre pendant l'année 1885

RECHERCHES

SUR

L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE

ET

L'IDIOTIE

PUBLICATIONS DU PROGRÈS MÉDICAL

RECHERCHES

CLINIQUES ET THÉRAPEUTIQUES

SUR

L'ÉPILEPSIE. L'HYSTÉRIE

ET

L'IDIOTIE

COMPTE RENDU DU SERVICE DES ÉPILEPTIQUES

ET DES ENFANTS IDIOTS ET ARRIÉRÉS DE BICÊTRE

PENDANT L'ANNÉE 1885

PAR

BOURNEVILLE

MÉDECIN DE BinËTRE

ET

COURBARIEN

INTERNE DU SERVICE

SEGLAS

1 DOCTEUR EN MÉDECINE

Volume VI avec 7 figures

PARIS

AUX BUREAUX DU

PROGRÈS MÉDICAL

H, rue des Carmes, 14.

A. DELAHAYE & E. LECROSNIER

EDITEURS

Place de l'Ecole de Médecine

1886

PREMIERE PARTIE

Historique. Statistique.

La nouvelle section.

BOURNEVILLE 4885.

PREMIERE PARTIE

Histoire du service pendant l'année 1885.

La nouvelle section.

I.

, ?

SITUATION DU SERVICE. ENSEIGNEMENT PRIMAIRE. V

\

Des changements nombreux et importants ont eu

lieu dans le courant de l'année. Les écoles ont été

transportées dans la nouvelle section : la petite école le

23 mars, la grande école le 22 avril. La salle de l'an-

cienne section que l'on désignait sous le nom

merie et qui contenait, nous le répétons pour la der-

nière fois : 1° Des enfants atteints de maladies ai-

gués, médicales et chirurgicales; 2° des enfants atteints

de maladies contagieuses aiguës (rougeole, scarla-

tine, diphthérie, etc.), ou chroniques (teignes, ophthal-

mies granuleuses, etc.); 3° des enfants agités ; 4° des

enfants idiots, gâteux et invalides auxquels cette

salle servait à la fois de dortoir, de réfectoire et de salle

de réunion, cette infirmerie hideuse a été évacuée le

29 août. Les enfants idiots, gâteux, invalides ont été

transférés dans le bâtiment spécialement construit pour

eux et désigné sous le nom de service des gâteux,

et les enfants atteints de maladies aiguës dans la nou-

IV DIVISION DES MALADES PAR CATÉGORIES.

velle infirmerie : ils sont maintenant tout à fait séparés

des précédents. Malheureusement comme le pavillon

des cellules et le pavillon des maladies contagieuses

ne sont pas encore construits, le plan que nous pour-

suivons n'est pas encore réalisé et l'infirmerie actuelle

reçoit, outre les enfants affectés de maladies aiguës

pour lesquels elle a été construite, les enfants atteints

de maladies contagieuses et ceux qui offrent des pé-

riodes d'agitation maniaque. Comme nous le verrons

plus loin, il est à espérer que sinon ces deux pavillons

au moins l'un d'eux, - le pa1Jillon des contagieux, -

pourra être construit dans le courant de 1886 à l'aide

des économies réalisées grâce à la surveillance inces-

sante exercée sur les travaux par M. Imard, inspecteur

de l'Assistance publique, et l'architecte, M. Gallois.

En 1884, nos malades étaient répartis dans les diffé-

rentes salles de l'ancienne section toujours encombrées,

dans deux des locaux encore inoccupés du bâtiment des

ateliers, enfin dans quelques-uns des nouveaux dor-

toirs.

La population assistée, on s'en souvient, comprend

les épileptiques adultes et les enfants. Les premiers

se divisent en épileptiques aliénés, à la charge du dé-

partement, placés par l'intermédiaire du Bureau d'ad-

mission de l'Asile clinique (Sainte-Anne), et en épilep-

tiques réputés non aliénés à la charge de la Ville, et

placés directement par l'Assistance publique.

Quant aux enfants, ils se divisent en trois catégories

principales : 1° Les enfants idiots, gâteux, épilep-

tiques ou non, mais invalides; 2° les enfants idiots,

gâteux ou non gâteux, épileptiques ou non, mais va-

LmLS; 3° les enfants propres valides, imbéciles, ar-

stères, épileptiques, hystériques ou non.

I. Les enfants de la première catégorie se subdivisent

en deux groupes : le premier, composé d'enfants gaz-

teux invalides, dont un certain nombre sont suscep-

PETITE ÉCOLE. V

tibles d'amélioration ; l'autre, d'enfants tout à fait incu-

rables ou d'enfants atteints d'épilepsie ou de méningo-

encéphalite devenus gâteux sous l'influence des accès

ou des poussées congestives. Les premiers sont l'objet

de soins réguliers ; on leur apprend à se tenir sur les

jambes à l'aide des barres parallèles, à marcher soit

à la main, soit au charriot ; on essaie de les rendre pro-

pres, de leur apprendre à se servir de leurs mains. Pour

ce qui est des enfants absolument incurables ou deve-

nus gâteux, on se borne naturellement aux soins de pro-

preté. Au 31 décembre, il y avait dans ce groupe 17 en-

fants ne marchant pas du tout et 9 marchant un peu,

avec le secours d'un aide.

II. Enfants idiots, gâteux ou non, épileptiques ou

non, valides. Ces enfants fréquentent la petite

école confiée exclusivement à des femmes. 138 enfants

ont été inscrits, dans l'année, à la petite école. Sur ce

nombre, 2 sont passés aux adultes; 11 sont décédés;

5 sont sortis définitivement; 5 sont passés à la grande

école; un a été transféré. 114 enfants ont fréquenté ré-

gulièrement les exercices. 40 d'entre eux mangent avec

la cuillère ; 44 avec la cuillère et la fourchette ; 30

se servent de la cuillère, de la fourchette et du cou-

teau.

7 enfants suivent les exercices de la grande gym-

nastique; 107 les exercices de la gymnastique Pi-

chery. 4 enfants gâteux sont devenus tout à fait pro-

pres ; plusieurs autres sont en bonne voie, mais ne

peuvent pas encore être mis en pantalon.

Le matériel scolaire de la petite école s'est notable-

ment enrichi pendant l'année 1885. Des vitrines et un

casier composé de 24 tiroirs recevant les légumes, les

graines, les fruits, les substances les plus usuelles, etc.,

destinés aux leçons de choses ; des armoires pour les

jouets (passe-boules, tonneau, etc.), servant en même

temps à l'amusement des enfants et il l'éducation de

VI 1 GRANDE ÉCOLE.

leurs mains et de leurs yeux. Le tableau du système

métrique, dressé et donné par M. Marsoulan, conseiller

municipal, etc., etc. Tous les meubles ont été fabriqués

par les ateliers des enfants.

III. Enfants propres et valides, imbéciles arriérés,

instables, épileptiques et hystériques ou non. .

Grande école. En terminant l'exposé des faits prin-

cipaux de l'année 1884 (page xvii), nous disions que

nous avions demandé à l'Administration diverses amé-

liorations et notamment la nomination d'un institu-

teur-adjoint; l'année 1885 s'est écoulée sans que nous

ayons obtenu satisfaction. Et cependant le nombre des

enfants qui fréquentent la grande école a notablement

augmenté. De 105 qu'il était au 1 Il janvier il est monté

à 140 le 31 décembre. Nous avions aussi demandé que

le maître de gymnastique vînt donner une leçon tous

les matins au lieu de trois par semaine : il n'a pas été

fait droit non plus à cette réclamation. Inutile de dire

que nous l'avons rappelée maintes fois soit verbalement

soit par lettres. Sachant, par une expérience pénible,

combien peu de personnes, et sur ce point beaucoup de

médecins sont aussi ignorants que les administrateurs, 1

se rendent un compte exact de l'utilité de l'assistance

des enfants réputés incurables, de la possibilité d'amé-

liorer la situation physique et intellectuelle de la plupart

d'entre eux, nous ne nous étonnons que relativement

des résistances que nous rencontrons à la réalisation

des améliorations qui, suivant nous, et surtout suivant

l'examen des résultats obtenus à l'étranger, doivent

rendre de réels services.

L'instituteur, M. Boutillier, continue à nous seconder

avec un zèle et un dévouement que nous ne saurions trop

signaler à l'attention de l'Administration. Il tient à

accompagner les enfants dans leurs nombreuses prome-

nades (voir page vu), profitant de toutes les occasions

qui se présentent pour aider à leur instruction. Le seul

PROMENADES. VII

changement que nous ayons à mentionner est la nomi-

nation d'un troisième garçon de classe.

Comme les années précédentes, l'enseignement a

surtout pour base les Leçons de choses. Des lectures à

la fois instructives et attrayantes sont faites aussi fré-

quemment que possible. Nous espérons, l'an prochain,

organiser enfin, dans l'école de la nouvelle section dont

les enfants ont pris possession le 22 avril, des projec-

tions à la lumière oxydrique.

Sept enfants ont été présentés pour le certificat cl'ét2t·

des primaires, quatre ont été reçus.

Le matériel scolaire a été amélioré. Nous avons fait

installer des armoires et des bibliothèques fabriquées,

comme les meubles de la petite école, par les ateliers

des enfants ; nous pensons pouvoir compléter tout

l'ameublement dans le cours de 1886.

Promenades et distractions, a) Adultes. -- Malgré

l'insuffisance du personnel et le surcroît de besogne

occasionné par des installations partielles, faites succes-

sivement et dans des conditions que l'Administration

aurait pu rendre moins pénibles, les promenades des

adultes infirmes dans les cours et les jardins, et des

adultes valides non visités, ont continué en 1885. Ces

derniers sont allés à l'Hay, à Montsouris, à Villejuif, à

Vitry, etc. Enfin, tous les adultes assistent, chaque se-

maine, au concert dirigé par M. Peny, le maître de

chant.

b) Enfants. Tous les enfants de la grande école

et tous ceux de la petite école qui sont propres ont fait

de nombreuses promenades soit dans les environs de

l'hospice, soit dans Paris. Nous citerons les visites au

parc de Vitry (7 fois), de Montrouge, de Montsouris

(6 fois), à Bagnolet, Alfortville, Choisy, Vincennes,

aux fêtes de lxentilly, de la place du Trône, du Kremlin,

de la place du Lion de Belfort, au Palais de l'Industrie,

VIII DISTRACTIONS.

à l'Exposition du Travail, au Jardin des Plantes (4 fois),

au Luxembourg (2 fois), etc. Mentionnons, d'une façon

spéciale, la visite de 17 enfants aux égouts. Si nous en-

trons dans ces détails, c'est que, malgré la multiplicité

de ces promenades, dans des lieux très fréquentés,

jamais elles n'ont présenté d'accidents susceptibles de

gêner les promeneurs ou d'attirer l'attention.

c) Enfants de la petite école. - Nous avons dit

que les enfants propres de la petite école avaient pris

part aux promenades des enfants de la grande école.

Tous ont fait des petites promenades fréquentes dans

les cours, les jardins, autour de l'hospice et du fort de

Bicêtre. Ces promenades sont mises à profit pour leur

instruction.

Mentionnons enfin des distractions diverses (distri-

butions de jouets, de gâteaux, séances de lanterne ma-

gique, etc.), et notamment le concert que donnent cha-

que année les frères Lionnet. Le concert de 1885 a eu

un éclat tout particulier. M. le Dr Laborde, invité par

M. le Directeur de l'Administration de l'Assistance pu-

blique, en a fait, dans son journal la Tribune médicale

(10 juillet), un récit si bienveillant pour tous que nous

croyons devoir le reproduire presque en entier :

« La Fête-Concert du 21 juin à la Salpêtrière, dont nous avons

essayé de donner une idée dans notre numéro du 28 du même

mois, a eu son pendant, ainsi que nous l'avions annoncé, le sa-

medi 4 juillet, à Bicétre. '

«C'était, cette fois, le tour des enfants, qui peuplent, hélas ! en

grand nombre, l'établissement de Bicêtre, frappés d'une de ces

imperfections cérébrales qui constituent l'idiotie et ses divers de-

grés, ou atteints du mal caduc.

« Ici, comme à la Salpêtrière,c'est sous l'impulsion et la direction

actives, intelligentes et dévouées des frères L¡oNNET que le Concert

a été organisé ; presque tous les artistes de l'autre fois ont été fi-

dèles au rendez-vous; et ceux qui ont dû s'excuser, au dernier

moment, Fusier, 111^° Barctta-Worms et M. Worms, ont été retenus

par de sérieux empêchements de service. Mais il y avait, en com-

pensation, et de plus qu'à la première réunion, Mil. TESSANDISS,

et M. AccuLZ (de l'Opéra).

CONCERT. IX

«Ajoutons de suite qu'à Bicêtre un banquet donné par l'Administra-

tion réunit, d'ordinaire, après le Concert, les artistes et les invités.

«Ceux-ci étaient nombreux et de haute marque, pour la plupart :

Citons, entre autres et d'abord, M. Poubelle, préfet de la Seine et

Madame Poubelle; M. le secrétaire général de la Préfecture, Bourg-

GEOIS; M. le directeur-général de l'administration de l'Assistance

publique, leD' E. PEYRON faisant,avec sa gracieuseté et son empres-

sement habituels, les honneurs de la fête et de la maison; M Imard,

inspecteur-général de l'Administration, un inspecteur-modèle, pour

le dire en passant; notre excellent collègue et ami, le docteur Boun-

NEVILLE, médecin de la section des enfants, pour lesquels était

organisée la fête, et qui se consacre, depuis quelques années, à

l'amélioration morale et physique de ces malheureux infirmes de

l'esprit ou du corps, avec toute sa compétence, sa puissante activité,

la ténaeité indomptable et le dévouement qu'on lui connaît ; MM. les

Présidents des Conseils municipal et général de Paris, IICxrLIN, et

Rousselle, accompagnés des membres de la commission de l'Assis-

tance publique : MM. Robinet, S'rRAUfS, DUJARRIEII, Cattiaux;

MM. Félix Voisin, ancien préfet de police et Goup\',membres du con-

seil de surveillance de l'Assistance publique; M. A. PÉPHAU, l'ai-

mable directeur de l'hospice des Quinze-Vingts, qui ne manque nulle

occasion de se renseigner sur les moyens physiques et moraux,

d'améliorer le sort des pauvres enfants déshérités dont il a, de son

côté, pris charitablement la charge, en fondant l'oeuvre de l'Ecole

enfantine et des ateliers d'aveugles.

« Nous sommes obligé d'en passer, mais nous ne saurions oublier

messieurs les internes en médecine, qui, à Bicêtre, en particulier,

représentent et personnifient, traditionnellement, la jeunesse et la

gaité françaises, dans toute leur expansion, s'alliant à la pratique

des devoirs et du dévouement professionnels : les internes de cette

année, nous avons été heureux de le constater, en nous retrem-

pant nous-mêmes dans les meilleurs souvenirs de notre jeunesse

professionnelle, sont les dignes continuateurs des glorieuses tradi-

tions Bicêtriennes. Mentionnons, enfin, le personnel administratif

de l'hospice, et en première ligne, messieurs le directeur et l'éco-

nome, qui ont rivalisé de zèle, pour faire à leurs hôtes la meilleure

réception possible.

«Le concert commençait à 4 heures 1/2 dans la grande salle de gym-

nastique, très bien décorée pour la circonstance, mais malheureuse-

ment un peu trop chaude, en cette saison, ce qui a du contribuer

aux malaises et même aux attaques, qui se sont produits, en

assez grand nombre chez les jeunes épileptiques. Un choeur d'en-

fants, conduit par le maître de chant, et très bien exécuté a ouvert

la fête; puis II. Lionnet, le charmant imprésario de circonstance,

est venu annoncer le premier morceau du programme, qui allait être

improvisé au sur et à mesure, ce qui est, selon nous, un attrait de

plus. On a alors entendu successivement Mademoiselle TESSAx-

DIER. dans une poésie un peu triste, mais pleine de sentiment de

F. Coppéc; Mademoiselle Adhamar, dans la fable de Lafontaine,

la belette, le chai et le jeune lapin, encore mieux dite, si c'est pos-

sible, qu'à la Salpêtrière ; Madame Masson, dans un fragment de

X CONCEHT.

Gallia de Gounod, admirablement chanté, avec accompagnement

d'orgue et de piano ; M. Auguez, dans la ballade de l'opéra de llenri

VIII, dite avec cette ampleur et cette pureté dosons, que l'on con-

naît au sympathique artiste ; MM. Clodio (des Italiens) et les frères

Lionxet, dans un trio, dont la musique est d'A. Lionnet, et les

paroles de Maxime Rude, ayant pour titre : « le Noël des enfants, »

morceau tout de circonstance, interprété avec un charme indicible ;

Mademoiselle GOD.1RD, la jeune violoniste dans un chant tenu, dont

l'intitulé nous échappe, rendu avec une délicatesse d'expression,

un sentiment, et une pureté qui ont touché à la perfection ; enfin

la désopilante Madame Rivière, et son mari assorti, M. Bruet, ont

fait s'esclaffer l'assistance avec leurs duos de la Musette et

de la Chandelle.

Après un entr'acte de 20 minutes, les mêmes artistes ont reparu

avec des sujets différents, et le même succès, encore plus écla-

tant, car on ne saurait imaginer, nous l'avons déjà constaté, l'en-

thousiasme de ces pauvres enfants, dont les applaudissements, et

les cris de « bis » ne prennent fin que quand ils ont obtenu

satisfaction. Le magnifique trio de Faust (scène de la prison) a dû

être bissé par Madame Masson, MM. Auguez et Clodio ; et Madame

Rivière et M. Bruet qui ont clos le concert, ont eu toutes les peines

du monde à se soustraire aux exigences toujours renaissantes

d'un auditoire insatiable. Aussi combien ces braves artistes ont

dû éprouver de satisfaction, en voyant leurs charitables et bienfai-

sants efforts si bien appréciés et récompensés par tant de plaisir

et d'enthousiasme.

rt « Avant le banquet, M. le préfet de la Seine le secrétaire

général, MM. les membres de la commission municipale, suivis

de la plupart des assistants, ont visité les nouveaux pavillons en

construction, sous la conduite et la direction de M. Bourneville,

qui a fait les honneurs de co qu'il est permis d'appeler son oeuvre,

avec la passion qu'il a mise à en faciliter et en hâter la réalisation,

montrant et expliquant tous les détails des constructions nouvelles,

des appropriations et des améliorations introduites, toutes, d'ailleurs,

fort remarquables ; le temps et l'espace nous manquent pour don- o

ner aujourd'hui même un aperçu de ces travaux qui transforment

complètement ce côté de l'asile de Bicêtre et font le plus grand hon-

neur à l'architecte, M. Gallois. Nous nous proposons d'y revenir

prochainement.

« Puis a eu lieu, dans la grande et nouvelle salle du réfectoire, le

diner, qui réunissait près d'une centaine de convives. Il suffit de

rappeler que tous les artistes que nous venions d'applaudir, et que

les internes de l'hospice assistaient à ce banquet, pour que l'on

se fasse une idée do la franche gaité, qui y a régné du commen-

cement à la fin.

« M. le Directeur de l'Assistance publique a porté un toast de re-

merciements et de félicitations aux organisateurs de la fête, aux

artistes, aux membres de la commission municipale, - en termes

si bien appropriés et tellement heureux, selon son habitude, du

VISITES, CONGÉS, ETC. XI

reste, que nous regrettons de ne pouvoir le reproduire textuelle-

ment nous pouvons, du moins, répéter un mot très expressif et

justement applaudi, quand, parlant des pauvres enfants infirmes et

de leur reconnaissance, il a dit : « Si l'esprit leur fait défaut, ils' '

possèdent le coeur... »

« Il appartenait à M. le Président du Conseil de répondre : M Mi-

chelin a été fort bien inspiré en proposant de boire aux internes

et au personnel servant de l'administration ; il en a profité pour

boire à la laïcisation, probablement parce que la laïcisation est de

fondation à Bicétre.

« Si nous avions eu qualité pour prendre la parole, nous eussions

réparé une double omission : d'abord celle du nom du médecin

qui, comme nous le disions plus haut, a tant contribué à l'oeuvre

d'amélioration qui se poursuit à Bicêtre, le docteur Bourneville ; et

ensuite des administrateurs dont la haute sollicitude, celle du Di-

recteur général en tête, préside aux incessants progrès de l'Assis-

tance publique.... »

Visites, permissions de sortie, congés. - Les ma-

lades adultes ont reçu 2.168 visites et les enfants 5.161.

Les visiteurs ont été au nombre de 10.788. Voici mainte-

nant la statistique des permissions de sortie et des

congés :

XII ' PEVCCI\ 1TIOVS.

cette faveur. Nous ajouterons que nous laissons à nos

malades la faculté de correspondre librement avec

leurs parents. En un mot, nous nous efforçons d'assi-

miler le plus possible notre section à un hôpital owli-

navire.

Vaccinations et revaccinations. - Depuis que nous

avons été chargé du service (9 octobre 1879), nous

avons chaque année fait procéder, sous notre surveil-

lance et celle de nos internes, à la vaccination de tous

les malades entrés dans l'année, par les élèves infir-

mières de l'école de Bicêtre. Cette pratique, nous ne

cesserons de le répéter, devrait être suivie dans tous les

services hospitaliers. On diminuerait ainsi le champ

laissé, par une insouciance regrettable, aux épidémies

de variole et on rendrait probablement inutile la con-

struction coûteuse d'un ou de plusieurs hôpitaux de va-

rioleux. L'administration de l'Assistance publique

devrait mieux comprendre que si elle a le devoir de

secourir les malades de chaque jour, elle a non moins

le devoir de s'efforcer de prévenir les maladies. Il est

vrai qu'il s'agit là d'une question d'hygiène, science

peu connue au chef-lieu de l'Assistance publique.

Service dentaire. - Ce service, confié à notre ami

le Dr Cruet, ancien interne des hôpitaux, qui fait sa

visite tous les quinze jours, est d'une très grande utilité

à tous les enfants et surtout aux enfants idiots dont la

dentition est souvent si défectueuse.

Bains et hydrothérapie. Les bains et les douches

ont été donnés à tous les malades dans l'ancien service

jusqu'au 1 cr août. A partir de là, ils ont été donnés dans

l'ancienne section pour les adultes et dans la nouvelle

section pour les enfants. Voici le relevé de l'année

1885 :

BAINS ET HYDROTHÉRAPIE. XIII

XIV MUSÉE PATHOLOGIQUE.

Conseil de surveillance de l'Assistance publique ;

MM. B. Raspail, Em. Richard (de la Nation) ; Rousse-

let, Zaborowsky (de la Justice); Guischam, architecte;

Leclère, chef de bureau ; le directeur de l'asile de

Bron, etc., etc.

Tous, à l'exception de deux membres du Conseil

de surveillance, ont manifesté publiquement l'impres-

sion très favorable que leur laissait la visite de la nou-

velle section et reconnu que le Conseil municipal avait

réalisé, en la votant, une réforme urgente et d'une uti-

lité incontestable.

Musée pathologique. Lorsque nous avons été

chargé du service Bicêtre, notre première idée avait

été de joindre en quelque sorte Bicêtre à la Salpêtrière

au point de vue scientifique, d'enrichir le Musée de la

Salpêtrière, que nous avions commencé bien modeste-

ment à l'origine, des pièces intéressantes recueillies

à Bicêtre ; d'avoir le même mouleur, le même photo-

graphe ; c'est dans ce but que nous avions fait voter au

Conseil un crédit commun. Au bout d'une année ou

deux, nous nous sommes aperçu que de nombreux

obstacles s'opposaient à la réalisation de notre idée,

que nous ne trouvions pas dans le préparateur attaché

au Musée de la Salpêtrière le concours espéré, et nous

avons été forcément amené à demander le partage du

crédit voté par le Conseil municipal; à chercher dans

Bicêtre même un photographe et un mouleur. Nous

avons eu la bonne fortune de trouver deux hommes

dévoués, MM. Hubert et Hurel, qui, pendant la première

année du nouveau mode de fonctionnement, se sont

contentés des modestes gratifications que nous pouvions

leur donner nous-même.

Tout d'abord, moulages et photographies ont été dé-

posés dans les armoires de notre cabinet; puis, l'espace

MUSÉE PATHOLOGIQUE. XV

étant devenu bientôt insuffisant, nous avons dû installer

nos collections dans l'un des logements vacants du

deuxième étage du bâtiment des ateliers, c'était à la fin

de 1883. Les nouveaux locaux ont été à leur tour rapi-

dement remplis. En présence de cette situation, nous

avons dû chercher ailleurs. Nous avons écarté l'idée de

réclamer la construction prévue, dans la nouvelle sec-

tion des enfants, d'un pavillon spécial pour un musée,

un laboratoire, l'atelier de photographie et de moulage.

C'est que, en effet, cet ensemble de services doit être

commun à tous les médecins et chirurgiens de l'établis-

sement et en l'édifiant sur le terrain de l'un des ser-

vices on est exposé à blesser ceux qui placent leurs

susceptibilités personnelles au-dessus de l'intérêt scien-

tifique.

Pour éviter toute critique et faire que le service

scientifique soit organisé de la façon la plus conve-

nable, nous pensons qu'il conviendra de choisir un em-

placement pou éloigné de l'infirmerie générale et de la

division du service des aliénés, et d'y construire le ser-

vice des morts et des autopsies, le musée, les labora-

foires, l'atelier de photographie et de moulage. Cet

emplacement existe. Toutefois, demander la réalisation

de ce programme dès maintenant n'est pas possible et,

on l'absence de crédits disponibles à la Ville, la bonne

volonté de nos amis du Conseil municipal demeure

impuissante. Ne pouvant réaliser complètement le but

que nous poursuivons, nous avons recherché avec le

directeur de l'hospice, M.Ventujol, avec l'inspecteur,

M. Imard, et l'architecte, M. Gallois, un local pouvant

être utilisé immédiatement. Nous sommes tombés

d'accord pour choisir l'ancien réfectoire des enfants

idiots gâteux, placé en quelque sorte dans un endroit

neutre et à proximité de tous les services. Les travaux

d'appropriation, autorisés quelques semaines après par

M. Peyron, ont été conduits avec activité et le 20 oc-

tobre, M. le Dr P. Bricon, nommé conservateur du

XVI MUSÉE PATHOLOGIQUE.

musée depuis le 1er janvier 1885, a pu procéder à l'ins-

tallation. A la fin de 1885,1e Musée pathologique ren-

fermait 109 bustes en plâtre; 18 plâtres divers (mal-

formations, tumeurs, etc.) ; 17 squelettes entiers de la

tête; 100 calottes crâniennes; des os divers; 101 cer-

veaux d'idiots ou d'épileptiques. Nous devons mention-

ner aussi quelques cerveaux d'animaux, commence-

ment de la série dont nous essaierons de doter le

Musée en 1886 et qui nous parait devoir être d'une

grande utilité au point de vue de l'anatomie comparée

des centres nerveux.

Pour compléter ce qui a trait au Musée, nous devons

ajouter que nous sommes en train de rassembler les

portraits des médecins qui ont été chefs de service de

Bicêtre. Mme veuve Moreau (de Tours) a fait don du

buste de notre regretté maître le Dr Moreau (de Tours),

et du buste de Calmeil. M. Delasiauve nous a adressé

sa photographie, ainsi que M. le Dr Voisin qui y a joint

le portrait de son grand-père, M. le Dr Félix Voisin;

M. Legrand du Saulle nous a donné sa photographie et

le portrait de Marcé. Nous espérons continuer cette

collection de portraits, intéressante au point de vue de

l'histoire de Bicêtre et qui constituera un juste hom-

mage à ceux qui ont rendu des services aux malades et

aux vieillards de l'établissement.

PRODUIT DES ATELIERS.

XVII

II.

ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL.

Cet enseignement est resté confié durant toute l'an-

née aux maîtres qui en ont été chargés dès le début :

MM. Leroy, pour la menuiserie ; Alêne, pour la cou-

lure; Perche, pour la cordonnerie; Bénard, pour la

serrurerie ; Marchai, pour la vannerie et le 1'e1npaiL.

lage de chaises. Nous n'avons qu'à nous féliciter de

leur concours; ils se sont acquittés de leurs fonctions

avec zèle, bonté et dévouement. Le tableau suivant

montre que ces éloges sont parfaitement justifiés :

x YI 11 ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL.

oublier, d'ailleurs, que l'évaluation du travail est infé-

rieure à la réalité en ce sens que, si les travaux de me-

nuiserie et de serrurerie sont évalués d'après les tarifs

ordinaires, ceux de vannerie, d'après les tarifs du Ma-

gasin central des hôpitaux, un peu inférieurs aux prix de

la Ville, il n'en est plus de même des travaux de cor-

donnerie et de couture qui sont évalués d'après les prix

payés aux vieillards et aux aliénés de l'hospice, prix de

beaucoup inférieurs à ceux de la Ville ; c'est ainsi qu'un

paletot de vieillard est payé 4 fr. au Magasin central et

1 fr. 60 seulement à Bicêtre ; une paire de souliers de

garçonnet de 6 à 11 ans est payée 1 fr. 35 à Bicêtre,

tandis qu'elle est payée 2 fr. 15 par la Société anonyme.

Si nous insistons sur le rendement du travail des en-

fants, c'est pour faire voir à nos adversaires, à ceux qui

n'ont cessé de mettre des obstacles à la création de

la section des enfants de Bicêtre, que les sacrifices faits

par le Conseil municipal sont parfaitement justifiés ;

que le travail des enfants, non seulement couvre la dé-

pense occasionnée par le salaire de leurs maîtres, mais

encore qu'il est bientôt près de couvrir l'intérêt de la

somme engagée dans la construction des ateliers (1).

Toutefois, à nos yeux et aux yeux de toutes les per-

sonnes sérieuses qui s'occupent avec un esprit géné-

reux des questions d'assistance, ce côté financier est

secondaire. L'enseignement professionnel rend des ser-

vices d'un ordre bien autrement supérieur. Il permet

de donner à un certain nombre d'enfants un métier qui,

à leur sortie, les mettra en mesure de gagner leur vie.

Quelques-uns déjà ont quitté l'hospice et sont placés ;

nous en placerons d'autres dans le courant de l'année

(1) Les ateliers ont fabriqué un grand nombre de meubles pour

la nouvelle section : coffres à charbon, tables scolaires, tables pour

les réfectoires, des armoires, des bibliothèques, etc., etc. Ils ont

fourni à la colonie de Vaucluse, pour l'enseignement de leurs ca-

marades, des lettres en bois, des solides, des tableaux divers, des

boites pour les leçons de choses, etc.

RÉSULTATS DE CET ENSEIGNEMENT XiX

1886. Il permet de donner à beaucoup d'autres enfants

le moyen d'atténuer dans une proportion variable les

sacrifices que la société s'impose pour eux. Aujour-

d'hui, l'habillement et la chaussure des enfants ne

laissent plus autant à désirer qu'autrefois ; ils font ou

raccommodent leurs vêtements, leurs souliers, rem-

paillent les chaises, etc. Enfin, en fournissant à tous une

occupation utile, cet enseignement contribue à la mo-

ralisation de ces malheureux et contribue à assurer le

bon ordre et la discipline dans la section. Le tableau

suivant montre que le nombre des enfants qui profitent

de cet enseignement est allé en progressant depuis cinq

ans :

XX RECOMPENSES AUX APPRENTIS.

le 2'2 juin, l'Administration a consentià allouer 10 fr. à

distribuer aux ateliers tous les samedis.

Dans le courant de l'année, nous avons encore été

obligé d'adresser des réclamations à l'Administration

au sujet du long séjour au Chef-lieu des billets d'ordre

autorisant l'achat des matières premières, ou bien des

commandes de travail, par exemple pour l'atelier de

vannerie, ou encore dans le but d'accorder aux maîtres

tailleur et cordonnier la permission d'apprendre la coupe

aux enfants les plus habiles. M. Pcyron, directeur de

l'Assistance publique, a examiné ces réclamations et les

trouvant justes a donné des ordres pour que le travail

des ateliers ne soit jamais suspendu et devienne aussi

profitable que possible aux apprentis.

ENTRÉES, SORTIES, DÉCÈS.

XXI

III.

STATISTIQUE. MOUVEMENT DE LA POPULATION.

Le 1 cr janvier 1885, la section contenait 346 malades

ainsi répartis : 122 adultes épileptiques (54 aliénés et

G8 réputés non aliénés) et 224 enfants (épileptiques,

hystériques, idiots, arriérés, instables, pervers, etc.).

Voicile résumé du mouvement de la population en 1885 :

XXII ' DÉCÈS.

DÉCÈS. XXIII

XXIV

DÉCÈS.

DÉCÈS. XXV

XXYI

DECES.

DÉCÈS. XXVH I

XXX PERSONNEL DU SERVICE.

Nous n'avons pas à revenir sur cette classification qui,

on se le rappelle, en ce qui concerne les épileptiques, est

plutôt administrative que médicale, les épileptiques non

aliénés étant sujets après leurs accès -Il des troubles

intellectuels aussi bien que les épileptiques dits alié-

nés, et, chez les uns comme chez les autres, l'épi-

lepsie produisant à la longue la même dégradation

physique et la même déchéance mentale.

Personnel du service en 1885. - Le personnel se

composait : 1° pour le service médical : d'un interne

titulaire, M. Courbaricn; d'un interne provisoire,

M. Jonesco; de M. le Dr P. Bricon, nommé conserva-

teur du Musée 2^athologique de l'hospice, mais qui

nous prête toujours le concours le plus dévoué; 2" pour

le service scolaire : a) grande école : d'un instituteur,

M. Boutillier, aidé d'un professeur de chant, M. Peny;

d'un professeur de gymnastique, et de 3 administrés

de l'hospice, faisant fonctions de moniteurs; b) petite

école : Mlle Bl. Agnus, au début de l'année sous-sur-

veillante et à la fin surveillante ; de Mlle Berthe Lan-

glet, sous-surveillante; de Mlle A. Bohain, au commen-

cement de l'aimée suppléante et à la fin sous-surveil-

lante ; de Mlle Friedgen, suppléante; - 3° pour le sea-

" vice hospitalier : de M. Agnus, surveillant de la sec-

j tion ; cle M. Lantin, sous surveillant ; de Mme Jolliot,

t sous-surveillante; de Mlle E. Labbé, suppléante; de

/ 2 infirmières de première classe; de 17 infirmières de

seconde classe et de 3G infirmiers ; 4° pour l'enseigne-

ment professionnel : de MM. Leroy, maître menuisier ;

Alêne, maître tailleur; Perche, maître cordonnier;

Bénard, maître serrurier, et Maréchal, maître vannier.

ÉTAT DES TRAVAUX EN J.1\\-il : Ii. \11f

IV.

LA NOUVELLE SECTION CONTINUATION DES TRAVAUX ;

INSTALLATION .

Au commencement de 1885, la situation pouvait se

résumer ainsi : 1° Le bâtiment des ateliers était en

plein fonctionnement pour cinq ateliers sur sept, les

deux autres étant utilisés comme dortoirs provisoires ;

2° le bâtiment des réfectoires était terminé, sauf les

peintures, et employé comme dortoirs provisoires; 3" le

bâtiment des écoles était sur le point d'être achevé ; 4°

et 5° le service de propreté et du traitement du gàl is-

me, le service balnéo-hydrothéra.pique, compris entre

chacune des extrémités des deux bâtiments qui pré-

cèdent, étaient prêts quant aux constructions ; il restait

à procéder à l'installation des appareils ; 6° et 7° les

deux premiers pavillons à l'usage de dortoirs étaient

presque terminés ; 8° et 9° les 3c et in pavillons à usage

de dortoirs étaient au début de leur construction; 10°

et 11° le bâtiment des enfants gâteux et invalides

était achevé quant au gros oeuvre, ainsi que l'infir-

merie.

Plein de confiance dans l'habileté, l'activité et la

bonne volonté de l'architectc, M. Gallois, nous termi-

nions le Compte rendu cle 1834 en exprimant l'opi-

nion que tous les bâtiments dont le Conseil municipal

avait voté la construction le 29 juin 1883 et le 24 novem-

bre 1884, pourraient être occupés par les malades

dans le courant de 1885 ; nos prévisions se sont com-

plètement réalisées.

XXXII OCCUPATION SUCCESSIVE DES SERVICES.

Le premier pavillon de dortoirs a été terminé le

18 mars 1885 et les lits installés provisoirement dans le

réfectoire des grands enfants y ont été aussitôt transpor-

tés, ce qui a permis d'achever ce réfectoire (22 avril).

Le deuxième pavillon de dortoirs a été fini le

23 mars 1885 et les malades en ont pris possession

immédiatement. Les Ecoles ont été livrées : la petite

école, le 23 mars 1885 ; la grande école, le 22 avril ; le

service de propreté le 23 mars ; les bains, le 23 juin

1885 ; le bâtiment des gâteux, le 20 août; l'infirmerie,

le 29 août; les bains de pieds et le service du perru-

quier, le 23 juin. Le 3 et le 4e pavillons de dortoirs

ont été livrés le 14 octobre, mais, faute de mobilier,

ils n'ont pu être occupés que le 29 décembre 1885 et le

26 janvier 188G.

A la fin de 1885 il n'y avait plus qu'à terminer quel-

ques travaux secondaires (1), par exemple la pose des

balcons du bâtiment des gâteux.

Avant de parler des efforts que nous avons tentés

pour obtenir la continuation des travaux, nous croyons

utile de fournir quelques renseignement sur la section,

non plus tant au point de vue des travaux d'architecture,

qu'au point de vue du fonctionnement par rapport aux

enfants et au service médical.

L'entrée de la section a été complètement transfor-

mée. L'ancienne grille doublée de planches pour dissi-

muler à la vue les malheureux enfants gâteux qui

étaient parqués derrière elle avant 1879, a été débar-

rassée de sa doublure et remise en état. Le petit bâti-

ment qui, naguère, servait de refuge aux enfants du-

rant le mauvais temps et où nous avions installé, à

(1) Ces travaux ont nécessité un devis complémentaire dont la

dépense a été prélevée sur la réserve et qui a dû être soumis il

l'approbation de M. le Préfet de la Seine. Nous devons reconnaître

que, pour cette affaire, l'Aministration a déployé une réelle activité.

ENTRER ET PARLOIR DE LA SECTION. XXXIII

notre arrivée, la petite école et la gymnastique Pichery

a été transformé par M. Gallois en un chalet élégant

servant de loge et d'habitation pour le concierge de la

section des Enfants.

Les hangars à la suite, que nous avions fait affec-

ter successivement à une salle de refuge (servant de

parloir le jeudi et le dimanche), à un atelier de menui-

serie, au traitement du gâtisme, à une classe, ne for-

ment plus-que deux salles exclusivement réservées aux

familles les jours de visite : c'est le nouveau parloir.

Les murs extérieurs, après réfection, ont été ornés de

treillages qui donnent à ces vieux bâtiments, autrefois

si tristes, un aspect véritablement agréable.

La double rangée d'arbres qui existait dans cette cour

des gâteux a été complétée et forme aujourd'hui une

belle avenue qui se prolonge, en décrivant une courbe,

dominant la Sûreté, placée en contre-bas, jusqu'à l'en-

trée proprement dite de la section. Toute la partie cir-

culaire est limitée par une grille qui laisse voir une

partie de la section.

On pénètre dans le service par une large baie enca-

drée de pilastres, moitié en pierres, moitié en briques.

Ces pilastres sont reliés par une arcade que couronne

un fronton en pierres. Cette baie est fermée par une

grille en fer forgé. A gauche, on a ménagé une porte

cavalière pour le va et vient des piétons.

Lorsqu'on a franchi cette grille, on se trouve dans la

vaste cour du gymnase et des ateliers, plantée de

tilleuls et d'ormes pour laquelle nous avons réclamé

l'installation d'un chalet de nécessité, d'urinoirs et de

bancs. On y voit à gauche, le gymnase couvert cons-

truit en 1853, à droite, les ateliers dont nous re-

produisons les plans (fîg. 1,2,3) et, disséminés çà et IB,

tous les appareils de la grande gymnastique.

BOIJRNEVILLE 1883. .H

Fiai 1

XXXV ! RÉFECTOIRES ET COUR DES ÉCOLES.

Deux préaux couverts, joignant les ateliers et le

gymnase au bâtiment des réfectoires; enfin, une grille

légère divisant cette cour en deux parties, l'une pour

les plus grands enfants, l'autre pour les moyens, com-

plèteront heureusement l'organisation de cette portion

importante des services de jour.

En ce qui concerne le bâtiment des réfectoires, nous

nous bornerons à rappeler qu'ils sont vastes, bien aérés,

pourvus de lavabos, d'offices-laveries spacieuses, afin

de permettre aux enfants d'aider sans encombrement à

desservir les tables et à laver la vaisselle.

Au centre de ce bâtiment existe un large passage qui

conduit à la cour des écoles, plantée d'arbres d'essences

différentes, tous étiquetés. Une moitié de cette cour '

sert aux enfants de la petite école ; l'autre à ceux de la

grande école, soit pour se mettre en rang, soit pour

attendre que le déjeuner soit prêt... car l'exactitude

est loin d'être la règle dans la délivrance des aliments.

Cette cour est limitée à gauche par le service des soins

de propreté et du traitement du gâtisme ; à droite, par

les bains et les douches. Un peu en avant de ces ser-

vices s'élève un chalet de nécessité. Enfin au centre de

la cour il y a un petit parterre planté d'arbustes variés.

Les plates -bandes sont protégées par des arceaux en

fonte ; mais cette protection a été reconnue insuffisante

et, à l'heure actuelle, l'atelier de serrurerie des enfants

est entrain de fabriquer de petites grilles analogues à

celles que l'on voit dans quelques-unes de nos prome-

nades, par exemple au hois cle Vincennes et sur l'un des

côtés de la place d'Italie.

Service de propreté et traitement du gâtisme. - Il

comprend : 1° un long siège percé de trous, courant

au-dessus d'une auge en ciment dans laquelle l'eau

arrive en abondance par des conduites débouchant à

chaque bout. Le fond de l'auge s'incline en pente

XXXVIII TOILETTE ET TRAITEMENT DU GATISME.

de ses extrémités au centre où se trouve une soupape

que l'on fait fonctionner par l'intermédiaire d'une

chaîne, à l'aide d'un levier. En appuyant sur la poignée

de ce levier, la soupape se lève et l'eau se précipite,

en produisant une véritable chasse, clans l'ouverture cen-

trale qui communique avec l'égout.

2° Trois bidets, deux bains de siège servant au net-

toyage des enfants et une baignoire dans laquelle on les

plonge lorsqu'ils exigent un nettoyage complet (1).

3° De deux lavabos ayant chacun 5 cuvettes ;

4° de deux armoires destinées il recevoir les serviettes

étendues sur des bâtons fixés perpendiculairement sur

la paroi postérieure des armoires. Elles sont ouvertes en

haut et leurs portes, au lieu d'être pleines, sont formées

d'un treillage en fil de fer, afin de permettre à l'air de

circuler largement et de sécher le linge. Les armoires

sont séparées en d'eux étages par une double rangée de

tiroirs pour les brosser et les peigner.

A leur sortie du réfectoire, les enfants idiots se ren-

dent soit dans leur cour, soit, si le temps est mauvais,

dans une salle contiguë au réfectoire. De là ils viennent

par séries au service de propreté où on lcur apprend à

se laver la figure et les mains. Les idiots qui commen-

cent à être propres vont dans les cabinets d'aisances de

la cour, tandis que les idiots gâteux sont placés par

groupes sur les sièges d'aisances que nous venons de

décrire : c'est grâce à la régularité de ces soins hygié-

niques que, chaque année, un certain nombre d'enfants

sont guéris du gâtisme.

Ecoles. a) Petite école. Elle se compose : 1° de la

salle de jeux (éducation de la main et de 1'u,,il) ; -

2° de la classe dite de la petite gymnastique (2),

(1) Ces divers appareils ont un double alimcntateur d'eau

chaude et d'eau froide.

(2) ystème de RI. I'icliery.

ÉCOLES, BAINS ET DOUCHÉS. XXXIX

(éducation cle la main et du système musculaire) ;

3° de la classe des leçons de choses ; ;- 4° de la classe

pour les notions de lecture, d'écriture, de calcul, etc.

Les deux cloisons vitrées qui séparent les trois classes

sont à mi-hauteur afin d'assurer une large circulation de

l'air et servent d'appui chacune à un cabinet vitré,

pourvu d'un lit sur lequel on dépose les enfants qui

viennent d'avoir une crise nerveuse.

b) Grande école. Elle est divisée en quatre classes

auxquelles sont annexées deux petites salles garnies de

vitrines, de casiers, de bibliothèques où sont rangés

tous les objets, livres, etc., qui serventà l'enseignement.

Service balnéo-hydrotliérapique. La salle des

bains, longue de 10 mètres 80, large de 4 mètres 90,

renferme 12 baignoires où l'eau chaude et l'eau froide

sont amenées par des tuyaux établis dans l'étage sou-

terrain ; l'évacuation de l'eau est installée de la même

manière, de telle sorte que, à l'aide de robinets décom-

mande placés hors de l'atteinte des enfants, le service se

fait avec rapidité. Cette disposition permet, en outre,

de surveiller facilement toute cette importante canalisa-

tion et de boucher, aussitôt qu'il est nécessaire, et sans

dégâts ni recherches, les fuites qui pourraient se pro-

duirc. Il est à remarquer que, dans un but d'économie

et pour simplifier le service, le chauffage de l'eau se

fait par le fourneau de l'office voisine dont le tuyau de

fumée sert à chauffer l'étuve à linge et à actionner la

ventilation de la salle des bains.

La salle d'hydrothérapie^ qui lui fait suite, est

construite de la même façon; elle est précédée d'un

dshabilloir entouré de bancs et possède les appareils

suivants : douche en pluie et en jet ; douches écos-

saises ; douche en cercle ; douche ano-périnéo-

rectale.

XL DORTOIRS ET GALERIES.

Le long du service de propreté, des écoles et des

bains, existe une marquise qui permet aux enfants de se

rendre sans inconvénient aux réfectoires quand le temps

est mauvais.

Pavillons de dortoirs. Ils ont été construits con-

formément aux indications que nous avons énumérées

précédemment. Nous devons ajouter : deux dortoirs de

20 lits chacun, placés entre les fenêtres, séparés par

un service central comprenant 2 lavabos de 5 cuvettes

entre lesquels sont placées deux armoires avec tiroirs

pour les serviettes, les peignes et les brosses ; - un

cabinet servant de resserre et, de chaque côté, corres-

pondant à chacun des dortoirs les cabinets d'aisances

à l'anglaise, composés de deux stalles et d'urinoirs.

Enfin, à l'entrée des dortoirs, on a installé, en les sé-

parant par des cloisons à mi-hauteur, le lit de l'infirmier

ou de l'infirmière de jour, celui de l'infirmier ou de l'in-

firmière de nuit (1). Les trois premiers pavillons de

dortoirs sont construits sur le même modèle. Le qua-

trième, affecté aux enfants gâteux de la petite école,

présente, au lieu des cabinets d'aisances disposés en

stalles, un-système analogue à celui du service de pro-

preté, auquel sont annexés à droite des cabinets d'ai-

sances pour le personnel, à gauche une salle de débarras.

Galeries. Ces divers bâtiments, distants les uns

des autres de 16 m. environ, sont assis sur un sol dont

la déclivité est très prononcée en deux sens.

Ils sont reliés à leurs extrémités par des galeries lé-

gères en fer et couvertes en zinc ondulé, vitrées d'un

seul côté en vue de protéger les enfants contre les cou-

rants d'air.

(1) Ces installations très simples, qui ne nuisent en rien à l'hy-

giène de la salle,ont le grand avantage de donner aux infirmiers et

aux infirmières de véritables chambres, teuton les laissant à la

proximité immédiate des enfants en cas d'accident.

BATIMENT DES IDIOTS GATEUX INVALIDES. XLI

Elles présentent vers l'ouest une pente de près de

7 centimètres par mètre et afin d'éviter des marches,

dangereuses dans l'espèce, le sol de ces galeries suit

cette pente et a été disposé de manière à éviter les in-

convénients du glissement.

Les galeries du côté sud, par suite de la disposition

que nous venons d'indiquer, reposent sur le sol même.

Celles du côté nord présentent une partie inférieure

résultant de la pente des jardins, aujourd'hui complète-

ment à jour, mais qui est destinée à .servir plus tard de

communication avec les quatre pavillons de dortoirs que

complète le projet d'ensemble et qui doivent être édifiés

dans la partie inférieure du terrain réservé au nouveau

quartier et à la suite des dortoirs actuels, mais en con-

tre-bas. Ces quatre pavillons sont destinés aux enfants

de la grande école.

La galerie qui précède l'infirmerie et qui fait suite à

celles dont nous venons de parler en dernier lieu est de

niveau avec le sol et complètement à jour afin d'isoler

autant que possible l'infirmerie des autres bâtiments.

Bâtiment des enfants idiots gâteux invalides. - Il

offre un rez-de-chaussée et un étage disposés sur

le même plan. Chaque étage comprend deux dortoirs

avec leurs annexes.

La partie centrale se compose : la d'une salle de

réunion, où l'on apprend aux enfants à se tenir debout,

à marcher, et, à l'occasion, les lettres et les chiffres ;

2° à gauche et à droite, des réfectoires avec lavabos, où

l'on commence à apprendre aux enfants à se laver et à

manger 31, d'une office; 4° d'un petit service de

propreté sur le modèle 'habituel, avec baignoire pour

laver les enfants s'ils se sont souillés.

Chacun des dortoirs contient 24 lits et 2 d'infirmières.

Le sol est carrelé, afin de rendre plus facile le nettoyage

qui se luit à l'aide d'une prise d'eau placée au centre et

sur laquelle) on ajuste un long tuyau en caoutchouc avec

XLII INFIRMERIE.

lance en cuivre. Cette prise d'eau constitue en même

temps un poste d'incendie. Dans les angles de ces sal-

les il existe, affleurant le sol, des ouvertures fermées par

des bondes mobiles en cuivre de manière à permettre

de rejeter à l'extérieur et clans des tuyaux spéciaux

les eaux de ce lavage.

Les parties basses des fenêtres au lieu d'être pleines,

en maçonnerie, sont fermées par deux portes de façon à

permettre une aération parfaite. Les fenêtres de l'un

des dortoirs clu rez-de-chaussée, et celles des deux dor-

toirs du premier étage s'ouvrent de plein pied du côté

de l'ouest, sur de larges balcons où l'on peut aisément

placer tous les enfants.

Grâce l'ensemble de ces dispositions, nous espérons

arriver à avoir des salles de gâteux n'offrant plus la

puanteur qui transformait l'ancienne infirmerie en un

véritable dépotoir.

A l'extrémité de chacun de ces dortoirs il y a, séparés

par un couloir aboutissant à unc large fenêtre , d'un

côté un cabinet d'aisances avec bidets et une petite lin-

gerie ; de l'autre, deux chambres pour les inlirluièrcs('1 ).

Infirmerie. Elle comprend : 10 une partie centrale

(entrées, office, cabinets d'aisances pour les enfants et

le personnel, lavabos, baignoires, armoire pour les ob-

jets de nettoyage, couloir, réfectoire pour les convales-

cents (2), cabinet pour le médecin, pour la surveillante,

chambre d'examen particulier) ; 2° deux salles de

il) Chacune de ces chambres comprend un ]il, une armoire pour

le linge, une. petite toilelle. C'est en mieux logeant les infirmières,

qu'on arrivera à un meilleur recrutement. La promiscuité des

dortoirs qui existe presque partout encore, malgré nos incessantes

réclamations, constitue une honte pour l'Assistance publique.

(2) serait a désirer que dans Ions les hôpitaux, les salles de

malades soient pourvues d'un réfectoire, afin que les convalescents

du les malades qui se lèvent, puissent prendre leur repas au

lieu de le faire dans la salle même et souvent sur leur table de nuit.

SALLE DES BAINS DE PIEDS. XLIII

12 lits chacune, avec 2 chambres d'isolement pour les

malades atteints de délire ou d'affections suspectes ;

3° deux chambres pour les infirmières. Les lits sont

placés entre les fenûtres,eton ne peut pas, en raison de la

disposition de celles-ci, placer des lits contre les cloisons

qui terminent les dortoirs, ce qui se fait, à tort, dans

un grand nombre d'hôpitaux (1).

, Partout, soit afin d'éviter le plus possible les acci-

dents, soit pour rendre plus faciles les soins de propreté,

les angles des murs ont été arrondis. Partout aussi,

comme la disposition du terrain avait nécessité des sous-

sols assez élevés sur la moitié nord des bâtiments, ces

sous-sols ont été ou seront utilisés. C'est ainsi que celui

du quatrième pavillon de dortoir a été transformé en un

grand cabinet pour le médecin et en un magasin

d'habillement parfaitement aménagé ; que celui du

premier pavillon de dortoir sert de magasin pour les

ateliers. - C'est ainsi que, dans l'avenir, nous pourrons,

croyons-nous, transformer en serre le sous-sol d'un

autre pavillon, etc.

Dans le sous-soldes classes, vaste pièce formantrez-

de-chaussée sur le jardin géométrique, se trouve le

service du perruquier et la salle des bains de pieds

d'une surface de 112 mètres, toute dallée de ciment.

Trente bacs en fonte émaillée sont disposés en ovale.

Une double canalisation souterraine permet de faire

arriver l'eau mitigée au moyen de robinets réglés à

l'avance. Toute la tuyauterie et la robineterie sont dis-

simulés dans un caniveau recouvert de plaques en tôle

striée. La manoeuvre se fait au moyen de deux clefs à

tige permettant d'un seul tour de main de remplir ou

vider 15 bacs à la fois. Des précautions ont été prises

pour assurer le chauffage et la ventilation de cette pièce.

Une chaudière spéciale sert à chauffer l'eau des bains de

pieds.

(1) Cette disposition ingénieuse, qui se retrouve dans tout le

service, a été prise sur l'avis de M. Imard.

XLIV CAIJINETS D'AISANCES, CUISE D'llIt,

Cabinets d'aisances. Nous devons ajouter quel-

ques renseignements sur cepoint afin de compléter ceux

que nous avons précédemment donnés. Dans les ser-

vices, dits de jour, les cabinets d'aisances situés dans la

cour des Ecoles, sont renfermés dans deux pavillons

qui se rattachent aux galeries. Chacun d'eux renferme :

un cabinet isolé pour le personnel, avec appareil à l'an-

glaise à effet d'eau ; 2° quatre stalles réunies deux

par deux, desservies par un récipient commun à chaque

groupe, dont l'eau souillée de matières est renouvelée

par des chasses automatiques réglées, en ce moment,

demanièreà fonctionner toutes les sept minutes ; 3° sixuri-

noirs. Dans toute la section,les matières sont reçues dans

des tinettes filtrantes et les liquides déversés à 1'(,gout;

sous les récipients à plusieurs sièges, les tinettes sont

du système dit municipal, afin d'éviter les déborde-

ments. Des ventilateurs, actionnés en permanence par

des becs de gaz, empêchent la mauvaise odeur de s'in-

troduire dans les cabinets quand fonctionnent les val-

ves des appareils.

Linge sale. - La présence du linge sale dans les

salles constituant une cause d'infection et d'insalubrité,

il a été créé dans les sous-sols des cabinets spéciaux

pour le recevoir. Ces cabinets, enduits en ciment et

disposés en vue de lavages fréquents, renferment une

prise d'eau, Des trémies dont l'ouverture est à portée du

service permettent de jeter le linge dans ces cabinets.

Ces trémies, fermées du côté du service par des abat-

tants disposés de manière à retomber seuls, se prolon-

gent jusque sur les toits afin d'établir une ventilation

constante, activée, sur certains points, par un bec de az.

Cube d'air. - Le cube d'air est par lit : de 43 mètres

500 dans les dortoirs des valides ; de 46 mètres dans les

dortoirs des gâteux; de 50 mètres dans l'infirmerie.

Dans les classes, il est de 14 m. c. 200.

Ventilation. La classe et les dortoirs sont venti-

VENTILATION ET CHAUFFAGE. XLV

lés pendant l'été à l'aide des nombreux châssis d'im-

poste dont sont munies les croisées, et, pendant l'hiver,

par des prises d'air au niveau du sol, mises en commu-

nication avec le foyer des appareils de chauffage où

l'air vicié est ainsi appelé et brûlé. Elle s'effectue en-

core dans les dortoirs des gâteux et de l'infirmerie par

le mode même de chauffage de ces localités, qui con-

siste dans de vastes cheminées.

Chauffage. - Le chauffage des réfectoires, classes,

hains, etc., se fait à l'aide de grands calorifères en caves.

Celui des dortoirs et d'une partie des salles de réunion

est assuré par des poêles munis de saturateurs. L'infir-

merie et les dortoirs des gâteux sont chauffés à l'aide

de vastes cheminées à double foyer.

Pour terminer, il ne nous reste plus qu'à parler des

dispositions que nous avons prises dans le but d'utiliser

d'une manière complète, au point de vue cle l'ensei-

rJlLCJ1lCnt, les espaces libres entre les différents bâti-

ments. On trouve successivement : :

1° Entre les classes et le premier pavillon de dor-

toirs, le jardin géométrique, planté d'arbustes verts

qui seront taillés en cônes, pyramides, cubes, sphères,

etc.; - 2° Entre le premier et le second pavillon de dor-

toirs, le jardin des surfaces, où des bordures de buis

circonscrivent des pelouses ou des jardinets, représen-

tant le triangle, le carré, le rectangle, le losange, etc.

(Ces deux jardins sont terminés);- 30 Entre le deuxième

et le troisième pavillon de dortoirs, le jardin fleuriste ;

4° Entre le troisième et le quatrième, le jardin po-

tager. (Tous deux seront plantés d'arbres fruitiers).

Entre le quatrième pavillon, le mur de clôture qui

longe le chemin stratégique (Plan, 13) et l'infirmerie

nous disposions d'un espace beaucoup plus vaste que

celui des jardins. Nous l'avons divisé en deux parties :

1" Au fond, près du mur, le bois où nous avons fait

XLVI COURS, JARDINS, ROIS.

planter 21 espèces d'arbres (1); 2° près de l'infirmerie,

le préau pour les enfants convalescents, planté, sur

l'avis de M. Imard, de frênes pleureurs dont les bran-

ches, en s'entrelaçant, formeront plus tard un vaste-

berceau de feuillages; c'est là une excellente idée. Le

bois et le préau clés frênes sont séparés par une pe-

louse ornée de corbeilles de fleurs.

Dans la cour des gâteux invalides, nous nous pro-

posons de faire installer une tonnelle, faite de plantes et

d'arbustes grimpants (lierre, vigne, glycine, etc.), sous

laquelle les enfants seront portés pendant les grandes

chaleurs de l'été.

Enfin, sur une partie du terrain où doivent s'élever

clans un avenir plus ou moins rapproché les quatre pa-

villons de dortoirs qui complètent la section, nous avons

obtenu de faire semer du seigle, du blé, de l'orge, de

l'avoine, etc. : c'est le champ des céréales; et au mois

de mars prochain on y sèmera du trèfle, de la luzerne,

etc. : ce sera le champ des plantes fourragères.

Dans toutes les cours, dans tous les jardins, arbres,

arbustes, plantes portent, comme nous l'avons déjà dit,

des étiquettes indiquant leur nom; en un mot, tout,

dans la section, est organisé en vue de l'instruction

des enfants à l'aide des leçons de choses.

Pour la réalisation de notre idée, nous avons trouvé,

comme toujours, le concours le plus empressé, les con-

seils les plus judicieux, les plus expérimentés de

MM. Imard, Gallois et Ventujol. Tous les trois ont pris

les mesures nécessaires pour que les cours, les jardins,

le bois, etc. soient aménagés le plus vite possible et en

état de recevoir les plantations dès que la saison de-

(1) Il y a plusieurs spécimens de chaque essence; un seul est

étiqueté, les autres non, ce qui permet de mieux se rendre compte

des résultats de renseignement, fait sur place, aux enfants.

AMEUBLEMENT DE LA SECTION. XLVII

viendrait propice. Nous leur renouvelons ici nos remer-

ciements les plus vifs pour leur coopération incessante

à une oeuvre qui nous est devenue commune. Et les

heureux résultats que nous sommes heureux de faire

connaître, l'Administration les obtiendra toujours lors-

que, pour l'exécution d'une oeuvre utile, elle saura

faire appel, sans arrière-pensée, franchement, à toutes

les bonnes volontés.

Ameublement de la nouvelle section. - Tout le

mobilier scolaire, les tables des réfectoires, les buffets

des oflices, les commodes de l'infirmerie, la plupart des

armoires pour le personnel secondaire du service, etc.,

ont été fabriqués par les enfants dans leurs ateliers. Le

reste, c'est-à-dire la literie, les tables de nuit, les chaises

devaient être fournis par une adjudication : il appar-

tenait donc l'Administration de la préparer en temps

opportun, de manière à avoir à sa disposition tout le

vwbi lier aussitôt que les bâtiments seraient terminés.

L'Administration ne semblait pas s'en occuper et déjà

les deux premiers bâtiments à usage de dortoirs (80 lits)

étaient sur le point d'être livrés par l'architecte.

Nous avons cru devoir prévenir l'Administration, et le

5 avril 1884, M. l'inspecteur Imard et M. Tauxier,

économe de Bicêtre, recevaient la mission de préparer

les devis. Le 10 juin 1884 ils remettaient leur travail à

l'Administration. Durant ce temps, l'Administration

préfectorale, la suite d'incidents que nous avons

racontés dans le précédent Compte rendu (1884, p. lxv),

avait obligé l'Assistance publique à installer 80 lits pro-

visoires (lits Tucker et lits de sangle) dans les deux

bâtiments terminés (voir p. LXX).

Pendant une année (juin 1884, juin 1885), l'Adminis-

tralion a laissé dormir dans ses cartons les devis pré-

parés par ses fonctionnaires et pourtant de nouveaux

bâtiments, celui des gâteux et celui de l'infirmerie, étaient

près d'être finis. Tout le monde le savait, seule l'Admi-

XLVUI AMEUBLEMENT TARDIF DE LA SECTION.

nistration ne semblait pas s'en apercevoir. A la suite de

nouvelles insistances, de l'intervention officieuse de

membres du Conseil de surveillance et de l'Administra-

tion préfectorale, l'Administration se décida à sortir de

ses cartons les devis concernant l'ameublement, à les

examiner et à les faire modifier par M. Imard et le

nouvel économe M. Adancourt.

Le Conseil municipal avait décidé que la dépense du

mobilier serait prélevée sur le reliquat disponible des

subventions municipales accordées en 1880 et en 1882

à l'Assistance publique. M. Peyron, mal renseigné,

affirmons-nous, nous déclara qu'il n'yavait aucune res-

source disponible et se souvenant que nous avions été

chargé du Rapport au Conseil municipal, nous demanda

s'il ne valait pas mieux prélever la somme nécessaire

sur les bonis de l'adjudication. 11 ne nous appartenait

pas de nous y opposer et les circonstances pressaient

trop pour que nous n'acceptions pas de suite la propo-

sition de M. le Directeur.

Les nouveaux devis furent vite préparés par MM.

Imard et Adancourt. L'affaire fut approuvée par le

Conseil de surveillance dans l'une des séances de juillet,

puis soumise au Conseil municipal qui donna également

son approbation sur le rapport de M. Robinet (séance du

6 août). La dépense était évaluée à 74.514 francs 13.

L'adjudication eut enfin lieu le 28 septembre et donna

un rabais de 8.767 fr. 40, ce qui réduisit la dépense du

mobilier à 65.74(if. 10(1).

M. Poubelle eut l'obligeance de l'approuver au bout

de quelques jours. L'adjudicataire devait fournir la

moitié des lits dans les premiers jours de novembre.

(1) M. E. Ferry, pour empêcher la création de la section, a écrit

que, en plus du crédit voté pour les constructions, il faudrait en-

core 250 mille francs pour l'installation des bains et l'ameublement.

Or la première a été faite, comme c'était prévu, sur le crédit des

travaux, et l'ameublement n'a coûté que Go.i4G fr. 10. Ce fait per-

)ne ! d'apprécier la conduite et le savoir de cel administrateur.

DEMANDE DE NOUVEAUX ' TRAVAUX. XLIX

Malheureusement il ne s'était pas'conformé aux con-

ditions de son contrat; ses lits furent refusés par l'Ad-

ministration et il dut en faire d'autres conformément

aux conditions du cahier des charges. C'était là un retard

imprévu et indépendant de l'Administration. Les deux

derniers bâtiments à usage de dortoirs ont été terminés

le 10 octobre. La première livraison de lits n'a eu lieu

que le 17 décembre; les autres livraisons se sont suc-

cédé assez vite et la dernière a eu lieu le 22 janvier 1886.

Il suit de cet exposé que l'Administration n'a pas pris

ses mesures pour que le mobilier fût prêt aussitôt que

les constructions seraient achevées. Là encore s'est fait

sentir l'influence fâcheuse dont nous avons fait con-

naître dans le Compte rendu de 1884 (p. LXXI) les détes-

tables agissements.

Dans le cours de l'année, voyant la population s'ac-

croître plus vite que nous ne l'avions prévu nous.

même (1), ce qui doit être attribué à ce que, aujour-

d'hui, les parents mettent autant d'empressement à

placer et à maintenir leurs enfants, sachant qu'ils se

trouvent dans des conditions convenables, qu'on s'oc-

cupe d'eux, qu'ils y avaient de répugnance autrefois,

les retirant souvent après un court séjour; constatant

de plus, chaque jour, les inconvénients dus à l'absence

d'un pavillon d'isolement pour les maladies conta-

gieuses, nous avons demandé à M. le Directeur de l'As-

sistance publique, la continuation des travaux. C'est en

réponse à cette demande que M. le Directeur a envoyé as

la Ville, pour être soumis au Conseil municipal, un

mémoire sur un projet de travaux dont nous allons ex-

traire les principaux passages. Après avoir rappelé

qu'un arrêté en date du 10 septembre 1883, rendu en

(1) En 1878, et 1879, mes amis du Conseil général et moi pen-

sions qu'une section de 200 lits devrait suffire (avec la colonie de

Vaucluse) pour les garçons ; c'est pour cela que, en 1883, nous

n'avions demandé qu'une partie des pavillons-dortoirs. '

BOURNEVILLE 4884. HH

. INSUCCÈS DE NOTRE DEMANDE.

conformité d'une délibération du Conseil municipal du

29 juin 1883, avait autorisé l'Administration à détacher

du programme complet un certain nombre de pavillons

et avait pourvu à l'imputation de la dépense, évaluée a

1.560.261 fr. 91, et qu'un deuxième arrêté en date du

11 décembre 1884, pris en conformité de la délibération

duConseilmunicipal du 24. novembre 1884, avait autorisé

la construction de deux nouveaux pavillons de dortoirs,

avec imputation de la dépense évaluée à 228.547 fr. 85

sur le boni des rabais de l'opération, M. le Directeur

ajoute :

« M. le Dr Bourneville, chargé de la section des Enfants

idiots et épileptiques, demande que l'Administration détache

des travaux restant à faire : 4° le pavillon d' isolement ; 2" le

pavillon des cellules ; 3° deux préaux couverts pour relier le

nouveau quartier au gymnase et aux ateliers ; 4° la clôture du

quartier et les canalisations d'eau, de gaz, et d'égout ; 5° un

pavillon pour dortoir...

La dépense totale des travaux est évaluée à la somme de

598.639 fr. 59, imprévus et frais de direction compris... Cette

somme, bien entendu, n'est qu'une prévision basée sur les

prix de la série. La dépense réelle restera bien au-dessous de

ce chiffre, soit que les travaux soient confiés aux adjudica-

taires de la première partie de l'opération, auquel cas elle se

trouverait réduite par suite des rabais obtenus à 430.000 fr. '

environ, soit que de nouvelles adjudications aient lieu. »

M. le Directeur résume ensuite la situation de la pre-

mière partie de l'opération au point de vue financier ;

indique qu'une somme de 106.834 fr. 73 est disponible,

mais qu'il convient de la réserver ; affirme que « l'11d-"

ministration n'a pas de ressources qu'elle jouisse

affecter aux travaux projetés (1). Dans cette situation,

(1) Il y avait : 1 une somme de 40G mille fr. disponible sur la

réserve; 2° un reliquat considérable sur' les subventions muni-

cipales extraordinaires de G millions et de 3 millions; cela est si

vrai que le Conseil municipal voyant que l'Administration de l'As-

sistance publique n'avail pas encore employé ces subventions, a

prélevé sur le reliquat 500,000 fr. pour équilibrer le budget de

l'Assistance publique de 1886.

EMPLOI DU CRÉDIT DISPONIBLE. Ll

conclut-il, le Conseil de surveillance a, en approuvant

le projet, émis l'avis que la dépense en soit couverte

par une subvention spéciale à allouer par la ville de

Paris. »

Une fois de plus, l'Administration et le Conseil de sur-

veillance, dont la ligne politique semble être de tenir le

moins de compte possible des votes du Conseil munici-

pal, faisaient appel à sa bonne volonté pour avoir une

nouvelle subvention. Le Conseil de surveillance aurait

pu, sans commettre d'imprudence, affecter au moins

80.000 francs sur les 106.000 disponibles, car tous les

bâtiments étaient achevés, sauf les deux derniers

pavillons construits avec les bonis; enfin il aurait pu af-

fecter un crédit quelque mimine qu'il fût sur les som-

mes disponibles des subventions municipales.

L'affaire fut envoyée à la Ville dans ces conditions.

Malheureusement, malgré toute la bonne volonté de

nos amis du Conseil et de M. Poubelle, préfet de la

Seine, il fut impossible d'y donner suite : les ressources

du budget municipal ne le permettaient pas.

Au mois d'octobre, apprenant qu'il résultait de l'exa-

men des mémoires alors remis par les entrepreneurs

que le règlement définitif clonnerait un boni ; sachant

d'autre part qu'il restait un disponible de plus de

100,000 fr. sur la réserve, nous avons demandé à M. le

Directeur de bien vouloir donner des ordres, pour activer

plus que d'habitude, le règlement de ces mémoires et

d'affecter les bonis de toutcprovcnanccvlaconstruction

du pavillon des contagieux et des cellules. A la lin de

l'année, cette opération était assez avancée pour qu'on

pût être assuré d'avoir près de 200.000 fr. il employer à

la continuation de l'oeuvre. Nous espérons que, grâce à

la bonne volonté de M. Peyron, l'année 1886 ne se ter-

minera pas sans voir la section des enfants pourvue et

du pavillon des contagieux et des cellules.

MI ADMISSION DES ALIÉNÉS.

V.

DU MODE D'ADMISSION DES ALIÉNÉS, DES ÉPILEPTIQUES

ET DES ENFANTS IDIOTS, IMBÉCILES, ÉPILEPTIQUES,

PARALYTIQUES, ETC.

1. Aliénés. - On sait que les placements dans les asiles

d'aliénés sont de deux espèces : les placements volon-

taires, faits par les familles, et les placements d'once, faits

par l'autorité publique.

A Paris, les placements d'office sont effectués par la Pré-

fecture de Police. Il y a quelques années,la très grande ma-

jorité des aliénés passait par le Dépôt de la Préfecture de

police. L'Administration de la Préfecture de la Seine ne se

réservait que 330 placements volontaires dans les asiles

publics : 17Ù pour les malades payants, 160 pour les indi-

gents. Les formalités exigées par la Préfecture de la Seine,

le long temps perdu pour leur accomplissement rendait

presque absolument illusoire la faculté des placements

volontaires d'indigents et jamais les lits accordés aux

placements volontaires n'étaient remplis par eux. C'est

pour ce motif que, à la fin de 1881, lors de la discussion

de notre rapport sur le budget des aliénés pour 1882, nous

avons insisté afin que les formalités fussent abrégées le

plus possible, que les conditions de ce mode d'admission

fussent portées à la connaissance du public et que le nom-

bre des placements volontaires gratuits fut illimité.

Les placements d'office n'en sont pas moins restés les

plus nombreux et dans une très forte proportion, occasion-

nant des ennuis très pénibles aux familles, obligées de

recourir au commissaire de police qui, en maintes cir-

constances, refuse son concours, attendant qu'il se pro-

duise des accidents, un scandale public. L'état des ma-

lades est souvent aggravé par cette intervention, par le

voyage du domicile au Dépôt de la Préfecture de police, le

séjour dans ce lieu redouté, et enfin par un second voyage,

ADMISSION DES ÉPILEPTIQUES. LUI

dans une voiture de prisonniers, du Dépôt au Bureau

d'admission de l'Asile clinique.

Les plaintes des familles, celles des malades dont l'état

mental leur permettait de se rendre compte de ce pas-

sage à la Préfecture de police, l'aggravation de la maladie

occasionnée par le séjour au Dépôt et se traduisant parfois

dans les manifestations délirantes, toutes ces circonstances

ont attiré notre attention sur cette pratique détestable de

l'intervention de la police dans l'hospitalisation des aliénés.

Nous avons en conséquence soumis au Conseil général,

qui l'a adoptée, une proposition autorisant M. le Préfet de

la Seine à faire recevoir au Bureau d'admission de l'Asile

clinique, titre de placements volontaires, tous les malades

aliénés qui y seraient conduits par leurs familles, après

l'accomplissement des formalités légales (2G novembre

1881.)

Il a fallu plusieurs votes du Conseil général pour déci-

der l'Administration à essayer de réaliser cette réforme il

la fois si simple et si utile aux malades et à leurs parents.

Aujourd'hui, et bien que le service préfectoral des aliénés

y mette de la bonne volonté, le nombre des placements

volontaires d'indigents n'augmente que très lentement.

En voici la preuve : il y a eu 191 placements volontaires

en 1883, 330 en 1.'3S4 sur plus de 3000 admissions. C'est

afin de réduire le plus possible aux seuls individus arrêtés

sur la voie publique, le passage au Dépôt de la préfecture

de police, que nous revenons encore une fois sur ce

sujet et que nous rappelons à tous nos lecteurs, exerçant

la médecine dans le département de la Seine, que :

Tout aliéné peut être conduit directement par ses pa-

rents ou ses amis au Bureau d'admission de l'Asile cli-

nique (Sainte ? lmze), sans passer par la Préfecture des

police, à la condition d'avoir un certificat médical léq,2'

lisé par le commissaire de police et l'extrait de l'acte lie

naissance du malade. j

II. Epileptiques. - A l'heure actuelle, le ? épileptiques-

des deux sexes sont hospitalisés de deux façons : 1° pay

l'Administration de l'Assistance publique dans les sections''

spéciales de Bicêtre et de la Salpêtrière ; ils sont qualifiés

d'épileptiques non aliénés et leur entretien est à la charge

LIV ADMISSION DES ÉPILEPTIQUES.

de la Ville de Paris; 2° par la Préfecture de la Seine et la

Préfecture de police dans les mêmes services spéciaux de

ces deux hospices et, quand les places font défaut, ce qui

est fréquent, dans les sections d'aliénés des hospices ou

même clans les divisions des asiles ; dans ce cas, les épi-

leptiqttes sont dits aliénés et leur entretien incombe au

Département.

C'est là une distinction purement administrative. Au

point de vue médical, il n'y a pas de différence sensible

entre ces deux catégories d'épileptiques. Tous sont plus

ou moins sujets à des troubles intellectuels, do durée

variable, après leurs accès ; tous sont exposés à la dé-

chéance intellectuelle, à la démence épileptique; tous aussi

peuvent voir leurs accès diminuer ou môme présenter des

rémissions complètes plus ou moins longues ; quelques-

uns, de l'une ou l'autre catégorie, peuvent même guérir.

Le Conseil général, d'accordavec l'Administration, avait

limité, dans son projet de délibération de 1877, 1878, 1Sî`l,

le placement des épileptiques ainsi qu'il suit :

Art. 4. - Aucun placement d'aliénés épileptiques ne pourra être

fait en dehors des services spéciaux de Bicêtre (sexe masculin) et

de la Salpêtrière (sexe féminin). Aucun placement d'enfants alié-

nés, idiots ou arriérés, ne pourra être fait en dehors des services

spéciaux de Bicêtre (jeunes garçons gâteux ou âgés de moins de

7 ans), de Vauclusc (jeunes garçons arriérés, ou idiots valides de

7 il 16 ans) et de la Salpêtrière (filles de tout âge). Toutefois, les

enfants idiots âgés de plus de 16 ans qui, par un arrêt de déve-

loppement physique, paraîtraient n'avoir pas atteint cette limile

d'tige pourront être exceptionnellement admis à la colonie spéciale

de Vauclusc. -

Cet article, qui limitait, comme on le voit, l'admission

des épileptiques à deux services spéciaux, disparut dans

la délibération de 1880, parce que les deux services étaient

devenus toutàfait insuffisants et aujourd'hui il y a des épi-

leptiques non seulement dans les services d'aliénés de Di-

cêtre et de la Salpêtrière, mais encore dans les divisions

des autres asiles (1).

(1) En janvier 188C. il savait dans la section spéciale de Bicêtre

7V épileptiques aliénés, 71 épileptiques dits non aliénés; 98 dans

da section de M. J. Voisin ; 59 dans la section de M. Charpentier ;

li7 u l'asile cliniclcte SttiWn-Aane; 'i L t l'a,ilc cle Vaucluse ; IU iL

HOSPITALISATION DES ÉPILEPTIQUES. LV

L'ospasa<t0dcs épileptiques, telle qu'elle se prati-

que dans le département de la Seine, nous paraissant exi-

ger une réforme sérieuse, nous avons soumis la question au

Conseil général, en février 1878, dans les termes sui-

vants ;

Bicêtre et la Salpêtrière possèdent chacun une section spéciale-

ment consacrée aux épilcptiques adultes et aux enfants élileli-

ques et idiots. Ces malades forment une catégorie toute particu-

lière, très différente de celle dos aliénés. En effet, la plupart

jouissent, sinon de l'intégrité, au moins d'une partie do leurs fa-

cultés intellectuelles. Aussi ont-ils, dans les asiles, une plus

grande liberté et peuvent-ils, de temps en temps, sortir en ville

accompagnés de leurs parents.

Nombre d'entre eux présentent; des améliorations assez notables,

des suspensions assez longues de leurs accès, qui permettraient do

les rendre à leurs familles. Mais celles-ci hésitent souvent à les

reprendre et le médecin à les leur rendre, par suite des difficultés

nombreuses exigées ensuite pour leur réadmission. Une fois sortis,

s'ils retombent, si les crises deviennent plus fréquentes, il faut re-

commencer les démarches déjà faites, lors du premier placement :

certificat de médecin, visa du commissaire de police, séjour iL la

Préfecture de Police, passage à Sainte-Anne, enfin transfert 11 ]Ji-

cêtre pour les hommes, iL la Salpêtrière pour les femmes. Votre

Commission est d'avis d'appeler, sur celte situation intéressante,

huile la sollicitude de l'Administration, en l'invitant iL examiner

si, pour les malades incontestablement épileptiques et qui ont

séjourné iL ce titre dans nos asiles, il ne serait pas possible de

diminuer les formalités et de les faire réadmettre directement dans

les sections spéciales de Bicêtre et de la Salpêtrière. Nos finances

y gagneraient en ce sens que les médecins hésiteraient moins iL

l'envoyer des malades améliorés, s'ils savaient que, en cas de re-

crudescence de la maladie, ils trouveront les portes largement ou-

vertes pour rentrer. Une élude attentive de ces malades nous

autorise iL penser qu'un nombre respectable d'entre eux pourraient

passer plusieurs mois dehors chaque année, ce qui serait utile a

leur santé et diminuerait nos dépenses (1).

Le Conseil général a adopté notre voeu; l'Administration

n'ayant rien fait, nous l'avons renouvelé à la fin de 1878

[Rapport sur le budget de 1S7 ! )) et, les choses étant restées

dans le même état, nous sommes revenu de nouveau à la

l'asile de Ville.Enar ! 1 ; iL la Salpêtrière lf)8 dans le service de

M. Legrand du Saulle ; 3 dans le service de M. A. Voisin ; 108 di -

les non aliénées dans le service de M. Charcot.

())I ! ourueviHe ? ppo)'< sur le service des aliénés (budget

de 48 î5), p. 21 cl -25.

LVI SECOURS AUX ÉPILEPTIQUES SORTIS.

charge dans notre Rapport de décembre 1879 sur le bud-

get de 1880. Après avoir reproduit les considérations qui

précèdent, nous ajoutions qu' « une étude attentive de ces

malades nous autorisait à penser qu'un nombre respectable

d'entre eux pourraient passer plusieurs mois dehors, cha-

que année, si la proposition était mise à exécution, ce qui

serait utile à leur santé et diminuerait les dépenses. » Nous

terminions ainsi : « Nous vous prions, Messieurs, d'inviter

encore une fois l'Administration à examiner cette question

intéressante et à en préparer la solution. »

En 1880 (Rapport sur le budget de 1881), nous consta-

tions que nous n'avions pas été plus heureux ; mais, en

même temps, nous signalions au Conseil que nous avions

obtenu, pour nos collègues et pour nous, l'autorisation de

donner aux malades des congés de 1 à 15 jours, c'était un

premier pas vers la réalisation de la réforme que nous

poursuivons. Malheureusement, depuis cette époque, il n'y

a pas eu d'autre changement. Notre insistance, en 1881 et

1882, n'a pas eu plus de succès. En donnant à cette ques-

tion plus de publicité, en attirant davantage sur elle l'at-

tention et des médecins et des administrateurs, nous fini-

rons peut-être par provoquer une solution qui nous parait

devoir être très profitable aux malades et agréable aux fa-

milles.

Les épileptiques, tous les médecins le savent, constituent

un groupe spécial ; ce sont des aliénés d'un genre particu-

lier, parfois tout il fait calmes et intelligents dans l'inter-

valle de leurs accès, mais sujets à des crises de folie tran-

sitoire et menacés de clémence. C'est avec raison qu'on a ré-

clamé pour eux des sections spéciales, sections dans les-

quelles il faudrait un quartier pour les déments et les gâ-

teux, un quartier de cellules pour les isoler lorsqu'ils of-

frent de l'excitation maniaque. C'est aussi en raison de la

nature de leur maladie qu'il faudrait rendre faciles et les

sorties et les réadmissions. 11 conviendrait enfin, lorsque

la famille est nécessiteuse, qu'on accordât à leurs malades

un secours mensuel lorsqu'ils sont sortis de l'asile. Main-

tes fois nous avons sollicité l'attention de l'Administration

surl'allocation de ce secours etmalbeureusement, usqu'ici,

nous ne sommes parvenu à aucun résultat sérieux.

ADMISSION DES ENFANTS IDIOTS. LVII

111. Enfants idiots, imbéciles, arriérés, épileptiques, lJa,-

ralytiques; hystériques. - Si l'intervention du commis-'

saire de police et le passage à la Préfecture de police ont

de graves inconvénients pour les aliénés adultes dont les

familles réclament le placement, ces mesures en ont de

plus graves encore quand il s'agit des enfants, et d'autant

plus que les enfants sont moins inintelligents. L'interven-

tion du commissaire de police, le passage à la Préfecture

ne se justifient absolument que pour les enfants arrêtés

en état de vagabondage ; mais pour tous les autres, qui

sont dans leurs familles, ces pratiques constituent une vé-

ritable barbarie, dont se rendent coupables et des méde-

cins, et des commissaires de police, et des administra-

teurs, et cela par ignorance des votes du Conseil général,

par l'insouciance de l'Administration qui a oublié de leur

. faire connaître ces votes.

Il est des médecins, même des médecins aliénistes, à la

consultation desquels on présente des enfants et qui, inter-

rogés par les familles, sur les formalités à remplir pour

l'hospitalisation de leurs enfants, leur conseillent de se

rendre au Dépôt de la Préfecture de police, au lieu de leur

indiquer sur-le-champ qu'il faut un certificat médical lé-

ualisé, l'extrait de l'acte de naissance et, avec ces pièces,

conduire l'enfant au Bureau d'admission de l'Asile cli-

nique où les familles auront à signer la demande de

placement.

Des commissaires de police déclarent qu'ils ne peuvent

rien faire tant que l'enfant est au domicile paternel ; ils

conseillent aux parents d'abandonner l'enfant sur la voie

publique parce que, alors, et alors seulement, ils pourront

s'en emparer et le faire placer par l'intervention de la Pré-

fecture de police.

A l'Assistance publique, on n'est pas mieux renseigné.

On répond qu'on n'a pas de places pour les enfants incu-

rables ; on semble même ignorer qu'il s'est construit une

section pour ces enfants, dits incurables, à l'hospice de Bi-

cêtre et qu'il y a la colonie de Vaucluse; on ne se préoc-

cupe pas ou si l'on s'en préoccupe rien n'en paraît -de

créer des places pour les icliotes à la Salpêtrière. D'autres

fois, et c'est ce qui ressort d'une lettre écrite par l'un des

principaux fonctionnaires de l'Assistance publique, lettre

LVIII CONDITIONS D'ADMISSION DES ENFANTS.

que nous avons entre les mains, on dit aux parents : « Con-

duisez votre enfant à la Préfecture de police. » Comme on

le voit, les votes réitérés du Conseil général ne sont pas

encore parvenus à la connaissance de tous au Chef-lieu de

l'Assistance publique.

L'Administration de l'Assistance publique semblant, et

nous le regrettons, se désintéresser de l'assistance de ces

enfants qui constituent les 95/100 au moins des enfants in-

curables, nous répéterons que les familles doivent remplir

les formalités suivantes : 1° certificat de médecin consta-

tant l'état mental, ou la maladie convulsive de l'enfant ;

2° légalisation de la signature du médecin par le commis-

saire de police de son quartier; 3° extrait de l'acte de

naissance; 4° conduire l'enfant, avec ces pièces, le matin

de préférence, au Bureau d'admission de l'Asile clinique

(Sainte-Anne) (1) qui, lui, répartira les enfants entre les

services spéciaux, suivant le sexe et suivant la nature de

la maladie.

C'est là, à notre avis, que doit être faite la répartition et

non ailleurs. Elle doit y être faite promptement, on une

huitaine de jours au plus, sauf dans des conditions excep-

tio.1 nelles. La disparition de l'épidémie d'ophthalmic quia a

sévi a la colonie de Vaucluse, la construction de la pre-

mière partie de la section de Bicêtre permettent d'espérer

qu'en 188G rien ne viendra gêner la répartition de tous les

enfants du sexe masculin. Malheureusement il n'en sera

pas ainsi pour les petites filles idiotes, faute de places à la

Salpêtrière.

Ici finiraient les considérations que nous avions à faire

sur l'admission dans les asiles ou les hospio3s, des mala-

des frappés dans leur intelligence, s'il n'y avait pas une

catégorie d'enfants qui exige que nous entrions à leur su-

jet dans quelques explications. Nous voulons parler des

enfants dont les parents habitent bien à Paris depuis plus

ou moins longtemps, mais qui, nés dans d'autres départe-

ments, n'ont pas droit de domicile dans le département de

la Seine et doivent, légalement, être assistés par leur dé-

partement d'origine. Voici comment nous avons montré

(1) Hue Cabanis, n° 1.-

ADMISSION DES ENFANTS IDIOTS. LXIX

au Conseil général de la Seine, en 1878, la nécessité

d'une réforme en ce qui les concerne :

Il est, enfin, une catégorie particulière d'aliénés transférés sur

lesquels votre Commission croit convenable d'appeler les réflexions

de l'Administration. Nous voulons parler des aliénés qui, nés

dans d'autres départements que le nôtre, et ayant toute leur

famille il Paris, sont encore mineurs et par conséquent, n'ont pas

acquis droit de domicile dans la Seine. Réclamés ldualcnvml par

leur département d'origine, ces malheureux sont transportés dans

des asiles plus ou moins éloignés, séparés entièrement de leurs

parents. Quelquefois, ceux-ci prévenus à temps, reprennent leur

malade, si sa situation, n'offrant aucun danger pour la sécurité

publique, permet au médecin de le leur rendre. Qu'arrive-t-il

bientôt ? C'est que la maladie s'aggravant, les parents sollicitent

une nouvelle admission dans nos asiles. Il y séjourne jusqu'à ce

que surgisse une nouvelle demande de transfert. L'enfant fait la

navette entre sa demeure et l'asile. N'y aurait- pas moyen de

faire disparaître cet inconvénient très préjudiciable aux malades

et aux familles ?

- Ne pourrait-on pas demander une modification de la loi auto-

risant le Département de la Seine à garder dans ses asiles les

malades mineurs dont les parents habitent Paris ou le Départe-

ment depuis plusieurs années ? Le Département de la Seine récla-

merait au département d'origine les frais de séjour au taux de la

journée dans le propre asile de celui-ci et supporterait la diffé-

rence entre le prix de journée dans ses Asiles et celui de l'Asile

du département d'origine. C'est la, nous le savons, une situation

difficile; mais l'Administration n'aura que plus de mérite si elle

parvient à y remédier et à faire passer les droits de l'humanité

au-dessus de prescriptions administratives qui ont des conséquences

aussi déplorables. »

Quatre ans plus tard, en décembre 1882, dans le Rapport

sur le service des aliénés (budget de 1883), après avoir

reproduit le passage qui précède, nous adressant a nos

collègues du Conseil général, nous ajoutions :

« Vous avez donné, Messieurs, votre approbation il ces idées

que nous avons exprimées au nom de la 3" Commission. Vous les

avez encore approuvées en novembre 1878, en décembre 1879 et

1880. Personne ne peut donc dire qu'il y a eu un vole de surprise.

Ces idées, qui n'ont pas jusqu'ici attiré l'attention de l'Administra-

tion, ont paru excellentes au Conseil général du Département de

Seine-et-Marne ; mais il a étendu aux aliénés adultes ce que vous

aviez, demandé seulement pour les enfants. En effet, par une

délibération en date du 19 août 1880, le Conseil général de Seine-

et-Marne a demandé que les aliénés mineurs ou non, séquestrés

dans les asiles de la Seine et appartenant par le domicile de

secours, au département de Seine-et-Marne, soient maintenus

LX ADMISSION DES ENFANTS IDIOTS.

dans ces asiles quand leurs familles sont établies à Paris, et ce,

au prix de journée de 1 fr. 20 c. payé à l'asile de Clermont (Oise)

pour les autres aliénés de ce département.

« Au mois de mai 1881, l'Administration a soumis au Conseil

général la demande du Conseil général de Seine-et-Marne. Dans

le mémoire administratif, on lisait ce passage : « Ce cas, dit

M. le Préfet, ne se présente pas dans la pratique aussi fréquem-

ment qu'on pourrait le croire, attendu que les familles qui désirent

garder dans les asiles de la Seine des enfants ayant le secours de

domicile en province, obtiennent cette faveur facilement (1). Il leur

suffit pour cela de contribuer au paiement des frais de séjour, en

prenant à leur charge la différence qui existe entre le prix de

journée de l'asile où le jeune malade est maintenu et celui de

1' asile de province où il devrait légalement être traité. De la sorte,

le département d'origine ne supporte aucun surcroît de dépenses.

Je m'empresse d'ajouter que s'il arrive qu'une famille se trouve

dans l'impossibilité de payer celte somme, assez légère ordinaire-

ment, l'Administration prend elle-même à sa charge, par exception,

le surcroit de dépense qu'entraîne le maintien du malade dans le

département de la Seine. La situation des enfants dont il s'agit est

donc, en réalité, très supportable. L'Administration est d'avis

qu'il y a lieu de rejeter cette demande.

« Ensuite M. Herold combat très vivement le maintien des

aliénés adultes du département de Seine-et-Marne dans nos

propres asiles. Nous n'insisterons pas sur ce passage de son

mémoire, puisqu'il s'agit d'une modification que nous n'avons pas

demandée.

« En ce qui concerne les enfants qui ont fait l'objet de notre

voeu, nous avons cru devoir insister : *( Dans ce cas, écrivions-nous,

c'est-à-dire quand il s'agit d'enfants nés hors du département de

la Seine et dont la famille habite Paris depuis plusieurs années,

dans ce cas les familles n'ont pas seulement le chagrin de se sépa-

rer de leurs enfants, il peut arriver, de plus, que ceux-ci ne

trouvent pas dans les asiles de province où ils sont transférés, les

soins spéciaux qu'ils recevaient à Bicêtre ou à la Salpêtrière. »

Et nous concluions ainsi : .< Contrairement à l'avis de M. le Préfet,

la 3° Commission croit qu'il y a lieu d'accepter la proposition qui

nous est faite en ce qui concerne les enfants idiots et épileptiques

des deux sexes : 1° Parce qu'il est barbare de séparer ces enfants

de leurs parents en les envoyant dans des asiles éloignés ; 2"

Parce qu'il est inhumain d'enlever des enfants des sections où

existent tous les moyens capables d'améliorer leur situation, pour

(1) Les faits non pas isolés, mais nombreux, contredisent cette

assertion. Le maintien de ces enfants était une exception et exi-

geait de nombreuses démarches et des protections puissantes ;

même aujourd'hui, malgré nos efforts, ce n'est qu'exceptionnelle-

ment que quelques enfants des autres départements sont conservés s

et c'est pour cela que nous reprenons la question. Il importe donc

de remplacer la faveur par une règle précise et la même pour tous.

ADMISSION DES ENFANTS IDIOTS. LXI

les expédier dans des asiles oit ne se trouve aucune des installa-

tions nécessaires. En conséquence, nous avons l'honneur de vous

soumettre, au nom de la 3e Commission, un projet de délibération

conforme (Procès-verbaux, 9 mai 1881, p. 129). »

« Vous avez adopté les conclusions de la 3e Commission, accep-

tant les propositions du Préfet et du Conseil général de Seine-et-

Marne, renouvelant l'ancien voeu autorisant, dans les conditions

précitées, le maintien des enfants dans nos asiles à la condition

que les familles habiteraient Paris depuis deux ans (1). Si l'Admi-

nistration préfectorale avait tenu compte de ce voeu si souvent

renouvelé, nous n'aurions pas eu à y revenir aussi longuement ;

mais elle ne l'a pas fait, car, pour des enfants appartenant aux

départements de l'Orne, de la Seine-Inférieure et de la Somme,

l'Administration, consultée, a répondu qu'il n'y avait rien à faire,

qu'il n'y avait d'engagement que pour le département de Seine-et-

Marne. C'est à tort, puisque le Conseil général avait invité l'Ad-

ministration à faire connaître son vote aux Préfets des départe-

ments chaque fois que l'occasion s'en présenterait.»

Comme on le voit, le Conseil général de la Seine a été

guidé dans la solution donnée il notre proposition par des

sentiments d'humanité qui lui font le plus grand hon-

neur. Personnellement, nous n'avons jamais manqué, cha-

que fois que nous avons fait des certificats réclamés pour

le transfert d'enfants, de prier le Bureau des aliénés de la

Préfecture de la Seine, de faire connaître au préfet du dé-

partement d'origine de l'enfant la décision prise par leCon.

seil général de la Seine. Nous croyons qu'il a été tenu

compte de notre requête, mais la plupart des préfets n'ont

pas répondu aux sentiments généreux du Conseil général

et ont maintenu leur demande de transfert, à laquelle on a

dû faire droit sauf dans les cas, et ils sont nombreux, où

les parents ont préféré reprendre leurs enfants.

La statistique des visites faites aux enfants par leurs pa-

rents, celle des sorties de 24 heures et des congés mon-

trent combien les familles conservent d'affection pour ces

malheureux déshérités. On croirait même que, souvent,

cette affection augmente en proportion de l'état misérable

de l'enfant.Nous avons vu des familles n'ayant pas d'autres

ressources que le produit de leur travail, chargées d'en-

fants, dans une situation voisine de la misère, préférer re-

(l) Voir la discussion dans les Procès-verbaux du Conseil gé-

cle la Seine, lre et 2e sessions de 1881, p. 130-132.

LXII ASILE D'IDIOTS INTEIlDÉPAH1'EMENTAUX.

prendre leurs enfants que de les laisser transférer dans des

asiles où ils ne reçoivent aucune éducation spéciale. Si,

dans certains cas, il reste encore dans le département des

parents plus ou moins éloignés, dont les soins, quelque

bienveillants qu'on les suppose, ne remplaceront jamais

ceux des frères, ou soeurs, du père et surtoutdela mère,-

d'autres fois il n'y a plus de parents ou ils sont clans une

situation qui les met dans l'impossibilité d'aller voir l'en-

fant. Parfois même la situation est encore plus déplorable :

Il n'y a aucun parent. Tout récemment on nous a demandé

un certificat afin de transférer dans le département du

Nord un enfant naturel reconnu par sa mère. Or, celle-ci

est née en Alsace; c'est là qu'elle a des parents ; elle a

mis son enfantau monde dans le département du Nord, où

elle n'a aucun membre de sa famille ; elle habite Paris

depuis plusieurs années. La situation faite à l'enfanta

clonc quelque chose de barbare et d'indigne d'une société

qui se prétend civilisée.

La mesure prise par le Conseil général est un premier

pas vers la réalisation d'une idée que nous avons maintes

fois exprimée, relative à la création, pour les enfants idiots,

imbéciles, etc., d'asiles interdépartementaux, analogues

aux asiles faits entre les comtés en Angleterre. Il y a là

au point de vue de l'assistance, une belle et bonne réforme

à entreprendre et qui ferait honneur au gouvernement ré-

publicain.

DEUXIÈME PARTIE

Clinique.

PREMIERE PARTIE

A propos de Clinique

BOURNEYILLE, 1885. 1

Des Familles d'idiots;

par SOURT1H'.VILLE et IÉrLAJ.

A sanis sana, : morbosis morbosa.

(IIIPPOCRATE. De Morbo sacro, cap. n.)

La transmission héréditaire des maladies n'est plus un fait

discuté maintenant et l'on s'accorde à attribuer à l'hérédité un

rôle important dans la génèse d'un bon nombre d'affections.

Cette influence de l'hérédité est surtout manifeste dans la pro-

duction des maladies nerveuses et mentales; elle est le plus

souvent alors, comme l'a dit avec raison Trélat, la cause pri-

mordiale, la cause des causes, qui fixe la maladie dans les

familles et la rend transmissible de génération en génération.

Telle est la loi. Cependant il y a des faits en apparence contra-

dictoires. C'est ainsi que l'on verra dans une même famille

des enfants sains qui auront des frères sourds-muets ou rachi-

tiques ou strabiques et d'autres aliénés, épileptiques ou idiots.

Cette diversité dans les manifestations pathologiques chez les

descendants est-elle unargument contre l'hérédité ? Nullement :

« Aliénés, idiots, scrofuleux, rachitiques, en vertu de leur

commune origine, de certains caractères physiques et moraux,

doivent être considérés comme les enfants d'une même famille,

comme les rameaux divers d'un même tronc », dit Moreau (de

Tours). Ce serait fort mal comprendre la loi d'hérédité que

d'attendre fatalement à chaque génération nouvelle le retour

des phénomènes morbides identiques. Sans doute le fait existe,

mais ce n'est toujours que dans un certain nombre de cas, et

les affections les plus diverses, qui de près ou de loin viennent

atteindre le système nerveux des parents, peuvent devenir pour

les enfants une cause de prédisposition héréditaire il des afl'ec-

4 DES FAMILLES D'IDIOTS.

tions nerveuses d'un autre ordre. Ce que le père transmet à

l'enfant, ce n'est pas sa folie; c'est le vice de constitution qui

se manifestera sous des formes différentes. Et, comme le dit

fort justement M. Delasiauve, « la ressemblance qui existe entre

les individus soumis à la même influence morbide, n'empêche

pas qu'on puisse trouver chez eux des caractères tout particu-

liers et tenant essentiellement à leur différente manière d'être,

à leur tempérament propre, à leur idiosyncrasie ».

La tare héréditaire se manifeste souvent chez les ascendants

par des symptômes peu accentués et qu'un commerce suivi

peut seul dévoiler à l'oeil de l'observateur. Ce sera par exemple

un vice de conformation quelconque, un « tempérament ner-

veux », des excentricités, une émotivité anormale. Ces indi-

vidus, sans présenter des troubles assez nets pour être classés

dans telle ou telle espèce pathologique, manquent de cet

équilibre des facultés qui caractérise les intelligences bien pon-

dérées. Ils vivront le plus souvent fort bien dans le monde qui

les qualifiera d'excentriques et d'originaux ; mais ils seront inca-

pables de rien faire de suivi et de durable par eux-mêmes. Ils

donneront naissance à des individus dégénérés, abâtardis au

point de vue physique, intellectuel et moral et alors les symp-

tômes morbides prendront une intensité plus grande, un carac-

tère mieux défini. Au bout d'un certain temps, surtout si à la

tare héréditaire viennent se joindre des causes occasionnelles,

ces familles s'éteindront d'elles-mêmes; car les derniers descen-

dants, tombés au plus bas degré de l'échelle sociale, ne vivant

plus que de la vie végétative, seront inaptes à la reproduction.

Notre but est justement de montrer ici plusieurs exemples de

ce genre. Mais, avant de rapporter nos observations communes,

nous citerons brièvement deux cas analogues. Le premier a été

publié par l'un de nous'.

I. Famille II...

Trois frères idiots. Influence de r/tet'(M ! <ë ? e)'c affectée d'irré-

gularités mentales. Affaiblissement paralytique chez les trois

enfants. - Irascibilité chez deux d'entre eux. (Archives des mala-

dies mentales et nerveuses, 1861, p. 289.)

Aucun anlécédent du côté paternel. Le père est bien 'conformé

et intelligent. La mère, assez nerveuse, est sujette à des accès de

l3oarneville.-Arc% lues des maladies mentales et ccerueuses, 18(il, p. 289.

DES FAMILLES D'IDIOTS. 5

tristesse, revenant à intervalles irréguliers, s'accompagnant de

maux de tête et suivis d'une sorte d'hébétude. Habituellement

douce et affectueuse; santé physique bonne. Pas de renseigne-

ments sur sa famille. - Les accouchements ont été naturels. -

Une petite fille morte à cinq ans ne différait en rien des enfants

de son âge.

4° R... (Vincent-Clet), né à Douarnenez, âgé de quinze ans,

est grand, fluet, et se tient avec peine sur ses jambes. Front assez

saillant, médiocrement élevé, effacé sur les côtés; légère dépres-

sion au-dessus des arcades sourcilières. Le crâne n'offre rien

d'anormal, le sommet seul en est un peu exhaussé. Le regard

constamment baissé, errant, ne peut fixer les objets, mais révèle

une certaine lueur d'intelligence : strabisme assez prononcé à

droite. C'est le plus avancé des trois frères sous le rapport des

connaissances usuelles, bien que son vocabulaire soit très restreint.

Caractère généralement doux : il ne joue pas, reste immobile.

Il mange à peu près seul, ne sait pas s'habiller et ne gâte pas.

Parties génitales développées; pas d'onanisme.

2° R... (Joseph-René) est né à Brest en 1850. La mensuration

ne donne pas de différence entre sa tête et celle de son frère. Le

front est aussi effacé sur les parois latérales, mais la dépression

sus-sourcilière est moins profonde. L'oeil droit est aussi moins

strabique, ce qui, sans doute, lui donne une apparence plus intel-

ligente. Mais, au fond, l'affaiblissement intellectuel est plus grand

que chez l'aîné ; il ne sait pas distinguer les objets et ne dit guère

que son nom. Il se tient mieux sur les jambes que le précédent,

mais, à l'inverse de lui, il est très turbulent, inattentif et irascible.

11 a un tic qui consiste à se frotter continuellement les yeux. Les

organes générateurs sont normalement développés; il gâte la nuit.

3° Le dernier R... (Vincent-Michel), âgé de neuf ans, est à

peu près conformé comme ses frères, quant à ce qui concerne la

tête. La dépression sus-sourcilière est légère, les arcades effacées,

l'arc interne abaissé, le front bas et étroit. Il n'a pas de strabisme,

mais le regard est méchant et sauvage. La taille est en rapport

avec l'âge, mais les jambes sont sans force; aussi est-il toujours

assis. Cependant il n'y a rien d'anormal du côté de la colonne

vertébrale.

Sauf les mots «papa» et «maman », son vocabulaire se limite à des

cris inarticulés qu'il pousse surtout quand on le regarde. 11 est

encore plus irritable que le précédent. Il mange seul, mais avec

ses mains et est galeux. Les testicules sont petits, la verge déve-

loppée, ce qui tient sans doute à ce qu'il se frotte liabituellemen

les jambes et les cuisses l'une contre l'autre en plaçant les mains

aux parties génitales.

De ces trois frères, l'aîné seul paraissait perfectible et pouvait

prêter quelque attention aux petits exercices qu'on lui faisait faire.

6 DES FAMILLES D'IDIOTS.

Ce fait n'est-il pas un exemple frappant des dégénérescences

dans certaines familles ? Comme antécédents : de simples irré-

gularités mentales ; et cependant dans la nouvelle génération

l'abâtardissement est très prononcé et tout porte à croire que

la famille s'est éteinte en elle. Sur quatre enfants, l'un meurt

à cinq ans ; les trois autres idiots, strabiques, paralytiques, iné-

ducables sont la dernière expression des dégénérés aux trois

points de vue physique, intellectuel et moral. Remarquons en-

core ici une sorte de marche graduelle dans l'expression des

phénomènes de déchéance, moins accentués chez l'aîné des

trois frères que chez les deux autres.

Citons encore un nouvel exemple emprunté au Dr F.-W.-A.

Browne.

II. Famille W...

Groupe de sept idiots, frères et soeurs. (The Journal o/ mental

science, 1862, t. VIII, p. 439.)

Parents excentriques, que l'on croyait consanguins.

Onze enfants. Un frère disparu : on l'a cru noyé. Une soeur

imbécile est encore vivante. Deux frères et une soeur bien portants.

1° Agnès, soixante et onze ans, affectueuse particulièrement

pour Thomas, calme, inoffensive, industrieuse; parole indistincte.

2° James, soixante-neuf ans, affectueux, enfantin, brouillon,

irritable, ne travaille pas.

3° Hélène, soixante-cinq ans, affectueuse et attentive pour ses

frères et soeurs, soumise, travaille volontiers comme laveuse il la

cuisine, propre dans ses vêtements; parole intelligible.

4° David, cinquante-six ans, indifférent pour ses frères et soeurs,

actif aux grosses besognes, aide les servantes, ne veut pas tra-

vailler au jardin ; aime à laver les bas. : i° William, cinquante-trois ans, affectueux pour ses frères et

soeurs, travaille au jardin mais ne veut pas arroser ; ne peut parler

intelligiblement.

6o Thomas, cinquante et un ans, affectueux pour ses soeurs,

indifférent pour ses frères, violent il l'occasion, se querelle avec

James, aime le changement, a travaillé au jardin jusqu'à ce qu'il

eût perdu l'usage de sa main droite.

7° Mungo, quarante-sept ans, indifférent pour ses frères etsoeu ! 's,

parle quelquefois à James; solitaire, taciturne, travaille dur au

jardin.

DES FAMILLES D'IDIOTS. 7

Ainsi donc, ces parents excentriques et peut-être consan-

guins ont donné le jour à onze enfants dont huit imbéciles à

différents degrés, inéducables, incapables de se suffire à eux-

mêmes. L'influence de l'hérédité n'éclate-t-elle pas manifes-

tement dans la déchéance de cette famille où les derniers

membres arrivés à un âge avancé, ne vivant guère que d'une vie

machinale, privés de la parole, de sentiments affectueux, sans

initiative, n'étant propres qu'à exécuter des travaux manuels qu'il

faut leur commander, mourront sans avoir été capables de se

reproduire.

Dans les observations suivantes que nous avons recueillies, le

fait de dégénérescence, sa marche sont encore plus évidents,

l'état d'hérédité morbide plus net, plus accentué et ses consé-

quences finales plus frappantes et plus terribles.

II bis. Famille WHAUP '.

M. Ireland a publié, en octobre 1881, une note intéressante

qui doit naturellement figurer dans notre travail. Il s'agit d'un

homme, du nom de John Whaup, désigné comme intelligent

et sobre, dont la femme vivait encore à l'époque où la note a

été publiée. Ils ont donné naissance à trois enfants, deux filles

et un garçon, tous plus ou moins faibles d'esprit. Ceux-ci ont

eu, à leur tour, des enfants presque tous dégénérés. Le tableau

suivant, dressé par l'auteur, nous a paru devoir être reproduit :

John WHAcr (marié).

8 DES FAMILLES D'IDIOTS

.... 111. Famille 13ONT...

Père : faible d'esprit, épileptiquc, buveur. Grand'mère paternelle

alcoolique; grand' tante paternelle imbécile. - Cousin germain

paternel, mort de convulsions.

Mère : faible d'esprit, sujette ci des alourdissements et ci des migraines,

goitreuse; grand-père maternel alcoolique; grand-oncle maternel

bègue. .

Cinq enfants : un épileptique, un faible d'esprit, ivrogne; deux

idiots épileptiques; un mort-né.

Antécédents héréditaires. (Renseignements fournis par la mère,

13 juillet 4881.) Père : ouvrier journalier, travaillait dans

les plâtrières ou dans les poteries, où il ne gagnait jamais plus

de 3 fr. par jour, car il n'avait jamais eu l'intelligence déve-

loppée : il ne savait pas lire; son caractère était doux. Il fumait

beaucoup et faisait de fréquents excès de boisson; il était souvent

ivre plus ou moins deux ou trois fois par semaine; depuis la guerre

cela ne lui arrivait plus qu'une fois par mois; il buvait surtout du

vin et de l'eau-de-vie, quelquefois de l'absinthe. On était alors

obligé de le coucher, et souvent il gâtait dans ces moments-là.

Pas d'excès vénériens; il était au contraire peu porté aux rapports

sexuels. Pendant trois mois, avant son mariage, il avait eu des

relations avec sa femme, qui avait été attirée dans la maison par

la mère du jeune homme, laquelle l'a mise en relation avec son

fils. 11 est mort en décembre 1879, à quarante-neuf ans, dans un

accès d'épilepsie. Il travaillait alors dans une fabrique de faïence :

une masse de terre est tombée sur son dos, elle n'aurait pas suffi

à l'étouffer; mais, ayant été pris d'un accès d'épilepsie, il a suc-

combé avant qu'on ait eu le temps de le secourir. Il était devenu

épileptique il l'dge de six ans, ci la suite d'une peur : son maître

d'école l'avait enfermé dans un cachot noir où les autres enfants

allaient lui faire peur. Lorsqu'il s'est marié, à vingt-huit ans, sa

femme ignorait absolument qu'il tombât du haut mal; elle ne

l'a su que quinze jours après le mariage, parce qu'il a eu deux

accès dans une nuit. Le nombre des accès variait un peu; il en

avait tantôt trois ou quatre, tantôt cinq ou six dans une nuit. Ils

venaient en général parsérip avec des intervalles de une ou deux

semaines au plus. A mesure qu'il vieillissait ils devenaient plus

fréquents. [Père, mort on ne sait de quoi, il travaillait à la terre.

- 111ère : journalière aux champs, bien portante, boit beaucoup,

souvent de l'eau-de-vic et de l'absinthe; elle s'enivre. Pas d'attaques

de nerfs. - Deux frères bien portants, l'un célibataire ; l'autre a

quatre enfants qui sont en bonne santé et n'ont jamais eu de

DES FAMILLES D'IDIOTS. 9

convulsions. Ces deux frères sont plus intelligents que le père de

nos malades. Une Soell1', bien portante, mariée, a eu dix enfants

et n'en a plus que trois; les autres sont morts tantôt de convul-

sions, tantôt de maladies ; on ne peut donner à ce sujet de rensei-

gnements précis. Une tante paternelle aurait toujours été

« imbécile »; elle parlait, mais n'était au courant de rien. Pas de

paralytiques, d'épileptiques, de suicidés, de criminels, de difformes

dans la famille.]

Mère : quarante-sept ans, taille petite; journalière, parait d'une

intelligence peu développée; cependant, elle renseigne passable-

ment. Pas d'excès de boisson. De quinze à vingt et un ans, elle

aurait eu des « faiblesses » qui revenaient plusieurs fois chaque

année. Elle avait comme un étourdissement et tombait par terre :

chaque fois que cela lui arrivait, elle rendait un ver (ascaride)

par la bouche. Depuis la puberté, ces étourdissements ne sont

pas revenus. Elle n'a été réglée qu'à vingt et un ans ; les mens-

trues, qui ne venaient que trois ou quatre fois par an, ne

devinrent régulières qu'après le mariage; elle ont cessé brusque-

ment à quarante-cinq ans, lorsqu'on lui a apporté le cadavre de

son mari et ne sont plus revenues. -- Elle est sujette à des

migraines depuis l'âge de vingt ans, c'est-à-dire six ans avant son

mariage. Elles consistent en douleurs de tête frontales vives,

accompagnées de mouches violettes, rouges, blanches, qui volent

devant les yeux, sans que ceux-ci soient douloureux; en même

temps il y a des nausées violentes et parfois des vomissements

aqueux. Ces accidents durent une journée, et sont moins fréquents

en hiver qu'en été où ils reviennent presque toutes les semaines;

ils n'ont aucun rapport avec les règles. Pas d'autres accidents ner-

veux. Cette personne, qui est originaire de la Savoie, a eu dans

sa jeunesse un goitre, gros comme le poing, situé sur la ligne

médiane du cou, et qui disparut en un mois à la suite d'un abcès

de la région sus-steruale survenu dans la convalescence d'une

pleura-pneumonie; la malade avait alors trente-huit ans. [Père,

travaillait à la terre, est mort très vieux. Il buvait du vin et de

l'eau-de-vie de marc, pas d'absinthe et s'enivrait une vingtaine de

fois par an. Il n'était pas violent, cependant il battait souvent sa

femme quand il était ivre. Mère, serait morte enflée après avoir

été longtemps malade. - Trois frères qui sont morts, deux tout

jeunes, l'autre de la poitrine, à trente-trois ans; il avait eu un

enfant qui est mort en bas âge, on ne saitde quoi.- Cinq soeul's dont

quatre sont mortes jeunes; la cinquième est morte vers quarante ans,

on ne sait de quoi; elle n'était pas mariée et n'avait pas d'enfants.

Un oncle paternel était bègue, à un degré très prononcé. Pas

d'aliénés, de goitreux, de convulsifs, etc., dans la famille.]

Pas de consanguinité....

10 DES FAMILLES D'IDIOTS.

Six enfants : d° un garçon mort à dix-huit ans, le 2 décembre

1879, à l'hôpital Tenon, d'une bronchite chronique. Il était devenu

épileptique « aux germes de ses dents», à six mois. Il n'était pas plus

intelligent que nos malades, ses frères; cependant il travaillait un

peu dans les fabriques de faïence et gagnait 50 centimes par jour.

2° Un garçon, dix-sept ans, sert les maçons, parait peu intelli-

gent ; il n'a jamais rien appris il l'école ; il a été soigné à l'hôpi-

tal des Enfants-malades, pour la gourme et la teigne ; il n'a pas

eu de convulsions et ne tombe pas; il est déjà ivrogne;

3° Notre malade Philippe ;

4° Notre autre malade Julien ;

5° Fausse couche à sept mois et demi;

6° Enfant mort-né. Ces deux derniers étaient bien conformés.

Nous allons maintenant rapporter l'histoire personnelle de

cnacun des deux enfants idiots épileptiques.

Observation I. - Idiotie; epilepsie nocturne.

Premières convulsions ci sept mois; - peur ci dix ans : premier accès

d'épilepsie. Caractère et marche des accès ; fièvre continue ci douze

ans. Description du malade; - blésité : amélioration de l'état-

intellectuel. Hydrothérapie (amélioration) ; bromure de nickel,

etc.; aggravation de l'épilepsie.

Bont... (Philippe-Désiré), ne il Bourg-la-Reine, le 13 mars 1866,

est entré le 23 mai 1 88 à Bicêtre (service de M. Bourneville).

Antécédents personnels (Renseignements fournis par la mère,

4 3 juillet 188 t). - Grossesse bonne, pas d'alcoolisme; pas de trau-

matisme, accouchement à terme, naturel. Rien de particulier à

la naissance. L'enfant, élevé au sein par sa mère jusqu'à vingt et

un mois, a marché à dix-sept mois, a été propre à deux ans, a

parlé vers un an. Premières convulsions internes ( ? ) à sept mois :

pendant la nuit on s'est aperçu qu'il avait les yeux égarés, on n'a

pas vu les convulsions. A dix ans, il eut peur d'un cheval emporté

qui courait vers lui et troisjours après, il eut son premier accès, puis

un second huit jours plus tard. Depuis lors il en a toujours eu en-

viron tous les mois; ils sont plus fréquents quand il a des contrariétés.

On n'en a jamais noté plus de deux en vingt-quatre heures; ils sont

plus souvent nocturnes que diurnes. Le plus long intervalle entre

deux accès serait de trois à quatre semaines. Les accès seraient

précédés d'une aura. L'enfant les sent venir et dit : « Maman, cela

me prend » ; il disait aussi qu'il avait les membres engourdis, tan-

tôt les bras, tantôt les jambes. Il n'a jamais eu d'accès aussi forts

que son frère Julien. Il ne pousse pas de cri : rigidité générale,

DES FAMILLES D IDIOTS.

H

égale des deux côtés, pas de secousses, de stertor, d'écume, ni de

morsure de la langue. (Le père et le frère aîné se mordaient la

langue, ronflaient et écumaient.) Il s'endort quelquefois après les

accès ou reste hébété; pas d'hallucinations. Aucun traitement.

Comme maladies antérieures, l'enfant n'a eu qu'une fièvre mu-

queuse qui a duré un mois et pour laquelle il a été soigné aux En-

fants-malades : il avait alors douze ans. -Pas de signes de scrofule :

quelques glandes seulement au cou, non abcédées. Sommeil

bon, sans peurs; pas d'onanisme.

A l'école, il n'a presque rien appris : il se sauvait de l'école et

allait jouer dans le pays ou se cachait : depuis deux ans, il n'y

allait plus que le matin et travaillait le reste de la journée dans

des fabriques de faïence où il gagnait 0,40 par jour. Il était peu

obéissant, n'était pas gourmand; il mangeait salement « comme

défunt son père »; il s'habillait et se lavait seul, mais mal et il

fallait l'aider. Il est assez peureux.

12 2 DES FAMILLES D'IDIOTS.

1884. 7 mai, - Etat actuel. Tète de grosseur moyenne, ronde,

régulière ; les bosses frontales sont saillantes, les bosses parié-

tales très accentuées semblent égales; au-dessous d'elles, il existe

une dépression qui est plus marquée à droite, méplat peu pro-

noncé à l'angle supérieur de l'occipital qui est saillant. L'occi-

pital est aplati, les deux bosses occipitales saillantes, surtout la

droite.

Circonférence au niveau de l'attache des oreilles, 0, 5;i; de la

racine du nez à la protubérance occipitale externe, 0,34 ; d'une

oreille à l'autre, 0,31 ; diamètre antéro-postérieur (compas Budin),

47,5; diamètre bi-pariétal, 14,7; diamètre bi-temporal, 13. Face :

ovale, régulière et symétrique. Front assez élevé, étroit : pas de

dépressions latérales. - Arcades sourcilicnes : peu prononcées.

Nez moyen, un peu déprimé il sa racine. - Yeux petits; iris gris-

bleu ; pupilles égales et contractiles. - Strabisme convergent sur-

tout du côté droit. - Douche moyenne, lèvres normales, voûte

palatine peu profonde, assez large, pharynx régulier et symétrique.

Maxillaire supérieur régulier et symétrique; quatorze dents

permanentes saines, mais un peu écourtées : il en est de même du

maxillaire inférieur; les gencives sont saines, l'articulation des

mâchoires normale; menton rond ; oreilles grandes, bien ourlées,

écartées de la tête, lobule détaché.

Le cou ne présente rien de particulier : la colonne vertébrale est

rectiligne. Sur le thorax, bien conformé d'ailleurs, on ne note

qu'une saillie exagérée des clavicules a leur tiers interne. Les ancm-

6;'M, supérieurs et inférieurs, bien conformés, bien musclés, m;

présentent pas de traces de rachitisme ; les doigts sont longs,

les ongles normaux, la voûte plantaire bien accentuée; la colora-

tion des extrémités est normale. Les appareils respiratoire et

circulatoire sont absolument intacts; ['appareil digestif fonctionne

régulièrement, le foie et la rate sont normaux; l'abdomen, souple,

ne présente pas de saillie exagérée.

Organes génitaux : verge assez volumineuse, pas de phimosis,

méat normal, testicules bien développés.

Peau : cheveux, cils, sourcils châtains, abondants; poils assez

abondants sous les aisselles et au pubis, plus rares sur les jambes,

les cuisses, et les bras; léger duvet à la lèvre supérieure. Deux

cicatrices de vaccin sur le bras droit, trois sur le bras gauche; de

ce côté, cicatrice de vésicatoire à la partie moyenne et externe du

bras.

La sensibilité générale est normale : la sensibilité spéciale intacte :

cependant l'enfant ne lit que de très près les petits caractères :

blésité assez accentuée. ])ynmnomèt/'c : ;>'1. r..IO : j; M, I). 110.

L'état intellectuel de cet enfant s'est considérablement amélioré

depuis son entrée. A ce moment, il ne savait lire que les lettres,

DES FAMILLES D'IDIOTS. 13

n'écrivait que mal et en gros caractères, ne savait pas un mot

d'orthographe, ne connaissait, en fait d'arithmétique, que l'addi-

tion de petits nombres : il ne connaissait bien que les choses

usuelles. Caractère tranquille, mais aussi indolent que possible.

Actuellement, il a fait de grands progrès en lecture et syllabe

assez bien; il écrit en caractères moyens, mais l'orthographe est

encore défectueuse, il sait les trois premières opérations d'arith-

métique. '

La mémoire est toujours faible, la compréhension lente; les pro-

grès ont été aussi marqués pour les exercices physiques et cet

enfant sait actuellement un peu d'escrime, de danse et de gymnas-

tique. En somme, il s'est beaucoup amélioré, il est moins grossier,

plus docile et plus courageux au travail. Il n'est pas méchant,

n'a pas de mauvais instincts. On l'a surpris parfois se masturbant

en cachette; pas de gâtisme. Les sentiments affectifs sont peu

développés; cependant il accueille assez bien ses parents et surtout

lorsqu'ils le font sortir.

1885. La publication de ce travail ayant été retardée, nous

ajouterons quelques nouveaux détails. En février, B... a essayé

de se sauver, entraîné par l'enfant Rouz. Il a été envoyé à l'ate-

lier de serrurerie en janvier 1884; ses progrès sont très lents. Il

a été soumis depuis l'entrée à divers traitements : hydrothérapie

(1881, 1882, 1883 ) : c'est durant cette période qu'il a eu le moins

d'accès; bromure de nickel (mars-août 1884); enfin à l'élixir poly-

/'1'omlwé (janvier 1885); ces deux médicaments n'ont amené aucune

amélioration ainsi que cela ressort du tableau et aussi de ce fait

que du Ier janvier au 31 juillet 1885, B... a eu 80 accès toujours

nocturnes. Les signes de la puberté se sont accentués, les

moustaches se dessinent bien; les poils sont assez nombreux au

menton et à la partie supérieure et externe des joues. - Les poils

sont plus abondants au pénil. La verge mesure 9 cent. 5 de

longueur et 5 de circonférence; le gland, en partie découvert, est

découvrablc, le méat normal, les bourses sont pendantes, plus à

gauche qu'à droite; les testicules sont égaux, de la dimension

d'un oeuf de pigeon.

' Observation 11. Imbécillité ; epilepsie.

Premier accès ci six mois. Marche des accès. Description du

malade, blésité. Progrès réalisés sous l'influence du traitement ;

école, gymnastique, travail professionnel, hydrothérapie, etc.

Boni... (Désiré-Xavier), dit Julien, né à Bourg-la-Reine, le 5

14 DES FAMILLES n'IDIOTS.

avril 1868, entré le 23 mai 1881 à Bicêtre. (Service de M. BOUR-

NCVILLE.)

Antécédents personnels. (Renseignements fournis par la mère,

juillet 4881). Grossesse bonne; cependant la mère aurait en des

émotions fréquentes, par suite de scènes que sa belle-mère venait

lui faire, étant ivre, montant la tête au mari auquel elle reprochait

de nourrir des bâtards. Cependant la mère assure que cet enfant,

comme les autres, est bien du père légal : pas d'alcoolisme. Accou-

chement à terme, naturel. Rien de particulier à la naissance de

l'enfant. Elevé au sein par sa mère jusqu'à dix-huit mois, il a

marché à vingt mois, a commencé à dire quelques mots à un an,

a été propre à dix-huit mois. Jamais de convulsions. A six mois

« au germe de ses dents n, premier accès; deuxième accès à

deux ans; troisième accès vers trois ans, attribué à une peur causée

par un obus pendant la Commune. A partir de ce moment, les

accès revinrent tous les deux ou trois jours et sont toujours allés

en augmentant. Ils sont diurnes et nocturnes, leur maximum n'a

jamais dépassé quatre en vingt-quatre heures ; le plus long inter-

valle entre deux accès était de huit à dix jours.

Pas d'aura. Bont... pousse un cri et tombe raide, également des

deux côtés, quelques secousses; pas de ronflement, pas d'écume;

miction involontaire. Il s'endort quelquefois après les accès et est

toujours très hébété. Pas d'hallucinations ni de délire. Aucun

traitement.

Pas de maladies antérieures, sauf une diarrhée sanguinolente à

l'âge de trois ans, pour laquelle il fut soigné aux Enfants-malades.

- Croûtes dans les cheveux, adénites cervicales non suppurées,

ophthalmies pendant deux ou trois mois.

Le sommeil est bon, sans cauchemars; il est moins peureux que

son frère; cependant, quand les accès le prennent, il veut qu'on

reste auprès de lui et qu'il y ait de la lumière parce qu'il a

peur.

Le caractère est assez doux et affectueux, il est bon pour les

animaux, quelquefois il est méchant avec les autres enfants; il

n'est pas voleur ni malfaisant, un peu gourmand sans salacilé ; il

mange salement, ne s'habille pas tout à fait seul; pas d'ona-

nisme. A l'école il appienait mieux que son frère, bien que quel-

quefois il se laissât entraîner par celui-ci à faire l'école buisson-

nière.

DES FAMILLES D'IDIOTS.

15

16 DES FAMILLES D'IDIOTS.

déprimé à sa racine. Oreilles grandes, bien ourlées, très écartées

de la tête, lobule aux trois quarts distinct. Bouche grande, lèvres

épaisses surtout l'inférieure, voûte palatine un peu profonde,

régulière, pharynx normal. Les maxillaires sont réguliers et

symétriques; vingt-huit dents saines, un peu écartées les unes

des autres, léger 1J1'(J ! ]lwtisme inférieur, les incisives s'articulent

bout à bout, en obliquant en avant : gencives saines. - Menton

rond.

Cou régulier, un petit ganglion au niveau du sterno-mastoïdien

gauche. Thorax : la colonne vertébrale présente une double

concavité, la supérieure dorsale tournée à gauche et l'inférieure

lombaire tournée à droite. - Les membres supérieurs et inférieurs

sont bien développés, bien musclés, ne présentent aucune trace

de rachitisme; les doigts sont longs, les ongles normaux,. la voûte

plantaire est bien concave.

Les appareils respiratoire et circulatoire ne présentent aucune

lésion ; Y appareil digestif fonctionne bien, l'abdomen n'est pas

saillant, le foie et la rate sont normaux.

Organes génitaux : verge assez volumineuse, pas de phimosis

méat normal, testicules assez développés; pas d'onanisme signalé.

Peau : cheveux, sourcils et cils châtain-clair assez abondants ;

quelques poils au pubis; visage glabre, pas de poil sous les aisselles

ni sur les membres; une cicatrice de vaccin à l'extrémité infé-

rieure du deltoïde droit, deux à gauche; sur la partie médiane

et extrême du bras de ce côté cicatrice de vésicatoire. Au niveau

des fausses côtes et de chaque côté on trouve une petite tumeur

papillomateuse de la grosseur d'un noyau de cerise; tache pigmen-

taire de la largeur d'une lentille au niveau des premières vertèbres

dorsales.

La sensibilité générale est normale; les sens spéciaux sont

intacts : l'odorat seul paraît un peu obtus. - Blésité très légère.

Dynamomètre. M.-D : 78. Ai.-G : 6cJ.

Les progrès que cet enfant a réalisés depuis son entrée sont en-

core plus marqués que ceux qu'a faits son frère, qui est d'ail-

leurs beaucoup moins éducable. Au moment de son admission,

il ne savait guère lire que les lettres et syllabait avec peine

en bégayant beaucoup; il écrivait un peu, niais très mal et ne pou-

vait lire son écriture ; il était à peu près nul en calcul, et ne sa-

vait rien en orthographe, il connaissait peu les choses usuelles.

Aujourd'hui, il lit couramment et blèse à peine; il fait les quatre

opérations d'arithmétique, il écrit d'une façon très lisible, sait un

peu d'orthographe; il ne reste guère en arrière que pour les exer-

cices physiques et les travaux manuels, il connaît tous les objets

usuels. Sa mémoire est bonne, il comprend assez bien les explica-

tions qu'on lui donne : il travaille bien et se montre docile et assez

DES FAMILLES D'IDIOTS.

17

travailleur. Il n'a pas de mauvais instincts; mais il est parfois

violent et se bat souvent avec ses camarades : il n'est pas gâteux.

Les sentiments affectifs sont peu développés : s'il aime bien à voir

ses parents, c'est surtout parce qu'ils lui apportent des friandises

ou qu'ils l'emmènent à la promenade.

1885. Juillet. L'enfant travaille à l'atelier de cordonnerie depuis

le 13 novembre 1883; il a fait quelques progrès. - L'épilepsie

paraît s'aggraver, comme l'indique le tableau des accès et aussi

le relevé desseptpremiers mois (34 accès), malgré les traitements

auxquels le malade a été soumis (hydrothérapie, bromure de nickel,

ëM'po& ? 'ot7n<<'<'). Les signes de la puberté ne se sont pas accu-

sés au visage, mais les organes génitaux se sont développés. Les

poils, noirs, sont assez abondantsaupénil et à laracine des bourses

qui sont pendantes, plus à gauche qu'à droite. - Verge volumi-

neuse (10 cent. de long et 9 cent. 5 de circonférence); gland eu Il

partie découvert, découvrable.; méat normal. Parfois onanisme.

Le tableau ci-contre met en relief les points particuliers de

ces observations se rapportant au sujet qui nous occupe

actuellement : .

.18 DES FAMILLES D'IDIOTS.

de l'hérédité se fait déjà sentir dans la famille du père qui voit

plusieurs de ses neveux mourir de convulsions en bas âge et

qui lui-même, faible d'esprit, ivrogne, succombe aux atteintes

du mal comitial.

D'un autre côté le grand-père maternel de nos malades était

ivrogne, un de ses frères bègue ; cette dernière affection, de

même que le strabisme, si légère qu'elle puisse paraître au

premier abord, est la trace d'un état névropathique déjà pro-

fond. Dans un récent mémoire (Arch. Netc·olog ? janvier138a), 1

M. Féré, « considérant les associations convulsives qui accompa-

gnent souvent le bégaiement et qui s'exagèrent encore sous

l'influence de l'émotivité si commune chez les bègues, pense

qu'elles montrent qu'il ne s'agit pas là d'une anomalie de

développement localisée et accidentelle, mais d'un état névro-

pathique qui a des racines profondes dans la constitution et

qui mériterait d'être classéparmi les névroses. On le rencontre

d'ailleurs souvent, ajoute-t-il, à des degrés variables chez

les sujets atteints d'affections nerveuses ou dans leurs fa-

milles ». L'observation II est un exemple de ce fait, aussi la

mère de nos malades porte-t-elle les traces de cette tare héré-

ditaire : faible d'esprit, migraineuse et goitreuse, elle voit aussi

sept de ses frères et soeurs mourir jeunes, l'un de tuberculose.

Avec de pareils antécédents, sous l'influence de cette héré-

dité double accumulée sur leurs tètes depuis deux générations,

quoi d'étonnant à ce que nous trouvions chez les enfants ces

signes de déchéance que nous avons rapportés en détail pour

deux d'entre eux, et qui, lorsqu'ils ne meurent pas jeunes, en

font des épileptiques, des ivrognes, des imbéciles à différents

degrés.

Pour terminer ce travail, nous avons encore à parler de

deux familles ayant produit plusieurs enfants idiots ou

imbéciles.

IV. Famille Horn...

Père alcoolique ( ? ) - 4lène débauchée, enfant naturelle ( ? ), Grand' -

mère paternelle irritable, débauchée ( ? ), voleuse, Un frère et une

suceur imbéciles; deux frères idiots; deux frères et une S6BM ? ' morts

de convulsions en bas âge.

Antécédents héréditaires. (Renseignements fournis parla grand'-

mère maternelle, le père et la mère). - trente-sept ans, assez

DES FAMILLES D'IDIOTS. 19

grand, atteint depuis quatre ans d'une bronchite chronique; carac-

tère doux; n'est pas du tout nerveux; n'a jamais fait d'excès de bois-

son, au dire de sa femme, tandis que sa belle-mère prétend qu'il

buvait beaucoup d'absinthe, s'enivrait souvent et ne commençait

quelquefois sa semaine que le mercredi. Il était d'ailleurs bon

ouvrier et vivait tranquillement avec sa femme. Pas d'autres

maladies que sa bronchite'. [Père, cantinier, mort à soixante-

dix-sept ans d'un asthme, n'avait jamais eu de maladies ner-

veuses, n'a fait d'excès d'aucune sorte. Mère, ménagère, n'a

jamais été nerveuse, est morte d'un mal de jambe. - -Deux frères,

qui étaient bien portants et ont eu des enfants bien portants,

sont morls, l'un du choléra en 1866, l'autre tué en 1871 2. Deux

soeurs, dont l'une est morte en couches; leurs enfants sont bien

portants. Il n'y a dans la famille ni épileptiques, ni aliénés, ni

difformes, ni suicidés, ni criminels.]

Mère, trente-sept ans, blanchisseuse, intelligente, est sujette

depuis son enfance à des douleurs de tète qui reviennent une quin-

zaine de fois par an. Elle est très vive, mais n'a pas d'attaques de

nerfs; elle n'a jamais fait d'excès de boisson. (Sa mère raconte

que sa fille, à partir de quatorze ans, s'est livrée aux hommes et

à la débauche, tandis que la fille accuse sa mère de l'avoir prosti-

tuée à l'âge de quatorze ans et demi ; elle cite même le nom de

l'homme qui l'a possédée par suite de ce marché qui a valu à sa

mère deux ans de prison. Celle-ci ne nie pas les deux ans de

prison, mais prétend avoir été faussement dénoncée et injuste-

ment condamnée). Quoi qu'il en soit, elle a eu, avant son mariage,

à l'âge de vingt ans, un enfant actuellement à Bicêtre, qu'elle

nomma Desob..., du nom de l'amant avec lequel elle aurait vécu

quatre ans. Puis, l'année suivante, elle est accouchée à l'Hôtel-

Dieu d'un enfant du même père et qui est mort-né. Ensuite elle

a eu , d'un autre, un 3e enfant dont elle est accouchée à l'hôpital

Saint-Antoine, et qui est morte à trois mois. Après cette troisième

couche, elle a mené une vie plus régulière et a connu son mari,

avec lequel elle s'est mariée deux jours avant d'accoucher de

Horn... Constant. On pense que depuis son mariage elle est restée

tranquille, mais, depuis la mort du mari (déc. 1881), elle fréquen-

terait, au dire de sa mère, de malhonnêtes gens (hommes et

femmes), ce qui aurait amené une brouille entre elles3. [Père, do-

1 11 est mort en 1884 de sa bronchite tuberculeuse.

Il Il parait que, étant enfant, il était arriére; un jour, il est parti de

chez ses parents, et on ne l'a retrouvé qu'au bout de quinze jours; il n'a

jamais pu apprendre de métier; il ne bégayait pas, mais parlait très vite,

et parfois on avait de la peine iL le comprendre.

3 La tenue de cette femme est celle d'une ouvrière soigneuse et propre.

On pense qu'elle a encore un amant (septembre 1885).

20 DES FAMILLES D'IDIOTS.

- mostiquc, mort à vingt-sept ans de la variole, six mois avant la

-naissance de sa fille qui est une enfant naturelle. - Mère, bien

portante, sans accidents nerveux, change souvent de profession.

Elle assure n'avoir eu qu'une enfant (la mère de nos malades), et

n'avoir pas connu d'autre homme que le père de sa fille : cette

dernière l'accuse au contraire d'avoir eu plusieurs amants et de

l'avoir prostituée elle-même, comme nous l'avons vu plus haut.

Elle dit que sa mère, outre les deux ans de prison que ce fait lui

valut, a encore été condamnée une fois pour vol; elle assure aussi

qu'elle buvait et boit encore. Depuis l'entrée des enfants à Bicêtre,

la grand'mére est souvent venue les voir; sa tenue est convenable;

on n'a pas constaté d'indice d'ivrognerie. - Pas de névropathes

dans la famille, etc.]

Pas de consanguinité, ni avec Des..., ni avec Horn...

Depuis son mariage, Mme Horn... a eu sept enfants, ce qui fait

en somme dix enfants : 4° un garçon, Des... (OBs. V);-2° fausse

couche de sept mois ; 3° fille morte à sept mois de convulsions ;

4° Horni... Constant (Obs. VI); - 5° un garçon mort de

convulsions à treize mois; 6° fausse couche de trois mois ;

7° Horn... Stéphane (Ons. VU); - 8° une fille âgée de douze ans

en 1884, bien portante, d'un caractère doux mais peu intelligente,

et qui a eu des convulsions à cinq ou six mois, à plusieurs reprises';

9° une fille, neuf ans en 18Si, bien portante, un peu chétive,

est gentille, avenante et intelligente; elle n'a jamais eu de con-

vulsions ; 10° un garçon, mort à cinq mois, d'une méningite,

avec des convulsions.

. Observation V. Imbécillité ; perversion DES INSTINCTS.

Antécédents personnels. - Arrêt de développement ; premières con-

vulsions dans la première année; secondes convulsions vers deux

ans. Marche ci deux uns et demi; parole à trois ans. -Mauvais

instincts. Accès de colère. Premier 'placement il Bicêtre, en

18ïO; transfert ci l'asile de Saint-Albccn, en août 1870. Place-

ment ci la colonie de Yaucluse, en 1 877 ; transfert ci Bicêtre en 4 881.

- Incontinence nocturne d'urine. Traitement; école, gymnas-

tique : amélioration considérable.

Desob... (EugèÍ1e- Viclor), né à Paris, le 4 septembre d 865, est

entre à Bicêtre le 21 septembre S81 (service de M. UOLJRNEVILLE).

Cet enfant est entré une première fois le 12 juin 1870; il a été

' Elle est depuis deux ans à l'hôpital de Forges-les-Bains pour une

tumeur blanche du genou droit.

DES FAMILLES D'IDIOTS. 21

transféré le 31 août à l'asile de Saint-Alban, puis à Vauclusé, .le

23 juillet 1877 ; il a été envoyé de la colonie de Vaucluse à Bicêtre, > «

le 20 septembre 1881, parce qu'il est atteint d'incontinence noc-

turne d'urine. Les notes prises sur lui pendant son premier séjour

ne donnent que des renseignements très incomplets.

Antécédents personnels. (Renseignements fournis par la mère de

l'enfant, 27 février 1882.) - Le père de Desob... se portait bien

jusqu'au mariage de sa maîtresse avec Hornick; il n'avait pas

d'accidents nerveux, ne buvait pas; il était intelligent, d'un carac-

tère calme. [Pas de névropathes dans sa famille.] "'" : -

Grossesse bonne, sans accidents, pas d'alcoolisme, etc.1. - accot-

chement à terme, naturel, sans chloroforme. Pas d'asphyxie à la

naissance. L'enfant a été élevé en nourrice, au sein jusqu'à un

an, puis ramené à Paris et placé en garde; il n'a marché qu'à

deux ans et demi, et n'a guère parlé distinctement qu'à l'âge de

trois ans. A cette époque, on l'a repris et on s'est aperçu qu'il

avait des habitudes d'onanisme. Son père nourricier avait déjà

signalé ce fait : il a continué à se toucher; quand on lui avai t

attaché les mains, il « travaillait de son corps » et on avait déses-

péré de pouvoir l'en empêcher. Amaigrissement progressif.

Pendant le temps qu'il a passé chez ses parents, il mangeait

beaucoup, dormait mal et criait parfois la nuit; il a eu presque

continuellement la diarrhée, mais jamais de vomissements. Il

était jaloux des autres enfants, et passait ses journées seul, sans

jouer, soit assis, soit marchant dans la chambre. Il était méchant,

voulait tuer les serins de sa mère, son frère Horni.. ; il faisait des

niches aux locataires. Un jour, il inonda la maison en ouvrant un

robinet d'eau au sixième étage. Un médecin qui l'a examiné alors

a déclaré qu'il tournait à « l'idiotisme ». Il était sujet à des accès

de colère, surtout quand on le contrariait.

Il aurait eu, pour la première fois, en nourrice, des convulsions

très fortes; puis une seconde fois, de un à trois ans, lorsqu'il était

en garde. - Croûtes dans les cheveux à un an; pas de glandes, de

dartres, d'ophthalmies, ni d'otites... ?

, - ?

.u....... 1.-( t

1881. Septembre. Poids : 30 kil. 30. Taille : 1 rn.,34. ? \fi ? r.

1882. Juin. Poids : 33 kil. 30. Taille : 1 m. 38. , |

1883. Juin. Poids : 36 kil. Taille : 1 m. 42. ?

1884. Janvier. Poids : 40 kil. 10. Taille : 1 m. 46... ? ., .

- Juin. Poids : 41 kil. HO. Taille : 1 m.50. "t ? z £

1885. Janvier. Poids : 46 kil. 50. Taille : 1 m. 52. '

- Juin..Poids : 45 kil. 70. Taille : 1 kil. 52. '11.1;'1;-[[

1 Rieli de particulier lors de la conception.

22 DES FAMILLES D'IDIOTS.

z. 14 mai. Etat actuel. Tête ronde, assez volumineuse et régu-

lière.

DES FAMILLES D'IDIOTS. 23

musclés, présentent une très légère concavité de la face interne

des tibias; la voûte plantaire est peu accentuée, les doigts longs

et normaux. La coloration des extrémités des quatre membres

n'a rien de particulier.

Organes génitaux : verge assez développée, pas de phimosis,

méat normal, testicules normaux. Rien à l'anus.

Les appareils respiratoire et circulatoire sont intacts; les diges-

tions sont régulières, les selles normales; pas de vomissements,

de mérycisme, ni de gâtisme. La sensibilité générale et spéciale

est conservée.

Peau : cheveux, cils, sourcils bruns, abondants ; léger duvet à

la lèvre supérieure; poils abondants au pubis, plus rares aux

aisselles et aux jambes. Sur le masséter gauche, on trouve une

cicatrice de six centimètres de long, oblique de haut en bas et

d'arrière en avant, due à une chute sur un couteau; une cicatrice

de vaccin sur chaque deltoïde; cicatrice gaufrée, au niveau de

l'ombilic, du côté gauche; tache pigmentaire au-dessus du condyle

interne du fémur gauche; pas de ganglions.

Dynamomètre illcctlticzc : M. D = 70,5 M. G. 70.

Actuellement, cet enfant n'est pas méchant, ni taquin; il est

docile, doux pour ses camarades, pour les animaux; il n'a pas de

mauvais instincts, n'est ni voleur ni salace; il est toujours assez

coléreux; il ne montre pas beaucoup d'affection pour ses frères,

ni pour sa grand'mère; mais il aime beaucoup sa mère et est très

heureux de la voir; il refuse de voir sa grand'mère, parce que

« cette grande bique ne cherche qu'à faire du mal à sa mère o. Il

n'aurait plus, parait-il, d'habitudes d'onanisme régulières; cepen-

dant on l'a encore surpris quelquefois se masturbant.

L'étcatiatellccG2tcl de Desob... s'est aussi considérablement modifié

depuis son entrée; à ce moment (septembre 1881), il savait à peine

lire, n'écrivait qu'un peu, faisait un peu de calcul, n'avait aucune

notion d'histoire de géographie. Dès le mois de janvier 1882, on

constata chez lui des aptitudes assez grandes et des progrès, dejà

sensibles, qui n'ont fait que s'accentuer depuis. Aujourd'hui (1884),

il sait lire et d'une façon assez expressive, il écrit assez bien, fait

des problèmes sur les quatre opérations, sait un peu d'histoire et

de géographie; la mémoire est demeurée un peu paresseuse; il

comprend bien toutes les explications qu'on lui donne. Mêmes pro-

grès pour les exercices physiques : gymnastique, danse et escrime,

et pour les travaux manuels. Cet enfant est actuellement un des

meilleurs apprentis de l'atelier de menuiserie. En somme, il se tient

bien, est docile, actif, apporte au travail toute la bonne volonté

possible, et fait en tout des progrès considérables.

1885. - La puberté s'est accusée : fine .moustache, rien aux

joues ni au menton. Poils noirs, abondants au pénil. Verge grosse

2'ï DES FAMILLES D'IDIOTS.

et longue. Testicules de la grosseur d'un oeuf de pigeon. Il avoue

se masturber encore quelquefois.

L'incontinence d'urine a diminué, mais n'a pas complètement

disparu. On l'a notée : 23 fois en 4882, 22 en 1883, 35 en 1884 et

6 fois du Ier janvier au 30-septembre 1885.

Au dynamomètre, la main droite est un peu plus forte que la

gauche.

L'amélioration a continué sous tous les rapports. Desob... est

capable de gagner sa vie comme menuisier et l'on s'occupe de le

placer.

' " ' " ! ) ? ['.I.

Observation VI. IDIOTIE complète. "'

Athrepsie de la première enfance; premières convulsions à huit mois;

secondes convulsions à neuf mois, etc. ; marche à sept ans et demi;

bave, succion, parole nulle, gâtisme, etc.. Syphilis : roséole,

plaques muqueuses anales, adénites. Etat du malade en ')884.

Horni.. (Constant-Jean-Emmanuel) est entré le 20 septembre

1880, à l'âge de douze ans, à l'hospice de Bicêtre (service de

M. BOURNEVILLE.)'

Antécédents personnels. (Renseignements fournis par sa mère,

12 janvier f 8$I ). - Pendant la grossesse 1, la mère a eu des contra-

riétés nombreuses par suite de disputes avec sa mère à cause de

son mariage, qui ne s'est fait que deux jours avant l'accouche-

ment. L'accouchement, naturel, aurait eu lieu à terme; cependant

le nouveau-né n'avait d'ongles ni aux pieds, ni aux mains. Il a été

élevé au biberon jusqu'à trois mois, il était bien portant; puis il

a été mis en nourrice pour être élevé au sein; cinq semaines

plus tard, il était « en étisie ». Sa mère l'a repris alors et l'a

élevé au biberon.

Depuis quatre mois et demi jusqu'à huit mois, l'enfant vomis-

sait presque tout ce qu'il prenait (lait de chèvre, de vache...); sa

mère a fini par lui faire conserver ses aliments en lui donnant

du biscuit qu'elle mâchait d'abord elle-même. A huit mois, il a

eu une première fois des convulsions qui ont duré une heure, et t

portaient également sur la face et les quatre membres. Un mois

plus tard, il a eu une seconde attaque de convulsions pendant

dix minutes. Il a encore eu des convulsions à deux autres reprises :

en tout, elles ont duré jusqu'à un an, les deux dernières crises ont

été les plus courtes.

A vingt mois, il n'avait pas une dent; à vingt-deux mois, il les

avait toutes. A dix-neuf mois, il disait : « papa, maman », et n'a

1 Bien portants tous deux à l'époque de la conception.

DES FAMILLES D'IDIOTS. 25

jamais dit autre chose; il n'a marché qu'à sept ans et demi. C'est

vers deux ans qu'on s'est rendu compte qu'il « n'était pas comme

les autres enfants o. Il n'a jamais su s'habiller, ni manger; il boit

seul, n'est pas salace : il a toujours gâté; cependant, à la fin de

son séjour chez ses parents, il s'accroupissait pour faire ses besoins.

Il n'est pas gourmand; il vole par moments surtout les objets

massifs, il est colère. Il est gai, joueur, n'a pas d'autres tics que

de têter toujours son doigt. Il est assez affectueux, en particulier

pour sa mère, qu'il ne veut jamais quitter et avec laquelle il est

très expansif. Il n'aime pas entendre crier les autres enfants :

avant son entrée, il n'avait jamais pleuré, maintenant cela lui

arrive quelquefois. Il ne parle pas. Croûtes dans les cheveux; pas

d'otites, ni de dartres, ni d'ophthalmie; varioloïde en 1870. Depuis

qu'il a été en nourrice, il a toujours eu une « faiblesse de la

colonne vertébrale », et s'est tenu incliné en avant.

14 juin. Rougeole légère n'ayant rien présenté de particulier

dans son évolution. "

31 juillet. Poids, 24 kil. 600; taille, I m,3.

1882. Janvier. Poids, 25 kil. 500 ; taille, 1m,26.

% juin. L'enfant est un peu moins gâteux qu'autrefois, il ne

mange plus d'ordures; il commence à se servir de la cuillère. Il

continue à sucer ses doigts et bave sans cesse, la bouche toujours

entr'ouverte. Il ne dit encore que « papa, maman», il ne sait ni

s'habiller, ni se laver. Il est assez obéissant.

6 octobre. Hier, on s'est aperçu que l'enfant présentait une

éruption. Elle est disséminée et presque confluente sur l'abdomen,

moins abondante dans le dos, presque nulle aux bras, aux jambes

et au cou; la face est intacte; pas de croûtes dans les cheveux. Les

taches ont une couleur cuivrée très nette. Rien aux lèvres, dans

la bouche, ni dans le pharynx. A l'anus, on trouve deux plaques

exulcérées à gauche et en bas, une en haut et à droite, une au

haut du sillon interfessier. Rien à la verge : ganglions inguinaux

très développés des deux côtés (syphilis).

7 octobre. L'éruption est plus confluente qu'hier et a remonté

sur le cou; la gorge est un peu rouge. Vin de quinquina, sirop

d'iodure de fer; bains.

- 10 octobre. Persistance de l'éruption, les plaques muqueuses de

l'anus se sont un peu élargies; rougeur des muqueuses gingivale

et buccale.

26 octobre. La roséole commence à s'éteindre; c'est principale-

ment sur le ventre et à la partie postérieure des cuisses, à la région

lombaire que l'éruption a été confluente. Adénites nombreuses,

cervicales, sous-maxillaires, axillaires et inguinales; rien dans la

gorge, plaques muqueuses anales. ,

2fi / / DES rAIIIILLES D'IDIOTS.

26 / DES FAMILLES D'IDIOTS.

15 novembre. Persistance de larges plaques de roséole qui tendent

à s'effacer : plaques muqueuses anales; on ne sent plus les adénites

cervicales droites.

9 décembre. Adénites persistantes, rien dans la bouche, ni au

cuir chevelu. Le traitement n'a consisté, jusqu'ici, qu'en toniques.

1883. 2 janvier. Les taches, en voie de disparition, laissent après

elles une teinte cuivrée : persistance des adénites, pas d'alopécie.

45 janvier. Plaque muqueuse près de la commissure labiale

gauche. Embarras gastrique fébrile.

31 janvier. Adénites cervicales multiples peu volumineuses;

quelques adénites dans l'aisselle droite et dans les deux aines. La

roséole a presque disparu sur le dos; il n'y a plus rien sur le resle

du corps; rien à la tête, à la bouche, à la gorge, ni à l'anus.

Poids, 24 kil. 800; taille, im,2S.

23 avril. Il y a encore quelques taches sur les reins; rares adé-

nites cervicales, et dans l'aine droite; rien dans les aisselles, rien

dans la bouche; pas d'alopécie.

13 juin. Les taches sont complètement effacées; il ne reste plus

que quelques ganglions dans les aînés.

30 juin. Poids, 28 kil. 9; taille, lm,30.

1884. 4 janvier. Rien à la peau si ce n'est de l'érythème chro-

nique des fesses et des cuisses dû au gâtisme; la partie inférieure

du sacrum est très saillante. Plus de glandes au cou, aux aisselles,

ni aux aines; pas d'apolécie, ni de croûtes dans les cheveux. Rien

aux lèvres, à la bouche, ni à la gorge; rien à la verge, qui est

petite et allongée. Le prépuce long permet cependant de décou-

vrir le gland qui est intact; le méat est un peu rouge, normal; on

ne sent que le testicule droit dans l'anneau, le gauche n'est pas

descendu. Le traitement suivi a été simplement tonique : extrait

et vin de quinquina, sirop d'iodure de fer, hydrothérapie.

31 janvier. Poids : 26 kil. 20; taille : 1m,30.

14 mai. Etat actuel. Tête moyenne; léger degré d'acrocéphalie et

de pltgiocéphalic combinées. En effet, le crâne est allongé dans le

sens vertical, mais il n'est pas ohlique et ne se termine pas ahso-

lument en pointe. En même temps, on constate un chevauchement

de ses deux moitiés l'une sur l'autre, de telle sorte que foule la

moitié droite paraît portée en avant ; celle moitié est aussi plus

développée que la gauche, par suite de la présence des voussures

de compensation. Les sutures des os crâniens ne sont pas saillantes.

Les bosses frontales sont assez marquées, surtout la droite qui, en

même temps, est sur un plan antérieur il la gaucho; la bosse

pariétale droite est très volumineuse, tandis que la gauche est à

peine indiquée. L'occipital est plat suivant un plan vertical, la

DES FAMILLES D'IDIOTS. 27

moitié droite en retrait sur la gauche; les deux bosses occipitales

sont peu saillantes, égales, mais ne sont pas sur le même plan.

28 DES FAMILLES D'IDIOTS.

Peau : cheveux, cils, sourcils châtains, abondants ; pas de poils

aux aisselles, au pubis ni sur les membres : trois cicalrices de

vaccin sur chaque bras; une tache pigmentaire au niveau du

bord inférieur du grand pectoral droit; petite tumeur papillo-

mateuse un peu au-dessous de l'ombilic et du côté gauche.

On trouve encore quelques taches jaunâtres, derniers vestiges de

l'éruption syphilitique sur le tibia droit et sur la face antérieure

des deux bras; il n'y a rien dans la gorge, ni à l'anus; pas d'alo-

pécie : quelques ganglions seulement dans les deux aines de l'ais-

selle droite.

Au point de vue intellectuel, cet enfant est un type d'idiotie

complète, et ne semble aucunement susceptible d'être amélioré. Il

n'a aucune notion du monde extérieur; il ne parle pas du tout,

ne pousse que de petits cris ltett ! heu ! Son regard est vague, et

son attention ne peut se fixer sur aucun objet. Il n'a pas de mau-

vais instincts, n'est pas voleur, ni malfaisant : il n'est pas mé-

chant, ne bat pas ses camarades; il aime beaucoup à jouer avec

de petits bâtons; il se balance souvent, suce toujours ses doigts,

ne bave plus; pas d'onanisme. Il marche seul et mange seul,

mais avec ses mains; il est gourmand et même vorace; pas de

salacité ; gâtisme. Il paraît assez affectueux pour ses parents qu'il

caresse lorsqu'ils viennent le voir.

1883. Juin. Poids, 27 kil. 400. Taille, 4°'33.

1885. Janvier. Poids, 29 kil. 500. Taille, 4m33.

Juin. Poids, 29 kil. 500. Taille, 1°'3r.

Pas de changements au point de vue de la puberté : rien aux

lèvres; un groupe de poils courts à gauche de la verge, qui est

toujours petite. Il n'est plus salace, ne pleure plus quand on l'ap-

proche ; dans la marche, il a conservé l'habitude de plier et de

relever alternativement le tronc. Il a pris en affection dès l'entrée

un autre enfant, Naud ? ils s'approchent l'un de l'autre en riant

et eu chantonnant. Il se sert d'une cuillère pour manger, à la con-

dition qu'on le surveille.

Observation VII. Imbécillité.

Crises nerveuses à quatre ans, suivies de strabisme pendant un an. -

Alternatives de somnolence et de turbulence ; kleptomanie, mendi-

cité. Onanisme. - Accès de colère, jalousie. Syphilis

(1882-1883); injections sous-cutanées de peptonate de mercure;

stomatite NM)'CM)' : ee.rMHtCM ! ' du /(Me.jSt'0) ! C/tOpHCMnMK<e.

Rubéole. - Description du malade. Etat des organes génitaux.

Etat intellectuel.

Horn... (Jean-Stéphane), est entré le 18 février 1881, à l'âge de

dix ans, à Bicêtre (service de M. BOURNEVILLE).

DES FAMILLES D IDIOTS. 29

Antécédents personnels. (Renseignements fournis par le père et

la mère, 9 juin 4881 '.) Grossesse bonne.-Accouchement à terme,

naturel, sans chloroforme. - A la naissance, l'enfant ne présen-

tait rien d'extraordinaire. Sa nourrice, qui était enceinte d'un

mois, ne l'a nourri au sein que jusqu'à quatre mois; ensuite il a

été élevé au biberon (lait de vache). Il a marché vers quinze

mois, et a parlé vers dix-huit mois ; il a toujours uriné de

temps en temps au lit. Quand il fut repris par sa mère à l'âge

de deux ans et demi, il n'avait pas eu d'autres maladies que

le ventre ballonné et de la constipation. Jusqu'à quatre ans,

il n'eut rien autre que des engelures, quelques croûtes dans les

cheveux, sur les mains, à la figure et sur le corps, et souvent des

adénites cervicales. A quatre ans, « il est tombé tout raide par

terre et est resté ainsi pendant une heure; le médecin qui a été

appelé a dit que ce n'était pas des convulsions, mais une crise

nerveuse. Après, les yeux étaient retournés et il a louché pendant

un an ». Il n'a jamais eu la rougeole, ni aucune autre fièvre : n'a

jamais présenté d'autres accidents nerveux que ceux qui sont

mentionnés plus haut ; il faisait souvent des grimaces en jouant.

A trois ans et demi, mis à l'asile, puis dans une série d'écoles, il

n'a jamais rien appris; quelquefois il dormait des heures entières;

dans d'autres moments, il était d'une turbulence extrême, taqui-

nant ses camarades, les empêchant de travailler et même les

volant. Souvent, au lieu d'aller à l'école, il s'en allait mendier; il

disait alors que ses parents ne lui donnaient pas à manger.

11 s'habillait très mal ; il mangeait seul avec une cuillère et une

fourchette, mais salement et gloutonnement. Pas de salacité; pas

de rumination ? quand il boit, il tousse tout de suite. Onanisme

très fréquent depuis son retour de nourrice jusqu'à l'âge de sept

ans. Il est colère, menteur, indifférent à tout, peu affectueux. 11 est

jaloux de son frère, qui est idiot et sur le compte duquel il met

tous ses méfails. Il ne veut pas jouer avec les autres enfants, et

préfère rester seul dans un coin; il ne peut souffrir les animaux.

Le sommeil est généralement très agité; il a été quelquefois

un mois de suite sans dormir la nuit. Pas de vertiges, d'attaques,

ni de chutes.

A son entrée dans le service, on constate que cet enfant ne sait

que quelques lettres, qu'il ne sait pas écrire, qu'il prononce bien

et parait avoir un peu de mémoire. Il connaît les objets usuels. Il

est très turbulent, paresseux, malpropre, menteur et gourmand, ce

qui confirme les renseignements de sa mère. Il s'habille convena-

blement ; onanisme persistant. Poids, 18 kil. 800; taille, '1 m,09.

1882. 17 juin. Embarras gastrique; douleurs de côté d droite,

avec un peu d'affaiblissement du murmure vésiculaire de ce côté.

Rien de particulier à la conception.

30 DES FAMILLES D'IDIOTS.

La température oscille toujours entre 38° et 39°. L'enfant sort de

l'infirmerie le 7 juillet.

10 juillet. 11 remonte à l'infirmerie, se plaignant de douleurs

de côté à droite. Pas de signes stéthoscopiques; à la percussion,

on constate, dans le tiers inférieur et postérieur du thorax, de la

submatité qui se prolonge dans toute la région du foie jusqu'à

l'épigastre. Cette région est très sensible, ne présente pas de dé-

formation, il n'y a pas d'ictère ni de vomissements; les selles

sont normales. Le malade sort le z14 août sans que la température

ait dépassé 39. - Poids : 21 kil. 800; taille : 9m 17.

23 décembre. Amélioration sensible ; parole tout à fait libre; il

commence àsyllaber, compte jusqu'à cinquante; il est plus obéis-

sant, s'habille seul.

Eruption papulezcse confluente à la région lombaire, discrète

sur les membres et le tronc; à la nuque, les papules présentent

une petite collerette; coloration bronzée. Adénites cervicales, rien

à la face, à la verge ni il l'anus. L'amygdale droite est un peu

tuméfiée; le pilier antérieur, rouge et luisant, présente vers sa

partie moyenne une petite élévation de deux millimètres de lon-

gueur (syphilis).

1883. 30 janvier. La sypliilis est envoie de diminution ; des-

quamation des papules qui présentent une coloration rouge brun

cuivré; nombreuses adénites cervicales, axillaires et inguinales.

Quelques papules dans le cuir chevelu ; rien à l'anus; ulcération

à bords irréguliers sur l'amygdale gauche. Sirop d'iodure de fer,

vin de quinquina, injections sous-cutanées de peptonate de mercure.

(XX gouttes, 2 milligr. 50.) Poids : 22 kil. 60; taille : 1m 18.

24 février. Nombreuses adénites cervicales de la grosseur d'un

haricot au maximum; quelques petites adénites axillaires, pléiade

inguinale. Les papules sont toutes revêlues de squames en voie

de détachement, ayant une coloration brun jaunâtre qui va en

s'éteignant. Quelques, squames dans le cuir chevelu, un peu d'alo-

pécie ; plaque rouge de la paupière inférieure gauche, pointe du

nez couperosée. La face interne des lèvres et des joues n'a rien

de particulier, les gencives sont fongueuses et ulcérées par points,

les dents sont couvertes de taches à leur couronne, la langue est

recouverte d'un enduit blanchâtre et est comme mâchonnée sur

ses bords qui sout le siège d'un dépôt jaunâtre qu'on détache

assez aisément. L'haleine est infecte, la salivation considérable ;

adénite sous-maxillaire droite quelques induralions consécutives

aux injeclions. Amaigrissement notable. (Poids : 20 kil. 320.)

27 février. On suspend les injections. L'état est toujours le même.

12 mars. La stomatite est très améliorée ; le malade mange et

parle facilement; il ne crache presque plus ; son haleine n'est

DES FAMILLES D'IDIOTS. 31

plus fétide. Il s'est produit une eschare d'un centimètre de dia-

mètre au niveau d'une des injections sous-cutanées.

10 avril. Depuis plusieurs jours l'enfant se plaint d'un point de

côté à droite et au niveau de l'épigastre. Cette région est le siège

d'une voussure très douloureuse à la pression ; le foie est gros et

déborde les fausses côtes. Pas d'ictère; un peu de toux; subrnatité

sous la clavicule droite et râles assez fins mélangés de frotte-

ments. Langue chargée. Deux verres d'eu'de'Sedlitz; extrait de

quinquina.

13 avril. Douleurs au niveau' de' la' région hépatique, qui est

bombée et saillante. A la palpation, on sent le foie déborder les

fausses côtes de près de 3 centimètres ; dans cet espace, on cons-

tate une matité évidente. Au niveau de l'épigastre, le rebord du

foie est également abaissé; l'examen ne détermine que peu de

douleur; ventre souple; pas d'ictère, anorexie, soif vive, langue

saburrale. Le 11, l'enfant qui avait pris de l'huile de ricin, a vomi

pour la première fois; hier, il a vomi son potage; deux ou trois

selles diarrhéiques, jaunâtres par jour. Fièvre très modérée,

n'ayant rien de particulier; vésicatoire.

32 DES FAMILLES D'IDIOTS.

nution de la sonorité dans les deux tiers inférieurs du poumon

droit. Rien à gauche; le foie n'a pas augmenté de volume ; pas

d'ictère, diarrhée. La température n'est pas très élevée et oscille

toujours aux environs de 38°, sans rien présenter de particulier

dans sa marche.

DES FAMILLES DI'DIOTS. 33

8 mai. L'éruption est modérément confluente vers la face, peu

confluente sur le tronc; les taches, larges et pâles, sont difficiles

à distinguer des taches presque effacées de roséole. Toux fré-

quente ; expectoration abondante et glaireuse ; soif vive, langue

sale. A la percussion, diminution de la sonorité dans la moitié in-

férieure du poumon droit, en arrière et sur le côté. A l'ausculta-

tion, souffle dans les deux tiers inférieurs du même poumon, et

respiration soufflante à la base, en arrière sur une petite életi-

due ; râles soufflants et sibilants disséminés dans le reste du pou-

mon et dans le poumon gauche.

9 mai. L'éruption commence à s'effacer, sauf sur la face; souffle

dans toute l'étendue du poumon droit en arrière, mélangé par

places de ràles crépitants; à gauche, diminution de la sonorité

et râles fins à la base; rien en avant. La respiration est régulière,

la toux fréquente. 11 n'y a pas de larmoiement; un peu de con-

jonctivite ; langue humide, selles régulières. - Vin de quinquina,

extrait de quinquina.

10 mai. L'éruption continue à s'effacer, surtout en arrière. Ma-

tité à droite, en avant et en arrière; râles sous-crépitants, crépi-

tants et souffle tubaire en arrière; en avant, on n'entend que

des râles sous-crépitants. A gauche, il y a également des râles.

Toux fréquente, dyspnée marquée, sueur abondante.

Il mai. Persistance du souffle et de la bronchophonie dans la

moitié inférieure du poumon droit; quelques râles ronflants à

l'inspiration, au sommet des deux poumons; un peu de sonorité

au niveau du tiers moyen du poumon droit, sonorité dans toute

la hauteur du poumon gauche. En avant et à gauche, l'inspiration

est un peu rude. La toux est toujours fréquente, l'expectoration

assez abondante. Langue nette, appétit bon, pas de vomissements,

selles régulières. La voussure du foie a disparu et il ne dépasse

plus le rebord des fausses côtes. - Bouillon, potage, lait, un oeuf,

vin de quinquina.

12 mai. Même état; quelques râles à la base gauche; pas de

gêne de la respiration; vomissement dans la journée d'hier.

13 mai. Point de côté violent à droite, l'auscultation ne révèle

rien de nouveau.

18 mai. L'état général est beaucoup meilleur, mais l'état local

le modifie très peu. Le souffle persiste, un peu moins rude et dans

une étendue un peu moindre ; râles sous-crépitants nombreux,

surtout vers l'aisselle et au sommet droit; quelques frottements

pleuraux. La température, qui n'a guère dépassé 39°, est revenue

à la normale sans avoir présenté, dans ses oscillations, rien de

caractéristique.

BOUl\ : OEVIL.LE, 1885. 3

3 ! DES FAMILLES D'IDIOTS.

21 mai. L'enfant est gai et mange de bon appétit. Selles régu-

lières, toux fréquente par quinte, expectoration verdâtre. La région

thoracique semble déprimée du côté droit qui présente à la per-

cussion un peu de submatité. Dans toute la hauteur du poumon

de ce côté, souffle et râles fins humides, aux deux temps de la

respiration. Du côté gauche, respiration, un peu rude, mêlée de

quelques râles ronflants très disséminés.

4 juin. Toux moins fréquente, toujours quinteuse; expectoration

muco-purulente abondante, sonorité normale à gauche; subma-

tité dans toute l'étendue du côté droit et râles humides mélangés

de gros frottements pleuraux. Etat général satisfaisant.

30 juin. Poids : 21 kil. 900; taille : 1 m. 19.

9 juillet. Etat actuel. - Tête ovoïde assez développée; l'occipital

fait une légère saillie, au dessous de laquelle existe à droite une

sorte de méplat, tandis qu'à gauche il existe une convexité assez

marquée. La bosse occipitale droite est plus accentuée que la

gauche; de même la bosse pariétale droite. Le front est haut,

bombé, assez large; la bosse frontale gauche est notablement

plus développée que la droite.

DES FAMILLES D'IDIOTS. 35

tion est normale ; les gencives sont eu assez bon état, mais recou-

vrent légèrement les dents.

Le cou est régulier : le thorax présente en avant une saillie assez

marquée des insertions sternales des quatrième, cinquième et

sixième côtes; le rebord costal droit est plus déprimé que le

gauche, et en arrière, la moitié droite du thorax parait aplatie

au-dessous de l'omoplate.

Le rachis est normal, ainsi que le bassin. Les membres supé-

rieurs et inférieurs sont bien conformés, quoique un peu grêles.

Pas de traces de rachitisme.

Les cheveux sont blonds et peu abondants ; sur la moitié gauche

du crâne on trouve sept cicatrices, les unes linéaires, les autres un

peu étoilées. Sourcils blonds et rares, cils très longs et abondants;

duvet assez marqué sur les épaules, les flancs et les cuisses. - Peau

blanche avec de nombreuses taches (vésicatoires, petits abcès

consécutifs aux injections); petites glandes cervicales etinguinales,

rien dans les aisselles. Les testicules sont descendus, mais très

petits; la verge est peu développée, un phimosis assez prononcé ne

permet pas de découvrir le gland.

Digestion. - L'appétit est régulier, la mastication se fait bien,

les selles sont normales ; pas de gâtisme. Le foie déborde les fausses

côtes d'un travers de doigt, et remonte presque jusqu'au niveau

du mamelon ; la rate ne paraît pas volumineuse; du côté droit on

distingue mal les espaces intercostaux qui sont très apparents du

côté gauche. Le ventre est assez développé et un peu tendu. Pas

d'ictère.

Respiration. Submatité au sommet des deux poumons, surtout

à gauche; de l'épine à la pointe de l'omoplate, sonorité; au-des-

sous de la pointe et des deux côtés, matité. En a1'ritj¡'e età gauche,

la respiration est un peu obscure au sommet, du côté du rachis; à

lapartie moyenne, elle est normale; en bas, elle paraît lointaine;

la voix est un peu chevrotante en bas vers la colonne vertébrale.

Ce phénomène est plus marqué à droite, et dans une plus grande

hauteur. De ce côté, la respiration qui est normale dans la moitié

supérieure ne s'entend presque pas dans la moitié inférieure; il

reste encore un peu de souffle. En avant, sonorité un peu exagérée

des deux côtés; à droite, la respiration est normale sous la clavi-

cule, un peu obscure au niveau du mamelon; à gauche, elle est

normale.

La sensibilité, générale et spéciale, est intacte. '

Etat intellectuel. - En juin 4S81, dès son entrée, on a constaté

qu'il savait compter jusqu'à cinquante, avec des jetons; il connais-

sait les lettres de l'alphabet, mais sans savoir les assembler; il

faisait des bâtons sur l'ardoise; il se nettoyait assez bien, cirait

ses souliers, mais ne savait pas s'habiller seul; au réfectoire, il se

36 DES FAMILLES D'IDIOTS.

servait de la fourchette, de la cuillère et du couteau, il aidait à laver

la vaisselle.

En juillet et août, on remarque qu'il a parfois mauvaise tête,

qu'il est menteur, a de mauvaises habitudes et cherche à entraîner

les autres enfants; en octobre, il est plus attentif; en décembre,

il s'habille seul, travaille mieux.

En mars et avril 1882, il est plus docile et plus assidu; après un

premier séjour à l'infirmerie (15 mai-27 juillet), il travaille assez

bien jusqu'au 29 décembre. est alors malade de nouveau, et lors-

qu'il redescend de l'infirmerie, le 11 juillet 1883, on constate qu'il

n'a rien oublié de ce qu'il avait appris.

Actuellement, il s'habille bien, mange proprement, n'est plus

gourmand, ni voleur. Il n'est plus onaniste. Il connaît les diffé-

rentes parties du corps, sait nommer les mouvements, les couleurs,

tous les objets contenus dans les boîtes de leçons de choses, et tous

ceux qui l'entourent. Il commence à faire quelques lettres et à les

assembler; il n'a que très peu de notions en ce qui concerne son

âge, les saisons, les mois, les jours, l'heure. La parole est très

distincte. Il paraît être assez affectueux.

4884. Janvier. Poids, 24 kil. 400. Taille, i m. 23.

Août. Poids, 25 kil. 100. Taille, 1 m. 26.

1885. Janvier. Poids, 26 kil. 400. Taille, 1 m. 28.

Juin. Poids, 25 kil. Taille, 1 m. 30.

La puberté ne s'accuse pas. Lèvres et pénil glabres; testicules

de la grosseur d'une olive; bourses un peu rétractées; prépuce

long; gland découvrable; méat normal. La longueur de la verge

et la circonférence sont de 3 centimètres et demi.

Durant cette année, on a remarqué, comme les autres années,

des périodes de une ou deux semaines durant lesquelles il est

inerte, irritable, querelleur, refuse de travailler. D'ordinaire, il

est moins sujet aux colères qu'autrefois; il n'est plus menteur,

est devenu affectueux, s'occupe de son frère, idiot, le place

auprès de lui au réfectoire et le fait manger. Il est devenu plus

actif, assez propre, et joue avec les autres enfants, ce qu'il ne

faisait pas dans les premiers temps. Il syllabe assez bien, assemble

même quelques mots, sait la numération, compte 2 par 2, trace

quelques lettres. Il est complaisant et fait de petites corvées dans

le service.

En résumé, sous l'influence du traitement, cet enfant s'est

notablement amélioré à tous les égards.

Laissant de côté tous les faits, quelqu'intéressants qu'ils

soient, que les observations peuvent présenter d'étrangers à

DES FAMILLES D'IDIOTS,

37

notre sujet, nous ne résumerons dans notre tableau que les

points qui nous occupent en particulier :

38 DES FAMILLES D'IDIOTS.

signale l'hérédité et les anomalies intellectuelles ou morales

o

qui les accompagnent, trahissent facilement leur origine mor-

bide. Le cas actuel nous semble faire partie de ce groupe, et

ces deux condamnations dont l'une surtout décèle une perver-

sion profonde du sens moral, coexistant avec l'instabilité

mentale, peuvent, à notre avis, être un signe de plus de la

tare héréditaire.

Ainsi donc du côté de la mère, l'hérédité s'accumule depuis

deux générations. Du côté paternel, même chose. Le père des

Horu... ne présentait pas d'accidents nerveux, mais il faisait de

fréquents excès de boisson et c'est là un fait d'une valeur

très importante au point de vue de l'hérédité. De plus, il est

le fils d'un asthmatique et cette affection, qui a des rapports si

intimes avec les maladies du système nerveux, est une cause

d'hérédité qui a certes une grande valeur. L'asthme, en effet, est

lié souvent au goitre exophtlzalmidue; les récentes recherches

de MM. Ballet ' et Marie 2 le montrent fréquemment uni par

l'hérédité aux maladies nerveuses et surtout aux maladies

mentales. Guislain 3, d'un autre côté, a fait voir que souvent

l'aliénation alterne avec l'asthme, et Solter * lui trouve de

nombreuses connexions avec l'épilepsie. On peut donc aisé-

ment admettre qu'un père atteint d'asthme transmette à ses

descendants une prédisposition névropathique spéciale, tout

comme un choréique, une hystérique, une épileptique, ou

même un aliéné.

Aussi disons-nous que, dans le cas actuel, l'hérédité est

double et s'accumule sur les enfants avec une intensité d'au-

tant plus forte qu'elle date de deux générations. Aussi de ces

cinq malheureux enfants venus à terme, deux meurent, à quel-

ques mois, de convulsions, deux sont idiots, l'un inéducable, tous

deux incapables de tenir placedans lasociété ; une autre, imbé-

cile, a eu autrefois des convulsions. Une seule fille est bien por-

tante et intelligente, mais on peut pronostiquer sans peine,

qu'avec des antécédents pareils, si elle-même ne ressent pas

les atteintes de l'hérédité, ses enfants, si elle en a, hériteront

des prédispositions névropathiques de toute la famille.

1 (;. Ballet. - - lieviie du ntétleeirte, 188 : 1, p. 254.

= t\Inrie. -- 1'Itèu de Paris, 1883 .

3 fiiiislain. - Leçons orales sur les plti'Cltop"tlties,

1 Saltur. - On asthma, 1860.

DS : S P,1DI(LLES DIDInT'S. 39

V. C.autt,r,r GUI...

Grand-père paternel; quelques excès de boisson; oncle paternel

aliéné; mère migraineuse. - Grand-père maternel asthmatique ;

cousin éloigné idiot; consanguinité éloignée. [Onze enfants ;

quatre idiots, une idiote, un convulsif.

Antécédents héréditaires. (Renseignements fournis par la mère,

20 octobre 1879.) - Père : ébéniste, quarante-deux ans, bien por-

tant, d'une taille assez élevée, a eu, dans le courant de l'hiver 1872,

un eczéma de la face et du tronc qui n'a pas reparu. Pas d'alcoo-

lisme, ni de migraines, pas d'accidents nerveux ni rhumatismaux ;

caractère doux. [Père : soixante-sept ans, n'a jamais été malade;

aucun accident ',nerveux ; quelques excès de boisson. Mère :

morte de la rupture d'une anévrysme ; pas d'affection nerveuse.

- Deux frères : l'un est mort du choléra ; l'autre, placé à l'asile de

Maréville comme aliéné, y est mort le Il, décembre 1858 à l'âge

de dix-huit ans 1. - Deux semeurs : dont l'une encore vivante, n'ont

jamais eu d'accidents nerveux.]

Mère : quarante-deux ans; brodeuse, intelligente, maigre, un

peu anémique ; sujette à des névralgies faciales et à des migraines

très fortes, sans vomissements. A la. suite d'une contrariété d'a-

mour-propre, elle eut pendant six mois des troubles sensoriaux

de la vue (phosphènes). Elle voyait pendant deux ou trois heures

des feux, des cercles lumineux. Ces phénomènes disparaissaient

sous l'influence du sommeil. Aucun accident cutané, rhumatis-

mal ou pulmonaire ; pas de maladies graves. [Père : mort d'un

asthme à soixante ans, sans'avoir présenté d'autres accidents ner-

veux. - Mère : soixante-dix-sept ans, bien portante, pas d'affec-

tions nerveuses. - Une cousine paternelle au troisième degré de

la mère de notre malade a eu uu garçon idiot, mort à huit ans.

1 Gui... (Charles), dix-neuf ans, entré le 22 novembre 1858 à l'asile

de Maréville, mort le ler décembre 1858. - Aucun antécédent héréditaire,

pas d'excès alcooliques; pas de syphilis; excès vénériens et onanistiques.

Chagrins d'amour suivis d'accès de tristesse, d'excentricité, d'embarras

de la parole. Les accidents ont débuté quinze jours avant l'entrée à

l'asile ; terreurs panophobiques lui arrachant des plaintes et des cris con-

tinuels ; hallucinations incessantes : on le poursuit, on veut le mutiler

lui couper le cou; il est agité, bruyant, agressif. Plus tard il se croit

amputé des parties génitales et, dans cette conviction, il urine dans son

lit ou dans ses vêtements. Les traitements sont infructueux; sous l'in-

fluence des terreurs panophobiques, Gui... refuse toute alimentation; il

survient un amaigrissement rapide et un état de marasme nerveux qui

amènent rapidement la mort.

40 DES FAMILLES D'IDIOTS.

Consanguinité : le père et la mère du malade sont cousins au

cinquième ou sixième degré. Leurs deux mères portaient le même

nom.

Onze enfants : 1° une fille morte à un an sans avoir eu de con-

vulsions ; paraissait intelligente. A sa naissance, elle était comme

enflée. 2° et 3° deux filles, l'une de vingt et un ans, l'autre de

dix-neuf, bien portantes, intelligentes ; aucun accident nerveux.

4° un garçon (Louis-Oscar), mort idiot à l\Iaréville; 5° un

autre garçon (Charles-Georges), idiot, est encore actuellement à

Maréviile; - 6° une fille morte à huit mois de la variole, quoi-

qu'elle eût, dit-on, été vaccinée et que le vaccin eût bien pris ;

7° une fille (Henriette), idiote, morte à la Salpêtrière à dix ans le

1 cr décembre 1875; - 80 un garçon, bien portant, assez intelli-

gent, a eu quelques convulsions internes, il louche; - 9° une

fille, huit ans, bien portante, pas de convulsions ni d'affections

nerveuses; -- 10° Un garçon de cinq ans (Henri-Gabriel), idiot,

gâteux; -110 un garçon de trois ans (Eugène-Georges), idiot et épi-

leptique.

Ces deux derniers malades ont été placés à Bicêtre; mais

avant de relater leur observation, nous allons dire quelques

mots de leurs frères Charles et Louis-Oscar. Nous devons à

l'obligeance de M. le Directeur de l'asile de Maréville, de

nombreux renseignements sur ces deux premiers malades :

nous n'indiquerons ici que les traits principaux de leur affec-

tion.

Observation VIII. - Idiotie complète.

Gui... (Louis-Oscar), âgé de six ans et demi à son entrée à l'asile

de Maréville le 27 juillet 1868. Mort le 30 avril (872.

Idiotie congénitale. Tête petite, front bas, déprimé : ne parle

pas, peu de sentiments affectifs : calme et inoffensif. Gâteux.

Santé physique bonne; vie purement animale.

Le 10 avril 1872, l'enfant est atteint de bronchite généralisée,

il meurt le 30 avril. A l'autopsie, on trouve un ramollissement

notable des lobes antérieurs du cerveau et des tubercules gris

en voie de formation dans les deux poumons.

Observation IX. - Idiotie complète.

Gui... (Charles-Georges), âgé de quatre ans et demi à son entrée

à l'asile de l\1aréville le 14 septembre 1868.

Tête assez bien conformée, figure assez intelligente; idiotie con-

DES FAMILLES D IDIOTS. 41

génitale, ne dit guère que «papa» et « maman»; gâtisme. L'état

intellectuel de l'enfant ne s'améliore pas, et les derniers certi-

ficats (novembre 1881) constatent l'idiotie complète; l'absence de

parole, le gâtisme, l'existence automatique et végétative. La santé

physique est bonne.

Nous avons pu aussi recueillir à la Salpêtrière quelques

renseignements sur Henriette Gui..., le septième enfant de

cette famille. Nous les transcrivons ici :

Observation X. - IDIOTIE complète.

Gui... (Henriette), entrée à la Salpêtrière le 9 juin 1873, morte

le 4 décembre 1875 (service de M. Moreau).

Les différents certificats concernant cette malade constatent

qu'elle était atteinte d'idiotie congénitale avec microcéphalie ; stra-

bisme convergent et asthénie générale. Elle était turbulente avec

des périodes d'excitation; elle avait de mauvais instincts. Elle ne

mangeait pas seule et était gâteuse. Elle ne s'est pas améliorée

pendant tout son séjour à la Salpêtrière.

Nous allons maintenant rapporter plus en détail les obser-

vations des deux derniers enfants qui ont été placés à Bicêtre.

Observation XI. - Idiotie congénitale complète.

Pas de convulsions. Congestion cérébrale à trois ans ( ? ). Parole

nulle. - Incapacité de s'habiller, de se laver, de manger. - Gâtisme,

onanisme, phimosis.

Gui... (Henri-Gabriel) est entré à Bicêtre le 8 novembre 1879, à

l'âge de cinq ans (service de M. BOURNEVILLE). Il est né le

22 juin 1874.

Antécédents personnels. (Renseignements fournis par la mère,

3 décembre 4879.) Rien de particulier lors de la conception ?

Aucun accidentpendant la grossesse; accouchement à terme, facile.

A la naissance, pas d'asphyxie. -Elevé au sein par sa mère jus-

qu'à quinze mois. Rougeole à deux ans et demi, variole à trois ans;

congestion du cerveau ( ? ) : il a été pendant soixante-cinq ours très

malade, a déliré pendant deux jours, pas de paralysie ni de con-

vulsions. Pas de croûtes, de dartres, de glandes, d'ophthalmies,

d'otites, etc.

Il a commencé à marcheràun an; toutefois, il semblait «comme

maintenu sur les genoux ». Il a commencé à prononcer quelques

42 des familles d'idiots.

monosyllabes vers deux ans, jamais la parole ne s'est développée;

il mange avec la main, mais sait tenir une cuillère. Il a toujours

été gâteux. Pas d'onanisme. 11 est taquin, mais n'est pas méchant;

il est assez caressant, embrasse souvent sa mère de lui-même.

Il n'est pas gourmand, ni salace ; pas de colères, quelquefois des

accès de cris.

1880. 26 juin. Gui... parle très peu, prononce quelques mots

(maman...), ne lit pas ses lettres; il est d'ailleurs presque impos-

sible de fixer son attention. Il mange bien avec la cuillère; il

n'est pas gourmand, salace, ni voleur; gâte moins dans le jour

depuis quelque temps. Pas d'onanisme.

1881. Mai. Bronchite légère.

Juillet. Epulis au niveau des incisives gauches de la mâchoire

inférieure, extirpation au thermo-cautère.

1882. 29 mai. Ne dit que «papa, maman», ne sait pas se laver, ni

s'habiller, mais sait se déshabiller. Il est voleur, mais pas destruc-

teur. Pas d'onanisme, gâtisme persistant; ni bave, ni succion,

ni balancement. Mange souvent avec ses mains, et déchire les

aliments avec ses dents.

Juin. Poids, 18 kil. 500; taille, l-,12.

Il septembre. Etat actuel. Au premier abord, on est frappé de

l'aspect malingre et chétif de l'enfant. Le visage, les extrémités

sont froides et très cyanosées; la maigreur est prononcée.

Tête peu développée, asymétrique. La moitié droite de la calotte

crânienne est plus large et plus saillante que la gauche, surtout à

l'union du pariétal avec l'occipital. La bosse pariétale gauche est

plus basse et plus en arrière que la droite; à gauche, au-dessus

de la bosse pariétale, dépression assez marquée. Les bosses occi-

pitales sont saillantes et égales, les bosses frontales sont égales,

peu saillantes; au-dessous d'elles, légère dépression.

DES familles d'idiots. 43

Système dentaire très défectueux; la petite incisive gauche, la

canine droite et la première petite molaire droite manquent en

haut. En bas, il ne reste que les quatre incisives, les deux grosses

molaires gauches et la dernière molaire droite; menton très

pointu. -

Cnzc grêle, pas de ganglions, pas de cicatrices. - Thorax peu

développé, mais bien conformé. - Colonne vertébrale rectiligne.

- Pas de développement exagéré de l'abdomen.

Membres supérieurs grêles, bien conformés; mains violacées,

doigts longs; pas de ganglions axillaires. Membres inférieurs

maigres, sans déviations; extrémités violacées et froides, doigts

longs, voûte plantaire normale; pas de ganglions inguinaux.

Organes génitaux : verge petite, normale; prépuce long, léger

phimosis. Testicules descendus, de la grosseur d'une petite noisette.

Peau : cheveux, sourcils, cils blonds, abondants. Pubis, mem-

bres, aisselles glabres. Une petite cicatrice gaufrée sur l'insertion

supérieure du couturier gauche; une cicatrice de vaccin sur le

deltoïde gauche, deux sur le droit.

Rien dans les poumons, ni au eoew'. Fonctions digestives régu-

lières, appétit bon; langue bonne; ni vomissements, ni diarrhée.

- Foie et rate normaux.

Sensibilité générale intacte. Sens spéciaux obtus, surtout

l'odorat. - Sommeil bon, pas de cauchemars.

Degré d'instruction, nul. Il est très inattentif, ne retient rien de

ce qu'on lui dit, ne prononce que quelques mots « papa, maman»,

ne connaît pas le nom des objets usuels. Il est assez méchant,

très désobéissant, ne craint personne, comprend bien ce qu'on lui

dit. Assez affectueux pour ses parents qu'il reconnaît bien. Il a

souvent des accès de colère et de cris; très joueur, il s'amuse avec

n'importe quoi, ne se querelle pas avec les autres enfants; il est

voleur. Il sait manger seul avec la cuillère; cependant, il se sert

souvent de ses mains; il ne sait pas s'habiller. Pas de bave, ni de

succion, ni de balancement. Gâtisme invétéré, onanisme par inter-

valles. Marche bien, pas de paralysie. Pas d'épilepsie.

1879. Novembre. Poids, 14 kil. 800. Taille, i m. 01.

1880. Septembre, Poids, 16 kil. 100. Taille, 4 m. 05.

1881. Juillet. Poids, 18 kil. 30. Taille, 1 m. 06. '

1882. Janvier. Poids, 18 kil. 500. Taille, 1 m. Il. '

1882. Juin. Poids, 18 kil. 500. Taille, 1 m. 12.

1883. Janvier. Poids, 20 kil. Taille, 1 m. -la.

1883. Juin. Poids, 20 kil. 30. Taille, 1 m. 16.

1884. Janvier. Poids, 21 kil. 500. Taille, i m. 16.

1884. Juillet. Poids, 22 kil. 200. Tallle, 1 m. 21.

1885. Janvier. Poids, 22 kil. 30. Taille, 1 m. 22.

1885. Juin. Poids, 23 kil. 200. Taille, 1 m. 22.

DES FAMILLES D'IDIOTS.

Observation XII. - Idiotie complète; ÉPILEPSIE.

Crises nerveuses simulant des peurs; accès épileptiques (dix ans);

impotence absolue, parole nulle; mâchonnement des mains, stra-

bisme ; affaiblissement prédominant au membre inférieur gauche.

Tuberculose pulmonaire, marche des accès. - Autopsie incomplète.

Gui... (Eugène-Georges), entré à Bicêtre, le 27 août 1879, à l'âge

de trois ans. Mort le 5 mars 1880 (service de M. BOUItNEVILLE.)

Antécédents personnels. (Renseignements [fournis par sa mère,

20 octobre 1879). Lors de la conception, rien de particulier.

Grossesse bonne. - Accouchement à terme facile. - A la naissance,

pas d'asphyxie. - Elevé au sein jusqu'à deux ans. Pas de

gourmes, d'ophthalmies ni de dermatoses. Rougeole à deux ans.

Vacciné, pas de varioloïde. Il a eu d'abord des crises nerveuses

(deux ans); il semblait avoir peur, et tressautait; plus tard, les

mêmes phénomènes se reproduisirent avec un cri. Enfin survin-

rent de véritables accès pendant lesquels il rendait de l'écume

sanguinolente (un an).

Il n'a jamais ni marché, ni parlé; il a toujours gâté. Son regard

est vague et ne fixe personne ; il ne paraît pas entendre; jamais

on ne l'a vu rire; il ne pleure que rarement. Il passait ses jour-

nées sur les bras de sa grand'mère ou dans une chaise, mettant

ses mains dans sa bouche, mais sans les sucer.

1879. Septembre. Idiotie, épilepsie, strabisme; mutisme, cris

inarticulés; instincts très bornés; turbulence, gâtisme. Arrêt gé-

néral de développement, atrophie des membres inférieurs, para-

plégie.

16 octobre. Depuis l'entrée, l'enfant est resté couché constam-

ment. Depuis son admission, les jambes sont fléchies sur les

cuisses, et les cuisses sur le ventre. Quand on le lève, il se tient 1

assez bien sur la jambe droite ; mais la jambe gauche reste fléchie.

Traitement anti-scrofuleux ; deux bains salés par semaine ,

essayer de faire marcher l'enfant.

4 novembre. Pas de modifications appréciables. Quand on le

soutient, l'enfant avance les jambes comme pour marcher, mais

tout se borne à cet effort.

20 novembre. Poids : 8 kil.; taille : 0-.65.

1880. 2 janvier. Amaigrissement progressif depuis quelque

temps. Toux assez fréquente ; sonorité normale, râles ronflants aux

deux bases. Les jambes ont plus de tendance à se fléchir; gonfle-

ment oedémateux du prépuce avec quelques petites ulcérations ; un

ne sent pas les testicules. Même traitement; viande crue.

DES FAMILLES D'ID10TS.

45

4 mars. Maigreur extrême la peau. est collée sur les os.

L'enfant ne peut tenir sur ses jambes; il prend toujours un peu

de lait, de viande crue, de vin, et on lui a donné des bains salés

et un traitement auti-scrofuleux.

5 mars. Mort à quatre heures du soir.

Marche des accès :

46 DES FAMILLES D'IDIOTS.

côté du père et du côté de la mère. L'influence de l'alcoolisme

sur la dégénérescence des produits, et que nous avons pu déjà

constater dans les deux observations précédentes, trouve encore

ici son application.

Nous voyons, en effet, le grand-père paternel de ces malades

qui était alcoolique donner naissance à un fils qui succombe

à un délire mélancolique bien caractérisé. Quoique le père de

nos malades ait été sain de corps et d'esprit, il n'en est pas

moins évident que, de son côté,.il y a transmission des disposi-

tions morbides par hérédité, en. retour collatéral. Les faits de

ce genre, pour être plus rares que ceux de l'hérédité directe,

n'en existent pas moins, et l'atavisme est, en fait, admis par

les aliénistes.

D'un autre côté, la mère, dont le père était asthmatique,

et qui compte déjà un idiot dans sa famille, est elle-même

sujette à des accidents nerveux. Ici l'hérédité se manifeste

directement et les dispositions pathologiques, venant des deux

parents, s'accumuleront, aggravées par la transmission, sur la

tête des enfants. De là, les dégénérescences si frappantes chez

la plupart d'entre eux et que nous rapportons plus haut en

détail.

Il est un fait déjà signalé dans la famille W... (p. 4) que l'on

retrouve dans celle-ci et auquel on pourrait attribuer aussi une

influence sur l'état des descendants : c'est la consanguinité

des parents. Mais, outre que, pour nous, on a beaucoup

exagéré l'importance étiologique de la consanguinité, est-il

besoin de l'invoquer ici ? Et la double hérédité n'est-elle pas

une cause beaucoup plus active et plus certaine. Si la consan-

guinité intervient, ce n'est, somme toute qu'indirectement, en

rapprochant les deux familles déjà tarées et en accumulant, si

nous pouvons parler ainsi, l'intensité de /'Ae'cp. Les unions

consanguines ont, en effet, pour nous, une double action sur

le produit, suivant l'état des parents. Il est évident, en effet,

que si ces derniers sont bien conformés, bien portants, sans

tare d'aucune espèce, le produit sera irréprochable. Dans le

cas contraire, il héritera des vices de ses créateurs, absolument t

comme dans les cas où ils n'ont aucune affinité.

Ce n'est pas la consanguinité de ses parents qui fera de lui

un dégénéré, ce sera la transmission des affections hérédi-

taires dont ils peuvent être atteints.

Quoiqu'il en soit, dans le fait qui nous occupe actuellement,

DES FAMILLES D'IDIOTS. 47

nous voyons que, par suite de la dégénérescence progressive,

cette famille est vouée à l'extinction. La plupart des enfants

sont morts jeunes, souvent avec les phénomènes les plus pro-

noncés de déchéance physique et intellectuelle : idiotie com-

plète, épilepsie, paralysie, tuberculose, maladie dont la rela-

tion avec les maladies du système nerveux, signalée par

Esquirol, bien étudiée par ilf. Dupouy, est un fait généralement

admis. Nous en avons vu, d'ailleurs, encore un exemple dans

l'OnslwvATIOX VI.

Parmi les survivants, deux présentent une constitution

débile et tous les caractères de l'idiotie ; ils sont et resteront

incapables de tenir jamais leur place dans le monde, ne pou-

vant se suffire à eux-mêmes, privés de toutes les facultés

nécessaires à la vie de relation, ne vivantque de la vie animale,

et môme inaptes à se reproduire. Un autre, qui a eu des con-

vulsions et est affecté de strabisme, porte déjà le cachet hérédi-

taire, et si les trois autres enfants sont sains jusqu'à ce jour,

ils n'en restent pas moins les héritiers des dispositions mor-

bides de leurs parents, qui, si elles ne se manifestent pas plus

tard chez eux, peuvent éclater dans leurs rejetons, sous une

forme peut-être plus terrible.

Ce pronostic funeste peut s'appliquer à tous les cas de ce

genre, et sans qu'il soit guère possible d'y remédier. Et les

faits que nous rapportons aujourd'hui ne sont que des

exemples de plus de ces dégénérescences de l'espèce humaine

que Morel a si consciencieusement étudiées et si magistrale-

ment décrites.

Nous aurions pu multiplier les exemples de familles d'idiots ;

nous nous sommes bornés volontairement aux précédents afin

de ne pas allonger démesurément cette note. Nous n'avons pas

non plus relevé tous les faits analogues, disséminés dans les

recueils; nous nous sommes contentés d'en citer deux, peu connus

et particulièrement intéressants.

Qu'on nous permette, en terminant, d'appeler l'attention sur

les heureux changements survenus chez les deux frères, objet des

Observations V et VII, sous l'influence d'un traitement tonique

d'une part, et de l'enseignement spécial que nous avons organisé

à Bicêtre. L'aîné de ces enfants est aujourd'hui, à la fin de 1885,

en état de gagner sa vie comme ouvrier menuisier, et aussitôt

48 DES FAMILLES D'IDIOTS.

que les circonstances le permettront, nous essaierons de le placer

au dehors.

Chez le second, les résultats obtenus sont moins considérables;

mais le traitement a été entravé par une série de graves compli-

cations qui donnent à son histoire un grand intérêt au point de

vue de la pathologie de l'enfance. Toutefois, l'amélioration qui

s'est produite nous autorise à espérer qu'il nous sera possible de

lui faire suffisamment apprendre un métier pour qu'il atténue les

dépenses qu'occasionne son entretien.

CHORÉE ET BROMURE DE CAMPHRE. 49

IL

Observation de chorée traitée par le bromure

de camphre ; spécimens de l'écriture d'un

choréique ;

Par BOURNEVILLE.

Le bromure de camphre a été employé plusieurs fois

dans le traitement de la chorée. Dans sa thèse, M. le Dr

Pathault (1') a rassemblé 4 observations de chorée guérie

par ce médicament, et dues à MM. Lorain, Desnos, Gallard,

et des Brûlais. Un autre cas a été rapporté par M. le

D'' Petrovitz (2) ; en voici l'analyse :

Il s'agit d'une jeune fille, âgée de 11 ans, qui fut prise

do chorée dans le courant du mois de juillet. « Malgré le

traitement avec l'extrait de belladone, depuis un jusqu'à huit

centigrammes par jour, et le vin de quinquina, la maladie a

fait du progrès. Le 20 août, nous voyons la malade, qui aie côté

gauche en particulier animé de mouvements involontaires dès

qu'on l'examine : elle peut à peine se tenir debout; elle tomberait

même si, dans-c.es circonstances, on ne la soutenait. La face est

grimaçante et la mastication difficile ; il arrive quelquefois que la

langue est pincée. Nous conseillons alors l'emploi du bromure

de camphre. On commence d'abord par une seule pilule de

10 centigr. ; on cesse la belladone, mais on continue le vin do

quinquina et quelques bains de rivière. Au bout de huit jours,

la malade prenait huit pilules, et déjà l'amélioration était

sensible. Ce furent les jambes qui revinrent les premières sous

l'empire de la volonté. On continua pendant huit jours

encore à la même dose. Il n'y avait plus que la main gauche

qui présentait de temps en temps quelques secousses

involontaires quand il s'agissait do saisir un objet délicat

devant des personnes étrangères ; mais, au bout de vingt jours

de traitement, tout phénomène a disparu. »

L'auteur formule ainsi son opinion :

« Bien que ces faits (les faits relatifs à la chorée) ne soient

pas encore nombreux, nous avons eu de si heureux résultats

(1) Pathaull. - Des propriétés physiologiques du bromure de

camphre et de ses usages thérapeutiques. Paris, 1876, 2e édit.

(2) Petrovitz. Elude clinique du bromure de camphre ;

Thèse de Montpellier, 187G.

BOURNEVILLE 1885. 4

50 chorée : bromure de camphre.

que nous n'hésitons pas à croire que c'est une des affections

dans lesquelles le bromure de camphre est plus spécialement

indiqué quand il n'y a pas de complications. »

Nous avons eu l'occasion de voir un cas analogue à notre

consultation de Bicêtre. Nous allons résumer à grands

traits l'observation du malade.

Sommaire. Première attaque de chorée en ISSU.

Deuxième attaque en 1885 : début, marche, caractères.

Spécimens de l'écriture à diverses l'c1'ioc/C.s. - Traitement.

- Gue/'ison.

La ! ...., Ilenri-Ch., est de G ans et demi. Il est très

nerveux et d'un tempérament lymphatique. Il a eu une première

attaque de chorée en 1881. Elle a commencé dans les premiers

jours de juillet, à la suite d'une peur, et n'a disparu qu'au

commencement d'octobre, c'est-à-dire après une durée de

plus de trois mois. Traitement : Bains alcalins, valériane,

toniques, bromure de potassium , purgatifs.

Le 2 février 1885, nous revoyons cet enfant. Il a été pris, il y

a huit jours, de mouvements choréiquos. Sa mère avait

remarqué que, depuis trois ou quatre semaines, il devenait

« songeur». Aucun autre prodrome. Début par la langue et la

moitié droite de la face, puis envahissement du bras et de la

jambe du même côté, et enfin des membres du côté gauche,

mais à un moindre degré. L'agitation est continuelle, avec

exacerbation le matin. La nuit, si on ne le maintenait, il

tomberait de son lit ; il a des frayeurs et ne veut coucher que

dans les bras de son père. Parfois, il ne peut rester assis. En

buvant, il répand le contenu du verre. Dans la marche, il se cogno

les jambes et tombe souvent. Il est devenu très émotionnable : si

on le regarde, il s'imagine qu'on se moquedelui et pleure. Son

caractère est très modifié : il déchire ses effets, ses bas, ses

souliers, etc., tandis qu'auparavant il était très soigneux. Il parle

en mâchonnant, en coupant les mots, bave, se mord la langue.

Hier matin, il a fait une chute, a eu peur, et, depuis ce

moment, l'agitation aurait un peu diminué. Céphalalgie; pas de

vomissements, constipation. Au dynamomètre Mathieu : 5 à

droite, 9 à gauche. Traitement : purgatifs, valériane, sirop

d'iodure de fer ; 2 gr. de bromure de potassium.

12 février. La mère de L... prétend que l'agitation a peu

diminué, qu'elle est plus forte de deuxjours l'un. Ainsi, elle est

plus prononcée aujourd'hui qu'hier : parolo difficile, grimaces

incessantes, mouvements continuels des bras, des jambes.

La marche est difficile, titubante ; les pieds s'appuient mal, le

droit frotte le sol et se soulève plus haut qu'il ne convient; les

CliUIIEE : ÉCRITURE.

51 1

jambes sont projetées de côté ; l'enfant s'arrête brusquement

et repart plus vite qu'il ne voudrait. Parfois, le corps s'incline

latéralement en avant ou en arrière. La joie ou les contrariétés

augmentent le désordre musculaire. - Les fonctions

digestives s'exécutent bien, mais la constipation persiste.

Traitement : 2 Capsules de bromure de camphre le soir

pendant deux jours ; 2 matin et soir pendant cinq jours ;

ensuite 2 le matin et 3 le soir; le reste ut supra.

l'J février. Au lieu de suivre exactement la prescription, la

mère de L .. lui a donné dès le premier jour deux capsules le

matin et trois le soir. Une amélioration de plus en plus marquée

s'est produite à partir du 1'i jusqu'à hier soir. A ce moment,

sans cause connue, l'agitation a reparu tout d'un coup :

mouvements de la tête, des yeux, des membres, envie de

pleurer, etc. On l'a couché, et peu après il s'est endormi. Dans

la journée, il avait été triste,avait refusé de jouer avec ses frères

et était resté couché sur un tapis. Ce matin, l'enfant se présente

à nous dans une situation en tout semblable à celle que nous

avons décrite il y a huit jours. Il essaie d'écrire son nom; tout

son corps remue, ses pieds buttent le parquet, la plume lui

échappe ; enfin, après des efforts réitérés, il arrive à tracer le

barbouillage représenté fig. 4.

Traitement : 2 Capsules

de bromure cle camphre

du 20 au 25 ; 1 le matin et

2 le soir du 2(5 au 2,s 2

matin et soir du 1er au 5

mars ; sirop d'iodure de

fer, tisane do valériane,

bains alcalins.

5 mars. On note un

mieux sensible. L'enfant

boit seul, s'habille, mais ne

peut se boutonner, parle

plus facilement, etc. La

chorée, qui prédominait à

droite, semble à peu près

égale des deux côtés. -

Même traitement.

19 mars. L'amélioration a

continué : L... mange seul

sans trop d'inconvénients;

saute à la corde, siffle, est

moins impressionnable, n'a plus peur la nuit et couche seul. Il

pont maintenir les mains appuyées sur la table sans bouger

Fig. i.

52 CHORÉE : BROMURE DE CAMPHRE.

durant une minute environ. Il écrit encoroillisiblement(/i. 5).

Les grimaces sont intermittentes. La parole est plus libre. La

marche est plus assurée, il ne se cogne ni ne tombe plus. Au

dire de sa mère, L... a grandi de 4 centimètres. - Traitement :

Les Capsules, supprimées le 16 mars, sont reprises ; huile do

foie de morue, vin de gentiane, etc.

26 mars. Le mieux se soutient. L... mange avec une

fourchette, se déshabille, s'habille, se boutonne seul, casse du

bois, etc. Même traitement, mais suppression du bromure

de camphre.

16 avril. L'enfant paraît à peu près guéri : parole libre,

absence de grimaces, mouvements des membres réguliers,

marche naturelle : cependant sa mère dit qu'il lui arrive

quelquefois de se pencher brusquement comme s'il allait

tomber. Le sommeil est bon.Toutes lesfonctionss'accomplissent

bien. Son écriture commence il être régulière (lit. 6).

30 avril. L... est guéri. Sa mère, interrogée sur le médicament

qui, selon elle, a le plus heureusement agi, a déclaré aussitôt

que ce sont les capsules.

21 mai. 1 ? n'a pas eu de nouveaux accidents. Son écriture

a repris les caractères qu'elle avait avant sa maladie (7. 7).

Fiy. 5.

1 - - 1 Fig. 6.

Fia. 7. /

CHORÉE : BROMURE DE CAMPHRE. 53

Cette observation s'ajoute à celles qui ont été rapportées

par les auteurs pour montrer qu'il est possible de recourir

avec avantage au bromure de camphre dans le traitement

de la chorée. Il va de soi que l'on doit agir avec prudence,

commencer par des doses faibles, que l'on élève progres-

sivement. Dans le cas actuel, nous avons fait prendre

les Capsules du matin dans de l'huile de foie de mo-

rue, qui en rendait la dissolution plus rapide.

54 FOLIE DE L'ENFANCE.

III.

Hallucinations de la vue, de l'odorat et du

goût chez un enfant ; i

Par BOURNEVILLE et COURBARlEN.

Nous avons eu déjà bien des fois l'occasion, à la Sal-

pêtrière et à Bicêtre, de recueillir des observations rela-

tives à la folie chez les enfants. En attendant que nous

puissions les rédiger et traiter ce sujet d'une façon

complète, nous croyons intéressant de placer sous les

yeux du lecteur l'observation suivante.

Sommaire. Père : excès de boisson; eczéma; migraines.

- Tante paternelle morte d'apoplexie. -DTèi·e usée, aspect

misérable, instruction nulle ; intelligence tout à fait ordi-

naire. - Frère et soeur un peu arriérés.

Intelligence un peu arriérée ( ? ). Céphalalgies.

Cauchemars consécutifs a des récits concernant les no-

leurs. Hallucinations de la vue, de l'odorat, du goût.

Guerison.

Moren ? Jules, âgé de quinze ans, est entré à la section des

enfants idiots de 131cétro (service de M. Bourneville), le 22 dé-

cembre 1884.

Antécédents (Renseignements fournis par son père el sa

wère).-Pé1·l' 52 ans, faïencier, trapu, sanguin ; ;- il'Lise pas de

tabac, très nombreux excès de boissons assez souvent sui-

vis de violences ; eczéma des mains et du corps. Pas de

convulsions; gourmes; sujet à des migraines de 14 à 40 ans ;

leur intensité et leur durée l'obligeaient souvent à suspendre

son travail. [Père mort, à 70 ans, d'une enflure des jambes, il

était sobre. Mère morte à 72 ans de fatigues et d'usure. -

Grands -parents : pas de détails. Deux frères, un mort-né,

l'autre âgé de 47 ans est bien portant et a eu neuf enfants

exempts de tout accident nerveux. De ses trois soeurs, l'aînée

est morte d'une apoplexie foudroyante à 35 ans ; une autre a

deux enfants bien portants comme elle ; 1) de nouvelles de

la troisième depuis une vingtaine d'années. - Pas d'aliénés,

folie Nu l'enfance. 55

d'épileptiques, ni paralytiques, ni difformes, ni sourds-muets,

ni suicidés, ni criminels dans la famille.]

Mère, 49 ans, autrefois journalière aux champs et mainte-

nant couturière, très usée ; chute probable de la vesssie ; sobre,

nerveuse; pas de migraines, mais ou des céphalalgies à

15 ou 16 ans. Les règles se sont établies à 17 ans ; elles ont

diminué d'abondance depuis trois ans ; elles viennent assez

souvent deux fois par mois ; laborieuse ; pas de maladie de

peau. Intelligence tout iL fait ordinaire, mais non arriérée. Pas

de convulsions, pas d'attaques. Mariage tardif, à 30 ans. [Père

mort de la poitrine iL li-2 ans ; sobre. -Mère, morte de fatigue à

75 ans,ellen'était ni paralysée ni en enfance. Pas de détails sur

les grands parents. Un frère mort à 3 ans, on ne snit de

quoi, mais sans avoir présenté de convulsions. Do ses quatre

soen ? 's, trois sont mortes de un an à quinze mois, on ne sait

de quoi ; l'autre est bien portante et a deux enfants aussi en

bonne santé. Pas d'aliénés, etc.]. Pas de consanguinité. (Le

père est de Vierzon et la mère des environs de Tours.)

Le père du malade a été marié trois fois et a eu de sa pre-

mière femme cinq enfants : 1° Fille, 28 ans, bien portante ; elle

a une fille de 10 ans en bonne s : l ! 1té; - 2" Fille morte sans

enfants, à 25 ans, d'une angine ; - 3° Garçon bien portant, il

a eu un enfant mort-né; lit et 5° deux jumelles (1) mortes

il huit mois de la dysenterie.

Il a.eu de sa seconde femme : 11° Fille, -'2 ans, bien portante;

nerveuse ; colère ; pas de convulsions ; pas d'enfants.

Sa troisième femme, la mère du malade, lui a donné trois

enfants : 1° Notre malade ; - 20 Une fille, âgée de 13 ans, bien

portante; céphalalgies, pas de convulsions; intelligence mé-

diocre; 3" Garçon, 9 ans, bien portant ; pas de convulsions ;

il est lourd et apprend très lentement.

Notre malade. Parents bien portants iL la conception qui a

eu lieu trois ans après le mariage. Grossesse bonne, pas do

traumatismes, de chutes.de chagrins ou d'alcoolisme; pas

d'ccdèmo. ,Lccouclcen2ent à terme, naturel. la naissance, bel

enfant, fort, pas d'asphyxie. Elevé au sein par sa mère

jusqu'à dix-huit mois, il a eu sa première dent à onze mois, a

marché à quatorze mois et a été propre vers quinze. Il n'a

jamais eu de convulsions. Envoyé it l'Asile dès 3 ans et à l'école

à 6 ans, il apprenait difficilement, si bien que le maître d'écolo

a conseillé de le retirer pour le mettre en apprentissage. Pas

(1) Le libre assure qu'il n'y avait de jumeaux ni de son côté, ni

dans la famille de sa femme.

5G PEUR : cauchemars ; HALLUCINATIONS.

de manifestations de scrofule ; pas de dartre ni do teigne. Rou-

geole à sept ans; pas d'autres fièvres. Ni tics, ni onanisme, ni

vers. Caractère un peu sournois; il est médiocrement affectueux

et n'a pas de mauvais instincts.

Le 4 novembre dernier, l'enfant a beaucoup entendu parler

par ses camarades, à l'école du soir, de voleurs et de vols com-

mis vers cette époque dans le pays. Cette nuit même, il a brus-

quement réveillé ses parents en poussant des cris violents et

répétés : a aux voleurs ! » Il avait l'air égaré quoiqu'il fut bien

éveillé et, bien que ses parents soient restés près de lui le reste

de la nuit pour le rassurer, il n'a pu se rendormir.

A partir de ce jour, il a continué à aller travailler comme

apprenti cordonnier il Choisy-le-Roi, mais on était obligé

d'aller à sa rencontre et sa mère devait coucher avec lui pour le

rassurer ; à l'atelier, il voyait dans les boîtes de clous une

grosse boule blanche de la grosseur d'une bille de billard.

Le 27 novembre, son état s'aggrave ; il est inquiet et voit des

voleurs dans les coins de l'atelier ou sous la table de travail.

Tout à coup, il croit s'apercevoir que les voleurs s'avancent

vers lui; il les signale : « Tiens, voilà un voleur chez vous »,

dit-il à son patron, puis il se jette brusquement dans les bras

de celui-ci afin de lui demander protection. Tout le reste de la

journée il a continué à voir le voleur qui se cachait le plus

souvent sous la table ; il se plaignait de picotements dans les

diverses parties du corps : « les mouches le piquaient ». Le soir,

la lumière allumée, il prenait les ombres reflétées sur une porto

vitrée pour le voleur, il se raidissait alors et pâlissait.

Le jour suivant, les troubles intellectuels auraient encore

augmenté : Mor... voyait toujours le voleur, des boules d'or et

d'argent qu'il essayait d'attraper et qui se dérobaient au moindre

effort qu'il faisait pour les atteindre ; ou bien il voyait des

têtes qui s'allongeaient sur le mur comme pour surveiller ce

qu'il faisait et qui disparaissaient aussitôt qu'il se retournait.

Pour toutes ces raisons, il était impossible de l'amener à

changer de place et surtout à passer d'une pièce dans une

autre; on a essayé chez son patron de l'y contraindre, mais ce

fut une véritable bataille dans laquelle l'enfant donnait des

coups.

Indépendamment de ces hallucinations de la vue qui re-

viennent à diverses reprises dans le jour, on a constaté encore

des hallucinations de l'odorat : il sentait tout it coup une

mauvaise odeur dans l'appartemant et des hallucinations du

goût : il refusait de boire son café parce qu' « on y avait mis

de la terre glaise. »

FOLIE DE L'ENFANCE. 57

Il y a huit jours (28 novembre), étant au lit, il a cru que la

boule blanche était venue le surprendre et il se tortillait en

divers sens pour lui échapper , disant qu'elle le piquait, le

mordait, etc. Depuis qu'il est dans cet état, il mange peu et

passe son temps avec sa mère ou les voisines, évitant de se

trouver seul. Son sommeil est tranquille, mais à la condition

que quelqu'un couche à côté de lui. Avant sa maladie, il se

plaignait de maux de tête assez fréquents, quelquefois accom-

pagnés de vomissements. Traitement : chloral, eau de

Pullna, bains.

Il décembre. - Mor... est toujours très émotif; ses peurs

persistent. Il ne veut pas quitter sa mère un seul instant. Il ne

voit plus de boule, mais il voit encore des têtes attachées le

long du mur auprès de son lit. Le sommeil est moins mauvais.

- Angine érythémateuse. Même traitement; gargarisme.

Jusqu'à ce jour, nous avons vu l'enfant à notre consultation ;

nous conseillons de nouveau à sa mère de le placer à Bicêtre.

Elle s'est décidée à le faire. Elle l'a conduit le 20 décembre à

l'Asile clinique (Sainte-Anne) d'où il nous a été envoyé le

2 ? décembre. Durant son court séjour à Sainte-Anne M. Ma-

gnan a noté qu'il voyait des têtes qui le regardaient, s'appro-

chaient de lui et l'effrayaient. Les hallucinations étaient diur-

nes et nocturnes. Il était triste, inquiet, légèrement excité.

Etat ;i l'entrée (fin décembre).- La tête est arrondie, les bos-

ses frontales et pariétales sont peu saillantes. La protubérance

occipitale, assez proéminente, est surmontée d'une dépression

transversale. - La face est ovale, symétrique ; le nez, les yeux

(un peu saillants), la bouche,etc., sont régulièrement conformés.

Les oreilles sont petites et bien ourlées; leur lobule est adhé-

rent. - Le cou est court et gros. Le tronc, les membres

supérieurs et inférieurs sont normaux. La sensibilité

générale et les sens spéciaux n'offrent pas de lésions.

Les organes génitaux sont normaux. La puberté s'annonce

seulement par un duvet assez abondant sur les joues et par

quelques poils sur le pénil et à la partie supérieure des bourses.

L'enfant assure qu'il ne se touche pas ( ? ). - Taille : 1 m. 42 ; -1

- poids, 1 kilogr. 42. Dynamomètre (Collin) : adroite, 27 ; à

gauche, 21.

La respiration et la circulation sont régulières. - La peau,

un peu rugueuse, offre un aspect furfuracé sur les cuisses et à

la face externe des bras. - La dentition est régulière (14 dents à

chaque mâchoire) ; l'articulation des mâchoires est normale ;

58 HALLUCINATIONS. GUÉRISON.

les gencives sont en bon état. Appétit naturol ; constipation

habituelle.

L'intelligence de l'enfant est peut-être supérieure à ce que

semble indiquer son degré d'instruction qui paraît assez faible :

1\1.... lift couramment, d'une façon expressive, écrit passable-

ment, commence à faire la division. Sa tenue est bonne. Trahi-

tement : bains et purgatifs 2 fois par semaine; sirop d'ioduro

de fer; gymnastique, école, cordonnerie.

7 janvier 1885. Mor.... est tranquille, obéissant, son

sommeil est bon, il n'a plus d'hallucinations de la vue, ni du

goût, etc. Il déclare se trouver beaucoup mieux ; il ne pousse

plus de cris à l'improviste comme cela lui arrivait chez lui

lorsqu'il avait ses hallucinations : « Je no crie plus, dit-il. »

Février, mars. - L'amélioration se maintient, Mor..., est

docile et travaille bien. Une surveillance attentive ne fait

constater aucun trouble intellectuel ou sensoriel.

Avril. Même traitement et hydrothérapie.

2 mari. - La mère de l'enfant complète les renseignements

qu'elle nous a donnés par les suivants, qu'elle n'a pas osé

fournir devant son mari : elle dit qu'elle a toujours été mal-

heureuse avec lui ; qu'il a commencé à la battre huit jours

après son mariage ; qu'il est devenu do plus en plus paresseux

et ivrogne. « Il y a quelques jours, ajoute-t-elle, il est rentré

ivre, il m'a mise à la porte, avec ma fille, en chemise et nous

avons été forcées de nous réfugier chez une voisine. »

L'enfant est guéri. Il a fait des progrès sérieux l'école ; son

écriture est meilleure ; il a appris quelques notions d'histoire

et de géographie ; il fait de petits problèmes sur les quatre

opérations ; enfin il s'est perfectionné dans son métier de cor-

donnier. Exeat. Taille : 4m 425 ; Poids : 32 k. 500 ; il a

donc un peu grandi et un peu augmenté en poids durant son

séjour à l'hospice.

*)mat. est retourné travailler chez son ancien

patron. Il a repris son ancienne place dans la boutique. 11 n'a

présenté aucun trouble intellectuel. Sa patronne, qui l'accom-

pagne, dit avoir remarqué que, parfois, le regard était un peu

égaré. Elle confirme le récit précédent relatif à son père : Il

est ivrogne, fainéant et bat sans cesse sa femme et ses

enfants (1). o

(I) Nous avons cherché, mais en vain, à avoir des nouvelles de

l'enfant depuis sa sortie ; ses parents ont quitté Thiais où ils de-

meuraient lors du placement et de la sortie de l'enfant.

HALLUCINATIONS. GUÉRISON. 5H )

Relevons les particularités les plus intéressantes de

ce cas. L'hérédité a joué un rôle important. Le père de

Mor... était alcoolique, violent et migraineux ; une de

ses tantes paternelles est morte d'apoplexie. Sa mère

n'a qu'une intelligence au-dessous de la moyenne. Un

frère et une soeur paraissent se rapprocher des enfants

arriérés, si même ils n'appartiennent à cette catégorie.

Quant à l'enfant lui-même, il ne présente dans ses

antécédents aucune affection pathologique digne de

mention. Bien que l'instituteur n'ait pas obtenu, avec

lui, des résultats satisfaisants, nous hésitons cependant

riérés, car, à Bicêtre, il a fait de sérieux progrès.

Une émotion vive a été l'origine des accidents qui

nous l'ont fait conduire. Ces accidents se sont résumés

en une impressionnabilité très vive et en des hall2cci-

nations de la vue, de l'oclo1'êlf et du goût, sans délire

général, sans excitation maniaque. La mémoire était

conservée ; le raisonnement n'offrait aucune modifi-

cation.

Ces accidents ont disparu très vite aussitôt que l'en-

fant a été changé de milieu et placé dans de meilleures

conditions hygiéniques et morales. Le traitement a été

très simple et peut se résumer ainsi : école, gymnasti-

que, atelier, bains, hydrothérapie, toniques et pur-

gatifs.

TABLE DES MATIERES

PREMIERE PARTIE

Histoire du service pendant l'année 1885.

62 TAULE DES MATIÈRES.

TABLE DES MATIÈRES. ¡);3 I-)

DEUXIEME PARTIE

Clinique.

r. Des familles d'idiots, par Bourneville et Sellas ... l

II. Observation de chorée guérie par le bromure de cam-

phre ; spécimens de l'écriture d'un choréique, par Bour-

ncvillc ................. 49

II 1. - Folio de l'enfance, hallucinations de la vue, de l'odo-

rat et du goût, par Bourneville et Courbarien.... 53

P.11t1S. 1MP. V. GOUPY ET JOUHDAN, RUE DE RENNES, 71