(1877) Iconographie photographique de la Salpêtriere. Service de M. Charcot, 1877
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(1877) Iconographie photographique de la Salpêtriere. Service de M. Charcot, 1877

ICONOGRAPHIE

PHOTOGRAPHIQUE

de i.a

SALPÉTRIÈRE

SERVICE DE M. GH ARGOT

par

BO URNE VILLE ET P. REGNARD

PARIS

Aux bureaux du PROGRÈS MÉDICAL

fi, rue des Ecoles, fi.

V. ADRIEN DELAHAYE4C8, Libraires-Éditeurs

Place de l'Ecole-de-Médecine

PRÉFACE

En soumettant a l'appréciation du public médical ce premier volume de /^Iconographie photographique

de la Salpêtrière, il nous semble nécessaire de dire pourquoi et comment il a été conçu et exécuté.

Bien des fois, dans le cours de nos études, nous avons regretté de ne pas avoir à notre disposition les moyens de perpétuer par le dessin le souvenir des cas, intéressants à des titres divers, que nous avions l'occasion d'observer. Ce regret devint de plus en plus vif a mesure que nous vîmes, par l'exemple de M. Charcot., combien étaient considérables les bénéfices qu'on pouvait retirer de semblables représentations.

Plus tard, durant notre collaboration à la Revue photographique^ nous eûmes la pensée de faire photographier les malades épileptiques et hystériques, qu'une fréquentation assidue des services spéciaux de la Salpêtrière nous 'permettait de voir fréquemment tandis qu'elles étaient en attaques. Obligé de recourir à un photographe du dehors, nos premières tentatives furent peu fructueuses : souvent, lorsque l'opérateur arrivait, tout était fini.

Pour réaliser le but que nous poursuivions, ce qu'il fallait avoir sous la main, à la Salpêtrière même, c'était un homme qui connût la photographie et fût assez dévoué pour être prêt, chaque fois que les circonstances Vexigeraient, a répondre a notre appel.

L'homme dévoué et habile que nous désirions, nous avons eu la bonne fortune de le rencontrer en notre ami M. P. Regnard. Quand il vint, en qualité d'interne, à la Salpêtrière, en 1875, nous lui fîmes part de notre idée qu'il accepta avec empressement. C'est donc grâce à lui que nous avons pu utiliser, d'une façon saisissante, une portion des matériaux, que nous avons rassemblés.

Tout d'abord, nous avions, M. Regnard et moi, composé un Album de cent photographies et peut-être noîis serions-nous bornés là, si notre excellent maître, M. Charcot, qui suivait nos travaux cliniques et nos essais photographiques avec sa bienveillance habituelle, ne nous avait encouragé à publier les observations recueillies par nous dans ses salles, en les illustrant des photographies prises par M. Regnard. Nous avons suivi ce conseil ; c'est maintenant aux lecteurs à décider si l'œuvre, qui nous est devenue commune avec M. Regnard, est utile et mérite d'être poursuivie.

30 Novembre 1877.

BOURNEVILLE.

HYSTÉR0-ÉP1LEPSIE

ATTAQUES

OBSERVATION I.

Hystérie.

Th. L..., dont nous allons rapporter l'histoire, n'appartient pas à proprement parler au groupe de Y hystéro-épilepsie. C'est une hystérique ordinaire. Mais, en raison de la simplicité de ses attaques, dans lesquelles les phénomènes épileptoïdes étaient à peu près nuls, nous avons cru devoir placer son observation en tête de ce volume. Elle aura encore l'avantage de mieux mettre en relief les phénomènes multiples que nous aurons à décrire chez les autres malades.

Sommaire. — Antécédents. — Maladies de l'enfance. — Début de l'hystérie; ses causes. — Hémianesthésie. — Hyperesthésie ovarienne. — Description des attaques : périodes. — Urines. — Température. — Traitement et marche des attaques. — Relation entre les règles et les attaques. — Tuberculose pulmonaire ; son influence sur les attaques et sur les symptômes permanents de l'hystérie. — Mort. — Autopsie.

L...., Th., fleuriste, est entrée à la Salpétrière (service de M. Charcot), le 12 août 1872 ; elle était âgée de 18 ans.

Renseignements fournis par sa mère (juin 1874). Père, mort à 42 ans, d'une pleurésie; il était très-irritable, grand bu

veur de café. Dans l'année qui précéda la naissance de Thérèse, il eut des crises nerveuses dans lesquelles il ne perdait pas connaissance, mais il ne pouvait se tenir, tombait et parfois se blessait. Ces crises, qui se terminaient par des pleurs et du tremblement, duraient 10 à 15 minutes. [Père, nerveux, mort à 83 ans d'une rétention d'urine. — Mère, âgée de 80 ans, bien portante.]

Mère, sujette à des bronchites; aucun accident nerveux. [Père, mort d'une attaque d'apoplexie à 60 ans. — Mère, morte de la poitrine à 46 ans : elle avait eu 21 enfants.]

Pas de consanguinité.

Deux enfants : 1° une fille, âgée de 22 ans, d'une bonne santé, mais très-impressionnable ; 2° notre malade.

Th. a été élevée en nourrice jusqu'à dix mois ; elle aurait pâti dans les trois derniers mois, ce qui décida sa mère à la reprendre : elle téta une chèvre jusqu'à 4 ans. Sa première enfance a été très-accidentée : bronchite, eczéma généralisé, rougeole, vario-loïde. A chaque dent qui perçait, elle était à la mort; pourtant elle n'eut pas de convulsions; ses dents venaient toutes gâtées. A 3 ans et demi, elle ressemblait à une petite vieille, pissait encore au lit et commençait à peine à parler et à marcher. A partir de 4 ans, l'intelligence s'est développée et toutes les fonctions ont pris un cours régulier. Vers 7 ans, glande au cou de la grosseur d'un œuf. Th. était paresseuse, elle ne voulait rien apprendre, était taquine, méchante et se faisait renvoyer de toutes les pensions où on la mettait.

Les règles ont paru sans douleurs à 13 ans. Après la troisième époque, il y eut une suspension d'un an. Mise en apprentissage comme fleuriste (15 ans), Th. travaillait mal et se disputait avec ses camarades. Chez elle, sa mère et sa sœur la laissaient faire ses caprices pour avoir la tranquillité.'

En juin 1870, elle eut une fièvre muqueuse dont la convalescence fut longue.

La première attaque d'hystérie est survenue en juillet 1871 dans les circonstances suivantes : Son patron l'accusa, à tort, de lui avoir dérobé 500 fr; il lui fit une scène violente et la menaça de la pri

son : huit jours plus tard, Th. eut une attaque qui fut subite et dans laquelle elle se blessa au front où l'on voit une cicatrice. Toutefois, le terrain était déjà préparé. En effet, Th. était très-nerveuse, les événements du siège l'avaient vivement impressionnée et, depuis le mois de janvier, il lui arrivait de temps à autre de pleurer sans motif, d'avoir des étouffements et une sensation de boule qui remontait vers la gorge.

Mme L.... était alors absente de Paris ; elle revit sa fille en septembre. A ce moment, les crises étaient précédées de douleurs à la région cardiaque. Immédiatement avant leur début, Th. s'écriait : « Ah! mon cœur! mon cœur! » et tombait sans connaissance. Elle se débattait et criait beaucoup; il fallait plusieurs personnes pour la maintenir. Ensuite, elle pleurait et s'endormait. Elle n'avait ni écume, ni vomissements.

En octobre, les crises se succédant à des époques de plus en plus rapprochées, on plaça Tb. à Necker où elle resta deux mois. D'abord, elle eut des séries d'attaques presque tous les jours : l'une d'elles se prolongea 8 ou 9 heures. Une amélioration s'é-tant produite, Th. revint chez sa mère. Les attaques ne reparurent pas pendant deux ou trois mois, mais on observa de latympanite, uneconstipa-tion opiniâtre, exigeant, pour être vaincue, jusqu'à cinq gouttes d'huile de croton. Th. était triste, colérique, méchante et se plaignait souvent de douleurs au cœur.

Les attaques recommencèrent en mai 1872. Un soir, en dinant, elle repoussa brusquement son assiette, et fut prise de convulsions. Le lendemain, comme on lui demandait pourquoi elle avait rejeté son assiette, elle dit qu'elle était pleine de crapauds (1). Elle fut envoyée de nouveau à Necker et, les attaques persistant, elle fut dirigée sur la Salpétrière.

Les règles ont été supprimées de nouveau du mois de juin 1870 au mois d'août 1872. — Ni onanisme, ni rapports

(1) Le démon, pour se venger, prend cent formes hideuses : « Il file gluant en couleuvre sur le sein de la sorcière, danse en crapaud sur son ventre ou chauve-souris, d'un hec aigu, cueille à sa houche effrayée d'horribles baisers... » (Michelet, La Sorcière, p. 76).

sexuels. — Affections vermi-neuses (oxyures et ascarides). Depuis quelques années, Th... aurait un caractère moins désagréable et se montrerait plus aimante vis-à-vis de ses parents.

Etat de la malade 2^endant les années 1873, 1874, 1875. (Planche I).

Fonctions intellectuelles, etc. — Th. est dissimulée, capricieuse, taquine et met souvent la discorde entre ses compagnes ; elle est contente quand elle occasionne des embarras : une nuit par exemple, elle saute par la fenêtre et va se coucher dans râtelier de couture, afin qu'on la cherche; d'autres fois, elle se sauve dans les cours, essaie de sortir de la Salpé-trière, etc. — Elle est très-impressionnable et fréquemment on a remarqué que ses attaques se montraient après des disputes. Peut-être aussi, à ce moment, est-elle déjà sous le coup de l'aura.

Appétit variable, préférence pour les mets acides, renvois gazeux, crampes d'estomac, constipation habituelle (une garde-robe tous les 3 ou 4 jours). — Palpitations cardiaques par accès, avec douleur à la région précordiale, pâleur et quelquefois faiblesse lipothymique.

Les règles sont peu abondantes et très-irrégulières : elles ont paru sept fois en 1873, douze fois en 1874, neuf fois en 1875 et deux fois du 1er janvier au 21 juillet 1876.

Hémianesthésie. — Elle est complète sur toute la moitié droite du corps : ni le froid (glace), ni la chaleur (boule d'eau chaude), ni le pincement ou la piqûre (transfixión d'un pli de la peau) ne sont perçus. — L'insensibilité porte également sur les muqueuses (moitié droite de la langue, de la bouche, narine et conjonctive du côté droit). Les sens participent à l'anesthésie : Y ouïe est moins fine à droite qu'à gauche ; — Vodorat et le goût sont abolis. — En ce qui concerne la vision, voici les résultats d'un examen pratiqué par M. Landolt:

« Amblyopie de l'œil droit dont l'acui té visuelle n'est que de Cet œil distingue toutes les couleurs et voit en gris (comme l'œil gauche, normal) le mélange de trois couleurs fondamentales à quantités données. Seulement, pour être distinguées, les couleurs doi-

Planche I.

HYSTÉRIE : PHYSIONOMIE NORMALE

vent être plus rapprochées (ou plus étendues) que pour l'œil gauche.

« Ainsi, ia malade reconnaît avec son œil droit des couleurs de deux millimètres de côté sur le fond noir. — Le rouge et le bleu à 1 m. 30. — L'orangé, le jaune et le vert à 2 mètres. — Le violet à un mètre. Le minimum de couleur qu'il faut ajouter au blanc (disque rotatif) pour qu'elle soit perceptible à cet œil est :

De 135 parties de rouge pour 226 de blanc. De 60 parties de vert pour 300 de blanc. De 200 parties de violet pour 160 de blanc.

« Quant à la perception des différents degrés de clarté, l'œil ne distingue pas la différence entre un mélange de 20 parties de noir -f- 340 de blanc et de 25 parties de noir -f- 335 de blanc que l'œil normal reconnaît facilement.

« Le champ visuel de l'œil droit est rétréci concentrique-ment. Les limites du bleu n'atteignent pas 45°. Celles du rouge sont encore plus rétré-cies et celles du vert n'atteignent que 20° en dehors, en bas et en dedans, 15° en haut. — Les phosphènes ne sont perceptibles qu'à partir de l'é-quateur de l'œil, point qui correspond à peu près aux limites de son champ visuel (1). »

Hyperesthésie ovarienne ; aura. — Les attaques sont précédées d'une aura, offrant tous les caractères qui ont été décrits par M. Charcot : a) douleur siégeant à la région de Yovaire droit, et existant d'ailleurs, à titre .de symptôme permanent, entre les attaques; 6) constriction épigas-trique, suivie de palpitations cardiaques; c) laryngisme; d) phénomènes céphaliques consistant en des bourdonnements dans l'oreille droite et des coups de marteau au niveau de la tempe correspondante. Entre les phénomènes ovariques (premier nœud), exacerbation de ceux qui existent à l'état ordinaire, et les symptômes épigastriques, il s'écoule un temps relativement long ; arrivée au cœur, l'aura précipite sa marche et lorsqu'elle est parvenue à la tête, l'attaque éclate.

Description des attaques. — Les attaques se montrent par séries qui durent plusieurs

(l) Archives de physiologie, 1875, p. 632.

heures. Dans l'intervalle de deux attaques on observe l'état suivant : la tète est un peu inclinée, la face pâle; les paupières sont closes, les pupilles dilatées; par instants, on remarque des mouvements de déglutition ; le ventre est quelquefois volumineux, ballonné [iympanite). C'est sur ce terrain que se développent les attaques proprement dites.

Première période, a) La tète se soulève, se dirige sur l'épaule gauche; les cheveux sont rejetés en arrière (Pl. II); la face, devenue très-rouge, regarde à droite ; si on ouvre les paupières, on constate que les globes oculaires sont dirigés en haut et à droite, qu'ils sont animés de convulsions rapides et que les pupilles sont davantage dilatées. Le cou est gonflé, tendu. Les membres supérieurs, aemi-fléchis, rigides, et qui reposaient d'abord sur le tronc, se soulèvent au-dessus du lit. Les membres inférieurs sont rigides et dans l'extension.

b) Th. pousse un cri plus ou moins prolongé : Oue ! Oue ! et jette brusquement la tête sur la ligne médiane (Pl. III).

g) Après un court repos, surviennent les mouvements de balancement: Th. fléchit violemment le tronc, puis le rejette en arrière; ces mouvements se répètent cinq ou six fois avec une grande rapidité. Puis, le corps se met en arc et conserve cette position durant quelques secondes. On observe ensuite quelques mouvements légers du bassin.

d) La tète se place sur l'épaule droite, la face est tournée vers la gauche (Pl. IV). De petits mouvements tétaniques envahissent tout le corps et surtout les membres inférieurs.

Période clonique. La tète et le corps se reportent sur la ligne médiane; de nouveaux mouvements de balancement apparaissent et sont suivis de mouvements cloniques très-étendus des bras, des jambes et du tronc : c'est cette période qui nécessite l'emploi de la camisole.

Période terminale. Th. tombe en résolution ; la respiration est stertoreuse ; la bouche laisse parfois couler une écume sanguinolente (morsure de la langue) ; le corps se couvre souvent de sueurs.

Planche 11.

ATTAQUE D'HYSTÉRIE : lre PHASE

Planche III.

ATTAQUE D'HYSTÉRIE : 2e PHASE

Planche IV. ATTAQUE D'HYSTÉRIE : 3e PHASE

Bientôt la malade se réveille et pleure.

Les urines recueillies après les attaques, loin d'être claires, sont en général assez colorées. Elles ne contiennent ni sucre, ni albumine.

L'examen de la température chez Th. confirme l'opinion que nous avons émise ailleurs (1). 1S octobre]872:Th. est prise à 8 h. d'attaques hystériques épileptiformes qui continuent encore à 11 h.; à ce moment, T. Y. 38°; P. 120.

— 18 oct. Début de la série à 9 h. 3/4; à 10 h. 1/2 : T. V. 37°, 8. — 28 oct. La température est prise quand la malade est en attaques depuis une heure; elle est de 38°,2 ;

— un quart d'heure après la dernière, T. V. 37°,5. — 30 oct. Une demi-heure après le début, T. V. 37°,7. — 9 août : T. V. 38°,2 une heure après la première crise.

Traitement des attaques. --Divers moyens, mécaniques ou médicamenteux, arrêtent les attaques. — En premier lieu, vient la compression de la

(l) Etudes cliniques et thermométriques sur les maladies du système nerveux., p. 247.

région ovarienne droite. Sous son influence, la tête se soulève doucement, la gorge semble se gonfler et se tendre à l'extrême ; les paupières s'ouvrent peu à peu ; les yeux d'abord en haut et à gauche, deviennent directs; les pupilles reprennent leurs dimensions normales ; la respiration s'accélère et s'accompagne d'une sorte de sanglot étouffé; des larmes coulent sur les joues. Alors Th. recouvre la connaissance, se rend compte de ce qu'on fait et se plaint de souffrir du ventre ; ses pleurs augmentent, elle se débat pour échapper à la compression et se cache le visage. Suivant elle, la compression dé termine une sensation de strangulation, prédominant à droite. En général, lorsque la manœuvre est continuée durant quelques minutes, les attaques ne reparaissent pas. Pratiquée à gauche, la compression est de nul effet.

Les inhalations de nitriie d'ample (1) et de valérate d'é-

(l) Voyez : Bourneville.—Recherches cliniques et thérapexitiques sur l'épilepsie et l'hystérie, Obs. xxiv, p. 99.

I

thyle arrêtent également les attaques. Sous l'influence de ce dernier médicament, Th. revient à elle au bout d'une vingtaine de secondes : elle dit qu'elle étouffe, que ça sent mauvais, que ça racle dans sa gorge et qu'elle a mal à la tète.

Traitement de la maladie.

— Le bromure de potassium a été employé longtemps, quand Th. était chez ses parents et à Necker : il n'a eu d'autre résultat que de donner naissance à de nombreuses pustules d'acné. — Le bromure de camphre, administré à la Salpôtrière, n'a agi que sur les phénomènes cardiaques qui ont été amendés et sur le sommeil qui est devenu meilleur

Marche des attaques. —Août-décembre 1872, 30. — En 1873, 26 ; — en 1874, 55 ; — en 1875, 34.

Relation entre la menstruation et les attaques d'hystérie.

— Dans ce cas, cette relation

(l) La glace a été appliquée avec un certain succès contre les crises cardiaques. (Bourneville, loc. cit., p. 58.) n'a été que rarement observée, ainsi que le démontre l'examen comparatif des jours où les règles ont paru pendant l'année 1875.

15, 25 et 20 janvier, attaque; — règles, le 11. — 1,2, 10, 14 et 24 février, attaques : — règles, le 9.— 9, 12, 16 et 26 mars, attaques; — règles, le 7. — 12 et 23 avril, attaques; — règles, le 5. — 3, 11 et 30 mai, attaques; — les règles font défaut. — 3, 4, 16 et 24 juin, attaques ; — règles, le 22. — En juillet, ni règles, ni attaques. — 5 et 10 août, attaques ; — règles, le 9. — En septembre, attaques le 1er; — pas de règles. ¦— En octobre, les règles viennent le 3 ; — pas d'attaques.— 5 et 22 novembre, attaques; — règles, le 23, — En décembre, pas d'attaques, — règles, le 23.

Tuberculose pulmonaire. — Th. avait toujours été chloro-tique. A partir du mois de janvier dernier, ses forces ont décliné ; elle a eu de temps à autre de la diarrhée et des vomissements fréquents. En mai, ces accidents se sont aggravés ; Th. a maigri promp-tement et on a constaté les premiers signes d'une tuberculose pulmonaire. Celle-ci a fait de rapides progrès et Th. a succombé le 21 juillet.

Influence de la tuberculose sur les attaques et les symptômes permanents de Vhystérie. — Th. n'a eu aucune attaque en 1876. —Dans les premiers jours de mai — c'est-à-dire tout-à-fait au début de la tuberculose — Vhémianesthésie et Yhyperesthésie ovarienne du côté droit étaient présentes avec leurs caractères parfaitement accusés.

Le 1er juin, l'hyperesthésie ovarienne (spontanée ou provoquée) persistait encore, quoique moins intense qu'autrefois.—Le simple contact et le chatouillement n'étaient pas sentis sur la moitié droite du corps ; mais la piqûre d'épingle, la traction des poils, le pincement, le froid (glace) étaient perçus, un peu moins vivement toutefois qu'à gauche. L'ouïe était encore moins nette à droite: la vue, l'odorat et le goût étaient à peu près les mêmes des deux côtés.

Le 13 juillet, l'hyperesthésie ovarienne spontanée avait disparu ; la pression exercée sur cette région était encore douloureuse, mais Th. assurait que cette manœuvre ne déterminait plus la sensation ordinaire de strangulation. La sensibilité générale, dans ses divers modes, était complètement revenue, mais toujours un peu moins vive sur la moitié droite du corps que sur la moitié gauche.

Autopsie le 21 jîiillel 1876. — Crâne. L'examen le plus attentif, à l'œil nu, ne fait découvrir aucune lésion dans le cerveau (1155 gr.), dans le cervelet, la protubérance et le bulbe (U5 gr.), ni dans la moelle épi-nière.

Thorax. — Adhérences au niveau du sommet des deux poumons. — Poumon gauche : cavernes dans le tiers supérieur ; granulations disséminées dans le reste de son étendue. — Poumon droit : plusieurs petites cavernes dans le lobe supérieur ; — nombreux tubercules dans les autres lobes. — Cœur, petit, mou. décoloré.

Les autres organes ne présentaient pas de lésions méritant d'être relevées, saufles ovaires. Ceux-ci ont été examinés avec soin par M. de Si-néty ; voici un résumé de la communication qu'il a faite sur ce sujet à la Société de biologie. (Séance du 2 décembre) :

c Les organes génitaux externes étaient normaux. L'ovaire droit était distant de l'utérus de 4 centimètres, tandis que le gauche était seulement à un centimètre environ de l'ovaire droit. — Entre cet organe et le pavillon de la trompe, on voyait une petite tumeur hémisphérique, de la grosseur d'un pois, simulant un ovaire surnuméraire.

» KV examen M biologique, on constatait qu'il n'y avait sur aucun point des deux ovaires un seul follicule de Graaf à une période quelconque de son développement ascensionnel. On ne trouvait que des follicules primordiaux contenant leur ovule avec une seule rangée de cellules. On voyait quelques follicules atrophiés, mais aucune cicatrice indiquant une ovulation plus ou moins ancienne.

» La muqueuse utérine était dans l'état qu'elle présente au début de la période menstruelle. Les vaisseaux étaient nombreux et gorgés de sang; les glandes hypertrophiées et dépourvues à peu près partout de leur épithélium cylindrique. Dans la lumière des glandes, on observait un grand nombre de petites cellules rondes, présentant les caractères des éléments embryonnaires. En outre, tout le tissu interposé entre les glandes était infiltré des mêmes éléments.

» La couche la plus interne de la muqueuse ne se colorait pas par le picro-carminate, et, à un grossissement suffisant, on reconnaissait que les éléments de celte couche avaient subi la dégénérescence graisseuse.

» La petite tumeur située dans le voisinage de l'ovaire droit ressemblaitaupremier abord, ou avec un grossissement faible (15 diarn.;, à un ovaire de nouveau-né. On y voyait, en effet, un revêtement épi-thélial se prolongeant sur certains points dans le stro-ma et rappelant la disposition des tubes de Pflüger et des cavités contenant de petits masses arrondies. Mais, avec un objectif plus puissant, on constatait que l'épi-thélium de la surface et des tubes, — aussi bien que celui qui recevait les cavités, — étaient formés de cellules à cils vibrátiles. Les petits corps globulaires, contenus dans les cavités, n'étaient eux-mêmes que des amas d'épi-thélium desquamé. Le stroma

était à peu près semblable à celui de l'ovaire normal adulte. Mais, sur aucun point de cette tumeur, on ne voyait un seul ovule ou rien qui pût y ressembler. C'était donc un pseudo-ovaire surnuméraire. »

Les attaques, chez Th. L..., ont toujours offert une régularité parfaite : les Planches II,•LU, IV donnent une idée exacte des principales attitudes de la tête.

Contrairement à ce que nous relèverons plus tard, elles n'étaient pas d'ordinaire suivies de délire : toutefois nous devons dire que, à la fin de quelques-unes de ses crises, Th. revoyait son patron proférant des menaces contre elle.

Un point, à notre avis, très-intéressant de cette observation, est relatif à l'influence de la tuberculose (dont l'évolution a été rapide) non pas sur les attaques, fait connu, mais sur les symptômes permanents de l'hystérie : Yhémianesthésie et Yhyperesthésie ovarienne. Nous avons constaté, en effet, que ces symptômes ont disparu très-vite à mesure que les lésions pulmonaires faisaient des progrès.

OBSERVATION IL

Hystéro-Epilepsie.

Ler..., Rosalie, âgée actuellement de 53 ans, habite la Salpétrière depuis trente ans. Son histoire est déjà connue. Nous l'avons racontée en entier (1). Aussi, nous bornerons-nous, ici, à rappeler les causes présumées de sa maladie, à décrire ses attaques et, enfin, à mentionner les modifications survenues chez elle depuis l'année dernière.

A onze ans, L... eut une première peur. Allant un jour porter le déjeuner de son père nourricier qui travaillait dans un autre village, elle rencontra un chien qui avait les yeux hors de la tête, la gueule pleine de bave, la queue traînante et balayant le sol. Cette vue l'effraya. Le chien, qu'elle supposait enragé, la suivant toujours, sa frayeur redoubla. Elle s'enfuit, tomba par terre et se fit de profondes blessures. Elle put se relever néanmoins et reprendre sa course folle

(l) Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie et Vhystérie, p. 116 à 150.

jusqu'à la maison où, en arrivant, elle tomba de nouveau, le corps tout raide et couvert d'une sueur froide... Durant huit jours, elle fut souffrante, eut de « fausses peurs », s'imaginant que le chien courait encore après elle. À partir de ce jour, elle fut sujette à des accidents qu'elle qualifie de « pertes de connaissance. »

Cinq ans plus tard, seconde peur. Voyant un attroupement autour d'une maison, elle voulut en connaître la cause et, malgré les recommandations des personnes sensées qui essayaient de l'éloigner, elle se faufila jusque dans la maison où elle vit le cadavre d'une femme que son mari venait d'assassiner. La vue du cadavre et de l'assassin arrêté par les gendarmes, déterminèrent une « attaque de nerfs. »

L... eut une troisième peur dans les circonstances suivantes. Une nuit d'hiver, traversant un bois où, deux années auparavant, on avait tué une enfant de 10 ans, et portant sur elle une somme de 200 francs, elle fut poursuivie par un voleur. Elle se sauva, appelant au secours ; mais, de plus en plus épouvantée par cet homme qui lui criait : « Je t'attraperai, va, gueuse! tu auras beau faire, » elle s'accrocha dans des « éronces» et tomba sans connaissances, en proie à une violente attaque convulsive.

Ces détails sommaires nous ont paru nécessaires afin que le lecteur puisse mieux interpréter les manifestations délirantes qui accompagnent les attaques d'hys

téro-épilepsie. Enfin, si dans le récit qui précède nous avons pris le soin de reproduire quelques-unes des expressions qu'elle emploie quand on lui fait raconter sonhistoire, c'est parce qu'elles donnent unejuste idée du degré de ses facultés intellectuelles. Elles sont médiocrement développées ainsi qu'on peut en juger par l'examen de la Planche V qui représente la malade dans son état normal. Rien, du reste, n'a été fait pour cultiver son intelligence. L... ne sait pas lire et plus loin on verra que, même sous l'influence de ses crises convulsives, son imagination ne lui fournit que des tableaux vulgaires.

Les symptômes permanents de Tliystérie que présente Ler... sont : une anesthésie générale et une liyperesthésie ovarienne double; mais ces symptômes, et par conséquent les phénomènes de Y aura, prédominent d'ordinaire dans la moitié droite du corps.

Divers phénomènes annoncent à l'avance, quelquefois de plusieurs jours, rapproche des attaques. Leur intensité s'accroît progressivement et, à un moment, la malade vient trouver la surveillante pour qu'elle prenne les précautions habituelles en pareille circonstance .

Description des attaques. — Les attaques, dans ce cas, offrent des formes assez nombreuses et qu'il serait bien difficile de décrire clairement et d'une manière trèsexacte, si nous ne nous aidions des figures et des planches. Bien que les unes et les autres soient en partie connues, nous les reproduirons afin de mieux réaliser le

Planche V.

HYSTÉRO-ÉPILEPSIE

but que nous poursuivons à | le des différentes phases des

Fig. 1.

savoir la représentation fidè- | attaques convulsives.

3

Formes communes. — L...., éprouvant les phénomènes habituels de l'aura, a prévenu qu'elle allait être malade ; on la déshabille rapidement et entièrement parce que, sans cette précaution, elle déchirerait tout \\). A peine est-elle couchée que la crise éclate.

La face pâlit et se tourne à gauche ; la tête ou s'incline sur l'épaule droite [Fig. ! et 2) ou bien demeure rectiligne {Fig. 3). Les yeux regardent en haut et à gauche, à un tel degré quelquefois que les pupilles sont cachées sous les paupières qui, elles, sont animées de palpitations rapides. Les muscles de la face, surtout ceux de la moitié droite, sont agités par des secousses cloniques. Ces phénomènes qui s'accompagnent d'une rigidité générale de tout le corps et des membres constituent une première période très-courte, que l'on pourrait désigner sous le nom de période épileptoïde.

Puis, survient une seconde période,quenous appellerons,

(l) C'est ce qui explique pourquoi, dans la plupart des figures que nous reproduisons, L... est représentée toute nue.

avec M. Charcot, la période des contorsions. Le bras droit s'élève dans l'extension et se place au-dessus de la tète : tantôt les doigts sont très-allongés et écartés [Fig. / et 2); — tantôt deux d'entre eux sont allongés, simulant des cornes, tandis que les autres sont fléchis : — tantôt enfin ce sont les trois premiers doigts qui sont allongés. — Le bras gauche est étendu le long du tronc ; les doigts sont fléchis, le pouce étant fortement appliqué contre la paume de la main.

Les membres inférieurs, à l'origine très-rigides et dans l'extension, s'infléchissent, tout en conservant leur rigidité, et s'entre-croisent. Les pieds participent à la contracture et les orteils sont vigoureusement fléchis (1).

Cette seconde période pré-

(l ) L'auteur de Y Histoire des Diables de Loudun mentionne la variabilité des symptômes chez les religieuses, réputées possédées : On recommença aussitôt les exorcismes et la Supérieure commença aussi à être travaillée de grandes convulsions, à peu près semblables à celles du matin, hormis que ses piés parurent crochus, ce qu'on n'avait point encore vu auparavant. » (p. 40).

sente d'ailleurs des variétés dont les Figures2et 5 donnent une idée suffisante pour qu'il soit inutile de les décrire.

On observe ensuite de grands mouvements avec prédominance de la projection du bassin en avant. Par instants, le corps ne repose plus que sur les talons et la partie postérieure de la tète. Puis, L... a une espèce d'accès de rage : elle pousse des cris effrayants, appelle à son secours, voit des brigands, des voleurs, etc. Ensuite, elle s'asseoit sur son lit, se lamente, se plaint de ne plus voir clair, incline la tète, la secoue violemment en grinçant des dents et en imitant les chiens qui ont saisi un objet qu'ils déchirent ; elle cherche à se mordre et, afin de s'y opposer, on interpose entre ses arcades dentaires une compresse qu'elle secoue avec furie.

D'autres fois, en même temps que L... crie : «Jean-Louis - Philippe ! » , elle se donne de violents coups sur la poitrine sur laquelle on place un coussin pour qu'elle ne se blesse pas, elle retombe sur son lit et, à diverses reprises, elle fléchit et étend brusquement le tronc et la tète. Enfin, elle se met à souffler, comme si elle allumait du feu. Durant la plupart de ses attaques, le ventre se ballonne démesurément (1).

Période de délire. — Aux convulsions succèdent des phénomènes délirants : L... divague, parle de chiens enragés, de gardes-champêtres, de forêts ; dit qu'elle a des oiseaux dans la tète, des lézards dans le ventre. Elle a des hallucinations de la vue et de l'ouïe : elle voit au plancher des papillons, des hirondelles, des étincelles qui voltigent, des lézards qui grimpent le long des murs , ou bien elle aperçoit un gros animal noir avec des cornes, et ressemblant à un bœuf : sa figure, dans ce cas, exprime l'effroi. Elle entend des voix, des cloches qui sonnent à toute volée, etc.

Variétés. Dans quelques attaques, le membre supé-

(l) Ce gonflement est un trait cruel de la possession ; c'est un supplice et un orgueil. Elle porte son ventre en avant, l'orgueilleuse de Strasbourg, renverse sa tête en arrière. ...» (Michelet : La Sorcière, p. 80.)

rieur gauche, après avoir | fléchit ; le bras se porte en

exécuté quelques grands mouvements oscillatoires, se ¿5%. 2.

arrière ; l'avant-bras va se placer horizontalement sur le

dos, de sorte que la main, qui est fermée, s'applique sur la colonne vertébrale. Quelquefois, le bras ainsi contracture un cri aigu et prolongé ; la bouche s'ouvre largement ; la langue est attirée si violemment au dehors, que sa

Fig. 3.

conserve cette position pendant des heures et ne redevient libre qu'à la suite de nouvelles crises convulsives. D'autres fois, L... pousse pointe descend jusqu'au menton et, en conséquence de la contracture, les papilles sont plus saillantes et la muqueuse devient bleuâtre.

A ces attaques, si diverses par l'ensemble des symptômes qui les composent, peuvent succéder des contractures plus ou moins persistantes, affectant soit la face et les mâchoires (Pl. VIII), soit la langue, l'isthme du pharynx, le col de la vessie, etc.

Crucifiement. — Les attaques dont nous avons parlé jusqu'ici constituent de véritables attaques démoniaques. Celles que nous allons décrire et qui sont très-rares ont un caractère tout à fait opposé. Nous les désignerons sous le nom d'attaques de crucifiement. Elles sont précédées d'ordinaire par de l'agitation, un hoquet fatigant et des mouvements de déglutition. Bientôt, la tète se porte en arrière, les bras s'étendent, le tronc se raidit, les jambes deviennent rigides. Alors, le crucifiement est complet. Voici les caractères qu'il présente (Planches VI, VII et IX).

D'une façon générale, immobilité complète de la face, du tronc et des membres. La tête est rectiligne, fortementportée en arrière ; }es paupières sont entr'ouvertes et parfois animées de mouvements convulsifs très-rapides ; elles laissent voir les globes oculaires qui sont immobiles, portés en haut et en dedans (Planche VII). Les muscles des mâchoires sont contractures et les arcades dentaires, distantes d'un centimètre l'une de l'autre, ne peuvent être ni rapprochées ni écartées.

La face antérieure du cou, arrondie, comme gonflée, est soulevée momentanément par de bruyants mouvements de déglutition. Les muscles du cou sont durs, tendus.

Les membres supérieurs, très contractures et étendus perpendiculairement au tronc, sont en croix (Pl. VI et IX); les mains sont fermées et les doigts fléchis si violemment sur la paume des mains qu'il est impossible de les allonger.

Le tronc est légèrement incurvé, de telle sorte que sa face postérieure est concave et que le ventre, par conséquent, est un peu projeté en avant. Les membres inférieurs sont rapprochés, allongés, les orteils sont fléchis, crochus.

En un mot, la rigidité est si accusée qu'on pourrait soulever le corps tout d'une pièce comme une barre de fer.

Planche VI.

ATTAQUE : CRUCIFIEMENT

Planche VIII.

CONTRACTURE DE LA FACE

Planche IX.

ATTAQUE : CRUCIFIEMENT (1875)

Ces attaques durent quelquefois six ou sept heures. La descente de croix s'effectue peu à peu. Les membres qui, pendant l'attaque, étaient pâles, presque froids, deviennent bleuâtres et chauds; les avant-bras se fléchissent puis s'étendent comme si la malade se détirait. Elle porte les mains à son cou qu'elle déchirerait si on ne la surveillait. Elle a un hoquet qui se précipite de plus en plus. La tête se fléchit. L... semble se réveiller d'un songe : « Où suis-je ? » Elle se soulève, s'assied, se lamente : « J'étais si bien là-haut, dit-elle..... C'était si

beau ! » Enfin, elle se plaint d'être fatiguée et courbaturée.

Lorsqu'on demande à L.....

de raconter ce qu'elle a vu, sa physionomie revêt une expression de bonheur : « Elle était dans le ciel au milieu d'une lumière éblouissante. Partout, il y avait de la mousse, des petits Saint-Jean, des moutons frisés, des diamants qui brillaient, des dessins des tableaux, des étoiles de toutes les couleurs... Notre Seigneur a de longs cheveux bouclés, une grande barbe rouge; il est beau, grand, fort, tout en or. La Sainte-Vierge est dorée. Notre Seigneur lui a parlé, mais elle ne peut se rappeler ses paroles. Elle n'a pu lui répondre tant elle était émue. »

Elle gémit et paraît regretter de ne plus avoir ses visions (1).

(l) Voyez aussi Bourneville. — Louise Lateau ou la Stigmatisée belge.

Les attaques de L... se présentent, en définitive, sous deux formes principales : les unes, rares d'ailleurs, observées pour la première fois en 1872 (Pl. VI) et pour la dernière fois, en 1875 (Pl. IX), revêtent la forme du crucifiement sur laquelle nous aurons bientôt l'occasion de revenir ; — les secondes, les plus ordinaires, qui rappellent la plupart des caractères assi

gnés par les auteurs aux convulsions des possédées, justifient tout à fait le nom (Yattaques démoniaques que leur donne M. Gharcot.

L'histoire est riche en documents sur les possédées et certes, il n'y a guère plus d'un siècle, c'est parmi elles qu'on aurait rangé L... pour ces dernières attaques. Rien n'est plus facile que de justifier cette assertion. Ce qui frappait surtout les spectateurs dans toutes les séances d'exorcismes auxquelles se livraient les prêtres et les moines, c'était la variabilité des convulsions, les attitudes effrayantes que prenaient les malheureuses malades. Relever toutes les analogies qui existent entre leurs attaques et celles de L... serait trop long et sans grande utilité. Aussi, nous bornerons-nous à comparer quelques-uns des symptômes.

Nous avons raconté que souvent, dans ses attaques, L.. essaie de se déchirer les membres, la poitrine, le cou. C'est également ce qui avait lieu chez les possédées de Loudun. « Ayant proféré quelques paroles, le Démon devint encore plus forcené et, témoignant une grande rage de ce qu'il avait dit, se mordait aux bras et contournait horriblement tous les membres (lj. »

Nous avons vu encore que, dans quelques-unes de

(1) Calmeil. — De la folie considérée sous le point de vue pathologique, philosophique, historique et judiciaire, etc., t. II.

p.; 23.

ses attaques, L... sortait la langue hors de la bouche à un degré tel que la pointe venait toucher le menton : nous retrouvons la même chose chez les possédées : « Bientôt le Père, répétant le commandement qu'il avait déjà fait, mit le corps de la Prieure dans une effroyable convulsion, tirant une langue horriblement difforme, noirâtre et boutonnée ou grenue comme du maroquin.. \. »

Les médecins qui sont témoins pour la première fois des attaques de L... sont fortement impressionnés. Qu'ils jugent donc par les sentiments qu'ils éprouvent de l'émotion que devait ressentir la population tout entière d'une ville qui voyait réunies dans une église une dizaine de religieuses, et même davantage, en proie à la possession, — c'est-à-dire à des attaques semblables à celles de notre malade, — excitées par la solennité du lieu, par la présence des congrégations rivales, par les cérémonies dont elles étaient l'objet , excitées enfin par le contact incessant des prêtres et des moines et par le délire de leurs compagnes! Assurément des scènes aussi effrayantes devaient frapper vivement l'imagination des assistants. Et, puisque L... nous en fournit l'occasion, nous allons reproduire, bien qu'il soit un peu long, le récit d'un de ces tristes spectacles qui se terminaient presque toujours par le sacrifice de quelques victimes. Il s'agit encore des possédées de Loudun.

« Le Vendredi 23 de juin 1634, veille de la Saint-» Jean, sur les trois heures après midi, Monsieur de » Poitiers et Monsieur de Laubardemont étant dans » l'Eglise de Sainte-Croix de Loudun, pour continuer » les exorcismes des Religieuses Ursulines, de l'Ordre » dudit Sieur de Laubardemont Commissaire, fut » amené de la prison en ladite Eglise, Urbain Gran-» dier Prêtre Curé, accusé, et dénommé Magicien par » lesdites Religieuses Possédées, auquel furent pro-» duits par ledit Sieur Commissaire quatre Pactes, » raportés à diverses fois, aux précédents exorcismes, » par lesdites Possédées, que les Diables qui les pos-» sédoient, disoient avoir faits avec ledit Granclierpour » plusieurs fins, mais l'un particulièrement rendu par » Léviatan, le Samedi 17 du présent mois, composé de » la chair du cœur d'un Enfant, prise en un Sabat fait y à Orléans en 1631 ; de la cendre d'une Hostie brûlée, » du sang et de la se... dudit Grandier ; par lequel » Léviatan dit avoir entré au corps de Soeur Jeanne » des Anges, Supérieure desdites Religieuses, et l'avoir » possédée avec ses adjoints, Béhémot, Isaacarum et » Belaam ; et ce le 8 de Décembre 1632.

« L'autre composé de graines d'oranges et de gre-» nades, rendu par Asmodée alors possédant la Sœur » Agnès, le jeudi 22 du présent mois, fait entre ledit » Grandier, Asmodée et quantité d'autres Diables, » pour empêcher l'éfet des promesses de Béhérit qui » avoit promis pour signe de sa sortie, d'enlever la

» calotte du Sieur Commissaire de la hauteur cle deux

» piques, l'espace d'un miserere. Tous lesquels Pactes

» représentez audit Grandier, il a dit sans être aucune-

» ment étonné, mais av7ec une résolution constante et

» généreuse, ne savoir en façon quelconque ce que

» c'étoit desdits Pactes, ne les avoir jamais faits, et ne

» connoître point d'art capable de telles choses ;

» n'avoir jamais eu communication avec les Diables

» et ignorer absolument ce qu'on lui disoit. Dont fut

» fait Procès-Verbal qu'il signa.

« Cela fait on amena toutes lesdites Religieuses Pos-

» sédées, au nombre d'onze ou douze, comprises trois

» filles Séculières aussi possédées, dans le chœur de

» ladite Eglise, accompagnées de quantité de Religieux,

» Carmes, Capucins et Recollets, de trois Médecins et

» d'un Chirurgien ; lesquelles à l'entrée firent quelques

» gaillardises, appellant ledit Grandier leur Maître, et

» lui témoignant alégresse de le voir. Alors le Père

» Lactance Gabriel, Recollet, et l'un des Exorcistes,

» exhorta toute l'Assistance d'élever leur cœur à Dieu

» avec une ferveur extraordinaire, de produire des

» actes de douleurs des ofenses faites contre cette

» adorable Majesté, et lui demander que tant de péchés

» ne missent point d'obstacle aux desseins que sa Pro-

» vidence avait pour sa gloire en cette occasion, et

» pour marque extérieure de la contrition interne,

» dire le confiteor, pour recevoir la bénédiction de

» Monsieur l'Eveque de Poitiers.

» Ce qui aiant été fait, il continua de dire que » l'affaire dont il s'agissoit, étoit de si grand poids, et » tellement importante aux véritez cle l'Eglise Catho-» lique Romaine, que cette seule considération devait » servir de motif pour exciter la dévotion; et que » d'ailleurs le mal de ces pauvres Filles étoit si étrange, » après avoir été si long, que la charité obligeoit tous » ceux qui ont droit de travailler à leur délivrance et » à l'expulsion des Démons, d'employer l'éficace de )» leur caractère pour un si digne sujet, par les éxor-» cismes que l'Eglise prescrit à ses Pasteurs, et adres-» sant la parole audit Grandier, il lui dit qu'étant de » ce nombre par l'onction sacrée cle Prêtrise, il devoit » y contribuer son pouvoir et son zèle, s'il plaisoit à » Mr. l'Evêque de lui en donner la permission, et de » commuer sa suspension, en autorité ; ce que ledit » Sr. Evêque aiant concédé, le Père Recollet présenta » une étole audit Grandier, qui., s'étant tourné vers le-» dit sieur Evêque, lui demanda s'il lui permettoit de » la prendre ; à quoi aiant répondu que oui, il se mit » ladite étole au cou, et alors le Père Recollet lui pré-» senta un Rituel, qu'il demanda permission de prendre » audit sieur Evêque, comme ci-dessus, et reçut sa » bénédiction, se prosternant à ses piés pour les bai-» ser. Sur quoi, le Veni Creator Spiritus, aiant été » chanté, il se leva et adressa la parole à Monsieur de » Poitiers, et lui dit : Monseigneur, qui dois-je exor-» ciser ?

« A quoi lui aiant été répondu par ledit sieur Evêque » Ces Filles. Il continua et dit : Quelles filles ? à quoi il » fut répondu : Ces filles Possédées. Tellement, dit-il, » Monseigneur que je suis donc obligède croire la Pos-» session; VEglise la croit, je la croi donc aussi, » quoique j'estime qu'un Magicien ne peut faire Possé-» der un Chrétien sans son consentement. Lors quel-» ques-uns s'écrièrent qu'il étoit hérétique d'avancer » cette créance, que cette vérité étoit indubitable, » reçue unanimement dans toute l'Église, et aprouvée » parla Sorbonne. Sarquoi il répondit qu'il n'avoit pas » formé de créance déterminée là-dessus, que c'étoit » seulement sa pensée, qu'en tout cas il se soumettoit » àl'opinition du Tout, dont il n'étoit qu'un Membre, » et que jamais personne ne fut hérétique pour avoir » eu. des doutes, mais pour y avoir persévéré opiniâ-» trément, et que ce qu'il avoit proposé audit Sieur » Évêque, étoit pour être assuré par sa bouche qu'il » n'abuseroit point de l'autorité de l'Eglise.

« Et lui aiant été amenée par le Pére Recollet la » Sœur Catherine, comme la plus ignorante de toutes, » et la moins soupçonnée d'entendre le Latin, il com-» mença l'exorcisme en la forme prescrite par le Ri-» tuël, qu'il ne put pas continuer longuement, parce » que toutes les autres Possédées furent travaillées des » Démons, et tirent force cris étranges et horribles, et » entre autres, la Sœur Claire s'avança vers lui, lui » reprochant son aveuglement et son opiniâtreté ; si

» bien qu'en cette altercation il quitta cette autre Pos-» sédée qu'il avoit entreprise, et adressa ses paroles à ». ladite Sœur Claire, qui pendant tout ce tems de » l'exorcisme ne fit que parler à tors et à travers, sans » aucune attention aux paroles de Grandier, qui » furent encore interrompues par la Mére Supérieure, » qu'il entreprit, laissant ladite sœur Claire.

» Mais il est à noter qu'auparavant que de commen-» cer à l'exorciser, il lui dit, parlant en Latin, comme » il avoit presque toujours fait, s'expliquant puis après » en François.que pour elle, elle entendoit le Latin, et » qu'il vouloit l'interroger en Grec, étant une des mar-» ques requises pour justifier une Possession indubi-» table, et que les Diables entendoient toutes sortes » d'idiomes ; à quoi le Diable répondit par la bouche » de la Possédée, Ah ! que tu és fin, tu sais bien que » c'est une des premières conditions du Pacte fait » entre toi et nous, de ne répondre point en Grec.

» A quoi il répondit, 0 ! pulchra itlusio, egregia » evasio ! 6 la belle défaite ! Et lors il lui fut dit qu'on » lui permettoit d'exorciser en grec pourvu qu'il » écrivît premièrement ce qu'il voudroit dire. Ladite » Possédée offrit néantmoins de lui répondre en quelle » langue il voudroit, mais cela n'eut point de lieu, » car toutes les Possédées recommencèrent leurs cris » et leurs rages, avec des désespoirs nompareils, des » convulsions fort étranges, et toutes différentes ; per-» sistant d'accuser ledit Grandier de magie, et du

» maléfice qui les travailloit, s'ofrant de lui rompre » le cou, si on vouloit le leur permettre, et faisant » toutes sortes d'éforts pour l'outrager; ce qui fut » empêché par les défences de l'Église, et par les » Prêtres et Religieux là présens, travaillans extraor-» dinairement à réprimer la fureur dont toutes étoient » agitées.

« Lui, cependant demeura sans aucun trouble ni » émotion, regardant fixement lesdites Possédées pro-» testant de son innocence, et priant Dieu d'en être le » protecteur; et s'adressant à Monsieur l'Evêque, et à » Monsieur de Laubardemont, il leur dit qu'il implo-» roit l'autorité Ecclésiastique etRoiale, dont ils étoient » les Ministres, pour commander à ces Démons de lui » rompre le cou, ou du moins de lui faire une marque » visible au front, au cas qu'il fût l'auteur du crime » dont il était accusé, afin que par là la gloire de Dieu » fût manifestée, l'autorité de l'Eglise exaltée, et lui » confondu, pourvu toutefois que ces Filles ne le tou-» chassent point de leurs mains, ce qu'ils ne voulurent » point permettre, tant pour n'être point causes du » mal qui auroit pu lui eu arriver que pour n'exposer » point l'autorité de l'Eglise aux ruses des Démons, » qui pouvoient avoir contracté quelque Pacte sur ce » sujet avec ledit Grandier.

« Alors les exorcistes au nombre de huit, aiant com-» mandé le silence aux Diables, et de cesser les désor-» dres qu'ils faisaient l'on fit aporter du feu dans un

». réchaut, dans lequel on jetta tous ces Pactes les uns » après les autres, et alors les premiers assauts redou-» nièrent avec des violences et des confusions si horri-» bles, et des cris.si furieux, de postures siépouvanta-» bles, que cette assemblée pouvait passer pour un » Sabat... (1) »

(1) Cruels effets de la vengeance du cardinal de Richelieu ou Histoire des Diables de Loudun,de la possession des religieuses ursulines, et de la condamnation et du suplice d'Urbain Grandier, curé de la même ville. Amsterdam, 1176, p. 118.

OBSERVATION III.

Hystéro-Epilepsie et Epilepsie.

C'est surtout depuis la publication des leçons que M. Charcot a consacrées à l'hystéro-épilepsie [hystérie épileptiforme de Louyer-Villermay) que cette maladie convulsive est bien séparée de l'épilepsie. Dans l'hystéro-épilepsie, en effet, pour employer les expressions ds notre illustre maître, l'épilepsie n'est là que dans la forme extérieure, mais elle n'est pas dans le fond des choses.

L'observation suivante, en nous offrant chez la même malade des attaques relevant incontestablement de l'hystéro-épilepsie et des accès franchement épileptiques, dissipera les doutes, s'il en existe encore : le lecteur impartial, nous en sommes persuadé, partagera notre conviction.

Sommaire. — Antécédents. — Hystéro-épilepsie et épilepsie. — Hémianes-thésie gauche. — Description des attaques d'hystéro-épilepsie et d'épilepsie. Attitude du crucifiement. — Marche des deux maladies. — Relation entre les règles et les crises convidsives.

W.. , Madeleine, était âgée de 17 ans à son entrée à la Sal-pétrière (Service de M. Charcot), le 16 septembre 1875.

Renseignements fournis par sa sœur aînée. — Père, ouvrier gazier, a fait de tout temps des excès de boisson; il s'em-4

porte facilement et autrefois il battait sa femme. — Celle-ci est morte à 40 ans (1864), on ne sait de quelle maladie; elle était « très-nerveuse. » —Sur les ascendants, on manque de détails précis; ce qu'on affirme pourtant, c'est qu'aucun membre de la famille n'aurait été ou ne serait atteint de « haut mal. » —Pas de consanguinité.

Quatre enfants : 1° la jeune fille qui nous renseigne; elle est bien portante; — t° une fille âgée de 19 ans, bossue, souffreteuse, très-impressionnable; — 3° Madeleine; — 4° un garçon mort à un an dans les convulsions.

Jusqu'à 8 ans, la santé de Madeleine aurait été bonne. Elle a été propre (1 ) et a marché de bonne heure. — De 8 à 14 ans, elle a habité le Grand-Duché de Luxembourg, chez une de ses tantes : c'est durant cette période qu'aurait débuté sa maladie convul-sive.

(il L'incontinence nocturne de l'urine est due quelquefois à des accès. Nous relevons ce phénomène car il peut mettre sur la voie du diagnostic en faisant reconnaître l'épilepsie dans les cas où les accès ne surviennent que la nuit.

[Voici, d'après la malade, à la suite de quelles circonstances serait survenue sa maladie : allant à l'école, elle traversait, pour couper court, une rivière dont la surface était glacée. La glace se brisa et elle tomba dans la rivière, d'où elle fut retirée sans connaissance. Un mois plus tard, elle aurait eu sa première crise nerveuse et 5 ou 6 semaines après celle-ci, les régies seraient apparues.]

Comme les accidents allaient en s'aggravant, sa tante l'a renvoyée à Paris. — Quelques jours après son arrivée, Madeleine a eu des attaques pour lesquelles elle a fait plusieurs séjours dans les hôpitaux. Dans les intervalles, elle travaillait chez le marchand de vin où logeait son père. — L'intelligence n'aurait pas baissé depuis trois ans, mais toujours elle a été paresseuse, lourde. —La malade est d'ailleurs douce, affectueuse, et n'a jamais eu de délire.

Etat actuel (septembre 1875). — Embonpoint assez prononcé ; tempérament lymphatico-sanguin. Teint frais, joues très-colorées ; traits réguliers; physionomie un peu obtuse. (Planche X). — Toutes les

Planche X.

HYSTÉRO-ÉPILEPSIE

Planche XI.

ATTAQUE : CRUCIFIEMENT

fonctions organiques s'accomplissent convenablement. Elle aurait eu, à une époque qu'elle ne peut indiquer, un écoulement de l'oreille droite, suivi d'une abolition presque absolue de l'ouïe de ce côté.

Hémianesthésie gauche. — Le contact, la piqûre, le froid ne sont pas perçus sur la moitié gauche du corps (face, tronc, membres). —La moitié correspondante de la muqueuse linguale participe à cette insensibilité tandis que la narine gauche a conservé sa sensibilité. — L'ouïe, la vue sont normales. — L'odorat (valérate d'amyle, etc.), le goût (coloquinte, etc.) sont très-émous-sés à gauche, mais non abolis.

L'intelligence est médiocrement développée, de sorte qu'il est souvent difficile d'obtenir de la malade des réponses précises.

Il ne parait pas y avoir d'kyperesthésie ovarienne. Interrogée maintes fois sur ce point, ses réponses ont toujours été vagues : un jour, elle dit souffrir dans le côté gauche du ventre, un autre jour dans le côté droit. Si l'on appuie sur la région ovarienne gauche, elle prétend qu'on la fait étouffer et c'est tout ce qu'on peut en obtenir. Interrogée relativement à ce qu'elle éprouverait soit avant les attaques, soit avant les accès (car elle est à la fois hystéro-épilepti-que) elle nous a assuré constamment qu'elle tombait tout d'un coup. Elle ne fait, elle-même, aucune différence entre ses différentes crises.

A. Description des attaques d'hystéro-épilepsie. — La malade a été prise ce matin, 13 octobre, à 8 heures, d'attaques hystéro-épileptiques qui ont continué jusqu'à 10 heures 3/4. A onze heures les attaques recommencent.

a) Période tonique. — Pas de cri. La tête se porte dans l'extension, le cou est tendu, gonflé, les yeux sont dirigés en haut, les pupilles sont très-dilatées ; la moitié inférieure des conjonctives oculaires est injectée, les pommettes sont colorées, moyennement chaudes. Les jambes s'allongent, les bras s'écartent lentement du tronc et se mettent en croix. La rigidité est extrêmement intense. Le crucifiement est complet. (Planches XI et XII.)

b) Période clonique. — Au

bout de deux minutes, les bras et les jambes se détendent, la malade secoue la tête de gauche à droite et réciproquement ou bien elle la soulève au-dessus de l'oreiller et la laisse retomber brusquement; elle projette les bras de tous côtés, soulève tantôt la poitrine, tantôt le ventre ; d'autres fois, elle se tortille. Durant cette période, la respiration est précipitée, haletante.

Après un court répit survient une nouvelle attaque (11 heures 6\

a) Période tonique. — La tète prend la même position que dans l'attaque précédente. Tout le corps devient rigide. Les bras se mettent doucement en croix, le gauche d'abord. Quand le crucifiement est complet, la malade pousse des cris: oue! oue! qui se succèdent rapidement pendant deux minutes environ.

b) Période clonique. — Puis, le décrucifiement s'opère ; les secousses cloniques apparaissent, accompagnées cette fois de : oue ! oue ! Ceci dure une trentaine de secondes. Madeleine demeure immobile, couchée sur le dos, dans la résolution, et criant de temps en temps. La respiration est bruyante. Bientôt, nouvelles secousses cloniques avec cris. Les cheveux, dénoués, sont rejetés derrière la tète et sur ses côtés ; les yeux sont dirigés en haut et un peu à gauche. Parfois, on note du nys-tagmus. La bouche est entre-ouverte, le cou tendu.

A onze heures douze minutes, troisième attaque.

a) Période tonique {crucifiement). — L'attitude delà tète, l'aspect de la face sont les mêmes que dans les autres attaques. Les paupières sont animées de battements rapides. Par un mouvement brusque, le bras gauche, puis le droit se placent perpendiculairement au tronc et deviennent très-rigides. Les doigts sont vigoureusement fléchis. Les membres inférieurs sont dans l'extension forcée, y compris les pieds. Tout le corps, en un mot, est rigide et absolument immobile. La respiration semble suspendue. On n'observe aucun mouvement des narines, des lèvres, des muscles supé -rieurs du thorax ou du diaphragme. Cette suspension de la respiration persiste près

de deux minutes ; ensuite on voit se produire des mouvements légers et rapides du diaphragme.

Le crucifiement durait depuis une dizaine de minutes, lorsque nous avons pratiqué la compression de la région ovarienne gauche. Elle s'opère difficilement , en raison du volume naturellement assez considérable du ventre, augmenté encore par la tympa-nite et en raison de la contraction des muscles abdomi naux. Après plusieurs tentatives infructueuses, nous parvenons à enfoncer les doigts dans la cavité du bassin ; alors, Madeleine se décrucifie,se réveille, se plaint non plus comme tout-à-l'heure, mais comme une personne qui souffre (1).

c) Période terminale. — La malade revient entièrement à elle. Ce nouveau repos s'est prolongé pendant cinq ou six minutes, après quoi la malade a été reprise et la série n'a cessé définitivement qu'à midi et demi. Quelques minutes plus tard, M____ s'est

(l) L'inhalation du nitrite d'a-mi/le, employé un futre jour, à sur le champ mis fin à l'attaque.

levée, n'accusant que de la fatigue et n'ayant pas la moindre stupeur.

14 octobre. — La nuit a été tranquille. Ce matin, M... a eu une attaque de crucifiement qui a duré dix minutes.

Presque toujours, en 1875, les attaques d'hystérie avec crucifiement, se terminaient par du délire : la malade ehan-taitdes chansons allemandes. En 1876, ce délire ainsi que le crucifiement n'ont pas été constatés une seule fois.

 . Description d un accès d'épilepsie (22 août 1876). — Début. Pendant qu'elle causait avec ses compagnes, Madeleine tombe par terre, en poussant un cri étouffé.

a) Période tonique. — La face est colorée, très-rouge, vermillon ; la bouche est entre-ouverte ; le cou est rigide, la tète un peu soulevée; les bras sont étendus le long du corps, rigides, les doigts sont fléchis ; les jambes sont allongées et dans l'adduction. La rigidité est la même des deux côtés.Ces phénomènes durent environ une minute.

b) Période cloniqtie. — Elle

est constituée seulement par quelques secousses cloniques.

c) Période de stertor. — Résolution générale , cyanose bleue très - intense, regard éteint, pupilles modérément dilatées; léger ronflement, un peu d'écume non sanglante ; sueurs très-abondantes à la face et à la paume des mains. La malade ferme les paupières et pousse quelques plaintes.

A cette cyanose bleue succède une décoloration très-prononcée de la face et ce n'est qu'au bout de trois ou quatre minutes que le visage se colore. La malade s'endort ; de lemps en temps, elle quenotte, se plaint, secoue la tête. La face et les mains sont toujours couverts de sueur. La température vaginale est de 38°, 1.

On relève la malade et on la couche sur son lit et dès qu'elle y est placée, elle se rendort. Un quart d'heure plus tard, je reprends sa température sans qu'elle s'en rende compte. T. V. 38°.

Quelquefois, à la suite de ses accès d'épilepsie, elle a du délire. C'est ainsi qu'unjour, après un accès, elle est allée dans la cour, criant, gesticulant, tournant sur elle-même. Comme les infirmières voulaient la faire rentrer, elle a essayé de les battre et on a été obligé de lui mettre la camisole.

Marche des deux maladies. — Du mois de septembre à la fin de décembre 1873, Madeleine a eu 18 accès et 22 attaques. En 1876, elle a eu 54 accès et 15 attaques.

Janvier\S11. —L'intelligence de la malade nous parait avoir un peu diminué. M... est lente dans tout ce qu'elle fait, ne comprend pas toujours ce qu'on lui dit. Ses réponses sont vagues. Sa mémoire est incertaine. En un mot, il existe chez elle une confusion intellectuelle assez accusée. Cet affaiblissement des facultés intellectuelles s'explique naturellement par la marche des deux maladies. Durant les quatre derniers mois de 1875, elle a eu 22 attaques d'hystérie et 18 accès d'épilepsie, c'est-à-dire que l'hystérie prédominait; —durant l'année 1876, les accès (34) l'ont emporté, et dans une proportion considérable sur les attaques (15) et cette

prédominance de l'épilepsie sur l'hystérie s'est accusée davantage dans le dernier semés tre.

1er Semestre, 22 accès, 11 attaques.

2° — 32 — k —

La physionomie de Madeleine, ses habitudes s'éloignent de plus en plus de celles des hystériques et se rapprochent de plus en plus de celles des épileptiques.

La sensibilité, dans ses divers modes, est encore affaiblie, quoique à un moindre degré qu'en 1875, sur toute la moitié gauche du corps. M... sent le froid, mais moins bien qu'à droite. L'odorat et le goût sont aussi très-émoussés : il résulte de ce nouvel examen que Yhémia-nesthésie est moins prononcée qu'en 1875. Les autres fonctions n'offrent rien de particulier.

Relation entre les règles et les crises convulsives. — Depuis l'entrée de la malade à la Salpétrière jusqu'à la tin de 1876, les règles sont venues assez régulièrement tous les mois. Elles durent le plus souvent quatre jours, quelquefois plus longtemps. Elles n'ont pas d'action sensible sur les accidents convulsifs, en d'autres termes, ceux-ci ne se montrent pas de préférence à ces époques, et s'ils se présentent, ce n'est pas d'une façon prédominante. Ainsi, en mai 1876, on a compté 5 accès dont deux seulement durant les six jours du flux menstruel ; en juin, sur six crises, on relève un accès et une attaque durant les cinq jours des règles.

Nous voyons réunies chez cette malade et Yhystéro-épitepsie et Yépilepsie. Gomment se sont développées ess deux maladies? Quelle est celle qui a précédé l'autre ? Autant de questions sans réponse : la malade n'a jamais pu no as éclairer à ce sujet. Malgré ces lacunes le fait n'est pas moins très-intéressant, puisqu'il nous permet de faire nettement ressortir quelques-uns

des caractères qui distinguent ces deux affections con-vulsives. ,

Uhystéro-épilepsie se traduit chez Madeleine par un seul symptôme permanent, Yhémianesihésie et par des attaques. Nous n'avons rien à ajouter à la description que nous avons donnée de l'hémianesthésie, ni sur sa diminution depuis que l'épilepsie l'emporte sur l'hystérie épileptiforme. Mais nous devons établir un parallèle entre les attaques d'hystéro-êpilepsie et les accès d'épilepsie.

Attaque» d'hystéro-êpilepsie.

Pas d'aura.

Souvent cris répétés, prolongés, au début et pendant la période clo-nique : rarement absence de cris.

Rigidité générale; attitude variable des membres ; crucifiement.

Mouvements cloniques très-éten-dus, très-variables, projection du thorax,, du bassin, tortillements, etc.

Tympanisine.

La compression ovarienne arrête l'attaque.

Retour rapide de la connaissance.

Délire, chants.

Attaques par séries durant k à 5 heures.

Accès d'cpilepsie.

Pas d'aura.

Un cri étoutfé au début seulement.

Rigidité générale ; attitude constante.

Quelques secousses cloniques, limitées, tout-à-fait temporaires.

Pas de tympanisme.

Elle est sans action sur les accès.

Sommeil profond et prolongé , stupeur consécutive. Délire violent. Accès isolés.

Quoiqu'il s'agisse, dans ce cas, d'une malade dont les attaques hystéro-épileptiques ne sont pas aussi diverses et aussi effrayantes que celles de Rosalie L... qui a fait le sujet de I'Observation II, les symptômes qui les

constituent sont suffisamment tranchés pour qu'il soit aisé, ainsi que le démontre le tableau qui précède, de les séparer des accès d'épilepsie.

C'est à dessein que nous avons placé l'observation de Madeleine à la suite de l'observation de Rosalie L..., car, chez l'une (Planches VI, VII, IX) et chez l'autre Pl. XI et XII), durant la période tonique d'une variété d'attaques, nous observons Y attitude du crucifiement.

Ue tels cas ne sont pas absolument rares. Quand ils se présentent dans la pratique hospitalière, on les étudie comme des manifestations intéressantes de la grande névrose; mais, dans le monde, ils sont l'objet d'un étonnement d'autant plus extraordinaire que les spectateurs sont plus ignorants. Enfin, si le terrain s'y prête, en d'autres termes si la malade se fait remarquer par l'exaltation de ses convictions religieuses, le prêtre intervient ; on croit trouver dans cette attitude du Christ sur la croix la preuve d'une intervention surnaturelle ; en un mot, on s'imagine avoir devant soi cette chose incroyable, un miracle.

N'est-ce pas, en effet, comme un miracle qu'on nous donne le cas d'une hystérique belge, du nom de Louise Lateau (1)? De même que Rosalie Ler..., les attitudes que prend Louise Lateau sont très-changeantes, tout en se succédant avec une certaine régularité. Le crucifie-

(l) Science et miracle : Louise Lateau ou la stigmatisée belge, 1875.

ment, chez elle, s'effectue ainsi qu'il suit: Elle fait un mouvement brusque, les bras se mettent en croix et deviennent rigides ; les membres inférieurs, allongés, sont également rigides. Alors, Louise Lateau offre l'attitude du crucifiement que nous avons décrite chez Rosalie, chez Madeleine. Nous avons mis hors de doute, dans un mémoire spécial, les nombreuses ressemblances qui existent entre Louise Lateau et les hystériques, et en particulier Rosalie L..; nous n'avons donc pas à recommencer une démonstration déjà faite. Mieux vaut passer de suite à l'exposé sommaire d'un autre exemple qui nous est fourni par Léontine V.. (1). Voici comment se comportent chez elle les attaques de crucifiement.

« Tout d'un coup (il heures 34), Léontine pousse un cri prolongé, étend les bras et tombe lentement en arrière. On arrive, en général, assez vite pour la soutenir dans sa chute et empêcher qu'elle ne se blesse.

» La tête est droite, dans l'extension ; la face est modérément colorée et regarde directement en haut. Les paupières sont ouvertes à demi et animées de battements rapides ; les globes oculaires sont portés en haut et en dedans; les pupilles sont dilatées. La bouche est presque fermée. Le cou est tendu, gonflé et on entend des mouvements bruyants de déglutition.

(l) Nous avons rapporté ses antécédents et tout ce qui est relatif à l'épi-lepsie dans nos Recherches cliniques et thérapeutiques sur fépilepsie et l'hystérie, p. 24.

« Les bras sont rigides, étendus perpendiculairement au tronc, en croix', les doigts sont fléchis. — Les membres inférieurs, allongés et rapprochés, sont rigides.

» A 11 heures 37, le bras droit se décontracture et retombe ; les paupières sont largement ouvertes ; les yeux dirigés en haut. Les paupières ne battent plus. Les mouvements de déglutition ont cessé. — A 11 heures 40 tout est terminé. La malade se lève. »

Là encore, l'attitude du crucifiement est complète, tout en étant moins belle, moins artistique en quelque sorte, que chez les autres malades et surtout chez Rosalie L...

Outre ces attaques hystériformes, Léontine a des accès d'épilepsie dont nous allons donner une courte description.

« Au moment où l'accès va éclater, la malade bredouille et son regard devient fixe. (Début). — Elle tombe sans connaissance et se blesse souvent. Les membres sont rigides, dans l'extension. La tète est portée en arrière, la face légèrement colorée. Les paupières sont ouvertes, les globes oculaires dirigés en haut et à gauche, les pupilles dilatées. La bouche est fermée (Période tonique). — Surviennent alors des convulsions rapides des muscles frontaux et sourciliers ; les globes oculaires s'abaissent, la rigidité diminue

dans les membres où se produisent quelques secousses cloniques [Période clonique). — Puis, stertor, écume, évacuations involontaires, etc. »

On voit par ce qui précède que Léontine, comme Madeleine, a des attaques hystériques et des accès épilep-tiques. Toutefois, chez elle, encore plus que chez Madeleine, l'épilepsie l'emporte sur l'hystérie qui n'est là qu'à l'état d'ébauche.

Voilà donc quatre malades, Rosalie L... (Planches VI, VII et IX), Madeleine W... (Planches XI et XII), Louise Lateau et Léontine V..., chez lesquelles le principal symptôme de la période tonique des attaques, est une contracture générale qui revêt la forme du crucifiement.

..Chez toutes, à part quelques nuances, le crucifiement, considéré dans son ensemble, offre les mêmes caractères. Les rappeler de nouveau serait superflu. Les photographies qui représentent Rosalie et Madeleine sont des témoins irréfutables qui confirment les descriptions que nous avons tracées.

La durée du crucifiement varie, au contraire, d'une malade à l'autre. Très-court, ne persistant que quelques minutes chez Léontine, il dure de dix minutes à 4 heures et demie, avec quelques intermittences chez Madeleine. — A l'origine de sa maladie (1868), Louise Lateau restait crucifiée pendant deux heures et demie, 3

Planche XII.

CRUCIFIEMENT : ATTITUDE DE LA TÊTE

heures et même six heures; en 1874, le crucifiement cessait au bout d'une heure et demie. — Chez Rosalie L..., le crucifiement a duré plus de cinq heures. Il résulte encore de ces chiffres que le crucifiement est moins long, aujourd'hui, chez la prétendue miraculée belge que chez l'hystérique du service de M. Charcot.

A côté des faits que nous venons de citer et concernant des hystériques chez lesquelles le crucifiement est spontané, il en est d'autres où le crucifiement est artificiel, produit par une intervention étrangère. On trouve des exemples de ce genre dans les relations publiées sur l'épidémie de Saint-Médard. On y voit que les convul-sionnaires, assemblées dans des maisons particulières, opéraient sur les saintes de leur secte un véritable crucifiement, les plaçant sur une croix et les y fixant à l'aide de clous qui traversaient les mains et les pieds. Ces « saintes » qui se laissaient plus ou moins facilement crucifier étaient des hystériques. Nous en avons la preuve, et dans les convulsions dont elles étaient atteintes, et dans le récit que nous a donné La Conda-mine des scènes de crucifiement auxquelles il a assisté.

La Gondamine fait la remarque que les convulsion-naires ne souffraient pas et qu'il ne s'écoulait pas de sang quand on enfonçait les clous dans la main et le pied du côté gauche, tandis qu'elles semblaient souffrir et perdaient du sang quand on transperçait la main et 1@ pied du côté droit. Sachant aujourd'hui que les hys-

5

tériques ont quelquefois une anesthésie totale, presque toujours une anesthésie de l'une des moitiés du corps (hémianesthésie), le plus souvent de la moitié gauche ; — sachant en outre que cette hémianesthésie s'accompagne d'une sorte de contraction des vaisseaux, nous nous expliquons sans peine pourquoi les convulsion-naires, que des prêtres crucifiaient eux-mêmes, n'avaient ni douleur, ni perte de sang.

Des faits nombreux, observés à la Salpétrière, nous autorisent à être aussi afflrmatif. Bien des fois, en effet, nous avons vu qu'il était possible de transpercer un pli épais de la peau d'une région quelconque du corps, chez Ler..., chez Geneviève, chez Gl..., etc., etc., et cela sans provoquer le moindre signe cle douleur. Il en était également de même quand on transfixait la langue,, la main, etc. Donc, chez les malades auxquelles nous faisons allusion, des thaumaturges pourraient, sans inconvénient sérieux, procéder au crucifiement. Mais il va de soi que, pour expliquer ces pratiques barbares, il n'est nullement besoin d'invoquer une influence surnaturelle.

Avant que les convulsionnaires n'eussent été forcés de se cacher, alors qu'ils se livraient, dans l'église Saint-Médard, à leurs singulières manifestations, il paraît, au dire d'un médecin du temps, Hecquet, que des hommes même étaient tout disposés à se laisser crucifier, ainsi qu'en fait foi le passage suivant, emprunté à son livre sur le Naturalisme des convulsions, pas

sage que nous reproduisons malgré ses incorrections.

« En effet, dit-il, vit-on jamais une aliénation d'esprit plus marquée que dans ce prophanateur de la passion de Notre-Seigneur, qui avait résolu de se faire crucifier réellement sur une croix, jusqu'au point que les clous, la lance, la couronne d'épines et la croix étaient toutes prêtes. On ne voit pas trop pourquoi les instruments de la flagellation du Sauveur manquaient à cet impie appareil. Car c'aurait été des verges et des fouets par où il aurait fallu ramener à la raison et à la pénitence un tel prophanateur. Mais la Providence avait ménagé cette omission pour nous aprendre quel est le meilleur spécifique contre le phanatisme épidé-mique ; c'est l'autorité de sages magistrats, comme on va le voir dans une tradition là-dessus : Aussi a-ce été le sage conseil, mais menaçant, d'un magistrat 'grand zélateur cependant du Convulsionnât) lequel aïant été fait juge entre ce malheureux et la troupe insensée des convulsionnaires qui voulaient absolument le crucifier ; il prononça d'avance l'arrêt dont lui-même serait d'aveu, de les faire rompre en Grève s'ils exécutaient une si folle entreprise... (T. II, p. 179-180, 1733). »

Ce n'est pas seulement chez les hystériques ni chez les mystiques irréguliers qu'on observe le crucifiement artificiel. On le retrouve chez des mystiques orthodoxes et aussi chez certains lypémaniaques, les uns et

les autres affaiblis par une abstinence et des veilles prolongées,en proie à des obsessions religieuses. Quelle que soit la maladie mentale qui ait troublé leur intelligence, le résultat est le même : ils arrivent non seulement à prendre Y attitude du crucifiement, à la conserver pendant des heures, comme nous l'avons vu chez les hystériques du service de M. Gharcot, mais ils tombent dans un état d'insensibilité qui leur permet de produire sur eux-mêmes des plaies au côté de la poitrine, de s'enfoncer des clous au travers des pieds et des mains. Il y a là les éléments d'une curieuse étude que nous espérons pouvoir entreprendre un jour.

OBSERVATION IY

Hystéro-Epilepsie.

Il s'agit, dans l'observation ci-après, d'une malade connue de tous les médecins qui ont assisté aux leçons cliniques de M. Gharcot ou qui ont visité son service. L/existence pathologique de cette femme, encore jeune, est déjà ancienne, singulièrement accidentée et, tout en nous efforçant d'exposer rapidement, nous ne dirons pas tous les événements qui composent sa vie, mais les principaux, craignons-nous d'avoir été trop long. Nous espérons pourtant que le lecteur nous tiendra compte de nos efforts et qu'il excusera certains détails qui, peut-être, encombrent notre récit, mais que nous avons jugé utile de mentionner pour faire voir, par un exemple, quelle est la triste destinée d^s malheureuses atteintes d'hystérie grave et pour montrer qu'elles méritent beaucoup plus de pitié que ne sont disposés à leur en accorder ceux qui ne les connaissent pas d'une manière suffisamment complète.

Sommaire. — Antécédents. — Enfance. — Accès de colère; — léthargie.— Apparition de la première attaque d'hystéro-épilepsie. — Irrégularités de

la menstruation. — Présomption de grossesse ; — empoisonnement par la belladone. — Torticolis hystérique. — Alimentation à l'aide de la sonde œsophagienne. — Tentatives répétées d évasion et de suicide. — Mutisme ; refus de manger. — Pérégrinations dans les hôpitaux et les asiles d'aliénés- — Première et seconde grossesses; — leur influence sur les attaques; — allaitement.

Hémianesthésie et hyperesthésie ovarienne du côté gauche. — Caractères et périodes des attaques : température. — Délire hystérique. — Action de la compression ovarienne. —Laryngisme, pharyngisme ; — secousses- — Double hyperesthésie ovarienne. — Anesthésie générale. — Contracture du ¦membre inférieur droit ; — prodromes, symptômes ; — influence des attaques.—Etat de mal hystéro-épileptique.— Situation de la malade en 4877.

Renseignements fournis par la malade. — Geneviève est née à Loudun, le 2 janvier \ 843. Déposée immédiatement à l'hospice de cette ville, on l'inscrivit sur les registres sous le nom de Geneviève B... Elle fut placée aussitôt chez des habitants de la campagne. Tout ce qu'elle sait sur son enfance se borne à peu de chose : elle était, dit-elle, follette, courait partout, était difficile à tenir, et, à la moindre contrariété, entrait dans de violentes colères. A. 8 ans, elle fut reconduite à l'hospice, elle ne sait pour quel motif. Là, sa turbulence, son caractère volontaire, firent qu'elle était toujours en punition(1).

(1) Une religieuse de l'hospice de

Quelque temps après, elle fut mise de nouveau à la campagne dans une ferme où on l'occupait à divers travaux, sans l'envoyer jamais à l'école. Elle prétend que les personnes chez lesquelles elle était, n'ayant pas d'enfants, l'aimaient beaucoup, et lui laissaient faire ses volontés.Elle n'aurait eu aucune maladie.

Vers 12 ans, une de ses compagnes ayant marché sur l'un de ses doigts, elle eut un panaris qui a laissé une

| Poitiers qui a connu Geneviève tout ' enfant confirme ces renseignements: I en classe, on était souvent obligé de I l'attacher; elle avait la manie de sauter par dessus les murs. ¦ Geneviève, toute petite, était folle » I ajoule la religieuse.

légère déformation. — Ses accès de colère persistaient, devenaient plus prononcés à mesure qu'elle avançait en âge. Parfois, elle était méchante et elle se souvient que deux fois, entre autres pour avoir lacéré une jupe, elle fut fouettée avec des orties. Si on s'en rapporte à son récit, ce châtiment ne l'aurait pas fait souffrir, ce qui semblerait indiquer que, déjà, la sensibilité n'était pas normale.

Dès l'âge de 14 ans, elle était courtisée par un jeune homme, du nom de Camille. Alors qu'elle avait 15 ans et demi, son « promis » est mort d'une « fièvre cérébrale. » Son père nourricier, craignant qu'elle ne fit des scènes, l'enferma pour l'empêcher d'assister à l'enterrement. Elle parvint à s'échapper par une fenêtre, courut au cimetière et voulut se jeter dans la fosse. Pendant la nuit qui suivit l'inhumation, elle se sauva de sa chambre, se rendit au cimetière, appelant son amoureux et cherchant à le déterrer. On accourut, on s'empara d'elle et elle fut prise d'une crise dans laquelle elle était « comme une morte.» Elle serait demeurée dans cette sorte de léthargie durant 24 heures : son état parut si grave qu'on crut nécessaire de faire venir un médecin.

De 15 ans et demi à 16 ans, elle était toute drôle, triste, refusant souvent de parler ; de plus, ses colères étaient plus fréquentes. Sa mère nourrice étant venue à mourir, on la reconduisit à l'hospice de Poitiers.

Là, en raison de son état mental,on lui aurait fait prendre des bains prolongés et on lui aurait donné des douches, puis des bains froids. Elle fut réglée vers cette époque. L'établissement de la menstruation s'accompagna de douleurs très-fortes dans le bas-ventre. Les règles étaient irrégulières et l'auraient toujours été jusqu'à 25 ans, c'est-à-dire après son premier accouchement. Vers l'âge de 16 ans et demi à 17 ans, sa situation s'étant améliorée, on la plaça en ville comme femme de chambre. Elle était alors parfaitement développée et elle parle d'elle, à cette époque, avec un certain amour-propre. Son maître lui faisait la cour, et plusieurs fois même il l'avait embrassée, bien qu'elle s'en défendit : « J'étais très-dévote, dit-elle, et je me

faisais un grand scrupule de pareilles choses. » Elle avoue que cet homme lui plaisait, qu'elle n'avait pas d'autre préoccupation « que cet homme », et c'est dans cette situation d'esprit qu'elle aurait eu un soir, dans sa chambre, une première attaque. Comme elle criait, on accourut et on la trouva sans, connaissance. Elle ignore quels ont été les caractères de cette attaque; ce qu'elle sait, c'est que la perte de connaissance aurait persisté plusieurs heures et que, le lendemain, elle était « fatiguée et meurtrie. Un médecin , appelé , déclara qu'elle avait des attaques de nerfs etla fit conduire à l'Hôtel-Dieu de Poitiers.

Durant 5 ou 6 mois, les attaques revinrent chaque jour. Son ventre était très-gros; à cause de cela et à cause aussi de l'irrégularité de la menstruation, les religieuses s'imaginèrent qu'elle était enceinte et la persécutèrent, se plaignant d'avoir été trompées par elle. Les présomptions de grossesse reposaient encore sur d'autres apparences : elle mangeait peu, d'une façon capricieuse et vomissait souvent ; dans « ses colères » elle se cognait la tète contre les murs. Alors, les Religieuses lui disaient des injures et l'accusaient de vouloir faire mourir son enfant. Enfin, un jour, on la fit passer dans le service des femmes en couches. L'examen fit reconnaître l'erreur et pour se débarrasser d'elle, parce qu'elle criait, pleurait et cassait tout, on la transféra dans le quartier des aliénées.

Soumise à un traitement par la belladone, elle s'imagina de garder ses pilules et, une fois, en prit dix d'un coup. Elle ne voyait plu s clair, avait des visions, courait par tout l'hôpital. Elle rentra dans la salle et absorba dix autres pilules. A partir de ce moment, elle ne sait trop ce qui se passa. On lui administra un vomitif à l'aide de la sonde œsophagienne, puis du lait, etc. Elle se remit assez vite de ces accidents et, peu après, sans pouvoir en indiquer la raison, elle s'enleva complètement avec des ciseaux le bout du sein gauche. Cette mutilation, dont on peut constater la réalité ne lui causa aucune douleur [Hémiancsthésie gauche.) (1).

(l) .Cette mutilation volontaire ! rappelle celle que les skopUy exécu-

Plus tard, elle se sauva du quartier des aliénées et se réfugia chez une blanchisseuse qui s'empressa de prévenir le directeur et, le lendemain matin, quand Geneviève se réveilla, elle trouva à côté d'elle deux infirmières et un gardien de l'hospice. On s'empressa de la réintégrer dans l'établissement. A cette date, elle aurait eu, à la suite d'attaques, une contracture du côté gauche du cou, si prononcée que le menton répondait a l'épaule. Ce torticolis hystérique disparut au bout d'un mois et demi. Enfin, dans la même année, on aurait été obligé de l'alimenterj pendant trois mois, à l'aide de la sonde œsophagienne.

A 17 ans et demi, elle s'enfuit de l'hospice avec un étudiant et vint à Paris où elle fit un premier séjour de trois mois. Elle avait deux ou trois fois par mois des attaques moins violentes, prétend-elle, qu'avant qu'elle n'eut des rapports sexuels. Lecôté droit du corps était toujours insensible. Rentrée à Poitiers avec

tent sur leurs adeptes. (Voyez : E. Teinturier. — 'Etude médico-légale sur les Skoptzy).

son amant, elle fut prise, un jour, d'une attaque dans la rue. La police la conduisit au quartier des aliénées. Bientôt elle se sauva et alla à Tours se cacher dans un hôtel. Trois ou quatre jours après, le commissaire de police vint la prendre et la réexpédia à l'asile.

A 20 ans, elle revient à Paris où elle se place comme femme de chambre. Au bout de peu de temps, ayant eu une attaque très-intense et prolongée, on la conduisit à l'Hôtel-Dieu. De là, on l'aurait envoyée à Necker. Elle refusait de manger, avait une paralysie de la sensibilité du côté gauche du corps et une rétention d'urine qui, pendant 15 jours, nécessita le cathétérisme. Etant à Necker, elle se serait foulé le poignet droit dans une attaque. Commeles crises persistaient, on la dirigea sur la Salpé trière le 6 décembre 1864 , dans le service de M. Baillarger. Elle raconte que, son ventre étant très-volumineux, on aurait cru, une fois encore, mais momentanément, à une grossesse. Elle sortit le 15 décembre et s'empressa d'aller rejoindre son amant.

Quelques jours s'étaient à

peine écoulés que l'idée lui vint de se précipiter du haut du puits de Grenelle. Ses allures étranges, son air égaré éveillèrent l'attention, on la surveilla et on arriva à temps pour la retenir. Elle fut prise d'attaques, menée à Necker, d'où elle fut dirigée pour la seconde fois sur la Salpétrière (service de M. Mo-reau) le 26 janvier 1865.

Sa situation s'étant améliorée, elle fut placée à l'infirmerie générale, en qualité de fille de service. Un jour, elle s'empare d'un flacon de chloroforme et s'enferme dans les lieux d'aisances pour s'empoisonner: on la retrouva profondément endormie. On la reconduisit dans la section des épileptiques. Le 1e'" avril, on lui accorda la permission de sortir en ville avec une infirmière. Elle trouva le moyen de l'abandonner et courut chez son amant.

Dans les treize mois qui suivent,elle entre à la Charité, à la Maternité, à Beaujon, soit comme malade, soit comme fille de service. De ce dernier hôpital, elle est expédiée à la Salpétrière (service de M. Delasiauve), le 4 mai 1866. C'est à cette époque que nous avons commencé à l'observer nous -même. A son arrivée, elle refusait de manger et de parler. La persuasion, les menaces [Y] ayant échoué, nous la fîmes placer dans un bain sinapisé, dont elle-*a gardé le souvenir. A peine y était-elle depuis quelques minutes, qu'elle recouvra la parole et consentit à prendre des aliments. Les deux phénomènes qui nous frappèrent le plus furent Yhé-

(l) G..., refusant de parler et de manger, je me contentai, le premier jour, de l'encourager à prendre quelques aliments. N'ayant rien obtenu, le soir, connaissant par la surveillante, combien elle élait susceptible, je me bornai à faire la remarque que c'était un avantage d'avoir une malade qui ne parlât pas , les autres étant trop bavardes et je recommandai qu'on lui fit voir les appareils servant à l'alimentation artificielle. Tout ceci ayant échoué, le lendemain matin, j'essayai de nouveau, mais en vain, de la persuasion. A la fin de la visite, je me moquai d'elle, en déclarant que son refus de manger nous était indifférent, que les hystériques pouvaient rester longtemps sans manger et que, en continuant, elle ferait faire des économies à l'Administration. Tous ces discours restant sans effet, c'est alors que je lui fis "prendre un bain largement sinapisé.

mianesthésie à gauche, des tendances erotiques et une tympanite énorme.—M. Dela-siauve signa la sortie de Geneviève le 11 juin 1866.

Le 25 juin, ses attaques la firent admettre à la Pitié (service de M. Marrotte) ; elle en sortit le 2 juillet pour venir à la Salpétrière. A la suite de violences exercées sur le chef du service dans lequel elle avait été placée, on la mit momentanément dans la section de M. Trélat, comme punition, parce que là, elle jouissait d'une moins grande liberté.

En décembre 1866, elle fut transférée à l'asile d'aliénés de Toulouse. Quelques mois plus tard, étantparvenue à capter la confiance des religieuses, on la laissa plus facilement circuler dans l'établissement. Aussi en profita-t-elle bientôt pour se sauver. Si l'on en croit son récit, bien des fois renouvelé et toujours identique, elle serait revenue à pied de Toulouse à Paris, vêtue de l'uniforme de l'asile, en sabots, couchant dans les bois, se déshabillant pour laver sa chemise qu'elle séchait sur elle ; se nourris-santde pain qu'elle demandait dans les fermes : Elle ne se décidait à mendier que pressée par le besoin, car elle est très-orgueilleuse. Mais, la faim aidant, elle capitulait avec son orgueil, se disant « que Notre-Seigneur avait bien demandé l'aumône et qu'elle pouvait faire comme lui. » Son voyage aurait duré près de trois mois. Arrivée à Paris, elle serait allée rejoindre son amant (?).

Geneviève ne resta pas tranquille bien longtemps. Un matin, la fantaisie lui fit prendre le chemin de fer du Nord ; elle descendit à la station de Saint-Leu et, sous l'influence des prodromes de son mal, elle lacéra les affiches apposées dans la gare et tomba en attaques : elle fut arrêtée et conduite à l'asile des aliénés de Clermont (Oise). Elle prétend que, dans les premiers jours, elle refusait de parler et de manger. Au bout de six semaines, on signa son exeat.

Le 31 août 1867, Geneviève revient, enceinte, à la Salpétrière ; elle accouche d'une fille, le 27 février. Son accouchement n'a offert rien de. particulier. Elle voulut nourrir, mais les circonstan

ces ayant nécessité le placement de son enfant à l'hospice de la rue d'Enfer, elle eut un abcès du sein gauche — celui dont elle avait naguère coupé le mamelon. Sortie le 28 avril.

Pendant la période de 1868 à 1870, nous ignorons quelle a été l'existence de cette malade. A l'époque de la guerre, elle était à la Salpétrière ; elle s'en échappe et, peu après, va remplir les fonctions d'infirmière à l'hôpital Saint-Antoine, dans la salle des femmes en couches. Elle y était depuis 2 ou 3 mois (1), lorsqu'une discussion vive avec une religieuse, envers laquelle elle se livra à des voies de fait, nécessita son renvoi.

L'armistice signé,elle quitte Paris pour aller voir sa fille qui hahitait chez des paysans aux environs d'Avallon. Arrivée à Montbard, les Prussiens la retiennent et durant huit jours elle eut des relations avec un (?) officier prussien, relations qui aboutirent à une seconde grossesse.

Suivant Geneviève, les atta-

(l) Du 27 juillet au 13 octobre. ' *

ques ont été très-nombreuses et très-fortes durant sa gros-sese. Elle est accouchée, deux semaines avant terme à l'Hôtel-Dieu. Dans les jours qui précédèrent l'accouchement, les attaques auraient été quotidiennes et on lui aurait donné du chloroforme. L'accouchement, cette fois comme la première, fut facile. G... sortit, bien qu'éprouvant des douleurs dans le ventre, parce qu'elle s'était disputée avec la religieuse. Elle alla habiter à Nogent chez une amie. Sa fille étant souffrante,ainsi qu'elle-même, elle vint au Bureau central et demanda à entrer à l'Hôtel-Dieu. Le médecin lui ayant délivré un billet pour la Cha -rite, elle refusa de s'y rendre. A peine dehors, elle fut prise d'attaques et on lui accorda l'hospitalité à la caserne de la Cité où elle passa la nuit. Le lendemain, on la mena à l'Hôtel-Dieu où sa fille mourut de convulsions : elle était âgée de six semaines. Geneviève assure que, pendant les six semaines de Vallailement, elle n'a eu qu'une seule fois des attaques. — Pendant la première grossesse, les attaques auraient été très-fréquentes et, durant les trois semaines

Planche XIII.

HYSTÉRO-ÉPILEPSIE

qu'elle nourrit son enfant, elle n'aurait pas eu non plus d'attaques.

Le 15 décembre 1871, elle revient à la Salpétrière; le certificat d'entrée indique qu'elle a été expédiée de l'Hô-tel-Dieu à Sainte-Anne, et de Saint-Anne à la Salpétrière. Elle sort le 10 janvier 1872.

1872. 7 mars.— Geneviève entrecomme épileptique, dite simple, dans le service de M. Charcot.C'est une femme un peu au-dessus de la moyenne, aux cheveux blonds et bien conformée. (Planche XIII).

21 mars. — Les attaques se présentent sous forme de séries et leurs caractères,ainsi que la description suivante en témoigne, sont tout-à-fait ceux de Yhystéro-épilepsie.

1 ° Période épileptoïde. — Immobilité complète du corps; battements rapides des paupières, rougeur de la face, perte delà connaissance; opisthotonos, laryngisme, pha-ryngisme , stertor , écume. (Planche XVII).

"i0 Période cloni que.-Cris perçants, répétés, mouvements désordonnés des bras, des jambes; rotation rapide de la j tète; projection du bassin. Un des mouvements qui se sura-i joutent d'habitude aux pré-i cédents consiste en ce que G. [ s'asseoitbrusquementsurson i lit, et rejette non moins brusquement le tronc en arrière, de telle sorte que la tète vient battre violemment l'oreiller.

3° Période de délire. — Les i convulsions cloniques ont j cessé et sont remplacées par I du délire.

La malade avait été prise dans la salle et placée par terre. Au bout d'un quart d'heure, elle se lève et demande à aller se coucher dans son lit. On l'y conduit en la soutenant des deux côtés. Alors, elle se livre à une espèce de danse singulière : elle saute en l'air, les pieds abandonnent le sol en même temps: elle jette la tète alternativement en avant et en arrière. Ce délire moteur, dù à des hallucinations sur lesquelles nous reviendrons, continue tant que G. n'est pas dans son lit. Bientôt, les attaques se reproduisent, et, à maintes reprises, on constate que \ compression de l'ovaire gauche met fin aux attaques isolées. En déprimant la paroi abdo

minale, au centre de la fosse iliaque, on sent avec la main un corps oblong, roulant sous les doigts; c'est quand on comprime ce corps que tout mouvement convulsif cesse, que la respiration redevient calme, et que, la malade recouvrant connaissance, dit être soulagée.

La série a commencé à 5 heures et demie et n'a cessé qu'à dix heures. — Le ventre était distendu par une tym-panite considérable.

27 mars. — Ce matin, Geneviève est couchée ; elle refuse de se laisser examiner, fait mine de mordre, essaie de frapper, divague, profère des injures. De temps à autre, elle a des spasmes du pharynx.

28 mars. — Hier, dans la matinée, G... a mangé un peu ; depuis lors, elle a refusé de prendre quoi que ce soit. Elle a quitté deux fois son lit et est allée se promener en chemise dans la cour. D'ordinaire, elle est blottie dans son lit et divague. Les spasmes des muscles du cou et du pharynx persistent ; ils s'accompagnent de bruits de glou-glou, de palpitations des paupières, de rougeur de la face, de turgidité du cou et, souvent aussi, de secousses dans les muscles du thorax et de l'abdomen. La déglutition, d'ailleurs, comme on s'en est assuré, s'effectue sans difficulté.

29 mars. — G. s'est décidée à manger. Aussitôt après le repas du soir, elle a vomi abondamment. Elle se plaint d'une douleur au sommet de la tète et dans la fosse iliaque droite. — Attaques épilepli-for mes.

30 mars. — G., assez calme ce matin, a été prise de délire dans l'après-midi : on pense qu'elle est parvenue à se procurer du vin blanc et qu'elle en a bu une assez grande quantité.

31 mars. — Mêmes excès alcooliques. G. est très-excitée, déraisonne, se querelle avec tout le monde.

Mai. — Les accidents que nous venons de décrire ont disparu dans les premiers jours d'avril; puis, consé-cutivementà des attaques survenues au commencement du moi de mai, Geneviève, dans son délire, s'est saignée au bras droit : le sang a coulé en jet.

18 octobre. — Durant une série d'attaques T.V. 38°,2.

21 octobre. — G .. est tranquille depuis deux jours, et, par conséquent, dans son état normal : T. V. 37°,3. — On voit donc que, sous Vinfluence des attaques d'hystéro-épilepne, la température s'élève de près d'un degré.

26 octobre. — Elle a des attaques quotidiennes et le délire est presque continuel. Ce matin, G... s'est échappée de sa salle et a couru à l'infirmerie générale, disant qu'elle voulait voir « son docteur. » Elle était toute effarée, avait les cheveux et les vêtements en désordre. Les tentatives faites pour la calmer n'ayant d'autre résultat que de l'exciter davantage et de lui faire exécuter de grands mouvements des bras et des jambes, comme si elle voulait se défendre, M. Charcot l'a fait coucher sur le parquet et a comprimé la région ovarienne gauche. L'excitation a promptement disparu; mais, après un court intervalle de repos, a éclaté une véritable attaque hystéro- épileptique avec ses caractères ordinaires.

Dans son délire, Geneviève déclare qu'elle veut s'en aller, imagine des projets d'évasion, vocifère contre les personnes qui prononcent des paroles qu'elle interprète de travers ou ne répondent pas à ses questions selon ses désirs, crache au visage de tout le monde, etc. D'où la nécessité de la maintenir à l'aide de la camisole.

14 novembre. — G. s'est pratiqué une nouvelle saignée au bras droit avec des ciseaux. Pour atteindre son but, elle s'y est reprise à trois fois: le sang a coulé en assez grande quantité.

23-28 novembre. — Attaques tous les jours. — Rien le 29 et le 30 novembre, ni le 1er décembre. — Le 2 décembre, contracture du membre inférieur droit dans l'extension.

7 décembre. — La contracture est la même. — Inhalation d'éther mais non jusqu'à résolution. Quelques instants après, G. a une attaque : la contracture disparaît complé*-iement. — Le lendemain, elle envahit de nouveau la jambe droite et, le 16, elle n'est pas modifiée : le membre inférieur tout entier est rigide ; il est impossible d'imprimer des mouvements aux jointures; le pied a l'attitude du pied bot varus équin. La flexion dorsale du gros orteil détermine une trépidation générale

du membre. — La contracture se dissipe le 30 décembre consécutivement à une espèce à'état de mal hystéro-épilep-tique.

1873. 15 janvier. — Délire consécutif aux attaques. Geneviève casse tous les objets qui sont à sa portée, brise les carreaux des fenêtres, etc.

27 janv. — Les règles ont paru hier dans l'après-midi. Ce matin, G... est en attaques. On les arrête par la compression. Elle revient à elle, mais est en proie à un délire hallucinatoire : elle voit des corbeaux et des serpents; raconte avec des détails minutieux une discussion entre le directeur et la surveillante, relative à de petits incidents du service.

Février. — Attaques fréquentes. Le 10, elle refuse de parler, est engourdie, absorbée. Le 11, elle semble se réveiller, cause.

19 fèù. — G... se plaint de douleurs névralgiques occupant la tête ; elle a des contorsions des membres et de la face.

21 fév. — Elle saute pardessus le mur qui sépare la section de l'infirmerie générale.— 25 fév. — Contorsions.

Mars. — Le pied droit, contracture après des attaques survenues le 4, redevient libre le 6, également après des attaques.

8mars. — G... a eu une faiblesse lipotbymique. Le sommeil est presque nul. — L'insomnie persistant le 30, on lui donne du chloral qui l'a fait dormir.

Avril. — Application tous les jours, pendant plusieurs heures, d'une vessie de glace sur la région ovarienne gauche. Sous l'influence de ce traitement , les attaques ont momentanément diminué (1). — Dans le courant de ce mois, nous la trouvons un matin, sous le coup d'une attaque : elle a un besoin incessant de mouvement, saute partout, danse, se tient debout sur le pied de son lit, cherche à embrasser, lève ses jupes, et, durant ce temps, sa physionomie exprime à un haut degré la lubricité. Ces manifestations erotiques augmentent encore à l'heure de la visite. A un moment, sa

(l) Voir pour plus de détails : Bourneville. — Recherches cliniques et thérapeutiques sur Vépilepsie et l'hystérie, p. 52.

face est envahie par une pâleur extrême et par des mouvements convulsifs. Geneviève prend ma main et la place sur son cœur pour faire constater les palpitations qui sont véritablement très-intenses ; ces phénomènes sont bientôt suivis d'une attaque qui se termine par une période de délire où l'érotisme prédomine. Les règles ont paru la nuit dernière : il semble que les phénomènes erotiques sont toujours plus accentués avant ou après les attaques qui se produisent durant les périodes menstruelles. — Tympanile considérable. — Plusieurs fois, en avril, nous avons entendu G., pousser des cris très-aigus et, lorsque nous l'interrogions à ce sujet, elle répondait qu'elle était souffrante et que ces cris la soulageaint.

Mai-août. — Les particularités les plus intéressantes, observées du mois de mai à la fin d'août ont été résumées dans notre note sur l'emploi thérapeutique du ni-trite d'amyle (1); comme elles ne diffèrent guère des descriptions suivantes nous

(l) Boumeville,/oc.«Y.,p. 108-110.

croyons inutile de les reproduire.

Septembre. — Le 4 et le o. secousses. A midi, application de la glace qui amène la disparition des secousses et de l'oppression cardiaque qui les complique. — Le 7, Geneviève est agitée, ne tient pas en place, court dans le jardin, menace de tout briser, pousse des cris aigus qui,comme nous l'avons écrit plus haut, lui procurent un grand soulagement. Elle se plaint, en outre, de douleurs très-vives dans la région ovarienne gauche.

8 septembre.— Aujourd'hui, ce sont les douleurs cardiaques qui; prédominent; elle sent des coups à la région du cœur, étouffe. La face est pâle; les traits sont altérés: la physionomie aune expression d'effarement. De plus, Geneviève se plaint de sentir au niveau de la tempe gauche des douleurs qu'elle compare a des coups de marteau et d'éprouver une fatigue générale. « Je préférerais, dit-elle, avoir mes attaques que de rester comme je suis. » Tympanite énorme. — La compression ovarienne calme momentanément tous ces accidents.

12 septembre. — Excitation. Ce matin, G... était encore

couchée quand le Directeur a visité la salle; elle s'est levée, a couru après lui, criant que elle voulait le tuer, qu'il passerait par ses mains, etc.»

14 décembre. — Les règles ont paru le 9. Depuis lors, G. ne travaille plus, fait des folies, se couvre la tète d'une façon bizarre. Hier, elle est allée à la cantine et a bu du vin ; elle est rentrée dans sa section avec plus d'excitation et peu après a vomi. Quand elle s'est mise au lit, elle avait le libre exercice de ses membres. Aujourd'hui, à son lever, il lui a été impossible d'aider à faire son fit parce qu'elle avait de la peine à se tenir sur lesjambes. A 9 heu res, elle a éprouvé des douleurs très-intenses dans les deux côtés du ventre, douleurs auxquelles a succédé une contracture de la jambe droite: la jambe est dans l'extension ; la hanche, - le genou, le coude-pied sont très-rigides; le pied est en varus équin; les muscles se dessinent d'une manière très-nette. — L7ié-mianesthésie est toujours complète à gauche; — à droite, il y a simplement de Y analgésie.

1874. 5 janvier. — Délire consécutif à une série d'attaques : G... casse quatorze carreaux. — Les règles ont commencé le 6 et fini le 9.

13 janvier. — La contracture du membre inférieur droit persiste. La malade marche en boitant avec beaucoup de difficulté.

Geneviève a eu un grand nombre d'attaques en janvier. Le 30 et le 31, rien, malgré l'apparition des règles (31 janvier). Le 1er février, les 2 et3, pas d'attaques.Aujourd'hui, 4 février, on remarque que la contracture a diminué-dans la hanche et le genou. Le pied conserve la même attitude et reste rigide.

13 février.—Secousses; pas d'attaques.

17 février. — Attaques presque quotidiennes. G... est abattue, prostrée, refuse de parler. — Même état le 18 février; ce jour là l'inhalation de quelques gouttes de nitrite d'anyle suffit pour la réveiller.

26 février. — Les règles ont paru hier. Attaques suspendues parla compression alternative des deux régions ovariennes: il existe une double ovaralgie. Le pied est redevenu libre: par conséquent le membre inférieur droit est presque normal : il n'y a plus

qu'un léger affaiblissement (parésie). La disparition de la contracture a coïncidé avec l'apparition des règles et avec des attaques.

27 février. — La sensibilité au contact, au pincement, à la piqûre, à la transfixion, à la chaleur et au froid, est abolie sur toute la surface du corps. —Lorsque,maintenant les talons avec les mains, on dit à la malade de fléchir les jambes sur les cuisses, on constate que la jambe gauche est moins faible que la droite. Il en est de même, quand, les jambes étant fléchies et les mains appuyées contre elles, on ordonne à la malade de les allonger: elle exerce une plus grande pression à gauche qu'à droite.

1or mars. — Hier, elle a eu plusieurs attaques après lesquelles elle a été très-excitée; profitant d'un instant où la surveillance s'était ralentie, elle a couru jusqu'à l'infirmerie. — Le soir, à 8 heures, pendant que la veilleuse était occupée dans la salle voisine, elle s'est sauvée. On n'a pas pu la retrouver, bien qu'on l'ait cherchée pendant deux heures. Ce matin, à 5 heures, elle a essayé de franchir la porte ; mais reconnue aussitôt, elle a été arrêtée et réintégrée dans le service. Elle raconte que, durant les recherches, elle s'était cachée sur le toit d'un petit bâtiment situé auprès de la salle d'autopsies ; puis, qu'elle s'est réfugiée dans l'un des jardins et que là, comme elle avait froid, elle avait essayé, sans y parvenir, de faire du feu.

2, 3 mars. — G. est calme.

4 mars. — Plusieurs attaques. Tout d'un coup, elle saute de son lit et se précipite en chemise jusqu'au parloir. S mars. — Attaques répétées.

6 mars. — Attaques nombreuses. Dans un intervalle de repos, elle s'enfuit jusqu'à l'infirmerie générale où éclatent de nouvelles convulsions que M. Charcot arrête par la compression ovarienne On en profite pour la camisoler et la reconduire dans sa section. — Dans l'après-midi, on lui retire la camisole pour qu'elle puisse manger. Bientôt, elle s'excite, descend précipitamment de son lit, et court grimper sur le toit d'un bâtiment où travaillaient des couvreurs. Ce n'est qu'avec beaucoup de peine qu'on est arrivé à la faire descendre et à lui remettre la camisole. Dans la nuit, elle déchire sa camisole

et se sauve encore une fois : à une heure du malin, on l'a retrouvée dans la cour de l'infirmerie générale, assise sur un hanc, toute nue, et tenant sa chemise sur son bras. Elle 's'est laissée ramener dans' son lit sans difficulté.

7-10 mars. — G. mange peu, ne dort pas. — Chloral et extrait thébaïque dont la dose est portée, progessivement de 5 à 10 centigrammes.

11-13 mars. — Refuse de manger et de parler. De" temps à autre, attaques.

16 mars. — Geneviève est dans un état de prostration profonde; elle ne parle ni ne mange. Sous l'influence de la compression ovarienne, il se produit des mouvements de déglutition, des contractions de la face ; puis, la malade regarde les assistants et bientôt, s'adres-ant à l'un d'eux, dit : « Embrasse-moi. » D'abord, elle refuse de manger ; mais, la compression continuant, on la décide à boire du bouillon et du vin. En raison de l'insomnie, on lui donne 0,20 d'extrait thébaïque.

17 mars. — Elle n'a pris aucun aliment depuis hier matin. Tantôt elle refuse de parler, tantôt elle injurie les infirmières, la sous surveillante, etc. Dans ces derniers jours* elle a uriné plusieurs fois sous elle.'2o centigr. d'extrait thébaïque.

18 rnats.^Dès qu'on a eu fini.de l'alimenter à l'aide de la sonde œsophagienne, G...

\ a essayé de se faire vomir sans y parvenir.—Cette nuit elle a eu des hallucinations de la vue, prétendait voir des chiens énormes, suppliait la veilleuse de fermer les portes, pleurait. Elle s'imaginait qu'il- y avait une grande tempête et que la fin du monde approchait. — Ce matin elle se plaint qu'on laisse les corbeaux venir lui piquer la tète, d'avoir des serpents et des "vipères iqui pénètrent dans son ventre et la font souffrir. « Si elle refuse de manger, c'est parce qu'elle ne veut pas nourrir toutes ces bètes. »

Bien qu'elle prenne régulièrement 0,2o d'extrait de thébaïque, elle ne dort pas ; c'est tout au plus si elle s'assoupit pendant quelques minutes.

19 mars. — M. Chareot réveille Geneviève par la compression ovarienne. Elle raconte alors ses visions. Notre maitre recommande d'exercer

Planche XIV.

APPROCHES DE L'ATTAQUE

rnie surveillance minutieuse afin de s'assurer si personne ne lui donne pas à manger en cachette et aussi afin qu'on sache combien une hystérique est capable de rester de temps sans prendre de nourriture. M. Charcot n'avait pas encore franchi le seuil de la porte de la salle que Geneviève, assise sur son lit, en fureur, réclamait impérieusement à manger : coup sur coup, elle but plusieurs tasses de bouillon, du vin, mangea de la soupe, etc.

20 mars. —G .. est excitée, déclare qu'elle ne se laissera pas v. crever de faim », répétant des expressions prononcées à côté de son lit, il y a quelques jours et qui l'ont mortifiée. — Elle dit qu'elle s'est vue très-près de la mort et qu'elle a promis à la Sainte-Vierge, si elle sortait saine et sauve de cette crise, d'ètré pieuse et de se confesser.

22 mars. — Depuis qu'elle s'est réveillée brusquement (19 mars), G... ne gâte plus. Elle n'aurait pas eu de garde-robes dans les douze derniers jours. — Traitement tonique, viande crue, etc.

timars.—La malade mange bien, est plus tranquille. —

Elle a eu plusieurs attaques et a uriné sous elle : elle attribue cet accident à ce qu'il lui est impossible de se retenir.

25 mars. — Elle mange très-peu; elle préfère surtout la salade, les oignons, l'ail, les cornichons qu'elle se procure de façon ou d'autre. — Hier, dans la journée, le membre supérieur droit a été pris d'une contracture très-intense : le bras était collé contre le thorax, l'avant-bras demi-fléchi sur le bras, le poignet fléchi sur l'a van t-bras, le pouce contre la paume de la main. De plus, G... avait des plaques congestixes de la face, alternant avec une pâleur extrême; enfin, elle avait de temps à autre des secousses. La contracture et les troubles vaso-moteurs ont disparu vers minuit. Ensuite, G... a dormi. Son sommeil est d'habitude mauvais, agité par des rêves pénibles.

1er avril. — Geneviève est triste, de mauvaise humeur. Elle prétend qu'elle ne tardera pas à être malade. Sa physionomie traduit d'une façon expressive cet état d'affaissement qu'elle éprouve souvent à l'approche des attaques. (Planche XIV). Dans l'après-midi, elle a eu, en effet, une attaque épileptiforme.

7

1 avril. — A la suite d'une attaque épileptiforme, G... est prise du délire saltatoire auquel nous avons déjà fait allusion. Elle saute, jette la tète de côté et d'autre, en avant, en arrière, etc. Elle voit des corbeaux, leur adresse des invectives. « Qu'est-ce qu'il fait à la fenêtre, cet idiot-là? » (C'est d'un corbeau qu'elle parle)... « Oh ! il m'a donné un coup de bec! » et elle porte vivement la main au sommet de sa tète. — Elle a peur, pousse des cris d'effroi. « Les corbeaux!... ils me piquent les yeux. » Et, en un clin d'oeil, elle détache ses cheveux et les jette sur sa figure pour la protéger. — Puis, elle voit des serpents: « Ote-lcs donc » dit-elle à l'infirmière qui la soutient. — Elle saute, crie et tantôt ramène ses jupes entre les jambes, tantôt les soulève pour chasser les serpents.

5 avril. — Cette nuit, G... a eu des visions, prétendait voir la Vierge, le Christ, etc. — Ce matin, elle accuse tous les prodromes de l'aura ovarienne. Après beaucoup de difficulté, nous parvenons, M. Regnard et moi, à obtenir qu'elle se laisse photographier, et nous pouvons avoir l'aspect de sa physionomie quelques instants avant le début d'une attaque épileptiforme (Planche XV'). A peine le temps nécessaire pour avoir l'épreuve était-il écoulé, que G.-, était prise de convulsions.

6 avril. — Nous venons d'indiquer les modifications de la physionomie qui surviennent au moment de l'approche des attaques. Ce matin, G... a eu une crise épileptiforme, terminée par la période de stertor (Planche XVI). La malade était dans la résolution la plus complète, lorsque notre ami, M. Regnard, a pu prendre la photographie.

10 avril. — Geneviève est impatiente, erre dans les salles, dans la cour, se fâche sans motif; enfin, elle casse un carreau d'un coup de poing et se blesse au poignet gauche.

13 avril. — Attaque, a) Période du début. G... se plaignait des douleurs qui annoncent l'arrivée prochaine de ses attaques, quand elle cesse brusquement de parler. On remarque aussitôt que les modifications, déjà mentionnées, de la physionomie s'accusent davantage : les yeux deviennent hagards, les pupilles se dilatent, les paupières sont ani-

Planche XV.

DÉBUT DE L'ATTAQUE

Planche XVI.

ATTAQUE : PÉRIODE ÉPILEPTOÏDE

Planche XVII.

ATTAQUE : PÉRIODE ÉPILEPTOÏDE

Planche XVIII.

ATTAQUE ; PÉRIODE TERMINALE

mées de mouvements rapides, les muscles des joues et des lèvres sont agités par des convulsions incessantes.

b) Période épileptoïdc.—Alors commence une seconde période : la tète se porte lentement dans l'extension, la face et les yeux se dirigent à gauche; le cou est violemment tendu; tout le corps est rigide; les bras et les jambes sont dans l'extension, les mains contournées et fléchies sur les poignets (Planche XVIPi. La respiration est suspendue.

c) Période cIonique. — Au bout d'une minute environ, la rigidité disparait, la malade soulève brusquement le tronc, qu'elle rejette non moins brusquement sur le lit et exécute, plusieurs fois, avec rapidité les grands mouvements de balancement. Bientôt, elle reste dans le décubitus dorsal, le visage se convulsé d'une façon horrible; puis, G... roule dans son lit de gauche à droite et de droite à gauche ; les cheveux, dénoués, tantôt voilent sa face, tantôt sont rejetés en arrière. A ces phénomènes en succèdent d'autres qui constituent la dernière période.

d) Période de délire. — G... est immobile, couchée sur le dos, les cheveux pendant sur les épaules. La physionomie est empreinte d'une profonde tristesse (Planche XVIII). De temps en temps, elle prononce quelquesparoles, allusion aux incidents les plus pénibles de son existence. Enfin ses traits se détirent, elle se réveille, s'asseoit, et le délire mélancolique est remplacé par un délire erotique.

Nous laisserons de côté les manifestations, déjà connues, que Geneviève a présentées durant le reste de l'année, ayant hâte d'arriver à la description d'autres phénomènes très-curieux qui.se rattachent à la période de délire. Toutefois, nous croyons utile de mentionner auparavant les résultats d'un examen de la vision, fait par M. Landolt.

1875. Examen de la vision.— Œil droit. L'acuité visuelle est normale; G... distingue toutes les couleurs, seulement il faut les approcher plus près que pour un œil tout-à-fait sain. — Le champ visuel est rétréci concentriquement ; il s'étend en dehors au-delà de 45°, mais non jusqu'à 55° ; en

bas,les limites dépassent également 45°; en dedans, il s'arrête à 30° environ.

Œil gauche. — De cet œil, G... reconnaît toutes les couleurs sauf le vert qui lui parait blanchâtre. Le champ visuel est considérablement rétréci (10°).

A Tophtlialmoscope, on trouve que la rétine des deux yeux est congestionnée ainsi que la pupille quoique à un moindre degré. La partie de la rétine qui environne la pupille gauche est infiltrée. Les veines centrales sont un peu sinueuses et dilatées à gauche (1).

25 Mai. — Nous assistons à une attaque précédée des modifications de la physionomie déjà décrites (Pl. XV) et qui se compose, suivant la règle : 1° d'une période tonique ou épileptoïde (Pl. XVII) ; 2° d'une période clonique avec mouvements de balancement ; — 3° d'une période de délire, qui, tout en offrant encore aujourd'hui le caractère mé-

(l) Cette perversiou du sens de la vision a parfois des conséquences sérieuses : Un jour, Geneviève acheta une robe d'un rouge violet, croyant avoir une robe marron.

lancolique que nous avons déjà mentionné, a présenté, en outre, des particularités que nous n'avons pas consignées jusqu'ici.

G... est à demi-assise sur son lit, le tronc reposant sur les oreillers ; les cheveux sont rejetés en arrière ; le regard est fixe, la physionomie est empreinte d'une sorte de tristesse résignée (Planche XIX). Elle parle de sa mère, de son premier amant, amant de cœur si on l'en croit, Camille, elle parle de son second amant, le père de sa fille, de sa fille elle-même, etc. :

« Pauvre Geneviève !.. . Ton existence est bien triste.. oh! ma fille !... Ton père je ne l'ai jamais aimé... Oh! le traître !... » Elle pleure ; puis reprend : « Non, je ne l'ai jamais aimé.... Oh! mou Camille, où es-tu?... Mon fiancé!.. Je ne lui trahirai jamais ma foi... Si je ne suis pas restée sage, ce n'est pas ma faute... Le traître, il m'a tendu des pièges... Il m'a dit que je guérirais... Oh! Marie, mère de Dieu, ayez pitié de moi !... Oh ! ma fille.. tout mon bonheur... Tu es pour moi un triste souvenir, mais je t'aime... Sans toi, fille chérie, je me serais donné

Planche XIX.

PÉRIODE TERMINALE : DELIRE MÉLANCOLIQUE

Planche XX.

PÉRIODE TERMINALE : DÉLIRE MÉLANCOLIQUE

Planche XXI

PÉRIODE TERMINALE : DÉLIRE MÉLANCOLIQUE

la mort.... Pour toi, je travaillerai nuit et jour... Je ne ferai pas comme ma mère, je ne t'abandonnerai pas... Je pense à toi, ma fille. .. Pourquoi chercherai-je à me détruire?... Dieu ne m'a pas permis de m'ôter la vie... Je n'ai un sourire amical de personne...»

Ce délire dure un temps variable, roulant toujours sur les actes de sa vie. En£uite, les muscles de la face se contractent, donnant à la physionomie une expression de douleur, de surprise, qui s'efface promptement et est remplacée par une expression de lubricité cynique.'Alors, se manifeste le délire erotique...

L'attitude de la malade pendant la période de délire mélancolique n'est pas constante. Outre celles dont nous avons parlé, il en est d'autres dans lesquelles Geneviève est assise, la physionomie ayant une expression larmoyante (Pl. XX), ou bien inclinée sur l'un des côtés du corps (Pl. XXL. Mais, le fond du délire est le même : ses discours roulent sans cesse sur les événements les plus frappants de son existence et qui sont, à l'état normal, l'objet de ses préoccupations; parfois aussi, sur les discussions, les querelles qu'elle a eues soit avec ses compagnes, soit avec les personnes du service, médecin ou employées.

Ce délire prend quelquefois un caractère religieux. Ainsi, en 1875, G... avait les attitudes qui sont représentées dans les Planches XVIII et XX. La tête était relevée sur l'oreiller, les cheveux rejetés en arrière, flottaient sur les épaules, les jambes étaient légèrement fléchies sur les cuisses; ou bien G... était assise et avait, appuyé sur ses genoux, un crucifix qu'elle maintenait de la main droite tout en discourant :

« Pauvre petite créature ! (Allusion à sa fille.)... Tu ne sais pas quelle destinée t'attend?... Moi, je connais la mienne... Elle a commencé bien jeune à être triste... Pauvre Geneviève!... Pauvre mère nourrice!... Tu me donnais souvent des fessées... Tu croyais que ça me ferait du bien... Je t'aimais bien tout de même... Notre Seigneur a aussi été flagellé... Mon Dieu, guérissez-moi et je vous servirai ! » Par instants, elle embrasse son crucifix; puis,

elle pleure et recommence ses lamentations.

Dans le cours de l'année, nous avons été témoin d'une autre variété de délire où le cachet religieux était encore plus marqué. Au lieu d'un délire purement mélancolique, accompagné de discours et de lamentations, il s'agissait d'une véritable extase.

G... est assise : tantôt la tète garde une attitude presque naturelle ; les yeux sont légèrement dirigés en haut, les mains jointes, reposent sur le lit; c'est Y attitude de la prière (Pl. XXII); — tantôt, la tête est un peu penchée en arrière (Pl. XXIII) ; — d'autres fois, enfin, l'attitude est celle que l'on attribue aux illuminées comme sainte Thérèse, etc., (Pl. XXIV). Dans ce dernier cas, la tête est rejetée en arrière, le regard porté vers le ciel: la physionomie, empreinte d'une grande douceur, exprime une satisfaction idéale;le cou est gonflé, tendu; la respiration parait suspendue ; l'immobilité du corps entier est pour ainsi dire absolue. Les mains jointes reposant sur la partie supérieure de la poitrine complètent la ressemblance avec les représentations des saintes que l'art le plus parfait nous a données.

Quelle que soit d'ailleurs l'attitude prise par la malade, elle la conserve durant 10, 15, 20 minutes et même davantage. A la fin, aussi, on observe les mêmes contractions de la face, les mêmes modifications de la physionomie, le même délire erotique qui succèdent d'ordinaire au délire mélancolique. Seulement le contraste, alors, est beaucoup plus frappant. En effet, après avoir assisté à cette extase dans laquelle là malade est en quelque sorte transfigurée, l'observateur, non habitué encore à ces scènes, reste tout stupéfait en voyant ses contorsions hideuses de la face, cette expression de lubricité extrême que nous avons précédemment signalées. En pareille circonstance, la malade laisse retomber son corps sur le lit, relève sa chemise, écarte les cuisses ; — ou bien, s'adressant à l'un des assistants, elle s'incline brusquement vers lui, disant : « Embrasse-moi !... Donne-moi... Tiens voilà mon... » Et ses

Planche XXII PÉRIODE TERMINALE . EXTASE

Planche XX11I

PÉRIODE TERMINALE : EXTASE

Planche XXIV

PÉRIODE TERMINALE : EXTASE

gestes accentuent encore la signification de ses paroles.

A différentes reprises, dans ses attaques, G-... s'est donné des entorses des pieds ou des poignets, s'est fait des fractures, etc. Quelques feuillets de son observation ayant été égarés, nous sommes obligés denous borner à cette simpie mention. Aussi sommes-nous dans l'impossibilité de dire quelle est la relation qui a pu exister entre ces traumatismes et les contractures des membres supérieur et inférieur du côté droit dont elle a été atteinte.

Le 8 décembre 1875, à la suite d'une scène qu'elle fit chez M. le Directeur de la Sal-pétrière, on la fit passer dans la section de M. Delasiauve, consacrée aux épileptiques et hystériques réputées aliénées. Elle en sortit le 12 mai.

Pendant que G... était libre, nous avons eu plusieurs fois l'occasion de la voir parce que, lorsqu'elle se sentait malade [aura ovarienne), elle venait nous trouver ou nous faisait appeler, dans la crainte que d'autres médecins ne la fissent conduire à la préfecture de police, d'où, naturellement elle aurait été dirigée sur l'asile Sainte - Anne qu'elle redoute, nous ne savons pour quelle raison, à un très-haut degré.

Plusieurs semaines s'étaient écoulées sans que nous ayons eu la véritable corvée de mettre fin à ses attaques, quand M. Charcot nous communiqua la lettre suivante de M. Decaesseckey, médecin à Quesnoy-sur-Deule, près Lille :

12 août 1870.

Monsieur et cher maître,

Je prends la liberté de vous écrire ces quelques mots au sujet d'une malade qui vous intéresse beaucoup : je veux parler de lhys-téro-épileptique, Geneviève L... En passant par Quesnoy, elle a été prise d'une attaque d'hystéro-épi-lepsie qui a duré depuis 6 heures du soir jusqu'à une heure du matin et n'a cessé que par la compression ovarienne.

Avant son attaque, elle s'était arrêtée dans un cabaret où elle avait, dit-on, tenu des propos assez libres et, comme elle avait bu, avec des gens plus libres qu'elle qui s'y trouvaient, environ un demi litre de bière, cela avait suffi pour la faire passer aux yeux des habitants, grâce à la complicité d'un médecin peu au courant des maladies nerveuses, pour une ivrognesse, une femme qui ne méritait pas la moindre pitié.

Quand je l'ai vue, elle était en proie à une de ses attaques, avec ballonnement du ventre, contractures intermittentes, délire raisonnant, hallucinations, etc. J'écartai bientôt l'idée de gi'ossesse avec attaques éclamptiques ou l'idée d'accès d'é-pilepsie. C'est en me rappelant vos savantes leçons que je fus amené à pratiquer la compression ovarienne.

Revenue rapidement à elle, Geneviève me narra alors son histoire et je fus heureux d'avoir pu épargner à cette fdle les humiliations et les critiques plus que malveillantes qui venaient tinter à mes oreilles. Devant la méchanceté des uns, l'ineptie des autres, c'est pour moi un soulagement de vous raconter ces choses et de vous prouver que le dévouement et l'intérêt que vous portez aux étudiants de Paris, ne laissent pas de produire des fruits,et cette occasion me fournit le plaisir de vous témoigner toute ma reconnaissance...

Geneviève est restée un jour chez moi et, malgré mon insistance à la faire retourner à Paris, elle a voulu aller voir une de ses amies à Bruxelles et dire bonjour « à sa sœur Louise Lateau » comme elle dit avec raison.....

Cette lettre, fort intéressante, demande quelques explications. L'histoire de la prétendue miraculée belge,ra-contéepar tous les journaux, était venue à la connaissance de Geneviève qui, à la Salpé-trière, avait maintes fois manifesté l'inteution d'aller en Belgique rendre visite à Louise Lateau. Il parait que, en route, elle fut malade et qu'on la fit descendre à Ques-noy où, étant prise d'attaques, elle fut soignée par M. D... Ainsi que la lettre précédente nous l'annonce, Geneviève continua sa route jusqu'à Bruxelles. Dans cette ville, elle aurait eu des aventures.... Enfin, elle est rentrée à Paris sans avoir vu sa sœur.

D'après des lettres qu'elle nous a montrées pour dissiper notre incrédulité, G.....

aurait été sur le point de se marier. Elle aurait eu, aussi, des rapports sexuels sans éprouver aucune sensation voluptueuse. « C'est un essai que j'ai voulu faire et c'est ce qui m'a décidé à ne pas me marier » dit-elle. (1 )

G.... est rentrée le 10 mars 1877, à la Salpétrière, dans le service de M. Charcot.

29 mars. — G... a été prise de secousses à 11 heures 15. Elles ont débuté par les jam-

(l) Dans le délire consécutif aux attaques, elle fait parfois allusion à cette abolition du sens génésique : toute la .surface du corps (peau et muqueuses) est insensible.

besqui, actuellement (11 h. 30), sont débarrassées. Le bras droit est dans l'extension, rigide dans toutes ses jointures ; la main et les doigts sont fléchis ; le pouce est appliqué sur la paume de la main et re-couvertpar les doigts. Le bras gauche a la même attitude et présente la même rigidité. A cette rigidité — qui est permanente — s'ajoutent des secousses tétaniformes, rapides, comme électriques. Les secousses et la rigidité prédominent à gauche.

11 heures 35. — Lebras droit devient libre. Le bras gauche demeure rigide, dans l'extension et la pronation. Parfois, les deux bras sont secoués brusquement. Puis, la scène change : mouvements de déglutition, pâleur, convulsions de la face ; extension suivie de flexion de la tète; déviation des yeux en bas; contracture des muscles du cou dont les veines sont gonflées. Ces phénomènes durent une vingtaine de secondes. Alors, G... soupire, la face rougit, les secousses cessent ; le bras droit qui avait été de nouveau contracture, se relâche ; le gauche conserve la même position et le même degré de rigidité. De temps à autre, on observe des palpitations des paupières.

De 11 h. 20 à 11 h. 30, les secousses se montraient et dans les bras et dans les jambes qui étaient rigides et à demi-fléchies;les pieds avaient i'attitude du pied bot varus équin. L'extension a fait cesser les secousses mais non fa rigidité.

11 heures 45. — Lebras et la jambe du côté droit sont absolument libres; le pied est normal. Bientôt l'épaule et le coude, à gauche, récupèrent, leursouplesse naturelle; seuls le poignet et les doigts conservent leur rigidité. G... revient tout à fait à elle, cause, et par moments soupire. La physionomie est naturelle. G... raconte que les secousses sont précédées des mêmes phénomènes que les attaques proprement dites. Elle est énervée, a envie de crier, éprouve dans les bras et les jambes des sensations qu'elle compare à des fils qui se raccourciraient; enfin, il lui semble que sa figure est froide, glacée.

6 mai. Attaque (Yhystéro-épi-lepsie. 1° Période épileptoïde (Pl. XVII) ; — 2° Période ctonique ; — 3° Compression ovarienne, la malade étant couchée par terre ; elle revient

à elle : délire erotique, puis délire hallucinatoire.

Tandis que les infirmières la conduisaient à son lit, en la tenant sous les bras, elle s'écrie : « Mais chassez-les !. Ils viennent me piquer ! » Et elle cherche à se protéger contre les corbeaux en cachant sa tète avec ses mains. Elle pousse de petits cris, comme si on la piquait. S'a-dressant à la surveillante, elle dit : « Cache-moi !» et ce disant, elle essaie de dissimuler son visage avec son tablier. Tout d'un coup, elle tressaute et s'écrie : « Oh ! les vilaines bêtes! » Elle se débarrasse de ses aides, s'affaisse, cherche précipitamment dans ses jupes qu'elle relève, fait le geste de chasser,de prendre quelque chose qu'elle rejette avec un dégoût mêlé d'effroi : c'est un serpent. En même temps, elle profère des cris différant de ceux qui accompagnent le délire des corbeaux : ils rappellent ceux d'une femme qui s'imagine qu'un animal quelconque, une souris par exemple,grimpe le long de ses jambes. Puis, elle reporte les mains à la tète, reparle des corbeaux : « Ça me pique ! » et veut s'arracher les cheveux. Ces hallucinations se dissipent en général au bout de 5 à 10 minutes.

23 mai. — Le membre supérieur gauche est contracture dans la demi-flexion et on note des secousses dans le membre supérieur droit avec contracture passagère des doigts.

M mai. — Hier soir, G... s'est sauvée de son dortoir et a couru, en chemise, dans la cour d'entrée de la section des épileptiques et, de là, à la salle de garde. Elle voulait voir M. X... qui n'y est jamais à pareille heure. Elle s'est laissé ramener sans difficulté, tout en sautillant. Pour expliquer la singularité de sa conduite, elle prétend, ce matin, que M. X..., accompagné de M. R..., lui intimait l'ordre de venir ; que d'abord elle a résisté: mais que M. X... ayant paru se mettre en colère elle avait « volé à son appel ».

Juin. — G... se plaignant de douleurs vagues dans la tête, d'une insomnie continuelle, on lui a fait plusieurs injections de chlorhydrate de morphine. A la suite de l'injection, au même point, d'une quantité un peu trop considérable de la solution, il s'est produit une induration des tissus voisins,

avec rougeur, élancements, etc. Une ponction a donné issue à une petite quantité de sérosité sanguinolente.

Les douleurs céphaliques ont persisté durant la plus grande partie du mois, avec des rémissions d'une durée variable. Ces douleurs siègent de chaque côté du front, dans les yeux, dans les oreilles, au sommet de la tète, à l'occiput sans qu'il y ait, à proprement parler, de points fixes.

Un jour, G. paraissait préoccupée, menaçait de s'enfuir. Mise en cellule, elle a cassé tout ce qu'elle a pu, a déchiré les matelas des murs, etc. Quand elle est sous l'influence de ces « menaces d'attaques », elle est facile à contrarier, beaucoup plus susceptible que d'habitude et travaille moins ou même ne travaille pas du tout (1 ).

30 juin. — G... a eu au sujet d'un moineau {%) une discus-

(1) G. ., dans l'intervalle de ses séries d'attaques, est très-laborieuse^ travaille à la coulure avec une grande activité pour gagner de l'argent afin d'entretenir convenablement sa fille, Elle passe pour une ouvrière très-habile.

(2) Quelques malades s'amusent à prendre des moineaux, surtout sion très-violente avec une de ses compagnes, nommée Catherine, sur laquelle elle s'est précipitée. Une fille de service étant intervenue, G... lui a égratigné le visage et les cuisses et a essayé de la saisir à la vulve, dans l'intention de lui faire le plus de mal possible. Dans sa colère, elle menaçait encore de défigurer avec du vitriol une autre de ses compagnes, plus jeune qu'elle et dont elle est jaïouse. Pour rétablir l'ordre, on fut obligé de la conduire en cellule. Aujourd'hui, elleseplaint énergiquement, accuse tout le monde ; elle est surtout furieuse parce que, suivant son dire, on aurait placé un torchon sale sur sa bouche pour l'empêcher de crier. Dans la lutte, elle s'est contusionné le poignet droit.

7 juillet. — G... est en cellule ; elle continue de proférer des menaces ou refuse de parler; actuellement, elle est couchée dans la ruelle du lit, la face tournée vers le mur. Sous l'influence de la compression ovarienne, on parvient à faire cesser son silence. Bientôt, elle regarde et

Marc..., dont nous publierons prochainement l'observation.

dit, au bout de quelques instants : « Embrasse-moi. » Nous avons pu examiner son poignet droit qui est médiocrement gonflé et constater, dans les mouvements provoqués, quelques craquements.

Soit dans le récit précédent, soit dans le cours des premières observations, nous avons avancé que les hystériques faisaient fréquemment allusion, pendant la période de délire, aux événements qui avaient frappé leur imagination. L'exposé des divers phénomènes présentés par G... dans le mois de juillet, fournira au lecteur une nouvelle démonstration de l'exactitude de notre assertion.

1 juillet, soir. — G... a été prise d'attaques à une heure et demie. Lorsque nous l'observons, à quatre heures, elle est à la fin de la période de délire. Elle se lamente, parle de l'ancienne surveillante du service des épileptiques (1):

0) Durant un de ses séjours dans le service dont cette dame avait la surveillance, G... s'était cachée sous la plaque d'un regard des eaux. Pendant plusieurs heures, on la chercha partout et particulièrement sur les « Madame Delsinne a dit que je serais malheureuse...Quand elle me mettait en cellule, elle me faisait garder... Avec elle, je ne me suis jamais blessée aux bras... Quand je lui ai jeté un bol à la tète, elle ne m'en a pas voulu. . Ici, on me maltraite. Dimanche, on a voulu m'étouffer... Pour résister, il faut que j'aie l'âme chevillée dans le corps. » — Elle s'arrête, soupire : « Pauvre Geneviève ! quelle existence ! — Après un nouveau repos, elle reprend: « Oh! mon Dieu, je vous offre mes souffrances. » Puis, elle revient sur les différentes phases delà discussion du 30 juin, s'efforce de se justifier et rejette tous les torts sur les autres.

Avant notre arrivée, elle parlait de diverses personnes du service médical, de M. X.. surtout, de la passion qu'elle éprouve pour lui. Bien que des ouvriers qui travaillaient dans une salle voisine, aient

toits où parfois elle avait grimpé. Enfin, soit parce qu'elle était satisfaite de la peine qu'on s'était donnée sans résultat, ou bien parce qu'elle était mal à l'aise dans sa cachette, elle se décida à sortir : « Sont-ils bêtes, dit-elle, de me chercher eu l'air quand je suis en terre. •

passé plusieurs fois à côté de son lit — durant son délire erotique — elle ne leur a pas adressé la parole. Cette conduite forme un contraste frappant avec ce qu'on observe lorsque G... présente ce même délire pendantlavisite: quelle que soit, alors, la personne du service médical qui se trouve devant elle, elle lui demande de l'embrasser... quand elle-même ne prend pas à l'impro-viste l'initiative. C'est à celui qui le premier attire son regard, quand elle recouvre la connaissance qu'elle s'adresse. Cette distinction estun indice qui mérite d'être relevé, de son caractère orgueilleux.

14 juillet. — Attaques de 7 heures et demie du soir à 11 heures. Revenue à elle, G., demande à manger. A. notre arrivée, avec un de nos amis, elle était relativement calme. La physionomie, toutefois, était loin d'être naturelle, et son ventre était distendu par une tympanite extrêmement prononcée. G... s'est mise à bavarder, s'est assise sur son lit, puis elle s'est levée, voulant embrasser l'un ou l'autre de nous. Nous l'encouragions à être plus raisonnable, à se recoucher, quand nous vîmes les paupières battre, la physionomie s'altérer, la face pâlir, enfin la malade s'incliner lentement en arrière. Nous pûmes la retenir à temps pour l'empêcher de se blesser dans sa chute; c'était le début d'une nouvelle série d'attaques.

La tète est dans l'extension ; la face; les paupières sont closes ; les yeux fortement déviés en bas et à gauche ; le cou est 'tendu, gonflé. Le ventre est toujours extrêmement ballonné. Tout le corps est rigide ; les bras sont placés le long du corps, retournés (en pronation); les mains sont à angle droit sur les avant-bras ; les doigts sont énergiquement fléchis sur la paume de la main, les pouces en dehors. — Les membres inférieurs sont dans l'extension et l'adduction; les pieds en varus équin.

Puis, congestion de la face, respiration très - bruyante, stertoreuse ; écume. Par instants, on observe des secousses du tronc, avec soulèvement des épaules qui, pourtant, ne quittent pasie lit.

Ace moment, G... pousse un cri aigu, très-perçant; les paupières battent ; la déviation des yeux, qui avait diminué, augmente de nouveau;

les pupilles sont moyenne-mentdilatées; les doigts,seuls, changent d'attitude : le pouce, l'index, le médius et l'auriculaire sont dans l'extension ; l'annulaire est fléchi, la respiration est suspendue: cette réunion de symptômes constitue une sorte d'exacerba-tion de la période tonique.

La respiration devient ensuite fréquente: on entend des mouvements de déglutition; les paupières s'entr'ouvrent. G... fait aller son ventre de gauche à droite et inversement ; elle le roule, pour ainsi dire ; redresse à demi le tronc qu'elle rabat en arrière; frappe l'oreiller de sa tète, le lit de sa jambe gauche. En même temps, il s'écoule delà bouche une écume sanguinolente.

Ces mouvements cloniques sont moins étendus et moins violents que dans la période clonique complète ; ce n'est en somme qu'une ébauche de cette période telle qu'elle se présente d'ordinaire.

Enfin, G... est relativement tranquille; toutefois la rigidité générale est la même et tous les membres, sauf le membre inférieur gauche qui est infléchi, sont dans l'extension.

Les exacerbations ont les caractères suivants :

a) La tète s'étend davantage; la gorge est plus saillante : le front se plisse ; les muscles du nez se convulsent, ce qui donne à la physionomie une expression hideuse. Les paupières battent; les pupilles s'élargissent; ;la face regarde à gauche. On note aussi des mouvements de déglutition, après un arrêt passager de la respiration.

b) La respiration devient convulsive. G... pousse un cri aigu. Le menton s'abaisse; la respiration est ronflante, le corps se met en arc, à concavité dorsale et ne repose plus que sut la nuque et le talon droit, car le membre inférieur gauche, y compris le pied, est soulevé au-dessus du lit. G... conserve cette position durant une trentaine de secondes.

c) Mouvements cloniques modérés, comme tout à l'heure ; soulèvement des épaules, accompagné d'une espèce de hoquet ; plaintes ; enfin, repos, mais avec persistance de la rigidité.

Parfois, les exacerbations offrent quelques autres caractères: la congestion de la face, entre autres, est plus prononcée que dans celle que nous venons de décrire ; les yeux

se dirigent à droite au lieu de se porter vers la gauche. Outre ces variations, qui surviennent pendant la période tonique, il en est qui se montrent à la période clonique : ainsi, dans l'une de ces exa-cerhations, G... pousse, durant une dizaine de secondes, des cris que l'on compare, dans le service, aux cris des bètes féroces ; ou bien, à la fin de cette période, la physionomie est lubrique. Malgré ces modifications, le fond ne change pas: on voit les différentes phases se succéder régulièrement.

La compression ovarienne est pratiquée. Presque aussitôt, l'état tétanique disparait et G... délire : « M. X... ne croyez pas ce que disent les infirmières... Mon frère m'abandonne... Je n'irai plus à la Salpétrière... On m'a mis en cellule. Elles m'ont placé un torchon sale sur la figure. .. J'avais le cou serré... J'étouffe... Mon Dieu! je fais mon acte de contrition... M. X.,. ressemble à Camille.— Camille je l'aimais bien et pourtant nous n'avons jamais fait de choses inconvenantes.. Mon frère a tort... Il me fait du mal quand je vois qu'il croit les autres plutôt que moi... Je veux partir. Je ne veux pas aller à l'amphithéâtre (1)... Je suis venue ici malgré le Directeur... Si j'avais su, je serais restée à St-Antoine... Les religieuses disent que l'amour me rend folle... M. X. donne-moi... Il me semble que si je faisais l'amour avec toi, je le sentirais... Quant je le vois, je sens quelque chose d'indéfinissable ... Je deviens' pâle comme une morte... »

Nous cessons la compression ovarienne. Sur le champ, comme par un coup de théâtre, la parole s'arrête; les traits du visage sont immobiles; la malade parait subir un choc ; la face se porte vers la gauche et ses musefes se convulsent; tout le corps est envahi par une rigidité extrême : la période tonique est complète. Bientôt éclate la période clonique avec grands mouvements du tronc, projection du bassin, agitation des bras et des jambes.

Compression ovarienne : Détente générale, délire: G... appelle l'amant, père de sa fille, regarde sans se rendre

(l) Allusion à des paroles imprudentes prononcées durant la lutte du 30 juin.

encore un compte exact de ce qu'on lui fait: « J'aime mieux., donne-moi... Ah! mon Dieu! Ah! mon Dieu! je ne sens plus rien que ce soit le doigt ou... » — Puis, interpellant une de ses compagnes elle lui demande: «Et toi, M... cela te fait-il quelque chose? »

Suspension de la compression : mêmes phénomènes que tout-à-l'heure. — Compression : « M. X... au secours!... Je l'aime, mais il ne le sait pas... Quand je le vois, je deviens toute pâle... Il n'y a que lui et Camille qui m'aient produit cet effet... Quand Camille venait me faire la cour, c'était la même chose... Nous ne faisions pas autre chose, »

Suspension de la compression : attaques avec leurs périodes ordinaires. Compression ; G... appelle son amant, père de sa fille, L... : « Oh ! L... ! Oh! L... ! Les geôlières ! elles m'ont mis un torchon sale sur la figure... On ne te donnera pas ta sortie pour aller chez D... (1). Mon frère me donne tort devant la surveillante... lui que j'aimais tant!... Ce

(t) Allusion à la promesse que lui a faite M. D... médecin des hôpitaux, de la recevoir dans son service si elle sortait de la Salpétrière.

n'est pas moi qui ai tort... La fille disait : Si c'était à X... on te traînerait par les cheveux.. Mais je n'y suis pas... Moi, je ne suis pas une sale femme, comme les femmes des rues... Je n'aime pas un homme un jour et un autre le lendemain.. Quand j'étais avec mon amant, à la fin ça ne me faisait plus rien... Embrasser un homme qu'on n'aime pas... saleté! » — Sa physionomie exprime le dégoût; elle crache. — « M. X..., je sais que je ne pourrai jamais l'embrasser... J'irai mourir dans un couvent... Je l'ai dit à mon frère que je devenais pâle quand je voyais M. X... Mais je ne suis pas assez bête pour lui dire tout... Je ne suis plus à moi quand je Je vois... Il ne faudrait pas qu'il reste longtemps là, je deviendrais folle... Je lui disais ce matin que je voulais aller à Poitiers... Ici, je ne guérirai jamais... Chaque fois que je le vois, je suis toute bouleversée... lime tiendrait tout le temps en cellule que je ne dirais rien. »

La compression estarrètée: attaques. — Voyant que la série continuait nous administrons le nitrite d'ample. Au bout d'une quinzaine d'inspirations, G... se met à parler :

« J'étouffe... Ote le chiffon... Mon frère ! pardonne-moi !,.. Mon Dieu! je t'en supplie ne me donne pas de cela... mon frère!... mademoiselle!...» — Nous la laissons respirer librement pendant quelques instants et nous recommençons l'inhalation de nitrite d'amyle : « Tu m'étouffes. . j'en ai assez... ne m'en donne plus... pardonne-moi! je t'en prie... ayez pitié de moi... je la vois encore, la compresse. »

Interrogée sur ce qu'elle éprouve, elle assure que c'est fini. Parprécaution, nous procédons à une nouvelle inhalation: «M. X...! à mon secours!... Pardon... je suis revenue à moi... M. B... pardonnez-moi ! » — Elle pleurniche. — « J'aime M. X... quand il me voit, il doit se dire : comme elle est pâle!... Mon bon frère!... Oh, oui, personne n'a pitié de moi... je vais me lever, ne m'en donne plus... M. B... va venir demain. Il me défendra... Il a toujours été convenable avec moi... Je me fâche après lui... Il m'a fait parler (1)... Il ne se fâche pas. » — Elle divague

(1J Allusion aux renseignements qu'elle m'a donnés sur ses antécé -dents.

encore durant quelques minutes et enfin s'aperçoit nettement de la présence des personnes qui l'environnent.

15 juillet.—Peu après la cessation de l'administration du nitrite d'amyle, G... a supplié la surveillante de desserrer \ la camisole de force et s'est endormie promptement. — Ce matin, elle est couchée, calme, tressaute au moindre bruit et se plaint de souffrir « en dedans de la tête » ce qu'elle attribue au nitrite d'amyle. Après ses attaques, terminées naturellement, elle a aussi mal à la tête, mais la douleur est différente. Le nitrite d'amyle lui fait paraître tous les objets en vert; elle voit des lapins verts qui courent de tous côtés. Pendant qu'elle me raconte ses sensations de la veille, elle a de temps en temps des secousses : tout d'un coup, les bras se soulèvent, sont secoués brusquement et deviennent roides. La faces'attère, pâlit; les muscles se convulsent ; la respiration s'arrête; la connaissance est perdue, durant 10 à 15 secondes : c'est une attaque avortée.

Ensuite, G... recommence à causer: « Oh! là là! que je souffre dans les jambes. » — La jambe droite est allongée, 8

la gauche un peu fléchie; toutes les deux sont contrac-turées, immobiles. Le bras droit est soulevé, rigide; la main et les doigts sont souples. A gauche, la contracture occupe le bras, la main et les doigts qui sont fléchis, le pouce en dehors. Ceci dure 23 à 30 secondes et on observe une période de calme, du reste assez courte.

Bientôt, la physionomie devient immobile ; la contracture diminue dans les bras ; G... soupire, s'assied, regarde, dit: «Embrasse-moi... » Elle se frappe la tête. La face se couvre de rougeur. On observe ensuite des palpitations des paupières, qui sont entr'ou-vertes, un léger nystagmus, de la déviation des yeux en bas et à gauche, uue dilatation modérée des pupilles : au fur et à mesure que ces phénomènes se produisent, on voit augmenter la congestion du visage.

Deux minutes plus tard, la face devient pâle, le regard morne, G... soupire, a une secousse ; puis il survient de l'écume à la bouche. A ces phénomènes succèdent des convulsions 'grimaces) de la face prédominant à gauche ; une déviation très-prononcée des yeux en bas et à gauche, côté vers lequel la face est elle-même dirigée. Tout le corps est rigide. Les pieds sont envarus équin.La jambe droite est allongée, la gauche un peu fléchie. Les bras, la jambe gauche, sont pris parfois de secousses violentes; on note enfin des plaintes et des mouvements de déglutition.

Repos : la physionomie est un peu souriante ; G... soupire profondément; les bras sont souples; les jambes sont toujours rigides. La malade semble regarder ; puis, les yeux sont fixes, le corps est immobile. Alors, la jambe droite, seule, conserve de la rigidité. La physionomie a une expression amoureuse. G... donne des baisers et parait réclamer quelque chose. On lui demande : que voulez-vous? Elle répond : « Donne-moi____» puis fait un geste

simulant l'intromission et tortille le bassin.

Compression ovarienne ; délire : « Tout le monde disait quand j'ai fait ma première communion: Est-elle blanche! Elle a l'air d'une sainte!... Mon Dieu!... Pourquoi ne m'a-t-il pas emportée avec Camille!... J'allais dans le poulailler casser les œufs

pour voiries petits. Ma nourrice me battait. Je pleurais... Elle m'embrassait... Je suis une fille maudite... Ma mère m'a abandonnée... » Elle divague encore durant quelques minutes et revient tout à fait à elle.

16 juillet. —A 7 heures du soir, G... a été prise d'attaques qui ont continué jusqu'à onze heures du matin, le 17. Lorsqu'elles ont été finies, on a constaté une contracture du membre inférieur droit et une rétention d'urine.

18 juillet.— La contracture et la rétention persistaient encore à 7 heures du soir, quand G... a eu des attaques d'un genre particulier, que nous connaissons peu. On dit qu'elle tient les bras et les jambes en l'air, croisés, tortillés et qu'elle cause sans cesse. La conscience est conservée. Au bout d'une heure etdemie,G... s'est endormie: à son réveil, la contracture et la rétention n'existaient plus.

Du 19 au 22 juillet, G... n'a pas eu d'attaques. Le 23, nous assistons à une nouvelle série, dans laquelle la période destertor est plus accusée que de coutume : la face est rouge, violacée ; il s'écoule à la fois de la bouche et du nez une écume abondante, d'abord blanche, puis fortement mélangée de sang. Le ronflement, sifflant à l'origine, devient ensuite plus fort. Dans son délire, qui ne diffère pas de celui que nous avons noté, G -. • fait allusion à une scène qui a eu lieu avec une malade, Goul...; elle plaint sa fille, craint que, ayant vu à sa dernière visite une malade en accès, elle n'ait, elle aussi, plus tard, des convulsions. A un moment, elle mord son bras droit avec une violence extrême. On ne parvient à lui faire lâcher prise qu'en lui serrant vigoureusement le nez. Le délire reparait : « Dans les hôpitaux, les religieuses maltraitent les hystériques... Quand j'étais à l'Hôtel-Dieu, la religieuse disait : « Il y a trente ans que je soigne des malades, je n'ai rien vu de semblable. (Allusion à la violence de ses attaques). Je ne plaignais pas les hystériques, celle-là je la plains. » On m'a fait admi-ministrer. . Je ne demandais pas mieux, parce que j'ai de la religion... Hier, pendant l'orage, je faisais le signe de la croix... » Les divagations continuent encore quelque temps, mais la conscience est

en partie revenue. Comme l'infirmière lui arrangeait les cheveux, elle la repousse : « Laisse-moi, lui dit-elle, je m'imagine que tes mains sont des corbeaux. »

14 août. — Hier, à midi, G... se sentant malade, a demandé à être mise en cellule. Pendant plusieurs heures elle a eu du délire, causait sans cesse.

Ce matin, au contraire, elle ne parle pas. Elle est couchée sur le dos ; la tète est dans l'extension; le cou est gonflé; les paupières sont à demi-ouvertes, les yeux déviés en bas et à gauche, les pupilles modérément dilatées. — Les membres supérieurs sont rigides : le bras gauche est étendu le long de la poitrine, l'avant-bras est fléchi à angle droit sur le bras et correspond à la ceinture, la main et les doigts sont fléchis. Le bras et l'avant-bras droits sont allongés et croisent le poignet gauche. — Les membres inférieurs sont rigides, le gauche croisant le droit; les pieds sont en varus équin.

Compression ovarienne.— La jambe gauche se décroise, devient souple, ainsi que les autres membres ; les yeux ! s'ouvrent largement, le re-| gard exprime l'étonnement; la figure grimace; la tète s'incline; G... s'asseoit et dit toute étonnée : « Où est-il donc ? Il est parti M. X... ! » Nous la faisons lever. Après être restée un instant immobile, elle relève sa chemise et sa 1 physionomie devient lubrique. On la recouche, elle s'assied, puis retombe sur son lit; bientôt la rigidité reparait.

Vers onze heures et demie, nous trouvons G... debout, n'ayant pour tout vêtement que sa chemise; les cheveux dénoués, couvrent en partie son visage; la tète est inclinée, le bras droit est étendu, horizontal; le gauche est contracture, à demi-fléchi. Au bout de quelques minutes, G... va se placer dans un coin de sa cellule, la figure dirigée vers le mur.

Durant toute la journée ses actes ont été incohérents. Elle a eu des attaques avortées,avec écume; tantôt elle était assise sur son lit, tantôt couchée. La porte de sa cellule ayant été laissée entre-bâillée, elle s'est enfuie à l'extrémité de la salle voisine ; on la fait rentrer sans peine; elle obéit automatiquement.

Alors, elle regarde autour d'elle, cherche : « Où est-il?» Lève sa chemise, veut embrasser, claque sur ses fesses: « Reviendra-t-il ? » se couche, relève sa chemise jusqu'au cou, semble s'endormir. De temps en temps, on observe des secousses dans les bras. Elle demeure tranquille pendant une vingtaine de minutes, se réveille en jetant un grand cri : « Le voilà ! » rabaisse sa chemise, la relève, tâte ses cuisses, son ventre, regarde les personnes qui l'entourent avec des yeux effarés ; parle entre ses dents, envoie des baisers, lève les jambes en l'air et conserve cette position pendant un quart d'heure.

Vers 2 heures de l'après-midi, G-... frappe à la porte, disant : « Ouvre-moi ; on m'appelle. » Elle parle à voix basse, embrasse sa main, se couche sur son lit, se découvre, écarte les jambes, murmure des paroles inintelligibles, regarde en l'air, envoie des baisers, se remue, se tortille, soupire plusieurs fois ; puis elle se lève, rit et va se mettre debout dans un coin de sa cellule,les bras croisés sur sa poitrine, les yeux fixes, dirigés vers le ciel.

Après avoir gardé cette attitude durant dix minutes, elle pleure, s'agenouille les mains jointes.Tout d'un coup, elle se redresse et s'écrie : « Donne-moi ta... Je ne t'en voudrai plus... Voyons, embrasse-moi. » Elle pleurniche, sejettesurle dos, par terre, dans une position...... singulière. Elle donne des baisers, se tortille de plus en plus vite, grogne, s'assied, s'essuie, regarde et dit : « Tu vois, je ne t'ai pas menti, embrasse-moi encoreune fois.» (1 )

A 3 heures, une personne du service entre dans sa cellule ; elle s'imagine que c'est M. X... et se livre en conséquence à des actes qu'il est difficile de décrire... On la comprime, elle se calme. Une heure plus tard, elle se réveille, crie : Oh ! là là ! tend la main, l'embrasse, se lève, se découvre, frappe à la porte, se précipite brusquement par terre, se roule « comme un ver » en criant ; la scène se termine par des rires bruyants.

A 5 heures et demie, la

(l) Ceci semblerait indiquer que, dans son délire sexuel, elle s'imagine que la sensibilité génésique est revenue.

sous-surveillanle essaie, mais sans succès, de faire manger Genev... Elle a des secousses fréquentes suivies d'une attaque incomplète et à laquelle succède une extase : les yeux sont largement ouverts, les bras sont en croix, les jambes allongées, rapprochées ; tout le corps est rigide. Le ventre est considérablement ballonné. Cette attitude a persisté dix minutes. G... s'assied sur son lit, regarde dans sa chemise, saute, crie : « Les vipères ! les vipères me mordent le... » Elle fait des grimaces, se débat, envoie des coups de pied en criant : « Allez-vous en ! » se redresse, frappe sa tète contre le mur, appelle « au secours. » Cette agitation est remplacée par une extase : G... est debout, immobile, les bras d'abord élevés, puis croisés sur la poitrine... Elle donne des baisers , semble embrasser quelqu'un qu'elle serrerait sur son corps. A six heures un quart, elle se recouche, ramasse sa couverture, son édredon sur sa figure et rit. Bientôt elle se dégage, son visage est souriant. « X...! X...! voyons, voyons, donne-moi... » Elle se lève, va se placer debout dans un coin de sa cellule, appuie son corps contre le mur qu'elle embrasse, soupire, se recule cl flatte de sa main l'endroit où était collé son ventre. Cette scène dure une vingtaine de minutes. Alors, G... saute, rit, se découvre, fait des gestes cyniques... Puis, ayant une main cachée dans sa camisole, l'autre élevée,elle marche à reculons disant : « Aliénée ! aliénée ! Oh ! oh ! » (A) Elle grogne, et tout en reculant va buter contre la porte; le contre-coup la renverse par terre. Elle se redresse, demande son jupon, monte sur son lit, ferme violemment le contrevent de la fenêtre, réclame ses escargots, veut manger, et lorsqu'on lui apporte des aliments elle les refuse. « Je n'en veux pas; j'ai mieux mangé que toi, j'ai mangé à la table de M. X...

Il m'a donné____» Et elle se

livre de nouveau à des gestes lubriques. On parvient à la calmer ; elle se couche, les yeux fermés, les mains jointes et reste tranquille jusqu'à

(l) Souvent, quand elle a commis quelque faute grave, on lui dit qu'on la fera passer dans la section des aliénées : c'est à cela qu'elle pense dans son délire.

onze heures. De onze heures à une heure du matin, elle a marché dans sa cellule. A une heure, elle s'est recouchée et a dormi jusqu'au matin.

15 août. — G... a été assez calme et a mangé un peu.

16 août. — Pendant la nuit, elle appelait : « Mon frère ! mon frère ! viens me délivrer ! » Elle voyait des corbeaux, des hommes qui venaient pour l'assassiner. Elle a sauté durant une quinzaine de minutes. Ensuite, elle s'est agenouillée, les bras en l'air, et a gardé cette attitude près d'une demi-heure. A diverses reprises, elle s'est couchée ou a marché.

Actuellement (11 heures), elle va et vient dans sa cellule, abaissant et relevant alternativement la tête. La face est pâle, profondément altérée. De temps en temps, G... frappe sa tète contre le mur. — Elle n'a pas eu de garde-robe depuis le 11 août.

Compression ovarienne. Elle revient vite à elle et dit : « Tiens, il fait jour. » Nous suspendons la compression : la face grimace, G... se lève tout-à-coup et recommence sa marche, etc.

17 août. — G... a continué de marcher et de balancer sa tète jusqu'à midi. A ce moment, elle a eu une attaque épileptiforme et, en recouvrant connaissance, elle a paru toute surprise d'être en cellule. Elle a mangé, a été tranquille, a voulu sortir dans la cour, prétendant qu'elle « entendait venir de Paris des gens pour elle. x Tout le reste de la journée, elle a été absorbée, soucieuse. Elle a nettoyé les escargots qu'elle avait apportés avec elle en entrant en cellule (11 août'.

18 août. — Hier, dans la soirée, elle a pleuré, est restée à genoux pendant deux heures. La nuit a été bonne. Ce matin, après avoir fait sa prière à genoux, elle a lu un chapitre de Ylmitaiion. — A 11 heures, nous la trouvons en train de coudre, mais elle travaille moins activement que d'habitude:; elle est triste, s'ennuie. — Plaques d'urticaire sur le cou, le ventre, etc., bien qu'on ne lui ai pas fait d'injection de morphine.

19 août. — Nuit calme. — G... a pleuré beaucoup. Ce matin, elle est allée à la messe, s'est promenée dans la cour, faisant des projets d'évasion.

20 août. — Elle semble re

mise à peu près tout à fait: elle cause raisonnablement.

31 août. — G... raconte qu'elle a des visions toutes les nuits, qu'elle reçoit la visite de Camille, celle de M. X..., et que ses visiteurs s'enfuient dès qu'on fait du bruit auprès de son lit.

6 septembre. — Hier soir, à sept heures et demie, G... s'est sauvée de la Salpétrièro avec Marc... A deux heures de l'après-midi, nous avons reçu la visite des deux fugitives, accompagnées d'un petit chien noir qu'elles avaient ramassé, on ne sait où. G..., qui avait été malade le matin, déclarait que M. X... l'appelait, lui ordonnant d'aller le rejoindre à la campagne et qu'elle voulait lui obéir. Malgré nos remontrances, elle persistait dans son idée. Bientôt, elle fut prise d'une attaque qui cessa promptement grâce au nitrite d'ample. Dans ce délire consécutif, son idée fixe d'aller retrouver M. X... persistait. Sous prétexte de la faire conduire chez M. X..., nous l'avons expédiée à la Sal-pétrière.

Relation entre les règles et les atttaques. —Cette relation existe chez G..., mais elle est loin d'être constante. Presque toujours , avant ses règles , elle est souffrante, agacée, ou bien elle a des secousses, des faiblesses, des douleurs névralgiques ; le plus souvent elle n'a pas, alors, d'attaques proprement dites. Celles-ci surviennent d'ordinaire durant l'écoulement sanguin, et surtout à la fin. Ainsi, en août et septembre 1875, les règles paraissent le 15 et les attaques le 17; en novembre, règles le 7, attaques le 7 et le 10 ; en décembre, règles le 8, attaques le 10 et le 12. — En 1874, règles le 26 janvier, attaques le 27 ; — règles le 22 février, attaques les 23, 24 et 25 ; R. le 8 juin, A. le 9 ; — R. le 3 juillet, A. les 3, 5 et 7 ; — R. et A. le 14 novembre.

1 875. A. le 5 et le 6 janvier. R. le 6, A. le 8.—Le 22 avril, R. et A. Même chose le 3 août. Le 18 octobre, R., A. le lendemain.

Ces indications suffisent pour montrer l'action qu'exerce la menstruation sur les attaques. Celles-ci, il importe de ne pas l'oublier, se montrent aussi en dehors des règles : les contrariétés, les querelles, les émotions diverses peuvent en provoquer la venue.

Les règles qui, nous l'avons vu, étaient irrégulières avant le premier accouchement, offrent aujourd'hui un cours normal. Elles sont assez abondantes, d'une durée variable et ne sont pas suivies de pertes blanches.

Durée des séries. — Les attaques, chez G-..., de même que chez beaucoup d'hystériques, sont rarement isolées, comme le sont les accès d'épilepsie ; elles viennent par séries qui se prolongent pendant des heures et se composent de 10, 20... 50, 100 attaques ou même davantage (1).

Rackiatgie. — G... n'a pas le clou hystérique (l), mais elle a une rachialgie extrêmement accusée, qui consiste en une hyperesthésie répondant

(1) Aux renseignements disséminés dans l'observation, nous ajouterons les suivants : Le 7 avril 1877, série de 10 heures ; — le 8, série de 4 heures , — le 12 et le 29, série de 3 heures.

(2) On donne le nom de clou hystérique œuf hystérique, clams, ovttJti) à une douleur occupant une étendue très-limitée de la tête, égale à une pièce de vingt centimes, d'un franc, de cinq centimes au plus. (Voir l'observation de Rosalie Ler..., dans nos Recherches cliniques et thé-rapeut. sur l'épilepsie et l'hystérie, p. 144).

approximativement aux apophyses épineuses des 7e, 8e, 9° et 10e vertèbres dorsales. La malade affirme n'éprouver dans cette région aucune douleur spontanée ; mais la pression y occasionne des phénomènes très-prononcés. Estelle légère, Geneviève recourbe brusquement le tronc, inclinant la tête et le haut de la poitrine en arrière ; la face pâlit.la physionomie exprime une vive angoisse. Si la pression est assez forte, aux phénomènes précédents s'ajoutent les suivants :G... pousse un cri, perd connaissance et tombe en attaques. Si, par inadvertance, la malade appuie la région hyperesthésiée contre un corps quelconque, les pieds de son lit, le mur, etc., les effets sont les mêmes. L'approche du doigt lui cause une véritable frayeur. Aussi est-il difficile de préciser très-exactement les caractères de celte hyperesthésie qui intéresse une partie des gouttières vertébrales.

Les facultés intellectuelles n'ont pas sensiblement changé depuis que nous connaissons la malade (1866) ; mais il n'eu est pas de même de son caractère, ni de son moral ; elle est plus souvent qu'autrefois

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sujette à la tristesse et à des I les muqueuses sont complé-accès de colère. — La peau et | tement anesthésiées (I).

Rappeler tous les épisodes de cette longue histoire, en faire ressortir toutes les particularités cliniques qui offrent un véritable intérêt, nous conduirait à des répétitions inutiles. Aussi, nous attacherons-nous seulement à quelques points.

Dans le récit très-abrégé que nous avons donné de l'existence de Geneviève, tout est-il vrai? Nous sommes très-enclin à le penser. Outre que, maintes fois, nous l'avons interrogée sur les mômes faits sans parvenir à la mettre en défaut — et cela à de longs intervalles puisque nous la connaissons depuis une douzaine d'années, nous avons vu ou reçu des lettres d'une religieuse de Poitiers, des directeurs des asiles des aliénés de Glermont et de Toulouse, MM. Labitte et Marchant^ du directeur de l'hôpital Saint-Antoine, etc., qui toutes confirment les récits de Geneviève.

Jusqu'à 17 ans, G... est bizarre, capricieuse, sujette à de violentes colères, très-impressionnable, en un mot elle présente un ensemble de phénomènes qui indiquent qu'elle est en puissance d'hystérie. Déjà aussi son caractère orgueilleux se décèle nettement.

Une fois née (17 ans), l'hystérie convulsive acquiert promptement une grande intensité. Dès l'origine, la

(1) V03'. plus loin quelques notes complémentaires sur le voyage en Belgique.

tympanile était si exagérée, si persistante, qu'on s'imagina que G... était enceinte et plusieurs fois nous avons vu, clans les années ultérieures, que l'on crut, mais momentanément, à la possibilité de grossesses (pages 53, 55). Aujourd'hui encore, à l'approche des attaques, on observe un ballonnement considérable du ventre.

La sensibilité générale qui, peut-être, était pervertie avant l'apparition des attaques, était alors abolie sur la moitié gauche du corps : la section du mamelon du

sein gauche, que G..... opéra elle-même, ne nous

semble laisser aucun doute sur ce point, Durant longtemps, l'anesthésie resta limitée à gauche; mais, depuis plus de trois ans (1873), le côté droit est devenu insensible : l'insensibilité atteint à la fois la peau et les muqueuses. —Nous avons vu aussi que les sens spéciaux offraient des troubles curieux et que le sens gé-nésique était aboli.

Cette insensibilité complète permet aux hystériques de subir sans inconvénient l'action du froid, de la pluie, etc. Geneviève ira se promener en chemise dans la cour par une pluie battante, elle se promènera sur un toit, durant une nuit glaciale ; elle passera des heures toute nue, sa chemise sur le bras, assise sur un banc, etc., rappelant pour ainsi dire point pour point une possédée célèbre, la supérieure des Ursuli-nes de Loudwi, Madame de Belflel. Un jour où M, de

Laubardemont était au couvent, « elle se mit en chemise, la corde au cou, un cierge à la main, resta dans cet état l'espace de deux heures au milieu de la cour où il pleuvait en abondance, et lorsque la pGrte du parloir où était M. de Laubardemont fut ouverte, elle se jeta à genoux devant lui, déclarant qu'elle venait satisfaire à l'offense qu'elle avait commise en accusant l'innocent Grandier. Elle se retira ensuite et alla attacher la corde à un arbre du jardin où elle paraissait vouloir s'étrangler si les autres sœurs n'y fussent accourues (1). »

L'anesthésie,on le sait, était « une marque du diable », un signe de possession. Geneviève, il y a moins de trois siècles, aurait été considérée comme une possédée, car chez elle la marque du diable est aussi évidente que possible : telle était la sœur Glaire de Sazilli, à laquelle le père Elizée, capucin, exorciste habituel de cette fille, « prenait la peau du bras et la perçait d'outre en outre avec une épingle, sans qu'il en sortit du sang ou que la fille en fit paraître aucun sentiment (2). »

V hyperesthésie ovarienne gauche date des premiers temps de la maladie; c'est Geneviève qui en révéla l'existence en déclarant que, quand elle appuyait sur cette partie du ventre,elle calmait ses douleurs etretardaitles

(1) De la MénarJay. — Examen et discussion critique de l'histoire des diables de Loudun. Liège, 1748, in-12, p. 495,et Calmeil, loc. cit., t. II, p. 14.

(2) Cruels effets de la vengeance du cardinal de Richelieu, etc., p. 231.

attaques (1). —Celles-ci, on s'en souvient, sont annoncées par une aura complète, typique. — Lorsque l'a-nesthésie gagna la moitié droite du corps, l'ovaire correspondant fut pris à son tour. — Enfin nous avons décrit trop minutieusement les effets de la compression pour y revenir de nouveau. (Voy. p. 57, 64, 72, etc.).

Maintes fois, les attaques ont laissé après elles des contractures d'une durée qui variait entre quelques heures et six ou sept semaines. En premier lieu, ce fut un torticolis du côté gauche (p. 53), et plus tard des contractures des membres (p. 59, 62, 65, 74); elles étaient le plus souvent circonscrites à un seul d'entre-eux, et avaient les caractères classiques. Suivant la remarque de M. Charcot, elles étaient liées intimement aux autres symptômes permanents de l'hystérie, anesthésie cutanée et hyperesthésie ovarienne. A diverses reprises aussi, le col de la vessie a été contracture : de là, des retentions d'urine qui obligeaient de recourir à la sonde (p. 53, 83). — Quel que fût leur siège, ces contractures ont en général disparu comme elles étaient venues, c'est-à-dire par des attaques convulsives.

Les secousses tétaniques que nous avons signalées sont assez communes chez les hystériques. Mais il s'agit

(i) Charcot. — Leçons sur les maladies du système nerveux, t. I, 3° édition, p. 333. — Pendant l'épidémie de Saint-Médard, ou voyait des Con-vulsionnaires « se frotter d'une manière indécente et redoublée le bas-ventre dans leurs accès de convulsions. » (Hecquet. — Le naturalisme des convulsions, t. ii, p. 49).

là d'un accident qui, s'il est fréquent dans l'hystérie, ne lui est point particulier, car il n'est pas rare de le rencontrer chez les épileptiques, du moins chez les femmes épileptiques (1).

Nous avons insisté plus haut sur la relation qui existait entre les règles et les attaques (p. 88). Nous devons ajouter encore, que les rapports sexuels, au moins au début, diminuaient les crises convulsives que les deux grossesses en ont augmenté le nombre (p. 55, 56;, tandis que Y allaiteme?it a paru amener une certaine amélioration.

Geneviève a présenté bien des fois des troubles intellectuels : ses manies de se cacher, de se sauver, de refuser de parler (2) ou de manger, le besoin de déplacement qu'elle éprouve de temps en temps, surtout lorsque les attaques sont imminentes, en fournissent un témoignage irrécusable.

Nous avons indiqué en quoi consistaient les prodro-

(1) Voir dans le Progrès médical, 1877, p. 656, l'observation de Lab. . . ¦—Une autre malade du service de M. Charcot, nommée Cous. .. Louise, nous en fournit encore un exemple. Les secousses durent plusieurs heures et disparaissent souvent après un accès. Elles sont quelquefois générales, tout le corps est soulevé ; les bras sont secoués; d'autres fois, elles sont circonscrites à l'une des moitiés de la face, à l'un des bras (les doigts s'écartent), ou bien les secousses soulèvent les pieds (la malade est assise dans un fauteuil). Ces secousses, qui portent également sur les deux côtés, viennent par séries séparées par un court intervalle. Durant ce temps, la malade a la face pâle ; elle se plaint de crampes à l'estomac, d'uns sensation qu'elle assimile à celle que déterminerait une corde qui serrerait la poitrine.

(2) Nous avons montré que la compression ovarienne guérissait le mutisme.

mes des attaques hystéro-épileptiques de Geneviève ; nous avons fait le tableau d'un certain nombre de ses attaques, décrit leurs périodes et leurs variétés qui permettent de voir comment et dans quelle mesure se trouvent mélangés les phénomènes épileptiformes et ceux qui appartiennent en propre à l'hystérie. Nous avons rassemblé ainsi des éléments nombreux et d'un haut intérêt clinique. Déjà quelques-uns nous ont servi dans une étude critique (1) ; mais il en est d'autres qu'il nous semble bon de comparer avec les phénomènes que l'on a notés autrefois, au bon vieux temps, chez de malheureuses femmes, hystériques comme Geneviève : nous voulons parler des possédées et, en particulier, des possédées de Loudun, pays natal de notre malade. Ce sera aussi, pour nous, une occasion nouvelle d'appeler l'attention sur le délire hystérique.

Survenant, en général, à la fin des attaques, le délire chez Geneviève, de même que chez beaucoup d'hystériques, est un mélange d'idées religieuses et d'idées erotiques avec hallucinations de l'ouïe et cle la vue. Tantôt c'est un délire calme, passif en quelque sorte, extatique ; tantôt c'est un délire d'action.

Les hallucinations de la vue varient, des hallucinations gaies, voluptueuses, précédant ou remplaçant des hallucinations terrifiantes. Geneviève voit quelquefois

Sciepre. et Miracle : Louise Latean, etc.

des chiens, ie plus souvent des vipères et des corbeaux. Nous avons dit quels étaient alors les singuliers gestes, la danse bizarre, qu'elle exécutait : portant brusquement ses mains à son visage ou sur sa tète pour se garantir des corbeaux qui viennent la piquer avec leur bec; ou ramassant vivement ses jupes entre les jambes pour se défendre contre les serpents, sautant en l'air pour les empêcher de l'atteindre ; ou bien enfin se découvrant complètement pour les saisir, les chasser parce qu'ils pénètrent dans son ventre, etc. Des modifications de la physionomie, des cris divers accompagnent chacun de ces actes.

Sous l'influence de leurs hallucinations, les hystériques prennent des attitudes très-variables. Nous avons décrit les extases de Geneviève (Pl. XXIV), l'attitude de la prière(PL. XXII) ; d'autres fois, elle se met debout sur son lit, n'appuyant qu'un seul pied, étendant l'un des bras comme si elle prêchait ou comme si elle menaçait un personnage imaginaire (1). On se souvient encore que Geneviève reste en contemplation devant un grand crucifix qu'elle a constamment à côté d'elle. Rien de surprenant à cela, car elle conserve un fond de religiosité (2) qui déteint sur son délire et qu'explique

(1) Un jour, la sœur supérieure des Ursulines de Loudun « s'était élevée jusque à porter son bras proche de la poutre du planch -r, sans qu'elle touchât son lit que d'un pié.....» [Cruels effets, etc., p. 54.)

(2) Elle porte presque toujours un scapulaire, a des images religieuses, lit des prières, limitation, etc.

surabondamment son contact avec les religieuses pendant son enfance et son adolescence.

Dans leur délire, les hystériques ont des réminiscences des événements anciens de leur existence, des douleurs physiques aussi bien que des émotions morales qu'elles ont éprouvées et plus particulièrement, peut-être, des événements qui ont été la cause occasionnelle de leurs attaques. N'est-ce pas un rappel des sensations physiques qu'elle a ressenties dans son enfance qu'éprouve Rosalie Ler... lorsque, dans son délire, elle se plaint de douleurs dans la jambe qui a été mordue par un chien, lorsqu'elle se plaint qu'on lui tire la jambe ou le pied ? Quant au souvenir des faits d'ordre moral, rien n'est plus incontestable.

Dans une certaine mesure, les hallucinations des hystériques ressemblent à celles des malades alcooliques ou à celles que détermine le chloroforme (Briquet): chiens énormes, animaux revêtant les formes les plus fantastiques, corbeaux, lézards, serpents, scènes effrayantes, etc.

Les hallucinations de l'ouïe sont beaucoup plus rares. Toutefois, il est des malades qui entendent la musique, par exemple la musique militaire, en même temps qu'elles voient passer le régiment. Geneviève, une nuit, entendait des bruits épouvantables produits par une violente tempête qui annonçait la fin du monde; d'ordinaire, elle entend des voix qui lui donnent des ordres, etc.

Souvent, durant cette période, les hystériques cherchent à se faire mal. Nous avons mentionné les tentatives de suicide renouvelées si fréquemment par Geneviève : empoisonnement par la belladone et par le chloroforme, saignées, tentative de se précipiter du puits de Grenelle, de s'étrangler, etc. Assez communément, aussi, elle essaie de se mordre avec une sorte de rage. C'est aussi ce que faisaient les possédées de Loudun (1).

Geneviève — et beaucoup cVhystériques sont dans ce cas — injurie tout le monde, même les personnes pour lesquelles elle a le plus d'affection ou de respect lorsqu'elle est bien portante; elle leur crache à la figure, les envoie promener avec des expressions énergiques ; ou bien elle est cynique, lubrique, etc. Telle était la soeur Claire : « Barré s'étant approché pour l'exorciser, elle fit mine de lui vouloir cracher au visage, elle lui leva souvent le nez (2) en signe de dérision. Elle fit voir des mouvements lascifs à tous les spectateurs et prononça plusieurs fois un mot sale et déshonnête... (3). » Les hystériques regrettent ensuite tout ce qu'elles ont fait ou dit. Quand l'excitation cessait, les possédées,, dont le délire se traduisait par des paroles impies, des malédictions, devenaient douces, retiraient les accusations qu'elles avaient portées, dé-

fi) Voir page 24.

(2) C'esL ce que fait quelquefois Gl. . .

(3) Cruels effets, etc., p. 48.

mandaient à Dieu, à la Vierge, pardon de leurs blasphèmes.

On observe fréquemment, chez les hystériques, un délire de paroles qui, comme l'a fait remarquer avec juste raison M. Briquet, roule toujours sur les objets qui ont le plus vivement frappé l'imagination. « Les religieuses démoniaques et hystériques d'Ubertet, de Loudun, de Louviers, de Sainte-Brigitte, etc., préoccupées de l'idée qu'elles étaient en la possession du démon, croyaient le sentir dans leur corps, se comportaient en paroles et en actes comme elles supposaient que le clémon lui-même l'aurait fait. Elles avaient des accès de frénésie toutes les fois qu'elles entraient à l'église, ou lorsqu'on voulait leur faire faire quelque acte de piété ; on comprend qu'avec de pareilles dispositions de l'esprit, les exorcismes répétés auxquels on les assujettissait aient toujours augmenté le délire démoniaque, puisque dans quelques cas les exorcistes eux-mêmes l'ont également contracté(1).» C'est aussi ce que nous avons constaté à la Salpétrière, chez les hystériques des services de MM. Charcot et Delasiauve.

Presque constamment, le fond du délire est le même. Geneviève, Rosalie L..., Mar..., Gl..., Bée..., etc., ont chacune un certain nombre de sujets qui reviennent à chaque série d'attaques. Cependant cette fixité n'est pas absolue. En effet, après être resté limité durant

(l) Briquet. — Traité clinique et thérapeutique de l'hystérie, p. 429.

longtemps, le délire peut s'étendre, se modifier. Il suffit, pour cela, d'une nouvelle émotion, ou d'un incident, une lettre, une visite, qui vient raviver le souvenir d'événements anciens. L'imagination en est préoccupée et bientôt on voit ces événements figurer dans le délire dont le champ s'est agrandi.

Chez Geneviève, par exemple, à la place des idées pour ainsi dire fixes qu'embrasse ordinairement son délire, viennent s'en substituer d'autres relatives à des accidents qui l'ont fortement affectée soit la veille, soit les jours précédents. Elle raconte ce qui s'est passé dans le service, les scènes désagréables, les discussions qu'elle a eues avec les employées, avec le directeur, qu'elle dénonce aux médecins en grossissant outre mesure des affaires de médiocre importance : Ceci confirme tout-à-fait l'opinion émise par M. Briquet : « Les impressions ressenties pendant l'intervalle des attaques, écrit-il, constituent la cause la plus puissante des différents phénomènes qui accompagnent les attaques d'hystérie ; ce sont elles, en effet, qui ont le plus souvent donné aux épidémies le caractère particulier qu'a eu chacune d'elles, caractère qui a frappé tous les observateurs. » (Loc. cit., p. 371).

L'histoire des possédées de Loudun fournit une démonstration frappante de cette vérité. Urbain Grandier, la victime des Ursulines, avait été successivement pourvu de la cure de Saint-Pierre du Marché de Loudun et d'une prébende dans le chapitre de l'église de Sainte-

Croix. « L'union de ces deux bénéfices dans une personne qui n'était pas de cette province, l'exposa à l'envie de plusieurs ecclésiastiques qui se fussent bien contentés de l'un des deux... Il était de grande taille et de bonne mine, d'un esprit également ferme et subtil, toujours propre et bien mis... Cette politesse extérieure était accompagnée de celle de l'esprit. Il s'exprimait avec beaucoup de facilité et d'élégance; il prêchait assez souvent, et il s'acquittait de cet emploi incomparablement mieux que la plupart des moines qui montent en chaire... Il était doux et civil à ses amis, mais fier et hautain à l'égard de ses ennemis; il était jaloux de son rang, et ne relâchait jamais rien de ses intérêts... Ses hauteurs lui avaient suscité un grand nombre d'ennemis, et le penchant extraordinaire qu'il avait à la galanterie lui en avait encore bien plus fait. Ce n'était pas seulement des rivaux qu'il avait à craindre, c'était des pères et des maris outrés et furieux de la mauvaise réputation que ses fréquentes visites attiraient sur leurs familles... »

Une série d'affaires fixèrent encore davantage l'attention sur Urbain Grandier. Ce fut, d'abord, en 1620, un procès par-devant l'Official de Poitiers contre un prêtre. Il gagna et fit exécuter la sentence avec beaucoup de rigueur. Puis un procès contre les chanoines de Ste-Croix à l'occasion d'une maison qu'il disputait au chapitre ; il eut encore gain de cause. Ensuite Grandier chagrina le procureur du roi qui avait une fille

qu'il avait vue « trop familièrement ». Ses ennemis se concertèrent et déposèrent une plainte l'accusant «d'avoir débauché des femmes et des filles; d'être impie et profane; de ne dire jamais son bréviaire et d'avoir même abusé d'une femme dans son église .. » Peu après, un de ses ennemis, Duthibaut, leva le bâton qu'il avait dans la main et en frappa Urbain Grandier, quoiqu'il fût revêtu de ses habits sacerdotaux.Grandier alla à Paris porter plainte; mais durant ce temps, son évêque rendait contre lui un décret de prise de corps. A son retour de Paris, il fut arrêté et enfermé dans la prison de l'évêché. « Le 3 janvier 1630, Grandier fut condamné à jeûner au pain et à l'eau pour pénitence tous les vendredis pendant trois mois et interdit à di-vinis dans le diocèse de Poitiers pendant cinq ans et dans la ville de Loudun pour toujours. » Appel de la sentence fut fait des deux côtés. Grandier eut gain de cause à la fois devant le présidial de Poitiers et devant le tribunal de l'archevêché de Bordeaux; enfin, il fit condamner celui qui l'avait bastonné par la Chambre de la Tournelle.

Les aventures judiciaires d'Urbain Grandier, ses aventures galantes étaient plus que suffisantes pour faire travailler les imaginations et, dans l'oisiveté de leur couvent, les Ursulines devaient, comme la ville, s'entretenir souvent du beau et célèbre curé. Leur directeur étant mort, Grandier fut proposé et refusa, dit-on.

Un voit, par cet exposé, que tout était réuni pour que, les Ursulines devenant « possédées » elles eussent sans cesse à l'esprit et à la bouche la pensée et le nom d'Urbain Grandier. Geneviève n'a-t-elle pas Camille ou L..., ou M. X... ? Marc..., Ernest? Angèle, Alphonse ? etc.

En opposition au délire de paroles dans lequel les hystériques décèlent leurs plus secrètes pensées, leurs désirs les plus intimes, on observe quelquefois un mutisme absolu, un état d'absorption intellectuelle si profond qu'elles paraissent étrangères à tout ce qui se passe autour d'elles. Ce mutisme était attribué par les exorcistes à un Pacte de silence ; en vertu de ce pacte, le diable, disaient-ils, était dans l'impossibilité de parler. Les adversaires de la possession assuraient que ce n'était là qu'un subterfuge des exorcistes pour expliquer le silence des possédées auxquelles on posait des questions embarrassantes. Chez Geneviève, le fait pathologique est indéniable. Mais, tandis que les exorcistes étaient impuissants à faire cesser le silence des possédées, nous avons, nous, un moyen de rompre le pacte : c'est la compression ovarienne.

Aux symptômes que nous avons déjà assignés au délire hystérique, nous devons en ajouter un autre qui existe à un haut degré chez Geneviève : il consiste en des phénomènes erotiques, sorte d'hallucinations géné-siques.

Geneviève est une succube (1). La nuit, elle reçoit la visite de Camille ou de M. X..., qui sont devenus aujourd'hui une seule et même personne (2). Elle le voit, lui cause, l'embrasse, en reçoit des baisers, perçoit le contact de son corps sur le sien,et éprouve les sensations les plus voluptueuses. Durant ces scènes, elle est toute éveillée. Son amant nocturne n'aime pas le bruit, il s'enfuit dès que quelqu'un s'approche du lit.

Le matin qui succède aces nuits amoureuses, Geneviève est plus pâle, plus fatiguée que cle coutume, elle est peu communicative, et, pour lui arracher ces quelques renseignements,il nous a fallu insister beaucoup, encore dissimule-t-elle une partie de ses sensations et de ses visions.

(1) ' C'est une opinion très-répandue, et continuée par les témoignages directs ou indirects de personnes absolument dignes de foi, que les Sylvains et les Faunes, vulgairement appelés Incubes, ont souvent tourmenté les femmes, sollicité et obtenu d'elles le coït. Il y a même des démens, nommés par les Gaulois Duses (ou lutins^, qui se livrent très-régulièrement à ces pratiques impures : Ceci est attesté par des autorités si nombreuses et si graves, qu'il y au ait impudence à vouloir le nier. » (Saint-Augustin, --Cité de Dieu, livre xv, chap. 23).— Les Incubes « sollicitent les femmes, quelquefois même les hommes ; éprouvent-ils un refus, ils s'attristent, se mettent en fureur, comme les amants : amantes, ameutes ; ils pratiquent parfaitement le coït, et engendrent quelquefois. Donc, il faut conclure qu'ils sont doués de sens, et conséquemment qu'ils ont un corps ; cùnséquemment aussi qu'ils sont des animaux parfaits. Il y a plus : portes et fenêtres closes, ils entrent partout à leur fantaisie, donc leur corps est subtil ; enfin, ils connaissent et annoncent l'avenir, ils composent et ils divisent, toutes opérations qui sont le propre d'une âme raisonnable, et ce sont bien, en réalité, des animaux raisonnables. • {De la démonialitéet des animaux incubes et succubes, par le R. P. Louis-Marie Sinistrari. Trad. Liseux, p. 136-137).

(2) Comment, dans l'esprit de la malade, M. X .. est-il devenu Camille? C'est ce que nous n'avons pu encore savoir.

Le doute émis sur les visites qu'elle reçoit, l'accueil ironique fait à ses confessions, n'ébranlent pas la conviction qu'elle a de leur réalité. Elle jurerait devant les tribunaux, devant Dieu et devant les hommes qu'elle a vu Camille, qu'elle a reçu ses embrassements. C'est* pour obéir aux ordres qu'il lui donne qu'elle se sauve, se précipite dans la cour de l'infirmerie, s'échappe de la Salpétrière, etc.

Par là encore, Geneviève se rapproche des possédées de Louclun qui recevaient Urbain Grandier. Voici, à l'appui, quelques passages de Y Extrait des preuves, qui sont au procès de Grandier. Quatorze religieuses « ont eu un amour fort déréglé pour l'accusé ; l'ont vu de jour et de nuit dans le couvent les solliciter d'amour, pendant l'espace de quatre mois ; ont été travaillées de quantité de visions... Disent en outre avoir été frappées par quelque chose qui n'était point connu d'elles et qui laisse sur leur corps des marques si visibles que les médecins et chirurgiens les ont pu facilement reconnaître... Disent encore que la Mère Prieure... ne parlait plus que de Grandier, qu'elle disait être l'objet de toutes ses affections, et lequel ainsi que toutes les autres religieuses elle a vu souvent approcher de son lit, comme elle lui a déclaré, lorsqu'elle lui a été confrontée, lui ayant soutenu, comme sept ou huit autres, que c'était lui-même qui s'était souvent présenté à elles...»

L'imagination des Ursulines était si fort occupée d'i-

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dées erotiques qu'elles étaient poussées à des actes d'un cynisme révoltant : « La sœur Glaire se trouva si fort tentée de coucher avec son grand Ami, qu'elle disait être ledit Grandier, qu'un jour s'étant approchée pour recevoir la sainte Communion, elle se leva soudain et monta dans sa chambre, où ayant été suivie par quelqu'une des soeurs, elle fut vue avec un Crucifix

dans la main dont elle se préparait.......... » L'auteur

du livre auquel nous empruntons ce récit interrompt l'extrait par des points et ajoute que « l'honnêteté ne permet pas d'écrire les ordures de cet endroit (1) ».

Dans des temps encore peu éloignés de nous, les derniers phénomènes, que nous venons de décrire chez Geneviève, auraient eu pour elle des conséquences redoutables. Son crime, bien entendu au point de vue catholique, n'est-il pas le même que celui d'une femme qui expira dans les flammes, à Buchel, dans le pays de Bâle? « Cette malheureuse se reprochait d'avoir appartenu pendant six ans à un incube, d'avoir reçu les caresses de ce démon jusque clans le lit conjugal, aux côtés mêmes de son époux. On l'entendit souvent s'écrier sur le bûcher qu'enfin elle allait être soustraite à la domination d'un amant aussi impur, qu'elle ne consentirait pas à ressaisir la vie quand bien même elle en aurait le pouvoir (2). » Et ce n'est pas là une victime

(1) Cruels efets, etc., p. 179, 182.

(2) Calmeil, loc. cit. p. 161.

isolée des superstitions religieuses ! C'est par milliers qu'on pourrait les compter.

D'autres malades nous fourniront encore des éléments pour compléter cette description du délire hystérique.

Nous terminerons ces commentaires par une remarque que déjà le lecteur a dû faire : c'est que, sous l'influence du délire, tantôt les malades offrent une dépression plus ou moins profonde, leur donnant une certaine ressemblance avec les mélancoliques ; tantôt, au contraire, elles ont une surexcitation des facultés intellectuelles (1) ; leur langage est plus choisi, plus pittoresque, qu'à l'état normal ; l'expression de leur physionomie a souvent quelque chose d'idéal, les attitudes qu'elles prennent font songer aux attitudes sous

(l) Une malade, Lafonl.. . (Alex.-Maria), que nous avons observée en 1866 (service de M. Delasiauve), avait des attaques hystéro-épileptiques que la compression épi gastrique arrêtait et qui se terminaient par des extases, par un délire où se retrouvent ces deux phases : dépression, excitation. Dans la première, elle était triste, voyait des fantômes, avait peur, voulait se crever les yeux, crachait au visage des gens, voulait mourir, avait des besoins irrésistibles de briser, de déchirer les objets, etc. Dans la seconde, sa physionomie exprimait un vif contentement ; elle, qui était très-réservée, tutoyait tout le monde, voulait embrasser les hommes, essayait de se mettre toute nue et de courir sous les lits parce que des voix le lui commandaient ; elle voulait prendre le nez des gens ; voyait des fleurs, chantait des rondes de son enfance, riait aux éclats, etc. Elle disait qu'elle n'était plus mademoiselle La-font. . . .mais madame Grenouille, qu'elle avait épousé un crapaud et qu'elle venait d'accoucher de deux petits crapauds. En plus d'attaques très-violentes, cette jeune fille avait des spasmes du diaphragme, du hoquet, etc. Sortie de la Salpétrière, elle s'est mariée, a eu des enfants et les attaques ont, assure-t-on, complètement disparu.

lesquelles on représente les mystiques du Moyen-Age, les Saintes les plus renommées par leur exaltation religieuse (1).

(l) Nous avons parlé plus haut du voyage de Geneviève en Belgique. Nous avons dit que, arrivée au Quesnoy, elle avait été malade; que, de là, malgré les conseils du médecin qui lui avait donné des soins, elle était partie pour la Belgique. Elle prétend avoir été malade à Maubeuge et avoir été conduite à l'hôpital. Il en aurait été de même à Bruxelles où il lui serait arrivé d'autres aventures. Ensuite, elle se serait rendue à pied de Bruxelles à Bois d'Haine qu'elle atteignit trop tard pour voir Louise Lateau. Elle aurait couché sur un arbre et, le lendemain, elle aurait essayé, mais en vain, de voir Y hystérique belge. Des gens du pays, auxquels elle parlait du but de son voyage, se seraient moqués d'elle. Enfin, elle serait revenue à Paris, voyageant à pied et couchant dans les bois. Nous ne donnons ces détails que sous toutes réserves. Connaissant la malade, ils n'ont rien, d'ailleurs, d'invraisemblable.

— Durant le siège de Paris, G..., après des attaques, eut la fantaisie de s en aller. Parvenue aux avant-postes, du côté de Saint-Denis, elle fut arrêtée et prise pour espionne parce qu'elle ne voulait pas répondre (mutisme hystérique); on la conduisit à la préfecture de police où on la reconnut. 'Pour ce qui concerne l'influence de la compression ovarienne sur le mutisme et la contracture récente, de nature hystérique, voir : Debove et Liouville, Progris Médical. 1870, p. lio, et Bourneville. Ibid, 1877, p. 385 et 487."

— Nous avons fait quelques recherches relativement aux secousses dont nous avons parlé à diverses reorises. M. Briquet ne les décrit pas dans ses articles consacrés aux convulsions, à la contracture et aux spasmes. Lan-douzy ne les mentionne pa = . M- Delasiauve [Traité de l'épilepsie. p. 51. les signale simplement comme prodromes des accès du mal caduc. — Outre les secousses, les hystériques ont encore ce qu'elles appellent à la Salpétrière, des attaques de contracture. Voici en quoi elles consistent : Tout d'un coup, la malade jette un cri, la tête se renverse en arrière, ia face se convulsé, les membres supérieurs se contractureiit violemment dans l'extension, l'adduction et la pronation ; lesinférieurs.dans l'extension et l'adduction. Cette contracture générale disparaît au bout de 15 à 30 secondes : C'est une sorte d'ébauche de la période épileptique. La connaissance paraît conservée (?).

OBSERVATION Y.

Hystéro-épilepsie. — Action de l'éther. — Métallothérapie.

Si les attaques d'hystérie grave possèdent des caractères principaux communs, elles offrent aussi des symptômes secondaires différents, qui donnent en quelque sorte à chaque malade une originalité propre. Des complications variables contribuent aussi à imposer à chaque cas un cachet particulier. Cette opinion, qui s'éloigne un peu de l'opinion courante, nous paraît trouver sa confirmation dans l'observation de Marc.... qu'on ne lira pas sans intérêt, nous l'espérons, même après celle de Geneviève.

Sommaire. — Antécédents : Paresse, vagabondage, instabilité, onanisme, vaginisme. — Description d'une attaque en 4871. — Symptômes perma-' nents de l'hystérie : Hyperesthésie ovarienne et hémianesthésie du côté gauche. — Effets de la compression ovarienne sur les attaquées. — Troubles des sens spéciaux du côté gauche. — Hallucinations de la vue. — Température comparative entre les mains et les aisselles. — Ischémie à gauche. — Attaques avortées. — Tympanisme. — Anesthésie incomplète et hyperesthésie ovarienne du côté droit. — Autres caractères des convulsions : Lubricité- — Crises cardiaques. — Cautérisation du col utérin au fer rouge ; son action. — Contracture passagère du membre inférieur gauche.—

Torticolis hystérique. Description des attaques en 1874 et en 4876. — Usage de l'éther, de la glace, du nitrite d aw y le. — Erythème. — Contracture des membres dît côté gauche (Forme hémiplégiqtie). — Névralgies erratiques. — Crampes. — Injections sous-cutanées de morphine : Accidents locaux et généraux. — Hallucinations terrifiantes. — Contracture des membres du côté gauche. — Ovarie double ; anesthésie générale ¦ —Modifications des attaqua ; leur cause- — Contracture du bras droit. — Troubles de la vision. — Irrégularités de la menstruation. — Effets de l'éther ; sensations qu il détermine. — Tremblements. — Amaurose. — 'Sensibilité or. — Traitement par le chlorure d'or et de sodium. — Relation entre les attaques et les règles.

Marc..., Célina, est entrée à la Salpétrière (service de M. Delasiauve) le 9 juin 1867 et est passée en 1870 dans le service de M. Charcot.

Renseignements fournis par le père de la malade et par la malade elle-même. (Juin 1874). — Mère, blanchisseuse, morte à 27 ans, à la suite d'une jaunisse. Elle parait avoir eu une affection utérine. Elle était très-colérique et ses colères se terminaient par des suffocations et des pleurs. On assure aussi que la sensibilité était affaiblie sur une moitié du corps. Elle n'aurait pas commis d'autres excès que des excès de travail.— De ses parents connus, aucun n'aurait eu d'affections nerveuses.

Père, horloger, comédien, âgé actuellement de 53 ans, est nerveux, sujet, s'il est contrarié, à des tremblements et à des crises dans lesquelles il étouffe, devient tout noir, tombe par terre sans perdre connaissance. (Pas de morsure de la langue, ni d'urines involontaires). Le tremblement durerait quelquefois tout un jour. Cet homme fait de fréquents excès de boisson : il a, en effet, l'aspect d'un vieil alcoolique. Il s'est marié deux fois ; il a eu 15 enfants. [Père, ivrogne, mort à 63 ans, on ne sait de quoi. — Mère encore vivante, bien portante. Personne, dans sa famille, n'a de maladie nerveuse].

Pas de consanguinité.

Des sept enfants du premier lit, il ne reste que Célina. Les autres sont morts en nourrice, quelques-uns des convulsions. — Des huit enfants du second lit, deux sont vivants et ont une bonne santé ; deux ont succombé au croup et quatre à des convul-I sions.

Célina a été élevée en nourrice. Rentrée à \ 8 mois à Paris, elle marchait et parlait à peine. Jusqu'à 14 ans, elle n'aurait pas eu d'autre maladie qu'un rhumatisme articulaire aigu, pour lequel elle serait entrée à l'hôpital des Enfants-Malades. Après la mort de sa mère (7 ans), elle resta un an avec son père ; durant ce temps, on l'envoya à l'école ; elle apprenait peu, parce que, dit-elle, elle avait la tête dure, mais surtout parce qu'elle faisait l'école buissouuière, s'amusant avec les garçons à jouer « au mari et à la femme. » Ceci fit qu'on la mit dans un asile. Elle était difficile à tenir, n'apprenait presque rien ; avait de violentes colères, cassait les carreaux des fenêtres, criait à l'assassin, etc. Elle pissait au lit presque toutes les nuits et s'amusait avec une de ses compagnes qui, la nuit, rapprochait son lit du sien. Un jour, les religieuses se lassèrent; l'une d'elles prit une voiture pour reconduire M... chez son père ; elle donna une série de fausses adresses et se fit promener pendant une partie de la journée, et, en fin de compte, on la mena rue du Cherche-Midi, à l'ouvroir de Saint-Vincent-de-Paul (?). Elle prétend qu'on y était fort mal et que les enfants qui, comme elle, avaient de l'incontinence d'urine, couchaient au grenier, pêle-mêle, sur de la paille. Son père la reprit vers l'âge de 12 ans.

Placée en apprentissage, comme blanchisseuse, elle ne faisait rien, et fut bientôt renvoyée. Elle alla chez une autre, femme de mœurs légères, où elle s'amusait plus qu'elle ne travaillait. « On mangeait bien un jour, dit-elle, et le lendemain on n'avait plus rien, mais on se consolait en disant qu'on avait bien noce la veille. » Elle allait porter le linge chez des « femmes entretenues » qui l'embrassaient..., allait dans les brasseries chercher sa patronne, etc. C'est à cette époque qu'elle fit connaissance d'« Ernest » dont ie nom revient dans son délire : c'était l'ami de l'amant de cœur de la blanchisseuse. M... flânait avec lui le soir ou l'accompagnait dans sa chambre. Deux tentatives de rapports auraient échoué parce qu'elle souffrait trop (vaginisme). Cette vie, qui lui plaisait, durait depuis quelque temps lorsque la scène que nous allons ra

conter, la décida à tout dire à son père.

Sa patronne, cultivant plus les plaisirs que ses fers, négligeait ses pratiques. S'at-tendant, un jour, à des reproches mérités de la part de l'une d'elles , elle prévint M... qu'elle se cacherait, si elle venait ; tu lui répondras que je suis absente, ajouta-t-elle. La blanchisseuse s'enferma dans sa chambre quand la cliente arriva. Celle-ci, sur la réponse de M..., se fâcha, voulant son linge quand même et s'en alla, menaçant de faire arrêter et la maîtresse et l'apprentie. Ces menaces causèrent une grande frayeur à M...: le soir, elle avoua tout à son père qui la retira de chez cette trop aimable patronne.

Elle fut mise dans une fabrique d'éventails, où on ne put la garder, sous prétexte qu' « elle suait trop des mains » ; — puis, chez une passementière, qu'elle quitta un matin pour aller se promener; — ensuite chez une fleuriste où il lui fut impossible de rester, parce que «le carmin lui occasionnait de violentes douleurs de tète. »

Des palpitations cardiaques, des troubles gastralgiques la firent recevoir à l'hôpital Nec-ker. On l'envoya en convalescence à l'asile du Vésinet. A son retour, elle se plaça comme domestique chez une fruitière. Un matin, sans motif, elle jeta son tablier sur la rampe de l'escalier et s'enfuit, c II fallait que j'aille et que je vienne, dit-elle, je ne pouvais demeurer tranquille. »

On essaya d'une nouvelle blanchisseuse ; celle-ci était moins facile que la précédente, elle donnait des coups de torchon mouillé à son apprentie paresseuse. M... eut un panaris et retourna chez son père. Une fois guérie, elle fut placée, pendant deux mois, chez un marchand de vin où elle servait au comptoir. Là, il y eut des essais de rapprochements sexuels, mais encore sans résultat. Elle avait 16 ans.

M... devient alors piqueuse de bottines. Quinze jours à peine s'étaient écoulés qu'elle s'ennuie de sa nouvelle profession et abandonne sa patronne. Mais sa belle-mère lui ayant déclaré, avant son placement, que si elle n'était pas plus raisonnable et revenait à la maison, son père aurait à choisir entre sa fille et sa femme, M... errait à l'a

venture, ne sachant quel parti prendre.

Tandis qu'elle réfléchissait, assise sur un banc du boulevard, elle fut abordée par un jeune homme qui lui proposa de l'emmener chez lui. En route, un individu, suivi d'un gros chien, voulut enlever Gélina à son compagnon, qui se sauva. Des passants intervinrent, la rassurèrent et lui indiquèrent son chemin pour rentrer dans sa famille. Accostée quelques instants après par un ivrogne, elle fut délivrée par un autre jeune homme qui lui offrit à son tour l'hospitalité. En route, elle se retrouva en face de « l'homme au chien » mais ils parvinrent à s'en débarrasser. Cette fois, M... n'aurait eu encore que des rapports incomplets, le moindre contact étant douloureux et déterminant des étouffe-ments.

Le lendemain, M... se plaça comme « fille de semaine» chez une blanchisseuse où elle resta trois mois. C'est à ce moment que se seraient accusés les phénomènes hystériques. Toutes les nuits,elle avait des cauchemars, voyait l'homme au chien; elle éprouvait des crampes dans les jambes, était sujette à destremblements , à des c faiblesses » durant lesquelles elle perdait connaissance. Ces accidents, devenant de jour en jour plus fréquents, la décidèrent à entrer à la Pitié, d'où elle fut envoyée au Vésinet.

Revenue chez son père, elle travailla avec sa belle-mère qui est brodeuse. M... prétend qu'elles se disputaient sans cesse ; qu'elle était mal nourrie, souffrait de l'estomac, ne pouvait boire que de l'eau. Sur ces entrefaites, elle eut une névralgie dentaire et se rendit à l'hôpital Lariboisière pour faire arracher sa dent cariée. Après l'opération, elle fut prise d'une « attaque de nerfs. » Si on l'en croit, c'était la première. On l'envoya au Bureau central, de là à l'Hôtel-Dieu, et enfin, un mois plus tard, au Vésinet.

En quittant l'asile de convalescence, elle alla comme domestique à Bougival. Au bout de quelques semaines, sa patronne aurait voulu la battre et elle aurait eu recours aux gendarmes pour se faire payer. Elle fut recueillie par une couturière de l'endroit et, peu après, se plaça, toujours en qualité de domes-11

tique, chez un marchand de poêles, dont la femme était paralysée., Cet homme l'embrassait, iui faisait des cadeaux ; mais, malgré leur bonne volonté, tout se serait borné là. Un soir qu'elle était seule avec l'ouvrier,elle s'enivra ; il voulut abuser d'elle, sans y parvenir. Elle remonta dans sa chambre, eut des vomissements, faillit mettre le feu et, le lendemain, on la congédia.

Rentrée à Paris, elle fut admise successivementdans divers hôpitaux et finalement à l'Hôtel-Dieu,d'où elle fut transférée, le 9 juin 1867, a la Sal-pétrière. Depuis sa première attaque, elle en avait eu d'autres. Dans les.intervalles où elle était libre, ses relations avec Ernest continuaient; toutefois, elle assure qu'elles se bornaient à des attouchements réciproques, le vagi-nisme persistant au même degré.

Nous ne saurions affirmer l'exactitude absolue de tous ces renseignements ; ce que nous pouvons assurer, c'est que les dires du père et de la fille, interrogés séparément, concordent sur les points principaux

Les règles ont paru à 14 ans. Marc... a des tendances erotiques plus prononcées depuis son admission à la Sal-pétrière qu'auparavant. Dehors, avec son père, elle ne parle que d'hommes, de mariage, d'envie d'avoir des enfants, etc.

Marc... est maigre, petite (1 m. 43), de physionomie vulgaire (Voyez Pl. XXV), d'un caractère assez malléable ; mais il lui arrive assez fréquemment d'exciter sournoisement des querelles; elle est paresseuse, ne travaille que par caprice. Elle est très-libre dans son langage et emploie, sans le moindre embarras, les mots les plus expressifs pour peindre ses sensations ou manifester ses désirs et ses appétits vénériens qu'elle ne dissimule nullement, ainsi que son père nous l'a déjà dit.

1871 (1). Description d'Une série d'attaques. — La malade est camisolée, maintenue de tous côtés. Les attaques se succèdent assez régulièrement et suivant un type assez bien déterminé. Tout d'abord,

(l) Rédaction d après les notes recueillies par M. Michaud.

Planche XXV.

HYSTERO-EPILEPSIE

il y a quatre ou cinq contractions assez brusques des muscles sacro-lombaires et de tous les extenseurs du corps. Puis, la partie supérieure du corps et la tête frappent violemment le lit.

Après un court moment de repos, M... pousse trois ou quatre cris très-élevés, toujours du même timbre, séparés par des intervalles égaux et le corps tout entier devient roide. Bientôt surviennent des ¦mouvements de rotation de la tète, surtout à droite, s'ef-fectuant très - brusquement. On note un nouveau repos, après lequel la face reste immobile, les yeux convulsés en haut et à droite.

Ces caractères sont à peu près les seuls qui offrent quelque régularité. Tout le reste du temps, les différents symptômes se montrent tantôt seuls, tantôt groupés avec ou sans ordre, accompagnés ou suivis d'une très-grande agitation, avec contracture des membres, grincements des dents, écume, sueurs, congestion de la face.

Deux fois, nous avons observé des convulsions des muscles de l'abdomen, convulsions très-courtes et très-rapprochées. Selon les phases, la respiration est lente ou précipitée. Nous n'avons pas vu de convulsions cloniques, sauf celles des muscles du ventre et quelques-unes dans les muscles de la face.

Vingt minutes après le début, il est devenu impossible de saisir quoi que ce soit de régulier. Parfois M... se relève et dit : «. Oh ! mon Dieu 1 Oh! là là ! » A la fin, elle dit. « Papa ! papa ! » mots qui, suivant la surveillante, annoncent la fin de la série. En effet, la malade se réveille et, interrogée, répond d'une voix brusque : « Cela va bien. » Elle surveille l'opération de sa mise en liberté et prie qu'on ait lien soin de ne pas la chatouiller. Elle se plaint d'envies de vomir, de fatigue et de battements de cœur. La série a duré une heure. P. plein, régulier, à 130 ; T. R. 38°.

1872 (1). 21 février.—La malade a été prise d'attaques à 8 heures et demie ; M. Charcot les arrête à 9 heures 3/4 par la compression de l'ovaire gauche. Cette manœuvre

(l) Rédaction d'après des notes recueillies par notre ami M. Gom-bault et par nous.

est douloureuse ; Mar... crie qn'on lui fait mal. Après un long rire convulsif, elle est tout à fait remise. On lui retire la camisole ; elle se lève, est un peu étourdie, tremblante; elle est d'ailleurs capable de marcher, mais en boitant légèrement parce que, dit-elle, .elle éprouve de la gène dans le genou gauche.

Les attaques sont annoncées par une aura complète : douleur au niveau de l'ovaire gauche, constriction épigas-trique, douleur et palpitations cardiaques, sensation d'une boule qui monte au cou (laryngisme), troubles cé-phaliques (sensation de coups de marteau dans le côté gauche de la tète, surtout à la région temporale, sifflements dans les oreilles, mais plus intenses à gauche, sensations lumineuses, mouvements convulsifs de l'œil gauche « qui saute »). Ces derniers phénomènes, auxquels s'ajoute une pâleur prononcée de la face, précèdent immédiatement ta perte de connaissance. L'aura se complique quelquefois d'un sentiment général de froid avec tremblement ( frisson nerveux), de tendance à la syncope, de vertige et d'engourdissement dans le bras et la jambe gauches.

23 février. — Outre Y hyper-esthésie ovarienne gauche, Mar... présente une hémianes-thésie du même côté ; les sens spéciaux, entre autres la vue, offrent des modifications pathologiques. Ainsi, Y œil gauche voit le rose jaune, le bleu vert, le jaune blanc, le vert pomme bleu clair. La vision est normale à droite. L'examen ophthalmoscopique ne fait découvrir aucune lésion de l'un ou de l'autre œil (G-alezowski). On note encore une analgésie légère du-bras droit.

29mars. — Hier M... a eu des attaques. Malgré cela, elle éprouve encore une partie des phénomènes de l'aura et dit avoir été tourmentée pendant la nuit par des visions effrayantes : elle a vu la lune se lever sous son lit, des chats circuler dans la salle et elle s'est levée pour courir après eux. M... se plaint souvent d'accidents du côté de l'estomac, les digestions sont pénibles ; elle a, principalement avant ou après les attaques, des vomissements bilieux ou alimentaires.

Soir. — La température est moins élevée dans la main

anesthésiée que dans la main saine, ainsi que le montrent les chiffres suivants :

T. de la main droite après 5 m. 34°, 2

— — 10 33°, 9

— gauche 5 31°, 6

— — 10 3C°

Deux sangsues sont appliquées sur chaque région ovarienne. A droite, elles prennent tout de suite; à gauche l'une prend aussitôt, la seconde lentement. Les piqûres sont douloureuses à droite, indolores à gauche. Après l'application des sangsues :

T. de la main droite après 20m. 34°, 4 — gauche — 20 31°, 3

La température est la même (37°,9)dans les deux aisselles. A dix heures, l'une des piqûres du côté droit coule encore; toutes les autres sont taries. L'hémorrhagie a été plus considérable à droite qu'à gauche. Les règles, qui étaient en retard de 25 jours, viennent de paraître.

\% avril. — Hier, M... a éprouvé des douleurs dans le flanc droit et a eu des attaques de 10 heures du soir à minuit. Ce matin, elle est dans la situation suivante : La perte de connaissance n'est pas complète, les yeux sont ouverts ; de temps en temps, il se produit de la rigidité dans les membres et il s'écoule de l'écume de la bouche; M... reste un temps fort long sans respirer ; puis, tout à coup, les muscles respirateurs accessoires entrent en contraction violente ( sterno-mastoïdiens, trapèzes, etc.) Pendant ces efforts convul-sil's, M... porte la main à la région précordiale. La région épigastrique semble alors déprimée. Le ventre est extra-ordinairement ballonné.

Une attaque épileptiforme survient après laquelle M... retombe dans son état dys-pnéique. Ensuite, elle a une attaque complète,suivie pres-qu'aussitôt d'une autre attaque que la compression de l'ovaire droit a fait cesser sur le champ. On constate que Yanesthesie a envahi, en plus du bras droit déjà analgésie, la moitié droite du tronc; seul, le membre inférieur a gardé sa sensibilité.

§ novembre.— M... est agitée; elle chante, cherche à. embrasser les assistants ; son regard est provocateur, lascif. On lui met la camisole, croyant qu'elle va avoir ses attaques. A peine était-elle

fixée, que ses yeux se dirigent en haut comme si elle voyait quelqu'un ; elle appelle : « Viens, dit-elle, » et elle fait signe de la tète. La physionomie exprime un vif plaisir. M... semble toute heureuse. Elle soulève son corps, projette le bassin en avant, et quand elle a exécuté plusieurs fois et plus ou moins rapide-ments ces mouvements, elle s'écrie avec satisfaction: « Çà y est! » La bouche, à la fin, laisse échapper en abondance une salive mousseuse.

Dans une autre crise, elle envoie des baisers avec les lèvres, sort et allonge la langue. Ses gestes sont lubriques, le plaisir est peint sur son visage et de nouveau reparaissent les mouvements de bassin qui, parfois, alternent avec de grands mouvements de balancement dans lesquels la tète et le tronc battent brusquement l'oreiller.

Ces crises, qui sont séparées par des intervalles de calme extatique, se terminent presque toujours par les mêmes expressions : « Ah! mon Dieu! mon Dieu! » ou bien: « Çà y est... C'est pas vrai ! Çà n'y est pas ! » — Elles cessent au bout d'une heure et demie et, aussitôt, la malade évacue une assez grande quantité d'urine très-claire.

1873 (1). M... est sujette à des accès d'oppression, avec palpitations cardiaques, qui sont quelquefois très-violents.

22 novembre.— Cautérisation du col utérin au fer rouge. L'introduction du spéculum est difficile et occasionne une grande souffrance par suite de l'existence d'un vaç/inisme très-accusé. M... répète que, lors des tentatives sexuelles, un rapprochement complet était impossible.

1874. 3 février. — Depuis la cautérisation,les étouffements sont moins pénibles. Hier, à la suite d'un accès de ce genre, sorte de crise hystérique avortée, avec prédominance des phénomènes cardiaques, M... a été prise d'une contracture de la jambe et du pied gauches. La marche était impossible tant le pied était dévié et la jambe pesante. La contracture a disparu au bout d'une demi-heure : la malade

(t) A partir de cette année, la rédaction est faite exclusivement d'après nos notes personnelles.

prétend que sa jambe est devenue progressivement moins lourde et que le pied, qui était en varus équin, s'est remis en deux temps. Les membres du côté gauche sont toujours très-faibles et engourdis.

Il y a quelques jours, aussi après une crise semblable, M... a eu un torticolis: la face était fortement dirigée vers la gauche et inclinée sur l'épaule correspondante. Cette contracture n'a persisté que 15 à 20 minutes et s'est dissipée lentement (1).

4 février.—Attaques : 1°Première période, a) Torsion de la tète, face déviée à gauche, rouge, grimaçante, ayant parfois une expression cynique ; paupières ouvertes, regard dirigé en haut et à gauche, pupilles dilatées ; rigidité générale.

b) Les bras sont dans l'extension, les mains tordues et tléchies à angle droit sur les avant-bras ; les trois derniers doigts sont fléchis, les autres allongés. Les membres supérieurs se contournent simultanément ou successivement : le bras gauche, par exemple,

(l) Voir page 53.

remonte en haut et se place derrière la tète ; la jambe gauche se fléchit sur la cuisse en croisant la jambe droite ; quelquefois, la jambe gauche se met perpendiculairement au lit, ou bien elle se lève et s'abaisse alternativement,etc. (Phase des contorsions).

Des bruits pharyngiens et buccaux, accompagnant des mouvements de déglutition ou des efforts de vomissement, séparent d'ordinaire la première période de la seconde.

8° Période clonique. — La malade exécute de grands mouvements : elle s'assied tout d'un coup et laisse retomber brusquement la tète et le tronc sur le lit qu'elle ébranle ; ces mouvements, entre lesquels on observe des mouvements de soulèvement du ventre, se répètent cinq ou six fois de suite.

Une heure après le début de cette série, composée d'attaques dans lesquelles la période de délire a fait défaut, M... revient à elle et pleure.

16 avril. — Nouvelle cautérisation du col avec le fer rouge.

21 avril.— Les étouffements sont beaucoup plus rares. Il est survenu des plaques rouges d'érythème sur différentes

parties du corps, surtout à la face.

]3juin. — Troisième cautérisation du col. Depuis'la dernière, M... n'a pas eu de grandes attaques, et elle n'a eu que deux accès-d'oppression. Le vaginisme persiste.

7 juillet. — Hier, M. . ayant un accès d'oppression qui se prolongeait, on lui a donné de Vétàer en inhalation. — Les 18, 20, 22, 23,24 et 25, étouffe-ments et contorsions sans attaques ; les règles ont paru le 19 et fini le 21.

31 novembre. — Application d'une vessie de glace sur la région ovarienne gauche successivement pendant une heure, une heure et demie, deux heures et trois heures. Les attaques ont été moins nombreuses, mais les étouffe-ments ont augmenté (Voir le tableau).

1875. Janvier-mars. — M... se plaignant sans cesse d'é-touffements, M. Gharcot lui fait donner de Véther en inhalation. Peu à peu, la malade est arrivée à en absorber des quantités considérables, 125, 250,500 grammes et même davantage par jour. Lether est actuellement pour elle indispensable ; elle tourmente tout le monde jusqu'à ce qu'on lui en accorde. Elle est devenue beaucoup plus difficile à tenir ; elle est très-irritable, crie, menace, brise parfois tous les objets qui lui tombent sous la main.

8 avril. — Attaques. Première période. Souvent la première attaque d'une série débute sans cri ; les attaques consécutives s'annoncent par un cri aigu, modulé. La face se congestionne, les paupières battent rapidement ; les muscles de la face frémissent, la respiration est suspendue. Tout le corps est rigide et dans l'extension. Puis il y a un repos : la face regarde soit à droite,, soit à gauche ; le ventre est soulevé par des mouvements onduleux, avec borborygmes très-bruyants.

Période clou'ique.— Ensuite, M... pousse un cri aigu, modulé, ou bien un « Oh! là là !» déchirant ; elle se tortille, exécute des mouvements latéraux de la tète. Au bout de quelques instants, elle se redresse tout d'un coup et s'asseoit, la tête est légèrement penchée en arrière ; les yeux regardent en haut : Gélina est dans une sorte d'extase ; elle semble voir quelqu'un, et de fait, on l'entend bientôt dire :

Planche XXVI.

HYSTÉRO-ÉPILEPSIE : 3° PÉRIODE

Planche XXVII. HYSTÉRO-ÉPILEPSIE : 3e PÉRIODE

« Ernest ! Ernest ! » De la tète, elle lui fait signe de venir et lui envoie des baisers avec les lèvres. (Pl. XXVI et XXVII.) A cette phase, succèdent les grandes convulsions eloni-ques : La malade soulève la tête et le tronc qu'elle laisse retomber brusquement, battant ainsi le lit avec une violence extrême. Chaque fois que le tronc retombe sur le lit, le bassin est projeté en avant et la malade ne repose plus que sur la nuque et les talons.

Depuis le 15 décembre 1874 jusqu'à ce jour, nous avons administré un nombre assez considérable de fois du nitrite d'ample à Mar.. Les phénomènes, dus à l'inhalation de cet agent, ont été consignés dans nos Recherches thérapeutiques sur l'épilepsie et l'hystérie (p. 107).

6 mai. — M... prend presque chaque jour 125 gr. d'é-ther en inhalation. Pour qu'il s'évapore plus lentement, elle le respire en se cachant la figure sous son drap. Hier, sa dose habituelle étant épuisée, elle a été violente, a cassé les carreaux, déchiré les rideaux, parce qu'on lui refusait de l'étb.er et qu'elle en voulait encore. — Aujourd'hui, cautérisation du col au fer rouge. L'introduction du spéculum est toujours aussi douloureuse. Au dire de la malade, il lui semble que « le conduit se rétrécit à mesure que le spéculum enfonce, a Après l'opération, irrigation d'eau froide, repos, cataplasmes.

24-29 juin. — Bronchite.

30 juin. — L'hémianesthésie du côté gauche est la même. — M... se plaint de douleurs qui, de l'épaule gauche, irradient vers le coude. Les veines sous-cutanées de la partie antérieure de la jointure sont légèrement dilatées. Il n'y a pas d'épanchement dans la séreuse articulaire. De plus, M... a.des douleurs sur le trajet du nerf sciatique droit et l'on constate l'existence des points sacré, fessier et fémoral. (Frictions avec l'essence de térébenthine).

1er juillet. — Hier soir, lors de la dernière friction, on s'est aperçu que le pied gauche était contracture ; le genou et la hanche avaient conservé la liberté de leurs mouvements. M... n'aurait pas eu d'attaques (?). A part quelques secousses, la nuit a été relativement bonne.

Ce matin, à 6 heures, on a constaté que les membres supérieur et inférieur gauches étaient entièrement contractures. A la visite, nous observons les particularités suivantes :

Membreinférieur:I1 est dans l'adduction ; la cuisse est légèrement fléchie sur le bassin et la jambe sur la cuisse; le pied est en varus équin ; les orteils sont énergiquement fléchis. Tout mouvement spontané ou provoqué est impossible.

Membre supérieur: Le bras est accolé au tronc ; l'avant-bras est fortement fléchi sur le bras et fixé contre le sein ; la main est fléchie à angle droit sur le poignet et les doigts viennent toucher l'épaule (Pl. XXVII). Si l'on essaie de modifier l'attitude du membre, on ne produit qu'un déplacement insignifiant, tant la contracture est intense.

Aucune des jointures n'est gonflée. La malade accuse des douleurs lancinantes au niveau du poignet surtout, de la partie moyenne et postérieure du bras, de l'extrémité externe de la clavicule, enfin des gouttières vertébrales, à gauche des 4° et 5e cervicales. D'après elle, la contracture du membre supérieur se serait constituée progressivement : débutant par l'épaule, elle aurait gagné le coude, puis le poignet. Nous avons vu que, pour le membre inférieur, elle aurait commencé par le pied.

On note encore, depuis trois jours, et non d'une façon constante, de la difficulté pour uriner. P. 92; T. R. 38°,4. — Soir : T. R. 38°,2.

% juillet. — Le membre supérieur gauche est devenu tout à fait libre dans la soirée d'hier, à la suite de crampes et d'une exacerbation des douleurs névralgiques. Le membre inférieur gauche reste contracture; par moments, la contracture serait plus prononcée.

3 juillet. —M... se plaint de douleurs névralgiques par tout le corps ; de crampes occupant la langue, les muscles de la nuque, des doigts (fléchisseurs) ; d'autres fois, il lui semble que la jambe ou le bras du côté droit se retirent, se rapetissent, se rétractent. Les foyers situés sur le 'trajet du sciatique sont moins douloureux. Appétit presque nul ; vomissements, constipation.

o juillet. — Même état. P.

Planche XXVIII.

HYSTÉRO-ÉPILEPSIE ; CONTRACTURE PERMANENTE

104 ; T. R. 37°,7. — Traitement : Julep chloral, 4 gr., 3 pil. de 0 gr. 05 d'extrait thé-baïque.

6 juillet. — La contracture du membre inférieur gauche a disparu. M... a passé la journée d'hier dans un état d'assoupissement presque continuel dans lequel elle a eu des visions pénibles : elle s'imagine que sa bouche se con-torsionne, comme cela a lieu sous l'influence du nitrite d'amyle ; elle voit les figures des malheureuses femmes des Incurables, atteintes de cancroides ou de lupus de la face. Quelquefois, des crampes dans les mollets la font sortir de cet assoupissement.—Herpès labialis. — P. 76; Tv R: 38°. — Injection sous-cutanéé de 50 gouttes d'une solution de morphine au 50e.

7 juillet. — La malade est plus calme ; mais elle vient d'avoir un frisson et se plaint d'un malaise général. L'auscultation de la poitrine est négative. P. 112; T. R. 39°,7. — Soir : T. R. 38°,9.

8 juillet. — M... a eu deux crises douloureuses dans l'après-midi. La nuit a été assez bonne. — L'appétit est toujours mauvais; la langue est humide, la constipation revient dès qu'on suspend l'usage des purgatifs. La dysu-riepersiste. P. 116; T. R. 37°,8. — Soir : T. R. 38°,4.

9 juillet. — T. R. 37°, 5. Injections sous-cutanées et bains.

10 juillet. — T. R. 37°,9. — Douleurs spontanées et à la pression occupant les jointures et la continuité des membres et prédominant à gauche.

11 juillet. — T. R. 38°. — Soir : T. R. 38°,4.

12 juillet. — Les douleurs, qui s'étaient calmées pendant la-matinée, ont reparu dans l'après-midi; La malade a constamment la physionomie rechigné^ P". 84 ; T. R. 37°,7.

ïo-juillet.-vf^Les douleurs, qui 'avaient'sensiblement di-miriu'e,'sont revenues ce matin avec • une nouvelle intensité : tantôt Célina est accroupie à « quatre pattes » sur son lit, tantôt elle se tortille, ne sachant quelle position prendre, ayant des impatiences ou une sensation de rétraction. Dès qu'elle s'endort, elle se figure qu'elle tombe dans des précipices ; elle se réveille en sursaut et saisit les barreaux de son lit pour se retenir; ou bien elle voit des montagnes énormes, des gens

qui danseDt ou jouent, des machines immenses, etc.

20 juillet. — Légère amélioration. On a levé la malade hier et on a remarqué que , debout, les membres du côté droit étaient pris de tremblement. — Les injections de morphine ont été pratiquées régulièrement jusqu'à ce jour ; nous leur substituons des injections d'eau.

24 juillet. — Les « peurs » ont été plus vives. M... s'imagine qu'un homme est caché derrière son oreiller à droite; elle voit des gens qui se battent à coups de couteau ; elle assiste à des « scènes de la Révolution. » Un effroi profond est peint sur son visage. Parfois, elle se soulève brusquement, regarde à droite et bientôt elle a une sueur froide. Le moindre bruit exagère sa frayeur. — Elle a eu, il y a quelques heures, une attaque épileptiforme très - violente après laquelle les crampes ont à peu près disparu complètement.

26 juillet. — M... va mieux, elle se promène dans la salle. — On note un amaigrissement assez considérable (34kilogr.).

29 juillet. — Insomnie, rêves fréquents, mais pas de peurs ni de visions. La marche est difficile parce que les jambes sont lourdes et douloureuses. Quelquefois, il se produit des crampes dans les doigts et un tremblement des mains, comparable au tremblement alcoolique. — M... mange peu ; elle n'a d'appétence que pour la salade et la charcuterie. — La constipation a été remplacée par de la diarrhée ; la miction est normale.

3 octobre. — Nous assistons aujourd'hui à une série d'attaques qui, tout en étant composées des mêmes périodes et des mêmes phases, offrent des particularités nouvelles.

Les prodromes et la période épileptoïde n'ont pas subi de modification. Mais il n'en est pas de même de la période clonique : nous avons vu précédemment que, au début de cette période, M... se tortillait puis qu'elle s'asseyait brusquement, qu'elle avait une attitude extatique, qu'elle paraissait heureuse et voyait « Ernest. » (Pl. X). Ce matin, au lieu de cette expression souriante,sa physionomie exprime le dédain (Pl. XXXI) ou le dédain et la terreur (Pl. XXXIV). Les lèvres sont pincées, les cheveux rejetés en arrière ; la tête est plus ou

Planche XXIX.

HYSTÉRO-ÉPILEPSIE : HALLUCINATIONS

ANGOISSE

Planche XXX.

HYSTÉRO-ÉPILEPSIE : HALLUCINATIONS

surprise

Planche XXXI,

HYSTÉRO-ÉPILEPSIE : HALLUCINATIONS

DÉDAIN

Planche XXXII.

HYSTÉRO-ÉPILEPSIE : HALLUCINATIONS

IRONIE

Planche XXXIII. HYSTÉRO-ÉPILEPSIE : HALLUCINATIONS

dégoût.

Planche XXXIV. HYSTÉRO-ÉPILEPSIE : HALLUCINATIONS

terreur.

Planche XXXV. HYSTÉRO-ÉPiLEPSIE : HALLUCINATIONS

répugnance.

moins inclinée sur l'épaule droite. M... conserve la même expression pendant plusieurs minutes, puis elle fait des grimaces affreuses. Enfin, elle retombe sur son lit qu'elle bat rapidement en soulevant et laissant retomber la tète et le tronc [grands mouvements clo-niques, déjà décrits).

Dans les intervalles de repos qui séparent les attaques, la physionomie sur laquelle se reflétait autrefois une sorte de béatitude, un air de contentement, exprime mainte-nunt des sensations d'une nature toute opposée. M... semble en proie à une véritable angoisse ; les_yeux sont fortement convulsés en,haut et à gauche ; la bouche, oûyerte, laisse sortir la langue qui est cyanosée (Pl. XXIX). C'est, là une expression démoniaque et qui rappelle celle que nous reproduisons, d'après une esquisse de Rnbens (Pl. XL).

Après une autre attaque, c'est un sentiment de surprise désagréable qui se peint sur le visage (Pl. XXX). — Après une troisième attaque, les yeux brillent de colère, la physionomie exprime le dégoût (Pl. XXXIII) ; la malade, ainsi que le montrent les Planches XXX et XXXII, a ramené le tronc vers le haut du lit et tient sa tète légèrement élevée. Dans un autre intervalle, M... ramasse les bras sous son menton et parait manifester une vive répugnance (Pl. XXXV).

Il était intéressant de rechercher la cause de ces modifications des attaques. Notre curiosité était d'autant plus vivement excitée que, pendant les jours qui suivirent, M... était plus triste que de coutume et pleurait souvent. A force d'insistance,nous parvînmes à savoir,que, peu auparavant,.. M... était sortie en ville et que,.le soir, la personne qui la ramenait à l'hospice et qpilui touche de près parfdes.diens du sang, l'avait fait monter en voiture et avait essayé d'abuser d'elle. Cette tentative, bien qu'elle ait échoué, l'avait vivement et douloureusement impressionnée.

11 octobre.—M... travaille à la buanderie depuis quelques semaines : on s'est aperçu que, souvent, elle revenait dans un état de demi-ivresse et on a découvert qu'elle se procurait de l'eau-de-vie. C'est sans doute à

cette cause qu'il faut attribuer son irritabilité et son esprit d'insubordination.

31 octobre. — Les injections sous-cutanées de morphine qui ont été continuées durant longtemps, puis remplacées par des injections d'eau, ensuite reprises pour calmer les inquiétudes et l'insomnie dont se plaint constamment la malade, ont déterminé une dizaine de petits abcès dus, selon toute probabilité, à ce que les injections sont mal faites ou pratiquées avec des trocarts malpropres. Ces abcès sont très - douloureux, même- du côté anesthésié.

22 novembre. — Hier, Mar... s'est coupé les cheveux, a brûlé ses colliers, a donné ses jupons à ses compagnes et, le soir, elle s'est cachée dans l'un des petits jardins de l'hospice. Elle est dans ses jours de tristesse : elle voudrait assassiner quelqu'un, afin d'être mise en prison ; elle veut « se tuer, se livrer à la boisson. »

Ce matin, il existe une contracture des membres du côté gauche (forme hémiplégique). L'attitude du bras est celle que nous avons décrite plus haut (Pl. XXVIII). L'attitude du membre inférieur est différente : la cuisse est fléchie sur le bassin; la jambe est à angle droit sur la cuisse et le pied en varus équin très-accentué. M... souffre constamment « d'inquiétudes » dans toute la moitié gauche du corps, y compris la face.

Des attaques survenant, nous constatons que, par moments, la contracture disparaît dans le membre supérieur gauche. — Nous administrons du nitrite d'amyle. Pour juguler les attaques, on doit lui donner maintenant des doses considérables (plus d'une cuillerée à café) : La face, les oreilles, le cou, les bras, la poitrine, le ventre et les cuisses deviennent rouges ou rosés (érythème) ; la pression avec la main rend évidente cette action du nitrite d'amyle sur la circulation capillaire de la peau.

M... revient à elle, vomit, a ses idées mélancoliques. Son bras est libre, la jambe allongée; elle marche en boitant. Au bout de quelques minutes, elle est reprise d'une attaque, contrairement à ce qui arrive d'habitude après l'inhalation de nitrite d'amyle. Dans cette crise, les membres inférieurs se dressent en l'air, s'entre-croisent doublement

(cuisses et jambes) de même que chez Rosalie Ler... (1). Nouvelle administration de nitrite d'amyle qui, cette fois, amène des vomissements bilieux. M... est cyanosée, bleue, à un degré effrayant. Elle parait avoir des douleurs dans la poitrine, demande qu'on la frotte pour la soulager. Les accidents, dus au médicament, se dissipent peu à peu et M... ne conserve plus que la contracture du membre inférieur gauche dans l'extension.

23 novembre. — La contracture du membre inférieur gauche n'a pas changé. M... a, de temps en temps, des accès de contracture ainsi caractérisés : La tête se porte à gauche et en arrière, les yeux à gauche et en haut; les pupilles se dilatent; les muscles de la moitié gauche de la face se convulsent; le bras et la jambe droite, qui étaient libres deviennent rigides et le membre inférieur gauche se roidit davantage. Ceci dure 30, 40 ou 50 secondes et se termine queiquefois par de l'écume. T. R. 38°.

(l) Voir page 14 et Recherches cliniques et thérap. sur l'hystérie, etc., p. 116.

24 non. — La contracture est permanente au membre inférieur gauche, mais variable dans sa forme ; toutefois, c'est l'extension qui l'emporte. — Au membre supérieur, elle n'apparaît que durant les crises épileptiformes signalées hier et que l'on désigne dans le service sous le nom de « contractions ou d'accès de contracture. » Quelquefois ces crises se compliquent de contorsions avec grimaces affreuses [crises démoniaques, Pl. XL.). Elles durent 15, 20, 30 secondes, et la malade recouvre de suite la connaissance.

Dans les intervalles, elle dit souffrir de tiraillements dans le côté gauche, de picotements; d'engourdissements et de sueurs froides. — A 9 heures 1/2, contracture du membre inférieur gauche dans l'extension et du membre supérieur dans la flexion; à 11 heures, contracture du membre inférieur gauche dans l'extension; le membre supérieurestflasque.

Ovarie double. — Hémianes-thésie complète à gauche. — A droite, anesthésie complète sur la moitié correspondante de la face et du thorax jusqu'à une ligne horizontale, passant par l'appendice xi

phoïde et sur le bras droit.

24 nov. — Contracture du membre inférieur gauche et du membre supérieur droit.

30 nov. — La contracture persiste dans le membre inférieur gauche; dans le membre supérieur droit elle a disparu, sans attaques, il est vrai, mais après des crampes.

5 déc. — Examen des yeux (Landolt). — Diminution de l'acuité visuelle à droite jusqu'à tj~ de la normale (comme à gauche). Diminution proportionnelle de la perception des couleurs et rétrécissement du champ visuel jusqu'à la moitié au moins du champ visuel normal. — Au dynamomètre Mathieu, 40 des deux côtés.

15 déc. — Afin de calmer les douleurs de M..., on lui prescrit un julep avec 4 gr. de clilo-ral et 15 pilules d'un centigramme d'extrait thébaïque.

Janvier 1876. — Le traitement reste sans action sérieuse. Inquiétudes, fourmillements, crampes, contractures passagères dans les quatre membres, tout cela ne se dissipe pas. — Ovaralgie double, etc. — Injections sous-cutanées de morphine. — Poids, 48 kilogr.

24 février. — Même état. Les injections ont occasionné des indurations du tissu cellulaire sous forme de nodosités. — L'anesthésie occupe toujours lamoitiégauche du corps et la partie supérieure de la moitié droite. Les muqueuses auriculaire, oculo-palpébrale. nasale, buccale et pharyngienne sont également insensibles des deux côtés. — A droite, au-dessous de la ligne horizontale tangente à la base du thorax, la sensibilité est obtuse.

11 mars. — Attaques : ni-trite d'amyle. A la fin de l'inhalation, Celina fait des grimaces hideuses, tortille la langue, contorsionne la bouche. Elle prétend qu'elle voit des figures affreuses qui la forcent à imiter leurs grimaces.

25 mars. — M... prend 6 gr. de chloral et on lui fait quotidiennement des injections sous-cutanées. Elle garde le lit à peu près toute la journée et se plaint toujours des sensations douloureuses, énumé-rées précédemment. Elle a des accès de tremblement des lèvres et des membres, sans éprouver, d'ailleurs, de sensations de froid.

Quand elle marche, elle est quelquefois obligée de courir malgré elle. Par instants, elle

pleure; pourquoi? Elle ne saurait le dire. — Elle ne mange presque rien (salade, fromage); en revanche, elle boit toute sa portion de vin, une potion cordiale, du vin de quinquina, etc. — Au dynamomètre M., 50 à droite, 40 à gauche. Poids, 40 kilogr. —L'anesthésien'a pas changé.

Hier, vers 6 heures du soir, la malade étant couchée voulut s'asseoir sur son lit. Dans le mouvement qu'elle fit, elle sentit « quelque chose » qui, du côté droit de la nuque, venait tomber dans l'œil correspondant, et, sur le champ, elle se plaignit de ne plus voir clair [Amaurose hystérique); elle s'imaginait avoir une longue paille dans l'œil droit et éprouvait la plus grande difficulté à ouvrir les paupières qui, elles, n'offraient rien de particulier. Elle avait la perception d'un brouillard épais. L'œil gauche était sain. M... a demandé qu'on lui mît un bandeau sur les yeux parce que la pression la soulageait. Elle a bien dormi. Ce matin, quand on a voulu écarter les paupières pour examiner l'œil, elle accusa une vive douleur; elle croyait qu'on enfonçait les cils dans l'œil. — Actuel-ement, les deux yeux sont pris ; le toucher est indolore ; les paupières sont animées de mouvements rapides ; la lumière fatigue la malade qui a encore la sensation d'un brouillard épais, semé de flammes, surtout de flammes vertes. Les globes oculaires, affectés de nystagmus, sont déviés en haut. M... se plaint de douleurs sus-orbitaires des deux côtés et au même degré, de contorsions dans les muscles de la face, de tractions sur la bouche, etc.

30 mars— Même état de l'œil droit ; même brouillard ver-dâtre. A gauche, distinction confuse de l'ombre des personnes.

31 mars. — Hier, M... s'est endormie vers 2 heures ; en se réveillant, à 4 heures, la vision était revenue. Aujourd'hui, M... est capable délire, mais bientôt les lettres deviennent troubles. Elle a continuellement devant les yeux des étincelles ou des flammes verdâtres. Elle reconnaît le bleu, le vert, le rouge, le jaune foncés; le rose, le bleu tendre ou le violet clair lui paraissent blancs.

lor avril.—Apparition,il y a quelques instants, de taches rouges, irrégulières, sur la face, le cou et les bras. Ces

12

taches disparaissent par la pression et sont le siège de démangeaisons (urticaire). Elles se sont effacées promp-tement. M... prend 6 grammes de chloral et a, chaque jour, deux injections de morphine et deux d'eau simple.

3 avril. — La malade a pris son chloral à 2 heures de l'après-midi; en se réveillant, elle a ressenti une seconde fois la sensation d'une paille qui s'enfoncerait dans l'œil droit et la vue a été abolie, de ce côté, jusqu'à ce matin.

4 avril.—De 6 à8 heures du soir, cécité de l'œil gauche ; vision colorée. Durant la cécité, douleurs dans la moitié correspondante du front et de la tète.

5 avril.—Cécité incomplète pendant une heure, survenue au réveil.

26 juillet.—Depuis une huitaine de jours, douleurs vagues, tortillements dans le ventre, sensation de rétraction des muscles « comme si on les tirait avec des ficelles. » La bouche se tourne ; l'œil gauche saute de temps en temps : Tous ces phénomènes prédominent dans la moitié gauche du corps. Quelquefois M... a des faiblesses, est sur le point de se trouver mal.

Hier soir, T. R. 38°,7. Ce matin, T. R. 38°,2. — Soir. T. R. 37°,3.

27 juillet. —T. R. 37°,4. Les phénomènes douloureux persistent. Hier soir, on a observé des tortillements, puis un tremblement du membre inférieur gauche, suivi d'une contracture, dans la demi-flexion, qui s'est dissipée au bout d'un quart d'heure ; enfin, des contractions, également passagères, dans la face (grimaces) et dans les mains. M... dit qu'elle avait des fils électriques qui la tiraient de tous côtés.L'insensibilité s'arrête, à droite, à une ligne horizontale passant par le mamelon. — Soir. T. R. 38°.

28 juillet. — Hier, de 3 à -j heures, contracture des membres inférieurs (forme paraplégique). T. R. 38°. Elixir poly-bromuré, 4 cuillerées. —¦ Soir. T. R. 38û.

29 juillet. — Insomnie absolue durant les trois dernières nuits. M... a des hallucinations de la vue. Elle voit Thérèse L... (I) qui rappelle, lui

(l) Il s'agit de la malade doiil nous avons relaté l'histoire (pages 1-13) et qui est morte le 20 juillet 1870

montre un cercueil, une bannière, lui fait signe de venir, que c'est à son tour de mourir ; elle voit encore des ombres blanches, des milliers de bêtes, particulièrement de grosses araignées. La sensibilité a reparu, mais d'une manière incomplète, à la face, au thorax et au bras du côté droit: toute cette moitié, du corps reste analgésique. Matin et soir : T. R. 37°,4.

30 juillet.— Six cuillerées d'élixir. T. R. 37°,2.— Soir. T. R. 38°.

31 juillet.— Le sommeil est mauvais, fréquemment interrompu. T. R. 37°,4. Démangeaisons généralisées. Amélioration notable. M... est levée, se promène, est gaie. Elle n'a pas eu d'attaques hys-léro-épileptiques durant toute la période douloureuse qui précède. — Soir. T. R. 37°,7.

11 septembre.—L'état général est plus satisfaisant. Le sommeil est meilleur. M... travaille à l'atelier. Elle n'a pas eu d'attaques hystéro-épilepti-ques depuis le mois de mars. Il y a bientôt un an qu'elle n'a eu ses règles. Elle prend toujours 6 cuillerées d'élixir et on lui fait, quotidiennement, quatre injections sous-cutanées de chlorhydrate de morphine au 50e. A partir d'aujourd'hui, on change la solution (eau 60 gr. ; chlorhydrate de morphine, 0 gr. 50). Ce matin, M... se plaint de douleurs « atroces » dans le côté droit de la tête et dans l'œil correspondant qu'elle ne peut découvrir. De ce côté, elle voit des étincelles et des lumières rouges. Ces accidents n'ont pas eu de suite.

1877. 9 février.—A. la fin de l'année (1876), les attaques,qui avaient repris leur ancien type (Pl. XXVI et XXVII),ont subi de nouvelles modifications. Nous assistons à une série de ces attaques : 10 La période tonique ou épileptoïde n'a pas changé. Entre elle et la seconde période, M... regarde en face, puis incline la tète à droite, regarde à gauche, exécute quelques légers mouvements auxquels succède, 2° la période clonique : elle fléchit et laisse retomber brusquement la tête et le tronc à huit ou dix reprises, comme auparavant. Alors, elle s'assied et la période des hallucinations commence : c'est sur elle que portent les modifications.

Le bras gauche est fléchi, la main appliquée sur l'épaule ;

le bras droit est demi fléchi, la main en avant de la poitrine. M... est attentive, aperçoit quelqu'un; de la tête, elle lui fait signe de venir, ouvre les bras, les rapproche comme si elle étreignait l'être imaginaire. La physionomie exprime d'abord le mécontentement, la déception, puis, par un brusque changement, le bonheur. On observe, à ce moment, des mouvements du ventre; les jambes s'infléchissent, M... retombe sur son lit et exécute de nouveau des mouvements cloniques.

D'un mouvement rapide, elle porte le corps sur le côté droit du lit, la tête repose sur l'oreiller; la face se congestionne, le corps roule en partie sur lui-même, la joue droite s'applique contre l'oreiller, la face se dirige vers la droite du lit, la malade présente les fesses, qui sont élevées, les membres inférieurs étant fléchis. Au bout de quelques instants, tout en conservant sa position lubrique (Pl. XXXVI), M... fait des mouvements de bassin. Elle se redresse ensuite et a ses grands mouvements cloniques. Enfin, elle grimace, pleure, parait vivement contrariée.

Elle s'âsseoitencore, regarde à gauche, fait signe de la tète et de la main droite. Elle assiste à des scènes variées, semble éprouver tour à tour des sensations agréables ou pénibles, si l'on en juge par le jeu de sa physionomie. Tout-' à coup, elle replace le corps sur le milieu du lit, le soulève un peu et, avec la main droite, exécute les gestes du meâ culpâ, suivis de contorsions, de grimaces. Puis, elle pousse des cris aigus : « Oh ! là ! là ! » sourit, regarde avec un air lubrique, s'assied, semble voir Ernest et dit : «Mais viens donc ! viens donc ! »

Agitation: M... se débat, jette les jambes de tous côtés, essaie de défaire les manches de sa camisole avec les dents. — Repos de 3 ou 4 minutes.

M... s'assied à demi vers le bord gauche du lit, le corps étant incliné vers la droite, la face, immobile, ayant la même direction; les yeux sont fixes; la bouche est légèrement en-tr'ouverte (Pl. XXXVII. — Le bras droit est un peu écarté du tronc; l'avant-bras, fléchi, vient toucher le menton; le coude est enfoncé dans l'oreiller. Le bras gauche a la même attitude. En raison de la position des deux membres

Planche XXXVI.

HYSTÉRO-ÉPILEPSIE : DÉLIRE

LUBRICITÉ.

Planche XXXVII.

HYSTÉR0-ÉPILEPS1E : CONTORSIONS

Planche XXXVIII. HYSTÉRO-ÉPILEPSIE : CONTORSIONS

supérieurs, la malade exerce une violente traction sur les manches de la camisole (1).— Les cuisses sont fortement fléchies sur le bassin et les genoux remontent jusqu'à l'avant-bras droit; les jambes sont si fléchies que les talons touchent les fesses. (Planche XXXVII.)

Surviennent ensuite des grimaces, une nouvelle attitude, des tortillements, enfin la position décrite plus haut et figurée dans la Pl. XXXVI.

A ceci succède un moment de réflexion : les paupières sont demi-closes et M... a un air béat. Bientôt se produi-.

(l) Lorsque les malades sentent venir leurs attaques, elles se couchent et demandent la camisole. Celle-ci, on le sait, est faite en toile solide, se ferme dans le dos et est pourvue de liens qui maintiennent: 1° les épaules (et vont se fixer à la tête du lit) ; 2° les hras, la poitrine (et vont s'attacher aux pieds du lit). De plus, le tronc est maintenu par des bandes transversales, attachées aux parties latérales du lit, et les pieds par des liens fixés aux barreaux voisins du lit. Malgré la solidité de cet appareil, les malades le déchirent souvent. D'ailleurs, la présence de deux infirmières est, en général, nécessaire pour surveiller les malades, afin qu'elles ne se blessent pas.

sent des mouvements rapides du bassin, des tortillements, et M... reprend l'attitude indiquée clans la Pl. XXXVII. Elle en sort en appelan t«papa! » reste quelques secondes tranquille, se couche sur le dos, se roidit, pousse des : Oh ! là là ! porte brutalement, sur le bord gauche du lit, le corps qui est en quelque sorte ramassé sur lui-même. Les bras et les jambes sont entre-croisés ; la physionomie est ingrate, rechignante (Pl. XXXVIII).

Après avoir accompli quelques mouvements rapides, Mv.. allonge les jambes et demeure tranquille pendant une minute environ;?Ensuite, elle s'asseoit,., sfeùîit, - envoie des baisers,'revient peu à peu à elle, s'aperçoit qu'elle est dans la cour, où nous l'avons fait transporter pour photographier ses attitudes, reconnaît les assistants, dit, d'un ton brusque : « C'est fini ! »

Les attaques ont commencé à 8 h. 45 et cessé à 11 h. 15.

Dans ces attaques, les scènes qui se succèdent se rapportent à des hallucinations gaies ou sombres. Voici ce que raconte la malade à ce sujet : Tantôt, elle voit une de ces

compagnes, S..., paralysée, qui la touche de son bras pour lui transmettre sa paralysie , ou des cadavres, ou une autre malade, Danj..., qui est pendue : de là, les expressions douloureuses de la physionomie ; — tantôt, elle voit « Ernest » auquel elle prodigue ses caresses;'de là, les expressions voluptueuses.

Dans d'autres attaques, du même genre, les scènes diffèrent : M... s'imagine voir, d'un côté, une grande place, de l'autre, une pelouse ; sur la place, il y a une négresse, nue, dont les yeux ressemblent à des lumières ardentes et qui lutte contre quatre hommes qui veulent la violer; comme elle résiste, les hommes la scalpent, le sang coule en abondance ; M... crie..., les hommes s'emparent d'elle et l'attachent à un poteau (ce serait pour cela que, parfois, elle tire de toutes ses forces sur sa camisole) ; — sur la pelouse, parsemée de bosquets, se promènent des femmes et des hommes jeunes, peu vêtus, qui s'amusent, chantent, rient, jouent, fument, boivent, etc., etc. Elle est parmi eux, embrasse Ernest... qui, quelquefois, la quitte pour aller avec d'autres femmes... Elle prétend que, après ces attaques, elle est fatiguée comme si eile avait eu des rapprochements réels.

Règle générale, quelque soit la forme des attaques, dont elle sort sans aucun des phénomènes qui compliquent les attaques d'épilepsie, M.... est incertaine, égarée; pendant quelques minutes, elle obéit, se lève, s'habille machinalement. La Planche XXXIX représente la malade à l'issue d'une série d'attaques. Cette photographie a été prise dans le courant de mai, époque où la malade avait la manie de ramasser des oiseaux qu'elle enfermait dans son panier. Son premier soin, une fois remise, était de reprendre son panier pour s'assurer que ses oiseaux y étaient en core.

20 mars (10 h. 35). — M... est sous l'influence des inhalations d'éther. Elle est assise par terre, auprès d'un lit, dans une espèce d'état cataleptique. La figure est immobile; M... a le bras gauche accolé au tronc, l'avant-bras fléchi, l'un des doigts allongé; on dirait que, dans son absorption extatique, elle fait signe de ne pas la déranger. Invitée à se le-

Planche XXXIX.

APRÈS L'ATTAQUE

ver, elle répond, d'un ton sec, qu'elle est incapable de bouger. Bientôt elle se plaint : « Il en fiche trop peu! » ce qui signifie qu'on ne lui donne pas assez d'éther. On imbibe de nouveau la compresse qu'elle fourre sous son nez, ramasse son jupon et son tablier par-dessus la compresse, afin que l'éther s'évapore plus lentement. Elle respire, vite; secoue de temps en temps la tête ; les paupières sont closes; la figure est grimaçante. Quelquefois, M... écarte un peu la compresse et parle : « Je le vois bien... Ça fait du bien... Je t'aime bien... Ce n'est pas _ ma faute, je te le jure... (Allusion sans doute au vaginisme qui rend le contact parfait impossible)... Il ne faut rien dire. »

10 h. 45. M... ouvre les yeux, respire deux ou trois fois profondément, pleure et dit: « C'est embêtant... (frappe sur sa poitrine)... Ça se passe en pleurant... (Regarde dans le coin du lit, sanglotte)... Ça ne me fait pas de mal... (Embrasse le drap)... Ça me ferait du bien, si j'avais de l'éther. » (Embrasse sa compresse, la sent, la tripotte, etc., et continue de causera voix basse).

10 h. 48. M... paraît reprendre connaissance et réclame de l'éther. « Çà me fait drôle dans les jambes... Çà me fait bien à moi... là,...au cœur...Ce petit était si drôle!.. (Elle embrasse le pied du lit, pleure). Oh ! mon Dieu ! si j'avais encore de l'éther... Il me mettra bien de l'or (allusion aux expériences de métalloscopie)... mais il ne me mettra pas de l'éther... C'est des bêtes sauvages (ceux qui ne veulent pas lui donner d'éther)... ,Je sens encore dans le ventre ce que "je sentais dans le temps... Il ne faut pas qu'on me voie. » (Elle se blottit dans la ruelle que sépare deux lits voisins.Elle fait des grimaces, sourit, fait signe, se couche tout de son long, écarte les bras, agite les doigts, remue les jambes, se couche sur le côté droit, se rasseoit, regarde à gauche, semble heureuse, rapproche les mains.) « Oui, ça fait du bien!... Oh! oh! mon petit chéri !... Allons-nous cou.... cou.... cher! On mange bien... On boit bien... On fait l'amour... » (Elle prononce ensuite des paroles incompréhensibles, est accroupie, chantonne.) « Personne ne saura ma pensée [bis)... Personne ne saura ce que j'ai en dedans (bis}. » Elle regarde

les filles de service et dit : « Puisqu'on a tout retiré, tout se passe maintenant... Cependant, je ne fais pas de mal... » Elle regarde sous son lit : « Il y a des pieds sous mon lit... des pieds d'Ernest!... Il me tenait dans ses bras... On éteignit le gaz... on faisait brûler le punch. » Alors, elle revient aux pieds du lit, pleure : « C'est embêtant !» Elle prend ses bottines et chante : « Des bottines ! Des bottines ! » Veut de l'éther ; se met à genoux ; regarde les personnes qui l'entourent, se lève et, montrant la table qui est au fond de la salle, elle dit d'un air d'envie : « Voilà du vin, du vin ! » — Elle cause seule : Comme çà le soir! sautille, se frotte les mains, chante. « Ernest ne pouvait pas faire autrement qu'Estelle. » Et elle fait des confidences sur les relations qu'elle a eues avec Estelle. A ce moment, la conscience revient tout à fait, en quelque sorte subitement ; M... se rend compte des dernières paroles qu'elle vient de prononcer, pleure, disant que « tout le monde va le savoir. » Elle était debout, elle va se cacher sous un lit. Nous la retirons ; elle se laisse manier comme un automate. Elle demeure immobile, les yeux dirigés en haut et pleins de larmes, la figure extatique, les mains jointes ; puis, elle se balance lentement ; marche sur la pointe des pieds, va embrasser une de ses compagnes , reste debout, à côté d'elle, la main droite appuyée sur la poitrine; frotte ses jambes, s'appuie sur un lit, saute. Elle tombe dans des idées tristes, se plaint de douleurs dans les dents ; redevient souriante. « M. Charcot ne m'a donné qu'un petit peu d'éther aujourd'hui. » Enliu, montrant une vieille femme, elle dit: « Elle a eu 17 enfants ; moi, je n'ai pas eu

d'enfants ____ On ne peut

pas... »

21 mars.—Attaques de 8 h. a 10 heures et demie. Nous l'observons à la fin d'une inhala-lion d'éther (230 gr.) : Physionomie souriante; petits mouvements du ventre. M... est tantôt couchée, tantôt assise. Elle fait des signes d'appel avec les lèvres et la tète ; assiste à des scènes variées. Expression de tristesse, fait des gestes comme si elle voulait écarter un être imaginaire. « Oh ! oh!... Ça fait du bien. [Bis)... envoie des baisers, se recouche, appuie la main sur

les organes sexuels, tapotte, est heureuse. Bientôt la douleur se peint sur son visage, M... pleure : « Çà fait du mal! ...Des bêtes! des bêtes!...» Elle sourit, exécute des mouvements de ventre ; puis, elle s'accroupit sur son lit, prend une des images attachées à sa pancarte (1), rit, bavarde, recouvre la conscience. T. Y. 37°,3.

6 sept.—M... s'est enfuie de la Salpétrière en compagnie de Geneviève. (Obs. IV, p. 88.)

1 sept.—Elle vient nous trouver en ville, avec Geneviève : nous les faisons reconduire à i'hospice.

8 sept.— M... raconte qu'une fois libre, elle est allée rejoindre son « Ernest »; qu'ils ont passé la nuit ensemble, qu'elle estguérie,parce qu'elle a pu avoir des rapports, à diverses reprises, sans souffrir.

12 sept.— Hier, M... a eu ses « étouflèments » de 3 heures et demie à 6 heures, et de

(l) Dans les salles où sont réunies les épileptiques et les hystériques, on reconnaît facilement les lits de celles-ci : leur pancarte est enjolivée de heurs artificielles, de rubans, de fragments de miroir, d'images aux couleurs voyantes, etc.

8 à 10 heures. La nuit a été bonne. Ce matin,à 11 heures, elle a été prise d'attaques qui ont duré jusqu'à plus de 2 heures : elles ont présenté les caractères du type ancien, régulier.

Période de délire. — Elle est heureuse, se tortille légèrement: « Viens !... A la bonne heure ! » Mouvements du bassin, se tortille, se soulève, regarde à droite ; — Se recouche, se tortille plus fort, se découvre, bat ses genoux l'un contre l'autre. — Se soulève brusquement : « Allons-y ! » retombe, se tortille. Repos : figure contente : « Tu ne veux plus ?... tu es un méchant... »

Cris aigus ; se soulève, retombe, se tortille se débat, repousse les draps. Repos : physionomie heureuse : « Viens donc!... Encore!... » Mouvements du bassin. « Faut en profiter. » — La sécrétion vaginale parait peu abondante. T. V. 38°,4.

13 sept. — Poids : 42 kilog. On voit que M... a engraissé. Sa figure paraît bouffie.

23 sept.— M... a passé la nuit dernière, avec Geneviève, on ne sait où. Elle assure (?) qu'elles sont allées se promener en ville et qu'elles sont rentrées à l'hospice vers 4 h.

du matin. — A la fin de septembre et dans les premiers jours d'octobre, la malade a eu, plusieurs fois, des vomissements.

10 octobre. — Attaques.

15 ocl. — Attaques. Apparition des règles qui cessent le 16 dans la soirée.

19 oct.— Contractions passagères dans les membres.

21 oct.— Attaques de 8 à 10 h. Arrêt par la compression ovarienne gauche. Chez elle, cette opération, qui, d'ailleurs, produit les phénomènes ordinaires,est très-douloureuse.Lorsque la malade reprend connaissance, c'est en se plaignant et, souvent, en injuriant la personne qui la comprime.

25 oct. — Attaque de tortillements pendant une heure.

26 oct.—Etouffements d'une heure à 5 heures.

28 oct.— Tortillements, contractions durant deux heures.

5 novembre. — Etouffements de 5 à 9 heures.

11 nov.-—Inhalation d'éiher. Dès qu'elle a sa compresse imbibée, elle va s'asseoir à l'écart, ramasse son tablier par-dessus la compresse pour que l'évaporation soit plus lente. Ses yeux sont fermés ; elle secoue seulement la tète;

puis, elle ouvre les paupières; les yeux sont immobiles, les pupilles légèrement dilatées; le regard est vague; M... est dans un état d'absorption profonde, parait jouir de la plus vive félicité. Quand, sa compresse étant sèche, elle réclame de l'éther, si on exige qu'elle réponde aux questions pour avoir encore de l'éther, elle donne des renseignements, mais comme quelqu'un qui est contraint, qui confesse ce qu'il voudrait cacher : Elle voit des hommes, s'abandonne à eux, perçoit leurs baisers, sent leur contact, etc. Tantôt, et le plus ordinairement, c'est Ernest, tantôt M. X..., tantôt un autre.Elle prétend qu'on l'a renversée, couchée, avant de l'embrasser : « J'ai bien senti... C'est parfaitement sûr. » Elle fait ses confidences à voix basse, avec une expression cynique, essayant, parfois, d'embrasser son interlocuteur.

Ether : voit Ernest ; exécute de légers mouvements du bassin : « Faut pas que je bavarde, dit-elle, je ne pourrais plus m'arrêter. » Ce qui indique qu'elle sent que, sous l'influence de l'éther, elle se laisse aller à des discours qu'elle ne veut pas qu'on en

lende. Elle allonge et fléchit les jambes, écarte les genoux, balance lentement le tronc. Sa physionomie exprime un certain degré d'égarement, d'abrutissement. Elle est en proie à une demi-ivresse, assez prononcée pour l'exciter, assez légère pour lui permettre de reconnaîtreleshom-mes qui l'environnent, qu'elle tutoie sans distinction, cherchant à les attirer vers elle, embrassant leurs mains, leurs habits. Elle comprend qu'elle est impuissante à résistera la volonté de ceux qui la font causer et c'est pour cela qu'elle s'isole autant que possible.

Si l'on soulève le bras gauche, qui est libre, l'autre tenant la compresse, il conserve la position qu'on lui a imposée (état semi-cataleptique). Les bruiis subits semblent impressionner vivement la malade. Ainsi, un chat, qu'on avait blessé par mégarde, ayant poussé un cri aigu, M... a bondi,juré et dit: Ca... chat. Elle a, de temps en temps, de l'embarras de la parole ; par instants, la bouche est entr'ouverte, la langue s'allonge entre les dents, la salive, qui paraît augmentée, s'écoule au dehors.

Nouvelle dose d'éther.Bien-tôt, M...bavarde à voix basse, regarde de côté et d'autre, secoue la tête et le ventre, sourit : « Ernest !... Viens donc !» Peu après, elle se lève, vient nous retrouver pour avoir de l'éther. La physionomie exprime l'égarement ; M... s'avance en titubant, automatiquement, demande de l'éther sur un ton impérieux : « On n'a pas dit tout à l'heure que c'était la dernière fois... Il faut qu'on le dise. »

On lui donne un peu d'é-ther. Les mêmes phénomènes se reproduisent. De plus, elle a une trépidation du membre inférieur droit. Quand elle a eu fini, elle s'est mise à chanter une romance à haute voix.

Un autre jour, nous l'avons observée à la fin d'une inha-lation de 125 grammes d'é-ther. Elle nous a déclaré que, lorsqu'elle revenait à elle elle épouvait de violents besoins génésiques (1); elle déclare « voir bien des choses » qu'elle dépeindrait sur le moment, mais dont le souvenir

Cl) Les sensations de cet ordre se perpétuent tant qu'il y a des hommes dans la salle.

lui échappe en partie. Elle a les jambes lourdes, ce qui rend la marche difficile. La face aune coloration jaunâtre; les traits sont altérés. Après l'éther, M... a la tête pesante, boit beaucoup d'eau, saute malgré elle ; il y a quelque temps, elle a fait un bond de son lit et elle est tombée par terre. Enfin, elle a des crampes, mais elles seraient moins douloureuses que celles qui apparaissent spontanément.

12 novembre.—Etouffements et contractions d'une heure à 4 heures. Apparition des règles qui cessent le 13.

14 nov.— Attaques ; nitrite d'amyle.Ce médicament, sauf une fois (page 126), a toujours mis fin à la série d'attaques.

22 nov.— Contractures passagères dans les mains et dans la langue : c'est ce qu'on désigne d'habitude sous le nom de contractions.

24 nov. — Tortillements de 5 h. à 8 heures du soir.

26 nov.— Hier matin, palpitations cardiaques très-pénibles, puis tremblement de la jambe droite; parfois, le tremblement envahit le bras droit et. plus rarement, le bras et la jambe gauches. Le tremblement prédomine, en général, du côté droit. Dans la journée, M... a été prise d'attaques, auxquelles ont succédé des crampes dans les doigts (demi-flexion) et dans la langue. « Il me semble, dit M..., que ma langue se rétrécit, e met en tampon et se colle contre la mâchoire inférieure. » Elle a aussi des crampes dans les paupières qui, si elles sont alors ouvertes, ne peuvent se fermer. — Anesthésie générale.

tQnov.—M... et Geneviève ont disparu du service pendant une partie de la soirée. Elles ne sont revenues qu'à 10 heures, et paraissent avoir sauté par dessus la clôture des jardins, si l'on en juge par l'état de leurs vêtements.

Métalloscopie. — Les expériences métalloscopiques ont été commencées vers le mois de septembre 1876. Le 4 novembre, la Commission nommée par la Société de biologie (1) pour étudier ces phénomènes, constatait que l'application de bracelets d'or monnayé sur l'avant-bras et la jambe du côté gauche (anesthésie), pendant 15 minutes,

(l) Cette commissiou était composée de MM. Cbarcot, Luys et Dumontpallier, rapporteur.

produisait les modifications suivantes : « Les régions sur lesquelles l'or avait été appliqué étaient devenues sensibles à la piqûre superficielle et profonde, le sang coulait des piqûres,et au-dessus et au-dessous des zones redevenues sensibles, il existait de la dyses-thésie, c'est-à-dire qu'au contact d'une compresse trempée dans de l'eau bouillante, la malade accusait une sensation de froid intense, tandis que sur les mêmes parties l'application d'un morceau de glace produisait la sensation d'une brûlure (1). » On voit, par cette citation, que M... est une hystérique à sensibilité

or.

Metallothérapie. — 11 juin: 0 gr. 02 de chlorure d'or et de sodium. — M juin : 0 gr. 03.— 19 juin : Retour partiel de la sensibilité. — 21 juin: Retour presque complet de la sensibilité. — 22 juin : Sensibilité

(l) Rapport sur la métalloscopie du docteur Burq, p. 5.

revenue partout, sauf sur le dos du poignet gauche (analgésie). —- 2 juillet : 0 gr. 05.— 14-17 juillet : Suspension. — 18 juillet : 0 gr. 03. — 17-21 août: Suspension. — 22 août: 0 gr. 03.

La potion au chlorure d'or et de sodium a été suspendue complètement du 3 au 12 septembre et reprise sans régularité du 13 septembre au 29 octobre. A partir de ce jour, la malade prend son médicament au moment de la visite. Le tableau suivant indique les changements observés quant à la force dy-namométriqueÇD.) et quant à la sensibilité (anesthésie, analgésie, etc.), durant la période comprise entre le 29 octobre et le 1er décembre. Le point le plus important qui ressort de ce tableau, c'est le prompt retour de la sensibilité (11.

(l) Les expérimentations thérapeutiques entreprises à la Salpétriè-re, dans le service de M. Charcot, n'ont pas encore été prolongées assez longtemps pour qu'on puisse se former une opinion définitive.

DATES

COTÉS

GAUCHE

DROIT

DOSES du

MÉDICAMENT

Octobre 29.....

— 30.....

— 31.....

Novembre 3 . .

— 6 .. .

— 9. . .

• — 13 ...

— 25..

— 26. .

Décembre 1er..

D. 28

Anesthésie

D. 24 Anesthésie

D. 26 Anesthésie

D. 25 Sensibilité lég.

D. 29

Sensibilité

D. 30

Sensibilité

D. 26

Sensibilité

D. 21

Anesthésie générale (l)

D. 25

Sensibilité

22

Analgésie 30

Sensibilité

30

Sensibilité 31

Sensibilité 22

26

30

20

30

25 gouttes (1 centig.) Id. Id. Id. Id. Id.

Id.

Attaques..

30 gouttes

(l) L'anesthésie générale a reparu à la suite des attaques hystéro-épilep-tiques survenues la veille.

Relation entre les règles et les attaques. — Malgré les recommandations les plus pressantes, malgré une surveillance attentive, nous n'avons pu obtenir jusqu'ici des résultats absolument précis sur les époques et la durée des règles. Aussi devons-nous nous contenter de quelques indications imparfaites.

1er janvier 1875 : Règles du 3 au 0 ; — Attaques les 4, 5, 6, 10, 14, 17, 19 et du 27 au 31.

Février : Règles du 15 au 16 ; — Attaques les 1er, 9, 17, 20, 26.

Mars : Règles du 28 au 30 ; — Attaques les 1er, 2, 3, 4, 5, 8.

Avril : Règles du 28 au 29 ; — Attaques les 5, 8, 12, 19.

Mai : Règles du 14 au 20 ; — Attaques le 24.

Juin : Règles le 13 (l ) ; — Attaques les 2, l\ 12, 23, 24, 25.

Juillet, août : Absence de renseignements.

Septembre: Règles du 17 au 19; — Attaques les 13, 26, 29.

Octobre : Règles du 23 au 24 ; — Attaques les 1, 5, 6, 7, 8, 9, 19 et 24.

Novembre et décembre : Les règles manquent

1876. 29 juin : Les règles, qui n'avaient pas paru depuis le mois d'octobre 1875 , sont revenues aujourd'hui; elles finissent le 3 juillet.

Août : Règles du lor au 4 et du 31 août au 5 septembre.

(l) Le 13 juin, M... s'est fait une saignée au bras gauche.

Octobre : Les règles font défaut.

Novembre : Règles du 12 au 13; — Etou/pemenls le 1er et le 12 ; — Attaques les 13, 16, 18, 26 et 29.

A la fin de novembre, on note : une hyper es tliésie de l'ovaire gauche;— la disparition de Yhémianesthésie gauche ; — la persistance des crampes, des contorsions, des tremblements, des étoufemeuts et des attaques hystéro-épilep-tiques. — M... n'a jamais présenté, à notre connaissance, ni rachialgie, ni clou hystérique. — La tympanite se développe assez souvent avant les attaques, mais elle n'est ni aussi fréquente, ni surtout aussi prononcée que chez Geneviève.

Nous avons essayé de donner dans le tableau suivant quelques indications sur la marche de la maladie chez M... Ce tableau est loin d'être parfait, parce que, le personnel du service ayant changé, la notation, chaque fois, a différé. Pour arriver à un résul-tatvraiment précis, il faudrait compter, d'une part, le nombre des séries, avec leur durée et,d'autre part, le nombre des attaques qui composent chacune des séries.

années

1867

1868

1869

1870

1871

1872

1873

1874

1875

1876

1877

NATURE DES CRISES HYSTÉRIQUES.

Attaques et attaques épileptif ormes

Attaques et attaques épileptiformes

Attaques et attaques épileptiformes

Attaques épileptiformes j

Attaques

Attaques épileptiformes

Attaques

Attaques épileptiformes

Attaques

Attaques épileptiformes

Attaques

Etouffeuients

Attaques épileptiformes

Attaques

Btouf£emeut3

Attaques épileptiformes

Attaques

Etouffiements

Attaques épileptiformes

Attaques

Etouffiements Contractions

Attaques épileptiformes

Attaques

Etouffiements Contractions

Janvier........

Février........,

Mars..........

Avril.........

Mai...........

Juin...........

Juillet.........

Août..........

Septembre......

Octobre.........

Novembre.......

Décembre......

Totaux. .

36 54 29 19

4

6 13 14 8 1

1

3 2 5 3 3

59

2 1 5 4 3 4 4 2 1 4 1 5

36

1

1

8 11 10

3 2

1

2 3 2 2 1

45

1

3 1 4 3 2 9 2

26

1

1

»

2

7 1 4 4 1 5 1 2 5 8 3

41

10 6 3

o

u

26

3 2 2 3 2 2 4

3 2 1 3 1

3

2 6 5 3 2 2

12 28

67

1 1

1

2 1

2 ¦ 2 2

12

26 37 33 15 1 4 13 66 50 37 30 30

342

1 4

12 6 7 4 1 6

3 2 5 4 1

51

30 27 67 70 30 8

1

1

25 5

263

1

2

» »

3

3 1

3

13

1

2 2

17

20 17 18

2

79

4

5 11

4

3

2 4

3

I. — De nombreuses conditions ont favorisé le développement de l'hystéro-épilepsie dans ce cas. Les accidents nerveux, constatés à la fois chez la mère et chez le père ; de plus, l'alcoolisme chez celui-ci, ont assurément exercé leur action sur l'organisation de M... Véducation déplorable qu'elle a reçue, l'existence vagabonde qu'elle a menée, les habitudes vicieuses qu'elle a contractées dès son enfance, tout cela a joué un rôle dans la production de la maladie. Une seule circonstance mérite une mention à part : c'est l'influence qu'un traumatisme, l'avulsion d'une dent, paraît avoir eue sur la première grande attaque. Nous n'insisterons pas non plus sur le caractère de M...,il se rapproche à beaucoup d'égards du caractère de Thérèse L... (p. 4) et de celui de Geneviève (p. 75-90).

II. — Les symptômes permanents de l'hystérie grave se composaient, à l'origine : Io d'une hyperesthésie ovarienne gauche; 2° d'une hémianesthésie du même côté ; 3° d'attaques convulsives, ayant un type régulier, presque invariable. Cet ensemble symptomatique demeure le même pendant plusieurs années (1867-1872). Plus tard, nous voyons s'y joindre : 4° une hyperes-thésie de l'ovaire droit ; 5° une hémianalgésie droite, avec anesthésie complète de la face, du thorax et dû membre supérieur droit; et, à partir de 1874, uñe série d'autres manifestations : a) contractures, b) crampes, c) contorsions, d) tremblements , e) secousses, f) névralgies. Un mot sur chacune d'elles.

o) En 1874, M... a présenté : 1° une contracture du membre inférieur g anche (forme hémiparaplégique), dont la disparition, au bout d'une demi heure, s'est effectuée progressivement, les segments du membre étant redevenus libres en deux temps; 2° une contracture des muscles du cou (torticolis hystérique), qui s'est dissipée en vingt minutes.

En 1875, nous avons observé : 3° une contracture du pied gauche, puis de tout le membre inférieur, enfin, du membre supérieur du même côté (forme hémiplégique). Cette fois, la contracture a été annoncée par des secousses et s'est constituée lentement, débutant, par le pied et la main, et gagnant ultérieurement les autres jointures. Elle a disparu après cinq jours, non pas à la suite d'attaques, selon la règle, mais consécutivement à des crampes, exacerbations, pour ainsi dire, de la contracture.

Nous avons noté ensuite : 4° une contracture des membres du côté gauche (forme hémiplégique), qui a duré quelques heures ; 5° une contracture du membre inférieur gauche (forme hémiparaplégique), qui a duré une dizaine de jours (1) ; 6° une contracture du bras droit (forme monoplégique), qui a duré cinq jours ; 7° une contracture du membre inférieur gauche

(l) Voir p. 128. La contracture, apparue le 22 novembre, aguérile2 décembre (date non indiquée plus haut).

(forme hémiparaplégique) ; 8° enfin, une contracture des deux membres inférieurs (forme paraplégique), qui a disparu en deux heures.

b) Les crampes siègent principalement dans les mains et les pieds, surtout à droite ; elles maintiennent, durant un temps variable, les doigts fléchis et sont assez douloureuses pour arracher des cris à la malade. Elles occupent aussi les muscles des paupières, de la langue, etc., immobilisant ces organes dans la position qu'ils avaient quand la contracture les a envahis.

c) Les contractions ne sont autre chose que des contractures passagères, changeant de place à chaque instant, sorte de crampes généralisées qui, par la douleur qu'elles occasionnent, donnent lieu à des contorsions, à des tortillements dans lesquels la malade prend successivement les attitudes les plus diverses et les plus bizarres.

d) Le tremblement parait avoir été, ici, l'un des premiers accidents de l'hystérie (p. 113,124, 130, etc.); il se montre par accès, affecte d'ordinaire les membres du côté droit, et de préférence le membre inférieur ; si, alors, la malade est assise, on entend le pied battre le parquet de petits coups secs, qui se succèdent avec rapidité [trépidation).

e) Chez M..., les secousses, dont nous avons parlé plusieurs fois (1), n'offrent rien de particulier.

Tous les troubles de la motilité, que nous venons de passer en revue, constituent en quelque sorte, à eux seuls, une crise d'un genre spécial, ou, au contraire, s'ajoutent aux autres prodromes de l'attaque convulsive. Dans le premier cas, il n'est pas rare de les voir revenir pendant plusieurs jours consécutifs, alterner les uns avec les autres, le tremblement remplaçant les secousses ou les précédant, etc. ; en pareille circonstance, les malades se plaignent vivement, déclarant préférer de beaucoup leurs grandes attaques qu'elles appellent de tous leurs vœux, qu'elles se font donner même, comme Geneviève ; dans le second cas, ces perturbations de la motilité, contractions, crampes, etc., disparaissent avec les convulsions.

f) Nous ne ferons que rappeler, pour le moment, les névralgies à siège variable, signalées maintes fois dans le cours de l'histoire de la malade et Y hyperes-thésie vulvaire déterminant le spasme du constricteur du vagin (2).

(1) Voir pp. 93 et 108.

(2) Afin de compléter ce qui est relatif au vaginisme, nous devons rapporter encore deux outres tentatives de coït infructueuses. Yers 1871, M ... sortit en ville avec son père qui, le soir, chargea un jeune voisin de la reconduire à l'hospice. En route, M. .. décida qu'elle ne rentrerait point et passa la nuit avec ce jeune homme : rien ne fut possible.—Il y a quatre ans en-

III. — Quelques-uns des phénomènes vaso-moteurs, relevés chez M..., doivent être mis en relief et rapprochés de ceux que nous avons consignés dans d'autres observations. Une application de sangsues (p. 177), faite au niveau de chacune des régions ovariennes, a permis de vérifier l'opinion formulée par M. Charcot, au sujet de la pâleur et du refroidissement du côté anesthésié chez les hystériques, modifications dues à une ischémie plus ou moins permanente (1). Cette expérience démontra, conformément à l'assertion de notre illustre maître, que le sang coulait moins du côté insensible que du côté sain.

Nous citerons encore, chez M..., les plaques d'éry-thème, d'urticaire (2), survenues à diverses époques, et nous rappellerons que Geneviève, elle aussi, a eu des plaques congéstives de la face ; — qu'une autre hystéro-épileptique, Hert... (3), a présenté, dans une attaque, un pointillé ecchymotique de la région antérieure du cou.

Ces hémorrhagies de la peau se voient aussi après des accès d'épilepsie. En 1866, durant notre in-

viron, elle s'enfuit de la Salpêtrière, alla trouver un homme d'une cinquantaine d'années qui, lorsqu'elle était libre, lui avait fait des propositions et coucha avec lui sans plus de succès. Aujourd'hui, elle assure « que tout va bien, » depuis sa dernière escapade (?). En effet, l'introduction du spéculum n'est plus douloureuse.

(1) Leçons sur les maladies du système nerveux, t. I, 3e édit., p. 303.

(2) Voir pages 87, 130.

(3) Bourneville — Recherches cliniques, etc., p. 105

ternat dans le service de M. Delasiauve, nous avons observé, chez une femme, Bure..., Victorine, âgée de 50, ans un pointillé ecchymotique très-fin, comparable à des piqûres de puces, formant un véritable collier de sept centimètres de hauteur, autour du cou. Très-confluent sur les parties latérales, le pointillé devenait de plus en plus rare, à mesure qu'on se rapprochait de la ligne médiane.

IV. — Nous ne reviendrons pas sur les différents troubles des sens (perte du goût, de l'odorat, du côté correspondant à l'anesthésie de la peau et des muqueuses, affaiblissement de l'ouïe, achromatopsie, am-blyopie, diminution de l'acuité visuelle, etc.), puisque nous sommes entré, à leur occasion, dans des détails minutieux. Toutefois, nous devons faire une mention spéciale de Yamaurose hystérique.

Elle survient, tantôt à la suite d'une attaque, tantôt en dehors de toute crise convulsive. Rosalie L... nous fournit un exemple du premier groupe ; deux fois au moins, à notre connaissance, nous l'avons entendue se lamenter parce qu'elle ne voyait plus clair ; la cécité, du reste, fut toujours passagère (1).

Chez M..., au contraire, l'amaurose, qui porta à la fois sur les deux yeux, ou, sur l'un d'eux, apparut indépendamment de toute attaque et dura, chaque fois,

l) Voir p. 19 et Recherches cliniques, etc-, p. 137 ot 146.

plusieurs heures (p. 129). Toujours, elle fut accompagnée de douleurs vives qui arrachaient des cris à la malade. Il s'y joignait aussi de la photophobie et des convulsions des paupières. Nous devons ajouter que, suivant la règle, en pareille occurrence, les paupières et le globe oculaire étaient insensibles au toucher, et que la cécité a disparu d'elle-même d'une manière aussi spontanée qu'elle était venue. Ce sont les amau-roses hystériques qui guérissent quelquefois... à Lourdes et aux établissements similaires.

V. — Les règles sont parfois accompagnées d'attaques, mais non d'une façon absolue. Souvent, les attaques éclatent durant les intervalles qui les séparent. Les retards dans la menstruation ne paraissent pas avoir eu d'action. Enfin, une très-longue aménorrhée (19 mois) n'a pas empêché les attaques de revenir pendant 10 mois ; tandis que pendant les 9 autres mois de sa durée, la malade n'a pas eu une seule attaque convulsive. Rappelons, à ce propos, que si la ménopause coïncide quelquefois avec la disparition des accidents convulsifs (1), il est d'autres cas dans lesquels on voit les attaques persister après la cessation régulière des menstrues (2).

VI. — Les nombreuses médications, instituées chez

(1) Observation d'Etch... (Recherches cliniques, etc., p. 151.)

(2) Obs. de Rosalie L..,, Ibidem, p. 116.

M..., n'ont pas produit de changements notables que Ton puisse inscrire à leur actif. La glace a paru calmer les palpitations cardiaques. Les cautérisations du col de l'utérus (nov. 1873 —mai 1875) semblent avoir agi sur les attaques épileptiques et avoir rendu moins fréquentes les attaques hystéro-épileptiques ; quant aux étouffements, s'ils étaient plus éloignés durant les jours qui suivaient immédiatement l'opération, ils se multipliaient ensuite. U elixir polybromuré (juillet—décembre), administré à une dose variant de 4 à 6 grammes, n'a pas procuré d'amélioration plus sérieuse. (Voir le Tableau des attaques.)

D'ailleurs, la glace, la cautérisation, l'élixir polybromuré, ont été employés simultanément avec les injections sous-cutanées de morphine, le chloral, Y extrait thébaïque, sans compter le nilrite d'amyle et Yéther qui ont été donnés un grand nombre de fois pour arrêter les séries d'attaques.

Quoi qu'il en soit de la part qui revienne à chacun de ces agents part qu'il est difficile d'apprécier, les attaques épileptiformes ont disparu, et les étouffements sont devenus plus rares, en 1876 et en 1877; enfin, les attaques hystéro-épileptiques ont fait défaut durant six mois en 1876, et durant six mois en 1877.

Quant au chlorure d'or et de sodium, il est intervenu, alors que M... n'avait pas eu d'attaques depuis trois mois, et si les crises convulsives ont encore

manqué pendant les trois mois suivants, elles sont revenues en septembre, octobre et novembre; toute opinion définitive serait donc prématurée.

VII. — Notre intention étant de revenir plus tard, lorsque nous aurons rapporté de nouveaux faits, sur les phénomènes produits par Yéther chez les hystériques, nous ne relèverons aujourd'hui que quelques particularités. Les inhalations d'éther, prolongées, donnent lieu assez souvent, dans le cas actuel, à un état cataleptique : Met-on, par exemple, les bras dans l'extension, ils gardent cette position durant plusieurs minutes. Fait-on reposer la malade sur un seul pied, elle s'y tient pendant trois, quatre minutes ou même davantage.

L'éther occasionne aussi un délire qui offre beaucoup d'analogie avec celui qui succède aux attaques : la volonté paraît absente ; la malade s'abandonne à des confidences qui trahissent ses aspirations, ses besoins les plus intimes.Ce qui domine chez M..., de même que dans son délire hystérique, ce sont les sensations génitales. Ce n'est pas là, du reste, un trait distinctif de M.... Nous retrouvons le même phénomène chez d'autres hystériques et, dès maintenant, nous pouvons citer Angèle X... qui, si elle est soumise aux inhalations d'éther, qu'elle réclame sans cesse, s'imagine recevoir les baisers de son « Alphonse » et percevoir génitale-ment son contact.

VIII. — Les prodromes des attaques et la période épileptoïde ne soulèvent aucune remarque nouvelle. Il n'en est pas de même des intervalles qui séparent les diverses périodes, ni du délire.

Entre la période épileptoïde et la période clonique, il se produit, chez M..., comme chez la plupart des autres malades, des mouvements onduleux du ventre qui se soulève et s'abaisse alternativement ; mais ces mouvements sont accompagnés de bruits intestinaux qui, souvent, sont extrêmement prononcés (borborygmes){\), bien que la tympanite concomitante n'atteigne jamais des proportions aussi considérables que chez Geneviève .

Durant la période clonique — et c'est là un phénomène que nous n'avons pas signalé autant qu'il le mérite — les hystériques présentent une extension extraordinaire du corps qui, ne reposant plus que sur les talons et la nuque, décrit un arc de cercle, presque un demi-cercle chez Geneviève, dont la convexité répond au ventre. La tympanite contribue encore à accroître la projection. — Chez Geneviève, chez M..., il y a quelquefois une distance de plus de 50 centimètres entre le lit et le sommet de la concavité formée par le dos. A cette attitude, que les hystériques conservent

(l) D'après Hecquet, répétant une opinion ancienne, « c'est l'animal de la concupiscence qui l'ait remuer et gonfler si étrangement le ventre des hystériques.» (Du naturalisme des convulsions, etc., 1733, t. I, p. 60.) Ceci reproduit à titre de curiosité.

souvent pendant plusieurs minutes , succèdent les grands mouvements de balancement sur lesquels nous n'avons pas à insister (1).

Reste la période de délire. — L'un des symptômes qui frappent le plus vivement ceux qui assistent aux attaques de M.., c'est le changement d'attitude. A l'origine; les attaques avaient un type uniforme : qui avait vu une attaque, les avait vues toutes. Tout d'un coup, M.... s'asseyait, était en extase, voyait son amant, lui lançait des regards provocateurs, lui faisait signe de la tête; puis, après avoir dit; «Ernest! Ernest !.. viens donc ! » elle retombait subitement sur le lit, prête à le recevoir.

Nous avons indiqué (p. 125) la cause révoltante qui était venue modifier cette attitude et imposer à la physionomie des expressions sinistres, répondant aux différentes scènes de la lutte à laquelle nous faisons allusion. Naguère, au temps où le fanatisme religieux faisait des milliers de victimes, on aurait attribué chacune de ces attitudes, chacune de ces expressions de la physionomie, à l'intervention d'un nombre égal de démons. (Pl. XL.)La preuve, la voici:

L'une des Ursulines de Loudun,Elisabeth Blanchard, était possédée par six démons. « Monsieur, frère unique du Roy, » — qui assistait à une séance d'exor-

(1) Cette attitude sépare parfois deux phases de la période clonique.

Planche XL.

ESQUISSE DE RUBENS : DÉMONIAQUE

cisme — « aiant désiré de voir paroître tous les Diables qui possédoient cette Fille, l'Exorciste les fit venir au visage les uns après les autres, tous le rendant fort hideux, mais chacun faisant sa difformité différente (1). »

Dans son délire, M... parle peu. Ses hallucinations d'ailleurs, sont aussi de deux espèces : les unes gaies, les autres tristes. Pendant la phase triste, elle a des visions épouvantables : elle voit une négresse que l'on veut violer, qui résiste, qu'on scalpe;— des milliers d'animaux étranges, des chats, des araignées, prenant des dimensions outrées; — des hommes qui se battent, des scènes de révolution ; — une compagne morte qui l'appelle, des cadavres, etc., etc.

Dans la phase gaie (attitudes et expressions de la physionomie extatiques ou lascives), M... voit son amant, l'embrasse, le,possède ; — des hommes qu'elle désire; - des hommes"et des femmes qui s'amusent. Et son délire lui retrace des paysages ou des épisodes qui se rapportent aux cabarets ou aux bals cle barrière qu'elle a fréquentés.

Tels sont les caractères du délire qui termine les attaques (2) ; ce qui domine, ce sont les idées voluptueuses, traduction des préoccupations constantes de la malade à l'état ordinaire.

(1) Histoire des Diables, etc., p. 229.

(2) Nous reviendrons, dans le second volume, sur les attaques de délire, rares d'ailleurs, qui se montrent indépendamment des attaques convulsives.

Les différentes descriptions que nous avons tracées des attaques hystéro-épileptiques, dans les observations qui composent ce volume, montrent que si, dans toutes, il y a des symptômes communs, il en est un grand nombre qui spécialisent les attaques de chaque malade. Et si l'on se souvient que ces malades vivent en commun, sont souvent réunies dans la même salle, le même atelier, s'assistent mutuellement, on se convaincra sans peine que l'action réciproque, qu'on suppose exister d'une malade sur l'autre,, est en vérité, peu puissante. On a répété que les hystériques s'ingéniaient à imiter les attaques de leurs compagnes ; les faits qui précèdent montrent que l'imitation est loin de jouer un aussi grand rôle, tout au moins, chez les femmes atteintes d'hystérie grave.

Avons-nous décrit toutes les formes que peuvent revêtir les attaques? Certes non, et il nous reste encore à exposer bien des observations avant d'avoir accompli cette tâche. Dans le volume, qui va suivre, nous en décrirons quelques autres; mais, afin de rompre l'uniformité d'histoires concernant la même maladie, nous aurons soin d'intercaler quelques observations relatives à Yépilepsie. Nous insisterons, du reste, sur les accès et sur les vertiges, afin d'arriver au but que nous poursuivons sur les conseils de notre maître, à savoir une classification précise des diverses formes que revêtent les accès oVépilepsie et les attaques oVhystérie.

TABLES DES MATIÈRES

TABLE DES MATIÈRES.

Préface....................................................... 1

Observation I : Hystérie....................................... 2

Observation II : Hystéro-Epilepsie.............................. 14

Observation III: Hystéro-Epilepsie et Hystérie.................. 33

Observation IV : Hysléro-Epilepsie : Extases.................... 48

Observation V : Hystéro-Epilepsie : Action de l'éther ; Métalloscopie. 109

ERRATA.— Page 18, col. 1, ligne 12, au lieu de Fig. i et 2, lisez Fig. 4 et 3 : ligne 14, au lieu de Fig. 3, lisez Fig. 2.

Page 122,ligne24,col. 1, au lieu de Planche XXVII, lisez Pl. XXXVIII. Page 143, ligne 33, col. 1, au lieu de 1876, lisez 1877.

TABLE ANALYTIQUE

A

Accès d'épilepsie (Description des), 37.

Achkomatopsik, 7, 116. Alcoolisme, 33. 110, 125, 146. Allaitement (Influence de 1') sur

les attaques, 55, 56. Amaurose hystérique, 129, 151. Amblyopie, 6.

Amyle (Nitrite d'), 9, 37, 61, 62,80,

88, 121, 125, 128, 140, 153. Arthralgie, 123.

Attaques (Description des), 7, 16, 35, 57, 67, 77, 114, 120, 131, 133.— Caractères généraux et secondaires des —, 109. — Durée des séries d' —, 89. — Mode de notation des —, 143 — Modifica-tiou des —, 124. — Tableau des —, 144. — démoniaques, 20, 21, 24, 125, 127. — de contracture ou épileptiformes, 108, 124, 127.

Attitudes (Des) dans l'hystérie, 96, 155, 156.

Aura, 7, 16, 60, 66, 93, 116 (V. Hyperesthésie ovarienneJ.

B

Belladone, 52. Borborygmes, 155 et passim. Bromure de camphre. 10. — de potassium, 10.

c

Camisole. 133.

Caractère des hystériques, 4, 0,

58, 75, 77, 89, 90, 111, 114, 146. Caudialgie, 5, 0.

Catalepsie, 134, 139, 154 (V.Extases).

Causes de l'Hystérie, 4,14,34, 51,110.

Cautékisation du col utérin au fer rouge, 118, 119, 120, 121, 133.

Chatouillement, 115.

Chloral, 60, 64, 123, 128, 130,153.

Chlorofohmk, 97.

Chlorure d'or, 141, 133.

Clou hystérique, 89, 143.

Compression ovarienne, 9, 57, 59, 60, 61, 63, 72, 79, 82, 84, 87, 103. 115, 117, 138.

Constipation, 5, 6, 65.

Contorsions, 18, 60, 143, 148.

Contractions, 138 140, 148.

Contracture, 93, 146. C. du membre supérieur gauche, 74, 122,126. — droit, 65. 128.—membre inférieur gauche, 118, 122, 126, 126. — droit, 59, 62, 83. — du pied, 60. 121 — du col de la vessie, 93. (V. Torticolis).

Crampes (Des) chez les hystériques, 113, 12-2, 124, 128 140,143.147, 148.

Crucifiement (Du) chez les hystériques, 22, 23, 30, 42 ; durée, 44, — chez les mystiques. 47. — chez les lypémaniaques, 47.

D

Délire épilcplique, 38. — hystérique,

13, 19, 23, 59, 60, 76, 79, 95, 107, 156.—Double caractère psychique du —, 107. — Forme saltatoire, 57, 66, 74. — erotique, 67, 70, 79, 80, 84. — mélancolique, 67, 68, 69, 79, 83, 126. — religieux, 69, 83, 85, 87, 96. — de parole, 99, 103. — de l'éther, 154. (V. Erotisme, Extases, Mutisme).

Delirium tremens, 97.

Dénonciations, 60, 69, 75, 79, 80,

83, 98. Dtnamométrie, 128. Dysurie, 122,

E

Elixir polybromuré, 130, 153. Epilepsie, 33, 43, 150. (V. Accès). Erotisme, 60, 61, 64, 69, 77, 82,

84, 85, 118, 121, 132, 133, 138.

Etat de MALhystéro-épileptique,C0.

Ether, 120, 134, 136, 138, 153, 154.

Ethyle (Yalérate d'), 9.

Etouffements, 137, 138, 140, 143.

Excès alcooliques chez les hystériques, 58, 62.

Extases, 70, 86, 96, 107, 118, 134.

F

Facultés intellectuelles des hystériques, 6, 16.

G

Gastralgie, 6. Glace, 60, 61, 120, 153. Grossesse (Influence de la) sur les attaques, 55, 36.

H

Hallucinations de l'ouïe, 19, 23, 74, 97, 107, 130, 134. — de la vue, 5, 19, 23, 64, 66, 84, 87, 95, 97, 197, 130, 134. 138, 157.

Hémianesthésie, 0, 35, 39, 52, 65, 116, 143, 146.— double, 16, 62, 9l, 91, 117, 140, 142.—Disparition de f— sous l'influence de la tuberculose, 11.

Hémorrhagifs de la peau, 15«'.

Hérédité, 4, 34, 110.

Hyperesthésie ovarienne, 7, 57, 61, 116, 143, 146.—double,76, 62,93, 127.— Disparition de 1' — sousTinfluence ae la tuberculose, 11.

Hystérie simple, 3. Htstéro-Epilepsie, 33, —diagnostic entre 1'— et l'épdepsie, 40.

I

Illuminées, 70.

Incontinence d'urine, 4, 64, 111. Incube, 104, 106.

Injections hypodermiques, 128, 153.

(V. Morphine). Insomnie, 60,64, 74, 123, 124. Ischémie du côté anesthésié chez

les hystériques, 45, 117, 150 (V.Va-

so-Moteurs.)

L

Léthargie, 51.

Louise Lateau, 41, 72, 108.

M

Métalloscopie, 140. Métallgthérapie, 141. Morphine, 74, 123, 130. Mutisme,51,54, 55, 60, 64. 75,163,108.

N

Névralgies cardiaques, 61. —cé-phaliques, 60, 75.—sciatique, 121. — sus-orbitaires, 130, 151.

O

œsophagisme ('?), 53. Onanisme, 111. 136, 146. Opium, 123, 128, 153. Ovaires (Lésions des) dans l'hystérie, 11.

P

Pacte de silence, 103. Palpitations cardiaques, 61. Pharyngisme, 58.

Possession, 19, 24, 26, 92, 95, 99. Prodromes de l'hystérie, 51, 90, 111, 112.

R

Rachialgie, 89, 143.

Rapports sexuels (Influence des)

sur les attaques, 53, 94, (V. Va-

ginisme.) Refus de manger, 53, 54, 55, 58,

64.

Règles (Apparition des) chez les hystériques, 4, 31. — Irrégularités des —, 5, 6,131.— Relations des — avec les attaques, 10 39, 88, 142, 152.

Rétention d'urine, 83,89.

S

Sangsues, 117.

Scrofule et hystérie, 4.

Secousses, 58, 61, 62, 65, 72, 81, 85, 93, 108, 147, 149.

Sécrétion vaginale dans les attaques, 137.

Sensations génitales, 85, 140, 154 et passim.— Abolition des —, 72, 91. (V. Erotisme, Vaginjsme).

Succube, 76, 79, 85, 87, 104.

Suicide (Tentatives de), 52, 54, 38, 59, 98, 126.

T

Température centrale dans les attaques d'hystérie, 9, 38,59, 115, 137.

— Température des mains et des aisselles du côté sain et du côté anesthésié, 116, 117. — dans les attaques épileptilbrmes (attaques de contractures), 127.— dans la contracture hystérique, 122,123.

— dans l'anesthésie par l'éther, 137.

Torticolis hystérique, 53, 119. Tortillements, 123, 128, 148. Traumatisme chez les hystériques,

71, 75, 113. Tremblement, 113, 124, 128, 140,

144, 148. Trépidation, 139, 148. Tribadie, 146.

Tuberculose pulmonaire dans l'hystérie; son action sur les symptômes permanents, 11.

Tympanite, 5, 8, 19, 52, 33, 35, 38, 01, 77, 91, 117, 143, 135.

u

Urbain Grandier, 100.

Urines (Caractères des) chez les

hystériques, 9. .Urticaire, 87, 130, 150.

V

Vaginisme, 111,114, 118,120, 134, 149.

Vaso-moteurs (Troubles) dans l'hystérie, 05, 119, 150.

Vision (Troubles de la) chez les hystériques, 67, 128, 129, 131, (V. Achromatopsie, Amaurose, Amblyopie, Hallucinations.)

Vomissements, 58, et passim.

TABLE DES PLANCHES.

Planche I en regard de la page................................. 6

— II, III, IV........................................... 8

-- V................................................... 16

— VI. VII, VIII, IX..................................... 22

— X, XI............................................... 34

— XII.................................................. 44

— XIII................................................. 36

— XIV................................................. 64

— XV, XVI, XVII, XVIII............................... 66

— XIX, XX, XXI....................................... 68

— XXII, XXIII, XXIV................................. 70

— XXV................................................ 114

— XXVI, XXVII....................................... 12Ü

— XXVIII............................................. 122

— XXIX, XXX, XXXI, XXXII, XXXIIÍ, XXXIV, XXXV 124

— XXXVI, XXXVII, XXXVIII......................... 132

— XXXIX............................................. 134

— LX.................................................. 156

versailles. — cerf et fils, imprimeurs, rue dupless1s, 59.