(1858) Journal du magnétisme [Tome XVII]
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(1858) Journal du magnétisme [Tome XVII]

1858

JOURNAL

DU

MAGNÉTISME

BÉDICfi

Par une Société de Magnétiseurs et de Médecins

SOÜS LA DIRECTION

DE M. le baron DU POTET.

La vérité, n’importe par quelle bouche; le bien, n’importe par quelles mains.

TOME DIX-SEPTIÈME.

2° SÉRIE.

PARIS.

BUREAUX : RUE DE BEAUJOLAIS, 5

(palais-royal)

i 858.

JOURNAL

DO

MAGNÉTISME.

LE MAGNÉTISME, /-:'K0Sp

I ri 11 r

LE SOMNAMBULISME ET LE SPIRITUALISME DANS \ L ÎIIÇTCttREj, AFFAIRE CURIEUSE DES POSSÉDÉES DE LOUWE&S.' ' 1

Les sceptiques, les railleurs, les hommes légers qui jugent de tout sans connaître , traitent le magnétisme, le somnambulisme , les manifestations spiritualistes de jonglerie ou d’hallucination. Contre leurs sarcasmes, leurs dénégations obstinées, leur aveugle incroyance, le magnétisme, le somnambulisme et le spiritualisme ont été obligés de faire leurs preuves, de multiplier les expériences, d’accumuler les fait.«. Ces expériences, ces faits, se reproduisent maintenant par tout le globe entier, et bientôt il n’y aura à leur endroit d’aveugles que ceux qui absolument ne veulent point voir, de sourds que ceux qui ne veulent point entendre. Mais c’est bien plus : mis en demeure d’étayer leurs affirmations sur une base solide, les magnétiseurs et les spiritualistes sont allés chercher dans l’histoire des exemples propres à fortifier leur doctrine. Un grand nombre de ces exemples ont été mis au jour par quelques savants magnétographes. Mais dans leurs ouvrages que de lacunes encore ! Nous avons, dans le numéro du Journal du Magnétisme du 10 janvier Tome XVII. — 95. — 2« Sébis. —10 Janvier 1853. 1

dernier, donné un aperçu des faits et des sources, qu’il y aurait à consulter à ce sujet et que personne n’a consultés. Comme nous le disions alors, les prodiges du magnétisme, du somnambulisme et du spiritualisme se sont montrés à toutes les époques et chez tous les peuples. Nous pouvons même ajouter qu’ils ont été la base, qu’ils ont constitué le principal domaine de toutes les religions. La critique et l’examen de ces matières prouveront, dans un avenir prochain, si nous nous trompons à cet égard.

En attendant, qu’il nous soit permis de retracer ici une de ces affaires de possession si fréquentes au moyen-âge, si émouvantes de leur nature, et où il y a tant à prendre et à, glaner pour l’étude du spiritualisme et des phénomènes que Mesmer et Puységur ont érigés en corps de doctrine. Nous voulons parler de la possession des religieuses de Louviers , affaire bien plus émouvante encore que celle d’Urbain Gran-dier et des religieuses de Loudun, où on retrouve les phénomènes analogues à ceux dont nous avons parlé au sujet des sœurs Augustines du Quesnoy dans le n° du 25 octobre de l’année dernière.

C’était en 16/il, deux ans avant la mort de Louis XIII, à peine cinquante ans après que les trop fameux démonographes Delangle et Boguet avaient répandu la- terreur et l’extermination en Bourgogne et eu Gascogne, dans le siècle même où l’on brûlait des sorciers par centaines de mille en Allemagne, où l’on en immolait, rien que dans l’espace d’un an,, 1,000 à Côme, 500 à Genève, 64 àRuremonde, 50 à Douai. C’était dans le siècle qui avait vu brûler en place de Grèvç la maréchale d’Ancre. Les esprits étaient pleins de ce souvenir, ainsi ipe de celui du drame lugubre de Loudun, arrivé, quinze ans auparavant, quand tout à coup l’attention générale fut portée sur les mystères non moins étranges et émouvants accomplis daas un modeste monastère de la Normandie , le couvent de Saint-Louis de Louviers, habité par de3 sœurs de l’ordre de Sain*.-François.

Nous allons à. ce sujet rapporter les faits dans l’ordre oii ils se sont succédé en les appuyant des témoignages les plus

authentiques, respectant la couleur que leur donnèrent les auteurs contemporains qui nous les ont relatés, et nous réservant çà et là d’y mêler des commentaires et des explications que nos connaissances magnétiques actuelles nous permettent d’avancer.

Le monastère Saint-Louis de Louvîors, vers le milieu du xvif siècle, était remarquable entre tous par l'austérité des vertus des religieuses qui l’habitaient. Nulle part ailleurs on ne rencontrait un lieu où la vie éméritique apparût avec autant de perfection.

« Toutes les jeunes sœurs qui s’y étaient vouées à Dieu, a dit un écrivain, étaient embrasées du feu de l’amour séraphique; le recueillement, le silence, le goût de la retraite, l’anéantissement des passions étaient leurs vertus familières. Leur cloître fut comparé à cette solitude ravissante que, selon le prophète, un éternel printemps enrichit de fleurs toujours nouvelles, et qui recèle dans son sein les pierres précieuses dont se construit la Jérusalem céleste.

« A la vue de tant de pureté, d’innocence et d’attraits, un ecclésiastique, doué de la plus rare éloquence, sentit son zèle enflammé au point de rêver pour ces adorables créatures un degré de perfection encore plus exquis ; il crut concevoir la possibilité d’en faire presque des anges. C’était, dit la chronique, un homme d’une démarche grave et mesurée; ses yeux baissés, son humble contenance, sa barhe longue et négligée, son visage pâle et de jeûnes exténué, n’ôtaient rien à l'ardeur de sa parole, qu’il savait merveilleusement suspendre ou précipiter à son gré. Ceux qui lui parlaient trouvaient en lui une condescendance pleine de bonté ; il laissait échapper des mots enflammés qui donnaient un avant-goût du bonheur céleste ; ses messes n’étaient qu’une longue extase; sa voix harmonieuse soupirait de sublimes actions de grâces qu’il entrecoupait de sanglots, ou qu’un silence mystérieux interrompait tout à coup dans leur plus grande véhémence.

« 11 s'annonça à ces jeunes ouailles comme l’envoyé de l’Es-prit-Saint et le dispensateur de ses grâces. D les fortifia dans leur abnégation et dans le ferme propos où elles étaient de renoncer à tout et de tout souffrir en vue de Dieu ; il leur prêcha l’extrême simplicité du cœur, et canonisa Cobéissance aveugle; il leur dit de s’anéantir entièrement dans la contemplation divine sans avoir égard à l’entendement, ni à la maté-riaiué des sens, dont l’oubli complet était le triomphe de

l’âme sainte. « Elevez-vous et ne rampez plus comme le vnl-« gaire qui s’arrête k de misérables scrupules; volez avec l’ai-« gle, et laissez loin de vous les tempêtes et les brouillards des k passions et des dérèglements humains, se dissiper et se con-« sumer d’eux-mêmes dans la basse région de l’àme. Mourez « dans l’extase et dans l’union de l’esprit avec Dieu, sans vous « occuper de ce qui se passe au-dessous. Des vierges illumi-« nées commevous, n'ont point affaire avec les fardeaux com-« muns; en elles l’amour opère tout; elles sont libres de la k liberté du Christ ; la grâce est à vous ; à vous l’onction de « l’Esprit-Saint. Et des essences épurées comme la vôtre s’a-« baisseraient à repousser la convoitise de la chair, à lutter » avec ses assauts ! Non, cette ennemie grossière est indigne « de vous; vous auriez beau la combattre, elle reviendrait « toujours à la charge pour troubler la paix intérieure et l’i-(, neilable repos sans lequel il n’y a pas d’adhésion possible « avec le souffle divin ; il faut donc mortifier la honte etcon-« fondre le péché en évitant de le discerner et de le voir, parce « qu’il n’y en a plus dès que l’âme est sans distraction unie « à Dieu. Voilà, mes tendres colombes, la vie cachée dont k j’avais à vous révéler les mystères, et dans laquelle vous k trouverez des joies inconnues et des délices sans fin. »

« Pour entretenir les jeunes sœurs dans ces idées, qui, on le voit, n’étaient pas toutes orthodoxes, il leur prêtait les livres qui en étaient remplis. 11 avait dit à l’évêqued’Evreux : «Je h ferai de ce monastère un tabernacle dont les murailles s’é-« lèveront jusqu’aux nues, où les anges viendront conver-« ser, et dont la renommée s’étendra par de lii les siècles ! »

« Quelques affaires, qu’il eut à Rome et à Paris, interrompirent le cours de ses instructions ; et à peine fut-il de retour, que la mort, qui vint le surprendre, arrêta le cours de ses ambitieux projets (1 ). »

(1) Cet ecclésiastique si austère et si plein de sollicitudo pour le per-fectionn«menl des jeunes brebis confiées à sa garde, était un prêtre de la

• contrée. Citait par sjs conseils que le monastère de Saint-Louis avait été fondé par II» veuve d’un procureur de la chambre des comptes de Rouen, nommé Henne«uin, condamné à mort pour cause do malversations. Il y avait fait transférer les sœurs d'un couvent de l'ordre do saint François existant depuis longtemps à Louviers, et avait été choisi pour le diriger par la veuve du procureur Hennequin, devenue elle-même supérieure du

couvent.

Nous avons dans ce qui précède suivi les assertions des écrivains contemporains qui sont les plus favorables ii ce prêtre. Cependant nous devons dire que les avis sont partagés sur ¡•on compte. M. Paul Dibon de

S’il en faut croire les pieux écrivains qui jusqu’ici ont raconté la possession des religieuses de Louviers, leur directeur

Louviers, dans uno histoire de cette ville, imprimée en 1836, dit do lui que, sous prétexte d’introduire la parfaite obéissanco dans le monastère, de faire, comme il disait, mourir le péché par le péché (similia, simili-bus curantur), et de forcer les jeunes sœurs à rentrer dans l'état d’innocence parfaite à l imitation de nos premiers parents qui n'avaient aucune honte do leur nudité, il exigeait d’elles qu elles se dépouillassent de leurs vêtements. Les religieuses qui passaient pour les plus saintes, les plus parfaites, étaient celles qui, dans cet état, paraissaient au chœur pour y recevoir l'Eucharistie, etc., etc. Delà, M. Dibon tire la conclusion qua M. David était un infâme débauché. A cela, il ajoute qu'il ^introduisit dans la communauté une religieuse nommée Françoise Gaugain, avec laquelle il avait des relations toutes particulières, et que c'est à l'aide de cette femme, nommée peu après supérieure, qu’il établit la corruption dans le couvent. Nous ne savons où M. Paul Dibon a été puiser ses affirmations à l'égard do l’esprit de débauche qu'il attribue au prêtre David. S'il n'a eu pour les élayer que le fait de nudité des jeunes sœurs dans l’accomplissement des plus saintes pratiques de la religion, il pourrait très-bien se tromper dans ses conclusions. Dans un culte où Dieu, les anges, la plupart des saints sont partout représentés à l’état de nudité, il a pu arriver que des sectateurs do ce culte, égarés par leur imagination, par des maximes erronées et par un esprit d’imitation par trop docile et peu éclairé, aient cru à cet égard s’affranchir des liens de la bienséance. L’histoire n’cst-clle pas pleine d’aberrations de ce genre? Qui ne connaît les habitudes des fakirs indiens, d'une foule de derviches, d’ascètes des pays orientaux? L’exemple des flagellants et de tant d'autres fanatiques du moyen-âge n’est-il pas là pour montrer jusqu'où peut aller parfois en pareille matière l'égarement des esprits? N"a-t-on pas vu aussi des sectes prétendre que le corps n’étant rien et l'âme tout, il n’y avait que les péché* de celle-ci qui étaient répréhensibles, et que par conséquent il importait peu do s'abandonner ou non aux souillures du corps ? Tant d'hommes en délire, mais dont la ferveur était sincère, doivent-ils être considérés comme des débauchés, des infâmes? Non, certainement, pas plus que les pieux écrivains do la Bible, quand ils racontent avec une crudité naïve des scènes dont le récit fait aujourd'hui rougir le vulgaire. 11 est à remarquer que plus les mœurs sont corrompues, plus le sentiment de la pudeur est, sinon puissant, du moins affecté. Jean-Jacques Rousseau a très-bien développé cette thèse dans son Emile. Les natures innocentes, les âmes pures qui ne pensent pas au mal, qui n’ont dans l'esprit rien de déshonnête, ne voient jamais dans un récit une peinture où la nature apparaît dans toute sa nudité, mais rien que dans sa nudité, le scandale, l’immoralité qu'y voient les âmes perverties. C'est ainsi que chez les sauvages, les peuples primitifs, les femmes privées de leurs vêtements n'inspirent pas plus de désirs dishonnêtes que les femmes con-

spirituel, par la vie séraphique qu’il leur avait fait suivre, avait éveillé en elles des illusions et des idées d’orgueil dont l’esprit de malice s’empara pour les perdre. Le diable fut jaloux des vertus des jeunes sœurs, de l’état de perfection oïl elles étaient arrivées et jura de leur dresser toutes sortes d’embûches afin de les entraîner dans le vice.

Nous qui ne croyons pas au diable, c’est-à-dire à un esprit assez puissant pour entrer en lutte perpétuelle avec Dieu, à un être étemel fatalement voué à la perdition du genre humain,, nous dirons : Ce n’est pas impunément qu’on distend, qu’on affaiblit le lien qui unit l’âme au corps, qu’on rompt l’équilibre, l’harmonie qui doit exister entre ces deux parties constitutives de notre être. Quand la vie physique s’efface > s’amoindrit, les facultés animiques prennent un développement par trop considérable, et de là des phénomènes que les physiologistes appellent désordres moraux, hallucinations, folie, quand ils veulent bien en reconnaître l’existence, et que nous, nous appellerons manifestations, faits de

veiiablement vêtues de nos sociétés civilisées. Cest ainsi quo chez les Spartiates, le peupla le plus continent et la plus frugal de la terre, on voyait les femmes danser toutes nues sur io mont Taygite. Cela étant, nous croyons que dans l'état de macération, d'exaltation et de dévotion excessives où se trouvèrent les religieuses do I.ouviers, il fût possible de les égarer au point de leur faire bannir la pudeur inhérente h leur sexe. On peut voir là de l'aberration, de l'égarement, de la démence, du In part de ces pauvres femmes et do leur trop excentrique directeur, mais jusr qiïà plus ample informé, nous n'admettons pus qu'il y ait eu intention de débauche et d’infamie. Ce qui nous empêche do l’admettre surtout, c'est la certitude acquise à l'histoire des austérités excessives, des actes de dévotion extrême auxquels furent soumises los religieuses de Louviers par le prêtro qui les dirigeait. Les jeûnes, les abstinences, les veilles, la prière no soi.t guère propres à alimenter les passions sensuelles : ce sont de pauvres reworte pour la débauche, le libertinage. Ajoutez à cela que les phénomènes de l’ordre psychique, les extases, les visions, l’extrême sensibilité nerveuse des religieuses do Louviers, nu se montrent guère en des milieux où on a pris l'habitudo de se livrer aux séductions dû sens, aux passions charnelles. Los facultés animiques ne se développent qu’en proportion do l’élévation morale, et il est do notoriété aujourd'hui chez les spiritualités que plus l'hommo se détache do la matière, plus II est susceptible d’éprouver les perceptions, les divines facultés inhérentes à la vie des âmes.

l’ordre spiritualists L’âme arrachée à l’étreinte de la matière, placée dans un milieu autre que celui qui la domine pendant sa période d’incarnation, ou perd son libre arbitre, ou est susceptible de subir l’empire d’autres âmes plus fortes, soit que celles-ci se trouvent également incarnées, soit qu’isolées de la matière, elles nagont dans cet atmosphère qu’on a appelé fluide vital universel ou magnétique.

C’est ce qui arriva aux jeunes sœurs du monastère Saint-Louis de Louviers. ,Une série de faits que nous allons exposer nous les montrera en butte aux esprits qui peuplent l’atmosphère susdite ou en communication avec eux, nous les montrera le jouet de forces inconnues, extraordinaires ou de la volonté des hommes de leur entourage, qui par la fascination magnétique ou par la suggestion électro-biologique, leur feront faire ou avouer une foule de faits véridiques ou faux, par de là l’ordre de la nature ou du moins par de là l'ordre des faits réputés naturels et possibles.

En tête de ces faits, et les premiers qui se montrèrent au monastère de Louviers, figurent ceux d’apparition, de visions, d’obsession, de manifestations d’esprits, genre de faits qu’on ne peut plus révoquer en doute aujourd’hui qu’il nous a été donné d’en être témoins et de les voir partout se reproduire. •

Parmi les religieuses de Louviers qu’avaient surtout exaltées, fascinées les prédications, le regard, l’approche du directeur spirituel de ce couvent, les effluves émanés de sa personne, si l’on peut s’exprimer ainsi, il s’en trouva six qui portèrent au plus haut degré la faculté de percevoir les phénomènes de l’ordre spiritualiste et magnétique, de leur servir d’intermédiaire, d’instrument, de cause provocatrice, d’en être les jouets, les victimes ! Ces religieuses furent la sœur Marie de Jésus, la sœur Anne de la Nativité, la sœurMarie du Saint-Sacrement, la sœur Barbe, la sœurMarie Cheron et la sœur Marie du Saint-Esprit (1).

(1) Sœur Marie du Saint-Sacrement, sœur Anne do la Nativité et «ceur Marie du Saint-Esprit, ont laissé par écrit le récit de leurs visions et des manifestations spirituelles qui leur Curent faites. Comme on le voit, ca

A sœur Anne de la Nativité apparut un jour entre autres un ange dont rien n’égalait la beauté.

« Dieu, disait cet ange, voulant gouverner la digne « sœur, immédiatement par lui ou par ses anges, avait « chargé celui-ci de venir lui enseigner les sept degrés de K perfection; mais il ne fallait pas qu’elle révélât rien de « ce qu'il lui disait, parce que les hommes ont des con-( naissances trop basses pour comprendre les voies de Dieu, « et ce qu’il peut opérer dans les âmes; et c’est lorsqu’on ■i ne s’en rapporte pas à lui qu’il vous livre au démon, ainsi « qu’il lui est arrivé à lui-même; » mais elle eut la prudence de déclarer qu’elle ne voulait rien faire sans en référer à ses supérieurs. Au même instant elle entendit un grand cliquetis d’épées nues, et ce fut comme un nuage qui fondit devant elle. Enlin, Marie, mère de Dieu, vint un jour la trouver et l’avertit qu’elle avait fait une grande faute de repousser la grâce de son fds, qui, pour mieux la toucher, avait bien voulu se remettre sur la croix, et qui avait ensuite revêtu des splendeurs éblouissantes, qu’il était encore temps de revenir à des résipiscences; qu’elle n’avait besoin pour cela que de s’abandonner à ses conseils, et qu’elle ne tarderait pas à jouir des célestes bienfaits. Tout cela ne réussit pas mieux; et la jeune fdle sut par la prière se préserver de cette nouvelle tentation.

« La sœur Marie du Saint-Sacrement vit de grosses étincelles de feu tomber la nuit du plancher sur sa couverture; quand elle se servait de sa discipline, on la lui arrachait pour la lui jeter à la figure.

«Une nuit, on frappa de petits coups à la porte de sa cellule : c’était une religieuse qui tenait une bougie ardente •„ son voile d’étamine lui couvrait le visage et ses mains se cachaient dans de longues manches. Elle lui dit : « N’ayez pas; « peur, je suis la sœur de la Pa&ion, autrefois religieuse en « ce couvent; je suis retenue en purgatoire, où je souffre « beaucoup, et personne n’a pitié de moi ; je suis venue à i vous parce que je connais votre bon cœur ; » et là-dessus elle lui proposa^ de faire à son intention diverses pratiques, dont Marie sut bien discerner le danger et qu’elle eut l’habileté d’éluder. Un autre jour, c’est une de ses compagnes qui

u'étaient pas seulement des extatiques, mais encore des médiums écrivants, autrement dit ptycographet. Nos spiritualistes modernes connaissent la signification de ces mots et Jn nature des facultés qu'ils désignent, facultés qu’on mettait autrefois sur ]e compte du diable.

vient lui l'aire la confidence qu’elle a découvert que le confesseur était amoureux d’elle et qu’il compose des philtres pour la séduire, et que les hosties qu’il lui donne pour communier ne sont que des charmes d’amour; et, en effet, un matin, celui-ci vint dans sa chambre, et, après beaucoup de discours mielleux, finit par lui déclarer sa passion et lui cita des passages de l’Ecriture qui permettaient d’aimer. A ces mots, Marie resta interdite et lui dit en lui jetant de l’eau bénite ; a Sors, infâme, au nom de Jésus-Christ ! Quand le véritable père confesseur l’envoya quérir pour tout de bon, elle ne voulut plus y aller, et ce ne fut pas sans peine que celui-ci parvint à lui démontrer que tout cela n’était qu’une imposture, et qu’elle avait été itludée par de fausses apparences. Enfin, dix-neuf jours de suite, un archange de lumière apparut à Marie comme une belle aurore qui venait éclairer sa cellule. « Je viens te trouver, lui dit-il, mais à condition que « tu garderas le secret ; il est écrit : Mon secret est à moi ; « l’épouse portera l’époux sur son cœur comme un bouquet * de myrte et sur son bras comme un cachet; malheur n à l’homme qui se confie à l’homme : dès qu’on recherche « l’approbation de l’homme, Dieu s’éloigne : c’est un maître « qui ne veut pas de second et qui ne fait connaître le ra-« visscment de ses consolations célestes et de ses complai-« sanees d’amour qu’aux âmes qui ne se confient qu’à lui « seul. »

« En un mot, il semblait lui développer des principes de vertu si sublimes et si purs, qu’elle fut persuadée que cette fois Dieu voulait lui enseigner le chemin de perfection. L’archange en lui parlant posait la main sur son cœur ; et elle se sentait entraînée vers Dieu parun amour si doux et si chaste qu’elle succombait sous le faix. Il lui apparaissait tous les jours plus lumineux et l’entretenait de la gloire de Dieu et de l’immortalité de l’âme fidèle. Il lui procurait des ravissements d’esprit lors desquels 'elle pensait voir des choses admirables et entendre des harmonies sans fin. Il lui promettait de la faire sommeiller entre les bras de l’époux, de ce sommeil mystique qui est le complément de la grâce, et toujours il la pressait de lui donner son cœur; mais il en vint à des flatteries si ouvertes et à des tendresses si vives, qu’elle devina le fourbe, et qu’elle le força de fuir en lui criant :

«> — Misérable trompeur, je te renonce. Sois confondu par la vertu de mon Sauveur ! »

Et à cela le narrateur qui nous a transmis ces faits ajout

que la sœur fit bien de repousser ainsi l’esprit séducteur, car ce n’était rien autre que Satan, l’esprit des ténèbres, cet être abominable toujours fatalement voué îi la perdition des âmes.

L’auteur de la Science chrétienne de communiquer avec les esprits, le pieux Gérard de Caudemberg (1), un des plus purs écrivains spiritualistes de ce temps, ne conclut pas, comme on sait, de la môme manière. Lui aussi a eu des communications semblables à celle de sœur Anne de la Nativité et à sœur Marie du Saint-Sacrement. Des anges, la sainte Vierge même lui sont apparus, dit-il, mais, loin de les considérer comme des démons, il s’est plu à entretenir avec ces puissances célestes le plus doux commerce, et il s’en est trouvé très-bien, assure-t-il. Soyez pur, vertueux, vous attirerez à vous les esprits purs, vertueux, disent les spiritualistes modernes. C’est ce qui arriva à sainte Hildegarde, à sainte Gertrude, à Sainte Mechtilde, sa sœur, aux saintes Elisabeth de Schonav et de Spaelbeck, à sainte Brigitte, à sainte Marie de l’incarnation, à Madeleine de Pazzi, à Marguerite de Cordoue, à sainte Thérèse, à Madeleine de la Croix, à madame Guyon et à tant d’autres; c’est ce qui dut arriver aux pieuses sœurs de Louviers ; mais le préjugé, l’opinion dominante, s’obstinait alors à voir le diable en tout, et l’on était loin du progrès qu’a fait de nos jours cette importante question des esprits.

Après les visions, les apparitions, eurent heu les obsessions, les faits les plus étranges de possession ou de manifestations physiques d’esprits. Celles des sœurs qui étaient exemptes de l’invasion des diables, dit le narrateur, aperçurent dans le chœur de l’église voler en l’air les règles, les bréviaires, les diurnaux de leurs sœurs tourmentées sans qu’elles se remuassent. Tautût c'étaient les pupitres et les livres qui se renversaient, les plats et ustensiles de cuisine que chacun apercevait tomber rudement aussitôt que de loin en approchaient les obsédées. D’autres fois les pauvres sœurs s’affaissaient malgré elles sur leurs genoux, étaient jetées

1) Voyez son livre publié dernièrement par Dentu.

violemment le corps contre la terre et maintenues de force dans des positions tout à fait contre nature, tandis que des mains inv isibles attachaient leurs sandales, leurs disciplines et leurs chapelets à l’extrémité de leurs voiles. Pendant ce temps on voyait les lumières s’éteindre et se rallumer, on entendait des bruits, des üntamares épouvantables dans les cheminées et des sons de plusieurs voix d’hommes dans les dortoirs. Une sœur plusieurs fois fut enlevée de sa cellule par des mains invisible et retrouvée en des lieux éloignés du monastère. Une autre fut saisie par le nœud de sa ceinture, enlevée en l’air et précipitée d’un grenier au bas d’une montée où elle fut relevée blessée, laissant échapper du sang par le nez. Une troisième reçut sur la joue de la part d’une main mystérieuse un soufflet qui fut entendu de ses compagnes ; une quatrième, forcée par l’esprit qui l’obsédait à lécher une patère, en eut la langue brûlée et couverte de pustules pendant trois jours, comme si elle eût léché un fer rougi au feu ; une enfin fut guérie instantanément d’enflures, de pustules et de verrues causées par des piqûres d’orties et des contusions. On vit en outre la sœur de Jésus, possédée par un esprit qui se nommait Accaron, s’élever de trois pieds en l’air pour saisir le soleil d’or du Saint-Sacrement, et l’évêque d’Evreux, voulant la retenir, être enlevé à son tour et jeté violemment à terre. Un autre esprit, répondant au nom deDagon, fit plus : s’acharnant après la pauvre sœur Marie duSamUEsprit, il lui jeta un jour la tête et une main dans le feu, ce qui eut lieu sans lamoin-dre brûlure, et une autre fois il la transporta sur un mur haut dedixpiedsd’oùil la fit tomber violemmentla tête la première, sans qu’il s’ensuivit aucune lésion ni aucun autre mal qu’un léger étourdissement (1). Ajoutez à celala double vue, la vueà

(1) Ces faits do déplacements d’objels 5 l'approche de certaines personnes ne sont pas arrivés seulement au monastère de I.ouviers. Toute l'histoire est pleine de phénomènes de co gonre. Dans le Journal du Magnétisme, tomes II, XV et XVI, il est fait mention da jeunes filles des départements de l'Orne , do Seine-et-Oiso et de la C6l&-d'Or qui étalon t douées de l’étonnante faculté de provoquer ainsi par leur approche le déplacement d'une foule d'objets. Les journaux ont suffisamment parlé de ces jeunes filles pour que nous n'ayons pas besoin d’insister à cet égard.

distance, la pénétration de pensée, la connaissance et la découverte des choses les plus secrètes et les mieux cachées, le don de répondre à des questions faites en des langues

Quant aux autres phénomènes qui so seraient passés î> Louviers, tels que le mouvement et lo déplacement imprimés à des personnes vivantes ou à dos matières inertes par des mains invisibles, nous y avons la plus grande foi. L’histoire est également pleine de faits do ce genre, et on les a vu reproduire de nos jours dans une foule de circonstances manifestes et devant les témoins les plus attentifs et les moins favorablement prévenus. Avons-nous besoin de citer ce qui se passe actuellement dans tant de pays, surtout en Amérique? Avuns-nous besoin de rappeler ce qui a été fait à Paris devant tant do personnes honorables et dignes de foi par M. Home, l'illustre médium ?

Il est vrai que des personnes qui ne se sont point donné la peine d’étudieret d'expérimenter patiemment, minutieusement parelles-mi'mes les faits do manifestations spiritualistes, et qui n'ont point été témoins de celles de M. Home, les ont révoquées en doute. Leur argumentation consiste à représenter ce jeune homme comme un habile charlalan, un prestidigitateur, ou bien les témoins des phénomènes qu’il produit comme des dupes par trop crédules, jouets de cet état d'hallucination, de suggestion magnétique qu'on a appelé électro-biologie. Pour quiconque connaît M. Home, il est de notoriété que ce jeune homme, si doux, si honnùto et si simple, n’est ni un jongleur, ni un charlatan : c'est encore moins un prestidigitateur, lin moment on avait cru pouvoir le considérer comme tel, et il est une circonstance que nous avons rapportée dans lo Journal du Magnétisme (année 1857, n° du 25 avril) où l’on Gt venir pour le contrôler M. Moreau-Sainti, un prestidigitateur consommé. Les faits se sont passés au Palais-Royal en présence du prince Jérôme et de plusieurs autres personnages. Après un examen attentif, force a été à M. Moreau-Sainti de convenir qu'il n’y avait aucune des pratiques ordinaires de la prestidigitation dans tout ce que faisait M. Home. Mais ce qui prouve Clairement que les phénomènes spiritualistes produits par ce jeune homme ne sont pas de la prestidigitation, ce sont les circonstances où l'illustre médium n'a pu rien produire, malgré son désir et celui des personnes présentes. Ces circonstances, dont les railleurs, les incrédules ont fait grand bruit, prouvent au contraire en faveur du spiritualisme. Comme nous l'avons dit ailleurs (voyez le n° du Journal du Magnétisme, du 10 septembre dernier), si M. Homo ne produit rien ou ne produit pas quand il veut, il n'est donc point un prestidigitateur, car les prestidigitateurs ont toujours la certitude de faire mouvoir leurs ficelles et, pour eux, le moment et les spectateurs, quels qu'ils soient, ne sont jamais des obstacles. Il faut donc attribuer à des causes d'un tout autre ordre la puissance de M. Home et les éclipses dont cette puissance est parfois l'objet. Il faut les attribuer à des causes d'un ordre plus élevé, ca’uses quo l’on ferait mieux d'examiner, d’approfondir sérieusement plutôt que d’en

étrangères, de faire les discours les plus savants, les plus éloquents, sur une foule de hautes questions morales et religieuses, et vous n’aurez encore qu’un faible aperçu des phénomènes inouïs qui répandirent à la fois le trouble et la consternation au sein du monastère Saint-Louis de Louviers dans le courant de l’année 1641 et dans les premiers mois de 1642.

Aussi le bruit de faits aussi étranges, aussi prodigieux, ne tarda pas à se répandre. L’évêque d’Evreux, François de Pé-ricard, et les principaux ecclésiastiques de son diocèse, y employèrent toute leur science, se livrèrent, à force de con-

nier les effets ou d'en rire en l’accompagnant des épithètes de jongleurs et

de dupes.

Quant aux allégations qui tendent à représenter les phénomènes produits par M. Home comme le résultat de l’état d’hallucination, d'illusion, d électro-biologie dans lequel se trouveraient les personnes par trop crédules et impressionnables qui en auraient été témoins, les faits sont là pour leur donner le plus complet démenti. En cITct, parmi les personnes qui ont rendu témoignage aux étonnantes facultés du jeune médium, il n'y o pas eu seulement que des imaginations faciles à tromper, à sc laisser éblouir, mais des esprits forts, des incrédules, nullement sensitifs et impressionnables, qu'on le veuille bien croire. D’ailleurs. M. Home, ce jeune homme si frôle, si peu faiseur et si peu initié à la science des prestiges, est bien loin d’être un magnétiseur, un électro-biologiteur, si l’on peut s'exprimer ainsi. Il suffit de l’avoir vu et connu pour s'en convaincre. Du reste, ce qui prouve péremptoirement contre ce dernier ordre de raisonnement imaginé par les incrédules, ce sont des signes sensibles constatés après coup par des personnes qui n'avaient nullement assisté aux séances deM. Home, et qui par conséquent n’avaient pu en être êlectro-biologiiiei. C'est ainsi qu’aux Tuileries, un fauteuil s'est brisé en morceaux, que des (leurs ont été cueillies sur des jardinières par des mains invisibles et ont été distribuées aux dames-, que chez le duc de Bassano un lustre a été déplacé miraculeusement du lieu où il était, et emporté dans un salon situé deux pièces plus loin que le premier; c'est ainsi enfin que des sonnettes se sont agitées toutes seules au grand étonnement des voisins, des passants. Dira-t-on que les domestiques qui sont venus ramasser les débris du fauteuil, que ceux qui ont été témoins de la promenade du lustre 4 travers l'espace, que les personnes qui le lendemain sont venues constater à la jardinière l'absence des fleurs qui s'y trouvaient, que les passants, les voisins qui ont vu les sonnettes s'agiter toutes seules étaient hallucinés, èlcctro-biologiscs? L'explication serait par trop commode en vérité. Mais combien d’autres faits que le défaut d'espace nous empêche de rapporter ici, viennent en réponse aux objections des incrédules! Encore quelque temps, ils frapperont tellement les yeux de tous, qu’il n’y aura plus de possibilité de les nier.

jurations, à tous les exorcismes possibles. Mais ils y perdirent leur latin, rien n’y fit, et la possession îles pauvres sœurs continuant, l’évêque d’Evreux fit venir, au monastère le provincial des capucins de Normandie, homme très-expert en matière de conjurations, prédicateur éloquent, persuasif et vigilant, très-propre à. répandre partout l’esprit de Dieu là où il n’y avait plus que l’esprit du diable, très-habile à déjouer les ruses de ce prince des ténèbres et à pénétrer les secrets de ses machinations. Ce provincial des capucins ne fut rien autre que le père Esprit de Bosroger, le narrateur qui nous a transmis, dans un livre très-détaillé et assez bien écrit, l’histoire complète de la célèbre affaire de possession des religieuses de Louviers.

De Bosroger se mit à l'œuvre avec la foi, le courage et la ferveur qui le caractérisaient. De nouveaux jeûnes, de nouveaux actes de piété plus grands encore que par le passé, des offices multipliés accompagnés de sermons, d’adjurations, conjurations, exorcismes, eurent lieu de plus belle au monastère de Louviers.

Un jour que le révérend père, en parlant du démon, s’animait plus qu’à l’ordinaire et disait que ce n’était qu’une mouche en comparaison de la vertu divine, l’une des assistantes, Madeleine Bavan , tourière du couvent, jeune fille admirablement belle, ne put s’empêcher de se récrier : « Eh bien, dit-elle, on verra dans quelques jours si ce n’est qu’une mouche. » Et cinq religieuses ne tardèrent pas à ressentir d’effrayantes convulsions. Gela fut un trait de lumière pour des imaginations crédules qui, croyant au diable, voulaient absolument lui trouver des suppôts. On se rappela une circonstance où Madeleine avait crié au secours, en se plaignant que le diable la frappait et la renversait sur les marches de sa cellule ; on conjectura que Madeleine s’était vouée à lui, qu’il avait tout pouvoir sur elle, et qu’il en avait fait un des instruments des troubles abominables qui désolaient le monastère..

Aussi résolut-on de l’exorciser tout particulièrement. L’é-vêque d’Evreux s’en vint en personne pour procéder à cette

œuvre. Les démons, dit de Bosroger, n’eurent point la force de résister à la puissance conjuratrice du pieux évêque, et crièrent tout d’une voix que Madeleine était magicienne, et que c’était elle qui leur avait fait prendre possession du couvent; qu’elle fréquentait le sabbat et qu’il fallait qu’on s’en méfiât, parce qu’elle y avait Teçu un nouveau pouvoir de charmer par les yeux. A cela le narrateur ajoute que Madeleine fut atterrée; qu'elle resta sans action et sans voix, et comme anéantie sous les terribles syndérèses de sa conscience qui l'écrasait, en présence de la vérité du Dieu vivant qui venait pour la confondre. On l’enferma dans une chambre séparée. On examina attentivement son corps, afin d'y reconnaître la marque du diable, c’est-à-dire la cicatrice, le stygmate dont le prince des ténèbres ne manquait jamais d’estampiller, disait-on, le corps de ceux qui s’étaient livrés à lui. Après un mûr examen, après avoir bien palpé, comme c’était l'habitude, le sein nu de la pauvre Madeleine, on crut y reconnaître la fatale marque. Alors, dit de Bosroger, lasor-cièreavoua tout. Mais, pleinede confiance, elle requit le secours de l’Eglise. Elle déclara qu’elle avait été pervertie parle prêtre Mathurin Picard, directeur spirituel du couvent, qui l’avait induite au mal, en lui arrachant son consentement par ruse; que c’était lui qui l’avait instruite dans l’art de la sorcellerie et conduite au sabbat, et, là-dessus, elle se mit à faire récit de toutes les scènes incroyables de sabbat qui étaient admises de son temps.

Mathurin Picard, mort depuis peu, avait été curé de de la paroisse du Ménil-Jourdain , près Louviers. Il avait eu pour vicaire Thomas Boullé , que Madeleine Bavan reconnut être son complice et son compère en tous ses maléfices et fornications. Comme elle et Picard, Boullé s’était rendu au sabbat, où il avait servi de diacre dans les messes sacrilèges célébrées en l’honneur de Satan. A. cela Madeleine ajouta qu’elle avait participé avec les deux prêtres à une foule de scènes de magie, de diablerie, à toutes les énormités et sacrilèges qui se commettaient au sabbat.

Doit-on regarder comme véridiques toutes les révélations

de Madeleine Bavan ? Y a-t-il jamais eu réellement un sabbat auquel se rendaient, à travers les airs, des sorciers et des sorcières, montés sur un manche à balai rôti ? Nous ne le croyons pas. Qu’on remarque que, dans la plupart des procès de sorcières, les malheureuses qui faisaient de tels aveux étaient de pauvres femmes en état d’hallucination, de fascination magnétique ; de malheureuses créatures chez qui le système nerveux avait acquis une sensibilité telle, que tout libre arbitre, toute volonté en étaient absents. A des êtres tombés dans un tel état, il est facile de tout suggérer, de tout faire avouer ; mille faits produits par nos magnétiseurs modernes en sont une preuve, et, pour quiconque a assisté à des séances d’électro-biologie, ces choses ne font pas le moindre doute. Au moyen-âge, au xvn* siècle, on avait des idées, des croyances générales, officiellement, catholiquement admises sur les sorciers, le diable, le sabbat, croyances dont on ne se départissait jamais, qui étaient aussi bien enseignées par les docteurs de l’Église qu’insinuées aux jeunes générations dès la plus tendre enfance. Ces croyances, qu'on affirmait volontairement de soi-même, et à l’aicle desquelles ou expliquait tous les phénomènes de l’ordre surnaturel dont on avait connaissance, étaient de plus suggérées d'autorité par des prêtres, des exorcistes, des confesseurs, des inquisiteurs, desjuges.Que pouvait faire,dans un procès de sorcellerie, une pauvre femme, dominée physiquement, magnétiquement, moralement par son juge,son scrutateur? que pouvait-elle,si ce n’est de faire des aveux conformes à sa propre croyance, à ses idées personnelles, conformes aux desseins, à la volonté fortement marquée et déterminée de celui qui l’interrogeait? C’est ce qui est arrivé àla plupartdes malheureux qu’on vit impliqués dans ces procès de sorcellerie, de magie, si fréquents autrefois ; c’est ce qui arriva à Madeleine Bavan. Parmi les aveux faits par cette jeune fdle, on voit qu’elle avait été fascinée, séduite par le prêtre Mathurin Picard, son confesseur, et que des relations criminelles s’étaient établies entre eux. Ces faits, on peut les croire, on les comprend ; ils ne sont arrivés que trop souvent; l’histoire est là pour en adminis-

trerla preuve, et l’année dernière, dans le Journal du Magnétisme du 25 octobre, à propos de la possession des sœurs Augustincs du Quesnoy, près Valenciennes, nous citions une circonstance tout à fait semblable. On peut admettre également l’état de fascination, de charme, exercés par le curé Picard et son vicaire sur la pauvre Madeleine; les visions, les dons de clairvoyance, de vue à distance, les hallucinations, l’extrême sensibilité magnétique qui en furent chez elle la conséquence ; mais tous les autres faits incroyables de diablerie avoués par cette malheureuse, doit-on aussi facilement les admettre ? Non ; il y a là matière à controverse, et jusqu’à ce que des faits patents, une plus grande expérience soient venus nous convaincre, nous qui n’admettons pas l’existence du diable, nous les révoquons en doute.

Quoi qu’il en soit, après l’aveu de ses crimes, sortilèges et maléfices, aveu sur lequel elle revint pourtant, en protestant de sa parfaite innocence, Madeleine Bavan fut d’abord condamnée à la prison de l’oflicialité. Exorcisée de nouveau, elle fit de nouveaux aveux ; elle apprit que la présence du corps de Mathurin Picard, enterré près la grille de communion, était la cause de l’un des plus dangereux maléfices qui affligeaient le couvent. De plus, une religieuse déposa contre Picard que, la veille de sa profession, il l’avait instruite à faire des vœux au dieu Beel ; deux autres déclarèrent que, pour avoir été seulement touchées par lui, elles ont ressenti comme des horreurs, et sont restées dans un état complet de stupidité. Alors l’évêque d’Évreux fit faire le procès de feu le curé de Ménil-Jourdain. Le juge ecclésiastique ayant trouvé assez de charges, l’excommunia sur la fosse, et ordonna qu’on l’exhumât, et qu’il fût porté en un lieu profane (1). 11 ne vou-

(1) Ce lieu fut un trou profond, appelé puils Crosnier, lequel existe encore dans un petit bois voisin de Louviers, appelé bois do Dé-fens. L'imagiuation populaire fut tellement frappée du récit des sortilèges abominables de Picard, que pendant longtemps il régna une tradition qui assurait que son corps , lorsqu’il fut tiré de ce lieu, paraissait plein de vie, et que du fond du puits il vomit pendant longtemps des llaiumcs qui illuminaient toute la for(t pendant la nuit.

lut pas , dit l’historiographe Bosroger, créer un curateur au corps, parce qu’il voulait épargner l’honneur du sacerdoce, tenant cette affaire le plus secrète qu’il lut possible. Mais quelque soin qu'on prît, quelque secret qu’on gardât, l’affaire ne larda pas à transpirer ; cette exhumation d’un prêtre fit scandale. Le bruit en vint aux oreilles de la justice , où les parents de Picard en appelèrent connue d’abus: le lieutenant criminel de Ilouen descendit sur les lieux et dressa du tout procès-verbal, pour en référer au parlement, qui en prit connaissance et ordonna qu’il eu fut plus amplement informé. Le parlement réclama une enquête, afin de s’assurer si réellement il y avait possession de la part des religieuses et maléfices de la part des ecclésiastiques incriminés, et si les désordres nerveux arrivés au monastère de Louviers ne devaient pas plutôt être attribués à quelque maladie, à quelque contagion épileptique ou hystérique. La reine Anne d’Autriche, régente du royaume, à la requête des magistrats, nomma une commission chargée de faire une enquête sur tant de faits étranges, épouvantables, scandaleux, dont la connaissance commençait à être partout divulguée.

Cette commission se rendit à Louviers en septembre I6i3. Elle était composée de Charles de Montechal, archevêque de Toulouse ; de Jacques Charron, pénitencier et chanoine de l’Eglise de Paris, docteur en théologie ; de Samuel Martineau, également docteur en théologie et chanoine de ladite Eglise, et enfin de M. de Morangis, conseiller du roi et maître ordinaire des requêtes de son hôtel. Ces doctes et respectables personnages se rendirent au sein du monastère Saint-Louis; et, présumant que les convulsions et contorsions extraordinaires, les cris et agitations des soi-disant possédées pourraient bien être le résultat de quelque maladie, ils prirent la précaution de s’adjoindre un homme de l’art dont les lumières pussent les guider. Cet homme de l'art fut le sieur Ivelin, médecin ordinaire de Sa Majesté, qui, depuis quelques jours déjà, s’était rendu dans le monastère pour y examiner l’état des pauvres religieuses et y appliquer

les remèdes de la médecine (1). L’enquête commença donc sous ces auspices avec toutes les précautions possibles. Mais, après l’examen le plus minutieux , les commissaires ne virent pas la plus petite trace de maladie ou d’indisposition corporelle dans les religieuses de Louviers, et force leur fut de convenir qu’elles étaient réellement obsédées, possédées et maléfi-ciées. Ils constatèrent de la manière la plus formelle l’existence de phénomènes identiques à ceux que nous avons indiqués plus haut.

Mais, se défiant de leur jugement en pareille matière et voulant pousser plus loin encore la circonspection et l’examen, ils prièrent les médecins do Rouen de se rendre comme eux an monastère afin de faire une autre enquête et que la plus grande lumière soit faite sur les faits étranges qui s’y passaient. Les médecins de Rouen obtempérèrent à cette invitation, et, quel qu’ait été leur peu d’empressement comme médecins à admettre des faits de la nature de ceux qu’on disait avoir lieu au monastère de Saint-Louis, ils ne purent s’empêcher, après un examen également long et minutieux, de conclure de la même manière que les commissaires nommés par la reine. Nous reproduirons leur rapport, attendu qu’émané d’hommes de l’art, il offrira un caractère d’autorité que les sceptiques seront moins tentés de révoquer en doute. Voici ce rapport tel que nous l’extrayons de plusieurs pièces originales relatives à la ténébreuse affaire :

Les médecins de Rouen , priés par MM. les commissaires députés par le roi de visiter les religieuses de Saint-Louis de Louviers , prétendues possédées et leur en donner advis : s’estant transportés audit lieu et ayant diligemment observé et considéré toutes les actions, paroles et mouvements desdites religieuses, tant hors que pendant leurs accès, en leurs exorcismes, communions, confessions et autres exercices de dévotion : icelles interrogées pendant leur tranquillité et en leurs accès, sur tout ce qu’ils ont cru pouvoir donner lumière à, ceste connoissance , ont jugé conformément lesdites religieuses au nombre de 5 estre véritablement possédées

(1) C'est le môme qui a publié sur la possession des religieuses quelques-uns des mémoires, réclamations, controverses, que nous citons ci-dessous. Jl y eut aussi M. Briant, médecin de Louyiers.

par les signes suivants distingués en trois chefs. Premièrement aux choses qui dépendent de l'intellect et de l’esprit ; secondement aux choses qui dépendent du corps ; et tier-cement en ce qui dépend des choses sacrées, sans s'arrêter aux signes présomptifs, dont les théologiens font 12 sortes, par ce qu’ils ne concluent nécessairement.

Signes remarques auxdites religieuses dépendant de Cesprit.

1« Qu'elles connoissent les personnes qu’elles n’ont jamais vues, les appelant par leurs noms , et les distinguent par les professions qu’elles font.

2» Qu’estant ignorantes et principalement les jeunes et les novices, lesquelles à grand’ peine savent par cœur les litanies estant aux accès de leur possession, font des discours sur les plus hauts et difficiles mystères de nostre religion, avec des conceptions si rares, des termes si significatifs , des paroles si fortes un fort long temps, qu’elles donnent de l’estonnement à ceux qui les entendent, et hors de libelles sont ignorantes.

3° 'Qu’après leurs plus violentes convulsions, extases et autres plus curieuses agitations de leurs accès, elles se ressouviennent de tout ce qu’on leur dit et fait : ce qui n’arrive jamais aux maladies qu’on pourroit accuser en ces religieuses : comme l’épilepsie , phrénésie , manie et autres , auxquelles on perd la mémoire lors des accès.

Qu'elles entendent les langues grecque et latine, répondent aux interrogatoires qu’on leur fait en ces langues, en language vulgaire et après un peu de temps, et font aussi précisément les choses, lesquelles on leur commande en ces langues.

5° Qu’elles découvrent les choses desquelles elles n’ont jamais eu connoissance, confine elles l’ont fait pour le corps du Picard et les charmes et les maléfices cachés en plusieurs lieux de leur monastère, désignant particulièrement et véritablement les lieux où ils estoient, encor qu’ils fussent 8 ou 10 pieds dans terre ; et même les choses desquelles ils estoient composés, le tout s’estant trouvé véritable.

6° Qu’elles ont dit à plusienrs ce qu’ils avoient fait et même les desseins qu'ils avoient eus, qu’ils ont reconnu es-tre véritable. Et ont aussi donné advis à beaucoup de se prendre garde des choses qui leur estoient importantes.

7" Que lorsqu’elles sont hors de leurs accès, elles sont sages, tranquilles, humbles, demandent pardon à Dieu ; la bénédiction à ceux qui les assistent et reconnoissent que ce

qu’elles ont dit et fait n’est point de leur volonté, mais par la contrainte des démons qui les possèdent.

8° Qu’elles nomment les démons qui les possèdent par leurs propres noms, et les démons s’appellent l’un l’autre par les mêmes noms.

Signes des choses qui dépendent du corps.

1° Qu’elles font plusieurs choses par de là l’ordre et la force de la nature et qui ne peuvent être référées à aucunes maladies quelles qu’elles soient, leurs accidents étant tous différents.

2° Qu’elles parlent intelligiblement la bouche ouverte et la langue tirée hors d’icelle.

3° Que dedans leurs plus violentes convulsions et accès, elles parlent, ce qui est contre la nature de ces maladies.

h" Qu’en un moment, sans fléchir le corps, elles se jettent en arrière sur la teste, la battent d’une force incroyable sur le plancher fort longtemps, et se relèvent tout de même et en un moment sans s’ayder des mains.

5- Qu’elles se portent sur le plancher, sur l’extrémité de la teste et la pointe des talons, rendent leur corps en arcade et seulement soustenue sur ces deux parties, coulent de cette façon sur le plancher, sans s’appuyer des mains, et n’est pas possible de toute force leur pouvoir faire abaisser le ventre ainsi élevé et pendant ce temps, ont les pieds et les mains recrachés comme des crampons en pieds de chapon rosty.

6° Qu’ayant demeuré ainsi en convulsion universelle et extraordinaire, elles se relèvent de terre en un instant sans l’avde des mains et sans témoigner aucune lassitude ny débilité , font des actions de force et d’agilité, sautant pardessus les bancs et les tables sans y toucher, s’élançant et passant par des fenêtres impétueusement la tête la première sans se blesser.

7° Que, s’estant battu la tête, les mains, les coudes et les pieds fort longtemps contre le plancher d’une force incroyable, qui fait retentir du bruit de leurs coups le lieu où elles sont, avec étonnement des assistants, elles ne ressentent ni pendant ni après aucune douleur, et ne restent en ces parties ainsi martelées aucune rougeur, effleurement, meurtrissure, marque, ni impression, ces parties faisant aussitost leurs actions comme en pleine santé.

8° Que une d’entre elles que possède Dagon s’estant lancée de terre et passée par une fenêtre d’étroite ouverture,

de hauteur d’une demi-pi que de terre, la teste la première, et ayant esté retenue en l’air par le bas de sa robe accrochée à un barbillon de fer de ladite fenestre, se reguinda sans aucun ayde ni soustien et dégagea sa robe qui estoit ainsi accrochée, puis retomba de l’autre costé sans se faire aucun mal, et rentra aussitost dedans leur chapelle dansant et chantant.

9° Qu’après que leurs accès sont passés, leurs corps demeurent quelquefois tellement attachés contre terre , qu’il n’est possible à toute force humaine de leur faire perdre de la hauteur d’une feuille de papier. Ce que l’on a essayé plusieurs fois à l’ayde de 6 hommes toujours inutilement : et incontinent après se relèvent d’elles-mômes.

10» Qu’elles montent à des arbres vite comme un escu-reuil avec leurs robes et sandales, et se coulent jusqu’à l’extrémité d’une branche qui ne pourroit pas porter deux livres pesant et y demeurent quelque temps avec crainte et étonnement des assistants , et, repassant par-dessus les mêmes branches, descendent comme elles ont monté.

11° D’autres se jetant dedans un puys ne soutiennent tout leur corps que sur le poing qu’elles appuient sur la rnar-jelle, s’en retirent sans autre soustien, et font la pirouette autour du puits.

12° Que la nuit en laquelle les malades de l’esprit font

Ï)lus de violences au corps et travaillent davantage les ma-adt's, c’est lorsqu’elles ont plus de repos et sont moins travaillées de leurs démons, disant qu’ils les laissent pour aller au sabbat.

13° Que dedans leurs accès elles hurlent, sifflent, aboient, dansent, sautent, chantent, crachent tant sur les choses sacrées qu’on leur présente, que sur le nez d’iceux qui les ont assistées, disent des paroles et chansons dissolues, et le tout presque en même temps.

Après avoir énuméré les signes dépendant des choses sacrées , signes moins curieux que les précédents, et que leur longueur nous fait un devoir de passer sous silence, les médecins ajoutent :

11 y a beaucoup d’autres choses qui sont encore davantage pour la preuve de leur possession.

Mais parce qu’elles ont été recueillies aux actes journaliers de leurs exorcismes, et qu’iïest meilleur de les taire que les publier, ils ont trouvé bon de ne les employer.

Pour tous lesquels signes lesdits médecins ont jugé la vé-

ri té de ces possessions, ne pouvant être référées aux causes naturelles ny aux maladies, ce qu’ils maintiennent.

Ont signé : L’Empériëre et Maignard. 2 septembre 1647.

Après le rapport des médecins de Rouen, le parlement de cette ville n’hésita plus à instruire l’affaire. Il fit appréhender au corps Thomas Boullé et chargea son lieutenant criminel Routier de faire subir à Madeleine Bavan les interrogatoires nécessaires.

Madeleine renouvela ses précédents aveux devant le lieutenant-criminel et, à ces aveux, en ajouta d’autres. Elle avoua qu’étant à Rouen, chez une couturière, un magicien la séduisit et la conduisit au sabbat ; que ce magicien y célébra la messe et lui donna une chemise pour la porter à l’impudicité; qu’elle fut mariée à Dagon, diable d’enfer; qu’elle reçut son accolade maritale non sans beaucoup souffrir; que Mathurin Picard l’éleva à la dignité de princesse du sabbat, quand elle eut promis d’ensorceler toute la communauté et qu’elle commit avec lui le crime de Sodome sur l’autel du diable ; qu’elle composa des maléfices en se servant f hosties consacrées mêlées avec du poil de bouc du sabbat ; que, dans une maladie qu’elle éprouva, Picard lui fît signer un pacte de grimoire ; qu’elle vit accoucher quatre magiciennes au sabbat ; qu’elle aida à égorger et à manger leurs enfants; que le Jeudi-Saint on y fit la Cène en y mangeant un petit enfant; que, dans la nuit du Jeudi au Vendredi, Picard et Boullé, son vicaire, avaient assassiné le Saint-Sacrement, en perçant l’hostie par le milieu et que l’hostie jeta du sang ; de plus, elle confessa s’être fait avorter et avoir assisté à l’évocation de l’âme de Picard, faite par Thomas Boullé dans une grange, pour confirmer les maléfices du diocèse d’Evrenr.

Le Rédacteur en chef du Journal du Magnétiima,

Z. PlÉBART.

(La fin au prochain numéro.)

CLINIQUE.

PH YTOMAGNÉTIS ATI0N. — FAIT A OPPOSER A CEUX QUI ATTRIBUENT I.ES PHÉNOMÈNES MAGNÉTIQUES A I.’EMPIRE DE L*IMAGINATION.

A M. la baron du Potet.

Paris, 15 décembre 1857.

Depuis longtemps je m’occupe de magnétisme; j’étudie avec soin les effets surprenants que j’obtiens continuellement à l’aide de cette science.

Parmi les phénomènes les plus curieux que j’ai obtenus jusqu’alors, aucun ne m’a paru aussi étrange que celui que je vais vous décrire, et que je vous prie d’insérer dans votre journal, si vous le jngez convenable.

J’ai l’habitude d’employer la phytomagnétisation pour calmer les maladies ; je me sers ordinairement du myrte, attendu sa quantité de feuilles, et j’en ai toujours d’heureux résultats. — Depuis quinze jours, un myrte de ce genre est déposé près d’un malade ; un cordon de chanvre est attaché d’un côté au tronc de l’arbuste, de l’autre au bras du magnétisé, et sert de conducteur fluidique. Ce réservoir magnétique actionné par moi, tous les deux ou trois jours, a acquis une force vraiment extraordinaire.

Voici la preuve :

Une dame d’un tempérament robuste, mais du reste sensible au magnétisme, voulut à nion insu essayer si réellement ce myrte avait toutes les propriétés qu’on lui accordait. Elle toucha donc à la corde conductrice ; mais aussitôt elle

reçut une commotion violente qui l’endormit instantanément ; puis survinrent des crises nerveuses épouvantables. Elle était dans un état très-alarmant ; pourtant on parvint, après des efforts inouïs, à la calmer un peu, et même à la réveiller.

C’est alors seulement qu’on s’aperçut que sa main était crispée et serrait avec force la corde. Toutes les ressources, comme frictions, eau froide, chaude, magnétisme, etc.,furent employées inutilement ; les doigts au contraire s’enfoncaient de plus en plus dans les chairs.

On eût dit que la force mystérieuse et occulte qui agissait si puissamment sur cette personne voulait porter défi à tout moyen possible.

Cependant on put, avec beaucoup de patience, arracher le cordon de la main, mais voilà tout.

La crispation augmentait prodigieusement.

Cette dame prit le parti de venir me trouver.

C’est donc samedi, 12 courant, qu’on vint me dire qu’une personne m’attendait dans une voiture. Je me rendis immédiatement près d’elle, et je la trouvai dans la condition que vous venez de lire.

Lors de son sommeil, cet intéressant sujet avait dit que moi seul pourrais faire cesser le phénomène.

N’obtenant pas de suite des résultats désirables, je crus devoir mettre le bras en catalepsie complète, en démagnétisant ensuite et le bras et la main. Tout cela ne fit pas grand’-chose. Je ne me décourageai pas pourtant; non, j’étais même heureux d’éprouver de la résistance, et je dirai pourquoi plus bas.

Rien ne me retirait de l’idée que je pouvais détruire ce que j’avais produit; avec cette conviction, j’étais forcé de réussir.

Après avoir un instant réfléchi et concentré en moi toute ma force morale, je fis une insufflation chaude très-prolon-gée à travers les doigts.

La patiente laissa échapper un soupir de bonheur, car,

comme par enchantement, sa main et ses doigts venaient de recouvrer leur usage.

Après des faits aussi irréfragables, peut-on encore douter que les effets du magnétisme soient causés par l’émission d’un agent, c’est-à-dire d’un fluide émanant de nous-mêmes?

Que ceux qui persistent à croire que tous ces phénomènes doivent être attribués à l’imagination, que ceux-là, dis-je, viennent m’expliquer pourquoi je n’ai pu faire cesser instantanément la crispation nerveuse citée ci-dessus. Mon apparition seule n’aurait-elle pas dû suffire pour frapper l’imagination de cette dame, qui avait en moi une confiance des plus grandes ?

Agréez, Monsieur le baron, l’assurance de ma considération distinguée.

L. Sarrade fils,

Hue Geoffrol-Lasnler, H.

Nota. Les personnes dont l'abonnement expirait au 1" janvier 1858 sont priées de le renouveler le plus tôt possible, si elles ne veulent éprouver de retard dans l’envoi du Journal.

Baron bd POTET, propriétaire-gérant.

LE MAGNÉTISME,

LE SOMNAMBULISME ET LE SPIRITUALISME DANS L HISTOIRE. — AFFAIRE CURIEUSE DES POSSÉDÉDS DE LOUVIERS.

(Suite et fin.).

Il n’en fallait pas tant pour être Référé à la justice. Aussi Madeleine fut-elle assignée à comparaître devant le parlement de Rouen. Là, elle compléta ses aveux d’une manière encore plus explicite. Elle raconta que David, le premier directeur du monastère de Louviers, était magicien ; qu’il avait donné à Picard une cassette pleine de sorcelleries et qu’il lui avait délégué tous ses pouvoirs diaboliques ; que Mathurin Picard lui tâtait le sein par dessus sa guimpe quand elle s’a-vançait pour communier, et qu’il lui dit : « Tu verras ce qui t’arrivera; » qu’elle éprouva une telle émotion, qu’elle fut obligée de sortir dans le jardin et que, s’étant assise sous un mûrier, un horrible chat, fort noir et puant, lui mit ses pattes sur les épaules et approcha sa bouche de sa gueule comme pour faire attraction de la sainte Hostie quelle n’avait pas encore digérée ; qu’elle composa des maléfices avec des crapauds, de vilaines poudres, et le corps et le sang de Jésus-Christ.

Madeleine confessa, de plus, qu’étant un jour dans la chapelle du monastère de Louviers, Picard la connut charnellement dans ladite chapelle, commettant cette action criminelle avec des abominations qu’on a horreur d’expliquer, pendant laquelle exécrable action un diable en forme de chat (que la déposante croit être le même qui lui apparut sous le mûrier) se présenta à elle et que le magicien Picard fut souillé honteusement par lui en même temps qu’il avait sa compagnie char-

Toue XVI. — No *«. _ »• séiiie. — 25 Jakvisr 1858. 26

nelle. Elle dit enfin avoir péché et dansé avec Boullé et Picard, et que les démons, sous forme de chats, étaient venus leur prodiguer leurs caresses dans sa cellule ; que les magiciens ayant donné des coups de couteau dans le précieux sang de Jésus-Christ, le vin, devenu sang, ruissela jusqu’à terre; que Pieu parut, selon son humanité, la très-sainte Vierge à ses pieds ayant deux saints à ses côtés ; qu’il reprocha cet assassinat aux magiciens; qu’il les frappa de sa foudre pendant que les deux saints ramassaient le précieux sang qui avait coulé à terre (1).

Boullé, incriminé par tant d’aveux, comparut devant le parlement ; mais il fut très-difficile à convaincre ; jamais le moindre aveu ne sortit de sa bouche, même au milieu des plus atroces douleurs de la torture. Mais cela ne prouva rien aux juges ; selon de Bosroger, cet homme avait reçu le don de taciturnité. Mais, malgré son silence obstiné, il n’en fut pas moins déposé contre lui :

Ou’un homme harassé de fatigue, se trouvant encore à plus •d’unelieue du Ménil-Jourdain, où il serendaitavec ledit Boullé, .celui-ci dit qu’iln’avait qu’àmettre le bout du pied sur le sien, -ce qu’ayant fait, il marcha et arriva presque aussitôt et sans se donner de peine ; que le même homme s’étant plaint à lui ■ desobstacles qu’il éprouvait dans la conclusiou d’un mariage, Boullé lui remit un billet où se trouvaient écrits les noms de cinq démonsavec des caractères talismaniques, et lui indiqua certaines pratiques au moyen desquelles il devait venir à bout de ce qu’il désirait; qu’un prêtre, scandalisé !e ses désordres, lui ayant reproché de s'être voué au démon , et Ïayant défié de déclarer qu’il y renonçait, Boullé s’y refusa constamment ; qu’il donnait les maladies et les guérissait avec des sortilèges ; qu’un jour, pendant matines, il tomba dans l’église et qu’il parut alors effroyable; qu’il se tordait en se

(1) Voyez Garinet, Histoire de la Magie en France, et Collln dePlancy, ])ictionnaireinfernal, ouvrages imprimésà Paris au temps de la Destaura-lion. Toutefois, il est a propos de dire que ces aveux étaient pour ainsi dire arrachés à Madeleine Bavent et que plusieurs fois elle revint dessus, disant qu'il fallait distinguer les scènes de sabbat d'avec les autres, priant les juges de n'y ajouter qu'autrement de créance qu'ils trouveraient cire à propos, de séparer ce qu'ils penseroient réel d'avec ce qui porteroit quelque marque d'illusion (Floquet).

roulant; qu’il avait le visage noir, les cheveux hérissés et la langue hors de la bouche; qu’il débauchait les filles en abusant de la confession, et qu'il ensorcelait les femmes à tel point que celles qui aimaient le mieux leurs maris ne pouvaient plus les sentir et leur jetaient des bâtons à la téte ; que, se trouvant à une noce, sous prétexte de bénir le lit nuptial, il y jeta un charme, et que toute la nuit les nouveaux époux furent tourmentés et frappés de vertiges; qu’on lui surprit souvent entre les mains des livres de magie; qu’il avait tou jours écrit dans sa poche quelque nom de diable pour s’en faire assister au besoin ; qu’il se vantait de se coucher sur des brasiers ardents, sans éprouver le moindre mal, ce qu’en effet plusieurs personnes l’ont vu faire; qu’il s’appropria une somme d’argentqu’on avait cachée avec leplusgrand soin ; qu’il se rendait exactement au sabbat où il adorait le bouc et commettait toutes sortes d’abominations et d’impuretés.

On ajoutait qu’une nuit, pour sceller plus fortement leur détestable associaiion, la reine du sabbat, Boullé et Madeleine Bavent, se retirèrent de la bouche des hosties consacrées, les piquèrent, en firent jaillir du sang, puis échangèrent entre eux les quatre hosties, qu’ils se présentèrent en signe d’alliance ; que Boullé se fit désigner par Picard pour succéder à ce dernier dans la continuation de ses sortilèges et des maléfices pratiqués dans le monastère de Louviers; que Madeleine Bavent promit de lui obéir comme elle avait obéi à Picard, et qu’elle signa avec lui le papier de blasphème ; qu’au retour du grand sabbat, ils en firent un petit dans le chœur du couvent ; que, dans la confrontation de Madeleine avec Boullé, ce dernier lui toucha le bras et lui fit d’horribles menaces, en lui ordonnant de rétracter tout ce qu'elle avait dit contre lui ; qu’en effet elle fut agitée de frissons et qu’elle perdit l’usage de ses sens, tandis que Léviathan, vaincu aussi par la force du charme, fut arrêté tout court lorsqu’il allait déposer contre Boullé et garda le silence le plus obstiné ; qu'il portait sur son corps les stigmates du démon (en effet, on trouva sur son corps la marque d’un fer chaud) (1) ; enfin qu'il avait trempé dans tous les meurtres

(1) On prit pour la marque des sorciers une cicatrice qu’il avait à la cuisse et qui provenait d'une blessure qu'un chirurgien du pays avait pansée et guérie (Dibon). Voyez, au sujot delà marque di'S sorciers, le passage curieux que M. Louyer-Villermay a inséré dans le Dictionnaire det sciencei métiicalet, au mot Imagination. Voytz aussi Go. res, 1, ch. xv 5, ch. nv.

et dans toutes les profanations qui ont été ci-dessus rapportées, etc. »

Après les interrogatoires et aveux de Madeleine Bavent et des témoins, le tribunal se déclara suffisamment informé, et, admettant le fait de présomption de magie, sorcellerie, prononça la sentence suivante, que nous avons retrouvée parmi les actes originaux relatifs au procès.

Arrest de la Cour du Parlement de Rouen contenant le jugement et exécution de maître Mathurin Picard, curé du Menil-Jourdain, et son rivant vicaire, accusés de magie et sortilège, lesquels ont esté brûlés tout vifs au vieil marché de Rouen, le 21 août 1647. a La Cour, les grand'chambre, Tournelles, et édicts assemblez, ayant aucunement égard à l’appel comme d’abus, dict, qu’il existe par ledict juge ecclésiastique, abusivement et précipitamment ordonné de l’exhumation du corps dudict Picard, et faisant droit sur le coprivilégié, a déclaré et déclare ledict défunt maître Mathurin Picard, et ledit Boullé, son vicaire, dueinent atteints et convaincus du crime de magie et sortilège, pour punition et réparation duquel crime et autres cas abominables mentionnés au procès, les a condamnés et condamne, savoir : ledit Boullé à estre traisné nud en chemise sur une claye ensemble, ledict cadavre devant le portail principal de l’église cathédrale de Notre-Dame de Rouen, et là, ledit Boullé faire amende honorable, tenant une torche ardente du poids de 2 livres, et demander pardon à Dieu, au roi et à la justice. Ce faict estre conduit en la place du vieil marché de ceste dite ville , pour y estre bruslé vif, comme aussi le corps dudit Picard y estre bruslé et consommé en cendres, et ¡celles estre jestées au vent, tous et chacuns leurs biens acquis et confisqués au roi, sur ¡ceux préalablement pr is la somme de 1,000 livres d'amende, applicables audit moines de Saint-Louis deLouviers, et auparavant souffrir ladicte exécution de mort, ordonne que ledict Boullé sera submis et appliqué à la question ordinaire pour avérer ses complices, et a différé le jugement de ladite Bavent jusque après l’exécution dudit Boullé, a ordonné et ordonne que sœur Françoise Gaugain, cy-devant religieuse audit monastère et couvent, sera prinse et appréhendée au corps , amenée et constituée prisonnière en la Conciergerie du palais, pour estre interrogée sur les charges contre elle rapportées par le procès, et où recouvrée ne pourra estre,

sc-ra appelée à six ou à trois briefs jours, le 1" au mois du lendemain de l’exploit et les deux autres de quinzaine en quinzaine (1).»

L’exécution par le feu du vicaire Boullé et du corps du curé Mathurin Picard eut lieu à l’endroit désigné, au milieu d'un concours innombrable de peuple, accouru de toutes parts. Depuis six ans, cette terrible et ténébreuse affaire du monastère de Saint-Louis de Louviers occupait l’attention des esprits, non seulement dans les environs, mais dans la France entière. Des bruits étranges, exagérés môme par l’imagination des conteurs, avaient rendu fameuse au-dessus de toutes cette affaire, et l’avaient fait apparaître plus formidable encore qu’elle ne l’était. Ce ne fut pas sans un sentiment d’inquiétude où la curiosité, l’intérêt se mêlaient à une certaine frayeur que tant d’hommes, de femmes et d'enfants entourèrent le bûcher qui devait réduire en cendres les corps du curé de Ménil-Jourdain et de son vicaire. Il semblait à chacun que toutes les puissances infernales allaient intervenir pour empêcher l’exécution, ou du moins pour renouveler l’une de ces manifestations terribles qu’on disait avoir eu lieu dans le monastère. Tous emportèrent du spectacle de cette exécution, pour crime de magie, la plus vive impression. Le même lieu avait vu brûler autrefois, victime des mêmes accusations, l’infortunée Jeanne Darc.

Peu de temps après, de dernières instructions étant faites, le parlement de Rouen rendit son arrêt relativement à Madeleine Bavent. Cet arrêt est conçu en ces termes :

« La cour, les grand’chambre, Tournelles et Edicts assemblés, en ce qui concerne Madeleine Bavent ; vu la sentence de l’évêque d’Evreux, du 12 mars 1643, par laquelle Madeleine Bayent a été déclarée dûment atteinte et convaincue d’apostasie, sacrilège et magie, d’avoir été au sabbat et assemblée de magiciens, par plusieurs et diverses fois, d’avoir obéi aux diables, et obtenu d'eux le pouvoir d’employer ses charmes sur telles personnes qu'elle voudroit, d'en avoir fait mettre

(Il Cet incroyable arrêt no passa pas toutefois sans opposition. Il y eut celle du procureur général Courtin, qui, le lendemain do l'exécution, demanda aux chambres assemblées que l'on insérât dans les registres da parlement les conclusions contraires qu'il avait données (Dibon).

en plusieurs lieux du monastère, de s’être donnée au diable diverses fois par billets et cédules signés de son sang, voire même d’être retombée en cette abomination après renonciation par elle faite entre les mains dudit évêque ; d’avoir abusé des saints sacrements, et particulièrement pris la sainte Hostie, lorsqu’ellecommunioit, pour être portée au sabbat et em ployée à faire des charmes et autres choses abominables ; d’avoir livré honteusement son corps aux diables, aux sorciers et autres personnes ; d’avoir voulu séduire plusieurs religieuses du monastère, et les attirer par ses charmes, à son affection démesurée et à mauvaise fin ; d’avoir conspiré, avec ses sorciers et magiciens, dans leurs assemblées et dans le sabbat, au désordre et ruine générale du monastère , perdition des religieuses et de leurs âmes ; pour la réparation desquels crimes ladite Bavent avoit été déclarée indigne de porter, 5, l'avenir, le nom de religieuse, et il avoit été ordonné qu’elle seroit dépouillée du saint voile et habit de religieuse, et revêtue d’habits séculiers, qu’elle seroit confinée à perpétuité, tant qu’il plairoit à Dieu de conserver ses jours , dans la basse fosse ou un des cachots des prisons ecclésiastiques de l’officialité, pour y jeûner au pain et à l’eau trois jours la semaine; diffère à statuer définitivement jusque après l’audition de Simonne Gaugain, dite la petite mère Françoise, ci-devant supérieure du monastère, et plusieurs autres religieuses., la sentence conservant jusque-là son effet.

On ne sait pas si Madeleine Bavent subit sa dure réclusion, du moins les documents que nous avons consultés n’en font pas mention (1) ; ils ne font pas davantage mention de ce qui arriva aux autres religieuses compromises avec elle, et sur lesquelles le parlement devait statuer. Peut-être ces dernières firent-elles plus de révélations qu’on n’en voulait savoir et découvrirent-elles de nouveaux mystères qu’on trouva bon de tenir secrets. Trop de scandales en effet avaient déjà eu lieu dans l’asile des jeunes religieuses, et on aura peut-être

(1) Floquet prétend que la réclusion de Madeleine fut douce et agréable, A cela il ajoute que ses dernières années furent vouées aux pratiques d'une grande piété. 11 existoit, dit-il, dans la riche bibliothèque de l'abbé Gauget un recueil de diverses vies (mss.) de personnes séculières qui avoient vécu dans une haute piété. Or, le n° 25 était la vie de Madeleine Bavent. (Bibliothèque hist. de France, par Lelong et de Fontelte, t. 1, n° 4735). ¡Si ce fait est vrai, c'est une preuve de plus il l'appui du dicton : Quand le diable devient vieux, il te fait ermite.

trouvé par trop difficile de les attribuer tous au diable, de s empêcher de reconnaître que d’autres séducteurs y avaient mis la main. On se contenta de renvoyer les religieuses dans leurs familles, ou de les transférer momentanément dans un autre monastère,c’est-à-dire qu’on finit par où l’on aurait dil commencer. Quant à la petite mère Françoise, que les dépositions de Madeleine et des autres religieuses avaient incriminée, elle avait eu le soin, dès le moment où tant de phénomènes étranges avaient éclaté au monastère de Louviers, de se réfugier à Paris. Selon Dibon et Floquet, de qui nous tenons ce fait, elle parvint à se faire une telle réputation de vertu et de sainteté, que, peu de temps après, elle était nommée supérieure des religieuses hospitalières de la place Royale, devenait l’amie de l’archevêque Gondyet s’acquérait tant de crédit à la cour par des visions, des prédictions agréables à la régente Anne d’Autriche, que celle-ci, par un arrêt du Conseil d’Etat de septembre 1646, fit défense que l’on continuât de nouveau toute information à son sujet (1). Peu de temps après, le Parlement de Rouen, ayant horreur de ce qu il avait fait, anéantit lui-même toutes les pièces du procès.

Quoi qu’il en soit, cette terrible affaire n’en a pas moins été regardée comme une des plus mémorables qui figurent dans les annales des faits et gestes attribués au prince des ténèbres. La tradition s’en est maintenue, et aujourd’hui encore il n’est personne à Rouen, à Louviers et aux environs, qui ne connaisse l’histoire des possédées de cette ville, et il n est point de vieille femme qui n’y fasse souvent encore avec effroi confidence des faits terribles attachés à la mémoire de Madeleine Bavent, du curé Picard et de son vicaire Thomas Boullé. Dans les bâtiments du couvent, aujourd’hui transformés en hôtel-de-ville, en palais de justice, en

(1) Comme Madeleine Bavent, Simonne Gaugain, la complice de toutes les scènes si étranges établies par le prêtre David au monastère de Lou-viois. mourut en odeurde sainteté. On a même écrit sa légende. Voyez la “* la ^érable mère Françoise de la Croix, institutrice des religieuses hospitalières de la charité de Notre-Dame de Paris. In-li. Paris,

gendarmerie et en maisons d’école, 011 montre encore la place delà cellule de Madeleine, de l’église et des lieux où se passèrent les différentes scènes du lugubre et merveilleux drame.

Cette célèbre affaire des possédées de Louviers, bien plus émouvante et bien plus curieuse encore que celle de la démonomanie de Loudun, et pourtant omise, comme tant d'autres de ce genre, dans les différents ouvrages qui traitent de l’histoire du magnétisme, fait naître bien des réflexions. Elle montre une fois de plus que ces faits de magie, de fascini-tion, de clairvoyance somnambulique, que ces phénomènes magnétiques et spiritualistes si extraordinaires et si contestés ont eu lieu de tout temps et sont on ne peut mieux attestés, ou ne peut plus clairement prouvés. 11 suffit d’avoir fri bonne volonté de les chercher quelque peu dans l’histoire pour les y découvrir ; il suffit d’avoir la patience de les examiner pour s’en convaincre à point nommé. Et pourtant combien n’est-il pas de savants encore qui, pouvant être aujourd’hui témoins de ces faits ou en retrouver la trace partout dans l’histoire, préfèrent les nier effrontément! Mais, fermer les yeux à la lumière, déserter l’examen d'une question de peur d’être obligé de lui donner une conclusion affirmative, n’est pas même la résoudre négativement. Une vérité dédaignée, étouffée, bafouée, enterrée ne tarde pas à surgir et à se dresser de nouveau, mettant un chacun en demeure de s’en préoccuper. C’est ce qui est arrivé, c'est ce qui arrivera au magnétisme jusqu’à ce que la science officielle lui ait donné droit de cité, et ce temps-là, nous le croyons, est prochain. Autrefois, cette grande vérité était étouffée dans la flamme des bûchers. Les hommes qui avaient découvert le secret de cet agent formidable, qui osaient s’en servir, comme ceux qui en étaient les jouets, les victimes, étaient taxés de complicité avec Satan et immolés, persécutés comme tels : autre malentendu, non moins fatal à l’éclosion de la vérité contestée que le scepticisme aveugle de nos savants modernes.

On frémit en pensant avec quelle tranquillité d’âme, avec quelle confiance les prêtres catholiques et la justice d'autre-

Ibis voyaient l’intervention du diable dans tout ce qui surpassait leur entendement et livraient au bûcher une foule de malheureuses victimes. A Louviers, de pauvres femmes qu’aujourd’hui 011 considérerait tout simplement comme des médiums, des somnambules, des voyantes, des extatiques, des cataleptiques, sont regardées comme possédées par les puissances de l’enfer. Une jeune femme, deux prêtres sont désignés comme les complices des maléfices qui pèsent sur elles. L’un est mort et ne peut plus se défendre; l’autre, malgré la toi ture, n’avoue rien. Reste l’infortunée Madeleine Bavent, une pauvre femme hallucinée, égarée, se trouvant dans un état presque permanent d’électro-biologie, de crise magnétique, sur l’imagination de laquelle peut tout la suggestion de ses exorcistes et de ses juges ou celle de ces esprits follets perfides et impurs qui nagent à côté de notre monde dans l’atmosphère des âmes, mauvais esprits dont l’existence ne peut pas plus aujourd’hui être révoquée en doute que celle des bons esprits, et qu’on a eu trop longtemps la grave erreur de considérer comme des démons, comme des puissances ennemies éternelles de l’homme et en lutte continuelle avec Dieu. Eh bien! cette malheureuse égarée, ainsi dominée par des forces, des volontés dont elle n’a pas conscience, ce sont ses seuls aveux, ses rêves, ses hallucinations dirons-nous plutôt, qu’on prend pour guides et pour point capital de tout un système d'accusation aussi étrange qu’incroyable. D’après des révélations qui lui sont arrachées à force de suggestion, et sur lesquelles elle revient pourtant plusieurs fois, disant qu’il fallait prendre garde à ses dires sur le sabbat; que c’était peut-être illusion, d’après des aveux aussi peu solides, deux ecclésiastiques, l’un mort, l’autre vivant, sont déclarés convaincus de complicité avec le diable et brûlés comme tels.

Si on supprime les scènes de sabbat et autres diableries incroyables révélées par Madeleine Bavent, que reste-t-il à la charge des victimes du parlement de Rouen ? Des faits de fascination magnétique d’une part, un abus bien coupable sans doute de leur position de la part de ministres de la re-

ligion ; et de la part des pauvres femmessoumises àleur action , des faiblesses criminelles aussi sans doute , mais des faiblesses que l’on comprend, qui sont arrivées et arrivent tous les jours, mais qu’il n’est pas besoin d’expliquer par 1 action du diable. Aujourd’hui, Mathurin Picard et Boullé seraient sans doute passibles de grandes peines disciplinaires, mais non du bûcher. L’affaiblissement qu’a subi en ces temps la croyance au diable leur vaudrait ce résultat. D'égales peines seraient sans doute infligées à David, ce premier directeur du couvent de Saint-Louis, à ce prêtre excentrique qui, par des macérations excessives, des pratiques d’un acétisme vraiment curieux, par les plus étranges maximes de l’ada-misme et du gnosticisme, avait exalté, égaré 1 âme de ces pauvres religieuses et leur avait fait perdre terre.

Mais, que disons-nous ? 11 est bien question des lumières du siècle et de la sagesse de nos tribunaux actuels. N’existe-t-il point encore un parti puissant, nombreux, qui voudrait assimiler les faits de magie que nous voyons chaque jour se reproduire sous nos yeux à des œuvres du prince des ténèbres et dont les coryphées ne seraient pas éloignés de déchaîner contre nous le bras séculier, les foudres de quelque sainte inquisition nouvelle? Mais, grâces soient rendues à la Providence, la lumière s’est faite et grandit chaque jour. Il ne sera pas plus au pouvoir du fanatisme ignorant de la dénaturer qu’au scepticisme aveugle des savants de l’étouffer.

L’habitude que nous avons prise de toujours eiler nos sources et d'étayer nos affirmations su; les témoignages les plus authentiques, nous engage à donner une nomenclature des documents ù consulter sur les fails qui précèdent.

Ces documents sont do deux sortes : contemporains ou postérieurs à l'époque où les fails se passèrent. Les documents postérieurs sont •. 1® Gônes, la Mystique divine, naturelle et diabolique, ouvrage traduit de l'allemand, en 1854, par Ch. deSaintc-Koi, 5 vol. in-8;— 2" Garinet, Histoire d» la magie en France, 1818; —3° Collin dePlancy, Dicl. infernal, 18Ï6 ; —4° Morin, Histoire de Louviert, liouen, 1842 ; — 5° Paul Dibon, Essai historigut fur I.ouviers, Rouen, ; — U° Histoire du Parlement dt Normandie, pep Floquet, ençiçn élève de l’Ecole des chartes, greffier eu

chef de la cour royale le Rouen, Rouen, 1842, 7 vol. in-8, ouvrage qui a obtenu le grand prix Gobert; — 7“ Histoire de France sous le règne de Louis XIV, par de Larrey, 1.1, p. 563, 364, édition in-12 de 1718; = 8° Histoire civile et ecclésiastique du comté d'Evreux, par Le Brasseur,

Ch. 4' et *2. .

Les documents contemporains sont : 1° Examen de la possession des religieuses de Louviers, Paris, 1643; par Ivelin; — 2° Proccs-verbal de M. le pénitencier d'Evreux. sur ce qui est arrivé dans la prison, interrogeant et consolant Madeleine Bavent, magicienne , a une heureuse conversion et repentance, Rouen , 1643; — 3° Récit véritable de ce qui s est passé à Louviers touchant les religieuses possédées, Paris, 1C43; — 4° Interrogatoires de Madeleine Bavent, religieuse du monastère de Louviers , convaincue du crime de magie et sortilèges, par le lieutenant criminel Dupont de l'Arche, 1644; —Histoire de Madeleine Bavent, religieuse du monastère de Louviers. sa confession gèné-rale (dictée par elle-inüme à Rouen dans sa prison), où elledèclare lesabo-minations impies et sacrilèges çu elle a pratiquées et vu pratiquer tant dans ledit monastère qu’au sabbat, et les personnes qu’elle y a remarquées ; «n-semble Varrèt donné contre M. Picard et Thomas Boullè, et ladite Bavent, tous convaincus du crime de magie. Paris, 1652. ouvrage dédié à la duchesse d'Orléans. Ces cinq ouvrages sont dans le volume de la Bibliothèque impériale, intitulé: Possession de Loudun, marqué z'm, n° 1016, petit in-4° ; — 6° Apologie pour l’auteur de l'examen de la possession des religieuses de Louviers, adressée à MM. L'Emperière et Maignard, médecins de Rouen, par l)u ltal, chirurgien, Rouen 1643; — 7° Rapport de MM. l'Emperière et Maignard, médecins de Rouen, sur les preuves de la véritable possession des religieuses de Louviers , Rouen , 164S; — 8o Réponse à l'examen de la possession des religieuses de Louviers, Evreux, 1643; — 9° Censure de l'examen de la possession des religieuses de Louviers, 1643 ; — 10" Défense de la vérité touchant la pos-ssssiondes religieuses de Louviers, par Jean Le Breton, théologien, Evreux, 1643 (ces quatre pièces se trouvent à la bibliothèque de Sainte-Geneviève, dans un in-4\ intitulé : Discours sur le fait de Marthe Brossier, marqué zem, n° 899) ; — 11° La Piété affligée, ou Discours historique et théo-logique sur la possession des religieuses de Louviers, par Esprit de Bos-roger, provincial des capucins de Normandie, Rouen, 1652, et Amsterdam, 1700, in-4° et in-8° ; —12» L'Innocence opprimée ou défense de Mathurin Picard, curé de Mesnil-Jourdain, par Laugeois, successeur immédiat dudit Picard, manuscrit de la bibliothèque de M. Auguste Le Prévost, d’E-yreux, correspondant de l'institut, aujourd'hui entre les mains de M. d’Ac-quigny, — 15° Récit de ce qui s est passé aux exorcismes dt plusieurs religieuses de Louviers, in-8, par GaufTre.

Des ouvrages écrits postérieurement à la possession des religieuses de Louviers, et qui parlent de cette affaire, le plus sérieux est celui de Gôrres qui, bien qu'il admette l'intervention du diable et s’eu rétère entièrement aux récits de Madeleine Bavent, n'en donne pas moins des détails précieux accompagnés de commentaires. Quant à Garinet, Collln de Plancy et Morin, ils n'ont fait que travestir les faits et en rire. Il est curieux do voir avec quel sans-façon ces auteurs parlent des choses les plas sérieuses. Morin, dans son Histoire de Louviers, fait plus :

c'cst à peine s’il dit un mot des religieuses du couvent do Saint-Louis, et des faits merveilleux qui les ont h jamais rendues célèbres. Il glisse sans aucun examen sur des faits qui à eux seuls pourtant suffisent pour faire ranger l'histoire de Louviers parmi les plus intéressantes histoires locales qu’on commisse. C'est il peine s’il leur accorde quelques lignes. Devant les documents les plus nombreux, les plus irréfragables émanas de témoins oculaires, lui qui ne fut témoin de rien, révoque en doute la possession des religieuses, et dit qu’il n'y eut tout au plus dans leur sein que des têtes égarées, des femmes nerveuses, atrabilaires, exaltées. Et voilà comment les hommes de l'école sceptique écrivent l'histoire, nient les faits les mieux avérés quand ils viennent se mettre à rencontre de leurs opinions.

Paul Dibon est plus consciencieux, il enregistre un certain nombre de faits, donne des détails et parait avoir quelque peu recouru aux sources originales. En cela son livre est utile. Mais également scoptique, il ne voit dans la possession do I.ouviers que des crises nerveuses et surtout des scènes de débauche suscitées par le prêtre David, directeur primitif du couvent. Pour lui, le témoignage d'hommes honorables et do bonne foi qui ont vu, minutieusement vu, est regardé comme non avenu. Quant à VHistoire du Parlement de Normandie, de Floquct, c’est peut être l'ouvrage où l'on trouve les renseignemenls les plus précis, les plus intéressants et les plus variés sur la matière. Floquct non seulement nous fait connaître à point nommé la fameuse affaire de Louviers et scs suites , mais encore tous les procès de sorciers qui eurent lieu devant le Parlement de Normandie. Seulement, comme Dibon, il ne croit ni aux sorciers, ni à la magic, ni même aux phénomènes psychiques incontestables qui, pour la plupart, donnèrent lieu à ces procès. Il s’en moque, et, selon lui, tant de gens dans tant d'occasioos et à toutes les époques, n'auraient été que des dupes, des fous, des imbéciles ou d’habiles jongleurs. C'est ce qui s'appelle trancher un peu commodément sur une question aussi grave qu’importante et qui demande avant tout de la part de ceux qui la veulent éclaircir d’être examinée sérieusement, minutieusement par les faits, la science magnétique et une expérience soutenue.

fclus sérieux et plus croyants sortt Gaulfre, Jean Le Breton, de Bosroger, dans leurs ouvrages. GaufTre était un pieux ecclésiastique de Paris qui s'en vint à Louviers persuadé que le contact des reliques qu’il portait suffirait pour chasser les démons. 11 raconte des faits de seconde et do double vue, de pénétration de pensées remarquables de la part dis religieuses qu'il vit et qui lui firent croire plus que jamais à leur possession. De Bosroger narre avec les détails les plus circonstanciés ce qu’il a vu, ce que d'autres ont vu, et si ce n’est sa croyance nu diable, au sabbat qui'fui fait admettre comme véridiques tous les aveux de Madeleine Bavent, et interpréter tous les phénomènes psychiques du couvent de Lou-vièrs comme étant l’œuvre du démon, son livre serait d'on prix im-inelrse. Mais à nous magnétiseurs et spiritualités modernes qui avons la clé de ces phénomènes, de nous servir des faits précieux qu'il enregistre et de leur restituer leur véritable sens.

Les différentes pièces contemporaines qui figurent ci dessus sous les numéros 1,3,6, 7,8,9, sont aussi très-curieuses à consulter. Ce son t des ontro-vewessoutenues de part et d'autre peu de temps après le dénoùment de la fameuse affai re. Les unes affirment, lei autres nient le fait de possession ou

du moins en amoindrissent le caractère. De ce nombre sontles controv erses d'IvelinetdeDuBal. Lepremier. loul en admettant unepartiedes affirmations du rapport des médecins de Rouen, fait ses réservessur plusieurs. Du Bal, esprit ergoteur, sceptique quand même et, do plus, sceptique sans avoir *u, avait attaqué le rapport des médecins. I.a pièce n° 8 est une réplique île sa critique pleine d'énergie et de logique. Quant au manuscrit possédé par M. Auguste Le Prévost, c'est une apologie de Mathurin Picard que paraît avoir beaucoup consulté Dibon. L auteur de cetto apologie, le cuné Laugcols était le successeur du curé de Mesnil-Jourdain. Il prit b lâche de le réhabiliter en tout point. 11 nie le fait do possession, et attribue le tout à la faiblesse de l'évêque d’Evreux et au crédit de Bosroger. Lui qui n’a rien vu, il prélend en savoir plus que des témoins oculaires, hommes honorables et désintéressés. Cependant il convient que deschoses horribles et criminelles se passaient dans le couvent quand David en était directeur, ce qui était dû aux damnablei maximes de celui-ci ; que Picard, de son vivant, en avait fait la confidence à un jésuite nommé Dufour. Pour laver son prédécesseur de tout ce qu’on lui avait imputé, Laugooi* assure que c'était un homme pieux et éclairé, et il cite à ce sujet des ouvrages qu'il avait écrits et dont l’un était intitulé: le Fouet des Paillanti. Ce qui no prouverait pas grand'ehose. Tartufe en effet n'affeclait-il pas une très-grande austérité de mœurs et une très-graud'J inimitié pour les libertins?

Dibon a recueilli h la suite de l'apologie do Du Bol un fait dont il s'empare pour nier la possession des religieuses. Une des sœurs aurait indiqué ¡ endroit où se trouvait enterré un des charmes du curé Picard. Comme on ne le trouvait pas, elle aurait déclaré qu'elle seule pouvait 1e trouver. Alors une foule de personnages l’accompagnèrent jusqu'au lieu indiqué. L'un d’eux lui voyant une partie de la main fermée, la lui fit ouvrir et.y reconnut un petit objet pareil au charme désigné, dont la malicieuse sœur avait pris soin do se munir, afin de ne point se trouver au dépourvu. Lè-dessus, grande colère de tous les assistants. Nous no savons si ce fait est vrai; tout ce que nous savons, c’est que nous avons eu des somnambules qui voyaient très-bien, n’importe en quel lieu où ils pouvaient être cachés, le» objets que nous avions magnétisés. Pour quiconque connaît la science de Uesmer, ce phénomène est considéré comme uo des plus faciles à i£-produire. Après cela, la supercherie de la religieuse de Louviers fùt-cHe avérée , que cela n’em|>éche nullement les autres faits de possession d'être véritables. Parmi ces faits, il y en eut un bien bien grand nombre que nous mettons qui que ce soit au défi do simuler. D’ailleurs un seul fait faux au milieu de cent véritables ôte-t-il à ceux-ci leur valeur? Ce serait, en vérité, une singulière maaière d'argumonter que do nier tout un onsemble do phénomènes ou ne peut mieux attestés, par cette seule raison que l'un d'eux aérait le résultat d’une ruse habile.

Le Rédacteur en chef du Journal du Magnétisme,

Z, PlÉRART.

CONTROVERSE SUR LE SOMNAMBULISME.

FAITS CURIEUX ET DIVERS.

A Monsieur le baron du Potet.

Monsieur le baron,

Je viens de lire dans les numéros d’août et septembre du Journal du Magnétisme plusieurs articles très-intéressants sur la question de savoir si, dans les cas de vision d’objets éloignés , l’âme du somnambule se transporte dans les lieux où se trouvent ces objets. Ces articles contiennent une controverse à laquelle je vous demande la permission de prendre part.

MM. G... de C... et Lamothe ne tranchent pas la question d’une manière absolue, mais ils penchent pour l'affirmative, je prends la même position.

J’insisterai davantage que ne l’ont fait ceg messieurs, car mon expérience, qui me paraît plus concluante que la vue à distance, c’est le toucher à distance.

Voulant un jour connaître l’impression qu’un sujet ressentait au contact de métaux divers, ce sujet me dit qu’il était inutile de lui apporter des objets en métal, qu’il toucherait de son fauteuil ceux que je lui indiquerais. Aussitôt je le priai de toucher ma montre en or, accrochée à la cheminée ; il m’assura qu'il la touchait et en ressentait une impression agréable. Puis vint un objet en argent qui se trouvait sur un meuble, il en résulta une sensation agréable à un

degré moindre que pour l'or. Une clef en fer laissa simplement une sensation de froid ; un bouton de cuivre à une porte donna une sensation désagréable, et le sujet se frotta la main sur ses habits comme pour la faire cesser plus vite. Ce sujet m'affirma qu’il se transportait vers les objets que je lui indiquais et qu'il les prenait dans sa main.

J'ai renouvelé plusieurs fois cette expérience qui me paraît, à tort ou à raison, prêter moins à l’illusion que la vue.

Un jour, voulant faire une expérience sur le phénomène appelé vue à travers les corps opaques, je priai un somnambule de me dire ce qu’il y avait dans une pièce voisine, et je lui demandai comment il le voyait, persuadé qu’il allait me répondre qu’il voyait à travers la cloison. Contre mon attente , il m’assura qu’il se transportait dans la pièce voisine ; alors je lui demandai s'il passait au travers la cloison ; il me répondit qu’il ouvrait la porte et passait par là.

On me répondra illusion... C’est possible, quant à la manière dont le somnambule croyait passer dans la pièce ; mais quant au transport lui-même, si le somnambule voyait au travers le mur, pourquoi ne le disait-il pas? Il n’avait pas l’intention de me tromper ; il ne lui était pas plus difficile de reconnaître un mode d’opérer que l’autre; et je ne lui suggérais pas sa réponse, puisque j’en attendais plutôt une autre.

L’opération est la même qu’il s’agisse de voir dans une chambre contiguë ou bien à une distance quelconque, il y a des obstacles matériels qui s’opposent à la vue telle qu’elle résulte de la réflexion des rayons lumineux par les objets.

La manière de M. Lamothe de procurer la vision à l’aide de miroirs magiques, semble amener l’image devant le sujet et ne paraît pas exiger de déplacement de sa part ; elle est donc en dehors de la question qui nous occupe, c’est une autre opération.

En suivant ce mode, le sujet n’est pas en somnambulisme, il se trouve dans l’état de charme, qui est par excellence l’état des visions de toute nature (je prends, bien entendu, le mot vision en bonne part). Cet état diffère essen-

tiellement du somnambulisme, et je crois qu’aucun magné-tiste n’établit aujourd’hui de confusion à cet égard.

La production de cet état, qui est très-facile sur la plupart des personnes sensibles à l’action magnétique, ni a rendu témoin de faits très-curieux. 11 n’est pas nécessaire d’employer les miroirs, une action légère suffit, mais les phénomènes ne présentent pas dans les deux ôas le même caractère. Quelquefois la vision commencée à l'aide du miroir se continue sans lui et change de nature.

Il est plus difficile dans l’état de charme que dans le somnambulisme d'imprimer une direction à la manifestation ; il faut s’y prendre avec adresse et ménagement ; il est bon d’attendre que le sujet commence la conversation, on lui donne la réplique, et il devient possible de le conduire où l’on veut. Sans cela, on court le risque de voir le phénomène cesser subitement.

Pendant la guerre de Crimée, un sujet se transporta sur la mer Noire et monta à bord de l’un des vaisseaux dans la flotte ; à peine commençait-il à me décrire les uniformes des matelots et à me dire que ce devaient être des Anglais, à leur idiome, qu’il fut pris de hoquets violents et se plaignit du mal de mer, ce qui le fit revenir aussitôt et lui procura un dérangement d’estomac pour toute la soirée.

Le même sujet vit une flotte sur la mer Noire dans un miroir magique, les vaisseaux de ligne lui paraissaient tout petits, comme si la vision s’opérait de très-loin ; il n’en fut nullement incommodé. Etant éveillé, il est sujet au mal de mer quand il se trouve à bord d’un navire, mais il voit impunément des bâtiments secoués par les flots les plus courroucés.

J’ai vu ainsi des voyages exécutés, je pourrais dire d’un pôle à l’autre. Dans les hautes latitudes, les sujets ne se contentent pas d’énoncer qu’il fait froid, ce que chacun sait, ils se plaignent du froid, se ramassent sur eux-mêmes et se mettent à frissonner et à grelotter.

Quand , au contraire , ce sont des pays chauds qui sont parcourus , le voyageur se plaint de la chaleur, l’ombrage

des forêts lui est agréable, il se repose à l’ombre des cocotiers , tout effrayé à l’idée que les fruits énormes suspendus à la cime de ces arbres peuvent lui tomber sur le corps.

Le lion dans ses rochers, l’autruche et ses œufs rangés en bataille sur le sable , tous les animaux du désert lui apparaissent successivement dans sa course fantaisiste. Les singes énormes du centre de l’Afrique, le monstrueux hyppopotame l’effraient, et la rencontre de quelque grand serpent lui cause quelquefois une telle peur que son voyage se trouve brusquement interrompu et qu'en un clin-d’œil il est rentré au logis.

Notre voyageur pénètre dans la hutte du sauvage africain et découvre les secrets de son intérieur, il en décrit la disposition et l’ameublement. S’il rencontre un cours d’eau sur son chemin , lui qui vient de franchir les mers sans s’en inquiéter, il se trouve arrêté par cet obstacle et veut remonter ou descendre les rives; vous êtes obligé de l’exciter à franchir le fleuve et à continuer en ligne droite. Le voici arrivé à la limite du continent ; l’île de la Réunion l’attire par ses charmes, il en admire les plantations et les jardins où se trouvent des allées d’orangers comme dans les nôtres des allées de tilleuls. Vous l’engagez à effectuer son retour par Madagascar et le cap de Bonne-Espérance qu’il signale comme un endroit dangereux pour les navigateurs. 11 visite le triste et stérile rocher de Sainte-Hélène, avec son tombeau vide et son vieux saule qui tombe en ruines et dont plus d’une main pieuse a détaché l’écorce et les branches.

11 passe devant la côte d’Afrique, signale les lies du cap Vert, le pic de Ténériffe et Sainte-Croix, et s’arrête aux Canaries, en admiration devant le beau climat et la belle végétation de ces îles fortunées, aux magnifiques forêts où s’ébattent des oiseaux aux vives couleurs et où chante en liberté 1 oiseau charmant qui leur a emprunté son nom. A cet instant, le sujet éprouve un soubresaut nerveux, et le voici revenu gardant à peine ou même pas du tout le souvenir de ses impressions de voyage.

line autrefois, un sujet se trouvera transporté au-dessus

de la mer, mais il dit que l’eau est claire et peu profonde et qu'il distingue au fond des objets divers ; cela ressemble à une batterie de cuisine en fort mauvais état ; il y a aussi une boite qui parait rouillée et est bien fermée, il y a dedans des papiers et des cheveux; ce sont les débris d’un naufrage. Ce n’est pas étonnant, car voici un énorme rocher à peine recouvert par l’eau, et sur lequel les navires doivent se briser.

Nous voici dans un pays inconnu, un enfant est couché par terre, il n’est pas tout à fait noir et est très-robuste ; il parait seul; non, voici sa mère, une grande femme peu jolie et peu vêtue.

11 y a de bien beaux arbres dans ce pays ; je vais me reposer sous ceux-ci... 11 se trouve du cuivre dans cet endroit.

— Le voit-on ?

— Non, mais je le sens bien, il n’est pas très-profond, et en creusant avec un couteau on en trouverait. Plus loin , ici, sous ces deux arbres, il y a de l’or.

Voici un rivage désert, il y a un homme assis qui parait fort triste, il est seul... Ah ! je vois quatre de ses camarades qui reviennent de faire une tournée d'exploration , ils ont très-mauvaise mine et sont fort maigres, leurs vêtements sont en lambeaux ; ils parlent une langue étrangère. Ce sont des naufragés, car on voit leur vaisseau peu éloigné de la côte, une partie est cachée sous l’eau.

— Pouvez-vous voir le nom de ce vaisseau ?

— Non, le soleil me gêne, la réverbération de la lumière sur l’eau me fait mal aux yeux.

— Approchez et montez à bord, à l’arrière du navire, il doit y avoir un nom écrit.

— Je ne puis le voir, cette partie-là est recouverte' par l’eau.

— Plongez sous l’eau pour le lire.

— Non, non, cela me fait trop peur.

J’ai cité comme assez remarquables ces exemples de vue à distance, et je livre aux réflexions de vos lecteurs ces faits qui paraissaient incroyables à d’autres qu’à des magnétistes.

Tous se sont produits dans l’état de charme et spontanément. J’en ai rencontré aussi chez des somnambules, surtout en ce qui concerne la recherche des médicaments que- le sujet allait chercher et essayer chez tel ou tel pharmacien. Mais , comme principe, je ne fais pas d’expériences de voyages ou recherches avec des sujets doués de lucidité médicale.

Abordons maintenant, si vous le voulez bien, le domaine assez peu défriché des explications.

Mais d’abord, comme ces questions touchent à beaucoup de choses, il est nécessaire d’exposer certaines idées-princi-pçs qui me paraissent dominer toute cette discussion et sur lesquelles nous n’aurons plus à revenir.

Je considère l’âme humaine comme un être immatériel, doué des facultés de connaître , de penser et de sentir, et par conséquent doué de volonté et d’activité , elle est ce qu’on appelle une intelligence.

La matière, au contraire, est unechose inerte qui nepossède-aucune des facultés que nous venons de reconnaître à 1 âme. Depuis la matière la plus grossière, qui n'est peut-être pas celle dont notre planète est composée, jusqu’à la plus subtile qui existe et dont nous pouvons à peine nous faire une idée, il y a une série presque indéfinie de matières.

Les choses immatérielles (je suis obligé d’employer le mot chose, faute d’un meilleur) s’appliquent à la matière dans ses diverses séries et plus particulièrement aux matières les plus subtiles, et par leur moyen arrivent à gouverner et à agiter la matière brute. Car plus la matière est subtile et plus l’immatériel a d’action sur elle. ,

Ainsi les lignes, les formes, les images existent indépendamment de la matière et paraissent la contenir. Les forces se combinent avec la matièie subtile et forment des agents, tels que la vie universelle, le fluide vital ou magnétique humain, la lumière, le calorique , l’électricité, le magnétisme terrestre, les principes alcooliques et de fermentation, les actions chimiques dont on rencontre les effets dans ces trois règnes de la nature. Le tout est régi par les lois.

Le mot esprit a été employé dans plusieurs acceptions ;

j’appellerai ainsi la faculté de penser cl de connaître, et, prenant la partie pour le toui, je me servirai indistinctement des mots âme ou esprit, connue on le fait souvent.

L'homme, selon moi, est composé d’une âme, d’un corps organique matériel et du fluide humain, qui procède de l’un et de l’autre, et forme leur trait d’union. Notre corps animal et corruptible doit disparaître un jour pour faire place à un corps incorruptible que l’écriture appelle corps spirituel (Saint Paul, I, Corinth xv, hh), qui, très-probablement, se trouve contenu comme en germe dans notre corps actuel, et que ce dernier a peut-être pour mission de former et de faire éclore par sa dissolution.

L’âme humaine, pendant la vie et très-probablement après la mort, est unie à de la matière ; elle se trouve, dans les deux cas, contenue dans une forme et présente une image.

Ces prolégomènes rapidement exprimés pourront peut-être faciliter l’intelligence de ce qui se passe dans les opérations magnétiques que nous examinons.

Dans l’état ordinaire ou vie de relation, l’âme se sert du cerveau, je dirai même a besoin du cerveau pour penser et connaître, à cause de la situation complexe de l’homme. Mais, sous l’influence magnétique, il y a engourdissement du cerveau , et sa paralysie est d’autant plus complète que l’invasion par le fluide du magnétiseur est plus grande. L’âme exerce sans son organe habituel, mais non absolument nécessaire , les facultés inhérentes à sa nature ; elle pense sans cerveau, voit et entend également sans lui, et, par conséquent, sans y$ux et sans oreilles. On ne peut argumenter de ce qui se passe à l’état de veille pour conclure quoi que ce soit à propos des opérations magnétiques; toute comparaison entre les deux états est impossible et doit être rejetee d'une manière absolue ; nous ne reviendrons pas sur ce point.

Sous l’influence magnétique, il y a relâchement du lien qui unit le corps à l’âme ou esprit, et ce relâchement est tel, dans certains cas, que l’esprit peut quitter son enveloppe grossière, tout en lui restant uni par une attache, qui n’est

autre qu’un courant fluidique maintenant la communication entre ce qui existe et ce qui s’éloigne. Il est évident que s’il y avait séparation complète et définitive, la mort s'ensuivrait, mais il n’en est pas ainsi, la séparation n’est pas entière, et c’est à proprement parler plutôt un dédoublement. Il y a d’ailleurs des cas où , en dehors du magnétisme , le mime phénomène de séparation se produit ; .telles sont, par exemple, certaines crises d'hystérie , la léthargie et la syncope.

La vue somnambullque est l’acte par lequel un somnambule voit, quel que soit son procédé de vision. Personne, que je sache, parmi les magnétistes, n’a eu l’idée de lui fixer une limite ; en tous cas , ce ne sont pas les partisans du système dit de la séparation qui ont cette prétention. 11 s’agit simplement de rechercher comment cette vision s’opère, n’importe à quelle distance.

Un somnambule est dans un fauteuil, les yeux fermés et mouillés; s’il veut voir une chose qui se trouve dans la même chambre, et placée, par exemple, derrière le fauteuil, la vision ne s’opère pas à travers ce fauteuil, l’esprit perce son enveloppe, la quitte et se transporte vers l’objet ; si ces objets sont renfermés dans une boîte, il ne s’enferme pas dans la boîte , ce serait trop ridicule , mais il la pénètre, et, en passant à travers cette matière, il prend connaissance de ce qu’elle renferme. De la même façon il passe au travers des portes et des murailles, et va voir ce qui se passe dans la pièce voisine, ou dans la maison à côté, ou bien dans un lieu plus ou moins éloigné ; car une fois le principe du transport admis, on comprend qu’il n’est pas plus difficile de se transporter au bout de la terre qu’à quelques lieues seulement.

Du tout, nous dira-t-on, les choses ne se passent point ainsi, la faculté de voir sans se déplacer perce les corps opaques, notre enveloppe d'abord; puis les murailles deviennent transparentes et le sujet voit au travers , et quand il s’agit de voir ce qui se passe aux antipodes, le globe terrestre devient diaphane et le somnambule perçoit diamétralement au travers.

Franchement je trouve le système de la séparation aussi admissible à priori, et il me semble plus facile à expliquer.

A ce propos, je m’élèverai contre la manière dont on exécute généralement l’expérience dite vue malgré l'occlusion des yeux , où l’on emploie des tampons et des masques qui étouffent les sujets et nuisent considérablement à leur lucidité. Pourquoi ne pas leur faire lire un livre placé dans la pièce voisine, ou les faire jouer aux cartes contre une personne placée dans cette môme pièce ; l'adversaire resterait muet, et le sujet annoncerait à haute voix les cartes jouées par les deux parties. Aucune personne éveillée et les deux yeux grands ouverts ne serait capable d’en faire autant.

Nous sommes donc induits à penser que l’esprit se transporte vers les objets éloignés qui sont perçus; mais comme il reste en communication fluidique avec son corps, il entend les paroles que le magnétiseur adresse à ce dernier, et peut y répondre en faisant mouvoir les lèvres, comme dans la conversation ordinaire et sans plus d’intervalle ; car le fluide transmet instantanément les pensées et les sensations. Ce fluide, en tant qu’il procède du corps, est, comme celui-ci, soumis aux influences atmosphériques de chaleur, froid ou humidité, et on comprend dès lors comment il peut en résulter des rhumes et des enrouements dont le corps reste affecté. On comprend également comment l’esprit se trouvant à bord d’un navire, l’eflet du balancement se transmet au corps, et il en résulte ce que vous savez. 11 n'est pas plus question dans tout cela de vomissements d’âme que quand une personne en corps et âme, chair et os, se trouvant en mer, éprouve les mêmes inconvénients; l’âme ne vomit pas plus dans un cas que dans l’autre. Le système de la séparation ne conduit point à une aussi grosse absurdité. 11 n’est pas non plus nécessaire d’avoir recours à certains effets d’imagination que rien ne prouve.

On nous demandera comment nous expliquons que l’esprit d’une somnambule marche sur un caillou en se rendant chez un pharmacien, ou sur le bord de sa robe en montant un escalier, et comment, d’un autre côté, nous prétendons

que l'esprit d’une autre somnambule, ou plutôt d un sujet mis dans l’état de charme, s’est transporté, avec la rapidité de l’éclair, à plusieurs centaines de lieues. Nous avons cru remarquer une nuance, pour les opérations de 1 intelligence, entre le somnambulisme et l’état de charme. Dans le premier cas, l’esprit est en possession de lui-même, il a la conscience de ses actes, il raisonne et agit presque comme à l’état de veille, il se transporte comme il veut et il emploie le plus souvent les moyens ordinaires, circulant par les rues et évitant la rencontre des gens qui vont et viennent, en employant toutefois moins de temps que le corps n’en mettrait à parcourir le même chemin. L’esprit, en s'appuyant sur le sol, peut donc rencontrer un caillou sous son pied. Dans 1 état de charme au contraire, tout semble imprévu, spontané : l’esprit ne s’appartient plus en quelque sorte, ses actes paraissent irréfléchis ; il ne raisonne pas, il perçoit et sent, et s’abandonne tout entier à ses impressions ; il se transporte d’un bon et avec une vitesse incalculable, car cette vitesse doit être égale à celle du fluide humain, et ce fluide étant plus subtil que la lumière, doit circuler avec plus de vitesse ; donc les distances terrestres sont insignifiantes.

Quelles figures ont les esprits, s’il vous plaît, quand ils voyagent ainsi? Et la robe, veuillez donc nous 1 expliquer ; vos voyageurs ont donc des robes ou des pantalons ?

Je répondrai que les formes et les images sont indépendantes de l’espace et du pays, ainsi que des objets matériels. L’esprit, en se séparant de son corps organique, conserve l’apparence que présente ce dernier, quelle que soit la substance qui forme cette apparence ; il importe également la forme, l’image, la représentation plus ou moins matérielle de ses vêtements. Le somnambule lui-même se voit double, et son esprit contemple son corps matériel tranquillement assis dans un fauteuil. Cela nous paraît prouvé non seulement par l’assertion des esprits, mais encore et surtout par ce qui se passe après la mort. Depuis des milliers d années que de milliers de personnes ont vu des milliers de morts, aucun de ceux-ci, que je sache, n’est apparu sans vêtemeuts;

on les voit tels qu’ils étaient sur terre, et généralement vêtus de la même façon. Est-ce leur état réel, ou bien ont-ils pris cette apparence pour se faire reconnaître, cela est indifférent. Ce qui est certain, c'est qu’ils ont des vêtements perceptibles. Il est probable que ces vêtements sont formés de matières très-subtiles, et on peut les appeler spirituels, par opposition à la matière grossière dont les nôtres sont composés. Quoi qu’il en soit, ce doit être la même chose qui arrive dans les cas que nous énumérons. L’existence de ces vêtements prend les proportions d’un fait qu’il est impossible de nier, et il paraît plus sage de désirer vivement l’explication de ce fait et d’en rechercher la nature, que de lui décocher des traits satiriques, qui n’atteignent pas le but. Il est probable que le poète macaronique, sous la forme d’une plaisanterie que je goûte autant que personne, a dit, sans s’en douter, une grande vérité.

On prétend que tout est illusion chez les somnambules, et que toutes leurs explications sont imaginaires ; on a tort de généraliser ainsi les erreurs dans lesquelles tombent quelquefois les somnambules, et de traiter d’illusions tout ce qui peut choquer des idées arrêtées ou des systèmes. Il ne faut point traiter de rêves toutes ces opérations intellectuelles des somnambules, et un sujet qui ne produirait que des rêveries creuses ne mériterait pas ce nom. Il est certain qu’on ne doit accorder qu’une confiance réservée aux affirmations des somnambules, mais l’effet de cetle réserve devra être de faire examiner quelles peuvent être leurs chances d’erreur.

Si vous êtes à peu près certain de n’avoir exercé aucune suggestion sur votre sujet, avec lequel vous ne vous êtes jamais livré à des expériences volontaires de suggestions ; s’il lui arrive quelquefois de répondre à vos questions d’une manière opposée ou non conforme à l’idée que vous vous étiez faite des phénomènes sur lesquels vous l’interrogez ; si enfin ce somnambule sait dire à propos : je ne sais pas, ou : je ne vois pas, et que vous ayez dès longtemps expérimenté sa véracité et sa lucidité, ses assertions méritent, je ne dis pas

une créance entière et aveugle,mais elles doivent être prises en sérieuse considération.

Est-ce parce qu’elle rejette absolument le témoignage des somnambules (sur la question seulement qui nous occupe, je suppose) que l’opinion qui nous combat n’en cite aucun à l’appui de son thème?

Quant à n.oi, je n’ai jamais entendu parler d’aucun somnambule expliquant la vue à distance au moyen de la transparence des corps opaques. Je ne sais s’il existe des .sujets ayant la prétention de voir à l'autre bout de la terre sans que leur faculté de percevoir bouge de son fauteuil, mais je n'en ai jamais vus.

11 me semble que l'accord unanime des sujets est de quelque valeur. Comme on ne propose que deux explications, ils n’ont qu’une chance d’erreur sur deux ; il serait bien malheureux qu’ils se trompassent toujours. L’homme, dans son état ordinaire, est sujet à l’erreur, et il n’est venu à l’esprit de personne de rejeter pour cette cause toutes les œuvres de l’entendement humain.

Nos adversaires nous conseillent de dire : je ne sais pas, plutôt que de risquer des suppositions et des explications. Quand on ne sait pas, il faut chercher à savoir; et pourquoi ne pas présenter le résultat de ses recherches ? Ils combattent de toutes leurs forces le système de la séparation, il s’ensuit qu’ils adoptent avec énergie le système contraire, et on doit supposer qu’ils savent. Mais s’ils savent, pourquoi n’expliquent-ils pas ? Ils nous présentent une réfutation, ou plutôt une négation qui ne nous paraît rien moins que concluante; mais de preuves, aucune. Leur conviction ne peut s’en tenir là.

Ce sont matières ardues et difficiles à traiter ; si je l'ignorais, l’imperfection de ces lignes m’en instruirait. Je ne demande pas mieux que de rejeter mon erreur, si j’en commets une, mais je suis en droit de demander une réfutation aussi solide que possible et des preuves également solides. Jusque-là, je me permettrai de rester in statu quo.

Cette discussion a pris naissance à propos d’un livre pu-

blié par Alexis, ou sous son nom. Je déclare, en terminant, que je n’ai jamais vu Alexis et que je n’ai pas lu son livre. Je ne me fais donc en aucune manière le champion de ses doctrines ; j’ai exprimé simplement mes propres idées, et je les donne pour ce qu’elles valent.

Je vous demande pardon, Monsieur le baron, de la longueur de cette lettre, mais vous reconnaîtrez avec moi que le sujet qu'elle traite comporte de plus longs développements, et je suis bien certain, en faveur de ce sujet, d’être excusé par vous.

Veuillez agréer, Monsieur le baron, l'assurance des sentiments distingués avec lesquels j'ai l’honneur d’être,

Votre très-humble serviteur,

Berruyer.

Paris, 20 décembre 1857.

DÉDIÉ À M. LE BARON DU P0TET.

Dans un salon des Quinze-^ingts Rempli d'aveugles de naissance,

Par un coup de la Providence,

Le plus savant des médecins,

L'un d'entre eux recouvra subitement la vue.

— 0 mes amis, je vois,

Et maitcnantje crois A cette faculté que j'ai tant combattue De toucher les objets de loin avec les yeux. Dieu! que c'est étonnant, inouï, merveilleux!

Croyez-moi, ce n'est point un conte,

San* sortir île mon banc je vous touche et vous compte !

— Encore un de toqué, s'écrie à l'unisson Le personnel de la maison.

Quand cette folie agrippe son homme,

Il faut qu’on le lie ou bien qu'on l'assomme;

Le seul moyen d'avoir raison des fous,

Est de les faire expirer sous les coups!

Aussitôt dit, cette aveugle assemblée Se lève pour tomber d'emblée Sur le malheureux clairvoyant,

Qui s'esquive d’abord, et puis se ravisant,

Revient à pas de loup et sur leur joue applique Un coup de poing géométrique,

Qui leur fait voir incontinent Des milliers d'étincelles,

D’éclairs et de chandelles,

Ce qui termina leurs querelles Et les convainquit sur-le-champ.

Si les magnétiseurs pouvaient en faire autant Aux Quinze-Yingtsde notre Académie,

Sans doute ils guériraient leur presbimyopie;

Car il s'en trouverait beaucoup Qui seraient convaincus du coup.

De discuter sur la lumière Avec un aveugle entêté,

Me paraît une absurdité.

De tous les arguments contre la cécité,

Congéniale ou volontaire,

A mon avis il n'en est point

De plus frappant qu'un coup de poing.

Jobard.

AVI3 A NOS COLLABORATEURS.

Au point de départ de ce journal, les croyants étaient rares, les matériaux produits par l’intelligence presque nuls. Le groupe que nous avons formé, petit d’abord, s’est grossi tellement qu’il serait impossible de nombrer aujourd’hui les partisans sincères et éclairés qui défendent la cause de la vérité. Aussi nous sommes encombrés de mémoires, de récits de faits, de théories sur cette science divine que notre époque voit naître. Sans exclure aucun de ceux qui ont la bonté de s’intéresser au journal, nous les prions d’attendre patiemment le temps de l’impression de leurs œuvres; notre cadre est trop petit pour renfermer to ut à coup les pièces qui nous sont envoyées, et nous-mêmes nous ajournons pour un temps nos causeries magnétiques écrites en vue de notre feuille, mais nous dirons à tous nos correspondants: Travaillez, travaillez comme nous, rien ne sera perdu ; peut-être pourrons-nous avec nos faibles ressources donner des suppléments au journal.

Baron 1)0 POTET.

ERRATA. — Il s’est glissé quelques petites erreurs de détail dans les renseignements qui nous ont été donnés sur M. Home et que nous avons fait figurer dans une note du numéro précédent. Les faits de déplacement de lustre et de fleurs cueillies sur une jardinière que nous avions placés aux Tuileries, se sont passés chez le comte de Komar, rue des Champs-Elysées. 12, hôtel Vouillemont. Le lustre a été seulement transporté de la cheminée sur une table. Chez le duc de Bassano, il n'y a eu qu’un lustre secoué et balancé en l'air.

*

Nota. Les personnes dont l’abonnement expirait au 1" janvier 1858 sont priées de le renouveler le plus tôt possible, si elles ne veulent éprouver de retard dans l'envoi du Journal.

Baron dü POTET, propritilaire-géranl.

Paris. — Imprimerie de Pommi&bt et Morbao, 42. rue Yaviu.

LETTRES D’UN VOYAGEUR

SUR

LE SPIRITUALISME AMÉRICAIN (1)

QUATRIÈME LETTRE.

A M. le baron du Potet.

Mon cher maître,

Je vous ai déjà fait connaître M. WiBis ; occupons-nous maintenant des prodiges qui l’acoompagnent.

Exclu de l’université, l'irréprochable et malheureux jeune homme reçut d’un des premiers citoyens de Boston et l’un des plus riches négociants des Etats-Unis, une hospitalité également honorable pour tous deux. J’allai le visiter chez ce gentleman, qui, informé de l’objet de ma démarche, eut la courtoisie de m’inviter pour le lendemain à prendre le thé chez lui en compagnie du médium. A mon arrivée chez M. A. A..., place Franklin, h* 12,un peu tard dans la soirée, je rencontrai un groupe fle personnes réunies dans le salon : c’étaient d’honorables, et, autant que leur conversation put me l’apprendre , d’instruits et intelligents confrères en Hippocrate. Ils étaient venus pour soumettre leur scepticisme à l’épreuve des manifestations spirituelles que M. Wil-lis devait évoquer ce soir-là.

On nous fit passer dans une salle placée dans les fondations, dont tout l'ameublement consistait en une grande table à manger et en quelques chaises. Cette table était à ralLnges; elle n’étaitrecoaverte d’aucun tapis. Nous nous assî-

(1) Voir le n° du 10 décembre 1857.

Tome XvU.— N» *7. — 2» Série. — 10 Fevwm 1858.

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mes tout autour, M. Willis avec nous. Des instrumentsde musique furent placés dessous pou rl’u sage des espri ts. Cette réu n ion qui, après la maîtresse delà maison et une autre dame, femme très-distinguée par ses qualités personnelles et veuve d’un des plus célèbres hommes d’Etat de l’Amérique, paraissait ne compter que des hommes d’un parfait savoir-vivre, offrait néanmoins une composition par trop doctorale pour ne pas rayonner une certaine inlluence d’incrédulité hostile que toutes les réserves de la bienséance ne pouvaient dissimuler à la susceptibilité nerveuse du médium. Il me parut tout d’abord en proie à un grand malaise et comme dans une atmosphère irrespirable. Une heure se passa dans une attente qui semblait accroître sa gêne en aggravant peut -être les dispositions peu favorables des assistants. Enfin les coups commencèrent à être frappés sur un bout de la table, à la barbe d’un de nos médecins. Son premier mouvement fut d’explorer le dessous de la table: mais il était vide, les pieds de M. Willis reposaient sur le plancher à la distance de plusieurs mètres, et les coups continuaient toujours. Un deuxième docteur, assis près de moi, à l’autre extrémité de la table, provoque l’invisible frappeur à venir essayer ses marteaux devant lui. A l’instant même, il est obéi, et les coups se transportent ensuite successivement à tous les points de la table, à l'appel de chacun. Puis, le feuillet de la table sur lequel je me trouve appuyé s’agite tout à coup, et, se séparant entièrement par un de ses bords du feuillet contigu, frappe à coups redoublés sur le sommier. Quant aux instruments de musique, ils restèrent muets, et nous attendîmes en vain l’apparition de la main lumineuse qui, telle que jadis au festin de Baltazar, se montre souvent, assure-t-on, devant les cercles spiritualistes, et dont le saisissant aspect a plus d’une fois jeté le frisson dans l'entourage de M. Willis.

On rentra dans le salon. M. Willis se mit au piano. Après quelques minutes, et pendant qu’il jouait encore , des craquements insolites se firent entendre dans le corps de l'instrument, et bientôt après, à la clarté du gaz et à la

vue d’une douzaine de personnes bien éveillées et les yeux bien ouverts , ce piano, d’une dimension colossale , se souleva des pieds de devant, retomba, se redressa et frappa en cadence sur le plancher l’espace d’un quart d’heure. Durant tout ce temps, le piano n’était en contact visible qu’avec le plancher et le bout des doigts de M. Willis. M’étant glissé sous le piano pour mieux en observer les mouvements, je remarquai que son plancher inférieur, à la partie voisine du clavier, gémissait comme si l’épaule d’un Hercule appliquait là son effort pour soulever le fardeau. Quand le piano eut recouvré son inertie, je mis toutes mes forces à essayer de le soulever, mais je pus à peine le faire glisser de quelques lignes en le poussant horizontalement. Une autre personne, d’une conformation presque athlétique, fit la même tentative, avec le même insuccès.

Là se termina une séance dont le médium paraissait très-peu satisfait, mais qui, bien que ne me présentant aucun fait nouveau, avait néanmoins le mérite de confirmer jusqu’à un certain point, en les répétant, la vérité de ceux dont j’avais été déjà témoin ailleurs.

Mon cher et honoré maître, voilà maintenant sous vos yeux à peu près toute mon expérience des manifestations physiques du commerce intermondain dont l’existence esl affirmée par le spiritualisme. 11 n’a fallu rien de moins qu’une obligation impérieuse et inopinée de rentrer précipitamment en France pour me décider à retourner vers vous sans vous rapporter au moins une observation personnelle sur chacune des nombreuses variétés de ce grand ordre de phénomènes, qui viennent de déborder comme un torrent sur le champ de la physique, à la consternation des tenanciers et au gr,v-l dommage de ces pauvres clôtures bien ambitieuses, dans lesquelles l’orgueil d’une demi-science prétendait murer lo domaine du vrai et du possible. Pour combler autant que je le puis les lacunes de mon expérience personnelle, èt au risque de les rendre par cela même plus apparentes, je vais vous faire connaître les résultats des investigations auxquelles d’autres ont soumis les faits qu’il ne m’a pas été permis

d’étudier moi-même directement. Du reste, les témoignages imposants que j’aurai à citer, et dont certains sont fournis par les adversaires les plus accrédités et les plus sérieux du spiritualisme, auront l’avantage de prêter à mes déclarations anonymes une autorité à laquelle sans cela il leur serait interdit de prétendre.

M. Eustis, professeur à la faculté des sciences de l’université de Cambridge (Massachusetts), accusateur de M. \V il-lis et promoteur de son exclusion , a publié, dans le Courrier de Boston, la relation détaillée d’ une séance donnée par ce médium, et à laquelle ce savant avait daigné assister, Voici quelques passages de ce récit qui renferme des aveux précieux et incroyables en présence des conclusions dont l’auteur le fait suivre. Ces citations sont de nature à édifier le lecteur sur la force des objections auxquelles en sont réduits à cette heure les adversaires les plus habiles du spiritualisme. Je traduis M. Eustis d’après son article du Courrier du 22 mai dernier : ,,-,

«... Cette table avait six pieds de long sur quatre de largo. Le médium prit place au milieu du long côté de la table ; je m’assis au bout à sa gauche ; un accordéon, une grande sonnette de table et un harmonica furent déposés sur le plancher, sous la table , à l’extrémité opposée à celle que j’occupais. Bientôt le jet du gaz ayant été modéré de façon à ne répandre qu’une clarté douce, mais cependant suffisante pour distinguer les objets sur la table, cette table fut ébranlée» déplacée et inclinée... A la fin, l’harmonica se fit entendre, la sonnette sonna, et l’accordéon joua. Deux de ces instruments se faisaient entendre à la fois, et même ils s’accompagnaient... Plus tard, la table ( une table à coulisse) était tirée par ses deux bouts, de façon à laisser un espace vide d’environ huit pouces entre un des bouts et le feuillet du milieu, cet espace restant couvert par le tapis. On voyait quelque chose soulever le tapis dans cet intervalle. Ce quelque chose, ayant été saisi, se trouva être la poignée delà sonnette. Elle fut tenue par un de nous, et, les esprits ayant été invités à la reprendre, elle fut retirée des mains de presque tous les

membres de la réunion qui voulurent répéter l'expérience. Quand moi je la tenais, elle fut tirée très-violemment (very violent ty), mais je réussis à la retenir... Il (M. Willis) s’assit ensuite à un piano. Là lumière qui nous éclairait était très-faible ; il (11. Willis) joua, et le piano fut agité d’un mouvement de bascule très-violent. Le poids d’un homme placé sur le meuble ne put le retenir... »

0 mon cher maître! vous avez brisé bien des lances contre la cuirasse de l’endurcissement scientifique, et cependant vous aurez peine à croire que le rédacteur et signataire des déclarations que vous venez de lire, loin de s’avouer vaincu par les faits écrasants qu'il nous raconte, se déclare plus incrédule encore qu’avant son expérience : tous les exercices qu’il vient de vous décrire, tintement d'ime sonnette, sonnette arrachée très-violemment de la main qui s'efforce de la retenir ; balancement violent d'un piano avec la charge d’un homme par-dessus; symphonie d'instruments!... tout cela a’est, pour M. le professeur Eustis, qu’un tour, un tour d'escamoteur exécuté, par qui? par quoi? — « Par te-piedde M. Willùt!» Risum teneatis.

Malheureusement, dans cette affaire, l’odieux l’emporte sur 1« ridicule. M. Eustis n’a pas hésité, sur une pareille présomption, à faire prononcer l'expulsion ignominieuse du pauvre étudiant et à briser sa carrière. Je dis présomption , car, malgré tout, je ne me crois pas fondé à mettre en doute 1e. bonne foi du professeur. Que voulez-vous, cet homme est lui-même une victime plus à plaindre encore que la sienne, victime de l’arrêt prophétique rendu contre tant de savantes gens de tous les siècles et de tous les pays, oculos habent et nonzidebunt. Juî («9300!

Voiei la relation d’une autre séance de manifestations spirituelles devant le même médium : elle est d’un témoin dont, le caractère public n’est pas moins respectable que celui de M. Eustia, du Révérend.M. F.-W. Higgissoa, de Woroester. La déclaration de cet ecclésiastique a été signée et affirmée par serment devant le juge de paix Henri Chapin. Je-la traduis ¡nextenso j ,ûi: .maont

«Exposé de faits. A qui il appartiendra : L’attention pu-blique a été récemment appelée sur les pouvoirs attribués à M. Willis, de Cambridge, comme médium, ainsi que sur les formes étranges de l'acte de suspension dont il a été l'objet, comme étudiant en théologie à l’université Harvard. Dans une pensée de justice envers M. Willis et envers toute une classe de faits du domaine scientifique, mais non encore expliqués, je désire faire connaître ce que j'ai observé durant deux soirées passées avec lui dans une maison particulière de cette ville.

« Nous étions en tout de neuf à douze personnes, et tous mes compagnons, M. Willis excepté, étaient d'honorables citoyens de Boston. Parmi eux, se trouvait un de nos médecins les plus expérimentés. Nous nous assîmes autour d'une longue table de salle à manger. La salle n'était pas brillamment éclairée, mais toutefois d’une manière suffisante pour que les mouvements de chaque personne pussent être suivis de l’œil aisément, et, pour mon compte, je m’appliquai à ne rien perdre de vue. — J’omettrai dans ma relation les détails secondaires, pour ne citer que les effets principaux.

« 1. Des instruments de musique, une guitare, un accordéon et deux sonnettes, qui avaient été déposés préalablement sous la table par les membres de la réunion, se mirent en mouvement, en se portant çàetlà, d’un pointàun autre. Ils jouèrent ensuite à plusieurs reprises et très-bruyamment. Deux de ces instruments jouèrent plusieurs fois à l’unisson aux extrémités opposées de la table et hors la portée du médium. Pendant que ceci se passait, la table se souleva plusieurs fois en entier, et un de ses feuillets (c’était une table à rallonges) fut également soulevé dans toute son étendue au-dessus de son support, et oscilla dans l’air sans être touché par aucune main.

« 2. L’accordéon se porta sur les genoux de M. Willis. Celui-ci l’ayant pris, et le tenant d’une seule main entre ses jambes, l’instrument joua à ravir, et exécuta plusieurs morceaux demandés par nous, et même, au dire de quelques personnes, sur leur demande mentale. Je ne fis point person-

nellcment cette dernière épreuve. L'accordéon produisit des imitations excellentes du hautbois, du violoncelle et de la contre-basse. Il est sans doute inutile de rappeler que pour jouer de l’accordéon l’emploi des deux mains est nécessaire.

i 3. La lampe ayant été éteinte par nous afin de changer les conditions de l'expérience, par deux ou trois fois des lueurs parurent sur la table auprès de M. Willis. Elles allaient çà et là comme des vers luisants dont elles avaient l’apparence. D’autres lueurs voltigeaient dans l'air avec des mouvements plus rapides, semblables à des lampyres. M’étant fait apporter un flacon renfermant du phosphore, et l’ayant ouvert, l’intensité de ces points lumineux s’accrut ; elle s'affaiblit ensuite quand j’eus rebouché le flacon, et redevint ce qu’elle était premièrement. Ces clartés furent vues distinctement par toutes les personnes présentes.

« h. La salle restant toujours obscure, l’accordéon fut tenu sur la table par M. Willis. L’instrument s'élant remis à jouer comme il l’avait fait d’abord, de faibles lueurs sautillaient parmi ses clés. Tout les phénomènes prenaient de l’intensité dans l’obscurité, mais les nerfs de M. Willis paraissaient en être affectés désagréablement, et il pria qu’on rallumât les lampes.

« 5. La salle ayant été éclairée de nouveau, j’entrepris quelques expériences plus directes. Je saisis l’accordéon d’une main, le fixai entre mes genoux, et, à l’aide des pieds, je le tins à l’abri de tout contact étranger. A ma surprise, je sentis qu’une force invisible le tirait par l’autre bout, et mon oreille m’avertit ensuite que les diverses clés de l’instrument étaient mises en jeu. Des sons musicaux se produisirent, mais d’une manière imparfaite, toutefois. Bientôt l’instrument me fut arraché avec une très-grande force, et tomba à terre. D’autres prirent l’accordéon à leur tour, mais il ne rendit aucun son dans leur main. Il est bon d’ajouter que je tenais l’accordéon par un seul bout et d’une seule main, et que je ne sais point jouer de cet instrument ; disons encore que tout le cercle avait les mains sur la table, et que j’étais hors de toute atteinte de M. Willis.

k 6. Ayant regardé sous la table pendant que la guitare jouait, je vis, dune matière parfaitement distincte, l’instrument couché sur le dos : pas une main ne le tondrait, mais de faibles tueurs mciflantei (faim flickerings of lïglit) s agitaient Mi*dessus des cordes. Je voyais les pieds des personnes les plus rapprochées de l’instrument : ils ne le touchaient point ; et, quant à M. Wiffis, il était trop loin pour y atteindre. Je fus seul, je crois, qui regardai sous la table, et je ne fi« part à personne de mes observations qu'après que le phénomène eut cessé, ayant jugé à propos, dans ce moment, d« conduire mes recherches 4 part moi.

X 7. La guitare entra en mouvement et $’avança lentement, poussée par une force dont la nature reste pour mai un secret impénétrable ; puis, elle se dressa entre ma genoux, le manche s’appuyant sur ma cuisse gauche. Sur la pro*-position de quelqu’un de la compagnie, je me mis à chanter après m’être placé de façon à mettre l'instrument à l’abri de tout attouchement étranger. Chacun des airs que je chantai fut accompagné sur la guitare, mec précision, avec goût, et une facilité croissante. Le plus bel accompagnement de tous, qui lut magnifiquement exécuté, fut celui d’un chaut portugais assez difficile, et qui probablement n’est pas connu de douze autres personnes, en Amérique. Je ne sais point moi-même pincer la guitare» mais j'ai beaucoup enteudu cet instrument, et Je sais que ces accompagnements étaient par eus-Mêmes uoechase extraordinaire, à part le mystère de l’agettl dfejùécutien. Ce «pie je sais encore, c'est que j'étais hors de In portée d'uue partie quelconque du corps de M. Willis, et qu’il ¿tait, ttatérieUameat impossible pour toute personne de toucher l'instrument k mon insu.

« 8. Durant le cours de ces divers phénomènes, je sentis à plusieurs reprises un« étreinte délicate sur mes pieds, ressemblant exactement >àceüe«T«ne main avec la pression tiis-tiacte des doigta. Après avoir quitté ma chaussure, le contact fut plus distinct encore,et fut «¿raque fois aoonr.paigné d’une «ensatiou électrique tiès-paiTticulière, et comparable à oelle qu’éprouvent deux personnes quand elles se prennent par la

main pour compléter le circuit (Tune batterie électro-magnétique. Je n’avais encore soufflé le mot de tout ceci, quand j’entendis plusieurs personnes à l’autre bout de la table accuser les mêmes sensations simultanément. Je mis ensuite la main sous la table, et pareil contact s’y imprima avec plus de force encore. Cependant tous avaient les mains sur la table, eü j’étais horsde l’atteinte de M. Willis.

« 11 me serait possible d’ajouter encore au merveilleux de cette relation, enm'engageant dans déplus longsdétails. Mais, sans doute, j’ai été déjà beaucoup au-delà de ce que le lecteur sera disposé à m’accorder; je m’arrête donc : maintenant, à ceux qui refuseront de croire aux faits racontés ci-dessus, sur la foi de mon témoignage, je n’ai à dire qu’une seule chose, c’est que moi-même j’aurais trouvé très-difficile d’y croire sur la foi du leur. Commit eux, j’ai voulu ne m'en rapporter, sur le compte de faits aussi nouveaux, qu’à.mon expérience personnelle. Je n’ajouterai qu'un mot, c’est que» m’étant appliqué toute ma vie à l’étude des sciences naturel-les, j'ai appris, à l’heure qu’il est,¿compter quelque peu sur l’exactitude de mes observations et sur la fidélité de mes gens,

« La question de l’origine spirituelle des fiwts n’est point soulevée ici; ils’agi* simplementen ce moment d’une question de fraude ou de bonne foi. Si, après ce qui vient d’être raconté, je ne possède poirçt une preuve suffisante de la sincérité de ces faits, il n’existe rien qui mérite d’être appelé preuve, et l’édifice tout entier des sciqnçes d’observation peut être regardé, à ce compte-k’t, conv; e une accumulation Kimpostures. Mais lorsque je considère que des faits identiques ont, durant ces dernières années* été constatés en différents lieux par des centaines d’hommes d’intellig;euce, j» me sens disposé à répéter humblement le mot que l’on prête à Arago, « Hors des mathématiques pures, il y a témérité à « prononcer le mot impossible. »

« Paos. Wentwort Higgisson. » !

« Worccster, le 15 avril 1857.

« Je certifie que la pièce ci-dessus a été signée et affirmée par serment devant moi,

« Henri Chapin, juge de paix. »

Un homme dont le nom, respecté de tous les savants du globe, n’est étranger à aucune personne au courant de l’histoire de la chimie moderne, le vénérable docteur Hare, de Philadelphie, renouvelle, dans le cours d’une lettre adressée au New-England spiritualist, du 18 juillet dernier, une assertion qu'il avait déjà produite devant le congrès scientifique d’Albany. Voici la traduction du passage en question :

«...... J'exposai » dit-il, « un fait simple sur lequel il

n’est pas possible de se méprendre, et tout à fait analogue à ceux décrits par le révérend M. Higgisson, le fait d une table battant une marche en sautant, tandis que j étais assis dessus, mes pieds élevés au-dessus du plancher, et aucun mortel, pas plus que le médium, n’étant en contact avec ladite table. »

Plus loin, le docteur cite une lettre qui lui a été adressée par M. Yeadon, rédacteur du Courrier de Charles ton, qui, après avoir amusé ses lecteurs aux dépens du spiritualisme par des railleries dont le vénérable docteur avait eu sa part, s’était décidé, d’après le conseil de ce dernier, à étudier le sujet à l’égard duquel il avait commencé, comme tant d’autres, par nier et médire. Voici le passage de la communication de M. Yeadon, renfermant le récit du résultat de ses investigations chez un certain médium :

(i Une table produisit des coups, dansa, moi m’asseyant ou me tenant debout sur elle; alla en mesure avec chacun des airs que je m’avisai de chanter, et cela sans aucun contact apparent concevable, direct ou indirect, de qui que ce fût : la table était nue, et exposée à ma vue dans son entier, par-dessus el par-dessous. »

Le rédacteur d’une feuille politique, la Revue de Crawford-ville (Indiana), dans un article qui débute par une rétractation solennelle des Imputations, interprétations el dénon-

dations contre le spiritualisme auxquelles ce journal s’était complu jusque-là, donne le procès-verbal d’une séance de manifestations spirituelles auxquelles il a assisté en compagnie de plusieurs habitants notables de la localité, dont il donne les noms que voici : M. Easton, banquier, et major de la milice; M. Snyder, directeur de la poste; M. Wallace, sénateur ; M. Watson ; M. le major Wim et M. le colonel Manson.

Après avoir raconté les chassez-croisez d’une grosse table chargée de livres, et que personne ne touchait, et s’être étendu longuement sur la respectabilité du médium officiant, M. le docteur Sloan, un parfait gentleman dont le caractère est à couvert du soupçon, et qui, d’ailleurs, ne retire aucun profit pécuniaire de ses transcendants pouvoirs, le journaliste poursuit ainsi :

« La réunion avait à peine eu le temps de remarquer que le docteur ne touchait point la table durant ses exercices, quand se présenta à nous une scène qui aurait été d'un ridicule sublime, n’avait été la puissance mystérieuse qui s’y manifestait. Les majors Wim et Easton, deux personnages aussi calmes et sérieux comme une grave assemblée puisse jamais en offrir, étaient assis l’un contre l’autre, spectateurs stupéfiés des excentricités de la table. Tout à coup une force invisible les enlève, l’homme et la chaise, et les balotte dans l’espace, l’un faisant face à l’autre, tels que ces marmots criards que leurs bonnes élèvent et abaissent dans l’air pour les apaiser. Ils eussent bien volontiers quitté leurs sièges, et leurs yeux adressaient des regards suppliants à la compagnie ; mais la main invisible qui les balançait dans l’espace savait aussi les tenir ferme. Aujourd’hui nous nous rappelons en souriant ces deux têtes blanches s’encensant ainsi l’une l’autre ; mais alors nous étions trop terrifiés pour songer à leur porter secours. Rappelez-leur cette course aérienne de sorcière, et vous les voyez sourire de ce sourire maladif d’un homme qui a vu un revenant. Ils croient fermement au spiritualisme... >>

Et plus loin : « Le docteur Sloan plaça la chandelle au mi-

lieu de la salle, l’éteignit, et s’éloigna : la lumière reparut, se ravivant graduellement par l'action d'un agent invisible, et, quand elle eut recouvré tout son éclat, nous fûmes saisis d’tan frisson d'horreur en voyant une main étendue au-dessus. On serait excusable, sans doute, de douter de ses sens en pareil cas ; il n’y avait pas cependant à s’y tromper ; la main tout entière , pâle comme celle d'un cadavre et délicate comme celle d’une femme, était très-nettement dessinée. Elle sé tenait dans une position horizontale, et indiquait du doigt le-colonel Manson, etc... »

M. Jabez Woodman, avocat consultant (counsclor). àPort-land, dans le Maine, vient de publier une brochure fort remarquable sous ce titre : Woodman’s rep/y lo D' Dirig/u’s sermon on Spiritualism. (En vente chez Bela Marsh, 14, Brom-field, Boston.) La probité et le mérite de l’auteur sont admis par l'adversaire juré et officiel du spiritualisme, le Courrier de Boston, organe de la morgue et des préjugés universitaires. Dans le cours d'une polémique qui s’est engagée au sujet de cet écrit eatre. l’auteur et le Courrier, M. Woodman a produit les certificats suivants revêtus de la signature d’une douzaine de témoins. :

1. « Nous certifions.que ce soir nous avons vu une table d'acajou mise en mouvement sans le contact d’aucune personne en corps matériel, sauf que nos pieds et le support de la table reposaient sur le même plancher. La table avait trois pieds carrés, et reposait sur une colonne terminée par quatre pieds. Aucune personne autre que les soussignés nç se trouvait dans la chambre. Durant les mouvements de la table, elle était â plus de huit pouces de distance de chacun de nous.

n septembre !857.

«Jabez Woodman, Olive Gleason, etc., etc. »

% .■ Noos certifions individuellement que nous avons vo un1 objet pesant mis en mouvement sans contact du médium ou de toute autre personne en corps matériel.

«George G. French, etc., etc.»

3. « Nous certifions individuellement qu’un morceau d’écriture dans lequel il était dit qu'il provenait d’un esprit, » été tracé en notre présence sans l’aide d’aucune main, soit du médium soit de toute autre personne en corps matériel. »

(Suit la signature des témoins, qui forment pour les trois certificats un total de seize personnes.)

Un médecin très-estimé, et homme fort grave, M. le docteur Neidhard, de Philadelphie, m'a dit tenir du docteur Grev, un des premiers praticiens de New-York, que ce dernier étant un jour dans son cabinet à discuter sur le spirituafifiine avec une personne, cette personne fut tout à cowp enlevée de sa chaise et promenée dans l’espace sans aucun soutien apparent. M. le docteur Grey est aujourd’hui un partisan avoué et tnèe-zélé de la nouvelle foi.

Comme vous voyez, mon bien cher maître, le spiritualisme avait répondu d’avance et répond tous les jours à l’imprudent défi de Y Univers {i), et voilà le grand saint Cupcrtin lui-mème réduit à déposer son auréole de demi-dieu pour prendre un rang plus modeste parmi les simples médiums. Je pourrais multiplier les citations qui précèdent, mais ce serait ici une répétition superflue. Les journaux américains fourmillent de récits semblables.; le lecteur curieux consultera ces recueils avec intérôt

11 me reste à vous décore deux antnas genres de manifestations ¡physiques* ■ ..i eiiupa /ne iroineLej

Des faits «oat .rapportés sous la garantie des témoignages les plus respectâmes., qui, s’ils,sont bien réels., sont appçjés à modifier considérablement les idées que la science s’est .formée jasqu’ici de l’impénétrabilité des corps. L’-hono-rahle M. Barthet, de la Nouvelle-Oxléans, vous a déjà fait connaît!« un cas très-perplexe ide cette .nature qu'il avait observé dans sa propre maison. Une jeune tille placée dans .l’état somnambulique, exhibait tout à coup aux nombreux

(I) L'Univen, dans un arlklc où il e»allait les prouesses uCfleiiies de saint Cupcrtin, défiait le spiritualisme deprodoire ae»«lMele*4,«ooie)le force.

témoins qui l’avaient observée attentivement jusque-là, des objets qu'elle prétendait recevoir de certains esprits, et que les perquisitions les plus minutieuses n’avaient pu faire découvrir un instant auparavant, ni sur sa personne ni dans la pièce où ceci se passait. En outre, des pièces de monnaies et des bijoux qu’on avait mis sous clé dans un endroit inaccessible au médium étaient soustraits mystérieusement et placés ensuite, par un procédé invisible, entre les mains de l’enfant.

Pendant mon séjour à la campagne, dans l’Etat de New-Jersey, durant l’été de \ 856, je fus appelé pour donner des soins à la famille d’un fermier du voisinage. Son nom est Pinney; il habite au lieu appelé Phalanx, dans le comté de Monmouth, à cinq milles de la petite ville maritime de Red-Bank. Cet homme n’est point spiritualiste, dans ce sens qu’il est exclusivement fermier, autrement dit absorbé par les soins de sa laborieuse profession et peu en souci des affaires de l’autre monde. Il s’attache même à combattre les tendances opposées de sa femme, personne d’intelligence et d'instruction. Du reste M. Pinney jouit de l’estime générale. Voici ce qu’il m’a raconté. Un cercle exclusivement composé de personnes de sa famille était réuni chez lui autour d’une table, en vue de provoquer des manifestations spirituelles. M. Pinney, après avoir considéré quelque temps à distance, en observateur critique et narquois, s’avise d’adresser mentalement aux esprits le défi de faire sauter en l’air un cahier qui se trouvait au milieu de la table : aussitôt le cahier de voler au plafond et de tomber ensuite lentement avec ses feuillets écartés luttant contre la résistance de l’air. Je passe au point que j’ai particulièrement en vue. M. Pinney fumait beaucoup, et les esprits lui donnèrent le conseil (par les rapt) de renoncer à cet habitude, mais le pécheur résistait à la grâce. Or les calumets étaient dressés en panoplie contre le mur de l’appartement : les esprits invitent la famille à passer dans la pièce voisine après avoir fermé soigneusement toutes les ouvertures de la première. Au bout d’un quart d’heure, les raps donnent le signal d’y rentrer : les

pipes avaient toutes disparu sans laisser après elles la moindre trace.

M. le juge Preston, île Boston, un vénérable vieillard que j’ai l’honneur d’avoir pour ami, m’a dit avoir vu souvent et tenu entre ses mains un pigeon blanc, d’une variété entièrement inconnue dans le pays, qui avait été mystérieusement apporté à une dame par l'esprit de son fils, tandis qu’elle était dans sa chambre, toutes les portes et toutes les fenêtres étant closes. Cet oiseau se perchait de préférence sur le portrait de ce fds défunt. Il disparut un jour sans que l’on sache trop comment, et il n’a plus reparu.

11 existe, assure-t-on, une autre classe étrangement bizarre de manifestations spirituelles que je n’ai jamais eu l'occasion de constater. L’extrait suivant d’une lettre insérée dans le N. E. Spiritua/ist du 26 septembre 1857, va vous donner une idée du phénomène.

. Rutlanil (Vcrmont), lo 15 septembre 1857.

d Dans le cours de ce voyage, étant arrivé près de East Middlesexburg, et ayant appris que miss .CQgSwpll, la demoiselle dont la figure et d’autres parties du corps sont couverts de légendes tracées par les esprits, résidait dans cette ville, je me .présentai chez elle. Je lui étais complètement étranger, et pas une personne de la localité ne me connaissait... Elle était assise à trois pieds de moi, et nous nous faisions face l’un à l'autre. J’étais parfaitement éveillé et mes yeux tout grands ouverts; je puis donc garantir la réalité du fait suivant. Après quelques minutes, il apparut sur son bras des lettres presque aussi grosses qu’un tuyau de pipe. Ces lettres étaient légèrement en relief et d’une couleur rougeâtre que la blancheur du bras contribuait à faire ressortir. Ces lettres étaient Dr. M. Les autres lettres du nom étaient trop peu distinctes pour être déchiffrées. « Attendez, n dis-je au médium, « l'esprit va peut-être essayer de se rendre plus lisible. » Au bout de quelques instants tout disparut. Nous attendîmes ensuite un certain temps,

et les bras ayant été découverts de nouveau, nous trouvâmes, tracés sur le bras droit en lettres d’environ un pouce de long, ces mots : I)' MayhcW. Les lettres étaient rouges comme du sang, et si fortement en saillie qu’on eût dit qu’une corde de fouet était enfilée entre chair et peau...,

« John Mayhew. »

Le fameux miracle des stigmates de saint François d’As-sises se trouve ainsi renouvelé sons une forme encore plus merveilleuse dans la personne de miss Cogsvvell et de plusieurs autres médiums delà même catégorie, que Y Univers ■ ne songe eertainemeirt pas à canoniser. Le don des miracles, attribut tant révélé de la sainteté, n’est donc plus qu’une aptitude naturelle que toute organisation est plus ou moins apte à manifester. Le plus humble mortel découvrant en lui-même le secret du prestige qni l’a si longtemps«ourbé dans un tremblant respect, refuse dès-lors son encens aux divinités factices du supernaturalisme, et il s’écrie avec l’esclave de Térence, dans le noble orgueil de son affranchissement moral :

* t . . ... Homo tumatque Ilutnant niMl à me atienum pttto.

- Salut, mon cher maître, et à bientôt.

X..., D.-M.

•UJ«JimqqB H .•¡ssuauu >ü;*i îrj» .jiuwiu ut,i ui>

ÎUmtA. — 111* Lettre, page 6Î0, ï* afinis, au lieu de onvie, 'tiw ironie.

Pag» 650, au lieu d* toute Ja raison, lit» toute raison.

Page 646, Ie' alinéa, a« lieu de ne venait en aide, Us*i ne lui vonait, etc. Page 650,an fieu de impénétrable à toute la raison, liie: à toute raison.

CONTROVERSE.

VALEUR DU MAGNÉTISME ET DU SOMNAMBULISME.

Une fois déjà, en août 185(3, M. Guibert de Glelles m'avait amené à montrer avec lui combien il serait regrettable que le journal du Magnétisme s’égarât dans la recherche exclusive de la valeur du spiritualisme en magnétisme. Dans l'article que je fis à cette époque, je m’éitais aussi élevé contre des prétentions vraiment exagérées et injustes parfois envers la médecine que souvent nous lisions dans un journal que nous voudrions rendre digne de tous. Ce que je disais en général et sans application directe sembla personnel à M. G. de C., et notre honoc.tble collaborateur crut devoir m’opposer mes propres écrits pour me montrer que j'avais devancé ceux que je réprimandais en fait de lèse-médecwic. Je suis heureux de cette méprise, garnie permettra disposer quelques réflexions dont l’effet sera, je l’espère, de montrer que la pratique de la médecine n/est pas incompatible avec celle du magnétisme. Om . >f i■ /

« L'homme, disait Pascal, n’est absolument ni ange, ni bôte, pensée que j’interpréterai en disant : L’homme est rai composé d’une substance spirituelle, Ame ; d'un agent impondérable, électricité vitale ; et d'un corps, agrégat moléculaire. De l’harmonie de ces différents éféwjen*» résulte la santé et les manifestations de tontes les facultés humain«». > Le corps est formé de parties nombreuse» appartenant à la ] matière proprement dite et ces parties sont toutes soumises au* lois physiques et cbimiqncs qui régissent la matière. Ainsi, les vaisseaux peuvent être plus au moins pleins, les liquides purs ou altérés, les organes blessés, diminués ou augmentés dans leur consistance ou dans leur volume. Tons

ces désordres relèvent de la matière et constituent de* maladies contre lesquelles des moyens physiques auront une action efficace. Ainsi, il y a des embarras de l’estomac et des intestins dont un remède évacuant fera prompte justice , comme je viens, par exemple, d’observer un cas d’occlusion intestinale portée à un si haut degré, que le malade, au milieu des plus atroes souffrances , rejetait les matières fécales par la bouche, et qui fut guéri quand j’osai administrer des purgatifs les plus énergiques. Ainsi encore, il y a dcsaliérations du sang produisant l'affection dite chlorose, et qui, à un degré des plus compliqués, ne cède bien complètement qu’aux préparations chimiques du fer. Je pourrais continuer à énumérer les cas assez nombreux dans lesquels une médecine intelligente a l’influence la plus positive, mais j’en ai dit assez pour que le principe de l’existence et de l’utilité d’une médecine d’observation et de raisonnement soit admis sans contestation. ,

Mais si certaines altérations organiques, physiques et chimiques survenues dans le corps humain trouvent des reinè:les efficaces dans des moyens du même ordre, physiques et chimiques, il n’en est pas moins évident pour tout médecin vita-lisle qu’un grand nombre de désordres résultant du trouble dans les rapports entre les forces vives (âme et électricité vi taie) et les organes, soient bien plus efficacement influencés par les forces vives elles-mêmes que par des agents médicinaux. Pour être complète, pour être aussi fructueuse que la théorie le fait connaître, la médecine doit donc avoir égard à la double nature des éléments constitutifs de l’organisme humain. Une exclusion absolue de l’un des trois termes conduit à une doctrine incomplète. Or, nous savons que la médecine classique reste dans cette exclusion des forces vives ; c’est pourquoi j’ai toujours cru de mon devoir de chercher à faire pénétrer dans la science la doctrine des forces vives, et qu'aujourd’hui comme autrefois je répéterai : « Combien sont coupables ceux qui, par intérêt, par ignorance ou par de ridicules préventions, entravent la marche de la science nouvelle ! » Sans aucun doute « l’étude approfondie du magnétisme doit

remettre dans la voie qui mène à la vérité la physique, la nia-ilecine et la philosophie... Et quand les principes qu’un des premiers j’ai formulés relativement à ces forces dynamiques seront admis, l’art de guérir sera profondément modifié dans ses principes et dans sa pratique. Je pense donc encore aujourd’hui comme il y a quinze ans...

Mais des deux forces qui vivifient l’organisme humain, il en est une essentiellement active et volitive, qui voit ses facultés intelligentes s’accroître d’une manière prodigieuse, quand, par l'intermédiaire de la seconde force élémentaire, l’électricité vitale, le char de l’âme, elle entre en rapport intime avec les objets étranges dont l’élément vital, leur électricité propre aussi, se soude, se fusionne avec elle, substance fluidique, ¡essence vitale de l’organisme humain. Un rapport substantiel, vital et intime s’établit entre l’âme de l’homme élevé à cet état particulier que le magnétisme peut développer, et dès lors, en effet, tous les phénomènes de la lucidité se produisent. En nous renfermant dans la sphère de la lucidité médicale, nous reconnaissons par l’observation que les lucides sentent et voient les choses qui peuvent les guérir. De là, la médecine intuitive. Les annales du magnétisme sont remplies de cures merveilleuses obtenues à l’aide de la lucidité, et moi-même j’eri ai cité de fort remarquables. Ce principe de la médecine intuitive me paraît donc certain, et je le proclame encore comme autrefois. Cependant il est une restriction sur ; aquellej’ai insisté dans mes écrits, mais moins peut-être (jue j’eusse dû le faire. C’est que pour s’abandonner irrévocablement à la lucidité, il faut que cette lucidité soit complète, ferme et fixe. Or là est tout l’écueil et l’apparente dissidence ®tre le magnétiseur d’une pratique récente et celui qu’une

Îongue expérience a familiarisé avec les caprices du somnambulisme. En effet, les sujets chez lesquels la lucidité telle que âme humaine est susceptible de la manifester dans le suprême degré de la clairvoyance sont rares d'abord, et ce qui Est encore plus rare, c’est la permanence àlongue date de cette Clairvoyance qui voit les maladies et qui indique le traitement fjui doit les guérir. Nous savons tous qu’il n’y a pas de rap-

port entre la faculté que tel somnambule possède relativement au diagnostic des maladies et celle qui trouve le remède. Ainsi, on peut bien révéler à un malade son mal sans pour cela qu’il soit prouvé que les remèdes indiqués sont le résul-tat de l’intuition. Or, le plus grand nombre de somnambules lucides finissent par se faire une médication routinière, qui est loin d’être le fait de l’intuition. I)e là, un danger facile à comprendre, de là un éloignement naturel de celui qui peut s’apercevoir de cet obscurcissement de la faculté intuitive; l’expérience de tout magnétiseur qui pratique longtemps et beaucoup le conduit donc à ne pas faire du somnambulisme le fond de sa pratique. Le somnambulisme est une source de lumières que nous recherchons avec ardeur, pour nous éclairer quand cette lumière estasse! vive et asseï pure pour prévaloir sur ce que l’intelligence a pu conquérir pas ses procédés naturels, mais, je le répète ici comme dans m i Phyxiuloyie : « Les facultés du somnambulisme ne peuvent être utilisées que dans uit petit nombre de circonstances, « encore faut-il que l'application en soit faite par quelqu'un de profondément expérimenté dans l’art si difficile du magné» tisme pratique... Le médecin, à son début dans le magnétisme ,- est trop soupçonneux. ; il écarte de bons somnambules; lemagnétiseur nouveau est a»contraire trop crédule (p. 206).

Que le praticien mette donc tous ses efforts à classer cm anomalies, à les diriger et à utiliser chacune dans sa sphère. Certes, nous ne dissimulerons pas que cette tentative est des plus difficiles; car, encore une fois, la clairvoyance des soa- ' nnmbulesbrille par étincelles capricieuses. Nous n'hésitons1 donc pas à prédire au magnétiseur sans étude et sans expérience que, plongé dans un océan ténébreux, il prendra sou-j vent la trompeuse image de l’ombre pour la réalité (p. 2#7). 11 devient évident, par les considérations que je viens de-déJ velopper, que je n’étais pas aussi exclusif en faveur de lanw decine des somnambules que M. Guibert de Clelles le croit. M quia pu entretenir notre estimable collaborateur dans cet« pensée, c’est qu’il a recherché exduslvemement mes opj nions dans la première édition de l’ouvrage, ouvrage publw

en 1841, tandis que depuis, en 1848, j'ai fait paraître cette Physiologie, Médecine et Métaphysique du magnétisme, corrigée par l’expérience. Ce nouveau travail, de l’avis que tous les hommes compétents ont ¿mis, est bien supérieur à son aîné, et pourtant je sais, moi, qu’il est encore bien imparfait. Pourrait-il en être autrement? L’esprit humain marche toujours ; à chacun de nous de suivre le mouvement ascensionnel et de ne pas hésiter à corriger, à TPj'eter, h admettre, à proclamer ce que l’ignorance de la veille avait laissé imparfait, impossible ou ténébreux pour notre faible intelligence.

Je terminerai cet article sur la lucidité en signalant un phénomène sur lequel on n’a pas suffisamment fixé l’atteution. Dans les guérisons obtenues par les traitements que les somnambules s’ordonnent pour eux-mêmes, la cause intime et virtuelle est plus souvent due à la puissance de la force ¿mimique sur l’organisme qu’à la propriété des remèdes. Ces remèdes, en effet, sont sans rapport a*ec la maladie dans beaucoup de cas, et pourtant les effets attendus et prévus par le somnambule ont lieu. 11 y a là uue action d’un ordre plus élevé et qui, en prouvant et en expliquant la puissance de Pâme humaine, ouvre un champ vaste à de graves étuctee. ¡Tarais -déjà, du reste, parlé de cette théorie dans cet ouvrage «pie je viens de citer à la page 238, et l’observation attentive d’un grand nombre de faits de somnambulisme magnétwjoe et d’extase naturelle que j’ai vus depuis m’a confirmé dans cette manière devoir relativement au rôle important de l'âme humaine quand elle est élevée au suprême degré de la foi quel que soit son objet.

t>r CHARPIGNON.

Orléans, décembre 1857.

VARIÉTÉS.

CAS EXTRAORDINAIRE DE SOMNAMBULISME.

Une jeune femme de la ville de Galusliiels, âgée de dii-huit ans, fut saisie, il y a vingt-trois semaines, d’une fièvre bilieuse très-grave, par suite de quoi elle se trouva extrêmement faible et abattue. Le docteur Tweedle se décida à employer sur elle le mesmérisme (le chloroforme avait déjàété pratiqué avec un faible succès). En conséquence, après quelques essais, il parvint à la plonger dans le sommeil magnétique. Même avant de passer à cet état, la pauvre malade avait perdu complètement l’ouïe et la parole, et ce n'estque par l'éj criture qu’elle se faisait comprendre. Elle se trouva alors dans ; une espèce de léthargie, et resta plusieurs semaines sans cou naissance; néanmoins, elle était impressionnée par la voloall de son magnétiseur, qui acquit sur elle une influence extraor dinaireetsemblaitcom manderau corps aussi bien qu'à l'esprit Nous allons racooter brièvement ce dont nous fûmes $ moin. Quand le docteur entra avec nous, la malade, qui éuitj plongée dans le sommeil magnétique et complètementimj mobile, sembla s’éveiller et manifesta l’impression que lot causait sa présence : les yeux s’ouvrirent, son regard élw comme dans l’état ordinaire, et la coloration de la face sein blait annoncer la santé. Elle reconnut son magnétiseur, tu»» elle ne vit aucune des autres personnes qui étaient dansl chambre, et elle ne distingua que les objets appartenant» magnétiseur ou placés sous son influence. En ce moment elle était sourde et muette. La faculté de parler lui fut d * bord rendue au moyen de passes dirigées sur le larynx: e% suite la surdité fut dissipée par des procédés analogues qi1 durèrent environ cinq minutes; la malade manifestaitnft vive souffrance, et éprouvait de légères convulsions penuajjf que ses sens reprenaient leur activité. A la suite de cette opt

ration, elle parla librement, et entendit la voix de son magnétiseur. Il se mit à exciter diverses parties du corps, en commençant par une des articulations du petit doigt ; et alors elle déclara qu’elle entendait la voix d’un chanteur. Le doigt voisin fut actionné, et elle dit entendre une seconde voix qui accompagnait la première, et ainsi de suite. Quand les quatre doigts de la même main eurent été actionnés, elle dit entendre un concert de voix d'hommes et de femmes, qui exécutaient divers morceaux, et comprenant plusieurs parties, contralto, ténor et basse. Sur les questions qu'on lui fit, elle répéta les paroles qu’elle disait entendre chanter, mais c’était pour elle un travail qu’elle n’accomplissait qu’avec une certaine répugnance. Les articulations supérieures furent ensuite actionnées, et le même effet se produisit; seulement ce fut une musique instrumentale qu’entendit la malade.

On nous fit voir plusieurs autres expériences. Le coude étant actionné, il y eut un éclat de rire ; l’action sur le talon produisit des mouvements de danse et des visions chorégraphiques. L’action sur l’épaule produisit des visions de fleurs très-variées, mais la malade n’en pouvait nommer aucune. Il est à remarquer qu’elle ne pouvait désigner d’une manière spéciale aucun objet, soit parmi ceux qu’elle voyait réellement, soit parmi ceux qu’elle voyait en imagination. Elle ne avait plus son propre nom ; elle ne pouvait voir une montre, » moins que ce ne fût celle de son magnétiseur, ou qu’elle »'ait été magnétisée par lui, de même alors elle ne pouvait «i nommer cet objet ni en dire l’usage.

On fit encore d’autres expériences. L’action sur l’articula-lion du genou produisit des visions effrayantes de chiens furieux ; en agissant sur la mâchoire, on lui fit apparaître des poules et des œufs; sur la cheville du pied, des lapins; sur los du nez, des mouches; sur la pointe du nez, des oiseaux dont plusieurs avaient un aspect terrible, et cette dernière vision lui arracha des cris d’effroi. Du moment où l’on cessait action sur un organe, l’objet qu’il avait fait apparaître

s’évanouissait, et il n'en restait p is la plus légère trace dans l’esprit de la malade.

Nous n’avons pas la prétention d’expliquer ces phénomènes extraordinaires : ce sont des mystères de la nature humaine, sur lesquels les recherches des magnétiseurs parviendront peut-être à jeter quelque lumière. Nous nous bornons à publier ce que nous avons vu, et nous pensons que notre devoir de journaliste est de faire connaître des faits aussi remarquables, espérant que le docteur Grégory ou quelque autre mesmériste expérimenté en fera le sujet de ses études.

Traduit du Border Advertiser, par A. S. M.

LE MAGNÉTISME EN ITALIE.

Ce n’est pas seulement en France que la presse périodi que s’occupe de magnétisme et de sciences occultes, En Italie, le journal ultra-catholique la Chitta catftoliq consacre (dans son numéro du 17 octobre dernier) un ar ticle de vingt pages à l’examen du magnétisme dont il recoo naît la réalité et la puissance, et dont il attribue la cause non à la volonté humaine, non à un fluide quelconque, mais» un esprit étranger, ange ou démon. Peu importe le système l’essentiel, c’est l’adhésion au fait. Notre cause fait partou de rapides progrès.

Le Nizzardo, journal de Nice, a publié, le 27 novembr dernier, un article très-bienveillant sur le magnétisme.

1er, et nous avons trouvé qu’elle n’élait pas inférieure à sa réputation. Après les expériences bien connues de catalepsie, d’insensibilité et d’attraction, on en est venu à des essais de lucidité. C’est là, comme on sait, l’écueil le plus ordinaire des sujets les plus vantés, et les magnétiseurs les plus prudents s’abstiennent de faire devant une nombreuse assemblée des expériences de lucidité, parce que cette admirable faculté est capricieuse de sa nature et souvent fait défaut au moment où on la désire le plus. 11 n’en a pas été ainsi chez mademoiselle Louise. Trois personnes, parfaitement inconnues d’elle et de son magnétiseur, lui ont présenté des objets appartenant à des individus absents, et de suite , sans hésitation, sans tâtonnement, elle a désigué exactement les propriétaires de ces objets, de leur genre de vie, leur état de santó, la cause de leurs maladies, et a prescrit des remèdes. C’est surtout dans l’extase qu’elle a été ravissante. Sa physionomie, assez commune dans l’état ordinaire, s’est en quelque sorte transfigurée, et suivant les

expressions de la musique, a exprimé successivement les sentiments divers, la colère, la vengeance, la prière, la joie, la gaîté, etc. ; les poses les plus poétiques et les plus pittores-pies ajoutaient à l’expression de ses traits et offraient des ypes admirables où un artiste eût pu puiser les plus bril-ants sujets d’étude dans le ravissement religieux ; on croyait tair sainte Thérèse absorbée par l’amour divin. La société était dans 1 euchantement ; des applaudissements unanimes ont éclaté à plusieurs reprises, et il y avait des moments où es spectateurs, électrisés par la contemplation de l’exta-ique, paraissaient partager les sentiments qu’elle savait ai )ien exprimer. Un jeune poète a été l’interprète de l’admi-ation générale en célébrant, daas de forts jolis vers, les merveilles de l’extase somnambulique.

A. S. M.

Le Journal de l’Hérault du 2k janvier dernier publie la note suivante :

« On cite un cas de léthargie très-curieux qui a été con-' staté ces jours passés à l’hôpital de la Charité. Un médecin commençait à procéder à l’autopsie d’un cadavre, lorsque la léthargie a cessé, et le patient a repris connaissance. Heureusement que l’incision n’était pas profonde. Le malade est est voie de guérison. »

MÉDIUMS ET SOMNAMBULES.

Les journaux spiritualistes d’Amérique contiennent d’innombrables relations de guérisons attribuées aux esprits Plusieurs de ces relations sont signées des personnes qui ont été guéries, indiquent d’une manière détaillée toutes les circonstances, et n’ont rien d'invraisemblable aux yeux di ceux qui sont familiarisés avec le magnétisme. En en présentant quelques échantillons à nos lecteurs, nous les mettrons à môme d’apprécier l’hypothèse par laquelle on explique les faits.

Dans le Spiritual Telegraph du 14 novembre dernier, on lit une lettre signée C. Nerwood et datée de Pontiac (Mij chigien) : nous en extrayons ce qui suit : « M. Jackson, d cette ville, a un fils de dix-sept ans, qui, depuis son enfance était sujet à des convulsions quand il éprouvait quelqu contrariété. Les accès les plus terribles avaient lieu quao il était en proie à une passion violente ; quelquefois ils du raient plusieurs heures. Des médiums , ayant été consultés n’ont pu ni apporter aucun soulagement, ni indiquer la eau: du mal.

« Une réunion spiritualiste ayant eu lieu dans le voisinage madame Colvin, médium, fut possédée par un esprit indiei nommé Œil-de-Pigeon. Pour éprouver le pouvoir de a lui-ci, quand le médium fut entrancé, on lui amena le jeurt homme. Œil-de-Pigeon déclara qu’il avait des accès, et que la cause du mal venait d’un ver (le texte dit même snakt serpent) long de quatorze pouces, et qui se trouvait dans l’estomac ; cet animal était plat, vert foncé, et chaque fo que le jeune homme éprouvait une irritation, l’helminth frappait sa tète contre l’estomac, et continuait cette manœu

vre jusqu'à ce que le jeune homme tombât sans connaissance.

«L’esprit prescrivit un remède et annonça que dans six semaines le parasite serait expulsé en deux morceaux. Quoique personne n’eût confiance dans cette promesse, la prescription était si simple qu’on se décida à l’exécuter. En six semaines, jour pour jour, le reptile fit son apparition , et il était tout à fait conforme au portrait qui en avait été tracé. Le jeune homme est parfaitement guéri et parait jouir d’une excellente santé.

« Si la connaissance n’a pas été communiquée aux hommes par les esprits, d’où vient-elle?

« Beaucoup de témoins peuvent certifier l'exactitude de tous ces faits. »

La conséquence que tire la narrateur nous semble au moins hasardée. Qu’un individu entrancè, c’est-à-dire arrivé à un état anormal et voisin de l’extase, voie l’intérieur du corps d’un malade et indique un remède efficace, c’est ce que nous présente journellement le somnambulisme dont on ne songe aucunement à rapporter la cause à l’action des esprits. Qu’on donne au voyant le nom de médium, qu’il ait les yeux ouverts ou fermés, peu importe. Si les phénomènes de lucidité , bien que prodigieux et inexpliqués, ont été acceptés sans difficulté comme étant le résultat de facultés exceptionnelles, il n’y a pas de motif pour attribuer à une autre cause les phénomènes exactement semblables qui se passent en Amérique.

Le même journal (n° du 17 octobre dernier) insère le certificat suivant : « Il y a quelques mois, J. J. Huddleston vint chez moi : j’éprouvais au genou une vive douleur qui durait depuis fort longtemps, je boitais tellement, que c’était . pour moi une extrême difficulté de faire le tour de ma maison. M. Huddleston posa sa main précisément sur le siège de la douleur, sans que je le lui aie fait connaître ; la douleur disparut presque instantanément. Je cessai d’être boiteux, et je fus délivré de mon mal pour toujours. Je dois ajouter que j’avais précédemment consulté une foule de doc-

teurs qui m’avaient prescrit do nombreux médicaments dont je n’ai jamais retiré aucun soulagement. (Signé Mary Helm.)»

En Europe, on n'hésiterait pas à attribuer une telle cure au magnétisme ; en Amérique, on eu fait honneur aux esprits, bien que rien n’autorise à recourir à une pareille intervention. Nous savons que l’homme peut exercer sur son semblable une action salutaire, que dans certains l’efficacité de cette action est très-rapide et presque instantanée ; il n’y a donc là que le jeu tl’une loi mystérieuse sans doute, mais dont l’existence est incontestable. Faire intervenir les esprits, c’est imiter les MirvUle, les Raiset et autres démono-îâtres, qui se croient en droit d’attribuer à des puissances surhumaines toutce qu’ils jugent inexplicable, et même tout ce qui leur semble porter l’empreinte des êtres imaginaires dont ils se sont plu à dépeindre le caractère et les attributions. En signalant les étranges conceptions auxquelles acon-duit le système démonologique, nous espérons en préserver ceux qui tiennent à ne pas s’écarter de la route du bon

Sifc al*

A. S. MORIN.

BflfM ri. —'DansVarticle intitulé Contraverse sur ta Somnamhilitmi, d« journal idu 25 janvier ¡dcrs ¡or, il s'est glissé quelques iaplcs d'impression qui nuisent à la correction et à l'intelligence du texte; ainsi il faudra lire: A la ïi* ligne de la pago 42, sur une expérience, au lieu de car mon.

A la Wltpwfle la •pogo 44, d’une flotte, au lien de dans la flotte.

A la dertiitti'B ligne de la jnie *e, paraîtraient au lieu de paraissaient. A l’anlé-pénultièmc ligne de la page 47, les au lieu de ces.

A la 16e ligne de la page 48, il faut esquissés, au lieu de exprimés.

A la i** ligneide la poge 49, il faut ce qui reste, au lieu de ce qui exilU. A la iV ligne le la nrtnie page : les yeux fermés et convulsés, au Iha da mouillés. , .

A la r ligne du dernier alinéa de la page 51 : du temps, au lieu de«

pays.

A.la 10* ligne du même alinéa : des sujets, au lieu de des esprits.

A la ün du 4* alinéa de la page 53 : leur conviction ne peut en tenir liea, an ii«n de l’en tenir là-

Baron du POTET, propriétaire-gérant.

CLINIQUE MAGNÉTIQUE.

Nous avons reproduit dans des précédents numéros le compte-rendu des cures obtenues par M. Bégué, directeur dn dispensaire magnétothérapique de Toulouse. Nous donnons ici les observations faisant suite à ce compt-rendu.

14' Observation. — Madame Journés, A3 ans.

Névralgie Intercostale cbroniciue.

La douleur provoquée par cette affection était continue depuis plusieurs années, et se faisait sentir au dos, du côté droit principalement, avec des élancements vers l’épigastre. Le mouvement l’excitait à un haut degré. Insuccès d’un grand nombre de médications. — Guérison en quatre séances par le magnétisme.

15' Observation. — Marie Estève, 17 ans.

Amenorrhée.

Depuis trois années, tous les mois, à peu près vers la même époque, cette demoiselle était prise par des symptômes divers qui, sans mettre ses jours en péril, lui faisaient éprouver de très-vives souffrances. Ils se traduisaient par des coliques excessivement violentes, le ballonnement du ventre, le gonflement des mamelles, trouble de la vue, migraine, vertiges et fièvre. — Cet état persistait de six à huit jours au même degré d’intensité, et disparaissait sous l’influence d’une diarrhée dont la durée n’était que de quelques heures.

Cette affection, qui revenait péridioquement tous les mois, était la conséquence d’une trop grande plasticité du sang, le flux menstruel ne pouvait s’établir convenablement. — Les traitements variés entrepris à diverses reprises n’ont jamais produit de résultats favorables.

Magnétisée cinq ou six jouis avant l’apparition de ces symptômes, elle les a vu disparaître comme par enchantement, et le sang, redevenu liquide sous l’empire de la magnétisation, a pris enfin la route tracée par la nature.

L’eau magnétisée en boisson et en lavement a été dans ce cas un puissant auxiliaire.

16e Observation. — Madame Mandement, ¿0 ans.

Tome XVII. — N° 8. _ 2« Série. —25 Février 1858. i

Gastralgie chronique.

Cette affection n’ayant présenté aucune particularité incessante, je me borne à en signaler la guérison en quatre séances.

17' Observation. — M. Dalaux, AS ans, mesureurcle grains au canal.

Lombago, huit inois.

La guérison rapide obtenue chez ce malade est une de celles qui semblent tenir du prodige.

Depuis huit mois, Dalaux a essayé d’un grand nombre de remèdes pour trouver un peu de soulagement, tout a été inutile.

Il se fait conduire chez moi dans le courant du mois de janvier 1856. — Il est pelotonné par suite d’une contraction violente des membres qui tendent à se porter vers le centre du corps ; la tête est fortement inclinée, le menton touche presque le creux de l’estomac ; la figure est déformée par une contraction incessante des muscles de cette partie; douleur lancinante aux lombes, au côté droit surtout, s’irradiant sur toute la surface dorsale et au cou par excès du mouvement spasmodique. Les spasmes se communiquent aux branches nerveuses des viscères pectoraux, car la respiration et la circulation sont sensiblement modifiées dans certains moments.

Les quatre premières magnétisations donnèrent un calme général et firent cesser les contractions des muscles. Le malade se redresse en quelques jours et marche, quoique péniblement encore, sans le secours d’aucun aide. Néanmoins il se sert d’une béquille par précaution, dit-il, car il ne pouvait croire à un soulagement si rapide.

Vers la quinzième magnétisation l’amélioration est manifeste. Les muscles du cou sont encore un peu douloureux, la tête est aussi un peu tiraillée, mais tous les symptômes ont perdu de leur importance, le malade marche rapidement vers la guérison.

Sur ces entrefaites, une indisposition subite vint me surprendre et me mit dans l’impossibilité de continuer à lui donner mes soins. Pour soutenir le mieux obtenu, je l’adressai à un de mes collègues en magnétisme, M. Bastié, qui s’empressa de le recevoir et de le magnétiser avec une solli-

citude toute particulière. Les soins assidus qu’il lui prodigua hâtèrent le retour vers la santé, et trois semaines plus tard le rétablissement était complet.

18e Observa lion. — M. Castérés, 38 ans, plâtrier.

Asthme chronique. Pleurésie aiguë.

J’ai entrepris le traitement de ce malade lorsque les médecins qui le visitaient depuis tongtemps eurent déclaré leur impuissance.

Je constate un asthme humide, avec pleurésie récente. — Le malade est couché dans son lit qu’il n’a pas quitté depuis trois semaines environ ; une maigreur générale extrême, la face cadavéreuse, les lèvres et les pommettes très-colorées, les yeux ternes et enfoncés dans leur orbite ; — le pouls est petit et fréquent; — à l’auscultation on entend des râles sifflants et craquants, la percussion dévoile une matité considérable, principalement à la base du poumon droit ; — toux continuelle avec expectoration de crachats épais et jaunâtres mêlés à une grande quantité de salive ; la respiration est difficile, haletante ; — douleur lancinante au côté droit, siège d’un épanchementabondant; —selles diarrhéiques, plusieurs fois dans la journée ; enfin, surexcitation nerveuse très-prononcée : le malade est en proie à des frayeurs continuelles, et la nuit se passe sans sommeil.

Voilà en résu né l'état dans lequel je le trouve. Ses jours me paraissent compromis si une nouvelle médication ne vient sur l'heure enrayer les progrès du mal.

Le magnétisme est appliqué sans retard ; un quart d'heure n’est pas écoulé qu’un bien-être général se manifeste; la respiration devient moins laborieuse, la face se colore uniformément, et une légère moiteur se répand sur tout le corps. Je le laisse dans cette situation. — Le lendemain, je constate un mieux sensible, la nuit a été bonne, la surexcitation nerveuse a totalement disparu, la douleur au côté droit est moins violente, le pouls a acquis plus de force, les pulsations sont presque à l’état normal. Je réitère l’opération de la veille. — Après la quatrième magnétisation, le malade se lève, et promène autour de son habitation ; il mange avec appétit et les digestions sont bonnes. Tous les symptômes

alarmants ont disparu, son état est des plus satisfaisants, la sérénité renaît sur son visage.

Mais l’asthme le tracasse toujours un peu sans pourtant qu’il soit aussi violent; le malade vient chez moi se faire magnétiser; il fait quatre kilomètres tous les jours sans éprouver une trop grande fatigue ; les rigueurs de la saison n arrêtent point sa marche et n’influencent en rien l'amélioration obtenue.

A cette époque du traitement, il me prie de mettre eu somnambulisme une de ses cousines qui avait eu jadis en cet état une clairvoyance remarquable. Mariée depuis cinq ans, elle n’avait plus voulu faire usage de cette précieuse faculté pour être tout entière aux soins de son ménage. Ne voyant aucun obstacle à satisfaire le désir du malade, je me rends à son invitation.

Cette jeune dame se prête gracieusement à l’opération magnétique, et au bout d’un quart d’heure, elle entre en somnambulisme aussi lucide que par le passé. — Elle décrit la maladie de son cousin avec des détails minutieux, et lui dit que la guérison sera parfaite dans trois mois,, pourvu toutefois qu’il exécute rigoureusement les prescriptions qu’elle va formuler : — Magnétisation trois fois par semaine; tous les huit jours une purgation avec mannes, deux onces, pendant un mois ; tisane préparée avec le son, soir et matin. — Pour régime, des bouillons faits avec des pieds de veau, deux fois par jour; viandes grillées ou rôties, et quelque peu d’un vin généreux; — flanelles sur la peau, et se priver de travailler pendant quatre mois. — Trois semaines plus tard, elle fît ajouter aux prescriptions ci-dessus l’usage du cresson de fontaine, une poignée, mangé le matin à jeun sans préparation aucune.

C’est à l’aide de ce traitement d’une simplicité on ne peut plus évidente que la guérison de l’asthme a été obtenue, et qu’elle se soutient encore aujourd’hui.

Bègué.

M. HOME.

M. Home ne se laisse pas facilement pénétrer. Il est sobre de paroles II aime à tâter le terrain sur lequel il doit marcher. Il se méfie de l’observateur attentif. Il n’en veut, de cette catégorie, aucun à scs démonstrations.

M. Home aima les riches. Cela n’est pas défendu. Il aime aussi les bijoux. On ne doit point lui faire un crime de cette passion de prima-dma. Il aime également les bons dîners. Cela est bien permis. Que reprochons-nous donc à M. Home? C'est un manque de franchise; c'est son peu de souci de la vérité et de ceux qui la défendent; son absence de dévouement à la science ; enfin, c’est qu’il n’a à cœur que son propre succès et qu’il ne recherche que ce qui reluit.

Il y a ici quelque chose de mystérieux à approfondir, et ce n’est qu’avec circonspection que l’on doit admettre la cause avouée et soutenue de tous les phénomènes étranges produits par M. Home. Dans tous les cas, uotre sentiment est

Îu’il y a mélange ; que tout n’est pas toujours indépendant.

elui-mCme, etqu’unjour on sera tout étonnéd’apprendre que la force phsychique n’était pas seule au service de M. Home.

Mais est ce bien moi qui ose écrire aujourd’hui ces paroles de méfiance ; moi qui ai loué et prôné le médium extraordinaire, moi spiritualité? Pourquoi pas, si le doute est né dans mon esprit? Est-ce que je ne dois pas la vérité aux hommes qui croient en ma sincérité et en ma prudence ?

La vérité est simple. Elle marche à découvert ; ses vrais apôtres sont pour tous. Ils ne se fixent point dans la classe des oisifs, que M. Home aime par-dessus toute chose. Ainsi M. Home n’est point un apôtre, et s’il est possédé par un esprit, celui-ci n est pas un esprit relevé et dont on doit faire grand cas.

Les facultés de M. Home étaient propres à opérer une révolution dans le monde. Sa pauvreté était une double fortune. Il n’en était que plus libre. Mais il a tout sacrifié à un vain orgueil. On a usé de lui comme on use d’un chanteur de romance. Il a amusé plutôt que convaincu. Aussi pas un témoignage authentique de ses hauts faits n’est sorti de ce. brillant milieu, ce qui prouve que le doute y est resté.

Baron du Potet.

BIBLIOGRAPHIE.

te Monde spirituel ou Science chrétienne de communiquer intimement avec les puissances célestes et les urnes heureuses, par Girard lc Ciu-demberg. i vol. in-12, Dentu, 1857.

Depuis quelques années, une réaction marquée a lieu contre le scepticisme que nous avait légué le dix-huitième siècle : l’homme a besoin de croyances religieuses, il ne peut se résigner à voir sa destinée renfermée dans le monde terrestre, une force irrésistible l’entraîne à la recherche d’un idéal supérieur; il aspire vers des sphères inconnues et cherche le lien mystérieux qui lui permettra de communiquer avec les intelligences occupant les divers degrés de l’échelle des êtres. Une foule de sectes se prétendent en possession des moyens de communiquer avec les êtres extra-humains : quelques-unes se rattachent aux anciennes églises, d’autres sont de création toute récente et se croient favorisées de révélations qui ne le cèdent en rien à celles des temps passés. Toutes sont plus ou moins animées de l’esprit de propagande ; elles publient des livres, des journaux, exaltent les faits sur lesquels reposent leurs croyances , les livrent à l’examen , souvent même offrent de les reproduire et s’en font un moyen de conviction. La science est donc appelée à vérifier ces faits, à en scruter l’exactitude , à en discuter les conséquences: elle doit s’acquitter de cette mission délicate avec une scrupuleuse impartialité, et accepter toute vérité démontrée, quelque perturbation qui en résulte dans les théories établies. Le magnétisme est particulièrement intéressé dans cette exploration ; car les phénomènes qu’il produit ou qu'il a l’habitude d’observer, jouent un rôle important dan* te systèmes des divers thaumaturges; il revendique conn# étant de son domaine la plupart des faits réputés miraculeux; il est en quelque sorte le chaînon qui rattache le ration* lisme au supra-naturalisme. Le livre de M. Girard de Cafl-

demberg doit appeler spécialement notre attention, puisqu’il y est traité du magnétisme, du somnambulisme, des tables tournantes et parlantes.

L’auteur est un catholique fervent, qui est favorisé des visites d’esprits bienheureux et de révélations. Nous n’avons pas l’honneur de le connaître, mais nous devons déclarer que son ouvrage respire la candeur et la bonne foi ; sa conviction est sincère et profonde, il vit dans un monde surnaturel. On peut n’être pas satisfait de ses arguments, expliquer à l’aide des lois naturelles les merveilles qu’il, raconte, mais on ne peut traiter légèrement une œuvre de cette importance, il a droit à uue discussion sérieuse.

Son point de départ est dans les tables tournantes. On peut trouver étrange qu’un phénomène physique aussi bizarre et en apparence d’une aussi faible portée, serve de base à un spiritualisme élevé jusqu’au mysticisme; mais la cause du mouvement des tables amenant naturellement la question d’intervention d’êtres extra-humains, plus d’un observateur s’est ainsi laissé entraîner hors du monde réel et a navigué à pleines voiles dans l’océan illimité des hypothèses.

A Genève, le tabulismc est devenu une religion , et les guéridons sont les organes du Saint-Esprit, ce qui ne devrait pas nous étonner, puisque, sous l’ancienne loi, c’était par le moyen d’un coffre appelé propitiatoire que Dieu était censé rendre ses oracles. *

M. Girard, ayant pris à tâche d'attribuer les mouvements des tables à l’action des esprits, commence par réfuter les théories qui ont prétendu expliquer ces phénomènes sans une pareille intervention. Il discute avec soin et par des arguments tirés de la mécanique, le système de M. de Gasparin, l«i, sans doute, est vulnérable sous plus d’un rapport. Nous nous permettrons, à ce sujet, d’adresser une question préala-

e- H y a environ trois ans que M. de Gasparin certifie avoir obtenu des mouvements sans contact ; la relation d’un homme aussi distingué, aussi recommandable, a produit une vive sensation ; les faits étaient certifiés par un témoignage des

plus imposants. Mais ces faits, les a-t-on répétés, peut-on les reproduire à volonté? M. de Gasparin est sans doute venu plus d’une fois à Paris : a-t-il cherché à rendre ses expériences inattaquables en les présentant à des savants, a des magnétistes , à des personnes en état d observer et dont l’attestation eût achevé de donner la sanction à un point de fait qui dés lors serait au-dessus de toute discussion? Nou ; les expériences de M. de Gasparin sont restées un événement isolé et 9térüe. Hue foule de personnes ont essayé de les renouveler, mais sans succès. 11 est vrai que, dans quelques cercles d'illuminés, on se vante de produire des faits semblables et même de plus étonnants ; mais chaque fois qu’un homme doué de quelque sagacité pénètre dans ces cénacles, tout se tait, les tables sont rétives, les fluides captifs; hier et avant-hier, c’était magnifique, aujourd'hui tout est paralysé, on ne sait pourquoi. Parfois môme, un observateur, émerveillé d'abord de mouvements étranges des tabtes, à force d’attention, finit par découvrir un genou frauduleux qui donne furtivement l’impulsion, ou un pied qui, protégé par l’ampleur des plis d'une robe, frappe des coups mystérieux. Pour mon compte, j’ai cherché de tous cAtés pour sur* prendre enfin quelqu’un de ces prodiges, je me suis rendu partout où l’on m’annonçait qu’H s’en produisait, je me sais soumis patiemment à toutes les conditions imposées (I) ;

(1) J'avsis entendu vanter les résultats prodigieux qu'obtenait un nécroli-gue étranger. Je le priai de vouloir bien m'initier. Il me conduisit au Mus« des antiques, et il posa des feuilles de papier blanc sur le socle des statues ti ntres monuments. Ï1 m'assurait que souvent, quand il retirait ces papiers, il les trouvait couverts d'écritures qu'il regardait comme venant des persos-nages auxquels il s'était adressé, qu'il avait ainsi obtenu des réponses en gret. en latin, «h égyptien, et écrites en caractères lapidaires. J'attendis dcuihe» n» : on retira les p*pten*, il» ne contenaient rien. Une seconde sêarret * aussi infructueuse. L'Initiateur « annonça alors qne j'allais enfin être «* fait : l'esprit de Pascal avait annoncé qu'il ferait une réponse écrile le les* nain, et le rendez-vous Tut pris au tombeau du célèbre philosophe, à l'W* Saint-Etienne-du-Mont. Je n'eus garde d'y manquer. J'attendis onebe«* le nécromancien n'arrivait pas. Puisque j«vais la parole de Pascal, Je me tas» dai k placer une feuille de papier derrière sa pierre tumulaire, et j'éveqtw11

mon nleax. J'attendis encore une'heorc. L'hiérophante ne venant pas, il ' tallut bien faire ma besogne mot-même. Jb retirai respectueusement l«M

loin d’apporter des dispositions malveillantes, j’avais le plus friand désir d’être témoin d’un succès, et je n’ai éprouvé que des déceptions. Plusieurs de mes amis ont fait les mêmes efforts et n’ont réussi qu'à découvrir les mystifications. Je suis loin de conclure à l’impossibilité des mouvements sans contact ; mais je crois pouvoir affirmer que dans l’état actuel de nos connaissances, ce n’est pas un fait acquis à la science; et tout en rendant hommage à la véracité et aux qualités éminentes de l’honorable M. de Gasparin, je regarde comi ■> probable que ses expériences ont été mal faites, et ce sera, je crois, la conclusion à laquelle s’arrêtera tout homme de bon sens, tant que denouvelies expériences, faciles à répéter et accessibles pour tout le monde, ne viendront pas confirmer les premières. Jusque-là, nous n’avons donc pas à juger entre les explications contradictoires de faits qu’on doit tenir pour douteux.

M. Girard passe en revue et critique d’une manière judicieuse les autres explications du mouvement des tables, telles que le prétendu système des vibrations qui n’est qu’un assemblage vide de sens, de grands mots groupés au hasard i et. le système d’un être intelligent et. collectif, formé de la réunion, des. membres de la chaîne, prenant naissance au moment où les opérateurs font la chaîne, pour mourir à la fin de la séance, sauf à revivre et. à remourir à. chacune de3 séances suivantes, système qui a tant séduit M. Jobard, sans doute à cause de l’excellente occasion qu’il y trouvait de soutenir seul un paradoxe bien étoffé. L’auteur passe ensuite au récit de ses expériences personnelles; il ne relate aucun cas de mouvement sans contact, ni même aucun essai de ce genre ; il s’occupe surtout de réponses de tables par le procédé bien connu du soulèvement des pieds ; il trouve dans la justesse de ces réponses la preuve lu’elles avaient pour auteur une intelligence, et il croit pou-

papier : elleétatt vlerge de toute écrlture... La peraonne en qnestion continue de célébrer sei succi? anprcs dea morti et ie déclare méme en étti de «produire le» phénomène« au gré de tona ceni vondronl ae-convaincre par *ui-mSmea ; mai» elle ne rénssit jamais que le jour où vou» n'y èles pas.

voir établir, par les circonstances, que cette intelligence n’était celle d’aucun des opérateurs. Cette partie de son argumentation laisse beaucoup à désirer. En effet, il avoue (page 91) qu’une certaine dame, faisant partie de la chaîne, se lai— sait, par conjecture, un avis sur les questions qui étaient posées, et influençait /es réponses de la table ; il faut donc alors qu’entre cette dame et le médium il se soit établi, nous ne savons comment, une communication intellectuelle, ou que cette dame ait été médium elle-même et ait fait prévaloir son influence sur celle de la personne laquelle on reconnaissait cette qualité, et que, dans l’une ou l’autre hypothèse, le médium réellement influent ait, sans en avoir conscience, traduit sa pensée au moyen des mouvements de la table, ce qui exclut toute intervention d'êtres invisibles. Une des circonstances qui paraît la plus probante à l’auteur, c est qu’une table aurait dicté quatre mots qu’il reproduit, que n’aurait compris aucune des personnes présentes, et qui appartiendraient à la langue slave et formeraient même une prédiction très-compromettante, puisqu’on a jugé qu’elle

n’était pas de nature à être publiée. Nous remarquerons à ce sujet qu’on désigne sous le nom de slave une famille nombreuse de langues, comprenant le polonais, le russe, le bohémien , etc. : on ne nous dit pas au juste à laquelle de ces langues appartenaient les quatre mots en question. Mais l’auteur avoue (page 84) qu’il connaissait très-peu les personnes avec lesquelles il se trouvait ; c’est même ce qui lui

fit trouver si extraordinaire que la table ait répondu exactement aux questions concernant sa famille. Il ne peut donc répondre que la dame qui servait de médium n’a jamais entendu quelques mots de polonais : admettant même la parfaite bonne foi de cette dame, il n’est pas impossible qu’elle ait oublié le peu qu’elle savait de cette langue, mais que, dans l’état de médium où il se développe incontestablement des facultés anormales, elle ait trouvé assez de réminiscence du passé pour composer une phrase de quatre mots.

Ce qui prouve qu’aux yeux de l’auteur lui-même ces expé-riences de tables sont insuffisantes pour prouver l’interven-

lion des esprits, c'est qu’il avoue (page 92) que, pour se mettre en garde contre toute supercherie, il voulut luire parler seul les Uibles. Il lui fut répondu qu’il n’aurait jamais ce pouvoir, et on lui conseilla de recourir au mouvement du bras. Cette expérience consiste à laisser pendre un de ses bras comme un balancier, et à attendre une réponse à une question faite par la pensée. Il obtint ainsi des réponses dues à une force qui, dit-il, n’était pas la sienne. Mais qui ne voit que cette expérience est sujette aux mêmes illusions que celle de la clef et celle du poids suspendu par un fil dont on tient l’extrémité entre ses doigts?... Il termine cette partie de son récit par cet aveu significatif : « Le mode de communication avec les esprits plus ou moins frappeurs, par l’intermédiaire des meubles ou autrement, me paraissait très-imparfait et manquant tout à fait de la gravité que comportent de pareils entretiens. 11 ne laissait aucun moyen de se garantir de l’erreur, aucun de la reconnaître en temps utile. Les notions si importantes sur le monde des âmes, obtenues par cette voie, étaient des plus contradictoires et reflétaient évidemment, dans la plupart des cas, les opinions des interrogateurs ou manifestaient les plus mauvaises tendances (page 95). » Nous verrons si les autres moyens sont à l’abri de ces inconvénients.

M. Girard nous raconte qu’il devint médium écrivant : « Le mode d’évocation consiste simplement à appeler, par la pensée, l’âme qu’on veut consulter et à lui abandonner sa main armée d’un crayon ou mieux encore d’une plume. » Mais il reconnaît, dès le début, qu’il est un genre possible d’erreur, qui consisterait à s’abuser soi-même, à être sa propre dupe, ce qui, dit-il, constitue une des plus singulières situations où puisse se trouver un observateur. Il a donc prévu l’objection qu’on ne manquerait pas de lui faire, et que lui ont faite ses amis et ses proches, c’est qu’en réalité il ne fait autre chose que de converser avec lui-même, et qu’il est le seul et véritable auteur de tout ce qu'il se figure lui être dicté par des esprits extérieurs. Il a dû chercher à se donnèr à lui-même et à donner à ses lecteurs des garanties contre une pareille déception.

Ce qu’il cite comme la circonstance la plus décisive en faveur de la coopération étrangère, c’est que, quand il écrit dans son état de médium , il a une écriture qui n’est pas du tout la sienne , qu’il a même plusieurs écritures essentiellement différentes, selon les esprits qu'il interroge, c’est que les communications se terminent par les signatures avec paraphe des défunts dont les esprits meuvent sa main, et qu’il obtient ainsi les signatures de personnes qu’il n’a jamais connues. Certes, ces résultats sont graves et présentent un problème des plus ardus. Voyons pourtant s’il ne serait pas possible d’en rendre raison. Il est certain que le médium est (fyns un état extraordinaire : il y a chez lui, sans qu'il en ait conscience, une surexcitation intellectuelle, grâce à laquelle il peut rappeler le souvenir d’objets qu’il croyait il jamais eflfecés de sa mémoire ; peut-être jouit-il alors de quelques aptitudes spéciales, notamment de celle d’imiter des types d'écriture dont l’image est dans son esprit ; peut-être aussi possède-t-il une lucidité analogue à celle des somnambules, «t il aurait avec ces derniers ce trait de ressemblance , qu’au sortir de la cris«, il perdrait la mémoire de ce qu’il aurait éprouvé, il ne lui resterait pins qu’un souvenir confus de ce qui se serait passé awtoar «telui. On comprend dès lors qu’un médium, frappé de l'idée préconçue que sa main va être l’instrument passif d'une volonté étrangère, se crée un genre particulier d'écriture1, puis arrive à imiter les écritures, quand elles'lui sont connues , dés personnes dont l’ésprit est censé drnger ses organes. Si ses'facultés sont très-développées, il parviendra à imiter des écritures qu’il n’avait vues autrefois que d’une manière fugitive, et dont 11 croît, dans son état ordinaire, n’avoir conservé aucun souvenir. Pour imiter des écritures qu’ii n’a jamais vues (chose beaucoup plus difficile ■et à.f égard de laquelle nous faisons toutes nos réserves, tant que nous n’aurons pas une constatation authentique},, le médium lirait dans la pensée du consultant et y verrait tout, à la fois le nom du défunt évoqué et son écriture. Pour compléter cette série ascendante d’expériences, il serait intéressant d’évoquer une personne dont l’écriture ne serait connue ni du

consultant ni du médium. Nous recommandons cette épreuve à ceux qui ont le bonheur de connaître des médiums de la force de M. Girard , et nous croyons que le nombre en est bien restreint, si nous jugeons par la pauvreté des résultats qu’ont donnés les médiums et corbeilles que nous avons été à même d’observer (1).

Nous n'avons pas la prétention de donner la claf de toutes les diflicultés que présente l’état de médium ; nous ne faisons que hasarder une h y pothèse en attendant que des faits plus nombreux et surtout bien observés permettent à la science de formuler la loi qui les régit. Nous avous seulement voulu faire voir qu’il n’est pas exact de dire que les phénomènes en question ne puissent s’expliquer que par l’action des esprits. Le recours aux esprits n’est qu’une hypothèse. Un examen attentif prouve qu’elle n’est ni la plus rationnelle ni la plus vraisemblable.

M. Girard, poursuivant le récit de ses succès en nécromancie , nous raconte qu’armé désormais d’un moyen qu’il

(1) Nous avons fréquenté un cercle spiritualiste où se sont trouvées pres-puesque toutes les sommités des sciences occulte* , «fqüi JoUrt d'une certaine célébrité. C'est une corbeille qui est l'instrument des oermmiBicaUons. Quand on évoque un mort quelconque, il ne manque jamais de répondre, quand même il n'aurait pas existé. SI, pour vous assurer de son identité, vous lui faites des questions sur le* particularité* de » Vte, la corbeille fait de* réponses quelconques ,> plu* sotrvent vague* évasives. J'ai vu ordinal»«* ment employer de «oytn suivant : Vc*H demandez À voUe «mi ou «aient évoqué d'écrire son nom de baptême; on vous répond : Ecris-moi dix noms, et je le désignerai le mien parmi le* dix. Vofts écrivez dix noms, et fa 'Corbeille, qui n>st pas sotte, re promène lentement «1 épie un signe de ta» part, qui trahisse votre pensée. Quelquefois elle trouve juste. Dans le -ce* contraire, elle recommence et ainsi de suite. Une dame de mes amies ayant évoqué son mari et ayant écrit les dix noms, la corbeille joua de malheur et ft trompa neur Tôt*. Les défunt* sont tout aussi embarrassés quand «n'leur demande le lieu de tan naissance, leur prolesitoi ou toute antre circonstance» On nous assure que , dan» l'autre monde , les ni or ti o'^Uacienl plu* aucune importance à toutes ces vétilles et s'empressent de les oublier. IIS oublient de même leur langue maternelle pour ne parier que celle ifu médium. ATfipi ne connaît même plus la signification le* termes le*i(rtn* i«mentliees d«i mi* thématique». Tonte* ces déoonvennes ne refroidissent poinJ.leiéledc*iabUu4» qui n'en »ont pas moins persuadés, non seulement de la présence de» esprits corbillonneun, mais même de leur identité.

croyait sûr, il se mit en rapports suivis avec les esprits qu’il affectionnait. 11 obtint les visites d’une jeune femme qu’il avait tendrement aimée. Comme on devait s’y attendre, il eut avec elle les entretiens les plus doux, reçut d'elle les témoignages de l’affection la plus vive ; il sentit même l'esprit invisible lui appliquer des baisers sur la bouche. 11 décrit avec transport le bonheur dont il fut inondé. On est touché de la peinture d’une joie si pure, si angélique. S'il ne s’agissait que d'un roman, la satisfaction serait complète. Mais il s'agit de science, et la raison demande ce qu’il y a de réel dans ce commerce entre deux amants séparés par la mort. 11 est évident que l'imagination suffit pour rendre compte de cet épisode -,. et dès qu’un fait s’explique par l’action des lois de notre nature , il serait contraire au bon sens de recourir à une intervention de l’esprit d’un mort. Certes, il y aurait de la cruauté à enlever à l’auteur une illusion qui le rend heureux : mais du moment qu’il soumet ses actes au jugement du public, il doit s’attendre à l’appréciation consciencieuse des lecteurs et des critiques.

Nous trouvons dans son récit un fait qui mérite d’être noté. Un des premiers esprits qui se présentèrent à lui à l’aide de l’écriture, est un certain Framinanoleo qui se dit son ange gardien, et qui lui'apprit, lors de la dernière guerre d'Orient, que la flotte russe, trompant la surveillance des Français et des Anglais, s’était échappée du port de Sébastopol, s’était emparée de Constantinople, avait brûlé la flotte turque, et que le fils de l’auteur avait été blessé dans un combat de terre : l’esprit donnait tous les détails les plus circonstanciés, de manière à rendre la nouvelle vraisemblable. Il esprit avait donc fabriqué un affreux canard. Dès lors sur qui compter? L’auteur s’adresse à son amie qui, toujours par l’écriture, lui assura que Frammanoleo n’existait pas (ce que tout le monde croira parfaitement) et qu’un mauvais esprit, nommé Sesse-ment, avait imaginé de prendre le nom de ce personnage fictif pour tromper le médium. Bien plus : ce mauvais esprit avait dissimulé sa véritable nature à l’amie angélique

ci avait servi d'intermédiaire pour amener les communications de celle-ci; et quand le médium abandonnait sa main à son amie, le mauvais esprit prenait sa plate , contrefaisait son écriture et parlait en son nom. Comment, après de pareilles déceptions, l’auteur peut-il se flatter de reconnaître l'identité d’un esprit, et qui lui garantit que Sassement existe plus sûrement que Frammanoleo? Si les esprits peuvent^ aussi facilement usurper de faux noms et simuler l'écriture d’autrui, on ne saura jamais à qui l’on a affaire, et les communications ne pourront avoir de valeur que par elles-mêmes, et abstraction faite de leurs auteurs vrais ou supposés.

M. Girard, une fois entré en communication avec les bienheureux, ne devait plus trouver d’obstacle pour s’élever jusqu'aux êtres les plus éminents. S’il se fût adressé à Jésus-Christ, bien certainement il eût obtenu des réponses. C’est la Vierge Marie qu'il évoqua : il en obtint sans la moindre difficulté, et des réponses écrites et signées, et des baisers sur la bouche : en un mot, tout se passa comme avec son amie. 11 dépeint longuement le bonheur que lui procurent ces entretiens qui rappellent les ravissements des célèbres mystiques, de sainte Thérèse et de madame Guvon. Et celle de qui il reçoit des communications, étant regardée par ¡’Eglise comme la Reine du ciel, comme la première de toutes les créatures, le culte d’hyperdulie qui lui est rendu, tendant de plus en plus à l’égaler à Dieu, sinon à la mettre au-dessus, ces communications prennent le caractère de révélations; l’auteur a donc à sa disposition un oracle infaillible, dont les avis sont des ordres échappant à toute discussion, il est seul autant que le pape et les conciles , il puise à son gré à la source de toute vérité. Heureusement la douceur de caractère qui se révèle dans le livre de M. Girard, nous garantit quant aux suites d’une pareille exaltation ; mais mettez à sa place une nature sombre, ardente, chez laquelle la haine des impies soit la première vertu, et le fanatisme armera la main d’un Balthazar Gérard, d’un Jacques Clément, d’un Ravaillac. Qu’un nouvel Abraham en vienne à prendre la voix de l’es-

prit pour la voix de T)icu, et il n’hésitera pas à immoler son fils pour obéir à lin commandement du ciel.

Si l’on examine ces prétendues révélations, on voit qu’elles ne sont que le reflet de la pensée de l’auteur, qu’elles s’accordent toujours avec scs opinions préconçues, qu’elles ne dépassent jamais le cercle de ses connaissances, et que rien, par conséquent, n’empêche d’admettre qu’il les ait tirées de son propre fonds. Quant à la lutte qu’il croit établie entre les esprits qui se disputent sa possession , elle n’a rien que de conforme à ce qui se passe, àj’état ordinaire, dans notre esprit: quand nous délibérons avec nous-mêmes, nous apprécions les opinions contraires, nous les revêtons même en imagination du langage sans lequel nous ne pouvons concevoir nettement les idées, et pour peu que l’esprit s’exalte, nous nous figurons entendre les discours. Notre jugement nous tient toujours en garde et nous empêche de croire à la réalité de paroles articulées et de sons transmis à nos sens. Mais, dans nos rêves où le jugement nous fait défaut et où l’imagination domine, l’illusion est complète, nous voyons des personnages fantastiques, mais à la réalité desquels nous croyons tant que dure le rêve ; nous entendons leurs discours dans lesquels ils expriment des opinions souvent contraires aux nôtres, nous avons conscience d’être étrangers à ces discours et à ces opinions dont nous sentons la fausseté. EX pourtant personne ne prétend que ce soient des esprits qui en soient les auteurs -, à peine éveillés, quand nous nous rappelons le dialogue auquel nous avons pris part, nous savons très-bien que tout s’est passé en nous-mêmes et que le dialogue n’était qu’un monologue. Eh bien , il en est de même du médium qui n’est qu’un rêveur éveillé.

M. Girard n’est pas le premier médium qui ait fait parler la vierge Marie. Mais on a remarqué généralement que le même personnage défunt professe des doctrines très-différentes suivant les cercles où il est évoqué. Marie, catholique orthodoxe chez M. Girard, sera ailleurs protestante , juive, swedemborgienne ; Voltaire, pécheur repentant chez M. Ca-

rion, nous a paru déiste et persévérant dans l’œuvre de sa vie terrestre ; J.-J. Rousseau qui, en Amérique, prêche la doctrine des sept sphères, conformément à l’enseignement de MM. Hare , Edmonds, etc., se prononce en France pour la métempsycose. On ne peut admettre l’identité entre des personnages jouant en même temps des rôles contraires. Chaque petit cercle se tire d’affaires en disant que son esprit visiteur est le vrai, et que les autres sont des esprits menteurs qui usurpent son nom. Mais toutes ces prétentions opposées se valent au fond, aucune n’a de critérium pour distinguer un faux esprit d’un vrai, chacune se fait un titre de ses assertions, et là, comme dans les sectes religieuses, l'orthodoxie, c’est ma doxie, et le fanatisme étouffe la voix de la raison.

Si les communications spirituelles avaient réellement pour auteurs les personnages auxquels on les attribue, on devrait y retrouver leur style. C'est ce qui n’a pas lieu, et rien ne se ressemble moins que les prétendues dictées de Bossue t. Fénelon, Mirabeau, Châteanbriand', etc., et les écrits immortels de ces grands hommes. Cette disparité si choquante devrait suffire pour prouver la fausseté de l'origine. Mais les spiritualistes ne sont pas embarrassés pour si peu : ceux auxquels j’ai soumis cette objection m’ont répondu que la forme importait peu, que l’esprit se bornait & inspirer les pensées et que le médium les revêtait comme il pouvait de son langage. S’il en est ainsi,le médium n’est plus un instrument passif, il apporte une coopération active; pour fournir l’expression des pensées, il faut que son intelligence intervienne. Et comme néanmoins il a conscience de n’être pour rien dans ce qu’il a écrit, il faut croire dès lors qu’il s’abuse et que, sans s’en douter, il est auteur au moins de la forme. Dès qu’on se trouve ainsi ameué forcément à reconnaître qu’un individu, dans l’état de médium, peut composer des discours sans en avoir conscience, il n’y a pas de raison pour ne pas admettre qu’il puisse également être l’auteur du fond, et que, par conséquent, au heu d’être le secré-

taire d'autrui, il n’ait fait qu’écrire ses propres inspiiations. Ainsi s’écroule tout l’édifice des communications des esprit,«.

On demande aussi comment il se fait qu’un esprit ne puisse écrire que dans la langue du médium et soit hors d’état d’employer la langue dont il se servait sur terre. Que la vierge Marie ait appris le français depuis quelle a quitté la vie terrestre, je le veux bien. Mais elle n’a sans doute pas oublié le syro-clialdéen qu’on parlait de son temps à Nazareth. Que M. Girard veuille bien lui demander d’écrire une seule fois dans cette langue (je suppose que pour lui, il ne la connaît pas), et il est bien certain qu’il n’obtiendra rien. Mais je prévois la réponse. L’esprit dira qu'il ne veut pas se prêter à satisfaire une vaine curiosité. C'est un moyen trop commode de déguiser son impuissance. S’il importe pour l’humanité de répandre la croyance aux communications spirituelles , si, en particulier, Marie fait des révélations utiles au salut des âmes (1), elle doit environner ses manifestations de toutes les conditions nécessaires pour en assurer l’efficacité, et, par conséquent, donner à son intervention un caractère d’authenticité qui ferme la bouche aux incrédules... Hélas! non seulement les esprits refusent de se servir de3 langues que ne connaît pas le médium, mais ils ne comprennent môme pas les questions qui leur sont faites dans ces langues. N’est-il'pas clair dès lors que le médium ne cesse pas d’ètre livré à ses propres forces, et qu’il ne faut pas chercher en dehors de lui l’auteur de ce qu’il écrit ?...

M. Girard consacre un chapitre particulier à la discussion du magnétisme animal, du somnambulisme, de la magie, de de la sorcellerie et des possessions. Nous devrions le suivre sur ce terrain , mais nous sommes obligé d’abréger cette no-

(I) Au lieu d« faire 4 la sainte Vierge des questions dont la réponse est cennue d’avance, M. Girard devrait bien lui poser de véritables difficultés dont il n'a pas la lololion et qui intéressent gravement la cause du christianisme; il pourrait, par exemple, l'interroger sur les deui généalogies contradictoires données par saint Matthien et saint I.nc, rt qui sont iuic pierre «l'achoppement pour beaucoup de personnel qui cherchent la vérité.

lice déjà trop étendue pour le cadre du journal. Nous nous bornerons à apprendre à nos lecteurs que M. Girard adopte les idées de M. de Mirville et croit, comme lui, que c’est le diable qui est l’auteur des phénomènes magnétiques et som-nambuliques. Nous avons déjà réfuté plus d’une fois cette étrange théorie : nous aurons prochainement occasion" d’y revenir.

L’ouvrage dont nous venons de rendre compte se recom-mandepar de brillantes qualités, par des sentiments élevés, une poésie attachante, un style élégant. Etpourlant nous doutons qu’il obtienne le succès que devrait lui assurer le mérite de l’auteur. Les hommes de science y verront un livre de dévotion et regretteront que le bons sens n’ait pas tenu la bride au sentiment; les magnétistes seront peu flattés de concessions.qui aboutissent à faire d’eux des instruments du démon ; quant aux dévots, je doute qu’ils puissent digérer les tables, et ils préféreront les révélations de sainte Brigitte et de sainte Marie Alacoque.

a. s. MOKIN.

CONDAMNATION SUH LA DÉMONOMANIE DE LOUDUN.

URBAIN GRANDIER, par M. Alexandre Douas père.

Ce travail, réuni à un autre intitulé : Massacre du midi, compose un volume récemment édité par la librairie t/iôd-Irale. Si on n’y trouve pas la verve ordinaire de l’admirable conteur que vous savez, l’absence de cette qualité est rachetée par un caractère sérieux qui seul pouvait nous autoriser à parler ici de ces recherches historiques. L’intérêt, d’ailleurs, ne fait nullement défaut ; le sujet seul en fournissait surabondamment ; il suflisait de consulter les documents originaux, de les compulser, de les analyser, de les repro-

(luire par extraits. C’est ce qui nous paraît avoir été fait avec un certain soin. Mais alors pourquoi ne pas être entré dans quelques détails sur les sources, soit à l’aide de notes au bas des pages, soit par quelques indications préliminaires? Cette précaution était d’autant plus opportune que, signé du nom d’un homme qui a souvent encadré un fond historique dans les broderies du roman, la méfiance est de mise. Cependant, pour cette biographie de Grandier, on ne saurait douter que l’auteur ait eu des prétentions à la gravité historique; ainsi, malgré l’absence de justifications dont nous nous plaignons, nous admettons l’œuvre sérieuse, et nous allons la discuter sérieusement.

Un fait ressort, avant tout, du procès de Loudun, c’est que, pendant son séjour dans cette ville, Urbain Grandier fut 011 butte à des haines de village, à des coteries de couvents qui eurent une large part dans sa condamnation. Ces passions mesquines, furent suscitées par les avantages physiques et spirituels dont la nature l’avait doué, une. rare beauté» un esprit cultivé, une éloquence entraînante; elles furent très-bien servies par la raideur de son caractère qui lui faisait affronter ses ennemis, au lieu de chercher à les calmer. A cette cause première et principale vint se joindre la haine du cardinal de Richelieu, excitée par l’attribution à Grandier d’un pamphlet : la Cordonnière de Loudun. Nous savons que M. Bazin , dans son excellente Histoire de Louis XIII, a cherché à repousser ce dernier motif, en disant que Richelieu ne prenait pas tant de détours pour abattre ses ennemis, qu’il les frappait en face et sans trop se préoccuper de l’opinion publique, qui n’était pas alors ce qu’elle e9t aujourd’hui. Nous ne nions point que ce ne fut là le véritable esprit du grand ministre; mais ne peut-on pas aassi admettre qu’il eilt dédaigné de tirer vengeance d’un fait qui lui paraissait sms importance, et que, plus tard, lorsque Laubardemont fut commis par là pour juger l’affaire, ce dernier faisant du zèle se rattacha à cette circonstance comme à un fait principal? M. Dumas, qui ne discute pas d’ailleurs l’opinion de M. Bazin, nous parait donc dans le vrai, lorsqu’il a adopté

l’opinion contraire à celle de cet historien; seulement il y attache trop d’importance.

Les motifs principaux de la condamnation, tout le monde le sait, furent les possessions de plusieurs religieuses. Aux yeux de M. Dumas, ces possessions ne sont que jongleries infâmes, inventées àplaisir par les ennemis de Grandier; un pur prétexte. Il a adopté plcinemcntl’opinion émise àcet égard par un protestant réfugié en Hollande, dans un écrit imprimé à Amsterdam. Nous, au contraire, nous croyons aux possessions, nous croyons à la bonne foi des juges; et c’est dans le livre de M. Dumas que nous allons puiser des arguments contre lui.

Faisons d’abord remarquer que toute l’antiquité a cru aux possessions : cette doctrine se lie à celle de la métempsycose. Des génies de diverses natures, des esprits bons ou mauvais, des anges gardiens ou des suppôts de Satan nous tiraillent dans tous les sens ; Robert entre Alice et Bertram. Homère révèle ce système en philosophe, dans les conseils qu’il fait tenir à ses dieux pour délibérer sur les actions de ses héros. L’homme, selon sa nature particulière qu’il a puisée dans le sein de ses parents et dans l’influence astrale, est plus ou moins sensible à cette action supérieure des esprits, tout en ayant par son esprit propre le pouvoir de résister. Bocrate, Jeanne-d’Arc, Cardan, Le Tasse et bien d’autres, avaient sur cette assistance d’en haut des perceptions d’une grande netteté. Nous connaissons des personnes qui reçoivent ainsi fréquemment des avis, des conseils pendant le sommeil et surtout au moment du réveil. La présence de l’esprit se manifeste par un léger clapotement qui se fait au milieu de l’air et non contre un objet. Les idées, les noms propres sont alors souvent clairement et nettement révélés; mais quelquefois par mirage, ainsi que 'le raconte M. Cahagnet pour les personnes qui ont pris du haschisch. Dans ces cas, les esprits qui communiquent sont extérif-urs à nos corps et n’agissent que par attouchement fluidique, par infiltration fractionnelle ; mais ils peuvent aussi faire invasion complète, s’incorporer à un être, le posséder, et, lorsque ce sont de mauvais esprits, l'amener à des crimes ou produire des ma-

ladies. Les Juifs attribuaient à des possessions ou à des influences d’esprits l’épilepsie, la catalepsie, etc., et ils pouvaient être quelquefois dans le vrai. L’exorcisinc prescrit par l'Église est une magnétisation qui peut bien chasser un esprit, puisqu’on peut aussi en appeler. Nous ne doutons pas non plus que des maladies naturelles ne puissent être guéries de la môme manière : voilà les guérisons miraculeuses opérées par les neuvaines, les médailles bénies, les amulettes de tout genre et les prières en général, quels que soient leurs noms et leurs formes, dont l’efficacité dérive seulement de la sincérité, de la ferveur et de la persistance, et non pas de son nom ou de la couleur et de la coupe d’un habit.

Les faits de Loudun ne sont donc qu’un cas de cette nature ; c’est ainsi que les a compris, et, selon nous, avec une grande vérité, un auteur moderne, dont nous sommes loin d’ailleurs d’adopter les tendances rétrogrades : M. de Mirville nous paraît avoir donné un sens assez vrai à cette affaire; et il est fâcheux, pour en revenir au sujet de notre article, que M. Dumas ne se soit pas pénétré de cet esprit : sa foi au magnétisme pouvait faire espérer qu’il aurait mieux interprété les faits soumis à son examen. Reprenons donc son livre, et chicanons-le un peu. Il est assez robuste pour ne pas se laisser épouvanter et même pour que nous ne lui fassions pas grand mal.

La pratique delà magie était chez Grandier, nous apprend-il, un goût de famille; Pierre, père de Urbain, et Claude son oncle, qui firent son éducation, conjointement avec les jésuites de Bordeaux, pratiquaient déjà la magie. «Lamai-« son qu’habitaient les Ursulines leur avait été cédée à un « prix au-dessous de celui qu’elle valait, parce que le bruit « courait par la ville qu’il y revenait des esprits. Son pro-« priétaire avait donc pensé avec raison que rien n’était plus « propre à chasser les fantômes que de leur opposer une «communauté de saintes et religieuses filles qui, passant « les journées en jeûnes et en prières, ne pouvaient guère “ donner prise aux démons sur leurs nuits : en effet, depuis un an qu’elles habitaient la maison, les revenants eu avaient

«complètement dispara, ce qui n’avait, pas peu contribué « à établir dans la ville leur réputation de sainteté, lorsque u leur directeur mourut. »

Bientôt après les bruits reparurent. « On entendit d’abord « sur les toits de la maison de grands bruits pareils à des « plaintes et à des gémissements; bientôt les fantômes se ha-« gardèrent à pénétrer dans les greniers et dans les man-« sardes, où leur présence s’annonçait par un grand bruit de « chaînes, enfin ils devinrent si familiers qu’ils en arrivèrent « jusqu’à entrer dans les dortoirs pour tirer le drap des lits « et enlever les jupes des religieuses. »

M. Dumas ne voit là qu'un amusement de jeunes religieuses. Sans doute cela peut être, mais assez souvent des faits identiques se sont manifestés, que l’on ne pouvait attribuer à aucune plaisanterie, pour que l’on doive au moins ici se tenir sur la réserve.

Dans d’autres passages, on retrouve des circonstances non moins caractéristiques. Ainsi (page 302) : « Les Heures de la « supérieure furent arrachées deux fois de ses mains, et je-« tées à ses pieds, et, au moment où il (son confesseur, l'abbé « Mignon) les ramassait pour la seconde fois, il reçut un « soufflet, sans qu’il pût voir la main qui le lui avait donné.»

M. Dumas ne pouvait pas ajouter foi à ces circonstances ; et cependant n’a-t-on pas vu, dans l’affaire de Cideville, ne voit-on pas tous les jours aux États-Unis, des objets inanimés s’agiter violemment,sans cause apparente, comme les Heures de la supérieure ? 11 suffirait de parcourir le Journal du magnétisme pour y trouver des exemples de coups donnés à distance, qui rappelleraient le soufflet donné par une main invisible.

Beaucoup de traits épars, dans la notice de M. Dumas, peuvent servir à tirer des inductions en faveur de l’intervention des esprits. C’est ce que confirmerait, croyons-nous, k ne pouvoir en douter, la publication des pièces officielles et complètes du procès ; et il serait à désirer, clans l’intérêt des sciences psychologiques et magnétiques que l’on entreprît ce travail.

Dans l'état actuel des choses, nous croyons qu'aux yeux de tout homme un peu adonné aux expériences de la magie, l'intervention des esprits est manifeste. Reste à savoir si cette intervention était due à une influence occulte antérieure à Grandier, et indépendante de son fait, on si elle était le résultat de ses coupables opérations. Les dépositions des religieuses soumises à l’exorcisme tendraient à la faire attribuer à Grandier ; mais l’influence involontaire des exorcistes est toujours immense, et ceux-ci étant persuadés à l’avance de la culpabilité de Grandier, c’en était assez pour faire tenir un tel langage aux religieuses. On ne pourra donc probablement jamais faire la part exacte des opérations magiques de Grandier, s’il en a pratiqué. En proie à toutes les douleurs de la torture, il répondit, selon M. Dumas, à Laubardemont : « Je i n’ai point commis de crimes, Monsieur, mais seulement des « fautes. Comme homme, j’ai abusé des voluptés de la chair, « mais je m’en suis confessé, j’en ai fait pénitence, et crois « en avoir obtenu le pardon par mes prières; et, ne l’eussé-je « point obtsnu, j'espère qu’en faveur de ce que je souffre en « ce moment, Dieu me l’accorderait. »

Pour satisfaire des passions auxquelles il ne sut pas résister, cet homme n’avait-il pas craint de troubler le monde surnaturel? S’il en est ainsi, c’est sans doute une grande faute, car c’est le plus grand abus qui puisse être fait de la science,

niais nul, de nos jours, n’oserait dire que cette faute méritât

de si affreux supplices. C’est dans le for intérieur de la conscience que se jugent ces questions; à Dieu seul il peut être réservé de punir ces témérités. En intervenant dans ces matières obscures, la loi humaine n’a jamais commis que des monstruosités. Aussi lorsque Louis XIV fit ouvrir les portes des prisons de Normandie à un grand nombre de personnes qui y étaient détenues pour cause de magie, et qu’il commua pour plusieurs la peine de mort en celle du bannissement, il donna le signal d’une graude réforme à introduire dans la législation ; il mit un terme aux infamies commises par d’absurdes magistrats, tels que les De Lancre, infamies mille fois plus affreuses que celles qu’ils prétendaient réprimer.

Grandier mort, tout ne fut pas fini à Loudun. Bordeaux fournit encore un nouveau directeur à ce cornent. Ce fut Surin, homme d’une ardente charité, d’une piété évangélique, surnommé par les biographes l’homme de Dieu, qui fut désigné pour remplir le poste vacant. Il arriva à Loudun en décembre 1(53A, c’est-à-dire quatre mois après la mort de Grandier. Ses premiers soins furent employés à calmer l’état d'agitation des religieuses, et notamment de la supérieure, Jeanne des Anges; mais quelques mois s’étaient à peine écoulés, que le nouveau directeur ressentit à son tour les atteintes du mal dont cette supérieure était obsédée. Surin fut rappelé par ses supérieurs ecclésiastiques deux ans après, en 1636. Il y reparut l’anné suivante. Jeanne des Anges ayant été, selon un vœu, prier à Annecy, sur le tombeau de saint François de Sales, revint bientôt à une santé complète. Mais l’état de Surin persista près de vingt ans: ce ne fut qu’en JG57 qu’il fut à son tour délivré de ses souffrances.

Ce vénérable ecclésiastique a laissé beaucoup d’écrits, la plupart fort connus et justement estimés. Ils contiennent plus d’un trait curieux sur lui-même, et qui se rapportent au sujet que nous étudions. En voici quelques-uns :

Dans une lettre qui semble avoir été écrite vers 1663, et qui est adressée à une religieuse, il parle de lui en ces termes : « Depuis mon arrivée dans cette ville, j’ai passé par une « bien rude épreuve de corps et d’esprit. Jusqu’à présent, j’ai « été dans les remèdes, qui m’ont considérablement affaibli, « en renouvelant mes soulèvements d’estomac et mes vomis* « ments, passés depuis six semaines, comme je vous l’ai dit « à Laval. J’ai pris depuis huit demi-bains, qui, au lieu de me « procurer quelque soulagement, n’ont fait qu’augmenter mon « mal, ma faiblesse et cette langueur générale qui meconsu-« me. La fièvre presque tous les jours, indigestions perpétuel-it les ; un appétit infatigable, avec tout cela un dégoût extrême a démon régime ordinaire. Je ne m’étais jamais trouvé si mal. « Vous dire ce que j’ai enduré de peines et d’agonies pendant « tout cela m’est chose impossible, tant mes souffrances étaient

« cuisantes; car je n’avais point encore éprouvé un délaisse-« ment et une obscurité pareils. Aussi ne me suis-je laissé a aller, quelquefois clans les moindres maux, à des impatien-oces et à des sensibilités vraiement extraordinaires, à des « attaches et à des empressements pour certaines créatures n qui me semblaient pouvoir me consoler dans mes peines « ou m’en divertir. Ajoutez à touteela les violences que l’esprit « de Dieu me faisait souffrir, pour me faire résister à toutes ces e insinuations, et vous aurez quelque idée des rages, des fu-« reurs et des murmures où la nature se laissait emporter. « Pour tout dire en un mot, c’est alors que j’ai commencé à 0 connaître expérimentalement ce que vous m’avez dit si sou-« vent de vos peines. Je n’avais point encore été convié à de « telles noces ; néanmoins, depuis un ou deux jours, je me sens « un peu soulagé, et mon esprit est à présent plus détaché de « moi-même et de tous mes intérêts, de sorte cjue je suis con-« vaincu, que, pour satisfaire exactement à la justice de Dieu, «je dois être abandonné a toutes les peines, et passer par des « états encore plus humiliants et plus semblables à ceux du c véritable enfer, et ainsi je dois les voir se succéder en moi « comme les différentes scènes d’une tragédie sur un théâtre,

« sans y prendre plus de part qu’un spectateur, et souffrir en « moi, av ec patience et résignation, tout ce qu’il plaira à Dieu « d’y permettre de pénible et d’humiliant, et m’oublier moi-« même, le plus que je pourrai, et ne m’inquiéter ni du passé,

« ni du présent, ni de l’avenir.....L’oubli de moi-même et la

« simplicité d’esprit me sont à présent fort nécessaires. J’ai « été, pendant tout ce temps en une peine profonde et en de i grandes perplexités, touchant l’usage de la viande ; car, d’un « côté, mes parents, mes médecins et mes amis me le conseil-« lent absolument, comme très-nécessaire ; ma prudence « charnelle me le persuade aussi, comme très-utile dans l’état h de faiblesse et de langueur ou je suis ; mais la simplicité in-« térieure et l’oubli de moi-même me représentent ce soulage-« ment comme indifférent. Au reste, la crainte de violer l’or-« dre secret de Dieu m’a retenu jusqu’à présent, quoique avec u d’extrêmes violences, et je n’ai pu encore me résoudre.

„ rjuelquo besoin que j'en aie, ;ï m'accorder aucun soulage-

« nient, *

Un pense involontairement, en lisant ces lignes, Job sur son fumier, aux tentations de saint Antoine. Si l'on eût fait alors l'analyse du sang de Surin, ou eût certainement remarqué une grande déperdition de globules ; la faiblesse physique, suite des privations qu’il s'imposait et de l’absence du régime animal, avait nécessairement exalté, exaspéré son moral, et disposait son esprit à se dégager plus facilement de son corps, pour se mettre en rapport avec les êtres surnaturels. Sur sa possession, il donne les détails suivants : « Les choses sont « venues si avant que Dieu a permis (je pense, pour mes pé-« ehés) ce qui ne s’est peut-être jamais vu en l’Église, que, « dans l'e\ercice de mon ministère, le diable (1) passe du corps « de la personne possédée, et, venant dans le mien, m’assaut « et me renverse, m’agite et me traverse visiblement, en me f. possédant plusieurs fois, comme un énergumène. Je ne sau-(i rais expliquer ce qui se passe en moi durant ce temps, et, k comme cet esprit s’unit avec le mien, sans m’ôter ni la con-« naissance, ni la liberté de mon âme, eu se faisant néanmoins « un autre moi-même, et comme si j’avais deux âmes, dont « l’une est dépossédée de mon corps, de l’usage de ses or-« ganes, et se tient à quartier en voyant faire celle qui s’y est h introduite. »

Citons enfin un curieux passage rapporté par Bayle (Dict. crit.), et extrait du Journal des savants, mai, 1689 (p. 200): h Au temps auquel le P. Surin exorcisait les possédées de Lou-« dun, les démons déclarèrent que deux magiciens s’étaient « saisisde trois hosties, pour les profaner. Le P. Surin se mit en « prières, pour obtenir la délivrance du corps de son maître, « et consentit que le sien propre fût mis au pouvoir des défi nions, pour le racheter. Les offres furent acceptées et l’é-« change exécuté. Les démons tirèrent les trois hosties d’entre « lès mains de leurs suppôts et les mirent au pied du soleil « du Saint-Sacrement, qui était alors exposé, et l’un d’eux en-

(i) 11 fallait dire plutôt un esprit.

( tra dans le corps du père, qui demeura possédé- ou obsédé « presque tout le reste de sa vie. »

Bayle reste stupéfait et n’ose conclure. Nous ferons d’abord remarquer que cette version diffère de celle plus haut racontée par Surin lui-même ; nous voudrions que des témoignages dignesdefoi certifiassent le fait. Enfin, ces preuves pourraient-elles être fournies,que nous dirions encore qu’il y adansl’his-toire plusieurs exemples d’apport d’objets par des forces invisibles, que des faits analogues se produisent journellement en Amérique.

U LAllOTHE.

Le Journal de l'Hérault du 24 juillet dernier a publié la note suivante :

On cite un cas de léthargie très-curieux qui a été constaté ces jours passés à l’hôpital de la Charité. Un médecin commençait à procéder à l’autopsie d’un cadavre, lorsque la léthargie a cessé, et le patient a repris connaissance. Heureusement que l’incision n’était pas profonde. Le malade est en voie de guérison.

Baron do POTET, propriétaire-gérant.

Paris, — Impr. ce Pommeret et Moreau, 42, me Varia.

FAITS ET EXPÉRIENCES.

TE DOMPTEUR I>E CffÈVAUX.

Les journaux anglais ont fait mention récemment des expériences mystérieuses d’un Américain, dompteur de chevaux, sans le secours d'aucun moyen disciplinaire. Nous trouvons k ce sujet, dans le journal le Sport, la note suivante :

« Cette mystérieuse prescience n’est point chose nouvelle ; Sullivan, l’irlandais, la possédait il y a environ soixante ans, et plus récemment, M. Catlin a divulgué le fameux secret qui a valu à Sullivan une certaine célébrité.

« Nos recherches sur Eclipse nous ont conduit à indiquer ce même nom de l’une des plus étranges individualités qui figurent dans les annales du turf : c’est Sullivan, né en Irlande, dans le village de Charleville. Sa réputation, qui a été fort grande, reposait sur des faits irrécusables. 11 prétendait, afin de mieux détourner la curiosité publique, que l’effet extraordinaire qu’il obtenait sur les chevaux les plus fougueux était dû à la magie de quelques paroles dites à l’oreille des animaux qu’il voulait soumettre, si bien qu’on le désignait sous le sobriquet de charmeur de chevaux. La singularité de sa méthode semblait d’ailleurs justifier sa prétention.

« Ce qu’il y avait de plus étonnant dans l’habileté de Sulli-vant, c’était la promptitude avec laquelle il opérait. Il ne reculait devant aucune difficulté. Il s’enfermait avec l’animal, et une heure suffisait ordinairement pour que la métamorphose se fît. Ni la menace, ni les coups, ni la force n’étaient employés, et pourtant le résultat obtenu dans un intervalle de temps si court était généralement durable. On convenait d un signal auquel la porte de l’écurie, où il restait tête à tête Tous xvu. — Ko !t®. _ 2. Série. —10 Mars 1858. 5

avec le cheval indompté, devait être ouverte. Pendant cette étrange conférence, 011 n’entendait que peu ou pas de brui« à l'intérieur ; puis, quand le signal était donné et qu’on ouvrait la porte, on trouvait le cheval couché par terre, l'homme étendu à côté de lui et jouant avec lui comme 1111 enfant avec un petit chien. A partir de ce moment, l’animal montrait une docilité à toute épreuve ; il se soumettait aux disciplines les plus contraires à sa nature primitive.

k M. Crocker a été témoin d’une des plus difficiles épreuves par lesquelles l’habileté de cet homme ait eu à passer. Il s’agissait d’un cheval qu’on n’avait jamais pu ferrer. Sullivan vint, vit l’animal rétif, s’enferma avec lui, et au bout d’une demi-heure le prodige était opéré. Le lendemain M. Crocker. tout plein d’incrédulité, se rendit chez le maréchal-ferrant à l’heure où le cheval devait y être amené. Beaucoup d’autres curieux l'avaient accompagné. On savait que ce cheval avait été destiné à la cavalerie, que la science des écuyers de l’armée avait vainement tenté de l’apprivoiser, et on avait pensé avec quelque raison qu’aucune discipline ne réussirait, puisque celle du régiment avait échoué. Néanmoins le succès de Sullivan fut complet. « Je remarquai, dit M. Crocker, que le « cheval paraissait terrifié chaque fois que le charmeur le « regardait ou lui parlait, et, en vérité, ce serait chose im-« possible que de comprendre comment un pareil ascendant « pouvait s’obtenir.

« Ce secret, disait, il y a quelques années, le Morniwj Advertiser, vient enfin d’être divulgué par M. Catlin, auteur d’un ouvrage intéressantsurles Américains du Nord, elle même que nous avons vu à Paris possesseur d’un cabinet d'histoire naturelle, de raretés archéologiques et botaniques recueillies outre-mer. « Il m’est souvent arrivé, dit-il, conformément à l'u-« sage assez généralement répandu parmi les hordes sauvages « des Montagnes Hocheuses, de poser ma main sur les yeu* « d’un veau et de souiller fortement dans ses narines; après 1 quoi, accompagné de mes amis de chasse, je me suis pro-« mené à cheval pendant de longues heures, le petit prisonnier i, suivant mon cheval à la piste sans désemparer. C’est par ce

« même procédé qu’on apprivoise ici les chevaux sauvages-« Quand un Indien en a capturé un, quand il s’est assuré de a lui au moyen d’un lasso, il avance graduellement jusqu’à ce o qu’il puisse poser sa main sur les yeux de l'animal et qu’il , soit parvenu à lui souiller dans les naseaux ; le cheval se a calme aussitôt, et sa soumission immédiate est telle que « l’Indien n’a plus qu'à le monter pour le ramener au « camp. »

« M. Ellis, propriétaire à Cambridge, ayant lu l’ouvrage de M. Catlin, eut l’envie d’essayer si ce mode d’apprivoisement réussirait sur des chevaux anglais. Il en fit l’expérience sur un poulain d’un an, qui avait été séparé d»; sa mère trois mois auparavant et n’était jamais sorti de l’écurie. L’épreuve se fit dans des conditions défavorables, car c’éiait en plein air et au milieu d'un grand nombre de personnes. M. Ellis ne parvint qu’avec peineà couvrir les yeux dece petitanimal tout àla fois peureux et sauvage; enfin, la chose étant faite, il lui souffla dans les naseaux. Il ne s’ensuivit aucun effet ; alors il ne se borna pas à souffler, mais il aspira, et aussitôt les mouvements impétueux du poulain se calmèrent : il devint immobile, puis il trembla. Il paraissait prendre uu vif plaisir à l’épreuve qu’il subissait, et levait la tête pour mieux recevoir l’haleine qu’on lui insufflait. Le lendemain on recommença l’expérience, et, à partir de cette époque, non seulement il se laissait diriger à volonté, mais il eût été impossible de parvenir à l’effrayer. D’où il suit qu’aujourd'hui il est à peu près certain que chacun peut opérer des métamorphoses semblables à celles qui sont demeurées si longtemps le privilège de cet Irlandais.

« Sullivan mourut en 1810 ; son fils lui succéda ; mais, soit qu’ij ne fût qu’incomplètement initié dans la mystérieuse science de son père, soit qu’il fût incapable de la mettre en pratique, il n’obtint jamais que des résultats douteux et finit par quitter le métier. De très-belles offres d’argent avaient été faites à Sullivan en échange de son secret. On lui proposa aussi, moyennant de gros salaires, d’aller à l’étranger, mais il refusa. Il avait la.passion delà chasse, et en Irlande il pou-

vait mieux que partout ailleurs la satisfaire. Il lui fallait le-belles campagnes, les renards, les meutes et les huniers de üuhallow. » (Presse du 22 ffrrier.)

On ne saurait douter un seul instant que le magnétisme ne soit la cause principale du résultat obtenu, le magnétisme produira bien d’autres merveilles.

Baron Du Potet.

PRÉVISION SOMNAJIBDLIQUE.

En écrivant Feu Lionel, ne dirait-on pas que M. Scribe a connu l’histoire d’un jeune homme que nous nommerons prudemment Jules Bernard ?

Il y a quelques années, il se trouvait à la tête d'une manufacture considérable : il y régnait, mais ne gouvernait pas. Se sentant plus de goût pour le plaisir que pour les affaires, il vivait gnlment.

Un jour, le dernier jour d’un moi9, il eut un réveil terrible ; il se trouva dans l’impossibilité de faire honneur à ses engagements.

Il fit secrètement un paquet de quelques hardes, et disparut.

Le lendemain, son domestique entrant dans la chambre vit une lettre cachetée, placée en évidence sur la table de travail. Elle était adressée à M. Bernard père et était conçue en ces termes :

« Un négociant qui fait faillite est perdu d’honneur. J’aimais mieux l’honneur que la vie. Demain, je serai mort. »

L’alarme fut vive dans la famille Bernard. On fit jouer le télégraphe ; on avertit la police ; on fit des insertions dans les journaux. Mais on ne put recueillir aucun renseignement.

Un ami de Jules, un auteur dramatique très-spirituel, voulut que l’on consultât une somnambule.

La somnambule, aux mains de laquelle ou plaça une cravate de Jules, répondit avec assurance :

— Je le vois. Il marche seul, il marche à pas précipités.

— Où se trouve-t-il?

— Dans une forêt... c'est la forêt de Fontainebleau. Dieu! qu’il a l’air agi lé ! Oh ! courez ! courez ! Vous arriverez trop tard, il se pend... il est pendu !

— Dans quel quartier de la forêt s'est-il arrêté?

La somnambule indiqua avec précision la physionomie des lieux où se passa la scène lugubre qu’elle décrivait. Sur-le-champ M. Bernard courut au chemin de fer de Lyon.

Deux heures après, guidé par des paysans, il arrivait auprès d’un grand chêne dont le tronc pourri présentait une large déchirure. En levant les yeux , il aperçut un corps attaché par le cou à l’une des premières branches. On coupa lac orde.

— C’est bien lui! s’écria M. Bernard. Cependant, afin de ne plus avoir aucun doute, examinons le genou du mort. Jules avait à cette place une cicatrice très-facile à reconnaître.

On examina le cadavre. Pain t de cicatrice au genou!

— Cet homme ressemble étonnamment à Jules ; mais ce n'est pas Jules, s’écria M. Bernard, gardant encore quelque espérance. Il revint à Paris et rendit compte de son voyage. Aussitôt on renouvela les dépêches télégraphiques, et l’on fit publier dans les journaux la note suivante :

« M. Jules Bernard a disparu depuis quelques jours. Sa famille est dans les plus vives inquiétudes. En quelque lieu qu’il lise ces lignes, qu’il écoute l’appel des siens, qu’il revienne auprès d’eux et soit assuré de retrouver toute, l’affection et toute l’estime de ses parents et de ses amis. »

Pendant ce temps, on arrangeait les affaires du fugitif, qn payait ses créanciers, et on mettait sa réputation commerciale à l’abri de tout soupçon.

Un matin, on frappa à la porte de Rl. Bernard pèrq. Ç’é-tait Jules Bernard ; sa santé était parfaite ; niais il avaitcoupé ses moustaches et portait les cheveux taillés eu brosse. Pen-

dant qu’on pleurait sa mort, il avait été faire un polit \ovag« sur les bords du lac de Genève.

Feu Lionel, feu Bernard, veux-je dire, est aujourd’hui un de nos industriels les plus riches et les plus estimés.

Ces jours-ci, une femme, élégamment mise, entra chez un coiffeur, et, le prenant à part, lui dit :

— Vous ôtes le coiffeur de M. X... (Ici le nom d’un de nos puissants financiers.) Si vous le voulez, vous pouvez faire ma fortune et la vôtre.

— Par quel moyeu, madame?

— Le moyen est des plus simples : La prochaine fois que vous taillerez les cheveux de M. X..., coupez-lui une mèche que vous me remettrez. Je vous la paierai le prix que vous me demanderez.

Le coiffeur, ne pensant pas que les cheveux de M. X... fussent un talisman comme ceux de Samson, coupa la mèche et la donna à l’inconnue.

Celle-ci courut chez une somnambule, et la mettant en communication avec M. X...,apprit d’elle tous les calculs, tous les projets, toutes les manœuvres du financier. Munie de ces renseignements , elle [commença des opérations fictives sur les valeurs publiques ; elle joua en blanc, suivant l’expression tehnique. Toutes ces tentatives préparatoires furent très-heureuses. Alors elle songea à jouer bon jeu, bon argent , et se mit en relations avec la Bourse. En quelques jours, elle fit des gains considérables.

— Restez-en là, lui dit la somnambule elle -même , et ne comptez pas trop sur mes oracles ; je dirai vrai quatre-vingt-dix-neuf fois, la centième je me tromperai et vous perdrez tout.

Mais il paraît qu’on ne saurait se borner quand on est en veine de prospérité. Les conseils de la somnambule ne furent pas suivis, et, pour avoir voulu poursuivre son jeu, madame C... a fini par se ruiner complètement.

Je la plains personnellement ; mais j’estime que son mal-

heur est d’un exemple utile. S’il était vrai que la lucidité des somnambules fût constante, et que leur autorité fût infaillible, les gens qui les consultent joueraient à coup sûr et n'auraient qu’à mettre la main dans le sac pour y puiser à discrétion. Ce serait vraiment trop commode!

HENRY d’aUDIGIER.

(Extrait de la Patrie du 12 février dernier.)

RECHERCHE DUN TRÉSOR PAR LE SOMNAMBULISME.

En 1848, un cultivateur des environs de Bouthéon (Loire) se trouvait dans un champ lorsque le terrain manqua sous ses pie 1s, et il entendit sortir des entrailles de la terre une voix plaintive, — ses bœufs s’enfuient épouvantés, comme saisis d’une subite panique, et s’étant mis à leur poursuite, il arrivait au village pâle, défait, respirant à peine.

Interrogé sur ce qui venait de lui arriver, U raconta ce que nous avons résumé brièvement ; seulement en amplifiant considérablement, et en se posant comme le héros d’une aventure mystérieuse et fantastique.

L’événement prit des proportions considérables, chacun brodait son histoire; l’un prétendait que l'affaissement du sol avait été produit par un souterrain creusé par les voraces de Lyon, qui voulaient envahir le département par cette route obscure ; l’autre affirmait que pendant la nuit il avait vu se promener sur le théâtre de l’événement un long fantôme vêtu de blanc ; enfin, le plus grand nombre assuraient qu’an immense trésor était enfoui dans ce champ.

L’autorité municipale, pour faire cesser tous ces bruits, ordonna des fouilles ; — après avoir creusé divers puits, bon nombre de tranchées, on arriva à trouver... de l’eau et des pierres, — ce que l'on trouve partout en donnant quelques coups de pioche.

Depuis huit ans que s’était passé cet événement, il avait été complètement oublié, lorsque, il y a quelques jours, un ma-

gnétiseur de Lyon ayant endormi sa fille, sujet très-lucide, lui demanda ce qu'eLe voyait.

— Père, murmura la somnambule, je vois un trésor.

-> u_ Où? s’écrie le père en lançant à son enfant une nouvella dose de fluide.

— Sous un château, non loin des bords de la Loire.

—.Son nom? son nom? fit le magnétiseur qui, à la perspective de la fortune découverte par sa fille, voyait tous les trésors des Mille et une Nuits emplir sa caisse.

— Je ne sais, murmura la somnambule... Il est près de Saint-Etienne... J’aperçois sur les murs des Ni que surmontent les armes de France.

C’était le château de Bouthéon que la somnambule venait d’àpercevoir, château construit par un bâtard de Bourbon, et qui a été restauré par le seigneur de Gadâgne, célèbre datrt lés annales de l’histoire dti Lyonnais.

Le père de la somnambule se rendit aussitôt chez ses partisans et ses adeptes, et là bonne nouvelfe circulant avec la i&pidité d’un train express, bientôt un atte de société fut sigtié entre divers capitalistes pour la recherche du trésor.

On S’est abouché avec le propriétaire du château, et en te moment une armée de travailleurs est occupée à creuser deS Mtfchées, à construire des galeries sous la tour principale, ïoirt'le pays est en émoi, l’émotion est à son comble.

Nous atons écrit ce que nous venons de dire sous la dictée â’tfti témoin Oculaire, qui nous a certifié très-vrais les détails que nous avons donnés. NoUs faisons des vœux pour que lè tiôsor en question soit aussi véridique.

(Salut public, de Lyon.)

CAUSERIES MAGNÉTIQUES.

NEUVIÈME CAUSERIE.

Patience et persévérance.

Comment se fait-il qu’issu de deux êtres humains, je n’en sois pas la continuation pure et simple , en tout semblable , et que, contrairement ii cet ordre constant dans la nature, j’aie des goûts, des instincts, des aptitudes toutes différentes de tous deux , et que tout ce qui est sorti du môme moule que moi présente le même phénomène? On a cherché à expliquer ce mystère, mais on n’est pas encore parvenu à satisfaire la raison.

C’est que le nid humain se découvre bien , mais que l’oiseau qui le construit n’est point aperçu. C’est que nul ne sait ce qui se passe au moment de la fécondation, et que, instrument nous-mêmes de cette production nouvelle, nousignorons une partie essentielle du rôle que nous y jouons. Le médecin examine la coquille, sans savoir comment elle se forme. 11 en découvre bien la trame, il en connaît la structure. Ici rien ne semble lui échapper, et le travail de la science a été immense. La richesse réelle abonde. Puis les systèmes sont venus ayant tous la prétention d’expliquer, hélas ! ce qui est inexplicable.

On a rattaché la fécondation humaine à celle des animaux de tous les règnes, sans être plus avancé, car le mystère aussi plane sur leur vie. On sait la composition chimique des germes, et l’électricité a semblé venir couronner les œuvres de la science, puis le calorique, que sais-je encore ! On oublie ce principe inconnu , la vie qui circule partout et les premières semences qui ne pouvaient être que spirituelles. Quand je dis qu’on avait oublié quelque chose , je me trompe , on a, au contraire , attribué à la nature seule ce chef-d’œuvre : on a parlé d’emboîtement des germes qui allaient toujours en se dédoublant, etc., etc. On a si bien travaillé, que l'on en sait aujourd’hui autant que le premier jour. L’oiseau naît et s’en-

vole. Etait-il avant? est-il encore après? nul n’en sait rien. Mais je sais, moi, qu’une pensée est créatrice, et que ce qu’elle crée est impérissable, quoique ne le voyant pas par nos yeux. Je sais qu’elle a des formes et des couleurs; qu’elle est force, qu'elle a puissance en dedans de nous, aussi bien qu'en dehors, quelle s’échappe et va où son destin la conduit.

Je sais à n’en pouvoir douter que les idées de la femme enceinte influent puissamment sur son fruit ; je sais que les pensées du père peuvent également exercer une influence, et que les contes des fées dont on berce l’enfance ont un fond réel de vérité que nos savants devraient étudier. Les savants riront bien, s’ils daignent me lire ; mais leur rire pour moi cachera seulement leur profonde ignorance touchant la vraie nature, qui n'est pas, je l’avoue, celle'de convention. Les savants expliquent tout, et, pour prouver leur puissant savoir dans les questions difficiles, ils appellent à leur secours la fantaisie, l’imagination, ces deux sphynx, ces deux pôles de l’esprit humain. Donc, dans tous les phénomènes difficiles à expliquer et qui tiennent aux créations de l’esprit et de ses conceptions, le savant se sert de cet argument sans réplique : imagination. C’est qu’en effet et sous certains points de vue, tout est imaginaire. Nous ne pouvons remonter jusqu’aux causes, et nous léguons à nos successeurs la même incertitude. Cependant on avance à force d’études et d’observations. Petit à petit, le nuage semble s’éclaircir. Sera-ce un bonheur lorsqu’il sera tout à fait transparent? Je n’en sais rien.

Mais ce flambeau divin, le magnétisme, jette un jour ‘tout nouveau sur le monde des causes, et nos savants devraient bien venir à notre école ; nous les convions à devenir nos maîtres. Ne vit-on pas des princes changer de religion pour posséder une couronne ? Nous espérons que quelques savants bien avisés abandonneront leur système pour devenir chefs d’une nouvelle école. Qui sait si l’intérêt ne déterminera point un jour des apostasies et si notre armée ne sera point commandée par un transfuge des vieilles doctrines?

Baron du Potet.

CONTROVERSE SUR LES MÉDIUMS

ET LE SOMNAMBULISME.

Le journal du 10 février contient un article intitulé : Médiums el somnambules, dans lequel se trouvent appréciées certaines guérisons présentant des caractères particuliers et attribuées aux esprits. Je crois pouvoir admettre, contrairement à l’opinion de l'auteur de cet article, la possibilité de tels faits qui ne m’offrent rien d’invraisemblable.

Disons de suite, à propos du second des deux faits racontés, que je ne sais sur quoi on se fonde pour l’attribuer aux esprits, car il n'en est pas question, et on ne dit rien de leur concours. On ne peut rien induire de semblable de ce que le magnétiseur a posé la main sur le siège de la douleur, sans que le patient le lui ait indiqué au préalable, il devait savoir que son ami, qui boitait, se plaignait depuis longtemps d’une douleur au genou ; d’autre part, s’il est médium, ce qu’on ne dit pa*, mais ce qui paraît probable, il pouvait être assez sensitif pour reconnaître par lui-même le siège du mal. Enfin, en admettant que ce siège lui ait été indiqué par un esprit qui lui ait donné en même temps des conseils sur la manière de magnétiser, cela rentrerait dans le cadre des communications spirituelles ordinaires, plutôt que de se ranger dans une classe à part et nouvelle de phénomènes. Le fait, tel qu’il est présenté, ressemble simplement à une guérison instantanée produite par l’application directe du magnétisme. Mais de ce que l’intervention des esprits n'était pas nécessaire, il ne s’ensuit pas qu’elle n’ait point eu lieu ; seulement, comme on n’indique pas en quoi leur concours a consisté, la discussion est impossible.

Il n’en est pas de même de l'autre citation ; il s’y trouve

de la part d'un esprit indication delà maladie, de son siège, de sa cause et du remède à y apporter, remède efficace. Une somnambule ne ferait pas autrement, mais vouloir prétendre que ce ne soit effectivement qu'une consultation somnambu-lique ordinaire, c’est tirer de cette ressemblance une conséquence au moins hasardée.

La lucidité somnambulique a lieu lorsque l’âme du sujet est dégagée à un degré suffisant de l’étreinte de son agrégat moléculaire, comme disait hier le docteur Charpignon. — Pourquoi les intelligences complètement dégagées de semblables agrégats n’auraient-elles pas une lucidité supérieure ou au moins égale à celles d'intelligences qui s’y trouvent encore jusqu’à un certain point enchaînées? Il me semble que la lucidité médicale somnambulique peut faire conclure à fortiori à la lucidité médicale des esprits et à la possibilité où ils se trouvent de guérir par ce moyen les hommes avec lesquels ils sont ou ont été mis en rapport.

On a raison de ne songer aucunement à rapporter à l'action des esprits les phénomènes que présente journellement le somnambulisme ; et on aura également raison de ne pas rapporter à l’ordre somnambulique les faits de même nature que présentent très-fréquemment les communications spiritualistes. Ce sont des phénomènes semblables, puisqu’ils sont le produit de facultés intellectuelles s’appliquant à obtenir le même résultat; ce qui les distingue seulement, c’est la différence de situation .des intelligences qui les produisent. Des «œpérientès magnétiques convenablement faites pourraient reproduire la majeure partie des manifestations des esprits, peut-être mime toutes ces manifestations.

H iuporle beaucoup de ne pas confondre le médium et le somnambule; les divers degrés à'entramement ou d’envahissement fluidique donnent des résultats tout différents que l’on a trop souvent confondus. Les phénomènes du somnambulisme n’ont pas été et ne sont pas encore aujourd'hui acceptés sans difficulté par tout le monde ; il n'est donc pas étonnant qu’il en soit de même pour les faits de spiritualisme, mais on y-arrivera quand on y sera plus familiarisé.

L’homme en magnétisant exerce une action sur son semblable, action qui lui permet d’amener des changements, des modifications dans l’organisme du patient. Une foule de laits* tant anciens que contemporains, établissent que les esprits peuvent avoir une action naturelle ou artificielle sinon sur tous, au moins sur un certain nombre d’hommes. On peut donc être conduit à conclure, par analogie, qu’ils pourraient* sur ces hommes, amener des modifications en bien et eu mal, des changements et des guérisons par une action directe, ce qui parait encore plus étonnantque la connaissance des maladies et des remèdes.

Le mot démon, dans l’antiquité, signifiait simplement esprit; depuis l’avénement du christianisme, ce mot a été pris spécialement dans l’acception de mauvais esprit ; d’où 011 a fait démonologie, traité ou science des Mànifestations des démons ou des esprits quelconques considérés comme mauvais; dèmonolAtres, adorateurs des mauvais esprits. I)e pareilles dénominations 11e nous sont point applicables et nous les rejetons bien loin. Les vocables où le mot dérncn figure comme racine, doivent disparaître de notre vocabulaire qualificatif actuel, pour faire place à ceux où le mot esprit figure comme radical. Nous avons les termes spiritualistes et anti-spintua-Ustes, gardons-les. D’ailleurs ici la réalité des communications spirituelles n’est pas mise en question, il s’agit simplement de rendre à un ordre de faits ce qui lui appartient

Nous ne trouvons rien d’étrange dans ces conceptions que nous examinons, et en admettant la possibilité dé semblables faits, nous ne croyons pas nous écarter de la routé du bon sens. Les données du bon sens se composent des opinions qui paraissent raisonnables à chacun, il est donc néJ cessairement Variable v cette petite edntroverse en est la preuve, bien que je n’aille pas jusqu’à dire, comme on l’a fait, autant d’hommes, autant de sentiments. Le sens commun consiste dans l’ensemble des idées admises par la majorité des hommes; il change donc aussi avec les généraiions et avec les siècles; le progrès des lumières élargit chaque jour son cadre. Mais les faits magnétiques de tout ordre, et

surtout ceux de l’ordre spiritualiste, n’étant admis que par la minorité des hommes, étant surtout peu compris et encore moins expliqués, aucun d’eux n’est entré dans le domaine du sens commun. — Le bon sens et le sens co nmun sont donc' en cette matière d’une bien faible ressource. — Cherchons et discutons du mieux que nous pourrons afin de faire jaillir la lumière; nos petits-neveux diront si nous avons le sens commun.

BERRUYfcR.

CHRONIQUE.

u On parle, depuis quelques jours, d’une démarche d’un certain nombre de médecins notables auprès du chef de l’Etat pour réclamer contre l’influence prise par les somnambules qui enlèvent à la faculté une clientèle de plus en plus nombreuse. La répression des tribunaux est jugée tout à fait illusoire par la faiblesse de la pénalité, qui sert même de réclame à ces concurrences illicites dans l’art de guérir. On assure, toutefois, que la demande d'aggravation n’aurait pas été accueillie par la haute volonté à laquelle on s’adressait, et qu’il aurait été répondu que la législation actuelle suffisait pour réprimer les abus. »

(.L'Indépendance belge du 0 mars.)

VARIÉTÉS.

On lit dans le Courrier de Lyon :

« Il y a quelque temps, un jeune homme se brûlait la cervelle rue Mornand, sous les yeux d’une jeune fille nom-, niée Julie R..., dont il était épris et qui avait refusé d’agréer s.i recherche en mariage. Lorsque, au bruit de la détonation, on accourut, on trouva le jeune homme sans vie et la jeune fille immobile comme une statue, les bras étendus, dans l'attitude que lui avait donnée l’effroi. On essaya de la faire revenir à elle, mais ses membres, comme ceux d’un mannequin de bois à l’usage des artistes, gardaient avec une insurmontable rigidité la position qu’on leur donnait. Elle était cataleptique.

« Au bout d’une demi-heure, l'accès cessa : la détente eut lieu par une éruption de larmes et de sanglots, et la jeune fille se trouva rétablie dans son état normal.

.« Le lendemain, à l'heure précise où la veille s’était manifesté l’accès, Julie R..., qui était dans un salon plein de monde, reprit subitement, au grand étonnement des spectateurs, la pose qui, dans son immobilité, la faisait ressembler à la statue de l’Effroi. Les jours suivants, toujours à la môme heure, le même effet se reproduisit. Les secours de l’art étaient restés impuissants ; du temps seul on attendait la guérison de cette affection étrange, et toutes les précautions avaient été prises pour que les accès n’entraînassent aucun accident.

« Julie R... aimait beaucoup les oiseaux. Hier, elle s’amusait à embellir la prison fleurie dans laquelle chantaient deux petits musiciens du Bengale. Dans cette occupation favorite, elle avait oublié que l’heure de son accès approchait. Au moment où, montée sur une chaise, à la fenêtre, elle

voulait replacer à son clou la cage des captifs, une secousse violente étendit ses membres ; elle lâcha la cage, et, perdant l’équilibre, tomba elle-même dans la cour. Quand on vint la relever, elle vivait encore, et elle put faire connaître ce qui s’était passé ; mais, malgré les soins qu’on s’empressa de lui donner, elle ne tarda pas à rendre le dernier soupir. »

Rien n’eût été plus facile, pour un magnétiseur, que de faire cesser cet état cataleptique, qui a été si funeste à cetle jeune fille. Mais l’ignorance volontaire des médecins, touchant notre art, les rend d’une impuissance complète, en présence des accidents nerveux, accidents qui, pour nous, ne présentent aucune difficulté. Quand dont le magnétisme sera-t-il dans toutes les familles? quand donc les médecins ouvriront-ils les yeux ? Nous marchons en avant, chaque jour nous constatais un progrès, et puissent nos appels rapprocher le temps béni où beaucoup de maux, terribles aujourd’hui, s’évanouiront comme de vains songes sous le souffle ou la main d’un ami de l’humanité.

Baron du Potet.

M“* Quétel s’eftt prise d’une belle passion pour le magnétisme, dit-elle ; pour le magnétiseur, dit son mari, qui a porté contre elle lïfle plainte en adultère, plainte qu’elle vient combattre devant la police correctionnelle.

Elle a été trouvée enfermée chez le magnétiseur, le sieuf Dauphin, mais celirî-ci était absent, en sorte qü’il n’a pu être inculpé ; M"* Quétel a donc à se défendre seule.

tes charges d'abord, la défense ensuite. Voici les premières : La porte du logement de Dauphin était fermée à clef quand le commissaire de police s’y est présenté ; on l’a feit ouvrir par un serrurier, on a pénétré dans l’appartement et on a trouvé quoi? M“* Quétel occupée à mettre des fond« au pantalon du magnétiseur. Fouillée, on a trouvé sur elle «ne mèche de chevet«, qui semble avoir été cueillie sur fe

chef dudit magnétiseur, d’où la présomption quelle ôte de la tûte de celui-ci et qu'elle ajoute à. celle de son mari.

Elle recevait des \isites de Dauphin, et un témoin déclare qu’ils se sont enfermés tous deux pendant une heure, après avoir pris la précaution de mettre dehors le jeune enfant de M“* Quétel. On les a vus au spectacle ensemble.

Maintenant, voici la défense :

M. i.k président. On vous a trouvée enfermée à clef chez Dauphin, vous, femme mariée, c’est au moins fort équivoque.

La prévenue. Du tout. Ça n’est pas équivoque, j’attendais mon magnétiseur.

M. i.k président. Qu’est-ce que c’est qu’une femme qui a la clef de l’appartement d’un homme dans sa poche, qui va ;'i toute heure chez lui ?

La prévenue. Je n’y allais pas à toute heure, mais seulement à l'heure du magnétisme.

M. i.e président. C'était en l’absence du sieur Dauphin, et vous aviez sa clef pour entrer chez lui. Et puis, qti’est-ce que cela signifie? on vous trouve occupée à lui raccommoder son pantalon.

La prévenue. C’était en l’attendant.

M. le président. Vos consultations magnétiques étaient des consultations médicales. Depuis quand des malades, qui se présentent chez leur médecin, lui raccommodent-ils ses pantalons en l’attendaut?

La prévenue. J’étais intimement liée avec M. Dauphin, et...

M. le président. Trop intimement; c’est ce qu’on vous reproche.

M»* Quétel complète ses explications en affirmant qu’il n’y a jamais eu, entre elle et M. Dauphin, que des séances de magnétisme. Affectée d’une maladie pour laquelle les soins de celui-ci lui étaient indispensables, elle allait le consulter souvent et sortait toujours de chez lui calmée et soulagée.

M” Quétand, avocat de la prévenue, présente la défense de sa cliente. C'est M. Quétel, dit-il, qui a jeté la perturbation dans l’esprit de sa femme. Ayant trouvé une magnéti-

seuse aux eau\ d’Aix, ¡1 y a quelques années, et l’ayav.t con sultée, il s’est épris du magnétisme et s’est mis à le pratiquer lui-mèine ; il a d'abord magnétisé sa femme, puis une jeune servante avec laquelle il a poussé beaucoup trop loin les expériences ; c’est lui qui a amené M'“'Quétel aux pratiques somnambuliques; elle les a appliquées à sa maladie, elle a soigné ses enfants par le même moyen, etc., etc.

Le tribunal, après délibération en la chambre du conseil, a jugé que, quelque graves que soient les présomptions élevées contre la dame Quétel, quelque inconsidérée qu'ait été sa conduite, le délit d’adultère n’est pas suffisamment établi; en conséquence, il l’a renvoyée des fins de la plainte et a condamné le mari aux dépens.

(Gaz. des Tribunaux.)

EXPÉRIENCES SUR LA LUMIÈRE.

L’Ami des Sciences du '29 novembre dernier contient un article fort curieux de M. Niepce de Saint-Victor, sur une nou velle action de la lumière. En voici un extrait qui sans doute intéressera nos lecteurs : « Un corps, après avoir été frappé par la lumière ou soumis à l’insolation, conserve-t-il dans l'obscurité quelque impression de cette lumière ? Tel est le problème que j’ai cherché à résoudre par la photographie. La phosphorescence et la fluorescence des corps sont connues; mais on n’a jamais fait, que je sache, avant moi, les expériences que je vais décrire : — On expose aux rayons directs du soleil, pendant un quart d’heure au moins, une gravure qui a été tenue pendant plusieurs jours dans l’obscurité, et dont une moitié a été recouverte d’un écran opaque. On applique ensuite cette gravure sur un papier photographique très-sensible, et après 24 heures de contact dans l’obscurité,

on obtient on noir une reproduction des blancs de la partie de la gravure qui dans l’acte de l’insolation, n'a pas été abritée par l’écran. »

Cette belle expérience nous semble pouvoir conduire à une explication de la lucidité appliquée au passé. En effet, il en résulte qu’un corps exposé à la lumière du soleil en a reçu une modification dans sa partie superficielle, et qu'on peut, au moins dans certains cas et en employant certains procédés, retrouver les traces de l'action de la lumière. Si, en dehors de l’emploi de ces procédés, ces traces ne sont pas visibles pour nos yeux, elles n’en existent pas moins, et il est vraisemblable qu’elles sont visibles pour celui qui possède une vue plus parfaite, pour le lucide. On peut même admettre, par analogie, que tout fait laisse une trace qui peut être appréciée par des organes d’une finesse supérieure. Ainsi rien de ce qui s’est passé ne serait perdu, tout est enregistré dans des archives perpétuelles, i! ne s’agit que de pouvoir les déchiffrer, et, quelle qu’en soit la difficulté, elle n’est que relative, ce n’est jamais une impossibilité absolue.

Ceux qui nient à priori la vue du passé, qui, sans vouloir vérifier les faits de cette nature, les déclarent péremptoirement absurdes et impossibles, allèguent qu’il ne peut y avoir aucun moyen de voir ce qui n'est pas et n'a laissé aucune trace. Cette assertion tranchante est démentie pari’expérience en question ; il est au contraire rigoureusement démontré que tout ce qui s’est passé à la clarté du jour laisse des traces. Les détracteurs de la lucidité devront donc renoncer à leur argument favori, à l’aide duquel dernièrement un magistrat se flattait d’écraser la somnambule qu’il interrogeait.

Quelque étonnante que soit la vue du passé, cette faculté n’est due qu’à l’action des lois naturelles ; elle est même en harmonie avec les conquêtes de la science, et elle ne suppose ni magie noire ou blanche, ni intervention d’anges ou de démons.

A. S. Morin.

CURES PAR LE MAGNÎTISME.

1° M. Guidi raconte dans son journal lu Luce tnagnelica du 28 novembre dernier, que le 2 du même mois, comme il passait à Lyon, près le bureau des messageries Bonafous et compagnie, une dame, en descendant de voiture, eut une entorse qui lui causa une très-vive douleur ; elle se trouva hors d'état de marcher, et on la transporta au bureau. M. Guidi se mit à la magnétiser : en quelques minutes, il la guérit complètement. La dame n’éprouva plus aucune souffrance et put se mettre en marche sans la moindre difficulté. On sait qu’une entorse dure toujours au moins 4 à 5 semaines malgré tous les secours de la médecine et de la pharmacie : le magnétisme dissipe ce mal instantanément.

2° Madame Stella, me Chauveau-Lagarde, 12, était depuis longtemps sujette à des migraines qui la faisaient beaucoup souffrir, M. Rlorin, l’un de nos collaborateurs, l’ayant magnétisée une'seule fois pendantcinqminutes, la douleur cessa. Cinq mois se sont écoulés depuis, et la migraine n’a pas reparu.

Dernièrement, vers onze heures du soir, dit le Journal de Rouen, un domestique âgé d’environ dix-sept ans, demeurantà Allonville, chez son maître, se lève dans un état de somnam-balisme, ouvre la fenêtre de sa chambre, et de là hasarde un saut jusqu’à terre. Eveillé par le brait de sa chute, le maître, qui le croit sinon tué, du moins peut-être dangereusement blessé, se hâte de descendre et trouve le somnambule sur pied, occupé à essuyer quelques gouttes de sang qui découlaient de son nez. Il avait, en outre, une égratignure à l'oreille. Le domestique, ne sachant comment il se trouvait là, surpris de la présence de son maître, étonné sans doute aussi de l’accoutrement dans lequel il se trouvait, et ne compre-

nant rien enfin aux soins qui lui étaient offerts, remonte dans sa chambre, se reinet dans son lit et se rendort.

Le Siècle du 11 janvier dernier raconte qu'une dame sujette à des attaques d*épilepsie, étant assise près de la cheminée, a été saisie tout à coup de son mal et est tombée dans le feu. Au bruit de sa chute, 011 est venu à son secours ; elle avait la figure horriblement blessée par les brûlures, elle resiera défigurée ; mais cet événement l’a gliérie de l’épilepsie. Si cette maladie, contre laquelle les ressources de la médecine sont impuissantes, a pu être guérie par une cause morale, on peut d'avance en conclure à l’efficacité du magnétisme qui agit puissamment sur le moral ; c’est ce qni a été confirmé par de très-belles expériences.

Dans une gazette américaine, on a adopté l’usage d'indiquer à la liste des décès, après le nom de chaque mort, lè nom du médecin qui l’avait soigné pendant sa maladie. Cet article a pour titre : Cause et Effet.

BIBLIOGRAPHIE.

WiEUMATOl.OGIE POSITIVE ET EXPÉRIMENTALE. — La réalité des esprits et le phénoinèiio inerveilleui de leur écriture directe , p«r le Baron L. ut Goldkkstuibî: 1,1).

Ce livre est à coup sûr un des plus graves qui ait été publié siir cette matière. Dans une première partie, l'auteur constate la réalité des faits spiritualistes dans l’antiquité et depuis la venue du Christ; il raconte les expériences qu'il a faites et donne, dans des planches fort curieuses , soixante-sept fac-similé d'écritures tracées par des mains invisibles. La seconde partie du livre, la plus considérable en étendue, est intitulée Jours du spiritualisme dam l'antiquité; elle est consacrée à retracer les principales doctrines qui ont eu cours chez différents peuples et qui se rattachent au spiritualisme : d’abord les hiérarchies célestes, ¡mis la question de la préexistence des esprits, le dogme de l’immortalité, la métempsycose , le culte des ancêtres, la tutelle des esprits ou plutôt des vivants par les esprits, l’extase, le magnétisme, conclusion.

Oh voit combien est vaste le cadre envisagé par M. le baron de Guldenstubbé. 11 serait difficile, impossible même de le suivre sur un terrain aussi étendu. Tâchons de nous borner en relevant les points les plus puissants de son livre. Et d’abord sur la question des expériences, côté le plus délicat au moins pour les incrédules (et il y en a toujours beaucoup), laissons-le parler lui-même : « L’auteur étant toujours à la recherche d'une preuve intelligente et palpable en même temps de la réalité substantielle du monde surnaturel, afin de démontrer par des faits irréfragables l’immortalité de l’âme, n’a jamais cessé d’adresser des prières ferventes à l'E-ternel de vouloir bien indiquer aux hommes un moyen infaillible de raffermir la foi en l’immortalité de l’âme, cette

(1) Pirij. De Franck, libraire, rue Richelieu, 67.

base éternelle de la religion. L'Eternel, dont la miséricorde est infinie, a amplement exaucé cette faible prière. Un beau jour, c’était le 1" août 185(5, l’idée vint à l'auteur d’essayer si les esprits pouvaient écrire directement, sans l'intermédiaire cCun médium. Connaissant l’écriture également directe et merveilleuse du Décalogue, selon Moïse, et l’écriture également directe et mystérieuse durant le festin du roi Baltiiazar, suivant Daniel, ayant en outre entendu parler des my stères modernes de Strafford en Amérique , où l’on avait trouvé certains caractères illisibles et étranges, tracés sur des morceaux de papier, et qui ne paraissaient pas provenir du médium, l’auteur a voulu constater la réalité d’un phénomène dont la portée serait immense, s’il existait réellement.

(i 11 mit donc un papier blanc à lettres et un crayon taillé dans une petite boite fermée a clef, en portant cette clef toujours sur lui-même et sans faire part de cette expérience à personne. 11 attendit durant douze jours en vain , sans remarquer la moindre trace d’un crayon sur le papier, mais quel fut son étonnement, lorsqu'il remarqua, le 13 août 185(5, certains caractères mystérieux tracés sur le papier ; à peine les eut-il remarqués, qu’il répéta dix fois pendant cette journée à jamais mémorable la même expérience, en mettant toujours, au bout d’une demi-heure, une nouvelle feuille de papier blanc dans la même boite. L'expérience fut couronnée chaque fois d'un succès complet.

«Le lendemain, li août, l’auteur fit de nouveau une vingtaine d’expériences en laissant la boîte ouverte et en ne la perdant pas de vue ; c’est alors que l’auteur voyait que des caractères et des mots dans la langue esthonienne se formèrent ou furent gravés sur le papier, sans que le papier bougeât. Depuis ce moment, l'auteur, voyant l’inutilité du crayon, a cessé de le mettre sur le papier ; il place simplement un papier blanc sur une table chez lui, ou sur le piédestal des statues antiques, sur les sarcophages, sur les ruines, etc., au Louvre, à Saint-Denis, à l’église Saint-Etienne-du-Mont, etc. 11 en est de même des expériences faites dans les différents cimetières de Paris. Du reste, l’auteur n’aime guère les cimetières, la plupart des esprits pré-

férant les lieux où ils ont vécu durant leur carrière terrestre, aux endroits où repose leur dépouille mortelle. »

C’est ainsi que l’auteur a obtenu des écrits signés de Platon, Virgile, Cicéron, Hippocrate, Jules César, Abélard, saint Jean, saint Paul, Pascal, Marie-Antoinette, etc.

M. le comte d’Ourches, qui avait assisté aux premières expériences, a fini par opérer seul, et a obtenu des résultats analogues. Du reste, plus de cinquante témoins, suins de corps et d'esprit, la plupart nommés dans le livre, sont en mesure de certifier les faits accomplis en leur présence.

Quelques personnes ont cherché à contribuer à l’identité des esprits révélés, en comparant les écrits ainsi obtenus des autographes authentiques et remontant à l’époque de la vie. Souvent ce rapprochement a fait ressortir une certitude surprenante ; mais quelquefois aussi il y a des dissemblances assez frappantes et qui pourraient faire naître quelques doutes.

On comprend ainsi, après avoir lu seulement la première partie, que la deuxième partie ne doive être que la confirmation, par les doctrines des grands faits du spiritualisme, et que la conclusion ne peut être qu’un chant de triomphe en faveur de la doctrine nouvelle, la pnenmatologie moderne; mais l’enthousiasme de l’auteur le conduit certainement trop loin, lorsqu’il en arrive (page 196) à nier le fluide magnétique, pour ne voir dans tous les faits obscurs que l'intervention des esprits.

Toutes les sciences se lient ; ainsi les limites qui séparent la magie et le magnétisme peuvent être quelquefois difficiles à saisir; mais ce n’est que dans la pratique; théoriquement une ligne de démarcation assez tranchée, beaucoup plus que ne l’est, par exemple, celle qui sépare la physiologie de la psychologie , se trouve entre ces deux sciences ; le magnétisme n’envisageant que les forces naturelles propres à chaque homme, dont son côté est le principe ou le foyer, la magie appelant à son aide les forces surnaturelles. Mais le magnétisme est autre chose qu’un moyen soporifique, quoi qu’en dise M. le barondeCuldenstubbé. Si les passes n'avaient pas d’autre effet, tout le monde posséderait au même degré le pouvoir fascinateur. S’il en est ainsi, et le cas n’est pas

douteux, c'est que les mis ont une plus grande force nerveuse ou plus de fluide magnétique en réserve et dont ils peuvent disposer selon leur volonté. C’est donc une erreur contre laquelle on ne saurait trop s’élever, de réputer toute table parlante animée par un esprit, le plus souvent elle n’est agitée que par le mélange du fluide des opérateurs, et, si cette table manifeste par moments une superintelligcnce, c’est que1 le fluide qui l’anime est dégagé d’organes corporels, obstacle à l’extension de notre propre lucidité, lequel disparaîtra à la mort. Un esprit n’anime une table que lorsqu’il est nominativement appelé, ou qu’assistant comme guide un des opérateurs, ce qui est fort rare, il juge à propos de s’y incorporer momentanément pour parler par cet intermédiaire.

L’erreur que nous reprochons à M. de Guldenstubbé lui est commune avec des auteurs dont il ne partage pas d'ailleurs les tendances, avec M. de Mirville et avec M. le comte dé Résie. Ces derniers non plus ne croient pas au fluide magnétique contre lequel ils n’ont pas assez d’anathèmes ; pour eux aussi, il n’y a que des esprits. Cependant ce rapprochement n’empêche pas le noble Danois de semonccr vertement et à jurte titre M. de Mirville, pour avoir fait trop large part aux démons. « Nos prétendus chrétiens orthodoxes, aveuglés par la démonophobie, regrettentia défaite du matérialisme, de cet adversaire acharné de. toutes les religions. En vérité, on ne saurait s’imaginer cette démence du parti orthodoxe. M. de Mirville, le représentant le plus érudit de la démonophobie moderne, s’écrie, le cœur navré, dans sa pneumatologie qui n’est qu’une démonologie : « Le matéria-« lisme est vaincu ; mais à quel prix peut-être ? » M. de Mirville traite même le spiritualisme américain de fléau ; il redoute le retour des dieux du paganisme. Cet auteur ne soupçonne pas que la plaie morale de notre société consiste dans le penchant au matérialisme et nullement dans les tendances polythéistes. Certes, s’il y a de nos jours quelques velléités polythéistes, on ne les rencontre que dans l’Eglise romaine, qui... » Nous nous arrêtons dans la citation pour ne pas sortir du cadre du journal.

Résulterait-il de là que M. de Guldenstubbé ne croit pas aux mauvais esprits? Non, sans doute. Il n’est pas possible

qu’après avoir analysé les idées des Chinois, des Indiens, des Perses sur les hiérarchies célestes, systèmes qui tous admettent les. mauvais esprits, il n'est pas possible que l’auteur rejette cette dernière croyance. Nous sommes donc tous au fond vraisemblablement à peu près d’accord sur ce point ; la divergence ne roule que sur des points secondaires. 11 y a donc après, ou plutôt au-dessus du magnétisme, la magie blanche et la magie noire, ou, comme le dit Gorres, la mystique humaine, divine, diabolique. Les dissidences entre MM. de Mirville et de Guldenstubbé tirent leur source de points de vue autres que le magnétisme, et sur ce nouveau et dangereux terrain, nous ne sommes peut-être pas plus d'accord avec l’un qu’avec l'autre.

Revenant sur la question des mauvais esprits, nous dirons qu'il est fâcheux (et ce regret s’étend à toute la deuxième partie du livre) que l’auteur se borne au rôle ingrat de rapporteur, qu’il ne pose pas lui-même ses conclusions. A coup sûr, il était en état de le faire, et son œuvre eût tiré de ce complément une nouvelle et singulière valeur.

Ainsi, sur la nature des esprits, admet-il, oui ou non, leur corporéité? l'Eglise catholique penche pour l’incorporéité: mais elle n’en fait pas un article de foi, et M. de Mirville profite de cette latitude pour adopter l’incorporéité. M. Jean Reynaud professe la. même opinion ; il rapporte ces remarquables paroles de Jean de Thessalonique (Ciel et Terre, page 323) : « 11 n’y a que Dieu qui soit incorporel et sans forme ; quant aux créatures intellectuelles, elles ne sont nullement incorporelles. » Cette opinion est, croyons-nous, celle de tout magnétiseur.

Sur la question de la préexistence des âmes et la métemp-sychose, ce n’est pas faire avancer la question que rapporter l’opinion des anciens ; MM. Cahagnet et Jean Reynaud l’ont poussée bien plus avant, ceux-là discutent et concluent (1).

(t) On pourra trouver étrange l'association que nous établissons entra ces deux noni9 : M. Jean Reynaud, également versé dans les sciences exactes et dans les études historiques, piofond philosophe, maître en l'arl d'écrire: M. Cahagnet, tourneuren bois, coupeur de faux cols (il l'a dit dans ses livres), et de plus, donnant assez fréquemment des entraves à I» syntaxe. Mais qu’on ne s'v tioiupe pas et qu’on ne juge pas du fruit »

(. est ainsi i|u il laut faire toutes les fois qu’on ne veut pas lais.-.cr l'esprit du tuteur dans une indécision pénible.

L'auteur termine le chapitre sur l’immortalité de l’âme en rapportant les opinions des stoïciens et des bouddhistes, selon lesquels l’âme, après plusieurs incarnations successives, irait s’abîmer en Dieu, où elle finirait par perdre toute personnalité ; puis il s’arrête. Nous lui demandons encore de s’expliquer; car, de nos jours, ces questions sont trop vitalespour qu’il soit permis, après les avoir soulevées, de s’effacer. M. de Gultdenstubbé reviendra, nous n’en doutons pas, sur le terrain pour les vider et donner son dernier mot. Et il en profitera pour reprendre ses études au point où il les a laissées, et pour les prolonger dans le moyen-âge, la renaissance et jusqu au dix-huitième siècle. Il trouvera une chaîne non interrompue de penseurs spiritualistes, de mystiques et de théurgistes; et même dans ce dix-huitième siècle qu’il renie, son attention sera frappée par les sillons lumineux qu'ont tracés Swedenborg, le diacre Paris, Pasqualis, Saint-Martin, Mesmer, Cagliostro, le comte de Saint-Germain, etc.

Nos critiques sont donc suscitées bien plutôt par le plaisir que nous a fait éprouver ce volume trop restreint et par le désir de le voir continué, que par des taches sérieuses. Nous le proclamons de nouveau un livre bien fait, bien écrit, plein d'attrait, et surtout écrit par une plume sérieuse, honnête et profondément religieuse.

L. Lamothe.

lecorco. Cet ouvrier, lui aussi, est un penseur, un mystique positif; il a raison de se .lire le continuateur de Swedenborg; il en a les hardiesses, les temintis; il en a bien aussi quelquefois les chutes : n’importe, on ne se souv.endra un jour que de ses élans audacieux et de ses généreux enorts. Cest si peu un homme ordinaire que, ne sachant pas écrire, Il a encore parfois du style.

Avis aux Abonnés.

De toutes les revues on journaux traitant de spiritualisme, nous recommandons spécialement : le SpiritualUte de la Nouvelle-Orléans, rédigé par notre ami J. Barthet, le seul journal qui puisse sans entraves dire sa pensée sur toutes choses; le seul journal au reste dont nous recevons les abonnements.

Nos abonnés 'qui lisent l'anglais, trouveront dans le Spiritual Télé-graph qui se publie à New-York, 30G, Brodwoy, une ample moisson de faits.

Nous continuerons à enregistrer la relation des phénomènes les plus intéressants du spiritualisme, sans pourtant perdre de vue un seul instant le magnélime, Ce puissant agent sans lequel le spiritualisme n’a plus de Il æe.

1

M. Piéraftibe participant plus à la rédaction du Journal du Magnétisme, je prie les alwnnés qui ont des réclamations à nous faire, ou des mémoires à nous envoyer, de vouloir bien dorénavant m’adresser personnellement leurs écrits.

Baron DU POTET.

Baron do POTET, propriétaire-gérant.

LE DOMPTEUR DE CHEVAUX,

Deuxième artile.

Les expériences commencées à Paris par M. Rarey, au sujet (l’un nouveau mode de dressage des chevaux difficiles, ont continué, hier lundi, au Tattersall, devant un public nombreux et brillant. Parmi les assistants, on remarquait S. A. le prince Murât, S. A. le duc de Brunswick, M. le comte de la Ferrière, chambellan de l’empereur ; M. le général Mellinet, le vicomte Daru, MM. de Vatry, Lupin, Rei-set, Aguado, et une foule de notabilités de l’armée et du sport.

A trois heures et demie, M. Rarey est entré dans le manège, conduisant, attelés ensemble, un cheval connu par son caractère méchant, et le terrible étalon Stafford, venu du dépôt de Cluny. Stafford, réduit à l’obéissance il y a huit jours, avait été, depuis cette époque, soumis de nouveau au procédé mystérieux de M. Rarey. Stafford^t son compagnon ont fait plusieurs tours dans le manège et dehors ; ils^ont montré une docilité complète, et ont été gouvernés sans la moindre peine.

Stafford était, comme nous l’avons dit, un des chevaux les plus dangereux qu’on pût voir ; il mordait, il ruait des pieds de derrière et de devant, personne n’était à 1 abri de ses atteintes. Au retour de la saillie, il était ingouvernable. Lundi dernier ,M. Rarey s’enfermait une heure avec Stafford dans un box, et en ressortait montant et conduisant

Tohe XVII.— N° 30. — 2* Série. — 25 Mars 1858. 5

avec un simple bridon ce cheval qui, jusque-là, avait montré les instincts d’une bête féroce. Hier, il s’agissait d’abord de constater s’il y avait eu perpétuité dans les efTets obtenus une semaine auparavant, et renouvelés depuis une fois ou deux seulement. Hâtons-nous de dire que le résultat a été des plus satisfaisants et de nature à démontrer pleinement l’excellence de ce système de dressage.

Stafford a marché, trotté, galopé, au gré de son cavalier, sans hésitation, sans la moindre velléité de défense. M. Rarey, lui posant les rênes sur le cou, l’a fait galoper encore, l’arrêtant par un simple attouchement ou avec la voix ; bien plus, il l’a débridé, et, cette fois, le spectacle de ce cheval, naguère terrible, courant sans bride ni mors, sous un cavalier qu’il eût voulu fouler aux pieds quelques jours avant, a excité dans la foule une admiration qui s’est traduite par d’unanimes applaudissements. M. Rarey a battu ensuite le tambour aux oreilles de cet animal jusque-là si ombrageux ; monté sur Stafford, il a déchargé les six coups d’un revolver, et le cheval n’a pas bougé ; il a ouvert devant lui et passé sous ses yeux et sur sa tête un parapluie qu’il a ensuite refermé, et Stafford n’a pas bronché ; l’animal suivait M. Rarey comme un chien suit son maître, et il s’est enfin laissé monter sans difficulté par un des jockeys du Tat-tersall.

Beaucoup de personnes ont remarqué comme nous la contenance singulière de ce cheval, dont le moral semblait dominé par une impression profonde, et dont les forces physiques paraissaient en quelque sorte sommeiller. Cet état particulier était mis .par quelques assistants sur le compte du magnétisme. Toujours est-il que quand M. Rarey était à terre, ses yeux ne quittaient pas ceux du cheval ; M. Rarey a d'ailleurs une manière à lui de flatter les chevaux avec la main; quant à scs effets, il ne les manque jamais, et il fait preuve, en toute circonstance, d’un tact et d’une adresse très-rares.

La séance s’est terminée par une expérience faite sur un cheval arabe appartenant à un officier des chasseurs de la garde. On sait que tout ce régiment est monté avec des chevaux

barbes, de couleur grise. Le cheval dont nous parlons n a jamais pu Être ferré , et toutes les fois qu’on a tenté de toucher ses jambes et lui lever le pied, on s'est exposé aux plus grands dangers. M. Rarey s'est enfermé pendant trois quarts d'heure dans un box avec ce cheval, et, l’amenant au milieu du manège, il a soulevé successivement ses quatre pieds, qu'il a frappés sous le sabot avec la main, puis il a passé entre les jambes de devant, et le cheval s'est laissé faire avec une docilité parfaite.

M. Rarey serait, dit-on, purement et simplement un cultivateur américain, qui n’a jamais eu la prétention d’être un homme de cheval, comme on dit dans la langue du sport. Si le fait est vrai, il ne rend que plus intéressante la découverte dont nous parlons, et à propos de laquelle son auteur vient d’ouvrir une souscription. Une fois que le chiffre de 500 souscripteurs aura été atteint, M. Rarey s’engage à leur livrer son secret sous certaines conditions ; une commission composée de six personnes, a été nommée pour examiner ce procédé, que l’auteur lui a confié, après que ohaque membre s’est engagé sur l’honneur à ne rien divulguer. Un rapport sera présenté à ce sujet à l’empereur ou au ministre de l’agriculture , du commerce et des travaux publics. Le procédé est d’ailleurs tellement simple, nous a-t-on assuré, qu’il peut être appliqué même par une femme ou par un enfant.

Dans le compte-rendu que la Presse fait des expériences de lundi, ce journal raconte ainsi la première entrevue de M. Rarey avec le fougueux coursier Stafford :

« A l’ouverture de la porte de l’écurie, l’animal se jeta si violemment sur M. Rarey, que le palefrenier qui lui a\ait ouvert cette porte , fut effrayé pour M. Rarey, le saisit par son habit et l’entralna dehors, en refermant la porte.

i Mais M. Rarey, avec la gravité pâle et brave qui ne le quitte jamais , dit qu’il était venu pour faire une chose , et qu’il la ferait. Il rentra seul dans le box, et l’on put voir, par un guichet, ce qui se passa : le cheval, nous a-t-on dit, au-

rait commencé par ouvrir la mâchoire et saisir le milieu uu corps du dresseur qui resta impassible, ne manifestant ni douleur, ni crainte, ni colère, mais attachant sur les yeux même du cheval un regard puissant, fixe, patient, qui domine, qui fascine, qui magnétise ; puis, étant sûr désormais de sa domination, il lui fit lâcher prise en lui donnant un coup de poing sur le nez.

« Il se rapprocha ensuite du cheval, et fit alors... ce qui est son secret. Bientôt l’animal, obéissant et tremblant, se couchait à ses pieds. »

PROGRÈS DU MAGNÉTISME.

LA PRESSE PÉRIODIQUE ET LE MAGNÉTISME.

Un des signes les plus manifestes des progrès du magnétisme, c’est lu manière dont il est accueilli par la presse périodique. Autrefois les journaux gardaient à ce sujet un dédaigneux silence, ou si par hasard ils en faisaient mention, c’était pour insérer quelque grosse facétie, quelque impertinente boutade. Aujourd’hui un grand nombre de journaux montrent pour notre cause une grande bienveillance, enregistrent avec empressement les faits qui l’intéressent, et rendent compte d'une manière sérieuse des publications concernant le magnétisme et tout ce qui s’y rattache. C’est là la preuve d’un mouvement dans les esprits; la connaissance du magnétisme pénètre dans toutes les classes ; toute personne un peu instruite tient à en avoir au moins quelques notions élémentaires; les séances publiques d’expérimentation ont accru considérablement le nombre des sectateurs. Les journaux ne peuvent passer sous silence un sujet qui occupe aus3i vivement l’attention publique ; ils ne peuvent rester étrangers à «ne des branches les plus importantes de la science.

Nous allons mentionne r les articles publiés, à notre connaissance, depuis quelques mois, et pouvant offrir de l'intérêt à nos lecteurs t

1' L’ambassadeur persan Ferruk-Khan a assisté à une séance magnétique qui lui a été offerte par la Société philan-thropico-magnétique ; il en a témoigné toute sa satisfaction. Le Courrier de Paris du 8 décembre et la Patrie du lendemain ont rendu compte de cet événement.

2* L’Estafette du 2 février contient un long article sur le somnambulisme. On y raconte qu’une mère ayant consulté

sur la santé de sa fille, qui était gravement malade, le somnambule Alexis, celui-ci lui donna une prescription qui amena sa guérison, et qu’Alexis lui annonça en outre qu'elle serait longtemps séparée de sa fille. Cette prédiction se réalisa. L’enfant fut enlevée ; et après plusieurs années, ce fut aux indications d’une autre somnambule que la mère dut le bonheurde retrouver sa fille, et cet événement se réalisa au jour précis fixé par la somnambule.

5* L’Estafette du 45 février rapporte que, dans les environs de Bouthéon (Loire), un magnétiseur ayant endormi sa fille, sujet très-lucide, celle-ci vit un trésor enfoui sous un château qu’elle désigna. Une société de capitalistes s’est formée pour en faire la recherche ; on s’est entendu avec le propriétaire du château, et en ce moment une armée de travailleurs est occupée à creuser des tranchées et à construire des galeries sous la tour principale : tout le pays est en émoi.

4° L’Ami des Sciences du 31 janvier contient un article extrait de Y Union bourguignonne où il est rendu compte des phénomènes extraordinaires que présente une jeune fille de Chavigny.en Vallière, nommée Marie Huart, offrant quelque analogie avec Angélique Cottin : des mottes de terre, des pierres se détachent du sol etsont lancées vers elle, sans moteur visible ; il en a été de même des briques qui se sont détachées du foyer ; on cite une pierre de trois kilogrammes poussée vers elle avec une grande violence. Déjà l’Union de Paris avait mentionné ces faits étranges qui demandent confirmation.

5” L’Ami des Sciences du 29 novembre dernier contient une lettre de M. Matthieu, ancien pharmacien des armées, qui atteste que dans ses réunions où se trouvent des médiums, on entend distinctement des coups, sans aucune cause physique appréciable; que les combinaisons de ces coups produisent un langage conventionnel au moyen duquel les personnes présentes s’entretiennent avec l’auteur mystérieux des coups. M. Matthieu, qui a publié plusieurs écrits estima-

bles sur ces phénomènes mystérieux, demande qu'ils soient étudiés et constatés.

6° On lit dans le Siècle du 3 février, un article remarquable de M. Jourdan, sur le livre intitulé Clef de lu Vie, que deux hommes de lettres ont offert au public comme ayant été dicté par des esprits au nommé Michel, berger dépourvu de toute instruction. L’origine de ce livre le rapproche des ouvrages du fameux voyant américain Davis qui n’a jamais étudié que six mois à l’école primaire, et qui, dans ses nombreux et volumineux ouvrages, traite de toutes les sciences et discute à fond les questions les plus ardues. Il serait à désirer que les deux éditeurs de la Clef de la Vie fournissent quelques éclaircissements sur l’origine de cet ouvrage, afin qu’il fût établi que Michel l’a réellement dicté sans aide humain. M. Jourdan, sans ce préoccuper de cette question, fait le plus pompeux éloge des idées grandioses qui y sont exposées, de la hardiesse des conceptions, et de la poésie sublime qu’il met au niveau des épopées antiques.

7° Plusieurs journaux ont rendu compte ou fait mention d’un livre très-singulier intitulé : Pneumatologie positive et expérimentale, par le baron Louis de Guldenstubbé. Cet auteur assure avoir obtenu de l'écriture directe e» immédiate des esprits, et il enjdonne les fac-similé à la fin de son livre. Ces journaux sont : le Courrier de Paris ( 26 décembre et 4 janvier), la Chronique parisienne (31 décembre), le Monde illustré (16 janvier), le Bérenger (24 janvier) ; il faut ajouter à cette liste le Charivari (30 décembre et 28 janvier), qui l’a tourné en ridicule, mais qui à ses plaisanteries mordantes et spirituelles joint beaucoup de sagacité et de bon sens.

8° Enfin le grand thaumaturge Home a été l’objet de nombreux articles de la part des chroniqueurs (Courrier de Paris, du 8 décembre, Patrie du 29 novembre, Estafette du 29 décembre, etc.). On y raconte une foule d’anecdotes des plus merveilleuses ; on cite des meubles qui dansent et voyagent d’une salle dans l’autre, des accordéons qui jouent tout seuls une musique ravissante, des assiettes de pâtés qui d elles-mêmes vont trouver le nécromancien, des divinations

renversantes, etc. Malheureusement ces chroniqueurs n ont pas été témoins des choses prodigieuses qu ils racontent, •ne certifient pas les tenir des témoins oculaires ; ils ne nomment même pas ces témoins qu'ils ne désignent ordinairement que par des initiales; de sorte que le lecteur peut douter s'il s’agit de personnages réels, et si la comtesse de X..., le baron K... et le vidame de Trois Étoiles ne sont pas des êtres fictifs créés pour donner un corps à des aven-lures imaginaires. Avec des renseignements aussi légers, 0» conçoit que la constatation est impossible, et que, malgré tout le broit produit par le sorcier qui pendant deux hivers a été le lion de la fashion, le public est loin d’être édifié sur la réalité des merveilles qu’on lui attribue.

11 parait toutefois que ses exhibitions ont eu un dénoûment ■très-positif : les journaux assurent qu’une dame anglaise a légué à Home une rente viagère de 6,000 fr., par reconnaissance du service immense qu’il lui a rendu en lui dé-montrant d’une manière palpable et visible l'immortalité de l’âme.

Nous terminons en remerciant, au nom du magnétisme, les journalistes qui nous prêtent leurs concours bienveillant : quant à ceux qui persistent à dénigrer le magnétisme, nous les remercions encore, car leurs diatribes, en appelant l’attention sor ce sujet, forceront leurs lecteurs à s’en occuper et dou» amèneront indubitablement de nouveaux convertis.

A. S. Morin.

TRAITEMENT MAGNÉTIQUE

ACCOMPAGNÉ DE SOMNAMBULISME LUCIDE.

C'était pendant les beaux mois d’été, pendant lesquels j’ai l’habitude d’aller jouir des délices de la campagne : l’exercice de ma profession me mit en rapport avec une certaine Agathe Oriani, de la commune de Gorgonzola, près Milan : c’était une jeune fille de dix-neuf ans, de formes athlétiques, ayant en apparence une constitution robuste et un tempérament sanguin ; sa menstruation était régulière. Elle me dit qu’elle avait éprouvé, il y avait deux ans, une grande frayeur, à la suite de quoi elle ressentait comme des coups à la poitrine, accompagnés d’une douleur interne et lancinante à la région du cœur ; ses digestions étaient difficiles, elle manquait d’appétit, et de temps en temps elle était tourmentée d’une toux aiguë bronchiale. Pour combattre tant de maux, elle n’avait suivi aucun traitement régulier, et elle s’était bornée à quelques purgations.

Quand je la vis, au mois d’octobre 1857, elle était affectée d’une gastro-entérite dont je vins à bout au moyen de saignées, de purgations et de boissons rafraîchissantes.

Quand je revins à la ville, je l’engageai à m'y suivre et & continuer son traitement, ce à quoi elle consentit.

Le 10 novembre, elle fut prise de sa toux ordinaire, avec inflammation des bronches, fièvre, douleur locale, insomnie, inquiétude, etc. Je continuai le traitement anti-phlogistique, interne et externe, l’affection sembla disparaître, ou du moins s’atténuer considérablement Le 21, les symptômes d’inflammation ayant reparu, ainsi que la toux qui tourmentait beaucoup la malade, je voulus tenter si, concurremment avec la médecine ordinaire, la magnétisation directe pourrait amener au moins une trêve à.

cette toux spasmodique. La jeune personne ignorait complètement ce que c’était que magnétisme. Cet essai fut assez heureux, la toux cessait au moment où j’agissais, mais pour reparaître après quatre ou cinq minutes. Je continuai d'opérer ainsi pendant deux jours, et il y eut les mêmes alternatives de cessation et de réapparition de la toux ; cependant je ne négligeais pas les boissons mucilagineuses et les pilules sudorifiques de Dower.

Le 23, je voulus pousser plus avant la magnétisation, afin de voir si ma puissance produirait sur la malade le complet assoupissement des sens. J’eus le bonheur de trouver en elle une somnambule magnétique qui, dès les premiers instants, me fit espérer une bonne clairvoyante, et me présenta d’une manière non' équivoque les phénomènes d’attraction, d’isolement et d’insensibilité, et de plus l’intuition instinctive des remèdes. Elle fit immédiatement usage de cette dernière faculté pour se prescrire la saignée, les purgations et les boissons analogues, grâce auxquels moyens elle déclara qu’elle réussirait, sinon à faire complètement disparaître le mal (car elle était, disait-elle, très-malade et fort éloignée de la guérison), du moins à obtenir un mieux relatif, et elle indiquait les poumons comme le siège de son mal.

Son état s’étant aggravé à l’arrivée de la mauvaise saison, elle commença, dès le premier jour de décembre, à parler de prédictions : elle annonça qu’elle en ferait une sur sa maladie vers la fin du mois. En effet, le 27 décembre, quand je l’eus plongée dans le sommeil magnétique, elle fit la prédiction suivante que je reproduis textuellement :

« Je guérirai; mais il me faut une année de traitement; je me prescrirai moi-même les remèdes dans mon état magnétique ; car sans le magnétisme il serait impossible de me guérir. Durant cette période, j’annoncerai d’avance tout ce qui doit m’arriver. — D’ici à quinze jours (c’est-à-dire au

10 janvier), les taches que j’observe à mes poumons m’affaibliront tellement, que je serai forcée de rester au lit pour dix jours (c’est-à-dire jusqu'au 20 janvier), et pendant ce temps, je me prescrirai les remèdes dont j'aurai besoin. -•

De lit à trois mois (c’est-à-dire au 27 mars, je serai frappée d’une céphalite qui m’obligera de garder le lit pendant un mois, et je serai guérie de ce mal particulier au moyen de sangsues et d’autres médications. — Un mois après que je serai guérie de ma céphalite (c’est-à-dire vers le 15 mai), je serai prise d’un rhumatisme intestinal qui me fera garder le lit pendant quinze jours (c’est-à-dire jusqu’au 10 juin), et je me guérirai de cette affection par les remèdes que je me prescrirai.

« Depuis cette époque jusqu’à la fin de l’année, je ne vois pas que je doive être tourmentée d’autres maux ; au bout du temps prescrit, j’achèverai le traitement de mes poumons, et je ferai de grandes choses dont on sera émerveillé.

« Je sens que dans cet état somnambulique, je serai capable de répondre de la manière la plus satisfaisante aux questions qu’on m’adressera. »

Elle termina ce discours en recommandant de lui adminis- • trer tout ce qu’elle se prescrirait pour les maux, et de ne tenir aucun compte de ses caprices et de ses résistances dans l’état de veille; de la magnétiser chaque jour, et de lui donner à manger trois fois le jour, mais en petite quantité.

Emerveillé d’un tel déploiement de facultés chez un sujet dès son entrée dans la sphère magnétique, je suivis toutes ses prescriptions avec la plus scrupuleuse attention.

Dans les premiers jours de janvier, j’observai chez elle l’exténuation accompagnée de la diminution de la toux et de l’inappétence, ainsi qu’elle l’avait annoncé dans son sommeil magnétique.

Je la magnétisai chaque jour comme elle l’avait prescrit, et le 8 janvier, j’obtins d’elle d’autres prévisions sur son propre état. Elle me dit, dans son sommeil, que le 8 août, à une heure après midi, elle serait prise d’un tremblement dans les membres inférieurs, accompagné d’une grande épouvante qui durera une heure, après quoi elle sera guérie de son mal ; mais alors je devrai la magnétiser une demi-heure après

1 apparition de sa crise.

Comme je l’interpellai pour avoir un éclaircissement sur les évolutions de sa maladie, elle me répondit qu’il y avait

vingt-neuf mois qu’elle avait été saisie de cette épouvante qui causa tous ses maux, et que tout serait enlevé par la magnétisation quotidienne et par l’emploi des autres médications quelle se prescrirait.

Le 10 janvier, elle fut incapable de se lever du lit, à cause de la prostration et du malaise général qu'elle éprouva, aiusi qu’elle l’avait annoncé. Le 12, conformément à une autre prédiction, elle m’annonça pendant huit jours la continuation de ses accès d’épouvante devant durer deux minutes chacun. Elle en indiqua dix-huit répartis en divers jours et à des heures qu’elle détermina.

Tout arriva comme elle l’avait prévu. Pendant tout le temps qu’elle garda le lit, elle mangea très-peu, et réduisit sa nourriture à quelques potages et de l’eau pure; elle fut même soixante heures sans boire ni manger.

Le 20, bien qu’elle eût semblé la veille loin de pouvoir espérer d’être de longtemps en état de se lever, elle vint, à l’heure par elle annoncée, trouver la société, et elle ne se plaignait que d’une extrême faiblesse et de manque d’appétit.

Les 20, 21 et 22, je la mis en somnambulisme avant midi et je lui fis faire la promenade de vingt minutes qu’elle s’était prescrite, et j’observai la fermeté de sa démarche, bien qu’elle n’eût pas de soutien, ce qu’elle refusa. Après cet exercice, ses jambes se trouvèrent fatiguées, à cause de l’inertie de ses nerfs, disait-elle ; mais il fallait les rompre par la inarcbe, car autrement, dans dix-huit mois, elle serait morte dca jambes.

Le dernier jour de sa marche, dans un moment de lucidité, elle m’annonça que, pendant dix jours, depuis trois heures jusqu'à cinq de l’après-midi, elle serait prise d’un lombago dont pourtant j’aurais pu la préserver en la magnétisant six mimâtes le long de l’épine dorsale, dans son état de veille.

Telle est la relation que je soumets à mes collègues en magnétisme, les invitant à vérifier avec moi les phases futures de' la maladie qui doit encore peser sur le sujet pendant si* mois.

En continuant mes observations et le traitement magnétique, je serai à même de donner le complément de cette

histoire qui, je pense, intéressera ceux qui cultivent sérieusement le mesmérisme.

La jeune Oriani présente jusqu'ici les plus belles chances »le devenir une somnambule des plus remarquables, et d’égaler toutes celles dont il est mention dan s les fastes du mesmérisme.

Fasse le ciel que je puisse trouver le’précieux secret d’initier tout le monde au somnambulisme dont la principale utilité est dans le traitement des maladies humaines i

Janvier 1858.

Docteur Carlo Viitoosn, de Milan.

VISIONNAIRE

INTERPRÈTE DES SONGES.

M. Home a quitté Paris. Le grand évocateur du monde de génies, le Mesmer, le Cagliostro de nos salons modernes, a pris congé de ses enthousiastes admirateurs de France. Que ces derniers se consolent pourtant, un autre visionnaire, un nouvel inspiré leur arrive du Nord. Ce prodige s’appelle Friedrich Wolkstager; il nous vient du fond de la Suède, le mystérieux berceau des déesses du Valhala. Voici ce que raconte sur ce prodigieux personnage un de nos confrères de la Chronique, M. Paul d’ivoi :

v Friedrich Wolkstager, qui doit arriver à Paris dans les premiers jours du mois prochain, et qui descendra à l’hôtel du Louvre, a une très-grande réputation en Suède, en Nor-wége, en Finlande et en Danemark. Les Russes, qui sont très-superstitieux, ont beaucoup de foi en lui, et ont souvent fait le voyage de Saint-Pétersbourg à Stockholm pour aller le consulter. Il a fait des prédictions dont plusieurs sont restées célèbres. En voici une :

« Lorsque le prince GortschakofF était ministre de Russie à Stuttgardt, il rêva que son cuisinier, —un homme illustre, Gruyère, qui est oncore au service du prince, — il rêva, dis-je, que son cuisinier, au moment où l’on allait se mettre à table, venait à lui, les vêtements en désordre, pâle, défait, désespéré. 11 venait apprendre au prince une chose effrayante, un prodige inouï :

« Il avait, lui Gruyère, mis à la broche une magnifique poularde truffée arrivant directement du Mans, et il avait chargé de la surveiller et de l’arroser un jeune marmiton parisien fort intelligent. Au bout de quelque temps, s’étant approché de la broche pourvoir à quel point en était son rôti,

il vit, 0 terreur ! 6 prodige ! la poularde disparue et remplacée à la broche par l’aigle à deux tètes de Russie, ayant un écusson sur le cœur au lieu d’une barde de lard. Un homme en habit tout brodé, un crêpe au bras, avait remplacé le marmiton et arrosait la bête avec son jus, tandis qu’un Turc ac croupi soufflait le feu.

« Le prince GortschakofF, ne pouvant croire au récit de son fidèle Gruyère, descendit à la cuisine et vit avec terreur que le récit était exact. A son arrivée, l’homme en habit brodé se leva. Le prince reconnut M. de Nesselrode, qui vint au-devant de lui, s’inclina, lui prit la main et la baisa. Le contact de ses lèvres froides réveilla le prince.

« Le prince GortschakoiT écrivit tous les détails de ce rêve singulier au grand onéiromancien suédois, et Wolkstager lui répondit. Dans sa réponse, il prédisait la guerre, la défaite des Russes, la mort de Nicolas et la chute de M. de Nesselrode, remplacé par le prince GortschakoiT. Cette prédiction, qui s’est répandue en Russie avant sa réalisation, a, comme on le pense bien, illustré encore plus le nom de Wolkstager. »

EMILE FONTAINE.

(L'Union du 43 mars).

BULLETIN SPIRITDALISTE.

On nous garantit l’authenticité de l’anecdote suivante :

M. X..., tous les matins, depuis un mois, à sept heures et demie, était réveillé par do grands coups frappés contre la muraille, contre le bois de son lit, contre tous ses meubles.

M. X... croit aux esprits, et s’occupe avec passion de ce qu’on appelle les phénomènes surnaturels. 11 employa le procédé habituel des gens qui veulent consulter les esprits frappeurs, et demanda :

— De quoi s’agit-il ?

— Annonce de mort, répondirent les coups mystérieux.

— Qui es-tu T

— Albert D..,

Albert D... est un ami intime de M. X..., qui habite à vingt lieues de Paris.

Aussitôt M. X... prend le chemin de fer et arrive chez Albert. 11 le trouve au lit, gravement malade.

— Que je suis heureux de te voir ! dit le moribond ; tous les matins, vers sept heures et demie, on me fait prendre de l’opium, et il me semble alors qu’une force irrésistible m’entraîne vers toi et que mon âme entre en communication avec la tienne.

— Je le savais, mon ami ; et c’est parce que tu m’as averti de ta maladie que je suis accouru vers toi.

M. X... passa alors dans la chambre voisine, où se trouvait le médecin :

— Que pensez-vous de l’état d’Albert ?

— M. D..., répondit le médecin, ne s’en relèvera pas.

Le soir même, M. D... rendait le dernier soupir.

(Extrait de la Patrie du 9 mars. )

_Nous lisons clans Y Intérêt public île Tarbes, du h mars :

« On raconte des faits si merveilleux et si extraordinaires sur une promenade que fait chaque matin, depuis quinze jours, à deux kilomètres de Lourdes, une toute petite jeune fille, nommée Bernadette Savi, dont le père est un simple ouvrier vivant chaque jour du produit de son travail, que nous ne pouvons les passer sous silence. En sortant de cette ville, dans la direction de Saint-Pé, cette enfant se rend dans une grotte, située au centre d’un rocher où jaillit une fontaine non loin des bords du Gave, et parvenue en ce point, elle y fait chaque jour, à six heures du matin, une adoration durant laquelle elle prétend avoir des rapports directs avec la Vierge, mère de Dieu. Lorsque la sainte apparition a lieu au moment qu’indique cette enfant, les spectateurs remarquent que sa ligure pâlit, que ses mains deviennent tremblantes et que des crispations nerveuses se manifestent. Cet état disparaît bientôt pour faire place à un sourire gracieux et aux émotions les plus douces et les plus ravissantes.

« Sans ajouter à ces faits l'importance qu’y attache la rumeur publique, nous les consignons ici, parce que nous sommes certain que ces faits ont déjà excité la sollicitude de l’autorité.

« On nous assure qu'aujourd'hui même, vers huit heures du matin, plus de cinq mille personnes se pressaient autour de la jeune fille, quand elle a fait sa prière au lieu accoutumé; elle a fait espérer des révélations publiques lorsqu’elle aura conféré avec son confesseur.

« Encore une fois, nous réservons notre opinion et nous nous bornons à constater ces bruits, qui, quoique mystérieux, en apparence, préoccupent en ce moment, d’une manière assez vive, l’attention publique, et amènent tous les jours de nombreux pèlerins dans les murs de la ville de Lourdes. » Les mêmes faits sont rapportés par Y Ère impériale.

Un médium et Mesmer.

16 janvier 1858.

Mademoiselle ErmanceDufaux m’ayant fait l’honneur devenir passer une soirée chez moi, en compagnie de plusieurs personnes, fut priée de vouloir bien se mettre en communication avec Mesmer; elle y consentit avec une grâce charmante, et voici la réponse qu’elle obtint. Je rapporte textuellement le procès-verbal, écrit à l’instant même. Cette réponse fut donnée si vite et si correctement que nous fûmes tous étonnés au dernier point.

Je n’ai pas besoin d’ajouter que rien n’avait été préparé sur ce sujet et que ce fut seulement sur une pensée qui me vint dans ce moment.

« A Mesmer.

« Veux-tu nous parler sur le magnétisme?

Réponse.

Le fluide que dégage le magnétisme, élargit la prison de l’esprit ; alors, celui-ci s’élève au-dessus de lui-même, voit, sent et dit des choses qu’enfermé dans son âme, l’homme ne connaît pas. Ainsi, l’esprit du somnambule magnétisé ne tient plus à son corps que par un faible lien, et cet esprit recouvre en partie les éléments de sa nature. Le somnambule, dans son état anormal, souffre, car l’action magnélique est une sorte de mort anticipée. De là vient que le sujet sent ses forces vitales s’affaiblir et perd souvent la vie prématurément.

D. Que penses-tu de l’avenir du magnétisme?

R. Je le crois grand.

i). Pourrais-tu donner quelques développements à celte pensée?

R. Je le pense destiné à guérir la plupart des maux de l'humanité; mais comme l’homme est un être borné, il en abusera, ("est un lien de plus entre le monde matériel et le monde spirituel, une sorte de télégraphe qui conduira plus docilement la pensée des esprits à la pensée des hommes ; car le meilleur magnétisé, se trouvant presque délivré des liens de la matière, reflétera mieux la pensée qu'il aura reçue. Ainsi, l’esprit du médium, dans l’état anormal relatif, reçoit généralement l’idée confusément, attendu que l’esprit qui la lui transmet doit employer une partie de ses facultés pour maîtriser l’être matériel. »

M. Home est à Rome, ce qui dément les bruits répandus sur son arrestation à Paris. M. Home me fait faire ses re-merciment s sur mon article qu’un ami bienveillant lui a communiqué. Cela l’a, dit-il, bien amusé, et la tournure de l’article surtout me mérite son suffrage.

Si j’ai pu déterminer chez M. Home un moment de gaîté, je n’ai pas perdu mon temps; car je désire que notre Saint-Père le Pape trouve le médium en joie et ne le confonde point avec l'esprit matin qu’on nous représente toujours si triste.

Je reparlerai donc bientôt de M. Home, et j’examinerai plus au fond le médium. J’espère ainsi lui procurer quelques nouveaux plaisirs.

Baron du Potet.

VARIÉTÉS.

ZOOMAGNÉTISME.

Plusieurs fois nous avons rapporté, dans ce journal, des exemples d’une sorte d’action magnétique, exercée p ir certaines espèces de reptiles. Aujourd’hui, nous trouvons, dans un feuilleton du Siècle, intitulé FArabie-IIeureuse, le fait suivant :

( Nous vîmes alors les serpents et les couleuvres qui, ainsi que nous l’avons dit, sont fort communs dans ces parages, faire la chasse aux rats, aux souris et aux autres petits rongeurs que nous avons indiqués. Les couleuvres les joignent à la course. Les serpents, lents et lourds, se contentent de les fasciner quand ils se trouvent à la portée de leurs regards. Les Arabes prétendent que ces serpents fascinent aussi les oiseaux. 1( .... .

« J’ai vu des exemples de fascination sur les rats et les souris dans l’Arabie-Heureuse, mais ce n’est qu’en Abyssinie que j’ai vu la même opération pratiquée sur des oiseaux. J'ai tué plus d’une fois le reptile au moment où, la gueule ouverte, les yeux fixés et le cou tendu, il n’attendait plus que la chute de l’oisèau. Si je tuais le serpent raide, presque toujours l’oiseau tombait près de lui. Seulement le serpent n’en revenait pas; mais l’oiseau en revenait; pas toujours cependant ; parfois le vôlatile mourait, sans blessure aucune, de terreur qu’il avait éprouvée, puis peut-être aussi d’asphyxie.

« Ces gros serpents courts, dont je viens de parler, la couleuvre ordinaire et le céraste, c’est-à-dire les trois principaux serpents de l’Arabie, ont dans ce gros lézard que mangent les Arabes un ennemi acharné. »

HALLUCINATION.

Un rassemblement considérable s’était formé hier dans le jardin du Palais-Royal à la suite d’un individu dont les vêtements étaient dans le plus grand désordre, et qui criait et gesticulait d'une façon tout à fait excentrique. Il remettait à tous ceux qui l’approchaient des billets soigneusement pliés en leur disant : « Prenez et lisez ; si vous avez la foi, vous verrez des lettres de feu qui vous révéleront des choses extraordinaires; puis vous agirez, car les temps sont venus!...» On dépliait ces billets, et on ne trouvait que du papier blanc.

Comme l’exaltation de cet individu allait croissant, des sergents de ville intervinrent et le conduisirent au commissariat de police du Palais-Royal. En entrant dans les bureaux, il tomba à genoux et ouvrit une Bible dont il était porteur : il commençait à psalmodier un psaume, lorsqu’on le releva pour le fouiller.

On ne trouva sur lui que 1 fr. 30 c. ; mais on sut qu’il avait distribué à la foule une certaine somme qu’il avait sur lui. On apprit que ce jeune homme était un élève en pharmacie devenu fou, on ignore pour quelle cause, et en traitement à Bicêtre, d’où il s’est échappé. A la suite des constatations* il a été réintégré dans cet établissement.

BIBLIOGRAPHIE.

REVDE SPIRITE, journal d'études psychologiques, par Aluk K*«dkc.

Le spiritualisme a fait tant de progrès depuis quelques années, surtout en Amérique, les prodiges qu’il s’attribue ont excité si vivement la curiosité publique, les hauts faits du fameux médium Home ont eu tant de retentissement, qu’on devait s'attendre à voir éclore un organe spécialement consacré au surnaturel. M. Allan Kardec, directeur de la Revue spirite, est l'auteur de l’ouvrage remarquable intitulé le Livre des Esprits, ou plutôt il a la modestie de ne prendre que le titre de secrétaire des esprits qui l’ont dicté aux médiums, car il déclare n’avoir eu d’autre tâche que de mettre en ordre les matériaux ainsi obtenus. Nous voyons avec plaisir cette nouvelle tribune ouverte à la discussion de questions très-controversées et dont la solution intéresse grandement l'humanité. Le débat est très-animé, la lutte des plus ardentes : il est bon que chaque parti ait ses champions et fasse valoir tous ses moyens. La science ne peut rester indifférente sur les faits bizarres, merveilleux dont on nous apporte journellement les relations; il faut qu'un examen approfondi nous mette à même de les apprécier.

Les deux numéros qui ont paru contiennent des dissertations intéressantes, quelques récits de phénomènes spiritualistes et des morceaux présentés comme l’œuvre des esprits qui les ont dictés aux médiums. Les auteurs paraissent animés d’une conviction parfaite et d’un zèle ardent de prosély-

tisme; il serait à désirer qu’ils apportassent une critique sévère dans l’admission des faits qu'il est d’autant plus difficile de faire accepter, qu’il s’agit de choses plus extraordinaires.

La Revue discute avec une certaine aigreur l'histoire du fameux défi dont le résultat a causé quelque dépit dans le camp spiritualiste. Une offre de 500 dollars (2,500 francs) avait été faite, par l’intermédiaire du Boston Courrier, à toute personne qui, en présence et à la satisfaction d’un certain nombre de professeurs de l’Université de Cambridge, reproduirait quelques-uns de ces phénomènes mystérieux que les spiritualistes disent avoir été produits communément par l’intermédiaire des agents appelés médiums. Le défi fut accepté par le docteur Gardner et par plusieurs personnes, qui se vantaient d’être en communication avec les esprits. Les concurrents se réunirent dans les bâtiments d’Albion à Boston : parmi eux on remarquait les demoiselles Fox, devenues si célèbres par leur supériorité en ce genre. La commission chargée d’examiner les prétentions des aspirants au prix, se composait des professeurs Pierce, Agassiz, Gonld et Horzford, tous quatre savants très-distingués. Les essais spiritualistes durèrent plusieurs jours ; ils furent infructueux, ainsi que le constate le passage suivant du rapport de la commission : « La commission déclare que le docteur Gardner n’ayant pas réussi à lui présenter un agent ou médium qui révélât le mot confié aux esprits dans une chambre voisine ; qui lût le mot anglais écrit à l’intérieur d’uu livre ou sur une feuille de papier pliée ; qui répondit à une question que les intelligences supérieures peuvent seules savoir ; qui fit résonner un piano sans le toucher, ou avancer une table d’un pied sans l’impulsion des mains; s’étant montré impuissant à rendre la commission témoin d’un phénomène que l’on pût, même en usant d’une interprétation large et bienveillante, regarder comme l’équivalent des épreuves proposées, d’un phénomène exigeant pour sa production l’intervention d’un esprit, supposant ou impliquant du moins cette intervention; d’un phénomène inconnu jusqu’ici à la science ou dont la cause ne fût pas immédiatement assignable par la

commission, palpable pour elle; n’a aucun titre pour exiger du Courrier de Boston la remise de la somme proposée de 500 dollars. »

M. Kardec, loin d'être ébranlé par cet échec, allègue que les phénomènes du spiritualisme ne sont pas de ceux qu’on puisse reproduire à volonté, que les esprits qui en sont les auteurs agissent quand bon leur semble et ne sont pas à nos ordres, qu’ils choisissent leurs genres de manifestations, que les soupçons les irritent, qu’ils ont des antipathies pour certaines personnes et surtout pour les incrédules, que l’appât d’une prime pécuniaire, loin de faciliter les communications, devait plutôt leur nuire.

Tous ces arguments ont un vice capital, c’est qu’ils supposent résolu ce qui est en question, c’est-à-dire d’abord la réalité des faits qu’il s’agissait de vérifier, et ensuite la production de ces faits par des esprits. Tant que ces deux points ne seront pas prouvés, ce sera s’égarer dans le vide, que de. disserter à perte de vue sur les mœurs et le caractère d'esprits dont l’existence même est problématique. Vous noua alléguez des faits prodigieux, vous prétendez que rien n’çst plus commun, qu’ils se présentent journellement dans vos réunions, vous tancez même vertement l’incrédulité de ceux qui refusent de les admettre, et quand nous vous demandons à voir, tout s’évanouit ; il ne reste que votre assertion qui ne peut nous suffire ; ce n’est qu’en nous rendant témoins de ces faits, que vous pourrez nous convaincre.

Les spiritualistes se contredisent quand ils disent que leurs phénomènes ne sont pas de nature à se reproduire à commandement : car ils rangent dans la classe des manifestations spirituelles le phénomène des médiums écrivains; or, il est notoire que chacun de ces médiums peut à son gré mettre en action la faculté dont il est doué, et n’a qu’à prendre mie plume avec une intention de médium pour que sa main se mette aussitôt à écrire des dictées réputées spiritualistes. Si les esprits qui conduisent la main des médiums sont ainsi à la disposition de ceux-ci, on ne voit pas pourquoi il en serait

autrement des esprits moteurs de tables, joueurs d'accordéon, montreurs de mains, etc.

Que les esprits choisissent leurs genres de communication,, soit : mais pour peu qu’ils soient sensés, ils doivent choisir des manifestations non équivoques, capables de porter la conviction chez tous les spectateurs ; et quand on répond, au nom de ces esprits, qu’ils ne veulent pas se soumettre à des épreuves, c’est un aveu d’impuissance ou l’abandon de la. mission qui leur est attribuée, d’éclairer l’humanité.

Des esprits élevés, comme on les suppose, ne peuvent s'offenser de soupçons parfaitement légitimes de la part de personnes qui n’ont aucun motif pour croire à de pareilles interventions, et auxquelles la prudence fait un devoir d’être «h garde contre la supercherie et l'entraînement aveugle.

Quant à la prétendue antipathie des esprits contre les incrédules, il e9t impossible de voir dans cette allégation autre chose qu’un moyen commode d’éviter le regard vigilant d’observateurs attentifs. Un spiritualiste qui demeure au quatrième étage m’a assuré qu’il suffirait que je misse le pied sur la première marche de son escalier pour faire cesser chez lui toutes les manifestations. S’il en est ainsi, je suis le maître des esprits, puisque ma présence les frappe subitement d'inertie, et je suis le plus grand des exorcistes. Il est fâcheux qu’il ne se soit pas trouvé un homme comme moi pour mettre à la raison tous les diables de Loudun ; on aurait évité de recourir à de pauvres jésuites qui ont sué sang et eau pendant plus de deux ans, et ont fini par être eux-mêmes possédés par les diables qu’ils voulaient chasser.

Quant à la question pécuniaire, certes le désintéressement est une belle vertu, et nous souhaitons, comme M. Kardec, la rencontrer chez tous les médiums. Mais ceux-ci, en se présentant au concours, pouvaient n’avoir en vue que le triomphe de la vérité, et rien ne les aurait empêchés, en cas de succès, d’employer la prime en œuvres pies. La prime ne devait donc détourner ni les médiums, ni les esprits; les ans et les autres devaient au contraire redoubler d’efforts

pour sortir victorieux d'une épreuve qui avait pour juges d’excellents observateurs, et qui aurait dû être décisive. Du reste, une foule de médiums, tant en Amérique qu’en France, et notamment les demoiselles Fox, font payer leurs séances, ce dont nous ne leur faisons nullement un reproche, puisque le prêtre lui-même doit, d’après saint Paul, vivre de l’autel. Eh bien, la rémunération que reçoivent ces médiums n’enlève rien à leurs facultés qui entrent en action à commandement et chaque fois qu’il se présente un client.

On voit que les raisons données par M. Kardec ne valent pas grand’chose. Il aurait été plus sage de dire qu’un fait négatif ne prouve rien, s’il est isolé, que la question demeure entière, et que ceux qui cherchent sincèrement la vérité doivent étudier avec persévérance et multiplier les essais pour parvenir à arracher à la nature ses secrets.

M. Kardec expose la hiérarchie des esprits, leurs fonctions, leur caractère, etc., et il procède à la manière des révélateurs, sans discuter, comme s’il était persuadé qu’à sa parole tout doit s’incliner avec respect. On est en droit de lui demander oh il a puisé toutes ses affirmations. Ce ne peut être que dans le langage des corbeilles qui sont ses oracles. Sans examiner quelle est la valeur de ces communications, nous nous contenterons de lui objecter l’énorme divergence qu’on trouve dans les résultats ainsi obtenus. Les médiums nous donnent des systèmes contradictoires qui ne peuvent être tous vrais. Pour discerner la vérité, nous dit-on, il ne faut écouter que les bons esprits ; mais à quel signe les reconnaître ? On nous répond que c’est à la nature de leurs dictées. Ce procédé ne peut servir qu'à éliminer les dictées évidemment grossières, immorales, ineptes. Mais parmi les autres, où l’on trouve une morale pure, un langage noble, des sentiments élevés, il y a désaccord sur la doctrine. Choisir capricieusement le système qui nous sourit le plus, ce n’est pas agir philosophiquement, puisque ce système ne jouit d’aucun caractère de supériorité qui établisse entre lui et les autres une différence tranchée. On en est donc réduit

à n’adopter que ce que confirme la raison et à reléguer tout le reste dans le domaine des hypothèses. Nous regrettons que M. Kardec n’ait pas procédé avec cette sage réserve, qu’il ait accueilli précipitamment des systèmes dont rien ne justifie l’exactitude, et qu’au lieu de travailler, comme il le pourrait, au progrès de la science, il tende (peut-être à son insu) à fonder une secte d’illuminés, une petite église où la corbeille remplacerait le trépied sacré.

Il nous donne des dictées de saint Louis. Nous avons eu déjà occasion de signaler à quels dangers d’erreurs on s’expose en acceptant ainsi les déclarations des médiums sur l’origine de leurs communications. Même en admettant l'intervention des esprits, leur identité ne peut être constatée, et les plus éminents spiritualistes ont avoué qu'ils avaient été dupes d’esprits qui s’attribuaient faussement le nom de grands personnages. Aucun critérium connu ne peut servir à contrôler ces déclarations. Dans le cas particulier, la dictée consiste dans des banalités sur l’avarice; certes, il n’y a rien, ni dans le fond, ni dans la forme, qui dénote la personnalité du bon roi, rien qui dépasse la portée intellectuelle du médium, M. Kardec ne se fait pas faute de rejeter arbitrairement des dictées spiritualistes, tout ce qui ne s'accorde pas avec ses idées. Ainsi l'esprit de saint Louis ayant enseigné l’éternité des peines de l’enfer, M. Kardec, qui n’admet pas ce dogme, en est quitte pour nous dire que cet esprit a sciemment affirmé une fausseté, mais que sa dictée est destinée aux esprits de la troisième classe (précisément troisième, ni plus ni moins), afin d’augmenter leurs souffrances en leur faisant croire qu’elles n’auront pas de fin. Cette explicatiou est loin d’étre satisfaisante, car cette dictée est faite, non à des esprits incorporels d’un ordre quelconque, mais à des hommes terrèstres, et a le grave [inconvénient de leur inculquer ce qu’on reconnaît pour une erreur. Ce fait vient à l’appui de nos observations sur l’impossibilité de reconnaître aucune autorité à de semblables productions qui se contredisent, et sur la nécessité de tout soumettre au jugement de la raison. De plus, si un esprit, pour un motif quelconque, se permet

d’altérer la vérité, il perd tout titre à la confiance et ne peut plus Être cru même sur la qualité qu'il s'attribue, comment donc admettre l’identité du prétendu saint Louis?...

Nous ne pousserons pas plus loin ces observations cnti-(nies. Nous saluons volontiers l'apparition d’un recueil consacré au spiritualisme ; il a un champ immense à explorer, il peut rendre les plus grands services. Mais nous lui conseillons de prendre toujours la raison pour guide de ne pas s’écarter de la voie expérimentale, de résister à 1 élan qui emporte les adeptes vers un illuminisme dangereux, et de ne pas prêter son concours au rétablissement du fanatisme et des vieilles superstitions.

a. s. mou».

ERRATA.

L'article WMfrigranhique publié dans le dernier numéro sur le livre de M de GuldenBtubbé, S RéalUé des esprits, * e*., contient quelques erreurs d'impression, dont voici la rectification :

Page 134, ligne 8, au lieu de jours, lisez source.

Page 134, ligne 19, au lieu de puissants, lisez saillants.

Page 136, ligne H, au lieu de contribuer à,- lisez contrôler.

Page 136, ligne a, au lieu de des autographes, lisez a des autographes.

Page 136, ligne 34, au lieu de coté, lisez être.

Page 136, ligne 39, au lieu de s'il en est ainsi, lisez s il n en est pas

ainsi.

Baron du POTET, propriétaire-gérant.

SOMNAMBULISME LUCIDE.

PRÉVISION»

(; Le magnétisme—disait monsieur le docteur Billot — est une mer semée d’écueils, une voix pratiquée à travers d'immenses précipices »,—et il avait bien raison, car, quel est en effet celui d’entre tous les magnétiseurs qui peut se flatter de ne s'être jamais trompé dans ses appréciations et jugements, d’avoir toujours produit de lions effets par toutes les magnétisations qu'il a été appelé à faire ?

« La réussite, dans ces sortes d’expériences, tient à tant de causes différentes, qu’on ne peut ni ne doit se flatter d’aucun succès, s’il n’est déjà obtenu.

« D’après certains maîtres en magnétisation, il ne s’agit, pour avoir beaucoup, si ce n’est toutes les chances de réussite, que d’être fortement constitué, surtout matériellement plutôt que moralement. — L’énergie du caractère est un bon auxiliaire, disent-ils — mais une robuste constitution assure presque toujours le succès.

« Ilestbien vrai qu’une forte constitution doit donner beaucoup plus de fluide vital qu’une constitution frêle, car la quantité de fluide est chez nous en raison d’êtres vivants qui sont appelés à former, par leur réunion et par la solidarité de leur organisation avec la nôtre, l’intégralité de notre être matériel ; mais aussi, je crois pouvoir affirmer que le sentiment intime de notre force centuple notre émanation fluidique. Précédemment j’ai dit que la foi seule en nous suffirait pour nous faire transporter des montagnes.

J'ai même expliqué, aussi clairement que cela est possible, ce que l’on entendait par la foi. La foi nous étantTlonnée, la force, la puissance qui découlent de sa présence en nous nous Tome XVII.— N'o 31. — 2*Sérik. — 10 Avril 1858. 6

sont aussi données. L'émanation fluidico-magnétique n’étant que l’agent intermédiaire contre l'esprit et la matière, celle-ci ne peut être supérieure à l'esprit qui l’anime par son souille vivifiant.

« 11 résulte de ces explications, que quand il ne s’agit que de produire une force d'une importance tout à fait secondaire et ne devant s’appliquer ou ressortir que de notre organisation physiologique, la force musculaire, constitutive, matérielle, semble au premier abord devoir être le plus puissant auxiliaire pour un expérimentateur; il n’en est cependant pas ainsi d’une manière absolue, mais, dès que l’on veut pénétrer dans le domaine de l'imagination, de la pensée ou de l'âme• supérieure, on a grandement besoin de l’appui d’une force spirituelle ; car tous les phénomènes psychologiques que la magnétisation produit ne sont que le résultat du développement de cette force en nous. Dans certaines circonstances l'âme supérieure nous prête son concours, soit pour satisfaire au désir incessant qu’elle éprouve de nous faire progresser dans la voie de la perfection divine, soit pour mieux nous modeler à son image et nous rendre plus propres à son ser-•vice. Mais, que nous importe que ce soit pour nous ou pour elle qu’elle nous éclaire? Ne profitons-nous pas directement, -présentement et dans l’avenir, des immenses avantages que cette lumière nous accorde ?

« Voici un fait de magnétisation qui vient à l’appui de mon raisonnement sur la force corporelle ou morale que doivent posséder les magnétiseurs.

« C’était vers la fin du mois de novembre 1851, je magnétisai pour la première fois M. X. ; cinq minutes me suffirent pour le magnétiser entièrement, quoiqu’il fût beaucoup plus fortement constitué que moi. Quoique ce que je vais raconter en peu de mots se rattache à la politique d’alors, je puis cependant sans aucune indiscrétion le faire connaître ici, à titre seulement de fait niagnético-historique.

« M. X... avait été introduit chez moi par M. Roberaud (étudiant en médecine à l’hôpital de Nîmes), avec qui j’étais entré en relation à l’occasion des fréquentes expériences de

magnétisme que nous faisions avec et chez M. le docteur G., en présence d'autres étudiants, internes à l’hôpital de Nîmes.

« Dès que M. X.... fut endormi (magnétiquement parlant) et qu’on lui eut adressé quelques questions plus ou moins en usage chez tous les expérimentateurs, M. Roberaud lui fit la question suivante : — Savez-vous et pouvez-vous nous dire comment se terminera l'élection parisienne? Pensez-vous qu'il y aura assez de votants pour la valider? — Oui, répondit M. X..., — mais tout juste assez; — il ajouta : — Mais qu’importe la validité du vote, en présence des évnée-ments qui vont s’accomplir? — Quels sont ces événements? demanda M. Roberaud. — Une révolution, un coup d’état, les pouvoirs suprêmes luttant entre eux; le plus haut, mais le plus faible, renversant le plus fort et s’installant comme pouvoir unique. — Vous vous illusionnez, mon cher. — Non, je ne’m’illusionne pas, vous pourrez vous en convaincre sous peu.

« Pendant que ce dialogue avait lieu entre M. Roberaud et M. X..., M. C..., marchand mercier, place du Marché à Nîmes, entra pour acheter quelque chose et mit fin à cette conversation, que j’avais écoutée, mais à laquelle je n'avais apporté aucune attention, car je n’avais eu en magnétisant M. X... d’autre intention que de faire une expérience magnétique de plus et augmenter de M. X... lui-même le nombre des croyants.

« Par rapport à M. C..., nous fîmes encore quelques autres expériences non ¡moins curieuses. La nuit vint nous forcer à clore la séance, et nous nous séparâmes sans nous communiquer |le sentiment que cette expérience avait fait naître en nous.

h C’était, je crois, le 25 décembre 1851 que je donnai cette séance de magnétisme, et, six ou huit jours après, l’élection et la révolution que nous avait annoncées M. X... eurent lieu, et ce ne fut qu'alors que je crus sincèrement à la réalité du somnambulisme de M. X... pendant cette séance.

« Quelque temps après, dans la salle Pol (aujourd'hui

Houël), M. X.-- nous permit de faire sur lui une nouvelle expérience de lucidité somnambulique. Dans cette séance, M. V., avoué à Nîmes, fit faire à M. X... une excursion dans l'Ar-dèche, excursion qui fut faite avec beaucoup de précision et d’exactitude dans les détails. M. X... suivait lo cours d’une rivière, faisant très-minutieusement la description des lieux environnants : sur un mouvement d’impatience que manifesta M. V... de ce que M. X... ne voyait pas ce qu'il voulait plus particulièrement lui faire visiter, — Ali ! dit ce dernier, c’est de ce pont naturel que vous voulez qu« je m’occupe? — Oui. —Eh bien! j’y suis. —Et alors il raconta plusieurs faits historiques se rapportant à ce lieu; il en fit la plus fidèle description, ce qui, joint au récit général de cette excursion, constitua l'une des plus curieuses séances de magnétisme que j’ai donnée ou auxquelles j’ai assisté.

«, Pendant l’année 1852, j'ai magnétisé quatre ou cinq fois M. X..., toujours en présence d’une société choisie, dans laquelle figurait chaque fois M. Dimey, en sa, qualité de rédacteur; de la Gazelle du ISm-Langue duc; dans chacune de ses magnétisations, M. X... était admirable par sa lucidité et l’indépendance qu’il conservait pendant son sommeil magnétique.

h Dans ces expériences il n'est nullement besoin que le magnétiseur possède une grande force corporelle ; au contraire, il faudrait pour les réussir pleinement,, qu’il pût se. dégager entièrement des étreintes desa matérialité, et s’identifier avec l’esprit de son somnambule.

Je raconterai plus tard quelques expériences physiologiques extraordinaires que j’ai eu l’occasion de répéter maintes fois et en présence de nombreux témoins, sur la personne de M. X..., commis banquier à Nîmes, dans le cours de l'année 1852, du mois de janvier au mois de juillet inclusivement.

MANLIU9 SALLES.

(Extrait de la ftevue méridionale du 16 mars 1858.)

U’OIDÎTÉ. — UN I.Ê/.ARD EXPULSÉ d’l-jî corps humain.

Le Sjiiriliuil Tlivlcjrapli, du 27 février dernier, contient Ja relation suivante, datée d’Ellington (Connecticut) du 2 du même unis :

«En juin 185/i , Seldon N. Pinney, âgé de dix-huit ans, fils de Nelson et de Mirantfi Pinney, d’Ellington , devint malade et éprouva des spasmes. Plusieurs médecins de la faculté appelés auprès de lui employèrent en vain toutes les ressources de leur science, ils ne purent parvenir â faire cesser cet état fâcheux. Au mois de juin 1857, M. John R. Reed, de Hartford, âgé de vingt-un ans, forgeron de son état, ayant la prétention d'être influencé par les esprits, fut invité à voir le malade. Il lui prescrivit un médicament qui parut produire le bon effet de diminuer la violence des spasmes; mais, vers l’époque de la fête des actions de grâce, le malade éprouva des attaques plus violentes $ie jamais. Le médecin fut encore appelé T et ses prescriptions n’amenèrent presque aucun soulagement, si même il y en eut. On eut alors de nouveau recours à M. Reed , qui vit le malade le 3 janvier 48Ô8 , ;et, dans son état de iranse, -décrivit minutieusement un reptile dm genre du lézard , qu'il affirma être iogé dans l’estomac ou les intestins du malade. Il en désigna-, avec une extrême précision , la longueur, la cou-leur, les taches et les raies, et déclara qu’on pourrait l’expul 9er. H fit avaler au malade de fortes doses de térébenthine •écrasée avec des cerises noires et des toiles d'araignée ; il lui fit prendre, en outre, un lavement de décoction de tabac. ’Quelques minutes après l'administration de ces remèdes, le reptile parasite fut foircé de quitter son asile et fut rejeté au dehors ; 3 > était vivant et se mit à ramper,; cet animal vécut encore dix minutes. I^e malade rendit ensuite une masse de vers de différentes grandeurs, dont l’un de trois pouces, d'une coulent- rougeâtre , avec la tête noire. C’est,le 21 juin fwele malade s'est débarrassé du reptile et des vers, et depuis ce temps, il a recouvré rapidement la santé,,

i« Le ma'ade et ses père et mère sont prêts- à attester par serment tous ces faits. » Signé Eli JkiuNSôN. »

CLINIQUE.

EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE.

A M. le baron du Potet.

Monsieur,

Souffrez qu’après avoir examiné sérieusement votre Essai sur renseignement philosophique du Magnétisme, je vous offre l’hommage bien sincère de ma reconnaissance; car, non seulement j’y trouve les motifs les plus pieux et les plus orthodoxes pour engager tous les chrétiens à se secourir fraternellement et à peu de frais les uns les autres dans leurs infirmités, et à accomplir par là le plus grand de tous les commandements qui est celui de la charité ; mais, pour mon compte particulier, je me crois extrêmement flatté de tous vos chapitres, qui semblent écrits aussi bien pour moi que pour vous, sauf les progrès étonnamment supérieurs que vous avez faits dans l’art admirable du magnétisme.

J’étais prêtre depuis plusieurs années, et je n’avais jamais entendu parler du magnétisme animal que dans nos classes de physique , où l’on n’en apprend que le nom , ni jamais je n’avais eu la pensée de m’informer de ce que c’est en effet.

Cependant j’avais lu la sainte Ecriture , et, ayant vu que le prophète Elie avait ressuscité un enfant par l’apposition de ses membres sur les membres correspondants de cet enfant, j’ai jugé que l’homme de Dieu est appelé, aussi bien que le médecin, à soulager l’humanité souffrante non seulement par la prière , mais par tous les moyens honnêtes que la nature

peut nous offrir; d’ailleurs, le souverain Maître l’a dit bien formellement : Guérissez les infirmes, ressuscitez les morts, « purifiez les lépreux , chassez les démons; vous avez reçu « gratuitement, donnez gratuitement. » (Matli., 10, 8.)

Sans connaître le magnétisme, j’ai donc prié et imposé les niains aux malades ; je leur ai fait des frictions, et par conséquent j’ai été magnétiseur sans le savoir. Car si vous avez guéri des paralytiques et des sourds-muets , moi, j’ai ainsi apaisé de violentes coliques, de violents maux de tète , des douleurs aiguës rhumatismales ou autres ; j’ai tiré des portes de la mort le fils David de Theys (Isère) ; j’ai réveillé d’un sommeil de deux ans Marguerite Peyron, jeune fille du Cou-vet (Isère). Mais comme l’exercice de la médecine est interdit aux prêtres, bien que saint Luc n'ait pas cessé de l’exercer, je me suis ainsi attiré la note d’immoralité qui m’a fait interdire plusieurs fois par M. Bruillard, évêque de Grenoble.

H. M. D., Prêtre.

Lyon, 8 janvier 1858.

A M. le baron du Potet.

Monsieur,

Je viens vous remercier pour les conseils que vous avez eu la bonté de me donner pendant mon séjour à Paris et qui m’ont été fort utiles.

J’ai enseigné à une pauvre femme de magnétiser son mari, qui a été trois mois à l’hospice par suite d’une paralysie.

Il ne pouvait pas se tenir debout sur les jambes sans béquille, et les médecins, voyant qu’il n’y avait rien à faire, l’ont renvoyé chez lui. Les bonnes sœurs de charité l’ont soigné avec beaucoup de dévouement, niais cela suffit pour montrer que, même en s’immolant pour les autres par charité, on ne peut rien faire sans la science. J’ai fait davantage

pour ce pauvre limmiie en enseignant à sa femme de 1‘ magnétiser. L'autre jour, il a pu l'aire deux JSeues à pied, et i) travaille maintenant, pour une nombreuse famille, lil n est pas encore parfaitement rétabli; mais j’espère que le magDô-tismeoert le beau temps lui donneront pins de forces. — Le cantonnier près de nous avait tellement mal à la jambe, que le médecin , après lui avoir lait payer beaucoup de médecines mutilas, luirecontmanda d’aller à l’hospice pour se faire couper la jambe. J’ai enseigne à sa femme le magnétisme : d'abord, il a jeté une béquille, ensuite l’autre, et le voilà qni travaille sur la route. J’ai eu.soin de faire comprendre à ces braves gens que le magnétisme est un don de Dieu, pour lequel nous devons être très-reconnaissants.

Le véritable héroïsme est d© faire du bien aux autres.

ie regrette de ne: pas mieux connaître le français;, cap j’aurais écrit un article pour votre journal, pour démontrer le bien que pourraient faire les personnes charitables; si elles voulaient enseigner-lè magnétisme aux pauvres, car les médecins sont de véritables fléaux pour ltes malheureux , car ils épuisent leurs faibles ressources. Aussi, c’est souvent un grand chagrin pour les pauvres de quitter leurs familles pour entrer à l’hospice. Je sais qu’il y a des cas où c’est indispensable, mais aussi il y en a beaucoup où.l’on pourrait l’éviter, et on fait toujours (Tu bien à la moralité en resserrant les liens de la famille. Ainsi ferait le magnétisme ; on pourrait faire ressortir une question de l’économie politique; en montrant les avantages tle,gi*érisons faites à.doœicile, les épargnes des.dépenses;6pie fait l’administration, l’intérêt de L'Etat de s’occuper de la santé des ouvriers, car latoaladie produit l’oisiveté.* et la. paresse engendre la misère et le vice. EnFrance, il.y a tant de.personnes dévouées aux pauvres, si elles avaient seulement la connaissance du magnétisme * il en résulterait beaucoup de bien. Aussi, La meilleure manière d’effacer les piiéjugés contre le magnétisme sera de prouver ses bienfaits envers les pauvres. R. C.

A M. le baron du Potet.

Monsieur,

(iDepdiMRviicn dix-mois,des ennemis acharnés,impitoyables , me poursuivent jour et nuit, en Taisant sur moi des expériences de magnétisme , et cela contre ma volonté expresse. Je dis magnétisme, je le crois du moins. Voici, du reste, ce que j'éprouve : A l’état de veille, étant couché les yeux fermés, je commence à distinguer un point bleu, puis bientôt des figures de personnes connues ou inconnues , mortes ou vivantes, évoquées dans leur grandeur naturelle , ou bien des représentations de toute espèce d’objets inanimés , quelquefois môme d'animaux. 11 me semble entendre des paroles qui offrent souvent quelque rapport avec quelques-unes de mes actions. En m’endormant, je me sens entraîner quelquefois dans des lieux connus ou môme inconnus. Mais, à l’état de veille, toutes mes pensées et toutes mes actions sont connues. Je ne pense rien , je ne fais rien qui ne me soit représenté par la personne qui me magnétise. Une fois, entre autres, cette personne, au moment de mon réveil, prononçant Te Clôt épigastre, imitant de la voix le roulement de la foudre, me fit voir clairement à la région de l’épigastre la 'foudre serpentant brillamment, telle qu’on la voit déchirjr les nues quand il fait du tonnerre. Enfin, Monsieur, on exerce contre moi une tyrannie insupportable. Ayant eu le bonheur de faire connaissance àvecM. G..., qui est en relation avec vous, j'ai reçu de lui îavis de m’a dresser à vous pour faire cesser ces odieuses poursuites. Ayez donc, je vous en conjure, la bonté de répondra à M. G... au sujet des obsessions que j’ai l'honnsur de vous signaler, et comptez sur la respectueuse reconnaissance que m’inspirera un service de cette importance. »

Dans le prochain numéro je donnerai ma réponse à cette lettre. Baron Du Potet.

BULLETIN DU SPIRITUALISME.

Les homœopathes avancent plus rapidement que les hallo-pathes dans la voie du progrès, ils ne dédaignent point les lumières nouvelles, ils ne nient point ce qu’ils ne peuvent encore expliquer, et, sous ce rapport, ils sont nos amis.

Voici un extrait d'un de leurs journaux. Le Propagateur homaopathiçiie (1). En le lisant, on verra que le spiritualisme a déjà de profondes, racines et que les hommes de sciences sont tout prêts d’accueillir les nouvelles vérités. Je rends grâce à tous ceux qui nous viennent en aides et savent, se dépouillant de vieilles erreurs, chercher comme nous à percer le voile qui couvre encore les mystères de la nature.

Baron du Potet.

Mens agilat molem !

«Les médecins et les physiologistes les plus habiles avouent avec franchise que l’anatomie n’a pu rien leur apprendre sur les maladies mentales, ni sur aucune des fonctions et des affections relatives ou morales ; que ces fonctions et ces affections paraissent dépendre d’une cause invisible, insaisissable, et d’un ordre différent de celui des organes ; qu’on ne peut constituer véritablement la science de l'homme sans admettre la dualité du dynanisme humain, de l’ordre métaphysique, dualité dont l’existence, prouvée par l’expérience et par l’observation, est aussi certaine que celle d’une foule

1) Le Propagateur homœopalhique , parafant une fuis par semaine, rue des Moulins, 16.

(le phénomènes généralement admis en physique , en astronomie, en chimie, etc.

«Et au pointdevuedes naturalistes, la vie individuelle est un phénomène temporaire, consistant dans la formation , l’accroissement, le décroissement et la dissolution d’un agrégat mixte.

i(Or, dans cet agrégat, on est bien obligéde distinguer une partie matérielle qui tombe dans les sens, — matière palpable, impénétrable, soumise à l’action de la pesanteur et aux lois de la composition et de la décomposition chimiques, — et un dynanisme mystérieux qui est l’agent du phénomène.

« Cet agrégat, ainsi que la prussaule qui le vérifie, commence par un infiniment petit voisin du néant matériel.

« Ils croissent et se développent simultanément jusqu’à un certain terme, au delà duquel la puissance vitale diminue progressivement avec une lenteur à peu près égale à celle qu'elle avait mise à développer. Et après avoir parcouru la période de décroissement, la force vitale épuisée s’éteint, laissant à l'état d’une masse inerte la machine matérielle composée de toutes ses pièces, tantôt entièrement délabrées, tantôt assez bien conservées pour qu’on pût s’imaginer que la machine était capable de fonctionner encore au moment où la force vitale s’est anéantie. Bientôt elle se disloque , se décompose, et la matière qui formait ses différentes pièces, manipulées dans le laboratoire de la nature, changent de formes et de propriétés, et sont employées dans d’autres combinaisons.

« Il faut convenir que le point où commence la vie est enveloppé de profondes ténèbres.

« On sait seulement que la vitalité organique se trouve dans le germe avec les conditions de développement que comporte son espèce.

«Mais, relativement à l’espèce humaine, les opérations de l’intelligence commencent-elles en même temps que la vie organique, ou bien un peu plus tard?

« Le principe pensant, qu’il ne faut pas confondre avec les

déterminations purement inhérentes, ne se manifeste point d’abord d’une manière appréciable dans l’enfant nouveau-né.

« Est-il plongé dans un profond sommeil jusqu au moment où les organes externes, créés par la puissanca vitale, seront assez formés pour le mettre en relation avec le monde extérieur? ou bien son activité, encore toute intérieure, est-elle employée, de concert avec la puissance vitale, à la formation de ces mêmes organes , sans lesquelles les idées ne peuvent se produire?

« 11 est certain que l’enfant nouveau-né ne pense pas ; que ses mouvements sont déterminés, comme ceux des animaux et ceux de quelques plantes , par une puissance vitale toute différente de ce que l’on appelle la pende, la vohrrlf; qii’il obéit aux impulsions de cette puissance vitale sans «voir aucune conscience de lui-même, ni de ses mouvements, ni de sa propre existence ; enfin, que toutes les opérations qui s effectuent en lui sont celles dont la nature se réserve exclusivement la direction, non seulement lorsque la vie commence, mais pendant toute sa durée ; le choix et l’élaboration des aliments, la vivification et la circulation du sang, la distribution et la réparation des forces vitales, le jeu harmonique de tons les organes,.et.les déterminations internes qui en résultent^’est-à-dirad’isieûi/tf, s’accomplissent dans le cours de notre existence, sans que nos réflexions, nos raisonnements, netre volonté, y -aient la moindre part.

«Loin de là, au contraire, la pensée trop profonde et trop persistante les g£ne plutôt qu’elle ne les seconde.

« Or, dans l'enfant nouveau-né, lesopérations dugenre de’ celles que nous venons d’indiquer sont, jusqu’à présent, les seules que les plus habiles physiologistes aient pu observe*1.'

, « Les opérations de l’intelligence ne paraissent pas commencer en même temps que celles de la force organique. 'Et les facultés de l'intelligence, au moment où leur activité commence à se manifester, sont tellement fcnWes, qu on ne petit, en aucune iBRnière, les comparer à Pénergie de la force vitale.

«iAiaa»,,cas>deux.principe3 du dyrranisme humain n'ont pas

un développement identique et simultané ; ils ne se manifestent point, au début de la vie, avec le même degré d'énergie ; ils ne paraissent point subordonnés à la môme loi générale.

« Pendant que la puissance vita’eparcourtla période décroissante , le principe du sentiment et de la pensée, ou, si l’on aime mieux, le sois infime, continue son développement oh conserve son énergie , souvent jusqu’à l’extrême vieillesse , jusqu’à l’extinction totale de la vie.

« Lorsque les organes, totalement usés, ne se prêtent plus à l'action de la force motrice , ou lorsque cette force motrice elle-même, diminuant graduellement d’intensité, finit par s’éteindre, que devient le principe du sentiment et de la-

pensée ?

« Nous n’en savons rien.

« Seulement, nous voyons qu'il doit être simple, indécomposable, et que, par là, indépendant des lois qui régissent 'a composition et la décomposition chimiques , il ne* peut être détruit comme le corps.

« Mais, demandera-t-on encore, ce principe isolé de toute substance matérielle organisée, qu’est-il en lui-même ? Quel est son mode d’existence? Où va-t-il,après la destruction du corps ? Se mêle-t-il à la masse du fluide terrestre comme une étincelle électrique, ou bien, abandonnant la terre, va-t-il, dans d’autres régions de l’espace* se Joindre à. d’autres corps organisés ?

« Ici, les conjectures, les hypothèses, les opinions les plua variées, ont un champ illimité,

«Nous n’entrons pas, comme oa le pense bien, danace dûr maine qui n'est pas. celui de la science.

« Il nous suffit de montrer que; dans l’homme, la vitalité organique et les déterminations de l'instinct n’étant pas gant vemés par les mêmes kxisqwe le principe du sentiment et üj la pensée, on est fondé à les considérer comme'deus choses différentes, parfaitement harmonisées entre elies.

« I.a plus grande partie de l'humanité, dans tous les temps et dans tous les pays, a cru à l'existence îles esprits. Nous ne concevons pas, à la vérité, ce que peuvent être les esprits séparés des corps ; mais de ce que, sur ce point, comme sur tant d'autres, nous n’avons aucune notion certaine, il ne résulte pas que les esprits n’aient point, par eux-mêmes, une existence réelle indépendante des corps.

« L’univers, réduit aux seules choses quenouspouvonscon-naltre, serait assurément bien imparfait et bien borné.

« Que savons-nous ?

« Le plus petit insecte, le moindre végétal, envisagé dans sa conformation, dans son développement, dans tout ce qui constitue son être, dépasse la portée de notre esprit et confond notre intelligence.

« E. M. »

LES ESPRITS.

S'il faut en croire les bruits rapportés par /’Indépendant de la Charente-Inférieure, M. Home, le fameux médium, aurait à l'hôpital civil de Saintes un concurrent invisible qui ne lui céderait en rien comme puissance surnaturelle... ou comme mystificateur. Voici à ce sujet la version du journal que nous venons de citer :

« On raconte les histoires les plus merveilleuses, et on ne parle d’autre chose en ville depuis huit jours que des bruits singuliers qui, toutes les nuits, imitent, tantôt le trot d'un cheval, tantôt la marche d'un chien ou d'un chat. Des bouteilles placées sur une cheminée sont lancées à l’autre bout de la chambre. Un paquet de chiffons a été trouvé, un matin, tordu en mille nœuds, qu’il a été impossible de dénouer. Un papier sur .lequel on avait écrit : « Que veux-tu ? Que de-

mandes-tu? » a été laissé un soir sur une cheminée; le lendemain matin, la réponse était inscrite, mais en caractères inconnus et indéchiffrables. Des allumettes, placées sur une table de nuit, disparaissent comme par enchantement; enfin, tous les objets changent de place et sont dispersés dans tous les coins. Ces sortilèges ne s’accomplissent jamais que dans l’obscurité de la nuit. Aussitôt qu’une lumière parait, tout rentre dans le silence; l'éteint-on, les bruits recommencent aussitôt. C'est un esprit ami des ténèbres. Plusieurs personnes, des ecclésiastiques, d’anciens militaires, ont couché dans cette chambre ensorcelée, et il leur a été impossible de rien découvrir et de se rendre compte de ce qu'ils entendaient.

« Un homme de service à l’hôpital, soupçonné d’être l’auteur de ces espiègleries, vient d’être renvoyé. Mais on assure qu’il n’est pas le coupable et qu’il en a, au contraire, été maintes fois la victime lui-même.

« 11 paraît qu’il y a plus d’un mois que ce manège a commencé. On a été longtemps sans rien dire, chacun se défiant de ses sens et craignant de se faire moquer de soi. Ce n’est que depuis quelques jours qu’on a commencé à en parler. »

(La Presse du 16 mars.)

Government liouse, Toronto Canada vest, ce 12 février 1858.

Monsieur le baron,

Depuis mon départ de Paris, j’ai vu beaucoup d’expériences en spiritualisme ; les faits les plus remarquables, vous devez les avoir trouvés dans le Spiritual Telegraph, signés L. B., mais, outre ceux-là, je fais partie d’un cercle de spi-ritualistes. Nous nous réunissons chaque dimanche, à sept heures du soir, afin de recevoir les leçons véritablement célestes des esprits qui furent célèbres parmi nous. Massillon,

Chateaubriand, Ftnclon, Voltaire et tant d'autres daignent répondre à nos questions par le moyen de plusieurs médiums qui sont de notre société. Les leçons sont d'une sublimité inouïe; il faut les entendre pour pouvoir s'en former une idée. Un soir, j’ai demandé l’esprit de ('.harminy île 111'ex-pliquor le mystère de la trinité. Il me répandit que la trinité telle qu’on nous l'explique n'existe que dans notre imagination. Que la seule trinité de Dieu est amour, lumière et vérité. J'ai aussi demandé quel était le meilleur moyen pour devenir médium, la réponse fnt : «Suivez le conseil que Jésus donna à ses disciples : Aimez-vous les uns les autres, etc. » Nous avons parmi nos médiums des voyants qui sont quelquefois admis en esprit dans les sphères célestes et qui nous décrivent ce qu'ils voient autant qu’il leur est possible, et toujours regrettant que1 la langue ne fournit pas de mots assez expressif pour pouvoir décrire la beauté de leur vision. Souvent notre salle est remplie d’esprits bons et bienfaisants, et alors tout se passe tranquillement en bonne harmonie ; d'autres fois, il s’y mêle des esprits mal disposés et méchants qui tâchent de posséder les1 médiums pour empêcher les bons esprits de les influencer. Alors il se livre un combat entre les médiums et les méchants esprits, qui est visible dans les mouvements, l’agitation, la lutte apparente des médiums, qui finissent presque toujours par sortir victorieux, chassant les méchants esprits hors de la société. 11 arrive aussi quelquefois qu’il est permis à un de ces derniers d'influencer un' médium ; alors, ce n’est que des injures, blasphèmes, et quelquefois même des coups, que les médiums distribuent à quiconque voudrait arrêter leur audace. Heureusement les bons ésprits s’en mêlent en les chassant; mais le pauvre médium reste brisé de fatigue pour quelques heures. Les bons esprits nous disent que cela est permis-pour nous mettre sur nos gardes contre les mauvais conseils que nous poumons recevoir si nous permettions leir influence da nous posséder. t.. bertoi»tto.

Extrait d'une lettre que m'adresse un de mes correspondants. Dü POTET.

TOMBEAU DE MESMER.

Nous devons à M. Chalain , magnétiste zélé, ce dessin du tombeau de Mesmer; notre intention, en le reproduisant, est de rappeler à tous les magnétistes que le 23 mai prochain nous célébrerons dignement l’anniversaire de la naissance de no tre maître.

Nous espérons que ce banquet fraternel réuniral’élite du monde magnétique et les spiritualistcs de la nouvelle école : Mesmer n’est-il point le génie qui a trouvé l’agent qui soude le monde physique au monde moral? — Leur reconnaissance doit être égale à la nôtre , aussi notre appel ne sera pas vain.

Baron dc Potet.

POLÉMIQUE.

LE SPIRITUALISME.

Le spiritualisme est un chapitre de la science magnétique, comme le somnambulisme et comme la classe nombreuse des faits physiologiques. Les phénomènes qui le manifestent sont aussi anciens, aussi nombreux que ceux de ces derniers genres, et les faits les plus saillants du magnétisme dans l’histoire sont de l’ordre spiritualiste.

A quoi comparerai-je le magnétisme ? Je le comparerai à un homme. Les faits physiologiques sont comme les membres inférieurs, ils sont les moins relevés, mais les plus faciles à obtenir, les plus communs; ils frappent les sens et sont destinés à faire marcher la science en portant la conviction dans les esprits. Les faits somnambuliques qui entrent dans le domaine de la psychologie et qui se mêlent quelquefois aux phénomènes des autres ordres qui sont si utiles et si intéressants peuvent être comparés au tronc qui renferme les organes les plus importants de la vie et aux membres supérieurs. Enfin le spiritualisme, qui forme la partie la plus élevée de la science, peut être comparé à la tête. 11 nous ouvre des horizons sans bornes ; c’est une porte ouverte sur l’infini, c'est une lumière qui nous éblouit et à laquelle nous sommes exposés à nous brûler les antennes, comme des papillons à la flamme d’une bougie. C’est à cause de cet éblouissement et de l’imperfection de nos moyens d’investigation, ainsi que de l’insuffisance de notre propre intelligence que les résultats obtenus jusqu’à ce jour sont ou paraissent si incohérents, si contradictoires, si absurdes ou si faux.

Le spiritualisme peut être comparé à une mer sans rivages, mais semée d'écueils, et sur laquelle on est très-exposé à

faire naufrage ; car, à côté des vérités les plus belles et les plus consolantes se trouvent toujours le mensonge et l'erreur; à côté des plus pures jouissances de l’esprit se rencontrent la folie et la mort.

Les produits du spiritualisme imprimés et publiés, les doctrines qui lui doivent naissance ei qui sont professées publiquement appartiennent essentiellement à la critique ; ils peuvent et doivent être examinés, comparés, émondés avec le plus grand soin ; cette tâche incombe aux magnétistes plus qu’à tous autres, car ils sont plus compétents que qui que ce soit, puisque ces choses sont de leur domaine et l’objet de leurs études. Mais de cet examen, qui peut conduire à rejeter certains résultats jusqu’à la négation du spiritualisme lui-même, il y a loin. Cette négation de la part d’un magné-tiste est un fait grave, mais c’est un fait doublement grave quand il se produit de la part d’un homme qui occupe dans la science magnétique une position officielle, et qui, par cela même, peut entraîner des opinions qui sont encore flottantes. Nous ne pouvons laisser passer une chose pareille, dans ce journal, sans protester énergiquement.

Ces réflexions nous sont inspirées par un article bibliographique dans lequel sont examinés un livre récemment publié par M. Girard de Condemberg et les doctrines professées dans ce livre. Cet article est de l’honorable M. Morin que nous connaissons tous et dont nous aimons la plume facile. M. Morin a été moins heureux que de coutume, cela tient à ce que, au lieu de critiquer seulement M. Girard et son livre, qui lui appartenaient, il s’est attaqué au spiritualisme lui-même. Or, on n’a pas beau jeu à nier ce qui existe, et le rai-sonnememt vient diflicileu.ent à bout de la vérité.

M. Morin commence par dire qnelques mots des tables tournantes qui, pour lui, présentent un phénomène physique en apparence d’une faible portée, et dont le cause, quand elle a été attribuée à l’intervention d’êtres extra-humains, a entraîné plus d’un observateur hors du monde réel et l’a fait naviguer à pleines voiles dans l’océan illimité des hypothèses. 11 résulte de ces termes que M. Morin ne voit encore

dans 1;‘ mouvement des tables qu'un .phénomène physique bizarre, dont il ignore la cause, mais que l’on ne doit pas rapporter à l’intervention d’êtres extra-humains. Ceux qui partagent cette opinion puissent-ils trouver ailleurs la vraie cause du mouvement et du soulèvement des tables, nous aurons alors la satisfaction de les voir reconstruire d'une main en démolissant de l’autre.

M. Morin déclare n’avoir jamais assisté qu'à des expériences sans résultat ou dont les résultats devaient être attribués à la supercherie. En lisant ce passage de son travail, on le croirait sorti de la plume d’un membre de l’Académie de médecine faisant un rapport sur le somnambulisme. Vingt fois, ('ans ce journal, un pareil argument a été détruit par h milice mesmérienne ; j’ai éprouvé un étonnement pénible on le voyant reproduit par un magnétiste.

Au reste, les tables n’étant qu’un des divers moyens connus et un moyen assez défectueux , je n’y attache pas une importance majeure. Si le tabulitme est devenu une religion, si l’homme a mis ses dieux dans de9paniers, est-ce aux tables qu'il faut en vouloir ? C’est plutôt à la faiblesse humaine (imbecillittts kwnana, comme dit un ancien) ; quand je vois l’homme fermer l’oreille aux choses vraies qui lui sont communiquées par ses semblables, et ajouter une foi aveugle aux premières balivernes que lui débite son guéridon, je n’ai pas le courage de m’en prendre au guéridon.

Quant à faire de soi-même un médium, si ce moyen l’emporte sur les tables par plusieurs avantages, il a, dans oer* tains cas, des inconvénients que celles-ci ne présentent pas. Je ne m’étendrai pas ici sur ce chapitre. Si ces moyens em ployés jusqu’ici laissent à désirer, il est très-bon d’en faire ressortir l’insuffisance, mais il faut en chercher de .meilleurs et ne pas s’attaquer au spiritualisme lui-même.

Pour démolir les assertions de M. Girard, M. Morin se livre à des suppositions qui ne nous paraissent pas trè&-probantes, surtout celles contenues dans le passage où àl examine ce qui a trait aux écritures imitées et aux signatures. Il a soin , du reste de dire qu’il ne fait que hasarder une hypothèse, mais

¡1 ajoute, deux lignes plus bas, que cette hypothèse est plus rationnelle et plus vraisemblable que celles des esprits ; c'est ce que nous contestons formellement.

La suite de l’argumentation de M. Morin a pour effet de très-bien faire ressortir une partie des inconvénients que présente le mode de communication suivi par M. Girard ; mais celte argumentation ne fait point écrouler tout l’édifice des communications des esprits , comme il le pense : elle ne fait écrouler que les conséquences certaines que M. Girard attribue aux communications qu'il a obtenues et la créance absolue qu’il veut inspirer à leurs résultats.

Tout ce grand procès que l’on intente au spiritualisme vient de ce qu’on s’est fait de fausses idées sur les esprits et leur situation. On leur a.prêté la. science infuse et des connaissances certaines sur toutes choses qu’ils sont éloignés d’avoir. L’homme aussi est un esprit, combien n'a-t-il pas bâli de systèmes contradictoires et faux sur beaucoup de doctrines, et surtout à propos des points sur lesquels on adresse ordinairement des questions aux esprits de T'aulrc monde! On doit moins s’étonner des divergences qu'offrent les réponses de ces derniers. En outre, ils ne sont pas tous dans la nj£mc situation ; on doit donc obtenir sur leur état des notions qui diffèrent entre elles. Puis il semble se confirmer de plus en plus que le mal règne chez eux ou chez une partie (Tentre eux comme chez nous ; de là des réponses entachées d’erreur et de mensonge et portant l’empreinte des mauvaises passions qui font agir leurs auteurs. Comme les esprits incarnés attirent et appellent volontiers leurs semblables de l’autre monde (c’est-à-dire ceux qui sont avec eux en communion de pensées et de volonté) , en vertu de rapports-naturels, il n’y a rien d’étonnant à ce qne les réponses pa^ raissent être souvent le refltet des pensées des opérateurs. Tout cela doit produire un excellent effet, c’est de faire accepter les communications seulement pour leur valeur intrinsèque comme émanées d’êtres dont lrintelligence peut être tout aussi bien inférieure que supérieure à la nôtre.

La critique de la partie du livre de !& Girard où ri est question du magnétisme-, du somnambulisme, de3 po'scs-

sions, etc., doit être prochainement faite par AI. Morin ; sans nul cloute, ce dernier fera ressortir une inconséquence de première force que commet cet auteur, inconséquence qui consiste à attribuer au diable le magnétisme el le somnambulisme , et à n’en pas faire autant du spiritualisme , quand ce serait plutôt le cas. M. Girard ne paraît pas se douter qu’il n’est autre chose qu’un possédé (je n’ai pas dit du diable), c’est ce qu'il faudra lui démontrer pour sa peine.

BEUKUYER.

VARIÉTÉS.

M. HOME ET LA PRESSE AMÉRICAINE.

Le Times, de New-York, publie une correspondance parisienne sur le fameux nécromancien Home : ce journal n’est pas spiritualiste, et il n’est pas sans intérêt de voir comment il l’apprécie ; il est bien entendu que nous reproduisons cet article sans garantie et à titre de renseignement.

« Le monde fashionable continue à s’occuper de notre médium Home. Son prestige toutefois a quelque peu diminué, et l’on ne parle plus de ses réceptions aux Tuileries. 11 n’en est pas moins l’objet de l’étonnement et de l’admiration de beaucoup de cercles aristocratiques où l’on devrait trouver plus d’intelligence et de discernement. Comme preuve de la réalité de ses manifestations, on cite une daine distinguée qui avait été jusqu’ici sceptique quant à l’immortalité de l’âme, et qui est morte dernièrement après avoir légué au célèbre médium une rente annuelle de 1,200 dollars. Jusqu’à l’arrivée de Home à Paris, cette dame était restée obstinément dans ses sentiments d’incrédulité ; il fit apparaître devant

elle le spectre d'un de ses parents morts; elle le toucha, elle crut, et mourut peu de temps après ; et elle fit le legs dont nous avons parlé, comme un gage de sa reconnaissance pour celui qui lui avait procuré la paix de l’âme et la certitude sur son sort dans l’autre monde. Faible récompense pour un si grand service ! service le plus sublime ! Mais le fait est authentique quant au legs.

« Home continue son manège, qui consiste à ne point se montrer en public et même à ne pas se laisser voir : il ne donnerait pas de séance même pour un million.

i, Il ne s’inquiète ni des caricatures (sesportraitsse trouvent partout), ni des tournures diverses données aux anecdotes qui circulent sur son compte ; il refuse absolument de parler, d’écrire ou de figurer partout ailleurs que dans la petite sphère aristocratique où il s’est confiné. Beaucoup de gens sont incrédules et regardent Home comme un mythe. En fait, la moitié de sa force consiste dans le mystère dont il s’entoure.

« On racontait, il y a quelques jours , que comme Home allait sortir de chez la comtesse Tascher de la Pagerie, une des dames de la maison de l’impératrice , une table se mit à courir tout autour de l’appartement, et s’arrêta devant le piano qui s’ouvrit et exécuta tout seul une musique délicieuse. La table avait l’air de s’être placée précisément de manière à servir de siège au musicien invisible, lin autre de ses exploits, qui, à ce qu’il paraît, étonne beaucoup les gens qui ne sont pas habitués à voir les fameux professeurs d’escamotage, consiste h rendre les corps alternativement légers et lourds. Je ne puis vous énumérer, même en abrégé, la moitié des exploits extraordinaires qu’on attribue au médium américain. Je croyais, l’hiver dernier, que nous avions une indigestion de ces étranges absurdités ; mais la manie continue avec une légère modification. »

L'Echo des Vallces raconte ainsi un fait singulier qui s’est passé dans l’église paroissiale de Bagnères de Bigorre :

« Le jour commençait à peine à se lever ; un des vicaires, avant de célébrer la première messe, confessait une pénitente. Tout h coup , on frappe à la porte de son confessionnal ; il ouvre, et une femme lui raconte, d’une voix encore tremblante d’émotion , qu’elle vient de voir une grande ombre blanche traverser le derrière du maître-autel. Le vicaire s’empresse, bien entendu, de renvoyer la pauvre femme, la traitant de folle et de visionnaire.

« Une heure après, M. le curé vint à son tour à l’église et veut se rendre à son confessionnal où l'attendent quelques fidèles. 11 ouvre la porte... Mais, au lieu d’entrer, il recule à la vue d’un homme qui, dans le simple appareil..., dort tranquillement assis sur la banquette du fond. Le sacristain appelé reconnaît notre homme. C'était tout simplement, à ce qu’il paraît, un somnambule du voisinage; il fallut aller ■chercher chez lui ses habits, pour qu’on pût le ramener décemment au logis.

« Nous laissons à penser si ce fait a prêté aux coirmrTi-taires des commères de la ville. »

BIBLIOGRAPHIE.

LE M AGISME Grande inilialion, par le docteur Salae-hen-Aodali.au. I vol. in-S. 1857.

I.e grand mot de magisme, qui compose la première moitié du titre, est bien fait pour allécher le lecteur qui s’attend à de magnifiques découvertes; mais, après avoir lu, on est tenté de croire que la seconde moitié du titre contient une grosse faute d’impression, et qu’au lieu de grande initiation, il faut lire grande mystification. Si notre confrère de L’Union magnétique est bien informé , l’auteur aurait changé son nom français contre un nom arabe ; ses formules orientales, ses invocations au prophète Mahomet ne seraient donc qu’une forme littéraire ou un moyen de succès : c'est ainsi que les marchands de pastilles du sérail se déguisent en Turcs. Une pensée domine l'ouvrage, c’est de glorifier et de recommander au public l’illustre ,, l'incomparable docteur Mure (si vous ne le connaissez pas r tant pis pour vous) , le moderne Esculape qui, comme Fontanarose, a parcouru l’univers (et le Brésil en sus), a rapporté de ses voyages la sublime panacée et a inventé Valgèbre homœopathique avec la manière de s’en servir. Si réellement Salah-ben-Abdallah est un mythe, nous ne serions pas éloigné d’admettre que le docteur magicien Mure, à la perspicacité duquel rien n’échappe, est le seul de tous les mortels qui connaisse à fond le mystère de ce pseudonyme , et s'il n’a pas tempéré l'élan des éloges emphatiques dont il est l'objet, c'est que la vérité doit passer avant tout... Dieu est grand , nous dit son prophète ; cette vérité n’est pas neuve, mais elle est consolante.

L’initiateur commence par donner de petites notions sur l'anatomie, la botanique, etc., pareilles à ce qu'on trouve

dans les résumés à l’usage des gens qui voudraient bien apprendre sans avoir la peine d'étudier. Jusque-là, rien de magique. On nous donne ensuite l’indication de certaines plantes qui peuvent causer du trouble dans l’intelligence et faire naître des facultés exceptionnelles; puis, l’auteur nous fait part d’un procédé qu’il a découvert pour produire les mômes résultats sans employer ces plantes. On prend des disques, on écrit le signe de la planète dont chaque disque lire sa protection , le signe du zodiaque, etc., et C action èi produire; et la seule présence de ces disques fera sur les personnes autant que l’usage des plantes. On cite l’exemple d’un jeune homme cjui avait été endormi par le chloroforme, et qui, à la vue du flacon à chloroforme, fut endormi comme s’il eût été soumis à l’action de cette substance.

Ce procédé ne consiste, en définitive, que dans la suggestion dont le pouvoir est parfaitement connu en magnétisme, et qui fait la base du système d'électro-biologie. Seulement, l’auteur s’abuse étrangement s’il se figure pouvoir aussi réussir sur le premier venu : il est certain que les personnes susceptibles d’être modifiées par de pareils procédés, ne forment qu’une minorité. Nous ferons à l’auteur un reproche plus grave. Pourquoi cet attirail de planètes et de signes du zodiaque ? Croit-il réellement que les sept planètes aient pris chacune un des sept disques sous sa protection ? Alors il devrait au moins nous faire savoir comment s'est manifestée cette adoption et quelles preuves il en a eues. Et puisqu’il se dit astrologue, il devrait faire progresser l’astrologie avec l’astronomie ; il n’ignore pas sans doute que le nombre des planètes est de beaucoup supérieur à ce que croyaient les anciens ; néanmoins, il ne fait aucune mention des planètes découvertes par les modernes. Or, comment admettre que les sept d’autrefois exercent une influence considérable sur notre monde, tandis que les autres planètes qui sont bien plus nombreuses, et dont quelques-unes , comme Uranus et Neptune , occupent dans notre tourbillon un rang considérable, seraient sans action sur nous? Le professeur de magie n’a-t-il donc pu rien imaginer au

delà des vieilles formules soi-disant cabalistiques, et ne serait-il donc qu’un copiste servit du grand et du petit Albert, de ïAlmanach des bergers et du Messager boiteux?

M. S.ilali (etc.) consacre un chapitre aux somnambules, il croit à la lucidité, il est mécontent de bien des choses, mais il n'est pas toujours facile de savoir pourquoi. Les somnambules, dit-il, peuvent sans le secours d’un magnétiseur se mettre en état de somnambulisme, en catalepsie, en extase, et provoquer sur eux-mêmes, parleur propre volonté, tous les phénomènes que jusqu’à présent les magnétiseurs ont attribués à leurs forces vitales. Cela prouve que les phénomènes magnétiques ne doivent leur réussite qu’à la même cause que le magisme (science tout à fait ignorée par les magnétiseurs). C’est ce qui fait qu’ils attribuent un quantité de petits miracles à leur prétendue force. Nous savions très-bien , ô ami d’Allah, que des sujets non magnétisés pouvaient, par l’effet de l’imagination, tomber d’eux-mêmes en somnambulisme : vous nous apprenez que cela proure l’action du magisme ; je veux bien le croire sur votre parole, car un homme qui a été au Brésil, et qui cite le Ko-ran, doit en savoir plus que nous. Mais, ô grand Salah, disciple fidèle du docteur des docteurs , de l’archi-magicien Mure, que ne prenez-vous pitié de notre ignorance en nous expliquant ce que signifie le mot magisme que vous employez à chaque ligne? Qu’est-ce que cette science universelle à laquelle vous promettez de nous initier et dont vous nous donnez pour tout échantillon vos disques protégés par les sept planètes, ce qui ne nous apprend pas grand’chose?... Vous dites que les somnambules méritent des couronnes, et les magnétiseurs les galères : c’est un peu dur, ô montagne de lumière , d’autant plus que vous ne daignez pas dire en quoi consiste notre crime. Si nous ne sommes coupables que d’ignorer le magisu e , la faute en est à vous qui ne répandez la vérité que d'une main si avare, quand vous pourriez en inonder le monde.

Vous prétendez, ô apôtre de Mahomet, que les sociétés de magnétisme, « se trouvant dans les ténèbres, n’ont fait que satisfaire les curieux et donner à des charlatans un nouveau mode de spéculer sur la crédulité publique. » J’aime à

croire que ce portrait pou flatteur a été tracé par vous en vue des sociétés magnétiques que vous avez observées dans les terres lointaines, peut-être au Chili ou au Congo ; car si vous connaissiez les sociétés de France, des lies Britanniques, de Piémont, et notamment celles de Paris, la justice vous ferait uu devoir de proclamer qu’elles renferment une foule dü membres désintéressés , dévoués à la science et à l'humanité, et qui journellement répandent les bienfaits du magnétisme.

De toutes les belles choses que vous avez apprises dans vos voyages, il en est une surtout que vous avez bien fait de propager, c’est que l’étude est superflue, vu que «Dieu seul accorde la science et la connaissance des choses à tout homme de bien qui, par la prière, ne la demande que pour eu faire un bon emploi. « (Page 12/i). Voilà qui va nous économiser les frais d’écoles et de professeurs ; on remplacera tout cela par. la prière qui ne coûte rien et qui est à la portée de tout le inoude; mais alors à quoi serviront les Salah, docteurs ès-sciences logiques?

Sur ce, vénérable Sidi-bcn-Schahabaam , je prie Mohammed, Boudha, Brahmaet Sivade vous tenir en leur sainte et digne garde.

a. s. MORIN.

Baron du POTET, propriétaire-gérant.

ÉïUüES ET THÉORIES.

I.A SCIENCE MAGNÉTIQUE.

Quatre forces immenses qui sont partout et qui agissent partout, dont la cause première est inconnue et dont, les physiciens, aussi bien que les philosophes et les théologiens, ne savent encore si leur nature est spirituelle ou matérielle, sont maintenant l’objet des investigations les plus profondes et les plus actives : ce sont Y électricité, le calorique, la lumière et le magnétisme.

Dans cette incertitude et pour plus de facilité dans les explications des phénomènes qu’elles présentent, 011 les regarde comme des fluides : fluides impondérables et incoercibles. En physique, à cause de leur importance, ou leur donne le nom générique (Yagents de la nature.

L’électricité est l’agent qui donne à certains corps frottés la propriété d’attirer les petits corps environnants.

Le calorique est l’agent qui produit en nous la sensation de la chaleur.

La lumière est l’agent qui produit en nous la sensation"de la vision.

Le magnétisme (magnétisme minéral) est l'agent qui donne à certains corps, naturellement et sans l’auxiliaire du frottement, la propriété d’attirer d’autres corps.

Voici quelques notions succinctes bien propres à faire croire que jamais ni la lumière, ni aucun des autres fluides impondérables, à cause de l’analogie qu’ils ont avec elle, ne pourront Être rangés parmi les substances matérielles.

On sait que les effets qu’un boulet de canon peut produire dépendent si directement de la masse et de la vitesse, que l’on peut, sans les altérer, changer un de ces éléments,pourvu que l’on fasse varier l’autre proportionnellement et en sens invirse.

Un boulet de deux kilogrammes, par exemple, renverse un mur, un boulet d’un kilogramme renversera le même mur, pourvu qu’on lui imprime une vitesse double.

Si le poids du boulet était réduit au 10% au 100* de sa va-

Tome XVII. — N" SS — 2® Série. — 25 Avril 1558. 7

leur primitive, il faudrait, pour l’identité dcflet, que la vitesse devînt 10 fois, 100 fois plus grande.

On sait que la vitesse ordinaire d’un boulet est la six cent quarante millième partie de celle de la lumière; par conséquent, si le poids d’une molécule lumineuse était la six cent quarante millième partie de celui du boulet de canon, comme ce boulet, elle renverserait les murs.

Ces données sont prouvées mathématiquement et ne sont nullement contestées par la science.

Or, bien loin de renverser les murs , non seulement une molécule lumineuse, mais des milliards de ces molécules pénètrent dans un organe aussi délicat que l'œil sans occasionner aucune douleur, sans faire sentir aucune pression.

Allons plus loin.

Opposons le levier, qui multiplie les forces, à l’immense quantité de lumière qui peut être condensée au foyer de la plus large lentille.

Prenons le levier le plus délicat possible, le plus léger fétu suspendu à un. fil d’araignée.

Après avoir eu la patience de faire plus de quatorze mille expériences avec cet appareil apposé aux plus grandes quan-lités de lumières, Franklin ou Fresnel ne put observer la moindre oscillation.

Des milliards de rayons lumineux agissant simultanément ne produisent aucun choc appréciable ; on pourrait déduire de ces expériences qu’ils n’ont pas de diamètre appréciable , ni aucune des propriétés reconnues comme essence de la matière.

Cependant, la science n’est pas encore assez avancée pour se prononcer définitivement.

¿'ne autre force, non moins puissante que celle dont je viens de parler, est le fluide vital ; et je nejvois pas pour quelle raison on ne l’a pas rangée parmi ces dernières etpourquoi on ne dit pas , en termes scientifiques, les cinq fluides impondérables, les cinq agents de la nature, au lieu de quatre.

Comme nous touchons à des questions brûlantes, qui sont des bornes aussi délicates que le tranchant de la lame la plus ¡iffilée entre le matériel et le monde immatériel, nous ferons

remarquer à nos lecteurs, avant d'entrer dans les détails suivants, que nous regardons l’esprit humain, cet hôte intelligent et immortel du temple de chair dont il doit se dépouiller un jour, comme, étant différent du fluide vital, mais avec lequel il a une relation intime.

La vie remplit tout, elle met tout en mouvement ; c’est cette force mystérieuse qui produit, conserve et renouvelle tout. C’est le souffle inépuisable, infini, de la Divinité, qui, après des milliers d’années, se présente à chaque printemps avec la même fraîcheur et toute la magnificence dont elle était ornée quand elle sortit des mains du Créateur.

Le sentiment du prix et du bonheur de l’existence se règle exactement sur la plus ou moins grande abondance de force vitale, ce dont chacun peut se convaincre par un peu d’observation sur lui-même.

L’abondance de cette force rend propre à toutes les jouissances, à toutes les entreprises ; elle sème l’existence de joie et de bonheur; mais, d’un autre côté, rien n’est plus capable de produire l’ennui et le dégoût de l’existence que le manque de ce fluide précieux.

La vie peut exister dans un état libre ■ou latent, et en cela elle a beaucoup d’analogie avec le calorique et l’électricité. Comme eux elle peut se trouver dans un corps, sans se moa-trer d’aucune manière, jusqu’à ce qu’une circonstance favorable détermine son développement.

Même lorsqu’elle est développée, elle peut être interrompue et enchaînée pendant des temps considérables , et que la science actuelle ne peut déterminer. Elle paraît adhérer moins fortement là où elle existe en plus grande quantité et en plus grande perfection. Le polype imparfait, par exemple, et qui ne vit que, faiblement, la retient plus fortement qu’aucun autre animal plus parfait, d’une classe plus élevée-

Elle donne à chaque corps qu’elle possède des propriétés particulières. Elle le soustrait aux lois générales de la mécanique et de la chimie de la nature inanimée.

Elle s’oppose aux effets de la putréfaction et du froid. Il faut absolument qu’elle soit anéantie, même dans son état latent, pour que la putréfaction puisse avoir lieu.

Aucun œuf, aucune graine, aucune chrysalide, aucun de

cesètrcs, q ui ne sont morts qu’en apparence, n’entre en putréfaction pendant que la vie y réside.

Un œuf, une graine qui possède la vie gèleront plus tard qu’un œuf et une graine dans lesquols cette forco cat ,i*_ truite. Plusieurs plantes poussent et donnent môme des (leurs à travers la neige et dans un terrain gelé ; la plante et môme la fleur restent intactes jusqu’à ce que la vie cesse.

Beaucoup d’animaux passent tout l’hiver dans un état d'engourdissement sous la neige et même sons la glace sans goler.

Hunter lit congeler de l’eau dans laquelle il y avait des poissons; aussi longtemps qu’ils vécurent, l’eau, d'ailleurs cougelée, resta fluide autour d’eux, et forma une véritable caverne; ce ne fut qu’au moment où ils moururent que la congélation 'Se fit entièrement.

Ce n’est que lorsque le froid augmente jusqu’à faire disparaître la vie qu'il peut pénétrer le corps. Ce phénomène repose principalement sur la propriété qu’a la force vitale de développer de la chaleur.

Dès qu’un corps perd la force vitale, il rentre dans le domaine du monde inorganique ; il obéit au\ lois et aux affinités de la nature inanimée ; il se décondense en ses éléments; ordinairement il en résulte la putréfaction , qui seule peut nous convaincre que la force vitale est entièrement disparue d’un corps organisé.

Chose remarquable, c’est l’analogie qu’il y a entre le fluide vital et les agents impondérables, qui ne sont peut-être qu’un seul et même fluide présentant des phénomènes différents , suivant les circonstances dans lesquelles il se trouve.

On sait que les corps sont plus ou moins bons conducteurs du calorique. Que l’on mette, par exemple, en communication avec une source de chaleur un caillou et un morceau de métal, le caillou sera légèrement effleuré par le calorique, lorsque le métal en sera déjà pénétré.

Mais, en revanche, que l’on fasse cesser la communication du caillou et du métal avec la source de la chaleur, lorsque l’un et l’autre en seront pénétrés, le métal sera déjà froid lorsque le caillou conservera encore presque tout son calorique.

Viii.-si, Il y a de.-; substances qui s'incorporent promptement La chiileur, mais qui la perdent aussi promptement; il y en a d'autres qui se l'incorporent lentement, mais la perdent aussi lentement.

Ln d'autres termes, il y a des corps qui sont bons conducteurs de la chaleur et d’autres qui en sont mauvais conducteurs. Entie celui qui est le meilleur conducteur et celui qui l’est le moins, il y a une infinité de degrés intermédiaires dans lesquels 011 peut classer les différentes substances.

Ce qui a lieu pour la chaleur a également lieu pour les autres fluides impondérables. Ainsi, il y a des corps qui sont plus ou moins bons conducteurs de la lumière, plus ou moins bons conducteurs du magnétisme , plus ou moins bons conducteurs du fluide vital.

Sous ce rapport, quelle magnifique étude à faire sur les organisations relativement à leur degré de conductibilité de la vie ? Cette seule étude pourrait donner des notions assez grandes pour permettre de classer à priori les individus suivant le genre, la nature de leur intelligence et de leur capacité , et de donner ainsi des indices précieux sur la richesse et la distinction de leur organisation.

Entrons dans quelques détails.

Il suffit de jeter un coup d’œil général sur les divers individus, pour voir que l’ou peut les classer en deux grandes catégories.

Les personnes au caractère physique et moral uniforme, modéré, toujours le mèma, qui ne tombentdans aucun extrême, qui ne sont que rarement plus molles ou plus fatiguées qu’à l’ordinaire, mais qui, lorsqu’elles le sont, le sont pour tout de bon; ces personnes, dont les pensées et les sentiments sont presque toujours sur le môme diapason, possèdent une quantité et une intensité de vie à peu près uniforme, toujours la mèine, qui ne change que lentement, difficilement ; mais, une fois modifiée, affaiblie, ne se répare aussi que difficilement.

Ce, sont là des tempéraments mauvais conducteurs de la *ie ; ils la gardent bien ; mais si malheureusement des circon-

stances viennent à l’affaiblir, ils ne peuvent la renouveler qu’avec infiniment de peine. Voilà les natures vulgaires, communes, qui n’ont aucun sentiment de poésie, qui sont faites pour vivre uniformément, sans excès d’aucun genre. C’est pour cela qu’on les appelle communément de bons caractères.

Mais il est une autre catégorie d’individus. Voyez cet homme plein de force, de joie, d’enthousiasme ; la vie anime tous ses fibres, l’existence n'est plus pour lui que bonheur et réussite; mais revoyez-le demain, et peut-être aujourd’hui même, l’abattement comprime ses traits, une mélancolie profonde voile son regard; que de tristesse dans sa physionomie! l’appréhension , l’indécision , le vague le plus complet s’est emparé de lui ; il ne voit plus qu’amertume sur la terre, le bonheur a disparu.

Et, chose étrange, toute sa vie se passera dans ces alternatives de force et de faiblesse, de courage et d’abattement, de joies et de tristesses inouïes.

C’est là le type de ces organisations qui se remplissent de vie en un instant , et qui peuveut aussi le perdre en un instant. Elles sont aujourd’hui au bord du tombeau, et demain elles seront rajeunies comme si elles venaient de naître.

Il est bien remarquable que la plupart des grands hommes n’ont pas fait leurs études dans les collèges, ou ont été de mauvais écoliers; leur nature changeante, variable, leur rend impossible la vie asservie à des règlements monotones.

Ces natures au caractère changeant, qui donnent le diapason de tous les degrés de la passion humaine, tantôt pleines de feu et de verve, tantôt froides et glaciales, sont ce que le vulgaire appelle de tristes caractères, des fous, car chez nous le génie est la suprême folie (1). Mais l’homme intelligent reconnaîtra le cachet des hommes d’élite, les seuls capables de grandes choses. Ceux-là surtout ont besoin que la sagesse leur vienne en aide, et leur donne la force de retenir ou de

(1) Re'vei et RialUit, par madame Blanchccolte.

ne faire paraître de leur caractère que ce qui est nécessaire pour le bonheur de ceux qui les entourent.

Ces natures seules sont susceptibles de jouissances ou de douleurs sublimes; c’est dans leurs rangs que se trouvent les grands martyrs de l’humanité : les génies et les poètes. Ce sont eux qui voient la vérité et sen tent son expression : le beau eu tout genre, musique, dessin, littérature, etc.

Malheur! si ces natures se fourvoient et n’ont pas soin de réprimer leurs mauvaises passions : ce sont les seules capables de fairelesgrands scélérats comme lesgrands hommes de bien.

Depuis l’individu qui est le moins bon conducteur de la vie , jusqu’à celui qui l’est le plus, il y a une infinité de degrés où chaque énergie de caractère avec toutes ses conséquences trouve sa place.

Lorsque la vie sera plus étudiée , que ses lois seront mieux connues, tous les phénomènes du magnétisme animal seront expliqués; car ils se rattachent aux lois du fluide vital, lois invariables comme celles qui régissent tous les phénomènes de la nature.

Le peu que l’on en connaît maintenant pourrait jeter une lumière inattendue sur ce sujet ; mais l’espace qui m’est réservé dans ces colonnes m’oblige de terminer bientôt.

Prenons une pierre froide et une pierre brûlante, et mettons-les en contact. La pierre brûlante ne laisse que très-lentement échapper sa chaleur, et la pierre froide ne l’absorbe de même que très-lentement : en sorte qu’il n’y a presque pas de communication de calorique entre ces deux corps.

Mais que je prenne, par exemple, deux plaques de métaux, l’un froid et l’autre très-chaud, et que je les mette en contact, bientôt la température sera presque égale dans l'un et dans l’autre.

Ce3 expériences, très-9imples, nous indiquent la transmission du fluide vital ou du magnétisme animal entre les divers individus.

- Deux organisations mauvais conducteurs de la vie resteront froides au contact ; il n’y aura pas de communication entre leur fluide vital ; elles n’éprouveront l'une pour l’autre

ni sympathie, ni antipathie. Deux organisations bons conducteurs de la vie, au contraire, et dont les fluides se mêleront ou se repousseront, éprouveront immédiatement de la sympathie ou de l’antipathie.

On sait que tous les corps n'ont pas la même capacité pour la chaleur. Une faible quantité de calorique peut porter au rouge certaines substances, tandis qu'elle sera beaucoup moins sensible snr d’autres. Nouvelle analogie avec le fluide vital.

Qu'une riche organisation bon conducteur de la vie se mette, en communication avec une nature délicate aussi bon conducteur de la vie, cette organisation communiquera s cette nature délicate une telle abondance de vie ou »le fluide magnétique qui sera capable d'observer toute son organisai-tieu, de rayonner au loin, de produire ce que l'on appelle le sommeil magnétique, l'état du somnambulisme.

Ce fluide de vie, comme tous les agents impondérables, traverse les corps les plus compactes el peut instantanément franchir les plus plus grandes distances; il pourra donc révéler à l’individu qui en est saturé, en influant sur son intelligence, les secrets cachés à nos sens dans leur état naturel..

Les songes mystérieux , les pressentiments intimes, etc., n’ont pas d’autre cause que le rayonnement du fluide magnétique que chacun possède en plus ou moins d’intensité, suivant les circonstances dans lesquelles se trouve l’individu.

J’ai assisté à beaucoup d’expériences magnétiques, j’en ai fait une étude spéciale, et dans le principe j'étais aussi incrédule que le plus incrédule ; mais j’ai vu des faits qui ne me permettent plus de douter de la réalité des principaux phénomènes dus à cet agent invisible qui sera bientôt le sujet d’une nouvelle science.

Je ne dirai que quelques mots de la dernière séance à laquelle j’ai assisté.

Nous sommes dans un salon des plus sérieux de l’aristocratie. De nobles fronts ridés par les pensées profondes s’inclinent et sont attentifs à ce qui doit arriver. Philosophes et

savants, professeurs à la Sorbonne, magistrats, avocats et médecins, toutes les hautes facultés de l’intelligence sont re-* présentées et de manière à ne donner prise à l’illusion. Jusqu’aux doux yeux rayonnant à l'égal dos gemmes brillant sur les tissus fins de la chrysalide soyeuse sont captivés et se plissent il’un petit souris moqueur qui veut dire : tout à l’heure, nous aurons beau jeu.

line personne à la physionomie nerveuse et sensible, dont tout le monde a entendu parler, Alexis, vient de recevoir quelques passes de son habile magnétiseur, et déjà il est sous l'influence du fluide mystérieux.

Il débute par une partie de cartes ; les yeux sont bandés d’un triple bandeau : cependant sa main est guidée plus sûrement et avec plus d’intelligence que celle du plus habile joueur.

On craint trop de croire ; on se rassure en pensant aux tours de Robert Houdin.

Les pins incrédules de la société lui présentent des lettres. Il décrit les personnes qui les ont écrites, donne sur leur caractère, sur leurs habitudes, sur leurs occupations, sur les sociétés avec lesquelles elles se trouvent, sur la topographie des pays éloignés qu elles habitent, sur leurs projets et leurs intentions, les détails les plus minutieux et les plus vrais.

Parmi les nombreux volumes d’une bibliothèque choisie, un livre est pris au hasard et ouvert de môme.

Dans son sommeil mystérieux, le magnétisé lit distinctement à la page qui lui est présentée. Ceci est la moindre chose ; allons plus loin.

Demandons-lui de nous lire et de nous écrire sans ouvrir le volume ce qu’il y a à telle page et à telle ligne de cette page.

Il hésite, il éprouve de la difficulté. Quel bonheur ! on va prendre le charlatanisme sur le fait : on serait si heureux d'être confirmé dans son incrédulité!

Mais quel coup de foudre électrise toute l’assemblée! Une plume s'agite dans les doigts magnétisés, et voilà qu’ils présentent aux regards terrifiés le texte de la page demandée.

Le lecteur me dira que sans doute le volume avait été indiqué d’avance et que tout cela n’était qu'une jonglerie.

A cela, je n’ai pas autre chose à répondre que le volume n'a pas été indiqué d’avance et que toute jonglerie a été impossible.

D’autres expériences ont aussi étonné les assistants ; mais après ce fait il est inutile de les rapporter.

Une des premières réflexions qui se présentent est celle-ci : lors môme que les phénomènes du magnétisme seraient vrais, quel parti utile pourrait-on en tirer ? Je crois qu’il n’y a pas grand parti utile à en tirer maintenant ; le plus souvent, il n’est propre qu’à troubler les esprits ; mais attendons qu’une étude approfondie en ait été faite, et qu’il soit élevé à l’état de science, on en verra alors les résultats incomparables et inattendus. L'astronomie n’a-t-elle pas commencé par l’astrologie, et la chimie par l’alchimie?

Un grand philosophe a dit : « Attendez que l’affinité naturelle de la religion et de la science les réunisse dans la tête d’un seul homme de génie : l’apparition de cet homme ne saurait être éloignée et peut-être existe-t-il déjà. Celui-là sera fameux et mettra fin au dix-huitième siècle qui dure toujours ; car les sièdfes intellectuels ne se règlent pas sur le calendrier comme les siècles proprement dits. Alors, des opinions , qui nous paraissent aujourd’hui ou bizarres ou insensées, seront des axiomes dont il ne sera pas permis de douter, et l’on parlera de noire stupidité actuelle comme nous parlons de la superstition du moyen âge. Déjà même la force des choses a contraint quelques savants de l’école matérielle à faire des concessions qui les rapprochent de l’esprit. (Soirées de Saint-Pétersbourg.)

Lorsque le magnétisme animal sera élevé à l’étatde science, la parole prophétique de Joseph de Maistre sera accomplie.

J. HAMIIOSSON.

(Gazette dt France du 24 mars. )

POLÉMIQUE.

Lettre du Dr Charpignon à M. le baron du Potet sur les rapports du magnétisme avec la médecine classique et le, catholicisme.

Orléans.

La position que vos écrits et vos œuvres vous ont acquise si légitimement, parmi les magnétistes, donne aux opinions que vous émettez sur tout ce qui se rattache au magnétisme une telle autorité qu’on est porté, en général, à prendre vos paroles, sinon comme l’expression de la vérité même, au moins à les prendre en grande considération. Vous avez donc des devoirs sérieux à remplir pour ne pas induire en erreur ceux qui veulent vous suivre dans l’étude delà science de la nature, soit en leur livrant comme sanctionnées par l’expérience des appréciations chimériques, soit en dénaturant des faits pratiques et en en exagérant les conséquences ; soit, encore, pour ne pas éloigner les intelligences habituées à gravir les degrés de la science par les études d’analyse plu tôt que les vues de synthèse qui sont plutôt le propre du génie. Vos écrits, vos conférences, vos trop rares et trop laconiques articles dans le Journal du Magnétisme ont suffisamment fait connaître que vous considériez le magnétisme comme un moyen régénérateur de la médecine des écoles et comme une doctrine devant modifier les doctrines religieuses. Sans aucun doute le magnétisme, qui est la loi d'influence des êtres de la création les uns sur les autres, à quelque règne, à quelque type, à quelque degré qu’ils occu-

Sent dans l’océan de la vie et de la pensée, sans aucun oute, dis-je, le magnétisme a les rapports les plus intimes avec la médecine et avec la métaphysique ; mais ces rapports vont-ils, peuvent-ils jamais aller jusqu’à remplacer l’une et jusqu’à modifier l’autre? Voilà deux assertions, qui émises par vous bien des fois, sont de nature à troubler les uns et à éloigner les autres.

Je me permettrai donc d’examiner ces deux questions capitales savoir, les rapports du magnétisme avec la médecine, puis avec la religion.

MÉDECINE ET MAGNÉTISME.

Quant à l’origine de la médecine, vous et moi, monsieur

le baron, nous sommes d’accord. C'est-à-dire que les facultés instinctives de l’homme, développées spontanément ou sous l'influence des prêtres des temples de l’antique Orient, fournissaient les moyens de guérir les souffrances, quand toutefois elles étaient guérissables, car enfin il faut toujours se souvenir de la grande loi de la mort qu'aucune puissance humaine ne saurait vaincre. Les indications des songeurs endormis dans le temple étaient écrites sur des tablettes et suspendues aux murailles; c'est là qu’elles étaient consultées, copiées, et c’est ainsi que commença la médecine ordinaire, vulgaire, en opposition avec la médecine sacrée. Les frictions lentes étaient administrées par les prêtres pour obtenir la cure, et ce moyen puissant a continué à être conseillé par les médecins de l’antiquité.

Les siècles ont passé sur le monde, les cataclysmes les plus terribles ont bouleversé l’humanité, et cependant l’époque moderne a retrouvé les songeurs qui ordonnent des remèdes pour les maladies et aussi les frictions lentes et à distance qui guérissent ou modifient l’état maladif de l’homme. C'est que ces deux choses sont inhérentes à la nature humaine et qu’elles suivent l’homme dans tous les lieuj et dans tous les temps. Voilà bien le magnétisme et le somnambulisme! Mais la science qui commença par la compilation des tablettes des temples, qui se forma par l’observation, la comparaison, l’expérimentation des Hippocrate, des Gallien, des Boerbave, et de toute la phalange des médecins, par cela même qu’elle se faisait par les forces de l’entendement, oublia complètement ce quirelevait de l’intuition et des forces vives de l'homme, en sorte qu'aujourd’hui-la séparation est telle qu’une alliance semble impossible.

Vous, Monsieur, absorbé dans les recherches de la force vive de la vie, vous avez imité ceux que vous blâmez si souvent, et vous avez si bien rompu avec les études des lois physique» du corps humain et des substances dites médicinales que vous ne croyez plus à leur puissance, ou du moins que ces puissances puissent être utilisées par des opérations de l’intelligence, c’est-à-dire par la science.

Pour vous, les savants, et les médecins surtout, sont dans une erreur complète ; leur science est, illusoire et chimérique, et vous voulez y substituer la science intuitive et la puissance de la force vive qui l'ait la vie. lies principes les mieux arrêtés dans la médecine ne trouvent pas grâce, les médicaments les plus éprouvés, les spécifiques môme ne sont rien-Témoin ces lignes que vous écriviez au n° 5 du journal, r On n'ira plus aux écoles de médecine chercher les idées systématiques de nos illustres professeurs sur les maladies et la santé... Bientôt on n’introduira plus clans le sang de l’innocent un poison funeste pour détruire un poison moins dangereux. Nous voulons parler de la vaccine. La fièvre se guérira sans quinine et sans que l’estomac ait à souffrir du remède. On demandera à ce grand art médical, implanté dans les nations comme le gui sur des arbres vigoureux, de vouloir bien montrer son utilité dans les épidémies, de nous dire enfin quelles sont les maladies qu’il sait guérir, et tandis que la chirurgie restera inébranlable, mais restreinte dans sa pratique, la médecine verra sa décadence, qomme ces vieux pouvoirs fondés sur la crédulité humaine qui croulèrent malgré l’appui que leur prêtèrent des milliers de docteurs bourrés de grec et de latin. »

La ferveur avec laquelle vous avez donné toutes vos facultés au magnétisme, vous fait juger les autres sciences avec une partialité injuste, et votre langage, monsieur le baron, nuira par son exagération à la cause que nous défendons, plutôt qu’il ne lui servira. i •>!

Vous n’ignorez pas, mais vous voulez l’oublier, que les plantes qui couvrent la terre ont des propriétés qui modifient profondément 1’éco.iomie de l’homme; témoins : le pavot et la belladonne qui donnent le sommeil et calment les douleurs; le jalap, le ricin, l’ipéca qui évacuent l'estomac et les intestins ; le quinquina qui agit si puissamment sur les fièvres!! Vous savez bien que parmi les minéraux que renferment les entrailles de la terre, il en est dont 1,'a©-tion sur l’organisme est très-puissante ; tels le fer qui reconstitue le sang appauvri; l’antimoine, l’arsenic, le. mer-

cure, le soufre dont la chimie, cette science positive sortie de l'alchimie, a su faire des agents incontestablement utiles dans les maladies du poumon, de la peau, dans la syphilis.....Vous savez bi«m encore que les songeurs, les oracles,

les pythies, les sybilles, les somnambules, les extatiques puisaient dans les produits naturels ou composés de la terre les remèdes par lesquels ils guérissaient les malades; et vous ne croiriez pas à la médecine ? 11 est possible, soyez-en certain, à l’intelligence humaine de comparer les effets produits par certaines substances sur l'organisme de l’homme, de tirer des déductions positives sur le rapport qui doit exister entre la propriété de la substance médicinale et l'état de l’organisme malade pour obtenir un résultat qui sera le retour de la santé. La médecine existe donc comme science et comme art, il faut l’admettre ; mais, par cela même qu’il y a science et art, il y a aussi des savants et des artistes bons et mauvais. Et puis cette science et cet art n’ont-ils pas pour but un objet irréalisable, le maintien de la vie? N’y aura-t-il pas toujours des organes lésés de manière à ne pouvoir être rétablis que par une nouvelle création, pouvoir au-dessus des forces limitées de l’homme?

Les moyens dont le médecin peut disposer étant appliqués avec les conditions convenables triompheront plus vite, plus complètement de certaines maladies que le magnétisme, même sur les sujets les plus sensibles à l’action de cette force vive. Comparez les traitements par la médecine et par le magnétisme des embarras bilieux graves, des chloroses, des affections syphilitiques, de certaines névralgies, et vous verrez que l’avantage n’est pas pour le magnétisme. y

Cependant la médecine, telle qu’elle est enseignée et pratiquée, est loin d’être parfaite; elle est incomplète, parce que, par un aveuglement qui ressemble à l’exagération que je viens de reprocher, la science officielle nie qu’il y ait d’autres forces que celles qu’elle a reconnues. Elle nie les deux forces vives qui donnent la vie à l’homme, forces dont il peut disposer dans certaines mesures, et à l’aide desquelles il peut opérer dans l’organisme les modifications les plus

grandes, modifications qui parfois sont au-dessus de celles que les substances médicinales opèrent.

Le magnétisme, qui est la science de ces deux forces, l'âme et la vie ou l'agent vital, doit donc faire partie de la médecine pour la compléter ; mais il ne saurait la remplacer en constituant à lui seul l’agent thérapeutique qui pourrait convenir à tous les cas et à tous les individus.

N'usez point vos facultés si brillantes à vouloir détruire la médecine ; loin de là, cherchez à opérer l’alliance de deux sciences qui ont le même objet pour étude et pour application pratique, c'est-à-dire l’homme. Sans doute la génération médicale actuelle recevra nos tentatives avec l'hostilité la plus révoltante, mais elle s'usera, avec nous sans doute, mais notre œuvre nous survivra, car ce n’est pas des hommes que nous devons nous préoccuper, mais bien de la vérité. Or, il faudra nécessairement que ces deux parties de la science de l’homme se retrouvent, après avoir été séparées durant tant de siècles.

Si la médecine et le magnétisme peuvent faire alliance, comme sciences, en peut-il être de même pour l’homme? c’est-à-dire le médecin et le magnétiseur peuvent-ils se réunir dans le même individu? Malgré de grandes incompatibilités, nées de la direction différente des facultés intellectuelles, la chose est plus facile qu'on ne le pense. Pourtant le choix de la spécialité est avantageux, et dès qu'elle sera fixée, tous les obstacles disparaîtront, car le médecin croira parfaitement à l'efficacité du magnétisme qui lui aura été enseigné, et le magnétiseur de son côté ne perdra pas un temps précieux pour le malade en le privant de médicaments plus convenables pour son état que le magnétisme. Les spécialités existent en médecine pratique, c'est une nouvelle à ajouter; le temps la créera et lui rendra la place d'honneur qui lui appartient.

(La suite au numéro prochain.)

CLINIQUE.

Mon très-cher maître,

Les observations que je vous fais parvenir aujourd’hui sont les dernières de la première série. Celles que j’aurai le plaisir de vous envoyer prochainement seront plus intéressantes et pourront être de quelque enseignement à ceux qui, dans leur pratique magnétique, auraient à traiter des maladies du genre de celles dont je parlerai.

Daignez agréer, mon cher maître, mes sentiments respectueux et l’assurance de mon dévouement,

J. Bégijé , M. M.

19' Observation. M. Sangé, vingt-huit ans, forgeron en voitures.

Dartre teigneuse à la jambe droite, depuis douze ans.

Les traitements dits rationnels et ceux pompeusement formulés par certains spécialistes sont restés dans ce cas si grandement inefficaces, pendant une période de douze années, que le malade, rebuté par tant d’insuccès, ne veut plus rien opposer à Fenvahissement sans cesse croissant du mal affreux qui le dévore. L’existence lui est devenue tellemeut insupportable qu’il verrait avec joie la mort survenir plutôt que de coutinuer à vivre dans une situation semblable. — C’est dans ce moment, alors qu’il croyait tout espoir perdu pour son avenir, qu’un de ses amis, grand partisan de la médecine somnambulique, vient de lui proposer d’en faire l’essai (1). L’amour de la conservation l’emporte sur le désespoir qui l’accable; il vient solliciter une consultation tout en

(1) M. Cnstèrcs, celui dont j'ai rapporté la guérison dans l'un des précédents numéro?. C'est à son instigation que sa cousine a bien voulu, pour cette rois encore, donner une preuve nouvelle do sa lucidité.

conservant néanmoins une certaine appréhension pour le nouveau mode de traitement qu’il va entreprendre.

La jambe est recouverte dans toute son étendue, surtout à la partie interne, de croûtes épaisses, purulentes , laissant suinter à travers de nombreux interstices une matière jaune d sanicusc à la fois, répandant une odeur fétide , et se con-crétant à masure qu’elle arrive à la surface. Le pourtour de la plaie est violacé, noirâtre en certains endroits, et très-douloureux ; il y existe une tension remarquable gênant considérablement la locomotion. — Le pied est tuméfié et l'engorgement très-prononcé à l’articulation. — Au rapport du malade, cette affection est à peu près la même depuis cinq ou six ans, rien n’a pu l’amender. Seulement, dans certaines circonstances et par l’effet de médications énergiques, le mal semblait s’améliorer, mais c’était de courte durée, il reprenait bientôt après avec un surcroît de violence.

La somnambule déclare cpie cette maladie provient d’une ulcération variqueuse méconnue dès le début, et pour la guérison de laquelle il n’a été employé jusqu'à ce jour que des traitements fort mal appropriés. Le tempérament du malade étant continuellement lymphatique , les humeurs se sont portées peu à peu sur cette partie , et soit par incurie ou disposition, elles ont déterminé cette dartre teigneuse telle qu’elle existe aujourd’hui.

Le mal n’est pas incurable, deux mois suffiront pour le faire disparaître, à la condition cependant de remplir avec une exactitude scrupuleuse les prescriptions qui vont être formulées.

— Mercredi 17 décembre. — Première consultation. — Diète, privation totale de vin, de café, de liqueurs spiritueu-ses, et cesser de fumer. — Un bouillon de veau ou de poulet, très-clair, soir et matin. — Tisane émolliente avec la mauve, plusieurs fois dans la journée, — tous les deux jours , une purgation avec l’eau de sedlitz ; lavement émollient le soir. —l Leiendemain de chaque purgation, un bain entier préparé avec la mauve fraîche, et, au sortir, se coucher pendant une heure environ. — Panser la plaie avec des cataplasmes de

farine de graine de lin pour ramollir les croûtes el hâler leur chute ; maintenir la jambe dans la position horizontale pour (pie le sang ne puisse se porter sur la plaie avec trop d’abondance. — Le but principal de ce traitement, dit-elle, est de déterger le sang des humeurs dont il se trouve mélangé.

A la consultation suivante, le ‘¿h du même mois, la suppuration parait être plus abondante, mais moins épaisse ; les croûtes sont ramollies et quelques-unes sont sur le point de se détacher. — La douleur est moins forte. — Continuer la prescription précédente huit jours encore.

Le 31, le malade est-très-alfaibli par l’usage de cette médication ; la plaie cependant prend une tournure favorable. — Même régime, seulement ajouter le sagou à l’eau, une prise matin et soir. — Cesser provisoirement les purgations et les bains. — Panser la plaie avec des compresses imbibées d’eau sédative moyenne ; si elles déterminaient une irritation trop forte, les suspendre momentanément pour frictionner avec la pommade camphrée.

Huit jours plus tard, l’amélioration est sensible. Le malade a souffert de l’application de l’eau sédative sur la plaie, mais il a supporté la douleur sans sourciller; les croûtes ont presque disparu. — Ajouter au régime deux soupes par jour, quelque peu de pain et du poisson ; — reprendre les purgations, deux en une semaine, et aussi deux bains entiers avec une livre de sel ordinaire pour chacun. — Continuer l’application de l’eau sédative, et remplacer la tisane de mauve par celle d’orge et de chiendent.

Le 14 janvier, la plaie est presque nettoyée , il ne s’en écoule qu’un liquide très-peu coloré et qui ne se concrète plus. — La couleur violacée a pris une teinte moins foncée ; la tension de la peau et l’engorgement du pied sont sans importance. — Discontinuer les purgations, faire usage des bains quelques jours encore; — laver la plaie avec l’eau de guimauve deux fois par jour, l’essuyer et appliquer en remplacement de l’eau sédative une compresse trempée dans ua mélange à parties égales de suc de joubarbe des toits (sem-

ptrvium tectorum, famille des crassulacées, Jussieu), et iOr-pin commun (sedum telephium, fam. joubarbes, J.).

3-1 janvier. — A la consultation de ce jour, la situation semble ne pas s’être améliorée, la plaie est dans le même état que huit jours auparavant. •— La somnambule déclare que les prescriptions n’ont pas été rigoureusement exécutées.

En effet, le malade avoue s’être négligé quelque peu__Même

régime ; deux purgations, un bain entier. — Continuer l'application des compresses et ajouter au mélange un tiers d’eau sédative et quelques grammes de couperose verte.

Le 5 février, la plaie est presque entièrement cicatrisée, le suintement est imperceptible, c’est à peine s’il tache le linge ;

— la couleur de la peau est devenue rosée ;—plus de douleur, la marche est facile. — Le malade est au comble de la joie. Cesser le régime débilitant, les purgations et les bains ; continuer seulement les compresses.

Huit jours plus tard, la guérison est assurée, la jambe est dans un état des plus satisfaisants. Cesser définitivement l’usage des compresses, et faire prendre à la jambe, deux fois en une semaine, un bain dans l’eau duquel on aura fait bouillir trois ou quatre poignées de cendres de genet.— Puis enfin, pendant trois mois, recouvrir la partie qui a été malade d'un linge en toile fine, et par-dessus une guêtre en peau de chien, et boire une décoction de salsepareille, un bol tous les matins à jeun.

Chaque année, durant cinq ans, à l’époque où la guérison a eu lieu, faire usage de la même décoction, quinze jours ou trois semaines environ.

Ce Monsieur, que j’ai eu l’occasion de revoir ces jours derniers, continue à jouir d’une santé parfaite.

20« Observation. —M. le vicomte de L..., soixante-huit ans.

Rétention d’urine. (Mars 1857.)

J’ai été appelé auprès de ce malade dans l’intention d’aider parle magnétisme l’effet des prescriptions médicinales, et pour apaiser un ténesme vésical et des spasmes excessivement douloureux, dont la fréquence ne lui laissait aucun moment de repos.

Magnétisé une quinzaine de jours, tous les soirs , vers neuf heures environ , le magnétisme déterminait un calme parfait qui lui permettait de passer une excellente nuit. La guérison ne s'est pas fait longtemps attendre.

21* Observation. — Mademoiselle Ricard, vingt-six ans. (Juillet 1857.)—Anémie, huit ans.

A l’époque où cette demoiselle vint me consulter, la maladie datait d'une huitaine d'années. Les traitements qui avaient été administrés à diverses reprises n'avaient jamais pu modifier la nature et la variété des symptômes. Au contraire, elle atteste qu’il y a eu tous les jours des progrès nouveaux.

11 existait une pâleur très-grande de la peau avec bouffissure générale. — Le pouls petit, filiforme. — Elle se plaignait de palpitations, de faiblesse dans les membres, d’un besoin continuel de dormir ; — de migraines, de douleurs nerveuses dans diverses régions du corps, vives, avec élancements, ayant peu de durée, mais revenant à tout instant— Les fonctions intestinales étaient troublées, il y avait une irritation constante qui déterminait une diarrhée depuis plusieurs années. — L’appétit n’existait plus, l’estomac supportait très-difficilement les solides et les liquides ingérés, ils excitaient presque toujours le vomissement.

Une dizaine de magnétisations ont suffi pour faire disparaître tous les symptômes dont nous venons de parler, et la guérison n’a pas tardé à se montrer.

Il n’y a pas longtemps que j’ai revu cette demoiselle, sa santé est des plus florissantes.— Elle me disait qu’elle se trouvait trop bien portante et son appétit trop exigeant, car trois bons repas dans la journée ne suffisaient pas pour le satisfaire.

Toulouse, 8 avriH858.

J. Bégué. M. M.

BULLETIN SPiRITUALISTE.

A la vue des grands et incontestables phénomènes de spiritualisme, qui sont peut-être à la veille de terminer leur apparition eu France, on peut se demander ce qu’en ont dit les savants, ce qu’ils ont pensé de leur venue et ce qu’ilsen on (écrit. Rien, sera la réponse, et lorsqu’un jour leshistoriens chercheront dans les annales de ces temps le rôle qu'auront joué les savants, que penseront-ils de celte coupable indifférence , de cette faiblesse ou de cette impuissance que nous constatons aujourd’hui 2 Ils diront que nos académies étaient sans doute peuplées d'enfants ou de vieillards infirmes, de sourds et d’aveugles.

En effet, rien ne peut émouvoir ces corps savants d'où la vie etla passion semblents’être retirées. Tous leurs éloges sont pour les éleveurs, pour tous ceux qui s’occupent de la race bovine et chevaline , pour ceux qui cultivent les poissons. Les historiens diront que l’on tenait en grand honneur les producteurs de grosses bêtes; en effet, la terre en sera bientôt couverte, elles tiendront le premier rang, le haut du pavé, on les promènera en cérémonie, mais la race humaine que va-t-elle devenir ? Oh ! voyez-vous ces nuages sombres à l’horizon, c’est l’égoïsme et l’ignorauce qui s’avancent, le nuage s’épaisissant davantage produira bientôt la nuit de l'esprit ; l'homme rendu bêle, c’est le meurtre et l’incendie; c’est le vol, le développement enfin des plus grossiers, des plus féroces, instincts. ■,

Gouverneur des nations, vous ne voyez rien encore, attendez un peu , il vous sera donné d’apercevoir le mal chassant devant lui le bien et établissant sa domination malgré vos armées.

Intelligence, feu divin, où es-tu? Prévoyance, nos juges te poursuivent, notre Code te punit ; cette loi, sans doute, fut

faite par des savants , aussi avons-nous vu qu'ils n'ont rien prévu et rien empêché.

“Un jour, vos gigantesques égouts ne seront pas assez grands pour donner passage aux immondices des villes , au sang corrompu de leurs habitants.

Les clartés de l’âme pouvaient renaître à la voix des savants; la bile pouvait être dominée par l’intelligence, la nature mieux comprise, l’existence d’un Dieu rendue plus sensible et plus manifeste, tout un monde nouveau allait se découvrir, les savants n’ont pas bougé, les gouvernements avaient d’autres pensées... Spiritualistes, moins que nous d’abord vous ne réussirez , car nous réalisons déjà beaucoup de bien, et nos études ont quelque chose de rationnel. Laissez venir les temps en continuant pourtant vos recherches ; le magnétisme va d’abord s’établir ; le spiritualisme renaîtra de nouveau ; car le magnétisme en fournit constamment l’élément, il est et sera toujours l’enveloppe d’un fruit spirituel.

Oui, de notre temps, on oublie trop que l'âme comme le corps a besoin d’un aliment toujours nouveau ; la foi s’éteint par la vieillesse des traditions, les soupiraux de l’âme s’oblitèrent et l’homme ne voit plus que la terre.

La science physique ne produit plus qu'une fausse civilisation, la civilisation du traficant et du soldat : partout l'amour de l’or remplace l’amour de l’humanité, ce qui doit relier les hommes est sans force, ce qui les divise a la toute-puissance. Continuateur des apôtres , faites tant que vous le voudrez connaître le mal, votre parole sera sans elFet, on ira vous entendre, puis on retournera tranquillement se désaltérer à la source du mal. C’est bien inutilement que j’écris ces choses, la vérité a trop peu d’amis, ceux qu’elle illumine aujourd’hui sont trop faibles pour la faire prévaloir, nos successeurs verront pourtant combien elle nous préoccupa.

Baron du Potkt.

Dans un dos hauts quartiers de Paris, tout le monde parle d’un fait étrange que je vous donne sans commentaires.

La famille d’un ancien représentant du peuple, affligée par de grands revers de fortune, a perdu récemment une fille de dix-neuf ans.

Trois jours après cette mort, la sœur de la défunte, une jeune personne de seize ans, entra précipitamment chez des voisins qui habitent au même étage que ses parents; elle était pâle, effarée; ses dents chiquaient; elle essayait de parler et n’arrivait qu’à balbutier quelques mots inintelligibles.

— Qu’avez-vous ? lui dit-on. Que vous est-il arrivé?

Quand elle fut un peu calmée :

— Je viens de voir ma sœur, dit-elle en frissonnant de tout son corps.

— Allons, allons, c'est une hallucination, mon enfant.

— Je viens de voir ma sœur, répéta-t-elle avec énergie. Elle m’a parlé, elle m’a touché la main, je l’ai vue comme je vous vois, là, dans la chambre à coucher de ma mère. Elle m’a dit : « Viens où je suis, chère sœur; on y est mieux que dans le monde où tu t’attardes. Adieu, je t’attends. »

Un mois après cette apparition, un mois après jour pour jour, cette jeune personne mourait, et depuis lors, comme si quelque malédiction avait frappé cette pauvre famille, le père, la mère, un frère, sont tous atteints d'une maladie de langueur, et leur vie semble en danger.

(La Patrie du 10 avril.)

M. Allen Putnam, auteur de plusieurs ouvrages estimés sur le spiritualisme, vient de publier à Boston une brochure fort intéressante, intitulée : Mesmérisme, spiritualisme (Witchcraft and miracle). (Le mesmérisme, le spiritualisme, la sorcellerie et les miracles, brève dissertation où il est prouvé que le mesmèrism e est la clef qui ouvre plusieurs chambres du mystère). L’auteur y rapporte à une môme cause les divers phénomènes indiqués par le titre ; selon lui, le magnétisme est une action, produite par l’homme revêtu du

corps tcrroüUv, ¡c spiritualisme csl une action d.' mémo nature, produite par l’homme dégagé de son corps. Los faits de sorcellerie et les miracles bibliques se rangent dans l’une ou l’autre de ces catégories, et appartiennent à l’ordre naturel, l’action de l’homme dégagé du corps étant tout aussi naturelle, tout aussi conforme aux lois universelles et immuables que l’action de l’homme corporel. Cette identité des phénomènes du spiritualisme et des miracles bibliques a déjà été établie d’une manière très-lumineuse par notre collaborateur, le docteur X (numéro du 10 septembre 1857, page /|02 et suiv.).

Dans la Putric du 18 avril, à la fin d’un article iutitulé : Causeries, on lit l’article suivant :

« J’ai une répugnance naturelle pour le merveilleux, pour l’inexplicable, pour ce qu’on nomme les sciences occultes; je me défie singulièrement des tours de passe-passe et des prestiges, et souvent j’ai dit, comme certains descendants du sceptique Thomas : « Je verrais que je ne croirais pas ! » « Cependant j’ai assisté chez madame Mongruel (délia Grimaldo) à d’étranges spectacles. J’ai vu cette belle et intelligente somnambule montrer par scs gestes et par ses paroles qu’elle lisait à livre ouvert dans l’intelligence de personnes qu’elle voyait pour la première fois, traduire des pensées non exprimées et se mettre en relation directe avec d’autres personnes placées fort loin d’elle et qu’elle n’a jamais connues.

« Je suis sorti de chez la sybille moderne, sinon converti et croyant, du moins étonné, inquiet. Ce que j’appelle ma raison résiste encore au témoignage de mes yeux ; mais je conçois aujourd’hui les passions vives, les amitiés et les haines ardentes qu’excite le magnétisme.

« HENRY d’aüMGIER. ))

VARIÉTÉS.

Dressage immédiat des cher aux tes pins difficiles.

SYSTÈME PERROQUET.

Longjumcan, 1« avril 1858.

A M. le rédacteur du Journal de Seine-et-Marne.

Monsieur,

Pour l’acquit de ma conscience , locataire importune qui me talonne chaque jour et me crie de remplir en chrétien un dernier devoir envers une société que je vais bientôt quitter (je suis pas mal vieux), je dois, dis-je, pour satisfaire à cette conscience, vous faire pirt d’un procédé qui, appliqué aux chevaux récalcitrants et rétifs, m’a toujours réussi, du temps que j’étais postillon (cela remonte à 1825, en ce temps, la chaise de poste roulait rondement ! ).

Parmi les systèmes plus ou moins efficaces de dressage, le plus inconnu , le plus rare, est certes celui que je vais divulguer ici gratis et pro Deo.

Vous savez , monsieur le rédacteur, que’presque sans exception pour to«s les perroquets privés, le fond de l’éducation roule sur un premier mot, que ces bipèdes emplumés répètent, je ne dirai pas à satiété, mais bien à dégoûter pour la vie du voisinage assassinant de ces trop loquaces 'animaux. Ce premier mot est grrrratte qu’ils disent en courbant le col et présentant ainsi le sommet de la tôte, c’est alors que leur gentille maîtresse (j’aime la supposer telle) exerce avec l'extrémité des doigts, les ongles venant en aide, sur cette partie de la nuque, une friction légère et répétée qui parait les

mettre en extase, aussi perruches et perroquets répètent-ils à charjn» instant pour obtenir ce bien-être , le fameux mol sacramental grrrratte.

Eh bien ! monsieurle rédacteur, cette espèce de magnétisme qui, ainsi exercé, se produit sur tous lesanimaux, chats, chiens, quadrupèdes didactyles ou monodactyles, est très-recherché par tous, et s’ils ne demandent pas, comme le perroquet, la répétition de cet exercice, c’est que comme lui, et fort heureusement, ils n’ont pas le don de la parole.

Je poursuis :

La tête du cheval est attachée à l’extrémité de la partie antérieure de la colonne vertébrale qui représente l’encolure, par des liens et muscles qui, se contractant par la volonté de l’animal, relèvent ou abaissent la tête. Or, un léger frôlement répété, exercé par la main de l’homme sur ces muscles, exactement sur le sommet de la tête, entre les oreilles, et sur l’espace qui relie la tête à l’encolure, amène aussitôt le relâchement de ces muscles, et c’est alors plaisir de voir le cheval le plus vigoureux, le plus irascible , le plus fougueux, allonger aussitôt l’encolure, baisser la tête, avancer les épaules, céder de partout, et cela avec une sorte de volupté.

Cet exercice du frôlement des doigts sur la nuque doit être pratiqué pendant dix à quinze minutes et deux ou trois fois par jour; alors le cheval attelé ou monté sera à tout jamais votre très-humble serviteur.

Le fait que je signale, et qui est de la plus grande exactitude, peut être vérifié par chacun et à la minime même.

Sûr, monsieur le rédacteur, de trouver en vous un écho fidèle pour la propagation des procédés utiles, je me dis pour la vie votre très-reconnaissant serviteur,

jean ,

Ci-devant postillon.

Il n'est bruit à Roux, dans la province du Hainaut, et dans les hameaux voisins, que des fouilles entreprises pour découvrir, non une petite somme d'or ou d’argent, mais tout le riche trésor de l'ancienne abhave d’Aulnes.

Voici ce qu’on écrit à ce sujet, au Journal de Gand :

« Comme vous savez, non loin de chez nous, existent encore aujourd’hui les bâtiments, jardins et bosquets de l'ancien prieuré de Sart-le-Moine, qui dépendait, avant 1793, de l'abbaye d’Aulnes. Une tradition prétend que lorsque le premier mouvement révolutionnaire apparut à Paris, les moines d’Aulnes y transportèrent leurs richesses.

« Toujours d’après la même tradition, elles auraient été enfouies dans le petit bois de Sart-le-Moine.

« Le prieuré échappa aux bombes incendiaires des républicains français, et il fut vendu intact et bien conservé comme propriété nationale.

« Les nouveaux propriétaires de Sart-le-Moine eurent connaissance de la tradition dont nous venons de parler, et quelques recherches furent tentées par eux, mais sans amener de résultats.

« L’affaire en était restée là, lorsqu’il y a quelques semaines une somnambule, consultée par un intéressé, déclara positivement que toutes les richesses de l’abbaye d’Aulnes avaient été cachées dans le bois de Sart-le-Moine, à une profondeur de 15 mètres environ, mais qu’on ne les trouverait qu’après avoir fait sortir trois âmes du purgatoire. Cette femme lucide ajouta que les ouvriers qu’on emploierait à ces fouilles ne pouvaient y travailler que de une à deux heures du matin.

« Aussitôt on se met en devoir de remplir les conditions indiquées par la somnambule, et les curés et vicaires de Roux, Juinet, etc., furent priés de dire force messes et prières pour faire sortir les trois âmes prisonnières, tandis que les membres de la famille X... distribuaient des aumônes abondantes pour augmenter l’efficacité des offices de l’Eglise.

« En même temps, une brigade d’ouvriers se mirent à l’œuvre, éclairés par des falots.

« Après quelques nuits de travail, la somnambule fut

consultée île nouveau. Elle annonça que deux âmes étaient délivrées, *

« Cette bonne nouvelle encouragea les chercheurs de trésors. et. le lendemain, ils crurent être au bout de leurs peines. A peu près à la profondeur indiquée par la sybille, la pioche des ouvriers avait résonné sur un corps métallique, et un cri de joie était parti de toutes les poitrines. Mais un éboulement subit vint troubler leur joie et recouvrir le trésor.

« Consultée le lendemain matin sur cet incident, la somnambule déchra qu’au moment où le trésor allait être mis à découvert, la troisième âme qui sortait du purgatoire y avait été réintégrée aussitôt par suite d’une pensée coupable qu’elle avait elle au moment où on lui signifiait sa mise en liberté.

« Voilà où l'affaire en est aujourd’hui. On continue les recherches. »

AVIS.

Nos abonnés ont lous reçu un journal spirituali sic ; nous les prévenons que nous sommes tuul à (ail étrangers à celle publication cl que c'est sans notre participation aucune qu'elle leur a élé envoyée.

Les Médailles accordées par le Jury magnétique viennent d'étre déposées au bureau du Journal. Nous prioos les personnes qu’elles intéressent de vouloir bien les faire retirer ; elles auront, en même temps, à nousfaire parvenir leurs noms et prénoms lisiblement écrits, pour que la gravure en soit faite.

Le lemps m'a manqué pour répondre à un cas très-curieux d'obsession, inséré dans le dernier numéro. On trouvera celle réponse dans la prochaine livraison.

Baron du POTET, propriétaire-gérant■

CONTROVERSE.

i HUOf

11 ('pou se à la premier e pur tic de la lettre de M. H F)' Charpi-gnon, insérée dans le dernier mmiértK - ' lli'liH

Monsieur,

Je ne doute pas des nobles sentiments qui vous animent, et de la sincérité de votre croyance en la médecine classique que vous défendez. Vous me croyez l’ennemi de cette dernière; vous vons trompez en ce point. Ce que j'attaque en elle, ce que je signale seulement, c’est l’insuffisance de cet art, ses erreurs, ses écarts, son peu de certitude ; ce que je signale parfois, c’est l'indifférence du médecin en présence d'une vérité qui vient ajouter aux lumières qu’il possède un moyen de se rendre presque toujours utile.

J’ai besoin, je vous l'assure, Monsieur, de retenir ma plume, car ma pensée m’excite souvent à dévoiler les dangers qui accompagnent sans cesse l’emploi des médicaments. Vous le voyez, loin de contester l’action de certains remèdes, j’en reconnais au contraire les vertus; mais c’est ici surtout que la science fait défaut (je ne dirai rien de plus), ma thèse ressemblerait trop à un réquisitoire, et j’éprouve de la répugnance à soulever ce débat. J’aime bien mieux vous montrer, Monsieur, que nos succès Bont éclatants là où votre médecine échoue, là où toutes les ¡lumières de l’école ont servi à éclairer le diagnostic; j'aime mieux vous montrer qu’il ne s’agit pas de quelques cas seulement de maladies, mais d'un grand nombre d’affections graves, guéries par le magnétisme ; ce sera vous prouver que si cet agent n’est pas toute la médecine, il en réunit du moins tous les avantages, sans présenter aucun de ses inconvénients.

Veuillez, Monsieur, bien vous persuader que j’apprécie votre caractère, et que je vous ai toujours distingué de cette foule de médecins dont l’opiniâtreté à repousser la vérité, atteste l’orgueil et l’ignorance.

Baron du Potet.

Tome XVII. -- N° 33. — 2«Sêp.ie. — 10 Mai 1838. 8

CLINIQUE.

Je, soussignée , madame d'Harris Van der Broeck, veuve de l'aide-de-camp de Napoléon I", demeurant à Anvers, rue Kipdortp, n° 9, déclare ce qui suit :

Depuis plusieurs années, j’étais atteinte d’un rhumatisme goutteux qui me parcourait toutes les parties du corps, et notamment le côté droit. Dans ces derniers temps, je l’avais dans le genou, dans l'articulation et dans toute la jambe droite; je souffrais beaucoup et ne pouvais point marcher.

C'est dans cet état que j’ai eu recours au magnétisme, comme dernier moyen, après avoir consulté et m’être fait traiter par les plus célèbres médecins de l’Europe, et notamment en dernier lieu par le docteur de Sa Majesté la reine d’Angleterre.

Je certifie avoir été guérie en trente magnétisations et que cette cure extraordinaire, est due au célèbre professeur des .sciences occultes, M. Brunet de Ballans.

Je ne saurais trop remercier M. Brunet de son abnégation, ■de son zèle et de sa persévérance assidues dans cette circon stance ; de ses soins empressés et de son dévouement à faire le bien.

En foi de quoi je lui ai délivré le présent comme témoignage de reconnaissance et pour rendre hommage à la nouvelle vérité.

Anvers, le 8 avril 1838.

Signé : S. d’Harris vas dlr Broeck.

Vu pour la légalisation de la signature,

Signé : Baron Delvaux, bourgmestre.

Je, soussignée, dame Willems, demeurant Anvers, plare Saint-l’aul, n° 20, déclare et certifie avoir été magnétisée et endormie par M. Ilcssier, élève de M. Brunet de Ballans. el deux lois par ce dernier, et d’avoir été guérie parce moyen, au bout de quelques jours seulement, d’une surdité de laquelle j'étais atteinte depuis plusieurs années et qui avait résisté à tous les traitements médicaux.

Je ne saurais trop remercier l’élève et le professeur de cette heureuse guérison qui tient du prodige, opérée en si peu de temps.

Signé : A. Willems.

Anvers, lo 5 avril IS58.

Vu pour la légalisation,

Dei.vaux , bourgmestre.

M. Brunet de Ballans mentionne d’autres guérisons dont les certificats sont entre ses maios.

M. Lemmers, notaire à Anvers, Courte-rue-Neuve, n°6, paralysie des deux jambes guérie en vingt-six jours.

Deux demoiselles Grégoire, à leur campagne à Vieux-Diens. L’une , mademoiselle Eugénie, traitée pour consomption, névralgie, rhumatisme ; l’autre, mademoiselle Mathilde . pour surdité, rhumatisme, défaut de menstrues, constipation ; guéries en onze jours.

Mademoiselle Marie Valériens, rue des Peignes, 5, à Anvers, âgée de treize ans, épileptique ; guérie en vingt-un jours.

Je, soussigné, docteur en médecine, en chirurgie et accouchement, après examen minutieux des expériences et traitements magnétiques du professeur Brunet de Ballans, estime :

-1° que ses«xpéiieoce8 sont de la plus scrupuleuse exactitude, et que, dans bien des cas de maladies, ce traitement est des plus efficaces : en conséquence, m’engage à donner mon concours à M. Brunet dans cette circonstance, à l'assister dan tous traitements magnétiques et de les prendre au besoin sous ma responsabilité.

Bruxelles, le 1" février 1857.

Signé : Dr A. biî Ploeq.

Vu pour légalisation de la signature de M. le docteur de Ploeq apposée ci-contre.

Bruxelles, 2 avril 1851.

Pour le bourgmestre, Signé : V. Mallet.

Je, soussigné, docteur médecin en chef de l’hôpital civil de Carlsruhe, certifie par ceci que M. Brunet de Ballans a essayé le traitement magnétique sur trois malades de cet institut, et que deux de ces malades, deux femmes atteintes d’accès, convulsions périodiques , n’ont éprouvé d’abord de changement dans leur état que quelques cessations de leurs Crises, mais que par la suite elles se sont trouvées tout h fait débarrassées de cette horrible affection, et que le troisième, un jeune ouvrier de vingt-huit ans, souffrant d'une espèce de mélancolie religieuse avec angoisse et congestion de sang , a éprouvé de suite, après trois séances, un soulagement tel qu’il a pu quitter l’hôpital et reprendre ses occupations quelques jours plus tard.

Carlsruhe, ce 14 njai 1856.

Signé : D' Hochftaedlbr.

I,a soussignée atteste el cerlifie par ces lignes que M. Brunei do üttlkuis l'a traitée par les moyens magnétiques, el qu'après quelques jours, elle s'est sentie fort soulagée d’une affection de la moelle épinière, d'un rhumatisme goutteux et d'une faiblesse paralytique, et (¡«c môme elle a pu marcher avec facilité.

Elle n’a eu qu'à se louer de la manière et du dévouement avec lesquels M. Brunet l'a traitée, ainsi que du zèle et de l'abnégation qu’il a prouvés, ne tendant qu’à faire le bien autant que possible.

Ce certificat est en même temps un témoignage do ma reconnaissance.

Wilbad, le 81 juillet 18r,6.

Signé : Thérèse , princesse Esterhazy, née princesse de la Tour et Taxis.

Wilbad, 20 juillet 1856.

Monsieur le baron,

Permettez-moi de prendre la liberté de vous écrire et de vous dire que je suis heureux d’être allé vous voir à Paris, et d’avoir eu foi d’après vos paroles dans le magnétisme.

J’ai trouvé une occasion ici de me faire traiter parce moyen, et M. Brunet de Ballans, le célèbre magnétiseur, dont j’avais appris à connaître la modestie et le talent, m’a complètement guéri, dans l’espace de huit à dix jours, de mon hernie que j’avais depuis quinze à dix-huit ans.

Agréez-en par contre-coup, vous-même, mes remerclments et recevez, etc.

Signé : Constant Petit, maitre-d’hôtel de l’impératrice-mère de Russie.

Deux certificats et une autre lettre des plus flatteuses constatent, en outre, cette cure extraordinaire.

.Te, soussignée, dame Moller, demeurant à Bruxelles, rue de Bavière, n" 15, atteste, par ces présentes, que M. limnei de Ballans m’a traitée par les moyens de la science magnétique d'une amaurose avec engorgement de sang, dont je souf-Irais cruellement et pour laquelle j’ai subi les traitements des plus célèbres docteurs de l’Allemagne et en dernier lieu ici, du docteur Valler, tant renommé pour les maladies d'veux, et déclare qu’après dix jours de traitement (du 1« au 10 février), j’ai complètement été guérie de cette terrible affection qui ne faisait qu'augmenter sous les autres traitements, au point que je n’y voyais plus et que je n’avais aucun repos, tellement mes souffrances étaient devenues intolérables. C'est donc avec reconnaissance que j’atteste ici ma guérison que je considère presque miraculeuse en !si peu de temps. J'ajoute que, par suite d'une imprudence, j’ai eu depuis une autre maladie d’yeux, également grave (n’ayant aucun rapport avec la première affection) et que M. Brunet m’en a également débarrassée en six jours.

Bruxelles, le 21 avril 1857.

Signé : dame Moller.

Je joins, pour la corroborer, mon attestation h celle de ma femme, et je suis heureux en même temps d’exprimer ici ma profonde reconnaissance au célèbre professeur pour le service éminent de la guérison dont il s’agit.

Bruxelles, le 21 avril 1857.

Signé : G. W. Moller, pour moi elmon épouse.

Vu pour la légalisation,

Bruxelles, le 25 avril 1857.

Pour le bourgmestre, Signé : Jacobs.

5 Je, soussigné, major en retraite , chevalier de la Croix de 1er, demeurant à Bruxelles, rue des Alexiens, 32, certifie, par ces lignes, que M. Brunet de Ballans m'a traité par les moyens magnétiques d’un anévrisme à l'épigastre (tumeur formée par la paroi de l’artère l'aorte) ; d’un asthme (fluxion journellement périodique et névrose), et qu’après deux mois environ de soins, je me suis trouvé entièrement guéri, à mon grand étonnement, ayant soixante-sept ans, de ces cruelles aifections, pour lesquelles depuis dix ans j’ai employé tous les moyens de la médecine ordinaire, sans éprouver un jour complet de soulagement, tandis qu’aujourd’hui et depuis plus d un mois que mon traitement est fini, je n’ai plus ressenti la moindre atteinte de douleur dans aucune partie du corps. Aussi ma reconnaissance éternelle est acquise àM. Brunet pour son abnégation, son talent et le bien incalculable qu il m a fait. Je lui en rends ici hommage , comme je serai heureux de le faire publiquement à toute occasion.

Bruxelles, lo2avrlH857.

A. Taxier, ex-major.

Vu pour la légalisation,

Pour le bourgmestre,

Signé : Jacobs.

Je déclare avoir été soulagé et guéri par M. Brunet de Ballans de ma paralysie au poignet droit, et d'être parvenu à écrire ces lignes au bout de neuf magnétisations.

Bruxelles, le î mai 1857.

Signé : Marquis de Maillen , rue Montoyer, n° 26.

Certifié sincère,

Signé : De Pi.oecq, docteur.

Vu pour la légalisation, etc.,

Signé : Jacobs.

Je, soussigné, déclare que ma petite fille Eugénie, âgée de sept ans, a été traitée par M. Brunei de Ballans par le moyen do la science maguétique, d’une affection de surdité qu'eUe avait,,depuis son enfance, et qu'au bout de dix-sept jours, elle ¿’est trouvée entièrement guérie. Je ne puis laire autrement que de faire mes plus granls éloges à M. Brunei de la guérison de ma Glle, puisqu’après avoir été traitée en vain par les hommes de l’art les plus éminents, je la croyais sourde pour tôtrte sa.vie.

Je dois ajoater que mademoiselle Anna, son sujet magnétique, l’a beaucoup aidé dans cette guérison extraordinaire.

BrmClte», le S mai 1857. i Signé i Tassibk.

, :Vu pour la légalisation,

Pour le bourgmestre,

Signé ; Jacobs.

Je, soussignée} Jeannette van Crickinge, demeurant à Bruxelles, rue de Lacken , n° 89, atteste et certifie avoir été traitée pendant dix-huit jours par M. Bi unet de Ballans, professeur de magnétisme, d’une amaurose grave que j’avais depuis plusieurs années, et qu’au bout de ce peu de temps, j’ai été complètement guérie après avoir été dans les premiers jours soulagée de cette affection que la médecine ordinaire avait été impuissante à réduire.

Je ne saurais trop remercier M. Brunet du dévouement et du zèle qu'il m'a témoignés dans cette circonstance , ainsi que de son abnégation.

De tout quoi je *uis très-reconnaissante,

Bruxelles, la 5.mai 1SB7.

Signé : Jeannette Van Crksingb,

Certifié sincère.,

Signé : Db Ploeq, docteur.

Vu poujr légalisation,

Signé : Mollet.

Je, soussigné , César de Greffe (frère du commissaire de police de la quatrième division à Bruxelles, rue des Fabriques ,11° 17 bis, obéissant tout à la lois à un sentiment de justice et de profonde reconnaissance, déclare ce qui suit :

Depuis plus de trois ans , j’étais atteint des affections ci-après : perversion de tout le système nerveux ; défaut de circulation, atrophie consécutive des dent membres du côté droit, en un mot peraiysé de tout le côté droit, y compris la langue ; je souffrais d’une amanrose grave.

C'est dans ce triste état que j'ai eu recours au magnétisme, comme dernier moyen. Ce traitement, simple, facile, exempt de tous médicaments, m'a rétabli la circulation d« sang et du fluide nerveux, et m’a enfin guéri dans l’espace de trois semaines de mes affections, au point que je puis maintenant marcher et écrire avec facilité, et parler et vpir comme tout être qui n'aurait jamais été malade.

Après un tel succès, je me fais un religieux devoir de déclarer que cette guérison estdue.au célèbre professeur M. Bru-net de Ballans, et m'empresse, par ces présentes, à rentlre à. cet homme de bien, ainsi qu’à l’art bienfaisant qu’il professe, mon tribut sincère de reconnaissance, de dévouement et d’affection.

Bruxelles, le 12 juin 1857.

Signé : C. de Geneffe.

Vu pour légalisation,

Pour le bourgmestre,

Signé : Massart.

Certifié sincère par le docteur de Ploeq.

Procès-verbal de lu Commission ayant assisté aux séances de M. Brunet de Ballans.

Nous, soussignés, assistant le » juin 1857 à la séance de magnétisme donnée par M. Brunet de Ballans, rue Saint-Jean,

ii" 17, à Bruxelles, déclarons avoir constaté les expériences suivantes : 1° Catalepsie complète des membres, poussée jusqu’à l’insensibilité la plus absolue. Nous avons vu le cartilage du nez et les muscles de l’avant-bras traversés par de longues épingles sans que le sujet manifeste la moindre douleur. 2° Paralysie de la pupille et paralysie complète , alors qu’on approche de l’œil une bougie allumée à un centimètre de distance du globe de l’œil. 3° line grande variation dans le mouvement du pouls.

Nous pourrions mentionner d’autres expériences plus curieuses et aussi concluantes, mais nous nous bornons à déclarer ici que toutes les expériences faites par M. Brunet de Ballans sont dégagées de toute espèce de charlatanisme el appréciables par toute personne qui a des yeux pour juger et des doigts pour toucher.

En foi de quoi nous avons délivré àM. Brunet de Ballans le présent certificat. Suivent les signatures des commissaires : Fauconnier, docteur en médecine; Boyer, docteur-médecin, A. de Ploeq , docteur-médecin ; Phosseter, docteur-médecin et savant; Pigny, professeur à l'université ; Pelletin, rédacteur de l’Écho; A Stenner, professeur; C. de Geneffe, com-missairede police ; E. Acton,professeur à l’université ; A. Re-not, chimiste ; Dupré, savant compositeur; Jobard, directeur du Musée.

BULLETIN SPIRITÜAJUSTE.

Non, ce monde n’est pas le dernier mot de la création ; il y a quelque chose d’inconnu entre Dieu et l’homme, et la dignité de celui-ci, sa science, son bonheur consistent à pénétrer ce mystère immense ; toute autre connaissance ne doit être que secondaire et seulement une préface du grand livre de la nature, indiquant ce qui reste à connaître.

Voyez comme l’être humain est mal à l’aise dans ce monde, comme il s’agite et se tourmente! Son âme, pressentant un autre destin, ne laisse nul repos à l’esprit ; comme un malade que la fièvre dévore, il se tourmente sur sa couche * et, ne trouvant aucun but à la vie, l’homme, à force de rêver, devient semblable au fou. Il ne se connaît pas, et cette ignorance de la première et la plus importante des sciences, fait de sa vie une continuelle contradiction ; au dehors il ne voit qu’antagonisme; lois, morale, religion, famille, ce qu’il y a de plus respectable et de plus sacré, devient l’objet de ses soupçons, de ses doutes et de ses controverses ; rien ne peut donc plus désormais arrêter le trouble de ses pensées et l’ardeur indomptée de ses passions ; il injurie, il frappe, il tue : voilà son existence et le bonheur dont il jouit !

Pour l’homme rassis, quel affreux spectacle que ce dérèglement! Il voit chaque nation avoir son Dieu, ses saints, son paradis, chaque homme prendre ses visions pour des réalités. Ne lui semble-t-il pas que dans ce monde la sagesse seule soit le fruit défendu !

Eh quoi! il n’y aurait de réel, de vrai, de permis et de toléré que ce que nous voyons ; la raison humaine n’irait pas

(»lus loin: elle ne pourrait s'élever au-dessus de laut de misères morales et physiques et saisir enfin lus causes premières et finales de ses amères contradictions!...

Quel sera son guide, son flambeau dans cette ascension suprême vers la vérité? Le spiritualisme,... éclairé lui-même par le fait immense, révélé par Mesmer, priucipu aussi certain que la lu nière, aussi fécond qun la nature, dont il semble être la plus haute expression. Nous allons à tâtons, sans doute, voyant s’accomplir devant nous ce que les anciens appelaient des miracles; nous pouvons nous écrier pourtant : Ici est la source de toute vérité et du bonheur futur de l’iiom .ne !

Qu’eat-ce, en effet, et quelle signification peuvent, avoir ces phénomènes qui. laissent bien loin derrière eux, ce> que la chimie et la physique offrent de transcendant, ce que la science médicale nous présente de plus parfait, si ce n’est l'âme révélai itr. ses. divines propriétés et sou- immortalité ? L’impuissance n'est pas dans les faits, mais dans le langage qui ne. peut le3 rendre et en faire sentir la grandeur; ce n’est qu’en s’élevant, au risque de so perdre, qu’on pnutar-river à,saisie leur rapport avec uu ordre de choses invisibles, qui se montrent pourtant aux voyants.

14 faut donc posséder une certaine force de caractère et d'intelligence,, poui; l'étade -du spiritualisme, car il. faut maîtriser, brader bieni des frayeurs et se dépouiller des erreurs communes, des.fauesesKxoy&uces répandues sur la terre et rejpter.ces iaiterprétALions arbitraires dont les savants se sonii servi» pour expliquer ce quu’iLls ne pouvaient comprendre.

En publiant, dans chaque numéro', notre bulletin du,spiritualisme, nous n'avoua qu'un ImU, éveiller l'attention des hommes forts et,la porter succès dioses nouvel les ipour no uav., mais que les anciens connaissaient et» appelaient ]&:lnétordv. la. uu/esse huit mine.

Baron nu Pûtes.

GUÉRISONS SPIRITUAI.ISTES.

Les journaux spiritualistes d’Amérique donnent fréquemment des relations de guérisons attribuées à. l'intervention des esprits et présentées comme preuves de la doctrine spi-ritualiste.

Nous en avons déjà rapporté plusieurs: nous en empruntons aujourd'hui au Spiritual Telegraph (n" du 27 mars) ; nos lecteurs, familiarisés avec la puissance magnétique, apprécieront si c’est à elle qu’on doit faire honneur des résultats obtenus, ou s’il y a nécessité de recourir à des agents d'ane autre sorte.

« Mon père étant gravement malade, appela un médecin ; mais son état ne fit qu’empirer jusqu'à ce que le médecin prononça que le cas était désespéré. La maladie consistait dans une fièvre typhoïde avec inflammation au cerveau. J’entendis cette décision avec l’émotion d’un fils menacé de perdre un père tendrement aimé. Pourtant il restait un espoir • dans le pouvoir des esprits ; je partis immédiatement pour Albion, j’allai trouver le docteur Fellow9, le'plus proche médium-guérissant qui fut à ma disposition, et, en outre, mon ancien camarade de collège. Nous avions dès l’enfance été unis de sentiments. Je connaissais la position qu’il avait prise, et je savais que quelque'influence puissante devait le diriger.

« 11 était sept heures du soir quand je fus-Chez lui, et je1 le décidai à se rendre de suite chez moi. Nous avions trente "à quarante milles à parcourir par une nuit froide et un très-mauvais chemin, et il fallait arriver avant une heure du matin, ou tout était perdu ; car, m'avait dit le docteur, aussitôt que je le vis, votre père est encore vivant, il peut vivre encore douze heures, et si je parviens auprès de lui à une heure, je le sauverai. Il ne nie fit aucune question ;• je ne lui donnai aucun renseignement. jeme bornai à lni dire: Mon

père est très-malade, j’ai besoin de vous pour venir le traiter. Néanmoins, il me décrivit son état aussi exactement qui1 s’il avait été auprès de lui pendant tout le cours de sa maladie. A minuit et demi, nous entrions à la maison ; le docteur se rendit de suite à la chambre du malade, le prit par la main, fit sur lui quelques passes et lui dit : Vous serez guéri, el toute influence contraire va cesser. A l’instant il se fil chez le malade un changement comme je n’en ai jamais vu. l.’œil qui était devenu éteint et vitreux, reprit son éclat ordinaire ; la fièvre cérébrale, le toucher visqueux de la peau disparurent. Ses facultés intellectuelles reparurent à tel point qu’il put converser avec le docteur et avec ses enfants qui se levaient autour de son lit. Tout ce rétablissement se fit en moins de dix minutes. Il ne fut administré aucun médicament. Je restai pendant tout ce temps auprès du docteur : plusieurs personnes étaient aussi dans la chambre et sont prèles à attester ces faits si quelqu’un en doutait. Depuis ce temps, mon père a été de mieux en mieux; au bout de quelques jours il put se promener, et en trois semaines il fut complètement rétabli , de manière à pouvoir aller à son magasin et vaquer à ses affaires.

« Le second cas consistait dans une inflammation de poumons , la malade était madame Long. La maladie, m’a-t-on dit, était très-dangereuse, mais non désespérée. Le docteur Fellows vient le soir, et le lendemain matin, la malade était guérie et s’occupait des travaux de son ménage.

« Le lendemain, le docteur vint chez moi avec M. Long, le mari de la dame dont je viens de parler. Je lui parlai de madame Lombard, qui était très-malade de la fièvre. Je venais d’auprès d’elle; elle était tellement faible qu’elle nu pouvait rester levée dix minutes. 11 était alors midi : vers deux heures, le docteur et M. Long se rendirent avec moi auprès de la malade. En quinze minutes, le docteur la guérit. Elle s’habilla et se promena autour de sa chambre. A cinq heures, elle aida à préparer la table pour le thé et se livra à ses travaux habituels.

« Le fils de M. F. Chopin avait une inflammation de pou-

nions, il était tellement affaibli qu’on s'attendait à l'envelopper clans lf1 linceul. Quelques minutes après l’arrivée du docteur, il fut mis en état, de se lever tout seul, et il fit deux fois le tour do la chambre. Cinq jours après, il sortait et allait au spectacle. Il ne fut fait usage d’aucun médicament.

« Le dernier cas que j’ai à signaler est celui de Anna E. lirush. Elle était malade de consomption lente ; elle employa les ressources de la médecine jusqu'à ce que son médecin déclara qu'aucun traitement ne pourrait plus lui être utile , et il la laissa avec ses amis dont les bénédictions étaient le seul soulagement qu'elle pût recevoir. C’était le cas d’éprouver la puissance des esprits guérisseurs. Tout le côté gauche du corps était paralysé ; elle ne pouvait remuer un doigt ; sa parole était embarrassée, de sorte qu’il était difficile «le comprendre ce qu’elle demandait. Elle devint plus faible de jour en jour, et il semblait qu’elle allait tomber eu dissolution. On ne pouvait apercevoir aucun mouvement des muscles, ni aucune pulsation. Elle avait toute l’apparence d'un cadavre, si ce n’est que ses lèvres conservaient une légère teinte de rose, et qu’en mettant l'oreille près de sa bouche, on pouvait encore entendre le souffle de sa respiration. Toutefois un membre de notre cercle déclara qu’elle pouvait encore être guérie par le secours des esprits. On choisit dans notre cercle (qui, depuis cette époque, a atteint le nombre de 35 à 40) six membres pour former chaque jour une chaîne autour d’elle. Peu de temps après , il y avait déjà une amélioration visible. En une semaine, les membres paralysés recouvrèrent le mouvement ; au bout de quatre semaines, elle put marcher autour de sa chambre. 11 y a maintenant six ou sept semaines qu’elle était au plus bas, et hier, je l’aidais à descendre d'une voiture où elle s’était promenée l’espace d’un demi-mille, elle me disait : — Je rentre à la maison, je me sens forte, tout va bien. Elle est un monument vivant du pouvoir des esprits guérisseurs. Elle n'a pris aucun médicament depuis que son médecin l’a abandonnée.

« Ces exemples que je viens de rapporter sont les plus remarquables. Je pourrais en «ajouter beaucoup d’autres;

mais je pense que ce serait inutile pour les personnes que ceux-là ne satisferont pas. Nous avons, dans notre cercle , quatre ou cinq médiums vo\ ants. plusieurs médiums parlants et deux ou trois bons médiums guérissants. Nous avons eu le révérend Plammond, M. Scaver et plusieurs autres qui nous ont fait des lectures.

« Cet article est plus long que je n’aurais voulu : il pourra être profitable à ceux qui s'occupent du spiritualisme. Le pouvoir qui guérit dit être un esprit. Peu m’importe ; je ne veux forcer personne à croire que cela est ou n’est pas. Les résultats satisferont tous ceux qui sympathisent aux maux de l’humanité et démontrent qu’il y a là quelque chose d’utile à l’homme. Attachons-nous à ce bien, et quantà la cause, elle prendra soin d’elle-mème.

n Campville, 1" mars 185«.

« S. N. VlCKERY. »

CORRESPONDANCE.

Suite de la lettre du !)• Char pignon à M. le baron du l'olet, sur les rop ports du magnétisme avec la médecine classique et le catholicisme.

La religion est uu ensemble de préceptes et de moyens j à l'aide desquels l’homme parvient à rr-Uer (rvliyurc) avec Dieu et les êtres surhumains des rapports naturels, comme fin de la créature intelligente, mais rapports rompuset brisés.

Le magnétisme est l'ensemble des lois qui régissent les influences réciproques des êtres de la création : magnétisme sidéral, minéral, animal, humain et spirituel.

Le magnétisme est donc un des moyens d’établir des rapports avec le monde surnaturel cette assertion, il me scrabble, n’est plus à démontrer. Mais de ce que le magnétisme, par sa nature même et par ses effets les plus élevés, fait partie des moyens qui se rattachent directement à la religion, ¡L ne. s ensuit pas qu’il soit toute la religion et qu’il soit possible à ses théories de modifier les dogmes religieux. Cette prétention, que trop souvent vous avez fait soupçonner à vos lecteurs, monsieur le baron, est le résultat d’incertitu^ des philosophiques que vous n’avez pas encore élucidées complètement, mais qui le seront en. faveur du catholicisme, je l’espère du moins, avant votre départ de cette terre.

Esquissons rapidement ensemble les rapports du magnétisme avec le catholicisme, et voyons si l'on peut exclure l’autre.

Elle est née d’hier cette grande science que nous connais-

sons, i t. chaque jour nous apprend son immensité. Or, que nous a-t-elle appris ? Le voici :

L'homme est un composé trinaire : puissance animique, essence vilale, fluidique, corps ou matière.

Par la fusion de l’essence de la vie, il s’établit entre l’homme et ses semblables une communion intime.

Des facultés supérieures à celles que nous manifestons ordinairement apparaissent dans certaines circonstances, mais d’une manière vague et temporaire.

Des êtres surhumains existent etentrenten communication avec certains extatiques et médiums.

Le principe de vie, émis par le magnétiseur, peut être fixé sur un objet, il s’y conserve avec les propriétés que la volonté lui a données.

Tels sont les grands faits, principes du magnétisme, et dans lesquels tous les autres se résument. Mais, en vérité, ces principes et ces phénomènes, que, sons l’impulsion de Mesmer nous avons trouvés, sont aussi anciens que le monde, et s’ils ont été oubliés, méconnus, transformés par le moyen-âge, par les religions, les philosophies et les constitutions politiques des peuples de l’orient comme de l’occident, il n’en est pas moins certain qu’ils ont toujours constitué la base de la religion catholique. Le catéchisme , en effet, prend sa racine dans le Livre des ancêtres du monde, dans la Bible ; et comme une religion qui vient de Dieu ne peut mourir, quand le judaïsme a disparu sous l’action de la politique romaine, le dogme religieux déposé dans la Bible a dû se continuer, se développer et se résumer dans un dogme nouveau en rapport avec la civilisation progressive de l’humanité. Les dépositaires du premier Livre étaient dispersés, il en fallait d’autres jouissant d’une autorité aussi grande, aussi immuable. L’Evangile a été proclamé, et l’Eglise a été fondée.

Pendant que les révolutions et les siècles bouleversaient les coutumes, les constitutions, les religions, les sciences et les arts des nations , les deux livres gardés par l’Eglise survivaient intacts au cataclysme universel, et ils conservaient

lus dogmes el principes des grandes vérités. Oublieuse du ces vérités ou intéressée à les rejeter, l’intelligence humaine refaisait religion , constitutions, sciences, chez chaque peuple, variant les principes suivant les intérêts ou les circonstances. En sorte que, retrouvant parfois et par intervalles les faits enveloppés dans la nature même de l'homme, les peuples les rattachaient à des causes diverses et souvent opposées.

Quoi donc d’étonnant si l’Eglise à sa naissance et plus tard aussi, trouvant au milieu du paganisme des doctrines les plus opposées à la vraie religion , certains phénomènes , certains principes, paraissant au-dessus des facultés humaines, àcause de l'ignorance relative de la science de l’homme, proscrivit ces faits et principes comme antipathiques avec sa doctrine et comme émanant des esprits mauvais? Ne fallait-il pas que le temps démontrât une communauté d’origine entée sur des facultés naturelles, ou bien des analogies dans les causes et non pas une identité ? Et ces rapprochements qu’on saisit aujourd'hui, on les niait jadis! Et ces phénomènes que le magnétisme a apportés à la raison pour lui faire admettre l’ordre spirituel, la doctrine catholique les en éloignait depuis l’origine du monde. Voyez en eflet cette concordance : i

L’homme est âme, esprit et corps. Anima spiritus et corpus. (Saint Paul.)

L’homme a possédé des facultés supérieures à celles dont il jouit, il en a été privé, et le rapport qu’il avait avec les esprits a été rompu.

Au-dessus de lui, il existe une hiérarchie d’ètres avec lesquels l’homme peut continuer selon certaines conditions inconnues de lui. Ces êtres sont de nature perverse ou bonne. La foi et la prière , la sainteté et la charité sont les vertus par lesquelles l’homme obtient le secours direct, la grâce divine, le rapport angélique et avec les âmes des saints.

Les tendances spirtuelles du chrétien sont encoi e aidées par l’action des sacrements (signes sensibles ayant une puissance réelle par une vertu divine).

Vest-ce pas la reproduction des principes que je formulais au commencement? Cela devait être, parce que le magnétisme a sa racine dans les lois de la création, et, par conséquent, ses principes doivent concorder avec ceux de la religion qui émane de Dieu.

Pourquoi ne pas croire au catholicisme? lYa-t-il pas, comme je viens de le montrer, los plus intimes rapports avec votre science ? Ce que vous n’admettez pas, c’est son origine divine, c'est l'incarnation du Verbe de Dieu ! Mais méditez donc sur les puissances de votre âme, voyez donc ces facultés merveilleuses, pensez donc à cette force créatrice dont elle jouit dans l'ordre fluidique* rappelez-vous que cette âme est faite à l'image de Dieu , et dites si la volonté divine n’a pu faire en substance réelle ce que nous faisons en image, en forme, mais non substantiellement? Examinez ensuite les nécessités morales, l'ensemble de la doctrine, et, vous appesantissant sur les faits, cherchez dans les actes de Jésns-Christ s’il n’y a pas là une puissance élémentaire, créatrice de substance , une possession réelle de la vie : et alors dites si les faits qu'il a produits sont de la même nature que cens que nous produisons. Vous trouverez une analogie, parce que, encore une fois, l'homme possède des facultés qui sont l’image de celles qui constituent Dieu lui même , parce que Jésus faisait émaner de lui la vie créatrice et que de nous la vie créée émane seulement. Vous comprendrez la sagesse, la puissance ties sacrements, qui infusent dans l’homme la rie divine déposée dans des signes sensibles; vous comprendrez les prières de l’Eglise, sa communion des saints, ses dogmes, ses rites môme et aa discipline. L’Eglise, ah! ne confondez pas , comme les esprits étroits, l’institution avec les membres. Vous l’avez trouvée hostile, méfiante, et vous la croyez votre ennemie! Question d’individus, question de tempaJ Examinez un peu. La doctrine admet des esprits surhumains ions et mauvais, et dans chaque catégorie des ordres, des legrés. 1

Comment, dès lors, l’Eglise catholique n'eût-elle-pas attribué aux esprits inférieurs, jaloux et méchants, ces plié**-

mènes que les nations païennes el idolâtres faisaient dépendre île l’intervention de leurs divinités et génies? Comment reconnaître naturels et bons dans leur principe ces phénomènes du moyen-âge, que leurs auteurs eux-mèmes attribuaient positivement aux démons ? Comment au temps moderne ne pas frapper d’interdit, des faits dont la doctrine erronée prétend détruire et remplacer la doctrine-mère, universelle, vraie, de l’Ecriture sacrée?

La doctrine de l’Eglise et celle du magnétisme ne sont pas opposées, la preuve est dans lès rapprochements que j'ai signalés, dans l’intelligence des choses considérées d’un point de vue général et nullement dans les détails, car le christianisme ne tire pas sa divinité seulement dans les miracles de l’Evangile , on peut les expliquer comme le faisait Gelse par les lois du magnétisme , quand 011 confond l'analogie avec l’identité ; la question des miracles est surabondante, et c’est l’ensemble du côté historique et doctrinal qu’il faut envisager ; alors pourrait-on conclure, comme le faisait Jean-Jac-ques par la comparaison des deux manières de mourir de Jésus et de Socrate, en disant comme lui : « Oui, si la mort de Socrate est celle d’un sage , celle de Jésus est celle d’un Dieu ? «

*

Le catholicisme mis en demeure, dans ces derniers temps, de se prononcer sur le magnétisme, a résolu la question dans le même sens que moi. En lui-même, in se, le magnétisme est une doctrine et un fait naturel, bon , licite ; ce qu’il y a de vicieux, d’hérésiarque, de schismatique, de mauvais, ce sont ces mille interprétations théoriques que chacun veut faire passer pour la vérité; ce sont ces abus, ces déviations de la puissance de l'homme sur son semblable; ce sent ces invocations et confiances imprudentes dans ces communications spirituelles que certes vous 11e pouvez croire être toutes le produit d'êtres sages, dignes et obéissants.à la loi de Dieu.

Voilà ce que l’Eglise condamne dans l’intérêt de la vérité, de la doctrine pure, des mœurs et de la satisfaction individuelle.

L’avdnir, j’en ai la conviction , amènera entre le magné-

tisme et le catholicisme la même alliance qu’avec la médecine. Toute science qui est vraie émane de Dieu. et les vérités, manifestations diverses de la grande vérité de l'intelligence suprème, ne peuvent se repousser, elles doivent, au contraire, s’absorber dans l’unité. La marche progressive de l'humanité tend à ce but suprème ; heureux ceux qui, dociles à l’impulsion harmonique de l'action providentielle, concourent au grand œuvre de l’amélioration individuelle el générale.

Le Dr Chakpignon (d’Orléans).

Ma réponse sera insérée dans un prochain numéro.

Baron du Potet.

obsession.

Dans le numéro 31, j'ai publié, sous le titre d’obssession, une affection très-curieuse et bien moins rare qu'on ne pour-rait l’imaginer. Les premiers cas qui ont été soumis à mon appréciation, je dois le dire, me causèrent un grand embarras; tous les principaux symptômes me montraient une cause agissante , comme l’eût fait le magnétisme, et pourtant, d'un autre côté, l’action occulte exercée par un individu sur un autre et dans ces conditions me paraissait impossible. Petit à petit, la lumière s’est faite dans mon esprit, et, plus lard, j’ai pu me convaincre que, fort heureusement, le magnétisme n’allait pas jusque-là. Ces désordres moraux ont une grande gravité. Les fera-t-on cesser un joui ? je l’espère. Ils viennent évidemment du jeu mystérieux de nos propres forces magnétiques dérangées dans leur équilibre et simulant, à s’y méprendre, tout ce que cet agent peut produire extérieurement sur des individus non malades.

Vous échouez presque toujours lorsque vous voulez vous servir tic la raison pour combattre ces maladies ; l’individu sent, entend, et le témoignage de ses sens l’empêche seul de distinguer les erreurs de la vérité. Jusqu’à présent, le seul médecin de ces affreux désordres, c’est le malade lui-même lorsqu’il peut, ce qui est bien rare, arriver à comparer ses sensations. Les remèdes sont inefficaces; il n’en est point pour les maux de l’esprit. On a vu parfois ces monomanes, ces hallucinés ou obsédés, 011 ne sait quel nom donner à cette maladie, se porter aux plus grands excès contre des gens parfaitement innocents, mais auteurs présumés des souffrances ressenties. Les sorts, le mauvais œil, les incantations, etc... sont invoqués en témoignage par le malade pour justifier une action qui ne vient que de lui-même.

11 y aurait ici un long chapitre à écrire, mais il demanderait du temps et de la réflexion, et le temps m’est refusé. J’ajourne bien malgré moi cet examen approfondi, mais j’espère qu’il me sera permis un jour de dévoiler ce mécanisme mystérieux dont le dérangement fait naître ces maux que l’on ne sait guérir.

Baron nu Potet.

BIBLIOGRAPHIE.

. o -

ill'

MANUEL HISTORIQUE, ÉLÉMENTAIRE ET PRATIQUE DE MAGNÉTISME ANIMAL, par li. Bkkjot: suivi d'une Dissertation sur le fluide magnétique animal, par A. Bûche. 1 petit vol. in-lâ, IS:>8 , chez I autour, 15, rue lu Buci.

I.e magnétisme est tellement répandu dans toutes les classes, le désir d'en connaître au moins les principes élémentaires est tellement général, que les manuels consacrés à l'exposition sommaire de cette science répondent à un véritable besoin et se multiplient chaque année sous diverses formes. Les personnes qui ne tiennent à acquérir que les premières notions, recherchent les ouvrages de peu d’étendue «pi peuvent leur donner une idée du magnétisme , retracer les principaux faits historiques el enseigner la manière de procéder, tant pour produire les phénomènes les plus usuels, que pour traiter les différents genres de maladies. Bien qu'il existe déjà quelques-uns de ces traités composés par des hommes d’un grand mérite, M. Berjot a cru avec raison qu’on pouvait encore rendre des services à la cause du magnétisme, en traitant d’une manière élémentaire ce sujet ai vaste et si fécond. 11 s'est attaché d’abord à foumir aux commençants des réponses au questionnaire de la Société du Mesmérisme, comprenant les connaissances indispensables à toute personne qui veut s’occuper de magnétisme. 11 y avait à garder un juste milieu quant à l’étendue des développements : une concision excessive nuit à la clarté, les dissertations théoriques appartiennent plutôt à un traité qu’à un manuel. M. Berjot s’est maintenu dans de sages limites; ces explications sont claires et nettes et contiennent tout ce qu’il est nécessaire au lecteur de connaître. Nous nous permettrons seulement de signaler deux lacunes regrettables. Y la

piigo 7. stir la question relative aux différentes hypothèses pour expliquer les faits magnétiques, nous aurions voulu que l’auteur, au lieu d'une simple nomenclature, indiquât en peu île mots en quoi consistent ces hypothèses dont l’étudiant doit connaître au moins l’énoncé. A la page f>, où il est question de l'imagination, il aurait été bon de faire saisir la distinction si importante entre les faits qui peuvent être attribués à l’imagination , et ceux dans lesquels l’imagination ne joue aucun rôle et qui ne peuvent être attribués qu’à un agent particulier.

La seconde partie est la plus utile pour celui qui, conformément à la pensée de Mesmer, veut sc livrer à la pratique de la thérapeutique et appliquer le magnétisme à la guéri-sen de ses semblables. Il ne suffit pas, pour remplir convenablement cette tâche, d’avoir la volonté de faire le bien et de croire à l’efficacité de l’agent mesmérien : il faut encore connaître en quoi consiste le mal et quels sont les meilleurs, moyens de le combattre, il faut aussi apprécier les cas où le magnétisme peut suffire et ceux où il a besoin d’être secondé par la médecine. Le magnétiseur thérapeuthe doit donc posséder quelque notions d’anatomie, de physiologie et de pathologie. Le petit exposé de M. Berjot suffira pour mettre-l’étudiant à même de traiter les maladies les plus communes, celles dans lesquelles on a le plus souvent recours au magnétisme.

Son ouvrage, qui a été lu comme thèse pour le grade de-titulaire à la Société du Mesmérisme, y a été salué par d’unanimes applaudissements, et nous sommes persuadé que ce jugement sera ratifié par le public.

La dissertation de M. Bauche est également unethèse lueàla même Société qui l’a accueillie de la manière la plus favorable. L’auteur est un champion énergique du fluide ma-gnétiqne ; il a soutenu habilement sa théorie par de nombreux arguments. Quantàlaquestion en elle-même, on nepeutseflat-terqu’elle soit résolue : elle sera sans doute encore longtemps controversée parmi les magnétiseurs, des raisons fort spécieu-sesont été alléguées pour et contre, et notamment un débat des-

plus intéressants a eu lion dans leJourimldu Mugné/ismecnire MM. JVrrier et Ordinaire. A quelque opinion qu’on se rattache, il ne faudrait pas perdre de vue que l'existence du fluide n'est qu'une hypothèse mise en avant pour expliquer les phénomènes du magnétisme, et que la réalité de ces phénomènes n’est pas liée à la vérité de l’hypothèse. Le magnétisme s’appuie sur des faits que chacun peut reproduire, observer et vérifier : qu'on cherche à les expliquer, rien de plus légitime ; mais une explication hasardée ou même reconnue fausse ne laisserait pas moins subsister les faits et n’enlèverait rien à leur autorité.

11 en est de même de plusieurs branches de la physique. Pendant longtemps le monde savant, était partagé, quant à la lumière, en deux camps, celui des cartésiens partisans des ondulations, et celui des newtoniens, partisans de l'émission d’un fluide lumineux. Les derniers ont fini par être vaincus, et le fluide lumineux est à peu près abandonné ; mais ce que, ni d'une part, ni d'autre, on n'a jamais mis en question, c'est l’existence de la lumière et de ses phénomènes qui tombent sous nos sens.

11 en est de même du magnétisme. L’hypothèse de Alesmer n’a pas régné longtemps ; la plupart même de ses disciples immédiats ont délaissé l’action du fluide univerel, l’influence des astres, la distinction des pôles du corps humain , etc. Le magnétisme n’en a point été ébranlé. L’hypothèse d’un fluide particulier a pris faveur et est admise par le plus grand nombre des sectateurs, mais des hypothèses contraires ont aussi été chaudement soutenues par des magnétistes d'un grand talent, tels que le docteur Ordinaire, Bertrand, D'Hé-nin de Cuvilliers, Billot, etc. Toutes s’appuient sur des considérations plus ou moins ingénieuses , mais aucune ne peut encore être présentée comme une doctrine parfaitement démontrée. Les partisans des divers systèmes doivent user les uns envers les autres de ménagements ; et leurs dissentiments sur les théories, loin de nuire à la cause commune , lui sera profitable, en les forçant à étudier de plus en plus, à accumuler des observations, à multiplier les faits bien constatés, ce

qui fournira un jour les moyens de formuler la loi qui les régit.

Tout en rendant justice au mérite de M. Bauche, nous lui reprochons d’être trop exclusif et d’envelopper dans la même réprobation ceux qui nient le magnétisme et ceux qui se bornent ne pas admettre le fluide. « Si, dit-il, on repousse la doctrine du fluidisme, c’est-à-dire son existence etsacommunicabilité,je dis que lesconsultationssomnambu-liques ne sont qu’un acte frauduleux de la part de tons ceux qui les donnent, et qu'une niaiserie stupide de la part de ceux qui lesprennentet les paient. « Cet arrêt est évidemment irréfléchi. Si celui qui s’adresse à un somnambule s’assure par lui-même de sa lucidité et obtient de lui les renseignements dont il avait besoin et qu’il lui aurait été impossible de se procurer par les moyens ordinaires, il paiera de grand cœur la juste rémunération de sa consultation , et le somnambule recevra ce prix en toute sûreté de conscience, il n’y aura ni fripon, ni dupe ; et l’on devra décider ainsi, quelque opinion qu'on puisse avoir sur l'explication de la lucidité. Qu’importe, dans ce cas, que le fluide existe, pourvu que la lucidité soit réelle? Pourquoi subordonne)' la réalité du fait à la vérité de l’hypothèse par laquelle 011 cherche à l’expliquer.

L'argument de M. Bauche est d’autant plus défectueux que si le fluide peut être commode pour expliquer l’action magnétique, il ne sert à rien pour rendre compte de la clairvoyance : bien des lucides parviennent à voir et à décrire exactement des objets fort éloignés, sans avoir besoin de toucher un corps qui en provienne, sans qu’on puisse par conséquent alléguer aucune communication de fluide ; sans doute , ce phénomène est étonnant, prodigieux et même incroyable pour ceux qui n’en ont pas été témoins; mais les fluides ne servent en rien ;ï l’expliquer, et il est plus sage de les réserver pour les cas où ils peuvent rendre compte des faits.

A. S. Morin.

AVIS.

Nous rappelons ,'t lous nos abonnes, à tous ceux qui sioceupent Je magnétisme, à ceux qui eu ont reru quelque bien, A lous ceux enfin qui voient dans le magnétisme une rénovation des sciences, un progrès de l'humanité vers le bien, nous rappelons que le 2r, mai. jour de la naissunce de Mesmer, nous félons, dans un banquet fraternel, l'anniversaire de cet homme illustre, de ce génie bienfaisant qui jeta sur la terre une nouvelle semence.

Puisse noire appel être entendu, afin que cette solennité soit digne et forte par le nombre, afin qu'il en sorte quelques-unes de ce» aspirations qui .donnent un élan nouveau à la vérité et couronnent les efforts faits dans le passé I Le banquet aura lieu, comme de coutume, dans les vastes salons de Lemar-delay ; la souscription est la même, 10 francs.

La liste de souscription est ouverte au bureau du journal, où on peut s'inscrire dés à présent, de 10 à 5 heures du soir.

Baron or Potbt.

Baron bd POTET, propriétaire-gérant.

ANNIVERSAIRE DE LA NAISSANCE DE MESMER

a:« liai 1858.

Cette dernière fête se distingue de ses aînées par une réunion plus nombreuse d’hommes éclairés et vrais amis du magnétisme: là, était le jury, sinon tout entier, du moins représenté par ses chefs. La science vraie et l’intelligence, dans tout ce qui a rapport aux fait nouveaux, se trouvaient réunies. Cette soirée laissera une trace ineffaçable dans le monde magnétique, et nos annales auront à enregistrer le travail de plusieurs éminents collègues. Les personnes qui ont pris part à cette fête toute d’harmonie, car l’entente cordiale existait entre tous, ont pu voir quel progrès le magnétisme avait fait et que son triomphe était prochain.

Nous allons, sans autre préambule, donner dans ce numéro les discours prononcés et quelques pièces importantes lues à la fin du banquet; puis, les décisions du jury; et nous remettrons la publication des autres documents au numéro qui suivra.

Nous commençons par le discours de M. le baron du Potet, qui, comme président du banquet, a ouvert la série des tostes.

DISCOURS DE M. LE BARON DU POTET.

Mesdames et Messieurs,

Dans ce moment en cent lieux différents, des hommes honorables sont réunis pour fêter en commun l’anniversaire de la naissance de Mesmer. Les mêmes désirs, les mêmes sentiments les assemblent, et leurs inspirations sont les nôtres; mais, disons-le sans orgueil, ce banquet, celui du jury magnétique, est le banquet initiateur. C'est lui qui institua cette Tome Xv I. — N" Si. — S» Série. — 25 Mai 1838. 9

fête de la reconnaissance et qui alluma dans les âmes cet amour sacré de la vérité qui ne doit plus s’éteindre.

Croyez-le Lien, chers et dignes collègues, le monde magnétique attend de nous, non des paroles stériles et de frivoles discours, mais les pensées-mères qui doivent agrandir et compléter les œuvras de nos maîtres. Le magnétisme est loin encore d’être défini; il est une force mystérieuse qui échappe à nos sens, ou ne se laisse saisir que par l’ensemble de phénomènes singuliers dont il détermine l’éclosion ; phénomènes qui font jaillir, dans l’esprit de chaque homme, des explications diverses d'une cause unique pourtant.

C’est ainsi que vous voyez, assis à ce banquet des spiritualistes tellement avancés que leur intelligence, dépassant la limite du fini, va chercher, jusqu’au séjour de ceux qui ne sont plus, une explication que notre raison est impuissante à trouver ; près d’eux , des collègues rétardataires, qui ne voient dans le magnétisme qu’un fait naturel, ordinaire, et qui peut s’expliquer par les lois communes ; d’autres magné-tistes, enfin, sans récuser la science, pensent que la foie t le dévouement suffisent pour obtenir de la nature les plus grands bienfaits et les plus sublimes manifestations.

Ces divergences n’empêchent point le bien de se faire, elles indiquent seulement que le Créateur de ce monde a si bien caché ses divins outils qu’il est presque impossible à l'esprit le plus subtil de les découvrir. Mais, que nous importe? — Les savants ne sont, sous ce rapport, pas plus-avancés que nous : savent-ils ce qu’est l’électricité, le galvanisme , le calorique, la lumière ? — Non , ils utilisent ces agents précieux et nous font connaître seulement les lois en vertu desquelles ils agissent, leurs principaux attributs.

Peut-être même n’en saurons-nous jamais plus sur les causes premières; l’harmonie pourrait bien être dans les contrastes , et l’homme serait contraint d’admirer sans jamais comprendre.

Mais ces recherches diverses ennoblissent son esprit, elles le rendent supérieur à l’animalité : les erreurs elles-mêmes peuvent servir à éclairer ses pas ; elles offrent des points de

comparaison et rendent ainsi plus brillante la lumière de la vérité.

A celui-ci donc les idées spéculatives, les théories et les systèmes; à cet autre, une mission plus modeste, l'application de l’agent nouveau au traitement des infirmités humaines; à chacun son lot. Sur cette terre tout a son utilité.

Repoussés par les savants, nous sommes accueillis par tous les hommes de sens et de raison. En faut-il davantage? (.'est à nous de faire et d’établir notre propre science et de montrer que celle-ci est féconde en bienfaits.

L’étude est donc nécessaire ; elle nous fera trouver les règles d’une application toujours rationnelle, et rien ne sera plus livré au hasard.

Qui de vous, chers condisciples, n’a pas senti en lui ce feu divin dont Mesmer nous a révélé l’existence ? Et la pensée exaltée par ce sentiment nouveau , qui de vous n'a entrevu à l’instant la possibilité de produire des phénomènes approchant des miracles? Pour moi, ce fut un de ces éclairs qui décida de toute ma vie; aujourd’hui même, je ne puis rester froid en présence d’une œuvre de mes mains.

La science officielle n’offre rien de comparable; ses disciples sont bientôt fatigués; nous, au contraire, nous nous sentons vivre; il semble que l’exaltation de nos forces vives soit entrée dans les vues de la Providence.

Mais je laisse ii de plus capables le soin de pénétrer ces mystères et de vous les exposer ; pour moi, je vais simplement vous présenter un résumé de l’état présent du magnétisme.

Plus que jamais, les magnétistes ont droit de se féliciter, l’avenir leur appartient, car la vérité est avec eux, et chaque jour nous rapproche du temps où elle ne sera plus contestée. Mieux qu’un autre, je puis peut-être vous donner l’assurance d'un prochain triomphe. N'ai-je pas suivi pas à pas ce chemin de difficile accès, défendu par nos ennemis? ne les ai-je pas vus en face à chaque instant, et reculer à chacun des pas que nous faisions en avant ? Maintenant ils sont acculés près de leur dernière forteresse; ils en défendent, il

est vrai, l’entrée; mais, honteux de cette lutte sans gloire es voyant leur chute prochaine, ils cherchent les moyens d’éloi-gner cet instant, ils appellent le pouvoir à leur secours, demandent de nouvelles lois contre nous; mais, malheur au pouvoir qui interviendrait dans de mauvaises causes, car c'est toujours une faute, quelquefois même un crime!... Il faut espérer que la sagesse de celui qui nous gouverne ne protégera point les industries malsaines ([lie nous attaquons.

Cet anniversaire a pour nous tous quelque chose de solennel et de religieux; n’est-ce point une religion que la vérité? A celle- ci seule est permis de relier tous ceux qui s’en pénètrent.

Chers collègues, je n’ai donc que de bonnes nouvelles à vous annoncer ; car, nous pygmées, nous avons enchaîné des géants ; tons ces grands savants qui voulaient nous pourfendre , nous les avons réduits à l’impuissance ; les quelques voix criardes qui s’élèvent encore viennent d’embryons d’hommes et ne méritent point que nous nous arrêtions pour leur répondre. L’ennemi sérieux n’est point là; il est où on reconnaît les faits de nos mains, ces œuvres magnifiques, pour en altérer le vrai caractère et détruire ainsi par de fausses interprétations l’existence et la grandeur de la vérité.

Chers collègues, notre joie serait plus grande encore si quelques-uns des nôtres n’avaient point disparu de ce monde ; le prince de la Moskowa, l’abbé Almignana, ce bon Gathv... d’autres encore ne sont plus ; mais les plus fiers de nos ennemis, Gerdy, Magendie, Burdin, ces trois Horaces, et quelques autres moins célèbres, sont allés au séjour de toute lumière, chercher celle qui leur manqua et qu’ils pouvaient trouver dans ce bas-monde.

La vérité magnétique a suivi dans sa progression la marche de toutes les autres découvertes, car ce n’est qu’à coup d’hommes et à coup de générations qu’une science se fonde. La nôtre a commencé par l’initiation de quelques-uns par Mesmer, puis la propagande de ces premiers disciples amenant la diffusion de cette nouvelle lumière, la croyance générale se fonda; il ne reste plus maintenant qu’à réglemen-

icr l'exercice public de l'art nouveau, car le magnétisme, comme toute force physique ou tout agent moral, présente non pas seulement un instrument de bien, mais il peut servir les mauvaises passions et donner lieu à, des abus. Que Dieu nous garde pourtant, chers collègues, d’une tutelle injuste ou de gens intéressés à ce que la vérité ne soit pas!

Pour faire triompher le magnétisme, on a dû le jeter en dehors des académies et des écoles qui ne voulaient point en entendre parler : on a dû le démocratiser. Il perdait ainsi de son caractère primitif, car il fut toujours dans l’antiquité le patrimoine exclusif des chefs d’empires et du sacerdoce qui avaient bien leurs raisons pour empêcher qu’il ne tombùtja-mais dans les mains du peuple. Ici est le crime impardonnable des savants modernes; leur obstination malheureuse a tout perdu : la vérité la plus belle, la plus grande, je dirai même la plus chaste est sortie du sanctuaire sacré, maintenant elle court les rues comme une prostituée, et le premier paillasse venu la place en évidence sur ses honteux tréteaux. Nous avons même perdu les traditions de Mesmer, des Puy-ségur et des Deleuze, qui voulaient au moins de l’instruction et de l’honnêteté dans la pratique. Aujourd’hui on ne choisit plus les hommes, on ne leur demande plus qui ils sont, on leur dit : Prenez tous ce pouvoir que la science officielle dédaigne, faites-en l'instrument ctu bien ou du mal, ceci ne nous regarde point, et c’est ainsi que nous vîmes naguère une société magnétique, dont les travaux avaient toujours été pacifiques, présenter l’image d’un club de bas-étage, déshonorer la vérité et se montrer indigne de posséder ces divins secrets. Sans doute , les mauvaises passions de quelques hommes, turbuleuts et mal élevés, furent combattues ; mais il fallut pour les vaincre entièrement recourir au pouvoir, la raison ne pouvant plus rien.

Vous le voyez, chers collègues, des teintes sombres viennent obscurcir la lumière répandue sur le monde magnétique, et altérer nos joies; non pas que nous croyions que tout soit perdu, c’est un cri d’alarme seulement que nous poussons, car nous savons que quelque chose de providentiel veille sur

l’humanité, et qu’à un mal passager succède toujours une somme de bien. Que vos esprits se rassurent donc et voient au-delà de notre temps le magnétisme honorant la science et la science lui rendant hommage, le regardant comme la clef de voûte de son édifice, et le plus grand des bienfaits que Dieu ait accordés à sa créature.

Chers collègues, je devrais vous instruire de la révolution profonde que le principe nouveau a opéré en Amérique... Là, nulle contrainte, l’homme est libre, et nul ne peut s’opposer à l’émission d’une idée ou à la production d’un fait. La vérité comme l’erreur circulent d’un bout à l’autre de ce vaste continent : les vieilles erreurs sont défendues, ont leurs champions; les phénomènes nouveaux ont de puissants organes pour se faire valoir, et les hommes les plus considérables sont à la tète de ce mouvement. Tous nous jugent en arrière du progrès, sans tenir compte des temps où nous vivons et des difficultés que chaque jour nous avons à vaincre.

Pour moi, chers collègues, mon œuvre dernière s’accomplira bientôt ; comme vous, j’aurai voulu le triomphe de la vérité sur l’erreur; comme vous, j’aurai voulu le bien. Je laisserai la vérité assez établie dans le cœur de l’homme, pour être à tout jamais impérissable ; et s’il ne m’a été donné qu'une intelligence Irop faible pour accomplir une œuvre qui exigeait la force du génie, du moins vous me rendrez ce témoignage qu’ouvrier laborieux je n’ai quitté le travail qu’à la fin de ma journée.

Gloire donc aux hommes qui nous enseignèrent le dévouement à la vérité comme la première des vertus. Gloire donc à Mesmer, ce génie immortel, pour avoir dirigé nos regards au-delà de ce qui est périssable, en nous révélant ce pouvoir divin qu’on appelle Magnétisme.

Je porte un toste à la mémoire de cet homme de bien, — A MESMER.

Ce toste fut chaleureusement applaudi. M. du Potet invita aussitôt M. Morin a prendre la parole, et cet écrivain distingué prononça le discours suivant :

AUX FOUS !

Quand nous cherchons à propager les bienfaits du magnétisme et qu une discussion s’engage avec quelques-uns de ces incrédules qui, ayant décidé d’avance dans leur sagesse que les faits étaient impossibles, se croient par là dispensés d examiner et de discuter, nous ne gagnons le plus souvent à cette tentative de conversion,que d’être traités de fous, de visionnaires. Si la politesse empêche nos interlocuteurs de nous exprimer tout crûment ce jugement peu flatteur, leur sourire dédaigneux manifeste assez leur pensée, et quand ils s adressent au public pour qualifier d’une manière générale les adeptes du magnétisme, on ne nous ménage pas, nous sommes des cerveaux fêlés, une bonne police devrait nous mettre aux Petites-Maisons et nous administrer des douches... Beaucoup d’entre nous ont quelque peine à se faire à ces aménités , et animés d’une sainte colère, veulent se poser en champions de la vérité et combattre à outrance ceux qui s’obstinent à la méconnaître. Vains efforts ! peut-on discuter des injures, réfuter des quolibets ? Non, le plus sage est d’en rire. Nous sommes des fous, soit; on nous en a assez souvent décerné le brevet; consolons-nous en songeant qu’on nous met en bonne et joyeuse compagnie. Tous ceux qui ont apporté au monde des vérités nouvelles, qui ont attaqué de front les vieilles erreurs, n’ont-ils pas été conspués, bafoués traités de maniaques? Pourquoi échapperions-nous à cette loi commune qui impose aux novateurs le martyre du ridicule? Le Rédempteur qui fit entendre la bonne nouvelle de la fraternité universelle, qui osa démasquer la vaine science de la synagogue (c’est-à-dire l’académie d’alors ) , qui flagella l’avidité et le pédantisme des docteurs, comment fut-il accueilli ? Les récits sacrés nous apprennent que ses parents eux-mêmes voulurent le faire enfermer comme fou, préparant ainsi la voie à ceux qui se flattaient d’étouffer dans le sang du novateur des théories inconciliables avec l’orthodoxie régnante. Quand Galilée, sapant par la base l’ancienne cosmogonie, vint annoncer le mouvement de la terre, un

immense cri d'indignation s’éleva contre co téméraire qui d'une main sacrilège touchait aux dogmes établis ; on lo déclara fou à lier, et, par pitié pour son grand âge, on voulut bien se contenter de le condamner à l’amende honorable et à la détention perpétuelle ès-prisons du Saint- Office. Harvey qui découvrit la circulation du sang et ruina d’un coup l'antique physiologie, fut jugé fou par tout ce qui portait robe, rabat et perruque. L’émétique, l’antimoine. la vaccine fuient longtemps considérés, dans le monde officiel, comme de folles utopies et ue conquirent le droit de cité qu’après qu’un laps de temps suffisant eut lavé ces découvertes de la tache d’innovation. Il n’y a pas encore bien longtemps que les académies traitaient de fous ceux qui croyaient aux aérolithes et prouvaient mathématiquement qu’une pierre ne peut tomber du ciel. Celui qui le premier trouva le parti qu’on pouvait tirer de la vapeur et indiqua la puissance colossale qui devait changer la face du monde, lut récompensé de sa découverte par le dédain et les persécutions, et mourut dans une maison d’aliénés. Celui qui imagina d'appliquer cet admirable moteur à la navigation 11e fut guère plus heureux; méconnu, raillé, il ne put vaincre l’incrédulité des académies qui pour toute réponse lui jetaient outrageusement le mot impossible.

L’homme de génie dont nous fêtons aujourd’hui l’anniversaire ne devait pas s’attendre à un meilleur sort. Quand Mesmer vint annoncer que l’homme peut, par sa volonté, influer sur son semblable, déterminer chez lui des modifications considérables et faire servir cette puissance au traitement des maladies les plus rebelles, que de railleries n’excita pas une nouveauté aussi étrange! Quoi, on pourrait ainsi se passer de médecin, et par de simples gestes faits devant un malade on lui rendrait la santé ! un ignorant, fort de son dévouement et de sa charité, pourrait, par des procédés d'uue simplicité extrême, faire passer son excès de vitalité dans un organisme affaibli et dissiper des maux qui auraient résisté aux efforts de toute la Faculté coalisée! Allons donc, rêveries, utopies, folies ! Cela ne mérite pas même l'exa-

nien des hommes sérieux qui par dix aus d’études ont conquis avec leur parchemin le privilège de médicamenter, de purger, de saigner, et même de tuer secundum artem.

Et ce n’est pas encore assez : voici qu'un autre fou, digue élève du fou Mesmer, prétend que des gens endormis voient plus clair les yeux fermés que tous les docteurs aidés de leurs meilleures lunettes ; que ces voyants découvrent parfois les choses cachées ou éloignées, lisent la pensée non exprimée; que leur vue pénètre même à distance dans l'intérieur du corps humain, en distingue les lésions el indique les remèdes. Et ce qu’il y a de pire, c’est que, grâce à ces remèdes de charlatans et de commères, les malades ont l’impudence de guérir, au mépris de toutes les règles et de tous les privilèges. Voilà pour le coup une folie des mieux caractéi'isée. La raison a beau s’exténuer à prouver que tout cela est im-possible, qu’il n’y a de salut que par la médecine hippocra-lique : les malades, indûment guéris par les lucides, viennent gambader à la barbe des professeurs et rire effrontément de leurs anathèmes. Aussi sont-ils , pour l’honneur des principes, jugés non moins fous que leur maître Puysé-gur, ainsi que tous ceux qui s’obstinent à croire à toutes ces merveilles incroyables.

Si donc nos maîtres sont des archi-fous, il est clair que nous devons partager leur démence. Nous avons, il est vrai, la satisfaction de nous trouver passablement nombreux et de compter dans nos rangs des esprits distingués, des caractères élevés ; nous y voyons des gens qui ne manquent ni d’intelligence, ni de savoir, ni de dévouement. Mais nous n’en sommes pas moins classés authentiquement parmi les fous,à commencer par notre cher président; et certainement on nous fera tous enfermer... dès qu’on aura trouvé un asile assez vaste pour contenir tous les adeptes atteints de la folie mesmérienne, ce qui nous permet de respirer à l’aise encore un certain temps.

En attendant, mes chers frères en folie, trinquons joyeu-sementàcelui dont nous suivons les leçons, et souvenons-nous que le grand poëte national, que Béranger a chanté les fous,

nous a montré parmi eux les bienfaiteurs du genre humain, accusés d’abord de folie, puis, un siècle plus tard, glorifiés, déifiés. Que l’hommage de sa muse nous dédommage des sarcasmes des hommes raisonnables qui ont juré de nous guérir ou de nous extirper. Vous me faites l’efict d’être tous incurables, et je plains le descendant de Diafoirus, qui, armé de toutes pièces, est entré tout récemment en lice, décidé à user, pour vous rendre la raison, de tous les moyens que la Faculté met à sa disposition, et n’aspire à. rien moins qu’à purger le corps social. 11 y perdra son temps et ses drogues. Nous avons tous la folie de faire un peu de bien, sans nous inquiéter si le moyen est approuvé par la raison : nous n’échangerons pas la folie qui sauve contre la raison qui désespère.

M. Morin reçut de l’assemblée des félicitations et des marques unanimes de sympathie.

Le calme rétabli, la parole fut accordée à. M. Petit d’Or-moy, et ce logicien du magnétisme porta un toste qui était certainement dans le vœu de chacun.

/

A l’union DE LA SCIENCE ET DU MAGNÉTISME !

Le vœu que je viens énoncer devant vous à notre réunion solennelle parait bien appartenir à un esprit positif. Mais les genspositifs ne sont pas, moins que les autres, sujets à se faire illusion.

A peine le magnétisme avait fait son apparition , que les disciples de Mesmer, rêvant l’union que nous appelons de nos souhaits, vinrent, confiantset naïfs, heurter à la porte des académies. Nous savons- tous quelle fut la suite de leur démarche , quels furent les résultats de tous les efforts analogues.

Venons-nous ici vous proposer de recommencer sur nouveaux frais des tentatives aussi infructueuses ? — Ne le croyez pas. Les corps scientifiques, qu’il ne faut pas confondre avec la science elle-même, gardiens et conservateurs des sciences faites, sont en môme temps d’admirables instruments pour aider à les perfectionner. Mais par la nature même

de leur institution, toute découverte leurestsuspecte. Habitués aux sciences parfaitement constituées, où l’erreur et la vérité sont nettement distinctes, ils ont une répugnance instinctive pour toute vérité nouvelle ; car il est écrit : « Ne mettez point le vin jeune et généreux dans de vieilles outres; il les ferait éclater. »

C’est qu’aucune science humaine ne peut apparaître entière et d’une pièce. Ce n’est que du cerveau de Jupiter que sort une Minerve tout armée.

A toute vérité qui surgit se mêlent quelques incertitudes, quelques hypothèses douteuses qui ne peuvent, qui ne doivent pas trouver grâce devant les savants de profession. Il faut donc, de toute nécessité, qu’une science nouvelle se constitue par elle-même avant de conquérir son droit de bourgeoisie.

Si le magnétisme avait eu seulement un but théorique et scientifique, son travail se fût fait sans bruit et serait accompli maintenant. Les groupes magnétiques, opérant en silence, eussent classé les faits, vanné les erreurs, criblé les doutes, trié les vérités , discuté les expériences et les théories.

Mais le magnétisme avait en outre un but pratique, utile, immédiatement applicable. La propagande, qui devait introduire l’usage du magnétisme dans les familles, était donc urgente.

Repoussée d’en haut, l’idée de Mesmer s’est adressée aux masses, et les masses, frappées de l’évidence des faits, ont accepté le principe nouveau. L’œuvre de la propagande populaire est maintenant un fait accompli, et, de ce côté du moins, nos efforts et notre dévouement n’ont pas été stériles.

Il reste un grand pas encore à faire, c’est de constituer le magnétisme comme science positive. D’ailleurs, les circonstances sont changées. Depuis quelques aimées, un rameau du magnétisme a pris un accroissement considérable. Il tend de plus en plus à jeter autour de lui des racines, à vivre de sa vie propre.

Enfant sinon ingrat, du moins peu respectueux du magnétisme, le spiritualisme, enfant terrible aux yeux d’un grand

nombre de gens trop timorés, représente surtout le développement du magnétisme au point de vue du sentiment, comme le mesmérisme proprement dit en représente le développement au point de vue positif et rationnel.

Ces deux aspects, légitimes tons deux, qui restaient mélangés à l’état confus, tendent de plus en plus à se distinguer. De là une division plus apparente que réelle.

Mais le développement du spiritualisme effraye les esprits prudents. Ou craint l’effet de ses prédications enthousiastes sur les masses peu éclairées, et la défiance dont il est l’objet a rejailli sur le magnétisme tout entier.

Les séances d’expérimentation publique, — l’instrument le plus actif de la propagande magnétique, l’occasion la plus facile, le moyen le plus précieux de recherches, les grandes séances de démonstration pratique sont prohibées...

Le magnétisme doit donc entrer dans une nouvelle phase. 11 lui faut se recueillir, se livrer à l’étude sérieuse et intime. Après la phase de naïve enfance ou il ne demandait qu’à se livrer de lui-même et sans conditions aux corps savants ; après la phase d’adolescence où il épandait sur les niasses l'enthousiasme de ses croyances et de ses convictions, il doit arriver à la phase de maturité , et se constituer comme science.

11 lui faut maintenant grouper el peser les faits qu’il a produits à pleines mains. A Ja multiplicité , à la confusion des expériences doivent succéder, la rigueur des discussions, la précision des méthodes, l’autorité du raisonnement.

Que les deux groupes des spiritualistes et des magnétiseurs suivent doue chacun sa voie !

Que ceux-ci s’emparent comme éléments — du sentiment, de l’imagination, de l’enthousiasme, — en évitant de s’égarer dans les nuages d’un mysticisme exagéré I

Que ceux-là, acceptant un rôle plus modeste, mais plus sûr, se contentent — du jugement, de la raison, de l’ordre méthodique, — sans échouer au terre-à-terre d’un matérialisme grossier !

A tous la foi ! Et qu’ils ne craignent point de se séparer en

marchant dans des voies si diverses. Le sentiment ci la raison sont tous infinis.

Au sentiment !

A la raison !

A la foi !

.A l’union de la science et du magnétisme !

M. Petit d’Ormoy, écouté avec une attention soutenue, fut \ ivement applaudi. Ce discours termina la première partie des tostes; celle consacrée entièrement au magnétisme; le spiritualisme, s’il a paru pour la première fois dans ce banquet, s’y est montré bannière déployée ; M. Clever de Mal-digny fut invité à prendre la parole et porta un toste au spiritualisme :

l'Je porte un toste au spiritualisme.

« Ce toste est un vœu pour le bonheur de tous. J’en appuyé « la pensée sur le sentiment et sur les notions de la science :i d’autrefois, que la science d’aujourd’hui, peut-être à son « insu, tend à sanctionner de nouveau.

«Je ne développerai point ici ces considérations; mais, « comme elles concernent spécialement le mesmérisme , je h m’empresse de les offrir, en manuscrit* à M. du Potet, pour « être insérées dans son journal. Puissent-elles jeter un pont « sur les deux rives du monde magnétique. »

Cédant aux exhortations de ses amis, l'auteur, séance tenante , lit son manuscrit. Nous le publierons dans le numéro prochain.

11. de Maldigny termine par ces mots :

« Heureusement, malgré l’espèce d’antagonisme des opinions,un même banquet nous réunit encore. Tant mieux!

« c’est de bonaugure. Quellesque soientdoncnos divergences, «je vous demande une place hospitalière pour des couplets «spiritualistes. Mon ami, M. de la Chesneraye, que vous « connaissez et dont le talent éveille partout de justes sympa-> thies, voudra bien me servir d’interprète, et nous accorder « aussi, je l’espère, quelque trésor de son répertoire.

« Au spiritualisme !

« A tous ses propagateurs éclairés I »

M. Clever de Maldigny fut acclamé, bien que tous les magnétistes ne fussent pas montés à son diapason, mais généralement on est disposé à louer, à encourager tout effort tendant à établir des principes que l'on croit vrais et qui portent l'homme à la recherche de vérités morales.

La parole fut accordée à un autre spiritualiste, M. Paul Auguez. Voici son toste :

Mesdames et Messieurs,

Je porte un toste à l’union ! à la concorde !

Il y a quelques années, une de nos célébrités du barreau, Nogent-Saint-Laurens disait :

«C’est par dessus le monde matériel qu’existe cette masse d’idées éternellement flottantes, dont les combinaisons et les modifications séculaires produisent les sciences, les lettres et les arts. Là, sont les sources vives de la politique, de la philosophie, de l’éloquence; là, est le passé avec son enseignement ; là, est l’avenir avec son progrès. Eh bien , c’est dans ce monde intellectuel, c’est là qu’il faut chercher la véritable gloire d’un homme ; car, avant de mourir, c’est

là que nos beaux génies ont blasonné leur immortalité......

La haute intelligence de celui que je viens de nommer nous est une garantie qu’il connaissait la portée et le sens profond de ces paroles... Combien en est-il cependant, qui, tous les jours tiennent un langage analogue et qui ne se doutent pas de ce qu’ils disent ! C’est une espèce de formule à laquelle ils sont poussés comme malgré eux, formule de la vérité qui plane partout et qui pourtant n’est pas évidente pour tous ! Cela ne doit pas nous étonner, car notre maître le prévoyait lorsqu’il disait à ses disciples, au moment de les quitter : « Voilà que je retourne vers Celui qui m’a envoyé , et le prince de ce monde, le prince des ténèbres va revenir... »

Hé bien! c’est à nous de vaincre de nouveau les ténèbres ! Par quelle puissance, par quel charme inconnu arriverons-nous à produire ce prodige ? Par l’union de toutes nos forces, parla concorde de toutes nos intelligences, par l’harmonieux ensemble de nos efforts régénérateurs !

Aucun magnétiste ne l’ignore; dans le trouble, dans la désunion, pas de phénomène transcendant possible.... 11 en est de même des grandes choses de la vie ; rien ne s’y fait qu'avec ensemble. Fille du ciel, l’harmonie en a conservé la clef. C’est en la perdant que l’homme a perdu la puissance qu'il tenait de son origine; c'est par l’harmonieuse entente des milliards de volontés qui divisent la grande famille humaine qu’il doit recouvrer ce don sublime, apanage du nouvel Adam !

Mais, dans tous les temps, des hommes se sont prévalus d’observer la loi plus exactement que Iss autres ; ces hommes, égarés par un zèle excessif et mal entendu, ont fait un tort grave la cause qu’ils s’imaginaient défendre. Chez le peuple juif ces farouches casuistes s'appelaient les Pharisiens; aujourd’hui on les nomme les intolérants. Ils sont la négation de toute lumière, de tout art, de toute industrie, de toute découverte ; ils condamnent tout développement matériel, toute initiative dans l’individu. Gardons-nous, Mesdames et Messieurs , gardons-nous d’imiter un si triste exemple ! Souve-nons-nous que 1’absolu contient tout, et, malgré l’incroyance générale aux phénomènes extraordinaires obtenus par des hommes d’honneur et de raison, ne nous targuons jamais de notre assurance pour les arguer de faux.

A l’union ! à la concorde I Paul Auguez.

Ce toste, qui exprimait les mêmes idées que celles de M. de Maldigny, idées tendant à élever l'homme dans des régions supérieures, où, nous devons le dire, le vague existe encore pour certains esprits, ce toste fut applaudi ; il termina tous les discours.

Le tour vint des chants et des pièces de vers. M"" Jobey de Ligny, lut avec beaucoup d’âme des vers de sa composition , que nous aimons à reproduire ici, bien que M. du Potet ait protesté contre les éloges qui lui étaient adressés par cette dame.

Il dit que, fort sensible à ces louanges, il préférerait pourtant qu'elles vinssent après sa mort; qu’alors seulement, si sa

vie avait été méritante, les louanges serviraient d’exemple aux hommes qui parcourraient le môme chemin et deviendraient ainsi un excitant toujours favorable.

ODE

SIS LANIVERSAIRE DE L* NAISSANCE DE MESMER, 23 MAI 1858, JOUR Dl la Pentecôte.

Par le ciel rassemblés pour cette double fête,

L'Esprit-Saint et Mesmer se trouvent réunis;

Tous nous sommes joyeux, l'amour et le poète,

Ce jour est à jamais un de nos jours bénis.

Présage heureux, une nouvelle aurore Va désormais éclairer l’univers;

Et ses rayons feront partout éclore La foi divine et l'esprit où se dore L'horizon triste assombri de revers!

C'est en ce jour que le sacré symbole,

Apparaissant aux élus du Seigneur,

Leur dit le sens de chaque parabole.

Puis, sur leur front imprimant l'auréole,

Vint leur ouvrir et les yeux et le cœur.

En leur disant : Allez de par le monde,

Ayant reçu ce don si précieux,

Prêchez du Christ la parole féconde;

Du feu divia sa flaniuæ vuus inonde,

Montrez à tous le royaume des cieux.

D'un pôle à l'autre, amour, paix, indulgence Et charité, car c'est la loi de Dieu.

Poor calmer l'âme, alléger sa souffrance Faites briller le flambeau d'espérance,

Que son rayon se projette en tout lieu.

Et le souffle divin, courant sur les nuages,

Eclaira les élus de sa langue de feu;

Ce phare lumineux de la nuit des orages Fit descendre la foi des voûtes du ciel bleu !

Ce fut pour consoler les hommes,

Nos voisins et ceux d’outre-iner Que Dieu, du haut de ses royaumes,

Fit naître uu jpur le grand Mesmer.

Aux calomniateurs en butte,

Vaillant athlète dans la lutte,

l’our devise il avait : Guérir!

Malgré les jaloux et l'envie,

Aux malades rendant la vie,

Comme son maître il fut martyr.

Disciples de Jésus, l’Esprit-Saint nous anime,

Nous avons effleuré tous le calice amer;

Mais nous suivons toujours la mission divine Qu'a laissée en partant chaque apôtre et Mesmer.

Du bandeau qui couvrait la terre Chaque jour arrache un lambeau;

Du feu de l’immense cratère Vient jaillir l'éclatant (lambeau ;

Son éblouissante lumière Du palais et de la chaumière Eclairera les habitants.

C'est ainsi que l'espèce humaine,

Qu'un flot entraîne et qu’il ramène,

Verra s'accomplir tous les temps.

Si vous saviez combien est douce Au cœur l'ardente charité,

Vous suivriez le vent qui pousse En soufflant amour et bonté.

Que la parole évangélique De la Trinité symbolique Vous inspire et vous fasse fort.

Si jamais votre main se lasse,

Aspirez la foi dans l’espace,

Elle vous montrera le port.

Dans le grand livre ouvert d'éternelle science Du monde vous verrez les flux et les reflux.

Heureux celui qui peut dire en sa conscience :

Un malade de moins, puis un croyant de plus!

Qu'importe le climat, l'Amérique ou l'Asie,

A l'àme qui s'en va, par le Seigneur choisie,

Guérir en imposant les mains? laissons rire la foule et sa pâle ignorance,

Marchons, marchons toujours, qu’importe la souffrance Et les ronces dans les chemins.

Poursuivons nos labeurs, quand le bien en résulte ; l'our nous, frères, amis, le devoir est un culte, Travaillait pour l'humanité;

Calmer uni: douleur et sécher une larme,

("est là notre triomphe et notre puissante arme Pour battre l’incrédulité.

On parle de magie et sorciers, l'anathème

Est bien lancé sur nous, mais ne nous atteint pas,

Les savants ont en vain bâti sur ce vieux thème,

Et dans l’antique ornière, ils marchent pas à pas.

Il faut leur pardonner, la rage les égare,

Nous, imitons le Christ, ressuscitons Lazare En invoquant le nom de Dieu.

Consolons et prions, le long de notre route Faisons germer l’espoir en arrachant le doute,

Ce lléau qui croit en tout lieu.

A Mesmer.

Toi, pour qui la nature a soulevé son voile,

Nous te suivons de loin, ô lumineuse étoile!

A toi salut et souvenir,

Mesmer, notre héros, et puisse ta grande ombre Passer quelques instants sur tes enfants sans nombre Et les guider dans l’avenir!

A II. du Potct.

Nous avons parmi nous, dans la grande famille,

Un fier représentant de Mesmer ici-bas;

Voyez-vous, à son front la langue de feu brille,

Au bien ainsi qu'au vrai toujours il tend les bras.

Séchez, séchez vos pleurs, famille désolée,

Il fait rendre à son corps la pauvre Ame envolée,

Ce grand maître de l'art divin.

Tout le bien qu'il a fait dont l’éclat l'environne Est le plus beau fleuron de sa riche couronne. L’imptora-t-on jamais en vain?

Qui sait combien il a pu faire de miracles,

Et du monde céleste entendu des oracles Dont le merveilleux l'enchantait?

11 est notre bannière et notre point de mire ;

Ce nom qu'au fond des cœurs on honore, on admire,

Ce nom puissant : c’est du Potet.

Par le ciel rassemblés pour cette double fête, L'Esprit-Saint et Mesmer se trouvent réunis,

Tous nous sommes joyeux, l'apôtre et le poëte,

Ce jour est à jamais un de nos jours bénis!

C. Jobeï de Ligny.

La parole fut accordée à M. liaïliaul, qui chanta les couplets suivants, nés de la situation des esprits du monde magnétique.

INVITATION A L'HARMONIE.

Air : Du Dieu des bonnes gens.

C’est au printemps, quand la belle nature Semble renaître aux doux baisers du ciel,

Que vint Mesmer, cette àme noble et pure Comme un parfum de l'esprit éternel.

Car le printemps est la saison bénie,

Où Dieu nous rend les amours et les tleurs.

Fils de Mesmer, qu'une sainte harmonie Régne seule en nos cœurs.

Dans l'harmonie et morale et physique,

Mesmer voyait le bonheur des humains ;

Et l’harmonie, attribut magnétique Avait un temple (I) élevé par ses mains.

Temple sacré, la noire calomnie Souffla sur toi ses poisons destructeurs !...

Fils de Mesmer, qu'une sainte harmonie Règne seule en nos cœurs.

Mais, toujours grand, Mesmer but son calice,

Et n'exhala ni fiel ni déplaisir;

A son exemple, écartons de la lice :

Aigreur, colcre, ardent ressouvenir.

La vérité, pour plaire à qui la nie,

Doit se montrer sous d’aimables couleurs.

Fils de Mesmer, qu'une sainte harmonie Règne seule en nos cœurs.

Que l'incroyant garde son scepticisme,

Triste foyer d'où n'émane aucun feu;

Que Loyola prêche un noir démonisme :

Croire à l'excès, c’est au moins croire un peu.

Si l'un médit, si l'autre excommunie,

Dans nos bienfaits cherchons nos défenseurs.

Fils de Mesmer, qu’une sainte harmonie Règne seule en nos cœurs.

Notre doctrine est féconde en nuances :

Sachons les fondre avec un soin jaloux ;

Car l’ennemi, guettant nos dissonnances,

Y puise une arme et la tourne vers nous.

(1) L* loge ou société de l'Ordre de Chr.rmonlt. I.c Journal du Magntliimt [tome 11, ac-1852) «publié la liste dc>430 membres de cette société.

mesmerism'', est l’œuvre d’un génie,

Et nul cncor n’en voit les profondeurs.

Fils de .Mesmer, qu'une sainte harmonie Règne seule en nos cœurs.

Qu’importe donc que Paul soit fluidiste,

Si la vertu conduit toujours sa main?

Ou que Warcel soit spiritualité,

Si du vrai seul il poursuit le chemin ?

Place pour tous dans la voie infinie !

.Ne proscrivons que les vils imposteurs.

Fils de Mesmer, qu'une sainte harmonie Itègne seule en nos cœurs.

Ne rions pas de ces rêveurs honnêtes Qui vont plus haut que ne veut la raison,

Les grands rêveurs sont parfois des prophètes,

Esprits d'élite en étroite prison.

Ah! s'ils sont fous, plaignons bien leur manie,

Mais respectons leurs sublimes erreurs.

Fils de Mesmer, qu'une sainte harmonie Règne seule en nos cœurs.

Serrons nos rangs! S'il survient un orage,

Nous serons forts pour détourner ses coups.

L'amour du bien, tel est notre héritage,

Le vaste champ que nous cultivons tous.

N’y laissons pas germer la zizanie,

Et la moisson doublera ses faveurs.

Fils de Mesmer, que la sainte harmonie Soit toujours dans nos cœurs.

Ces couplets furent vivement applaudis, on en loua l’à-propos et M. Baïhaut, par une triple salve d’applaudissements, dut apprendre que ses désirs étaient ceux de toute l’assemblée.

Parut alors M. le docteur Ordinaire, ce vieil athlète du magnétisme dont la voix forte et vibrante jeta au milieu de l’assemblée cette Nétnésis vengeresse, inspirée à notre savant collègue par tous les outrages dont furent abreuvés les magnétiseurs ; l’elfet en fut immense : on aimait à entendre cet homme qui a tant souffert, résumer en quelques strophes tous nos griefs et arrachant le masque des hypocrites qui nient encore aujourd’hui, et pour leur propre intérêt, tin fait

aussi évident que la lumière. Aussi, M. le docteur Ordinaire put .se féliciter de scs hardiesses, car ce fut un tonnerre d’applaudissements et de bravos dont il dut être fier; ils lui prouvaient que le temps des voix flùtées était passé et que la vérité comme la victoire devaient emboucher la trompette et sonner le triomphe.

Dans tout banquet il est d’usage De chanter 011 de discourir;

Je reconnais qu'il est plus sage,

Celui qui sait s'en abstenir.

Moi, qui n’admire la sagesse Que lorsqu’elle est chez mon voisin,

Je cède au désir qui me presse,

Et je me lève, verre en main.

Je veux, par charité chrétienne,

Boire à nos puissants ennemis ;

Assez longue en sera l’antienne,

Mais nos ilacons sont bien fournis.

On prétend que tout magnétiste A pour guide l’esprit malin ;

11 se peut fort bien qu’il assiste En secret à notre festin.

Comme le Christ, sur la montagne,

S'il s’avisait de nous tenter,

Et qu'il vint offrir du champagne.

Qui de nous saurait résister?

Puisqu'on nous a voués au diable,

Il doit nous traiter en amis,

Ne pas faire tourner la table Où nous trouvons le paradis.

Nous savons qu'il est une échelle,

Entre Dieu, le plus haut placé,

El le polype sans cervelle Qui tout au bas se voit casé,

Au milieu vient l'espcce humaine...

Aux savants ce rang ne va pas;

Tout médium par trop les gène,

Ils préfèrent rester en bas.

Magnétiseurs, sans répugnance,

Buvons à ces savants altiers Qui, par humilité, je pense,

Tiennent au rang des polypiers.

Ces sommités académiques,

Pour attaquer le grand Mesmer,

En longs discours soporifiques lisent leur prose, usent leurs vers.

Ils rappellent certaine faille,

Et de la lime et du serpent.

Us n'usent rien, c’est véritable,

Car ces vieillards n'ont plus de dents. Buvons à leur belles victoires,

Car de nous vaincre ils sont certains, Puisqu'ils possèdent des mâchoires, Dont Samson eût armé ses mains.

Flourens, professeur ridicule,

Quand il nous frappe de ses coups, Mériterait une cellule A certain hospice des fous.

A force d'observer la bête,

Ce savant, plein de son sujet,

Un beau jour a perdu la tète ;

Bète sur bète a fait effet.

Sautant du faux à l'hyperbole,

Il a conquis un haut emploi,

11 a pris place au Capitole,

Depuis qu’il a su faire loi.

Burdin, en Gascon qui veut rire, Défiant les plus clairvoyants,

A qui sans les yeux pourrait lire, Offrit un jour trois mille francs ;

Mais bientôt, refusant l'enquête,

Il craignit la lucidité ;

On eut sans yeux vu qu’en sa tète Se logeait la stupidité.

Bien loin de lui faire un reproche, Buvons tous à ses mille écus ;

Jamais il ne les eut en poche,

Nous en sommes bien convaincus.

Du magnétisme la puissance Sur les âmes se fait sentir,

Il excite la somnolence,

Et malgré soi vous fait dormir.

Du grand Viennet la poésie Possède un égal agrément,

Car toujours, à l’Académie,

Chacun s’endort en l'écoutant.

Buvons à sa musc badine, l’eu dangereuse, en vérité,

Oui tous les jours nous assassine,

Et nous laisse en bonne santé.

Paul d'Yvoi donne la chronique Du fameux Courrier île Paris,

.Mais il a peur qu'en sa boutique Pénétrent un jour les esprits.

En parcourant sa maigre prose,

On ne comprend pas scs frayeurs;

D'un peu d'esprit la moindre dose Plairait beaucoup à ses lecteurs.

Buvons à Paul que Dieu bénisse.

Quand nous voudrons suivre un sentier, Pour marcher comme une écrevisse, Nous userons de son Courrier.

Voici Mabru, place au sceptique Qui nous a fort peu ménagés.

11 prétend qu'en sa prose éthique Par nous-mémes sommes jugés (I), Tout magnétiste est sans croyance,

Le plus honnête est un jongleur.

11 était ivre, je le pense,

Lorsque Mabru se fit auteur. Réservons-lui force rasades,

On dit qu'il aime le clairet.

11 nous traite en lions malades,

Et prend le rôle du baudet.

Puisque je suis en train de boire A nos impuissants ennemis,

Je propose un toste à la gloire De tous les savants endormis.

Ils font moins bien que la marmotte,

Qui dort pour braver les climats.

Tout savant suit même marotte,

11 dort, mais ne s'éveille pas. Remplissons nos coupes amies,

A la santé de ces sauteurs,

Qui peuplent nos académies.

Endormis autant qu'endormeurs.

On dit qu’en la ville de Bruxelles,

Le magnétisme est pourchassé ;

Qu’il soit mile, qu'il soit femelle,

Tout somnambule est expulsé;

(1) Le livre de M. Mabru est intitulé la Magnétiseurs jugés par cux-mtmrs.

t)et obstacle à la propagande,

Messieurs, ne nous a pas surpris,

Objets et gens do contrebande,

Ont seuls accès dans ce pays.

Buvons à l'aveugle Belgique,

Qui nous réserve ses prisons;

Cette poursuite est très-logique,

Elle n'aime que les fripons.

Laissons de côté l’ironie !...

Nos vers, faiblement inspirés,

Contre la noire calomnie Lancent des traits mal acérés.

Bravons avec persévérance La fâcheuse incrédulité;

Nous avons pour nous la science,

L'avenir et la vérité.

Combattant l'erreur et le doute,

Acceptons le calice amer,

Et si nous succombons en route,

Soyons dignes du grand Mesmer.

Mesmer ! à ton nom je m’incline ! ! !

Tu fus un céleste inventeur,

Quand tu trouvas qu'en médecine,

L'agent le plus sûr, c’est le cœur.

« Aimez-vous, » a dit l'Evangile;

Mesmer a dit : « Soulagez-vous ;

A guérir chacun est habile.

Car ce pouvoir nous l'avons tous. »

Peur lui que chacun vide un verre;

Si Mesmer a fait tant de bruit,

C'est qu'il prouva que, sur la terre Si le corps meurt, l'âme survit.

A du Potet, l'apôtre digne Du grand maître que nous fêtons;

Il révèle un mérite insigne Dans ses écrits, dans ses leçons.

Au magnétisme, à la magie,

Aux secrets qu'il sut découvrir,

Chaque jour il nous initie,

Et chaque jour le voit grandir.

Sans être galant, mais logique,

Par un toste, nous (inirons :

Buvons au pouvoir si magique Des dames que nous admirons.

P.-C. Ordinaire, d.-m.

Après celte A rintsis, M. de la Chesneraye chanta les couplets composés par M. de Maldigny pour le banquet. Cette voix douce et sympathique d’un véritable artiste rendit et lit saisir par tous les cœurs les idées exprimées par M. de Maldigny. M. de la Chesneraye dut s’apercevoir de tout le plaisir qu’il avait causé, car l’assemblée entière !ui demanda avec prière de lui faire entendre un chant de sa composition. M. de la Chesneraye s’y prêta avec une grâce infinie, et nous donna une délicieuse romance. Ces chants ajoutèrent aux agréments de la fôte et terminèrent la série des compositions écrites pour le banquet. Mais beaucoup de magnétistes distingués avaient envoyé à M. le baron du Potet leurs tostcs, et M. Morin fut chargé d’ètre l’interprète des absents; il lut d’abord le toste de M. Siemeling que nous donnons en raccourci, faute d’espace ; et comme il restait à faire la distribution des médailles et la proclamation des mentions honorables, accordées par le jury magnétique, nous dûmes interrompre, à cause surtout de l’heure avancée, et charger le journal seul de faire connaître les pièces dont le temps ne permettait pas la lecture.

COUPLETS

A L’OCCASION DE LA FÊTE MESMÉItlENNE DU 23 MAI 18.Ï8.

Air du Chanvre (de M. de la Chesneraye).

Comme un essaim qui se rassemble Pour fonder la ruche de miel,

Cherchons, fertilisons ensemble Les dons du Ciel.

A l'homme, en lui complétant l'être,

Esprit partout disséminé,

Dieu dit : « Après moi, sois le maître ;

« Régnons tous deux, mon (ils ainë. »

Mais aux ténèbres de la terre Se laissa choir l’humanité.

Puis elle eut peur du saint mystère,

Encore aujourd'hui contesté.

Comme un essaim, etc.

Le front dans une nuit extrême,

Abîme de notre splendeur,

L’homme, tombé du rang suprême,.

Avait ruiné sa grandeur.

Combien, sous la hideuse épave,

Combien, à travers nos trépas,

Le naufragé fut-il esclave?

Scs pleurs 11e s'en souviennent pas.

Comme un essaim, etc.

Enfin, un rayon de lumière Ravive tant d’obscurités;

Dieu veut, dans leur gloire première,

Que sesenfants soient rachetés.

L'œuvre immense a déjà ses preuves ;

L'univers se sent tressaillir : l’Ius cruel fut le temps d’épreuves,

Plus noble est la palme à cueillir.

Comme un essaim, etc.

Mais point d’abus qui nous dérobe Le fait dans sa réalité ;

Trop de fous ont peuplé le globe :

Tout passe, hormis la vérité.

Vouloir!... telle est notre boussole.

A nous d'en observer la loi.

Nous avons l'espoir... qui console,

Et l’amour... qui donne la foi.

Comme un essaim, etc.

Le bonheur!... voilàl’Evangile Poursuivi par l’efTort humain :

Isolé, l’effort est fragile;

De concert, il fait son chemin.

Grandir sa force et son courage,

C’est grandir le fruit qui naîtra.

Marchons !... sans orgueil, sans outrage ;

La main de Dieu nous conduira.

Comme un essaim qui se rassemble,

Pour fonder la ruche de miel,

Cherchons, fertilisons ensemble Les dons du Ciel.

Dans toutes les parties du monde il existe des amis du magnétisme qui, aujourd’hui, s’unissent à nous pour célébrer la gloire de Mesmer. Un des plus zélés et des plus éclairés sectateurs du magnétisme, M. Sicmeling, d’Amsterdam, nous écrit pour confondre ses vœux avec les nôtres ; il nous dit que, retenu auprès de malades auxquels il prodigue sa force vivifiante, il regrette de ne pouvoir se rendre auprès de nous pour preudre part à cette fête de famille; mais qu’il y

ncra présent de cœur et d’intention. Il est heureux de nous annoncer que le magnétisme a fait dans le royaume de Hollande, d'immenses progrès. M. Siemeling y a puissamment contribué par sa pratique dévouée et persévérante, et par la publication qu’il vient de faire d'un ouvrage important sur cette matière. Il a été secondé par la bienveillance de personnages éminents; le roi et la reine, ainsi que le maire de la capitale ont souscrit à son livre, et donné par là une marque éclatante de leur sympathie pour le magnétisme. 11 signale aussi les louables et généreux efforts de M. Ticdemann. — Le bon grain a été répandu par d’actifs travailleurs, il ne manquera pas de fructifier.

M. Siemeling profite de cette solennité pour proposer de constituer en une société les magnétiseurs du monde entier, de manière à réunir en faisceau tous ceux qui concourent au progrès de la même cause. Cette idée, vous le savez, est celle qui a présidé à la formation du jury magnétique dont les membres sont tout disposés à accueillir tout ce qui pourra en développer les avantages.

M’associant au vœu de notre honorable correspondant, je propose de boire

A TOUS NOS AMIS ABSENTS, à tous ceux qui se dévouent comme nous à la propagation et à l'application de la grande découverte de Mesmer, aux magnétiseurs de tous les pays !

La série des tostes portés et des mémoires qui nous sont parvenus ne peuvent trouver leur place dans ce numéro ; nous en renvoyons la publication, et nous terminons aujourd'hui par un apologue d'un de nos amis, M. Jobard, qui à voulu, quoique absent, payer son tribut à notre fête.

On dirait que le chien comprend, devine ou flaire L'intention, l'esprit, le ca-ur, le caractère,

Caressant l'homme bon, poursuivant le brutal,

C'est un thermomètre moral,

Ln gardien matrimonial,

Qui s’éveille au moindre signal.

Je vais vous conter une histoire

Que ¡es chiens d'aujourd'hui n’auront pas peine à croire.

Un de ces animaux, petit, niais vigilant,

Aboyait don Bazile avec acharnement,

Et mordillait son froc de sa faible mâchoire;

Hazile souffrait tout, comiionctucusemcnt Selon la règle du couvent;

Mais, un jour, en l'asticotant,

Il attire Fidclc aux confins du village,

Et, s'adressant au premier paysan Qu’il aperçoit sur son passage,

Il lui dit : Prends garde, Gros-Jean,

Ce méchant roquet a la rage!

Ce mot lâché, le saint homme s’enfuit En se disant, la calomnie Aura bientôt porté son fruit.

En effet, le manant court à son écurie,

Revient la fourche en main Suivi de son gamin,

Appelle le voisin,

Qui s'arme d'un gourdin,

D’un parpin, d'un rondin,

D'une broche ou d'une mailloche,

Ainsi de proche en proche,

Et crie, haro ! sur le barbet,

Si bien que cette pauvre bête,

Perdant et la piste et la tète,

Parut enragé tout à fait.

Sur lui la canaille se rue Et, sans plus d'examen, le tue.

Que de gens ont perdu crédit,

Fortune, honneur, esprit,

D'un coup de calomnie!

Car sa puissance est infinie,

Beaumarchais avant nous l'a dit :

« En petit bruit rasant la terre,

« S’enfle, grandit, gronde comme un tonnerre,

« Et foudroyé un homme de bien « Tout aussi lestement qu’un chien. »

Ne dites pas je la méprise,

Car la calomnie est un fait,

Qu'elle soit bien ou mal assise,

On n’en peut éviter l'effet. Jobard.

Baron du POTET, propriétaire-gérant.

AVIS.

Au moment de mettre sous presse, nous recevons une heureuse nouvelle, nouvelle officielle : la Société du Mesmérisme, dissoute dernièrement, va pouvoir être reconstituée en faisant subir seulement quelques modifications à. son règlement. Cette société n’avait été que tolérée ; maintenant elle sera autorisée et pourra se produire en pleine lumière, ('.’est un bienfait que nous devons à une haute autorité; nos remercîments, comme ceux de tous les magnétlstes, lui sont acquis.

BANQUET MESMÉRIEN.

(Suit«.)

Dans notre dentier numéro, nous avons donné à nos lecteurs une grande partie des discours et des pièces de vers qui nous ont été remis, en élaguant toutefois tout ce qui n’avait pas une corrélation directe avec ce qui faisait l’objet de cette fête. Beaucoup cette année ont voulu payer leur tribut à Mesmer, et c’est avec une grande joie que nous avons constaté le progrès que le magnétisme fait chez les hommes intelligents. Bon nombre de nos amis, pourtant, manquaient ii cette fête ; le dimanche, la famille, la campagne ou la maladie nous avaient privé de leurs concoure habituel ; quelques-uns même se sont associés à une autre manifestation faite aussi sous les auspices du génie de Mesmer, nous voulons parler de la société philanthropico-magnétique, qui joint ses efforts aux nôtres pour répandre la connaissance du magnétisme. Malgré les absents, le banquet du jury magnétique avait quelque chose d’imposant et de grandiose ; l’intelligence, le savoir et l’idée s’y trouvaient réunis. On pouvait juger que ce groupe déjà considérable, était le point de départ, et, on pourrait le dire sans orgueil, le centre ou le foyer d’où émanait chaque année l’amour ardent de la vérité. Car le magnétisme ne doit pas être l’apanage d’un corps ex-Tome I. — jjo 33. — ¿«Série. — 10 Juin 1858. 10

clusif ou d’une caste; il est pour tous ceux qui rechercher.; la science : il est pour tous ceux qui souffrent, comme l’air,

le calorique, l’électricité, etc......; il est principe général,

force, et contient de plus en lui le germe des nouvelles destinées de l'humanité !

Beaucoup de magnétisles ne voient point comme nous, tout disposés qu’ils sont, à remettre leurs armes dans les mains de leurs ennemis, croyant (fue la lutte est finie ou près de finir. Hommes candides, ils ne voient point que la lutte ici doit être éternelle! C’est le principe du bien qui est en guerre avec le principe du mal, et celui-ci sans cesse renaissant doit toujours trouver devant lui son contraire ; l’humanité ne s’est jusqu’ici soutenue que par les efforts incessants d’hommes dévoués, dont Dieu fait des soldats pour soutenir la cause de l’ordre, de la vérité et de la justice.

Non, ceux-là ne sont point nuagnétistes, qui ne considèrent la découverte de Mesmer que comme un agent de guérison; à nos yeux, ils sontcomme des enfants qui jouent avec le feu sans connaître rien de l’élément qui excite leur curiosité. Mais si je ne touche ce sujet qu'en passant, c’est qu’il ¡,e faut pas seulement du temps et de la réflexion, il faut surtout considérer l’opportunité, qui rend toute vérité utile et féconde. Quand viendra le moment de dire ma pensée?.... Je sens qu’on ne doit pas encore soulever le voile qui couvre la science, bien peu cependant comprennent le vrai sens des phénomènes magnétiques.

Les personnes qui ont assisté au banquet étaient secouées, remuées, et l’avenir semblait se révéler, car l’esprit de chacun pressentait la grandeur des créations futures.

Voilà pourquoi nous avons écouté attentivement les spiritualistes et les avons applaudis ; voilà pourquoi les convives n'étaient point venus seulement prendre leur part d'un banquet magnifiquement servi, mais apporter, sans sollicitation, leur tribut de travail et concourir à cette solennité; voilà pourquoi il mérite la reconnaissance du monde magnétique.

Baron Du Pxtbt.

Voici le discours de M. Clever de Maldigny qui n'a pu trouver place dans notre dernier numéro :

SP1111TUAL1SME EN FRANCE.

« Semper in assiduo inotu res quæquc gcrunlur. • (l.cer.K.ce).

Tout se meut constamment dans ses attractions.

Les académies modernes ont dit: « Le magnétisme Im-« main n’existe pas; son prétendu titre ne signifie que la « fraude et l’illusion d’une... bûtise. » Le mot appartient désormais à l'histoire. Cependant le magnétisme humain a prouvé qu'il existe, et malgré la sentence, il gagne journellement du terrain, dans l’expérimentation au secret de la famille.

A leur tour, les magnétistes exclusifs, ceux-là précisément qui s’indignent sans trêve à l’endroit des académies, nous traitent, nous spiritualistcs, avec toute la bonne grâce... académicienne. Nous, hier encore, leurs condisciples; nous, toujours... et quand même! leurs confrères dévoués; nous qui, non moins que nos rivaux, sommes dominés par l'ardeur d’un probe scrupule. Et combien d’entre ces frètes-ennemis, comme les soldats de Pilate, jettent violemment l’injure et l’insulte au spiritualisme, au lieu de patienter et d’acquérir, par les efforts soutenus d’une calme bienveillance, les conditions qui mènent au développement de la vérité. Pourtant ils nous connaissent ; ils savent que, si nous sommes peu jaloux du facile abri de l’opinion, ce n’est point par un stérile enthousiasme, encore moins par oubli du respect que se doit la conscience honnête. Sous peine d’inconséquence, ils sont donc obligés d’induire que, nous aussi, nous avons nos preuves. Oui, des preuves positives!... Et je pourrais vous en fournir de nouvelles merveilles : des phénomènes inédits, tout récents, graves, et curieux parmi les plus curieux; dignes enfin d’une philosophie avancée, en même temps que circonspecte.

Une des principales causes de l’antagonisme des mesmé-nstes, c'est que, sans parler des mécomptes, le spiritualisme,

l’instar des choses mondaines, se traduit, dans sa rénovation présente, par des diversités mal appréciées, et par des apparences d’oppositions qui répondent à la foule des préjugés en vogue. C’est pourquoi, lorsque je m’aventure à le confesser devant vous, mes paroles, j’ai la précaution d'eu prévenir, n’articulent que le thème de mes réflexions actuelles, et n’incombent en aucune sorte à la loi des litiges concurrents.

Dans cette période, pour essayer île poser le pied quelque part, et ne serait-ce que dans la mesure d'un simple point de repère, je ne saurais trop répéter aux mesméristes qui veulent gravir le sommet de la question, ce que je me répète fréquemment à moi-inôme : Rappelons-nous la synthèse éso-térique de la vieille Egypte ! Quoi que l’on ait formulé depuis, elle renferme ,1e plus haut concept des théories accessibles notre entendement.

Tout est doué de vie à des degrés variés et dans des communautés réciproques, du plus au moins, et du moins au plus, par suite d’ascendances de modalités intermédiaires, incalculables, réliées les unes aux autres, et fécondes virtualités des indicibles synergies de condensations et d’expansions d une Essence unique. Essence parfaite, intelligente, toute-puissante, suprême créatrice infinie , nécessairement harmonique en ses productions et dans C ordre d'engendre-ments successifs de la fertilité de leurs fruits. Essence qui ’constitue la substance (sub-stanlia, ia base) el l’entité motrice des infinités de figurations et d’activités qu’Elle manifeste, soit dans la région de leur sublime harmonie primordiale , région invisible pour l’abaissement obscur de notre infime relativité ; soit dans les décadences précaires de leurs pro-générations ultérieures.

Cette Essence a tout créé du propre fonds de son Être absolu. Jamais Elle n’aliène son Principe éternel, qui se sauvegarde au trajet de toutes les migrations et successions de l'enfantement des types primitifs, tout en prêtant essor aux attributs personnels de ces enfantements, et dans les circonstances du milieu qu’ils habitent.

Pour cela, sans cosse elle agit au moyen de ses imperceptibles filières de cohésion et de dispersion; autrement dit, pour notre langage : à l'aide ininterrompue d'innombrables pôles magnétiques et dia-magnétiques, au sein desquels se meuvent les inénarrables phases des mondes.

(Vêtait là l’ultimatum de l’enseignement occulte du sacerdoce, alors qu’il avait l’initiation (Krata repua, les puissances conquises).

Par cette clef bien étudiée, bien maniée, il n’est pas de phénomènes dans les différents ordres naturels, des plus élémentaires aux plus transcendants, dont il ne rendît humainement compte aux justes exigences de la raison.

En effet, le mécanisme de l’univers déploie ur. système de forces inégales, fonctionnant par des équations harmoniques en.multiplicités inouïes, dans chacune des séries de la nature, depuis les entrailles du rocher où tant de myriades moléculaires sont à la chaîne des plus misérables étreintes, jusqu’aux organisations les plus composites et les plus riches en largesses de vivre. Sur ce magnifique dénombrement des manifestations et des relations de l’étre, l’homme tient le sceptre. Armé de son complet unitéisme, en entier exercice des organes afférents à ses nombreuses facultés, sciemment dirigées par leur prééminence exclusive, il réunit dans sa structure, largement soumise à l’arbitre de son vouloir, tous les rudiments, tous les agencements, tous les degrés des règnes sé-riaircs au-dessous de lui-même, auxquels il commande avec d’autant plus d’autorité, qu’il possède un plus habituel, plus rationnel et plus bienfaisant usage de cette prérogative. Et, cette admirable royauté de faveurs insignes, il l’étend parmi ses semblables, avec bonheur, avec assurance, aussi longtemps qu’il se maintient, dans l’harmonie vraie et dans les voies conservatrices providentielles.

Ne l’oublions pas, suivant l’induction que je viens de vous retracer, tous les corps de l’immensité de la création, partout vivants (1), à quelque classe, à quelque degré que vous les

(1) Au mois d'avril dernier, à Paris, j'accompagnais un conseiller à la Cour impériale il.' Poitiers ii la consultation somnambülique du docteur

preniez, contiennent, sous la densité de leur cohésion extérieure, la substance diffuse et perspirable de leur personnalité respective, essentiel type interne, force et matrice fluidiques de leurs qualités inhérentes.

D’après les témoignages de la lucidité chez les anciens, cette

fi.' S'". Le magistrat fut on ne peut pas plus content de la lucidité de la somnambule. A la lin delà séance, on nie demanda si j’avais quelque question à faire. Une seule observation, répondis-jo, et la voici :

Tandis que madame dictait ses prescriptions, j'ai dû comprendre à ses gestes, à la teneur, à l'intervalle de ses paroles, qu'elle nous racontait \in spectacle qui se passait aux yeux de la voyante. Ainsi, lorsqu'elle parlait de tel objet, elle ajoutait: On m'en montre une, deux, trois pincées ou poignées , etc. Lorsqu’elle désigna l’emploi do tel végétal, elle répéta successivement: en voilà cinq, puis cinq, puis cinq, etc. Les chose« et leur nombre semblaient des scènes en action, des images qui venaient et disparaissaient.

« — Oui, monsieur, c'est cola, dit-elle.

« — En ce cas, ces images vous étaient apportées par quoiqu'un, ou bien « elles arrivaient par le mobile do leur propre virtualité ?

« — Soudainement jo les vois. Elles se meuvent, elles sont intelli-« gentes; mais comment et par quoi ? je I ignore. »

Une nuire fois, clicz Mm* de P*" ,rue Dupliot, 12, jcfuslémoin dequelquo chose d'aussi frappant. La somnambule était M™* de C‘", femme d’un avocat à la Cour impériale de Paris. Assise au milieu du salon, cette dame avait à su gaucho les différentes personnes réunies; à ta droite, l'espace vide.

Durant sa crise, la lucide no satisfit à plusieurs de nos interrogations qu'après avoir conféré pendant quelque temps à haute voix, et souvent par de vives interpellations et de brusques interruptions, avec un être invisible, vers qui, tout à coup, elle se tournait, à sa droite , où nous n’apercevions rien.

J’appelai sur ce phénomène l'attention de M. Jules Maillard, banquier, rue Montmartre, 125, qui se trouvait, comme moi, parmi les spectateurs.

Quoique je m’abstienne maintenant, le plus que je le puis, d’asiislcr à ce genre d'expérience, où, pour l'instant, l'on ne pêche guère qu’en eau trouble, j'aurais & citor bien des faits semblables à ceux-là.

Jo termine par une remarque, dont l’impression no s'efface pas do ma mémoire; les lecteurs l'apprécieront: c’est que, ians volonté ni préméditation de qui que ce fût des membres de l'assemblée, j'ai vu, sous certaines impulsions mystérieuses, les somnambule» devenir horribles, et n’agir, n'articuler qu'avec le geste et le ton de l'impatience et do la colère. Sous

d’autres secrètes influences, charmantes et délicieuses, les sujets s'embel-tissant, leur leint revêt une fraîche blancheur, leur physionomie prend un cachet de perfection, leur langage exhale une touchante suavité.

substance diffuse, organisme modèle, précession (1) infinitésimale et de fluidités graduées, de sa source intime à sa liaison au revêtement de superficie que nous voyons et que nous tondions dans sa forme grossière (2), se subdivise elle-même d’une manière considérable, et dans des superpositions (3) telles, que des milliers de nuances de ses dédoublements extrêmes, on peut percevoir deux corporéités distinctes : l'une, espèce de nébuleuse, transition médiane, se rapprochant de l'écorce du dehors, est celle que, dans le règne hominal, nous appelons l'âme, anemos, vent, air; l’autre, d’une couche plus exquise, d’une ténuité plus subtile, est la perspiration immédiate du germe générateur.

Ce germe, au nec plus ultra de sa sublimation substantielle, s’élève finalement, chez toute individualité créée, à l’origine ontologique la plus inexprimable. C’est le souffle initial, c’est l’esprit, afflatus, spiritus, menas.

Impérissable, puisqu'il émane de l’essence éternelle, il procède vers un aflinement de plus en plus inappréciable à nos sens, au milieu de l’âme collective, et de l’espfit général des sphères où son état se transmue, jusqu’à l'intégrité de son retour à la perfection du premier type, dans les félicités régionales de l’absolu.

(1) C'est cotte précessiou impondérable, embryonat et rayonnement lumineux, que saisit la sensibilité dota voyance. Ils lui photographient les sentiers ensemencés de l'avenir, autan! quo des contingences inaperçues n'interrompent ou ne détruisent pas le cours de cette génése... en perspective (■). A part la lucidité plus expansive des contemplatifs bibliques, la vie alors étant plus uniforme, on pourrait en inférer, peut-être, que les événements se trouvaient plus aisés à prédire.

(2) Je préfère m'exposer au reproche do redondance, plutôt que de ne pas être assez explicite dans les détails importants de cette grande loi physiologique.

(3) Je crois utile de remémorer aux lecteurs du Journal du Magnétisme, ce passage déjà connu d’une leçon de M. Dumas, sur la statique chimique des êtres organisés : « Les plantos et les animaux dérivent de l'air, no « sont que de l’air condensé; ils viennent de l'air et y retournent. » Cette déclaration do l'itlustie professeur confirme pleinement l'assertion des savanls d’autrefois.

(*) C'est ta ¡raine des éventualités. Aboutira-t-elle, ou n’aboutira-t-elle pas?

Parcourez, si c’est possible, ces transmulalions progressives, ou retardataires, au domaine pneumatique des siècles inconnus, historiques ou fabuleux, et vous aurez, pour l'humanité, les anges et les démons de toutes les sectes religieuses.

Ainsi, par nos relations occultes, conscientes ou non conscientes, nous communions avec des forces similaires, hôtes visibles ou non de la piscine électro-magnétique (1) où nous sommes plongés tous, à notre rang, à notre zone ; et, métaphoriquement, selon les angles d’inclinaisons harmoniques ou désharmoniques de nos organes, vis-à-vis de ceux du moule normal ou divin, on peut dire que chacun porte en lui ses cieux et son enfer, ses dieux et ses diables.

Ces forces, dites invisibles, immatérielles, ne le sont que pat rapport à nous, communément. Elles résultent d’une fluidification continue de nos agrégats, soit avant, soit après la rupture terrestre de leur union avec nos corporéités animiques, à l’heure que l'on nomme la mort (2),; rupture non élucidée encore dans l’irrémission de ses causes, et dans le terme résolu de 9a durée ordinaire.

D'ailleurs, comme on sort d’en avoir la raison, ce terme ne tue pas l’entité spirituelle, indestructible. Conséquem-ment, les corporéités animiques, d’une trame moins cohésive, mais d’une organisation correspondante à celle de leur dépouille inhumée, vivent, dans leur nouvelle existence, au moyen de leurs échanges d’effluves, en communications sympathiques.

Ces explications une fois établies et reçues, on s’entend définitivement sur la signification des mots : esprit, matière, vie.

L'esprit, c’est le faîte quintessentiel de la substance. La matière, c’est la cohésion de plus en plus concrète des stratifications de l’inertie. La vie, c’est le mouvement : simple

(1) Voir les numéros 12,13, 14et 15 île la seconde série du Journaldu Magnétisme.

(S) En latin , mon, dérivé du verbe grec morfô, je divise. Etymologiquement, vous le voyez, la mort n'exprime pas l'anéantissement de l’étre. mais son départ de l'état d'iufime condensation.

comme la molécule, ou complexe comme les rouages et le jeu des appareils de la cosmogonie, il grandit avec la puissance d'expansibilité de l’impulsion; il diminue, au point même de sembler s’éteiinlre, dans la passivité. Son moteur, c’est l’étinr celle du foyer inextinguible. Immuable en principe, elle suit dans la nature les destinées du genre hominal; car, à titre de chef de ses patries, il se perpétue leur modificateur.

11 a pour ministre la volonté.

Mais connaissez-vous ce ministre? L’avez-vous analysé dans ses replis d’initiative, si profonds que, la plupart du temps, sur les talus de nos routes charnelles, nous ne nous doutons pas de sa façon d’agir? Et cette façon, si machinale en ses couvres, l’avez-vous si bien scrutée que vous puissiez vous la représenter comme la main d’un artisan à son métier? Non ! généralement on ne les connaît pas.

Je veux, en latin volo, dérive du verbe grec poléô, je tourne. D’oit provient aussi notre mot pôle.

D’après le sens littéral, vouloir, c’est tourner, c’est activer le fonctionnement des pôles. Or, puisque la vie s’entretient par les alternatives combinées de deux sortes de pôles en directions contraires: l'une envidante; l’autre, Umdnnte; il s’ensuit que, des racines les plus déliées et les plus enfouies de notre personne, en vertu des prépondérances dynamiques de nos entraînements de fondation acquise, uous enfournons (1) et nous détournons d’habitude, sans que la somme superficielle de notre jugement en soit suffisamment avertie. Voilà, songez-y bien, le mode occulte et le résultat des institutions publiques, régulièrement pratiquées et puissamment en vigueur ; car le moral, les mœurs, mos, mores, substantifs du verbe numere, mouvoir, — et plus démonstrativement indiqués par le mot grec tropos, tourneineut, — ne sont, en ultime analyse, que des tournures, jugées nécessaires au bonheur de tous. Ce sont des mobiles incessamment perfectibles par le progrès des temps (2).

0) Los ca lia listes eu ont fait leur mot envoûtement, involutio.

(i) Par cette connaissance de l'empire et de l'action des mœursj préju-aez, si les choses continuent telles que nous les voyons, ce que préparent, è

la géuêraüou prochaine, la fièvre de l'ugiotagc, les furours du tidgoce

Donc, mesméristes ¿mérites des plans inférieurs de l'édifice humain, vous qui niez (ncgare, nec-ac.kkk, ne pas agir (1)), de longue date, et presque malgré vous aujourd’hui, je le présume; hommes d'intelligence réfractaire à l’acceptation des phénomènes que vous n’avez pas vus, 11 accusez que vous-mêmes, s’ils s’abstiennent de satisfaire tout de suite voire curiosité. L’exubérance de votre incompatibilité cérébrale vous pousse intestinement à les refouler. 11 faut, de, guerre lasse, dompter e.es dispositions adverses, latentes hostilités dont l’énergie est d’autant plus tenace, qu’elle est plus despote, et plus coutumière du fait. Patience!.. et persévérance!..

Voilà ce que je ne cesse de répéter même aux spiritualistes, pour leur aplanir les montagnes de tant de merveilleuses choses, dont trop de gens sont loin de peser mûrement les applications rigoureuses (2).

Maintenant, je le demande aux scrutateurs sans prévention, est-il extraordinaire que certaines organisations obtiennent assez vite ce que les organisations opposées n’obtiendront que difficilement? Le néant constitue-t-il la semence de quelque chose? Non. Pour produire, il faut, enacle, la puissance

(negotium, nec oticm, fans repos {') ), el les catastrophes du luxe {luxus, excès, d'où vient luxure, qui littéralement, veuf dire excettivilé, n’importe sur quel puint s’exercent ses ravages).

(1) Douter, dubilare, duo-bitark,. aller en deux sens. Consultez, le plus que vous le pourrez, l’étymologie. Souvent elle est le catéchisme de la philosophie de l’antiquité.

(i) Des esprits m'onl donné, comme il suit, la

« Mathématique de l'iiarmoxie :

« L'homme, dans sa raison, doit-il jamais sc plaindre?

« L’univers a ses lois, que nul ne peut enfreindre, n La cause... en ta nature... engendre ses effets ;

« lit le mal, pour chacun, naît des maux qu’il a faits. »

C’est l’explicatif de ln maxime : A chacun selon ses œuvres.

Cette vérité, fondamentalement répandue, sera plus profitable, plus salutaire aux intérêts sociaux, quo les plus terribles articles de notre code cri minci.

(•) C'cjI p«r ce motif qno l'on défendait »uj prilrei 1« prioccupilion cle> a/fnim, »fin qu’iU cou»1.rvfssmi I» puis [pax, «nbMontif de paeio, je fins un accord), /r gage de «nlrn la placidité tic* ¿lém« nls ¿thériforimi et leur alliance avec dooi, ou leur trnn5ligor«' lion scirible aui perceptions de U> (trie.

et les instruments, lis lurent le privilège du premier homme, c’est-à-dire du proto-type de la race hominaie, dans son règne d’ÂDASt ou de I’Être Universel, ayant l'intégrante extension de toutes les parties de son organisme, et Y équilibre de leurs activités. Alors son uuitéisme, au conseil supérieur de ses hautes facultés tectrices, était vraiment le maître. Il agissait et se gouvernait dans le ressort divin, sur la terre divine, qui n’est certes pas et n’a jamais été celle que nous peuplons. Par corollaire, logique des phénomènes du magnétisme, elle doit s'offrir à notre conception comme une terre sublime, ou plutôt la substance ¡¡indique à l’état du premier milieu de la création. Cette terre touche la maison du Père, le ciel parfait, l’éther ineffable où s’épanche l’esprit de tous les types de l’échelle cosmogonique, régénérés à l’harmonie de leur émission radicale, et par conséquent sans offensivité.

Mais, dans le désarroi de nos déchéances, ihominalitê n’est plus qu’une mutilation, plus ou moins invalide, au niveau de notre descente dans le péché (pecus, troupeau), malheureux esclavage des conditions inférieures et diversement restrictives affectées à l’animalité.

Le conteste, envisagé de la sorte, peut-il, doit-il durer? Je ne le pense pas.

Délivrons-nous du fanatisme et de la superstition ! Ils ont ensanglanté chaque pas des gouffres de l’ignorance. Gardons-nous de l’intolérance et de l’exploitation (1) ! Elles ne conduisent qu’à l’abîme.

Instruisons-nous; soyons vrais; veuillons, faisons le bien, et persistons sans inquiétude. A son temps, toute désirable amélioration surviendra. Laissons, dédaignons les insulteurs ! Ce sont les impuissants, où qu’ils soient, quels qu’ils soient.

(1) En plein dix-neuvième siècle, n'cst-ce pas navrer le bon sens que de ressusciter les proscriptions.... sacrilégement appelées religieuses? On pémit du jugement rendu le 19 mai 1858, par la Cour royale de Stokolm, contre do pauvres femmes, coupables.... d'avoir embrassé le catholicisme.

Oue, dans tout pays, la foi , la conscience, maintenues au dogme de l'équité, puissent librement s'élever à Dieu par le sanctuaire qu'elles aiment, H que, désormais, la civilisation nous préserve des haioeset des dangers du prépondéranlismcclérical.

.Te ne prétends point louanger tout ce que l’on tire du spiritualisme, tant s’en faut. 11 est la mine infinie. Le pionnier, s’il y brise sa lampe, y court de grands risques. Mais, aux lumières immortelles, par le ; chemins de la solidarité, pourquoi, lorsque nous baignerons en masse dans les dignes sympathies de l'esprit sans fin, nos affections sincères n y recouvreraient-elles pas les objets de ses abstractions aimées?

Je suis de plus en plus convaincu de la providentialité de ce pouvoir (I). 11 se manifestera sans exception, et d autant mieux que nous nous débarrasserons davantage des langes de nos misères.

Sous la pluie d’or de l’idéal, paradisons l’âpre séjour de nos labeurs; illuminons, rendons heureux jusqu’il nos moindres entoure, et bientôt les étages de notre ciel, de leurs vallées à leurs cimes éblouissantes, ne respireront que la douce haleine de la réintégration de l’homme.

Animé de cette confiance et guidé par la justice, on ne recherche le suffrage, ni l’on ne se soucie du blâme, et, dans la réconfortation de l’étude, on s’en va, le cœur tranquille, vers l’instant où nous abordons tous l'autre face du problème.

« Je me récrée souvent à cette pensée, disait Socrate :

(1)0 ne les mesméristes exclusifs comparent leur langage envers le spiritualisme, et les attaques de M. Mabru contre le magnétisme humain. Avec du sang-froid, ils seront forcés de convenir que le chimiste lauréat exhibe plus d’apparence de raison qu'ils n’en peuvent revendiquer dans leur inconcevable éclectisme. M. Mabru n'a jamais rien pu voir, pas plus que les académies, ei, cooséquemroent, il persiste i».nier mordiieui- A son point de mire, l'échafaudage de son plaidoyer paraît d’autant plus plausible quo les imprudents Tyrlée d'une élude... en voie d él)3uche, qu’ils proclamaient une seiencefaite et parvenue à l'infaillibilité de l’évidence, l’ont singulièrement compromise par leur tonde malamoret et par leurabsenee de solidité scientifique.

Il ne manque au livre de M. Mabru quo le calme profond et la complète abnégation de système préconçu, sans lesquels un observateur, quoi qu’il en ait, se condamne à faire fausse roule.

La difficulté d’acquérir ce vrai diapuson augmente avec les assurances que l'on.sa croit en droit d'asseoir au trône de son for intérieur. C'est pourquoi l'opiniâtreté des savants, opiniâtreté tout honorable dans scs i ntentionset nécessaire donsson contre-poids rationnel,présente incessamment une résistance, qui, somme toute, finit à la gloire delà vérité.

i Toute chose, en l'admettant comme vraie, qui procurerait « au genre humain un avantage réel, ou bien une consolait lion, acquiert par cela seul un haut degré de vraisetn-« blance... Je suis toujours tenté de répondre aux sceptiques, « ajoutait-il : 0 mes amis! imaginez une doctrine qui soit « autant indispensable à l'homme, et je parierai qu’elle est « vraie. » (Phédon, deuxième entretien sur C immortalité de l’âme.)

Eh bien ! la doctrine excellente, si l'on savait ta pénétrer, nous l’avons, nous qui sommes nés dans le christianisme. Loin de le répudier, à l’exemple de ses négateurs incompétents, entendons-le comme l’entendait son fondateur (i). Ne nous emprisonnons pas, ne nous désolons pas dans le sommaire de sa lettre, qui divise et met en guerre ses sectes dissidentes, et même ses flancs maternels, à présent si peu catholiques. Répandons, universalisons l’esprit de sa science ; elle résume l’affirmation, elle divulgue la démonstration des vrais caractères de notre vie : l’amour, l’intelligence, la liberté.

« C’est un malheureux, s’écrie Caldéron (et j’atténue l’indignation du poëte!), l’homme qui, captif du brut désir, y rive ses liens, et qui, misérablement, ayant perdu le plus, se contente avec le moins. »

Ceci ne s’applique-t-il pas à tant de bénévoles praticiens, livrés, à l’aveuglette, à tourner la meule aux sous-sols du magnétisme, qu’ils déclarent bravement le belvéder de la pyramide ?

Rudes geôliers des bas-fonds du ravin,

Où, sans essor, leur front hâve s'incline;

Avec tumulte, Usgourmandenl en vain,

Le regard libre, en paix, sur la colline.

D' Clevêï de Maldigny,

(I) o J’aurais encore beaucoup de choses à vous dire ; mais elles sont cd ■ co moment au-dessus de votre portée. » (LE CHRIST.)

Pièces qui n'ont pu être lues au banquet et qui n'en méritent pas moins de trouve leur place ici.

A Monsieur le Président du banquet, anniversaire de ht naissance de Mesmer.

Paris, 2i mai 1858.

Monsieur le Président,

Ne pouvant, à mon grand regret, assister cette année il la fête destinée à célébrer Mesmer, je viens vous prier, si vous le trouvez bon. de donner connaissance de la présente lettre à la réunion que vous allez présider.

Mesmer, dont nous fêtons la naissance, a aujourd’hui 12/i ans.

Je dis : a aujourd’hui 12h ans, car pour un homme de cette valeur la mort est bien plutôt le réveil qu’un anéantissement. A l’âge de 81 ans il rendait à la terre dont elle émanait sa dépouille mortelle ; — mais son esprit est resté parmi nous ; il plane sur le monde. C’est lui qui nous éclaire, nous anime, nous soutient et nous guide dans la carrière que nous parcourons tous, en suivant, il est vrai, chacun des chemins quelque peu différents, mais qu’importe! Nous tendons au même but : le triomphe du magnétisme pour la gloire de Mesmer, pour le bonheur du genre humain.

Quatre-vingt-un ans! c’était pour les hommes un grand âge; et cependant l’exemple de cette verte vieillesse exempte des infirmités qui accablent ordinairement l’espèce humain ? au déclin de ses ans, n’a point donné a réfléchir aux hommes de son temps. .Ils n’ont pas compris que cette fin de l’être humain, cette décadence de la partie matérielle de notre être, — cette usure du corps, — si longtemps arrêtée chez lui malgré ses longs malheurs et l’activité de sa vie, il ne le devait qu’au magnétisme animal, it l’exercice qu’il faisait sur lui-même de cette force qu’ils niaient, qu’on ne nie plus aujourd’hui !

L’année dernière, à pareil jour, on nous distribuait un dessin de la tombe de Mesmer que venait de visiter M. V. C.lia-lain. Nous avons tous lu les mots simples et touchants par lesquelsM. Chalain a rendu compte de sa visite àMeersbourg : cette bonne et vieille servante ou compagne de Mesmer ; ce médecin chassé du grand-duché de Bade, pour avoir exercé

le mesmérisme: enfin cette révélation que Mesmer, mort pauvre, a longtemps reposé dans le cimetière de Meersbourg, sous une simple pierre avant qu'une àme intelligente et reconnaissante — 011 ignore le nom de cet admirateur inconnu, — lui ait fait élever la tombe actuelle.

Cctle tombe ne suffit pas à l'universalité de la gloire de Mesmer, à l’admiration de nous tous.

Ce qu'il faut à la mémoire de Mesmer, c'est une statue en bronze, en marbre, élevée au lieu de sa naissance; à Vienne d'où il a été proscrit; —à Paris si l’on veut, un monument enfin digne de lui, digne de notre commune admiration.

Celte statue, j'en signalais la nécessité dans l’intérêt du développement de la science nouvelle, j’en demandais l’érection il va trois ans déjà (Journal l’Union magnétique, août 1855), et je m’adressais à tous. Ne devrions-nous pas en France, où Mesmer est venu poser les bases de sa doctrine, prendre enfin aujourd’hui l’initiative et former un comité chargé de diriger l’ouverture d'une souscription universelle pour cet objet? Elle serait bientôt remplie ; faut-il d’ailleurs tant d’argent, et n’aurions-nous pas tout d'abord, pour la partie artistique de l'œuvre, le concours, le dévouement personnel de ces artistes dessinateurs, de ces architectes, peintres, sculpteurs, que nos sociétés comptent en si grand nombre dans leur sein ?

Les Sociétés mesmériennes de France, d’Europe, d’Amérique ne sont que les feuillets d'un même livre; une œuvre comme celle que j'ai l’honneur de proposer trouverait dan3 les mesméristes réunis en ce jour sous votre présidence, monsieur le baron, un point de départ, un centre actif qui bientôt rayonnerait sur le monde ; — et peut-être, l'an prochain, à nos banquets annuels, pourrions-nous annoncer le jour prochain alors où une solennité réparatrice et juste rassemblerait autour du monument de Mesmer, comme les membres épars d’une même famille, ses disciples et ses admirateurs.

Je suis avec un profond respect, Monsieur le Président, Votre très-humble et très-obéissant serviteur.

Dupuis Delcourt.

t\I. Marcillet nous a fait parvenir la relation suivante : nous lui en laissons la responsabilité.

A M. le rédacteur en chef de la Gazette de France.

Monsieur le rédacteur,

Permettez-moi d’abord de vous remercier pour l'accueil bienveillant qu’en diverses circonstances vous avez accordé à mes articles sur le somnambulisme en les publiant.

Les faits que je viens raconter aujourd’hui sortent de la ligne habituelle de la clairvoyance, et je pense qu'ils seront lus avec intérêt même par les personnes les plus incrédules :

Dans le courant de janvier dernier, parmi nos visiteurs, je remarquai un monsieur à l’œil scrutateur et d’un extérieur assez décidé. — Monsieur Marcillet, me dit-il, je voudrais consulter Alexis, désireux que je suis de ni’assurer si les phénomènes prodigieux qui m’ont été racontés de lui ne sont pas chimériques.

Ce début n’était pas encourageant, et je fus heureux qu'A-'lexts ne se trouvât pas présent à cette entrée en matière, assez originale, car, doué d’une organisation nerveuse, sensitif et partant très-impressionnable , il eût refusé de donner la consultation.

Après les avoir mis tous les deux en rapport magnétique, le colloque suivant s’engagea entre eux :

— Voici une brochure dont les feuillets ne sont pas encore coupés, pourriez-vous, Alexis, y lire sans l’ouvrir ?

Et Alexis de tracer aussitôt au crayon plusieurs lignes qui furent trouvées dans le livre.

— Je crois maintenant en vous, Alexis, reprit l’interlocuteur , et s’il vous était possible de me faire la description de la ville que ¡j’habite , ainsi que la situation de ma maison, vous me rendriez bien heureux.

Non-seulement Alexis dessina le plan de son habitation et tout ce qui l’avoisinait, mais encore il nomma la ville où il résidait : c’était Copenhague.

11 lui donna des nouvelles de sa famille et des détails tellement circonstanciés sur ce qui se passait à l’heure même

dans son intimité, que l'étranger voulut en faire la vérification, et séance tenante rédigea la dépêche expédiée à Copenhague.

Quelques jours après, l'étranger revint, émerveillé de l'exactitude des réponses d'Alexis et de son admirable lucidité, nous communiquer les lettres de Copenhague qui confirmaient tous les détails de la séance précédente.

En terminant, il m'1 dit : Je me nomme Bock, je suis premier médecin du roi de Danemark et je viens d'adresser à mon souverain un compte rendu de la séance d’Alexis.

La conduite si digne et si loyale du docteur Bock offre un contraste frappant avec celle de nos médecins français. Eux aussi viennent de's’ adresser à l'Empereur, nousdisent les journaux, mais c'est pour supplier Sa Majesté de faire réviser la loi, afin qu’elle sévisse encore davantage contr,e les somnambules.

Comment ! messieurs de la faculté de médecine ne sont pas satisfaits des rigueurs delà loi contre nous!...

Je ne ferai qu’une citation entre mille pour leur démontrer combien leur réclamation est injuste.

11 y a quelques années, le somnambule Alexis retrouva un bracelet qui avait été volé à la duchesse de Séville. Il devina que ce bracelet était enrichi de diamants ; que c’était un cadeau fait par le roi d’Espagne; il alla môme jusqu’à voir une peinture enchâssée à ce bracelet représentant le monarque. Le tribunal crut devoir prononcer contre Alexis une condamnation à cinq jours de prison et une amende de 15 fr., pour s'étre rendu coupable d’avoir deviné.

Ne serait-ce pas le cas, monsieur le rédacteur, de reconnaître une nouvelle preuve de la haute sagesse de. l’Empereur, qui, par sa fermeté , a su résister à une pareille demande de la part d'un corps savant ; s’il en eût été autrement, bientôt nous eussions vu revenir le bon vieux temps où magnétiseurs et magnétisés aurions, été brûlés vifs, apparemment comme sorciers.

Agréez, etc. Marcillet,

Ce 1S usai ISjS. Ru? GooITroy-Mune, 11.

Beaucoup d'autres documents nous sont parvenus, leur étendue n’a pas permis d’en faire la lecture, et, comme ils n’ont pas un intérêt direct avec la l'ête de Mesmer, nous ajournons la publication des parties essentielles.

Vers la fin du banquet, la soirée étant avancée, M. le baron du Potet, président du jury magnétique, a pris la parole pour faire connaître à l’assemblée le nom des personnes auxquelles le jury avait accordé une médaille ou un encouragement.

M. du Potet a d'abord fait ressortir l'utilité du jury magnétique, de cette institution qui a porté déjà de si bons fruits. N’est-il pas utile, en effet, d’encourager et de récompenser les efforts qui sont faits chaque jour pour répandre la découverte sublime de Mesmer? N’attendant rien des corps savants, ni du pouvoir, les magnétistes trouveront au moins dans leurs collègues des cœurs reconnaissants, des esprits sympathiques.

La médaille signifie, courage et persévérance; elle dit que celui qui la porte a bien mérité et que ses efforts ont été jugés dignes d’être loués.

Le premier nom proclamé, a été celui de M. Brunet de Bal-laus, actuellement en Belgique : le jury a voulu encourager les tentatives heureuses de ce magnétiste, et adoucir les amertumes de son apostolat.

Le second nom proclamé, a été celui de M. Siemeling, ma-gnéliste hollandais; le jury a reconnu chez ce magnétiste, l’enthousiasme et cette sorte de foi bien propre a établir une vérité qui demande le désintéressement et de nobles passions.

Le troisième nom proclamé, a été celui de M. le comte Pet-torelli, de Florence ; le jury a vu dans cet homme de bien un soutien, un appui pour le magnétisme, et ses efforts, longtemps soutenus pour étendre l’empire du nouveau principe, ont mérité la distinction que lui a accordé le jury.

Chacune de ces trois personnes a obtenu une médaille de bronze.

Deux mentions honorables ont été proclamées : l’une, accordée à madame Prosper, de Meaux, pour son constant dévouement et les belles cures qu’elle a opérées par le magnétisme; puis enfin, à M. Berjot pour sa publication, résumant les connaissances magnétiques, présentée à la Société du mesmérisme.

INSTITUTIONS.

SOCIÉTÉ DU MESMÉRISME.

La Société du Mesmérisme a cessé d’exister : bientôt, nous pouvons l’annoncer avec certitude , elle va, comme le phénix , renaître de ses cendres. Nous devons au public quelques éclaircissements sur cet événement qui ne peut manquer d’intéresser vivement tous les amis du magnétisme.

Cette Société a été fondée en I8AA par de fervents adeptes; le nombre de ses membres s'est élevé jusqu’à 150 ; parmi eux se sont trouvés des médecins, des littérateurs, des savants distingués, des hommes appartenant à des professions diverses, et qui, unissant l’amour de l’étude et le dévouement à l’humanité, ont travaillé avec ardeur à répandre la connaissance du magnétisme et à en multiplier les applications utiles. Les séances publiques du Waux-Hall ont rendu d’immenses services : deux fois par mois, une foule avide se précipitait dans cette vaste salle pour écouter avec recueille-mentles instructions familières sur la science nouvelle, suivre attentivement les expériences et s’initier à la découverte de Mesmer ; à chaque séance, 30 personnes se soumettaient à la magnétisation , afin de juger par elles-mêmes de la puissance de l’agent mystérieux dont elles entendaient célébrer les prodiges. Ce. public, sans cesse renouvelé, recevait ainsi la précieuse semence et grossissait le nombre des adhérents du magnétisme. Ce moyen de propagande a produit des effets merveilleux et a fait pénétrer la doctrine mesmérienne dans toutes les classes.

La Société avait en outre des séances particulières consacrées à l’étude : là, ses membres venaient rendre compte de leurs travaux ; on enregistrait les laits, on recueillait tous les renseignements propres à enrichir la science, on se livrait à des discussions sur la nature des phénomènes, on cherchait à établir la loi qui les régit, à fonder sur les faits une doctrine positive. C’était là une tâche des plus ardues, et la Société Mesmérienneest loin de l'avoir complétée, mais elleaconscien-

cieusement rassemblé des matériaux utiles qui seront utilisés , l’on consultera avec fruit ses archives où sont accumulées une foule d'observations curieuses, (le dissertations pleines d'intérêt.

l)c pénibles incidents vinrent arrêter le cours de ses paisibles travaux. Le règlement défectueux laissait trop de facilité à l'admission de nouveaux membres et ne leur imposait pas des garanties suffisantes pour prendre part aux délibérations. Pendant plusieurs années, cet inconvénient ne se fit pas sentir: mais malheureusement en dernier lieu, il s’introduisit des éléments de désordre, quelques brouillons s’en servirent pour jeter le trouble et la discorde : la .cause du magnétisme se trouvait compromise ; la Société, dont le passé était honorable, dont plusieurs savants étrangers avaient accepté avec reconnaissance le titre de correspondants, dont les travaux jouissaient d'une certaine autorité dans le monde magnétique, se devait à elle-même de ne pas déchoir ; le soin de son honneur lui faisait une loi de prendre un parti énergique. Son digne président, M. le baron du Potet, secondé par la presque totalité des membres titulaires et par un grand nombre de vétérans du magnétisme, reconnut la nécessité d'une réorganisation et demanda lui-même à l’autorité la dissolution de la Société et sa reconstitution sur de nouvelles bases. 11 résulta de là une crise fâcheuse sans doute, puisqu’il y a interruption dans les travaux. Mais la nouvelle société, qui comprendra l’élite de l’ancienne, et à laquelle s’adjoindront des membres studieux et zélés, reprendra la même mission et continuera son œuvre avec d’autant plus d'efficacité, qu'elle ne sera plus entravée par ses hommes légers et turbulents, impropres aux études sérieuses, et qui n’avaient vu dans le magnétisme qu'un passe-temps, une frivole récréation. Le nouveau règlement, élaboré avec soin, préviendra le retour des abus causés par les vices de l’ancien.

Seulement, le magnétisme sera privé de la ressource si précieuse des séances publiques. L’autorité a cru devoir les interdire. On n'a fait aucun reproche à la Société sur la tenue de ses séances qui ont toujours été parfaitement convenables, ni sur l’esprit des discours qu’y ont prononcés les présidents;

(tii ne peut nous refuser cette justice de reconnaître que nous n’avons cherché à propager que la partie utile et positive du magnétisme, nous attachant principalement à vulgariser un moyen facile de faire du bien , en mettant la médecine naturelle à la portée de tous, et que nous nous sommes abstenus de jeter inconsidérément devant la foule, les théories qui, mal comprises, auraient pu troubler quelques esprits faibles. Malheureusement, cette règle de prudence n’a pas été suivie partout : il existe de petites réunions où, tout en se rattachant au mesmérisme, 011 s’occupe exclusivement de systèmes aventureux, d’utopies nébuleuses. Le spiritualisme qui, étudié par des penseurs vigoureux, pourrait enrichir l'humanité de conceptions sublimes et de grandes découvertes, devient dangereux quand il est présenté à des individus chez lesquels la raison n’est pas assez forte pour contenir la fougue du mysticisme. En Amérique, où le spiritualisme s’est répandu dans de grandes proportions, il a donné lieu à des aberrations déplorables que n’ont pu contenir les partisans les plus éclairés delà doctrine ; une foule de gens ont perdu la raison ; d’autres , égarés par le fanatisme, se sont portés à des actions insensées. Mais là, où règne la maxime du laisser-faire, l’autorité ne s’émeut pas de ces aberrations, chacun prend en soi ses inspirations et les suit à ses risques et périls, sans que la société ait à s’en occuper, il n’y a ni contrôle, ni tutelle.

11 n’en est pas de même en France, où il est admis que les pouvoirs constitués surveillent tous les intérêts et sont chargés de prendre toutes les précautions pour prévenir les malheurs de tout genre. La police, avant d’autoriser une société, doit donc s’enquérir , non pas de la vérité de ses doctrines , mais de l’influence qu’elles peuvent exercer sur les populations. O11 conçoit qu’avec ses règles gouvernementales, l’autorité ait pu voir un certain danger dans l’introduction de sociétés spiritualistes avec des séances publiques et dans la propagation, sur une grande échelle, d’idées qui, chez un autre peuple, ont causé une grande agitation et ont produit peut-être plus de mal que de bien. Les spiritualistes n’ont donc été autorisés qu’à la condition de ne pas tenir de séances

publiques. Une fois cette restriction établie, on se trouva amené à mettre en question les séances publiques des sociétés de magnétisme : les personnes peu versées dans ces matières peuvent facilement confondre des doctrines qui se rattachent toutes à Mesmer, et qui ont certains principes communs , bien qu’elles diffèrent énormément par leur but et surtout par leur méthode. Les hommes positifs ont payé pour les songe-creux. Les séances publiques de magnétisme sont interdites jusqu’à nouvel ordre.

Cette nouvelle sera très-pénible pour beaucoup de nos amis. Quant à nous, tout en regrettant que le magnétisme se trouve privé d’un puissant moyeu de propagande, nous pensons que ce changement pourra tourner au profit de notre cause. Rappelons-nous que les fameuses sociétés de V Harmonie n’étaient pas publiques, non plus que les sociétés magnétiques du temps de la Restauration ; elles ont eu dans leurs rangs des hommes éminents dont plusieurs seront comptés parmi les bienfaiteurs du genre humain ; elles ont immensément contribué aux progrès du magnétisme par leurs travaux intérieurs. Les sociétés actuelles , trop préoccupées du but spécial des séances publiques, ont peut-être un peu négligé certaines parties de leur tâche qui désormais devront appeler leur attention, c’est-à-dire l’expérimentation rationnelle selon la rigueur des procédés scientifiques, et par suite le triage des faits, l’élimination des merveilles apocryphes et des hâbleries si communes chez quelques auteurs : c’est par ce travail critique qu’on arrivera à asseoir le magnétisme sur une base solide et à le faire accepter définitivement comme une science indubitable.

Nous devons, en terminant ces observations, ajouter quelques mots pour prévenir le fâcheux effet que pourraient produire sur l’esprit public les relations inexactes de certains journaux sur ce qui s’est passé dans laSociétédu Mesmérisme. La Société dissoute laissait quelques affaires à régler, un actif à réaliser et à répartir entre les associés ; quelques difficultés avec un de nos débiteurs nous ont obligés d'employer les formes judiciaires pour faire nommer M. du Potet liquidateur. C’était là une affaire de pure forme : il n’y a ni det-

les, ni embarras, ni procès. Toutefois, cet événement si simple a été enregistré par les feuilles judiciaires, puis, passant de bouche en bouche et défiguré en route, a donné lieu à l’article malveillant et plein de faussetés, qu'a publié l'Indépendance belge, et que nous transcrivons en note (1). Nous ne connaissons point de cénacle rue Chauchat, nous n’avons rien à démêler avec ML Home, nous ne craignons aucun créancier, nous ne donnerons point aux ennemis du magnétisme la satisfaction de voir mis aux enchères notre modeste mobilier qui n’a rien de magique, ni de cabalistique, et l’union la plus cordiale règne entre tous ceux des membres de l’ancienne société, qui, après avoir fait tous leurs efforts pour y maintenir l’ordre et l’harmonie, se sont groupés autour de M. du Potet pour former une nouvelle société : nous voulons bien croire que le journaliste étranger, qui a accueilli tous ces bruits ridicules, n’a été coupable que de légèreté. Que les détracteurs du magnétisme ne s’empressent pas de se réjouir : la nouvelle phase où nous entrons, ne fera qu’accélérer son triomphe.

a. s. MORIN.

(1) Si les ombres de Mesmer et do Puységur, évoquées par tours disciples désespérés, étaient venues co malin dans le cabinet de M. le président Benoit-Champy, elles auraient été à juste raison indignées. Croiriez-vous que la fameuse Société des magnétiseurs est on dissolution ? Mon Dieu, oui! Iæ somnambulisme, lui aussi, a scs désagréments en justice. M. Home y est pour beaucoup, et le sens commun également. Voilà M. le baron du Potcl qui se retire sous sa tente, cruelle détermination dont ses adeptes ont tâché de le dissuader. N'ayant pu y parvenir, ils dépouillent tout respect et réclament les meubles, tentures, tableaux, elc., qui garnissent l'établissement. La Société a bien, paraît-il, quelques petites dettes, par ci, par là ; mais les adversaires du baron n'insistent point pour les payer eux-mêmes. M. Benoil-Champy, gardant à ces débats un sérieux fort méritoire, a nommé M. du Potet liquidateur.

J'empiète snrvotrequatrième page pour annoncer d’ores et déjà la vente des ustensiles et bibelots du cénacle do la ruo Chauchat. Qui veut s'établir thaumaturge? On fera 95 pour cent de rabais sur les baquets, les tringles, les accordéons sympathiques, et l’on enseignera à l'acquéreur la pratique des posscs par-dessus le marché. W.

BIBLIOGRAPHIE.

LE SOMNAMBULISME DEVANT LA SORBONNE.

M. Ch. Lévêque, professeur à la Faculté des lettres de Paris, a fait paraître dans la Revue des Deux-Mondes (15 avril dernier) une dissertation remarquable sur le sommeil et le somnambulisme; il y rend compte des travaux récents de plusieurs philosophes, MM. Lélut, Charma, Macario, Maury, Al. Lemoine ; il analyse avec sagacité les fonctions humaines dans les diverses espèces de sommeil, et il s'occupe particulièrement du somnambulisme naturel, de l’extase qui se produit dans certaines maladies, et enfin du somnambulisme magnétique. Nous devons déjà signaler comme un progrès la reconnaissance de cet état par un homme de science. Il se trouve encore des docteurs, des académiciens pour lesquels le somnambulisme n’existe pas, parce qu’on n’a pu ni en donner une définition exacte ni en déterminer d’une manière précise les caractères distinctifs ; en raisonnant de même, ces savants devraient nier le sommeil que tout le monde connaît, mais dont on n’a pas encore donné une bonne définition. Pour eux, le somnambulisme n’est qu’une jonglerie, et tous ceux qui s'en occupent appartiennent ou à la classe des niais ou à celle des fripons: les faits innombrables qui se passent journellement sous les yeux d’une multitude d'observateurs et qu’il ne tient qu’à eux d'examiner, ne sont que des effets simulés, des tours de passe-passe. MM. Dubois (d’Amiens), Burdin et Mabru ont parlé, c’est à la nature à obéir et à mettre de côté tout ce qu’ils ont déclaré impossible, tout ce que leur science infaillible a condamné.

M. Lévêque, au contraire, cherche la vérité, reconnaît l'au-

tome des faits et se propose de les expliquer. Parmi les signes qui caractérisent le somnambulisme artificiel, il énumère l’insensibilité absolue, l’exaltation prodigieuse des facultés de l’esprit, le déplacement des sens, la prévision, l’instinct des remèdes et le pouvoir de parler des langues étrangères ou inconnues. « Relativement ¡t ces faits, dit-il, la science se pose deux questions : Sont-ils certains? Ont-ils une suffisante explication dans les lois de l'union de l’àme et du corps? »

11 reconnaît que, dans plusieurs genres d’extase naturelle ou artificielle, il y a souvent insensibilité, que, dans d’autres cas, il y a, au contraire, surexcitation de toutes les puissances physiques et spirituelles, et notamment développement extraordinaire de la mémoire. 11 admet encore l’instinct des remèdes : : C’est, dit-il, un instinct naturel de conservation tpie possèdent les animaux et les sauvages, et qui, inactif ou négligé dans la vie éveillée et normale, se ranime chez le dormeur, le malade, le erisiaque ou le somnambule , pour leur indiquer le point précis de leur corps que le mal menace ou attaque, et leur suggérer par une rapide induction la pensée de quelque facile remède. » Mais il n’admet ni la transposition des sens, ni la faculté de voir le mal d’autrui et les remèdes, ni la prévision. 11 ne croit pas non plus au don des langues : mais nous devonsfaire remarquer que très-peu de magnétistes ont attribué aux somnambules la faculté de parler des langues non apprises ; les écrivains les plus estimés affirment seulement, d’après de nombreux témoignages, que certains lucides comprennent des langues non apprises, ce qu’ils expliquent par la communication de pensées. M. Lévêque ne s’occupe pas de ce dernier phénomène, non plus que de la vue à travers le corps opaques, ni de la vue du passé. A cet égard, s’il veut étudier plus à fond cette branche si curieuse de la science de l’homme, il trouvera les attestations les plus satisfaisantes : qu’il cherche lui-mème à expérimenter, ce qui est toujours préférable, et il ne pourra manquer de rencontrer des cas de lucidité qui le forceront à modifier ses idées et à reconnaître que le somnambulisme ouvre l’entrée d’un nouvel horizon où les merveillesdépassent les prévisions scientifiques.

M. Lévêque ne voit dans le somnambulisme qu'un état morbide : « Si le somnambule magnétique n’est qu’un dormeur qui sommeille, rêve et délire, comment croire qu’il soit doué de facultés extraordinaires? Comment admettre qu'il y ait en lui une puissance divinatoire ? 11 a des visions, des fantômes, des hallucinations, des souvenirs, et son imagination échauffée par la crise nerveuse, dirigée d’ailleurs par l’artisan du magnétisme, lui suggère des discours où semblent éclater des connaissances et une pénétration refusées aux autres hommes. Vous fierez-vous à ce pauvre malade et à ce fou, vous qui doutez si souvent du témoignage de la science ou d’une raison saine?... »

Ici l’auteur se met en contradiction avec lui-même, puisqu’il a reconnu que dans le sommeil il se développe parfois des facultés extraordinaires, que la mémoire et l’intelligence peuvent acquérir une énergie étonnante, que le dormeur peut avoir la vue instinctive des remèdes ; et il a cité même des exemples d’œuvres remarquables accomplies dans le sommeil, telles que la fameuse sonate de Tartini. Si donc le sommeil est un état inférieur à certains égards, il peut aussi renfermer des caractères de supériorité ou servir de transition pour passer à un état supérieur à celui de la veille. M. Lévêque parait avoir eu en vue ceux qui sont disposés à accepter comme oracles toutes les réponses des somnambules; c’est là une exagération déplorable qu’on a raison de combattre. Le raisonnement et le jugement font défaut chez le somnambule qui, comme le dormeur ordinaire , est sans cesse égaré par son imagination, et incapable de discerner l’illusion de la réalité; lui accorder une confiance sans bornes, ce serait folie. Mais, d’un autre côté, à moins de donner un démenti à l’évidence des faits, on ne peut refuser de reconnaître que souvent le somnambule jouit de facultés exceptionnelles, pénètre la pensée et voit ce qui échappe à la vue ordinaire ; il y a là des merveilles que la science ne peut expliquer, et en môme temps une source de lumières dont on peut utilement tirer parti, pourvu qu’une saine critique nous préserve des chances d’erreur.

L;i qualification do [on appliquée au somnambule ne peut ('•Ire regardée comme l'expression d'un jugement calme et raisonné. Mais quand même elle devrait être prise la lettre, il ne s’ensuivrait pas qu'on ne doive tenir aucun compte, de ce que nous déclarent les somnambules sur leurs percep-tions. Si un fou a la vue plus perçante que la mienne, l’ouïe plus fine, je ne dédaignerai pas de recourir au témoignage de ses sens pour apprendre ce qui se passe au loin et que j’ai intérêt à connaître ; seulement comme je suis averti que j'ai affaire à un liomme sujet aux hallucinations, je me tiendrai sur mes gardes, j’écouterai ce qu'il me dira, je le contrôlerai par tous les moyens en mon pouvoir, je chercherai par ma raison à éviter les erreurs où pourrait me jeter une déclaration suspecte, et à l’aide de ces précautions, je parviendrai ii faire mon prolit des facultés dont jouit ce fouet dont je suis privé.

A. S. Morin.

CHRONIQUE.

Dans son numéro du 20 mai, la Patrie donne le compte-rendu d’une brillante soirée donnée, dans l’un des plus beaux salons du quartier Montmartre, où l’on remarquait, dit le chroniqueur, la présence de M. Charavet, l’un de nos plus remarquables somnambules. M. Robert, son magnétiseur, dont la puissance égale au moins celle du fameux abbé I( aria, J'a fait tomber en extase, au moment où M. Binûeld exécutait une adorable mélodie de Schubert.

Jamais, continue-t-il, je n’ai rien vu de plus admirable que le rayonnement pour ainsi dire céleste que jetait autour d’elle la figure de l’extatique ravi dans l’espace par cette sorte de concert divin; rien de plus beau à contempler que ses yeux noyés dans le vague des rêves éthérés qui ne regardaient plus sur la terre, mais qui voyaient au ciel.

Je ne conçois pas que les peintres ne se soient pas encore inspirés de pareils spectacles.

Edouard Fournier.

ERRATA.

Il s’est glissé quelques erreurs dans len° 34 du 23 mai : Page 257, li^'ne 28, au lieu uo ces, lisez ses.

Page 208, ligne 9, au lieu de l'amour, lisez l'apôtre. Page 470, ligne 19, au lieu de passer, lisez planer.

Page 270, ligne 27, au lieu de fait, lisez sait.

Baron uo POTET, propriclairc-géranl.

PLAIDOYER POUR BODIN

CONTRE MM. BAUDRILLART ET OSCAR DE VALLÉE.

"Nous n'ignorons pas que c’est assumer une grave responsabilité, s’exposer presque à être pris en pitié, au moins par beaucoup, que d’attaquer certains noms placés désormais, et sous bien des rapports avec juste raison, an premier rang de la science. 11 faut que la vérité,-ou ce qui brille à vos yeux sous ses apparences, ait un pouvoir bien fascinateur pour vous entraîner et vous exposer, sciemment et de propos délibéré, aux critiques et, mieux que cela, au dédain de personnes dont on estime, et dont on respecte le caractère et le talent. Maison compte sur le jour prochain où cette vérité sera reconnue et proclamée, et sur l'honneur qui en rejaillira, sinon pour vous, au moins pourvotre nom, cette représentation de vous-mêine, de l’avoir pressentie un despremiers, et alors qu’elle était méconnue par de plus avancés que vous dans le temps présent.

Cette courte exorde nous a paru indispensable pour oser dire que nous voulons défendre Bodin, Bodin le sorcier, ou au moins le croyant aux sorciers, Bodin l’auteur du livre de la Dànonomanic, Bodin attaqué à tort, au moins quant aux points fondamentaux de sa doctrine, par MM. Baudrillai t, professeur au collège de France, et Oscar de Vallée, avocat impérial à la Cour impériale de Paris. Ceci ne doit pas faire entendre cependant que nous croyions aveuglément et en tout point aux opinions de Bodin. Non, ce serait aujourd’hui de la folie ; mais il faut trier et ne pas condamner en bloc, comme l’ont fait ces messieurs. Ainsi le fond est vrai ; certains détails seuls sont erronés ; et, si nous ne demandons pas un jugement qui relève notre client complètement absous,

Tome Xvil.— N° JG. — 2« Série. — 23 Juin 1858. il

nous réclamons au moins en sa faveur le mérite de circonstances grandement atténuantes.

M. Baudrillart a consacré un volume tout entier (l), et des mieux remplis, à l’étude des théories de Bodin. C’est surtout l’économiste, le publiciste qu'il envisage; il montre sa supériorité sur tous les légistes de son époque, l'influence qu’il exerça sur sou siècle et sur ceux qui suivirent : un lien étroit de parenté l’unit à Montesquieu, et par là an dix-huitième siècle. Mais, pour envisager Bodin tout entier, il fallait bien parler de Bodin démonographe. M. Baudrillart ne l’a fait que succinctement et avec peine; il regrette d’ètre obligé de parler de son héros sous de tels rapports, qui ne montrent, d'après lui, que l’infirmité de la nature humaine, puisque les plus beaux génies ne savent pas se préserver totalement de l’erreur. Citons le passage le plus intéressant qui résume l’opinion de M. Baudrillart.

« Voici, un bizarre et ridicule chapitre qui vient s’ajouter à l’histoire des contradictions de l’esprit humain. Nous pouvions nous croire loin, bien loin du moyen âge, de ses superstitions et de ses barbaries ; nous y voici brusquement ramenés, nous y retombons, pour ainsi dire, en plein. Où est la pensée, avide de lumière, fière de sa propre, émancipation, toute tournée vers l’avenir, qui a dicté la Méthode historique? Qu'est devenu le judicieux observateur de la Réponse sur les monnaies et Renchérissement ? 11 ne s’agit plus ici des lois que la Providence adonnées au monde social, mais du diable et de sa légende. En fait de chimères, Cornelius Agrippa et Cardan sont vaincus; il faut, pour trouver un équivalent dans l’absurde, aller presque jusqu’aux centuries de Nostradamus.

« 11 y a, en tout temps, une part àfaire, une part très-large au besoin du merveilleux poussé jusqu’à l'absurde. Que Bodin, malgré ses lumières, ait cru à la sorcellerie, comme beaucoup de ses contemporains, même éminents, il ne faudrait donc pas trop s’en étonner. De Thon, si éclairé, ne croit-il pas à l’astrologie judiciaire? Machiavel, à tant d’égards si li-

(1) Bjdin et son temps. Paris, (tuillaumin, 1 vol. in-8.

brc do préjugés, si sceptique en fait de morale, tombe là-dessus dans les erreurs de son temps. Un des plus hardis jurisconsultes de l’époque, le critique hardi dont nous avons parlé, F. Hotrnan, mit, nous dit Bayle, une application ruineuse à la recherche de la pierre philosophale. N’a-t-on pas vu le sage Lanouo ranger au nombre des maux qui désolent la France les progrès de la sorcellerie? Enfin Bacon, cette lumière du dix-septième siècle, n’est pas exempt lui-même de telles superstitions. Mais ce qui donne à ce livre de la Démo-nomanic un caractère particulièrement fâcheux, c’est que l'auteur emploie tout un long volume à en démontrer la réalité; c'est qu’il y applique tous les procédés d’une logique en apparence rigoureuse : observation des faits, examen des témoignages, définitions sévères, enchaînement des preuves; c’est qu’il fait servir la méthode d’investigation et de libre examen à établir dogmatiquement de fabuleuses niaiseries ; c’est qu’enfin ce monument élevé à l’absurde semble l’être à la fois par les mains savantes de l’érudition et par les mains violentes du fanatisme. »

Passons maintenant à M. Oscar de Vallée : c’est aussi dans une biographie, qui ne le cède pas en mérite à celle écrite par AI. Baudrillart, danslabiographied’Antoine Lemaistre, que M. de Vallée a occasion de parler de Bodin et de la sorcellerie.

« Un demi-siècle s’était à peine écoulé depuis que Bodin avait publié son incroyable traité de la Jtémonomanie. Ce précurseur de Montesquieu avait écrit un livre sur la magie et ses effets, sur les moyens de la combattre et sur les châtiments qui devaient l'atteindre. 11 s’était décidé à composer cette œuvre de démence, et qui fait bien paraître la fragilité des plus grands esprits, en voyant brûler toute vive une pauvre sorcière des environs de Compiègne. Il trouva sa mort bien méritée, et s’indignait contre un médecin, Pierre d'A-pone, qui, étant sorcier lui-même, avait osé soutenir que les sorciers n’étaient dangereux pour personne; il lui reprochait d’être à la cordelle de Satan, et d’écrire sous la dictée de Bel-zébuth. Si n’était le besoin que nous avons de toujours monter vers Dieu, de le voir en toutes choses et de toujours le

craindre, 011 11e s’expliquerait pas comment ccttc croyance à la magie a pu envahir et dominer les esprits les plus vigoureux, et qui semblaient les plus rebelles; comment au seize et au dix-septième siècle, elle a pu trôner dans les livres, dans la politique, dans la loi, dans l’église, devant la justice elle-même. Un des plus grands magistrats de ces temps, le président de Thou, étudiant l’astrologie judiciaire comme une source de vérités; un des plus grands jurisconsultes, un de ceux que leurs œuvres placent à côté de Cujas et de Donneau, (Ilotman), dérobait au Digeste beaucoup de temps et d’études pour chercher la pierre philosophale. Bacon lui-même a laissé pénétrer dans sa haute intelligence les émanations de cette crédulité ridicule et démoniaque. Il y avait des lois précises pour fixer les peines que méritaient les sorciers et les magiciens. Rien n’est plus curieux ni plus triste que de voir des magistrats poursuivant à coup d’arrêts, et comme un crime, cette puissance surnaturelle, et se faisant ainsi les auxiliaires de Dieu contre le démon. Je doute qu’en sa sagesse infinie, et quoi qu’en disent les livres saints, Dieu se soit jamais applaudi de ces secours, et je crois bien plutôt qu’il a gémi de tant et de si grossières erreurs. »

La lecture de ces deux passages doit, ce nous semble, avoir fait naître cette première réflexion dans l’esprit du lecteur. Quoi ! messieurs, vous reconnaissez que les idées de Bodin ont été partagées par les plus beaux esprits, par Lanoue, Hotman, Bacon, de Thou, Machiavel, et cela ne vous arrête pas pour prononcer une condamnation ! N’eût-il pas été plus prudent de suivre les errements des tribunaux, d’étudier de près les faits, de rechercher des témoins, de consulter des experts? Bodin mettait certainement plus de forme dans la condamnation des sorcières que vous dans la condamnation de Bodin. Cependant, et vous serez ici de notre avis, Bodin vaut bien une sorcière. Mais vous avez oublié que te vrai peut n’être pas quelquefois vraisemblable, ou, ce qui est la même choso, que l’invraisemblable peut être quelquefois vrai. Et c’est ici le cas, croyons-nous. Prenons donc ce livre de Bodin et voyons d'abord ce qu’il renferme.

L’ouvrage est divisé en 't livres et 26 chapitres, savoir :

Livra 1" : 1“ définition du sorcier ; 2° association des esprits avec les hommes ; 3“ différence d'entre les bons et les malins esprits; 4° prophéties et autres moyens divins pour savoir les choses occultes ; 5° moyens naturels et humains pour savoir les choses occultes ; 6“ moyens illicites pour parvenir à chose qu'on prétend; 7° Tératoscopie, aruspicine, ornéamantic , liiéroscopie, etc.

Livre 2 : 1“ magie en général ; 2° invocations tacites des malings esprits ; 3° invocations expresses des maüngs esprits; h" sur ceux qui renoncent à Dieu par convention expresse et s’ils sont transportés en corps par les démons ; 5° extases et ravissements des sorciers, fréquentations ordinaires qu’ils ont avec les dénions ; 6° lycanthropie, et si les esprits peuvent changer les hommes en bêtes ; 7° si les sorciers ont capitulation avec les démons; 8° si les sorciers peuvent envoyer les maladies, stérilités, grêles et tempêtes, et sur hommes et bêtes.

Livre 3 : 1° moyens licites d’obvier aux charmes et sorcelleries; 2° si les sorciers peuvent assurer la santé des hommes allègres et donner guérison aux maladies ; 3° si les sorciers peuvent avoir par leur métier la faveur des grands, la beauté, les honneurs, les richesses et le savoir, et donner fertilité ; lt° si les sorciers peuvent nuire aux uns plus qu’aux autres ; 5° moyens illicites pour prévenir les charmes et maléfices et guérir les maladies; 6“ de ceux qui sont assiégés et forcés par les malings esprits, moyens de les chasser.

Livre h : 1° perquisition des sorciers, 2° preuves requises pour avérer le crime de sorcellerie; 3° confession volontaire et forcée que font les sorciers ; k“ présomption contre les sorciers ; 5° peines que méritent les sorciers ; 6° réfutation des opinions de Jean Wier.

Lisons ce livre tout entier et ne nous arrêtons pas, comme pourrait bien l’avoir faitM. Baudrillart, aux premières pages. Une pensée générale domine cet ouvrage , la croyance aux esprits. Et peut-on n’y pas croire? C’est un dogme établi, consacré par toutes les religions ; la croyance aux esprits a précédé la notion du Dieu unique ; c’est le dogme même de l’immortalité de l’âme, ou plutôt de la persistance de la per-

sonnalité après la mort. Les traditions de tons les peuples abondent en faits d’apparitions, de manifestations diverses, et voici que de nos jours les faits révélateurs recommencent plus éclatants qu’à aucune époque de l'histoire.

Si l'homme 11e meurt pas tout entier, si son esprit lui survit, quoi deplusnaturel que de conserver, au moins pendant quelque temps, les penchants qu'on a eus ici-bas; et que, de même qu’il y a des ho 1 mes vertueux et des hommes vicieux, il y ait aussi des esprits, les uns bons, les autres mauvais ? Origène et Grégoire de Nysse prétendent qu’après la mort, les âmes des méchants deviennent des démons, et Agrippa établit neuf classes de démons, comme saint Denis l’aréopagite avait établi neuf ordres d’anges. Or, si les bons esprits peuvent chercher à réaliser le bien, pourquoi les mauvais ne chercheraient-ils pas à opérer le mal ? L’imitation , le prosélytisme pourrait bien être un penchant de notre nature , après comme avant la mort. Voilà donc des essences invisibles de deux espèces, les unes bonnes, les autres mauvaises, se livrant une lutte perpétuelle pour diriger les hommes doués de libre arbitre, mais seulement comme une machine, dont l’engrenage jouit d’une certaine élasticité dans des conditions préétablies.

Ces essences invisibles sont par la prière, parles conjurations, à la disposition de l’homme qui peut en faire un instrument puissant de progrès, un instrument de miracles, comme un moyen d’arriver au mal, selon qu’il sera lui-même bon ou mauvais, qu’il invoquera l’assistance des bons ou des mauvais génies. Voilà le fond de la pensée de Bodin, c’est la nôtre et celle de beaucoup d’autres.

Mais, pour convaincre des incrédules et surtout des savants , il faut autre chose que des affirmations banales et des formules générales ; il faut des faits et des expériences. 11 y en a beaucoup autour de nous ; mais nous voulons remonter un peu haut. Cela tendra à prouver d’abord que la tradition n'a jamais été interrompue, et le récit que nous allons mettre sous les yeux du lecteur a un caractère de naïveté et de franchise qui semble garantir plus particulièrement sa sincérité.

("est. Benvenuto Cellini, l’orfèvre florentin, qui parle ainsi dans ses Mémoires :

u Au milieu de cette vie étrange, je me liai avec un prêtre sicilien, d’un esprit très-distingué, et qui était profondément, versé dans les lettres grecques et latines. Un jour que je causais avec lui, la conversation tomba sur la nécromancie, et je lui dis que toute ma vie j’avais ardemment désiré voir et apprendre quelque chose de cet art.— Pour aborder une semblable entreprise, il faut une âme ferme et intrépide, me répondit le prêtre. Je lui répliquai que j’aurais de la force et du courage de reste, si je trouvais l’occasion de m’initier à ces mystères. Eli bien, me dit alors le prêtre , s’il en est ainsi, je ne te laisserai rien à désirer. Et aussitôt nous con vînmes de nous mettre à l’œuvre.

« Un soir donc, le prêtre fit ses préparatifs et me dit de chercher un compagnon ou deux. Il s’adjoignit un homme de Pistoia, qui s’occupait lui-même de nécromancie. Moi, j’amenai Vincenzio Romeli, mon intime ami. Nous nous rendîmes au Colysée. Là, le prêtre se vêtit à la manière des nécromans, puis se mit à dessinersurle sol des cercles, avec les plus belles cérémonies que l’on puisse imaginer. Il avait apporté des parfums précieux , des drogues fétides et du feu. Lorsque tout fut en ordre , il pratiqua une porte au cercle, et nous y introduisit en nous prenant l’un après l’autre par la main. Il distribua ensuite les rôles. Il remit le talisman entre les mains de son ami, le nécromant, chargea les autres de veiller au feu et aux parfums, et enfin commença ses conjurations. Ceite cérémonie dura plus d’une heure et demie. Le Colysée se remplit de légions d’esprits infernaux. Lorsque le prêtre vit qu’ils étaient assez nombreux, il se tourna vers moi qui avais soin des parfums et me dit : Benvenuto, demande-leur quelque chose. Je répondis que je désirais qu’ils me réunissent à ma Sicilienne Angclica. Cette nuit-là, nous n’eûmes pas de réponse; je fus néanmoins enchanté de ce que j’avais vu. Le nécromant me dit qu’il fallait y retourner une seconde fois, que j’obtiendrais tout ce que je demanderais, pourvu que j’amenasse un jeune garçon qui eût sa virginité. Je choi-

sis un de mes apprentis, âgé de douze ans environ, et je pris encore avec moi Vincenzio Roincli, et, déplus, un certain Agiiolino Gaddi, qui était de nos amis. Dès que nous fûmes arrivés à l’endroit convenu , le nécromant procéda à scs apprêts avec autant et même plus de soin que la fois précédente. Puis, i! nous conduisit dans le cercle qu’il avait tracé avec uu art admirable et des cérémonies encore plus solennelles que les premières.

« 11 confia le soin des parfums et du feu h Vincenzio, qui fut assistéparAgnolino Gaddi,et il me mit en main letalisman,en me disant de le tourner vers les endroits qu’il me désignerait. Mon jeune apprenti était placé sous 111011 talisman. Le nécromant commença ses terribles évocations, appela parleur nom une multitude de chefs de légions infernales, et leur exprima des ordres en hébreu, en grec et en latin, au nom du Dieu iu-créé, vivant et éternel. Bientôt le Colysée fut rempli d’un nombre de démons cent fois plus considérable que la première fois. Vincenzio Romeli et Agnolino étaient occupés à attiser le feu et à brûler des parfums. Par le conseil du nécromant, je demandai de nouveau à me trouver avec Angelica. Le nécromant se tourna vers moi et me dit : Ne les as-tu pas entendus t’annoncer que dans un mois tu serais avec elle? Et il me pria de tenir ferme, parce qu’il y avait mille légions de plus qu’il n’en avait appelé. Il ajouta qu’elles étaient les plus dangereuses, et que, puisqu’elles avaient répondu à mes questions, il fallait les traiter avec douceur et les renvoyer tranquillement ; d'un autre côté. L’enfant, qui était sous le talisman, s écriait avec épouvante qu’il apercevait un million d hommes terribles qui nous menaçaient et quatre énormes géants armés de pied en cap , qui semblaient vouloir entrer dans notre cercle. Pendant ce temps, le nécromant, tremblaut de peur, essayait de les conjurer en prenant la voix la plus douce et la plus suave qu’il pouvait. Vincenzio Romeli, qui tremblait aussi comme la feuille, soignait les parfums. Mon effroi n’était pas moindre que le leur, mais j’essayais de le dissimuler, et je prodiguais toutes sortes d’encouragements à mes compagnons, bien qu’en vérité je me crusse mort, eu

voyant la terreur dont était saisi le nécromant. L’enfant s’était fourré la tête entre ses genoux et criait : Je veux mourir ainsi ! Nous sommes morts ! Je lui dis alors : Ces créatures sont toutes au-dessous de nous, et ce que tu vois n’est que de la fumée et de l’ombre; ainsi lève les yeux. A peine m'eut-il obéi qu’il reprit : Tout le Colysée brûle, et le feu vient sur nous. Puis il sp. cacha le visage dans ses mains , et répéta qu'il était mort et qu'il ne voulait plus rien voir. Le nécromant se recommanda à moi, et me recommanda de tenir ferme et de faire brûler de l’assa-foetida. Je me tournai donc vers Vincenzio Romeli, et je lui dis de jeter vite de l’assa-fœtida sur le feu. Tout en parlant, je regardai Agnolino Gaddi. Il était si épouvanté que les yeux lui sortaient de la tête et qu'il semblait être plus qu’a demi mort. Allons, Agnolino , lui dis-je, il ne s’agit pas d’avoir peur ici, il faut s’employer et nous aider ; ainsi mets promptement de l’assa-fœtida sur les charbons. Alors Agnolino, en voulant se mouvoir, lâcha une pétarade avec accompagnement d'une telle abondance de bran, que l'assa-fcetida eut un effet beaucoup moins eflicace. A ce bruit et à cette affreuse puauteur, l’enfant se hasarda à lever la tête. En m’entendant rire, il se rassura un peu et dit que les démons commençaient à opérer précipitamment leur retraite. Nous restâmes ainsi jusqu’au moment où matines sonnèrent. L’enfant nous dit qu’il n'apercevait plus que quelques démons et à une grande distance. Enfin, dès que le nécromant eut accompli le reste de ses cérémonies, quitté son costume et ramassé un gros tas de livres qu’il avait apportés, nous sortîmes tous du cercle, en nous pressant l’un contre l'autre, surtout l’enfant qui s’était faufilé au milieu de nous, et avait saisi le nécromant par sa robe et moi par ma cape. Pendant que nous cheminions vers la rue des Bianchi pour regagner nos demeures, il assurait que deux des démons qu’il avait vus dans le Colysée gambadaient devant nous et couraient tantôt sur les toits, tantôt sur le sol. Le nécromant jurait que, depuis qu’il avait mis le pied dans un cercle magique, il ne lui était jamais rien arrivé d’aussi extraordinaire... Toute la nuit, chacun ne rêva que diable.»

Benvenuto ajoute que le nécromant lui prédit aussi qu'il courrait sous peu de jours un grand danger. En elTet, à la suite d'un meurtre, le pape voulut le faire arrêter, il fut obligé de prendre la fuite , et ce fut dans le cours de ses voyages qu’il rencontra Angelica, juste à l’expiration du délai assigné par les démons.

Il nous serait facile de multiplier les citations de faits de ce genre, d’en trouver de bien plus excentriques. Nous en avons publié quelques-uns dans la lleruc de Bordeaux, en 185û. M. le baron du Potet et M. Cahagnet ont pu composer chacun un volume sur ce sujet : l’un a donné la Magie dévoilée , l’autre la Magie magnétique. Si nous sommes arrêté par la volonté du premier et par les lois de discrétion pour parler de son livre avec détail, nous pensons qu’il nous permettra cependant de dire qu’il ne doute pas de la possibilité des évocations, puisque (lui-même nous le disait récemment), voulant Savoir au juste à quoi il devait s’en tenir sur cette matière, ila faitune évocation dans son salon du Palais-Royal. Trois esprits, dont il n’est parvenu à se débarrasser qu’avec peine, répondirent à son appel. L’idée la plus essentielle qu’ils lui inculquèrent fut celle de sa culpabilité, en voulant pénétrer dans le monde surhumain, interdit par la volonté du Très-Haut à nos investigations et des dangers auxquels il s’exposerait en renouvelant cette expérience. Son esprit resta ensuite longtemps fâcheusement impressionné, et ce ne fut que graduellement et plusieurs mois après qu’il redevint entièrement lui-même.

La dernière édition du Traité complet du Magnétisme animal a été enrichie d’un résumé sur les faits spiritualistes d’accord avec ces théories nouvelles. Si donc le directeur du journal laisse une grande latitude aux opinions dissidentes pour se produire, ce n’est certainement pas indécision de sa part, mais plutôt libéralisme, qui attend de la discussion, la conviction des dissidents et des indécis.

M. Cahagnet ne paraît pas s’être livré lui-même à des opérations de ce genre; il sa borne à ce que nous pourrions appeler les évocations de premier degré, bien préférables en cequ’elles sont généralement sans danger grave. Cependant il parle de

quelques faits magiques analogues aux précédents: ainsi i! cite M. Renard, qui a fait une évocation , qui en conserve un souvenir si fâcheux que pour rien au inonde, dit-il, il ne voudrait recommencer, et qui donne pour conseil de ne jamais en entreprendre de semblable.

Lui-même, M. Cahagnet, après s'être mis en relation avec un mauvais esprit, eut des visions, des pressentiments, etc., qui persistèrent pendant trois ans.

Il cite un cercle de neuf magnétiseurs existant avant 1830 et présidé par le coionel Roger. Plusieurs scènes étranges leur survinrent, parmi lesquelles celle qui suit : « Un jour où l’esprit qui présidait à ce cercle avait été rudoyé avec assez d’inconvenance, sans doute pour se venger, il fut chercher du renfort : c’est an moins ce qu’on peut présumer, si l’on en juge par les dégâts qui survinrent, Le cercle cabalistique fut assiégé par les esprits d’une façon toute particulière et dangereuse pour ses membres. Sans la puissance des noms des quatre archanges qui en protégeaient l’entrée, nos pauvres cabalistes eussent été broyés par la masse de projectiles qui leur fut jetée de tous les coins de la chambre où ils étaient assemblés ; mais fort heureusement aucun des membres présents ne fut blessé. Ce siège commença par un souffle ricaneur que tous entendirent et qui éteignit toutes les lumières à la fois. Ce souffle fut suivi par une multitude de cris aigus qui les remplirent tous d’épouvante ; vint ensuite le siège qui dura très-longtemps, vu l’état du lucide qui était, comme les autres, eflrayé de ce qui se passait. Lorsqu’il put revenir au calme, il fit cesser ce vacarme par un commandement approprié à cet acte. Le lendemain , il ne fut pas ramassé dans la pièce assiégée moins d’une trentaine de livres de ferraille de toute forme. Trois membres de ce cercle sont encore vivants et peuvent attester la véracité du colonel. Ce sont, etc.

« Un jour, un des lecteurs des Arcanes de la vie future, habitant Troyes, vint exprès à Paris pour me confier sa position et me consulter. Cet homme m’était tout à fait inconnu, il occupait une place honorable près le tribunal de cette ville? il me dit qu’ayant lu avec assez d’incrédulité la Philosophie oc-

culte d’Agrippa, il voulut tenter, avec deux autres notabilités de cette ville, les expériences indiquées dans le quatrième volume de cet ouvrage. Après tous les préparatifs, le cercle étant tracé et l’opération commencée, ils furent assaillis par une nuée de pierres qui ne purent pénétrer dans le cercle, mais qui firent une assez grande impression sur leur esprit pour les paralyser à moitié de leur œuvre. Mal leur en prit; car l’obsession n’en devint que plus forte et plus menaçante, se manifestant par des cris et des sifflements capables d'assourdir l'oreille la plus paresseuse , enfin ils eurent recours à une prière à Dieu qui les délivra de cette triste position et ne leur donna pas l’envie de recommencer. »

Ces faits et ces observations sont, croyons-nous, la meilleure justification que nous puissions faire du fond des opinions de Bodin et en même temps l’excuse deses erreurs. Ils expliquent beaucoup d’autres doctrines sur le diable et l’enfer. Mais pour le moment il s’agit de démêler le vrai du faux qui se trouve dans la Démônomanie. Ainsi M. Baudrillart rapporte, comme chef-d'œuvre de ridicule et de fanatisme, le début delà préface où Bodin raconte les détails d’une affaire de sabbat. La sorcière s’est servie de charmes, etc, etc. Ici nous entendons nos antagonistes nous demanderai nous ajoutons foi aux philtres, au mauvais œil, au déchaînement des tempêtes, aux stygmates,aux loups-garous; vous aussi, nous disent-ils demi-souriants, seriez-vous donc allé au sabbat, voyageant dans les airs un balai entre les jambes? Nous ne nous laissons pas effrayer par le ridicule, et nous répondons sans détour :

Oui, nous admettons le mauvais œil, les onguents rendus délétères non-seulement par les principes chimiques qu’ils contiennent, mais aussi par les émanations aériennes impures dont a pu les charger la volonté de malintentionnés.

Sur la production des tempêtes, M. Ricard (Cours de magnétisme) paraît disposé à reconnaître l'influence du fluide humain sur l'atmospHère; et, après diverses expériences, MM. Renard et Cahagnet partagent cet avis.

Sur les stygmates qui apparaissent sur le corps, lisez donc un curieux travail de M. Alfred Maury, inséré dans la Revue

des Deux-Mondes (1er novembre 1854). M. Maury n’a pas grande foi dans la magie et le magnétisme, et cependant il reconnaît la réalité de ces signes sut- certains individus.

Quant aux loups-garous, saint Augustin l'ait observer avec bon sens qu’il ne faut pas croire que l’art ou la puissance du diable puisse changer un corps humain en forme d’animaux, ni que la matière des choses visibles fléchisse à la volonté d’un ange rebelle. Mais il,pense que l’esprit malin peut prendre à cette fin un corps fantastique et lui donner quelle forme et quelle ressemblance il veut. Cette dernière croyance a été celle de la plupart des démonographes.

Il semble qu’il ne doive pas en coûter davantage d’admettre, que par des conjurations on puisse fixer momentanément un esprit sur un corps d’animal : ce serait un acte 'du môme genre que l’évocation dans une table.

Maisc’est-il une loi de l’autre monde et des métamorphoses que l’on peuty supposer que l’esprit d’nn être pervers puisse, à titre de punition, dégénérer et habiter pour un temps donné une forme animale inférieure? Porphyre, qui admet, conformément aux idées de Pythagoreet de Platon, que'les âmes passent sur cette terre dans plusieurs corps, ne'pense pas qu’une fois qu’elles ont atteint la forme humaine, efles puissent dégénérer et descendre dans celui des animaux. 'Il y a donc chez Bodin crédulité extrême, lorsqu’il ajoute foi à l’Ane. d'or d’Apulée ; et il eût bien fait de dire avec saint Augustin, dont il ¡rapporte l’opinion, que c’est une fascination.

Et le sabbat, y croyez-vous aussi? nous ditam. Voici un point essentiel, fondamental, qui nécessite quelque détail. Les nombreux témoignages consignés dans les procès dn moyen âge et de ¿la renaissance sont sinon 'complètement, au moins en grande partie exacts. Ainsi il y a très-peu à reprendre, pensons-nous, dans le récit suivant qui nous est transmis par Florimond de Ræmond, comeillerau parlement de Bordeaux ; nous rapportons cet extrait comme une description des plus fidèles et des plus complètes que nouscon* naissions de ces étranges assemblées.

« Je me contenterai de cette histoire prodigieuse advenue l’an 4594, laquelle surmonte toutes celles que Bodin a remar-

quées clans sa Démonomanie, ce qui m’a occasionné d’en faire le récit particulier. Une jeune femme, nommée Jeanne Bor-deau, appelante du juge ordinaire de la chastellenie de Sal-lagnai en Lymosin, qui l’avoit condamnée à la mort, estant ouye en la Chambre criminelle, sans peine ne tourment, confessa comme elle l’avoit fait par devant le juge, qu’en son jeune âge, un Italien l'avoit débauchée et amenée la veille de Saint-Jean, sur la minuit dans un champ, où il fit avec une verge de houx un grand cercle, marmottant quelques paroles, qu’il lisoit dans un livre noir, sur quoi survint un bouc grand et cornu tout noir, accompagné de deux femmes, et tout aussi tost un homme habillé en prêtre. Le bouc s’étant enquis de l’italien qui étoit cette fille, et lui ayant répondu qu'il l'a-voit amenée pour estre des siennes, il lui fit faire le signe de la croix de la main gauche, puis commanda à tous de le venir saluer, ce qu’ils firent, lui baisant le derrière. Ce bouc avoit entre les deux cornes une chandelle noire allumée, à laquelle les autres alloient allumer les leurs, et lorsqu’ils l’adoroient on jetoit dans un bassin de l’argent. Cette femme s'estant depuis retrouvée au même lieu, le bouc lui demanda un bouquet de ses cheveux, lesquels l'italien coupa et les lui bailla. Le bouc l’ayant retirée à part (1).........

...........Tous les mercredis et

vendredis de chaque mois, le chapitre général se tenoit au Puy-de-Dôme, où elle s’estoit trouvée une infinité de fois avec plus de soixante autres personnes, tous lesquels por-toient une chandelle noire qu’ils allumoient à celle que le bouc avoit entre ses cornes, à laquelle il avoit donné le feu, le tirant de dessous de sa queue, après cela tous se mettoient en danse en rond, le dos tourné l’un i l’autre. En cette assemblée, on disoit la messe à leur mode, tournant le dos à l’autel. Celuy qui fesoit l’office, qu'elle nomma estoit revêtu d’une chappe noire sans croix, élevant une tranche ou rond de rave teinte en noir au lieu de l’hostie, criant tous, lors de l’élévation : Maître, aidez-nous. On mettoit de l’eau dans le

(I) I.a décence nous fait une obligation de n'en pa9 dire davantage.

calice au lieu de vin, et pour faire de l'eau bénite, le bouc pis-soit dans un trou à terre, et celui qui faisoit l’office en arro-soitles assistants avec un aspergés noir. En cette assemblée, 011 distribuoit les mestiers de sorcellerie, et chacun rendoit compte de ce qu’il avoit fait. Les estais étoient pour empoisonner, ensorceler, lier, guérir maladies avec charmes, faire perdre les fruits de la terre et telles autres méchancetés (1). »

Voil t le récit d’un sabbat ordinaire, lorsqu’il était dirigé par un magicien qui n’opérait que naturellement ; des évocations d'esprit ont pu les rendre beaucoup plus extraordinaires; et môme plus dangereuses, comme clans le récit de Benvenuto.

Ces bizarres cérémonies remontaient à une haute antiquité ; elles ont été, croit-on, une persistance du paganisme à travers les temps modernes. Chassé des régions officielles, il se réfugia dans les carrefours des forêts et y vécut dans un demi-mystère, à peu près comme le christianisme naissant dans les catacombes.

Cette question de l’origine du sabbat a du reste été fort bien comprise par M. le comte de Résie dans un ouvrage rempli de faits curieux, très-souvent légendaires, mais interprétés le plus souvent dans un déplorable esprit (2). Cet auteur constate d’abord, avec Dom Calmet, que ni les Hébreux, ni les Egyptiens, ni les Grecs, ni les Latins, n’ont connu le sabbat, et il en donne pour raison que le démon, l’esprit du mal, cause première du sabbat, était, dans ces religions, placé sur l’autel et adoré publiquement; les Euménides, la Nuit, Hécate et Proserpine avaient, dit-il, leurs statues et leurs temples, et on leur offrait publiquement des prières et des sacrifices. Ces assemblées diaboliques faisaient elles-mêmes partiedes différents rites de leur religion, ou du moins rentraient dans le nombre de ces réunions secrètes, dont les désordres furent longtemps et soigneusement voilés sous le nom d’initiations et de mystères...

« Qui ne reconnaîtrait le sabbat de nos sorcières modernes

(1) L'Anlechriit, p. 76.

(ï) Histoire el traité des sciences occultes. Il en a été rendu compte dans ce journal par M. Morin.

dans ces orgies infernales qui se célébraient en Egypte, en Grèce, en Italie, en l’honneur de Bacchus, et dont le nom sert encore dans notre langue à exprimer tout ce que la débauche et le libertinage peuvent offrir de plus honteux ? Qui ne reconnaîtrait les sorcières du moyen âge dans ces bacchantes, demi-nues, furieuses, échevelées et couronnées de lierre, qui, le visage barbouillé de plâtre, ou couvert de masques hideux, exécutaient en rond des danses obscènes, mêlées avec la troupe lubrique des faunes et des satyres? Quand on lit dans les auteurs païens, ainsi que dans saint Clément d'Alexandrie, toutes les dissolutions et les impudicités des prêlres et des prêtresses de Bacchus, des ménades et des bassarides dans les assemblées qui avaient lieu tous les trois ans sur le mont Parnasse, on croit assister au sabbat nocturne de Satan, tel que l’ont décrit les auteurs du moyen âge ; on croit voir les accouplements honteux de sorciers et de sorcières avec les démons, les incubes et les succubes, ainsi que les pollutions, les méchancetés et les impiétés sans nombre qui se commettaient au* milieu des ténèbres, durant ces réunions infernales qui se tenaient dans la nuit redoutée du Valpurgis (1er mai) sur le 9ommet élevé du Broken. 'C’est là que tous les samedis les sorcières accourent du fond du Nord s’asseoir de chaque côté du bouc immonde ; les plus vieilles racontent, les plus jeunes écoutent. Puis, au signal du chef de la bande, chaque sorcière donne le bras à quelque démon fourchu ; le branle infernal ^commence, et se prolonge ainsi jusqu'aux premiers chants de 1 oiseau matinal, dont la voix a le pouvoir de chasser les esprits malfaisants qui viennent, pendant la nuit, troubler le repos des hommes. »

L’auteur poursuit ses recherches chez les peuples anciens, il retrouve le bouc en homme chez les Egyptiens, dans les lupercales, dans les fêtes de Bacchus. Bacchus, en Phrygie, était appelé Sabus et Sabezius, chez les Thraces Sabadius; en grec, Sabazim signifie faire beaucoup de bruit ou de tumulte, et les Grecs modernes appellent les loups-garous loups sabaziens, de là le mot sabbat.

M. le comte de Résie eût pu ajouter que, dès le quatorzième

siècle et principalement à la renaissance, l'esprit satirique qui se développait contre l’Eglise et qui se faisait jour jusque dans les temples, souvent sur les chapiteaux des colonnes, dut jouer un rôle important dans les usages du sabbat, en y luisant parodier le culte établi.

Parmi les circonstances propres au sabbat figurent en première ligne les voyages aériens que confessaient avoir faites toutes les sorcières; Bodin y ajoute une foi des plus robustes.

Les faits de soulèvement sont fréquents dans l'histoire de la magie. Dans un travail intéressant sur les possédées de Louviers, publiés dans les premiers numéros de cette année du Journal du Magnétisme, M. Piérart cite la sœur de Jéus-qui s’élevait de trois pieds en l'air, et l'évêque d’Evreux qui, voulant la retenir, était soulevé à son tour et jeté violemment ii terre. Simon le magicien, selon la légende, était aussi enlevé dans les airs. M’. le comte de Résie a réuni là mention de quelques prodiges de ce genre (p. hili et suiv.), mais qui n’ont de valeur que comme légende 011 poésie, à peu près comme beaucoup d’autres faits du même genre consignés dans les Vies des Saints. Aussi, sans déclarer impossibles à l'influence spirituelle le transport à de grandes distauces des corps humains, nous ne les admettons pas comme démontrés, et nous pensons que les vols aériens que croyaient opérer les sorcières, après s’être enduit le corps d’onguents narcotiques et excitants du système nerveux, étaient de pures hallucinations, résultat d’une tendance de séparation entre l’âme et le corps, plus prononcée que dans le rêve ordinaire et semblable à celle produite par le haschisch. 11 suffisait que des traditions mentionnassent ces transports comme possibles, que les personnes eussent assisté une fois au sabbat, ou même seulement que leur imagination eût été frappée du récit de ces scènes mystérieuses pour que les souvenirs dans le sommeil leur fissent considérer comme réelles après le sommeil ces illusions de la nuit. Le parcours de l'espace dans les airs est tellement dans les données de notre nature spirituelle qu’il est peu de personnes, quelque saines d’esprit qu’elles soient, et étrangères même aux questions que nous traitons en ce

moment, qui n’aient l’ait des rêves de ce genre et qui n’aien; passé qiielcjuos doux instants dans cet étrange état volatile.

Voilà, selon nous, une des plus graves erreurs admises par Bodin et par la plupart des démonographes. 11 a cru aussi et évidemment avec une bonne foi par trop crédule à la présence réelle et corporelle du diable. Qui ne comprend aujourd’hui que le plus souvent ces boucs immondes n’étaient que des sortes de travestissements de bals masqués, travestissements à l’usage d’êtres dépravés qui voulaient satisfaire à tout prix de basses passions ?

Mais Bodin veut absolument voir le diable partout : ainsi c’est Satan et non le sommeil qui produit l’extase; la preuve, pour lui, c’est l’insensibilité des sujets ; dans ce ravissement ils voient à distance, d’où il conclut que si les démons peuvent ainsi séparer l’âme du corps, à fortiori peuvent-ils déplacer les corps. Cet à fortiori ne nous parait pas très-logique, car la séparation de l’âme du corps est un fait naturel, c'est la mort qui a des degrés divers et des états préliminaires intermédiaires (1), tandis que le transport de corps dans les airs est au moins fort rare, si même il a été quelquefois réel. Les faits pour l’explication desquels Bodin croit l’intervention du démon indispensable sont opérés tous les jours par le seul fluide magnétique.

Mais, sous ce rapport, les idées fâcheuses et erronées de notre auteur sont loin d’être disparues. MM. de Mirville et de Résie sont ses dignes continuateurs; eux aussi voient à peu près partout et dans tous les faits magnétiques l’interventioa du démon, du diable, des mauvais esprits. Et tous ceux, fort nombreux encore, même parmi les magnétiseurs d’aujourd’hui, qui voient partout des interventions d'esprit sont encore très-près de Bodin, de M. de Mirville et de M. le comte de Résie, c’est-à-dire de l’erreur. Ceux-ci, il est vrai, n’appellent pas les esprits diables ou démons, ou, pour parler plus clairement, ne croient pas à une intervention redoutable et constante des mauvais esprits ; mais, en restituant au mot démon

(1) Voirco que nous avons déjà dit à co sujet dans le Journal du ifa-gnétiimc, 1857, p. 505.

son sens primitif, celui île génie et d’esprit eu générai, us sont tous à peu près d’accord. Seulement ils se fout une idée plus vraie que les premiers de la nature des esprits, en pensant que, dans la vie céleste comme dans la vie terrestre, il y a des transitions et des variétés infinies dans la nature des esprits. Il n'est pas, en effet, vraisemblablement si facile qu’on le pense de dire : celui-ci est bon, celui-là est mauvais. Croire aux catégories tranchées dans l’autre monde serait faire comme celui qui appellerait malhonnêtes gens tous ceux en prison et honnêtes tous ceux en liberté. Mais, à part cette divergence et cette rectification dans la conception de l’idée d’esprit due aux nouveaux spiritualistes, ils nous paraissent donner la main, sans s’en douter, aux démonographes d’autrefois. Quant à nous, nous nous éloignons des uns et des autres, en pensant que le fluide humain opère souvent seul sans concours d’esprit, et qu’il produit des effets analogues, mais moins intenses. Le point délicat à fixer consiste alors à dire quand le fluide seul du vivant opère, et quand il y a intervention d’esprit. Nous aurons occasion de revenir sur ce sujet qui est, dans l’état actuel de la science, un des points les plus délicats à élucider.

Revenons à Bodin et finissons-en une bonne fois avec lui. Son livre n’était pas. dit-il, complètement imprimé lorsque son éditeur lui communiqua le livre de Lan dis par Jean Wier, Medemi. Cet auteur réclamait l’adoucissement des peines prononcées contre les sorciers, quoiqu’il crût à la sorcellerie. Bodin voit dans cette opinion une contradiction qu’il combat en répétant plus d’un argument fort pitoyable, déjà développé dans son livre. Voilà le côté le plus déplorable et la grande erreur de Bodin. Semblable aux sauvages qui immolent des victimes humaines pour apaiser leurs dieux, il croit honorer la divinité en envoyant le sorcier au bûcher : « les plus doux et les plus pitoyables (compatissants),); votent pour la corde. Mais il faut ajouter à sa décharge que cette erreur fut celle de son temps : de I.ancre, conseiller au parlement de Bordeaux, est encore plus tristement célèbre que Bodin par ses sévérités envers les sorciers; Florimond de

Rœmond, autre conseiller du même parlement, défend avec énergie ce même corps d'avoir eu quelque mansuétude pour les sorciers. Afin de mieux réfuter cette opinion, il avait corrigé, dit-il, tous les arrêts rendus par ce parlement dans les affaires de ce genre. Nous espérons , pour l’honneur de l'humanité et de la Guienne en particulier, qu'un tel recueil est bien perdu, qu'il ne sera jamais retrouvé.

Nous partageons donc l’opinion de Jean Wier, quelque inconséquence que puisse y trouver Bodin : les crimes de ce genre, quoique très-réels, échappent, nous l’avons déjà dit d’autres fois, à la justice humaine et sont du ressort du tribunal de Dieu seul. Quelques magnétiseurs, bien pénétrés de ces dangers, ont demandé que la pratique libre du magnétisme fût interdite ; que son exercice fût soumis à des conditions de capacité et de moralité. En entrant dans cette voie, il faudrait des pénalités pour punir les contraventions, des tribunaux pour reconnaître les contraventions. On voit aisément où nous serions ramenés... à Bodin, au moyen âge (1). Or,- cela n’est pas possible, ou ne supprime pas ainsi d’un trait de plume Montaigne, Bayle, Voltaire, l’imprimerie, la vapeur, la télégraphie , c’est-à-dire les progrès accomplis par la raison humaine émancipée et indépendante; on ne supprime pas le temps, ce grand chemin de la liberté «t de la civilisation.

L. Lamothe.

(1) Voir un excellent article de M. Morin sur co sujet clans ce journal. 857, p. 121.

BIBLIOGRAPHIE.

LA VIN DES MYSTÈRES, par Emile Bertrand, brochure, IS55. — LIVRE

INTIME DES FAMILI.ES. par lo mémo, brochure, 1857. — TRIOMPHAIS ÜNITAS, par le même, t vol. i 11 - ï - -

M. Emile Bertrand a publié lin grand nombre d’ouvrages pour développer ses idées sur les destinées du genre humain : il veut régénérer le christianisme en puisant à ses sources primitives, répandre les sentiments religieux et réaliser l'unité de la grande famille humaine, en y faisant régner la fraternité. 11 poursuit avec le zèle le plus louable sa généreuse mission. Nous le félicitons de son dévouement apostolique, mais nous ne pouvons ici rendre compte de ses conceptions politiques et philosophiques. Nous n’avons à mentionner de ses écrits que ce qui concerne le magnétisme. M. Bertrand en est un chaud partisan, et, dans son livre latin dédié au Pape, loin d'épouser les antipathies et les sottes frayeurs des théologiens démonolàtres, il fait un pompeux éloge du magnétisme auquel il assigne dans l’avenir un rôle immense pour le perfectionnement physique et moral du genre humain.

11 consacre une dissertation aux tables tournantes et pait^r lantes. 11 ne voit aucune nécessité, pour expliquer ces phénomènes, de recourir à l’intervention d’esprits, il les attribue à la puissance de C homme collectif même sur la matière inanimée; s'appuyant sur les paroles de Jésus, que si deux ou trois personnes s’assemblent pour prier en son nom, il sera au milieu d’elles, l’auteur en conclut que les hommes, en unissant religieusement leurs pensées et leurs efforts, ont par leur seule volonté action sur la m&lièie; selon lui, « cette influence faible et peu sensible dans l’individu ne se montre

forte et puissante que dans l’action collective, et elle n’est môme destinée à devenir absolue et complète que par l’union et le concours de tous les individus qui composent l'humanité, c’est-à-dire l’être humain complet... (l’est sans doute pour nous donner une idée de notre puissance collective, que la Providence a permis la découverte du phénomène des tables et chapeaux tournants, afin de nous ramener au principe chrétien de l’union et de la fraternité de tous , à une époque surtout où l’homme, absorbé par ses préoccupations matérielles, ayant brisé le lien puissant de la vraie foi religieuse, tend le plus fortement à s’isoler de ses frères pour se concentrer en lui-même, sous l’influence d’un funeste et désolant égoïsme. »

M. Bertrand , précisant davantage ses idées, attribue le mouvement des tables à l'influence du fluide actif émanant de l'être humain. Cette explication , qui a été traitée ex professo par M. de Gasparin , est purement physique et semble contredire l’explication religieuse dont nous venons de produire le résumé. Car si le moteur en question est un fluide, la somme des effets produits sera en raison du nombre et de l’énergie des fluides, soit que les divers fluides convergent vers un môme but, soit qu’on les applique séparément à des buts distincts ; tandis que, d’après le système de l’être collectif, l’union ferait croître les forces dans des proportions beaucoup plus considérables. ,

D’un autre côté, si l’homme agit sur la matière au moyen d'un fluide dont il dispose. ce n'est plus par sa volonté seule qu’il produit des mouvements. De même que par mon souille j’agite une plume, quand par le rayonnement de la chaleur de ma main je fais monter un thermomètre très-sensible, j’agis sur les corps extérieurs à l’aide des fluides, mais non par ma volonté seule. 11 y a donc chez l’auteur contradiction au moins apparente, et qui peut-être n'est due qu’au peu de soin qu’il a pris de formuler sa pensée avec une netteté suffisante.

Quant à l'action de la volonté seule sur la matière , elle est très-problématique : cette supposition est môme contraire

à tout ce que nous enseigne l’expérience ; toujours, pour agir sur un corps, nous avons besoin ou du contact île nos organes ou de l’intermédiaire d’autres corps. Pour afin mer qu’il puisse en être autrement, il ne faudrait rien moins que des faits bien étudiés et où l'on pût prononcer avec certitude qu’aucun auxiliaire physique n’est intervenu, et il nous semble bien difficile, pour ne pas dire impossible, de se prononcer aussi catégoriquement ; car, quand même nous ne verrions en jeu aucun des agents physiques connus de nous, nous ne pouvons en concluie rigoureusement qu’il n’y a pas eu l’action de quelque force dont nous ne soupçonnions pas l'existence et dont les lois pourront nous être révélées par des progrès ultérieurs. L’action de la volonté seule ne se voit que dans les contes des fées, où, sans aucun intermédiaire, elle produit capricieusement les résultats les plus variés et se joue des lois de la . nature ; aussi n’est-ce pas à l’homme que la fantaisie des conteurs attribue un tel pouvoir, c’est à des êtres imaginaires, impossibles. L’hypothèse de M. Bertrand n’a de lien qu’avec le domaine de la magie et s’écarte totalement de l’ordre scientifique.

Il est encore démenti par les faits quand il assure que l’action fluidique , qui se traduit par la relation des tables , appartient surtout aux hommes de l'idée, c’est-à-dire aux personnes éminemment religieuses. L’expérience démontre que cette faculté, qui forme un degré dans l’ordre des médiums, dépend surtout du tempérament, et on la trouve très-prononcée chez des individus d’un caractère sec et égoïste, d’une intelligence épaisse, ayant même des opinions matérialistes.

Déjà, avant lui, plusieurs écrivains, frappés d'admiration à la vue des tables tournantes, avaient été saisis d'une espèce de vertige, et dans leur enthousiasme avaient déclaré que c’était un des plus grands événements de l'histoire de l’humanité, un signe éclatant par lequel la Providence nous annonçait de nouvelles destinées. M. Madrolle, entre autres, a placé cet événement, sous le rapport de l’influence sur le monde, au-dessus de la rédemption : il est vrai qu’à ses yeux c’était le fait capital qui consacrait d’une manière per-

inanenlela communion des vivants et des morts. PourM. Bertrand , qui rejette l’intervention des esprits dans ces phénomènes , 011 conçoit moins la haute portée qu'il leur assigne. Si l’on n’y voit que la découverte d’un moteur nouveau, d’une force physique ajoutée à celles dont l’homme dispose, les hymnes d’allégresse sont au moins prématurés. Car les mouvements qu’on obtient par l’imposition desmains, sont bien inférieurs aux effets produits,parunesimple impulsion musculaires; et.depuis cinqansenvironqu'a eu lieu ladécouverte des tables tournantes, 011 n’a pas môme entrevu la possibilité d’en fairela moindre application dansl’ordrc matériel. Rien 11enous autorise donc jusqu’ici à voir dans ces faits le présage d’une domination de l’homme sur la matière. 11 ne parait pas non plus que dans les exercices de tables, les effets s’accroissent sensiblement avec le nombre des opérateurs : le contraire a souvent lieu ; c’est sous les mains de quatre ou cinq personnes bien groupées, qu’on voit la table exécuter toutes sortes dejnouvements avec une rapidité et une agilité surprenante ; l’addition de nouveaux coopérateurs n’ajoute rien à la puissance et souvent même semble la diminuer. Les faits connus 11e justifient donc pas l’assertion de M. Bertrand sur la puissance de l’être collectif.

Sans doute, l’homme est appelé à régir le globe, à le dominer, à l’embellir, à le féconder, à le faire servir à tous sos besoins ; sans doute aussi ce n’est que par l’association qu’il pourra remplir d’une manière complète cette tâche sublime que lui a départie la Providence. Mais ce n’est pas par la volonté seule, ce qui suppose une sorte de quiétude contemplative, c’est par une énergie inflexible, par la force de son génie, par le développement de toutes ses facultés et par la mise en œuvre de tous les agents physiques que la nature a libéralement mise à notre disposition. Chercher à agir immédiatement sur les corps, c’est poursuivre une chimère : l’action médiate s’offre d’elle-même à nous, et le champ ouvert à notre activité est tellement vaste que nous n’avons pas besoin de rêver des conditions fantastiques.

L’auteur, 11e traitant des tables tournantes que d’une ma-

nière incidente, n’a pas jugé à propos de s’étendre sur ce sujet : i! ne semble avoir en vue que les mouvements avec contact, qui s’expliquent suffisamment par l’action inconsciente des opérateurs et ne présentent d’intérêt qu’au point de vue psychologique ; il n’y a donc pas nécessité de recourir à l’hypothèse d’un fluide. Quant aux mouvements sans contact, il y a d'abord constater les faits qui, bien que certifiés par un grand nombre de personnes recommandables, doivent encore être tenus pour douteux tant qu’ils ne pourront être reproduits à volonté, comme les expériences de physique. Jusque-là, le plus sage est de s’abstenir d’explications qui manqueraient de base.

A. S. MOKLN.

VARIÉTÉS.

— On lit dans le Journal (le Saint-Etienne :

« Le sieur M... et ses fils, domiciliés à Saint-Etienne,, avaient acquis, depuis plusieurs années, la réputation de communiquer directement avec les Esprits célestes et de-guérir, parleur intervention, toutes les infirmités humaines.

« Appelés auprès d’un malade, ils commençaient par lui faire comprendre qu’il n’était atteint d’aucune affection dangereuse, que c’était simplement un malheur qu’un de ses ennemis avait jeté sur lui. Pour conjurer ce malheur, les sieurs M... ordonnaient de placer, dans un vase de terre, de l’urine, de la raclure d’ongles, une ruèche de cheveux et de barbe et quelques gouttes de sueur des pieds, le tout provenant de l’ensorcelé; enfin d’ajouter à ce mélange de l’huile, du vinaigre et dix clous de la longueur de 6 à 8 centimètres, et de faire bouillir jusqu’à parfaite évaporation du liquide.

« Pendant cette opération, qui ne pouvait pas durer moins

de vingt-quatre heures, l'individu qui avait jeté le son sur le malade devait se présenter dans la chambre même où elle avait lieu et repren ¡re à son compte le malheur.

« Les clous devaient être enfoncés dans une planche destinée à cet usage, et n’ayant jamais servi à aucun autre.

« Si la guérison n’était pas obtenue (et elle ne l’était jamais), le malade devait prendre un bâton de la longueur de 3(5 pouces, d’un égal diamètre dans toutes ses parties, le couper en douze portions égales, les placer dans la poche droite de son pantalon et suspendre ce vêtement pendant vingt-quatre heures à la porte de sa chambre à coucher ; puis, le lendemain, ces douze bouts de bâton devaient être coupés dans leur longueur et être réunis tous ensemble, de manière à reformer le bâton sur une surface unie.

« Les sieurs M... père et fils ne se contentaient point de ces moyens absurdes pour enlever de l’argent à leur clientèle, car tous ces procédés ridicules étaient assez chèrement p lyés. Ils prescrivaient, afin d'obtenir l’enlèvement des malheurs pour lesquels on les consultait, de faire bouillir, après les avoir coupés, dans une marmite remplie d’huile, les vêtements du malade.

« Quelquefois l’un des fils M... se rendait ou feignait de se rendre à la Louvesc, pour intercéder auprès de saint François-Régisafin d’obtenir la guérison du malade.

« Enfin, lorsque tous ces moyens avaient été reconnus inutiles, on faisait lier avec des cordes les bras et les jambes du malade, et on lui prescrivait de rester dans son lit pendant au moins trente-six heures.

« Qui le croirait ? toutes les momeries absurdes ont trouvé créance auprès de certains esprits, et l’on prétend que la maison des sieurs M... ne désemplissait pas de gens qui venaient les consulter.

« Ces faits ont justement éveillé l’attention de la police, qui a fait une enquête, et la justice est saisie. »

(iliaque colonne dos journaux de médecine contient presque infailliblement, dans une langue de convention , comme la langue sacrée des Chinois et intelligible seulement pour les adeptes, des histoires dites avec un sérieux de matassin à se tenir les côtes, ou des drames racontés gravement, doc-toralement, sentencieusement, savamment, et que leur forme impassible rend encore plus terribles. Depuis trois mois, par exemple, ces journaux regorgent de discussions sans fin sur la fièvre puerpérale : or, il en résulie que les plus célèbres et les plus savants ignorent jusqu’au premier mot des causes et des remèdes de cette épidémie, de cette contagion ou de cette maladie non épidémique et non contagieuse. Tant d’interminables disputes, tant de formidables chocs, n’ont pas même produit une étincelle de lumière I On s’est pris de bec, passez-moi cette expression, qui peut seule bien faire comprendre ce qui s’est passé in docto cor-pore; on a débité des phrases ronflantes et savantes, en grec et en latin , on s’est critiqué l’un et l’autre, on a même plaisanté et ri. —Plaisanter et rire d'un fléau et de pareille ignorance! Mais, du reste, la question n’a pas fait un pas, point un seul ! On en est resté au sacramentel : et voilà pourquoi votre fille est muette ! de Molière. Le tout ad minorent medicinæ gloriam.

(La Patrie du 27 mai.)

SOCIÉTÉ DU MESMÉRISME.

La nouvelle Société du Mesmérisme s’est réunie pour la première fois le 2/i juin : elle n’est plus seulement tolérée comme était l’ancienne, mais autorisée par arrêté de M. le ministre de l’intérieur, ce qui lui donne une existence plus stable et plus régulière. Elle comprend la majeure partie des membres de l’ancienne Société, qui, après trois mois de sé-

paration, se sont retrouvés comme d’anciens amis, habitués de longue date à poursuivre le môme but, à répandre la même doctrine, à partager les mômes fatigues, a combattre sous le môme drapeau. Aussi est-ce avec joie, avec cordialité que l'on s’abordait ; les mains étaient sympathiquement serrées, on se félicitait de pouvoir reprendre ensemble l’œuvre interrompue par suite d’accidents fâcheux. La Société, désormais purgée de ses éléments de désordre, est comme une famille où régnent l’harmonie, la confiance réciproque.

M. le baron du Potet a exposé les motifs graves qui 1 a-vaient forcé à provoquer la dissolution de l’ancienne Société, les obstables qu’il a eus à vaincre pour obtenir la réorganisa-tion de la nouvelle ; il a parlé avec cbaleur de la grandeur du but et du rôle important que devait prendre la Société, il a montré en perspective le succès définitif du magnétisme, couronnant les efforts des sociétés, et l'humanité bénissant avec reconnaissance leurs travaux persévérants.—Bien qu’en règle, a-t-il dit, il n’y ait plus de séance publique, nous avons la promesse d’autorisation pour quelques séances non périodiques et qui n'ren ¡auront que plus de solennité.

Parmi les nouveaux membres dont s’enrichit la Société, nous sommes heureux de citer l’honorable M. Mialle, l’ami de Puységur, le savant écrivain, le vétéran du magnétisme.

La Société a commencé à procéder à ses élections. M. du Potet, a été élu président; MM. Morin et Petit d’Ormoy, vice-présidents. L’heure avancée a obligé de remettre les autres élections à la prochaine séance.

Baron du POTET, propriétaire-gérant.

CORRESPONDANCE.

CLINIQUE.

Mon cher maître,

Je suis souvent honteux de voir figurer mon nom, comme pour mémoire, dans votre journal, sans l'enrichir d’aucune observation pratique, car je m’abstiens de soulager qui que ce soit dans notre pays de libertó où l'on prive de la science quiconque se permet d’appliquer la main sur son semblable, soit pour le tuer, soit pour le guérir ; mais je crois cependant devoir me confesser de l’infraction que je viens de commettre, à la demande des deux médecins les ¡plus célèbres en allopathie et en homœopathie, à bout de voie, après un traitement de six mois sur une maladie qui menace de devenir à la mode comme la crinoline ; ces messieurs ont engagé le mari, personnage ministériel, de recourir à mes lumières, à moi simple rebouteur de lois foulées, fléau du laisser-faire, et tympa-nisateur de la routine.

Cependant, j’ai promis; je suis venu et j’ai vaincu d’abord l’incrédulité de la famille, et je vaincrai le mal si l’on veut suivre, non pas mes prescriptions, mais celles de la malade, dont la lucidité est extrême, attendu l’exacerbation, ou, si vous voulez, l’exaltation de la sensibilité nerveuse ; car la névralgie est universelle et entrecoupée de crises tétaniques, épileptiformes multipliées qui paralysent chaque fois un certain nombre de rameaux nerveux, et doivent amener k paralysie complète et la mort, si l’on n’y apporte renié* ; c’est, comme vous savez, au magnétisme seul que la c»re des névroses incombe, ainsi que toutes les malades de l'espèce contre lesquelles la médecine vulgaire se déclare impuissante, en ces termes : Que voulez-vous, c’est »erveux! — Mais, docteur, répondait Franklin, quelle est donc la maladie qui ne

Toïe Xvii__N° 37. — 2» Séiiie. — 10 Juillet 1858. lî

soit pas nerveuse? car enfin, sans les nerfs, je ne sentirais aucun mal, et ne vous ferais pas appeler.

Voici comment j’ai procédé en prenant la main de la malade que chaque bruit de porte, de fenêtre, de voiture faisait douloureusement tressaillir, comme chaque rayon de lumière fait souffrir une personne atteinte de choroïdite.

Jecommençai paranesthésier l’ouïe en approchantles doigts des oreilles : mais le moyen de se faire entendre d’une personne sans oreilles? le voici : après lui avoir crié mes questions et vu que l’isolement était complet, je songeai à la transposition des sens et je rencontrai l’ouïe au bout des doigts. —Vous m’entendez? — Fort bien.—Occupez-vous de découvrir votre mal et son remède, vous le pouvez et je vous l’ordonne. — Je vois que tout l’intérieur de l’épine dorsale est malade ainsi que tous les rameaux qui en sortent pour s’épanouir en dedans et en dehors. Oh! cela va jusqu’au bout des pieds et monte dans ma tête ; il y a des filets rouges, roses et blancs, tendus, gonflés, et des petits détendus, flasqueset morts. Comme ils ont souffert, le fluide n’y circule plus! — Le traitement que vous suivez est-il bon? — Les vésica-toires me font horriblement souffrir, il faudra les enlever après demain ; la quinine me soulage, mais me donnera une autre maladie qu’il faudra guérir, puis me faire des rigolades d’eau tiède entre les épaules, de cinq en cinq minutes ; cela me soulagera, mais ne me guérira pas, il n’y a pas de remède ! — Vous qui savez que Dieu a mis le remède à côté du mal et qui ne doutez pas de sa puissance, c’est blasphémer que de désespérer : cherchez et vous trouverez ; pas de paresse ; employez bien la/lucidité qu’il vous donne, et vous inventerez uii remède, aussi bien qu’un inventeur trouve une solution à force-Je la chercher.—Ah ! voilà : faire passer l’inflammation nerveuse à la peau; deux ventouses sèches aujourd’hui, quatre demain, puis six, puis quatre, puis deux. — Voilà déjà quelque chose, majg V0Us trouverez le reste une autre fois. — C est singulier, îe n’ai plus qu’un corps sans tête. — Cela prouve que votre esprV est délivré de la matière, et que vous pouvez 1 envoyer où vous voulez.—Oui.jevoisledocteurquiar-

rive, il sonne, il entre (c’était vrai). — Voyez ce qu’il y a dans le petit lit au second. — Ma petite fille (c'était également vrai). — Vous pouvez évoquer l'esprit des personnes qui vous sont chères. (Je renonce à décrire la scène déchirante que je m'empressai d’effacer sur la prière de la famille. Cela rentre dans le spiritualisme.) En ce moment une crise de tétanos commença; je lui demandai ce qu'il fallait pour la calmer. — I,a main entre les deux épaules. Ah ! que c’est bon, que c’est bon, que c’est bon ! Les nerfs se détendirent et la crise n’eut pas lieu. Elle annonça le lendemain que c’était la dernière. —C’est merveilleux, disaient les médecins.—Oui, messieurs, c’est merveilleux, et vous refusez cependant un tel secours qui vous guiderait mieux que toutes vos pharmacopées.

Ils me prièrent de demander l’origine de la maladie. — Cela acommencé dans le dos. — Mais, la cause? C’est lacause première que ces messieurs voudraient connaître. — Je ne veux pas le dire. — Suffit; intelligenti pares. Voyez vos poumons. — Le soufflet est bon. —Le foie.—Bon.—Le col de l’utérus. —Enflammé. —Le colon. — Encombré—Le sang. — Noir et épais; mais pas de saignée, pas de purgatif; un régime fortifiant, viandes blanches, beaucoup boire d’eau gazeuse, avec peu de vin, pour liquéfier le sang. Ayant quitté la main en ce moment, l’ouïe abandonna les doigts; je la cherchai au sommet de la tète, aux pieds, aux genoux, rien ; mais je la retrouvai à l’épigastre. — Étant à la veille de partir, cherchez qui pourrait vous soulager parmi les vôtres. — Personne, il faut un fluide étranger, ma famille et moi c’est tout un. — Ce mot fut une révélation qui en explique une autre, l’interdiction par la théologie des mariages consanguins, c’est que les fluides ou les pôles de môme nom se repoussent, tandis çue, de noms contraires, ils s’attirent;—mon gendre seul.—Je lui donnai mes instructions sur la nécessité de ne pas perdre la tramontane et de rester calme, impassible et san* le moindre effroi devant les crises les plus .violentes ; car. du moment où le magnétiseur s’effraye , s’agite, ou roidfi son action; en croyant maîtriser l’accès, il ne fait que le redoubler ; c’est ce qui arrive aux néophytes ou jeunes magnétistes. Tant que je n’ai pu me rendre maître de moi, je n’ai produit que des effets

désastreux sur mes sujets. Aujourd'hui c'est tout le contraire, je calme sans effort et sans fatigue les crises les plus violentes.

Il ne faut jamais oublier d’imposer au malade le souvenir du traitement qu’il s’est prescrit et la volonté de le suivre. _Il ne faut pas non plus le démagnétiser avant de lui

ordonner un réveil heureux, riant et plein d’espérance : cela fait le meilleur effet sur l’entourage et sur le malade lui-même.

Jamais depuis six mois elle n’a eu une meilleure nuit et une meilleure journée, me disait le mari ; comment vous témoigner ma gratitude? — C’est très-aisé, vous ôtes législateur, proposez l'admission du magnétisme dans la pharmacopée, ce ne sera pas la plus mauvaise de ses recettes, comme vous voyez. Je vous envoie ces quelques linéaments recueillis à la hâte en rentrant chez moi, car il faudrait un volume pour les nombreux et intéressants détails recueillis en deux séances de trois heures chacune. Ce serait tout un cours d’anatomie fait par la malade sur chacun de ses organes, au grand ébahissement des médecins. Comment en effet se reconnaître au milieu de ce labyrinthe de nerfs sortant delà colonne vertébrale pour aller vivifier par mille anastomoses chacun de nos organes? Comment se faitril que ce système télégraphique, destiné a porter des nouvelles de tous les points du corps à la station centrale qui leur renvoie ses ordres par les mêmes fils, est resté incompris des médecins jusqu’à la découverte d’Ampère?

Ne voyant pas circuler le fluide nerveux, ils n’y croyaient pas plus que le paysan qui ne voit pas passer le fluide élec-triqt« dans les fils du télégraphe ne croit à ce mécanisme.

Ne p®ut-on pas dire que l’établissement des télégraphes par toute '.a terre formera son système névralgique, et que les contrées qui tn seront privées resteront paralysées et privées de la vie de relation? M. Cantagrel aura raison de dire alors que la terre est un animal vivant, quand il ressentira les piqûres qu’on lui fait, et la médecine n’existera réellement que quand elle s’occupera avaw. tout des nerfs et de l’électricité animale intelligente qui les parcourt, sous la direction de la

volonté ou de l’esprit recteur ; car nous ne sommes que des stations, recevant des ordres de la station générale pour les transmettre à toutes les autres. Tenons notre pile en bon ordre, alimentons-la quand elle s’épuise ; transmettons fidèlement les dépêches d’en haut, ne falsifions pas, et nous mériterons la faveur de servir longtemps d’intermédiaire entre le ciel et la terre ; mais si nous laissons rouiller, salir et engourdir notre instrument, les transmissions divines prendront une autre route par anastomose, pour porter l’enseignement à nos semblables; nous serons relégués parmi les piles de rebut, brisées, jetées à la vieille ferraille pour être refondues sans doute, mais non sans déchet. Ceci explique, cette parole de l'Évangile : Donnez, donnez ; celui qui donne le plus s’enrichit au centuple; car Dieu l’emploie de préférence pour transmettre à la terre les étincelles de sa lumière, et les vibrations dynamiques de sa puissante volonté, la pile qui traverse le plus, dure le plus ; le baron de Humboldt a bientôt 90 ans, Biot autant ; c’est cela qui a fait appeler les vieux savants des immortels. Quant à vous, mon cher baron, vous ne mourrez que quand vous cesserez de magnétiser. Votre pile est excellente, ne la laissez pas s’oxyder; donnez donnez, prodiguez votre force, elle vous sera rendue avec usure, car la source d’où découle la vie est inépuisable, et les courants rapides ; vous le savez, vous qui, après cent magnétisations en un jour, vous trouviez en état de recommencer le lendemain ; répétez bien à vos élèves que la magnétisation à tours de bras fatigue les muscles, mais n’épuise pas la vie comme le profane vulgaire le croit sur la parole des scieurs de long et des portefaix.

JOBARD,

Conservateur du muiée d'industrie de Bruxelles.

Rio-Grande, nu Brésil, ce 18 mai 1858.

Monsieur et respectable maître.

Qu’ils sont heureux ceux qui, près de vous, suivant vos remarquables expériences et écoutant votre parole, ont pu s’initier ainsi à la science du magnétisme ! que de reconnaissance ne vous doivent-ils pas pour leur avoir montré la vérité et leur en avoir aplani le chemin ! que de cœurs dévoués ! à moins que la reconnaissance restant toujours une vertu, ne devienne jamais une vérité. Il n’y a cependant pas de plus grand bienfaiteur que celui qui vous loge une bonne vérité dans la cervelle, et vous la rend facile.

Quoi qu’il en puisse être, moins heureux que vos élèves, j’ai dû m’armer de courage, d’une fermeté de volonté, d’une constance rare, pour ne point me laisser arrêter dès les premiers pas par les ennuis, les dégoûts, les difficultés, venant autant de mon ignorance que de la mauvaise foi des autres.

En 1840, dix mois avant mon départ, alors que je ne songeais pas le moins du monde à quitter la France, une somnambule que je voyais pour la première fois, et dont je n’ai plus eu de nouvelles, m’annonça ce voyage, mon séjour dans ce pays, ce qui m’y adviendrait, et, je dois le dire, ses prévisions se sont accomplies en tout point.

Voilà donc dix-huit ans que je fais du magnétisme dans ce pays ; j’ai produit tant de faits, j’ai été témoin de tant de Choses, sans compter celles que j’ai ressenties moi-même, que je commence à regarder l’acceptation du mot impossible ccnmie impossible. Voilà bien de quoi se faire traiter de fou, et bien d’autres aménités que vous connaissez; ce sont les complaintes de ceux que la vérité ne peut éclairer.

J’ai employé le magnétisme au traitement des maladies, que les médecins avaient bravement déclarées incurables, et j’ai montré aux malades, à leur très-grande satisfaction, que les bornes de la méiecine étaient toutes dans l’ignorance volontaire de leur médecin.

J’ai guéri des douleurs, des maux de tête en une seule séance avec quelques passes seulement, des paralysies complètes en trois séances; j’ai guéri une obsession, et, sur les indications de l’obsédé qui était tombé en somnambulisme, j’ai dû avoir recours à la prière.... La prière, je crois qu’il n’y a pas beaucoup de cette médecine à la Faculté ni chez les pharmaciens. Ce traitement a présenté des laits merveilleux, que je vous rapporterais si je ne craignais de rendre ma lettre trop longue et vous fatiguer. J’ai guéri des épileptiques en .cinq mois de magnétisations.

Un pauvre petit enfant de quatre ans, dont la jambe était ployée en arrière contre lacuisse, qui nepouvait marcher qu’en s’aidant de ses mains, et dont le genou présentait une grosse tumeur, a pu se tenir droit à la troisième séance, et à la trentième n’avait plus besoin de mes soins.

Les maladies des femmes cèdent encore très-bien au traitement magnétique ; de nombreux exemples m’en ont convaincu. Dans tous ces cas divers, je n’ai jamais employé que la magnétisation directe, celle des aliments et de l’eau, à qui j’ai vu produire plus d’effets que n’aurait pu le faire la fameuse purge de Leroy, et qui a de plus, sur cette dernière, l’avantage de l’innocuité.

Un homme dont la bouche était remplie de chancres s’en est vu délivré en huit jours.

Voilà bien assez de merveilles dues à l’action du magnétisme ; je ne finirais pas de sitôt, si je ne voulais mettre un terme à ma lettre. J’ai éprouvé moi-même un commencement d’obsession, semblable en tout point à celle dont j’ai fait mention; je m’en suis débarrassé avec de la fermeté et du courage. J’ai été témoin de faits de spiritualisme, d’apparitions d’esprits. J’ai vu comme devant s’accomplir des événements qui se sont accomplis en effet ; mais j’aurais mauvaise grâce à vous les rapporter maintenant, j’aurais l’air de faire de la prophétie après coup.

11 en est une cependant que j’ai faite au moment où les Français s’embarquaient pour la Russie, et qui attend encore plus ample confirmation ; elle concerne ¡’Empereur

Louis-Napoléon. J’annonçais donc qu’il aurait plusieurs héritiers et régnerait longtemps. Comme tout ce que j’ai vu s’est accompli, je suis porté à croire cette dernière comme j'ai dû croire aux autres.

Enfin, moi qui sais à peine ce que c’est qu’une note, vous le dirai-je? je suis devenu compositeur; ce n’est certainement pas du Rossini tout pur, ce que j’ai fait, mais les amateurs ne le trouvent pas trop mal. Je vous mettrai à même d’en juger par un petit envoi que je veux vous on faire.

Si vous ne redoutez pas la longueur de mes lettres, si ce que je vous raconte excite quelque peu votre intérêt, j’entrerai une autre fois dans plus de détails, car, si je ne me trompe, ce sont les détails qui donnent surtout de l’intérêt à toutes les relations.

Je serais bien heureux et votre obligé, si vous vouliez m’honorer d’une réponse chargée de vos bons conseils ; en retour, si quelque chose peut vous intéresser dans le pays où je me trouve, je suis tout à votre disposition.

Agréez, Monsieur le baron, l'assurance de mon respect et de mon dévouement.

PIERRE JHOTIl.

BULLETIN SPIRITUALITE.

Governimcnl house Toronto, ce 30 mai 1838.

Monsieur le baron,

J'ai considéré le bon accueil que vous avez fait à ma première communication comme un encouragement à vous en adresser d’autres. Voici donc de nouveaux faits que je vous présente, pris parmi tous ceux dont j’ai été le témoin et l’acteur. Auront-ils pour vous et vos lecteurs l’intérêt qu’ils m’ont inspiré? en jaillira-t-il quelque vérité utile? C’est mon désir le plus ardent.

11 faut d’abord vous dire que le Canada n’est pas comme les États-Unis, où le spiritualisme est permis; ici les diverses sectes religieuses se sont réunies contre l'ennemi commun, ettouthommeconnu pours’en occuper est anathématisé comme suppôt du démon ; malgré cela la vérité n’en progresse pas moins, et nous formons un petit noyau qui augmente dans le silence, car, malgré notre bonne volonté de propager la vérité, les intérêts de la plupart de nos membres seraient en danger de subir une ruine totale, car avant tout il faut vivre... En arrivant à Toronto, mon premier soin fut de m’informer s’il s’y trouvait quelque médium, et j’eus le bonheur d’être introduit chez madame X..., excellent médium dans presque toutes les phases. La première séance à laquelle je fus admis, c’était le premier dimanche de février 1857 ; nous nous assîmes six personnes autour d’une table de quatre pieds ; écrire les noms des personnes formant le cercle, n’est pas nécessaire, et je veux bien en assumer toute la responsabilité. Les chandelles furent éteintes, mais un feu de bois qui flambait dans l’àtre donnait assez de clarté pour que la silhouette des assistants fût visible.

Après quelques minutes de silence, commencèrent ce qu’on appelle les démonstrations physiques, la table sc leva d’un côté cl de l’autre. T)es frappements légers se firent entendre, prouvant la présence des esprits. Une sonnette et un porte-voix que l’on avait préalablement placés sous la table, s’agitèrent et frappèrent sur nos pieds et contre nos jambes. La sonnette frappait sous la table avec une force telle que pourrait le faire un marteau. Quoique ce fût la première fois que j’assistais à de telles démonstrations, je ne fus ni effrayé, ni surpris, seulement ma curiosité s’augmenta et je voulus interroger les esprits moi-môme; mais, craignant quelque supercherie, c’est mentalement que je le fis. Je demandai si mon père était présent: trois'coups frappés sur la table, à côté de moi, fut la réponse affirmative ; de la môme manière, je demandai si ma femme, ma fille, ma sœur, ma grand’-mère étaient présentes, à toutes ces questions la réponse fut affirmative. J’éprouvais un bien-être inexplicable d’être ainsi entouré de ceux que j’avais tant aimés. Alors, m’adressant à mon père à haute voix, en italien, sachant qu’aucun de la société ne le comprenait, je lui demandai s’il était heureux, s’il était souvent avec moi, si ma femme et mes enfants étaient avec lui, et à toutes ces questions je reçus une réponse affirmative; lui ayant exprimé ma satisfaction de les savoir héureux, je lui demandai s’il pouvait m’écrire quelque chose que je pusse conserver pour souvenir, il me répondit par deux coups, ce qui veut dire douteux. Néanmoins, je mis une feuille de papier et un crayon sous la table. M. X..., le mari du médium, entonna un hymne auquel nous nous joignîmes; pendant que l’on chantait, la sonnette sonnait et le porte-voix frappait la mesure sous la table, sur nos pieds, avec beaucoup de force. Après le chant, je fis mentalement cette prière: Si c’est vous, mon père, qui êtes ici présent, donnez-m’en une preuve pour qu’il ne me reste aucun doute... Je n’eus pas plutôt formé cette pensée, que la sonnette frappa fortement sur mon pied, en même temps une main m’empoigna le bas de la jambe, me palpant doucement en montant jusqu'au* genoux; je mis ma main sur cette main, cherchant à

la saisir par les doigts, mais, malgré mes efforts, je lie pus la retenir qu’un instant, elle glissait de mes doigts aussitôt que je la serrais; quatre fois je pris cette main froide, quatre fois elle fondit dans mes doigts. Monsieur le baron, il vous sera plus facile de vous imaginer qu’à moi de décrire mes sensations après cette première séance. L’effet quelle eut sur moi fut d’adresser un vœu à notre Père qui est aux cieux, de me conduire à l’avenir de manière à mériter d’être heureux avec mes parents dans les sphères célestes. En ramassant le papier que j’avais déposé sous la table, je le trouvai tel que je l’avais mis sans aucun signe d’écriture.

Le 1" mars, le cercle ne se composait que de quatre personnes, M. et madame X..., M. J. et moi; nous nous assîmes autour d’une petite table ronde. Les esprits manifestèrent leur présence par des coups réitérés autour de la chambre , sur la table ; par le nombre et la différence de ces coups, l’on pouvait juger qu’ils étaient nombreux. Après les demandes d’usage, il fut prouvé que mon père était absent, mais que le reste de mes défunts étaient présents. Ma femme m’assura par la voie de l’alphabet qu’elle était très-heureuse, que notre fille était avec elle et qu’elles étaient souvent avec moi. Je lui demandai si elle m’avait pardonné les torts que je pus avoir envers elle. Elle me répondit que oui. Cette consolante assurance m’encouragea à la prier de me donner quelques preuves de son identité: elle ne me fit aucune réponse.. Cinq minutes après, je fus ébloui par une lumière bleuâtre, comme une étincelle électrique, qui parutsur la table, devant moi; doutant de mes sens, je priai l’esprit de renouveler ce phénomène, ma prière ne fut pas exaucée... Après quelques instants d’attente, je vis par la clarté du feu que madame X... avait la main et les yeux vei s le ciel dans une apparence d’extase ; son mari me dit à l’oreille qu’elle allait parler et qu’elle était en trance. En fait, avec une faible voix qui m’était bien connue, elle prononça cesmots : Chers amis, nesoyez pas contrariés si nous ne vous donnons pas toutes les démonstrations que vous désirez ; les conditions auxquelles nous sommes obligés de nous soumettre ne sont pas toujours favorables, même

ces petits coupsque nous vous donnons en réponse à vosques-tions, épuisent bientôt le médium électrique qui nous est nécessaire pour les produire ; mais nous progressons, et dans peu de temps nous pourrons nous expliquer avec plus de facilité. Mon cher et bien-aimé Louis, et chers amis, soyez certains que nous désirons autant que vous pouvez le désirer de vous communiquer les instructions nécessaires pour vous convaincre de ces divines vérités. Adieu, chers amis, aimez-vous les uns les autres et ayez confiance dans nos ellorts pour vous aider... Madame X... étant revenue à son état normal, j’ai prié ma fille Rose de me donner quelques marques de sa présence. J’avais une de mes mains placée sur mon genou gauche et l’autre sur la table ; quelques instants après avoir formé ce désir, une petite main froide se posa sur la mienne qui était sur mon genou, et puis la caressant légèrement pendant dix minutes, je pus sentir cette petite main caresser la mienne depuis le poignet jusqu’au bout des doigts; pendant tout ce temps j'éprouvais un bien-être, une espèce de frisson agréable, que je me gardais bien d’interrompre en voulant saisir ces trois petits doigts. La main disparut, et en même temps je sentis qu’elle grimpait sur mes genoux où elle s’assit, et, quoique invisible, et quoique mes mains ne pussent rien toucher, le poids d’un corps était pour moi très-sensible; après quelques instants, elle redescendit précisément comme ferait un enfant quittant les genoux de son père. Ainsi finit ma seconde soirée spiritua-liste. La distance que j’avais à parcourir pour aller chez moi est au moins d’une demi-lieue; mon contentement, mon exaltation était si grande, que je me trouvai chez moi sans m’être aperçu de la longueur du chemin.

Mardi, le 3 mars, je fus invité à me joindre au cercle chez M. X..., son frère de Buffalo , qui devait s’en retour nerle lendemain, était présent; il y avait aussi plusieurs autres personnes, en tout, nous étions huit à une table en noyer très-lourde. J’ai oublié de dire que parmi les esprits qui visitent madame X..., il y en a un qui désire être appelé Jinn, c’est un Indien qui est très-jovial, et toujours

disposé à faire ce que nous lui demandons ; c’est ordinairement lui qui se charge des manifestations physiques, telles que sonner la sonnette, faire danser les tables, nouer les mouchoirs ou toute autre chose que nous le prions de faire. Ce soir je n’ai pas occupé les esprits de moi, j’ai voulu laisser toute liberté aux étrangers de profiter de l’occasion , et tous eurent des manifestations satisfaisantes; mais, comme je ne veux pas écrire ce que les autres ont éprouvé, je ne dirai que ce qui me concerne. D’abord, voyant que la table ne bougeait pas comme à l’ordinaire, je dis en riant : Jinn trouve la table trop lourde ce soir; je n’eus pas plutôt dit cela, que la table fit un bond, s’élevant d’au moins uu pied et retombant si lourdement que toute la société en fut épouvantée. C’était sans doute pour me prouver que ce n’était pas trop lourd pour Jinn... M’adressant à lui, je dis : Jinn, veux-tu me faire une faveur? Trois coups. Je désire que tu noues mou foulard pour que je puisse le garder pour souvenir de ton savoir-faire... Trois coups. Je jetai mon foulard sous la table, et la séance continua ; tous les assistants firent des questions et reçurent des réponses. Une demi-heure après avoir mis le foulard sous la table, je sentis quelque chose qui me chatouillait les jambes à la hauteur des genoux; j’y mis la main et je trouvai que c’était mon foulard si artiste-ment noué, qu’il serait difficile pour un mortel de l’imiter. Je le conserve religieusement pour le montrer aux incrédules... Ce pauvre Jinn eut de la besogne, car tous les assistants ayant vu mon foulard, voulurent aussi avoir le fac-similé, et tous jetèrent leur mouchoir sous la table, mais il n’y en eut que deux qui furent noués.

Je demandai à ma fille Rose si elle voulait m’écrire un mot, elle répondit affirmativement, je mis du papier et un crayon sous la table ; nous entendîmes le bruit du crayon se promenant sur le papier, et après quelques minutes, il me fut remis par une main invisible à la hauteur de la table. Les chandelles étant allumées, nous trouvâmes le papier tout couvert de marques au crayon, mais pas la forme d'une lettre, rien d’intelligible; elle a voulu par là me montrer sa

bonne volonté de m’écrire quand elle aurait appris. Celle-ci fut pour moi une autre heureuse soirée ; j’en ai eu beaucoup depuis, comme vous verrez dans ce qui suit. Y a-t-il rien de plus consolant que de se savoir toujours entouré par des êtres qui s’intéressent à vous, qui vous gardent, vous inspirent autant qu’il est en leur pouvoir de le faire, qui se réjouissent de nos bonnes œuvres et qui, sans doute, se chagrinent quand vous agissezeontre les lois divines et de la nature? N’est-ce pas une forte raison pour nous conduire, pour nous abstenir de commettre des crimes devant ces témoins qui nous aiment et que nous aimons, et de leur faire de la peine? Quand nous serons tous spiritualistes véritables, nous aurons le millénium...

Les ministres des religions établies, trouvant que, nier ces phénomènes après tant de faits prouvés par des millions d'êtres intelligents ne leur donne pas les avantages qu’ils en attendaient, ont décidé de faire l’honneur au diable ;de tous ces faits ; mais, malheureusement, l’on connaît l’arbre par le fruit qu’il produit, et le spiritualisme a converti plus d’hommes au bien dans ces dix années de son existence, que tous les prêtres depuis Moïse.

Depuis mars jusqu’à septembre, répétition des mêmes faits dans le détail desquels je n’entrerai pas, pour ne pas vous ennuyer avec des redites qui ne pourraient avoir aucun intérêt ni pour vous, ni pour vos lecteurs, et je reprends mon récit au 28 septembre 1857.

Ce soir-là, nous, c’est-à-dire M. et madameX..., ma femme et moi, retournions d’un cercle spiritualiste de chez un de nos amis qui est médium (chez qui nous allons presque tous les dimanches, et où nous recevons des leçons par des discours provenant des esprits haut placés dans les sphères et dont je parlerai à la fin de cette lettre). Nous devions passer devant ma maison avant d’arriver chez madame X...., et nous les priâmes de s’arrêter un instant chez nous et prendre un verre de bière ; ils acceptèrent, et nous nous assîmes autour de la table ; le domestique apporte du pain, du fromage et de la bière. Au centre de la table était un verre en porce-

laine contenant un bouquet de fleurs ; nous causions, tout en mangeant, de choses indifférentes, quand, tout à coup, la table lit un bond qui manqua de renverser les bougies. Je m’écriai : « M. X..., prenez garde, vous allez renverser tout ce qui est sur la table. » llmeréponditqu’il ne l’avait pas touchée ; alors je dis : « Dans ce cas, ce doit être Jinn qui est avec nous. » Troiscoups'sur la table prouvèrent que je ne m’étais pas trompé... et je dis : «Jinn, je suis bien aise que tu sois avec nous, et puisque tu es si aimable, je vais te chanter une chanson. » En réponse, il y eut un grand nombre de coups frappés en preuve de sa satisfaction. Je décrochai ma guitare et commençai à chanter, en m’accompagnant de l’instrument, une chanson anglaise très-gaie. Jinn frappait sous la table la mesure. La chanson finie, je lui demandai s’il voulait pincer de la guitare pendant que je chanterais.... Trois coups. « Désires-tu que les bougies soient éteintes? » Trois coups. Nous éteignîmes les bougies, je déposai l’instrument sur la table, et je recommençai à chanter la même chanson ; mais il paraît que Jinn n’est pas professeur de guitare, car son accompagnement ne consistait qu’en un frottement en mesure sur les cordes. La chanson finie, la guitare fut passée par la main de notre invisible convive par-dessus les genoux des trois autres personnes et finit par s’arrêter sur les miens... Je lui dis : « Merci Jinn ; pour te récompenser de ton obligeance, je vais te chanter une jolie romance. » Trois coups, accompagnés de mouvement de table. Je commence la romance d’Otello : Arnica a pic cC un sa lice; mais je n’eus pas plutôt fini le premier couplet, que la guitare me fut arrachée des mains et placée sous la table. Je lui demande pourquoi il m’arrachait la guitare ; il me répondit par deux coups. « Tu n’aimes donc pas cette romance (un coup) ? Est-elle trop triste (trois coups) ? Veux-tu que je t’en chante une plus gaie (trois coups)? Rends-moi l’instrument!» A l’instant il me fut remis dans les mains. Alors je chantai la tarantelle napolitaine, qui plut beaucoup à notre ami, car il frappait la mesure sur le dos de la guitare, sur ma tête, mon dos, mes bras, et tout autour de la chambre. Remarquez que Jinn doit avoir bonne

oreille, car tous ces coups étaient frappés on mesure. La ta-rantelle finie, je lui demandai s'il aimait cela; après les trois coups affirmatifs,il frappa contre le mur, sur tous les meubles (c’est par ce tapage qu’il nous montre sa satisfaction). Après qu’il eut fini ses démonstrations de contentement, il y eut un instant de silence , mais il parait qu’il n’en était pas moins occupé ; car, quelques instants après, je sentis couler sur mes pantalons un liquide froid, et je m’écriai : « Jinn, tu as renversé le vase aux fleurs, car l’eau coule de la table sur moi... » Unfort coup pour réponse. Je sonnai pour avoir de la lumière, et je fus étonné de voir le vase à la place ordinaire, la table parfaitement sèche; mais, en regardant mes pantalons, toute la jambe gauche était trempée. Ne pouvant concevoir d’où venait cette eau , je pris le vase à fleurs, j’en ôtai le bouquet , et quelle fut ma surprise de ne pas trouver une goutte d’eau dedans... Jinn avait ôté les fleurs du vase, avait répandu l’eau sur moi et remis les fleurs et le vase à leur place... Je garde les pantalons sans les faire laver pour montrer aux sceptiques la tache d’eau jaunâtre visible. M. et madame X... s’en allèrent chez eux, et ainsi finit cette séance inattendue. Octobre 22. J’allai passer la soirée chez madame X... où son frère, sa belle-sœur et moi nous nous assîmes autour de la table ; aussitôt assis, les mouvements de la table, les coups réitérés, aussi bien qu’une chaise non occupée à l’extrémité de la chambre, qui se mit en mouvement sans contact apparent, nous annonça la présence des esprits. La guitare que j’avais apportée, la sonnette , le porte-voix étant déposés sous la table, le vacarme commence ; la sonnette surtout faisait un tapage si grand, que nous fûmes obligés d’en ôter le battant pour ne pas réveiller le voisinage (c’est une sonnette à main de six pouces de diamètre). Malgré cela, Jinn et ses amis n’en firent pas moins de bruit, en frappant du manche sous la table de force à la défoncer : les marques produites ne pourront jamais être effacées... Après les répétitions de questions et réponses, la guitare fut pincée par Diou sait combien d’esprits à la fois, ne formant qu'un carillon inharmonieux. Ilfut demandé s’il y avaitbeaucoup d'esprits dans la chambre. Trois coups.... Voulez-vous les compter? — Oui. » Alors on com-

mença lentement à frapper sur la table, et nous comptâmes jusqu’à vingt, puis ils frappèrent si vite qu’il nous fut impossible de les suivre. On dit : « .linn, tu vas trop vite. » Aussitôt la main du médium fut influencée ; elle prit le crayon (qui avec du papier est toujours sur la table) et écrivit ces mots : « Les esprits présents sont si nombreux qu’il nous est impossible de les compter. Si vous pouviez les voir, vous verriez qu’il n’y a pas un pouce d’espace qui ne soit occupé... » La belle-sœur de madame X... dit ¡«Quelqu’un ôte mes souliers. » Madame X... répond : « A moi aussi. » Après quelques instants, elle reprit : « On me les remet. » Encore quelques moments, et l’autre répond : « Et à moi aussi. » La belle-sœur dit : « 11 parait qu’ils se sont trompés depied, car je sens que les souliers me serrent plus étroitement qu’à l’ordinaire. » Madame X.. : « A moi, au contraire, ils me semblent avoir grandi. » Et, ôtant son soulier, et le mettant sur la table, elle s’aperçut que ce n’était pas le sien, maiscelui de sa sœur. Ainsi, il paraît que Jinn et ses amis avaient changé les souliers des deux dames. Madame X.... ayant remis le soulierde sa belle-sœur à son pied, quelques minutes après ils furent rechangés et remis à leur place. Quelques instants après, la belle-sœur qui est une forte et grande femme, se sentit en-traînée par les pieds sous la table, et, malgré tous ses efforts, elle fut forcée de glisser de sa chaise par terre, d’où elle se releva sans trouver d’opposition.... Me rappelant qu’il y avait une demoiselle en visite chez moi, et que j’avais promis de rentrer à dix heures pour la reconduire chez elle, je me proposais de quitter le cercle, quand je me sentis pris par les jambes, parles mains, et, malgré mes efforts pour me délivrer, je n'en pus venir à bout, et je dis : «Jinn, il faut que tu me laisses partir; car c’est dix heures, et mademoiselle N.... doit être rentrée chez elle avant dix heures et demie. » Pour réponse, il y eut un coup sur la table. « Tu ne veux pas me laisser partir?—Non.—Tu m’obliges à manquer à ma parole.— Non. II me retint ainsi jusqu’à la fin de la séance, quand il nousditbon-soir, et je fus délivré. En rentrant chez moi, préparé à faire mes excuses à la demoiselle, ma femme me dit qu’un ami de miss N.... était venu la prendre à neuf heures. Ainsi vous voyez que Jinn avait raison de ne pas me laisser partir. Du-

rant cette soirée les chandelles ne furent pas éteintes, et la chaise vide à l’extrémité de la chambre fut plusieurs fois tournée de côté et d’autre sans contact apparent : nous en étions éloignés de deux mètres. Mon père étant présent, je le priai en italien de tourner la chaise, ce qu’il fit, la tournant du côté que je lui indiquais. Monsieur le baron, si vous avez eu la patience de lire jusqu’ici mon mauvais français, vous devez en être rassasié, et je pense qu’il serait prudent de m’arrêter ici, car si je vous traduisais tout ce que mon journal contient de faits extraordinaires, je craindrais de vous fatiguer. Cependant, permettez-moi de vous en raconter encore un ou deux qui, je crois, méritent votre attention ; libre à vous de le jeter au feu si cela vous ennuie.

Vous devez vous rappeler que je souffrais de la goutte scia-tique et que, après deux années de souffrances, après avoir essayé tous les moyens de soulagement de l’art médical, sans aucun secours avantageux, j’eus recours à vous, et que, dans quinze magnétisations, vous.me rendîtes à la santé. Depuis mon arrivée en Amérique, j’eus souvent des rechutes de mon ancien tourment, et, quoique d’une manière moins douloureuse, c’était assez désagréable, souvent étant obligé de garder ma chambre, Nous avons ici de la très-bonne bière. C’est la seule boisson quej’aime; j’avais cru m’apercevoir que quand j’en buvais quelques verres de plus, mes douleurs me revenaient plus fortes. Un soir que M. et madame X.... sou-paientchez moi, j’ai voulu, après le souper, m’informer d’un esprit, qui s’appelle docteur Chopin, si la bière me faisait du mal; aussitôt madame X.... fut poussée à écrire ces mots : « Prenez une bouteille de solution d’arsenic et une bouteille de bière ; quand vous avez soif, buvez l’arsenic, il ne peut pas vous être plus nuisible que la bière. »

Depuis cet avis, j’ai abandouné la bière, et le résultat est que, depuis six mois, je n’ai pas souffert la moindre douleur. La veille de Noël, nous étions six à souper chez moi, M. et madame X...., ma belle-sœur, une demoiselle de nos amies, ma femme et moi. Pendant le souper, les esprits annoncèrent leur présence par des battements de la table, des coups, etc. ; il y avait sur la table, quatre verres de bière et deux verres d’eau. Vers la fin du souper, les verres venaient d’être

remplis, la table commença à faire des mouvements si marqués, que nous fûmes obligés de tenir les flambeaux avec la main pour les empêcher de tomber. Pendant ces mouvements, toute la bière contenue dans les verres fut répandue sur la nappe, tandis que pas une goutte d’eau ne sortit des autres. Remarquez que les verres d’eau étaient aussi pleins que ceux de la bière ; mais une puissance invisible gardait les premiers tranquilles et permettait aux derniers de répandre leur contenu... J’ai oublié de vous dire que Jinn avait pris une affection toute particulière pour moi, et m’en donnait des preuves en introduisant ses mains entre mes pantalons et ma jambe gauche , me magnétisant de dix à vingt minutes chaque fois ; mais en le remerciant de sa bonne volonté, je ne m’en trouvais ni mieux ni pire ; aussi, je n’ai pas grande foi à la magnétisation d’outre-tombe... Encore un fait pour dernier bouquet.

Un soir, nous étions à peu près douze personnes assises autour d’un guéridon. 11 y avait six dames et autant d’hommes ; les messieurs, en entrant, avaient accroché leurs chapeaux aux chevilles dans le corridor où était la porte de la chambre où nous tenons nos séances. Dans ce corridor est toujours une lanterne allumée, qui éclaire tout le passage. Quand le cercle est formé, la porte est fermée et les chandelles allumées dans la chambre, éteintes. Ce soir-là, après les manifestations habituelles , nos chapeaux furent déposés par des mains invisibles devant nous sur la table ; la chambre était partiellement éclairée par le feu de l’âtre, et nous avons tous vu notre chapeau devant nous. Nous les avons touchés et reconnus... Après quelques minutes, les chapeaux disparurent, et en sortant, nous les retrouvâmes accrochés dans le passage comme nous les avions laissés... Je conçois qu’un esprit puisse pénétrer par le trou d’une serrure ; mais que des objets matériels s’introduisent par là, je ne peux pas le comprendre. Remarquez que la porte n’aurait pu être ouverte sans qu’on s’en aperçût; la lumière dans le passage aurait éclairé l’ouverture , ce qui ne pouvait pas se faire à l’insu de douze personnes. Pouvez-vous expliquer ce phénomène?

Je ne puis pas finir cette lettre sans vous donner un abrégé des quelques discours que nous recevons tous les dimanches au soir, d’une société d’esprits qui ont la bienveillance de nous instruire des lois divines. Il me serait impossible de vous décrire les beautés des sphères spirituelles ; ils ont des villes, des mers, des lacs, des forêts, des temples, des habitations somptueuses, et aussi des bicoques, le tout d’une supériorité si grande, en comparaison de notre terre, que l’imagination de l’homme ne peut s'en faire une idée... Nous sommes instruits que, quand nous quittons notre forme, nous nous réveillons avec un autre corps d'une matière éthérée. Nous regardons autour de nous pendant quelques minutes ; nous voyons nos amis pleurant sur notre corps étendu sur le lit ; puis notre ange gardien qui est ordinairement quelqu’un de nos parents morts avant nous, nous tend la main et nous emmène à travers les airs jusqu’où est notre demeure. Cette demeure est ordinairement placée parmi ceux qui nous sont semblables en dispositions; ainsi, si nous sommes ivrognes, usuriers, sensualistes, gourmands, etc., nous nous trouvons parmi les mêmes classes d’êtres ; c’est ce que les esprits appellent l’enfer, car il n’y a d’autre enfer ni d’autre diable que celui que nous nous donnons nous-mêmes. Dans ces enfers, il règne une obscurité des plus profondes. La nourriture nécessaire pour le soutien des esprits est difli-cile à obtenir, ce n’est ( comme ici ) qu’avec beaucoup de peine qu’on l’obtient. Plus nous sommes mauvais au moral, et plus nous descendons dans l’obscurité ; mais cette punition n’est pas éternelle ; là comme ici, cela dépend de nous. Nous quittons ce moude emportant avec nous toutes nos vertus, tous nos défauts, sans rien perdre. Mais il y a toujours des bons anges qui descendent dans ces lieux lugubres, tâchant de les relever en leur montrant un point lumineux à distance qu’il laut atteindre pour obtenu- cette réhabilitation qui, Mt ou tard, doit être la destination de tout être immortel. Mais, làcommeici, il y a des êtres obstinés qui reçoivent ces leçons bienfaisantes avec mépris et chassent ainsi pour quelque temps ces bienheureuses influences. Tandis que ceux qui, par

leur amour pour leurs frères , se sont acquis une plus belle place dans les sphères, sont reçus avec joie par des légions d’anges, etc., conduits dans ces habitations célestes promises par le bon Nazaréen. Los Esprits nous apprennent aussi que la bible contient de bonnes choses parmi un tas d'erreurs. Ils nous donnent une idée de la création qui est bien éloignée de celle de Moïse. Ils nous prouvent que nous progressons ; que le mal qui est dans ce monde est nécessaire pour nous faire apprécier le bien auquel il conduit. Ayant demandé à un esprit d’une intelligence élevée si la prière était nécessaire, il répondit, par un beau discours d’une heure, que prier Dieu était une insulte à l’Etre-Suprême, car Dieu aime tous ces enfants également, et que ce n’est pas lui qui nouspunitde nos méfaits, mais que nous ne faisons que subir les conséquences de nos actions, fixées par des lois éternelles: que c’est un sot orgueil de croire que nous pouvons offenser Dieu; que tous les soi-disant péchés sont commis ou contre nous ou contre nos frères, et que si nous faisons du mal à notre prochain, c’est notre prochain qui doit nous pardonner , et c’est à celui à qui nous avons causé des chagrins dont nous devons implorer le pardon, indispensable à obtenir, pour pouvoir aspirer au royaume des cieux. Je fis à un autre esprit cette objection : «Vous dites que la prière à Dieu, non-seulement n est pas nécessaire , mais que même c’est une insulte à la Divinité, comment se fait-il donc que la plus grande partie des esprits qui nous font des discours en public par les médiums qu’ils entraînent, commencent ordinairement par une prière adressée à l’Etre-Suprême? » La réponse fut 1 occasion d’un autre discours qui nous força d’admettre la justesse de son raisonnement.

« Dans les réunions publiques, dit-il, il s’en trouve peu qui ' oudraient admettre la nullité de la prière, et nous faisons usage de leur faiblesse comme d’un médium , pour concilier leur attention qui les dégoûterait en agissant différemment; car ils disent ou pensent alors que le spiritualisme ne peut être contraire à la religion, puisqu’ils invoquent l’aide de Dieu dans leurs discours. » *

J'ai souvent pensé, en voyant tant de misère dans le monde , que les esprits pourraient secourir pécuniairement des millions de pauvres souffrant la faim et la plus misérable existence. 11 me semble que cela ne doit pas leur être difficile, car, pouvant aller partout, transporter des poids considérables, qui les empêcherait d'user de tant de trésors enfouis sur terre et dans la mer? Ces trésors n’appartenant à personne, l’on 11’Oterait pas à Pierre pour donner à Paul, et la distribution pourrait être faite sans causer de perte à personne. J’ai souvent posé cette question à des esprits, sans en obtenir de réponse satisfaisante ; ils s’excusent en disant que ce n'est pas leur mission. Il me semble à moi que ce serait un excellent moyen d’inculquer le spiritualisme.

Je regrette, monsieur le baron, mon absence de Paris le 25 mai, et j’attends avec impatience le récit de la fête à l’occasion de l’anniversaire du grand Mesmer. Lui aussi était spiri-tualiste, il fut la première étincelle qui doit embraser 1 univers.

Gloire à Mesmer 1 gloire à vous ! digne apôtre de ce grand homme. Gloire à tous les suivants de cette science divine !... Les guérisons par l’imposition de la main sont très-ordinaires en Amérique. C’est étonnant combien de personnes ont été guéries de maux, abandonnées comme incurables par la médecine.

Malgré cela, je ne puis obtenir la guérison de mon fds, qui, à l'âge de huit ans, ne peut parler, quoiqu’il ne soit pas sourd; il est tout à fait imbécile. Vous pourrez vous former une idée de son idiotisme, si je vous dis qu’il est même plus bête que son père.

Je regrette de voir qu’un homme de l’esprit de M. A. S. Mo-rin soit si conlraire au spiritualisme; un séjour d’un mois à New-York suffirait pour le convaincre de son scepticisme.

Agréez, monsieur le baron, le dévouement de votre reconnaissant et humble serviteur,

t. BERTOI.OTTO.

CHRONIQUE MAGNÉTIQUE.

MM. BABINET ET MABRU.

M. Babinet, lors de sa polémique sur les tables tournantes et parlantes, a écrit que « le magnétisme et le somnambulisme étaient appelés à devenir deux belles et bonnes sciences. » Nous avons enregistré avec joie cet aveu d’un des hommes les plus savants de notre époque, et nous croyons que le moment n’est pas éloigné où les corps savants, entraînés par l’exemple de quelques-uns de leurs membres, dépouilleront de vains préjugés et consentiront enfin à étudier sérieusement des phénomènes dont l’importance s’accroît de jour en jour, et qu’il n’est plus permis à la science de dédaigner.

Dans une des spirituelles causeries dont il enrichit le Journal des Débats, M. Babinet s’exprime ainsi (numéro du 23 juin) : « Comme la cause physique des épidémies est encore enveloppée d’une grande obscurité, plusieurs personnes avaient espéré et espèrent encore que le magnétisme animal pourrait nous donner quelques lumières sur ces influences occultes, car les phénomènes de ce genre étant attribués par tous ceux qui ne sont pas tout à fait incrédules à des ell'cts nerveux, il eût pu se faire que des organes qui dans l’état normal auraient été insensibles aux agents physiques dont l’action pro-duitlesépidémies,fussent dans l’état magnétique influencés par ces agents de manière à nous donnerd’utiles renseignements.»

Il y a là une indication dont les magnétiseurs devront profiter : on leur offre un sujet d’études fort important et dont les résultats peuvent être très-précieux. Il nous semble que le somnambulisme devra aussi être appelé à fournir son concours : il faudrait, lors des épidémies, inviter les somnambules lucides à porter leur attention sur l’influence qu eux-mêmes ou les malades venant en consultation, pourraient subir de la part des phénomènes qui vicient l’atmosphère : peut-être parviendrait-on, à force de recherches à obtenir, non-seulement la désignation des causes des épidémies, mais les moyens propres à prévenir ou à guérir le mal. C’est aux

magnétiseurs habiles diriger vers ce but les somnambules.

A propos du magnétisme, M. Babinet, entretient ses lecteurs du livre de M. Mabru, intitulé : les Magnétiseurs jugés par eux-mêmes, et il le déclare très-instructif et tris-amusant ; il est loin d’en adopter les conclusions, puisqu'il reconnaît la réalité du magnétisme, comme le prouve suffisamment l’extrait que nous venons de transcrire ; mais il y voit une collection de documents utiles à consulter, et il termine ainsi : « Je répète à ceux (pii veulent juger impartialement la question de savoir où le possible est relégué dans cette curieuse matière, (pie le livre actuel mérite l’attention de quiconque a souci de cette qualité que Pythagore donnait comme le cachet de l'âme humaine, savoir : la recherche de la vérité. »

Nous aimons à croire que M. Babinet aura eu quelque motif particulier de bienveillance pour s’exprimer d’une manière aussi flatteuse sur le livre de M. Mabru, qui ne mérite guère un tel éloge. Nous ne comptions pas discuter dans ce journal cette grossière et haineuse philippique contre le magnétisme. La mention faite par M. Babinet nous oblige à en dire quelques mots.

Le livre commence par une prolixe et fastidieuse introduction où l’auteur parle de tout et de beaucoup d’autres choses encore, mais très-peu de magnétisme ; il est probable qu’il avait dans ses cartons un certain nombre de vieilles tartines dont il n’avait pu trouver le placement ; il a profité de l’occasion pour exhumer toutes ces friperies dont il a fait une macédoine fort peu instructive et nullement amusante.

Il nous donne ensuite la seconde édition des lettres échangées à propos du magnétisme et insérées dans Y Ami des sciences, en y joignant de longues et lourdes missives dont M. Meunier avait eu le bon esprit de priver ses lecteurs, mais dont M. Mabru ne veut pas priver la postérité.

Puis vient le récit fort partial des rapports qu’a eus le magnétisme avec les académies, récit tiré en majeure partie de Y Histoire académique de MM. Burdin et Dubois (d’Amiens) auxquels il emprunte également leurs objections et leurs ar-

guments, sans y rien ajouter que des déclamations et des injures.

Enfin, il nous donne, sons le titre d'Excentricités magnétiques, des extraits de divers ouvrages 0C1 se trouvent des prétentions plus ou moins outrecuidantes. Certes, nous convenons que plusieurs écrivains, emportés par leur enthousiasme, ont compromis le magnétisme en lui attribuant des merveilles imaginaires ou en se vantant de résultats qui ne sont pas constatés et qu’ils sont hors d’état de reproduire. S0119 ce rapport, ils ont prêté le liane à l’adversaire du magnétisme ; mais une science ne peut être responsable des écarts de quelques-uns de ses adeptes; des prétentions mal fondées à l’égard de certains faits n’enlèvent rien à la certitude des faits bien établis. De ce que certains chimistes se sont flattés à tort de faire de l’or, s’ensuit-il que la chimie ne soit pas une science positive ?... M. Mabru a voulu par ses citations ridiculiser le magnétisme ; mais a-t-il agi avec bonne foi quand il a compris, dans ses citations, des extraits d’auteurs qui notoirement ne se sont jamais occupés de magnétisme, ou des élucubrations qui y sont complètement étrangères? En quoi, par exemple, le magnétisme peut-il être solidaire des escargots sympathiques, des rêveries de Victor Hennequin , des opinions de MM. Vaquerie, DémonviUe, Constant, Ma-drolle, et surtout du bon M. de MirviUe, qui voudrait voir rôtir tous les magnétiseurs dans ce monde et dans l’autre ?...

M. Mabru fait voir combien il connaît peu la question, quand il fait dépendre l’existence du magnétisme de la vue à travers les corps opaques. S’il s’était donné la peine d’étu-dier un peu le sujet qu’il traite si légèrement, il aurait su que le magnétisme constitue, d’après ses partisans, l’influence que l’homme exerce sur ses semblables, sans l’emploi des moyens ordinaires de relation, et qu’il a pour but essentiel l’application de cette influence au traitement des maladies. Le somnambulisme n’est qu’ua des effets du magnétisme. Les magnétiseurs les plus renommés ne se sont attachés, dans la pratique, qu’à l’emploi direct du magnétisme ; les ans donnent un rôle accessoire à la lucidité somnambulique,

d’autres môme n’en font aucun usage. Le magnétisme primitif existait sans somnambulisme ; et, bien que le somnambulisme ait pris une importance considérable, le magnétisme n’en est pas moins indépendant. Quant à la lucidité, elle s’exerce le plus souvent à l’examen des maladies et à la recherche des remèdes; il y a là une mission d’humanité, et des résultats bienfaisants sont journellement obtenus. Fort peu de somnambules se sont occupés de lire à travers les corps opaques; ce n’est qu’un exercice de curiosité, qui offre de l’intérêt pour la science sans cloute, mais cet intérêt est fort secondaire. Des témoignages nombreux et dignes de foi certifient que, dans plusieurs cas, des individus ont pu voir dans des conditions anormales. Si l’on croit que ces attestations laissent à désirer, au moins devrait-on les discuter sérieusement. Mais on n’est nullement autorisé à affirmer que si la vue anormale n’existe pas, il n’y a plus de magnétisme. Il s’ensuivrait seulement qu’une des prétentions des magnétiseurs n’était pas fondée : on ne pourrait rien en conclure contre les autres ; non-seulement le magnétisme n’en serait pas ébranlé, mais il y aurait encore à compter avec le somnambulisme et avec la lucidité en tant qu’elle s’applique à toute autre chose que la vue anormale.

Par suite de l’erreur que nous venons de signaler, M. Ma-bru, persuadé que toute’la question du magnétisme était concentrée dans le seul fait delà vue à travers les corps opaques, a voulu en finir tout d’un coup avec son ennemi. Bien qu’il tienne la lucidité pour bien écrasée par le rapport du terrible M. Dubois (d’Amiens), bien qu’à ses yeux la commission Burdin aitconfirmé cet écrasement, il sent le besoin d’écraser encore de nouveau et pour son propre compte. L’hydre s’est-elle relevée de ces deux coups également mortels ? On serait tenté de le croire : car un nouvel Hercule se dresse, armé de la massue Burdin, son esprit peu fécond ne lui ayant suggéré aucun autre moyen d’écrasement. M. Mabru, à l’exemple de M. Burdin, propose un prix de 3,000 fr. à celui qui lira l’écrit renfermé dans une boîte fermée. M. Babinet applaudit à cette proposition ; et, faute d’avoir suffisamment réfléchi, il

ajoute que M. Ma bru a donné aux personnes lucides toutes les facilités de temps et de circonstances favorables qu’elles pourront désirer. 11 y a là une erreur regrettable et que notre devoir est do. relever.

Non, M. .Vlabru ne donne pas aux personnes lucides toutes les facilités de temps et de circonstances favorables qu elles peuvent désirer, et il est facile de le prouver. La boite reste chez M. Mabru, et il faut que la personne lucide voie de chez elle ce que cette boîte contient. Or, tous ceux qui se sont occupés de somnambulisme, savent que chaque lucide a son mode de procéder, et qu’il est indispensable de le laisser agir à sa fantaisie, sans quoi 011 s’ôterait toute chance de succès. Il y a des somnambules qui, pour découvrir ce qu’une boîte contient, ont besoin de la flairer, delà porter à leur front ou à leur estomac ; il est clair qu’on doit les laisser faire, pourvu que la clôture de la boîte reste intacte; d’autres qui n’ont pas besoin de ces manipulations, ne peuvent voir qu’à une faible distance. Ils ne pourraient donc accepter les conditions de M. Mabru, d’après lesquelles le lucide ne peut ni toucher la boîte, ni même en approcher.

M. Burdin, modifiant loyalement ses conditions premières, consentait à ce que le prix fût réputé gagné dès qu’une personne verrait sans le secours des yeux, quel que fût le mode de procéder. Ainsi il n’était pas nécessaire que l’objet à voir fût renfermé dans une boîte, on se contentait, ou d’un bandeau appliqué sur les yeux du somnambule, ou d’une simple feuille de papier interposée entre les yeux et l’objet, avec faculté pour la somnambule de promener ses mains sur une plaque de verre recouvrant ledit objet. On était allé jusqu’à supprimer la feuille de papier, pourvu que les yeux étant tenus abaissés parla pression des doigts d’un autre personne, l'objet fût placé vis à vis le front. En un mot, on laissait toute latitude, et l’on ne demandait qu’une chose, la vue sans le secours des yeux. M. Mabru, au contraire, restreint le mode de procéder et impose des conditions inacceptables qui rendent son défi dérisoire.

Ce n’est pas tout, lors du défi Burdin, il y avait une com-

mission composée de membres de l’Académie de médecine. M. Mabru déclare qu’il n’a pas besoin de commission. C’est très-commode; mais qui constatera si le prix a été gagné? M. Mabru, sans doute. Cependant, comme c’est lui qui fournit les fonds et qu’à plus d’un titre il a intérêt à ce que le prix ne soit pas gagné, on reconnaîtra qu’il ne peut être juge et partie. Il peut se faire que la victoire soit douteuse ; que, par exemple, une personne lise l’écrit entier, l’exception d’une lettre , il faudra décider si elle a droit au prix. Au lieu d’une lettre omise, il peut y en avoir deux, trois..., un plus grand nombre, ce qui rendrait la question de plus en plus embarrassante. 11 faut donc que des juges impartiaux et désintéressés prononcent en leur âme et conscience si les conditions du défi ont été remplies, et M. Mabru doit sentir qu’il ne peut être compétent pour statuer sur ces difficultés.

Un pareil défi ne peut être pris au sérieux, et le chimiste Mabru semble copier son confrère Lob qui, pour prôner son eau merveilleuse, fait insérer chaque semaine dans les journaux : ■ Je donne 40,000 fr. à celui qui prouvera, etc. » A ce compte-là, c’est être bien modeste que de n’offrir que trois ou quarante mille francs; on peut offrir des millions sans crainte de se ruiner.

Nous admettons, avec M. Babinet, que la fondation de prix est une manière vraiment scientifique cCattaquer la question ; c’est un moyen d’éprouver les prétentions, de confirmer celles qui sont fondées, et de réduire au néant les illusions et les rodomontades ; mais que les conditions du concours soient loyales, que des juges dignes de la confiance publique soient chargés de présider aux épreuves et de décerner le prix, s’il est légitimement gagné. Les magnétiseurs sincères seront unanimespour applaudir à desemblables concours ; et, quelles que soient les intentions de ceux qui les auront proposés, le résultat ne pourra être que le triomphe de la vérité.

A. S. Mobin.

Baron du POTET, propriétaire-gérant.

PROGRÈS DE LA SCIENCE.

La science officielle vient lentement au magnétisme, mais enfin elle y marche, elle arrivera avant la fin des temps.

Nous donnons un article sur les sciences, extrait du jour-jiai L'Union, qu’on ne lira pas sans intérêt : c’est un ensemble d’idées et de faits qui conduisent sur le chemin que nous avons parcouru. Le magnétisme est plus grand qu’on ne le fait ici ; mais cet article n’était point écrit pour les croyants.

Baron du Potet.

Le numéro 11 des comptes-rendus hebdomada'res contient une note sur la circulation du sang. Je discute volontiers les mots : ils représentent des idées, et les idées gouvernent le monde. «Ne croyez pas, disait Bossuet au grand Dauphin son « élève, qu’on vous reprenne si sévèrement pendant vos « études, pour avoir simplement violé les règles de lagram-« maire.... Quand vous viendrez à manier, non plus les pa-« rôles, mais les choses, vous en troublerez tout l'ordre... « maintenant vous placez mal les paroles : alors vous pla-« cerez mal les choses... »

Le mot circulation fait supposer quelque chose qui circule. On dit fort bien la circulation du sang, et l'on entend par là, le sang, c’est-à-dire un liquide particulier circulant dans des vaisseaux propres, sortant du cœur par les artères pour aller se distribuer dans toutes les parties du corps ; puis, de l’intimité de ces mêmes parties, après les avoir réparées, revenant au cœur au moyen des veines. Du cœur aux parties par les artères, des parties au cœur par les veines, le cercle est complet ; il y a circuit ; et, comme à l’aller et au retour, c’est un liquide qui marche, il y a véritablement circulation.

Peut-on dire des nerfs et de9 centres nerveux ce que l’on dit du cœur et des vaisseaux ? Peut-on dire la circulation nerveuse, comme on dit la circulation du sang? Voyons.

M. Flourens met à nu, sur un pigeon, toute l’étendue de moelle épinière comprise entre les deux renflements. Quand il irrite la moelle à une égale distance des deux renflements, il provoque des convulsions égales aux jambes et aux ailes. Tohe XVII.— No 38. _ 2» Série. — 25 Juillet 1858. 15

S'il irrite la partie de lanioëlle plus près des jambes, ce sont les jambes seules qui sont convulsées; si c’est plus près des ailes, ce sont les ailes seules. Dans ces expériences, l’irritation a une intensité déterminée : si l'intensité est augmentée, ses effets se font sentir dans toute l’éteiulue de la moelle ; plus forte encore, ils peuvent aller jusqu'à ébranler toutes les parties de l'animal.

M. Flourens dit : A partir du milieu de l’espace découvert; c'est à dire du point central, situé entre les deux rendements de la moelle, dont l’un, en haut, fournit les nerfs qui vont se distribuer aux muscles des ailes, et dont l’autre, en bas, fournit les nerfs qui vont se distribuer aux muscles des membres inférieurs ; à partir de ce point central, l’irritation monte et descend tout à la fois. En dehors de ce point central elle monte ou elle descend exclusivement, selon que le point irrité est au dessus ou au dessous de ce centre. Dans les deux cas le cours est direct, l’irritation marche tout droit, elle ne descend pas si on a piqué au dessus du point central, elle ne monte pas si on a piqué au dessous. C’est seulement dans le cas d’une irritation violente que ses effets se propagent à toute la machine.

Ces expériences sont très-curieuses, mais elles ne démontrent pas encore une circulation, même dans le sens de M. Flourens. Avançons.

M. Flourens enlève à un pigeon les hémisphères cérébraux, le cerveau proprement dit; (l’animal ne meurt pas .pour cela.) (Voyez Académie des Sciences, 5* article, Union du 15 avril dernier). Il ne perd que la volonté et l’intelligence, la moelle épinière est intacte. Dans cet état, M. Flourens pince la patte, le pigeon retire sa patte, tout comme s’il avait encore sa tète et la jouissance de sa volonté. M. Flourens pince la queue, l'animal agite sa queue.

Voilà donc un même phénomène qui se produit par deux procédés différents, en partant de deux points opposés. Vous irritez la moelle, l’animal agite le membre qui y correspond, sans que vous ayez touché le membre. Vous irritez le membre, j'animai l’agitedemême, sans que vous ayez touchéà la moelle.

Conclusion : de la moëllc au membre, première moitié du cercle ; du membre à la moelle, deuxième moitié : le circuit est complet, et voilà la circulation nerveuse de M. Flourens accomplie.

Encore une fois, le mot circulation ne me plaît pas ; ce mot sera impropre à mes yeux tant que je ne verrai pas de liquide qui circule. Il faut chercher un autre terme ; sans cela vous vous exposez à inculquer dans l’esprit de vos lecteurs des idées inexactes, fondées sur des analogies forcées, incomplètes, et sous quelque rapport tout à fait fausses.

Sans doute, il y a quelque chose qui va de la moelle épinière aux muscles et des muscles à la moelle; mais ce quelque chose n’est certainement pas un liquide circulant dans des canaux particuliers, comme le sang dans les veines et les artères. Je sais bien que M. Flourens n’a pas dans l’esprit une pareille assimilation ; aussi, comme je l’ait dit en commençant, ne fais-je qu’une querelle de mots. Mais il faut respecter le sentiment de Bossuet ; et puis Cuvier, dont l’autorité ici est également légitime, n’a-t-il pas, lui aussi condamné comme paralogismes ces façons trop habituelles, en philosophie naturelle, de se servir d’un même mot pour désigner des choses complètement différentes ? (Voyez Cuvier, au mot Nature du Dictionnaire des Sciences naturelles.)

Au reste, la question de savoir de quelle nature est l’agent nerveux, est un point fort obscur dans la science : « Il y a « grande apparence, dit Cuvier, que c’est par un fluide im-« pondérable, tel que le calorique, que le nerf agit sur la « fibre... tous les fluides animaux étant tirés du sang par sé-« crétion, il n’y a pas à douter que le fluide nerveux ne soit « dans le môme cas... Il est certain que la matière médullaire « (la substance nerveuse) est le seul conducteur du fluide « nerveux ; tous les autres éléments organiques lui servent de « cohibants, et l’arrêtent comme le verre arrête l’électricité. » (Cuvier, Règne animal. Introduction,)

L’analogie que Cuvier établit ici entre l’élément nerveux et l’électricité est conforme à l’opinion de tous les physiologistes.

Cette opinion a été surtout corroborée par la découverte de M. Matteucci relativement à l’électricité de la torpille. 11 y a en effet deux points capitaux dans cette découverte :

1° En retirant des étincelles de la torpille, phénomène qui n’avait pas été obtenu avant lui, M. Matteucci a démontré que l’électricité animale est parfaitement identique avec les autres électricités ;

2° En établissant que la source de l’électricité de la torpille est dans un des lobes du cerveau de l’animal, il «a démontré qu’il existait entre l’agent nerveux et le fluide électrique une analogie d’origine, puisque l’un et l’autre procèdent d’un même appareil organique.

Mais cette analogie d’origine indique-t-elle et doit-elle faire présumer une analogie de nature et d’essence entre les deux agents? 11 y aurait de la témérité à le croire ; car les effets, connus de l’agent nerveux qui sert de manifestation à la pensée sont trop différents de l’électricité, pour ne pas faire supposer dans chacun d’eux une essence spéciale.

On comprend que si jamais l’action nerveuse est démontrée semblable à l’action électrique, de là à pouvoir la faire passer d’un individu à un autre, il n’y aurait pas loin, et le magnétisme serait fondé sur une base scientifique.

Je fais ici une simple hypothèse en vue de l’avenir; je prie qu’on n’en tire aucune conclusion touchant le magnétisme, aucune conclusion ni pour ni contre. Je ne connais rien du magnétisme ; je n’ai pas étudié cette question d’une manière spéciale ; je n’ai pas suivi les écoles des maîtres ; mais je dois à la vérité d’ajouter que, dans les écrits qui ont été publiés depuis Mesmer et le rapport de Bailly jusqu’à nos jours, et par conséquent jusqu’aux discussions qui se sont produites à l’Académie de médecine, une première fois sur la provocation du docteur I’oissac, une seconde fois pour le prix Burdin, je n’ai point trouvé les éléments d’une base d’expérimentation véritablement scientifique. Je m’explique.

Les sciences d’observation ont chacune un fait primitif qui leur sert de base. Un observateur guidé par l’étude, le plus souvent par le hasard, découvre ce fait ; son premier soin est

de le constater, d'en étudier toutes les circonstances, afin de s'en rendre uiaiire au poiut de pouvoir le reproduire à volonté. Ce n’est qu’à cette condition que le fait est acquis à la science et qu'il peut servir de base et de point de départ pour des investigations et des découvertes futures. Prenons l’exemple de l’électricité : c’est le moins éloigné de nos discours. Voici le fait primitif de cette partie importante de la physique dont les applications réalisent de nos jours de si merveilleux phénomènes.

On prend un bâton de verre , ou de cire d’Espagne, ou de gomme laque, ou de soufre ; on le frotte vivement dans toute sa longueur avec uue étoffe de laine ou une peau de chat ; on l’approche ensuite d’une table sur laquelle ont été déposés de la sciure de bois, ou les barbes de plume, ou en général des fragments déliés de corps légers, et on les voit s’envoler d’abord vers le cylindre frotté qui les attire, puis se disperser dans toutes les directions, par l’effet d’une répulsion qui succède à l’attraction.

Si, au lieu de présenter le bâton frotté à des corps légers, vous l’approchez de votre joue sans la toucher, vous éprouvez un chatouillement comparable à celui que cause le contact d’une toile d'araignée. Si le bâton a de grandes dimensions et qu’on le frotte pendant un certain temps, on éprouve une série de picotements douloureux, on entend une suite de crépitations, et l’on voit même, en opérant dans l’obscurité, de nombreuses étincelles lumineuses qui éclatent entre la joue et le bâton frotté. Je renvoie, pour plus de détails, au premier volume du Cours de Physique de M. Jamin, professeur de physique à l’Ecole polytechnique, publié par Mallet-Ba-chelier. Des figures très-bien faites font comprendre les expériences les plus délicates, en même temps que leur description donne la mesure de la précision que l’on doit apporter dans l’étude des phénomènes lorsqu’on veut les introduire dans le domaine scientifique.

Voilà donc le fait primitif de la science de l’électricité : des corps légers sont attirés par un certain agent qu’on développe à volonté à la surface d’un bâton de verre ; cet agent agit sur

C organisa lion ,• enfin cet agent produit des étincelles qui, dans de certaines proportions, font entendre un léger bruit; et, dans des proportions plus grandes, produisent de véritables détonations.

Vient un autre observateur qui dit : Ces étincelles sont, la foudre. 11 lance un cerf volant dans les nuages et l'analogie est vérifiée : Eripuit cœlo fulmen.

Un troisième, guidé par le hasard, signale l’action de deux métaux sur les muscles d'une grenouille morte ; et on en tire cette conséquence qui se vérifie, savoir : que l’électricité 11e se développe pas par le frottement seulement ; mais qu’elle se développe aussi en mettant en contact deux métaux différents , dans des circonstances déterminées.

Un quatrième arrive : il étudie l’électricité comparée avec l’action des aimants qui en dérivent; et les conséquences, prévues par lui, et des faits qu’il révèle, poursuivies par d’autres, conduisent aux résultats les plus surprenants et les plus utiles. Ampère avait désigné nominativement le télégraphe électrique comme devant résulter des révélations de son génie.

Enfin un cinquième, celui-là nous l’avons déjà cité, M. Matteucci, étudiant le même agent sous un autre point de vue, démontre que les phénomènes d’apparence électrique, dont certains animaux sont le siège, ont pour cause réelle l’électricité ; et que cette électricité se développe chez eux sous l’influence d’une portion de leur système nerveux céphalique.

Voilà comment se fonde la science, et comment elle se développe et s'établit.

Mais, encore une fois, il faut que les faits qui servent de base à une science en se déduisant les uns des autres, soient d'une nature tellement incontestable et si positifs, que celui qui en possède la théorie puisse les reproduire à volonté et sans difficulté autre que l’observation minutieuse de toutes les circonstances reconnues indispensables à leur manifestation.

Ces prémisses posées, je n’hésite pas à entrer de plein-

pied dans la question du magnétisme ; et j’y suis encouragé par deux motifs que je crois parfaitement rationnels.

Depuis plus de soixante ans on parle de magnétisme, et dans cet espace de temps, une foule de personnes auxquelles on ne saurait contester l’esprit, le bon sens et la dignité du caractère, s’obstinent à dire qu’il y a quelque chose. Je n’admets pas qu’il en soit ainsi et que, nonobstant, le magnétisme ne soit qu’un tissu d’illusions. Sans doute, M. Husson, rapporteur de la première commission, a eu grand tort de ne pas soumettre son rapport à la sanction de l’Académie de médecine. La vérité n’a jamais rien perdu à la discussion ; mais cette négligence, qui lui a été souvent reprochée , des procédés et des formes académiques, n’ôte rien à mon premier motif, surtout quand je parcours la liste des noms que M. Mabru me fournit dans son livre très-curieux et et très-sérieux, à part le hors-d’œuvre de l’introduction, et parmi lesquels je relève seulement les suivants : Mgr le cardinal Gousset, le général de Rumigny, le Père Ventura, M. de Tocqueville, le Père Lacordaire, le général Jacqueminot, M. Agénor de Gasparin, M. Crémieux, le pasteur Vors, M. Jules Favre, le général Lafayette, cité par Arago, etc.

Voilà mon premier motif : il est de l’ordre moral.

Je tire le second de l’ordre scientifique.

En 1844, M. Arago prononça àl’Académie des sciences un long éloge de Bailly, dont la publication n’eut lieu que neuf ans plus tard dans l’Annuaire de 1853, par des raisons bonnes ou mauvaises, dit M. Arago lui-même dans une note. Bailly avait été le rapporteur de la commission instituée pour l’examsn du magnétisme animal dont le premier promoteur, il faut le dire, fut Mesmer. Après avoir rendu compte du travail de Bailly, M. Arago ajoute les considérations suivantes que je regarde comme dignes d’attention, dans la bouche d’un homme si expert dans les choses de la science et qu’on ne trouva jamais occupé à labourer le champ infécond des illusions, comme chacun sait.

« Le physicien , dit-il, le médecin, le simple curieux qui se livrent à des expériences de somnambulisme ; qui croient

devoir rechercher si, dans certains états d’excitation nerveuse , des individus sont réellement doués de facultés extraordinaires, tous ceux-là, disons-nous, ne récusent nullement la chose jugée, ils ne se mettent réellement pas en opposition avec les Lavoisier, les Franklin, les Bailly; ils pénètrent dans un monde entièrement nouveau, dont ces savants illustres ne soupçonnaient pas môme l’existence.

« Je ne saurais approuver le mystère dont s’enveloppent les savants sérieux qui vont assister aujourd’hui à des expériences de somnambulisme. I,e doute est une preuve de modestie, et il a rarement nui au progrès des sciences. On n’en pourrait pas dire autant de Y incrédulité. Celui qui, en dehors des mathématiques pures, prononce le mot impossible, manque de prudence. La réserve est surtout un devoir quand il s’agit de l’organisation animale.

« Nos sens, malgré plus de vingt-quatre siècles d’études, d’observations, de recherches, sont loin d’être un sujet épuisé. Voyez, par exemple, l’oreille. Un physicien célèbre, M. Wollaston, s’en occupe ; aussitôt, nous apprenons qu’avec m ne égale sensibilité, relativement aux sons graves, tel individu entend les sons les plus aigus et tel autre ne les entend pas du tout ; et il devient aviré que cetains hommes, avec des organes parfaitement sains, n’entendirent jamais le grillon des cheminées ; ne se doutèrent point que les chauves-souris poussent souvent des cris très-aigus; et l’attention une fois éveillée sur ces singuliers résultats, des observateurs ont trouvé les différences de sensibilité les plus étranges entre leur oreille droite et leur oreille gauche, etc., etc.

u La vision offre des phénomènes non moins curieux et un champ do recherches infiniment plus vaste encore. L’expérience a prouvé, par exemple, qu’il existe des personnes absolument aveugles pour certaines couleurs, telles que le rouge, et qui jouissent d’une vision parfaite relativement au jaune, au vert et au bleu. Si le système newlonien de l'émission est vrai, il faut irrévocablement admettre qu’un rayon cesse d être lumière dès qu’on augmente ou qu’on diminue sa vitesse d un dix-millième. De là découlent ces conjectures

naturelles et bien dignes d'un examen expérimental : les hommes ne voient pas tous par les mêmes rayons ; des différences tranchées peuvent exister à cet égard chez le même individu dans des états nerveux divers ; il est possible que les rayons calorifiques, les rayons obscurs de l’un, soient les rayons lumineux de l’autre, et réciproquement; les rayons calorifiques traversent librement certaines substances dites diathermanes; ces substances jusqu’ici avaient été appelées opaques, parce qu’elles ne transmettent aucun rayon communément lumineux; aujourd'hui, les mots opaque et dialhermane n’ont rien d’absolu. Les corps dialher-rnar.es laissent passer les rayons qui constituent la lumière de celui-ci ; ils arrêtent au contraire les rayons formant la lumière de celui-là. Peut-être trouvera-t-on sur cette voie la clef de plusieurs phénomènes restés jusqu’ici sans explication plausible.

« Rien, dans ces merveilles du somnambulisme ne soulevait plus de doutes qu'une assertion très-souvent reproduite touchant la propriété dont jouissaient certaines personnes à l’état de crise, de déchiffrer une lettre à distance, avec le pied, avec la nuque, avec l’estomac. Le mot impossible semblait ici complètement légitime. Je ne doute pas néanmoins que les esprits rigides ne le retirent, après avoir réfléchi aux ingénieuses expériences dans lesquelles Moser produit aussi, à distance, des images très-nettes de toutes sortes d’objets, sur toutes sortes de corps, et dans la plus complète obscurité.

« En se rappelant encore dans quelle proportion énorme les actions électriques ou magnétiques augmentent par l’acte du mouvement, on sera moins enclin à prendre en dérision les gestes rapides des magnétiseurs.

«En consignant ici ces réflexions développées, j'ai voulu montrer que le somnambulisme ne doit pas être rejeté à priori, surtout par tous ceux qui se sont tenus au courant des derniers progrès des sciences physiques, -l’ai indiqué des faits, des rapprochements dont les magnétiseurs pourraient se faire une arme contre ceux qui croiraient superflu de

tenter de nouvelles expériences, ou même d y assister. Pour moi, je n’hésite pas à le dire, je croirais manquer à mon devoir d’académicien si je refusais d’assister à des séances où de tels phénomènes rne seraient promis, pourvu [u’on m'accordât assez d'influence dans la direction des épreuves, pour être certain de ne pas devenir victime d'une jonglerie. »

" Voilà ce qu’on peut appeler un langage net et sans ambiguité. Il prend sa source dans des faits scientifiques, dans des faits qui peuvent servir de base et de point d’appui, je ne dis pas aux théories magnétiques, elles sont trop diverses et trop dissemblables, mais à quelqu un des faits que le magnétisme accuse, à un fait commun à toutes les théories, à celui que toutes revendiquent ; par exemple, au fait de la vision, sans le secours apparent des yeux.

La constatation d’un pareil fait me semble la chose la plus simple du monde. Deux lignes écrites sur un morceau de papier, enfermé dans un carton scellé et lues à coup sûr par un sujet quelconque, dans les conditions choisies par les magnétiseurs, à l’abri de tout soupçon de supercherie, doivent suffire aux esprits les plus difficiles.

Ce fait étant bien acquis et élevé à-la puissance d un fait scientifique, en vertu des précédents que nous avons empruntés à Arago , je serais sûr de ne pas me trouver en contradiction avec l’encyclique du 30 juillet 1856 , et de n être pas exposé aux censures de l’église. 11 n’y aurait là en effet ni erreur, ni sortilège, ni invocation explicite ou implicite du démon : lïcmoto omni errore, sortilegio, explicita, aut implicita dœmonis invocatione, usus magnelisini nempi merus aclus adhibendi media physica aluindè licita, non est moraliter vetitus, dummodo non ten dut ad finem ilhcitum aut quomodo UOet pravum.

G. Grimaud de Caux.

LE MAGNÉTISME

ET LA MÉDECINE LÉGALE.

VIOL ACCOMPLI PENDANT LE SOMMEIL MAGNÉTIQUE. RAPPORT PAR

MM. LES DOCTEURS COSTE, DIRECTEUR DE l’ÉCOLE DE MÉDECINE,

ET RROQUIER, CHIRURGIEN CHEF-INTERNE.

En fait de médecine légale, les questions les plus délicates et les plus difficiles sont incontestablement celles qui sont relatives au viol et aux attentats aux mœurs. Aussi, malgré toute l’attention des auteurs [de traités spéciaux, chaque affaire présente-t-elle le plus souvent un côté encore inaperçu et pour la solution duquel le médecin légiste ne peut faire appel qu’à sa conscience personnelle. Le rapport que nous publions offre, à ce point de vue, un intérêt tout particulier.

L’idée du viol n’entraîne pas toujours l’idée d’emploi de la force brutale. Il suffit que la volonté de la victime ait été annihilée assez, pour qu’elle n’ait pu garder ni la conscience du fait, ni la force d’y résister. Ainsi les substances narcotiques, les liqueurs enivrantes, l’éther et le chloroforme ont plus d’une fois favorisé l’accomplissement du crime. Mais jamais, jusqu’à présent, il n’avait été question de l'emploi du magnétisme. Nous croyons donc bien faire que de publier notre rapport, moins pour le donner comme critérium à suivre à l’avenir, que pour provoquer l’attention et les études de nos confrères, sur un sujet dont l’importance sera facilement appréciée.

Pour l’intelligence du rapport, nous allons dire les circonstances qui l’ont provoqué, sans hasarder la moindre appréciation des faits qui sont exclusivement du ressort de l’instruction.

La jeuneMarguerite A..., âgée de 18 ans, se croyant malade,

se (it conduire par sa plus jeune sœur, dans le courant du mois de novembre dernier, chez le nommé C..., exerçant à Marseille, à ce qu’il paraît, la profession de guérisseur parle magnétisme. Chaque jour elle allait prendre sa séance. Vers le commencement d’avril, s’étant aperçue qu’elle était enceinte, elle porta plainte à l’autorité, et c’est alors que

M. L..... commissaire de police, nous commit tous deux « à

a l’effet de constater la grossesse et l’époque à laquelle elle n pouvait remonter; et en second lieu de répondre à la ques-« tion de savoir si la jeune Marguerite A... avait pu être dé-« florée et rendue mère, contrairement à sa volonté, c’est-à-« dire si cette volonté avait pu être annihilée complètement « ou en partie par l’effet du magnétisme. »

En présence de cette réquisition, voici en quels termes noua dressâmes notre rapport :

Nous soussignés...........Vu la réquisition (conçue dans les

termes précités) déclarons avoir procédé à la visite de la jeune Marguerite A..., et avoir constaté.........................

(Suit la description des signes qui nous ont permis de conclure qu’elle était enceinte, et que sa grossesse datait de quatre mois à quatre mois et demi.)

2m° question : Dire si la jeune Marguerite A... a pu être déflorée ?

Cette question touche un point tout-àrfait neuf de la médecine légale. Car si cette science est aujourd’hui fixée à cet égard, pour ce qui est de l’emploi des narcotiques, de l’éther et du chloroforme, nous ne pensons pas qu’elle ait jamais abordé le magnétisme à ce point de vue. Malgré cela, et sauf toutes réserves, uous croyons qu’il nous est possible de résoudre cette question, sans nous en tenir à des appréciations personnelles, mais bien d’après des documents scientifiques, les seuls qui doivent et puissent ici entrer en ligne décompté. Ces documents, nous les trouvons dans le rapport déM. flus-son, fait en 1831 à l'Académie de Médecine, au nom d’une commission composée de MM. Double, Magendie, Guersant, Guéneau de Mussy, Husson, etc. Ces noms suffisent pour

donner à cc rapport toutes les garanties scientifiques de vérité et d’authenticité que l’on serait en droit d'exiger. Et du reste, ce rapport est et demeure encore aujourd’hui le seul monument scientifique que possède le magnétisme.

Dans les conclusions de ce rapport nous trouvons :

Au n0 13 « le sommeil est un eilet réel du magnétisme; » Au n° 16 « il s’opère des changements plus ou moins reri marquables dans les perceptions et les facultés des indivi-« dus magnétisés. La plupart du temps, ils sont complétç-« ment étrangers au bruit extérieur et inopiné fait à leur « oreille, tel que le retentissement d’un vase de cuivre frappé

« près d’eux......; l’odorat est comme anéanti, on peut leur

h faire sentir l'acide muriatique ou l’ammoniaque sans qu’ils « s’en doutent; la plupart sont complètement insensibles; on « a pu leur chatouiller les pieds, les narines et l'angle des h yeux par l’approche d’une plume, leur pincer la peau, la pi-« quer sous l’ongle avec des aiguilles enfoncées profondé-« ment et à l’improviste, sans qu’ils aient témoigné de la dou-i leur, sans qu’ils s’en soient aperçus. Enfin on en a vu une « qui a été insensible à une des opérations les plus doulou-« reuses de la chirurgie, et dont ni le visage, ni le pouls, ai « la respiration, n’ont dénoté la plus légère émotion. »

Au n° 23 a les forces musculaires des somnambules sont « quelquefois paralysées'; — à leur réveil ils disent avoir ou-« blié totalement toutes les circonstances de Tétat de somnam-« bulisme et ne s’en ressouvenir jamais, »

D’après tous ces faits, si une jeune fille sous l’influence du sommeil magnétique est insensible à toutes les tortures, il nous semble qu’il est rationnel d’admettre qu’elle pourra être violée sans qu’il y ait participation de sa volonté, sans qu’elle en ait conscience, et que, par conséquent, elle ne saurait repousser par la force l’acte qui est consommé sur elle.

Du présent rapport nous posons les conclusions suivantes : i° La fille Marguerite A... est enceinte :

2° Sa grossesse ne remonte pas au-delà de quatre moi» à quatre mois et demi ;

3° Nous pensons qu’il est possible qu’une jeune fille soit déflorée et rendue mère contrairement à sa volonté, celle-ci pouvant être annihilée par l’effet magnétique.

Marseille, ce 8 avril 1858. Signé : Coste et Broquieu.

Depuis lors, nous avons eu occasion de soumettre la question à un homme dont l’autorité ne saurait être méconnue, à M. Devergie, médecin de l’hôpital Saint-Louis, et auteur du Traité de Médecine légale. Voici la réponse écrite que nous a adressée cet honorable confrère ; nous la transcrivons textuellement, et nous sommes heureux de montrer que son opinion est en tous points conforme à nos conclusions :

« Paris, 10 avril 1858.

« Mon cher confrère,

« Voici ma réponse :

« Je crois qu'unejeune fille de 18 ans, peut, en thèse géné-« raie, avoir été déflorée et rendue mère contrairement à sa « volonté, dans le sommeil magnétique.

« Ceci est une affaire d’observation et de sentiment personnel.

« Mais en dehors du sommeil magnétique il y a tant de • mensonge que je ne saurais aller plus loin.

« Le sommeil magnétique est fictif ou réel : fictif, en ce « sens que toutes les personnes qui donnent des consultations « ou des représentations de magnétisme ne sout jamais en-« dormies; réel, et alors tout rapport, tout sentiment de re-« lation peut être interdit par le sommeil, la sensibilité peut « être émoussée et même éteinte, partant la femme dans l’im-« possibilité de se défendre.

« Agréez, etc.

« A. Devergie. »

Jusqu’à présent la justice a été trompée par les médecins au sujet du magnétisme. Tout en lui était charlatanisme ; le magnétisme n’exisfait pas. Bien souvent nous avons dit :

c’est par le ri'.al que fera ou peut faire le magnétisme que les savants seront portés à l’étudier. Dans l’accusation que nous donnons plus haut, accusation non encore prouvée, le magnétisme est avoué, mais comme agent de mal. On remonte pour cela au rapport de Husson, dont on ne voulait point d’abord.

Quelle pitié de voir nos autorités médicales si peu instruites, si mal renseignées sur le magnétisme ! et pourtant leur fierté est égale à leur ignorance ; et, pour comble de ridicule, la justice de notre pays ira chercher la lumière où est l’aveuglement, et des conseils là où manque le savoir.

Nous ne voulons point ici entrer dans la question du possible en magnétisme ; nous donnons seulement un procès-verbal constatant un crime ; car, pour lui donner quelque fondement, on est venu au magnétisme. Nous attendons le jugemeut pour connaître et exposer les bases plus élargies de l'accusation.

Baron dü Potet.

TRANSMUTATION DES MÉTAUX

/*«»• !*•» r:*prii*.

Les journaux spiritualités américains nous ont habitués aux prodiges de toute espèce ; nous en avons offert à nos lecteurs un grand nombre d’échantillons, sans rien discuter, laissant à la sagacité de chacun le soin d’apprécier le degré d’authenticité des faits et la vraisemblance des systèmes par lesquels on les explique. Le Spiritual Telegraph du 1" mai nous paraît surpasser en merveilleux tous les récits de ses confrères ; il ne s’agit de rien moins que de la transmutation des métaux. Voici la relation datée de Philadelphie (18 avril 1858) et signée S. A. Pcters :

« Venant du Missouri et ayant à visiter la ville de Philadelphie, je profitai de cette circonstance pour aller voir le professeur Hare et m’informer des développements et des découvertes qu’il obtenait dans le spiritualisme. Je ne doute pas que dans un temps opportun il ns fasse connaître au public l'histoire des prodigieuses manifestations spirituelles qui ont lieu dans son laboratoire. Je n’ai pour but aujourd’hui que de raconter ce dont j*ài été témoin. Les manifestations qui se produisent dans le laboratoire du docteur Hare et qui sont observées par son esprit analytique, sont certainement les plus extraordinaires qu’on ait jamais vues ou dont on ait entendu parler dans le monde; elles sont de nature à entraîner la conviction de ceux même qui étaient les plus déterminés à ne pas croire, car il est impossible à un mortel de faire de pareilles choses. Je vais en conséquence raconter quelques-uns des phénomènes que le docteur m’a déclaré s’être passés chez lui depuis peu de temps.

« Un de ceux qui ont lieu le plus communément devant M. Hare, c’est le changement d’un cent de cuivre (un sol de France) en une pièce d’or, et cela en quelques minutes. 11

possède un certain nombre de pièces d’or qui toutes ont été des cents de cuivre et ont été métamorphosées par les esprits. 11 nie montra une dissolution de platine de llussie, Alite par les esprits avec le minerai. Une pièce d’argent du poids de 3980 grains a été liquéfiée par les esprits, puis rendue à l’état solide et remise dans la môme forme. Il met ensemble un certain nombre de pièces de monnaie d'espèces différentes, d’or, d'argent et de cuivre ; il les place dans ua rase de verre solidement bouché; puis ce vase contenant les monnaies est enfermé dans une boite de bois que l’on clôt minutieusement. En l’espace de trois minutes pendant lesquelles le docteur se tient auprès, montre en main, la masse de métal est changée en une monnaie d’or de deux dollars et demi ( 13 fr. 50 c. ). On examine cette pièce d’or , on la remet dans le vase de verre, et le vase dans la boîte de bois; et en cinq minutes la pièce d’or est convertie dans les monnaies primitives qu’on retrouve telles qu’elles étaient avant la première métamorphose, line autrefois, en procédant de même, les différentes pièces de monnaie ont été changées en un bloc solide, puis les esprits ont changé ce bloc dans les monnaies primitives, toutes rendues à leur premier état.

Beaucoup d’autres manifestations extraordinaires ont eu lieu dans le laboratoire du docteur, et en présence de divers témoins.

u Je vais maintenant raconter ce que j’ai vu moi-même. Quand j’entrai dans le laboratoire, il n’y avait que le docteur Hare et le médium, M. Aug. Ruggles, jeune homme de dix-huit ou dix-neuf ans, auquel j’étais parfaitement inconnu. Le médium s’assit devant le spiritoscope qui était posé sur la table au milieu de la chambre. M. Hare et moi, nous nous assîmes près de la table en face de lui. Après quelques minutes, les esprits dirent au moyen du spiritoscope : Que S. A. Peters place deux tubes de verre et deux morceaux de minerai russe dans la boîte. M. nare se leva et m’apporta deux tubes de verre d’environ six pouces de long et d'un demi-pouce de diamètre, scellés hermétiquement à

leurs extrémités, et deux morceaux de platine de Russie, ayant chacun à peu près le volume d'une balle de fusil. J’examinai la boite dans laquelle je devais placer ces divers objets : elle était posée devant moi, sur la table. Elle a la forme d’un pupitre â écrire, un peu plus de deux pieds de long et un pied et demi de large, de quatre à huit pouces de hauteur ; le couvercle en est incliné, à charnière, et ferme par une agrafe. Je mis dans cette boite les deux tubes de verre et les deux morceaux de platine; il n’y avait rien autre chose; je la fermai. M. Hare et moi, nous reprîmes nos sièges, et le médium continua de se tenir au spiritoscope. Après 55 minutes d’attente, l’esprit déclara au moyen de cet instrument : Nous avons un présent pour S. À. Peters, qu’il aille le prendre dans la boîte. J’allai alors à la boîte qui était éloignée de moi d’un intervalle de quelques pieds, je l’ouvris et je trouvai les deux morceaux de platine dans les deux tubes de verre hermétiquement scellés.

« Je ne fais aucun commentaire. Je regarde comme un devoir de faire connaître au monde ce dont j’ai été témoin. »

Ce récit, on doit s’y attendre, trouvera plus d’un incrédule. Quant à nous, nous ne prétendons point fixer les limites du possible, et nous ne demandons que des faits bien constatés. Que M. Hare répète ses expériences devant un certain nombre de témoins, non-seulement il enrichira la science de faits nouveaux, mais encore, grâce à ses esprits alchimistes, il pourra, par la création d’une énorme masse d’or, réaliser les rêves les plus brillants, les utopies sociales les plus séduisantes, métamorphoser le genre humain et inaugurer l’âge d'or. Ainsi soit-il.

A. S. Morin.

BIBLIOGRAPHIE.

LA MÉDECINE DANS SES RAPPORTS AVEC LA RELIGION, ou réfutation du matérialisme théorique et pratique; par le docteur Wit-

TEAUT (t).

L’auteur de ce livre s’est proposé de combattre le matérialisme, en puisant des armes dans l’arsenal même de celui-ci. « A une époque comme la nôtre, — dit-il, sous forme d’épigraphe,— il importe, ce me semble, de rechercher ce que la science médicale, de concert avec les autres sciences, peut pour la démonstration de la vérité philosophique et religieuse. »

C’est donc pour concilier la science et la religion, jusqu ici réputées adverses, que M. le docteur Witteaut a écrit son livre. Cœur plein de foi, il a voulu prouver aux savants, et spécialement aux médecins, que, si la plupart d entre eux sont matérialistes, la faute n’en est point à la science, mais à eux-mêmes qui, en l’interrogeant, ne savent ou ne veulent pas se dépouiller d’opinions préconçues. Homme de savoir, il nous paraît avoir voulu montrer aux ministres du culte que, nonobstant toute prévention contraire, la science bien comprise est en puissance virtuelle de prêter un solide appui à la religion.

Voilà le cadre du livre, et ce cadre, aussi élevé par le but que vaste et complexe par l’ensemble et les détails, — car le sujet embrasse à la fois les plus hautes questions de physiologie, de psychologie, de métaphysique et de théologie, il fallait, pour le bien remplir, non-seulement une érudition armée de toutes pièces, mais encore une vaillante confiance en la bonté de la thèse à soutenir.

(1) Un vol. in-S, avec planches «les systèmes nerveux. Paris, 185j J.-B. Baillière et lils, P. Diard, éditeurs.

Il ne nous appartient pas de juger si M. le docteur Wit-teaut est resté la hauteur de sa tâche ('!). Dans les matières qui ne sont point de notre domaine, nous ne pouvons et ne devons formuler qu’une opinion de pur sentiment. A cet égard, il nous est permis de présenter le livre de M. le docteur Wit (eau t, comme empreint d’un travail sérieux, d’une grande force de logique, et, mieux encore, d’une chaleur de conviction telle, que l’on y sent en quelque sorte le frémissement d’une âme pénétrée d’amour pour la vérité.

L’objet essentiel de cet ouvrage est de prouver scientifiquement la justesse d’une doctrine dont le Journal du magnétisme fait la base de ses démonstrations habituelles, à savoir : l’immatérialité de l’âme ou principe pensant, et son indépendance du principe vital ou fluide nerveux, appelé aussi par nous fluide magnétique. Mais c’est à un titre plus naturel, plus direct encore, que nous faisons bon accueil à ce livre: quoique fervent catholique et médecin érudit, peut-être même parce qu’il est à la fois l’un et l’autre, M. le docteur Witteaut ne craint pas de rompre une lance en faveur du magnétisme. A la vérité, notre cause ne peut pas encore le compter parmi ses plus fermes champions; car il s’entoure de réserve, à la manière d’un guerrier prudent qui aborde une arène nouvelle pour lui. Mais nous, qui avons l’honneur de connaître M. le docteur Witteaut, et qui lui portons au-

(1) Voici l'opinion exprimée par une notabilité de la science médicale, — M. le docteur Bonnet, professeur à l'école de Lyon,—dans une lettre adressée à l'auleur, le 8 septembro 1857 :

« Vous avez raison de le dire, le christianisme est le sanctuaire de* vérités les plus hautes et les plus nécessaires à l’homme. Quand les sciences profanes touchent aux sujets que la religion a marqués de son empreinte sacrée, elles ne peuvent que s'égarer en s'abandonnant à des solutions contraires. Cette direction a été trop souvent celle de la médecine, et vous êtes dans la vérité où l’on se repose sans crainte, en démontrant que cette science bien connue apporte, comme toutes les autres, sa part do preuves aux grands principes que la société comme les individus ne peuvent méconnaître sans un danger égal à leur erreur. Je vous félicite d'avoir consacré votre talent au développement d'une thèse sur laquelle il importe tant d'éclairer les esprits, et de l'avoir fait avec une grande richesse da preuves et une remarquable élégance de style. »

tant (l’amitié que (l’estime, nous savons (pie ses restrictions tiennent à ce que, dans le milieu où il est placé, il ne lui a été possible d’étudier qu’une faible partie des divers ordres de laits qui constituent l’ensemble du mesmérisme. Vienne donc pour lui l’occasion de compléter son instruction magnétique, et nous pouvons garantir que, passionné comme il l’est pour le vrai, le beau, le bien, il n’hésitera pas à se montrer l’un de nos plus chauds défenseurs. Pour le moment, contentons-nous des quelques pages qu’il veut bien nous donner comme simple hors-d’œuvre (notes A, C, J), et voyons en quoi les idées qu’il exprime se rapprochent ou diffèrent de celles admises par la généralité des magnétistes.

Il se demande d'abord (note A, page 359), s’il faut, « à l’exemple de quelques savants qui n’ont pas eu l’honneur de les découvrir, nier certains effets du magnétisme. » Puis il ajoute : « Pour peu qu’on veuille voir expérimenter, ou expérimenter soi-même, en se mettant en garde contre toutes les sources de supercherie et d’erreur, si l’on est de bonne foi, il est impossible de ne pas reconnaître qu’il y a là quelque chose de réel, des faits incontestables, des phénomènes d’attraction, des phénomènes de transmission de forces particulières. »

A la page suivante, il cherche à montrer comment s’opère la transmission de pensée. Dans ce phénomène, «il n’y a rien, dit-il, qui se sépare de mon principe spirituel; mais il y a extension de ce principe, lequel, ma volonté cessant d’agir, se recueille de nouveau sur ma substance cérébrale. » Ce sentiment est partagé par un grand nombre de magnétistes, aussi bien pour la transmission de pensée que pour la vue à distance; il offre d’ailleurs un double cachet d’orthodoxie philosophique et de rationalité, en ce sens, que l’àme est une entité indivisible, et qu’elle ne parait point pouvoir s'isoler de l’organisme, dont elle régit la vie, sans que la mort survienne aussitôt.

Reste à savoir si cette théorie suffit pour rendre compte des phénomènes magnétiques en général. Les fluidistes purs en ont une autre, au moyen de laquelle ils veulent aussi tout

expliquer. M. le docteur Witteaut, lui-mèmc, semble leur donner indirectement raison quand, à propos des tables tournailles (noie C, page 373), il montre le lluide nerveux comme cause unique du phénomène: « Ce n’est donc point l'esprit, la vie, que l’on transmet à la surface de la table..., c’est purement la force motrice nerveuse qui fait sentir son action (1) ; et ce phénomène, qui n’a rien de merveilleux, de magique, est essentiellement du ressort de la physiologie. » Nous le voulons bien, mais alors il s'agit de s’entendre sur le sens de ce qui a été dit à la page 309 : « Si j’avais expérimenté sur un panier, ou corbeille à ouvrage..., si à cette corbeille on avait eu soin de fixer une plume, la corbeille aurait, sous l’influence de la volonté, exécuté certains mouvements voulus ; sur le papier, elle aurait écrit certains mots, certaines phrases en réponse à des questions posées. » Êtes-vous bien sûr, cher et honoré docteur, qu’une force physique, comme l'est la force motrice nerveuse, soit capable d’agir avec assez d’intelligence pour amener la matière inerte à exécuter des actes empreints d’une sorte de discernement? Certes, contrairement à votre avis, nous verrions là quelque chose de bien mci'vcilleux, de bien magique! Dans ce phénomène, vous placez, il est vrai, le meuble sous l'in/luencc de la volonté; mais ici, de deux choses l’une : ou la volonté agit concurremment avec la force nerveuse, et alors on ne peut pas dire que le phénomène est uniquement dû à l’action d’un principe physique; ou bien, la force nerveuse agit seule, et alors on ne doit pas dire que le meuble subit l’influence de la volonté, qui est un attribut de l’âme, à moins de supposer que la force nerveuse possède une volonté propre. Nous sommes loin de vous prêter une telle supposition, et nous ne voyons ici qu’une simple divergence, quant à la valeur donnée de part et d’autre au mot volonté. Pour nous, l’exercice de la volonté est un acte moral, ou, si vous le préférez, un acte psychique, lequel, pour se manifester, a be-

(I) Cette opinion de M. le docteur Witteaut est la conséquence d'une savante exposition qu'il fait du fonctionnement des systèmes norveux q“' président à la vie organique et à la vie animale (pages 569 à 573).

soin d’un agent fourni par l'organisme. Pour nous, donc, tenir un être ou un objet quelconque sous l'influence de la volonté, c’est, magnétiquement parlant, l’assujettir à une puissance mixte; à une force physique excitée et dirigée par une force intelligente émanant de l’âme. Que cette émanation ait lieu par émission ou par extension du principe spirituel, cela importe peu : la question, pour nous, est entièrement dans la cause efficiente du phénomène où l'on voit des marques d’intelligence que le principe nerveux nous parait impuissant à produire par lui seul. Avec l’intervention du principe spirituel, et pas autrement, nous pouvons arriver à comprendre que le meuble pénétré de votre principe nerveux, soit amené à s’imprégner de vos pensées et à les réfléchir mécaniquement (1). Si vous n'admettiez pas cette intervention, nous ne saurions nous expliquer ce que vous dites à la même page 369 : « La table, de même que le panier, de même que le chapeau, donne et ne peut donner raison que des choses vues et sues de celui qui dirige le mouvement. » Assurément, ce ne peut pas être le principe nerveux qui ait, à lui seul, la vertu d’inculquer ainsi à un objet privé de tout organe, la connaissance des choses vues et nues de l’expérimentateur, et l’obligation de les répercuter.

Nous comprenons d’ailleurs qu’il vous répugne de faire descendre le principe spirituel en des vulgarités peut-être indignes de sa noble essence ; nous comprenons cela, sachant que vous avez dit (note A, page 360), au sujet de la transmission de pensée : « Pour que l’idée soit transmise, on conçoit qu’il est de rigueur que l’extension se fasse jusqu’au siège de l’àme de l’individu que je magnétise ; qu’il faut que mon âme pénètre jusqu’à son principe pensant. » Or, comme le meuble que vous voulez influencer n’a point de principe pensant, votre âme, qui ne traite que de pair à pair, se contente de dire au principe nerveux, son humble serviteur: va! ceci ne regarde que toi; puis elle reste passive et indifférente, tout en exigeant que le pauvre meuble se fasse l’écho

(* ) Voy. la note de la pago suivante.

fidèle de pensées qu'elle a gardées pour elle seule, ou dont peut-être elle n’a pas conscience!... Savez-vous, cher docteur, que s’il en était ainsi, il n'y aurait pas d’expressions assez admiratives pour qualifier le phénomène, lequel serait alors infiniment plus merveilleux que celui déjà si remarquable de transmission de pensée dans le somnambulisme magnétique? Car, enfin, le fait est le même des deux côtés, et cependant quelle immense différence dans les moyens de le produire ! Ici, c’est une âme qui parle directement à une âme, son égale en genre, laquelle dispose de bons organes pour répéter la leçon qu’on vient de lui souffler mot à mot. Là, au contraire, c’est un simple agent à qui vous imposez tacitement le devoir d’instruire la matière inerte, de telle façon que celle-ci traduise illico ce que vous n’avez point appris à son1-précepteur 1... Convenez donc (votre thèse n’y perdra rien), que soustraire ainsi la force nerveuse à 1 inspiration et à la direction immédiate du principe spirituel, sans lesquelles, en dehors de l’organisme, cette force ne peut accomplir aucun acte intelligent, c’est compliquer le problème au point de le rendre superlativement insoluble : c’est douer implicitement la force nerveuse d’un pouvoir supérieur, eu quelque sorte, à celui de l’âme; ou bien, chose moins concevable encore, c’est attribuer à l’essence même de la matière inerte, des facultés plus transcendantes que celles dout jouit l’homme à l’état lucide.

Oui, certes, le phénomène des meubles parlants serait trop merveilleux si l’on n’y faisait point participer le principe spirituel comme cause première ; car, même avec cette puissante coopération, certains faits observés nous semblent tellement prodigieux, que nous inclinons à penser qu’un autre élément non moins décisif doit aussi concourir très-activement au phénomène. Nous y voyons (cela va de soi), une propriété nouvelle de l'âme, une affirmation pratique de ce poète : mens agitat molem; mais nous y soupçonnons autre chose encore (1), par la raison que bien des faits de cet ordre

(1) C'est afin de ne point sortir du terrain où la question se trouvai placée, que j'avais raisonné jusqu'ici dans un sens qui n'est pas le mien.

franchissent avec tant d’irrévérence les bornes posées par la science et la philosophie, que l’on serait tenté de leur attribuer un caractère surnaturel, si la nature.... Nous allions oublier, cher docteur, que vous n’en êtes encore qu’aux rudiments du spiritualisme magnétique, — au moins en ce qui concerne 1 observation des faits, — et que vouloir vous entraîner au-delà, sans autre préparation, ce serait exposer la croyance nouvelle à l’application, peut-être un peu mieux motivée cette fois, des sévérités trop absolues que vous prononcez (note J, page 406) contre tout lucide qui, usurpant le rôle du médecin, prétend diagnostiquer les maladies, distinguer les lésions des organes profonds et indiquer les remèdes pour tes guérir. « C’est ici, dites-vous, que les témoignages font défaut, que se rencontrent la spéculation, la mauvaise foi, les coïncidences, les prétentions extravagantes, l’absence de tout esprit d’observation et de toute espèce de bon sens. » Convenez pourtant que cette sentence est au moins prématurée, après l’aveu formel que vous aviez fait, page ¿05 : « Je n’ai point eu l’avantage d’être, comme pour la transmission de pensée et pour les tables tournantes, témoin et même plus que témoin de faits qui prouvent la lucidité. » Au surplus, votre rudesse actuelle ne nous inquiète en rien : connaissant votre parfaite sincérité, nous savons que,

I occasion aidant, il vous suffira d’avoir vu pour croire et pour le confesser hautement.

au sujet des meubles parlants. Ainsi, je ne puis ni comprendre ni admettre que le fond du phénomène soit un simple écho de nos pensées; car des milliers d’expériences ont démontré que les meubles (puisque meubles il y a), articulent aussi des idées et des faits complètement inconnus des expérimentateurs. 11 y a donc là, certainement, autre chose qu'une répercussion de la pensée consciente ou inconsciente des individus qui conversent avec le meuble. Autrement, il faudrait supposer qu'à notre insu, notre àme possède l’omnisciencc, et qu'elle a le miraculeux pouvoir de infuser dans la matière inerte. Mais, quand même cette hyperbolique supposition serait une vérité, il resterait à expliquer par quel prodige de mécanique le meuble peut parler et, mieux encore, écrire. C’est là le •« /... Et voilà pourquoi je suis pour l’intcrveution, non pas seulement c l’esprit, mais des esprits.

B.

Mais trêve (le réflexions, et répétons, en manière de résumé, que, transmettre la pensée à une personne ou à un meuble, c’est tout un pour nous, avec cette différence que, nonobstant la parité présumée des causes, les effets sont beaucoup moins explicables ici que là. Quant à vous, docteur, vous paraissez voir, dans le premier cas, un fait purement psychologique, et., dans le second, un fait purement physiologique; c’est-à-dire que, d’un côté, vous seriez spiritualiste, et, de l’autre, fluidiste. Est-ce bien cela? Dans l’affirmative, nous croyons que vos deux théories gagneraient quelque chose à être fondues ensemble; car, à notre avis, tout fait magnétique nécessite l’action simultanée de deux forces : l'une qui ordonne, éclaire et dirige, en vertu de sa propre essence ; l’autre qui obéit, agit et exécute, en vertu de l’impulsion et du caractère particulier que lui imprime la première. Cette union des deux forces constitue ce que, dans sa longue expérience, notre digne maître, M. le baron du Potet, appelle la vie spiritiialisée. La fusion proposée sent peut-être l’éclectisme (et nous le regrettons, sachant que, comme philosophe, vous tenez cette école en fort médiocre estime ) ; mais, pour nous, la méthode éclectique a cela de bon, que, dans le domaine des hypothèses, elle aide à donner raison d’un plus grand nombre de faits, en conciliant des théories d’apparence contraire, lesquelles, vues isolément, n’aboutissent parfois qu’à des demi-solutions, tendis que, rapprochées, elles peuvent conduire à la vérité entière, en se complétant les unes par les autres.

Et maintenant, cher et bon docteur "Witteaut, si nos verbeuses remarques sont sans objet; si, comme nous l’avons déjà pressenti, elles reposent uniquement sur un malentendu de mots, eh bien ! veuillez considérer le zèle qui nous a peut-être égaré, non comme un veilléité de critique, mais comme une marque sincère du cas que nous faisons de votre œuvre, et comme un témoignage indirect de haute estime et de cordiale amitié pour votre personne.

Baïhaut.

VARIÉTÉS.

M. Guidi, meir.bre du jury magnétique, professeur de magnétisme à Nice, rédacteur en chef du journal La Luce magnetica, et auteur de plusieurs bons ouvrages, a publié récemment un petit livre intitulé : La Vérité du magnétisme animal, et l'utilité de ta médecine magnétique et somnambu-lique. C’est un résumé clair et substantiel contenant toutes les notions élémentaires, et qui sera fort utile aux personnes qui veulent commencer l’étude du magnétisme. L’auteur traite avec talent, et d’une manière succincte, les questions théoriques, passe en revue les tables tournantes, les médiums et les esprits, et montre dans la discussion autant d’indépendance que de sagacité. Nous recommandons c e manuel aux amis du magnétisme.

NÉCROLOGIE.

Nous apprenons avec peine la mort du docteur Williams Grégory, professeur de chimie à l’université d’Edimbourg, membre de la Société royale de Londres et du jury magnétique de Paris, décédé le 24 avril dernier. C’était un savant de premier ordre et un des défenseurs les plus éclairés et les plus zélés du magnétisme. Il a traduit en anglais les ouvrages du baron de Reichenbach, et a publié plusieurs ouvrages fort estimés sur le magnétisme, notamment Lcttcrs to a candid inquirer on animal magnetism, Le tiers on mesmerism and clairvoyance, dont il a été rendu compte dans ce journal. Prêchant par la parole et par l’exemple, il a puissamment contribué à répandre en Ecosse la connaissance et l’usage

du magnétisme. 11 a été nn des principaux fondateurs de la société établie à Edimbourg sous le titre de Provisional mes-meric association, dont il était le président, et qui répand journellement les bienfaits du magnétisme dans toutes les classes. Cette société, qui soigne gratuitement une foule de malades, et qui a obtenu un grand nombre de guérisons éclatantes, conservera toujours avec respect et reconnaissance le souvenir de l’homme de bien qui l'a organisée, et son nom sera béni par tous les malheureux qui lui doivent le rétablissement de leur santé.

M. Grégory n’était pas de ces gens qui craignent de se compromettre en adhérant publiquement à notre doctrine. Homme d’énergie et de conviction, toujours prêt à la lutte et à la discussion, il a soutenu publiquement la cause de la vérité avec l’ardeur d’un véritable apôtre.

Cette perte sera un sujet de deuil pour tous les amis du magnétisme.

Avis à dos Abonnés.

Les grandes chaleurs de ces derniers temps avaient forcé M. le baron du I’otet d'interrompre ses séances démonstratives, consacrées spécialement aux abonnés. Le prochain numéro du Journal indiquera le jour où ces séances seront reprises.

Rien ne sera changé dans leur l'orme; elles auront lieu à la même heure.

Baron do POTET, propriétaire-gérant.

POLÉMIQUE.

RÉPONSE A LA LETTRE DE M. LE DOCTEUR CHARPIGNOK (1).

L’abondance des matériaux ne nous a pas permis de répondre plutôt à la lettre de M. le l)r Cliarpiguon. On a vu que M. Charpignon, tout en avouant l’existence du magnétisme et ses bienfaits, place bien au-dessus de lui la médecine ; il lui semble que cette science a une valeur près de laquelle le magnétisme doit s’incliner; notre sentiment est bien différent, et nous avons dans nos écrits soutenu cette idée, que la médecine des écoles ne sera un jour que l’auxiliaire du magnétisme, de cette science qui se fonde seulement maintenant. Mais ces discussions, pour être approfondies, demanderaient des volumes et nous voulons seulement ici faire quelques objections au système ou à la doctrine de notre très-lionoré maître M. (Uiarptg.non.

Voici, sans autre préambule, ce qu’on objecte contre l’ait de guérir par des remèdes; plus tard, nous établirons ce qui ressort de l’étude suivie du magnétisme, de ce principe dont la nature est inconuue etqui peut par des. mains intelligentes opérer des œuvres tellement capitales et extiaordinaices qu’elles effrayent ceux-là mômes qui :Sont les plus avancés dans l’art de guérir par les' remèdes. Voici ce que nous extrayons, contre la médecine, d’un ouvrage récent ayant pour titre Essai de médecine pratique. Baron du Poïet.

« La science médicale est loin d’être une science positive ; car la plupart des faits sur lesquels elle se fonde sont des anomalies , des perturbations des lois de la nature qui règlent la santé ; c’est à vrai dire un art scientifique.

(1) Voir les numéros du 25 avril ot du 10 mai.

Tome XVji. _ no 39. _ 2« Série. — 10 aoùl 1858. M

Oui, la médecine, cet art scientifique, est loin d’être un» science positive ; elle n’a encore aucun code de. loi reconnu et adopté par tous; bien au contraire, elle a malheureusement une foule do codes contradictoires, semblables à ces lois éphémères nées des tourmentes sociales où l'esprit de système et les passions ne prescrivent que des expédients dangereux et souvent homicides.

En effet, que de systèmes divergents préconisés tour à tour par les auteurs de doctrines médicales.

Celui-ci, semblable à Dracon, ne fait que verser le sang de ses victimes. II attaque le principe de la vie sous prétexte de la sauver.

Celui-là ne voit partout que faiblesse et qu’extinction de la flamme de l'existence; aussi veut-il l’alimenter par les matériaux les plus inflammables.

Cet autre voit tout en feu, et, semblable à un pompier, il ne cherche que dans l’eau le remède contre l’incendie.

Ici l’on n’aperçoit que des humeurs peccantes qu’on doit évacuer sans relâche et sans cesse pour rétablir la santé.

Là on ne trouve que dans le régime seul le moyen de vaincre la maladie par la fa nine.

Pour quelques-uns le corps n’est qu’un simple laboratoire chimique qu’il faut fournir de bases ou d'acides pour les neutraliser.

Pour d’autres, les maladies sont seulement des plantes parasites qu’il ne s’agit que de détruire par leurs racines.

Pour celui-ci, tout mal est vivant et est une invasion d'ennemis visibles qui font des ravages mortels et qu’il faut •combattre et expulser.

Là, tout remède est un contre-poison contre la maladie .(jui n’est elle-même qu’un empoisonnement général ou particulier , et la crise devient la victoire entre ces deux poisons rivaux.

Celui-ci certifie, au contraire, que la maladie naturelle ne peut être combattue que par une maladie artificielle de même nature. Semblable à Zopire, le remède introduit dans la

place assiégée, comme un ami de la révolte, doit la livrer bientôt à son Darius devenu médecin.

Ici, on donne des doses titaniques et des remèdes héroïques pour combattre un mal souvent pygmée ; là, 011 assure par contre guérir une grande maladie avec un simple atome que le calcul infinitésimal lui-même négligerait comme n’ayant nulle valeur.

Ici, 011 ne voit qu’une lutte entre le trop de force ou l’excès de faiblesse, et les remèdes distribués en excitants ou en débilitants, doivent seulement régler le bilan de la santé, en comblant le déficit d'un côté, ou en enlevant de l’autre le trop plein de l’avoir.

Celui-ci voit dans la graine de moutarde la semence dï l'arbre entier de la science médicale.

Celui-là préconise le mercure comme le seul messager de la santé.

Cet autre ne demande que l’extrait de pavots pour endormir tous les maux, sans songer aux suites funestes de ce poison désorganisateur.

Ici, tout est nerveux, et la douleur, et le siège du mal, et la cause de la maladie ; et le remède est pour le médecin la foudre réduite en doses médicales par une brosse métallique.

Là, tout est musculaire ; aussi, comme au temps de la Grèce, veut-on rétablir la gymnastique curative, pour guérir tous les maux par la danse et le pugilat.

Plus loin, on ne voit que des sympathies de tissus qu’il s’agit seulement de resserrer ou de dilater pour les mettre en harmonie.

Là, tout mal ne vient que de l’estomac qui, malhabile fournisseur, ne sait plus alimenter tout l'organisme, et qui est la cause du dépérissement de l’individu. Toutes les maladies rentrent alors dans la gastro-entérite.

Ici, on ne combat jamais la maladie de front ; mais en habile tactitien, le médecin doit opérer des attaques obliques et des diversions pour déplacer l’ennemi, obligé alors de lever le siège pour se défendre aux frontières contre les assauts extérieurs du remède.

L’un ne demande ses médicaments qu’au règne minéral

seul ; l’autre n'admet que les simples dans sa pharmacopée; le troisième ne veut que des substancesanimalisées pour neutraliser les efforts de la maladie ; le quatrième ne demande qu’à frapper le malade pour tuer la maladie. Celui-ci s’arme seulement d’une simple brosse pour enlever le mal comme une poussière incommode.

Mais que dire de ceux qui n’aperçoivent dans l’homme vivant qu’uue machine inconsciente, dont les organes sont de simples rouages et dont les mouvements ne sont produits que par une force purement mécanique ? ou de ceux qui n’admettent aucune différence entre l’âme animante et l’être animé? cpii confondent l'homme avec l’animal, et qui, dans leur système immoral et absurde, veulent nier l’âme et la vie individuelle , en prétendant par là faire triompher leur système athéiste.

Que penser aussi de ceux qui ne voient que dans l’âme,immortelle seule le siège et la cause de la vie? Ils sont obligés logiquement, ou de nier la vie des animaux, ou de leur supposer une âme comme la nôtre.

La crédulité et l’incrédulité ont, dans l’histoire de la médecine , eu des effets tout aussi faux et.tout aussi dangereux qu’en philosophie et en religion.

La crédulité, en croyant aveuglément à chaque fait .rapporté , et en élevant bientôt ce fait, souvent imaginaire, en loi générale, en règle universelle, pour traiter toutes les affections morbides.

L'incrédulité, de son côté, en rejetant les faits les plus avérés et les plus authentiques, en négligeant les analogies qui font apercevoir des rapports utiles, est arrivée par contre a nier même les genres et les espèces dans les maladies semblables , en ne voyant jamais que des cas isolés et toujours nouveaux.

La synthèse et l’analyse ont aussi produit par leur exagération exclusive des effets bien déplorables en médecine î l’une a voulu faire de la médecine une vaine théorie, l’autre un métier irrationnel.

La médecine a toujours réfléchi les iulluonces dominantes

!u milieu social où clic, s’est développée, — sacerdotale et secrète dans l’antique Orient, tour il tour populaire et philosophique dans la Grèce, elle a, été matérialiste ou spiritua-liste, dogmatique, ou empirique, ou électrique, en s'harmonisant ainsi avec les systèmes des éçoles dominantes.

Au moyen-âge, toute scholastique et dogmatique ; depuis Bacon, expérimentale et malheureusement matérialiste.

Cependant la multiplicité des faits enregistrés, l’apparition des grandes invasions contagieuses venues de l’Orient asiatique et de (’Occident américain , ont accumulé une immense quantité de faits, de matériaux et d’expériences qui ne seront jamais perclus, grâce à l’imprimerie.

L’ancienne lutte, renouvelée entre les dogmatiques et les empiriques, a éclairci bien dps questions , mais sans les résoudre.

Cependant, plusieurs rameaux vraiment scientifiques sc sont développés au milieu de cette lutte ; entr’autres l’anatomie , la chirurgie générale et particulière, l’art de l’accouchement et la physiologie.

La matière médicale a fait aussi des progrès par les analyses chimiques du règne végétal ; et elle augmente depuis peu aussi ses connaissances dans le règne animal, par la chimie organique.

Mais les rapports entre les remèdes et les maladies sont encore incertains. Aussi l’application des remèdes aux maladies est-elle scientifiquement peu avancée ; et cette partie de la médecine est loin d’être à la hauteur de la physiologie, qui a pour fondement l’observation des faits constants et des lois de la nature; tandis que la thérapeutique n’a pour base que des faits variables et des dérogations aux lois normales qui règlent la santé.

Cette supériorité de la physiologie sur l’art de la médecine générale a eu aussi des effets très-nuisibles. Elle a occasionné un envahissement dominateur de la physiologie sur la médecine proprement dite ; et le docteur Broussais a été le chef de cette invasion sanglante qui a fait répandre, au dire d’nn

grand médecin, plus de sang par la Faculté que n’en avait versé la grande révolution par ses échafauds.

La synthèse matérialiste a étendu sa domination sur tout l’art de guérir, en voulant simplifier la médecine, en en faisant une branche dépendante uniquement de sa physiologie.

Ce système a égaré une foule de praticiens par la symétrie, par sa simplicité, par la facilité avec laquelle on pouvait l’apprendre et l’appliquer ; par son positivisme exclusif, si je puis m’exprimer ainsi, en n’admettant ni épidémie, ni contagion, ni spécifique ; en ne voyant partout que des inflammations et des subinflammations localea et générales, sans prendre en considération les causes morbides.

Les praticiens de l’école de Broussais n’avaient qu’à consulter le pouls, déterminer le siège du mal, et puis agir contre l’inflammation générale par des saignées abondantes et souvent répétées.

Après avoir vaincu l’inflammation, dite générale, ils devaient opposer à l’inflammation locale des sangsues pour faire évanouir.

Venait en dernier lieu l’emploi des excitants externes, les sinapismes, les vésicatoires et le rnoxa, pour produire dans un organe moins noble, et par sympathie, une inflammation artificielle qui devait nécessairement déplacer le siège du mal, qu’on n’avait plus à traiter que par de simples topiques émol-lients.

Qne de malades ont été victimes de ce traitement dogmatique, de ce brownisme retourné ; et que de médecins se sont égarés dans cette voie si dangereuse !

Les bons esprits rejettent aujourd’hui les soi-disant dogmes de cette école, mais la paresse et les avantages commodes de la non-responsabilité retiennent encore une foule de praticiens dans son sein.

La revue si spirituelle des systèmes de médecine, par Broussais, n’est qu’un exposé critique des doctrines médicales, pour faire voir les contradictions et l’incohérence de ces divers systèmes entre eux et leur complication, en comparaison de la

simplicité et de la marche logique du broussaisisme. Cependant le but de la médecine n’est pas de faire des systèmes élégants, symétriques et faciles à concevoir, mais bien de guérir, et Broussais et son école ont bien plus tué que guéri.

Je me suis plus étendu sur le système de Broussais que sur les autres, car il est le plus séduisant, le plus dangereux et le plus en vogue encore aujourd’ hui dans certains pays. »

[La suite à un prochain numéro..)

M. DHABRU w.

C’est contre notre sentiment et pour obéir à quelques exigences de position que nous avons parlé de l’ouvrage de M. Mabru. Nous ne lisons jamais les ouvrages écrits contre le magnétisme, mais c’est toujours avec soin que nous analysons les livres écrits sur cette science.

A quoi bon, en effet, discuter la valeur d’un livre dont Tauteur s’est plu à rassembler, à accumuler tous les faits négatifs, les excentricités et les actes de quelques magnétis-tes, sans tenir aucun compte des phénomènes positifs ou même de ceux probants? Nous avons dans notre vie rencontré nn millierdeMM. Mabrus, d’hommes de ce tempérament, membres d’académie, lauréats, etc. Nous leur avons tourné le dos, car c’était sans profit pour la science qu’on produisait des faits devant eux ou seulement qu’on en discutait la valeur. Lorsque c’est un parti pris de nier quand même, on n’a plus à s occuper de semblables esprits et les magnétiseurs doivent répandre ailleurs leurs trésors. Le magnétisme a eu des ennemis bien plus puissants que M. Mabru, des écrivains d’une autre force et d’une autre renommée l’ont combattu, ils n’ont rien empêché et n’ont été applaudis que par les gens qui redoutaient la vérité nouvelle et en avaient peur.

(•) Voir le journal du 10juin, n» 38, l'article sur MM. Dabinet cl Mabru.

N’àvonè-nous pas eu le fttmeux rapport de Thouret, de la Société royale; puis les écrits de Virey, de l'Académie de médecine; puis enfin ceux de Dubois (d'Amiens), de cette même Académie; et enfin, quelque centaines d’autres ouvrages de moindre valeur? Tout cela est tombé dans l’oubli, tandis (pie la vérité étend chaque jour scs ailes sur le monde. Que veut M. Mabru aujourd’hui et que prétend-il? Qu’on lui prouve l’existence du inaghdtiSMto comme agent, comme force, ou son action curative? Non*, il demande un fait exceptionnel, qui se produit très-rarement et dans des conditions que l’on ne peut connaître d’avançât phénomène qui, prouvé pour M. Mabru, ne signifierait absolument rien “pour déterminer sa croyance au magnétisme, car, ce fait se produit sans lui, dans la catalepsie et l'extase naturelle. Bien différent de ces devanciers, AI. Mabru ne discute point, il calomnie, et son enjeu est un pari de cabaret, ou un défi de fabricant de serrures à secret.

Beaucoup de magnétistes se sont émus pourtant, ils ent redouté cette attaque... crainte chimérique , peur d’enfant! Un écrit contre le magnétisme n’a pas plus de valeur, à nos yeux, que ceux qu’on lancerait contre l’électricité, le galvanisme ou la lumière ; et M. Mabru l’apprendra bientôt, s’il ne le sait déjà. Nous voyons donc avec peine les magnétistes donner dans un piège. Que voulait M. Mabru, qu’on s’occupât de lui, ne fût-ce qu’un instant. Notre sentiment est que le magnétisme aujourd’hui n’a plus besoin d’ètre défendu, il est partout, chacun même, peut en produire les phénomènes, et son action puissante autant que salutaire ne tardera, point à être reconnue par les maîtres de M. Mabru. Magnétistes, si nous pouvions exercer quelque influence sur vos pensées et sur votre raison, nous vous dirions, laissez-là cet auteur, ne vous en occupez point, car il est pris d’une espèce de rage aveugle qui se terminera un jour par le dédain qu’auront polir lui ceux qui l’ont poussé dans cette voie, où celui qui la suit, laisse le jugement et la raison et n’en sort que revêtu d'un stygmate d’homme partial et de faux jugement. Baron du Potet.

SOMNAMBULISME MAGNÉTIQUE.

Avant-hier, dans un des rares satons du-faubourg Saint-Germain qui restent, encore ouverts pour une société d'amis, on parlait de magnétisme et de somnambulisme , un des thèmes favoris de la conversation contemporaine , et, en dépit des sceptiques, une des questions les plus intéressantes et peut-être les plus graves qui puissent préoccuper les esprits sérieux.

On le pense bien, tout le monde n’était pas du même avis sur ces matières délicates et mystérieuses, et un jeune homme entr’autres, M. deL..., exprimait en termes presque impertinents son incrédulité systématique.

Un homme de cinquante ans environ, d’un extérieur grave et modeste, qui suivait depuis longtemps la discussion sans y prendre part, rompit tout à, coup le silence, et s’adressant à k de L...

— Monsieur, dit-il, vous paraissez résolu à ne croire au-cnn des faits qu'on vous rapporte, et je me garderai de faire aucune réflexion sur ce'parti pris. Mais, veuillez croire'au témoignage très-désintéressé que je vous apporte. Je n’ai pas mission de prêcher l’Evangile du magnétisme; je ne suia pas un apôtre, mais un homme sincère, qui pense devoir dire ce qu’il sait et ce qu’il a vu.

C’est à la lucidité d’une somnambule que je dois la vie , monsieur, et si vous le permettez, je vais vous faire une assez longue histoire.

Il y a six ans, j’étais encore professeur dans une institution dirigée par des ecclésiastiques. Après la distribution des prix, je me rendis en Normandie, chez les parents d’un de mes élèves , qui avaient voulu que leur fds prît des leçons pai-ticu-liùces pendant ses vacances. Cette famille, qui est ancienne

considérable, habile aux environs d'Honfleur un château

dont la construction remonte, dit-on, à l'époque de l’empereur Cliarlcmagne.

Lesoirmême démon arrivée, on veilla jusqu’à dix ou onze heures dans le salon, et l’on me raconta l’histoire de l’antique manoir. Scs murs ont ôté plus d’une fois ébranlés par des assauts, et les luttes féodales ont teint de sang le pavé de ses cours et le bois de son pont-levis ; mais de tous les récits qu’on voulut bien me faire, ce fut le plus moderne qui me fit la plus vive impression. Il y a soixante ou soixante-dix ans, une jeune femme du château disparut ; on la chercha pendant des années, et l’on ne put rien apprendre de son sort; on futréduitaux conjectures. On supposa qu’elle avait été enlevée par quelque corsaire, et l’on essaya de l’oublier; mais son souvenir est demeuré vivant dans le pays et surtout dans le château de X..., où l’on s’empresse encore de parler d’elle à tous les visiteurs.

Quand on quitta le salon, je me dirigeai vers l’aile du château où l’on m’avait préparé une chambre. Je l’avais visitée dans la journée, et, comptant sur ma mémoire, je voulus y aller sans guide.

Mais je ne tardai pas à m’en repentir. Je m’étais engagé dans un couloir sombre, entre deux murs interminables, le long desquels je cherchai vainement une porte. Etonné et déjà inquiet, j’allais en tâtonnant, promenant la main sur les parois froides et nues ; tout à coup, une porte s’ouvrit, j’avais sans doute touché quelque ressort secret, je descendis deux degrés et je me trouvai dans une vaste salle, que je n’eus pas-le temps d’examiner : un courant d’air éteignit ma bougie; je voulus battre en retraite, mais la porte s'était refermée sur moi, et je ne pus en retrouver même la place.

Alors, je fis quelques pas dans l’obscurité, tendant les bras en avant ; je touchai des objets polis et glacés, qui me firent courir des frissons partout le corps et qui résonnaient au moindre contact. Je cherchai un siège quelconque ; n'en trouvant pas, je me couchai pas terre et j’attendis le jour. Vers deux heures du matin, je m’endormis. Quand je m'éveillai, il faisait grand jour, et je promenai mes regards autour de

moi. Je ne vis d’abord que des armures rouillées, des casques, des hauberts, des épées rongées pas la vétusté ; mais bientôt je jetai un cri d’effroi.

Je me trouvais en présence d’un squelette de femme, vêtu d une robe de satin bleu , quelques beaux cheveux blonds étaient encore épars sur le crâne dépouillé, et des dents blanches étaient rangées dans l’affreux rictus de la bouche vide.

Je pensai que cette infortunée élait sans doute tombée comme moi clans cette fosse sans issue apparente, qui servit autrefois de retraite aux guerriers trop vivement pressés par l’ennemi.

Je me mis à crier de toutes mes forces , j’appelai du secours, je frappai du poing, du pied contre tous les murs, et je me démenai comme un fou jusqu’au coucher du soleil.

Alors, le désespoir me gagnant, je fis la prière, je me couchai, et j’attendis la mort. Je l’attendis deux nuits et deux jours, et déjà je n'avais plus guère conscience de mon existence, lorsque je crus entendre des coups de pioche non loin de ma tête. J’écoutai, le bruit devenait de plus en plus distinct ; je me ressentis naître ; je me traînai du côté du mur, je criai, ma voix fut entendue, et, au bout de deux ou trois heures, j’étais délivré.

Or, savez-vous se qui s’était passé pendant mon agonie ? On avait couru à Honfleur consulter une somnambule.

Cette femme vint au château; on l’endormit.

— Je le vois? s’écria-t-elle.

Et marchant droit vers un côté des remparts, elle dit simplement :

— 11 est là !

On n’hésita pas à abattre le mur, et me voici.

Je dois tout avouer cependant; la somnambule avait dit encore le même jour :

— Dans ce château, à telle place, un trésor est déposé.

On a dépensé 50,000 fr. en fouilles, et l’on n’a rien trouvé.

HENRY d’aüDIGIER.

SOMNAMBULISME NATUREL.

Dernièrement à New-York, un pompier nommé Brown , âgé de vingt-sept ans et qui était sujet à des accès de somnambulisme naturel, étant endormi, se leva de son lit, sauta par la fenêtre d’un étage élevé et tomba sur le pavé : dans sa chute, il se cassa un bras et line cuisse et reçut plusieurs autres blessures. Transporté à l’hôpital, il mourut le lendemain matin des suites de sa chute. Le coroner a fait une enquête, et le jury a rendu un verdict constatant que cet individu était mort des blessures reçues en état de somnambulisme. (Spiritual Telcgraph du Îi) juin.)

De pareils malheurs devraient attirer l'attention sur les dangers, auxquels sont, exposés les somnambules naturels.. Souvent les. parents croient avoir assez fait en prenant quelques précautions pour les empêcher de sortir de leur appartement ; mais la plupart du temps, il arrive différentes circonstances qui mettent ees précautions en défaut. Le mieux est de combattre cette affection maladive. Il a été prouvé par de nombreux exemples.que le magnétisme était le remède le plus efficace ; le magnétiseur, en produisant le somnambulisme artificiel, devance les crises, puis les maîtrise et Cnit par les faire disparaître. 11 est à désirer que ce moyen, si facile et qui n’offre aucun inconvénient, soit employé dans toutes les familles où il y a des somnambules,natuïels.

Nous extrayons du Journal de Seine-ct-Marne la relation suivante d’un fait qui a été jugé àMelun aux assises du mois de mai dernier.

Sî le mystère, dont les criminels cherchent à entourer leurs actes , peut quelquefois dérouter la police , il ne suffit pas toujours néanmoins pour les mettre à l’abri de la justice.

Une malheureuse fille déjà mère était accouchée clandes-

tinemeot, son nouveau né était disparu sans qu’on sût comment, deux mois s’étaient écoulés sans que la justice eut

l ien pu découvrir,'et déjà l'on y pensait plus quand une fille du même village rêve la nuit qu’elle voyait l’accusée jeter son enfant dans la glacière du château de Q..», elle confia ce rêve à une amie en lui en faisant un secret qui,. Je soir du jour même, n’en fut plus un pour personne. La police fut instruite, la glacière explorée, l’enfant découvert et la coupable mère forcée d'avouer son crime.

PROPHÉTIES.

Le Spiritual Telegraph du 8 mai dernier nous révèle l’existence d’un livre fort singulier, écrit en anglais, publié >à Londres en 1794, et dont voici le titre traduit en-français-: « Révélation île plusieurs choses qui s’uccompftront bientêt dans le monde; communiquée ù un certain1 nombre de chrétiens réunis de tous les pays à Avignon, par te pouvoir:de f Esprit de Dieu; actuellement publiée •en vetUwd’im commandement divin, pour te bien de tous (es hommes, par John Wright, serviteur de Dieu, et par un de ses frèresjo»

!1 n'y a peut-être pas en France une seule personne qpui'ëa-clie qu’au mois de janvier 1789, ils’est tenu À Avignon un synode de prophètes venus de tous les coins du ‘monde ; c’ast l’Amérique qui vient aujourd’hui nous apprendre cetémrasige événement. Vôici quelques détails sur l’auteur du livre.

Jcftin Wright était charpentier à Leeds, dans le Yorkshire (Angleterre) ; «’était un homme fort pieux et porté au miyefii-cisme. EnÜ7B8, il fit connaissance de missionnaire» Swedeœ-borgiens qui ie décidèrent à se rendre à tendre* pour;>Se mettre en communion avec la nouvelle Jérusalem. Il ’«ut des rapports avec cette église qui était récemment -établie, mas

il en fut peu satisfait ; il la trouva attachée aux vieux usages et aux superstitions qui, selon lui, devaient bientôt disparaître. Il entendit parler d'un/i«/? nommé William Ryau, dont les traits et la physionomie avaient la plus grande ressemblance avec ceux de Jésns-Christ tel qu'on le représente dans lestableauxreligieux; il avait une voix d’une douceur extraordinaire, et son éloquence touchait tous les cœurs. Wright se lia intimement avec Ryan qui lui dévoila les événements importants qui allaient changer la face du monde. Tous deux informés (sans doute pacdes voix intérieures) qu’une assemblée de prophètes devaitse tenir à Avignon, étaient fortement incités à s’y rendre, et connaissaient la haute portée de cette réunion. Mais plusieurs obstacles s’y opposaient; nos deux saints n’avaient pas le sou, et, de plus, la femme de Ryan, qui était gravement malade, n'appréciait nullement l'utilité de ce voyage. Le mari, persuadé qu’il obéissait à la volonté du ciel, ne tint aucun compte de cette résistance, et décida que le départ aurait lieu. Au jour fixé, il trouva moyen d’emprunter d'un ami quatre guinées; il en donna généreusement une à sa femme, en lui promettant la protection divine, et la chargeant en outre de pourvoir pendant son absence aux besoins delà femme de Wright et de ses enfants ; puis, munis des trois autres guinées et délivrés dès-lors de tout souci relatif aux choses d’ici-bas, les deux prophètes se mitent en route. Après bien des fatigues et des privations, ils arrivèrent enfin à Avignon, ville sanctifiée par le séjour des papes. Ils lavèrent dans le fleuve leurs pieds souillés de la poussière du chemin, prirent quelque temps pour asile les buissons des champs, puis se mirent en quête de la maison où se tenait le concile. Ils furent surpris de trouver une porte ouverte , à laquelle se tenait un homme qui parlait anglais, qui venait d’arriver d’une contrée lointaine, et qui leur servit d’introducteur. Ils furent de là conduits à une autre maison où était une table • somptueuse, servie par le Seigneur à ses serviteurs ; on leur fournit également des vêtements neufs et de l’argent à discrétion pour leurs aumônes, toujours aux frais et par les soins dudit Seigneur :

Dieu prodigue ses biens A ceux qui font vœu d'ètre siens.

Les prophètes se réunissaient chaque soir, mangeaient et buvaient avec componction, en commémoration de la mort du Seigneur. A chacun de ces soupers, quand les convives étaient assis, tout ce qui garnissait la table était violemment secoué au point qu’on craignait que tout ne se brisât en mille morceaux. On apprit que ces bi/ares manifestations étaient produites par la présence des anges qui venaient se mêler à leurs réunions. On s’y habitua tellement que, quand le grabuge ordinaire n’avait pas lieu, les prophètes se soupçonnant coupables de quelque tnéchef, craignaient que le Seigneur ne cessât de bénir leurs assemblées.

On nous assure que les prophéties ont été recueillies pendant ce concile en 1789; toutefois elles n’ont de date authentique que par la publication qu’en fit Wright en 1794. On affirme qu’elles annoncèrent les principaux événements de la Révolution française, l’élévation prodigieuse du grand Napoléon et sa chute terrible, les échecs de la Turquie, etc. Les extraits que donne le Telegraph, nous semblent manquer de précision et se rapprocher beaucoup de ces prédictions vagues et ampoulées, comme celles que débite chaque année le Triple Liégeois, prédictions qui ne s’appliquant à rien, peuvent, avec un peu d'effort, s’appliquerà tout. Au surplus, nous allons mettre nos lecteurs à même d’en juger par un échantillon ;

c Tous les événements de ce siècle (le 18*), ont été prédits, et aucun siècle n’a été distingué par autant de prodiges; mais le siècle suivant en montrera de bien plus grands encore. Le feu est allumé, le moment est venu. Le mahométan est sur le point de tomber; l'Asie et l'Afrique sont ébranlées etsaisies de frayeur, elles entrevoient le sort qui les attend. — On n’attendra pas longtemps l’accompli3sement des promesses de l’Étemel. 11 appelle les temps qui cheminent dans l’ombre et les jours de ténèbres, pour les pousser en avant, changer la face du monde et commencer son nouveau règne; ce sera l’avénement de nouveaux deux et d'une nouvelle terre.

L’Éternel a dit : Je simplifierai toutes choses dans l'intérêt de mes élus. Le moment est arrivé où la confusion des langues ne sera plus un obstacle à la connaissance de la vérité.

«Quand l’impie et son ange orgueilleux, dans leur furie, oseront déclarer la guerre au Dieu du ciel, tout cédera son audace : il fera des victimes parmi les saints que le Seigneur a choisis, il profanera les asiles sacrés, et souillera par les crimes les plus odieux les temples de l’Éternel ; son orgueil croissant avec le succès, il se croira îe maître dumoilde. (.’est alors que le ciel l’arrêtera. Un faible enfant terrassera sa valeur; sa chute prouvera qu’aux yeux de l’Éternel il n’y apas d’autre pouvoir que le pouvoir de son bras. ¡Déjà la mesure est comble ; déjà lestemps sont accomplis, le règne du monde est prêt. La terreur servira à éclairer les aveugles, à humilier les obstinés et les .ambitieux, et .à punir les impies. »

.Nous ne savons si le journal américain a bien choisi ces extraits : peut-être se trouve-t-il dans le livre, des passages qui désignent plus clairement les événements? Nous appelons à ce sujet l’attention des personnes qui pourront se procurer cçt ouvrage qui est très-rare, et qui, par sa date et sonorigine, est curieux à plus d’un titre. On y trouvera sans doute des documents intéressants snrles évolutions du spiritualisme et sur ses rapports avec hrpoïrtique.

A. 'S.'Momh.

APPARITION D’ESPRIT.

EXPÉRIENCE FAITE PAR M. LE BARON DE MORTEMART-0ÔB9E.

Supposons qu’au milieu d’une représentation de la' TioCtttè bïariehe ou d'Obrron, un spectateur se lôVe et dise au public-« Messieurs, vous considérez sans doute comme purement fantastiques les actions dont des poètes et des musiciens vous présentent les tableaux ; les auteurs de la Dame blanche, pfus scrupuleux que ceuX’d'OüèroTJ, ont môme soin de substituer; à h fm de leur œuvre, le réel à la fantiifeic. Eh bien ! détrom-pez-votis : la fantaisie n’est pas moins vraie que le côté réel ;-seulement, ellen’éstpasit là portéede toates les organisations; maiselle est tout aussi sensiblement vraie pour quelques-unes. N’écoutez donc pas d’une oreille distraite; car ce qui vous parait aujourd’hui un pur amusement, pourra être demain pour vous un sujet d’émotions profondes et db réflexions pénibles, » ■■!■■■ 1 r.A

La réponse- du public est Bien facile à deviner. Il n’y aurait qu’un cri dans la salle de spectacle pourfaire chasser un pauvre insensé ; et, si la police s’en emparait et le soumettait i une enquête médicale, il serait grandement exposé à aller recevoir quelques douches dans un asile d’aliénés.

Cet homme vient de se trouver ; ce n’est pas seulement au public d’un théâtre qu’il a parlé ; mieux que cela, c’est à tout le momie; car voici son livre imprimé, et dont les:éditions s'épuisent facilement. Cet homme n’est pas le moins du. monde un insensé ; c’est, au contraire, un homme grave et réfléchi ; c’est un homme placé- dans ute haute position sociale, et qui sait joindre à de grandes manières le goût des lettres et des arts : c’est AL le baron de Mortemart-Boisse.

Ecoutons-le raconter, dans un chapitre de la Vte élégante à Paris, une apparition de la daine d’Ybourg.

« Lorsque le vent passa à la sorcelllerie, espèce de brise nocturne et sombre qui précéda de loin l’arrivée de M. Home, dont je ne raconterai pas les prouesses à la cour de Napoléon III, il y eut des soirées magnétiques et fantastiques chez la baronne de M***, chez la vicomtesse de Blan***, et aussi chez la duchesse de ’**, dans le haut du faubourg Saint-Germain.

« L’une des plus remarquables fut celle de la rue de Cau-martin, chez M. de Vaudreuil. Un de mes meilleurs amis, le vicomte de la Tour-du-Pin, qui y assistait, m’a raconté que, mis en communication avec la somnambule, il lui demanda d’écrire, dans son sommeil magnétique, une lettre dont lui penserait le sens et le but. Elle le fit sans hésitation, et c’était précisément ce qu’avait pensé M. de la Tour-du-Pin. Il m’a assuré dernièrement, pendant un joli spectacle de salon, rue Saint-Dominique, 85, qu’il avait renouvelé cinq fois cette épreuve, et qu’autant de fois cette femme avait transcrit littéralement ce qu’il avait pensé 1

« Tout récemment, j’ai parcouru, comme tant d’autres curieux, un livre intitulé : le Livre des esprits, écrit sous la dictée et publié par l’ordre d’esprits supérieurs ( par M. Allan Kardec). J’appris dans ce livre :

n Que les esprits n’appartiennent pas perpétuellement au même ordre. Tous s’améliorent en passant par les différents degrés de la hiérarchie spirite ». J’y appris encore « que l’esprit devant passer par plusieurs incarnations, il en résulte que nous tous avons eu plusieurs existences, et que nous en aurons encore d’autres plus ou moins perfectionnées, soit sur cette terre, soit dans d’autres mondes. »

« Tous ces faits et cent autres que je pourrais rappeler, prouvent fort en faveur des amis du merveilleux, et ce qui va suivre justifie la comtesse de M*** et tous ceux qui se livrent, depuis M. Home, aux évocations.

« Ecoutez bien, petits et grands.

« § 252. Tout le monde peut évoquer un ou plusieurs

esprits déterminés, et l’esprit évoqué se rend à cet appel selon les circonstances où il se trouve, s’il le peut et s’il lui est permis de le faire •>. Est-ce clair ?

« Dans mon ignorance de toutes ces choses et dans mon désir de m’éclairer, je demande, à ceux qui sont initiés à ces mystères, aux adeptes de cette nouvelle science, de me dire si ce sont les esprits qui m’ont mystifié, l’année dernière, à Baden, dans une promenade nocturne, ou si mon aventure n’est qu'une chose toute simple qui s’explique par une hallucination ou un sommeil avec un pesant cauchemar. Voici mon énigme ; je prie M. Home de m’en dire le mot.

n Promenade nocturne dans la Forêt-Noire....

« Baden est le lieu le plus pittoresque, le plus rêveur de la Forêt-Noire, et ses vieilles légendes sont remplies d'histoires de chevalerie et de féerie des plus émouvantes. Baden a aussi sa Fontaine de l'enfer; elle a sa Dame blanche, son Freyschütz et ses fées du lac Mumelsée ; elle a son Faust, de Goethe, comme ses Ballades de Burger et ses Contes d’Hoff-mann. Toute la poésie, toute la réflexion du penseur, tous le3 drames, tous les caprices du fantaisiste, sout là vivants et actifs. Baden est le romantique berceau de la rêverie allemande (1).

« A deux lieues environ de ce nid de fées et de gnomes, sur l’un des monts les plus sombres de la Forêt-Noire, est un ancien château isolé dont l’origine se perd dans la nuit des temps......

« Une ancienne tradition donne à Satan le vieux château

d’Ybourg..... Chaque nuit son règne commence à minuit

et dure jusqu’à l’aube matinale ; les lutins, les farfadets, les revenants surtout, sont alors dans toute l’extension de leur puissance, et malheur à l’imprudent qui veut aller connaître le secret de ces nuits mystérieuses !. ...

« Les histoires singulières qu’on me raconta sur Ybourg,

(1) Voir, sur la Forêt-Noire et ses curieuses légendes, un intéressant chapitre d'un volume de M. Louis Ulbach, sur les Secrets du Diable, qui »¡ent de paraître chez MM. Michel Lévy.

l’automne dernier, piquèrent ma curiosité : je résolus de la satisfaire, en allant moi-même, seul, t minuit, visiter les ruines du château d’Ybourg, et voir ce paysage de nuit dont on m'avait dit merveille.....

n J’étais d’autant plus poussé à faire ce voyage nocturne, que des gens qu'on appelle dignes de foi m’avaient dit que la dame châtelaine, morte en ÜOO, qui, depuis cinquante ans, ne paraissait plus à New-Ebersteiïï, s’était montrée deux fois cette année à Ybororg, et à minuit, avec son coup de poignard an cœur.... Je partis donc achevai, le vendredi 13 du-mois d’octobre de cette dernière année écoulée.

« Supposant que quelque faut revenant ou quelque échappé de prison avait intérêt à éloigner, la nuit, les curieux et les rêveurs des bois, je me munis d’une bonne paire de pistolets', de capsules-et de charges de rechange, d’une torche en résine, de mon excellent briquet Merkel, nouvelle invention, et d’une poignée de cigares pour mon établissement nocturne.

« Jepassserai les incidents ou accidents du voyage.....

« J’arrivai enfin à la perte entrouverte de la grande tour. Mon entêté de locatif» (cheval de louage) ne vouMt en «tienne manière entrer dans la première enceinte ; mes épe-rpna le faisaient reculer au lieu d’avancer... Je me décidai à descendre, et je l’attachai à un des anneaux de fer da la tous.-, le laissant piaffer et hennir à son gré.

« Les grands pans de mur et les voûtes obscures, jetant, beaucoup trop d’ombres sur le.lieu que j'avais choisi pour y établir mon bivouac, j’allumai ma torche, et. ramassai, tout le bois que je pus trouver pour en faire un monceau auquel je mis le l'eu. Un tronçon de colonne me servit de siège, eir me trouvant assez confortablement établi pour mon quartier-général, j’allumai mon premier cigare..,. ; j’avais! près de moi mes pistolets, sur lesquels je portais souvent les yeux ; mais quel ne fut pas mon étonnement de voir, quelques instants après, deux énormes crapauds, qui avaient trouvé je ne sais quel aliment dans lés capsules de mes armes, disparaître en les emportant dans les crevasses du pied de la tour.

près ile laquelle j’étais. Je repris aussitôt mes fidèles compagnons d’aventures, j’y replaçai de nouvelles capsules, je fis jouer les délentes, et, tout étant en parfait état, je nie dirigeai vers l’escalier qui conduit à la platc-forte, d’où je voulais jouir du paysage de nuit tant vanté.

« A peine avais-je gravi quelques marches, qu’un horrible hibou, perché sur la rampe, ine présenta deux yeux ronds et

flamboyants..... Au même moment, une orfraie, placée sur

la pierre que je venais de quitter, fit entendre un cri semblable à celui d’un mourant qui étouffe.

« Sans m’étonner de ces singularités, je retournai à mon feu pour prendre ma torche et me débarrasser de l’animal dont le chant me fatiguait sans m’effrayer. La lune, en ce moment, se voilait, et, par un hasard que je ne puis m’expliquer, mon feu s’éteignit tout à coup. Je voulus saisir ma torche, mais elle était humide, entourée d’animaux visqueux, et, au même instant, elle s’éteignit aussi 1

« Un cela m’est égal jeté par moi dans l’espace, sous ces arceaux démantelés, annonçait un mécontentement réel, qui, sous l’aspect de l’indifférence, peignait ma vive contrariété.

« Je saisis lin pistolet de chaque main, et je repris l’escalier de la gïande tour, car je voulais pouvoir me dire à moi-même que je n’étais pas venu en vain, que j'étais parvenu àia sommité de la tour, et que j’avais pu jeter un regard sur cette vue nocturne.

« J’avais monté un quinzaine de marches, les yeux à l’affût, l’oreille au guet, quand je crus entendre un bruit violent qui partait au-dessus de ilia tôle, et paraissait s’avàn-cer rapidement vers moi. J’étais dans un angle formé par une large crevasse d’une ancienne meurtrière ; je m’y fourrai aussitôt sans raisonner ma précaution : bien m’en prit; car un enorme quadrupède, -que je pris pour un renard, passa près de moi comme une avalanche, et m’eût certainement renversé, si je fusse Jesté dans i’teaalier.

'Qet otirag&ïi vivant traversa la cour, la première voûle, et s’arrêta près de n«>n cheval, qui, saisi d’uneliWreur ?ôu-

daine, brisa la bride qui l’attachait et s'enfuit fond de train.

« Je l’aperçus, par la meurtrière, au moment où un gros nuage cessa d'obscurcir la lune, ce qui fut de courte durée, car bientôt je ne vis plus rien, et je ne puis trop rendre le sentiment pénible que j'éprouvai lorsque j'entendis ce galop effréné suivre les spirales de la montagne, diminuant sans cesse, et finissant par le silence,.... au milieu de cet autre silence qui m'environnait !

« Je cherchai dans ma raison le parti pris dont j’ai parlé, et j’eus assez de peine à le retrouver.... Indigné de mes petites faiblesses et de tous ces faux présages, je repris un deuxième cigare, en m’avouant que je ne savais plus si j'avais fumé l’autre. Je frottai ma bougie phosphorique, j'allumai ce nouveau cigare, et me fis une quiétude de circonstance.

« Je sortis de mon coin et montai au deuxième étage, où étaient les chambres dites de la dame d’Ybourg.

« Quelques petites allumettes brûlées à propos me conduisirent à la porte de la première chambre, par laquelle on peut arriver à la plate-forme. Il me fallut un quart-d'heure d’efforts pour faire tourner cette lourde porte sur ses gonds, et encore le fit-elle d'une manière si désobligeante, que je faillis être renversé par le mouvement rapide avec lequel elle s’abbattit tout à coup en se refermant sur moi !

« Je commençai à m’impatienter sérieusement; ne sachant plus mon chemin, j’eus recours à mon briquet Merkel; je frottai une allumette... rien! deux, quatre, six... rien! plus de feu, plus de lumière, le diable s’en mêlait!

« Une clarté fauve et lampyrée m’apparut sur la tablette d’une cheminée gigantesque... je ne cherchai pas longtemps l’explication ; c’était un affreux hibou qui me regardait fixement à faire baisser les yeux d’un zouave.

« La patience m’échappa, j'armai l'un de mes pistolets, j’ajustai l’horrible bête, et le coup partit.

« Ce qu'il advint de ce bruit au milieu d'un morne silence, de cette vive lumière au milieu des ténèbres, de cette

colère sans mesure de ma part au milieu de mes calmes résolutions, je ne puis le dire : toutes mes facultés restèrent singulièrement et assez longtemps suspendues.

« Tout ce que je me rappelle bien, c’est qu’au travers d’une espèce de cauchemar pesant, une grande statue mourante m’apparut; ses traits étaient nobles, beaux, séduisants même; sa figure pâle et souffrante, son teint d’une blancheur livide; un long vêtement blanc ressemblant à un linceul l’enveloppait, excepté à la place du cœur, sur lequel elle avait la main gauche placée.

« Sous le poids de cette série de choses étranges et d’une terreur non avouée, j’armai mon second pistolet et j’ajustai cette espèce de fantôme.

« Au même instant, une voix plus douce que la plus douce mélodie, me dit en me nommant : « Vous si bon, si brave, si généreux ! auriez-vous donc peur d’une faible femme ? » J n Mon bras resta suspendu, ma tête se troubla ; je ne compris pas comment mon nom pouvait être su par une morte, par un fantôme 1 Un instinct machinal me fit abaisser mon arme devant cette femme. Elle sourit avec bonté, sourire d'ange que j’ai longtemps revu dans mes rêves.

« La femme ou le fantôme, car je n’en ai point encore fait la différence, me lendit la main et me dit, comme si ma pensée lui était connue : « Pauvre étranger qui s’étonne que son nom soit sorti des lèvres d’une morte ! pauvre curieux, qui ignore que la femme qui a le plus souffert par le cœur, possède le triste don de connaître tous les secrets du cœur! » « Mes idées se troublèrent tout-à-fait.

« Mais vous êtes donc un ange envoyé par Dieu? » m’écriai-je.

« A peine le nom de l’Eternel avait-il été prononcé que, par une révolution aussi subite qu’inattendue, tout rentra dans la plus profonde obscurité et le plus grand silence.

« Je restai affaissé dans une insensibilité léthargique ; je ne sais combien cet état dura. Je n’en sortis que lorsque l’aube diaphane vint éclairer le sommet du château et se glisser dans les fentes de la tour. J’aperçus la porte de la chambre

ie la dame d'ïbourg entièrement ouverte, et je redescendis l'escalier sans le moindre événement.

nUne vapeur rosée, transparente, flottait comme une gaze légère, sur la sommité des sapins de la forêt ; la brise du matin balançait leurs cimes et leurs branches, sur lesquelles l'oiseau cherchait à se fixer pour commencer ses premiers chants ; un vague et harmonieux murmure s’échappait de la source limpide qui coule au pied du château, et les parfums des fleurs ouvrant leurs calices aux premiers rayons du soleil achevaient de calmer l’agitation fébrile de ma nuit.

« Rarement la nature m’avait para s’éveiller plus radieuse et plus poétique

..... Luminc veslit purpurcs.

Les songes riants et légers que l’imagination enfante, les émotions mystérieuses du cœur, ce vague désir que la rêverie allemande appelle Rei&ein dus blaue hienein (voyage dans le bleu) vinrent m’assaillir en foule; et je ne sais combien de temps je serais resté sous le charme de ce rêve rose, si un bûcheron, qui arriva pour remplir son flacon d’osier à la fontaine, ne m’eût rappelé à la vie matérielle.

« Je compris que j’avais sans doute rêvé tout ce fantastique; mais ma torche, tout humide, était éteinte, à moitié bïùlée.... mais un de mes pistolets avait fait feu.... mais l’autre était resté armé dans ma main.... mais un fragment de la bride du cheval était encore attaché à l’anneau de fer de la première entrée. C’éta/t étrange, mais non impossible!

« J’allumai un troisième cigare; celui-là, je le fumai réellement, et jusqu’au bout, en me rendant à Baden à pied.... je ne dis pas un mot de mon aventure, et laissai discourir à la table d’hôte sur les charmes d’un paysage de nuit dans la forêt noire ot sur les apparitions de la dame d’ïbourg.

L. Lamotiie.

LA CHRONIQUE ET LES CHRONIQUEURS.

La réputation du fameux nécromancien Hume est .duc surtout aux chroniques de deux ou trois journaux ; nous avons toujours protesté pour -notre part contre l’engouement et la crédulité candide avec lesquels tant de gens ont accueilli des histoires merveilleuses sur la parole de journalistes qui ne se sont jamais pris eux-mêmes au sérieux, qui n'ont eu évidemment pour but que de remplir deux ou trois colonnes de manière à amuser leurs lecteurs ; qui n’ont jamais affirmé avoir rien vu par eux-mêmes , mais roucoulaient les prodiges arrivés chez les comtes au barons de A, B, C,D.„ jusqu'à Z.

Voici que l’un de ces chroniqueurs, celui qui a le plus contribué à faire passer Hume à l’état de prophète, et qui dernièrement nous donnait de sa part le programme d’un cours de haute magie ; M. Paul d’Yvoi justifie complètement nos jugements sur son compte en se moquant du dieu qii’il a créé, sans s’inquiéter s’il lui reste encore des adorateurs. Dans le Mi'seuger du 13 de ce mois vil raconte que parmi les sauvages etles saltimbanques de ikiifoire de Montmartre, il a remarqué une baraque de toile où une certaine demoiselle Angélique donnait des consultations sur toute espèce de questions ; elle avait pour magnétiseur et pour pitre un joueur de gobelets, dans lequel il reconnut Philippe, jadis célèbre prestidigitateur. Il fait à ce sujet les réflexions suivantes :

« Les escamoteurs de place publique sont effacés par les escamoteurs de salon. A quoi bon, en effet, s’avouer escamoteur, quand, grâce à la sottise publique, on peut.passer pour sorcier.

«L’escamoteur n’est qu’adroit, le médium fait faire par les esprits ce que le médium prenait la peine de faire lui-même. Ladisparition du prestidigitateur est une preuve des progrès de la bêtise publique. Ainsi, me disais-je encore, voilà un

pauvre prestidigitateur qui place là ses gobelets en signe de deuil. Le public ne lui demande pas de tours d'adresse ; il faut qu’il magnétise une somnambule qui va dire & mademoiselle Jeanneton si son cher Parot lui est fidèle dans sa nouvelle garnison, et à mademoiselle Palmyre si elle se mariera le mois prochain. Aujourd’hui, Conus s'appelle Hume, épouse une princesse étrangère. »

Avis à ceux qui pourraient être tentés d’aller chercher dans les chroniques des documents historiques, scientifiques ou théurgiques. a. s. mobin. ¡>

— M. Mabru a trouvé son second. 11 faut s’attendre à voir entrer en lice tous les esprits faux, tous les faiseurs de phrases, les cerveaux creux, tous ceux enfin qui, n’ayant point d’idées, ont tout juste la force, assez commune pourtant, pour calomnier les vérités les plus évidentes et jeter de la boue au visage de ceux que les défendent.

A quoi bon réfuter ces écrivains? Est-ce que la vérité leur importe? Est-ce qu’ils en ont souci? Nullement.

Le magnétisme a été le point de mire de tous les faux esprits. Cent fois ils ont cru l’avoir tué; mais la vérité lie périt point ; on ne peut même altérer en rien une loi de la nature, et le magnétisme en est une.

Qu’importe encore que des magnétistes sans foi et sans génie, dont la plume est trempée dans la boue, viennent en aide aux Mabru ? Ils ne peuvent inspirer qu’un sentiment de dégoût et de pitié !

Mais c’est ainsi que toujours les vérités ont marché vers le triomphe, au milieu des criailleries d’une multitude passionnée ou indifférente, insultées par ceux-ci, déniées par le plus grand nombre, desservies par ceux-là même qu'elles auraient dû remplir d’admiration, et n’ayant rapporté aax apôtres qu’elles eurent que des labeurs sans fin, une vie tourmentée qui ne doit être appréciée qu’après qu’ils ont vécu. Ah ! pour si peu que j’ai fait, je n’échangerais point ma destinée contre ces lauréats, ces bacheliers et tous ces tour-

menteurs qui, semblables aux guêpes, bourdonnent, fout des piqûres et ne produisent point de miel.

Vérité magnétique, chef-d’œuvre de la nature, cause de tous les miracles, ne saurais-tu donc redresser les erreurs de ces faux sages et chasser les ombres qui les environnent! Vous, magnétistes, soutenez la lutte, elle est dans l’intérêt des gens qui nous attaquent, et c’est pourquoi vous ne devez point fléchir !

Baron du Potet.

— Un journal de Londres, le Court Journal, sur la foi d'un correspondant parisien, annonce à ses lecteurs que tout Paris a été en émoi par suite des prédictions d’un médium , jeune fille de quatorze ans, qu'une panique s’est répandue dans la population, et que la Bourse elle-même , ce temple de l’esprit positif, a été bouleversée par suite du vertige qui portait les capitalistes à vendre à tout prix. Qu’enfin la prophétesse, auteur de tout ce grabuge , a été arrêtée par la police. Nous n’avons pas besoin d’avertir nos lecteurs qu’il n’y a pas un mot de vrai dans tout ce redit qui a été accueilli, d’après le journal anglais, par le Spiritual Tclcgraph. Cette dernière feuille qui, comme on sait, est le principal organe du spiritualisme, plaisante même les Français sur leur crédulité. Nous engageons nos confrères à mieux choisir leurs correspondants.

11 est triste de voir certaines personnes, encouragées peut-être par l’exemple de chroniqueurs en renom, se faire un jeu de forger des fables et de tromper le public.

— Voici une nouvelle classe de médiums. Ce sont ceux qni dessinent les portraits de personnes mortes et qu’elles n’ont jamais connues. Du moins, c’est ce qu’affirme un des correspondants du Spiritual Tclcgraph (26juin). Les personnes qui voudraient faire l’essai de cette étrange faculté peuvent s’adresser au médium Rodgers, à Clay (Etat de New-York.)

a. s. MORIPf.

KRH.VTA.

Il s'est glissé quelques erreurs d'impression dans le n° 38, du 2i» juillet (article de M. Baïhaut, sur le livre de M. le Dr Yitleaut.

Pages 383 h 300, au lieu de JVitleaul, lisez Yitleaut.

Page 384, ligne 6, au lieu de travail, lisez talent.

Page 386, ligne t i, mettez une virgule après voulus, et un point et virgule apirts papier.

Page 388, lignes 33-31, au lieu de ce poète, lisez ce mol du poète. 'Page 390, ligne 32, au lieu de vellléilé, lisez velléité.

Baron pu POTET, propriétaire-gérant.

CAUSERIES MAGNÉTIQUES.

DIXIÈME CAUSERIE.

I’alionco et pcriovÉrance.

(Suite.)

Regarde autour de toi, tu verras les animaux , les plantes même avoir tes maladies; toutes les variétés de la lèpre, de la gale, les mêmes écoulements purulents, sanieux, icho-reux, etc.... Tu ne sauras point si c’est toi qui leur communiques tes maux, ou si tu en reçois l’inoculation par lour voisinage ou leur contact. Mais tout ce qui s’approche de l’animalité, tout ce que tu soumets à ton régime se gâte , s’altère, se corrompt et voit son type primitif modifié dans ses formes. La cité est un séjour malsain où tout s’étiole, où la ptliysie éclate et d’où les germes pestilentiels partent sans cesse pour aller au loin exercer leurs ravages.

Une partie de ces maux est engendrée par la malpropreté, par les vices et les excès, par les exhalations partant de ces chenils où l’homme a fait son nid. Non, il ne fait pas bon vivre là où l’homme grouille, là où sont la paresse et l’oisiveté. L’activité humaine diminue tous ces maux, elle empêche du moins une plus grande corruption , mais elle altère les formes, car elle se porte communément sur des choses pour lesquelles les organes de l’homme n’étaient point faits.

Les animaux se lustrent, se nettoient, se lèchent, l’homme conserve sa sueur, il en accumule les couches dans ses habits et sur sa peau , l'eau ne lui manque point, mais il dédaigne un soin qui entretient la santé.

Le dimanche est fait pour le repos et la prière. Ce qui est bien et nécessaire; mais la cloche de l'église devrait, en ap-

Toiie XVII. _ n°. »0 — 2e Série. — 25 ooûl 1858. 15

pelant l'homme, lui dire : « Purifie-toi avant d'entrer dans le saint lieu ; Dieu n’aime pas plus les souillures du corps que celles de l’âme; afin que ses divins rayons aillent jusqu'à ton âme à travers ta substance, lave-toi. »

La vermine aime l’ordure et la crasse ; n’a-t-elle pas scs besoins, ses instincts, l’homme no peut-il donc la chasser de lui-même sans se parfumer des essences les plus fortes? Oui, r.ons portons en nous les œufs de mille espèces, et la chaleur de notre corps leur donne l’éclosion. Vous ne verrez point vivre sur certains malades les espèces qui vivent sur l'homme en santé, elles s’éloignent bien vite d'une partie d'où la vie altérée laisse exhaler des fluides qui les tueraient.

Les médecins pourraient ici puiser do nombreuses indications, mais ils n’observent point les petites choses, les moindres accidents, et c’est pourtant en eux qu’on trouve les vérités. Aussitôt que la mort frappe le domaine humain , vous voyez tout partir, tout se sauver du gîte précédemment choisi; cette terre morte n’est plus propre à leur vie, d’autres générations d’espèces différentes attendent ce moment, elles naissent aussitôt. On a dit que les gros mangeaient les petits, c’est vrai chez les vivants, c’est le contraire chez les morts, ce sont les petits qui mangent les gros, ils s’en repaissent, en vivent, la pourriture leur va, il la leur faut pour jouir de la vie ; pour être heureux, il faut qu’ils nous aient en pâture : et la nature a fait ainsi les choses , la vie suit la mort de très-près, l’une poursuit l’autre et ne lui laisse nul repos; cette loi est éternelle, nuTne saurait en interrompre le cours. Tout se prépare en nous dès notre commencement pour notre fin dernière, tout se prépare aussi pour la vie d’autres êtres, et de là ce mouvement que nous sentons en nous, sans que nous en devinions la cause; cette difficulté parfois de trouver le repos, ce besoin impérieux qui nous prend de marcher, d’aller et de venir, ce qui est en nous exige, commande le mouvement, et nous obéissons.

On a des mots pour rendre ces effets, mouvement machinal, ennui, etc. Qui donc tousse ou crache par ennui ? Qui donc satisfait aux besoins de chaque heure par caprice d’es-

prit? Nul, je pense ; il y a, au contraire, une voix impérieuse qui parle sans parole, que nos organesenicndcnt parfaitement, cl nous nous prêtons au mouvement obligé, nous obéissons souvent môme lorsque notre raison nous commande le refus, la nature plus forte que notre volonté nous force d'obéir.

Que nous savons peu de chose des mystères de la vie ! Pour l’orgueilleux médecin, la nature est aveugle; c’est lui, c’est celui-ci qui ne voit rien du tout, qui, marchant à tâtons, prétend régler nos destinées, comme s’il avait lui-même présidé à notre formation et fait le code de la vie.

Les médecins de nos jours ont beaucoup à faire encore avant «Tarriver à une juste appréciation des faits; mais on doit leur rendre cette justice que, sentant parfois l’insuffisance de leurs moyens, ils cherchent avec ardeur et ne trouvent point; il faut les plaindre de faire fausse route lorsqu’ils nous tuent en voulant nous sauver, on doit beaucoup leur pardonner, la justice exigerait autre chose , je ne sais si celle de Dieu sera plus sévère que celle des hommes. Pour tuer un homme , il faut si peu de chose , la piqûre d’un insecte , une goutte de poison , une substance alimentaire frelatée, un mets préparé dans un vase malpropre, le voisinage d’un lieu d’où s’échappent des gaz méphitiques, le sommeil au soleil ou sur une terre froide et humide, un atome respiré en passant, lui donne la fièvre et le laisse languissant sur le sol. Ce sont là les gros accidents, le médecin peut encore en saisir l’origine, y parer par instant ; mais mille agents, cachés à tous les yeux , peuvent nous faire sentir leur mauvaise influence, ceux surtout venus avec notre premier sang, avec le rudiment de vie que nous transmirent nos pères; ces nouveaux germes travaillent sourdement en nous-mêmes, ne laissant au médecin nul moyen de les voir, de prévenir leurs funestes effets, constatant seulement les ravages, la cause lui échappe, scs remèdes sont vains.

Je jetterais la terreur dans l’âme du plus fort, si je venais ici dire crûment les choses , montrer notre néant et mettre en évidence et dans tout son jour la science du médecin, en montrer les funestes résultats sur les générations, dire enfin nos malheurs : ceci n’est pas mon rôle, qu’un autre le remplisse,

je lui prédis seulement qu’on ne lui saura aucun gré de sa franchise , plus sage est de porter, comme le watchmann de Londres , sa lanterne derrière son dos , ce n’est que lorsqne vous ôtes passé qu’on voit votre lumière. Diogène, il est vrai, tenait sa lanterne à la main , mais il cherchait seulement un honnête homme , un homme complet ; s’il eût cherché autre chose, on aurait eu bientôt soufflé sur sa lampe.

Cette inconnue qu’on nomme la vie est donc notre sauvegarde, c’est de sa résistance ou de son abandon que notre sort dépend. Les remèdes n’ont de valeur et 11e sont efficaces qu’autant seulement que la vie les accepte, qu’elle s’en assimile les vertus ou les propriétés. Mais qui sait donner à la vie elle-même plus de ressort, une résistance plus grande, si ce n’est ce magnétisme découvert par Mesmer ? Ce n’est point en saignant un athlète qu’on lui ménage le prix de la victoire, c’est, au contraire, en le fortifiant. Le magnétisme, lorsqu’il sera bien connu, n’aura point de rivaux , il régnera en maître et sera le premier remède aux maladies.

Est-ce un bien, est-ce un mal de conserver les êtres ? la nature veut-elle une plus grande durée de la vie , ou faut-il prendre avecphilosophie les fins prématurées, les regarder comme un bien? Notre sensibilité nous égare parfois, elle nous rend souvent injustes, elle ne voit que le présent, mais derrière nous sont des êtres qui nous poussent, devons-nous trop longtemps rester à ce banquet? Beaucoup languissent en attendant notre sortie, nous restons trop au gré de leur désir; attendez un peu, soyez moins empressés, nous passerons bien vite, la médecine est là; vous vous coucherez bientôt dans notre lit, vous y serez sur des leuilles de rose ; ne dérangez point surtout ces fioles étiquetées, à votre tour vous vous abreuverez de leur contenu et en savourerez les parfums.

Enfants qui nous poussez vers notre lin dernière, et qui trouvez que nous vivons trop, votre sûreté, votre santé, votre bonheur dépendent pourtant de notre durée! Souvent nous vous servons de bouclier, nous prévoyons pour vous les désastres et les ruines qui vous attendent, et nous avons à verser des larmes sur vos malheurs. Ne vous pressez donc point,

le supplice qui précède la mort, vous aurez à le subir, on vous écorchera la peau, on brûlera vos entrailles... Oh ! vous, chers enfants dont nous avons vu les premières douleurs, vous serez témoins de nos souffrances, vous verrez les médecins à notre chevet ne nous quitter que lorsque notre estomac refusera tout poison , que lorsque notre enveloppe aura été labourée ou perforée par des cautères ou des sétons : enfants, le même sort vous attend, c’est la science de ces temps qui le veut ainsi ; elle changera, mais vous ne serez plus, car en toutes choses le progrès est bien lent : ne maudissez point nos bourreaux , car ils sont eux-mêmes doublement à plaindre, leur fils, leur fille, leur femme, sont comme eux victimes d’un art mensonger. Les Romains savaient bien ce qu’ils faisaient lorsqu’ils renvoyèrent de leur citéjusqu'au dernier des médecins; deux siècles cette loi dura; il ne fallait point les renvoyer, mais seulement les forcer d’apprendre ce qu’ils ignorent encore, ce qu'ils veulent toujours ignorer pourrions-nous dire, cette, médecine naturelle, ce don de Dieu déposé dans le sein de toute créature, don qui se révèle à nous par un simple attouchement.

(l’est trop simple et trop beau, cela coûte trop peu d’études, pour être admiré et recherché..., il faut du grec et du latin, quelques cent mille volumes , des cornues en quantité , des mélanges diaboliques où la raison s’embrouille , puis, lorsqu’on en est là, on ne sait plus ce que l’on fait, toute certitude manque, 011 agit à tâtons, quand le médecin dit oui, la nature dit non, cela tourne au drame ou à la comédie.

Salut douce, espérance d’un meilleur avenir, salut à toi, bienfaisant magnétisme, qui, comme un rayon de la Divinité, es venu répandre la lumière au milieu des ténèbres de ce monde,! Oui, quand les hommes le voudront, les douleurs ne seront plus que passagères, et l’intelligence verra grandir son horizon, toutes les facultés de l’âme humaine recevront leur développement, et la véritable science naîtra.

Baron Du Potet.

(La suite au prochain numéro.)

PROGRÈS DU MAGNÉTISME

Nous extrayons d’un ouvrage de philosophie de l’abbé Cau-pert (1), prêtre desSS. Cœurs, professeur de théologie, membre de plusieurs sociétés savantes, un chapitre important sur le magnétisme ; nos lecteurs verront avec plaisir qu’il est l’objet d’une étude sérieuse de la part d’hommes dont le nom était peu connu en magnétisme. Il y aura toujours et dans toutes les classes assez d’esprits curieux avides de connaître, fermes et consciencieux pour chercher la vérité pareux-mèmes, pour ne pas s’inquiéter des négations qui demeurent tôt ou tard à leurs auteurs comme une tache, un signe de faiblesse d’esprit ou de volonté quand, par ftereté de tempérament, on n’y ajoute pas la méchanceté et pis encore.

Électrisation humaiuo (magnétismehumain); observations préliminaires; préjugés, nature, existence, effets de l'électrisation.

L’électrisation humaine et le somnambulisme artificiel qui l’accompagne, sont deux erreurs graves ou deux vérités incontestables : dans l’un et l’autre cas, il appartient au philosophe de les étudier attentivement afin de les combattre avec courage ou de les proclamer sans faiblesse, selon qu’elles seront trouvées vraies ou fausses, bonnes ou mauvaises.

Les obstacles qui pourraient obscurcir ou voiler à nos yeux la lumière pure de la vérité dans la question qui nous occupe, viennent principalement de trois sources, savoir:

(1, L’autour déclare que, pendant huit ans, il a été un adversaire du magnétisme, qu’il no nie plus aujourd'hui, les faits dont il a été autour ou témoin l’avant amené à se défaire de scs préventions. Se fondant sur d'nutres analogies que présente lo magnétisme, il voudrait qu'on lui préférât la dénomination d'é.ectrisation humaine ; mais l’usage a consacré la première, bien quelle sot défectueuse.

(le l'ignorance, (les préjugés et de la nouveauté au moins apparente de cette découverte. Il nous aurait sufli de les indiquer, si nous ne connaissions l'empire absolu qu’ils exercent sur les esprits même les mieux intentionnés, et c’est ce qui nous a déterminés il les exposer ici.

Ignorance. Si la pratiquide l'électrisation humaine n’exige ni éludes, ni connaissances préliminaires, il n’en est pas de môme de sa théorie ou l’explication philosophique et satisfaisante qu'on peut en donner. Nous l’avons dit, plus une question est compliquée et renferme de relations, c’est-à-dire de causes et d’effets, plus il faut y apporter de lumières et réunir de connaissances pour l’embrasser dans toutes ses parties et l'éLudier avec succès. La question de l’électrisation humaine est de ce genre : tous ceux qui voudront l’étudier sans de longues et fortes éludes, 11e pourront que tomber dans de grands et nombreux écarts. Il conviendrait, ce nous semble, pour prendre un parti raisonnable et faire poids dans cette matière, d'avoir des notions plus qu’élémentaires de physique et de psychologie. Les données fournies en même temps par la science, la raison et la foi, nous paraissant indispensables pour étudier et expliquer convenablement une question si épineuse. On comprendra l’importance de cette remarque, si l'on fait attention que certains fluides impondérables très-subtils, et l’àme humaine, considérés dans tous leurs rapports, paraissent jouer ici le rôle principal.

Préjugés. Dans tout ordre de vérités et de sciences, le savant comme l’ignorant, doit avant tout se dépouiller de ses préjugés. Mais que cette maladie est commune et qu’il est diflicilc de l’extirper! En dehors et antérieurement à toute découverte, il est des croyances communes, des habitudes intellectuelles qui ont jeté de profondes racines ; et quelle répugnance n’éprouve pas le sentiment universel pour se rapprocher des résultats nouveaux de la science ! Le préjugé, ce prisme trompeur de notre intelligence, éblouit nos yeux et empêche noire âme de voir la vérité.

Nouveauté. On ne peut guère disconvenir d’une chose, c est que tout fait insolite ou nouveau nous étonne et nous

frappe vivement; il en est do môme de loutes les découvertes rares, et s'il est arrivé quelquefois que l'homme ail donné son assentiment à des fables grossières ou à des erreurs monstrueuses, il n’est pas moins certain que les plus belles inventions ainsi que les plus utiles secrets delà nature ont d’abord été poursuivis des plus longues comme des plus cruelles persécutions. Colomb, Copernic, flarvey, Képler, Descartes, Galilée, Caiis et tant d'autres en sont la preuve, et leur vie agitée ne peut que prêter beaucoup aux réflexions du sage, et le rendre assez indifférent au blâme comme â la faveur d'un monde si injuste dans ses appréciations (1). Que ces exemples nous Servent au moins de leçon. Ne donnons pas à chaque idée nouvelle notre enthousiasme et notre appui, mais ne l'étouffons pas non plus par esprit de système, sans preuve et surtout sans examen. Venons au fait.

L'action appelée jusqu'ici Magnétisme animal ou Mesmérisme, nous l'appelons électrisation humaine, parce que, d’un côté, nous ne la considérons que dans l’homme, et que, de l'autre, nous croj ons pouvoir enjchercher l’origine dans l’électricité, que la science actuelle admet, au moins à l’état latent, dans chacun de nous.

Nous ne donnerons pas, de cette espèce d’électrisation, une définition exacte et précise ; de semblables définitions sont impossibles dans la plupart des choses naturelles qui affectent nos sens, et constituent l’objet de l’ordre physique, telles que l’air, le feu, l’eau, les forces, etc. Pour bien faire connaître ces choses, il n’est alors qu’un seul moyen, c’est d’en faire la description ou d’expliquer les effets sensibles, d’où il est ensuite facile de remonter aux causes.

(t) On comprend bien quo les persécutions auxquelles nous faisons ici allusion sont venues d'ailleurs que du cdté de l’E^liso. Li vio de Galilée seule so rattache à l'histoire ecclésiastique, et s'il faut convenir qu'une assemblée de théologiens a été peu heureuse dans ses décisions à l'égard du célèbre astronoina, cela ne peut porter la plus légère atteinte à I’in-failllblo autorité de la cour romaino. Il ost d'ailleurs des mesures de prudence que commandait le sléale de Galilée et qui n’ont plus de raison d’être dans le nôtre. Gardons-nous bien do juger deux époques si différentes du même point do vue ! ( .Voie ,U l'auteur. )

Disons-le donc tout de suite, nous entendons par électrisa-lion humaine, l’influence et physique et morale quel’homme exerce sur son semblable, sur lui-même, sur les animaux, les végétaux, et en général sur toute la matière organique ou non organisée. L'électrisation humaine, considérée seulement en nous, se compose d’une série d’effets ou phénomènes insolites, et par-là même extraordinaires que l’homme développe sur un autre homme avec plus ou moins de succès, selon les dispositions physiques et morales dans lesquelles ils se trouvent l’un et l’autre placés. Ces phénomènes sont dus à différentes causes, dont la première paraît être un agent très-subtil, et connu clans la science sous les divers noms de fluide nerveux, vital, électrique ou magnétique. C’est ce fluide, dont la nature nous échappe, mais dont on ne peut guère nier l’existence, qui paraît produire entre deux individus une influence réciproque ou une série de rapports inexplicables. La puissance de cet agent est telle, d’après les partisans de cotte théorie nouvelle, que, mise à la disposition et sous la direction de l’âme humaine, elle agirait à des distances considérables, opérerait des guérisons incurables par les secours ordinaires de la médecine, développerait des facultés nouvelles d’une manière prodigieuse, etc.

Demander si l’électrisation humaine et le somnambulisme qui l’accompagne quelquefois existent, est une question qui ne peut être résolue que par les faits eux-mêmes ou par la discussion des témoignages qui les rapportent. Or, en par-tantde ce principe, et en mettant decôté l’expérience personnelle que tout homme peut avoir en tout temp3 sur cette question, nous disons que celui qui, dégagé de tout préjugé, considère le nombre et la qualité des savants distingués qui, doués d’une raison froide et d’un esprit éclairé, s’occupent sérieusement de celte science à Paris, à Lyon, à Bordeaux, à Cherbourg, dans toutes nos grandes villes, en Angleterre, en Prusse, en Allemagne, en Suède, en Russie, en Asie, en Amérique, et dans les quatre parties du monde, nous disons que celui qui considère cet imposant témoignage d’autorités, dans les ouvrages publiés sur cette matière ne peut révoquer

en doute la réalité de l’électrisation humaine, et que nier une vérité si bien constatée, serait ériger en dogme le scepticisme le plus universel sur tout ce dont nous ne sommes pas nous-mêmes les témoins (1).

Ainsi, reconnaissons-le sans crainte puérile comme s;ins espérances chimériques, l’électrisation humaine et le somnambulisme artificiel sont des faits, et ceux-là mômes qui, comme nous, y voient de graves dangers pour la santé, pour les mœurs et peut-être pour la foi, dans quelques âmes ignorantes ou faibles, ne peuvent guère plus en contester sérieusement la réalité.

Mais dans l’électrisation humaine comme dans le somnambulisme, nous devons distinguer un grand nombre de nuances et de variétés dans les efl'ets. Pour plus de clarté et de méthode, nous croyons pouvoir les ranger en trois groupes principaux, savoir : les phénomènes sensibles qui se manifestent souvent sans sommeil, quoiqu'ils en soient quelquefois les précurseurs ; le sommeil lui-même électrique; enfin, le somnambulisme artificiel, dit encore lucidité électrique. Lea deux premiers constituent ce que nous appelons électrisation humaine, le troisième porte le nom de somnambulisme ; les deux premiers sont purement physiques, le troisième appartient principalement à la psychologie ; voici leurs signes caractéristiques :

Le premier groupe se réduit aux traits suivants :

Augmentation de la chaleur ou du froid dans les membres, accélération ou ralentissement sensible de la respiration, bâillements, soupirs, pleurs, rires independantsde la volonté, pesanteurs des paupières, des bras, des jambes, difficulté de

(I) On peut dire que la question lo l'éleclrisalion humaine est to nbéc dans renseignement public, quand on la voit adn'ue ou traitée par las philosophes «le Louvain, de Saint-Sulpice, do Soissons, «te.; en tliéolo^io par lesGou-set, les Gury. les Maupieil, les Gnillois, etc.; en méJccine par les Cliarpi^non, les Descuret, les Gruveillor, Ici C.eorget qui lui dut sa conversion au spiritualisme, etc. ; en p lysique, dans les lettres, par u i grand nombre d hommes et d'ouvrages remarquables; vouloir en contester ta rcalilé n'accuserait plus désormais que mauvaise foi ou une ignorance impardonnable.

parler, engourdissement de (ont le corps, souvent petits mouvements convulsifs; et si le fluide électrique est trop abondant ou mal administré, il peut y avoir une véritable commotion semblable à celle d’une bouteille de Leyde, et qui n’est pas sans danger.

Le second groupe se reconnaît aux signes suivants :

Après avoir donné l’un ou l'autre de ces signes, certains sujets tombent quelquefois dans un état particulier appelé sommeil clcctriqne. Ce sommeil ne diffère en rien, du moins extérieurement, de celui que tout homme éprouve par suite des fatigues de la journée, et pour réparer ses forces. Comme le sommeil naturel, le sommeil électrique est profond ou léger, tantôt paisible, et tantôt agité ou accompagné de rêves et de songes. Dans quelques-uns, le sommeil est si profond, que ni un grand bruit, ni les attouchements réitérés ne peuvent le détruire sans le secours de l’électriseur lui-même. C’est même ce qui nous semble constituer, pour les mœurs, un danger dont nous aurons occasion de parler plus bas.

Au troisième groupe correspond le somnambulisme.

Le somnambulisme peut être considéré sous le double rapport physique et moral de l'électrisé. Nous allons en prendre les principaux caractères dans la philosophie si estimable de S.-Sulpice, qui elle-même les aempruntés en grande partie à l’excellent ouvrage de M. Barreau, sur cette matière (1).

Les somnambules électriques sont, au physique, d’une affectibilité extrême ou d'une insensibilité absolue.

Les somnambules affectibles, se trouvent dans un état plein de dangers et qui offre fort peu d’avantages; leurs sens acquièrent alors une impressionnabilité extraordinaire; le moindre contact produit en eux l’effet d’une décharge électrique plus ou moins forte, selon que l'attouchement est plus ou moins violent. Le coup pourrait devenir foudroyant,

(t) Le masnéti'iino humain en cour île Rome et en cour d-s cassation, sous le rapport moral, religieux et scientifliiue. A Paris, chez Sagnicr et Bray, 61, rue des Sainls-Pères.

leur faire perdre la lucidité dont ils sont cloués, engendrer en eux de graves maladies, et peut-être la mort. L’ouïe, l’odorat, le goût de ces somnambules paraissent doués de la même

impressionnabilité.

Les somnambules insensibles présentent des phénomènes tout opposés. Ils sont privés momentanément de l’usage de leurs sens physiques, de la vue, de l’ouïe, de l’odorat, du goût et du toucher. Les bruits les plus intenses, les odeurs les plus fortes, ne font aucun effet sur ces sujets; le corps, en un mot, paraît tout à fait insensible à la violence du fer et du feu, non moins qu’aux opérations chirurgicales les plus terribles et les plus douloureuses. Ainsi l'amputation d'un bras, d’une jambe, l’extraction des dents, de cancers, etc., ont été maintes fois opérés sans douleur et sans aucun accident subséquent, deux conditionsque l’on ne rencontre pas toujours dans 1 état d’insensibilité produite par le chloroforme et l'é-tlier.

Bien qu’extraordinaires, les phénomènes physiques ne sont pas néanmoins comparables aux phénomènes psychiques.

Voici, d’après M. Barreau, dont le bon esprit, nous est parfaitement connu, une partie des phénomènes psychologiques que l’on remarque dans la lucidité électrique. « Les somnambules lucides, dit cet auteur, possèdent la faculté prodigieuse de voir à travers les corps dits opaques, sans le secours des yeux du corps qui, d’ailleurs, sont exactement fermés ou comprimés sous d’épais bandeaux. Ils ont la prévision intérieure et extérieure, portent leurs regards dans des lieux éloignés et à eux inconnus; souvent ils en font une description exacte, ainsi que des objets et des personnes qui s’y trouvent. Mais ce qui intéresse au plus haut degré notre pauvre nature, c’estque ces somnambules, usant de la faculté de voir à travers les corps opaques, inspectent toutes les parties internes et externes du corps humain, signalent celles qui sont attaquées, le siège et la cause du mal, les progrès et la complication de la maladie, quelquefois même sa durée. Enfin, ils connaissent les moyens ou les remèdes elïicaces pour obtenir la guérison, ou au moins toute amélioration

possible. Non-seulement ils exercent cette précieuse faculté pour se guérir eux-mêmes, mais encore dans l'intérêt des malades qui se soumettent à leur direction. »

En résumé, voir à distance et travers les corps sans le secours des yeux, connaître d’une manière plus parfaite la nature et les propriétés des choses présentes ou éloignées, apprécier plus sûrement que dans l’état de veille les effets dans leurs causes, pouvoir enfin utiliser ces diverses facultés en médecine, en philosophie, etc., tel est l’ensemble des phénomènes que l’on remarque dans le somnambulisme électrique, et qui sont bien digues, ce nous semble, .d’être sérieusement étudiés.

Et qui ne voit que l’esprit de l’homme rappelle évidemment ici la grandeur d’où il est déchu, et cet état primitif d’inuocence, si riche de lumières qui permit à Adam d’appeler les animaux, les plantes et leurs propriétés, par des noms significatifs?

La lucidité magnétique et ordinaire, s’exerce, selon les individus, de trois.manières, directement, par sensation et par la communication des pensées. La vue directe consiste en ce que le somnambule peut acquérir la connaissance de plusieurs objets, qu’il ne pourrait connaître dans l’état ordinaire, même à l’aide des organes des sens. Ainsi, non-seulement il aperçoit les yeux fermés et couverts d’un bandeau épais les objets qui l'entourent, il découvre même les objets placés à une grande distance, pénétrant ainsi, de son regard» les retraites les plus cachées.

La vue par sensation consiste en ce que les somnambules étant mis en rapport avec d'autres personnes, surtout avec des malades sur l’état desquels on désire leur avis, entrent avec ces personnes dans une communication si intime de tout ce qu’elles éprouvent, qu’ils ressentent eux-mêmes momentanément tous les symptômes de leur mal. Ce n’est qu’alors que le somnambule est en état de prescrire un régime et les remèdes .convenables.

La vue par la communication des pensées est plus extraordinaire encore. Elle consiste, en ce que le somnambule peut

lire dans la pensée de ceux avec lesquels on le inet en communication, lors même que rien à l’extérieur ne la manifeste, pourvu, néanmoins, qu'elle soit nettement formulée dans l'esprit ; (1).

Nota. Nous prions tous ceux qui liront l’exposé succinct des effets physico psychologiques, que nous venons d'énumérer, de donner une attention spéciale aux remarques suivantes, sans lesquelles nos observations seraient mal comprises et peut-être dénaturées.

a) Inutile de faire remarquer que nous ne parlons ici que des faits réels, positifs, et que nous regardons comme le produit de l’électrisation humaine; le nombre des faits négatifs, c’est-à-dire des expériences qui manquent, ne produisent rien ou ne présentent que des faits douteux et qui peuvent être le résultat du charlatanisme ou du compérage, sont bien plus nombreux; nous en avons été nous-même plusieurs fois les témoin.

b) Nous sommes loin de pré endre que ces effets, ci-dessus mentionnés, soient toujours utiles, nous les regardons, en général, comme indifférents pour le bien et le mal; s’ils peuvent donc soulagerou guérir, ils peuvent aussi occasionner des accidents et engendrer des maladies, selon la science ou l’ignorance, les dispositions physiques ou moralesde l’électriseur et de l’électrisé, et autres circonstances de mode et de temps.

c) Les effets tint physiques que somnambuliques, qui viennent d’être énumérés, sont généraux ; il est donc très-rare qu’ils se déclarent tous et toujours de la même manière, dans le même ordre et dans le même espace de temps; il ne suffit donc pas qu’une personne soit lucide pour qu’elle puisse offrir tous les phénomènes attribués au somnambulisme électrique; et c’est encore là une erreur très-répandue.

d) Il n’y a pas moins de différence entre électriser, endormir et somnambuliser qu’entre vivre, sentir et parler. Le dernier état suppose sans doute les deux autres, mais lés deux premiers existent indépendamment du dernier.

(i) Pratectione* philosophia, t. il, p. S99.

e) Dans le cas où certains phénomènes somnambuliques et même le somnambulisme tout entier, serait erreur, mensonge! ou l'œuvre d'une puissance diabolique, la question de ¡’électrisation humaine demeurerait intacte, puisque la lucidité électrique n’est qu’un phénomène accidentel et même assez rare de l'électrisation humaine.

(La suite au prochain numéro)

FAITS ET EXPÉRIENCES.

Tous ceux qui étudient avec soin les phénomènes de la rotation des tables et du déplacement des corps matériels par des agents inconnus, ne liront pas sans intérêt quelques faits anciens qui peu vent servir à éclairer cette immense question. Nous extrayons ce récit d’un ouvrage intitulé : la Mystique, qui a paru, eii 1854, chez M. Poussielgue-Rusand, libraire.

Baron Dd Potet.

«Schaeffer, de Ratisbonne, consénior du ministère, qui vivait vers la fin du siècle dernier, s’occupant d’essais sur l’électro-phore que l’on venait de découvrir, remarqua que, lorsqu'il attachait à un fil une petite cloche ou un autre corps pesant, et le tenait suspendu sur un gâteau de résine frotté, il était mis aussitôt en mouvement, et que ses oscillations avaient lieu dans le plan de la ligne méridienne, et jamais dans une aulre direction. Mais lorsqu’il tenait le pendule à côté de l’é-lectrophore, les oscillations se dirigeaient vers le milieu de celui-ci. Il ne tarda pas à reconnaître que l’instrument dont il se servait n'était que la cause prochaine de ce mouvement, mais qu’au fond, c’était lui qui en fixait le but. En effet, ayant suspeudu le pendule à un pied de bois, il resta en re-

pos au-dessus comme à côté de l’électrophore. Mais ayant mis le doigt au fil. il se mit à osciller comme auparavant, et s’arrêta de nouveau dès qu’on eut éloigné le gâteau. Il découvrit, de plus, que le contact immédiat du fil n’était pas nécessaire, et que, pour produire le mouvement, il avait besoin seulement de toucher un point du support. Il n’était pas nécessaire davantage que l’électrophore fût très-proche : l’expérience réussissait lors même que le pendule était à une distance de 2h pieds, ou séparé de l’électrophore par un mur ou par un plancher. 11 fallait seulement que l’électrophore ne fût pas isolé, ou, s’il l’était, sa force devait être augmentée par une machine électrique. E fut constaté que non-seulement des pendules légers, mais que des masses de deux ou trois quintaux, suspendues à'des cordes ou à des chaînes, ou tenant à des fléaux de balance, étaient mis en mouvement; et leurs oscillations, malgré la pesanteur, se produisaient dans la môme direction que lorsqu’on agissait sur une masse plus légère : il suffisait, pour cela, de toucher seulement une partie quelconque de la chaîne.

« 11 fallait d’abord s’assurer que la main n’avait aucune influence sur ce mouvement, par une action insensible et inaperçue sur le corps qui oscillait. Pour cela, on attacha trois cloches à trois bras qui se coupaient sous des angles déterminés, et qui étaient poTtés par un même support, et on les suspendit au-dessus de l’électrophore. Or, aussitôt que Schaef-fer eut mis la main sur le support, à deux pieds de la cloehe du milieu, et à trois pieds de celles qui étaient situées aux deux côtés, la première se mit à osciller dans la direction de la ligne méridienne, et les deux autres dans une direction perpendiculaire à celle-ci. Une autre fois, on suspendit deux pendules avec deux bras à un snpport, et à côté des deux pendules, à l’est et à l’ouest, ou au nord et au sud, on plaça deux êlectrophores. Dès que Schaefler y eut mis la main, l’une des cloches oscilla vers le sud ou l’est, et l’autre vers le nord ou l’ouest. La même chose arriva en présence du professeur Xavier Epp, que l’académie de Munich avait envoyé en 1777,

pour lui rendre compte de ces phénomènes. On suspendit le pendule à une tige de 1er solidement fixée ii une porte, et on plaça l'électrophore à dix pieds de distance de lui et de côté, Schaefler ayant mis la main sur la tige du pendule, on y remarqua aussitôt des oscillations de cinq ou six pouces, dont la direction suivait toujours exactement le, lieu où, à l’insu de Schaefler, l’on avait placé l’électrophore dans une chambre voisine. On chercha si cette propriété de produire des oscilla-lions était attachée exclusivement à la maiu de SclueUer, ou ;>i d'autres quo Initia-possédaient encore, et Fon se convainquit que c'était un privilège très-rare. On fixa pour cela une poulie dans le mur, et 011 y suspendit le pendule ; puis Epp et beaucoup d’autres encore, y mirent la main sans qu’il en résultât aucun mouvement. Mais lorsque Schaefler leur mettait la main sur les épaules, le pendule se mettait à osciller, plus tard, néanmoins, et plus faiblement que de coutume. Lui-même ne réussissait pas toujours ni d’une manière complète, cependant l’exception était rare. Pendant trois semaines que durèrent les essais, qu’on renouvelait tous les jours, le pendule ne se trouva rebelle que deux fois; la première dans un après-midi, et la seconde en présence de douze personnes.Les oscillations commencèrent, toutefois, dès qu’on eut placé l’é-lectrophore dans une autre chambre. On voulut enfin se faire une idée de la manière dont cet instrument agissait, et l’on reconnut qu’on pouvait le remplacer par un autre corps, un siège, une table ou tout autre objet, pourvu que celui-ci eût ôté quelque temps en contact avec Schaefler, ou toute autre personne également favorisée. Un verre à boire conserva en-core: quatre jours, après avoir été touché de cette manière, la facidté de diriger de son eôlé les oscillations, quoiqu'il eût servi pendant tout ce temps. Si, après avoir placé l'électro-phore sur un livre, on pressait celui-ci pendant quelques instants sur un second, et ainsi de suite, jusqu'au centième, tous ces livres se communiquaient la faculté de produire les mêmes effets sans la moindre diminution dans leur intensité, et l’on pouvait ensuite faire passer celte propriété des livres! une série de plats ou de verres. »

Nous ne présentons qu’une simple analyse dos faits, qui furent alors soigneusement examinés et consiatés par la science; les magnétiseurs zélés et studieux trouveront dans les Archives de l’académie de Munich, les rapports qui en furent faits, et qui pourront servir de base pour des recherches plus persévérantes, des études plus profondes.

DON DE GUÉRIR LES MALADES.

Le magnétisme atoujoure eu les mômes ennemis, le bien n’a jamais pu se faire sans danger pour celui qui l’opérait, quelle que fût sa position. Le pouvoir de guérir est naturel chez certains hommes, et, par défaut de pratique, chez beaucoup il reste inconnu ; tantôt ces faits de guérison sont reconnus miraculeux, et ceux qui les produisent sont des saints; mais plus souvent on accuse de charlatanerie ces hommes d’élite. Quoi qu’il en soit des louanges ou des persécutions, le principe est trouvé, la loi est découverte, tous les hommes sont prévenus; qu’ils imposent les mains et les malades guériront. Nous extrayons ce curieux passage d’un ouvrage déjà cité : la Mystique.

Baron Du Potet.

« Saint-Sauveur-d'Horta , né en Catalogne, reçut la première moitié de son nom par une sorte de pressentiment de ce qu’il devait être un jour, et la seconde de son entrée comme frère lai dans le couvent des Récollets, à Horta. Il avait fait son noviciat avec une grande ferveur, et s’y était exercé d’une manière admirable à la pratique de toutes les œuvres de charité et de miséricorde, soit envers les frères du couvent, soit à l’égard des personnes du dehors.

« Le peuple sembla avoir deviné de bonne heure, par une sorte d’instinct, le don qui résidait en lui ; car peu de temps après qu’il eut fini son noviciat, les malades accoururent déjà en foule à Horta; de sorte qu'un jour il s’en trouva deux

mille ensemble dans le même lieu : et il les guérit tous en les bénissant, après qu’ils eurent accompli leur dévotion. 11 continua de guérir ainsi les malades pendant plusieurs années, et le nombre en monta une fuis, à la fête de l’Annonciation, jusqu’à (5.000. Bien plus, une autre fois, à Valence, sur la place devant le couvent de Sainte-Marie-dc-Jésus, il se trouva plus de dix mille hommes, depuis le vice-roi jusqu aux artisans, qui venaient recevoir sa bénédiction ou chercher la guérison de quelque maladie.

Il ne faut pas croire que les frères de son ordre vissent avec plaisir ce grand concours de peuple. Ils en étaient très-ennuyés, au contraire ; et pendant qu’il était encore àHorta, le provincial étant venu visiter le couvent, ils lui adressèrent leurs plaintes à ce sujet. Celui-ci, n’ayant pas de son côté confiance dans la chose, fit venir le saint au chapitre, afin de l’éprouver, et lui dit d’un ton fâché : « J’espérais trouver la paix dans cette maison, et je la vois au contraire dans le trouble par votre faute. Dites-moi donc, frère Sauveur, qui vous a autorisé à vivre de cette manière? N’avez-vous pas honte d’entendre dire partout : Allons trouver le saint à Horta? Ils devraient bien plutôt dire : Allons à l’esprit malin qui trouble les frères d’Horta. Mais vous, mes frères, ne remarquez-vous pas comme il vous fait tort et vous humilie en s’attribuant exclusivement le privilège de faire des miracles, comme si vous n’étiez pas aussi saints que lui, mais je ferai en sorte, mon frère, que votre nom ne soit plus cité désormais, et je saurai bien mettre fin à vos miracles et à tout ce concours de peuple. Et d’abord, pour pénitence, vous recevrez la discipline ; puis vous changerez votre nom en celui d’Alphonse, et à minuit vous partirez sans rien dire, avec cette lettre, pour le couvent de Reus. » Sauveur courut à l’église sans répondre un seul mot, et se mit en prière ; puis, à l’heure qui lui avait été indiquée, il parti nu-pieds pour Reus, avec un frère lai, traversant en silence la foule qui était accourue de nouveau autour du couvent d’Horta. 11 fit tout le voyage, plongé dans une prière fervente.

« Arrivé à Reus, il fut reçu par le gardien, devant le chapi-

tre assemblé, avec ces paroles : « Pour empêcher ce brouillon de troubler le repos des frères par ses miracles, je le mettrai en un lieu où il ne pourra déranger personne. » Il le conduisit alors à la cuisine, et l’y enferma en lui disant : « Faites la cuisine ici pour les frères, et opérez vos miracles, si vous voulez, parmi les assiettes et les plats. » Mais le matin, dès qu'il fit jour, le peuple de l'endroit accourut en foule au couvent, au nombre de plus de deux mille personnes, sans qu'on sût ni pourquoi, ni comment. Tous, les malades surtout, demandaient le Père Sauveur. Les frères, ne comprenant rien à la chose, allèrent trouver le gardien. Celui-ci courut à la cuisine; et pendant qu’il faisait une verte réprimande au pauvre frère à genoux devant lui, la foule brisa les portes, et le gardien fut obligé de lui amener Sauveur, à. la condition que tous s’en iraient tranquillement à l’église. Le saint leur adressa quelques paroles bien simples, les bénit et retourna à sa cuisine. Le grand nombre de béquilles, de ceintures, de bâtons qui furent laissés dans l'église, témoigna de l’effica- , cité de sa bénédiction. Mais le gardien, à cette vue, s’écria :

« Voyez-vous de quelles saletés ce frère remplit l'église, la changeant ainsi en une étable? Le couvent fut en repos pendant quelque temps ; mais dès que le peuple connut lo chemin qui menait au saint, les processions recommencèrent.. Pour y mettre fin, le provincial l’envoja à Sarragosse, à Bar-celonne et ailleurs ; .mais partout, au bout de quelque temps, c’était la même chose. Les malades campaient quelquefois sous des tentes quand ils étaient nombreux, et l'historien de l'ordre n’ose pas en fixer le chiffre, de peur de n’être pas cru.

Pour l’arracher à l’empressement des populations en Espagne, on l’envoya plus tard en Sardaigne, à Cagliari, avec le visiteur général de l’ordre, le P. Ferri. Là, il fut ce qu’il avait été en Espagne, simple, ouvert dans ses rapports avec les hommes, austère envers soi-même, passant les nuits en prières dans l’église, ne dormant que fort peu et au premier coin venu du couvent. Il passait le reste du temps au travail de la cuisine, du jardin, ou à la porte, distribuait des aumônes

et bénissait le peuple. 11 était compatissant pour les pauvres et les malades. Sa patience et sa résignation 11e furent jamais altérées par les persécutions nombreuses auxquelles il fut en butte. Il eut des extases et des visions, et souvent dans cet état, il fut élevé en l’air en présence de plusieurs milliers de témoins. Il eut le don de prophétie, de connaître les choses secrètes ei de commander aux éléments. 11 prédit l'heure de sa mort, et continua, du fond de son tombeau, à opérer de nombreuses guérisons. »

VARIÉTÉS.

APPARITIONS.

Quel étonnant procès que celui-là, et quel triomphe poulie grand évocateur des esprits, M. Home ! Le nommera-t-on expert en ces matières? Quoi qu’il en soit, comme il n’y a rien de nouveau sous le soleil de la justice, ce procès, qui se croira peut-être une nouveauté, ne sera qu’une vieillerie. 11 a un pendant qui, pour être âgé de deux cent soixante-trois années, n’en est pas moins curieux.

Donc, en l’an de grâce 1595, devant le sénéchal de Guyenne, un locataire nommé Jean Latapy plaida contre son propriétaire Robert de Vigne. Jean Latapy prétendait que la maison que de Vigne lui avait louée, une vieille maison d’une vieille rue de Bordeaux, était inhabitable et qu’il avait dû la quitter; après quoi, il demandait que la résiliation du bail fût prononcée par justice.

Pour quels motifs ? Latapy les donne très-naïvement dans ses conclusions.

'1 Parce qu'il avait trouvé cette maison infestée par des esprits qui se présentaient tantôt sous la forme de petits en-lants, tantôt sous d’autres formes terribles et épouvantables, lesquels opprimaient et inquiétaient les personnes, remuaient les meubles, excitaient des bruits et tintamarres par tous les

coins, et, avec force et violence, rejetaient des lits ceux qui y reposaient. »

Le propriétaire de Vigne s’opposait très-énergiquement à la résiliation du bail. « Vous décriez injustement ma maison, disait-il à Latapy -, vous n'avez probablement que ce que vous méritez, et, loin de me faire des reproches, vous devriez, au contraire, me remercier, car je vous fais gagner le Paradis. »

Voici comment l’avocat du propriétaire établissait cette singulière proposition : « Si les esprits viennent tourmenter Latapy et l’affliger par la permission de l)icu, il en doit porter la juste peine, et dire comme saint Hierosme : Quidquid patimur nos/ris peccatis mcrcmur, et ne s’en point prendre au propriétaire, qui est du tout innocent ; mais encore avoir gratitude envers celui-ci, qui lui a fourni ainsi matière à se sauver dans ce monde des punitions qui attendaient ses démérites dans l’autre. »

L’avocat, pour être conséquent, aurait dû demander que Latapy payât quelque redevance à de Vigne pour le service rendu. Une place en Paradis ne vaut-elle pas son pesant d’or? Mais le propriétaire généreux se contentait de conclure à ce que le locataire fût déclaré non recevable en son action, par ce motif qu’avant de l’intenter, Latapy aurait dû commencer lui-même par combattre et chasser les esprits par les moyens que Dieu et nature nous ont donnés.

« Que n’usait-il, s’écriait l’avocat du propriétaire, que n’usait-il du laurier, de la rue plantée ou du sel pétillant dans les flammes et charbons ardents, des plumes de la huppe, de la composition de l’herbe dite areolus vetu/us, avec la rhubarbe, avec du vin blanc, du saux suspendu au seuil de la porte de la maison ; du cuir du front de l’hyène, du fiel de chien, que l’on dit estre d’une merveilleuse vertu pour chasser les démons? que n’usait-il de l'herbe Moly, laquelle Mercure ayant baillé à Ulysse, il s’en servit comme antidote contre les charmes de Circé?... »

Il est évident que le locataire Latapy avait manqué à tous ses devoirs en ne jetant pas du sel pétillant dans les flammes,

et en ne faisant pas usage de fiel de chien et de quelques plumes de la huppe ; mais comme il eût été obligé do se procurer aussi du cuir du front de l'hyène, le sénéchal de Bordeaux trouva que cet objet n’était pas assez commun pour que Latapy ne fût pas excusable d’avoir laissé les hyènes tranquilles, et il ordonna bel et bien la résiliation du bail.

Vous voyez que, dans tout cela, ni propriétaire, ni locataire, ni juges, ne mettent en doute l’existence et les tintamarres des esprits. 11 paraîtrait donc qu’il y a plus de deux siècles, les hommes étaient déjà presque aussi crédules qu’aujourd'hui ; nous les dépassons en crédulité, cela est dans l’ordre : il faut bien que la civilisation et le progrès se révèlent en quelque endroit.

Frédéric Thomas,

Avocat à la Cour impériale.

Extrait du Courrier du Palais de la Presse du 2 août.

Un Parisien lit dans un journal qu’un vieux château est à vendre dans les Pyrénées ; il l'achète, et, dès les premiers beaux jours de la belle saison, il va même s’y installer avec ses amis.

On soupe gaiement, puis 011 va se coucher plus gaiement encore. Reste la nuit à passer : la nuit dans un vieux château perdu dans la montagne. Le lendemain, tous les invités se lèvent les yeux hagards, les figures effarées ; il vont trouver leur hôte, et tous lui font la même question d’un air mystérieux et lugubre : N’avez-vous rien vu cette nuit ?

Le propriétaire ne répond pas, tant il est épouvanté lui-même ; il se contente de faire un signe de tête affirmatif.

Alors 011 se confie à voix basse les impressions de la nuit. L'un a entendu des voix lamentables ; l’autre des bruits de chaînes ; celui-ci a vu la tapisserie se mouvoir ; celui-là un bahut le saluer. Plusieurs ont senti des chauves-souris gigantesques s’accroupir sur leurs poitrines. C’est un château de la Dame blanche : les domestiques déclarent que, comme le fermier Dickson, des fantômes les ont tirés par les pieds.

Ouoi encore ? les lits se promènent, les sonnettes carilionneni toutes seules, des mots fulgurants sillonnent les vieilles cheminées.

Décidément ce château est inhabitable. Les plus épouvantés prennent la fuite immédiatement : les plus intrépides bravent l’épreuve d’une seconde nuit.

Jusqu’à minuit tout va bien. Mais dès que l'horloge de la Tour du Nord a jeté dans l’espace ses douze sanglots, aussitôt les apparitions et les bruits recommencent. De tous les coins s’élancent des fantômes, des monstres à l’œil de feu, aux dents de crocodile, aux ailes velues, et tout cela crie et bondit, et grince et fait un sabbat de l’enfer.

Impossible de résister à cette seconde expérience. Cette fois, toutlemoude quitte le château, et aujourd’hui le propriétaire veut intenter une action en résolution pour vires cachés.

M. de S... (un nom historique porté aujourd’hui encore avec honneur) était officier sous le Directoire. Pour son plaisir ou pour les besoins de son service, il faisait route vers l’Italie.

Dans un de nos départements du centre il fut surpris par la nuit et s’estima heureux de trouver un gîte sous le toit d’une espèce de baraque de mine suspecte, où on lui offrit un mauvais souper et un grabat dans un grenier.

Habitué à la vie d’aventures et au rude métier de la guerre, M. de S... mangea de bon appétit, se coucha sans murmurer et s’endormit profondément.

Son sommeil fut troublé par une apparition redoutable. 11 vit un spectre se dresser dans l’ombre, marcher d'un pas lourd vers son grabat, et s’arrêter à la hauteur de son chevet. C’était un homme d’une cinquantaine d’années, dont les clie-veux gris et hérissés étaient rouges de sang ; il avait la poitrine nue, et sa gorge ridée était coupée de blessures béantes. 11 resta un moment silencieux, fixant ses yeux noirs et profonds sur le voyageur endormi, puis sa pâle figure s’anima, ses prunelles rayonnèrent comme deux charbons ardents ; ¡1

parut faire un violent clFort, et d’une voix sourde et tremblante, il prononça ces paroles étranges :

« Je te connais, tu es soldat comme moi, comme moi homme île cœur et incapable de manquer à ta parole. Je viens le demander un service que d’autres m’ont promis et qu’ils ne m’ont point rendu. 11 y a trois semaines que je suis mort ; l’hôte de cette maison, aidé par sa femme, m’a surpris pendant mon sommeil et m’a coupé la gorge. Mon cadavre est caché sous un tas de fumier, ii droite, au fond de la basse-cour. Demain, va trouver l’autorité du lieu, amène deux gendarmes et fais-moi ensevelir. L’hôte et sa femme se trahiront d'eux-mêmes et tu les livreras à la justice. Adieu, je compte sur ta pitié; n’oublie pas la prière d’un ancien compagnon d’armes. »

M. de S..., en s’éveillant, se souvint de son rêve. La tète appuyée sur le coude, il se prit à méditer ; son émotion était vive, mais elle se dissipa devant les premières clartés du jour, et il se dit comme Athalie :

Un songe ? me devrais-je inquiéter d’un songe ?

11 fit violence à son cœur, et n’écoutant que sa raison, il boucla sa valise et continua sa route.

Le soir, il arriva à sa nouvelle étape et s’arrêta pour passer la nuit dans une auberge. Mais à peine avait-il fermé les yeux, que le spectre lui apparut une seconde fois, triste et presque menaçant.

'Je m’étonne et je m’afflige, dit le fantôme, de voiruu homme comme toi se parjurer et faillir à son devoir. J’attendais mieux de ta loyauté : mon corps est sans sépulture, mes assassins vivent en paix. Ami, ma vengeance est dans ta main; au nom de l’honneur, je te somme de revenir sur tes pas. »

M. de S... passa le reste de la nuit dans une grande agita-tl0n; lejour venu, il eut honte de sa frayeur et continua son voyage.

Le soir, troisième halte, troisième apparition. Cette fois, le fantôme était plus livide et plus terrible ; un sourire amer errait sur ses lèvres blanches ; il parla d’une voix rude :

« Il parait que je t'avais mal jugé ; il parait que ton cœur, comme celui des autres, est insensible aux prières des infortunés. Une dernière fois je viens invoquer ton aide et faire appela ta générosité. Retourne àX..., venge-moi, ou sois maudit. »

Cette fois, M. de S... ne délibéra plus : il rebroussa chemin jusqu’il l’auberge suspecte où il avait passé la première de ces nuits lugubres. Il se rendit chez le magistrat, et demanda deux gendarmes. Asa vue, à la vue des deux gendar-mes, les assassins pâlirent, et avouèrent leur crime, comme si une force supérieure leur eût arraché cette confession fatale.

Leur procès s’instruisit rapidement, et ils furent condamnés à mort. Quant au pauvre officier, dont on retrouva le cadavre sous le tas de fumier, à droite, au fond de la basse-cour, il fut enseveli en terre sainte, et les prêtres prièrent pour le repos de son âme.

Ayant accompli sa mission, M. de S... se hâta de quitter le pays et courut vers les Alpes sans regarder derrière lui.

La première fois qu’il se reposa dans un lit, le fantôme se dressa encore devant ses yeux, non plus farouche et irrité, ¡ jjiais doux et bienveillant.

« Merci, dit-il, merci, frère. Je veux reconnaître le service que tu m'as rendu : je me montrerai à toi une fois encore, une seule; deux heures avant ta mort, je viendrai t'avertir. Adieu. »

M. de S... avait alors trente ans environ; pendant trente ans, aucune vision ne vint troubler la quiétude de sa vie. Mais en 182.., le 14 août, veille de la fètede Napoléon, M. deS..., qui était resté fidèle au parti bonapartiste, avait réuni dans un grand dîner une vingtaine d’anciens soldats de l’Empire. La fête avait été fort gaie; l’amphitryon, bien que vieux, était vert et bien portant. On était au salon et l’on prenait le café.

M. de S... eut envie de priser et s’aperçut qu’il avait oublié sa tabatière dans sachambre. 11 avait l’habitude deseser-vir lui-même; il quitta un moment ses hôtes et monta au premier étage de sa maison, où se trouvait sa chambre à coucher.

11 n’avait point pris de lumière.

Quand il entra dans un long couloir qui conduisait à sa chambre, il s’arrêta tout à coup, et fut forcé de s’appuyer contre la muraille. Devant lui, à l’extrémité de la galerie, sc tenait le fantôme de l’homme assassiné; le fantôme, qui ne prononça aucune parole, ne fit aucun geste, et, après une seconde, disparut.

C’était l’avertissement promis.

AI. de S..., qui avait l’âme forte, après un moment de défaillance, retrouva son courage et son sang-froid, marcha vers sa chambre, y prit sa tabatière et redescendit au salon.

Quand il y entra, aucun signe d’émotion ne parut sur son visage. 11 se mêla à la conversation, et, pendant une heure, montra tout son esprit et tout son enjouement ordinaire.

A minuit, ses invités se retirèrent. Alors, il s’assit et passa trois quarts d’heure dans le recueillement; puis, ayant mis ordre k ses affaires, bien qu’il ne se sentit aucun malaise, il regagna sa chambre à coucher.

Quand il en ouvrit la porte, un coup de feu l’étendit roide mort, deux heures juste après l’apparition du fantôme.

La balle qui lui fracassa le crâne était destinée à son domestique. Henhy d’Audigier.

ÉCRITURE DES ESPRITS.

Nous avons fait part des travaux de plusieurs nécromanciens qui assurent qu'ils peuvent à volonté obtenir l’écriture des esprits, (le phénomène, exalté par les uns, nié par les autres, a donné lieu à un débat qui sans doute ne se terminera qu’au moyen de nouvelles expériences, faites publiquement et avec toutes les précautions convenables. Voici, en attendant, quelques documents qui pourront servir à éclairer la question.

Lors du concile de Nicée, tenu en 325, trois des Pères moulurent après la dernière séance, mais avant d’avoir signé les décrets qui condamnaient la doctrine d’Arius. Comme 011 tenait à ce que les signatures fussent au complet, on plaça l’o-

riginal des décrets auprès des trois corps morts : le lendemain matin, les trois signatures s'v trouvaient.

Grégoire, de Tours, rapporte (Lib. vu, cap. 2) que le roi Chilpéric poursuivit le duc Contran qui, pour échappera sa colère, se réfugia dans l’église de S lint-Martin-do-Tours, qui était un lieu d’asile. Le roi n’osant l’en arracher, dans la crainte de se brouiller avec un saint puissant, prit le parti de lui écrire une lettre qu'il fit déposer sur son tombeau ; il demandait au saint s’il permettait d’enlever le duc de son asile. La lettre resta pendant trois jours et trois nuits sur le tombeau ; et l’on avait poussé la précaution jusqu’à placer tout à cûté une feuille de papier blanc, destinée à recevoir la réponse. Le saint ne jugea pas ii propos de répondre, mais le récit de l’historien prouve qu’à cette époque on regardait comme une chose toute simple qu’un saint fit connaître ses intentions par l’écriture.

On grand nombre de lettres autographes de Jésus-Christ et de la Vierge Marie, ont joui quelque temps d’une grande vogue, puis sont tombées dans l’oubli, sans qu’on ait même discuté leur authenticité.

On voit que M. de Guldenstubbé ne manque pas de prédécesseurs.

A. S. Morin.

— Les journaux américains nous apprennent la mort de M. Robert Hare, de Philadelphie, célèbre chimiste, et l’un des plus ardents promoteurs du spiritualisme ; il a publié sur ce sujet divers ouvrages fort estimés, notamment le traité intitulé : Spiritualism scientifically demonstrated. (Le spiritualisme démontré scientifiquement.)

Baron du POTET, propriétaire-gérant.

r»rii.— Imp. de PomUltï 61 Momid, 42, ru« Votili (piè» le l.uicoiLourg)

PROGRÈS DU MAGNÉTISME

(Suite et fin.)

Paragraphe II.

Cause générale et causes particulières des phénomènes physiques el psychologiques de l'électrisation humaine.

Tout effet suppose une cause, voilà un axiome philosophique. Vouloir se borner à la connaissance d’un fait sans remonter jusqu’à la cause qui le produit, ce serait réduire l’esprit humain à des fonctions de sensation et lui interdire le plus noble usage de son intelligence, voilà une vérité incontestable. Mais quand, dans une question, il se rencontre plusieurs effets ou plusieurs ordres d’effets qui ne peuvent être attribués à une même cause, il est indispensable alors de les rapporter à plusieurs causes différentes. C’est encore une vérité qui a toute la valeur d’un axiome. La question de l’électrisation humaine est une question complexe renfermant plusieurs ordres de phénomènes, des faits physiques et des faits psychologiques. On ne peut donc s’empêcher d’y appliquer le principe que nous venons d’établir et qu’indique facilement la théorie des rapports. Nous allons donc rechercher, en premier lieu, la cause générale des effets physiques ; nous passerons ensuite à la cause spéciale des mêmes phénomènes pour exposer enfin, dans une troisième considération, les deux seules opinions aujourd’hui en présence sur la cause des faits psychologiques.

1° Et d’abord, pour ce qui regarde les effets physiques de l’électrisation humaine, c’est-à-dire tous ceux que nous comprenons dans les deux premiers groupes, ainsi que ceux que présente l’état physique des somnambules, nous croyons que lacause en est naturelle et physique, et qu’on ne peut

Toïe XvIl. — N°. 41 — 2»Séiiie. — 10 Septmebre 1858. 16

sans prévention y voir quelque clioso de surnaturel. Nous niions ici laisser parler quelques hommes, dont le caractère et l'autorité personnelle sont d’un grand poids. « Nous avons la confiance, dit l'abbé Maupied, professeur d’Ecriture sainte à la Sorbonne et membre de plusieurs sociétés savantes, nous avons la confiance que les théologiens qui voudront peser les faits et les lois physiques et physiologiques que nous avons invoqués dans notre thèse (du magnétisme), ne se hâteront pas de traiter de superstitieux et de diabolique ce qui peut, en définitive, s’expliquer par les analogies des lois des faits naturels et connus. Nous avouerons même que le démon peut en tirer parti en certains cas, comme il tire parti de tous les phénomènes naturels; mais il n’en est ni la cause ni l’agent, et son action ne peut y être toujours mêlée. Nous le répétons, ce sont des phénomènes naturels qui ne peuvent être mauvais en eux-mêmes. »

Voici un pieux et savant auteur dont l’ouvrage n’est pas moins estimé que connu et qui répond directement à notre question. « Le magnétisme animal, dit l’abbé Guillois, est-il quelque chose de naturel ou bien ne doit-on y voir qu’une intervention diabolique? Nous pensons qu’on ne saurait, sans prévention, admettre ce dernier sentiment. Il y a sans doute bien des faits magnétiques qui tombent dans,1e domaine de la jonglerie et du compérage, mais il en est d’autres qui sont attestés par des hommes dont on ne peut mettre en doute ni les lumières, ni la prudence, ni la probité, et qui. quoique inexplicables, ne paraissent pas sortir de la classe des faits physiques et psychologiques (1). »

F.nlin, écoutons ce que le savant et judicieux archevêque de Reims dit au sujet des miracles : « Les efiets étonnants de l'électricité, les résultats non moins frappants de galvanisme, les phénomènes physiologiques du magnétisme animal, n’on t jamais été des miracles qu’aux yeux des ignorants. Sans en découvrir ou en expliquer suffisamment la cause, l’observa-

(I) Explication du Cathéchiime, par M. l’abbé Guillois, curé du Mans, ü» édition, png. 101.

teur n'a jamais douté qu'elle n'existât dans la nature, puisque les effets répondent constamment et proportionnellement à des opérations identiques et naturelles (1). »

En citant seulement des plumes ecclésiastiques et des noms si connus, nous avons voulu nous exempter de donner plus d’extension à cette matière. On comprend bien d’ailleurs que nous ne pourrions qu’avoir gain de cause auprès des laïques, dont un si grand nombre, hélas! professe le matérialisme et croit à peine à l’existence de Dieu et à ses propres destinées.

Ce qu’il y a de clair et de certain dans une chose quelconque, ne doit jamais être nié à cause de l’obscur ou de l’incertain qui pourrait se trouver dans la même chose. C’est un principe en philosophie que nous établissons plus bas. Il nous parait donc qu’alors même que nous ne pourrions donner aucune explication des phénomènes électriques, que, quand même nous ne verrions pas leur rapport avec les causes qui les produisent et que l’électrisation humaine ne pourrait jamais se présenter au monde comme science ou comme une démonstration précise et satisfaisante, l’ensemble de ces effets physiologiques n’en constituerait pas moins une des branches les plus intéressantes des connaissances humaines. Mais nous ne sommes pas tout à fait réduits à cette extrémité dans la question qui nous occupe; un grand nombre d’expériences et de faits récents permet d’établir une hypothèse très-raisonnable et d’embrasser une opinion aussi éclairée que prudente sur la cause des phénomènes physiologiques de l’é— lectrisalion humaine.

Voici cette hypothèse, à laquelle nous adhérons volontiers, jusqu’à meilleure explication.

D’abord, dans l’état actuel de la science, il est généralement reconnu et moralement certaiij qu’outre l’âme et cette masse organique qu’on appelle le rorps, on doit encore admettre dans l’homme une troisième substance, connue généralement sous le nom de fluide nerveux ou vital. C’est ce

(1) Théologie dogmatique, do Mgr. Gousset. 4« édl., p. 299

fluide ou substance matérielle très-subtile, que les physiologistes regardent comme le principe second, qui, conduit par les nerfs et mis sous la direction de l’âme humaine, préside aux doubles fonctions du mouvement et de la sensibilité.

Non-seulement l’existence du fluide nerveux dans l'homme est un fait peu contestable, mais encore et toujours, d'après l'état actuel de la science, on ne peut s’empêcher de reconnaître l’identité ou du moins la grande analogie entre le fluide vital ou nerveux et l’électricité, le galvanisme et le magnétisme minéral. Voici quelques faits qui viennent à l’appui de ces deux premières assertions :

1° La pile de Volta, ou le galvanisme appliqué à des cadavres humains, reproduit les mêmes phénomènes vitaux que nous remarquons dans un homme vivant. Ainsi, des cadavres soumis à cette expérience une demi-heure après la mort, présentent des mouvements respiratoires, agitent les jambes et les bras, se dressent sur leur séant, ouvrent et roulent les yeux dans leurs orbites, tordent la bouche de manière à faire frissonner les spectateurs, et offrent enfin le tableau des plus cruelles souffrances.

Or, nous le demandons aux hommes de bonne foi, peat-on-reconnaître une identité si frappante dans les phénomènes, sans supposer au moins une grande analogie dans la cause qui les produit?

2° L’application de l’électricité peut opérer la digestion, en rétablir le cours si elle est interrompue, activer les sécrétions et remédier à des paralysies de la sensibilité et du mou veinent; mille faits le constatent. .

3° La science physique et chimique proclame aujourd’hui comme principe incontestable que, dès que deux substances hétérogènes sont en contact, il y a produit d’électricité, et que toute action chimique, c’est-â-dire combinaison ou décomposition d’éléments divers met en liberté une certaine quantité de fluide électrique.

La circulation, les sécrétions, la digestion et autres fonctions animales, actions purement chimiques, feraient-elles exception à ce principe, aussi général que constaté?

h° Enfin, c’est l'opinion des physiciens et chimistes célèbres, dont les travaux sont connus de tout le monde savant, de Berzélius, Prévost, Dumas, Becquerel, Matteucci, et autres savants de nos jours.

Non-seulement le fluide vital ou nerveux existe dans l’homme, non-seulement il doit être regardé comme identique ou analogue avec le fluide électrique, mais encore ce même fluide existe dans l'homme à l’état libre, c’est-à-dire que l’homme peut le communiquer à son gré par contact et à distance à un autre individu. Voici quelques faits qui semblent prouver notre assertion :

1° 11 est à peu près unanimement reconnu que l’homme envoie de son cerveau, que nous comparons à un appareil galvanique composé de la substance grise et blanche, le fluide destiné à produire le mouvement dans tel ou tel membre avec une telle abondance, une telle énergie. Mais pourquoi, en mettant en contact l’extrémité de son doigt avec celui d’une autre personne, le fluide émané de notre cerveau ne passerait-il pas dans le système nerveux de cette personne, comme le fluide électrique passe dans la bobine de fils métalliques la plus enchevêtrée? Et de même, comme l’air est un excellent conducteur, qu’est-ce qui s’oppose à ce que l’âme humaine puisse envoyer ce même fluide à distance, comme y est envoyé celui de nos machines?

1° Nous ne voyons pas pourquoi l’on refuserait à l’homme le pouvoir de transmettre à un autre individu ce fluide électrique ou nerveux, tandis que nous reconnaissons cette propriété dans huit ou dix espèces d’animaux, tels que la torpille, le gymnote électrique ou anguille de Surinam, le silure, etc., qui envoient à distanceet dirigent ce fluide dans tel ou tel sens, selon leurs besoins et leurs volontés, soit pour arrêter, tuer leurs adversaires, ou en faire leur proie.

3° Un assez grand nombre de fois on a vu l’aimantation spontanée de plusieurs instruments se produire sur des individus. Ce phénomène se remarque surtout chez les cataleptiques. Pendant les jours qui précèdent leur crise nerveuse, on les voit aimanter des tourne-vis, des pince-bruxelles, de

sorte que ces instruments peuvent soulever de la limaille de fer, des aiguilles d’acier, etc.

A° Cette opinion est celle des plus savants physiciens et des plus habiles physiologistes. Tous reconnaissent que, dans l’électricité animale, non moins que dans le calorique, dans l’électricité de nos machines, et dans le magnétisme minéral, le fluide ne s’arrête pas à la superficie ou à la surface des corps, mais qu’il s’élance au-dehors avec un certain degré de force ou une certaine énergie, que doit augmenter prodigieusement la volonté de l’homme, et qui forme ainsi un rayonnement nerveux ou une sphère d’activité, absolument semblable à celle des corps chauds ou électrisés.

En résumé, si cette question appartient plus à la logique des faits qu’à celle de la métaphysique, elle nous parait définitivement résolue par l’expérience. Le corps de l’homme peut être considéré comme une machine sécrétant de l’électricité. Cette électricité nerveuse, accumulée dans le cerveau, pouvant être facilement dirigée sur son semblable an moyen de la volonté et des nerfs, ayant des caractères communs avec les autres espèces d’électricité, mais modifiée par son existence dans un être pensant, tel est l’agent physique, la cause naturelle que nous regardons comme pouvant déterminer touslesphénomènesphysiologiquesci-dessusmentionnés (1),

Si nous ne balançons pas à regarder comme physique et naturelle la cause des effets physiologiques de l’électrisation humaine, il n’en est pas de même des phénomènes si extraordinaires du somnambulisme. Nous croyons qu’il ne serait pas sans danger et sans témérité de vouloir se prononcer ici d’une manière absolue ; et comme la question n'est pas de nature à être décidée de sitôt, si jamais elle l'est, parce qu'on ne court aucun risque ii en différer la décision (2), nous allons

(1) Voir surtout l'ouvrage si remarquable du docteur Duiund de Uinkl, iutilulâ Souvellc Théorie de l action nerveuse et des phénomènes de la vie (Paris, 18i3). Ce dernier auteur no saurait être suspect, puisque, dans tout son ouvmge, il n'y n pas un seul mot qui ail trait 6 l'électrisa-tion humaine ou au somnambulisme.

(2) Paroles de son Eminence le cardinal de Casibacaki, en réponse à une lettre de Mgr Gousset.

exposer brièvement lesdeux opinions qui nous semblent seules admissibles :

La première opinion est de ceux qui prétendent que les effets purement somnambuliques ne peuvent être que l'tf.u-vre immédiate d’une puissance diabolique. Voici leurs raisons :

Io Ce sont d'abord les signes que le Rituel romain, d’une si grande autorité dans l'Eglise, donne pour reconnaître la possession du démon. Voici ces signes :

a ) Parler ou comprendre une langue étrangère sans l’avoir apprise.

b ) Voir clairement les choses cachées ou ii distance. c ) Déployer une force physique au-dessus de son âge, et de l’état dans lequel on se trouve (1).

2° Un assez grand nombre d’ecclésiastiques, recommanda-bles par leur piété et leur savoir, dont quelques-uns figurent à la tête des grands séminaires et même des évêchés, se sont prononcés formellement contre le somnambulisme, dont ils nient la réalité ou le considèrent comme l'œuvre immédiate du démon. Cet avis est encore partagé par un certain nombre de ministres anglicans, luthériens ou schismatiques russes.

La seconde opinion est de ceux qui ne voient dans le somnambulisme qu’une concentration de l’âme, ou une plus grande indépendance par rapport aux entraves du corps, ce qui rend les facultés de la substance spirituelle infiniment plus libres et plus développées. Voici leurs raisons :

1° Quand on fait une sérieuse attention aux histoires des somnambules naturels, on ne les trouve guère moins étonnantes que celles des somnambules électriques. Ainsi on voit, dans le premier cas, des sujets qui non-seulement parlent, marchent, montent sur des toits, se baignent et nagent, mais encore on en a vu un grand nombre qui, au milieu des ténèbres et les yeux fermés, lisent, écrivent, calculent, composent en vers ou en prose, résolvent des problèmes très-diificiles, et tout cela s’accomplit avec beaucoup d’ordre et de perfection. L'oubli total de ce qui s’est passé, dans cet

(1) De erorciianclis obtettit à dœmonibut.

état, a également lieu. Pourquoi donc, mi l’analogie frappante de ces deux étais, ne leur pas supposer les mêmes causes ?

2° 11 nous paraît difficile à expliquer et dangereux de prétendre que l’homme ait le démon à ses ordres pour l’appeler et le faire agir comme il lui plaît, pouvoir qu'il faudrait nécessairement accorder à un bon nombre d'électriseurs qui paraissent plonger dans le somnambulisme et en retirer à leur gré.

3° Nous ne voyons, dans ceux qui électrisent et somnam-bulisent aucun pacte ni implicite, ni explicite avec le démon; il en est même un bon nombre qui y renoncent conditionnellement, se servent de toutes les pratiques pieuses avouées par la religion, et qui ne laissent pas de déterminer les phénomènes somnambuliques les plus extraordinaires. Cela ne prouve-t-il pas que l’action du démon, dans cette science, n’est qu'une crainte, respectable sans doute, mais arbitraire et peu fondée ?

h° l)n grand nombre d’ecclésiastiques, également recom-mandables par le double caractère de la science et de la vertu, parmi lesquels nous distinguons des prélats romains, des grands-vicaires, des professeurs de grands et petits séminaires, loin de voir dans le somnambulisme l’ouvrage du démon, n’y voient qu’un mode de l’âme humaine, un état suigeneris que l’ancienne et moderne philosophie a toujours supposé, et que peut facilement déterminer cet agent physique naturel dont nous avons parlé. Cet avis est encore partagé par un grand nombre de ministres anglicans, luthériens et schismatiques russes.

Ce partage des opinions ne nous aurait jamais permis d embrasser plutôt l’une que l’autre, si un axiome théologique admis de tous les moralistes chrétiens, des rigides comme des relâchés, des ultramontains non moins que des gallicans, ne semblait pas favoriser le deuxième sentiment. Voici cet axiome : Toute loi qui n’est pas positive, certaine, n’oblige pas, et tout fait qui n’est pas renfermé dans une loi positive et certaine, laisse pleine et entière liberté humaine.

Voici l’application que le savant archevêque de Reims fait d’un principe si raisonnable : « Dans le doute, si un efl'et doit être regardé comme naturel ou diabolique, 011 doit le présumer comme naturel. »

Si la puissance électrique est naturelle à l’homme , quelle est donc la valeur morale qu’il convient de lui donner?

La question ainsi posée d’une manière générale est facile à résoudre ; il est permis de conclure qu’on ne peut assigner à l’électrisation humaine une valeur différente de celle que nous accordons aux autres facultés naturelles, à celle de la parole, de l’écriture, de l’éloquence, de la liberté, des arts libéraux, industriels, etc. ; cette faculté est soumise aux mêmes lois, entraîne les mêmes obligations, rien de plus , rien de moins ; ici, comme en médecine , comme en physique, comme partout, le bien ou le mal moral dépend de l’usage qu’on fait de ces facultés, de la fin qu’on s’y propose, ou des moyens que l’on emploie dans l’obtention de quelque résultat. Et comme la liberté ici est pour nous, puisqu’il 11’existe aucune loi certaine qui l’enchaîne , il est incontestable que l’homme est maître de ses actes et peut se considérer comme affranchi de toute obligation. Par conséquent, si, animé d’une intention droite, il a de justes motifs d’user de ce moyen comme d’un remède ou d’un art dont il espère obtenir quelque heureux résultat, il le peut encore sans obstacles, la morale sainement entendue lui en donne le plein droit.

Mais il est certain, d’un côté, que la pratique de l’électrisation humaine peut entraîner de grands désordres, et malheureusement il faut convenir qu’ici les abus peuvent être d’autant plus faciles et plus énormes, que le bienfait est plus rare et plus élevé. Ici donc, comme ailleurs et même plus qu’ailleurs, on ne saurait user de trop de prudence ou prendre trop de précautions.

Enfin , et pour conclure notre étude, nous dirons : Puisque l’électrisation est un fait, que tout fait est une vérité, et d’autant plus importante, que le fait lui-même paraît sortir davantage de la vulgarité, il suit que la société doit attendre de ce nouvel art les plus utiles et les plus grands bienfaits.

CLINIQUE.

LE MAGNÉTISME ET LA MÉDECINE.

La Gazctta mcdica, journal de medecine publié à Turin, qui s’était souvent montré hostile au magnétisme, vient d'insérer, dans son numéro du 19 juillet., un article remarquable du docteur Zambianchi, dans lequel cet honorable médecin rapporte un cas de guérison par le magnétisme, et s'attache à faire ressortir la nécessité d’étudier et d'appliquer ce grand moyen de guérison. Nous en extrayons les passages les plus importants :

« La Gazetta medica a tant de fois combattu la doctrine dont je veux aujourd’hui l’entretenir, que j’ai dû hésiter à vous adresser cette relation. 11 s’agit du magnétisme. Malgré la courtoisie avec laquelle votre journal a fréquemment accueilli les articles que l’occasion ou le caprice m’ont inspirés, je devais douter si je pouvais présentement compter sur l’obligeance accoutumée.

« Ce que la Gazetta a combattu, c’est une fausse science magnétique, une doctrine erronée, un art dont se sont emparés des charlatans pour se donner en spectacle; quant à moi, mon but est de vous exposer le résultat d'observations, d'expériences suivies, en un mot de présenter un fait. J’ai cru pouvoir en faire la narration sans me mettre en opposition avec les opinions soutenues dans ce journal. Sans me laisser séduire par aucun système, sans prononcer aucun jugement sur cette matière (ce que je regarderais comme téméraire et prématuré), je vais raconter exactement ce que j’ai vu , ce que j’ai fait, ce qui est arrivé, en me permettant seulement quelques réflexions.

« La jeune G. D..., de Turin, âgée de dix-sept ans, eut à souffrir, en 1857, d'une névrose sous forme de convulsions cio-

niques et de catalepsie. Les accès se présentaient irrégulièrement, ils étaient le plus souvent déterminés par les bruits. Les sons d’un instrument de musique, la sonnerie de l'horloge de sa chambre suffisaient pour produire instantanément la ca-calepsie. La maladie durait déjà depuis longtemps avant que je fusse appelé à l’observer. Vers le mois dernier, la menstruation fut à peine sensible; la jeune personne commença à se plaindre de maux de tête et d’estomac. Les phénomènes qui accompagnaient ces douleurs n’accusant pas d’autre maladie, je les attribuai à la névrose. Je rappellerai que l’année précédente , la catalepsie avait été précédée de ces mômes douleurs de téte et d’épigastre qui avaient duré quinze ou vingt jours.

« Après avoir employé les boissons amères, sédatives, anti-névralgiques, et des bains tièdes que la malade a mal supportés, les souffrances étant toujours aussi fortes, si môme elles n'augmentaient, je me décidai le soir du 1er juillet à la magnétiser. Ma croyance dans les prodiges du magnétisme est limitée ; mais pour les faits certains, elle est tenace et profonde. Je ne sais pas les expliquer ; mais une observation bien faite suffit pour en vérifier la réalité et pour les rendre dignes de plus d’attention que ne leur en accordent les hommes de science. Or, pensant en moi-même que la magnétisation pourrait apporter quelque trêve aux souffrances de la jeune fille, je me mis pour la première fois de ma vie à essayer sur elle le magnétisme auquel de son côté elle n’avait jamais été soumise.

« En conséquence, je la fis asseoir devant moi, je lui pris les mains dans les miennes, et je la regardai fixement dans les yeux. Au bout de quelques secondes, sa vue devint trouble, égarée, ses yeux larmoyants; ses doigts s’agitèrent doucement ; ses paupières se fermèrent, se rouvrirent un moment, puis se refermèrent, et la jeune fille tomba dans un profond sommeil. Tout cela se passa en deux minutes. Je fis sur elle quelques passes magnétiques de la tête à la plante des pieds, afin de répandre également mon influence sur tout le corps.

Après quelques minutes, je l’interrogeai : elle ne répondit

pas ; elle avait perdu le toucher etl'ouïe. Elle n’entendait ni ma voix, ni le son de l'harmonica ; je lui pinçai fortement les mains, elle ne le sentit pas.

« Je voulus la démagnétiser. Peine inutile : elle avait passé à l’état cataleptique. Ses membres fléhissaient comme de la cire, sous l’impulsion qu’on leur donnait, et restaient immobiles dans la position où je les mettais, [/effet obtenu par mon action magnétique avait surpassé mon attente et mon désir : je ne cherchais que le sommeil et le calme, et j’avais une belle et bonne catalepsie. Mais, malgré mes efforts et la fatigue que je me donnais pour la démagnétiser, je ne pouvais la ramener à l’état de veille, à la vie de relation, lui restituer la sensibilité et la conscience.

« Après une pause pendant laquelle je remarquai divers mouvements des bras, de la tête et des membres inférieurs, des soubresauts et des tremblements vraiment convulsifs , la partie latérale et antérieure du col se gonfla de manière à ressembler à un goitre. Le pouls s’accéléra et devint isochrone avec les mouvements cardiaques. J’essayai de nouveau à démagnétiser, à dégager la téte et à faire cesser la tnméfac-tion du col ; mais je ne pus encore y parvenir. La catalepsie ne cédait pas; par moments, les tressaillements étaient plus forts. La face conservait sa pâleur ordinaire, la respiration n’était pas sensiblement altérée quant au rythme, ni quant à l'étendue. Je n’avais pas de raison pour croire qu’il y eût à la tète une congestion sanguine, mais je ne pouvais me défendre d’un trouble indicible. Soit que je n’eusse pas une puissance suffisante, soit que jene misse pas assez deconstanceet de résolution dans la démagnétisation , soit que l’agitation où je me trouvais nuisit à mes moyens, soit défaut d’adresse, je me trouvais hors d’état de tirer la jeune fille de l’état anormal où je l’avais plongée. Comme c’était la première fois que je me trouvais dans une pareille situation, comme cela survenait dans une famille avec laquelle je n’avais pas de relations intimes, et dont la confiance n’était pas absolue, mon trouble et mon embarras ne firent que s’accroître. Il y avait déjà trois heures que durait la catalepsie.

« Toutefois, comme je savais que la jeune fille était tombée, l’année précédente, dans le même état, sans qu'il y eut action magnétique, et que cela avait duré environ six heures, j’espérai que le dénoùment serait le même , et je me demandai si c’était la magnétisation qui avait produit cette crise, ou si elle n’avait été que l'occasion qui avait développé l’ancien principe morbide. Ces doutes me traversaient l'esprit, peut-être par suite du désir que j’avais de me décharger de la lourde responsabilité qui pesait sur moi en ce moulent. En donnant à ces doutes une valeur qu’ils n’avaient pas et i que pourtant je désirais qu’ils eussent, en ne me rendant pas compte du désordre d’idées où me jetait la crainte d’un mal peut-être irréparable ou du moins très-grave, je me calmai un peu et je repris confiance.

a Je me décidai ainsi à quitter pour quelque heures la c&-taleptique et la famille, ce que je n’aurais pas fait si j’eusse véritablement craint pour l’existence de la pauvre malade. On devait m’avertir s’il survenait quelque nouvelle circonstance ; en tout cas , dès le lendemain, de grand matin, on devait me rendre compte de tout ce qui se serait passé.

« Le matin du 2 juillet, on vint me dire qu’il n’était pas survenu d’amélioration ; elle avait été pendant quelques heures tellement tranquille, qu’on aurait pu la croire endormie du sommeil ordinaire; elle avait été prise ensuite d’un accès de fureur et de quintes de toux ; la catalepsie durait toujours, ainsi que le mutisme et l’insensibilité.

« Mes espérances étant ainsi évanouies, que devais-je faire ? Retourner auprès de la malade en me faisant assister d’un autre magnétiseur dont le concours la tirerait peut-être de cet état. A peine ce projet conçu, je le réalisai immédiatement. A huit heures et demie, je revins accompagné de mon ami, le comteLuigiVespignani, magnétiseur habile et éclairé. Je trouvai la malade dans le même état où je l'avais laissée la nuit précédente. Seulement le pouls était moins fréquent 11 y avait douze heures qu’elle était insensible ,.sans conscience ni volonté.

i Mon ami, après s’être mis en relation avec moi en me te-

liant une main, se mit à l’œuvre et travailla à démagnétiser la cataleptique. Pendant environ une demi-heure, ses efforts n’obtinrent aucun résultat, si ce n'est quelques contractions musculaires. Enfin, en dirigeant spécialement son action sur la tête où paraissait s’être concentrée mon influence beaucoup plus que dans le reste du corps, on vit paraître quelques signes de sensibilité. L’opérateur ayant soufflé à froid sur les régions temporales et auriculaires, ou remarqua quelques signes d’impatience. Puis, les membres se relâchèrent un peu et exécutèrent de légers mouvements auxquels semblait n’être pas étrangère une volonté confuse et non encore bien «* arrêtée ; l’ouïe parut peu à peu se rétablir. La malade ne pouvait pas encore parler, mais, par des signes de tète, elle exprimait le oui et le non. Elle fit comprendre , à l’aide de ces signes,qu’elle souffrait de la tète et de l’estomac, qu’elle était soulagée par le souffle froid et les grandes passes magnétiques de l’épigastre aux extrémités inférieures. Invitée à me serrer la main, elle le fit avec un effort où la volonté se manifestait d’une manière sensible.

« L’opérateur continua son œuvre dont les effets salutaires étaient de plus en plus visibles. 11 y avait une heure qu'il y travaillait, et ses efforts allaient être couronnés d'un heureux succès. La souffrance de tète diminuait progressivement et était près de disparaître ; la malade n'accusait plus par signes que les douleurs d’estomac. Elle posa ses mains l’une sur l’autre , l’une prenant successivement les doigts de l’autre, comme si elle eût voulu exprimer l’action d’en retirer quelque chose qui l’incommodât, et imitant les mouvements rapides que l’opérateur avait employés peu auparavant.

« Les yeux étaient encore fermés. Invitée à lever les paupières, elle fit signe qu’elle ne le pouvait pas. L’opérateur fit, un effort de volonté pour obtenir ce résultat qui devait être en quelque sorte l’indice de sa réintégration dans son état normal, Grâce à son action, aux efforts de la jeune fille elle-même, et auconcourssimultané de deux volontés, les paupières fmirentpar s’ouvrir et se mouvoirlibrement. Presque au même moment, elle retrouva l'u^aje de la parole, en n’articulant

d’abord que des monosyllabes;... elle était rendue à la vie.

« Elle ne se plaignit pas des douleurs de lôte, mais elle déclara souffrir de l'estomac, et elle était extrêmement fatiguée. Enfin elle était sauve, et son salut lui venait de la puissance même d’où était venu le mal. Depuis le moment où j’avais commencé à la magnétiser, jusqu’à la disparition de tout phénomène magnétique, il s’était écoulé treize heures.

« Je la revis le soir, elle souffrait toujours de l’estomac, et elle avait en outre son même mal de tête, pareil à celui des jours précédents. Elle ne se plaignait pas d’autre chose, était souriante, plutôt gaie que triste, avait le pouls tranquille. Bien quelle se rappelât avoir éprouvé aux yeux une sensation douloureuse depuis le moment où je la fixai pour la magnétiser, bien qu’elle se souvînt de ne pas s’être couchée pour dormir selon son habitude, bien qu’elle se rappelât également tout ce qui s'était fait et dit autour d’elle dans la dernière période de son état magnétique, alors qu’elle commençait à recouvrer la sensibilité de la conscience; bien qu’ayant le souvenir de tout cela, cependant elle demeurait, comme auparavant, incrédule au magnétisme.

« Le jour suivant (3 du mois), elle eut encore des douleurs de tête sans qu’elles fussent plus fortes que de coutume, mais elle n’eut pas de douleurs d’estomac. Le 4, elle ne ressentit ni l’une ni l’autre; son humeur fut très-gaie, et elle prit plus de nourriture et avec plus de plaisir que les jours précédents. Il ne restait donc aucune trace de la profonde magnétisation qu’elle avait reçue, ni du malheur qui avait amené cette opération. Tout cela me confirma dans l’opinion que je m’étais faite que les souffrances dont elle s'était plainte, de la tête et de l’estomac, tenaient à une névrose. Depuis, la menstruation se fit régulièrement.

La guérison a été la conséquence médiate de la magnétisation que j’ai rapportée ; cet heureux résultat peut justifier ce qui dans mes travaux aurait pu être jugé avec quelque sévérité. »

L’auteur fait suivre son récit de réflexions fort intéressantes. Après avoir parié des hypothèses plus ou moins ha-

sardées, à l’aide desquelles on a cherché à expliquer le magnétisme, il ajoute :

« Au dessus de tout cela, demeurent les faits, les faits vérifiés, répétés, constatés nombre de fois, faits qui sont indépendants des opinions humaines, mais qui sont le résultat des lois de la nature ; c’est là qu’est la source de la vérité, le champ de nos observations et l’élément fondamental de notre savoir. J’estime en conséquence que le magnétisme doit être étudié plus qu’il ne l’a été jusqu’ici; que les hommes de science n’aient pas l’arrogance de nier ce qu’ils ne peuvent comprendre, et qu’ils en fassent l’objet de leurs recherches. Leur refus dédaigneux de s’en occuper a empêché cette partie de la physio-pathologiede s’élever au rang des sciences; ils l’ont laissée ton ber aux mains des charlatans. Cessez, messieurs, de vous en lamenter, car c’est votre faute. Emparez-vous du magnétisme, et vous aurez mis fin aux fraudes et aux abus, et ce qui n'est guère aujourd’hui qu’un spectacle de curiosité ou un moyen de fourberie, sera converti en une doctrine sérieuse, en un art utile à l’humanité.

« Je dois ajouter une considération sur la pratique du magnétisme dans le traitement des maladies. Dans l’ignorance où nous sommes de la manière dont s’exerce sa mystérieuse influence, on doit comprendre combien les médecins doivent mettre de prudence à la provoquer (du moins avec les connaissances bornées que nous possédons aujourd’hui). La maladie étant souvent mal connue, et le moyen de la combattre ne l’étant guère mieux, il est inutile d’insister sur la réserve qu’il est nécessaire d’apporter. En outre, on voit, d’après le fait qui m’est personnel et que j’ai rapporté, que si le magnétiseur manque d’habileté etd'expérience, il peut survenir des accidents graves, formidables, difficiles à combattre. Bien qu'en définitive, dans ce cas particulier, le résultat ait été heureux, puisqu’il y a eu guérison, cependant, d’après ce qui m’est arrivé depuis le 2 au soir jusqu’au matin du 3, j’ai le droit et le devoir de recommander aux médecins une extrême circonspection, sans quoi ils seraient exposés aux angoisses et aux anxiétés que causent les cas malheureux comme je l’ai

éprouvé; et finalement il n’est pas impossible que ce qui devrait être un instrument de salut, ne fasse qu'introduire un nouveau mal.

i Je ne cesserai donc d’inviter les médecins à cultiver cette branche d’étude, à acquérir la pratique du magnétisme, afin de se mettre en état d'employer tous les moyens qu'offre la nature pour faire le bien, à. s’épargner la honte d'être dépassés et confondus par des ignorants qui peut-être auront le tort de profiter de la crédulité publique, mais qui auront eu aussi le mérite de recueillir et de répandre une vérité que la science en robe a repoussée sans raison, a refusé d’examiner et laissée tomber dans les carrefours. »

A. Zambianchi.

Le journal Espero, de Turin, dans son numéro du 20 août, discute la relation qui précède et s’exprime sur le magnétisme de la manière la plus favorable et la plus sympathique. Tout en félicitant le docteur Zambianchi de son adhésion et du courage qu’il a eu de proclamer hautement sa reconnaissance pour le magnétisme, il lui reproche ses réticences et la manière dédaigneuse dont il parle de ceux qui, sans être reçus médecins, exercent le magnétisme. En effet, M. Zambianchi s’est trouvé fort heureux de trouver un de ces hommes pour le tirer d’embarras ; le docteur avait commis une grave imprudence en appliquant, dans un cas difficile, un instrument dont il ignorait la puissance et qu’il ne savait pas manier. Le magnétisme demande de l’étude et de l'expérience.

Nous reproduisons avec plaisir les réflexions par lesquelles termine le journaliste.

a Nous faisons des vœux pour l’union de la médecine et du magnétisme. La médecine a eu le grand tort jusqu’ici de se refuser à un sérieux examen et de contraindre le magnétisme à se jeter dans les bras de qui a voulu l'adopter. Il est temps de s’entendre et de mettre fin à cette inconcevable désunion. Il est tempsquela science cesse de dédaigner les bommes de bonne volonté qui s’occupent d’étudesutiles, et ne les con-

fonde plus avec les ignares sans valeur. Il est temps qu’au lieu de nier sans comprendre, on examine avec le concours des ma-gnétistes expérimentés les faits magnétiques, qu’on pose le problème et qu’on donne les moyens de le résoudre. »

CAUSERIES MAGNÉTIQUES.

ONZIÈME CAUSERIE.

Patience et persévérance.

{Suite.)

Je ne crois pas que l’on ait encore poussé jusqu’au bout les faits de la puissance magnétique et constaté par conséquent ce qui résulterait d’une action à outrance ou extrême.

11 y a dans le magnétisme deux phénomènes différents et dans leurs formes et dans leurs résultats ; ils sont aussi fréquents l’un que l’autre, et naissent des mêmes procédés.

D’un côté vous voyez se développer sur quelques, magnétisés , une sensibilité extrême; les membres inférieurs se choquent l’un contre l’autre avec une grande violence, le corps tout entier est soulevé en l’air par des convulsions, la respiration est haletante, précipitée ; la sueur couvre toute la surface du corps, les yeux deviennent brillants et semblent lancer des flammes, le cœur bat à rompre son enveloppe: on s’arrête, sans doute, à la vue de ces phénomènes, la peur saisit celui qui expérimente; mais si l’on continuait, qu’arriverait-il ? Nul, je crois, n'en sait rien encore.

D’un autre côté, on aperçoit une disposition au sommeil qui ne fait qu’augmenter graduellement, par la continuation du magnétisme, la sensibilité s’éteint par degrés, le corps est entraîné par son propre poids, jusqu’à ce qu'il ait

trouvé une surface pour point d’appui ; sa pesanteur et son abandon sont ceux du cadavre, le cœur cesse de battre la chaleur s’en va, la respiration est à peine sensible, la peau se décolore, plus de sensibilité nulle part, plus de parole, le magnétiseur même semble ne point être entendu.

En poussant plus avant cette magnétisation, quelque chose de nouveau et de grave apparaîtrait sans doute, mais je ne sache pas que l’on ait osé aller plus avant et tenter l’aventure. L'état de sommeil est déjà difficile à faire cesser, il faut du temps, beaucoup de temps pour arriver à replacer le magnétisé dans sa situation première, et l’effroi que l’on éprouve Ote l’envie d’aller plus loin.

Dans d’autres, cas plus rares, on ne voit point de sommeil ; l’état convulsif ne se montres pas, le corps-se roidit seulement et la chair acquiert la dureté du bois ou de la pierre. Quand on veut lever et faire marcher le magnétisé qui conserve pourtant toute sa connaissance, on ne peut obtenir la flexion de ses membres, on le lève forcément tout d’une pièce. Si vous voulez le tenir debout vous êtes obligé de l'appuyer contre vous ou contre une muraille, et il reste dans cette position, comme une momie dans sa boite, sans pouvoir faire un geste et sans qu’il accuse de souffrance. Si voys le pincez, il ne sent point, si vous le frappez, c'est la même impassibilité; il voit, il entend, il juge la situation extraordinaire où. il se trouve, mais il ne peut en sortir par sa propre volonté, celle-ci est enchaînée, les murailles de l’âme se sont durcies et les fluides qui lui sont soumis ne semblent point y arriver.

Qu’est-ce que ce phénomène et que signifie-t-il? où s'arrêterait son développement si l'on continuait la magnétisation? Nul n’en sait rien encore, mais il est très-probable que la circulation serait bientôt complètement éteinte et que des modifications profondes auraient lieu dans le jeu des organes essentiels à la vie. Que deviendrait celle-ci? Je l’ignore.

J’ai vu le sommeil se prolonger, avec la même intensité, pendant plus de quarante heures, pourtant on ne magnéti-

sait plus, on cherchait au contraire à démagnétiser, mais on n’apercevait aucun effet qui pût faire soupçonner que la démagnétisation était efficace, le sommeil cessait de lui-même.

J’ai vu durer pendant plusieurs jours, en s’affaiblissant pourtant par degrés, un état de surexcitation extrême du système nerveux causé par la magnétisation : quelquefois un ébranlement sourd de ce même système, mais sans trop d’apparence, devenir presque habituel, comme si les magnétisés avaient toujours joui d'un excès de vitalité qu’on avait voulu seulement produire pour un instant. •

Je ne sache pas qu’aucun accident grave soit jamais arrivé, du moins on ne l’a pas publié, on ne l’a pas dit. Sans doute on a vu des insomnies survenir à la suite de ces excitations, quelques petits accès de fièvre nerveuse, des envies de pleurer, des pleurs même. Chez les femmes on voit quelquefois naître le besoin irrésistible de déchirer ce qui est à la portée de leur main, de griffer les gens; le magnétiseur est ordinairement la victime de ces enfantillages ; mais, je le répète, entre mes mains, jamais il ne s’est produit un fait regrettable; je l’avouerais s’il en eût été autrement, car on doit toute la vérité à la science.

Peut-être encore est-on loin de connaître tous les effets de cet agent nouveau ; quelque variété de phénomènes singuliers peuvent se montrer; il est des êtres qui ont des propriétés que d’autres n’ont pas, leur magnétisme injecte le trouble et l’inquiétude, mais ceux-ci sont en petit nombre. On ne sait si cette disposition vient de leur constitution ou vient de leur pensée : ce sont ceux-ci qui nuisent à, vos démonstrations, qui’empêchent le succès ; lorsqu’ils se trouvent placés près de vos magnétisés, tout vient à rebours, vous ne pouvez que très-imparfaitement déterminer la production d'un fait vulgaire, les magnétisés sont mal à l’aise, ils se tournent en tous sens, semblent chercher le point de départ de ce nouveau fluide, très-souvent même ils découvrent la per-s:nne qui les détraque et les empoisonne.

J’ai connu un homme qui jouissait d’une singulière pro-

priété, jamais il ne put conserver une montre marchant bien plus d’un jour, si bien que depuis longtemps, il avait cessé d’en porter une, ayant reconnu son inutilité; toutes les fois qu’il avait renouvelé son expérience, il avait acquis une certitude nouvelle de cette singularité. D’où venait la mauvaise influence exercée sur le métal? De son corps sans nul doute. Chaque être a des propriétés qui lui sont propres; en rechercher les causes serait chose difficile et nul n’oserait le tenter.

Les vignerons ne laissent point approcher de leur cuvée des femmes ayant leurs régies ; ce que nous appelons matière a des sympathies et des antipathies que l’on ne connaît point; les plantes, soumises aux soins de tel horticulteur, sont vigoureuses ou malingres.

Mais si vous voulez juger des influences que les corps humains exercent les uns sur les autres, placez-vous près d'un somnambule, vous constaterez qu’à chaque approche d’un être près de lui, un sentiment bien^différent se manifestera et de là souvent le succès ou l’insuccès de la consultation.

Médecins, faites donc des livres sur les tempéraments, sur l’hygiène pour les humains!... Vous me faites rire; tenez... Voilà un terrain humide et marécageux, l’argile y domine ;... voici un terrain sec, brûlant, et qui abesoin d’eau;... en voilà un qui se boise avant le temps ;... en voilà un autre qui n’a point en lui la sève nécessaire;... là il y a trop de germe, ailleurs pas assez... Dans quelque temps et tout naturellement le sec peut devenir humide , le chaud sera froid. Qu’y pouvez-vous faire?... Empêchez donc ces coups de soleil qui ont lieu sur la face, ces rougeurs soudaines attribuées au sang ? Voilà un grand estomac placé dans un petit corps, il digérerait le fer;... en voici un autre qui parait inerte et ne sent pas les aliments;..-, voilà la soif qui naît, l’eau ne manque point pourtant, car on voit ceci chez les hydropiques, et, vous le savez trop, vos médicaments et vos régimes guérissent bien rarement de cette maladie. Vous avez trop de sang,dites-vous àcelui-ci,... vous en

tirez quelques palettes, l’individu languit ou meurt;... il n’avait pas trop de ce fluide, seulement ce qui devait Cire eu bas était en iiaut, et vous n’avez pas su le faire descendre. Eli bien ! il en est de même pour beaucoup d’autres humeurs; elles ne sont en trop, dans certains organes, que par acci- | dent, par déviation dans leurs cours, et quels sont vos outils pour agir dans cette occurrence? Pouvez-vous, comme l'horloger, démonter chaque pièce, nettoyer le rouage de la mécanique humaine, mettre de l'huile,... vous ignorez où est le grand ressort, celui qui fait mouvoir l’horloge ; et quand, vous voulez toucher à cette machine, conduit par ce que vous croyez être des vérités, de sûres connaissances, vous me faites frémir,... j’ai peur pour les insensés qui s’en rapportent à votre savoir.

Vous parlez toujours des nerfs comme si vous les connaissiez, comme s'ils étaient votre ouvrage. Sans cesse on vous entend répéter : Ce sont les nerfs,... c’est une névralgie, une affection nerveuse;... toujours, à chaque instant les nerfs, vous ne sortez point de là. Ici du moins on constate votre bonne foi, vous avouez que vous ne sauriez guérir ces affections arrivées à un certain degré. Souvent, pourtant, on pourrait croire, en vous entendant, que vous pouvez faire chez nous la pluie et te beau temps. Oui, vous produisez le calme ouïes agitations; maisavecquoi, grand Dieu!... avec des poisons, avec ce qui tue, si votre vue trop courte n’a pas mesuré les gouttes.

Tout est utile dans la nature, tout est efficace ou nuisible. On peut guérir par des moyens contraires, le tout est de trouver. Bien différent de vous, le somnambule lucide voit ou devine, je ne sais pas au juste ce qui se passe en lui ; ce qu'il indique est souvent efficace ; mais éveillé, serait-il médecin, toutes ses connaissances ne lui serviraient point; ce qui parle en lui ne vient pas de l’école, et si vous voulez le connaître, reconstruisez les anciens temples, ceux qui du temps d’Esculape existaient encore, et que votre fausse sagesse à détruits; peut-être alors pourrez-vous surprendre la nature sur le fait de ces opérations, apprendre ce qui en nous se

révèle sans travail, ce qui vient par inspiration. Oui, plus vous ôtes savants, plus vous m’inspirez de crainte, plus vous me remplissez d’effroi ; les plus éclairés d’entre vous, les plus clignes et les plus honnêtes furent ceux-là même qui écrivirent contre l’art qu'ils professaient, et déclaraient, hautement, que tout dans la médecine n’était que conjectures, et, tout bas, que la médecine n’existait pas. Baron Du Potet.

( La suite au prochain numéro. )

TRIBUNAUX.

ACQUITTEMENT DU» SOMNAMBULE.

Dernièrement ont comparu devant le tribunal de police correctionnelle de Paris (8e chambre), M. Robert, magnétiseur et M. Charavet, somnambule : tous deux avaient formé opposition à un jugement par défaut qui avait confirmé mie sentence de simple police, par laquelle ils avaient été condamnés à 15 fr. d’amende pour avoir fait métier de deviner et pronostiquer. Me Lachaud, leur défenseur, tout en repoussant, au nom de ses clients, l’imputation qui leur était faite, a noblement soutenu la cause du magnétisme et a hautement déclaré que les deux prévenus en faisaient journellement l’application au traitement des maladies. « Ces deux jeunes gens (a-t-il dit) ont consacré et consacrent encore leur vie à étudier honnêtement et à chercher laborieusement les résultats que l’on peut obtenir d’une science merveilleuse qu’on appelle le magnétisme. Cependant le jugement dont nous demandons l'information, les a assimilés à ces jongleurs, ces charlatans, ces tireurs de cartes, que l’on rencontre dans les foires publiques, et pour lesquels la justice a un tel dédain, qu’elle ne les atteint que de peines de simple police. MM. Cha-ravet et Robert ont plus d’amour-propre que cela. Ils ne

veulent pas qu’on ait une pareille opinion de la science qu’ils étudient. — On leur reproche d’avoir pronostiqué l'avenir Je cherche vainement les preuves de ce fait : je n’en vois de traces nulle part. J’ai bien vu dans le dossier un rapport constatant qu’ils ont donné des séances magnétiques, des consultations médicales, qu’ils ont guéri même des malades. Mais ces faits ne constitueraient pas une contravention du genre de celle pour laquelle nous avons été traduits et condamnés. — Mes clients ne veulent pas être condamnés pour la contravention. S’ils avaient commis un délit, ils ne demanderaient pas mieux que de se défendre. Jusque-là, permettez-moi de vous dire que ce sont de très-honnêtes jeunes gens, munis de nombreuses attestations qui prouvent que ce ne sont pas des charlatans ni les premiers venus. 11 faut d’abord que vous sachiez dans quelles circonstances ils ont dû se livrer au magnétisme : M. Charavet a le malheur, ou le bonheur, ou le tort, comme vous voudrez, d’être somnambule et d'être doué d’une lucidité remarquable. Son sommeil magnétique est si bien connu de tous les habitants de la commune où il est né, qu’il lui a servi d’exemption lorsque, comme conscrit, en 1852, il est passé devant le conseil de révision. »

Le défenseur, après avoir lu un grand nombre de certificats qui constatent que Charavet est atteint de la pénible maladie du somnambulisme, qu’il a été traité par les médecins comme'cataleptique, termine ainsi: «C’en est assez, messieurs, pour vous montrer que mes clients ne sont pas des charlatans. Ce sont deux hommes qui, loin de tromper, cherchent à s’éclairer sur une science vers laquelle aujourd’hui semble attirée l’attention des hommes les plus considérables et les plus éclairés de notre époque... Vous savez maintenant comment les deux jeunes gens assis devant vous ont été amenés, à la suite d'une étrange découverte, à s’occuper du magnétisme et de quelle manière ils s’en sont occupés, c’est-à-dire en gens du monde et en hommes convaincus. Ils ont traversé, en quittant leur pays, plusieurs villes du Midi, et jamais on n'a songé à les tourmenter, et cependant grand est

le nombre des malades qu’ils ont soignés et guéris. J’en ai là jes attestations plein mon dossier.... Voilà ce qu’ont fait les prévenus. Ils ont quitté leur pays, enseignant, prêchant le ¡magnétisme, soignant, guérissant les malades qui s’adressaient à euv, et recueillant de tous les preuves d’une grande reconnaissance et d’un sincère dévouement. Qu’on les poursuive, si on croit en avoir le droit, pour exercice illégal de la médecine, soit, ils le préfèrent ; ils aiment cent fois mieux le maximum de la peine pour le délit qui ne leur est pas repro-dié, que le minimum pour la contravention qu’on leur impute. Si on les poursuivait pour le délit, je me réserve le droit de les défendre, et j’espère démontrer au tribunal que la loi ne peut en aucun point de vue les atteindre, mais aujourd’hui là n’est pas la question.... d

M. le Président interrompant le défenseur, a déclaré la cause entendue. M. le substitut n’a pas cru qu’il y eût contravention et a conclu au renvoi des prévenus. Le tribunal, attendu que la contravention reprochée aux prévenus n’est nullement établie, les a renvoyés des fins de la plainte, sans dépens.

Nous félicitons M' Lachaud du succès de son éloquence ; on doit lui savoir gré de la manière favorable et sympathique dont il a parlé du magnétisme devant un tribunal. C’est en cela que consiste à nos yeux le principal intérêt de cette affaire. Car, il ne faut pas se le dissimuler, il n’a été résolu aucun point de doctrine dont puisse se prévaloir le magnétisme ou le somnambulisme. Que le principal accusé ait été somnambule naturel et cataleptique, cette circonstance ne pouvait avoir aux yeux des juges l’importance qu’y attachait le défenseur ; car cette infirmité n’implique nullement la faculté d’être mis artificiellement en somnambulisme à la volonté d’un magnétiseur et chaque fois qu’il se présente un consultant ; à plus forte raison n’implique-t-elle pas la lucidité. Elle ne pouvait donc servir à justifier Charavet, ni changer la nature des faits qui lui étaient imputés. Il résulte des débats que les poursuites ont été intentées un peu à la légère, puisqu’on a reproché aux prévenus d’avoir deviné et pronos-

tiqué, ce qui n'a nullement été prouvé, et qu’on ne les a pas accusés d’avoir donné des consultations à des malades, ce qu’il eût été facile de prouver contre eux, d’après leur défenseur qui leur en fait un mérite et un titre à la reconnaissance publique.

L’accusation ayant fait fausse route, les prévenus ont dû être acquittés. Mais personne ne peut préjuger ce qui serait arrivé s’ils eussent été accusés d'exercice illégal de la médecine. Les lois actuelles, comme on sait, garantissent le privilège des médecins diplômés, et chaque fois qu’un individu non pourvu d’un titre officiel est judiciairement convaincu d’avoir donné des consultations à des malades, il est inévitablement condamné, quels que soient sa moralité, ses bonnes intentions, les succès obtenus, les services rendus .à l’humanité.

11 est fâcheux qu’on ne soumette pas à une révision des lois faites à une époque où le magnétisme et le somnambulisme étaient inconnus, et qu’on laisse subsister des dispositions législatives qui permettent de poursuivre et condamner même les hommes les plus utiles, comme l’a été, le vénérable Laforgue. Les poursuites sont rares, il est vrai, et l’on doit savoir gré à l’autorité de sa tolérance. Mais de temps en temps la foudre qui sommeillait éclate sans qu’aucun symptôme ait fait pressentir l’orage, et vient frapper quelque praticien ; c’est une épée de Damoclès suspendue sur la têle de tous; de sorte que les somnambules et les magnétiseurs qui s’occupent habituellement de traiter des malades, sont chaque jour exposés à être traduits en police correctionnelle et à être traités de la manière la plus outrageante. Le plus souvent on ignore quelles circonstances appellent sur quelques personnes la sévérité du ministère public, tandis que des centaines d’autres, dont la position est semblable ou même moins favorable, ne soni point inquiétés. Nous demandons qu’on mette fin à cette situation précaire, qu’on définisse nettement ce qui est permis et ce qui ne l’est pas, que l’on concilie par un sage règlement le soin de la santé publique avec les droits de la science et les intérêts du progrès. A. S. Mobin.

FAITS ET EXPÉRIENCES.

GUÉRISON SPIRITüAÜSTE.

« Nous sommes informé, par un frère méthodiste, très-digne de foi, queM. S. deWiliamsburgli, qui fait partie, ainsi que sa femme, de l’Eglise méthodiste, a souffert longtemps de calculs dans la vessie, et a employé sans succès tous les remèdes connus en médecine. 11 devint très-faible, très-abattu, et dans une de ses crises de violente douleur, il s’écria, devant sa famille : Comment donc pourrai-je être soulagé?... Au même instant, sa femme fut influencée et excitée à écrire : se trouvantdans un état où elle n’avait qu’à moitié conscience de ce qu’elle faisait, elle écrivit une prescription (comme on le sut ensuite), et indiqua la manière de préparer et d’administrer le médicament. Ce fait était tout nouveau pour la famille ; on ne savait quelle cause avait déterminé la femme à écrire. Le malade déclara qu’il voulait faire l’essai de cette médication. Ses parents objectèrent la nécessité de s’assurer que les substances prescrites n’étaient pas des poisons; en conséquence, on consulta un médecin et un pharmacien qui déclarèrent que c’étaient des remèdes employés en médecine, mais le docteur ajouta qu'il ne voulait pas, pour le cas particulier, prendre la responsabilité de la prescription de ce médicament. Que le malade, dit-il, prenne, s’il veut, la responsabilité de son essai. C’est ce que fit le malade ; pendant plusieurs jours, ses souffrances ne firent que s’accroître. Mais la femme, obéissant à la même influence qui l’avait fait écrire, dit qu’il ne fallait pas s’alarmer, mais continuer l’emploi du remède indiqué. On suivit cet avis, et dans l’espace de dix jours, le

malade rendit plusieurs calculs, dont quelques-uns fort volumineux ; à la suite de quoi, il se trouva immédiatement soulagé, et, peu après, sa guérison fut complète.

« Ces personnes n’étaient point spirilualistes, et la femme n’avait jamais été influencée auparavant ; ni elle, ni son mari ne savaient ce que c’était que les influences des esprits; le malade ne se décida à essayer le remède qu’à cause de l’excès de ses souffrances, et en considération de la manière singulière dont il lui avait été prescrit. Depuis cet événement, ils ont appris que c’était aux esprits qu’ils devaient ces avis, et madame S. a été employée par les esprits à la guérison d’autres malades.

« M. et madame S. sont restés attachés à l’Eglise méthodiste, et n’avouent qu’avec beaucoup de réserve leur adhésion au spiritualisme. »

(Spiritual Telegraph du 17 juillet.)

Baron du POTET, propriétaire-gérant.

CAUSERIES MAGNÉTIQUES.

DOUZIÈME CAUSERIE.

Patience et persévérance.

[Suite.)

Il est des êtres qui, placés près de vous, vous soutirent, vous pompent, vous absorbent vos forces et votre vie, espèces de vampires, sans le savoir, ils vivent à vos dépens. Placés près d'eux , dans leur sphère d’activité, ou éprouve un malaise, une gêne qui vient de leur action malfaisante et qui détermine en vous un sentiment indéfinissable ; vous éprouvez le besoin de la fuir et de vous éloigner, mais ces gens-là ont une tendance contraire, ils se rapprochent de vous de plus en plus, vous serrent de près, se soudent à vous comme les poissons se collent sur d’autres poissons pour leur soutirer ce qu’il leur faut pour vivre. Certains hommes, certaines femmes sont malheureusement ainsi organisés; lorsque leurs victimes n’ont pas assez de vie pour deux, vous les voyez dépérir à vue d’œil, et leur langueur ne cesse que par la mort ou l’éloignement. J’ai vu plusieurs exemples frappants du fait que je décris et j’ai connu des veufs et des veuves qui, involontairement sans doute, avaient brisé leurs chaînes avant le temps.

D’autres, au contraire, portent avec eux la vie et la santé. Partout où ils se montrent et séjournent un instant, la joie se montre et éclate, on se trouve bien de leur voisinage ; leur conversation plaît, on la recherche, on aime à leur prendre la main, à s’appuyer sur leurs bras ; leur rayonnement a quelque chose de balsamique qui vous charme et vous magnétise en dehors môme de la volonté. On adopte facilement leur

Tous xvii. — no. 43. — “• Série. — 25'Seplembre 1858. 17

manière de voir, leurs opinions sans savoir trop pourquoi, et c'est avec regret que toujours on les voit s’éloigner.

L'ennui nous gagne bien vite où il n’y a point de vie ; on fuit certaines familles, honorables pourtant, non parce qu’on n’y rencontre pointles qualités du cœur, mais parce qu’il manque à leur foyer ce rayonnement magnétique qui fond la glace et qui seul soude les êtres les uns aux autres. Cette personne me déplaît, entendez-vous dire à chaque instant, et si vous demandiez pourquoi, 01111e saurait vous répondre. Heureux donc sont ceux qui ont une organisation privilégiée, ils réussissent presque toujours dans le monde et souvent même leurs fautes et leurs méfaits leur sont facilement pardonnés ; tandis que l’on hait et que l’on poursuit à toute outrance des malheureux qui n’ont que peu de fautes à se reprocher, et devant la justice même, ceux-ci n’ont pas beau jeu.

Depuis que cet être est dans la maison , nous n’éprouvons que des malheurs , que des pertes et des chagrins! Que de fois n’ai-je pas entendu ces mots si durs et si cruels !

Un grand empereur s’informait toujours, avant de confier une mission importante à un homme quelque distingué qu’il fût, s’il était heureux. On appelle superstition ces sentiments qui ne s’expliquent point, tandis qu’ils sont fondés sur une loi dénaturé, tandis qu’ils ont leur fondement certain en nous-mêmes. Mais ces opérations de l’âme sont couvertes d’un voile ■épais, nous les devinons sans pouvoir les expliquer.

N’est-il pas des hommes qui gagnent souvent au jeu sans que l'on puisse les accuser de tricherie; ils vous entortillent, endorment vos facultés, attirent à eux les atouts, c’est en vain que la perte vous révolte et que vous essayez de lutter contre de tels adversaires, ils vous ruineront bel et bien , si vous n’agissez point sur eux par votre regard et par un rayonnement de votre être qui égalise au moins les forces et modifie les dispositions. 11 n’est pas même indifférent de jouer petit jeu ou gros jeu pour que les chances soient égales, celui en qui la crainte va opérer un rétrécissement des facultés est certain de perdre.

Les duels sontdans le même cas : à habileté, à force égale

Tousserez défait ou tué si vous n'avez point en vous cette force occulte qui, comme un bouclier, vous couvre de toutes parts. Cette puissance invisible peut être projetée au loin, et alors elle remplit de crainte votre adversaire, elle détourne son arme et vous préserve, vous qui êtes souvent l’olTenseur et le seul coupable.

Combien d’amoureux déçus, de désenchantements cruels! On accuse le sort, on maudit sa destinée , 011 a obéi sans le savoir à la fascination, 011 s’est laissé séduire. Hélas ! ici la morale est impuissante, les conseils inutiles ; c’est moins chez nous un défaut de raison qui nous a fait succomber qu’une action occulte exercée sur nous par un être qui presque toujours ignore son fatal don, sa malheureuse puissance.

11 est encore des gens qui vous entraînent au mal comme au bien; avec eux vous ne raisonnez point, vous les suivez, la réflexion ne survient qu’après que le coup est fait, ou le bien accompli. Le principe est le même malgré la différence des résultats.

Etces marchands heureux qui, bon gré malgré, vous vendent cher leurs mauvaises marchandises..., revenu de votre étonnement d’avoir payé si cher ce que vous ne vouliez pas d’abord acheter, vous vous mordez les lèvres, vous maugréez contre le vendeur, tandis que celui-ci se frotte les mains, rit dans sa barbe, sachant très-bien que vous avez été sa dupe, mais son ignorance l’empêche pourtant de comprendre comment vous vous êtes laissé prendre à ses paroles, car souvent ce sont des sots, des bêtes qui attrapent les gens d’esprit.

Pauvres humains, dépétrez-vous si vous pouvez des liens qui vous enchaînent et que vos yeux ne peuvent voir, n’accusez point Dieu, mais votre ignorance seulement ; les savants de nos jours sont aussi sots que vous sur ces matières et n’ont pu vous rien apprendre des merveilleuses puissances de la nature et de l’homme. Oui, les écoles officielles sont au suprême degré ignorantes de toutes les choses occultes, elles ne s’attachent qu’à la lettre et à la matière, à ce qui est grossier, et de là des désordres moraux dont la cause échappe , de là ces impuissants remèdes. Voyez-là cette fausse science

rejeter ce magnétisme humain qui répand une si vive lumière sur les causes qui nous font mouvoir ; sur le mécanisme et l'origine môme de nos pensées. Elle devrait aller jusqu’à prévoir, cette science que nous combattons, à peine reconnaît-elle maintenant les faits accomplis.

Ah! si j’entrais dans le domaine des épidémies morales; si je signalais les causes véritables des croyances qui se sont établies sur la terre ; si j’entrais dans le domaine des épidémies de maladies, dans ces transmissions occultes des maux ! L’ignorance des savants, ainsi que celle des médecins, vous paraîtrait trop manifeste ; mais je rabaisse volontairement le voile levé un instant, car ma propre vue se trouble. Vivez , soyez heureux si vous le pouvez et en vous disant éclairez-vous , nous savons très-bien que nous parlons à des sourds. D’autres plus habiles que moi sauront un jour mettre en évidence ce qui est caché et obscur encore ; on aura alors des philosophes, des médecins et des prêtres instruits, mais aujourd’hui... que Dieu vous protège contre l’ignorance de vos faux sages, regardez seulement comme ils trébuchent à chaque pas, et, pour éviter de faire les mômes chutes , suivez d’autres sentiers.

Baron du Poxex.

[La suite au prochain numéro.)

CLINIQUE.

Jersey, 19 août.

Monsieur le baron,

Tout en vous annonçant ma prochaine arrivée, permettez-moi de vous parler de mes exploits magnétiques. Ce que j'appelle exploits est sans doute chose familière à tous les magnétiseurs, pour moi, je suis novice dans la science, et tous mes pas sont une suite d’enchantements. Combien je regrette d’avoir méconnu jusqu’à ce jour une si admirable vérité ! Je voudrais regagner le temps perdu, mais j’avance bien lentement à mon gré ; l’impatience me saisit et voilà le secret de la visite annoncée.

Il y a environ six mois seulement que mon attention ayant été de nouveau éveillée sur les faits de magnétisme, je me mis à l’essai pour savoir ce que j’en devais penser et asseoir mon jugement sur cette science. Mon heureuse disposition d’esprit fut récompensée ; le premier sujet sur lequel j’expérimentai tomba en somnambulisme dès la première séance. J'eus donc une somnambule (c’était une femme), et j’ai pu constater par la suite qu’elle était des plus clairvoyantes. Hasard ou faveur, j’en souhaite autant à tous les incrédules , mais chercheurs consciencieux de la vérité, Ce sujet a singulièrement facilité mes premiers pas dans la science ; c’est sur lui, endormi ou éveillé, que j’ai essayé et réussi à obtenir, à mon entière satisfaction, la catalepsie partielle ou totale , l’insensibilité , etc., toutes choses que je détruisais et rétablissais à mon gré, ainsi que le sommeil que je pouvais produire , quelque fût d’ailleurs la distance qui nous séparât.

Je vous ai parlé de sa clairvoyance : malade depuis longtemps, souffrante de la poitrine sans qu’aucun médecin eût pu en connaître la cause ni amener de soulagement, cette personne dut d’abord en faire usage pour sa propre santé.

'Dès la seconde magnétisation, clic demanda impérieusement le singulier et violent remède dont voici la composition : Quatre sous tl'esprit de vin brouillé avec de la gelée. Je lus averti qu'à la suite de l’ingestion de ce .mélange, elle demeurerait pendant dix minutes comme privée de connaissance et sans parole; qu'elle ne pourrait même en aucune façon témoigner qu’elle continuait à être en rapport avec moi. J’avais déjà quelques preuves de sa clairvoyance, et sans bien songer à la gravité de la situation, en présence de laquelle j'allais me trouver, je me décidais légèrement, je l’avoue, à remplir ses prescriptions. Le fatal moment arriva, et, à mesure que sa figure pâlissait, j’oubliais la recommandation qui m’avait été faite, surtout de ne pas avoir peur; une sorte de frisson me saisit, je regrettais vivement de m’être laissé circonvenir; j’avais entendu dire que les somnambules ne sont pas toujours lucides, je tremblais que, pour cette fois, sa clairvoyance n’eût été en défaut ; les dix minutes annoncées me paraissaient d’une longueur désespérante ; mon impatience, mon anxiété, m’empêchèrent d’attendre qu’elles fussent écoulées pour la questionner, j’y revins à plusieurs reprises toujours inutilement... Enfin le temps expiré, elle parla.—a Combien j’ai souffert 1 Ah ! j'avais là un vilain et bien méchant ennemi ; qu’il m’a fait souffrir 1 mais, Dieu soit loué, je suisguérie. — Qu’aviez-vous donc?—J’avais un tænia qui me rongeait le l'oie, maintenant il est mort, et je le rendrai demain, à onze heures ; je vous le répète, je suis guérie... et pour preuve, elle se leva, marcha dans la chambre, et manifesta le désir de rentrer chez elle... Tout était un sujet d'étonnement pour moi, et les personnes qui avaient assisté à cette scène; je les engageai, autant pour faire bien constater le fait que pouracbe-ver de les convaincre, à revenir le lendemain , à l’heure annoncée, et, après avoir pris les précautions nécessaires pour n’être point abusés , nous fûmes assurés que tout se passait comme il avait été dit. A dater de ce jour, la somnambule s’est très-bien portée, elle n’a plus rien accusé de ses souffrances. .

Le bruit de cette guérison se répandit et m’amena un jeune homme qui, depuis six mois, était entre les mains des mé e cins, et au bout de ce temps, sans espoir d’amélioration ; i

avait une tumeur au côté droit qui , se développant, menaçait de paralyser tout ce côté, il a eu à se louer d’avoir réclamé l’intervention du magnétisme , il se porte aujourd’hui le mieux du monde.

Une autre personne, souffrante de la poitrine depuis longtemps déjà, conservant à peine l'espoir presque le désir de vivre, s'est vu soulagée au bout de peu de temps et entièrement guérie dans l’espace de deux mois.

Enfin, monsieur le baron , émerveillé de tout ce dont j’étais témoin, je demandais un jour à la somnambule si elle ne pourrait point me donner des nouvelles de mon frère qui était à Montévideo, et j’obtins plus que je n’avais demandé. Après avoir donné son signalement, parlé de scs occupations, elle m’annonça que j’aurai une de ses lettres et son portrait dans huit jours, et, huit jours après, le navire qui m’apportait les souvenirs de mon frère était à Cherbourg.

Cette somnambule a bien aussi, comme toutes sans doute, un petit trésor en perspective. Elle m’en a fait connaître un; s’il était facile à prendre encore? Mais il faut de l’argent d’abord. Ma foi, un tiens vaut mieux que deux tu l'auras ; de peur de désillusion, je tiens l’indication pour non avenue.

Veuillez agréer, monsieur le baron, le désir que j’ai de vous appeler mon maître, et mes salutations respectueuses.

Mauger.

Il nous arrive rarement de faire un emprunt à la Revue de notre ami, M. Jos. Barthet, le spiritualisme étant pour lui le fait capital, comme pour nous l’est le magnétisme ; nous attachons sans doute la même valeur à ces deux ordres dç ph$’ nomènes, mais nous laissons de côté une grande partie des faits qui n’ont point un trait direct avec notre spécialité. Le magnétisme et le spiritualisme se lient pourtant étroitement, mais, placés à la base de l’édifice nouveau, nous en soutenons les assises avec la persévérance que notre ■ami met à soutenir le spiritualisme comme l’entendent les Américains. Plus heureux que nous , M. Barthet peut atta-

quer et démasquer ses adversaires, ce qu’il fait d’ailleurs avec courage , protégé qu'il est par la liberté ; nous, nous nous défendons seulement, n’osant attaquer tant nous avons la crainte de nuire au développement de notre science dont le progrès, quoique lent, n’en est pas moins certain. Nous aurions dû recommander plus chaudement ce recueil, l’amitié nous en faisait un devoir, et pourtant nous l’avons rempli timidement; mais nous disons aujourd’hui, en lisant des journaux français sur ce sujet, c’est d’un autre continent que la la lumière vient, ici, Si on l’a, on la cache, la crainte en est Çeut-être le motif, car l’esprit ne manque pas. Dans quelques guérisons attribuées aux esprits , plusieurs peuvent s’expli-quernaturellementetle magnétisme estavoué; dans quelques autres, l’intervention des esprits ne fait que voiler son action. Nous recommandons la Revue de M. Barthet à tous ceux qui cherchent la vérité dite sans réticence.

Baron du Poxet.

Delphi, Indigna, 50 mors 1858.

« Messieurs,

Je crois remplir un devoir de conscience en vous faisant part de deux cures bien remarquables, obtenues en ma présence par un médium guérisseur. Je voudrais pouvoir vous donner tous les détails de ce que d’autres ont observé aussi bien que moi, mais je dois être bref.

Madame Nelly Tipple, médium guérisseur, vint de Chicago à, Lafayette en janvier dernier. Ce médium est le premier qu’il m’ait été donné d’avoir à ma portée depuis que je m’occupe de recherches sur le spiritualisme ; et comme j’exerce moi-même la profession de médecin, et que je doutais de la réalité des cures spontanées et nombreuses que les journaux spiritualistes rapportaient comme ayant été produites par cette dame, je dus saisir l’occasion pour me livrer à un examen tout particulier de la question. J’avais en réserve, pour les puissances invisibles, un cas de maladie bien propre , selon moi, à paralyser leur zèle dès la première vue-Madame Tipple se rendit à mon appel. Mais, avant d’aller plus loin, voici en peu de mots quel était le cas :

Madame G..., mère de trois enfants (elle en avait perd» trois autres nés avant ternie) était sujette à des crises épileptiques depuis neuf ans, depuis quelques semaines après la naissance do l’aîné de ses enfants. Jusqu’à l’époque de sa dernière maladie, jamais il ne s’écoula trois mois sans qu’elle eût des crises, et plus d’une fois elle s’était vue forcée de garder le lit pendant tout le cours de la grossesse, en proie à des attaques qui se renouvelaient souvent de dix à douze fois par jour, sans avoir jamais un répit de plus de trois jours. Elle était allée de ville en ville, offrant dans sa personne , à plusieurs de nos praticiens les plus distingués, un sujet dont la guérison eût été digne de leur savoir éminent ; elle avait ainsi épuisé sa fortune. Le professeur Gross , de I.ouisville , après lui avoir fait subir un long traitement, conclut à ce quelle s’abstint de toute médication quelconque, le mal étant incurable, mais le retour de l’âge pouvant la débarrasser de ses crises. En novembre dernier, les attaques se multiplièrent , ayant lieu tous les jours, ou plutôt ne cessant qu’un jour par semaine, et elles se répétaient de huit à dix fois par jour. Vers le premier janvier, elle fit une fausse couche, et il en résulta une inflammation de l’utérus, accompagnée d’une augmentation du pouls, avec perte d'appétit, amaigrissement rapide, sensibilité douloureuse vers l’épine dorsale, les reins et le foie, tous symptômes constatés par moi, de concert avec deux autres médecins; elle avait d'ailleurs trois ou quatre accès d’épilepsie par jour. Bref, on ne peut imaginer un cas plus désespéré. Pendant tout un mois d’efforts, j’épuisai toutes les ressources de mon savoir, aidé des conseils d’autres médecins, sans pouvoir soulager la malade. Le premier février, son état avait empiré, au lieu de s’améliorer. Je perdis toute confiance dans les moyens médicaux, après avoir eu recours aux vésicatoires, aux ventouses, au mercure, nos grands moyens hfroiqnes .-j’avais, en effet, épuisé toutes les ressources de la science allopathique.

Tel était donc le sujet que je soumis au médium et à ses esprits.

Le médium vint voir la malade le premier février, à! trois

heures de l’après-miili : celle-ci avait eu trois attaques dans la matinée de ce même jour. Je fus témoin de la première manipulation, qui eut l’effet d’un calmant ; la malade était incrédule, mais l’instint de la conservation la portait à essayer de n’importe quoi, (.’est d ailleurs une femme de beaucoup d’intelligence, et elle parut enchantée de l’effet produit. Le lendemain, je lui fis une visite, en compagnie du médium : elle n’avait pas eu de crise depuis vingt-quatre heures, le sommeil avait été bon, l’enflure avait beaucoup diminué. La malade fut encore magnétisée par le médium et s’endormit pendant la séance. J’ai oublié de dire que, depuis bien des semaines, elle ôtait en proie à l'insomnie. Dès le troisième jour, elle put se mettre sur son séant, se peigner elle-même et manger de bon appétit ; l’inflammation du bas-ventre, autant que je pus en juger, s’était entièrement dissipée. Le médium visita la malade huit jours et la magnétisa le même nombre de fois. Le jeudi de la semaine qui suivit l’époque de la première visite, madame G... partit pour se rendre chez ses parents du Michigan , emmenant ses enfants avec elle. En prenant le chemin de fer, elle était encore pâle et faible,, mais se sentait très-bien ; aujourd’hui, la santé et l'em-bompoint sont revenus. Quant aux crises, elles n’ont plus reparu depuis la première imposition des mains par le médium.

Si j’avais destiné cette lettre aux hommes de ma profession, j’aurais décrit minutieusement tous les symptômes de la maladie , ainsi que le traitement que j’avais suivi. Madame Tip-ple n’a prescrit aucun médicament, sauf une légère dose de potion stomachique et tonique, dans les derniers jours.

Une autre fois, je vous ferai part de ce qui est arrivé à propos de mon propre enfant dont la vie a été sauvée d’une, manière en apparence miraculeuse par madame Tipple (1)-

Je suis, etc. E. W. H. Beck, D. M.

Je certifie que ce qui vient d’être dit au sujet de ma femme est conforme à la vérité. T. C. Gruber. »

(1) Nous donnerons cette relation très-remarquable en effet dons un prochain numéro.

ÉVOCATION.

EXEMPLE D’UN FAIT DE PRÉVISION DU A DES ESPRITS.

Il est des vérités que l’on ne saurait trop répéter, quelque évidentes qu’elles soient, parce qu’elles sont facilement perdues de vue, et que leur oubli peut compromettre l’avenir de la science, quelquefois même le repos des individus. Le magnétisme n’est pas une science mathématique; il y a des erreurs assez fréquentes chez les somnambules ; les plus lucides peuvent avoir des moments d’éclipse. Ne croyez donc jamais aveuglément ; vérifiez si vous le pouvez, et agissez toujours dans le sens d’un sage éclectisme. C’est surtout aux débutants que j’adresse ces recommandations, aux débutants faciles à s’enthousiasmer, et qui, à leur tour, pourraient induire en erreur des inexpérimentés.

Mais c’est surtout à l’égard de la faculté de prévision que ces recommandations doivent être faites. Très-peu de somnambules peuvent s’y aventurer; et lorsqu'ils entrevoient quelques données, il ne faut pas y ajouter une foi aveugle; car une foule de circonstances, provoquées par l’exercice du libre arbitre de l’homme, peuvent les contrarier et dérouter le cours des événements annoncés. Cependant il est incontestable que ce don existe dans certains cas; on en possède des exemples trop frappants pour que le doute soit permis. Deleuze a recueilli, dans un curieux petit volume, les faits les plus saillants que présentent à ce sujet bien des auteurs. M. le docteur Brière de Boismont a cherché à compléter ces indications dans un chapitre de son Traité des Hallucinations. Celui qui a lu ces livres n’a plus aucun doute sur l’existence de cette faculté chez certains individus dans certains élats cataleptiques. Nous allons mettre en saillie

un nouveau fait négligé par ces auteurs, qui viendra grossir ce curieux inventaire. Il est emprunté à la lienw française (octobre et novembre 1838). M. le comte Beugnot, ancien ministre, est l’auteur de ce récit ; il fait partie de ses mémoires inédits, et porte le titre : Extrait (les Sourenirs de 5)3 et 9/|. La prédiction de l’aide de camp du comte d’Estaing, qu'on va lire, est beaucoup moins connue que celle du célèbre mystique Cazotte ; elle est cependant du même genre, elle est aussi curieuse par les résultats qui se sont confirmés; elle l est beaucoup pins par le récit de quelques préparatifs qui furent faits pour l’amener, et que l’on regrette de ne pas trouver plus explicites. Mais c’est là peut-être une de ces réserves, un de ses cas de discrétion si fréquents chez les alchimistes et les magnétiseurs, discrétion qui devrait être une loi plus générale pour leurs émules de ce temps.

Cédons la parole à M. le comte Beugnot :

«L’aide de camp du comte d’Estaing avait fait la campagne d’Amérique. Il était homme instruit et de manières polies et réservées. Nous nous réunissions tous les soirs avec lui et Lamarlière dans la chambre d’un nommé Bunel, conventionnel, mais tout à fait homme de bien qui, durant un assez long séjour dans l’Inde anglaise, avait recherché curieusement les premières traces des connaissances humaines. Nous faisions une partie de whist, et, s’il nous restait du temps de reste avant qu’on nous enfermât chacun dans notre cachot, la discussion s’établissait sur quelque point de métaphysique. Baillv ne manquait jamais de venir dans notre chambre à ce moment de la soirée, et se flattait d’y être exact, comme jadis à l'Académie. L’aide de camp avait pour refrain que ce que nous appelions le possible n’était qu'un arrêt de notre ignorance qui serait infailliblement cassé pour l’avenir. Il ne manquait pas d’exemples pour prouver que les bornes du possible avaient été fort reculées depuis Pythagore et Aristote. Il accusait la religion chrétienne d’avoir comprimé l’essor des esprits, et applaudissait franchement aux coups qu’on lui portait alors. Son système de religion était le panthéisme; il croyait à une quantité in-

nombiablc d’êtres animés qui ne tombaient pas sous nos sens, et tenait que l’homme était encore bien loin de la place qu’il pouvait occuper dans le grand ensemble. Bunel, qui ne voulait pas perdre, en pensant comme un autre, le temps qu’il avait mis à apprendre l’indou, ni le chemin qu’il avait fait pour visiter des pagodes, appuyait l’aide de camp, et nous citait des autorités que nous n’étions pas préparés à aller vérifier.

Le général restait fidèle à la philosophie de son ancien ami Voltaire; il avouait des progrès dans quelques sciences naturelles, moins importants qu'on ne voulait le faire croire, puisque rien n’avait été positivement imaginé, et qu’il est facile d'avancer dans des routes une fois ouvertes. Pour tout le reste, il ne voyait rien de si incertain que ce qu’il convenait à chaque siècle d’appeler la vérité ; il croyait que les idées humaines recevaient de chaque époque des formes différentes, mais qu’elles circulaient dans un cercle qu’elles ne pouvaient jamais franchir. Je me rappelle qu’il ajoutait : h Vous applaudissez, par exemple, messieurs, à la «•démarche de l’archevêque de Paris qui vient d’abjurer sa « religion au sein de la Convention et aux yeux de tout l’u-«nivers... Fort bien! nous touchons à la fin du dix-hui-« tième siècle, et il est très-probable qu’aucun de nous ne u verra le dix-neuvième ; mais je prédis qu’il ne se p.asBera « pas sans que les Français ou ceux qui habitent la France « voient des processions de capucins dans les rues de Paris, « et des membres de la Convention y assisteront, le chapelet « à la main, si on veut bien le leur permettre. » Bailly penchait pour le premier parti et pour la perfectibilité indélinie de l’espèce humaine. « L’orage qui gronde en ce moment, disait-il, ne prouve rien sans doute et fera tomber bien des feuilles de la forêt; il arrachera même quelques arbres ; mais

il emportera aussi de vieilles immondices, et le sol épuré peut donner des fruits inconnus jusqu’ici. » A la lin de l’une de ces conversations, le général I.amarlière demandai l’aide de camp : ,i Vous croyez donc à Mesmer, à Cagliostro et tutti « quanti ? — Sans doute, répond froidement l’aide-de-camp.

« — Je serais fort curieux de voir, avant de mourir, une re-

« présentation d’une scène de voyants ou de somnambule lismc. — Cela n’est pas facile ici, mais j'y ferai ce que je « pourrai. »

«Cet aide de camp qui, je le répète, avait de l’instruction et du sens, recueille avec beaucoup de sérieux et fait entrer à la Conciergerie, sous le couvert de chacun de nous, les instruments dont il a besoin pour préparer cette scène. Il n’y avait pas moyen d’introduire une voyante ; à la rigueur, on peut la remplacer par un jeune garçon, pourvu qu’il soit âgé seulement de douze à quatorze ans, qu’il soit né sous les signes du Sagittaire, ou des Gémeaux, ou de la Vierge, et surtout qu’il soit d’une pureté parfaite. On en trouve un ; mais, avant que de l’admettre, 1 évocateur prend du temps et a soin de s’assurer, par la représentation de son extrait de baptême, du jour où il est né, et de l’interroger sur ses faits et gestes. Il remplit les conditions du programme; le jour est indiqué, et l’évocateur étale.ses préparatifs dans le local où nous faisions la partie de whist, mesurant avec un compas les distances respectives de chaque pièce. L’appareil est religieusement préparé et l’enfant à genoux devant le globe de verre. « Général, dit l’évocateur, indiquez dans le passé « ou dans l’avenir, le fait que vous voulez connaître. —

i L’issue du jugement qui m'attend. — Général, faites « choix d’un autre sujet ; je serais au désespoir si la ré-« ponse était mauvaise. — Je persiste, et vous assure que, « quelle que soit la réponse, elle ne m'effrayera pas le moins « du monde. — Dans ce cas, je renonce à l’évocation, et a reprenons la partie. — Vous me la faites trop belle. Com-« ment? sitôt battu et même avant d’avoir commencé! Je « me doutais bien que tout ceci n’était que de l’enfantillage. « — Vous le voulez absolument, général?... Dans ce cas, « je commence :

« Après une demi-heure d'exercice assez violent, l’évoca-teur et le jeune homme suaient à grosses gouttes, et chacun des trois assistants, fatigué lui-même par l’attente et par les convulsions qu’il avait sous les yeux, éprouvait une insupportable oppression. Enfin l’eau se trouble visiblement pour tout

le monde; l’enfant s'écrie qu’il voit. 'iQuoi? Deux hommes qui se battent. —Qui sont-ils? — Je ne sais pas. —Qui sont-ils? > Je ne sais pas.—Qui sont-ils?—Et chaque question est flanquée d’évocations, de menaces et de cris. Enlin, l’enfant répond ; « Mon Dieu ! un garde national et un officier à clia-« peau brodé. — Qui est plus fort? Ah inon Dieu ! le garde « national étend l’officier par terre et lui coupe la tête ! » Et l’enfant tombe à la renverse....

« Nous étions consternés, et le pauvre général, esprit fort le momentd’auparavant, tremblait alors de tous ses membres. Nous nous efforçons de le rassurer: il n’y a rien de commun entre le jugement sur lequel il a interrogé et la lutte entre un garde national et un officier. Le moment de la retraite arrive, chacun reporte dans son cachot son épouvante et le regret d’avoir pris part à cette misérable scène ; elle s’était passée le 20 décembre. Le 21 au soir, le général reçut son acte d’accusation, fut condamné à mort le 23 et exécuté le même jour par le bourreau, alors habillé en grenadier de la garde nationale. — Je reste le seul témoin vivant, je pourrais cependant invoquer M. Bailleul, conventionnel, qui habitait à la Conciergerie le même bâtiment que nous. Il n’assista point à l’évocation, mais elle fit assez de bruit dans la prison pour qu’il en eût gardé la mémoire. Je doute que tout ceci ait été une scène de compères. L’aide de camp était un homme sérieux, trop honnête pour s’être permis une plaisanterie criminelle. Il n’avait eu le temps ni les moyens de styler cet enfant, qui avait été choisi sur cinq ou six autres. Enfin nous avions été sur le point de renoncer à l’entreprise dans la crainte qu’elle ne fût éventée et considérée par Robespierre comme une conspiration. Il y avait ici quelque prestige, sans nul doute ; où était-il ? Je ne le sais.

« Si quelqu’un me racontait cette scène d’évocation, je ne le croirais pas ; permis donc à ceux qui me liront, si par hasard quelqu’un me lit, de ne pas y croire. On devine qu’elle fut le sujet de très-grands commentaires entre gens qui n’avaient rien à faire de mieux, et nous n’arrivions jamais à une solution satisfaisante. S’il n’y avait rien de vrai dans tout cet

appareil d’évocations, c’était un tour qu’on avait joué à La-marlière; mais le coup ne pouvait partir que d’un ennemi, et le général n’avait autour de lui que les amis que donnait promptement un malheur commun ; et puis, quel horrible choix de sujet ! dans quel lieu ! pour quelle circonstance ! Jusque-là, point de probabilité qu’on ait voulu se jouer de quelqu’un. Ensuite le jeune homme était fils d’un guichetier de la porte de la rue, nommé Langlois. Tout ce qui revenait sur son compte le peignait dans l’état obligé pour son rôle, c’est-à-dire dans une innocence parfaite. Le père était présent et décidé à reprendre son fils, dans le cas où l’on eût exigé quelque chose d’indécent. Plus on avance, plus on voit augmenter le nombre embarrassant des complices de la supercherie, si on eu avait voulu faire une. Et, cependant, après cette scène à laquelle la mort de Lamarlière avait donné beaucoup de gravité, et malgré nos recherches, nous ne découvrions aucun indice de fraude. Une pareille scène se rencontre dans la fatale intrigue du collier. M11* de Latour y joue aussi le rôle de jeune innocente. Elle voit descendre l’archange Gabriel dans le globe rempli d’eau, et l’archange lui fait voir tout ce dont on avait besoin de persuader à l’avance au trop crédule cardinal.

« On conçoit à merveille que Cagliostro et compagnie aient pu arranger à leur aise cette mystification ; ils en avaient sous la main tous les moyens et en disposaient fort librement. J’excepte toutefois la parfaite innocence de M"' de Latour, que j’ai de bonnes raisons de suspecter ; à cela près, le succès était facile entre une bande de coquins qui s’entendaient à merveille, et ce pauvre cardinal qui croyait à tout, excepté au Dieu qui le nourrissait. Mais en 1793, à Paris, dans une prison, et quelle prison ! à la Conciergerie ; on ne peut raisonnablement rien supposer de pareil. Toutefois, je ne crois ni aux sortilèges, ni aux évocations, ni aux devins, ni même aux rose-croix. La scène que j’ai racontée tient à des causes toutes naturelles, peut-être même des plus simples. Je m’étonne seulement de n’avoir pu les découvrir. » L. Lamothe.

Nous extrayons la relation suivante d’une lettre que nous écrit M. Bégué, médecin à Toulouse:

« Je vous fais part d’un fait assez curieux, qui m’a été rap-pprté dernièrement. A certaines époques, les gens du village de Saussens voient, pendant la nuit, l’intérieur do leur église s’illuminer subitement et projeter au-dehors une clarté resplendissante ; en même temps ils entendent des voix murmurer des chants religieux, et il semble que ces murmures sont exhalés des profondeurs de l'église, (.e phénomène s’est reproduit déjà plusieurs fois cette année, et chacun a pu satisfaire sa curiosité, s’assurer du lait, sans en pouvoir deviner la cause, car, au moment où l’on a voulu pénétrer dans l’église, la lumière disparaissait et les voix cessaient leurs murmures.

Puisque j’en suis sur le chapitre des merveilles, en voici une autre. — 11 n’est question dans tout l’arrondissement de Saint-Lvs que'de la voyance extraordinaire d’une jeune personne dont les rares facultés dépasseraient celles dés voyants ou médiums dont 011 a pu entendre parler. C’est, dit-on, merveilleux que les phénomènes qui se passent autour d’elle. Ainsi, 11011-seulement les objets matériels semblent s’animer et répondre à ses commandements, mais encore elle est douée d’une étonnante lucidité; rien ne peut lui être caché. Les versions qui courent sur son compte ne sont pas cependant toutes aussi favorables, elles sont plus ou moins contradictoires, et reflètent assez bien l’opinion préconçue des personnes qui vont la visiter, comme il arrive toujours en pareil cas. Une personne très-estimable, sachant que je m’occupe de magnétisme et que je m'intéresse vivement à tout ce qui parait s’y rattacher, me racontait ces jours derniers qu’une de ses connaissances, très-sceptique, était allée à Saint-Lys pour être témoin de quelque phénomène, mais se réservant une épreuve qui devait décider de son incrédulité. On l'introduit auprès de la voyante; à peine lui a-t-il adressé la parole que celle-ci lui dévoile son intention, et de plus l’apostrophe

vivement en lui révélant un secret important que lui seul connaissait. Ce jeune homme fut tellement étonné de ce qu’il venait d'entendre, qu’il n’en demanda pas davantage pour être convaincu.

11 paraît qu’elle a surtout le don de lire dans la pensée et de voir aussi facilement les événements passés qui intéressent les personnes qui la visitent. Quant aux phénomènes qui se produiraient à volonté, ce sont des apports, des suspensions, des coups frappés dans les murs, les meubles, etc. - On entend aussi des voix répondre à ses interrogations. Voici maintenant en résumé, d’après la rameur publique, ce qui aurait amené l’état où se trouve cette jeune personne : Il n’y aurait pas très-longtemps qu’elle aurait reçud’ une personne inconnue un paquet contenant divers objets, où, entre autres choses, se trouvait une sorte de miroir dans lequel on lui recommandait de se regarder. Elle ne perdit point de temps, aussitôt qu’elle y eut plongé ses regards, les visions se succédèrent, et à la suite survinrent les phénomènes dont je viens de vous entretenir. Voilà tout ce que m’ont appris les on-dit, et comme je veux en avoir le cœur net, je me propose d’aller la voir bientôt, et vous transmettrai ce que f aurai vu et entendu. Tout aussi bien que moi, vous devez y prendre quelque intérêt.

Présentez mes respects à M. le baron du Pote t.

Adieu. Votre tout dévoué ami,

J. Bégué, médecin.

APPARITIONS.

Les journaux des Etats-Unis rapportent le fait suivant, dont nous ne voulons pas priver nos lecteurs :

t La petite ville de Lichtfield , dans le Kcntucky, compte de nombreux adeptes aux doctrines du spiritualisme magnétique. Un fait incroyable, qui vient de s’y passer, 11e contri-

huera pas peu, sans doute, à augmenter encore le nombre des partisans de la religion nouvelle.

, [_a famille Park, composée du père, de la mère et de trois enfants qui ont déjà l'âge de raison , était fortement imbue des croyances spiritualistes. Par contre, une sœur de madame Park. miss Harris, n’ajoutait aucune foi aux prodiges surnaturels dont 011 l’entretenait sans cesse. C’était pour la famille tout entière un véritable sujet de chagrin, et plus d’une fois la bonne harmonie des deux sœurs en fut troublée.

« 11 y a quelques jours, madame Park fut atteinte tout à coup d’un mal subit que les médecins déclarèrent dès l’abord ne pas pouvoir conjurer. La patiente était en proie à des hallucinations , et une fièvre affreuse la tourmentait constamment. Miss Harris passait toutes les nuits à la veiller. Le quatrième jour de sa maladie, madame Park se leva subitement sur son séant, demanda à boire, et commença à causer avec sa sœur. Circonstance singulière, la fièvre l’avait quittée tout à coup, son pouls était régulier, elle s’exprimait avec la plus grande facilité, et miss Harris, toute heureuse, crut que sa sœur était désormais hors de danger.

h Après avoir parlé de son mari et de ses enfants, madame Park se rapproche encore plus près de sa sœur, et lui dit :

« Pauvre sœur, je vais te quitter ; je sens que la mort s'approche. Mais au moins mon départ de ce monde servira à te convertir. Je mourrai dans une heure et on m’enterrera demain. Mais aie grand soin de ne pas suivre mon corps au cimetière , car mon esprit, revêtu de sa dépouille mortelle , t’apparaîtra encore une fois avant que mon cercueil soit recouvert de terre. Alors tu croiras enfin au spiritualisme. »

« Après avoir achevé ces paroles, la malade se recoucha et s'endormit tranquillement. Mais, une heure après, comme elle l'avait annoncé, miss Harris s’apercevait avec douleur que le cœur avait cessé de battre.

« Vivement émue par la coïncidence étonnante qui existait entre cet événement et les paroles prophétiques de la défunte, elle se décida à suivre l’ordre qui lui avait été donné, et le lendemain, elle resta seule à la maison pendant que tout le monde prenait le chemin du cimetière. Après avoir fermé les volets de la chambre mortuaire, elle s’établit sur un fau-

tcuil placé près du lit que venait de quitter le corps de sa sœur.

«Cinq miuues étaient à peine écoulées, — raconta plus tard miss Harris, lorsque je vis connue un nuage blanc se détacher du fond de l’appartement. Peu ;ï peu cette forme se dessina mieux : c’était celle d'une femme à demi-voilée ; elle s’approchait lentement de moi ; je discernais le bruit de pas légers sur le plancher ; enfin, mes yeux étonnés se trouvèrent en présence de ma sœur...

« Sa figure, loin d’avoir cette pâleur mate qui frappe si péniblement chez les morts, était radieuse; ses mains , dont je sentis bientôt la pression sur les miennes, avaient conservé toute la chaleur de la vie. Je fus comme transportée dans une sphère nouvelle par cette merveilleuse apparition. Croyant faire partie déjà du monde des esprits, je me tâtai la poitrine et la tôte pour m’assurer de mon existence. Mais il n’y avait rien de pénible dans cette extase.

« Après être ainsi demeurée devant moi, souriante mais muette, l’espace de quelques minutes, ma sœur, semblant faire un violent effort, me dit d’une voix douce :

« 11 est temps que je parte : mon ange conducteur m’attend. Adieu ! J’ai rempli ma promesse. Crois et espère ! »

Le journal auquel nous empruntons ce merveilleux récit ne dit pas si miss Harris s’est convertie aux doctrines du spiritualisme. Supposons-le cependant, car beaucoup de geusse laisseraient convaincre à moins.

AFFAIRE DE LOURDES.

Dans les premiers jours du mois de mars dernier, une jeune fille de la ville de Lourdes, département des Hautes-Pyrénées, nommée Bernadette Savy, douée d’une grande pureté de mœurs et d’une candeur toute enfantine, prétendit que la Vierge Marie lui était apparue plusieurs fois dans une grotte voisine. Cette déclaration, faite avec tous les dehors de la sincérité et de la bonne foi produisit la plus vive impression sur tous les esprits, et excita dans le pays une émotion

générale. Un journal de la localité, Y Intérêt public de Tarbes, va nous aider à raconter la suite des laits :

» Le 4 mars dernier, dit ce journal, plus de cinq mille personnes se pressaient autour de la grotte et de la fontaine qui jaillit à côté d’elle, lorsque Bernadette Savy est venue y faire sa visite accoutumée, précédée par les agents de l’autorité locale, dont la multitude de spectateurs avait nécessité l’intervention.

« Ce jour-là, comme les précédents, on put remarquer la manifestation des sentiments éminemment religieux de la jeune fille; mais l’être divin et mystérieux avec lequel elle disait être en rapport, resta invisible ; on put distinguer le mouvement de ses lèvres, mais on n’entendit proféi er aucune parole, quoiqu’elle soutînt que sa conversation avait lieu à haute voix ; toutefois, son organisme paraissait complètement changé, son état d’extase était tel, qu'elle ne voyait et n’entendait rien de ce qui se passait autour d’elle, et sa figure, entourée d’une auréole virginale, semblait dire qu’un rayon du soleil spirituel était descendu sur sa tête pour y déposer, en caractères qui devaient disparaître bientôt, une majesté inconnue.

« Cette scène muette, qui se produisit au grand jour, en présence d’une population attentive, et qui ne s’est peut-être pas renouvelée depuis, engendra pour un grand nombre l’adhésion et l’enthousiasme; pour beaucoup d’autres aussi, il faut le dire, l’incrédulité et le dédain. De là, d’un côté, des offrandes considérables pour élever une chapelle et perpétuer le souvenir de l’apparition; de là aussi, d’un autre côté, des protestations contre la véracité des récits merveilleux de Bernadette Savy. »

Telle est l’exposition des faits. Nous les connaissions depuis longtemps, et nous gardions sur eux le silence le plus absolu, parce qu’en pareille matière le parti le plus sage, à notre avis, est d'attendre les décisions de l’autorité spirituelle, autorité seule compétente pour en juger. L’intervention de l’autorité civile ne nous impose plus aujourd’hui la même réserve.

L'Erc impériale de Tarbes, organe qui reçoit d’ordinaire

les communications de la préfecture, annonce que le mardi A de ce mois, jour de conseil de révision à Lourdes, M. le baron Massy, préfet des Hautes-Pyrénées, a adressé à MM. les maires du canton une allocution dans laquelle il a fait connaître « qu’il venait de donner l’ordre .au commissaire de « police d’enlever et de transporter à la mairie, où ils seraient n mis à la disposition de ceux qui les avaient portés, les objets « placés dans la grotte ; qu’il avait prescrit, en outre, d’arrêter « et de faire conduire à l’hospice de Tarbes, pour y être trai-«téescomme malades, aux frais du département, les per-« sonnes qui se diraient visionnaires, et qu’il ferait poursuivre « comme propagateurs de fausses nouvelles tous ceux qui « auraient contribué à mettre en circulation les bruits absurdes « que l’on faisait courir. »

D’après le même journal, la mesure prise par M. le préfet a été accomplie par M. le commissaire de police seul, sans la moindre opposition des habitants de Lourdes.

(Extrait de L’Union.)

Nous n’avons pas enregistré dans nos annales ce fait aussitôt que les journaux en eurent rendu compte ; nous attendions que la lumière se (it, mais la lumière tarde à paraître, seulement une longue polémique s’est engagée ; on n’a pas nié le fait, mais beaucoup rejettent ce que d’autres veulent y reconnaître, l’intervention divine. En effet, si toutes les visions, les apparitions étaient reçues comme vraies et qu'on attribuât au principe divin ce qui n’est souvent qu’une création toute humaine , les erreurs les plus monstrueuses verraient repousser leur tige et nous retomberions en plein moyen-âge.

Aujourd’hui, on cherche résolument et scientifiquement à découvrir ce qui appartient à l’ordre physique et à l’ordre moral. On doit craindre un entraînement facile, car il n’est pas toujours possible de distinguer ce qui appartient à l’un ou à l’autre de ces deux ordres. Si nous écoutions notre sentiment, nous dirions ce fait dernier est un rêve, une création

pure et simple de l'entendement, la vision est vraie, mais le caractère divin ne s’y trouve point.

11 est probable que cette vision sera regardée comme miraculeuse, car une commission, nommée par l’évêque de Tarifes, est chargée de faire une enquête, et tous les membres qui la composent, ont des idées préconçues qui ne leur permettront pas de se livrer à un examen scientifique dégagé des intérêts ou des doctrines. L’esprit va toujours au-devant de ce qui s’ajoute à nos croyances et vient leur donner de la force ,'mais autre chose est la vérité pure ; surtout dans ces matières délicates l’espril doit être dégagé des liens de l’enfance et assez fort pour examiner résolument ce qui appartient à Dieu ou ce qui appartient à l’homme.

Le magnétisme pourrait servir de flambeau et jeter quelques lumières dans ces profondes ténèbres; on n’en veut pas, c’est très-bien, mais nous craignons que l’erreur ne prévaille.

Nous suivrons attentivement ces débats, et, comme nous avons l’intention de poursuivre l’étude des faits occultes que présente le magnétisme et le spiritualisme, nous aurons donc l’occasion de revenir sur ce sujet et de faire des réflexions. On peut se persuader que nous ne seront mûs par aucun préjugé.

C’est au moment de mettre sous presse que nous trouvons dans un journal un nouveau fuit miraculeux. Nous nous associons aux réflexions qui accompagnent ce récit. Nous devons nous attendre même à ce que de nouvelles visions, toutes semblables, car cela paraît être une épidémie, viendront troubler l’esprit de quelques-uns, sans pour cela que la cause puisse en être attribuée à rien de surnaturel. Qui ne sait que notre cerveau seul peut produire des images fantastiques qui peuvent être prises pour des réalités extérieures? Il y a donc une distinction à faire, et en examinant ces faits, nous chercherons à découvrir la vérité.

— On lit dans l'Intérêt publie, de Tarbes :

« Le département de la Nièvre vient d’avoir, lui aussi, son miracle. 11 s’est manifesté en la personne de la jeune fille Beuvron, qui aurait été visitée par la Vierge Marie, au moment où elle communiait. Par suite de cette intercession, elle a été guérie, ajoute-t-on, d’une maladie chronique, qui l’avait percluse de tous ses membres. Plusieurs prêtre sont visité celte jeune fille, qui est devenue l’objet des conversations des communes voisines de la sienne. »

L’empressement mis par un journal de Tarbes à mentionner un miracle semble naturel, si l’on réfléchit que cette ville est proche voisine de Lourdes. Mais la Publicité nivernaise ne l’entend pas ainsi, et ne veut, paraît-il, pas laisser entrer le Nivernais en concurrence avec le Béarn pour les apparitions snrnaturelles. Voici sa version :

« Dans la nuit du 8 août, la fille..., estropiée depuis nombre d’années, prétendit que la sainte Vierge lui était apparue, mais sans lui rien dire. Cependant, elle fit part de cette vision à une personne qui lui conseilla, dans le cas où elle se renouvellerait, d’adresser la parole à la Vierge et qu’elle lui répondrait. Suivant la fille..., dans la nuit du 1A au \ 5 août, à deux heures du matin , la sainte Vierge lui serait apparue de nouveau ; elle aurait témoigné à la Vierge tout le regret qu’elle éprouvait de ne pouvoir s’approcher de la sainte table le jour de l’Assomption , en raison des souffrances qu’elle éprouvait ; la Vierge lui aurait répondu : « Lève-toi, essaye de marcher ; » puis la vision aurait disparu ; confiante dans ces paroles, elle s'était levée et avait marché.

« Ce fait peut être attribué tout simplement à une de ces hallucinations, à un de ces rêves qui prennent corps dans l’imagination d’une personne affaiblie par la fièvre ou la maladie. Si nous en parlons, c’est afin que l’opinion publique ne s’égare pas sur la nature d’un fait déjà commenté ou raconté dans plusieurs journaux.

« Stanislas Gourdet. »

EXTASE.

CRISE EXTRAORDINAIRE.

La Spiritual Telegraph du 3t juillet emprunte au Journal de Frereport (Illinois), la relation suivante :

« Permettez-moi de recourir à vos colonnes pour faire connaître un événement étrange qui est survenu, il y a quelques semaines, près de Milledgeville, dans le comté de Ca-roll, pendant une très-longue conférence qui y ont tenue les révérends S. Healy et A. Carpenter. L’intérêt des réunions alla toujours croissant pendant plusieurs semaines, et, après les serinons , on invitait, suivant l’usage , toutes les personnes qui se sentaient touchées à prendre la parole. A l’une de ces séances, madame S. A. G. se leva pour parler. Elle resta quelques moments silencieuse et immobile , puis, elle prononça ces seules paroles : « je sei)6 que je suis une grande pécheresse. » Après quoi, elle s’affaissa sur son siège, dans un état apparent d’insensibilité. D’abord on s’en inquiéta peu, et l’on supposa qu’elle était en contemplation. Elle resta dans la même position pendant environ une demi-heure. Quand la séance fut terminée, on la transporta dans une maison voisine, en compagnie de quelques personnes venues de l’église, qui la veillèrent toute la nuit, mais ne remarquèrent aucun changement. Ses yeux étaient grands ouverts et convulsés, le regard semblait fixé constamment dans lamême direction, et iln’yavait aucun mouvement, pas même de clignotement. Son corps était également immobile , si ce n’est qu’il était de temps en temps agité de convulsions spasmodiques, assez fortes pour que le corps fût plié horizontalement à la hauteur des pieds. Cet état se prolongea la nuit et le jour suivant.

« A la demande de quelques-uns de ses amis, on la transporta la nuit suivante à l’église, dans l’espoir que celte épreuve la ferait sortir de ce sommeil profond ; mais ce fut sans succès. On la fit conduire ensuite chez sa famille ; elle n’avait aucun sentiment, (¡et état se prolongea sans changement appréciable, trois ou quatre jours. Le médecin déclara qu’il y avait congestion cérébrale, que le cas était très-critique et qu’il y avait très-peu d’espoir de salut. 11 lit diverses prescriptions qui n’eurent aucun résultat. Pourtant la malade devint en état de répondre aux questions par des signes de tête, mais sans pouvoir encore parler.

Elle demeura dans cet état pendant seize jours , sans aucun changement visible. Pendant tout ce temps, elle ne prit aucune nourriture, si ce n’est qu'on lui faisait boire de l’eau. Les secousses devinrent moins fortes et finirent par cesser. Quelques jours avant qu’elle revint à elle, elle avait des accès pendant lesquels elle poussait des cris violents et était agitée de mouvementsimpétueux, jusqu’à ce qu'elle retombât épuisée dans son état d’immobilité. Ces accès eurent lieu jusqu’à trois fois par jour. Quoi qu’elle ne prit aucune nourriture et que ses forces physiques dussent s’altérer sans recevoir aucune réparation, sa santé ne paraissait pas plus mauvaise, rien n’indiquait qu’elle eût faim ou qu’elle éprouvât aucune souffrance pendant toute cette période.

« D’après ce qu’elle déclara depuis, elle avait conscience de son état et avait connaissance de ce qui se passait autour d’elle; elle était heureuse, mais incapable de l’exprimer ; elle voyait des choses qui ne sont pas de ce monde, et notamment les esprits avec lesquels elle avait des relations habituelles, ainsi que d’autres esprits qu’elle n’avait jamais connus ; si, dit-elle, elle révélait tout cequ’elleavu et éprouvé pendant cette longue crise, on ne la croirait pas. En conséquence , elle éprouve quelque répugnance à en faire la narration.

« La durée de ce singulier état et les circonstancesqui l’ont amené en firent un événement remarquable ; la curiosité fut vivement excitée ; les savants aussi bien que les ignorants, les

saints et les profanes, tous voulurent expliquer le phénomène. Ce qui semble le plus certain, c'est que la crise a été amenée par l'influence des sentiments religieux. »

Observation. — D'après le récit qui,précède, il y a lieu de croire que la dame dont il s’agit s'est trouvée dans un état d'extase religieux , comme 011 en voit beaucoup d’exemples dans les vies des saints. L'exaltation religieuse amène parfois cet état singulier dans lequel la vie matérielle semble suspendue , tandis que l’esprit acquiert des facultés prodigieuses. L’extase somnambulique présente à peu près les mêmes phénomènes. Les magnétistes et les médecins reconnaissent qu’il est très-dangereux de prolonger cet état anormal. Quand il a été amené artificiellement à la suite du somnambulisme , le magnétisme peut toujours le faire cesser. Quand cet état se développe spontanément, le même moyen peut être employé avec succès, et il est à regretter que, dans le cas particulier, les parents et amis de la malade n'aient pas eu recours à l’action magnétique, surtout quand la médecine confessait son impuissance à terminer une crise qui aurait pu être mortelle.

VARIÉTÉS.

Tout songe n’est pus mensonge, dit le Droit, et il explique cet aphorisme, d’une vérité fort contestable, par le fait suivant :

«. Le nommé Jacques M..., âgé de cinquante-deux ans, cultivateur àVernouillet (Seine-et-Oise), avait apporté à la halle de Paris des fruits, du beurre et des légumes. Après avoir effectué la vente de sa marchandise, il s’était remis en route, et, à quatre heures du matin, il se trouvait sur le territoire de Nanterre. Depuis que le cultivateur était en plaine, il avait jugé à propos d’étendre sur la paille fraîche de sa voiture ses membres fatigués, et le mouvement du cheval, qui allait au pas, l’avait bientôt endormi.

« Un songe descendit sur lui. Ce songe n’était pas sorti par la porte d’ivoire, car le cultivateur rêva que deux individus à mine farouche, armés de poignards acérés, se tenaient près de lui, délibérant pour savoir s’ils lui perceraient le cœur. Saisi de terreur, il restait immobile, et les brigands se contentèrent de le fouiller et de lui enlever son argent et ses habits. Malgré lui, il fit un mouvement, et il sentit sur sa poitrine le froid de l’acier. Cette sensation le tira de son sommeil, et il vit, de ses yeux éveillés, deux gaillards sauter à bas de sa voiture. Lorsque le saisissement qu'il éprouvait lui permit de crier, les bandits étaient déjà loin. Ils avaient soustrait au sieur Jacques M... une soixantaine de francs contenus dans ses poches, la limousine qu’il avait sur le dos et jusqu’à la longe de son cheval. »

UN SONGE RÉALISÉ.

M. E. G., commis mercier chez M. S., place du Marché, à Nîinçs, vit en songe, pendant une nuit de la semaine dernière, sa tante madame X., se rendant de Saint-Cosmes à Nîmes , trouver entre ce village et Clarensac un petit vieux sac de toile (contenant une somme que par convenance nous ne désignons pas). Quel ne fut pas son étonnement, quand, le matin en sortant de chez lui, il vit arriver sa tante, et surtout, quand après l’avoir questionnée, il apprit qu’elle avait trouvé, à l’endroit même où il l’avait vue dans son rêve un vieux sac de toile renfermant la somme en question.

(Communiqué par des personnes dignes de foi.)

(Extrait du Glaneur du Gard.)

Baron dd POTET, propriélaire-géranl.

CAUSERIES MAGNÉTIQUES.

TREIZIÈME CAUSERIE.

Patience et persévérance.

(Suite.)

DÛ FLUIDE MAGNÉTIQUE. '

Que fàut-il à un magnétiseur pour ses démonstrations? A-t-il besoin de ceB: innombrables instruments, nécessaires aux physiciens, aux chimistes, etc...? Non, il doit tout tirar de lui même; la nature ici fournit l’élément roi, le principe de toutes choses, la force, l’agent.des plus grandes merveilles. Son creuset divin est en nous-mêmes, la volonté y puise la puissance nécessaire, et ce laboratoire, où. la vie transmue la matière, où les fluides de l’espace viennent s’épurer, est mis à la disposition de l’agent supérieur que l’eü appelle âme humaine.

Ce feu que nous sentons en nons^-mêmeB, ce foyer qui, une fois allumé, ne s’éteint plus qu’avecla vie, nous avertit que les instruments fonctionnent, que les épurations se font. Nous constatons parles scories rejetée9, par l'activité des émonctoi-resque les matières introduitesenilous, pourlS'besoin de chaque instant, ont subi de nombreuses trawsfonH&tions, et que le divin ouvrier en a retenu les pures essences: ; c’est une de celles-ci qui est à la disposition du vouloir, sa subtilité est inconcevable, et porte en elle-même un rudiment de vitalité que l’homme peut fairecirculer et passer comme un fluide à travers tous les tissus, sans que l’on puisse d’abord le saisir ou seulement le reconnaître. Semblable aux arômes qui voyagent dans l’air et que parfois le sens de l’odorat perçoit, ce fluide arrive, dirigé par la pensée, sur l’objet désigné, s’engage dans

Tome XvII. — N°. 43. — 2» Série. — 10 Octobre 1858. 18

la su bstance inerte ou animée, s’y infiltre et accumule jusqu’au moment où, mis en excès , il secoue , tourmente, endort ou convulse l’être que l’on a choisi pour épreuve , ou qui, sans y consentir, s’en est laissé pénétrer, quand, par une affinité mystérieuse, cet agent s’étant détourné de sa route à la manière de la foudre, car il est capricieux dans ses effets, il a attaqué plutôt celui-ci que celui-là, choisi enfin de lui-même, malgré la volonté du magnétiste; le plus souvent pourtant, d’une docilité extrême, il quitte à l’instant l’être affecté pour aller où l’intention l’envoie ou le dirige.

Parfois ce9 effets sont semblables à ceux que détermine l’électricité, à ceux du galvanisme ; puis, devenant aimant, il attire forcément vers le magnétiste l’être en qui il a établi son domicile. La force humaine la plus grande s’annihile devant lui, il courbe l’homme le plus fort, le relève ou plutôt l’enlève sans que la résistance de la volonté, aidée du concours de de la force d’autrui, puisse rien empêcher et rien détruire.

Tantôt, dans une assemblée nombreuse, il affecte plusieurs personnes à la fois sans que jamais les effets qu’il détermine soient identiques. Quelquefois il quitte brusquement celui-ci en agitant les membres inférieurs ; parfois ce sont les bras, les mains qui reçoivent un ébranlement singulier ; parfois encore les muscles de la face entrent en convulsion, les mâchoires se serrent, les paupières sont agitées, l’œil s’ouvre démesurément, les cheveux s’horripilent, puis plus rien, si ce n’est .une sorte de lumière répandue sur la face, un agacement .général des nerfs, un froid des extrémités, mais bien plus communément une vive chaleur.

11 n’est pas rare non plus de le voir produire un rire singulier que rien ne saurait empêcher; un hoquet convulsif, ou bien encore l'extase ou le ravissement du sujet dont les yeux fixes et immobiles dirigés vers le ciel, semblent chercher ou voir dans l’espace des êtres spirituels que nos yeux à nous n’y sauraient apercevoir dans cet instant.

La description de ces singuliers phénomènes ne peut donner l’idée de ce qu’ils sont, il faut les voir ou être affecté soi-même pour en saisir l’image.

Ne l’oubliez point, tout est venu d’abord du magnétiste ; non la variété des faits (pie l’imagination eût été impuissante à créer, mais l’agent, le protée, le magicien qui vient sous vos yeux d’opérer ce qu’il lui a plu de produire ; son jeu même ne cesse pas toujours à votre volonté, il peut se continuer un certain temps, mais communément tout se calme à votre voix ; tout cesse lorsque des passes sont faites en face des parties surexcitées.

Gomment s'est insinué cet agent? Pouvez-vous reconnaître le point d’introduction, marque-t-il son passage? Nullement. Vous en ôtes réduit aux soupçons, aux conjectures ; ainsi, lorsque vous voulez affecter la tête, les effets parfois ont lieu loin de la direction de vos mains. Voulez-vous borner l’action de cet agent une région? Vous ne le pouvez toujours. Pourtant il a une circulation donnée que vous apercevez distinctement parfois. Ainsi dirigeant une main, un doigt sur la main d’un sujet sensible, il court le long des nerfs du bras et va donner une secousse à l’autre main, à l’autre bras, tandis que celui que vous cherchez à ébranler restera immobile. L'être magnétisé sent parfois éon parcours ; il éprouve une sorte de fourmillement d’un caractère particulier, un courant avec picotement des tissus ; dans d’autres cas même l’insensibilité s’établit sur ,1e passage de l’agent. Souvent encore il tourmente la peau, il produit une sorte de chatouillement qui est loin, il paraît, d’être désagréable. La réalité de cette circulation est parfois tellement incontestable que le doute n’est plus permis ; ainsi bandant les yeux du sujet et dirigeant la main sur un endroit quelconque, le sujet nes’y trompe point, il avertit du point correspondant à la ligne droite qu’indique votre main. J’ai pu sur des aveugles somnambules faire plus de cent fois cette curieuse expérience; j’ai également sur des animaux obtenu les mêmes résultats ; la partie où je dirigeais ma main et d’une assez grande distance éprouvait des secousses; mais si je continuais, le fluide cessait d’agiter le point choisi, et on voyait bientôt les muscles de la tête de l’animal et surtout ceux des lèvres et des mâchoires présenter une série de mouvements désordonnés, comme si le fluide,

ayant terminé sa course, eût choisi ces parties pour effectuer son départ. Ce qu'il y a de certain, c’est qu’il enrichit, qu'il vitalise puissamment tout ce qui se trouve sur sa route, et que, loin de nuire jamais, il est au contraire souverainement bienfaisant.

Une étude superficielle peut laisser des doutes, non sur les phénomènes, mais sur l’agent qui les détermine ; un examen attentif vous donne la certitude absolue de son existence. Plusieurs magnétistes distingués attribuent ces merveilles à la volonté seule. Pour moi, le fluide magnétique est aussi réel que la lumière, et ma croyance à son existence est entière« complète; les opinions contraires n’ont à mes yeux et depuis longtemps aucune sorte de valeur.

Baron du Potex.

{La suite au prochain numéro.)

CLINIQUE.

(Suite et ûtt.J (1).

Delphi, Indien», *« wrrll. 1859. iic!

Messieurs les Editeurs,

Le 8 février, madame Tripple quitta Del phi peur retourner à Lafayette, et le 9, ma petite fille, âgée de quatre ans, s’ôtant couchée la veille dans son état de sauté ordinaire, nous réveilla vers les trois heures du matin, prise de vomissement» et d’une très-forte fièvre. Supposant que le mai provenait d’une attaque de vers, j’administrai le calomel à haute dose. Le Dr Samuel Grimes, oncle de l’enfant, vieux praticien de mérite, qui, depuis six ans, est un des administrateurs nommés par l’État de l’hospice des aliénés, entra vers les sep» heures, et déclara que Gennie était très-malade. Son avis

(1) Voir, dàiu le n« do 25 sopterbbre, la rettrtion empruntée aO SpW-lualttte de la Nouvelle-OrléaMi

fut (le répéter les doses de calomel, et nous essayâmes, par tous les moyens possibles, de produire des évacuations. A deux heures de l’après-midi, l'enfant avait pris 30 grains de calomel ; la fièvre était intense, le cerveau engagé, et le pouls très-fréquent. Pendant que nous dînions, l’enfant éprouva une forte convulsion, qui fut suivie par d’autres crises toutes les vingt ou trente minutes. A neuf heures, un autre habile médecin s’adjoignit à nous. Nous employâmes l’huile et d’autres purgatifs, et tous les moyens que chacun de nous put suggérer pour dégager les voies inférieures et arrêter les convulsions, qui prenaient plus d’intensité et se prolongaient en durée. Ces symptômes allèrent en augmentant pendant la nuit et le jour suivant, l’emploi des moyens les plus énergiques n’ayant pas réussi à procurer le moindre soulagement. A trois heures de l’après-midi (mercredi 10 février), la malade sembla perdre la faculté d’avaler, le côté gauche était menacé de paralysie, et depuis la veille au soir, elle avait perdu connaissance. En nous consultant, l’un des médecins fut d’avis de cesser toute tentative de rien introduire par la bouche; le Dr Grimes n’en persista pas moins à administrer le calomel à la dose d'un sixième de grain, souvent répétée, que l’on déposait sur la langue ; mais ceci non plus ne produisit aucune évacuation. Les crises devinrent moins violentes, mais plus concentrées à l’intérieur; une forte tension spasmodique faisait courber le corps en arrière, la tête et les extrémités inférieures se rapprochant presque sans relâche.

Je commençai à perdre tout espoir de sauver ma fille; mais ma femme persista avec tant d’opiniâtreté à demander que l’on recourût au télégraphe pour prier madame Tripple de revenir par le convoi de 11 heures de nuit, que je finis par céder à ses instances, mais seulement pour la satisfaire, car je n’avais aucun espoir que cette dame pût nous être d’aucune utilité, persuadé que j’étais que l’enfant succomberait avant son arrivée. De huit à neuf heures du soir, il y eut plus de calme, mais la connaissance n’était pas revenue, et la constipation persistait. A neuf heures 20 minutes, l’enfant éprouva un violent spasme et empira rapidement. A onze heures,

nous crûmes qu’elle allait passer : le pouls était à peine sensible, les extrémités froides, les doigts des mains livides et glacés. A minuit, les deux docteurs se retirèrent, disant que dans quelques minutes, tout serait fini, et laissèrent entrer plusieurs dames. Il n’y a que des parents placés dans les mômes circonstances que nous, qui pourraient apprécier les angoisses et les tourments de l’attente que nous eûmes à subir, depuis ce moment jusqu’à l’arrivée du train de Lafavette, à deux heures, en retard de trois heures. Ma femme attendait l’événement avec espoir; moi, je n’en avais plus aucun, ne pensant môme pas que madame Tripple dût venir. Elle arriva cependant, et à peine la porte fut-elle ouverte, que je m'aperçus que cette dame était sous l’influence de l’inspiration. Tous les assistants fondaient en larmes. Le pouls avait disparu aux poignets de l’enfant ; la respiration était haletante et précipitée; l’ensemble des symptômes annonçait une fin prochaine : c’était l’agonie luttant contre la mort. La pauvre enfant, pleine de vie, de santé et de force, frappée d’une manière si subite, résistait énergiquement aux atteintes du mal. Ma femme, au milieu de ses sanglots, s’écria : « 0 Nelly ! trop tard! trop tard! Si vous eussiez été ici hier, notre enfant aurait pu être sauvée ! »

Madame Tripple posa une de ses mains sur la tête de la malade, et appliqua l’autre sur l’estomac; elle fut saisie d’un tremblement violent. L’enfant respira plus librement, et ses membres subirent une détente. Je marchais dans la chambre, croyant ma fille morte; le3 personnes qui entouraient le berceau dirent qu’elle vivait. En effet, elle ouvrit les yeux F Le médium parlait dans le jargon des Indiens et frictionnait l’enfant. Il me serait impossible de raconter tous les incidents de ce quart d’heure. Les médecins avaient abandonné la partie; il restait sept personnes, toutes spiritualistes, et nous nous regardions, doutant et espérant, stupéfaits et dans une douloureuse anxiété.

Il venait de s’écouler juste quinze minutes depuis l’imposition des mains, quand je sentis la chaleur ramenée aux extrémités et le pouls sensible au poignet. Bientôt l’enfant parla,

disant : « Boire ! » première parole échappée de ses lèvres depuis trente-quatre heures ! Quel moment pour moi ! l’enfant chérie de mon cœur, que je m'étais représentée, il y avait à peine quelques minutes, glacée par la mort, me regardait et parlait I elle vivait encore!

L’Esprit indien, dans son jargon anglais, ordonna de l’eau froide et du sel. L’enfant qui depuis si longtemps ne pouvait rien avaler, en but trois verres ; elle paraissait alors revenir à un état plus naturel. Ici, le médium ou plutôt l’Indien nous enjoignit de faire venir le frère Warren Chase (celui-ci était arrivé de la veille, pour prêcher la doctrine, et logeait chez M. Dewey, à plusieurs ilets de distance) répétant toujours : « Lui homme puissant ! beaucoup de force magnétique ! » etc., etc. M. Chase se rendit à notre appel. Ma femme, que les Esprits font quelquefois parler, n'ayant pu subir aucune influence, absorbée qu’elle était par ses terreurs maternelles et l’excitation qui s’ensuivait, devint alors impressionnée avec Je concours des autres médiums, et tous trois formant le cercle, se mirent à actionner la malade, jusqu’à ce qu'une réaction complète fut produite.

Alors l’Indien dit, en substance, que l’enfant avait des vers; qu’un amas de ces vers s’était cramponné au conduit qui va de l’estomac aux intestins; qu’ils (les Esprits) allaient essayer de détacher cet amas; qu’il était urgent de faire évacuer l’enfant et continuer les purgatifs. J’avais fait usage d'eau tiède ; ils insistèrent sur l’emploi de l'eau froide seule. Ils voulurent lui faire prendre un bain froid; je m’y refusai, penchant toujours pour le bain tiède dont elle avait déjà pris plusieurs ; ils n’en voulurent pas, désirant humecter les intestins avec de l’eau froide. (Ils indiquaient, à la surface des intestins, une excoriation purulente dont ils regrettaient l’existence.) Je m’opposai à l’emploi de l’eau froide de cette manière, tout en consentant à en faire des applications sur le ventre. Je recommandai les toniques et les excitants; ils rejetèrent mon avis, s'en tenant toujours à l’eau froide. Je me trouvais dans un cruel embarras, sommé de faire abnégation de mon jugement, après mes douze années de pratique et d’études, de-

vant une femme qui n’entendait rien à la thérapeutique, ou l’esprit d’un Indien (si toutefois il n’y avait pas supercherie) qui n'avait jamais, j’en étais convaiucu, reçu un diplôme de docteur. Pendant la journée de jeudi, j’obtins que l’on me laissât administrer quelques doses de teinture de rhubarbe, continuant les liquides froids. Ce ne fut que le vendredi que les intestins commencèrent à se débarrasser, et, pendant cette nuit et le samedi, la malade rendit une quantité de petits vers blancs.

La convalescence futrapide. Au bout de trois jours, l’enfant se tint assise sur son lit et mangea tout en jouant, mais continua pendant environ quinze jours à ne pouvoir s'exprimer d’une manière intelligible, difficulté provenant de la paralysie partielle de la langue.

Il me faut ici, avant de faire l’analyse raisonnée du traitement des Esprits, revenir un peu en arrière et décrire une particularité singulière de leur manière de procéder.

Environ une heure après que madame Tripple eut commencé à magnétiser, l’enfant éprouva des tressaillements dans les muscles, et je fis la remarque « quelle allait avoir une Autre crise. » J'avais à peine parlé, que le médium tomba sur le plancher,, se tordant dans un spasme effrayant qui dura cinq minutes, tandis que l’enfant restait parfaitement .calme. Madame Tripple, de cette manière, à quinze ou vingt reprises différentes, dans la journée du jieudi, fut atteinte des mômes convulsions à la place de l'enfant. L’Esprit qui la contrôlait nous expliqua ensuite que l'enfant étant trop faiblè pour supporter ces attaques; on les faisait subir au médium qui ét4it plus apte à les endurer. Quant à l’enfant, il n’éprouva qu’un petit nombre d’atteintes très-légères de spasme, comme de» frémissements convulsifs des muscles, et cela, le jeudi seulement, pour en être entièrement exempte à neuf heures du. seir.

J’ajouterai que l'enfant fut magnétisée & peu près tontes les demi-heures pendant quarante-huit heures, ensuite une fois par heure, et puis une fois toutes les deux heures pendant encore trente heures.

Nota. L’auteur E. W. H. Beck, D. M., termine son intéressante et remarquable relation par le résumé de la théorie qui leur fut communiquée de la part des invisibles par l'intermédiaire de madame Tripple et de sa femme, après que tout danger pour l’enlant eut disparu. Après avoir ajouté lui-mème quelques observations pour donner plus de poids à la théorie mentionnée, il finit sa lettre en témoignant vivement la reconnaissance dont il se sent redevable vis-à -vis de madame Tripple.

FAITS ET EXPÉRIENCES.

Compte rendu des quatre séances de magnétisme données les 25 et 26 août dernier, par M. Manlius Salles, libraire a Nîmes, boulevard de la Madeleine, sur la personne de M. Milet.

Nous avons été témoins, ces quatre derniers jours, de quelques expériences magnéto-thérapeutiques, tellement curieuses, que noue nous sentons en devoir de les mentionner publiquement.

M. Milet, âgé d’environ trente-cinq ans, atteint, depuis cinq ou six ans, d’une maladie nerveuse pour laquelle il a consulté en vain les plus célèbres docteurs de Paris, Lyon, Montpellier, Nîmes, etc., a eu enfin recours à la magnétisation de M. Manlius Salles, qui, en quelques instants, a produit sur lui les plws remarquables effets.

Pendant la première expérience, qui a duré plus d’une heure, à l’hôtel de Paris, boulevard de la Madeleine, M. Milet a joui presque entièrement de toutes ses facultés. Cette séance a eu lieu en présence de madame Milet, mère du magnétisé; de mesdames N. et L., institutrices, directrices de salles d’asiles communales, à Nîmes; de M. S., instituteur, directeur

de salles d’asiles communales, à Nimes ; et de M. L., mari de madame L., institutrice.

Pour démontrer que le magnétisme peut être pratiqué par tout le inonde, mais avec plus ou moins de chances de réussite, M. Manlius Salles se fit aider, dans la première expérience, par madame N., qui, portant le plus grand intérêt à M. Milet, déploya dans cette circonstance toute sa puissance et provoqua en une minute les premiers symptômes du sommeil magnétique, tandis que, de son côté, M. Manlius agissait directement sur le bras et la jambe, sièges delà maladie. M. Milet, disons-le, est atteint d’une de ces maladies propres ii dérouter la science du plus habile praticien ; il a toujours pu courir, tandis qu’il ne peut marcher qu’avec beaucoup de peine, à la vitesse d’un kilomètre par trois quarts d’heure, ne pouvant monter un escalier qu’en courant, et forcé de se cramponner fortement à la rampe quand il monte doucement, souffrant d’une crampe continuelle qui prend racine au coude du bras gauche et finit à l’extrémité des doigts, ne pouvant rester assis ou debout une seule minute sans être forcé de balancer son corps de manière à fatiguer le regard des personnes présentes.

M. Manlius, disons-nous, avait à peine fait quelques passes sur le bras malade et sur la tête de M. Milet, que celui-ci déclara sentir un effet indéfinissable, se produisant d’abord dans les parties magnétisées et ensuite dans tout son être; ce fut alors que M. Manlius Salles, lui ayant ordonné de se lever et de marcher, il se leva en effet, et, sans l’aide de sa canne ni de personne, marcha aussi bien que si jamais il n'avait été malade ; il exécuta avec la plus grande facilité tous les mouvements qu'il n’aurait pu faire avant l’expérimentation. En cet instant, madame Milet mère, émerveillée par ce résultat si surprenant et croyant son fils complètement guéri, fondit en larmes et se confondit en remerciements à l’adresse de M. Manlius Salles, qui s’empressa de lui dire que ce serait un miracle si son fils conservait cette heureuse influence après la séance, mais que cependant une amélioration assez prononcée résulterait pour lui de cette première expérimentation.

Le lendemain (Jeudi) nous nous réunîmes à la même heure dans le local de l’école d’asile dirigée par M. Servière (rue Pavée, à Nîmes), en présence de nouveaux témoins dont suivent les initiales : M. T., maître de pension; M. J. B., libraire; M. B., agent d’assurances, madame et mademoiselle S., habitant l’établissement ; madame et mademoiselle S., employées et habitantes de l’établissement. Dans cette séance, il y eut de nouveaux progrès; non-seulement M. Milet put marcher aussi bien que la veille, mais pendant plus longtemps et sans aucune fatigue.

Dans cette séance, M. Manlius Salles produisit sur mademoiselle M. S. une remarquable amélioration dans l’organisme. Cette jeune fille, âgée d’environ seize ans, est atteinte depuis trois ans d’une telle faiblesse dans la jambe droite, qu’elle ne peut se reposer sur elle seulement une minute. M. Manlius lui ayant ordonné de marcher sans faiblesse dans la jambe, elle marcha boiteuse, il est vrai, car sa jambe n’a pas grandi comme l’autre, mais sans souffrance et sans canne ; elle put se soutenir dix minutes sur cette jambe.

Nous pourrions citer beaucoup d’autres cures ou grandes améliorations dans la santé de plusieurs personnes, produites par la magnétisation de M. Manlius Salles ; mais le manque d’espace nous oblige à renvoyer à un prochain numéro la suite de cet entretien. C. E.

(Extrait de la Revue méridionale.)

SOMNAMBULISME ; MODIFICATION DES ORGANES DE LA VUE.

Le somnambulisme qui a déjà fourni tant de curieux phénomènes, en offre souvent d’inattendus ; et cette mine féconde est encore bien loin d’être épuisée.

Le 7 octobre, à une séance de la Société du Mesmérisme, on se livra à diverses expériences sur plusieurs sujets. M. le docteur Guidon présenta une somnambule qu’il considérait comme lucide et capable de voir sans le secours des yeux. On appliqua sur les yeux du sujet un bandeau, et elle parvint à

lire couramment dans une brochure imprimée en petit texte. Cependant l'expérience ne parut pas complètement satisfaisante ; la somnambule ne voyait que les objets placés dans la direction du rayon visuel, c’est-à-dire dans une position telle qu’uue personne éveillée et ayant les paupières abaissées eût pu les voir ; dès qu’on élevait l’objet à la hauteur des yeux, elle ne pouvait plus rien distinguer ; il n'était donc pas démontré quelle pût voir à travers le bandeau ou môme à travers les paupières, et on pouvait regarder comme possible qu’elle vit au moyen des yeux. Son magnétiseur repoussait cette supposition en se fondant sur ce que cette dame est presbyte et ne peut, dans l’état ordinaire, lire qu’avec de fortes lunettes. Cette,assertion était facile à vérifier. La somnambule étant,réveillée, on lui présenta la brochure dans laquelle, eüe venait.de .lire : elle dit qu’il iui était impossible d’y lire un -aeul mot. Alors on lui donna des lunettes convexes n° i 2 j leB ayant mises, elle lut couramment. Or los personnes qui ont une benne vue, et qui essayent de lire avec de pareilles lunettes, voient tous les objets confus, comme si un épais brouillard était interposé, et ne peuvent distinguer même une lettre ; c’est ce 'qu’ont éprouvé plusieurs des personnes présentes et qui ont essayé l’effet de ces lunettes.

.Ilnous semble donc bien ¡établi : l°que cette dame est presbyte à un degré très-prononcé ; 2° que, dans l’état somnam-bulique, cette presbytie disparaît et que la vue redevient normale.

M. Guidon nous a assuré que, dans l’état ordinaire, elle ne pouvait faire un point de couture i moins d’avoir des lu ■ nettes, et que même en y ayant recours, elle ne peut exécuter ¡çue (tes.ouvrages faciles ; tandis que, danql’état somnam-bulique, ajant les yeux fermés, elle fait toutes sortes d’ouvrages avec une rapidité et une adresse .merveilleuses. , r Voici une«^périence qui serait intéressante; on pourrait, quand cette.dame est.en somnambulisme,.lui tenir les yeux ouverts, et l'on s'assurerait si les pupilles présentent les ca-raotèresde preabÿtie et .diffèrent de ce quelles sont à l’état 4e veille. A.-S. Moaus.

ÉTUDE SUR L’AIDE.

VF. L ALIÉNATION MENTALE, par Battu de Bounonr,

L’essence du moral c’est l’âme. La» première fois que je fus admis dans une de ces retraites, où la science, courageuse flt opiniâtre, va chercher les secrets dela vie, à travers lesdébrifi des organes qui ontservi à sa manifestation, nn étudiant,,que ses paij-s tenaient déjà pour maître, interrogeait un «erveau humain. Nouveau venu et par conséquent tout ki fait curieuic de ces choses, dont l’aspect me. paraissait plus soleuaiel qu'étrange : ce cerveau a pensé, me disaia-je; unc ârne it toffi là. Et, entraîné par ma conviction, je demandai Baïvetmeat Où siégeait l'âme. J'entends encore les éclats de : ifaei de mes compagnons et le dédain superbe du doeteur prédestiné qui, levant la tôte d’un air olympien, me regarda un instant 9ans mot dire, puis la baissa lentement avec un sourire narquois très-significatif m >■ : ■ un

Le fait est que les traités d’anatomie ne disaient rw touchant ma question. Et plus tard, bêlas l ia physiologie, livcçs et maîtres, professeurs et docteurs ne m’eu surent pas dire davantage. Partout l’usage était de se tirer de la difficulté en disant que l’anatomie et la physiologie ne s'occupaient pas-4e métaphysique. . . •.,•11 i --¡us!»

Ainsi s’est formée une génération entière de médecins,, gii faisaient profession de croire à ce qu’ils voyaient et touchaient seulement. Il fallait un certain courage pout aifirwer en face d’eux que l’esprit et la. matière étaieût deux choses parfaitement distinctes et réelles. ; . ;; -, _--i .-Jsfl» Depuis, les temps ont bien chnngé, et une rude? Wgi-rience de ce que peuvent les mauvaises doctrines a ,déWjn tré au plus grand nombre que, bon ou mauvais,Teaprifcqui##!»-

duit l’homme est bien une réalité et ne doit pas être confondu avec le corps.

Aujourd’hui donc, un étudiant peut croire que l’âme existe et le dire tout haut, sans passer pour un phénomène ; c’est pour lui une vérité, non pas seulement de démonstration, mais encore d'instinct, de conscience et de sens intime, et même d’expérimentation.

« L’action immédiate et réciproque, dit Ampère, entre la substance matérielle et la substance immatérielle est la base de toute métaphysique d’accord arec l'état actuel des sciences. Le principe sur lequel repose la mécanique et par conséquent toutes les sciences qui s’appuient sur elle, savoir : que ta matière ne peut changer d elle-même son état de mouvement ou de repos, ce principe exige que l’on admette une substance immatérielle et motrice, partout où il y a mouvement spontané. On découvre ensuite que la pensée réside dans cette substance, quand on voit que les mouvements spontanés lui obéissent. ■

« Un chimiste, ajoute-t-il, sait que l’action entre les molécules des divers corps est d’autant plus énergique que ces molécules sont de nature plus différente ; et par conséquent il ne peut pas s’arrêter à une objection qui consisterait à dire que l’esprit et la matière étant d’une nature essentiellement différente ne sauraient agir l’un sur l’autre. » (Philosophie des Sciences, 2* partie, p. 167.)

Voilà assurément un puissant témoignage et des raisons scientifiques péremptoires. Après cela, il ne dôit y avoir dans le monde ni chimiste ni physicien qui se refuse à admettre dans l’homme une double nature, une âme immatérielle unie à un corps matériel, le tout constituant une unité ; et par conséquent il ne doit pas y avoir de médecin qui, ayant â traiter une maladie mentale, ne doive rester convaincu que l’élément moral, si les symptômes de la maladie signalent ses effets, repose sur quelque chose de très-réel, quoique n’accusant rien qui tienne à la matière.

Le troisième élément consiste dans les rapports mutuels ou les influences réciproques du physique et du moral. C’est ici

qu’il est facile de se payer de mots. Si l'on veut s’en tenir à la chose, on se trouve en présence d’une quantité innombrable de faits d’une variété infinie, dont la science n'a pas encore pu donner l’explication, quelle qu’ait été la base de l'examen ; qu’elle ait pris pour point de départ les organes et les fonctions, ou bien l’âme et ses facultés.

A cet égard, le désordre est si grand dans les esprits que certains, voulant interpréter ces faits, ont traité de fous les plus grands hommes.

Ainsi, un esprit qu’on doit prendre au sérieux se met à étudier Socrate: il lui demande compte de son génie, et la conclusion des recherches du moderne savant se résume en une accusation de folie, intentée à celui que l’antiquité vénéra comme le plus sage des mortels. Si du moins on avait dit à quels signes on devait distinguer la sagesse et quelle en était la mesure I «i

Le même savant a fait un travail analogue, et tiré les mêmes conclusions concernant Pascal.

En voyant de pareils abus de l’intelligence et du savoir, on serait tenté de se demander où sont les fous, de ceux qui dissertent ainsi sur la raison humaine et sur ses bienfaits, ou de ceux qu’on mène à l'hôpital pour les guérir d’une manie? Horace leur aurait dit volontiers : « Approchez-vous, que je voua montre à chacun votre folie, »

.........Hune prQpriùs me

Dum doceo insanire omnes, vos ordine addite.

Horace, sat. ITI, lir. 2.

Nota. On fait apercevoir par ce fragment d'ouvrage que le rapprochement s’opère entre le monde savant et nous. S’il admet l’existence de l’âme, il faudra bien admettre aussi ses facultés, et c’est en elles que gisent toutes les merveilles que le magnétisme produit, car celui-ci n’est qu’un de ses instruments. Baron du Pot^t.

VARIÉTÉS.

LES PRODIGES DE LA RUE DU BAC.

« La rue du Bac est eu émoi. lise passe encore par là quelque diablerie 1

« La maison qui porte le n° 65 se compose de deux corps de bâtiments : l’un, qui donne sur la rue, a deux escaliers qui se font face.

« Depuis une semaine, à diverses heures du jour et de la nuit, à tous les étages de cette maison, les sonnettes s'agitent et tintent avec violence-; on va ouvrir ; personne sur le palier. ^ "!

«On crut d’abord1 â une plaisanterie, et chacun se mit en observation pour en découvrir l’auteur. Un des locataires prit le soin de dépolir une vitre de sa cuisine et fit le guet. Pendant qu'il veillait avec le plus d’attention, sa sonnette s’ébranla: il mit l’œil à son judas, personne ! ïl courut sur

l’escalier, personnel T1-........

« Il rentra chez lui et enleva le cordon de sa sonnette. Une heure après, au moment où il commençait à triompher, la sonnette se mit à carillonner de plus belle. Il la regarda faire et demeura muet et consterné.

ii A d’autres portes, les cordons de sonnettes sont tordus et »oués comme des serpents blessés. On cherche une explication , on appelle la police; quel est donc ce mystère? on l’ignore encore; n 11 Voilà la nouvelle que le journal la Patrie, dans son nu-m.'ro du 4 septembre, donnait dans sa Chronique.

La Revue spiritualiste (p. 271) ajoutait ces nouveaux dé-

tails : « Des pierres étaient mystérieusement lancées à travers les croisées, sans qu’on ait pu découvrir d’où ni de qui elles émanaient; de plus, une avalanche d’eau inondait la maison depuis le rez-de-chaussée jusqu’au grenier, au grand émoi des locataires qui crurent pour un moment à un second déluge universel. »

J’aime les émotions, le merveilleux , le diabolique, le fantastique, le féerique : j’en cherche de tous côtés, je cours partout où l’on me fait espérer la vue de quelque prodige. Je m’empressai donc de me rendre rue dti Bac, espérant enfin prendre sur le fait quelque lutin, au risque de recevoir un coup de pierre dans le dos ou une averse sur la tête, trop heureux de pouvoir à ce prix faire connaissance avec les esprits infernaux. Mais, suivant mon habitude, j’arrivai trop tard. Je m’informai auprès de Mm* la concierge de l’état dès lifeux. Cette dame m’accueillit avec une parfaite urbanité; sans se douter du dépit qn’elle allait'me causer, die m’annonça d’un air radieux et le sourire sur les’lèvres, que tout était fini et que la maison était rentrée dans l’ordre.

Je questionnai sur la manière dont on avait mis fin auJ tintamarre ; est-ce par l’exorcisme, par les évocations, par l’intervention d’un bon esprit? Est-ce par les procédés FE-liphas Lévy, parla clavicule de Salomon? ou bien a-t-on, comme Tobie, fait griller le foie d’un poisson?.,'. Rien'de tout cela, c’est par la police. 0 désillusion, Oaiècle positifî Toujoura le même refrain qu'a« cimetière Sairtt-Médard :

De par )« roi, défense à Dieu r .. ■ . • • ,

D'opérer miracle en ce lieu.

. ■ > • IliJt

Voici les détails qu’ou me donna : Pour les sonnettes, il est. bien vrai qu’elles étaient mises en mouvement, sans qu’on ait pu découvrir par quel moyen. La pluie de pierres se réduit à quelques morceaux de coke lancés contre les fenêtres ; quant à l’averse d’eau, il n’y a eu qu’un fait : une personne montant l’escalier a reçu une ondée sur la tête, comme si, l'eau eût été lancée avec une pompe ou plutôt avec le joujou appelé c/i/oirc. Il y a bieu loin de là au débordement dont

parle la Revue, et si les habitants ont cru un instant à un second déluge, cet instant adù être bien court. Les habitants à ce qu’il paraît, n’ont vu dans tous ces faits rien de diabolique ni de surnaturel, mais seulement une espièglerie beaucoup trop prolongée. Us ont signé une pétition à M. le préfet de police pour le prier d’envoyer des agents sur les lieux afin de rechercher les auteurs de tout ce tapage. Vertu magique du mot police 1 Dès le jour où la pétition a été signée, tout est redevenu calme, et les sonnettes rentrant dans le devoir n’ont plus obéi qu’aux règles de la civilité et de l'étiquette.

Malgré cet heureux dênoùment dont s’applaudissent les locataires, le mystère n’est pas parfaitement éclairci. On n’a pas découvert les auteurs des faits ni leurs procédés. Rigoureusement on ne peut affirmer que la menace de l'intervention de la police ait été la cause de la cessation du vacarme : mais il faut convenir du moins que cette explication est extrêmement vraisemblable. Si c’étaient des invisibles, des esprits qui se fussent amusés (on ne sait dans quel but) à ces mauvais tours d’écolier, il est plus que probable que ces êtres surnaturels n’auraient pas quitté la partie précisément au moment où la police allait mettre le nez dans l’affaire. Des esprits ne craignent pas d’être empoignés, mis au violon,.condamnés à l’amende et aux frais; on ne comprendrait pas que le tricorne d'un sergent de ville les mît en déroute, eux qui sont habitués à braver l’étole et le goupillon; l’occasion aurait été belle de mettre en évidence la supériorité du pouvoir spirituel sur le pouvoir physique de l’homme; il aurait été curieux de les voir rosser le guet et asperger les municipaux. Fuir au moment de la lutte, c'est donner une pauvre idée de leurs forces, cela équivaut presque à signer leur déchéance et même un certificat de non existence...

Sans doute, il y a des faits qu'on ne peut expliquer et qui peut-être mieux étudiés révéleront un jour l’existence de causes qu’on ne soupçonnait pas. Mais de ce que des tours d'es-piéglerie auront pu réussir sans qu'on ait découvert les ficelles, il ne s’ensuit pas qu’on soit autorisé à les attribuer à des

êtres surhumains. N’imitons pas la bonhomie du célèbre cor-billonncur surnommé Gobe-tout qui, trouvant un billet dans le trou de la serrure et ne pouvant, dans son ingénuité, deviner comment une main humaine avait pu introduire ce papier, n’hésita pas à l’attribuer à l’esprit Hihahel dontil voyait la signature.

Rappelons-nous combien de fois des événements semblables à ceux de la rue du Bac et qui semblaient inexplicables, ont été expliqués et reconnus pour être produits par des moyens d’une extrême simplicité.

Sachons observer judicieusement, et ne nous empressons pas, aussitôt que nous sommes embarrassés, de faire honneur aux esprits de tout ce qui met notre pénétration en défaut.

A. S. Morin.

Les journaux américains annonceut la conversion au catholicisme de mademoiselle Marguerite Fox, célèbre médium, une des premières qui ait présenté la faculté de produire des coups mystérieux ; depuis une dizaine d’années, elle tenait une espèce de cabinet de consultations où toute personne, moyennant un prix uniforme, était admise à évoquer les esprits qui répondaient par les coups. Mademoiselle Fox a été baptisée en grande pompe dans l’église Saint-Pierre de New-York. Il serait intéressant de savoir si elle conserve ses facultés extraordinaires qui, comme on sait, sont attribuées par le clergé à l’action des démons.

BIBLIOGRAPHIE.

SPIRITUALISME, failt curieux précédés d'une lettre à M. Mabru, par Paul Auguez. Broch. in-8; chez Dcntu el Baillière , 1858.— Traité pratique de magnétisme humain, par Ferdinand Rouget. 1 petit vol. in-12, Baillière et Dentu, 1858.— Les Noms de baptême et Ict Prénoms, par L'douard-Léon Scott; 2* édit. 1 petit vol. in-12, lloussiaui, éditeur. Paris, 185S.

M. Auguez est un des champions les plus ardents du spiritualisme et du magnétisme ; il a déjà publié plusieurs ouvrages estimables dont nous avons rendu compte ; il ne laisse, échapper aucune occasion de prendre la défense de la doc*i trine à laquelle il s’est dévoué. Il a voulu rompre des lances contre le terrible M. Mabru, dont le livre a été apprécié, critiqué, combattu dans plusieurs journaux. Nous pensions que M. Auguez , n’étant pas circonscrit dans le cadre étroit d’un article et pouvant s'étendre à son gré dans un ouvrage de longue haleine, aurait donné une réfutation complète de son adversaire, aurait pris un à un ses arguments, ses sophismes, ses objections, et en aurait fait justice. Il n’a pas jugé à propos de s’imposer une pareille tâche ; il s’adresse à M. Mabru comme s’il ne l’avait pas lu, et se boriië à lui dire : Vous niez le magnétisme, je vais vous opposer dés faits. Certes, si ces faits étaient bien choisis, cette manière de procéder aurait bien ses avantages. Mais malheureusement, dans les exemples que prend M. Auguez,,. il n'est question ni de magnétisme, ni de somnambulisme, ainsi que nos lecteurs vont en juger tout à l’heure. Ces faits peuvent -néanmoins avoir une grande importance , leur publication peut être d’un grand intérêt ; mais ori ne voit pas ‘ pourquoi l’auteur a inscrit en tête de son ouvrage le nom de M. Mabru ; car il ne s’occupe aucunement des attaques de ce fougueux ennemi du magnétisme.

Voici les faits rapportés par M. Auguez : Il nous parle d'abord des communications d’un revenant (sic) ; c’était l’esprit d’un Romain mort au sixième siècle. Il ne nous dit pas par quel mode se sont faites ces communications. Ces détails eus-

sent été cependant fort nécessaires, car il s’adresse, non pas à des coréligionnaires familiarisés avec les moj ens habituels de converser avec les morts, mais à des incrédules qu’il veut convaincre, et auxquels il faut d’abord prouver la réalité d'un pareil commerce. 11 ne suffit pas de dire que cet esprit écrit par la main d’un médium ; il y a encore à établir que cette écriture n’est pas l’œuvre personnelle de ce médium.

Ce Romain écrit dans une langue inintelligible, bien qu’on y trouve mêlés quelques mots de latin. Et c’est là ce qui excite l’admiration de M. Auguez. Voici un échantillon de ce baragouinage d’outre-tombe : « Dommy pticem tory : lu in curcerem anty aquam noby tœnes. » Il défie les incroyants de donner une explication satisfaisante, soit du fait en lui-même, soit a de ces signes et « de ce latin eu apparence intraduisibles. »

La tâche des incroyants ne nous parait pas bien rude. Tous les jours, on entend des fous articuler des mots sans suite, et personne ne voit là de prodige; un farceur peut s’amuser à jouer le rôle de médium, ce qui n’est pas difiieile, tracer au hasard des mots dénués de sens , n’appartenant à aucune laogue connue, et y mêler quelques bribes de latin, comme Sganarelle quand il s’improvise médecin; ou bien encore ua individu jouissant habituellement de ses facultés intellectuelles , se figurant qu’il va entrer en communication avec les esprits , arrive à un état extatiforme, rêve les yeux ouverts , croit entendre des oracles et.retrace par l’écriture les mots incohérents qui frappent son imagination en délirç. Ce serait vraiment perdre son temps que de chercher la clef du jargon obtenu dans de telles circonstances, d’autant plus

1 qu’il est toujours possible, en arrangeant les mots, en intercalant des lettres et des syllabes , non-seulement de trouvér un sens à un assemblage confus de consonnes et dé voyelles, mais même d’y trouver le sens qu’on voudra.

Il faut convenir que de pareils faits sont peu propres à convaincre M. Mabru ou tout autre incrédule, même en tes supposant doués de toute la candeur, de toute là bonne' vo-k>mé désirables. !l méfiai *

Le second exemple est un1 cas 4e prévision. Voici en quoi il

consiste : Une dame, qui faisait des expériences d'hydroman-cic, vit une chambre à deux lits ; dans l’un était un mourant qu’elle reconnut pour l’ami des assistants, M. X..., employé dans une administration ; elle voyait à coté de lui une jeune femme et deux enfants, tous vêtus de noir ; elle pensa que c’étaient sa femme et ses deux fils. Cette prédiction parut fort étrange , car M. X... était d’une constitution robuste et jouissait d'une forte santé. Cependant, environ neuf mois après la vision dont nous venons de parler, M. X... fut atteint subitement d’une bronchite aiguë et d'un engorgement du poumon ; le mal fit des progrès, et l’on conçut de graves inquiétudes. M. Auguez m’écrivit alors une lettre cachetée que je ne devais ouvrir qu’après un certain événement qu’il ne me désignait pas. Un mois après, il me fit savoir qu’il y avait lieu à l’ouverture ; elle eut lieu en présence de témoins, et le cachet en était intact. Il nous apprit alors les faits que je viens de relater et qui m’étaient inconnus , et il nous annonça la mort de M. X..., qui était arrivée un mois.après l’envoi de la lettre.

Nous avons toute confiance dans le témoignage de M. Auguez que nous connaissons comme homme d’honneur. Mais, pour le public, il faut autre chose que des considérations personnelles. L'incrédule auquel on s’adresse et dont M. Mabru est le type, ne manquera pas d’objecter que la lettre cachetée n’a été adressée qu’à une époque où la maladie avait fait de tels ravages, que la mort était facile à prévoir; que la date certaine de cet envoi rie suffit pas pour prouver authentiquement l’existence d’une prévision extraordinaire ; qu’il aurait fallu qu’aussitôt après la prédiction de l'hydromancienne, on la consignât dans un écrit cacheté en lui donnant une date certaine ; qu’à défaut de cette précaution , les personnes même de très-bonne foi peuvent, sans s’en apercevoir, altérer le souvenir qui leur est resté de la prédiction, et l'accommoder aux événements, au fur et à mesure qu'ils ont lieu.

Enfin, M. Mabru insère une lettre de M. Tiedemann sur deux séances du fameux Home : c’est là un document précieux ; on ne saurait trop engager tous ceux qui ont assisté à des exer-

cices du thaumaturge, à en publier des relations détaillées, afin que par la réunion et la comparaison de ces renseignements , on puisse se rendre compte des facultés extraordinaires qui lui sont attribuées, et étudier la nature des phénomènes étranges qu’il produit.

M. Auguez tire de ces faits les conclusions suivantes : « L’esprit est partout ; sa puissance , presque généralement méconnue, peut, si elle est soigneusement, rigoureusement étudiée, doter l'humanité de nouveaux moyens d’arriver à la régénération vers laquelle elle se sent providentiellement poussée. L’esprit occupe tout ; l’esprit est partout d’essence intelligente; seulement, au degré de la multiplicité de ses instruments ou de la restriction de l’organisme auquel il fonctionne, organisme plus ou moins réduit ou plus transcen-dantalement gratifié, cet esprit est riche ou restreint dans les moyens de se manifester. » Le lecteur trouvera sans doute que ces idées gagneraient à être exprimées en termes plus clairs, plus accessibles au commun des intelligences.

Après la lettre à M. Mabru vient l’extrait du compte-rendu du banquet mesmérien du 23 mai dernier ; on y trouve des toasts qui ont été insérés dans ce journal. Nous devons seulement relever une note. A propos de l’interdiction par la police des séances publiques de magnétisme, M. Auguez fait les réflexions suivantes : « Beaucoup de magnétistes pensent, et nous sommes de leur avis, que celle prohibition n'a qu’un tort, c’est d’arriver un peu tard. Le magnétisme est à la fois une divine chose et le fléau d’une lave infernale ; cela dépend des natures qui lui servent d’instrument. Il faut donc le démocratiser aux mains généreuses et compatissantes; mais les autres ne doivent en avoir connaissance que lorsqu'elles auront appris qu’il porte en lui le châtiment des coupables, sans qu’ils puissent d’aucune manière s’en affranchir. Et châtiment d’autant plus terrible que l’on a plus outrageusement détourné de sa mission l’agent qui tend sans cesse aux conditions du salut. »

Nous voyons avec peine un magnétiste aussi distingué applaudir à une mesure de l igueur. Regretter qu’elle soit ve-

nue trop tard , c'est déclarer implicitement qu'il se passait des abus auxquels ¡1 était urgent de porter remède ; il aurait fallu préciser cette accusation. Applaudir ainsi à un désastre , c’est se montrer injuste envers des sociétés qui ont rendu des services incontestables, qui, dans leurs séances publiques, ne se sont jamais écartées des convenances, et où l’enseignement a toujours eu pour but d’exhorter aux applications utiles et bienfaisantes du magnétisme , c’est-à-dire au traitement des maladies, au soulagement des souffrances. On peut abuser des meilleures choses, et la possibilité de l’abus n’est pas une raison suffisante pour motiver une prohibition qui priverait l’humanité de l’usage moral et consciencieux. En enseignant le magnétisme avec sagesse , comme on l’a fait dans les sociétés dont il s’agit, on en expose les avantages et les inconvénients, et l’on apprend à en éviter les dangers ; loin de fournir au* gens pervers des armes qu’ils sauront toujours bien trouver, on donne aux honnêtes gens les moyens de se préserver de leurs machinations ; la morale ne peut donc que gagner à ce que la lumière luise pour tout le monde.

M. Auguez voudrait qu’on n’initiât au magnétisme que les hommes généreux et compatissants ; mais comment les distinguer? Quelles épreuves exigera-t-on des néophytes? Quand on voit que dans le collège des douze apôtres il s’est glissé un traître, on ne peut guère se flatter d’avoir la main plus heureuse que le Sauveur, et l’on peut regarder comme certain que, malgré toutes les précautions, le sanctuaire sera envahi par des individus malintentionnés. D’ailleurs, ce n’est pas seulement par la propagande orale que se répandent les connaissances, c’est aussi par les livres; les innombrables ouvrages qui ont été publiés sur le magnétisme, en ont dévoilé tous les secrets ; tout le monde peut indistinctement aller y puiser, et aucune puissance ne parviendrait à étouffer ces foyers d’où rayonne la science. Même pour les découvertes à venir, ce serait une tentative insensée que de songer & en renfermer la connaissance dans un petit cercle d'adeptes, à ressusciter les congrégations égyptiennes qui se tenaient séparées du vulgaire par une barrière infranchissable ; il se trouverait toujours quelque barbier du roi Midas, qui

confierait le secret aux roseaux, et les roseaux le répéteraient à tous les vents.

La brochure se termine par une relation fort intéressante qu’a publiée en Amérique un M. Evvers ; on y raconte qu’un individu nommé Lane, étant moribond et privé de sentiment, sa main a écrit des discours étendus sur le spiritualisme, et que vingt-quatre heures après sa mort, sa main, mue par une force mystérieuse, s’est encore mise à écrire , a continué le travail de la veille, et a donné la description du moiiilc spirituel. On conçoit que des faits aussi prodigieux ne puissent être accueillis qu’avec une grande circonspection. Le nom de M. Etvers est trop pet» connu en Europe pour que son attestation soit regardée comme une autorité suffisante. II y a un point essentiel qtx’il aurait fallu mettre hors de doute, c’est la réalité de la mort de l’indrtidu. Or, il est reconnu en médecine, qu’il n’y a aucun signe certain de la mort, et quelle' n’est indubitable que quand a lien la décomposition putride. 11 ne serait donc pas impossible que la mort de Lane n’ait été qu’apparente, et que, malgré sa torpear, il eût trouvé encore assez de force pondant quelques instants pour1 écrire, surtout s’il avait eu l’esprit vivement frappé de la nécessité de remplir un devoir sâoré avant de mourir.

— Toulouse es* une des vflle&'de France ofl le magnétisme a fait le plus de progrès et Compte le phtâ de séctateurs éclairés. C’est de Toulouse que nous Vient le petit ouvrage de' M. Rouget, élève du regrettabïe Olivier. L'anténr, après une longue et laborieuse pratique dans laquelle il a eu le bonheur d’obtenitf de nombreuses1 et brillantes cures, notis donne le résultat de son expérience et de sés méditations. Il présente de sage* avis et des règles utiles à l’üsage de céux qui voudront entrer dans cette carrière. Mais, du moment où il voulait renfermer son travail dans des Rmltes étroites, il aurait été préférable de négliger la partie théorique pour donner plus de placo aux notions élémentaires, indispensables au commençant, de manière à faire de l’ouvrage un manuel qui pût guider dans les cas les plus ordinaires. Quant aux idées

systématiques de l’auteur, il se borne en général à les énoncer, sans entrer dans aucun développement. On concevrait ce laconisme si un écrivain formulait les résultats des études scientifiques, tels qu'ils sont généralement adoptés, et se référait pour les démonstrations à des traités faisant autorité sur la matière. Mais M. Rouget émet des théories fort étranges, qui sont loin d’être en harmonie avec l’enseignement des ma-gnétistes les plus renommés, et dont l’énoncé même n’est pas toujours bien clair ; il ne fait aucun effort pour convaincre le lecteur de la vérité de ses assertions, et il ne lui indique pas les moyens de les vérifier.

Ainsi, d’après lui, le fluide magnétique est une émanation de l'âme et « pricipalement une émanation du principe vital spirtualisé (p. 95).» L’âme étant immatérielle,on ne conçoit pas qu’il puisse en émaner un fluide, c’est-à-dire de la matière. Quant au principe vital qu’on aurait bien dû définir, s’il est immatériel, c’est-à-dire spirituel, il ne peut se spiri-tualiser; s’il est matériel, il est parfaitement absurde qu’il se spiritualise , ou, en d’autres termes, que la matière devienne non-matière. Nous savons qu’on trouve de ces transformations chez les Pères de l’Eglise ; mais si ces vénérables écrivains brillent par la beauté de la morale, il est dangereux de les prendre pour guides en fait de logique.

Suivant M. Rouget : « Dans le somnambulisme lucide, il y a désunion des deux principes qui composent l’âme ; l’esprit remonte vers son tout et jouit de toutes ses facultés; le principe vital remonte vers son tout, et sa communication à la matière brute devient plus directe au sortir de cet état ; dans cette désunion, le corps conserve un reflet de l'union des deux principes qui composent l’âme, reflet qui empêche la désunion complète, c’est-à-dire la mort. » Nous doutons qu’après cette explication de la lucidité, le lecteur se trouve plus avancé et voie plus clair dans la question.

L auteur, à la suite d'observations peut-être un peu superficielles, arrive à des conclusions ou très-hasardées ou même démenties par un ensemble de faits qu’on peut regarder comme acquis à la science.

,, Si, dit-il, vous altérez chez un homme la cavité du cerveau qui remplit les fonctions de la mémoire, il la perdra ; ce résultat peut être l’effet d’une maladie. Artifice ou maladie, prenez ce même homme, plongez-le en somnambulisme magnétique , appelez son esprit sur une partie quelconque de son corps, cette partie remplira les fonctions de la mémoire aussi bien que la cavité du cerveau privé de cette faculté. » Pour justifier une pareille affirmation , il n’aurait fallu rien moins que des relations détaillées et authentiques, d’expériences suivies en présence d’hommes compétents pour apprécier les lésions des cavités.

Nous ne savons sur quels faits il se fonde pour assurer que la main gauche attire et absorbe, tandis que la droite repousse et communique (p. 108). Il déclare que les somnambules en général ont un éloignement invincible pour ce qui est mal ; ont horreur de l'égoïsme et de la cupidité ; qu’ils possèdent tous les nobles sentiments au plus haut degré , surtout celui de la pudeur (p. 88). Si c’est là le portrait fidèle des sujets qu’il a formés, nous l’en félicitons et nous désirons vivement qu’on lui confère le privilège du recrutement des somnambules; qu’il s’empresse de purifier les étables d’Augias.

Il professe cette doctrine que les somnambules sont infaillibles en matière de maladie : nous avons à plusieurs reprises combattu cette erreur dangereuse, et prouvé la nécessité du contrôle. Quelque admiration qu’on éprouve en voyant des faits de lucidité, quelque enthousiasme qu’inspirent les sujets qu’on a formés, nous en appellerons à M. Rouget lui-même, nous lui demanderons si, en recueillant soigneusement ses souvenirs, il ne se rappelle pas avoir trouvé une seule fois ses somnambules en défaut. Qu’on fasse une expérience solennelle en présence d’observateurs judicieux et qu’on présente à un somnambule un certain nombre de malades. Si toutes les réponses sont exactes de tout point, il faudra crier miracle et décerner la palme à ce phénix si longtemps et si vainement cherché. Heureux Eldorado où les somnambules, modèles de foutes les vertus, jouissent d’une lucidité qui ne se dément jamais !

C'est avec regret que nous signalons les points sur lesquels

nous sommes en désaccord avec M. Rouget dont l’œuvre n’en est pas moins utile au magnétisme. Nous terminerons en lui empruntant une citation à laquelle nous adhérons de tout cœur : « Lors même que les explications des phénomènes seraient erronées, les faits n’en restent pas moins une preuve évidente du vrai. »

— Comment faireunlivre surlesnomsde baptêmeet les prénoms? Beaucoup de gens se figureront sans doute que c’est là une matière ingrate, aride, bonne tout au plus pour faire briller l’érudition de quelque pédant ayant un nom en us. Eli bien, M. Scott y a trouvé matière à un petit ouvrage charmant, plein d’imagination, de grâce et de poésie ; il y a réuni une foule de connaissances qu’il a su présenter de la manière la plus attrayante. 11 fait voir l'importance du nom, l’influence qu’il peut eXBrcer sur l’individu; il retrace les usa-gôs des divers peuple* qui ont contribué comme éléments à la composition de la nation française, et donne des détails fou intéressants sur les usages, sur la signification des noms, etc. La lecture de cet ouvrage est très-attachante, et dans plus d’un passage où l’auteur dépeint l’influence des> êtres moraux les uns siir tes autres, nows avons cru trouver une certaine affinité avec les doctrines du magnétisme; c’est à ta titre que noos île recommandons plus particulièrement à do* lecteurs habituels, qtri sans doute partageront notre sympathie pouf l’auWür. A. S. Morw.

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»„ - Avi» aux Abonnés.

Les expériences magnétiques, prltae des abonnés du Journal, suspendues pendant le* grande» chaleur», reprendront le mercredi 20 octobre, à huit h«üres du soir.

Baron dü POTET, propriétaire-gérant,

CAUSERIES MAGNÉTIQUES.

QUATORZIÈME CAUSERIE.

Patience et persévérance.

DU FLUIDE MAGNÉTIQUE.

(Satie.)

J’ai dit que le fluide magnétique était un composé, qu’il n’était point homogène ; en eilet, ses qualités sont tantôt toniques, puis sédatives; il excité les émonctoires, serre ou dilate les tissus ; il fait suer, il purge, il augmente la circulation comme il en diminue l’activité ; il est parfois diurétique, provoque souvent les menstrues, les rétablit presque constamment lorsqu’elles sont supprimées ; il fait voyager les matériaux déposés dans les tissus; il fait suppurer ou sécher les émonctoires artificiels, tels que cautères, vésicatoires, etc. ; les plaies même en reçoivent un bénéfice marqué, elles deviennent plus belles, et le travail de la cicatrisation est meilleur ; il donne accidentellement des maux de tête et fait passer ceux qui existent au moment de la magnétisation ; il réveille les douleurs anciennes, calme les douleurs présentes ; il va, vient, fouille partout et détermine ainsi d’innouibra-ble^effets tous différents les uns des autres.

Cet agent a en lui les vertus éparses que l’on rencontre clans les plantes médicinales et dans les minéraux ; il n’est donc aucun agent qui puisse lui être comparé et produire des effets si divers. Veut-on un exemple de plus de ses propriétés? Celui-ci va montrer que cet agent est semblable à la force médicatrice qui est en nous et qui imprime à tous nos organes un mouvement régulier, conforme à la loi prescrite. Voici cet exemple :

Tohe XVII. — N°. 44. — î° Série. — 2J Octobre 1858. 19

J’ai endormi des milliers d’êtres qui n’avaient dans le moment qui précédait la magnétisation aucune envie de dormir, moi-même je n'avais nulle intention à cet égard, mais seulement le désir de produire un effet quelconque. Eh bien, dans des cas très-connus des médecins où le sommeil est presque permanent, où rien ne peut rétablir l’équilibre entre la veille et le sommeil, j'ai, par le seul fait de la magnétisation, fait cesser le sommeil. Bien souvent mon intention , en voyant cette disposition , fut de conduire cette crise jusqu’au somnambulisme pour tirer de cet état des indications favorables au traitement de cette maladie, car c'en est une et des plus graves, l’agent en savait alors plus moi, puisqu’il déterminait un phénomène tout opposé à ses effets habituels, mais nécessaire ici. Je pourrais citer encore beaucoup d’autres faits analogues; des cas où je voulais absolument réveiller les dormeurs magnétiques, lorsque leur sommeil m’avait paru infiniment trop prolongé, c’était en vain ; il y a des sommeils critiques, la nature a besoin de leur durée pour détruire de puissants obstacles au rétablissement de la santé ou déterminer des changements nécessaires dans quelques appareils de l’organisation humaine; changement nécessaire, mais que nous ne pouvons apprécier, tant le travail est caché et secret. J’ai vu des gens affectés de maladies graves sortir de chez moi guéris à la suite d’un long sommeil; des hypocondriaques, des mélancoliques, perdre leurs idées de tristesse et leurs rêveries, lorsque leur sommeil n’avait point été interrompu dans sa durée.

La seule cause qui fait ordinairement précipiter le réveil, c’est que les dormeurs, n’ayant pas toujours besoin dp^som-meil, s’y complaisent pourtant et en demandent la perpétuité, parce qu’ils se trouvent bien dans cet état qui leur paraît infiniment plus supportable que la veille. On les réveille dans la crainte qu’ils n’abusent.

Quel beau sujet d’études! quelle source de méditations! Pour moi, ici est la vraie médecine, la vraie philosophie. On contemple l’ouvrage de Dieu comme l’a fuit Dieu ; la grandeur de ce chef-d’œuvre se montre dans sa sublimité. Cette contemplation conduit à la science, et, nous l’avons dit, à la

sagesse. Les savants y viendront un jour; ils admireront avec plus d’enthousiasme que je n’en éprouve, car, sachant plus que moi, ils verront encore mieux tout ce que la nature a fait pour conserver son propre ouvrage, et les moyens si ingénieux et pourtant si simples qu’elle emploie pour ses diverses opérations.

Le danger n’est donc pas très-grand pour les magnétisés d’être soumis au magnétisme par un ignorant, lorsque surtout celui-ci ne cherche qu'à guérir. L’agent, obéissant à sa propre loi, circule partout en produisant des effets généraux dus à sa propre nature, car le magnétiste novice, ne sachant pas encore que le fluide magnétique peut se revêtir de pro priétés de convention par notre seul désir, laisse la nature libre, s’en rapportant à elle. Les choses changent d'aspect quand celui qui opère sait et connaît son instrument, car dès que le magnétisme est une force, qu’il est enfin quelque chose à la disposition de l’homme, celui-ci peut en abuser.

Parmi les propriétés incommensurables de cet agent, il en est une incroyable d’abord, lorsqu’on n’en a pas vérifié avec soin l’existence, c’est qu’il passe à travers les murailles les plus épaisses, c'est qu’aucun corps matériel ne l’arrête dans sa course et qu’il va trouver la personne sur laquelle vous l’avez dirigé, celle à laquelle vous avez pensé. Dirigé d’un Heu élevé vers un lieu plus bas, il arrive de même que de bas en haut. 11 est, comme la pensée, invisible ; et lorsque nous marchons vers un lieu habité par des personnes avec les* quelles nous sommes en rapport, il peut être senti, annoncer ainsi notre approche, bien que, souvent, nous n’ayons eu nulle intention de nous servir de ce messager. Le proverbe populaire qui dit : Quand on parle du loup on en voit la queue est né d’une observation répétée dont la cause réelle était ce magnétisme, qui explique aujourd’hui d'une manière rationnelle ce fait sans lui inexplicable. Ce que nous disons aura sa sanction et sera accueilli comme une évidente vérité, lorsque les hommes auront appris à diriger avec plus de rectitude cette électricité vivante.

Les savants voulaient, avant de croire au magnétisme, qu’on

leur donnât d’abord un système, une doctrine ; ils voulaient qu’on expliquât devant eux le magnétisme. Ils disaient : Aous croirons lorsque nous pourrons expliquer. S’ils attendent pour faire entrer dans le domaine de la science qu’on leur dise ce qu’est ce magnétisme; qu’on leur fasse connaître sa loi, toute sa loi ; sa nature intime, son composé, la source d’où il tire son origine, son réservoir commun. son point de départ et celui d’arrivée , ils attendront longtemps encore, car le magnétisme est comme la vie qui est en nous-mêmes et qu’on ne peut expliquer ni comprendre, mais que l’on ne peut refuser d’admettre comme un fait. Nous aurions beau jeu avec les savants , si, à notre tour, nous leur demandions ce que c’est que le calorique, ils ne répondraient pas non plus, mais ils nous montreraient ou nous indiqueraient les propriétés irrécusables de cet agent, laissant aux hommes de l’avenir à en découvrir davantage.

A tous ceux qui nient le magnétisme, offrons des faits; livrons à leur sagacité , à leur esprit, de quoi en exercer les hautes facultés, et s’ils trouvent plus que nous, ils mériteront nos hommages et deviendront nos maîtres.

Baron dü Potet.

{La suite au prochain numéro.)

Nota. Je dois publier encore quelques causeries, toutes ne sont que la préface d’un livre que je vais mettre sous presse et qui aura pour titre : Les Singularités du Magnétisme, du Somnambulisme et nu Spiritualisme. Cet ouvrage contiendra des données nouvelles et des règles de pratique ; il sera bien propre à fixer les idées sur les propriétés merveilleuses de l’âme humaine.

CLINIQUE.

CURES SPIRITUALITES.

Nous continuons à emprunter aux journaux américains quelques relations de cures attribuées aux Esprits ; nous pensons qu’il n’est pas sans intérêt de les rapprocher des cures magnétiques.

Le Spiritual Telegrah, du 28 août, contient la lettre suivante, datée d’Ontario (Indiana), du 6 août dernier :

« Après m’être rétabli d’une maladie, je devins médium pour les coups; comme ces faits ne diffèrent pas de ceux qui ont été souvent relatés, je n’en dirai plus rien. Je vais seulement raconter des événements plus importants.

« En février 1852, la fièvre typhoïde sévit dans toute ma contrée, et j’en fus atteint le l"mars. Mes amis les spiritua-listes m’engagèrent à suivre leurs instructions, m’assurant que je serais promptement guéri. Ils me prescrivirent de me lever le matin comme d’habitude, quand même je devrais me recoucher cinq minutes après ; de ne prendre aucune médecine, et de boire de l’eau froide à discrétion. Pendant une semaine, il sembla douteux qu’ils pussent triompher de la maladie ; mais leurs bons conseils me donnèrent la force de persister à suivre leur régime, et cinq jours après je commençai à aller mieux. Puis, après un autre intervalle de quatre jours, je fus en état d’aller à pied chez ma sœur (à une distance d’un quart de mille). Je me sentis un peu mal à l’aise, et je ne revins pas chez moi ce jour-là. Le lendemain (jeudi), ne me trouvant pas aussi bien que la veille, je restai au lit pour prendre du repos avant de retourner chez moi. J’étais couché sur le dos, ma tête penchée à gauche, et les yeux fermés, quand je sentis sur mon frontle contact desdoigtsd’unemain ; ce toucher était d’un froid glacial. Avant même que j’aie eu le temps

de chercher clans ma pensée à qui j'avais affaire, je vis et je sentis deux mains passer sur moi en sens iliflérents entre la tête et l’estomac. Je tournai la tête et je vis distinctement une personne se tenant tout prés de mon lit. Pendant un instant très-court je pus voir ses traits d’une douceur céleste ; puis tout disparut. Cette personne avait le haut de la tête entièrement chauve, des boucles de cheveux blancs comme la neige étaient ramenées des tempes jusque derrière la tête, une longue barbe blanche descendait sur la poitrine. Sa figure avait une telle expression de calme bienveillant, que je ne l’oublierai de ma vie. Dès ce moment ma santé s'améliora rapidement, et en trois jours je fus parfaitement guéri.

v En 1855, j’éprouvai une dyspepsie et une maladie de foie qui mirent ma vie en danger ; je souffrais en outre d’une douleur de côté tellement violente qu’il m’était impossible de rester couché. On fut obligé de me hisser dans mon lit. Je n'appelai pas de médecin, mais j’eus recours aux invisibles. Nous avions dans notre famille une servante allemande qui était un très-bon médium-guérissant. Elle se trouva influencée un soir que je souffrais horriblement. La douleur s’étendait jusqu’à l’épaule et au col, les muscles et les nerfs étaient enflés d’une manière effrayante, une tumeur se forma sur mon col. Les esprits m’annoncèrent qu’ils me guériraient. La servante aussitôt commença sur moi ses manipulations. Je sentais la douleur se retirer chaque fois que ses mains passaient sur moi. En quelques moments je fus entièrement délivré de mes souffrances. Les esprits m’ordonnèrent de rester couché et en repos. Je dormis toute la nuit, ce qui ne m’était pas arrivé depuis longtemps, et je ne me ressentis plus de ces maladies. Les esprits me dirent que comme médium je dissiperais moi-même la tumeur du col et la dyspepsie, ce qui eut lieu à ma grande satisfaction et à celle de mes amis.

« Peu de temps après, mon père et un jeune homme du voisinage furent atteints d’une fièvre bilieuse, un Esprit se chargea de traiter mon père ; en deux jours la fièvre fut dissipée, et il put vaquer à ses occupations ; pendant le même

temps, le jeune homme fit venir un médecin, sa fièvre tint bon, et il lui fallut trois ou quatre semaines avant de pouvoir se lever. Comme il était hostile au spiritualisme, il ne voulut pas permettre aux Esprits de rien faire sur lui.

« Dans l'été de 1855, ma mère souffrit cruellement d’une névralgie à la tète et aux yeux. Vers le milieu de juin, il lui arriva un jour d’éprouver des douleurs si violentes qu’elle était presque hors d’elle-même. Je sentis ma main serrée par une main invisible qui me conduisit à travers un verger, derrière la maison, dans un champ marécageux où je cueillis les racines de certaines plantes, les feuilles de quelques autres, et une mousse épaisse. Ensuite je fus conduit vers le mur de clôture ; ma main fut attirée par une force irrésistible au fond d’une cavité d’où je tirai une peau de serpent que je rapportai au logis avec les autres objets que j’avais recueillis. Je posai ensemble les feuilles, les racines et la mousse, avec la boue adhérant aux racines. Je mis le tout dans une fine mousseline, je l'humectai d’eau froide, je plaçai la peau de serpent sur le linge, et je posai cet emplâtre sur l’œil de la malade : en cinq minutes, elle fut entièrement délivrée de ses souffrances ; et depuis ce temps-là elle n'a plus ressenti de névralgie. »

Harriei M. Vincent.

COMMUNICATION MAGNÉTIQUE.

Tonin est fils d’un père somnambule naturel.

Depuis 1 âge de sept ans, il donna lui-même des signes de somnambulisme pendant une période de sept à huit jours et fournit ainsi une preuve de la puissance de l’hérédité en matière de maladies. Mais cette curieuse affection ne devait point s’arrêter là. A l'âge de vingt ans, il tomba malade, et

l’état uomnambulique reparut; pendant quinze jours consécutifs il se leva à dix heures du soir jusqu'à deux et trois heures du matin, accomplissant divers actes qui excitèrent au plus haut point l'étonnement et la curiosité. Les personnes qui l’entouraient, ne connaissant pas la valeur de ses facultés , s’amusaient à lui cacher divers objets à des distances même très-éloignées, et le somnambule finissait toujours par les découvrir.

Depuis quelques mois, M. R..., de Lyon, l’auteur de cette communication , l'a pris à son Bervice. Il n’ignorait pas les faits précédents et pensait que, par le moyen du magnétisme, îl parviendrait à régulariser l’exercice des facultés que Tonrn avait déjà montrées. Le résultat est venu confirmer, dépasser même les espérances qu’il avait conçues. Il le magnétise régulièrement quatre ou cinq fois par semaine, et la lucidité du somnambule n’a jamais fait défaut, chaque séance en offre des cas extraordinaires.

Tous les somnambules ont une aptitude particulière plus ou moins prononcée, celle du sujet est de chercher et de découvrir les mines et tout ce qui peut être cachédans la terre. Il ne répond pas aux questions insignifiantes ou oiseuses fartes sous le prétexte d’éprouver sa lucidité. Rien ne le contrarie comme l'incrédulité d’une personne qui vient pour le faire interroger. Il est excessivement impressionnable : deux fois on l’a consulté sur des personnes qui souffraient de la poitrine et deux fois il a ressenti les mêmes souffrances que ces personnes; il est resté plusieurs jours malade et souffrant du mal gifîl avaitainsi,prii. Les remèdes qtie le médecin lui ordonnait, ainsi que ceux qu’il s’ordonnait lui-même, ne le soulageant point, un jour qu'il souffrait beaucoup, dans l’état somnambulique, il a fait une invocation à la Divinité, et après une demi-heure de relation avec un être invisible, il s’écria, s'adressant à son magnétiseur r« Il n’y a que vous qui puissiez me guérir. Demain, à neuf heures du matin, vous me magnétiserez la poitrine pendant dix-huit minutes avec la main droite, ayant soin de placer votre main gauche .sur la tête et de laisser tomber vos doigts perpendi-

culairement sur le bout de votre nez, afin d’établir un courant de la main gauche à la main droite, celle-ci devant fonctionner à la hauteur du bout des doigts de la gauche ; par ce moyen, une portion du plus pur de votre sang passera dans mon corps. Votre main gauche perdra toutes ses forces; après les dix-huit minutes, vous l’appliquerez sur le creux de mon estomac pendant cinq minutes; elle pompera tout mon mauvais sang, elle deviendra brûlante , et les cinq minutes écoulées, vous tracerez avec la main droite sur le creux de la gauche une croix allant du bout des doigts jusqu’à la saignée du bras, et vous serez ainsi délivré de tout ce que vous auriez pu prendre de mon mal : seulement il faut avoir la foi et la confiance en celui que vous savez (Dieu).

« Vous renouvellerez la séance à trois heures du soir, le même jour. «

Cette prescription fut ponctuellement exécutée, tout se passa comme il l’avait dit. Après la première séance, il fut soulagé, et, après la seconde, entièrement guéri. Le môme soir, l’appétit, qui avait disparu depuis huit jours, revint si violent, qu’il fallut le modérer. Pendant ces deux séances, et durant la magnétisation, il sortait de la tête du magnétiseur une sorte de vapeur qu’on ne pouvait expliquer par un excès de chaleur, le magnétiseur n’en accusant pas plus qu’à l’ordinaire; plusieurs personnes étaient présentes et purent constater le fait. Dans sa seconde maladie, il a été encore guéri une deuxième fois au bout de deux séances de magnétisation sur le creux de l’estomac de la durée d'une heure chaque.

Au commencement de son arrivée, on le magnétisait, démagnétisait en faisant les passes 'ordinaires indiquées par les auteurs, et on éprouvait de la difficulté surtout pour la démagnétisation ; mais depuis qu’il a indiqué lui-même la manière de le magnétiser, la difficulté a disparu. A la fin de chaque séance, on lui demande comment on doit le démagnétiser, et en suivant ses indications il se réveille sans secousses ni peine, comme par enchantement.

Plus de vingt personnes sont venues le consulter sur des mines découvertes déjà; aucune ne l’a trouvé en défaut, il

a toujours répondu exactement à ce que la science et l’observation avaient constaté. Inutile de dire que le savoir du sujet, dans son état ordinaire, est nul ou à peu près. 11 a su toujours indiquer la nature du minerai et l'épaisseur connue. A l’une il a dit que la galerie avait été découverte sous Charles VII, et c’est vrai ; ni lui ni son magnétiseur ne connaissaient cette circonstance. A l’autre, que sa galerie avait 22 mètres 15 millimètres de largeur; on l’a vérifié et on a reconnu l’exactitude de ces affirmations. A une autre, que son minerai avait 40 centimètres d’épaisseur, mais qu’il valait plus qu’un minerai qui aurait 2 mètres ; à une autre encore , que son minerai renfermait un dixième d’argent : ces deux dernières appréciations avaient été données exactement de la même manière par le chimiste qui avait fait l’analyse.

Le sujet est en relation avec des Esprits, à chaque séance, il converse avec eux ; son frère , mort depuis cinq ans, est venu deux fois le visiter et deux fois il l’a pincé au bras si violemment, que le sujet s’en est ressenti pendant plusieurs jours ; l’empreinte de la pincée est restée longtemps visible. Lorsqu’il est embarrassé sur une question ; lorsqu'il veut se lever de son fauteuil pour marcher, et puis, lorsqu’il veut y retourner, il fait des signes avec ses doigts, et de suite la lumière se fait pour lui.

Il a signalé deux mines d’or, dont une en Espagne, en ajoutant qu’elle avait été exploitée par les Espagnols avant la découverte du Pérou ; qu’ un décret espagnol intervint à cette époque qui la fit combler, ainsi que la plupart des mines d’Espagne, afin de forcer les habitants à aller exploiter celles du Pérou; et qu’un grillage en fer, placé par les Espagnols près du filon, s’y trouvait encore. Tous ces renseignements, qu’il ne connaissait pas ni son magnétiseur, sont conformes aux écrits anciens et aux renseignements qu’a donnés le gouverneur de la province. Ce dernier a ajouté qu’une compagnie avait dépensé 15,000 fr. pour faire la recherche de ce grillage en fer qui n’a pu être retrouvé. Eh bien, la première chose que le somnambule a désignée, c’est la position de ce grillage, et, à côté de lui, l'existence d’un filon en or

ayant 43 centimètres d'épaisseur, il a signalé même la présence de deux outils qui avaient été délaissés. Le grillage étant à 50 m. de profondeur, il faudrait 8 à 10,000 fr. pour en faire la découverte, mais il n’y a que des personnes ayant foi au magnétisme qui puissent hasarder des capitaux dans une pareille entreprise. 11 a signalé une autre mine d’or dans les Alpes, non loin d'un ruisseau qui charrie des paillettes d'or visibles dont on peut montrer les échantillons; le filon aurait, d’après le somnambule, 70 centimètres d’épaisseur, et il vaut plusieurs millions à cause de sa longueur. Pour le mettre à jour, il faudrait entamer un rocher de 15 mètres d’épaisseur, ce qui coûterait aussi 8 à 10,000 fr., dépense qui ne peut être faite encore que’ par des croyants ; le rédacteur de la présente, après les preuves frappantes d’une lucidité qui ne s’est point encore démentie, souscrirait hardiment pour un dixième dans chaque entreprise.

Le sujet, qui est un être très-ordinaire dans son état d’éveil , a des sentiments excessivement honnêtes et religieux dans son état somnambulique, et recommande toujours à son magnétiseur d'observer la religion, de se rendre digne des faveurs de Dieu par une bonne conduite envers lui et envers les hommes. Il prétend que la lucidité du somnambule vient en grande partie du magnétiseur et du degré de confiance que ce dernier a en Dieu , que le magnétiseur doit toujours avoir Dieu présent pendant qu’il fait les passes. Il trouve que son magnétiseur est dans d’excellentes conditions à cet égard, et il ne veut point se laisser magnétiser par aucun autre, prétendant qu’il ne veut être magnétisé que par une conscience pure et honnête, chose difficile à rencontrer ici-bas. Il prétend que chaque somnambule a sa spécialité, que la sienne est de découvrir ce qu’il y a de caché dans la terre, que Dieu a créé le somnambulisme pour découvrir ses trésors. En parlant du somnambulisme, il dit : Peut-on y croire? Non. Faut-il y croire ? Oui.

Il a signalé un trésor caché dans une forêt où, depuis longtemps, la chronique dit qu’il y a été caché. Sans connaître cette forêt aurement que de nom, ainsi que son magnétiseur, il a

ordonné qu’ils s’y rendissent tous deux, sur les indications suivantes : « partir d’un pin silué à tel endroit, se diriger « vers un chêne à. telle distance du pin, descendre jusqu’à un « rocher à telle distance du chêne, se diriger au couchant « vers un autre gros chêne ayant 2 pieds de diamètre, le « seul de cette grosseur, aller au chemin de cette forêt, au « bout duquel est une campagne blanche;... que le magné-« liseur devrait parcourir ce trajet et lui le suivre à trois « pas. » Si nous entrons dans ces détails, c’est pour témoigner le degré de lucidité du sujet. On se rendit dans la forêt, et après six heures de recherches, on a trouvé tous les points indiqués et les distances ; trois fois le sujet est tombé en défaillance en s’approchant du premier chêne, et, en ce moment, son magnétiseur se sentait une force inaccoutumée. Le soir, interrogé pour savoir si on avait bien suivi les indications et pourquoi cette défaillance, il a répondu : — « que les indications avaient été bien suivies, que l’argent se trouvait sous le premier chêne, et que chaque fois qu’il s’en approchait, les Esprits lui attiraient son fluide. Heureusement, dit-il, que ce n’était que le mauvais, tandis que son compagnon lui attirait le bon. » Il a fini en disant que ce ne serait qu’au bout de deux mois qu’il pourrait fournir la suite des indications ; il a ordonné de le magnétiser pendant ce laps de temps trois fois par semaine, le laissant à lui-même pendant chaque première demi-heure. On a suivi ses ordres, et, en effet, à chaque séance pendant la première demi-heure, il demandait doucement des renseignements à certains Esprits sur le trésor. Les deux mois expirés, il a dit : — « que dans cette forêt « se trouvait un souterrain ; que, là, se trouvait une salle dans « laquelle on magnétisait autrefois ; que, dans la salle, il y « avait une caisse renfermant des ornements d'église d’une h valeur de 50,000 fr. et une caisse renfermant des louis en « or et des écus de 6 fr. pour 122,000 fr. ; que plus loin, dans « le souterrain, il y avait une caisse renfermant des papiers « qui indiquaient la place d’autres trésors cachés dans ce n itjème lieu ; que, pour pénétrer dans le souterrain, dont o Pourerture était soigneusement bouchée, il fallait creuser

« à un endroit qu'il a désigné, et qu’on le trouverait à une « profondeur de 22 mètres. » Ce puits occasionnerait une dépense de .1,500 fr. qui ne peut être faite que par des croyants. Le rédacteur souscrit pour une moitié.

On lui a fait remarquer que déjà plusieurs somnambules avaient, dans d’autres lieux, signalé des trésors qui n’avaient pas été trouvés ; il a répondu que ces somnambules étaient guidés par de mauvais Esprits, tandis que lui était éclairé par la lumière de Dieu et qu’on pouvait en toute confiance suivre ses indications. Enfin, il a une grande- confiance dans le magnétisme pour la guérison des maladies, surtout si les passes sont faites par son magnétiseur d®nt le fluide, dit-il, est très-puissant et bienfaisant.

Il recommande de ne laisser approcher personne de lui ; tout le monde doit se tenir derrière son magnétiseur, parce qu'il est contrarié souvent par des fluides nuisibles.

11 explique que, par le magnétisme, l’âme se dégage delà matière; que, dans cet état, le corps ressemble 3i un morceau de bois sec, et que l’âme ne communique avec le corps que par son fluide et celai du magnétiseur.

Il dit que le fluide est une fumée ou vapeur qui s’échappe des doigts du magnétiseur et pénètre chez le magnétisé, que le siège de ce fluide est dans le cerveau.

Il tombe quelquefois en extase, dès lors toute communication avec son magnétiseur est interrompue.

11 a indiqué que pour le sortir de cet état qni dure ■quelquefois très-longtemps, il Fallait lui jeter sur la'tête un foulard en sole.

Pour donner des consultations, il n'a pas besoin d’wSir le malade sous‘les yeux, il suffit de lui indiquer la demeure et le nom du malade.

PRÉVISION MAGNÉTIQUE.

Je livre aux méditations des sages l’étrange nouvelle que voici :

Il y a deux ans, le 6 septembre 1856 , une jeune et jolie Nantaise se présenta chez un magnétiseur très-connu, M. M..., et, sans préambule, lui tint ce singulier langage :

— Monsieur, je n’ai pas de fortune, je ne me sens pas en mesure d’en gagner une par mon travail ; cependant je veux devenir riche, c'est mon idée bien arrêtée. Je ne voudrais employer pour cela qu’un moyen honnête. La somnambule pourrait-elle m’indiquer ce moyen ?

M. M..., étourdi par cette brusque façon d’interroger les gens, ne savait d’abord que répondre. Et puis :

— Madame, dit-il, qui sait? Essayons !

Il endormit la somnambule et la mit en rapport magnétique avec la visiteuse, qui posa de nouveau sa question sous la même forme i

— Puis-je devenir riche par nn moyen honnête ?

— Rien ne vous sera plus facile, répondit la somnambule sans hésiter. Vous n’avez qu’à rester chez vous pendant deux jours. Avant leur expiration, vous recevrez la visite d’un vieux monsieur ; il viendra à vous de la part d’une amie de votre femille. 11 vous proposera de partir avec lui pour Buénos-Ay-res ; il vous offrira une position modeste dans un établissement industriel qu’il a fondé dans ce pays. Il ajoutera que, depuis vingt ans, il habite cette partie de l’Amérique , qu’il connaît le caractère des habitants et que, jeune, belle et sage, vous trouverez certainement à faire là-bas un excellent mariage. Acceptez ces offres, passez la mer avec lui ; car je vois an jeune homme, ur. Brésilien, si je ne me trompe, qui vous rencontre presque au sortir du navire, et devient très-amou-

reux de vous. Ne le repoussez pas ; ses intentions sont pures; il vous recherchera en mariage ; je le vois vous remettre une lettre ; par cette lettre, adressée à votre mère, il demande votre main. Un peu plus tard , je vois arriver chez vous une corbeille magnifique. Oh ! mon Dieu ! que de bijoux ! quelles riches étoffes ! que d’argent ! Cette corbeille vaut bien un million !

Mais qu’est ceci? Cette brillante médaille a un revers! Que vois-je ! attendez ! Ah! pauvre enfant, vous ne reviendrez pas en France.

— II faudra me fixer pour toujours à Buénos-Ayres?

— Vous y mourrez... Non, non , vous n’y mourrez pas , si vous voulez suivre fidèlement le conseil queje vais vous donner.

Parmi les esclaves qui seront à votre service dans la maison de votre mari, je vois une petite négresse dont l’œil jaloux jette des feux sinistres. Oh ! le petit monstre ! Elle se révolte, elle refuse de vous obéir ; elle frappe du pied, elle grince des dents, elle est horrible à voir; elle vous a juré une haine mortelle. Chassez, chassez-la au plus vite, et faites-la conduire bien loin , par delà les mers ; sinon, elle fera de vous ce qu’elle a fait déjà de deux Européennes : elle vous empoisonnera.

Ayant ainsi parlé , la somnambule s’arrêta, et la visiteuse ne fit plus de questions nouvelles. Elle se leva toute frémissante d’émotion, remercia M. M... et se retira.

Pendant plus d’un an, M. M... n’entendit plus parler d’elle. Que l’on juge de la surprise de ce magnétiseur, lorsque, le 14 septembre 1857, il reçut la lettre suivante que j’ai sous les yeux en ce moment :

« Monsieur,

«Il y a un an, le 6 de ce mois-ci, queje suis allée consulter chez vous. La dame qui m’a donné la consultation m’a prédit un grand voyage sur mer. Je ne pensais alors à aucun voyage, surtout à celui que je viens de faire.

« Oui, monsieur, cette dame m’a prédit des choses bien

surprenantes. J’arrive du Brésil, j’en rapporte une belle fortune... C’est une chose incompréhensible.

a En recevant mà lettre, vous serez sans cloute bien surpris, même je crois que vous ne pourrez pas vous rappeler qui je suis..,.

a Je vais me rendre à Paris, et soyez bien sûr, monsieur, que je me présenterai chez vous pour me faire reconnaître...

« E. D...

« Nantes, le 14 septembre 1857. »

Peu de temps après, M. M... vit entrer chez lui une jeune femme couverte de diamants, qui lui dit avec .un air franc et déterminé qui rendait sa beauté très-piquante :

— C’est à moi, monsieur, que votre somnambule a, prédit le voyage en Amérique, le mariage, et la dot d’un million. Elle a dit vrai, je reviens du Brésil, je suis mariée, je suis riche. J’ai trouvé la petite négresse, j’ai reconnu sa méchan • ceté et je m’en suis débarrassée à temps. Je vous dois la fortune et la vie.

Toute cette histoire est attestée par des preuves matérielles, et les Boms propres nous sont connus. A ce.sujet, chacun de vous pensera ce qu’il lui plaira dépenser. Mais il faut bien avouer avec Broussais que rien n’est brutalement concluant comme an fait. C’est donc un fait ; l’explique qui pourra !

Henri d’Aüdigier.

(Extrait de lu Patrie, du 12 octobre.)

Monsieur'*** affirme qu9’tdnt;n’est qu’itnposture dans le somnambulisme, et me gronde vertement d’avoir publié dès contes bleus qui peuvent surprendre la religion 'des nmfs. « C’est plus qu’une foute, me dit-il, c’est tme mauvaise action ! Il n’y a que trop de gens disposés à ajouter foi à ce qu’ils lisent dans un journal, surtout quand'Tarticle... Je vous en prie, monsieur, ne jouez plus avec de Celles armes; flonge* fpi’elles donnent la mort à l'intelligence ! »

Je réponds t t. Monsieur ***, vous êtes fort heureux d’avoir une opinion aussi arrêtée et aussi immuable sur ces importants problèmes ; ils inquiètent aujourd’hui bien des gens

qui ne sont ni des sots, ni des ignorants, et mon ami Ed Fourrier vous fera lire, un de ces jours, une phrase bien curieuse à ce sujet ; elle fut écrite et signée par l’un des hommes les plus savants de ce siècle, et vous verrez comment il qualifie cette incrédulité absolue et systématique dont vous faites profession : d'avance je vous en demande pardon pour lui.

Vous allez croire, monsieur ***- que je suis un apôtre du magnétisme, un associé de somnambule, un homme enfin intéressé dans le débat et plaidant sa propre cause. Il n’en est rien, monsieur ***, je vous l’assure-, il n’en est rien, bienveillant anonyme de Strasbourg, qui m’offrez votre amitié et me demandez mon opinion personnelle sur la question. Ami inconnu, je vous affirme que chez M. M... et surtout chez madame M..., j’ai vu des prodiges que je ne puis expliquer, des effets dont je ne sais point la cause, j’ai vu, j’observe, je m’étonne; jusqu’à nouvel ordre, je n’ai point à'opinion personnelle, et j’ignore si j’en aurai jamais une : toutefois, malgré la répugnance naturelle que m’inspire le merveilleux, je veu* êtue. assez loyal et asso* indépendant pour constater des faits, des résultats que je connais; je ne m’en rends pas compte, sans doute, mais on les expliquera peut-être un jour. » Henri d’Audigier.

(Extrait de la Patrie du 13.)

Ce n’est pas la première fois qu’un journaliste reçoit des lettres anonymes au sujet du magnétisme. Il est remarquable que tonte tentative, faite par des esprits loyaux et indépendants, pour faire pénétrer quelques rayons de lumière magnétique dans l’opinion publique ont été toujours mal venns et qu’on a su un très-mauvais gré aux auteurs Te ces essais. Pourtant, c’est un devoir sacré pour tout journaliste de répandre la vérité, et la presse, ainsi comprise, rendrait d’émi-nents servies, car tout le monde ne lit pas les litres dé science , cela coûte trop cher ; et tout le monde lit les journaux. Je me rappelle que M. et madame de Girardin reçurent une quarantaine de lettres anonymes pour avoir, dans un autre temps, publié des faits authentiques de magnétisme. Moi-

même, j’en possède une liasse, où les injures, les provocations , les menaces se trouvent accumulées. Heureusement que ceci n’agit que sur les égoïstes ou les lâches qui préfèrent leur tranquillité à la vérité. Ces oppositions occultes cachent toujours des intérêts; la vérité attaque des industries basées sur le mensonge, et nous savons parfaitement ce que le magnétisme sert et ce qu’il détruit.

Courage et persévérance , honneur et gloire aux hommes de dévouement qui marchent en avant sans se laisser détourner de leur route par les clameurs et les démarches ténébreuses des âmes perverses ! La vérité va droit au but, elle marche à découvert, et tôt ou tard elle brise les entraves qu'on lui oppose , et les générations, souvent ingrates et oublieuses , jouissent tranquillement d’un bienfait souvent, hélas ! trop chèrement acheté.

Baron do Potet.

PROJET D’INSTITUTION.

UN JURY SPIR1TUALISTE.

La Revue spiritualiste de Paris cherche les moyens de faire cesser la discussion qui règne parmi les spiritualistes, principalement sur la grande question du sort de l’âme humaine après la mort. Les spiritualistes ont tous à leur disposition des Esprits supérieurs, toujours prêts à répondre sur toutes les questions... non susceptibles de vérification ; mais, chose étrange, ces Esprits , bien que supérieurs, loin d’être d’accord entre eux, professent des doctrines contraires, soutiennent tous les systèmes, viennent donner leur appui à toutes les utopies, consacrer toutes les rêveries. Ceux du cercle Allan Kardec sont partisans de la métempsycose ; ceux d’Amérique rejettent bien loin cette théorie et soutiennent que

l’âme, une fois dégagée des liens du corps, n'est plus condamnée à recommencer des existences terrestres, mais qu’elle parcourt un certain nombre de sphères spirituelles , jusqu’à ce qu’elle arrive à l’état angélique ; d’autres Esprits sont tout simplement catholiques, protestants, sociniens, méthodistes, mahométans, etc. Ainsi les Esprits ne peuvent parvenir même à nous apprendre ce qu’ils sont, ce qui peut faire douter qu’ils le sachent eux-mêmes. Bien plus, ils se font la guerre. Les Esprits Kardec prétendent que ceux du cercle Barthet, à la Nouvelle-Orléans, sont des Esprits légers et menteurs, qui se parent impudemment des noms les plus respectables ; les Esprits américains ne sont pas en reste, comme on peut croire, et rétorquent à leurs agresseurs les imputations de mensonge et de légèreté. Que croire au milieu d’un tel gâchis? Comment discerner les bons des mauvais ? Chacun se vante d’avoir le vrai critérium ; mais comme ils ne peuvent avoir raison tous à la fois, ces prétentions se réduisent à cet aphorisme que chacun réserve in petto : Aies Esprits sont les seuls bons, et ceux du voisin ne valent pas le diable.

La Revue spiritmliste émet un moyen d’établir la concorde, c’est de convoquer un jury central, n une espèce d’académie de spiritualisme qui poserait des questions de cosmogonie, d’ontologie , de psychologie , etc., recueillerait les avis, les pèserait, et déclarerait jusqu’à plus ample informé et sauf révision, loi spiritualiste, celle qui, outre qu’elle aurait réuni tous les caractères de la vérité, aurait pour elle l’avantage d’avoir le plus concilié les avis. »

On cite comme exemple à suivre ce qui s’est passé dans les conciles chrétiens. Mais il est facile de voir qu’il n’y a aucune parité. Les chrétiens admettent que Dieu a constitué son Eglise et lui a conféré, par une grâce surnaturelle, le privilège de l’infaillibilité ; par conséquent, la voix de l’Eglise, c’est la voix de Dieu ; quand un concile a prononcé, il n’y a donc plus qu’à se soumettre. Les spiritualistes, au contraire, ne reconnaissent pas de révélation divine ; les communications qu’ils obtiennent sont seulement attribuéesà des Esprits, c’est-à-dire à des êtres imparfaits et faillibles, et même beau-

coup d’entre eux, nous dit-on, sont perfides, pervers, ignorants, vantards, ont en un mot tous les défauts. Les Esprits même les plus éminents, étant sujets à l’erreur, leurs communications, quand même elles seraient d’une authenticité incontestable, ne pourraient jouir que d’une autorité relative, et chaque homme serait en droit de les soumettre au jugement de sa raison. A plus forte raison, devra-t-on conserver son indépendance en présence de communications dont l’origine est suspecte ; et il résulte des écrits des spiritualistes, non-seulement qu’il n’existe aucun moyen de s’assurer si une communication émane du personnage dont elle porte le nom, mais même de distinguer si elle vient d’un Esprit bon ou mauvais. Chacun appelle bon l’Esprit qui lui apporte la confirmation de ses idées, mauvais celui qui les contredit.

A quoi servirait dès lors de compter les voix ? Si les communications dites spiritualistes sont réellement dues à des Esprits, il est très-possible que parmi eux les sots et les menteurs soient en majorité (comme il arrive quelquefois parmi les hommes) ; une erreur aura beau être répétée des milliers de fois , elle ne pourra devenir une vérité. Si, au contraire, les médiums ne font qu’exprimer leurs idées et celles de leur entourage, le grand nombre des prétendues communications concordant sur un certain point prouverait seulement que beaucoup de sectateurs d’une certaine doctrine se sont livrés anx exercices spiritualistes, ce qui ne serait nullement propre à donner des garanties de vérité, les médiums et leurs inspirateurs n’ayant pas plus droit d’être crus sur parole, quand ils prononcent du haut de la planchette ou de la corbeille {ex eathedrâ), que quand ils sont dans leur état normal.

Le moyen proposé par la Revue ne peut amener aucun résultat utile. Qu’on réunisse un concile un peu nombreux de spiritualistes, il y en aura de toutes les opinions, une lutte des plus vives s'élèvera entre métempsycosistes et swedenbor-giens ; on opposera médiums à médiums, corbeilles à guéridons, et la victoire ne sera à personne; on aura beau comp-tefle3 voix, les minoritésprotesteront, diront que les autorités

se pèsent et ne se comptent pas et qu'un seul bon Esprit (comme celui que possède invariablement chaque cercle) vaut infiniment plus que des milliers de farfadets et de lutins.

Ainsi, en résumé, malgré le prétendu concours des Esprits, nous n’en sommes pas moins obligés de chercher la vérité par les efforts de notre raison, et nous n'avons pour nous décider d’autres lumières que celles qu’elle nous fournit.

La Revue spiritualiste assigne un autre but h son jury proposé, c’est de faire des enquêtes sur tous les faits merveilleux. Nous souscrivons volontiers à cette partie de son programme, en y faisant néanmoins quelques modifications. La Revue n’appelle à concourir à l’élection de son jury que ses coréligionnaires « admettant l'existence des communications médianiiniques. » Il est évident que ce serait d’avance frapper son témoignage de défaveur. Pour être apte à faire une enquête, il n’est pas nécessaire d’avoir telle ou telle conviction sur les matières religieuses ou philosophiques, il suffit d’avoir de la bonne foi, du bon sens, de l'indépendance et un jugement assez sûr pour bien observer. Ce qu’on cherche, c’est que certains faits soient bien constatés : or, si les personnes chargées de cette mission sont imbues de préjugés, si elles sont habituées à se nourrir de récits de miracles, si, à force de rêver des communications surnaturelles, elles s’exaltent et deviennent faciles à halluciner, elles seront dans de mauvaises conditions pour vérifier avec exactitude tout «e qui aura lieu. Or, si des personnes, sans être sujettes à de pareils entraînements, sont en parfaite conformité de vues, désirent la réalisation des phénomènes annoncés , s'attachent à en être témoins et sont disposées à les recueillir avec sympathie , il sera à craindre qu’elles n’apportent pas assez de sévérité dans l’exercice de leur mandat, qt’eHes ne prennent pas les précautions qu’exige la prudence, et qu'elles ne soient dupes de quelque fourberie qu’un œil plus vigilant eût facilement déjouée. Dès qu’une commission d’enquête est exclusivement composée de partisans des miracles à constater, le public n’y verra qu’une réunion de compares. Aussi, dans

l’affaire de Lourdes, où la commission n'est composée que de chanoines, ses décisions ne peuvent inspirer aucune confiance, on se figure (sans doute à tort) que, décidée à voir des miracles, elle en verra nécessairement.

Pour qu’une attestation ait du poids, il faut qu’elle ait lieu contradictoirement; il faut que les opinions contraires soient représentées, que toutes les circonstances puissent être discutées par des juges sévères ; si un miracle a lieu en présence de gens qui étaient disposés à le nier et qui même le jugeaient d’avance impossible, certes le témoignage présentera tous les caractères d'impartialité et sera des plus imposants. Quand les magnétistes veulent constater un fait douteux, ils ne se bornent pas à le produire entre eux, ils appellent les incrédules, ils provoquent l’examen des savants, ils ne demandent pas mieux que de soumettre leurs expériences au contrôle le plus minutieux.

Que les spiritualistes fassent de même. Que toutes les personnes qui s’intéressent à la question soient convoquées pour former un jury d’enquête dans lequel on fera entrer des individus d’opinions différentes, et qu’on procède à la constatation et au contrôle de tous les faits merveilleux. On pourra ainsi faire luire la vérité sur des phénomènes dont la réalité est demeurée douteuse, on dissipera bien des nuages, on fera évanouir bien des prestiges.

La Revue spiritualiste affirme qu’elle a offert au Siècle des miracles, et que son offre a été dédaigneusement repoussée. C’est fâcheux; et si elle eût été acceptée, la Revue aurait pu être bien embarrassée. Quant à nous, nous déclarons avoir fait des efforts inouïs pour être témoins de ces merveilles, qu’on nous dit être si communes, et nous n’avons jamais pu en voir aucune. Espérons que le futur jury sera plus heureux, et que les Esprits devenus plus accommodants, cesseront de se renfermer dans leur dignité, et ne se contenteront plus de répondre par un refus d’épreuve aux demandes des incrédules qui ne demandent qu'à s’éclairer.

En attendant la formation du jury, on pourrait dans de petites réunions, préparer les bases de son travail. Ainsi, avant

de décider quel degré de confiance on doit accorder à (elle ou telle catégorie d’Esprits, il serait bon, au préalable, de rechercher si le médium n'est que l’instrument passif d'un être extra-humain, ou si, sans en avoir conscience, il ne fait que formuler ses propres pensées. Voici quelques moyens à employer :

Quand un médium écrit, interposez un corps opaque entre ses yeux et son papier ; ça pourra gêner le médium, mais non l’Esprit qui conduit sa main. — Posez sous les yeux du médium des questions écrites ; vous verrez comment il y répondra: puis posez les papiers contenant d’autres questions, au dos du médium, de manière qu’aucun membre de la société ne puisse les lire ; si c’est un Esprit qui lisait tout à l’heure, il ne lui sera sans doute pas plus difficile de le faire dans cette nouvelle position. — Réunissez quatre cercles à la même heure dans quatre quartiers différents, évoquez le même Esprit, et adressez-lui les mêmes questions qui seront formulées dans des paquets cachetés qu’on ouvrira seulement au début de la séance; vous verrez si les réponses sont conformes.

Quant aux mouvements sans contacts, apports d’objets matériels, apparitions de mains, pianos jouant tout seuls, écriture directe des esprits, etc., il y a très-longtemps qu’on nous en promet : peut-être les Esprits attendent-ils, pour nous montrer tout cela, que le jury soit formé. Hâtons-nous donc de nous mettre en mesure de constater solennellement ces manifestations qui doivent régénérer le genre humain.

A.-S. Morin.

L’ÉLECTRICITÉ ET LE MAGNÉTISME

Un accident survenu à Zara donne la mesure du danger résultant du contact des fils électriques. Dans la matinée du 8 septembre dernier, à la suite d’une tempête qui a duré deux heures avec accompagnement de fréquentes et violentes dé-

charges électriques, deux poteaux télégraphiques du fort ont été renversés. Le fil n’était pas rompu et l’isolement n’était pas détruit. Le ciel était redevenu serein ; quelques soldats du fort chargés de la surveillance des poteaux s’empressèrent d’aller les relever. Des canonniers, qui se trouvaient là par hasard, vinrent les aider et, n’ayant aucune expérience de ce genre de travail, ils prirent le fil à pleines mains, plaisantant sur les sensations agréables ou étranges que leur faisait éprouver le fluide électrique qui circulait le long du fil et s’amusant avec les petites étincelles qui s’en détachaient. Les soldats avaient beau dire aux canonniers qu’il y avait du danger à jouer de la sorte, ceux-ci ne tenaient aucun compte de cet avertissement. Voilà que tout à coup deux de ces canonniers, qui tenaient le fil dans leur main, jettent un cri des plus aigus :l’un d'eux reste étourdi (.islupidito) et sans mouvement, l’autre tombe à terre, se relève, chancelle et tombe encore pour ne plus se relever. En tombant la seconde fois, avec son coude il touche le bras d’un de ses compagnons qui était accouru pour le secourir; celui-ci * à peiue touché, pousse uu cri horrible et tombe également.

Tous les soins possibles furent donnés à ces infortunés ; au bout de quelque temps, on observa que celui qui tenait le fil avait les mains brûlées. On lui demanda ce qu’il avait éprouvé : des douleurs inexprimables s’étaient répandues en un instant dans toutes les parties supérieures de son corps, ses yçux avaient été saisis d’un éblouissement des plus intenses, les oreilles lui avaient tinté de la manière la plus violente, et enfin il avait éprouvé des douleurs de crâne inouïes, comme si sa tête allait éclater (quasi gli si spezzusse).

Ou découvrit le bras de celui que le simple contact de son compagnon avait précipité à terre ; il avait la chair brûlée de la même manière que les mains de celui qui avait tenu le fil : il avait éprouvé aussi des éblouissements, des douleurs de tête aiguës et un sifflement douloureux dans les oreilles.

Le corps de celui qui était tombé mort ne présentait que des brûlures aux mains, rien de plus.

Pendant que cela se passait sur les murailles de la forte-

reí so, une très-forte décharge électrique détruisait la spirale en 1er du paratonnerre du bureau du télégraphe et la réduisait en poussière (minutüsime gocciolc).

Plus tard, 011 apprit que la foudre était tombée sur le fil télégraphique entre Gospieli et Zara, et ayant pris la direction du fort, avait causé la mort du malheureux canonnier et blessé gravement ses deux compagnons.

Voilà un accident qui doit donner à réfléchir, et ce n'est pas sans motif que le ministre de la guerre consultait dernièrement l’Académie des sciences sur les moyens à prendre pour isoler les poudrières quand elles étaient sur la route d’une ligne télégraphique. Il résulte de l’accident de Zara que, par un ciel serein et quand le temps est magnifique, si 011 se met en rapport quelconque avec un fil télégraphique, on peut être frappé de la foudre par une décharge dont l’origine remonteraà plusieurs lieues de l’endroit où l’on se trouve.

Mac-Sheehy.

Nota. Ayant reconnu quelque analogie entre certains effets de l'électricité et du magnétisme, notre intention est de rassembler les faits divers de l’électricité de manière à montrer plus tard que le magnétisme, dans son jeu, quoique les effets soient plus faibles, a des rapports sur lesquels on ne saurait se méprendre. Ceci prouvé, il en résulterait la preuve que cet agent, comme on l’a dit, est de l'électricité modifiée par la vie.

Baron dc Potbt.

VARIÉTÉS.

LE SPIRITUALISME EN BAVIÈRE.

Bien que la cour de Piome ait condamné le spiritualisme et interdit aux fidèles de prendre aucune part à [sesjjexpériences, cette doctrine n'en a pas moins de nombreux adhérents parmi les catholiques. Il y a notamment, à Munich, un médium très-célèbre : c’est une dame qui prétend recevoir

ses communications des Esprits supérieurs. Chose singulière, ces Esprits professent la croyance au catholicisme, mais blâment sévèrement la corruption de l’Eglise et les vices d’une partie du clergé. Ses révélations ont été publiées sous ce titre ; « Communications des bons Esprits, et particulièrement de l’archange Raphaël, obtenues par la main de Mary Kahlhammer et par la bouche de Crescentia Wolf. » Ces révélations ont de chauds partisans jusque dans les rangs de la haute société. Deux des croyants sont venus à Rome afin d’empêcher, si c’était possible, la condamnation du livre par le pape. Mais ce fut en vain : le livre fut défendu comme pernicieux et infecté de superstition. La voyante et ses adhérents ayant refusé de se soumettre à cette sentence, furent excommuniés par l’archevêque de Munich. Mais le mouvement spiri-tualiste continue sa marche : le Volksbote, journal catholique de Munich, adjure le gouvernement de supprimer le spiritualisme, même par la force, en alléguant que les Esprits se mettent à exprimer des opinions politiques qui ne sont rien moins que conservatrices. La Gazette de CEglise évangélique, de Hengstenberg, consacre un long article à l’examen des révélations de May Kalhammer, et en produit de longs extraits qui donnent une pauvre idée de l’intelligence des Esprits en Allemagne.

( Spiritual Telegraph, 25 septembre.)

SOMNAMBULISME NATUREL.

Hier, est arrivé à Paris un jeune Suédois qui vient de Hom-bourg, où il a passé quinze jours. Ce jeune homme était pauvre. Il venait à Paris pour terminer ses études de médecine. 11 aime une jeune fille que son père lui a refusée parce qu’il n’est pas riche.

— Va, pars pour Paris, reviens vite, enrichis-toi, je promets de t’attendre.

Le jeune homme voulut, avant d’arriver à Paris, visiter les bords du Rhin. Il s’arrêta quelque temps dans toutes les

villes d’eau. A Hombourg, il a passé quinze jours. Le Suédois n’est pas joueur. 11 n’aurait pas risqué un louis sur un numéro ni sur une couleur. Cependant il a gagné en quinze jours (rois cent mille francs à Hombourg.

Tous les soirs, il rentrait chez lui de bonne heure, vers neuf heures. Fatigué des excursions faites aux environs, il se couchait et s’endormait. Puis il se relevait aussitôt, se rhabillait, allait au salon de jeu, jouait quelques coups à la roulette, gagnait vingt mille francs et remontait se coucher après avoir enfermé son gain dans un tiroir de commode. Au bout de quelques jours, il avait trois cent mille francs et ne s’en doutait pas.

Le seizième jour, un jeune homme, avec lequel il s’était lié, lui parle de son bonheur au jeu.

— Moi! je n’ai jamais joué, dit le Suédois.

— Ah ! voilà qui est fort, vous jouez et vous gagnez tous les soirs.

— Mais je vous jure que non.

— Je vous jure que si.

La discussion se prolonge et s’anime, enfin on s’explique. On monte chez le Suédois. On trouve les trois cent mille francs dans son tiroir.

Le jeune Suédois était somnambule et jouait en dormant. Vous jugez de sa joie. Il va retourner en Suède pour épouser celle qu’il aime et qu’il ramènera cet hiver à Paris.

(Extrait de la Patrie, du 6 octobre.)

APPARITIONS.

— On sait que le général républicain Marceau, qui fut si bien chanté par lord fiyron, a été enterré près de Coblentz sur le Pétersberg. Depuis quelque temps, on se disait dans Coblentz que Marceau quittait son tombeau, et nombre de gens prétendaient l’avoir vu la nuit chevauchant sur un cheval blanc et portant le manteau blanc des chasseurs français. Il y

a quelques jours, un soldat en faction sur le Petersberg voit venir à lui, vers minuit, un cavalier blanc monté sur un cheval blanc. 11 crie : «Qui vive! » Pas de réponse. 11 tire et tombe évanoui. La patrouille accourt au coup de feu, trouve la sentinelle privée de connaissance. Cependant, elle put pendant la nuit faire le récit de ce qu’elle prétendait avoir vu; après quoi elle expira. Voilà l’anecdote telle qu’elle peut être certifiée par toute la ville de Coblentz. Pauvre Marceau ! héroïque soldat! son ombre trouble encore, après soixante-cinq ans, les descendants de ceux qui furent les ennemis de son pays j (Extrait de la Pairie, du :10 octobre. )

MYTÉIUEUSE DESTINÉE.

Le prince Ghika, dont on a célébré hier les obsèques, n'était point, comme on l’a prétendu, le frère du prince Grégoire Ghika, lequel s’est tué l’année dernière au château de Mée, près de Melun; les deux princes n’étaient pas frères, mais cousins, et cousins très-éloignés. Le premier appartenait à la branche des Ghika de Valachie et le second à celle des Ghika de Moldavie. 11 n’en est pas moins vrai (pie cette famille des Ghika est comme vouée à une prédestination funeste. Le père de Grégoire Ghika, celui qui s’est donné la mort au château de Mée, avait eu, lui aussi, une fin tragique.

Avis aux Abonné*.

Nous prévenons de nouveau nos abonnés que les démonstrations magnétiques faites pour eux ont lieu tous les mercredis sans que rien soit changé à ce qui avait lieu précédemment. M. le baron du Potet se propose en même temps d’ouvrir, vers la mi-novembre, un cours de magnétisme. Les renseignements seront donnés au bureau du Journal.

Baron de POTET, propriétaire-gérant.

Avis ans Abonnes.

Plusieurs personnes m’ont fait l’honneur de me demander si, cetie année , comme les années précédentes, je n’ouvrirais pas un enseignement magnétique propre à guider quelques élèves dans la voie de l’expérimentation pure, et h faire connaître les principes et les procédés que j’emploiepour la cura des maladies.

Un cours de magnétisme exige un grand travail que l’on ne. s’impose point communément pour satisfaire l’exigence légitime de quelques-uns seulement. Mais, dans le cas où un nombre suffisant d’élèves se présenteraient d'ici au 25 de ce mois, j’accéderai à leurs demandes, et de nouveau je reprendrai un enseignement que j’avais interrompu, parce qu’il m’imposait un surcroît de travail. Donc, que les personnes qui sont dans l'intention de suivre un tel cours veuillent bien se faire connaître et donner, au bureau du journal, leurs noms et leurs adresses.

Patience et persévérance,

(Su««.)

Baron du Potet.

On rencontre, le long des magnifiques avenues de la ville de Versailles, avenues qui mènent à son château royal, on rencontre une foule de mendiants qui arrêtent ou escortent les étrangers, cherchant à leur faire agréer leurs services comme cicerone ; et si leur offre n’est pas d abord acceptée, ils cherchent à capter ces passants en leur donnant les titres les plus pompeux, et bien propres à attirer leur attention : Tome XvIl. — N°. 45.—2» Sème. — 10 Novembre 1858. 20

Mon officier, mon commandant, mon gcn'ral,... ils vont, je crois, jusqu’à leur donner le titre do prince et d'altesse. Ce n'est pas peine perdue : il est rare que, parmi ces grandeurs de convention, il ne se trouve quelques hommes qui, flattés par le titre nouveau , ne donnent la pièce à leur guide, et ne se laissent conduire vers les dieux de l’Olyinpe, vers les bains de Diane, de Sémélé et de Neptune.

Moi, je me tiens, comme ces mendiants, sur le chemin qui conduit à l’Académie, et je donne aux passants les plus beaux titres, tels que ceux-ci : Grand savant, illustre savant, illustrissime savant, prince de la science, etc., etc., et je leur dis: Je vais vous conduire au plus beau palais du inonde, dans un séjour enchanté -, en ce moment, vous vous trompez de route , grands hommes, ce que vous apercevez au loin n’est pas ce que vous cherchez ; mais ils montrent bien qu’ils sont d'illustres savants, ils ne se laissent point détourner de leur chemin. Un savant brille" surtout par son entêtement, c’est ce qui le distingue du vulgaire. Je perds donc chaque jour mon temps et mes peines ; mais quand les collets brodés sont passés, je rebrousse chemin, je m’adresse aux flâneurs, aux hommes qui ne cherchent rien, ou qui, blasés des choses humaines, n’ont pas même la curiosité de regarder où vont nos sages, n’ayant aucun désir de voir le séjour de leur immortalité , je dis à ceux-ci : Venez , je vais vous montrer du nouveau, j'ai tout ce qu’il faut pour vous guérir de vos ennuis, et pour que la vie ait pour vous de nouveaux charmes; venez, et, dans un instant, vos yeux apercevront la plus grande merveille du monde. Vous croirez rêver, et ce ne sera point un rêve, mais la réalité. Vous croyez être simples, vous reconnaîtrez, à votre très-grande surprise, que vous êtes dou--bles, que vous avez deux entendements, deux mémoires, deux ■ .esprits; une vue intérieure qui voit très-loin sans lunette, •„organe mystérieux qui ne craint ni le vent ni la poussière, gué jamais oculiste ne salit de ses onguents; vous apercevrez votre intérieur, circuler votre sang, tous les rouages de votre machine fonctionnant : ce qu’enfin aucun de vos ana-lomistes n’a vu de son vivant, vous le verrez.

■Si on vous a volé votre bourse , vous apercevrez votre voleur ; si un Esculape vous a estropié quelque peu par ses bons soins, vous lui en ferez votre compliment, et vous lui donne • rez une leçon de médecine. Ce n’est pas tout, mais seulement les bagatelles de la porte ; ce que vous verrez en plus , vous le garderez pour vous ; d’ailleurs , vos académiciens n’ayant pas prévu le cas, il n’y a aucun mot pour le leur rendre , et cela restera seulement en image dans votre mémoire.

Mais beaucoup de ces passants se détournent de moi comme si j'étais un fou , pourtant je n’ai point parlé de mouvement perpétuel, de quadrature du cercle, de pierre philosophai, etc... Je me suis tenu dans le vrai, et c’est pour cela sans doute qu'ils me quittent aussi vite.

Pourtant en voilà un qui entre,... il se risque, puis enfin, un autre,... un autre encore;... les plus éloignés de moi seretour-nent et arriventà la file. Ce que c’est que la patience et la persévérance, voilà ma chambre pleine ! Le premier occupant dit: Il va nous montrer su machine électrique. Un autre répond : Non, c’est de l'optique que nous allons voir. Un troisième, plus avancé dans les sciences physiques, fait cette remarque qu’il n’y a aucun instrument : Ce que nous allons voir, dit-il, c’est l’effet d’une combinaison diaimant ou pondre de sympathie. Mais le plus avisé de mes auditeurs a suivi Bosco, il a vu Robert Houdin , et, tout surpris de ne point apercevoir de gobelets, il assure que toutes mes combinaisons, mes pièces d artifice sont sous le parquet, et il frappe avec sa canne pour découvrir les conduits mystérieux qui cachent, à tous les yeux, mes mécaniques.

Je les laisse gloser et les tiens en suspens pendant quelques instants ; puis, prenant la parole, je leur tiens à peu près ce langage : Messieurs , leur dis-je, mon organisation, comme la vôtre, renferme un feu secret qui ne demande qu’à s’épancher au dehors; ses propriétés sont incommensurables, il assoupit d’abord les sens de celui qu’il touche, de celui dans lequel il entre ; il lui ferme bientôt les yeux et lui bouche les oreilles ; il le rend insensible aux piqûres et aux brûlures, on peut lui couper les bras et les jambes, le percer de

part en part, il ne sentira absolument rien. Vous pourrez vous-mêmes, messieurs, tout à l’heure brûler de l’agaric sous le nez d’un d’entre vous, lui faire respirer de l’ammoniaque, il ne sourcillera point. Vous tirerez, si vous le voulez , un coup de pistolet à son oreille et il ne s’éveillera pas, mais il répondra à vos interpellations, si je vous touche seulement du bout de mon doigt ; il dira qui vous êtes , teinturier-dégraisseur, maçon, serrurier, charpentier, commis-marchand, vendeur de contremarques, contrebandier, etc... Si vous êtes marchand, il vous dira comment vous sophistiquez vos marchandises, et si vous vous servez de faux poids ; enfin toutes choses intéressantes pour vous et qui peuvent se dire aujourd’hui en public. C’est curieux et intéressant, je vous assure ; placez-vous un instant seulement sur ce siège, et vous allez voir le produit de ce feu mystérieux.

Moi, je n’y crois pas, dit le premier, mais je ne veux pas essayer. Un second, non moins raisonnable, n’y croit pas non plus, maislapeur le saisit, il craint mon approche et regarde la porte. Enfin, le plus hardi d’entre tous s’écrie : J’y suis, me voilà ; que diable, vous ne m'avalerez pas, je suis trop gros. Je fais le tour annoncé au grand ébahissement de tous les spectateurs qui battent des mains, qui trépignent et me témoignent leur satisfaction, en me disant : C’est bien vrai tout de même, vous lui avez subtilisé les sens, vous êtes plus malin que nous tous. Mais le plus étonné , c’est l'expérimenté : il n’a rien vu, rien entendu et ne sait pas pourquoi l’on rit ; il sent seulement une légère douleur dans les parties qu’on a pincées ou brûlées, et s’en va sans croire au magnétisme et prend tout cela pour une mystification.

Voilà pourtant comment la vérité la plus sublime a commencé à s’établir. J’ai longtemps fait comme les bateleurs ; mon tribut à la vérité et à l’humanité ne pouvait être alors payé autrement : j’ai souffert sans me plaindre de ce que tant d’autres eussent regardé comme dégradant; je n’ai point rougi d’un apostolat commençant aussi bas : la science d’en haut devait ainsi descendre pour se faire comprendre. Celui qui sait l’alphabet ne s’avilit point en l’enseignant à l’enfance;

et n'aurais-je eu que ce seul mérite en ma vie, (l'une abnégation complète, que je regarderais mon existence comme ayant été une des plus heureuses; je n’éprouve aucun repentir, j’ai môme en moi une secrète joie, car une voix intérieure semble parfois me dire : Tu us fuit ton œuvre, ta vie est bien remplie.

Baron du Potet.

(La suite au prochain numéro.)

CLINIQUE.

A Monsieur le baron du Potet.

Gènes, 25 octobre 1858.

Mon cher maître,

C’est à vous, qui m’avez initié à la doctrine et à la pratique du magnétisme, que je dois toutes les jouissances que mon âme a éprouvées en explorant un monde inconnu, et qui semble interdit aux savants officiels. Grâce à vous, mon très-honoré m:iître, j’ai pu soulever un lambeau du voile de la grande vérité mesmérienne et en pressentir toute la valeur. Les merveilles du somnambulisme magnétique et la pratique du magnétisme, comma agent thérapeutique direct, exercée depuis longues années, me donnent le droit de déclarer hautement que, dans une foule de maladies (je dirai môme en toutes , si nous pouvions arriver à impressionner le premier venu), nouspouvonspuiserennous-mômes l’agent thérapeutique le plus doux, le plus homogène „ le plus naturel, le plus prompt et le plus sur. Permettez-moi maintenant d’ajouter une guérison bien remarquable, que j’ai obtenue dernièrement, à tant d'autres réalisées par le magnétisme. Vous pourrez l’insérer dansvotrejournal, si vous le jugez à propos.

Agréez mes salutations empressées.

Votre dévoué élève, Dr P. G.

SCI A TIQUE CLÉRIE PAR LE MAGNÉTISME.

Mademoiselle Antoinette Kurz, âgée de vingt ans environ, et d’un tempérament lymphatique, est une des plus célèbres danseuses d'un des premiers théâtres italiens. Elle a été atteinte d’une sciatique à la jambe gauche, pour laquelle je l’ai soumise à un traitement homœopatique, et ensuite aux applications électriques selon le système de M. Duclienne. Après une dizaine d'opérations, sa douleur commençait à diminuer ; mais , espérant peut-être une guérison plus rapide par les bains thermaux , elle se rendit à l'établissement de bains d’Acqui (Piémont). Après un mois de traitement thermal, sa douleur n’était point modifiée. Elle quitta les eaux et, voyant sa souffrance s’aggraver de plus en plus, elle eut recours alors à l’empirisme. (On lui avait parlé d’une femme de Cassano (Lombardie) , qui jouit d’une très-grande réputation pour la guérison des sciatiques.)

Mademoiselle Kurz alla donc à Cassano et fit appeler la guérisseuse qui, après l’avoir examinée, l'assura de la guérir. Elle lui appliqua au talon de la jambe malade un emplâtre vésicant très-douloureux, composé avec une herbe pilée (c’est dans la connaissance de cette herbe qu’est tout le secret de cette femme).

Après dix jours de souffrance, la plaie du talon se cicatrisa, et la douleur ayant disparu, la malade revint à Gênes guérie.

Quelque temps après, mademoiselle Kurz, logeant dans un endroit humide, recommença à sentir de nouveau une douleur semblable à la première. Au bout de trois jours, elle était tellement forte qu’elle ne pouvait remuer sans éprouver des douleurs excessives qui l’empêchaient même de sommeiller dans la nuit. Dans cet état, elle désira se faire transporter de nouveau à Cassano pour subir encore une fois le traitement de la guérisseuse.

Je revis la malade dans cette fâcheuse circonstance; je lui conseillai de se sou'iiettre à l’action magnétique , elle y consentit. Je la magnétisai au moment où la douleur était des plus intenses; après quelques minutes, les souffrances dimi-

nuèrent, et bientôt elle me sembla entrer dans le sommeil magnétique. Je l’interrogeai et lui demandai si elle dormait ; elle me répondit : « Je ne dors pas , mais je me porte très-bien. » Alors je pratiquai, avec la ferme volonté de faire disparaître la maladie, des impositions des mains sur toute la jambe douloureuse, et après, je lui ordonnai de la mouvoir et de la plier en tous sens, ce qu’elle fit plusieurs fois sans la moindre douleur.

Le sommeil magnétique était avancé et le somnambulisme se déclara. Plein de force alors et de confiance en Dieu , je sentis en moi-même une voix qui me disait : Tu la guériras. n Voulez-vous être guérie? lui dis-je. — Ah ! si je le voudrais ! répondit-elle. — Eh bien , vous guérirez , et je veux qu’aussitôt éveillée, vous marchiez dans la chambre sans douleur. » Je la réveillai immédiatement, et lui dis : « Prome-nez-rous sans crainte, vous n’aurez pas de douleurs. «En effet , elle a pu se promener franchement, sans douleur, n’accusant seulement qu’un peu de faiblesse à la jambe.

Voilà, mon cher maître, un premier fait que l’agent magnétique a produit instantanément; voilà prouvée encore une fois de plus et sans réplique son action thérapeutique. Dieu a mis en nous-mêmes le baume pour nos souffrances, l’agent guérisseur; étudions-le et sachons l’employer! Que nos grands et gros savants des académies officielles analysent dans les cornues de leurs laboratoires la matière ou l’agent qui a pu arrêter tout à coup une telle maladie et en faire disparaître les douleurs; qu'ils la pèsent pour nous éclairer sur sa nature!... Ah! pauvres savants ! on vous tourmente, on vous abreuve de dégoûts à chaque instant, on ose prétendre que vous n’êtes pas tels que vous vous annoncez! Ils sont bien insolents ces magnétiseurs, n’est-ce pas? Soit. Prenez donc patience, résistez, résistez toujours, confiez-vous dans voire matière, dans vos poids, retardez tant que vous pourrez voire chute.... elle sera plus solennelle !

Dc Pierre Gatti.

Fondateur de ¡‘Institut homœopatbique dc Gènes.

(La fin au numéro prochain.)

DE LA SPÉCIALITÉ DE CERTAINS HOMMES.

Pourquoi ne croirions-nous pas que chaque homme possède une spécialité, une particularité môme ? Ne voyons-nous pas, à chaque instant, clans tous les métiers, industries, arts ou vocations, des hommes acquérir une réputation qu’ils n’auraient jamais au mériter dans toute autre carrière que celle qu’ils ont embrassée?

L’intelligence humaine n’est pas seulement une puissance, une faculté individuelle caractérisant l’homme et le plaçant au-dessus des animaux, elle est aussi un organe de la puissance supérieure qui nous commande et nous dirige, et dont, par conséquent, nous sommes les instruments.

Noire conscience nous "parle et nous ordonne, notre intelligence nous permet d'obéir.

Tout le monde sait ici qu’il existe, depuis plusieurs années, dans le département de 1* Ardèche, une personne jouissant de la plus grande réputation de guérisseur par l’intermédiaire de la prière et par conséquent des esprits saints qu’il invoque ; je m'abstiendrai de raconter toutes les histoires que l’on débite sur son compte ; je me bornerai à dire que plusieurs personnes dignes de foi m'ont assuré avoir assisté à plusieurs de ces expériences curieuses, autant qu’elles sont extraordinaires et incroyables pour ceux qui ne sont pas initié* aux mystères de la puissance du magnétisme.

Ce que je puis affirmer, et bien d’autres personnes avec moi, parce qu’elles l’ont vu, de leurs propres yeux vu, et même éprouvé et contrôlé, c’est que notre compatriote, M. Manlius Salles, libraire, a, des milliers de fois peut-être, produit des elfets magnétiques remarquables et merveilleux sur des personnes dont je puis citer les noms sans crainte de démenti; moi-même, j’en ai eu la preuve : 1° en 1853, j’étais alors en proie à une cruelle crise de douleurs liémorroïdales, quand, par le plus grand des hasards, je fus mis en rapport

avec M. Manlius Salles, qui, eu un instant, m’eut débarrassé de cette très-incommodante affliction, et cela, par un moyen bien simple consistant à me faire garder pendant cinq minutes son passe-partout dans mes mains. Naguère encore, à la fin du mois de septembre dernier (1858), j’étais retenu au lit par une indisposition qui m’était occasionnée par une douleur provenant d’un engorgement avec enflure à l’aine du côté gauche, quand j’eus la visite de quelques amis et de M. Manlius Salles, qui, sur ma demande réitérée, consentit à me faire quelques passes magnétiques à huit ou dix pouces au-dessus de mes couvertures ; immédiatement je me sentis soulagé, l’engorgement et l’enflure avaient presque entièrement disparu. Je me sentais disposé à sortir du lit pour reprendre mes occupations journalières; je ne le fis cependant pas, mais par pure précaution.

Le lendemain matin, M. Manlius Salles revint me voir; cette fois, il était accompagné de M. Masclary, docteur-médecin à Nîmes, qui, ayant examiné la partie malade, la trouva beaucoup mieux après que M. Manlius Salles y eut pratiqué quelques nouvelles passes magnétiques. Ce jour-là, je suivis le conseil de ces messieurs, mes amis, je me levai et repris mes occupations, que je n’ai plus eu besoin de quitter pour cause de maladie. Je dois à la cause du magnétisme, pour laquelle combat depuis si longtemps mon ami Manlius Salles, cette sincère déclaration que, sans en être devenu un adepte, j'ai cessé d'être son ennemi ; plusieurs personnes sont prêtes à attester l’authenticité et la véracité de ce que j’avance.

J'ai ouï dire, par des personnes dignes de foi, que M. Mi-viel, sergent de voltigeurs au 25' de ligne, en 1852, en garnison à Nîmes, aujourd’hui à A.rles, raconte, à qui veut l’entendre, qu’avec une seule imposition de mains, M. Manlius Salles faisait cesser en lui les plus violentes crises de douleurs rhumatismales chroniques, et le rendait «à l’instant même propre aux exigences de son service. A la même époque aussi, M. Sigaud, sergent-major dans le même régiment (aujourd’hui officier), était susceptible de voir s’opérer en lui les plus importantes et salutaires modifications, à la seule vo-

lonté de M. Manlius Salles. Tout comme moi, ces braves militaires feraient, j'en suis certain, le sacrifice de leur existence pour être agréables à leur excellent ami Manlius Salles.

Alexandre Ducros.

(Extrait de la Revue miridionah*ù.\i 2 novembre.)

11 existe , depuis plusieurs années, dans les environs de Nîmes, un médium-médecin, très-renommé, connu sous le nom de Dominique. Le nombre de ses visiteurs est tellement grand . qu’on ne peut être introduit auprès de lui qu’après plusieurs jours d’attente et par tour de rôle.

Nous connaissons plusieurs personnes qui, ayant dans ces derniers temps visiti M. Dominique, nous ont raconté certains faits assez curieux pour mériter d’être mis sous les yeux de nos lecteurs.

M. X... fut introduit auprès de M. Dominique ; celui-ci ne lui demanda rien , pas le moindre renseignement, et il lui rappela toutes les phases qu’avait traversées sa maladie, et la moindre circonstance de sa vie privée ; en un mot, M. Dominique possède, à l’état de veille, une lucidité remarquable.

Madame X... alla consulter un jour M. Dominique, qui la fit asseoir et garda pendant un quart d’heure le silence le plus absolu, afin de mieux se recueillir ; prenant ensuite la parole et s’adressant à cette dame, il lui dit : « A tel âge, madame, vous avez eu telle chose ; depuis telle époque, vous souffrez de telle douleur ; vous êtes susceptible d'être atteinte par telle et telle maladie, etc. » Madame X... répondit affirmativement sur tous les points.

(Extrait du Glaneur du Gard du 31 octobre 1858.)

Un nègre médium. — Les journaux américains annoncent qu’il y a, dans la ville de Nobile (Etat d’Alabama), un nègre qui jouit de la faculté de guérir les maladies, au point d’égaler les anciens faiseurs de miracles. On lui amène des individus perclus de rhumatismes et incapables de se mouvoir ;

quelques passes du bon vieux nègre, accompagnées de prières, suffisent pour guérir les malades et les mettre en état de retourner chez eux à pied. Des enfants épileptiques depuis leur naissance ont été guéris instantanément. En un mot, tous les maux cèdent aux passes et aux prières de cet homme de bien dont le ministère est gratuit; aussi sa cabane ne désemplit pas. Puissent les Américains comprendre que la nature, en accordant ainsi ii un nègre les facultés les plus éminentes, nous enseigne qu’aucune des races humaines n’est déshéritée ni vouée à l’ilotisme, que toutes doivent être fraternellement unies, et que les distinctions de couleurs et de castes doivent disparaître ! Puisse le spiritualisme réaliser ce progrès que n'ont pu obtenir jusqu’ici ni la religion ni la philosophie !

UN CAS SINGULIER DE MAGNÉTISME.

M. 13..., ancien représentant du peuple, ne connaissait le magnétisme que par ouï-dire. Il lut quelques traités et voulut amuser son séjour à la campagne, en se livrant à des expériences. Il fit ses premiers essais sur une jeune fille très-impressionnable, qui passa promptement au somnambulisme. Encouragé par ce résultat, il la magnétisa de temps en temps et réalisa plusieurs des phénomènes dont il avait lu la description. L’ayant magnétisée le 6 octobre, elle tomba dans un état singulier qui dura six jours entiers ; pendant tout ce temps, elle présenta successivement les modifications les plus étranges : tantôt elle était complètement immobile , insensible , et semblable à un cadavre ; tantôt elle éprouvait des convulsions extrêmement violentes ; tantôt elle paraissait être en somnambulisme, parlait, répondait aux questions, se levait, exécutait les mouvements qu’on lui indiquait, puis, par moments, s’entretenait avec un Esprit dont elle disait entendre la voix. Elle a eu des accès de fureur, pendant lesquels elle

a déclaré qu’elle allait se tuer, et elle expliquait comment elle s'y prendrait. Le magnétiseur fit de vains efforts pour faire cesser cet état, il était sans influence sur elle. Un médecin fut mandé, et dit que c’était une maladie hystérique, que pour le moment il n’y avait rien à faire. — Elle annonça le moment où elle rentrerait dans l’état normal et déclara que rien ne pourrait devancer le terme fixé. Elle annonça d’avance chacun de ses accès; dans l'intervalle, elle prenait des repas, quoique étant toujours on somnambulisme. Elle s’est trouvée plusieurs fois en catalepsie, ses membres conservaient la position où on les mettait. L’avant-dernier jour, elle a eu un cauchemar affreux et s’est figuré voir des spectres menaçants. Enfin le 11, comme elle l’avait prédit, elle s’est réveillée sans avoir aucun souvenir de ce qui s’était passé; elle déclara qu’elle se portait bien, qu’elle ne souffrait pas du tout, et a paru étonnée qu’on se fût alarmé à cause d’elle.

A. S. Mobin.

POLÉMIQUE.

Dans sa chronique d'hier (1), mon ami H... d’Audigierm’a mis en demeure, au moment où je m’y attendais le moins, de venir témoigner ici au sujet du magnétisme, dont le procès, comme vous savez, se poursuit depuis tantôt un siècle. Je ne me récuserai pas; aussi bien étais-je vivement sollicité de me mêler à ce débat par le volumineux réquisitoire que M- G. Mabru, « lauréat de l'Académie des sciences, » a dernièrement lancé contre le magnétisme, sous ce titre : les Magnétiseurs Jugés par eux-mêmes, et qu’il croit être le coup de grâce de ce pauvre persécuté.

« Détruisons le magnétisme I » crie M. Mabru au commencement, au milieu, à la fin, bref, à toutes les pages de son livre; comme Caton avait dit cent fois et nunc delenda Cartage! comme Voltaire avait crié ; « Ecrasons l’infâme ! »Pour

(1) Voir le numéro du 25 octobre 1858.

M. Mabru , le magnétisme c’est Cartilage , c’est l’infâme. 11 n’admet pas de réserves dans ses anatlièmes : commençons par écraser, nous nous expliquerons après ; voilà quel est son indulgent système. On vient lui dire : Mais il y a magnétisme et magnétisme, comme il y a fagot et fagot, d’autant plus que le fagot est souvent la seule marchandise d’un certain nombre de somnambules, et que tous le sentent terriblement, comme 011 eût dit au moyen âge. Ou lui répète : Il faut savoir distinguer ceux qui se livrent sérieusement à ces intéressantes pratiques, de ceux qui n’en font qu'un métier de charlatan, M. Mabru 11e veut rien entendre; quoiqu’il soit de la science et tienne pour ses plus antiques errements, le distinguo sacramentel n’existe pas pour lui. C’est ce qui fait qu’au lieu d’avoir à moitié raison, il se donne complètement tort.

S’il n’eût pris à partie que ces magnétiseurs charlatans dont je viens de parler, et qui sont les plus mortels ennemis de la science dont ils se prétendent les prêtres, je l’eusse volontiers suivi sur ce terrain, et même. au besoin, je lui aurais prêté des armes pour pousser plus à fond ses attaques ; mais, encore une fois, M. Mabru ne veut que détruire, sans examen et sans choix. 11 fait reproche aux somnambules de ce qu’après avoir prétendu qu’ils verraient à travers d’épais bandeaux, ils ne lui ont en aucune façon prouvé l’existence de ce phénomène de vision transposée ; je lui reprocherai, moi, de s’être mis sur les yeux un bandeau bien autrement épais : l’incrédulité systématique, et d’avoir oublié de l’ôter, quand il s’agissait de voir si les autres voyaient, quand le moment était venu de bien regarder pour écrire, après, le résultat de ses observations.

Ah ! si encore une fois M. Mabru eût circonscrit, le procès et ne s’en fût pris qu’aux momeries magnétiques qui sont pour ces phénomènes inexplicables ce que les pratiques superstitieuses sont pour la religion véritable, c’est sincèrement decæur que j’auraisfaitcause cominune aveclui. De ce côté-là, triste revers d’une chose respectable et sérieuse, il y a tant de sottises intéressées, tant de niaiseries impudentes à dénoncer 1

Jadis la fortune, selon le vieux proverbe, souriait parfois aux gens qui dormaient ; maintenant elle y met plus de complaisance , elle comble de ses dons une foule de gens dont le métier est de faire semblant de dormir.

Ce que je vous signalerai surtout , c’est le magnétisme amateur, le somnambulisme de société. 11 s’exerce le soir entre amis, après le whist et avant le thé. Car Esquiros l’a dit quelque part : « Il y a des soirées magnétiques, comme il y a des soirées musicales et dansantes. Le maître de la maison écrirait volontiers au bas de ses lettres d'invitation : on dormira. »

On n’a pas besoin de chercher beaucoup dans le salon pour trouver une somnambule de bonne volonté ; d’ordinaire le sujet qui se présente de lui-même est une personne en fonds de malice qui n’est pas fâchée de trouver ce prétexte de dire innocemment toutes sortes de vérités à ses bonnes amies.

Le magnétiseur fait les passes d’usage; la dame ferme les yeux, simule une profonde syncope et finit par dire : « Je dors. » Est-ce vrai, dort-elle, en effet ? J’en doute, mais ce dont je suis sûr, c’est que sa médisance n’a jamais été plus éveillée.

— Je voudrais bien vous consulter sur quelqu’un, dit en lui donnant la main pour se mettre en rapport, une vieille fille qui se sent rougir rien qu’à l’idée qu’on pourra lui répondre sur ce qu’elle pense.

—Ah ! sur M. D..., dit la somnambule, et la vieille demoiselle ne fait que rougir davantage. Il me faut, pour bien voir, que vous me donniez quelque chose qui lui appartienne.

— De ses cheveux, par exemple?

— Oh ! non, ceux qu’il porte ne sont pas à lui.

Là s’arrête la consultation, et l’on passe à d’autres.

— Je suis bien malade , n’cst-ce pas ? dit une dame dont l’unique maladie est de croire qu’elle les a toutes.

— Eh ! non , pas plus que moi ; mais je comprends que vous le croyiez. Quand vous vous regardez dans une glace, vous mettez tant de blanc que vous êtes pâle comme une

morte. Prenez garde ! cela gâte la peau, et peut à la longue causer des accidents.

(Iliaque consultation aboutit à quelque confidence de ce genre-là; quand la soirée finit, qu’y a-t-il de réellement satisfait ? Une seule personne, la dame qui, se servant du magnétisme , comme les dominos se servent du masque de velours dans les bals masqués, a pu à son aise intriguer tout le monde. Avoir de bons yeux pour bien voir le mal, puis les fermer pour le dire du fond d’un songe simulé, tel est le système de ce somnambulisme médisant, que je livre, pieds et poings liés, avec toutes ses mômeries, aux colères de M. Mabru.

Mais , par grâce, qu’il ne s’en prenne pas-au magnétisme sérieux; qu’il ne s'en prenne pas surtout aux vrais apôtres de ces merveilleuses pratiques, à Mesmer entre autres, qui mieux que personne redouta, pour l’avenir des phénomènes qu’il faisait revivre, la vénalité qu’on reproche aujourd’hui au magnétisme , et aussi l’espèce de libre exercice dans lequel on le laisse sous prétexte qu’il ne vaut pas la peine qu'on le reconnaisse et qu’on le réglemente.

« Dans une cause, écrivait-il à Marie-Antoinette, dans une cause qui intéresse l’humanité au premier chef, l'argent ne doit être qu’une considération secondaire. »

Un examen consciencieux et impartial qui consacrât le magnétisme ; puis des lois sérieuses venant donner un frein à l’exercice de cette science nouvelle, si salutaire en des mains prudentes, si dangereuse en des mains inhabiles ou coupables, voilà ce que demandait Mesmer; voilà seulement aussi ce que devrait demander M. Mabru, sans tant de cris et de colères.

« Je cherche, dit encore Mesmer dans sa lettre à Marie-Antoinette , un gouvernement qui aperçoive la nécessité de ne pas laisser introduire légèrement dans le monde une vérité qui, par son influence sur le physique des hommes, peut opérer des changements inouïs. »

Peut-on avoir sur l’art dont on est le père , une opinion plus dégagée des aveuglements de la paternité, une impar-

tialité plus clairvoyante? Aussi, je le répéterai cent fois à M. Mabru : Respect, s’il vous plaît, à Mesmer; respect aussi à tous ceux qui ont pris à tâche de maintenir la doctrine, comme il l’avait créée et comprise. Ne soyez pas sceptique jusquà l’irrévérence envers ces esprits distingués, car le doute alors ne serait plus qu’une vanité, et l’incrédulité une superstition , comme disait le comte d’Orsay dans une lettre qu’on me permettra de reproduire ici :

i' Oui, disait-il, je crois au magnétisme et au somnambulisme. Quand on a vu et interrogé madame M... dans l’état de sommeil, il faut véritablement avoir la superstition de l’incrédulité pour douter de sa lucidité et du pouvoir magnétique. Soyez convaincu que cette science triomphera en dépit de toutes les persécutions, et qu’on n’oserait môme pas vous attaquer, si tous ceux qui y croient, avec raison , avaient, comme moi, la franchise de l’avouer. »

Si M. Mabru lit cette lettre, il dira : « Que m’importe ! c’est un homme du monde qui parle. Or, que me fait à moi, que fait à la science l’opinion d’un homme du monde? »

Soit, et puisqu'il vous faut des savants , je vais vous en servir.

D’abord je vous rappellerai le docteur Georget qui, dans son testament, demanda pardon à Dieu et aux hommes de sa longue incrédulité au magnétisme ; puis, pour finir, je ferai, s'il vous plaît, intervenir Arago lui-môme.

« Je ne terminerai pas cette pièce, dit Georget, sans y joindre une déclaration importante. En 1821, dans mon ouvrage sur la Physiologie du système nerveux, j’ai hautement professé le wai^-w/iswe... A peine l’avais- je misaujour, que de nouvelles méditations sur un phénomène bien extraordinaire, le somnambulisme, ne me permirent plus de douter, en nous et hors de nous, d'un principe intelligent tout à fait diffèrent des existences matérielles. Ce sera, si l’on veut, l'âme et Dieu. Il y a chez moi, à cet égard , une conviction profonde fondée sur des faits que je crois incontestables. Peut-être un jour aurai-je le loisir deifaire un travail sur ce sujet. » Ce travail est encore à faire, Georget mourut à la veille de le commencer.

Maintenant laissons parler Arago dans un de ses derniers écrits, l’éloge de Sylvain Bailly :

« Je ne saurais, dit l’illustre secrétaire de l’Académie, approuver le mystère dont s’enveloppent les savants sérieux qui vont assister aujourd'hui à des expériences de somnambulisme. Le cloute est une preuve de modestie, et il a rarement nui aux progrès des sciences. On n’en pourrait pas dire autant del'incrédulité. Celui qui, en dehors des mathématiques pures , prononce le mot impossible, manque de prudence. La réserve est surtout un devoir quand il s’agit de l’organisation animale.

« Nos sens, malgré plus de vingt-quatre siècles d’études, d'observations, de recherches, sontloin d’être un sujet épuisé. Voyez, par exemple, l'oreille. Un physicien célèbre, M. Wol-laston, s’en occupe ; aussitôt nous apprenons qu’avec une égale sensibilité, relativement aux sons graves , tel individu entend les sons aigus et tel antre ne les entend pas du tout., et il devient avéré que certains hommes , avec des organes parfaitement sains, n’entendirent jamais le grillon des cheminées , ne se doutèrent point que les chauves-souris poussent souvent des cris très-aigus, et, l’attention une fois éveillée sur ces singuliers résultats, des observateurs ont trouvé des différences de sensibilité les plus étranges entre leur oreille droite et leur oreille gauche, etc., etc.

« La vision offre des phénomènes non moins curieux et un champ de recherches infiniment plus vaste encore. L’expérience a prouvé, par exemple, qu’il existe des personnes absolument aveugles pour certaines couleurs, telle que le rouge, et qui jouissent d’une vision parfaite relativement au jaune, au vert et au bleu. Si le système newtonien de l’émission est vrai, il faut irrévocablement admettre qu’un rayon cesse d’être lumière dès qu’on augmente ou qu’on diminue sa vitesse d'un dix-millième.

« De là découlent ces conjectures naturelles et bien dignes d’un examen expérimental : les hommes ne voient pas tous par les mêmes rayons ; des différences tranchées peuvent exister à cet égard chez le même individu, dans des états ner-

veux divers ; il est possible que les rayons caloriques, les rayons obscurs de l’un soient les rayons lumineux de l’autre, et réciproquement ; les rayons caloriques traversent librement certaines substances dites diathermanes; ces substances jusqu'ici avaient été appelées opaques, parce qu’elles ne transmettent aucun rayon communément lumineux ; aujourd’hui , les mots opaque et diathermane n’ont rien d'absolu. Les corps diathermanes laissent passer les rayons qui constituent la lumière de celui-ci : ils arrêtent, au contraire , les rayons formant la lumière de celui-là. Peut-être trouvera-t-on sur cette voie la raison de plusieurs phénomènes restés jusqu’ici sans explication plausible.

« Rien dans les merveilles du somnambulisme ne soulevait plus de doutes qu’une assertion très-souvent reproduite, touchant la propriété dont jouiraient certaines personnes, à l’état de crise, de déchiffrer une lettre, à distance, avec le pied, avec la nuque, avec l’estomac. Le mol impossible semblait ici complètement légitime. Je ne doute pus néanmoins que les esprits rigides ne le retirent, après avoir réfléchi aux ingénieuses expériences dans lesquelles Moser produit ainsi à distance des images très-nettes de toutes sortes d'objets, sur toutes sortes dc corps, et dans la plus complète obscurité.

(( En se rappelant encore dans quelle proportion énorme les actions électriques ou magnétiques augmentent par l’acte du mouvement, on sera moins enclin à prendre en dérision les gestes rapides des magnétiseurs. »

« En consignant ici ces réflexions développées, dit encore Arago, j’ai voulu montrer que le somnambulisme ne doit pas être rejeté à priori, surtout par ceux qui se sont tenus au courant des derniers progrès des sciences physiques. •> Est-ce clair ?

J’en demande bien pardon à M. Mabru. Il voulait porter un coup de grâce, c’est lui qui en reçoit un.

Édouard Fournier.

(.Extrait de la Patrie du l/i octobre.)

PRÉVISION.

Communication sympathique. — Madame Belzoni, femme du savant archéologue, a raconté le fait suivant à M. Weisse qui le rapporte dans le Spiritual Tclcgraph du Í) octobre : « En 1823, j’étais à Paris; il arriva, une nuit, que je fus soudainement réveillée par deux ou trois coups frappés très-fort à la tête de mon lit. Aussitôt cette idée jaillit en quelque sorte dans mon esprit, c’est qu’il avait dû arriver quelque chose à mon mari qui était alors en Afrique, en marche pour Tombouctou. Je vis les rideaux du lit se mouvoir ; je sautai à bas du lit, espérant voir une figure humaine ; je sentis quelque chose glisser près de moi. 11 faisait un beau clair de lune ; j’explorai la chambre, je cherchai tout autour du lit, je regardai dessous, mais je ne vis rien. J’observai l’heure à ma montre : il était deux heures du matin. Je n'étais pas disposée à me rendormir. Je m’habillai; j’étais fort agitée et persuadée que mon mari était mort. Je notai le jour et l’heure où tout cela s’était passé et toutes les circonstances, ainsi que mes impressions. Quelques mois après, je reçus de tristes nouvelles, d’après lesquelles mon cher mari était mort précisément à l’heure où il s'était manifesté à moi pendant mon séjour à Paris. Ce fut la confirmation de ce que je savais déjà. Il s’est écoulé vingt six ans depuis ce terrible événement, et j’en ai conservé le souvenir aussi frais que s’il avait eu lieu la nuit dernière, et je ne l’oublierai jamais. »

VARIÉTÉS.

Home en Russie. — Plusieurs journaux assurent que le fameux Hoirie a donné devant la famille impériale une séance où se sont passés des phénomènes extraordinaires, et que la

czarine émerveillée lui a fait cadeau d’une bague de diamants (1 un très-grand prix. Plusieurs personnages de distinction l’ont supplié de leur accorder des soirées d’évocations, et lui ont offert jusqu’à 3,000 fr. par séance. Mais il a refusé : il s est engagé envers les parents de sa femme à cesser tout exercice de médium, à rompre entièrement avec les Esprits.

I.e Messager de Paris contient, dans son numéro du 28 octobre, une chronique du fécond Paul d’ivoi , qui nous assure qu’Alexandre Dumas , dans ses voyages en Russie, a trouvé des paysans très-versés dans la magie et possesseurs de secrets prodigieux, que l’un d’eux, entre autres, lui a fait voir dans une carafe d’eau, son passé et son avenir. Le même chroniqueur annonce l’arrivée à Paris de deux étrangers, le comte de Treurenberg et le baron de Greenwalder, tous deux médiums de première force et même supérieurs à Home. — Tout cela est peut-être vrai. Seulement, comme M. d’ivoi a parfois la fantaisie d’inventer des histoires plus ou moins émouvantes, sauf à s’en moquer huit jours plus tard, on ne sait plus au juste ce qu’on doit croire de ses affirmations'. Il ferait bien de mettre un signe à la clef, pour avertir les lecteurs s’il plaisante ou s’il parle sérieusement.

— De temps en temps, les auteurs dramatiques introduisent le magnétisme au théâtre, ce qui prouve combien sont maintenant vulgarisées des idées qui naguère paraissaient si étranges. Dans l’opéra bouffon, intitulé : Orphie aux enfers, qui se joue aux Bouffes-Parisiens, Aristée magnétise Eurydice, l’endort, et par sa volonté la contraint à écrire. Cette scène muette est parfaitement comprise du public.

A. S. Morin.

On écrit de Vienne (Isère) à la. Gazette de Lyon :

« La Côte-Saint-André vient d’être témoin d’un fait des plus sinistres, qui doit appeler de nouveau l'attention sévère de l’autorité sur le danger des inhumations précipitées.

a Vendredi dernier, vers six heures du soir, le fossoyeur du cimetière entendit un bruit sourd et même des gémisse-

Dicnts qui semblaient partir de la fosse d’une femme de cinquante-cinq ans, enterrée la veille au soir. Le commissaire de police de la Côte reçutaussitôt l'ordre de s’assurer du fait, et se rendit au cimetière, accompagné du docteur Gilbert.

« Le cercueil fut déterré ; mais on reconnut que la femme qu'il renfermait venait d’expirer à l'instant. Elle s’était vue ainsi ensevelie vivante. On l’a reportée à son domicile où elle avait été cqnservée vingt-quatre heures après son décès présumé. Mais la mort, cette fois, était réelle, et au bont de qua-rante-huit heures, on l’a remise en terre. Notre parquet est saisi de l’affaire.

Cet événement a jeté l’effroi et la consternation dans le canton de la Côte. 11 est de nature à provoquer une enquête rigoureuse et à faire prendre de salutaires précautions contre les inhumations précipitées. »

BIBLIOGRAPHIE.

LUCIE, épisode historique à Syracuse, sous le règne de Dioctétien , par René Duroe9ni! de Maricourt (1 vol. in-12, Scnlis, 1858).— L’ART DE MAGNÉTISER ou de se guérir mutuellement, par G&rard, ccnt-gaide (broch. 1858, Dentu éd.).

Bien des romanciers ont fait entrer le magnétisme dans l’action de leurs histoires fictives et en ont tiré un parti très-avantageux ; ils ont su trouver, dans l’exercice de cet agent mystérieux, des scènes fort poétiques, des situations pleines d'intérêt, des caractères dramatiques; tout en restant dans le vrai quant à la peinture des effets magnétiques, ils ont par là donné à leurs œuvres le charme de la mythologie la plus riante et la plus grandiose. Balzac, Frédéric Soulié, Eugène Sue, Alexandre Dumas ont largement puisé à cette source féconde, ont heureusement exploité ce nouveau genre de merveilleux qui offre à l’artiste d’immenses ressources. Ces écrivains, tout en enrichissant la littérature d’oeuvres fort remarquables, ont servi la cause du magnétisme dont

ils ont vulgarisé la connaissance; seulement le savant, l’liotnme positifpeuvent regretter quele romancier ne se soit pas toujours contenté de la vérité toute nueetl’ait souvent embellie au point de la défigurer; que son imagination l’ait même entraîné dans le domaine des chimères et qu'il ait pu ainsi contribuer à répandre des erreurs. Mais une œuvre d’art ne peut être jugée avec la môme rigueur qu’un traité scientifique; la poésie vit de fictions et d’exagérations; tout le monde sait que ce n’est pas dans un roman qu’il faut aller chercher des notions strictement exactes. Soyons donc indulgents pour ces charmants conteurs, sachons-leur gré de l’appui sympathique qu’ils prêtent à nos doctrines, et ne les chicanons pas si leur enthousiasme dépasse le niveau fixé par l’austère logique.

M. Dumesnil de Maricourt offre, sous forme de roman, la vie d'une sainte, vierge et martyre sous Pioclétien. 11 avertit, dans sa préface, que les faits merveilleux qu'il attribue au (lamine Sempronius, 11e doivent pas paraître étonnants à ceux qui savent que les magnétiseurs modernes peuvent les renouveler chaque jour. « Le magnétisme (ajoute-t-il) a toujours existé dans le monde sons différentes formes et différents noms; c’est un pouvoir réel que l’on peut employer pour le bien comme pour le mal, et dont l’avenir nous dévoilera les mystères et nous révélera la véritable essence. » Après une telle déclaration, il est clair que tout ce qu’il va dire du magnétisme doit être pris au sérieux et ne peut plus être considéré comme des ornements poétiques.

Il place son action à l’époque où le christianisme jeune, plein de sève, n'ayant pour arme que la force de l’idée, lutte contre le paganisme décrépit, impuissant malgré la force matérielle dont il dispose. Lucie, fille d'un riche Syracusain, a secrètement répudié la religion de ses pères et a embrassé avec ardeur la foi du Christ. Elle est fiancée à Valérius, noble romain , occupant la charge de tribun militaire. C’est lui qui joue le principal rôle ; l’auteur semble avoir fait ses efforts pour attirer sur lui l’intérêt; mais il n’en a fait qu'un être faible, irrésolu, tiède, sans caractère ; c’est donc un assez pauvre sire, incapable de passionner le lecteur. Élevé dans la

religion païenne, il ne partage pas l'indifférence fini alors était l’apanage des hautes classes; il est ébranlé par les discours et la conduite d’un esclave chrétien, il conçoit des doutes sur la réalité des dieux de llome ; dans son anxiété, il brise leurs statues qui décorent son palais et se met à railler leur impuissance à venger cet outrage. Cet argument contre les idoles se trouve souvent dans les écrits des anciens Pères, et pourtant il suffit de réfléchir un instant pour en découvrir la fausseté :1e christianisme a aussi ses statues, ses tableaux auxquels les fidèles rendent un culte; bien plus, Dieu lui-même est présent dans l’Eucharistie; eh bien, quand tous ces objets vénérés sont brisés, souillés, profanés, il n’intervient pas de miracle pour arrêter ou punir ces actes sacrilèges ; on ne pouvait donc pas exiger davantage des dieux antiques ; un argument qui peut à volonté servir à toutes les religions, ne peut évidemment profiter à aucune.

Valérius aime Lucie, mais d’un amour posé, calculé et qui ne peut compromettre. Il est chargé par le proconsul de découvrir la retraite des chrétiens et de les livrer à son tribunal : il hésite continuellement entre son amour et le devoir de sa charge, et par le fait il trahit l’un et l'autre. Il a pour ami un flamine nommé Sempronius qui fait tous ses efforts pour lui faire abandonner l’union projetée avec une chrétienne, pour l’affermir dans le paganisme, et pour lui faire concevoir la nécessité d’exterminer la secte nouvelle, hostile aux institutions de la patrie. Dans un long entretien qu’ils ont ensemble, le llamine èst censé dévoiler au jeune tribun les mystères les plus sublimes : il lui apprend que la religion n’est qu’un mot, que les cultes ne sont que des façons plus ou moins ingénieuses de cacher l’ignorance humaine, que le créateur n’attache aucune importance aux moyens par lesquels nous nous rapprochons de lui. C’est donc le déisme pur qu’il professe? Oui et non. Ce même flamine invoque l’autorité de ses dieux qui se sont parfois abaissés jusqu’à lui, qu’il a vus face à face, et desquels il assure avoir reçu le don de prophétie. Le voilà donc redevenu païen... Pas du tout. IL affirme qu’il y a dans le christianisme une sève vitale que rien ne pourra détruire, que la puissance du cru-

cifiéost effrayante, que les oracles sont muets devant ses adorateurs, et que les dieux eux-mêmes sont saisis de crainte en leur présence. Alors il reconnaît la supériorité du christianisme, il n’a donc plus qu’à se faire chrétien. On voit que ce prétendu sage ne fait que divaguer et que ses révélations ne sont qu’un chaos. On apprend à la fin que ce Sempronius est un chrétien renégat qui, comme le Diable, croit au christianisme, mais le hait et le combat avec fureur. Un tel caractère est non-seulement faux, mais impossible : il arrive tous les jours qu’un croyant manque aux prescriptions de sa foi quand l’ardeur de la passion l’emporte; mais ce qui ne peut se concevoir, c’est qu’un individu entreprenne de lutter contre Dieu, c’est que de dessein prémédité il s’acharne contre une religion qu’il croit vraie.

Sempronius se vante de pouvoir, comme Apollonius de Thvanes, voir d’un bout de l’univers à l’autre, frapper et guérir à distance ; il fait connaître à Valérius ce que fait un personnage éloigné. La vue à distance se trouve effectivement chez plusieurs somnambules ; elle existe aussi, bien que plus rarement, chez qualques individus qui, dans cerlaines crises, parviennent sans sommeil à la lucidité. Mais, on ne saurait trop le redire, cette faculté étonnante est précaire, variable, sujette à de nombreuses erreurs ; le lucide se trompe très-fréquemment, et il est également impressionné de la vue des choses réelles et des rêves qu’enfante son imagination ; il n’existe aucun moyen de discerner, parmi ses visions, le vrai du faux. Le tableau que nous trace l’auteur, est ddtac tout à fait fantastique : on ne cite pas un seul lucide qui, au milieu d'une conversation, puisse soudainement voir à coup sûr ce quise passe au loin.

Parmi les faits attribués à ce même personnage, il y en a plusieurs qui s'expliquent très-bien par le magnétisme. Ainsi il attire à lui une jeune fille dont il veut faire un instrument pour les mystères; il la fascine, il domine sa volonté; malgré sa répugnance, il la contraint à jouer le rôle de sibylle, il la met en somnambulisme, la ramène à la vie normale, etc. Tout cela, appartient au magnétisme réel. Mais voici qui est plus extraordinaire.

Le (lamine prend un coulcau, se fait au bras une large entaille, le sang coule, puis, un instantaprès, il ne reste aucune trace de la blessure. On raconte des faits semblables de la part des derviches, des bonzes thibétains et des fakirs indiens; mais les narrateurs qui en ont été témoins n’ont pu prendre les précautions convenables pour s'assurer qu’ils n’avaient pas été dupes de quelque adroite fourberie. Ces faits restent donc fort douteux, et en tout cas on ne peut dire qu’ils appartiennent au magnétisme. On a bien pu par le magnétisme hâter la guérison des plaies ; mais les faire fermer instantanément, opérer la suture de la peau de manière qu’il n’y ait pas môme de cicatrice, c’est ce que n’a jamais fait ni prétendu faire aucun magnétiseur.

Après l’accomplissement de rites bizarres, après une conjuration solennelle, le ilamine fait apparaître l’ombre du père de Lucie : Valérius voit s’avancer le spectre terrible, et il entend une voix qui lui aunonce l’avenir en ces termes : « Lucie restera chrétienne ; nos dieux ne peuvent rien contre elle; mais c'est toi qui la feras mourir. » Toute cette scène appartient à la magie dont nous u’avons pas à discuter ici la réalité, mais elle est complètement étrangère au magnétisme au nom duquel nous devons protester contre toute assimilation avec la nécromancie. Nous ne pouvons nous empêcher de remarquer que le revenant qu’on fait apparaître, semble avoir laissé sa raison dans le tombeau- Car, en sa qualité de mort, il devrait être édifié sur la vérité du dogme qu’il professait pendant sa vie ; et, loin de nous éclairer sur ce point essentiel, il s’exprime avec l’ambiguïté d’un oracle. Si ses dieux ne peuvent rien contre Lucie, c’est qu’ils existent. Ainsi Jupiter, Pluton, les Parques, etc., sont bien des êtres réels. • Mais si leur puissance est bornée, c’est qu’il existe au-dessus d’eux | des dieux supérieurs. Ces divers dieux sont-ils amis ou ennemis, le paganisme est-il vrai ou faux ? Le revenant laisse toutes ces questions indécises, et son indécision reflète celle de son évocateur, ce qui pourrait faire croire qu’a!ors comme actuellement, les esprits ne savaient rien de plus que les hommes qui les appelaient.

M. Dumesnil introduit en outre beaucoup de scènes où le merveilleux appartient à l’ordre surnaturel et qui par conséquent ne peuvent avoir rien de commun avec le magnétisme. Par exemple la sainte, par la prière, apaise subitement une tempête, des plaies sont guéries par l’application d’une relique, etc. Ce sont bien là des miracles : mais comme l’auteur raconte aussi des prodiges appartenant, les uns à la magie et les autres au magnétisme, comme il ne distingue point les causes de ces divers ordres de faits, et qu’il présente le tout comme également digne de foi, il s’ensuit que le lecteur ne sait où on veut le conduire ni en quoi consiste la doctrine de l’auteur.

Terminons en quelques mots l’analyse du roman. Valérius, pressé par les instances et les menaces de Sempronius qui est en quelque sorte son mauvais génie, se décide à exécuter les ordres du proconsul : il se rend à la tête d’une troupe de soldats au lieu où se rassemblant les chrétiens et les fait arrêter; il cherche à faire évader Lucie, mais Sempronius déjoue ses artifices ; notre amoureux, qui sans doute tenait avant tout à garder sa place et à se maintenir au mieux avec les autorités, livre donc sa bien-aimée au supplice et accomplit ainsi la prédiction du spectre. Lucie, sommée de jeter de l’encens dans une cassolette placée au pied de la statue de Jupiter, répond noblement qu’un chrétien ne peut encenser des figures de pierre et de bois, sans offenser le Dieu immortel. Certes, il y a un dévouement sublime chez le martyr qui meurt plutôt que de manquer à ce qu’il regarde comme un devoir sacré, et l’on ne peut se défendre d’une émotion mêlée d’admiration en lisant le récit de la mort héroïque de ces soldats du Christ, iit pourtant n’est-il pas à déplorer que tant de sang ait été versé pour un malentendu? Les chrétiens ne se font plus scrupule d’encenser des figures de pierre cl de bois, et parmi ces figures il y en a qui ressemblent exactement à celles que l’on présentait aux premiers chrétiens. On regarde donc aujourd’hui comme innocente et même comme méritoire une action qui était tellement réputée exécrable par les martvrs.dont on honore la mémoire, qu’ils aimaient mieux

souffrir la mort la plus cruelle , plutôt que de s’y associer.

Valérius, après avoir assisté comme tribun au supplice de Lucie, perd la tête, quitte le service, et longtemps après retrouve Sempronius qui, à la suite d'un long entretien, tout aussi peu concluant que le premier, lui avoue qu'il est un ré-négat, ce qui n'était pas un bon moyen de lui inspirer de la confiance. Le misérable (lamine est englouti dans un abîme, qui s'ouvre à point nommé comme une trappe d’opéra (ainsi doit finir tout traître au dernier acte); Valérius mctlant fin à ses irrésolutions, se fait ermite : la vertu est récompensée... dans le ciel, et la morale est satisfaite.

M. Gérard est un sectateur ardent et dévoué du magnétisme ; aux derniers banquets mesmériens, il a célébré en vers chaleureux les bienfaits de la médecine naturelle. Dans le petit écrit qu’il vient de publier, il trace au commençant les règles à suivre et expose sommairement les notions indispensables. 11 ne peut, dans un cadre aussi restreint, traiter à fond du magnétisme, il se borne à en donner des aperçus élémentaires, et il prépare à la lecture des nombreux traités qui ont été faits sur cette matière. On lira cette brochure avec plaisir. Nous y avons remarqué un document curieux : l’auteur assure que parmi les ouvrages anciens, dans lesquels Mesmer a puisé quelques-uns des éléments de sa doctrine, il y avait un écrit que le hasard avait fait tomber entre ses mains, et qui avait été composé par un docteur indien dans une langue savante. En voici le texte : Comme notre grand Dieu nous échauffe et nous remplit de sa puissance quand il se montre, de même l’homme peut agir sur l’homme. — Il doit se mettre en face dans un lieu sombre et silencieux, étendre les mains vers lui et vouloir. Alors le charme commence , vous ferez et déferez ce que vous voudrez. Lorsque vous serez animé du saint désir de la foi de nos dieux, vous aurez une partie de leur pouvoir, et vous produirez la mort aussi bien que la vie. — Mais vous ne pourriez rien produire de visible sur les ennemis du feu sacré, car il semble les méconnaître ; mais ses plus chers favoris et les élus qu’il aime

vous feront entendre sa volonté, vous répéteront le passé, vous diront le présent, et vous prophétiseront l’avenir. — Faites ici le serinent de ne jamais dévoiler le secret du grand-prêtre à aucun profane, quel qu’il soit... — C’est la volonté des dieux. »

Nous aurions désiré que M. Gérard, qui n'entreprenait qu’un résumé des plus succincts, n’v eût fait entrer que des principes généralement admis et se fût abstenu d'affirmations hasardées sur les points les plus épineux , par exemple sur le mode de vision des somnambules. Il prétend que« de nombreuses expériences faites jusqu’à ce jour démontrent que le somnambule ne voit pas par ses yeux , n’entend pas par ses oreilles. » Quant à l’audition , cette assertion est en contradiction avec tous les faits : le somnambule, qui est en rapport avec certaines personnes , les entend, et alors les organes de l’ouïe fonctionnent absolument comme dans l’état ordinaire, ainsi qu’il est facile de s’en assurer. Il n’est pas plus exact de dire que le somnambule « ne voit rien par lui-même et ne porte sa pensée que sur l’objet désigné par celui qui l’a mis dans cet état. »

Nous n’insisterons pas sur ces erreurs que le praticien sera bientôt en état de rectifier lui-même. Quand la somme du bien l’emporte, on ne s’arrête pas à quelques taches.

A. S. Morin.

ERRATUM.

Dans le dernier numéro il s'est glissé plusieurs fautes typographiques qu'il est utile de rectifier.

Page 559, ligne 26, uu lieu de depuis, lisez rfèi.

Page 542, ligne 15, au lieu de à chaque, lisez chaque.

Page 543, ligne 36, au lieu de qu'il y a, lisez quil a.

Page 5«, ligne 10, nu lieu do témoigner le, lisez témoigner du.

Page 550, ligne 2, article sur le jury spiritualiste, au lieu de discussion, lisez désunion.

Baron du POTET, propriétaire-gérant.

CAUSERIES MAGNÉTIQUES.

SEIZIÈME CAUSERIE.

Patience et persévérance.

(Suite.)

Dans nia précédente causerie, j’ai fait connaître mon brillant début dans la carrière magnétique. La forme était plus convenable que celle que j’ai décrite, mais le fond était bien le même. Je voulais donner, on ne voulait pas recevoir ; j’appelais, on ne voulait point venir; je m’aplatissais et mon dévouement ne pouvait faire fléchir l’opinion des gens qui me croyaient dans l’erreur. Ce ne fut que petit à petit que je parvins à déterminer quelques hommes instruits «i s’approcher de moi ; mais les dénégations pleuvaient, on niait les faits, il n’y avait point de magnétisme, l’imagination était le principal argument de tous ses détracteurs, et quand par malheur les phénomènes produits touchaient au merveilleux, on suspectait ma bonne foi et celle des personnes que le magnétisme avait rendues sensibles. C’était souvent un prétexte pour se retirer de moi et de mes démonstrations ; de cette manière, on n’était plus forcé de convenir de la vérité; l’honnêteté aurait au moins exigé le silence, mais on me calomniait sans scrupule.

Ce fut d’abord le docteur Virey, écrivain démérité pourtant, qui, le premier, emboucha la trompette et sonna l’hal-lali du magnétisme devant l’Académie. — La bête se mourait, la bête était morte, le magnétisme n’était pins.....

Puis, le bouillant Récamier, docteur des jésuites ayant les principes de Bazile, et connaissant les heureux effets delà calomnie. Lorsque ce membre distingué de l’Académie parlait du magnétisme, aa voix résonnait comme un cuivre.

Puis, le docteur Double, médecin, bien nommé et renommé parmi les plus décidés des antagonistes du magnétisme.

Puis encore, Magendie, ce grand physiologiste, bourreau Tüjie XVii. _ N". 1«. —2« Série. — 25 Novembre 1858, 21

desespècescanineset félines. A ce nom, les magnétiseurs tremblaient de tous leurs membres , car ce médecin sentait d’une lieue l’opium et l’acide prussique : il était redouté môme de l’Académie. Un magnétiseur ne sortait jamais desmains de ce savant homme sans avoir été écorché tout vif. Mais j'en passe et des meilleurs, tous, huppés, décorés, pensionnés et membres de toutes les académies, et parmi ceux-ci le docteur Laënnec, l'inventeur du stétoscope, j’allais l’oublier; il appartenait également à la grande confrérie des chapeaux rabattus : c’est pourtant bien lui qui entretenait l’Académie de médecine dans son rire sur les prétendues merveilles du somnambulisme, les cures magnétiques, l’insensibilité, etc....

Tous ces hommes illustres sont morts aujourd’hui, mais ils ont laissé des petits... (une nombreuse postérité!), le docteur Dubois (d'Amiens) , dont le fameux traité contre le magnétisme est resté pour les frais du libraire, mais qui valut à son auteur toutes les faveurs de l'Académie : il en est encore aujourd’hui, je crois, secrétaire perpétuel.

Puis encore Burdin , le créateur d’un prix de 3,000 fr., offert à la meilleure somnambule lucide prix fabuleux et merveilleux ! personne ne le vit, ne sut où il était déposé. Le docteur Pigeaire, qui voulait que sa fdle le gagnât, pour en gratifier les pauvres en l’honneur du magnétisme, ne put jamais savoir, au juste, ce qu’était le programme du docteur Burdin, car chaque jour on y ajoutait un paragraphe impossible. Ce fut un coup de théâtre , un trépignement de joie à l’Académie, lorsque ce médecin fit part de son invention. 3,000 fr., mais c’était superbe, on ne vous prend souvent pas plus pour vous couper un membre.

Je ne sais si d’autres magnétistes voulurent gagner le prix; je crois, au contraire , qu’ils sentirent tous que cette amorce était placée sur un piège à loups. On parla longtemps de ce fameux prix, on en inséra l’annonce dans tous les journaux; je crois même, Dieu me pardonne, que beaucoup de médecins s’appuient sur lui pour nier la possibilité de la vision magnétique à travers les corps opaques. Tout allait donc au mieux pour nos adversaires : mais, nous devons l’avouer, il y avait à F Académie de médecine, desconsciences honnêtes, des gens

convaincus du magnétisme, qui souffraient de cette opposition et n’en attendaient rien de bon pour la renommée du corps des médecins et de l’Académie. Malheur à eux! ces amis de la vérité étaient considérés comme chiens galeux , on les isolait, à peine pourtant avaient-ils tondu du pré la largeur de leur tangue. Ils n’avouaient que les plus petits faits du magnétisme, rétrécissaient autant que possible l’action de cet agent, et en diminuaient les propriétés bienfaisantes ; mais les esprits, les beaux et grands esprits étaient à la gaieté dans le monde médical, où on ne s’abordait qu’en se demandant mutuellement : « Me voyez-vous par la nuque ?... M'apercevez-vous pur l’épigastre?... Croyez-vous au magnétisme... animal?

Au Collège de France môme, où M. Magendie occupait une chaire qui lui servait à travestir le magnétisme et à le rendre odieux et ridicule, on trompait la jeunesse des écoles, on aimait mieux pervertir son jugement que l'éclairersur le plus grand fait moderne , sur une vérité qui doit un jour agir si puissamment sur les destinées humaines.

Tous ces hommes, que je signale, eurent sans doute, dès leur début, de généreuses passions; ils avaient le noble désir de se rendre utiles au monde ; on doit même à plusieurs d'entre eux d’utiles découvertes; comment donc leur jugement s’est-il faussé? Eh! mon Dieu , marchant bientôt en compagnie du démon de l’orgueil et animés par l’intérêt, ils devinrent aveugles ; ne voyant plus la lumière, ils en nièrent l’existence.

Leur jugement, leur raison ! mais c'est moi qui erre en ce moment. Que leur manqua-t-il à tous ces grands hommes ? Rien. Ils eurent tout ce qui peut satisfaire l’ambition, les honneurs et la richesse. Qui donc s’avisa jamais de leur faire un reproche et de blâmer leur dégradante conduite? Aucun, si ce n’est moi, — moi ! pardon ! que suis-je ? Rien, ou presque rien ; il y a donc profit à être injuste, partial, menteur, impudent, insolent et calomniateur. Ceux qui veulent le triomphe de la vérité et qui se dévouent pour la répandre sont certains de rester dans la crotte.

Baron du Potet.

{La suite au prochain numéro.)

FAITS ET EXPÉRIENCES.

VÉRIFICATION SCIENTIFIQUE 1)11 MAGNÉTISME.

Depuis sa naissance, le magnétisme n’a cessé d’aller au-devant de l’examen et d’offrir des moyens de s’éclairer à tous ceux qui en ont eu le désir, tandis que les nouveaux faiseurs de miracles, si prodigues de relations pompeuses, ne sont jamais prêts quand on leur demande des fait*, trouvent toujours quelque prétexte; et les Esprits, si puissants, si habiles quand il n’y a personne pour constater leurs exploits, sont frappés d’impuissance dès qu’il survient un observateur, semblables à ces mauvais cabotins qui se posent en virtuoses de premier ordre et qui sont toujours enrhumés ¡quand il s’agit de chanter.

Le meilleur moyen de vérifier la réalité du magnétisme, d’en mesurer la puissance, d’en constater les usages utiles et de discerner le vrai du faux, c’est de faire un appel à tous les hommes de bonne foi et de charger des personnes judicieuses et éclairées de procéder à de sérieuses investigations. C’est ce qui s’est fait en Amérique en 18il ; nous regrettons de n’être informés que tardivement des intéressantes expériences qui ont eu lieu alors ; nous devons à l’obligeance du savant M. Capern, magnétiçte anglais fort distingué, la communication .du procès-verbal qui a été régulièrement dressé alors, et dont nous allons donner à nos lecteurs quelques extraits.

C’est à Boston, dans le Temple maçonnique, qu’eut lieu, le 22 juin, une réunion nombreuse comprenant les bourgeois les plus considérables de la ville, dans le but de s’enquérir du magnétisme animal. On y nomma une commission composée des docteurs Abner Phleps, Winslow Lewis, et Francis Dana, qui s’adjoignit vingt-sept autres membres.

« A la séance du 25 juin, le docteur Collyer exécuta les gestes connus en agissant sur son fils Frédéric qui parut

plongé dans le sommeil. Plusieurs personnes essayèrent de le faire lever, soit en le secouant sur son siège , soit en lui tirant près des oreilles des coups de pistolet, niais 011 no découvrit chez le sujet aucun symptôme annonçant qu’il eût conscience de ce qui se passait : seulement, lors d’une des détonations , on remarqua dans un bras un spasme semblable à ceux qui avaient eu lieu plus d'un quart d’heure auparavant.

« On introduisit un jeune homme, fils de M. Beals, honorable négociant de cette ville, et qui souillait de l’affection appelée chorée ou danse de Saint Guy (en anglais, Saint Vitu). Comme on s’informa si quelqu’un le connaissait, le révérend M. Stovve attesta qu’il était son paroissien depuis plusieurs années, certifia sa moralité, et déclara en conséquence qu’on ne pouvait supposer de collusion entre, lui et M. Coljyer. Celui-ci fit, pendant environ quinze minutes, des passes sur le jeune homme qui ensuite se trouva parfaitement calme, tandis que précédemment il était continuellement agité de mouvements convulsifs et involontaires.

« Il est à remarquer que , pendant qu’on opérait sur ce malade, le premier sujet qui était endormi fut agité de spasmes très-forts qui continuèrent pendant tout le temps que dura son sommeil. Le révérend M. Gannet demanda à M. Col-lyer s’il avait eu l’intention de transporter les symptômes de chorée au premier sujet. Le docteur répondit qu’il n’avait point eu cette intention et qu’il était aussi surpris de cette circonstance que les autres personnes de la société. Le président (docteur Wiliam Ingalls) ayant demandé si l’enfant (Frédéric) était dans un état qui n’était pas naturel, le docteur Stedman répondit qu’il lui semblait qu’en effet cet état n’était pas naturel et-que ces spasmes ne pouvaient être simulés.

« A la séance du 28 juin, i\I. Collyer opéra d’abord sur ses sujets avec plus ou moins de succès apparent. Un membre observa qu’il serait bien plus satisfaisant pour la commission d’avoir des sujets qui ne fussent pas connus de lui, et qui le lussent davantage de la commission, et qu’il y avait dans la

salle un monsieur qui désirait se soumettre aux expériences et qu'on croyait susceptible de ressentir l'influence magnétique. M. Collyer consentit à faire un essai. Plusieurs personnes présentes, parmi lesquelles se trouvaient des médecins membres de la commission et des incrédules en fait de magnétisme, exprimèrent hautement leur estime pour ce nouveau sujet, vantèrent sa probité irréprochable, et ses connaissances en physique et en littérature, et le présentèrent comme un homme incapable de se prêter à aucune fraude. M. Collyer employa les procédés ordinaires pendant dix minutes ou environ, et le sujet s’endormit graduellement. Alors le magnétiseur dirigea sa main sur son visage, et tout à coup le sujet remua la tête et les épaules et se réveilla ; il souriait et ne paraissait qu’à demi redevenu maître de lui-même. Il resta ainsi environ dix secondes ; puis, M. Collyer lui ayant lancé un regard sévère, le sujet baissa la tête , et, au bout de dix autres secondes, retomba dans le sommeil. Quelques secondes après, ils’éveilla denouveau, un regard deM. Collyer le rendormit encore. Quand il futde nouveau réveillé, il clier-chaà rendre compte de ses impressions. Il appuya ses mains sur les bras du fauteuil, alin de se lever, comme s’il avait conscience depouvoirle faire, mais M. Collyer l’avant regardé fixement en face, le sujet retomba assis sur le fauteuil, comme s’il était trop faible pour se lever. Quelques instants après, il se leva debout, mais paraissant céder à l’empire de la même force, il retomba sur son siège. Il se releva et se dirigea vers la commission ; il semblait se croire réintégré dans son état normal, et ne pas apercevoir M. Collyer qui, debout derrière lui, avait sur lui les yeux fixés. Le sujet essaya avec une certaine énergie d’expliquer ce qu’il éprouvait ; mais il bégaya deux ou trois mots, passa deux ou trois fois sa main sur ses yeux comme pour dissiper un brouillard, et resta court au milieu d’une phrase, sans pouvoir se faire comprendre ni achever ce qu’il avait commencé ; puis, passant de nouveau sa main sur ses yeux, il les frotta comme un homme qui n’est qu’imparfaitement éveillé ; il retourna vers son fauteuil ; mais alors il s’aperçut que M. Collyer était derrière lui et

avait les yeux fixés sur lui ; il s'en éloigna d’environ trois pas. Le docteur cessa dès ce moment de s’occuper de lui, et le sujet put enfin s’exprimer d une manière suivie et avec une entière liberté. Il raconta qu’il avait senti un chatouillement agréable dans les-bras et les mains. Je n’ai pas, dit-il, perdu entièrement connaissance ; mais je ne sentais plus que confusément; j’ai essayé deux fois de parler, mais la puissance de M. Collyer m’en a empêché. Il assura que précédemment il n’avait jamais parlé à ce docteur, si ce n’est une fois par hasard, l’avant-veille, au Musée d’histoire naturelle, qu’il ne 1 avait vu que deux fois et qu’ils n’avaient causé ensemble de rien qui eût trait à l'objet de cette séance. Malgré le désir que lui exprima la commission, il déclara refuser de se soumettre à d autres expériences. — M. Beals vint annoncer que depuis sept ans son fils n’avait jamais été si tranquille que depuis qu’il avait été magnétisé par M. Collyer.

« Séance du 29 juin. — La commission nomme une sous-commission de cinq membres pour examiner le jeune Frédéric avant et après la magnétisation. Cette sous-commission l’examina et ne trouva en lui rien de remarquable. M. Collyer commença à le magnétiser à il heures 28 minutes: pendant l’opération , l’enfant déclarait qu’il ne voulait pas être endormi par M. Collyer, parce que celui-ci avait magnétisé M. Beals. Au bout de sept minutes, il y eut de fortes convulsions des muscles sur tout le corps, semblables en apparence à celles du jeune homme atteint de chorée , lequel était présent et affirmait qu’il n’avait plus rien ressenti depuis que M. Collyer avait magnétisé Frédéric dans cette séance, ruais qu’auparavant il avait encore éprouvé quelques convulsions, beaucoup moins fortes qu’avant d’avoir été magnétisé par M. Collyer. Cette cessation actuelle de son infirmité fut jugée digne d’être notée, bien que la magnétisation de Frédéric et la survenance des convulsions pendant cette opération pussent n’avoir aucune connexité avec cette cessation. Le révérend M. Turnbull expliqua le fait en disant que la tranquillité actuelle des muscles de Beals pouvait être causée par l’attention soutenue qu’il prêtait à l'opératidn sur Frédéric,

et il demanda à Bealss’il éprouvait lamême tranquillité quand il écoulait les discours de son pasteur ou quand il s’occupait d’une chose qui l’intéressait vivement. Beals répondit qu'alors, au contraire, il était beaucoup plus agité.La sous-commission fut invitée à donner un avis sur les convulsions musculaires de Frédéric, qui avaient continué pendant un temps assez long. Le docteur Storer ayant dit qu’elles pouvaient être simulées, on lui demanda s’il pouvait affirmer qu’elles le fussent. 11 répondit qu’il ne voudrait pas être forcé de se prononcer catégoriquement, mais que si l’on insistait, il était d’avis qu’il y avait simulation. Le docteur Morrell se rangea à cette opinion. Le docteur Lane s’excusa et dit qu’il n’était pas en mesure de prononcer un jugement. M. James dit qu’il regardait comme douteux qu’on put feindre un pareil état. M. Collyer offrit de maintenir le jeune homme dans cette situation certainement peu agréable, pendant doux, trois ou quatre jours , avec des gardiens qui alterneraient pour l’observer, de manière qu’on pût vérifier s’il simulait son état.

« M. Stone, étudiant en médecine à Salem, présenté à la commission par il. Storer, se fit garant du caractère sincère du jeune homme, repoussa la supposition d'un concert frauduleux entre lui etM. Collyer, et ajouta : « S’il dit que M. Collyer l’endort, je le croirai. » M. Collyer fit en conséquence une tentative. Les seuls effets obtenus sur ce sujet ( dans cette circonstance) furent une grande pesanteur des bras, semblable à celle que cause une énorme fatigue, et une forte con -traction du petit doigt, que le sujet s'efforça , mais en vain, de faire cesser.

« Comme M. Collyer avait dit à plusieurs membres que Frédéric se trouvait dans un élat de clairvoyance extraordinaire, M. John Parle, que le magnétiseur avait reconnu pour être doué de la suite dans les idées nécessaire pour interroger, fut mis en rapport avec le jeune homme. Al. Park, sans laisser apercevoir son but, sans poser de ces questions qui font pressentir la réponse, interrogea le jeune homme. Les deux ou trois premières réponses n’ayant pas été satisfaisantes, il revint sur ses pas. Les réponses suivantes furent excel-

lentes, et M. Park iléclara qu’elles contenaient, pour la majeure partie, la description exacte des objets qu’il avait en vue ; il signa en conséquence un certificat.

« Séance du Ier juillet. —Le docteur Gregerson fut invité à rendre compte des expériences auxquelles il s'était livré. Ce médecin lit un récit fort intéressant et détaillé des faits qui ont produit chez lui la conviction de la réalité du magnétisme animal. Il raconta que trois jours auparavant, alors qu’il était entièrement incré Iule , il avait actionné un monsieur, également incrédule, qui aurait voulu que M. Gollyer le magnétisât, tout en faisant semblant de dormir et en se moquant ensuite du prétendu succès du magnétiseur. Ce‘même individu, magnétisé par M. Gregerson, parut s’endormir. Quand il fut réveillé, 011 lui demanda s’il 11’avait pas exécuté le même stratagème dont il avait compté user avec M. Collyev : il répondit qu’effectivement il n’avait pas dormi. Mais en lui faisant différentes questions, 011 s’assura qu’il 110 s’était pas aperçu de bruits considérables qui avaient eu lieu pendant le même temps, et 11c se doutait pas que les portes avaient été ouvertes et fermées. Depuis ce premier essai, M. Gregerson l’a plusieurs fois endormi d’une manière non équivoque, et a produit les phénomènes du somnambulisme. — La commission a été mise, par M. Gregerson, à même de vérifier son assertion, dans la salle basse du Temple.

« Après une tentative infructueuse sur un nouveau sujet, M. Gollyer opéra sur M. Stone dont il a déjà été fait mention et pour lequel une partie de la réunion avait manifesté de la confiance. — Ce sujet étant debout, M. Gollyer fait des passes pendant une ou deux minutes, puis il cesse et s’assied. O11 demande alors à M. Stone ce qu'il éprouve ; mais il reste dans la même position, muet o,l immobile, ne paraissant pas s’apercevoir de ce qui se faisait et se disait autour de lui, les yeux demeurant fixes et ne paraissant rien voir. On lui demande s’il peut parler : il répond très-bas : Oui, monsieur. Après un peu d’intervalle, ayant toujours les yeux très-fixes, il ajoute : J’éprouve quelque chose de très-singulier; je ne puis mouvoir ni les yeux ni les membres. Une minute après,

iJ parut plus maître de lui-même, et il fit le récit suivant : — J’ai éprouvé toutes sortes de sensations confuses que je ne puis pas encore bien démêler. Quand on m’a demandé ce que je ressentais, je me suis figuré que je pouvais répondre , et j’ai essayé de le faire, mais j'en ai été empêché je ne sais comment. J’ai éprouvé dans les bras, dans les jambes et par tout le corps, une sensation particulière qui dure encore. Quand M. Collyer s’est éloigné de moi et m’a livré à moi-même, j’ai senti que je pouvais rester debout ici, très à mon aise, peni dant un temps assez considérable, et que j’avais un grand effort à faire pour pouvoir me mouvoir. Quand vous m’avez invité à parler, je sentais que vous attendiez tous ma réponse, et cependant je ne pouvais parler.

« M. Jones a agi sur Frédéric qui, au bout de cinq minutes, fut endormi. M. Jones lui fit différentes questions; la plupart des réponses furent exactes. M. Collyer avait été. éloigné. ,

« Séance du 6 juillet. — Un vif débat a eu lieu relativement aux expériences de M. Gregerson. Celui-ci présente ensuite un nouveau sujet sur lequel il opère. Le docteur Storer et plusieurs autres membres incrédules se déclarent satisfaits quant à sa moralité et le regardent comme incapable de. fraude.

« La sous-commission constate que Je sujet a la peau moite, les mains froides, le pouls tranquille donnant 96 pulsations par minute le pouls du magnétiseur marque également 96. il Commence à agir à h heures AO minutes.. Sept minute», après, le sujet paraît endormi. Le magnétiseur applique' ses; mains au-dessus de celles du sujet, comme pour l’attirer e» haut : alors les doigts du dormeur se mettent à trembler, puis toute la main est agitée de mouvements’convulsils en exécutant des vibrations d’au moins un pouce. M. Collyer applique son autre main sur celle du sujet, et on voit se produire sur celle-ci les mêmes mouvements. Le magnétiseur applique ensuite un aimant en forme de fer à cheval, ce qui détermine les mêmes effets. Il assure que le sujet est alors' dans un état de demi-somnambulisme. Quelques minute

après, il fait «le nouvelles passes et demande au sujet : Me voyez-vous? — Oui. — Voyez-vous autre chose?

— Non.

« Plusieurs personnes interpellent le sujet, quelques-unes ii très-haute voix, d’autres en imitant la voix du magnétiseur : le sujet se retourne et ne répond rien. On produisit un grand bruit : M. Collyer lui demande doucement s'il entend quelque chose, il répond que non. Il a les yeux ouverts : M. Sto-rer en fait remarquer les mouvements vibratoires qui semblent involontaires. Le pouls est toujours à 96 , comme avant l’opération. On chatouille le sujet au nez , aux oreilles , aux côtés et à d'autres endroits sensibles; il reste immobile , bien que son frère, présent à la séance, assure qu’habituellement il est très-chatouilleux. — M. Collyer lui fait faire par la pensée un voyage â Tremont-House. On lui demande où il est : il répond qu’il est à la salle d’audience et qu’il y a trois personnes. Une personne très-honorable de la société se détache , court à l’endroit indiqué et y trouve effectivement trois personnes qui déclarent que ce nombre n’a pas varié depuis plus de dix minutes. — On envoie également le sujet en imagination à la salle basse du Temple, et il y voit cinq personnes. Vérification faite, il ne s'en trouve que quatre. Le magnétiseur lui demande s'il se compte lui-même dans les cinq : il répond affirmativement. On le prie ensuite de désigner ce que tient à la main une de ces personnes, il répond un pied. Il se trouve qu’une de ces personnes tenait à la main le pied d’un tabouret.

« A 5 heures minutes, M. Collyer fait des passes pour le réveiller : deux minutes après , le sujet commence à remuer la tête; après deux autres minutes, il est debout, soupire profondément, remue les épaules , se passe les mains sur la figure, se frotte les yeux, puis étend les membres comme un homme qui sort d'un profond sommeil. Il avait dormi une heure dix minutes. Pendant tout ce temps, les diverses tentatives qu'on avait faites n’avaient pu déterminer de sa part aucun mouvement, si ce n’est les convulsions dont il a été parlé : et cependant, quand on avait fait claquer les doigts

près de ses oreilles, il y avait eu un léger mouvement de tète.

« Le sujet ayant repris par degrés sa connaissance, déclara que ses bras étaient, avant la séance, roides et fatigués d'avoir ramé la veille, au point qu’il avait dc la peine à les plier, qu’il éprouvait aussi une grande fatigue clans le dos, mais que maintenant ses bras étaient souples et agiles et qu’il ne restait presque plus rien de la fatigue du dos. M. Creen-wood lui ayant demandé combien de temps il croyait avoir dormi, il répondit : Environ dix minutes. Il ajouta qu’il ne lui en restait aucun souvenir, sinon d’avoir vu M. Collyer. Celui-ci dit que ce souvenir devait se rapporter à cequ’il avait vu dans son état de demi-somnambulisme. Le sujet rendant compte de ses/sensations, dit : En me réveillant, il m’a semblé sortir du sommeil ordinaire ; je ne me rappelle pas que. personne m’ait touché, je n’ai entendu aucun bruit et je n’ai souvenir d’aucun rêve-ou vision. — Le révérend Al. Gannet lui dit : Quand vous vous êtes réveillé, vous avez pressé votre estomac et croisé vos bras sur votre poitrine, comme si vous souffriez : éprouviez-vous quelque douleur clans les quatre ou cinq dernières minutes ? — 11 répondit négativement. Il dit qu’il n’avait pas cherché à s’endormir, qu’il croyait même pouvoir rester éveillé, qu’il n’avait jamais vu magnétiser avant les dernières1 expériences de M. Collyer.

« II fut décidé que les membres de la sous-commission donneraient individuellement leur opinion sur les faits observés.

« Le docteur Storer. — J’ai été jusqu’ici entièrement incrédule. Mais je considère comme parfaitement satisfaisantes les expériences dont j’ai été témoin. Je regardo maintenant comme hors de doute que Mi... (le dernier sujet) était dans un état non naturel, et que cet état a été produit par M. Collyer.

« Le docteur Lewis. — J’ai la même conviction quant aux autres sujets.

« Le docteur Morrell exprime une opinion qui, en substance, est conforme à celle de M. Storer.

«Le-docteur Adains. — Je suis obligé de reconnaître que

le dernier sujet était dans un état nerveux fort étrange et qui n’est pas naturel.

te M. James adhère à ces déclarations. Ii;i

« M. Stone. — Je n’hésite pas ¡1 reconnaître l’éUt non naturel du dernier sujet, d’autant plus que je l’avais observé deux fois avant la séance, que j’avais moi-même produit sur lui ces phénomènes, et que je le connais intimement depuis longtemps.

« Les procès-verbaux des séances furent lus et adoptés. Sur la proposition de M. Storer, la commission, à l'unanimité, vota des remerciements aux personnes qui avaient bien voulu se prêter aux expériences.

« Après une discussion prolongée, à laquelle beaucoup de membres ont pris pari, la commission a décidé à l’unanimité que, tout en s’abstenant de prononcer un jugement formel et décisif sur la science et le principe du magnétisme animal, elle reconnaissait que, dans les expériences de AI. Collyer, il s’était passé des faits qui ne peuvent s’expliquer ni par la simulation ou par la collusion, ni par les lois physiologiques connues. —Après avoir ordonné la publication de son procès-verbal, la réunion s’est dissoute. »

Pour extrait,

A. S. Morin.

CLINIQUE MAGNÉTIQUE.

Si les médecins pratiquaient le magnétisme, ils sauraient bien des choses qu’on leur cache, de peur de blesser leur dignité, comme cela est déjà arrivé. Nous dirons, par exemple, que si la quinine est quelquefois utile, on en fait trop souvent un déplorable abus. Ainsi :

Un enfant avait la fièvre; le médecin, averti, fit dire quai irait le voir le lendemain. La mère du petit malade fut som-nambulisée le soir même et dit : « Mon enfant a rune fièvre

de croissance; il faut la couper avec du jus de citron, mêlé au café. — Mais, lui fit-on observer, le médecin doit venir demain matin. —Non, il ne viendra pas; un monsieur viendra pour lui et me dira de donner au malade une poudre blanche. — Qu’est-ce que cette poudre? — Je ne sais pas. » Qn en nomma plusieurs, et au mot quinine: — « Oui/c’est cela, mais il ne faut pas lui en donner ; il en a déjà pris, et c’est pour cela qu’il est un peu sourd. » Le lendemain, le médecin attendu envoya un de ses confrères, le monsieur que la somnambule ne connaissait point et qui prescrivit la quinine. On suivit l’ordonnance delà mère, et •l’enfant s’en trouva bien.

Un autre enfant allait être traité par la quinine ; mais, auparavant, on voulut consulter une somnambule au moyen d’un vêtement de l’enfant. La clairvoyante déclara que le petit malade avait pris froid et que la fièvre provenait de l’irritation des intestins et de l'estomac. Elle recommanda les bouillons de poulet et les bains. On lui dit alors que le médecin venait d’ordonner la quinine (la science allait combattre le symptôme et non le mal). La somnambule répondit que si on donnait ce médicament, on courait risque d’occasionner une mauvaise fièvre. Mais la famille avait pleine confiance au médecin, et la quinine prévalut. Quelque temps après, cependant, le médecin, inquiet, demanda une consultation. On le laissa libre de faire comme il l’entendrait. 11 amena un confrère de son choix, et celui-ci fit cesser la quinine et prescrivit les bouillons de poulet et les bains (exactement ce que la somnambule avait recommandé le premier jour). On alla de nouveau consulter cette somnambule, qui dit simplement : « Celui-là en sait plus que l’autre ; le mal est arrêté, mais la convalescence sera longue. » Le pauvre enfant en eut pour six semaines.

O médecins ! nous reconnaissons volontiers que vous faites ce que vous pouvez, et vous êtes de bonne foi, puisque les malheurs qui frappent vos clients vous atteignent aussi dans vos propres familles ; mais vous pourriez faire beaucoup mieux si vous n’étiez pas aveuglés par vos préjugés scientifiques.

Vos insuccès dans l’épidémie que nous traversons, et les heureux résultats, comparativement si nombreux, qu’obtiennent des femmes sans instruction, ne vous disent-ils pas que vous marchez dans une fausse voie? Les clairvoyants, qui jugent mieux de l’état d'un malade, sur un simple vêtement et les yeux fermés que vous à l’inspection de la langue et au pouls ; les guérisons si éclatantes qu’ils obtiennent, après que vous avez épuisé vainement toutes vos ressources (trop souvent, hélas! pour aggx'aver le mal) ; tout cela ne vous dit-il point qu’au-dessus de votre art il y a quelque chose dont vous devriez l’agrandir ?

Au nom de la santé publique dont vous vous êtes constitués les ministres, nous vous conjurons de vous rappeler que vos devanciers, après avoir longtemps repoussé l’émétique et la vaccine, finirent par adopter ces deux agents, qui ont sans doute guéri et préservé de bien des maux. *Eh bien ! •faites-en autant du magnétisme et du spiritualisme (qui, sans être des drogues, sont des réalités), et nous ne doutons pas que si, maintenant, vous vous donnez énormément de mal pour faire un peu de bien, vous n’arriviez un jour à faire beaucoup de bien sans trop de peine. Vous compterez peut-être moins de visites ; peut-être encaisserez-vous de moins gros honoraires ; mais vous serez plus heureux, et votre clientèle aussi.

En attendant que la science médicale en vienne à cette réforme, à ce progrès, nous répétons que toute personne intelligente et bien intentionnée peut être médecin (non docteur) ; on n’a pas besoin de savoir le latin ni le grec pour guérir ses semblables. 11 y a presque un traité de médecine dans ces trois mots : Imposition des mains ; il y en a un dans cette ligne : se recueillir, penser à Dieu, vouloir le bien de son prochain, et Dieu fera le reste.

(Extrait du Spiritualiste de la Nouvelle-Orléans du mois d’octobre.)

CONNEXITÉ DU IIAGNÉTISME

ET DU SPIRITUALISME.

Le journal anglais le Britis/i Spiritual Tctcgraph, qui est consacré spécialement au spiritualisme, vient de publier, à titre de supplément, une brochure de M. John Ashburner, qui doit être suivie de plusieurs autres, ayant pour but d’établir la connexité du mesmérisme et du spiritualisme, et des religions naturelle et révélées. Dans cette première publication, l’auteur se livre à des considérations générales sur la nature de la matière, sur les forces en général et sur le mouvement ; il prétend établir une étroite analogie entre le magnétisme animal (qu’il appelle mesmérisme pour éviter toute équivoque) et le magnétisme minéral. « Il ne peut, dit-il, y avoir de contact entre deux hommes, sans qu’il en résulte nne influence réciproque de l’un sur l’autre. Quelle est la nature de cette influence ? C’est ce qu’il est difficile de préciser ; mais ce que nous savons, c’est qu’elle est magnéti-tique (ce mot étant pris dans le sens que lui donnent les physiciens), et il a été démontré par diverses expériences que cette influence peut être constatée au moyen d’une application ingénieuse du pendule due à M. Rutter, de Brighton, dont l'instrument est connu sous le nom de magnétoscope. Malgré les efforts des notabilités scientifiques pour nier jusqu’à l’existence de cet instrument, il n’est pas douteux que la connaissance ne doive bientôt en être répandue, et l’on sera émerveillé des résultats auxquels il conduira. »

Nous regrettons que M. Ashburner n'ait pas donné la description de cet instrument, qui est complètement inconnu en, France ; car nous ne pensons pas qu’il s’agisse ici du petit appareil en papier ou en paille qu’on faisait mouvoir en en approchant la main à une distante de quelques décimètres ; ce mouvement, que plusieurs auteurs avaient cru pouvoir attribuer à l’action du fluide magnétique, n’était dû qu’à

la chaleur de la main. Il est probable que la découverte de. M. Rutter, sur laquelle l’écrivain anglais fonde de si grandes espérances, a une tout autre valeur; et s’il existe, comme il nous l'annonce, un moyen physique et palpable de mettre eu évidence l’action mesmérique, nous serons charmé de l’aider à en répandre la connaissance dans le public.

M. Vshburner, dans son premier essai, n’aborde pas la question du spiritualisme; il s’occupe beaucoup, il est vrai, "des médiums guérisseurs (healing médiums) ; mais comme il ne fait pas intervenir, dans leurs opérations, d’Esprits ou êtres extra-humains, il est clair que leur action est purement mesmérienne, et que ces médiums sont tout simplement des magnétiseurs. C’est avec plaisir que nous reproduisons le récit qu’il nous donne de sa guérison due au magnétisme : « Je dois la vie, dit-il, au zèle patient et persévérant de mon ami Henry Thompson. En 1S/i7, souffrant à lafoisd’une bronchite, d’une pneumonie etd’une inflammation du foie, j’étais \ l'article de la mort. Mes amis, les docteurs Elliotson et Fergu-son avaient épuisé toutes les ressources de lpur art; le premier ayant entendu parler de l’arrivée à Londres de M. Thompson, l’envoya quérir dix heures et demie du soir, en lui mandant qu’il ne restait que bien peu d’espoir de me sauver. Le dévouement de mon ami fut infatigable. Il fixa les yeux sur moi, et avec les plus grands efforts, il dissipa les maladies l’une après l’autre. Cette opération, soutenue par une volonté forte et une charité ardente, dura quatre heures et demie; après quoi, moi, qui depuis trois jours et trois nuits n’avais pu goûter un moment de repos, ni rester couché horizontalement, j’écartai la montagne de coussins qu’on avait accumulée pour me maintenir assis, je me con-chaitout démon long, et je dormis profondément pendant cinq heures sans changer de position; Au réveil, je me trouvai bien ; plus d’inflammation, de toux, de douleur, tout avait disparu. Je n’avais plus souci que d’une chose, de bien déjeuner... Etait-ce un miracle? Non, car il n’y avait point d’intervention de la puissance divine. Thompson attribue ces résultats à sa volonté, à son énergie, à sa persévérance. »

L’auteur, par le choix de cet exemple, semble s’en tenir au magnétisme rationnel, et nous ne soupçonnons pas encore par quel chemin il conduira ses lecteurs pour leur démontrer ce qu’annonce son programme.

Si nous recevons ses autres essais, nous en rendrons compte.

A. S. M.

PRÉVISION.

— La Gazette d’Arad raconte le fait suivant :

« Deux frères Israélites, de Gyek (Hongrie), étaient allés à. Grosswardein, conduire, dans un pensionnat, leurs deux filles, âgées de quatorze ans. Pendant la nuit qui suivit leur départ, une autre fille de l’un d'eux, âgée de dix ans, et qui était restée à la maison, se réveille en sursaut et raconte en pleurant à sa mère qu’elle a vu en rêve son père et son oncle entourés de plusieurs paysans qui voulaient leur faire du mal.

« D’abord, la mère ne tint aucun compte de scs paroles ; mais, voyant qu’elle ne peut parvenir à calmer son enfant, elle la mène chez le maire du lieu ; celle-ci lui raconte de nouveau son rêve, en ajoutant qu’elle avait reconnu deux de ses voisins parmi les paysans, et que l’événement s’était passé sur la lisière d’une forêt.

« Le maire envoie immédiatement au domicile des deux paysans, qui étaient en effet absents; puis, afin de s’assurer de la vérité, il expédie dans la direction indiquée d’autres émissaires qui trouvent cinq cadavres sur les confins d’un bois. C’étaient les deux pères avec les deux filles et le cocher qui les avait conduits ; les cadavres avaient été jetés sur un brasier pour les rendre méconnaissables. Aussitôt la gendarmerie commença des perquisitions ; elle arrêta les deux paysans désignés, au moment où ils cherchaient à changer plusieurs billets de banque tachés de sang. Une fois en prison, ils avouèrent leur crime, en disant qu’ils reconnaissaient le doigt de Dieu dans la pompte découverte de leur crime. »

VARIÉTÉS.

LES RÊVES.

On n’a jamais tenu aucun compte des rêves, de ce travail mystérieux qui a lieu pendant notre sommeil ; seuls pourtant ils peuvent nous révéler les causes du somnambulisme, car ils en sont le commencement. Il faudrait donc soumettre les rêves une étude suivie, afin de distinguer ceux qui d’entre eux appartiennent aux digestions laborieuses, aux embarras momentanés qui peuvent avoir lieu dans la machine humaine, etdéjà ceci serait une indication pouvant conduire h des découvertes ; puis, voir si l’âme, dégagée des liens de la matière parle sommeil, ne pourrait, dans certains cas et par des images, nous faire pressentir notre destinée.

Tout en laissant à de grands esprits le soin de s’occuper des mystères du sommeil, j’inscris ici un de ces rêves bizarres qui m’a paru mériter de figurer dans le journal.

Do Potet.

Paris, le 18 novembre 1858.

Monsieur le baron,

En rêve, je me sentais mourir, toutes mes forces me quittaient à la fois, et cependant j’étais maître de toutes mes idées et j’observais attentivement ce que j’éprouvais. J’étais dans un cimetière, au milieu de fosses remplies de corps-, morts ; je respirais avec dégoût l’odeur des cadavres que je reconnaissais pour ceux de gens avec lesquels j’avais vécu. Ce cimetière était sous une grotte. Malgré ma mort, je voyais, par l’ouverture de la grotte, la belle vue que l’on a, du cimetière de Boulogne, en regardant les bords de la Seine vers Saint-Cloud. Je m’étonnais beaucoup de me voir mort, couché dans ma bière , enfin enterré, et cependant de voir la terre comme de mon vivant. Un moment après, je me trouvais dans le vaste escalier de marbre d’un palais, je desceu-

dais cet escalier. N’ayant plus que quelques marches pour être au vestibule, je m’arrêtais et voyais à travers la porte un magnifique palais d'une architecture grandiose. Lue de ses ailes était occupée par l’escalier où je me trouvais. Des arbres magnifiques reliaient sa cour au parc. Beaucoup de monde se promenait dans cette vaste cour.

Six ou sept personnages que je crus gens de connaissance s’v trouvaient assis sur un banc..., leur costume différait du nôtre et paraissait remonter à une époque plus reculée et d’un autre pays. Un entre autres était habillé en rouge. Me voyant descendre l’escalier, ils vinrent à moi en ouvrant leurs bras, je fis de même en allant à leur rencontre, et alors un fait, qui me parut extraordinaire, se passa.

Nous fûmes tous confondus en un seul, ils faisaient un seul moi, et cependant je les voyais tous.

Mon coeur en était inondé d’une joie immense qui se prolongea bien longtemps après mon réveil.

Ne serait-ce pas un symbole de ma mort et de la manière dont je serai reçu par des êtres qui me sont chers dans un monde plus beau? En tous cas, si la mort n’est que cela, Dieu est bon 1

D...

Le Messager de Paris, 11° du mardi 9 novembre 1858.

Cette fois j’ai à constater un des triomphes du magnétisme. Un magnétiseur autrichien nous est arrivé la semaine dernière. Il se nomme le docteur Friedberg. Il a obtenu par le magnétisme ce que personne n’a obtenu avant lui. Les autres ont fait des expériences plus ou moins intéressantes, nous ont fait assister à des phénomènes fugitifs ne se reproduisant pas toujours, se contentant pour ainsi dire d’intéres-rer la curiosité, mais se refusant à toute application régulièrement utile.

Ainsi combien de somnambules ont, dit-on, la faculté de voir à distance, combien de somnambules ont sérieusement la prétention de vous dire ce que fait, au moment où ils vous parlent, une personne absente ; où se trouve un objet égaré

ou perdu, etc. Mais ces expériences, qui se font toujours sans utilité et sans possibilité de contrôle immédiat, quand les a-t-on vus se produire dans les grandes circonstances où leur constatation serait officielle, où par leur utilité elles rendraient d'importants services? Quand a-t-on vu, par exemple, le somnambulisme remplacer le télégraphe électrique par la vue distance? Qu’on nous cite un seul cas où la justice humaine aurait découvert, à l’aide du somnambulisme, un de ces grands coupables dont le châtiment importe â la sécurité de la société ?

Eh bien ! le magnétisme a été utile au docteur Friedberg ; non pas utile à sa fortune par les bénéfices assurés à tout charlatanisme, mais sérieusement, immédiatement, directement utile.

Le docteur Friedberg s’occupait du côté précis et positif du magnétisme. 11 ne prétendait point guérir les malades par la divination somnambulique, dont il nie l’existence, mais bien par 1 action directe des passes magnétiques sur l’individu qui souffre. De plus, il donnait à toutes les personnes qu’il magnétisait la plus parfaite insensibilité. Si bien qu’il obtenait les mômes effets que le chloroforme, sans les dangers auxquels celui-ci expose. Plusieurs fois, à Vienne, des blessés qu’il fallait amputer d’une jambe ou d’un bras, ont subi, grâce au docteur Friedberg, cette cruelle opération sans aucune douleur. •

Le docteur Friedberg faisait des expériences publiques dans une vaste salle de la rue de Schœnbrunn, en présence d une foule’ considérable de spectateurs admis sur une carte d'invitation signée de lui, et tout à fait gratuite. 11 endormait 'ans ces séances la première personne venue. Sa puissance magnétique est si grande que nul ne lui résiste. Il guérissait, m’assure-t-on, les maladies nerveuses les plus rebelles; il triomphait, ajoute-t-on, de l’effrayante immobilité de la paralysie et des non moins effrayantes convulsions de l’épilepsie. Il avait beaucoup de succès, comptant parmi ses adeptes des magistrats, desministres, desfelds-maréchaux et même des médecins célèbres. Il a guéri, il y a plusieurs

années, M. de Metternicli d’un rliumatisme aigu qui avait résisté aux plus savants médecins, c’est ce qui a commencé la fortune de docteur Friedberg.

Tout à coup la police autrichienne s’émeut, on ne sait pas pourquoi, de ces séances retentissantes... La politique fut-elle pour quelque chose dans les mesures prises? je l’ignore; mais ce que je sais, c'est que la police avait des représentants aux réunions de la rue de Shœnbrunn, et que sur leur rapport elle a interdit ces réunions au grand désespoir des adeptes du docteur.

Le docteur a résisté d'abord. Deux fois, malgré des ordres formels, il a rouvert ses séances. La police a fait mettre M. Friedberg en prison, ainsi que deux de ses adeptes les plus passionnés.

Le jour où l'on vint l’arrêter, il pétrifia d’un geste les agents qui se préparaient à l’emmener. Lorsqu’il les eut endormis du sommeil magnétique, il les fit mettre dans un fiacre et les fit reconduire à la direction générale de la police.

Le lendemain, on vint de nouveau l’arrêter ; cette fois il se laissa faire, et on le conduisit en prison. Le docteur n’y resta pas longtemps ; il endormit du sommeil magnétique le gardien qui venait lui apporter à manger ; il descendit dans les cours, endormit deux gardiens qu’il rencontra, arriva à la porte principale, endormit les soldats du poste, endormit le concierge de la prison, endormit le factionnaire et retourna paisiblement chez lui.

Malheureusement ses élèves étaient poursuivis aussi ; pour ne pas attirer sur eux des persécutions qu'ils n’auraient pas pu empêcher, il renonça à ses séances et résolut de quitter son pays et de venir en France. On revint pour l'arrêter au moment où il fermait ses malles; il endormit les gendarmes et il partit. A la frontière, en vertu d’ordres expédiés par le télégraphe, on voulut l’arrêter encore; là comme ailleurs il endormit les agents et passa la frontière.

Le docteur Friedberg est arrivé à Paris et ne tardera pas à y jouir de la réputation qu’il mérite.

Paul d'Ivoy.

SUPERSTITION.

— On écrit de Suède :

« La superstition, qui a toujours eu un caractère particulier dans la Scandinavie, comme le prouvent de nombreux exemples, semble prendre à tâche en ce moment de se moquer du dix-neuvième siècle. On rapporte de la Dalécarlie (en suédois, Dclame, ou pays de vallées), le conte le plus étrange et le plus sombre. Un chanoine avait reçu des ordres de son chapitre pour s’enquérir du préjudice causé par la superstition et la sorcellerie à Gagnef, à Morkfjardi-Annexen, dans les vallées suédoises. Il y a recueilli de curieux et tristes renseignements. Les bonnes gens assurent avec une bonne foi parfaite que de grands mystères s’accomplissent à Josep-sdal, près de Stockholm. Si l’on part de certain clocher d’église pour se rendre dans un lieu désigné, on peut contracter une alliance avec le prince des ténèbres et opérer des choses inouïes.

« A peine est-on arrivé en ce terrible endroit, le diable apparaît, et avec une plume trempée dans le sang du petit doigt, écrit le nom de l’audacieux sur son livre. Aussitôt celui-ci est métamorphosé en ver. Il rampe et sort par une fiS-sure. Dès qu’il est dehors, nouvelle métamorphose; il est changé en pie, vole vers le clocher d’où il est parti et se perche au sommet. Alors, il revient à son premier état, mais une vache ou un veau se trouve placé entre ses jambes. Des fleurs sont sous sa main ; il en cueille quelques-unes, qui doivent servir pour la préparation d’un plat mystérieux destiné à un banquet plus mystérieux encore. Le voyageur aura pour convive Satan, qui prend ici le nom de Nors ou Norsgubbe. Ce Norsgubbe porte des bottes velues ; mais si la scène devient animée et qu’il ait besoin d’être plus agile, il jette volontiers, nous allions dire au diable, ses bottes pour agir les jambes nues. Avec la puissance dont Norsgubbe dispose, les bottes ne manquent point quand il veut de nouveau se chausser.

« Quelques Icmmes qui passent pour sorcières disent avoir fait le voyage de Joseplisdal ; mais, en général, ceux qui exploitent la crédulité des ignorants emploient des enfants à leurs fins. Violentées par leurs parents, qui eux-mêmes obéissent peut-être à des instigations ténébreuses, ces pauvres créatures sont contraintes de révéler ce qu'elles n’ont pu voir ni entendre, de raconter ce qu’elles ont éprouvé et fait sous leurs métamorphoses imaginaires.

«Le dommage qui résulte de ces coupables manœuvres n’a pas été difficile à constater. De même qu’un menteur, force de mentir, finit par croire à ses mensonges, ainsi les enfants, à force de répéter les prodiges qu’on leur a soufflés, finissent par croire à leurs fables. Et le bon peuple, en voyant tant d’assurance unie à tant de candeur, ne peut so figurer qu’on le trompe.

« Si ce régime dure, les paroisses de Gagnef et de Molcf-jardi - Annexai ne seront bientôt plus qu’un pays d’insensés. »

(Extrait de la Patrie du 1(5.)

J’admire ce personnage qui, la canne à la main , se présente à moi d’un air d’importance et me tient à peu près ce langage :

—Je connais la nature, les quatre parties du monde et les quatre éléments ; j’ai fait mes humanités, je suis licencié ; votre magnétisme, bien loin de me surprendre, à mon esprit

ne cause aucun embarras.....— bah ! lui dis-je, vous savez ce

qu’il est? — Sans doute, me répond-il, je pense comme M. Mabru et comme l’Académie. — Bien vrai ! je n’ai donc rien à vous apprendre, car moi, je ne sais ce qu’est cet agent, ni d'où il vient, ni où il va; mais vous, Monsieur, qui le savez, dites-le-moi ?

— Monsieur, notre imagination fait ici toute l’affaire. — Vraiment, vous eu savez trop long sur ce sujet, et puisqu’il s’agit d’imagination, permettez-moi de vous dire, Monsieur, que vous n'en montrez guère.

— Comment, Monsieur, l'Académie impériale do médecine serait donc une sotte; tant d’hommes de génie, qui ont certifié, jugé que tout dans le magnétisme était imaginaire, se seraient donc trompés et n’auraient pas eu plus de sens que des épiciers ? Je ne saurais le croire.

— Les épiciers, Monsieur, ne les dédaignez point, ils sont lettrés depuis que les livres de nos maîtres ont passé par leurs maips ; ils croient tous au lluide. Magendie et Dubois d Amiens leur ont donné l’envie d’exercer leur pensée et d’é-tendre leurs mains; le lluide s’est montré en faisceau lumineux et, sur vingt pratiques , 011 en ,vit quinze d’entre elles fermer les yeux , et cet étrange phénomène eut pour témoins des divers quartiers les cuisinières et les portiers.

— Comment, Monsieur, des épiciers auraient cette puissance , et nos maîtres ès-arts et ès-sciences en ignoreraient môme jusqu’à l’existence !

— 11 est un fait, Monsieur; c’est que, dans chaque nie, les portiers magnétisent depuis cet événement. Ils font des somnambules , et tous les locataires, jusqu’au cinquième étage, prennent des consultations en dépit des médecins et s’écrient tous en chœur : Vive le magnétisme, au loin les pharmaciens !...

— C’est un scandale, Monsieur, et le gouvernement devrait intervenir contre ces petites gens, car, s’ils ont raison de croire, l’Académie a tort de nier , et on 11e devrait jamais souffrir qu’un épicier en sache plus long qu’un académicien. Je vous le répète, c’est un scandale qu’il faudrait au plus vite faire cesser.

— Je suis cette fois de votre avis, Monsieur ; il faut que

1 Académie prouve, de nouveau, que le magnétisme n’existe point, ce qu’elle ne pourra pas, ou il faudra qu’elle se déjuge, ce qu’elle ne voudra point.

Baron du Potet.

LE NÈGRE PALE.

« Que pensez-vous du magnétisme? Est-ce surnaturel, ou bien la somnambule s’entend-elle avec le magnétiseur ? J’en voudrais essayer, mais je n’ose. J’attends votre avis. »

Telle est la question délicate que l’on veut bien m’adresser. Une pareille confiance me fait honneur assurément, mais me place dans un grand embarras. Je vais y répondre en Normand et par une histoire.

Comme il y a fagots et fagots, il y a somnambules et somnambules. Ce sont les charlatans qui font du tort aux honnêtes gens, comme les tartufes aux vrais dévots. Voici ce que mç racontait dernièrement madame M..., une femme qui n’est pas moins sincère et intelligente dans l’état de veille, que lucide dans le sommeil magnétique.

— J’avais entendu parler, me dit-elle, d’une demoiselle qui donnait des consultations dans un quartier central de Paris. J'eus la curiosité d'aller la visiter. Je montai jusqu’aux toits d’une maison de mauvaise mine et je sonnai ; une servante vint ouvrir.

— Qu'est-ce que vous voulez?

— Je désirerais assister à la séance magnétique.

La servante, m’ayant lancé un regard de défiance, me dit d’un air bourru :

— Entrez, alors, ça va commencer.

Le ton impoli de la chambrière m’étonna, mais ne me rebuta point. J’allai m’asseoir sur un banc, dans un coin d’un prétendu salon mal meublé et mal éclairé. Une dizaine de personnes étaient là réunies. C’étaient pour la plupart des gens du peuple, cuisinières et petites marchandes : un jeune homme bien mis, ayant l'air distingué et fort timide, tranchait sur cette assistance vulgaire.

La somnambule ne tarda pas à paraître. Elle avait la mine dure et maussade , une toilette ridicule, des mains et une voix de harengère. On l’endormit.

Le petit jeune homme vint à elle et lui présenta un mince paquet.

— Qu’est-ce que c'est que ça? dit la Pythonisse en fronçant le sourcil.

— Mais, madame, lui répondit-on avec beaucoup de douceur, c’est ce que je voudrais savoir par vous-même.

— Ah !... Eh bien! voyons, ce sont des cheveux?

— Oui, madame, cc sont des cheveux.

— De qui sont ces cheveux ?

— Mais , madame, j'attends que vous vouliez bien me le dire.

— D'une femme?

— Non, madame, d’un homme.

— Ah ! oui, c’est vrai, je le vois. Il est jeune?

— Oui, madame.

— Ah ! je vous le disais bien, je le vois à merveille. Il est blond.

— Non, il n’est pas blond.

— Oh ! comme il est pâle.

— Pâle ? yous m’étonnez.

— Je vous dis qu’il est pâle; il est bien malade.

— Je l’ai quitté il y a deux jours , il se portait comme un chêne.

— Je vous affirme qu’il est malade, très-malade. Oh I quelle pâleur !

— Mais, madame, c’est impossible.

— Comment ! c’est impossible ? Je vous déclare qu’il est pâle comme un linceul.

— Vous en êtes bien sûre, madame ?

— Ah çà! voyons, douteriez-vous de moi ? Une dernière fois, je vous certifie qu’il est très-pâle !

— Mais, madame, comment le serait-il? c’est un nègre!

Cette prétendue somnambule donne des séances gratuites,

mais elle n’y perd rien. Dès qu’elle est endormie, elle se trémousse comme si elle avait une attaque de nerfs.

— Ah ! dit-elle en grinçant des dents, il y a ici des manchons, des chapeaux de soie... Oh! je ne puis supporter ce

supplice ! Au nom du ciel, qu'on porte toutcelaau vestiaire!

Au vestiaire, 011 paye trois sous pour chaque objet déposé, et au bout de la journée, cela fait encore une petite jecette.

Eh bien ! j’engage la personne qui veut, bien nie consulter à ne pas aller chez mademoiselle X... Mais je connais de meilleures adresses, j’ose le dire sans craindre de me compromettre.

11. d’Aumgier.

( Patrie.)

AVIS.

Déjà quelques personnes se sont fait inscrire pour le Cours de Magnétisme de M. le baron du Potet ; le jour d’ouverture en sera fixé incessamment, et une lettre d’avis sera envoyée aux souscripteurs.

Baron du POTET, propriétaire-gérant.

CAUSERIES MAGNÉTIQUES.

DIX-SEPTIÈME CAUSERIE.

Patience et persévérance.

(Suite.)

A. B. C. 1). Ba, Be, Bi, Bo, Bu. La science morale de nos jours en est encore à cet alphabet, elle balbutie, estropie les premières lettres ; heureusement pour elle, elle s’essaye chaque jour devant des gens qui n'en savent pas plus long qu’elle. —Voyez donc comme mon enfant parle bien, dit un père, idolâtre de son bambin , il a prononcé papa et maman , il a dit loto; on admire la précocité du sujet.

— Avez-vous lu ou entendu le superbe discours prononcé à l’Académie? quelle éloquence, quelle verve , quelle profondeur d’idées, etc., j’en suis tout ému ! lit ce père X..., dans sa chaire de vérité, il a su se faire applaudir de plus de deux mille personnes, on était ravi, enchanté... — Ah! j’en suisfovt aise, et que vous ont appris ces hommes cCélite sur la nature et sur vous ? — Ma foi, je ne m'en souviens plus, mais c'était superbe, je vais de ce pas relire leurs discours.

Oui, des lieux communs, des phrases banales, dites de certaines manières, ont cette puissance ! le vase humain s’en remplit, puis l’évaporation s’en fait dans un instant: le cerveau se vide souvent sans rien conserver des choses prétendues sublimes que nous avions entendu.

11 n’en est pas de même de l’enseignement des sciences, celles-ci reposent toujours sur un petit nombre de vérités saisissables, sur des faits incontestables. Les expériences, les démonstrations font image et notre esprit la saisit et la retient ; c’est ainsi que nous acquérons des connaissances utiles en elles-mêmes, peu susceptibles de changements et d’interprétations diverses.

Mais pour les choses morales, tout est vague et incertain dans leur enseignement; les interprétations, les explications, Tous XVII. — N" Jï. — 2e Séiiie. — 10 Décembre.

les déductions se succèdent au gré de celui qui parle et enseigne , et les erreurs, les contradictions s'en mêlant, la vérité, si elle existait au point de départ, finit par devenir de plus en plus obscure, si bien que nous n’avons plus aucune certitude, mais, au contraire, toujours des doutes, ('.’est de là sans doute qu’est venu ce proverbe : le dernier i/ui parle a toujours raison. Chaque professeur d’éloquence sacrée ou profane a son pathos ;ï lui, etde même qu’un ancien philosophe, il pourrait s'écrier à la fin d’un beau discours : « Dieux immortels, soyez-moi témoins que je ne sais ce que je dis.

En philosophie comme en religion , chacun a ou fait la sienne, sauf à n’en pas suivre les préceptes et à vouloir pourtant les imposer aux autres. Il est de ces hommes qui ont, j'en conviens, une grande foi: ils deviennent martyrs à l’occasion pour soutenir une doctrine qui souvent repose sur des erreurs ; il en est d’autres qui deviendraient bourreaux et qui lapideraient leur prochain pour se venger des êtres qui ne pensent point comme eux : rien n’est plus absurde au fond et pourtant plus général. Que de reconnaissance ne devrait-on pas avoir pour celui qui vous conduirait dans la route du vrai ; mais où trouver cet homme ? la plupart des révélateurs même mentent ou se trompent. Non, il n’est qu’un seul maître, la Nature, qu’un seul bien, la Vérité.

Magnétistes, cherchons en commun, peut-être trouverons-nous, nous nous approchons de plus en plus de la vérité, peut-être pourrons-nous la découvrir tout entière. Dieu n’a-t-il pas mis dans l'homme une clarté divine, une science innée ? ne l’apercevons-nous point dans le somnambulisme? les faits de nos mains et de notre pensée n’ont-ils pas une valeur? Cessons donc d’être sourds et aveugles. Si nous n’y prenons garde , nous nous diviserons comme nos ennemis, et comme eux nous nous ferons la guerre, comme eux nous tomberons dans les mêmes fautes, et nous couvrirons de haillons la vérité découverte par Mesmer. 11 y a déjà je ne sais combien d’écoles pour le même fait, les interprétations sont aussi nombreuses qu'il y a de magnétistes, et taudis que les uns vont

au spiritualisme,d'autres, aucontraire, matérialisent l’esprit.

Il nous faut donc un plan d’études commun et faire table rase des idées préconçues, de nos croyances antérieures, et ne voir d’abord que le fait sans en tirer aucune conséquence; nous vivons sur les idées de nos pères, sans chercher s’ils étaient dans l’erreur; les mots qu’ils nous ont transmis avaient peut-être dès le principe un autre sens que celui que nous leur accordons. Laisserons-nous aller les choses comme elles vont, sans nous préoccuper en rien de l’avenir, laissant à la Providence le soin de régler les destinées du magnétisme? Le génie apparaît lorsqu on a préparé sa venue par une accumulation de matériaux épurés, il se fait reconnaître par ses grandes idées; architecte divin, il élève l’édifice et rejette au loin tout ce qui csl impropre à son œuvre. Préparons donc le terrain, car l’architecte viendra bientôt. Ce temple élevé devra abriter toutes les sciences et offrir à la vue tous les chefs-d œuvre. Quelle surprise ce serait pour nos savants actuels, s ils sortaient alors du tombeau, de voir leur divinité placée à un ranginférieur, et ce qu’ils ont tant admiré rangé parmi les ébauches du travail humain ! Leur confusion serait grande en apercevant au sommet de l’édifice, au lieu d’un maigre paratonnerre, un rayon du feu découvert par Mesmer répandant au loin sa lumière, sans que son foyer ait jamais besoin d’être alimenté et entretenu par des substances matérielles. Voyez-vous les Bouillaud, les Dubois d’Amiens, les Gerdy, remplis de confusion, examiner curieusement où serait placé l’extrait de leurs vastes connaissances et ne pouvoir point lire l’étiquette placée sur ce paquet précieux ; tous ces secrétaires perpétuels d’Académie, en quête de leur bagage comme si une douane impitoyable n’en avait point permis l’entrée? Voyez-vous la figure de nos antagonistes à la vue de ce mot magnétisme placé partout sous leurs regards ! C'est, leur dirait-on, l’agent que vous avez autrefois méconnu; il était en vous, vous dédaigniez de le voir, il animait alors comme aujourd’hui la nature tout entière, son évidence était semblable à celle du soleil, mais ouvrant vos yeux pour toutes choses, vous les fermiez pour le magnétisme, pour pouvoir

(lire au monde : Je ne l’ai pas vu , je ne le connais pas, loxis ceux qui le voient sont des enthousiastes, des fripons ou des visionnaires.

Voyez-vous tous ces illustres professeurs de médecine exacte, cherchant dans le temple élevé par la sagesse leur foie de morue, leur acétate de morphine, leur extrait alcoolique de noix vomique, leurs composés, leurs sublimés empoisonnés, et ne trouvant rien de toutes ces infernales inventions dues au génie du mal, obligés d’aller les chercher au loin dans un lac de sang corrompu d'où les animaux les plus immondes n’osent point approcher? Oui, sur ces bords erreront seulement, les ombres des trépassés, gens stupides jusqu’à la folie, qui prirent pour se guérir de leur maladie tout ce qui tue en pleine santé.

Ces autres fous, ces hommes noircis d’encre, au chapeau rabattu. ces tourmenteurs de l’espèce humaine et rôtisseurs d’hérétiques, tous ceux enfin qui, au nom du Dieu qui donne le génie, poursuivirent sans pitié les gens inspirés d’en haut, leurs ombres n’entreront point dans le temple... elles viendraient sans doute pour y effacer le souvenir conservé du ruisseau de larmes qu’ils ont fait couler, ou plutôt pour y contempler encore leurs instruments de torture, ces coins, ces chevalets... mais que Jeanne d’Arc soit leur protectrice I L’avenir d’ailleurs sera généreux pour ces bourreaux ; il ou bliera qu’ils furent quelque temps les bergers du troupeau humain, et que leur houlette fut une torche, leur étendard une chemise soufrée.

Baron du Potet.

( La suite ait prochain numéro. )

ÉTUDES ET EXPÉRIENCES.

DE LOI) ET LA SENSIBILITÉ

Les magnétiseurs ont souvent reproché aux savants de ne pas s’occuper de la question du magnétisme. Ces reproches, |ui ont parfois le tort de trop généraliser l’accusation , sont fondés du moins lorsqu’ils s’adressent aux physiologistes qui n’ont pas le droit de répondre comme les astronomes , les physiciens, les chimistes, etc. : Ceci n’est pas de notre res-« sort. Vous prétendez avoir les principes, les éléments d’une « branche neuve dans les sciences, faites votre science « vous-mêmes, nous suivons notre voie. »Les physiologistes, au contraire, ne peuvent prétendre que des phénomènes qui se manifestent dans l’organisme ne les regardent pas.

Lorsque Mesmer, en présence des faits nouveaux qu’il produisait, croyait d’abord reconnaître l’action de l’aimant sur l’homme, le phénomène hybride, suivant lui, ayant sa source partie dans l'aimant, partie dans l’organisme humain, paraissait s’adresser à la fois au physicien et au physiologiste.

Aujourd’hui, tels que les présentent les continuateurs de de Mesmer , les faits ne concernent plus que la physiologie et la psychologie, — ces deux sœurs, malgré les sentiments peu fraternels qui les animent.

Plus tard, Galvani crut à son tour découvrir une force voisine de l’électricité inhérente à l’organisme animal.

L’expérience démontra que le galvanisme, à qui nous devons tant de résultats merveilleux, n’avait pas l’origine que lui attribuait l’inventeur.

Malgré la connaissance positive de la production d’électricité chez certains animaux, malgré certaines analogies plus vagues entre les courants électriques et l’innervation, aucun lien précis n’est établi entre les forces qui sont du ressort

de la physique et celle? qui font la base des éludes physiologiques.

Cependant cette sorte d'instinct, qui poussait les savants du moyen âge à la recherche de l’absolu, n'a point cessé de préoccuper les esprits curieux , et la génération actuelle des savants tend son intelligence vers cet idéal constant de l'unité de force. La coïncidence habituelle de la chaleur et de la lumière, l'identité des lois qui régissent les phénomènes calorifiques et lumineux ne laissent pas de doute sur l’identité des forces qui produisent les uns et les autres.

Si la chaleur et la lumière sont compagnes presque inséparables, l’une et l’autre n’apparaissent-elles pas dans les phénomènes— chimiques, — électriques, rattachés d’ailleurs entre eux et aux lois des aimants par d’autres liens sans nombre ?

Toutes ces forces que la physique a jusqu’à présent considérées isolément et qui donnaient naissance aux théories des impondérables, apparaissent aujourd’hui comme ayant un principe commun, inconnu encore, vers lequel convergent les aspirations des chercheurs.

Mais la tendance vers l’unité ne s’arrête pas à ce qui concerne les impondérables. La grande puissance mécanique de notre siècle, la vapeur, n’est qu’un emploi indirect d’une de ces forces attribuées aux impondérables, à la chaleur, qui, par la dilatation des corps, produit plus directement des effets mécaniques connus d’ailleurs de toute antiquitté.

11 y a donc aussi un lien entre ces phénomènes qui paraissent de prime-abord si distincts : — l’élévation de température des corps — et le soulèvement d’un certain poids à une hauteur déterminée dans un temps donné.

Aussi les esprits sont à l’œuvre pour la recherche de ce problème hybride qui doit relier la physique des impondérables et la physique mécanique. On lui a donné le nom de équivalent mécanique de la chaleur.

Mais si toutes les forces de la nature en dehors du monde organique ne sont qu’une seule et même force, les forces propres de l’organisme sont-elles sans relation avec les autres?

Si l’organisme animal est une source de force mécanique de chaleur, un foyer d’actions chimiques ; s'il produit dans certains cas l’électricité, la lumière ; si de celte unité vivante jaillissent presque tous les effets qui ont pour principe la force une que l’on recherche en ce moment, les forces physiologiques qui apparaissent comme spéciales à. l'organisme, qui constituent ii proprement parler la vie, sont-elles sans lien avec la force principiunte de l’organisme général de l’univers?

Les forces constitutives d’un être Un sont-elles dépourvues d’Unité? La physique et la physiologie sont-elles destinées à rester presque complètement étrangères l’une à l’autre?

Ou bien le livre vainement rêvé par les précurseurs de la science moderne, — les alchimistes, — le lien qui a échappé au génie de Mesmer et de Galvani sera-t-il découvert par un chercheur plus heureux ?

Voici qu’un nouvel effort est tenté dans ce sens. Qu’est-ce en effet que quelques années, quand il s’agit d’idées? M. de Reichenbach a publié vers 1851, si nous ne faisons erreur, les lettres odiques qui ont été traduites en français, et dont le Journal du Magnétisme a parlé lorsqu'elles ont paru. Depuis , ce savant professeur a publié deux volumes : L'Homme sen-sitif et ses rapports avec t’Od; puis , deux brochures sur le même sujet; enfin l'Ami des sciences, du 14 novembre , annonce qu’une dernière brochure, qui a paru à Vienne cette année , sous le titre : le Monde des plantes dans ses rapports ■avec la sensibilité et l'Od va être traduite en français par M. Zurcher, et ce journal, dont le rédacteur en chef, M. Victor Meunier, est un des esprits les plus passionnés pour l’unité scientifique, vient d’en publier l'introduction.

Qu’est-ce que M. de Reichenbach a voulu désigner par l’Od?

Si l’on a bien compris ce qui précède, si le lecteur veut admettre, au moins comme hypothèse, que toutes les forces de la nature ont un principe commun, qu’elles ne sont en un mot que des modes divers de manifestation d’une force unique, la définition de l'Od sera simple et se fera d'un seul mot. L Od est le principe de toute force, quelle que soit sa nature.

Le mot lui-même, par son étymologie, contiendrait l’idée de l’unité de force.

Od, si l’on en veut croire les érudits, que nous ne citons ici que pour mieux faire comprendre l’idée du physicien qui a adopté cette appellation , Od serait un vieux vocable des langues du nord , signifiant la force créatrice universelle, et serait la racine de Odin. le grandDieu universel,le metteur en œuvre de l’Od ou force créatrice — de Toth ou Trut/i (qu’on a aussi voulu rapprocher du grec Dzeus, Théos, Jupiter, Dieu) ou Tèntath, directeur de FQd, qui préside à la vie universelle.

Ainsi, pour M. de Reichenbach, l’Od, c’est toute force dans son principe invisible, c’est la vie dans l’acception la plus large et la plus étendue de ce mot, la vie du monde inorganique,

— le mouvement, aussi bien que la vie du monde organique.

Or, suivant l’auteur, indépendamment des manifestations connues de la force universelle , il existerai des effets qu’un mode particulier d'observation permettrait seul d’apprécier directement, et jusifu’à ce jour le seul appareil sensible à ce genre de manifestations serait l’organisme humain, ou, pour parler plus exactement, certains organismes humains privilégiés.

Les hommes se diviseraient donc en deux classes : les sensitifs et les insensitifs, — catégories qui n’ont, du reste, rien de tranché d’une manière absolue , la sensitivité serait susceptible de degrés, et dans les bas degrés deviendrait inappréciable.

Les phénomènes signalés par M. de Ueichenbach ne sont perceptibles que pour les sensitifs, et, eu général, dans des circonstances toutes particulières. D’une autre part, la sensitivité ne se reconnaît que par la faculté de percevoir les manifestations odiques qui échappent au.x insensitifs , de sorte que l’on conçoit fort bien que, par suite de cette espèce de cercle vicieux , la sensitivité et les phénomènes odiques aient échappé à l'observation universelle.

Les expériences exigent presque toutes une obscurité absolue sans aucun rayon de lumière , si faible qu'il soit, ce

que nos appartements ordinaires 11e permettent pas d’obtenir. Les phénomènes n’apparaissent qu’après un temps assez long, au moins une demi-heure. Alors les sensitifs aperçoivent de légères lueurs; bientôt ils reconnaissent que ces lueurs partent de leurs mains ; puis, les mains des assistants deviennent ;\ leur tour visibles; les contours des visages se dessinent par une sorte d’auréole , et la figure des assistants finit par être nettement distincte. Des rayons semblent s’échapper des corps vivants, surtout des doigts.

On voit combien il y a de rapport entre ces expériences et celles que nous, magnétiseurs, faisons avec certains lucides. On voit quel intérêt l’étude de ces questions a pour la science magnétique, et combien de pareilles observations donneraient de poids à l’hypothèse d’une action physique rayonnante dans la magnétisation. Or je ne sache pas qu’aucun magnétiseur, depuis quelque sept ans que les lettres odiques ont été publiées et traduites en français, ait répété les expériences de M. de Reichenbach , ou du moins ait fait connaître les résultats de ses études à cet égard. N’y a-t-il pas là le sujet d’un reproche à faire aux mesméristes, plus sérieux et plus fondé que celui qu’ils adressent aux savants?

Mais les expériences odiques ne tendraient pas seulement à établir chez l’homme l’existence d’un rayonnement fluidi-que. Elles justifieraient les affirmations de Mesmer sur la polarité de l’organisme, principe nié depuis par les magnétiseurs, presque complètement mis en oubli, bien que reproduit de temps en temps par quelques voix isolées.

Et cependant il semble que ce soit là une de ces questions de principe qui demanderaient tout d’abord à être élucidées, si le mesmérisme voulait se'constituer comme science. Les expériences de M. de Reichenbach, difficiles à répéter par des individus-isolés qui n’ont pas toujours des masses de sujets disponibles , sont cependant bien faciles pour des sociétés magnétiques (I),

(1) Celui qui écrit ces lignes connnlt plusieurs sociétés magnétiques. Il appartient à l’uno d'elles cl n fait, depuis longtemps, tous ses efforts pour obtenir des expérimentations régulières au point de vue scientifique : l’ex-

D’après M. dc Reiclicnbach, cette polarité humaine serait manifeste. Pour les sensitifs, le rayonnement de la main droite et de la main gauche ne serait pas le même. La lueur de gauche est jaune-orangée , celle de droite , plus faible , est d'un bleu-grisâtre.

Cette différence polaire n’affecte pas que la vue des sensitifs. Si l’une de leurs mains touche une main, ils éprouvent une sensation de fraîcheur agréable ou celle d’une chaleur alourdissante, suivant que les pôles en contact sont de même nom ou de noms contraires.

Jusqu ici les phénomènes paraissent spéciaux à l’organisme humain, et ne se rattachent pas directement aux phénomènes physiques qui se manifestent dans les corps inorganiques. Mais voici qui les rapproche singulièrement des premières idées de Mesmer. Ces pôles, que nous voyons se manifester à droite ei â gauche chez l’homme, se manifesteraient parles mêmes propriétés dans les aimants et dans les cristaux. Pour les sensitifs, ces corps sont lumineux dans l'obscurité , ils ont des pôles jaune et bleu, leur contact fait éprouver ces sensations singulières dont nous avons parlé.

Cette circonstance d’observation , — si elle est telle que l’annonce M. de Reichenbach, — ne laisserait prise à aucune

périmentatioo pratique, applicable , qu’il n'aurait certes pas voulu faire négliger, est resiée la seule il laquelle on sesuil livré. Il a assisté, l’an dernier, 6 des conférences bien dirigées, pleines d'intérét. Les questions d’ordre scientifique y ont élé débattues; mais l'expérimentation régulière des faits élémentaires principiants n'y a pas été ellectuée. Une tendance naturelle à obtenir des sujets les phénomènes d'un ordre supérieur a toujours fait négliger la vérification des principes élémentaires.

La réflexion du fluide par les glaces suivant l'angle de réflexion égal à l’angle d’incidence, affirmée par Mesmer, admise par M. Hébert, qui dirigeait fort bien (comme nous l'avons dit déjà) ces conférences, est extrêmement facile à vérifier au moyen des miroirs courbes. L'expérience avait été proposée, admise ; il y avait des fonds disponibles pour se p*ocurer les appareils; et cependant elle n'a pas plus été effectuée que toutes celles qui auraient pu mettre quelque principe hors do doute, (elles que l'action sur des sujets non prévenus; l'oction sans gestes apparents exercée par derrière sur do petiîs enfants, sur des animaux; la magnétisation par des substances magnétisées, mêlées avec d'autres , et qu’on prétend agir en l’ubsence de toute suggestion. Ce sont lii des faits élémentaires positifs qui n’ont point d’apparence merveilleuse. On n’y attache aucune importance.

objection. Une fois la lucidité admise, et pour nous, magnétiseurs, bien qu’inconstante, elle est hors de doute, on pour rait supposer que les sensations des sensitifs sont des perceptions extra-normales, mais la différence de couleur des pôles, la sensation agréable de fraîcheur dans un cas, la sensation pénible de chaleur dans l’autre , tout cela dénoterait, par une constance que nous ne trouvons pas dans les perceptions de nos sujets un phénomène d’ordre physique. Les physiciens, qui ont une position officielle de savants, sont donc tout aussi inexcusables que les sociétés magnétiques de n’avoir pas répété les expériences de M. de lteichenbach, et d’autantplus inexcusables, — que l’auteurdes Lettres odiques n’a pas fait là une simple affirmation en l'air ; mais qu’il cite des milliers d’expériences; — qu’il a publié à plusieurs reprises le résultat de travaux persévérants, toujours concordants; enfin qu’il n’est pas le premier venu, mais que c’est un confrère, un savant officiel qui a fait appel à toutes les vérifications.

Gomme la première condition pour contrôler les dires de l’auteur, c’est d’avoir des sujets sensitifs, nous avons, lors des lettres odiques, essayé d’un moyen facile qu’indiquait alors l’autour pour reconnaître si nous et les personnes qui nous entouraient jouissions du privilège de la sensitivité.

Ce moyen, le seul, si notre mémoire ne nous fait pas défaut, qui n'exigeât pas l’obscurité absolue difficile à réaliser, consistait en ceci :

Le sujet soumis à l’exploration devait se placer à l'ombre, tenir d’une main un tube de verre d’environ un mètre de long, et exposer l’extrémité de ce tube aux rayons solaires. Selon que la main qui tenait le tube était la droite ou la gauche , la sensitivité devait se manifester par une fraîcheur agréable ou une chaleur lourde et pénible. Or ni moi, ni les miens n'avons rien ressenti, et je n’ai pu me livrer à des expériences.

M. de Reichenbach a publié depuis une brochure où il a indiqué d’autres symptômes de sensitivité. Cet opuscule, qui probablement n’est pas traduit en français, ne nous est pas

connu. Mais dans l’introduction que vient de reproduire X Ami des sciences, l’auteur 11e mentionne plus le procédé d’appréciation des sensitifs qui ne nous a pas réussi. 11 mentionne trois indices très-simples que nous reproduisons textuellement :

« On constate en premier lieu une vive répugnance pour la « couleur jaune.

« Deuxièmement, en posant les dix extrémités des doigts a très-légèrement sur le mur d’une chambre, l'impression « éprouvée par la main gauche sera considérablement plus « fraîche et plus agréable que celle que sentira la main « droite.

« Terminez par une troisième expérience : Placez un objet « métallique , une ou deux clefs de fer sous une feuille de « papier ou sous un mouchoir, la main gauche d’un sensi-« tif, en passant au-dessus, ouverte et étendue, sans rien tou-« cher, devinera la présence du métal par suite d’une sen-« sation particulière. » (Analogie, avec ce que l'on raconte des sourciers, découvreurs déminés.) «On peut mettre sur une a table en bois, et sans aucune garniture métallique, un cer-« tain nombre de feuilles de papier ou de pièces de toile : si, « sous quelques-unes d’entre elles, on a placé des clefs, une « personne qui n’est pas trop faiblement sensitive les décla-« rera infailliblement en passant au-dessus avec la main « gauche.

« En voilà assez : celui chez lequel on peut constater ces « indices est sensitif ; sinon, il ne l’est pas, ou si peu, qu’il « est impossible de procéder avec lui aux recherches phyto-« diques que je vais développer. » L’ouvrage annoncé est, on se le rappelle, consacré au inonde des plantes (1).

(1) Lis personnes précédemment soumises à l’expérience do tube et qui n'avaient rien éprouvé ont, toutes tes Irois, une répugnance prononcée à l’endroit de la couleur jaune. lieux d'entie elles ont, en appliquant les doigts sur une muraille , éprouvé les sensations indiquées par M. de Roi-chenbach. Je , qui suis le troisième sujet , n'ai pas subi d'impression constant«. Tantôt j'ai ressenti du frais !i droite, tantôt j’en ai éprouvé à gaucho. Aucun des trois.n'a rien ressenti sur une glace. L’expérience des clefs n’a pas élé bien faite: mais les résultats tendent à faire croire qu’aucun de ions no serait un sensitif de haut titro.

Il y a là pour les magnétiseurs, et surtout pour les groupes magnétiques, un beau sujet cl’étude, et si les phénomènes de sensitivité odique sont vérifiés, n’y a-t-ilpas lieu surtout du rechercher si la sensibilité magnétique est plus ou moins liée à la sensitivité odique, et si celle-ci, qui se reconnaîtrait à des indices précis, faciles à apprécier, pourrait servir de symptôme à la sensibilité magnétique que nous ne savons pas encore deviner à l'avance? A. Petit jj'Qhmoï,

CLINIQUE MAGNÉTIQUE.

SCIATIQUE GUÉRIE PAR LE MAGNÉTISME.

Suite et fin (1).

Mademoiselle Kurz étant douée d’une excessive sensibilité magnétique, la première magnétisation sullit pour la débarrasser de ses violentes douleurs. Ce premier fait avait lieu le 8 septembre dernier, vers dix heures du soir.. Le lendemain

0, à cinq heures du matin, on vint me réveiller en toute hàtfc: Mademoiselle Kurz était, me dit-on, en danger, elle avait été toute la nuit en proie à des convulsions. Je cours chez elle, sa mère me reçoit les larmes aux yeux : — « Ma fille est daas un état désespéré, les convulsions n’ont pas cessé un instani, durant cette nuit; elle n’entend ni ne connaît personne, gesr ticule, tend les mains comme si, parlant avec quelqu’un,.elle voulait s’élancer vers lui; en un mot, elle est en délirai » Qu’était-il donc survenu, mon Dieu, et quel accident avait pu troubler ainsi le résultat si bienfaisant de ma première naa-gnétisation ? ù

O savants ! venez et approchez avec moi du lit de la mar lade, examinez-la avec votre aplomb académique... Eh bien, que pensez-vous de son état ? Si on l’appelle, elle n’entend pas ; si on la pince, elle ne témoigne aucune sensibilité, ellfi

(1) Voir le numéro du 10 novembre 1856, pa^c 566.

est ou parait insensible ; ses yeux sont convulsés, tout son corps est pris d’un spasme clonique qui a duré toute la nuit, ses artères battent violemment; elle fait des gestes, murmure des paroles inachevées ou inintelligibles... — « ('.’est une congestion cérébrale, direz-vous, une méningite. » Mais que faire et quel médicament donneriez-vous donc? Je vous défie de le dire... Ou vous tueriez la malade, ou resteriez fort en peine. 11 n’y a qu'un médecin-magnétiseur qui puisse vous tirer d’embarras et faire cesser ce tableau alarmant; vous, avec toute votre science officielle et séculaire, n’en savez rien, vos moyens sont impuissants... Quelle misère! Un magnétiseur va vous instruire ! Oui je vous apprendrai ce qu’est cet état, comment on le provoque, comment on le dissipe. Ce n’est rien, et pourtant bien admirable ; c'est une extase que le magnétisme a déterminée... Cet agent avait touché à un être doué d'une organisation délicate, et, en brisant, pour ainsi dire, les liens entre la matière et l’esprit, son âme ï’était élevée vers les régions célestes, et conversait avec les anges. Voilà, en effet, que dans cette extase, avec une physionomie tranquille et souriante, mademoiselle Kurz gesticule, parle, tend les mains comme si elle voulait s’élancer dans les bras des êtres supérieurs et quitter ainsi la vie !

Pour faire cesser cet état et calmer les inquiétudes de sa mère, il a fallu de longues manipulations magnétiques après lesquelles mademoiselle Kurz revint à son état normal sans rien se rappeler de ce qui s'était passé. Elle me serra les mains, et sembla vouloir rassurer, par son sourire, sa mère encore toute tremblante. Je causai quelque temps avez elle et ne la quittai qu’après lui avoir ordonné de dormir d’un sommeil naturel. Je la revis le soir, le sommeil avait duré deux heures, la journée avait été très-bonne, toute douleur avait cessé; ses règles avaient paru, avec une avance de deux jours, ce qui n’était jamais arrivé. Je la trouvais dans son fauteuil, très-contente de son état et souriante ; mais, hélas ! en m’approchant d’elle et lui serrant les mains, des convulsions musculaires éclatent, une espèce Je tarantisme lui prend tout le corps, les bras s’agitent, elle semble comme fou-

droyée par mon regard, elle ne peul lever les yeux sur moi sans éprouver de très-fortes secousses, qui ne lui causent cependant aucun malaise. Voyant que ma simple atmosphère magnétique l’impressionnait si vivement, je la calmai et m'éloignai. I,e lendemain 10 septembre, je la revis à dix heures du matin, elle était très-bien, avait bien dormi et les règles continuaient à paraître ; mais si je m’approchais d'elle, les mouvements nerveux de la veille se renouvelaient. Depuis ce jour jusqu’au 20, les choses se passèrent de môme, sommeil tranquille et apparition constante des règles ; elle n’avait plus ressenti sa douleur sciatique, seulement elle éprouvait quelquefois une sensation de faiblesse à la jambe gauche, ou un malaise au sacrum ou à la sortie du nerf sciatique, ou bien quelque tiraillement à la région poplitée. Ces résidus morbides me décidèrent à la magnétiser de nouveau et à pousser jusqu’au somnambulisme. Dans cet état de clairvoyance, elle déclara: « qu’il fallait encore la magnétiser quelquefois et que, dans quinze jours, tout aurait disparu ; qu’elle serait alors parfaitement guérie et pourrait satisfaire à de nouveaux engagements. » Ce qui s’est exactement vérifié.

11 est à remarquer que, toutes les fois que je la mettais en somnambulisme, la faisant danser et exécuter des pas et des sauts d’école, valsant ensemble, jamais elle n’a ressenti le plus léger malaise. Hors du somnambulisme, ma présence lui a toujours fait éprouver des contractions ou des secousses électriques qui augmentaient dès qu'elle tournait son regard vers moi.

Au commencement d’octobre elle partit pour Milan, parfaitement rétablie, et à la date du 11 de ce mois, elle m’a écrit ces lignes :

« Je m’empresse de vous donner de mes nouvelles ; je « suis on ne peut mieux, mon voyage s’est fait sans aucun « dérangement, et, malgré le mouvement que je me suis « donné et le mauvais temps qu’il fait à Milan, je n’ai plus « senti la moindre douleur. »

Le 10 du même mois, mademoiselle Kurz écrivait à une personne de ses amies : € Je me porte excessivement bien, il

« me semble n’avoir jamais été malade ; et, de ce résultat, d j’en remercie Dieu et le docteur Gatti. »

Le 10 novembre, elle écrivait de Vienne que sa guérison était complète, elle n’avait rien eu malgré les pluies et l’humidité soufferte aux pieds pendant son voyage.

Voilà, mon très-honoré maître, un cas que je crois bien intéressant, un curieux et excellent sujet d’étude pour les physiologistes ; mais, malheureusement, tout ce qui se produit en dehors du cercle officiel n’est pas apprécié à sa juste valeur. Les magnétiseurs n'ont pas souvent la bonne fortune de rencontrer, sur leur chemin, des hommes impartiaux et de bonne foi. Pour les académiciens, il n’y a pas, il ne saurait y avoir de lumière au-delà des barrières qu’ils posent ; c’est fâcheux, ou pour mieux dire, c’est drôle... Quelle entente parmi eux et comme ils défendent bien la barricade qui cache leurs intérêts ! Mais nous, apôtres de la grande vérité mesméricnne, nous les ajournons devant l’histoire qui a déjà enregistré l’ignorance de leurs arrêts contre Galilée, Har-vey, Jenner, Colomb, Fulton et tant d’autres. En attendant instruisons-nous, instruisons les masses, elles sauront un jour faire valoir leurs droits contre ce déni de justice.

Et vous, mes chers académiciens, ne perdez point patience encore une fois, si, moi, obscur médecin, j’ose élever ma voix contre vous, étoiles resplendissantes du savoir officiel ! Mais que voulez-vous? Quand 011 vous voit traiter les grandes questions humanitaires ainsi que vous le faites, on a bien le droit de s’écrier: Qu’êtes-vous? qui vous a autorisés à étouffer toute vérité nouvelle, toute vérité utile ? Seize ans de propagande et d’efforts, pour le triomphe de la vérité Hahnema-nienne et Mesmérienne, m’ont appris de quoi vous êtes capables ! Que Dieu vous pardonne, comme moi, ce crime de lèse-humanité.

Gènes, le 25 novembre I808.

D' Pierre Gatti , fondateur de l'institut homœopalhique de G ènes.

SUPERSTITION.

il n’est aucun homme qui ne soit troublé par instants, sans que sa raison puisse maîtriser la voix inconnue qui parle en lui et qui agite son être. Le sceptique le plus avoué ne peut se dépouiller entièrement de ce qu’on appelle superstition, et ou le voit souvent eu proie à des alarmes non justifiées parla raison. Je ne voudrais pas d’autres preuves de l’exis-ier.ee en nous d’un être immatériel. Il est diflicile d’étu-dier les hommes ; pour les comprendre il faudrait connaître leurs faiblesses et c’est ordinairement ce qu’ils cachent le plus. Ce sont ces faiblesses pourtant, ces défaillances delà raison que le psychologistc doit enregistrer avec soin, car celte étude montre l'homme sans masque, tel que la nature l’a fait, c’est-à-dire une âme enveloppée dans la matière. Mais nous ne voulons point aujourd’hui traiter un pareil sujet ; nous voulons seulement donner à nos lecteurs quelques fragments sur l’histoire et la vie de personnages célèbres. Ces fragments sont précieux pour nous, car ils font concevoir la naissance d’une doctrine qui tirera bientôt les hommes de leur affreux matérialisme. Le magnétisme doit tout éclaircir et, tout en acceptant laraison, faire comprendre qu’en nous il y a quelque chose de plus divin, un guide plus certain.

C’est dans un feuilleton du Courrier français, signé Louis Nicolardot, des 21 et 28 novembre 1858, que nous trouvons les faits historiques qu’on va lire :

Baron nu Potet.

Nous connaisons la vie publique des philosophes ; forçous-les maintenant de nous dévoiler leur for intérieur.

« La Mettrie, remarque Thiébault, avait une imagination dont il n’était pas le maître. Matérialiste absolu et prononcé, il avait presque peurde tout. Un brave et cligne Berli-

nois fut très-surpris. en faisant avec lui la route de Postdam à Berlin, de le voir assailli, durant un orage assez violent, de toutes les frayeurs dont les âmes les plus faibles sont susceptibles (1). »

Voltaire n’était guère plus brave dans les moments d’orage. « Un jour, M. de Voltaire jouant, dans le salon de Lu-néville, au piquet avec une dévote, un orage survint, raconte Grimm, dans sa Correspondance littéraire de mai 17G/i. La dévote se mit à frémir, et prier qu’on baissât les jalousies, qu’on fermât les volets, à se signer, et à dire qu’elle tremblait de se trouver en ce moment à côté d’un impie, sur lequel Pieu, dans sa colère, pourrait se venger par la foudre. Voltaire, indigné de cette incartade, se lève et lui dit : « Sachez, madame, que j’ai dit plus de bien de Dieu dans un seul de mes vers, que vous n’en penserez de votre vie. » Ainsi le tonnerre amenait Voltaire à ne pas plaisanter sur la Divinité en face d’une dévote, suivant son habitude. A I’er-ney, il était assurément plus irréligieux qu’à la cour du roi Stanislas, mais il n’en était pas moins peureux. Aussi, chaque fois qu’il entendait tonner, il ne manquait pas d’envoyer chercher son curé, et il se faisait ainsi un paratonnerre de la soutane d’un prêtre (2). Il fallait même moins que la foudre pour le troubler. Le comte Beugnot tenait de Alalesherbes que Voltaire entrait chez lui de mauvaise humeur, lorsqu’il avait entendu dans la campagne des corneilles croasser à gauche (3).

Voici la note que Thiébault nous fournit sur le marquis d’Argens : «Il craignait lamortau point que la seuleidéed'en être menacé pouvait lui faire faire des choses ridicules. C’est, d’après ces dispositions, qu'ayant ouï dire que l’urine de ceux qui approchaient de ce dernier terme de la vie se noircissait

(1) Fridêric-le Grand, ou mes Souvenir! de vingt ant, du séjour à Berlin. Pdri», 18i6, in-8°, tomcV, p. 405.

(2) Biographie des hommes célèbres du département de l'Ain, par Depery. Bourg 1835, tome I«r, page 149.

(3' Mémoires inédits du comte Beugnot dans la Revue française, de septembre 1838.

dans les vingt-quatre-heures, il a été longtemps clans l'habitude de conserver de la sienne dans des vases qu’il allait examiner plusieurs fois le jour, jusqu’à ce que quelques personnes instruites de cette pusillanimité eussent secrètement découvert ce dépôt, et y eussent mêlé un peu d'encre; ce qui l’elïraya tellement, qu’il fallut lui avouer la supercherie pour lui sauver une grave maladie.

« 11 lui était impossible de tenir à une table où il y eût treize convives. Je l’ai vu à un repas, où j’étais à côté de lui, prendre mon couteau et ma fourchette, qui par hasard étaient croisés , et les remettre sur des lignes parallèles : et, comnieje lui témoignais ma surprise de lui voir prendre ce soin, me dire : « Je sais bien que cela n’y fait rien, mais ils seront aussi bien comme je les place. » Sa nièce, madame de la Canorgue, m’a raconté que, dans le temps qu’il travaillait à son long ouvrage sur l'esprit humain, il lui arriva un soir de se trouver si bien disposé et si heureusement inspiré, qu’il ne fut pas possible de lui faire quitter son bureau avant minuit, et qu’il vint souper très content de lui-même, et fort gai, quoique son gigot se fût desséché devant le feu à l’attendre ; mais que, s’étant rappelé, en se mettant à table, que c’était le premier vendredi du mois, il était allé à l’instant même jeter au feu tout ce qu’il avait écrit dans la journée.

« Le jeune prince Guillaume de Brunswick, en me parlant du silence respectueux dans lequel il se renfermait à la table du roi, son oncle, me disait que, seulement lorsque la conversation paraissait languir, il avait soin de pousser quelque plat vers celui des convives qui semblait vouloir en prendre, mais de le pousser de manière à renverser une salière; sur quoi le roi ne manquait pas de s’écrier : « Ah! mon neveu, qu’avez-vous fait? prenez garde que le marquis ne s’en aperçoive! eh vite, vite, jetez une pincée de sel au feu! Jetez-en une autre par-dessus votre épaule gauche, mais en riant. » Et voilà comment, me disait ce jeune prince, je ranime lacon-versation pour au moins un quart d’heure.

n Quoique le marquis fût très-superstitieux, et qu il eut

été impossible à sa raison de dompter, à cet égard, son imagination trop vive, trop ardente, et frappée, dans son enfance, des fables absurdes dont le peuple surcharge la religion, il n’en détestait que plus fortement la superstition en général; jamais il ne lui faisait grâce dans les autres (1) ! »

Samuel Bernard possédait trente-trois millions, et cependant i! n’était pas plus tranquille que d'Argens. Devinez pourquoi? 11 s’était imaginé que son sort était attaché à la vie d’une poule noire; aussi en faisait-il avoir le plus grand soin (2).

Si Rousseau avait pu scruter dans le cœur de ce ('.résus, peut-être n’eût-il point laissé ce paragraphe dans le livre vi de ses Confessions : « Je voudrais savoir s’il passe quelquefois dans les cæurs des autres hommes des puérilités pareilles à celles qui passent quelquefois dans le mien. Au milieu de mes études et d’une vie innocente autant qu’on la puisse mener, et malgré tout ce qu’on m’avait pu dire, la peur de l’enfer m’agitait encore souvent. Je me demandais : En quel état suis-je? si je mourais à l’instant même, serais-je damné? Selon les jansénistes, la chose était indubitable; mais, selon ma conscience, il me paraissait que non. Toujours craintif et flottant dans cotte cruelle incertitude, j’avais recours, pour en sortir, aux expédients les plus risibles, et pour lesquels je ferais volontiers enfermer un homme si je lui en voyais faire autant, lin jour, rêvant à ce triste sujet, je m’exercais machinalement à lancer des pierres contre les troncs des arbres, et celaavecmon adresse ordinaire, c’est-à-dire sans presque en toucher aucun. Tout au milieu de ce bel exercice, je m’avisai de m’en faire une espèce de pronostic pour calmer mon inquiétude. Je me dis : Je m’en vais jeter cette pierre contre l’arbre qui est vis-à-vis de moi; si je le touche, signe de salut; si je le manque, signe de damnation. Tout en disant ainsi, je jette ma pierre d’une main tremblante et avec un horrible battement de cœur, mais si heureusement, qu’elle

(1) Frédéric le-Grand, tome V, page 541.

(*) Vie privé» de Louis XV, par Mou (île d'Angcrvillï. Lonjrcs 1784, in-12, tome 11, page 119.

va frapper au beau milieu de l’arbre; en qui véritablement n’était pas difficile, car j’avais eu le soin de le choisir fort gros et fort près. Depuis lors, je n’ai plus douté de mon salut. Je ne sais, en me rappelant ce trait, si je dois rire ou gémir sur moi-méme. Vous autres grands hommes, qui riez sûrement, félicitez-vous ; niais n’insultez pas à ma misère, car je vous jure que je la sens bien.

Diderot est aussi naïf et aussi judicieux dans celte lettre adressée à M"* Volainl, le 23 septembre 17G2 : « N’avez-vous pas remarqué qu’il y a des circonstances dans la vie qui nous rendent plus ou moins superstitieux ? Commo nous ne voyons pas toujours la raison des effets, nous imaginons quelquefois les causes les plus étranges à ceux que nous désirons ; et puis nous faisons dus essais sur lesquels 011 nous jugerait dignes des Petites-Maisons.

« Moi-même, j’ai tiré une fois les sorts platoniciens. Il y avait trente jours que j'étais enfermé dans la tour de Vin-cennes ; je me rappelai tous ces sorts des anciens. J'avais un petit Platon dans ma poche, et j’y cherchai à l’ouverture quelle serait encore la durée de ma captivité, m’en rapportant au premier passage qui me tomberait sous les yeux. J’ouvre, et je lis au haut d’une page : celle a/faire eut de nature à finir promptement. Je souris, et un quart d’heure après j’entends les clefs ouvrir les portes de mon cachot : c’était le lieutenant de police Berryer qui venait m’annoncer ma délivrance pour le lendemain. »

Goethe aussi recourait aux sorts, comme Diderot. De là cette anecdote de ses Mémoires: «Je suivais la rive droite de la Lahn, qui coulant au-dessous de moi à une assez grande profondeur, m’était quelquefois dérobée par des prairies couvertes d’arbres touffus, et reparaissait ensuite en réfléchissant à mes yeux la lumière brillante du jour. Pourquoi avais-je mon couteau à la main ? c’est ce que j'ai complètement oublié, mais ce que je me rappelle très-bien, il me vint tout à coup l’idée bizarre de le lancer dans la rivière, et l’id:e,plus bizarre encore, de tirer de cette folie un présage pour le succès dc mes vœux dans la carrière des arts. Je me dis : Si je

vois mon couteau tomber dans l'eau, mes vœux seront accomplis : si les arbres me cachent sa chute, ce sera pour moi un avis de renoncer à mes projets. L’action suivit aussitôt ma pensée (I). »

u Madame du Troussel, la femme du monde qui s'occupait le plus de diseurs île bonne aventure, m'a positivement affirmé, raconte Thiébault, avoir su dans le temps que, durant toute la guerre de sept ans, et surtout aux époques les plus critiques, cette princesse, Amélie de Prusse, avait souvent passé les jours à faire tirer les cartes pour le roi, sans néanmoins le nommer; et qu'on avait envoyé les résultats et les annonces à Sa Majesté ; d'où l'on pouvait douter si le roi y avait ajouté foi ou non, et si la princesse recourait à ces sortes de divinations de son propre mouvement, ou par ordre de son frère (2). » Mais il est certain que Frédéric-le-Grand tirait des présages de ses chiens. «Il ét \it fort disposé, continue Thiébault, à se prévenir contre ceux que ses chiens accueillaient mal : il imaginait, dit-on, que l'odorat et l'instinct de ces animaux pouvaient leur faire sentir si ceux qui l'approchaient avaient ou non avec lui quelque sorte de sympathie. Ce que j’ai observé, c’est qu’on lui faisait une peine infinie lorsqu'on leur marchait sur les pattes, ce que l’obscurité et l’empressement de ces bêtes à venir vous flairer rendaient parfois difficile à éviter. Le malheur de blesser ces chiens ne m’est jamais arrivé, mais je l’ai vu arriver à d’autres, ii qui le roi disait avec humeur : Prenez donc garde (3) ! »

Potemkin croyait aux oracles. Une tireuse de cartes lui ayant prédit qu'il prendrait dans trois semaines Ismaïl qu'il assiégeait depuis septmois.il fit un retour sur lui-même, sen-titqu’on pouvait lui reprocher avec justice la durée du siège, et voulut réaliser la prophétie. Il envoya donc ordre à Suva-rof de presser le siège et de prendre Ismaïl en trois jours. On

(1) Mémoires de Goethe, traduit de l'allemand, par Aubert de Vitry. Paris, 1823. In-S», lomc II. page S.

(2) Frédéric le-Orand, lomc II, page 281.

(3) Frédéric-le-Grand, tome l,r, page 273

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donna deux fois l’assaut; au troisième, la ville était au pouvoir de Catherine (1).

« Le duc de Richelieu eut la faiblesse d’ajouter foi aux prédictions faites d’après l'influence des astres, lisons-nous dans la Vie privée du maréchal (le Richelieu. On lui avait prédit qu'il mourrait au mois de mars, et si, dans la jeunesse où l’on croit voir le ternie de sa destruction, il fit peu d’attention à cet oracle prétendu, ce fut pour s'en ressouvenir bien mieux dans l’âge mûr et dans sa vieillesse et pour redouter ce mois où sa fin lui était annoncée. A peine écoulé, il comptait être certain de passer l'année entière, et si, en 1788, il avait eu assez de tête pour faire le même calcul, il aurait vu sans crainte le mois d’août, qui fut celui de sa mort. Tous les charlatans affichant l’art de prédire furent consultés par lui. » Suivant le même ouvrage, le duc accorda toute sa confiance à un charlatan du nom de Damis qui promettait de faire de l’or. 11 crut à ce secret fort longtemps; malheureusement pour lui, Damis lui échappa et l’or n’arriva point.

Richelieu eut un autre caprice : pendant qu’il était ambassadeur, il se lia avec un autre charlatan qui s’engagea à lui montrer le diable en personne près de Vienne. « La scène devait se passer dans une carrière, rapporte le duc de Lévis dans ses Souvenirs et portraits -, quelques gens de marque s’y rendirent avec le maréchal. Duclos prétend qu’il eut la barbarie d’assassiner le prétendu magicien ; mais Duclos, qui a si souvent copié le duc de Saint-Simon, croyait, ainsi que lui, beaucoup trop légèrement aux accusations les plus atroces. Pour moi, je me suis assuré que tout ce qu’on avait reproché dans le temps au duc de Richelieu était d’avoir été assez extravagant pour faire le sacrifice d'un cheval blanc à la lune. Cette version est bien plus probable, et, dans le doute, il vaut mieux croire au meurtre d’un cheval qu’à celui d’un sorcier. Ce dont je suis positivement certain, c’est que cet homme si spirituel était superstitieux et qu’il croyait aux prédictions

(I) Vie du prince Potemkin, par madame de Cerenville, Paris, 1808. ln-8", page «59.

!es astrologues et autres sottises de cette espèce. Je l'ai vu refusant, à Versailles, d’aller faire sa cour au (ils aîné de Louis XVI, en disant sérieusement qu'il savait que cet enfant n’était point destiné au trône. »

Encore un amateur du diable ! «Monsieur, comte de Provence, nous dit la baronne d’Auberkirk, faisait des pratiques infernales avec le comte de Modène, qui lui avait fait voir le diable. Ce diable-là était un beau jeune homme dont tous les signes de diablerie se bornaient à de, jolies petites cornes. 11 avait fait lire Monsieur dans un grand livre tout rouge et tout enflammé, et il y avait lu, en très-distincts caractères, qu’il serait roi un jour. (1). »

Autre document de la môme dame: «Gustave 111 croit beaucoup aux sciences occultes, et je l'ai entendu assurer qu’il y avait àStockolm, sur le port, une devineresse à laquelle il avait foi et qu’il consultait sans cesse sous de nouveaux déguisements. N’importe lequel il prit, elle lui disait toujours la même chose : qu’il mourrait jeune et de mort violente (2). » 11 s’agit, sans doute, ici de la tireuse de cartes appelée Harvisson par le m u-quis de Bouillé, et Arvedsen par par Brown. 11 la consultait sur ses voyages et ses entreprises importantes ; il lui demandait même l’interprétation de scs rêves (3). Il résulte de ses lettres qu’il prenait le plus vif intérêt à ces hautes spéculations et qu’il était déterminé, il la réception d'un billet anonyme, à se rendre seul et sans épée dans un lieu qu’on lui désignait pour lui révéler des choses inconnues (4).

Faisons à la baronne d’Oberkirh la galanterie de lui emprunter ce troisième passage : « On avait découvert dans un cabinet du Palais-Royal, après la mort du duc d’Orléans, fils

(1) Mémoire! delà baronne d'Obeikirch, tome II, p. "S.

(2) Idem, page U8.

(3) Mémoires du marquis de Bouillé. Paris, 1841. In-8°, page 343. Les Cours du Xord, traduits de l'Anglais de John Brown, par Cohen. Paris, 18Î0. li)-8>, tome III, page 137 à 161.

(4! Collections des écrits politiques, littéraires et dramatiques de Gustave III. Stockolm, 1805. lu-8°, tome V, pages ï'J8 et 301.

(lu régent, une cachette pratiquée dans le mur et três-pro-fondc. Là on trouva des instruments inconnus, des livres de conjuration, des squelettes d’animaux, des têtes de mort, une foule d’herbes de toutes les façons et des poudres aux effets incroyables, sans être précisément nuisibles. On y trouva encore un écrit tout entier de la main du prince ; il contenait des choses tellement extravagantes, qu’on le brûla sur-le-champ, sans en donner connaissance à personne, (’.’étaient des conjurations cabalistiques, disait-on, des formules et des serments écrits avec la passion de la science, l’amour du merveilleux et surtout de l’inconnu (1).» Grâce aux M ('maires du duc de Saint-Simon, il est facile d'achever le portrait du régent fanfaron d’irréligion et de débauches, il n’en restait pas moins ennuyé et embarrassé de sa pensée. 11 goûta à toutes les voluptés et se livra à toutes les turpitudes. 11 affectait de lire Rabelais à la messe et de passer dans des orgies les grandes fêtes de f Eglise, et il travaillait avec ardeur à se persuader qu’il n’y a point de Dieu. Mais rien n’égalait son impiété et son libertinage, si ce n’est sa crédulité aux sciences occultes. 11 demandait les secrets de l’avenir à un verre d’eau, et il fut occupé de bonne heure & chercher à voir le diable etàpou-voir le faire parler. « 11 n’oubliait rien, jusqu’aux plus folles lectures, raconte Saint-Simon, pour se persuader qu’il n’y a pas de Dieu, et il croyait au diable j usqu’à espérer de le voir et de l’entretenir. Il y travailla avec toutes sortes de gens obscurs. Ils passaient les nuits dans les carrières de Vanves et de Vaugirard, à faire des invocations. M. le duc d’Orléans m’a avoué qu’il n’avait jamais pu venir à bout de rien voir ni entendre, et se déprit enfin de cette folie. » 11 resta fidèle aux sorciers. Finissons avec le boudoir de la marquise de Pompadour. Saint-Germain y était reçu souvent ; non-seulement LouisXV le traitait avec considération, mais il ne souffrait même pas qu’on en parlât avec mépris et raillerie. Quant à madame de Pompadour, elle eu était folle. 11 est vrai

(1) Relevé des dépenses de madame de Pompadour, depuis la première année de sa faveur jusqu'à sa mort, par le roi. lii-S°, poge 34.

quelle avait un faible aussi prononcé pour les sorciers. Elle accordait une pension de six cents livres à une dame Lebon, pour lui avoir prédit à l'tige de neuf tins i/u elle serait un jour lu )imitresse de /.ouis AV (1). Elle faisait souvent consulter une dame Bontemps, qui lisait l’avenir dans du n:arc de café. Elle se déguisait pour aller la contempler sur son trépied, et insista pour qu’elle ne fût pas poursuivie. Les démarches ramenèrent à savoir que le duc de la Vrillôre avait aussi des rapports avec cette Bontemps, et que le duc de Choiseul avait été si content de ses oracles qu’il lui avait promis un carrosse.

11 y avait jusqu'à de Berny, qui ne dédaignait pas de monter à son réduit. Nous devons ces détails à madame du Hau-set (2).

VARIÉTÉS.

Pouvoir de l'imagination. — Le Spiritual Telegraph emprunte au docteur Comstock, auteur de l’ouvrage intitulé : longue of Time, l’anecdote suivante qui fait voir un des dangers du spiritualisme. Un jeune homme employé dans un collège, au moment où il sortait de cet établissement, se figura entendre la voix d’un esprit qui lui annonça qu’il mourrait dans trois jours. A. l’approche du terme fatal, il se trouva tellement mal qu’on appela un médecin. Celui-ci le saigna, lui posa des vésicatoires , mais ces moyens n'amenèrent aucune amélioration. Le mal s’aggrava, et le médecin commençait à désespérer de son malade. Heureusement il eut l’idée de changer de régime, et il lui administra une forte dose d’opium. Il s’ensuivit un sommeil profond qui se prolongeait au-delà de l’expiration des trois jours. Quand le jeune homme se réveilla, il s’inform a du jour et de l’heure où l’on se trouvait : la réponse lui fit voir qu'il avait passé le terme fixé par la voix, et aussitôt il recouvra la santé et le repos. Sa préoccupation avait disparu, et il ne craignait plus ni mort ni maladie. « L’imagination , dit l’auteur, peut tuer comme elle peut guérir, et il n’est pas douteux que l’in-

'lividu en question n’eût succombé si l’on n'eût employé ce ce traitement,

I,e Journal de Scine-ct-Marne contient, sur le dressage immédiat des chevaux les plus difficiles, un article dont nous extrayons le passage suivant, qui résume la méthode préconisée par l’auteur sous le titre de Système Perroquet :

« La tête du cheval est attachée à l’extrémité de la partie antérieure de la colonne vertébrale qui représente l’encolure par des liens et muscles qui se contractent par la volonté de l’animal, relèvent ou abaissent la tête. Or, un léger frôlement répété, exercé par la main de l’homme sur ces muscles exactement sur le sommet de la tête, entre les oreilles, et sur l’espace qui relie la tête à l’encolure, amène aussitôt le relâchement de ces muscles, et c’est alors plaisir de voir le cheval le plus vigoureux, le plus irascible, le plus fougueux, allonger aussitôt l’encolure, baisser la tête, avancer les épaules, céder de partout, et cela avec une sorte de volupté.

« Cet exercice du frôlement des doigts sur la nuque doit être pratiqué pendant dix à quinze minutes, et deux ou trois fois par jour ; alors le cheval attelé ou monté sera à tout jamais votre très-humble serviteur.

« Le fait que je signale, et qui est de la plus grande exactitude, peut être vérifié par chacun et à la minute même. «

Extrait du journal /'Exposition de Dijon, n* 18.

Bon laboureur, lu perds ta poine En répandant sur tes sillons Le choix do ta meilleure graine.

Ne vois-lu pas que les dindons,

Les étourneaux et les oisons

I.a mangent dès qu'elle est tombée,

Et que les troupeaux de cochons,

En s'en allant ù la glauilé-,

Dii reste feront leur curie'?

— C'est possible, mais attendons, Attendons la fin de l'annéeI Car le bon Dieu n’a pas voulu Que tout le bon grain fût perdu.

Apôtre du monautopolc Par la plume et par la parole, Sème toujours, un temps viendra Où, malgré les efforts impies D’un las de corbeaux et de pies, Ton système triomphera,

Ta bonne graine mûrira,

Et qui plus est les nourrira.

E. Rocn.

AVIS.

Le Cours de Magnétisme de M. u dPotet commencera le vendredi, 17 novembre.

Baron dd POTET, propriélaire-géranl.

FAITS ET EXPÉRIENCES.

Liège, le 15 décembre 1858.

Monsieur le baron,

Il y a un an, la fantaisie me prit de lire quelques ouvrages de magnétisme, et à la lecture de ces traités, empreints la plupart d’exagération, mon esprit se refusait à admettre l’existence de ce merveilleux agent. Comme tant d'autres je niai à priori, sans examen. J'étais cependant de bonne foi, je ne demandais que des faits, que quelques phénomènes probants,lorsqu’un heureux hasard m’a rendu témoin d’expériences telles, que le doute n’était possible que pour un académicien. — La lecture de vos savants et consciencieux ouvrages raffermit ma conviction naissante et m’engagea à entrer dans la voie expérimentale. Le succès le plus complet couronna mes premiers essais, et dès ce moment je devins un fervent adepte de la science nouvelle.

Ma conversion a été aisée ; je n’avais en moi ni préjugés à vaincre, ni erreurs à surmonter, ni théorie préconçue à soutenir (et Dieu sait de combien de théories hasardées le magnétisme a conduit le deuil !). Je ne suis d’ailleurs ni un savant, ni un académicien, ce qui a parfois son avantage, surtout lorsqu'il s’agit de s’initier à une science nouvelle.

J. J. Rousseau disait : « Si les savants ont moins de préjugés que les autres hommes, ils y sont plus attachés ; » et madame de Linange : « Les académies sont des sociétés comiques, où l’on garde son sérieux. » L’histoire du magnétisme et le rôle qu’y a joué la science, ne semblent-ils pas confirmer ces paroles, dans ce siècle de lumière où toute vérité paye son tribut à l’ignorance, aux préjugés et aux passions égoïstes des représentants de la science ?

Je viens, monsieur le barou, vous rendre compte de mes premiers pas dans cette belle science dont vous ôtes le plus vaillant champion, comme le plus vaillant apôtre.

Tous XVII. — N° 48. — i* Série. — 25 Décembre. 2i

Peut-être y a-t-il de ma part de la présomption à vous demander d'ouvrir les colonnes de votre journal à des faits qui ne sont pas nouveaux pour vous. Mais je crois qu’on doit, dans l’intérêt de toute science nouvelle, rassembler les faits, les classer, les lier en faisceaux et n’avancer qu appuyé sur des notions expérimentales : en procédant ainsi du particulier au général, du simple au composé, on place la science sur des bases inébranlables et on parvient à formuler des synthèses générales. La physique, la chimie, la minéralogie, la médecine, etc., etc., ont puisé leurs premiers principes à l’école de l'observation. 11 en est de môme du magnétisme, et, quel que soit le nombre dc preuves et de faits constatés, il y a urgence d’en assembler de nouveaux pour élever une digue capable d'arrêter le flot toujours grossissant et toujours plus menaçant du charlatanisme. La science, débordée par les faits, finira par se rendre à l’évidence. D’ailleurs la paix n’est pas encore signée ; parfois des bombes incendiaires sont lancées du camp des académiciens et des savants (témoin l’ouvrage de M. Mabru). De la persévérance donc ! Aussi longtemps qu’un adversaire est sur la brèche, gardez-vous bien de mettre bas les armes ! Munissez, munissez sans cesse voire arsenal de preuves nouvelles, de faits probants, et à vous la victoire I

Cette méthode analytique présente un autre avantage : celui de servir de contrôle à la spéculation métaphysique (qui depuis quelque temps semble travailler la science), car aucune théorie ne saurait renverser des faits certains.

Avant d'aborder le compte-rendu de mes expériences, un mot encore sur la méthode que j’ai suivie. Je me suis pénétré d'abord des idées des magnétiseurs le plus en vogue, et, sans prévention aucune, je me suis mis à l’œuvre. J’ai fait mieux; j’ai pris pour point de départ le doute philosophique de Descartes, et, partant de la simple notion : le magnétisme existe, j’ai expérimenté, regardant tous les phénomènes cités dans les ouvrages comme n’existant pas, jusqu’à preuve du contraire; après six mois d’essais, j’ai obtenu tous les phénomènes dont parlent les auteurs. Ces essais ont été faits,

non sur des sujets mercenaires, mais sur des personnes du monde ou sur des amis, ou enfin sur des personnes qui se soumettaient aux expériences par pure curiosité.

Voici les résultats obtenus :

Après 10 ou 12 minutes de magnétisation, sur 50 personnes

! Coma simple, /|0 (1).

Coma suivi soit du sommeil magnétique, soit du

somnambulisme, 30.

f simple, c’est-à-dire sans somnan:-

Sommeil magnétique | bulisme, 30.

( suivi de somnambulisme, 15 (2).

c , ( non lucide 15.

Somnambulisme , ., ,

( lucide 3.

Ces effets ont été obtenus après une seule magnétisation.

Lorsqu’une fois j’étais arrivé à l’état comateux, presque toujours après une 2” ou 3* magnétisation, j’obtenais le sommeil magnétique. Le degré le plus difficile à franchir est le somnambulisme. 11 m'est arrivé 15 fois sur iO de le produire d’emblée; d’ordinaire il me faut 5 ou 0 magnétisations, quelquefois 10 ou 12, d’autres fois même il m'a été impossible de l’obtenir.

Dans le sommeil magnétique, j’ai rencontré des sujets chez qui l’insensibilité était complète, d’autres chez qui il fallait la provoquer en cataleptisant le membre qu'on voulait rendre insensible; d’autres enfin où la sensibilité était émoussée.

Après deux ou trois magnétisations, j'obûensl'insensibilité à l'état de veille, et cela en cataleptisant le membre que je veux rendre insensible.

Enfin il m’est arrivé de faire, en présence de plusieurs médecins, l’expérience de la sensibilité partielle. Le patient étant insensible,je démagnétisais unepartie ducorps ; et, bien qu’on pût enfoncer des aiguilles tout à l’entour de cette partie, dès qu’on touchait une place démagnétisée, le sujet poussait des cris atroces.

(1) Effets nuls, 5.

(2) Effets approchant du coma, 5.

Je me rallie franchement ;'i l’opinion (les finalistes, parce que leurs arguments me paraissent sans réplique et cadrent parfaitement avec mes observations. Tous nies somnambules, sans exception aucune, ont affirmé voir rayonner le fluide de mes doigts. Ensuite, plus d’une fois magnétisant dans un salon, le fluide agissait sur des personnes que je n’actionnais point et les endormait.

Parlons maintenant des remarquables phénomènes du somnambulisme : la prévision, la vision sans le secours des yeux, le diagnostic des maladies, la communication de pensée.

Le somnambulisme lucide est, il faut l’avouer, bien rare : sur 50 sujets je n’ai trouvé que 3 cas réellement remarquables et dont je vais vous entretenir.

Prévision. — On a beaucoup écrit pour et contre la prévision ; des magnétistes ont affirmé qu’elle n’existait pas ; voici pourtant un fait qui mérite toute attention :

Mademoiselle E. F., désirant vivement être magnétisée, se présente chezmoi le 28 septembre dernier. Après troisséances, elle tombe en somnambulisme. Dansceté(at,je lui demande si le magnétisme lui fait du bien. — Maintenant, dit-elle, que je suis en bonne santé, il ne me fait ni bien ni mal, niais lorsque je serai poitrinaire, c’est alors qu’il faudrait ine magnétiser.

— Quoi ! vous deviendrez poitrinaire ? vous badinez ! — Oh ! que non, je parle sérieusement. Dans huit jours ma mère mourra et cet événement sera pour nous le commencement d’une ère de souffrances, de tortures morales, de peines de cœur qui m’entraîneront au tombeau. J’ai encore quatre années ii vivre.

L’événement annoncé s’est accompli de point en point.

La mémo personne, à l'état de somnambulisme, a tracé de main de maître le portrait de plusieurs personnes qu’elle ne connaissait pas même de vue et avec lesquelles je l’ai mise en rapport ; elle a esquissé leur caractère d’une manière si nette et si précise, que personne n’a songé à s’inscrire en faux.— Lorsque l’état somnambulique se déclarait chez elle, sa physionomie se transfigurait ; toutes ses facultés se dédoublaient,

et celte jeune personne, qui s’exprimait convenablement à l’état de veille, devenait réellement éloquente. Elle savait trouver ces accents du cœur qui vont droit au but, et elle faisait partager à l’auditoire les sentiments qui l’animaient.

Gustave Goossens.

(La suite à une prochaine lettre.)

DES ANESTHÉSIQUES.

CHLOBOFORM& — MAGNÉTISME.

La routine et les préjugés de toutes sortes sont en France un des plus grands obstacles au progrès. La France aime assurément tout ce qui estgrand, tout ce qui est beau-, de toutes les nations elleestsanscontredit celle quifaitle plus desacrifices, qui se dévoue le plus facilement à tout ce qui peut faire avancer la Civilisation, dans le sens absolu du mot ; de toutes les nations elle est aussi celle qui met le plus d’entraves à toute innovation, elle est pourtant, personne ne le conteste, à la tète de tous les peuples. Au premier abord, il semble qu’il y ait contradiction dans cette opinion , mais la réflexion ne tarde pas à montrer que rien n’est plus vrai. Lisez l’histoire de toutes les découvertes, vous verrez à. toutes les pages de ce grand liviela preuve de notre asserüon ; lisez le long et douloureux mattyrologe des novateurs, vous trouverez à chaque découverte la lutte, le désespoir, l’agonie, la mort de tous ces génies créateurs, de tous ces prométhées modernes. Ce n’est qu’après de longues années , après des expériences faites ailleurs que la France accepte, consacre ce qu’elle avait repoussé d’abord.

Nous n’avons pas le dessein de développer ici cette thèse; nous laisserons de côté tout ce qui n a point rapport à notre tâche, le mouvement des idées, philosophie , littérature, les beaux-arts , et nous prendrons dans la science un tout petit point, celui qui intéresse la médecine. C’est à cette par-

lie île la science générale qu’il faut appliquer surtout ce que. nous avons dit au début de notre article ; il est vrai que cette science ne doit admettre qu’après de longs el minutieux examens toute découverte, toute méthode nouvelle ; car il s’agit ici de la vie des hommes. Mais une Ibis reconnue bonne et utile, toute idée nouvelle devrait être franchement, au préjudice même des intérêts, acceptée et appliquée. Eu est-il toujours ainsi ? Hélas !

Le chloroforme découvert en 1831 par M. Soubeiran, analysé par M. Dumas en 1834, lut proposé pour remplacer l’é-ther en 1847 parle docteur Simpson d’Eldimbourg. L’Allemagne fut la première à utiliser cet agent anesthésique dans les opérations chirurgicales, l’Amérique imita les docteurs allemands , et la médecine en France voulut bien alors essayer de ce moyen de faire, sans douleur pour le malade, les opérations les plus douloureuses.

Un autre agent anesthésique que nous comparerons tout à l'heure au chloroforme, suivit absolument la même marche. Le magnétisme, découvert en Allemagne, fut repoussé par la France, étudié, accepté par l’Amérique , et aujourd’hui il a enfin droit de bourgeoisie , n’en déplaise à tous les Mabru , non-seulement dans Paris, mais dans toutes nos villes de province. Le char roule et tous les Baziledu monde useront leurs petites langues de vipère, briseront leurs petites griffes sans en arrêter un instant la marche.

Si ce chloroforme fut une découverte utile , il fut aussi, il est encore une source de funestes accidents. Au dire des docteurs les plus estimés, le chloroforme, employé comme nneslliésique , peut, dans les mains même les plus habiles , devenir une cause de mort. Ecoutez plutôt M. Robert, chirurgien de l’hôpital de Beaujon, membre de l’Académie de médecine. Voici extraites de la Revue de thérapeutique médico-chirurgicale, 15 juillet 1857, quelques lignes d'un remarquable, mémoire sur le dosage du chloroforme pour les inhalations. «Depuis l’observation de M. Gorré (de Boulogne), qui fut le point de départ de la mémorable discussion de 184», les cas de mort se sont multipliés ; plusieurs ont eu lieu sous les yeux des

praticiens les plus consommés, de telle sorte que la question de responsabilité a complètement changé de face; car aujourd'hui il n'est plus permis de douter que le chloroforme ne puisse entraîner des accidents funestes , alors même qu’il est pur et administré par des mains habiles. — Mais, dira-t-on , si l’emploi des anesthésiques sagement dirigé peut amener la mort, que ne doit-on pas redouter de la témérité ou de l’ignorance ? » Après avoir montré les dangers des anesthésiques , le savant docteur cherche les moyens de les combattre , propose plusieurs appareils de dosage et termine son mémoire par ces mots pleins d’une sage vérité : « ... Si donc un malheur arrivait, on devrait admettre, à moins de preuves du contraire, que tout a été pratiqué convenablement , et ne pas oublier qu’en pareille occurrence on ne saurait faire peser sur le médecin la responsabilité d’un accident dont l’impuissance de l’art doit seule être comptable. »

Après avoir parlé avec éloge des anesthésimètres de MM. Snow, Charrière et Duroy, l’habile praticien fait comprendre dans ses conclusions que le dosage n’est guère possible d'une manière absolue et fait tomber sur l’impuissance de l’art tous les accidents qui peuvent naître de la chloroformisation. M. Heurteloup, dans une autre séance de l’Académie de médecine, va plus loin que M. Robert, et, au lieu de dosage, il parle de régularisations ; il croit que le dosage est une chimère. Ainsi, de l’aveu même des hommes les plus compétents , la chloroformisation offre les dangers les plus graves et les plus difficiles à éviter. L’expérience l’avait trop souvent démontré avant ces messieurs. On ne devrait donc appliquer les anesthésiques violents, tout au plus que dans les opérations qui ne réclament qu'une insensibilité partielle ou légère, puisque toutes les fois que l’anesthésie doit être profonde , complète, il y a danger de mort ; dans ce dernier cas, la prudence devrait faire remplacer cet anesthésique par un autre agent dont le pouvoir est aussi merveilleux, et qui a l’avantage de n'être pas, comme le chloroforme, un poison foudroyant.

Le magnétisme, plus puissant et plus habile que le chloroforme, produit sans nul danger, sur tout le corps ou sur une partie seulement, l'auesthésie la plus complète; le sommeil n’est point nécessaire pour anesthésier tel ou tel membre à opérer, et cet avantage a bien son importance dans certaines opérations chirurgicales.

Avant de donner quelques faits à l'appui de notre thèse sur la puissance du magnétisme anesthésique, nous citerons quelques lignes dUm ouvrage philosophique de l’abbé Cau-pert, professeur de théologie et membre de plusieurs sociétés savantes. Nous recommandons la lecture de cette cruvre remarquable à tous les ridicules pourfendeurs de magnétistes : « Les bruits les plus intenses, dit l'auteur en parlant des sujets anesthésiés, les odeurs les plus fortes ne font aucun effet sur ces sujets ; le corps, en un mot, paraît tout à fait insensible à la violence du fer et du feu , non moins qu’aux opérations chirurgicales les plus terribles et les plus douloureuses. Ainsi l’amputation d’un bras , d’une jambe , l’extrac. tion des dents, de cancers, etc., ont été maintes fois opérées sans douleur et sons aucun accident subséquent, deux conditions que l’on ne rencontre pas toujours dans l’état d’insensibilité produite par le chloroforme et l’éther. »

De pareils témoignages ne seront pas suspects, nous l’espérons ; contester la puissance magnétique, nier ses salutaires effets, accuserait aujourd’hui mauvaise foi ou ignorance impardonnable , et pourtant que d’ennemis s’acharnent vainement à ridiculiser les hommes qui vouent leur temps et leur intelligence au progrès de cette nouvelle science!

Nous pourrions citer les exemples nombreux d’opérations faitesparl’anesthésie magnétique avec le pluscompletsuccès : Paris, Bordeaux, Cherbourg, etc., l’Angleterre, l’Amérique, comptent par milliers les opérations chirurgicales par l’insensibilité magnétique.

Devant de semblables témoignages, bien faux serait celui qui nierait les phénomènes produits sur nos semblables par le fluide électrique vital. Pourquoi donc la docte assemblée

des princes de la science médicale repousse-t-elle systématiquement cet agent nouveau? Pourquoi préfère-t-elle anesthésier par le chloroforme qui peut tuer le malade, que par le magnétisme, qui, en produisant les mêmes eil'ets, ne peut causer aucun mal? Pourquoi les princes de la science aiment-ils. uiiûiu suivre une route üaeùe depuis longtemps, battue par eux et sur laquelle ifs rotriclit aisément-, que de chercher un nouveau chemin qui pourrait les conduire plus vite au but, c’est-à-dire à la guérison des malades, mais dont l’étude les ennuie, les effraye? Pourquoi? je l’ai dit dès le début de cet article : parce que FAcadémie de médecine a sa routine, ses préjugés qui arrêtent sa marche ; et puis, les docteurs exerçant leur art ont si peu de temps pour l’étude ! Les malades sont si nombreux ! Le temps est si précieux ! C’est pour eux qu’a ôté fait ce proverbe américain : Time is money. — Pauvres malades, vous croyez bénévolement qu’on a étudié la médecine pour vous guérir. On se fait médecin en France comme on se fait avocat, pâtissier, cuisinier, marchand, etc., pour gagner de l’argent, beaucoup d’argent per fus et souvent per nefas. QUe voulez-vous? c’est la mode.

L’Acidémie a déclaré, il y a déjà quelque temps, qu’à l’avenir toute question, tout ouvrage concernant le magnétisme serait rejeté par elle comme à l’Académie des, sciences on rejette toute solution de la quadrature du cercle et la recherche de la pierre philosophale. L’Académie de médecine nie hardiment le magnétisme, se voile la face de pudeur à ce seul mol et se drape orgueilleusement en montrant Hippocrate. Pourquoi fermer les yeux devant le soleil et nier la clarté qui nous éblouit ?

Allons, messieurs de l’Académie, un peu de bonne foi ; cessez de jouer le rôle d’aveugles, ce rôle est indigne de vous; ne fermez plus les yeux à la lumière nouvelle ou craignez de devenir sérieusement privés de la faculté de voir. Le jour où vous voudrez 'bien réhabiliter le magnétisme chez vous, ne fût-ce que comme agent anesthésique, vous rendrez

un grand service à l'humanité et vous ferez faire un grand pas à la science médicale.

Bernard.

ENQUÊTEiSUR LE SPIRITUALISME.

La Société philanthropico-magnétiqueannonçadernièrement qu'elle ouvrirait une conférence sur la valeur philosophique du spiritualisme, et elle invita à y prendre part les personnes étrangères à la Société et qui s'étaient spécialement occupées de la question. La réunion fut nombreuse ; il s’y trouva des sectateurs de diverses opinions; trois séances furent consacrées à la discussion. Nous croyons utile de rendre compte à nos lecteurs de cette intéressante délibération.

Je fus un de ceux qui répondirent à l’appel bienveillant de la Société : comme j’ai fait, depuis longtemps, des efforts pour démêler ce qu’il peut y avoir de vrai dans les prétentions spi-ritualistes, je saisis avec empressement l’occasion de concourir à une tentative ayant pour butdcjeterquelquelumièresur cette matière si controversée. Je fis observer qu’avant de rechercher la valeur philosophique du spiritualisme, c’est-à-dire des systèmes basés sur les manifestations des Esprits, il fallait d’abord être fixé sur la réalité des faits. 11 existe, à cet égard, d’innombrables relations ; on y rend compte de phénomènes extraordinaires, dont plusieurs semblent contraires aux lois naturelles connues : mais ces faits merveilleux sont loin d’être authentiques, il n’en a pas été fait de constatation régulière. Beaucoup de personnes éclairées et de bonne foi ont fait des démarches suivies pour en être témoins et n ont pu y parvenir. Souvent les tentatives qui ont eu lieu ont amené la découverte de fourberies employées par des intrigants pour duper des spectateurs crédules ou inexpérimentés, et faire croire à des interventions miraculeuses ; bien des faits allégués s’expliquent naturellement par l’état d’hallucination

où se sont trouvés quelques rêveurs enthousiastes ; plusieurs thaumaturges qui se vantaient de pouvoir reproduire à volonté des merveilles, ont éludé les demandes qui leur ont été faites, ont cherché à échapper sous divers prétextes à l'invitation de tenir leurs promesses, et ont ainsi été confondus et convaincus d'impuissance et de forfanterie. On peut donc déjà tenir pour certain qu'une partie au moins des faits affirmés par le spiritualisme, est chimérique. On n'est pas fondé à étendre au surplus ce jugement sévère, mais le doute est au moins permis. Tant qu’une vérification rigoureuse n'aura pas eu lieu, il serait évidemment peu rationnel de discuter des doctrines fondées sur des faits problématiques. On doit commencer par s’enquérir de ces faits. Bien qu’on nous dise sans cesse qu’ils sont extrêmement fréquents et que rien n’est plus facile que de les observer, l’expérience prouve au contraire que les recherches dans ce but n’aboutissent souvent qu’à des déceptions. Toutefois, il importe à la science de découvrir le dernier mot de cette énigme. Nous assistons à l'enfantement d'une nouvelle religion : nous sommes donc en quelque sorte responsables, vis-à-vis des générations futures, du contrôle que nous aurons exercé sur l’élaboration de systèmes qui peuvent apporter une influence heureuse ou malheureuse sur le sort des populations. Notre devoir est d’examiner avec le plus grand soin les miracles auxquels on réclame notre adhésion. Le meilleur moyen d’investigation consisteà former une commission d’enquête qui tirera de sa délégation une certaine autorité morale, qui invitera tous les médiums, tous les agents de manifestations extraordinaires, à reproduire devant elle les phénomènes considérés comme les modes de communication des Esprits ; cette commission sera chargée de recueillir tous les faits, de les observer, de les enregistrer, et son témoignage aidera puissamment le public à apprécier le spiritualisme ; on peut espérer par là parvenir à la connaissance de la vérité.

Cette proposition a trouvé dans l’assemblée un assentiment presque unanime. Toutefois il a été fait quelques objections que nous devons rapporter.

En général, a-t-on dit, les commissions n’achèvent rien, n’obtiennent rien, ne peuvent rien voir, môme ce qui est visible pour tout le monde : témoins les commissions académiques du magnétisme. Chacun ne peut-il pas faire lui-même son enquête et rendre compte de ce qu'il a observé?... Les faits du spiritualisme, autant qu’on peut en juger par les documents connus, dépendent de l’état psychique des médiums ; ces sortes de faits ne peuvent se reproduire à volonté, sans que l’on soit autorisé à conclure de là à leur impossibilité ; les sujets, ainsi que les somnambules, peuvent être influencés d’une manière défavorable par la présence de malveillants, d'incrédules ou môme de personnes qui se posent en qualité de juges ; il en est de même d'un artiste, d'un orateur dont les brillantes facultés peuvent être paralysées par f aspect d’une1 figure antipathique, par le sourire insultant d’un zoïle. 11 pourra donc arriver que de très-beaux phénomènes qui s’obtenaient avec aisance dans un cercle sympathique, s’arrêtent tout à coup sous le regard sévère et inquisiteur d’une commission qui se consumera en efforts infructueux et se croira le droit de nier ce qu’elle n’aura pu voir, tandis que des milliers de témoins qui auront vu, protesteront contre sa décision.

On a répondu que sans doute chacun pouvait s’enquérir, comme bon lui semblait, de la réalité des faits, et chercher, par ses efforts individuels, à se faire une conviction. Mais l’association présente des moyens beaucoup plus sûrs d’arriver à la vérité. Tout le monde n’est pas doué des qualités nécessaires pour bien observer. Combien de gens, ne manquant ni d’intelligence, ni de connaissances, restent ébahis devant tout ce qui leur semble extraordinaire, et se laissent duper comme des enfants par les ruses les plus grossières ! Une commission composée d’hommes habitués aux recherches scientifiques offrira certainement des garanties plus solides qu’un individu : les précautions à prendre y seront sérieusement discutées, on saura opérer dans le9 conditions convenables pour se' mettre à l’abri de toute erreur : le témoignage d’une commission aura donc infiniment plus de poids que

celui d’un particulier. Elle aura aussi plus d'indépendance pour se mettre au-dessus de certaines susceptibilités, pour formuler certaines exigences sans lesquelles les expériences ne sont plus que de vaines comédies. Donnons un exemple. Cinq ou six personnes, parmi lesquelles se trouve un médium, sont assises autour d’une table, et l'on entend retentir des coups qui paraissent venir de dessons la table ; ces coups, par leurs combinaisons, forment des mots, des discours. Plusieurs des spectateurs n’hésitent pas à y reconnaître l’action d’un Esprit ; d’autres plus circonspects, trouvent cette façon de raisonner un peu précipitée ; non-seulement ils ne pensent pas qu’on soit en droit d’attribuer à l’action des Esprits tout bruit dont la cause physique ne pourra être découverte, mais encore ils jugent qu'il serait bon de rechercher, parmi les causes probables, s’il y en a quelqu’une pouvant, rendre compte des bruits entendus; on pourrait donc jeter un coup d’œil sous la table, surveiller les pieds des opérateurs, vérifier s’il n’y a pas là quelque agent parfaitement humain, qui s’amuse à fabriquer à peu de frais des coups'mystérieux. Mais on n’ose montrer une défiance qui pourrait blesser le médium, surtout si c’est une dame ; cm craint même de faire part de ses soupçons aux bons croyants qui admirent tout, on se tait par discrétion et l’on s’expose à ce que quelque spi-ritualiste fervent invoque ce silence comme une adhésion et revendique le témoignage de ceux qui ont assisté & l’expérience sans faire d’objection. Une commission ne peut observer de tels ménagements ; elle a reçu une mission de confiance, elle manquerait à ses devoirs si, en procédant à l’examen, elle n’apportait pas les soins les plus scrupuleux ; elle devra même, dans le compte-rendu de ses travaux, détailler toutes les précautions qu’elle aura prises pour rendre toute fraude impossible. Les médiums sincères, loin , d'être choqués de cette manière d’opérer, seront certainement les premiers à demander qu’on s’y prenne de manière que leur loyauté ne puisse être suspectée, .certains de n'avoir .rien à craindre de la vigilance la plus clairvoyante. Quant.aux jongleurs dont les précautions pourraient faire manquer les

tours, ils allégueront sans doute, non leur dignité, mais cello des Esprits dont ils se disent les organes, et qui, offensés de ces marques de défiances, refusent de se manifester devant des observateurs si pointilleux; dans ce cas, il est vrai, la commission ne verra rien et le public appréciera le degré de confiance que méritent des miracles qui ne réussissent qu’à condition qu’on ne cherchera pas à voir les ficelles.

Ce qu’on allègue de l’impuissance des commissions est. démenti par l’expérience dans les sciences d’observation; des commissions ont rendu de très-grands services et ont souvent élucidé des points obscurs. En ce qui regarde notamment le magnétisme, la commission académique dont M. Husson a été le rapporteur, a observé des faits nombreux et importants, et son rapport est invoqué tous les jours comme un des plus beaux titres en faveur de la cause du magnétisme. Si, au contraire, devant la commission plus récente ayant pour rapporteur M. Dubois (d’Amiens), toutes les expériences ont échoué, cet insuccès tenait à des causes particulières dont il est facile de se rendre compte. Cette commission qui était instituée pour s’enquérir du magnétisme, ne s’en est réellement pas occupée ; elle a eu en sa présence des somnambules ; mais, par suite de ses préventions, qui lui faisaient considérer cet état comme simulé, elle n’a aucunement cherché à étudier la nature et les caractères du somnambulisme ; elle n’a porté son attention que sur la lucidité qui, de l'aveu des plus ardents magnétistes, est une faculté variable et sujette à beaucoup de mécomptes ; elle n’a même examiné que certains genres de lucidité. Or, tout le monde sait que quand on recherche de pareils phénomènes, il ne faut pas se borner à un petit nombre d’essais, ni de leur insuccès s’empresser de conclure à la négation ; il est nécessaire d'agir avec persévérance et de multiplier les expériences. La commission qu’il s’agit d’instituer, étant formée de magnétistes, saurait parfaitement qu'un petit nombre de faits négatifs ne suffit pas pour prouver la non existence du spiritualisme ; elle serait trop équitable pour déclarer la cause jugée dès le premier échec, elle poursuivrait sa tâche avec constance jusqu’à ce

qu elle ait épuisé tous les moyens d’investigation qui pourront être à sa disposition.

l)’un autre côté, il est fort possible que le personnel de: la commission Dubois ait été peu favorable à l’éclosion des phénomènes de lucidité : quelques-uns de ses membres étaient très-hostiles au somnambulisme, s’étaient exprimés à ce sujet de la manière le plus méprisante, affectaient de ne voir dans les somnambules que des fourbes exercés à jouer un rôle. On conçoit combien les somnambules, qui sont très-impressionnables, ont dû être influencés à l’approche, au contact de ces messieurs, combien la voix, le regard de pareils censeurs ont dû les troubler, paralyser les plus brillantes facultés. Dans le cas actuel, nous n’avons rien à craindre de semblable. Ceux qui demandent l’enquête ne sont pas hostiles au spiritualisme et même ne le nient pas ; ce sont des chercheurs de bonne foi, qui demandent à s’éclairer, qui, n’ayant pu réussir à être témoins des faits merveilleux qui occupent l'attention publique, espèrent que de nouveaux efforts finiront par dissiper les nuages et faire luire la vérité : s’ils sont en garde contre l’imposture, ils se gardent bien d’envelopper dans une commune flétrissure tous ceux qui jouent un rôle dans le spiritualisme ; et même, en tâchant d’expliquer les faits qui leur sont connus, tels que l’écriture des médiums, ils admettent que ceux-ci, tout en étant de très-bonne foi, exécutent des mouvements inconscients et s’abusent en attribuant à des êtres extérieurs ce qui est le produit de leur propre intelligence. Mais ceux même qui ont adopté provisoirement cette explication, n’ont pas la folle présomption de déclarer d’avance impossibles les faits qui la démentiraient; ils savent qu’on ne peut fixer les limites du possible et qu’il n’y a pas de théorie qui puisse tenir contre un fait bien avéré. Ils cherchent sans prévention, sans parti pris : leurs relations avec les médiums seront toutes bienveillantes ; loin de les intimider, on cherchera à les encourager.

Si, comme le prétendent les spiritualistes, les phénomènes en question sont dus à des êtres extra-humains, l’objection à

laquelle nous venons de répondre, s’évanouit d’elle-mème ; et, bien que nous ne connaissions pas la nature de ces êtres, on peut au moins regarder comme fort vraisemblable qu’ils doivent peu s’inquiéter de la physionomie peu amicale ou des dispositions morales des assistants. Néanmoins quelques docteurs de cette école ont prétendu que les Esprits n’aimaient pas les incrédules et ne faisaient rien devant eux. Sans entrer dans l’examen de cette étrange prétention que nous avons déjà réfutée dans ce journal, nous nons contenterons de faire observer qu’elle est journellement démentie par les faits : une multitude de phénomènes attribués aux Esprits, tels que les coups dans les tables, la rotation des tables, l’écriture des médiums, ont lieu à commandement devant n’importe qui, et ne font jamais défaut. Donc les spi-ritualistes qui provoquent ces faits et les obtiennent à leur gré, quelles que soient les dispositions morales des assistants, ne peuvent prétendre que les auteurs (qjiels qu’ils soient) des phénomènes choisissent leurs spectateurs et réservent leurs manifestations pour les croyants. Bien plus, les journaux américains 6ont remplis de relations où des faits bien plus graves, bien plus concluants, tels que apports d’objets matériels, ascensions humaines, apparitions de mains ou même de corps entiers, ont pour témoins des populations entières ; les demoiselles Fox ont opéré un jour devant une réunion de 500 personnes ;une foule de médiums donnent des séances, comme les somnambules, moyennant rétribution ot à tout venant, sans s'informer si le consultant croit ou non ; on cite même des incrédules houspillés par des invisibles ; cette grâce (pour employer l’expression de M. Delaage) n’était donc pas la récompense de leur foi.

Quelques membres ont rapporté des faits curieux qui leur sont personnels : d’autres membres en ont examiné la portée et ont cherché à prouver qu’ils pouvaient s’expliquer par l’action de facultés humaines et anormales, sans qu’il soit besoin de recourir à l’intervention des Esprits. On a fait observer que ces faits, n’ayant eu pour témoins que ceux qui les rapportaient et un petit nombre d’amis, n’ont pas assez

de poids pour être acquis à la science : quand il s’agit de choses aussi prodigieuses, une constatation solennelle est indispensable ; l’enquête est donc nécessaire ; les spiritualistes doivent la désirer, puisque, si les faits en question sont réels, elle ne pourra que leur donner une considération éclatante, la Société a décidé à l’unanimité, moins une voix, qu’il serait formé une commission d’enquête à l’effet de rechercher et de constater les faits appartenant au spiritualisme : cette commission est composée de MM. Duplanty, Loùyet, Dureau, secrétaire, Guillot, Millet, Bertin, de Tascher, Tarin, 'Win-nen, Angerville, Z. Piérart, Delaageet A. S. Morin.

Dès que la commission aura commencé ses travaux, nous en rendrons compte à nos lecteurs. Dès à présent, nous engageons les médiums et en général toutes les personnes en état de présenter des faits curieux, à concourir à cette œuvre et à, préparer tous les éléments d’instruction.

A. S. Mobin.

VARIÉTÉS.

l’anu-spibituauste américain.

L’Amérique est le pays des prodiges : depuis plusieurs années, on n’y entend parler que de merveilles étourdissantes; seulement ce qui excite l’admiration et la vénération des uns, est pour d’autres un objet de dédain et de raillerie, la réalité des faits y est aussi controversée qu’en France. Mais voici un nouveau thaumaturge qui s’annonce comme devant terminer le débat en mettant les miracles à la portée de tout le monde. Voici l’étrange annonce qu’il a répandue à profusion dans la ville de Bridgeport, et que reproduit le Sptri-iual Telegraph du 6 novembre : « Aujourd'hui, à sept heures et demie du soir, à Washington-Hall, le public sera admis à voir tous les phénomènes que l’on attribue ordinairement

aux Esprits détachés du corps. Le médium docteur V.-M. Blv invitera une commission choisie par l’assemblée à le lier solidement par une corde de 50 pieds de longueur, et il sera promptement délié, sans assistance d’aucune main humaine. Deux des membres de cette commission le tiendront de manière à ce qu'il ne puisse faire aucun mouvement qui leur échappe, et pendant ce temps-là une guitare se promènera au-dessus des têtes des assistants et fera entendre des airs. On entendra aussi des coups fortement frappés sur le parquet; les spectateurs feront des questions au moyen de billets pliés, et les réponses seront données par des coups venant de toutes les directions, avec les noms des esprits agissant. A la fin de la séance, le docteur donnera la clef au moyen de laquelle les spectateurs pourront devenir aussi bons physiciens et aussi bons médiums que lui-même et que personne au monde, la clef du système de déception et de jonglerie à l’aide duquel des milliers d'individus ont été dépouillés de leur argent et amenés à croire qu’ils conversaient avec les âmes de leurs amis défunts. Ces prétendues manifestations sont exécutées avec tant d’adresse par ceux qui y consacrent tout leur temps, que tout le monde peut y être trompé, à moins de posséder la vraie.t clef qui n’a pas encore été donnée au public. On donnera des leçons sur l'art des coups (rappings), de manière à rendre les élèves en état d’égaler et même de surpasser la famille Fox. Une table sera suspendue en l’air sans contact, les conditions étant favorables. »

Nous supposons que ces derniers mots veulent dire que l’opérateur se mettra dans les mêmes conditions que les médiums qui ordinairement ont besoin de l'obscurité pour obtenir l’ascension des tables et celle des personnes. Quoi qu’il en soit, il y a certainement dans ce programme de quoi piquer vivement la curiosité, et nous attendons avec impatience le compte-rendu des expériences promises. En supposant qu’il effectue tout ce qu’il annonce, il serait impor ■ tant de savoir si les résultats ne sont que des tours d adresse ou s’il emploie quelque nouvelle découverte dont il enrichi-

rait la science. Quand l'assemblée connaîtra sa clef, il est bien probable qu’on la publiera et que, sur les deux rives de l’Atlantique, 011 sera en état d'apprécier ses révélations.

D'après le Telegraph, d’autres individus se seraient donnés en spectacle, s’annonçant comme devant démasquer le spiritualisme et auraient misérablement échoué. Nous l’engageons à nous tenir au courant de ces tentatives qui doivent blesser ses croyances, mais qu’il ne peut se dispenser de mentionner et même de discuter.

Ce genre de contrefaçon peut donc avoir son utilité. Les faux miracles peuvent faire juger les miracles réputés vrais, s’ils ne les font pas évanouir ; ils leur donnent un nouvel éclat. Ainsi en Piémont où la liberté théâtrale est portée très-loin, on voit, dans les spectacles publics, des physiciens qui imitent parfaitement le miracle de la liquéfaction du sang de saint Janvier et celui de la Vierge de Ritnini qui

tourne les yeux..... Aussi Naples et Rimini attirent plus

de pèlerins que jamais.

Tous mémoires envoyés à la rédaction du journul, pour y être reçus, ont besoin d’être affranchis et devront être adressas directement à M. le baron du Potet, ainsi que tout renouvellement et envol de mandat.

Les Abonnés sont invités à renouveler au plus tôt leur abonnement, ■’ils ne veulent éprouver du retard dans l'envoi du Journal. Nous voulon» éviter des irrégularités d'écriture et dos réclamation».

OOKWjmCATXOW.

Baron do POTET, proprie(oirè-g,rap(.

TABLE

ANALYTIQUE

DES MATIÈRES DU TOME DIX-SEPTIÈME.

INSTITUTIONS.

Commission nommée pour faire une enquête sur les phénomènes spiritualités, par M. Morin. 658

Dispensaire magnéto-thérapique de Toulouse. Compte-rendu des cures obtenues par M. le docteur Bégué, directeur de cet établissement, 85, 212.

Fête de Mesmer : 124e « anniversaire, 13e célébration à Pari». Discours et toasts de MM du Potel, Morin, Petit d'Ormoy, Clever do Maldigny, Paul Anguez Pièces de vers de Mme Jobey de Ligny, MM. Baï-haut, Ordinaire, Clever de Maldi-gny, Jobard. Distribution de médailles décernées par le jury magnétique. 253 à 298.

Jury magnétique d’encouragement et

de récompense. Médailles décernées à divers magnétistes, 298.

Jury spirilualiste. La Revue spiritualiste, de Paris, propose la création d'un jury central, qui aurait pour mission d'établir les véritables lois du spiritualisme. Critique de ce projet, par M. Morin, 550.

Société du Mesmérime, de Paris. Coup-d'œil sur les services rendus par cette Société, sur les causes de sa dissolution, sur sos nouvelles bases de reconstitution, et réflexions concernant les abus qui ont amené l'autorité à interdire les séances publiques; par M. Morin, 299. — Séance de réouverture et nomination des dignitaires, 335.

CLINIQUE.

CAS DE MÉDECINE. — Maux guéris ou soulagés.

Affection de la moelle épinière, 229. Amaurose, 230, 232.

Aménorrhée, 85, 227.

Anémie, 216.

Anévrisme épigastrique, 231.

Asthme chronique ou périodique, 87, 231.

Bronchite, 605.

Calculs vésicaux, 475.

Catalepsie, 459.

Coliques violentes, 175.

Congestion sanguine, 228.

Consomption, 237.

Constipation, 227.

Contractions musculaires, 86, 343, 630.

Convulsions périodiques et autres, 82, 228, 459, 630.

Crispations nerveuses, 26.

Dartre teigneuse à la jambe, 212. Désordres nerveux, 337.

Douleurs articulaires, 83.

— hémorroïdales, 568.

— rhumatismale, 175.

Dyspepsie, 538.

Engorgement inguinal, 569.

Entorse, 132.

Epilepsie, 227, 458.

Expulsion de calculs vésicaux, 475.

— de vers et de reptiles logés dans l'estomac, 82, 173, 482, 510.

Fièvre bilieuse et autres, 538, 601.

— typhoïde, 231, 537.

Gastralgie chronique, 86.

Goutte sciatiquc, 354.

Hernie, 229.

Inflammation cérébrale, 237.

— pulmonaire, 119, 258.

Lumbago, 86.

Maladie de foie, 538, 605-

Maux de tête, migraines, 132, 175, 343.

Névralgies, 85, 227, 539.

Obsession, 343.

Paralysie, 175, 227, 229, 231, 233, 343.

Perversion du système nerveux, 233.

Pleurésie aiguë, 87.

Pneumonie, 605.

Rétention d'urine, 215.

Rhumatismes goutteux et autres, 226, 229, 610.

Sciatique, 566, 629.

Suppression de menstrues, 85, 227. Surdité, 227, 232.

Tœnia, ou ver solitaire, 482.

Toux spasmodique, 150.

Ulcères à la bouche, 343.

Vers intestinaux, 82. 510.

ÉTUDES ET THÉORIES.

Anesthésiants (des), chloroforme magnétisme, par M. Bernard, 653.

Causeries magnétiques. Vues philosophiques de M. du Potet, sur l’essence du magnétisme, ses vicissitudes, son avenir, etc., 121, 421, 466, 479, 505, 553, 561, 589, 617.

Clergé (le) et le magnétisme. Opinion de divers prêtres en faveur du magnétisme, 426, 450.

Définition et avenir du magnétisme, dictés par l’esprit de Mesmer à Mlle Ermance Dufaux, médium,

159.

Démonomanie. De sa pratique dans les siècles passés. Recherches historiques par MM. Piérart, 3, 29;

— Lamothe, 309.

Déplacement présumé de l’âme, dans la vision somnambulique, 42. — Opinion contraire, 385.

Electro-magnétisme. Analogie entre

le fluide vital et les autres agents impondérables, et possibilité d'appliquer cette donnée au classement des individus, quant à leur degré de conductibilité des forces magnétiques. Etude par M. Ram-bosson, 197.— Aualogie entre l’électricité et l'agent nerveux ; d'où la conséquence que lo magnétisme peut s'expliquer scientifiquement. Etude par M. Grirnaud de Caux, 365. — Coup d'œil sur lo mémo sujet, par M. l'abbé Caupert, 451.

Fluide magnétique. Ses analogies avec les autres agents impondérables, 197, 365, 451; —sou essence et scs propriétés, 505, 533.

Hippornagnélismo. Moyensde dompter les chevaux fougueux, 221 , 643.

Lucidité somnambulique. Opinions sur sa cause et son mode d'action,

par M. Berruyer, 47, 124 ; — sur sa valeur comme lumière thérapeutique, par M. le docteur Char-pignon, 75.

Magisme. Ses différentes branches, 193.

Magnétisation. Du double principe physique et moral présidant aux actes magnétiques, 170, 390.

Magnétisme ou électrisation humaine. Sa nature, ses effets, et causes générales et particulières des phénomènes physiques et psychologiques qui en découlent. Dissertation par M. l’abbé Caupert, 426, 449.

Médecine (la) et le magnétisme. Considérations sur leur valeur comparative et sur la nécessité de leur alliance, par le M. docteur Char-pignon, 73, 207. — Réponse par M. du Potet, 225, 393.

Médecine (la) légale ot le magnétisme. Une femme endormie du sommeil magnétique peut-elle être violée à son Insu ? Rapport affirmatif sur cette question , par MM. les docteurs Coste et Bro-quier, suivi de l'avis de M. le docteur Devergie, et de réflexions de M. du Potet, 375.

Métaphysique. De l'essence unique, ou cause première de la vie à tous scs degrés, dans l'ordre physique et spirituel. Dissertation par M. le docteur Clover de Maldigny, 283.

Od (de l'), ou principe invisible de toute force, démontré par la sensitivité organique de certaines personnes. Indications de M. le baron de Reichenbach, commen-mentées par M. Petit d’Ormoy, 621

Physiologie. Voy. Eletro-magné-tisme.

Psychologie. De l'âme et de son union avec la matière, pur MM. Berruyer, 47; — E. M-, 178. — Des relations et influences réciproques du physique et du moral, par M. le docteur Brierre de Bois-mont, 517.

Religion (la) et le magnétisme. De leurs rapports et du bien qui pourra résulter de leur alliance, par M. le docteur Charpignon, 241. Science (la) médicale. Avec scs sys-tèmes divergents et l'incertitude des rapports entre les remèdes et les maladies, la médécine est loin d’être une science positive. Extrait d'un ouvrage intitulé : Essai de médecine pratique. 393. i

Somnambules (des) et médiums, en ce qui concerne le don de guérir les maladies. Opinions de MM. Mo-rin, 82; — Berruyer, 123. Somnambulisme (du) magnétique. Théories diverses : sur la causo et le mode d'action de la lucidité somnamibulique , et principalement de la vue à distance, par M.Berruyer, 42, 124;—sur l’usage thérapeutique du somnambu-lisme, par M. le docteur Charpi-

gnon, 73 ; — sur la vue du passé, par M. Morin, 30; —sur l'instinct médical des somnambules, par M. Ch. I.évèque, 304.— Conjec-tures en faveur de la vue som-nambulique, tirées de certains phénomènes d’acoustique et de lumière, par Arago, 577.

Spiritualisme. Vues diverses sur l'essence et la réalité des communications dites spirituelles, par MM. Girard de Caudemberg, 91 ;

— Morin, 96, 164, 330 ; — baron de Guldenstubbé, 134;—Lamothe, 137, 314; — Allain Kardec, 163,

— Berruyer, 186 ; —docteur Cle-ver de Maldigny, 283; —Emile Bertrand, 329; — Baïhaut , 385 ; Paul Auguez. 524. — Réflexions philosophiques sur le même sujet, par M. du Potet, 217, 235.

Vue à distance. Son mode d'action, 42, 385; sa possibilité, par analogie avec certains phénomènes d'acoustique et de lumière, 577.

Vue du passé, expliquée par des expériences de photographie, 130.

Zoomagnétisme. Voy. Hippomagné-tisme.

CONTROVERSES

Débats divers : sur le magnétisme et le somnambulisme, entre ma— gnétistes, 42, 73, 207, 225, 241, 395, 59 ; — entre savants et magnétises, 359, 399, 524, 572 —Sur le spiritualisme, à l'égard des manifestations dites spirituelles, 82. 90, 103, 125, 137, 162, 186, 309, 329, 385, 520, 524, 550.

Démonomanie. Plaidoyer pour Bo-din, l'auteur du livre de la Démonomanie, contre MM. Baudrillart et Oscar de Vallée, par M. Lamo-the, 309.

Magnétisme (le) et le spiritualisme. Divergences d'opinions entre ma-gnélistes et spiritualités sur la cause des phénomènes attribués par ces derniers à l'action d'êtres extra-humains, 82, 90, 103, 123, 137, 162, 186, 309, 320, 385, 520, 524, 550.

Médiums et somnambules. M. Morin pense que certains médiums auxquels on attribue des guéri -

sons dites spirituelles, c'est-à-dire dues à l'intervention des esprits, sont tout simplement des somnambules doués de l'intuition médi-

' cale, 82. — Opinion contraire do M. Berrnyer, 123.

Procès du magnétisme. Lances rompues contre M. Mabru, ce grand pourfendeur du magnétisme et des magnétiseurs, par MM. Ordinaire, 275 ; — Morin, 339; — du Polet, 399 ; — Paul Anguez, 524; — Ed. Fournier, 572.

Spiritualisme. Argumentation de M. Morin sur le peu de fondement d'une intervention extra-humaine dans les phénomènes réputés spirituels, tels que mouvement des tables, écriture involontaire, etc., 90. — Observations contraires de M. Berruyer, 186.

Valeur (de la) du magnétisme et de ses rapports avec la médecine et la religion. M. le docteur Charpi-gnon, s’adressant à M. du Potet,

cherche à montrer que le magnétisme n'est point appelé à remplacer la médecine, ni à modifier la religion, mais à servir de complément à l'une et d'auxiliaire à l'autre, 75, 207, 241. — M. du Potet répond à la première partie de celle argumentation en renvoyant, d'une

put, aux cures de toute sorte accomplies par le magnétisme, et, de l’autre, aux fréquents insuccès des divers systèmes de médecine, ainsi

qu'aux dangers qui accompagnent l’emploi des médicaments, 225, 393.

Vue somnambulique. Le somnambule voit-il à distance, ou son âme se déplace-t-elle? Affirmation de celle dernière hypothèse et faits

à l’appui, par M. Berruyer, contrairement à l'opinion exprimée par M. Morin (pages 76 et 533 du lome XVI), 42.

FAITE ET EXPÉRIENCES.

Accidents arrivés dans l’état léthargique, 82, 581 cataleptique, 127 ; —épileptique, 133; — noc-tambulique, 132, 404; — causés par la foudre, 555.

Animaux magnétisés, 113, 141, 160. Annonces de mort par des esprits,

156, 446, 491, 579.

Apparitions de la sainte Vierge,

157, 496;—d’esprits, 10, 191. 219, 409, 444, 494, 559: — de mains, 68; — de lumières, 63 , 347 , 493.

Apport d'objets par des esprits, 70, 319, 521.

Attraction d'outre-tombe, 219. Catalepsie causée par l’effroi, 127;

— magnétique, 234, 460. Clairvoyance ou lucidité somnam-

bulique, 81, 116. 120, 150, 171, 173, 215, 220, 286, 296, 538, 403, 182, 515, 510, 516, 570, 599, 601. Contact de personnes avec des esprits, 64, 191, 346, 537.

Coups et autres bruits mystérieux attribués à des esprits, 10, 58, 66, 107, 146, 156, 182, 319, 316, 441, 494, 579.

Dictée des esprits, 147, 159, 354. Ecriture directe des esprits, 69, 135, 147, 349.

Electricité humaine. Jeune fille attirant involontairement à elle et sur elle des projectiles de toute sorte,

146.

Electrophore. Appareil et expériences de Schaeffer, 435.

Esprits qui font entendre des bruits, des cris, etc., 10, 58, 66, 107, 146, 156, 182, 319, 346, 441, 494, 579;

— qui apparaissent, 10, 191, 219, 409, 444, 494, 559 : — qui parlent ou murmurent des chants reli-

gieux, 10, 415, 493 ; - qui éteignent et rallument des lumières ou en font apparaître, 15, 63, 68, 319, 347, 493;—qui déplacent, enlèvent et transportent des meubles, des personnes, etc., 13, 59, 63, 67, 107, 147, 182, 191, 325, 351, 355, 494; — qui soustraient des objets, 60, 63, 70, 107, 183, 351, 355;—qui jouent de divers instruments et accompagnent la voix humaine, 60, 64, 191; — qui agitent dos sonnettes, 60, 346, 552, 520 ; — qui se mettent en contact avec des personnes, 64, 191, 346, 557 ;— qui font apparaître des mains, 68; — qui impriment des stigmates, 71; —qui donnent des consultations médicales, prescrivent des remèdes et guérissant des malades, 82, 259, 475, 537; — qui écrivent directement, 69, 135, 147 , 349: — qui dictent à des médiums, 147, 159, 354; — qui font des annonces de mort, 156, 446, 491, 579;—qui donnent des leçons de morale et de religion, 184, 356;

— qui apportent ou lancent dos objets matériels, 70, 319, 521 ; — qui transmuent les métaux. 380.

Extase magnétique, 81, 308 ; — religieuse, 501.

Fascination d'animaux par d’autres,

160.

Guérison miraculeuse attribuée à la sainte Vierge, 500.

Hallucination (fait d'), 161.

Imagination (pouvoir de l’), 642.

Interprétation de songes, 154.

Intuition médicale, 146, 150, 173, 213, 539,482, 540, 602.

Lucidité. ov. Clairvoyance.

Lumières éteintes, rallumées ou créées par des esprits, 13, 63, 68, 319, 347, 493.

Magnétisme expérimental. Expérien-

ces de magnétisme et de somnambulisme pratiquées ou rapportées par MM. : Sarrade, 26 — docteur Tweedle, 78; —Guidi, 80;— Manlius Salles, 170, 513; —Henry d'Audigier, 220. 546; — docteur Clever de Maldigny, 286;—Mar-Cillet, 296 ; —Ed. Fournier. 308;

— Jhotil, 342;—Morin, 515, 571 ;

— Divers, 592.

Magnétisme mystique. Cures pro-duiles au moyen de la prière, 438.

Magnétisme thérapeutique. Traitements opérés ou rapportés par MM. : docteur Begué, 85, 212; — Guidi, 132 ; — docteur Vandoni, 149.—Brunet de Ballans, 226; — Jobard, 357 ; — docteur Zambian-chi, 458;—Manger, 481;—docteur Beck. 484, 508; — docteur Gatti, 566, 629; — Manlius Salles, 568; —Ashburner, 605; — divers, 174, 539, 601

Malad’ies guéries par des esprits, 82, 239, 475, 537.

Manifestations spirituelles, rails rapportés par MM. : Piérart, 3, 29 ;

— docteur X..., 57 ; - baron de Guldenslubbé, 135:-Morin, 82, 447, 520; — Lamothe, 106, 315;— Burlololto, 184. 345 ; - Vickery, 237;—Péters. 380;—baron Morte-mart-Boisse, 409;—Fréd. Thomas, 441 ;—H. d'Audigier, 444;—docteur Bégué, 493; — Harriet Vin-cent, 537;—Weisse, 579;—divers,

147, 156, 182, 191, 494.

Médiums guérisseurs, 82, 173, 237, 438, 475, 484, 508, 538, 570.

Morale religieuse des esprits, 184, 356.

Musique des esprits, 60, 64, 181.

Obsession magnétique, ou prétendue telle. 177.—Réflexions, par M. du Potet, 246.

Phénomènes spirilualisles. La clef du docteur Uly, par M. Morin. 665.

Phytomagnétisation ou transmission du magnétisme par des plantes, 26.

Possession. Faits historiques rappelés par MM. : Piérart, 3, 29 ; — Lamothe, 103.

Prévision en somnambulisme, 116, 146, 150, 171, 488, 540, 516, 619

Rêves accompagnés ou suivis de réalisation, 154, 606.

Somnambulisme magnétique. Faits de : lucidité, 81, 116, 120. 130, 171, 173, 213, 220. 286, 296, 338,

403, 482, 540, 546, 570, 599. 601; —extase, 81, 308;—vue à distance et à travers les corps opaques, 117, 120, 220, 296 , 403, 515, 599; — prévision, 116, 146, 150, 171, 488, 540, 546: — indication de trésors cachés, 119, 146 , 223, 403, 542;

— intuition médicale, 146, 150, 173, 213, 339, 482, 540, 602.

Somnambulisme naturel. Faits, 132,

404, 558.

Sonnettes agitées par les esprits, 60, 346, 352, 520.

Soulèvement et transport de per-sonnnes et d’objets par les mêmes, 13, 59, 63, 67. 107, 147, 182, 191, 325, 351, 335, 494.

Soustraction d’objets par les mêmes, 60, 63, 70, 107, 183, 351, 355.

Stigmates imprimés par les mêmes, 71.

Transmutation de métaux par les mêmes, 380.

Trésors cachés et mines d’or, indi-’ qués par des somnambules, 119,

146, 223, 403, 512.

Vérification scientifique du magnétisme, à Boston, par une commission de médecins et de savants, 56.

Visions fantastiques, 29, 316, 444, 611.

Voix des esprits, 10, 415, 493.

Vue à distance et à travers les corps opaques, 117, 120, 220, 296, 403, 515, 599.

VARIÉTÉS.

Anecdotes, 116, 118. 127, 154, 156,

161, 192, 219, 401, 409, 451, 503, 546, 581, 614, 633, 642. Dompteurs (les) de chevaux : Sullivan, 113 Rarey, 141 ¡—divers, 221, 643.

Faiblesses d’esprit de quelques grands hommes, 633.

Histoires de revenants, 409, 441, 494, 559.

Magnétisme (le) et le somnambulisme dans l'histoire. Affaire curieuse des

possédées de CouviErs, par M. Pié-rart, 3, 29. — Urbain Grandier, par M. Alexandre Dumas, avec commentaires, par M. Lamothe, 103.

Magnétisme (le) en Ecosse. 78;—en Italie, 80, 149, 458, 565, 629 ; — en Autriche, 608 ; — en Belgique, 226 337; — au Brésil, 342;— aux Etats-Unis, 592, 604.

Médiums, visionnaires, guérisseurs, etc. Détails sur Home. 14, 89,

147, 160, 190, 417, 579;— Willis, 57 ; — Marguerite Fox , 523: — Wolkstager, 154; — Bernardette Savi, 157, 496 ;—divers, 159,173,

182, 237, 405, 484, 490, 508, 570.

Monuments mesmériens. Tombeau de Mesmer, dessin par M. Cha-lain 185. — Proposition , par M. Dupuis-Detcourt, d'élever une statue à Mesmer, 295.

Nécrologie. Mort des magnétistes et spiritualités. docteur Williams Gregory, 391 ; — docteur Robert Hare, 448.

Nègre (le) pâle, ou une pythonisse fourvoyée, 614.

Plaisanteries à l'adresse des négateurs du magnétisme, 259, 273.

Poésies diverses, par MM. : Jobard, 54, 279 ; — Baïhaut, 271 ; — Ordi-naire, 273;—Clever de Maldigny,

277 Roch, 643;—Mme Jobey de Ligny, 208.

Prise de bec des journaux de médecine entre eux, 335.

Prodiges (les) de la rue du Bac, 520.

Prophétie de John Wright, .405.

Récits de faits étranges, mystérieux ou merveilleux, 3, 29, 57, 107 156, 185, 191, 219, 315, 345, 401 409, 441, 488, 494, 520, 611. mscn (le) du magnétisme, ou le

Son acteur autrichien Fiedberg, 608. rcellerie. Scènes de sabbat et autres, 25, 315, 321, 611.

Spiritualisme (le) en Franco, 3, 29, 90, 123 134, 156, 162, 186, 283 309, 329, 409, 441, 487. 520, 524; 550;—en Amérique, 57, 82 173

183. 219, 257, 345, 380, 537; _ en Russie, 154, 579; —en Bavière 557 ;—en Suède, 611.

Tribunaux. Plainte eu adultère por-tèe par un mari contre sa femme, à l'occasion du magnétisme, 128. —Accusation de viol sur une jeune fille endormie du sommeil magnétique, 375. — Acquittement de MM. Robert, magnétiseur, et Cha-ravet, somnambule, prévenus d'avoir fait métier de deviner et pro-nostiquer. Plaidoyer de Me La-chaud , leur défenseur , et ré-flexions approbatives de M. Morin, 471. ’

BIBLIOGRAPHIE

Art (l') de magnétiser ou de se guérir mutuellement, par Gérard,, cent-garde. Appréciation par M. Morin, 587.

Bodin et son temps, par M. Baudril-hart. — Détails biographiques sur Bodin, par M. Oscar de Vallée. Examen et réfutation de ces doux écrits, par M. Lamothe, 309.

Fin (la) des mystères, par Emile Bertrand.— Livre intime des familles, par le même.—Triumphans uni-tas, par le méme. Analyse et examen, par M. Morin, 529.

Lucie, épisodev historique à Syracuse, sous le règne de Dioctétien, par René Dumesnil de Maricourt. Analyse et réflexions, par M. Morin, 581.

Magisme (le). Grande initiation, par le docteur Salah-ben-Abdallah.

Compte-rendu et commentaires drôlatique, par M. Morin, 193.

Manuel historique, élémentaire et pratique de magnétisme animal, par E. Berjot ; suivi d’une Dissertation sur le fluide magnétique animal, par A. Bauche. Examen et appréciation, par M. Morin, 248.

Médecine (la) dans ses rapports avec la religion, ou réfutation du matérialisme théorique et pratique, par le docteur Vitteaut. Examen des idées de l’auteur, en ce qui concerne le magnétiame et le ta-bulisme, par M. Baïhaut, 383.

Mesmérisme (le), le spiritualisme, la sorcellerie et les miracles Brève dissertation ou il est prouvé que le mesmérisme est la clef qui ouvre plusieurs chambres de mys-

tère, par Allen Putnam. Simple mention, 219.

Monde (le) spirituel , ou science chrétienne de communiquer intimement avec les puissances célestes et les âmes heureuses, par Girard de Caudemberg. Examen et discussion, par M. Morin, 90.

Noms (les) de baptême et les prénoms , par Édouard-Léon ScoTT. Appréciation, par M. Morin, 532.

Pneumatologie positive et expérimentale. La réalité des esprits et le phénomène merveilleux de leur écriture directe, par le baron L. de Guldenstubbé. Analyse et citations, par M. Lamothe, 134.

Revue spirite, Journal d'études psychologiques. Vues de ce journal et critique philosophique, par M. Morin, 162.

Somnambulisme (le) devant la Sor-

bonne. Dissertation insérée dam la Revue des Deux-Mondes, par M. Ch. Lévèque. Analyse et exa-men, par M. Morin, 304.

Spiritualisme. Faits curieux, précédés d une lettre à M. Mabru, par M. Paul Auguez. Examen critique, par M. Morin, 529.

Traité pratique de magnétisme humain, par Ferdinand Rouget. Extraits et discussion, par M. Morin, 529.

Urbain Grandier, par Alexandre Dumas père. Réfutation, par M. La-mothe, 105.

Vérité (la) du magnétisme animal, et l'utilité de la médecine magnétique et somnambulique, par M. Guidi. Mention et recommandation de cet opuscule aux amis du magnétisme, 391.

LISTE NOMINATIVE

DES PERSONNES DONT LES ÉCRITS, LES ACTES OU LES OPINIONS

soni insérés, analysés, cités, rapportés, commentés on réfutés dans ce volume.

Alexandre Dumas père, 103, 580. Alexis Didier, 146, 296.

Allait Kardec, 162, 550.

Allen Putnam, 219.

Ampère, 518.

Arago, 571, 577.

Ashburner. 604.

Audigier (Henry d'), 119, 220, 403, 447, 548. 616.

Auguez (Paul), 266, 524.

Babinet, 359.

Baïhaut, 271, 390.

Barreau, 451.

Barthet, 69, 140, 483.

Bastié, 86.

Bauche, 248.

Baudrillart, 509.

Bazin, 104.

Beals, 593.

Beck (docteur), 486, 513.

Bégué (docteur), 88, 212, 493. Belzoni (Mme) 579.

Bernard, 653.

Berjot, 248, 238.

Berruyer, 54, 126, 190.

Bertolotto, 184, 358.

Bertrand (Émile), 329.

Beugnot (comte), 488, 634.

Billot (docteur), 169.

Bly (V.-M.), 665.

Bock (docteur), 297.

Bodin, 309.

Bonnet (docteur), 384.

Brierre de Boismont (docteur), 517. Broquier (docteur). 378.

Broussais (docteur), 397.

Brunet de Ballans, 256, 298.

Brush (Anna), 239.

Bunel, 488.

Burdin (docteur), 274, 363, 590. Cahagnet, 105, 138,318.

Cuntagrel, 340.

Capern, 592.

Castères, 87.

Catlin, 114.

Caupert (abbé), 426.

Chalain, 185.

Chapin, 66.

Charavet, 308, 471.

Charpignon (docteur), 77, 207, 225, 341, 393.

Chesneraye (de la), 277.

Chopin, 238.

Clever de Maldigny (docteur), 265. 283.

Cogswell (miss), 71.

Collyer (docteur), 592.

Colvin (Mme), 82.

Constant Petit, 229.

Coste (docteur), 378.

Crocker, 114.

Cuvier, 367.

Delaux, 86.

Devergie (docteur), 378.

Dominique, 570.

Ducros( Alexandre), 570.

Dufaux (Hermance), 159.

Dumesnil de Maricourt, 581.

Du Potet (baron), 56, 89, 116, 122, 128, 140, 160, 178, 185, 218, 225, 236, 247, 252, 253, 282, 318, 379, 393, 400, 419, 425, 471, 480, 484, 508, 519, 536, 550, 561, 565, 591, 607, 613, 620, 633. Dupuis-Delcourt. 295.

Ellis, 115.

Esterhazy (princesse), 229.

Estève (Marie), 85.

Eustis, 60.

Ewers, 529.

Fellows (docteur), 237. Ferruk-Khan, 141.

Flourens, 274, 365.

Fontaine (Emile), 155,

Fournier (Edouard), 308, 578.

Fox (Marguerite), 523.

Friedberg (docteur), 608.

Gannet, 593.

Gasparin (de), 91.

Gatti (docteur), 567, 632.

Geneffe (de), 233.

Georget (docteur), 576.

Gérard, 587.

Ghika (prince), 560.

Girard de Gaudemberg, 90, 187. Goossens (Gustave), 649. Gortschakoff (prince), 154.

Gourdet (Stanislas), 500.

Gousset (Mgr), 450.

Gregerson (docteur). 597.

Gregory (docteur), 391.

Grev (docleur), 69.

Grimaud de Caux, 374.

Grimes (docteur), 508.

Gross (docteur), 485.

Gruyère, 154.

Guibert de Clelles, 73.

Guidi, 80, 132, 391.

Guidon (docteur), 515.

Guillois (abbé), 450.

Guldenstubbé (baron de), 134,147. Hare (docteur), 66, 380, 449. Harriet Vincent, 539.

Harris (d') Van-der-Broeck, 226. Horris (miss), 495.

Heurteloup (baron de).

Higgisson, 65.

Hochstaedler (docteur), 228.

Home, 14, 89, 147, 160, 190, 417, 579.

Huart (Marie), 146.

Huddleston, 83.

Husson (docteur), 376.

Jackson, 82.

Jean Raynaud, 138.

Johnson (Elie), 173.

Jobard, 55, 279, 341.

Jobey de Ligny (Mme), 267. Jourdan, 147.

Journés (Mme), 85.

Kalhammer (Mary), 558.

Kolz (Pierre), 344.

Kurz (Mlle), 566, 627.

Lachaud, 471.

Lamarlière (général), 488.

Lamothe, 42, 112,139, 329, 416, 492. Lane, 529, 596.

La Tour-du-Pin (vicomte de), 410. Lévèque, 304.

Lombard (Mme), 238.

Long (Mme), 238.

Louise (Mlle), 81.

Mabru, 275, 292, 359, 399, 524, 572. Mac-Scheehy (colonel), 557. Madrolle, 331.

Maillen (marquis de), 231. Mandement (Mme), 85.

Manlius Salles, 172, 513, 568. Marceau (général), 558.

Marcillet, 296.

Massy (baron), 498.

Mathieu, 146.

Matteucci, 368.

Mauger, 483.

Maupied (abbé), 450.

Maury (Alfred). 320.

Mayhew (docteur), 72.

Mesmer (docteur), 159, 185, 294, 573. Milet, 513.

Mirville (marquis de), 137, 326. Moller (M. et Mme), 230.

Mongruel (Mme), 221.

Moreaa-Sainti, 14.

Morin, 84, 103, 131, 132, 148, 168, 187, 196, 251, 259, 303, 307, 333, 364, 382, 408, 418, 448, 474, 516, 523, 532, 555, 572, 580, 588, 601, 658, 665.

Mortemart-Boisse (baron de), 409. Mure (docteur), 193.

Nicolardot, 633.

Niepce de Saint-Victor, 130.

Nogent Saint-Laurens, 266.

Obeikirk (baronne d’), 640.

Olivier, 529.

Ordinaire (docteur), 272.

Oriani (Agathe), 149.

Oscar de Vallée, 511.

Park, 495, 597.

Paul d'Yvoy, 275, 417, 610. Petit d'Ormoy, 262, 629. Pettorelli (comte), 298. Piérart, 25, 41, 140.

Pigeairo (docteur), 590. Pinney, 70, 173.

Ploeq (docteur de), 228. Preston, 71.

Prosper (Mme) 298.

Quétel (Mme), 128.

Rambosson, 206.

Rarey, 141.

Red, 173.

Reichenbach (de), 623.

Résie (comte de), 323. Roberaud, 170.

Robert, 308, 471.

Roch, 644.

Rouget, 529.

Rutter, 604.

Salah-ben-Abdallah, 193. Sangé, 212.

Sarrade, 28.

Savy (Bernardette), 157, 496. Schaeffer, 435.

Scott, 532.

Siémeling, 279, 298.

Sloan (docteur), 67.

Sella (Mme), 132. stedman (docteur), 593. Stone, 596.

Storer (docteur), 596. Stowe, 593.

Sullivan, 113.

Tassier, 232.

Taxier, 231.

Thiébault, 634.

Thomas (Frédéric), 443. Thompson, 605.

Tipple (Mme), 484, 508. Tonin, 539.

Turnbull, 595.

Tweedle (docteur), 78.

Van Crickinge (Mme), 232. Vandoni (docteur), 153. Vespignani (comte), 461. Vickery, 240.

Viennet, 274.

Vitteaut (docteur), 383. Warren Chase, 511. Weisse, 579..

Willem, 227.

Willis, 57.

Wolkstager, 154. Woodman, 68.

Wrigth (John), 405. Yeadon, 66.

Zambianchi (docteur), 458.

FIS DU DIX-SEPTIÈME VOLUME.