(1849) Journal du magnétisme [Tome VIII]
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(1849) Journal du magnétisme [Tome VIII]

1849

JOURNAL

DU

MAGNÉTISME

RÉDIGÉ PAR

UNE SOCIÉTÉ DE MAGNÉTISEURS ET DE MÉDECINS

SOUS LA DIRECTION

DE M. DU POTET DE SENNEVOY.

La vérité, n’importe par quelle bouche; ^ le bien, n’importe par quelles mains.

TOME VIII.

PARIS.

BUREAUX ; RUE NEUVE-DES-PETITS-CHAMPS, 20.

1849.

JOURNAL

DU

MAGNETISME.

MANUSCRITS DE MESMER,,,

Mesmer n’était pas seulement un grand médecin ; ayant accumulé dans son cerveau presque toutes les connaissances de son siècle, il exerçait sa pensée sur tous les sujets. Doué de facaltés perceptives et réflectives très-étendues , nous le voyons tour à tour savant, moraliste, philosophe, politique, financier, administrateur, etc.; et, en tout, il était pour le progrès. Il ne lui manque que d’avoir fait la guerre, pour nous apparaître comme les grands personnages de l’antiquité, dont les nombreux talents réunis excitent autant notre étonnement que notre admiration. Son savoir dans les langues n’était pas moins grand que dans les sciences ; ainsi il n’a presque pas écrit en allemand, sa langue maternelle : à Paris, il s’adresse en français aux corps savants et au public; à Londres, il parle en latin TOME Vin. — N" Si. — 10 JANVIER 1

au collège dos chirurgiens. Il nous a paru intéressant, sous ce rapport, de conserver les fautes d’orthographe et de tournure qui se trouvent dans ce manuscrit. 11 devait être publié avec le dernier chapitre de celui que nous avons précédemment édité, dont il n’est effectivement que l’appendice; mais ni l’un ni l’autre n’ont vu le jour ; ce qui fut l’auteur un chagrin profond. 11 est intitulé :

Reflexions sur la chereté des Denrées et Marchandises.

Deux causes générales produisent la cherté des denrées : i° la rareté absolue des denrées ; 2° le défaut de leur circulation. 11 ne peut pas être remédié à la première qu’en multipliant les productions. Quant k la seconde, on observe que la circulation des denrées suppose qu’il existe une sorte d’équilibre entre la valeur estimative des denrées et le signe représentative de cette même valeur; de sorte qu’à mesure que la valeur du signe représentative est diminué, le prix des denrées sera augmenté.

Ce n’est pas tant la grande masse des assignats qui est la cause du défaut de la circulation, et par-conséquent de l’augmentation du prix des denrées et des marchandises, que leur dépréciation ou la diminution de leur valeur estimative, par le discrédit ou ils furent jeltés par la malveillance, la crainte et l’agiotage; les proportions entre leur valeur estimative et celle des denrées ayant changée , on est plus intéressé de posséder des denrées que des assignats : il en résulte l’accaparement, nouvelle cause de la cherté.

Ce qui, d’ailleurs, a achevé à discréditer les

assignats, en fut, qu’abandonnés depuis quelque teins au caprice des usuriers , n’ayant qu’une valeur vague et incertaine, ils ont cessé d’être le signe d’une valeur effective et positive. L’opinion publique ne considère plus aujourd'hui dans les assignats la représentation de l’hypothèque pour lequel ils ont été créés.

L’idée directe de la valeur des assignats, que les citoyens pressés par le besoins y attachent, n’est plus celle de la valeur des denrées ou de leur hypothèque , mais seulement celle de la mince somme d’argent que l’usure veut bien leur accorder.

Tandis que les assignats ne représentent effectivement que le quart ou bien le sixième de leur valeur en argent, il fest inévitable que le prix des denrées et des marchandises n’augmentent en proportion de trois quart ou de un sixième. Ce qui doit arriver quelque soit la masse des assignats. C’fest donc à la non valeur du papier monnoie qu’il faut attribuer la cause de la cherté des denrées et marchandises.

Comme, dans l’état actuel des choses, il est impossible que les assignats puissent se relever au taux de leur création, il est d’une nécessité très-urgente, en bornant l’agiotage, d’en fixer une valeur moyenne, mais qui fût positive et invariable, et que cette valeur représente directement et imé-diatement l’argent pouvant ètrê Converti en argent à volonté.

Il sera donc substitué aux assignats un autre pa-pier-monnoie républicain , dont les caractères et les propriétés produisent d’une manière infaillible les effets tout opposés à ceux des assignats.

En conséquence, on propose, i° qu’il soit dé-crélé sans délai l'établissement de la caisse d’escompte nationale, et le papier républicain, d’après le plan ci-dessus ( 1 ) ; 2" la trésorerie nationale oll’rira, à tous ceux qui voudront, d’échanger les assignats pour la moitié de leur valeur qu’ils portent, contre l’argent ou des billets des caisse à l’option. Celte moitié de perte sera un sacrifice fait à l’intérêt publique, bien inférieur à celui que chaque possesseur des assignats ne pourra éviter de faire tôt ou tard pour la cherté et l’agiotage ; 3° tous les assignats que les propriétaires ne voudront pas échanger conserveront leur pleine valeur, et serviront exclusivement pour l’achat des biens nationaux , de sorte que la République n’en acceptera ni or ni argent en payement jusqu’à leur entière extinction.

Et voici les moyens sûrs pour remédier le plus promptement à la cherté des denrées, et pour rétablir le commerce en faisant reparoître et circuler le numéraire, et en reprimant à jamais l’agiotage et l’usure, de rétablir le crédit des assignats.

L’intérêt des particuliers riches étant en concur-rance avec la caisse d’escompte, ils en feroient les fonctions , et ainsi remonter la valeur des assignats.

En conséquence de toutes ces considérations, on propose un projet de décret des finances relativement à la dette publique.

(I) Voyez tome VII, page 71.

PROJET DE DÉCRET DE FINANCES.

Le corpslégislatif(i), après avoir constaté et consolide la masse totale delà dette de la République, voulant la rendre le moins onéreuse possible pour l’fitat, et en même teins assurer aux créanciers de la République la liberté et la sûreté de leur propriété; et voulant en outre détruire à jamais l’abus de l’agiotage, faire reparoître et circuler le numéraire et raffermir enfin le crédit de la République, adopte le plus simple et le plus solide des moyens, qui consiste dans une sorte.de conversion successive et graduelle de la detite nationale, ou une sorte de représentation ou papier dont les caractères produiroient infailliblement les effets ci-énon-cés : 1“ La totalité de la dette publique seroit divisée et répandue sur tous les individus de la République; 20 chaque individu possédant too livres de numéraire métallique auroit un intérêt de devenir créancier de l’État, ce qu’il pourroit cesser de letre à volonté; 5° toutes les collocations, de quelque somme et à quelque terme que ce soit, se feroient en tout temps et en tout lieu sans aucune formalité et sans fraix ; 4" l’État peut acquitter les dépenses, se libérer presqu a l’instant des dettes les plus pressantes et le plus onéreuses; 5° réduire sans inconvénients, et à l’avantage des créanciers, les intérêts à 3 p. too; 6° réduire à une époque peu reculé la totalité de la dette sous une forme constante et invariable; 7° simplifier la comptabi-

(1) Il y avail primitivement : Convention nationale; ce qui précise l’époque à laquelle co Mémoire fut écrit. (Note de PÉditeur).

lité; 8° augmenter et diminuer la dette publique, selon les besoins de l’État sans la moindre secousse; 9° faciliter les amortissements des toutes les dettes de l’Élal à mesure qu’on ressentira les effets des réformes, méliorations, revenus et ventes; io° enfin intéresser les nations voisines à porter une partie de la dette , et à envoyer le numéraire vers la caisse nationale, et à établir par là des relations d’amitié et de commerce. En conséquence le corps législatif décrète ce qui suit :

ART. Ier.

II sera établie , pour cet effet, une caisse d’escompte nationale; la trésorerie nationale, ainsi que toutes les caisses ensemble des départements formeront la caisse d’escompte nationale.

ART. 2.

Il sera fait successivement une somme de........

des billets de la République remboursables dans quatre ans , portant un intérêt de 3 p. 100 par an ; les impositions, les produits des ventes et tous les biens nationaux seront spécialement destinés à leur remboursement.

ART. 3.

Ces billets seront escomptables à vue, moyennant i p. ioo d’escompte avant le terme de leur échéance au bénéfice de la caisse.

art. /,.

La trésorerie nationale sera autorisée d’échanger les billets de la caisse de la République contre une

partie des bons assignats, clans les circonstances actuelles pour la moitié de leur valeur qu’ils portent, ou de liquider les capitaux des particuliers qui le demandent.

ART. 5.

Les produits des ventes des biens nationaux seront exigés on bons assignats exclusivement, de manière que la République n’en recevra ni or ni argent en payement jusqua leur extinction.

art. 6.

Les impôts seront exigés en espèces ou en billets avec perte de i p. 100 d’escompte avant le terme de leur échéance.

ART. 7.

D’après l’observation du retour plus ou moins fréquent des billets vers la caisse, la quantité de numéraire pour leur escompte sera fixée tous les six mois.

ART. 8.

Cette opération sera ainsi continuée jusqu’à l’entière conversion en billets de la totalité de la dette de la République.

La pièce suivante est le dernier manuscrit inédit qui nous reste de Mesmer : c’est 1111 brouillon écrit sur une feuille volante, ayant rapport à ce qui pré-

cède, et paraissant l'ait au nom d’un autre. Il est ainsi conçu :

Projet d'un Avant-Propos ou d'une Adresse au Directoire ou à l’Assemblée législative.

Un étranger [homme] célèbre par ses découvertes utiles à l’humanité , qu’il apporta parmi nous il y a quelques années, a fait part aux [à quelques-uns des] membres de l’Assemblée constituante des projets relativement aux impositions et aux finances, tendants à fixer sur ces deux objets inséjiarables un mode juste, général et invariable, comme étant pris dans la nature de l’homme.

Quelques-unes de ces idées ont été adoptées ; mais comme les institutions puisées dans cette source ne souffrent [suportent] aucunes modifications arbitraires, l’exécution en est demeurée tele-ment imparfaite qu’on se sentira bientôt dans la nécessité de retomber dans l’incertitude de nouveaux essais hazardé, et peut-être ruineux.

Ces considérations m’ont engagé à reproduire de nouveaux et à mettre sous les yeux du gouvernement et du publique ces deux projets important, dans leur intégrité, pour en assurer l’application utile à la République françoise ; et particulièrement pour s’accomoder aux circonstances actuelles où elle se trouve, j’ai ajouté les plans et les mesures nécessaires [convenables] pour leur exécution la plus simple, la moins dispendieuse; qu’elle soit constante et uniforme dans toutes les parties de l’Empire françois.

VARIÉTÉS.

Le Mesmérisme au Théâtre. — Parmi les pièces qui touchent la question mesmérique, le Mirliton du Diable (aux l’olies-Dramatiques), s’élève à l’actualité de la science. Ce n’est plus seulement du somnambulisme travesti, comme dans Irène, etc., mais bien des phénomènes d’attraction, de répulsion , d’hallucination, etc. Voici :

Urbain montre la gavotte à Hélène de Gros-Bec , fiancée au chevalier Duriflard ; le mariage va se faire. Mais Urbain n’a qu’une ambition.....pour fortune; il a le cœur haut, pour son malheur : comment atteindre à Mlle de Gros-Bec!... D’ailleurs elle

n’aime que Mimi..... Si on était au temps des Fées,

il pourrait encore se fier à la prédiction du vieux berger normand, mais rien... plus que périr. C’était décidé , quand arrive un grand escogriffe tout habillé de noir, qui fait éternuer tout le monde avec la prise qu’il aspire à lui seul. (Double allusion à la sympathie, ou communication de sensation, et à l’augmentation de la puissance médicamenteuse). Dans cette main inconnue, le mirliton a la voix de Mimi : il attire Hélène, qui caresse la tête d’Urbain, croyant que c’est celle de son cliat. (Hallucination, aberration du toucher.) Elle reconnaît son erreur; l’amant trop précipité était perdu sans la main mystérieuse qui chauffe le cœur de la belle, (lniluence sur le développement des passions).

......Mais Duriflard? Le sorcier le somnambulise,

Y attire en mesmériste des plus échevelés, et lui fait prendre un pétrin pour le lit nuptial. Heureux pour longtemps peut-être, sans le seau du boulanger, qui vient confirmer le'dire du chirurgien de Calcutta : le froid éveille. Cependant voici le tabellion,

il n’y a plus qu’à signer..... Hélène! où est Hélène?

Elle a bu un verre d’eau magnétisée, et la voilà disparue en compagnie d’Urbain. (Invisibilité.) Les varlels Gros-Bec, Duriflard en tête, poursuivent les fuyards; le sorcier se défait de Durillard en l’enfermant dans un pot à moutarde, et se débarrasse, par des passes à grand courant,-des hôteliers, qu’il fait bâiller à donner envie.

Hélène se retire dans un pavillon; Urbain reste en compagnie de l’homme noir, qui lui demande salaire pour sa peine ; tout bonnement s’engager à montrer la gavotte dans quinze ans à M"° Satan jeune, nourri, chauffé.... gratis. 11 n’y a pas à hésiter, sans quoi Duriflard enlève Hélène. Urbain signe. Partons, dit le commissaire infernal. — Mais ce n’est que dans quinze ans! — Quinze ans d’éternité! tu es déjà en retard. Urbain veut fuir......

la main satanique s’est étendue vers lui : il est cloué au plancher. C’en était fait de lui.....; heureusement il saisit la robe de l’hcrmile , qui leur avait donné refuge contre l’orage, et voilà le diable, magnétisé à son tour, forcé de regagner son trou.

On casse le mirliton ; il contient la naissance d’Urbain et sa fortune; Duriflard n’est qu’un voleur, qu’on tire pourtant de la moutarde, et Urbain et Hélène se marient.

Ainsi, tout s’en mêle; le monde s’imprégne de

l'arôme par tous les pores, et le gardera éternellement :

Scmc] inibula recens servabil odorem lesta diu. (Ovide.)

Un jour je passais devant l’ÉcoIe-de-Médceipc, avec M. du l’otet : «Voyez-vous, me dit-il, celte vieille boutique; prenez sa science, tonte matérielle, il vous la faut, c’est la base de l’art. Une fois hors de ses portiques, montez plus haut que le cadavre, adressez-vous à la vie par la vie elle-même.......

Marchons, et la boutique croulera. C’est votre

lâche à vous, jeune génération que j’aurai élevée.....

Tenez ferme, car vous aurez de la peine____Je ne vivrai plus alors que la vérité triomphera largement.... ou plutôt je vivrai dans chacun des efforts de mes enfants, et dans chacune de leurs couronnes! » Mon maitrç ne se souvient plus de ces paroles , sans doute, la source ne compte pas toutes ses ondes, le printemps ne tient pas registre de toutes ses fleurs ; mais moi je les ai conservées dans le sanctuaire que Dieu m’a donné pour recueillir la richesse impérissable qui sort de la bouche des hommes de bien, et je les traduis au vent qui souffle pour nous, qui sème pour nous de toutes parts... Sur les tréteaux ou dans les temples, à la ville comme aux champs,

le bon grain ne saurait se perdre____Tenon^ ferme;

la machine s’ébranle : elle s’abîmera. L’école rétrograde se croit forte parce qu’elle a pour elle le passé ; mais on lui dira comme Sophocle : Le temps t’a enrichie d’anpées, mais il t’a vidé le cerveau :

Ko« a'inïùrflwtv xpi io;

r’epoM/uu TiOr.ii, jtai v t vw xsva».

E. V. LÉGER.

Revue des Journaux. — Le Delta, journal anglais de la Nouvelle-Orléans, du 7 décembre, reproduit un article de l'Union, de Saint-Louis (Missouri), du 29 novembre dernier, intitulé : Qu’est ceci? dont voici la traduction :

« M. Philip S. Lanham , parfaitement connu dans toute la ville, souffrait depuis plus d’un an d’une affection du rachis, et durant les cinq derniers mois il n’avait pas quitté le lit, ne pouvant se mouvoir. Avant hier au soir ses amis le placèrent sur lin lit portatif, et le transportèrent à l’infirmerie de M. Kecly ; il y fut magnétisé, puis M. Keely le mit debout, et lui dit de marcher, ce qu’il fit librement, avec activité, et sans éprouver de douleur. Deux dames, ses parentes, qui l’avaient accompagné , sc mirent à fondre en larmes , et à pleurer

comme des enfants...... Comment cette guérison

s’est-elle opérée ? Nous l’ignorons. Il y a des gens qui disent que M. Keely guérit par la mystification et la charlatanerie; ch bien, il en a dû employer, dans ce cas, une décoction prodigieusement concentrée ! »

— La lettre suivante, que le Dr Charpignon nous adresse, montre jusqu’où s’étend la loyauté de nos adversaires.

Monsieur le Rédacteur,

Ayant lu dans le numéro du 3o décembre derr nier du journal le Constitutionnel, un article intitulé ide VEther et du Chloroforme, dans lequel l’auteur parlait du maguétisme de façon à montrer combien il était ignorant sur cette question , j’ai

cru devoir adresser au Rédacteur une note qui rectifiait les erreurs commises; mais, par je ne sais quelle cause, ma lettre n’a point été insérée, circonstance qui laisse toutes leurs forces aux assertions de l’article du I)r Roger. Pour remédier autant que possible à cet inconvénient, je pense que, comme moi , vous jugerez utile de publier les rectifications que le Constitutionnel n’a point acceptées. Voici cette lettre :

A M. le Rédacteur du Constitutionnel.

Bans un de vos derniers numéros, vous avez inséré une assez longue lettre sur l’élher et le chloroforme. Dans cet article remarquable sous plus d’un rappoft, son auteur , le Dr Henri Roger , a cru, j’en süis certain, donnef l’histoire bien exacte des différents moyens que l’art possédait ou croyait posséder pour anéahtir la douleur dans les opérations de la chirurgie. Or, M. Roger, en parlant du magnétisme , a commis une erreur profonde, que, dans l’intérêt de la vérité et de l’avenir d’une question dont l’influence philosophique et médicale e9t loin d’être aujourd’hui soupçonnée , je regarde comme un devoir de rectifier ce que M. Roger a dit à ce sujet. La position d’agrégé à la Faculté de Médecine donne à la parole de M. Roger une valeur trop considérable aux yeux du public pour que l’homme le plus désintéressé dans ces débats scientifiques ne comprenne l’importance d’une réclamation en faveur d’un principe méconnu. « Le magné-« tisme, dit M. Roger, entre autres prétentions « exhorbitantes, a aussi celle d’abolir la sensibilité,

« et de supprimer à volonté la douleur des opéra-« lions chirurgicales; mais, en soixante années, il « n’a pu en fournir à preuve qu’un fait ; un seul,

« observé pour ainsi dire à huis clos; et, con-« trairement à ce qui arrive des échantillons uni-« ques, ce fait, qui ne s'est pas renouvelé, qui se « montre une fois en un siècle, nous semble, par « sa rareté même, perdre beaucoup de son prix. »

Le fait dont on veut parler est l’opération d’un cancer au sein , faite en 1829 par M. J. Cloquet; et malheureusement pour ceux qui écrivent sans connaître tout ce qui se rattache à une science, il est loin que ce fait soit resté isolé, et qu’il ne se soit pas renouvelé.

« J’affirme, dit M. Andral, que sous l’influence de certaines manœuvres magnétiques par lesquelles un individu peut devenir somnambule, il perd toute sensibilité. » (Cours de Pathologie , 2“ édit., t. III, p. 178). Bien d’autres médecins d’un rang très-distingué admettent l’insensibilité magnétique, et aujourd’hui ce serait ignorance ou entêtement que de la nier encore. Sans doute ce résultat merveilleux ne s’obtient pas sur tous les sujets magnétisés, et, sous ce rapport, le magnétisme ne saurait entrer en lice avec le chloroforme ; mais néanmoins le fait de la production de cette insensibilité est réel, et par trop fréquemment obtenu, pour qu’il soit permis d’avancer qu’il ne s’en est produit qu’un exemple en soixante ans.

Je ne parlerai pas de moi, et pourtant j’aurais plusieurs cas d’insensibilité à mentionner; mais ce ne sont pas des opérations de grande chirurgie, et comme nous pouvons compter de celles-là, nous

laissons do côté les extractions de dents, les sections de nerfs, les dissections de tumeurs.....

Nous dirons donc vite, qu’en Angleterre, d’abord,

Un homme fut, en octobre i8/|2, amputé de la cuisse, dans l’état d’insensibilité magnétique, par le Dr Ward.

En i845, un jeune homme fut amputé de la cuisse par le Dr Fanton.

En septembre 1845, Mm* Northway fut amputée du bras par le D' Jolly.

Vers la même époque, amputation de la cuisse de M"' Lakin, par le Dr Toswell.

En France, voici les opérations majeures que je puis citer :

En octobre i845, amputation de la jambe de Mlle Marie d’Albanel, faite à Cherbourg par les Drs Loisel et Gibon, devant quatre témoins.

En mai 1846, dissection et excision, parle Dr Loysel, d’un paquet de glandes dégénérées, dont quelques-unes de la grosseur d’un œuf, situées 'a la région sous-maxillaire et cervicale. L’opéré était Baysset, âgé de dix-huit ans; vingt-cinq témoins.

En septembre 1846, même opération sur Anne Lemarchand. Dissection à l’artère carotide adhérente à une glande; dissection de couches musculaires superficielles pour détruire l’adhérence d’une des glandes sur les scalènes.

F.n 1847, même opération dans des circonstances analogues, par le même chirurgien.

Je ne cite que ces quelques cas, parce que d’eux seuls je puis garantir l’authenticité, mais on pourrait en compter plusieurs autres. Si l’on réfléchit combien le magnétisme est peu connu des méde-

cins, et peu pratiqué par eux, on ne sera pas étonné du petit nombre de cas d’insensibilité que le magnétisme peut revendiquer. Je suis certain que si les médecins expérimentaient le magnétisme sur des milliers de malades, comme 011 le fait pour le chloroforme, ils obtiendraient une proportion qui dépasserait la prévision des préventions. Mais la certitude et la promptitude de la réussite à l’aide du chloroforme, éloigneront désormais toute tentative pour obtenir l’insensibilité par le magnétisme. Les faits que le magnétisme a produits , il peut les produire encore) mais ils resteront dans son histoire, qu’un jour, très-certainement, la science médicale acceptera comme une sœur trop longtemps méconnue.

J’ai l’honneur, etc.

])f CHARPIGNON.

Orléans , G janvier 1849.

P. 5. Je viens d’extraire une dent molaire très-solide, à une somnambule magnétisée par un autre que moi. L’insensibilité a été parfaite et exempte des difficultés qui accompagnent celle obtenue par le chloroforme pour ces sortes d’opérations.

PETITE CORRESPONDANCE.

Blklali. — M. D.. ..r. — Reçu les 24 fr. Merci. N.-Orlcau». — H. J. B.....t. —Encaissé oOü fr. par\'r.

BIBLIOGRAPHIE.

Un nouveau volume des Arcanes vient de paraître, c’est le second fruit d’un arbre dont les rameaux se balancent paisiblement dans le ciel, et qui, sans doute, abrita nos premiers parents. C’est avec hésitation que nous avons rendu compte du tome Ier, et nous avions nos raisons pour cela. M. Cahagnet, excellent homme du reste, paraît être d’une susceptibilité excessive à l’égard de son Paradis, qui est aussi celui de ses lucides. 11 nous l’a bien fait voir. A peine avions-nous « tondu de ce pré la largeur de notre langue » , qu’il a paru à M. Cahagnet que c’était une témérité punissable par un châtiment exemplaire. Aussi les épithètes, qu’il croit sanglantes, et qui sont peut-être fort vraies : ânes, bornes, èteignoirs, imbéciles, etc., nous ont été lancées dans ce nouvel écrit.

Voyez ce que c’est qu’une nouvelle doctrine! elle est tout de suite intolérante comme les anciennes. Elle ne permet aucune critique , quelque modeste et modérée qu’elle soit, et, sous ce rapport, la nôtre était irréprochable : il faut croire, et tout croire, encore!.... C’est par trop fort, et nous nous y sommes refusé. Il nous avait semblé que beaucoup de faits pouvaient s’expliquer par une communication de pensées; nous l’avons dit avec franchise : voilà notre seul crime. Notre doute pouvait

s’excuser pourtant, surtout en ce qui concerne les merveilles du ciel, mais on ne nous le pardonne pas.

M. Cahagnet s’expose, par sa rigueur, à ce qu’on examine de plus près ses lucides, et qu’on fasse connaître leur parenté étroite, très-étroite même, avec tous les somnambules passés et présents. Nous savons bien que nous ne le convaincrons point, le temps y échouerait lui-méme. Nos observations actuelles paraîtront dictées par un sentiment malveillant et injuste, mais qu’importe, nous devons aux magnétistes notre opinion entière. On ne peut exiger de nous l’aveu d’une croyance que nous ne partageons pas. Cependant nous sommes spiritua-liste, et, bien avant M. Cahagnet, nous avons parlé de l’immortalité de l’âme en termes qu’aucun croyant ne désavouerait, ainsi que des joies et peines réservées aux humains après cette vie. Nous nous sommes arrêté dans ce chemin , justement parce que nous étions allé fort loin, et qu’il eût été peu sage d’avancer davantage. Les voyants , pourtant, ne m’ont point manqué, c’était un devoir pour moi de les interroger. Qu’en ai-je appris? Les réminiscences de leurs principes et de leurs croyances en l’état de veille; puis, la fantaisie s’emparant de leur esprit, ils me bâtissaient un paradis superbe, enchanteur. Saisi d’admiration , j’eusse désiré quitter de suite cette terre maudite, mais la réflexion venant, et refroidi, j’apercevais bientôt que j’avais voyagé avec les voyants dans le royaume des songes. Cependant encore ces songes avaient quelque chose de flatteur, d’enivrant ; ces lieux n’étaient point faits pour continuer les tristes devoirs de la vie, pour s’occuper des travaux nés de la civilisation , pour

suivre des idées systématiques nées des erreurs de la science ou des préjugés de l’ignorance. On y nageait , au contraire, dans un océan de délices ; l’âme n’avait plus souci du corps, en étant dégagée; soumise à des expiations, après un temps d’épreuves elle s’approchait de Dieu, et ne se ternissait plus jamais. J'aime mieux, je l’avoue, mon paradis rêvé que celui, même très-réel, de M. Cahagnet, où tout est commun, blafard, nuageux, indigne de la créa, tion du grand Être qui a fait ces mondes où les soleils sont nombreux comme les grains de sable de la mer, et qui sait maintenir dans leur cours régulier l’immensité des globes. On veut que mon âme immortelle traîne à sa suite les immondices de la vie terrestre, et que, sans s’épurer elle retourne dans les cieux. Plutôt dût-elle s’anéantir!... Que voulez-vous , je n’aime point, je vous le répète , ce qui ne peut trouver une comparaison. La naturo seule, magnifique, grande, riche, et que nous connaissons à peine, n’est rien pourtant en présence de l’infini et de Dieu lui-même.

Irai-je comparer des créations toutes chimériques de M. Cahagnet avec ce que je sais, ce que je pressens seulement, des perfections divines que l’homme est appelé à connaître un jour? Que M. Cahagnet ne se fâche point, nous lui laisserons son paradis comme on laisse aux enfants la croyance aux erreurs qui charment leur jeune âge, sachant bien que lorsqu’ils seront hommes ce manteau tom bera de lui-même.

Irai-je établir un parallèle entre les visions des lucides de M. Cahagnet et celles dont parle l’Écri-ture? Ont-elles même rien de commun avec les ap-

paritions qui résultaient du charme des py thonisscsP Pcut-on croire à dos récits, quelque circonstanciés qu’ils puissent être? Il faut, au contraire, que les évocations soient rendues sensibles ; que la forme soit visible, tangible; que la personne, enfin, se présente avec tous les caractères qui la distinguaient, avec le sceau des morts sortant de terre ou venant du ciel.

11 faut plus encore ; il faut que ce spectre manifeste autrement sa présence. Le bruit, la voix , le geste doivent exister, et tout ce qui sort de sa bouche doit être sans mélange d’erreur. Car telle est la différence qui doit exister entre nous et les morts, que ceux-ci n’ayant plus d’intérêt à mentir, la vérité seule doit les animer. Rien de semblable dans les évocations de M. Cahagnet : nul ne voit, si ce n’est la crisiaque; nul n’entend, si ce n’est elle encore, et il me suffirait des faits adoptés et cités comme vrais par M. Cahagnet, pour être rempli de doute. 11 ne craint pas de donner comme preuve de l’existence des esprits obéissant au commandement des magnétisenrs, des transports d’objets matériels tout à fait impossibles dans ces conditions. Oh ! ce n’est point ainsi que les Anciens comprenaient cette science secrète! elle avait ses formules, et M. Cahagnet les ignore ; ses préceptes, et ils ne se trouvent point dans les Arcanes. M. Cahagnet, ou le voit clairement, ne s’est pas pénétré de l’antiquité; un des Sages de ce temps ne se serait point mépris sur lui, car il eût vu immédiatement que ce mystique est totalement étranger aux connaissances qui distinguaient les initiés.

Sans doute le pouvoir magnétique peut éblouir

un instant; c’est une demi-lumière sortie du temple, un rayon du t'eu de Prométhée, mais par cela même il brûle le téméraire qui manque de principes pour le diriger; il peut même rendre insensé l’homme fort, en taisant naître en lui l’orgueil, car il croit alors que le ciel est ouvert devant lui, qu’il est un demi-dieu.

Nos voyants ne sont point des êtres à part de l’espèce humaine ; où puiseraient-ils donc les secrets de Dieu? Est-ce parce que le magnétisme leur donne un peu plus de lumière, qu’il les illumine un instant? Nous convenons qu’il y a quelque chose ici qui dépasse peut-êLre la raison; nous voyons des faits fort remarquables, et nous nous inclinons. Mais de là à parcourir le ciel, et voir ce qui s’y passe, il y a l’immensité. Et lorsqu’on nous dit : Les morts reviennent, ils apparaissent à l’appel des lucides, répondent à leurs interrogations, et instruisent ainsi les vivants; je ne vois dans cette assertion que les illusions les plus grandes , au lieu des vérités qu’on nous appelle il constater. Je trouve seulement un fait d’optique rétrospective déjà donné comme preuve par bien des magnétiseurs avant M. (iahagnet. Si les lucides avaient tant de pouvoir et tant de science, si leur génie n’était point bornéy leur lumière nous eût instruits du magnétisme lui-même. Qu’a-t-on appris d’eux sur ce sujet? Rien de positif; le progrès opéré l’a été par la perspicacité d’hommes bien éveillés, par la constante observation des phénomènes. Jugeant toujours par ce qu’ils éprouvent, les somnambules généralisent ce qui leur est particulier, et commettent ainsi les plus grandes erreurs.

Pcut-on admettre que les âmes dégagées de la matière puissent se tromper? Non, mille fois, non. Pourquoi donc ce mélange de vérités et de choses qui ne peuvent être reconnnes pour telles, même chez les lucides de M. Cahagnet? Quant à ce qui m’est personnel, et dont j’ai parlé précédemment (tome YII, p. 89), la vision a été fort exacte dans tout ce que mes souvenirs me fournissaient sur D***, ou dans tout ce que j’avais su , mais oublié. En dehors de ceci les affirmations de la voyante étaient fausses. D*** ne prenait point de tabac, quoiqu’elle ait dit qu’il prisât; il n’avait point de hernie, ne portait point de bandage; on ne lui vit jamais non plus de redingote de la couleur désignée, etc. Ces détails me sont certifiés par sa veuve et scs enfants. Quant encore â son apparition à moi , annoncée devoir s’effectuer dans un temps donné ; l’époque est passée depuis bien des mois, et je n’ai rien vu ; s’il m’était apparu , je le dirais avec la plus grande franchise, car j’aime et cherche la vérité avec une égale passion. D*** m’avait promis cette visite à son lit de mort; la lucide le vit, mais le mort ne revint pas, malgré sa promesse, mon désir et l’annonce de la lucide de M. Cahagnet. Je puis constater des erreurs semblables, et plus matérielles encore, en vingt endroits des Arcanes, et les explications de M. Cahagnet ne servent qu’à les rendre plus évidentes.

J’admire pourtant les qualités incontestables de la somnambule de M. Cahagnet, tant qu’il s’agit de choses tout humaines et terrestres ; lorsqu’elle en sort, il se passe dans son cerveau des choses étranges , un mirage d’erreurs et de vérités qui ne dé-

passe point ce que nous voyons chez les autres lucides. Et j’en reviens à dire : Non elle ne tient point le langage des esprits. Ses évocations sont des images trompeuses, car elles n’ont aucun des caractères que j’ai énumérés, et sur lesquels l’antiquité ne s’était jamais méprise. Que m’importe que Monsieur Swedenborg réponde à sa demande? ce n’est qu’un nom, une image; ce n’est point le personnage lui-même; et je ne constate dans le langage qu’on lui prête, que les propres idées de la voyante ou de son magnétiseur.

Quoi! les morts seraient aussi inintelligents que les vivants ? L’avare continuerait d’empiler ses écus, le tourneur de chaises exercerait son état, le tisserand ferait de la toile, dans ce monde sans pareil, si tels avaient été leurs goûts; l’architecte bâtirait des palais inutiles, puisqu'ils ne seraient point habités; les rois octroyeraient des chartes pour des sujets qui n’existeraient point, et le général rangerait des escadrons pour livrer une bataille impossible faute de combattans? Le fou rêve des choses plus grandes, mais elles sont le fruit du délire ; ici c’est un homme froid qui nous donne ces rêves, il les écrit sérieusement , en toute sûreté de conscience, il ne lui reste pas un doute ; sa croyance est telle, qu’il croit à la possibilité d’une démonstration rigoureuse, et il passe les nuits à écrire ce qu’il pense être des conceptions sublimes. Pauvre nature que la nôtre! les illusions nous rendent heureux ; les romans les plus bêtes sont ceux qui nous amusent ou nous tiennent en crainte. Les religions les plus stupides et les plus sanguinaires ont tour à tour conduit les hommes, et fait des fanatiques.

Pourquoi donc en est-il ainsi ? C’est que moins les hommes savent, plus ils s’exaltent; l’erreur est alors contagieuse; la vérité, au contraire, marche à pas lents , elle se dérobe à la foule, ne séduit que les âmes d’élite. Hermès, Socrate, Jésus l’avaient reçue de Dieu dans les choses morales; Galilée, Colomb , Newton l’avaient saisie pour ce qui est physique et terrestre. Mesmer seul, après ces génies, fut favorisé : il trouva la loi de la conservation des êtres.

Toutes ces grandes âmes évoquées ne savent plus rien en revenant sur terre; si elles parlent aux lucides, c’est en patois parisien. Deleuze, lui-même, n’est qu’une ombre insignifiante. Les lucides, au lieu de voyager dans le ciel, ne font que le tour de leur chambre : ceci résulte clairement de la lecture des Arcanes.

Dans le singulier paradis de M. Cahagnet, on boit,

on mange.....en idée. On conserve le caractère de

la vieillesse, mais on est, il est vrai, vieillard appétissant. Jésus fronce le sourcil, mécontent qu’il est de la politique de nos grands ministres. Les lucides voient tout cela, et bien d’autres choses..... Comment ne pas croire, dès lors, aux descriptions de M. Cahagnet? Cependant, beaucoup de gens, en consultant leurs goûts, aiment mieux un paradis d’opéra, car dans celui-ci il y a de la grâce dans les personnages, quelque chose de poétique et parfois de divin qui semble venir de l’inspiration. Si les auteurs de ces charmants ouvrages les eussent écrits endormis, qui sait l'influence qu’ils exerceraient sur le monde magnétique.

Tous les ôtres humains ayant une fausse idée des

choses d’ici-bas, s’cn imaginent de plus fausses encore sur celles de l’autre vie. La vie est un continuel rêve, la mort est le réveil; et on nous dit aujourd’hui par la bouche des lucides : Le voici dans sa vérité. Illusions de hachish et d’opium! si vous n’êtes plus vraies, vous êtes cent fois plus agréables ; si 011 s’en rapporte à ceux qui ont fait usage de ces drogues orientales.

Mais c’est trop s’étendre sur un ouvrage qui n’a point d’importance. C’est une élucubration qui n’aura pas même le mérite d’exciter une controverse. Fruit du cerveau d’un homme qui s’imagine des choses petites, mais qu’il croit grandes et sublimes , il aura le sort de ces livres qui étonnent un instant par leur étrangeté, mais que l’on rejelte en-suitecomme chose indigesteet malsaine pourl’esprit.

Cependant, nous croyons qu’on ira un jour très-avant dans la connaissance des choses du ciel. Les progrès seront lents et distancés par des années. La science antique se reformera, et les hommes seront témoins de merveilles ; tout nous l’indique. Mais que de travaux, et que d’hommes mourront à la peine! Le ciel ne s’escalade point, on ne parvient à y lire qu’en possédant les vertus les plus pures, et qu’après avoir mérité cette grâce par toutes les tortures de l’esprit. C’est là une des vérités du christianisme qui ne se trouve point dans l’ouvrage de M. Cahagnet, et que peu d’homines de notre temps comprendront. J’en ai été pénétré dans un jour de malheur et de tristesse profonde; d’autres, plus heureux, iront plus loin : que Dieu leur soit en aide, et leur épargne les maux et les dangers de l’initiation.

Je laisse toute liberté aux lecteurs de M. Caha-

gnet; j’émets seulement une opinion qui peut être erronée, mais queje crois vraie. Si mon langage a quelque chose de sévère , il emprunte celle sévérité à ma position même; le travail m’a donné une sorte de répulation, peut-être usurpée, mais dans tous les cas fort exagérée puisqu’on me suppose juge en cette matière. Je ne pouvais donc me taire eu présence des insinuations de M. Cahâgnet, et laisser sans réponse ses attaques que rien ne justifie.

Voici d’autres motifs.

A peine la base dé la science magnétique est-elle posée, que déjà on la sape par des erreurs dangereuses. Qu’importe que ces spiritualisles nouveaux aient la foi; est-ce qu’on fonde quelque chose sur des sentiments? 11 faut au contraire que tout s’explique a l’intelligence, que la raison se rende compte de tous les faits, que ces faits se rattachent toujours à la nature, sans s’en séparer jamais, sans qu’il y ait solution de continuité. C’est par la découverte de nouvelles forces, qui existent certainement; c’est par uhe étude plus approfondie de celle qui nous sert à produire les phénomènes dits magnétiques; car nous ne savons encore ce qu’elle est, quelle est sa nature et toutes ses propriétés. C’est par une étude comparée de tous les degrés de sommeil magnétique offerts par la masse des magnétisés, en en dégageant surtout l’inconnu , qui surgit à chaque instant, et que rien n’explique encore; en tenant compte de toutes les erreurs commises, de toutes les prévisions démenties, de tout ce qui est contraire à l’expérience et à l’évidence. C’est en étudiant surtout avec soin ces voix mystérieuses qui parlent parfois à l’âme des voyants, et qui, dans

beaucoup de cas, ne sont que l’écho des pensées du magnétiseur, qu’on arrivera à quelque chose de certain et de positif. On n’établit point une science sur de vagues données, sur des relations la plupart mensongères, puisqu’elle emprunte à celui qui écrit tous les préjugés de son esprit, et qu’elles se teignent, en passant dans son cerveau, des erreurs qui y avaient été reçues comme des vérités. Nous ne sommes que les devanciers de ceux qui doivent fonder quelque chose de durable , notre rôle doit se borner à rendre témoignage des phénomènes, à les enregistrer soigneusement. Nous avons en face de nous un principe inconnu qui embrasse la nature entière ; dès qu’on l’aperçoit, On reste confondu de sa puissance et de ses effets : on est anéanti. Qu’avons-nous donc en nous qui puisse d’un trait saisir le monde? Un faible rayon d'intelligence soudé avec la matière qui compose notre enveloppe, intelligence infirme jusqu’à ce qu’elle en soit complètement dégagée. Nous n’avons pas même de mots pour rendre nos pensées, et ce feu qui nous brûle lorsqu’il devient trop actif, va jusqu’à nous ôter le sentiment des choses. Voilà ce gu’il faut toujours se représenter lorsqu’on écrit sur le magnétisme.

Plus qu’un autre j'ai senti mon néant et mon impuissance; et, confus de mon ignorance, j’ai cher, ché ailleurs qu’en moi la lumière qui me manquait. Vainement j’ai demandé aux hommes que je croyais instruits, je n’ai pu rien apprendre sur ce que je cherchais; des notions vagues, des traditions du passé souvent altérées par les écrivains qui nous les transmirent; voilà tout. 11 me restait les clairvoyants, leslucides, ceux-ci, du moins,pourraientm’instruire

et faire luire à mes yeux les vérités dont mon âme pressent l’existence. Illusions plus perfides que toutes celles que j’avais eues jusqu’alors! Je n’ai rien appris de certain , si ce n’est qu’il fallait revenir en moi-méme. C’est de ce moment seulement que je compris quelque chose de la science divine, et que la nature m’apparut sous un jour tout nouveau.

Plein d’impatience, je voulais tout savoir; mais mon âme ne répondit pas tout d’abord ; je sus seulement qu’il n’en était point de la science divine comme de l’universitaire : celle-ci se vend au premier venu, l’autre, plus pure, s’accorde à l’esprit simple aimé de Dieu. Comment donc obtenir cette grâce d’en haut, afin que la lumière de la pé nétration ouvre votre entendement? Par la souffrance: l’homme heureux ne peut rien apprendre, il s’épanouit dans les plaisirs ; l’étude est un travail, une fatigue, souvent un ennui : il s’y soustrait. L’âme de l’orgueilleux ne reflète que sa vanité; et ce divin mirage des choses du ciel n’arrive que chez l’homme résigné qui, tout en souffrant, s’humilie. Celui qui croit arriver de suite aux connaissances supérieures qui ressortent des choses cachées par Dieu, se trompe donc beaucoup. En magnétisme, ¡1 est comme le physicien qui galvanise un mort, croyant surprendre les secrets d’outre-tombe. On ne peut rien apprendre lorsque les sens seuls fonctionnent; ils n’apportent qu’un tribut grossier que l’esprit n’analyse point pour en tirer la quintessence. Lorsque l’agitation des carrefours nous gagne et nous tient en éveil ; lorsque toutes les passions viennent résonner^en notre âme, l’édifice humain ressemble à la tour de Babel ; là est la confusion des langues : que voulez-vous qu’il en sorte?

J’ai donc senti en moi les véritables conditions de tout savoir, sans lesquelles il est impossible de pénétrer dans les choses occultes; et, je dois le dire avec regret, je n’ai pas le courage d’avancer dans cette route ouverte. Mon Essai philosophique est sorti de mes premiers aperçus ; il eût fallu poursuivre. Quoi qu’il en soit, j’ai découvert bien des choses qui avaient échappé à mes devanciers. Mais n’aurai-je trouvé, par la lumière qui m’est venue, qu’un lil pour me conduire dans le labyrinthe où cheminent, sans trouver d’issue, tant de magnétiseurs, que mes peines eussent été récompensées au centuple. C’est donc en vain qu’on opposerait à mes critiques une fin de non recevoir; je dirais : Ce que vous faites, vous ne pouvez vous en rendre compte, et je suis mes opérations sans m’égarer ; et, lorsque je le voudrai, j’étendrai mon cercle d’expérimentation sans que vous puissiez rien comprendre. Cependant je sais si peu de chose de la science antique, que je n’ai point le droit de parler de mes œuvres avec vanité.

Le6 sciences mortes s’apprennent toutes par les sens, l’intelligence les féconde parfois. La science de la vie et des rapports de celle-ci avec ce qui échappe aux sens, ne peut être que le patrimoine de celui qui a laissé arriver jusqu’à son cœur les harmonies de la nature, ne serait-ce que pendant un moment. Peut-il transmettre ces connaissances au premier venu? Non, il ne serait point compris : il parle une langue étrangère. Vous le voyez, magnétiseurs! le magnétisme a un côté tout physique et saisissableà tous ; il a un sens spirituel, et celui ci est encore peu connu.

Ne reste-t-il point pour l’étude cette immense série de faits, que vous pouvez tous produire, et qui n’ont encore trouvé aucun interprète capable d’en faire sentir l’importance et la grandeur. Les lumières du sommeil sont parfois utiles et nécessaires, lorsqu’on ne les recherche que pour toutes choses du domaine terrestre et pour la cure des maladies. Étudiez toutes ces facultés déjà si merveilleuses, et qui dans certains cas anéantissent notre raison. Magnétiseurs ! arrêtez-vous ici, assurez d’abord votre conquête, ne vous est-elle point disputée par des ennemis nombreux et acharnés ? ils n’attendent peut-être que vos divisions ou l’ouvrage d’un enthousiaste visionnaire pour rompre la trêve qu’ils nous ont accordée. S’il était vrai qu’un voyant eût pénétré jusqu’au ciel, il ne pourrait jamais traduire par des mots ce qu’il y aurait vu. Ainsi, rappelez-vous Jésus faisant usage de figures et de paraboles. Si un homme, par la force de son génie, découvrait ce qui dépasse la force humaine dans les choses morales, aucun de nous ne le comprendrait, il serait longtemps méconnu. Si M. Cahagnet est un du ces hommes, il est destiné à subir la loi commune; car, moi le premier, je viens lui dire : Je crois que vous avez imaginé unParadis dans vos rêves d’homme éveillé, et j’attends que les preuves deviennent plus évidentes, car mon esprit ne peut admettre pour des vérités vos conceptions bizarres. Je vous crois dans l’erreur.

DU POTET.

Le Gérant : liÉBEKT (de Garnay).

CLINIQUE MAGNÉTIQUE.

lin honorable instituteur du département du Gers, M. Tanazac, nous donne quelques détails intéressants sur l’état du magnétisme dans son pays, et une cure qu’il a faite.

Yoici des extraits de sa lettre :

«...........En attendant, j’ai l’honneur de

vous dire qu’un M. Ader (Jean), le père du notaire de notre commune, a été tellement malade d’une fièvre cérébrale, que MM. Larroque, médecin à Masseube; Maigné, médecin à Mirande, et Aubian, médecin dans notre commune, ont été appelés, lesquels, étant réunis, ont déclaré qu’il n’y avait plus de ressources, et se sont retirés abandonnant le malade, qui ne parlait plus, et respirait à peine.

« M. le curé est appelé pour lui donner l'extréme onction ; comme voisin et ami, j’étais dans la chambre, j’ai assisté M. le curé, qui, après lui avoir administré les sacrements, s’est retiré; moi, je suis resté avec deux autres personnes dans la chambre du malade; Mme Ader, la femme du notaire, avait déjà donné le linceul pour l’envelopper.

« Vers six heures du soir, et après que tous l’eurent abandonné, j’eus l’audace de le magnétiser, tomb vin. — NQ »6. — 25 janvier 2

et vers les onze heures il articulait quelques mots, comme une espèce de latin. A une heure après minuit, le reconnaissant un peu rétabli, je lui demandai s’il ne prendrait pas un peu de bouillon, et je fus assez heureux, Dieu en soit loué , de l’entendre me dire qu’il en prendrait un peu. J’ai fait apporter du bouillon; son fils, expert géomètre, le frère du notaire, le lui donna en présence de son autre frère, curé à Mont-Dastarac, et autres parents qui accoururent d’une chambre voisine où ils s’étaient retirés, quand ils entendirent qu’il s’agissait de lui donner du Louillon au grand étonnement de tous les assistants, qui ont crié au miracle ; j’ai continué de le magnétiser pendant toute la nuit, et aujourd’hui il est bien portant.

« Ce fait m’a valu la haine et l’inimitié de M. notre curé, et il en est venu jusqu’à me refuser l’absolution jusqu’à ce que je veuille lui promettre de ne plus magnétiser.

« J’ai aussi entrepris le traitement d’un enfant de huit ans, qui a de forts battements de cœur, et sur qui l’on a épuisé toutes les ressources de la médecine; depuis que je le magnétise il va beaucoup mieux , et j’espère être assez heureux pour obtenir sa guérison.

« Le 10 de ce mois (janvier), j’ai ouvert un cours gratuit d’instruction primaire, à l’usage des adultes, dans lequel j’aborderai la question magnétique, etc. »

Un de nos abonnés du département du Var, M. Clapier, qui a le soin de noter le résultat de ses magnétisations, nous a envoyé la note suivante des traitements qu’il a faits dans le courant de 1848.

Ce sont :

« Femme de soixante ans, rhumatisme nerveux au pied droit depuis trois mois, marchant avec difficulté avec un bâton ; guérison en huit séances.

« Homme de quaranle-sept ans, douleurs au bras droit par suite d’une chute, depuis trois semaines; sept séances, guérison.

«Homme de soixante-trois ans , incontinence d’urine depuis deux mois, ventre balloné, jambes enflées, fièvre dans l’après-midi ; guérison à la suite d’une crise occasionée par l’usage de sept bouteilles d’eau magnétisée. Cette crise fut une quantité de près de trois litres de sang rendu en trois différentes fois par la voie des urines, d’abord très-foncées en couleur, et moins chargées chaque fois. Cette cure est remarquable, en ce qu’elle a été faite seulement avec l’eau magnétisée....

« Femme de trente-deux ans, douleurs à l’épigas-tre depuis une quinzaine d'années; vingt-six séances, grande amélioration. Deux mois après la fin du traitement, on m’a assuré que l’amélioration était telle, qu’on pouvait presque la considérer comme guérison complète.

« Homme de soixante-sept ans, douleurs rhumatismales , depuis trois mois, à l’épine dorsale, à la jambe et au pied droits, marchant avec un bâton ; douze séances, cessation des douleurs, facilité dans la marche, sans bâton...

« Femme de vingt-quatre ans, par suite de frayeur, depuis niai, névralgie dans la tête dans l’après-midi, insomnie, ou sommeil très agité; vingt séances procurent une amélioration sensible, soit dans le sommeil, qui est en général plus calme, soit dans la diminution des douleurs, qui même plusieurs fois ne se font pas sentir.

« Fille de sept ans, affection du bras droit par suite d’une chute et d’un coup sur le coude , douleurs, privation du mouvement; quatre séances, guérison.

« Homme de trente ans , tache à l’œil droit par suite d’un coup d’un fer chaud, vue trouble; insufflation de sucre, et deux séances de magnétisation, guérison.

« Homme de trente-sept ans, coup d’une branche d’arbre au-dessus du sourcil de l’œil droit, par suite vue obscurcie; une séance, guérison.

« Une femme de quaranlc-einq ans, suffocation à la poitrine, à tel point qu’il faut à cette personne un quart-d’heure pour monter quatorze marches d’escalier ; deux séances produisent une amélioration remarquable, qu’on pourrait presque appeler guérison.

« Ces quatre derniers cas étaient des affections récentes.

« Dix-neuf cas de fièvre intermittente ont été traités de mai à octobre.

« Les personnes dont la guérison est constatée, c’est-à-dire celles que j’ai eu occasion de revoir, sont au nombre de quinze, deux par le simple attouchement, sans faire usage de l’eau magnétisée,

circonstance que j’ai été à même de constater déjà, *-n 1847, dans six cas.

« Je suis porté à croire que les quatre autres fé-bricitants dont je n’ai pu vérifier la guérison eu raison de l’éloignemcnt, ont été également guéris, car l’expérience commence à me faire croire que l’eau magnétisée que je donne, prise en plus ou moins grande quantité, ne trouve pas de sujets ré-fraclaires. Je me fonde surtout sur ce que j’ai observé que des cas anciens, et rebelles à toutes les médecines , ont cédé par l’usage de mon eau. Je citerai trois cas que je croyais réfractaircs après l’usage d’une dizaine de bouteilles, et qui ont, après la cessation de l’usage de l’eau, été pendant trois accès en diminuant, et ensuite ont disparu. Une remarque à faire est celle-ci : quelques cas des plus tenaces, après guérison, ont eu encore un accès qui a été le coup de grâce emportant définitivement la fièvre.

f Je vais tâcher de répondre aux questions que vous me posiez dans votre lettre au sujet de ces fièvres ;

« i° Oui ; les fièvres intermittentes ont ici, et surtout dans le voisinage de Hyères, un caractère endémique. Les miasmes paludéens en sont la cause;

« 2° Ces fièvres commencent à paraître au printemps, et durent ordinairement jusqu’en automne. Celles qui passent l’hiver sont dites tenaces, parce qu’elles n’ont pu être guéries en leur temps. La quinine, sous toutes les formes possibles, est le remède dont se servent les médecins. Plusieurs cas guéris par mon eau avaient été traites sans succès par eux ;

« 3° Je n’ai pu, en raison de mes occupations me livrer à des expériences propres à bien répondre, à cette troisième question, savoir: si la quantité d’eau magnétisée est indifférente; mais je crois pouvoir assurer que non , puisque tel cas où une bouteille d’eau n’a pas suffi pour chasser la fièvre, deux ou trois ont rempli ce but. Cependant je crois que l’eau ne joue ici qu’un rôle secondaire, et que le principe curatif est dans le fluide magnétique. Huit cas de guérisons bien constatées par le simple attouchement, sans usage de l’eau, prouvent que le fluide magnétique est le principal agent.

« De ces huit cas, je citerai celui bien remarquable d’un officier de marine qui depuis dix-sept ans souffrait de ces fièvres prises sur la côte de Madagascar : l’accès s’annonçait par une névralgie faciale; un attouchement d’une demi-minute sur le pouls , me trouvant en voiture avec cet officier, a fait disparaître la fièvre. Je n’ai pu vérifier la guérison qu’un an après : l’air de santé de la personne dont je parle venait à l’appui de son aveu, constatant que du lendemain du jour où il avait été touché par moi, la fièvre n’avait point reparu.

« Je renouvelle ici ce que j’ai pris la liberté de vous demander dans le temps au sujet du Jury magnétique , afin d’encouragement. Je crois que l’usage de l’eau magnétisée, pour les fièvres intermittentes, sera un bienfait pour l’humanité. J’ai été le premier à faire connaître la manière d’employer cette eau, reste à décider la question suivante : Toutes les eaux magnétisées sont-elles propres à guérir les fièvres intermittentes?

« J’oubliais de vous citer un cas assez remarquable

do l’emploi de l’eau magnétisée. Une femme de quatre-vingts ans, qui a habituellement joui d’une bonne santé, et qui travaille encore à la campagne, tombe malade; une forte fièvre, suivie d’abondants vomissements la tirent d'alFaire; mais, son estomac est si faible, qu’elle ne peut rien garder, ni tisane, ni eau, ni bouillon. L’eau magnétisée que je lui donne reste parfaitement sur l’estomac; viennent ensuite les bouillons et les soupes, et le retour à la santé est parfait. »

« P. S. Je viens de voir à l’instant la femme de trente-deux ans, affectée de douleurs à l’épigas-tre, etc., qui demeure à Toulon, d’où elle était venue pour se faire traiter ici; elle m’a assuré que sa guérison était complète, et qu’elle ne souffrait plus. »

Notre correspondant de Niort, M. Lasscron, nous écrit aussi :

« ........... Je ne cesse de m’occüper de magnétisme , et j’ai quelquefois à soigner plus de malades que mes occupations profanes ne me le permettant; J’ai eu le bonheur de réussir datis un assez grand nombre de cas; et de temps en temps il me vient des malheureux abandonnés ou mal traités par la médecine classique. Je vais vous faire, le plus succinctement possible, lenUméralion des maladies que j’ai eu le bonheur de combattre victorieusement.

« Ce sont :

« i° Luxation ancienne du poignet, guérie en quatre séances.

« Luxation du pied, en voie de guérison. Les médecins avaient incisé la jambe prétendant qu’il y avait plusieurs abcès. La malade était arrêtée depuis un au ; maintenant elle marche bien, et ne ressent plus qu’une légère douleur.

« 3° Rhumatisme articulaire aigu, guéri en cinq ou six magnétisations. A chaque séance le mal disparaissait comme par enchantement, en faisant suivre à la douleur la direction que je désirais lui donner.

« 4° Plusieurs gouttes sciatiques, dont une guérie en une seule magnétisation de cinq minutes.

« 5° Deux pertes sanguines abondantes, accompagnées de chaleur insupportable à la poitrine, ont été arrêtées presque instantanément par l’application de la main sur la poitrine, et l’emploi de l’eau magnétisée.

« 6° Constipation opiniâtre, guérie par l’eau ma-gétisée, et une seule magnétisation.

« 7® Hernie inguinale. Je n’ai pu guérir complètement cette affection, n’en ayant pas continué le traitement. Cependant l’application de la main faisait disparaître la tumeur, qui ne revenait que quelques jours après : il est probable que l’emploi prolongé du magnétisme aurait triomphé du mal.

« 8° J’ai guéri en outre une infinité de maux de tête, migraines, maux de dents, d’estomac, de suppressions menstruelles, de spasmes, de douleurs rhumatismales, etc.

« 9° J’ai échoué dans le traitement de la goutte; cependant, à deux reprises , j’ai guéri presque subitement le bras d’un de mes amis atteint de cette affreuse maladie; mais, pour les autres membres, malgré l’emploi constant du magnétisme pendant trois mois, deux fois par jour, je n’ai obtenu que de légers déplacements du mal.

« io° Depuis un mois je magnétise une jeune demoiselle dont le bras gauche était resté à peu de chose près paralysé à la suite d’une hydropisie de poitrine, et d’une hydarthrose du poignet. Le mal durait depuis treize mois, et toutes les ressources de l’art médical avaient été épuisées ; car cette jeune personne appartient à une famille très-aisée : aussi les médecins ne négligeaient-ils pas de faire de nombreuses visites.

« Fatiguée de tant d’essais infructueux, la malade eut recours au magnétisme; et, depuis un mois, je travaille à ranimer un membre qui, je crois, eût été perdu sans l’heureuse faculté dont nous a doué la nature.

« Au bout de quinze jours de traitement, la malade commença à toucher du piano , et tous les jours elle augmenta la durée de ses exercices sur cet instrument. Depuis huit jours environ, il est survenu pendant la magnétisation une transpiration locale tellement abondante, que l’eau ruisselle dans la main jadis paralysée. Ces résultats avaient été annoncés par une somnambule dès les premiers jours du traitement.

« Comme vous devez bien le penser, le médecin cessa ses visites assidues; cependant, appelé dans la même maison pour une autre maladie, comme

on lui demandait ce qu il pensait du changement survenu si rapidement dans l'état du bras, il fit cette réponse digne de Loyola, ou plutôt d hscobar : « Je ne nie point l’existence du magnétisme; mais * cependant je ne dis pas que le bien résulte de « l’emploi de ce moyen. Depuis bien longtemps je « faisais faire des remèdes qui ont bien pu avoir « une action ultérieure, et je crois que l’améliora-« tion qui se manifeste peut en être le résultat; je « pourrais même assurer que ce doit être ainsi. »

« Nous avons ici quelques médecins qui avouent cependant que, dans certaines maladies nerveuses , le magnétisme peut être efficace ; mais que dans la plupart des autres cas son action est complètement nulle. Ces bons docteurs ne réfléchissent pas que si quelquefois nous échouons, nous avons du moins la satisfaction de ne tuer personne.

« Comme je vous l’ai déjà marqué, plusieurs de nos ouvriers guéris par le magnétisme, sont devenus eux-mêmes ipagnétiseurs, et s’empressent de soulager leurs camarades quand l’occasion s’en présente. J'espère do leur concours une propagation active, etc. »

PETITE CORRESPONDANCE.

Varsovie. — M. P.....a. — M. R........1 vous emporte deux vol. et

une médaille.

Lyon. — MM. les Abonnés peuvent renouveler chez notre nouveau correspondant.

VARIÉTÉS.

Progrès. — 11 nous revient de tous côtés que les médecins commencent enfin à comprendre qu’ils ne peuvent rester étrangers à l’art de guérir les maladies magnétiquement. C’est sournoisement, il est vrai, qu’ils pratiquent le magnétisme : c’est sous forme de frictions. Se servant d’un prétexte habile, ils explorent lentement les régions malades, en y laissant leurs mains le plus longtemps qu’ils peuvent. Il n’est pas jusque dans les cas de choléra, où, dédaignant leurs remèdes, on ne les voie soumettre les patients à une magnétisation véritable, dont chaque jour ils reconnaissent l'efficacité.

S’ils rendaient justice tout haut aux propagateurs de la science de Mesmer, nous n’aurions que des louanges à leur accorder; mais pourquoi ces ca-cholteries , ces déguisements indignes de philosophes et de médecins? Pour dissimuler un sot orgueil et une vanité blâmable. Ils ont nié, et ils n’osent avouer leur participation à un sanglant déni de justice. Quoi qu’il en soit, c’est néanmoins un progrès que de les avoir amenés à faire œuvre de bien , et nous ne pouvons nous empêcher de les remercier, au nom de l’humanité, de faire cesser les douleurs et d’éloigner la mort.

C’est un adoucissement aux amertumes de notre vie, car nous voyons nos principes recevoir une

sanction. On nous volera bientôt nos découvertes, on se les appropriera, et nous réclamerons en vain notre priorité. Notre voix ne sera point entendue, nos maîtres savent leur métier; n’ont ils point toute la presse à leurs ordres? Nous n’en éprouverons nul chagrin , car nous n’attac hons aucun prix aux récompenses humaines : notre mission est au-dessus du jugement des hommes.

Parmentier apprenant qu’on dérobait chaque nuit, dans le champ par lui planté , quelques-uns des tubercules déclarés malsains par les savants, se frottait les mains etriait de bon cœur. Nous sommes, comme lui, en présence de ceux qui s’emparent des semences répandues par nous; tant mieux, disons-nous, car c’est pour tous les hommes que nous avons travaillé. Et n’avons-nous pas pris pour épigraphe :

La vérité, n’importe par quelle bouche ; le bien, n’importe par quelles mains?

Féte de Mesmer. — Nous approchons du 1 i5e anniversaire de la naissance do Mesmer. Nous avons l’intention de fêter , comme d’habitude, l’homme à qui nous devons la découverte si précieuse du magnétisme. Nous allons organiser cette solennité de manière à la rendre digne des souvenirs de notre maître.

Sans doute il y aura des absents : la mort en a moissonné quelques-uns; mais le vide sera largement comblé par des apôtres nouveaux, qui attendent cette occasion pour fraterniser avec les anciens. Quelles que soiont les diflicullés du moment, et les préoccupations politiques, nous sommes sûrs qu’un

grand concours de magnétistes, animé par une joie commune, viendra payer sa dette de reconnaissance à Mesmer, le bienfaiteur des hommes.

On peut, dès maintenant, se faire inscrire au bureau du Journal, car le temps sera court pour organiser ce banquet, et nous avons à regretter que l’homme honorable qui jusqu’à présent s'en était chargé, soit absent en ce moment.

C’est à cette solennité que seront distribuées les premières médailles d’encouragement offertes par le Jury magnétique.

Revue des Journaux. — On lit dans le Delta du 9 janvier, sous la rubrique de Washington, l’anecdote suivante :

« Nous avons vu hier chez le docteur William une scène de magnétisme bien amusante. 11 paraît que ce médecin peut faire qu’un homme s’imagine on être un autre, et que le patient est si profondément imbu de cette impression, que l’influence directe du docteur peut seule l’en délivrer. Il y avait beaucoup de membres des deux Chambres au nombre des assistants.

« M. William opéra d’abord sur un jeune homme qui se crut le général Taylor, puis sur trois autres qui se figurèrent être MM. Clay, Webster et Clayton. Le général imaginaire faisait le fier, et marchait militairement; tout à coup il s’arrête, et s’écrie : « Mes blessés sont derrière moi, et jamais je ne les « précéderai vivant. » Cette exclamation fut, comme vous pouvez le supposer, couverte d’applaudissements. « Venez, général, dit le docteur; permet-« tez-moi de vous présenter vos distingués amis,

« MM. Clay, Webster et Clayton. » Le général et M. Clay se donnèrent très-cordialement la main, et causèrent à voix basse. 11 aborda M. Webster avec une sorte de froideur, et neparut point désirer s’entretenir secrètement avec lui. « Voiei , général, « M. Clayton, un de vos plus chauds partisans, et « et que l’opinion désigne comme devant vous sup-« pléer. » Il garda sur ce point un silence absolu.

« Venez, général, reprit le docteur , vous vous « voyez entouré de vos amis ; c’est le 4 mars, et le « public est inquiet sur votre politique et la eom-« position de votre cabinet. » Le faux général salua gracieusement la multitude qui l’entourait, mais ne proféra pas une syllabe concernant sa politique ou son cabinet. L’effet sur l’auditoire fut parfaitement électrique.

« La dernière introduction fut celle d’un employé qui désirait savoir si le général avait l’intention de le remplacer, parce qu’il avait pris part à la politique. Le général mit la main sur sa hanche, et répondit avec une grande austérité de manières : « Je ne m’occuperai de cela qu'après mon instal-« lation. » C’en était trop pour la gravité elle-même, aussi la société éclata-t-elle de rire.

« Les personnes sont prises au hasard dans l’assemblée, et mises en état de subir ces étranges mutations. Nous vivons vraiment dans un siècle de merveilles. Ne riez point de ce que je vous dis , ni ne le niez, car il peut arriver que vous en soyez témoin, et alors, comme moi, vous serez rempli d’é-tonnement, et vous cesserez d’être surpris que la sorcière d’Endor ait pu évoquer Samuel pour une entrevue avec Saül. »

BIBLIOGRAPHIE.

L.\ SCIENCE DU DIABLE, Almanach pour 1849. — Paris, chez Martinoo, \ , rue du Coq-Saint-Honoré. — Prix : 50 o.

Sous ce titre se cache un pamphlet magnétique et politique, dont le gouvernement du général Ca-vaignac a fait opérer la saisie.

Nous n’avons point à nous occuper de la partie incriminée.

En ce qui nous concerne, c’est une diatribe dont l’aigreur s’affaiblit en se partageant. L’auteur ne trouve d'éloges que pour M. Cahagnet; tous les autres magnétiseurs sont vertement tancés. Mais s’il dit du mal des magnétiseurs, il n’en est pas de même du magnétisme, et à ce titre son almanach aurait pu être utile.

M. Cahagnet a cru pouvoir y insérer, sans notre assentiment, sans nous prévenir même , la relation d’une séance qu’il nous a donnée en compagnie du prince K***; ce procédé nous parait peu convenable. Cetle divulgation de noms propres, de détails intimes , de secrets de famille peut-être, a des inconvénients graves, car c’est pour soi et non poiir

le public qu’on consulte. Et, en supposant que cette indiscrétion ne nuisît ni ne déplût aux intéressés, quelle confiance peut-on accorder à des révélations privées de leur extrait de baptême P En admettant même que le somnambule dise vrai, celui qui le consulte est-il obligé de livrer ses secrets? Ne peut-il pas déclarer fausse la dévoilation d’un mystère qu’il veut garder? Dès lors, comment contrôler ses assertions d’une manière assez certaine pour se croire autorisé à attester la vérité d’un fait dont lui seul a la clef? C’est joindre l’inconséquence au manque d’égards.

Puisque l’occasion se rencontre de parler de M. Cahagnet, saisissons-la pour en finir avec les Arcanes. Acquittons-nous d’une dette envers lui par l’envoi de la lettre suivante :

Monsieur,

Vous avez daigné m’offrir la dédicace, à demi, de vos Arcanes de la Vie future dévoilés. Je vous remercie infiniment de l’intention qui m’a valu cette faveur ; elle prend sa source à un sentiment qui fait l’éloge de votre caractère, et dont j’apprécie justement l’altitude; mais, l’égalité d’honneur impliquant la parité de mérite, je ne puis accepter sans réserve un hommage qui place l’élève au niveau du maître.

Vous m’avez instamment demandé que ¡’analyse votre livre; je vais essayer de le faire, mais je vous avoue que c’est uniquement pour vous plaire, car je trouve la tâche tellement au-dessus de mes forces, que, si je n’avais la crainte que vous interpré-

tassiez mal mon silence, je ne l’entreprendrais pas. Ce franc aveu d’un embarras qui vient de mon incompétence, vous rendra, j’espère, indulgent pour les fautes que je pourrai commettre dans l’appréciation du sujet délicat dont vous avez désiré si ardemment me rendre juge.

L’amour-propre des auteurs est comme l’orgueil des mères : ils n’aiment que la louange de leurs œuvres ; mais, si légitime ou pardonnable qu’elle puisse être, cette faiblesse doit parfois se taire pour qu’ils en entendent la critique. J’ai besoin d’une exception de ce genre pour vous dire ma pensée toute entière ; j’ose espérer que votre sincère amour de la vérité ne me la laissera pas refuser.

Les seules remarques que je veuille me permettre sur votre écrit, se rapportent à la forme et au fond; je vais vous les exposer successivement, puis je résumerai mes observations sur l’ensemble du livre.

A. Forme. — Elle me paraît essentiellement défectueuse; mais, je me trompe peut-être. Voyons ;

Le plan peut être très-avantageux à l’émission de vos idées, et conforme à votre manière de voir; mais je ne pense pas qu’il satisfasse les esprits quelque peu méthodiques. Dans un ouvrage de ce genre, l’ordre doit, à mon sens, régner en despote; c’est vous dire combien jo regrette que vous ayez cru pouvoir en affranchir les Arcanes. Vos dialogues , par séances , à la façon des procès-verbaux , me semblent.un mauvais choix, en ce que cette méthode d’exposition des faits n’a de valeur que quand on sténographie, et non lorsqu’on résume, comme vous le faites; quand, dis-je, les paroles sont prises au vol, que l’expression de la pensée

est, pour ainsi dire, daguerrootypée, cl que des témoins certifient la fidélité de la reproduction. Mais vos relations ne sont revêtues d’aucun témoignage, nulle attestation n’en garantit l’authenticité : elles sont toutes sous votre responsabilité personnelle. Pourquoi donc leur avoir donné le caractère apparent d’une exactitude qu’elles n’ont pas? C’était au moins superflu. Ces entretiens ont en outre l’inconvénient , grave selon moi, de présenter séparément des faits qui doivent être réunis pour que l’esprit puisse en saisir aisément les rapports les plus ténus. Pour ces seules raisons, j’eusse, à votre place, préféré grouper les résultats de mes recherches en tableaux analogues à celui-ci :

N° »

qu’est-ce qub..........?

«

C’est, etc., etc. ...............

?.....?...........(Bruno).

C’est, etc....................

.....................(Adèle).

C’est, etc....................

....................(Fanny).

Observations.

Vous eussiez évité par cette disposition, ou autre semblable, la confusion, mille petits détails de narration inutiles, la mention de circonstances étrangères au sujet, de trop fréquentes répétitions, etc., sans que votre récit perdît en exactitude. De cette manière, chaque question, numérotée, aurait été suivie de la réponse, non pas d’un seulement, comme il arrive souvent, mais de tous vos extatiques; et le lecteur aurait saisi d’un coup d’œil ce qu’il ne trouve que par un effort d’esprit, un travail de mémoire : les similitudes, oppositions et différences qui existent entre les réponses des divers lucides interrogés sur le même sujet. Vos commentaires placés à la suite, en observations, auraient éclairci les points obscurs ou douteux, fait ressortir les rapports vrais ou spécieux, et prévenu les objections. Ce procédé m’eût semblé plus rationnel, et, surtout, plus favorable à la manifestation de la vérité, en ce qu’il offre les éléments d’une comparaison facile, et que ce n’est qu’en comparant qu’on peut juger.

Le style est non moins critiquable que le plan dont je viens d’esquisser les vices. J’en vais indiquer les principaux traits.

1° L’élégance n’est certes pas de rigueur en pareil cas, mais elle ne nuit jamais; et je crois qu’il eût été préférable que vous la négligeassiez un peu moins que vous ne l’avez fait. La toilette n’efface point les charmes de la vérité, elle les rehausse, au contraire.

2° Dans un travail de cette importance, il faut que la clarté fasse partout sentir sa présence , que tous les termes soient précis, enfin, que l’expres-

sion de la pensée porte un cachet de netteté qui ne laisse nulle, part.à l’interprétation. Vous n’avez peut-être pas été assez sobre de mots mystiques et sacramentels , dont la signification mal assise emporte pour beaucoup plus de gens l’idée d’une hypothèse contestée que d’une vérité acquise. Quand on veut être bien compris, il faut employer le langage de son temps.

3° L’équivoque est la plaie des sciences; je regrette que vous n’ayez pas pris soin de l’éviter. On vous reprochera, soyez-en sûr, si même on ne vous accuse , d’avoir interrogé vos lucides en termes et par tournures qui suggérassent leurs réponses, parce que la plupart de vos questions contiennent leur solution. Cette faute sera pour vous une source d’ennuis, en ce qu’elle fera douter de votre véracité, tout en annihilant la valeur des faits que vous rapportez. Vicq-d’Azir disait que pour bien voir, il fallait souvent bien observer : si vous aviez tenu compte de la leçon, vous auriez mis plus de sévérité dans vos investigations ; car vous auriez compris que tout vice de forme, sans entacher le fait de nullité, lui enlève sa signification absolue: il n’a plus qu’une valeur préventive.

J’arrive à la logique, cette arche sainte de l’esprit, sans laquelle l’humanité nagerait dans le chaos de l'absurde; elle se divise en deux sections : la vôtre, et celle de vos voyants.

i° En ce qui vous concerne, les convenances m’imposent une réserve dont je ne veux point franchir les limites bienveillantes. Qui, d’ailleurs, sans être coutumier du fait, ne laisse point échapper quelques résultats d’inadvertance ?

a0 En enregistrant tel que tel le dire de vos époples, vous avez donné la mesure de votre bonne foi; mais cela ne suffit pas quand il s’agit de la démonstration scientifique d’un objet aussi important que l’est la vie future : il aurait fallu signaler l’écueil. Ainsi, moi, je ne doute pas que Bruno vous ait tenu le langage que voici :

«......Je vous dis : c’est si miraculeux, que cela

« ne se peut comprendre ni s’expliquer.

« — Est-ce toujours Gabriel qui vous répond ces

« choses?

« — Oui ; puis je les sens et comprends. »

Mais je ne suis pas convaincu que ce somnambule eût en ce moment là l’esprit sain. 11 y a dans ce court passage, que je prends au hasard, une infraction majeure, je ne dirai pas seulement aux règles admises de la logique, mais aux aperçus du plus simple bon sens : la contradiction est si choquante , que les malheureux habitants du Valais la répudieraient presque.

Cette erreur de raison n’est pas unique dans les Arcunes; il y en a aussi beaucoup de fait, mais, je vous l’ai dit, je ne veux pas les relever toutes, ce serait fatigant pour moi, et ennuyeux pour vous. J’en tire seulement la conclusion, rigoureuse à mon avis, que, si, dans les choses de notro domaine, nous acquérons la preuve quo vos extatiques se trompent grossièrement, quelle confiance pouvons-nous accorder à leurs paroles à l'égard des choses

dont l’apprcciation directe nous est interdite?.....

Que chacun réponde selon sa conscience; la mienuu crie : expecte!....

B. Fond. — L’immortalité de l’âme est admise par la foi, mais la raison en demande la preuve empirique pour en faire passer la croyance du dogme dans la science. C’est cette preuve que vous avez l’extrême obligeance de vouloir nous administrer; l’intention est très-louable : elle vous vaudra 1 estime des gens de cœur et la reconnaissance des malheureux dont vous tentez d’alléger les peines par ce dictame moral. Si vous échouez, on vous plaindra et on le regrettera ; si vous réusissez, vous aurez rendu les hommes heureux , et vous serez l’objet de la vénération de toutes les nations.

C’est de ce nouveau point de vue que je vais examiner les Arcanes; je le ferai comme ci-dessus, avec indépendance et impartialité, sans crainte de vous déplaire comme sans envie de contester ce que vous donnez pour vrai. Mais, pour être bref, je me tiendrai dans les généralités; la dissection minutieuse m’entraînerait trop loin.

Quand la vie a cessé, où est l’âme? qu’est-ce qu elle fait? quel est son heur? etc. Sont des questions oiseuses, scientifiquement parlant, tant qu’il n est pas prouvé qu’elle survit. L’important n’est pas d abord de savoir, toujours scientifiquement parlant, ce que fait l’âme, mais biçn si elle est. Si j’avais à vous démontrer l’existence d’un corps quelconque, leau, par exemple, je ne vous montrerais pas une locomotive en mouvement, ou la cime blanche d une montagne, en vous disant : Voilà ce qu’elle fait, ce qu’elle devient ; mais je vous la présenterais telle qu’elle est, afin que vous la voyiez, touchiez, goûtiez. La notion de son existence ainsi acquise, je vous en ferais alors voir les diverses transforma-

tions. C’est ainsi qu’on procède dans les sciences, et c’esl logique, car il est naturel que le principe devance les conséquences.

11 paraît que vous n’avez pas cru cette marche applicable à l’étude de l’âme libre; car, au lieu de vous attacher à la démonstration pure et simple de son existence, fondement sans lequel tout votre édifice croule, vous commencez par nous décrire les joies du paradis, la barbe du bon Dieu, le costume des anges, la forme du soleil, les conspirations de Satan, etc., etc. Qu’est-ce que tout cela importe, si l’on n’a pas la certitude que lame subsiste?

11 ne s’agit pas ici d’inculquer une croyance religieuse plus ou moins vraisemblable, mais bien de fonder une science, c’est-à-dire de prouver un fait que donne, par voie d’expérience, la conviction à laquelle prêtres et philosophes conduisent par le raisonnement. Et pourtant vous inclinez manifestement plus vers la religion de Swedenborg que vers la science de Mesmer. Que dis-je? vous la dédaignez, cette science, vous injuriez même ceux qui la pos sèdent, parce qu’ils aiment la rectitude et préfèrent des préceptes à des rêveries !

On peut bien découvrir en naviguant sans boussole; on peut également trouver la vérité en étudiant sans méthode ; mais les conquêtes ainsi faites restent longtemps problématiques faute d’indications précises qui y conduisent les autres explorateurs. Toute recherche entreprise sans but déterminé, sans moyens fixes et rationnels systématiquement enchaînés , doit nécessairement aboutir au vague, à la confusion, si ce n’est au néant ou à l’absurde.

Choisissant pour vous le cas le plus heureux, supposant que vous avez saisi la vérité sur la vie ultra-mondaine, il me reste à examiner comment vous nous l’avez transmise ; quel est le sens de votre révélation sur la destinée animique et les arcanes célestes ?

Et d’abord, qu’esl-ce que lame, selon vous?

« Une pensée individualisée......» La môme chose a

déjà été dite par le révérend Townshend; et notre ami, M. Meade, y a répondu : « Pour ma part, je pense qu’une pensée sans penseur est chose que tout homme qui pense ne pourra concevoir. » L’inconséquence est trop évidente pour que j’insiste.

On s’étonne à bon droit qu’un logicien aussi strict, qu’un mathématicien aussi correct que l’est M. Townshend ait prôné une pareille définition ; mais on lui pardonne cette faute, en considérant qu’il n’avait point de précédent pour guide; tandis que vous, vous êtes inexcusable, puisque l’écueil vous étant signalé , vous n’avez pas su l’éviter.

Vous cherchez à établir, dans une autre proposition , que les âmes évoquées apparaissent à l’extatique souvent avec un vêtement d’emprunt, à l’aide duquel elles se déguisent, ce qui est une cause fréquente d’erreur, dites-vous.

Mais ce travestissement ne peut être que volontaire ou involontaire; c’est-à-dire libre ou forcé. Si elles apparaissent sous une forme de leur choix, ce sont des Protées qui nous trompent; si, au contraire, elles apparaissent telles qu'on les désire , je ne vois aucune différence entre elles et des pantins, et, dans ces deux cas il y a fausseté. Si l’âme des morts, leur ombre, si vous aimez mieux, n’était

pas une réalité substancielle, distincte, stable, comment en reconnaîtrait-on l’identité? Ce ne serait qu’un caméléon dont l’aspect et l’état toujours changeants ne permettraient de rien conclure sur son sort, puisque, n’étant aujourd’hui comme hier, on ignorerait son rôle de demain.

Je vous confesse que cette façade de l’édifice me paraît avoir besoin d’être badigeonnée.

Autre chose.

11 est exposé, dans les Arcanesque chacun de nous est pourvu d’un guide, bon ou mauvais, ange ou démon, apparaissant à droite ou à gauche, selon sa nature, et nous inspirant des pensées conformes à son essence pour nous faire commettre des actes à sa convenance. Ces esprits ne sont autre que les âmes désincarnées ; et l’on peut les faire venir par la prière, ou les éloigner par la conjuration.

Est-ce bien sérieusement que vous nous avez préseulé ce magma?

Quoi ! ces êtres, qui, pour nous faire faire ce qu’ils veulent, doivent nous être supérieurs, nous obéiraient! Comment! nos chefs seraient à nos ordres

comme d’humbles valets!..... Ah! convenez-en, de

tels guides ressembleraient trop au caniche qui conduit l’aveugle !

J’ajoute que, s’ils dépendaient de nous, ils ne pourraient jamais nous tromper, puisqu’il suffirait d’un signe de notre volonté pour les obliger d’être sincères. Par la même raison, ils apparaîtraient en costume et sous la forme que nous aurions ordonnés, ou même désirés, ainsi qu’il convient de faire à des esclaves soumis. Et ceci porterait une grave

atteinte à leurs droits d’existence effective, en tant qu’individus.

Puis, s’ils ont vécu, et que tous les humains soient sous l’influence d’un , dites-moi, je vous prie, quel était celui d’Adam ; d’où pouvait-il venir? D’ailleurs, lu nombre des morts depuis la création, excédant de beaucoup celui des vivants actuels, il en résulterait un chômage qui accuserait Dieu d’imprévoyance, lui qui met ordinairement tant d’harmonie dans ses œuvres.

Tout cela, je vous l’avoue, ne satisfait nullement ma raison , et mon intelligence se refuse à l’admission de pareils hôtes.

Mais ce n’est pas tout.

En présentant la vie céleste comme toute de béatitude, vous offrez une prime au suicide, et, ce qui est pire, un encouragement au crime..... Comment ! tant de gredins, de faquins insolents et hautains , rois spoliateurs, papes perfides, grands et petits seigneurs inhumains, parvenus intrigants et pillards, maîtres bourrus, prêtres caffards, inquisiteurs sanguinaires, canailles, enfin, de tous les rangs, de toutes les nuances, ne recevraient point le châtiment dû à leurs méfaits ! Si ceux-là sont bienheureux, pourquoi donc être honnête homme, dévoué, martyr? C’est inutile, puisqu’on aura le

même sort que les scélérats....... Je dis qu’un tel

état de choses serait injuste , et je ne puis qualifier que d’immorale et d’impie la doctrine qui l’enseigne.

D’un autre côté.

S’il est vrai, comme vous l’annoncez, que ce soit l’âme qui apparaisse aux regards de vos voyants,

les vivants ne devraient pas pouvoir être évoqués; car, pour apparaître, l’âme doit quitter le corps, et cela ne peut avoir lieu sans entraîner la mort. Or, M. Léon de Labordc a fait évoquer Cratlock sans qu’il s’en doutât, et sans qu’il ait cessé de vivre, quoique l’opération eût parfaitement réussi. Votre explication vous paraîtra peut-être inexacte, surtout si vous réfléchissez que les événements passés, les objets détruits, tels que meubles, livres, etc. , qui n’ont probablement pas dame au ciel, sont perçus comme les personnes. Leur accorderez-vous une âme ou type ontique ? Mais alors pourquoi n’avoir point évoqué des mânes de plantes, ou le spectre d’animaux célèbres, bien plus élevés dans l’échelle des êtres qu’une table ou un bonnet? Il y a là une lacune immense à combler; vous jugerez sans doute qu’il n’est pas indifférent de la laisser subsister.

Bornant ici cet aperçu, je vais envisager la question sous son aspect complexe.

C. Résumé. —Le tort commun des investigateurs sans principes, est de prendre l’exception pour la règle , et de conclure du particulier au général, au lieu de balancer le pour et le contre, et d’opter pour la majorité. Je vous dis ceci, parce que je crois que vous vous êtes trop hâté, que vous n’avez pas assez accumulé de faits, que vous avez spécialisé vos recherches au lieu de les étendre pour pouvoir comparer ensuite les résultats.

Dans les sciences physiques, où tout est mathématique, on peut induire d’un seul fait, s’il est bien observé, la loi qui régit ses pareils. Ainsi la chute d’une pierre a servi à déterminer la course des as-

trcs. L’nnalyse d’un sel donne la formule du genre entier. Soit un sulfate, par exemple ; si l’on trouve que l’oxygène de son acide est à celui de sa base : : 5 : i; on peut conclure que la même proportion existe dans tous les autres. La même chose a lieu en mécanique, en géométrie, etc. ; j’abrége les détails.

11 en est autrement pour les sciences naturelles; leurs lois ne se déduisent pas de l’observation d’un fait, de dix même, mais de centaines et de milliers, parce que ces lois ne sont jamais absolues : cc ne sont que des généralités souffrant un septième d’exception , et quelquefois davantage. Les exemples abondent en zoologie, en botanique, en médecine; votre instruction me dispense d’en citer. Cette variabilité des phénomènes de la nature est un des plus grands obstacles au progrès de ces sciences, parce que chaque) système y trouve des éléments de confirmation. De là viennent les divergences théoriques que l’on constate déjà en magnétisme, et les qualifications de spiritualistes que se donnent gratuitement les uns, et de matérialistes, qu’ils attribuent dédaigneusement aux autres.

J’ai dû croire, en lisant votre livre, que la doctrine y exposée était l’expression des faits; mais maintenant que je vous ai vu à l’œuvre, que je sais commeut vous procédez, je suis persuadé du contraire. Nul, plus que moi, n’est convaincu de votre conscienciosité, et Dieu me garde de laisser planer l’ombre d’un doute sur votre loyauté; mais je ne puis méconnaître ni taire que vous errez. Partant avec une idée préconçue, vous avez choisi dans l’arsenal du somnambulisme les faits confirmatifs , et laissé de côté les circonstances contraires. De cette

façon , on parvient d justifier des énormités, et c’est ce que vous avez fait. Je ne puis mieux vous comparer qu’à un aimant extrayant de limaille hétérogène les parcelles de fer à l’exclusion de celles des autres métaux. Assis depuis peu au banquet magnétique, vous n’avez pris que des mets à votre goût, pensant que c’étaient les seuls bons. Quand on voit tant de beautés que les autres ne peuvent apercevoir, on a l’âme tellement pleine de délices , que les vérités d’un ordre différent ne la touchent point. Elle ne s’arrête plus qu’à ce qui la charme, et l’on finit comme cet astrologue qui voyait dans le ciel, et ne sut pas éviter le puits qui était à ses pieds.

Si je n’avais à craindre qu’à la longue ma critique vous contrarie, je vous dirais encore :

Ignorant le magnétisme pur et dans ses rapports multiples, le somnambulisme s’est présenté à vous comme un dada; vous l’avez enfourché, puis vous voilà parti à travers champs, dans cette plaine immense qu’on appelle l’inconnu. Dans votre précipitation extrême, vous avez marché sans avoir égard aux jalons déjà posés, sans respect pour les tentatives de laborieux examinateurs, du docteur Billot, entre autres, si admirablement contenu par le sagace Deleuze. De même vous avez négligé la mention des faits probants de l’histoire : celui de la pythonisse d’Endor, pour l’antiquité; et, dans les temps modernes, celui de Powleska. Les expériences d’Ach-med le magicien n’auraient-elles pas également pu servir de terme de comparaison? Vous avez préféré l’isolement ; je ne vous en félicite pas.

Doué d'instincts généreux, désirant le bonheur de vos semblables, l’idée d’un monde meilleur que celui-ci, où la souffrance est l'état normal du plus grand nombre, vous a souri, et vous l’avez présentée comme une fiche de consolation, un bâton d’espérance aux malheureux brisés de fatigue dans la route ardue de la vie civilisée; mais vous avez oublié la compensation des peines par la punition des méchants, sans quoi l’équilibre reste détruit, l’iniquité subsiste. Si vous persistez à dire qu’une pareille doctrine est » consolante » , je vous répliquerai : Oui...... pour les garnements dont elle assure l’impunité; mais pour l’homme vertueux, c’est une amère déception. D’ailleurs, cette considération cesse d’être scientifique, elle appartient à l’ordre religieux, et, sous ce rapport, le Christianisme ne suffit-il pas à tous les besoins?

J’ai trop de respect pour les travaux d’autrui pour nier les faits que vous avez produits ; mais autre chose est un fait, autre chose est son explication : l’un est un objet d’évidence, l’autre de théorie. Je ne puis douter des faits puisque vous les affirmez; mais j’ai mes coudées franches relativement à l’explication que vous en donnez ; car c’est un terrain neutre, où chacun peut s’ébattre à son aise. Eh bien ! que votre susceptibilité ne s’en alarme point : votre honneur n’est pas en jeu; je crois à la pénétration intime des esprits, à une communication de pensées entre vous ou les consultants, et vos somnambules !.....

Ne vous récriez pas avant que j’aie dit.

Les circonstances qui résistent à cette solution, peuvent s’expliquer tout aussi aisément par des créa-

tions imaginaires, ou associations d’idées, comme les rêves, les hallucinations, etc., auxquelles les somnambules les plus lucides sont sujets, et qu’ils donnent sans scrupule pour des réalités tangibles. Quelquefois ils reconnaissent leur erreur dans un sommeil subséquent, et la confessent; mais, le plus souvent, ils y persistent, et donnent créance, de la même manière qu’on prend un roman pour l'histoire, et que les- menteurs finissent par croire à leurs propres mensonges. Yous êtes trop instruit pour ignorer ces choses; or, si elles se présentent concurremment avec la vérité, ne doit- on pas être en garde contre elles ? Et à quel signe reconnaître le vrai, si ce n’est par l’accord, la concordance des

réponses?..... Celles que vous avez obtenues sur

Dieu, le diable, les anges, etc., divergent toutes.

Je passe sous silence les illusions et hallucinations nées de la volonté ou du désir des consultants, dont vous avez soin de réclamer des dispositions favorables , c’est-à-dire le souhait que l’épreuve réussisse, au lieu de les laisser dans la condition de neutralité qui seule permet de conclure rigoureusement.

Je prévois l’objection que vos lucides ont vu des choses, rappelé des circonstances auxquelles on ne pensait pas. Mais est-ce que tous les jours il n’arrive pas qu’on cherche à se rappeler une chose sans pouvoir y parvenir ?

Et, pour n’être pas présente à l’esprit, actuelle au souvenir, cette chose n’en est pas moins en nous, car nous la trouvons un instant après. Direz-vous que le somnambule ne peut pas découvrir dans l’esprit, où elle est bien, cette chose oubliée, par cela seul qu’on n’y pense pas? L’exemple d’époptes disant

des choses qu’on veut cacher, c’est-à-dire malgré la volonté, ne prouve-t-il pas a fortiori qu’ils peuvent voir à notre insu, ou sans notre concours, ce qui est en nous ? Les Anglais donnent à ce phénomène le nom de soustraction de pensées ou d’idées, par opposition à communication ou transmission, qui impliquent volonté de la part du magnétiseur ou du consultant.

Il faudrait, pour que je crusse que l’ombre d’un mort est eifectivement apparue à vos lucides, i° que ni personnellement, ni par images, ni par relations, ni par ressemblance de famille, ni par lieu de résidence , etc., ce mort ne fût connu du voyant, ni de vous, ni du consultant; 2° que, ainsi abstrait de tout rapport sensible , une description m’en fût donnée non en termes élastiques ou ambigus, mais caractéristiques, et préférablement par un dessin, afin que j’en puisse vérifier ultérieurement l'exactitude. Ainsi, un inconnu, Turc ou Japonais, se présente au somnambule *****, comment décrire sa demeure, comment peindre des choses qui n’ont point d’analogue chez nous, partant, point de nom dans notre langue? Qu’à cela ne tienne. Vite, du papier, un crayon, et un dessin fidèle confond l’étranger.

Voilà, voilà, monsieur, ce que demande la raison éclairée, pour preuve de la palingénésie; et j’ose dire que si vous suiviez une voie d’expérimentation ainsi tracée, vous n’auriez pas de plus fervent admirateur que votre très-humble serviteur,

HÉBERT (de Garnay).

Le Gérant : HÉBERT (de Garnay).

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

Athénée magnétique de Lyon.

Nous annonçons avec peine la fermeture de cet Alhénée qui nous semblait appelé à de hautes destinées, et à faire progresser la science du magnétisme. Fondé en i844 » ^ ava‘l cess¿ Peu aPr^s> mais ^ avait été rétabli dans le courant de 1846, à la suite du cours de M. du Potet, ce fervent apótre de la doctrine mesmérienne, et tout semblait lui présager un long avenir. Les événements politiques survenus, en détournant les esprits des paisibles études, ont été funestes à l’Athénée magnétique. Le nombre de ses adhérents, successivement réduit, n’a pas permis de continuer un enseignement public dont les fruits, nous n’en doutons pas, auraient fini par être précieux.

L’Athénée magnétique va donc suspendre les séances publiques d’expérimentation qu’il donnait gratuitement tous les quinze jours dans son local, grande rue Sainte-Catherine, 11. Nous espérons que cette suspension n’est que provisoire, et que cette académie ouverte au magnétisme se rouvrira, grâce au zèle de quelques hommes dévoués au progrès.

(Tribune lyonnaise.) tome vin. — N" 87. — 10 fêvribb 1849. 3

— Nos informations particulières confirment i espoir que l’Athénée va en effet être réorganisé. Le faux de la cotisation était beaucoup trop élevé pour un grand nombre de membres, dont cette seule considération a déterminé la retraite au moment de la crise financière de l'an dernier.

Société magnétologlqnc de Pari*.

La reprise de ses séances expérimentales a été, pour la Société magnéto logique, le point de départ d’une ère de progrès. Le nombre de ses membres s’est considérablement augmenté, et des expériences mieux faites, plus curieuses et bien expliquées, ont converti davantage d’assistants.

Parmi ces expériences, une surtout a fixé l’attention, non moins par sa précision que par sa rareté. Voici en quoi elle consiste :

Une jeu,ne dame, somnambule , mise en rapport avec une personne quelconque, devient immédiatement son Sosie. Elle reflète les gestes, l’attitude, la voix, et jusqu’aux paroles de scs interlocuteurs. Cbantert-on, rit-on, marche-t-on? Elle fait immédiatement la même chose, et l'imitation est si parfaite et si prompte, qu’on peut se tromper sur l’origine de l’action. L’identification est telle, que des étrangers , russes, polonais , allemands, dont les idiomes sont très-difficiles à prononcer, lui ont tenu des discours qu’elle a parfaitement reproduits. L’un d’eux, qui lui avait fait chanter un fragment d’hymne national, lui témoigna sa satisfaction en français avec un accent germanique très-prononcé; elle lui rendit son salut, en répétant le compliment

sur le même ton , et toute l’assemblée d’éclater de rire.

Ce phénomène, déjà observé par plusieurs personnes, notamment par M. Braid (voy. t. V, p. 209), est susceptible d’une application télégraphique, et peut devenir un des plus précieux moyens de communication de la pensée. Si l’on parvenait à établir que l’imitation est aussi parfaite à de grandes distances qu’à de petites, on arriverait à des résultats merveilleux. Ainsi il suffirait qu’un tel somnambule fût mis en rapport, soit directement, soit par un objet magnétisé, avec un orateur, pour qu’à l’instant où celui-ci parlerait, son discours et ses mouvements fussent traduits à des assemblées qui croiraient voir et entendre le personnage lui-même. Les discours d’ouverture des parlements pourraient de cette façon être connus simultanément dans la métropole et les colonies. Des artistes célèbres pourraient ainsi jouer sur plusieurs théâtres à la fois, et des professeurs renommés enseigneraient en même temps dans plusieurs universités.

Ce n’est là qu’une supposition gratuite ; mais le Télégraphe traumatique, dont il est parlé ci-après, lui donne un haut degré de vraisemblance. C’est à l’expérience à prononcer sur cette applicabilité nou* velle du somnambulisme magnétique.

Une série de mesures tendant à accroître l’influence et la considération de la Société, ont été prises récemment; de ce nombre est une décision qui oblige tous les membres à porter un signe distinctif de leur qualité.

Cette sorte de décoration consiste en une main

d’or, suspendue à la boutonnière par un large ruban frangé, de couleur amaranthe, dont ci-dessous la figure. Cet emblème est assez bien choisi, mais la forme ne nous en paraît pas heureuse. Pourquoi une main de femme? Celle de l’homme, qui représente la force, n’eût-elle pas été plus convenable ?

Considérée comme signe de reconnaissance entre les magnétistes, comme la croix l’est pour les Chrétiens , etc., cette décoration ne remplit le but que très-imparfaitement, puisqu’elle ne se porte que dans des réunions où chacun se connaît. Mais une interprétation différente pourrait peut-être en rendre l’adoption générale, et ce serait la solution d’un problème dont bien des gens se sont déjà préoccupés. Dût cette marque de ralliement ne point avoir l’approbation unanime, il est toujours bon que la Société en ait pris l’initiative.

L’élection des fonctionnaires, pour 1849, T‘ent d’avoir lieu. Le bureau est composé de

MM. PICHARD, président.

DUVAL et WINEN, vice-présidents.

CARRIER et COMBES, secrétaires.

MILLET, archiviste.

DUTHEIL, trésorier.

LETUR et FLEURY, censeurs.

Un des membres correspondants, M. Quénard, de Saron-sur-Aube (Marne), nous envoie la relation suivante des guérisons qu’il a obtenues en i8'|8 :

«Pauline Bernard, femme Bertain, âgée de vingt-cinq ans, était atteinte d’une maladie survenue à la suite d’une couche laborieuse. Depuis deux mois elle suivait les conseils d’un médecin qui pensait que le mal de celte femme venait d’un amas de sang fixé au côté gauche, car on y sentait une dureté. Il employa pour l’amollir desémollients, des bains, des tisanes rafraîchissantes, et tout ceci ne servit qu’à irriter la malade , et, de plus en plus affaiblie, à la suite d’une diète, elle no put plus sortir de son lit.

« Elle avait de temps en temps des convulsions occasionnées par des douleurs dans le ventre, et c’est dans cet état qu’elle se décida à consulter une somnambule. Aussitôt le rapport établi, la somnambule déclara que la malade avait beaucoup de vers en boule, qu’il fallait détruire ; qu’on devait d’abord réchauffer la malade, qui était toujours très-froide, et lui faire suivre un régime bien nourrissant. Elle prescrivit en outre un vermifuge, et au bout de deux jours on nous apporta soixante et douze vers , presque tous de la grosseur d’une plume à écrire. Puis successivement elle en rendit encore quelques-uns. Débarrassée de cette verminet le régime nourrissant produisit son effet, et, maintenant, quoique bien amaigrie encore, cette personne se porte parfaitement bien.

« Elle demeure à Plancy-sur-Aube.

« Joséphine Joigny, femme Levêque, atteinte de maux d’estomac depuis plus de huit ans, a été guérie en dix séances magnétiques, et par l’eau

magnétisée. On a constaté que ces maux d’estomac étaient causés par des vers; vingt et un furent rendus. L’eau magnétisée, aussilôt prise, produisait un mouvement nerveux dans les arliculations, et la malade en éprouvait un bien extrême. Elle jouit maintenant d’une bonne santé et demeure à Saron.

« M11' Lorcet, affectée d’un mal de dents continuel, avec redoublement aux époques périodiques, qu’elle ne pouvait presque plus supporter, a été magnétisée neuf fois. A la première séance, elle tomba en somnambulisme et fut immédiatement soulagée. Elle dit que son mal venait du sang, et-qu’il fallait neuf magnétisations pour la guérir ; ce qui s’est vérifié. Elle habite Saint-Quentin-le-Ver-ger (Marne).

« J’ai encore à citer Mrae Lajoie, soulagée d’une grande colique et de convulsions par des passes depuis la gorge jusqu’à l’épigastre. L’eau magnétisée fut employée, et comme les dents étaient serrées, pendant l’état convulsif on en faisait pénétrer quelques gouttes dans la bouche, ce qui fit cesser les étouffements. Cette personne demeure à Saron.

« Fergeux Berlin, bûcheron, âgé de cinquante ans, demeurant à Saron, a été guéri en quatre séances d’une courbature et d’une fluxion de poitrine. Cette cure a été ma plus belle et ma plus glorieuse, attendu que le médecin, après avoir employé vingt sangsues, cataplasmes, bains de siège et saignées, le malade n’en était pas moins sur son lit, pouvant à peine respirer et accusant un point de côté qui le faisait beaucoup souffrir. Je m’approchai de lui sans lui dire ce que j’allais faire; il avait une grande antipathie pour le magnétisme, et

n’aurait pas consenti à recevoir mes soins. Je iis donc semblant de sonder où était le mal en appliquant ma main tantôt sur l’estomac et la promenant de place en place afin de prolonger le temps, ayant toujours l’intention de faire pénétrer le magnétisme dans les parties que je touchais; enfin, au bout de dix minutes, le malade ferma les yeux et tressaillit par tout le corps en laissant échapper un profond soupir; puis il devint si calme que je le croyais mort, car il ne respirait presque pas. Je lui demandai s'il dormait, il me dit : oui. S’il était bien, il me répondit : oui. Enfin je continuai à l’interroger sur son mal : il m’assura qu’il serait guéri en le magnétisant encore quatre fois.

« Le médecin vint le lendemain pour voir si les sangsues avaient produit l’effet qu’il désirait : il fut bien content de voir son malade sitôt guéri. J’avais défendu qu’on lui dît que j’avais magnétisé le malade, et qu’on lui laissât croire, au contraire, que ses prescriptions étaient cause du résultat.

« Stéphanie Briet souffrait depuis longtemps d’une douleur très-vive dans une cuisse; je l’ai magnétisée quatre fois seulement. Elle devint somnambule à la première séance. Cette personne ne croyait pas du tout au magnétisme ; une demoiselle l’avait magnétisée quinze fois sans obtenir de résultat, et moi j’ai obtenu le somnambulisme dès les premiers instants et sans contact. Chose remarquable, elle avait une horreur très-prononcée des magnétiseurs et du magnétisme; mais, une fois qu’elle en eut ressenti les effets salutaires, elle eût voulu être magnétisée constamment.

« Elle est maintenant d’une lucidité très-rare;

cl le m'a annoncé la mort de doux personnes, et je vous parlerai de celte prévision dans quelque temps. Elle demeure également à Saron.

« Le nommé Raguier a élé guéri par mon somnambule d’une tumeur blanche au genou, répulée incurable. Il demeure à Clesle (Marne).

• Bécot, affecté de vomissements de sang qui reparaissaient Ions les deux jours, soigné par mon somnambule, est arrivé à un étal deparfaite guérison, car il travaille sans ilre aucunement gêné.

« Je vous enlrotiendrais bien d’autres guérison?, telles que coliques, maux de dents el de tète, mais l’on connaît bien ces résultats comme nombreux en maguélisme.

« Je donne, de temps à aulre, quelques séances expérimentales, afin de communiquer celle science, si utile el si belle, aux personnes que je crois capables de l’apprécier, et d’en faire usage. Je crois que c’est là le but de la société dont je fais partie, et j’y veux concourir autant qu’il dépendra de moi. »

Société dn Journal du maguélisme.

Assemblée générale annuelle (les actionnaires.

L'extrait suivant du rapport du gérant intéressant tous les magnétistes, l’impression en a élé votée :

Messieurs,

J’ai à vous rendre compte de ma gestion durant l’année 1848. Investi do votre confiance pour l’ad-

îninistration de la société, je devrais ine borner au seul exposé de sa situation; niais la solidarité qui 'existe entre le magnétisme et son organe m’engage à \ous présenter aussi le tableau de son état.

Les sciences ne s’étendent que pendant la paix; l’agitation des esprits leur est non moins nuisible que le trouble des rues. Sous ce rapport l’année qui vient de finir a été calamiteuse. Les événements politiques survenus en Europe y ont arrêté brusquement l’essor du magnétisme. Et quelque temps nos craintes ont été vives sur sont sort; car, la révolution de 1789 lui ayant fait faire une halte de trente ans, cellc-ci pouvait être suivie d’un effet pareil. Mais peu à peu la position s’est améliorée; nous avons pu rassembler les forces éparses de la propagande, et aujourd’hui nos sinistres appréhensions sont totalement dissipées.

C’est à sa diffusion dans toutes les classes sociales et à son extension en tous pays que le magnétisme a dû son salut dans ces tristes circonstances. S’il eût été, comme du temps de Mesmer, limité à la [•’rance et le patrimoine de quelques privilégiés, il aurait été enseveli une seconde fois. Vous verrez, en effet, que c’est ici qu’il a le plus souffert, et que la défection est venue du côté où elle devait être !•* moins attendue. Mais il a résisté à cette dure épreuve, et maintenant rien ne le fera plus rétrograder. Son progrès pourra bien encore être, ci ou là, ralenti, mais son triomphe est assuré: une entrave partielle ne saurait arrêter sa marche générale. Nous sommes arrivés aux résultats d’ensemble; s’il périclite ici, il fleurit là; si le riche l’abandonne, le pauvre le soutient. Il est devenu

partie intégrante des croyances populaires, el nul ne pourra l'en arracher désormais.

En s’éparpillant, le magnétisme a multiplié ses ressources : un grain produit un épi, et, si la récolte manque en un lieu . les autres y pourvoient. Ainsi, tandis que nos relations diminuaient en France, en Allemagne, en Italie, elles augmentaient en Suisse, en Russie, en Suède, en Belgique, en Angleterre, et surtout aux Etats-Unis, où la paix est jointe à la plus grande liberté.

C’est cet appui du dehors qui a préservé notre publication de la ruine qui a atteint les autres; car, sachez-le, messieurs, à Paris seulement, nous avons perdu plus de la moitié de nos abonnés.

Des contrées où nous n’avions eu jusqu’alors que peu ou point de rapports sont entrées tout à coup dans le mouvement mesmérien, et nous ont prêté un concours efficace.

L’Inde est venue peser d’un poids immense par les admirables expériences du Dr Esdaile, à qui la cause est redevable de tant de convictions et la science de si précieuses conquêtes. Là, grâce à sa persévérance, il est démontré pour tous que le corps, magnétisé,est sourd à la douleur; et l’instrument, bienfaisant ou cruel, peut maintenant lacérer Ifs chairs sans faire couler une larme.

Les républiques de l’Amérique centrale, initiées à nos doctrines par des médecins instruits ici, nous ont été aussi d’un puissant secours. Et pourtant leur participation à la vie magnétique est toute récente.

L’Amérique du nord est parcourue par des magnétiseurs nomades qui répandent partout la con-

naissance des faits du mesmérisme. Les uns, ne s’attachant qu’aux phénomènes du somnambulisme et de l’extase, tendent à la démonstration de doctrines philosophiques et religieuses, dont le livre de Davis est la manifestation principale. Les autres, plus judicieux, cherchent à faire comprendre l’utilité immédiate du magnétisme en l’enseignant comme principe de médecine domestique.

Dans la seule ville de la nouvelle Orléans, où M. Barthet est parvenu à constituer une société puissante de guérisseurs philanthropes, nos abonnés ont quadruplé. C’est maintenant, après Paris, la ville dû nous en avons le plus, et ce résultat étonnant est dû aux efforts de notre digne correspondant. Si chacun des partisans du magnétisme déployait le quart de son zèle, il n’y aurait pas, avant dix ans un seul bourg privé d’un représentant de l’art mesmérien. C’est, sans contredit, l’homme qui a le plus contribué au succès de notre œuvre à l’Etranger; et son dévouement est d’autant plus louable, qu’il n’est point actionnaire. En vous signalant sa noble conduite, j’acquitte une dette de reconnaissance à laquelle vous vous associerez tous.

L’Algérie, où l’art révélé par Mesmer est appelé à rendre de si grands services, a donné asile à de nombreux colons, pleins d’une sainte ardeur pour la science nouvelle. Nous avons déjà des preuves de leur prosélytisme.

La Grèce, la Syrie, la Turquie elle-même, adoptant nos principes, ont aussi fourni leur contingent. Et l’Espagne, jusqu’ici inaccessible à nos idées, a spontanément oiFert son tribut.

-Si, passant en revue les adhérents nouveaux,

nous considérons leur qualité, nous en trouvons beaucoup d’éminents. 11 suffit de nommer Malter, Franck, Gordon. Vous aurez remarqué avec joie les noms du savant Jobard et des D" Charpignon, Du-gnani, Perrier parmi nos collaborateurs.

Une chose que je voudrais vous taire parce qu’elle est affligeante, mais que vous devez connaître parce qu’elle détruit une illusion funeste : c’est que les personnes, sur le concours desquelles on devait naturellement compter, sont presque les seules qui nous aient abandonnés. Mais ce fait, qui nous a surpris, cessera de vous étonner, si vous considérez que pour beaucoup de ceux qui peuvent se faire soigner par la médecine, le magnétisme n’est qu’un amusement révocable; tandis qu’il est pour tous les malheureux l’art bienfaisant dont la pratique empêche d’aller à l’hôpital.

Puis, à tant de pertes la mort est encore venue ajouter ses ravsges ; jamais en aussi peu de temps la cause n’a perdu autant de soutiens. Aux décès qui vous sont déjà connus, il faut joindre celui de M. Loisson de Guinaumont dont je reçois à l’instant la nouvelle.

La presse, dont l’opposition même servait à l’infiltration de nos idées, est restée presque muette cette année. Absorbée par la politique, elle, a délaissé la science ; à peine si nous avons pu mentionner quelques mots échappés aux journaux.

La littérature magnétique, qui tondait à prendre un si vaste développement les années précédentes, s’est soutenue en Angleterre, mais elle a baissé ici, et l’Allemagne, toujours si féconde, n’a rien produit. M. de Beaumont vous a fait connaître le livre du

D' Poéti ; c’est la seule production italienne. Il n’a été rien écrit dans les autres langues.

L’active propagation faite parles sociétés magnétiques de Paris et de Lyon au moyen de leurs séances expérimentales a été presque entièrement suspendue. Que d’adhésions n’auraient-elles pas recueillies ! Et que de soins et d’efforts ne faudra-t-il pas pour réparer cette inaction forcée ! Le calme qui revient promet une prompte réorganisation de cette branche importante de la propagande.

Tel est, messieurs, le résumé de l’état du magnétisme dans le monde. J’ai cru utile de vous donner ces détails, afin que vous n’ignoriez rien de ce qui peut hâter ou retarder son avènement. . .

L’assemblée ayant entendu le rapport de la commission de surveillance, confirmatif de celui du gérant sur la situation financière de la Société, qui est plus favorable qu’il n’y avait lieu de croire, a adopté à l’unanimité les deux mesures ci-après :

1° Emission de quarante des actions de réserve, (de 25 fr. l’une) pour donner de l’extension au Journal par la publicité.

Le nom des nouveaux actionnaires sera, comme celui des premiers, inscrit sur la liste générale publiée dans le Journal. Les statuts de la Société seront envoyés aux personnes qui, désirant concourir au succès de l’œuvre, en feront la demande.

2° A partir de ce jour, le prix des six premiers volumes de la collection est réduit de moitié en faveur des abonnés pour l’année courante, ce qui

porte le tome Ier à......^ fr.

et les 2e, 3*, 4% 5*, 6e chacun à. . . 2 * 5o c.

Cette réduction est la plus large qu’on pût faire; la Société a cru pouvoir ainsi mettre à la portée de tous une collection qui est unique par sa durée: quiconque voudra s’instruire le pourra désormais aisément.

Hôpital mcsinériqiic «le Calcutta.

1" Journal des traitements faits de noybmbbe 1840 a mai 1847; suivi de rapports officiels, etc., publié par le gouvernement.

§ 1. — CAS DE CHIRURGIE.

(Suite.)

5° Cure radicale d’hydrocèle.

Chand khan, un des individus exposés au froid le mois dernier (voy. t. V, p. 274)» pour connaître l’effet d’une basse température sur le sommeil magnétique, fut examiné avec soin le 1er janvier 1847. Je trouvai que sa tumeur était en grande partie liquide, qu’elle provenait d’un hydrocèle, et n’exigeait point l’excision. Je lui fis la ponction, et l’injection habituelle eut lieu sans signe apparent de sensibilité. Le malade s’éveilla de lui-même au bout d’un temps considérable; il dit que rien ne l’avait troublé,, et qu’il ne sentait de douleur nulle part. Prié de se lever et de montrer son mal, il fut très-surpris de voir le lit mouillé et sa tumeur considérablement diminuée. On lui montra le trou du trocar, en disant que probablement la poche s’était crevée durant son sommeil ; il parut accepter cette solution vraisemblable du problème.

C’est pour l’histoire physiologique des cas de

celte' sorte que je relaie ces particularités , et non pour prouver l'insensibilité au couteau, puisque l'opération ci-dessus n'est qu'une piqûre. Mais tout médecin sait que le premier contact de l’injection excitante avec les nerfs spermatiques est suivi d’une douleur aiguë , souvent très-grande , qui se propage jusqu'aux reins, lih bien, dans tous les cas que j'ai opérés, cl il n’y en a pas eu moins d’une douzaine, cette première douleur n'a jamais été sentie.

Les malades ne souffrent qu’au bout de*dix heures, lorsque l'inflammation artificielle commence.

Mais ce n’est pas là tout ce qui ressort de celte simple opération. Cinq ou six jours après, quand la fièvre consécutive a baissé, on trouve que le patient peut être aisément rendormi. La partie enflammée est encore très-sensible, et la moindre pression cause une vive douleur, mais dans le sommeil on peut toucher, presser même fortement, sans trouver vestige de sensibilité, et pourtant cet état revient dès que le sommeil est dissipé. Cette affection est assez commune pour que chacun puisse répéter l'expérience ; avec des observateurs candides, il me suffirait de ce seul phénomène pour prouver la réalité et la puissance du mesmérisme.

Ayant vu plusieurs fois l'inflammation artificielle suspendue sous l’influence du sommeil, j'en inférai la possibilité de combattre l’inflammation naturelle pur le même moyen. Hienlôt une orchite double se préscnla, l'individu fut magnétisé, et un sommeil de vingt-quatre heures, interrompu

fréquemment parle réveil spontané, triompha totalement de cette inflammation. Je mentionne ce fait seulement pour montrer ce qu’on peut obtenir dans des conditions meilleures, lorsque la personne est susceptible d’un plus haut degré d’influence.

4° Hypertrophie du scrotum.

Bhoyrub Doss, blanchisseur, âgé de quarante-trois ans, et demeurant à Dingavanga.cn Calcutta, est affecté d’une de ces tumeurs si communes dans l’In3e, depuis environ seize ans. La sienne est deux fois plus grosse que la téte d’un homme. C’est un curieux exemple d eléphantiasis, affectant seulement un côté du corps. La jambe et le bras du côté gauche ont pris un volume considérable, et le mal est renfermé dans ce même côté du scrotum, de telle sorte que le raphé sépare l’endroit malade de la peau saine. Le lestis sinister est enflé, la peau en est rude et épaisse, tandis que celle du côté sain est dans son état normal.

20 mars. — Pouls, 98; respiration , 18 par minute. Cet homme devra être magnétisé tous les jours, une heure et demie.

21 mars. Il n’a pas dormi aujourd’hui. Je lui fis inhaler de l’élher sulfurique pendant une heure à peu près, sans effet sensible; cependant, une demi-heureaprès,il se plaignit d’étourdissements et d’af-faibissement dans la vue, puis il tomba en somnambulisme , alors il cessa d’inhaler, et demanda la permission de se coucher. Au bout de quelques secondes, il fut ¡insensible aux piqûres que je lui fis à la jambe, mais la sensibilité reparut immédiato-

ment, quoique l’on eût repris l'inhalation. Je n'ai pas réussi dans une douzaine de cas successifs depuis mes premières et heureuses expériences avec l’éther, et certes on ne peut répondre du succès avec les appareils qu’on emploie ici, c’est pourquoi j’en ai fait faire un comme ceux en usage en Angleterre ; lorsqu’il sera prêt, il sera essayé d’une manière convenable.

22 mars. Il a été affecté partiellement; ses bras et ses jambes furent plusieurs fois soulevés en l’air, et violemment rejetés sur le lit sans aucun signe de mouvements volontaires. Il ne parut pas non plus éprouver d’émotion lorsqu’on le piqua; mais lorsqu’on lui releva, par un mouvement brusque, la tumeur vers l’abdomen , il s’éveilla.

24 mars. Il a été tout à fait indifférent à tous les essais d’insensibilité auxquels on le soumit. Son pouls était de cent huit, et sa respiration de vingt-quatre par minute.

mars. L’opération a eu lieu en présence de beaucoup d’Européens et de gens du pays. Le testis sinister étant évidemment malade, a été enlevé sans être disséqué, et nous vîmes qu’il avait été converti en un sac plein d’eau. Aucun tremblement ne fut perceptible dans le corps du malade, du premier au dernier moment.

Après qu'on l’eut bien lavé, et couvert d’un drap frais, on le réveilla non sans quelque difficulté. Questionné, il ne parut pas avoir conscience de ce qui lui était arrivé; il dit qu’il se sentait comme, à l’ordinaire et qu’il était prêt à être opéré si cela me plaisait.

5° Tiiini'itr caru/titftiieute.

9.1) mars. La femme Hurlo, paysanne de vingt-cinq ans, est venue de Chinsurah , endroit éloigné de vingt-cinq milles, lillc souffre depuis environ deux ans d’une tumeur cartilagineuse de chaque oreille ; la gauche est la plus grosse; elle pèse à peu près une livre. Il y a aussi une petite excroissance dans l’intérieur de l’oreille droite. Le mal est venu de ce qu’on lui perça les oreilles pour y passer des anneaux; il commença par une excroissance semblable à une verrue. Cette femme jouit d’une très-bonne santé. Elle est un exemple remarquable d’une sensibilité naturelle à l'influence magnétique.

On la magnétisera une heure et demie chaque jour.

Le 3o elle parut être profondément cntrancée. Ses membres étaient entièrement flexibles, et on la secoua presque avec rudesse sans qu’elle en parut émue. On lui enfonça une épingle dans le bout du nez, et on ne l’en retira qu’après l’y avoir laissée quelques secondes. Ses dents étaient serrées, et l’on ne put les entr’ouvrir qu’avec difficulté. On lui secoua fortement les oreilles; on marqua d'encre la tumeur du côté gauche , pour indiquer le contour du cartilage naturel, et tout cela sans qu’elle eût l’air de le ressentir. On aurait pu l’opérer aujourd’hui, mais un premier et attentif examen est autant de temps et de puissance perdus; c’est ce qui fit remettre l’opération à demain.

L’opération fut faite le 51 à midi, en présence

d’un grand nombre d’Européens et d’indigènes.

Les trois tumeurs furent disséquées sans précipitation et sans exciter le plus léger tremblement dans tout le corps de la femme, ni la plus légère contraction sur ses traits. Environ dix minutes après que tout fut terminé, je la réveillai, elle n’eut aucune conscience de ce qui lui était arrivé, jusqu’à ce que, se voyant dans un miroir qu’on lui présenta, elle se trouva bonne mine. Elle ne ressentit pas de douleur dans les oreilles, et ce ne fut qu’une demi-heu re après qu’elle comprit avoir été opérée.

6° Hypertrophie du scrotum.

Sonatun Mahetic, laboureur, âgé de trente-deux ans, est venu, le 25 mars de Budrock, Zillah Cut-tack. Il a fait environ onze milles par jour pendant quatorze jours. Il a une tumeur scrotale depuis dix-huit ans à peu près, et une de ses jambes est affectée d’éléphantiasis. Le volume de la tumeur est à peu près trois fois celui d’une tète d’homme. La santé de Sonatum est considérablement affaiblie. On le magnétisera tous les jours pendant une heure et demie.

Le 27, il s’est trouvé complètement sous l'influence mesmérique. 11 ne fut nullement agité lorsqu’il fut touché rudement et légèrement piqué.

Le 28. Profondément entrancé, ayant les membres flexibles, on les lui tire violemment sans le réveiller.

Le 29. Mêmes apparences et mêmes résultats que la veille.

Le 3o. La trance mesmérique est assez forte

pour, sans l’éveiller, lui enfoncer une épingle dans le bout du nez et l’y laisser quelques secondes sans la retirer

Le 3i. 11 n’a pu être entraneé aussitôt qu’à l’ordinaire.

A midi, tant que j’examinai la femme Huro, qui était dans la même salle, il fut agité d’une manière inaccoutumée, et ne s’endormit pas. Les spectateurs furent admis; une demi-heure la salle avait l’air d’une foire. Ayant fini avec la femme Huro, j’examinai encore Sonatum, et je le jugeai en état d’être opéré, ce qui eut lieu de la manière ordinaire, maison dut enlever les testes, parce qu’ils étaient atrophiés et inutiles. Quoiqu’il fût extrêmement agité pendant qu’on coupait les ligaments, son sommeil n’en fut pas interrompu, et quand la masse fut tombée il rentra dans un repos semblable à la mort. Lorsque toutes les artères furent liées et toutes les traces de l’opération disparues, on dit au magnétiseur de cesser son action. Un quart d’heure après, Sonatum s’éveilla spontanément. Questionné, il dit qu’il n’avait pas même été troublé par un rêve. Environ une minute après son réveil, il dit quil sentait quelque chaleur au scrolum; y portant la main, il s’aperçut alors qu’il avait été opéré.

II n’était certainement pas prudent d’opérer dans de telles circonstances ; mais je désirais faire voir combien est irrésistible la puissance, même dans les conditions les plus excitantes et les plus défavorables, une fois que l’organisme a été profondément influencé.

{La suite au prochain numéro.)

VARIÉTÉS.

Fille électrique. — Le même M. lloger, dont M. Charpignon a relevé les erreurs volontaires dans un de nos précédents numéros, écrit dans le Constitutionnel.

« 11 paraît que la population de la commune de Guillonville, canton d’Orgères, est toute en émoi depuis quelques semaines, par suite des prétendus miracles d’une jeune fille électrique. Cette fille, âgée de quatorze ans, domestique de ferme, d’une intelligence bornée, serait (dit la chronique), douée d’une force d’attraction très-extraordinaire, à l’endroit des meubles ou autres objets qui l’entourent. La première fois qu’on reconnut les effets de cette singulière faculté, la petite paysanne était en train de bercer un des enfants de ses maîtres : tout à coup les deux portes d’une armoire fermée à clef s’ouvrent toutes seules, et le linge qu’elle contenait est jeté à travers la chambre , comme lancé par une main invisible. Au même instant, une pelisse qu’on avait posée sur un lit voisin, enveloppe la berceuse, et se fixe sur elle assez fortement pour qu’on ait de la peine à l’enlever.

« A partir de ce jour les preuves de cette puissance attractive allèrent se multipliant d’une façon

merveilleuse, au grand dommage de l'électrique servante; tantôt, en effet, c’est un collier de cheval qui vient se placer sur scs épaules, tantôt des corbeilles de pain qui lui tombent sur la tête; tantôt encore un sac vide qui la coiffe et la recouvre en entier, et cette tunique de Ncssus d’un nouveau genre se colle à son corps sans qu’on puisse la lui arracher. Est-elle dans une chambre, les meubles de danser et de changer de place, ainsi que dans un conte fantastique d’Hoffmann. D’autres fois, un peloton de fil va se loger dans son dos, et toutes sortes d’objets, bouts de chandelles, morceaux de viande, et (ceci devient plus grave) boucles d’oreilles de sa maîtresse, se retrouvent dans ses poches, et toujours, à ce qu’on raconte, par la seule influence de son pouvoir d’attraction et par la vertu de l’électro-magnétisme. Une femme du village, esprit-fort de l’endroit, se présente à la ferme, hochant la tête d’un air sceptique, et disant d’un ton de défi qu’elle ne croira que ce qu’elle verra ; peu de temps après, le chef de la jeune fille de se couvrir d’un plat, sans qu’on puisse deviner d’où lui vient cette coiffure inattendue.

« Tels sontles faits qui ont fort agité les habitants de Guillonville, et qui, grossis naturellement à mesure qu’ils se répandent dans les communes environnantes, font partout crier au miracle; nous en devons le récit à un honorable médecin du département d’Eure-et-Loir, que gagne malgré lui l’enthousiasme général, quoiqu’il semble n’avoir rien vu, de ses propres yeux vu, ce qui s’appelle vu. Lecteur bienveillant des articles scientifiques du Constitutionnel, il nous fait l’honneur de nous de-

mander une consultation médico-légale sur celle sorcière du dix-neuvième siècle.

« La réponse est facile : elle se trouve dans l’histoire d’Angélique Cottin, celle autre jeune fille électrique, dont on se rappelle peut-être les mésaventures, et qui vint à Paris il y a deux ans pour y jouer une comédie d’élcctro-magnélisme tombée au milieu des siillels d’un public éclairé. 11 ne sera pas sans intérêt do rapprocher ces deux histoires, qui s’éclairent l’une l’autre. *

La suite de l’article a pour but d’établir que les propriétés de la petite Cottin étaient feintes et observées par des sots.

M. Roger doit être de l’Académie, il en a l’esprit et le langage. La nature est bien sotte, n’est-ce pas, messieurs les savants? Elle est aussi une charlatane bien effrontée ; car il lui arrive de faire de ces tours adroits que vous ne comprenez point, c’est vrai, mais que vous reconnaissez tout de suite pour être œuvre de tromperie Illustrissimes savants, grands médecins, prenez bien soin de vos personnes. Pourquoi faut-il que vous ne soyez immortels que de nom ! vous auriez pu immortaliser vos erreurs de jugement, et perpétuer la sottise humaine. Vous accablez de vos dédains des gens simples, parce qu’ils constatent un fait singulier. Vous les outragez et leur jetez vos mépris, croyant aussi détruire les phénomènes qu’ils ont vus cent fois, de leurs propres yeux vus. Nous pourrions parier que la nalure a produit les faits que vous niez, et qu’elle les produira encore pour voire plus grande confusion. Mais que vous importent les démentis, vous marchez droit votre chemin, comme si la postérité vous

ullendail un boni do voire course. Eh! messieurs, vous avez nié lu circulation , el le sang circule; l'inoculation se pratique toujours, malgré l’opinion de vos pères. La vapeur règne en maîtresse; les aérolithes tombent comme jadis , malgré vos beaux mémoires sur ces impossibilités. Et ce magnétisme animal, qu’en dites-vous, nos maîtres? Ne s’avance-t-il pas à son tour? Vous l’avez cependant tué cent fois dans vos sublimes rapports.

Aujourd’hui nous pouvons vous dire : Les (ails observés chez la petite Cotlin viennent de trouver leur analogue à Guillonville, et eux-mêmes ne font que confirmer les phénomènes offerts par les deux Smyrniote9 dont nous avons précédemment parlé (Voy. t. II, p. ooo). Il en viendra d’autres plus surprenants encore, et un jour la science les reconnaîtra tous pour véritables. En attendant cette sanction, nous ne pouvons que répéter le refrain du banquet mesmérien :

Les corps savant«

Sont bien amusants,

Quelles drôles de gens Que les savants !

Depuis que le monde existe,

Pour eux j’en suis tout confus ,

Ce qu’ils ont nié subsiste,

Ce qu’ils ont prôné n’est plus.

Continuez, braves gens , niez tout ce que vous ne pouvez comprendre, ce rôle est le plus facile de tous, il ne demande point qu’on se fatigue l’esprit, il dispense de toute recherche, il donne un vernis d’hotmne capable jusqu’à ce que le masque

tombo et laisse voir la profonde ignorance. 11 y a déjà longtemps qu’on sait que vous n’avez que le litre et la forme du savant.

Ah! monsieur Roger, comme vous parlez bien! qucvous savez de choses ! combien nous sommes reconnaissants des lumières que vous venez de répandre sur un phénomène si rare! Sans vous on eût pu douter de son existence : vos raisons nous ont déterminé à penser qu’il est véritable.

Quel malheur que le? savants n’aient point fait le monde! Il n’y aurait nulle , tout se-

rait connu, tandis que les plus grands mystères de la nature restent encore à dévoiler. Allons, monsieur Roger, mettez-vous à l’œuvre ; cessez votre rôle de critique, découvrez quelque chose, ne serait-ce que le moyen de guérir le choléra, car vous êtes médecin. Et si vous découvrez si bien la fourberie où elle n’est pas, peut-être trouverez-vous le charlatanisme où il est réellement : dans le sein de la Faculté ; car il faut bien croire que l’erreur est parmi les gens qui prétendent, avec des opinions et des systèmes divers, être tous dans le vrai. C’est là, monsieur Roger, que vous devez porter votre scalpel; n’attendez pas que le cadavre soit trop décomposé... Mais vous n’êtes point de l’étoffe de M. Royer-Collard; celui-là, du moins, demandait qu’on examinât toutes choses , même ce qui parait invraisemblable. Il lui semblait que c’était le moyen d’éclairer les hommes : l’Académie ne fut point de son avis. Craindrait-elle la lumière?

Télégraphe traumatique. — M. Jobard nous

communique la relation suivante d'un lait dont il a déjà entretenu nos lecteurs :

« On lit dans un recueil d’anecdotes chinoises, qu’un ancien empereur, égaré dans une forêt, entra dans une cabane d’une pauvre femme et lui demanda si elle n’avait pas quelqu’un pour lui servir de guide. « Je n’ai, dit-elle, qu’un fds qui travaille dans un endroit reculé de la forêt; je vais l’appeler, il sera ici dans peu de temps. » La vieille prit une aiguille dont elle se piqua le bout du doigt, il en sortit une petite goutte de sang. « C’est bien, dit-elle, il va venir. » En effet, un quart d’heure après, on vit accourir le jeune bûcheron , qui, croyant sa mère en grand danger, à cause de la piqûre violente qu’il avait ressentie, s’était hâté de descendre de l’arbre sur lequel il travaillait, pour voler à son secours.

« La date de celte anecdote remonte à près de six siècles; mais depuis lors ce procédé paraît s'étre beaucoup perfectionné; on dit que lorsque deux amis veulent, en se séparant, rester en relations journalières, ils se présentent chez un chirurgien qui leur réunit Tes bras avec un bandage sofide, et Ira ■ çant deux triangles semblables sur les bras, il en soulève deux lambeaux de peau qu’il échange , en mettant l’un à la place de l’autre, tout en laissant un péduncule de chaque lambeau attaché au bras cToù il est extrait. Quelque temps après, quand Fad-hérence paraît être suffisamment établie, le chirurgien coupe les péduneufes et sépare les deux amis qui peuvent désormais correspondre ensemble à coups d’aiguille, d’après un alphabet conventionnel, «fui se compose de dtférente coups frappés

aux différents angles du triangle, lequel perd, dit-on, sa sensibilité à la mort d’un des deux pôles de ce télégraphe traumalique.

« La douleur que doit causer cette opération est la seule cause qui a pu s’opposer à la généralisation de ce procédé, peut-être aussi la rareté d’amis sûrs qui n’abusent pas de ce pouvoir pour martyriser leur consort, s’il leur arrive de se brouiller.

« Il peut encore arriver que, par l’habitude de penser l’un à l’autre, le cas d’obsession et de tym-panisation dont vous nous avez entretenu, se développe au point de leur rendre la vie sympathique insupportable. L’insensibilité produite par le chloroforme et la suppression de toute douleur pendant la guérison, comme pendant l’opération, pourront rendre ces essais plus fréquents parmi nous. Le métier de télégraphe humain pourrait d’ailleurs tenir lieu de gagne-pain à beaucoup de frères malheureux, dont l’un resterait dans la famille pendant que l’autre accompagnerait son chef dans ses voyages. »

Palingénésie. — Expériences curieuses de reproduction organique.

Dans le Dublin University Magazine de février 1846, on trouve un extrait d’un ouvrage d’OEtinger, intitulé : Pensées sur les deux facultés de penser et de savoir, et l’on y cite l’expérience singulière que voici :

Je découpai un peu de baume, le mis dans une cornue de verre, j’y versai de l’eau de pluie, mis la cornue en communication avec un vase très-grand, et la fis chauffer au réverbère, d’abord doucement

jusqu’à la vaporisation, ensuite plus fortement. Alors il passa dans l’eau une huile d’un vert jaune, qui surnagea sur toute sa surface, à l’épaisseur d’une lame de couteau de table. Celte huile prenait la forme de feuilles de baume innombrables, qui ne se mêlaient pas, mais restaient séparées l’une à côté de l’autre, chacune se dessinant parfaitement avec l’indication distincte de toutes ses nervures. Je laissai la cornue pendant longtemps, afin que tous ceux qui se trouvaient près de moi pussent la voir. A la fin je la secouai afin de la vider. Les feuilles alors se confondirent, mais dans moins d’une minute elles reprirent leur forme de la manière la plus distincte.

Peu de jours après avoir lu ce qui précède, je tombai inaltendument sur un phénomène semblable , dans une source où je n’aurais certainement pas cru devoir trouver quelque chose de semblable, savoir, dans les Causes célèbres de Pitaval, d’où Alexandre Dumas a tiré la plus grande partie de son ouvrage populaire les Crimes célèbres. Dans le XIIe volume se trouve un récit intitulé le Spectre ou PIllusion reconnue, où Pitaval, vers la fin, se laisse aller à quelque digression sur les illusions relatives aux fantômes, et il est singulier qu’il produise les expériences ci-après (qui ont beaucoup de rapport avec celles que nous venons de citer d’OE-tinger), pour prouver que les formes peuvent exister indépendamment des choses.

D’ailleurs, il est possible que l’apparition des spectres ait une cause naturelle par une autre raison. Les chimistes montrent que la Palingénésie, ou la résurrection des plantes, est fort possible.

D’habiles chimistes, en fort grand nombre, ont fait des expériences, par lesquelles, en mettant les cendres d’une plante dans une fiole, ces cendres s’exhalent, et s’arrangent autant qu’elles peuvent, selon la figure que leur a d’abord imprimée l’auteur de la nature. L’abbé de Yallemont, dans un traité qu’il a fait des curiosités de la nature et de l’art, enseigne le secret de faire cette Palingénésie. Il dit que le père Schot, jésuite, a assuré que dans le temps qu’il était à Rome il eut la satisfaction de voir cette rose qu’on faisait sortir de ses cendres, toutes les fois qu’on le voulait, avec un peu de chaleur. Le même auteur que nous avons cité enseigne le secret d’une eau minérale qui fait reverdir une plante morte qui a sa racine, et qui la met en même état que si elle poussait en pleine terre. De cette Palingénésie des plantes, on est venu à la Palingénésie des animaux. M. Digby, d’animaux morts, pilés et broyés, en a tiré de vivants de la même espèce. Mais rapportons ce que dit M. GalFarel, un très-habile chimiste. « M. Duchêne, dit-il, un des meilleurs chimistes de notre siècle, rapporte qu’il a vu un très-habile Polonais, médecin de Cracovie, qui conservait dans des fioles la cendre de presque toutes les plantes, de façon que, lorsque quelqu’un, par curiosité, voulait voir par exemple une rose dans ces fioles, il prenait celle dans laquelle la cendre du rosier était gardée, et la mettant sur une chandelle allumée, dès qu’elle avait un peu senti la chaleur, on voyait remuer la cendre qui s’élevait comme un petit nuage obscur, qui, après quelques mouvements, venait enfin à représenter une rose si belle, si fraîche et si parfaite, qu’on l’eût jugée être palpable et odo-

ranie comme celle qui vient du rosier. » Ce savant homme dit qu’il avait souvent tâché de faire la même chose, et que, n’ayant pu en venir à bout, le hasard lui avait fait voir à peu près le même prodige. Comme il s’amusait avec M. de Luynes de Formentières , conseiller du parlement, à voir la curiosité de plusieurs expériences, ayant tiré le sel de certaines orties brûlées, et mis la lessive au serein d’hiver, le matin il la trouva gelée; mais avec cette merveille, que les espèces des orties, leur forme et leur figure, étaient si naïvement et si parfaitement représentées sur la glace, que les vivantes ne lé-taient pas mieux, M. Duchêne, étant comme ravi, appela M. de Luynes, pour être témoin d’un spectacle si curieux ; et à la vue de ce prodige, il conclut en ces termes :

Ce secret nous apprend qu’encor que le corps meure,

Les formes font pourtant aux cendres leur demeure.

A présent, ajoute Gaffarel, ce secret n’est plus si rare, car M. de Claves, un des excellents chimistes de notre temps, le fait voir tous les jours. D’où l’on peut tirer cette conséquence que les ombres des trépassés qu’on voit souvent paraître aux cimetières sont naturelles, étant la forme des corps enterrés en ces lieux, ou la figure extérieure ; non pas l’âme, ni des fantômes bâtis par les démons, ni des génies, comme quelques-uns l’ont cité. Il est certain que ces apparitions peuvent être fréquentes aux lieux où il s’est donné des batailles, et ces ombres ne sont que les figures des corps morts, que la chaleur ou un petit vent doux excitent, et élèvent dans l’air. C’est une belle question, continue Gaffarel,

savoir si ces formes admirables, sorties des cendres des corps, peuvent servir d’argument infaillible de la résurrection ignorée de plusieurs philosophes.

'Extrait du Mécanic Magasine, janvier 484-0, p. 83.)

Fête de Mesmer. — L’organisation du banquet mesmérien se poursuit activement ; la lettre suivante vient d’ôtre envoyée aux personnes qui ont fait partie des trois précédentes célébrations.

Monsieur,

En l'absence de plusieurs de nos amis qui avaient ordonné le banquet mesmérien des années précédentes, je viens, chargé par un grand nombre de magnétistes, vous inviter à faire partie de la fiéte nouvelle, qui aura lieu le a3 mai.

Bien que nul cœur ne soit à la joie, c’est un devoir pour tout magnétiste de donner une marque d’écialant souvenir à la mémoire du plus grand bienfaiteur des hommes, notre maître Mesmer. J’espère que vous ne manquerez point à cette réuv-nion, car elle doit resserrer les hens qui unissent tousiles magnétiseurs et réchauffer leurs âmes.

J’ai l’honneur d’être, avec une parfaite consid«-ration, votre tout dévoué collègue. DU POTET.

Enseignement. — M. du Potet commencera demain son dernier cours de cette année. Les élèves du précédent cours sont invités à assister â celui-ci pour compléter leur instruction magnétique.

P. S. Le prix de la souscription est de 5 fr.

La liste sera close le 20.

Si vous avez quelque magnétiste à présenter, veuillez bien vous procurer une lettre d’invitation sans laquelle nul ne sera admis à la fêle.

Comme les années précédentes, les dames assisteront à celte solennité.

Un avis ultérieur fera connaître le lieu de la réunion.

O11 souscrit au hureau du Journal du Magnétisme, 20, rueNeuve-des-Petits-Champs.

Revue des Journaux. — L’infatigable M. de Rovère est allé planter le drapeau magnétique à Bar-sur-Aube, où il a donné trois séances de démonstration du magnétisme simple. Le Mémorial de cette ville a rendu compte de cette propagation d’une manière malveillante, mais le Progrès de CAube a accueilli, dans son numéro du 7 janvier, deux protestations desquelles il résulte que les choses se sont passées tout autrement que le Mémorial l’a raconté.

M. de Rovère vient de faire de très-belles cures, dont nous ferons prochainement connaître quelques-unes.

Le Gérant : HÉBERT (de Garnay).

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

HApital incsinérlqae de Calcutta.

4° Journal des traitements faits de novembre 181G a haï 1847; suivi de rapports officiels, elc., publié par le gouvernement.

§ 1. — CAS DE CHIRURGIE.

(Suile.)

7° Calcul vésical.

Bhugearuth, laboureur, âgé de trente-deux ans, est venu chez moi, le a avril, se plaignant de tous les symptômes de la pierre; il en souffre depuis deux ans, eta passé la dernière année, surtout, dans des souffrances continuelles. II marche avec la plus grande difficulté, il dort peu, et, lorsque cela lui arrive, cest quand il presse un de ses talons contre le périnée, ce qui donne quelque trêve à ses souffrances. Je le sondai, et je sentis une pierre. Il souffrit, et se plaignit beaucoup pendant tout le temps de l’examen. Il désira aller à l’hôpital.

II y est venu le 3. Son constant état de souffrance rend extrêmement douteux qu’on puisse le rendre insensible ; mais il a été résolu d’essayer, et il sera magnétisé tous les jours, pendant trois heures, en trois fois.

tome vin. - M° 88. — 25 février 1849. 4

Profondément endormi, ses bras tombent en catalepsie, et l’on peut fortement le secouer sans l’éveiller. Il ne sentait pas quand on le piquait ; mais il remuait les jambes, murmurait et faisait un mouvement en arrière, chaque fois que l’on piquait son mamelon droit. Il s’éveilla environ une demi-heure après qu’on eut cessé de le mesmériser.

Le 4- 11 fut insensible aux piqûres ; ayant introduit doucement une sonde dans la vessie, 011 sentit la pierre.

Il fut alors posé sur le bord de la table avec le matelas, une sonde fut passée dans la vessie et ensuite retirée. Deinde pili abrasi surit, et tout cela sans le réveiller. Toutefois, on observa quelques mouvements convulsifs dans ses traits. On le réveilla avec quelque difficulté, et quand on le questionna il dit n’avoir rien senti depuis qu’il s’était endormi.

Le 5. Ses bras étaient roides, particulièrement le gauche, et il les tenait croisés sur la poitrine. Je lui passai une sonde dans la vessie , et immise di-ffilum ia rectum, je sentis la pierre. Alors on le plaça dans la position usitée pour l’opération de la lithotomie, mais sans lui attacher les mains et les pieds comme à l’ordinaire ; on lui passa encore une sonde dans la vessie, on le maintint dans cette position quelques minutes, 011 la retira, et le malade fut recouché. Lorsqu’il 6e réveilla il dit qu’il n’avait rien senti.

Le6. L’opération eut lieu. On apporta le malade avec son matelas. On le posa sur le bord de la table, et on le plaça dans la position en usage pour la lithotomie, les bras passés autour des jambes, au-dessous des genoux. Aucune ligature ne fut

employée, et je recommandai qu’on ne le tînt pas. Avant de commencer, je le piquai imprudemment autour de l’anus, ce qui provoqua une contraction instinctive de l’anus et de la vessie, suivie de l’expulsion du loliurn autour delà sonde, mais il n’apparut aucun autre signe de sensation. Ce commencement n’était pas propice, et il aurait été mieux de remettre l’opération au jour suivant. Cependant, je continuai.assez inconsidérément. Ayant injecté la vessie, je fis l’opération. Nous ne vîmes aucun signe d’insensibilité, je crois, jusqu’à ce que mon doigt pressât la pierre contre le fond de la vessie; alors il commença à s’agiter, à se mouvoir, à se plaindre, et il continua tant que je cherchai à saisir la pierre (ce qui était assez difficile à cause de sa forme qui était oblongue). Il ouvrit les yeux au moment où la pierre passait à travers le bassin, mais sans reprendre ses sens. Quand tout fut achevé, il dit qu’il avait seulement l’idée d’avoir senti quelque chose céder dans l’intérieur et suivi d’une certaine chaleur au siège de la plaie. Comme aux magnétisations précédentes, il ne vit clair que quelque temps après avoir les yeux grands ouverts. La première chose qu’il vit distinctement fut la pierre qu’on lui présenta. Alors seulement, il s’aperçut de la présence des personnes qui étaient autour de lui. La pierre pesait une once et demie, et vingt grains. Avec un peu plus de patience, cette expérience eût été plus complète qu’aucune de celles qu’on ait vues.

Quant aux yeux insensibles aux objets extérieurs, quoique grands ouverts, et en apparence dans leur état naturel, qu’il me soit permis de re-

porter ceci au cas du somnambule Suroop. J’ai fréquemment observé le même phénomène avant qu’il se présentât dans les opérations, et j’en ai lait mention dans mon Mesniensm m India.

8° Hypertrophie du scrotum.

i"r avril. Shaik koochill, charretier, âgé de cinquante ans, résidant à karawa, vingtrquatre Pur-gunnahs. Il a une tumeur scrotale depuis huit ans. II doit être mesmérisé tous les jours pendant une heure.

Du 8. 11 est sujet à la ficvre deux fois par mois, et il en éprouvait un accès lorsqu’il fut reçu à l’hôpital, ce qui a retardé la mesinérisation jusqu’à ce jour. 11 dort profondément, ses bras sont flexibles et jetés sur le Ht.

On l’a piqué partout, on a arraché un poil de sa barbe, on a comprimé la tumeur plusieurs fois et on l’a relevée brusquement vers l’abdomen, sans qu’il en ait ressenti aucune impression.

Du 9. Mêmes apparences et mêmes résultats.

Du 10. L’opération est faite, le iestis dexter étant malade a été enlevé. Aucun frissonnement n’a été visible dans tout son corps, de la tète aux pieds, et il est resté immobile comme un cadavre pendant une demi-heure après, pendant que j’opérai sur un autre homme dans la même salle. Je l’éveillai alors. Il est inutile de dire qu’il 11e se rappelait rien de ce qui s’était passé. 11 ne ressentait aucune douleur en marchant, et il avait une grande disposition à dormir encore.

Du 28. Il n’a éprouvé aucune douleur de sa plaie

jusqu’à ce jour, et il n’y a aucune apparence qu’il doive souffrir désormais.

9° Hypertrophie du scrotum.

2 avril. Shaik Torab, laboureur, âgé de cinquante ans, résidant à Goorana, Zillah Ilooghjy, a contracte une tumeur scrotale, depuis vingt ans à peu près. On le mesmérisera tous les jours une heure et demie.

Le 6. Sommeil naturel.

Le 7. Les bras raides, insensibilité aux piqûres, etc.

Le 8. Profondément entrancé, on lui souleva les jambes plusieurs fois et on les laissa retomber sur le lit. On lui arracha un poil de la barbe; 011 lui piqua le mamelon droit à plusieurs reprises; sa tumeur fut découverte, leslisque compressas est, sans troubler son sommeil.

Le 10. Après avoir préparé Shaik Koochill, je me disposai à opérer cet homme. Il avait été depuis deux jours dans l’état le plus satisfaisant, et je conclus de là qu’il en était de même aujourd’hui. Il tressaillit cependant à la première incision. J’eus presque envie de ne pas continuer; mais espérant que la trance mesmérique ne cesserait pas, quoiqu’elle fût troublée, et qu’il ne conserverait aucun souvenir de ses souffrances apparentes, je continuai l’opération comme à l’ordinaire; mais bientôt il s’éveilla complètement, et éprouva peu d'avantages de sa trance magnétique. Le contraste entre cet homme et son heureux voisin Shaik Koochill est des plus remarquables. Il passa vingt-quatre heures

dans d'excessives souffrances, tandis que 1 autre n’en éprouva aucune. Ce pauvre garçon a souffert de ma trop grande confiance.

io° Hypertrophie du scrotum.

6 avril. Bonmallée Bhuttacharge, brahmine âgé de vingt-six ans, résidant à Sookchur, vingt-quatre Purgunnahs, est affecté d’une tumeur scrotale depuis neuf ans. Il ne fut pas mesmérisé jusqu’au i5, à cause d’une fièvre périodique à laquelle il a été sujet.

Le i3. Ses bras étaient flexibles et on les secouait sans le réveiller. Il fut pareillement insensible aux piqûres.

Le 14. H se réveilla lorsqu’il fut piqué au mamelon droit.

Le i5. Un bassin de métal fut jeté sur les dalles près de son lit. On le piqua partout le corps, sa tumeur fut découverte et relevée brusquement vers l’abdomen, sans l'éveiller.

Le 20. On le secoua fortement, il parut le ressentir, et en conséquence 011 fut obligé de le mes-mériser une heure de plus que le temps ordinaire. Après qu’il parut profondément entrancé, la tumeur fut secouée plusieurs fois, et il fut piqué partout le corps sans que cela excitât le moindre mouvement dans tout son système.

Le 21. Il parut être profondément entrancé, c’est pourquoi il fut conduit à la salle d’opération; on l’assit sur un lit qui fut placé dans un fort courant d’air, sans que son sommeil en fût aucunement troublé. Sa bouche, qu’on avait ouverte

avec difficulté, resta béante; mais bientôt il s’éveilla en sursaut, et dit que l’air entrant dans sa gorge l’avait réveillé.

Le 22. L’opération est faite. Vers la fin, le malade s’agita et poussa dos cris, mais d’une manière inintelligible. Cependant, lorsque la masse tomba, il devint parfaitement tranquille, et ne s'éveilla qu’après avoir été bien couvert d’un drap blanc, et que toutes les traces de l’opération furent disparues. Rien n’avait troublé 6011 sommeil, dit-il, et il se sentait, continua-t-il, comme à l’ordinaire; de plus, n’éprouvant aucune douleur nulle part, etc. Alors, on lui montra la masse de chair, qu’il reconnut; il dit que de la voir lui faisait mal. Une heure après, il n’éprouva plus aucune douleur dans la partie.

ii° Hypertrophie du scrotum.

i/| avril. Shaik Morad, tailleur, âgé de quarante ans, résidant à Sobhabazar, en Calcutta, est affecté d’une tumeur scrotale depuis iix ans. Il sera mes-mérisé tous les jours pendant une heure.

Le i5. Il paraît dormir du sommeil naturel»

Le 16. Ses bras sont partiellement en catalepsie; il était en quelque sorte insensible aux piqûres, mais il s’éveilla par l’jntroduction d’une sonde jusqu’à la symphyse du pubis-.

Le 17. On le piqua presque partout le corps pendant quelques minutes. La tumeur fut découverte, et rejetée,par une secousse, sur l’abdomen. On lui enfonça une épingle dans le bout du nez, et on l’y laissa quelques secondes avant de l’en retirer.

On lui arracha un poil de sa barbe, et on lui piqua plusieurs fois le mamelon droit. Cette dernière expérience paraît l’avoir éveillé. En voyant sa main tachée de sang, il dit que la piqûre qu’on lui avait faite à la main l’avait réveillé.

Le 19. Profondément entrancé, il fut soumis à différents essais d’insensibilité; un bassin de métal fut jeté avec bruit sur les dalles tout près de son lit, etc., etc., sans troubler son sommeil.

Le 26. Il a été plus facilement agité que pendant les deux derniers jours. Je crois que cela provient d’avoir été examiné trop tard, après deux heures de magnétisation. Aussi je l’ai pris une demi-heure plus tôt aujourd’hui; et, ne lui voyant aucun mouvement instinctif, j’ai pratiqué l’opération qui fut excessivement rude et fatigante, à cause de la rugosité de cette tumeur qui, d’après son caractère, était presque cartilagineuse. Testis unus fut disséqué, l’autre n’ayant pu être trouvé malgré une recherche prolongée. A un examen ultérieur on s’aperçut qu’il avait dégénéré en un simple sac de peau d’environ le volume d’une fève française (un haricot). Cet homme parut aussi agité vers la fin de l’opération ; mais il ne s’éveilla pas avant qu’il n’eût été couvert d'un drap blanc. Il ne s’aperçut pas qu’aucune chose lui fût arrivée. Il sentait le poids comme à l’ordinaire, dit-il, et de douleur nulle part.

Le 28. Il n’a éprouvé aucune souffrance depuis l’opération.

12° Hypertrophie du scrotum.

Ce cas est curieux et intéressant, en ce qu’il a

donne lieu à une série d’expériences inattendues, montrant le pouvoir à la fois anodin et narcotique du mesmérisme, et conséquemment ses vertus curatives. Il nous a montré aussi un phénomène mental extraordinaire, qui ne s’était pas encore présenté dans ma pratique mesmérique à Calcutta.

Je parle de l’invasion de l’état de veille par l’état de sommeil, que l’on verra dans ce cas et le suivant. Et pour montrer que ce n’est pas un phénomène accidentel, mais un symptôme spécifique de l’état mesmérique, je vais citer quelques cas dans lesquels j’ai observé ce fait à Hooghly. La première fois que je le remarquai, ce fut sur une dame que j’entrançai pour la première fois en dix minutes, dans l’espoir de la soulager d’un mal de tête nerveux et persistant. Je l’éveillai avec une grande difficulté, et elle fut très-honteuse d’avoir été, à ce quelle supposait, surprise à dormir par moi. Elle n’avait aucun souvenir de m’avoir vu précédemment dans la même journée. La migraine était disparue et n’est pas revenue. Plusieurs mois après, cette dame fut tourmentée par une de ses dents de sagesse qui ne pouvait percer, ce qui avait ulcéré et endurci la gencive et l’angle de la mâchoire. J’endormis cette dame, dans le but de profiter de la trance mesmérique pour faire une incision à la gencive malade. Je réussis comme la première fois, et je la laissai comme elle était sur son lit, dans le sommeil.

Environ deux heures après, elle se réveilla comme d un sommeil naturel, et alla pour arranger ses cheveux à la glace. Voyant du sang autour de sa bouche, elle appela son mari pour lui dire que l’abcès avait

percé pendant son sommeil, et clic s’étonna que je ne fusse pas venu ce jour-là, comme je 1 avais promis. Non seulement elle n'eut aucun souvenir de m’avoir vu dans la journée, mais il en lut de même pour tout ce qui lui était arrivé durant la demi-heure qui avait précédé la trance mesmérique. Quelques mois se passèrent, après lesquels je fus encore demandé par cette dame qui avait été si heureusement guérie. Elle éprouvait alors de cruelles coliques (afier pains.)

Je l’entrançai aussi aisément que dans les occasions précédentes, et la quittai. J’y retournai une heure après, et la trouvai encore endormie ; mais elle s’éveilla quand je la touchai et que je lui parlai. Elle me dit qu’elle avait eu un sommeil rafraîchissant; que la douleur était passée, et qu’elle se sentait beaucoup de force. Je plaçai mes doigts devant ses yeux, une minute ou deux, et elle s’endormit de nouveau.

Elle dormit deux heures; à son réveil, elle n’eut aucun souvenir de notre dernière conversation. Cette dame fut seulement mesmérisée ces trois fois, et, à chacune, ce phénomène mental se produisit.

Le docteur Bedford ayant vu un ulcère qui envahissait toute la tempe droite d’une femme, le couvrit d’acide muriatique pendant que la malade était dans la trance magnétique. Elle n’en sentit aucunement l’effet. Etant revenu à mon hôpital, dix jours après, il me demanda la permission de toucher le mal avec l’acide, pendant que la femme était dans son état naturel. Quoi que je pusse penser do cette demande, j’y consentis : il loucha l’ulcère

avec le bout d’un bouchon de cristal humecté d’acide. La femme s’écria presque immédiatement que sa tête était en feu, et elle courut à travers la salle, éperdue de souffrance. Comme le meilleur adoucissement que je pusse lui procurer, je la mesmérisai. Je fis une opération sur elle dans cet état; quand elle s’éveilla, elle n’eut aucun souvenir d’avoir été cautérisée.

Le 4 mai. Myzoodeen, un Khidmulgar, âgé de vingt-cinq ans, résidant à Kalitollah, Zillah Hoo-ghly, a une petite tumeur scrotale depuis deux ans. Il vint, comme à l’ordinaire, avec une fièvre survenant deux fois par mois, au changement de lune. Il sera mesmérisé une fois par jour pendant une heure.

Le 5. Dormant profondément, ses bras étant flexibles, on les fit aller de côté et d’autre; on lui pinça le mamelon droit plusieurs fois, testes com-pressi sunl, et on le soumit au plus faible pouvoir d’un appareil électro-magnétique, sans qu’il en ressentît aucun effet. Alors la puissance de l’appareil fut portée au second degré, qu’un homme robuste ne peut supporter qu’avec une grande difficulté seulement quelques secondes. Il s’agita simplement comme un homme sous l’influence d’uu rêve pénible, et lorsqu’il s’éveilla, peu de minutes après, il dit qu’il n’avait été troublé par rien pendant son sommeil.

Le 6. Profondément entrancé, il fut soumis pour la seconde fois à l’action de la machine électro-magnétique, portée au second degré, sans montrer aucun signe de mouvements volontaires.

Il s’éveilla environ une demi-heure après, et dit

qu’il n’avait été troublé par rien dans son sommeil.

Le 7. 11 soutint très-bien l’action du même appareil, avec la batterie portée au troisième degré, pendant quelques minutes.

On l’assit sur son lit, et on le renversa soudainement dessus. On lui ouvrit aussi les yeux, et tout cela sans interrompre son sommeil. On le laissa dormir.

Le 8. 11 fut endormi sur une charpaie divisée, dont la partie inférieure était retirée. Ses jambes furent placées sur deux chaises, et la tumeur fut découverte. Avant de commencer l’opération, il fut piqué avec un bistouri, ce qui le fit tressaillir. Le son rendu par un bassin de métal jeté sur les dalles, tout à côté de son lit, lui fit faire aussi un mouvement soudain. Alors on jugea prudent de remettre d’un jour l’opération.

Le 9. L’opération a eu Heu aujourd’hui, aucun signe de sensibilité n’est apparu jusqu’à ce que j’eusse presque disséqué le testis aller. Alors il eut des mouvements convulsifs, sans cependant essayer de croiser les jambes et de mettre obstacle à mes opérations^ Comme je faisais les dernière» incisions, il poussa des cris aigus, et il tressaillit pendant la ligature des artères. Je dis à l’élève de continuer à le mesmériser, et en peu de minutes il fut entrancé de nouveau. Une demi-heure après, le magnétiseur ayant cessé de l’actionner, il s’éveilla de lui-même, et dit qu’il avait dormi profondément depuis dixbeures et demie; que rien ne l’avait dérangé dans sou sommeil, et qu’il n’éprouvait de souffrance nulle part. Il n’eut pas plus tôt achevé ces mots qu’il s'écria 2 » Il y a do la chaleur entre

mes jambes, oh! cela brûle! Qu’avez-vous mis sur moi, Dr Sahib? » lit il parut éprouver une vive souffrance. Je le fis aussitôt mesmériser, et en moins de dix minutes, il fut rendormi profondément. A ce moment, le Dr Veitch entrait dans la salle, je lui dis ce qui venait d’arriver, et que j’espérais qu’à son prochain réveil, cet homme ne conserverait aucun souvenir ni de l’opération, ni de la souffrance qui en avait été la suite. Il en fut ainsi. 11 se réveilla encore comme d’un sommeil naturel et rafraîchissant. 11 nous dit que rien ne l’avait dérangé depuis qu’il s’était endormi comme à l’ordinaire, et qu’il ne souffrait nulle part. Dans ce moment, on soulevaledrap pourvoir si l’hémorrhagie avait cessé; alors, seulement, il commença à comprendre que l’opération avait été faite. Pendant qu’on enlevait quelques vases, M. Lindssedt, le maître du patient, arriva. L’homme lui répéta ce que je viens de dire. Après qu’il fut pansé, on le laissa aller au sommeil. Je proposai aux personnes présentes de faire une troisième expérience, si elles voulaient en attendre l’issue; ces messieurs y consentirent. L’homme fut encore mesmérisé. Au bout d’un quart d’heure, il fut entrancé pour la troisième fois, et je lui arrachai un poil de sa moustache sans qu’il parût s’en apercevoir; j’eus beaucoup de peine à l’éveiller. En réponse aux questions de son maître, il dit qu’il s’éveillait dans ce moment, et sentait très-bien qu’il n’avait pas vu son maître déjà dans la journée, ni le Dr Veitch, ni moi-même, etc. ; en un mot, ce qui s’était passé depuis l’heure et demie qui venait de s’écouler, et où il avait eu une si grande part, n’avait laissé aucune trace dans son esprit.

i3° Hypertrophie du scrotum.

Le 10 mai. Gopaul Doss, un Sirdar porteur, âgé de quarante ans, homme grand et très-musculeux, est venu de Ballessur, ayant fait vingt-quatre milles par jour, pendant cinq jours. Il est affecté d’une petite, tumeur depuis cinq ans.

Il sera mesmérisé une heure et demie par jour.

Dormant profondément, ayant les bras en catalepsie, sa tumeur fut exposée et rejetée plusieurs fois. Il fut ensuite soumis par M. Siddons à l’action d’un électro-magnétique disposé au deuxième degré, puis au troisième, chaque fois pendant environ deux minutes et demie, sans manifester les moindres mouvements volontaires. On le plaça sur scs pieds, etil dormitainsi un moment. On le porta ensuite sur son lit et on le laissa dormir.

Le ii. Il a été électrisé aujourd’hui en présence du Dr Jackson, sans plus d’effet qu’hier.

Le 12. L’expérience a été répétée en présence de M. Halliday, du major Sage, de M. Simms et de M. Fraser.

Le i3. L’opération a été faite aujourd’hui, et toutes les parties sauvées. Il est étendu comme un cadavre. Un testis était converti en hydrocèlc, on le laissa jusqu’à ce que tous les vaisseaux fussent liés. J’ouvris alors le sac, et je pus prendre le temps d’extirper la tunique vaginale épaissie, et il fut aussi indifférent qu’à la première partie de l’opération. Il s’éveilla peu à peu, à l’aide de l’air, dans une demi-heure. Quand tout fut terminé, M. Kemp, qui est un savant distingué bingali, le questionna

minutieusement. Il était clans une ignorance absolue de tout ce qu’on lui avait fait. Il répondit avec répugnance, et il désira se rendormir. Je mis mes doigts sur ses yeux pendant une minuto; quand je les relevai, il était endormi. Je réclamai alors l’attention de MM. Kemps, les avertissant qu’il était probable qu’à son second réveil, il aurait totalement oublié le premier : c’est ce qui arriva. Nous le réveillâmes; il dit qu’il n’avait vu aucun de nous dans la journée, avant l’instant présent, et qu’il se sentait comme à l’ordinaire.

Le 14. La douleur, depuis l’opération, a été peu do chose.

i/,° Hypertrophie du scrotum.

Le 15 mai. Ramesur, laboureur, âgé de trente-cinq ans, résidant à Talowladaspore, Zillah Burd-wan, a depuis douze ans une tumeur scrotale do moyenne grosseur. Ses deux jambes sont affectées d’éléphantiasis; il a été sujet à la fièvre périodiquo ordinaire, venant deux fois par mois; mais, maintenant, il l’a seulement une fois en six mois. On le mesmérisera une heure et demie par jour.

Le 17. On n’a pu déterminer le sommeil aujourd’hui.

Le 18. Dormant profondément, on découvrit sa tumeur, et on la secoua plusieurs fois. On lui pinça aussi le mamelon droit à différentes reprises, sans interrompre son sommeil.

Le 19. Paraissant être dans le sommeil magnétique, il fut soumis à l’action de l’électro-magné-tique, la batterie portée au deuxième degré, ce

qui amena des mouvements convulsifs dans ses bras. Les personnes qui l’entouraient en furent atteintes. Lorsqu’il s’éveilla, environ une demi-heure après, il dit n’avoir été en aucune manière troublé dans son sommeil.

Le ao. Profondément entrancé, il fut piqué partout le corps pendant plusieurs minutes, et sa tumeur fut plusieurs fois secouée avec force sans troubler son sommeil le moins du monde.

Le 21. Il a été opéré aujourd’hui. TJnus testis était atrophié, il fut enlevé, l’autre a été sauvé. II ne lui est échappé ni cri, ni soupir ; et les seuls mouvements visibles dont on se soit aperçu ont été quelques légères contractions dans les doigts de pied et dans la face. Après qu’on eut lié tous les vaisseaux, et qu’on l’eut couvert d’un drap blanc, je le réveillai. Il dit qu’il ne sentait de douleur nulle part; qu’il étaitcomme à l’ordinaire, et était prêta être opéré.

Le 23. Il n’a ressenti aucune douleur depuis l’opération.

g 2. — CAS DE MÉDECINE.

10 Engorgement glanduleux.

Du a3 décembre 1846. Miss Gordon, âgée de dix-huit ans, lymphatique, souffre depuis deux ans d’un engorgement des glandes, qui occupe tout le col. 11 en résulte une très-grande difformité, qui ne pourrait être exactement représentée que par un dessin. Une glande située à l’angle de la joue est grosse comme un œuf, et la chaîne qui s’étend de

l’oreille à l'épaule est gonflée à la hauteur d’un travers de trois doigts, ce qui empêche tout mouvement de ce côté. Il y a aussi trois glandes isolées qui sont engorgées au sommet du triangle du cou, et une, à la base, a le volume d’une grosse bille de marbre. La sensibilité est très-vive dans la plupart de ces glandes, quand on les presse, et toutes sont extrêmement dures. Les menstrues sont irrégulières. La malade n’a éprouvé aucun soulagement de divers traitements médicaux.

Elle devra venir tous les jours à l’hôpital pour y être mesmérisée.

Du 18 janvier 1847. Elle a été magnétisée tous les jours, une heure, localement et généralement. Les glandes sont sensiblement amollies, et quelque peu réduites.

Du 29. Elle se sent généralement portée au sommeil magnétique, et elle y a passé quelquefois. Les glandes sont de beaucoup diminuées; celle de l’angle de la mâchoire n’a plus que le tiers de son volume primitif. La plus grande partie de l’arc qui, naguère, empêchait tout mouvement est disparue, et la malade tourne la tête avec peu de difficulté de ce côté. Les trois glandes du triangle du cou ont disparu dernièrement, et, selon toute apparence, le reste se résoudra promptement aussi.

Les règles sont plus abondantes.

20 Rhumatisme articulaire chronique.

Wulleemahmood, batelier, âgé de trente ans, natif de Chittagong, a été admis le i4 janvier 1847. 11 souffre depuis cinq ans d’un rhumatisme, qui,

dans les trois ou quatre premiers mois, était accompagné d’une fièvre quotidienne qui est devenue irrégulière, et a fi ni par disparaître. Toutes les articulations sont plus ou moins douloureuses, mais principalement celles des pieds, des genoux, des poignets et des doigts. Les malléoles sont considérablement gonflées, et excessivement sensibles au toucher. 11 y a aussi beaucoup de douleur clans un talon, ce qui a longtemps empêché le patient de marcher sans le secours d’une canne.

Mesmérisé localement etgénéralement une heure par jour, il n’a rien ressenti les quatre premiers jours durant la magnétisation ; mais les articulations sont devenues plus souples, et les douleurs plus étendues.

Le 20. Il dort durant toute la mesmérisation.

Le gonflement et les douleurs articulaires sont bien diminuées; le malade supporte qu’on manio librement les diverses articulations, excepté celles du tarse, qui sont encore gonflées et douloureuses; et il peut sortir de la salle sans bâton.

Le a3. Toute douleur a disparu des articulations, et le patient peut les mouvoir sans souffrir. Il marche sans souffrance, mais non sans gêne; car l’enflure malléolaire n’est dissipée que d'hier, et il boite encore.

Le 25. Il esttout-à-fait bien. Marchant, .courant, sautant sans la moindre souffrance; il a demandé sa sortie, et je la lui ai accordée.

3° Rhumatisme articulaire chronique.

Du i5 janvier 1847- M* des Brûlais, négociant

français, âgé do trcnlc-deux ans, demeurant à Calcutta, est aflccté depuis six mois d’un rhumatisme. Il a le coude gauche très-enflé, très-sensible, et par suite sans mouvement; l’avant-bras, demi-fléchi, ne peut être ni plié ni étendu. De nombreuses glandes engorgées entourent l’articulation , et la moindre pression cause une douleur excessive. Le poignet est aussi tout-à-fait immobile. L’autre coude est un peu contracté et douloureux, mais non enflé. Il y a deux abcès au sommet du sternum, dont les parties environnantes sont gonflées et très-sensibles.

Le coude gauche est entouré de cicatrices de vé-sicatoires et de cautères, dont le malade n’a éprouvé aucun bien, ce qui lui a fait renoncer à tout traitement médical.

Les nuits sont mauvaises; le patient ne peut se tourner dans son lit qu’avec une extrême difficulté, et il lui faut un aide pour mettre ou ôter ses habits. Il a le moral affecté et l’appétit dépravé ; tout son système nerveux est ébranlé.

Il devra venir tous les jours à l’hôpital pour y être mesmérisé une heure, tant sur la partie affectée que généralement.

Du 16. Les abcès ont été ouverts, et une grande quantité de pus en est sortie.

Du 18. Hier il a dormi pendant la magnétisation, et la nuit dernière a été bonne ; aujourd’hui les douleurs sont bien moins vives.

Du 20. 11 peut mouvoir le poignet gauche aisément, et la douleur de l’articulation du coude est diminuée au point qu’il peut s’habiller seul.

Du a5. Presque toute douleur a cessé dans le

coude gaucho. Le malade peut y endurer une pression assez forte, et même un coup, sans grande douleur. La mobilité du coude est redevenue presque à son état normal, et celle du poignet est entièrement libre.

11 dort mieux, se meut dans son lit et se lève aisément. Le moral et l’appétit sont bien améliorés.

Depuis huit jours il dort magnétiquement, et supporte, sans s’éveiller, la plus grande extension de l’avant-bras. Différentes fois il a tenté de résister au sommeil, pour être témoin de diverses expériences qui avaient lieu dans la salle, mais il n’a jamais pu y parvenir.

La douleur et l’enflure des parties voisines des abcès de l’articulation sterno-claviculaire sont disparues.

Du 27. J’ai beaucoup travaillé son coude aujourd’hui, pendant son sommeil mesmérique. il y a gonflement de l’extrémité des os, et encroûtement de leurs surfaces articulaires par des productions lophacées. Ce rude examen ne l’a point éveillé, et il n'en a point souffert à son réveil. Il est clair maintenant que le mouvement est empêché par une cause purement mécanique, qui sera vaincue, au moins en grande partie, par le temps et l’exercice, car l’inflammation est totalement éteinte.

/)” Rhumatisme articulaire chronique.

Du i/| février. M. Johnson, âgé de trente-quatre ans, eut, il y a trois ans, une fièvre violente à la suite de laquelle il fut pris de céphalalgies, quotidiennes durant huit mois, puis irrégulières ensuite.

11 n’obtint qu’un soulagement toujours momentané des moyens de la médecine.

11 est affecté depuis cinq semaines d’une douleur de l’articulation du coude droit, qui est continue, et augmente la nuit au point de l’empêcher de dormir. A mesure que la douleur du coude s’est accrue, les migraines ont diminué, et il no les a pas ressenties depuis quelque temps. L’articulation est engorgée, et presque immobile.

On le mesmérisera généralement et localement.

Les notes qui suivent ont été prises par le malade lui-même :

Du i5. Mesmérisation du bras pendant une heure, suivie d’une douleur légère dans la journée, et nulle le soir.

Du 16. Même magnétisation qu’hier; après l’opération , j’ai pu plier l’avant-bras avec la plus grande facilité, et lo porter beaucoup plus près do l’épaule que je ne le pouvais auparavant. Aucune douleur ni le jour, ni la nuit. Sommeil non interrompu pour la première fois depuis bien des mois.

Du 17. Bras douloureux et raide; mesmérisé localementune demi-heure, etautantgénéralemcnt, j’ai ressenti, durant cette dernière partie de l’opération, un assoupissement qui a été interrompu par un violent tressaillement. Légère douleur du bras dans le jour, et point durant la nuit 5 migraine faible l'après-midi, et profond sommeil la nuit.

J’ai pu me raser aujourd’hui assez facilement.

Du 18. Pas de douleur. Magnétisation locale et générale d’une demi-heure chacune. La raideur articulaire persiste, mais pas de migraine. Vers le soir j’ai éprouvé une légère douleur dans lo coude

gauche, qui a augmenté dans la nuit, et m’a empêché de dormir. Même souffrance simultanément dans le coude droit.

Du 19. Forte doideur dans le coude gauche ; tuméfaction des parties voisines. Le droit continue d’être raide, mais non douloureux. Mesmérisé sur chaque bras, sans eflet visible ni sensible; mais, par la magnétisation générale, tombé dans un profond sommeil, aucune idée ne m'est restée de ce qui s’est passé durant la trance, ni de ce qu’elle a duré, ni comment j’ai été réveillé. Pas de céphalalgie.

Du 20. Dormi profondément. Douleur Irès-lé-gère dans le coude gauche, aucune dans le droit, qui est toujours un peu raide. Point de sommeil par la magnétisation locale et générale.

Du 28. M. Johnson avait arrêté son passage pour Singapore avant de venir à l’hôpital, et n’avait que peu de jours à rester. Il n’est pas revenu depuis le 20, ce qui porte à croire qu’il n’a plus souffert depuis lors.

(La tuile au prochain numéro.)

Société du mesmérisme de Paris.

Les séances expérimentales, suspendues à la suite des événements de juin, vont être reprises comme par le passé; la première aura lieu jeudi prochain. Cette mesure complète la réorganisation des moyens de propagande dont nous disposions il y a un an. Tous les mesmériens apprendront avec joie la réouverture de ce centre d’initiation ; car c’est de Paris

que part l’impulsion principale, et quand la propagation s’y ralentit, le magnétisme est presque partout languissant.

La politique, en distrayant les esprits de la science, a l'ait perdre beaucoup de membres à la Société, mais nous espérons que le vide sera bientôt comblé par des adhérents nouveaux, car la seule annonce de la reprise de ses travaux a provoqué plusieurs demandes. 11 y a tout lieu de croire que d’ici à quelques mois la propagation magnétique aura repris son activité première.

Le bureau, élu en séance annuelle, se compose, pour 18/19, de

MM. HÉBERT (de Camay), président.

J. LOVY , vice-président.

J. FRANCK, secrétaire.

DE WALLES, secrétaire-adjoint.

GIROLLET, censeur.

COSSON, trésorier.

LE BRUN, archiviste.

Infirmerie incsnicrir|iic de Londres.

Nous avons donné, tome Y, page 345, la liste des donateurs et souscripteurs, avec le montant des sommes par eux fournies; en voici la suite jusqu’au 15 janvier 1849.

DONS.

Total do lai™ liste. 21,858 50

M. J. A. U. Janson. 510 »

Mm” Vbrnon. 25 50

M“ Young. 26 75

Total. 22,430 75

RENTE ANNUELLE.

Total de la 1'° liste. 5,808 55 M. Aiilard. 20 75'

MissAGLiONnv(2rsouscr.) 25 50 Miss Collins (2csouscr.) 21» 75 Mm» Nicnoix. 26 75

Total. 3,!H* 10

La lenteur avec laquelle ce projet d’établissement

philanthropique a reçu les adhésions, et la minimité des sommes souscrites, montrent combien la cause magnétique a aussi souffert en Angleterre, puisque les dons n’ont augmenté que do 56a fr. 9.5 c., el la rente de io5 fr. 10 c., en quinze mois.

Il est à remarquer que les daines sont en majorité dans cette nouvelle liste.

VARIÉTÉS.

Du Magnétisme en Italie. — Voici une lettre dont le contenu intéressera vivement ceux de nos lecteurs qui suivent pas à pas le développement du magnétisme à l’étranger.

Monsieur le baron,

En assistant à votre dernière conférence dominicale , j’ai été témoin de bien des merveilles qui laissent derrière elles tout ce qu’on nous a débité sur la magie des anciens, et que l’on croyait impossible. Les scènes du miroir magique et de ces lignes qui traçaient à vos magnétisés non endormis un chemin fatal et parfois infranchissable, m’ont vraiment étonné, tout en me réjouissant de voir lancé par vous le magnétisme dans cette voie nouvelle et jusqu’ici inconnue. Ce n’est pas, monsieur, pour vous en faire des compliments que je prends la plume, mais pour vous payer, en quelque sorte, un petit tribut en qualité de votre adepte, et comme té-

moignage de mon admiration et de l'intérêt que je prends à votre œuvre utile à la science autant qu’à l’humanité.

Pour remplir de mon mieux la tâche que je m’impose, je vous dirai un mol sur l’état actuel du magnétisme en Italie, ou plutôt, car ce serait m’engager trop loin, sur ce qui est à ma connaissance sous ce rapport, et sur ce qu’on vient de faire dans une partie de la Péninsule pour les progrès d’un art qui désormais doit prendre sa place parmi les plus hauts intérêts du genre humain.

D’abord je vous dirai, en général, que les magnétiseurs ne sont pas beaucoup répandus en Italie, et que ceux qui font du magnétisme ne visent, le plus souvent, qu’à satisfaire des curieux ou à convaincre des incrédules : très-peu, que je sache, en font une application sérieuse à des recherches scientifiques, ou au soulagement de l’humanité souffrante, et ce sont des médecins homéopathes; mais c’est à peine s’ils se connaissent entre eux comme magnétiseurs. Ainsi point de correspondance, point de communication d’études, et partant point de progrès; car il est rare que l’œuvre isolée puisse faire véritablement avancer une science ou un art quelconque.

Je ne vous donnerai pas la liste de tous les magnétiseurs italiens : vous en connaissez quelques-uns. Ainsi je ne vous parlerai pas du Dr Poeti, de Turin, dont votre journal a apprécié l’ouvrage; je ne vous nommerai non plus le Dr Dugnani, de Milan, qui est un de vos correspondants ; ni le comte Nani, de Venise, que vous avez connu à Paris, et dont j’attends aussi avec impatience l’ouvrage qu’il a

promis sur le magnétisme; enfin la renommée du l)r Orioli me dispense de faire son éloge comme praticien et comme auteur. Mais ajoutez à ces noms là le comte Sanvital, de Parme; le Dr Ferzaghi, de Milan ; MM. les 1),! Granetti et Finella, de Turin, et mon ami le Dr Coddé, de Mantoue, et voilà à peu près tous les représentants du magnétisme en Italie, c’est-à-dire de l’Italie du nord; car pour l’Italie du centre et du midi, je ne sais pas à la vérité si depuis la publication (Florence 1846) de \'Histoire théorique et pratique du Magnétisme, par Li-simaco Vérati, quelque attention s’est éveillée parmi le public sur ce genre d’études. Sans doute, il y aura d’autres magnélistes que j’ignore, et qui ne sont non plus connus aux magnétiseurs de ma connaissance; mais cela ne vous prouve que mieux qu’il n’y a pas encore chez nous cet esprit d’association, ce concours, cette conspiration de recherches et de travaux que je crois nécessaires pour surmonter tous les obstacles, et pour hâter les progrès du magnétisme. Cependant, il ne faut pas s’y tromper, le magnétisme, peut-être, allait prendre aussi son élan en Italie si la révolution ne l’avait pas arrêté; car il est impossible, ce me semble, que le triomphe d’une vérité longtemps combattue éclate tout à coup quelque part, sans que le bruit s’en répande partout ailleurs où il y a des hommes qui travaillent pour elle , et sans que ceux-ci s’en émeuvent et prennent du courage. Je suis d'autant plus persuadé de cela, que j’ai vu moi-méme avec quel empressement plusieurs de mes amis, homéopathes et magnétistes, ont tâché de profiter de cette image de paix que l’armistice donnait au Plé-

mont, et d’exploiter ces moments d’une liberté qui devait, hélas! bientôt expirer, en reprenant leurs études que la guerre avait suspendues. Aussi, dès le commencement de cette année, ils ont institué à Turin une Société homéopathique, avec un dispensaire. Deux fois la semaine on donne des consultations et des médicaments gratis aux pauvres présentés au dispensaire par les associés, et on y tient le soir des conférences sur l’homéopathie et le magnétisme, auxquelles sont admis des jeunes étudiants de médecine. C’est dans ces conférences que le Dr Coddé donne des leçons d’homéopathie et de magnétisme au point de vue philosophique et pratique. M. Coddé est de l’avis que le magnétisme soit le complément de tout système médical, et surtout de l’homéopathie, qu’il professe tout purement depuis nombre d’années avec un succès on ne peut pas plus heureux. Il emploie dans la magnétisation une méthode à lui, qui diffère des autres en ce qu’elle est basée sur le principe de la polarité de tout fluide impondérable, le biomagnétique compris, et sur la forme élipsoïde qui paraît être la grande loi naturelle du mouvement, depuis les grands corps mondiaux qui circulent dans l’é-ther jusqu’à l’atôme de poussière qui tourbillonne dans ce rayon du jour qui pénètre dans l’obscurité d’une chambre ; forme qui est celle aussi qui prédomine dans les parties dont je compose le microcosme humain, et particulièrement dans le système cérébro-spinal qui est le réservoir et le conducteur du fluide biomagnétique. Je demande pardon à mon ami Coddé si je fais défaut à ses idées en m’ef-forçant d’être concis; mais je sais d’ailleurs que je

parle à une intelligence qui n’en saisira pas moins au juste la pensée. Conséquent à ses principes, M. Coddé magnétise toujours par des passes élip-tiques, c’est-à-dire il promène sa main droite, ou toutes les deux ensemble, de la droite à la gauche du sujet, en descendant du sommet de la tête, par la joue et le côté gauche du sternum, à la région du plexus solaire, et en remontant du côté droit jusqu’à la tête. Avec la même loi il magnétise chaque partie du corps selon le besoin, savoir, ou la figure, ou la poitrine -, ou le tronc, ou les extrémités, et toujours en traçant des petites ou des grandes élipsoïdes. Mainte fois il ne fait que poser le revers de sa main gauche au creux de l’estomac, tandis qu’il tient sa droite suspendue et légèrement courbée sur l’occiput; c’est, selon lui, établir la même courante qui doit parcourir le chemin élip— tique du plexus solaire et du grand sympathique d’un bout à l’autre. M. Coddé prétend que cette manière de magnétiser e9t plus selon les lois de notre organisation ; il prétend qu’ainsi l’organisme reçoit sans secousses, et sans trop d’effort, de la part du magnétiseur, toute la quantité de fluide nécessaire à rétablir son harmonie détruite par une cause morbffique, ou à produire les phénomènes dont il est susceptible. Je ne dirai pas jusqu’à quel point ces prétentions me paraissent fondées; mais, ce qu’il y a de certain là-dessus, et que moi-inême j’ai constaté plusieurs fois , c’est qu’il ne survient jamais aucun de ces troubles nerveux, de ces crispations qui se rencontrent si souvent dans de certains sujets très-sensibles à cause d’une magnétisation moins soumise à certaines règles qu’au caprice

des magnétiseurs, ot que surtout la démagnétisation s’opère avec beaucoup plus de promptitude, qu’elle se fait même comme par enchantement; et ¡1 ne faut pour cela, au magnétiseur, qu’appliquer son petit doigt au petit doigt de la main du magnétisé, et vouloir retirer son fluide : c’est comme la décharge d’un corps électrique ; le sujet reste parfaitement réveillé. M. Coddé appuie cette pratique d’une théorie puisée dans une longue expérience, et dans ses études sur la mécanique moléculaire, dont il vient d’achever un traité bien intéressant, et à laquelle se rattachent, selon lui, au point de vue philosophique, le magnétisme aussi bien que l’homéopathie.

C’est ici, peut-être, que je devrais vous parler des expériences magnétiques tentées dans les conférences de notre Société * et de celles aussi que nous avons faites, Coddé et moi, dans notre particulier; mais je ne veux pas dépasser les bornes que je me suis imposées dans cette lettre, ni abuser de votre patience. Je vous dirai seulement que dans ces dernières expériences, Coddé et moi, nous avons constaté , par des faits qui ne nous laissent aucun doute, la possibilité de communiquer, par la voie du somnambulisme lucide, avec un monde et des êtres auxquels tout le monde ne croit pas. J'ai cependant assez vu et assez appris dans les entretiens dont vous m’avez honoré, pour être convaincu que vous partagez cette croyance.

Mais en voilà assez, pour le coup, pour vous faire comprendre, monsieur, où en est le magnétisme en Italie. Il y a, vous le voyez, des éléments, et il y aurait aussi un foyer où les rassembler et les

travailler pour en tirer du fruit; il ne s’agirait que do se grouper autour de ce centre, et d’y apporter chacun sa tâche avec bonne volonté. La Société dont je viens de vous parler, ou, je dirai mieux, le Comité qui en est la partie savanleet opérative, a des membres d’une capacité incontestable dans MM. les Dr* Coddé, Poeti , Granetti, l’abbé Marocco , et le l)r Porta-Bava, qui en est le président effectif, et auquel la Société est redevable de beaucoup de bienfaits. Je n’ai rien à désirer de ces messieurs, qui ont bien voulu me faire leur président honoraire, que la continuité de cette belle harmonie qui a régné entre eux jusqu’à présent, et que, je l’espère , aucune mauvaise passion ne viendra troubler à jamais. Enfin il est à souhaiter que la paix , mais une paix honorable, permette aux sciences de reprendre tranquillement leur assiette. C’est alors que je vous invite, monsieur, à venir visiter vos adeptes d’Italie, qui seront bien charmés de vous accueillir et de vous fêter. Vous nous apporterez une étincelle de ce génie créateur qui vous anime; et, réchauffés par ses rayons, nous marcherons plus vite, et avec plus d’alacrité.

En attendant, veuillez bien, monsieur, accepter les hommages de ma haute considération.

Votre très-obéissant serviteur,

Le comte Gérard FRESCHI.

Chronique. — Le portrait de M. duPotet, gravé par un artiste éminent, vient d’être mis à la tête

de son Essai sur l’Enseignement philosophique du

Magnétisme, sans rien changer au prix dudit ouvrage.

— M. Renard, de Rambouillet, qui nous fit connaître, il y a deux ans (Yoy. t. 111, p. 5a i), un fait d’électro-magnétisme analogue à celui rapporté dans notre dernier numéro, nous écrit que la manifestation de ces scènes étranges vient de recommencer.

— M. le Dr Cruxent, de Porto-Rico, qui ne nous avait pas encore donné de nouvelles depuis son départ de Paris, nous écrit que, en son absence, le magnétisme est resté stalionnaire sous le rapport de la propagande.

« Dans ce pays changeant et sans consistance, dit-il, tout passe avec une rapidité extraordinaire, et cette disposition fait qu’il ne reste qu’une impression légère et insignifiante des choses passées. C’est ainsi que le magnétisme, qui, il y a dix ans, lorsque je fis les premières passes, causa quelque bruit, est. aujourd’hui totalement oublié.

« M. Comelin et moi sommes peut-ére les seuls qui, dans l’île, en poursuivions l’étude avec persévérance. Nous espérons que les travaux laits dans le silence du cabinet parviendront à être plus utiles pour la science et l’humanité, que ceux qu’on entreprend entouré de témoins remplis, généralement parlant, de curiosité et pas de véritable désir de s’instruire. »

Revue des Journaux. — La Bretagne, journal de Sainl-Brieuc, du 20 janvier, reproche à l’abbé

Leray d’être magnétiseur, ce qui signifie bon à pendre. M. Leray, qui avait déjà avoué sa croyance magnétique à ses supérieurs, vient d’en faire la déclaration au public. La Réforme, du i5 février, contient sa réponse aux insinuations de son agresseur, M. deCourson; nous y lisons :

« Je suis magnétiseur! et en quoi ai-je prévari-qué? L’église a-t-elle condamné le magnétisme? le condamnera-t-elle jamais?

« J’ai étudié le magnétisme, parce que c’est une science qui, par ses rapports avec les autres sciences morales et physiques, ouvre des horizons tout nouveaux à l’étude de l’homme;.... chose inutile, sans doute, pour le catholique avant tout, qui en sait toujours assez pour tout condamner sans rien connaître. »

— Les Côtes du Nord, du 16 février, reproduisent la lettre de l’abbé Leray. Le magnétisme doit beaucoup gagner à cette publicité, dans un pays où la parole du prêtre est encore toute puissante.

Le Gérant HÉBERT (de Garnay).

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

Hôpital îuemnérlqne de Cnlcnttn.

1" Journal des traitements faits de novembre 18i(S a haï 1847; suivi île rapports officiels, etc., publié par le gouvernement.

g 2. — CAS SE MÉDECINE.

(Suite.)

5° Engorgement glanduleux.

Du 18 février 18/17. Sarah Gootlall, âgée de onze ans, a été affectée, depuis l’âge de trois ans, périodiquement tous les six mois, d’une inflammation des glandes cervicales et parotides. Les parolides d’abord s’engorgent et deviennent douloureuses; puis l’oreille se prend et n’est soulagée que quand la suppuration est établie. Aussitôt qu'une oreille va bien, l'autre est prise de la même manière.

Sa mère ne se rappelle point que les glandes se soient enflammées sans que le mal d’oreille ait suivi.

Cette inflammation semestrielle était accompagnée de beaucoup de fièvre, et ne cédait jamais qu’à une application de sangsues. Ces émissions sanguines ont affaibli sa vue; quand elle regarde dans un livre, les mots lui paraissent ne former qu’une seule ligne.

TOME vin. — N° 89. — 10 MARS tRM. S

Du 28. Il 1: ton cl son pied bien plus aisément, et il peut en frapper le sol sans douleur, ce qu’il n’a pu faire depuis cinq ans.

Du 10 mars. Il revient encore une petite douleur en marchant sur une surface inégale ; mais il peut mouvoir l’articulation assez librement. L’enflure et la douleur de la cheville ont diminué, excepté du côté externe qui est encore sensible à la pression.

Du 15. 11 marche très-bien, même sur une surface inégale, et ne souffreplus. L’enflure de la cheville est entièrement disparue. Le malade se sent très-bien sous tous les rapports , et se trouve suffisamment de force dans le pied pour travailler.

Il a cessé depuis ce jour de venir à l’hôpital.

7° Epilepsie.

Du .27 janvier. Mme Goodall, âgée de trente-huit ans, est sujette à des attaques d’épilepsie depuis dix-neuf ans. Ses accès sont précédés d’un tremblement du petit doigt, et de l’annulaire de la main gauche, que suivent des convulsions des bras. Elle devient insensible, et écume. Les attaques durent environ dix minutes, et reviennent généralement deux fois par mois. La dernière eut lieu en octobre, et depuis elle en a été menacée toutes les semaines, ce qui l’oblige de rester assise toute la nuit, cette situation étant le seul moyen qu’elle ait d’y échapper. Depuis l’origine de sa maladie elle a constamment éprouvé une crépitation articulaire dans l’annulaire et le petit doigt gauches, ce qui l’excite à les frotter continuellement avec le pouce. Pendant les six dernières années, elle a souffert du bas-

V,

ventre, et pris de la teinture de chanvre, sans laquelle elle ne pouvait dormir. Elle commença païen prendre quatre gouttes, le soir en se couchant, mais maintenant elle porle la dose jusqu a trente-huit. Sa santé générale est délabrée; les menstrues sont régulières, mais peu abondantes. Elle a des palpitations douloureuses étant couchée.

On cessera le chanvre, et l’on fera une magnétisation journalière d’une heure.

Mm” Goodall a tenu un journal de sa maladie, mais il est trop long et trop monotone pour le rapporter en entier : j’en extrairai seulement quelques notes qui montrent une interruption ou un changement dans l’enchaînement de l’action du mal chez elle. Les voici :

« Du 28. Venue encore aujourd’hui à l’hôpital ; trouvé un petit changement dans le bras; dormi de dix heures à quatre heures.

« Du 29. La crépitation des doigts a disparu ; le tremblement dans le corps est aü’aibli; dormi de dix heures et demie à trois heures passées.

« Ce tremblement, qui était un nouveau symptôme, venait probablement de la cessation du chanvre, mais il peut aussi être magnétique.

« Du i'r lévrier. Venue à huit heures; mesméri-sée quarante-cinq minutes. Je 11’y pus rester, à cause d’un tremblement et d’une pesanteur de tête. Nuit agitée.

« Du 2, La douleur du bas-ventre, constante, depuis six ans, m’a quittée pour la première fois. Nuit tranquille.

« Aucune tendance aux crises ce mois-ci.

« Du 20 mars. Aujourd'hui très-tourmentée par

une douleur au liras; la nuit je nie suis levée avec un tintement d’oreille qui me fait toujours tressaillir dans mon sommeil avant que les accès arrivent; après j’ai dormi quatre heures. Auparavant, quand j’avais cette sensation, j étais obligée de rester toute la nuit sur mon séant. »

Dans tout le mois d’avril il n’y a qu’une note de douleurs nerveuses, etc., sans aucun symptôme d’épilepsie : il n’y a pas eu d’autres perturbations. La crépitation des doigts et la douleur du bas-ventre n’ont pas reparu, et le seul symptôme épileptique qu’elle ait eu dans ces trois mois n’a point été suivi d’accès. Elle dort su/lisamment pour sa position de fatigue, trois ou quatre heures chaque nuit, sans user de narcotiques, et son état général s’est amélioré. C’est peut-être là tout ce qu’on pouvait espérer d’une constitution aussi délabrée, et d’un mal pareillement invétéré. Cela montre assez, je pense, que le mesmérisme est pour Mmc Goodall une nouvelle source de soulagement.

Pour éviter de tomber dans l'argument : Post/ioc, ergo propter hoc, il est nécessaire de multiplier les exemples, aussi ne consacrerai-je pas plus de temps à cette cure, mon temps pour les expériences élaut limité.

8° Rhumatisme chronique et tumeur blanche.

Du 21 janvier. Erances Ann Elliot, âgée de trente ans, née dans l’Inde de parents auglais, souffre depuis environ deux ans d’un engorgement articulaire du tarse droit. Cette endure forme, à la cheville interne, une tumeur molle et dou-

lotireuse , grosso comme un œuf. Dans le cours do la dernière quinzaine, la cheville gauche a été pareillement affectée, et excessivement douloureuse, la nuit surtout, ce qui empêchait la malade do dormir. La peau qui la recouvre est décolorée , et ne peut êlrc touchée sans faire crier la patiente. Il y a aussi un petit engorgement sur le dos de la main gauche, auquel participent le medium et l’annulaire, ce dernier est très-enflé et très-sensible : il ne peut se plier, et les téguments en sont tellement distendus, qu’il semble devoir s’ouvrir. La malade en souffre beaucoup, surtout la nuit.

Magnétisation générale et locale d’une heure par jour.

Le troisième jour, la tumeur de la cheville gaucho disparut, mais le battement resta, ainsi que la décoloration de la peau.

J’ordonnai l’application d’un cataplame trois fois par jour.

Du 27. Elle se plaint beaucoup de tressaillements dans la tumeur de la cheville gauche.

J’y fais poser dix sangsues.

Du 28. Point de soulagement à la suite des sangsues : la douleur est plutôt accrue.

Du 3i. L’enflure de la cheville gauche, du carpe, et des doigts, est de beaucoup diminuée. On peut maintenant toucher ces parties sans que la malade se plaigne d’en beaucoup souffrir. La tuméfaclion et la douleur de la cheville droite sont station-naircs.

Du 10 février. La douleur et la tuméfaction de la cheville gauche sont presque éteintes, mais la décoloration est plutôt augmentée. L’enflure de la

main gauche disparaît rapidement, tandis que celle de la cheville droite resle dans le même état.

Du 28. Un ulcère a percé sur la cheville décolorée ; il est de mauvais aspect, et douloureux au loucher.

Du 12 mars. L’enflure de la main est presque disparue, mais celle des doigts est plu tôt augmentée.

Du 3i. L’ulcère est presque cicatrisé. L’enflure et la douleur de la main et des doigs disparaissent chaque jour.

Du jtTt avril. Ulcère cicatrisé, enflure et douleur nulles. La malade est en état de sortir de l’hôpital, et de retourner chez elle.

90 Paralysie.

Du 5 avril, fleeja, âgé de trente ans, demeurant à Calcutta, a un bras raide depuis environ six mois, avec enflure et douleur considérables , par suite d’une inflammation de l’articulation du coude, causée par une chute. J/avant-bras était fléchi A angle droit; dans cette situation on pouvait le plier jusqu’à un certain degré, mais non l’étendre.

Il sera magnétisé une heure par jour.

Du 20. Il peut fléchir facilement l’avant-bras, et le ramener presque à angle obtus. La douleur de l’articulation a presque disparu, et la tuméfaction est bien diminuée.

Du 3o. Plus d’enflure ni de douleur; le patient peut, presque à volonté, étendre et plier l’avant* bras.

Du iq mai. Le bras paraît parfaitement droit ; le mouvement en est redevenu libre.

Du 7 avril. Bhoobunmohum Dey, résidant à Calcutta, a été li appé d’apoplexie il y a seize jours. Celte affection l’a pris la nuit : il s’était couché en parfaite santé, le lendemain il était paralysé de tout le côté gauche. La main est fortement serrée, on ne peut l’ouvrir qu’avec beaucoup de difficulté. La moitié de la face est contractée d’une manière permanente. Le pied et la jambe sont étendus et rigides. La langue est déviée, et la parole très-difficile. La station verticale est impossible : dès qu’on cesse de le soutenir, qu’il soit debout ou sur son séant, il tombe sur le côté gauche comme un cadavre.

Magnétisation journalière d’une heure.

Du 8. Point de sommeil magnétique.

Du il. Le malade peut lever l’avant-bras et la jambe assez haut sur son lit; il ouvre légèrement la main. Le spasme des muscles de la face a beaucoup diminué ; les traits sont presque réguliers.

Du i3. 11 peut se mettre sur son séant, et parler assez distinctement; il a repris l’usage de la jambe malade au point de pouvoir lui faire supporter le poids du corps en s’aidant d’un appui.

Du 18. Aujourd’hui il est sorti du lit, et a marché dans la salle avec un bâton. Il a pu rester debout sans soutien. Il se plaint de spasmes et de douleurs dans le côté affecté.

Du 24. 11 s'affermit tous les jours sur son membre malade. Le spasme est presque disparu. 11 peut maintenant marcher sans bâton, et lever très-haut

le bras paralysé, mais il ne peut encore ni ouvrir ni fermer la main.

Du 27. 11 a dormi dans le varandah (galerie couverte de toile) ouvert, ¿‘tant exposé à l’air froid. Il s’en est mal trouvé : sa voix s’est voilée; il sent le côté malade plus lourd, et il a en effet perdu de la vitalité qui lui était revenue. Il tousse sans expectorer.

Prendre une demi-once de mixture pectorale trois fois par jour.

Il ne peut se lever ni se tenir assis.

Du icr mai. Il y a apparence de mieux; la jambe reprend de la force, mais il ne peut mouvoir le bras, ni fléchir ou étendre l’avant-bras. La main reste toujours fermée, mais on peut l’ouvrir aisément.

Du 7. II marche de nouveau sans bâton; mais la jambe engourdie offre une résistance considérable , et tout le côté frappé est très-douloureux. II respire librement, cl n’est plus enroué.

Du 21. Il peut étendre et fléchir assez facilement le membre inférieur, qui porte le poids de son corps avec fermeté. 11 peut aussi beaucoup mieux mouvoir le membre supérieur, qui prend tous les jours de la force.

Il me prie de le laisser aller voir sa famille, et promet de revenir; s’il le fait, son traitement sera continué.

li° Aliénation mentale.

Kylas Chasterjee, âgé de vingt-huit ans, nalif de Talinparah.inZillahHooghly, fut amené de la maison

des fous ici, le /( avril. 11 est considéré comme aliéné depuis deux ans, et séjournait dans la maison depuis quatre mois. Il a l'air hébété, mais il est calme et tranquille. Le moral est abattu, et ce malheureux ne paraît disposé à aucun genre d’exercice. 11 a une douleur clans les reins, et le derrière des épaules, qui lui rend la marche pénible. 11 devient parfois furieux.

A mesmériser une heure par jour.

Du 28. La douleur du dos et des reins est bien calmée; la santé s’améliore, et l’animation vient. Il se dit ennuyé de rester dans l’inaction, et demande à être employé à la cuisine.

Du 5 mai. La douleur des reins et des épaules est entièrement dissipée : il peut maintenant marcher sans gène.

Du jo. Aujourd’hui il m’a adressé une lettre en bengali, dans laquelle il me dit que, étant parfaitement rétabli, il me demande la permission de retourner chez lui.

Du 21. Il est beaucoup plus animé que lorsqu’il vint, et dit qu’il est encore capable d’arranger ses affaires. N’ayant aucune raison pour le retenir plus longtemps, je vais lui délivrer son exeat. Le médecin indigène des aliénés l’a trouvé beaucoup mieux.

120 Epilepsie et folie.

Nobin, laboureur, âgé de trente ans, natif de Joypore, in Zillah Cattack, fut transféré de l’hospice des aliénés ici, le 4 avril. II est épileptique depuis deux ans. Les accès ont lieu deux ou trois fois par mois , généralement aux changements de

lune; ils durent environ dix minutes, après quoi il reste insensé pendant huit ou dix jours. 11 devient souvent violent, et parle avec incohérence.

On le mesmérisera une heure par jour.

Du 15. Il a eu un accès, la nuit dernière, avec de fortes convulsions, durant h peu près dix minutes. 11 s’en est suivi de la pesanteur et de la douleur céphaliques, mais aucun symptôme d'aliénation n’est apparu.

Du a3. Un accès est survenu la nuit dernière, il a duré six minutes, avec de violentes convulsions, mais il n’a été suivi ni de douleur ni de pesanteur de tête ni de trouble d’esprit.

Du 29. Durant la magnétisation, il a été menacé d’une attaque, mais elle n’est pas venue.

Du 11 mai. Un accès a eu lieu à onze heures, il a duré cinq minutes avec convulsions, mais 11’a été suivi d’aucun malaise ni désordre.

Du 20. Depuis dix jours il était impatient de s’en aller. Il s’est échappé cette nuit eu escaladant un mur.

Une révolution remarquable a eu lieu dans les symptômes morbides de cet homme. Anciennement les accès étaient toujours suivis de huit ou dix jours d’aliénation , ce qui n’est jamais arrivé depuis qu’on l'a magnétisé.

[La suite prochainement.)

Magie magnétique.

(Suite.)

C'est chaque dimanche, au milieu d’un grand concours de personnes, qtie nous faisons nos expériences si curieuses de magie. Ce sont toujours nos visiteurs, nos élèves et nos abonnés qui nous servent de sujets. C'est sur des gens connus que nous développons les phénomènes qui étonnent la raison et confondent le jugement.

Plus de doute, plus d’incertitude; la magie est retrouvée : cent faits divers sont là pour attester et prouver ce que nous avançons.

One sont les récits anciens de cet art singulier où les diables, dit-on, avaient leur bonne part? lin amas de faits sans lien aucun avec les agents connus ; quelque chose d'anormal apparaissant au travers du prisme des préjugés et de l’ignorance. Des croyances aux esprits, des pactes avec eux, des onguents, dos paroles, des signes, et tout un code de formules propres à troubler l'intelligence la plus forte. Puis, pour cortège, l'afTreuse torture, le bûcher, et des cendres humaines jetées auvent; un fanatisme aveugle, des savants imbéciles , un pouvoir sans limitesct des prêtres féroces, qui, au nom d’un Dieu de paix inondaient la terre de sang humain; des doctrines impies, des lois barbares : voilà ce que nous ofl're l’histoire.

Le génie comprimé, la nature enchaînée, la civilisation retardée, l’humanité n’existant que de

nom , car la barbarie régnait eu maîtresse, ayant pour ministres des inquisiteurs, des juges sans scrupule comme sans pitié, un cortège de bourreaux enfin : tel est le tableau du passé.

Quels étaient donc les crimes à punir , les lois à venger? Hélas! c’est la nature que l’on poursuivait sans relâche; ce sont les divines propriétés de l’âme humaine dont on voulait empêcher les manifestations.

0 siècles affreux, disparaissez de notre mémoire! vous ternissez notre histoire, et vous n’offrirez aux générations à venir que des souvenirs de honte et d’opprobre !

La lumière arrive chaque jour davantage, ellb chasse les ténèbres, nous allons pouvoir examiner sans trembler ce qui agitait le monarque sur son trône, et tenait les générations dans la crainte.

Mais comment dérouler à la vue ces tableaux , comment peindre ces scènes où les esprits servent d’intermédiaires? Nous saisissons, il est vrai, les phénomènes, mais l’agent principal de leur existence échappe à tous nos sens. Quel est-il, d’où vient-il? Voilà ce qui cause notre embarras et crée les difficultés que nons rencontrons à chaque instant. La nature, interrogée, répond; mais son langage nous est inconnu. Venez à noire secours, philosophes profonds, savants en toutes choses , aidez-nous dans notre mission : vous écrirez tandis que nous produirons. Mais à quoi servent mes appels? S’il existe des hommes qui savent, ils cachent leurs lumières. Disons plutôt : Notre époque n’a plus de génies profonds, nos académies sont pleines de médiocrités vaniteuses. La science véritable a fui de

notre patrie, aucuu de ses faux amants ne pourrait aujourd’hui ni nous guider ni même nous comprendre. La tolérance ne vient point d’eux, leur tribunal nous a condamnés cent fois, car ils voulaient détruire ce qui blesse leur vue, ce qui montre leur faiblesse et leur impuissance.

Seul, et sans guide, je vais cheminer dans une route où je puis m’égarer à chaque instant, où mon intelligence peut me faire défaut ; mais du moins j’aurai marché en avant, et ce Journal, que les savants repoussent du pied, contiendra ce qui, dans un avenir prochain, servira à accuser ces hommes sans verlu comme sans cœur; car le plus impérieux de leurs devoirs serait d’examiner et d’avertir le monde.

Il sera dit que ce magnétisme humain, cette force où la nature a mis tous ses trésors, où Dieu a déposé son empreinte, dut, pour être reconnu, circuler dans le monde pendant les siècles, comme l’esprit divin répandu sur les eaux du déluge. Repoussé parce qu’il était lumière, non point par les hommes simples, l'âme du simple à tous les regards s’ouvre; mais par les beaux-esprits de toutes les académies, par les hommes appelés à diriger les nations, et qui ne surent jamais que contrarier la nature, l’affaiblir dans sa puissance et ne nous la montrer, elle si généreuse, que comme une marâtre se plaisant à tourmenter ses enfants.

11 sera dit que ce qui nous touche de toutes parts, ce qui à l’intérieur nous agite et nous maîtrise, fut longtemps comme s’il n’existait point ; que ce principe, la cause, et la source de toutes nos sensations, des mouvements de notre être, celui enfin par qui

nous sommes, dut être nié jusqu’à nos jours par tous ces hommes aveugles qui ajoutent le blasphème au mensonge, en se disant les interprètes de la nature.

Mais jamais ils ne se plongèrent donc en eux-mêmes; ils n’eurent donc jamais d’oreilles, puisqu’ils n’entendirent point cette voix secrète, écho mystérieux des choses divines que Dieu a placées dans chaque être? Ils se meuvent donc sans reconnaître le mouvement. Leur haîne, s’ils n’aimaient point, dut les éclairer; pourquoi restent-ils comme sans vie? Ce feu, que tout à l’heure nous allons montrer à tous les regards , n’a donc point franchi leur enveloppe, et pour devenir savant, il faut donc tarir dès l’enfance cette source divine, qui, en créant l’être, le revêt de divins attributs?

Je ne m’étonne plus si de tels hommes condamnèrent Socrate à boire la ciguë; s’ils crucifièrent Jésus, et laissèrent Jeanne d’Arc monter sur un bûcher, quand je les vois maintenant encore rester étrangers aux merveilles qui se répandent, rire de la vérité nouvelle, et nous lancer l’injure et le mépris.

Je me dis : S’ils avaient en main le pouvoir; si l’institut et les Académies réglaient nos destinées, nos yeux ravis ne pourraient pas longtemps contempler les œuvres secrètes de Dieu, et nous ne pourrions lever le voile qui cache les opérations de la nature.

Pardonnez-moi cet exorde, lecteurs, vous ne pouvez vous pénétrer, en ce moment, des sentiments qui m’animent; mais si bientôt vous êtes en possession des plus hautes vérités philosophiques., si je parviens à vous démontrer l’existence irrécu-

sable d’une force douée des plus grandes vertus, loin de me blâmer de mes anathèmes, vous direz: Arrière tous ces fils du mensonge, tous ces douaniers de la pensée, qui n’eurent de rigueur que pour les vérités et les novateurs, qui tourmentent sans relâche et sans remords ceux qui d’entre les mortels étaient inspirés de Dieu !

Longtemps les hommes industrieux gardèrent pour eux les secrets qu’ils parvenaient à découvrir, souvent même ils emportèrent au-delà du tombeau ce qui eût pu contribuer au bonheur de l’humanité. Je m’explique leur conduite sans l’approuver en rien ; celui qui possède seul une chose croit ne la devoir à personne, il en jouit, et son orgueil lui fait éprouver les plaisirs d’un avare en présence de son trésor. Ne sait-il pas, d’ailleurs, qu’aucun ne lui tiendra compte du sacrifice qu’il ferait ; les hommes sont tellement oublieux et ingrats, qu'ils ne se rappellent presque jamais les noms de leurs plus grands bienfaiteurs. Pourquoi donc se montrer généreux? C’est que celui qui découvre doit à Dieu l’inspiration qu’il eut. Il n’est qu’un messager choisi entre beaucoup pour porter une bonne nouvelle; si, devenant infidèle , il garde ce qui lui fut confié, il est coupable d’abord envers les hommes, puis envers Dieu lui-même. Un châtiment l’attend : il ne peut l’éviter; voilà mon sentiment. Je dirai la vérité, parce que je dois la dire, bien que je sache d’avance qu’elle sera polluée, salie par d’indignes magnétiseurs, et qu’elle en enrichira plusieurs. Il ne me restera pas même cette sorte de gloire qui fait remonter au novateur le bien produit par la chose découverte. Tous bientôt diront :

Je savais cela, j’opérais ces merveilles ; absolument comme lorsque, publiquement, je rendis l’ouïe à plusieurs sourds-muets, chaque magnétiseur ambulant se vantait d’en avoir fait entendre et parler pour le moins une demi-douzaine. Mais qu’importe, j’espère plus tard les devancer encore.

DU POTET.

(La suite au prochain numéro.)

Société dn magnétisme de la Nonvclle-Orléaus.

Voici quelques extraits de lettres du président de la Société, qui marquent les travaux de nos frères américains :

« Je vous écrivis l’été dernier pour vous dire que nous avions fait mouler ici le buste de Mesmer sur celui que j’avais reçu de Paris ; nous en fîmes tirer cinquante exemplaires, à l’occasion du 15 mars (anniversaire de la mort de Mesmer) , et maintenant nous ne craignons plus qu’un accident vienne à briser le seul buste qui, jusque là peut-être, se trouvât aux États-Unis. Les exemplaires tirés ici sont pour les membres de la Société, et aussi des amis , médecins ou autres, auxquels nous avons le plaisir d’en faire l’offre dans l’occasion. #

Sachant combien nous avons été affligés du retard qu’a éprouvé la propagation du magnétisme l’an dernier, M. Barthet ajoute :

« Ne vous découragez donc point, Messieurs, l'humanité a trop besoin de votre aide. La marche du magnétisme pourra bien encore être ralentie

par intervalles; mais celte éclatante lumière a brillé partout, et désormais quelle que soit la capacité des illustres éteignons des corps savants et autres, ou ne réussira pas à l’éteindre.

« Nous poursuivons notre tâche, nous aussi; et, comme vous, nous constatons l’indolence du plus grand nombre, à la curiosité desquels il faudrait chaque jour un nouvel aliment. Mais nous, au moins, n’avons pas les ressources du maître, de cet infatigable apôtre qui sait tous les jours faire briller quelque nouvelle facette. Nous avons puisé dans ses livres , quelques-uns savent y puiser encore , mais ce n’est que le très-petit nombre qui sait glaner dans le grand livre de la nature.

« Je suis en train de recueillir des notes pour vous adresser, prochainement j’espère, un petit factum circonstancié au sujet de l’action qn’exerce le serpent à sonnettes sur l’homme. J’en ai déjà trois cas bien constatés, et combien d’autres, sans doute, qui passent inaperçus! »

Sa dernière lettre contient les lignes suivantes :

« Je ne vous dirai pas que nous faisons des choses toujours magnifiques, mais nous faisons au moins de bonnes choses : des conversions, des magnétiseurs, des somnambules et des guérisons. C’est dans le sein des familles que nous voyons tomber l’incrédulité, là où nous produisons de si merveilleux effets sur des personnes qui, le plus souvent, nous étaient inconnues. C’est que, à part les médecins qui, comme dit M. Magendie « vivent de la clien-« tèle », le monde, en général, ne demande pas mieux que de voir pour croire ensuite.

« Je vous parlais dans ma dernière d’une famille

de médecin, esprit-fort s’il en fut. J’ai été merveilleusement servi : j’ai fait une magnétiseuse et deux somnambules dans les sœurs et nièces du médecin et de sa malade abandonnée. Le traitement magnétique et somnambulique est en train ; je vous en dirai le résultat.

« Notre Société a réélu, pour la nouvelle anuée, les fonctionnaires de l’an passé, à l’exception du secrétaire ; voici :

MM. Jos. BARTIIET, président.

Ernest MORPIIY, vice-président.

D. DRIVON, secrétaire.

P. A. GIAMARCHl, secrétaire-adjoint.

H. PEYRAT, trésorier.

II. LÉAUMÜNT, bibliothécaire-archiviste.

Société inaguétologlqiic de Port-Louis.

Nous avons des nouvelles de l’île Maurice. On nous annonce l’envoi d’un volumineux dossier de documents relatant les travaux de la Société dans les deux dernières années.

M. Lacaussade y a transporté l’institution du Banquet mesmérien, auquel il assista en 19^7 * et le a3 mai dernier la naissance de Mesmer a été célébrée à Port-Louis; la communion s’établit peu a peu, et le temps n’est plus loin où de semblables solennités auront lieu dans toutes les villes qui comptent quelques magnétistes. Ces réunions sont l’élément principal de l’union qui doit exister entre les partisans d’une même doctrine; car elles mettent en présence des personnes qui ne se seraient ja-

mais rencontrées. Lus anciens font connaissance avec les nouveaux ; ils se communiquent leurs vues, se racontent leurs faits, et de cet échange résulte une émulation qui tourne toujours au profit de la science.

En attendant que la naissance de Mesmer soit fêtée dans chaque famille, il faut que partout les magnétiseurs s’assemblent, et que ce jour soit consacré, afin qu’à la même heure ils soient tous animés de la même pensée. C’est aux Sociétés déjà existantes qu’il appartient de donner l’exemple de ces agappes nouvelles ; celle de Lyon , maintenant disloquée, le fit en 1847; celle de Port-Louis, en 18/| 8 ; espérons que cette année celles de Troyes, de Cambrai, de la Nouvelle-Orléans, de Londres, de Turin, de Rouen , etc., entreront dans la même voie.

Jury ■nngucUqac.

L’absence forcée deplusietirs membres duComilé, sans le concours desquels les autres ne peuvent valablement délibérer sur les rapports et propositions à faire au Jury, concernant les médailles d’encouragement et de récompense qu’il doit distribuer cette année, oblige d’éloigner, d’une quinzaine environ , l’assemblée générale qui, aux termes des Statuts, devrait avoir lieu le même jour que le Banquet mesmérien.

Un avis spécial indiquera à chaque membre les jour, lieu et heure de la réunion.

•VARIÉTÉS.

Chronique. — La pretnière partie de l’ouvrage annoncé, de M. Ollivié, vient de paraître à Toulouse; nous en aurons dans quelques jours à Paris. Chaque partie se vendra séparément.

— M. le Dr Desbois, président de la Société du Magnétisme de Rouen, doit venir incessamment à Paris ; il fera coïncider son voyage avec une de nos séances dominicales, afin d’y faire connaissance avec les magnétistes parisiens.

— Un de nos abonnés, qui habite les montagnes du Liban, nous écrit qu’il y a dans ce pays des femmes druses qui exercent une sorte; de divination en se mettant dans l’eau jusqu’au cou. 11 nous promet des détails circonstanciés sur leurs pratiques, ainsi que sur celles des Mogrebins, dont il a déjà été plusieurs fois question dans ce Journal. 11 a magnétisé des Arabes avec beaucoup de succès ; mais il a eu à souffrir de leur fanatisme. Sur l’indication de ces somnambules, des fouilles vont être faites dans le temple de la Beauté, où ils prétendent qu il y a des armes et de l’or enfouis. L’introduction du magnétisme dans ces contrées promet d’être

féconde en résultats curieux, en rapprochements utiles; nous ferons connaître tout ce qui nous parviendra.

— M. Jobard nous écrit de Bruxelles :

« Mlle Yirginie est toujours ici, où elle fait l’admiration des chimistes et des médecins homéopathes; quant aux allopathcs, constitués en corps académique, ils ont recours à leur grand moyen : la police et la loi, qui leur donnent le monopole de la santé et de la maladie nationales.

« Le fameux général S....... est mort ces jours

derniers dans notre ville , son gendre est venu pour recueillir son héritage, et il n’a rien trouvé. 11 est allé consulter un somnambule de Montius, qui lui a dit que l’or avait été partagé entre les domestiques et le médecin, qui avait mis des bijoux de prix à couvert; mais qu’en le menaçant d’un procès, il rendrait le tout.

• En effet, il rendit d’abord trois objets de prix, et le somnambule dit qu’il en existait un quatrième bien plus important Cet honnête médecin répondit qu’il le gardait comme souvenir du général, et que cela ne valait pas 20 fr. On lui en offrit 25 en métal; il répondit qu’il le faisait monter, et qu’il y avait déjà dépensé i5o fr. « Holà! dit l’avocat qui accompagnait l’héritier, c’est une garniture bien chère pour un objet de 20 fr. ! On vous remboursera les i5o fr. , rendez la chose. » On ne savait pas même le nom de celte chose. Il refusa ; on l’assigna ; et, avant que la procédure fût entamée, il rendit uii camée antique de 10,000 fr. Rien que cela!

« Vous croyez que l'héritier qui m'a raconté lo fait fut convaincu de l’existence du magnétisme, et de la clairvoyance du somnambule? Détrompez-vous. Il supposa que Montius payait une police pour savoir tous les secrets des étrangers qui arrivent à Bruxelles, et que le hasard pourrait amener chez lui. Je lui demandai combien il avait payé une telle consultation. « 1 fr. 5oc.,me répondit-il. — lit vous trouvez cela cher pour vous faire rendre 15 à 20,000 fr. qui étaient pour vous perdus sans ressources ! Il m’est avis que les voleurs lui eussent donné davantage pour se taire, et qu’il ne peut pas entretenir une police avec ce qu’on lui paie. — Mais, reprit-il, j’ai consulté une autre de ses somnambules, qui ne m’a pas dit un mot de vrai; probablement parce qu’il ne l’avait pas serinée. — Allez! vous êtes un serin vous-même, de nous siffler un air aussi faux! »

— M. Théodore Léger, magnétiseur de New-York, qui a publié dans cette ville un ouvrage dont nous avons fait mention, est en ce moment à Paris. Il nous a confirmé que le magnétisme fait aux Etats-Unis des progrès dont la rapidité dépasse toutes les prévisions.

— Notre collaborateur, M. l’abbé Almignana, vient de publier un opuscule sur les rapports du magnétisme avec la religion. Nous en ferons l’analyse prochainement.

— Il est bruit dans le monde savant d’une découverte qui peut avoir la plus grande influence sur

l’avenir du magnétisme. Un physicien allemand aurait trouvé le moyen de faire dévier une aiguille aimantée, par la volonté. Si cette nouvelle se confirme , c’en est fait de la résistance académique : le magnétisme entrera dahs la science par cette voie détournée.

Revue des Journaux. —Notre dernier volume est presque rempli de relations d’états concernant des personnes qui se croient obsédées par des magnétiseurs. Dans l’énumération des cas de ce genre qui sont venus à notre connaissance, nous en avons tu plusieurs par considération personnelle. Depuis lors nous en avons connu beaucoup d’autres, dont un s’est produit à la tribune législative. Les journaux du 20 décembre en parlent dans le compterendu de la séance de (’Assemblée constituante. Voici la version du Constitutionnel.

* M. Arbey rend compte d’une pétition du citoyen Lacombe, domicilié à Paris, qui se plaint d’être l’objet de persécutions incessantes de la part d’un magnétiseur (on rit), et qui demande une pension alimentaire.

« L’Assemblée passe à l’ordre du jour. »

- La Presse vient de reprendre la publication du feuilleton de M. Alexandre Dumas : Mémoires d un Médecin. Dans la première partie il y avait un grand nombre de faits magnétiques travestis, et Caglios-tro y jouait le principal rôle; dans celle ci c’est Mesmer, non pas en fier docteur, mais en roué courtisan.

Jusqu’à ce que la presse devienne le flambeau de

l’humanitc en répandant les vérités que le génie découvre, elle ne sera qu’un instrument imparfait du progrès, et ne traduira les choses que selon les lumières des écrivains qui, jusqu’à présent, plus romanciers que savants, ont donné à leurs œuvres de critique un cachet que nous réprouvons. Ainsi, pour ne parler que du fait qui nous concerne, le magnétisme, astre brillant qui se montre à l’horizon , ne trouve encore que des interprètes qui jugent ses graves phénomènes sans les avoir vus. Mesmer, sous leur plume, devient un héros de roman; on dénature sa vie et ses écrits, pour que son nom couvre d’odieux mensonges arrangés pour plaire aux lecteurs. On lui prête un esprit d’intrigue aussi éloigné de son caractère que de ses moeurs. Et c’est de cette manière qu’on écrit l’histoire, en la dénaturant, sans qu’aucun scrupule vienne aux auteurs de semblables mensonges; puis l’esprit public perverti adopte des faits imaginaires comme des réalités, et les noms que la postérité attend sont entourés d’une auréole qui ternit leur gloire.

Mais ce n’est pas seulement dans les feuilletons, écrits moraux du jour, que nous trouvons motif à nos reproches ; des ouvrages plus sérieux, destinés aux bibliothèques, sont conçus de même. Chaque savant qui écrit sur cette science, suivant en cela l’exemple des contemporains de Mesmer , entache plus ou moins la mémoire et la conduite de cet homme respectable : c’est un parti pris de le salir; et, comme au temps de Rome, il y a chez nous desinsulteurs publics. C’est peu encourageant pour le génie : il doit payer ses propres bienfaits ; au lieu d’attendre la récompense légitime due aux œuvres

de son labeur, il doit toujours s’attendre à en supporter l’expiation.

Catalepsie. — Nous avons publié (t. IV, p. 5i8), la relation d’un cas de léthargie permanente, ayant la plus grande analogie avec celui dont suit le récit que nous empruntons au National de l’Ouest.

« Au nombre des faits de catalepsie les plus remarquables, on peut ranger le suivant :

« Non loin de Pont-llousseau, entre la Jaunais et Sainte-Hermine, il est une jeune fdle de meûnier, âgée de dix-neuf ans, qui s’est endormie le Jeudi-Saint , et dort par conséquent depuis un mois et sept jours.

« Pendant ce temps elle est restée tout à fait insensible. Ses membres sont raides, et sa figure a conservé sa fraîcheur.

• Une seule fois 011 a pu lui entr’ouvrir les paupières; mais l’iris était renversé, et le blanc de l’œil était seul apparent. Avant hier, ayant aperçu quelques contractions des lèvres, 011 a eu l’idée d’introduire dans la bouche de la malade uu bouillon qu’elle a semblé avaler. Cependant elle dort toujours, et est privée de toute sensibilité.

« On nous a rapporté que déjà, il y a quelques années, celte jeune fille s’était endormie pendant douze jours consécutifs. —Quand sera son réveil? 11 parait prochain.

« Une multitude de personnes, parmi lesquelles on cite plusieurs médecins de Nantes, curieux de voir par eux-mêmes un fait aussi anormal, se rend chaque jour pour visiter la belle dormeuse. »

Nous engageons les magnétiseurs des environs à essayer dans ce cas l’application du magnétisme. Mous pouvons d’avance garantir un plein succès à leurs tentatives. Et tandis que les médecins en sont à connaître et à comprendre l’affection de cette jeune fille, elle révélera elle-même la cause de sa singulière maladie.

11 est déplorable de voir la médecine volontairement impuissante dans toutes les affections nerveuses, tandis qu’il existe un agent propre à les guérir. On devient criminel à force de repousser une vérité utile. Les médecins veulent rester étrangers à la vraie médecine jusqu’au jour, peu éloigné, où le magnétisme deviendra le seul art raisonné, et par conséquent la base inébranlable de la science médicale.

PETITE CORRESPONDANCE.

\omellc-Orlenii». — M. J. B.....t. — J’envoie les numéros 55

et 79.

Stockholm. — D' G.... i. — Le D’ C.....I a reçu /¡¡né.... ; il vous

remercie.

IHnjtlgücz. — D' C.....t. — HoexpOdié les deux numéros î>2 par

M. 0.....n.

BIBLIOGRAPHIE.

DOCTRINE DE L’ÉCOLE DE HIO DE JANEIRO, ET PATHO-r.ÉNÉSIE BRÉSILIENNE. U» volume in-12 , publié par i’instilul homéopathique du Brésil. —1849.

On lit dans l’introduction de cet ouvrage, par le Dr Mure, lie passage suivant :

« 11 nous a paru urgent d’acquérir à l’homéo-palhie une notion déjà évidente pour les métaphysiciens, les théologiens cl Jcs magnétiseurs. Si le temps et l’espace ne sont que des formes de noire esprit, l'étendue, l’atlraction et tous les autres attributs de la matière ne sont également que des formes purement idéales; si l’homme est l’image de Dieu, il doit participer au don créateur, au moins dans les limites de son organisme. Enfin le disciple de Mesmer et de Puységur va plus loin que cela : un verre d’eau magnétisée peut devenir, à son choix, purgatif, émétique ou sudorifique pour sa somnambule. On a même retrouvé des gouttes d’huile de ricin dans les déjections provoquées par de l’eau transformée ainsi par un pur acte de la volonté; el cela ne nous paraît pas plus extraordinaire que l’odeur du soufre développée dans les mains d’un malade par une trentième dynamisation de suljur. Le pouvoir magnétique va plus loin en-

core : de l’eau, ou tout autre liquide, peut se changer en vin, en lait, en crème, en bouillon, en gelée, etc. Un morceau de terre glaise sera pris par une somnambule pour des viandes, des pâtisseries, des aliments de toute espèce, et le sentiment de la faim sera complètement apaisé chez elle par ces substances si peu nutritives. Ici double fait créateur : i° par l’action du magnétisme; 2“ par l’organisme de la somnambule, qui développe la masse de ses tissus vivants en réagissant contre des substances non assimilables, au dire des physiologistes. Disciples de Hahnemann , ayons donc un peu de courage! Au lieu de rapetisser la pensée du maître, jetons les yeux sur toutes les conceptions puissantes qui grandissent autour de nous, et tenons l’homéopathie à leur niveau, afin qu’unie avec elles dans une synthèse féconde, elle prépare l’avénement de la science universelle. »

¡Sous sommes en lutte permanente avec les médecins allopathes, parce qu’ils nient l’existence du magnétisme ou contestent sa puissance; c’est l’inverse avec les homéopathes : nous pourrions presque leur reprocher d’y trop croire. Hahnemann a prescrit des magnétisations si faibles, que l’elfet thérapeutique n’en peut être qu’illusoire dans la plupart des cas. Cette exagération de l’efficacité du magnétisme prouve que cet homme éminent n’en avait fait qu’une étude superficielle. Ses disciples l’ont imité, aussi n’ont-ils généralement qu’une connaissance fort imparfaite des propriétés de l’agent mesmérien. Au lieu de vérifier, ils se sont presque tous contentés d’assertions; ainsi, dans le

cas qui nous occupe, M. Mure admet comme un fait l’éjection d’huile de ricin formée de toutes pièces. C'est résoudre en deux mots la grande question de savoir si la volonté humaine crée matériellement ou idéalement, c’est-à-dire si l’eau magnétisée pour être, du vin contient réellement de l’alcool , ou si l’ivresse qu’elle produit chez celui qui la boit n’est que le résultat d’une idée transmise par ce liquide.

L’auteur de l’observation sur laquelle M. Mure s’appuie est M. Millet. Personne, assurément, ne contestera qu’il ait vu des globules huileux surnager des déjections alvines : ce n’est ni nouveau ni rare ; mais chacun demandera la preuve qu’ils étaient ri-ciniques. Or l’analyse chimique n’en a point été-faite , on ne les a pas même recueillis pour en apprécier les propriétés physiques : c’est donc une pure supposition.

D’ailleurs, pourquoi cette huile, ou l’une quelconque des substances citées, si elle est une création de l’esprit du magnétiseur, et émanant de ses doigts, ne se trouve-t-elle pas plutôt dans l’eau magnétisée que dans le corps du patient, ou excrétée avec des produits morbides? Puis, voyez les conséquences; si on a fait de l’huile, etc., on peut

faire de l’or : il suffit de vouloir.......... Si j’osais

faire une plaisanterie sur un sujet aussi grave, je dirais à l’auteur : Pourquoi va-t-on en Californie, si le corps des somnambules peut devenir une

mine inépuisable du précieux métal?........ Mais

je me borne à m’étonner qu’un homme aussi distingué, docteur en médecine, placé à la tête de

l’homéopathie par des travaux éminents , endosse la responsabilité de pareilles affirmations.

('es exagérations, provenant d’un défaut d’examen ou d'un manque de science, ne sont propres qu’à retarder l’avénement du magnétisme, au lieu d’en accélérer la marche. Avancer des choses qu’on ne peut pas prouver, c’est s’exposer à faire rejeter même celles dont l’existence commence à ne plus être contestée. Et n’y a-t-il pas assez de réalités dans le magnétisme, sans y ajouter des hypothèses? Falsifier un de ses produits , c’est rendre suspects tous les autres, et c’est un mauvais moyen de lui ouvrir des débouchés. Abstenons-nous donc tous d’assertions hasardées, fausses ou douteuses, de peur qu’elles paraissent mensongères ; nous avons bien assez d’ennemis naturels, sans en faire naître par notre conduite.

INITIATION AUX MYSTÈRES SECRETS DE LA THÉORIE ET DE LA PRATIQUE RU MAGNÉTISME, rendue simple et facile, quant à la pratique; simple et explicative, quant aux principaux phénomènes dérivant du somnambulisme , etc. ; suivie d'expériences inédites faites à Monte-Cristo, chez Alexandre Dumas ; de la Biographie de Jean-lion Marcillbt; de la visite faite au somnambule Alexis par le général Cavaignac, chef du Pouvoir Exécutif, à la veille des des élections à la Présidence de la République Française, et d’un Arrêt de la Cour Suprême concernant le Magnétisme. Par J. A. Gentil, membre de la Légion-d’IIonneur, etc. —Brochure de 90 pag. in-12. Paris, 1849. Chez Robert, éditeur, galerie de Valois, 185. (Palais-National).

Ouf!!!..... quel titre pour un si petit ouvrage!

Ce n’est pas que l’auteur ne soit un partisan sin-

cère du magnétisme, mais il s'exagère la portée do son esprit, et les vertus magnétiques de son héros. Chez lui c’est une passion, un entraînement, un délire : Marcillet est tout le magnétisme. Pourquoi contesterions-nous une évidence si palpable? Est-il donc défendu d’aimer, de chérir les grands hommes ?

Les intentions de M. Gentil nous paraissent meilleures que l’explication qu’il donne des phénomènes. 11 ne suffit pas d’être convaincu d’un fait pour en expliquer la portée, et trouver son lien naturel avec tout ce que la science a révélé. En somme, M. Gentil nous paraît être rempli de son sujet; ce qui lui manque , c’est l’esprit qui systématise et trouve la loi. Notre auteur n’a rien trouvé qui ne fût découvert, c’est pourquoi nous n’avons pas plus tôt rendu compte de sa brochure, et nous n’en aurions même pas parlé, si notre Journal n’était pas le Moniteur du magnétisme, recueillant avec un soin impartial tous les documents qui peuvent servir à l’histoire de la science mesmérienne.

Le Gerani : HKBKKT («le f.arnay).

THÉORIES.

PHILOSOPHIE MÉDICO-MAGNÉTIQUE.

La crainte donna naissance à la superstition ; les premiers sentiments religieux furent inspirés par la peur; l’homme chercha toujours, par ses prières, à dissiper le courroux d'une puissance inconnue.

Attribuant la cause de leurs maladies à la colère des dieux, les peuples primitifs invoquèrent naturellement leur clémence, afin d’obtenir un terme à leurs souffrances; aussi les premières cures durent-elles être le résultat d’une confiance aveugle dans la toute-puissance de la Divinité.

Les prêtres seuls jouissaient alors du privilège illimité d’exercer la médecine; ils soumettaient leurs malades à des épreuves qui ne pouvaient manquer de produire une réaction salutaire sur leur organisme. Lesjeûnes, les sacrifices, lesveillesprolongées exaltaient les imaginations et favorisaient les efforts d’une nature providentielle. On leur faisait un brillant récit des guérisons les plus inespérées; souvent même on les laissait dormir dans les temples jusqu’à ce qu’ils eussent des songes prophétiques (i ).

(1) Pansanias, lib. I, II, X; Tertulien, de Anima , r. ÎM.

TOME VIII. — RI" 90. —25 MAHS (i

De là l’origine probable de la médecine somnam-liulique; il y eut en tout temps des personnes qui, pendant les crises convulsives ou pendant leur sommeil, indiquaient une médication suivant les symptômes de l’alfeclion. Lorsque la maladie résistait à tous ces moyens, on avait alors recours à une classe de prêtres nommés oneiropoles (i), qui donnaient des consultations pendant leur sommeil. Les desservants des temples, ou les malades eux-mêmes, inscrivaient religieusement sur des tablettes les remèdes et les procédés qui avaient servi à leur guérison , et les suspendaient aux murailles en témoignage de leur reconnaissance. Cet usage fut observé fort longtemps dans les temples de Jupiter et d’Apollon , et particulièrement dans celui d’Esculape et dans le temple de Diane à Éphèse (2).

Ces oracles perdirent en partie leur crédit à l’époque des grandes conquêtes des llomains, qui avaient habituellement recours à leurs livres sybil-lins et à leurs augures.

L’établissement du christianisme ayant renversé les temples et les idoles, pour y substituer l’éten-tard de la croix, nous retrouvons la trace de ces pratiques, sous le nom d'ex volo (3). Ces ligures votives, très-répandues en Espaguc surtout, avaient la forme des parties malades, et les chrétiens les conservaient avec le plus grand soin dans leurs églises.

Si nous en croyons les auteurs anciens, les As-clépiades, héritiers de la science d’Esculape, pui-

(1) Sprengel, Hist. de la Méd. ; Philostrate, Vie iT/Ipullunius.

(2) De l’Ancre, Incrédulité, p. 22-i.

(5) Origènes, contra Celsum, lib. 111.

sèrent une partie de leurs formules médicales dans les inscriptions retrouvées dans les temples des païens. Philostrate (i) prétend que de tous les avantages que l'homme peut retirer de la divination , l’art de la médecine est le plus important; «car, dit-il, les savants fils d’Esculape n’auraient jamais connu l’art de guérir, si Esculape, fds d’Apollon, n’avait composé ses remèdes d’après les vaticinations de son père; Esculape enseigna ses remèdes à ses enfants, et ceux-ci en répandirent la connaissance : de là est né l’art de la médecine. >»

Jamblique (2), après avoir attesté que les maladies cédaient aux prescriptions que l’on recevait pendant le sommeil dans le temple d’Esculape, ajoute que la médecine ne doit son origine qu’aux songes que nous envoie la Divinité.

Gallien (3) déclare qu’il a fréquemment retiré des remèdes indiqués pendant les songes, un immense parti pour le traitement de ses malades.

Plusieurs autres (4) sont également convaincus que les œuvres d’Hippocrate n’ont été composées que sur les tables d’inscriptions qui existaient alors dans les temples de Cos.

Le prince de la médecine, tout en convenant que le véritable talent du médecin consiste à seconder les efforts de la nature dans les affections aiguës, avoue l’insuffisance de son moyen curatif dans les maladies chroniques. Cependant il faut croire qu’Hippocrate avait quelques notions des procédés

(1) lie d'Apolloniut; liv. III, chap. xin.

(2) De Mysteriii œgyplior., p. 55.

(3) Juin Cæsar ; Sealiger, 1le Insomniâ, in lib. ilipporr.

(4) Slrabon,lib XIV; Pline, lib. XIX.

occultes que le sacerdoce cherchait à couvrir d'un voile impénétrable, car il recourait fréquemment à des frictions particulières dans la cure des maladies anciennes.

« Un médecin, dit-il, a besoin de savoir beaucoup de choses ( i ) ; il ne doil pas ignorer quel avantage il doit recueillir des frictions; elles peuvent produire des effets entièrement opposés entre eux; elles serreront des articulations trop lâches , elles relâcheront celles qui sont trop tendues. J’exposerai dans un autre Traité la méthode de faire des fric-

lions, et leur utilité.....; dans le cas présent, les

frictions doivent être faites à l’épaule, mollement, avec les mains. «

Il est bien fâcheux que le Traité des Frictions, d’Hippocrate, ait été perdu, il nous eût probablement initié à quelques-unes des pratiques secrètes de ses prédécesseurs; le silence qu’il observe sur les procédés mystérieux de la médecine ne nous est-il pas expliqué par la formule du serment qui se trouve en tête des ouvrages de cet homme célèbre : « Je ferai part à mes disciples de tous mes préceptes, sous la foi d’un serment solennel. » Alexandre Trallien et plusieurs écrivains de l’antiquité, prétendent avec raison que c’est aux remèdes secrets des anciens qu’Hippocrate fait allusion, lorsqu’il dit (2) : « Retranchons aux regards proiànes les choses sacrées que nous ne devons révéler qu’à ceux qui sont revêtus d’un caractère sacré. »

(1) Ilippor.rale, Traité des Articulations, cliap. I; Aub. Gaulliier, Traité pratique du Magnétisme, p. 95.

(2) Ilippocrut. Opéra.

Depuis llippocralc la médecine n’a pas fait un pas ; la médecine empirique seule a quelquefois rempli cette lacune, que la médecine magnétique est appelée à combler entièrement lorsque nous aurons recours aux puissants véhicules dont elie peut disposer aujourd’hui.

La plupart des physiologistes modernes attribuent au pouvoir de l’imagination tous les effets magnétiques dont ils n’osent nier la réalité. Il serait certes bien injuste de refuser à l'imagination un rôle excessivement important dans la cure des maladies et dans le développement de quelques phénomènes somnambuliques. Si nos savants sc laissaient toujours guider par l’esprit d’une saine et impartiale observation, et s’ils n’étaient pas souvent aveuglés par les stupides exigences d’idées préconçues ou d'un amour-propre déplacé, ils ne tarderaient pas à constater avec nous la véritable cause de ces guérisons merveilleuses que la médecine classique ne peut revendiquer. Nous nous attacherons à faire une part consciencieuse à ces deux puissances curatives (imagination et magnétisme), dont les ressorts peuvent fonctionner isolément, mais qui nous conduisent, par suite d’une harmonie complète, aux plus brillants résultats.

Avant d’éludicr ces deux branches ?i précieuses de l’arl de guérir, il sera peut-être utile d’arrêter quelques instants notre atteution sur une médication empirique qui a joui à certaine époque d’une immense réputation : nous voulons parler de la trunsphintalion.

Ce n’est pas la rénovation de doctrines abandonnées depuis longtemps que nous voudrions imposer

aujourd’hui ; nous ferons on sorte seulement de dégager quelques vérités utiles des ténèbres épaisses qui les dérobent à nos yeux. J-a méthode des médecins hermétiques offre d’ailleurs des points d analogie si frappants avec quelques-uns de nos procédés magnétiques, qu’elle ne peut manquer d exciter notre intérêt.

CHAPITRE Ier.

Médecine transplantaloire.

On désignait sous le nom de transplantation une méthode curative qui consistait à faire passer une maladie d’un homme dans un autre , ou dans un animal, quelquefois même dans un végétal (i).

Paracelse passe pour être l’auteur de ce système, qu’il regardait comme infaillible dans un grand nombre de maladies. Maxwel, R. Flud, Bartholin, Wirdrg, Burgrave, Yan Helmont, etc., adoptèrent cette doctrine, qui rencontra beaucoup de partisans.

Les Allemands, séduits par cette nouvelle médecine , lui accordèrent longtemps toute leur confiance.

Nous nous garderons d’exhumer les élucubrations des médecins des xvie et xvne siècles sur la transplantation , il nous suffira de signaler quelques observations judicieuses, basées, dans le principe, sur des faits irrécusables, mais qui furent promptement étouffés sous le poids des prétentions les plus exagérées, et des jongleries les plus absurdes. Le charlatanisme exploita la médecine transplan-

(1) Philosophie mosa'ique, par Hoberl Flud.

taloire comme on exploite de nos jours la médecine magnétique.

Comment révoquer en doute l'authenticité des nombreuses guérisons obtenues par des hommes d’une grande réputation de science et de probité; ils ne se sont malheureusement pas toujours contentés d’observer la nature pour la faire contribuer au soulagement de leurs semblables, ils se sont attachés à découvrir la cause et à donner l’explication des phénomènes étranges dont ils étaient témoins; tant que le médecin s’écartera des lois de l’observation, il s’égarera dans le dédale immense de l’imagination. Dans tous les temps des hommes célèbres, victimes de leur vanité ou des préjugés de leur époque, ont avancé des idées extravagantes. Souvent les sciences les plus absurdes remontent à une origine sage; ce sont les conséquences que l’on veut en tirer, qui finissent par étouffer des germes qui, mieux cultivés, nous eussent offert une moisson abondante. La médecine systématique, semblable aux idoles du jour, ne peut jouir d’une longue existence; le temps fera promptement justice des aberrations de l’esprit humain.

Nous ne nous occuperons pas ici de la transplan* talion des maladies dans les végétaux : ce n’est qu’un tissu d’idées ridicules et superstitieuses qui n’offre aucun rapport avec notre sujet. Quant aux guérisons attestées par les écrivains du temps, nous en donnerons facilement l’explication lorsque nous traiterons de la Médecine d'imagination.

Nous trouvons dans les œuvres deParacelse (i),

(I) De la Lampe de vie.

des observations fort curieuses sur la manière de transmettre la santé et la maladie. Le médecin faisait coucher certains animaux auprès de quelques-uns de scs malades; il pensait que l'on pouvait, par un contact prolongé, leur communiquer la maladie et en délivrer ces derniers. Van Helmont, grand partisan des idées de Paracelse, rapporte aussi plusieurs guérisons de goutte, d’hydropisie et de rhumatisme, que l’on transplantait sur des chiens.

Borel (i) cite également des cures obtenues chez des goutteux que l’on mettait coucher au milieu de jeunes chats.

Bartholin (2) nous entretient de la guérison d’un de ses malades affecté d’une jaunisse très-intense, et qui recouvra promptement la santé par le contact d'un chat.

R. Flud (5) , médecin anglais, rapporte de nombreux exemples de maladies qui cédèrent à la médecine transplantatoire ; il nous apprend que l’on a souvent guéri de violentes coliques en maintenant sur le ventre un chien vivant, il se délivra lui-même d’une goutte des plus cruelles, en couchant avec un chien auquel il communiqua toutes ses douleurs.

Le savant Hoffman, et Lozel (4)i ainsi que le docteur Salmuth (5), réussirent aussi par ce moyen à

(t) De Curatione sympath. centuries.

(2) . tetu medic. et philosoph.

(3) Analogie de l’Eleclricilé, lome II, p. 300.

(4) Lozel, (le Pudatjrià.

(5) Centuries de Salmulh.

dissiper une affection goutteuse et une névralgie du bras.

Rcysclius et Maxwel (1) se félicitaient beaucoup des résultats avantageux que l’on obtenait par la transplantation, particulièrement pour le traitement des hydropisies.

Georgius Francus(a) rapporte à l’appui de cette méthode plusieurs faits très-remarquables.

Nous trouvons dans le Traité des Médicaments, de Boylc, la relation de deux cures merveilleuses de panaris. Les deux personnes atteintes de cette aflfection se rétablirent très-rapidement en mettant leur doigt malade dans l’oreille d’un chat qui ressentit après d’affreuses douleurs (3).

Le célèbre physicien Konig indique, dans son Traité du règne végétal, les moyens de communiquer ses infirmités aux animaux.

On a , dans un temps , ajouté une grande confiance à l’application des tourterelles vivantes sur les engorgements goutteux et les rhumatismes; il survenait, dit Delandine, auteur de la Philosophie corpusculaire, des nodo.«ités1aux pattes de ces animaux, lorsque la maladie avait cessé.

Nous lisons dans le Journal de Paris (avril 1784). une observation recueillie par M. delaRivoire, curé de Fontenay-sous-Vincennes, qui a connu une femme paralysée d’un bras ; elle habitua un jeune chien à coucher sur ce membre, il périt au bout de quinze jours, perclus de tout son corps : la malade ressentait déjà un grand soulagement ; deux

(1) Maxwel, de Medicinà magne tien.

(2) Ephémér. des Cur. de la Nal. ahs., i cl 5.

(3) Analogies de l’Électricilé, tome 11, p. 500.

autres chiens succédèrent au premier, et éprouvèrent le même sort : la guérison était alors complète.

¡Nul n’a le droit de contester toutes ces cures, que nous pourrions facilement multiplier ici, en y ajoutant des observations analogues que nous avons quelquefois recueillies dans nos campagnes , où cette méthode curative est encore en vigueur. La seule pensée qui nous dirige dans l’énumération de ces faits , c’est de pouvoir fixer l’attention du physiologiste et du médecin sur ce genre de médication sacrifié trop légèrement peut-être à l’oubli et au ridicule. Un praticien consciencieux ne doit jamais repousser l’expérimentation devant des témoignages aussi nombreux ; pourquoi mépriser les connaissances du peuple : l’expérience le met souvent sur la voie d’une découverte à laquelle n’arrivent pas toujours les physiciens les plus habiles, après de longues études ! Nous rejetons avec bçau-coup de dédain les remèdes vulgaires; tous les secrets de famille ne se seraient pas accrédités aussi longtemps s’ils n’avaient pris naissance qu’au sein des préjugés ou du charlatanisme.

Qui n’a été frappé de l’heureuse constitution des bouchers, qui ne doivent probablement leur brillante santé et leur teint fleuri qu'aux émanations des fluides animaux au milieu desquels iis vivent constamment ! Nous avons vu des jeunes gens souffrants et étiolés, recouvrer au bout de quelques mois de séjour dans une boucherie tout l’éclat de la santé.

« Quand 011 considère, dit Huffeland (1), quel

(l) Art de prolonger la Vie, p. (i.

effet l’exhalaison d’animaux que l’on vient d'ouvrir produit sur les membres paralysés, et combien 011 diminue la douleur d’un mal violent en appliquant dessus des animaux vivants, onjne peut s’empêcher d’approuver cette méthode. »

Le docteur Gilibert (1) , professeur d’anatomie à Lyon , nous apprend qu’il faisait le plus fréquent usage des peaux d’animaux nouvellement écorchés, ainsi que des animaux eux-mêmes. Il les ouvrait tout vivants, et les appliquait sur les parties douloureuses. Cet habile praticien fait ensuite l’énumé-ration des guérisons qu’il a obtenues par ce procédé , qui rencontre encore aujourd’hui de nombreux partisans dans nos villes et nos campagnes, surtout dans le traitement des affections rhumatismales.

Les somnambules ont quelquefois recours à ce moyen; parmi toutes les observations que l’on a recueillies avec soin, je ne citerai que celle-ci :

Une somnambule mise en rapport avec un jeune homme atteint d’une fièvre maligne dont l’état ne laissait plus d’espoir de guérison, ordonna l’application sur le côté droit et sur les côtes au-dessous du cœur, de deux pigeons vivants qu’elle fit ouvrir par le dos ; le malade les conserva pendant douze heures, et le délire cessa; ils furent remplacés par deux autres, et quelque temps après tous les accidents avaient disparu (2).

Nous avons pu constater l’avantage que l’on retire quelquefois d’un bain de sang à sa sortie de

(1) Aperçu sur le Magnétisme.

(2) Annales du Magnétisme, tome III, p. 215.

l'artoiv do l'animal : des luxations du pied ont cédé bien promptement à ce moyen.

Nous ne pouvons raisonnablement attribuer ces cures à l'action directe de la chaleur, car nous n’ignorons pas qu’un pédiluve d’eau chaude serait contraire dans cette affection : l’influence d’un fluide vilal pourrait à plus juste titre revendiquer ces résultats. Si nous en croyons l’opinion des somnambules les plus clairvoyants , le sang, à sa sortie du corps, contient une grande quantité de fluide qui tendrait, par le refroidissement, à s’identifier avec un corps vivant, suivant la susceptibilité d’absorption qu’il possède.

« Lorsque l’on me fait une saignée, nous disait une somnambule d’une rare intuition, il s’échappe beaucoup de fluide; une personne impressionnable aux influences magnétiques s’endormirait facilement en s’exposant à la vapeur qui se dégage du sang à sa sortie de la veine. »

Une étude plus approfondie du somnambulisme nous donnera sans doute un jour l’explication de ce phénomène.

Quelques partisans de la médecine transplanta-toire eurent la prétention de guérir les tumeurs froides et les écrouelles, en frictionnant les parties malades avec la main d’un mort(i).

Bacon discute longuement l'opinion des anciens sur cette pratique (2).

Le célèbre Harvey (3) fit quelquefois l’essai, d’après la méthode de Van Helmont, de l'application

(1) Iîoyle, de Efjluvlis.

(•') Bacon, Sylv. silv., § 973 cl suiv.

(5) Utilité de la Philos, nat.

longtemps prolongée de la main d’une personne morte de maladie lente, pour la cure des engorgements chroniques; il convient cependant que ce traitement lui a rarement réussi.

Nous ne nous étendrons pas sur cette médication singulière, qui pourrait à juste titre figurer à côté de l'onguent armaire et de la poudre de sympathie. Les difficultés d’emploi qu’elle nous offre, et la répugnance qu’elle devra toujours inspirer aux malades , nous fait un devoir d’en repousser l’expérimentation; possédât-elle réellement les propriétés qu’on lui attribuait.

La transplantation de la santé ou de la maladie d’homme à homme, sans influence apparente de la puissance magnétique, sera pour nous un sujet d’études beaucoup plus attrayant.

On appelait gérocomie l’art de rendre de la vigueur à un corps usé, en le mettant en contact immédiat avec un corps rempli de jeunesse et de vie (i).

On a souvent mis à profit les émanations de jeunes garçons et de jeunes filles ; en les faisant coucher avec des vieillards ou des hommes épuisés par des longues fatigues ou le libertinage, on prétendait leur communiquer la chaleur vivifiante de la jeunesse.

Nous sommes éloignés de nous faire les apologistes de cette médecine criminelle qui ne profitait aux malades qu’au péril de leurs bienfaiteurs; car c’était un véritable échange d’une brillante santé contre de hideuses infirmités.

(1) Huffeland, Art de prolonger ta fie , p 6.

L'observation la plus aiicicune que l’histoire nous ail conservée est celle du roi David. Si nous nous en rapportons au texte de l’Écriture-Sainte (i), il suffisait au roi David d’avoir le contact et de respirer les émanations de cette jeune vierge pour retrouver la chaleur qui l’abandonnait.

Le célèbre médecin Boerhave ne dédaignait pas toujours ce moyen. 11 fit coucher entre deux jeunes filles douées de toute la fraîcheur de l’âge , un vieux bourgmestre d’Amsterdam qui recouvra au milieu d’elles la vigueur et l’allégresse de la plus parfaite santé (2).

« J’ai vu, dit le professeur Gilibert (5), des valétudinaires se rétablir promptement en couchant avec des enfants; et des hommes épuisés coucher avec des nourrices fraîches et vigoureuses, éprouver une grande amélioration dans leur constitution. »

Les Grecs et les Romains faisaient le plus grand cas d’une haleine pure, pour raviver un corps épuisé.

Si l’on doit ajouter foi à l’inscription suivante, trouvée à llome, Clodius Hcrmippus atteignit un

(1) Or, le roi David devint vieux et avancé en àgc, et, quoiqu’on le couvrit de vêtements, il ne pouvait pourtant pas se réchauffer.

Et ses serviteurs lui dirent : Qu’on cherche une jeune fille vierge qui se tienne devant le roi, et qui en ail soin , et qu’elle dorme en son sein, afin que noire roi, notre Seigneur se réchauffe.

On chercha donc dans toutes les contrées d’Israül une jeune fille qui fût belle, et 011 trouva Abizag, Sunamite, qu’on amena au roi.

Et cette jeune fille était fort belle, cl elle avait soin du roi, et le servait ; mais le roi ne la connut point.

(I" livre des Rois, ch. 28, § 1.)

(2) lluffeland , Art de prolonger la f ie.

(5) Ouvrage cilé.

âge très-avancé grâce à la respiration bienfaisante de jeunes personnes.

Æsculapio el sanitali L. Clodius Hermippus Qui vixit annos CXV. dies v.

Pnellarum anhelitu (1).

Le docteur Cohausen, l’un des plus savants disciples de Boerhave, nous a laissé une longue dissertation sur cette inscription; il assure, d’après ses nombreuses observations, que l’on peut augmenter ainsi les forces vitales d’un individu affaibli, l’haleinc conservant dans la jeunesse la source de la vie dans toute sa pureté (a).

« Le frère du roi de France, dit Cardan (5), était atteint d’un ulcère de mauvaise nature, il fut guéri par l’inspiration prolongée d’un enfant âgé de douze ans. »

Il ajoute un peu plus loin, « que l’haleine qui provient d’un corps jeune et sain peut corriger les humeurs corrompues. »

La plupart des médecins hermétiques partageaient cette idée.

Bacon admet (4) une sympathie de santé, de même qu’une infection morbide.

L’esprit du sang, d’après Nicolas de Locques (5), possède des vertus d’autant plus grandes, qu’elles

(1) Hermippus Redivivus, 1.1, p. i.

(2) Hermipp. Redivivus.

(3) Oe Subtililale, lib. XVIII.

(i) Ouvr. cité.

(5) Vertus magnétiques du Sang, p. 22.

proviennent d’un animal sain et rempli d'émanations lucides.

Il y a des physiologistes qui admettent l'influence «les émanations, même à distance.

« Des observateurs très-sensés, dit M. de Huni-boldt (i), rapportent des faits d’après lesquels il semble que certaines personnes ont la faculté d'éprouver une sensation à l’approche d’un corps, sans le toucher. Je ne sais si le changement de température qui peut avoir lieu dans ce cas suffirait pour expliquer cette sensation , mais l’expérience prouve qu’un nerf dont l’atmosphère sensible est répandue autour de lui, peut recevoir et propager des impressions sans être touché. »

Longtemps avant cet homme célèbre, Maxwel attribuait aux émanations lointaines beaucoup de maladies dont on ignorait la cause (2).

Roger Bacon (3), parlant des émanations du corps humain, affirme qu’elles sont fortifiantes lorsqu’elles proviennent d’une source pure , mais qu’elles affaiblissent lorsqu’elles sortent de personnes malades.

a Rien n’est plus commun, dit Cohauscn (4), que de voir une femme sur l’âge redevenir non seulement plus leste et plus vivace, mais plus forte et mieux portante après avoirépousé un jeunehomme; elle boit, pour ainsi dire, sa respiration ; attire à elle ses esprits pour s’en restaurer, tandis que son pauvre et jeune époux, souffrant de la contagion

(1) Expériences sur le Galvanisme, p. 201.

(2) De Medicinü inagnellcü, c. 7.

(5) De Prolongatione / ilx.

(1) Ouvr. cité, tome I, p. 163.

de sou haleine et de scs autres émanations, tombe, victime d’une union mal assortie, dans la plus visible faiblesse. »

.Nous connaissons beaucoup de ces alliances contre nature, qui pourraieut venir ü l’appui de cette observation ; mais des motifs de haute convenance ne nous permettent pas de les enregistrer ici.

Le même médecin cite (i) plusieurs exemples d’hommes qui ont atteint un âge avancé dans la fréquentation habituelle de la jeunesse. Il raconte l’histoire d’un vieux seigneur , qui, dans un but de simple charité, avait réuni dans son château une douzaine de jeunes fdles; il jouissait dans leur société de la plus parfaite santé. Frappé plus tard du scrupule que cette pratique pouvait être irréligieuse, il éloigna ces jeunes personnes, et mourut dans un état de consomption trois mois après leur départ.

Le fameux Michel Montaigne croyait aussi aux influences salutaires de ces émanations.

« Simon Thomas, dit-il (2), estoit un grand médecin de son temps; il me souvient que me rencontrant un iour à Toulouse, chez un riche vieillard pulmonique, et traictant avec luy des moyens de sa guérison, il luy dict que c’en estoit l’un de me donner occasion de me plaire en sa compaignie ; et que, fichant ses yeux sur la frescheur de mon visage, et sa pensee sur cette alaigresse et vigueur qui regorgeoit de mon adolescence, et remplissant touts ses sens de cet estât florissant en quoy i’estoy

(1) Ouvr. cité, t. I, p. 68 et suiv.

(2) Essais, liv. I, cliap. 1.

soi) habitude pourroit amender; mais il oublioit à dire que la mienne s’en pourroit empirer aussi. »

Vers la fin du siècle dernier, on exploita a Paris la santé de jeunes filles, en les faisant servir à la restauration de la santé de riches vieillards. Rétif de la bretonne a tiré parti de ce sujet pour la composition d’un de ses ouvrages (i).

11 y avait dans la capitale (si nous nous en rapportons aux détails qu’il nous donne), une ancienne femme de charge d’un médecin célèbre, que l’on connaissait sous le nom de la Restauratrice ; elle recueillait dans les provinces de jeunes filles d’une santé florissante; elle mettait coucher un vieillard entre deux de ses élèves, après s’être assurée de sa continence au moyen d’une forte muselière : ces malheureuses victimes ne servaient que huit nuits consécutives , et cédaient leur place à deux de leurs camarades , qui étaient elles - mêmes remplacées plus tard par deux autres. Chaque Sunamite se reposait pendant quinze jours. Six d’entre elles suffisaient pour un traitement. Il fallait qu’elles fussent vierges, et nubiles. Leur directrice ne les gardait que trois ans, sous le prétexte qu'elles pourraient alors dominer le vieillard, et repousser ses influences morbides, sans influer favorablement sur lui. Une seule fille pouvait servir pendant un an lorsque ses fonctions n’étaient pas interrompues. Quelques personnes prétendent que cette coutume barbare nous est venue d’Angleterre (2).

Nous ne rapportons pas toutes les théories ridicules qui ont été écrites sur la transplantation de

(1) l.es Filles du Palais-Royal. Des Sunamites.

(2) Bacon, Sylvæ tylvanm, seu I/ist. natter.

la santé ou des maladies. L’ignorance profonde des anciens sur la physique expérimentale doit faire excuser les erreurs où sont tombés des hommes du plus grand mérite.

Après avoir étudié l’influence morbide ou curative des émanations animales, nous sommes instinctivement entraînés vers cette importante question de salubrité publique : la contagion des maladies. Nous pourrons traiter un jour in extenso ce sujet d’un intérêt si puissant pour l’humanité, si les forces et le courage ne nous abandonnent pas. Nos convictions sont appuyées sur des faits incontestables, et sur une longue observation. Dans un article aussi circonscrit que doit être celui-ci, nous ne pouvons qu’eflleurer bien légèrement une matière aussi étendue ; puissions-nous réussir au moins à diriger de ce côté l’attention et la sollicitude de nos savants physiologistes.

Nous croyons pouvoir affirmer a priori que le contact prolongé d’un individu malade ou malsain détermine généralement chez l’individu bien portant soit la maladie régnante, soit un état de malaise qui peut dégénérer en une aflêction quelconque, suivant l’idiosyncrasie du sujet, soit enfin le germe d’une maladie chronique qui se développera tôt ou lard.

Parmi les maladies qui nous ont offert un caractère de contagion bien prononcé, nous citerons la pbthisie pulmonaire; nous avons connu des hommes d’une forte constitution et d’une vie bien réglée, qui ont persisté à reposer auprès de leur femme pendant les ravages de cette affreuse maladie; ils n’ont pas tardé à ressentir eux-mêmes

tous les accidents précurseurs de cette affection ; hémoptysie, toux sèche, douleur entre les épaules : les uns ont succombé, les antres se sont rétablis. Un de nos amis, entre ces derniers, a vécu dans une étroite intimité, et à plusieurs années d’intervalle , avec deux femmes qui moururent des suites d’une affection tuberculeuse; pendant tout le temps qu'il lut en rapport avec chacune d’elles, il éprouva tous les symptômes d’une phlhisie au premier dé-gré : ce ne fut probablement qu’à sa forte constitution qu’il dut la chance de ne pas les suivre au tombeau. Quelque temps après le décès de chacune de ces deux malades, il recouvra promptement sa première santé.

Presque toutes les inflammations des membrane» muqueuses, même les plus légères, un simple coryza, une faible bronchite, etc., nous ont souvent présenté les mêmes caractères de transmission , surtout chez les enfants.

Combien d’affections dartreuses et scrofuleuses qui se transmettent d’un individu à l’autre par des rapports intimes! Tout en convenant des difficultés inévitables pour constater ce genre de contagion , nous croyons posséder des éléments suffisants pour appuyer nos convictions à cet égard.

Nous ne parlerons pas de la propagation de ces hideuses maladies d’une génération à l’autre par le rapprochement des sexes : ce n’est un doute pour personne aujourd’hui.

Nous ne nous étendrons pas non plus sur la question des épidémies , qui soulève encore dans ce moment tant d’opinions opposées. N’a-t-on pas nié dernièrement, dans notre savante Académie de mé-

dccinc, l'influence conlagieusc du typhus et de la peste d’Orient !

Nous devons admettre qu’il y a des organisations tellement impressionnables, quelles ne pourront échapper aux effets pernicieux du voisinage de certains malades , et sans contact immédiat; l’atmosphère serait alors l’agent de transmission des efTluves morbifiques; mais nous admettrons aussi qu’il existe des individu» si heureusement organisés, qu'ils resteront en tout temps à l’abri des influences les plus délétères.

Avant de terminer cet article, nous croyons utile de signaler à l’attention la dangereuse habitude que l’on conserve de faire coucher les enfants avec de vieux parents dont les maladies ou les infirmités peuvent imprimer une fâcheuse réaction sur ces frêles existences. Un auteur a dit fort judicieusement que le conte du Chaperon rouge était une allégorie suggérée pour combattre la déplorable manie de nos bonnes vieilles grand’mères, qui compromettaient la santé de leurs petites fdles en les faisant coucher avec elles.

D’ Alfred PERRIER.

{La suite prochainement.)

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

Conférences magnétiques dominicales.

Magie Magnétique.

(Suilc.)

Ces temps ne semblent point faits pour des travaux pacifiques, il est difficile d’ailleurs d'y appliquer ses pensées. Ici, plus qu’en toutes choses, l’esprit doit être dégagé de toute préoccupation ; et comment se défendre d’une secrète terreur quand tout est en péril? Doit-on amasser des idées, lorsqu’à côté de vous 011 amasse des haîues, et surtout lorsque celles-ci onteours? Qu’importe, après tout; dévoilons quelques mystères de la nature; qu’ils soient recueillis ou non, nous aurons rempli notre tâche. Il fut un temps où un instinct sûr me guidait , aujourd’hui cette sorte de prescience a cessé de m’avertir et de me faire entendre sa voix. Suis-je entraîné comme tous vers le torrent qui mugit déjà; me suis-je laissé gagner par cette sorte de vertige qui se rencontre chez les modérés? Ma pensée, dominée par la crainte, m’enlève jusqu’à l’es-

poir ; tous les lettrés sont au bout de leur science, ils se croisent les bras et laissent accomplir les événements qu’ils n’ont point su prévoir. Moi, je suis comme cet insensé qui sème en un champ qui ne peut produire d’épis. Dieu, dans ses desseins, incite les hommes; il faut sans doute qu’ils atteignent le but, quels que soient leurs fatigues et leurs ennuis. Nous sommes peut être un de ces êtres au triste privilège. Suivons.

L’homme a double vie; la science connaît bien l’une : celle de l’état de veille; et tous les humains sont sur ce sujet aussi avancés que les savants. Les rouages de la machine humaine ont été étudiés avec soin; il reste cependant encore beaucoup à découvrir. Les principaux organes laissent peu de chose à désirer ; les physiologistes sont à peu près d’accord; le cerveau seul, c’est l’homme presque tout entier : la science apprend peu de chose sur lui.

Mais l’être humain a une vie cachée, mystérieuse encore : c’est celle qui commence avec le sommeil, soit qu’il ait lieu naturellement ou par des agents physiques ou chimiques. Ici toute science s’évanouit; le savant est comme le dernier des hommes : il croit que tout se borne à des rêves, qu’il n’y a que des rêves. C’est dire que le soleil, qui pendant toute une journée a éclairé la terre, a cessé d’exister; qu’il est couché, pour me servir d’une expression vulgaire. Non, pour nous; l’intelligence, en tout semblableà la clarté, féconde de ses rayons un autre hémisphère. Des alternatives d’ombre et de lumière , vie de relation, vie intérieure. Celui qui sait interrompre ce double mouvement, le perturber et le diriger, est déjà magicien puisqu’il opère un

phénomène au-dessus de toute science académique. Et je crois on être arrivé à ce point.

Placez près de moi un grand philosophe comme M. Cousin ; un savant physiologiste comme M. Ma-gendie ; d’illustres médecins, comme MM. Bouil-laud, Gerdy, Velpeau, et toute l’Académie, je me charge de couvrir tous ces gens-là de confusion; car ils ne comprendront rien à mes œuvres : la cause leur échappera comme celle du choléra et de plusieurs autres maladies. Pourquoi donc en est-il ainsi? C’est que tout vivants ils nient la vie, en rejettent le principe. La force qui les excite, qui leur donne le mouvement, la pensée est pour eux comme si elle n’existait point. Lame, c’est-à-dire la force qui transmue la matière et lui donne des propriétés, malheur à celui qui irait soutenir son existence au sein d’une Académie : il serait conspué. Ces messieurs ne s’occupent que de sciences exactes, et ils y sont si habiles, que chacun de leurs systèmes ne dure en moyenne qu’une année.

L’homme agit sur tout ce qui l’entoure par une loi de nature : ils ne la connaissent point. Des flots de rayons s'échappent de lui dans tous les instants: ils n’ont rien découvert de semblable. La colère, la joie, toutes les passions, enfin, se communiquent par une voie toute physique. Allons donc! ce sont de pures hypothèses : un savant doit les dédaigner. Toutes les sympathies et leurs contraires ont une cause naturelle, le magnétisme la révèle. Erreur! diront les sages. Chaque ganglion nerveux rayonne, et envoie au loin un fluide saisissable : 011 11e le voit point, diront-ils. Attendez, grands hommes, on vous le montrera. Ce fluide a des propriétés

nutres que celles de produire les mouvements; il transporte au dehors du corps même des particules vitalisées; et, comme l’eau acquiert des propriétés en passant au travers de certains terrains , ce fluide éprouve des modifications en raison des éléments dont nous sommes composés. Les Académies, nous devons le dire, sont encore dans le doute au sujet de l’existence même du fluide nerveux.

Notre pensée se communique , rapide parfois comme l’électricité : ils n’en sont point certains, et pourtant, lecteurs, de toutes ces impossibilités je vais faire sortir un grand art, le plus magnifique de tous : m’emparant de l’agent méconnu , je le porterai á mon gré sur chaque partie d’une machine humaine, et il y pénétrera lors même que le corps serait enduit de poix résine, ou couvert d’une cuirasse académique. Et, avec ce levier, je ferai mouvoir la machine; je ferai plus, j’annihilerai la puissance de l’esprit qui y veille, et c’est alors que moi-même en autrui, ma pensée fera fonctionner le cerveau comme s’il était un de mes propres organes. J’y implanterai, j’y semerai mes idées; elles y germeront, et les faits de magie apparaîtront. Bah! diront les sages, vous nous faites des contes : ces choses sont impossibles! Attendez, géants de la science, vous n’y êtes point encore; ceci n’est que le commencement.

Bientôt l’aspect de l’être est changé; dégageant, par artifice, les par lies trop chargées, lame agit d’elle-même, se met de la partie, et un monde nouveau se révèle à nos yeux. 11 fait partie de la double manifestation de la vie, dont nous parlons plus haut. Des communications s'établissent avec

de pures essences. Ah! pour le coup, je vais être

pris en flagrant délit d’imposture.....! car les purs

esprits sont de l’Académie, et ils n’ont, ceux-ci , rien de commun avec la magie et le magnétisme.

Vous le voyez, lecteurs, j’ai presque honte d’affirmer tous ces faits; que voulez-vous? je crois ce que j’ai vu, quoique rien de semblable ne soit consigné dans les annales de notre aréopage. Mais c’est beaucoup trop m’occuper de lui ; cependant je me fais un malin plaisir de vous le présenter avec son auréole ; j’ai tant d’estime pour la science officielle, que je ne puis résister à l’envie de vous en montrer toute la grandeur. Elle est ce que fut le chaos : composée d’éléments divers ; le souffle de vie n’y est point encore, mais il y viendra.

Je puis donc, m’adressant aux illettrés, leur dire : Je vais vous rendre supérieurs, d’abord, à vos grands docteurs, puisque vous aurez pouvoir sur presque toutes les maladies, sans que, comme eux, vous y perdiez votre latin. Puis je vais vous montrer, vous faire toucher du doigt le principe et la cause de la plupart des faits miraculeux qui servirent de base à toutes les doctrines religieuses, et que l’homme, dans toute sa simplicité, attribuait au démon. C’est ainsi que Jésus fut accusé de magic, et d’avoir dérobé la discipline secrète des anciens temples; car il chassait les diables du corps humain, changeait l’eau en vin, ressuscitait les morts, et enfin guérissait une foule d’incurables par un pouvoir qui passait pour surhumain , etc. , etc.

Serait-il donc défendu de rechercher la cause de ces merveilles? Est-ce une grâce que Dieu accorde à ceux qu’il aime, ou bien une force qui se

trouve dans la nature, comme l'électricité? Je suis enclin à penser qu’en nous-méme existe cet agent. Oui sait si bientôt l'antiquité ne sera pas surpassée? car voici ce que nous pouvons déjà.

Réunissant en faisceau les rayons de cette lumière, et les portant sur un homme plein de vie, tout s’illumine en lui, sa face a quelque chose de divin ; ce n’est plus un être froid, gouverné par les lois habituelles ; l’âme n’est plus emprisonnée , et son voile est levé.

La matière ne prend donc point la forme humaine d’elle-même : c’est un esprit qui la lui donne. L’art maintenant peut isoler l’esprit de son enveloppe, et le faire apparaître de manière à ce qu’il soit saisi. Est-ce une erreur , une illusion? c’est à vérifier. Ce qu’il y a de certain , de positif ici, c’est la vision. Les sens, affinés magnétiquement, perçoivent. Les choses vues sont-elles des créations du cerveau, et toutes imaginaires? rentrent-elles dans le néant? ou bien encore le milieu dans lequel nous vivons est-il rempli de substances intermédiaires? Ces questions ont agité le monde autrefois, et ne furent point résolues; mon sentiment ici n’est rien, les faits vont parler d’eux-mêmes.

Opération.

Par un acte de mon entendement, je sépare de moi une force, il y a émission ; je pourrais la rendre sensible par une expression qui viendra en la pensée de tout lecteur. Cette force est réelle, quoique non visible encore. Déposée sur un corps quelconque, elle s’y fixe comme une essence; puis, bientôt elle

exerce son action sur ce qui l’environne, el la magie commence : e’est-à-dire que des phénomènes extraordinaires viennent nous frapper.d’étonnement. Ce n’est point ce que nous avons voulu qui sc manifeste; non, nous sommes tout-à-fait étranger dès lors à ce qui se passe. Cette force a d’abord la puissance d’attirer à elle les êtres qui sont dans un certain rayon. Ils s’approchent tremblants, incertains, palpitants ; leur visage exprime tour à tour la crainte, la tristesse ou le ravissement.

Toutes les beautés du somnambulisme puységu-rique sont effacées, pâlissent devant ces seuls traits qu’il est si difficile de peindre ! Magnétiseurs à somnambules, nous vous laissons bien loin maintenant, car ici point de sommeil; l’être veille, el nous allons tout à l’heure montrer le progrès.

Dü POTET.

(La suite au prochain numéro.)

Société mngnétlqnc de Cncn.

Un membre nous écrit :

« Je vous apprendrai avec peine que nos travaux mesniéricns n’ont plus d’écho dans notre ville. Notre Société se meurt d’inanition. La curiosité du merveilleux est le plus grand mobile de nos sociétaires ; il est déplorable de voir le côté sérieux magnétisme subir l’indiüérence la plus injuste. Nos impressions politiques ont puissamment concouru à faire dresser l’acte mortuaire du magnétisme à Caen. Celte condamnation n’est heureusement pas sans appel. »

VARIÉTÉS.

Catalepsie. — Voici d’intéressants détails sur la maladie de la jeune personne dont il est mention dans notre numéro précédent. C’est une lettre d’homme compétent; nous l’extrayons du National de F Ouest.

Monsieur le rédacteur,

Dès le lendemain du jour où j’ai appris, par votre numéro du samedi 12, qu’il existait un cas fort curieux de catalepsie près du petit village des

1 rois-Hermines, à près de quatre lieues de Nantes, sur la route de La Rochelle, je me suis rendu chez le sieur Chaigneau, dont la fille, nommée Anne, âgée de dix-neuf ans, est malade depuis longtemps. J’ai trouvé cette personne couchée dans un lit, étendue sur le dos, et ayant les membres dans un état de raideur tel, qu’il est impossible d’en déler-miner la flexion, même au moyen des plus grands efforts. Le bras gauche était fléchi, depuis plusieurs jours, sur la poitrine, et je n’ai pu en déterminer l'extension. L’insensibilité de tout le corps est presque complète, car on peut pincer et piquer la malade sans que la moindre sensation de douleur ait lieu. Cependant, en souillant avec force au visage de la malade, les paupières s’agitent un peu. Lors-

qu'on écarte ces parties, on voit que le globe de l’œil roule dans l’orbite, et qu’il est flans un état convulsif profond, ainsi que cela a lieu dans les affections graves du cerveau.

La pupille est très-dilatée, et on n’y remarque aucun mouvement si l’on place une chandelle allumée devant les yeux de la malade. La peau, devenue terreuse seulement aux mains, est dans un état de chaleur normale. Les mouvements du cœur et du pouls sont parfaitement isochrones ( rapport exact des contraclions du cœur avec les vibrations de l’artère de l’avant-bras ), et plus forts que faibles. La respiration est calme et régulière. L’artère aorte ventrale bat avec violence. Les sécrétions alvines et vésicales ont lieu, quoique rarement, les premières surtout. L’époque mensuelle manque. L’amaigrissement n’est pas très-notable.

En somme, la fille Chaigneau, valétudinaire depuis seize mois, est depuis cinq semaines non pas dans un état de sommeil, mais de contracture spas-modique, de raideur tétanique presque générale, et dans l’immobilité la plus complète. Cependant, si l’on reste attentif auprès d’elle, on aperçoit de temps à autre des saccades nerveuses de tout le corps ; alors les paupières s’entr’ouvrent largement et ne laissent voir que le blanc de l’œil, l’iris disparaissant presque entièrement sous l’arcade orbi-taire, en se portant de droite à gauche. De plus, le visage, remarquable par sa fraîcheur et un beau coloris, se contracte, se crispe et s’injecte tant que dure le spasme ; puis, dès qu’il a cessé , la face reprend une expression de calme et de sérénité évidente.

Depuis les cinq semaines consécutives que la malade est alitée, elle en a passé trois sans prendre un atûmc de nourriture. Depuis quelques jours la mâchoire jouit d’un peu de mouvement ; si l’on introduit une cuillerée d’un liquide quelconque dans la houche, la déglutition s’en opère visiblement après quelques secondes.

Jusqu’à ce jour, j’ignore si une médication suivie a été employée, et en quoi elle a consisté, mais je m’en enquiers.

Le cas maladif d’Anne Chaigneau, qui n’a guère d’analogie dans la science, peut donner lieu à quelques réflexions. Et d’abord cette fille est-elle bien atteinte de catalepsie? Cette maladie se développe subitement, et le plus ordinairement à l'annonce brusque d’une nouvelle fâcheuse; les membres conservent les différentes positions qu’on leur imprime. Or, ces phénomènes que j’ai observés trois fois dans le cours de ma pratique, manquent chez la jeune fille dont nous nous occupons.

La vie persistant, pendant un assez long laps de temps, sans alimentation, déconcerte un peu le physiologiste. Mais ce qui doit surtout le surprendre, c’est la suspension de toute perception de la part du cerveau et des nerfs, qui sont les organes du sentiment et du mouvement, sans qu’il y ait trouble dans l’action et la ¡vitalité du cœur et du poumon, qui sont sous leur dépendance. Le cerveau, le cœur et le poumon forment le trépied de la vie, et celle-ci ne peut subsister longtemps sans une simultanéité, sans une harmonie complète d’action entre ces trois organes.

La fille Chaigneau ne voit rien, n’entend rien,

no sont rion, no prend rien, et cependant elle vit. Je no la perdrai point de vue.

PltlOll, i>. M.

Cette intéressante malade a été soumise à l’action magnétique; aussitôt que le résultat de cette tentative nous sera connu , nous le publierons.

Chronique. — On nous écrit de Moscou que le magnétisme y est en très-grande faveur actuellement , par suite de quelques cures obtenues dans des conditions peu propices au succès.

— Nous avons invité les personnes qui, désirant devenir actionnaires du Journal du Magnétisme, n’auraient point connaissance des Statuts de la Société, à en faire la demande; nous réitérons cet avis, et prions celles qui nous ont promis leur concours de nous faire connaître leurs intentions.

Il y a déjà huit des nouvelles actions souscrites par MM.

BAÜIAUT. COLLOT.

MARGERY. ROVÈRE. .

Revue des Journaux. — L’Ère nouvelle vient de publier un Mandement de l’évêque de Verdun , qui infirme l’authenticité de la prophétie d’Orval , re-. produite par nous l’an dernier. Il paraît que c’est une pure invention , composée dans un but monarchique par un ecclésiastique dudit diocèse, qui vient de confesser son mensonge. Nous ne savons si cette explication est vraie , nous l’enregistrons simplement.

Le Gérant : HÉBERT (de Garnay).

Paris. — Imprimerie do Pommcrelel Moreau, quai dei Auguslins, 17.

CLINIQUE MAGNÉTIQUE.

La crainte inspirée par l’approche du choléra a fait chercher mille moyens d’en conjurer la venue. Plusieurs somnambules, qu’on croit lucides, ont été consultés, et leurs avis et recettes publiés. Pour que nos lecteurs n’ignorent rien de ce qui est relatif au traitement magnétique de cette épidémie ; nous enregistrerons tous les détails qui nous parviendront. En reproduisant la notice qui suit, nous n’entendons pas l’approuver en tous points : c’est un document; la valeur en sera ultérieurement appréciée.

DU CHOLÉRA MORBUS.

Lorsqu’une grande calamité frappe une nation, chacun doit la combattre selon la mesure de scs forces; savoir les moyens de la vaincre et les laisser ignorer est un crime; fuir devant elle est une lâcheté. Depuis trois mois le choléra exerce ses ravages sur Paris ; un instant assoupi, il se réveille avec plus de force, et la mort et le deuil vont frapper à toutes les portes. La science, avec tout son savoir , l’humanité, avec tout son dévouement, cherchent vainement à lui arracher ses victimes, TOIHK VIII. — Ri" 91. — 1(1 AVRIL IXi!). 7

il m; semble les abandonner que par caprice, et tantôt les foudroie dès ses premières atteintes , tantôt les enlève après de longues et cruelles souffrances , au moment où elles viennent de se féliciter d’un mieux, annonce de leur mort; au moment où, pleines de force , elles ont fait un effort puissant qui leur fait croire la maladie domptée, la mort éloignée. En présence de si douloureuses circonstances, est-il permis à un homme qui croit savoir des choses utiles, nécessaires, de se taire? Non! nous l’avons dit, ce serait un crime; nulle crainte, pas même celle du ridicule, ne doit l’arrêter ; son devoir est de dire ce qu’il soit; aux autres , d’examiner, d’approfondir, de profiter de ses dires.

Inconnu, sans titre officiel pour parler au nom de la science, je me suis tu jusqu’ici : aujourd’hui je viens faire un appel à tous, mais particulièrement et surtout aux médecins. Je leur dirai : Vous usez vos forces à lutter contre une maladie qui vous résiste toujours; tel remède que vous employez sauve presque instantanément un malade et est inutile aux autres; vous obtenez des succès avec les moyens les plus contraires : le froid et le chaud, les irritants et les émollients, guérissent et laissent mourir tour à tour, sans qu’aucune cause, aucun phénomène vienne vous expliquer leur puissance ou leur impuissance. Vous êtes encore obligés de conclure, lorsque vous réfléchissez sur le grand nombre de remèdes employés et la diversité des résultats obtenus, que « de toutes les tentatives auxquelles ont s’est livré pendant l’épidémie, en ville et dans les hôpitaux, il résulte, comme vérité dominante,

que, pour la guérison du choléra, il n'existe point de spécifique ni de méthode exclusive de traitement. » Paroles, hélas! plus vraies que consolantes, par lesquelles la commission de l’Académie terminait son rapport en 1802. Eh bien! au nom de l’humanité, au nom de l’admirable dévouement que vous prodiguez tous les jours presqu’en pure perte, écoutez-moi, et étudiez ce que je vous dirai ; songez au résultat sans penser aux moyens employés pour l’obtenir, faites pour moi ce que vous faites pour le premier remède que vous trouvez dans une gazette, dans un ouvrage quelconque : expérimentez, et l’expérience ne sera jamais nuisible ni à vous ni à vos malades, elle ne contrariera en rien votre traitement, et elle arrachera à la mort plus des trois-quarts de ses victimes.

J’ai foi dans le magnétisme, non une foi aveugle, mais une certitude appuyée sur l’expérience et la raison. J’ai vu magnétiser et guérir : j’ai douté ; j’ai magnétisé, j’ai guéri, et j’ai cru. Et alors j’ai étudié le magnétisme dans tous ses effets , dans tous ses phénomènes. Le somnambulisme m’a fourni les plus grandes ressources pour rendre service et guérir : pas de maladie qui ait résisté à ses remèdes, pas de malades qui les aien t trouvés inefficaces, (leux qui n’ont pas été guéris ont toujours été soulagés. Préoccupé depuis longtemps par l’approche du fléau qui sévit parmi nous, j’ai dû demander au somnambulisme les moyens de le combattre, il me les a fournis; et à ceux qui ne croient pas, parce que c’est le somnambulisme qui les donne, je leur répéterai : J’ai nié, j’ai douté comme vous; j’ai étudié, expé-

rimenté, et j’ai cru. Faites comme moi, et puis vous prononcerez.

Dans le mois de décembre dernier, on parlait de la présence du choléra à Paris ; je consultai ma somnambule, dont la lucidité constante m’était prouvée depuis longtemps; elle me dit : « Quelques cas isolés et rares peuvent apparaître, mais la maladie ne commencera réellement à sévir que vers le 10 avril. Elle continuera ensuite à marcher avec des fluctuations diverses, suivant les circonstances de température, jusqu’à ce que les brusques chaleurs de l’été viennent lui faire atteindre son intensité; il aura ensuite certains moments d’affaissement et de recrudescence, et mettra pour disparaître le même temps à peu près qu’il aura mis pour arriver à son degré le plus intense. » Ceci a été consigné, dès le mois de décembre, dans les registres de la Société Magnèlologique de Paris, dont j’ai l’honneur de faire partie. Malheureusement, jusqu’ici cette prévision ne s’est que trop réalisée. Espérons toutefois que nous avons atteint le moment de la période décroissante de la maladie, malgré qu’elle ne le prévoie pas avant le mois de juillet.

Le 26 février, celte somnambule fut atteinte pendant la nuit de crampes très-vives, de douleurs de tête, d’envies de vomir accompagnées de violents serrements de cœur, de coliques très-vives accompagnées de la diarrhée. Le matin, quelques instants de magnétisation eurent bientôt fait disparaître tous ces symptômes maladifs; un malaise, un affaiblissement général persista seul pendant quelque temps. L’ayant endormie du sommeil magnétique, je l’interrogeai sur les causes et la nature de son

indisposition ; elle me répondit que c’était une attaque du choléra, et me donna, sur la nature de cette maladie, des détails si utilement intéressants, que je continuai à l’interroger dans plusieurs séances somnambuliques. Aujourd’hui que l’expérience est venue confirmer toute la partie de ses dires, que j’ai pu vérifier moi-même , je livre ses réponses au public, suppliant, avec instance tous les hommes capables, et surtout les médecins, juges en pareille matière, de peser et de vérifier tous les faits que je vais exposer, et, certes, jamais prière plus légitime que la mienne ne leur aura été adressée; je parle au nom des victimes qu’a faites et que peut faire le choléra.

Le choléra n’est pas une maladie d’apparition nouvelle, sa cause est la même que celle des épidémies qui, sous différents noms, ont paru sur la terre, décimant les populations et disparaissant ensuite pendant quelque temps pour reparaître sous différentes formes. Son principe est toujours le même, seulement, ses symptômes changent et le font appeler tantôt peste, tantôt choléra, tantôt lui méritent toute autre dénomination. Pour le vaincre, il faudrait donc l’attaquer dans ses causes, et dès l’instant qu’elles seront connues, la science pourra chercher à les détruire dans l’humanité, dans l’univers , comme elle cherche à le faire chez l’individu.

Tout corps organique privé de la vie et abandonné à lui-même, tombe en putréfaction ; ceci est vrai des plantes qui fermentent et pourrissent, comme du cadavre qui se corrompt. Pendant cette décomposition , il se forme des gaz ou fluides pu-

irides, délétères, vénéneux, et le fluide vital, n’abandonnant entièrement le corps de l’individu que lorsque sa dernière molécule est entrée en rapport avec d’autres particules de matière, entraîne avec lui ses principes morbifiques dans la masse de fluide terrestre, ou fluide électro-magnétique, et lui communique aussi leurs pernicieuses propriétés. Les courants électriques opèrent leur purification dans les entrailles même de la terre, les fluides putrides se neutralisant par leurs combinaisons avec leurs contraires; mais lorsqu’avant leur purification ils se trouvent dans des circonstances telles, qu’ils puissent s'échapper au dehors, soit par les émanations, soit par le dégagement continuel de l’électricité terrestre qu’attire l’électricité atmosphérique, ces gaz se répandent dans l’air, pénètrent tous les êtres, et deviennent le principe, la cause de ces terribles épidémies qui désolent périodiquement l’humanité.

Le gaz le plus délétère, celui qui entre dans la combinaison de tous les fluides vénéneux, c’est le carbone, qu’on retrouvera toujours sous différentes formes dans tous les principes morbifiques. Ici, il se joindra à l’oxigène, et puis se combinera avec lui et d’autres principes pour les rendre mortels, jusqu’à ce qu’il trouve un contraire qui le neutralise. D’après cela, il est facile de s’expliquer la marche du choléra, et de trouver ses causes dans tout foyer d’insalubrité ; les marais où pourrissent lentement tant de détritus de toute espèce; les cimetières où les cadavres sont entassés à une petite profondeur, enfermés dans des cercueils qui ne font qu’empêcher l’action dévorante de la terre et

ralentir la marche de la putréfaction; les usines à gaz, d’où s’échappent continuellement des torrents de fluide carbonique combiné au soufre et aux autres éléments pernicieux. Qu’à un certain moment, la chaleur ou toute autre cause agisse de manière à attirer les exhalaisons terrestres, l’atmosphère s’infecte, et l’épidémie se répand clans toute la contrée. Arrive maintenant un vent violent qui souffle avec persistance dans une direction donnée, et avec lui les principes de mort sont transportés dans les contrées où il souille; et si alors, par une cause quelconque, les émanations terrestres sont activées , si l’atmosphère, fortement chargée d’électricité , appelle l’électricité du globe, l’épidémie éclate et sévit avec violence.

Les brusques transitions de froid au chaud et de chaud au froid arrivent alors presque toujours; tous les tempéraments faibles, maladifs, viciés, en souffrent et sont prédisposés plus que les autres à être atteints par le mal. Mais si la maladie atteint une constitution robuste et vigoureuse, elle la terrassera plus rapidement encore qu’une faible ou délicate.

Et malheur, si la contrée où s’abat le fléau renferme dans son sein des principes d’insalubrité comme Paris ! elle paiera alors bien cher le luxe de son éclairage au gaz, de ses somptueux cimetières, véritables charniers où l’on entasse cadavres sur cadavres sans daigner prendre la moindre précaution pour garantir la cité contre les miasmes méphitiques qui s’en exhalent sans cesse!

Pour détruire les causes, non seulement du choléra, mais de presque toutes les épidémies, il fau-

drait donc assainir tous les pays où croupissent des eaux, où la terre semble suer des fluides fétides, en donnant aux unes une issue, en se précaution-nant contre les autres; il faudrait surtout changer le mode d’inhumation ; il faudrait que tout cadavre fût embaumé ou consumé avant d’être confié à la terre ; il faudrait que les plantations d’arbres fussent multipliées partout. 11 n’y a pas de meilleur moyen d’assainir un pays, d’absorber le fluide carbonique , de détruire la mauvaise influence du vent et de l’atmosphère, que de cultiver les arbres partout où c’est possible. On devrait s’abstenir avec soin de manger des fruits cultivés dans une année d’épidémie, et si la nécessité force à se nourrir de légumes récoltés dans ces années, il faudrait, au moins, s’abstenir avec soin de s’en servir pour la semence des années suivantes, et ce que je dis ici, en général pour les légumes , s’applique surtout au blé dont la mauvaise qualité, jointe à la mauvaise préparation du pain dans les grandes villes, est une cause active de maladie.

Le choléra sévit contre l’individu en viciant tous les fluides de son corps, et principalement le sang. Lorsque l’attaque est à son plus haut degré d’intensité , dès son apparition elle foudroie pour ainsi dire le malade ; la circulation est arrêtée, le sang se décomposant presque instantanément, ainsi que le fluide nerveux, des douleurs de tête terribles, des crampes aux jambes et aux bras s’emparent du malade; le refroidissement des extrémités, presque général, arrive; la face se décompose ; tout le corps prend l’aspect d’un cadavre, et le malade meurt au bout de quelques heures.

D’autres fois la maladie marche plus lentement; elle est d’abord annoncée par des malaises, des faiblesses, des serrements des tempes, des douleurs dans les membres; puis arrivent la diarrhée, les maux de cœur, les vomissements, les crampes, l’aspect cadavéreux et le refroidissement; ces symptômes se succèdent plus 011 moins rapidement, et le malade meurt presque toujours en parfaite connaissance, parfois au moment où il se félicite de se sentir mieux, ou après qu’une réaction violente s’étant opérée, le cerveau finit de se prendre , et le malade est alors dans un état nerveux qui lui donne presque des moments de fureur, puis il meurt habituellement après un mouvement brusque, des fois en voulant se jeter hors de son lit.

Quelques coliques, la diarrhée, un malaise général, des douleurs de cœur, constituent ce que l’on appelle cholérine, la troisième et la moins dangereuse manière d’être du choléra; mais lorsque l’épidémie sévit quelque part, elle donne quelques-uns de ses symptômes à toutes les maladies qui existent en ce moment, n’importe d’ailleurs quelle que soit leur nature.

Un des premiers et des plus grands symptômes du choléra est dans les urines : elles sont d’abord troubles, rouges, laissent en dépôt quelques pe-lottes de sang, des petits grains rougeâtres, et une espèce de matière blanchâtre. Ces différents dépôts contiennent de l’acide sulfurique, du fer et du phosphore; en se décomposant, le sang s’épaissit, reste dans les veines, et tous les principes actifs se portant aux reins, occasionnent d’abord celte décomposition d’urines qui remplit la vessie de ma-

tières âcres, brûlantes, y occasionnent des douleurs, ainsi que dans les reins, et communiquent des coliques aux intestins; alors le sang se trouvant vicié, épais, dépourvu de principes vitaux, se fige, reste dans les extrémités, dans les petites veines, et produit ce froid si intense chez les cholériques.

Lorsque les fonctions vitales se trouvent dans un pareil désordre, toutes les sécrétions, au fieu de se porter dans les organes qui leur sont propres, se rendent dans le gros intestin, le remplissent de matière aqueuse, y occasionnent des gargouillements , et faisant l’effet d’un lavement ou d’une purgation, entraînent d’abord avec elles toutes les matières qui s’y trouvent, et finissent ensuite par couler, pour ainsi dire, toutes seules. Alors, les urines sont entièrement supprimées, elles ne reprennent que lorsque la maladie est domptée. Les matières provenant des vomissements ou de la diarrhée contiennent des corps graveleux, blanchâtres, ressemblant presque à des écaillures de porcelaine, et d’autres matières aussi blanchâtres, mais molles, semblables à du riz moitié cuit; si on les étudait, on reconnaîtrait facilement dans les premières du carbone, dans les secondes de l’azote, liés à d’au-treé èorps.

Le traitement doit être basé sur la nature de la maladie, sur ses différents symptômes : la nature, de la maladie est d’attaquer, de désorganiser tous les fluides, tous les principes vitaux ; or, le remède assez puissant pour combattre cette désorganisation, c’est le magnétisme ; les remèdes qui viendront â la suite ne feront qu’aider son action ; donc, le premier soin à donner au malade, c’est de le magné-

tiscr, puis do lui appliquer les remèdes qui peuvent aider l’action magnétique en combattant les différents symptômes.

Si la personne atteinte du choléra est prise subitement, ou si elle en reconnaît parfaitement les symptômes pour ne pas douter de son invasion, sans toutefois que les vomissements et la diarrhée aient commencé, le vin chaud sucré, fortement aromatisé avec de la canelle et un peu de sauge, doit être immédiatement administré, puis on lui donnera un bain, soit aux fumigations sèches de genièvre, soit à l’esprit-de-vin.

Lorsque la réaction commencera à s’établir, que la transpiration commencera à paraître, on la favorisera par l’administration à petites doses d’une infusion de genièvre qui, en même temps qu’il poussera à la peau, agira comme un excellent désinfectant.

Lorsqu’il y aura diarrhée et envie de vomir, on fera boire au malade, par demi-tasse, d’une infusion composée de fleurs de mauve, de feuilles d’oranger , de tètes de camomille et d’une petite quantité d’arnica. Ces infusions doivent être prises chaudes et sucrées.

Si l’attaque est venue à la suite d’une indigestion quelconque, il faudra d’abord favoriser plutôt que contrarier les vomissements et la diarrhée, puis lorsqu’on verra que les organes digestifs ne contiennent plus de matières étrangères, il faudra agir énergiquement pour arrêter les vomissements, et pour cela on pourra administrer la potion anti-vomitique de Rivière, ou toute autre préparation pharmaceu-

tique qui, sans être trop forte ni trop irritante, puisse produire les mêmes elfe ta.

Quant à la cholérine, le vin chaud, les infusions de genièvre, de mauve et de camomille doivent être seules appliquées pour la combattre.

Si, à la suite d’une attaque de choléra, on craint que la tête ne se prenne, 011 met sur le front des compresses d’eau tiède magnétisée mêlée à du vinaigre.

A la suite de ces différentes sortes de choléra, il sera bon de prendre, pendant quelque temps, une tisane tout-à-la-fois dépurativc et adoucissante. La plus convenable est la suivante :

% Houblon, 20 grammes.

Salsepareille, \ 0 grammes.

Une branche de sauge.

Une pincée de capillaire.

La moitié d’une pomme de reinelle.

Trois cuillerées de genièvre.

La moitié d'une tête de pavot.

Une douzaine d’amandes douces polées et pilées.

Faire bouillir le tout une demi-heure dans un litre et demi d’eau, et eu boire, chaud et sucré, un demi-verre d’heure en heure.

Quant au régime, la situation même du malade doit le dicter, mais il doit être presque toujours fortifiant, surtout si les urines, qui par leur retour annoncent la fin de la maladie, étaient décolorées, blanchâtres et sans odeur. Alors on doit donner des viandes rôlies peu cuites, et du vin, sans toutefois en fatiguer le malade.

Tous ces différents médicaments 11e seront efficaces qu’autant que le magnétisme agira comme le

plus puissant moyen ; sans lui, toute guérison obtenue sera due à l’énergie de la nature, ou à des circonstances exceptionnelles.

Les différents traitements employés jusqu'à ce jour peuvent parfois obtenir de bons résultats, sauf toutefois les réfrigérants, comme la glace , qui sont toujours désastreux ; mais la plupart sont à craindre pour leurs suites, surtout lorsque supprimant trop subitement les vomissements et la diarrhée, ils concentrent dans le corps les principes mêmes de la maladie, ou que, trop énergiques, trop irritants, ils s’adressent à des constitutions faibles, détério-réçs par les ravages du mal. Les sinapismes, les bains sinapisés, peuvent être employés dans différentes circonstances, lorsque les symptômes de la maladie, comme une somnolence trop prolongée et un engourdissement, le demandent. Toute espèce de lavement refroidissant le malade et augmentant la quantité de liquide contenu dans le gros intestin , doit ère rejeté.

Pour le traitement préservatif, il doit se réduire à des soins hygiéniques, une nourriture saine et fortifiante; on peut y ajouter des infusions de genièvre et des fumigations aussi de genièvre dans les appartements , s’abstenir avec soin de toute espèce d’excès.

line remarque importante à faire, c’est que, pendant le cours de l’épidémie, la santé des femmes se trouve plus ou moins dérangée dans leurs fonctions les plus spéciales, soit à cause de l’effet moral que produit la crainte de la maladie, soit à cause de son influence directe.

Voilà la traduction presque sommaire des entre-

diarrhée s arrêta, et lo médecin, content do voir sa malade en si bon étal, jugea ses remèdes inutiles , et m’engagea à continuer de la magnétiser, regrettant de no pouvoir appliquer ce traitement à tous ses clients. Celte dame marche rapidement vers sa convalescence, lille n’a plus ou, depuis la première magnétisation, le moindre symptôme 'alarmant.

Je pourrais ici multiplier les citations, indiquer les nombreuses cures que j’ai faites, et toutes celles qu’ont opéré les magnétiseurs que je connais, surtout M. Winenn, qui depuis trente-cinq ans dévoue son existence au service des malades, qui, en i832, a arraché à la mort des cholériques dans un état désespéré, et combat tous les jours avec le plus grand succès ce fléau. Ce que je viens de dire doit suffire pour attirer l’attention du public, et surtout des médecins, sur l’action du magnétisme dans le traitement du choléra. Qu’ils soumettent mes affirmations à l’expérience, cola en vaut la peine. Tout magnétiseur a assez de foi en lui-même, et sait en même temps assez combien la direction savante d’un médecin est utile et nécessaire pour s’adjoindre immédiatement à celui qui l’appellera; et s’il n’y a pas de magnétiseur disponible , je leur dirai : Prenez le premier individu venu , n’importe son savoir, pourvu qu’il soit bien constitué, dites-lui de faire des insufflations chaudes sur la région du cœur, à l’épigastre et dans toutes les articulations du malade, des frictions avec l’extrémité de scs doigts en descendant le long du corps, et voyez les résultats que vous obtiendrez.

Le magnétisme et la médecine doivent marcher ensemble, s’aider l’un l'autre; les séparer c’est ôter

donné, à moi travailleur, un moyen infaillible de guérir souvent, de soulager toujours nies frères les travailleurs.

11 faut la foi pour opérer des miracles, et le peuple seul la possède : c’est un terrain inculte, mais qui promet des trésors à qui voudra le défricher. Les méchants et les intrigants abuseront de la vérité nouvelle, sans doute, et ils l’ont déjà fait.

C’est une raison de plus pour prémunir le peuple contre leur malice. Et d’ailleurs, si la société est corrompue, ce qui se passe chaque jour sous nos yeux ne prouve-t-il pas que les couches supérieures du corps social sont plus gangrénées que les couches inférieures? A ceux qui devaient être les guides du troupeau, la responsabilité du mal ; car leur égoïsme leur a fait méconnaître la voix de Dieu : ils ont fermé les yeux pour ne point voir, et ils ont bouché leurs oreilles pour ne point entendre.

Voici le traitement en question :

M. D....., âgé de trente-cinq ans, atteint d’un

rhumatisme articulaire à la hanche gauche, entra à l’hôpital Saint-Louis au mois de janvier 1849. Après un séjour de trois mois dans cet hôpital, durant lequel je l’engageai plusieurs fois, et toujours vainement, à sortir, lui offrant de le magnétiser, etlui promettant guérison , il sortit enfin sans avoir éprouvé de soulagement notable à son mal.

Quelques jours après , je fus appelé. La douleur, fixée à la hanche pendant le séjour à Saint-Louis, avait envahi le poignet droit, où elle était intolérable; les genoux étaient affectés , ainsi que le pied droit. Point de sommeil.

Une magnétisation locale de vingt-cinq minutes calma la douleur, la lit changer de place, et endormit le malade.

Le lendemain, mieux sensible dans l’état général. Le malade a dormi la nuit. L’enflure de la main a diminué; la douleur persiste’au genou droit, où elle est légère, ainsi qu’au talon, où elle est plus vive.

Magnétisation générale et locale de trente minutes, qui amène le sommeil.

Le troisième jour le mieux continue. L’enflure du poignet a totalement disparu avec la douleur. Endormi, le maladè consulté ne peut répondre qu’en lui appliquant la main sur le front. Il se plaint de crampes à la main. Quelques passes sur les doigts le soulagent. Une douleur aiguë, qui arrache un cri au patient, survient au pied. Il l’indique ¿ur le trajet du tandon , sous la plante du pied. Quelques passes l’entraînent à l’orteil, d’où elle disparait, ce que le malade témoigne avec une vive expression de satisfaction, llévelllé , il fié se souvient de riefi.

Le quatrième jour, imgnétisatièn générale et locale d’une demi-heure. Le malade a bien dormi ; il peut se lever, se chausser et marèher. 11 se sert de sa main pour écrire.

Pendant son séjour à l’hôpital, une incision a été pratiquée au haut de la cuisse, ce qui le fait boiter et lui cause une légère douleur.

Le mieux est tel qrte M. D.... a repris ses occupations , et a cessé de se faire magnétiser.

Votre tout dévoué élève,

ARNÊTTE.

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

Coufcrcncc» magnétiques dominicale^*

Magie magnétique. (Suite.)

11 n’est plus ici question de somnambulisme : l’être est très-éveillé.

Dans le sommeil magnétique, toutes les forces vives étant refoulées vers les centres nerveux, aucune sensibilité ne reste à la surface; l’abandon du corps est complet, et les inspirations résultent d’un travail intérieur de l’âme repliée sur ello-mênîe. Les communications avec l’extérieur ne peuvent s’établir sans rapport, et ce travail doit presque toujours être sollicité ; enfin le magnétiseur est l’instrument actif des communications, le somnambule n’agissant point par lui-même.

Dans nos opérations, aucune de ces choses n’a lieu. Les forces vives sont appelées à la périphérie ; aucun isolement, sensibilité extrême, exaltation cérébrale, agitation, marche et mouvement volontaires. Les yeux sont ouverts et brillants, la face n’a plus celte teinte terreuse et cadavérique du sommeil ; le cœur a des battements tumultueux. On ne

saurait s’y méprendre, ce sont deux états diilè-rents ; ils ont d’ailleurs des résultats qui empêchent d’abord demies confondre.

Quel que soit le ressort secret que l’on ait fait mouvoir, tout est changé, et l’être ainsi placé offre l’image d’un aspect nouveau de l’humanité. Tout vibre en lui ; il éprouve une sorte; d’incandescence qui le rend lumineux, et qui caractérisait les inspirés : quelque chose de brillant l’environne de toutes parts.

Étonnez-vous, d’après ce court tableau, des merveilles qui vous attendent : ne doivent-elles point se succéder sans relâche? Aussi manquez-vous d’yeux et de sens ; car c’est l’inconnu qui vous frappe à chaque instant, et vous ne savez plus bientôt si vous êtes éveillé vous-même, ou en proie à des rêves qui sont venus vous saisir.

J’ai remarqué que ces scènes captivent fortement ceux qui en sont les témoins. Aucun cependant n’a trouvé jusqu’à ce jour do termes pour caractériser les faits, et les rendre compréhensibles à ceux qui ne les ont point vus. Moi-même j’éprouve qu’il est, pour dépeindre ce que l’on sent comme pour ce que l’on voit, des difficultés insurmontables, et j’avoue mon embarras. J’aimerais beaucoup mieux produire que dire1; mais qui donc consignera les faits? Doivent-ils seulement rester dans le souvenir de ceux qui les ont vus, et se perdre ensuite; ou bien dois-je, par une ébauche, épeler comme un enfant cet alphabet nouveau de la nature? J’ai le sentiment de ma faiblesse et de mon impuissance, commo j’ai la certitude de mon action. Faire et dire sont deux actes distincts; que les

habiles en toutes choses veuillent bien me tirer d'embarras, en me laissant seulement le rùle de machine, je leur serai très-reconnaissant.

Je reprends.

Aucune similitude n’existe entre les phénomènes présentés par plusieurs : tous diffèrent. Si vous laissez l’âme à elle-même, elle manifeste sa tendance, et vous surprenez ce que la vie habituellement cache à tous les yeux : le naturel vrai de l’être. La nature parle par les organes, et non plus d’après les convenances de la raison ; in vino verilas : ce proverbe pâlit ici, car l’homme troublé par le vin n’a aucune liberté: il est presque apoplectique. Dans l’état magnétique, au contraire, les esprits sont dégagés; les membres, loin d’être appesantis, se meuvent avec aisance et liberté ; le poids du corps semble diminué considérablement.

Voilà letre préparé par la nature elle-même à recevoir toutes les impressions , soit qu’elles viennent du magnétiseur, qui peut exercer sur son sujet une influence considérable, soit qu’elles résultent d’agents insaisissables que l’on peut soupçonner exister dans le milieu où l’on expérimente. On nie l’existence des esprits, parce que nos yeux ne nous les font point connaître. Mais toutes les essences qui voyagent dans l’espace, nous ne les voyons point non plus ; l’odorat, pourtant, nous avertit de leur présence. Que voyons-nous, que saisissons-nous par les sens? Infiniment peu de choses, et c’est sur leur témoignage seulement que la science fonde ses jugements. Aussi rejette-l elle tout ce qui est placé en dehors de l’action des sens. L’animal qui, a plusieurs lieues de distance, est averti de l’approche de

son maître, n’est point une preuve pour nos hommes à courte vue. ¡\Iillc faits sont là pour attester l’existence de forces mystérieuses, agissant sur nous et nous pénétrant sans cesse. Il faut en dévoiler quelques-unes : c’est par la magie qu’on y arrivera.

Lecteurs, je vais bien vous surprendre en vous avouant mes doutes sur la natnre de la cause des perceptions dont je vais vous parler. Je ne croirai d’une manière absolue que lorsque j’aurai vu moi-même les esprits sans corps, et que cent autres hommes les auront aperçus en même temps : il ne me suffit point d’un témoignage et de tout ce qui caractérise la situation extrême du voyant. Mais telle est ma convictipn , que j’espère un jour rendre sensibles pour une assemblée entière et pour moi-même, des images réelles de corps qui ne sont plus ; car ce qui a été est encore : rien ne périt. C’est à l’art nouveau à nous montrer les formes, les apparences de ce qui s’est dégagé de la matière. Mais si je conserve un doute, il est tout philosophique. Attendez, lecteurs, ne vous précipitez point en avant ; on s’égare facilement dans cette route, et l’esprit, en dépassant le vrai, le réel, ne vous laisse pas toujours la possibilité de revenir sur vos pas. Beaucoup de magnétiseurs se sont perdus déjà, et leur raison s’est égarée : ils vivront désormais avec de fausses croyances, et toutes leurs œuvres auront une tache indélébile facile à reconnaître pour les gens sages. Mais le commun des hommes adopte sans examen, et c’est ainsi que l’humanité se trouve encore sous l’empire de croyances qui n’ont pour appui que les rêves d’insensés.

Expérimentons.

J’ai tracé sur le parquet un signe avec du charbon ; ce signe n’a aucune vertu par lui-même , mais il en acquiert une fort grande lorsqu’il est tracé dans certaine disposition d’esprit. Le fer n’a aucune des propriétés de l’aimant non plus, mais il les acquiert par l’approche seùle d’une pierre d’aimant. Et, qu’est-ce que le magnétisme minéral auprès de l'humain? Lorsque le signe magique a en puissance la propriété que vous y avez imprimée, vous n’avez plus besoin d’autre préparation. Couvrez-le jusqu’à ce que vous soyez en mesure de commencer l’ex-périènee.

Evitez les senteurs, et tout ce qui frappe les sens, le bruit surtout. Soyez calme et tranquille; n’ayez point l’intention d’agir par vous-même, cela nuirait à l’expérience et en dénaturerait les résultats. Préparez-vous seulement aux éventualités d’accidents nombreux dont plusieurs seront à redouter. Soyez vif et prompt dans les déterminations que vous aurez à prendre ^ car les émotions qu’éprouvent les expérimentés font déborder leur sensibilité, et il faut que vous arriviez à temps pour les saisir et les transporter loin du signe magique. Empêchez-leur, autant que possible, tout contact étranger, et préservez-vous-en vous-méme.

Faites qu’il y ait autour de vous un espace assez grand pour vous mouvoir librement, ainsi que l’expérimenté, qui décrira des cercles autour de ce signe. Ayez, si vous voulez, un siège bas, et sans dossier; car souvent le voyant cherche à s’approcher très-près du signe ; il se penche et finit par se précipiter par terre. Ayez encore un couvercle

opaque pour couvrir instantanément le signe en cas de besoin ; car souvent les émotions sont si grandes, les frayeurs si terribles, que si vous ne dérobez pas à la vue l’endroit d’où partent et se montrent les images, il vous sera presque impossible de conserver votre empire sur le sujet. Ne soyez point ému vous-même, car vous deviendriez inhabile à calmer les désordres nerveux. Songez que vous ne connaissez point encore la résistance que peuvent offrir les organes aux forces vives qui, dans cette circonstance, paraissent quintuplées. Et ce que l’on voit dépasse de bien loin ce qui se montre dans les affections nerveuses, soit qu’elles proviennent d’une altération du cerveau ou d’un dérangement dans les fonctions de la vie organique.

Ne vous laissez point prendre au charme qu’éprouve parfois le voyant : les choses flatteuses qu’il perçoit ne durent que peu d’instants ; elles sont bientôt remplacées par des terreurs soudaines. Hélas! ici se déroule le drame de la vie, seulement la sensibilité est bien plus grande, et la raison n’est plus là pour en contrebalancer les effets et la puissance. Le livre de la vie se déroule, et chaque page se lit dans un instant. Mortels, vous voulez connaître votre destinée; vous brûlez d’impatience et d’envie ; chacun de vous veut dépasser les temps. Imprudents que vous êtes, laissez s’accomplir les événements ! Si ce n’est point la sagesse et la science qui vous guident, vous cherchez les pages heureuses : tout ce qui donne satisfaction à vos faux besoins, à vos passions. Voyez donc tout ce que cela va vous coûter d’ennuis, de déceptions, de peines et d’angoisses. Un vase d’or peut contenir de la lie ou

du poison. Les joies qui nous sont réservées ne se trouvent que dans nos rêves : les réalités cruelles accompagnent chacun de nos pas. Le sage n’a pas besoin de bandeau , ¡1 en faut un sur la vue du vulgaire. Mais, que parlé-je de sagesse ; en est-il aujourd’hui chez les hommes? Et, moi-même, dans cet instant, en livrant au public cette ébauche de science antique, qui jamais ne sortit en vain du temple ; sais-je bien ce que je fais, ce qui m’attend?

Peu confiant dans l’avenir, je n’ai pas voulu qu’il me fût révélé, tant je dois peu compter sur mes forces morales. L’avenir!... tous n’en ont pas; plusieurs doivent finir avant la fin de la journée. L’avenir!... c’est pour les uns l’infamie, le bagne, l’hôpital; la maladie longue et cruelle attend presque chacun de nous, tant nous savons peu vivre et dépenser notre vie. Insensé , qui compte sur le repos et des joies! interroge donc ceux qui t’entourent ; vois leurs tourments, et juge de leur bonheur par la fin qu’ils feront!

llien n’éclaire l’homme : présentez-lui une loi de conservation, il la dédaigne, ou ne s’y arrête point; montrez-lui à travers tous les périls une mine d’or, il sera comme un fou, rien ne l’arrêtera dans sa course.

Heureusement la vérité nouvelle n’est point de celles qu’on peut posséder tout-à-coup ; elle a scs mystères, ses difficultés, et lorsque nous vîmes nos premiers essais parodiés dans leur reproduction, nous savions bien qu’on ne pouvait franchir la limite sans être instruit des règles.

Je reviens au signe magique.

Toutes précautions prises, vous laissez aller les choses. Le voyant perd bientôt la conscience de son être ; le regard sans cesse tourné vers le centre magique, il tourbillonne emporté, soulevé par des forces inconnues, et la lumière des immortels vient pénétrer son âme. 11 sent de rudes secousses : la nature sans doute a besoin qu’il en soit ainsi, c est un rapprochement ou une union intime et parfaite. Voilà les combats allégoriques des fables anciennes. Les savants n’ont jamais pu en déchiffrer le sens, et ils les ont rejetées comme de purs jeux de l’esprit.

A côté du savoir, se cache donc une ignorance profonde; non, ils ne connaissent point la nature, ces savants glacés et rétrécis; ils manquent même d’instincts, car la seule vue d’un fait simple de magnétisme leur eût fait concevoir une révolution profonde dans l’humanité.

Jusqu’ici rien encore que des mouvements, c est le feu souterrain qui remue les terres et les crevasse; attendez, l’instant va venir, où, comme la Pythie, le voyant rendra ses oracles. Il voit, mais nul ne sait encore ce qu’il perçoit. Il pleure, car sa mère est apparue ; ses larmes sont douces et salutaires. 11 voit celle qui lui donna le jour, il la contemple avec transport et ravissement. D’abord il n’a vu que sa face, puis successivement elle s’élève devant lui ; il veut sentir ses étreintes, entendre sa voix ; 1 ombre sourit, et semble l’inviter du regard et du geste; mais bientôt je romps la chaîne établie entre les vivants et les morts, et tout s’évanouit.

Est-ce un songe, une pure vision, un réve sei|-lement? Il n’importe; c’est encore mon secret.

Je viens do produire 1111 fait inouï, je vais le faire suivre de cent faits différents, et montrer par des aspects nouveaux la magie dans ce qu’elle a de saisissable à son point de départ.

1)U POTET.

(La suite prochainement.)

Al lie nrc troycu de Mcftiuérologie.

11 y a deux manières d’attirer l’attention du public sur le magnétisme; l’une consiste à montrer des faits qui attestent son utilité, comme des guérisons magnétiques, des découvertes somnambu-liques, etc. ; l’autre le présente comme objet de curiosité. La première convient aux gens sérieux, la seconde s’adresse aux curieux. La plupart des magnétiseurs ne se sont attachés qu’à l'un ou à l’autre de ces deux modes de propagation. Les uns, s’appliquant exclusivement aux guérisons, ont banni toute expérience sans utilité immédiate; les autres, n’envisageant que le merveilleux, se sont bornés à l’exhibition, souvent théâtrale, des plus étonnantes manifestations du somnambulisme et de l’extase.

Entre ces deux extrêmes se groupent quelques investigateurs qui embrassent tous les faits, synthétisent les aspects, unissent les moyens. Magnétisant à la fois, selon l’occasion , dans un but d’étude spéculative, d’utilité pratique ou de simple curiosité , ils s’adressent à tous les esprits et livrent à chacun ce qui lui convient. Ceux-là seuls ont le vrai caractère de propagateurs , puisqu’ils réunissent tous les éléments de conviction.

C’est on vue de satisfaire toutes les aptitudes, que M. de Rovère fonda, il y a environ un an, iAthénée, où il transmet, par la parole et par les faits, à toute personne désireuse de les connaître, los notions élémentaires de mesmérisme pur et appliqué. 11 donne une séance gratuite tous les dimanches, à huit heures du soir.

Son auditoire étant composé en grande partie de prolétaires, généralement peu instruits des sciences avec lesquelles le magnétisme a des analogies, il a fait imprimer pour eux le résumé de ses conférences , où les données essentielles sur 1 aimant, 1 électricité, la lumière, la chaleur, etc., sont exposées. Démontrant l’existence du magnétisme par expérience , et son applicabilité médicale par des cures, il est arrivé à s’entourer d’un nombre de personnes assez considérable pour nécessiter l’agrandissement prochain de sa salle dos séances.

Chéri des gens qu’il a guéris, soulagés ou instruits, il a été porté candidat à la représentation nationale, et a réuni plus de 12.000 suffrages} mais celte faveur politique lui a , dit-on, beaucoup nui, comme magnétiseur, auprès d’une partie très-notable de la population de Troye9.

VARIÉTÉS.

Catalepsie. — On lit dan9 l’Hermine, de Nantes : « L’état de la jeune cataleptique dont nous avons déjà entretenu nos lecteurs n’est point encore sen-

sihlemcnt amélioré. La malade est toujours plongée dans ce sommeil profond dont rien n’a pu la tirer, si ce n’est à de bien courts el rares intervalles, depuis près de deux mois.

« Les dépendances du moulin de llalllé, situées sur la commune de Château-Thébaud, sonl en ce moment visitées toute la journée par un nombre toujours plus considérable de personnes, qu’un mouvement bien naturel de curiosité attire en présence d’un fait si extraordinaire, et qui s’en retournent pénétrées d’un vif intérêt pour la belle jeune lille dont la vie est aujourd’hui encore en grand péril.

« Après lui avoir vainement prodigué jusqu’ici tous ses soins, M. Sorin, l’un des médecins de la commune duBignon , a consenti à ce quelle passât de ses mains en celles d’un magnétiseur de Paris, M. Gravé, qui depuis quatre jours a soumis Anne Chaigncau à un traitement magnétique qui ne paraît pas avoir produit encore d’heureux résultats bien sensibles, mais sur les suites possibles duquel nous ne croyons pas devoir sitôt nous prononcer.

« Nous nous sommes rendus hier au soir auprès de la malade, et avons été témoin des efforts de M. Gravé pour arracher par l’effet des passes magnétiques , de son état deHorpeur, la pauvre jeune iille qui, avant son arrivée, était étendue sans mouvement sur son lit de souffrance. Pendant l’opération , Anne Chaigneau a plusieurs fois ouvert les yeux, mais presque aussitôt ses paupières sont retombées pesamment ; ses regards égarés et sauvages avaient cette expression étrange et saisissante qu’ont en général les malheureux frappés d’ une com-

piòte aliénation mentale ; ses lèvres se sont aussi en-tr'ouvertes de temps en temps, el le magnétiseur a dit avoir pu saisir quelques paroles, ce qui est peut-être vrai, bien qu’elles ne soient parvenues aux oreilles d’aucun des assistants.

« La cousine d’Anne Chaigneau, fdle d’un autre meunier dont le moulin se trouve, à très-peu de distance, sur la même route d’Aifrcfeuille, est en ce moment atteinte du même mal, après être tombée dans ce cruel état à la suite d’une visite à sa malheureuse parente. »

— Nous regrettons sincèrement quel'éloignement nous ait empêché d’aller voir celte jeune fille ; car c’est un cas tout magnétique, et où nous nous serions promis le succès le plus complet. Il ne fallait pas procéder comme pour les cas simples, c’est-à-dire chercher à éveiller la malade, mais, par une action directe sur les plexus et la base du cerveau, déterminer un somnambulisme magnétique. Bientôt la dormeuse eût parlé d’elle-même, révélé les causes de sa maladie, et indiqué les remèdes auxiliaires, si le magnétisme n’eût dû suffire à sa guérison.

Nous concevons que le magnétiseur ait essayé de la tirer de son assoupissement; c’est la pensée qui viendrait à tous les magnétistes étrangers à nos procédés. Mais, pour qui s’est pénétré des règles que nous avons tracées dans le Manuel, il y aura appris que dans les affections du système nerveux nous provoquons la nature, et que c’est par des perturbations nouvelles que nous parvenons à ramener le jeu normal des fonctions de la vie. Quoi qu’il en soit, nos lecteurs ont pu voir que M. Gravé a obtenu des signes certains de son action , une modification

ré,elle et apparente dans 1 état de l’intéressante malade, ce que n’a pu faire la médecine. Nous attendons des détails directs et plus complets.

BIBLIOGRAPHIE.

PREMIERS PRINCIPES DE MÉDECINE, par le Dr À. IîiLi.mr.; traduit de l’anglais de la quatrième édition , par le D' A. Ciiéreau. lin volume in-8. — Paris, 1847. Chez Victor Masson.

La haute position scientifique du Dr Billing donne * à son opinion un poids considérable ; c’est une puissante adhésion qu’il est bon que chacun de nous connaisse. Yoici comment il s’exprime, p. 21, sur le mesmérisme.

« J’ai, dans le cours de cet ouvrage, et en prenant pour base la physiologie, émis ma manière de voir sur la pathologie du système nerveux ; mais je n’ai poiut ¡voulu traiter un sujet aussi en litige que l’est le magnétisme animal. Le principe d’après lequel agit ce dernier (et sans aucun doute il agit jusqu’à certaines limites), peut, ce me semble, s’expliquer facilement. La physiologie du système nerveux démontre, non seulement dans la torpille, dans la gymnote électrique , mais encore dans la simple action des muscles, qu’à chaque acte de la volonté l’état électrique éprouve un changement en plus ou en moins ; que, en d’autres termes , il s’établit, tant dans l’action de jouer du piano, par

exemple, que dans celle d’exécuter des passes, ainsi que le font les magnétiseurs, une communication électrique entre le cerveau et les extrémités des doigts, et que chacune de ces actions est accompagnée d’une succession de transmissions d’électricité qui ne sont pas perceptibles individuellement, mais qui par leur continuation produisent une impression ou résultat, de même qu’il est possible de charger une batterie électrique au moyen d’une machine très-faible, bien que les étincelles ne soient point visibles. La personne qui exécute les passes produit une succession de transmissions d’électricité , lequelles altèrent l’état électrique du cerveau de la personne magnétisée, dont le système sera (outre les particularités individuelles qui modifient, même dans l’état de santé, la susceptibilité nerveuse), impressionnable si elle ne se trouve point dans des conditions normales, ou si elle est prédisposée au coma. » »

Ce bout de système pourrait être combattu, en ce que le magnétisme pénétrant dans la machine humaine, ne s’y comporte point entièrement comme l’envisage cet auteur. Mais comment faire une critique sur l’émission d’une simple idée jetée en passant? Nous devons nous borner à constater ces dispositions favorables d’un des plus grands médecins de l’Angleterre.

Le Gérant : IIKItERT (île Garnay).

CLINIQUE MAGNÉTIQUE.

Une personne qui suit avec beaucoup d'avantages le traitement de M. Laforgue , nous donne d’intéressants détails sur les cures qui s’opèrent à Pau. Voici quelques passages extraits de sa lettre :

« Le4 du courant, le sieur*** et la nommée Mag-deleine***, son épouse, habitants du hameau de Canarasc, canton de Clame , étaient présents à la séance diurne de magnétisme spirituel qui a lieu dans la cellule de M. Laforgue. Comme les privilèges et les prérogatives n’ont point d’accès dans ce lieu saint, tout individu, sans distinction , descend dans la piscine, sans au préalable avoir subi d’interrogatoire sur ce qui l’amène. Il en est ici comme à la piscine hébraïque; le premier arrivé a la première place.

« Les sus-mentionnés se trouvaient donc placés côte à côte, précisément à la première place, qui est en face du siège de M. Laforgue, à la distance d’un mètre. Le plus profond silence régnait au sein de cette assemblée compacte. Chacun, en particulier, adressait au Tout-Puissant des vœux plus ou moins ardents pour la délivrance de son infirmité.

TOME VIII. — N" »9. — 25 AVRIL 8

Le commandant, qui est dans l’habitude de jeter un regard furtif, de temps en temps, sur les malades placés vis-à-vis de lui, interrogea Magdeleine, qui répondit être atteinte de,- cécité depuis environ

dix ans.....Tout d’un coup, par inspiration divine

sans doute, M. Laforgue s’interrompt au milieu de sa prière accoutumée, et, de dessus son fauteuil de douleur, adressant la parole à l’aveugle, il lui dit : « Magdeleine, ne voyez-vous rien?» Elle répondit négativement. Au bout d’un instant M. Laforgue reprit : ■ Allons, Magdeleine, levez la tête, « et regardez-moi fixément ; tâchez de distinguer : « vous voyez? — Hélas ! répartit-elle , plût à Dieu, « M. le commandant, que je visse, comme vous le « dites; mais malheureusement la plus grande obs-« curilé règne pour moi dans ce lieu; je suis dans « les plus épaisses ténèbres. »

« Le commandant, dont la pénétration et la fixité de l’œil égalent celles de l’aigle, jette un regard perçant sur cette pauvre créature ; et, d’un élan spontané et rapide de l’âme, dit à cette intéressante personne : « Magdeleine , je veux que vous me « voyiez.... — Monsieur, je vous vois, » répondit-elle avec transport, et elle considère avec bonheur les différents tableaux qui décorent la cellule du bienheureux Laforgue. Jamais joie ne m’a paru plus vive que celle exprimée par les traits de l’heureuse femme. Naguère, en entrant, conduite par son mari, son visage était empreint d’une tristesse mortelle, et maintenant c’est elle qui la première, d’un pas leste et rapide, franchit le seuil de la modeste cellule.

« Après que l’émotion produite par un fait aussi

« Eh, comment voulez-vous sentir, puisque je ne « vous mels rien ! Je prie Dieu pour qu’il vous gué-« risse; voilà tout. — Oh ! reprit Belocq, j’ai la con-iviction qu’aussitôt que vous m’aurez mis l’huile « j’entendrai. »

« Le commandant demande alors la baguette de cristal dont il se sert d’habitude, comme premier rapporteur, pour introduire avec succès le fluide dans les organes. A peine la baguette avait-elle effleuré l’oreille du patient, que M. Laforgue s’arrête pour lui demander quel est son prénom ; Belocq répond aussitôt : Bernard.

« Je vous déclare que je fus véritablement électrisé , et tous les assistants crièrent au miracle. M. Laforgue continua cependant de l’explorer, et ce vieillard fut encore assez heureux pour voir la personne de son bienfaiteur. En somme, le pauvre cassé s’en alla pleinement satisfait, et grandement troublé de ce qui venait de lui arriver.

« Je passe sous silence, monsieur, bon nombre de guérisons arrivées avant et après celles-ci ; j’ai cité seulement ces faits comme étant les plus caractéristiques et frappants. Il ne se passe pas de jour qu’il n’y ait autant d’heureux.

« Je vous confesse que la personne de M. Laforgue est une de ces puissances occultes que l’esprit le plus perspicace ne peut ni saisir ni pénétrer. Et cependant il n’emploie d’autre moyen pour opérer tant de merveilles, que la prière, l’huile, l’tfau et l’encens magnétisés.

« Je regrette vivement, monsieur, d’être aussi peu avancé; je voudrais, dans l’intérêt du magnétisme cl de la société, pouvoir constater jour par

jour tous les faits rares qui se déroutant sous mes yeux. D’après mes plaintes de voir tomber dans l’oubli, et réduire à néant, des guérisons qui fixeraient vivement l’attention du public, M. Laforgue, dont la modestie est extrême, m’avait enfin témoigné , il y a environ un mois , l’intention de vous envoyer un relevé des cures obtenues depuis ta icr janvier; ce pauvre commandant est sans cesse avec de nouveaux malades. 11 reste dans sa cellule depuis cinq heures du matin jusqu’à huit heures du soir. A peine s’il a ta temps de prendre sa nourriture.

« Je fais les vœux tas plus ardents que puisse former un jeune homme enthousiaste de tout ce qui est bon cl utile, pour l’extension du magnétisme.

« J’ai l’honneur de vous saluer avec considération,

J. DARRIBES.

CATALEPSIE.

Nous avons déjà plusieurs fo¡9 parlé, d’après tas feuilles de Nantes, d’un cas extraordinaire de transe cataleptique, extatique ou léthargique, el de son traitement magnétique commencé. Yoici à ce dernier égard des détails précis qui nous sont adressés par le doyen des magnétiseurs nantais, M. de J-ongpré, qui, depuis la mort de M. Segrétier, l’élève et l’ami de Mesmer, est considéré dans 1e pays comme 1e représentant du magnétisme.

Monsieur,

J’ai sous les yeux le numéro du Journal du Magnétisme , où, après avoir mentionné le récit du National de [Ouest sur la maladie d’Anne Chai-gneau , vous exhortez les magnétiseurs de Nantes à tenter la guérison de cette singulière affection.

M. Gravé avait prévu votre intention, et, quand votre appel nous est parvenu, il avait déjà commencé le traitement de la maladie en question.

Mais, au lieu d’une cataleptique il s’en est bientôt trouvé deux.

M. Gravé, qui est doué d’une grande puissance et d’un zèle infatigable, s’est occupé de suite, et exclusivement, de ces deux malades, leur prodiguant journellement ses soins avec autant de dévouement que d’habileté. Je me borne ici à vous signaler ce zélé et modeste apôtre de notre doctrine, et à vous entretenir succinctement des deux cataleptiques , me réservant, si vous le désirez, de vous envoyer les détails circonstanciés du traitement, et les effets de la puissance qu’a déployée notre collègue en présence d’un public nombreux : savants, médecins, curieux.

L’état d’Anne Chaigneau est constaté dans la lettre du Dr Priou.

L’autre malade est Marie Rivierrc, cousine de la précédente. Elle était, depuis environ quinze mois, affectée de catalepsie histérique, dont elle a eu plusieurs accès permanents; un, entre aulres, a duré dix-sept jours. Elle était, en outre, depuis la

même époque, paralysée du bras droit, qui était contourné en arrière, la main renversée, etc., au point de rendre ce membre inutile. Elle avait aussi, depuis sept mois, une extinction de voix.

La catalepsie paraît héréditaire dans Còlte famille, car une tante dés deux tnàladés, religieuse, en est également atteinte.

Pendant le cours de leur maladie , plusiéUirB médecins ont employé successivement tous les moyens les plusénergiquespourles guérir £ ttiaiS tout échoua, notamment durant les cinqudhte-sept jôUré dii dernier accès d’Àhne Chaigneau, ainsi qu’il est relaté dans les précédents numéros de votre Journal.

C’est dans ces conditions qué M. Gravé entrepôt le traitement simultané des deux malades.

1° Anne Chaigneau.

Première séance. — Après deux heures et deihie de magnétisation, au milieu d'une foule de curieux qui gênait le magnétiseur et incommodait la bià-lade , celle-ci ouvrit les yeux plusieurs fois, et leur expression s’adressait à Dieu. Ses lèvres étaient moins contractées, et ses membres plus soupleé ; mais cette amélioration n’était sensible qüê poür ie magnétiseur. Il eût fallu continuer deüx heures de plus pour l’éveiller ; mais les parents engagèrent de cesser, et M. Gravé y consentit poür ne point lés éloigner de ce genre de traitement inconnu poür ëuiCi

Deuxième séance. — L’affluence du public, pendant l’absence du magnétiseur , neutralisa sans doute les effets de la précédente séance, car

M. Grave trouva la malade dans le même état, même moins bien qu’en la quittant.

Après une heure trois quarts de magnétisation fervente, il lui dit :

« Anne Chaigneau! »

Elle fit des efforts successifs de tous ses membres , grinça des dents, et enfin répondit assez énergiquement :

« — Que me voulez-vous?

— Que vous viviez; Dieu le veut! »

A ce moment solennel les larmes coulèrent des yeux de tous les assistants, étonnés el attendris.

Dès lors l’état cataleptique cessa, et après un vomissement de sang noir, d’environ deux cuillerées, elle toussa deux ou trois fois. M. Gravé l’engagea à boire de l’eau sucrée magnétisée. Elle le remercia de ses soins, prit le verre elle-même , à son invitation , et en but le tiers. Pour la première fois, depuis cinquante-huit jours, en rendant le verre elle étendit les bras, elle serra les mains de M. Gravé en pleurant, et demanda son père.

Troisième séance. — Le lendemain la malade était encore retombée en catalepsie ; les nombreuses personnes, médecins et autres, qui, dans l’intérêt de la science et de l’humanité, l’avaient visitée en l’absence du magnétiseur l’avaient sans doute fatiguée ou neutralisé les effets du fluide magnétique.

Au bout de deux heures de magnétisation, la malade sortit encore de sa léthargie, en vomissant deux cuillerées de sang noir, et toussant deux ou trois fois. Elle but, comme la veille, de l’eau ma-

gnétiséc qucM. Gravé conduisait de la bouche h l’estomac par des passes, et de là aux intestins, où clic produisait un bruit remarquable.

Après la séance, M. Gravé engagea les parents à ne la laisser approcher par quiconque; mais l’af-flucnce des curieux était si grande, que, avant qu’il se fût éloigné de cinquante pas, on se précipita dans la maison. Une lutte s’établit entre les parents et les curieux. M. Gravé, entendant ces cris, retourna auprès de la pauvre fdle dont on violait le domicile, et ne réussit à entrer qu’après bien des efforts. De quel spectacle fut-il témoin? La jeune fille, par la contrariété de ce tumulte, était en crise nerveuse, se tordant sur le sol, où elle était tombée de son lit de misère. M. Gravé et autres s’empressèrent de la recoucher; et après l’avoir calmée de nouveau, M. Gravé la quitta en faisant des vœux pour que Dieu ait pitié de cette intéressante créature, et lui permette d’avoir la possibilité d’améliorer son sort.

Quatrième séance. — M. Gravé trouva la malade retombée dans le même état, par suite du tumulte de la veille. Il y avait trente personnes autour d’elle, et plus de cent à la porte, qui demandaient à entrer. Après une heure trois quarts de magnétisation , la catalepsie cessa comme les jours précédents.

2° Marie Rivierre.

Première séance. — M. Gravé, après la magnétisation ci-dessus relatée, se disposait à s’en aller, lorsqu’on lui fit voir que Marie Rivierre venait de

tomber aussi en catalepsie. 11 la magnétisa immédiatement, et après quarante minutes d’action, il lui dit : « Joignez les mains , et priez Dieu pour le remercier de la grâce qu’il vous fait. » Ce qu’elle fit en présence de la foule qui comblait le modeste appartement. Par cet acte on vit avec étonnement que le bras droit de la malade était déparalysé, puisque elle joignait les mains en les levant en avant, ce qu’elle n’avait pu faire depuis quinze mois. Cette scène solennelle fut triomphale pour le bienfaisant magnétiseur, Il fut entouré de la foule émerveillée, qui lui demandait spn nom, son adresse, et implorait spn secours pour des malades.

Ce succès n’a rien d’étonnant pour vous, monsieur, qui êtes habitué à des ovations semblables pour des cures soudaines; mais ceux qui n’en ont jamais été témoins ne peuvent être que fort étonnés.

MM, Priou et Spriq, médecins des malades, étaient présents à cette séance.

Marie Rivierre refusa le moyen de transport qui lui était proposé, et s’en retourna à pied chez elle, à trois kilomètres ; enchantée de pouvoir agir librement > elle mouvait incessamment son bras en tQUS Sens, à la vue des personnes qui lui faisaient cortège, Elle fit dire à son magnétiseur que, rendue à la maison, elle s’était déshabillée seule avec son bras droit, pour 8$ reposer comme il le lui avait ordonné.

De la 2* à la i3e séance, Marie Rivierre a été trouvée en -catalepsie. La magnétisation la faisait chaque fois sortir de cet état. mais elle y retombait toujours en l’absence de M. Gravé, par l’incommo-

dite de la foule curieuse qui sc transportait à son domicile comme à celui de sa cousine.

Son bras n’a plus ¿té paralysé.

De la a6 à la 7e séance, elle vomissait du sang et toussait en s’éveillant.

A la 8e séance, toux sans vomissement.

A la ç)e, point de catalepsie.

Les 10e, ii*'et 12% retombée.

A la i3®, point d’accès, ni toux, ni vomissement. Les menstrues ont paru ; la malade se trouve bien.

De la ¡4' à la 17e et dernière séance, les menstrues continuent abondamment, ainsi qu’elle l’avait prédit, et la guérison s’ensuit.

Maintenant elle participe aux travaux delà cam-gne. Elle est venue à Nantes, avec ses parents, samedi dernier.

Quant à son extinction de voix, la somnambule de M. Gravé avait prédit qu’elle cesserait par le magnétisme; et cela s’est réalisé à jour dit, au grand étonnement de tout le monde à qui on l’avait annoncé; je m’en suis convaincu hier en l’entendant.

J'ai vu également hier Anne Chaigneau, qui va beaucoup mieux, et n’a plus retombé. Ses menstrues ont reparu une fois. Il ne lui reste qu’une grande faiblesse, ne pouvant encore prendre de nourriture solide à cause de la faiblesse de son estomac. Quoique ayant la voix faible, elle est gaie et cause très-volontiers.

Voilà, monsieur, un compte rendu fort long; c’est pourquoi je m’asbtiens de vous faire le récit des séances suivantes d’Anne Chaigneau , quoique fort intéressantes pour la science. Ayant suivi exacte-

ment ce traitement, et assisté à beaucoup de séances, je liens la suite à votre disposition si vous le désirez.

Veuillez agréer l’assurance de ma très-haute considération ,

BERTHÉR.VND DE LONGPRÉ.

Acceptant l’offre bienveillante de M. deLongpré, nous l’avons prié de nous envoyer le complément du traitement d’Anne Chaigneau, de manière à ce que l’histoire entière de cette maladie soit acquise aux annales de la science magnétique.

BU CHOLÉRA. — AVIS.

L’épidémie qui sévit sur Paris nous a trouvés presque dépourvus de moyens de la combattre ; pour que pareille chose ne se renouvelle pas , si jamais ce lléau vient à nous visiter, nous invitons tous les magnétiseurs à nous faire part des résultats qu’ils ont obtenus dans le traitement de cette cruelle maladie. Nous publierons tout ce qui est de nature à jeter du jour sur cette grave question.

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

Conférence» magnétiques «lominicalc.s.

Magie Magnétique.

(Suite.)

Nous disions naguère aux hommes d’intelligence, en faisant appel à leurs lumières : Prêtez-nous votre concours, écrivez tandis que nous produirons. Et pendant que nous parlions ainsi, l’article qu’on va lire s’écrivait. La précision et la clarté qui régnent dans cette description nous font vivement désirer que l’auteur poursuive; car si chaque sujet était traité de la sorte, la science se formerait promptement.

Aperçu sur différents états de l’extase magnétique.

L’extase est cet état magnétique où l’âme, détachée des sens, n’est plus impressionnée par leurs organes, et dans lequel les objets du monde physique ou animé, ainsi que l’esprit pur et infini, sont perçus par cette vue surnaturelle qu’on appelle vision, au lieu de l’être par le pouvoir magnétique ordinaire dans la lucidité somnambulique, où les objets matériels, par exemple, sont perçus directement et positivement comme le feraient les or-

ganes des sons arrivés à une perfection sublime; taudis qu’ici, iis ne représentent que des signes de corrélation, que des images associées que la vision saisit à l’exclusion des qualités matérielles.

Lorsque le sujet de l’aperception n’appartient pas au monde matériel ou animique, l’âme acquiert toute sa liberté ; sa sensibilité affective et religieuse se développe, absorbe toutes les autres facultés, et devient le seul foyer de sa vie spirituelle.

Nous allons successivement passer en revue ces trois états différents, dont nons avons recueilli des exemples dans les séances dominicales instituées par M. du Potet, dans le seul but philanthropique de la propagation et du développement de la science magnétique, dont les théories appliquées sur les personnes qui composent son auditoire, font naître les phénomènes magnétiques les plus intéressants.

Le premier état de l’extase, celui où des substances matérielles servent de sujet, de véhicule à l’aperception extatique , nous a été révélé dans maintes expériences faites avec le miroir magique dont le digne maître, qui en est aussi le renovateur, fait un si habile et si intéressant usage.

i° Lorsqu’un jour, dans la combinaison des éléments de ce miroir, il entrait quelques parcelles de terre provenant du sol de Naples ;

Le sujet de cette expérience se plaignit du malaise que lui causait la chaleur étouffante d’un climat brûlant, et ne se lassait pas d’admirer des jardins magnifiques, ornés de la végétation la plus belle et la plus nouvelle pour ses regards.

20 Lorsqu'à une autre séance, ce même miroir

lit voir à deux personnes qu’on y avait conduites, des mares de sang, des instruments de supplice, des sacrificateurs.....

Cette fois, l'élément combiné était de la poussière d’ossements humains recueillis dans un dolmen, ou tombeau druidique.

Le deuxième état, celui qui dévoile au sujet la perception du monde animique, s’est manifesté dans une expérience faite avec le miroir magique portatif.

L’une des dernières séances nous en a olfert l’exemple splendide. Lorsque le miroir ayant été posé à terre, eut attiré plusieurs personnes, les unes doucement, d’autres violemment, selon le degré de leur sensibilité, une jeune dame charmante, dominée comme les autres par le pouvoir magnétique, après avoir marché derrière les personnes agenouillées autour du miroir quelles contemplaient, se tint débouta l’écart, et comme en observation de celles-ci. La tête fortement penchée sur 1 épaule droite, sa physionomie exprimait le dédain, le mépris sardónique le plus énergique, j’allais dire le plus beau qu’il soit possible d’imaginer ; car, pour en voir la reproduction, soit dans 1 exercice naturel delà passion elle-même, soit dans les efforts de la mimique la plus savante et la plus étudiée, cela n’est pas possible : c’était lo prototype de 1 ironie. On aurait dit un modèle vivant des peintures d’IIerculanum, une Muse antique, Mel-pomène, en un mot.

Voilà 1 état du sujet dans ses rapports avec son semblable, dans ses rapports animiques; car ce

n'était certes pas les images du miroir qui occupaient son esprit, puisque la vue lui en était cachée ; c’était seulement les états de lame des autres personnes magnétisées qui la préoccupaient : le miroir et ses images n’étaient rien pour elle.

Le troisième état extatique , celui où le sujet n’ayant ou n’acceptant aucun rapport avec le monde matériel ou animé, existe d’une vie toute spirituelle. Alors sa sensibilité affective et religieuse, devenue libre, se développe, grandit et absorbe toutes les autres modifications de l’âme.

C’est cet état qui donne aux sentiments les plus délicats et les plus vifs de l'âme, cette aspiration vers le Ciel qui semble l’entraîner, par un ardent amour, vers la fusion de son essence dans l’essence du Père infini.

Le plus beau type que je connaisse de cette extase, nous a été offert dans la séance dominicale du 4 mars dernier.

Si je ne consultais que mes moyens, assurément je reculerais devant la tentative de décrire cette scène aussi neuve qu’émouvante pour moi. A défaut de talent, il faudrait au moins un nouveau langage, de nouveaux mots, de nouvelles images, pour dépeindre et analyser des situations, des émotions qu’on ne peut que sentir et admirer; pour faire comprendre quelle est cette seconde existence, cette seconde vie dans la vie, où l’âme est entièrement détachée de la matière corporelle, où les sens sont suppléés par les facultés de l’esprit pur, et où celui-ci n’est plus excité, ni par les substances matérielles, ni par les êtres de sa propre nature. La

sphère de ses rapports est uniquement celle du grand litre. Lui seul est son objet.

Ce sont les phases et les développements de cet état surnaturel que j’ai tant admirés et si vivement sentis.... Mais sentir et exprimer sont choses bien différentes. La première est un fait passif qu’on subit, tandis que la seconde doit résumer la force active, créatrice qui communique et l’idée et l’émotion.

En cherchant à fixer, même grossièrement, une impression aussi fugitive, j’avais seulement obéi au besoin d’une imagination d’artiste..... Malheureusement, mon croquis n’ayant eu pour but que de rappeler au souvenir quelques traits de ce séduisant tableau, il ne peut s’adresser qu’à ceux qui en ont été les heureux témoins ; pour les autres, c’est une pure énigme.

Le 4 mars, vers la fin de la séance, M. du Potet magnétisa une jeune personne de quinze à seize ans. Son visage régulier, son teint plein de fraîcheur, ses yeux bleus, grands et beaux, sa taille moyenne, concouraient à former l’ensemble de ce qu’on peut appeler une personne gentille plutôt que jolie.

Après plusieurs petites passes faites sur la face, ses paupières s’agitèrent rapidement, et finirent par se clore, puis s’ouvrirent à moitié par petits mouvements saccadés et convulsifs, laissant voir à peine la pupille de l’œil ; enfin, elle éprouva une contraction du bras droit, dont elle porta la main à son front avec une agitation pénible.

Le maître, alors, jugeant à propos de mettre un terme à cet état, d’un geste la dégagea du fluide qui le déterminait.

Quelques instants après, il la conduisit, tout éveillée , vers le miroir magique portatif qu’il avait posé à terre. Elle y fixa ses regards, et bientôt la puissance magnétique l’atteignit et la domina plus fortement que la première fois. Ses bras manifestèrent un mouvement spasmodique, et ses yeux s'ouvrant complètement se dirigèrent vers le Ciel, en s’y plongeant énergiquement; puis, fléchissant lentement les membres inférieurs avec une espèce de cadence, comme si elle eût obéi à un mouvement rhythmique, elle posa doucement et sans secousse l’un de ses genoux sur le parquet.

Elle était à l’état d’extase!....

Ce fut alors que commença, pour les témoins de cette scène muette, le spectacle le plus ravissant, mais en même temps le plus difficile à décrire; spectacle nouveau, inconnu , qui trouva cependant dans nos âmes des fibres sympathiques pour nous initier à toutes ses évolutions, et nous faire partager toutes ses émotions.

Une main ouverte et dirigée vers le ciel, l’autre abaissée vers la terre; le corps légèrement penché, dans l’attitude d’une Niobide; la tête renversée suffisamment pour concourir à la direction de son regard ; ses yeux, arrivés à leur plus grand développement, brillaient d’une vivacité et comme d’une lumière surnaturelle, d’un rayon de flamme ayant tout l’éclat d’une étincelle électrique permanente, qui troublait la vue et remplissait d’émotion ; et son sein oppressé exhalait un long soupir de ravissement. Tel était l’ensemble de sa pose et de son expression.

Dans cet état de béatitude indicible, elle sem-

blait prier, ou plutôt elle priait réellement; car, sa bouche d’accord avec ses yeux, avec les traits de son visage et toutes les parties de son corps, exprimait l’adoration et l’amour. Qu’elle était belle, alors! Ce n’était plus cette jeune fille presque vulgaire dont j’ai parlé : elle était transfigurée!.......

Ses formes physiques étaient passées à l’état d'idéal; les contours de son visage étaient épurés, anoblis; sa bouche plus gracieuse, et ses yeux agrandis, resplendissants, étaient devenus comme le foyer embrasé de toute sa vie animique.

Mais ses traits, sa physionomie, son attitude, signes visibles de ses émotions internes, n’étaient pas plongés dans une léthargique adoration, dans une extatique immobilité qui n’aurait représenté qu’un seul état de l’àme, qu’une seule note de l’harmonie animique universelle.....Non ! cet état phénoménal eut son enchaînement de phases qui formulaient un élan complexe d’adoration, de reconnaissance et d’amour; un entretien suivi, avec ses nuances d’aspirations, de désirs, d’espérance, toujours saturés d’un sentiment de tendresse inefFable. L’amour de Dieu l’embrasait tout entière : c’était 1 alliance immédiate de la terre avec le Ciel.

Un sentiment instinctif, une intuition d’harmonie préétablie, semblait initier le spectateur à cette extase, et le faire suivre et sentir toutes les modulations de cette hymne angélique, muette seulement pour nos organes grossiers. Alors tous ses traits changeaient graduellement d’expression; et l’attitude de son corps, les gestes de ses bras venaient compléter la formule de ces enivrants entraînements de 1 âme pure, de ces tendres supplications, de ces

élans d'amour épanchés dans le sein du Créateur.

Toutes les phases de son sentiment étaient exprimées par les modifications successives, et régulièrement enchaînées de son attitude et de sa physionomie , qui se succédaient lentement ; mais par des mouvements souples, cadencés et toujours gracieux, sans point d’arrét ni solution de continuité : de même qu’une belle fleur dont la fraîcheur du matin relève doucement la tige penchée, et qui ouvrant son calice aux premiers rayons du soleil, s’épanouit lentement aux regards attentifs.

Aussi, après s’être gracieusement inclinée à droite, puis à gauche, en ondulant son corps et ses bras, la vit-on se relever de son agenouillement, et arriver peu à peu à être debout sur la pointe extrême de ses pieds, les bras élevés, et paraissant réaliser un mouvement d’ascension ; les yeux plus saturés encore de leur vive lumière, de leur flamme électrique; la bouche plus expressive encore de l’amour des anges. Oh ! alors , elle était dans le Ciel, ou plutôt le Ciel était dans ses yeux.

A la vue d’un spectacle aussi ravissant que nouveau , sous l’ébranlement d’une émotion aussi communicative, nous pressentions qu’obéissant au pouvoir surhumain d’attraction qui la dominait, elle allait peut-être quitter la -terre qu’elle ne touchait pour ainsi dire plus____Nos poitrines haletantes exprimaient l’attente de ce fait merveilleux.....Alors

un transport de saisissement s’empara de toute l’assemblée, presque tout le monde se leva par un mouvement involontaire.....

A ce moment le digne professeur, d’un seul geste, retint sur la terre cette jeune transfigurée, en la

rappelant au sentiment de la vie commune, ainsi qu’à son exil, ici-bas.

Où êtes-vous, grands artistes de l’antiquité el de laUlenaissance? Où êtes-vous , Scopas , Raphaël, Dominiquin?... Votre famille deNiobé, votreTrans-figuration, votre sainte Cécile, où j’avais tant admiré l’énergie du sentiment, l’expression si profonde des passions!... Aujourd’hui... c’est avec un amer regret, avec un profond découragement que je reporte les regards de ma pensée sur vos œuvres, immortelles, pourtant! Mais vous-mêmes, n’eussiez-vous pas brisé vos palettes et vos ciseaux, si le type divin de l’Art se fût révélé à vos yeux comme aux nôtres, sous l’image plastique des passions pures de l’ange?

Et vous, savants chorégraphes, essayez de noler ces poses, ces gestes, ces accents de lame exprimés par les mouvements de ces traits et de ces membres !... Vous ne l’essaierez pas !... Et d’ailleurs, qui pourrait exécuter ces transitions gracieuses et consécutives, où l’énergique force musculaire, dissimulée sous une véritable aisance, maintient le corps dans des poses presque impossibles, et que vos sujets ne peuvent, pour ainsi dire, qu’escamolet.

Et vous, enfin , qui pensez déroger à votre dignité de savants en croyant à l’existence du magnétisme et de ses merveilles, approchez, c’est ici le sanctuaire de la science véritable ; c’est ici que le philosophe, seul digne de ce nom, découvre les traces des rudiments cachés de cette vie abstraite, de cette seconde existence dont la nôtre n’est que la grossière ébauche, et où votre science n'a jamais pénétré, car elle finit où la nôtre commence. Ve-

nez, ouvrez les yeux et instruisez-vous ! lit si vous notes pas convaincus, si des préjugés paralysent voire intelligence, si vous ne croyez pas..., au moins apprenez à douter, vous aurez fait un immense progrès dans la voie scientifique et humanitaire.

Atp. CHOCARNE.

Institut ni.ietlqne de Bristol.

Une nouvelle Société magnétique s’est formée en Angleterre. Nous en ignorons le but et les bases, son existence nous étant seule révélée par un article du Globe, dont voici la traduction :

« Le comte Ducie a accepté la présidence duÆ/fy-meric Institute, qui vient d’être fondé à Bristol. Le noble lord a dit à la Société, que, en consentant à la diriger, il croyait devoir lui faire l’historique de sa conversion; car il avait, comme tant d’autres, beaucoup ri du mesmérisme.

* Je souffrais, a-t-il dit, depuis quelques années, de la goutte et autres affections. Un de mes amis, ecclésiastique, vint un jour, tout joyeux, m’annoncer que si je restais malade, c’est que je le voudrais bien. Je le priai de s’expliquer, et il me dit qu’il venait d’être guéri d’attaques nerveuses dont il souffrait depuis longtemps, par une somnambule à laquelle il m’engageait d’avoir recours aussi, si je n’étais pas effrayé. Piqué par ce mot, je fis venir immédiatement la quasi-sorcière; mais, tout en m’en moquant, je dois l’avouer. Cependant je fus guéri au bout de quelques magnétisations régulières.

« Dès la première fois que celle dame opéra sur moi, en me tenant la main et faisant les passes d’usage, je m’endormis presque tout à coup, et elle s’en alla sans que je m’en aperçusse. Dès lors je me rendis journellement à Londres , durant qualre mois environ , chez un chirurgien qui pratiquait le mesmérisme , où j’eus de nombreuses preuves de la science.

« Un jo^r, lorsque je doutais encore de la réalité de la clairvoyance, ce chirurgien me proposa de l’accompagner pour expérimenter sur un cas intéressant de lucidité. Je lui exprimai combien je regrettais que d’aulres affaires m’empêchassent de profiter d’une si belle occasion. Il sonna, fit venir VOS jeune personne d’environ dix-huit ans, la magnétisa , et sortit. Supposant qu’elle était clairvoyante , je commençai à l’interroger. Nous voyageâmes donc mentalement à la station du chemin de fer ; là elle manifesta l'intention de pénétrer dans le pays, parce qu’elle n’y était pas allée depuis plusieurs années. Je la priai donc, selon l’usage , de parcourir le comté et de descendre chez moi. Elle décrivit l’allée sablée, les grilles , le vestibule avec ses pavés bigarrés, le mousquet el les gibernes suspendus à la muraille, la cheminée sculptée, etc., de mon château d’Elisabeth. Nous allâmes ensuite â nia ferme, où elle décrivit mes récoltes écourtées, quoiqu’elle parût, à l’occasion, embarrassée de distinguer les plantes, et qu’elle prît, commo un habitant de Londres, des navets pour des pommes de terre. Une preuve évidente de sa lucidité, c’est qu’elle s’aperçut qu’un champ contenait deux plantes différentes; elle me le fit ob-

server, et dit quelle partie du champ était coupée et enlevée, et celle qui restait. Je m’assurai par la suite que c’était parfaitement exact ; car, à ce moment, je n’en avais aucune connaissance.

« La somnambule par laquelle j’ai été guéri m’a dit aussi plusieurs choses que j’ignorais, et qu’elle n’avait pu apprendre de personne.

« Il ne peut point y avoir de supercherie dans ce cas, car je n’avais jamais vu cette jeune fille, et elle ne connaissait ni mon nom ni ma demeure, et quand même elle en eût eu connaissance, cela ne lui aurait pas appris tous les détails de ma ferme, située dans Glocestershire.

« J’ajoute que la même personne fit allusion à un magnifique châtaignier de ma terre : elle dit qu’il était entouré d’un grillage en fer, et décrivit sa longue feuille en éventail, d’un vert foncé , avec la plus parfaite exactitude, quoiqu’elle ignorât tout-à-fait, quelle espèce d’arbre c’était. »

VARIÉTÉS.

Chronique. — La belle bibliothèque du baron de Guillemin , dont nous avons dernièrement annoncé la mort, vient d'ôtre vendue aux enchères publiques à Paris. Ainsi se trouve de nouveau dispersée une collection presque complète des ouvrages de magnétisme. A part quelques volumes fort rares, qui ont été surenchéris par plusieurs amateurs , le reste s’est vendu très-bon marché. N’est-il pas rc-

grcttable que, pour quelques cents francs , les héritiers de M. de Guillemin aient dispersé des ouvrages qu’il avait eu tant de peine à rassembler? Les possesseurs de semblables monuments devraient prendre soin de leur conservation, en les léguant soit à l’État, soit à une société qui ne les puisse aliéner.

— Nous avons de bonnes nouvelles du département de la Sarthe. Il y a maintenant des magnétiseurs dans les principales villes, et la propagande qu’ils font est constamment soutenue. Les médecins commencent à envoyer leurs incurables aux magnétiseurs, ce qui est un point capital.

—L’auteur d’un opuscule sur le magnétisme, publié l’an dernier, et dont nous avons fait mention alors, M. Morin, vient de faire une conférence sur la magie et le magnétisme, dans les salons du journal la Démocratie pacifique. N’ayant point exposé tout ce qu’il avait à dire, M. Morin a remis à une autre séance la suite de son entretien. Nous attendrons qu’il ait fini pour résumer les idées qu’il a émises sur ce double sujet.

— On vient de trouver à Paris un manuscrit du Dr Wurtz, l’un des premiers élèves de Mesmer, traitant du magnétisme. Il est écrit partie en français , partie en allemand, et paraît avoir été composé vers 1820.

— M. Charpignon nous écrit :

* M. Lassaigne, dit Laurent, est à Orléans, il y donne des séances expérimentales de somnambulisme. Sa

somnambule est réellement très-lucide pour la vision à travers les bandeaux. Toutefois cette expérience n’est pas parfaitement nette, en ce sens qu’on ne distingue pas bien s’il y a faculté exclusive de vision, ou transmission de pehiée. Pour ma part» je crois n une combinaison des deux facultés j qui s’exercent ensemble, et produisent un résultat précis quand elles sont également en action. Quant à la transmission de pensée dégagée de toute autre manifestation , elle est très-développêe. La somnambule perçoit facilement les mots articulés mentalement, les sensations psychiques formées, etc. Mais M. Lassaigne a le tort, pour le magnétisme , bien entendu , de combiner à l’art du magnétiseur celui du physicien et du prestidigitateur. Il entremêle souvent ses séances de somnambulisme de tours d’escamotage qui sont habilement faits, et portent tout naturellement le plus grand nombre de ses spectateurs à conclure qüe ce qu’il fait avec sa somnambule est un genre parliculier de prestidigitation. Il a beau faire la distinction, on ne le croit pas. Quand il ne fait que du magnétisme , ceux qui ne l’ont point vu faire d’escamotage sont ébranlés , et parfaitement convaincus. Ainsi des choses humaines ! Mélange impur qui ne se laisse épurer que par les esprits d’élite. Bien et mal, mal et bien , on tire au hasard l’un ou l’autre ; car qui peut se dire assez sage pour savoir toujours choisir et distinguer l’un de l’autre. »

BIBLIOGRAPHIE.

ÉTUDES PHYSIQUES SUR LE CHOLÉRA DE 1832.

Nous venons de lire une brochure d’un haut intérêt. Ce travail, intitulé Études physiques sur le Choléra, est dû à la plume d’un savant magnétiste, M. de Tristan, et a été inséré dans le tome VIII des Mémoires de la Société des Sciences, etc., d’Orléans. Dans ces Etudes, l’auteur croit prouver, à l’aide de moyens dont nous allons parler, que le choléra est dû à un défaut d’équilibre dans l’électricité atmosphérique, et il conclut de ses expériences, que : « Là oû le choléra existe, il y a excès de fluide positif; là où il y a excès de fluide négatif, le choléra n’est pas présent. »

Cette opinion que la cause du choléra est une perturbation dans l’électricité du globe, est partagée par un certain nombre de médecins de tous les pays. En Russie, par exemple, des savants prétendent avoir observé pendant la durée du choléra des variations très-évidentes de l’aiguille, et en outre les appareils électriques perdaient de leur puissance.

Tout dernièrement, M. Andraud vient de communiquer à l’Académie des Sciences des observations analogues. Cet observateur assure qu’à Paris, pendant le règne du choléra, sa machine électrique ne donne pas d’étincelles, et qu’à mesure que l’in-

tensité du fléau diminue, la longueur des étincelles augmente, et revient peu à peu à sa force ordinaire qui est de 5 à 6 centimètres.

Quant à M. de Tristan , ses moyens d’expérimenter sur l’électricité ambiante sont d’un ordre tout particulier, et méritent de fixer notre attention ; car s’ils étaient réalisables entre les mains d’un bon nombre de personnes, la démonstration du fluide qui vivifie l’homme, et que nous appelons magnétique animal ou humain, serait facile à acquérir.

Déjà le Dr Charpignon, qui, habitant la même ville queM. de Tristan, avait pu étudier ces phénomènes auprès de ce savant, avait écrit : « Quand on aura construit un instrument capable de faire apprécier le fluide magnélique humain, comme l’électro-mètre rend sensible le fluide électrique, comme le galvanomètre révèle le fluide électro-magnétique, comme l’aiguille aimantée est sensible au fluide magnétique du globe, alors la physique du magnétisme animal révélera des secrets encore incompréhensibles par les théories actuelles. C’est h ce genre d’instrument que se rattache celui qui fournit le singulier phénomène qu’éprouvent les fibres végétales de certains arbustes, dans les mains des personnes qu’une cause excitatrice vient à rendre un centre d’électricité. Ainsi une branche fourchue, tenue par une de ces personnes, prend un mouvement de rotation quand celle-ci marche sur un courant d’eau, ou seulement quand elles tiennent un métal dans une de leurs mains.

«.......Le mouvement de cet appareil est

plus marqué lorsqu’on présente, en marchant lentement, ses branches dans le sens du courant ma-

gnétiquc du globe, c’est-à-dire son sommet au sud ou au nord. Le mouvement est plus sensible en

pleine campagne que dans un appartement.....

... Si l’on frotte une de ses mains avec de la résine, une peau de renard ou autre corps électro-négatif, et qu’on reprenne vite l’extrémité d’une des branches, on sent ce conducteur tourner, et on voit le sommet s’abaisser plus ou moins. Si, au contraire, on charge sa main d’électricité positive, on voit le conducteur s’élever.

« L’électricité naturelle des métaux produit les mêmes effets, en sorte que pour les métaux électropositifs (or et argent....) , le conducteur s’élève, et qu’il s’abaisse pour ceux qui sont électro-négatifs.

« Le fluide nerveux agit sur cet instrument. Ainsi lorsqu’une douleur forte existe vers une partie de l’organisme, si on y pose la main, et qu’on reprenne aussitôt l'extrémité du conducteur, il s’élève ou s’abaisse, selon que la cause de la douleur développe de l’électricité positive ou négative (i). »

L’instrument dont on vient de parler est bien la baguette divinatoire, la baguette de coudrier des anciens ; M. de Tristan l’appelle furcelle (petite fourche), et le compose ainsi : Deux petites baleines cylindriques dont les extrémités sont réunies dans une légère douille de bois ou de corne. On en saisit les extrémités libres à pleines mains, on les courbe en dehors , et l'instrument forme ainsi un Y dont les branches sont recourbées. On approche les coudes du corps, et on tient le sommet perpendiculaire devant soi, de manière à former un angle droit en haut et en bas.

(1) Physiologie, etc., du Magnétisme, p. 65, 2- édition.

Ainsi disposé, M. do Tristan, pour juger de l’état électrique do l’atmosphère qui l’entoure, prend dans une main une pièce d’argent, métal qui fait monter la baguette d’une certaine hauteur, puis il change cette pièce pour une de cuivre qui fait baisser l’appareil tenu préalablement à la perpendiculaire avec le corps, et comparant les deux mouvements, il en déduit la présence et l’action du fluide électropositif ou négatif, les deux pièces métalliques étant égales en force excitatrice.

Or, en temps ordinaire, l’électricité atmosphérique a ses deux fluides à peu près en égale force autour de nous; en temps orageux, l’un des deux prédomine, et la baguette l’indique; en temps de choléra, le ciel étant pur, il en est comme d’un temps orageux, et l’électricité ambiante dans le voisinage des lieux affectés est toujours en prédominance de fluide positif, selon l’indication de l’instrument. Voilà, certes, un fait bien important, et qui vient confirmer les assertions avancées par les autres savants. Mais, malheureusement, il nous semble que l’instrument de M. de Tristan n’est point susceptible d’être mis en action par beaucoup de personnes, et dès lors la démonstration qu’il promettait est moins facile à obtenir. Néanmoins ces expériences sont si peu connues, qu’elles n’ont pu être répétées par un grand nombre de personnes, aussi nous désirons qu’on les essaie, et qu’on cherche si on est apte à imprimer le mouvement à la baguette divinatoire.

Quant aux indications pratiques pour le traitement du choléra, il sortirait de ces expériences, si elles se confirmaient, que celte maladie serait une

névrose du système nerveux ganglionaircintestinal; déterminée par une violente perturbation de la circulation du fluide nerveux survenue sous l’influence de celle de l’électricité environnante. Dès lors il serait rationnel de chercher les moyens de guérison parmi les agents qui ont le plus d’action sur le système nerveux gangliohaire, et certes le magnétisme revendique ;t juste titre une des premières places. Des faits sortis de nos mains sont là d’ailleurs pour nous faire croire à l’efficacité du magnétisme dans le choléra, et nous sommes convaincus que les organisations puissamment impressionnables à l’action magnétique, susceptibles d’arriver au sommeil magnétique complet, peuvent trouver dans le magnétisme leur salut contre le choléra qui les a déjà frappés. Mais quelle tâche que de magnétiser les cholériques ! Quel dévouement ! Quelle fatigue ! Il n’est possible d’obtenir de bons résultats que sur quelques individus isolés ; car les forces manquent pour conduire plusieurs de ces traitements à la fois. Combien donc devrait-on comprendre l’utilité qui résulterait de la connaissance parfaite de la puissance que donne le magnétisme dans les familles où un des membres pourrait suffire avec ardeur à la magnétisation d’un de ses proches.

Assurément l’emploi du magnétisme, dans un cas de choléra, ne peut dispenser d’avoir en même temps recours à certains médicaments dont l’action est homogène à celle de cet agent dynamique. Ainsi les infusions de feuilles d’oranger, de menthe, de camomille, le calorique, sont des moyens qui aident la vitalité à dominer la perturbation qui tend à détruire les forces vitales.

Telle est encore la nature de l’agent magnétique dirigé avec connaissance de cause, que même dans le cas où une autre théorie qui est adoptée par un plusgrand nombre de médecins que celle dont nous venons de parler , savoir l’intoxication de l’organisme par un poison miasmatique spécial, qui nous viendrait des rives du Gange, et susceptible de développement comme tous les ferments virulents quand ils rencontrent un milieu fécondant, pourrait-on dire; telle est, disons-nous, la nature du fluide magnétique, que dans ce cas même il rend des services éminemment puissants. La vie soutient la vie défaillante. La vie infusée dans ce corps épuisé renouvelle scs puissances vitales qui luttent contre le poison qui circule dans le sang et prive le système nerveux de son électricité propre. Les fonctions éliminatrices, comme le vomissement et les selles, sont soutenues avec plus de force, et dans les intervalles le système nerveux s’assimile un fluide réparateur qu’une organisation saine lui donne avec ardeur. Ici encore des médicaments agissant synergiquement avec la puissance vitale.

Nous croyons donc que le magnétisme appliqué avec dévouement dans le choléra, est un auxiliaire puissant que les familles aflligées devraient pouvoir trouver dans leur sein sans avoir besoin de le demander au médecin qui, même magnétiste, ne pourrait le donner dans un temps aussi fatigant pour lui que le temps d’une épidémie.

Le Gérant : HÉBERT (de Garnay).

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

Couféreuccs mngnétlqnes dominicales.

Magie magnétique.

(Suite.)

T/état du voyant, que je viens de décrire, ne peut offrir d’ohjets de comparaison ; il est couvert de sueurs, il éprouve dans les membres des tressaillements répétés qui le soulèvent et le secouent fortement. On remarque une vive animation de la face , et des pleurs coulent avec abondance de ses yeux. Quoique très-éloigné du lieu d’expérimentation , et entouré d’une foule nombreuse, il dirige sans cesse ses yeux dans la direction du signe magique, semble faire appel à ses souvenirs, et s’écrie : Je viens d’être bien heureux! Il se plaint que

1 on n’ait point prolongé sa vision, et tend à nous échapper en se levant brusquement pour retourner au salon. On le calme d’abord avec difficulté. Il s écrie : Pourquoi m’avoir dérangé? Comme j’étais heureux! laissez moi revoir ma mère! Ses impressions s effacent enfin ; il rit, et demande avec une sorte d’anxiété pourquoi il est à cette place ; ce qui lui est arrivé ?

TOME VIII. - RI" 93. — 10 MAI 1849. !»

Mais, pendant ce temps, et malgré mon absence, deux personnes de l’assemblée, saisies, impressionnées par le signe magique, s’étaient levées avec effort d’abord, et étaient venues d’elles-mêmes tourner autour du miroir, où, se rencontrant, elles se regardèrent d’une manière singulière. Elles semblaient vouloir chacune jouir seule et sans partage de la vue des merveilleuses images visibles pour toutes deux sur la surface noircie. Un assistant, sur une parole de moi, s’approche pour séparer les deux voyants prêts à se quereller ; il est rejeté à cinq ou six pas par un mouvement du bras de l’un d’eux, mouvement qui nous a semblé à tous n’avoir rien de violent. L’étonnement de ce monsieur est partagé par tous les assistants, et tous semblent se demander d’où est venue cette force dont l’effet a été si inconcevable. Enfin j’intervins moi-même, et les deux voyants devinrent pacifiques. L’un s’agenouille, approche son visage du signe magique, sa tête oscille d’une étrange manière; on pourrait croire qu’il s’échappe une flamme invisible de ce centre mystérieux, à en juger par les mouvements de va et vient que le voyant exécute. Il pousse des éclats d’un rire étrange. Il voit : ce sont de pelits bons hommes qui dansent une ronde, enlacés l’un à l’autre, et semblent vouloir entraîner dans leur cercle le voyant lui-même.

Bientôt, en effet, celui-ci se lève, toujours en riant, et s’écrie ; Mais ils sont trop petits! et pourtant il se met à danser, d’abord lentement ; puis, s’animant, il se livre à la danse avec une sorte de fureur, en riant, en riant toujours du même rire. L’assemblée a cessé de conserver son sérieux : le

rire a gagné tout le monde, et je ne pense pas que jamais joie se soit communiquée avec une telle rapidité.

Mais l’autre voyant, que faisait-il pendant ce temps ? Il ne riait point ; au contraire, d’un sérieux de glace, il plongeait ses yeux pleins de feu sur le signe. Saisi bientôt de mouvements convulsifs, il dit apercevoir monter graduellement une tête hideuse; le monstre humain s’élevant déplus en plus, le voyant est rempli de terreur, ses dents se serrent, il recule; mais, enchaîné é l'ôtre qui apparaît, il faut qu’il s’en rapproche, et on peut étudier tous les effets de la peur et de la contrainte, toutes les terreurs que pourrait causer la vue d’un spectre qui n’aurait rien d’imaginaire.

Je calme ces deux personnes. Un vague souvenir leur reste, quelques instants seulement, de ce qu’ils ont perçu; puis plus rien, le calme ordinaire a reparu, tandis que de son côté toute l’assemblée a conservé ses émotions pour ne les perdre jamais complètement, sans doute; car la mémoire de chacun reproduira souvent à l’esprit ces scènes inimitables, qui ne pourraient être surpassées lors même que les images se seraient montrées à tous comme au voyant.

J’omets ici bien des particularités intéressantes, je ne décris que les accidents les plus grossiers, les plus matériels, car il me serait difficile de rendre les mouvements de lame des voyants. Cette finesse des traits de leur face, ces mouvements si changeants, l’expression de leurs regards, tout, enfin, ne peut se traduire par des mots.

Ai-je bien vu ces étranges choses, en plein jour, of-

fortes à mes regards par des gens qui n’avaient point pris d’opium ? Je le certifie, et des centaines de personnes appuieraient au besoin mon témoignage. Les sujets soumis aux épreuves sont-ils malades et en proie à quelque accès de fièvre? Pas le moins du monde : ils se portent parfaitement. Font-ils, du moins, des études, des recherches sur les choses occultes? Nous pouvons garantir qu’ils sont tout-à-fait étrangers à cet ordre de travaux. Mais encore ils ont été soumis à de nombreux accès de somnambulisme magnétique, et le magnétiseur a pu leur inoculer ses propres idées? Il n’en est rien absolument; aucun précédent, aucune fréquentation, si ce n’est pendant la séance, et je puis affirmer que ce que voient les magnétisés n’est point dans ma pensée, par une bonne raison , c’est que mon esprit n’a jamais pu croire, jusqu’à ce jour, aux prodiges surhumains de la magie, et que ma surprise égale celle de tout assistant.

On a fabriqué des miroirs pour voir les corps ; pourquoi n’en pourrait-on faire qui rendissent visibles les âmes ou les esprits? Il me semble entendre crier à l’absurde, 11e pouvant point m’accuser de charlatanisme ; car je ne me place point dans l’ombre, et mes mains n’ont jamais touché d’argent venant de mes démonstrations. J’ai bien peur de rencontrer sur mon chemin la sottise humaine, et peut-être l’inconséquence des gens qui se croient raisonnables. Interrogez chaque homme, parvenu à sa maturité, sur les choses singulières de sa vie; il n’en est aucun qui ne vous réponde que quelque chose de mystérieux l’a frappé parfois, qu’il a eu des avertissements de personnes mortes ou mou-

rantcs, des pressentiments, des visions, que tous les graves événements qui lui sont arrivés ont plus ou moins été pressentis par lui ou par les personnes avec qui il vivait, etc., etc. ; quelques-uns même vont si loin dans des détails, que la raison refuse de les suivre. Quoi donc d’étonnant jusqu’ici dans mes récits? ils sont au-dessous des faits recueillis et qui sc conservent dans les croyances des hommes. Tout à l’heure je dépasserai peut-être la démarcation , mais je veux être le seul garant de la vérité de mes descriptions, et je ne m’appuierai que sur tout ce qui sera personnel à mes expérimentations.

Continuons.

Je découvre le signe caché, devant une jeune fille qui n’a encore assisté â aucune de mes démonstrations ; bientôt elle est prise de tiraillements dans les membres, elle se sent attirée sur ce centre magique, elle fait d’incroyables efforts pour résister à cette attraction ; mais ces efforts sont vains. Elle «’approche toute tremblante, frémit, pleure, rit, se lamente. J’approche un siège, la voyant fatiguée ; elle s’assied sans se retourner ni perdre de vue ce qui a frappé ses regards. Bientôt elle veut fuir, mais elle ne peut se tenir debout ; elle se déplace pourtant, et nous la voyons tourner rapidement sans cesser d’être assise et accroupie; le siège (c’est une sorte de cube solide en bois) tourne avec elle ; oe n’est point la force et l’agilité humaine qui semblent produire les mouvements, ils sont inimitables. Bientôt, éloignée, elle est prise d’un rire convulsif, et malgré l’insistance de plusieurs personnes, elle ne veut point dire ce qu’elle a vu. Jamais, dit-elle, je ne le dirai : c'est trop drôle ; et à son seul souvenir

elle rit plus fort, et ce n’est qu’en l’entraînant au loin que nous parvenons à la calmer; mais, pendant tout le temps de son agitation, elle répète : Comme c’est drôle! comme c'est drôle!

Voulant, pour d’autres épreuves, dérober le signe magique à la vue, je m’avisai de réduire en poussière très-fine un peu de terre prise il y a plusieurs années dans un tombeau druidique : ce tombeau renfermait des ossements humains qui depuis vingt siècles au moins n’avaient point vu le jour. Cette terre prise au milieu de ces débris antiques était conservée par moi sans idées préconçues, et au moment de l’expérience je n’y attachais aucune importance : je m’en servais comme je me serais servi de cendre, ou de poussière de bois ; c’est seul, et plusieurs jours avant les épreuves, que je la déposai sur le signe magique. Aucune personne n’était confidente de mes projets, comme, encore aujourd’hui , j’agis sans communiquer à qui que ce soit mes idées sur la magie. J’éloigne même toute conversation sur ce sujet.

Le dimanche vient. Après quelques expériences de magnétisme simple, je découvre aux regards de toute l’assemblée le signe magique ainsi dissimulé. L’effet en fut prompt, et il eut quelque chose de terrible. Un homme d’une trentaine d’années, employé à l’imprimerie nationale, tout-à-fait étranger à des recherches magnétiques, assistant aux séances pour la première fois, regarde avec attention cette poussière jaunâtre; bientôt il s’agite sur son siège, se lève, s’approche tout tremblant, et s’écrie : Je vois du sang, des cadavres, leurs entrailles sont arrachées. Saisi d’effroi, il tremble, veut s’enfuir; mais

une force secrète le ramène près du signe magique, cl nous l’emportons rapidement ; il était sans connaissance, et cette syncope dura quatre ou cinq minutes. Il n’avait aucun souvenir.

I ne jeune femme est bientôt attirée; saisie des mêmes terreurs à la vue du sang répandu, elle voit des entrailles humaines dans une sorte de cuvette, les cadavres s’agitent sous ses yeux, et, bientôt, se trouvant mal, nous l’emportons sans qu’elle ait la conscience de ce que nous faisons ; et remise de ses craintes et de ses terreurs, on l’interroge en vain : il ne lui reste pas même un faible souvenir des perceptions de son esprit.

Le plus étonné de tous les assistants c’était moi ; ou plutôt mon étonnement était bien différent du leur. Par quel mystère incompréhensible ces choses étaient-elles apparues? L’endroit où j’avais pris cette terre renfermait cinq squelettes : l’un des voyants vit cinq cadavres. Je le répète, non , personne n’était dans mon secret, et cette poussière, pour moi, n’était susceptible d’aucune vertu. Il ne peut donc y avoir eu ici transmission de pensée, car rien de semblable à ce qui venait de se passer n’avait été dans mes idées.

Non, non, il y a ici quelque chose qui dépasse notre raison. Le surnaturel se montre lorsque je voudrais en nier l’existence. J’ai beau chercher à rejeter tout sur l’illusion, l’illusion est pour celui qui ne veut voir et chercher à comprendre; elle est dans le cerveau de celui qui pense que tout est découvert , et que le principe qui nous anime périt ou se désunit comme la matière.

Sur ce chemin je ne saurais m’arrêter; je dois

avancer ou reculer promptement : m’en tenir aux croyances vulgaires delà science, ou rester dans le doute , ce serait une sorte de lâcheté que je me reprocherais plus lard; j’aurais sans doute l’approbation des gens raisonnables, de ceux-là même qui nièrent l’existence du magnétisme pendant de longues années, de tous ceux à qui la nature refuse de parler. Je ne veux point rester comme un homme qui, ayant un nouvel organe, refuserait de s’en servir. J’avancerai donc, quel que soit le jugement porté sur moi ; ce n’est point un vain désir de savoir qui m entraîne, un besoin de surpasser les ma-gnétistes ; non, mais c’est la vérité réelle et puissante qui m’incite et me pousse en avant. L’homme qui a vu la lumière du jour, doit-il, parce qu’il ne la comprend pas, fermer à jamais ses paupières et vivre dans l’obscurité, en dédaignant les beautés offertes à ses regards par la nature entière. Et si, par une grande faveur, mes sens ont découvert quelque chose d'inconnu, me serait-il permis, sans cesser d’être homme, de ne point y appliquer toutes mes facultés.

Ma marche sera sans doute vacillante, je n’ai point de maître; j’ai des livres, sans doute, mais ils sont pour moi autant d’hiéroglyphes. La magie était connue des hommes autrefois, je ne puis en rejeter l’évidence. On a cessé de savoir et de comprendre; pourquoi s’en étonner? Bien des villes puissantes sont cachées sous les herbes sans qu’on sache rien sur les moeurs et les croyances de ceux qui les habitaient; leurs arts, leurs sciences sont oubliés ; on trouve des débris, des fragments de monuments : c’est tout. Les livres anciens sont

également incompris ; il me fallut trente ans pour savoir qu’ils avaient un sens , tandis que mes mains et mon intelligence pouvaient me fournir, dès le premier jour, les preuves sans réplique qu’ils étaient écrits non pour tromper, mais pour engager les hommes à rechercher les vérités qui étaient cachées sous leurs emblèmes et leurs paraboles.

Les savants de notre temps ont-ils tout découvert? La poudre à canon était connue bien avant la création des Académies. L’aimant, la vapeur et l’électricité n’étaient point ignorés des anciens. Les ballons; belle chose, ma foi! Des hommes existèrent, dans l’antiquité, qui surent s’élever fort haut sans celte grossière invention. Les télégraphes ne sont rien près des moyens de communication possédés par les Chinois. Nos savants ont inventé beaucoup de mots nouveaux; mais, en revanche, ils nièrent avec obstination la découverte de Mesmer, celle de Fulton; et si nous sommes en progrès sur quelques points, ce n’est point à leurs encouragements, à leurs efforts, que nous en sommes redevables , car ils nous manquèrent toujours.

Puissante intelligence de l’homme, les savants ont coupé tes aîles! Chaque fois que tu voulus prendre ton essor, tu les vis paralyser tes efforts, et te contraindre à rester dans le cercle qu’ils avaient tracé. Le lit de Procuste est sous le dôme de notre Institut. On raccourcit tout ce qui dépasse une certaine dimension. Les corps peuvent grandir, s’a-longer; mais l’esprit doit se rapetisser. L’immensité est devant nos yeux, c’est à nous de comprendre ; les interprètes de notre religion nous le défendent, et nous montrent l’enfer comme peine réservée à

ce péché. La science, aussi absolue et non moins barbare , a toujours flétri ce qui n’était point dans le catalogue de ses études.

Allons écrire sur les temples de ces modernes sages le mot Magnétisme , c’est la seule vengeance que nous voulions tirer de toutes les insultes faites à notre maître, de tous les dénis de justice. Le temps, en entachant leur mémoire, les montrera ce qu’ils sont ou ont été, vains et orgueilleux ; leur supplice a déjà commencé : la vérité se répand partout triomphante, et demandera bientôt sa réhabilitation.

DU POTET.

(La suite à un numéro prochain.)

Société dn mesmérisme de Paris.

L’intensité de l’épidémie régnante n’a pas permis de faire des réunions nombreuses. D’abord, parce que de grandes agglomérations d’êtres , toujours malsaines, sont dangereuses en ce moment; ensuite parce que chacun est frappé dans ses affections ou occupé à magnétiser les personnes qui l’entourent. M. de Vallès de Montjay, qui habite Pantin, écrit à cet égard à la Société :

« Ayant eu occasion de traiter quelques cholériques, que j’ai eu le bonheur de sauver, j’ai par là attiré l’attention du public sur les moyens que j’ai employés ; et, de plus, j’ai été chargé par l’autorité municipale de la direction de l’ambulance, au grand déplaisir des médecins de la localité. Etant à la fois homéopathe et mesmérien, sans avoir encore le titre de médecin, c’était plus qu’il

n’en fallait pour exciter la jalousie de mes futurs confrères; aussi ai-je été constamment le jouet de leurs petites menées, mais je m’en suis vengé en guérissant mieux qu’eux.

« L’énergie que ma mère a mise à me seconder n’a pas peu contribué à mes succès. Dieu veuille que son dévouement ne lui soit pas funeste ! Alitée depuis trois semaines, par le fait delà trop grande dépense qu’elle a faite de fluide magnétique, elle a bien du mal à reprendre ses forces, etles symptômes de sa maladie ressemblent beaucoup à ceux du typhus nerveux.

« Vous comprenez maintenant qu’il m’eût été difficile d’aller àParis. »

VARIÉTÉS.

Chronique. — Le zèle prosélytique enflamme beaucoup d’intelligences ; la vérité magnétique est si grande et si belle, qu’il faut, lorsqu’on la possède, l’implanter en autrui. Rien n’arréte l’homme qui croit, et le temps est passé où celui-ci n’osait franchir le seuil de l’incrédule. Dans le court récit que nous allons faire, nous trouvons une âme ardente, impatiente de tout prouver en s’appuyant, du reste, sur des recherches laborieuses dans le passé.

M. Morin avait dernièrement convié, dans les salons du journal la Démocratie Pacifique, un public

nombreux, presque tout phalanstérien, pour entendre l’exposé d’une nouvelle doctrine ayant la magie pour base, et le magnétisme pour point de départ. Doué d’une certaine éloquence, M. Morin s’est fait écouter; et, s’il n’a pas convaincu tous les esprits , il les a du moins impressionnés au point de recueillir des bravos. On est toujours sûr d’intéresser lorsqu’on parle de l’inconnu, quand il s’agit du merveilleux ; et sur ce point M. Morin est d’un profond savoir. 11 étonne, il confond, il subjugue la raison par des chiffres, des tableaux, des images : il ne manque qu’une chose que tout le monde attend avec une impatience fébrile, c’est la preuve expérimentale de sa théorie, les résultats matériels de ses découvertes. En effet, si la science réelle est possédée par lui, après ses discours viendront ses faits : c’est la marche rationnelle pour prouver ; et, d’ailleurs, il a dit : Je vous montrerai.

Nous attendions nous-mème des reproductions antiques, quelques-uns de ces phénomènes merveilleux que nous a légués l’histoire. Attente inutile ; rien ne devait suivre ! Dire est aisé ; comprendre la réalité de la magie : il suffit de méditer un instant; mais saisir le principe de cette science, s’en emparer et répéter le« prodiges, c’est autre chose. M. Morin nous a paru pénétré d’une conviction profonde; mais nous ne croyons point qu’il ait retrouvé la science elle-même. Nous pensons que tout son auditoire en a jugé comme nous.

Nous regrettons qu’il n’ait pas publié ses deux discours avec un fac simile des tableaux qu’il a tracés devant ses auditeurs. Des chiffres, des lignes, vu» en passant, fuient vite de la pensée ; il ne reste

qu’un vague souvenir, et les choses sérieuses ont besoin d’être méditées. 11 n’en serait pas de même si M. Morin avait produit un grand fait, nous n’aurions qu’à le raconter; il eût d’ailleurs prouvé par là la réalité de ses calculs, tandis qu’il reste un doute cruel sur la certitude de ses découvertes.

— Nous avons déjà dit un mot d’une découverte physiologique qui paraît devoir venir en aide au mesmérisme. Elle a été officiellement annoncée à l’Académie des Sciences par une lettre de M. de liumboldt, dont voici un extrait:

i II vient de paraître ici (Berlin) des recherches sur l’électricité animale, par M. Emile Du Boîb-Reymond.

« M. Du Bois est l’habile expérimentateur qui, le premier et le seul, a réussi à faire dévier une aiguille asiatique par la volonté de l’homme, c’est-à-dire par le courant électrique que produit l'effort musculaire, la tension de nos membres. Cette déviation s’opère à de grandes distances, et cesse dès qu’à volonté on ne tend plus les muscles. »

Cette lettre a donné lieu à une discussion qui sera résumée dans notre prochain numéro.

Revue des Journaux. — Le Journal des Théâtres, du 11 avril, rend compte d’expériences magnétiques faites dans ses bureaux, par M. Letur. Rien de saillant.

— L’Unirn Médicaley du s4 avril, analyse l’ouvrage du Dr Charpignon; inutile de dire que la conclusion n’en est pas favorable : c’est de fondation.

BIBLIOGRAPHIE.

LETTRES SUIt LE MAGNÉTISME ANIMAL, etc.; par le D' DE la Salzèdb. i vol. in-12. Paris, chez Labbé. — Prix : 2 fr.

Voici un livre qui, publié peu de temps avant les événements politiques de 1848, n’a pas eu la bonne chance de se faire connaître autant qu’il le méritait. Cet ouvrage formé de sept lettres adressées à un ami de l’auteur, médecin comme lui, a pour épigraphe ce mot de Montaigne : « C’est icy un livre de bonne foy, lecteur. » L’œuvre lient, en elfet, tout ce que promet le frontispice. A chaque page éclate la conviction la plus sincère, fruit d’une observalion attentive et raisonnée. Les faits sont exposés avec cette clarté et ce parfum de bon sens qui excluent toute pensée d’exagération. La transition du simple au composé est accompagnée de rapprochements ingénieux avec les points analogues des sciences physiques. Les conséquences déduites logiquement préparent ainsi sans effort la démonstration des phénomènes les plus transcendants du magnétisme animal. Le style, toujours net et engageant, revêt des formes variées, depuis le ton froid de la science positive jusqu’aux élans de l’inspiration lyrique. 11 y a là telles pages que ne désavoueraient pas nos écrivains d’élite. En un mot, la vérité mesmérienue

est présentée sous les dehors les plus propres â la faire accepter de tout lecteur impartial. Nous ne sommes donc nullement étonné que ce petit livre ait emporté de haute lutte les résistances du médecin à qui il est adressé, lequel, nous dit la préface, examine aujourd’hui la question du magnétisme animal avec une infatigable persévérance, et promet de devenir un des plus zélés partisans de cette doctrine, après l’avoir accueillie avec la plus dédaigneuse indifférence.

L’auteur se pose dès l’abord comme l’apôtre fervent du dogme établi par Mesmer, à savoir : que, très-vraisemblablement, le magnétisme terrestre, la lumière, le calorique , l’électricité, ne sont avec le magnétisme animal que des parties connexes d’un seul tout, que des dérivés immédiats d’un fluide universellement répandu, principe vital de tous les corps , se modifiant dans son caractère et ses propriétés , suivant les vues particulières de la nature. Cette loi fondamentale est le pivot sur lequel va s’appuyer l’auteur pour en faire jaillir les lois secondaires propres au magnétisme animal considéré comme science naturelle.

M. de la Salzède (nous l’en louons de tout cœur) commence par faire justice des moyens honteux que certains hommes à l’âme basse et cupide ont mis en œuvre pour exploiter le magnétisme, cette pure émanation de la Divinité. Dégagé du merveilleux excentrique sous lequel ces misérables histrions ont voulu le déguiser, le magnétisme animal rentre dans l’ordre des faits que la nature offre à nos méditations. « Dès lors, tout homme sensé peut se livrer avec une consciencieuse ardeur à des études

qui n’ont plus rien de chimérique, et dont sa raison peut et doit admettre les conséquences. »

Pour mieux faire ressortir sa pensée, l’auteur rappelle la première impression de surprise qu’on éprouve quand on voit se manifester par des faits l’existence des fluides impondérables étudiés par la science, et dont les lois sont bien connues. Un vif sentiment d’admiration peut succéder, dit-il , à l’observation de ces faits, mais il ne reste de place ni pour le doute ni pour l’incrédulité. Quant à la cause efficiente des phénomènes, la raison s’égare à la chercher : on croit, parce qu’on ne peut nier le témoignage des sens, mais on n'explique pas.

• Pourquoi faut-il — ajoute M. de laSalzède — que le fluide magnétique , qui, comme le fluide lumineux, comme le fluide électrique, enveloppe et pénètre de toutes parts l’ensemble des êtres créés, ait, lui seul, soulevé tant de défiance qu’on ait été jusqu’à nier son existence même, sans daigner s’apercevoir qu’il se manifeste pour nous à chaque pas que nous faisons dans la vie? C’est que, je l'ai déjà dit, des charlatans sans pudeur se sont emparés, comme d'une proie, des savantes inspirations d’un homme de génie ; c’est qu’en cherchant à fausser l’idée, ils en ont faussé le principe, qu’ils ont ainsi bientôt rendu méconnaissable et inadmissible pour quiconque a voulu suivre leurs théories empiriques, et accorder quelque créance à leurs erreurs mensongères. »

Passant à l’appréciation des effets apparents les plus habituels du fluide magnétique, l’auteur établit, par une série de propositions, que ce fluide ne se comporte pas différemment que les autres impon-

durables, et que, par analogie à ceux-ci, il doit être susceptible de courants , de rayonnement, de polarité, peut-être de polarisation. Cette théorie repose sur l’idée fondamentale que le fluide magnétique est uniformément réparti dans tous les êtres créés qu’il enveloppe et pénètre de toutes parts, et parmi lesquels il se tient dans un équilibre parfait. Ce fluide peut se trouver momentanément troublé dans son équilibre, par des causes naturelles ou artificielles, et alors se manifestent les effets qui nous le rendent perceptible. De là découle cette hypothèse que parmi les êtres créés, les uns doivent être meilleurs conducteurs du fluide que les autres, d’où l’on peut inférer que, relativement, ceux-ci sont positifs, tandis que ceux-là sont négatifs. C’est à l’aide de cette classification, et par des raisonnements appuyés d’exemples où le charme du style ajoute à l’intérêt du fond, que l’auteur explique un grand nombre d’effets naturels dont la manifestation est spontanée, tels que la sympathie, le dévouement, l’antipathie , l’ascendant bienfaisant ou malfaisant de certains êtres sur d’autres; enfin, l’action magnétique de l'homme sur les animaux, et de ceux-ci entre eux.

Résumant son argumentation, l’auteur croit pouvoir conclure :

« i° Que de l’absence de tout courant magnétique entre deux êtres, c’est-à-dire de l’équilibre parfait du fluide entre eux à l’état normal, résulte /’indifférence j

« 2° Que du courant qui s’établit naturellement et spontanément de l’individu positivement magnétique à l’individu chez qui le fluide est seulement à l’état

normal, résulte l'influence d’attraction ou la sympathie ;

« 5° One du courant qui s’établit forcément de l’individu positivement magnétique à l’individu négativement magnétique, résulte l’influence, toujours bienveillante, mais le plus souvent passionnée, l’amour, le dévouement, etc.;

« 4° Que de la lutte des deux courants qui tendent à s’établir entre deux individus positivement magnétiques au même degré (peut-être aussi quelquefois entre deux individus négativement magnétiques au même degré) résulte l’influence de répulsion , l'antipathie ;

« 5° Que du courant qui s'établit violemment de l’individu négativement magnétique au plus haut degré, à l'individu chez qui le fluide existe seulement d l'état normal, résulte l’influence mauvaise, l’influence des passions basses, la fascination, la domination despotique, l'entraînement au mal, etc.; 6" Que du courant qui s’établit invinciblement de l'individu chez qui la tension positive est extrême, à line masse d’individus négativement magnétiques, ou chez qui le fluide existe seulement à l'état normal, résulte l’influence de rayonnement, l’influence du génie ;

« 7° Enfin , que de la cessation de tout courant magnétique par suite du retour à l'équilibre, résulte immédiatement la cessation des phénomènes que nous venons d'énumérer. »

Plein de bonne foi et de modestie, M. de la Sal-zède déclare ignorer si déjà ces idées ont été ainsi formulées, ajoutant qu’il sait encore moins jusqua quel point elles sont vraies; toute son ambition se

bornant à essayer de démontrer comment l'élude du magnétisme animal peut être assimilée à celle des autres sciences naturelles. Quant à nous, partisan convaincu de la doctrine des courants magnétiques, en l’absence desquels on ne saurait expliquer ces nombreux phénomènes physiologiques dont la philosophie n’a pas encore trouvé le mol, nous admettons comme très-rationnelle la substance des idées de l’auteur à l’égard des efíets libres produits par la tendance attractive ou répulsive, active ou passive du fluide individuel. Seulement, nous pensons que la théorie de détail qui s’y rattache a besoin d’être sanctionnée par une longue série d’observations avant de pouvoir se traduire en aphorismes. Quoi qu’il en soit, on doit savoir gré à l’auteur d’avoir abordé résolument une question dont la solution créerait la vi-aie physiologie des passions humaines et des instincts animaux.

Envisagée sous ce point de vue, dit avec raison M. de la Salzède, l’étude du magnétisme offre à l’imagination le champ le plus vaste, peut-être, où jamais elle ait osé s’élancer. Il ajoute « que Mesmer, en soulevant de sa main hardie le voile qui dérobait à nos yeux cet immense horizon tout resplendissant des feux du fluide universel, a donné, comme preuve de sa théorie, le plus grand exemple connu de la volonté humaine aux prises avec la nature;.... que l’idée qu’il a eue d’enfermer dans le cercle d’une loi générale, imprescriptible , éternelle , tous les faits épars se rattachant par leur nalure propre à son adorable système, est l’idée d’un homme de génie , l’œuvre merveilleuse d’un être essentiellement doué parmi les êtres. »

De la théorie qu’il a exposée relativement aux courants naturels, l’auteur déduit cette conséquence que, si le fluide magnétique est, par son mouvement, le principe el la cause de nos affections, la volonté sera le moteur au moyen duquel les courants de ce même fluide pourront être artificiellement déterminés.

Arrivé à ce point de sa thèse , il définit judicieusement le magnétisme animal : la transition nécessaire des sciences purement physiques et positives aux sciences purement métaphysiques et spéculatives. 11 appuie cette définition sur le caractère mémo des effets constatés, où l’on observe : i° l'action d’un agent physique se conduisant à la manière des autres fluides qui participent de sa nature, — d’où les phénomènes physiologiques ; 2° l’action sur ce même agent d’une de nos facultés purement intellectuelles, la faculté de vouloir, — d’où les phénomènes psychologiques.

L’auteur décrit les procédés de magnétisation et les effets résultant de la mise enjeu du'moteur humain : la volonté. 11 démontre ainsi qu’effectivement le magnétisme animal tient de la physique par son action évidente sur nos organes, et de la métaphysique par son action non moins évidente sur no9 facultés? intellectuelles. Dans cette action complexe, le fluide magnétique ne se comporte pas différemment que les autres fluides impondérables, mais on voit qu’il leur est supérieur autant que l’esprit l’est à la matière , puisqu’il produit des phénomènes moraux dont aucun autre agent connu ne possède la propriété. C’est dono ici que s’arrête l’analogie première, et qu’on doit reconnaître dans

le fluide magnétique animal un élément sui generis, dont les effets sont constants, mais restent inexpliqués , leur double cause essentielle étant positivement inconnue.

Les effets artificiels étant admis, l’auteur examine leurs résultats, et le parti qu’on peut tirer du magnétisme animal comme agent thérapeutique. Le fluide humain agissant sur l’organisme, peut et doit être un agent de perturbation sur les organes, en modifiant leur état actuel pour y substituer un état nouveau. La médecine ne procède pas autrement: les remèdes qu’elle prescrit ont pour but de produire la perturbation artificielle de l’état morbide spontané, de manière à déterminer la crise par suite de laquelle celui-ci disparaîtra pour faire place à l’état normal auquel il avait momentanément succédé. De même l’action du fluide magnétique sur l’organisme doit toujours être une cause déterminante du retour à l'équilibre normal des divers fluides qui concourent à entretenir la vie, et dont Je juste rapport entre eux constitue l’état de santé.

Après avoir développé avec beaucoup de lucidité ce point si intéressant de sa thèse, l’auteur arrive à conclure :

« i" Que le magnétisme animal, au point de vue thérapeutique, est applicable à tous les cas où la science emploie comme moyens de guérison, c’est-à-dire comme moyens de perturbation , de modification de l’état morbide, les toniques, les stimulants, les sédatifs, les calmants, les narcotiques, les stupéfiants, et tous les médicaments, enfin, destinés par elle à produire sur l’organisme une action quelconque, suivie de réaction quelque

temps après. L’emploi du magnétisme animal sera donc ou pourra donc être utile dans toutes les al-fcctions de l’organisme où le système nerveux se trouve plus ou moins fortement intéressé, soit spontanément, soit par suite d’une cause première inhérente aux organes.

« 2" Que son action, comme stupéfiant, peut et doit être provoquée autant de fois qu’on croira pouvoir y réussir, dans les nombreuses circonstances où la médecine, impuissante à guérir par les moyens chimiques, est réduite à l’emploi des moyens mécaniques, aux opérations chirurgicales. »

L’auteur démontre ici, par la citation de plusieurs faits bien connus des lecteurs de ce Journal, que le magnétisme, employé comme procédé anés-thésique , est de beaucoup préférable aux substances usuelles. 11 en donne la raison en ce sens que les organes principaux de la vie, ceux qu’on désigne sous le nom de premières voies, ne sauraient être affectés par le magnétisme, puisqu’il n’y est point ingéré, et qu’il peut dès l’abord être dirigé, sans réaction préalable, sur le cerveau, où l’action des substances stupéfiantes (à part la fugacité d’effet de quelques-unes) , se manifeste au contraire par une réaction très-souvent dangereuse. Toute préférence doit donc être accordée à ce moyen dans les opérations chirurgicales, lesquelles, ainsi accomplies sous l’influence d’un agent toujours anodin, et dépouillées de leur affreux cortège ordinaire, pourront être exécutées avec d’autant moins de danger que le patient les subira sans appréhension comme sans douleur. Ne réussît-on qu’une fois sur dix à produire uu résultat si utile, ajoute M. de la Salzède,

qu’il faudrait bénir la nature de nous avoir donné ce précieux moyen de soustraire l’homme aux atroces souffrances qui naissent et se multiplient sous l’impitoyable scalpel de l’opérateur.

Nous interrompons un instant notre analyse pour faire remarquer que les opérations chirurgicales pratiquées avec le concours du magnétisme, peuvent réussir non pas une fois, mais'au moins neuf fois sur dix. Pour s’en convaincre , il suffît de lire dans ce Journal les procès-verbaux relatifs aux admirables résultats obtenus par le DrEsdaile, créateur d’un hôpital mesmérique à Calcutta. Les nombreuses expériences que cet habile praticien a dirigées , et dont plusieurs ont été suivies et rapportées par une commission officielle de médecins, démontrent d’une manière péremptoire que l’anés-thésie parfaite se produit constamment, sauf de très-rares exceptions, à la suite d’une magnétisation dosée sur la disposition naturelle du sujet.

L’organisme de celui-ci se montre-t-il rebelle aux premiers essais, l’action magnétique est alors soutenue pendant plusieurs heures consécutives. L’effet réfractaire persiste-t-il, on a recours, en définitive, aux moyens extraordinaires, consistant dans l’emploi simultané de plusieurs aides robustes qui sont relevés par d’autres dès que la fatigue se fait sentir. C’est ainsi que lejDr Esdaile parvient à élever l’action magnétique à sa plus haute puissance, et qu’il obtient toujours, ou presque toujours, au moment opportun, le degré d’insensibilité nécessaire pour opérer le patient dans les meilleurs conditions possibles de succès. Ce sont là des faits authentiques, et ils deviennent d’autant plus

concluants en laveur de l'efficacité du magnétisme, comme auxiliaire de la chirurgie, que tous les individus opérés ont été complètement exempts «le ces accidents terribles, de ces elfets traumatiques et autres qui suivent trop souvent les opérations exécutées sous l’empire des procédés ordinaires.

Continuant à parcourir le cercle des maladies qui affligent l’humanité, M. de la Salzède signale le magnétisme comme pouvant être utilement employé à la manière des remèdes que la médecine classe en dérivatifs, révulsifs, rubéfiants, pour combat Ire certaines douleurs aiguës provenant de ce trouble organique désigné diversement par les noms d’inflammation, d'irritation, de phlegmasie, de phlo-gose, etc. Ces remèdes ont pour effet de transporter la douleur d’un point sur un autre, où, à l’aide de moyens appropriés, il devient^plus facile de la vaincre. Or, de même que, par la volition magnétique, un courant s’établit d’un individu à un autre, de même le fluide transmis par la magnétisation est capable de déplacer la douleur. 11 arrive quelquefois que le mal passe du magnétisé au magnétiseur : ce fait rentre dans les cas ordinaires de contagion, et démontre encore l’analogie qui existe entre le fluide magnétique et les autres impondérables. « 11 y a circuit fermé, et c’est par le courant de retour que la douleur, déplacée sans doute par le courant d'aller, se transmet au magnétiseur à mesure qu’elle quitte le magnétisé. » Ici la volonté peut toujours arrêter l’influence du fluide que son passage dans un organisme vicié a rendu morbi-lère : il suffit, pour cela, que le magnétiseur exécute sur soi-même des passes à grands courants,

avec l’énergique intention de se soustraire à tout principe contagieux.

En ce qui concerne les maladies nerveuses, pour le traitement desquelles la médecine est le plus souvent impuissante, l’auteur exprime la conviction, fondée sur l’expérience, que l’emploi du magnétisme animal est éminemment utile dans ces sortes d’affections; qu’il est même l’unique moyen de guérison ou de soulagement pour grand nombre de malades, notamment pour les épileptiques.

M. de la Salzède pense également que le magnétisme animal n’est pas moins utile dans beaucoup de cas d’affections sanguines et bilieuses. Il attribue ces affections à un défaut d’équilibre dans les fluides, d’où résulte un trouble dans la circulation des liquides, ou réciproquement. Rétablir, dans ces sortes de cas, l’équilibre des fluides, cause essentielle de la sensation douloureuse et des symptômes qui caractérisent l’état morbide, c’est donc, ajoute l’auteur, se donner toutes les probabilités d’un prompt retour de la circulation des liquides à l’état normal.

Résumant notre analyse, relativement à l’emploi du magnétisme comme agent thérapeutique, nous voyons que le traitement curatif de toutes les maladies affectant l’organisme, peut s’exprimer par cette synthèse : Ramener à l'équilibre les divers fluides dont l’harmonie constitue l’état de santé. Proposition des plus rationnelles, et que les médecins feront bien d’examiner de près : eux qui ayant étudié l’appareil nerveux dans ses actes les plus secrets, ne peuvent que très-rarement en arrêter les désordres fonctionnels; eux qui savent sans doute influencer

isolément tel ou tel organe, par l’administration de certains remèdes, mais que l’on voit souvent impuissants quand l’état pathologique exige qu’on actionne simultanément plusieurs parties solidaires de l’organisme ; eux, enfin, qu’un art conjectural dresse théoriquement à traiter des causes et des effets, mais dont la pratique ne“va pas jusqu’à distinguer toujours un mal symptomatique d’un mal essentiel. Oui, que les médecins méditent sur la vérité qui leur est indiquée, et peut-être enfin voudront-ils reconnaître dans le magnétisme humain cet agent dynamique par excellence, ce principe vital et régénérateur qu’ils chercheraient vainement dans toute leur pharmacopée.

Nous nous associpns, d’ailleurs, à M. de la Sal-zède, quand il dit philosophiquement que le succès ne répond pas toujours au zèle du magnétiseur, dans le traitement des maladies. Dieu seul est tout-puissant, nous le savons, et la science médicale nous en fournit chaque jour la preuve. Mais nous avons à distinguer entre l'acle et l'acteur, quand M. de la Salzède ajoute que le magnétisme augmente quelquefois le mal du magnétisé (abstraction faite, bien entendu, des cas où une crise nécessaire semble aggraver momentanément l’état du malade); pour nous (à part certains cas d’hé-morrhagies spontanées et de tumeurs enkystées, le traitement par le magnétisme paraît offrir quelques inconvénients; à part aussi certains cas très-rares d’hypéresthésie qu’il faut aborder avec beaucoup de précaution), la magnétisation ne saurait jamais être nuisible si le magnétiseur est sain de corps et d’esprit, s’il s’est rendu compte du

mode d’action qu’il veut exercer, enfin s’il n’aborde le malade qu’avec ces sentiments de dévouement et de charité où s’épurent les effluves magnétiques. Toutes conditions impliquant de sérieuses études préalables pour apprécier les cas, une sage prudence pour diriger le traitement, une pratique judicieuse pour le différencier ou le suspendre à propos, finalement une organisation physique et morale qui donne la confiance en soi et qui sache l’inspirer à autrui C’est là, dira-t-on, l’idéal du bon magnétiseur, et peu d’hommes sont en état de le personnifier complètement, nous en convenons; mais c’est là aussi le type du parfait médecin, et si quelques praticiens parviennent à le réaliser à la suite d’une longue expérience, combien en est-il qui n’en approcheront jamais ! Que de tâtonnemeuts dangereux, que d’erreurs funestes à redouter, avant que la plupart d’entre eux n’arrivent à s’assimiler la vraie science d’observation! Que de contradictions entre la clinique d’école et la bonne pratique expérimentale! Quelle confusion de principes, quelles dissidences de, fond et de détail parmi les divers systèmes de thérapeutique ! C’est toujours l’éternel refrain : Hippocrate dit oui3 mais Galien dit non. Certes, nous nous empressons de reconnaître que, même avec l’intention deTaire le bien, le magnétisme pratiqué par _des mains incapables peut produire le mal, mais un mal relatif, passager, qu’une influence capable arrête toujours facilement. Or, dites-nous si la médecine, avec ses poisons, les médecins avec leurs doctrines divergentes, peuvent se flatter de ne produire que le bien, et si, quand ils ont causé ou aggravé le mal, il leur reste toujours

la possibilité do le réparer? Hélas! l’expérience est là pour démontrer le vague’de ces deux prétentions! Donc, à ce double point de vue, et nonobstant les inconvénients qui s’attachent aux meilleures choses dirigées par l'homme, le magnétisme est encore un agent qu’on ne saurait trop s empresser d’utiliser, puisqu’il constitue un principe d’essence intelligente, comme l’est en soi toutejforce vive de la nature.

Revenons à notre analyse.

Esprit docte et réfléchi, M. delà Salzède se montre très-réservé à l’endroit du somnambulisme, en tant qu’auxiliaire de la médecine. A la vérité, il admet, après examen, la réalité des merveilles inhérentes à cet état qu’il considère avec raison comme devant éclairer d’un jour tout nouveau la métaphysique et la psychologie; mais il veut sagement qu’on soit très-circonspect dans le recours aux consultations médicales des somnambules. L’état de somnambulisme se présente, dit-il, sous tant de nuances diverses, « qu’il faut, dans le cas assez rare de clairvoyance ou de lucidité, apporter les plus grands soins à s’assurer de l’excellence de cette lucidité, qui n’est que trop souvent trompeuse, abstraction faite de toute idée de supercherie, de tout soupçon de mauvaise foi. La certitude enfin de la lucidité parfaite d’un somnambule étant acquise, il n’y a nul inconvénient à le consulter sur les cas de maladie où la science est impuissante ô se prononcer sans hésitation. »

Il suit pour nous de cette opinion, que 1 auteur regarde l’intervention des somnambules, dans le traitement des maladies, plutôt comme un expé-

(lient que comme un moyen sérieux. L’ignorance et une vulgaire crédulité pourraient seules nier, en effet, que, dans la généralité des cas, la magnétisation pratiquée directement sur le malade ne soit de beaucoup préférable aux proscriptions pharmaceutiques ou hygiéniques des somnambules. Le fluide magnétique ayant des propriétés curatives reconnues, et ce principe médicateur pouvant se projeter d’une manière immédiate sur les organes en souffrance, tout homme de sens doit comprendre qu’il y a bien plus de probabilité de succès dans l’emploi direct de cet agent que dans le recours à des moyens médiats, reposant sur des facultés intermittentes, éphémères, toujours sujettes à l’erreur, souvent faussées par l’intérêt, la vanité, l’imagination, et dans la recherche desquelles il entre généralement moins de raison que de curiosité superstitieuse.

A part quelques rares sujets privilégiés de Dieu et de la nature, joignant une moralité éprouvée à un cœur compatissant, el chez qui le désintéressement est une garantie de bonne foi complète, les seuls cas ordinaires où il y ait chance d’infaillibilité de la part d’un somnambule réputé lucide, c’est, selon nous, quand il s’occupe de sa propre santé ou de celle de personnes qui lui sont chères. L’amour de soi et des autres est seul véritablement capable d’enfanter les prodiges que promet avec tant d’effronterie cette légion de sybilles modernes dont la quatrième page des grands journaux politiques étale chaque matin la pompeuse liste.

Ce que nous avons cité ou analysé du livre de M. de la Salzède suffit à faire apprécier dans quel

ordre d’idées cet ouvrage est conçu. Ce n’est point un traité du magnétisme animal, c'est un simple plaidoyer en faveur des immortelles vérités proclamées par Mesmer, mais où elles sont présentées sous des formes aussi attrayantes pour les gens du monde qu’intéressantes pour les magnétistes sérieux.

Ce livre renferme encore différents sujets que notre cadre nous obligea laisser dans l’ombre; savoir : une dissertation scientifique sur l’application combinée de l’électricité et du magnétisme animal au traitement de diverses maladies, telles que les paralysies persistantes, les amauroses rebelles, etc. ; une réponse péremptoire aux arguties par lesquelles bon nombre de savants et de médecins ont cherché à prouver l’inanité du mesmérisme et à nier l'existence même du fluide magnétique humain; enfin, une esquisse historique et philosophique poétiquement dessinée, nous montrant le magnétisme pratiqué dans tous les temps et étroitement lié aux mystères du paganisme comme à la doctrine de Jésus-Christ, de ce Verbe incarné, pure émanation de la sagesse éternelle, qui proclama l'affranchissement des esclaves, l’égalité des hommes devant Dieu, et changea la face du monde en disant à de pauvres pêcheurs : « Veuillez et croyez, aimez votre prochain comme vous-même, pour l’amour de moi; prenez en pitié les malades et les affligés, touchez-les au nom de mon père, ET ILS SERONT GUÉRIS. »

Vouloir, croire, aimer! Ces simples paroles ne résument-elles pas toute la théorie du magnétisme dans son application au soulagement de nos semblables? Ne renferment-elles pas également tout

l’esprit de l’Evangile, de cette morale sublime dont le magnétisme saintement pratiqué pourrait être la plus haute réalisation? N’est-ce pas là, enfin, l’harmonieuse triade, l'ineffable accord, la bienfaisante source où Jésus voulait que l’humanité vînt puiser le principe de tout code social et religieux? Pourquoi faut-il que l’erreur, l’ignorance, le mensonge, funestes présents de l’esprit du mal, aient aveuglé les hommes au point de leur faire dénaturer les adorables préceptes du Christ, de ce cœur tout amour dont le dernier soupir fut un pardon pour ses bourreaux! Pourquoi faut-il aussi que les ministres du Dieu-Sauveur qui apprenait aux apôtres à guérir les malades par F imposition des mains, aient méconnu la tradition vraie de cet enseignement,pour n’y voir qu’une formule mystique dont le sens propre leur échappe! Par quelle étrange aberration, enfin, la plupart de nos prêtres s’obstinent-ils encore à considérer comme œuvre? diabolique l’acte de théophilanthropie contenu en germe dans ces trois mots divins : Veuillez3 croyezt aimez/Et, comme le dit M. de la Salzède, le prêtre qui bénit est-il donc si distant du prêtre qui magnétise? Ah ! que nos pasteurs catholiques osent donc lire les écrits si lumineux, si orthodoxes, de l’abbé Loubert, do l’abbé Almingnana, et nous pouvons affirmer qu’ils abjureront leurs tristes préventions; car (nous lo disons en toute sûreté de conscience), le magnétisme, éclairé par la sagesse et sanctifié par la religion, c’est la consécration des vertus théologales, c’est la véritable voie de salut dont l’Eglise est lo symbole.

Que nos prêtres méditent aussi les excellents

conseils que leur adresse le livre du D' de la Salzède, et ils reconnaîtront que, par la pratique du magnétisme, ils pourraient joindre le titre de médecin du corps à celui de médecins de l’âme, titre que personne mieux qu’eux n’est en état d’exercer avec cette foi vive, cette ardente charité, cette religieuse espérance, conditions premières de succès, dont leur sacré caractère et le dégagement des choses mondaines leur donnent en quelque sorte le privilège naturel.

« Alors, les bienfaits du magnétisme ramèneront « au bercail bien des brebis égarées : la science « observera, les simples pratiqueront; et lorsque, « obéissant à la voix d’en haut, les hommes, suflî-« samment doués, se consacreront sans réserve au « soulagement du prochain,|la voix du prêtre aussi « sera la première à crier à tous : Vediixez et croyez; « car, en vérité, je vous le dis, quiconque aura la foi « sera sauvé! »

C’est par ces touchantes paroles que M. de la Salzède termine son appel au clergé. Nous craindrions d’en affaiblir l’impression en ajoutant un mot de plus.

Ricuabd BAIIIAUT.

Le Gérant : HÉBERT (de Garnay).

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

Société du maguétisinc de la Kouvellc-Orlénaa.

Le président nous écrit, sur les travaux de la Société, une longue lettre dont voici quelques extraits :

Mon cher monsieur Hébert,

Vous ne faites pas injure à mes collègues en leur supposant de la timidité à écrire. J’ai souvent cherché à les stimuler ; mais s’ils parlent peu, ou plutôt s’ils n’écrivent pas, je vous assure qu’ils font beaucoup plus qu’ils ne disent. Quoique nombreux sur les cadres, le chiffre des praticiens est comparativement fort petit, et pourtant j’oserais dire qu’ils font parfois de grandes choses. Leurs travaux ont singulièrement rectifié l’opinion publique depuis quatre ans ; c’est au point qu’aujourd’hui les médecins souffrent qu’on leur parle de cet animal de magnétisme (j’entends les médecins de l’École de Paris, qui sont toujours, et partout, les plus récalcitrants aux idées que leurs maîtres n’adoptaient pas) ; oui, ils écoutent sans trop se fâcher ; ils vont même jusqu’à reconnaître « que la magnétisation TOME VIII. —N" 94.-25 MAI 184». 11»

« produit quelquefois des perturbations salutaires, « niais, » sc liaient-ils d’ajouter, « c’est ce que fait « la médecine. » Ilélas! pas toujours; et c’est bien son impuissance et ses trop fréquentes et déplorables erreurs qui ont tant fait grandir son antagoniste, car nous avons eu affaire, le plus souvent, aux malades que les médecins ne guérissaient point, ou qu’ils avaient abandonnés. Combien n’en savons-nous pas que le médecin visitait à une certaine heure, le magnétiseur et quelquefois le somnambule à une autre heure : chacun formulait à sa manière; on traitant d’après celui-ci, et le malade guérissait ; mais on payait celui-là , qui emportait aussi les honneurs du succès!.... Il a bien lallu se prêter à de petites déloyautés de ce genre pour faire du bien et des prosélytes. C’est que les magnétiseurs n’ont guère que des faits à opposer aux dénégations et au baragouin des savants; ils ont, pour la plupart, fort peu de latin à leur service; ils estropient souvent les mots techniques, ou ils en font un mauvais emploi ; mais ils guérissent, ce qui est infiniment plus utile.

J’aurais bien voulu vous adresser la relation que vous attendez; mais il aurait fallu l’écrire, et je n’en ai guère le temps; le temps me manquerait surtout pour la faire courte, et je tiens à profiter d une bonne occasion qui m’est offerte pour vous faire tenir sûrement ma lettre. Laissez-moi donc vous raconter, le plus simplement qu’il me sera possible, ce que nous avons eu de plus récent ici, ou de plus intéressant.

M. Morphy m’a rapporté, entre autres faits de sa pratique, les cinq qui suivent : la guérison y a

¿■té obtenue sans que l’état de veille ait été suspendu.

M'i“ M*** : gastrite et douleurs névralgiques datant de quinze ans, guérie après trois mois démagnétisation quotidienne;

Milia, servante : suppression de règles et affection hystérique ancienne de plusieurs années,guérie après un mois de magnétisation journalière, suivie de trois autres mois de magnétisation à intervalles irréguliers ;

M"0 A. S*** : fièvre intermittente dissipée en trois séances ;

M. P*** : douleurs à la tête, névralgie de sept ans, dont au moins un accès par semaine. Magnétisé une seule fois, le 28 novembre dernier : pas le moindre accès ne s’est fait sentir depuis ;

M'lc A. L***, treize ans : croissance trop subite, douleurs à toutes les articulations, insomnies, fièvre lente. En quatre séances, plus de douleurs ni de fièvre ; à la septième les menstrues s’établissent, et dispensent de toute magnétisation ultérieure.

M. Drivon est encore un zélé magnétiseur. Il a fait un bon nombre de somnambules, et guéri ou soulagé une foule d’affections diverses. En ce moment il fait tous les jours une longue course, par un soleil bien ardent, pour magnétiser une pauvre fille qui a été abandonnée après trois mois d’inutiles soins; elle n’a plus l’usage d’une jambe, qui est d’un mince volume comparée à l’autre, et la pauvre fille ne marche qu’à l’aide d’une béquille. Durant les premiers huit jours, la magnétisation semblait sans action, mais le sommeil vint ensuite, et avec

lui une grande sensibilité du membre atrophié. Déjà la malade transpire beaucoup, dort bien la nuit, se sent plus forte, et elle pressent que dans peu de temps elle pourra marcher sans appui.

M. Léaumont est un autre magnétiseur de bonne trempe. II a dernièrement guéri des entorses, et diverses indispositions; entre autres, Mme L***, atteinte depuis cinq mois d’une névralgie très-opiniâtre à la région occipitale, et contre laquelle la médecine avait inutilement usé quelques-unes de ses douloureuses ressources, mais qui a cédé à un petit nombre de magnétisations. M. Léaumont a fait aussi plusieurs somnambules, une desquelles produit en ce moment de précieuses conversions parmi les familles qui visitent amicalement la sienne.

M. Mauberret est un des magnétiseurs les plus ardents et les plus dévoués. Je n’entreprendrai pas de vous dire ici tout ce qu’il a fait, ni même ce qu’il fait à présent ; mais il soigne des affections de poitrine et des maladies de femmes, rebelles jusque-là aux moyens méthodiques employés pour les combattre.

Il achève en ce moment la cure toute magnétique d’une dame atteinte de pneumonie, tandis qu’un de ses somnambules traite une autre poitrinaire , phthisique au dernier degré, considérée comme étant à son dernier jour , sinon à sa dernière heure, non seulement par ceux qui l’entouraient , mais encore par son médecin ; et c’est dans cette extrémité qu’on l’a jetée au somnambule. Le premier moyen dont celui-ci a fait usage a été l’arsenic, qui a réussi; mais la malade s’étant trop écartée des recommandations, la fièvre est revenue.

Alors notre sorcier a prescrit le carbonate de cuivre ammoniacal, el ¡1 est allé jusqu’à dire la manière de l’obtenir, sans doute parce que ce médicament est fort peu employé. L'effet désiré ne s’est pas fait attendre, et voilà plus de trois semaines que la malade est sans fièvre. Les moyens employés depuis lors ont été .généralement d’une grande simplicité, et l’amélioration est « miraculeuse » , au dire des intimes. Je pense que celui qui s’en étonne le moins n’est pas le médecin, à moins qu’il n'en attribue la cause à ses prescriptions, et alors il s’abuserait étrangement; car il se montra autrefois si virulent magnétophage, qu’on n’a pas osé lui dire ce qu’on fait à son insu. On le ménage , el ce sera sans doute un autre cas où le savantissimus Doctor recevra honor et argentum, comme dit le comédien. Mais, que la guérison s’achève, et nous aurons bien aussi notre propre satisfaction.

M. et Mme O*** doivent au même somnambule d’élever enfin un enfant. Mmc O“* avait été malheureuse à toutes ses couches; mais un jour, enceinte et souffrante, elle consulta notre homme, qui lui dit les précautions à prendre, quels soins, et tailla lui-même le patron d’une espèce de corset qu’il fallait porter. Enfin , trois mois avant le terme, il annonça le sexe de l’enfant, et ce petit drôle est déjà un gros moutard.

Le D1 L*** prit aussi une consultation du même somnambule, pour sa fille, qui était grièvement malade, et la santé fut promptement rétablie. Quand ces messieurs se revirent, le Docteur dit à l’autre : « Yous êtes un bien meilleur médecin que moi » ; mot charmant dans la bouche d’un véritable mé-

dccin ; mais celui-ci est américain, et parmi scs confrcrcs nationaux on compte non seulement beaucoup d’amis du magnétisme, mais encore beaucoup de magnétiseurs.

Les formules de'ce somnambule excitent quelquefois le sourire d’un médecin que je ne nomme pas : il est de la Faculté de Paris; mais il faut bien peu connaître l’homme, ou être prodigieusement médecin pour concevoir qu’il passe ses nuits à feuilleter les pharmacopées ! Et d’ailleurs, puisque les résultats de sa médication sont souvent les plus inespérés, il faut en conclure que sa méthode est supérieure à celle de Paris. Ne sait-on pas, du reste, comment se font les études médicales, et que l’École offre un accès facile à toutes les intelligences? A voir le plus grand nombre des médecins , il semble que le premier venu n’a qu’à se présenter pour être jugé dignus intrare. Je dois cependant, pour être juste, dire que les plus entêtés à l’endroit du magnétisme sont aussi les plus ignorants en médecine, et je pense que cette remarque aura été faite partout.

M. et Mme S***, porteurs de ma lettre, vous diront sans doute par quel moyen je les ai convertis, eux et leur famille. 11 m’a fallu persévérer près de quatre mois , mais enfin Mmc H*** est radicalement guérie. Très-prévenue, d’abord, effrayée même des contes absurdes qu’on lui avait faits, et des calomnies à l’adresse du magnétisme, je crus devoir la faire magnétiser en premier lieu par une de ses sœurs, à laquelle je donnai une leçon ad hoc; cette élève m’a fait honneur, et beaucoup de bien à la malade. Vous dire la complication des désordres qu’il fallait combattre;, serait chose longue : Mn" S***

vous le dira peut-être. Toujours est-il que cette dame, jeune encore, s’on allait, «condamnée et abandonnée » , pour citer l’expression d’une somnambule sa parente; et notez bien que ce n’était pas faute de médecins, car elle en compte plusieurs dans sa famille : son frère , son oncle et un cousin, sont trois médecins les plus anti-magnétistes dont la Nouvelle-Orléans puisse, s’enorgueillir. L’oncle et le neveu ont donné leurs soins successifs à la malade, qui fut également soignée à Paris, il y a plusieurs années ; mais ce furent partout des efforts inutiles, et on recourut enfin au magnétisme vers la mi-février. Tandis, donc, que la malade était journellement actionnée par une de ses sœurs, je somnambulisais une autre sœur, puis une nièce, puis enfin la malade elle-même, et je pus amplement satisfaire cette famille par une série de ces petites expériences qu’on peut se permettre, ou qui viennent sans qu’on les ait cherchées. Ensuite, sur quinze personnes qui firent habituellement usage d’eau magnétisée, huit éprouvèrent des effets non équivoques, et relatifs à leur état de santé. Une des somnambules, qui ne s’était soumise à la magnétisation que dans le simple et louable désir de venir en aide à sa tante, se trouva guérie, nous dit-elle en somnambulisme, d’un désordre qui lui occasio-nait depuis longtemps de cruelles douleurs, et qui devait inévitablement la conduire au tombeau, la médecine n’y pouvant rien , nous dit-elle. Enfin la malade aussi est guérie de tous ses maux, dont elle serait morte en août prochain, s’il faut ajouter foi à sa prédiction. On le doit peut-être; car elle avait prédit un mois d’avance, et souvent répété

depuis, la crise salutaire quelle eut effectivement le jour dit, et qui ine retint cinq heures auprès d’elle. Tout désordre a cessé depuis quelque temps : douleurs atroces des membres inférieurs et de la région cordiale, ainsi que de la tête ; perte de sommeil, de transpiration, d’appétit; froid continuel malgré les flanelles et le climat; toux, irritation de la poitrine, atonie, dépérissement, faiblesse extrême; grand affaiblissement d’un œil, strabisme outré de l’autre qui restait sans fonction, surdité considérable.... tout a cédé au magnétisme simple el à l’eau magnétisée, sans l’auxiliaire d’aucun remède proprement dit. Il est vrai qu’elle en avait assez pris depuis dix ou onze ans, époque à laquelle remonte la plus grave de ses affections, non la plus ancienne, qui date de 1835. Il ne reste, depuis plusieurs semaines, qu'une sorte de bruit qui ennuie et rend encore par moments l’ouïe un peu dure; mais j’espère que ce ne sera pas de longue durée.... Quelle magnifique occasion pour des médecins, si une semblable étude eût été de leur goût!... Mais voici une particularité à remarquer : le chirurgien, dans l’espoir de redresser l’œil louche, et d’en rétablir l’usage, détacha l’adducteur, ce qui pourtant resta sans effet. On aurait tort de s’en étonner, car ces opérations n’amènent, le plus souvent du moins, aucun résultat, et pourtant ces messieurs les considèrent comme le.nec plus ullrù des ressources de l’art!.... Que ne magnétisent-ils plutôt!.... Dans le cas de M1"“ II***, la vue redevint parfaite, et le globe oculaire se redressa considérablement dès les premières semaines. Si l’œil n’est pas tout-à-fait droit, les somnambules sont unanimes pour

en attribuer la cause à l’opération du chirurgien. Efforcez-vous donc de faire comprendre au monde que lors même que les plus grands médecins ont déclaré que tout a été tenté, et qu’il n’y a plus qu’à couper, il reste encore une ressource, la plus rationnelle sans doute, et celle par laquelle il eût fallu peut-être commencer. Qu’on ne se soumette donc jamais à une opération chirurgicale, tant que le magnétiseur n’a pas dit son mot. Certes, c’est un bel art que la chirurgie; mais s’il y a lieu de s’extasier devant une opération habilement faite, on peut très-souvent, trop souvent, hélas! en contester l’opportunité. Si encore on pouvait coudre ce qui a été coupé mal à propos!... Il ne suffirait pas ici de couper le muscle rétracté ; il fallait aussi raccourcir le muscle opposé devenu trop lâche, et cela n’est pas du ressort de la chirurgie : c’est l’affaire du magnétiseur. Le magnétisme, en produisant deux effets en apparence si opposés, ne fait cependant que rétablir l’équilibre; en un mot, il guérit.

Dans les derniers jours de mars, je dus me rendre auprès de Mn,c C***, malade depuis cinq ans, et que des médecins voulaient faire voyager. On parlait d’hypertrophie du cœur, à l’endroit duquel on voyait effectivement un gonflement très-prononcé, et la malade ne pouvait point se coucher sur le côté gauche, qui était déjà très-douloureux et le devenait bien davantage. Elle avait aussi de fortes douleurs à la tête et aux parties inférieures; mais particulièrement du côté gauche. La vue s’affaiblissait extraordinairement, ainsi que la mémoire. M'"° C*** oubliait jusqu’au nom de son enfant. Elle avait quelquefois des crises catalcpliformes, à la suite de

l’une desquelles la langue resta paralysée pendant cinq heures. Elle avait toujours froid, ne transpirait jamais, pas d’appétit, peu de sommeil, el d’une faiblesse extrême : son mari étai t obligé de la porter... Je la magnétisai une vingtaine de fois, une heure par jour, et je la mis à l’eau magnétisée. Elle entrait promptement dans cet état comateux où toute locomotion se trouve empêchée , mais elle dormait lort peu. L’effet quelle ressentait dans cet état, elle le comparait ensuite à ce que lui avait fait éprouver le chloroforme, qu’un des médecins lui avait administré quelquefois. Elle est parfaitement bien depuis près de deux mois, et n’a plus que le souvenir de sa maladie.

Dans sa lettre du 3i mars 1848, M. Jobard vous disait : « qu’il croyait avoir trouvé le moyen de faire « des somnambules qui ne mentent jamais; qui ne « parlent point à vide, qui ne cherchent point à de-« viner à la façon des gens éveillés.... » Les magné-tistes de tous les pays auront regretté que le savant bruxellois ait gardé pour lui sa découverte, que cependant il semblait devoir vous faire connaître daus une prochaine lettre.

J’ai aussi une manière de ne faire que de bons somnambules; mais cela me paraît si simple, que je n’ose dire que c’en soit une : je suis même persuadé que presque tous les somnambules seraient bons, si le moyen de les gâter n’était si facile. Mais la plupart des magnétiseurs accablent de questions les magnétisés, avant même que l’état magnétique soit bien atteint; ils les influencent très-probablement; et ensuite, dans un but utile, sans doute, mais peut-être aussi un peu par vanité, ils admet-

tent trop volontiers des curieux qui gênent presque toujours.... Je ne procède plus ainsi depuis longtemps , et je m’en trouve bien. Dès que le magnétisé, en présence de sa famille, ou d’amis seulement, me semble être sorti de l’état de veille, je lui demande s’il est assez magnétisé. Presque toujours il me répond négativement; et, sur ma demande, il me dirige dans ce que je dois faire. Je ne lui dis plus qu’un mot : c’est de m’avertir quand il sera convenablement magnétisé. Depuis ce moment il se passe plus ou moins de temps, souvent même plusieurs séances pendant lesquelles je me borne à lui répéter ma recommandation , à laquelle il se conforme toujours dans la suite. Quand enfin il me dit se trouver dans de bonnes conditions, je lui demande : « A quoi pensez-vous ? » Le plus souvent il me répond : « A rien. — Pensez à votre mal, lui dis-je; ou bien, pensez à telle personne » (le malade qui nous occupe); et, dès cet instant, je ne lui parle plus.

Quelquefois son nouvel état l’absorbe si profondément , qu’il n’en dit rien de longtemps ; mais j’ai la patience qu’il faut, et je sais attendre des heures, parfois même une autre, ou d’autres séances. Et quand enfin il s’est familiarisé avec cette autre manière d’être, il me dit spontanément tout ce qui peut intéresser le malade en question, et même d’autres malades que jusque là on croyait en bonne santé. Je fais écrire sans l’interrompre (ce que d’ailleurs il serait presque toujours inutile de tenter, parce qu’il n’aime pas à se distraire de ce qui le préoccupe), et ce n’est qu’à la fin, quand il n’a plus rien à dire, ou bien quand lui-même ques-

lionne , que je ini fais expliquer ce qui peul me sembler obscur ; mais ii y a rarement lieu à lui demander des explications. En un mot, j écouté mes somnambules comme je me figure que les anciens écoutaient leurs oracles.....

Les personnes qui n’ont pas étudié les phénomènes produits par le magnétisme, les nient, ou donnent beaucoup trop d’extension aux facultés somnambuliques. Je ne sais jusqu’où elles peuvent s’étendre, si tant est qu’elles aient des limites ; mais je crois que, dans l’état encore trop peu avancé de la science, au lieu de citer à tout propos ces merveilles qui étonnent même les magnétiseurs , et qui ne servent qu’à accroître l’incrédulité de ceux qui ne le sont pas, il faudrait, dans la pratique ordinaire, se contenter de faire considérer ces étranges effets simplement comme les analogues de ce qu’on observe chez les animaux; c’est-à-dire, et comme l’a si bien énoncé M. Auguste Marie , l’exercice de l'instinct. Si on était assez sage pour s’en tenir là, on gagnerait ceux qui écoutent; car ils seraient frappés de l’analogie, et ils en viendraient d’autant plus vite à expérimenter eux-mêmes.

Ma manière de procéder est donc toute simple : elle n’exige que de la patience. Je ne vous dirai pas que son application me conduit aux plus heureux résultats, quant au but que je me propose d’atteindre; car les mêmes effets ont été obtenus par d’autres méthodes, puisque les livres sont pleins de ces mêmes faits que j’ai lieu d’observer chaque jour, et dont les variétés infinies rempliraient encore tant d’autres volumes; mais il se peut qu’elle me fasse éviter bien des déceptions, et j’arrive à

des guérisons merveilleuses, quelquefois de malades réputés incurables par des médecins habiles, et qui ne sont pas moins rendus à la santé par la magnétisation directe et l’eau magnétisée seules. La plupart des somnambules, les miens, du moins, font un grand usage de ce dernier auxiliaire, tant pour boisson , qu’en lotions, compresses, etc. Deleuze en connaissait bien les précieux effets; M. Clapier en a fait l’expérience à son tour comme nous tous.

Nous fêterons le 23 mai en nous joignant à vous mentalement.

Mille amitiés, à vous et au digne cher du Potet.

Jos. BARTHET.

Banquet uieaincricn du 23 mai.

CÉLÉBRATION

OU

CKST-QU I NZI HUE ANNIVERSAIRE DE LA NAISSANCE DE MESMER-

Les hommes cherchent toujours à se survivre; c’cst un besoin de l’âme. 11 est l’excitant le plus puissant des facultés de l’intelligence, et nous lui devons le plus grand nombre des découvertes utiles. Un novateur ne jouit presque jamais du fruit de son génie, il sait qu’après lui seulement les hommes auront souci de sa mémoire, et regretteront d’avoir été ingrats : cela lui suffit ; il meurt s’en rapportant au temps et à l’histoire, qui placent chacun à son rang, chaque chose à sa place.

La civilisation avancée fait les coeurs égoïstes et ingrats; mais, nous devons le reconnaître, de nombreuses exceptions existent toujours à cette loi;

et c'est par ces âmes d’élite que le tribut dû au génie continue de s’acquitter.

Ainsi, pour Mesmer, nos plaintes seraient injustes, cet homme illustre vit toujours pour les magnétiseurs. Ils le retrouvent dans chaque fait, dans chacune de leurs œuvres, et nous sommes bien certains qu’un jour un monument sera élevé à sa gloire. Que sont en effet, près de Mesmer, toutes ces renommées éphémères ?.....Les Facultés comptent leurs pertes d’hommes illustres , enregistrent leurs hauts-faits, leurs brillantes découvertes : le monde ne s’en occupe point, Ilippocrate seul est toujours présent. La mémoire de Mesmer sera non moins durable, car il a, plus que le médecin de Cos, des droits à notre souvenir. N’a-t-il pas trouvé la loi de la conservation des êtres?

Cette année, qui comptera parmi les années malheureuses , n’a pas permis à beaucoup de magnétiseurs de prendre part à la solennité du 23 mai. Cette fête a été en quelque sorte improvisée; les lettres d’invitation n’ont même pas, par une infidélité des distributeurs, été toutes remises à temps, et cependant il s’est trouvé une centaine de souscripteurs. C’est plus qu’on n’avait esperé; qu’on juge ce que ce sera dans des temps meilleurs.

Si l’on compare le nombre des magnétistes qui ont assisté à cette fêle dans ses quatre célébrations à Paris, on trouve que :

En 18-46, il y en avait 78

— 1847, — 154

— 1848, — 48

— 1849, — 90

En jetant un coup d’œil sur les mêmes listes, et faisant pour les noms ce que nous venons de faire

pour les chiffres, ou ne retrouve qu’un petit nombre des fondateurs de cette solennité : la mort en a enlevé quelques-uns, beaucoup ont été dispersés ; la gêne nous a privés des autres. Mais tout fait espérer que l’an prochain il y aura moins d’absens et beaucoup plus de nouveaux adhérents.

La réunion de cette année a eu lieu au Capucin, rue d’Angouléme. La vaste salle de ce restaurant était remplie d’amis du magnétisme. La vérité est donc bien puissante pour réunir ainsi dans un même banquet une foule d’hommes! Ici point d’opinions diverses, ni de lutte ; les cœurs ne sont point agités par les passions : nous ne rencontrons aucune dissidence. Chacun a présent à la pensée, le souvenir du bien qu’il a fait, de celui dont il a été la cause. Ali! plût à Dieu que de semblables réunions soient fréquentes ; fondées sur un principe de bien, elles établiraient la vraie fraternité, et fonderaient l’ordre, si difficile à établir parmi nous.

Le portrait de Mesmer, par M. Carpentier, était placé au centre de la salle.

M. du Potet, président du banquet, a pris la parole et prononcé le discotirs suivant :

Messieurs,

« Les Chrétiens de la primitive époque s’assemblaient souvent pour se communiquer leur foi et leur espérance. Dépositaires de vérités morales qui n’étaient point comprises alors, ils cherchaient en silence les moyens d’étendre leurs croyances. L’esclavage était de droit commun parmi les nations, la fraternité inconnue, la liberté n’existait que pour

quelques-uns. Les sciences, comme un bien de famille, ne se transmettaient qu’à de rares élus.

« Des hommes inspirés de Dieu , se souvenant de Christ, osaient répandre des principes nouveaux dont la sublimité devait un jour changer la face du monde. Vous savez leur histoire, messsieurs; ils furent persécutés , presque tous mis à mort. Mais la vérité, dont ils étaient les apôtres et les victimes, se répandit comme une lumière céleste : la justice dès lors apparut sur la terre.

« Disciples de Mesmer, pénétrés des vérités sublimes que son génie découvrit, nous nous assemblons aujourd’hui, d’abord pour rendre hommage à notre maître, et chercher en commun les moyens de répandre les principes féconds qu’il nous transmit.

« Nous n’avons point à craindre le martyre : la tolérance est venue avec la liberté, elle est le plus beau fruit de l’intelligence. Nous avons passé cette époque malheureuse où la fausse science nous accablait de ses mépris, et nous pouvons maintenant prévoir des temps plus heureux encore. Récompense de notre persévérance et de notre bonne foi, messieurs, nos idées, tant de fois rejetées, se produisent en même temps dans les deux continents, et le monde commence à nous comprendre.

« N’apportons-nous pas aussi des vérités qui doivent un jour modifier puissamment ce qui existe, et rendre les hommes meilleurs et plus heureux. Voyez, messieurs, comme tout s’enchaîne, se suit, se coordonne dans ce vaste univers, et reconnaissez la main invisible qui conduit toute chose vers ses fins. Ainsi le soleil ne mûrit point tout à coup

les moissons. Les hommes, avant de jouir des bienfaits de la civilisation, étaient abruptes et grossiers, ils vivaient de fruits venus sans culture, et leur esprit ne pouvait percer l’enveloppe trop matérielle qui le couvrait. Longtemps errants et sans guides, ils ignoraient leurs destinées ; mais, le doigt de Dieu dirigeant toute chose, de proche en proche ils se transmirent ce que la pénétration leur faisait découvrir, et la science commença. Ce ne fut d'abord qu’un amas de vagues connaissances, enveloppées des plus grossières superstitions, et les siècles passaient, passaient toujours, en agissant sur les mœurs et sur les croyances, et les améliorant sans cesse.

« Tout était donc fixé d’avance. Une loi immuable avait voulu qu’il en fût ainsi. L’enfance ne doit-elle pas précéder la virilité? Notre orgueil pourrait nous faire croire que nous sommes arrivés à cette époque , il n’en est rien pourtant, relativement à la durée des mondes ; nous ne faisons que de naître, et cent peuples ont passé déjà !

« Ah , messieurs ! que de travaux, que de peines, et combien nous avons à rendre grâce d’être venus dans un temps où l’homme commence à se comprendre, et où , devinant la Providence, il sait que chacun de ses efforts prépare des temps plus heureux encore! Ne vous y trompez point, messieurs, instruments nous-mêmes du progrès, nous marchons , car Dieu nous pousse, et nul ne sait où les destinées humaines doivent s’arrêter.

« Ne vous effrayez point du bruit qui frappe souvent vos oreilles, la fin des temps est bien éloignée, et si les révolutions successives étonnent vos esprits,

sachez vous courber sans maudire, car vous pourriez blasphémer.

« Que faisons-nous nous-mêmes en ce moment? N’est-ce point un esprit de révolte qui nous anime ; car nous ne pouvons supporter le mensonge , nous faisons la guerre au faux savoir, nous attaquons sans relâche des principes destructeurs, sans considérer les êtres qui les ont adoptés comme base de leur fortune. Nous répandons des vérités qui doivent être fatales à quelques-uns dans un prochain avenir ; car elles reçoivent déjà un commencement de triomphe. Beaucoup de renommées doivent disparaître. Ceux qu’un vain orgueil avait établis au-dessus des autres hommes cesseront de faire autorité : c’est le progrès du temps et de la vérité, et nous sommes les plus hardis des novateurs, car nous osons combattre des doctrines qui longtemps furent admises comme règles de l’humanité.

« Si nous ne nous trompons , messieurs, tous les systèmes de médecine doivent tomber dans l’oubli, et faire place aux idées que nous apportons , et qui semblent basées sur une loi de la nature, qui voulut, on créant les êtres, leur donner les moyens de se conserver.

« La philosophie, cette science aujourd’hui sans lumière, doit disparaître également, car elle a méconnu les plus beaux attributs de l’âme humaine, ces perceptions presque divines que Puységur le

premier nous révéla.

« Toutes ces prétendues connaissances sur 1 homme, gloire des physiologistes, ne seront plus conservées que comme des débris épars d’un monde qui vécut, mais qui fut inférieur au nôtre.

« La religion, cette fille du ciel qui trouva tant d’interprètes, et qui ne put jamais par des arguments soumettre la raison des sceptiques entêtés, va s’épurer au flambeau nouveau : Dieu ne sera plus mis en doute. Voilà, messieurs, ce que nous annonçons , et ce que nous sommes prêts à prouver à tous par les œuvres qui sortent de nos mains. Je vous le disais tout à l’heure, messieurs, nous sommes de pacifiques révolutionnaires , et les changements que nous annonçons, et dont nous serons cause, doivent un jour être inscrits dans l’histoire. Les enfants des hommes qui nous maudissent béniront notre mémoire, car ils jouiront d’un bien conquis par nos efforts.

« 0 source intarissable de méditations ! Gloire à vous, mon Dieu, car j’ai pu un instant, arrêtant mes pensées, sentir par mon âmeet découvrir en moi ce feu dont la source est divine et l’essence immortelle. Mesmer! Mesmer! tu n’as point d’autel ni de statues, mais ceux que nous initions chaque jour à tes préceptes répareront bientôt l’injustice de tes contemporains. Et si tu fus chassé de ton ingrate patrie, poursuivi sur ce sol même, par la haine et l’envie, la postérité qui t’attend vengera ta mémoire.

« Et comment pourrai-je manquer de reconnaissance envers mon maître ! Je lui dois le peu que je suis, mes connaissances viennent de lui, mes œuvres de chaque jour, le bien que je puis faire n’ont point d’autre origine. Qu’importe que j’aie souffert pour sa cause? Dois-je me plaindre en cet instant ; on ne devient homme que par la souffrance, les plus heureux d’entre les mortels vécurent

sans vivre, car ils ne connurent point l’humanité.

« Courage et persévérance, messieurs, nous marchons dans un champ sans limite. Laissons venir les temps ; nous possédons la plus grande richesse, celle que rien ne peut nous ravir, la vérité est avec nous : c’est le plus précieux des biens; car, tandis que l’obscurité environne encore les hommes qui nous dédaignent, ne pouvant plus nous opprimer; nous possédons ce qu’ils cherchèrent en vain par d’autres routes, et quand nous le voudrons, nous porterons le trouble dans leur âme. Mais que l’orgueil et les mauvaises passions n’entrent jamais dans nos cœurs; plaignons ceux qui nous méconnaissent et nous méprisent, car ils sont malheureux : éclairons-les à force de patienee et d’efforts.

Disons bien haut aux novateurs : Vos doctrines sont incomplètes, quand vous méconnaissez les besoins impérieux de nos âmes. Les satisfactions physiques répétées tuent ¡l’intelligence : il faut à celle-ci un aliment digne de sa nature, et nous seuls pouvons vous le faire découvrir.

« Aidez-nous donc dans notre mission, si vous ne voulez que l’humanité n’éprouve dans sa marche un temps d’arrêt. Que vos moyens , surtout, soient pacifiques : le sang appelle du sang, et tout peut se faire aujourd’hui sans martyre.

« Pour moi, messieurs. qu’un long combat n’a point abattu, amassant des années, je vois venir avec sérénité le moment où j’irai rejoindre notre maître, Mesmer, vous laissant la continuation des mêmes travaux, car le temps où la lutte cessera est éloigné de nous, et beaucoup de choses encore restent à découvrir.

« C’est un bien beau jour, messieurs, que celui-ci, il marquera'dans nos annales, puisque, malgré les difficultés des temps , vous êtes venus nombreux à notre appel, ne voulant pas laisser passer inaperçu le jour qui vit naître Mesmer.

« Vous avez voulu que je fusse l’interprète de vos sentiments et de votre reconnaissance, pardonnez-moi si ma parole est impuissante à traduire vos pensées, car mon désir est sincère. Pour parler dignement de Mesmer, il faut une haute intelligence et du génie; pourquoi avez-vous choisi l’homme qui n’a pour tout mérite que les talents que tous peuvent acquérir. Ma parole sera seulement l’écho imparfait dé vos âmes.

« A Mesmer ! messieurs, à notre illustre maître! Buvons à sa mémoire, car il fut homme de bien. » A LA GLOIRE DE MESMER!!!!

Après ce discours, un nouveau partisan du magnétisme , M. Hipp. Bonnellier, dont le talent oratoire est si connu, a reporté l’assemblée vers les premiers temps de lutte du mesmérisme. S’appuyant sur des documents inédits, il a révélé des faits inconnus, dont le principal est que Mesmer fut victime d’une persécution politique ; la conduite que les savants ont tenue était commandée: cela résulte, dit l’orateur, de la correspondance secrète de ***, alors ministre, et devenu depuis lé 9econd mari de ma mère.

*

51. Burckard, s’appuyant sur ses propres œuvres, dépeignit ensuite les bienfaits futurs du magnétisme , lorsque, comme lui, les pères de famille sauront l’employer dans leur intérieur. Il voit dans

la pratique de cet art la réalisation de bienfaits inexprimables, et que ne peut procurer la science ollicielle. La main secourable d’un homme dévoué et sympathique se posant sur la douleur qui naît, empêche le développement de mille désordres que trop fréquemment les drogues aggravent encore. 11 fait des vieux pour que le divin magnétisme soit compris par tous les hommes, et que, descendant dans la famille, il devienne la médecine naturelle, comme Dieu l’a voulu.

La poésie succédant à l’éloquence, un magné-tiste dont l’âme est aussi élevée qu’expansivc a ex-priméen vers harmonieux quelques scènes de magie. Nous regrettons que sa modestie nous empêche de le louer comme il le mérite, et de publier son nom à la suite de l’œuvre que voici :

LE MIJIOIR MAGIQUE.

Dans co miroir où tu plonges,

Entant, ton regard rêveur;

Réalités ou vains songes,

Que vois-tu, joie ou douleur?

— Jo vois comme un cercle étrange,

Cercle immuable, où tout change,

Tout se transforme......ici-bas.

Harmonie, ordre suprême,

0 naturo, es-tu l'cmblême D'un monde qu’on no voit pas?.....

A ce fCve qui s'efface Un autre rêve est uni ;

Je vois à travers l'espace Comme un point dans l’infini ;

Chaque éclair qui l’illumine

Le fait grandir; il chemino

Siècle à siècle, pus à pas.....

Astre, esprit, ou météore,

Marche, marche, marche encore ...

— Ne vois-tu plus rien là-bas'/

— Tour à tour lent ou rapide,

Je le vois au haut des cicux, Décrivant, astre splendide, l)es signes mystérieux,...

Dans sa marche solennelle, L’humanité se révèle

A qui ne s’aveugle pas.....

Esprit, flottant sur l’abîme,

Reste, vision sublime.....

— Ne vois-tu plus rien là-bas ?

— Sous mes yeux, chaîne fatale Do crimes et de vertus,

Tourne une immense spirale

De peuples qui no sont plus.....

Mais qui s’avanco dans l’ombre?

Ce sont des hordes sans nombre,

Le sol tremble sous leurs pas.....

Passez, colonnes ardentes;

Passez, tempêtes vivantes.....

— Ne vois-tu plus rien là-bas?

Le vieux monde va finir;

Le passé tombe en ruines

Sous les coups de l’avenir.....

Plus de dieux au Capitole!

Mais la croix, divin symbolo,

Sur la terre étend les bras.. .. Tombez, tombez en poussière, Tombez, dieux d’or ou do pierre !.....

— Ne vois-tu plus rien là-bas?

—Jamais aurore plus belle N’a lui sur l'lramaniU5;

La (erre sc renouvelle

Au seul nom de liberté.....

Comme au printemps, la nature.

Sc dégage, libre et pure,

De sa robe de frimas,

l.e genre humain sc réveille ,

Entendant ii son oreille

Des mots qu’il ne comprend pas......

France, à toi l'intcltigcncc,

A loi le bras cl le cœur ;

Soldat de la Providence,

A loi l'œuvre du Seigneur '

Essuie à ta noble épie

I,c sang dont elle est trempée ;

Ferme l'èrc des combats ;

Deviens le flambeau du monde,

Que ta lumière féconde,

Éclaire et ne brûle pas....

— Dans ce miroir fatidique Ne vois-tu donc rien de plus?

— Je vois luire un nom magique Sur des drapeaux inconnus.....

Sur un océan qui gronde,

Je vois s'élancer le monde.....

O ciel ! qu’entends-je là-bas?

Sont-cc des chants d'allégrcsso?

Sont-cc des cris do délrcsso?.....

Je ne vois plus rien , hélas !.....

Mais l'avenir sc colore Au loin de feux éclatants :

Un nouveau jour vient d'éclore

Sur les ravages du temps.....

Que de lauriers éphéméres,

Que de gloires mensongères

Il a broyés sous scs pas!.....

Mais, û Mesmer ! d’âge en âge,

Je vois grandir ton image :

La vérité no meurt pas I

Un tout jeune homme, avenir du magnétisme, qui puise dans l’étude de la médecine tout ce qui peut venir en aide au puissant agent mesmérien , a, dans un discours chaleureux et rempli d’images, passé en revue les moyens qui tour à tour ont été employés pour soulager les hommes. Par des tableaux saisissants, il a peint les souffrances et l’agonie des malheureux que la science abandonne. Puis, esquissant à grands traits tout ce qu’il y a de sublime dans le magnétisme; il nous l’a montré non point comme une panacée, mais comme un remède si puissant, que devant lui la plupart des autres doivent s’effacer. On voyait, à son air convaincu, que M. Leger s’est trouvé souvent en face de la douleur, et que les remèdes de ses illustres professeurs étant inefficaces, il a bien des fois fait usage, dans les hôpitaux, du moyen dont il venait de peindre si brillamment les bienfaisantes propriétés.

M. Jules Lovy, payant avec joie son tribut habituel, a raillé dans une chanson comique le faux magnétisme, celui qui se cache sous le masque trompeur du somnambulisme. Sa verve s’est exercée à frapper le mensonge. Le temps va venir où on fera bonne justice des abus auxquels a donné

lieu la découverte de Ptiysêgur ; et, sans cesser d'accepter le bien qui se trouve dans le somnambulisme , on saura tellement en démasquer les faussetés, que nul homme ne pourra s’y tromper. Voici ces couplets :

S2©2)SaSÏS39

OU

LE PlIFF E1TRA-LHCIDE.

Ain : t'ouï n'êlet plut LiseIle.

J'ai vu, dans les journaux,

Prôner \ilus d’un fluide;

De ces sujets nouveaux Le sonimell est perfide :

Eli non, non, non,

Pour devonir lucide,

Eli non , non, non,

Le Pu/f n'est jamais bon.

Sur |a foi d’un journal,

Je fus chez LÉonidu :

Sujet pyramidal !

Lucidité splendide!.....

Eh non, non , non,

Elle n'est pas lucide;

Eli non, non, non,

Le sujet n’est pas bon.

( Parlé : ) Consultation de Mme lAmide : dix francs la séanee. ( Chanié : ) « Goddam I dis-je d'abord,

Avec un air candide.....

— Vous Mes un mylord !

Képondit Léonide.

— Eli non , non , non ,

Vous n'êtes pas lucide !

( A part : ) Eli non, non , non,

Ix sujet n’est pas bon I

Malgré maint détracteur,

Mesmer sc consolide :

A qui doit-on l’honneur D'un progrès si rapide ?

( Parlé:) la Somnambule. * C'est aux médecins! » ( Chanté :) — Eh non, non, non,

Vous n’ètes pas lucide I ( A part : ) Eli non, non, non,

Le sujet n’est pas bon I

Pour connaître la loi Qui règle le fluide,

Prendra-t-on, dites-moi,

Monte Cristo pour guide 1 ( Parlé:) la Somnambule. ■ Oui. »

— Eh non, non, non .

Vous n’ôtes pas lucide 1

( A part : ) Eh non , non, non,

Iæ sujet n’est pas lion !

Que fait le blond Lindor Avec marn’ Aristide,

Lorsque le mari sort,

Lisent-ils l'Énéide?

(Parlé:) la Somnambule. • Ils lisent l’Énéide. »

— Eh non , non, non,

Vous n’êtes i>as lucide I Eh non, non, non,

Le su jet n’est pas bon !

Ces financiers nombreux Dont Thiers est lo séïde, Hencontre-l-on chez eux line vertu rigide?

(Parlé:) la Somnambule. « Mais, oui! »

— Eh non, non, non, Vous n’ôles pas lucide !

Eli non , non, non,

Le sujet n'est pas bon i

Et tous ces travailleurs Qu’on veut tenir en bride, Est-ce par les rigueurs Que leur sort se décide?

( Parlé : ) la Somnambule. « Mais, oui ' »

Eli non , non , non,

Vous n’êtes pas lucide!

Eli non, non , non ,

Le sujet n’est pas bon !

Pendant uno heure ou deux , La dormeuse intrépide Me fit des contes bleus,

A me rendre stupide.

Eh non , non, non ,

Elle n’est pas lucide,

Eh non , non, non,

Le sujet n’est pas bon.

Je vois avec douleur Le néophyte avide,

Dans maint journal menteur, Profaner le fluide.

Eh non, non, non,

Pour devenir lucide,

Eli non, non, non,

Le Puff n 'est jamais bon.

A ces l'uff s mesmériens,

Toujours le dol préside :

C’est par do tels moyens Que notre art so suicide!

Eli non, non, non,

Le Puff extra-lucide,

Eli non, non, non ,

Ce Puff n’est jamais bon I

Des toasts furent ensuite portés :

i° Au Président, pour l’initiative qu’il a prise de cette fête;

2° Aux Dames, qui l’embellissent de leur présence ;

3° Aux Commissaires, dont les soins diligents ont si puissamment contribué à la rendre harmonique.

Et l’on s’est séparé plein d’enthousiasme, faisant des vœux pour la multiplication de ce banquet, dont la succession est désormais assurée.

Fête douce et tranquille, animée par les sentiments venus de la mémoire du cœur! Réunion sympathique, assemblée de frères, qui n’a point encore d’analogue ! C’est ainsi que tout ce qui est fondé sur le bien et la vérité passionne les hommes, et établit des liens dont le poids n’est jamais pesant. Les âmes s’échauffent à ce contact; on aime à

sc revoir : le bien se présente à la pensée de chacun, et de nobles désirs naissent dans les esprits.

L’assurance de nous trouver nombreux l’année prochaine, l’espoir de distribuer bientôt des médailles aux plus méritants , nous donnent une joie secrète qui sera partagée par les nombreux magné-tistes qui n’ont pu assister à cette solennité. Tout marche donc au gré de nos désirs ; l’avenir appartient à la découverte que nous glorifions : le monde sera bientôt sa conquête.

LISTE DES SOUSCRIPTEURS AU BANQUET

M. ANDR1VF.AÜ.

M. BAHIAUT.

Mmc BAÏHAUT.

M. BIj'RCKARD.

M. BRUN.

M"1» BRUN.

M"» BRUN.

M. B0RGN1S.

M. BRETON.

M. BLESSON.

Mrac GANDON.

M BÉNECH.

M. BICKÈS.

M. BONNEI.L1ER.

M. BESNOIN.

M. COI.LOT.

M. COSSON.

M. CAFLER.

M. CHARDON jeune.

M CARPENTIER (Paul.) M. C0LL1N,

Mm* COLLIN.

M. CHAPPÉE.

M. DU POTET.

M"'« DU POTET.

M. D'OUCHES.

M. DOHERTY (Hugh)

M. DARDIER.

M. DODARD.

M. DUVEY.

M. FAUCHAT.

Mmo FAUCHAT.

M. FRANCK (Jérôme.)

M. FRICK.

M. FRANÇOIS.

M. FROMENT-DELORMEL. M. FLEURY.

M1”« FLEURY.

M. GIROI.I.ET.

M. GERMER BAILLÈRE. M. GÉRARD.

M. GILLOT-L' ÉT AN G.

M. GUII.LOUX.

M. GUÉDON.

M"» GUÉDON.

M. GAUTIER (Jules.)

M. GUÉNEAU.

M. GU1I.11EM.

M'"« HIL1ARD.

M HEBERT (do Garnay).

M. noi:I.ET, père.

M. .IAHY.

M. LOGEROTTE.

M. LE VAILLANT OE FLORIVAL. M. LION.

.M. LEl'ÈVRE OE I.A ROCHE.

M. LE NORMAND.

M. LEBASTIER.

M. LA IIKRTHELL1ÉRE (de).

M. LOVY.

M. LEGER.

M. LAWOKEST (da]).

M. LEMOINE.

M. LORENZO.

M. LACACSSADE.

Äl. MILLET.

M“B MILLET.

M. MAC SIIEEHY.

M. MEI.BYE.

M. I’ICHARD.

M. PIÉTRESSON SAINT-Al’BlN. M. PIIÉI.IPPON.

M. PINGUILLY-L'IIARIDON (de). M"« PINGUILLY-L’IIARIDON (de). M. PELLE.

Jil. PllfON.

Mmo PIRON.

M. RIONI), il. HEIGNIER.

M. RAYNAL.

M. S1MONNEAU.

M. STASS1N.

M,,u SAUNIER.

M. SHAW.

M. SALLARD.

M. TRONCIION.

$lm° K. TRONC||ON.

Mn« A. TRONCIION.

Mlta TRONCIION.

M. W1NENN.

Ont adhéré «ana pouvoir aisister :

M. ARNETTE.

M. BASSET.

M. le Dr CIIARPIGNON.

M. DELAMOTTE-DUPORTAIL. M. LAl’ORTE.

M. LASSAGNE.

M"'o LASSAGNE.

M. MESMER.

M, J. DE ItOVËRE.

M. THUILLIER (Amiilée.)

VARIÉTÉS.

Chronique. — C’est à n’y rien comprendre. Le docteur Teste, après avoir renié la médecine, propagea le magnétisme par des Cours, des livres, et la pratique. Devenu médecin de l’établissement hydro-thermal de Bagnolles (Orne), il apostasia le magnétisme pour rentrer dans le giron de l’École. Les antagonistes du magnétisme, qui se sont réjouis de cette défection, seront bien surpris d’apprendre que M. Teste vient de faire un mariage magnétique.

Il a épousé une jeune anglaise que M. du Potet som-nambulisa à Saint-Pétersbourg, et dont il est parlé tome Ier, page 544 de ce Journal.

— Nous avons à inscrire le nom de trois nouveaux souscripteurs d’actions de ce Journal, ce sont :

M. GERMER-BAILLIÈRE.

M. BOMÉA.

Mm' ARBAUD.

— La deuxième livraison de l’ouvrage de M. 01-livier, de Toulouse, vient de paraître, et la troisième doit la suivre de près. Nous ferons l’analyse du livre entier, aussitôt qu’il nous sera parvenu.

Le Gérant : HÉBERT (de Garnay).

CLINIQUE MAGNÉTIQUE.

CIIOLÉRA-MORBUS.

A l’appel que nous avons fait pour colligcr les faits épars de magnétisme relatifs au choléra, deux de nos abonnés ont déjà répondu.

Yoici leurs communications :

Monsieur,

Quoi qu’en disent les détracteurs du magnétisme, je ne puis me dispenser, dans l’intérêt de l’humanité, de rendre publics quelques cas de maladies graves guéries par l’action de cette médication puissante.

M. C***, âgé de trente-deux ans, d’une complexion frêle et délicate, fut atteint, dans la nuit du 16 mai i8/|9, à quatre heures du matin, des symptômes ci-après : coliques intenses, selles liquides, ster-corales d’abord, puis jaunâtres, grisâtres, inodores et analogues à la décoction de riz plus ou moins épaisse, avec une perte totale d’urine; douleurs des reins, et augmentation rapide du sentiment de faiblesse. Contre ces symptômes caractéristiques du choléra, j’ordonnai une infusion de camomille pour tisane, cataplasmes de farine de graine de lin sur TOME VIII. — M- »5. — 10 JUIN 18*9. 11

l’abdomen, dcmi-lavcment avec huit ou dix gouttes de laudanum de Sydenliam cl une cuillerée d’amidon. A six heures les crampes commencent : elles se font surtout sentir à l’épigastre et aux jambes; surviennent quelques vomissements; quelques instants après la physionomie change totalement; les yeux s’enfoncent en s’entourant d’un cercle bleu ; peau fraîche, pouls déprimé. J’ordonne des frictions alcooliques camphrées sur les membres inférieurs , et tout le long de l’épine du dos, sinapismes aux mollets, et quelques bouteilles de grès remplies d’eau chaude le long du corps pour ranimer l’action vitale qui semble s’éteindre.

La position de. ce malade me paraissait fort grave. Mon esprit inquiet travaillait sans cesse à son soulagement , et sachant par expérience combien les meilleurs traitements ont échoué dans cette terrible maladie, le ciel, je le crois ainsi, m’inspira l’heureuse idée de magnétiser mon malade. Entre neuf et dix heures du matin, je reviens auprès de lui, je lui propose comme moyen curatif le magnétisme; il accepte ma proposition, et à l’instant je le soumets à son action. Je dirige particulièrement le lluide magnétique sur l’épigastre, l’abdomen et les membres inférieurs, là où il éprouvait le plus crampes, de douleurs. Durant trois quarts d’heure je cherche à lui communiquer toute mon énergie ; il est assoupi, sans dormir toutefois du sommeil magnétique. Quatre heures après avoir été magnétisé , les crampes des jambes ont presque disparu, du moins il ne s’en plaint pas; mais celles de l’épigastre , persistent avec autant d’intensité. « Je ne souffre plus des jambes, me disait-il d’une voix très-

faible, mais l’estomac, mais l'estomac!... » en s’efforçant d’y porter la main.

Je ne suis pas éloigné de croire qu’il ne ressentît pas les crampes aux jambes. (L’aphorisme d’IIippo-crate est bien véridique : Ex duobus doloribus vehe-menlior obscural allerum), et en voici les motifs. Je le magnétisai de nouveau, et au bout de vingt minutes de magnétisation environ, la douleur de l’é-pigastre diminua en partie ; je portai toute l’action du magnétisme sur ce point, et il recommença à se plaindre des jambes et surtout des mollets. Vers neuf heures du soir, même jour , il parut y avoir chez mon malade une amélioration sensible. Je continuai la magnétisation pendant une heure et demie, dans le ferme espoir qu’il passerait mieux la nuit : ma prévision s’accomplit.

Le 17, à cinq heures du malin, je me rendis auprès de lui. M. C*** avait passé assez bien la nuit; il n’y eut que deux selles bilieuses, point de vomissements. Cependant les douleurs à l’épigastre et aux jambes avaient reparu depuis quelques minutes seulement, ajoutez à cela un tiraillement dans tout l’abdomen dont il souffrait cruellement. « J’ai quelque chose dans le ventre, qui me tord les entrailles, » disait-il. J’ai hâte de revenir au moyen qui m’avait si bien réussi pour calmer scs souffrances. Pendant une heure au moins, j’exerce sur lui l’action magnétique ; le sommeil survient; mais il n’est point magnétisé. Je le laisse dans un état de torpeur remarquable qui dura cinq heures; point de plainte de la part du malade. Pendant ce laps de temps la sécrétion de l’urine se rétablit, elle est légèrement rougeâtre. Je continue la magnétisation,

11.%

et laisse mon malade dans le même état de torpeur cpie le malin; deux heures après une réaction salutaire s’opère, une transpiration assez abondante; survient : il mouille quatre chemises dans neuf heures de temps. La nuit du 17 au 18 se passe bien, le mieux est sensible. Le 18, à sept heures du matin, j’arrive auprès démon malade; il a uriné deux fois; une légère moiteur couvre tout son corps; il demande lui-même un bouillon gras , je l’accorde (son pouls était presque naturel) en recommandant de lui faire prendre le bouillon par cuillerée, et froid; il passe bien. A deux heures après-midi, un second bouillon est ordonné : même effet avantageux. Ce jour là, 18, il avait été magnétisé trois fois comme les jours précédents. Le 19 mai, M. C*** entre en convalescence, il désire néanmoins être magnétisé; « cet état de sommeil me fait tant de bien! » me disait-il. J’adhère à ses vœux, il demande du riz au lait, qu’on lui prépare sur-le-champ, et son estomac le digère facilement. A partir du 20 mai, je l’ai magnétisé journellement; la convalescence s’est maintenue, mais la guérison a été fort longue. Au bout d’un mois, les forces du malade n’étaient pas entièrement rétablies. Maintenant il est, selon ses propres expressions, revenu sur l’eau; il s’est sauvé avec beaucoup de peine,... mais enfin... il est guéri.

J’ai fait plusieurs expériences sur les cholériques, mon intention est de les rendre publiques. Aussi, dans un prochain numéro de votre Journal, je vous décrirai un autre cas de choléra dont la guérison est due entièrement au somnambulisme; j’y décrirai également la prétendue cause de ce fléau, telle

qu’elle m’a été communiquée par une somnambule dont la lucidité est incontestable.

Comme vous, monsieur, je veux sacrifier tous mes moments au soulagement de l’humanité ; comme vous je veux m’efforccr de rendre, plus facile et plus utile le traitement de presque toutes les maladies internes; car je sais par une expérience de dix-sept ans combien la science de la médecine est conjecturale; aussi, en terminant, ferai-je un appel généreux à tous les hommes de l’arl, mes collaborateurs : qu’ils s’occupent donc avec impartialité de cette médication thérapeutique; je suis sûr que leurs ell'orts seront couronnés de succès, el que, foulant aux pieds l’amour-propre et cette science qui enfle, ils diront avec vous et avec moi :

La vérité, n’importe par quelle bouche; le bien, n’importe par quelles mains.

Vous m’obligerez, Monsieur, d’accueillir ma lettre avec bienveillance, et de l’insérer le plus tôt possible dans votre estimable Journal.

A ma sincère reconnaissance, je vous prie d’ajouter les sentiments d’eslime et de considération avec lesquels j’ai l’honneur d’être,

Monsieur,

Votre très-humble et dévoué serviteur,

SAVOYT, médecin,

H, rue de PÉcoIe-de-Médecinc.

M. Boméa, de Valence (Drôme), nous écrit :

.........Pour le moment, vu l’urgence, je

me bornerai à vous transmettre quelques notes relatives au choléra, qui m’ont élé remises par une somnambule, qui dans plus d’une occasion m’a donné des preuves d’une assez grande lucidité. Un des moyens qu’elle indique pour combattre ce terrible fléau, m’a paru neuf, et mériter peut-être quelque attention. Vous en jugerez; le voici :

« Prendre une bande de flanelle, la tremper dans « un mélange d’essence de térébenthine et d’am-« moniaque liquide, l’appliquer sur le trajet de la « moelle épinière, et promener ensuite sur celte « bande un fer à repasser, chaud, ce qui devra « déterminer une rubéfaction plus ou moins vive « de la peau.

a Pour les personnes sanguines, des applications « de glace sur la tète, prolongées six à huit heures « de suite; des boissons rafraîchissantes prises à la « température de la chambre du malade; prendre « aussi des boissons à la glace au lieu de sucre.

« Lorsque le malade a la diarrhée, lui donner « du charbon végétal en poudre très-fine, à la dose « d’un demi-gros (deux grammes) par heure. »

« Je ne me dissimule pas tout ce que ce traitement laisse à désirer; mais j’ai cru devoir vous l’envoyer , tout incomplet qu’il est, vous laissant, comme j’ai eu l’honneur de vous le dire plus haut, fibre d’en faire ce que vous voudrez. »

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

e.niirércnccM magnétiques «lomlulcnlcn.

Magie magnétique.

(Suite.)

Je n’ai point pour auxiliaire ce qui paraissait indispensable dans l’antiquité : le silence des souterrains et de l’antre de Trophonius, l’épaisseur des forêts, la nuit qui seule remplit de terreur la plupart des humains, le bruit du vent et de la tempête, les éclats de la foudre; point de lampe sépulcrale, rien enfin de ce qui émeut et place moralement dans une situation où tous les sens ont un surcroit d’activité ou de sensibilité, où tous les soupiraux de l’âme sont ouverts.

Ce n’est point dans un vieux manoir rempli de sombres souvenirs, près d’un cimetière où les morts apparaissent, que je me place pour agir. Je n’ai point de grimoire ni d’objets consacrés : la verveine, le buis bénit, aucune baguette magique. Je ne fais aucune invocalion, aucune prière. J’ignore même si toutes ces choses ont les vertus qu’on leur attribue.

(’.e n’est point dans une chambre étoilée, présentant ça el là des débris humains, que sc font mes opérations; pas la plus petite main de gloire, ni de corde de pendu ou de graisse de supplicié ; aucunes drogues, aucuns parfums. Je crois que ceux qui se servent de ces derniers moyens savent les mots sans savoir les choses, et ne peuvent réussir qu’à agir sur les imaginations faibles ou malades.

Je n’ai point d’esprits familiers qui, recevant mes ordres, exécutent mes volontés : un magnétiseur m’accorde gratuitement ce privilège. Je n’ai jamais de ma vie soutenu une pareille chose, mais si elle était fondée j’oserais certainement l’avouer. J’éprouve sans doute un certain ébranlement dans tout mon être, je puis dire que je sens en moi quelque chose d’inaccoutumé. Lorsque les expériences doivent avoir un résultat, je participe en quelque sorte à ce qui se passe ; mon organisation me paraît quelque peu enchaînée, je puis croire être une pièce essentielle, indispensable même, un élément enfin nécessaire pour que les faits de magie magnétique aient lieu : voilà tout. Le reste tient assurément aux préparations préalables. Je fais taire en moi toute idée qui ne se rapporte point à mon sujet même, et je n’envisage que le terme, qui toujours demande une grande prudence et une grande attention.

Je me réduits volontairement au rôle d’instrument , je cherche seulement à ce qu’il approche d’une sorte de perfection. Ayant entrevu ce qu’une machine humaine peut produire en la plaçant dans certaines conditions, je cherche à les remplir. Je

sais très-peu, mais si j’avais ¿té bien renseigné à mon point de départ, j’eusse été le premier de tous les magnétiseurs. Pardonnez-moi cette appréciation flatteuse de moi-même , lecteurs ; je vous initie à un art nouveau, j’ai besoin de me dévoiler à vos yeux pour me faire mieux comprendre. Vous verrez bientôt qu’aucun de ces détails ne sera inutile. Je suis sorcier, magicien, cela résulte évidemment de mes œuvres. J’ai donc encore un secret? Sans doute ; mais, quel est-il? Ceci est une demande indiscrète à laquelle je ne suis pas tenu de répondre tout d’abord. D’ailleurs je vous tromperais si je vous disais : c’est ceci, ou cela; car moi-même je ne saurais donner un nom à ce qui n’en a pas ; mais je chercherai, par des figures, des paraboles ou des similitudes, à vous faire comprendre un grand mystère.

La vérité fut connue de bien des hommes, ils trouvèrent sur leur route ce qui n’existe plus, mais ce que l’on cherche à rétablir : les préjugés religieux armés de la loi et du glaive. Ils trouvèrent dans chaque homme d’église un censeur inexorable, ne laissant jamais à la pensée humaine son libre essor, prenant soin de penser pour tous sur les facultés de l’âme, et exigeant qu’on n’allât point au-delà. C’est ainsi que tant de livres précieux furent brûlés par la main du bourreau, c’est ainsi que tant d’hommes périrent d’une mort funeste pour avoir voulu faire cesser l’ignorance, en montrant à tous l’origine el la source des faits miraculeux ; mais ces tourmen-tcurs de la pensée sont bien punis maintenant : les chaînes sont rompues; ne voulant pas marcher, le monde les a devancés, et c’est ainsi que nous pou-

vous prévoir et annoncer les plus grands changements dans l’humanité. Dieu me garde pourtant de formuler ces changements , on me prendrait pour un socialiste tout rouge. Et cependant, lecteurs, rappelez-vous ce qu’ont fait l’imprimerie, la poudre à canon , la vapeur, l’électricité déjà. Ah ! je vous le dis, le monde n’est jamais modifié par des discours, mais seulement par des découvertes, cl le magnétisme est la plus grande de toutes.

Je reviens aux expériences faisant suite à celles déjà publiées.

La salle où se font les expériences, quoique grande, peut à peine contenir les curieux. La partie réservée pour mes opérations est de deux ou trois mètres carrés. Le signe magique, dont je varie à mon gré les dimensions, offre une surface diamétrale d’environ douze centimètres. Couvert d’un corps opaque , avant les expériences , son action ne se remarque point; mais aussitôt qu’il est découvert, les yeux des spectateurs se dirigent sur lui. Chacun se demande d’où lui vient sa vertu, et plusieurs doutent même qu’il en ait aucune. Attendez, incrédules; tout à l’heure vous serez saisis d’étonne-ment, peut être vous-mêmes offrirez la curieuse preuve que la force magique est indépendante de la croyance.

Dès que la surface magique est découverte, je m’éloigne, en me tenant seulement attentif. Il est bientôt facile de reconnaître quels sont ceux des spectateurs que le charme atteindra. Leurs traits s’altèrent ; il y a dans leur regard quelque chose d’inquiet ; leur corps est tourmenté ; ils cessent bientôt d’être distraits, et semblent ne considérer

qu’une chose, le signe magique. Leurs yeux deviennent ardents, expressifs; 011 peut aussi remarquer une légère flexion de la tête et du tronc, ainsi que de faibles tremblements. Au bout de quelques minutes, trois ou quatre en moyenne, ils sc penchent fortement en avant; une sorte d’aimant les attire : ils se lèvent enfin, et tournent autour du signe, tantôt s’arrêtent auprès de lui, et s’inclinent presque jusqu’à terre. Quelquefois même, par un mouvement brusque et rapide, ils se jettent sur le parquet, et enlacent de leurs deux bras la circonférence du signe.

On ne peut douter qu’ils voient; la certitude en est acquise par leur pantomime expressive. Une sorte de monologue intérieur a lieu. Muets d’abord, ils ne tardent point à jeter au vent quelques syllabes qui sont le résultat d’impressions et de visions. Dans une des épreuves , nous entendions ces

mots : Le lâche!.... On te trompe;.... non signée.....

— Qu’est-ce, lui dis-je, que voulez-vous dire? — C’est— un tel, journaliste; il est à son bureau; il reçoit une lettre anonyme : c'est une dénonciation calomnieusey etc., etc.....

Un autre voyant aperçoit un monsieur et une jeune dame faisant de la musique. Le chant a cessé; il s’impatiente, et nous l’entendons avec surprise entonner avec une voix superbe un morceau de musique inconnu de tous : celui-là même qu’il croyait avoir entendu. Puis, s'arrêtant, il écoute de nouveau; mais le chant ne continuant pas, il s’écrie avec emportement : Chantez donc! chantez donc! Et comme les personnages vus s’obstinaient à ne plus chanter, il recommence le morceau , et

nous plonge dans une sorte de ravissement; car sa voix, d’une grande étendue et d’une justesse parfaite, avait quelque chose de surhumain.

Un autre encore voit une jeune femme; il l’examine en silence, d’abord; puis s’impatiente : Je ne vois point son pied, dit-il. Il tourne, se penche, et paraît contrarié; mais le pied de la charmante femme apparue ne peut être aperçu , au grand déplaisir du voyant, qui témoigne de son dépit en frappant du pied le sol.

Ces sortes de visions étonnent, émeuvent le spectateur; il peut saisir les mouvements de l’âme du voyant, et surprendre une petite partie de l’effet produit par les apparitions diverses qui viennent se présenter à lui.

Y aurait-il en nous une puissance créatrice à laquelle serait due la formalion de ces images, qui, dans ce cas, seraient vues en nous-mêmes, à leur source, et non point extérieurement, comme se l’imaginent les voyants, trompés comme nous par leurs songes? Mais les rêves eux-mêmes; est-on bien certain qu’ils soient tous dus à des causes ayant leurs racines dans ce qui constitue notre être ; dans notre sang, nos nerfs ou nos humeurs? L’extérieur, les forces qui nous environnent de toutes parts , le milieu enfin dans lequel nous vivons, ont-ils action sur nous? Et, ce qui constitue ces divers agents peut-il enfanter, créer, arranger ce monde singulier dont nous avons la perception dans noire sommeil? Ou bien y aurail-il quelque chose de supérieur à notre intelligence , à notre puissance : un monde d’esprits sans corps, pouvant pénétrer la matière; se laissant apercevoir par intervalles seu-

lement, dans les moments où l'âme émue projetant sa lumière au dehors de notre enveloppe, entrerait en communication avec les invisibles?

Les essences spirituelles, s'il en existe, auraient-elles donc des affinités avec cc qu’il y a de plus pur en nous? Et, de ces communications, de ces rapports, naîtrait-il quelque chose de mixte, ayant aussi quelque puissance, existant dès lors dans l’espace, et y jouant un rôle? On sent bien que je ne veux point chercher à résoudre ces questions. Un enfant ne peut marcher comme un géant : mon cerveau est beaucoup trop petit pour qu’il en sorte de grandes choses. Mais si faible que je sois , relativement à nos grands savants, il m’est permis pourtant de jeter un regard sur ce qui m’est propre, et d’avoir un sentiment des choses.

Je vois des phénomènes inconcevables ; ils se produisent par l’émission d’une force ou agent venant de ma propre organisation. Ne sort-il point de la même source la faculté de créer des êtres ayant vie et puissance? La vie donne la vie, qu’importe l’organe employé : la nature n’a-t-elle qu’une voie, qu’un moyen? Qui donc oserait limiter ses œuvres?

Je touche à la partie secrète de la magie; il faut que le lecteur qui veut avancer dans cette science devine ce que je ne puis encore dire. 11 faut qu’jl s’assure que beaucoup de choses sont possibles quoique rejetées par notre raison. Est-ce que le principe qui nous anime n’a pas été sans corps? Est-ce que sa forme, quoique invisible', n’était pas très-réelle? Est-ce que le chêne n'est pas dans le gland, quoique nos yeux ne l’y voient point ? Juger

tout par los yeux, c'est s’exposer à commettre les plus grandes erreurs! ... Quoi! il faut donc pour juger l’effet d’une substance ingérée dans nos organes, qu’elle ait rendu perceptible son action par une série de phénomènes physiques! Iist-ce que nous ne sommes pas modifiés à chaque instant par des agents que nous n’apercevons point? O triste science que celle qui borne tout à la portée de nos sens! Chaque pulsation nous modifie, chaque émotion porte le trouble dans notre être. Se sent-on grandir ou décroître? Ce qui nous échappe est justement ce qui nous constitue : la vie est répandue dans toute la nature , nous n’en voyons que les plus grossiers effets.

Sait-on bien la cause de ces terreurs paniques dont l’histoire est remplie? Comment se fait-il que des milliers d’hommes soient saisis au même instant de la même crainte, du même effroi? Avez-vous découvert l’agent de ces terreurs soudaines? J’ai vu des animaux sortir tout à coup de leur tranquillité habituelle; sans que rien d’apparent et de nouveau pût les exciter. Je les ai vus hérisser leurs poils, fuir, se cacher, chercher un refuge jusque dans les jambes de leurs maîtres ; et flairer, éventer, non près des portes, mais dans l’air, comme si ce milieu renfermait ou venait de donner passage à leur ennemi.

Chez tous les peuples, dans tous les coins de la terre habitée, on trouve établie cette croyance : Les ombres des morts apparaissent parfois aux vivants. Il y a des esprits; de bons et de mauvais génies, des messagers célestes, des anges de lumière, des démons. Les morts errent longtemps sur la terre.

ils peuvent si; rendre visibles aux vivants. Ils baillent certains lieux, et ont action sur nous. On peut les conjurer, apaiser leur courroux, les éloigner, les

rendre secourables, etc..... Comment, par quel

mystère inconcevable les mêmes idées ont-elles pu prendre racine dans le monde entier, et survivre aux combats livrés par la raison ? L’Écriture a confirmé ces croyances, elle leur a donné une sanction telle, qu’à moins de rejeter complètement les livres saints, vous ne pouvez refuser votre croyance a ia réalité de ce qui fait le fond du sujet que nous traitons. Effacez de vos archives, de vos monuments les plus vieux toutes traces de croyances; et, si la pierre ne parle plus à vos sens, vous retrouverez en vous-mêmes l’écho mystérieux d’un monde inconnu , celui qui plane sur vous, et dont l’action quoiqu’invisible n’en est pas moins réelle.

Que l’on ail dénaturé la vérité en la revétissant de tous les préjugés; que l’imagination des hommes s’en soit emparée pour la traduire selon le caprice de chacun, etc., en est elle moins vérité pour celai* Une monnaie altérée, remise au creuset, peut être séparée de son alliage impur. Sans doute on a souvent trompé les hommes en leur imposant des croyances sacrilèges; mais la nature n’est point complice de ces méfaits : constante dans ses lois, elle défie toute atteinte. Ce qui était son œuvre hier, l’est aujourd’hui et lésera demain. C’est aux hommes à lever son voile et à l’imiter dans ses opérations. Ne se sont-ils pas emparés de la foudre, et n’onl-ils pas appris à la diriger? L’air, le feu, tout leur est soumis dans le monde matériel. Mais que sont loules ces combinaisons, auprès de ce qu’ils

peuvent dans l’ordre spirituel? Est-ce parce que les savants ont dit : Vous n’y pouvez rien, que rien ne serait possible? Le magnétisme est plus que suffisant pour prouver leur erreur, car si d’un côté il touche au domaine physique, son dernier anneau est dans l’infini en rapport avec de pures essences.

Je n’ai point l’amour du merveilleux ; je trouve même que le magnétisme en contient trop ; mais si des faits inouis se sont monlrés, dois-je les rejeter , ou n’en tenir aucun compte? Le doute serait une injure au bon sens. Esprits forts, rejetez d’abord la foi de vos pères ; reniez Dieu , devenez athées, faites-vous idiots, et cela est possible, car on peut faire pour les facultés de l'esprit ce qu’on fait pour les sens , les alteiudre , les modifier , les détruire; mais vous n’aurez rien fait encore; car, si faible qu’elle soit, il restera toujours en vous une lumière, un feu que vous ne vous êtes point donnés. Et, ceci est immortel, a des affinités secrètes et cachées, et vous quittera un jour.

Expérimentation.

De curieuses expériences étaient commencées ; déjà des résultats frappaient d’étonnement les spectateurs, dont plusieurs offraient l’indice de l’action exercée sur eux par le miroir. Quelques visions déjà avaient eu lieu. Une dame, forte d’organisation autant que par le caractère, avait jusque là manifesté son incrédulité; souriant à chaque fait nouveau, elle se présentait à mon esprit comme elle avait dit être : incrédule. Placée près d’une fenêtre, on la vit tout à coup s’agiter sur son siège, puis pousser

devant clic les personnes qui faisaient obstacle à son passage. Son beau-frère, qui l’avait amenée, ne comprenant pas d’abord son intention , sc leva pour la retenir : il reçut deux sou(Ilets appliqués avec une adresse et une dextérité de mouvement impossibles dans un état ordinaire. Puis, s’élançant à travers tous les obstacles, elle arrive au signe magique en maltraitant trois personnes qui y plongeaient leurs regards, et, dardant ses yeux de feu, elle vil, mais ne dil point ce qui lui était apparu.

Ce n’est qu’avec une grande difficulté que nous parvînmes à l’éloigner. Elle conserva, dans une pièce voisine, une grande envie de revenir au salon ; elle y parvint même une fois, niais son désordre nerveux ne nous permit point de la soumettre à une complète épreuve.

Dans ce cas c’est l’incrédulité saisie; c’est la force et la raison vaincues par une puissance que l’on ne voit point, el qui est contestable jusqu’à ce qu’on l’ait sentie. Ma pensée était étrangère aux phénomènes développés. Jusque là cette dame n’avait point occupé mon attention, et je ne lui eusse pas soupçonné une aussi grande sensibilité. Ce n’est pas la première fois que nous voyons semblable chose; l’imprévu arrive à chaque instant; il résulte d’une force occulte agissant d’elle-même, et c’est pourquoi nous disons aux magnétiseurs : Soyez attentifs; vous ne connaissez point l’agent dont vous vous servez; il paraît avoir des affinités avec d’autres agents plus sublils que lui même, et doués de plus de vertus.

Par une étude suivie, nous allons découvrir la source et l’origine de la magie. Laissez les sots avec

leur ignorance; vous n'avez point à éclairer leur esprit; car il faut d’abord qu’ils soient parvenus à épurer leurs sens. Ne vous occupez point des savants, ils reculeraient devant nos démonstrations. Un savant est pour moi une sorte de mulet qui habitué à suivre sa route, ne consent jamais à s’en écarter : le monde est dans ce qu’il connaît , et quelle que soit son erreur il y persistera.

DU POTET.

(Lu suite prochainement.)

Athénée Iroycn de UeMiiéroIoffle.

Je soussigné Girlat , cordonnier, certifie que mon fils, Augusle-Artbur Giblat, âgé de cinq ans, natif de Paris, a éprouvé l’état de maladie suivanl:

Le ier août 1847, un mal de tête effrayant se déclara, je conduisis l’enfant au Parvis Noire-Dame.

Consultation du médecin. — « Ce mal n’est rien. »

Le lendemain le corps se couvrit de rougeur; le troisième jour une toux cruelle se déclara. J’appelai M. Moclain , médecin, qui jugea mon fils atteint du croup, et perdu. Néanmoins il ordonna un grain d’émélique , qui ne produisit aucun effet ; on lui en donna jusqu’à sept grains, et pour 2 fr. de sirop d’ipécacuanha, pour le faire vomir; des sinapismes aux cuisses, aux mollets et aux pieds. Après la disparition du croup, la toux continuant, M. Moclain fit poser trois vésicatoires : un su

chaque bras, et le troisième sur le dos; sur l’estomac un emplâtre de poix de Bourgogne, et ordonna de le faire vomir de nouveau.

Résultat. —La toux augmenta; les plaies formées par les vésicatoires ne rendaient que du sang : mon enfant souffrait comme un malheureux.

Dix mois après il prenait pour toute nourriture de l’eau gommée, de la tisane des quatre fruits.

Mes ressources s’épuisant, je retournai consulter au Parvis, et je fis connaître le traitement prescrit par M. Moclain.

Réponse des médecins consultants. — « M. Moclain a employé toutes les ressources de l’art médical : vous ne pouvez pas espérer sauver votre enfant, m

Ordonnance. — « Donner au malade tout ce qu’il demandera. »

Le cœur nâvré, je ramenai mon pauvre enfant chez moi, et je continuai l’eau gommée et la tisane des quatre fruits : il était mourant. Je le conduisis à l’hôpital Neckcr.

Résultat de la consultation. — « Cet enfant est poitrinaire; il n’y a aucun espoir de guérison. On ne peut le sauver. »

Ordonnance. — Tisane de fleurs pectorales.

Enfin j’eus recours au traitement Raspail. Je fis usage de la pommade camphrée sur l’estomac, de l’eau sédative sur le front, cigarettes camphrées pour l’oppression. Au bout de quinze jours de ce traitement, mon enfant se trouva mieux.

Après les journées de juin 1848 » me trouvant

sans ouvrage et sans ressources, jt: quittai Paris pour me rendre à I royes, dans ma famille. Là, je m’adressai aux sœurs Saint-Vincent, réclamant leurs soins pour mon fils. 11 avait alors, à la cuisse droite, une tumeur grosse comme une noix. La sœur Saint-Vincenl me consola; mais , craignant que cette tumeur, venant à suppuration, n’emmenâtle malade, elle me donna de l’onguent pour la faire dissoudre, des pilules, et du sirop. Le 20 novembre le malade était dans l’état suivant :

Plus de sommeil ; la tête penchée sur l’épaule gauche, par suite de la violence du mal ; le corps renversé en arrière par les douleurs de reins. La tumeur de la cuisse droite a pris un développement, effrayant : elle a cinq pouces de longueur sur quatre d’épaisseur. Mon fils ne peut plus marcher : ses yeux sont enfoncés dans leur orbite ; le teint est jaune verdâtre.

C’est alors que je me présentai à M. de Rovère, magnétiseur à Troyes. Je lui peignis la position pénible dans laquelle je me trouvais, et je le priai de donner ses soins à mon fils.

M. de Rovère fit revenir l’espoir en mon âme; il s’employa pour me trouver de l’ouvrage, et traita mon fils gratuitement, par le magnétisme.

Aujourd’hui, 8 février 18/19, grâce aux soins assidus de M. de Rovère, je vois renaître de jour en jour mon fils à la santé. Il 11e se plaint plus; la tumeur qu’il avait à la cuisse est percée en deux endroits : plus de trois litres de pus en sont sortis. 11 a retrouvé le sommeil, son teint est devenu vermeil ; il lient sa tétc droite sur ses épaules, il mange bien, marche assez bien pour sa position. Je crois

mon enfant sauvé, après avoir été condamné à Paris par six médecins.

CIBLAT.

P. S. Je dois faire connaître un nouveau bienfait de M. deRovèrc, dont l’inépuisable bonté s’attache ma famille.

Depuis vingt-cinq ans j’étais sourd de l'oreille droite; j’ai été, pour cette infirmité, traité inutilement par M. Beaufils, el, depuis sa mort, par M. Dacheron, tous deux médecins à Paris, et ces deux messieurs m’ont assuré que toute ma vie je serais sourd de cette oreille, attendu que le tympan (selon leur manière de voir), était à jour. En une seule séance, pendant laquelle M. de ïlovère a fait usage de l’élcctro-magnctisme, l’ouïe est revenue : j’entends de l’oreille droite, la gauche étant entièrement bouchée.

G.....

Troyes, ce 8 février 1849.

Je soussigné, certifie que le fils du sieur Gibut, magnétisé par moi ii VAthénée Troyen, est aujourd’hui, grâce il l'agent universel révélé par Mesmer, hors de tout danger. Cet enfant Ù qui l'on pouvait complètement appliquer le diclum :

Alicrum pedem in cvmbù Caronlis habere,

a tellement recouvré ses forces et l'usage de ses membres, qu'il fait les commissions de sa mère et do son père, au grand étonnement do ceux chez qui on l’envoie, et qui s'attendaient à te voir passer d'un jour à l’autre.

Les visiteurs de mon établissement, témoins de cette belle cure, ont désiré joindre leurs noms au mien, atin de rendre hommage à la vérité.

J. ROVÈRE.

Troyes, Séance du 18 février 1849.

ATTESTATIONS.

Camusa! îles Carets alleslc avoir vu l'enfant ilonl il est question, dans son iMal de maladie, et l’avoir revu depuis en étal de guérison.

CAMUSAT DES CAHETS (I).

Je certifie que j'ai vu l'enfant dans un élat tout à fait déplorable, et que, par les soins de SI. de Rovère, il est aujourd'hui sauvé.

E. CHEVALLIER.

J.-B. GIRAl'D, ft Troves, rue de l’ÊpiCCrio, 33.

Estiieh DALLAS, rue de la Monnaie, 43.

Juliette GIRAULT, rue du Temple, 41.

J'atteste que j'ai vu mon neveu à l'article de la mort, et qu'aujourd’hui il est sauvé.

LORI.NET BAÜDAIN, rue du Sauvage, 7.

Femme GIBLAT, mòre de l’enfant.

TANQUERY, à Troyes.

Veuve GIRAULT, ft Troyes.

BOULAT, ft Troyes, rue des Cailletes, 30.

Madeleine BAÜDAIN, tante do l'enfant. A Troves, rueMocisc, 13.

J’atteste que j'ai vu l'enfant dont il est question ci-dessus, dans son élat de maladie, et que je l'ai revu depuis en état de guérison.

V1AUT.

Collis MATHE, oncle do l'enfant. A Troves, rue Saint-Paul, 9. FOURNIER, ft Troyes.

MORAND, propriétaire, ft Troves, rue de la Grande Tannerie, 88. ROY, ft Troyes, rue de 1a Grande Tannerie, 88.

ORBELOT, ft Troyes.

REVERET DUPONT, à Troycs.

CH AMPION, ft Troycs.

Femme RENVOYÉ, ft Troycs.

MARTELET, ft Troycs.

Collin BAÜDAIN, grand-père de l’enfant, ft Troycs.

Femme MARESSE, à Troycs, rue de la Grande Tannerie, 86.

(1) Président du Tribunal civil.

J'atteste avoir connu le lits Giblal avant le commencement du traitement par le mesmérisme, el qu'il se trouvait dans une position vraiment désespérante; aujourd'hui 19 février 1S19 , quatre mois après, sa position est tellement différente, que si je n'avais pas suivi les phases de son traitement, je serais il me demander si c’est hien le même enfant.

P. MELAY, rue de la Tannerie, 8i.

Lucie DROIN, f\Troyes, ruo de la GrandoTannerie, 53.

Veuve PETIT, à Troyes.

Adèle PETIT, à Troyes.

F. FE8SARD-LEJEUNE, it Troyes, rue de la Monnaie, 17.

Veuve LÉCORCHÉ, à Troyes.

RIHNARD, îi Troyes, rue Notre-Dame, 107.

Joséphine BEIJ.EV , ii Troyes.

A. COUVREtR, rue de la Tannerie, 81.

G. 1ICBL1N BOCRC1ER, il Troyos, rue do la Grande Tannerie, 26.

- - ¿e-sga-i —---

VARIÉTÉS.

Le magnétisme à l’institut. — Dès que le mesmérisme apparut, les savants de l’Europe cherchèrent à le réduire sous les lois, déjà connues, de l’électricité ou du magnétisme, et pour ça iis employèrent les instruments les plus sensibles que la science leur fournissait : l’électroscope à feuilles d’or, l’aiguille aimantée librement suspendue, le condensateur, la balance de Coulomb, etc., etc.; et comme ces moyens d’observation ne leur fournissaient guère d’indices appréciables de la présence de l’agent que Mesmer appelait Magnétisme animal, ils en conclurent que le prétendu agent n’était qu’un

rêve, et les effets qu’on en obtenait, qu’un produit de l'imagination. Probablement ces savants auraient répondu de la même façon à quiconque se fût hasardé à leur soutenir qu’un barreau aimanté pouvait affecter la lumière, et pourtant il n’y a aujourd’hui personne qui ne puisse reconnaître, palles instruments admirables que nous possédons , la vérité du phénomène signalé par Faraday.

De cette manière là, argumentant à priori de ce qu’on connaît à ce qu’on ne sait pas, les corps savants ont toujours trahi leur mission , non pas par méchanceté, mais à cause d’un certain attachement aux anciennes traditions, qui ne leur permet d’accepter une découverte nouvelle que lorsque l’évidence en est si frappante qu’il n’y ait pas moyen de s’y soustraire, ni d’en refuser croyance. Que si, par hasard, le fait nouveau venait se rattacher , même seulement en apparence, à une classe de phénomènes déjà reconnus, ces soutiens de l’antiquité, effrayés par le fantôme, mettraient en œuvre tous leurs efforts pour l’écarter de la place usurpée; comme si la nature les eût faits ses arbitres, et que chaque phénomène qui viendrait se développer, diit passer entre leurs mains, et subir le contrôle de leur savante analyse.

Mais heureusement que le magnétisme animal n’est ni l’électricité, ni le magnétisme de l’aimant ou celui des courants vollaïques. Mesmer l’avait dit, il y a déjà longtemps (i ), et c’est faute d’avoir connu

(1) Mémoire sur la découverte du Magnétisme animal, 1784. 20 Proposition : «.....Le principe du magnétisme animal diffère essentiellement de celui du minéral. »

ses principes que les Académies se sont levées contre les recherches tendant à établir le l'ait du développement de courants dans les actions musculaires, de peur que le magnétisme, caché sous ce travestissement, ne vînt un jour, en perçant son enveloppe , se montrer rayonnant aux yeux éblouis de ses ennemis déclarés. Non, messieurs, le magnétisme animal n’est aucune de vos forces plus ou moins connues, car celles-ci n’agissent que sur la matière, ou sur la substance qu’on désigne sons ce nom, tandis que le magnétisme animal pénètre plus avant dans l’organisation des corps que les différentes vibrations de l’éther , et atteint jusqu’à l’âme, c'est-à-dire la substance qui pense et raisonne; el, mieux encore, il peut émQuvoir celte âme sans produire des changements appréciables dans l’enveloppe qui la recèle.

C’est pour ça qu’il était inutile à messieurs de l’Institul de repousser avec tant de fierté l’annonce de la découverte de M. Du Bois-Reymond, découverte qui, d’ailleurs , intéresse beaucoup la physiologie et la physique, et qui n’a rien en elle-même de ce caractère mystique qu'on lui a supposé dès le premier jour de son apparition.

C’était le 3o avril 1849, M- Arago, l’illustre secrétaire de l’Académie, venait d’achever la lecture d’une pièce de la correspondance qui avait fait faire les grands yeux à M. Magendie, et dessiné un sourire ironique sur les lèvres de M. Becquerel. Il ne s’agissait rien moins que d’une déviation déterminée à distance sur l’aiguille asiatique, par la seule action de la volonté s’exerçant à la contraction des muscles des bras. Celui qui donnait communica-

lion do celte découverte était le Nestor des physiciens vivants, le naturaliste qui avait produit tant d'excellents ouvrages sur les sciences, cc M. de Huinboldt qui, au déclin de sa vie, nous envoyait dans son Cosmos un dernier rayon de cette lumière qui jadis étincelait dans son esprit créateur.

L’expérimentateur qui avait trouvé la chose était M. limile Du Bois-Reymond, qui depuis six à sept ans travaillait après une idée, et avait enfin réussi à démontrer ce que personne n’avait pu avant lui. M. Magendie fit observer qu’en admettant qu’il y eûl déviation de l’aiguille, ce n’était pas à la volonté qu’il fallait l’attribuer, mais bien au muscle qui se contractait. M. Duvernoy, prenant la parole sur le même sujet, raconta qu’il avait plusieurs fois observé et déterminé lui-même des mouvements tétaniques sur des individus magnétisés, en présentant à quelque distance d’un muscle un barreau aimanté, et que par cette raison il n’y avait rien d’exlraordinaire à ce que le muscle, en se contractant, déterminât à son tour la dérivation d’une aiguille librement suspendue. La déduction paraissait claire et évidente; mais M. Arago sourit de son sourire le plus malin , en répondant à son modeste confrère qu’il sortait de la question, et que ce n’était pas là un argument favorable au sujet de la note du physicien allemand. M. Duvernoy se tut, et son observation ne fut pas même reproduite dans le compte-rendu de cette séance.

Plus tard de nouveaux détails sur le même sujet parvinrent à l’Académie, et le mode d’expérimen-talion fut connu. Les deux fils d’un galvanomètre très-sensible , terminés par deux lames en platine,

plongeaient clans deux vases remplis d’eau salée. L’opérateur plaçait les deux doigts correspondants des deux mains dans les deux vases, et, après ça, il contractait fortement l’un des bras. Aussitôt le courant se montrait par la déviation de l’aiguille, et on pouvait le reconnaître dirigé du doigt à l’épaule du bras contracté ; c’est-à-dire que ce doigt se comportait comme la partie cuivre d’un arc zinc-cuivre qu’on aurait placé entre les deux vases à la place de l’opérateur (1).

A la séance du 28 mai, MM. Despretz et Becquerel vinrent lire chacun un mémoire sur ce sujet. Tous les deux avaient répété l’expérience de M. Du Bois-Reymond; mais tandis que M. Despretz ayant obtenu tantôt des résultats positifs , tantôt négatifs, laissait la question douteuse, et n’osait se prononcer ouvertement contre ce qu’avaient vu MM. de Ilum-boldt, Müllcr et Helmkottc; M. Becquerel tranchait le nœud en niant la possibilité d’un pareil résultat, et attribuait les déviations obtenues à des manques de précaution de la part des expérimentateurs ¿’Allemagne, précautions qui prises parlui n’avaient laissé subsister aucun doute sur l’exactitude de ses résultats.

L’affaire en était là lorsqu’une nouvelle lettre de M. de Humboldt (2) vint reprocher le peu d’égards qu’on avait eus pour sa vieille expérience, et donner un nouveau et brillant témoignage des faits avancés. M. Milscherlich, le fondateur de la doctrine de

(1) Comple-rendu des séances de l’Académie des Sciences, I. xxvni, N" ii, p. Cil.

(2) Comple-rendu des séances de PAcadémie des Sciences, l. xxix, N» 1, page 8.

ïIsomorphisme, habile physicien, et chimiste des plus distingués , avait vu et répété l’expérience de M. Du 15ois, et venait appuyer de; sa voix l’assertion des hommes éminents qui avaient déjà précédemment constaté le fait. L’Académie resta interdite h cette assertion, et personne ne se leva pour réclamer, si ce n’est M. Despretz, qui voulut bien témoigner hautement de tout son respect pour l’illustre de Humboldt, respect qui ne l’aurait point empêché de réfuter une erreur quand elle se serait présentée sous les auspices d’un si grand maître.

A part des communications insignifiantes données par M. Ducros, et un travail fort incomplet et rédigé d’après des vues théoriques par M. Mat-teucci, il n’y a pas d’autres pièces, jusqu’à présent, qui viennent confirmer ou démentir l’énoncé de M. Du Bois-Reymond. Nous attendrons les nouvelles communications pour en donner compte à nos lecteurs dans un autre article ; mais cependant il nous reste encore quelque chose de général à dire sur ce sujet, que nous ne voulons pas remettre à une autre fois, vu que l’on pourra mieux juger les faits d’après ces considérations, qu’on ne le ferait sans elles.

Et avant toute autre chose je commence par admettre la possibilité du développement des courants électriques dans les contractions des muscles ; seulement il me paraît difficile, comme le fait observer judicieusement M. Despretz, qu il puisse y avoir manifestation d’un courant à 1 extérieur, attendu que la recomposition des deux électricités devrait sc faire tout simplement à l’intérieur du muscle contracté. Néanmoins, en admettant qu’il

y ait un courant dû peut-être à la tension extraordinaire de l’électricité par suite de la contraction énergique des bras, j’insiste sur cette idée, que l'existence d’un tel courant n’enlralnerait aucunement son intervention à la production des phénomènes magnétiques, si ce n’esl pour ceux qui dépendent purement et simplement d’une aclion irritante localisée, comriie le froncement des sourcils, la tétanisation des membres, etc. , etc. Quant aux autres phénomènes, que l’on peut nommer psychiques ou moraux, et qui font, 011 peut le dire, toute la science du magnétisme animal (si nous en exceptons les actions thérapeutiques, uniquement 011 partiellement matérielles), je défie tous les élec-triseurs de l’univers de m’en produire de semblables par leurs appareils, qui ne peuvent encore atteindre que ces modes de vibration de la substance élhérée qu’on nomme calorique, lumière, électricité ou magnétisme, mais qui ne vont pas au-delà, et qui pour ça 11e peuvent émouvoir l’esprit, substance bien plus déliée et moins maniable que les autres substances de la nature qui jusqu’à présent nous soient connues.

11 ne faudrait pas croire pour ça que l’étude des phénomènes électro-physiologiques serait tout-à-fait inutile au magnétiseur, je crois, au contraire, que rien ne pourrait mieux l’aider que l’emploi rationnel de celte force organique, à l’obtention de certains résultats qui, bien que corporels, ne manqueraient pas d’avoir indirectement une action sur l’esprit, et favoriseraient par cela même la puissance morale qui serait chargée d’accomplir et de diriger les elFets ébauchés par le fait de l’action ma-

tériclle. Il n’y a aucune partie de la science de l’être, en général, et de l’homme en particulier, à laquelle le magnétiseur doive rester étranger. Qu’il songe à la haute mission dont il se charge en cherchant à répandre l’emploi de la puissance vitale; qu’il pense à la nécessité de mieux en connaître les lois et les influences, et il verra qu’une élude sérieuse des autres produits de l’organisme ne serait pas seulement utile, mais devrait être reconnue de tous comme tout-à-fait indispensable.

Gilbert GOVI.

Chronique. — L’Assemblée Législative qui vient d’être élue , contient une vingtaine de magnélistes; c’est proportionnellement plus que la Constituante. Nous remarquons , parmi les nouveaux membres , MM. Colas, de Bordeaux; Plichon, d’Arras ; Vau-tier , de Bourges ; etc. , etc.

— Le docteur Lcdure, qui s’occupait un peu du magnétisme, vient de mourir du choléra. Il a été traité par l’homéopathie , à laquelle il s’était spécialement adonné.

— Il y a à Saint-Louis un interne d’une grande sensibilité magnétique. Ses collègues qui l’ont d’abord magnétisé en riant, font maintenant de son état une élude sérieuse. C’est un événement dont on parle dans tout l’hôpital.

Revue des Journaux. — C’est dans son numéro du 21 mars, et non du il avril, que 1 c Journal des Théâtres rend compte des expériences mentionnées dans notre dernière revue.

— Le Politique du 11 mai contient un exposé succinct de la cause du choléra, et de son traitement selon la lucide de M. Cahagnel.

— i.'Estafette du 26 mai parle du commencement do résultat obtenu par la magnétisation d’Anne Chaigneau , la cataleptique nantaise.

-—Voici en quels termes M. l’abbé Moigno apprécie, dans la Presse du 4 juin, les rapports que le mesmérisme peut avoir avec la découverte de M. Du Bois-Reymond :

« Mais de là surtout au magnétisme animal, à ces influences mystérieuses et extra-lunaires qui endorment, qui font découvrir les secrets les plus cachés, transportent dans les lieux les plus inaccessibles, révèlent les causes des maladies les plus bizarres, font deviner les remèdes les plus ignorés en même temps que les plus efficaces; font parler des langues qu’on n’a jamais apprises, mettent à nu le secret des urnes électorales les plus profondes, montrent dans leurs repaires les hommes dangereux que la justice poursuit en vain, etc., etc. ; il y a l’intervalle de l’affirmation timide à la négation la plus infaillible, l’intervalle du possible à l'impossible, l’intervalle du probable à l’absurde, etc., etc.

«Ah! messieurs les magnétiseurs! pourquoi cherchez-vous à vous couvrir de l’ombre au moins de la science? N’est-ce pas parce que vous êtes effrayés vous-mêmes de votre nudité? Pourquoi vous plongeâtes-vous si empressés dans le baquet de Mesmer? Pourquoi vous êtes-vous tournés si rapides vers l’aiguille de M. Du Bois-lleymond , au risque de recevoir un cruel démenti, si ce n’est parce que vous êtes saisis, malgré vous, d’une défiance invincible? Vous avouez tous, certes, que l’action d’une volonté forte, d’une parole adroite, d’un regard fascinateur, d’une passion violente sur une

nature timide, ardente, morbide, rêveuse, curieuse, etc., etc. , suffisent au-delà pour expliquer des triomphes bien plus éclatants que ceux qui vous rendent si fiers dans le commerce intime de la vie, qui vous laissent si inquiets, si ombrageux, si tremblants dès qu’il faut apparaître au grand jour. Menlita est iniquitas sibi. »

Dans le même article, ce savant avoue qu’il a été contristé, irrité , de la découverte en question , parce que « une aiguille aimantée mue à distance par la volonté de l’homme , c’était donner gain de cause à ces nuées de charlatans qui, sous le nom usurpé de magnétiseurs, font aujourd’hui encore tant de dupes. »

Votre saint ministère, monsieur l’abbé, vous fait enseigner des choses que la raison repousse, et que vous adoptez sans doute. Vous devriez être plus circonspect à l’égard des faits magnétiques, qui ne sont point irrationnels Puisse cet avis vous éviter de flétrir davantage des hommes honorables, et jeter , sans motif, la défaveur sur des faits que vous ne connaissez pas.

PETITE CORRESPONDANCE.

Pari«« — AVIS GÉNÉRAL. — On pourra désormais s’abonner pour trois mois au Journal du Magnétisme ; mais les abonnés seuls seront admis aux Conférences dominicales. Celle mesure mettant la fréqueulation des Séances à la portée de lous, il ue sera plus accordé d’entrées exceptionnelles.

Le Gérant : IIKMitiT (de Garnay).

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

llôpital lucsincriqnc de Calcutta.

lOlIRNAL DES TRAITEMENTS FAITS DE JUIN A DfCEMURE 1817 ; Suivi (!o rapports ofüciels, etc., publié par le gouvernement.

Voici le résultat de la pratique du Dr Esdaile, durant le second semestre de l’année pour laquelle son hôpital a été créé.

Nous avons traduit presque en entier la première partie de cet important document; nous n'allons faire que le résumé de celle-ci, parce que, les faits étant identiques, il suffit à la majorité de nos lecteurs d’en connaître la substance. Ceux qui voudraient approfondir le sujet pourront toujours recourir à l’original, que nous mettrions bien volontiers à leur disposition.

Au lieu de suivre l’ordre chronologique dans lequel ces expériences sont relatées, nous allons, comme précédemment, exposer d’abord les cas de chirurgie, puis ceux de médecine.

§ 1. — CAS DE CH1HUHGIX.

Première Observation.

Muneeroodeen, âgé de trente ans, est affecté, depuis dix ans, d’une tumeur scrotale , et à’éléphan-tome vin. —RI" 96.-25 juin 1840. 12

tiasis à la jambe droite. Sa maladie a commencé par une lièvre décadiennc.

11 doit être magnétisé une heure et demie par jour. Dès la troisième mesmérisation, il supporta les épreuves ordinaires d'insensibilité. 11 fut impassible comme un caclavrc à l’action la plus énergique de l’électro-magnélisme, qui déterminait dans tout son être de violents mouvements convulsifs.

L’opéralitm eut lieu sans apparence de sentiment ; mais les traits s’altérèrent à la ligature des vaisseaux. —Point de souvenir au réveil, qui fut difficile.

Deuxième Observation.

Gobind Chunder, Agé de trente-deux ans, porte, depuis huit ans, une tumeur scrolale, suite d’une fièvre sCmi-mensuelle, qui durait deux jours.

Magnétisé une heure et demie par jour, du •>.§ mai au 4 juin, il fut opéré sans le moindre signe de sensibilité. Inutile de dire qu’il ignorait, comme les autres, que l’opération fût faite.

Son insensibilité à l’électricité était telle, qu’il supporta l’action de la machine pendant trois minutes sans s’éveiller.

Troisième Observation.

Khêturmohun Sen, âgé de vingt-un ans, a une tumeur scrolale, et les jambes affectées d'éléphant iu-sis, affections précédées de fièvre périodique.

Magnétisé journellement une heure et demie, du i*r au 7 juin, il fut opéré après avoir donné les preuves ordinaires d’insensibilité.

La dissection fut excessivement pénible et longue, à cause de la grande épaisseur et de la dureté des parois de la tumeur, etc.; et, comme il arrive d’ordinaire dans l’éléphantiasis, le patient gémit et se tordit vers la fin de l'opération.

Comme toujours, oubli au réveil.

Quatrième Observation.

Mudhoo, âgé de trente-deux ans, porte une petite tumeur depuis trois ans.

Magnétisation quotidienne d’une heure et demie.

Du 8 au 10 juin, ce malade offrit les divers caractères de l’anesthésie ; mais un accès d'asthme força d’attendre cinq jours.

Le 18, il fut opéré en présence du Dr Palmer, venu exprès de Hooghly. Comme dans le cas précédent, le malade s’agita et se plaignit vers la fin de l’opération ; mais ne s’éveilla pourtant qu’un quart d’heure après , étant tout-â>fait inconscient de ce qui s’était passé.

Cinquième Obse/vaiion.

Kartick, âgé de trente an9, se présente avec une tumeur ordinaire, et les jambes affectées d’cléplian-tiasis.

Dès la seconde magnétisation, il était en état d’être opéré. Électrisé, piqué, pincé, etc., en vain, il s’éveilla spontanément au bout de trois heures.

L’opération eut lieu le lendemain ; le Dr Esdaile dit que c’est sa plus parfaite, a Le patient supporta le scalpel comme un cadavre. » Un léger mouve-

nient se manifesta seulement à la ligature des artères.

Ou le laissa dormir. Au bout d’une demi-heure, la plaie ayant été découverte pour voir s’il n’était pas survenu d’hémorrhagie, le malade se leva , ouvrit les yeux, porta la main à la plaie, qu’il semblait voir, et retomba incontinent dans le coma. Une heure après on l’éveilla. 11 n’avait souvenir de rien ; mais un sentiment de brûlure l’avertit bientôt de ce qui avait été fait.

Sixième Observation.

Shamchunder Dutt, âgé de quarante ans, sujet à fièvre périodique deux fois par mois, a depuis six ans un scirrus teslium. L’accès fébrile déterminait une vive inflammation de la partie susdite, qui s’ulcéra à la longue.

Quoique torturé par d’excessives douleurs, ce malade fut entrancé en moins d’une heure.

Le cas étant urgent, on procéda immédiatement à l’opération. Vers la fin, le patient se remua et gémit copime s’il était sous l’influence d’un rêve fatigant. On le remagnétisa un peu, et la ligature artérielle eut lieu sans apparence de sentiment. Quand il s’éveilla, trois quarts d'heure après, il se plaignit d’une cuisson au siège de son mal, et d’une certaine faiblesse. Du reste, ignorant qu’on l’eût opéré.

Septième Observation.

Moteewoolla, âgé de cinquante ans, est affligé d’une tumeur commune depuis huit ans. 11 souffre

aussi d’une bronchite chronique , qui pourrait être un obstacle à l'entrancement, s'il toussait fréquemment.

On le magnétisera une heure et demie par jour.

Du 7 au i a juillet il supporta toutes les épreuves ordinaires d’insensibilité.

L'opération fut pratiquée le 13, à l'heure habituelle (midi), et dura beaucoup. Vers la fin seulement il fit divers mouvements du pied et de la poitrine. A son réveil spontané, au bout d’une demi-heure, il se plaignit d’une cuisson, et se découvrit pour voir ce qui la causait s sa surprise fut extrême. 11 bénit le Dr lisdaile, et exprima l’espoir que Dieu lui donnât un palanquin d’or.

Huitième Observation.

Bideadhur, âgé de seize ans, a eu le pied gauche écrasé il y a deux mois. La contusion présente l’aspect gangréneux : il y a nécessité d’amputer le pied.

Magnétisation quotidienne d’une heure et demie.

La première mesmérisation produit l’effet désiré.

Ce garçon fut opéré le lendemain. Couché comme une büclie, il ne s’éveilja qu'une demi-heure après l'opération, et dit qu’il souffrait moins qu’avant d’être entrancé. C’est un bel exemple d'extinction d'une douleur aiguë par le magnétisme.

Neuvième Observation.

Shaik Ackber, âgé de trente ans, souffrait depuis trois ans d’une tumeur, consécutive d’une fièvre qui venait tous les huit jours. Le dernier accès

fut si violent, qu’il amena une inflammation aiguë de la tumeur, qui sc termina par un ulcère très-irritable.

Entré le 16 juillet, il fut magnétisé, comme tous les autres , une heure et demie par jour. L’opération eut lieu le 19 ; les muscles du cou et de la face se contractèrent vers la fin. Mais, au réveil, nulle connaissance de ce qui s’était fait.

Dixième Observation.

Ramgopal, âgé de cinquante ans, souffre, comme tant d’autres, d’une tumeur venue il y a deux ans , à la suite d’une fièvre périodique.

Magnétisé une heure et demie par jour, il fut, dès le troisième, insensible à l’électricité. Effrayé d’avoir vu opérer Shaik Ackber, cet homme voulait fuir. Le Dr Esdaile étant prévenu de son dessein, le fit mesmériser aussitôt, et l’opéra, après lui avoir fait supporter la décharge d’une batterie électrique. « Il ne bougea pas sous le scalpel. » Sa respiration devint seulement inégale vers la fin , et surtout quand on lia les artères. Il s’éveilla seul, au bout d’un quart d’heure environ. II répéta qu’il ne voudrait se laisser opérer à aucun prix. On lui avoua alors que c’était fini : « C’est bien heureux, dit-il, car je me serais sauvé ce soir. »

Onzième Observation.

Ramdial Chaterjia, âgé de quarante ans, possède une tumeur ordinaire, depuis cinq ans.

Entré le 21 juillet. Magnétisation ordinaire.

Le 24, la respiration seule le distingue d’un corps mort. On l’opère sans manifestation de sensibilité. Il

s’éveille au bout d’une heure et demie, ignorant tout, et ne souffrant nullement. C’est un fait admirable;,le résultat est complet!

Douzième Observation.

Akoy Doss, âgé de trehte-cinq ans, porte une petite tumeur depuis deiix ans.

« Avant d’opérer Ranidial j’examinai cet homme, tjue je n’avais pas encore vu. C’était le jour de son eHtréè à l’hôpital : 011 le magnétisait depuis une heure environ; je dis que je le croyais susceptible d’êtt-c opéré, mais qu’il y en avait un aiitre plus dVdhcé: Aÿàtat fltli atec Ramdiàl, les visiteurs, désireux de voir opérer à là prëmièrè ihesmrisatibn, me pt-ièrent d’ëssayer. Pensant que nous pouvions mainteriant noüs përmettre une expérience dou-tbiisë, j’y bonsëntîs. Le pàtieht fut bientôt agiié, et s’éveilla enfin coiaplétëment. Ce sera, j’ëspëre, là dernière fois qüe je sferàl séduit par une expérience douteusfc. »

Ce malade a souffert beàiicotip pendant plusieurs jours, tandis que Ranidial n’épronvait aucune douleur.

Treizième Obiervation.

Seetaram, âgé de cinquante ans, est doté d’une petite tumeur depuis vingt-deux ans.

Entré le ier août. Magnétisé selon la coutume. Soumis aux épreuves ordinaires sans s’éveiller, il fut opéré le 7, « avec toute la passivité d’un cadavre. » Un léger mouvement eut lieu dans les jambes au moment de la ligature des artères. Eveillé au

bout d’une heure, il n’avait connaissance de rien. Une cuisson faible se fit sentir peu après le réveil.

Quatorzième Observation.

Baboo Ramdhun Nundy, âgé de quarante-cinq ans, soufl'rait depuis quatorze ans d’une énorme tumeur. C’est un homme fort et musculeux ; il s’est souvent fait cautériser profondément cette tumeur par les médecins du pays, dans l’espoir de la faire disparaître, car elle le gêne beaucoup.

« Entré le 17 juillet, il dormit bientôt régulièrement durant la mesmérisation ; mais aucun symptôme spécifique n’ayant encore paru le 12 août, je perdis patience, et résolus d’essayer par l’éther. Mais , comme il arriva toutes les fois que j’eus recours à cet agent, le malade ne put l’inhaler à cause de l’irritation qu’il en éprouvait. »

Le lendemain il dormit plus longtemps qu’à l’ordinaire, et ne s’éveilla point à l’appel de son nom.

Le 15, il fut indifférent aux divers bruits et aux secousses électriques.

Le 16, il gémit durant tout son sommeil.

On fit le simulacre entier de l’opération, en piquant avec la pointe du scalpel les points où devait avoir lieu l’incision. Au réveil il ignorait tout.

Le 17.... « Comme son unique salut était dans la promptitude, je fis l’ablation des parties avec la célérité d’une décapitation. Je transperçai le col de la tumeur avec un long couteau à deux tranchants, que je fis sortir à droite et à gauche. A la section de la seconde moitié, le patient cria, mais ses yeux restèrent fermés, et aucun son articulé ne lui

échappa. Non maintenu comme les autres, il no mil pas le plus pelit obstacle à mes procédés. L’hé-morrhagic fut effrayante ; et, comme son pouls avait disparu, je le fis éveiller immédiatement après la ligature des artères, pour lui administrer un cordial. Il ouvrit les yeux, mais dit ne pas voir. Il but le vin que j’avais ordonné. Son pouls se ranima en variant beaucoup. A deux heures, lorsque je le quittai, il était encore à dcmi-conscient : l’hémor-rhagie ayant amené le délire. Je défendis qu’on lui parlât. Quand je revins, à quatre heures, avec M. Kemp, savant bengali, il délirait encore, et ses voisins nous dirent que les seuls mots intelligibles qu’il eût prononcés, étaient : Pourquoi me couper '( Pourquoi me faire dormir ? Cet état continua jus-qu’à cinq heures, alors on le changea de lit, et pendant qu’on lui liait quelques petits vaisseaux, sa raison revint complètement, sans souvenir de l'avoir perdue.

« Ce cas est presque identique à celui de Shaik Manick, relaté dans mon précédent rapport (i). Mais Shaick Manick est mort depuis plusieurs mois, et ce malade-ci n’aurait pu prendre son rôle. Tout ce qui s’est passé de midi à cinq heures lui fut inconnu. Il ne souffrit nullement de sa plaie, mais un peu du dos.

« Le lendemain il était incroyablement bien, ne paraissant pas même affaibli. 11 répéta qu’il n’avait aucun souvenir de nous avoir vus, son magnétiseur et moi, entre le moment de son sommeil et celui de son réveil. Il avait souvent déclaré qu’il ne consen-

ti) Voyez Journal du Magnétisme, (ome V, page 268.

lirait jamais à être opéré en état de veille , et maintenant il dit que Itrahma est au-dessus dr tout, cl moi après lui. »

Quinzième Observation.

Dabee Chose, âgé de vingt-cinq ans, a une petite tumeur depuis deux ans.

Magnétisation d’une heure et demie par jour.

11 est insensible à tout dès le second jour, et est opéré séance tenante. Légère agitation vers la fin de l’opération. On le magnétise pendant la ligature des vaisseaux : point de sentiment. Réveil spontané au bout de dix minutes, ignorance absolue de ce qui s’est passé.

Seizième Observation.

I’uranchunder Some, âgé de vingt-trois ans, porte depuis deux ans une petite tumeur, consécutive d’un hydrocèle qui vint lui-même à la suite d’une fièvre qui paraissait deux fois par mois, au changement de lune.

Du 7 au i5 août on le mesmérise une heure et demie par joqr.

Le 16, d’ailleurs parfaitement insensible à toutes les épreuves ordinaires, il s’éveilla au contact de l’eau sur la partie pileuse qu’on s’apprêtait à raser.

Le 17, l’investigation fut plus sévère. On le plaça dans la position requise pour l’opération, on lui pinça fortement les mamelons, et on le piqua avec le scalpel durant quelques minutes. Pour plus de sécurité, oq lui mit dans la main un charbon ardent,

il ne le sentit pas ; mais en le lui plaçant sur l’abdomen , il s’agita, sans s’éveiller pourtant.

L’opération eut lieu le lendemain; elle fut très-longue; mais l’insensibilité était si parfaite, que, vers la fin seulement le patient grimaça légèrement. 11 s’éveilla naturellement un quart d’heure après le pansement. Il déclara n’avoir rien senti pendant la trance ; mais il se plaignit bientôt d’une cuisson assez vive.

Dix-septiime Observation.

Selaram fut opéré le 7 août avec un plein succès; il alla très-bien quelque temps, mais la fièvre revint à son époque ordinaire avec une très-grande intensité. La plaie devint le siège d’une fluxion extraordinaire ; la gangrène s’y mit, et une nouvelle opération fut pratiquée.

On l’entrança en un quart d’heure. L’ablation des parties ulcérées et circonvoisines, se fit sans la moindre apparence de sensibilité. Après la ligature des artères, on cessa la magnétisation , et le patient s’éveilla comme d’un sommeil tranquille, ne sentant nulle douleur.

Il avait beaucoup souffert de douleurs articulaires pendant plusieurs jours, la magnétisation locale les fit disparaître.

Le lendemain on chercha vainement à l’endormir; c’était d’un mauvais augure: il mourut, en effet, le jour suivant.

(La suite prochainement.)

ÉTUDES SOMNAMBULIQUES.

§ X. — PUÏSEGURISME.

(Suite.)

De la véracité dans le sommeil magnétique.

Ceux qui connaissent les particularités de l’état mcsmérique, ont souvent observé que ses sujets montrent, dans tout ce qui sort de leurs lèvres pendant la trance, un degré remarquable de sincérité et de véracité.

« Isolé, dit M. Townshend, dans son Facts in Mesmer ism, de l’action habituelle des sens, l’esprit paraît acquérir de plus justes notions des choses purement spirituelles, posséder un nouveau sens pour les saisir, et être plus rapproché de la source de tout bien et de toute vérité. Le principal caractère de cet état élevé de la sensibilité, est une répugnance pour la fausseté que j’ai trouvée commune à tous les somnambules : la sincérité est ce qui les caractérise spécialement. Ils ne peuvent feindre, ni flatter ; ils semblent être en dehors de la vie commune, de ses formes égoïstes et de ses conventions spécieuses. »

On ne doit pas en conclure, cependant, qu’ils ne disent jamais rien d’erroné , ce qu’ils font sans doute souvent, et qu’ils doivent probablement

aux influences qui les dominent, principalement si leur état moral ordinaire n’est pas bon; mais ce qui est certain, c’est qu’ils ne trompent pas avec préméditation. Leurs paroles ne dissimulent pas leurs sentiments réels au moment où ils les éprouvent. Il paraît exister chez eux un éloignement instinctif pour toute forme de déguisement ; tellement qu’il leur serait très-difficile, dans cet état, d’agir à parte, comme ils sont souvent accusés de le faire par ceux qui refusent d’accorder leur croyance aux faits de l’action mesmérique. Et si, dans l’état de veille, ils eussent consenti à devenir complices d’une tromperie, le résultat serait très-propre à établir l’honnêteté spontanée de leurs suggestions extatiques.

« Je procède par un ou deux exemples, continue M. Townshënd , pour montrer combien les somnambules sont spontanément entraînés à ne dire que ce qui est, et à repousser de leur conscience cette dissimulation qui s’attache si fréquemment à l’homme dans son état naturel.

« Un jeune homme, nommé E. A*** nous présente l’exemple d’un aveu sincère.

« Je lui avais donné une bouteille contenant une lotion pour ses yeux qui, à ce moment, étaient fatigués. Il l’emporta chez lui ; et, un ou deux jours après, lui ayant demandé quel bien il en était résulté, il me répondit mensongèrement, et de manière à me faire supposer qu’il avait employé la •lotion avec avantage. Un instant après, étantplongé dans le sommeil mesmérique, il me dit, tout-à-fait spontanément : « Il y a une chose que je désire « vous dire. L’autre soir, en retournant à la maison,

« j’ai cassé la bouteille que vous m’aviez donnée. « J’ai craint qu’en l’apprenant vous ne fussiez fà-« ché, et je n’ai pas osé vous l’avouer quand j’étais « éveillé ; mais, à présent, je comprends que je n’ai « pas bien agi. »

« Dans l’état mesmérique, le caractère de ce somnambule présentait un contraste frappant avec celui de son état de veille. De bonnes dispositions morales et de grandes capacités avaient été corrompues et étouffées par une déplorable éducation ; et, quoique jeune, il avait l’esprit imbu de certaines opinions irréligieuses de la pire espèce, et qu’il cherchait à peine à dissimuler. Je lui demandai, un jour, dans son état de veille, ce qu’il pensait qu’il dût advenir de nous après la mort. Sa réponse fut: «Quand on est mort, on n’est plus rien dutout(i). » « Son extrême ignorance sur la plupart des sujets de nos connaissances, était accompagnée de la vainc opinion qu’il savait beaucoup ; et si on lui établissait les faits les plus simples de la philosophie, par exemple , la distance du soleil à la terre, il supposait qu’on avait le dessein de se jouer de sa bonne foi, et se retranchait dans une incrédulité absolue.

« Dans son sommeil magnétique, tout était changé. Ses idées sur l’esprit étaient singulièrement opposées aux vue9 matérielles qu’il avait sur tous les sujets, quand il était éveillé. Une fois , il me querella parce que j’avais appelé l’âme une chose ; et dit : « Ce n’est pas une chose, c’est une « pensée (2). — L’âme peut-elle mourir, lui défi) Les paroles de ce jeune homme sont citées en français dans l’ouvrage anglais.

(2) Voir tome I", page 252, la réfutation de cette doctrine.

« mandai-je:1 — Non, certainement. C’est l’âme « qui est la seule véritable existence, et qui donne « la vie à tout ce que nous concevons. — D’où vient « l’âme? Sa réponse fut : L’âme provient de Dieu , « qui a créé l’univers par sa pensée. — Y a-t-il une « punition future pour ceux qui font le mal? — « Sans doute; une grande. — En quoi consiste-« t-elle ? — En se voyant soi-même comme on est, « et Dieu tel qu’il est. »

« Dans une autre circonstance, je mesmérisai ce jeune homme en présence d’une dame très-distinguée, et d’un auteur bien connu dans la littérature anglaise. Ce dernier était sous le coup d’une profonde affliction domestique. Tout récemment, il avait perdu une fille chérie ; et les dispositions de son esprit accablé par cette perte, l’entraînèrent naturellement à interroger un somnambule sur les sujets relatifs à la vie future. Afin que ce monsieur pût parler avec la plus grande facilité, je le mis en rapport avec le jeune homme, et je pris peu de part à la conversation qui s’en suivit. Je ne saurais donc la décrire avec soin; mais l’impression générale qu’elle a laissée sur mon esprit ne pourra jamais s'effacer. Elle était simple, elle était belle, elle était semblable à une inspiration. Le jeune sujet parla de la nature immortelle de l’âme, de sa béatitude et de ses progrès variés à travers toutes les phases de son existence; et il assura (je me rappelle ses propres paroles) que, « dans la vie future, « elle conserve la mémoire du passé et des amitiés « faites sur la terre , et qu’elle a l’envie de revoir « ceux qu’elle a chéris autrefois. Tout le bien de « l’âme s’en va avec elle et dure après la mort ; et

« les justes qui sc sont pleurés ici-bas seront réunis « devant Dieu. » Tous ceux qui étaient présents furent émus, quelques-uns jusqu’aux larmes. 11 était vraiment beau de voir un jeune prophète dont le maintien avait pris une expression de candeur et d’innocence, prononcer avec tant de calme des paroles de sainteté et de consolation ; et un vieillard s’incliner humblement pour s’abreuver à une source si modeste, et y puiser un soulagement à ses peines.

« Le même somnambule, quoique dépourvu de sensibilité dans son état de veille, semblait toujours, quand il était mesmérisé, prendre plaisir à se perdre dans la contemplation d’un autre monde. Il me dit de magnifiques choses au sujet de la reconnaissance de ceux que l’âme avait aimés sur la terre, et du privilège des amis décédés de veiller sur les objets de leur sollicitude, dans leurs peines à travers le pèlerinage de la vie. Mais si je voulais enregistrer ces spéculations, car c’est ainsi quelles doivent être appelées, je passerais probablement pour un visionnaire, ou serais traité d’enthousiaste. Il suffît de dire que toute la tenace incrédulité de ce jeune homme s’évanouissait dans le sommeil mesmérique. Son opiniâtreté devenait soumission; son orgueil, humilité ; et en proportion exacte de ce qu’il paraissait en savoir davantage, il se croyait lui-même plus ignorant. Souvent il regrettait les erreurs de ses heures de la veille , el parlait de son état naturel comme d’une existence exceptionnelle. Souvent encore il s’écriait, dans son sommeil : « Combien je désirerais voir toujours les choses « comme je les vois maintenant! » Il n’y a personne qui, l’ayant vu dans l’état mesmérique, n’ait re-

marqué le changement en mieux que subissait sa physionomie. Ses affections aussi étaient plus développées. Égoïste en général, et montrant peu de sensibilité, il manifestait dans l'état mesmérique toute la chaleur d’un naturel plein de cœur, l'eu de temps avant qu’il ne me quittât, je le mesmé-risai. Aussitôt qu’il fut passé au sommeil magnétique , sa contenance porta l'expression du plus profond chagrin ; tellement , qu’il semblait hors d’état de parler. Quand je lui eus demandé la cause de sa tristesse, il me dit : « Je vais vous quitter....

« Combien je le regrette profondément! » Rendu à son état de veille , il rit, parla , et parut tout indifférent que de coutume. » /^T'v

Un état d’esprit si simple, si religieux , sip | q E ''V' et même si pur, est en lui-méme une réSflatiqjv. i,.\ ¡’T' victorieuse de l’imputation d’immoralité qui manquent de la charité qui espère et q^eioit le bien, ont tenté de porter contre le mesmémijiôilt (Extrait de Mesmer and Swedenborg, par George Bush. )

— A cette appréciation d’hommes distingués, nous opposerons quelques réflexions correctives, inspirées par un examen plus général des faits magnétiques.

Qu’est-ce donc que l'humanité? L’homme est-il né bon ou méchant? Si nous le surprenons endormi, dans ce moment où l’âme, s’occupant peu des besoins du corps, semble s’appartenir totalement, nous trouvons encore, et assez souvent, ces tristes penchants, ces restes d’instincts cruels qui laissent des doutes sur la divinité de sa nature.

Combien de fois, dans le somnambulisme natu-

rel, no vit-on pas les dormeurs s’armer du couteau homicide, et frapper eà et là des objets qu’ils prenaient pour des êtres humains voues à leur haine? Dans le sommeil magnétique, plus réfléchi, plus dégagé des scories du sommeil grossier, les passions se font jour partout, et les misères de notre nature se laissent apercevoir. La vanité, le mensonge, la rouerie ; plus encore, le désir de la vengeance, qui quelquefois trouve et saisit le moyen de se satisfaire, sont le triste apanage de cet état.

Le magnétiseur qui commence n’aperçoit point ces choses, elles né naissent d’ailleurs que petit à petit. Le sommeil magnétiqueen est d’abord exempt: trop de jouissance enivre le dormeur, nageant pour ainsi dire'dans un océan vital, il s’épanouit. A ce degré excessif de sensibilité, le somnambule est bon, humain, comme on vient de le peindre ci-dessus; mais bientôt tout en lui se modifie. Ce n’est plus qu’un instrument d’une extrême mobilité, et vous ne pouvez plus vous promettre que, docile à votre voix, il fouillera dans l’inconnu pour y chercher ce que les sens du médecin n’ont pu découvrir. Il vous dira qu’il cherche; il n’en sera rien, il vous assurera qu’il fait tous ses efforts; non, il attend que les idées lui arrivent au lieu d’aller les chercher à leur fond, etc. A moins qu’il n’éprouve yne grande sympathie pour celui qui consulte, tout travail ne sera fait qu’à demi, d’où résulte un mélange d’erreurs et de vérités qui rend toujours incertain le succès d’un traitement. Quelquefois même, au moment de recueillir les fruits d’une longue persévérance, un remède mal choisi ou ordonné au hasard vient enlever tout espoir en replongeant les

malades dans l’état où d’abord ils avaient été pris.

On obtient donc de ces êtres capricieux, inconcevables, plus qu’on n’espère, parfois; moins que l’on doit en attendre, dans la plupart des rapports.

Illuminés soudainement, ils retombent dans l’obscurité presque aussitôt. La vie du sommeil demande donc un nouvel examen. Sans doute on rencontre des êtres à part, deués d’une nature qui les rend ce que nous devrions tous être , pleins de dévouement et de charité.

Il y en a qui iront jusqu’à se rendre malades, afin d’arriver plus vite au soulagemeut des êtres souffrants qu’on leur a faits connaître ; mais à côté de ces âmes d’élite, et toujours rares, la nature a permis qu’il y eût des âmes dépravées. J’ai vu des somnambules profiter de leurs lumières pour agir occultement sur les êtres qui leur déplaisaient , et déterminer une altération dans leur santé, altération d’autant plus difficile à faire cesser qu’on ignorait les moyens, les agents employés. Parvenu à ces résultats déplorables, le somnambule jouit, il est satisfait ; de sorte que vous ne pouvez plus vous-même vous applaudir de vous être livré en toute confiance.

Aucune de ces choses n’est à craindre dans les traitements directs, quand le somnambulisme se montre chez l’homme souffrant. Le dormeur est trop occupé de sa propre conservation, il a un intérêt trop direct à bien voir, et sa douleur le rend compatissant; il est plein d’amour pour son magnétiseur , il le considère comme une divinité bienfaisante , car il reçoit de lui le baume qui calme ses souffrances. Mais, dans ce cas encore, comme

il y a deux êtres en nous, ne vous promettez point «ne perpétuité des sentiments que vous aUrez faits naître; on oubliera votre dévouement ; car, la santé rétablie, l’égoïsme reprendra son empire.

Les magnétiseurs qui ont préconisé le somnambulisme avec enthousiasme, n’avaient vti qu’ün côté, qu’une face de cet inconcevable phénomène. Ils curent le tort de voir en lui tout le magnétisme , tandis qu’il n’en est qu’un produit, et celui-là même qui est le plus propre à ëgarer l’esprit.

Ces réflexions, que nous donnons en passant, doivent plus tard être corroborées par de nombrelix faits.

Magnétiseurs ! point d’enthousiasme ; observez cette riche mine, en songeant que l’arsenic est quelquefois mélangé avec les métaux 16B plus précieux; il faut tout faire passer au creuset de la science. C’est en nous montrant scrupuleux et sincères * qu’on pourra dire : A son enfance, le magnétisme trouva des hommes qui surent se dégager des illusions , et voir la vérité comme la nature l’a faite.

Maintenant, quel degré de certitude présentent les révélations des somnambules? Et lors même que la véracité serait la compagne inséparable de ce qu’ils expriment, quelle confiance fonder sur des dires qui sont loin d’être semblables chez tous, à l’égard des mêmes objets? Tous les révélateurs religieux i et il y en eut beaucoup, imposaient leurs croyances, soutenant qu’elles seules étalent fondées sur la vérité pure; nous savons pourtant qu’il n’était pas indifférent que l’inspiré fût né en orient ou en occident* La nature se rit de nous et des efforts que nous faisons pour la comprendre ; est-ce une

raison pour cesser toute recherche? Au contraire, il faut examiner avec soin ce que les voyants aperçoivent dans leur fond. Le magnétisme agit sur chaque cerveau; il en fait jaillir des étincelles qu’il faut recueillir ; seulement prenons garde de dire : Ceci est la vérité, avant la concordance de l’universalité des voyants, juifs ou chrétiens, musulmans ou chinois.

Le temps est passé où un inspiré pouvait dire : S’il arrive un nouveau prophète , mettez-le à mort. Aujourd’hui les prophètes abondent, mais nul ne faitencorede miracles. Un membre de notrelnstitut, M. Littré, semble croire qu’ils né se renouvelleront plus : c’est une erreur; un jour , bientôt peut-être, les nations seront témoins de faits merveilleux. L’agent de leur production est trouvé ; c’est notre malhabileté qui nous rend inférieurs aux hommes distingués de l’antiquité. Mais près de nous* déjà * un membre de l’institut est fort peu de chose ; car ce que nous produisons est fort au-dessus des conceptions académiques.

i)U POTET.

VARIÉTÉS.

Physiologie magnétique. — On lit dans le National Intclligenccr, journal de Washington, du 9 juin 1849, k* relation suivante de curieuses expériences et découvertes :

DÉVELOPPEMENT EXTRAORDINAIRE DE FROID, DE CIIAI.ECR ET D*ÉLEC-

TRICITÉ.

Depuis les découvertes merveilleuses du Dr Bûcha-nan, sur l’existence des organes ou parties du corps humain correspondant à différentes portions du cerveau, et même aux facultés de l’esprit, le Dr Per-siston, professeur de chimie et de pharmacie au collège médical de Victoria, apprenant que le Dr Buchanan avait découvert un organe de la chaleur ou organe calorifique ; que cet organe avait son siège dans le menton, et que, par son excitation, la température du corps humain s’élevait considérablement; le Dr Persiston fut incité à vérifier le fait, et, s’il était réel, à appuyer sur quelques expériences remarquables ces phénomènes merveilleux. Le sujet qu’il choisit fut une négresse, par la raison qu’en Afrique, les développements physiques prédominent sur ceux de l’esprit, et qu’alors les résultats ne pourraient pas être aussi facilement attribués à l’imagination. Dans le but de rendre son sujet aussi sensible que possible, le docteur le mes-

mérisa plusieurs lois avant do hasarder ses expériences. Il fut magnétisé par les procédés ordinaires et fut trouvé un bon sujet ; déplus, il ignorait complètement les intentions du docteur. Quand le Dr Persiston fut convaincu qu’il avait acquis un pouvoir suilisant sur son sujet, il actionna l’organe supposé du calorique; et, à son étonnement, ainsi qu’à sa satisfaction, il trouva la température du corps croissant rapidement et à toi point que , plaçant un thermomètre sous la langue, elle était parvenue à i4o° Fahrenheit (environ 6o° cent.). Ce qui était très-remarquable dans celte extrême chaleur du corps, c’est qu’il n’v avait aucune apparence de transpiration. La première expérience qu’on tenta, fut faite dans le but de s’assurer jusqu’à quel point cet état était permanent, ou pourrait être maintenu par une excitation constante, contre les influences de causes contraires, comme par exemple, l’application de corps très-froids. Un gros morceau de glace mis dans la main du sujet y fondit promp-toment, sans que celui-ci parût en ressentir la moindre incommodité; et au moment de l’entière fusion de cette glace, l’eau qui restait sur la main fut évaporée instantanément. Le thermomètre y ayant été appliqué,-marqua îSg“, seulement un degré de moins que sous la langue. Ses pieds alors furent mis dans un seau contenant de l’eau et de gros morceaux de glace; ils y restèrent jusqu’à ce que toute la glace fût fondue et cela eut lieù sans que le patient éprouvât Je moindre malaise ; retirés de l’eau, ses pieds furent trouvés à la même température de 15g°. Plusieurs expériences de la même nature furent essayées, et toutes offrirent les mêmes

résultats. De telle sorte qu’il paraît que, par l’excitation de cet organe, si le calorique estrapidement soustrait, il est en même temps aussi rapidement reproduit.

Le Dr Persiston supposant qu’il pouvait exister quelqu’organe opposé à l’organe calorifique, découvrit, après plusieurs tentatives, un organe frigorifique, et trouva qu’il était placé à l’extrémité du nez. Après avoir excité cet organe, un froid mortel, à la surprise et à la grande frayeur des assistants, s’empara de tout le corps du sujet et en fit descendre la température jusqu’à 4°° Fahrenheit (4° et demi cent.), point de condensation de l’eau. Un médecin présent à l’expérience craignant que, par suite de la coagulation du sang, la mort ne s’en suivit, engagea d’une manière pressante le D'Persiston à s’arrêter ; mais celui-ci fit remarquer avec assurance que, si la vie pouvait être maintenue à cette température extraordinaire, il ne pouvait y avoir aucun danger pour la coagulation du sang. La peau, pendant toute cette opération, était humide de transpiration. On essaya alors l’effet de l’influence de causes contraires, et l’on trouva que, quoique la chaleur eût été rapidement communiquée au corps, elle fut aussi rapidement absorbée, rendue latente et sans action.

Les pieds du sujet furent ensuite placés dans un seau d’eau chaude; alors l’eau se refroidit promptement et descendit bientôt à la température de 4o° Fahrenheit. Le docteur prit ensuite une barre de fer chauffée au rouge, et l’approcha à un demi pouce de la joue du sujet; et là, ne remarquant aucune, apparence de douleur ou de malaise,

il la maintint dans cette position jusqu’à ce que le fer, refroidi, fût devenu noir; retiré, il trouva que la peau située dessous ou tout près de la barre, était tout aussi froide qu’aucune autre partie du corps. Le fer fut alors chauffé à blanc et mis à la hauteur delà lèvre supérieure, puis approché graduellement jusqu’à ce que le docteur, malgré.les remontrances des personnes présentes, eût mis le fer en contact avec la lèvre. Il s’éleva une légère fumée provenant probablement de la combustion de quelques poils implantés sur la lèvre (ce que nous avions attendu, vu l'organisation incomplète du tube capillaire) ; mais le sujet ne s’émût pas ; sa peau ne fut pas du tout brûlée par le fer, qui se refroidit rapidement jusqu’à ce qu'il fût descendu à /(o°, température anormale du corps. Lorsqu’on eut ôté le fer, on n’aperçut aucun effet visible sur la peau, excepté une légère marque ou contour de la surface du fer qui avait été mise en contact avec la lèvre. On doit remarquer ici, pour rendre justice au Dr Buchanan, que le Dr Persiston, dans la crainte de provoquer la douleur, avait préalablement excité l’organe du courage, découvert et indiqué par le D' Buchanan. N’importe sur quelle partie de la peau (qui, comme nous l’avons dit, était partout humide) le fer rouge était mis en contact, le résultat fut toujours le même. La flamme d’une bougie fut placée sous les narines sans causer aucune douleur; mais ici, comme dans les autres essais, les poils furent brûlés, sans doute à cause de leur constitution particulière.

Après que ces expériences hardies furent terminées, le sujet fut rendu à son étaf normal et ne se plaignit de rien, sicen’est d’unsentiment d’engour-

(lissement dans la lèvre supérieure, et d'un chatouillement dans les narines. Le médecin dont nous avons parlé remarqua, en plaisantant, qu’après tout, le docteur n’avait rien produit de nouveau, attendu qu’il croyait que le mesmérisme était aussi vieux que le monde.

Cette dernière expérience , quoique très-extraordinaire, ne pourrait pas être, au premier coup d’œil, considérée comme impossible par les incrédules ; car nous savons que l’estomac vivant secrète constamment un liquide suffisamment puissant pour dissoudre tous les corps organiques et inorganiques , tandis qu’il est totalement incapable d’agir sur l’estomac lui-même, tout aussi longtemps que cet organe est doué de la vie. Ainsi, quoique le suc gastrique soit un des plus puissants dissolvants connus, cette propriété n’est pas plus en rapport avec la fibre vivante, que la propriété destructive de la chalenr intérieure ne l’est avec la même fibre, quand celle-ci est soumise à l’organe frigorifique, et, peut êlre aussi, à celui du courage.

La plus remarquable découverte du Dr Persiston est l’organe de l’électricité dont le siège est la rotule. La découverte de l’organe électrique fut faite environ quinze jours après les expériences que nous venons de décrire. Lorsqu’il est convenablement action né, il agit d’une manière analogue aux organes calorifique et frigorifique; c’est-à-dire que l’électricité est accumulée aussi rapidement qu’elle est rapidement soustraite. Le patient ayant été placé sur un siège isolé, et ayant été en partie mesmérisé, l’excitation de l’organe électrique fut produite en touchant la rotule. D’abord, une odeur légèrement

phosphorescente fut sensible, puis remplacée, après le délai d’une minute, par le développement le plus puissant et le plus énergique de l’odeur particulière aux races de couleur ; et cela arriva jusqu’à un point insupportable, pendant toute la durée de l’expérience. Des étincelles furent tirées de ses doigts et de toutes les parties de son corps qui étaient saturées d’électricité. Les phénomènes d’attraction et de répulsion furent exécutés, et une bouteille de Leyde fut chargée dans l’intention de produire des décharges électriques. Elle ne parut pas très fortement chargée, car les étincelles n’avaient pas plus d’un demi pouce de longueur.

Quant à la possibilité de cet état, cela ne peut pas être l’occasion du moindre doute, même pour les plus sceptiques, depuis que dans le dernier numéro du journal de Silliman, on a inséré le compterendu, authentique, de l’électrisation d’une clame. Le docteur ne réclame que la seule découverte de la localité de l’organe.

L’état de l’électricité du sujet fut trouvé négatif, et cela est fort intéressant lorsqu’on pense que les salles remplies de monde ont toujours été trouvées électrisées négativement. »

UN TÉMOIN OCULAIRE.

— Le premier sentiment qui naît à la lecture de ces faits est le doute, tant est grande leur étrangeté. Les procédés dont se sont servis les expérimentateurs ne sont point indiqués, ce qui contribue encore à augmenter l’incertitude sur la réalité de ces prodigieux phénomènes. Nous voyons bien

que le magnétisme joue le rôle principal dans leur production, puisqu'on opère sur une personne magnétisée; mais de quelle nature est l’excitant employé? Est-ce un agent physique, chimique, psychique? L’incitation de ces faits étranges n’est-elle pas différente de la stimulation phréno-magnéti-que? Le silence des auteurs nous réduit aux copr jectqres.

Nous livrons donc ce document tel qu’il nous est arrivé; et, jusqu’à ce que des informations nous soient venues, nous engageons nos lecteurs à n’en accepter le contenu que sous bénéfice d’inventaire.

Chronique. — Une réunion des magnétiseurs de Lyon va avoir lieu incessamment dans le but de reconstituer l’Athénée Magnétique. Nos amis espèrent que les séances de cette société pourront être reprises au commencement de l’automne.

— M. Mansut, libraire, que le magnétisme comptait au nombre de ses adeptes, est mort du choléra. Il a été frappé si violemment, qu’on n’a pas eu le temps de lui porter les secours que réclamait son état.

Revue des journaux. — L e Journal des Théâtres, du i/j juin, relate une série d’expériences soipnam-buliques faites dans ses bureaux par l’un des frères Didier.

— La rédaction du Constitutionnel est, depuis quelque temps, parsemée de mots de notre voca-

bulairc, malignement employés. Des comparaisons malveillantes, des allusions injurieuses, tout, enfin, ce qui peut déconsidérer le magnétisme, trouve toujours place dans les colonnes de ce journal. Ce que nous signalons ici n’est d’ailleurs pas nouveau, c’est une simple recrudescence.

PETITE CORRESPONDANCE.

Avis. — A la faculté de s’abonner pour trois bois , l’adminisiraiion du Journal du Magnétisme vient d’ajouter celle de faire dater l’abonnement du commencement de chaque mois. La durée des abonnements ne correspondant plus ainsi à la division des tomes, chaque année sera désormais réunie en un seul vo-|ume, qui sera double des précédents.

Les personnes dont l’abonnement expire à la fin du tome quj devait se terminer aujourd’hui sont priées de vouloir bien la renouveler dans le plus bref délai, faute de quoi elles ne recevraient point le prochain numéro.

BIBLIOGRAPHIE.

La lumière s’est faite dans tant d’esprits , depuis quelques années, qu’il n’est plus permis aux anthro-pologistes de passer le magnétisme sous un silence dédaigneux. De gré ou de force, la plupart des auteurs modernes traitent la question; presque tous, il est vrai, n’en parlent encore que vaguement : les uns par calcul, les autres par ignorance. Pour un qui l’expose bien, il y en a dix qui le défigurent; le public confianL en leur savoir, croit à leurs dires erronés, à leurs fausses assertions. Les notions ainsi transmises égarent l’opinion , embrouillent les faits, au lieu d’éclairer l’une et de préparer la solution des autres. Cette propagande est très-mauvaise, mais nous ne pouvons l’éviter. Contentons-nous donc d’en examiner les fruits. Voici :

LE LIVRE DE LA NATURE, par Cousin DbsprSaüx. Nouvelle édition. 4 vol. in-12. Paris, 1848. — Chez LecolTre et C'.

Un professeur du collège Stanislas, M. Desdouits, chargé de mettre la nouvelle édition de cet ouvrage au niveau des connaissances actuelles, y a ajouté un chapitre sur le magnétisme mesmérien. Cet auteur croit à l’action vitale de l’homme sur son semblable. Il admet bien que nos procédés provoquent certains effets comme en produisent le chatouillement, les frictions, le massage, etc. Il ne nie même pas les faits de lucidité somnambulique, mais il les

explique à sa façon. Il prétend que, par l'habitude ou l’exercice, la translucidité des paupières se change en transparence ; de sorle que les somnambules voient au travers de leurs paupières comme si elles étaient de verre!

Cette explication est ingénieuse, en supposant qu’un tissu organique puisse changer de nature; mais elle ne rend pas compte de la vue des objets cachés, perdus, volés, éloignés, etc. D'ailleurs n'y a-t-il pas des aveugles qui, magnétisés, sont d’excellents voyants. A quoi servirait la transparence des paupières à ceux qui, comme M. Lemaire, ont les globes oculaires détruits ?

Voilà pourtant les inconséquences qu’on débite dans des écrits sérieux, fort estimés, et d’ailleurs très-bien faits sous d’autres rapports.

lilÀNtlEÎi DE PHYSIOLOGIE, par J. Miller , traduit de l’allemand, sur la quatrième édition, par Jourdan. 2 vol. in-8. Paris, 1845.

— Chez J.-B. Baillière.

Il ne s’agit pas ici d'ün écrivain plus ou moins obscur; b’est un des premiers physiologistes, le professeur de l’Université de Berlin, l’un des savants les jJliis renommés qui va parler.

Dissertant sur la forme vitale, il dit (page 22) :

« Quelque certitude que tous ces faits donnent de l’existence, ou d’une force agissant souvent avec rapidité et susceptible de Se propager dans l’espace, ou d’une substance impondérable, rien 11e nous autorise à admettre l'identité de cette dernière avec les impondérables connus, avec les forces générales de la nature: chaleur, lumière, électricité. Loin

de là, le moindre examen suffit pour faire rejeter toute idée d’un semblable rapprochement. Le magnétisme dit animal sembla d’abord répandre quelque jour sur ce sujet énigmatique. On crut que le frottement d’un homme par un autre, l’apposition des mains, etc., produisaient des effets remarquables, dépendant de la transmission d’un prétendu fluide zoomagnétique, que quelques personnes s’imaginaient même pouvoir accumuler à l’aide de certains appareils; mais l’histoire du magnétisme animal est devenue un déplorable tissu de mensonges et de déceptions; elle n’a montré qu’une seule chose, c’est combien peu la plupart des médecins ont d’aptitude pour l’observation empirique, et combien ils sont loin de posséder l’esprit d’examen si généralement appliqué dans les autres sciences physiques. 11 n’est aucun fait dans cette histoire qui ne soulève des doutes, et l’on n’a la certitude que d’une seule chose : le nombre infini des illusions. La médecine ne fournit non plus aucun fait conciliable avecles merveilles du magnétisme animal, si ce n’est qu’on a souvent répété, sans cependant qu’il y ait encore de certitude à cet égard, que certains paralytiques avaient été guéris par l’immersion de leurs membres dans le sang d’animaux égorgés depuis peu, à quoi on peut ajouter les contes si répandus sur le prétendu rajeunissement des vieillards et des cacochymes par la fréquentation et la transpiration de jeunes enfants bien portants. »

Le Gérant : IÏÉBERT (de Garnay).

CLINIQUE MAGNÉTIQUE.

CATALEPSIE.

A Monsieur du Potet de Sennevoy.

Monsieur,

Vous désirez que la suite (i) du traitement d’Anne Chaigneau vous soit envoyée, afin que l’histoire entière de cette maladie soit acquise aux annales de la science magnétique. Elle ne peut être mieux acquise, car le magnétisme seul deM. Gravé, et quelques prescriptions de sa somnambule, ont seuls été employés.

J’en ai sous les yeux le journal détaillé en soixante séances. Il est à votre disposition, si vous le croyez nécessaire. Si je ne vous l’envoie pas, c’est que les séances ont beaucoup d’analogie les unes avec les autres, à quelques circonstances et variétés près. Par exemple : elle a rechuté plusieurs fois en l’absence de M. Gravé, par l’indiscrétion d’un public nombreux et incessant, qui l’entourait par curiosité, et occasionnait souvent des crises nerveuses

(1) Voyez le commencement, page 230 de ce volnme. tome vin. — N" 97. — 10 juillet 1849. 15

que le magnétiseur ne pouvait apaiser qu’à la séance du lendemain, ce qui retardait beaucoup sa guérison , surtout dans l’état de faiblesse où elle était pendant les trois quarts de son traitement. Il y a eu quelques variétés occasionnées par l’approche et la durée de ses menstrues, qu’elle a maintenant régulièrement. Elle a eu plusieurs vomissements de sang noir, aux approches du flux périodique; une toux sèche, occasionnée par le sang qu’elle allait rendre par le nez, une fois avec un gros ver de vingt centimètres, une autre fois avec deux vers semblables qui furent annoncés plusieurs jours d’avance par somnambule Ces faits se sont réalisés exactement, aux jours et heure indiqués, ainsi que d’autres prédictions mentionnées au journal. En général, chaque séance était couronnée de succès, et d’une amélioration sensible.

Vous apprécierez, Monsieur, les difficultés et les contrariétés qu’a eues à vaincre le magnétiseur, qui, au lieu d'opérer dans le calme qu’exige le magnétisme , a lutté pendant vingt séances au milieu du tumulte des curieux. Mais M. Gravé, homme de coeur et de conviction , c^lme et courageux , a tout surmonté; sa puissance a vaincu les obstacles : il a marché d’un pas ferme vers son but. Ce digne et zélé apôtre de notre doctrine, mérite une mention honorable. Chaque jour il fait des cures remarquables, et rend des services à l’humanité souffrante.

J’ai suivi successivement les progrès en mieux d’Anne Chaigneau. J’ai voulu la revoir avant de vous écrire. Elle va aussi bien que possible. Elle serait déjà dans l’état normal, si une meilleure nour-

ri turc avait secondé la nature'débilitée par un jeûne forcé. Cette pensée est déplorable!... lille ne paraît pas avoir souifert. Elle est grasse, rosée, causante et gaie. Elle s’occupe journellement des petits travaux de ménage et de couture.

Quant à Marie Rivierre, ainsi que je vous l’ai annoncé, elle est à l’état normal. Son traitement a été aussi compliqué que celui de sa cousine. Vous pouvez annexer ces deux cures dans vos annales.

Agréez, Monsieur, l’assurance de ma haute et respectueuse considération.

BERTHÉRAND DE LONGPRK.

ATROPHIE DE LA JAMBE.

Le certificat suivant vient de nous être adressé; nous nous faisons un devoir de le publier, M. de Rovère étant encore poursuivi par la justice.

«Les soussignés, habitants de Chemilly et de Chablis (Yonne), attestent et certifient, pour rendre hommage à la vérité, les faits qui suivent :

« M. de Rovère a entrepris, en 1847 , le traitement, par le magnétisme, de M. Justin Marion, ualif de Chemilly, alors âgé de quinze ans, dont la jambe gauche était presque paralysée, privée de sensibilité et de vie; moins grosse que l’autre, et plus courte d’au moins cinq centimètres , enfin menacée de la carie, selon l’opinion des médecins.

« Avant le traitement, cet enfant, qui avait été soumis à l’action de la médecine ordinaire, était dans un état qui laissait peu d’espoir pour sa cou-

servation. Il y avait, on eft'et, indépendamment do l’impossibilité absolue pour l’enfant, non seulement de marcher, mais encore d’imprimer à sa jambe le moindre mouvement articulaire, il y avait affaiblissement général du malade, plus de sommeil, plus d’appétit, maigreur excessive , débilité, atonie.

« Après moins de quinze jours de l’action magnétique, les symptômes les plus heureux se sont manifestés; l’appétit et le sommeil, complètement perdus, sont revenus; le moral affecté a été relevé; l’espérance, la vie, étaient rendues au malade.

« Le traitement dura cinq mois; après ce temps la jambe avait recouvré sa sensibilité et sa grosseur ordinaire ; elle était devenue presque aussi longue que l’aulre. Les mouvements articulaires étaient faciles, et l’enfant, en s'appuyant sur une canne, pouvait faire des promenades assez longues : les forces étaient complètement revenues ; la croissance reprenait son cours.

« Cet état n’a fait que s’améliorer depuis, et aujourd’hui , sauf une légère claudication , le jeune Marion est dans d’excellentes conditions : on peut dire même dans son état normal. Il a grandi, sa taille est parfaitement droite, ses forces ne sont pas au-dessous de celles des jeunes gens de son âge; enfin il travaille à la terre : il a fait la récolte des prairies, et fait aujourd’hui la moisson, n’en cédant pas aux autres ouvriers.

« Nous devons signaler un fait remarquable, et qui prouve jusqu’à l’évidence l’action du magnétisme. C’est que pendant la durée des séances, le bien être du malade était bien plus grand qu’a-

près. Ainsi, dans les premiers mois du traitement, l’enfant, quand il était soumis à la puissance magnétique, soulevait seul et sans effort sa jambe, el faisait une promenade de quelques centaines de pas, tandis qu’après la séance, l'articulation pouvait à peine produire quelques pénibles mouvements, et ne pouvait encore supporter le poids du malade.

« Tous ces faits sont positivement vrais, et exactement rapportés , ils sont de notoriété publique à Chablis et à Chemilly. »

Ludovic POULLAIN, propriétaire à Chablis.

J. MARION père.

MOLLOT, conseiller municipal de Chablis.

N0D10T-BARBETTE.

Femme N0D10T-BARBETTE.

«Moi, guéri par M. de Rovère, je certifie que tout ce qui est contenu sur celle feuille est certain. »

MARION (Justin), fils.

CHOÏÎHA-MOBBCS.

L’épidémie qui vient de désoler la Franco sévit maintenant en Amérique, avec nne violence extrême. Nos amis s’occupent là-bas de combattre le fléau par le magnétisme. Yoici une lettre pleine de judicieuses réflexions, publiée par VAbeille de la

Nouvelle-Ürtéam. Kilo est signée J. fi., initiales bien connues de nos lecteurs.

Au Rédacteur.

La lettre de M. le Dr Andraud au président de l’Académie des Sciences de Paris, reproduite dans VAbeille, corrobore une opinion en confirmant ce fait déjà entrevu, que la violence du choléra est en raison inverse de l’électricité atmosphérique. On se rappelle, en elfet, que lors de l’apparition du lléau à Berlin, le télégraphe électrique ne put pas fonctionner.

Dans ses Recherches sur l'Électricité animale, publiées en 1807, à Paris, le D' Coudret définit le choléra, une congestion soudaine, générale et en quelque sorte foudroyante de nos principaux viscères intérieurs, préparée par certaines prédispositions individuelles, et déterminée par l’efiet im-diat d’un brusque et violent déplacement, au profit de ces mêmes viscères, de principales actions vasculaires et électro-motrices de la peau. Suivant ce médecin, le choléra est l’une des nombreuses et des plus graves variétés de Y irritation : l’origine commune à l’un et à l’autre est la perturbation des actions de l’électricité animale.

11 semble donc que lorsque l’épidémie du choléra règne, l’électricité s’élimine de l’atmosphère, tandis que chez le malade elle quitte l’enveloppe cutanée pour se concentrer sur les principaux viscères abdominaux et thoraciqucs. — Je pense que d’autres expériences démontreront que l’électricité atmosphérique ne quitte la couche basse où nous

respirons habituellement que pour s'amasser dans les régions élevées, ce qui fait sans doute que le. choléra ne sévit pas sur les montagnes ; et c’est probablement là ce qui a donné le change à ceux qui ont préconisé le soufre , car ils sont partis de cette remarque, que le choléra n’a pas visité les lieux où se trouvent des eaux sulfureuses...

Depuis longtemps la médecine emploie les machines électriques lorsqu’elle juge qu’il faut donner de l’électricité; mais depuis quelques années seulement on la soustrait, dans l’irritation, au moyen d’électro-moteurs, et cela paraît fort rationnel ; car si l’électricité se trouve en moins dans certains cas de maladie, elle peut bien se trouver en plus dans d’autres cas. On sait d’ailleurs qu’elle est souvent très-inégalement répartie sur notre enveloppe, ce qui donne lieu à bien des sortes d’indispositions, et il n’est pas du tout improbable que des effets analogues, mais sur une plus grande écholle, ne se manifestent aussi à la surface terrestre....

Mais voici que les machines électriques ne fonctionnent plus dans le choléra, et vraisemblablement lesélectro moteurs n’auront pas plus d’action, d’autant qu’il serait impossible de les mettre en contact avec les parties irritées. L’impuissance de ces machines artificielles une fois constatée, on en viendra peut-être à faire l’essai des machines électriques naturelles; mais que de victimes encore avant d’arriver à la solution de ce terrible problème : le traitement du choléra!____

Quand je parle de machines naturelle«, on comprend que je fais allusion à l’organisme humain. On sait que notre cerveau est une excellente bat-

Icrie électrique, bien supérieure aux machines artificielles de nos cabinets de physique, en ce sens du moins qu'elle est intelligente, et qu'elle agit, à volonté, positivement ou négativement, sans conducteurs matériels, et malgré l’humidité de l’air, etc. Bien plus, elle agit à l'insu de celui qui opère, eu dehors même de sa voloulé, de son intention, selon les besoins de la nature !.... Donnons à la chose son nom : je parle du magnétisme, de cet autre lluide analogue au lluide électrique, qui n’est sans doute, lui aussi, que le fluide vital modifié suivant la nature des milieux qu’il traverse ou qui l’élaborent. Je ne veux pour preuve de sa puissance salutaire, que ces guérisons inespérées dont le public entend parler fort souvent, et qu’obtiennent des hommes simples après que de savants médecins ont vu leurs remèdes rester sans effet. Et qu’on n’aille pas croire que le magnétisme ne convient qu’aux affections nerveuses, car il a guéri des maladies de toutes les dénominations, même des lésions organiques très-graves, ainsi que nous en avons des preuves sous les yeux.... J’ai ouï dire qu’il a déjà été employé dans des cas de choléra, et on a cité quelques succès ; mais, comme je n’ai pas eu le bonheur d’en être témoin, je n’en parlerai pas autrement. Je me contenterai de dire que puisque la science médicale ne sait rien de certain contre ce redoutable fléau ; que les praticiens, après les sages mesures hygiéniques que quelques-uns d’entre eux recommandent, en sont encore réduits aux tâtonnements, eh bien! qu’on essaie la magnétisation; qu’on la fasse faire par des personnes en bonne sauté et mues par un ardent désir de faire

du bien, et 011 trouvera peut-être que son action est d’autant plus énergique que le danger est plus pressant. Qu’on en fasse des essais partout, seule, ou conjointement avec les remèdes : ce 11e sera qu’un tâtonnement de plus, et une chance nouvelle. On est bien assuré d’avance que l’action magnétique n’aggrave point le mal, et qu’elle ne contrarie en rien celle des remèdes.

J. B.

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

Conférences magnétiques dominicales.

Magie Magnétique.

(Suite.)

Croquis psychologique sur deux Expériences de mesmeri-magie.

Les physiologistes magnétistes qui ont observé et décrit, autant que le permet l’état de la science, le jeu du fluide mesmérique sur les organes du corps humain ; les psychologistes qui ont étudié, analysé et classé les différents phénomènes de la trance magnétique, ont énuméré presque toutes les forces ou puissances actives de l’âme dégagée de ses liens corporels ; tandis que, excepté la communication de la pensée, faculté passive qui devient

souvent active par la volonté du sujet, ils n’en ont point cité d’autres. Cet oubli, cette négligence a une conséquence très-grave, et qui ne tend à rien moins qu’à dépouiller la science nouvelle de ses plus belles prérogatives et de ses phénomènes les plus merveilleux. Nous voulons parler de ceux qui résultent du pouvoir, de la domination irrésistible de la volonté, de l’âme du rnesmériseur sur la volonté , sur l’âme du sujet.

La nature, la variété, les développements de ces faits psychiques seraient infinis dans leur production si l’imagination, dans ses combinaisons, n’avait pas, elle aussi, ses bornes; car leur sphère est sans limites.

C’est devant la production et la réalité de ces faits que M. du Potet a planté son drapeau magique; c’est sur ces régions élevées des phénomènes psychiques que, guidé par l’expérience bien plus que par la tradition , il a posé les jalons qui lui serviront à relier la science nouvelle à la science occulte de la mystérieuse antiquité; en un mot, le mesmérisme à la magie; et qui , enfin, le guidant à travers les ruines des temps barbares, lui feront retrouver et reconstruire de toutes pièces, ces trésors de savoir, cachés, même dans les temps anciens, aux yeux profanes de la foule ignorante. Dans ses mains qu’il tient ouvertes pour tous, la magie, arrachée du milieu des décombres de la science des siècles, dégagée des préjugés qui la flétrissaient aux yeux du sage, dépouillée de tout l’appareil mystérieux qui la déguisait, la magie, disons-nous, reconstituée avec ses éléments et sa puissance puisés tout entiers dans le mode d’organisation physique

el morale de l’homme, apparaîtra de nouveau, mais sans voiles, et seulement pour éclairer les humains sur la prodigieuse étendue de leurs facultés intellectuelles et morales; et, en élevant davantage leurs pensées, au lieu des craintes puériles, ridicules ou passionnées du vulgaire, leur faire bénir la main prodigue qui a répandu tant et de si précieux dons sur leur être.

Dans l’expérience que nous allons décrire, et qui établit péremptoirement, d’un côté la puissance active et de l’autre la passivité, poussées toutes deux jusqu’aux dernières limites, il est bien entendu que nous ne parlons pas de cette puissance d’un ordre inférieur qui agit sur la partie matérielle ou organique du corps, et qui produit l’attraction, la répulsion , l’insensibilité, la catalepsie, la paralysie des organes des sens, et d’autres phénomènes purement physiques. Nous entendons seulement ne nous occuper que des rapports animiques qui existent entre l’expérimentateur et son sujet; c’est-à-dire, ceux qui résultent d’une volonté forte dirigeant l’action de l’agent magnétique sur une autre volonté qu’elle domine et dirige, en lui communiquant avec la rapidité de la pensée, les pensées et les sentiments qu’elle veut lui imposer; bien plus, qu’elle lui rend personnelles.

Première expérience.

Dans une séance récente, M. du Potet proposa de montrer le pouvoir qu’il possède d’éveiller, ou plutôt, de faire naître dans le cœur de l’un de scs auditeurs, l’antipathie et la fureur contre une autre

personne de la société. Après avoir désigné les deux individus, distants l’un de l’autre d’environ deux mètres, le professeur s’assit au milieu du salon en dirigeant un regard soutenu sur celui qui devait être le principal sujet de cette expérience ; jeune homme d’une vingtaine d’années, et d’une constitution assez délicate. Ce regard du maître, regard magnétique, attira et fixa celui du sujet, qu’on vit peu à peu s’animer, s’agrandir et briller d’un éclat très-vif. Après quelques minutes, et lorsqu’il eut jugé que ce jeune homme était suffisamment dominé, M. du l’otet porta ses yeux , avec une intention préméditée, sur l’autre personne. A ce moment, on vit le sujet de l’épreuve diriger alternativement et vivement son regard sur le professeur et sur l’autre personne, et, à mesure qu’il changeait d’objet, sa physionomie s'animait davantage, son œil devenait menaçant, ses narines se gonflaient, ses lèvres, pincées fortement, exprimaient le mépris et la colère, et sa face et ses yeux étaient comme injectés par un épanchement bilieux : tout, en un mot, annonçait l’explosion soudaine d’un accès de fureur.

A ce moment, le professeur engagea la seconde personne à feindre de lever une canne contre lui. Alors le sujet, arrivé au paroxysme de la colère, se lève avec fureur pour attaquer son adversaire, c’est-à-dire , celui qui avait seulement menacé M. du Potet ; et quoique deux hommes placés à ses côtés fissent tous leurs efforts pour le retenir chacun par un bras, il s’élança cependant avec le plus violent emportement, la passion la plus furieuse.... On eût dit une bête fauve, un animal féroce qui fond sur

sa proie. La colère, la fureur, l’ardeur du combat, le mépris du danger, ne peuvent pas avoir un type plus vrai, plus saisissant.

(Je 11e fut pas sans quelques efforts que le maître parvint à détruire le charme qui dominait ce jeune frénétique, et à le rendre h son état normal.

Cette expérience réussit admirablement jusque dans scs moindres détails. Quel est le pouvoir mystérieux qui a produit ce sentiment complexe d’attachement passionné pour l’expérimentateur, et de colère furieuse contre celui qui avait seulement feint de lui être hostile? Est-ce par les procédés physiques du mesmérisme? Non; puisqu’on n’a fait aucune passe. Est-ce par la magnétisation du regard? Non ; puisque le maître, en regardant la seconde personne n’agissait plus sur le sujet, et que, néanmoins, ce fut pendant ce temps que l’action s’est le plus développée. Est-ce, enfin, parla communication de la pensée ou du sentiment? Pas davantage; car l'expérimentateur n’était point à ce moment sous la domination de pensées ou de sentiments de la nature de ceux qu'il a développés: au contraire, il était parfaitement calme.

C’«9t donc, il faut en convenir, par le pouvoir immatériel de la volonté de l’àme que tous ces ressorts sont mis en jeu; c’est par ce pouvoir exorbitant que l’homme possède d’entrer violemment, par l’énergie de son vouloir, dnns lame d’un autre homme, de s’y installer, de toucher toutes les fibres de la sensibilité intellectuelle et morale; de leur imprimer à son gré, et suivant sa fantaisie, toutes les passions humaines les plus opposées ; les plus bienveillantes comme les plus féroces.

lit ce n’est pas seulement son âme qu’il a le pouvoir de loger dans le corps d’un sujet, après avoir expulsé celle qui l’animait; il y introduit encore celle de tout autre individu , vivant ou mort, et transforme ainsi son patient en tel personnage qu’il lui plaît: César, Napoléon, Talma; même en une jeune fille avec toute sa pudeur.

Au moment de produire ces phénomènes psychiques, en face de scs sujets, M. du Potet semble dire, comme le statuaire du bon La Fontaine devant sonbloc de marbre :

Qu’en fera, dil-il, mon ciseau ?

Sera-t-il dieu, table ou cuvette?

Il sera dieu : mime je veux Qu’il ait en sa main un tonnerre.

Tremblez, humains, faites des vœux,

Voilà le maître de la terre!

Quelle puissance prodigieuse accordée par Dieu à sa créature sur son semblable! Puissance inouïe, dont Dieu lui-même ne semble pas s’être réservé l’usage ! L’esprit s’abîme dans la contemplation de pareils phénomènes, où les lois les plus simples, les mieux établies des facultés, des états, des opérations, des connaissances de l’âme sont renversées, anéanties; par quoi?... Par la simple volonté d’un homme; par cette volonté qui dirige un agent mystérieux que chacun possède, et qui, soumis à cette même volonté, va bouleverser l'organisation physique, intellectuelle et morale d'un autre homme.

Seconde expérience.

Dans la seconde expérience, la scène a un loul autre caractère; ici tout se passe gaîment ; aucune passion n’est mise en jeu. L’action mesméri-inagi-que ne s’adresse qu’aux organes du mouvement ; lame et les sens ne laissent voir aucun signe de perception ; la vie semble toute concentrée dans les organes de l’appareil moteur. Cependant, il n’en est rien; et lame, comme dans l’expérience que nous venons de décrire, est tout entière sous la domination du mesmériseur. Seulement, elle n'est sollicitée que pour de simples actes de locomotion et-de mouvement: toutes ses autres facultés sont laissées à l’état de repos.

Ayant placé un jeune homme fort sensible à l’action magnétique, debout devant lui; après l'avoir dominé du regard pendant quelques instants, le sujet, les yeux restés ouverts, exécuta tous les mouvements que faisait le.professeur : frappant du pied, levant un bras, puis un autre, vivement et correctement, à l’instant même où celui-ci les exécutait. Prenant la pose d’un boxeur, roulant ses avant-bras l’un sur l’autre, les arrêtant, puis recommençant de nouveau , le jeune homme faisait instantanément et rigoureusement les mêmes gestes. Quand nous disons iustantanément, nous ne nous exprimons pas d’une manière assez précise, ni assez saisissable; car, c’était l’instantanéité du courant électrique. Tellement que, lorsque le maître et le sujet gesticulaient, on aurait pu penser que le moteur était aussi bien le jeune homme que M. du

l’otet, ou même, qu’ils obéissaient tous deux à un agent supérieur.

A un certain moment, l’expérimentateur étendit les bras horizontalement, puis traça avec ses pas une marche circulaire : son sujet l’imita aussitôt. Mais voilà qu’un autre jeune homme présent à la séance, dominé par l’irradiation de l’agent mesmé-rique, suivait, en sautant sur son siège, le mouvement rhythmique de cette espèce de danse magique ; puis, se levant, prit sa place entre les deux mimes danseurs; et là, exécuta, toujours en tournant , et d’une manière rigoureusement exacte, tous les mouvements du corps, de la tête, des bras, des jambes de ses partners. Les gestes de ces trois messieurs étaient toujours identiques, instantanés : c’était un triangle équilatéral vivant, dont les trois côtés exécutaient des gestes semblables. Cette parfaite identité et cette instantanéité étaient vraiment merveilleuses. On ne pourrait les comparer , la première, qu’au kaleïdoscope qui, par l’effet de deux miroirs, reproduit plusieurs fois une image simple ; la seconde, qu’à celle du télégraphe électrique.

Ces phénomènes si surprenants, on en doit la production aux infatigables recherches de M. du Potet. C’est lui qui, après avoir le plus contribué, par ses persévérants travaux , à la propagation de la croyance aux faits et à la doctrine magnétiques, dont il a répandu avec profusion les connaissances rudimentaires, c’est lui, disons-nous, qui le premier en a franchi les bornes, et qui, par lelan de

sa pensée, s’élevant dans une sphère où sa puissance toute morale n'agit que sur l’esprit sans le secours des procédés élémentaires, a donné à la science celte extension qui n’a plus de limites. C’est poussé par le génie des découvertes, et aidé par cet instrument si parfait qu’il possède, et qui est le signe de son immense puissance, qu’il est parvenu à réaliser des faits que l’imagination, dans ses rêves, n’aurait pas même entrevus.

Maintenant, plaçons-nous devant ces faits curieux et si remarquables, et convenons, nous hommes réfléchis, observateurs et initiés quelque peu aux études philosophiques de tous les âges, convenons qu’ici nous sommes forcés de considérer l’âme sous un tout autre aspect que celui sous lequel elle avait été envisagée par la science psychologique.

N’est-ce pas un sujet de bien légitime élude, que celui qui doit nécessairement conduire à une plus ample et plus complète connaissance de l’homme; à l'examen philosophique de ces états si surprenants où, sans être plongé dans un sommeil naturel ou artificiel, l’homme apparaît à nos yeux jouissant de toutes ses facultés, dans l’ordre des faits sensuels et des faits de l’esprit, et où il est cependant entièrement transformé? Où l’on retrouve ce prodigieux renversement des lois naturelles; où ce sens intime nommé conscience, n’est plus là pour constater les états, les facultés , les opérations, les connaissances de lame?

Or, la conscience, qui est la vue de ce qui se passe en nous, qui est l’âme prenant connaissance d’elle-même, n’existant plus, c’est-à-dire, ne se manifestant plus par sa propre activité, étant inerte

et pour ainsi dire anéantie, que devient laine, alors? Quelle est sou essence? Quels sont ses liens et ses rapports avec les organes sensuels et corporels?

Dans son état naturel (nous n’osons pas dire normal, car cette qualification n'appartient peut-être qu’il laine pure, dégagée de son enveloppe matérielle), lame connaît toutes les phases de la sensibilité, toutes les formes de l’intelligence, tous les modes de la volonté. Le témoignage qu’en porte la conscience est irrécusable, et c’est le fond même de notre existence intérieure qui se compose de pensées, de sentiments et de volontés. Mais dans les états que nous avons décrits, tous ces principes, dus à l'induction, sont ébranlés, et les faits nouveaux deviennent, au moins, les éléments nécessaires d’une nouvelle analyse et d’une nouvelle synthèse.

Quel beau sujet d’étude pour nos philosophes ! Et que font-ils, cependant? Rien;.si ce n’est de récrire et de ressasser ce qui a été écrit et ressassé dans tous les siècles ; de le retourner , de le pressurer pour tâcher d’en exprimer, non une idée , mais une forme nouvelle; travail éternel qui, à force de tortures, n’aboutit qu’à exhumer des doctrines méprisées et oubliées, déjà plusieurs fois ; véritable supplice de Sisyphe auquel sc condamnent les savants, qui, malgré leurs efforts pour faire marcher la science de l’homme, ne l’ont pas fait avancer d’un pas depuis Socrate, Aristote et Platon.

Venez donc, philosophes, approchez! Nous vous tendrons une main amie pour vous introduire dans le sanctuaire de la science nouvelle; heureux de vous montrer, de vous expliquer au moins, la puis-sauce et les fonctions de cette force naturelle que

toute organisation humaine recèle, et que vous possédez à votre insu ; de vous apprendre à la faire fonctionner , a la diriger de manière à produire des effets à la réalité desquels vous n'ajoutez pas foi, mais auxquels vous croirez comme nous y avons cru nous-mêmes , après avoir douté comme vous ; de vous y faire porter les investigations de votre intelligencejexercée et de votre riche savoir. Quels progrès, alors, pour la science! Quelle source de biens pour l’humanité! Et quand Socrate, le plus sage et le plus instruit des hommes, avait pris pour maxime : La seule chose que je sais } c’est que je ne sais rien (ce qu’il pouvait bienfs’appliquer, lui qui n’avait point pris ses grades à l’Université), il avait également choisi pour devise ces deux mots gravés sur le temple de Delphes, yvan ««wrov, connais-toi toi-même.

Remettons-nous donc à l’étude avec le secours de la science nouvelle, et commençons par celle de l’homme, ce merveilleux assemblage de toutes les puissances de la nature, cet univers en petit, ce résumé de tous les prodiges de la création; le plus beau spectacle que Dieu ait donné à l’homme.

Nous vous appelons encore, comme nous vous avons toujours appelés. Mais comment avez-vous répondu, le plus souvent, à nos sollicitations fraternelles, faites au nom du progrès et de la charité?... Hélas! par le dédain et le sarcasme; quelquefois, par la colère et la persécution. Eh quoi ! messieurs, vous refusez même d’examiner ce qu’on signale à vos recherches avec tant de bonne foi ; vous dédaignez de chercher dans des expériences, faciles pour vous, la conviction qui nous anime! Cela vous dé-

rangerait, troublerait votre quiète existence, ferait faire un pii aux roses sybarites de vos trônes scientifiques! Et, quoique philosophes, vous aimez mieux vous fâcher, nous menacer! Oh! alors, nous vous dirons avec l’épigrammatistc ancien :

Les liassions sont toujours suspectes ; tu prends tes foudres, ô Jupiter , tu as donc tort !

Alpii. CIIOCAKNK.

Jury mnguctlqnc

d’encouragement et de récompense.

Lorsque tout s’apprêtait pour rendre un éclatant hommage aux hommes qui ont servi la cause du magnétisme, et que, déjà, des mesures étaient prises pour que la médaille de Mesmer fût frappée avec un revers indicateur, des troubles que nous n’avons pas besoin de rappeler vinrent couper court à l’élaboration des projets, et ajourner les résolutions. Le comité du Jury, après plusieurs tentatives de réunion, vient de décider que, ayant perdu plusieurs de ses membres, et ne se trouvant plus en nombre suffisant pour remplir sa mission, le Jury serait convoqué en assemblée générale extraordinaire dans le mois prochain. C’est dans cette réunion que l’on fixera l’époque où les médailles seront distribuées.

Nous déplorons ces retards, qui ressemblent à un oubli; mai« ce serait mal juger des intentions du Jury que de les lui attribuer. Chacun de nous a hâte, au contraire, de prouver la vive sympathie qu’il éprouve pour les travaux d’autrui, et d’ho-

norcr les hommes qui servirent la cause de l’humanité.

Un avis ultérieur fera connaître le jour de l’assemblée générale, et le Journal contiendra le rapport de ses délibérations.

VARIÉTÉS.

Un charmeur de serpents. — Vers la fin de l’année 1847, Je Passa¡ de Madras à Ceylan, tant pour jouir des brises fraîches pendant l’été que pour y visiter quelques amis. L’île prospérait alors sous le judicieux gouvernement de sir John Campbell. Le corps colonial, tous les corps constitués, les peuples de toutes les dénominations avaient en lui un ami sincère : partout régnaient le contentement et la joie. Les tam-tams retentissaient gaiement tous les soirs jusque sur le territoire des ir-rascibles Kandyans; en un mot, l’on était heureux et l’on se livrait au bonheur. Ce qu’on aurait pu dire contre Ceylan, c’est que son climat ne sympathisait ni avec la mélancolie ni avec la tristesse. En Angleterre, on a parfois un jour triste et sombre qui vous dispose à compatir aux malheureux, un jour où les brouillards qui obstruent la vue sont en rapport avec les nuages de l'imagination ; mais ce n’est point là Ceylan ; ce n’est point cette île dont on peut dire avec vérité qu’elle est toujours riante. Là, point d’hiver qui vienne couvrir le brillant paysage sous son linceul de neige; point de bise

d’automne pour dépouiller les arbres de leur feuillage; point de bourgeons flétris par la gelée; sur cette admirable scène, ce ne sont que de brillants oiseaux, des coquillages ou des fleurs! Ceylan, c'est la représentation du paradis sous la forme la plus séduisante qu’il soit donné à une imagination sensuelle de concevoir.

A Colombo, la métropole, on peut le dire, de l’île, je rencontrai un ami qui a depuis perdu la vie sur le champ de bataille de Sobran , l’infortuné capitaine Campbell, du 14e régiment, fds du gouverneur. Jamais plus galant homme ne porta le3 ¿paillettes avec autant de distinction que le capitaine Arthur Wellington Campbell. —Paix à ses mânes !

Pendant mon séjour, le capitaine découvrit un matin, au moment d’entrer dans son bain, une énorme cobra (i) couchée en rond à quelques pas de lui. Sous les tropiques, ce n’est pas chose très-rare de se trouver dans le voisinage de si dangereux reptiles; mais, à moins qu’on ne marche sur eux ou qu’on ne les irrite, ils ne sont nullement enclins à attaquer. Ce serpent ayant été jugé l’un des plus grands de son espèce, le capitaine résolut de le tuer et de l’envoyer au Musée britannique; et comme, en même temps, l’occasion lui paraissait belle pour s’assurer du pouvoir tant vanté des charmeurs de serpents, il en envoya chercher un qui demeurait à quelques milles de distance, et qu’on disait très-habile dans son art.

(1) Nom portugais du serpent à lunettes : Voyez Lacépède , Histoire naturelle des Reptiles, article Naja. — Voyez aussi dans ce Journal, tome III, p. 92, et tome VI, p. 169, sur le Charme d'autres espèces dans des lieux différents. (.Voie de la rédaction).

Grand fut le nombre des uniformes rouges qui se réunirent sous le verandah du capitaine Campbell, pour être témoins du pouvoir de l’enchanteur. Nous avions pris à la main , pour la plupart, de grandes feuilles de talipot en guise de boucliers, dans le cas où l'ennemi viendrait à se diriger sur nous ; mais sa seigneurie reposait tranquillement dans une mue à poulet à l’extrémité de la cour, se doutant aussi peu du charme qui l’attendait, qu’un jeune provincial entrant pour la première fois dans le salon où se trouve la beauté qui doit le fasciner.

L’enchanteur était un vieillard shingalais ; il s’avança vers la mue, et commença ce chant singu-lièrement monotone qui est si commun chez les peuples de toutes les parties de l’Orient. La cobra, troublée, se déroula, et nous découvrit la circonférence de son énorme corps, admirablement bariolé de noir et de blanc, mais sans paraitre le moins du monde disposée à s’échapper de sa prison. Le charmeur la tira par la queue hors de son asile, et se cacha aussitôt sans interrompre son chant. La cobra, de plus en plus visiblement troublée, se dressa sur la partie inférieure de son corps; et déploya son chaperon comme si elle s’apprêtait à s’élancer; mais le charmeur, loin d’être intimidé, lui fit face, et, par un mouvement rectangulaire, chantant toujours, il s’approcha tout près du reptile, en lui poussant un chilfon rouge au bout d’un bâton, ce qui parut grandement l’irriter, à en juger par scs sifflements. Pendant environ quinze minutes, le vieillard continua sa manœuvre, marchant, tournant, chantant, et je commençais à n’être pas sans inquiétude sur la fin de cette lutte. L’homme en

opposition avec le serpent, quelle plus émouvante représentation !

Le serpent, toujours plus excité ou charmé, avait les yeux fixés sur l'homme, dont il semblait suivre les évolutions, et il agitait sa crête en cadence, comme s’il eût accompagné le chant du vieillard, qui, bien que fatigué déjà, mais plein de confiance dans son art, prenait avec le serpent toutes sortes de libertés. D’abord il lui jeta un balai, puis une toile, et puis enfin un poulet que la cobra accueillit avec des sifflements, et qu’elle mordit. Le poulet expira dans l’espace de trois minutes : quant à l’homme, elle n’essaya pas même de l’attaquer. Mais quelle fut notre terreur lorsque nous vîmes le charmeur, comme pôur se glorifier à nos yeux de son taiomphe , s’approcher de la cobra, chantant toujours , la toucher, la caresser de la main sur la tête et sur le col, et, à notre extrême surprise, recommencer plusieurs fois avec impunité!

L’opération avait duré plus d’une heure : la scène se passait sous nos yeux ; nous pouvions être certains qu’il n’y avait là ni escamotage ni supercherie, car l’enchanteur n’avait pour tout vêtement qu’un morceau de toile autour des reins, et il ne faisait même pas une profession de l’art d’enchanter les serpents. Existerait-il une influence magnétique pour les bêtes comme pour les personnes? Ce serait là , certes , un sujet précieux d’études et d’expériences.

(Revue britannique).

Les muets de Bellecombe. — Le fait que je vais rapporter est assez curieux et assez peu ordi-

naire pour fixer l’attention publique. La science médicale, la persuasion, la force, ont tour à tour montré leur impuissance à la faire cesser comme à en indiquer la cause. Faudra-t-il donc se contenter longtemps encore de la seule explication très-vague de fanatisme et d’ignorance?

Sur l'un des plateaux les plus élevés des monts Jura, qui domine la ville de Saint-Claude, dans un pays perdu et enseveli sous les neiges durant moitié de l’année, vit la famille des Durafour, riches cultivateurs : trois fils, une fille , le père et la mère la composent. Dès le commencement de l’hiver dernier on aperçut en eux une grande tristesse, on chercha à en connaître le motif, ils répondirent peu ou pas, et enfin, depuis Noël, nul ne put tirer d’eux une seule parole. Tous rapports avec leurs semblables avaient cessé, et ils vivaient dans la plus grande misère plutôt que de renouveler leurs provisions. La curiosité publique se préoccupa bientôt de ce fait étrange, et de toutes parts on vint voir les fous, les muets de Bellecombe. Chacun voulut tenter de les faire parler ; questions, prières, menaces , violences, tout fut vain, ils restèrent inébranlables dans leur résolution. Une fois, un vigoureux gaillard saisit le fils aîné, qui paraissait exercer sur la famille une grande influence, le Jia sous les bras par une corde, et le descendit dans un puits dans l’eau jusques au menton. Si tu ne parles, lui dit-il, je te noie. L’autre resta impassible, n’opposant, comme toujours, qu’une résistance inerte à cette violence. Un autre jour, un jeune homme s’approcha de la fille, et lui fit quelques caresses : elle sourit, prit son soulier, en asséna

sur le nez du galant un coup vigoureux qui calma son ardeur. La superstition et l’ignorance qui régnent dans ces montagnes crièrent à la magie : 011 leur avait jeté un sort, cela ne fit pas le moindre doute; iin fameux devin suisse fut mandé en tonte hâte; il vint, répandit sur le loyer ses philtres les plus puissants, fit tous les gestes cabalistiques imaginables, les muets eux-mêmes rirent de ses efforts, et ceux qui l’avaient amené dirent que du moment où celui-là n’y avait rien pu, nul n’y pourrait; el, en effet, les choses en sont encore au même élat. L’autorité locale craignant que ce mystère ne cachât quelques méfaits, crut devoir s’en occuper : le préfet, le procureur do la République, la gendarmerie , se transportèrent à Bellecoinbe. Leurs investigations n’ayant ancun succès, ils crurent que l’isolement, que l’absenco de l’influence du frère ainé surtout, finirait par faire parler quelques membres de la famille. On conduisit les deux plus jeunes fils, et la fille, à l’hôpital de Saint-Clpude. La jeune fille, à qui ce mutisme paraissait peser davantage, répondit effectivement à quelques questions ; on sut que son frère l’avait souvent menacée pour l’obliger au silence ; mais tout se borna là, et la justice en est réduite, comme le public, à des conjectures. On dit qu’une femme qui aurait quitté le pays, avait menacé ces gens, naturellement superstitieux , pour en tirer profit. Que l’influence de ses sorts, leur aurait-elle dit, avait fait périr leur

vache, ravagé leur moisson....... etc. Mais, en

somme, c’esl à n’y rien comprendre, et le temps seul, peut-être, lèvera le voile qui couvre ce mystère.

Je voulus voir par moi-même aussi la vérité de tout ce que j’avais entendu conter. Je fis l’ascension des montagnes; un homme du pays, ami des Durafour me conduisit à leur ferme. Lorsque nous entrâmes, ils étaient à déjeûner, et ne levèrent pas même la tête pour nous voir. Les trois couverts des absents étaient sur la table comme s’ils avaient dû venir; un feu ardent brûlait dans le poêle, malgré la chaleur de la saison. Sur leurs physionomies se peignaient le fanatisme et la ténacité ; chez la mère surtout, figure osseuse el jaune, nez serré, yeux petits. Chez le fils il s’y joignait une expression de ruse et de malice. Mon conducteur m’avait mis au fait de toutes leurs habitudes. A plusieurs reprises il s’était caché pour entendre leur conversation entre eux. Souvent ils se plaignaient des violences des étrangers. Le fils aîné disait aux autres : « Prenons garde de faire des fautes, cela retarderait nos projets. Le temps n’est pas long encore; nous voilà à Pâques, nous serons bientôt au i*r mai. Ayez grand soin, lorsque vous ouvrez une porte, de la fermer après vous ; si un obstacle l’arrête, ne la lâchez que lorsqu’il aura cédé. Si un étranger prend un meuble, c’est nn objet perdu, il ne faut plus y toucher. Cependant, ce qui est de force n’est pas faute. » Si rien, malheureusement, dans tous ces propos, ne peut donner de renseignements utiles, du moins on y voit un projet, une idée arrêtée, tout un règlement dont ils ne doivent point s’écarter.

Nous livrons ces faits à la réflexion, en attendant que le temps vienne nous apporter une solution, si aucuns moyens humains ne peuvent l’accélérer. Ils attireront ailleurs, comme ici sans doule, l’ai-

tcntion par leur sigularité. On peut voir, on effet, un individu atteint d’une idée fixe, d’une iolie momentanée , se condamner pour un temps au mutisme, comme les fanatiques indiens , qui se privent volontairement de l’usage d’un membre; mais voir six individus réunis dans une semblable idée, et contre lesquels viennent échouer toutes les tentatives ; en vérité, ceci passe l’extraordinaire, et c’est pourquoi j’ai voulu le soumettre aux méditations de tous les lecteurs du Journal du Magnétisme.

DE UREVANS d’ALROIS.

— La relation qui précède nous est envoyée par une personne digne de toute confiance , qui nous tiendra au courant des péripéties de cette étrange affaire, dont la fin ne peut se faire attendre longtemps.

Bien que ce mutisme n’ait aucun rapport apparent avec le magnétisme, nous le mentionnons cependant, persuadés que ce n’est qu’en examinant tout ce qui est anormal, exceptionnel, qu’on pourra connaître la cause des faits qui, sous les noms d’imagination, d’imilation, etc., ont toujours été l’écueil de la science.

Revue des Journaux. — La Liberté du 9 juillet, contient l’appréciation laudative des facultés de la somnambule eæfra-lucide, par un habitant d’Oran.

BIBLIOGRAPHIE.

LE CHRIST QUALIFIÉ MAGNÉTISEUR ¡ par l’abbé Almic-nana. lirocbure in-1 '2. — Paris, \ 849. Chez l’Auteur.

M. Almignana est idolâtre de la vérité; il la cherche avec passion. Quand une question l’embarrasse, il va partout en demander la solution , et il ne s’arrête qu’après l’avoir trouvée. Cet amour du vrai lui fait mettre à contribution toutes les lumières : laïcs et prêtres, juifs et chrétiens, catholiques et protestants sont interrogés, et il faut que tout le monde lui réponde. Savoir est son but ; il se soumet à toutes les exigences pour y parvenir.

Dans des démêlés théologiques avec les rabbins, il avait appris d’eux que les faits magnétiques rendaient parfaitement compte de la puissance exercée par Jésus : il a voulu s’en assurer. De là sa conversion au magnétisme, dont les lecteurs habituels de ce Journal auront sans doute gardé le souvenir. Fortifié de ces nouvelles connaissances, l’infatigable abbé est allé reprendre ses conférences avec les ministres du culte judaïque. L’opuscule qu'il vient de

publier n’en est que le résultat au point de vue magnétique.

M. Almignana admet tous les faits du magnétisme, même ceux qui, par plus d’un côté, jettent la lumière sur les guérisons miraculeuses que toutes les religions revendiquent. C’est enfin un adepte fervent, un croyant éclairé, qui serait même, au besoin, un défenseur zélé. Cependant il croit qu’il n’y a nulle parité entre nos œuvres et celles de Christ. Les arguments qu’il oppose à l’opinion des rabbins, sont d’un ordre élevé, et trop subtils pour pouvoir être brièvement exposés. Nous craindrions d’en altérer le sens en en concisant l'expression.

Voici seulement les réflexions que le sujet nous inspire.

N’ayant nul penchant pour les controverses religieuses; porté, par sentiment et par devoir, à l’établissement du magnétisme sur des bases solides , nous évitons , autant que possible, les discussions ecclésiastiques. Mais ce que nous ne voulons faire est précisément ce qui convient à d’autres hommes. A nous la science positive, les données rigoureuses, les faits utiles; à eux les conjectures, les spéculations, les doctrines : chacun a sa part de cette manne divine.

M. Almignana dit, en terminant, que si on lui prouvait que Jésus-Christ n’élait qu’un magnétiseur, il se soumettrait à la circoncision judaïque avec autant de sincérité qu’il a reçu le sacerdoce catholique. Nous avouons, nous, que nous ne nous ferions pas faire la plus petite opération pour une opinion; car, quoique religieux, nous voulons

n’embrasser aucune croyance à tout jamais, ni porter un signe qui enchaîne noire esprit. Nos idées sur ce point peuvent être fausses; mais elles ont le précieux avantage de nous laisser la liberté.

nu potkt.

KINÉSITHÉRAPIE, etc.j par le Docteur Crorgii. ürochme in-8.

— Paris, 1817. Chez Germbr-IUiiliîrb.

Voici un livre où le mot de magnétisme n’est pas même prononcé, mais dont la substance est en connexion parfaite avec l’objet constant de nos études.

C’est une exposition abrégée du système dcLlng, sur l’éducation physique.

L’auteur, qui habite ordinairement la Suède, a, durant deux années de séjour ici, souvent fréquenté nos séances; et s’il n’a point parlé du magnétisme dans cet écrit, c’est qu’il ne l’a pas pu.

Kinésithérapie signifie : traitement des maladies par le mouvement; c’est-à-dire, gymnastique médicale.

Les anciens faisaient, comme on sait, un grand usage de cette pratique, tant pour le développement du corps que pour la cure des infirmités.

Cet usage s’est perpétué jusqu’à nos jours; mais de celte gymnastique empirique à la méthode de Ling, il y a la différence de l’ignorance au savoir.

Je suivais la clinique de M. Georgii, depuis une

quinzaine, lorsque la révolution de février éclata ; ses malades, presque tous étrangers, s'enfuirent épouvantés : je ne pus conséquemment constater rien de positif. Mais, du peu que j’ai vu, il m’a paru résulter, d’une part, que le magnétisme n’est pas tout-à-fait étranger aux guérisons obtenues par ce moyen, et de l’autre, que la kinésithérapie est quelquefois la cause d’elfets attribués au magnétisme animal. C’est d’ailleurs l’opinion de M. Georgii, et le docteur Taissèire de Saint-Mars, qui a plus longtemps que moi suivi ce genre de traitement , la partage entièrement.

Ne pouvant résumer ici le contenu de cet ouvrage , je me borne à le signaler à l’attention des magnétiseurs studieux. Puisse l’aperçu superficiel que je viens d’en faire en engager quelques-uns à chercher les points de contact que peuvent avoir les méthodes de Ling et de Mesmer.

HÉBERT (de Garnay.)

PETITE CORRESPONDANCE.

Avis. — Les Cours élémentaires de Magnétisme théorique et pratique, par M. du Potet, interrompus par la saison des vacances , recommenceront vers le 20 octobre. MM. les lilèves inscrits pour le premier Cours sont priés de considérer cet avis comme dé-finitif.

Le Gérant : HÉBERT (de Garnay).

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

Hôpital nicsinériqnc de Cnlcntln.

Journal des traitements faits de juin a décembre 1847; suivi dp rapports officiels, elc., publié par le gouvernement.

§ I. — CAS SE CHIRURGIE.

(Suite.)

Dix-septiéme observation.

Shaik Gopal, âgé de quarante-cinq ans, est porteur, depuis trente ans, d’une tumeur scrotale.

Entré le 21 septembre, et magnétisé selon la coutume, une heure et demie par jour, il fut parfaitement insensible le a3 ; mais M. Esdaile ne put l’opérer que le 25.

« Ce jour là l’insensibilité était moins complète, mais on passa outre. Le malade commença à crier vers le milieu de l’opération , et ne discontinua pas avant qu’elle fût achevée. Il remua aussi beaucoup ses jambes, cherchant à rapprocher ses genoux; mais il ne put y parvenir. Lorsque les artères furent liées, il cessa de s’agiter, mais non de se plaindre.

tome viii. — N" OS. — 25 juillet 18*9. H

« Comme il était déjà vieux, et que l’hémorrhagio avait été abondante, son pouls devint très-faibie. Je jugeai prudent de le réveiller, et je commençai à le démagnétiser. Ses plaintes, jusqu’alors confuses, devinrent intelligibles; il se lamentait (ayant toujours les yeux fermés) sur son triste 'sort de vivre pour être témoin le la mort fit; son fds. 11 se frappa la tête, la poitrine, et versa d'abondantes larmes, disant que Dieu l’avait destiné à survivre à tous ses enfants, etc. ; mais pas un mot relatif à sa situation. Je le démesmérisai un peu plus, et son rêve changea aussitôt de caractère. 11 joignit les mains, et protesta devant Allah qu’il ne s’enivrerait plus, et que jamais il boirait de taree, cause de tous ses malheurs. Je continuai de lui souffler sur les yeux, il s’en aperçut, et demanda à rester ainsi; je m’y refusai, en cherchant à le réveiller par de légères frictions sur les paupières ; alors il tenta de me frapper, et m’injuria avec fureur. Quelques minutes après, je lui jetai de l’eau froide sur les yeux, qu’il ouvrit enfin.

« Il paraissait éveillé. Je lui demandai qui j’étais, 11 me répondit : « Comment puis-je vous le dire sans « lunettes. » Je lui souillai de nouveau sur les yeux; il me reconnut. 11 ne souffrait, dit-il, nulle part, et ne voidait pas croire qu’on l’eût opéré; il fallut l'en convaincre. En voyant sa tumeur détachée, il dit que c’était la chose la plus extraordinaire du monde , et que tout ce qu’on lui avait rapporté sur mon hôpital était réel, qu’on y rendait les hommes entièrement insensibles à leurs souffrances. 11 avoua s’être quelquefois laissé aller au taree , mais il n’avait point éprouvé de récentes pertes de famille.

« Il y a une entière différence entre les plaintes d’un dormeur magnétique, qui paraît souffrir, et celles des patients ordinaires, sous l’impression du scalpel. Les mouvements du magnétisé sont vagues et sans objet, gênant à peine l’opérateur. Ses yeux ne s’ouvrent jamais, à moins que la trance ne soit tout à fait dissipée; et, ce qui est encore plus caractéristique, ses cris inarticulés durent souvent plus que dans l’état naturel. Ils se prolongent quelquefois plusieurs heures , lorsque, par suite d’hé-morrhagie, le délire s’ajoute à l’état mesmérique, comme il est arrivé pour Shaik Mannick, et Ram-dhun(i). Il existe une très-grande ressemblance entre lescriset mouvementsqui nous occupent et ceux qui se produisent dans l’hystérie, lesquels ont lieu sans le concours de la volonté, et sont oubliés à la fin de l’accès. On a souvent remarqué la même chose par l’éthérisation, et un chirurgien français a dit que ses patients criaient davantage depuis qu’il se servait de lether, quoiqu’ils fussent, d’ailleurs, inconscients du leurs actes et de leurs souffrances.

« On a pensé que les nerfs ganglionaircs avaient la propriété de transmettre les impressions sensitives aux nerfs moteurs, sans qu’elles fussent perçues, ce qui expliquerait la plupart des plaintes des dormeurs en question Le fait est que quand l’esprit est troublé, la vie volontaire, dont la conscience de la douleur paraît dépendre, n’est point incitée, et le cerveau semble réduit à la condition temporaire d’un ganglion reflexc ; ou s’il y a quel-

(t) Voyez ci-devant, page.">6t.

qui' sentiment de douleur, il est si imparfaitement porté au.siège «le la conscience qu’il n'en reste aucune trace dans la mémoire quand le dormeur recouvre ses sens. »

Dix-huitième observation.

Ramdoss, âgé de vingt-cinq ans, a une tumeur depuis neuf ans.

« Magnétisé pour la première fois le 29 septembre, â dix heures et demie, il était si profondément endormi à midi, que je l’opérai immédiatement. Jamais opération ne fut plus longue ni aussi fatigante, à cause de la dureté des parties devenues cartilagineuses sous l’influence des cautérisations qui furent employées poür résoudre cette tumeur. Le Malade, cependant, ne fit qu’hne légère grimâce au moment où je finissais. Il s’éveilla de lui-hiême Une demi-heure après la ligature des artères, ne soupçonnant même pas qu’on l’eût opéré; quand il en fut instruit, il exprima sa gratitude en disant que j’étais un dieu, etc. »

Dix-neuvième observation.

Buddunchunder Kowr, âgé de cinquante ans, était depuis onze ans affecté d’une tumeur.

« C’est un des cas les plus ennuyeux que nous ayons eus. Le malade, grand et vigoureux, n’avait point du tout le système nerveux affaibli. Il fut magnétisé lin mois et demi sans présenter de symplô-mes mosmériques ; ne pouvant le garder plus longtemps, j’essuyai de l'éthériser, mais il s’y refusa,

au lxml de deux inhalations : je le congédiai; mais il revint par intervalles, durant trois mois, se soumettre ;i de nouveaux essais. La mesmérisation était chaque fois interrompue par des accès de bronchite, et une inflammation périodique de la tumetr. Enfin, le a5 septembre, il s’endormit, et fut longuement et sévèrement éprouvé par le Dr Mouat. Comme l’examen avait beaucoup duré, je remis l'opération au lendemain ; mais nous fûmes désappointés, car pas possible ne fut de l’endormir. Le 3 octobre il s’endormit de nouveau, et, comme je ne pouvais avoir de confiance en sa constitution magnétique, je l’opérai aussitôt. Durant la dissection des téguments, le patient resta parfaitement calme, mais lorsque j’ouvris l’énorme sac , duquel environ vingt litres do liquide s’échappèrent en un moment, il gémit, poussa des cris inintelligibles, sans bouger pourtant. J’ai souvent vu la soustraction Soudaihe d’tltie grande quantité d’eau provenant soit d’ascite, soit d’hydrocèle, produire une violenté perturbation : je crois que ce fut cette secousse et non le scalpel qui troubla notre malade.

«Son poids étant devenu imperceptible, je le réveillai aussitôt que les principales artères Furent liées. Il recouvra immédiatement àes sens, et dit qu’il avait très-bien dormi. On lui fit prendre un peu d’eau-de-vie, et bientôt il se plaignit d’une cuisson locale dont on lui fit alors connaître la cause, il exprima sa reconnaissance en disant que j’étais le premier après Dieu; que je lui avais donné une seconde vie, etc., etc.

« Dans ce cas, comme dans beaucoup d’autres, un fait très-frappant fut observé : au moment où

la parfaite connaissance revint, toute trace de souffrance disparut instantanément des traits. »

Vingtième observation.

llamkisto Doss, âgé de trente-cinq ans, souffrait depuis trois ans d’une tumeur scrotale. Magnétisé le 8 octobre, il fut insensible à tout le lendemain.

« II commença à gémir vers le milieu de l’opération; puis il s’arqua en arrière comme en épis-thotonos; mais il ne fit aucun mouvement pour arrêter l’opération, et n’ouvrit point les yeux. »

Du reste nulle connaissance au réveil, comme les précédents.

Vingt et unième observation.

Susteedoss, âgé de trente-cinq ans, a la maladie commune depuis six ans.

Endormi dès la première séance, il aurait pu être opéré le jour même, car il subit les diverses épreuves d’anesthésie, durant uneheure, sans broncher: ce fut pour le lendemain i5 octobre.

Vers la fin seulement de l’opération, il tourna doucement la tête et eut des mouvements convulsifs de la face, mais sans ouvrir les yeux ni gémir. 11 s’éveilla spontanément peu après la ligature des artères, et dit qu’il ne souffrait nulle part, que rien n’avait dérangé son sommeil.

« (Je cas est un nouvel exemple de l’expression de la douleur sur le visage , disparaissant comme une ombre au retour de la connaissance ; il prouve la nature instinctive ot inconsciente de ces douleurs apparentes. Ce phénomène, mainte-

n.'int passé clans les faits physiologiques universellement admis, fut décrit par moi longtemps avant que l’élher s’employât en chirurgie. Voici ce que j’en disais dans mon rapport de décembre i8/(6, qui était le résultat de dix-huit mois d’une observation minutieuse (i). »

Vingt-deuxième observation.

Shaik Durrab, âgé de quarante-huit ans, a, comme les autres, une tumeur depuis huit ans.

Magnétisé selon la coutume depuis le 23 octobre, il fut opéré le 26. 11 resta calme durant l’opération; mais il s’éveilla avant que les vaisseaux fussent tous liés, et s’évanouit presque aussitôt. La circulation resta une demi-heure suspendue : une minute de plus lui aurait peut être été fatale.

Vingt-troisième observation.

Gopeedoss, ami de Bhugwandoss, qui fut opéré l’année dernière, à Hooghly. d’une tumeur serotale, a la même affection depuis cinq ans.

« Magnétisé une heure et demie, le 7 novembre, il ne lui fallut qu’une heure le lendemain pour être amené au degré le plus profond de l’aneslhésie. Après avoir été piqué, pincé, électrisé, sans en être affecté, je lui mis un charbon ardent sur la poitrine. Un léger frissonnement se manifesta, mais le malade n essaya pas d’écarter le feu. Une demi-minute après, il ouvrit soudainement les yeux; le croyant éveillé, je lui enlevai le charbon, et mon

(1) Voyo* Journal du Magnétisme, tome V, page 27t.

aide lui demanda, en bengali, ce qui l’avait éveillé. 11 ne répondit point. Je vis de suite, à la fixité de ses yeux, qu’il n’était pas réveillé. Presque aussitôt ses paupières s’agitèrent et se fermèrent spasmodiquement. Je recommençai à le piquer et sans exciter le plus faible signe de sensibilité. Une heure après il s’éveilla naturellement, ignorant ce qui s’était passé.

« L’opération eut lieu 109; il commença à gémir vers la fin, et fit quelques mouvements convulsifs. Au moment où la masse tomba, il dit à haute voix : Juggernath, et demanda à être éventé. 11 ouvrit les yeux et retomba instantanément en coma. Démcs-mérisé, il nia avoir invoqué Juggernath. »

Vingt-quatrième observation.

Horry, âgé de trente ans, portait une tumeur depuis cinq ans.

Magnétisé journellement depuis le 23 octobre, il fut opéré le 2 novembre, sans cris ni mouvements. Il avait précédemment enduré les piqûres, pinçures, l’électricité, le calorique, sans manifestation de sensibilité.

Vingt-cinquième observation.

Chundechurn, avocat à Silhct, âgé de quarante-deux ans, avait, depuis cinq ans, une tumeur considérable. Longtemps traité sans succès, il désespérait de guérir, lorsqu’il lut dans un journal bengali qu’un hôpital avait clé établi à Calcutta, pour la guérison do cette maladie.

« Lorsqu'une personne y va, disait ce journal, on

« la rend insensible par quelque procédé magique, « el on lui enlève sa tumeur sans aucune souf-

« franco. »

« Celte absurde prévention vient de ce que mon hôpital a presque exclusivement servi pour de tels cas; mais j’espère que les Européens désabuseront les indigènes en faisant connaître généralement qu'il va très-peu d’opérations qui ne puissent y être aussi pratiquées dans les mêmes conditions.

« Cet homme me montra la noie où il inscrivit alors mon nom et remplacement de l’hôpital. Cette indication lui avait suffi pour entreprendre le voyage qui dura vingt-deux jours en bateau. »

Entré le 28 octobre, il fut opéré le Ier novembre. La première moitié de l’opération eut lieu sans le moindre tressaillement; dans la seconde, ses traits s’altérèrent un peu. Eveillé quelques instants après le pansement, il dit ne souffrir nulle part; il ignorait l’événement.

La cicatrisation touchait à sa fin lorsqu’il fut soudainement atteint du choléra, il en mourut le i3 novembre.

Vingt-sixième observation.

Hurrochunder Chowdry, âgé de trente-six ans , est affecté d’une tumeur depuis douze ans; il est venu sur la recommandation dcRamdhun Nundy, précédemment opéré à l’hôpital.

Entré le 20 novembre, et magnétisé le jour même, il fut opéré le 22. « Je m’éloignai, dit M. Esdaile, au moment de son réveil, après avoir fait disparaître toutes traces de l’opération. 11 répondit aux de-

mandes de M. Ilalliday qu’il était venu pour être guéri; qu’il ne l’était pas; que le docteur l’avait visité la veille, mais qu il n’était pas encore venu ce jour-là. On lui montra alors sa tumeur détachée. »

Vingt-septième observation.

Karlick, âgé de trente-cinq ans, avait une tumeur depuis dix ans. Cette infirmité commença par un hydrocèle du côté droit, qui fut percé il y a environ six ans. Il était sujet à la fièvre périodique deux fois par mois.

Dès la première magnétisation, qui eut lieu le 2 décembre, il fut indifférent à toutes les épreuves d’insensibilité, sauf au premier contact d’un charbon ardent, qu’il ne sentit point à une seconde application. On aurait pu l’opérer sur l’heure, mais il ne le fut que le surlendemain. Un peu d’agitation se manifesta lors de la ligature des vaisseaux, et le réveil vint aussitôt.

Vingl-huilième observation.

Luckhynarain Dey, âgé de trente-cinq ans, est affecté d’éléphanliasis aux deux jambes, et d’une tumeur scrotale, depuis dix ans. Cette double maladie avait été précédée d’une fièvre venant deux fois par mois, au changement de lune.

Magnétisé pour la première fois le j décembre, il résista le jour même à toutes les épreuves anesthésiques, excepté au contact d’un charbon ardent, qui le fit légèrement tressaillir. On ne put l’éveiller qu’en lui jetant de l’eau froide sur les yeux.

Le lendemain, on fit viln*cr à ses oreilles un bus-

sin métallique, qui rendait des sons très-aigus, inaudibles pour lui. Du sulfate de magnésie déposé sur sa langue ne fut point goûté. Du carbonate d’ammoniaque placé sous le nez fut respiré comme si c’était de l’air. On fut obligé de l’éveiller encore par l’eau froide. En recouvrant ses sens il éprouva des nausées, et dit qu’il avait dans la bouche une amertume dégoûtante, dont il ne pouvait se rendre compte.

« L’opération, retardée à la demande de diverses personnes qui désiraient en être témoins, fut faite, le 6, par mon aide Baboo Bunddcnchunder Chow-dry. Le malade soutint la dissection des parties avec autant d’indifférence que s’il eût été mort. Eveillé un quart d’heure après, il ignorait que ce fût fini, et quand 011 le lui dit, il fut transporté de joie, demandant en grâce qu’on le débarrassât de son éléphantiasis par le même moyen. »

Vingt-neuvième observation.

Kasseonaulh Ghose, âgé de quarante ans, a une tumeur depuis dix ans.

Dès la deuxième mesmérisation , le 5 décembre, il devint insensible aux piqûres, pinçurcs, au bruit, aux saveurs. O11 l’opéra séance tenante. Du commencement à la fin, il ofTril l’impassibilité d'un cadavre, on distinguait en apparence un seul petit tremblement des pouces.

Au réveil, venu spontanément au bout d’une demi-heure, ignorance totale de l'événement.

Trentième observation.

« Bamdoss, opéré avec succès d’une tumeur, au début de mes expériences, revint à l’hôpital le 21 décembre, avec une plaie baveuse, large de 2 centimètres, à l’origine inférieure du pénis. Je résolus de la cautériser avec l’acide nitrique, s’il pouvait être profondément entraver; à la seconde fois, j’appliquai le caustique d’abord sur les lèvres de la plaie pour voir jusqu’à quel point il pourrait le supporter : ce fut comme si on lui eût mis de l’eau tiède. Aucun signe de sensibilité n’apparut, et, en s’éveillant, il dit moins souffrir qu’avant d’étre magnétisé. »

[La fin au prochain numéro.)

CLINIQUE MAGNÉTIQUE.

M"e Angélique B***, atteinte, depuis huit ans, d’une maladie fort cruelle, se soumit, à différentes époques, avec la plus courageuse persévérance, aux traitements les plus énergiques de la médecine classique. Tôt nomina census. Le mal fit des progrès rapides, et elle se vit bientôt abandonnée aux chances de la Providence.

Lorsque je vis cette malade pour la première fois, c’était au mois de décembre 1S'§2 ; son corps était courbé sous le poids des souffrances les plus atroces, ses forces paraissaient épuisées; elle accusait

une violente douleur à l’épigastre et aux parois tho-raciques, surtout au côté gauche. Ces parties étaient fort sensibles ¡111 toucher; des palpitations cl une oppression constantes, accompagnées de battements extraordinaires aux deux côtés de l’abdomen, venaient compliquer cet étal. Un anévrisme de l’aorte ventrale avait été diagnostiqué antérieurement par un des médecins qui lui avaient donné des soins. Le. météorisme et les inégalités du ventre avaient fait croire à l’existence de tumeurs, etc., etc. L’écoulement des règles, fort imparfait depuis 1 invasion de la maladie, avait cessé entièrement; la peau était jaune et terreuse, la constipsftion opiniâtre; les digestions se faisaient très-difficilement, le pouls était filiforme, mais régulier el peu fréquent.

Le Dr Desruisseaux, qui examina cette malade avec le plus grand soin, s’abstint, dans son incertitude, de porter un jugement sur cette singulière affection, tout en penchant avec moi pour soupçonner une gastro-entéralgie fort compliquée.

M,u Angélique avait reporté depuis longtemps tout son espoir sur le magnétisme, mais les conseils, je dirai môme les exigences d’un confesseur ignorant et fanatique , avaient jusqu’alors effrayé sa conscience par trop timorée. Enfin, lasse de souffrances, ces ordres avaient été enfreints. Je la soumis pendant un mois à un traitement magnétique, sans produire chez elle d’autres phénomènes qu’un soulagement momentané. Toutes mes tentatives ne purent développer chez elle la plus légère disposition au sommeil magnétique. Ce traitement fut interrompu jusqu’au 27 mars époque à laquelle Mllc Angélique réclama mes soins pour sa

niece, jeune fille de onze ans, dont je rapporterai plus tard la curieuse observation. Celte enfant, d’une constitution rachilique, fut magnétisée el somnambulisée dès la première séance ; ce fui d'après ses conseils, pendant un sommeil très-lucide, que je soumis sa taille à un nouveau mode de magnétisation (les courants), que je n’avais osé employer chez un sujet aussi affaibli. Cette méthode ne tarda pas à me réussir ; des crises fort douloureuses faisaient place à un bien-être général qui se prolongeait pendant plusieurs jours; les accidents ne revenaient qu’avec beaucoup moins d’intensité.

Un voyage forcé m'éloigna de ma malade jusqu’au mois de novembre. Toutes ses souffrances avaient alors reparu. Armé de courage et d’espérance, je me remis à l’ouvrage; au bout d’un mois de magnétisation, presque tous les accidents s’étaient dissipés; les règles avaient reparu, les fonctions digestives se faisaient assez bien; les douleurs de l’épi— gastre et des hypochondres 11e revenaient qu’à de rares intervalles, line somnolence assez prononcée se développait naturellement pendant chaque séance; les membres supérieurs, agités d’un tremblement cataleptique, sc raidissaient avec violence sous l’empire de courants dirigés sur l’épigastre et les deux côtés du ventre. Le mouvement des bras imitait les signes télégraphiques les plus variés. Une émission de larmes abondantes terminait toujours cet éréthisme nerveux. L’amélioration marchait en raison de la puissance des crises; quelques phénomènes de lucidité médicale vinrent se joindre à cel état singulier. M1'* Angélique se prescrivit des fumigations au siège, avec des feuilles d’Ièble, pout sli-

muler une abondante transpiration. Ce trailomcnt produisit le résultat attendu , et par suite tin grand soulagement. Le lendemain, nouvelle prescription d’un large cataplasme de feuilles de betteraves sur l’estomac et le côté gauche, dans le but de rubé-lier la peau. Compresses imbibées d’eau de verveine pour modérer l’inflammation sans la dissiper entièrement. Le cataplasme fut posé à six heures du soir, et la violence des douleurs força la malade à le retirer à deux heures du matin.

A ma visite, je m’assurai que la peau était fortement rubéfiée. Le lendemain, même application: la rougeur était beaucoup plus intense. L’infusé de verveine ne tarda pas à dissiper en grande partie la rougeur de la peau. M11* Angélique s’ordonna trente grammes de sel de sedlitz dans un demi-litre d’eau; même dose le lendemain. Enfin, le troisième jour, quarante-cinq grammes d’huile de ricin. Ces purgatifs entraînèrent une énorme débâcle de matières muqueuses mélangées de pseudo-mem-branes fort épaisses. La malade se félicita beaucoup, pendant son somnambulisme, de ces résultats. Elle se prescrit un vésicatoire volant sur l’hypochondre gauche, une forte infusion d’absinthe tous les matins à jeun, et une infusion de houblon pour unique boisson pendant ses repas. Viandes ronges.

Je ferai observer que sa lucidité ne piit l’éclairer sur la nature de sa maladie ; tous les remèdes appropriés à son état se présentaient instinctivement à son esprit. Le somnambulisme se développait à la simple présentation de la main devant l’épigastrc. La malade me défendit avec la plus grande instance les ¡•tissas ou les courants sur la téte; la magnétisation

ne consistait alors qu’en courants sur le côté gauche et l’os to mac , et passes entraînantes exercées à une grande distance de. la somnambule. 1a dégagement indispensable dans ce traitement a toujours été fort long. La guérison était à peu près complète au mois de décembre i843, lorsqu’une maladie assez grave m’empêcha de terminer ce traitement. Les occupations urgentes de mon précieux collaborateur, M. Alphonse Lecavelier, au dévouement duquel je fus obligé de recourir plusieurs fois pendant le cours de cette longue maladie, ne lui permirent pas de me remplacer. J’appris alors que M"* Angélique était exposée chaque jour à une somnolence des plus pénibles. Des propos perfides exaltèrent son imagination, en lui représentant cet état anormal comme le résultat d’expériences coupables tentées sur elle par scs magnétiseurs. Uneespèce de monomanie furieuse lui fit oublier nos soins affectueux et complètement désintéressés ; elle s’abandonna aux propos les plus injurieux et aux menaces les plus ridicules. M. Alphonse Lecavelier ne balança pas, à ma sollicitation, à négliger ses affaires pour porter secours à cette malheureuse insensée. Il parvint promptement à rappeler un peu de calme dans son esprit, sans cependant réussir à dissiper entièrement cette funeste somnolence.

Aussitôt que je fus entré en convalescence, je me rendis auprès de M'1® Angélique; tous mes raisonnements ne purent combattre ses préventions absurdes; tous mes efforts magnétiques échouèrent contre cet irrésistible assoupissement. Le. somnambulisme n’avait pas cessé, mais l’intuition médicale avait complètement disparu. J'eus alors l’inspira-

tion de profiter do cette disposition incessante au sommeil, pour plonger la malade dans le sommeil magnétique le plus profond (j’avais eu antérieurement l’occasion d’apprécier l'avantage de cette méthode) , je la fis mettre au lit à quatre heures du soir, et l’endormis du sommeil magnétique; elle me promit de ne faire aucune tenlative pour sortir de cet état. Le lendemain, à neuf heures du matin, elle ne s’était pas réveillée, et paraissait jouir de la béatitude la plus complète; je la réveillai sans peine, et reconnus avec joie une énorme amélioration du système nerveux. La somnolence ne revint pas. J’eus recours à ce mode de traitement pendant quinze jours , sans obtenir d’autres phénomènes magnétiques qu’un sommeil agréable et réparateur, que je pouvais prolonger à volonté. L’instinct médical n’a jamais reparu.

Depuis cette époque, MUo Angélique jouit de la santé la plus parfaite, et à l’heure où je rédige celte observation, l’opinion publique a pris soin de m'apprendre qu’elle n’a conservé de cette maladie qu’un sentiment de répulsion pour ses magnétiseurs.

D' Alfred PERRIER.

Caen. Juillet 1849.

A Monsieur Ilébert (de Garnay).

Voici, mon cher ami, une observation curieuse.

M. du Potet nous disait un jour : «Je suis sur que le magnétisme réduirait deshernies étranglées. » Moi qui étais fort (songez! un prosecteur d’anatomie , c’est fort par nature, par prédestination) ; donc, moi très fort, j’ouvre do grands yeux , et mu

permets de sourire in petto, et de douter de toute la force de ma compréhension , et même je pardonne majestueusement cet excès mesmérien , en disant : 11 a oublié son anatomie. Mais, mon cher, voici qui vient de me corriger pour l’avenir.

Un de mes parents, Kdme Flogny, âgé de cinquante-six ans, demeurant à Mérey (Yonne), portait une hernie depuis trente ans, sans jamais en avoir été incommodé, bien qu’il n’eût pas de bandago. 11 y a quinze jours, ce brave homme s’occupait à ramasser des débris de chaume jetés à terre par les ouvriers qui découvraient sa maison, occupation qui le tint continuellement courbé, les géniloires pendantes.

Probablement l’anse intestinale ordinaire entraîna une porlion voisine, qui distendit le sac herniaire hors de coutume, et de là inflammation.

A minuit on vient me chercher. Je trouve le malade pâle, respirant à peine; point de selles , vomissements fréquents. S’il m’eût été permis de me tromper sur le faciès j’eus pensé au choléra ; songez ! nous étions en pleine épidémie! Je vais pour examiner l'abdomen , le malade s’y oppose. « Que diable, lui dis-je, vous n’êtes pas une femme! » Je le découvre de force, et j’aperçois une tumeur énorme (i5 cent, de long, 20 de circonférence.) « Mais c’est une hernie! m'écriai-je ; que ne le disiez-vous donc de suite. — Oh, cousin , voyez-vous, ça se cache, ces infirmités là! » lit j’eus toutes les peines du monde à lui faire comprendre que cette infirmité était très-commune à notre époque, et qu'il n’y avait rien de déshonorant pour lui.

Enfin j’examine les vomissements. Déjà des ma-

tières stercoralcs ! Je tente le taxi», une, deux, trois fois; point de succès, lit certes je fus à assez bonne école pour dire qu’alors il n’y avait plus d’espoir que dans le bistouri. J’envoie chercher un confrère immédiatement, pour procéder à l’opération. Les accidents se succédaient d’une manière effrayante. 11 élait quatre heures du matin; j’attendais.

Tout-à-coup une idée lumineuse, fatidique, se lève en mon cerveau : le dire de M. du Potct. — Voici ma main sur la tumeur, tans mouvement, sans pression, simplement appliquée. Notez bien ceci; c’est important.

Cinq minutes, dix minutes, un quart d’heure, c’est long en magnétisme, dans une semblable perplexité. — Rien. — Vingt minutes, vingt-cinq minutes; mon homme se tourmentait..... et rien. Les

vomissements avaient cesse, et les coliques se calmaient... Soudain la sueur me monte au front; « toutes mes phrènes, métaphrènes et diaphragmes étaient tendus et suspendus pour incoruifistibulcr dans la gibecière de mon entendement (i) » ce qui venait de se passer.

Je venais de sentir un mouvement vermiculaire comme celui d’un scrotum refroidi, puis quelque! chose me glisser sous la main très-doucement : c’était l’anse intestinale qui faisait des siennes, et se permettait de rentrer honnêtement en son logis. « Ça y est, » me crie le malade; et immédiatement une selle ronflante, qu’il ne peut retenir, inonde son lit.

J’étais attéré. Je ne puis m’empêcher de rire dans

(I) Haletais, 111,35.

mon escient en relatant ce fait; ma surprise était épouvantable ; je tiens à mon expression. « Rentrée ! fis-je avec un profond soupjr; il aura donc toujours raison, ce vieux sorcier de magicien. » Je tiens encore à mon expression, pour faire comprendre combien jetais désappointé, moi qui tenais tout à l’heure une magnifique opération, et avais été assez innocent pour me faire un puff s j’étais pétrifié. Mais comment diable le magnétisme a-t-il réduit cette hernie? Je croyais pourtant la chirurgie à l’abri des attaques de Mesmer..... Et me voici me remémorant toute l’histoire des hernies.....Je me souviens

qu’un interne de l’Ilôtel-Dieu ayant élhérisé 1111 malade pour une dernière tentative de taxis, sentit l’inlestin rentrer comme de lui-même à la première pressionet qu’il expliquait ce fait par le relâchement des tissus blancs dont l’anneau est formé. Le magnétisme aurait donc relâché les ligaments, ce n’est pas la première fois qu’il se rencontre avec l’éther. Mais comment l’intestin est-il rentré tout seul, sans pression? 11 est de fait médical qu’un purgatif violent a déterminé seul la rentrée de hernies; er, que faisait là ce purgatif? Il éveillait tout bonnement le mouvement péristaltique, et l’anse emprisonnée revenait à la liberté. Yoici bien mon affaire : le magnétisme endormeur par excellence, a changé de rôle; il a éveillé, tonifié, revivifié. D’un côté il relâchait les ligaments, de l’autre il rappelait à sa place l’intestin descendu ; d’qne pierre deux coups : j’éthérisais et purgeais , et cela simplicc manu.

Mais du reste, pensai-je, il n’en pouvait être autrement. Nous guérissons le tétanos; la hernie est

admise comme un tétanos partiel, donc... ; el voici que mon prodige devenait simple comme tisane de violette.

Celte observation est très-sérieuse; nous en comptons bien peu , que je sache; mais impossible de vous la donner en d’autres termes, mon cher; elle perdrait son naturel.

La médecine et la chirurgie battues par le magnétisme, sous la même cape, c’est admirable! Rien de drôle comme ma physionomie d'alors : mon doute puni, mon petit amour-propre vexé; celait curieux !

Adonq, mon cher ami, réhabilitez-moi auprès du maître , dont le cœur fut toujours si débonnaire envers moi; je m’incline à tout jamais devant sa prodigieuse expérience , avec parfaite contrition. La Bible l’a bien dit :

In antiquu est sapienlia, et mullo tempore piiticntia. (Job., XII , 12.)

Tout à vous, de cœur,

E. V. LÉGER.

BIBLIOGRAPHIE.

HISTOIRE DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE, par M. Louis Ulanc. — Paris, 1847.

L’auteur, remontant aux causes qui ont amené le mouvement de 89, a inséré, dans le second volume, un chapitre sur les révolutionnaires mystiques. Sous cette dénomination, il comprend Ca-glioslro, Saint-Marlin, Mesmer, etc. Voici quelques extraits ayant un rapport direct avec le magnétisme.

« Mais à une société avide d’excilations, des agitateurs invisibles 11c suffisaient pas : il lui fallait des prodiges qui fissent spectacle, des élonnemenls tumultueux; et, tandis que le martinisme s’attaquait silencieusement aux hases de l’ancien monde moral , il se passait, à la place Vendôme, des scènes où tonies les lois ordinaires du monde physique paraissaient renversées.

«Au milieu d’une grande salle, autour d’une cuve remplie d’eau sulfureuse, refermée par un couvercle , et au fond de laquelle des bouteilles

pleines d'eau se trouvaient couchées . les unes en rayons convergents et ie goulot tourné vers le centre de. la cuve, les autres dans une position symétrique et en sens contraire, vous eussiez vu assis , pâles de douleur ou d’émotion, de nombreux malades. Pour qu’entre eux circulât plus facilement le fluide mystérieux auquel on attribuait le pouvoir de les guérir, ils se touchaient par les bras, par les genoux, par les pieds. Une longue corde, partant d’un anneau du couvercle, allait, sans se nouer, entourer les membres infirmes ; et chacun tenait appuyé sur la partie souffrante de son corps des tringles en fer, mobiles, qui sortaient de divers trous du couvercle. Cependant, l’air s’imprégnait de suaves odeurs ; de pénétrantes mélodies se faisaient entendre; et, des sensations inconnues se communiquant de proche en proche aux malades, le cercle vivant se mettait à frémir. La plupart, les femmes surtout, éprouvaient des spasmes nerveux, des suffocations; les yeux se fermaient; on se sentait défaillir; on entrait dans la région des songes, bien tôt, aux accords prolongés de l’harmonica, au bruit dos voix qui s’élevaient en chœur, sous l’empire de je ne sais quel charme indéfinissable et puissant, les langueurs faisaient place aux convulsions. C’étaient de toutes parts des accents plaintifs, des cris de joie, des rires immodérés, des sanglots, ou encore des étreintes folles et passionnées. Une salle, matelassée, s’ouvrait alors, dans laquelle on emportait les plus violents : celait la salle des crises. Là, bien souvent, les transports eurent le caractère de la frénésie. Des femmes y furent aperçues se roulant sur un parquet de coussins ou battant de leur»

lûtes les murailles ouatées. Parmi celle foule éperdue un personnage, vêtu d'un habit de soie lilas, sc promenait d’un air tranquille et grave, tantôt étendant sur les malades une baguette aux effets magiques, tantôt s’approchant d’eux, leur appliquant la main sur les épaules, puis la laissant couler le long des bras jusqu’à l’extrémité des doigts. Amenées de la sorte à leur dernier terme de développement, les crises se dissipaient enfin, et elles emportaient, disait-on , le mal avec elles (i).

« L’homme qui semblait ainsi commander à la vie nous venait de l’Allemagne. Il était médecin et se nommait Mesmer.

« Ce qu’il y eut de vrai, ce qu’il y eut de faux dans son système, et s’il fut œuvre de génie, de mensonge ou d’erreur, nous n’avons pas à 1 examiner ici. Mais, pour peu qu’on aime et qu’on respecte dans l’histoire l’épopée de l’esprit humain , il ne saurait être inutile de montrer en quoi le mesmérisme secondait la marche de ces révolutionnaires mystiques dont nous cherchons la trace.

« Mesmer se représentait les sphères célestes , la terre et tous les êtres créés comme plongés daus un immense océan de fluide, par l’intermédiaire duquel ils exerçaient les uns sur les autres une influence permanente (a). Cette influence, analogue aux propriétés de l’aimant, Mesmer l’appelait le

(]) /(apport des médecins choisis dans la Faculté de Paris. — Bailty , /apport secret sur le Magnétisme animal. — Virey, Dictionnaire des Sciences médicales, art. Magnétisme. - Burdin jeune el Dubois (d’Amiens), Histoire académique du. Magnétisme animal, pag. S et G.

(2) Premier Mémoire de Mesmer, proposition 1, p. 12 des Mémoires et Aphorismes de Mesmer. Germer-Baillère, 1842.

Magnétisme animal (i). Rassembler une porlion du fluide universel, la concentrer, en diriger le mouvement ou le courant, la communiquer à son semblable, soit par le contact immédiat, soit, à une certaine distance, par la simple direction du doigt ou d’un conducteur quelconque, c’était magnéli ser(2); et posséder un tel pouvoir, c’était, selon Mesmer, posséder le pouvoir de guérir. La santé, disait-il, consiste dans l’action régulière de la nature. S’il survient des obstacles, la nature fait effort pour les surmonter. De là les crises, salutaires quelquefois, quelquefois funestes, mais inévitables, et tel que le magnétisme seul les pouvait provoquer ou accélérer sans péril (5). « 11 n’y a qu’une santé, « qu’une maladie, qu’un remède (4). »

« Quant aux procédés magnétiques dont l’appareil du bii(/uct n'était qu’une mise en scène fastueuse et jugée depuis superflue, ils offraient l’image de la communication la plus attractive, la plus extraordinaire qui eût jamais été imaginée. C’était en quelque sorte la vie de l’un passant d’une manière visible dans celle de l’aulre. Le corps humain était considéré comme ayant un pdle nord, un pôle sud. Les hommes devenaient des barreaux aima ntés (5).

« Ainsi, théorie ou pratique, tout dans le mes-

(1) Premier Mémoire de Mesmer, p. 113, aphorisme 80.

(2) Jtàpporl de la Société ruijale de médecine, 1" part., 5 I.

(5) Mémoires et Aphorismes de Mesmer, p. 172 ; apli. 333 et 331.

— Kurl-Sprengel, Hist. de la médecine (traduclion de M. Jourdan), t. VI, p. 101 et 102. Paris, 1815.

(i) Mémoires et Aphorismes de Mesmer, p. 17-2; aphorisme 333.

(5) Procédés de d’Eslon, à la suile des Mémoires et Aphorismes, p. 208 el 20‘J.

mérisme concourait à mctlrc en lumière la loi de dépendance mutuelle, la loi d’union; et, par une rencontre aussi remarquable qu'inattendue, les essais de Mesmer venaient se joindre à la philosophie occulte de Saint-Martin.

« Saint-Martin affirmait l'unité du monde moral, sous le nom de cause active et intelligent!'. : Mesmer celle du monde physique, sous le nom de FLUIDE UNIVERSEL.

« Saint-Martin glorifiait l’attraction des âmes, l’amour; Mesmer l’attraction des corps, le magnétisme.

« De l’action impérieuse, décisive, mais sympathique, des natures supérieures sur les natures moins puissantes, Saint-Martin faisait résulter le salut des empires : à une action analogue Mesmer attachait la guérison des maladies.

« Ensemble ils proclamaient, en se partageant les deux grands aspects de la vie, le dogme de la solidarité.

« L’instinct rapproche les êtres animés, tandis que la raison les divise. Aussi Mesmer 11e craignait-il pas d’écrire : « L’instinct est un effet de l’har-« monie (1); la raison est factice (2); » et on lit dans ses Aphorismes cette belle définition : « La « vie de l’homme est une partie du mouvement « universel (5).

« Que Mesmer ait décrié son rôle de novateur par des préoccupations grossières ; que le côté vrai-

(1) Mémoires et Aphorismes, p. 152; aphorisme 194.

(2) Mémoires et Aphorismes \ aphorisme 197.

(5) Mémoires et Aphorismes ; aphorisme 19S.

ment noble de son hypothèse fondamentale lui ait échappé à demi, c’est possible. Eli qu’importe? est-il donc nécessaire que l’écho ait conscience de la parole qui vient le frapper et qu’il prolonge? La plupart de ceux qui passent sur la terre en y faisant du bruit ne sont que des porte-voix fragiles. Quand le son aura été rendu, libre à vous de briser l’instrument. Le penseur, c’est la pensée.

« Mesmer était venu à Paris dès 1778; mais, repoussé par les savants, traité avec dédain par Dau-benton et Yicq d’Azir (1), il avait été confiné dans des tentatives obscures , et le découragement s’était emparé de lui, lorsque d’EsIon devint son disciple. Médecin du comte d’Artois, d’Eslon avait des relations élevées, une figure charmante, de l’esprit, l’audace de la jeunesse : le docteur étranger eut en lui un impétueux et utile auxiliaire, l u premier mémoire apprit au public les cures merveilleuses de Mesmer en Allemagne, les injustices qu'il y avait essuyées, le peu d’accueil fait à sa découverte par l’Académic de Berlin , la ligue formée contre lui par les savants de Vienne, et comment, après avoir recueilli dans sa maison el guéri presque entièrement une jeune fille aveugle, il avait vu, grâce aux suggestions d’une noire cabale, la reconnaissance des parents se changer en aigreur, en violence, jusque-là qu’un jour le père élait venu lui redemander son enfant l’injure sur les lèvres et l’épée à la main (2). Ce mémoire, qui tendait à

(1) Foissac, Rapport et discussions sur le Magnétisme animal, note 1, p. 220.

(2) Premier Mémoire de Mesmer, p. 53.

concilier à Mesmer l'intérêt qu’inspire le génie persécuté, sc terminait par vingt sept propositions contenant les principales bases du système. A son tour, d’IislOh éclata. Non content d’avoir publié un vif commentaire de la doctrine du maître, il ne craignit pas d’adresser à la Faculté de médecine un insultant défi. Qu’on fit choix de vingt-quatre malades, dont douze seraient traités d’après la méthode magnétiqüe et douze d’après la méthode ordinaire : le public serait juge du camp. Un relus et la menace de rayer d’Fslon de la liste des membres, s’il persévérait, telle fut la réponse de la Faculté (i).

« Milis l’éíóuflemeht du magnétisme, par le mépris , n’était déjà plus possible. Mefemet et d’Eslon trouvèrent un appui énergique, et dans les sociétés SeCrèteê dont ils faisaient partie (2), et dans la secte martinistt dont lelir système formait tomme la contre-épreuve, et dans cette inquiétude révolutionnaire à laquelle toute nouveauté hardie servait alors d’aliment.

« D’un autre côté, de Lasône, médecin du roi, avait fait connaître Mesmer à la cour (3) ; et, toujours prête à se passionner pour l’imprévu , Marie-Antoinette favorisait le docteur allemand. La curiosité publique une fois ch éveil, les résistances ne firent que l’irriter. Les cures magnétiques se

(1) tiurdin jeune el Dubois (d’Amiens), Ilisl. acaclém. du Magnétisme animal, p. 15, 14, et 15.— Foissac, Rapports el discussions de CAcadémie royale de médecine sur le Magnétisme animal, lióle 1, p. 221.

(2) Kurl-Sprengel, Ilisl. de la médecine, t. VI, p. 10Í.

(5) Ilisl. de la médecine, p. 103.

multiplièrent. Tout Paris s’agita auto.r de la doctrine mesmérienne; l'entraînement devint mémo si général, si impérieux, que Mesmer ayant parlé de quitter la France, le gouvernement s’en inquiéta. Il fallut traiter de puissance à puissance avec l’heureux étranger. On 1 adjure de rester, on le’Utoure; on lui propose pour prix de scs lumières communiquées à des médecins que le gouvernement choisira , vingt mille livres de rentes viagères et dix mille de loyer (i). Dans l'enivrement de son orgueil et du succès, il refusa, il partit; mais bientôt les triomphes de d’Eslon le rappelèrent : son disciple était son rival (2).

« Alors se manifestèrent avec une fougue sans exemple cette soif des choses inaccoutumées, ces aspirations vagues et pourtant brûlantes, cette impatience d’être étonné, ce besoin d’être ému, tourments d’une société qui portait la plus grande des révolutions au fond de SC9 entrailles, et qui déjà la sentait tressaillir. Riches et pauvres , nobles et plébéiens, voulurent éprouver les effets de la cuve aux enchantements. D’un cœur avide et l’imagination ébranlée par le désir, les femmes coururent s’asseoir en foule au drame de l’existence humaine renouvelée. On surprit au baquet magnétique de d’Eslon la princesse de Lamballo (3). On prétendit y avoir reconnu, déguisée, Marie-Antoinetle elle même (4). Pour enrichir Mesmer, ses partisans

(d) Rapports et discussions, clc., note i , p. 222.

(2) Rapports et discussions, etc-, note 1, p. 222.

(3) Bachaumont, Mémoires secrets, t. XXV, p. 252 el 255.

(i) Burdin jeune el Dubois (d’Amiens), Hist. académique du Magnétisme animal, p. 25.

ont appelé cent sotiscsipteurs à lui acheter, moyennant cent louis chacun, la connaissance de son secret; le chiffre est non seulement atteint, mais dépassé. L’enthousiasme gagne d’Epréménil, le fameux avocat Bergasse, Servan, Duport, des littérateurs en renom, des savants, des prêtres. Si bien qu’à Bordeaux, un célèbre prédicateur d’alors, le pèrcHervier, s’arrête au milieu d’un sermon, descend de chaire, et magnétise une personne qui venait de s’évanouir (1). Ce n’étaient plus qu’attaques enflammées et réponses fanatiques. « Les magiciens « de Pharaon, disait Court de Gébelin dans une « brochure où il s’annoncait guéri par Mesmer, les « magiciens de Pharaon n’étaient que des magnéti-« sauts ; mais, ignorant la théorie du système ma-« gnétique, ils ne pouvaient percer la profondeur des « mystères auxquels on s’est élevé dans les temps mo-« dernes, en formant des prophètes, des sibylles que

« nulle puissance ne peut mettre en défaut....... »

Court de Gébelin mourut au moment même où il affirmait sa guérison ; cl c’est à peine si l’opinion publique tint compte de ce démenti tragique (2). En vain les procédés magnétiques furent-ils étudiés chez d’Eslon, et solennellement condamnés par deux commissions, l’une de la Société royale de médecine, l’autre de la Faculté de médecine et de l'Académic des sciences. On remarqua que Jussieu s’était séparé de ses confrères; on opposa son rap-

(1) Bacbaumont, Mémoires secrels, l. XXV, p. 221.

(2) Burdin jeune et Dubois (d’Amiens), llist. académique du Magnétisme animal, p, 20. — Kurl-Sprengel, l/isl. de la médecine , l. VI, p. 105.

port impartial et modéré à ceux qu’avaient signés Bailly, Lavoisier, Guillotin, d’Arcet, Poissonnier-Desperrières, Franklin; 011 lit observer que, si les effets du magnétisme devaient être uniquement attribués à l’imagination , e’élait déjà une bien grande et bien réelle merveille que ce pouvoir de rallumer à l’imagination le flambeau de; la vie. Le nombre des élèves s’accrut donc à un point extraordinaire. La méthode mesmérienne sortit de Paris, se propagea dans les provinces, passa la mer, atteignit Saint-Domingue (1) ; et, se constituant selon le rite de la franc-maçonnerie, la société des magnétisants adopta le nom expressif d'ordre de l'harmonie.

« Tout à coup le bruit se répand qu’à Busancy, près Soissons, le marquis de Puyscgur et le comte Maxime, son frère, ont tiré du système de Mesmer des conséquences inattendues, surprenantes. Il no s’agit plus, cette fois, des merveilles de la salle des crises , que déjà l’on commence à déclarer dangereuses, on assure que, sous des arbres garnis d’un épais feuillage et magnétisés, des malades se sont endormis d’une sorte de sommeil divin. Durant les extases de ce sommeil, disait-on, ils lisaient en leur propre corps ainsi qu’en un livre ouvert; ils indiquaient les remèdes vraiment sauveurs; ils voyaient au delà du rayon qu’il est donné à l’œil de parcourir; ils avaient le don de prescience, lit pour produire ces inexplicables phénomènes, que

(1) Dcleuze, llist. critique du Magnétisme animal, I. I, p. 20. Paris, 1819.

fallait-il? M. do Puységur répondit en deux mots au siècle de Voltaire : Croyez, veuillez ( i ).'

« Or, telle était alors la fièvre des esprits que le somnambulisme, à son tour, fit fortune. On expliqua par les secrets magnétiques la vie d’Apollonius de Tyane et celle d’Apulée , magiciens célèbres qui, au moyen de leurs prestiges, avaient essayé de défendre le paganisme expirant. On se crut en possession de cette puissance qu’avait pointe en vives images le code immortel où il était dit : « La « foi transporte les montagnes. » Veuillez-le bien, allez et guérissez, devint la formule sacramentelle (2) d’une secte nombreuse, active, à la tête de laquelle il faut placer Lavater (5), etc.

« Les disciples de Mesmer, joués sur le théâtre (/i), se défendaient avec la plume éloquente de d’Épréménil (ü); et ils élevaient leur protestation jusqu’à la menace. »

(1) Puységur, Mémoires pour servir à tHistoire el à l'établissement du Magnétisme animal : épigraphe.

(2) Kurl-Sprengel, Illst. de la médecine, t. VI, p. 117.

(3) Yoy. dans la brochure de Mirabeau, déjà citée, la Lettre de M. le diacre Lavater au médecin de la cour de Hanovre Zurich,

10 septembre 1785.

(4) Dans la comédie des Docteurs modernes.

(5) L’article de d’Épréménil était intitulé : Réflexions préliminaires à F occasion de la pièce des docteurs modernes , jouée sur le théâtre italien.

Le Gérant : IIKIHülT (de Garnay).

ÉTUDES SOMNAMBULIQUES.

§ X. - PUY8EGURISME.

(Suite.)

I)E L’INSTINCT POÉTIQUE.

Il y a peu de magnétiseurs qui n’aient eu l’occasion de constater, chez certaines somnambules, l’accroissement, quelquefois prodigieux, des facultés intellectuelles. Une étude approfondie de ce curieux phénomène nous permettra peut-être de pénétrer un jour une partie des mystères de l’innervation cérébrale, en fournissant aux phrénolo-gistes de nouveaux moyens d’investigation. Quelques magnétiseurs anglais se sont déjà livrés à des expériences du plus haut intérêt, qui ne laisseraient aucun doute sur la localisation du cerveau.

Premier cas.

J’ai signalé, dans un article précédent (i), le développement spontané du sentiment poétique pendant l’extase somnambulique. Je ne citerai que quelques improvisations nouvelles de ma jeune sibylle; lorsque le temps et l’occasion me le permettront, j’espère publier le résumé de mes ob-

(1) Voyez t. V, p. 17.

TOME VIII. — N" î>î>. — 111 Wi). •'>

servations pratiques qui pourront intéresser davantage le physiologiste.

A mon retour d’une promenade que je fis avec M~e ,jans un ,j(.s pius beaux sites de la Normandie, au commencement de l’automne dernier, je la magnétisai, afin de la laisser reposer quelque temps du sommeil magnétique; elle ne tarda pas à entrer en somnambulisme. Alors sa figure prit une expression de béatitude infinie, ses yeux brillèrent d’un vif éclat, et se croyant transportée au milieu des délicieuses promenades qu’elle venait de parcourir, elle s’écria, dans l’enthousiasme qui l’animait :

Iæ beau tabloau que m’oftre la nature I Autour «1e moi sont des dons précieux :

Ici Pomone ajoute à sa parure ;

Plus loin la terre semble s’unir aux cieux !

Oui, je goûte un bonheur extrême A contempler dans sa splendeur Ton univers, 6 Dieu suprême,

Qui nous révèlo U jinmdour! '

Un jour, son magnétiseur habituel ne pouvant maîtriser un mouvement d’impatience devant quelques exigences de M"" *'*, qui était fort souffrante, elle lui dit avec la plus grande douceur :

Aujourd’hui vous «'ton colère,

Demain plus calme on vous verra ;

Et pour moi vous aurez, j'espère,

La bienveillance nécessaire.

Et tout le calme qu’il faudra.

Je lui demandais un soir si M. X, un d«; ses amis, obtiendrait du succès de quelques productions poétiques qu’il désirait publier; elle me répondit instantanément :

Piirmi les fous il sera mis,

Kl je «lirai que c'est dommage;

L'esprit qu'il perd était compris Par le philosophe et le sage.

Une autre fois je l’interrogeais pour connaître son opinion sur les voyants qui, pendant l'état de veille, croient apercevoir dans un globe de verre un ange qui répond à leurs questions, elle me dit :

Ainsi que la tour de Babel, l’ar moi ce Tait est contesté ; i.e miroir de la vérité Ne me montre point Anafil.

Je pourrais multiplier ces citations, prises au hasard parmi toutes celles que j’ai recueillies ; mais elles suffiront, je crois, pour constater la durée de cette disposition d’esprit pendant le somnambulisme. Je dois avouer, cependant, et les magnétiseurs n’en seront pas surpris, que pendant une maladie fort grave, qui dura plusieurs mois, toute lucidité médicale vint à cesser entièrement, ainsi que cette grande aptitude à versifier ; le somnambulisme s’obtenait avec autant de facilité qu’auparavant, mais il ne consistait que dans un état d’assoupissement presque continu. Alors, à ma grande surprise, je remarquai chez Mm* ***, pendant la veille, des phénomènes analogues à ceux du som-

i.V.

nambulisme lucide, seulement scs poésies laissaient beaucoup à désirer, et pour l’esprit et pour ln forme. Je ne croirais pas devoir en transcrire un échantillon, si, depuis qu’elle a recouvré la santé, elle n’avait perdu , pendant la veille, toute aptitude poétique, el retrouvé , pendant l’extase somnambulique, ses charmantes inspirations.

Les deux versets qui suivent ont été produits dans les circonstances que je viens d’indiquer. Ils sont extraits d’une lettre de condoléance qu’elle adressait à une de ses parentes dont le mari venait de mourir.

Quand je m’élève assez pour contempler su gloire,

Quanti mon Ame épurée arrive jusqu'à lui,

Je le vois vous bénir, et sons i|UO sa mémoire Console votre avenir que le bonheur a fui.

Pour que de ses vertus l'éclat vous environne,

Il abaisse sur vous un regard impérieux,

En vous montrant qu'au çiçl il tient «ne cpuraniw,

El que vous l'obtiendrez en faisant des heureux I

Ces ver? ne sop.f pas tous correct», aux uqs il manque la mesure, à d'aMtres la rime, etc. C’est le produit brut de l’inspiration native, le jet irréfléchi d’une faculté saps guide. Tels iis sont venus, tçls je les transcris : rien n’y est changé.

Je dois faire observer aussi que, dans l’un des fragments oi-dessus, cette dame s’est exprimée en cinq vers au lieu de quatre qu’elle emploie ordinairement. C’est la seule exception que je connaisse à cette règle.

Une autre particularité mérite d’être signalée ici.

Quand Mm' *** improviso sur un sujet composé de plusieurs quatrain», ceux-ci no se produisent pas dans l'ordre où ils doivent être placés. Venant ainsi : rr, 31', a”, 5e, ’\", etc. ; il faut les transposer ensuite pour établir le sens.

Deuxième cas.

En stimulant les organes, le magnétisme les fertilise, pour ainsi dire. Cette aption est surtout remarquable à l’égard de l’intellect. On voit souvent, sous son influence, des esprits stériles devenir tout-à-coup féconds, et des aptitudes naître , des facultés éclore comme les fleurs s’épanouissent au soleil.

Les faits que j’ai cités, ci-dessus et précédemment, sont une preuve éclatante de cette vérité d’observation. Je pourrais, à la rigueur , me dispenser d’en fournir de nouveaux exemples ; mais les théories 11e pouvant jamais être trop appuyées, je vais faire connaître encore un produit de cotte faculté primitive.

Ayant appris qu’il y avait aux environs de Ma-mors, une jeune fille ayant le don de poésie, je fis des démarches pour la connaître.

Voici le résultat de mes informations.

Cette personne a l’esprit tout-à-fait inculte : elle ne sait ni lire ni écrire. Servante dans la maison d’un abonné de ce Journal, elle a été magnétisée par lui , et dès la première fois somnambule. On s’aperçut bientôt qu’elle parlait en vers, et, comme cela contrastait avec son ignorance , 011 chercha à recueillir ses paroles. Un jour, elle venait de dé-

biter une sorte de complainte, on l'interrogea sur cette composition , qui causait la surprise des auditeurs. Voici sa réponse :

Je vois , de chaque côté de ma tête, feues vos deux petites filles, qui composent ce que je récite; près d’elles est leur oncle, qui me le dicte. 11 veut m’apprendre cette complainte; voilà qu’il recommence.

Elle reprit, en effet, et l’on put écrire ce qui suit :

Arrête ici, passant,

Regarde cette tombe.

Puisque tu es mortel , il faut quitter le monde.

Regarde bien commeut La mort m’a mis,

Comment j’ai quitté Mes parents et amis!

Quand la mort m'a surpris,

Au printemps de mon 4ge,

Je m'occupais l'esprit A lwaucoup de courage :

Dans ce même instant Je m’en vis séparé!

Heureuse éternité!

Descends dans ce toml>eau.

Remue cette poussière,

Tu n’y trouveras rien De ma beauté première.

455

llegante Ilion :

Dans cc mominicnl,

Les vers ne m'ont laisse Que les os seulement.

^.’imperfection de ces vers est manifeste; la prosodie en est absente. Mais ce que l’on doit considérer ici n’est pas l’art, c’est la pensée.

On voit que le troisième verset de cette composition est incomplet, et que le quatrième manque tout entier. Il n’a point été possible de saisir ces vers à la dictée, et la somnambule n’a pu les retrouver ni actuellement ni dans ses sommeils ultérieurs.

J’ignore si les personnages de la vision étaient eux-mêmes poètes de leur vivant. C’est une question de psychologie que je ne saurais me proposer de résoudre. Je me borne à rapporter le fait tel qu’il m’a été raconté.

H. EVETTE.

Vimoutiers, août 18*!!.

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

Hôpital mewnérlqne de Cnlcnttn.

Journal drs traitements faits de juin a décembre 18i7; suivi de rapports officiels, etc., publié par le gouvernement.

§ II. — CAS DE MÉDECINE.

La pathologie interne ne fournit que peu d’observations, et l’intérêt qu’elles oiTrent est fort médiocre. Les guérisons obtenues ont moin9 d’importance par elles-mêmes que par l’identité qu’elles révèlent de l’action curative du magnétisme dans des conditions différentes. Nous allons seulement les énumérer :

i» Une hydarthrose chronique du coude, produite par une cause externe, cède à seize magnétisations quotidiennes, d'une heure chacune.

2° Une hémiplégie qui durait depuis six ans , traitée par une magnétisation générale et locale d’une heure et demie par jour, disparaît au bout de vingt jours ;

3° Une paralysie totale du sentiment et du mou-

vemcnt, consécutive d’apoplexie, durant depuis cinq semaines avec des accidents divers, tels que violentes douleurs, trouble visuel, etc., fut entièrement dissipée par trois mois de magnétisation journalière d'une heure et demie.

4° Une paraplégie, avec insensibilité de la surface totale du corps, qui duraient depuis quatre mois chez un sujet de cinquante-six ans, ont disparu après dix-huit magnétisations d’une heure et demie par jour.

5° Une paralysie du bras, chez un enfant de dix ans, traitée dès le lendemain de l’accès, n’a duré que douze jours. Même magnétisation que dans les cas précédents.

6° Une paysanne souffrait depuis quatre mois, de douleurs intolérables dans la région occipitale; cette névrose la privait de sommeil et de mouvement. Dix-huit magnétisations d’une heure par jour l’ont rendue à son état normal.

7° Une violente douleur du dos qui empêchait le patient de vaquer à ses occupations depuis six mois, céda à neuf jours de traitement mesmérique.

8° Une névralgie compliquée de la tête, venant par accès alternatifs de vingt-quatre heures, depuis vingt-deux ans , contre laquelle tout avait échoué, fut guérie on peut dire instantanément. Le malade, magnétisé huit jours de suite sans rien éprouver, s'endormit le neuvième. Le sommeil dura trois quarts d’heure, et la douleur disparut avec lui. La magnétisation fut continuée cependant encore quinze jours dans le but de prévenir tout retour de celte cruelle infirmité.

9° Une douleur rhumatismale affectant le bras

et la jambe gauches, a cédé à une suite de mes-mérisations journalières d'une heure chacune. pendant un mois.

io° Une goutte scialique qui résistait depuis deux mois au traitement médical, a été guérie en douze magnétisations d’une heure.

il0 Un épileptique, qui était sujet à un accès tous les cinq ou six jours, magnétisé une heure et demie par jour, pendant six semaines, n’a plus eu d’accès depuis le commencement du traitement.

12» Un violent accès de tétanos étant survenu à un homme affecté de rhumatisme aigu, on le magnétisa durant six heures, quatre personnes a la fois : les accidents disparurent. Purgé cinq jours après, le spasme revint; deux personnes magnétisant durant trois heures le firent de nouveau disparaître.

Une magnétisation de quatre heures, par quatre personnes, pratiquée le lendemain afin de prévenir le retour des accidents, produisit un sommeil dont le malade éprouva le plus grand bien. La guérison était parfaite au bout de seize jours.

M. Esdaile dit que c’est le troisième cas qu’il traite par le magnétisme. Dans les deux premier», il avait magnétisé seul, et avait obtenu la cessation du spasme ; mais le bien n’avait pas duré longtemps , et les malades étaient morts, probablement parce que la magnétisation d’une seule personne est insuffisante dans ce cas.

i5o Suivent neuf cas de rhumatismes musculaires chroniques compliqués. Ils ont tous cédé à l'action magnétique pure, dans un temps assez court. Tous ces traitements n’offrent poiut de différence

sensible avec ceux suivis en Europe ; c’est la même marche, et à peu près la même durée.

Là s’arrête le récit ; l’épreuve est finie.

L'hôpital a été fermé au bout d’un an, comme il était prescrit dans le décret organiqne.

M. Esdaile a rempli son mandat ; les procès-verbaux de ses expériences ont été publiés; les commissaires chargés d’examiner sa clinique ont déposé leur rapport ; le gouvernement n’a plus qu’à se prononcer. On pense généralement, à Calcutta, que sa décision ne sera point conforme aux vœux des magnétistes, parce que, dit-on , le but qu’on se proposait d’atteindre par le mesmérisme a été dépassé par l’éther.

Cette solution nous parait effectivement très-probable dans l’état d’engouement où sont les esprits de la prodigieuse célérité avec laquelle agissent l’éther et le chloroforme; mais le magnétisme reprendra faveur aussitôt qu’on aura reconnu partout les immenses dangers qui accompagnent l’administration de ces agents chimiques.

Quel que soit le sort réservé au Mesmeric Hospi-lal, cette tentative aura servi la science et l’humanité.

La relation des travaux du Dr Esdaile restera comme un monument impérissable dont tous les âges invoqueront le témoignage. Ce document fait, par son authenticité, suite au rapport de M. Hus-son, dont les magnétiseurs se prévaudront éternellement; par son contenu, c'est la pièce la plus.

importante du dossier de l’insensibilité. On y aura recours toutes les fols que l’observation direct«! fera défaut, et tous les points en seront soigneusement comparés, vérifiés.

Sous le rapport philanthropique, cet établissement n’aura pas été moins utile. I)e nombreux malades y ont trouvé la guérison ou le soulagement de leurs maux , sans qu’aucun accident soit venu ternir l’éclat des démonstrations.

11 manquait au magnétisme humain l’essai de ses moyens sur une grande échelle. Mis en demeure de justifier les prétentions des magnétiseurs isolés, M. EsdaSIe s’en est acquitté avec un succès inespéré. Maintenant le mesmérisme a la sanction de l’expérience en grand ; il est racheté du péché d’empirisme par le baptême officiel.

Incessamment nous serons instruits de la détermination qu’aura prise le gouvernement.

Jury magnétique

d'encouragement et de H fi CO M P EN SE.

L’assemblée générale extraordinaire des membres du Jury, annoncée dernièrement, vient d’avoir lieu.

Elle a décidé s

i° Que la distribution des médailles qui devait avoir lieu en niai 1848, n’ayant pu se faire, la cotisation qui aurait dû y pourvoir ne serait point perçue pour l’exercice 1848-/19.

3° Que la distribution qui devait être faite le

20 mai dernier, le serait avant la fin de cette année, nonobstant l’approche de la seconde distribution , qui aura lieu régulièrement le ?.5 mai i85o.

Ensuite elle a élu M. Mai Sheehy secrétaire général, en remplacement îleM. le IVBésuchct; puis JIM. Carpentier et Millet, membres du comité, en remplacement de MM. Mac Sheehy, el Derrien.

Les élections ci-dessus ont donné lieu aux mutations de fonctions suivantes dans le comité.

M. LASSAGNE, vice-président, devient président.

M. HUBERT (de Camay), censeur, — vice-président.

M. MII.ET, sans fonctions, — censeur.

M. LAPOHTE, — — trésorier.

Les cihq autres membres conservent leurs attri-btitiôns premières.

Le comité et le conseil d’administration ainsi reconstitués, fonctionneront jusqu’à la fin de l’exercice i845-5o. Ils sont chargés de continuer les recherches commencées, et de présenter leurs rapports dans le plus bref délai.

La nouvelle assemblée générale aura lieu aussitôt que ces travaux seront terminés.

VARIÉTÉS.

Le magnétisme à l'institut. — Un nouvel incident s’est produit à ¡'Académie des sciences, à propos du magnétisme animal. Il s’agissait encore de la démonstration de sa matérialité. Reprenons la question h son origine; nous la jugerons mieux.

LE MESMÉRISME EST-IL UN DES FLUIDES CONNUS?

11 y a peu de choses, peut-être, dont on ait tant parlé sans rien conclure, que du mesmérisme. A peine était-il né, nous l’avons déjà dit dans un article précédent, relatif aux expériences de M. Du Bois-Reymond, que les savants s'en emparèrent pour l'examiner, comme c'était leur droit, et pour fixer les esprits sur ce qu'on devait penser de cette nouvelle découverte qui paraissait destinée à renverser toute la médecine , et peut-être quelque chose de plus respecté que la science des Diafoirus do l’époque. Chacun connaît le résultat de l’examen officiel du magnétisme , et les raisons qu’on apporta pour réfuter la théorie de Mesmer, et par suite la vérité de sa découverte. Les physiciens possédaient l’électricité, le magnétisme, la chaleur, la lumière , ils ne voulaient donc avoir affaire à autre chose qu’à leurs fluides, et pour cela ils tâchaient de voir si les magnétiseurs pouvaient, par leurs

baquets ou par des passes, agiter les clectroscopes, faire marcher les thermomètres, dévier les aiguilles de boussole; et, comme il se trouvait qu’aucun phénomène ne se produisait en présence de tels instruments, les physiciens en concluaient que le. mesmérisme était une folie, et ses résultats des effets dus à l’imagination échauffée (i). Quelques

(I) On lit dans le Rapport des commissaires chargés par le roi de l’examen du magnétisme animal. Paris, 17Si. ln-4, page 5 :

« Les commissaires se sont assurés.........au moyen d’un

• électromùtre et d’une aiguille de fer non aimantée, que le baquet ne « contient rien qui soit ou électrique ou aimanté. » Et après ils établissent ces propositions , page 9 : « Le fluide magnétique échappe à tous « les sens ; c’est par erreur qu’on a pu croire que la vue , le tact pou-« vaient avertir de sa présence. » Page 10 : « Il n’est pas plus sensible

• à l’odorat. L’existence de ce fluide ne peut élre constatée que par son « action sur les corps animés. » La conclusion de leur examen se trouve formulée, page 57, en ces termes : * Attouchement, imagination , imi-« lai ion, telles sont donc les vraies causes des effets attribués à cet « agent nouveau. »

On trouve dans VHistoire de l’Académie royale des sciences, année 1784 , p. 6 , un Exposé des Expériences qui ont été faites pour l'examen du magnétisme animal, dans lequel on remarque les passages suivants; p.9 :

« Procédant en physiciens, nous avons cherché à reconnaître la pré-« sence du fluide; mais ce fluide échappe à tous les sens. On nous a « déclaré que son action sur les corps animés était la seule preuve que

« l’on pût administrer de son existence............L’action que

« l’homme a sur l’imagination peut être réduite en art, et conduite par

« une méthode, sur des sujets qui ont la foi.......» Page 15 : « L’inten-

« tion que je dirige, c’est mon imagination qui commande ; l’intention « qui nie répond , c’est l’imagination qui s’exalte et qui obéit. La re-« cherche d’un agent qui n’existe pas, sert donc à faire connaître une

« puissance réelle de l’homme......Le magnétisme est un fait de plus à

« consigner dans l’histoire des erreurs de l’esprit humain , et une grande « expérience sur le pouvoir de l'imagination. »

Il est dit dans le Rapport des commissaires de la Société royale de Médecine. Paris, 1784, in-4, I" pari., ç II, p. 4.

« SI. Desion ne connaît point de preuves physiques qui démontrent

magnétiseurs prirent lachóse moins en philosophes que d’autres, el, sans examiner si le raisonnement des savants était juste, ils se mirent à la recherche d’une démonstration du magnétisme fondée sur l'emploi des instruments de physique (1). Mais,

« l’existence «le l’agent ou fluide auquel il attribue le magnétisme animal » comme un principe dont il émane. »

(I) Entre autres essais pour ramener le mesmérisme aux lois des fluides connus des physiciens , nous trouvons dans le Journal encyclopédique de /louillnn , n" de février et de mai 1784, p. 127 et 12!) du premier, 10!* du second, des expériences faites à l’aide des bâtons de soufre appliqués sur différentes parties du corps, et qui auraient produit les mêmes effets que le magnétisme de Mesmer.

On ¡chercha la démonstration de la réalité du fluide mesmérique en magnétisant dans le cùne lumineux du microscope solaire, selon les procédés de Marat; mais on ne put y voir autre chose que les vapeurs dues k la transpiration, qui ne prenaient aucune direction particulière par l’action de la volonté du magnétiseur. Marat étudia même les variations dans l’intensité de ces émanations provenant de l’àge ou de l’état de santé des individus; mais il n’y découvrit rien qui vint en aide aux chercheurs du mesmérisme. (Journal encyclopédique de Bouillon, octobre 1784, p. 543).

« Celle action , attribuée à un lluide universel non démontré, appar-« lient certainement à la chaleur animale existante dans les corps, « qui émane d’eux continuellement, se porte assez loin, et peut passer « d’un corps dans un autre. » Rapport de M. de Jussieu, le 12 septembre 1784. M. Jumelin regardait aussi le magnétisme animal comme de la chaleur qui tendait à se mettre en équilibre. (Rapport des commissaires, etc.

Dans une petite brochure imprimée à Constance en 1784 , et ayant pour litre : Mesmer justifié, on trouve exprimée la supposition que le fluide mesmérique n’est que de la chaleur produite par de l’huile de vitriol enfermée dans le baquet, ou bien qu’un produit de l’acide phospho-rique pur, vitreux, sous la forme de tablettes, etc.

Pételin admettait les phénomènes mesmériques, tout en les attribuant > l'électricité. ( Mémoire sur la découverte des phénomènes jue présentent la catalepsie el le somnambulisme, etc. Lyon, 1787, in-8. — Électricité animale prouvée par la découverte des phénomènes physiques et moraux de la catalepsie hystérique, etc. Lyon , 1808, in-8.)

comme il arrive toujours en pareil cas, on confondait étrangement les choses, et pourvu qu’il y eût production de mouvement, on croyait tout de suite avoir trouvé la démonstration recherchée. On courait aux Académies, on criait eureka, et 011 en sortait convaincu de n’avoir rien démontré. Autrefois c’était en réve qu’on découvrait ces démonstrations, et, une fois réveillé, on allait répandre parmi ses confrères ces absurdités, avec un aplomb et un sérieux tels que les plus consciencieux étaient obligés d’y croire, et devenaient eux-mêmes des propagateurs de semblables folies. Nous trouvons à ce propos, dans des notes manuscrites de M. le doc-teurWürtz, qui accompagnent un ouvrage imprimé du même auteur, ayant pour titre : Prospectus d’un nouveau Cours théorique et pratique du Magnétisme animal, etc., etc., que : « Quelqu’un voulant dé-« montrer d Mesmer le pouvoir de la volonté sur « les êtres même inanimés, suspendit en l’air une « chaîne de fer et la fit tourner autour d’clle-« même en la fixant, et par le seul acte de sa vo-« lonté. Alors, pour prouver que ce n’était pas par a l’influence de son regard , il se tourna de ma-« nière à ne pas pouvoir la voir; il voulut, et elle « se tourna de même comme auparavant. » Mesmer n’était certainement pas homme à croire à des faits de telle nature, mais peut être qu’on lui attribuait des idées et des choses auxquelles il n’avait aucunement songé, afin de donner plus de valeur à ces inventions, et de les faire passer dans le monde des demi-savants comme autant de vérités incontestables. Le fait est que le temps et les progrès des sciences au lieu de persuader de l’inutilité

des efforts pour démontrer physiquement (qu'on me passe cotte expression) le mesmérisme, ne firent qu’augmenter le nombre des chercheurs; et, des éleclroscopes passant aux galvanomètres, des thermomètres aux piles thermo-électriques, on essayait encore de produire une conviction par des moyens qui ne l’auraient jamais donnée, mais l’auraient plutôt détruite. Et, effectivement, quoi de plus absurde que de vouloir prouver que le mes* mérisme est l’électricité, si avec l’électricité nous ne pouvons reproduire aucuu de ses phénomènes; qu’il est du magnétisme, si le magnétisme reBte inactif devant le système nerveux de l’homme et des animaux; qu’il est de la chaleur, si la chaleur ne peut vous donuer un seul de ces faits qui caractérisent si netlement l’action mesmérique? Il ne fallait pas chercher si le mesmérisme était un de ces modes de vibration de l’éther, il suffisait de montrer que ces agents ne produisaient point l’effut du mesmérisme, et c’était chose bien plus facile (i). Mais c’est toujours par le plus long chemin qu’on arrive à la découverte d’une vérité par le raisonnement, et ce n’est qu’après qu’on s’aperçoit de la fausse route qu’on avait suivie. Les mathématiques se traînèrent jusqu’à Descartes par toutes les longueurs des démonstrations géométriques, et ce ne

(1) Deleuze avait bien reconnu que le mesmérisme n’est pas l'électricité. « Ce fluide, dit-il, n’est point le fldlde électrique : ou si l’un ou « l'autre sont des modifications du Quide universel, ce sont des modi-» fications totalement différentes. * Ilisloire critique du SiagnéUmr animal, t. I", p. 88 (édit. de 1819). — Voy. encore Mesmer, Mémoire sur la découverte du Magnétisme animal, Proposition XX :

* Le principe du magnétisme animal diffère essentiellement de celui du

maéfül, 'i

fut qu’alors qu’on vit combien l’algèbre aurait pu abréger le chemin, et qu’on l'adopta dans les recherches d’analyse.

Il y eut pourtant encore des hommes, pleins de mérite et de savoir, qui crurent avoir trouvé des rapports entre le mesmérisme et le magnétisme de l’aimant (1) , entre l’agent volontaire et le fluide galvanique (2). Mais ces ardents chercheurs n’avaient encore pu obtenir l’examen de l’Académie, ils n’avaient point jeté leurs lingots à la coupelle , et des recherches qui auraient pu éclairer tout de suite le champ ténébreux de la question, restaient oubliées dans un coin avec tant d’autres choses plus intéressantes confiées à l’examen des commissions qui n’examinent pas.

Les expériences de M. Du Bois-Reymond, en Allemagne, appuyées du témoignage de MM. de Humboldt, Müller et Mitscherlich (3), dont nous avons déjà rendu compte , éveillèrent de nouveau l'attention des savants sur de telles recherches, et amenèrent, de la part de MM. Becquerel et Despretz, deux rapports fort contradictoires dans la forme, mais d’accord sur le fond, et la chose paraissait tout-à-fait terminée, lorsque M. le docteur Ducros(de Marseille), se présenta avec un système physiologique à lui (4), galimatias bariolé de toules

(1) Journal du Magnétisme, t. III, p. 30. — Expériences de MM. Thilorier et Lafontaine.

(2) Névrurgie , ou le Magnétisme animal devenant une science physico-mathématique, par M. le comte de Kobiano. Bruxelles, 1846.

— Voy. sur ce livre Journal du Magnétisme, t. III, p. 50 et 8t.

(3) Journal- du Magnétisme, t. VIII, p. 313 et suiv.

(4) Comptes-rendus de l’Académie des Sciences, années 1846, 17, 48. 49.

les couleurs, mélange confus de vérités et d’absurdités, de science el d’ignorance puisée» dans toutes les sources possibles, et, parmi les pièces de cet étrange édifice, il plaça aussi la démonstration matérielle de l’identité du mesmérisme avec le magnétisme de l’aimant. Le docteur avait réussi à faire dévier l’aiguille d’un galvanomètre en la regardant fixement, en approchant d’elle et contractant ses muscles, ou bien en se faisant pincer, piquer, briller, en avalant des médecines * etc. , etc. Toujours en présence de son aiguille bien aimée, qui, par pitié pour tant de souffrances, s'agitait dans sa cage au grand étonnement du patient et de l’Aca-démie, qui en écoutait de temps à autre les récits. Enfin, un beau jour, M. Despretz (i) vint lire une note sur ces phénomènes surnaturels, et les ftîles du pauvre Icare se défirent sous l’action du savant en laissant tomber le hardi voyageur dan» le» abimes du néant. Toutes leB déviations observées par M. Ducros n’étaient que l’effet de la chaleur qui rayonnait de son corps. chaleur qui croissait ou diminuait selon les différentes émotions qui agitaient l’individu , et selon sa plus ou moins grande proximité de l’appareil. L’explication était claire, les preuves qu’on en apportait étaient incontestable^;

(1) M. Despretz : Noies sur la dcvialionde l’aiguille aimanterpar l'action des corps chauds ou froids (Comptes-rendus, etc., I. XXIX, p. 225). Le savant physicien termine sa note par cette conclusion :

« De ce petit nombre d’expériences, il suit, si je ne me trompe, que r la cause principale, j’oserais dire la cause unique du fait communiqué « par M. Ducros, doit se trouver dans le rayonnement calorifique de « la main. C'est un phénomène de chaleur et non de magnétisme. — Il « suit encore de ces essais, et d’essais plus anciens, qu’on ne saurait « trop éviter la présence des corps froids ou chauds quand on emploie » des galvanomètres sensibles, »

néanmoins M. Pouillet crut devoir protester (i ), et protesta eu son nom contre celte solution du problème, en faisant observer qu’en 1829 il avait déjà expliqué tics faits de même nature, et bien plus complètement, en les attribuant aux courants d’air qui naissaient dans l’intérieur de l’nppartil toutes les fois qu’une partie en élait échauffée plus fortement que les autres. Les faits dontM. Pouillet s’était occupé dataient presque d’un siècle, et étaient dus au Père Berthier, de l’Oratoire, qui en avait fait l’objet d’une communication à l’Académio en 1750, à Fresnel (2), qui s’était engagé dans

(1) Note historique snf divers phénomènes d’attractions, de répulsion el de déviation qui oui élé attribués à des causes singulières, el qui s’expliquent naturellement par l'action de certains courants d’air dont on n’avait pas soupçonné l’existence, par M. Pouillet (Comptes■ rendus, etc., t. XXIX, p. 245 et suiv.)

Dans cette note, M. Pouillet se propose de démontrer que les faits annoncés par M. Ducros, étudiés par M. Despretz, el attribués par ce gavant, à ce qu’il croit, £1 une cause inconnue, ne sont autre chose que les faits signalés par le P. Berthier, Kreshel el M. Saigey, et qui « se « trouvent expliqués de la manière la plus simple et la plus satisfaisante » dans un Mémoire que lui, M. Pouillet, présenla à l’Académie le 16 février 1829, dont le titre et la date se trouvent dans les Annales de Physique el dcChimie, 2e série, l. XL, p. 196. — L’auteur donne ensuite un extrait de ce mémoire dans lequel il démontre l’existence des courants d’air dans une caisse fermée dont on approche un corps échauffé, el dans une cloche sous laquelle on a pratiqué le vide à 1 ou 2 millimètres. —Ces courants sont indiqués en direction et en intensité par des aiguilles en paille suspendues à des cheveux , qui tournent en différents sens, selon la direction du courant qui les pousse.

(2) Histoire de? Académie royale des Sciences, ann. 1751, p. 38.

— Le P. Berthier , de l’Oratoire, correspondant de l’Académie, voulant éprouver si lous les corps terrestres ne s'attiraient pas , ou ne se repoussaient pas les uns les autres saus être électrisés, suspendit à des cheveux de longues aiguilles de matières différentes, comme de papier, de parchemin , de cuir, de bois et de fer, toutes d’environ un pied de long, et très-minces ; il présenta divers corps qui se trouvèrent sous sa

main , à deux ou trois lignes de distance de. la pointe de ces aiguilles, et toutes, sans exception, furent attirées ou repoussées cinq à six secondes après qu’on en eut approché ces corps. — M. de Réaumur , auquel il fit part de celle expérience, la communiqua ît l’Académie, qui la jugea digne d’être suivie , et désira qu’elle fiit répétée dans le vide : ce que le P. Berlhier exécuta chez l’abbé Nollet ; les aiguilles furent toujours attirées ou repoussées par les différeuts corps qu’on leur présenta. On fit même l’expérience en employant au lieu d’aiguilles un tuyau de verre de deux lignes d’épaisseur, qui fut aussi constamment attiré. La mémo expérience ayant été répétée dans l’air en présence de MM. Bouguer et Leroy, le premier conseilla au P. Ilerthier d’augmenter considérablement la largeur de ses aiguilles, sans louchera leurs autres dimensions; il le fit, et ces aiguilles nouvelles furent attirées et reponssées avec beaucoup plus de force que les premières. L’interposition du verre ne parait metlre qu’un faible obstacle à cette attraction. Le P. Ilerthier a même éprouvé que, lorsqu’il se tenait à un ou deux pieds des récipients fermés, dans lesquels il tenait ses aiguilles pour les garantir de l’agitation de l’air, les pointes de ces aiguilles venaient à lui au bout de dix à douze secondes, quoique un peu plus lentement qu’elles ne se portaient aux corps qu’il plaçait devant la cloche. Dans une expérience à laquelle assistaient MM. Punch« el Gueltard , le premier proposa de présenter aux aiguilles qui étaient sous la cloche, un gros rouleau de papier allumé, aussitôt toutes, même celle de fer, qui avait toujours été la moins docile , se tournèrent très-promptement vers la flamme.

(I) Note sur la répulsion réciproque que des corps échauffés exercent les uns sur les autres à des distances sensibles, par M. A. Fresnel. — Mu par les expériences de M. Libri sur le mouvement d’une goutte liquide le long d’un fil métallique échauffé à l’un des bouts, Fresnel essaya dans le vide si la répulsion pouvait s'exercer entre deux corps échauffés plus ou moins inégalement :

« J’ai attaché aux deux extrémités d’un ûl d’acier très-fin, aimanté et suspendu par un fil de cocon, un disque de clinquant et un autre disque découpé dans une feuille de mica, afin de pouvoir essayer avec le même appareil un corps opaque et un corps transparent ; le corps fixe qui devait repousser l’aiguille était un disque de clinquant. J'ai fait le vide sous la cloche de verre qui couvrait l’appareil, avec assez de soin pour que l'élasticité du gaz restant, indiquée par le mercure de l’éprouvette, ne fût guère que de un ou deux millimètres; ensuite, j’ai porté la cloche au soleil, et ie l’ai tournée de manière que le fil d’acier aimanté fût peu écarté de la direction du méridien magnétique, el assez cependant pour

vi (i), el à M. Saigoy, qui. dans ses Recherches sur tes répulsions des Corps, avait enrayé dans les mêmes ornières (2).

que l’un îles disques attachés à scs extrémités exerçât une très-légère pression sur le disque fixe, afin qu’il restât en contact avec lui. L'appareil étant ainsi disposé, j'ai fait tomber les rayons solaires réunis par une loupe, tantôt sur le disque fixe, tantôt sur le disque mobile : et aussitôt c.elui-ci s’écartait brusquement du premier, je le maintenais éloigné, el quelquefois même à un centimètre de distance, eu continuant d’échauffer un des disques. Quand je relirais la loupe, l’aiguille 11e revenait pas sur-le-champ loucher le corps fixe, mais s’en approchait graduellement en exécutant de petites oscillalious. Il est Irès-probable que si j'avais employé des corps plus épais, et parlant plus difficiles à refroidir, ce retour à la position primitive aurait été encore plus lent.

Pour m'assurer que ces pbénomèues n'étaient pas ocrasionés par le peu d’air ou de vapeurs restés sous la cloche, j’ai laissé rentrer l’air graduellement, et en répétant l’expérience lorsque l’air intérieur était devenu quinze ou vingt fois plus dense qu'au commencement, j'ai reconnu que la répulsion n’avait pas augmenté d’énergie d’une manière sensible, comme cela aurait eu lieu si elle avait élé occasionée par le mouvement de l’air échauffé; il y avait mémo certaines positions du disque mobile, relativement au disque fixe, pour lesquelles on ne pouvait pas produire des écarts aussi grands que dans le vide. » (Nouveau Uullelin les sciences par la Société philomatique de Paris, année 1825, p. 84 et 85.)

(1) Uullelin des sciences mathématiques, astronomiques, physiques el chimiques, rédigé par M. Saigcy. — Première section du Bulletin universel des sciences et de l’industrie, publié sous la direction de M. le baron de Férussac, etc., etc., I. VII, 1827, p. 371. — Nou-vclle propriété de l’antimoine et du bismuth , répulsion exercée par ces deux métaux sur l'aiguille uimantée de M. Le Ilaillif. (Communication faite par M. Bequerel à la Société Philomalique, le 31 mars 1827), t. VIII, p. 87. — Notice sur la construction du si-déroscope el sur les faits nouveaux qui s’y rapportent, par M. Le-Baillif. L’auteur y fait observer, p. 92, que « si l'on opérait au soleil, « les résultats seraient faussés par le calorique. »

(2) Bulletin de Férussac, etc., t. IX, 1848, p. 89 et suiv. — Magnétisme de quelques combinaisons naturelles du fer, et répulsions mutuelles des corps en général, placés dans les circonstances ordinaires, par M. Saigey. — Dans ce Mémoire, ou voit que M. Saigev

Le savant auteur des Éléments de Physique s’attribuait par là un mérite qu’il avait sans doute, mais qui n’était pas aussi complet qu’il se le figurait; car, sans vouloir affirmer que M. Buache eût eu la mèmeidëeen 1751, Cavendish l’avait exprimée bien nettement en 1798 , comme M. Desprelz l’avait fait observer (1), et Fresnel même, et Le Baillif et

avait tenu compte des courants d’air produits dans l’intérieur de ses appareils avant que M. Pouillet eût songé à les prouver, p. 90 : 0 lin petit corps chaud placé dans la cage, y occasionne des courants d’air que l’on peut étudier de la manière suivante. Au moment de l’introduction du corps chaud, on le saupoudre avec une matière capable de se réduire en fumée obscure ou colorée. Aussitôt on voit dans l’intérieur de la cage des traînées de fumée représenter en direction et en intensité les courants de l’air d’une manière vraiment admirable. Ces courants sont encore produits par une chaleur très-faible; mais ils cessent promptement quand on retire le corps supposé même très-chaud, et qu’on ferme la cage ; les mouvements se compliquent et durent plus longtemps quand celle-ci reste ouverte. Le même M. Saigey fait observer, p. 169, que M. Arago avait déjà supposé les courants d'air comme agents producteurs des phénomènes observés par M. Le llaillif. Et plus bas, il ajoute, p. 211 : " Les répulsions mutuelles entre tous les corps que j’ai essayés « ne pouvant être attribués ni aux mouvements de l’air , ni au magné-« tisme, ni à l’électricité, ni à la capillarité, il devient probable qu’elles « sont ducs à la chaleur rayonnante. J’ai vu que, toutes choses égales « d’ailleurs, les répulsions croissent avec la température. >>

(I) M. Desprelz : Réponse aux observations de M. Pouillet, tues dans la dernière séance de f Académie. — M. Desprelz, après avoir montré le passage de Cavendish (*) relatif aux phénomènes en question, dit que MM. Bailv el Forbes avaient reconnu dans leurs expériences analogues à celles de Cavendish, la même cause perturbatrice, et que M. Du Bois-Reymond aussi l’avait signalée, lui attribuant les variations accidentelles des aiguilles du galvanomètre. (Complet-rendus , etc., t. XXIX, p. 273).

(•) Exptrimenti to dtKrmme the Drnùty of ikt Eartk, by Henry Cavendish, Ksq. F. R. S. (Read Junc, 211 1708), p. Û70 ,471. — Ln force avec laquelle le» boule» sont attirée» par cette puissance est excessivement petite, el ue dépasse guère 0,00000002 de celte puissance. Kn sorleque l’on voit clairement que la plu» petite force perlurbatrico doit être suffisante pour empêcher la réussite de l'expérience ; et de toutes mes expériences j'ai pu rcconnjitre que la force perturbatrice, qu'il est le plus dillicile d’éloi-

Saigey l’avaient émise dans le cours de leurs travaux, et, à l’aide de précautions minutieuses, s'étaient garantis de l’influence des courants d’air sur les résultats de leurs expériences.

M. Pouillet n’avait donc pas constaté le premier l’action des courants d’air, et tous les faits examinés par lui n’étaient ni explicables ni expliqués par ces simples courants ; le calorique rayonnant y avait sa part, et si M. Despretz n’avait pas été très-exact en attribuant à celui-ci plus spécialement les effets constatés par M. Ducros, son illustre confrère avait bien aussi exagéré la portée de ses recherches.

Bien que les travaux dont il est question dans la note de M. Pouillet ne soient pas précisément l’ouvrage des chercheurs du mesmérisme, nous avons cru bien faire d’en parler, et de nous arrê-réter plus particulièrement à faire ressortir l'action du calorique rayonnant et des courants d’air dans ces essais de diverses natures, parce que, ordinairement , tous les expérimentateurs mesméristes échouent contre cet écueil, et qu’il serait à regret-

gner, vient des variation» dn chaud et da froid ; car, si l'an des côtés de la boîte est plus chaud que l'autre , l’air qui se trouve en contact avec lui se raréfie, el par conséquent monte , tandis que l’air , de l’autre côté , descend et produit un courant qui fait dévier sensiblement l’aiguille.

......M. Casaini, en observant les variations de la boussole qu’il avait placée

dans l’observatoire (qui avait été construit de telle façon que toute déviation, bien que minime , pût être visible , et dans lequel l’aiguille était suspendue à an fil de soie), trouva que lorsqu’il se tenait près de la botte poar observer , l’aiguille était sensiblement déviée , ce que je ne doute pas avoir été causé par les courants d’air. 11 faut encore observer que la botte de la bou*sole était en métal, qui transmet la clialeur bien plus vite que le bois, et, en outre, avait plusieurs ponces de profondeur, causes, toutes les deux, qui servaient h augmenter les courants de l’air. Afin d’amoindrir les effet* de ces courants, il serait convenable de ne donner k la boite dans laquelle l'aiguille se meut, plus de profondeur qu’il ne soit nécessaire pour empêcher qoe l'aiguille ne tonch? an fond ou au rouverele.

ter de voir se consommer en vains efforts des intelligences (|ui pourraient être mieux employées à l’analyse des phénomènes déjà constatés, qu’à la recherche d’une force ou d’un fluide qu'elles ne pourraient jamais reconnaître.

De celte histoire, que nous avons résumée très-succinctement, il ne résulte rien de nouveau, rien même d’intéressant, si ce n’est l’assurance dans laquelle on doit être que le mesmérisme ne peut pas se mesurer par des angles d’écartement ni par des appareils inorganiques, attendu qu’il est un produit de l’êlre vivant doué d’une âme ou de la faculté de penser et de se déterminer librement, et que c’est au moyen de son action par cette ;îme et sur celle âme, ou sur la pensée qui en découle, qu’il se manifeste et se distingue des autres agents qui peuvent être employés pour endormir, rendre insensible, enivrer, cataleptiser, etc. ; en sorte que l’on ne parviendra à faire voir l’action mesmérique sous une cloche, que le jour seulement où un nouveau Zambullo nous apportera Asmodée, Astnroth, Belzébuth ou quelqu’autre esprit familier des alchimistes, claquemuré dans une fiole, moyennant le sigillurn llermetis (1).

G..M

— Ah! messieurs les savants! vous cherchez dans les lois qui régissent la matière les propriétés

(1).....L'homme a le pouvoir d’agir sur son semblable, d’ébranler le

système de ses nerfs, et de lui imprimer des convulsions; mais cette action ne peut être regardée comme physique... elle est entièrement morale. (Exposé des expériences, etc. — Histoire de l'Académie royale des Sciences, année 1784, p. 15.)

Quoique l’examen des fiiils m’ait conduit à admettre un fluide magné-

de la vie! Vous voulez donner la preuve do cot agent mystérieux qui produit les incommensurables phénomènes que cinq cents volumes contiennent à peine déjà! Oh! nous vous le disons, l’homme, par son âme, est séparé de la nature terrestre, et c’est par cela seul qu’il s’en distingue. C’est donc en vain que vous avez cherché à soumettre à des instruments matériels, les caprices ou la loi du principe spirituel qui nous anime. Dès nos premiers pas nous cherchâmes également. Lorsque nous vîmes des secousses profondes ébranler l’édifice humain , et qui étaient dues à l’agent magnéti-tique, nous crûmes, parleur analogie avec l’électricité et le galvanisme, qu’elles s’en rapprochaient encore plus parla base de l’agent. Mais après avoir, comme vous, fait de nombreux essais, nous abandonnâmes cette route, en reconnaissant notre erreur et cherchant à signaler l’écueil. Car c’était vouloir donner une forme à l’idée, c'était vouloir rendre sensible ce que Dieu voulut cacher à tous les yeux. Et nous rappelâmes cette sentence des anciens, parlant par la bouche de l’Isis égyptienne : « Je suis tout ce qui est, tout ce qui a été, tout

ligue, je ne prétends pas que la réalité de ce fluide soit démontrée. Peut-être que le magnétisme agit sur le principe de la vie comme l’attraction sur la matière. (Deleuze, Histoire critique , etc. ; note à la pagu278, 1.11.)

Homo potest facerc virtutem et speciem extra se.... propter dignila-

tem animœ ralionalis.....exeunt (enfin) spiritus et calores ab eo.......

Prirnum moyens (sicut Avicenna docet tertio Melapb.J est cogitatio, deiude desiderium conformatum cogitatioui, postea virlus uaturalis in membris, qua: obedit desiderio et cogitationi. — Frai. Rogerii Raconis : Epistuhr ad Guliclmum l'arisiensem conscripta; (anii'i 1205), etc. Opéra Juhannis Dec. Hamburyi, ex llthliopolio h’robeniano, auno 1(118, p. ait, et scq.

oc qui sera ; nul mortel n’a encore levé mon voile. » Nous sommes heureux que cet article termine une discussion qui ne pouvait aboutira rien d’important, si ce n’est de fixer les idées des chercheurs. Nous continuerons de dire aux savants : Nous soulèverons votre machine, nous agirons sur chacun de vos organes, et vous ne verrez point notre levier. Nous produirons des merveilles, et la cause vous en restera inconnue. Aux médecins qui jettent un lustre si brillant sur les Académies, disons également : Nous guérirons les malades que vous n’avez pas même pu soulager ; nous montrerons ainsi votre impuissance et votre défaut de vertu , sans que vous puissiez connaître la nature de la force qui nous sert d’instrument. Cherchez donc, dans les corps morts, la vie qui vous échappe chez les vivants. Étudiez les ressorts de l’organisme humain ; à nous, plus avancés, de connaître ce qui le fait mouvoir, et de savoir comment il peut retrouver son harmonie, lorsque, par des cause* étrangères, il n’obéit plus à sa loi. Tandis que vous resterea à la porte du sanctuaire, nous, contents et joyeux, admis à la pratique de saints mystères, nous serons dans le temple, attendant que la taie qui couvre vos yeux s’abaisse , et que Dieu vous éclaire.

1)U POTET.

Le Magnétisme en société. — Au commencement de cette année, Mm° Birette, sage-femme, M. Hébert(i), avoral, etM. et M"" Moreau ont formé

(1) D'Aveney. Yoy. I. VII, page 124.

une société pour l’exploitation d’une maison dn santé magnétique.

L’apport de Mme lîirettc, dans la société, consistait principalement dans son droit de soigner les maladies des femmes, dans sa faculté el ses talents comme sage-femme, médecin ét somnambule, et dans ses connaissances et sa pratique en matière de magnétisme.

M. Hébert s’obligeait, de son côté, à faire un cours de magnétisme, et à verser dans la société le produit de ce coure et de toutes les magnétisations qu’il pourrait faire en ville.

Quant à M. et Mme Moreau, ils apportaient une somme de 8,000 fr.

Les bénéfices escomptés à l’avance étaient estimés â 10,890 fr. par mois. Les dépenses ne devaient pas s'élever à plus de 3,000 fr.

L’attraction magnétique n’a pu main tenir la bonne harmonie entre les contractants, et à la suite de difficultés intérieures, ils ont cherché à se séparer.

Leyr acte de société n’avait pas été publié conformément à la loi, et il était nul de droit.

Le tribunal de commerce de Paris, sous la présidence de M. Rousselle-Charlard, après avoir entendu les plaidoieries de Me Dillais, agréé de M. et M1"' Moreau, et Me Amédée Lefebvre, agréé du défendeur , a déclaré la société nulle, et a renvoyé les parties devant arbitres-juges pour faire leur liquidation.

Audience du 24 juillet.

(Droit.)

— Peu de jours avant ce triste dénouement, on

lisait clans le Tintamarre , la pompeuse annonce que voici :

MAISON DE SANTÉ MAGNÉTIQUE,

31, rue de la Pépinière.

■¡mAOTTEEfllEKlT £>E TOUTES ILE§ ÛSQILADOE8 par le Magnétisme et le Somnambulisme.

Guérison radicale des maladies et ulcérations de l’utérus, sans repos ni régime, par M'"'- BIKETTE, maîtresse sage-femme de la Faculté de Paris, Somnambule, ci-devant rue Cadet, 20. — Traitement de toutes maladies, et notamment de celles articulaires, rhumatismales, gouttes, etc., par le réservoir magnétique, appareil complet, inconnu en France, et supérieur, par son action et sa richesse , à tous ceux qui existent en Europe. — Cours de magnétisme expliqué par la métaphysique, la physiologie, l’électricité et l’anatomie générale. — Consultations tous les jours, excepté le dimanche, qui est réservé aux indigents de midi à cinq heures du soir. — Uu docteur de la Faculté de Médecine est attaché à demeure el spécialement à la maison.

Nota. — On trouve dans la Maison de Santé tous les soins et tout le confortable possibles; les prix sont réglés à l’amiable.

Revue des journaux. — Le Droit du i5 juillet rend compte d’un procès scandaleux dans lequel M. Lafontainc figure indirectement comme magnétiseur.

— M. l’abbé Moigno soutient, dans la Presse du 16 dudit mois, à propos d’une nouvelle note de M. de Humboldt sur les expériences de M. Du Bois-Reymond, la thèse qu’il a précédemment développée avec tant d’aménité. A ses yeux nous sommes tous des jongleurs, et cependant il signe, en collaboration de M. Jobard, les articles très-remarquables que la Prisse publie sur l’exposition des produits do l’industrie. Si le savant bruxellois n’a

pu vaincre ses préventions, on conçoit que nous y renoncions nous-mêmes.

— Le Commerce de Dunkerque, des iget 24 juillet, donne l’aperçu de séances soninambuliques faites en cette ville par un professeur de magnétisme, jusqu’alors inconnu, accompagné du plus célèbre som-nambule de Paris.

— Le Journal de Dunkerque, du 22, relate les mêmes faits que son confrère précité.

Ces deux organes envisagent les expériences qu’ils rapportent, comme un amusement théâtral; et tel paraît être, en effet, le caractère des séances en question. Ils citent des traits de lucidité, malgré l’occlusion des yeux par des tampons, des bandeaux, etc. C’est, comme on voit, toujours la même manière de procéder, bien qu’on sache que ces précautions n’offrent point de garantie suffisante.

— Il parait que tout le monde n’a pas admis sans contesie la réalité des faits somnambuliques rapportés par les feuilles dunkerquoises, car le Journal, du a5 juillet, et le Commerce, du 28 , font des réflexions, d’ailleurs très-sensées, à cet é gard.

Nous remarquons là ce qui arrive partout où au lieu de présenter le magnétisme tout entier, on ne met en avant qu’un de ses eflets, le somnambulisme. Les esprits avides du merveilleux s’emparent avec enthousiasme des premiers faits, ils les commentent, les exaltent; mais le merveilleux des faits vient-il à cesser, ils abandonnent aussitôt la partie, se croyant trompés.

— A Bourbourg (Mord), où est allé, en quittant Dunkerque, M. Adolphe Didier, qui semble être partout pris pour son frère Alexis, il s’est trouvé un médecin éclairé pour examiner les facultés de ce somnambule. M. le Dr Dehenne rend compte, dans Y Éclaireur, journal de Saint-Omer, du 3 août, des faits dont il a été témoin , avec une sincérité rare. Sa lettre est une véritable profession de foi au magnétisme, dont on ne lui a fait pourtant voir qu’un côté.

— Sous le nom de Nonciorarna, on vient d’inaugurer un genre tout nouveau de publicité. C’est la reproduction , sous une forme pittoresque et dramatique , des annonces industrielles dont on peut lire dans les journaux le détail libellé. On a choisi pour cela les rideaux de.théâtre, sur lesquels se portent les yeux des spectateurs, durant les entre actes. La Presse du 6 août donne la description de celui de l’Ambigu. Nous en extrayons le passage qui suit :

«......En arrière ! M. Mesmer magnétise ma-

« dame la princesse Koritza, et son négrillon lui « rapporte le coffret de bijoux volés que le magi-« cien naturel lui a fait retrouver, et sur lequel est « inscrite l’adresse d’une somnambule célèbre de « nos jours. »

— Le Mémorial artésien , du 4 août, annonce en termes pompeux l’arrivée à Saint-Omer du professeur Fortier et de son somnambule Ad. Didier.

Le Gérant HÉBERT (de Garnay).

THÉORIES.

PHILOSOPHIE MÉDICO-MAGNÉTIQUE.

CHAPITRE II.

De la Médecine d'imagination.

L’histoire de la médecine empirique nous a présenté, dans tous les temps et chez tous les peuples, des phénomènes du plus grand intérêt pour le physiologiste. L’explication de ces faits a été soumise aux appréciations les plus diverses, suivant les idées scientifiques et les préjugés de chaque époque.

Tout observateur consciencieux ne pourra certainement révoquer en doute ces nombreuses guérisons dont les magnétiseurs réclament aujourd’hui la prérogative, mais il ne découvrira pas toujours, au milieu des pratiques du magnétisme, des preuves suffisamment concluantes pour croire l’existence de cette puissance occulte. Son esprit pourra-t-il se contenter uniquement de l’intervention de la divinité? Les hommes les plus religieux du xixe siècle ne croient plus guère aux miracles. Alors il se verra forcé, pour échapper à cette pénible in-tosif yiii. — m- lOO. — 25 mn. 10

certitude, d’invoquer la toute-puissance de l'imagination.

« L'empire de l’imagination est si étonnant, dit Virey (1), qu’on l’a vu guérir sur-le-champ des malades aux portes du tombeau, et frapper soudain de mort l’homme le mieux portant; elle opère de vrais miracles, elle est la reine du système nerveux, et domine toutes les puissances de la sensibilité. »

En admettant que l’imagination soit susceptible de mettre en jeu tous les ressorts du système nerveux, et de produire des cures aussi éclatantes, nous serions bien coupables de repousser ce précieux auxiliaire, dent la nature nous a toujours indiqué l'usage.

« Si la médecine d'imagination, disait le docteur Desion à ses détracteurs (2), est la meilleure, pourquoi ne ferions-nous pas la médecine d’imagination? »

Paroles judicieuses qui, dans ces dernières années, trouvèrent de l’écho dans la bouche d’une de nos célébrités médicales, M. Orfila, qui osa défendre le magnétisme devant l’Académie royale de médecine.

Tous les physiologistes ont été frappés des merveilleux effets que l’imagination exerce sur l’organisation de l’homme. Ils sont unanimes pour signaler le pouvoir dont elle dispose pour le soulagement et la guérison des malades, lorsqu’une circonstance opportune vient mettre en jeu ce mobile puissant et salutaire.

(1) Dictionnaire des Science» médic., t. 24, p. 1G.

(2) Observations, p. 47.

Ilippocrate parle, en scs Aphorismes, de l'in-Uuencc avantageuse que le médecin peut retirer de la confiance qu'il inspire. Qui oserait nier aujourd’hui les effets si puissants du moral sur le physique?

D’après Avicennes (i), les Arabes étaient convaincus que l’imagination agissait non seulement sur son propre corps, mais encore sur des corps très-éloignés, qu’elle pouvait les rendre malades ou les guérir.

Corneille Agrippa est un des premiers philosophes hermétiques qui ait fait jouer un rôle important à l’imagination dans la cure des maladies.

« Il n’est pas douteux, dit-il (2), qu'une ferme confiance, qu’une foi ardente dans la médecine et le médecin, contribuent beaucoup à rétablir la santé, et quelquefois sont plus efficaces que la médecine elle-même. *

Pomponace (3) fait ressortir les effets merveilleux que peuvent produire la confiauce et l’imagination, surtout quand elles se trouvent réunies chez l’agent et le patient.

Suivant Paracelse (4), l’imagination et la foi sont si efficaces qu’elles ont le pouvoir de produire la santé ou la maladie. Celui qui croit dans la Providence est récompensé suivant l’étendue de sa confiance : le doute laisse tout imparfait dans la nature.

(1) De Natura rerum, ch. 6 , § 6.

(2) Philosophie occulte, ch. 60.

(3) De Incunlulionibus.

(4) Occulta philos., t. Il, p. 220.

¡Via re i le Ficin(i) partage cette opinion, lorsqu’il affirme que l'esprit peut agir sur le corps, lorsqu’il est dirigé par de violents désirs.

« 11 n’est pas surprenant, ajoute-t-il (2), de voir les maladies du corps et de l’esprit se dissiper ou se communiquer, sous l’inflilencé de l’imagination, lorsque nous savons que notre esprit peut agir directement sur une substance qui est intermédiaire entre l’âme et le corps. «

Fienus (5) prétend que la puissance imaginative peut causer toutes les maladies.

« On a vu, dit-il, des personnes gagner la peste et la petite vérole par la peur et la force de l’imagination. »

Combien d’accidents voyons-nous arriver à la suite d’impressions vives ; les médecins ne nieront pas que la peur puisse développer des affections nerveuses fort graves, telles que l’épilepsie, l’hystérie , etc. ; la suppression des règles, l’avortement sont souvent le résultat d’une violente émotion. I.a seule appréhension du choléra ne détermine-t-elle pas les accidents propres à cette maladie.

On a même vu des personnes mourir à la suite d’une perturbation morale?

« Je ne treuve pas estrange que l’imagination donne et les febvres et la mort à ceulx qui la laissent faire et qui luy applaudissent (4) *.

« Lorsque l’exaltation morale, dit Chardel (5),

(1) De Vitd cœlilùs comparanda, ch. 20.

(2) )b.. c. 21.

(3) Tractatus de viribus imagin.

(4) Montaigne. Essais, ch. ‘¿0-

(5) Essai do Psychologie, p. 188.

dohne à l’Attie uric trop grande puissance sur la vie spiritiialisée, l’impulsion qu'ellè lui imprime peut la séparer Complètement du fluide nerveux ; et c’est ainsi qu’on meurt de doiileur oii de plaisir. La sytteope proltingée est toujout-s dangereuse, car elle dihliriue l'effluve du fluide nerveux, qüi peut s’arrêter et amener la mort. •

Fieniis (i) parle d’un malftiteuf qui, conduit à l’échàfhild, tadÜtüt de la frayeur que lüi inspira an doilp porté sur le cou. par le bourreaü, avec ùn linge mouillé.

Montaigne avait déjà Cité une Observation semblable :

« Il y en a qui de frayèiir aHticiperit la rfiàin du bourreau; et celuy qu’on dèsbnndàitpour luy lire sa grâce, se trouva roide mort sili1 l’eschaffâüd, du seul colip de son imagination. » (Essais, c. io.)

Une demoiselle de Livonie rêva qu'un tàüréaù fllrieux se précipitait stir elle; l’imprèssioii qu’elle épfoilvà fut si gteihde, qu’elle èüotit'ii t le lendemain (2).

Pouidns-nous attribuer seulement à la prévision •la réalisation de ces citations à comparaître detttHt Dieu à une époque déterminée. Ces ajout-nemëhts sont fréquents dans l’histoire des sorciers; ils s’observent aussi quelquefois chez des somnaHibüles et des personnes à l’article de la mort; ils peüverit être, nous n’en doutons pas, le résultat d’ùne merveilleuse intuition, mais nous pehsons que là plupart des nombreuses observations qüe l’histolfe

(t) Ouvrage cité.

(2) Epbémérides germaniques.

nons présente, trouveront plutôt leur explication dans l’influence du remords ou de la peur.

« Jacques de Molay, grand-maître des templiers, et Guy, grand-prieur de Normandie (i), protestèrent de leur innocence jusqu’au dernier soupir, et citèrent le roi et le pape au tribunal de Dieu, Clément dans quarante jours et Philippe dans l’année. Le peuple, témoin de la constance de ces deux infortunés, donna des larmes à leur fin tragique, et crut qu’ils mouraient innocents. 11 fut encore confirmé dans cette nouvelle opinion par la mort des deux auteurs de cette catastrophe, qui arriva aux termes marqués par leurs victimes. »

Les PP. Tranquille et Lactance, menacés d’une mort prochaine par leur innocente victime Urbain Grandier, succombèrent à l’époque fixée par ce martyr d’une honteuse vengeance et du fanatisme religieux.

Les exemples de guérisons opérées instantanément sous l’empire d’une violente réaction du système nerveux ne sont pas rares.

Si l’on en croit Hérodote, le fils du roi Crésus , muet de naissance, voyant son père sur le point d’être atteint d’un coup de hache, pendant un combat contre Cyrus, lui sauva la vie en s’écriant :

« Arrête, soldat! ne porte pas la main sur le roi Crésus! » L’impression que ressentit ce jeune prince fut si vive, qu’elle développa chez lui les organes de la parole. L’histoire atteste qu’il continua à parler.

Péklin cite l’observation d’un homme qui fut

(1) Anquetil. Histoire de France, 1.111.

guéri très-rapidement d’une fièvre hectique très-violente, avec jaunisse, à la nouvelle de la naissance d’un fils (ij.

« Extrêmement malade, dit Mme Guyon, dans ses Mémoires, on fit venir le père Lacombe pour me confesser. Sitôt qu’il entra dans la maison, mes douleurs s’apaisèrent, et, lorsqu’entré dans ma chambre il m’eut bénie, en appuyant les mains sur ma téle, je fus guérie parfaitement, et en état d’aller à la messe. Les médecins en furent si étonnés qu’ils ne savaient à quoi attribuer ma guérison; car, étant protestants, ils n’avaient pas envie de croire au miracle (2) ».

N’a-t-on pas vu des malades oublier leurs souffrances au moment d’un incendie, pour se soustraire au danger par la fuite, et se rétablir complètement à la suite de cette vive émotion? Des paralytiques même ont retrouvé des forces pour échapper aux flammes. La foi religieuse a produit des cures aussi merveilleuses.

« En l’année 1802 , rapporte Gratien de Sé-mur (3), le hasard nous fit trouver, au village de Mottel, à peu de distance de Dreux et tout près de la forêt d’Anet, le jour de la Fête-Dieu. Le concordat venait d’être conclu , et c’était la première fois, depuis la Révolution, que l’on revit dans nos campagnes la célébration du culte divin. Comme il n’y avait que des catholiques dans la cominuni'fla procession put sortir de l’église. Nous avons été témoin de ce que nous racontons. Il y avait, dans

(1) Roullier. Exposé plivsiol. des Phénomènes du magnét., p. 177.

(2) Charpignon. Pbysiol. méd. el mélaph., p. 169.

(5) Traité des Erreurs et des Préjugés, p. Î71.

un petit village de Mottel, une bonne vieille femme, bien dévote , paralysée de tous ses membres, au point que, depuis plus de trois ans, elle n’avait pas lait d’autre voyage que de son lit à sa chaise, et de sa chaise à son lit. Quand elle apprit que le saint-sacremeut passerait sur un chemin qui longeait l’extrémité de son jardin, la bonne femme voulut se faire porter à cet endroit. Ce que l’on fit, non sans peine. Quand elle vit le prêtre portant le saint-sacrement passer devant elle, elle en ressentit une secousse de joie si puissante, qu’elle put revenir à pied à son logis, appuyée sur le bras d’un de ses enfants. La paralysie n’était pas seulement suspendue, elle était à peu près guérie, car la bonne femme continua à pouvoir marcher. »

Nous ne pourrions expliquer , sans recourir à l’influence de l’imagination, certaines douleurs sympathiques que nous ressentons quelquefois.

Malhbranche (1 ) raconte l’histoire d’un savant qui, voyant faire une saignée au pied de sa maîtresse, ressentit subitement à la même partie une douleur qui persista pendant plusieurs jours.

Hecquet (2) cite l’observation d’un homme qui, apercevant une personne suspendue par les talons au crampon d’une voiture qui l’entraînait, fut saisi d’une telle émotion, qu’il ressentit à l’instant une violente douleur au talon, et resta boiteux toute sa vie.

Un peintre de notre connaissance se trouvait à

(1) Recherches de la Vérité, t. I, liv. 11, ch. 7. — On trouvera dans cet ouvrage plusieurs faits aualoguea, ainsi que dans les Ephémerides germaniques.

(2) Natural. des Couv.

Paris, pendant les journées de Juillet iB^io. Surpris sur la place des Victoires, par une compagnie de la garde royale qui poursuivait des insurgés, il se réfugia précipitamment sur le piédestal île la statue de Louis XIV. A peine avait-t-il atteint cette retraite , qu’une décharge de mousquetcric se fit entendre. L’effroi de notre artiste fut si profond , qu’il éprouva instantanément, à la partie postérieure de la jambe , une vive commotion qui le fit boiter pendant quelques jours.

M",e S., habitant le village de la Maladrerie, près Caen, aperçut un de ses enfants étendu sans vie sur la roule, au moment où les roues d’une voiture venaient de lui écraser la tête. La douleur de cette pauvre mère fut si grande, qu’elle perdit connaissance. Lorsqu’elle recouvra ses sens, elle éprouvait à la partie supérieure du crâne une sensibilité si violente, qu’elle ne pouvait supporter à cet endroit le plus léger contact sans ressentir d’horribles souffrances. Depuis deux ans cette affection avait résisté à toute espèce de médication, lorsque nous eûmes la pensée de la soumettre à un traitement magnétique qui dissipa ce mal au bout de deux séances.

Le père Kircher, dit, en parlant des forces de l’imagination (i), qu’il y a beaucoup de personnes qui éprouvent l’effet d’un purgatif ou d’un vomitif, soit à la vue soit à l’odorat.

Donatus (2) affirme avoir connu plusieurs personnes qui se trouvaient purgées abondamment à

(1) Magnes, p. 472.

(2) Hist. mirab., lib. vi.

l’odeur seule d'un purgatif. Nous avons vu des malades vomir à la vue d’un vase qui contenait de l’émétiqile.

Un de nos amis, littérateur distingué de la ville de Caen, ne peut rester auprès d’un malade qui a des nausées ou des vomissements, sans ressentir l’action d’un vomitif.

A l’âge de douze ans, la dentition s’était fort mal développée chez lui. Sa famille lui fit extraire plusieurs dents ; cette opération fut très-douloureuse. Chaque fois qu’il rencontrait son dentiste, il lui survenait à la mâchoire une névralgie très-intense, qui se dissipait naturellement après une ou deux heures. Cette singulière susceptibilité persista plusieurs années.

Shultzius (i) rapporte plusieurs témoignages à l’appui de cette immense sensibilité de la vue ou de l’odorat, qui doit rentrer, suivant nos convictions , dans le domaine de l’imagination; car nous avons vu des malades assez impressionnables pour ressentir tous les effets d’un médicament actif qu’elles croyaient avoir avalé, lorsqu’en réalité elle6 n’avaient pris qu’une substance parfaitement inerte; et, à ce sujet, nous citerons l’observation suivante, dont nous avons été témoin (2).

Une jeune femme, d’une constitution très-nerveuse, atteinte d'une gastralgie chronique, avec constipation opiniâtre, était obligée depuis long-tîmps de faire usage de purgatifs en lavements,

(1) Ephém. german.

(2) Cette expérience fut tentée dans le but de nous assurer si l’imagination des malades ne venait pas quelquefois suppléer à l'insuffisance des remèdes homéopathiques.

pour obtenir quelques évacuations. Plusieurs pilules de mie de pain furent préparées sous nos yeux; la malade, fort éloignée de soupçonner nos intentions, en avala deux, et nous lui donnâmes l’assurance quelles ne tarderaient pas à produire l’ellet d’un violent cathartique. Notre espérance ne fut pas trompée, el de nombreuses évacuations vinrent, au bout de quelques heures, donner raison à la médecine d’imagination.

Nous allons passer en revue tous les traitements qui nous semblent appartenir à la médecine d’imagination. Loin de nous la pensée de porter atteinte à la susceptibilité des magnétiseurs qui se sont approprié la majorité des cures. Les ressources immenses que leur fournit le magnétisme les dédommageront amplement de celle trop juste revendication.

Nous nous garderons bien de mettre en doute l’action si puissante de la volonté qui, dans quelques circonstances exceptionnelles, devait agir magnétiquement sur les malades et les conduire à une prompte guérison. 11 nous est également bien démontré que la pratique du magnétisme a dû quelquefois servir d’auxiliaire à la médecine d’imagination ; mais nous ne pouvons nous dissimuler qui la plupart de ces cures n’étaient que le résultat d’une violente surexcitation cérébrale, sous l’empire de la confiance et de la foi. Qui pourrait nier aussi que l’enthousiasme, l’amour, la colère, etc., ne soient susceptibles d’imprimer sur notre organisation physique de puissantes déterminations. L’exaltation morale peut certainement produire des maladies ou des guérisons. Nous comprenons

l'influence que la présence de Napoléon, dans l'hôpital de Jafla, dut exercer sur l’esprit profondément découragé des malheureux pestiférés. Cette visite fut peut-être plus salutaire que tous les secours de la médecine.

Il a existé, dans tous les temps, des hommes ou des femmes qui passaient pour guérir les maladies par les attouchements, l’imposition des mains ou la prière. On les appelait loucheurs ou taumathur-ges. Ils devaient ordinairement ces connaissances au hasard ou à des héritages de famille. La plupart d’entre eux étaient des habitants de la campagne , gens simples cl de moeurs pures. On en rencontre encore aujourd’hui dans nos provinces.

J.-B. Thiers ( i ) nous affirme que certaines familles avaient le privilège de guérir le carreau par le toucher ; d’autres, les corps aux pieds, etc. Il fallait être de la famille de sainte Catherine, et né en mars ou avril, pour produire ces cures.

Les loucheurs du mal caduc prétendaient descendre en ligne directe de saint Martin.

Suivant Pline (2), une fille vierge faisait cesser l’é— pjlepsie, en touchant le malade du pouce droit.

Les ensalmistes (3) gravaient sur leur corps la fjgure d’une roue, qu’ils assuraient avoir apportée en naissant ; ils l’appelaient roue de sainte Catherine.

Les sauveurs d’Italie, portaient sur la peau l’empreinte de la figure d’un serpent, et faisaient remonter leur généalogie jusqu’à saint Paul. Ils jouis-

(1) Des Superstitions, liv. yi , p. 518.

(i) Hist. nal., 1. vin.

(3) Thiers. lb., liv. vj, th. 4.

saient surtout du don de guérir les morsures de serpents (i).

Les psylles, les marses et les ophiogènes avaient le même privilège , suivant les anciens (2).

« 11 existe à Baveux, dit M"* Bosquet (5), d’après Y Essai historique de Frédéric Pluquet, une famille à laquelle cette faculté merveilleuse (toucher du carreau) a été reconnue depuis un temps immémorial. Enfin, dans certains cantons 011 croit que le septième garçon ou la septième fille, et leurs descendants jusqu’au quatrième degré, reçoivent, par don de naissance, la prérogative de guérir le carreau. »

Cet usage est encore fort répandu dans nos villes et nos campagnes. Nous avons eu quelquefois l’occasion de nous en assurer, et tout nous porte à croire que ces pratiques se rapprochent dans la plupart des cas, de la médecine magnétique. Aussi noys ne nous en occuperons pas davantage.

Les toucheurs d’écrouelles remontent à une époque fort éloignée. Nos anciens rois se sont toujours arrogés le privilège de guérir les affections scrofu-leuses, par l'imposition des mains ou le toucher. Toutes nos recherches n’ont pu nous faire décou-. vrir dans cette coutume le plus léger rapprochement avec les procédés du magnétisme. L’empire de l’imagination nous donnera facilement l’explication de ces guérisons merveilleuses, surtout si nous nous reportons à ces temps où la royauté était entourée d’une religieuse vénération. Quelle puissante réaction devait alors opérer l’imposition

(1) Doisardus. Iraclat. de Divinat., c. 2, de Satvaloribus.

(2) Pline, liist. natur. —Tliiers, ouvr. cité.

(3) .Normandie romanesque , p. 305.

de ccttc main royale sur l’esprit de ces malheureux infirmes dont l’enthousiasme el la confiance étaient sans bornes !

André Du Laurens, médecin du roi Henry-le-Grand (i), et Thomas d’Acquin, nous apprennent que Clovis fut le premier de nos rois qui recul le pouvoir de guérir les écrouelles par le toucher. 11 fut averti en songe que ce don lui était octroyé, et, à son réveil, il toucha le cou d’un de ses chevaliers et favoris, nommé Lanicetus, qui vit ses engorgements se dissiper en très-peu de temps.

Ce ne fut que vers la fin du xic siècle que les rois réclamèrent cette prérogative, qui leur avait été léguée, suivant plusieurs historiens , par saint Marcoul, abbé de Nanteuil, en Normandie, mort en 558, et qui passait pour guérir les humeurs froides. Le corps de ce prêtre fut transporté , en 95o, à Corbigny, dans le diocèse de Rheims. Les rois allaient, après leur sacre de Rheims, à Corbigny , faire une neuvaine pour remercier ce saint du don qu’il leur avait accordé (2).

Philippe 1er, roi de France, s’honora le premier de ce privilège. On donnait alors à cette maladie le nom de mal de roi. Philippe passa pour avoir perdu celle faculté, lorsque le pape l’eut excommunié, après son divorce.

Guibert, abbé de Nogent, fut témoin de presque toutes les cures qu’obtenait Louis-le-Gros. 11 ac-

(1) Du Laurens. De Mixrabil. strumas sanauil, 1. m , c. 5. — De-lancre. De l’Incréd., p. 159. — Forcetullus. üelmper. el Philos. jal-lorum, p. 13.

(2) Dictionnaire des Religions, par Collin de Plancy, t. Il, p. 15i.

compagnait ordinairement le prince pendant les cérémonies du toucher (i).

On trouvera dans Y Histoire de France d’Étienne de Conti, des détails sur les rites usités, dans ces circonstances par Charles VI. Louis XIII et ses successeurs pratiquèrent encore le toucher (2). Ce fut Louis XVI qui, le dernier, observa cette pratique, et il se servait toujours de la formule ancienne : Le roi te touche, Dieu te guérisse.

Guillaume de Nangis assure que saint Louis avait recours au signe de la croix lorsqu’il touchait les écrouelles (5). Aussi passa-t-il, dans ces temps de fanatisme religieux, pour guérir beaucoup plus de malades que ses prédécesseurs.

Les Anglais réclamèrent pour leurs rois la priorité de cette influence curative, el Édouard-le-Confesseur passa pour être doué exclusivement du don de guérir les écrouelles, qu’il devait à ses grandes vertus , et qu’il transmit à ses descendants. Quelques auteurs fout remonter ce pouvoir au roi Robert.

Guillaume Tookes (4) et Delancre (5) font observer que la reine Élisabeth, quoique hérétique , s’était acquis une grande réputation dans le traitement des écrouelles, appelées aussi Icing devil (mal de roi.)

Les rois ont cessé de guérir ces maladies lorsque la confiance et la foi ont abandonné leurs sujets,

(1) MeaJ. opéra, i. Il, p. 327.

(2) Philosoph. corpusc.

(3) Dictionnaire des lîeliqucs , t. II, p. 124.

(4) Claris, sive dvnum sanal.

(5) De l'incrédulité, p. 157.

ou lorsque eux-mêmes cessèrent de croire à leur privilège.

Cette propriété fut aussi attribuée à quelques hommes dont les vertus ou la position élevée pouvait exercer une influence morale sur le peuple.

Le pape Alexandre VII guérit des écroucllcs la fille du tribun Quirinus. Hugues , abbé de Cluny, dit Delancre (1), obtenait des cures semblables par le simple attouchement; le comte de Hasprug, suivant les Allemands, possédait cette faculté à un très-haut degré.

Déjà les rois s’étaient adonnés au traitement de beaucoup d’affections diverses.

Pyrrhus, roi d’Épire, avait la réputation de calmer toute espèce de douleurs, coliques, maladies de la rate, etc. (2). 11 faisait coucher les malades, et se contentait de leur faire une légère friction avec l’orteil du pied droit sur la partie douloureuse. « 11 n’y a pas, dit Plutarque , d’homme si pauvre et si abject, qu’il ne soulageât lorsqu’il en était prié. »

Joachim Camérarius affirme, d’après une version ancienne de l’Iliade, que l’orteil d’Achille jouissait de la même propriété curative.

Vespasien , Adrien , Aurélien , Agrippa , etc., avaient, dit Delancre (3), le don de guérir plusieurs maladies; l’empereur Adrien dissipait l’hy-dropisie par le simple contact avec l’index.

Il suffisait à Vespasien de prononcer quelques

(1) Incrédulité, p. 157.

(2) Pline. Hist. nalur.

(3) Ouvr. cité, p. 1G3.

paroles. Nous lisons dans la‘ Philosophie de F Histoire, qu’un aveugle et un paralytique furent avertis en songe que ce prince devait les guérir. Ils se présentent devant lui. Vespasien, ne pouvant croire à ce pouvoir, refusa de les loucher; enfin, vaincu par leurs prières, il les guérit tous les deux. Cette cure eut lieu à Alexandrie, et fut, dit-on, consignée dans les archives de l’empire.

Il n’est pas douteux que tous les malades qui se présentaient au toucher n’obtenaient pas leur guérison sous le contact d’une main royale; un petit nombre seulement devaient à leur grande foi, et à une organisation très-impressionnable, des cures aussi éclatantes, dont la renommée avait soin d’exagérer les merveilles. Ainsi que dans les pèlerinages, les guérisons miraculeuses ne s’opéraient que chez le plus petit nombre des croyants. On doit penser que la foi diminue avec la civilisation ; car aujourd’hui les pèlerins ne manquent pas dans nos chapelles, et les cures sont fort rares.

Les rois d’Angleterre ne se contentaient pas seulement , à l’imitation des rois de France , de guérir les maladies par le toucher, l’imposition des mains ou la prière, ils possédaient aussi des anneaux, qui, portés aux doigts , préservaient de beaucoup d’affections, et dissipaient le mal caduc. L’anneau d’Edouard guérissait les membres engourdis et paralysés (1). Ces talismans étaient conservés avec le soin le plus religieux dans les archives de l’église de Westminster. Delancre (s) assure qu’ils avaieut élé

(1) Du Laurens. De Strumis, lib. i el m.

(2) De l’incrédulité , p. 157.

bénis anciennement par les rois d’Angleterre, et qu’ils avaient la propriété d’enlever les spasmes, les contractions nerveuses, Y épilepsie.

I'aut-il s’étonner si les bagues magiques, les phylactères, talismans, etc., ont produit des cures inespérées ; leur plus grand mérite s’appuyait nécessairement sur la foi des malades.

« Pour établir, dit Leclerc (i), l’usage de ces remèdes superstitieux, il a suffi, suivant quelques personnes , que l’on crût en avoir du soulagement; et, comme l’imagination est non seulement contagieuse, mais aussi fort puissante dans les sujets où elle est fort vive, il est arrivé que des choses qui d’elles-mêmes n’avaient aucune force, ou qui ne pouvaient point agir sur le corps, aient produit en certaines rencontres des effets sensibles par la force de l’imagination; ceux qui ont vu cela se sont persuadés qu’il en pourrait être partout de même. La religion, dont on a abusé dans cette matière, et qui a un très-grand pouvoir sur le9 peuples, a achevé de les déterminer entièrement... Quoi qu’il en soit, les charmes se sont si bien introduits dans la médecine, que toutes les nations du monde les ont pratiqués de temps immémorial, et ce n’est pas seulement le simple peuple qui s’en est mêlé, les plus sages n’y ont pas moins donné. »

Nous parlerons peu des propriétés merveilleuses que les anciens accordaient aux pierres précieuses et à certains minéraux dans le traitement des maladies ; l’émeraude passait pour guérir de l’épilep-sie; le rubis, de l’hypochondrie; la pierre d’aigle,

(1) llist. du la Médecine, p. 13 et 76.

do l’avortcment. Les habitants do la Nigritie et de la Guinée ont une confiance illimitée dans le corail, et portent des colliers de cette matière. Notre civilisation a fait justice de ces pratiques superstitieuses , et nous ne pouvons attacher à ces substances d’autres propriétés qu’une influence morale, quelquefois fort peu salutaire.

Les Egyptiens, les Hébreux , les Grecs môme, croyaient aux amulettes. Plutarque nous apprend que Périclès en portait toujours une. Les anneaux et baguettes des brahmanes étaient renommés pour posséder des vertus curatives (i); les talismans, si généralement employés, furent inventés, dit-on, par les philosophes arabes, lis étaient formés de pierres et de métaux qu’ils appelaient sympathiques , et qui portaient l’image d’une constellation (2). « Il est certain, dit Gaffarel(3), qu’on a veu de nos jours, et de ceux de nos pères , de ces talismans qui ont guari des morsures de serpens, scorpiôs, chiens enragez, et plusieurs autres malheurs qui n’arrivent que trop souvent. Les anciens arabes, comme Almansor, Omar, Sérapion, etc.,

en rapportent des exemples très-véritables.....Ilaly

asseure qu’estant en Egypte, il toucha une de ces images de scorpion qui guarissait ceux qui estaient mordus par cette beste0 »

Il y avait autrefois , dans la Provence et le Dau-phiné (4), des prêtres qui faisaient chauffer un morceau de fer ou une des clefs de leur église, dont

(1) Plnlostrate. Vie d’Apollonn., liv. iv.

(2) J.-ll. Thiers. Ouvr. cité, 1.1, p. 558 etsuiv.

(3) Curios, inouics, p. 3.

(4) Thiers, ouvr. cité , 1.1, p. 390.

ils touchaient les malades pour les guérir de la page; cela s’appelait la clef de Saint-Pierre ; la cjpf de Saint-Hubert, qui avait reçu le contact delà sainte étole, était un remède analogue dans le diocèse de Liège.

• Pendant plusieurs siècles, les bains de mer ont eu une grande célébrité, comme propres à préserver de la rage. Les personnes mordues étaient niellées à reculons dans la mer, par dejix baigneurs qui les tenaient sous les bras, puis les renversaient ou les plongeaient trois ou cinq fois dans l’eaq , à chaque vague de la marée montante. Ui> seul ba>n suffisait. »

« Il y a huit jours, dit Mm” de Sévigné (Iptjre du i3 mars 1671), que M “' de Ludre, Coëtlogon e( la petite de Rouvroi, furent mordues d’une petite chienne qui était à Théobon : cette petite ohieqne est morte enragée; de sorte que Ludre, Coëtlogon et Rouvroi sont partis ce mptjn pour aller à Dieppe, se faire jeter trois fojs dans lp iper. »

« M. de Coigny, gouverneur de la vjllp pt cljâ-teau deCaen, ayant eu le malheur d’éjre mppdu par un chien enragé, est arrivé eq ppste pour se baigner à la mer. » ( Journal d’un bourgeois de Çaen, publié par J. Mancel, p. 214).

Si l’on s’en rapporte à l’historien Josepbe, Mpïsc faisait des bagues d’amour et d’oubli, qui exerçaient de l’iniluence sur les malades. Le serpent d’airain qu’il dressa dans le désert, était un puissant auxiliaire pour ranimer la confiance d'une population livrée au découragement le plus profond.

On gravait sur les talismans des figures allégoriques, en prononçant certaines paroles. Par la

suite op se contenta de faire usage de ces paroles sacramentelles (i).

Homère (2) atteste que le sang qui sortait de la plaie d’Ulysse fut arrêté par de simples paroles.

Iléliodorp etStrabon (3)aflîrment que leslndiens et Içs Ethjppjens guérissaient par des paroles. Cette coutu tpe est encore aujourd’hui très-répandue dans la classe du peuple, et il n’y a pas une province où l’on ne rencontre des guérisseurs de ce genre.

Van Hclmont (4) consacre un chapitre entier, pour démontrer l'efficacité des objets magnétisés dans une intention quelconque, et portés par des malades. « Cette énergie , dit-il, l’homme la tient de Dieu, et non de Satan, et il peut la communiquer à des corps étrangers , pour produire des cures remarquables. » Nous entrerons pins tard dans quelques détails spr cette matière; car nous no pouvons nier l’action directe des pbjets magnétisés sans aqçtme influence de l’imagipation.

Nous ne devons pas garder le silence sur les remèdes secrets usités généralement dans nos villes et nos capipagnes. pour préserver de la rage. On ne se djssipiule pas qu’une imagination frappée des dangers qui sont ordinairement le résultat de cette affreuse maladie, suffit quelquefois pour développer l’hydrophobie chez des personnes qui ont été mordues par des chiens enragés. Notre intention n’est pas d’aborder une qnestion qqi soulève en-

(1) Cafiarel, ouvr. cité, p. 148.

(2) Odyssée, liv. xix.

(3) Géorgiques, liv. 15.

(4) De Mal/net. euIner. curatio.

core bien des contradictions parmi les médecins. Nous voulons seulement fixer leur attention sur des accidents qui ne sont souvent que la conséquence d’une violente émotion pour une organisation impressionnable. Nous ne nous dissimulerons pas qu’une confiance aveugle dans le traitement que l’on suit peut préserver de beaucoup d’accidents, en soutenant le moral de l’homme. Nous avons souvent été surpris de l’efficacité de ces remèdes empiriques auxquels ont rarement recours les incrédules. Les observations qui sont à notre connaissance, et que nous ne pouvons citer ici, sont d’un grand poids pour nous affermir dans celte opinion.

Tous les autres moyens superstitieux qui ont été mis en usage pour agir sur un moral afTaibli, tels que le nouement de [aiguillette, le chevillement, Y envoûtement , etc., ne méritent pas d’occuper notre attention. Nous parlerons seulement de deux remèdes fort anciens, qui ont joui pendant plusieurs années d’une réputation immense : la poudre sympathique et l’onguent armaire.

Paracelse est un des premiers inventeurs de la poudre de sympathie. Cette substance s’appliquait sur des linges que l’on avait eu le soin d’imbiber extérieurement du sang ou du pus sorti d’une blessure ou d’un abcès. Cette application suffisait, d’après les partisans de cette méthode, pour guérir le malade, à quelque distance qu’il se trouvât (1).

liricins Mohy, médecin à Blois, publia en i6.)q un traité sur la poudre sympathique, pour démon-

(I) François Placct. Poudre de sympathie, soupçonnée de magie, page 168.

trer qu'en projettant simplement cette poudre sur le sang retiré d’une plaie, la guérison ne se faisait pas attendre; il prétendait que cette vertu était une émanation de» astres. Goclénius partageait entièrement cette opinion , seulement il pensait que cette substance n’acquérait du propriétés curatives qu’autant qu’elle était préparée à l’ombre, et privée de toute humidité.

Van llelmont (1) s’éleva contre ces prétentions, et crut reconnaître dans cette médication une influence magnétique. « J’ai toujours observé, dit-il, que le traitement n’était efficace que lorsqu’on y avait recours avec une intention bienveillante. »

La composition de cette poudre a beaucoup varié; Malus et Papinius en inventèrent une, mais ce fut celle que découvrit le chevalier Dygby qui obtint le plus de vogue.

« On ne peut croire, dit Thouret (a), combien cette médecine singulière acquit de faveur ; quels partisans illustres et distingués elle eut; quel nombre infini de traités elle donna occasion de publier. »

Le chevalier Kénelme Dygby, irlandais, vivait à la cour de Jacques I", qui lui portait une grande affection; Charles Ier le nomma pins tard intendant général de ses armées; à la mort de ce prince , il se retira en France auprès de la reine de la Grande-Bretagne-, qui l’honora du titre de chancelier, et l’envoya deux fois eu ambassade auprès du pape Innocent X.

(1) Opéra de Sympath. mcd.

(S) Doules sur le Magn., p. 113.

Lorsque Dygby apporta dans notre pays sa découverte, elle y fut d’abord accueillie avec enthousiasme, mais bientôt de nombreuses attaques vinrent lui disputer scs propriétés ; il y eut alors de violentes discussions à ce sujet entre les membres de l’Académie de médecine.

Dygby publia en 1673 un ouvrage fort curieux (1), dans lequel il établit en principe, i° que l’air est rempli de lumière; 20 que cette lumière pénètre tous les corps, et en dégage des corpuscules ou atomes; 2° que l’atmosphère est rempli de ces atomes ; 4° que tous les corps sont divisibles à l’infini; 5° que tous les corpuscules mis en mouvement suivent différentes directions , d’après certaines lois d’attraction. Exemples : la succion , le syphon ; l’action de l’aimant, de l’électricité ; l’absortion de l’air, par le feu, la filtration, etc.; 6° que l'attraction des atomes par d’autres corps, est d’autant plus forte que la nature des atomes se rapproche davantage de celle des corps absorbants. Exemples : exposez une brûlure à l’action d’un feu vif, la douleur cessera; le vin travaille pendant la floraison de la vigne; les taches du corps , telles que fraises, framboises, etc., se colorent à l’époque de la maturité de ces fruits; enfin, l’auteur comprend dans ce sixième paragraphe tous les phénomènes d’imitation et de sympathie.

L’on est surpris de rencontrer dans cet ouvrage, à côté d’aperçus fort ingénieux, les erreurs les plus grossières. Toute la méthode curative du chevalier

(1) Discours fait en une célèbre assemblée, touchant la guérison des plaies par la poudre de sympathie.

Dygby n’esl basée que sur des laits ridicules et parfaitement contestables. Nous n’en citerons qu’une preuve bien suffisante pour faire apprécier la fragilité des fondements de sa doclrine. Cet écrivain prétend qu’en jetant au feu les excréments d’un chien , d’un enfant ou d’un homme , les intestins commenceront à s’échauffer; une fièvre violente surviendra, et la mort ne tardera pas à arriver; parce que, dit-il, les organes intestinaux attireront la vapeur de ces matières brûlées, en même temps que les atomes du feu qui les enflammeront.

La poudre de Dygby était composée de vitriol commun dissous dans de l’eau de pluie ou de fontaine. Il faisait infuser dans cette solution le linge maculé du sang sorti de la blessure que l’on voulait guérir. Lorsque le sang était encore humide , il se contentait de saupoudrer le linge qui en était imbibé. Plus tard, il fit usage du vitriol romain calciné au soleil, avec addition de. gomme adra-gante. « La lumière, ajoute-t-il, emportant les atomes de vitriol et de sang, et les dilatant à une grande étendue dans l’air , la plaie les attire et est d’abord soulagée, et puis ensuite guérie par les esprits du vitriol, qui est balsamique. »

Quelques auteurs prétendent que Dygby tenait ce secret d’un religieux qui l’avait recueilli aux Indes-Orientales. Il ne faisait aucun mystère de la composition de cette poudre, qu’il donnait gratuitement aux pauvres ; le roi et les grands dignitaires de la cour d’Angleterre en faisaient un fréquent usage.

L’onguent des armes, ou onguent armairc, ou onguent vulnéraire, était employé longtemps avant

la poudre de sympathie. Ce fut en i53o que Pa-racelse le fit connaître (i). C’était un composé d’usnée, ou des fongosités développées par l'humidité sur le crâne humain. Cette substance était unie ù divers corps gras, et passait pour guérir à dcnormcs distances les blessures les plus graves; il suffisait d’enduire de celte pommade les armes encore teintes du sang de la victime. Un linge trempé dans le sang, un morceau de bois enfoncé dans la blessure, suffisaient pour ce traitement, lorsque l’on ne pouvait se procurer l’instrument qui avait fait la plaie. On recommandait surtout découvrir ces objets, et de ne pas les exposer au froid. Cette médication s'appelait traitement sympathique des blessures, et ceux qui en faisaient usage portaient le nom de tclungarii (2).

J.-B. Porta adopta cette doctrine.

Quelques faits extraordinaires, dont parlent dans leurs ouvrages Santanelli, VanHelmond, Maxwell et Petrus Servins, donnèrent, suivant Thouret (Doute* sur le Magnët., p. 110), naissance à cette méthode médicale. « Un homme de Bruxelles, rapporte ce médecin , s’étant fait faire un nez artificiel par l’opération du célèbre Talliacot, s’en était retourné, ainsi réparé dans ses traits, au lieu de son séjour ordinaire, où il continua de vivre bien portant. Mais, tout-à-coup, dit-on, la partie factice qu’il s’était procurée devint froide, se pourrit et tomba. On ne savait à quelle cause attribuer ce changement imprévu, dont on ne voyait aucune raison

(1) Arcliidoxis mayica.

(2) Bertrand. Magn. anim., p. 8. — Thouret. Doutes sur le Magn., page 113.

sensible. Mais on apprit bientôt que, le jour même de la chute du nez factice, à Bruxelles, un croche-teur de Boulogne, qui, pour de l’argent, avait fourni une portion de peaujprise à son bras, était mort dans cette ville où avait été pratiquée l’opération. »

Goclénius (i) et le P. Kircher (2) s’attachèrent à combattre l’opinion de plusieurs auteurs qui affirmaient que l’onguent armaire n’étaït qu’une composition de pierre d’aimant; ils s’appuient, pour démontrer cette erreur, sur la similitude des effets produits par l’onguent vulnéraire et l’aimant, dont l’action, suivant eux, peut s’étendre à de longues distances. Kircher (5) ajoutait du reste peu de confiance aux propriétés de ce remède; il indique seulement la manière de le préparer, et l’appelle ma-gues microeosmius; il pense que ses effets ne sont sensibles qu’autant qu’il existe un pacte avec le diable.

Van Helmond avait une grande confiance dans l’onguent armaire, qu’il paraît distinguer de l’onguent de Paracelse. Il s’appuie, pour en démontrer l’efficacité, sur cette raison bien singulière :

« Lorsque le sang sorti du corps se corrompt, la portion d’esprit qui lui était unie s’échappe, et va se joindre de nouveau au corps auquel elle appartenait. Yoilà pourquoi, lorsqu’on applique le remède sur le sang retiré d’une blessure, ce remède agit sur la blessure même (4). »

(t) Théâtre sympalh.

(2) Magnel. medic.

(3) lb., p. 681, et Thealrvm sympalh.

(i) Du Main. vulner. curai.

Le célèbre charicelier Bacon (i) , tout cri niant une pahie des merveilleux effets de ce traitement, en admet l'influence salutaire.

Nous nous abstiendrons de parler de toiltes ces inventions auxquelles la superstltiôn attachait une grande importance, telles que : la lampe de vie, dôht la lumière s’affaiblissait avec la vie dii malade; le sel de sang, qui se terhlssait à la mort de l’individu ; l'alphabet sympathique, etc.

Ce qui est indubitable, c’est que tous les systèftiès dont nous voyons atljourd’Hül les ridiclilès ptéteh-tions, comptaierit de nômbrcurt partisans parthi les homtties les pltls distingués des Ie et îUii* siècles. Nous ne pouvons nier l’autheriticitë dé la majeure partie des cures qu’ils ont enregistrées. Nous ferons seulement observer que là plupart des auteurs qui ont écrit sur ces matlèfreS sôht généralement d’accord sur un point bien impôrtant : c’est que toutes ces méthodes n’avaient d’efficacité qii’àü-tant qu’elles étaient prescrites avët tltte ihtention charitable par le médecin, et accueillies par le malade avec une parfaite confiahce.

Pierre Servius , professeur de médecine à Rome, tout en s’abstenant de juger leâ effets de l’onguent des armes, atteste qu’ils sont dignes de toute notre attention. «J’ai vu, dit-il (2) ; l'onguent armaire guérir les blessures les plus graves; je in’en suis servi avec avantage, en implorant le secours de Dieu. Qu’il nous suffise donc de constater les faits, et d’avouer notre ignorance sur les causes. Ce qui

(1) Sylva tylvar., 5 908. — Analogies de rf.leclricité, U fi, p. 369.

(2) Dissertation de l’onguent armaire.

agit à distance agit par une cause occulte que nous ne pouvons pénétrer; combien y a-t-il de phénomènes aussi étranges que nous ne pouvons expliquer ! »

Suivant Burlinus(i), toutes les guérisons attribuées à l’onguent sympathique sont imaginaires, naturelles ou diaboliques. 11 cite dans sa Dissertation tous les ouvrages qui ont été publiés sur ce sujet.

L’auteur de la Philosophie mosaiqile, Robert Flud, ne voyait dans cette influence que la puissance des anges, ou un esprit de la Divinité, dirigé par leur intermédiaire vers le bien ou le mal. Van Helmond lui-méme , un des plus chauds partisans de ces doctrines, convient qu’une volonté bienveillante est souvent d’une grande utilité. (Ouor. cité, p. 6i4).

Les médecins hermétiques employaient plusieurs médicaments sous le nom de powlres sympathiques, qu’il ne faut pas confondre avec celle de Dygby et de ses devanciers. Le médecin écossais Maxwell (2) en avait composé une avec du sang, de l’urine, de la sueur et de la fécule. 11 l’appuyait sur les parties malades, en ayant soin d’exciter nne forte transpiration par des sudorifiques. Ces cures rentrant dans les effets de la médecine ordinaire, ne

doivent pas nous occuper......

D' Alfred PERRIER.

(La suite au numéro prochain.)

(1) Ve noploclirtetmalc.

(2) L. 111, ch. 1, p. 193.

VARIÉTÉS.

Révélation. — Que le magnétisme tende à rendre le monde meilleur, à moraliser les relations sociales, cela paraît incontestable, et le fait suivant en fournirait au besoin la preuve.

On reçoit une lettre anonyme; elle ne contient pas de choses très-graves, mais c’est un procédé fort désobligeant, et on en recherche l’auteur. Je place cette lettre entre les mains d’un somnambule, et lui témoigne mon désir. « Cela n’en vaut pas la peine, dit-il, c’est un enfantillage. 11 ajoute que l’auteur de cette lettre est la dernière personne qu’on soupçonnait. Il ne la nomme pas ; mais il se charge de lui remettre une réponse. Cette idée me séduit : le somnambule s’imposait nécessairement l’obligation du souvenir au réveil.

En effet, à peine rentre-t-il dans l’état de veille, que le nom de l’individu, tel qu’il le signe, apparaît à ses yeux : les lettres se tracent et s’effacent successivement. Cette vision se produit deux fois dans un instant. Chose remarquable! magnétisé, il refuse de dire ce nom ; éveillé ; il n’en fait aucun mystère.

La comparaison de l’écriture est venue confirmer ce qu’il nous apprit; il n’y manque rien, que l’a-

Si de tels faits sont fréquents et sont enfin acceptés, celui qui projetera une mauvaise action sera empêché de la commettre, par la certitude d’être reconnu tôt ou tard.

Chronique. —Un homme instruit, intelligent et d’un bon cœur, pratique souvent le magnétisme, et rend depuis deux ans d’immenses services à sa nombreuse famille. Son médecin habituel, riant de ses exploits et du-'magnétisme, dernièrementjc. rencontre. Il l’abordefd’un air goguenard, mulant les passes, lui dit : « Eh bien! fait^Vous toujours votre petite affaire? — Oui, lui le croyant ; et je m’en trouve bien, et aussi. » Vr^. 1 1

Or ce savant médecin avait le privilège de toute la famille, et, bon an mal an, en recelait une somme assez ronde. Depuis l’emploi de la petite affaire, pas un écu ne fut versé dans son escarcelle.

Riez bien, riez fort, chers docteurs, la petite affaire va son train ; elle se propage malgré vos dédains , et il faudra bien qu’un jour vous cessiez de rire; car la misère ne rit point, et l’ignorant qui rit fait pitié.

— Le libraire Dentu, éditeur des ouvrages de MM. de Puységur et Deleuze, vient de mourir subitement. Le magnétisme perd en lui un ardent prô-neur.

— On imprime en ce moment un supplément au Dictionnaire de médecine, par Fabre. Le magnétisme est compris au nombre des additions faites à cet important ouvrage. Nous ne connaissons pas encore l’esprit de l’article; mais tout porte à croire qu’il est favorable.

Revue des Journaux. — Le Temps, du 11 août, contient, sous la rubrique de Vienne, un article qui semble fait à Paris , dans lequel il est longuement parlé de somnambulisme à propos des événements de la Hongrie.

— Le Mémorial artésien, du même jour, résume en quelques mots très-sensés, l’impression produite par les expériences de M. Ad. Didier.

— L’Illustration des 4 et 11 août, analysant le livre du somnambule américain, J. A. Davis, parle du magnétisme ironiquement.

— Le Charivari, du 18 août, se moque du docteur Ducros, et un peu du magnétisme, dont ce médecin est partisan , à propos de ses communications à l’Académie sur le pouvoir de faire dévier l’aiguille astatique par le regard, pratique qu’il appelle médusigue, et dont quelques magnétiseurs font encore usage.

Le Gérant : HÉBERT (de Garnay).

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

Jury magnétique

d’ehcodragembnt et de récohpehse.

Première séance annuelle.

A ceux qui doutent de l’existence du magnétisme, nous dirons : Lisez les œuvres contenues dans les rapports qui ont motivé les décisions du Jury, et vous serez convaincus de la sublimité de la vérité que nous défendons.

Aux magnétistes qui pensent que cette science n’a que des interprètes insouciants et égoïstes, nous dirons: Voyez ce que, dans le silence, font vos frères. Ils recherchent avec ardeur ceux qui d’entre vous se distinguent, afin de leur offrir un témoignage propre à les encourager, et qui soit en même temps pour eux une marque d’honneur.

Le magnétisme entre aujourd’hui dans une nouvelle phase ; il prend rang parmi les découvertes dont le dégré de certitude ne permet plus le doute. Il est reconnu comme un agent insaisissable par des instruments, mais susceptible d’une démonstration rigoureuse par les faits qu’il fait naître. Devons-nous nous plaindre du temps qui s’est écoulé? Non ; car il fut une épreuve. Après tant de luttes et tant TOMB VIII. —N° tOl. — 10 EHURK 1849. 17

de combats , le magnétisme survit et vient braver ses ennemis.

La séance dont nous allons rendre compte est d’une importance majeure par les idées qu’elle fait naître, par le dévouement qu’elle signale et le progrès qu’elle réalise.

Comme toutes choses, la vérité magnétique ne fut d’abord qu’un point dans l'espace , une lueur aperçue dans les ténèbres. L’intelligence humaine féconda ce germe naissant, et le monde, maintenant , commence à en recueillir les fruits. La vérité est donc une puissance invincible, car celle-ci supporta tous les assauts, et dut vaincre, pour arriver où nous la voyons, les méchants et les sots. Elle eut contre elle les savants de tous les pays, souvent même les pouvoirs, les préjugés nombreux, les intérêts médicaux, et nous ajouterons l’universalité des opinions. Bien plus encore, elle eut à se dégager des étreintes du charlatanisme, qui obscurcit et salit les plus belles choses, mais sa lumière perça tous les nuages, et maintenant son règne est assuré.

C’est une gloire, sans doute, pour quelques hommes qui d’abord osèrent soutenir Mesmer et ses idées. Maintenant la voilà , cette vérité brillante et majestueuse, enfantant des vertus, passionnant les hommes, et les reportant aux principes sublimes de l’Évangile, qu’ils semblaient avoir oubliés.

Vous revivrez dans la mémoire des génies des temps anciens qui luttèrent pour établir que le corps tout entier n’était point un limon grossier; qu’une intelligence y habitait, et que son essence était immortelle. L’orgueil humain brisa votre ouvrage, les préjugés et l’ignorance furent plus forts

que vous ; 011 altéra les vérités que vous découvrîtes', et des dieux menteurs apparurent dans vos temples. On trompa les nations , 011 exploita leur crédulité : doit-on s’étonner aujourd’hui des difficultés que nous eûmes à surmonter ?

Mais, sans autre préambule, donnons à nos lecteurs les pièces d’un dossier qui restera dans les archives du magnétisme comme un monument in-naltérable. Nous regrettons seulement que notre recueil soit trop circonscrit: car, nous avons à publier tant de pièces intéressantes, que nous sommes obligés d’en faire un choix. Plus tard, sans doute, elles verront le jour, et les magnétistes qn’elles font connaître recevront un nouveau témoignage de la reconnaissance de leurs contemporains.

M. du Potet, président du Jury, a ouvert la séance par l’allocution suivante :

Messieurs,

« Vous vou9 honorez tous de vivre dans un siècle de lumière. Les sciences, vous le pensez du moins, suivant leur progrès naturel, sont arrivées à leur apogée; et le monde savant, se reposant de son labeur, doit jouir en paix de ses conquêtes. S’il en était ainsi, vraiment, ce jour ne nous verrait point rassemblés ; profitant du bienfait de la science, nous nous livrerions paisiblement à des travaux d’un autre ordre.

« Ah ! messieurs, quelle déception l’on éprouve lorsqu’on jette un regard autour de soi, et que, l’esprit recueilli, l’on considère, sans passion

comme sans préjugés, les fruits que laisse tomber l’arbre de la science. Non, ils ne compensent point les travaux de leur culture. Trompeurs par l’apparence, s’ils charment un instant la vue ils empoisonnent le cœur. Ils sèment le doute en nous, et nous nous écrions : Est-ce là tout ce que l’homme peut connaître de sa nature; doit-il donc toujours 6’ignorer lui-même? Les plus beaux génies doivent-ils s’éteindre comme les simples mortels? Ce rayon de lumière qui illumine nos Ames sera-t-il donc insuffisant pour pénétrer les ténèbres qui nous environnent; devons-nous désespérer de découvrir jamais pourquoi [nous existons, notre but sur la terre ?

« Jouets des vents, comme le frêle roseau, devons-nous nous courber au souffle des ouragans, sans prévoir leur venue? Sujets à tant de maladies, continuerons-nous de laisser faire le mal sans pouvoir y mettre une digue ?

« Jouets des événements que lespassionshumaines font naître , resterons-nous donc toujours soumis à de fausses doctrines? La perversité est-elle inhérente à notre nature; le mal, enfin, doit-il pérdo-miner sur le sentiment du bien, que nous avons tous?

* Non; il n’en sera point ainsi. N’avons-nous pas une découverte propre à nous tirer de cet état misérable et dégradé? N’avons-nous pas le magnétisme ?

« A ce mot, je m’arrête, messieurs; je donne un nom à ce qui ne peut en avoir jamais ; car c'est l’essence des choses, le souffle de Dieu, le principe de la création des êtres, la cause de leur du-

rée; et, je dois le dire, la force puissante qui nous donne la possibilité de produire des merveilles. Le mot de magnétisme est donc insuffisant pour la peindre.

« C’est elle qui va paraître tout à l’heure dans les œuvres que vous aurez à récompenser. Au-dessus de toute science humaine, elle apparaît à nos yeux étonnés comme une émanation des plus purs esprits; et notre intelligence ne peut comprendre autrement ces divins résultats qu’en en plaçant la source dans le sein de Dieu.

« Que diriez-vous si, aujourd’hui, vous aperceviez dans nos rues, sur nos places, les lourds chars des Gaulois et les ustensiles de leur grossière industrie? Vous ririez, sans doute, par la comparaison des inventions successives du génie humain. La science, dans l’ordre moral, en est restée aux premiers âges de notre histoire; lorsque tout marche autour d’elle, nous voyons son char embourbé dans l’ornière creusée par l’ignorance.

« ¡N’est-ce pas pitié que de voir de tels hommes établis comme guides des nations ? Et si nous jet-tons nos regards sur les principes des sciences médicales et physiologiques, ne devons-nous point gémir de l’honneur que l’on rend de nos jours, â l’impuissance et à la vanité?

« Précieuse vérité magnétique, viens éclairer de ton flambeau la génération qui s’avance; que, par toi inspirés, se montrent parmi nous des hommes comme Pythagore, Socrale et le divin Jésus. Le magnétisme n’a-t-il pas besoin d’une de ces fortes intelligences pour en faire saisir les lois?

«Plus heureux que Franklin, qui déroba la foudre,

Mesmer fit jaillir du corps humain un fluide plus subtil cl plus plein de vertus. Ce fut assez pour sa gloire ; mais sa découverte réclame un autre génie pour en saisir tous les rapports, et montrer les affinités de cette essence avec le monde inconnu dont nous pressentons l’existence, sans cependant y plonger notre regard.

« N’allez point vous égarer en prenant pour cet homme inspiré l’un de ces mystiques rêveurs qui donnent pour la réalité des illusions fantastiques , qui , gravement, de leur logis, affirment être allés jusqu’au ciel. Bien des sectes doivent se produire ainsi. L’homme aime par passion l’erreur; il s’y plonge. 11 admet ce qui lui plaît, non ce qui est conforme aux lois de la nature ; ce qui, enfin, peut s’expliquer, se comprendre. Le merveilleux ne perdra jamais sur nous son empire : peut être est-il utile pour soutenir la vie de quelques-uns? La nature n’a rien fait en vain; c’est sans doute pour maintenir la raison dans de sages limites qu’elle permit qu’il y eut des insensés.

« Nous n’avons point ici à vous parler de doctrines : mais à vous entretenir de brillants résultats, de saines pratiques. Dans vos généreux desseins, vous voulûtes honorer les hommes d’intelligence et de dévouement ; ceux qui, marchant sur les traces des Mesmer, Puységur et Deleuze, surent faire aimer le magnétisme, et en étendre l’empire par des œuvres humanitaires, des actes de cha-ri lé.

« Tout à l’heure, vous allez entendre l’exposé des motifs et la lecture des pièces qui ont justifié les préférences du comité. Ce n’est que le premier ré-

sultal d’une sage investigation ; les temps vont venir où vous vous montrerez plus libéraux. L’ajournement n’est qu'un retard apporté à ces actes de justice.

« Pour moi, messieurs, je ne puis vous dire combien je suis heureux d’avoir participé à la fondation d’une institution si utile et si respectable. A mon point de départ, je ne rencontrai nul soutien ; et, je le dis avec amertume, je trouvai des entraves, venant de ceux-là même dont je prouvais les principes et justifiais les croyances. Combien j’eusse été fier de rencontrer des amis , des frères, qui, me tendant la main lorsque je sortais triomphant de l’Hôtel-Dieu, m’eussent dit : Voici une preuve de notre sympathie ; elle attestera et votre dévouement à la science et votre succès dans une délicate entreprise.

« Il ne faut plus désormais laisser dans l’abandon l’homme qui n’attend qu’un regard d’ami pour marcher en avant.

« Le découragement, je dois l’avouer, me gagna souvent; mais je le vainquis toujours. Ce fut, sans doute, utile au magnétisme; car trente années-de sacrifices ne m’ont point flétri le cœur ; je serai demain ce que je suis aujourd’hui, disposé à donner ma vie pour acheter le triomphe du principe nouveau.

« Je dis ceci, parce que nous avons besoin de deviner les hommes, d’être attentifs à leurs œuvres, pour discerner leurs aptitudes. Toujours il en est un qui devance ses contemporains, son siècle même ; c’est à nous d’apercevoir son génie et d’ap-planir sa route, en l’aidant à propos.

« Nos prédécesseurs ont laissé le docteur Georget dans l’isolement, sans lui témoigner quelque reconnaissance de ses beaux travaux. Il mourut sans être encouragé par ceux dont il préparait l’avenir.

« Le docteur Bertrand retourna à la médecine, faute de trouver un [appui chez les hommes qu’il voulait servir par son beau talent.

« Le docteur Roslan aussi, sans abandonner le magnétisme, préféra la médecine, comme plus lucrative et menant aux honneurs.

« Le docteur Frapart, qui défendit si courageusement notre art, et dont la mémoire sera impérissable , mourut sans qu’on daignât faire quelque chose pour lui.

« Bien d’autres hommes encore méritaient d’être soutenus, encouragés; on les laissa à l’écart, sans prendre aucun souci des services qu’ils rendaient à l’art nouveau.

« Combien de fois n’ai-je pas gémi de mon impuissance, lorsque, consulté par de jeunes hommes, dont plusieurs étaient médecins, s’ils pouvaient s’ouvrir une carrière en pratiquant le magnétisme? N’ai-je pas dû diminuer leur enthousiasme en les avertissant des obstacles qui les attendaient, de la lutte qu’il faudrait soutenir, des privations qu’il faudrait endurer? Plusieurs , méprisant mes avis, se brisèrent sur le roc , et renoncèrent, fatigués qu’ils étaient bientôt, à suivre unichemin trop rempli d’épines. Je n’avais rien à leur offrir pour les encourager, si ce n’était la gloire du triomphe. Mais la gloire touche bien peu les hommes aujourd’hui. Que leur importent ces récompenses accordées à celui qui, ayant vécu en combattant pour

l’humanité, ne laisse qu’un nom rappelant des souffrances et quelque vertu. lille vient trop tard, messieurs, cette renommée; lorsque le mensonge est honoré partout. Qu’importe à l’homme qu’il se survive, quand l’erreur lui donna, vivant, les avantages promis par la postérité.

« Cependant tous les magnétiseurs n’étaient point dépourvus de richesse et de sentiments élevés; mais on croit généralement que les vérités marchent seules; tandis que ce n’est que par le labeur de quelques-uns et des sacrifices répétés qu’elles se généralisent.

« Le magnétisme, honnêtement pratiqué, ne mènera jamais à la fortune ; et c’est une des preuves de sa sublimité. 11 doit être un jour dans la famille; s’y exercer comme une des vertus domestiques. Il doit consoler et guérir : c’est ainsi que vous le comprîtes, et je ne suis ici que votre interprète.

« Nous allons nous survivre, messieurs, notre institution sera toujours jeune; car elle doit se renouveler sans cesse par l’adjonction d’hommes nouveaux et méritants. Honneur à vous, qui avez eu cette pensée profonde, la vérité vous inspira.

« Vous avez fait, pour Mesmer, en peu de temps, ce qu’on devait attendre d’hommes dévoués; ce que n’avaient point réalisé les hommes riches et titrés qui pourtant croyaient à ses principes. Après l'inauguration de la fêle de Mesmer, cette solennité nouvelle est un fait d’immense portée; il est providentiel , et doit avoir, sur les destinées du magnétisme, une grande influence. Jouissez de votre ouvrage; soyez heureux comme je le suis moi-

même ; car la vérité unit les hommes entre eux, tandis que l’erreur les divise.

« Ce jour sera significatif pour nos antagonistes; ils désespéreront désormais de nous vaincre. Un temps viendra même où ils rendront justice à notre sincérité. J’ai honte de le dire, ce sera bien moins leur vertu que la force des choses qui en aura décidé ainsi. Il arrivera un moment où le magnétisme débordant ne laissera plus de relâche à nos fiers ennemis. Ils seront trop heureux de trouver toute faite une science à la place de leurs meurtriers et désolants systèmes, que nous aurons détruits.

« Pourquoi faut-il, messieurs, que la vérité rencontre tant d’obstacles? Quel beau sujet d’études ! Apportée par un homme inspiré, la vérité prend d’abord racine sur le granit, comme ces plantes venant on ne sait d’où; puis ces rameaux s’étendent au loin, et fournissent des graines abondantes que l’on ne saurait plus ni compter, ni détruire.

« Vérité, Vérité! c’est par toi que d’ici-bas l’homme remonte jusqu’à Dieu; sans toi, il n’est qu’un vil animal grouillant dans la fange. Le magnétisme, ce rayon divin, révèle à l'homme sa nature : par lui, la face du monde sera changée. Pressentez, messieurs, ses hautes destinées; augmentez vos rangs d’hommes dévoués et convaincus ; puis, attendez l’avenir. L’être prévoyant accumule pour ses enfants un sûr héritage : l’humanité est votre famille. Ah ! messieurs, vous aurez fait beaucoup pour son bonheur en rassemblant en faisceau les œuvres de génie et de vertus inspirées par le magnétisme , car elles seront l’héritage impérissable que nous léguerons à nos successeurs. »

(La suite au prochain numéro.)

THÉORIES.

PHILOSOPHIE MÉDICO-MAGNÉTIQUE.

CHAPITRE II.

De la Médecine d’imagination.

(Suite.)

Si les talismans, les amulettes, la poudre sympathique , etc. , étaient susceptibles de guérir des maladies souvent incurables, par une puissante réaction sur le moral, que devons-nous penser de ces cures éclatantes attribuées par les hommes superstitieux à la puissance des saints ou de leurs reliques ?

Loin de nous la pensée de porter la plus légère atteinte aux dogmes de la religion ; la croyance aux miracles ne nous a jamais été imposée comme article de foi : il nous est donc permis de les discuter suivant nos convictions.

Les Apôtres chassaient les démons au nom de l’Esprit Saint, rendaient la santé aux malades, guérissaient même les paralytiques. S’ensuit-il de là que nous devions rapporter tous ces résultats uniquement à la toute-puissance de la Divinité , lors-

que nous constatons des cures aussi remarquables au milieu des temples païens? Le doute est du moins permis devant tant d’opinions diverses(i).

Les prêtres, possesseurs exclusifs du pouvoir temporel se seraient bien gardé de désabuser un peuple trop crédule ; ils s’efl'orcèrent au contraire d’attribuer toutes ces guérisons à l’influence des saints ou de leurs reliques. Les gens simples ont toujours été prodigues de vénération pour ces figures en bois ou en pierre, images grossières de nos saints martyrs. Chaque église spécula dans tous les temps sur la réputation d’un saint; chaque saint eut une spécialité curative : saint Marcou guérissait des écrouelles ; saint Clair des maladies des yeux ; saint Fiacre des hémorrhoïdes; saint Ouen de la surdité; saint Roch de la peste; sainte Pétronille de la fièvre ; saint Main de la gale et des dartres ; saint Cloud des furoncles, etc., etc. (a).

Saint Cyrille, patriarche d’Alexandrie (3), assure que la plupart des saints avaient reçu le don de chasser les démons et de dissiper les maladies.

Théodoret dit (4) que saint Barsès, évêque d’E-desse, guérissait par sa parole, et que le lit qu’il laissa à sa mort possédait tant de vertus, qu’il rap-pelait à la santé tous les malades qui s’y couchaient.

Parthénius, évêque d’une ville de l’Hellespont, commandait aux démons, et dissipait les maladies.

(t) Apollonius de Tyanes, Simon le magicien, Apuléo, se firent une grande réputation par les nombreuses guérisons qu’ils obtenaient, et qui furent opposées, par les païens, îi celles de Jésus-Christ.

(2) Dict. des Religions, par Collin de Plancy.

(3) Lib. vi, in Julian.

(4) Histoire ecclésiast., lib. iv.

Zozomène et Nicéphore ( i ) affirment que le moine Jean avait reçu de Dieu la prérogative de guérir la goutte, et de remettre les membres disloqués; que le moine Benjamin détournait toutes les maladies par le seul contact de sa main. Protogène, prêtre d’Édesse, soulageait les enfants qu’il instruisait, par des prières et son seul attouchement.

Les moines Julien et Moïse de Lybie, ainsi que Copras, suivant le rapport de Cassiodore (2), jouissaient du même privilège.

Le jésuite Thyrée (3) dit que saint Clair, abbé de Vienne, chassa les démons du corps d’une servante, en lui mettant simplement les doigts dans la bouche ; que saint Germain, évêque de Paris, guérit plusieurs personnes par l’imposition des mains; enfin, que saint Martin fit passer un flux de ventre chez une femme, par le contact de son habit.

Grégoire, surnommé le Thaumaturge, souffla sur un voile qu’il plaça sur la tête d’une possédée, et le démon se retira.

L’évêque Multhonius jeta son mouchoir au cou d’une possédée, et lui fit boire de l’eau bénite; aussitôt l’esprit malin fut expulsé de son corps.

Saint Bernard s’étant lavé les mains, fit avaler cette eau à une jeune fille qui se trouvait aussi possédée , et le mal se dissipa.

L’histoire de l’Église est remplie d’observations de ce genre. On regardait alors comme de véritables possessions toutes les affections nerveuses qui

(1) Zozom. el Nicéph., lib. t, lib. vni, lib. ix. — J.-B. Tkiers, des Superstitions, 1.1, p. 561.

(2) Hist. tri part.

(3) De Demoniac.

paraissaient s’écarter des lois de la nature par la singularité des phénomènes qu’elles présentaient : tels que l’état cataleptique des membres, les crises épileptiformes, l’hypochondrie, le somnambulisme avec tous ses prestiges, enfin ces déplorables perturbations cérébrales , triste résultat d’nne imagination ardente, sous l’empire de l’ignorance et des préjugés, et qui se propageaient alors sous la forme d’une obsession réelle.

« Les sorciers et les possédés, dit le Dr Esquirol ( 1 ), étaient souvent victimes des imposteurs, qui trafiquaient de l’ignorance et de la superstition de leurs semblables. C’étaient des imbéciles, des mélancoliques, des hystériques, qui croyaient être possédés, parce qu’on les avait menacés; les juges étaient assez ignorants pour livrer aux flammes ces malheureux. Il y avait une jurisprudence contre la sorcellerie et la magie, comme il y avait des lois contre le vol et le meurtre. Les peuples voyant l’Église et le prince croire à la réalité de ces ex-travagancas, restaient invinciblement persuadés; plus on poursuivait les sorciers et les possédés, plus on mettait d’appareil à leur supplice, plus on augmentait le nombre de ces malades en exaltant l’imagination et en l’occupant de craintes chimériques. »

Les hallucinations étant ordinairement relatives aux occupations de l’esprit et du corps, nous n’ignorons pas qu’à l’époque où les épidémies devinrent si communes, l’imagination des peuples était surexcitée par tous ces bruits de possession. Ce

(1) Diction», des Sciences médic., t. VIII, p. 299.

judicieux observateur ajoute qu'une vive commotion morale, une frayeur, la crainte d'avoir reçu un sort joint à la force d’imitation, pouvaient facilement faire ¿dater des épidémies de ce genre.

Toutes les affections nerveuses, telles que l’extase, la possession, l’illuminisme, etc., sont susceptibles de se communiquer chez les personnes dont le système nerveux sera à l’unisson de celui des crisiaques.

« Si les nerfs de deux individus, dit Montjoie(i), se trouvent au même ton, dès que l’un agit, l’autre doit nécessairement répéter le même geste; et il le ferait avec la ressemblance la plus exacte , si la conformation des organes plus grossiers qui couvrent les nerfs le permettait. »

Qui n’a pas observé, aux théâtres, aux parades et aux autres représentations scéniques, l’influence des gestes de l’acteur sur la physionomie d’un certain nombre de spectateurs ?

On a souvent vu les maladies nerveuses devenir contagieuses dans les hôpitaux, les pensionnats, les couvents, etc. L’extase et l’illuminisme se rencontrent particulièrement chez les personnes adonnées à la vie contemplative, aux macérations , aux veilles et à la prière.

Une des épidémies les plus anciennes dont l’histoire fasse mention est celle des femmes argiennes, qui se croyaient changées en vaches, et qui furent guéries par le médecin Mélanipus.

Les Milésiennes avaient la manie de se pendre. Bien des moyens furent tentés pour les arracher à

(1) Lettres, p. 115.

ce funeste entraînement au suicide. Alors les magistrats déclarèrent que toutes celles que l’on trouverait pendues seraient exposées, dans la nudité la plus complète, et la corde au cou, sur une place publique. Cette ordonnance ne tarda pas à les guérir radicalement.

La possession des nonains, au xve siècle, envahit presque tous les couvents de femmes en Allemagne , et s’étendit jusqu’en Hollande.

Yan Dale rapporte dans la préface d’un de ses ouvrages (i) , qu’une épidémie extraordinaire envahit, en i55o, un hôpital d’Amsterdam; soixante à soixante-dix enfants en furent atteints : ils grimpaient aux toits comme des chats, et racontaient ce qu’il y avait de plus secret dans le conseil de la ville. Ils parcouraient les places, et dévoilaient tous les complots qui se tramaient contre les protestants.

Une épidémie à peu près semblable se renouvela en i556 , sur trente jeunes enfants (2).

A l’époque de nos dissensions et de nos guerres religieuses, on a toujours observé des affections nerveuses fort bizarres, qui ne tardaient pas à devenir contagieuses.

Après la révocation de l’édit de Nantes, les protestants se trouvèrent exposés, en France, aux plus indignes persécutions, les malheureux paysans, traqués comme des bêtes fauves, défendirent leurs croyances religieuses avec fanatisme. La plupart d’entre eux éprouvèrent des accidents nerveux,

(1) De l’Idolàlrie, p. 18 et 19.

(2) Démonoman., de Bodiu, p. 305.

accompagnés de convulsions et de tremblements. Cette maladie s’étendit avec une grande rapidité , particulièrement dans les montagnes desCévennes, où plusieurs milliers d’individus étaient allés chercher un abri contre leurs persécuteurs. Il prêchaient et prophétisaient en faveur de leur délivrance. On les désignait sous le nom de trembleurs (i).

Un grand nombre d’enfants ressentirent cette affection, qui présentait les phénomènes les plus étranges d’insensibilité et de seconde vue.

Une jeune fille de seize ans, connue sous le nom de la Bergère du Cret acquit à cette époque une grande célébrité.

« Dans ses extases, dit Jurieu (2), elle avait l’apparence d’une personne endormie profondément ; elle était d’une insensibilité complète à toute sorte d’excitation; elle n’avait, dans son état ordinaire, qu’une connaissance très-imparfaite de la langue française, et devenait, pendant ses extases, capable de s’exprimer dans cette langue avec une grande pureté. N’ayant jamais appris d’autres prières que son Pater et son Credo, elle faisait, pendant son sommeil, des prières admirables ; elle était exempte de tout mouvement convulsif. Quand elle était sortie de ses extases, elle ne se souvenait de rien de ce qu’elle avait dit ; elle soutenait qu’elle avait fort bien dormi, quoiqu’elle eût parlé souvent pendant quatre ou cinq heures, presque sans prendre de repos. Elle faisait des prédictions pendant ses extases;

*

(1) Théâtre sacré des Cévennes. —Traité du Magnét. animal, par le D' Bertrand, p. 351 et suiv.

(2) Lettres pastorales, l*r octobre 1688. — Bertrand, ouvrage cité, p. 363. — Journal du Magnét., n° 1...., 1818.

elle ne sortait pas d’elle-même de cet état, mais elle demandait qu’on l’éveillât. »

Tous ces phénomènes offrent la plus parfaite analogie avec ceux du somnambulisme le plus lucide, et cependant le magnétisme n’avait aucune action sur le développement de ces crises que l’on observe assez fréquemment chez les démoniaques et les illuminés.

James Cornish ( i ) nous entretient longuement des effets du fanatisme religieux dans le comté de Cor-nouailles.

Aux réunions des méthodistes, en Angleterre, une partie des personnes qui assistaient aux prêches ressentait une exaltation du système nerveux, suivie de convulsions violentes qui se propageaient de village en village. Les uns prophétisaient , les autres tombaient dans une noire mélancolie.

M. Brierre de Boismond (2), qui a publié récemment un ouvrage fort remarquable sur ces maladies , rapporte une épidémie extatique qui eut lieu de 1841 à 1842, dans les campagnes de la partie centrale de la Suède.

« Les malades, dit-il, se faisaient remarquer par une loquacité irrésistible, et par une manie constante à vouloir prêcher la parole de Dieu ; par des visions et des prophéties. La plupart des médecins qui ont vu les paroxysmes, les ont assimilés au somnambulisme, ou sommeil magnétiqne, sans qu’aucun d’eux ait cru pouvoir déclarer positivement que ces paroxysmes appartenaient à cet état.

(1) Medic. and Physic. Journal, 1814.

(2) Des Hallucinations, p. 249.

La maladie attaquait communément des jeunes gens de seize à trente ans, souvent aussi des enfants de six à seize ans, et même quelques personnes âgées.»

Parmi les épidémies démoniaques qui ont eu le plus grand retentissement, nous devons citer celle des Ursulines de Loudun, si diversement interprétée par les auteurs qui ont écrit sur ces convul-sionnaires. Ce sera du reste l’opinion du Dr Bertrand dont nous nous rendrons l’écho ; car, après la lecture de toutes les pièces qui traitent de ce sujet, nous restons parfaitement convaincu que tous les effets de ces possessions se rattachent à l’influence de Y imitation.

Deux jeunes religieuses d’une communauté de Loudun furent atteintes , en i632, d’une affection hystérique , avec quelques phénomènes d'extase. Leur confesseur, attribuant ces accidents à une puissance surnaturelle, les exorcisa. Ces pratiques leur persuadèrent facilement qu’elles étaient sous l’empire du démon. Interrogées sur l’origine de cette possession, elles accusèrent Urbain Grandier. La réputation de ce prêtre, homme d’esprit, et d’un extérieur agréable, était alors l’objet d’interprétations diverses; on l’accusait même d’aventures scandaleuses qui n’étaient pas ignorées des religieuses. Tous ceux qui ont fait quelqu’étude des maladies hystériformes n’ignorent pas qu’elles sont souvent le résultat de besoins comprimés, chez de jeunes filles d’une forte constitution et d'une imagination ardente. 11 suffit alors d’une légère étincelle pour que l’amour des sens succède à l’amour spirituel le plus pur. Soit que l’exorciseur se laissât emporter par des motifs de haine ou de jalousie

contre Grandier, soit qu’il fût victime de son ignorance et de scs préjugés, il ne cessa pas d’entretenir scs deux pénitentes dans leurs idées extravagantes. Les exorcismes avaient d’abord lieu dans le plus grand secret ; mais l’affection nerveuse offrant de jour en jour des faits plus singuliers, ils devinrent publics.

Alors les convulsions se communiquèrent à d’autres religieuses, et s’étendirent au dehors de la communauté.

Laubardemont, ministre inflexible des volontés du cardinal de Richelieu vint à Loudun à cette époque; il profita de cette accusation de sortilèges contre Grandier, pour satisfaire la vengeance de son maitre contre ce maheureux prêtre, soupçonné d’être l’auteur d’une lettre satirique contre le cardinal. Après avoir obtenu les pouvoirs nécessaires, il composa un tribunal de tous ses agents, et fît condamner Urbain Grandier à périr, comme sorcier, sur un bûcher. La sentence fut exécutée â Loudun le 18 avril i654- Cette condamnation barbare sera toujours envisagée comme le résultat d’un complot infernal, ou d’un fanatisme déplorable.

Nous ne pouvons accuser les Ursulines de la plus légère complicité dans ces fourberies.

« Imagine-t-on, dit Bertrand (1), rien de plus horrible que l’infernal rassemblement de huit jeunes femmes s’exerçant ainsi en secret à la plus épouvantable comédie? Et pourquoi? Pour conduire à une mort cruelle un malheureux prêtre innocent, qu’elles n’avaient aucun intérêt de faire périr. »

(1) Ouvrage cité, p. 344.

Nous savons, d’ailleurs, que les convulsionnai-res, aussitôt qu’elles eurent connaissance du rôle infâme qu’on leur avait faitjouer, selivrèrentauplus profond désespoir ; plusieurs même moururent de chagrin.

D' Alvïid PERRIER.

(La suite prochainement.)

VARIÉTÉS.

Prospectus. — Le sommaire des sept volumos formant la collection du Journal du Magnétisme , vient d’être publié, et se délivre gratis.

On y a joint l’en-tête que voici :

Une vérité qui n’a point d’organe pour la propager, la servir et la défendre, est comme une âme sans corps ; il lui faut une enveloppe, afin qu’on puisse juger à son allure ce qu’elle sait faire, ce qu’elle vaut, à quoi elle peut être utile.

Le magnétisme animal est, à nos yeux, dans ce cas; courant lé monde sans guides, il ne peut être saisi ni fixé nulle part. On sait qu’il existe, voilà tout. Aujourd’hui il se montre ici, demain dans le Nouveau-Monde, où il étonne et confond par sa présence ; puis plus rien, si ce n’est un vague souvenir de9 faits étranges, incompréhensibles, inconcevables, qui l’accompagnaient.

Tout ce qu’on écrit sur cette vérité mystérieuse semble être dicté par une mémoire infidèle où l’imagination tient lieu de réalité ; c’est un mélange de vérités et d’erreurs qui étonne l’esprit du lecteur sans éclairer sa raison.

Cependant tous ces écrits, toutes ces opinions diverses relatent une chose positive : c’est qu’une vérité immense s’est révélée au monde, qu’elle l’envahit chaque jour davantage, et que sa voix est si puissante aujourd’hui qu’on peut l’entendre en tous lieux.

Nous avons créé un Journal pour servir d’écho à cette voix, recueillir tous les faits de magnétisme et de somnambulisme épars dans le monde, dire ce qu’ils ont de fondé, sans qu’aucune prévention, aucune crainte n’altère notre jugement.

Nous voulons :

i° Enseigner une nouvelle méthode magnétique, claire et compréhensible à toutes les intelligences, afin que celui qui souffre et languit sache le moyen de soulager ses maux ;

2° Grouper tous les phénomènes nouveaux, de manière à faire saisir la loi qui préside à leur développement;

3° Rechercher dans les sciences naturelles : la physique, la psychologie, et la médecine, tout ce qui a trait au magnétisme, et relier ces faits entre eux ;

4° Donner une nouvelle théorie de ce principe mystérieux, dire d’où il vient, quelle est son origine , afin que tous puissent le voir, le juger par les effets qu’il produit, et marcher sans crainte dans la route nouvelle qu’il ouvre à l’intelligence humaine.

Dans nos travaux, l’expérience nous éclairera de son flambeau.

La sincérité sera notre compagne.

Si, notre œuvre accomplie, il en résulte le bien que nous désirons, nous serons heureux et fiers ; car la vérité est notre idole, et son triomphe notre seule pensée.

Tel était notre langage, en i845, au début de cette entreprise.

La suite a prouvé que nous augurions bien alors des dispositions qui animaient les personnes auxquelles nous nous adressions. Nous n’avons point en vain sollicité leur concours.

Par des efforts multipliés, une propagation soutenue, les magnétiseurs sont parvenus à étendre leur croyance en tous lieux. Des travaux importants, rédigés avec soin, nous ont été envoyés de toutes parts , en grand nombre. Recueillant tous les documents contemporains, notre Journal est devenu le compendium des magnétiseurs, le résumé historique, théorique et pratique, les archives , enfin, de la science nouvelle. C’est aujourd’hui le livre le plus précieux, tanl par l’actualité que par la multiplicité des questions qui y sont traitées. 11 renferme toute une bibliothèque dont les éléments variés le rendent indispensable à quiconque pratique ou veut étudier le mesmérisme. Suivant pas à pas l’évolution de la science, constatant son progrès jour par jour, c’est le seul ouvrage qui soit constamment au niveau des connaissances.

On y trouve l’abrégé concis, mais complet, des principes et procédés sur lesquels repose actuellement l’art de magnétiser. Les règles d’une application rationnelle de l’agent mesmérien au traitement des maladies, y sont exposées de manière à rendre le succès prompt et facile.

Le somnambulisme, avec ses manifestations phénoménales, méritait une attention spéciale; il y est traité sous le triple rapport de sa production, de ses caractères et de son utilité. Les pages que nous y avons consacrées sont un guide certain contre bien des erreurs.

L’insensibilité traumatique, les hallucinations, l’extase, l’attraction, la catalepsie, etc., sont appuyées par tant de faits dans cet écrit, qu’on a, pour ainsi dire, toutes les formes du genre sous les

yeux. Ce qui dispense de recourir à une multitude de sources difficiles à consulter.

Les idées les plus élevées sur la philosophie, la psychologie, la théologie, y sont également consignées, ainsi que les germes d’une physiologie, appuyée non plus sur des suppositions, mais par le jeu surpris des organes au moment où la vie presque doublée, permet d’apercevoir ce dont ni le cadavre, ni l’état normal ne peuvent donner l’indice.

De curieux faits du pouvoir de l’âme, révélant les mystères de l’antique magic, donnent au récit une variété et un intérêt toujours soutenus. Corroborant le témoignage de l’histoire, ces phénomènes étranges prouvent qu’une science profonde exista jadis. Initiant à d’occultes connaissances, ils tendent à faire revivre la magie avec son cortège de merveilles, mais soutenue par l’expérience et guidée par la raison; telle, enfin, qu’elle n’ait plus à redouter les préjugés de l'affreuse ignorance.

Traitant de choses extraordinaires, notre recueil offre l’attrait du roman, avec la vérité de l’histoire et la sévérité de la science : sa lecture ouvre à l’intelligence un champ sans limites.

Des planches représentant des scènes caractéris-.tiques, ou difficiles à décrire, ont été intercalées dans le texte.

Le Gérant : HÉBERT (de Garnay).

THÉORIES.

PHILOSOPHIE MÉDICO-MAGNÉTIQUE.

CHAPITRE II.

De la Médecine d'imagination.

(Suite.)

Les bizarres anomalies du système nerveux ont été exploitées suivant les préjugés de chaque siècle. 11 n’y a pas longtemps que les lumières de la civilisation nous ont éclairé sur la nature de ces affections si variables dans leurs transformations. Dans un temps, des juges éclairés se seraient exposés à de grands dangers en refusant de poursuivre comme sorciers ou possédés, de pauvres malades imaginaires. Le clergé, tout puissant, leur eût fait un crime de leur incrédulité (1). Tous ces malheureux visionnaires étaient d’ailleurs tellement convaincus de leur possession, qu’ils aimaient mieux endurer les plus affreuses tortures, et la mort même, plutôt que d’avouer une supercherie dont ils n’étaient pas coupables.

Les maladies démoniaques ont une origine fort

(1) Voyez la Démonomanic de Bodin, p. 392.

TOMB VIII. — N" 102. —25 EMURK 18VJ. 18

ancienne, puisqu’elles remontent jusqu’à l’époque où l’intervention du démon lut admise dans la direction de nos destinées.

Les législateurs de l’antiquité ont toujours reconnu deux principes qui doivent présider à nos actions : Osiris et Typhon, chez les Égyptiens; Oromase et Arimane, chez les Perses; le principe du mal était appelé Satan par les Arabes, et Job paraît être le premier qui ait employé ce terme. Enfin, chez les chrétiens, les anges et les démons remplacèrent les dieux du paganisme.

Si la possession était une maladie imaginaire, elle devait nécessairement s’amender sous l'influence d’une médication essentiellement morale. Le traitement le plus usité dans cette affection était l'exorcisme, qui passait, d'après tous les démonographes, pour avoir la propriété de chasser le diable.

Nous lisons dans la Bible que toutes les maladies qui présentaient quelques symptômes surnaturels étaient attribuées à l'influence du démon. Les prêtres recoururent dans tous les temps aux exorcismes pour dissiper ces accidents, et l'on comprendra facilement l'action salutaire que devaient exercer dans la cure de la démonomanie, des hommes revêtus des insignes du sactrdoce. Les rites et les cérémonies que l’on observait alors devaient réagir puissamment sur une organisation affaiblie par des veilles et des macérations.

Il y avait plusieurs procédés pour exorciser. Le plus répandu était l’imposition des mains; on avait aussi fréquemment recours à des paroles sacramentelles ou à la prière.

L’insuffiation devenait souvent un précieux

auxiliaire, et nous ne pouvons confondre cette pratique avec le souffle magnétique; car l’exorciseur ne faisait que trois légères insufflations, comme nous l’apprend saint Denis l’Aréopagiste (i). On était persuadé que ce moyen activait la sortie du malin esprit, et nettoyait la maison du Seigneur (2). C’est un traitement bien efficace, que le souffle, dit saint Cyrille (5) ; c’est un feu brûlant lancé sur un esprit invisible par la vertu du Saint-Esprit.

Flavius Joscphe (4) nous rapporte que Salomon avait recours à des exorcismes si puissants, qu’il chassait les démons, et guérissait ainsi les maladies les plus opiniâtres. Cet écrivain ajoute que l’exorcisme était en grande vigueur chez les Hébreux, et qu’il a vu un juif nommé Éléazar qui guérit, en présence de Vespasien et de son armée, une grande quantité de personnes possédées du démon , en leur mettant sous le nez un anneau qui contenait quelques débris d’une plante découverte par Salomon.

Le Père Brognoli (5) fait le plus grand éloge des effets merveilleux de l’exorcisme dans le traitement des maladies diaboliques dont les symptômes concordaient parfaitement avec ceux des afiections nerveuses, telles que l’hystérie, la catalepsie, l’é-pilepsie et l’hypochondrie.

Suivant Henry Bognet (6), saint Paul guérissait

(1) Lib. v, Adversns Parmenianum.

(2) Lcloycr. Ilist. desSp., p. 915.

(3) Catcchis., c. 16.

(4) Antiq. judaïq., lib. vill, c. 2.

(5) Aleticacon ,1618.

(6) Ilist. de Sicile. — Leloyer. Hist. des Spectres, p. 165.

18,%

les possédés en les couvrant de scs vêtements ; mais il prétend qu’une foi vive était indispensable chez le malade.

Fascl prétend qu’on exorcisait tous les ans, le jour de Saint-Philippe, dans la cathédrale d’Ar-gériane, les démoniaques qui se présentaient pour être guéris. La plupart d’entr’eux s’en retournaient en bonne santé. Les exorcismes se faisaient devant le grand autel, au nom de Dieu et de saint Philippe.

« On ne peut disconvenir, dit J.-B. Thiers (i), que l’usage des exorcismes et des oraisons pour chasser les maladies des hommes ne soit aussi ancien que l’Église. Le fils de Dieu lui-même , ses apôtres et leurs disciples, les évêques, l’ont pratiqué utilement dans tous les siècles.....; mais il

faut avoir caractère, et être approuvé de l’Église pour cela. »

Suivant saint Augustin (2), les plus célèbres exorciseurs étaient saint Ambroise et saint Martin. Il y avait une hiérarchie dans l’ordre des exorcistes : les sous-diacres devaient céder ce droit aux diacres présents, ceux-ci aux prêtres, qui étaient obligés d’en laisser l'honneur aux évêques. Ces derniers même ne pouvaient réclamer cette prérogative devant l’autorité papale (3).

Les exorciseurs n’étaient pas toujours à l’abri des maladies dont ils entreprenaient la cure.

« Nous lisons, ès actes des Apostres, dit Bodin (4),

(1) Ouvrage cité, t. 1,1. vi.

(2) Vies des Pères. —Dictionn. janséniste.

(3) Leloyer. Ouvrage cité, p. 9Gb.

(i) Démonomanie, p. 598.

que deux de leurs disciples qui vouloyent chasser l’esprit maling du corps d’une personne, le diable se saisit de tous deux, et laissa celuy qu’il véxait. Nous avons une histoire semblable en saint Grégoire, au i" Dialogue , qu’il y eut un prestre, le quel voyant une femme saisie du diable, il print une estole et la mist sur la femme ; soudain le diable sc saisit du prestre, et quitta la femme. »

Ces accidents devaient être assez fréquents; car le plus grand nombre des exorcistes, gens ignorants et fanatiques, se trouvaient, d’après les lois naturelles de l'imitation, quelquefois victimes des rapports qui existaient entre leur organisation nerveuse et celle des malheureux crisiaqnes.

L’usage du saint-chrême, ou onction huileuse, remonte sans doute aux premières pratiques de l’exorcisme; car on s’en est toujours servi dans le traitement des possessions et des maladies les plus graves, surtout aux approches de la mort (i). Grégoire de Tours rapporte plusieurs observations de guérisons de démoniaques obtenues par cette onction (2).

Le sel marin, que l’on employait dans ces circonstances, passait pour avoir la propriété de dissiper la démonomanie (3). Nous lisons dans le Lé-vitique, ch. I, que Dieu recommande l’emploi du sel dans tous les sacrifices , pour détourner son peuple des sacrifices à Satan.

Saint Justin , martyr, écrivait que l’on recourait

(1) Saint Cyprien, de Unctione christmat. — Sml Denis, deifie-rarch. ecclestast., c. 2.

(2) Leloyer. Ouvrage cité, p. 92t.

(3) Bodin. Ouvrage cité, p. 133.

souvent à la fumée de plantes aromatiques pendant les exorcismes, pour guérir les possédés (i), on administrait également à ces malades de l’ellébore, par ordre des médecins (2).

Les laïques ne tardèrent pas à s’attribuer ces facultés curatives. Ainsi les salmadores, en Espagne, et les ensnlmistcs, en Italie, passaient pour avoir la vertu de chasser les démons par les exorcismes et les prières. Ils se servaient aussi de l’insufllation ; mais les prêtres, qui se réservaient le monopole de ces guérisons, s’émurent au bruit de la concurrence qu’on leur faisait. Plusieurs ordonnances émanées de différents conciles défendirent l’emploi des exorcismes et des traitements par talismants, amulettes, paroles magiques r etc.

« Nous défendons à toutes sortes de personnes de faire à l’avenir l’office de ceux que l’on croit guérir les maladies par paroles et par bénédictions, et de réciter publiquement des prières ou des oraisons, soit dans les rues soit dans les églises, à moins qu’ils n’aient été auparavant examinés par l’évêque (5) ».

Il faut croire aussi que plusieurs événements analogues à celui que rapporte le Père Mathias Fe-lisius, déterminèrent à recourir à la sévérité des lois ecclésiastiques pour éviter le scandale :

« Une femme affectée d’une violente inflammation des yeux, demanda à un écolier s’il ne connaissait pas quelques paroles pour la guérir; ce

^1) Leloyer. Ouvr. cité, p. 8G9. — Voyez Examen des Esprits, par Jourd. Guibert.

(2) leloyer. Ouvr. cité, p. 150.

(5) Concile de Mexico, 1585. — Tliiers. Ouvr. cité, 1.1,liv- VI, c. 2.

jeune homme, séduit par la récompense qu’on lui offrait, traça plusieurs mots sur un papier qu’il cacheta soigneusement, et défendit formellement à la malade d’en prendre connaissance. Cette femme ne tarda pas à se rétablir, et confia ce papier à une de ses voisines atteinte de la même affection : celle-ci se trouva guérie aussi promptement. Alors la curiosité fit oublier la défense, et l’on ouvrit la lettre cabalistique, qui contenait ces paroles : « Que le diable t’arrache les deux yeux, « et te bouche la place avec de la boue. » Ces deux femmes furent promptement se confesser , el firent pénitence de ce crime imaginaire. »

Les lois civiles et religieuses , suivant les préjugés de chaque époque, se sont montrées très-sévères contre les guérisseurs qui avaient recours aux procédés étrangers à la médecine (1). Plalon (2) proposa une loi contre eux.

Ammien Marccllin (3) nous fait connaître que l’empereur Valens fit mourir une vieille femme qui avait la réputation de guérir par de simples paroles les fièvres intermittentes. Ce fut après avoir rendu la santé à la fille de l’empereur, qu’elle fut envoyée au supplice.

Cependant Constantin, tout en conservant la loi contre les guérisseurs, ordonna de cesser toutes poursuites contre ceux qui soulageaient (4).

Charlemagne (5) fit défense aux laïques, et même

(1) Du Laurens. De Strumis, c. G.

(2) De Legibus.

(5) Liv. xxix.

(4) Code Théodos., 1. ix.

(5) Capitulaires, t. vi.

aux ecclésiastiques, de se servir de préservatifs, tels qu’amulettes, ligatures, etc., dans le traitement des maladies, parce que, dit-il, ce sont les enseignes de la magie. II condamna à la prison les augures, devins et enchanteurs.

Parmi les exorciseurs des temps modernes, deux hommes se sont acquis une grande célébrité. Victimes de la partialité de quelques écrivains aveuglés par leurs passions, ils passent encore aujourd'hui, dans l’opinion publique, pour de vils charlatans. Les cures authentiques qu’ils ont faites , leur dévouement désintéressé pour l’humanité souffrante, enfin les témoignages nombreux en faveur de leurs vertus et de leur probité, nous font un devoir de réhabiliter leur mémoire.

Valentín Greatrake, né en Irlande en 1C28, appartenait à une famille estimable; il servit comme officier pendant la guerre de son pays, et remplit plusieurs charges honorables dans le comté de Cork. Il manifesta en tout temps des sentiments religieux, et recherchait les habitudes de la vie contemplative. A la suite d’une révélation qu’il eut en songe, il s’imagina qu’il avait le don de guérir les écrouelles. Plusieurs malades s’adressèrent à lui et furent guéris. Il obtint des succès extraordinaires pendant une épidémie de fièvres qui eut lieu en i665. Plus tard il traita indistinctement toutes les maladies, et sa renommée lui attira de la part du clergé l’ordre de cesser ses miracles. Il passa en Angleterre, où tous ses succès le suivirent. Le roi l’appela plusieurs fois à la cour, et lui témoigna le plus vif intérêt.

Le traitement de Greatrake consistait ordinaire-

ment dans un simple attouchement, cependant il recourait aussi aux passes entraînantes de nos magnétiseurs , lorsqu’il voulait dissiper les aü'ections goutteuses ou rhumatismales. 11 attirait alors la douleur aux extrémités des membres, d’où il l’expulsait entièrement. Ce dernier procédé étant du ressort de la médecine magnétique, nous y reviendrons plus tard ; maintenant nous ne pouvons consciencieusement attribuer aux influences de cette médication la plupart des cures du célèbre thaumaturge, qui nous paraissent appartenir à la médecine de l’imagination ; car elles n’étaient ordinairement que le résultat d’une confiance illimitée chez les malades. Greatrake ne voyait partout que possessions; il rapportait à Dieu tous ses succès, et exhortait toujours ceux qu’il soignait à se joindre à lui par leurs prières. 11 n’eut jamais la prétention de guérir toutes les infirmités humaines, soit qu’elles fussent trop invétérées , soit qu’il en reconnût l’incurabilité.

Le fameux médecin Henry Stubbe, Boyle, les célèbres théologiensWilkins, Cudworth,Patrick, etc., rendirent témoignage à la vérité en venant annoncer la réalité de ces cures merveilleuses (i).

Jean Joseph Gassner, né en Souabeen 1727, fit ses éludes à l’Université de Prague , et reçut les

(1) Voyez, pour plus de détails : Petetin. Obs. 31. — L’Anti-magné-tisme, 1781, p. 171. — OEuvres de Saint-Evremond, 1.1, p. 82; 1753. - Arch. du Magn., t. IV, p. 216; et t. V, p. 44 et 188. — Thouret. Recherches et Doutes sur le Magn., p. 114. — Bertrand. Du Magn. — Tableau mouvant de Paris, t. 11, p. 235. — Philosophie Corp., p. 115. Delandiue. — Roullier. Exposition physiologique des Phénomènes du Magnétisme, p. 66; etc., etc.

ordres en 1760. Huit ans après il fut appelé à la cure de Closterle. Sa constitution physique était très-mauvaise, et il recourut en vain aux ressources de la médecine pour l’améliorer. 11 crut enfin reconnaître dans son état une véritable possession; il eut recours aux exorcismes, et recouvra la santé. Convaincu de l’existence de ce principe morbide dans beaucoup de maladies, il fit lui-même usage des exorcismes pour d’autres malades, qui se rétablirent très-promptement. Alors sa réputation s’étendit au loin, les incurables aflluaient de tous côtés.

Gassner distinguait les maladies en deux grandes catégories : les maladies naturelles et les maladies démoniaques. Ces dernières étaient, suivant lui, les plus nombreuses, et comprenaient : les convulsions, l’épilepsie, la catalepsie, l’asthme, la goutte, la paralysie, en général toutes les affections nerveuses. 11 admettait aussi des maladies mixtes occasionnées en partie par la nature, en partie par Satan (1). Les médecins ne guérissaient que les accidents qui se rattachaient aux lois naturelles.

Gassner, après avoir parcouru la Suisse, où il obtint de nombreux succès, vint se fixer à Ratis-bonne, où sa clientelle prit une extension extraordinaire. On vit, dit-on, jusqu’à dix mille personnes réunies en même temps sous des tentes. 11 exigeait une foi vive chez les malades, cette condition lui paraissait indispensable à scs succès. 11

(1) Voyez PAnti-MagnétiBme, p. 198 ; et la plupart des ouvrages cités plus haut.

guérissait rarement au premier exorcisme ; il y consacrait souvent plusieurs séances. Ce célèbre exorciste portait une étole rouge, et avait ordinairement un crucifix près de lui. I.es malades se mettaient à genoux devant lui, et il touchait la partie douloureuse. Lorsqu’ils étaient guéris, il leur faisait acheter «les médailles au nom de Jésus-Christ, et les engageait à les porter.

Gassner eut de nombreux détracteurs, mais il ne répondit à leurs attaques que par des cures nouvelles. Cependant il fut obligé, malgré la protection du prince évêque de llatisbonne, de se retirer, sur l’ordre de l’empereur, dans une communauté religieuse. Il ne pouvait se livrer, dans sa retraite, à aucun traitement, sans une autorisation particulière. DeHaën, médecin d’une grande réputation, s’attacha, dans un ouvrage fort remarquable (1), à démontrer la réalité des cures de Gassner. Encore imbu des préjugés de son siècle , il ne crut pouvoir expliquer ces guérisons merveilleuses, qu’en admettant une puissance diabolique.

On publia alors la guérison miraculeuse d’une jeune fille, âgée de dix-neuf ans, nommée Émilie, qui présenta tous les phénomènes les plus admirables du somnambulisme (a) ; les crises les plus singulières et les plus variées se développaient ou se dissipaient suivant le désir de l’exorciste. La circulation du sang chez la malade , s’accélérait oit s’arrêtait à volonté.

(*) De Miracults, cap 5.

(2) Procès-verbal des guérisons obtenues par Gassner, à Schillings-furt. — Voy. l’Anlimagnétisme, p. 200 et suiv. — Archives du Magnétisme, t. III, p. 222.

Des résultats analogues furent obtenus à Pondorf, chez un laboureur nommé Charlemagne. Ces expériences curent lieu devant les hommes les plus recommandables du pays, des théologiens, des médecins, etc., qui donnèrent à Gassner les certificats les plus honorables.

Mesmer alla visiter Gassner en 1775, et assista à ses exorcismes. 11 ne découvrit dans ses traitements aucun procédé qui pût lui faire croire qu'il se servait du magnétisme animal. « Mon expérience, dit-il (1), m’avait appris dès lors que cet homme n’était que l'instrument de la nature. » Nous aurons l’occasion de revenir sur cette question, lorsque nous nous occuperons de la médecine magnétique.

Nous ne pouvons nous dispenser de citer encore quelques noms assez célèbres parmi les exorcistes qui appartiennent à la classe des médecins de l’imagination.

Il existait, en 1771 , à Paris, rue des Moineaux, un homme que l’on appelait le Toucheur, ou leSatni homme , qui obtint de nombreuses guérisons par le simple attouchement et le signe de la croix. Il était ordinairement entouré de soixante ou quatre-vingts adeptes qu’il avait choisis dans la classe du peuple, et qui suivaient ses traitements ; ils s’appelaient frères entre eux. Les malades affluaient en si grand nombre vers sa demeure, que la police la fit fermer , malgré la protection que lui accordait le prince de Deux-Ponts. Nous ignorons ce qu’il devint , ainsi que ses élèves.

Le comte de Thun , issu d’une des familles les

(1) Mémoire sur la découverte du Magnétisme.

plus illustres du Tyrol, guérissait les malades par le toucher. Les gazettes de Prague et de Nuremberg rendirent compte, de i8o5 à 1807, des nombreuses guérisons qu'il opéra.

Un curé de campagne., habitant le département de la Marne, sc fit unegrande réputation, en 1819, par les cures innombrables qu’il obtenait; les médecins de son pays lui firent un procès pour avoir osé guérir gratuitement leurs incurables (1).

Le prince de Ilohenlohe s’est acquis une grande célébrité comme exorciste. Fils d’un général autrichien , il commença ses éludes à Vienne, et les termina, en 1815, à Ellwangen, en Souabe, où Gassner avait été curé : ce fut là qu’il reçut les ordres sacrés. Le roi de Bavière le nomma au vicariat deliamberg; il s’y distingua par une grande éloquence. Le prince de Hohenlohe fit connaissance, en 1820, avec un exorciste nommé Michel Martin, qui guérissait les maladies en invoquant le nom de Dieu. Il le vit opérer, la première fois, à Wurtzbourg, avec le succès le plus complet, sur la jeune princesse Mathilde de Schwartzenberg, âgée de huit ans, atteinte d’une paralysie qui avait résisté aux soins des médecins les plus célèbres. Michel fit une prière et lui commanda de se lever; celle-ci sortit du lit sans le secours de personne, et sc rendit le lendemain à l’église pour y rendre grâce à Dieu. Le prince de Hohenlohe, qui n’assista à cette cure que comme spectateur, en eut tout le mérite aux yeux du public. Il sc vit entouré chaque jour de nombreux malades, et il obtint des guérisons par la

(!) Archives du Magnétisme , 1.1, p. 245.

méthode de Martin, qui fut lui-même bientôt oublié. Sa réputation prit un accroissement prodigieux; la rue où il logeait à Wurtzbourg était encombrée. dès le matin, de tous les incurables du pays; l’exagération de la multitude prit soin de multiplier les guérisons et d’en faire des miracles. Le prince se rendit ensuite à Bâinberg, où il voulut continuer ses cures sur les places publiques; mais le magistrat de cette ville lui ordonna de n( tenter aucun traitement qu’en présence d’une commission spéciale. Il accepta ces conditions, mais il n’eut pas lieu d’en être satisfait; l’isolement des malades et la sévérité des juges contrastaient singulièrement avec les rassemblements et l'enthousiasme superstitieux de la populace. Les guérisons cessèrent faute d’aliments suffisants pour l’illusion des malades. Peu soucieux d’enfreindre les ordres do l’autorité, il recommença ses opérations dans les lieux publics; mais une injonction sévère l’obligea de quitter la ville. Ce fut alors qu'il eut recours aux pratiques dont il use encore aujourd’hui. Les malades s’adressent à lui par écrit; le prince leur assigne le jour el l’heure où il doit prier pour leur guérison. De leur côté , les malades, après s’être confessés et avoir communié, doivent, au même moment, unir leurs prières aux siennes, avec une confiance aveugle dans la miséricorde divine. On signale chaque année quelques guérisons, mais on se tait soigneusement Sur les expériences négatives (t).

(1) Voy. Archives du Magnét. , t. III, p. 232. — Notice historique sur le prince Hohenlohe, par le D' Jourdan. (Extr. de la Biogr. médic.)

Un volume serait insuffisant pour transcrire la biographie de tous ceux qui ont obtenu des guérisons par l’influence qu’ils exerçaient sur l'imagination des malades ; mais nous espérons que cet exposé, quoique bien incomplet, suffira pour dissiper les préventions injustement attachées au nom de ces hommes honorables par leurs vertus et leur dévouement à l’humanité.

Qui pourrait douter de la diversité des traitements qui réussissent à soulager nos infirmités? Combien d’impulsions différentes qui nous conduisent au même résultat? La nature n’a souvent besoin que d’une légère secousse pour retrouver l’exercice de tons ses rouages. Pourquoi ne profiterions-nous pas de tous les moyens qu’elle nous offre pour rétablir l’équilibre dans la machine humaine? Toujours esclaves de l’observation, nous ferons une guerre incessante à la médecine exclusive dont nous avons souvent apprécié les dangers. Si nous allons remuer la poussière de tant de vieilles doctrines enterrées par le charlatanisme, c’est dans l’espoir d’y découvrir quelques vérités utiles.

Après avoir démontré que tous les hommes investis aux yeux du peuple des prestiges de la puissance divine, étaient susceptibles d’exercer une influence salutaire sur les malades, on ne pourra révoquer en doute les effets curatifs des reliques.

Les reliques de saint Féüx, ancien évêque de Noie, avaient, dit saint Paulin (i), le don de faire fuir les esprits immondes les plus rebelles, du

(1) De Vit A divi Felicls.

corps des possèdes. Celles de saint Julien, martyr (i), appliquées sur le cou d’un démoniaque, le guérissaient instantanément. Les reliques de Maximin , évêque de Trêves, sous l’empereur Constance, passaient pour chasser du corps de tous les possédés l’esprit malin, et les ossements des saints ont produit des guérisons, suivant la confiance que le peuple leur accordait.

« Que l’objet de votre foi soit réel ou faux , dit Paracelse (2), vous n’en obtiendrez pas moins les mêmes effets, et c’est là la cause de la superstition. C’est ainsi que si je crois en une statue de saint Pierre comme j’aurais cru en saint Pierre lui-même, j’obtiendrai les mêmes effets que j’aurais obtenus de saint Pierre lui-même ; mais c’est là une superstition. C’est la foi, cependant, qui produit ces miracles, et soit qu’elle soit vraie, soit qu’elle soit fausse, elle produira toujours les mêmes prodiges. »

Cette opinion est du reste partagée par tous les hommes qui se sont occupés de la médecine d’imagination (5). Si, au lieu d’ossements respectés, on venait à en substituer d’autres en l’absence du malade, on obtiendrait le même résultat. C’est ce qui arriva lors de la possession des Ursulines de Loudun : le comte de Ludre, indigné de la mauvaise foi des exorcistes, les pria d’appliquer sur les convulsion-naires une boite de reliques qu’il portait sur lui. On la plaça sur la tète de la supérieure, qui tomba de suite dans des spasmes affreux, en disant qu’elle

(1) Histoire ecclésiast.

(2) Phitosoph. occulte, t. H, p. 450.

(3) Pomponuce. De Incantation., p. 252.

se sentait dévorce par un feu invisible. Le comte fit alors l’ouverture de la boîte, qui ne contenait que du poil et de lu plume.

« Ali, monsieur ! s’écria le moine, pourquoi vous êtes-vous moqué de nous? — Mon père, répondit le comte de Ludre, pourquoi vous moquez-vous de Dieu et du monde ? »

L’histoire des convulsionnaires du cimetière de Saint-Médard nous donnera une juste idée des prodiges que peut enfanter une imagination surexcitée par la confiance aux reliques, surtout pendant l'effervescence dès persécutions religieuses.

François de Paris, fils aîné d’un conseiller au Parlement, refusa l’héritage de la charge de son père, pour se consacrer à Dieu. Après avoir partagé sa fortune entre son frère et les pauvres, il se retira dans une profonde retraite, au faubourg Saint-Marcel, où il se livra à la pénitence la plus austère. Toule sa vie s’écoula au milieu des privations et de la prière. Chaque jour il se déchirait le corps au pied d’une croix, pour obtenir de la Divinité le pouvoir de faire ressortir les vérités attaquées par la Bulle Unigenilus ( i ), qu’il ne voulait pas admettre. A sa mort, on rechercha ses haillons comme des reliques , et on l’enterra avec une pompe extraordinaire. Ses partisans prirent le nom d’appelants, et se rendaient tous les jours dans le cimetière de Saint-Médard pour prier sur son tombeau. Quelques femmes furent atteintes de convulsions, qui devinrent bientôt contagieuses; des

(1) C'est ainsi que s’appelait la Bulle du pape qui condamnait le Nouveau Testament du P. (juesnel, comme un livre hérétique et dangereux.

guérisons furent constatées, et firent croire aux miracles. Des malades se rendirent, el se firent transporter en foule, auprès de la tombe du saint personnage. Des cures inespérées furent le résultat de celte confiance aveugle, elles n’avaient lieu qu’à la suite des plus violents accès convulsifs, et furent appuyées sur les témoignages les plus irrécusables. Les jésuites, comme le fait observer le sceptique Hume, ne purent parvenir à les réfuter. Les premières guérisons furent obtenues pendant le mois de juillet et août 1731, et continuèrent jusqu’au 27 janvier 1752 que le gouveruement donna l’ordre de fermer le cimetière. L’archevêque de Paris interdit même le culte que l’on rendait à la mémoire du diacre Pâris. Alors les malades se réunirent dans des lieux particuliers ; l'épidémie de convulsions et les cures continuèrent. Une nouvelle ordonnance, datée du 17 février 1761 , défendit aux personnes sujettes à ces convulsions de s’exposer en spectacle, et aux curieux de les visiter.

Ces précautions ne firent qu’augmenter l’enthousiasme populaire; les rassemblements se firent avec le plus grand mystère, et de nombreuses guérisons furent observées pendant plusieurs années.

Toutes ces cures , attribuées par les uns à l’intervention de la Divinité, par les autres à la puissance du démon, n’étaient bien certainement que le résultat de ces réactions dont l’histoire des maladies nerveuses nous offre tant d’exemples. Chaque observation est accompagnée des témoignages les plus authentiques ; il faudrait être d’un scepticisme révoltant, pour en nier la réalité, lorsque l’on a

médité avec soin les ouvrages ( i ) de Carré de Mont-geron,conseiller au Parlement deParis. Cethomme consciencieux et estimé , aliéna sa fortune et sa liberté par dévouement à la vérité , et préféra finir ses jours dans une étroite prison plutôt que de consentir à une rétractation exigée par les jésuites.

« Quant aux convulsionnaires de Saint-Médard, dit le savant auteur des Révolutions du Globe (2). Si jamais ouvrage avait pu être capable d’attirer l’attention sur les phénomènes de l’extase, celui de Carré de Montgeron eût été bien propre 'a produire ce résultat : jamais on n’a recueilli en faveur d’aucuns faits des témoignages aussi nombreux et aussi concluants que ceux que l’auteur rapporte à l’appui des événements qu’il raconte. »

On a généralement observé chez les convulsionnaires des phénomènes fort curieux d’insensibilité. Ils recevaient de violents coups sur toutes les parties du corps sans paraître s’en apercevoir ; des hommes leur marchaient sur le ventre et la poitrine , sans qu’il restât la plus légère trace de contusions. Ils supportaient quelquefois des supplices beaucoup plus atroces sans en ressentir de douleur. Ces faits ont du reste été signalés dans la plupart des épidémies d’affections nerveuses ; l’insensibilité du corps était même regardée comme le signe le plus certain de la possession.

Chez les convulsionnaires de Saint-Médard, le phénomène le plus saillant, celui qui a le plus

(1) Vérité des Miracles opérés par l’intercession de M. de l'àris. 5 vol. in-4.

(2) Du Magnétisme animal en France, par le D' Bertrand, p. 317.

attiré l’attention du public, c’est la faculté qu’ils avaient.de résisîer à des coups si terribles, qu’il semble que les parties de leur corps sur lesquelles ils étaient appliqués auraient dû se trouver brisées sous l’eli'ort des instruments vulnérants. Les épouvantables scènes de ce que l’on appelait les grands secours , furent données publiquement pendant plusieurs années : tout Paris courut pour en être témoin (1). »

Sous le pape Innocent III, les prêlres hérétiques se livrèrent, en Provence, aux actes les plus atroces du fanatisme. Ils pratiquaient sur leurs prosélytes le supplice de Xhcretication, qui consistait à soumettre le patient à d’allreuses tortures, après lui avoir fait faire publiquement sa profession de foi. Le néophyte était presque toujours insensible à la douleur.

« Chez les maniaques, les hypochondriaques, dit Yirey (2), plusieurs parties du corps sont tellement engourdies (tandis que le centre cérébral est au contraire fortement tendu sur une idée fixe), qu’on peut enfoncer des épingles, de longues aiguilles dans ces parties , sans que ces individus le sentent, et malgré qu’ils le voient faire. »

Presque tous les physiologistes sont d’accord sur ce phénomène.

« Chez les hystériques, affirme le D’ Jourdan, il y a une inégale distribution de la sensibilité nerveuse; on enfonçait des aiguilles dans le corps des

(1) Voy. Traité du Magnétisme, et Traité du Somnambulisme, parle D1 Bertrand, ainsi que l’ouvrage cité de Carré de Montgeron, el le Naturalisme des convulsions, par Hecquet.

(2) Dictionnaire des Sciences médicales, art. Indolence.

sorciers sans qu’ils éprouvassent la moindre souffrance. »

Lorsque nous traiterons de la médecine magnétique, nous reviendrons sur ces étranges modifications du système nerveux, que l’on observe chez la plupart des somnambules.

Nous avons parlé de l'invulnérabilité du corps des extatiques ; ce phénomene étroitement lié à l’état de quelques convulsionnaires de Saint-Médard, a été observé aussi chez des somnambules (i). Ilecquet (•?.) croit trouver l’explication de cette résistance aux causes de destruction auxquelles ces corps étaient soumis dans le gonflement des muscles qui présentaient alors toute la puissance d’une forte voûte. Nous étudierons plus tard cette intéressante question, étrangère au sujet dont nous nous occupons aujourd’hui.

Nous terminerons cet article par quelques considérations sur la danse de Saint-Guy, affection nerveuse qui présente la plus grande analogie avec l’épidémie des convulsionnaires.

La danse de Saint-Guy (chorea sancti viti), danse de Saint-Weit, des Allemands , appelée aussi danse sainte, fut observée pour la première fois à Eshter-nach , petite ville dépendant alors du duché de Luxembourg; elle prit son plus grand développement en 1734, et se répandit dans plusieurs cantons le long du Rhin et de la Moselle. Elle envahit aussi une partie de la France et de l’Angleterre.

(1) Bertrand. Traité du Somnambulisme, p. 384.

(2) Natural, des Convuls., p. 58.

« Cette maladie, dit le savant Cullen (i), était épidémique dans certains cantons , particulièrement dans les endroits où un grand nombre de personnes se trouvaient réunies, et étaient témoins des mouvements convulsifs de ceux qui allaient invoquer l’intercession de quelque saint, pour la guérison de cette maladie; comme on l’a vu à Ulm (dans la Souabe), dans le temps de la fête de Saint-Weit, et dans les montagnes des Cévenncs, à la fête de la Vierge. Des personnes de différents âges pouvaient en être attaquées, mais généralement c’étaient des jeunes gens des deux sexes. »

Les personnes atteintes de cette maladie entraient dans de violents tremblements convulsifs, et dansaient deux h deux comme des fous, jusqu’à ce que la fatigue les fît tomber par terre. Alors on leur marchait sur le corps, et les prêtres les exorcisaient comme des possédés; ces moyens réussissaient ordinairement à les guérir. Cette épidémie se renouvela en 1802 avec une grande intensité. Muller, juge de paix d’Eshternach , compta dans cette ville jusqu’à 2,974 danseurs réunis.

Les derviches hurleurs présentèrent, à Constantinople, des phénomènes à peu près identiques. Ces religieux, épuisés par les veilles et les privations , se livraient à des danses frénétiques jusqu’à ce qu’ils tombassent à terre comme inanimés. Peu d’instants après ils sortaient de cette léthargie, se relevaient avec violence, poussaient d’affreux hurlements, et brandissaient en l’air des barres de fer rougies au feu. Ensuite ils se déchiraient le corps avec des ins-

(1) Eléments de Médecine, t. Il, p. 565.

trumonts tranchants, et voyaient avec la plus grande impassibilité couler leur sang abondamment.

Cette relation bien incomplète des maladies et des cures qui appartiennent au vaste domaine des puissances de l'imagination, ne nous a pas permis d’approfondir suffisamment certains phénomènes, qui, mieux étudiés, feraient sans doute jaillir pour nous de nouvelles lumières. Noire enthousiasme pour la vérité nous a entraîné malgré nous entre deux écueils que nous aurions désiré pouvoir éviter. D’un côié, nous portons atteinte aux convictions d’hommes honorables et instruits, qui, dans leur admiration pour les effets merveilleux du magnétisme, ont cru pouvoir rattacher à leur système tous les prodiges qui appartiennent, suivant nous, à l’influence de l’imagination. De l’autre côté, nous nous disposons à combattre les partisans exclusifs de la puissance morale qui doit, d’après ceux-ci, suffire à l’explication de tous les phénomènes du magnétisme et du somnambulisme. Puissent nos convictions, basées sur une longue observation, nous faire pardonner les erreurs involontaires que nous avons pu commettre eu traitant un sujet aussi épineux.

D' Alfhf.d PERKIER.

(Le chapitre III prochainement.')

PETITE CORRESPONDANCE.

ERRATUM. — Dans le dernier numéro, p. 514, ligne 28; au lieu de ■ mémoire des génies, etc. ; lisez : mémoire, génies, etc.

Avis. — L’abondance des matières nous oblige à renvoyer au numéro prochain la suite du compte-rendu du Jury magnétique.

VARIETÉS.

Revue des Journaux. — 1/Indépendant du 6 août contient, à propos des séances amusantes qui ont lieu à Saint-Omer, quelques lignes impartiales sur le somnambulisme.

En somme, si ces exhibitions déconsidèrent le magnétisme, ce qui n’est pas douteux, elles paraissent aussi servir à sa propagation, en appelant sur lui l’attenlion de quelques esprits sérieux qui savent bien séparer l’ivraie du bon grain.

— Le Journal du Ildvre, du .27 août, annonce l’arrivée en celte ville d’un magnétiseur ambulant et de deux somnambules.

— Sous le titre de la Somnambule et le Laitier, le Constitutionnel du ier septembre rapporte que , un lyonnais ayant été volé, consulta une somnambule qui lui désigna son laitier comme l’auteur du larcin. Celui-ci, appelé voleur, assigna le lyonnais en dommages-intérêts, pour atteinte portée à sa réputation ; mais il a été débouté.

Le tribunal paraît reconnaître, par ce jugement, que les révélations somnambuliques établissent une forte prévention contre quelqu’un.

Le Gérant : 1IÉBEKT (de Garnay).

Paris. — Imprimerie de Pommeret et Moreau, quai des Auguilini, 17.

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

d’encocragement et de récompensé

Première séance annuelle.

Jlary magnétique

(Suile.)

Après l’allocution du Président, M. le Secrétaire général a prononcé le discours suivant :

Messieurs,

Ce n’est rien que d’avoir fondé notre institution, si nous ne lui donnons la vie, qui doil en perpétuer la durée. Il faut donc que toutes les sympathies , tous les dévouements entourent le nouvel être; que l’amour, enfin, le soutienne. Sans ce concours , le sentiment du beau, du bon, qui porte l'homme à honorer les actions éclatantes et les œuvres utiles, ne pourra s’exercer dans sa plénitude.

Le but du Jury magnétique, vous le savez, messieurs, puisque vous en êtes les fondateurs, est d’encourager tout ce qui sort de la ligne commune , comme actes de vertus et de talents.

C’était juste, messieurs, car à côté du génie qui découvrej du savoir qui perfectionne, il y a TOMR VIII. — N“ 103. — 10 BRB 1849. 19

le zèle qui propage ; vous avez voulu qu’il fût aussi soutenu. Comment, 011 effet, ne point distinguer cette abnégation constante, ce sacrifice de soi-même , qui portent certains hommes à donner leur vie pour prolonger celle de leurs semblables ?

l.e magnétisme a cela de particulier, qu’il exige, de la part de celui qui s’y livre, un dévouement sans bornes. Il faut qu’il distraie de sa propre organisation, non pas seulement le surplus des forces vitales, mais celles qui sont parfois bien nécessaires, en allant jusqu’à la source de la vie puiser ces rayons de feu qui constituent notre essence. Celui qui dispense ainsi le principe de la conservation des êtres ne ressemble point à l’homme, pourtant généreux, charitable, qui distribue son trésor. Le magnétiseur fait plus, il ajoute à la vie par sa vie; et cette défaillance de la nature qu’on remarque chez la plupart des êtres, reçoit un complément de puissance que l’or ne peut fournir.

Le Jury, n’oubliant aucun des services rendus, a pensé que l’habile écrivain dont la plume traduit le génie des faits et établit les préceptes de la science, méritait aussi une mention.

Un autre article de ce code nouveau porte que la multiplicité des œuvres pratiques doit être également encouragée; car la faculté de découvrir est un don très-rare. Tous ne peuvent pas pénétrer les mystères de la nature; c’est déjà beaucoup de pouvoir féconder les découvertes d’autrui.

Imitant les gouvernements, qui récompensent par des marques d’honneur les hommes qui furent assez heureux pour arracher à la mort quelques-uns de leurs frères, nous allons chercher ceux

d’entre nous qui, dans le silence, guérissent les êtres que la fausse science laissait mourir. Attendant cette heure, qui viendra pour nous-mêmes, où la main d’un ami nous rendra ce que nous aurons fait aux autres.

Messieurs, toutes les œuvres dont nous parlons, méconnues par le pouvoir, n’ayant souvent pour témoin que le grabat du malheureux, doivent sortir de l’obscurité; et le Jury, en leur donnant la publicité dont il dispose, doit les porter à la connaissance de tous.

Dans ces temps malheureux de dissensions civiles, où la pensée est dominée par les dangers de l’avenir, nous n’avons pu donner à cette première solennité toute la splendeur qu’elle comportait. C’est un beau et vaste travail qui eût dû vous être présenté, où chaque fait, chaque œuvre eût brillé comme les diamants d’un écrin. Que ceux dont le Comité a apprécié les travaux ne nous jugent peint sur l’esquisse que nous en donnons. Nous avions hâte de leur dire :

Vos collègues savent ce que vous faites; ils connaissent le dévouement que vous avez montré. Nobles soutiens d’une cause sacrée, vous recevrez de vos contemporains un témoignage d’admiration, une preuve évidente de la part qu’ils prennent á vos succès. Votre zèle a trouvé des imitateurs, et, de toutes parts, le bien que vos mains ont répandu se reproduit en moissons abondantes. Continuez, et de nouveaux émules naîtront à la vue de la distinction que le Jury vous accorde.

Le Comité aurait voulu, messieurs, placer sous vos yeux une longue liste de propositions ; mais,

M/*

pressé parle temps, voulant ne pas différer davantage cette solennité , il s’est borné aux personnes dont les services datent do loin , aux réputations acquises, aux dévouements éprouvés. Il a réservé pour la seconde promotion l’examen des travaux qui ont motivé des demandes en faveur de

Messieurs

ELLIOTSON ¡ CLAPIER ; CHARPIGNON ; DUGNANI; JUFFEY; CÉSARD ;

LIENAR;

MIALLE;

ORDINAIRE;

PERRIER;

VALLETTE ;

GRAVÉ.

Vous n’avez donc à vous prononcer aujourd’hui que sur des magnétiseurs dont les titres ne pouvaient être discutés à cause de leur notoriété.

Voici par quelles considérations les choix ont été inspirés : le Comité s’est décidé à l’unanimité sur toutes les propositions que j’ai l’honneur de vous soumettre , ci-après, en son nom.

I. — M. LAFORGUE

Simple et plus que modeste, vivant comme un anachorète, soutenu par cette sublime pensée que lebien qui jaillit de nos mains fait tomberuncdouce rosée donnant la paix du cœur, et qu’il initie par avance l’homme béni aux jouissances réservées à l’homme juste; M. Laforgue, l’homme antique, ressemble à ces solitaires d’un autre âge, qui, pleins de foi, imposaient les mains sur les malades, en leur disant : Au nom de Dieu, soyez guéris. Que lui importent les vanités de ce monde? Heureux

du bien qu’il fait, méditant par la prière, la croyant utile, nécessaire, il reporte à Dieu les guérisons qu’il opère ; el s’il demande la conservation de ses jours, c’est uniquement parce que les malheureux se succèdent, et qu’il est leur refuge.

Nous n’avons point à juger ici si la méthode de M. Laforgue rentre dans la voie scientifique ou si elle s’en écarte : ce sont ses résultats que nous devons apprécier.

Eh bien! il est à la connaissance de tous, que, par une pratique constante, depuis presque l’origine du mesmérisme, M. Laforgue a rendu d’immenses services : une multitude d’infirmes lui doivent le retour à la santé. Énumérer tous les bienfaits dont il est l’auteur serait impossible. Ici ce sont des aveugles qui revoient la lumière; là des paralytiques abandonnant leurs béquilles; des maladies plus cruelles, ces tumeurs dégoûtantes que les scrofules ont enfantées disparaissent sous sa main bienfaisante; les fièvres, si communes sous le ciel qu'il habite, semblent fuir à son approche ou céder à sa prière. Sa cellule est remplie des témoignages de ses œuvres presque divines : touchants trophées, qui épanouissent lame de ceux qui les contemplent !

On a comparé la demeure de ce saint homme à la piscine de Jérusalem : c’est tout dire ; et les magnétiseurs vous rendront cette justice, qu’en plaçant M. Laforgue le premier sur la liste des préférés , vous n’avez fait que vous conformer à un vœu depuis longtemps exprimé.

Puisse la dislinction que nous sollicitons aller droit au cœur de cet homme vénérable, pour lui

dire : Vos frères pensent à vous ; ils conservent la mémoire de tant de dévouement ; ils ont voulu honorer vos vieux jours, et signaler cc désintéressement inaltérable qui vous place, comme les apôtres, déjà au-dessus de l'humanité.

11 est des œuvres au-dessus des récompenses que le Jury peut offrir, et de ce nombre sont celles de M. Laforgue. Le Comité a pensé que la médaille d’or devrait être offerte à ce généreux propagateur du magnétisme; mais nos ressources ne répondent point encore à nos besoins. Persuadés, d’ailleurs, que la nature du métal ne lui ferait pas attacher plus de prix à votre témoignage, nous vous prions de vouloir bien lui décerner une médaille d’argent, la première frappée.

II. —M. ESDAILE.

Mesmer avait dit : Ma découverte est une vérité ; elle régnera sur le monde. Déjà ces paroles sont justifiées ; le magnétisme ne rencontre plus de barrières : il a partout des représentants éclairés et sincères. Parmi ceux-ci nous distinguons surtout. M. le Dr James Esdaile, dont vous avez tous admiré les heureuses tentatives et les nombreux succès. Calcutta est son théâtre; c’est là où, dans un hôpital, sa main habile a, sur des centaines de malheureux, enfoncé le scalpel sans arracher un cri de douleur, sans faire verser une larme de désespoir.

Quel est l’agent de ces surprenants effets? Est-ce le chloroforme tant vanté, qui fait partout des victimes ? Non, c’est le magnétisme habilement

dirigé; c’est cet agent naturel dédaigné par les écoles, et qui doit pourlant un jour changer la face des sciences.

Nous n’avons point h vous signaler d’erreurs, à vous rendre compte de suites fâcheuses. Dans les moins graves comme dans les plus terribles de ces opérations, rien que le succès! 11 paraît qu’en donnant l’insensibilité, le magnétisme pénètre les chairs d’un baume sans pareil. Suites toujours heureuses: jamais de résorbtion purulente, point de fièvres traumatiques, cicatrisation plus prompte, pansement sans douleur!!! 11 semble que comme ces contes dictés par l’imagination, ici tout soit un rêve.

M. Esdaile a un double mérite : médecin éclairé et physiologiste profond, il a su faire ressortir des faits de sa pratique d’ingénieux aperçus dont les magnétiseurs tireront un grand parti.

Ce n’est donc pas seulement comme opérateur qu’il nous convient d’apprécier son mérite.

On savait bien, depuis longtemps déjà, que des personnes susceptibles d’un effet : de somnambulisme, par exemple, au bout d’un certain nombre de jours pouvaient être endormies enj moins de temps, si, au lieu de les magnétiser une fois par jour, comme c’était la coutume, on leur faisait subir plusieurs magnétisations dans la même journée.

De plusieurs magnétisations par une seule personne , à une magnétisation unique par plusieurs personnes, il y a un rapport évident, une inversion palpable, mais personne ne l’appliqua, si même quelqu’un y pensa. Il paraîtrait que les choses les plus simples sont les plus lentes à découvrir, sans

doute parce qu’on les néglige comme détails sans importance.

Nous ne savons si c'est guidé par le raisonnement qui précède, 011 conduit par une donnée expérimentale, que M. Esdaile a réformé le mode de magnétisation habituel ; mais le fait est qu’il a le premier mis en pratique publique la magnétisation simultanée, à l’aide de laquelle il a obtenu l’insensibilité sur presque tous les sujets. L’eflicacité de ce procédé est telle, que, dans l’hôpital mesmérique, la production de l’insensibilité a été la règle, et son défaut l’exception.

M. Esdaile conclut de ses observations , « que si « on n’obtient pas tous les effets magnétiques sur « toutes les personnes, c’est qu’on ne magnétise « pas suffisamment. » D’après ce principe, un individu dont la constitution exige dix magnétisations d’une heure pour dormir, éprouvera cet effet par Une magnétisation d’égale durée par dix personnes agissant à la fois. L’expérience confirme sur ce point la théorie dans la majorité des cas.

De quelle utilité une pareille méthode ne peut-elle pas être dans les cas pressants : sur les champs de bataille, dans le tétanos, le choléra, etc., où le» remèdes ne sont efficaces qu’à la condition d’agir promptement !

Sous ce rapport, l’étendue du service rendu par M. Esdaile au magnétisme militant, ne peut encore être convenablement appréciée, mais on pressent qu’elle est immense.

Voilà donc le drapeau mesmérien planté sur un autre continent, non plus par des hommes obscurs, mais par un médecin distlngné, dont I3 science

fécondanI les travaux, appelle sur lui les regards du monde magnétique. A son gouvernement de le récompenser comme médecin, nous, nous l’admirons comme magnétiseur, laissant à la postérité le soin de placer son nom parmi ceux des contemporains qui rendirent des services à l’humanité.

Nous sollicitons pour M. Lsdaile une médaille d’argent. Nous espérons que ce trop court rapport, quoique ne disant pas tout ce que mérite ce savant, aura à vos yeux suffisamment justifié la récompense que nous demandons. Car si nous pouvions donner cette année une médaille d’or, M. Esdaile aurait tous les droits pour l’obtenir ; nous vous eussions d’ailleurs proposé de la lui voter, certains que nous étions d’avance de vos généreux desseins.

III. —MM. DURAND et LOYSEL.

Faire que l’art du chirurgien s’exerce sans ajouter au mal qu’il doit détruire, la douleur des opérations , est un problème qui a préoccupé toutes les générations médicales. Depuis Hippocrate, qui indique dans ce but plusieurs anodins, on a proposé une foule de moyens ; mais l’insensibilisation par ces divers agents, presque tous narcotiques, offrait des dangers plus grands que les avantages.

Fatiguée de tant d’essais infructueux, la chirurgie avait renoncé au bénéfice de l’anesthésie, lorsque l’insensibilité magnétique parut. Née à l’Hôtel-Dieu de Paris, durant les mémorables expériences de M. du Potet, sa venue parut providentielle. Georget fit voir par quels caractères elle différait de ses aînées, et les princes de l’art, comme les

mages d’autrefois, vinrent l’adorer dans l’asile même de la souffrance, dont elle était le signe rédempteur. Préludant à son destin par des faits en rapport avec son âge, elle grandit bientôt, et Jules Gloquet, reconnaissant la supériorité de sa nature, lui donna le baptême. Depuis elle a confondu le monde.

L’application du magnétisme à la médecine laissait en dehors de ses bienfaits une nombreuse série de gens infirmes abandonnés aux tortures du scalpel. Il fallait empêcher que le fer libérateur fût accompagné de douleurs qui fissent redouter son secours. M. Durand, appelant l’insensibilité magnétique à son aide, a pu surmonter cet obstacle. Secondé par un chirurgien habile, M. Loysel, ils ont résolu publiquement le problème ébauché dans l’ombre par leurs prédécesseurs.

Leur prodigieux essai a été couronné plusieurs fois par le plus grand succès.

Gloire à vous, messieurs, le magnétisme vous doit une récompense, et l’humanité un tribut d’éloges !

Le Comité appréciant, comme ils le méritent, ces faits nouveaux dans l’histoire de la chirurgie, demande que le Jury consacre par une médaille le souvenir de cette heureuse tentative.

L’utile découverte qui y a donné lieu ne fait-elle pas révolution dans les sciences? Ne donne-t-elle pas la mesure de la volonté humaine, qui semble dire à la douleur comme Dieu disait aux îlots : Tu viendras jusqu’ici ; tu n’iras pas plus loin.

Ce n’est pas à MAI. Durand et Loysel qu’appar-tient la priorité de l’application de l’agent ma-

gnétique en semblable occurence. Déjà on avait tenté et réussi pour des maux de moindre importance. Mais il y avait loin de là à cet anéantissement calculé de la sensibilité, à ces douleurs vaincues d’avance, à ces chairs vives, qui, comme la main de l’innocent soumise à l’épreuve du feu, semblent dire à l’instrument : Coupe, retranche; je te défie.

MM. Durand et Loysel ont rendu à la science magnétique un service immense : d’abord par un premier bienfait, l’ouverture d’une route nouvelle où les magnétistes se sont engagés depuis; en second lieu en montrant l’invincible force magnétique laissant de côté ces agents tant vantés, qui sur leur chemin amoncèlent des victimes innocentes. Le magnétisme peut être maintenant appliqué sans crainte; car ces messieurs ont prouvé que nul remords n’attend l’opérateur.

Nous n’avons besoin que de rappeler ici ces belles opérations dont la relation est ailleurs publiée. Leur brillant succès n’a pu être contesté que par des fanatiques d’incrédulité, gens intéressés à soutenir l’erreur, et qui toujours prêts à ternir ce qui est beau et vrai, ne craignent pas de jetef l’injure et de semer le doute, là où la vérité est évidente à tous les yeux. Par contre, tout ce que Cherbourg renferme de plus honorable en personnes capables de bien observer , a, par un témoignage authentique, rendu pleine justice aux hardis novateurs.

Nous n’avons point à nous préoccuper ici des préjugés, ni à tenir compte de la routine; appréciateurs de travaux qui ont pour base le principe mesmérien, notre jugement emporte avec lui la

constatation dos faits, et nul des initiés à la pratique magnétique ne le contestera. C’est pourquoi nous vous prions de vouloir bien placer MM. Durand et Loysel sur la liste des personnes que vous avez àhonorer. Ils se sont élevés en élevant le magnétisme, el ont un plein droit à vos hommages.

Le Comité vous propose de leur décerner à chacun une médaille de bronze.

IY. - M. DE ROVÈRE.

Parmi les hommes que vous vous êtes promis de récompenser, vous avez rangé ceux qui, par un dévouement sans bornes ont multiplié leurs soins , en méprisant leur santé, pour satisfaire d’abord au vœu de leur cœur, et justifier ensuite l’efficacité de l’agent mesmérien.

Au nombre de ces êtres dévoués, il en est un que nous avons surtout remarqué , parce qu’il nous était à la fois signalé par la reconnaissance d’une population nombreuse , et les tracasseries de médecins jaloux appelant sur lui la rigueur des lois protectrices de leur ignorance : c’est M. Jules de Rovère , habitant Troyes , et y exerçant le magnétisme.

Son zèle infatigable n’est point nouveau; son enthousiasme se soutient à la vue de ses œuvres. Que lui importent les contrariétés suscitées par l’ignorance, et soutenues par l’envie! Nous le voyons tour à tour en butte à des dénonciations malveillantes , et paraissant devant la justice, où il accable ses adversaires, qui, condamnés déjà par les faits, le sont enfin par les juges eux-mêmes.

Ses bras infatigables distribuent partout le bienfaisant agent magnétique , dont il justifie les vertus en guérissant les proches de scs ennemis. 11 ne faudrait pas croire que M. de llovère recherche le riche; que lui importe l’argent? Vivre de peu est sa loi. Le pauvre eut toujours ses préférences, et jamais il ne réclama de lui en vain les soins qui exigent un si grand labeur.

Un livre pourrait se faire des récits de ses traitements : vous en trouverez quelques-uns à la fin de ce rapport. Les victimes qu’il arracha aux souffrances, à la mort même, sont des titres qui méritent pour lui une des préférences que le Jury destine à la persevérance, au dévouement.

M. de Rovère a fondé une école, un athénée, où, chaque jour , cherchant à se créer des imitateurs, il enseigne une douce et consolante philosophie, basée sur la fraternelle assistance des êtres. Il joint la pratique au discours; et, dans ce siècle mort aux convictions , la sienne ressuscite les temps antiques , en faisant revivre cette charité vive qui distinguait les premiers chrétiens.

Vous ne laisserez pas, messieurs, tant de ferveur sans appui; vous voudrez que cet homme énergique aperçoive de loin des aides, des admirateurs et des frères, et qu’une bouche amie , résumant vos sentiments, lui crie : Vous avez bien mérité. Vous avez compris l’essence même du magnétisme, qui, par un irrésistible attrait, porte l’homme aimant à s’approcher de l’être souffrant, et d’en ranimer de son souille les membres refroidis.

Nous sollicitons donc pour M. de Rovère, une médaille de bronze, qu’il gardera comme son plus

beau titre; car elle lui sera décernée bien moins par des juges que par des amis de la science dont il concourt si puissamment à agrandir le domaine.

V. — M. BARTHET.

Comme une religion, le mesmérisme a ses missionnaires actifs, ses zélés propagateurs , dont rien n’arrête l’ardeur prosélytique, et qui semblent être choisis par Dieu pour faire connaître aux hommes les vérités utiles.

M. Joseph Barthet, de laNouvelle-Orléans, dont les travaux ne sont ignorés d’aucun de vous, a implanté notre science dans le Nouveau-Monde. Zélateur puissant de notre cause, il rechercha les hommes d’élite, dont il vainquit les résistances en les initiant à l’art de produire les faits qu’ils contestaient. Puis, les reliant entre eux, et se les associant, il a su opposer à l’incrédulité une digue inattaquable, et former une phalange qui harcèle de tous points le scepticisme américain.

Le magnétisme a donc, dans ces pays lointains , d’actifs et laborieux partisans, qui attendent de nous bien moins une récompense de leurs efforts qu’une marque visible de notre sympathie. Leur zèle n’a pas besoin de stimulant, ni leur conduite d’approbation; ils ont fait plus qu’on ne pouvait espérer en aussi peu de temps. Mais tout ce qui viendra de vous leur sera cher, parce qu’il a cela de particulier qu’on le regarder^ comme une faveur dispensée toujours avec un sentiment de loyale justice.

Vos encouragements d'ailleurs susciteront de

nouveaux adeptes, en même temps qu’ils inciteront les anciens à mieux faire. Le bronze n’est qu’un métal presque sans valeur, mais lorsqu’il revêt l’effigie de Mesmer, lorsque vous y faites graver un nom, qui donc ne chercherait à mériter l’honneur d’une pareille distinction? Elle est sans prix, puisqu elle signifie : Vcrtu, force , persévérance.

M. Barthet a mérité la médaille de bronze; ses titres vous sont en partie connus, les pièces déposées aux archives compléteront votre information. En lui accordant cette distinction, vous obéirez, comme nous en la sollicitant, à un sentiment de reconnaissance; car vous voulez honorer le mérite, non la stérilité et l’impuissance.

Arrivé au terme de cette énumération de noms honorables et de louables actions , permettez-moi, messieurs, de vous remercier de l’insigne honneur que vous m’avez l'ait en me choisissant pour être l’organe de vos pensées. Je m’estime heureux d’avoir à interpréter des sentiments aussi nobles et des vues aussi élevées que ceux dont vous êtes animés.

Rien ne plait tant aux hommes que la vertu ; on aime à lui rendre hommage. Elle est au fond de la conscience de chacun, et, si tous ne la pratiquent point, cela vient sans doute de ce que nul encouragement ne lui est donné. Ce serait, nous le répétons, les gouvernements, qui ont tous les moyens , et d’où doit découler la source des distinctions , qui devraient être les dispensateurs des faveurs que nous accordons. Mais comme rien

n’annonce que justice nous soit bientôt rendue par les mains du pouvoir, il y aurait chez nous incurie et presque lâcheté à ne point devancer les temps et à laisser dans l’oubli ceux qui d’entre nous se sont distingués.

Je me plais , en terminant, à rendre hommage aux membres du Comité, auteurs des rapports qui viennent de vous être présentés. Nous n'attendions pas moins de leur vigilance et de leurs soins éclairés.

Lieut.-Colonel Ch" MAC SHEEHY.

L’assemblée passant à la délibération des propositions ci-dessus énoncées, se prononce à l’unanimité sur chacune d’elles.

Elle ordonne en outre que :

i° Pour plus de solennité, la distribution des médailles aujourd’hui décernées, n’aura lieu que le 30 mai prochain, à la fête de Mesmer, avec celles qui serout décernées eu avril i85o.

2° Le compte rendu de la séance sera imprimé en nombre suffisant pour être envoyé à tous les membres du Jury , et autres magnétistes connus.

(Les Pièces à [appui au numéro prochain.)

VARIÉTÉS.

Conversion médicale. — L’anathême académique a perdu peu à peu sa puissance; nous ne sommes plus au temps où la censure de leurs confrères empêchait les médecins consciencieux de se livrer à la pratique du mesmérisme. Aujourd’hui, convaincus de l’existence de l'agent, les plus timides en tolèrent ou conseillent l'application ; d’autres, plus hardis, bravent le préjugé en magnétisant eux mêmes.

M. le Dr Savoyt, rompant avec les traditions de l’école, vient de prendre la courageuse résolution de faire connaître à tous sa conversion au magnétisme. Nous extrayons de la circulaire qu’il a publiée à Get effet, (es passages suivants :

Paris , 12 septembre 1849.

M.......

« Hier comme aujourd’hui, la guérison des maladies internes est toujours conjecturale ; ici, c’est le diagnostic qui échappe au meilleur praticien; là, le pronostic est tout-à-fait aventureux. Le médecin ami de l’humanité a donc dû chercher le moyen le plus utije aux innombrables infirmités qui affectent

l’espèce humaine ; je ne l’ai trouvé, ce moyen, ni dans la science médicale, ni dans l’expérience, mais dans le magnétisme seulement, dépouillé de toutes les jongleries dont on cherche à l’environner, et pratiqué par un homme consciencieux.

« Il y a vingt-quatre ans, j’étudiais le magnétisme animal avec goût, et j’ose dire avec succès. Rentré au sein de ma famille, où j’ai exercé pendant dix-sept ans la médecine , personne mieux que moi ne sait combien il es.t facile d’errer ou de se tromper dans l’art de guérir. Pour obvier à cet inconvénient si grave, j’ai fait des efforts sérieux sur l’action magnétique, et mes efforts sont aujourd’hui couronnés de succès. Aussi je n’hésite pas à marcher fièrement sur la trace des Mesmer, Puy-ségur et du Potel; comme eux j’emploie avec bonheur le fluide magnétique dans les maladies les plus graves, et dans celles qui, de tout temps, ont fait le désespoir des sommités médicales, etc. , etc.

« Le magnétisme, comme toutes les découvertes savantes (Mesmer l’a su et Galilée aussi), a eu des détracteurs et des persécuteurs; aussi me ferai-je un devoir de démontrer à ceux qui ne croient pas, que le magnétisme est réel et vrai, et que son action est le meilleur moyen thérapeuthique que possède la science médicale. »

Lucidité. — M. Yates, inspecteur de police attaché au tribunal de Southwark, a reçu une lettre fort curieuse qui se rattache au procès de Manning et de sa femme. Cette lettre est datée de Boston, dans le comté de Lancastre, où demeure une somnambule qui a fait connaître, il y a peu de jours,

le lieu où étaient cachés les billets de banque volés dans la maison de commerce Arrowsmith et compagnie. Voici cette missive :

Boston, 11 septembre 1849.

Monsieur, c’est dans une cave, au-dessous de la partie de la maison où l’on a découvert le cadavre d’O'Connor, qu’a été enfoui le pistolet avec lequel il a été assassiné. Si le renseignement est exact, publiez-le immédiatement, et je vous enverrai des informations plus détaillées sur cette affaire, avec le secours d’une clairvoyante, ou somnambule très-lucide.

Votre très-obéissant serviteur,

w.....

P. S. La clairvoyante assure qu’il y a dans cette maison trois berceaux de cave, les uns au-dessus des autres; elle ne peut pas voir l’extrémité de la cave où l’on a enterré le pistolet. Cherchez, et vous trouverez.

D’après cette indication, des perquisitions ont été faites à telle fin que de raison. Il y a, en effet, dans la maison qu’ont occupée les époux Manning, trois caves superposées, et l’on a découvert sur les murs des gouttes de sang qui étaient échappées jusqu’ici à toutes les investigations. Quant au pistolet, on n’a pu en trouver aucun vestige.

(Presse.)

Sorcellerie. — L’histoire des Muets de Belle-combe nous a rappelé un fait analogue. Nous en empruntons le récit au Messager du 25 février i836.

« Depuis un temps immémorial, les habitants

du comté de Lancastrc, en Angleterre, sont persuadés qu’il existe dans leur paysdes sorcières dont le pouvoir s’étend sur tout le territoire de la Grande-Bretagne, et qui jettent sur leurs victimes un sortilège que l’on appelle, par cette raison, Lancastershire-JVilhcraft.

« Ces sorcières frappent du maléfice le plus déplorable les nouveaux mariés qui avaient auparavant promis mariage à une autre belle. Le charme dure jusqu’à ce que l’amante délaissée ait pardonné, ou jusqu’à ce qu’une autre sorcière, plus puissante, ait détruit le maléfice, ce qui ne coûte qu’un peu d’argent.

« Un jeune villageois de Bowlee, près de Middleton, est persuadé que l’on a usé contre lui de l’influence d’une des sorcières de son pays.

« Après avoir fait longtemps la cour à une jolie paysanne, il l’a abandonnée pour épouser la fille d’un riche fermier. La première maîtresse a dit, le jour des noces, à ses compagnes : « Ils vont rire « et boire toute la journée; mais, ce soir, mon iufi-« dèle trouvera du mécompte : j’ai trouvé une brave « sorcière qui me vengera ».

« Ce qui est certain, c’est que, dès la première nuit de son mariage, le jeune villageois est tombé dans une affliction profonde, et presque dans l’abrutissement.

« II passe des journées entières assis à la même place, sans proférer une parole; 11 ne se plaint d’aucune douleur, et parait jouit de la santé la plus parfaite ; son moral seul a été affecté par de ridicules superstitions ».

Nécrologie. — Il s’est éleint à Soissons, le 27 septembre 1849, un (^es P^us sûrs flambeaux du somnambulisme, Catherine Frotin, épouse De-lahay, âgée de soixante-neuf ans.

Cette femme dont la simplicité de cœur n'était égalée ou surpassée peut-être que parla bonté, dût à la beauté de son âme, aux soins de Puysé-gur et aux conseils de M. Mauprivez, l’excellence de la lucidité que lui accorda le Divin auteur de la lumière.

A la suite d’un laborieux accouchement, dans lequel elle faillit perdre la vie en la donnant à une fille chérie, elle reçut les visites du généreux résurrecteur du somnambulisme, qui développa en elle le précieux don de la clairvoyance auquel elle fut redevable de sa guérison.

Par reconnaissance, Catherine Delahay voulut se dévouer au soulagement et au salut des autres.

Elucidée et instruite par Puységur, elle se trouva ensuite guidée dans sa carrière parles conseils d’un éminent magistrat consulaire dont le premier titre fut d’être homme de bien, de savoir et de charité.

Douée de ces vertus , et formée par de tels hommes , M“' Delahay devait acquérir les plus vives et les plus pures lumières du somnambulisme. Elle les obtint en effet, et s’est acquitté saintement de sa mission.

Aussi quelle simplicité dans l'examen, quelle lucidité dans le conseil, quelle bonté dans l’être! Ces qualités ont été portées si haut, que c’est un devoir pour les amis du magnétisme qui ont connu cette femme, et qui ont pu la comparer à tant

d’autres lucidités menteuses, de rendre à sa mémoire ce juste et public hommage.

Modèle de clairvoyance et de droiture, nous l’avons entendue , un jour où elle pouvait faire une brillante consultation , dire au malade, qui l’avait oublié : « 11 y a deux ans, vous vous êtes adressé à un autre somnambule, qui vous a prescrit tel remède ; il n’y a qu’à le reprendre et à le continuer, et vous serez guéri. » Ce qui fut.

Cette femme eût pu facilement gagner de l’éclat et de la fortune sur un grand théâtre; ses affections de famille et ses goûts simples l’en détournèrent, quoique son penchant à la bienfaisance la portât à aider sans mesure et les siens, et les autres.

Dieu la récompensa, car sa réputation vint à dépasser de beaueoup sa modestie, et l’on arrivait du plus loin pour consulter madame Delahay, la Somnambule de Soissons , comme on l’appelait plus généralement.

Elle laisse un patrimoine appauvri par ses libéralités, et une héritière de ses qualités et de sa clairvoyance.

Chronique. —M. le D' Ducros, dont il est parlé dans nos derniers numéros, vient d’être emporté par un accès foudroyant de choléra.

— Notre ami M. Lassagne a remarqué au Musée du Louvre, un tableau de Mola, représentant une scène qu’on peut croire magnétique, tant l’attitude des personnages est semblable à celle que comporte une magnétisation réfléchie. Il est situé vers le milieu de la grande galerie, à droite, et figure dans le livret, sous le n° 337.

— line Société magnétique est sur le point d'être établie ¡1 Turin. La demande d’autorisation a été envoyée au ministre, les statuts seraient ceux de la Société du Mesmérisme de Paris, modifiés eu raison des circonstances locales.

— La Société Magnétologique de Paris vient de transporter le siège de ses séances, a3, rue Lamartine. La nouvelle salle d’expériences peut contenir au moins trois cents personnes, et elle est presque pleine, chaque séance , tant la curiosité publique est excitée par les récits des prodiges magnétiques. La propagande marche maintenant avec une activité surprenante ; le nombre des prosélytes qui se font chaque jour est plus considérable qu’en aucun temps. C’est cette prospérité qui a déterminé le changement de lieu dont nous parlons; le local que la Société occupait rue Saint-Honoré, 319 bis, ne pouvait plus contenir les nouveaux adeptes.

— M. le Dr Mathieu fait en ce moment un Cours, à l’Athénée national, sur l’histoire philosophique et morale de la femme , dans lequel il traitera du magnétisme, qu’il paraît devoir considérer comme un produit de l’imagination féminine. Quand le temps sera venu, nous résumerons les opinions émises par ce jeune médecin.

Revue des Journaux. — Le Journal des Débats et Y Assemblée nationale, du 18 septembre, annoncent qu’un procès est intenté à M. l’abbé Joly, de Rouen, pour faits de magnétisme.

— La Démocratie pacifique du 7 octobre, rapporte que « leManchester-Guardian publie une con-

stillation de somnambule relative au capitaine Franklin, dont on ignore le sort. Elle le voit vivant, engagé dans les glaces avec trois compagnons qui ont survécu. Les autres sont morts : elle voit leurs cadavres près de la baie de Hudson. »

— L'Assemblée nationale , du 8 , reproduit aussi le récit du Alanchester-Guardian.

— Le numéro d’octobre des Archives israélites contient la relation d’une scène de somnambulisme simulé, dans une petite ville du midi de la France.

PETITE CORRESPONDANCE.

Bibliographie. — L’ouvrage de M. Ollivier, de Toulouse, est terminé; MM. les souscripleurs peuvent faire retirer dans nos bureaux l’exempiaire auquel ils ont droit.

Enaelgneiiieut. — M. du Potet va recommencer, dans quelques jours , le Cours do magnétisme qu’il fait chaque année. (Voir les conditions à la deuxième page de la couverture du Journal.)

Le Géranl : HÉBERT (de Garnay).

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

Conférence» magnétique» dominicales.

Avant-Propos d'une nouvelle série d'articles sur la magie magnétique.

Le magnétisme et les effets de magie qui en résultent, établissent pour tous les hommes de sens l’existence d’une science nouvelle différant en tout de celle des écoles. En effet, on pourrait caractériser leur dissemblance en disant que les connaissances qui forment le faisceau de la science officielle représentent la nature morte; l’autre, au contraire , connue seulement encore d’un petit nombre, est la véritable science de la vie, et se sépare de l’autre science par des nuances si tranchées, qu’il est impossible de les confondre.

A vous, messieurs desAcadémies, tou t ce qui frappe grossièrement les sens et peut être soumis à des analyses , à des mesures de convention , et passer par le creuset; à vous tout ce qui peut être calculé, réglé ; à vous les cadavres, et nous pourrions dire toutes les apparences de la vie, les fausses idées nées dans vos esprits sur tout ce qui est supérieur aux forces tome vin. — M° 104. — 25 krb 1849. 20

mortes. A nous ces brûlants phénomènes résultats de l’agent que vous avez méconnu ; à nous l’étude des facultés de l'âme, et la possession des mystères anciens qui étonnèrent le monde.

Franchissant la limite tracée aux connaissances humaines, nous pénétrons aujourd’hui dans le domaine moral, el les fruits que nous en rapportons n’ont point parmi vous leurs pareils. Vous nous accusiez naguère d’illusions, tandis que vous donniez vos rêves comme des réalités : nous n’avons plus besoin que de souffler sur votre échafaudage pour qu’il soit renversé.

Nous pouvons donc, enfin, saisissant l’homme en lui-même, faire apparaître dans tout son jour la merveilleuse faculté dont la nature l’a doué ; montrer à tous sa divine essence, et révéler un nouveau monde. Vous ne comprendrez rien à notre langage; car nous parlons une langue qui vous est étrangère : pourtant c’est la langue des faits , et Dieu n’en eut pas d’autre.

Magie! magie! viens étonner et confondre tant d’esprits forts, gens pleins d’orgueil et de vanité, qui ont conservé les préjugés de leur enfance, et qui pensent être arrivés dans le vrai des choses, tandis qu’ils n’ont point dépassé la porte du sanctuaire où se trouve renfermée la vérité ! Ils semblent frappés de vertige, et sont pour nous comme ces aveugles-nés à qui on parle de la lumière du jour, des beautés de la nature qu’elle nous laisse apercevoir, de ces brillantes couleurs qui charment tant la vue ; ils ne peuvent comprendre, et restent froids à la description de ces beautés : pour nous le savant est semblable, lorsque nous

étalons sous ses yeux couverts de taies les merveilles de la science nouvelle.

Agir sur une âme par une âme ; faire mouvoir le corps d’autrui, l’agiter comme fait l’aquilon du faible roseau; pénétrer dans un cerveau humain et en faire jaillir les pensées cachées ; déterminer un tel mouvement dans les organes les plus profonds, que tout ce qui s’y est accumulé d’images apparaisse à la vue de l’esprit; rendre sensible ce travail, le montrer n’est plus qu’un jeu pour nous, et ce n’est aussi que le commencement des œuvres magiques. Nous savons mettre en fusion le métal humain et le pétrir à notre guise; nous savons en extraire l’or et les métaux les plus précieux, et, ici, nous employons ces figures, car nous manquons de mots pour peindre les choses morales. Notre agent, messieurs , vous ignorez même jusqu’à son existence, quoique sa nature soit toute divine, et c’est justement ce qui vous en fait dédaigner l’étude.

Plaignez-nous donc de croire aux merveilles et aux principes de leur reproduction ; nous vous pardonnons même le mépris que vous avez pour nous; car vous êtes bien malheureux, vous, savants, le monde vous honore, hélas ! il adore des idoles incapables de rien comprendre à la vie, incapables de répondre à une question sur ce qui la constitue. Jouissez, savants, recevez les tributs que vous paie le vulgaire. Un nouveau germe a été répandu sur la terre, il doit bientôt éclairer l’ignorance. Un Dieu ne sera plus nécessaire pour vous chasser du temple i nos enfants le feront un jour.

Mais, que suis-je moi-même, pour vous parler ainsi? Rien, ou presque rien; car j’ignore ce que

vous savez, en moi se. trouve seulement ce qui peut vous confondre. Mon intelligence de la vérité a seulement saisi un rayon , et cela ma suffit : je n’ai nul besoin d’autre chose. Je puis émouvoir les esprits, si, quittant ma simplicité, et me revêtant du manteau d'un grand homme, je me mets à parcourir les populations en les rendant témoins et admiratrices des œuvres que je sais produire. Un temps fut où ces choses se faisaient, et où les louanges ou le bûcher étaient acquis irrévocablement à l'homme aventureux qui s’était inspiré pour un instant de la nature, et qui en imitait les ouvrages ; mais pourquoi quitterais-je ce bienfait d’une innocente tranquillité? Je ne demande rien et n’envie rien aux hommes. En éclairer quelques-uns est ma seule envie ; jouir en paix en moi-même, et reportant à Dieu seul mes hommages pour ce qu’il lui a plu de me faire entrevoir; j’attendrai patiemment le jour où, quittant celte vie, j’en saurai davantage. De disputes, je n’en veux point; car elles tuent les forces sans profit pour les sciences. Réservant ma liberté, j’agirai selon ce qu’il me plaira, ou que me dictera cette voix secrète que j’ai toujours écoutée. Je produirai mes ouvrages devant tous, car je n’aime point les mystères; sans jamais faire de mal, je me servirai de la force inconnue, pour montrer l’étendue du pouvoir humain. Me croyant insensé, les savants laisseront faire le fou, disant : « Il se saisit de l’imagination; il agit sur les faibles. » Tandis que je prendrai les plus forts pour sujets de mes épreuves. « Ce n’est rien, diront-ils encore, car tout est prestiges, illusions , et affaires de compérages. » Mais laissons

do côté ces gens tant habiles et experts en toutes choses. Je prendrai des notoriétés de savoir et de probité. Je les soumettrai à mes opérations, si bien qu’un jour, la vérité étant connue et répandue, le fou sera réhabilité malgré lui ; car il ne demande point à être classé parmi les sages de ce temps.

Expérimentation.

Donnant suite à mes expérimentations, je viens aujourd’hui essayer de transcrire quelques résultats qui rentrent dans le cadre que je me suis tracé.

Commençons :

Je prends un homme plein de santé, dans la force de l’âge, et, lui mettant à la main une canne qui ne m’appartient point, je dis à cet homme éveillé : « Tu seras ivre dans un instant, et tu vas nous offrir l’image et le dérèglement naissant de l’ivresse. » Le sujet sourit, me regarde, et doute, non de la sincérité de mes paroles, mais de l’efficacité de mon pouvoir. A peine, cependant, une minute écoulée, il tressaille, son visage s’altère, ses yeux se voilent : il commence à chanceler; essayant de marcher, il trébuche, car ses jambes ne peuvent plus le porter; sa figure avinée prend un caractère sarcastique, et des discours sans suite, tantôt légers et badins, tantôt graves, prouvent aux plus incrédules que le moral, subissant l’action du charme qui opère, a obéi à la force qui voulut soumettre la chair à l’esprit. Bientôt, cependant, l’ivresse augmente, la fureur se montre, et, brandissant sa canne, l’être tout â l’heure inoffensif s’apprête comme s’il voulait combattre; la méta-

morphoseesl complète, nul n'oserait soutenir qu’il y ait simulation; car nul au monde ne serait assez habile pour tromper les yeux à ce point, pour imiter, même en s’en éloignant beaucoup, ce saisissant tableau.

Bientôt, l'enchantement cessant, l’ivresse disparaît, el la saine raison revient dans ce cerveau que..... le vin a troublé.

Un seul exemple serait suffisant pour établir ce nouveau pouvoir; mais, offrons-en quelques autres :

Que ce jeune homme blond, et qui paraît joyeux de la scène qu’il vient devoir, entre aussi dans l'ivresse; qu’il soit pour nous une antre image de cette dégradation de l’âme, de cette souillure que les anciens offraient à la jeunesse pour la guérir à jamais du penchant à l’ivresse, et de la débauche. Qu’importent les doutes de celui que nous voulons soumettre et rendre insensé! Bientôt, en effet, nous le voyons plongé dans le délire qu’occasionne le vin ; il pleure, il rit, il chante, se promène en vacillant, veut tirer son mouchoir de sa poche et ne peut y parvenir, il commence une chanson bachique, s’accule et cherche à ramasser son portefeuille qu’il a laissé tomber. A ses discours sans suite, à ses incomplets mouvements, on reconnaît la hideuse ivresse, il se relève et retombe. Qu’importe pour lui la société nombreuse qui le considère ! il en fait peu de cas : ce n’est plus, enfin , le jeune homme qui, tout-à-l’heure, avait de la contenance, du respect pour tous. N’esl-il pas ivre! et l’homme ainsi placé n’a nul souci d’autrui. Le vin n’altère pas davantage les traits, et ne peut

soumettre au feu caché qu’il recèle, d’une manière plus marquée et plus évidente, les organes et la pensée. La différence des deux caractères se montre dans tout son jour. Dans le premier exemple, le sujet est triste et morose; dans le second, il reste joyeux. Un hoquet de fâcheuse apparence m’avertit qu’il est temps de faire revenir la raison. C’est assez, c’est trop, peut-être, pour une assemblée qui n’est nullement préparée à ces phénomènes qui révèlent un pouvoir dont l’étendue est sans limites. En effet, comment fout peut-il s’annihiler dans un être, à ce point de rendre méconnaissable à tous les yeux ce qui tout à l’heure nous était semblable? Ah ! je sens que ma plume est insuffisante, el je chercherais en vain les expressions nécessaires à peindre et à décrire ! Scènes incomparables ! vous vous reproduirez pour confondre la raison du plus fort, et nous convier à l’étude. C’est une science dont je jette le fondement ; plût au ciel qu’elle ne tourne point contre l’humanité!

Mais essayons, dans un sujet viril, de faire naître la décrépitude. Que la vieillesse saisisse le vif et pétulant jeune homme, qu’elle se présente avec son caractère indélébile, afin que l’on ne puisee s’y méprendre. II faut que les années marquent de leur sceau celui que la nature a placé au quart du chemin de la vie ; que sans transition il devienne centenaire.

Le voici : à ma voix son échine se courbe. Ses membres flageolent, sa parole est faible, elle a perdu son timbre argenlin ; les traits se rident, l’œil perd sa vivacité. Il s’appuie sur la canne que je lui ai donnée. Ce n’est plus un jeune homme ro-

buste. Los années ont opéré leurs ravages. Il n’a plus rien de la fleur des ans, son langage est celui du vieillard guilleret. Sa bouche est béante. A son nez est suspendue une larme tenace. Il crachote une matière glaireuse. Il sourit malicieusement, prend sa prise et se promène à pas mesurés : c’est la nature vieillie, l’homme près du tombeau. Mais, que dis-je? Il se croit jeune; il jette un regard assassin sur de jeunes demoiselles, et ses yeuxsemblent dire: Je suis encore capable ! Vain et fanfaron vieillard, je puis te laisser ainsi dans ton innocente démence. Reviens, reviens vite à ton printemps; ce qui divertit l’assemblée m’attriste trop le cœur. Vivante image du déclin de la vie, tu donnes trop à penser, et les moments que je te ravis, jeune homme, me pèseraient comme un crime.

Artistes , qui croyez imiter la nature en empruntant â la couleur vos rides factices, en changeant votre voix, que vous êtes loin de la réalité ! Et nulle comparaison ne peut être établie entre votre jeuet ce changement soudain que la magie produit,

Qu’est-ce que ce phénomène nouveau? Ai-je donc en ma puissance une baguette de fée? Dois-je montrer à tous les yeux les tableaux imaginaires des poètes d’un autre âge? Puis-je réaliser les merveilleux sortilèges attribués à Circé et à tous les enchanteurs? Pourquoi pas! si je sais habilement me servir de la vie, l’employer à propos. La nature fait lentement les choses : l’art peut les réaliser subitement.

Ai-je vu seul ce quejedécris?Non, car plus de trois cents personnes pourraient en attester la réalité, et dire que je suis resté bien au-dessous de ce qui

a frappé leurs yeux ; niais c’est assez pour moi de dire : J’ai fait ceci devant tous ceux qui suivent mes démonstrations; qu’ils me démentent, j’accepte leur jugement ; car, si je dis vrai, j’annonce une révolution dans l’humanité. Si c’est un rêve, il est encore instructif, et je tiens à le consigner comme un témoignage de ce que peut produire de bizarre la nature sur un être éveillé.

Voyons si de cet enfant qui ignore l’art de feindre, nous pourrions changer les traits. Il a à peine douze ans , qu’il subisse l’action, et se métamorphose. Mis au milieu du salon, comme son aîné, il se courbe : c’est le nain de Stanislas ayant passé la trentaine. Il est vieux en un instant. 11 va succomber sous le poids du temps____ Faible enfant,

reviens à la vie, l’heure n’est point venue! mais tu as senti, pourtant, les atteintes d’un long âge. Fasse le ciel que tu y arrives exempt des vices qui détruisent la santé , et que tu cesses un jour de vivre à l’instant fixé seulement par la nature. Va, s’il en est ainsi, tu auras laissé sur ton chemin bien des malheureux victimes de la fausse science, bien des bourreaux d’eux-mêmes.

Il serait inhumain de prolonger cette factice vieillesse ; il serait odieux de faire cesser l’âge mûr. Ce que Dieu a fait est bien ; mais l’homme a la puissance d’altérer son ouvrage. N’a-t-il pas en lui quelque chose de créateur et de divin? N’a-t-il point le pouvoir de faire que cet églantier sauvage offre à la vue des fleurs parfumées? que ces arbres aux fruits acerbes et amers en produisent de délicieux au goût? Il fait disparaître des races en mariant le noir et le blanc. Que fera-t-il vin jour avec ce

magnétisme humain qui lui est révélé? N'est-il point le principe même de la création des êtres? Ma raison s’effraie, car je ne vois point de digues à opposer au torrent. L’homme qui s’élève dans les airs est bientôt saisi de vertiges; en serait-il de même en avançant dans les sciences? On pourrait le craindre et le redouter.

Lecteurs, je vais vous préparer à des récits de merveilles : vous aurez peine à croire ; il faut pourtant vous en pénétrer, car je n’exagère rien, et personne ne fut plus que moi sincère. Vous en jugerez bientôt.

DU POTET.

(L« suite prochainement.)

Jlury magnétique

d’encouragement et de récompense.

Première séance annuelle.

(Suite.)

En publiant ses Statuts (i ) le Jury a invité les amis du magnétisme à lui adresser tous les renseignements propres à éclairer son jugement. Voici quel-ques-uns des nombreux documents envoyés, et servant de pièces à l’appui aux propositions du Comité, pour les médailles décernées dans la première assemblée générale annuelle.

(\) Voyez Journal du Magnétisme, tome IV, p. 32J.

(¡UÉRISOfi MIRACULEUSE OPf.BÉE TAR LE MAUNÉTISHE.

Qui no connaît les articles spirituels d’IIofl'mann, ou quelques malins sarcasmes de Figaro sur le ma-gnélisme? Qui ne s’est même permis quelque, innocente plaisanterie sur les passes, les grands courants et tous les autres grands mots du vocabulaire des disciples de Mesmer? Qu’en est-il, cependant, de la puissance mystérieuse du magnétisme? En une matière aussi grave, l’homme frivole se contente de rire, celui que la nature a doué d’une foi vive et d’une âme ardente, se hâte de croire : le sage, doute. Nous nous rangerons modestement parmi les sages ; nous rapporterons, sans aucune espèce de commentaire, et dans toute sa naïveté, la lettre suivante, qui nous est adressée par un bon villageois. Les esprits forts nient le magnétisme, et, pour toute réponse, on va le voir, les disciples de Mesmer opèrent des miracles. Trouveront-ils encore des saint Thomas; c’est ce dont, pour notre compte, nous n’oserions répondre.

Monsieur le rédacteur,

Je viens d’être informé que des individns inconnus dans notre commune se donnaient la peine de chercher à découvrir celui qui avait guéri mon épouse d’une hydropisie générale; elle avait entièrement perdu le sommeil et l’appétit. Je vais satisfaire ces messieurs(1). Avant tout, je dois leur dire

(1) Celte guérison est inscrite sous nü 9 du tableau inséré tome V, page 129 de re Journal.

succinctement que ma femme était malade depuis les premiers jours d’octobre dernier. Fatiguée des remèdes qu’elle avait pris, et toujours sans succès, elle me pria un jour de régler avec son médecin et le pharmacien. Son mal empirait journellement; j’étais très inquiet, lorsque, le 4 décembre dernier, la nommée Marthe Lassalle, de la même commune, vint chez moi. Cette dernière fut épouvantée de voir que ma femme avait de la peine à respirer tant elle était enflée de la tète aux pieds; elle pressa et engagea ma femme et moi à faire prier M. le commandant Laforgue, de Pau, de se rendre auprès d’elle pour la magnétiser; qu'elle était assurée que la malade serait de suite soulagée, et dans peu de temps guérie, qu’elle-même elle avait été guérie d’une maladie qu’on disait incurable, n’ayant fait usage que du magnétisme et d’eau magnétisée. Ce M. Laforgue vous fera éprouver quelque difficulté pour venir chez vous, et n’aime pas à aller voir les malades dans leurs maisons. J’espère néanmoins que lorsque vous lui aurez dit quel est l’état de votre femme et votre triste position, je suis assurée qu’il se rendra de suite auprès de la malade; il a si bon cœur, qu’il est peu d’humains comme lui.

Après cet avis, je me rendis en toute hâte à Pau, et chez M. le commandant Laforgue, rue du Pont-Serviez. Je fus assez heureux de le trouver chez lui. Je m’empressai de lui dire le sujet de ma visite, et enfin je le priai instamment de m’accorder la grâce de venir avec moi dans ma maison, pour donner quelques secours à ma femme. Il me dit à différentes reprises qu’il n’était pas médecin, qu’il au-

rait volontiers magnétisé le malade chez lui, comme il en voyait tant d’autres ; que, néanmoins, attendu que ma femme ne pouvait être transportée à Pau, qu’il allait me suivre de suite : en effet, cet homme extraordinaire se rendit chez moi, cl, après avoir examiné ma femme, il lui mit sa main droite sur la tête, et, «leux secondes après , mon épouse fit nn soupir et déclara se trouver soulagée; il la magnétisa environ demi-heure ; ensuite, comme ma femme était très-altérée, il lui magnétisa une cruche d’eau, et lui prescrivit d’en boire à discré tion , et d’en faire aussi son bouillon. Je dois observer que ma femme avait, outre son hydropisie, une diarrhée continue, qui la fatiguait beaucoup. Je dois déclarer, à notre grand étonnement, qu’après le second verre d’eau magnétisée que ma femme eut bu, sa diarrhée cessa, le sommeil revint, et l’appétit aussi. M. Laforgue continua pendant quatre jours de visiter ma femme. Comme l’enflure avait considérablement diminué. M. Laforgue assura ma femme que le lendemain elle serait en état de faire la route de Bizanos à Pau ; elle la fit sans qu’elle éprouvât d’incommodité ; elle a fait ce voyage quatre à cinq fois , à quelques jours de distance l’un de l’autre ; elle est en ce moment très-bien, au grand étonnement de toutes les personnes qui l’avaient vue comme moi dans les premiers jours de décembre dernier. Elle continue de faire usage d’eau magnétisée. Moi, ma femme et mes enfants, faisons des vœux et des prières journellement à Dieu pour la conservation des jours de M. Laforgue. Nous désirons donner de la publicité au bien qu’il nous a fait , et donner satisfaction à

ceux qui désiraient connaître l'auteur de la guérison de ma femme, lin conséquence, Monsieur le Rédacteur, je vous prie d’insérer la présente dans votre prochain numéro.

J’ai l’honneur d’étre , etc.

LABOUltDETTE lils.

liizanos, 8 janvier 1832.

-----■ -

A M. Jules de Rovère.

Monsieur,

Pour satisfaire à votre demande, je vais donner ci-après un détail circonstancié des causes qui ont ou doivent avoir déterminé ma maladie, et des effets que j’ai ressentis depuis que vous me traitez par le magnétisme direct.

Jusqu’à l’âge de quinze ans, quoique d’un tempérament naturellement faible , je jouissais d’une assez bonne santé, mais à cette époque où vraiment la petitesse de ma taille me faisait tourner en ridicule par mes camarades, je pris tout à coup une croissance tellement rapide, qu’en deux années j’ai grandi de 3o à 35 centimètres, ce qui m’occasionna plusieurs maladies auxquelles les médecins ont donné le nom de fièvres gastriques, et dont je me crus guéri. Cependant, soit que le principe du mal ne fût pas détruit, soit que les remèdes qui me furent administrés aient causé des ravages dans l'intérieur du corps, le fait est que je ressentis, pen-

dant plus d’une année après ma maladie , des douleurs lancinantes aux principaux viscères de la poitrine. Au mois de janvier i8/|5, toute cause de maladie ayant disparu, je me croyais radicalement guéri, lorsqu’à la fin du mois d’août de la même année, je fus subitement atteint d’une douleur violente à la hanche droite. Deux chirurgiens habiles furent immédiatement appelés ; l’un d’eux soutint que les symptômes du mal annonçaient d’une manière certaine que l’affection n’était autre chose qu’une coxalgie des plus compliquées : il termina en annonçant que je boiterais toute ma vie; l’autre, au contraire, soutint que la maladie provenant, sans aucun doute, d’une trop grande croissance, avait déterminé chez moi des tiraillements musculaires , et que la soudure des os qui s’opérait à cette époque occasionnait une sensibilité excessive autour de l’organe affecté ; il déclara en outre, et avec une conviction profonde, que cette maladie ne pouvait me rendre boiteux. Il appuya son opinion sur des faits et sur les règles, que, disait-il, tout bon médecin ne doit jamais perdre de vue; sa dissertation fut longue et remplie des termes usuels de la médecine, où je crois vraiment qu’un laxicographe aurait perdu son latin.

Il était évident qu’un des deux Esculapes était dans l’erreur; moi je crois, et il y a tout lieu de le penser, que tous deux, quoiqu’ayant pris une route différente, sc trompaient également. Après avoir disputé mot à mot les divers préceptes de la thérapeutique, les deux antagonistes ordonnèrent qu’il fût appliqué sur la partie malade quatre, vési-catoires; ce qui était, malgré leur diversité d’opi-

nion, le seul spécifique à opposer à la maladie. Ces moyens, comme ceux que j’ai détaillés dans ma première lettre, n’ont produit aucun résultat.

Quand, le 9 décembre dernier, je m’adressai à la science du divin Mesmer, dont le nom sera transmis en lettres d’or à la postérité, jetais vraiment dans un état de souffrance insupportable. Les douleurs étaient tellement violentes que la nuit était pour moi un supplice; car, aussitôt que jetais au lit, et au moindre de mes mouvements, des craquements sourds et de mauvais augure se faisaient entendre; les muscles, se crispant, raidissaient la jambe et lui imprimaient des secousses tellement violentes qu’elles me faisaient jeter des cris.

C’est dans ce triste état que je me livrai avec une confiance sans bornes à votre talent, et je vous assure que je ne le regrette pas. Jusqu’à la cinquième séance d’électro-magnétisme, ma jambe , qui était raccourcie de trois centimètres, était presque revenue à son état naturel, et les muscles commençaient à reprendre leur élasticité; à cette époque je marchais à l’aide de deux cannes, avec une telle difficulté, que je trébuchais à chaque pas en essayant de gagner mon lit. Aujourd’hui, mes douleurs ont successivement disparu ; ma jambe commence à devenir plus maniable ; je marche dans les appartements à l’aide d’une seule canne, et j’espère pouvoir bientôt m’en abstenir, si vous continuez toujours à me prodiguer vos soins. Tel est, monsieur, le soulagement dont je vous suis déjà redevable ( 1 ), et je vous prie de croire que

()) Pour la suite de ce traitement, voir ci-après

lorsque ma guérison sera complète, ma reconnaissance envers vous ne s’éteindra qu’avec ma vie.

Agréez,"monsieur, l'assurance de ma considération la plus distinguée et de ma reconnaissance

E. POINSOT.

10, rue de la Pie.

Troyes. L janvier 1848.

A Monsieur le Président du Jury magnétique.

Monsieur le Président,

Permetlez à la voix de la reconnaissance de se faire entendre et de s’élever jusqu a vous, pour l’aider à acquitter envers le mesmériste de Rovère les bienfaits qu’il a répandus sur nous par le magnétisme. La voix de dix malades traités tous les jours, ensemble et gratuitement, pendant deux heures et plus, se joint à la mienne, pour vous demander , monsieur le Président, d’accorder à notre bienfaiteur une des plus honorables récompenses que doit décerner le Jury magnétique institué par vous à cet effet.

Plusieurs d’entre nous pourront attester qu’il se charge- de nos maux en y participant, pour maîtriser la désorganisation qu’ils entraînent à leur suite, à tel point qu’en traitant le fils de M. Cou-vretix, trois glandes de la grosseur du doigt se sont établies sur legenou correspondant du mesmériste, dès les premières magnétisations. Les doigts correspondant à ceux de la main de Mme Folliot mère (i), demeuraient raides et inactifs à chaque

(I) Noyez Journal du Magnétisme, tome V, page 77.

magnétisation; ainsi de suite pour la variété des souffrances que nous lui voyons entreprendre du soulager et de guérir.

Ajoutez encore à ces fatigues physiques les peines morales qu’ont dû lui occasionner les dénonciations injustes des corporations privilégiées; car, depuis son arrivée à Troyes, mandé pardevant le ministère public et le juge d’instruction, il n’a pas hésité à déclarer avec énergie, qu’il persistait et persisterait toute sa vie à propager, soit oralement soit expérimentalement, les sublimes vérités du mesmérisme (i).

En vous envoyant les documents formant l’exposé des traitements exercés par M. de Rovère, n’est-ce pas chercher à contribuer au but que se propose la société philanthropique que vous présidez, c’est-à-dire la centralisation au sein de votre comité? N’est-ce pas aussi mettre à même un rémunérateur aussi impartial que vous, de juger avec connaissance de cause le zèle infatigable d’un démonstrateur aussi dévoué?

Daignez, monsieur le Président, agréer l’assurance de notre sincère admiration pour les services que vous avez rendus et rendez chaque jour à une si noble cause.

0. MONNET.

Place du Marché au blé.

Troyes, 10 mars 1848.

(1 ) Ces poursuites ont continué. Voir ci-après l’arrêt de la Cour d’appel de Paris.

Dj-droplmic

PRÉSENTANT LES SYMPTÔMES CI-APRÈS :

en dérembrc

1° Enflure du ventre, de la main gauche, dalant de douze années.

2° Index de la main droite gonflé au point de ne pouvoir être fléchi par intervalles.

3° Gonflement commençant des doigts et de la main gauche.

4° Froid glacial des mains, résistant à la chaleur du feu.

5° Soif intense, dite d'hydropique.

6° Douleurs rhumatismales.

7° Mal de tête continuel , plus ou moins violent, durant depuis douze ans.

8° Enflure constante du pied droit, et souvent des jambes.

9° Tumeurs grosses comme des œufs de pigeon, aux chevilles des pieds, depuis deux ans.

10° Impossibilité de marcher depuis plusieurs années.

11° Soubresauts douloureux , et comme disloquant toutes les articulations , dans les premiers instants du sommeil.

en mars 181».

1° Considérablement diminuée.

2° Liberté du mouvement; encore un i>eu d’enflure.

3° Disparue totalement.

4° Retour de la chaleur naturelle.

5° Eteinte dès les premières séances.

6° Elles sont revenues faibles, après avoir disparu pendant plusieurs mois.

7° A cessé en juillet 18*7.

8" Revient par intervalles; mais très-faiblement.

9° Diminuant graduellement.

10° Marche facile.

11° Plus de traces ni des soubresauts ni des douleurs qui les accompagnaient.

(1 ( Pour bien comprendre cel eiposd , il faut se reporter h une précédente lettre insérée clam en Jnnrnal, lome Y, page 76.

1ü“ Envie d'uriner de dix minutes en dix minute», ou rétention pendant douze heures, cl quelquefois davantage.

13° Relâchement musculaire , présentant depuis douze ans les faits suivants :

Nerfs (1) so nouant subitement; ceux du talon formant un nœud gros comme un pois ; celui du genou gauche , qui a été démis durant le séjour au lit, empêchant la marche; celui de l'index droit ayant amené l’immobilité du poignet.

14° Douleurs au cœur, faisant éprouver à la malade la sensation d'un relâchement des nerfs (2) qui supportent cet organe. Les premières atteintes s’en firent sentir en 1852, pendant une grave maladie.

12° Amélioration marquée. Ce symptôme doit durer jusqu’à la fin du traitement.

13° Ne se fait presque plus sentir.

Ces dérangements de nerfs ont été successivement guéris par un homme de I.igny, habitué au traitement de ces maux, et, pourcela, poursuivi par les médecins.

14° Atteintes légèros à de rares intervalles.

Traitement médical.

Yésicatoires au bras droit, deux fois par an, et alternés, en neuf années, par deux cautères ordonnés pour toute la vie.

Deux saignées par an : une à la fin de l’hiver, et l’autre durant les plus fortes chaleurs. Bains de pieds, demi bains

Douches d’eau de Bourbonne.

Promenades continuelles, distractions.

Tisanes rafraîchissantes, sel de nitre, etc.

Résultats. — Nul autre que celui énoncé dans la lettre indiquée ci-devant an note.

(1) Cesl évidemment les ttndons que la malade désigne ainsi. (S) Acception vulgaire-

Traitement magnétique.

Magnétisation simple, journalière, de durée variable.

Résultats. — Cette action amène difficilement le sommeil. L’inlensité delà maladie, portée au comble par celte influence, s’amende peu à peu. Le sommeil nrturel revient, et avec lui le repos, la diminution de toutes les souffrances. Le somnambulisme lucide se déclaré enfin, et la guérison s’annonce par la disparition graduelle et successive de tous les maux ci-dessus énoncés.

En i836, j’ai été traitée pour une gastrite ainsi qu’une descente de matrice ; j’ai éprouvé, à la même époque, une névralgie , et les premières atteintes de surdité : aujourd’hui les mêmes douleurs existent, mais affaiblies.

Le traitement par le magnétisme, sans aucune espèce de médicament, commencé depuis deux mois, et dont les effets sur moi sont extrêmement remarquables , me fait espérer ma guérison , que j’ai demandée inutilement à fart médical. Je dois rendre justice au dévouement avec lequel M. de Rovère me prodigue les soins les plus assidus.

Femme FESSART-LEJEUNE, rue de la Monnaie, 17.

Troyes, i I mars 1848.

(2) Deux longues consultations, l'une de M. Récamier, et l’autre de M. Halin , sont jointes à cette attestation.

J’atteste que M. île Rovère m’a guérie, dans une seule séance de deux heures, d’ttne entorse au pied gauche , qui n’avait pu l’être pendant plusieurs jours par le médecin. Ne pouvant m’appuyer sur ma jambe, le lendemain de cette magnétisation j’ai pu reprendre mon travail, et n’ai plus rien senti.

Anna CHABOT.

Troyes, 12 mars 1848.

Ami des sociétés et des hommes qui s’occupent du mesmérisme, et membre correspondant de la Société du Magnétisme de Paris, je dois rendre à M. de Rovère la justice qui lui est due.

M. de Rovère, dont je dois la connaissance à un des grands bienfaiteurs de l’humanité, M. du Potet, et au judicieux M. Hébert, qui ont eu la bonté de me l’adresser, il y a environ deux ans , par suite d’un article dans lequel je l’avais défendu, ainsi que la cause mesmérienne, contre des médecins d’Auxerre, pour le protéger à Troyes contre un appel formé à la demande de ces messieurs, appel dont il est sorti victorieux, grâce à la seule bonté de sa cause et ses applications, est venu se fixer en notre ville depuis plusieurs mois.

Depuis ce temps il n’est sorte de dévouement dont il n’ait fait preuve, sorte d’abnégation dont il n’ait donné l’exemple, sorte de courage et de désintéressement qu’il n’ait manifestée.

De nouvelles persécutions l’attendaient ici ; il les a supportées, et en a encore triomphé.

Des malades l’attendaient aussi, de pauvres et

d'aisés, plus depauvres qui' d’autres, il lésa traités la plupart gratuitement, et il les a guéris.

Il n est à déplorer pour le magnétiseur que la perte cruelle d’une jeune fille, fiancée, attaquée au dernier degré de la fièvre typhoïde, à laquelle il consacrait la nuit et le jonr des soins assidus ; perte malheureusement causée par les parents de la malade pour ingestion anticipée d’aliments.

J’ai suivi la plupart de ses trailements, je les ai approuvés dans ma pensée, el le suécès en a été le dernier juge. J’ai été plus que satisfait de la méthode et du dévouement sans bornes du mesmé-riseur; aussi l’occupation l’altend-elle pour lui disputer jusqu’aux minutes comptées de ses repas.

J’ai été témoiu d’une partie de scs cures; je connais celle du jeune Poinsol, je connais aussi celle de la demoiselle Monnet, ci-devant rapportée , trop remarquable pour que j’y insiste et que j’aie besoin de la faire ressortir ; je connais encore d’autres faits, et particulièrement les heureux résultats du traitement du fils Couvreux, d’un épileptique qui est en pleine voie de guérison , et les beaux progrès obtenus sur une malheureuse hydropique.

Il est surtout un fait que je ne puis me rappeler sans sourire ; c’est celui d’un bon gendarme gravement hypothéqué d’un mal qui lui garottait les jambes; pas moyen de monter en selle, nul pouvoir de se mouvoir le moindrement sans le secours d'un bras solide. Il fallait voir pourtant avec éton-nnement, à l’une de nos dernières revues, un bel homme d’armes sauter en selle, se mouvoir et faire l’exercice avec une merveilleuse aisance duc à l’u-

sage parfait (le tous scs membres ; c’était noire goutteux, notre paralytique de la veille, qui s’élait déchargé de son mal aux dépens du guérisseur, et s’amusait à faire caracoler son cheval pour lutter de souplesse avec le coursier étonné el bondissant de retrouver son maître.

Grâces soient rendues par lui et par tous à notre mesmériseur Rovère, et à l’Etre divin dont il répand si bien le feu sacré et régénérateur.

Louange lui soit aussi donnée, pour ajouter à ses bienfaits uu cours gratuit de doctrine mesmé-rienne, appuyée de démonstration pratique; c’esl joindre l’exemple au précepte, et semer le bien partout.

Puisse également la société des hommes reconnaissants et éclairés des pieux disciples de Mesmer, faire quelque chose pour liii, et reconnaître les services de cet homme fervent et courageux qui refuse d’honorables et lucratives positions pour continuer sa carrière de charité et de dévouement.

Il a bien mérité de l'humanité et de la science.

l'ACQL'ENOT.

Troyes, 15 mars 1848.

(La suite au prochain numéro.)

Le Gerani : HÉBEKT (de Garnay).

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

.ïury mngnC'tiqnc

n’ENCOl'RAf.ESIBNT HT DE RÉ COM I* ENS E.

Première assemblée générale imnueHe.

(Suite.)

Extrait des Minutes du Greffe de la Cour d'appel de Paris.

La Cour «l’appel de Paris, chambre des mises en accusation, a rendu, le sept mars mil huit cent quarante-huit, l’arrêt dont la teneur suit:

La Cour, réunie en la chambre du conseil, M. Meynard de Franc, substitut de M. le procureur-général, est entré, et a fait le rapport du procès instruit contre Jules de Rovère.

Le grcfller a donné lecture des pièces du procès, qui ont été laissées sur le bureau.

Le substitut a déposé sur le bureau son réquisitoire écrit, signé de lui, daté du 5 mars, présent mois, et terminé par les conclusions suivantes : Requérons qu’il plaise à la Cour confirmer l’ordonnance des premiers juges.

TOME Vin. — M“ 105. —10 L'MIÎRE 1849- 21

Le substitut s’est retiré, ainsi que le greffier.

Il résulte de l’instruction les faits suivants :

Dans le courant de l’année 18/17, de Rovère élnnl venu se. fixer à Troyes, comme professeur de langues, et comme magnétiseur, donna ses soins à plusieurs malades, qu’il traila seulement au moyen de l’électro-magnélisme et de passes, sans prescrire de médicaments ni formuler d’ordonnance.

Le 26 janvier 1848, un procès-verbal ayant été dressé contre lui, comme ayant illégalement exerce-la médecine, une instruction a eu lieu dans les formes prescrites par la loi.

Sur le réquisitoire du commissaire du gouvernement, tendant au renvoi de l’inculpé devant le tribunal de police correctionnelle, il est intervenu , le 10 février iS-|8, une ordonnance de 11011 lien, à laquelle le substitut du commissaire du gouvernement a formé opposition le même jour.

La Cour, après en avoir délibéré,

Statuant sur ladite opposition,

Considérant qu’il ne résulte pas de l’instruction que Jules de Rovère ail exercé la médecine;

Con fi me l’ordonna uce ci-dessus datée dénoncée;

Dit qu’il n’y a lieu à prévention , ni à plus amples poursuites contre ledit de Rovère;

Ordonne que le présent arrêt sera exécuté à la diligence du procureur général.

Fait au Palais de Justice, à Paris, le 7 mars i8/(S, en la chambre du Conseil, où siégeaient : M. Ga-

baillo, conseiller plus ancien, faisant fonctions de président ; MM. Faure, Brisout de Barneville, Michelin, Faget de Baure, Godon. conseillers, assistés de M1' Gorgeu, greffier; lesquels ont signé.

Pour expédition conforme délivrée à M. de Rovère,

Pour to greffier en chef, empêché,

M. CRAPOIEL.

A M. le Président du Jury magnétique.

Monsieur le Président,

La mission que j’ai à remplir auprès de vous en faveur de M. de Rovère est trop louable et trop sainte, pour que je ne m’en acquitte pas avec plaisir.

Voici ce que je sais sur cet homme charitable : Connu ici comme amateur de magnétisme, par lequel le bon docteur Frapart m’a sauvé miraculeusement, M. de Rovère me fut adressé lors du deuxième procès que lui avaient intenté les médecins d’Auxerre (1). 11 plaida si bien, et fournit tant d’attestations de cures obtenues dans le département de l’Yonne, que, avec l’aide de Dieu, qui connaît tout le bien qu’il a fait dans sa vie, et le mal qu’il a enduré des antagnonisles du système de l’illustre Mesmer, il sortit victorieux de cette nouvelle épreuve.

(1) Voyez les détails, tome III, page 300.

C’est alors que, pour servir mou pays eu y répandant la connaissance divine du magnétisme, j'ai prié M. de Rovère de venir habiter parmi nous, où avaient échoué successivement MM. l’u-gère, Laurent et Joussin. 11 se rendit à mes désirs, et, depuis le mois d’octobre 18/17, Par l0,IS *(‘s temps, j’ai remarqué que cet excellent homme , non moins désintéressé que courageux, a donne scs soins à une foule de malheureux malades.

J’ai assisté quelquefois à son traitement gratuit, et je n’ai entendu que louanges de la part des malades qui y étaient admis.

En ville, il prodigue ses soins avec un égal empressement ; prenant à peine le temps de se nourrir, il abandonne tous les plaisirs qui lui sont offerts pour ne penser qu’à ses malades.

Sans indiquer les différentes personnes chez lesquelles il va, je vais citer un trait bien capable de lui concilier la bienveillance du Jury.

Ayaut été appelé auprès d’une jeune fille, jardinière, âgée de 18 ans, dans un état désespéré, abandonnée des médecins, il avait pu, par une magnétisation constante de plusieurs jours et nuits, obtenir un mieux qui donnait toute espérance de la sauver, lorsque les parents, la croyant en état de manger, lui donnèrent des alimenLs, malgré la défense expresse du mesmériste. Une rechute et la mort ont été la suite de cette imprudence.

Je ne pense vraiment pas qu’une distinction puisse être accordée à plus juste titre qu’à ce généreux citoyen, qui sacrifie tout ce qu’il possède en faveur du mesmérisme, santé, fortune, plaisirs, même sa vie, s’il le fallait, pour faire triompher la

cause |it’il défend. C’est en vous signalant ces vérités en l'honneur de l'adepte zélé pour lequel je parle, que j’espère vous fournir l’occasion d’un acte de justice, qui comblera les \œux «les partisans du magnétisme dansl’Auhe.

Veuillez agréer, Monsieur le président, la haute estime de votre très-humble serviteur,

SALl.AliD.

Ti'oycs, 18 mars 1848.

Je ne puis que me joindre aux personnes dont les noms précèdent pour donner des louanges au magnétiseur llovère.

Il est certain que si lé magnétisme ne m a pas sauvé la vie, il m’a au moins préservé d'une afllic-lion certaine. Aujourd’hui, grâce aux soins assidus de M. de llovère, je puis marcher assez facilement, et jouir des bienfaits de la promenade. J’espère donc arriver à uue guérison parfaite....

Dès les premières séan.'es de magnétisme, j’éprouvai un grand soulagement, et, voyant mon état s'améliorer, j’y eus une grande confiance; puis, ayant lu quelques ouvrages qui traitaient de cette science, je voulus essayer de magnétiser. Le hasard me favorisa , car, à mon premier essai, je réussis parfaitement, puisque je tombai sur un somnambule lucide. Ce ré.-ullat obtenu, je fus dévoué corps et âme au mesmérisme; aussi ai-je converti bien des incrédules et fait bien des prosélytes. De son côté, M. de Rovère faisait ses démonstrations, traitait les malades pauvres gratuitement, n’exigeant

d’eux que la confiance et l'exactitude, lin agissant aussi philanthropiquement, il a propagé une doctrine presque inconnue dans notre département; et, malgré le mauvais vouloir des médecins et antres intéressés, la vérité triomphera.

F.. POINSOT.

Troyes, 22 mars 1848.

.....Pendant trois mois, les soins les plus touchants me furent prodigués, en sorte qu’aujourd'hui, qu'une guérison complète a couronné les efforts de M. de Rovère, je vais à la chasse et fais de vingt à vingt-cinq kilomètres sans éprouver de fatigue.

Veuillez vous rappeler que ma maladie, passée à l’état chronique depuis plus de trois ans, avait son siège dans l’articulation de la cuisse.

E. POINSOT.

Troy«s, 28 octobre 1848.

Monsieur le Président,

C’est sous les inspirations de la plus vive reconnaissance, que j’ai demandé à exprimer tous mes sentiments d’admiration pour M. de Rovère, qui comprend à un si haut degré la doctrine mesmé-rienne, dont il sait faire journellement, et avec le plus grand succès, l’application par la méthode la mieux raisonnéc; car M. de Rovèrc n’est point un homme ordinaire; il n’est point seulement hon praticien, mais il raisonne et déduit parfaitement les effets des causes; il est même théoricien remar-

quahlr, attendu qu’il démontre logiquement et avec une lucidité frappante pour tout le inonde.

Le mi'sü.ériste de Rovère a donné plusieurs séances publiques, auxquelles j’ai eu la faveur d’assister, et dans lesquelles son talent brilla par la concision et l’induction qui ne sont pas sans éloquence; il est toujours prêt pour toutes les questions, qu’il résout spontanément, avec facilité, tant il est pénétré de la science qu’il professe et de sa bonne pratique : ce sont ces brillants résultats qu’il a obtenus, qui ont fait de moi, qui avais eu d’abord une croyance rebelle, le plus fervent et le plus docile disciple.

.le n’exagère rien, en vous disant que M. de Rovère a acquis de la célébrité dans notre ville, où il s’est fait connaître très-avantageusement, en ga-gnanl l'affection de toutes les personnes avec lesquelles il a été et est constamment en rapport. Il fait de sa mission un saint devoir d’humanité, avec complète abnégation de lui-même, ayant un désintéressement rare dans la noble profession à laquelle il veut rester dévoué inébranlablement. Chaque jour il consacre gratuitement plusieurs heures à prodiguer les bienfaits trop peu appréciés et trop peu connus encore du mesmérisme.

Son unique bonheur est de rendre la santé à ses semblables, en se mettant en communauté de souffrances avec ses malades, dont il éprouve sympathiquement les effets ; en faisant marcher les paralytiques, voir les aveugles, entendre les sourds, et en rendant la raison aux esprits aliénés : voilà le sublime de la charité évangélique! C’est dans ces sentiments et avec la conviction la plus intime,

que, inc trouvant inoi-inêinc dans un élat do sauté qui laissait à désirer plusieurs choses, je réclamai le traitement mesmérien par M. de Rovère, que j’avais pu apprécier par scs nombreuses cures, qui sont à ma connaissance, et contre la plupart desquelles la méthode et les ordonnances médicales étaient venues se briser.

Je certifie, avec la plus cordiale gratitude, que j’ai éprouvé des effets très-salutaires, visibles et faciles à constater sur moi; car, outre les diverses affections pour lesquelles M. de Rovère me traite encore, j’avais un goitre qui a disparu déjà et que chaque jour je me trouve mieux et ressens des bienfaits que ma plume est inhabile à vous peindre.

Tout ce que je puis ajouter, Monsieur le président, à mon admiration cl pour mieux exprimer mon ravissement, c’est que j’entrevois dans celle science, encore trop peu répandue, quelque chose de divin, de miraculeux, que mon esprit ne peut analyser, el que M. de Rovère transmet si puissamment à ceux qui ont le bonheur de lui accorder leur foi et d’être les objets de sa rèmarquable sollicitude pour tous ceux qui souffrent.

Quand j'ai dit que M. de Rovère avait fait abnégation complète, je ne fais que lui rendre une haute justice, attendu qu’il n’est pas de jouissance mondaine pour lui; il n’a que celle de 1 aine, de la satisfaction qu’il éprouve d’avoir rendu la santé à des malades, pour lesquels il néglige même la sienne; car, souvent, je l’ai vu sc priver de ses repas pour ne point perdre un moment si précieusement employé pour les êtres souffrants.

M. de Ruvère a les qualités éminentes de la mo-

cleslie, de la générosité la plus exquise, d’un désintéressement parfait; pratiquant humainement et avec pureté le mesmérisme, el n’en faisant point un objet de spéculation, il est surtout d’une louable exactitude.

C’est par toutes ces qualités qui le distinguent, el par l’amour de son honorable profession, qu’il a acquis l’estime générale de nies concitoyens , qui ont eu aussi l’occasion de reconnaître en lui, dans les circonstances actuelles, les vertus, d’un civisme à toute épreuve. J’oserai donc insister, Monsieur le président, pour que la société de la propagation du mesmérisme prenne en sérieuse considération tout ce qui concerne ici M. de Rovère, digne, autant que qui que ce soit, de la faveur due au vrai mérite.

C’est avec la persuasion que ce que je viens d’exposer est la reproduction des sentiments partagés par tous ceux qui ont connu et qui connaissent M. de Rovère, que j’ai l’honneur de vous saluer,

Monsieur le président,

E. JACQUIER DE BREUIL.

Troyes, 31 mars 1348.

Monsieur le Président,

Après avoir entendu toutes les calomnies des hommes qui cherchent à jeter des embûches dans la marche que M. de Rovère s’est proposée de suivre, il est de mon devoir de vous dire ce qui me concerne.

J’élais malade depuis quinze mois; cinq plaies à

la jambe droite, donl deux très-profondes, me privaient de marcher. Ce n’était qu’avec la plus grande peine que je pouvais me rendre chez M. de Rovère. Je vais vous rappeler les circonstances qui m’ont fait connaître cc digne homme.

M. Thessier, médecin , voyant l’état de ma maladie, me dit que je ne pourrais jamais guérir à Troyes , vu que l’os de ma jambe était dans un mauvais état, mais qu’il me ferait entrer à Paris dans l’hôpital où M. Ligner était employé. Je le remerciai des bontés qu’il avait pour moi. M. Ligner était alors dans le département, à courir pour sa candidature, mais M. Thessier ne pouvait pas le voir dans ce moment là ; il me fallait attendre.

Un de mes amis me parla de M. de Rovère, je me décidai à l’aller voir. Il me reçut avec bonté , et me demanda si j’avais été traité par la médecine. Je lui répondis : Oui. Il me demanda encore si j’en avais éprouvé du soulagement. Je lui répondis que mon mal avait été toujours en augmentant. 11 me dit : Yenez demain, je tâcherai d’adoucir vos souffrances. Je lui fis observer qu’étant ouvrier et malade, mes moyens étaient épuisés ; il me répéta : Venez demain; et, depuis ce temps, il m’a prodigué les soins les plus touchants.

Je me rendis le lendemain à son traitement, et je ressentis tout de suite les effets magnétiques. Cependant, je l’avoue, en y allant pour la première fois, je me disais : Est-il possible qu’avec un moyen aussi simple on puisse guérir un mal comme celui dont je suis atteint? Petit à petit la force me revint, et les plaies commencèrent à sécher et à se fermer peu à peu. En ce moment-ci, la guérison

est complète'. Depuis deux mois et demi je suis comme si je n’avais jamais rien eu. Je viens de faire, dans une circonstance pressante, dix lieues en cinq heures et demie, sans éprouver trop de fatigue; car j’ai pu danser le lendemain à ma noce.

M. de Rovère m’a rendu une santé parfaite , et à l’heure qu’il est mon cœur saigne de voiries hommes si injustes. Ils ne comprennent pas que l’homme qui donne sa santé pour soulager les autres, ne doit pas être jugé sans justice; il faut y apporter un cœur dégagé de toutes les petites passions pour voir la vérité, et examiner si, moi qui vous écris, je suis véritablement guéri. Mais, malheureusement, il en est du magnétisme comme de toutes les sciences : souffrance et résignation pour les hommes qui sont utiles au genre humain.

V'otre serviteur,

DOUÉE,

71, rue de la Grande Tannerie.

Troyes, 20 novembre 1848.

Société du mesmérisme de Paris.

Jusqu’en ces dernières années, on croyait généralement que la mort de Mesmer élait arrivée le. 15 mars iSi5. C’est ce jour là que, en i8/|6, on inaugura son buste, et qu’eut lieu un banquet commémoratif. Un peu plus lard, M. Mesmer, neveu, fournit à la Société divers papiers de famille (i), desquels il résultait que l’événement en question

(I) Voyez lome V , page 82.

serait arrivé !c 5 cl non k* 15 mars. Des recherches faites dans ce bul au Trésor public el à la Cour des comptes, furent sans résultat, parce que les pièces qui devaient établir celte date avaient été détruites.

M. Mesmer, devenu membre de la Société, se mit, pour elle, en quête de nouveaux documents, et, après trois ans d’actives recherches, il est par venu à fixer d’une manière positive cc point litigieux d’histoire.

11 a découvert el communiqué à la Société, qui le fait publier, l’extrail mortuaire de son oncle; ce document est en allemand ; en voici la traduction précise :

EXTRAIT du Registre des Décès de la paroisse de Meersburg, de l’an 1815. - Page 13 (ou 73), N" 9.

Le cinq mars mil huit cent quinze, à dix heures avant midi, est décédé ici le sieur Antoine MESMER, âgé de quatre-vingt-un ans ; il était docteur en médecine , et inventeur du magnétisme. — Il était né le a5 mai 1754» ® Ignanz (ou Iznang) , paroisse Weiler, près de Rudolphzell, et veuf depuis nombre d’années. — Il fut enterré le 7 , à 4 heures du soir.

Témoins : M. Cuaiu.es FABER, éclievin ; et Jean WAGNER, négociant.

Meersburg, le 8 mars 1815.

Jean AMTSBLLER, curé.

Pour extrait conforme,

Meersburg, 31 mars 1842.

Pour le Comité paroissial métropolitain ,

II AIN.

Pour corroborer l'exactitude do cette pièce, pour-tant authentique, nous avons fouillé dans les sources publiques, et, de celte vérification scrupuleuse, il est résulté la confirmation du fait qui précède.

Voici ce que nous avons trouvé :

« Le fameux docteur Mesmer, grand-prêtre du « magnétisme, est mort le 5 mars, à Mccrsburg, « piès du lac de Constance , à lage de 81 ans. Un « somnambule lui avait dit qu’il ne mourrait qu’à « l’âge de 84 ans. •

{Journal de l'Empire (Débats), du 26 mars 1815; 5e page, kc colonne, 1er alinéa.)

On trouve la même nouvelle, et dans les mêmes termes, dans la Quotidienne du 27 mars i8i5. Ce journal, pas plus que le Journal de VEmpire, n’indique la source où il l’a puisée.

«......On n’entendit plus parler de Mesmer

« qu’à l’époque de sa mort, arrivée dans sa ville « natale, le 5 mars 1815. »

(biographieuniverselle,?tc.,parF. X. Fellcr,article Mesmer, p. 549. édition de 1844-)

Le docteur Roubaud, dans son Annuaire médical, etc., année i849> ^ixe auss* cctte t*ale au 5 mars.

Si, à ces preuves, on ajoute le fait précédemment relaté, que la rente viagère dont jouissait Mesmer n’a été servie que jusqu’au 5 mars, il demeurera bien évident pour tous que ce jour est bien celui de sa mort. C’est ce qu’il s’agissait d’établir.

VARIÉTÉS.

Le Novateur. — C’est un triste et douloureux métier que celui de novateur! 11 est déjà très-dif-iicile de faire adopter et de répandre une invention utile; il l’csl cent fois plus lorsqu’il s’agit d’une vérité morale, ou d’un principe qui doit rénover les sciences.

Le novateur peutêlre assimilé au galérien : il est marqué au front par les savants, qui faisant alors l’office degardes chionrmes,le traquentetl’insultent à qui mieux mieux. La société le réprouve, d’abord , car elle ratifie la flétrissure qu’a subie son génie; elle bal des mains à tous les outrages qu’il reçoit. Partout où il va, même accueil, même réprobation : il doit subir cette loi cruelle, et se courber sous le poids du mépris.

Malheureux ! que viens-tu faire , et quelle est ta mission? Tu veux réformer les croyances, et éclairer les hommes ! Tu veux les rendre heureux en faisan t pénétrer dans leur intelligence un germe des vérités immortelles! Tu viens briser les fers qui rivent l'homme au mensonge, et chercher son émancipation ! Puis , fuis vile ! c’est ici que le mensonge a des autels ! c’est ici qu’on meurt en l’adorant, et qu’on lui tresse des couronnes! Ouvre les

yeux, et considère les fruits empoisonnés que laissent tomber ces arbres qu'on vénère. Toutes ces têtes blanchies renferment des sophismes que le temps a durcis. Enveloppes de philosophes, elles cachent à tous les yeux des misères profondes : le doute, la négation, le mépris, enfin, de tout ce que Dieu fit de sublime. Approche, cependant, et ose toucher du doigt ces humains ; ose leur dire: Voilà la vérité qui doit changer votre être, et vous donner un guide pour vous conduire dans la sombre nuit qui vous environne de toutes parts! Tu vas voir leur horreur pour ce qui peut les éclairer, et peut-être la peur qu’ils auront de comprendre!

Non, Dieu ne fit point ainsi les hommes! Qui donc a pu les pervertir et changer leur nature? Nul ne le sait; mais, à force de recherches, peut-être peut-on l’apprendre. Il faut à l’homme de l’or, beaucoup d’or. Pourquoi faire? Ne faut-il pas que ses passions soient satisfaites, et qu’il s’énerve dans des jouissances qui doivent dégrader sa nature? Tout ce qui est bas, matériel, ordurier, doit faire partie de son bagage, ainsi l’ont établi les lois de civilisation qu’il s’est données, et que ses mœurs, d’ailleurs, rendaient nécessaires.

Pénètre dans le sanctuaire, et de la chaire dite de vérité, tu entendras tomber des paroles que Dieu n’a jamais dites, et que jamais même une sainte inspiration n’est venue révéler. C’est la doctrine, c’est la loi qu’il faut suivre; c’est celle dont on pétrit ta jeune innocence! Ya, va plus loin; monte les degrés de ces Académies, pénètre-toi des discours de ces hommes vénérés, l’élite de la nation ; puis cherche le fil propre à te conduire

dans ce labyrinthe de la vio ! Le néant apparaîtra au bout de les réflexions, et la vanité des choses humaines te sera démontrée. Pousse plus loin tes recherches ! Sans doute tous ces hommes ont trouvé le remède aux maladies nées de leurs passions et de leur ignorance; ils ont un baume secret qu’ils appliquent aux tourments de leur cœur, et enfin, engourdissant l’affreuse douleur, ils vivent exempts d'infirmités dont pourtant ils ont en eux semé les germes ! Va, tu détourneras bientôt la vue : le fer, le feu , le poison, tous agents que l’enler semble avoir inspirés comme moyen de vengeance, seront mis sous tes yeux comme les seuls consolateurs de l'affligé, comme son unique espérance!

Mais, ce n’est rien encore : descends , descends l’échelle, et ose pénétrer dans cette cuve où bouillonne, en montrant son écume, cette lie humaine entretenue dans son ignorance et dans ses vices par des maîtres qui voient sans sourciller ces affreuses horreurs !

Ose maintenant parler d’âme et de facultés divines ! Ose soutenir que ce qui constitue l’étre ne périt point tout entier! Ose annoncer l’existence d’une médecine souveraine, qui, en même temps qu’elle purifie le corps, fortifie la pensée! Parle d’une philosophie douce et consolante, qui porte l’homme vers son auteur en semant sur sa route de nombreuses merveilles! Prononce ce mot magique : magnétisme! Ce qui est pur va tomber dans la boue; car aucun homme de science ne voudra le comprendre.

Va, tout n’est qu’erreur ou hypocrisie. Un masque couvre tous ces visages; mais ton destin te

cuuduil. Je nu baurais arrêter la marche; j'ai voulu seulement le faire connaître les écueils.

Le novateur entend résonner à son oreille celle voix aux tristes présages. Il s’arrête: un instant ; puis, comme 1111 enfant indocile aux conseils de la sagesse, il continue sa marche.

Non , le novateur ne s'appartient point. Une intelligence supérieure à la sienne le pousse en avant. D’où vient-elle? Qu’importe! il faut qu’il accomplisse une mission difficile : il doit être l’instrument forcé d’une Providence cachée. Jusqu’à ce qu’il l’ait accomplie, il évitera la morsure du serpent caché sous l’herbe, il évitera et surmontera tous les accidents qui menacent sa vie. Il n’a donc rien à craindre que s’il dévie de sa route; car, alors, la nature l’abandonne, et,son guide iutelli-geut le laisse dans l’obscurité. Ainsi l’on vit périr les hommes du destin, qui, pensant être des dieux eux-mêmes, car ils réglaient les destinées, s’abandonnaient alors à leur orgueil el à leur folle raison. Ils étaient remplacés aussitôt par d’autres hommes ayant même mission ; le monde tourne et se maintient, régi qu’il est par des lois : l’humanité do même ; mais ces lois sont secrètes et insondables au vulgaire.

L’homme ne s’est donc rien donné : il a tout reçu ; et les idées saines qu’il peut avoir des choses, il les doit à son intelligence, qui d’abord en avait reçu l’empreinte. Supérieur aux animaux , plus malheureux peut-être, il laisse de côté son instinct pour écouter la voix non moins puissante qui parle en lui. 11 n’est pas le maître de son inspiration, il connaît seulement l’organe qui l’élabore; et s’il veut

trop approfondir, la vue de l’esprit se trouble. Semblable à la vision lorsque nous plongeons noire regard flans l’espace , nous ne pouvons plus rien saisir, et cependant encore des mondes y existent!

Est-ce une faveur divine que de souffrir? Pourquoi non? C’est la souffrance qui fait l’homme fort. En effet, c’est la pensée tourmentée , échauffant le cerveau, qui en fait jaillir ces éclairs avec lesquels nous perçons pour un instant les ténèbres qui nous environnent. Cette fièvre singulière qui s’empare de l’homme placé au milieu de circonstances difficiles où tout n’est qu’embarras et traverses, est nécessaire. On l’a dit cent fois : la nécessité est mère des inventions. Il faut que l’homme s’oriente, qu’il rumine un aliment moral, et que, comme l’insecte dont les antennes sont à chaque instant blessés, il redoublé d’activité pour éviter les périls qui le menacent, et trouver une issue.

Tout est obstacle pour le novateur, nous l’avons dit; mais la principale occupation de scs pensées, son véritable tourment, c’est celui-ci : Il faut qu’il rende sensible aux autres intelligences ce qu’il sent lui-même; ce qui, souvent, ne peut se traduire par des mots. En effet, le langage suit les choses, il ne les précède point : toutes sont peintes lorsque déjà elles sont comprises. 11 doit sc faire un langage qui ait un sens nouveau, et le faire adopter. C’est une sorte de langue étrangère qui n’arrive à être entenduc'qu’après qu’une sorte d’éclosion a eu lieu dans les idées par la transmission de l’idée-mère venue du cerveau du novateur; et, comme il n’a point devant lui des cerveaux vierges de préjugés et d’ignorance, il doit surmonter

tant d’obstacles, que sa peine redouble à chaque instant.

L’être fait écoute peu : il croit tout savoir. Il n’emploie d’abord ses facultés qu’à repousser tout ce dont vous voulez l’instruire. Il est distrait par vos observations, et cherche bien plutôt à faire prévaloir son propre sentiment qu’à recueillir celui, plus vrai, né d’une observation plus profonde et d’une pénétration plus grande. Que de soins, que de fatigues ne faut-il pas alors! Mais, chose singulière! l’énergie augmente par la résistance. Une sorte de vertu se développe, et le novateur, loin d’abandonuer son ouvrage commencé, tient à assurer sa conquête ; c’est ainsi qu’une transmission se fait, colle de la vérité. Le temps y ajoute, et l’arbre greffé porte dos fruits plus doux.

On s’étonne des progrès lents de la vérité. Nous venons d’en affaiblir les causes. Elles sont si nombreuses que nous nous sommes arrêté en chemin. Ce sont les esprits superficiels qui font en quelque sorte au novateur un reproche du peu de progrès de ses idées. Ceux-là n’ont point eu de vérité à répandre. Ils n’avaient point d’apostolat à accomplir, et nous pourrions dire qu’au milieu du cercle où ils vivaient, leur propre jugement n’avait jamais prévalu. Jamais, à leur esprit, les difficultés n’ont apparu. Leur étonnement commence seulement lorsque, nouveaux convertis, ils se voient de toutes parts repoussés.Pourquoila lumière del’inlelligence 11’est-elle pas semblable à celle du soleil, qui n’a besoin que do se montrer pour illuminer la terre?

O misère profonde de l'humanité ! L’homme est destiné à vivre dans l’ignorance, car celle-ci

doit sc; perpétuer. C’est en vais» que (les hommes téméraires , plutôt qu’éclairés , soutiennent le contraire. 11 faut trop d’années pour qu’un être arrive à comprendre. 11 faut trop de temps encore, après ce noviciat, pour que sa raison ait quelque maturité. 11 seml)le que la nature soit avare de ce don d’intelligence, et que celui qui veut lui frire violence paie des tourments de toute sa vie cette faveur du ciel. Si jeunesse savait et si vieillesse pouvait ! Telle est celle affreuse vérité, que l’on découvre, seulement au déclin de la vie, comment il faut vivre, comment il faut apprendre! Étonnez vous maintenant des disputes des hommes, des opinions diverses, des croyances opposées; et de l’existence de ces milliers de sectes religieuses, de ce lohubolui au milieu duquel nous vivons ! Étonnez-vous qu’il soit si rare de rencontrer quelques opinions identiques, dans deux hommes partis de points différents! Eh! nous l’avons fait pressentir dès le début de cet article : des êtres providentiels surgissent et paraissent inspirés; ils tracent le chemin que doit suivre la foule, et la foule obéit. Mais aussi, par un contraste choquant, la nature produit des hommes à esprit faux, qui parlent el agissent comme s’ils avaient la vérité.

C’est ainsi que nous voyons des plantes vénéneuses parmi celles qui nous offrent un aliment sain et agréable; il faut beaucoup d’expérience pour les distinguer. C’est le flux, le reflux, la vague incertaine. Ce n’est point là la science; mais son ombre seulement; une idée lancée par les vapeurs du cerveau, assez puissante?,.pourtant, pour inoculer quelque grande passion. La terre n’est qu’un

champ de carnage, uu sépulcre, un tombeau où l'homme vraiment éclairé esl réduit à gémir. Son impuissance est manifeste; et, le sentant, son regard abandonne la terre pour se diriger vers Dieu.

Des hommes sans scrupules et sans science pervertissent le cœur dos nations en les trompant chaque jour, car ils leur donnent pour pâture leurs propres erreurs.

Ah! si j’osais parler de moi! de ce qui m’est personnel ! de mes propres difficultés à faire prévaloir la vérité magnétique! Je pourrais vous faire le tableau des misères morales des hommes que je rencontrai sur ma route, de leur crétinisme natif, qu’ils n’avaient jamais pu surmonter. Ces hommes m’ont fait un crime de ma croyance, m’ont flétri pour mon dévouement.! Champions du mensonge, ils voulaient me contraindre à adorer leur idole. Combien de fois dans ma vie, n’ai-je point eu le cœur navré, en entendant sortir de la bouche de ces hommes , que je croyais philosophes, les paroles les plus choquantes, les sophismes les plus grossiers. — Un secrétaire perpétuel d’Académie me répondant : J'aime mieux la tranquillité que la vérité. Un doyen de Faculté, croyant être poli, répondant à des affirmations de faits : Je le crois, puisque vous me le dites ; mais je verrais , que je ne croirais pas. Puis, riant, gambadant, se moquant, ces hommes allaient sans doute, en quittant leur interlocuteur, justifier, près de quelque malheureux souffrant de la haute opinion qu’ils avai nt d’eux-mêmes, la vérité de leur médecine exacte. — Cet autre docteur, arrivant à l’Académie et en devenant le secrétaire, par ses ouvrages contre le

magnétisme, par les outrages qu’il adressa aux magnétiseurs. —Cet autre encore, mentant en pleine Académie, en affirmant un fait faux. —Mais, pourquoi poursuivre? Leur Académie est une tour de Babel, d’où il ne sort qu’un bruit confus de voix, mais aucune chose utile. Le choléra peut revenir exercer ses ravages, ils seront aussi habiles qu’ils l’ont été lors de ses deux invasions.

Mourez, pauvres humains ! La science est impuissante; mais, le sachant, pourquoi donc consentez-vous à prendre des poisons, à supporter le martyre?

Est-ce à l’Académie des sciences que le novateur doit porter sa découverte? Mais ce corps illustre a déclaré que le magnétisme n’existait pas ; il repoussa Mesmer eu le flétrissant du titre de charlatan.

Est-ce à l’un des pouvoirs qui se succèdent avec tant de rapidité ? On l’a fait à plusieurs : ils renvoyèrent les novateurs aux corps savants. Ainsi, la vérité, qui doit peut-être déplacer le pivot des sciences, changer un jour le monde, est ballottée; elle roule dans l’espace, comme ces astres errants, attendant le moment où, tombant tout à coup, ils bouleversent les corps qu’ils rencontrent sur leur chemin. — Le magnétisme, je n’en doute nullement, produira cet effet sur nos corps savants : ils seront brisés par un choc terrible et inévitable ; car, si nous ne sommes point des imposteurs, si le magnétisme existe, enfin, c’est tout un monde d’idées et de faits qui contredisent toutes les assertions de nos grands hommes. C’est un nouvel art de guérir les maladies; une nouvelle philosophie;

la mort certaine de toute doctrine matérialiste; l’existence prouvée d’un agent pi us puissant que tous ceux découverts jusqu’à ce jour; la réhabilitation de ce qui fut condamné; la preuve de l'existence de l’âme et de celle d’un Dieu !

F.n avant,novateurs! Qu’importent les difficultés à vaincre, el les hommes puissants que vous avez à combattre! Vous avez pour vous la nature, qui ne vous démentira jamais. Ne craignez rien des sophistes, le monde leur appartient par 1111 contrat frauduleux; vous pouvez contester leur titre. S'il existe une Providence, elle doit être avec vous; car vous êtes dans la loi morale qui veut le triomphe de la vérité sur l'erreur, celui du bien sur le mal.

Ne comptez point les années écoulées déjà, cela pourrait refroidir votre zèle; portez vos yeux vers l’avenir, et réjouissez-vous en songeant an triomphe certain de vos idées. N’avez-vous pas déjà vaincu bien des obstacles, détruit bien des préjugés? Après vous, d’aulres hommes achèveront votre tâche. Pionniers de la pensée, vous défrichez des terrains incultes, couverts de ronces el d’épines. Vous avez à vous défendre encore de sauvages ennemis, toujours prêts à détruire ce que vous avez édifié : il en est ainsi pour toute chose nouvelle et féconde; chaque vérité n’arrive qu’après un laborieux enfantement. J’arrête ici le cours de mes pensées, je crains trop en ce moment de pénétrer dans un autre ordre de faits propres à rendre sceptique; je veux garder nia foi et mon espérance, et je vous dis, en terminant cet article, ce que beaucoup de vous auront peine à croire, ce que nul

homme étrangerau magnétisme nopourra comprendre : 11 y a dans l’agent nouvellement découvert tant de vertus, cachées encore à tous les yeux, qu’on peut prédire hardiment la révolution la plus grande, la plus inespérée, el peut-être la plus nécessaire, dans l’humanité tout entière. L’imprimerie, la vapeur, l'électricité, n’ont fait que modifier 1 humanité : le magnétisme humain la changera complètement. Je suis, dans cet instant, peut-être seul de mon avis ; cela me procurera le mérite de prévoir les choses futures. Que ce journal obscur renferme mon aveu; le temps dira.si jetais insensé; mais je refuse tout jugement contemporain; car je m’appuie sur des faits que trop peu d hommes ont eu la faveur de voir, mais qu’ils sont tous appelés à constater cl à produire un jour.

DU l’OTi'.T.

(Im suite prochainement.)

PETITE CORRESPONDANCE.

ItU — M. du Polet commencera un nouveau Cours de magnétsime le mercredi 20 de ce mois. Il aura lieu , comme de coutume , ¡1 sept heures el demie du soir.

On souscrit au Bureau du Journal.

Le Gérant : HÉBEUT (ile Garnay).

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

ffonfftrcnrr» nsaguéiîqucH dominicale».

Magie magnétique.

(Suite.)

La vie ne serait-elle que de l'électricité avec un mélange d’une force incréée, que les anciens appelaient, je crois, esprit astral? Ne serait-elle qu'une lumière pure, qu’un feu ayant puissance d’agir sur la matière et de lui donner la forme? Peu versé dans les connaissances nécessaires à celui qui veut décrire des mystères, je me courbe aujourd’hui sous mon ignorance, laissant à d’autres l’espace et le temps. Je n'ai point de pinceau, et mon langage n’aura qu’un mérite, celui, bien utile pourtant, de peindre la vérité comme je la sens, comme elle s’est présentée à mon esprit, comme elle s’est exprimée par des faits que d’autres hommes ont saisis.

La vie nous arrive par un rayon plus ou moins actif, qui emporle avec lui le rudiment de l'être d'où il s’est élancé. Séparée désormais, libre ei indépendante, elle régit !e domaine qu’elle crée.

TOME. V Kl. —K" 3 OU. —25 E.MMI8 l“4P- 'H

Celte force vive pcul être disjointe de la chair de plusieurs manières. D’abord, par le fait naturel de l’usure des organes, par les maladies, par une vive secousse, par une joie excessive, par le désespoir subit, par de nombreux poisons, par aversion des choses qui la blessent, etc., etc. La vie peut donc s’enfuir tout à coup, quitter son enveloppe ; mais, jusqu’à ce jour, un fait important était inconnu, et c’est celui que nous allons décrire dans toute sa vérité.

Par un moyen magique, d’une excessive simplicité, et par cela même forl caché aux chercheurs, qui pensent toujours que la nature a besoin de grandes combinaisons pour manifester sa puissance. Par quelques signes et quelques traits, je puis isoler la vie, faire qu’elle déloge du domicile humain; rendre sensible à tous les yeux cette singulière opération, et frapper ¿’épouvante ceux qui ignoreraient la possibilité de rétablir les choses dans leur premier étal. Flux et reflux! Le flot baisse, il se reiève par une double puissance. Attraction, répulsion, sympathie et antipathie? Bast! Qu’importe ici l’explication ? Peut-être ne me soucierais-je pas trop de la donner !

Je trace sur le parquet un signe magique, figuré par des traits de charbon. Je place sur cette figure un jeune homme en très-bonne santé, plein de doute, et parfaitement éveillé. J’avertis les spectateurs de bien observer ce qui va se produire, et de ne point interrompre, quoiqu’il arrive. A deux minutes de là, la face du patient s’altère, il éprouve dit-il, des battements dans les tempes, des tinte-

monts d'oreilles, scs yeux se voilent ; il a un commencement de vertige. Ses jambes commencent à fléchir, sa tête quitte la position verticale; les muscles qui la retiennent n’ont pu la maintenir. Encore un instant, et le corps va tomber comme une masse inerte. Chacun le pressent, le voit même, à un mouvement indéfinissable qui se manifeste dans l’être, mouvement que l’on aperçoit seulement à la fin d’une agonie ou à l’approche d’une syncope. Une sueur froide le couvre : c’en est fait ! L’expérimenté succombe. On soutient son corps, où il ne semble rester que la chaleur.

Par un mouvement irrésistible, le père de cet infortuné s'approche, plein de trouble et d’émotion; il a suivi dans tous ses degrés cette curieuse épreuve, et son cœur, détruisant ses doutes, l’empêche de s’y méprendre. Je suis maître absolu de la vie de son fils; encore un instant, et mon pouvoir imitera la nature dans son œuvre terrible : il aura dissipé ce rayon de vie. La balle meurtrière n’est pas plus prompte dans ses effets, lorsqu’elle frappe le cœur, que ne l’est dans cet instant un caractère tracé de main d’homme.

Changeant brusquement la position de l’expérimenté, nous le soutenons sur un signe différent du premier. Petit à petit, il revient à la vie, et je renonce à transcrire ici les symptômes de cette résurrection.

L’incrédulité du jeune homme n’existait plus. Il était converti à la foi nouvelle, ainsi que son père et tous les assistants.

Lecteurs, je ne me joue point de votre crédulité; mon récit n’est que trop fidèle; mais je vous assure

22.*.

que je ne me livrerais qu’à un autre moi-même dans semblable occurence.

Plus j’avance, plus je découvre ; mais plein de sérénité, car je vais, non comme un fou , m’aventurer dans un lieu que je n’ai point exploré; je tâtonne longtemps, je m’assure et ne me risque que lorsque je n’ai rien à risquer.

Plût à Dieu que la science que nous appelons à notre aide reste longtemps encore étrangère au magnétisme ! Vous la verrez un jour répéter avec cet agent ce qu’elle a fait avec les poisons subtils dans quelques hôpitaux. Elle essaiera, et franchira la limite sans scrupule, je vous l’assure : tant pis pour les malheureux! Ne doivent-ils pas, vivants, servir à l’étude des chirurgiens et des médecins? Leurs cadavres, aussi, ne sont point exempts de sacrilèges. Que voulez-vous i* Chaque chose a son temps. Après l’erreur, la vérité; après la nuit, le jour; mais la lumière est bien lente à paraître! Celle qui jaillit en cet instant ne peut éclairer qu’un petit nombre d’hommes. Qui donc allumera le flambeau qui doit guider le genre humain ?

Qu’est-ce, après tout, que ce pouvoir singulier dont je viens de traduire un épisode? Je souffle sur une bougie, je l'éteins ; le fait s’explique. Mais je souf/le une pensée ; elle efface celles qui lui sont contraires et opposées, malgré la résistance de l’être semblable à moi. Je domine sa propre existence; je l’absorbe entièrement ; sa vie n’est plus à lui : elle m’appartient. Dieu donna-t-il au plus fort un pouvoir sur tous? On a bien dit que certains étaient nés pour gouverner les hommes, les conduire et régler leurs destinées. Ils étaient sacrés,

formaient une race à part, et jouissaient de tous les privilèges, même de celui de faire périr qui leur portait ombrage. A ces croyances, on opposa une loi de nature; les doutes devinrent une certitude : nous étions tous égaux. Ilélas ! c’était encore une erreur. L'Egalité, n’existe point; la vérité me force de le dire. La Fraternité rencontre d'invincibles antipathies chez un grand nombre d’étres. La Li~ bertè mal entendue n’est plus qu’un vain mot, propre à séduire les hommes. La liberté, laquelle entend-on? Pour moi, toutes sont dangereuses. Mais le despotisme et la contrainte le sont cent fois plus encore.

Pauvres humains ! Je pourrais rire de votre ignorance; mais c’est vous qui rirez de moi et de mon pouvoir; vous aurez raison, carvous êtes le nombre, et tout se décide aujourd’hui par des majorités, par des chiffres, enfin. Ce sont ceux-ci désormais qui régleront vos destinées. Vous allez subir la loi du hasard, du caprice du sort. La vraie science viendra plus tard comme un dernier remède. C’est elle qui dira : Ceci est vrai, ceci est faux; voilà ce qu'il faut croire. Elle motivera son jugement, non sur des opinions, mais sur des faits. La vérité sera souveraine, parce qu’elle est la raison même.

Mais je m’écarte de mon sujet; je vais y revenir par des descriptions exemptes de cet alliage. Aussi bien tout se touche et s’enchaîne ; lorsqu’on enfonce la sonde dans le sol pour en faire jaillir l’eau qui s’y trouve renfermée, on traverse des couches de terrains divers, l’œil examine avec curiosité ce que la sonde apporte. Ainsi, de même je considère un instant tout ce qui se présente à mon esprit

lorsque, pénétrant dans les mystères d’un fait, j’en aperçois les conséquences forcées.

DU POTF.T.

(La suite prochainement.)

CLINIQUE MAGNÉTIQUE.

DE LA VALEUR DU SOMNAMBULISME

DANS LB TRAITEMENT DES MALADIES.

Il est évident qu’aujourd’hui presque tout le monde confond, comme une seule et même chose, le magnétisme et le somnambulisme. On est, en effet, consulté tous les jours par des personnes qui réclament les secours du magnétisme, et qui se retirent quand on leur dit qu’une consultation do somnambule n’a d’autre bienfait à offrir qu’une indication actuelle d’une médication pharmaceutique dont la puissance est plus ou moins limité« et subordonnée à mille considérations ; tandis que l’application du magnétisme est un moyen direct d'agir sur l’organisation malade par des forces vives. — C’est une consultation de somnambule qu'on veut, ou ne croit pas à l'action du magnétisme; on se figure que les somnambules trouvent d’inspiration les remèdes infaillibles contre la maladie, et aujourd’hui, comme je le disais, dans le somnambulisme est tout le magnétisme. Celle erreur est grave, elle est funeste aux malades eux*

mêmes et au magnétisme considéré comme science.

Il est temps que les hommes sérieux qui étudient et pratiquent le magnétisme, examinent à fond ce qu’est le somnambulisme magnétique dans son essence, quelle est la valeur de ses révélations, et quelle est la cause qui rend efficaces un grand nombre de ses prescriptions médicinales, quoique ces prescriptions soient souvent reconnues sans valeur, et quelquefois même contraires, par la science.

Le somnambulisme est un phénomène dont la magnifique richesse a ébloui beaucoup de magnétiseurs, et qui a grandement contribué à fausser la direction des études, à peine commencées, sur celte science si vaste et encore si peu connue du magnétisme.

L’influence de l’esprit mercantile de notre époque a eu aussi une large part dans la direction qu’a pris le somnambulisme depuis une dizaine d’années. On peut dire, sans crainte d’être démenti, que ce n’est plus le magnétisme qui est un art et une profession, mais bien le somnambulisme. Il n’est pas un journal, en effet, qui chaque jour n’annonce quelque nouveau ou nouvelle somnambule lucide, extra-lucide, ayant facultés médicales et prophétiques.

Certes, ce n’est pas moi qui nierai chacune de ces facultés dans tel ou tel somnambule; mais je ne puis demeurer insouciant à la vue de cet étalage de facultés somnambuliques, toujours prêtes à se montrer à la demande des consultants qui se renouvellent chaque jour, et souvent à l’heure, pour la satisfaction du caissier.

La lucidité à l’aide de laquelle un somnambule peut indiquer à des malades la nature de leur mal, et les remèdes convenables, est assez rare; elle est peu durable, si elle est fatiguée par un trop fréquent usage; celle qui permet de voir quelque chose de l’avenir, ou de suivre par rétrospection un événement quelconque, est encore plus rare et ne se commande pas à volonté. Comment donc alors *:îs nombreuses sybilles et ces nouveaux oracles sont-ils toujours prêts à répondre aux désirs d’un consultant?

L’expérience, mais l’expérience sévère et dégagée du ver rongeur de l’intérêt, épure une croyance trop enthousiaste au somnambulisme, et permet de j-établir les choses dan» leur véritable état, elle laisse au somnambulisme ce qui lui appartient, et elle restitue au magnétisme ce qu’un enthousiasme mal éclairé lui avait ravi,

Deleme, qui devrait servir de modèle sous tant de rapports, dit en parlant des somnambules à consultations : « .„.Ce* somnambules sont rares; 11 ceux qui ont donné des preuves de cette inconcevable çl^irvoyance, ne la conservent pas totyours, et ne la possèdent que dan» certains moments. » {IugtnuHian pratique-)

Koreff, ce médecin si expérimenté, s’exprime ainsi dana sa, Lettxe à Delmzei * Je ne nie point, et jç l’ai bien des fois, que les somnambules de procession n’aient souvent des aperçus très-justes et.très-surprenants,, qu’ils n’opèrent des guérisons extraordinaires; mai* je persiste dans l’opinion, qu’une longue pbservation m’a fait adopter, qu'on trouve chez plusieurs d’entre eux un mélange

inextricable d’aperçus justes, inspirés par une intuition instinctive, avec des réminiscences et même avec des illusions provoquées par une singulière variété inhérente à cet état, et que sur cet océan obscur, on manque tellement de boussole, qu’il est du devoir de se confier plutôt aux conjectures rationnelles de la science, qu’aux incertitudes incalculables d’un instinct si facilement égaré par l’usage arbitraire qu’on en fait. »

Je le demande, a-t-on aujourd’hui trouvé la boussole qui puisse diriger la lucidité si mobile des somnambules? Celui qui regarde comme sans appel les assertions des somnambules, en est à son début, ou manque d’esprit d’observation.

L’étude du magnétisme, qui comprend celle du somnambulisme, est une de celles qui exige le plus de temps, le plus de sagacité, le plus de profondeur d’esprit ; il faut être à même de faire l’examen comparé de la physiologie dynamique de tous les êtres , il faut pouvoir comprendre par une philosophie transcendante les forces et les facultés des âmes ; et quand des savants qui ont toutes ces conditions d’étude n’hésitent pas à mettre la valeur d’application du somnambulisme au-dessous de celle du magnétisme, qui est force vive, on ne comprendrait pas queje protestasse contre les fastueuses prétentions du somnambulisme moderne!

Je ne puis traiter ici du somnambulisme d’une manière assez complète, et je suis forcé de renvoyer à ce que j’ai dit sur cet important sujet dans la deuxième édition de ma Physiologie du Magnétisme; je veux seulement entrer dans quelques con*

sidérations relatives au somnambulisme appliqué aux consultations médicales.

A ce point de vue médical, le somnambule lucide est celui qui, mis en rapport direct ou indirect avec un malade, indique les parties souffrantes, la cause organique de ces désordres, et les moyens de soulagement ou de guérison.

Celte faculté inhérente au somnambulisme lucide, ne l’est pourtant pas d’une manière tellement absolue, qu’elle soit une conséquence du développement de l’état somnambulique. Loin de là, cette faculté d’instinct médicinal est plutôt l’exception que la règle; c’esl donc une erreur dont les suites sont très-graves, que de croire médecin tout somnambule qui s’annonce comme tel.

L’expérimentation qui doit éclairer sur la véracité et la justesse des dires du somnambule, est plus difficile que ne le pensent généralement bien des personnes. En se renfermant dans des détails généraux, il est facile à quelque somnambule, même de bonne foi, de tromper les autres en se trompant lui-méme.

Mais, lorsque le somnambule indique parfaitement les parties malades qu’il signale, les causes physiologiques de la maladie, ce n’est pas une raison pour que cette lucidité soit la preuve que celle qui fait trouver les remèdes existe, et c’est là l’é-cueil de la médecine somnambulique. On est, en effet, naturellement porté à recevoir avec confiance les remèdes conseillés par un somnambule qui vient de donner les renseignements les plus exacts sur une maladie, et pourtant, il faut qu’on le sa-

che, il n’y a point de solidarité forcée entre ces deux genres ou ces deux degrés de lucidité.

Très-souvent, les somnambules assez lucides pour sentir et voir le mal dans sa nature et dans scs effets, ne sont plus que des individus à facultés de l’état de veille, quand ils abordent le traitement. Ainsi, les uns ne coordonnent leur médication qu’à l’aide des moyens divers, dont la connaissance leur est acquise par le commerce habituel de la vie; les autres se sont fait une sorte de méthode de traitement qu’ils appliquent dans tous les cas; chez d’autres, l’habitude et la réflexion en état somnambulique les guident dans leurs prescriptions à l’aide de certaines études de médecine et de botanique. Bienheureux ceux dont la pharmacopée est inoffensive par sa composition de plantes sans grande puissance ; car ils n’exposent pas les malades qui les consultent à des accidents sérieux.

Je crois donc, avec Deleuze, avec les médecins magnétistes de l’Allemagne et bien d’autres, que les ressources offertes par le somnambulisme aux malades consultants, sont très-restreintes, et qu’elles sont inférieures à celles que le magnétisme, agent dynamique, renferme par suite de sa nature et de son mode d’action.

Pour mieux faire comprendre la force des réflexions que je viens d’ébaucher, je citerai deux faits choisis au hasard parmi des centaines consignés dans mes notes.

Depuis plus d’un an, une demoiselle d’environ a5 ans, éprouvait une maladie singulière. C’étaient des enflures de grosseur d’une noix, d’un œuf, de

couleur rouge ardent ou violacé, qui se développaient sur toutes les parties du corps, soit en même temps, soit en épargnant telle ou telle partie, lille ressentait, quelques heures avant, un sentiment de brûlure, de picotement à l’endroit qui bientôt devenait gonflé et plus ou moins tuméfié. Les yeux ou les joues, le cou ou les bras étaient tour à tour envahis, quelquefois ensemble; un autre jour c’était le corps et les jambes. L’enflure une fois établie, la fièvre, qui l’avait précédée, diminuait, et pendant quatre à six jours la tuméfaction continuait, puis disparaissait graduellement, pour se montrer sur d’autres points, après un intervalle de six à quinze jours au plus.

Les forces étaient un peu affaiblies, il y avait une toux sèche, de la pâleur, peu d’appétit, de la soif. Rien d’anormal dans les autres fonctions.

Plusieurs médecins avaient considéré cette maladie comme scorbutique, et, pendant une année, avaient vainement usé des moyens les plus rationnels.

Cette malade désira que je la soumisse à l'examen d’une’somnambule fort lucide que j’avais alors, et qui, dans plusieurs cas difficiles, avait non seulement porté un diagnostic très-précis, mais avait aussi guéri par des ordonnances médicinales.

Cette somnambule déclara voir du sang congestionné dans tous les organes, principalement dans les intestins et à la gorge; selon elle, le sang était trop liquide el altéré.

Traitement. — Infusion de tilleul et ache, avec sirop de chicorée pour tisane. Bains de pieds à l’ar-

moise; cataplasmes sur le ventre avec verveine et suqeau ; au bout de huit jours saignée du pied.

Quinze jours après, il y a eu quelque amélioration. — Nouvelle consultation. Continuer un mois, et saignée du bras. — Purger tous les dix jours.

Ce traitement fini, il y avait beaucoup de mieux; mais les enflures, quoique moins fortes, revenaient encore. — La somnambule ordonna de prendre chaque mois, huit jours avant les règles, un grand bain avec cerfeuil, verveine, armoise, caille-lait; continuer les purgations, et, à la sortie du bain, faire une petite saignée au pied. Suivre six mois ce traitement. On suivit ponctuellement ces moyens ; mais il n’y avait pas encore de guérison. Je conseille alors à la malade de laisser de côté toute médication et de recourir au magnétisme.

La magnétisation produisit des effets très-sensibles.

Le sommeil magnétique se déclara, offrant de particulier une torpeur si profonde, que tous les muscles du corps étaient comme paralysés, et que, quand au bout d'une heure le sommeil perdait de son intensité et laissait la pensée et la volonté fonctionner, il était impossible à la magnétisée de faire le moindre mouvement ou d’articuler une parole, malgré des efforts tentés.

Il est d’observation que quand le magnétisme produit dans l’organisation des effets puissants et nettement appréciables, il est à peu près certain qu’avec de la persévérance et de la méthode, on obtiendra un soulagement notable, si toutefois il n’y a pas guérison. Aussi, dans le cas dont nous parlons, espérant beaucoup, je continuai environ

un mois une magnétisation quotidienne, puis je la distançai pour l’abandonner entièrement. .

Au second mois, la santé était redevenue parfaite, et nulle trace d’enflure ne paraissait plus. Depuis cette époque, bien des années se sont passées, et jamais celte maladie n’a reparu.

11 est donc évident que dans ce cas l’action du magnétisme a modifié l’organisme d’une manière toute salutaire, et que cet agent a régularisé les forces vitales, bien mieux que n’avaient pu le faire des médications appliquées d’après la science rationnelle et d’après la lucidité somnambulique.

Autre fait.

Une demoiselle, de 35 ans environ, éprouvait depuis près d’une année, des douleurs dans la région de l’estomac et dans les intestins , dont le caractère paraissait nerveux. Les digestions étaient très-difficiles, souvent les reins étaient pris, aussi, de douleur, et les urines contenaient des sables très-fins et en petite quantité. Parfois, la tête devenait très-souffrante, des étouffements très-pénibles survenaient, se terminant quelquefois par de légères crises nerveuses, accompagnées de sanglots. La menstruation était régulière, mais diminuée, et son approche augmentait toujours les accidents.

Malgré l’emploi de différents moyens appropriés à cette névrose, l’amélioration était loin de se montrer; la malade, au contraire, perdait ses forces et son courage, et la maladie augmentait d’intensité.

La malade voulut consulter une somnambule.

N’en ayant point à ma disposition, je laissai faire ma cliente, qui envoya des cheveux à une somnam-

bide do Paris, et je lus la lettre, qui ne donnait assurément aucun indice sur la maladie.

La consultation fut un mélange de vérités et d’as' sériions erronées sur la maladie et sur la malade. Néanmoins, des aperçus d’une justesse frappante so faisaient remarquer sur la nature de l’afiection, et sur son siège.

Le traitement était indiqué d’une manière générale; mais il était réellement en rapport avec ce que demandait l’état de la malade. 11 fut suivi avec exactitude, amena du soulagement, mais ne guérit pas ail'temps promis.

Je conseillai alors d’avoir recours au magnétisme. Dès la première séance, le sommeil se manifesta; bientôt il devint somnambulisme, mais sans aucune lucidité. Au bout de dix à douze magnétisations, un mieux sensible était obtenu, et, après trois semaines, la santé était redevenue aussi bonne qu’autrefois.

Cette seconde observation montre, comme la première, quelle influence salutaire le magnétisme exerce sur l’organisation malade depuis un long temps ; influence bien supérieure à celle de toutes les médications, même somnambuli-ques.

Loin de moi de vouloir généraliser l’enseignement qui ressort dos réflexions qui précèdent; une pareille prétention serait le fait d’une prévention mal fondée contre le somnambulisme, et de l’ignorance, en attribuant au magnétisme une puissance qu’il n’a pas sur beaucoup d’organisations. J’ai seulement cherché à prémunir les esprits contre les dangers de l’enthousiasme et de la crédulité, et

à les ramener à une juste appréciation de la valeur du magnétisme et du somnambulisme, appliqués au traitement des maladies.

1)' CHAKl’IGNON.

A Monsieur du Polet de Sennevoy.

Mon cher maître,

Fidèle apôtre du mesmérisme, ou plutôt digne émule du maître,vous avancez dans la découverte et l’enseignement d’étranges et sublimes vérités, sans être arrêté par la grande commotion politique qui ébranle aujourd’hui le vieux monde, et prépare l’avènement du nouveau. Journellement en communication avec les esprits, vous vous occupez peu de ces matérialistes qui veulent conserver la société comme elle est, parce qu’elle procure toutes le9 jouissances de leurs basses passions satisfaites. Vous me rappelez le Juif-Errant, auquel il est dit : Marche!... Or, le Juif-Errant a toujours été pour moi le symbole du progrès , qui doit marcher jusqu’à la fin des siècles d’ignorance, jusqu’à l’avènement de la lumière et de la vérité. Vous continuez vos belles expériences, méprisant les sarcasmes, l’incrédulité, l’indifférence, et sans autre espoir de rémunération que celle d’une conscience satisfaite; sans autre stimulant que la pensée du bien que vous faites dans le présent, et des trésors que vous amassez pour l’avenir.

J’aime à vous suivre dans le beau inonde des intelligences où vous moissonnez si largement, parce

que, l’un clos premiers, vous en avez découvert toutes les richesses. Ce beau inonde ne m’est pas inconnu, comme vous le savez; car vous m’avez quelquefois reproché de m’y égarer , d’être trop psychiste et pas assez /luidiste. Dès mes premiers pas dans la science, j’ai compris toute l'action de l'âme dans le magnétisme, et j’ai constaté par de nombreuses expériences tout ce que l’homme peut sur l’homme. J’ai obtenu, sans le sommeil magnétique, les plus étranges phénomènes : la tristesse, la joie, l’ivresse, le délire, l’immobilité, la communication de pensées. Je rappellerai l’observation que j’ai publiée dans le temps, de certain brigadier des eaux et forêts, M. C..., que je paralysais, j’immobilisais, à de grandes distances; que je rendais insensible en totalité ou en partie; que je faisais venir de chez lui chez moi, sans avertissement, sans l’avoir préalablement soumis à l’action du magnétisme, par le seul fait de ma volonté. C’est l’obtention de ee phénomène qui m’a fait dire : Le fluide magnétique n’est que très-secondaire dans le somnambulisme; j’allais même, vous le savez, jusqu'à nier son existence, et, si je l’admets, je suis encore loin de lui accorder l'importance que lui reconnaissent le plus grand nombre des magné-tistes. Ne serait-ce pas parce que cet agent n’est pas encore défini? Ne serait-ce pas parce que notre vocabulaire manque encore des mots nécessaires pour désigner convenablement les éléments du magnétisme? J’aime à le penser; car je reconnais que l’action de la main, que l’action du souffle, ajoutent considérablement à la volonté, qui est le moteur principal.

Celle action de la main el de l'insufllation, ressort avec évidence des deux observations que je prends la liberté de vous soumettre, observations religieusement recueillies au lit de mon enfant mourant, et que j’ai sauvé par le magnétisme.

Ami déclaré de toutes les réformes ayant pour but le bien de l'humanité et l’amélioration de la classe des déshérités, j’ai dû subir les persécutions qui atteignent aujourd’hui les partisans de la démocratie. Je me suis trouvé dans la nécessité de fuir pour me soustraire à une condamnation à cinq années d’emprisonnement, et à une amende s’élevant, avec les frais, à 16,000 fr.

Je m’étais réfugié à Aix-les-Bains, où ma femme et mon enfant sont venus me rejoindre et partager mon exil. Nous habitions cette localité depuis un mois, lorsque mon fds, âgé de six ans, fut pris tout à coup, sans cause appréciable, d’une fièvre intense, avec éruption ortiée d’abord , puis avec lous les caractères de la fièvre typhoïde. L’estomac et les intestins s’altérèrent assez gravement pour déterminer une soif intense, un amaigrissement rapide, un balonnement et une sensibilité abdominale très-prononcés, accompagnés de coliques incessantes, et assez vives pour arracher au petit malade des cris continuels. En moins de huit jours, mon pauvre enfant se trouva réduit à l’état de squelette. Pendant vingt jours, je l’ai disputé à la mort qui le menaçait, et mon traitement s’est borné à de fréquentes magnétisations. J’étan-chais, comme par enchantement, sa soif ardente par quelques cuillerées d’eau magnétisée; je calmais instantanément scs coliques en appliquant

ma main sur l'abdomen, et en formulant cette prière: Oh! mon Dieu, soulagez mon enfant! Ma main n’était pas retirée, que les cris recommençaient. Les passes ne pouvaient remplacer l’action de la main. Je ne pouvais quitter un seul instant mon petit malade, qui voulait toujours la main de papa. Je ne vous dirai pas les heures des jours et des nuits que j’ai employées à le magnétiser. Enfin, mes efforts ont été couronnés de succès; le pouls, qui donnait i5o, jusqu’à 200 pulsations à la minute, s’est ralenti ; la fièvre s’est calmée, le sommeil et l’appétit ont reparu , et je m'applaudissais de cette guérison, lorsqu’nprès un écart de régime et un exercice trop forcé pour un convalescent, mon pauvre fils est pris de tous les symptômes d’une affection cérébrale: fièvre ardente, pouls brûlant, assoupissement invincible, interrompu par une violente agitation et un délire furieux, dépérissement rapide, etc., etc. J’eus de nouveau recours à la magnétisation, et, chose merveilleuse, je faisais disparaître tous ces symptômes effrayants par l’insufflation sur le front. Mon enfant était aux prises avec la douleur, le délire; on avait peine (1 le contenir dans sou lit; j'arrivais, je soufflais légèrement sur son front, et le calme se montrait, suivi bientôt du sommeil le plus paisible. Je cessais l’insufflation, et le réveil, suivi du délire et de l’agitation, reparaissait. Les insufflations de sa mère, celles de sa nourrice, le soulageaient, mais bien moins rapidement que les miennes. J’ai passé des nuits entières à souffler sur le front de cet en-faut chéri ; je sacrifiais ma santé, je prenais de ma vie pouf fa 1;Ver la tienne. Pendunt douze jours,

j’ai dû combattre les accidents cérébraux; el l'insufflation et l’eau magnétisée ont été mes seuls remèdes. Aujourd’hui, mou fils jouit d’une santé parfaite.

Déjà, depuis longtemps, dans ma pratique, je calmais les convulsions des enfantsles coliques des adultes, par l’application de ma main sur l’abdomen; je faisais disparaître les céphalalgies les plus intenses, par l’insufflation sur le front. Je ne saurais trop recommander ces deux moyens d’action magnétique.

J’ai visité à Aix l’excellent docteur Despine, qui n’a rien perdu de sa foi mesmérienne. J’ai trouvé dans ses confrères, non .plus cette incrédulité systématique qui les faisait jadis accabler de leurs sarcasmes les disciples de Mesmer, mais un doute qui, pour la plupart, est une croyance qu’un sot amour-propre empêche encore d’avouer.

Continuez, cher maître, le grand œuvre que vous avez si bien commencé. La société, qui se régénère, secoue actuellement ses vieux langes pour apparaître bientôt brillante de fraîcheur et de lumières, foulant aux pieds le matérialisme. C’est alors seulement que les sciences et les arts reprendront leur prépondérance, que la philosophie sc retrempera dans les découvertes du magnétisme. C’est alors seulement que justice sera rendue à nos efforts, et que le mesmérisme triomphera, appuyé sur la liberté et vos sublimes expériences.

Dans cette attente, agréez, cher maître, les sentiments d’affection de votre bien dévoué correspondant,

P. C. ORDINAIRE, D. m.

VARIÉTÉS.

Autographe de Mesmer. — On retrouve de temps en temps des traces de l’activité que déployait Mesmer pour faire admettre sa découverte.

La pétition qu’on va lire est inédite; nous en devons la communication à l’obligeance de M. Bou-tron. La date de ce document coïncide avec la mention du Moniteur, que nous avons publiée, tome Y, page a65. Cette pièce importante est écrite en entier de la main de Mesmer, et nous la reproduisons telle qu’elle est, avec ses fautes de langage, comme nous l’avons fait pour les autres manuscrits.

MESMER, m. d.

Au citoyen François de Neuf château, ministre de l’intérieur.

Citoyen Ministre,

J’ai présenté sous l’ancien gouvernement la découverte que j’ai fait dans la nature de moyens inconnus jusqu’alors de guérir et de se préserver des maladies. L’esprit de nouveauté l’a fait un instant accueillir, mais bientôt j’ai été repoussé par l’entêtement des corporations que je désirais instruire.

Après avoir employé, malgré les contradictions de tout genre, vingt années de travail à perfectionner cette découverte, je me suis aujourd’hui encouragé, par la sollicitude d’un gouvernement philosophe, et occupé en ce moment d’une nouvelle organisation des écoles de médecine.

Quelle circonstance plus favorable pour apporter à la grande nation le fruit de connaissances aussi précieuses à la conservation de l'espèce humaine, que celle, où elle profite de son génie et de ses victoires pour communiquer ses lumières el ses vues bienfaitrices aux peuples qui, à l’appui de sa puissance, sçavent se soustraire à la tirannie et aux préjugés !

Mon désir le plus ardent est de faire hommage à la République française du fruit de mes travaux, et de la faire jouir ¡le plus promptement possible des avantages de ma méthode de guérir, à raison des années qui s’accumulent sur ma tête, et qui ne me laissent que peu de tems pour l’exécution des moyens d’instruction et de pratique nécessaires à un établissement aussi nouveau dans son genre qu’inappréciable par son utilité.

Permettés moi, citoyen Ministre, de vous présenter les moyens d’application. Je propose qu’on fasse de ma doctrine partie du plan qu’on va adopter pour l’enseignement médicale , et pour le faire d’une manière sure, générale et évidente, je demande qu’on me confie une chaire clinique dans un hospice destiné à former une école normale de l’art de guérir pour y instruire les officiers de santé conformément à mes principes. J’y développerai les méthodes de traiter toute espèce de maladies in-

ternes et externes. J'ose avancer sans prétention ni amour propre, que bientôt on sera forcé de reconnaître l’étendue de mes découvertes en physique et en médecine, et leur application utile pour le perfectionnement de l’espèce humaine. La conviction de l’avantage de ma méthode sur toute autre employée jusqu’à ce jour ne tardera pas à devenir générale, el le gouvernement s’empressera de former tous les établissemens des hôpitaux à l’instar de celui qui m’aura élé confié.

Pour annéantir même les préventions contre moi, auxquelles ont donné lieu ceux qui, d’après des connaissances superficielles de ma méthode l’ont quelquefois indirectement appliqué, je compte publier un Mémoire qui expliquera les phénomènes qu’ils ont exposé trop légèrement à la curiosité, je ferai plus, je désignerai et je préviendrai par l’exposition et l’application de mes principes les erreurs occasionnées par ces phénomènes merveilleux, qui, dans tous les temps ont égaré l’esprit humain, et dont on s’est servi pour établir et alimenter le fanatisme et la superstition ; et ainsi en indiquant aux hommes les moyens naturels de guérir, et de jouir de la santé, je leur procurerai encore des lumières pour parvenir, autant que possible, à la connaissance de la vérité.

Je vous prie , citoyen Ministre, en réponse à la présente, de me marquer le jour et l’heure où vous pouvez disposer de quelques momens. Je me flatte qu’après m’avoir entendu, vous ferez agréer au gouvernement français l’hommage que je lui présente aujourd’hui, et ce sera ajouter aux droits

que vous avez à la reconnaissance nationale et à celle de l'humanité.

Salut et respect,

MESMER,

Docteur en Médecine,

à Paris ce 5 nivôse l'an 7*, rue Gaillon,

Maison do Gaillon, n" 28.

— Il sera donc bien prouvé un jour que toutes les tentatives ont été faites auprès des pouvoirs pour établir le magnétisme d’une manière officielle, en le faisant entrer dans l’enseignement. Mais, République ou Monarchie, Faculté ou Académie, c’est tout un ponr les vérités : elles n’ont rien û gagner aux tourmentes politiques; dans la paix même, elles ne peuvent triompher que par le dévouement et le sacrifice des individualités.

Magnétiseurs! aujourd’hui comme jadis, vous n’avez rien à attendre d’aucun pouvoir; ce qu’a fait Mesmer sous le Directoire, je l’ai tenté sous Louis-Philippe (i), imitant ceux qui m’avaient précédé, et qui sollicitèrent les Bourbons de la branche aînée. Nous pouvons nous passer de tous les pouvoirs. Nous ferons moins de bien, sans doute, et la marche sera plus lente; mais nous arriverons envers et contre tous.

(I) Voye» lome I", pages 97 el 241.

Le Gérant : HÉBERT (de Garnay).

BIBLIOGRAPHIE.

MESMEIl AND SWEDENBORG : or, the Relation of the Developments of Mesmerism to the Doctrines and disclosures of Swedenborg; by Gkorgb BUSH. 1 vol. in-12", second edition, New-York, 1847.

It ccrtainly is agreeable to reason, that there are some light efllazions from spirit to spirit, when men are in presence one with another, as well as from body to body.

Fr. Bicox.

Un document sur le magnétisme animal adressé, le 19 juin 1787, par la Société exégétique et philanthropique de Stockholm, à celle des Amis réunis de Strasbourg, a probablement donné au professeur Bush, l'idée de l’ouvrage que nous avons à examiner.

Instituée en 1786, dans le but de publier les écrits et de propager les doctrines de Swedenborg, fondateur inspiré de la secte des néo-chrétiens spiritualités, nommés Jérusalemistes; cette Société, toute religieuse, puisqu’elle empruntait son titre aux exégètes, interprètes de la religion à Athènes, fit en peu de temps, de nombreux prosélytes parmi les membres du culte réformé. Elle admettait les livres canoniques de l’Écriture, corrigés par Swedenborg, d’après les textes hébreu et grec;

TOMF VIII. — W 107. —10 DfCKMnRK ISii). 2r>

mais rejetait impitoyablement tontes les décisions des conciles.

En Angleterre, où ce nouveau dogme eut pres-qu’immédiatement de fervents apôtres, on publia, en 1790, des annales sous le litre de Revue de la nouvelle Jérusalem (New Jérusalem magazine). 11 sc répandit jusqu’en Amérique; et depuis, il est peu de contrées en Europe où il n’ait étendu ses racines. A Paris , même, une société de magnétiseurs spiritualistes, semble vouloir suivre les doctrines mystiques du -prophète suédois, qu’ils invoquent, dit-on, sous le nom de bienheureux Swedenborg.

Lorsque la société exégétique se constitua, il y avait déjà plusieurs années que Mesmer avait fait connaître au monde sa sublime découverte, et qu’une foule d’écrits sur le magnétisme et le somnambulisme, avaient été publiés par lui ou par ses élèves.

Frappés de l’identité des faits du mesmérisme, récemment connus, avec les doctrines et révélations de Swedenborg, les membres du synode sué-dqis s’empressèrent de se mettre en relation pacifique avec les Amis réunis, el leur adressèrent, dans ce but, le document en question (1). Ils semblaient alors, partager J’émotion produite, dans leur pays, par l’ayantage de position que les phénomènes magnétiques, divulgués et produits au grand jour, ppuvaient prendre sur les révélations mystiques, cachées de Swedenborg. Emotion bien naturelle, dit M. Busch, quand on sait que la première añil) I^Ure sur la seule explication satisfaisante des phénomènes du Magnétisme et du Somnambulisme, etc. ln-8"; Stockholm , 1788.

nonce de ces merveilles fui reçue avec une incrédulité universelle, et comme étant aussi ridicule que digue de mépris. Il est probable que voyant un adversaire puissant et dangereux dans le mesmérisme; puissant, par la force de ses arguments positifs qui imposent la conviction; dangereux, parce qu’il ébranlait la croyance des adeptes de la secte nouvelle, en soulevant le voile mystérieux dont Swedenborg avait pu couvrir l’origine de ses révélations, et en montrant ainsi, sous le manteau d’un prétendu prophète, un habile magnétiseur.

Poussés par l’instinct de conservation , ils crurent conjurer l’orage en recherchant l’alliance des propagateurs de la science nouvelle. Ils le firent convenablement, à la vérité; mais, avant tout, de manière à sauvegarder l’honneur et les intérêts de la société naissante dont ils cherchèrent à leur faire partager les doctrines.

Cette démarche diplomatique , par laquelle ils étaient obligés de confesser la vérité mesmérienne, les avait entraînés à en étudier les faits merveilleux; et, après les avoir produits eux-mêmes, à les comparer aux révélations de leur maître. Mais, dominés par l’esprit de secte, plutôt que par la raison et la vérité, ils prétendirent trouver dans les révélations, l’autorité et les principes des faits du mesmérisme; tandis qu’en saine logique, c'était dans les phénomènes magnétiques que les doctrines du savant suédois devaient trouver leur véritable pierre de touche. Car, l’autorité du témoignage ne s’établit pas sur une déclaration individuelle: teslis mus, testis niillus. Mesmer, lui, avait acquis celte autorité, par l’identité des

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faits produits par une foule d’expérimentateurs, scs élèves ; voire même, par les partisans de Swedenborg.

Ainsi, c’est au besoin de coordonner les doctrines du révélateur avec les vérités éternelles du mesmérisme, que l’on doit la lettre des membres de la Société exégétique. Nous ignorons quels auraient été les résultats de ces communications scientifiques, si les événements politiques survenus pres-qu’immédiatement en France, n’avaient réduit au silence toutes les sociétés savantes.

Depuis cette époque, la science du mesmérisme s’est bien répandue, développée; une foule d’hommes dévoués aux idées humanitaires ont, par leurs travaux consciencieux, persévérants, assis le mesmérisme sur des bases inébranlables; et aujourd’hui, cette supériorité de position semble troubler de nouveau les adeptes de la révélation Sweden-borgienne, dont le nombre s’est prodigieusement accru. Le professeu Bush, l’un de ses apôtres les plus zélés, et l’on peut dire, les plus éclairés, a repris, en sous-ceuvre, la tentative des anciens membres de la société de Stockholm; et afin d’arriver, en quelque sorte, à canoniser son bienheureux fondateur, il a écrit son Mesmer et Swedenborg , ouvrage dont nous nous sommes chargé de rendre compte, et qui, certainement, offre beaucoup d’in-térét au point de vue des progrès de la science nouvelle. Mais là ne se borne pas la tâche, je devrais dire , les prétentions du savant professeur; il veut encore, pour donner plus de poids au caractère inspiré de Swedenborg, se servir du témoignage extatique de A. 3. Davis, ce somnambule amé-

ricain dont on a tant parlé; de celui de la célèbre voyante de Prévorsl, ainsi que de celui du Révérend William Tcnncnt, dont il rapporte une vision bien extraordinaire.

En analysant cet ouvrage, nous porterons notre examen sur les facultés sompambuliques de ces différents personnages; et surtout, sur les conséquences que M. Bush croit pouvoir en tirer. Mais, avant, nous suivrons l'auteur dans la classification des différents états magnétiques, dont quelques-uns, sous le rapport analytique, sont tout nouyeaux. A ce point de vue, son ouvrage est un véritable traité du mesmérisme, qui a toute l'orthodoxie désirable. 11 est vrai qu’il n’a voulu le donner que comme un accessoire, ne le faire servir que de cadre pour exhiber les doctrines de son auteur favori; mais nous ferons comme cet amateur qui, achetant un mauvais livre orné de riches vignettes, commence, chez le marchand stupéfié, par en arracher les gravures, puis, jette le texte au feu. Nous ne ferons un semblable auto da-fé, cependant, qu’après l’inventaire des droits à la mission prophétique que s’est attribué le théosophe suédois; qu’aprèç avoir examiné scrupuleusement la source et Ja nature de scs révélations, et reconstruit les éléments mag°é-tiques qui, suivant notre opinion, ont servi de base à ses révélations, comme à la plupart de sps ouvrages philosophiques et scientifiques.

Parmi les différents aperçus que nous suggèrent certains passages de ce volume, il sc trouvera, peut-être, quelques propositions qui choqueront des idées reçues. Nous conjurons nos lecteurs, d^RS l’intérêt des progrès de la science, de sc prémunir

contre ce que nous appelons des idées arrêtées, et qui ont trop d’analogie avec dos préjugés. En lisant le livre de M. Bush, notre sentiment a passé par des phases bien diverses : l’approbation, le dédain, la satisfaction, le sourire de pitié, se sont succédés à chaque nouvel examen. Ce dernier état de notre conscience de magnétiste, nous a dominé longtemps et nous avait inspiré une critique amère. Mais une étude plus suivie, un examen plus approfondi, nous ont fait revenir à la conviction que de9 assertions qui nou9 avaient paru hétéroclites, portaient le germe de principes tout à fait rudimentaires. Et d’ailleurs, pour arriver aux connaissances que nous possédons, qui ne sait combien d’erreurs, erreurs nécessaires, ont été formulées, proclamées, admises! Tandis que la vérité était antipathique et repoussée dédaigneusement.

Un acte de justice et de courtoisie que nous devons remplir envers le professeur Bush, notre auteur, nous oblige, avant d’arriver à un examen sérieux de Swedenborg, au point de vue psychologique ou de scs facultés magnétiques personnelles, ainsi que de ses révélations, nous oblige, disons-nous, à exposer quelques idées des doctrines dont il fait précéder son travail. Il est juste de montrer que s’il admet les principes, et accepte sans réserve les révélations du savant illuminé, c’est du moins avec une profonde conviction. Cependant , nous ne nons dissimulons pas que nous avons, devant nous, un homme grave, aussi éminent par son savoir que recommandable par son caractère. Si, malgré l’usage habile qu’il fait du syllogisme, nous parvenons à prouver qu’il s’est trompé, n'oublions

pas, en publiant son erreur, que c'est trop souvent aux hommes avides de vérités nouvelles qu’est applicable le vieil adage : Errare humanum est.

Les progrès des sciences, dit-il, se sont autant manifestés par leur étendue, que par la solidité et la certitude des inductions sur lesquelles ils reposent. 11 suffît de citer l’astronomie, la géologie, la physiologie , la chimie , pour montrer jusqu’à quelle profondeur a pénétré l’œil perçant de l’étude. Et quoique l'ultimatum de ses conquêtes ait laissé de nouveaux mondes de vérités à découvrir et à explorer, on ne peut nier que ses principaux résultats ne soient basés sur des observations justes et des raisonnements solides.

Ce titre de recommandation, cependant, ne doit pas faire admettre que la théorie des causes soit découverte , ni que des investigations ultérieures ne viendront pas renverser 'ou modifier grandement celles qu’on admet dans plusieurs branches des sciences. Pourtant, il n’en est pas moins vrai que les temps modernes ont immensément accru le nombre des faits recueillis antérieurement.

Il est également positif que nous nous rapprochons continuellement de la vraie philosophie, celle qui est subordonnée à la méthode expérimentale, et qui prédomine de nos jours. Cette philosophie, lorsqu’elle sera complètement développée, nous conduira dans la sphère spirituelley la vraie région des causes, et fera découvrir des rapports nouveaux et imprévus, entre le monde matériel et le monde spirituel. Cette prévision, qui est très-légitime, préoccupe beaucoup , quoique vaguement, toutes les intelligences. G. Bush prétend que « ce but a

été non seulement prédit, niais atteint par le sublime système de philosophie et de théologie, réunies et incorporées dans les ouvrages de Swedenborg ; système qui satisfait à tous les besoins de l’esprit, et répond à tous les desiderata qui pourraient se formuler dans les siècles à venir. »

De plus, pense-t-il, il n’est pas déraisonnable de supposer que Dieu, voulant octroyer au monde une nouvelle révélation, et l’appuyer sur une masse de témoignages, les récents et merveilleux faits du mesmérisme ont dû servir de confirmation et d’appui à la vérité que la Providence a cru cohvenablc d’accorder à ceux qui la recherchent.

Ces phénomènes constituent un thème d’études très-intéressantes, considérées, même* dans leurs effets physiques et les plus ordinaires, puisqu’ils appartiennent à l’organisme humain. Mais ce n’est pas sur ce terràin qu’ils placent leurs plus hautes prétentions. Ils s’appuient aussi directement Sur la psychologie que sur la physiologie : ils entrent dans la sphère de l’anthropologie au point où celle-ci se lie avec la théologie.

A mesure que se développent nos connaissatices dé nous-mêmes, nos connaissances de la vie future s’accroissent, et doivent continuellement progresser, par le résultat des recherches physiologiques et psychologiques. Or, dans ce champ du savoir, on ne peut mettre en doute que les phénomènes du mesmérisme ont fait apparaître une nouvelle phase de notre nature, remplie d’aspects nouveaux, frappants el importants pour la philosophie de l’âme. Et, quoi qu’on en puisse dire, ils découvrent une classe entièrement nouvelle de faits de

psychologie, dont la réalité ne saurait être mise eij doute, ni l’importance placée trop haut.

Les principaux phénomènes mesmériques sont du domaine de l'esprit. Ils comprennent les lois dç la communication mentale entre un esprit et un autre esprit. Us nous portent donc précisément dans la, sphère des phénomènes que Swedenborg prétend expliquer. Sa prétention , ou ne l’ignoçe pas, est d’avoir été mis , surnaturellement, dans un état qui lui permettait d’avoir des entretiens avec le pionde des esprits, et d’en faire connaître aux hommes les mystères, impénétrables par toute a,utçç vo*ç.

Il déclare (Swedenborg) , de la manière la plus formelle et la plus explicite, que la destinée future de chaque individu est le résultat naturel, normal et nécessaire des lois physique, psychique et morale par lesquelles il est distingué dans la vie présente ; — que le siècle n’est pas assez avancé pour comprendre la vérité de ses révélations ; mais qu’un temps viendrait où des conclusions plus favorables à sa mission pourraient prévaloir; — que lorsque, oc temps sera arrivé, il aura le droit de dire : « Je prétends être reconnu comme un véritable révélateur du monde des esprits; et, si les faits que je proclame sont soutenus pgr l’évidence, alors je demanderai sur quels motifs on s’appuierait, pour me refuser le caractère d’envoyé du Ciel?... Aurajs-je pu révéler les faits, si je n’avais été divinement chargé de le faire? »

11 est un point, dit G. Bush, où les phénomènes du mesmérisme viennent en contact avec les révélations de Swedenborg. Et l’objet que nous avons principalement en vue, est de faire ressortir , avec

toute la clarté possible, leur parfaite coïncidence; afin de montrer que les deux classes de laits appartiennent au même ordre do phénomènes. Mon but définitif est de prouver que les manifestations mentales les plus élevées, produites par les procédés mesmériques, ont été connues de Swedenborg ; qu’il les a décrites parfaitement et complètement; et qu’alors, elles impriment à ses révélations un caractère de vérité.

Le professeur américain fait suivre ces considérations analytiques de récriminations chaleureuses contre ceux qui veulent ne voir que des rêves et des visions d’enthousiaste, dans la théologie mystique de son prophète. Il ne s’est pas aperçu qu’il y a une distinction importante à établir entre les faits naturels du mesmérisme et leurs résultats ; entre la certitude des premiers et l’incertitude des derniers. De ce que les phénomènes sont vrais et réels, il ne 9’en suit pas que les révélations qui en résultent soient des vérités. Et de ce que Swedenborg a connu et pratiqué les véritables faits du mesmérisme, il serait bien illogique de prétendre que les révélations qu’il doit à ces mêmes faits, sont des vérités.

Pour soutenir sa thèse, G. Bush s’est réservé d’autres arguments qu’il croit bien victorieux. C’est une monnaie dont le savant logicien n’est pas avare; nous en examinerons, en temps et lieu, le poids et le titre.

CHOCARNE.

( La suite au prochain numéro. )

VARIÉTÉS.

Le Novateur (Suite.). — A peine un germe est-il sorti de terre qu’il cherche le soleil : l’ombre lui est contraire; il s’étiole et devient rachitique, si quelque roi des forêts le couvre de ses rameaux. Il faut qu’il subisse l’action libre des éléments : le froid -, la chaleur, l’orage et ses suites terribles ; battu par les vents, déraciné par les courants, tout l’attaque, enfin, et tend à le détruire; il survit pourtant, soutenu qu’il est par une force inconnue; la vie eit dans scs racines, comme l’intelligence dans un cerveau humain. Ce qui l’a fait naître portait en soi une pensée. Ah! dans la plus petite graine, il y a quelque chose d’un Dieu : le mystère de la création toute entière.

Une vérité découverte est ce germe naissant» Bientôt, en sffet, elle sera battue par la tempête, et dominera les clameurs qui ¿semblent devoir lui être contraires. Ce qu’elle doit craindre et redouter, c’est l’ombre projetée par les corps dits «auants, ce sont eux qui l’éliolent trop souvent et qui l’em-pêchent d’acquérir dans son temps la vigueur nécessaire. Autour d'eux, vous n’apercevez que des

mousses, des lichens et des églantiers, pas un l'ruit savoureux.

Le novateur, comme un enfant, se trompe; il cherche d’abord un abri qu’il croit protecteur; il demande aux rois de la science de le protéger contre les tempêtes suscitées par les préjugés el l’ignorance; mais quelle est sa folie? ¡Malheur à lui, s’il s’arrête dans cet endroit perfide ! Étouffé bientôt, il ne sortira rien, pas même un parfum des fleurs qui déjà montraient leurs corolles. Ainsi l’ont expérimenté les hommes de génie. On les vit s’approcher, se placer sous cet ombrage; puis, un doux sommeil s’emparant d’eux', leur cœur ne battait plus qu’à moitié. Ce feu qu’ils avaient en eux s’éteignait bientôt. Ah ! ce feuillage sous lequel vous passez, novateurs, cache la pie bavarde, le geai, le corbeau, le sansonnet, l’oiseau de proie (le rossignol ne perche pas si haut). Plus l’arbre est vieux, plus vous devez craindre; fuyez, il vous faut l’air, la liberté; vous devez croître par les forces qui sont en vous, par les impulsions seules de votre nature. N’allez pas vous greffer sur autrui; que le fruit que vous porterez soit celui-là même dont le germe naquit de l’inspiration. La source, en mêlant ses eaux à celles d’un fleuve, perd de sa limpidité, et celui-ci, bientôt, devient saumâtre.

Voyez ce que sont devenus les principes religieux, sous la tutelle des savants et des érudits, et, dans ce nombre, je place toute la hiérarchie cléricale. Chacun y a mêlé ses idées, ses opinions, ses erreurs. Que reste-t-il des vérités pures? Rien,

qu’un amas cou (us d'absurdités, repoussées par le simple d'esprit, car il ne peut comprendre.

D’une loi de nature, d’un fait simple, Mesmer voulut faire une science, il s’égara; et ses disciples, ajoutant à son erreur les conceptions de leur esprit, complétèrent l’œuvre. Semblables aux médecins qui, de perfectionnements en perfectionnements, sont arrivés à ne plus savoir s’il existe une médecine, et doutent d’eux-mêmes.

Ah ! c’est que la science proprement dite, n’est possible que là où tout est physique; et, dans le magnétisme même, la science ne peut que coordonner un ordre de phénomènes; le reste lui échappe : c’est le côté moral et par cela même lo plus important.

La science comprendra, expliquera l’action d’uu système nerveux sur un autre par contact, ou à petite distance; mais elle rejetera le fait, non moins certain pourtant, de cette même action à grande distance; car il est facile de jeter un homme par terre à plusieurs centaines de pas.

La science expliquera passablement tout ce que l’agent magnétique doit déterminer de phénomènes physiques, et même moraux, par l’ébranlement nerveux dont il est cause; mais elle rejetera la prévision, la vue à distance, etc., car elle ne pourra les comprendre.

Le médecin admettra bien la curabilité de certaines maladies par des applications magnétiques ; mais il n’ajoulera aucune foi aux assertions des magnétiseurs, touchant la vue intérieure de tout le travail qui s’opère en nous, et de la prévision des crises. Si vous lui dites qu’il y a dans l’état

somnambulique une science innée, il rejettera bien loin ce que la nature a formé et donné à l’homme.

Le magnétisme et le somnaüibulisme ! Voilà la médecine de la nature. Dieu donna à l’hortitoié plus qu’aux animaux ; ceux-ci n’ont que l’instinct; l’homme reçut la double vue.

De tout ce qui précède, concluez et voyez.

Nous bouleversons toutes les idées, détruisons tous les systèmes, et nous avons devant nous des édifices qui paraissent inébranlables. C’est donc une œuvre colossale, impossible dans le temps présent. La vérité, comme la goutte d’eau tombant sur le granit, finira par faire son trou; mais bien des hommes 9’useront sans que la trace de leurs efforts soit aperçue ailleurs que dans un petit cercle. Nous nous laissons aller à une illusion lorsque, apercevant ceux qui croient au magnétisme répandus en tous lieux, bous croyons toucher au motnent du triomphe. Cette petite armée a contre elle le nombre dans la proportion de un contre mille, et cela en France; ailleurs, la différence est bien plus grande encore. Tous les magnétistes ne Sont pas dévoués ; beaucoup jouissent de la vérité nouvelle, sans se soucier en rien de son progrès. Quelques-uns voudraient seuls la posséder ; d’autres encore ont peur qu’elle ne s’étende en dehors de certaines limites. Il en est qui la flétrissent en croyant la servir; ailleurs, on l’obscurcit par un stupide mysticisme.

Cette vierge des temps antiques n’a point de temple ; elle erre sur la terre, attendant d’êtrfe comprise , pour y être honorée comme elle le fut

jadis, Ce n’était point alors par des annonces mensongères qu’elle se révélait; elle ne disait point par la bouche de scs interprètes : Je suis la plus lucide, etc. , etc., etc. Voici mon adresse : je donne des consultations de telle heure à telle heure. Chacun savait sa demeure, et ce n’est qu’en tremblant qu’un mortel osait s’en approcher. Les rois eux mêmes redoutaient ses oracles et cherchaient à se la rendre favorable, par un respect semblable à celui que l’on a pour Dieu.

Allez, humains, allez aujourd’hui consulter vos oracles; allez demander à vos sages, à vos pontifes ce que vont être les temps prochains, ce que vous devez craindre ou espérer; une règle de conduite pour que votre vie soit douce et tranquille, ce qui peut assurer à chacun une part de bonheur. Pitié pour eux et pour vous tous! Vos chefs sont aussi misérables, aussi ignorants que les derniers des hommes, et vous en êtes arrivés à vous moquer justement de celui qui se dit infaillible. La lumière s’est éteinte par l’orgueil et la fausse science, l’hypocrisie a pris le masque de la vertu. Allez, humains, vos savants ne rallumeront pas le flambeau !

Ce qu’ils veulent, vous le voulez également : la richesse, afin d’être oisifs. Aucun ne demande plus; car c’est votre idéal, ce qui vous préoccupe dans vos songes, ce qui fait mouvoir les rouages de votre machine, le but de votre vie. L’ordre, que vous appelez à grands cris, comment voulez-vous qu’il se fonde? Autant vaudrait l’exiger d’une société d’aliénés. Oui, vous marchez dans l’obscurité; chaque fois que vous vous heurtez, le sang coule,

cl, plus qu'en aucun temps, bientôt, vous le verserez encore.

Tristes et douloureux résultats de l’ignorance, qui donc arrêtera votre cours ?

Lorsque, dans les siècles derniers, le magnétisme se montra, sous le nom de magic et de sorcellerie, plus de cent mille individus, en France seulement, périrent par la main du bourreau, après avoir souffert les douleurs de la torture. Demandez à nos docteurs d’aujourd’hui, ce que c’est que la magie, la sorcellerie? Ils vous répondront que tou,t est imaginaire. Étrangers aux fails qui conduisirent tant de malheureux au bûcher, ils croient, dans leur simplicité d’enfant, que les hommes d’autrefois, accusés de magic, étaient des niais ou des insensés; que les juges étaient également en proie à des hallucinations. Attendez, sa-vantissimes docteurs, voici les mêmes phénomènes, sous les noms de magnétisme, de somnambulisme, d’extase. Rien n’est changé en eux, si ce n’est la dénomination. Yous niez encore. Accusez la nature, punissez-la, car elle çst bien coupable! Mais cette fois, clip vous défie ; c’est vous qui serez punis et méprisés. Ici, il y a une force, un pouvoir bienfaisant ou terrible, et, comme vous, ceux qui yous précédèrent dans la carrière des sciences, ne voulurent jamais ouvrir les yeux à cetle lumière et éclairer les nations par des recherches que vous auriez rendues fécondes. Le monde vous doit une partie de ses malheurs; les crimes commis pèsent sur vous; l’humanité doit désormais récuser votre témoignage, refuser vos services, et, comme der-

nier outrage, vous rappeler sans cesse le jugement que vous avez prononcé au sujet de Mesmer.

Les difficultés que rencontre le novateur ne sont qu’esquissées ici ; ces digressions en font comprendre la nature, comme le but final du magnétisme. Dissiper l’erreur, éclairer les hommes, leur dire : Votre malheur vient de vous, et non de la nature; celle-ci vous a tout donné. C’est à vous de comprendre et de régler vos destinées. La lumière est en vous, faites qu’elle vous éclaire.

DU POTET.

(La suite prochainement.)

Le Magnétisme au 17e siècle. — Sous ce titre, YUhion médicale du 27 octobre publie la note, assez méchamment rédigée, que voici :

« Il paraîtrait que Mesmer aurait été devancé par quelques illuminés de la même espèce. Un individu, nommé Valenlin Greatrakes, a publié, en 1666, un livre intitulé : The miraculous conformât, ou Compterendu de plusieurs cures merveilleuses opérées par l'apposition des mains (les passes), avec un discours physique sur ce sujet, précédé de cette épigraphe : Non ideb negari debet quod est aperturn ; quia com-prehendi non potest quod est occaltum. L’épigraphe serait encore vraie aujourd’hui.

« M. Greatrakes était une espèce de M. du Potet, et, comme lui, il comptait des cures merveilleuses. On trouve dans ce livre un cas de lèpre guéri avec l’assentiment de lord Convay et de l'évêque de Glocestre. Le mesmérisme devrait donc, pour être

juste, être appelé greatrakisme; niais le nom serait

moins euphonique....... Hélas! il n’y a donc rien

de nouveau sous le soleil, pas même le magnétisme animal!

« Cet ouvrage, curieux et rare, se trouve à la bibliothèque de Maldon, en Angleterre. »

— C’est comme qui dirait ; II ne s’est passé aucun fait d’armes depuis la bataille de Fontenoi. Mais, MM. de VUnion, vous marchez à reculons, ou vous fermez volontairement les yeux à la lumière ! Le magnétisme est partout ; vous seuls sem-blez ignorer qu’il fait son chemin dans le monde.

Votre note bibliographique est précieuse, en ce sens qu’elle prouve combien peu vous avez souci des vivants : les morts seuls paraissent occuper vos pensées.

Correspondance. — Notre savant correspondant de Bruxelles adresse la lettre suivante à M. du Potet.

Mon cher maître,

Je suis sensible à vos reproches d’avoir abandonné la psychique pour la physique ; mais vous le savez, le matérialisme académique domine encore le monde; les grossiers douaniers du besoin, postés sur tous les gués de la libre pensée , ne la laissent point passer à son gré. On excommunie encore les sorciers, à la façon du dix-neuvième siècle, par mille tortures imperceptibles à l’œil nu , mais tout aussi meurtrières que les outils de Tor-

qucmada. Il n’est pas permis de faire du bien sans un diplôme qui vous autorise à faire du mal à vos semblables. Voilà pourquoi je ne magnétise plus , ce qui ne m’empêche pas de vous regarder faire , et d’admirer votre indépendance et votre résistance à l’écrasement, qui ne peut se comparer qu’à celle du diamant pur.

Je veux cependant vous faire part d’une anecdote dont vous devriez avoir connaissance avant moi, puisqu’elle met en émoi 'a ville de S.... depuis quelque temps. Voici ce qu’un habitant de cette cité vient de m’affirmer, et, comme c’est une personne digne de toute ma confiance, je vous rapporte ce que j’ai retenu de sa narration :

Depuis longues années la croyance était répandue dans S.... qu’il existait dans une ancienne abbaye une cachette où avaient été enfouis douze apôtres d’argent, et un christ d’or massif. M. le colonel

C...... étant à Paris , eut occasion d’interroger

Al... sur la réalité de ces bruits. Al... répondit qu’il voyait dans les caveaux un puits couvert d’une pierre chargée de platras, au fond duquel existaient ces statues. Le colonel revint à S......; mais

ne pouvant travailler à cette fouille sans avoir l’entrée de l’abbaye, il dut s’ouvrir au chef de la manutention militaire, qui occupait le vieux couvent; on travailla longtemps à deux, en se relevant jour et nuit. Le colonel fit plusieurs voyages à Paris, pour obtenir des renseignements du somnambule, qui voyait parfaitement l’avancement des travaux, le percement des murs et des voûtes ; mais un jour 011 tomba sur un amas d’eau considérable, qu’il fallait détourner ; le commandant de place de-

manda trente hommes pour creuser une citerne qui devait recevoir ces eaux ; mais on les lui refusa : il fallut donc se tirer soi-même de ce mauvais pas; cela fut long et pénible ; mais enfin , que ne peut l’amour du gain ! L’eau évacuée, on trouya le caveau en question : c’était évidemment le dernier. Pour ne pas faire fausse route, un nouveau voyage à Paris fut convenu, et même sollicité par le chef de la manutention.

A.... cpnsulté, déclara qu’il voyait le puits, qu’il était découvert par l’associé travailleur ; mais de statues point, ou plus. Le colonel retourne à S.... , se rend chez son associé, qui lui avoue avoir levé la pierre pendant son absence, mais qu’ils en étaient tous les deux pour leurs frais et pour leurs peines; rien, rien, rien!

Dp là des soupçons et des enquêtes de la part du commandant de place, qui finit par découvrir que pendant son absence plusieurs caisses avaient été mises au roulage par son associé, à l’adresse dp quelques-uns de ses parents de la province, plus de doutes; mais le moyen d’en savoir davantage? Il est vrai que le ménage de l’associé se meuble d’argenterie ; que madame achète des vêtements de luxe, etc., etc.

Que fera le pauvre commandant? Ira-t-il dénoncer la trouvaille au gouvernement? 11 n'y gagnerait rien. Et le gouvernement pourrait-il saisir les apôtres et le christ, pour les mettre en fourrière? Et puis, où sont-ils, et sous quelle forme les retrouvera-t-on?

Seront-ils dieux, table ou cuvette ?

Seront-ils lingot ou culot?... On s’attend à un duel.

Sans doute que quelqu’un de vos correspondants de S.... vous aura déjà informé de cela ; s’il y a des inexactitudes de détail, il les redressera. A.... seul pourrait être mis à la poursuite de ces apôtres, par l’administration, qui a ses droits sur cette trouvaille; mais ce serait reconnaître l’existence du magnétisme, et, en cas de succès , ce serait proclamer sa puissance, et souffleter toutes les sociétés scientifiques officielles, les cours et tribunaux. Le gouvernement ne voudrait pas faire cela pour un million.

Je lis toujours votre journal, mais je ne le trouve pas assez anecdotique : vous tournez à l’académie, vous virez en société d’encouragement. C’est bien; mais, croyez-moi, les magnétiseurs n’ont pas besoin d’être encouragés par des médailles : ils y vont de tout cœur dès qu’ils ont acquis la foi dans leut puissance.

Je m’aperçois qu’une foule de faits racontés par les journaux vous échappent; vous devriez inviter tous vos disciples à vous envoyer directement ceux qui leur tombent sous les yeux, en lisant des milliers de feuilles que vous ne pouvez lire, et que les grands gazetiers, incrédules et dédaigneux, de Paris, se gardent bien de répéter, pour ne point; passer pour des esprits faibles, et se voir soupçonnés de croire qu’il existe un monde intellectüêl qtiî n’est que le reflet du monde mâtétfel, Ou son prolongement indéfini hors de là portée de nbs sens grossiers. C’est ainsi que ma pensée vous atteint en ce moment avec la rapidité dü télégraphe électrique ; ce qui vous force à penser à votre serviteur et ami, qui vous renouvelle la promesse d’envoyer

sous peu un procédé pour empêcher les somnambules de mentir.

JODARÜ.

Chronique. — A l’une de nos dernières conférences dominicales, assistaient MM. Durand, de Cherbourg, Manin, président de la République vénitienne, et Prideaux, rédacteur du Zoist.

— M. Hébert d’Aveney a commencé à l’institut polytechnique, passage Jouffroy, un cours public de magnétisme. Nous rendrons compte de ses leçons.

— M. le docteur Mathieu a trompé nos prévisions. Il s’est prononcé formellement en faveur du magnétisme, disant que, non seulement il croyait au magnétisme et au somnambulisme, mais qu’il prouverait qu’ils ne pouvaient pas ne pas être. Nous suivrons le développement de ses idées sur ce sujet. Ses leçons ont lieu le vendredi, à l’Athénée, rue du Vingt-Quatre Février.

Revue des Journaux. — Le Journal du Hâvre, des 6 et 10 septembre, rend compte de séances de somnambulisme données en cette ville par M. Adolphe Didier, qui est passé des mains de M. Fortier en celles de M. Mongruel.

— Le Courrier du Hâvre des 6 et 20, parle des mêmes faits que son confrère.

Ces deux journaux s’accordent sur le succès des expériences; mais leur récit est plein d’une emphase qui paraît commandée.

— Le Temps du 8 octobre, publie une lettre signée Muncorps, relatant une affection de poitrine guérie par le somnambulisme.

— Lo Constitutionnel du a5 octobre public une lettre de Rome, dont un passage est relatif au magnétisme. Le voici :

« 11 se trouve ici, depuis quelques jours, le célèbre magnétiseur Ch. Lafoutaine. 11 a donné avant hier une séance de magnétisme curatif, applique aux organes de l'ouïe. Après une courte injection du fluide magnétique, il est parvenu à faire percevoir très-distinctement des sons à deux sourds-muets, l’un âgé de trente ans, et l’autre de trente-trois, Toutes les célébrités médicales de Rome s’étaient donné rendez-vous dans son salon. L’autorité ecclésiastique s’est opposée à ce qu’il donnât une séance publique.

— La Tribune lyonnaise, numéro d’octobre, exposant un nouveau procédé d’impre9sion, connu sous le nom de lytholipoclirocliomie, dit :

« Cette découverte est due, à ce qu’on nous assure, au magnétisme. M. Boulay, qui avait conçu l’idée d’imprimer simultanément sur plusieurs couleurs ; mais qui ne trouvait pas le moyen de réaliser cette idée, chargea M. L.-C. Lefebure, magnétiseur à I’aris, de l’interroger après l’avoir mis en état de somnambulisme. Cela eut lieu, et Boulay, pendant son sommeil magnétique, découvrit ce qu’il cherchait depuis longtemps en vain. M. Le-febure prit note exacte, et c'est sur le vu de cette note que Boulay, rendu à son état naturel, a opéré, et est parvenu à faire faire un pas immense à l’art typographique. »

Cette indication n’est pas exacte. Nous sommes autorisés à déclarer que M. Boulay n’a jamais été

magnétise. Mais sa fille, somnambuliséc effectivement par M. Lefebure, a indiqué un perfectionnement ail procédé en question.

— Dans le Constitutionnel du 28 octobre, M. le docteur II. Roger, parlant des expériences du docteur Ducros, dont nous avons rendu compte, se prononce de nouveau contre le magnétisme, avec une orgueilleuse ironie. Cependant, M. Roger n’ignore pas que son neveu, fils du consul de France à la Nouvclle-Orléans, est actuellement magnétisé par M. Jos. Barthet, pour une affection qui a résisté à la médecine scolastique.

— La Patrie des 18 et 1 g novembre, grande édition , analysant l’ouvrage du docteur Mathieu sur les maladies des femmes, cite de cet auteur un passage favorable au magnétisme.

PETITE CORRESPONDANCE.

Avi». — Le Gérant du Journal du Magnétisme a l’honneur de prévenir MM. les Actionnaires, que l’Assemblée générale annuelle prescrite par l’article 19 des Statuts, pour la reddition de ses comptes, aura lieu dans la première quinzaine du mois prochain , au siège social.

Le jour et l’heure de la réunion seront indiqués dans les lettres de convocation individuelles.

Le Gérant : IIKBERT (de Garnay).

BIBLIOGRAPHIE.

MESMER AND SWEDENBORG : or, Ihc Relation of the Developments of Mesmerism lo the Doctrines and disclosures of Swedenborg ; by Gborge BUSH. 1 vol. in-12", second edition, New-York, 1847.

2' ARTICLE.

Comme c’est principalement sur les facultés psy-cho-magnétiques de Swedenborg que le professeur Bush appuie sa croyance aux révélations, il est de l’intérêt de la vérité, et par conséquent de notre devoir, de les examiner scrupuleusement : la science ne peut rien perdre à cette étude.

Si Swedenborg, dans son état surnaturel d’extase, dit son panégyriste, a été capable de révéler les véritables phénomènes produits par le mesmérisme, dire que son état doit avoir été réellement l’état mesmérique, est une induction à priori très-naturelle. Ce qui donne du poids à celte probabilité, c’est que les rapports des sujets lucides, lorsqu’ils ont pour objet les merveilles du monde spirituel , ont ordinairement une analogie marquée avec les révélations de l’illuminé suédois.

« Cette coïncidence semblerait impliquer une communauté de condition qui ne serait pas à l'a-tojik vin. —IV’ ION —2“> Dêckmbrr 1841). 24-

vantage de ce dernier. On a prétendu ne le considérer que comme un somnambule auto-mesméri-que d'un ordre très-élevé, et n’envisager ses révélations que comme différant seulement en degrés avec celles qui sont fréquemment faites par d’autres sujets, moins favorisés, mais cependant, non moins véritablement illuminés. Admettre cette opinion serait saper, dans sa base, l'autorité particulière réclamée par ses découvertes et ses doctrines. Le point dont il s’agit ne peut être éclairci qu’en mettant en parallèle les caractères ordinaires de l’état mesmérique, avec ceux de l’état de Swedenborg. La trance magnétique, qui est produite artificiellement, au moyen de certaines opérations manuelles et mentales, laisse le sujet, après qu’elle est passée, dans l’oubli le plus complet de tout ce qui lui est arrivé pendant sa durée. Or, sous tous les rapports, le cas de Swedenborg était exactement l’opposé. Son état n’était pas un état de sommeil, ni aucun de ceux qu’on peut produire par un agent quelconque ; il n’était pas marqué, non plus, par la moindre absence de souvenir, en sortant de cet état ; si, en vérité, on peut dire, sortir d’un pareil état. Contrairement aux lucides magnétiques qui sont dans l’état interne (1), mais ne jouissent pas de la conscience externe, Swedenborg était en pleine possession de sa conscience et se trouvait dans les deux étals à la fois. Sa prérogative était d’ouvrir une vue spirituelle qui lui laissait l’entière

(1) L’état interne est celui où l’âme, entièrement dégagée des organes corporels et sensitifs, n’existe plus que de la vie spirituelle. L’état externe, au contraire, constitue l’état normal. C’est l'âme rendue à la vie de relation.

jouissance de sa vue naturelle ( i ). » 11 en résulte « qu’il pouvait connaître et décrire, dans son état de conscience externe, ce qu’il voyait avec ses yeux spirituels; et, affranchi de toute illusion, voir et apprécier, avec une grande justesse, ce qui se passait autour de lui, dans le monde naturel, en même temps que ce qui se manifestait, pour lui, dans le monde spirituel. » Et il possédait si parfaitement la conscience externe pendant l’exercice de ses perceptions spirituelles que, dans une occasion, «en marchant au milieu d’un convoi funéraire, il se trouva engagé dans un entretien avec l'esprit du défunt, dont il accompagnait le corps jusqu’à la tombe. » (Neu> Churchman, vol. I, p. 53.)

« Nous puisons, ajoute notre auteur, dans les déclarations personnelles de Swedenborg, la principale preuve de l’existence de cette double faculté qui le rendait apte à devenir l’intermédiaire des communications divines. » — Ses écrits sont remplis de particularités psychiques sur son propre état; et l’on trouvera le plus haut intérêt dans la distinction qu’il en fait avec les états simulaires, où il montre « une minutieuse connaissance des phénomènes mesmériques, a une époque où leur découverte, du moins sous ce nom, était inconnue au monde. »

L’état de cette double faculté, pour parler nette-

(1) Dans la vie spirituelle, l’âme perçoit également par scs propres facultés, toutes les sensations que les organes sensitifs lui fournissent à l’état de veille : elle voit, elle entend, quoique les yeux et les oreilles aient été rendus insensibles. Ces perceptions de l’âme sont ce qu’on appelle, ici, la vue, l’ouïe internes ou spirituelles. On les nomme externes ou naturelles, dans la vie normale ou la veille.

2i.\

ment, n’est autre chose que l’état de lucidité magnétique ou d’extase se produisant simultanément avec l’état de veille. La possession de cet élat complexe est prodigieuse, il faut en convenir; et Swedenborg, s’il fut réellement doué de cette double et merveilleuse faculté, a été un être bien privilégié. Mais avant de s’extasier sur ce point, avant même de rechercher si, dans les faits du mesmérisme recueillis par la science, on ne trouverait pas des états analogues, semblables même, ne serait-il pas prudent de s'assurer si Swedenborg était réellement gratifié de ce sublime pouvoir. Tous les biographes orthodoxes du savant suédois ont affirmé qu’il le possédait ; mais leur conviction, à cet égard, n’a pas d’autre origine que celle de G. Bush lui-même, qui nous dit que « c’est dans les déclarations personnelles de Swedenborg que nous puisons la principale preuve de la possession de cette double faculté » : il se contente de ce témoignage équivoque pour y asseoir sa croyance et sa foi.

Une pareille aberration de jugement fait pitié; car, si Swedenborg a été, comme il le dit, favorisé de ce don merveilleux, qui s’est produit pendant vingt-six ans (Yoy. Vraie Relig. ehrêt., p. 157), il a dû avoir pour témoins très-intéressés de ce fait, des milliers de personnes. Cependant, qui a vu, examiné, vérifié l’état prodigieux de l’auteur des Arcanes? Où sont déposés ces témoignages revêtus de toute l’authenticité, si nécessaire, lorsqu’il ne s’agit de rien moins que de faire connaître et d’établir la mission d’un nouveau prophète ?

Cependant, le professeur de New-York nous apprend lui-même, qu’avant d’ajouter foi aux vérités

mesmériques, il a voulu vérifier, par ses propre» expériences, la réalité de leurs phénomènes; qu’autrement, il ne s’en serait jamais rapporté, même aux témoignages les plus sérieux. Cela est impitoyable; mais, c’est juste et raisonnable. Comment se peut-il, après une déclaration de principes aussi formelle, et lorsqu’il s’agit d’un ordre de faits unique , qu’aucun témoignage ne soutient; comment se peut-il que G. Bush ferme les yeux, et commette un véritable suicide de l’intelligence? Cela n’est point acceptable ; et ce qui l’est encore moins, c’est que ce nouveau saint Thomas, à l’endroit du mesmérisme, veuille nous obliger de croire aveuglément aux prétendues révélations de Swedenborg; et cela, sous peine de sa dévote férule. Lorsqu’il est question du mesmérisme, il n’oblige personne à croire; il dit seulement: cherchez, pratiquez, instruisez-vous ! Mais lorsqu’il s’agit d’élever un homme à la hauteur de prophète et de fondateur d’une religion nouvelle, il exige que, comme lui-même, on ferme les yeux de l’intelligence, et qu’on croie avec humilité.

Eh bien! il y a ici pour les penseurs, un enseignement. C’est que cette manière différente de procéder à l’égard d’une vérité et à celui d'un doute; qui permet l’expérience pour l’une, et prescrit la foi pour l’autre, prouve surabondamment qu’il n’existe, dans les deux ordres de faits en question, qu’une seule vérité.

Puisqu’on nous a lancé dans la voie du doute, nous avons bien le droit de demander sérieusement si quelqu’un pourrait affirmer que Swedenborg ait jamais été dans l’état magnétique; et si,

comme beaucoup d’autres magnétistes, il ne s'est pas tout simplement servi de sujets lucides ou extatiques, pour arriver à ses révélations.

Mais en admettant, pour un moment, la sincérité de ses déclarations et la réalité de son état exceptionnel, nous ferons quelques réflexions uliles sur cette faculté, dont Swedenborg lui-même décrit ainsi l’un des principaux développements : « Un jour, marchant par les rues d’une ville, puis dans la campagne, j’étais en même temps en conversation avec les esprits ; je savais que j’étais éveillé, que je voyais comme dans les autres instants, et que je marchais sans me tromper de chemin. Dans ce moment, j’étais à l’état de vision; voyant des bosquets, des rivières, des palais, des maisons, des hommes et d’autres objets. Mais après avoir marché ainsi pendant quelques heures, tout d’un coup, je fus plongé dans une vision corporelle, el remarquai que j’étais dans un autre lieu. Très-étonné de cela, je m’aperçus que j’avais été dans cet état où sont ceux dont on dit qu’ils sont transportés en esprit dans un autre lieu. » (Swedenborg, Arcana cœ-lestia, 1882-1885.)

Ce petit paragraphe descriptif de l’état magnétique de Swedenborg est très-précieux, en ce qu’il nous fournit la preuve évidente qu’il ne possédait pas cette double et merveilleuse faculté qu il s’est attribuée et que ses sectaires lui accordent si bénévolement. Nous affirmons, nous, qu’il ne la possédait nullement; car, pendant qu’il était plongé dans la vision qui lui faisait voir des palais, des bosquets , des rivières, etc., il ignorait où il était, et n’avait pas, par conséquent, la conscience de son

état; puisque en fut un changement soudain d’état, qu’il appelle vision corporelle, qui lui montra qu’il était dans un autre lieu ; un lieu où il ne croyait pas être. Or, si, pendant sa vision, il ignorait le lieu où il se trouvait réellement, il ne possédait donc pas « cette prérogative d’ouvrir une vue spirituelle qui lui laissait l’entière jouissance de sa vue naturelle. »

Ajoutons ici que sa prétendue vision corporelle, qui lui montre la réalité du lieu où 11 est et des objets qui l’environnent, ne peut être, même dans le langage usuel et mystique de Swedenborg, que le retour puç et simple à l’état de veille. Appeler cela une vision corporelle, nous paraît prodigieux. Risum teneatis, amiei!

Si nous accordions à Swedenborg la double faculté que G. Bush lui reconnaît et que nous sommes obligé de lui refuser; tout en convenant qu’il est rare que des sujets extatiques aient quelque souvenir de leurs visions, nous dirions cependant que cela n’est pas sans exemple, et M. Bush, qui est le plus généreux des adversaires, nous prêtera cette fois encore, dans les deux extraits suivants, des armes pour le combattre.

« Au mois de juin dernier, A. J. Davis, le célèbre somnambule de New-York, étant au milieu d’un de scs discours scientifiques, improvisés pendant la trance magnétique, s’arrêta tout à coup, et déclara qu’il ne recevait plus aucune impression — c’est ainsi qu’il appelle ses communications internes — et qu’il sentait qu’il fallait qu’il allât immédiatement à Poughkeepsie, petite ville voisine; que là, il devait lui arriver quelque chose d’extraordi-

nairc; qu’il était incapable le savoir ce que c’était; mais que, dans trois ou quatre jours, ce serait connu à New-York; que ses associés — ses magnétiseurs — pouvaient informer les autres de ce fait, mais qu’il fallait le lui laisser ignorer pendant son état de veille. Ses désirs, à cet égard, furent exactement remplis; et, conformément à cela, un instant après, quand, il était dans son état naturel, il annonça son projet de partir le lendemain pour Poughkeepsie, quoiqu’il eût pris précédemment une détermination différente, dans le but d’une excursion à la campagne. » (Mesmer and Swed., p. 164.)

Ainsi, voilà Davis plongé dans la trance magnétique; il est averti par un pouvoir étranger, supérieur, qu’il doit se rendre immédiatement dans une ville voisine. Il défend qu’on l’en instruise, pendant sa veille. Ses magnétiseurs gardent le silence et n’ont recours à aucun procédé magnétique pour le lui rappeler, lorsqu’il est revenu à son état normal; et cependant, aussitôt qu’il est réveillé, sa première 'parole est pour annoncer son voyage ! Bien plus, le lendemain matin, avant de partir, il achète une feuille de papier pour écrire une lettre — car cette lettre était l’unique motif de ce voyage, la cause de cette inspiration soudaine, et devait être adressée au professeur Bush, lui-méme.

Ce petit document, qui fait partie intégrante de notre examen critique, sera donné plus lard, avec les bien curieux commentaires qu’elle nous a suggérés.

Voici le second exemple :

« Une sœur de madame Hauffe, la célèbre

voyante de l’révorst, jeune personne très-simple et très-sincère, avait une sensibilité si exquise à l’approche de ces êtres immatériels (les esprits), que, sans les voir avec ses yeux, elle pouvait donner une description de leur figure, qui coïncidait avec celle donnée par la voyante. Elle disait : je ne les vois pas avec mes yeux ordinaires; je les vois intérieurement (from within). Cependant, cette jeune fille ne fui jamais somnambule, et était en parfaite santé. » (Mesmer and Sived., p. 285.)

Voilà donc encore un fait qui vient rabaisser l’élévation fantastique de l’état magnétique de Swedenborg.

Nous pourrions ajouter une quantité de faits semblables ou analogues; mais comme ils sont acquis à la science expérimentale, nous nous contentons, avec une intention malicieuse, de ce que nous pouvons puiser dans le livre de notre auteur. En acceptant le terrain et les armes de notre adversaire , nous pensons faire preuve de générosité et de loyauté.

Puisque le professeur Bush nous accorde que Swedenborg possédait les facultés magnétiques, nous n’insisterons pas sur ce point où l'accord des parties rend superflue toute discussion. Mais cette concession de sa part, jointe à celle qui attribue à Swedenborg la connaissance des faits du mesmérisme — bien que sous une autre dénomination — fournit à notre critique le sujet d’un sérieux examen, et par déduction, d’une attaque contre les prétentions collectives du Suédois et de son panégyriste.

a Swedenborg, dit ce dernier, a connu toutes

les manifestations mentales ou les plus élevées, produites par les procédés mesmériques : il les a décrites, parfaitement et complètement. »

Nous n’en doutons nullement, et c’est précisément en raison de cette conviction, que nous demanderons pourquoi le révélateur de ces différents états du mesmérisme, ne nous a pas dit un seul mot sur les procédés ou moyens employés pour lc3 produire, soit sur lui-même, soit sur les autres. Après avoir révélé les choses spirituelles, qu’il a décrites très-minutieusement et trop longuement, peut-être, il est descendu dans la sphère humaine pour y analyser tout ce qu’elle renferme. Comment n’a-t-il pas signalé I’agent mystérieux et si puissant de la nature, et indiqué toutes ses propriétés, soit pour obtenir les états magnétiques, soit pour guérir les maladies ? Que les opérations fussent mentales ou manuelles, il devait le proclamer, ne rien laisser ignorer ! Son devoir, son honneur, l’accomplissement de sa prétendue mission, tout l’y obligeait !...

Et qu’on n’objecte pas qu’il los ignorait, car ses écrits nous fournissent la preuve du contraire. Dans ses Arcana cœlestia, aux numéros 1882-1885, il dit positivement, à propos des visions et de la vue à distance, qu’il appelle transposition de l’âme: « J'ai été mis dans cet état, trois ou quatre fois ; seulement, afin de le connaître. » Et il répète cette déclaration jusqu’à trois fois, dans les numéros précités.

Si Swedenborg avait été vraiment inspiré, il n’aurait pas eu besoin d’être mis dans cet état pour le connaître; attendu que l’inspiration est la com-

inunication par un pouvoir supérieur, tles vérités cachées et mystérieuses. S’il lui fut nécessaire d’y être mis , c’est qu’aucune inspiration ne venait ou ne pouvait lui révéler cet état. Or , il y a été mis plusieurs fois, seulement afin de le connaître ; donc, il n’a pas été inspiré et n’a reçu aucune révélation. « J’ai été mis dans cet état, » dit-il; mais il aurait dû nous apprendre comment et par qui. Y était-il plongé directement par l’influx de Dieu , ou par la mesmérisation directe de son semblable ? Si c’était par ce dernier moyen, il devait surtout le déclarer; car c’était le principe de la science nouvelle, dont on a dû la découverte à l’immortel Mesmer. — * J’ai été mis dans cet état. » Mais c’est qu’apparemment il ne pouvait s’y mettre lui-même; qu’il ne possédait pas la faculté auto-magnétique. Ce ne pouvait être non plus par l’influx de Dieu, puisque cet influx donnait, par infusion, la connaissance ou révélation de cet état. Donc, alors, il était superflu, ridicule même, d’être mis dans cet état pour le connaître. Ainsi, il ne reste plus d’acceptable, de possible que la simple opération usuelle : la mesmérisation directe par son semblable.

A toutes ces interpellations, nous en ajouterons une : Pourquoi, Swedenborg, dans la « minutieuse description de ces manifestations, » a-t-il employé un langage aux formes mystiques, et enveloppé ses définitions de nuages presqu’impénétrables à l’œil de l’intelligence? Pourquoi, dans ses écrits, tout se trouve-t-il transformé, défiguré, méconnaissable ? Serait-ce le résultat d’un système arrêté ; d’une détermination de voiler aux autres la lumière, lorsqu’on croit en être le foyer? Et l’idée ambitieuse

d’imposer ses tables de « la nouvelle Jérusalem, » ne lui a-t-elle pas fait rêver un nouveau Sinaï?...

Nous regrettons de nous croire obligé de penser que ces formes nébuleuses résultent d’un calcul intentionnel; et nous pensons également qu’il ne serait pas impossible de dégager les faits réels du mesmérisme, des formes arcaniennes dont Swedenborg les a recouverts. Nous demandons la permission démontrer ici, dans un simple parallèle, quel a dû être son procédé pour défigurer ou envelopper mystiquement, les phénomènes magnétiques venus à sa connaissance. Cet exemple est la description de la première expérience de somnambulisme dont il a été témoin. Mais supposons, d’abord, qu’un magnétiste soit placé dans une situation identique à celle de Swedenborg, c’est-à-dire, devant la première manifestation du phénomène de somnambulisme lucide, et qu’il en rende compte en ces termes :

La première fois que je vis une personne en état de somnambulisme, on me mit en rapport avec elle. Elle révéla aussitôt l’objet de mes pensées. J’en fus bien étonné, et croyais que des choses aussi cachées ne pouvaient être connues de personne. Mais des épreuves réitérées, sur plusieurs sujets, me faj miliarisèrent bientôt avec ce prodigieux pouvoir, et me convainquirent que les somnambules aperçoivent toutes les choses de la pensée et de la volonté de l’homme, et même beaucoup plus qu’il n’en sait lui-même.

Or, voici comment Swedenborg transforme ce même fait qui lui est personnel, et le décore du

titre pompeux de Révélation. Dans l’ordre du temps, elle doit être sa première.

« Avant que j’eusse des entretiens avec les esprits, il arriva qu’un certain esprit m'accosta et me dit, en peu de mots, quel était le sujet de mes pensées. Je fus bien étonné qu’un esprit pût savoir ce que je pensais, parce que j’imaginais que de pareilles choses étaient profondément cachées, et connues seulement de Dieu. Quand, après cela, je commençai à parler aux esprits, j’étais indigné de ce que je ne pouvais pas penser une chose, quils ne la connussent aussitôt. Cela devint un sujet de tourment pour moi; mais après une habitude de quelques jours, cela me devint familier. J’appris, enfin, que les esprits aperçoivent, non-seulement, toutes les choses de la pensée et de la volonté de l’homme; mais même, beaucoup plus de choses que l’homme n’en sait lui-même. » (Ârcana cœles-tia, 6214.)

Quel est celui de nous qui ne retrouve dans ce récit le souvenir des impressions qu’a produite sur son esprit la première révélation du phénomène somnambulique? Et qui ne reconnaisse, en même temps, dans le parallèle de l’essence des deux narrations, une identité absolue ?... Quelle différence, cependant, il existe entre elles ! différence qui ne résulte, pourtant, que du remplacement d’un mot par un autre : somnambule par esprit, et de on me mit en rapport avec elle, par un esprit m'accosta.

Un seul mot changé les sépare immensément, et donne en quelque sorte, à l’un, ce caractère mystérieux et solennel où l’inspiré semble trôner du haut de sa mission; tandis qu’il laisse, à l’au-

Ire, la simplicité dont la vérité revêt, même un fait prodigieux. Dans l’une, le narrateur veut absolument être prophète; dans l’autre, il se contente de voir et de décrire : connaître, admirer, être utile, cela lui suffît. Il dit la vérité; l’autre en abuse. Et c’est bien le cas, lorsque Swedenborg s’est emparé des faits magnétiques pour soutenir une pieuse fraude, de lui appliquer cette verte sentence : Tromper est tellement le partage de l’humanité, que l’homme se sert même de la vérité pour mentir.

CHOCARNE.

(La suite prochainement.)

VARIÉTÉS.

Tribunaux. — Il y a quelques mois, des affiches annonçant des séances de magnétisme et de somnambulisme furent placardées sur les places publiques de la ville de Rouen. Ces séances avaient lieu boulevard Beauvoisine, 70, dans les salons d un abbé, le sieur Joly, avec le concours d’une dame Hardy, dite Mm* Marthe.

Dans le même temps, un imprimé de seize pages, signé de l’abbé Joly, était envoyé à domicile. Quelques citations de cet imprimé en feront connaître l’esprit général. Voici comment il commençait :

« Dans ma première lettre sur le magnétisme naturel , il y a deux ans, j’ai annoncé que mes intentions étant de consacrer mes vieux jours à la science du magnétisme, me sentant destiné à en pousser les conséquences aussi loin que possible, et plus

loin qu’aucun homme ne l’avail l'ait encore, je n’agirais point dans l’ombre, mais au grand jour, en rendant le public témoin et participant de mos expériences.........

«........Depuis , j’ai répandu plusieurs

petites brochures sur le magnétisme naturel et spirituel , et sur les divers résultats heureux que j’avais obtenu dans la guérison d’un grand nombre de maladies de langueur, de l’épilepsie; dans les maladies hystériques, les pâles couleurs, les affections hypochondriaques, etc., etc.; tant par le magnétisme naturel, qui est à la portée de tous les hommes, que par le magnétisme spirituel, qui ne peut être exercé que par quelques hommes privilégiés.

«..... Tous les arbres ne peuvent produire des

fruits de même qualité , chacun selon son espèce ou sa destination. Le magnétisme naturel est comme le parvis d’un magnifique temple; le magnétisme spirituel en est le sanctuaire où peu d’hommes peuvent pénétrer. Science sublime, qui appartient autant au ciel qu’à la terre;'science qui transforme l’homme sur la terre, et l’associe déjà aux intelligences célestes....

« ....Aujourd’hui j’offre à tous les hommes instruits, et de bonne volonté, dans toutes les classes de la société, au clergé, à tous les chefs de grandes entreprises, à tous les malades et à tous les amateurs du merveilleux, un succès nouveau, d’une grande importance, et inoui de nos jours, obtenu par le magnétisme spirituel, et que j’appelle la clé mystérieuse..................

«......Madame Marthe, épouse de M. Pau

Hardy, que mes années me permettent de considérer tous deux comme mes enfants d’adoption, est devenue, après sa guérison d’une maladie réputée généralement incurable , par le magnétisme spirituel, et avec les plus délicates précautions de ma part, le phénomène le plus merveilleux des temps modernes, et le sujet le plus précieux, tant pour l’humanité souffrante, que pour le développement de toutes les sciences. . . . . . Extatique à trois extases par jour, elle réunit à la fois et posède au plus haut degré de perfection possible (car on ne saurait,je crois, aller plus loin: au-delà ce serait peut être la mort subite de la somnambule ), non seulement les sublimes et suaves prérogatives de l’extase , de l’intuition , de la vision, de la pénétration-de la pensée, et de la vue à distance avec l’instinct des remèdes. . . .

« Elle possède, en outre, l’inconcevable puissance, la faculté merveilleuse, la propriété, unique de nos jours, de faire mouvoir, tourner et varier dans sa main, par sa seule volonté, la clé par laquelle je l’endors ordinairement du sommeil som-nambulique pour les consultations ; car maintenant, pour les extases, je l’endors spirituellement, par ma seule volonté, peu importe la distance, à

trente pas comme à trente lieues......

............Et elle donne

mystérieusement à cette clé, par sa seule volonté, tous les mouvements convenables selon les diverses demandes des consultants; et les indications de la clé sont exactes, conformes à la vérité, et indubitables.............»

Après avoir décrit quels sont les mouvements de

la clé, suivant que la chose demandée existe ou est vraie, ou bien n'existe pas ou est fausse, ou bien encore est vraie sous quelques rapporls et fausse sous d’autres rapports, etc., l’abbé Joly continue ainsi :

« Mme Marthe, dans ses extases, invoque souvent son ange gardien , mais le plus souvent la Sainte Vierge, pour laquelle elle a toujours eu dès son enfance, une piété afTectueuse. A certains jours, sa prière à Marie est si vive, si animée, qu’elle semble ne plus prier, mais commander...

« Mme Marthe est destinée à opérer plus tard, par le magnétisme spirituel, des merveilles encore plus surprenantes. Déjà, dans ses extases, elle devient d’une légèreté telle, qu’elle marche sur les objets les plus fragiles,... se promène sur des globes de pendules, s’y met à genoux, s’y renverse, et y prend les positions les plus surprenantes; il semble, à certains moments, qu’elle n’est plus soutenue que par la colonne d’air;... j’ai la presque certitude de la voir un jour s’élever de terre, dans ses extases , comme sainte Thérèse dans ses oraisons... de la voir marcher à pied ferme sur l’eau...

« Mais la plus belle, la plus admirable, la plus précieuse des qualités de cette femme étonnante, c’est que déjà elle commence à soulager un grand nombre de douleurs par la seule application de la clé, qui sans doute alors devient conductrice de sa volonté bienveillante, de son fluide réparateur et bienfaisant.

« Malades ! confiez-vous à son action bienfaisante, elle est pieuse, très-pieuse, la piété aide en tout! Píelas ad omnia ulitis est.

« Quand Mme Marthe sera parvenue à tout le développement possible de cette heureuse faculté, qui rapproche l’homme de la divinité, de guérir, du moins de soulager par l’application de la clé, comme autrefois par l’imposition de la main, par attouchement, toutes les douleurs, toutes les infirmités, but unique de toutes mes pensées, de tous mes travaux, de toutes mes expériences , j’entonnerai le cantique d’actions de grâces, je mourrai le cœur content. »

L’attention du ministère public fut éveillée par ces affiches placardées dans la ville, et par cet imprimé distribué à domicile. La police fut chargée de prendre des renseignements sur l’abbé Joly, et l’on sut que cet homme, ancien curé de Selles et de Bac-Hellouin, communes du département de l’Eure, était un prêtre interdit; qu’il se livrait à l’exercice illégal de la médecine, débitait des médicaments, et attirait chez lui des personnes dont il exigeait une rétribution de a fr. pour une séance de magnétisme, et de 10 fr. pour une séance de somnambulisme.

Des poursuites furent alors exercées contre l’abbé Joly, qui comparaissait aujourd'hui (i3 décembre), devant le tribunal correctionnel, sous prévention : i° de s’être, à Rouen, depuis moins de trois ans, à l’aide de manœuvres frauduleuses, fait remettre différentes sommes, ce qui constitue l’escroquerie, aux termes de l’art. 4o5 du Code pénal ; a0 de faire métier de deviner et de pronostiquer, contravention prévue par le n° 7 de l’art. 479 du Code pénal ; 3° d'avoir exercé illégalement la médecine, délit prévu par la loi du 19 ventôse an XI ; 4° d’avoir ,

sans qualité, débité des médicaments et vendu des produits pharmaceutiques, délit prévu par l’art. 56 de la loi du 21 germinal an XI et par la loi du 29 pluviôse an XIII; 5° enfin, d'avoir porté un costume qu’il n’avait plus le droit de porter, délit prévu par l’art. 269 du Code pénal.

La dame Marthe est assise à côté de l’abbé Joly. Elle est comprise dans les trois premiers chefs d’accusation que nous venons d’énumérer.

Sur la table du greffier, on voit une douillette de couleur violette, et une croix d’or. Ces objets, qui étaient portés habituellement par l’abbé Joly, ont été saisis comme pièces à conviction.

Parmi les témoins entendus, la plupart viennent déclarer qu’il y a quatre ou cinq ans, l’abbé Joly leur a donné, soit à Pont-Audemcr, soit à Bac-Hellouin, des médicaments fort inolfensifs, qui ne leur ont fait ni bien ni mal.

Les témoignages concernant la prévention spéciale d’escroquerie présentent seuls de l’intérêt; ils se réduisent à deux.

La dame Pennetot, âgée de l\h ans, pâtissière, demeurant à Rouen, rue St.-Vivien, dépose :

J’ai une fille qui a, depuis trois ans, une maladie de ventre. Comme elle était abandonnée des médecins, j’allai trouver l’abbé Joly, dont j’avais entendu parler. Celui-ci me dit qu’il arriverait peut-être à un résultat satisfaisant par le magnétisme. Un jour, ma fille, que je n’avais pu accompagner, se présenta seule chez l’abbé Joly, qui lui proposa d’endormir la somnambule, moyennant 10 fr., en lui faisant espérer que la dame Marthe pourrait ainsi découvrir quelle était sa maladie. La somnam-

bulc déclara à nia fille qu’elle était enceinte, ce dont elle se défendit. Quoique la guérison de ma fille n’avançât pas, j’avais toujours foi dans l’abbé Joly, qui proposa une nouvelle fois d’endormir la somnambule. Cette fois j’étais avec ma fille, mais on me fit passer dans un appartement voisin pendant l’opération. La somnambule dit encore à ma fille qu’elle était enceinte, car j’entendis ma fille se récrier, affirmant que si elle était enceinte, c’était comme la Sainte Vierge, sans le savoir. J’avais dépensé ainsi 89 fr. Voyant que j’avais été trompée, j’allai enfin réclamer mon argent à l’abbé Joly, en le menaçant, s’il refusait, de le dénoncer à la justice. L’abbé me rendit mon argent, à l’exception de a5 fr., que je consentis à déduire pour les médicaments qu’il m’avait fournis.

La demoiselle Pennetot, âgée de vingt-un ans, est ensuite entendue. Sa déposition n’est que la reproduction de celle de sa mère. 11 en résulte qu’elle s’est rendue pour la première fois chez l’abbé Joly le 22 mars 1848, et que sa dernière visite a eu lieu le 6 juin suivant.

Le témoin, qui regagne péniblement sa place, a le ventre démesurément gonflé.

Le prévenu Joly s’avance à la barre. Il porte de longs cheveux , qui commencent à grisonner, et a le costume des ecclésiastiques.

M. LE PRÉSIDENT. —Vos noms?

le prévenu. — Maximilien Joly.

D. Votre âge?— Cinquante-huit ans.

D. Votre état? — Prêtre.

D. Votre lieu de naissance ? — Beaugency, dans le Loiret.

D. Votre demeure ? — Rouen, boulevard Beau-voisine. n. 70.

D. Vous avez exercé illégalement la médecine?

— R. Jamais.

D. Cependant, nous avons entendu des témoins qui le prouvent. — R. Je recevais quelquefois des malades par complaisance, mais pas autrement.

D. Vous avez débité des médicaments? — Je ne me le rappelle pas.

D. Qu’avez-vous à dire en ce qui concerne la dame Pennetot et sa fille ? — R. La dame Pennetot est venue me trouver parce que sa fille était abandonnée des médecins. Je lui ai dit, d’après bien des auteurs, que le magnétisme pouvait produire des résultats avantageux; je l’ai prévenue que, pour chaque séance de magnétisme, on payait 2 fr., et que, pour endormir la somnambule, il fallait payer 10 fr. J’ai laissé la dame Pennetot libre d’accepter ce que je lui proposais : elle a donc fait ce qu’elle a voulu.

La dame Marthe s’avance à son tour. Elle porte un chapeau de velours noir avec un voile; un manchon garantit ses mains contre la rigueur du froid. Sous ce costume, ceux qui l’ont connue autrefois dans une condition beaucoup plus humble, la reconnaîtraient à peine.

D. Vos noms?— R. Marthe, femme de Paul Hardy, employé dans les douanes.

D. Votre âge ? — R. Vingt-cinq ans.

D. Votre état? —• R. Somnambule.

D. Votre lieu de naissance? — R. Rouen.

D. Votre demeure? — R. Boulevard Beauvoi-sine, 70.

1). Vous avez exercé illégalement la médecine?

— R. Je ne sais pas ce qu’on veut dire; je sais seulement qu’on m’endort; voilà tout ce que je sais.

La prévenue paraît en proie à une violente émotion.

D. Vous étiez cependant éveillée lorsque vous avez palpé la demoiselle Pennetot? — R. Non; j’étais en étal de somnambulisme.

m. asse, substitut du procureur de la République, soutient la prévention sur tous les points, excepté en ce qui concerne le chef relatif au port illégal d’un costume , parce que l’abbé Joly, quoique interdit, n’a pas cessé d’être prêtre.

Me CIIASSÀN, dans l’intérêt de l’abbé Joly et de la dame Marthe, a discuté les différents chefs de la prévention. L’avocat s’est attaché principalement au fait le plus grave, celui d’escroquerie. Il a démontré que les manœnvres frauduleuses, nécessaires pour constituer le délit, ne se retrouvaient pas dans l’espèce; qu’on ne pouvait pas les voir dans l’imprimé distribué à domicile, puisque la clé mystérieuse dont il est question n’a pas servi à amener la demoiselle Pennetot chez l’abbé Joly, la brochure étant de >84g, c’est-à-dire d’une époque postérieure à la connaissance qu’a faite la demoiselle Pennetot de l’abbé Joly. On ne peut pas voir davantage les manœuvres frauduleuses dans l’usage du magnétisme, car si le magnétisme est traité avec dédain, il n’en faut pas moins reconnaître que le magnétisme est une chose sérieuse, et qu’il ne faut pas le persécuter à cause des services qu’il peut rendre à l'humanité. Le ! magnétisme, d’ailleurs, est un moyen thérapeutique, et une commission,

composée d’illustrations médicales, qui avait été nommée en 1825, à Paris, par l’Académie de médecine, pour faire un rapport sur le magnétisme, a conclu en ces termes : Le magnétisme doit entrer dans le cadre des connaissances médicales; l’Académie doit encourager les études magnétiques.

Le tribunal a prononcé le jugement suivant :

« En ce qui touche l’escroquerie :

« Attendu que Joly a employé le magnétisme comme moyen curatif; que les annonces peuvent bien être du charlatanisme, mais ne constituent pas des manœuvres frauduleuses; qu’au surplus, l’emploi de la clé mystérieuse est postérieur aux faits signalés ;

« En ce qui touche le port illégal d’un costume :

« Attendu que Joly, quoiqu’interdit par ses supérieurs, avait le droit de porter le costume de prêtre;

« En ce qui concerne le reproche de faire métier de deviner et de pronostiquer :

« Attendu que ce chef de prévention se confond avec celui d’exercice illégal de la médecine ;

« En ce qui concerne l’exercice illégal de la médecine :

« Attendu qu’il résulte des débats que Joly n’a pas pris le titre de médecin ou d’oflicier de santé, et que les faits d’exercice illégal de la médecine remonteraient à plusieurs années; qu’ils sont, dès lors, couverts par la prescription, aux termes de l’art. 64o du Code d’instruction criminelle;

• En ce qui concerne l’exercice illégal de la pharmacie ;

« Attendu qu’il est constant que Joly a distribué dns médicaments ;

« Ce qui constitue le délit prévu par l’art. 3G de la loi du 21 germinal au XI, et par la loi du 29 pluviôse an XIII;

* En ce qui concerne la femme Hardy;

« Attendu que, pour l’escroquerie, les manœuvres frauduleuses n’existent pas davantage, et qu’elle ne serait complice que d’un fait atteint par la prescription ;

« Par ces motifs,

« Le tribunal condamne Joly à 100 fr. d’amende et aux dépens;

« Décharge la femme Hardy de l’action du ministère public. »

(Droit.)

PETITE CORRESPONDANCE.

Avis. — Le Gérant du Journal du Magnétisme a l’honneur de prévenir MM. les Actionnaires, que l’Assemblée générale annuelle prescrite par l’article 19 des Statuts, pour la reddition de ses comptes, aura lieu dans la première quinzaine du mois prochain, au siège social.

Le jour et l’heure de la réunion seront indiqués dans les lettres de convocation individuelles.

Le Gérant .- HÉBERT (de Garnay).

TABLE

ANALYTIQUE

DES MATIÈRES DU TOME VIII.

INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.

Athénée magnétique de Lyon. Suspension de ses séances d'expérimentation publique. Espoir d’une prochaine réorganisation, 65, 580.

Athénée Troyen de Mesmérologie, fondé par M. J. de Rovère. Expériences, 219. — Cure remarquable , 338.

Banquet mesmérien. Fête annuelle. Cent-quinzième anniversaire de la naissance de Mesmer. Annonce du Banquet, 44, 95. — Sa célébration. Compte-rendu. Discours de MM. du Potet, H. Bonnelier, l.éger et Burckard. Les Sybilles modernes, couplets par M. Jules Lovy. Le Miroir magique , stances par M. A***. Liste des souscripteurs au banquet, 301 à 319.

Conférences magnétiques dominicales. Expériences de magie naturelle. Etudes philosophiques et psychologiques, par M. du Potet, 140, 182, 211, 237, 257, 327, 393, 585, 633.

Hôpital mesmérique de Calcutta , fondé et dirigé par le Dr Esdaile. Journal des Traitements faits en 1847, publié par le gouvernement. — Cas de chirurgie, 78, 97, 353, 417. — Cas de médecine, 112, 129, 456.

Infirmerie mesmérique de Londres. Liste des dons réalisés pour son établissement, 119.

Institut magnétique de Bristol. Le comte Ducie, président, converti à la science nouvelle par les merveilles du somnambulisme, 246.

Jury magnétique d’encouragement et de récompense. Sa prochaine éunion pour distribution de mé-

dailles, 148. — Ajournement et causes, 404. — Assemblée du Jury, élection des fonctionnaires, 461 .—Première séance annuelle. Compte-rendu. Discours de M. du Potet, président, 513. — Rapport de M. le colonel Mac Sheehy, secrétaire-général. Titres de MM. Laforgue, Esdaile, Durand. Loysel, de Rovère et Barthet à l’obtention d’une médaille honorifique. Propositions admises à l’unanimité, 561 à 576. — Pièces justificatives, 594 à 619.

Maison de santé magnétique à Paris. Le magnétisme en société commerciale, 476.

Société du Journal du Magnétisme. Assemblée générale annuelle des actionnaires. Compte-rendu du gérant. Résumé de l'état du magnétisme dans les diverses parties de monde, 72. — Souscription d’actions nouvelles, 192, 320. — Prospectus du Journal, 533.

Société du Magnétisme de la Nouvelle-Orléans. Composition de son bureau. Lettre de M. Joseph Barthet, président, sur la propagation du magnétisme aux États-Unis. 145. — Lettre du même, sur diverses cures, 289.

Société du Magnétisme de Rouen. M. le Dr Desbois, président, 149.

Société du Mesmérisme de Paris. Reprise de ses séances expérimentales. Composition de son bureau, 118. — Ambulance de cholériques à Pantin, 266.—Recherches sur la date exacte de la mort de Mesmer, 619.

Société magnétique de Caen. Causes de sa décadence, 188.

Sociélé magnétique de Turin. Sa prochaine formation, 583.

Société magnétologique de Paris. Reprise de ses séances expérimentales. Decoration distinctive obligatoire pour tous ses membres. Composition du bureau, 66.

— Changement de local, 583.

Société magnétologique de Port-Louis (Ile Maurice). Banquet mesmérien. Annonce de documents relatifs aux travaux de la Société, 147.

CLINIQUE MAGNÉTIQUE.

$ I. Cas de chirurgie. — Opérations accomplies sous la trance ou l'insensibilité magnétique.

Amputation de membres, 17, 357.

Avulsion d’une molaire, 18.

Calcul vésical, 97.

Eléphantiasis, 353 à 355.

Glandes dégénérées, 17.

Hydrocèle, 78.

Hypertrophie du scrotum, 80, 83, 100 à 112, 353 à 362, 417 à 428.

Scirrus testium, 356.

Tumeurs cartilagineuses, 82.

§ II. Cas de médecine. — Maux et affections guéris ou soulagés ¡par le magnétisme.

Affection du rachis, 14.

Aliénation mentale, 137, 138.

Atrophie de membres, 291, 387.

Catalepsie pathologique, 154, 189, 220, 229, 385.

Cécité, 226.

Choléra-morbus, 206, 321.

Constipation opiniâtre, 40.

Convulsions, 70:

Coups et meurtrissures, 36.

Coxalgie compliquée, 598, 614.

Désordres généraux, 295, 297, 338, 428, 603, 646.

Douleurs intestinales, 646, 650,

Engorgements glanduleux, 112, 129, 601.

Entorses, 292, 606.

Epilepsie, 131, 138, 458, 607.

Fièvres cérébrales, 33, 651.

Fièvres intermittentes, 36, 291.

— typhoïdes, 650.

Fluxion de poitrine, 70.

Gastrite chronique, 291.

Goître, 616.

Goutte, 246.

— sciatique, 40, 458. Hémiplégie, 136, 456.

Hernie étranglée, 433.

— inguinale, 40.

Hydartrose chronique, 456. Hydropisie, 595, 603.

Hystérie,. 291.

Incontinence d’urine, 35.

Luxations, 40.

Menstruation, 40, 291.

Névralgie, migraine, etc., 40, 291, 457.

Odontalgie, 40, 70.

Palpitations de cœur, oppression, suffocation, 34, 36.

Paralysie, 41, 135, 456, 457, 607.

Paraplégie, 457.

Perte sanguine, 40.

Plaies cancéreuses, 617. Rhumatisme articulaire aigu, 40.

— articulaire chronique,

113 à 118, 130, 133, 209, 458.

— nerveux, 35, 71, 457.

Strabisme, 296.

Surdi-mutité, 227, 679.

Surdité, 227, 296, 341.

Tétanos, 458.

Tumeurs blanches, 72, 133. Tuméfaction, 643.

Vers intestinaux, 69.

Vomissement de sang, 72.

VARIÉTÉS.

$ I. Théories, études, phénomènes remarquables, expériences curieuses, etc.

Anesthésie magnétique. Le magnétisme auxilaire de la chirurgie, 15 à 18, 78 à 84, 97 à 112, 278, 353 à 363, 417 à 428, 567.

Baguette divinatoire, ou furcelle. Instrument à l'aide duquel on peut juger de l'état électrique de l’atmosphère, 253.

Catalepsie prolongée. Phénomène extraordinaire. Traitement et guérison, par M. Gravé, 154, 189, 220, 229 , 385.

Charmeurs de serpents, 405.

Choléra-morbus. Traitement par le magnétisme, 206, 255, 321.

Eau magnétisée. Ses propriétés curatives, 35, 37, 69, 295, 301, 597, 650.

Electricité humaine. Jeune fille électrique. Négation par le Dr Roger. 85. — Réponse du Journal, 87.

Electro - magnétisme. Théorie et faits, 85, 152 , 269 , 343 , 378, 390, 462.

Éther et chloroforme. Le Dr Roger

préconisant les propriétés stupéfiantes de ces deux agents chimiques, nie les faits d’insensibilité magnétique, affirmés, au contraire, par le Dr Andral dans son Cours de Pathologie. Réponse au Dr Roger, par le Dr Charpignon, 14.

Etudes somnambuliques. De la véracité dans le sommeil magnétique, par M. Townshend, 364. — Réflexions par M. du Potet, 369. — De l’instinct poétique , par M. Evette, 449. — De la valeur du somnambulisme dans le traitement des maladies , par le Dr Charpignon, 638.

Insensibilité des magnétisés aux décharges électriques, 107 à 111, 354, 358, 423.

Insensibilité magnétique. Voy. plus haut : Anesthésie.

Insufflations magnétiques. Leur puissance dans les affections cérébrales. l.etlre du Dr Ordinaire, donnant la relation d’une cure remarquable sur son enfant, 631.

Invasion subite de l’état de veille par l’état de sommeil, 105, 423.

Magie magnétique. La philosophie et la science ont fait fausse route. Le magnétisme peut expliquer el reproduire les fails merveilleux de tous les temps, que les esprits forts attribuent à l'imagination ou à la crédulité du vulgaire ; par M. du Potet, 140, 182, 211. 257, 327. — Aperçus sur le même sujet, par M. Alph. Chocarne, 237, 393. — Phénomènes psychiques et physiologiques : Empire de la volonté animique, 185, 394, 589, 634, 649. — Transanimation, 185, 397. — Existence conjecturale des esprits, 187, 213 , 332. — Signes magiques, 215, 634. — Dangers à éviter dans les expériences de magie, 215. — Réserve à provoquer les prédictions, 216. —Communication ultramondaine, 218. — Extase, 237 à 246. — Exaltation passionnelle, 258, 337, 396. — Mimique imitative involontaire, 399. — Miroir magique, 238, 258, 330. — Perception rétrospective, 238, 262.

— Visions, 258, 331. — Métamorphoses physiques et morales, 589. — Isolement et rappel de la vie, 634.

Magnétisme (le) à l’Institut. — Déviation de l’aiguille asiatique par la volonté, 152. — Affirmation, par M. de Humboldt, de la découverte de M. Du Bois-Reymond, 269. — Controverse à l’Instilut de France. Compte-rendu, par M. Gilbert Govi, 343.

— Continuation du même sujet, avec notes scientifiques, 462. —

Réflexions, par M. du Potet, 474.

— Boutades de M. l’abbé Moigne, à propos de cette question, 351 , 478.

Médecine d’imagination. Effets de l’imaginalion sur l’organisme humain, 481. — Toucheurs, taumathurges, guérisseurs , 492 , 523, 544. — Amulettes, talismans, charmes, reliques, 498, 542, 551. — Poudre de sympathie, 502. — Onguent armaire, 505. — Sorcellerie, possession, exorcisme, 526, 537. — Trembleurs des Cévennes, 529. — Convulsionnaires de St.-Médard, 555. — Danse de St.-Guy, 557.

Médecine transplantatoire. Maladies passant du corps d’un homme dans un autre, ou dans un animal, 168. — La gérocomie, contact d’un corps usé avec un corps jeune, 173. — Les Sunamites, ou les vierges du Palais-Royal, 178.

Novateur (le). Réflexions philosophiques sur le néant de la science des académies, et sur la mission humanitaire que l’avenir assigne au magnétisme, par M. du Potet, 622, 667.

Palingénésie végétale. Secrets chimiques pour donner à des plantes incinérées l’apparence de la vie. Induction en faveur de l'apparition des trépassés, 91.

Philosophie médico-magnétique, par le Dr Alfred Perrier. — Préambule : Le somnambulisme dans l’antiquité, 161. — Ch. Ier : Médecine transplantatoire, 166. — Ch. Il : Médecine d’imagination, 481, 523, 537. (Voy. plus haut le sommaire de ces deux chapitres.)

Physiologie magnétique. Développement extraordinaire de froid, de chaleur et d’électricité , selon qu’on actionne le nez, le menton ou la rotule. Expériences intéressantes. par le Dr Persiston, 374.

— Réflexions du Journal, 379.

Puységurisme. Voyez plus haut: Etudes somnambuliques, et plus bas : Somnambulisme.

Somnambulisme : Sa connaissance dans les temps antiques, 161. — Onéirapoles, prêtres somnambules de l’antiquité, 162. — L’art médical paraît avoir son origine dans les révélations somnambuliques, 163. — Médecine des somnambules , 171, 193, 292, 326, 431, 644. —Lucidité, 69, 71, 578.

— Prévision, 72, 386. — Révélation, 150, 310. — Transmission de pensée , 250. — Vue à distance, 247, 579, 584, 675. — Mutation d’individualité, 45. — Identification de personnes, 66. — Erreurs des somnambules, 284, 369, 638. — Abus des consultations médicales somnambuliques, 284, 638. — Préférence à donner à la magnétisation directe, 284, 643.

Télégraphie magnétique. Sa vraisemblance, fondée sur la faculté d’identification de quelques somnambules avec des personnes placées hors de leur vue, 67.

Télégraphie traumatique. Son usage en Chine. Communication de M. Jobard, 89.

Théorie des courants magnétiques naturels, 273.

Trance magnétiqne. Voyez plus haut Anesthésie.

§ II. Nouvelles intéressant le magnétisme. Faits divers.

Annonce d’un opuscule sur les rapports du magnétisme avec la religion, par M. l’abbé Almignana, 151.

Annonce d’un Traité sur le magnétisme, par M. Olivier, de Toulouse, 149, 220, 584.

Assemblée nationale. Pétition d’un habitant de Paris, le sieur Lacombe, se plaignant des obsessions d’un magnétiseur, 152. —

L'Assemblée nationale compte parmi ses membres une vingtaine de magnétiseurs, 350.

Bibliothèque magnétique du baron de Guillemin (Vente de la), 248. Biographie. Notice sur Mme Catherine Delahay, dite la Somnambule de Soissons, 581. Chercheurs (les) de trésors. Anecdote racontée par M. Jobard, 674.

Cours élémentaires de magnétisme théorique et pratique (Ouverture de nouveaux), par M. du Potet 95, 416, 584, 632.

Evocation des âmes des trépassés, 19, 48.

Exhibition publique de somnambules, 249, 479, 560, 678.

Faits,.mystérieux. Les muets de Bellecombe. Relation par M. de Brévans d’Albois, 408. — La sorcellerie en Angleterre, 579.

Magie et Magnétisme. Conférence par M. Morin, 249, 267.

Magnétisme (le) au 17e siècle. Note épigrammatique de l'Union médicale. Réponse du Journal, 673. Magnétisme (le) aux monts du Liban. Divination des femmes druses. Somnambules arabes, 149. Magnétisme (Etat du) magnétisme dans les diverses parties du monde, par M. Hébert (de Garnay),74.

Magnétisme (Etat du) en Italie. Lettre du comte Gérard Freschi, de Venise, rappelant les noms des principaux magnétistes italiens, et analysant la Methode magnétique du Dr Coddé, basée sur le principe de polarité des fluides impondérables, 120.

Magnétisme (Etat du) aux Etats-Unis, 145, 151. — Propagande active par M. Barthet, à la Nouvelle-ürléans, 75, 574.

Magnétisme (Etat du) à Porto-Ricco.

Lettre du Dr Cruxent, 127.

Malades abandonnés de la médecine, et guéris par le magnétisme, 33, 207, 221, 338, 341, 428, 598, 644.

Mariage du Dr Teste avec une jeune anglaise, 320.

Mesmer : Ses manuscrits sur les finances île la République, 3. — Son buste, 145. — Ses actes travestis en faits romanesques, 153. —Son disciple Wurtz, 249, 465. — Son ami d’Eslon, 443. — Sa théorie sur le fluide universel, 271, 440.

— Célébration de sa fête, 301.

— Son portrait, 303. — Sa coopération morale à la Révolution française, 438. — Ses baquets, et autres appareils magnétiques, 439. — Ses partisans et ses détracteurs, 443. — La date exacte de sa mort, 620. — Sa pétition autographe au ministre François de Neufchàteau, pour provoquer la création d’une chaire de clinique magnétique dans l'un des hospices de Paris, 653.

Mesmérisme (le) au théâtre. Le Mirliton du Diable. Analyse au point de vue magnétique, par E. V. Léger, 11.

Nécrologie. Mort des magnétistes : Loisson de Guinaumont, 76. — Dr Ledure, 350. — Mansut, libraire, 380. — Dentu , id.,511. — Mme Delahay, 581. —Dr Ducros, 582.

Paradis (le) de M. Cahagnet, 20.

Persécutions contre les magnétiseurs. Procès intentés pour faits de magnétisme, à M. l’abbé Joly, de Rouen, 583, 694. — Idem à M. J. de Hovère, 609.

Portrait de Mesmer, peint par M. Carpentier, magnétiste, 303.

Portrait de M. du Potet. Gravure ornant l'Essai sur l'Enseignement philosophique du Magnétisme, 126.

Profession de foi magnétique de l’abbé Leray, 127. — Id. du Dr Dehenne, 480. — Id. du Dr Savoyt, 577. — Du Dr Mathieu, 678.

Progrès du magnétisme. Beaucoup de médecins pratiquent sournoisement le magnétisme sous forme

de frictions, ou par l’imposition des mains, 43.

Prophétie d'Orval. Un mandement de l’évêque de Verdun en infirme l'authenticité, 192. (Voy. cette prophétie, tome VI, page 273.)

Renseignements authentiques sur la dale du décès de Mesmer, 619.

Réservoirs magnétiques, 438.

Séances de magnétisme simple, par M. .Iules de Rovère, à Bar-sur-Aube. Malveillance du Journal le Mémorial, 96.

Tableau de Mola. Scène de magnétisme, 582.

Voleurs découverts par Mlle. Virginie, somnambule. Lettre de M. Jobard, de Bruxelles, 150.

BIBLIOGRAPHIE.

Arcanes (les) de la rie future dévoilés, par M. Alph. Cahagnet. Critique philosophique de cet ouvrage, par M. du Potet, 19.

— Examen de forme et de fond, par M. Hébert (de Garnay), 48.

Christ (le) qualifié magnétiseur, par M. l’abbé Almignana. Réflexions par M. du Potet, 413.

Doctrine de l’Ecole de Rio-Janeiro, et Pathogénésie brésilienne, avec une introduction par le Dr Mure, médecin homéopathe. Excessive crédulité des disciples de Habnemann à l’égard de certains effets qu’ils attribuent au magnétisme, 156.

Etudes physiques sur le Choléra de 1832, par M. de Tristan. L’auteur attribue l’invasion du choléra à un excès d’électricité positive dans l’atmosphère, 251.

Histoire de la Révolution française, par M. Louis Blanc. Extrait du chapitre sur les Révolutionnaires mystiques, en ce qui concerne Mesmer, 438.

Initiation aux Mystères secrets de la théorie et de la pratique du Magnétisme, etc., etc., etc., par M. J. A. Gentil. L’auteur a voué un culte au dieu du somnambulisme; M. Jean-Bon Marcillet en est le grand-prêtre, et M .Alexis Didier l’oracle, 159.

Kinésithérapie, ou Traitement gymnastique des maladies, par le Dr Georgii. — Reflexions par M. Hébert (de Garnay), 415.

Lettres sur le Magnétisme animal , par le Dr de La Salzède. Analyse et examen , par M. Baïhaut, 270.

Livre (le) de la Nature, par Cousin Despréaux ; nouvelle édition, augmentée d’un chapitre sur le magnétisme. Erreurs de M. Desdouits, professeur au collége Stanislas, auteur de ce chapitre, relativement à la lucidité somnambulique, 382.

Manuel de Physiologie, par J. Muller, professeur de l’Université de Berlin, traduit de l’allemand par M. Jourdan. Négation absolue du magnétisme animal, 383.

Mesmer et Swedenborg, par G. Bush. Analyse et examen critique par M. Chocarne, 657, 681.

Premiers principes de Médecine, par le Dr Billing, traduit de l’anglais par le Dr Chéreau. Ouvrage favorable au magnétisme, 223.

Science du Diable (Almanach de la). Pamphlet magnético-politique dans lequel M. Cahagnet fait sa propre apologie, et lance vertement tous les magnétistes qui ne sont pas de son Eglise, 47.

LISTE NOMINATIVE

des Personnes dont les Écrits, les Actes ou les Opinions sont insérés, analysés, cités, rapportés, commentés ou réfutés dans ce Volume.

A***, 310.

Alexandre Dumas, 152.

Almignana (l’abbé), 151, 287, 413.

Andral, Dr, 16.

Andraud, Dr, 251.

Arago, de l’institut, 346.

Arnette 208.

Aubian, Dr, 33.

Baïhaut, 270.

Barthet, 75, 145, 289, 390, 510, 574, 680.

Beaufils, Dr, 341.

Becquerel, 317, 467.

Bertherand de Longpré, 230, 385.

Bertrand, Dr, 520, 532.

Billing, Dr, 223.

Boisseau, 193

Boméa, 326.

Bonnelier (Hypolite), 309.

Boulay, 679.

Braid, Dr, 67.

Brévans d'Albois, 408.

Brierre de Boismond, Dr 530.

Buchanan, Dr, 374.

Burckard, 309.

Bush (George), 657, 681. Cabagnet, 19, 47, 48.

Carpentier, 303.

Chabot (Mademoiselle), 606.

Charpignon, Dr, 14, 249, 252, 269, 638.

Chassan, 702.

Chereau, Dr, 223.

Chocarne, 237, 393, 657, 681.

Clapier, 35.

Cloquet, Dr, 16, 570.

Coddé, Dr, 122 à 126.

Coudret, Dr, 390.

Cruxent, Dr, 127.

Dacheron, Dr, 341.

Darribes, 225.

Davis (J.-A.), 687.

Dehenne, Dr, 480.

Delaliay (Madame), 581.

Deleuze, 640.

Dentu, 511.

Desdouits, 382.

D’Eslon, Dr, 443, 482.

Despine, père, Dr, 652.

Despretz, 347, 467.

Didier (Alexis et Adolphe), 159, 380, 480, 678.

Douée, 617.

Drivon, 291.

Du Bois-Reymond, 269, 345, 351, 462.

Ducie (Comte), 246.

Ducros, Dr, 348, 467, 512, 582. Dugnani, Dr, 121.

Du Potet de Sennevoy, 19, 140, 182 , 211, 237, 257, 303 , 320, 327, 369 , 393, 413 , 474, 515, 585, 622. 633, 667.

Durand, 569,678.

Duvernoy, 346.

Esdaile, Dr, 78, 97, 129, 279, 353, 417, 456, 566.

Evette, 449.

Fanton, Dr, 17.

Ferzaghi, Dr, 121.

Fessart-I.ejeune (Madame), 605.

Finella, Dr, 121.

Frapart, Dr, 520, 611.

Freschi (Comte), 120.

Gentil, 159.

Georget, Dr, 520.

Georgii, Dr, 415.

Giblat, 338.

Gibon, Dr, 17.

Gilbert-Govi, 343, 462.

Gilibert, Dr, 171, 174.

Granetti, Dr, 121.

Gravé, 221, 230, 385.

Hardy (Mme Marthe), 694.

Hébert d’Aveney, 476, 678. Hébert (de Garnay), 48, 72, 415.