1847
JOURNAL
DU
MAGNÉTISME
REDIGE PAR
UNE SOCIÉTÉ DE MAGNÉTISEURS ET DE MÉDECINS
SOUS LA DIRECTION DE
M. LE BARON DU POTET.
La vérité, n’imporle par quelle bouche; le bien, n'imporle par quelles mains.
TOME IV.
PARIS
BUREAUX : BUE D'ANTIN, 12.
1817
Pam. — Imprimerie d\A. Rctb ctComp., rue tie Seine, Si.
PÉRÉGRINATiONS MAGNÉTIQUES.
§ Il. — Lyon.
(5e article.)
Dans nia précédente lettre, mes chers élèves, après vous avoir signalé des tendances coupables, j’en appelais de mes vœux à une réforme nécessaire; mais c’était un vœu plus qu’une espérance. Vit-on jamais l'araignée être secourable à la mouche (pie la fatalité ou l'imprudence conduit dans sa loile? Non, car en la dévorant elle obéit à une loi de nature. Les corporations sont tou* tes despotiques et cruelles lorsqu’on ne restreint point leurs privilèges. Toutes les sectes religieuses ne lurent-elles pas envahissantes, et ne devinrent elles point les plus dangereux ennemis des hommes que d'abord elles devaient protéger? C’est donc aussi une loi de notre nature puisque, voulant le bien isolément, le ma! est toujours la suite des délibérations que l'intérêt d>i corps a provoquées.
JOURNAL
DU
M A G N É TIS M E.
Les réformes se font rarement par le pouvoir; et, ceci est horrible à penser, ce sont presque toujours des révolutions qui les accomplissent. Chers élèves, nous qui n’avons point le pouvoir et qui ne sommes point révolutionnaires, il nous faut agir sur les esprits par une propagande active, et attendre du temps qu’il nous donne gain de cause. Ne vous attendez donc point à trouver le chemin facile, prenez garde aux toiles d’araignée tendues avec art sur votre route; que vos sens soient toujours en éveil, et tâchez d'imiter votre maître, qui, simple moucheron, allant par-ci par-là bourdonner la vérité, a pu pourtant passer au travers des toiles de l’université, du clergé, de la médecine et des académies.
Vous allez, comme lui, rencontrer les préjugés, la sottise dans chaque homme que vous voudrez convaincre, et cette armée qui est là devant vous a ses sentinelles avancées qui vont vous crier : Passez au large! et vous traiter en ennemi, absolument comme si vous alliez parler de liberté en Russie ou de christianisme à Canton. Cependant c’est un bien préférable à la liberté que vous apportez aux hommes, c’est une vérité qui mène à la croyance en Dieu, c’est aussi la santé et lu connaissance deux-mêmes dont vous venez leur révéler les mystères. Mais ne vous rebutez point; car les armes ne sont plus changées, dans noire pays du moins, et les fagots ne doivent plus s’allumer au souffle des âmes pieuses, mais ignorantes. Vous allez même être secondés par une foule d’abbés, bons chrétiens à ce que l’on dit, qui vont vous ouvrir les portes des gens les plus timorés. Tâchez d’entrer de suite; car vous pouvez être certains qu'ils vous les fermeront un jour sur le nez, et laisseront leurs sandales pour avertir qu’on ne les trouble point dans les saintes extases qu’ils procureront aux pécheresses endurcies.
Yous voyez qu'aujourd’hui j’ai bien changé de thème.
Ali! c’est que je ne me sens pas d’aise, et je vais vous dire en confidence la cause de cette disposition si nouvelle en moi.
J'ai rêvé celte nuit que le diable, devenu ermite, se. faisait magnétiseur, et créait un journal qu’il devait distribuer gratis (le diable est toujours généreux); chaque page devait être lumineuse, et contenir sur la science de l’homme tout ce que de saints personnages avaient caché jusqu'à ce jour (plusieurs par ignorance, d’autres parce qu'ils virent que certaines vérités divulguées pourraient devenir conlraires aux préceptes qu’ils enseignaient). Pour cet effet, le diable s’associait une foule d'hommes qu’il avait gagnés par promesse de largesses et par son éloquence; puis, les touchant, tous de sa baguette, il les illuminait de son esprit, pour faire voir à moi et à bien d’autres que nous n’étions que des magnétiseurs vulgaires, et qu’ils avaient seuls les vraies connaissances des mystères de la vie humaine. Et je les vis, toujours dans mou lève, se répandre par toute la terre, et aller en pèlerinage, prêchant les populations et leur annonçant la venue d'un monde nouveau, d’un monde où chaque homme aurait un œil de plus et des dons surnaturels. Et, pour prouver la sainteté de leur mission, ils guérissaient tous les possédés ou démoniaques qu’ils rencontraient. Et le peuple, reconnaissant à leurs œuvres qu’ils avaient vraiment plus de vertus que les autres hommes, leur demandait leur bénédiction. Mais jugez de l’étonnement de tous : le vent avant dérangé certaine! pièce de l’ajustement du général, ou aperçut un tout petit bout de queue!... Je ne vous dirai pas la suite de ce rêve, cela pourrait vous ennuyer, et sortirait d’ailleurs de mon sujet. Cependant le diable lit encore une chose que je ne puis vous taire. Il fascinait tellement de pauvres cervelles, qu’elles voyaient nu firmament la Vierge et tous les saints du paradis, et s’imaginaient re-
cevnir une foule de grâces d’en haut, comme M. Ferdinand Cuny en recul une, ce «¡ne garant.il M. Possin, son magnétiseur : de vraies couronnes de brouze en lin, dorées par les procédés Ruollz et Eklinglou. Mais, chers élèves, tout s’évanouit enfin, et je ne vis plus que des diables sans queue, ce qui me lit une peine extrême, car je ne pus plus les distinguer des hommes bienfaisants dont ils avaient pris l'allure el le costume.
.Revenons donc aux choses plus sérieuses, à des réalités cruelles qu'il faut savoir désormais regarder en face, afin d'en modilicr la nature et de faire sortir le bien du mal, etnon,éoininc on l’a fait toujours, le mal du bien. Il y a plusieurs siècles que ce travail est commencé, et un jour je vous ferai l'histoire des hommes généreux qui l'entreprirent et pajèrent de leur vie leur philanthropique leuialive. Cesexemplcs viendront. avec uneautre col-leciion ûn peccadilles i el vous serez réjouisdene pas vvre dans le siècle des Jeanne d’Arc, des Urbain Grandier, etc., où des évêques envoyaient au bûcher ces victimes de leur ignorance ou de leur méchanceté, après toutefois leur avoir la.t sentir les douceurs de la torture.
Ces horreurs ne doivent plus reparaître, sans doute, mais elles attristent l’âme par le souvenir. Ah! que l'homme qui sent, qui voit la vérité est malheureux! Mieux vaudrait pour lui l’erreur, car il marcherait en aveugle et ne découvrirait point les méchancetés des hommes. Dans ce moment, un grand nombre d'entre eux s'agitent; ils ont entrevu la vérité naissante, el cherchent le moyen de lui couper les ailes.
Chers elèves, Dieu a voulu que l’homme, quelle que fût la dilïéieuce des temps, des lieux el des croyances, jouit de certaines facultés immuables, qu’il eût des propriétés inahéiables, que quelque chose de divin existât en lui, pour que, se ressouvenant de son orijjue, il trouvât dans sou coeur des sentiments de reconnais*
sance pour tant de bienfaits. Aussi avez-vous vu que les Juifs autant que les chrétiens , les maliométans eomme 1ns Indiens, les Egyptiens, les Grecs, les Romains,les \ra-bes cl es peuples modernes, ont constaté les phénomènes si précieux du magnétisme, du somnambulisme et de l'extase. Bien mieux, Ions ontdansleursanualesdes miracles qui attestent l'universalité des facultés de l’âme humaine. Mais jamais, si ce ne sont les Égyptiens, les savants ne voulurent étudier ces faits oc:ultes, si dignes pourlant.de leurs méditations. Mais pourquoi s’étonner? ¡.'électricité ne fut-elle pas de tout temps dans l'air sans qu’oa s'occupât de l'en soustraire et de Polilisur? Ne vit-on pas aussi l'eau bouillir et soulever le couvercle des chaudières sans songer que c'était une force immense que l’on pouvait rendre utile aux hommes? A nos yeux i! en aélé de même pour la force vitale: aperçue dans tons les temps, ce n’est pourtant que du nôtre qu'on s’occupe de lui faire jouer le rôle de toute force conquise. Seulement, chers élèves, celle-ci porte en soi quelque, chose de divin qui embarrasse l’esprit de ceux qui ont de fausses idées. Kl le est par conséquent destinée à faire d’abord plus de fous que de sages, car les hommes no sont point encore préparés à la recevoir.Ce que nous ne devons pas souffrir, sans nous rendre coupables aux yeux de la postérité, c’est de laisser tromper ceux qui veulent l’étudier en les détournant trop tôt des phénomènes physiques que la vérité nous offre; car on va tenter de les jeter en dehors du monde réel pour leur faire adopter un dogme qui n’est pas le dernier mot de Dieu.
'C'est donc dégagés de tous iiens, de toute entrave, en planant au-dessus des croyances religieuses, que yous devez considérer la puissante vérité magnétique. Les faits merveilleux qu’elle offre révéleront ;i vos esprits leur véritable signification. Ils existent, en vertu d’une loi naturelle; leur principe bienfaisant est supérieur à la
matière, car il la régit. Aussi devons-nous craindre que ce moteur dont l’origine est divine serve de nouveau h enchaîner les nations; car si on a pu, avec des idées erronées, corrompre le cœur de tant de générations, que ne doit-on pas appréhender du pouvoir immense qui, bien plus que des opinions, peut agir sur les esprits!
Voyons ce qu'en fera le médecin s'il s’en empare. Il faut une abnégation de soi-mème; l’aura-t-il? Il faut souvent donner plus que !c superflu de sa vie; le fera-t-il? Et dans ce cas, n’abusera-t-il point du rapport intime qui résulte d’une semblable situation? Ne le fera-t-il point tourner à l’exploitation du malade? Ne vendra-t-il pas trop cher un bien qui devrait être donné, el respectera-t-il la liberté, toujours enchaînée pour un temps?
Iist-ce le prêtre qui sera dépositaire des secrets du magnétisme? Est-il de nos jours pénétré de l'esprit de l'Evangile? Ali! s’il en était ainsi, c’est lui, c’est lui surtout qui devrait remplir la mission sublime d’alléger les souffrances et de guérir les maux.
Le magnétisme agit non-seulement physiquement, mais aussi moralement; il purille tout ce qu'il pénétre , l’esprit et le corps, lorsque celui qui magnétise agit comme interprète de la Divinité. Je ne vous ferai point le tableau désolant de toutes les turpitudes humaines; je ne vous montrerai point l’hypocrite allant au chevet du malade, lui parlant d’un Dieu auquel il ne croit point. Que ferait-il en imposant les mains? 11 ajouterait au trouble.
Je ne vous parlerai point non plus du médecin, qui chaque jour ordonne des drogues dont il n’a pu recon* naître l'efficacité, etqui saigne et purge tour à tour sans se soucier de la vie de ses malades. '
Yous parlerai je de la profession magnétique qui commence à s’établir? Non, le charlatanisme la dévore déjà.
Où donc placer votre confiance, et quel est le génie
tulélaire que vous devez appeler pour vous servir «le guide? Hélas! il est en vous; évoquez-le afin qu’il vous éclaire; il vous parlera en faisant naître des instincts dont vos esprits seront illuminés. Vous pourrez alors trouver les véritables conditions pour accomplir les actes magnétiques, comme aussi vous aurez le jugement, la prudence qui fait éviter les embûches de la mauvaise foi. Vous aurez aussi la véritable force, sans laquelle on ne peut opérer de prodiges, sans laquelle toute œuvre estcommune. Une nouvelle vertu naîtra en vous, et vous en sentirez les douces étreintes; vous verrez sans frémir la maladie envahir vos organes, car vous sentirez en vous l'intelligent travail de la force qui conserve. Si ce sont ceux que vous aimez que le malhe.ur frappe, vous pourrez pour eux plus que pour vous-mêmes; car vous ajouterez votre vie à la leur, et ce concours fera obéir la nature dans le sens voulu. *
Comptez donc rarement sur autrui, mais toujours sur vous-même. Fortifiez votre corps comme votre inlelli—. gence par des actes répétés de puissance magnétique, i Eloignez surtout les vices que trop souvent les hommes ont pris pour des défauts supportables. Ce n'est qu’à celle condition que vous pourrez rendre par vos mains la vérité féconde. Celui qui u’a rien amassé peut-il faire l’aumône? Celui qui a dépensé ses forces peut-il en trouver lorsque la nécessité exige impérieusement qu'il en ait? On peut tout par le magnétisme; mais à condition que la volonté trouve la force toujours prête.
Pardonnez-moi de vous écrire avec si peu d’ordre et de méthode sur un sujet si grave; mais je n'ai qu’un instant pour émettre mes pensées. Dans ma dernière lettre, je vous parlerai sans voile et sans allégories.
(La tuile prochainement.)
ÉTUDES SUR LE SOMNAMBULISME.
§ X. — PUYSÉGI'RISMK.
Nous avons reconnu, par une multitude de faits contenus dans neuf paragraphes précédents, l’exi-tcncc d’un phénomène psychique se manifestant spontanément sous les noms de : songe, rêve, vision, extase, somnambulisme, instinct, pressentiment, etc Nous avons également vu les alcooliques, les narcotiques, et quelques autres médicaments, employés pour lui donner naissance, produire les illusions les plus étranges, les visions les plus fantastiques. Ces préliminaires étaient néee saires pour rattacher sûrement le présent au passé, el montrer que la faculté divinatoire existe latente dans tonie l'humanité. Maintenant que le moyen de faire éclore cette faculté et de la rendre presque permanente est trouvé, nous allons l’examiner sons ce nouvel aspect.
Nos exemples seront autant que possible pris en dehors des livres spéciaux, pour éviter des répétitions inutiles, et montrer que partout et toujours les mêmes attributs caractérisent l étal que M. de Pu.vségtir a fait connaître sous le nom de somnambulisme magnifique.
Première observation (1).
« Une cataleptique de quatorze ans, tombée dans cet état après une grande frayeur, avait des accès tellement fréquents qu’on en comptait plus de cent dans les vingt-
(1) Recueillie par M. le docteur Bouvier et insérée dam la Thérapeutiqut d'Aliberl, tome 11, page 003.
quatre heures; à peine y avait il quelques minntes d’intervalle entre les attaques. Col état durait depuis deux mois, lorsque la malade fui amenée a l’hrtpital Saint-Louis le G novembre IS?0. On mit en usage, pendant plusieurs jours, divers moyens propres à combattre celte singulière affection sans obi cuir une amélioration bien marquée.
■ Celle jeune personne maigrissait, épuisée par 1rs assauts continuels et par l'insomnie. Elle était menacée de tomber dans la langueur lorsqu’on ténia les procédés du magnétisme animal. T.a malade, qui se trouvait alors dans l’état cataleptique, passa assez promptement de l’accès qu’elle éprouvait à un sommeil paisible, pendant lequel toutefois elle répondit aux questions qui lui furent adressées. Ce sommeil dura deux heures. On obtint depuis le même résultat un grand nombre, de fois; les accès devinrent aussi moins fréquents, élpnt remplacés par un sommeil île plus en plus prolongé. On endormit également la malade dans l'intervalle des accès; mais on n'y réussissait pas constamment, et le peu de sucés paraissait lié le plus souvent à une préoccupation d’esprit de cette jeune personne,dont le moral fui singulièrement tourmenté par suite des soupçons que firent naître des phénomènes 1 u : genre aussi nouveau en apparence.
« Ayaut été magnétisée dans son sommeil naturel,qui s’élait rétabli au bout d’un certain temps, elle passa encore à l’état que lui procurait le même moyen pendant ses accès, et qui différait du sommeil ordinaire en ce qu’elle répondait aux questions qu'on lui faisait. I.a première menstruation s'établit chez elle après quelques mois de séjour à l'hôpital; les accès, déjà plus rares à celle époque, s’éloignèrent île plus en plus; mais ils étaient plus longs et souvent compliqué* d hystérie. D'autres phénomènes, également dus au trouble de l’action
nerveuse, comme l'aphonie, le délire, le tremblement, les convulsions, parurent à diverses époques, et presque toujours à la suite de vives contrariétés. Enfin, on put encore observer dans cette maladie, véritable Pro-tée, revêtant presque toutes les formes connues des névro es, même le somnambulisme naturel, qui survint spontanément à plusieurs reprises sans que la malade y fut sujette auparavant. Lorsqu’elle sortit de l'hôpital Saint Louis, le 21 avril 1821, elle avait repris de l'embonpoint et de la fraîcheur; les attaques étaient simplement hystériques et accompagnées de convulsions violentes; il y avait entre Icsaccès un intervalledeplusieurs jours. L“s procédés magnétiques, qui avaient été si efficaces dans la catalepsie, ne produisaient en général aucun changement dans les accès hystériques. Nous eûmes encore l'occasion de faire sur cette jeune fille une remarque bieu intéressante. A deux reprises différentes, on plaça sous ses narines un tlacon d’odeurs suaves pendant l’attaque de catalepsie, et l’on oblint sur le champ la cessation de cette dernière et le sommeil ; double effet qui n'avait été jusqu'alors produit que par les procédés magnétiques. On questionna souvent cette malade dans le sommeil en quelque sorte artificiel que l'on provoquait chez elle, sur le nombre et l’époque de ses attaques a venir, la durée de sa maladie, les remèdes qui pourraient lui convenir. Ses réponses ne furent positives (pie sur le premier point, et l’événement sembla plusieurs fois en montrer la justesse. Ses parents ont même usé de ce moyen, après sa sortie de l’hôpital, pour prendre à son insu les précautions convenables au jour et à l'heure qu elle avait annoncés comme devant amener une attaque. Il ne lui restait en effet aucun souvenir d'avoir parlé pendant son sommeil. Alibcrt dit que cette observation lui fournit une nouvelle preuve que, dans certaines formes de névroses, il y a aberration des sens.»
«
Deuxième observation (I).
«M. Garcin, médecin français à Draguignan, a constaté par des expériences multipliées le don du sommeil magnétique naturellement provoqué dans un jeune homme de vingt-deux ans, avec des circonstances qui ne permettent pas le soupçon et les doutes où s’enveloppent trop souvent les adversaires du sens intime.
«Cet individu, nomméMichel, natifdel'iganières,s’endort positivement à volonté, et à tonte heure du jour ou de la nuit. Il n’a pas d'autre éducation que celle qu’on acquiert dans les écoles primaires de village, et n'a jamais voyagé que de Draguignan à Nice. Il suffit de regarder Michel fortement pour l'endormir une fois dans une minute, qu’il soit étendu dans son lit ou assis sur une chaise au milieu d'une société nombreuse. Dès que le sommeil est venu, des coups de fusil tirés aux oreilles de Michel ne sauraient troubler son repos. Daus cet état, il passe bientôt, et sans aucune difficulté, à une série de tours de force intellectuels dont nous allons tracer une esquisse rapide, en confessant notre profonde humiliation vis-à-vis de la puissance supérieure qui a disposé un semblable mécanisme dans la charpente animée de l’homme.
« L’esprit de Michel se transporte au gré des questionneurs dans les astres, aux antipodes, sous la croule du globe terrestre; il décrit avec une effrayante rectitude de jugement les lieux qu’on lui fait ainsi diaboliquement visiter. Il s’attache d’abord aux masses; les détails dépendent de la fantaisie des interrogateurs. Désignez-lui une personne absente qu'il n'a jamais tue, à l'instant il
(I) Insérie dans la Haut britannique et reproduite dans la plupart d«s journaux parisien» de 1838.
décrit son portrait pliys:que et moral, il on lire l’horoscope, pénètre dans son intérieur, cherche la partie malade ou viciée, indique le remède le plus efficace, et prescrit le traitement.
« On a fait voyager Michel dans les l:eix qu'il ne connaissait assurément pas, et. ses réponses ont donné la preuve d’une lucidité que les puissances actuelles de l’organisation rie l’honn e ne semblaient pas a Imettre. lia parfaitement raconté (¡ne la petite vile des Marti -gnes élait longue et en trois parties; que près de Saint-Chainas, et sur la Tonlonbrc, rivière qui se jette dans les étangs de la Camargue, ¡1 y a un pont, et sur ce pon t un arc de triomphe de construction romaine. Dans un château situé au dessus de Salons, des personnes jouaient aux cales à dix heures du soir : il lésa vues. Les arènes de construction romaine et le nouveau canal d’Arles furent également indiqués avec une précision surprenante. Mais voici quelque chose de plus merveilleux, et que M. Garcin livre à la méditation des savants et des philosophes.
"Michel possède la faculté de la rclrospeclion; il voit des événements depuis longtemps passés et qu’il n’a pu connaître. On l’a fait descendre à l’année 18 ¡3 pour l’envoyer à la recherche de la I.illoite.
• Michel découvre la corvelteau moment de son départ de Cherbourg 11 l'arrête à 103 lieues des côtes de France, à cause du mauvais temps. Il arrive en Irlande avec elle en mai 1836; en repart le 13 juin. Il la perd de vue, et ne la retrouve qu'en mai 18-36 , tout à fait dans le nord, où règne un froid excessif, qui empêche les habitants de se montrer et de lui dire le nom du pays dans lequel il voyage. La corvette part de nouveau; il ne la revoit qu’à la fin de décembre 13 57, dans le pays le plus glacial qu'il ait parcouru. Du événement qu’il ne peut définir, à cause du froid qu'il éprouve lui même
dans tous scs membres, menace le navire français du plus grand danger; il entend les cris de détresse de l’équipage; le navire est englouti; tout, disparaît, tout périt; pas un liommc n’échappe, pas même trois chats qui se trouve ni à bord!!!
« Ce sinistre arriva à 1105 lieues de Londres.
«Voilà assurément l'exaltation mentale la plus inouïe dont il soit parlé dans les annales de la psychologie humaine. Quoique celte navigation, au dire de M. Garcin, ail beaucoup fatigué Michel, par suite des variations de la température qu’il ressentait, comme s'il eut réellement changé de place, on lui lit faire, dans la même séance, d’autres voyages qu’il accomplit avec la même exactitude et constamment, grâce à la simple puissance de l'imagination. Du reste, il vit le siège «le Conslantine, à l’époque où celte opération militaire fui entreprise, et le général Danrémont recevant le coup mortel, le jour même de la catastrophe.
Enfin, pour en revenir à l'instinct des remèdes, interrogé sur la maladie d’une dame du pays, Michel prescrivit une plante à laquelle il donna un nom particulier, la Maila dona, et qu’on ne connaît ni dans la botanique ni dans la contrée; il s’agissait de trouver celle plante. Michel déclara qu’elle croissait dans l’intérieur d'une forêt, au pied d’un chêne-vert, à 400 mètres d’une cas-sine dont il désigna le propriétaire. On conduisit le somnambule à la recherche de cette plante inconnue; ne la trouvant pas, malgré tous ses efforts, Michel se couche à terre dans la forêt, s’endort, et, dans le sommeil magnétique, il indique le même arbreau nord-est de la cas-sine et toujours à la distance de i00 mètres. On mesure
1 a dislauce et on découvre la plante au pied d’un chêne-vert.
« Il paraît, au surplus, que les objets qui constituent la question que l’on adresse au somnambule de Figanière*
font en quelque sorte une révolution autour de son corps, el que si Michel ne les saisit pas au premier tour, il les manque rarement aux tours qui suivent. Réveillé, le somnambule n’a souvenance que d’un vaste tableau qui formai! ciiculairemenl un vrai panorama, et auquel il empruntait les faits, les idées el les mots dont se composent ses réponses. »
(La ¡uile nu prochain numéro.)
SOCIÉTÉS SAVANTES.
SOCIÉTÉ DU MAGNÉTISME DE PAB1S.
Nous avons omis jusqu’ici de parler d’une société établie à Paris en 18i2, comme la continuatrice de celle fondée en 1815 par M. de Puységur, mais qui n’en a vraiment que le cachet. Ce n’est pas que nous n’ayons cherché à connaître ses travaux, comme il était de notre devoir de le faire; mais malgré nos recherches nous n’avons pu rien apprendre.
D où vient cetle disette de faits? d’un vice d'organisation que nous allons indiquer.
Magnétiseurs qui ne savez faire que des livres, vous croyez agir beaucoup sur les esprits : bêlas! détrompez - vous, car on ne les lit pas. Ce qu’on demande, ce que la généralité des hommes exige de vous, ce sont des expériences qui prouvent l’existence de l’agent magnétique. Voyez la différence des moyens employés pour conquérir l’opinion, et jugez des résultats.
Des sociétés se sont formées : deux pénétrées de nos
principes, une des idées contraires; celle-ci voulant agir sur l'opinion par l’autoritc des noms, les antres par l’autorité des faits. Ces dernières, toutes simples, modestes, composées d’hommes sans prétentions scien-tifii|ues, sans noms marquants, sont pourtant parvenues à réunir autour d'elles des milliers d’individus attirés par la magie des expériences. Si tous ne furent pas convaincus, la grande majorité y puisa la croyance au magnétisme, et ce succès, qu’on croyait impossible à obtenir, est venu prouver qu’on était sur la voie naturelle. C’est de cette manière que le magnétisme est descendu dans la classe moyenne, où, sans ces expérieuces, il eût eu de la peine à parvenir.
C'est, nous venons de le dire, par des magnétisations publiques, faites souvent sur le premier venu, que ce succès a été obtenu, et que ces sociétés ont dû de voir venir à elles des hommes nouveaux demandant leur incorporation. Maintenant, si nous considérons la Société du magnétisme, qui s’était donnée comme modèle, nous voyons qu’il n'est sorti de scs archives aucun fait. Elle est donc comme n’existant pas.
Si nous avons bonne mémoire, la société de MM. de Puységur et Deleuze était florissante; des discussions brillantes sur d'intéressants mémoires animaient ses séances, dont de Puységur était l'âme. C'était une tribune pour le magnétisme, et un journal contenant tous ces travaux amassait pour l’histoire de curieux matériaux qu’on aime à relire aujourd'hui. Mais, nous le répétons, c’était de Puységur et sa pensée; c’était Deleuze avec ses profondes connaissances, sa parole mesurée, imposante et toujours instructive; c’était Barouillct, littérateur distingué; c'étaient les comtes Lovenhielm et Panin, et cinquante autres partisans éclairés qui venaient jeter la vie au sein de cette illustre compagnie. A ça près du nom, la société actuelle n'a donc rien de commun avec
l’ancienne. Cependant elle s’en dit l’hérilière; mais nul ne le p‘iit croire, a moins qu’elle n’ait, comme certains grands hommes, donné naissance à un avorton?
Sans aucun doute, si M. de Puysé^ur ressuscitait et qn’il lût les statuts qui régissent la Société actuelle, il se prendrait à rire, car il y est dit que chaque membre s engage à ne point faire d'exjicricnces, lorsque lui, do Piiységnr, tout marquis qu'il était, en faisait constamment; mais son étonnement serait bien plus grand on voyant le plus respectable d’entre ces nouveaux apôtres faire prêter sans rire aux initiés le serment suivant. :
« Au nom nu Pkrh, nu Fils kt du Saint-Esprit, au nom
• de tous 1rs sumls cl saintes qui ont guéri en imposant les
• mains, etc., elc. »
Profondément affligé, ce digne successeur de Mesmer s’eer:erait : «Au nom de mon maître et du fluide universel, qu’est-ce que toutceci? » Et, prenant son chapeau, ¡1 s’en iraiten abaissant sa lèvre narquoise, et murmurant : « Mais je voulais que le magnétisme devînt une science, et je ne voisieiquedesmnbreset désœuvrés stériles. Le magnétisme, c'est la vie, le mouvement; c’est par une propagande active, sans relâche, et par la chaleur de l;lme qu’on le démontre, et ceux qui se prétendent mes successeurs reculent devant une démonstration dont mille fois j'ai donné l’exemple. »
Deleuze, ce brave et digne homme, qui, nous en convenons, n’était pas très-porté pour les expériences, mais qui ne blâmait que celles qui ne réussissaient pas, dirait, s’il revenait aussi : « Mais, messieurs, vous ne marchez pas, vous reculez même; appelez donc à vous des hommes plus jeunes, plus entreprenants, car l’âge semble avoir glacé votre sang. »
Nous ne voyons qu’un homme qui se serait fort accommodé de cet état de choses, c’est le baron d’Hénin; il dirait à ces messieurs : * Vous justifiez à merveille
l'opinion que j’ai toujours eue du magnétisme. Je n’ai jamais cru qu’il fut possible de montrer un seul fait concluant, et c’est pour cela, sans doute, que vous avez refusé de faire des expériences; je vous en félicite. Tout vient de l’imagination, et si vous ne produisez rien, c’est que, comme moi, vous en manquez, car je u’ai jamais pu sortir de mes doutes, etc. »
Ainsi, d’un côté, nous voyons des résultats magnifiques obtenus par des gens simples, uiais qui agissent, et de Paulre quelques noms qui imposent; mais comme œuvre, rien. Espérons que la Société du magnétisme reconnaîtra qu’elle a fait fausse route.
ACADÉMIE DES SCIENCES.
Séance du 28 septembre. — M. Duraml de Lnrx'l adresse, de Rlidali, un mémoire intitulé : Lois synthétiques du mouvement vital.
Il se propose d’établir que les lois de l'organisme ne sont autres que les lois qui président à tout mouvement matériel, et que la force d'attraction a une grande part d’iiidticncc dans le système vital. C’est un développement nouveau d’un travail déjà paru.
Voici en quels termes il résume sa synthèse : L’appareil nerveux, qui est un conducteur continu, est un conducteur à pôle négatif dans l’impression générale nutritive, à pôle positif dans toules les antres im-p: essions permanentes. Ainsi le sang artériel est un foyer vital irradiant, à travers les nerfs, du fluide électro-posi-tif vers tous les appareils, pour exciter les impressions négatives desquelles dépend l'exercice de leurs fonctions (sang veineux au poumon et au foie, fibre musculaire, air et température atmosphérique aux extrémités de
1 appareil cérébro-spinal, substance blanche dans l'appareil de ce nom, etc.) ; et à leur tour et par la môme vore,
tous ces impressifs envoient du fluide électro-négatif vers le sang, pour en exciter l’impression.
Tel est le mécanisme du mouvement vital; l’impression nutritive sanguine en est la force centrale; les autres impressions permanentes en sont les forces multiples gravitantes.
L’auteur trouve dans le fait déjà constaté par John-stone, Legallois, Gall, etc., que la substance grise est un imparfait conducteur, l'explication de divers phénomènes d’intermittence et de rémittence vitale (sommeil, veille, etc.).
Enfin, poursuivant son parallèle entre la force attractive animale et la force attractive générale, cette force, dit-il (force altractive générale), présentant des spécialités de prédilection, selon la nature de certains corps en présence comnie ailleurs, elle devait s’offrir souvent spécialisée dans la matière vivante : de là les variétés dans les impressions, les sécrétions, les absorptions, les compositions, les maladies, et pourtant toujours liées à un lype électrique commun, positif ou négatif.
Ainsi, dit-il en terminant, l’attraction répond à tout ce qui n’est pas métaphysique dans la vie, et nous proclamons celte large synthèse :
L'organisme vivant est un système en tout semblable au système universel. _ (Abeille médicale.)
M. le docteur De La Salzède, dans l’ouvrage qu'il vient de publier (I), fait sur cette théorie les réflexions suivantes :
« Or, du moment où l'organisme vivant sera reconnu pour être en tout semblable au système universel, fait qu’il est bien difficile de révoquer raisonnablement en
(1) Lcttrci tur te magnctiimc anin-al, considéré sous le point de vue physiologique et psychologique. ^ »ol. in-IS, 1647, chei Labbé. Prix : 2 fr. 50 c.
doute, le magnétisme animal et tous les phénomènes qui s’y rattachent rentrent, dès lors, dans l’ordre des faits naturels, et rien ne saurait plus justifier le dcdain stupide avec lequel les corps savants ont cru devoir accueillir les éternelles vérités mises en lumière et proclamées par Mesmer. »
VARIÉTÉS.
Frojet de loi. — On lit dans la Mouche du 1G décembre:
« Si Jésus-Christ revenait sur la terre et qu’il se permît de guérir les malades, de rendre la vue aux aveugles, la force aux paralytiques, il se verrait condamner à 15fr. d’amende. Ainsi le veut la loi ; car Jésus-Christ serait accusé d’exercer illégalement la médecine : 15 fr., c’est létaux admis pour les somnambules qui prétendent avoir la faculté de guérir sans autorisation légale.
« Nous disons, nous, quo c'est trop et que c’est trop peu : c’est trop pour les vrais somnambules, qui peuvent réellement rendre d’importants services, surtout dans le diagnostic des maladies; c’est trop pour des personnes qui n’onl pas la conscience de leurs actes, puisque réveillées elles ne gardent pas le moindre souvenir de ce qu’elles ont dit et fait. Le somnambulisme est une découverte moderne, il est encore
contesté. Aucune loi ne peut le poursuivre , puisque aucune loi ne l’a prévu et ne (’admet. Nous disons que c’est trop peu pour les faux somnambules qui abondent dans les grandes cités, qui feignent de dormir, et exploitent ainsi la crédulité publique.
« M. le ministre de l’instruction publique, qui parait ¡mimé de bonnes intentions, et qui travaille à une réforme médicale, devrait, dans son nouveau projet de loi, établir les paragraphes suivants :
« Art. 1er. — l.e magnétisme, étant considéré comme un puissant agent médical, ne pourra désormais être pratiqué que par les médecins.
« Art. 2. — Le somnambulisme artificiel, autre agent médical qui émane du magnétisme, sera de même exclusivement réservé aux médecins, q|i pourront avoir sous leur direction un ou plusicurMom-nambules.
« Aiit. 3. — Toute personne non pourvue d’un diplôme de docteur ou d’officier de santé qui pratiquera le magnétisme médical, c’est à-dire magnétisera les malades ou les soumettra à la lucidité des somnambules, sera considérée comme exerçant illégalement la médecine, et sera passible des mêmes peines.
« Art. A. — Tout somnambule qui ne sera pas dirigé par un médecin et donnera des consultations sera de même considéré comme exerçant illégalement la médecine.
• Joignez de fortes pénalités à l'exercice illégal de la médecine, après avoir admis les quatre articles qui précèdent, et, ministre, vous aurez réprimé de révoltants abus et reconnu l’existence incontestable du magnétisme. Cette cxistcnco est admise par tous les
tribunaux, qui veulent qu'un somnambule soit nécessairement assisté d’un médecin. »
— Nous nous sommesaffligésen lisant cet aperçu du docteur Ordinaire, touchant l'introduction du magnétisme dans !a médecine. Ne pouvant plus repousser, on veut maintenant emprisonner la vérité nouvelle dans les catacombes médicales, lit c’est à vous, cher docteur, qu'en reviendrait l’idée! Allons donc, je ne pourrais le croire. Vous avez écrit voire petit projet de loi sans y attacher l’importance que mérite la chose. Vous voulez qu’un principe humanitaire, que le secret des destinées, soient remis en dépôt à ceux qui nous combattirent toujours et nous couvrirent de mépris! Si vous avantagez tant les vaincus, que réservez-Vous aux vainqueurs?Mais vous le dites: rien« Que dis-je, rien? Ils auront le droit de se plaindre, mais non celui de protester.
Ah ! docteur, vous vous rappelerezce que vous avez vu dans vos expériences magnétiques, ce que vous m’en avez raconté, et vous concevrez alors comme moi que l’Ecole do médecine est une trop étroite enceinte pour contenir une vérité si grande. Elle est utile à tous les hommes et doit de tous être connue. 11 ne laut point, par conséquent, qu’elle serve à l'exploitation de l’espèce, cl qu’elle rentre dans la classe des moyens qu’ont employés nos modernes sages. Vous verrez bientôt que nous entendons mieux les droits de l'humanité, et suivons les pas île Mesmer. Ce que nous voulons pour nous, nous le voudrons pour les autres, alin qu’un bien qui peut se faire par toutes mains n’ait point d’obstacles à vaincre.
Néologie. — A mesure que les faits magnétiques se multiplient, que la connaissance s'en généralise, l'esprit investigateur s'en empare, les dissèque, les compare, y trouve des similitudes et des dissemblances que des mots nouveaux sont chargés de peindre. L'analyse exacte d'un fait complexe et l'invention de termes précis qui en caractérisent les nuances sont un progrès notable; car l'obscurité des sciences naissantes tient plus à la confusion des faits, à l'ambiguïté des termes qu'à l’aridité de la matière. Les noms influent tant sur la destinée des choses que les magoétologistes doivent s’attacher à les bien choisir, les nettement définir. L'adoption d’une dénomination nouvelle doit toujours se faire avec circonspection, autrement on embrouille ce qu’on veut éclaircir; car si un terme juste évite des disputes, donne à la science une allure franche, décidée, un mot impropre jette dans les idées un trouble souvent difficile à détruire. Pour éviter cet écueil, nous soumettons à la sagacité de noslectcurs les expressions suivantes, qui-, sçms être généralement adoptées, ont cours dans le langage magnétique. Chacun eu appréciera la justesse, la valeur, et si l'usage les sanctionne, nous nous estimerons heureux de les avoir fait connaître.
Cataleptisbr.Produire la catalepsie; état magnétique dans lequel les membres, souples, conservent les diverses attitudes qu’on leur donne.
Extatiseb. Mettre un somnambule en extase.
Faciès magnétique. Par ces mots on exprime l’ensemble varié des changements qui surviennent dans l’attitude des traits des magnétisés, l’expression sut generis, indicible, insimulable, à laquelle on reconnaît que le magnétisme agit. C’est le symptôme d'action le plus certain, le signe caractéristique, le guide infaillible dont la manifestation dissipe tout doute.
Insensidiuseb. Rendre, par le magnétisme, quelqu’un
insensible h l’action des agents physiques et chimiques.
Magkètisknde. Celui ou celle qui doit être magnétisé, sur qui on essaie. Ce mot, qui a pour vagues équivalents : sujet,‘ patient, comble la lacune laissée entre magnéti-sublc et magnétisé. Il est à magnétiseur ce que dividende est à diviseur.
MaGNÉTOPUILE. Venant de «>!/oç, qui aime, qui chérit; ce mot est synonyme de partisan dévoué, enthousiaste du magnétisme. Riche d’expression comme de signification, il est déjà fort employé.
Magnètoi'iiobe. Etymologiquement, ce terme signifie: qui a horreur du magnétisme. Il remplace avec avantage les expressions de : ennemis, antagonistes, etc.
Mesmérisme. Les amis de Mesmer par admiration, se* ennemis par dérision, attachèrent son nom à sa découverte, à son système. Mesmérisme devint synonyme d* magnétisme animal, et l’homme fut ainsi inséparable de la chose. Les Anglais et les Américains emploient indifféremment ces expressions et leurs dérivés. Les Allemands-observent la même règle, et le dernier ouvrage de Mesmer, celui qui contient l'exposition complète de sa doctrine, a même pour titre : ¿Hesntmemuo.
Les Français ne sont pas d’accord sur la signification de ces expressions. Les uns veulent que mesmérisme ne s'applique'qu’àux procédés opératoires de Mesmer. Les autres, et nous sommes de ce nombre, pensent que magnétisme et mesmérisme sont et doivent être générique-ment synonymes. C'est dans ce sens que la Société du mesmérisme de Paris emploie : mesmériser, mesmérisa-tion,mesméiilogie,mesméritechnie, etc.,etc.
Som nam nu liste.' C’est aux Anglais que nous sommes redevables de celte expression, qu’ils appliquent à tout« personne s’occupant spécialement du somnambulisme, soil comme somnambule ou magnétiseur. Nous ne voyous
rien qui s’oppose à ce qu'elle soit francisée et employée dans le même sens.
TÈTANisKn. Produire la contracture des muscles, la raideur des membres, une sorte de tétanos enfin, que la plupart des magnétiseurs appellent improprement catalepsie.
Pour les autres mois nouveaux, voyez ce journal, t. II, p. 314, et le vocabulaire qui se trouve ii la fin du Manuel de rÉtudiant magnétiseur.
Nécrologie. — M. le docteur J.-B. Dubois, ancien chirurgien mi ¡taire, est mort à Paris le 30 du mois dernier, à la suite d’une phtisie.
I.a mort a quelque chose rie peu redoutable pour le juste: il s’v prépare, elle jour venu de quilter cette terre, «me douce sérénité anime tous scs traits. Ainsi nous avons vu ta lin arriver, pauvre Dubois; nous avons recueilli tes dernières paroles, puis ton âme s’est enfuierapidement. Ainsi à chaque instant la terre redemande aux mortels la matière qu’elle a fournie pour construire leur édifice; en vain la vie résiste, force lui est bien de céder enfin. Cette loi de destruction rencontra ici peu de résistance. J -B. Difbois était un de ces hommes avides de science, qui, pour acquérir une idée, entendre un bon discours, voir une opération délicate, se passe ni de manger, oublient qu’il faut vivre, et remettent au lendemain pour satisfaire aux exigences impérieuses de l'organisation. On veillit vite de celte manière par les chagrins que celtc vie vous attire; car si vous négligez de manger, vous négligez aussi vos affaires domestiques. Dubois était un de ces hommes, à part de l’espèce, qui \ivenl pourvu qu'ils aient matière à penser. Aussitôt qu'il fut assuré de l'existence du magnétisme, il en sonda les secrets ci rejeta la médecine scolastiqiie, qui lui apparut dès !ors telle que’lle est : hypothétique. Sa carrière se trouva changée : il renonça
à l'exercice d'un art que sa conscience réprouvait désormais, el se jetaà corps perdu dans l'étude des sciences positives qui ne devaient point lui rapporter une obole. Il ne s’apercevait point de sa misère, et la richesse ne se présentait à lui que comme une superlluité. L’eùt-elle d'ailleurs empêché de mourir? Non sans doute; mais elle eut pu prolonger le lerme Je sa vie d’une année ou de deux au plus. 11 avait donc raison au fond, puisque pour acquérir il eût dû négliger les études qui le charmaient.
Si notre âiae ne 1110»le point au Ciel tout à coup, celle de cet homme de bien doit par habitude errer h la Sur-bonne elau Collège de France; elle doit aller pyrfnU visiter Je vieux etpuanls bouquins. Là elle n'a plus d’organe pour applaudir les grands maîtres; ici elle regretle saris doute de 11e pouvoir acquérir ce précieux volume, où une idée, une seule, est enchâssée dans des milliers d’erreurs.
Mais tout ceci est uu rêve; (a mort seule est certaine. v bon cl estimable homme. Je verrai souvent ton visage illuminé comme il était toujours dans les discussions scientifiques, ou quand tu parlais des Jésuites que lu voyais partout; car tu les détestais cordialement. Je me rappellerai aussi que jamais une basse pensée ne préoccupa ton esprit.
Heposc en paix, Dubois; tes ennemis comme tes amis iront te rejoindre un jour; mais je suis certain que 11 im-porteoù lu sois, nous ne le retrouverons à côté d’un Jésuite!... Mais, j'y pense! ils doivent avoir uu lieu spécial; car Dieu ne permettra pas qu'ils soient confondus avec ceux dont ils diffèrent à tant d'égards.
A nos lecteurs. — Le sentiment de justice qui nous a guidés jusqu’à ce jour a soulevé quelques haiiies; on ne nous pardonne pas d’apprécier à leur juste valeur certains hommes et certains faits. Nous nous attendions
à cette démonstration ridicule, à ces impuissanteÿco-lères. Nous écrivons pour ceux qui veulent que le magnétisme sorte enfin de ses langes dégagé d'erreurs et pur de tout charlatanisme. Et loin de reculer ou de nous arrêter dans cette voie, nous continuerons d’y marcher avec la même ardeur. Sans doule, nous aurions plus à gagner en flattant des passions cupides ou ignorantes, en laissant s’établir des choses blâmables, trompeuses. Mais nous ne voudrons jamais être confondus avec les hommes qui, agissant sur la crédulité, trouvent le moyen de vivre sans rendre aucun service.
Le magnétisme, celte brillante vérité, semble être destiné à passer par des mains impures; c’est une épreuve qui doit durer jusqu’au temps où le temple de la science lui sera ouvert. Mais il dépend des hommes honnêtes, consciencieux, éclairés, d'abréger ce terme, en nous aidant de leur concours, nous prêtant leur appui pour signaler partout les abus, les crimes peut-être, qui se commet Iront sans que la justice puisse en atteindre les auteurs. Déjà, vous le savez, un trafic honteux s’est établi. Ce n’est plus seulement pour la sanlé que le sommeil lucide est employé, mais pour découvrir les secrets des familles, et souvent, lorsque la lumière manque pour ces choses impies, le mensonge remplace la vérité qu’on n’a pu découvrir. Plus encore, une sorte de captation s’exerce, dans certains cas, du magnétiseur à la magnétisée, et de pauvres êtres sont asservis à des hommes sans pitié, qui, pour avoir un peu d'or, les tiennent plongés dans un sommeil incessant. Ils savent pourtant que la sénilité du cerveau résulte de cette concentration de force vers les centres nerveux.
Arrêtons-nous; le temps va venir où nous pourrons dévoiler bien d’autres turpitudes, sans négliger cependant d’indiquer les moyens de les réprimer.
Déjà on remarque qu’une modification heureuse s’est opérée dans les croyances; le somnambulisme commence à ne plus être considéré comme la base du magnétisme. Les merveilles de ce sommeil sont appréciées à leur juste valeur, et le public, trompé quelque temps, distingue aujourd'hui les charlatans et commence à s’éloigner d’eux. Petit à petit l'opinion s'épurera, reviendra à la vérité et n’en pourra plus être détournée. Nous espérons qu’un jour on reconnaîtra notre sincère amour pour la vérité et Tardent désir que nous avions de voir s’épurer le magnétisme au flambeau de l’expérience.
Affaire Cucy. — Nous avons rapporté, dans notre numéro du 7 décembre, les circonstances de la tentative de meurtre dont le sieur Claude-Ferdinand Cuny, prenant la qualité de somnambule, avait déclaré au commissaire de police du quartier du Temple avoir été victime dans le cours de la nuit précédente, au moment où, entre minuit et une heure, il sortait du café Rosa, situé rue de Bondy, derrière le théâtre de l’Ambigu-Comique.
Depuis ce moment, et par suite des déclarations du sieur Cuny, une instruction judiciaire a été suivie; différents témoins ont été entendus; d’actives démari lies d’enquête ont été faites, et cependant on n’a pu recueillir aucun indice de nature à éclaircir les circonstances du crime tenté sur le sieur Cuny.
Ce matin, M. le juge d’instruction Desnoyers, s’étant transporté cité d'Orléans, 3, au domicile du sieur Cuny, qui persiste à demeurer alité et qui avait dit ne pouvoir se rendre au Palais, où il avait été appelé dans le cabinet du juge, une perquisition judiciaire a eu lieu, dont, le résultat a été la saisie d’un poignard qui paraîtrait avoir quelque similitude avec celui dont le sieur Cuny a élé frappé. Liustruclion continue. (Preste.)
— M. Cnny a écrit pour rectiGer plusieurs termes de eette version. Nous tiendrons nos lecteurs au courant des incidents ultérieurs de cette affaire.
Grossesse fictive. —Te fait rapporté dernièrement par M. Derrion m’en a rappelé un analogue, que j’ai observé en I8i0 sur Mn° C***, somnambule.
Lui ayant donné, durant son sommeil, une lettre écrite par une malade sur laquelle je voulais la consulter, je fus très-étonné de voir, au bout de quelques instants, son ventre grossir, et de l’entendre se plaindre d’une grande pesanteur abdominale et de mouvements précipités qui la faisaient, beaucoup souffrir. Je restai stupéfait, surtout en lui voyant prendre les diverses altitudes d'une femme enceinte. Elle s’était inoculé la grossesse de la malade, enceinte de huit mois environ. Me croyant victime d’une illusion, je pris le parti de lui palper le ventre, et je sentis des mouvements pareils à ceux if nn fœtus, ce que quatre personnes présentes constatèrent aussi.
J'ai raconté ce fait étrange à plusieurs magnétistes, et j'ai appris que la même somnambule, mise en rapport cvec une femme en couches, avait éprouve tontes les douleurs de l'enfantement, et jusqu’aux contractions cxpulsives de l’utérus, qu’on sentait distinctement.
Je n’explique point ces faits; je les cite seulement comme venant à l’appui d’un pareil récemment observé.
Laporte.
BIBLIOGRAPHIE.
Compte-rendu du Congrès scientifique de France, treizième session , tenue à Reims en septembre isj. 1 vol. in-S".
L’œuvre dos mille savants réunis à Reims l'an dernier n’a pas l’importance qu’on suppose à un livre de ce genre. C’est une vraie macédoine où toutes les discussions sont tronquées, et pas une seule question nettement résolue.
Dos trois séances consacrées au magnétisme, une seule y figure, celle où M. du Potetexposa la théorie actuelle du magnétisme; tout le reste est passé sous silence, en sorte que pour avoir l’image fidèle, la physionomie magnétique du congrès, il faut recourir« la Itcvuedo M. AuhinGaulhier, qui, de son côté, n’a fait que mentionner le passage principal de ce long débat, celui qui remplit presque toute la séance dont nous analysons le compte-rendu.
Vers la fin s’est produite une scène analogue à celle qui eut lieu à l’Aeadémie de médecine le 24 janvier 1820.
M. Récamier disait alors qu’on avait grand tort d’invoquer à l’appui du magnétisme la guérison de la demoiselle Samson, sujet des expériences de l'Iiôtel-Dieu, parce qu’elle était morte dans scs salles quelques semaines après. Des recherches furent faites, et la demoiselle Samson retrouvée fut présentée à la
commission, qui la reconnut parfaitement. Ainsi M. Récamier fut, en pleine Académie, convaincu de mensonge.
Au congrès, après avoir écouté les dénégations de MM. Maldan et Landouzy, M. du Potet, reprenant la parole, « rappelle les cures qu’il lit à l’IIôtel - Dieu de € Reims, il y a dix ans, et notamment le soulagement « qu’il apporta à une jeune fille hystérique, inutile-« ment traitée jusque-là. »
M. Duvnl, médecin de l’Hôtel-Dieu, dit alors » que « cette même jeune fdle est morte dans son service « quelque temps après le départ de M. du Potet. » Ainsi voici une mort attestée,et M. du Potet, ignorant le sort de cette malade, dont il n’avait pu continuer le traitement à cause de son départ, s’en rapporte à l’assertion du docteur Duval. Mais pendant qu’à Reims on déclare morte la pauvre jeuno fille, on proclame à Paris sa guérison obtenue dans le service deM. Fouqtiier(sal!e Saint-Jean, numéro 18 ¿1 s, à la Charité). L’observation détaillée en a été recueillie par le docteur Bourdin, et consignée récemment dans la thèse du docteur Favrot, comme une nouvelle preuve que le magnétisme ne guérit pas.
La contradiction est on ne peut pas plus manifeste ; espérons que les médecins de Reims s’expliqueront sur cette étrange coïncidence de noms et défaits.
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (de Garnay).
MANUSCRITS DE MESMER.
Ketions clénientnireR sur In morale, l'éducation et la législation, pour servir à l’instruction publique en France, par F.-A. Mesmer.
§ V. - JCSTICE NATURELLE.
La contemplation de la nature et de l’harmonie dans laquelle tous les êtres coexistent et tous les changements se succèdent, nous offre la vérité la plus importante, et pourtant la plus méconnue ou du moins la plus négligée par l'antiquité.
Celte vérité, évidente et immuable comme la divine source d’où elle est puisée, a été remplacée par les dogmes, les doctrines vagues et hasardées que l’ignorance, la superstition et la tyrannie inventèrent pour gouverner les actions des hommes.
De même que les principes et les règles pour nous conserver, pour éviter les maladies et pour rétablir la santé, n’ont pas été trouvés ailleurs que dans l’étude de notre organisation et de ses rapports avec les êtres dont nous sommes environnés, de même aussi il ne faut pas chercher des règles et des motifs pour gouverner nos actions ailleurs que dans la nature et dans les lois du mouvement, qui entretiennent l’équilibre et l’harmonie entre les divers corps de l’univers.
J1 a été dit que toute action de l’homme consiste dans
un changement produit par un principe interne. Ce changement est ou conforme à l’harmonie (I) universelle et sociale, ou il lui est contraire; ce qui rend toute action bonne ou mauvaise: bonne, quand ce changement qui se mêle dans la série des événements s'accorde avec l’ordre et l’équilibre essentiel à la nature ; mauvaise, quand il en trouble le cours.
Il esl donc d’une nécessité absolue que Véquilibre qui a été troublé soit rétabli, et que l’ensemble des causes et des effets concourent à effectuer ce rétablissement aussi promptement qu’il est possible, par une sorte de réaction sur la première cause.
Ce trouble de l’équilibre ou de l’ordre élan t une exception de la règle de l’ordre, ou un mal physique, le rétablissement de l’équilibre ne peut s’effectuer que par une autre exception de la règle , c’est-à-dire par un autre mal. Il se fait donc nécessairement un retour du mal sur la cause, pour l’altérer ou pour la détruire, et finale • ment pour faire cesser le désordre.
Celte assertion nous est constamment prouvée par l’observation prise dans la nature, soit en général, soit en particulier.
Jamais la sérénité de l’atmosphère n’est altérée sans qu’il s’ensuive tôt ou tard un trouble qui devient un moyen de la rétablir.
Agitez, par exemple, le niveau de l’eau en frappant la surface qui est en équilibre ; vous verrez rejaillir Yers la main la portion d’eau que vous avez déplacée. Cette
(i) Le changeaient qui réulte d’une action est conforme ou contraire i l'ordre dans lequel les êtres et les éténemems se succèdent. L'ordre de la nature est établi sur l'harmonie dans l'universalité des corps de la ciéation ; l'ordre de contention, ou l'ordre social, esl établi sur le consentement et la totalité des hommes réunis parfamille ou nation. Les lois constituent l’ordre posilifou légal ; les usages, les coutumes, les habitudes des peuples, constituent leurs mœurs. Il est important de ne pas confondre ces deui définitions.
action vers le centre de la première impression se répétera jusqu’à ce que l’équilibre et le repos soient rétablis.
Tout liomme peut observer que jamais impunément il ne commet une faute qui dérange l'harmonie de la santé. 1! cii éprouvera, par une sorte de retour plus ou moins immédiat, la punition par un mal physique appelé maladie ou crise, qui n’est autre chose que cet effort de la na -turc dont j’ai parlé, pour rétablir l’ordre qui a été troublé.
Ce retour cependant est quelquefois si long, qu’en perdant de vue la première cause üri se trouve moins apte à ce raisonnement
Comme les excès et les débauches de la jeunesse souvent ne se font ressentir et ne sont vengés que dans l'âge avancé : ces effets, quelque éloignés cependant qu’ils soient de la cause, sont inévitables. C’est ainsi qu’en morale ou en physique invisible, l'effet d‘un crime, tout caché qu’il est, ou tout-puissant que soit le criminel, dès qu’il a troublé l’ordre de la nature, reviendra sur son auteur comme un mal nécessaire pour rectifier le désordre, soit, par un effet direct et physique, soit pur une représentation ou motif.
Quoique tout le monde ne soit pas assez à portée ou assez observateur pour constater dans tous les cas celte vérité, il su fût d’avoir en sa vie remarqué des exemples les plus familiers pour se persuader de sa réalité, et se former ainsi l’opinion la plus importante» notre bonheur.
Qu’on se figure ce retour comme autant de cercles dont les périphéries sont plus ou moins étendues, el dont une partie quelquefois sc perd dans les nues du secret ou du temps.
C’est donc cetlc tendance dans la nature, fondée uniquement sur la nécessité de rétablir l’équilibre troublé, qui détermine pour toutes les actions des individus des suites qui tôt ou tard rendront son état heureux ou mal-
heureux. Ce sont ces suites et ces effets pour rétablir l’harmonie qu’on peut appeler la justice universelle ou naturelle. De sorte que l’on peut affirmer avec certitude que tout homme sera inévitablement puni par la nature même, qui se permet d’enfreindre scs lois et troubler son harmonie.
Dès la plus tendre enfance on doit se procurer la connaissance de cette vérité, et en accréditer ou au moins fixer l’opinion par tous les moyens que l’expérience, l’exemple et la réflexion peuvent nous fournir.
I.a société peut compter que l'homme le mieux persuadé de celle vérité sera aussi le plus vertueux. Son cœur etson intérêt lui rappelleront sans cesse les règles suivantes:
Ne faites pas aux autres ce que vous ne voulez pas qu'on vous fasse.
Faites aux autres ce que vous voudriez qu’on vous fit; car, en conséquence des lois éternelles de l’équilibre, c'est par un retour plus ou moins immédiat qu’il vous reviendra sur vous même ce que vous aurez fait aux autres.
En morale, rien né peut suppléer à la doctrine de la justice naturelle ou universelle.
(La tuile prochainement.)
ÉTUDES SUR LE SOMNAMBULISME.
§ X. — PUYSÊGURISMË.
Troisième observation.
La relation du fait concernant le colonel Gurwood, gouverneur de la Tour de Londres, devrait se trouver ici; mais cette observation est si curieuse que nous l’avons, par anticipation, insérée tome 1er, page 306. Nous y renvoyons nos lecteurs.
Quatrième observation (1).
L’ordre, l'enchaînement méthodique indiquait ailleurs qu’ici la place de cette curieuse observation; mais il nous a semblé préférable d’enfreindre les règles de la classification pour la placer à côté des deux précédentes, dont elle se rapproche à tant d’égards.
« Un savant dé Dijon s’était fatigué tout le,jour sur un endroit essentiel d’un poète grec, sans y pouvoir rieu comprendre. Rebuté et fâché de l’inutilité de sa longue application, il se couche; son chagrin l’endort, et comme il est dans le fort du sommeil, son génie le transporte en esprit à Stockholm, l’introduit dans le palais de la reine Christine, le conduit dans sa bibliothèque; il suit des yeux tous les livres et les regarde. Etant tombé sur un petit volume dont le titre lui paraît nouveau, il l’ouvre,
(1) El traite de La tuile d* comte de Catalis, ou tei Géniei assistant ir page 58.
et après avoir feuilleté dix ou douze pages, il y aperçoit dix vers grecs dont la lecture lève entièrement la difficulté qui l’n si longtemps occupé. La joie qu’il ressent il celle découverte l'éveille; son imagination est si remplie de celte poésie grecque, qu'elle lui revient et qu’il la répète sans cesse; il lie veut pas l'oublier, et pour cela il bat le fusil, et avec le secours de sa plume il s'en décharge sur le papier; après quoi il tâche de ralrapperson sommeil. Le lendemain, à son lever, il réfléchit sur son aventure nocturne, et, la trouvant des plus extraordinaires dans toutes les circonstances, il se résout de la suivre jusqu’au bout
«51. Dcscartes était alors en Suède auprès de la reine, qui apprenait sa belle philosophie. Il le connaissait de réputation ; mais il avait plus de relation avec M. Chanut, qui y était ambassadeur pour la France. C’est à lui qu’il s’adressa pour faire rendre une de ses lettres à M. Des-eartes, et pour l’engager ii lui répondre. Il le supplia de. lui marquer précisément si la bibliothèque de la reine, son palais cl la ville de Stockholm sont situés de telle manière; si dans une des tablettes de cette bibliothèque, et qui est dans le fond, il y a un livre de tel volume,de telle couverture, et avec un lel titre sur la tranche, et enfin si dans ce livre, qu’il le conjure de lire exactement pour l’amour de lui, en cas qu’il s’y trouve, il n’y a pas dix vers grecs tout semblables à ceux qu’il a mis au bas de sa lettre.
« M. Descartes, qui était d’une civilité sans pareille, satisfit bientôt notre savant, et lui répondit que le plus habile ingénieur n’aurait pas mieux tiré le plan «Je Stockholm qu’il l’avait fait dans sa lettre ; que le palais et la bibliothèque y étaient parfaitement bien dépeints; qu’il avait trouvé le livre en question sur la tablette désignée, qu’il y avait lu les vers grecs mentionnés ; que ce livre est très*rare ; mais néanmoins qu’un de ses amis lui
en availpromis un exemplaire, qu’il enverrait en France par la première commodité ; qu'il le suppliait d’agréer le présent qu’il lui en Taisait par avance, et de le regarder comme une marque de l’estime particulière qu’il avait pour sa personne.
« Cette histoire est publique, et il y a peu de gens de lettres qui l'aient ignorée. »
Cinquième observation (().
Ayant lu dans les journaux de Chàlons-sur-Saône qu’une jeune fille du nom de Prudence, conduite par M. le docteur Laurent, était douée de si grandes qualités magnétiques que, dans l’état de somnambulisme, elle voyait parfaitement k travers les corps opaques, marchait, tombait, se relevait, chantait et s’interrompait à la volonté de celui qui l’avait endormie, sans que cette volonté fût exprimée par aucun signe apparent; ayant appris, en outre, qu’une foule d'autres phénomènes plus extraordinaires encore, et constatés par la grande majorité des personnes les plus instruites et les plus judicieuses, jetaient la ville de Châlons dans une telle logomachie que la guerre civile, moins ses horreurs toutefois, était sur le point d’y éclater, parce que les uns croyaient et que les autres niaient, je voulus m’assurer par moi-méme de l’exactitude des faits annoncés. Je partis et j'obtins audience du docteur Laurent, qui, heureux de faire des adeptes, s’empressa d’acquiescer à mes désirs.
Je vis la somnambule, jeune fille de dix-sept ans, d’une figure assez commune, mais empreinte d’une simplicité et d’une douceur qui captivent. Quoique fatiguée des séances publiques des jours précédents, et désirant garder un repos absolu , elle consentit à répéter devant moi
(1} Extraite du Progrès, journal de Saône-el-Loire, 1342.
l’expérience qui m'intéressait le plus, la vision par le front à travers les corps opaques. M. Laurent, après avoir endormi Prudence en lui tenant simplement les pouces pendant dix minutes, contact qui n’est pas indispensable puisque le docteur endort la somnambule à deux cents pas de distance, me pria de clore les yeux de la jeune fille de manière à n’avoir aucun doute sur l'interception de tout rayon lumineux. Il me laissa le choix de divers masques, de foulards ou autres mouchoirs, ou d’un bandeau préparé la veille par un pharmacien incrédule, avec la collaboration d’un médecin plus incrédule encore. J’avais essayé préalablement sur moi un des masques, présentant une seule fissure en face de la bouche, et qui, n'ayant pas été moulé dans d'assez grandes proportions, me plongea cependant dans une obscurité telle que, malgré tous mes efforts , je ne pus voir poindre le moindre filet de lumière. Avant l’application du masque, le docteur Laurent m’engagea à immobiliser les paupières à l’aide de plusieurs couches de taffetas gommé. Je préférai le masque seul, me réservant d'ajouter à son opacité par l’addition de plusieurs mouchoirs.
Le masque appliqué, je nouai un foulard disposé en cravate sur le front et les yeux , et je commençai une partie d’écarlé. Prudence aime le jeu avec passion. Chaque carte jouée était par elle portée à son front et reconnue aussitôt. J’exprimai le désir d’appliquer un second foulard par-dessus le premier. On y consentit, et la vision continua. Je fis une seconde partie, et, pendant son exécution, une personne jeta sur la tête de la jeune fille un épais mouchoir qu’elle noua sous le menton sans que la somnambule éprouvât plus de peine à reconnaître ce qu’on lui présentait. Enfin un quatrième foulard fut ajouté, formant avec les précédents un véritable matelas, et la vue conserva toute sa lucidité. J’étais stupéfait, et j avouai que ma conviction était fortement ébranlée. J’é-
crivis des mots sur «lu papier; Prudence les lut sans même tenir la feuille dans le sens voulu. Je lui présentai une montre; elle ne put indiquer l'heure; elle montra la situation des aiguilles. Elle reconnut la couleur des vé-tements d'une dame étrangère qui était présente, et admira les lines broderies d’un mouchoir que cette dame tenait à la main.
Je remarquai que les objets simples qu’on lui présentait, tels qu’uu as, un mot, un chiffre, étaient distingués très-rapidement, tandis que les composés, les neuf ou dix de cœur, de pique, etc., une addition, une phrase, demandaient un instant d’application ; d’où j'ai conclu que la vue n’embrassait pas, comme dans l'état normal, une certaine largeur, peut-être parce qu'ellcavait perdu ses principaux organes, les globes de l’œil, el se trouvait limitée aux nerfs optiques, embrassant un plus petit rayon. Je parle de nerfs optiques, parce que-jc ne mets pas en doute que Prudence voit par les organes de la vue. exaltée par le magnétisme, el traversant les objets dont on recouvre le front. C'esldire que je n’admets pas encore la transposition des sens. »
Je priai le docteur Laurent d’enlever les foulards et le masque, el de vouloir bien me laisser expérimentera ma guise. Le masque était devenu tellement adhérent à la face par la chaleur et la transpiration, que nous eûmes de la peine à le détacher. Le sommeil continuant, les paupières étaient entièrement closes. Je ramenai divers objets par derrière et au-dessus de la téte jusqu'au front, de manière que les yeux, fussent-ils ouverts, ne pussent distinguer ce que je présentais. Prudence les signala T mais plus difficilement que lorsqu’elle avait masque et foulards qui lui comprimaient le front. Enfin j’essayai le fameux bandeau préparé par les antagonistes du magnétisme-, outre le bandeau, j'appliquai plusieurs foulards, et l’intéressante somnambule vit tout ce qu’on
lui présenta. Je m’avouai convaincu. Suffisamment éclairé sur le fait le plus remarquable du somnambulisme, et ne voulant pas abuser de la complaisance de celle jeune fille malade, je priai le docteur Laurent de la réveiller, ce qu’un de ses élèves de Chûlons fit en quelques minutes, à l'aide de passes transversales.
Dans une autre séance, M. Laurent jeta sa somnambule dans un tel élatde raideur cataleptique, qu’à moins de lui briser les membres il eût été impossible de les faire fléchir. Cet étal augmentait ou diminuait à la volonté du magnétiseur.
La somnambule étant retenue debout par deux personnes, le magnétiseur, placé à distance derrière elle, l’attirait à lui ou la repoussait, sur l’ordre muet d'un assistant. Etant assise, elle a porté la main droite à sa tête, puis à ses pieds, parties du corps qu’une personne de la société avait désignées par écrit.
Elle a chanté, s’est arrêtée, puis a continué sur le seul geste d’un spectateur. Observez que Prudence dort, et que, pour éviter tout soupçon, elle a les yeux hermétiquement fermés par un masque et un mouchoir.
M. Laurent a fixé sur la poitrine d’une personne désignée par la société ce qu’il nomme un point lumineux, point, bien entendu, invisible pour les spectateurs. Tous
les mouvements de cette personne ont été dès lors suivis et imités par Prudence. Si, à l’aide d'un foulard, d'un chapeau ou de tout autre corps étranger, on cachait ce point lumineux, la somnambule s’en apercevait immédiatement et saisissait avec une sorte de colore les objets appliqués. Une autre personne s’étant substituée très adroitement à celle sur laquelle Prudence semblait avoir le regard immobilisé, la jeune fille, toujours endormie et les yeux bandés, s’est levée, a parcouru l’assemblée, et a découvert, au milieu de trente personnes, l’objet de ses recherches.
Un verre d’eau ayant été apporté, une personne du parterre a exprimé par écrit le désir que cette eau eût pour Prudence le goût du lait. Le magnétiseur a soufflé sur le liquide, l'a fait présenter à la somnambule, quia bu et a dit : « C'est du lail! » Cette expérience a excité vivement l’intérêt ; maia au moment où un murmure d’admiration agitait l'assemblée, un incrédule s’est écrié: « On a cru remarquer que M. Laurent, trop rapproché delà somnambule, soufflait le mot indiqué en soufflant sur le verre. On demande une seconde expérience. » L’incrédule alors a élé prié de monter sur la scène et de veiller lui-même à celle qui allait être répétée. 11 a écrit sur une carte le mot Vin. Le magnétiseur, après avoir lu à distance, a souillé sur le verre et a prié l'incrédule de présenter lui même la liqueur. « C’est mauvais! c'est du vin ! • a dit Prudence, en témoignant une grande répugnance. Pour convaincre davantage, le docteur Laurent a f»rié la même personne de désigner une nouvelle liqueur plus agréable. L’incrédule a écrit de nouveau le mot Luit. Prudence a bu avec plaisir, et a dit : « C’est bon! c’est du lait! » On a applaudi.
On a passé au phénomène de clairvoyance, malgré l’occlusion des yeux.
Ici l’incrédulité, déjà fortement ébranlée, n été obligée de capituler. Elle est tombée devant une série d’expériences qui ont laissé de l'étonnement dans les esprits, mais nul doute sur l'exactitude des faits annoncés. Prudence a fait une partie d’écarté et une partie de dominos avec des cartes et .des dominos apportés par des spectateurs. Sa lucidité a été parfaite, malgré les masques de plomb, les bandeaux et les foulards sur foulards qui lui couvraient les yeux. Une addition ayant paru l’embarrasser, une personne du parterre demauda à en présenter une nouvelle elle-même, et en l’absence du magnétiseur, ce h quoi ce dernier consentit. L’addition présentée,
la somnambule, après l’avoir approchée de son front, s’est écriée : « Que voulez-vous que je fasse de vos trois zéros? » En effet, la personne avait placé trois zéros en ligne. Cette preuve de vision a généralement convaincu.
Cette séance a donc été des plus satisfaisantes.... Mais tous les spectateurs sont-ils sortis avec l'intime persuasion que, dans tout ce qu’ils avaient vu , il n’y avait ni fraude ni supercherie? Je ne le pense pas, parce qu’il faut, pour admettre des phénomènes aussi extraordinaires, examiner plusieurs fois.
Le même soir, l’esprit tout préoccupé de ce que j’avais vu, j’entrai au café Lafavette, où un avocat se lit fort d'endormir le garçon qui nous servait. Le maître de l’établissement y ayant consenti, en moins d'un quart d'heure ce garçon tomba dans un sommeil tel que rien ne put le réveiller. Craignant une supercherie, je tins sous son nez un flacon d’alcali volatil qui fit tomber à la renverse un curieux qui voulut sentir ce que le flacon contenait. Le magnétisé ne témoigna aucune sensation. Je pris la clochette du café et je sonnai h grands coups à scs oreilles : môme immobilité. Je le pinçai jusqu’au sang, j’enfonçai une grosse épingle dans ses chairs : immobilité parfaite. On le fit marcher, on l'agita, on cria à ses oreilles à réveiller toute la maison : il ne Longea pas. Je ne mis plus en doute alors que, dans un tel état, il fût possible d’amputer, ainsi que l’a fait le professeur Cloquet, un sein cancéreux ou un membre, sans faire éprouver ail malade la moindre douleur. Je voulus réveiller moi-môme l’endormi, ce qui eut lieu très-rapidement, et le premier-mouvement du patient fut de porter la main à l’endroit où j’avais enfoncé l’épingle, et de se plaindre d’avoir été piqué. Nous n’avons pu obtenir de ce garçon aucune parole distincte, parce qu’il n’était pas encore arrivé U l’état de somnambulisme : cependant il répondait par des
signes de (été aux questions qu’on lui adressait; plus tard il parlera.
Arrivé chez moi, je m’empressai de mettre en pratique la théorie magnétique à laquelle j’étais si nouvellement initié. J'expérimentai sur une fille de la Dresse, atteinte de crises nerveuses que, depuis longtemps, je cherche vainement à combattre. En moins de cinq minutes j’obtins 1111 tel efl'et que j’en fus effrayé, a Que me faites-vous? Vous me tuez; je sens mes crises qui reviennent ! » s’ecria-t-ellc en tombant dans un état de spasme. Je me hâtai de la réveiller, bornant là mon premier essai. Je crois que cette jeune personne est aussi éminemment magnétique que Prudence, et que bientôt je parviendrai à obtenir d’elle des effets non moins extraordinaires. P.-C. OttDINAIRE, D.-M.-P.
(La suite prochainement.)
CLINIQUE MAGNÉTIQUE.
Un de nos abonnés du Yar, M. C**‘, nous envoie une liste de maladies qu’il vient de traiter avec succès. Il nous promet de nous faire parvenir les détails circonstanciés sur chaque cure qu’il a opérée. En attendant ces récits, voici l’énumération des maladies qu’il a guéries :
1° Suppression de règles accompagnée de fièvre et de douleurs d’estomac; guérie en cinq magnétisations.
2° Migraine avec fièvre et vomissements, revenant périodiquement chaque dimanche depuis quatre ans, résultat d’une frayeur.
3° Paralysie «lu bras droit sur une fille de vingt-huit ans, durant depuis quatorze ans ; détruite en grande partie. La malade fait maintenant usage de son bras pour des travaux qu'elle ne pouvait exécuter.
4° Fièvre cérébrale sur un enfant de neuf ans.
.5° Pleurésie sur un jeune homme de quinze ans.
Dans ces deux affections, l’eau magnétisée a exercé une action purgative.
6° Quatre cas de lièvre intermittente, parmi lesquels on remarque surtout la guérison d’un enfant de trois ans dont les accès avaient résisté à tous les remèdes.
1" Rhumatisme nerveux affectant le pied gauche d'une femme de soixante ans, durant depuis deux ans et demi, et tenant la malade presque dans l’impossibilité de marcher.
8° Sciatique de deux mois de durée affectant un homme de trente-cinq ans.
9” Etisie, avec fièvre et diarrhée continuelles, chez un enfant de onze mois. Ce qu’il y a de remarquable dans cette guérison, c’est.que quatre autres enfants de la même mère sont morts de cette maladie. Le magnétiseur, outre l’action directe, a employé l’eau etles objets magnétisés: chemise, coiffe, langes, etc.
10° Plusieurs cas de maladies nerveuses, contusions, odontalgie, guéries en un ou deux séances.
11” Gastro-entérite aiguë chez un enfant de six ans et demi. Trois magnétisations par jour, amélioration dès les premiers instants, et retour à la santé en moins de quinze jours.
Nous omettons ici une foule de détai's concernant des malades qui n’ont éprouvé qu’un soulagement du traitement magnétique sans auxiliaire.
—M. le docteur Maurice, de Privas, nous fait aussi parvenir une longue liste de maladies guéries par la médecine magnétique. Nous devons faire observer cepen-
dant qu’ici il y a eu administration de remèdes indiqués par une somnambule, tandis que dans la relation plus haut rapportée le magnétisme a seul été employé.
— Nous ne devons pas oublier de mentionner les faits de guérison produits par un des plus anciens et des plus respectables magnétiseurs, M. Laforgue, de Pau. L’ÜSge chez lui n’a point affaibli la faculté de faire du bien par le magnétisme ; heureux privilège obtenu par une vie consacréeconstammentàdebonnes œuvres. Des centaines de malades ont eu recours à cet anachorète, dont jadis on aurait fait un saint, et ont vu leurs maux guéris ou adoucis par des pratiques simples et toutes magnétiques.
M. Laforgue croit que la prière est nécessaire pour obtenir des guérisons. Pourquoi contester cette opinion? Connaît-on bien le principe qui guérit, et lors même qu’il y aurait erreur, si cette erreur place l’esprit dans une situation favorable à ces opérations, il y aurait mal à la détruire si on ne pouvait donner une conviction basée sur des certitudes toutes physiques. Nous ne pouvons nous empêcher de citer un fragment de la dernière lettre qu’il nous écrit ; il donnera lui-môme une idée de sa croyance et de ses procédés:
>• En 1829 , lors de mon dernier voyage à Paris, je voyais souvent M. Deleuze, dontj’étais l'intime. Un jour il me pria de vouloir bien donner des soins à sa portière, qui était paralysée, en présence de deux savants médecins. Le jour fut arrêté, et la malade appelée chez M. Deleuze, en présence de ces messieurs. Elle était prise de tout le côté droit. Je l’explorai sans mot dire. Un des médecins me demanda dans combien de jours la malade serait guérie; je lui répondis qu’il aurait dû attendre que je le lui eusse dit, qu'elle le serait plus tôt qu’ils ne le pensaient, lui, la malade et M. Deleuze, etje renvoyai la séance au lendemain à la même heure. En conséquence, nous nous réunîmes le lendemain.
« Après avoir fait placer la malade sur un fauteuil, comme la veille, et m’ètre mis en rapport avec elle, comme je le faisais alors, je fis des passes de bas en haut (I) du côLé paralysé et de l’épaule jusqu’au poignet du même côté, et, dans une ou deux secondes, je lis un effort, comme qui arrache un gant: j’enlevai toute la douleur, et la malade sc mit à sauter en criant au miracle, qu’elle était entièrement guérie.
Les médecins et M. Dcleuze lui-même furent on ne peut plus étonnés d’une guérison si prompte et d’une merveille semblable. M. Dcleuze voulut à l’instant être exploré par inoi pour voir si je savais toutes lesdouleurs qu’il éprouvait dans ce moment. Je lui donnai satisfaction. Les médecins eurent un doute sur des faits obtenus si promptement, et alors ils me prièrent de recevoir une malade qu’ils me présenteraient, et de leur permettre jusque-là d’être dans le doute.
« Quelques jours après, ces messieurs vinrent me trouver dans mon hôtel et me prièrent de les accompagner auprès de M"' Cadet-Gassicourt, femme d’un pharmacien do la rue Saint-Honoré ; j’y trouvai quatre médecins. Après les compliments d’usageje m’assis auprès de la malade, qui avait une affection nerveuse compliquée. Dès que je lui eus imposé les mains, elle eut des convulsions si fortes, si violentes, que son mari, qui lui tenait le bras droit, crut qu’elle allait expirer. Il me demanda au nom de Dieu de faire cesser la crise, je lui répondis que je ne ferais que co que son épouse me demanderait; alors je m’informai si elle voulait que la crise cessât; elle me répondit qu’elle s’en rapportait entièrement à moi et que ces messieurs étaient quatre ânes, qu’ils n’avaient pas su lui procurer le moindre soulagement. Alors je re-
(1) Contraire aux principes des magnétiseurs d'alors, qui prétendaient que I(i passes en remoulant étaient mauvaises. (Noie du directeur.)
tirai mes mains de dessus elle, et. m’éloignai de quelques pas: la crise cessa à la minute.
« Ces messieurs, si contents de mon procédé et des entretiens qucj’eus avec eux chaque jour, m’oft'rirent un hôtel meublé, un équipage et 12,000 francs par an pour les accompagner dans leurs visites. Il est bien entendu que je refusai.
« Il y a bien des années, mon bicn-aimé collègue, que je m’appuie sur la prière pour demander an Seigneur la guérison des malades qui viennent me visiter de tous les pays du monde. Evangile selon saint Jean, chap. XIV, v. 12, 13, 11, il est dit: « Qui croira en moi fera ce que « je fais, et fera bien au delà de ce que je fais. » Ces paroles se sont expliquées ici dernièrement: une aveugle-née, âgée de vingt ans, a vu la lumière le 8 septembre dernier. Elle est revenue dans ma cellule le 7 ou 8 novembre, alors j’eus la pçnsée de lui faire faire un alphabet sur une planche. Après deux ou trois jours, elle connaissait toutes les lettres.
« Un de ces jours je fus visité par un Indien, qui m’assura connaître le magnétisme, etquenulle part on n’opérait comme moi, que j’opérais comme le Seigneur, etc.
Il me dit encore bien d’autres choses que je ne puis répéter.
«J’ai encore un autre aveugle de Bordeaux, âgé de soixante ans, qui a recouvré la vue le 11 du courant. Je n’ai pas tenu note de ceux qui ont eu le même bonheur.
« Deux boiteux ont aussi laissé leurs béquilles.
« Un épileptique depuis neuf ans a été guéri et tant d’autres malades, que je n’en finirais point, etc., etc. »
SOCIÉTÉS SAVANTES.
SOCIÉTÉ PHILANTHROPICO-MAGNÉTIQUE.
D’importantes améliorations doivent avoir lieu dans l’administration, jusqu’ici un peu tiraillée, languissante, de cette société. Les membres comprennent maintenant que l'élément philanthropique qui domine dans leur constitution est insuffisant h la propagation du magnétisme. Le bien qui résulte des traitements gratuits faits au nom de la société est grand, sans doute, mais non en rapport avec les tendances actuelles du monde au milieu duquel nous vivons. En effet, en ne s’adressant qu’aux pauvres, comme la société l’a fait dans l’origine, on néglige toute la classe des riches, qui, exposés à tout autant de maladies, doivent aussi participer aux bienfaits du magnétisme. La société paraît décidée à maintenir ses traitements gratuits, mais aussi à donner de l’extension aux démonstrations publiques, qui ont l’immense avantage de propager les connaissances magnétiques dans toutes les classes sociales. Cette voie est la plus courte, mais aussi la plus difficile. Il faut, par nnedirection intelligente et ferme, éviter l’exhibition de somnambules-omnibus qui se servent de ces séances comme d’un marche-pied ; car alors la considération qui doit entourer ces magnétiseurs, dévoués au soulagement des misères et au développement du magnétisme, en serait altérée nota-* blement. 11 faut, enfin, que ces démonstrations, instituées pour la propagation de la science, ne soient point détournées du but pour lequel elles ont été créées ; c’est
par une grande sévérité de principes qu’on peut éviter qu’elles tournent au prolit d’intrigants habiles à s’insinuer partout. La composition du Bureau pour 1817 fait préjuger une bonne direction et un progrès social.
Ont été nommés :
MM. Dehrien, président.
Levaillant de Florival,!
Morot j vicc-presidents.
Possin, secrétaire.
Thuillier, secrétaire adjoint.
Delacoor, trésorier.
Roustan,/
.. > censeurs.
Duteil, 1
CONFÉRENCES magnétiques.
Dans nos cinq dernières conférences du dimanche, M. le baron du Potet a essayé de produire quelques effets de magie magnétique, dont la réussite prouve que le magnétisme est la clef des sciences occultes de tous les temps et de tous les pays. Les expériences, faites sur six personnes en présence d’un auditoire nombreux et choisi, ont présenlé des résultats tels que la plume la mieux exercée aurait peine à les décrire. Comment, en effet, traduire les sensations variées, dépeindre le jeu multiple des muscles de la face, le regard, l’attitude corporelle des personnes soumises à un pouvoir occulte qui les pénètre, les domine, qui a fait élection de domicile dans le centre cérébral lui-môme, où il livre un combat à Pâme qui anime celte organisation, qu’il subjugue? Essayons pourtant de faire comprendre quelques traits de ces étranges phénomènes.
Première expérience. — Soit deux lignes de craie tra-
cées snr le sol (figure ci-dessous) avec une intention
magnétique, à l’extrémité desquelles se trouve, séparé
• par un espace C, un cercle D, figurant intentionnellement un précipice.
Le patient, jeune et robuste, est placé, tout éveillé, au point A, un pied sur chaque ligne. M. du Polet, qui a reconnu précédemment sa sensibilité, ne le magnétise point et le laisse complètement libre d’obéir ou de résister aux diverses impressions qu’il éprouvera : il résiste. Bientôt un tremblement convulsif des membres inférieurs se manifeste et se communique à toute l’économie; les yeux deviennent brillants, vitreux, fixes; quelque chose de saccadé se fait remarquer dans ses mouvements, une impatience manifeste se montre, et il commence aussitôt à marcher sur les lignes sans pouvoir les quitter, en devier, les fuir, les éviter : quelque chose d’inexprimable se peint alors sur ses traits. Un pouvoir dominateur ou fascinateur l’attire jusqu’au bout de cette route fatale, où le magnétiseur a voulu qu’un profond précipice existât. Ce n’est cependant qu’une idée, un désir magnétiquement formulés ; mais cette idée s’est communiquée au magnétisé tellement qu’en approchant de l’abîme imaginaire il se couche et rampe du point B à l’ouverture béante du précipice fictif. Là un profond désespoir se peint sur sa figure ; il a la respiration haletante, râleuse, bruyante. Comme saisi de vertige, il cherche à s’accrocher, se retenir en enfonçant ses ongles dans les fissures du parquet. Un tremblement insimulable agite tout son corps, et, dans ce moment, la plus grande partie de l’assemblée, émue par la vue de
cette scène singulière, y participe tellement que tous les regards se tournent avec atteulion vers le magnétisé, que les corps se lèvent, que les bouches s’entr’ou-vrent : encore un instant, et il va sortir de cette foule des cris déchirants. Mais M. duPotet, mettant tin à cette scène imitative de magie, fait enlever le patient, toujours livré à ses craintes, ses angoisses; ce n’est que dans une pièce voisine qu'il reprend ses sens et oublie les dangers auxquels il se croyait exposé un instant auparavant. Une sueur froide l’inonde, et l’oubli par lui de ce qui s’est passé frappe d’un étonnement nouveau les témoins de cette curieuse tentative.
Deuxième expérience. — Ce sont encore deux lignes crayeuses tracées avec volonté déterminée (figure ci-dessous) qui forment tout l’appareil de cette démonstra-
tion; un triangle E se trouve à l’une des extrémités linéaires, pour un usage que nous connaîtrons tout à l’heure. >
Le sujet de cette expérience, jeune et robuste, est également, éveillé. Placé, les pieds dans l’&pace compris entre les deux lignes, qui sont assez éloignées pour y marcher sans les toucher, et abandonné à la seule jfetion du fluide déposé sur les lignes, le magnétisende est bientôt attiré dans ce plan, dont il ne peut franchir les limites, qui lui paraissent comme des murailles contre lesquelles il se heurte tantôt h droite, tantôt à gauche. De l’extrémité, ensuivant la ligne ponctuée,il arrive au point A, où il fait de vains efforts pour continuer sa route en droite ligne; la pointe de ses pieds heurte la ligne magique sans la pouvoir franchir. Un brusque mou-
veulent le fait obliquer et suivre jusqu'au point B la direction figurée p;>r la ligne ponctuée, et de là au point C, à chacun desquels il s’arrête, les pieds comme cloués et le corps oscillant, jusqu’à ce qu’un brusque demi-tour le replace dans son sinueux chemin. Parvenu au bout D, il trouve L’issue fermée par l’écartement des côtés du triangle K; il fait les plus grauds efforts pour franchir cet obstacle, et manifeste une sorte de désespoir et de crainte que des mouvements musculaires involontaires attestent à tous les regards : il est comme fixé au sol.
Quatre autres personnes placées dans les mêmes conditions obéissent de la même manière avec des différences d’intensité seulement.
Jusqu’ici ces faits, quoique curieux, ont cependant beaucoup de ressemblance avec les effets de l’attraction magnétique, bien qu’ils en diffèrent essentiellement, quant à la manière de les produire, puisque dans le cas présent Je magnétiseur reste passif, et que dans l’atlrac-tion il magnétise énergiquement. Mais voici où commence la magie. Il s’agit de faire sortir de ce labyrinthe les gens qui s’y sont engagés. L’adhérence de leurs pieds au sol rend cette opération difficile; ils n’opposent pourtant pas de résistance, et ce n’est pas l’inertie que l’on a à vaincre : c’est quelque chose de plus : une sorte de soudure^rfun seul homme ne peut rompre; il faut que plusieurs s’emploient à cet office. Et lorsqu’on est parvenu à éloigner les magnétisés du plan magnétique, leurs pieds sont attirés vers les lignes et s'y fixent de nouveau, de telle sorte que, pour enlever les patients, il faut les emporter en évitant le voisinage du plan vers lequel ils tendent sans cesse à se rapprocher.
Tous ces magnétisés transportés dans une chambre voisine reprennent leurs sens, mais n’ont pas une connaissance exacte des sensations qu’ils ont éprouvées. ¡1 leur reste un peu de fatigue daus les pieds et dans les
mollets, avec sentiment de chaleur et de traction, comme si tous les muscles des jambes avaient élé tiraillés.
Mais, nous le répétons, il est impossible de rendre sensible tout ce qu’il y a d’anormal dans les faits : la pensée s'abîme en voulant approfondir ces mystères.
ACADÉMIE ROYALE DE MÉDECINE.
Séance du 12 janvier. — M. Malgaigne entretient l’À-cadémie des résultats qu’il a obtenus de l’emploi de l’éther sulfuriquc, comme stupéfiant la sensibilité, et procurant nn état physiologique qui permet de faire les opérations chirurgicales, sans douleur.
La découverte de ce procédé appartient MM. Jackson etMorlon, de Boston. On le connaît en Europe depuis plus de deux mois, mais personne ne l’avait voulu employer. C’est !yf. Lcston qui en a fait le premier l’essai, dans les derniers jours de décembre. Voici comment les journaux anglais en rendent compte :
» On sait qu’avec le secours du magnétisme bn peut entreprendre les opérations chirurgicales les plus douloureuses, sans que le patient endormi en éprouve la moindre sensation. On vient de pratiquer à l’hôpital d’U-niversily-Collége, à Londres, deux opérations, sans que les patients aient éprouvé la moindre douleur. Le chirurgien, M. Leston, ne s’est pas servi pour cela du magnétisme, mais de l’influence de la vapeur d’éther. L’une de ces opérations était l’amputation d’une jambe, et l’autre l’extraction de l’ongle du gros orteil. L’opérateur se servit d’abord d’un appareil pour étourdir le patient par la vapeur d’éther, et l’opération fut ensuite promptement exécutée avec le plus grand succès. Ni l’un ni l’autre des deux patients, en revenant à lui, ne se doutait de ce qui lui était arrivé. »
Les résultats obtenus par M. Malgaigne sont identiques.
Si nous en croyons le souvenir des hommes, si nous nous en rapportons aux Écritures, la première opération chirurgicale faite sans douleur date du commencement du monde. Le récit biblique touchant la création de la femme est présent à tous les esprits; mais personne, que nous sachions, ne l’a rapproché de ce qui se passe dans l’état d’insensibilité provoquée de nos jours. Nous espérons que les chrétiens ne nous blâmeront pas de ce rapprochement, car il est dit qu’en cette occasion Dieu procéda sans miracle.
El iéternel Dieu avait fait tomber un-profond, sommeil sur Adam, dont ils’était endormi; et Dieu avait pris une de ses côtes, et resserra la chair en son lieu. (Gen., chap. II, v. 21.)
L’auteur du Monde naissant, page 362, commente ainsi ce curieux passage de l’histoire du monde.
« Mais parce que les raisons qui avoient obligé le Créateur à ne rien créer en la présence de l’homme ne pou-voient pas luy permettre de luy laisser voir comment il formeroit sa compagne : et parce encore que s'il avoit été possible que Dieu eût enlevé une partie considérable de son corps, sans luy causer une douleur très-sensible, à quoy sa bonté et ses tendresses n’auroieut pu consentir, ou sans faire un miracle, ce qui ne convenoit pas à cet établissement de la nature, dont le miracle renverse les lois : ce bénin Créateur choisit une voye naturelle, qui otoit entièrement à Adam la connoissance et le sentiment de ce qu’il s’en alloit faire, il luy envoya un sommeil profond et semblable à celui des léthargiques. Car, ayant fait élever à son cerveau des vapeurs grossières, qui s’y épaissirent, qui y bouchèrent les orifices des nerfs, et particulièrement de ceux qui. alloicnt à ses côtés, et qui en relâchèrent, en empêchant qu’il y coulât
des esprits, il étoit très-aisé d’y faire une grande playe sans qu’il le sentît : surtout si son àme étoit occupée à même temps toute entière par les vives et agréables pensées d'une extase, comme il y a beaucoup de sujets de croire qu’elle fut. Dans cet état donc qui le rendoit insensible, Dieu prit une de scs côtes, accompagnée de la chair et de toutes les autres choses qui Penvironnoient : et ayant au même instant rempli la place d'où il la tira d’une chair qu’il y resserra pour luy donner une dureté approchante de celle des os ou des cartilages... Et ayant réveillé à même temps Adam de son profond sommeil, en dissipant entièrement les vapeurs grossières et épaisses qui occupoicnt son cerveau... »
Ne semble-t-il pas voir une opération magnétique? Rien n’y manque-, toutes les phases y sont marquées, comme si Dieu avait voulu, dès le commencement, initier les hommes au magnétisme.
Nous ignorons les suites immédiates de l’opération adamique; nous ne connaissons pas encore les accidents consécutifs de celles des stoïciens de la secte élhérée, comme dit M. Malgaignc ; mais nous savons que de toutes les personnes amputées dans l’insensibilité magnétique, une seule, Mm' Plantin, magnétisée par M. Chapelain, est morte à la suite. Chez les autres, on remarque que la plaie se cicatrise avec une rapidité qui étonne autant que l’absence d’accidents consécutifs, circonstances qu’il est important de noter; car dans tous les services de chirurgie, beaucoup de malades meurent des suites de l’opération.
Onneditpascequesontdevenus les malades deM. Lésion; il serait pourtant important de le savoir; car dans les procédés de Darwin, et quelques autres qui ont proposé l’asphyxie, l’opium, etc., comme moyen d’empêcher la douleur, l’expérience démontre que ceux qui ont pris les plus fortes doses du narcotique, ceux qui ne
crient point, qui supportent avec résignation et sans sc plaindre les plus vives douleurs, courent ensuite le plus de dangers. Ce résultat désastreux motiva le rejet de ces moyens, et fil croire qu’il n'était pas indifférent pour la conservation des opérés de les rendre insensibles, opinion qui peut-être influe encore assez pour empêcher l’application générale du procédé magnétique. Ceci ne veut pas dire que la vapeur d’éther doive produire un effet analogue aux moyens susmentionnés, mais c’est à craindre, car l’ivresse éthéreuse est bien plus pernicieuse que l’alcoolique.
En résumé, ce moyen doit-il nuire au procédé magnétique? Non, il le fortifie au contraire. C’est une heureuse connexion qui peut avoir pour résultat l’admission du magnétisme comme principe similaire. Mais quoiqu’on ne sache encore à quoi s’en tenir sur les suites de ce moyen nouveau, nous avons la conviction que le magnétisme lui sera toujours supérieur ; car il est naturel, et n’allère en rien la vie et les organes.
VARIÉTÉS.
Hydroscopie. — On lit dans la Démocratie pacifique du 17 janvier, à propos des sources artésiennes :
.....Le docteur Griffilh a raconté à M. Jobard que
les caravanes sont souvent suivies par des sorciers ou tourciers arabes, qui guettent le moment ou l’eau vient à manquer k la caravane. Ils s’approchent alors des chefs
pour offrir leurs services, c’est-à-dire pour leur découvrir les sources dont ils ont seuls le secret... Après avoir fait une espèce d’évocation et tracé de grands cercles, au centre desquels ils vont planter leur baguette, ils n’ont pas plutôt écarté le sable et creusé dix 011 quinze pieds, que le trou se remplit d’eau. »
Bévue des Journaux. — Le Siècle du 5 janvier, parlant des conférences du R. P. Lacordaire, dit: « Il a abordé'la délicate question du magnétisme.»
L'Entracte du 16, à propos des expériences qui se font dans les hôpitaux de Paris avec l’étber sulfurique pour produire une insensibilité appelée à détrôner celle que les magnétiseursontfaitconnaîtrc, poursuit le cours de ses plaisanteries sur M. Orfila. Aujourd'hui c’est une députation de magnétiseurs qui va réclamer au doyen rétif la priorité due à l'insensibilité magnétique.
La llcvue d'Anthropologie catholique dont nous avons annoncé la prochaine apparition, a vu le jour le 21. Elle est mensuelle.
Les fils de Loyola commencent leur œuvre par un grossier mensonge. Tome III, page 17 de ce journal nous a vons dit : « ... Nous connaissons la moralité des méde-« cins, et celle des jésuites nous est suspecte. » Puis, page 18: Que les prêtres humains travaillent à fé-« conder ces nouveaux germes, rien de mieux et de plus » utile ; leurs œuvres de bien les feront chérir et res-« pecter. »
Fidèles à leur coutume d’altérer les textes (I), de les manipuler, de les frelater pour les rendre favorables à leurs doctrines, ces fauteurs de la religion nous font dire aujourd’hui, page 36 de leur Berne: a Nous connaissons la
* moralité des jésuites; redoutons celle des prêtres, craignons 0 que le magnétisme ne tombe entre leurs mains. »
(1) Voy ci la kllre de M. Theit dans la Démocratie pacifique du 18 janvier 1847.
Comme on le voit,ces Baziles débutent sans manquer a leur règle; cela promet pour l’avenir.
Cette Revue nous apprend que le R. P. Debreyne, docteur-médecin, prêtre, religieux de la Grande-Trappe (Orne), ne veut pas prier pour la sainte entreprise, et se joindre aux quinze-vingls et quelques qui ont accepté la formule des prières créées puurcet objet. Ce révérend Père appelle les magnétiseurs des farceurs et des comédiens; comment ses coreligionnaires von^-Hslc déterminer à changer d’opinion? Peut-être qu’un nouveau miracle, car cette Revue en contient déjà d'eux, se fera en faveur du bon père. Mais pour nous, qui sommes magnétiseurs libres, nous nous contenterons de lui retourner l’épitbète qu’il nous adresse, et nous croyons que cela sera beaucoup plus mérité.
C est avec une certaine impatience que nous attendions l’apparition de celte Revue; nous espérions y trouver des idées neuves, quelque chose qui marquât la science d’un nouveau sceau; mais, il faut le dire, ce n’est qu’un pâle reflet de quelques ouvrages mystico-inagnétiques, el nous pouvons dès lors assurer que ces nouveaux écrivains ne seront point damnés, car ils n’ont pas mangé du fruit défendu, ni touché à l’arbre de la science magnétique.
L'Union médicale, nouveau journal de médecine, contient dans son quatrième numéro d’amères plaisanteries sur le magnétisme dues à la plume de M. Jean Raymond (Amédée Latour). N’est-il pas triste de voir un journal fondé en vue du progrès se traîner dès le début à la remorque des rétrogrades?
La Démocratie pacifique du 2 i compare judicieusement l’insensibilité magnétique avec celle produite par l’inspiration de l’éther sulfurique.
BIBLIOGRAPHIE.
Neuf années a Constantinople , par le docteur A. Brayer(I).
Ce livre, qui pa sse à juste titre pour un des meilleurs traités d'hygiène publique, contient un fragment bien curieux sur la médecine des émirs, dont les pratiques sont identiques avec les nôtres.
« .... C’est auprès de la Douane au tabac que se tien-ncnl les émirs, regardes comme les descendants de Fa-îiinah, fille de Mahomet, et qui, eu priant, soufflant et touchant, ont la réputation de guérir plusieurs maladies, surtout les érysipèles, très-communs à Constantinople. Quelques guérisons bien avérées ayant été, dit-on, opérées de cette manière, et le Koran ne s’y opposant pas, le gouvernement a cru devoir, dans l’intérét de la population, accorder à quelques-uns d’entre eux un tahin (ration), pour qu’ils pussent se consacrer entièrement à l'exercice de ce genre de médecine, mais à la condition de ne [tas recevoir plus de 5 paras de chaque personne qui a recours à leur ministère. C’est pour cela qu’ils se tiennent près de cette Douane depuis le lever jusqu’au coucher du soleil.
« Curieux d’examiner ces nouveaux confrères, je me plaçai dans un café voisin pour les observer sans en être vu. 11 y en avait alors deux qui se promenaient lentement dans la petite place adjacente; ils étaient d’un âge inûr; leur taille était élevée, leur habillement simple, mais propre. Le turban vert, distinctif de celte caste, ceignait leur front ; leur figure était sérieuse, mais douce et vénérable. Ils tenaient à la main un tesbih, sorte de
(I) 2 vol. iu-8*. Pari», 1836. Chez A. RcüO et Cie, rue de Seine, 3?.
chapelet dont les musulmans se servent comme de passe-temps. Ils s’arrangeaient de manière que l’un ou l’autre fût toujours en évidence. Une demi-heure s’étail à peine écoulée qu’une femme turque arriva sur la place avec un enfant de quatre à cinq ans. Quoique voilée, suivant l’usage, elle paraissait âgée de quarante ans. Elle alla droit à 1 émir en vue, et lui parla pendant une minute environ, sans doute pour l’instruire de sa maladie. Tous deux étaient là, debout, sans que les allants et venants y lissent la moindre attention. Après s’être-recueilli, l’émir récita d’une voix presque basse quelques prières en langue arabe, à en juger par sa prononciation gutturale; puis il mit une main sur la tête de la malade, lui souffla sur le front, et, avec le pouce de la main droite, lui frotta légèrement l’espace qui se trouve entre le côté du nez et l’éminencc malaire, ce qui me fit présumer que cette femme avait un érysipèle de la face. En cinq minutes la cérémonie fut achevée. Retirant alors d’un des angles de son mouchoir de poche, où il est d’usage de mettre son argent en y faisant un nœud, le nombre de paras voulu par l’ordonnance, cette femme les lui remit.
• Plusieurs personnes, hommes et femmes, jeunes et vieux, se présentèrent successivement. Quelques-uns ne paraissaient pas malades; d'autres, au contraire, la tête tristement enveloppée dans leur châle , semblaient souffrir de fluxions variées. Les émirs lisaient avec une rare patience et un sang froid imperturbable sur chacun d’eux, et à très-peu de chose près delà même manière.
« Pour mieux voir leur procédé, j’étais sorti du café et m’étais assis sur le banc extérieur. Un d’eux, étant libre, passa près de moi ; je le saluai affectueusement, et lui dis que moi aussi j’étais médecin, que j’étais venu exprès pour observer leur pratique, que j’y avais beaucoup de confiance dans quelques maladies nerveuses, mais peu dans les maladies inflammatoires; mais que j’étais sur-
tout charmé de la douceur, de la patience et du désintéressement avec lesquels ils remplissaient leur ministère. Il parut flatté de ma prévenance et de la bonne opinion que je lui témoignais, d’autant plus que la plupart des étrangers que la curiosité attire auprès d’eux croient ordinairement faire preuve de leur grande supériorité en les tournant en ridicule : « La santé et la maladie, me « dit-il, sont également dans les mains de Dieu; c'est o donc à lui qu’on doit s’adresser pour obtenir la conti-« nuation de l’une et la guérison de l’autre. L’homme « qui vit suivant les lois de la nature n'a guère besoin de « médicaments.
« La noble profession d’étre utile à ses semblables, « ajouta-t-il, doitétre exercée avec exactitude, douceur « et dignité, et non dans des vues d’intérêt pécuniaire. » Il termina ce discours en me disant : « Inchallahl gieu-ruchurus (nous nous reverrons, s'il plaît à Dieu), » et me quitta pour faire ses ablutions avant d’aller prier à la mosquée voisine.
« Les musulmans ne sont pas les seuls qui croient à l’efficacité des moyens de guérison employés par les émirs. Les Arméniens et les Francs eux-mémes y ont quelquefois recours. Rien de plus commun, dans la pratique médicale à Constanlinople, que d’entendre des malades demander au médecin : a Dois-je me faire lire? Ne ferais-je pas bien de me faire lire?» Et j’avouerai que, quand la personne malade se trouvait être d’un tempérament nerveux, si c’était surtout une Grecque orthodoxe, crédule et fanatique à l’excès, je n’hésitais pas à répondre : « Fais-toi lire promptemeut. »
« On ne peut révoquer en doute l’influence de ces pratiques sur la guérison de certaines maladies; les annales de la médecine en contiennent de nombreux exemples. Pour ma part, je me crois suffisamment autorisé à rapporter le fait suivant :
« Le nommé C***, âgé de trente à trente-cinq ans, Arménien, alors drogman du docteur M"*, Vénitien, fut un soir attaqué d’une violente fluxion à la joue ; elle augmenta tellement pendant la nuit que le lendemain il ne put accompagner son professeur dans sa tournée. Son maître lui prescrivit ce qui est d’usage en pareil cas, lui promettant que dans quelques jours il serait guéri. —Dans quelques jours! reprit le drogman; j’espère bien l'être demain. — Tu serais bien habile. Eh! comment feras-tu?— Je vais aller me faire lire par un des émirs. Demainjeserai guéri, et ce ne sera pas la première fois. — Le médecin éclate de rire, lui recommande de se tenir chaudement et de ne pas sortir de la maison. Cependant le drogman, la tôle bien enveloppée dans un châle, se met en chemin, va trouver l’émir, se fait lire, et revient chez lui beaucoup moins souffrant; le repos de la nuit acheva sa guérison. Le jour suivant il reprit son service.
« Je tiens ces détails de mon drogman, qui, comme compatriote et confrère, voyait chaque jour le sujet de cette observation. »
Ces faits d’observation, à ça près de la prière, que nous ne regardons pas comme essentielle, ne présentent-ils pas tous les caractères d’une magnétisation sagement et savamment faite? N’est-il pas étonnant de voir un gouvernement prétendu barbare encourager, solder même les hommes qui guérissent les maux en se servant de facultés naturelles et humaines, tandis que, dans notre pays, le plus civilisé de tous, on cncourage, on récompense, on honore la médecine qui tue, mais on ne fait rien pour celle qui guérit. Patience donc : une vérité est en présence d’une monstrueuse erreur; il faudra bien que la victoire soit un jour du côté du bon droit.
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (de Garnay).
P«rii. — Imprimerie d'A. Bisb el Comp., rue de Seine, 31.
CLINIQUE MAGNÉTIQUE-
Insensibilité. — La production de l'insensibilité par l’inhalation de l’éther sulfurique continue avec une ardeur qui tient de l’insanie. C’est une fièvre d’imitation sans pareille qui se propage des hôpitaux à la ville. Il n’est bruit que d’opérations faites en cet état; partout on rencontre les chirurgiens armés du bocal au liquide délirant.
A la tribune académique, dans la presse, on chante sur tous les tons les vertus de cette nouvelle eau lé-thee. On y fait grand bruit de sa supériorité ; on se flatte môme que le magnétisme est détrôné; que la plus belle corde de son arc est rompue. C’est trop vite applaudir : attendez, messieurs; de cruels revers vous sont réservés : des accidents, suite inévitable du trouble que vous portez dans l’organisme par l’emploi d’un agent si actif, viendront bientôt montrer que vous vous êtes trop pressés de conclure. Sans nul doute, le patient ne se rappelle pas, dégrisé, ce que vous lui avez fait ; mais il souffre pourtant, car il crie, se lamente, se débat; vous lui enlevez la conscience, mais non la douleur, car ses plaintes ont un sens, et les coups qu’il porte s’adressent à ceux qui le torturent. Vous croyez pouvoir impunément introduire durant vingt ou trente minutes dans les poumons de ces malheureux la vapeur délétère ; coupable erreur ! Ivres vous-mêmes de l’ivresse que vous
TOME IV.—IV» 30.— 10 FÉVRIER 18Z|7. 3
procurez, vous ne tenez aucun compte des accidents (I) qui surviennent à la suite de vos essais. Et telle est l’empire de la manie qui vous domine, que vous éthérisez pour le plus léger bobo, et même dans les cas où la douleur est nécessaire, lorsqu’elle sert de guide.
Pourquoi faut-il que la chirurgie, comme la médecine, laisse en dehors des hôpitaux ce magnétisme qui parcourt maintenant le globe en y semant scs bienfaits? Quel aveuglement pousse à le vouloir détruire, à l’annihiler? L’insensibilité magnétique diffère essentiellement de celle produite par l’éther : une vérité ne saurait en détruire une autre. Et tandis qu’ici nos antagonistes crient victoire, il nous arrive de l’Inde le rapport de soixante-treize opérations faites en état magnétique, sans douleur aucune, et la nouvelle de la création d’un hôpital magnétique à Calcutta.
L’opposition stupide que le magnétisme rencontre dans notre patrie ne ccsscra-t-elle jamais? Sera-ce en vain que les magnifiques résultats obtenus à Cherbourg auront éclairé la France? Non; le temps approche où la confusion couvrira bien des visages, car la vérité que nous défendons approche de l’instant du triomphe.
Nos avertissements ne seront point écoutés des savants officiels, ni de ces chirurgiens dont nous admirons le talent; le réveil de la raison ne viendra que lorsque des accidents cruels, trop faciles à prévoir, auront montré que ce n’est point en vain qu’on s’éloigne de la nature, qu’on méprise les moyens si simples qu’elle enseigne. Voyez en effet la différence. L’insensibilité magnétique n’est accompagnée d'aucune douleur, d’aucun
(i) Voyez, pour ce qui s'est passé au Val-de-Grüce, la Démocratie pacifique du 3. Nous avons vu, dans le service de M. Jobert (de LaraballeJ, il Saint-Louis, une femme atteinte d’une céphalalgie que rien ne peut calmer. Celte ivresse dure plusieurs heures après l’opératiou. Quand ell« ne cède pas d'elle-mCme, ou est obligé de recouri r à la saignée.
trouble d’esprit; les pansements se font aussi sans dou-
* leur, les plaies se cicatrisent vite et sans accidents redoutables.
Par le procédé Jackson, an contraire, l’insensibilité est fugace, indécise; on n’en peut calculer la durée, et les cris des patients attestent que leurs souffrances ne sont que trop réelles. Revenus à eux, ils sont comme les buveurs dont l’ivresse a cessé : ils ne se souviennent de rien ; mais bientôt la réaction commence, la sensibilité s’exhalte, la fièvre s’allume, et l’on reconnaît la défectuosité du moyen tant vanté.
Le magnétisme ue rend pas tous les êtres Insensibles, mais l’éther non plus ; ceux surtout qui font usage d’alcooliques, les ivrognes enfin, n’en éprouvent que très-imparfaitement les effets. Qui sait si le magnétisme, mieux étudié, mieux appliqué, n'arrivera pas à insensibiliser tous les individus? Nous ne voyons pas pourquoi la nature aurait accordé à quelques-uns un si grand privilège; il uous paraît plus naturel d’accuser notre ignorance. C’est pourquoi nous appelons de nos vœux le temps où les hommes de science emploieront leur génie à de nouvelles recherches.
—M.Ie docteur James Esdaile, chirurgien militaire, aujourd’hui directeur de l’hôpital magnétique de Calcutta, a publié dans YEnglishman le résumé de sa pratique magnétique durant huit mois de séjour à Hooghly. C’est la publication de ce document qui a attiré l’attention do gouvernement sur le magnétisme; on j trouve l’énoncé de soixante-treize opérations chirurgicales sans douleur, et de dix-hnit maladies internes, avee des réflexions cliniques. Yoici la traduction de ce résumé qui a fait une vive impression en Angleterre et dans l’Inde.
Opérations.
« 1° Amputation d'un bras, d'un sein, d’un pouce et de deux pénis.
« 2° Ablation d’une tumeur à la mâchoire supérieure, d’une à la jambe, et d'une autre à l'aine.
« 3° Extirpation de deux scirrhus testium.
« 4° Opération de trois cataractes.
« 5“ Ponction de sept hydrocèl«s et de deux liydro-pisies.
a 6* Ouverture de sept abcès.
« 7° Réduction de six rétractions musculaires, tant de la jambe que du bras.
« 8° Cautérisation d’un ulcère avec la potasse caustique, et de deux avec l’acide chlorhydrique.
c 9° Sept ulcères de mauvais caractère ébarbés.
« 10° Extraction de trois dents.
« 11° Trois circoncisions.
« 12° Extirpation de trois ongles du gros orteil.
« 13° Incision de gencives.
« 14° Introduction de séton de la cheville du pied au genou.
« lit0 Ablation de dix-sept tumeurs scrotales. » Maladies internes.
« 1° Trois migraines, un tic douloureux, une colique spasmodique, des convulsions, un sentiment d’insectes rampant sur Ta peau, guéris en une seule séance.
« 2- Un rhumatisme nerveux empêchant de marcher depuis deux ans et demi, deux autres moins anciens, et une inflammation chronique de l’œil, guéris par le traitement chronique (I).
(1) « Par traitement chronique, j’entends la magnétisation journalière sans chercher le sommeil, qui n'est pas nécessaire pour guérir. ■
« 3° Une conjonctivite aiguë guérie en un jour par des magnétisations répétées.
« Une orchite aiguë guérie en trente-six heures par des magnétisations fréquentes.
« 5° Un lombago, une sciatique, une névralgie crurale, guéris en une semaine; une paralysie du bras en un mois, et une hémiplégie en six semaines, par des magnétisations générales et locales. »
M. Esdaile fait suivre cet énoncé de remarques cliniques d’un haut intérêt pratique; en voici quelques-unes qui feront juger du reste:
« On objectera, dit-il, que les cures citées ci-dessus sont des maladies essentiellement nerveuses; mais je répondrai que le sommeil et l’absence de douleur étant la condition la plus favorable h la résolution naturelle des inflammations, j’ai éteint les inflammations locales en tenant les patients endormis jusqu’à complète guérison.
« Je dois établir, pour la satisfaction de ceux qui n’ont point la connaissance pratique du sujet, que je n’ai vu naître aucune conséquence fâcheuse chez, les personnes opérées dans l’état, magnétique. Il est des cas où les malades n'ont senti aucune douleur, même après l’opération; les plaies se cicatrisent en peu de jours par première intention; dans les autres cas, je n’ai remarqué aucune lésion de nature à offenser les organes. Il me semble, au contraire, que de graves accidents ont été évités, parce que, dans cet état, le trouble des fonctions est moindre que dans les circonstances ordinaires.
« Aucun de mes opérés n’est mort. »
SOCIÉTÉS SAVANTES.
CONFÉRENCES MAGNÉTIQUES.
24 janvier. — Les faits de magie imitative que nous allons raconter laissent bien loin derrière tout ce qu'on a fait jusqu’ici en magnétisme; ils ouvrent un vaste champ aux investigations des expérimentateurs et agrandissent la pensée. Heureux ceux qui ont été témoins du drame que nous allons décrire, car ils ont pu comprendre et sentir ce que vainement notre plume essaiera de tracer.
M. le baron du Potet, tenant de la craie d’une main et du charbon de l’autre, trace sur le parquet deux lignes djroites, parallèles, l’une blancbc et l’autre noire, distantes d’un mètre etlongoesde trois environ. Personne ne connaît son projet, car Jui seul 1’« conçu ; on est attentif, car il va s’agir, comme dans les conférences précédentes, de magie magnétique.
A l’extrémité B de la ligne blanche se trouve dessiné de la même manière un niveau N; l’extrémité D de la ligne noire se termine par un serpent S; deux étoiles de craie X, 0, sont tracées, sans intention magnétique, à une égale distance des deux lignes (figure ci-dessus).
Maintenant M. du Potet nous fait connaître sa pensée; voici ce qu'il se propose : reconnaître si véritablement deux principes opposés nous gouvernent, comme l'ont cru les anciens philosophes : l’un qui, principe du bien, nous pousse et conduit dans cette voie; l’autre qui, principe du mal, nous incite sans cesse à des actes coupables. Le triomphe de l’un ou de l’autre fait le vice ou la vertn de chaque être, le rend heureux ou malheureux.
« Voyons, dit M. du Potet, si l’être humain placé entre ces symboles décèlera sa tendance; voyons quelle sera la diiyction prise par les êtres engagés dans cette route. L’espace est libre ; l’influence magnétique n’existe que sur les ligues. En les traçant j’ai eu deux pensées : la noire est pour moi le chemin du vice : j’y ai imprimé-, par intention, tout ce qui peut le caractériser; la blanche est contraire : j’y ai imprimé aussi, par ma volonté, mes pensées,.tout ce que les hommes regardent comme étant la vertu. Essayons donc leur influence sur des personnes sensibles au magnétisme, mais non magnétisées actuellement. Je vais rester entièrement passif durant l’opération, et le résultat, quel qu’il soit, devra être attribué à l'unique influence exercée par les lignes etsym*-boles. »
Un jeune homme de vingt-quatre ans, robuste et dé cidé, chez qui le sommeil magnétique n’a jamais été produit, est placé sur l’étoile crayeuse X. Sa volonté est libre, et personne ne remarque d’altération ni dans sa raison ni dans son maintien habituel ; il rit et exprime ses doutes su? l’issue de cette tentative.
M. du Potet se place au point 0, où il reste inactif, attendant l’événement, comme chacun dos assistants,, pour qui cette expérience est aussi nouvelle qu’inattendue, personne ne croyant alors à l’iniluence que peut exercer un signe de craie ou de charbon tracé avec intention magnétique. Tout le monde est invité an si-
lence; mais celte recommandation devient inutile, car, au moment où on ne pouvait encore s’y attendre, nn mouvement assez violent agite, secoue le patient. On est, dès lors , dans l’attente anxieuse de cequi va se passer; le plus grand silence règne. Les traits du sujet prennent un caractère d’inquiétude; il fixe alternativement ses yeux sur les lignes, et ne regarde déjà plus l’assemblée. C’est alors que de nouvelles secousses remuent tout son corps et l'ébranlent fortement. Il avance enfin d’un pas vers la ligne noire, puis retourne volontairement à sa place; mais à peine y est-il arrivé qu'il repart dans la même direction. On remarque déjà manifestement que la ligne noire l’attire; il s’en approche en oscillant, et la louche enfin du bout du pied au point E; puis il la quitte de nouveau pour rentrer dans le plan, mais quelque chose semble le retenir; il regarde la ligne blanche , et son corps se penche latéralement vers elle, les pieds restant immobiles près de la ligne qu’ils touchent presque. Un brusque demi-tour le replace sur la ligne qui l'attire, et il y marche rapidement jusqu’au point G. Là, tournant un peu sur lui-même, son corps, fléchissant de côté, forme presque un demi-cercle, la tête inclinée sur la ligne blanche. C’est dans cette position, ainsi courbé, qu’il avance luléraletnent vers l’extrémité D de la ligne noire, regardant avec anxiété ce qui la termine. Ses yeux semblent lancer des lueurs tant ils sont brillants; tout est saccadé dans ses mouvements; le jeu des muscles de la face exprime les combats de l’âme; on peut y voir l’ivresse du plaisir commô»le désespoir que cause une grande faute. Agité par le tumulte de ses pensées, tout est en mouvement dans son organisation; sa poitrine se gonlle, sa bouche chasse des bouffées d’air, puis toute hésitation disparaît; il se tourne vers le serpent symbolique, se penche sur ce signe fatidique en écartant les mains comme pour le saisir. On l’arrachc
alors île celle cruelle situation ; il est sans connaissance et inondé de sueur; ses yeux sont immobiles. Transporté dans une pièce voisine, il y reprend peu à peu l’usage de ses sens. Interrogé sur ses sensations, il ne se rappelle (pie ses premiers mouvements , et dit que les trois premiers pas qu’il a faits étaient accompagnés d’un sentiment de plaisir indicible, puis qu’aussitôt après un sombre désespoir s’est emparé de lui, qu’il entendait une voix intérieure qui lui criait : « Où vaff-lu? Retourne sur les pas... » Mais qu’à dater de ce moment il ignore ce qu’il a fait, ce qu’il est devenu, où son corps a été entraîné. Il assure qu’il ne croyait point d’abord à une influence de cette sorte, et qu’il était bien résolu, si elle se faisait sentir, à la repousser de toute sa volonté.
Il est impossible de dépeindre la diversité des sensations éprouvées par les assistants. Chaque mouvement du patient produisait sur tous l’effet d’un choc électrique, une sorte de contagion vibratile : toutes les poitrines étaient haletantes, et lorsqu’il fléchit pour saisir le symbole du mal, des bras se sont levés, des bouches ouvertes, comme si, blessés dans leur conscience, les témoins de cette scène étrange eussent voulu protester contre ce résultat.
Cette première émotion calmée, M. du Pote t engage une autre personne à se placersur l'étoile X. C’est encore un hommefortetparfaitementéveillé; il pense quesa volonté est plus puissante et dominera toute sorte d’influence. C’estdonc résolument, sans hésitation, qu’ilconsentàsu-bir l’épreuve. Chacun estdès lors attentif et s’appréteàsai-sirlcsmoindresparticularitésdel’expérience. Deux minutes sont à peine écoulées, que déjà des mouvements convulsifs se manifestent dans les jambes; le regard est fixé entre les deux lignes ; on peut remarquer une grande hésitation ; son corps se penche tantôt à droite, tantôt à gauche; enfin un premier pas a lieu vers la ligne blan-
clie. Toute l’assemblée croit qu’il va s’y diriger de plus eu plus, mais il n’eu est rien : il est jeté brusquement sur la ligne noire au point E, et puis la cotoie jusqu’au point H, où il la touche de nouveau. C’est alors que le désespoir s'empare de lui, que de grosses larmes coulent de scs yeux. On croit qu’un mauvais génie le pousse. Erreur! Par un effort désespéré, il s’éloigne et se dirige au point 1 delà ligne opposée qu’il touche du bout du pied; mais il laquitte vile, et, dans une sorte de transport impossible à rendre, arrive au point 0 sur M. du Potet, qu’il étreint de ses bras et inoude de ses larmes.
Voilà deux épreuves qui semblent décisives ; chacun est saisi et pense dans ce moment que véritablement deux génies, deux forces gouverneut la machine humaine, se la soumettent; plus de doute môme pour quelques-uns, dont une sombre tristesse s’empare. Quelque chose de fatal nous pousserait-il invinciblement vers un abîme lorsque la puissance contraire ne peut contrebalancer sa rivale, et chacun de nous pourrait-il, par ces épreuves, connaître son destin? Essayons encore, dit M. du Potet; et, prenant un nouveau sujet qui paraît sûr de lui, il le place sur l’étoile X comme les précédents.
Cette épreuve encore va donner des résultats. Les membres de cet homme résolu sont agités convulsivement^ l’attitude de ses traits commence k s’altérer; encore uu instant, et il va marcher... Tout à coup une porte ost violemment poussée, des individus froisses, des sièges renversés; un jeune médecin que personne n’avait remarqué dans uu coin de la salle s’élance vers les lignes aye« b* rapidité d’un trait; renversant tout ce qui lui fait pbstacle, il arrive d’un bond dans l’espace compris entre les deu* ligpes. 11 a les traits bouleversés, les cheveux hérissés, les yeux hagards, les bras étendus, les doigts écartés ; il s’agite violemment et sçmble vouloir prendre la place de celui qui se prêtait à l’expérience.
Tout le monde se lève étonné; une sorte de panique» saisi rassemblée ; mais VI. du Potet s’approche promptement. passe la main sur le front du patient, qui se penche sur lui, ferme les yeux et redevient calme. Entraîné dans une autre pièce, le héros de ce drame imprévu est interrogé, mais lent à répondre ; il exprime enfin que, malgré lui, il a commis cet acte; qu’entraîné par un pouvoir invincible, il avait été comme jeté sur les lignes.
Comme on le voit, les émotions les plus grandes n’ont cessé de pénétrer l’auditoire, qui, dominé, semblait être sous le charme de cette magie. Plusieurs personnes avouent mêmeavoir senti pendant ces épreuves quelque chose d'anormal qui les portait à regarder les symboles et à s’en approcher ausài. Voilà donc, à n’en point douter, les sources de la magie; voilà par quel pouvoir toute l’antiquité a été subjuguée, dominée, et d’où découlèrent tant de croyances qui eurent dans tous les siècles une si grande influence.
M. du Potet, résumant la séance, engage l’assemblée à ne tirer aucune conséquence rigoureuse des faits qui viennent de se passer. 11 croit qu’en cette circonstance la matière, obéissant plus que l’esprit, u été subjuguée par les seules propriétés de la vie; que l'âme, trouvant des organes paralysés, ne pouvait manifester toute sa puissance. II engage tous ceux qui s’occupent de magnétisme à ne répéter ces expériences qu’avec uue grande réserve; car, pour bien conduire ces opérations encore mystérieuses, il faut posséder une certitude d’action et un calme profond de l’entendement; le plus grand trouble pourrait résulter de l’ignorance ou de l’inobservation des conditions reconnues nécessaires à la manifestation régulière des effets. Il rappelle à ce propos la profonde vérité pratique contenue dans ces simples paroles d’une somnambule : Ne vous étonnes de rien. Nous savons en effet que si le magnétiseur partageait l'émotion
que fait toujours naître la surprise, se laissait influencer par la vue des perturbations qu’il a causées, tout bientôt ne serait que désordre qu’il ne pourrait plus détruire.
« C’est, dit il, par une suite de démonstrations analogues, en poursuivant celle série d’expériences, que nous espérons allumer le flambeau qui doit éclairer la marche du magnétisme. Trop longtemps les magnétiseurs sont restés dans le cercle expérimental tracé par nos devanciers; il faut maintenant le franchir hardiment, résolument, en marchant toujours du connu à l’inconnu, sans oublier un inslant les règles pratiques, sans perdre de vue les propriétés de l’agent magnétique. Laissons de côté ceux qui voudraient empêcher la marche de la science en exprimant leurs craintes. Innovons, innovons sans cesse, mais que toujours la sagesse et l’expérience nous servent de pilote. »
ACADÉMIE DES SCIENCES DE STOCKHOLM. .
Séance du 31 mars 1846. — M. Berzélius, dans son Rapport annuel sur les progrès de la chimie, entretient l’A-cadémie d’un travail de M. le baron de Reichenbach, publié dans les Annules de chimie et de pharmacie de MM. Liebig et Woehler, vers la fin de I8i5.
Le savant secrétaire perpétuel, blâmant ceux qui nient aussi bien que ceux qui adoptent avec un enthousiasme irréfléchi la réalité des phénomènes du magnétisme animal, dit : « On ne peut nier qu’il y ait au fond quelque « chose, et qu’il vaut bien la peine qu’on cherche à ac-a quérir quelques faits positifs. Il est certain que l’expé-« rience nous offre souvent, dans toutes les branches de
* la science, des phénomènes qui sont incompréhensibles « et dont on se tire le plus facilement en déclarant qu’ils « sont des erreurs ou des fables. Mais telle n’est point la « véritable manière dont on doit procéder; il est tout
« aussi nécessaire de prouver que ce que l’on envisage o comme erroné l’est réellement, que de démontrer que « le vrai est vrai, et le véritable savant ne recule nitle-« vantl’un ni devant l’autre.
« M. de Reicheubach admet que le système nerveux o des personnes sujettes au somnambulisme est, dans un a état maladif, doué d’une sensibilité plus grande qu’à « l’état norm al, et qu’elles peuvent être impressionnées a par des influences qui n'affectent nullement les per-
o sonnes bien portantes, au point que ces dernières peu-« vent complètement ignorer l’existence de ces inlluen-« ces. 11 en est de cela comme des animaux qui peuvent « suivre un son ou une odeur qui échappe complètement « aux organes de l’homme. Il désigne ces personnes par « le nom de sensitives, et a essayé d’étudier les impres-« sions qu’elles éprouvent dans certaines circonstances « qui influent extérieurement sur elles, sans s’occuper, « du reste, des phénomènes physiologiques qui accom-« pagnent cet état que l’on comprend par le terme géné-« ral de magnétisme animal.
« Il a examiné en premier lieu l’effet des dynamides « sur des personnes sensitives; il a noté et comparé les « inlprcasions d’iudividus différents, et l’accord qu’elles « présentaient l'a conduit à la conclusion que ces sensiti-
• ves sont toutes affectées de la même manière par des « influences qui étaient inappréciables pour lui-même et « pour d’autres personnes en bonne santé. Il croit pou-« voir arriver, de cette manière, à une connaissance plus « intime des phénomènes des dynamides que par nos « sens à l’état normal. Il s’est assuré ainsi, par l’accord «parfait des assertions de plusieurs sensilives, que la a polarité magnétique exerce sur elles une influence, « qu’elles éprouvent une sensation différente pour le « pôle nord que pour le pôle sud, et qu’elles s’aperçoi-« vent immédiatement lorsque l’on change le pôle tourné
«de leur côté, bien que l'aimant soit dans une autre «chambre qu’elles. Dans l’obscurité, elles voient une « lumière faible qui émane des pôles, et qu’il a dessinée « d’après leur description. Il a trouvé que les personnes « tensitives dont le sommeil était agité lorsque leur lit «se trouvait dans la direction du nord au sud, dor-« maient tranquillement lorsqu’on le plaçait de l’est à « l’ouest, ce qui prouve que la polarité magnétique ter-« restre exerce une influence sur elles. De grands cris-« taux exercent aussi sur elles une influence, différente « suivant l’extrémité qu’on leur présente; et pour spéci -« fier la nature de la sensation qu’ils produisent, elles la « comparent à une sensation de chaleur ou de froid. Les « corps électro-positifs et électro-négatifs influent aussi «sur elles d’une manière différente, de telle façon « qn’elles ont pu les distinguer les uns des autres, bien « qu’ils aient été entourés de la même enveloppe.
« Mon but n’est point de donner ici un extrait du mé-« moire de M. de Reichenbach, mais seulement d’atti-« rer l’attention des savants sur ses recherches. Ce sujet « mérite d’être exploré partons les savants qui se trou-« vent dans les circonstances nécessaires pour cela, et « les résultats doivent en être jugés sévèrement, rfgon-« reusement, etc., etc. »
Ici le savantchimiste rappelle la comparaison si souvent faite de la chute des pierres météoriques. Lorsque Piolet, qui avait été témoin de ce phénomène, le rapporta à l'Académie, il fut interrompu par de Laplace, qui s’écria : « Nous en savons assez, de fables pareilles. »
VARIÉTÉS.
Les voici, les voilà. —La question magnétique ' est h l’ordre du jour dans le monde religieux. Ce résultat était facile à prévoir; on devait s’attendre à ce qui arrive. Le magnétisme étant entré dans les masses malgré toutes les oppositions, les théologiens, qui l’ont nié le plus obstinément, veulent s'en emparer maintenant pour l’enseigner selon leurs vues, l’appliquer suivant leurs instincts.
Nous avons, dans notre dernier numéro, signalé les tendances de jésuitiques apôtres, aujourd’hui bien disposés et tout prêts à nous donner leur sainte bénédiction , mais avec des restrictions mentales que nous pourrions dévoiler.
Viennent à leur tour les gallicans! Ils ont aussi fraîchement reconnu le magnétisme, qui se présente à leur esprit comme un objet d’effroi. Et, pour mieux faire partager aux âmes pieuses les terreurs qu’ils éprouvent, ils transcrivent de l’ouvrage nouveau de M. Debay la relation suivante (1) :
« Mlla Fulvia, jeune personne délicate et nerveuse au suprême degré, avait été habituée par son frère, étudiant en médecine, à s’endormir sous l’influence magnétique.....Je transcris la dernière séance que donna cette
jeune demoiselle, et qui m’a été communiquée par un témoin oculaire.
« Lorsque son frère eut exercé sur elle sa magique influence, il vint nous prévenir que nous pouvions entrer. M11® Fulvia était assise sur un fauteuil, les yeux fermés, la physionomie calme, et dans l'attitude d’une
(I) Revue gallicane, janvier 1847, page 29.
personne qui goûte un doux repos. Le magnétiseur lui adressa plusieurs questions, obtint des réponses.... Puis ¡1 demanda : « Pourriez-vous nous accorder une dernière réponse? — Je ne puis. — Une sœur désire avoir des nouvelles île son frère, en ce moment sur la lerre d'Afrique, » reprit le magnétiseur. M"' Fulvia suait à grosses gouttes, sa physionomie s’assombrit, ses lèvres murmurèrent quelques mots inintelligibles. « Eli bien, votre réponse? demande le magnétiseur. — J’ai aussi, répond-elle, un frère en Afrique, moi. Dites à celte dame qu’il vaut mieux vivre dans les ténèbres de l’incertitude, avec un peu d’espoir, que de s’éclairer d’une affreuse lumière. — Je suis résignée k tout, s’écria la jeune dame; parlez, je vous en conjure. — Malheureuse sœur, j’aperçois votre frère traîné par les Arabes. Leur fer est levé sur sa téte. Ils vont l'immoler. » A ce dernier mot, la jeune daine pousse un cri aigu et s’évanouit. La magnétisée bondit sur son fauteuil, comme si ce cri l’eût frappée d’un courant électrique. « Son frère! prononça-t-elle en râlant; attendez. Ciel! que vois-je! Non, ce n’est pas son frère qu’ils entraînent; c’est le mien! Ah! grâce, grâce pour lui! »
« Elle se lève de son siège, les traits convulsés, se tordant les mains; court quelques pas devant elle, et tombe en s’écriant : « Les scélérats ! ils l’ont assassiné! » Les spectateurs, effrayés, s’empressent autour d’elle. On cherche vainement à lui prodiguer des secours. La vie avait quitté cette chétive enveloppe. On ne releva qu’un cadavre.
« Trois semaines après, la mère de.M"' Fulvia reçut une lettre d’Afrique, lui annonçant la triste nouvelle que son fils et les braves qui l’accompagnaient, surpris dans une embuscade, avaient eu la tête tranchée par les Arabes. »
— Nous devons déclarer que nous ne croyons que la
moitié de ce récit. Toute la partie dramatique a été arrangée pour semer l’épouvante et éloigner le temps de l’examen. Dans une longue pratique, une vie passée en présence des phénomènes magnétiques les plus développés, les plus saisissants, nous pouvons dire que, dans aucun cas, la mort ne fut la suite de ces extensions des propriétés vitales, de phénomènes nerveux qui dépassent pourtant la limite de ce que parfois la nature offre aux regards du médecin. Sans doute, j’ai dit : « Beau-« coup ont cessé de magnétiser lorsqu’ils eurent reconnu « l’existence de phénomènes si bizarres. Ne croyant « pas à la possibilité de les diriger, ils se sont soustraits « à la crainte de les produire. » Mais ce n’est pas aussi étonnant qu’il paraît à messieurs les gallicans. La crainte naît de l'ignorance, et lorsqu’on est éclairé sur ces faits, qu’ou sait les conduire, tout danger disparaît.
Les docteurs en droit canon, comme ceux en médecine, arrangeront les faits magnétiques selon leurs intérêts, jusqu’à ce que la puissante vérité mesmérienne force la porte du temple de la science et se fasse reconnaître pour ce qu’elle est.
Magnétisme au théâtre. — MM. Scribe et Lokroy viennent de faire représenter au Gymnase Irène, drame-vaudeville sur un sujet magnétique. Voici comment le Journal des Thédtres rend compte de cette pièce :
«Le comte Henri de Clermont, gentilhomme de la cour de Louis XVI, a été reçu plusieurs fois chez M. de Brienne, dont la fille Irène a ressenti pour lui un amour qu’elle n’a pas avoué et qu’elle a résolu d’oublier à tout jamais ; car le comte Henri, entraîné sur une pente fatale, s’est rendu indigne d’elle par ses scandaleux débordements. Le comte Henri, cependant, ne s’est pas tellement livré à la débauche, qu’il ne se soit épris des
idées nouvelles qui germaient alors en France, et la plus fantastique de toutes est celle qui s’est surtout emparée de son esprit et de son cœur. 11 a vu Mesmer; Mesmer est devenu son maître et l’a initié aux secrets du magnétisme ; puis un jour, dans les petits jardins de Versailles, il a rencontré Irène qu’il aime et dont il se sent indigne, et n’osant lui parler, il a osé bien davantage: il a tenté sur elle une expérience magnétique; il a voulu que la jeune fille s’endormît, et la jeune fille s’est endormie: alors il a pu la contempler il loisir et s’enhardir assez pour lui offrir quelques fleurs à son réveil. Ces fleurs, Irène les a dédaigneusement rejetées ; puis, quand Henri a disparu, elle les a pieusement recueillies pour les conserver. Quelque temps s’est passé, et M. de Brienne, vice-amiral, doit se rendre à Toulon pour aller croiser contre les Anglais dans la Méditerranée: il arrive donc avec sa sœur à l’hôtel de la Croix-d’Or, qu’il doit quitter le lendemain matin. Le vice-amiral est rentré chez lui pour prendre du repos, et sa fille est restée devant ses fenêtres sur une terrasse où elle respire l’air frais du soir. Mais bientôt un pouvoir inconnu s’empare d’elle-même, elle se sent attirée par une force invincible : c’est qu’en effet le comte de Clcrmont, qui allait passer en Italie, s’est arrêté à l'hôtel de la Croix-d’Or, y a appris la présence d’Irène et l’ayant aperçue, n’a pu résister au désir de la voir une fois encore. Irène a cédé à son mystérieux pouvoir; elle est là, près de lui; il est le maître de sa volonté, il peut surprendre les secrets les plus ca-chésdeson cœur... illuiavbue son amour et lui demande s’il est aimé lui-même. — La pudeur la retient d’abord, mais la vérité l’emporte. « Oui, je t’aime, lui dit-elle, mais je te méprise ; ces fleurs que tu m’avais données, les voilà; je les ai gardées , espérant qu’un jour tu te rendrais digne de moi, que tu partirais avec toute la noblesse française au secours de l’Amérique esclave, etque
là tu rachèterais par ton courage ta vie de scandale et de honte. » Henri est transporté; il obéira à la volonté de sa maîtresse, et il reviendra, lavé de ses fautes, réclamer l'accomplissement de la promesse qu’il vient de recevoir. La nuit cependant s’cst écoulée, l’heure du départ a sonné pour le comte de Brienne, et au moment où il vient faire ses adieujj à sa fille, il aperçoit le comte Henri qui la reconduit dans sa chambre. Faire un éclat dans une auberge, en présence des officiers de son bord, c’est à tout jamais déshonorer son nom ; il se condamne au silence et se résout à partir. Ce premier acte est égayé par la présence de deux amis du comte Henri, l’uu expert et l’autre apprenti mauvais sujet. C’est au moyen de ce dernier que Henri se débarrasse d’une certaine baronne qui le poursuit et l’incommode fort.
« Un an s’est écoulé: M. de Brienne, sous-secrétaire d’Etat au ministère de la marine, est au moment de marier sa fille avec le comte Annibal, le mauvais sujet expert dont nous parlions tout à l’heure. Déjà même on est allé à l’église et l’on en est revenu, quand le comte de Clermont arrive tout à coup au milieu de la_noce. Il s’est couvertde gloire en Amérique, il s’est chargéd’unemis-sion pour le ministre de la marine, et se croyant digne maintenant de celle qu’il aime, il vient la demander en mariage à son père. Irène, qui n’a pas le souvenir d’une promesse qu’elle a faite pendant son sommeil magnétique, ne peut concevoir comment Henri a pu découvrir le secret de son amonr; du reste elle est mariée, elle se doit tout entière à ses devoirs et ne doit pas écouter les plaintes et les regrets de Henri.
« M. de Brienne, bien convaincu que sa fille est déshonorée, en a fait dans une lettre l’aveu à son gendre fn-tur ; celui-ci prend la chose du bon côté, si toutefois il y en a un, et vient demander à Henri de Clermont si par hasard il ne pourrait pas lui indiquer celui qui a été Fa-
niant de sa femme. Henri de Clermont, ne recule pas devant un aveu, et, sans chercher à expliquer la méprise de M. de Brienne, accepte le duel que lui propose son ancien ami, le comte Annibal. Mais aller se battre et mourir peut-être avant d’avoir revu encore une fois Irène, pour laquelle il a tant fait; il ne peut s’y résoudre: ce pouvoir qu’il a sur elle, il va l’employer encore afin de lui dire un dernier adieu. Dans une nouvelle scène où Irène, est sous l’empire du sommeil magnétique, elle lui avoue de nouveau son amour, et sa profonde indifférence pour son mari Annibal : Henri se réhabilite à ses yeux, et déjà ils oublient presque leurs douleurs quand l’heure du duel sonne. «N’y va pas, s’écrie Irène; des temps meilleurs voul venir, j’cutrevois des jours heureux!....» En effet, toutes les personnes de la noce paraissent, et les deux premières qui se trouvent en présence sont justement le comte Annibal,qui a changé de nom, et la petite baronne du premier acte, qui n’est rien moins que sa femme légitime. Le mariage contracté avec Irène est donc nul; Henri de Clermont peut l’épouser. »
— Jusqu’ici le magnétisme n’avait été présenté au théâtre que comme un objet de risée; dans la pièce actuelle, il figure comme une vérité démontrée, ce qui est un notable progrès.
Médecin somnambule. — On ne dira plus que les médecins rejettent le magnétisme; car en voici un qui se pose comme somnambule, et devient ainsi le concurrent redoutable d’une foule d’autres dépourvus du titre légal. Lecteurs, vous en verrez bien d'autres : le somnambulisme entrera dans la médecine aiusr. Quelques médecins ayant la faculté somnambulique en tireront parti au profit de la science et dans leur propre in-térôt.jPeut-ètre trouveront-ilsainsidans les connaissances
qu’ils ont acquises à l'école des ress ources nouvelles ; nous le saurons bientôt.
Voici par quel avis, inséré dans les jouruaux, ce nouvel Esculape révèle son existence au public.
«Somnambule reçu médecin par la Faculté de médecine « de Paris. Ce somnambule, endormi tous les jours par « son magnétiseur, de midi à cinq heures, donne des «consultations médico-somnambuliques et médicales.
i Rue, etc., etc. »
Celui-ci necraintpointle procureur du roi, ne redoute pas la publicité; sa fortune est certaine si... si... s’il est lucide!
Tribunaux. — Nous avons, tome II, page 252 de ce journal, mentionné les poursuites dirigées contre le docteur Maurice et sa somnambule, accusés d’avoir causé la mort du nommé Chapus, en le mettant dans un bain de vapeur ordonné par celle-ci. On se rappelle que l’autopsie fut faite par deux antagonistes du prévenu; sur leur rapport une enquête fut faite, à la suite de laquelle lr chambre des mises en accusation rendit une ordonnance de non-lieu.
M. le substitut du procureur du roi releva appel de cette ordonnance. Le dossier fut envoyéà la Courroyale de Nîmes, qui vient de rendre un arrêt de non-lieu conforme à l’ordonnance.
Ainsi s’est terminée cette affaire, qui soulevait une question bien grave: celle de savoir si les somnambules, qui n’ont pas la conscience de leurs actes, peuvent être punis; en un mot, si la responsabilité du médecin quien signe les ordonnances lesmetà l’abri des atteintes de la loi.
— Une descente judiciaire a eu lieu chez Mm” P‘", somnambule, prévenue d'exercice illégal de la médecine. Cette affaire se dénouera devant la police correctionnelle, et Mm" P*" sera très-probablement con-
damnée k 15 fr. d’amende. C’est sur la plainte d’un médecin de Vanves que des poursuites ont été dirigées contre elle. Allons, messieurs les médecins, du courage, dénoncez jusqu’au temps où l’opinion publique vous traduira à son tribunal pour y rendre compte de vos meurtres. Nous croyons qu’elle ne vous infligera pas une légère amende, mais la flétrissure.
Chronique. — L’heureuse conversion du docteur Forbes, dont nousavons entretenu nos lecteurs (tome III, page 234 ), ne devait pas être la seule conquête de l’ouvrage du docteur Esdaile, Mesmerism in India, dont nous publierons incessamment des extraits. Les nouvelles du Bengale nous apprennent aujourd’hui qu’à la suite de la publication de ce livre remarquable, le gouvernement a nommé une commission de quatre médecins et trois notables pour examiner la question du magnétisme, et que, sur le rapport de cette commission, un hôpital magnétique a été fondé à Calcutta, sous la direction du docteur Esdaile.
. L’indian-News du 26 janvier annonce que l'ouverture de cet établissement a eu lieu le 1er décembre.
— L'Epoque du 3 février, parlant de l’insensibilité produite par l’éther, fait des rapprochements dans lesquels le magnétisme figure comme un fait démontré.
—Dans ses trois derniers numéros, la Mouche, à propos des opérations qui se font pendant l’ivresse éthéreuse, parle également de l'insensibilité magnétique. Elle promet de piquer bientôt l’Union médicale.
— La Revue gallicane, numéro dijanvier, dit : « Le « magnétisme n’est point de ces choses indifférentes que
• « la religion peut abandonner sans inquiétude à la curio-« sité publique. Doublement dangereux, car il compro-« met en même temps la verLu et la santé, il importe de « le surveiller avec une vigilance sérieuse. »
L’an dernier, à pareille époque, M“ Anna Marie (comtesse d’Hautefeuille) disait la môme chose dans le Correspondant; niais c’était en traits si fins, avec tant de réserve, qu’on lui pardonnait aisément l’exagération de scs craintes. Le rédacteur de la Revue gallicane ne saurait avoir la même excuse que l’auteur de la Science funeste.
— M. l’abbé DesGarets, chanoine de Lyon, va publier un livre sur le magnétisme : les uns disent pour, les autres contre ; nous.verrons.
_ M. Thuillier de Saint-Marceau vient de faire paraître la Planète Leverrier, chansonnette qui contient de piquantes allusions magnétiques. Cher magnétisme, pour le faire admettre, on en fait un Protéc. Les romans, la scène, les chansons, la gravure, y trouvent une mine inépuisable. Que la peinture, la sculpture, s’y arrêtent un instant, et aucun genre d’illustration ne lui aura manqué, pas même la caricature, dont Chain nous a donné un échantillon l’an dernier.
-T- M. Lafontaine vient de livrer k l’impression l’Art de magnétiser; c’est son premier écrit. Nous l’analyserons aussitôt qu’il aura paru.
—11 n’est plus question de l'affaire Cuny. Nous ne comprenions pas qu’il se fut trouvé un médecin assez oublieux des préceptes chirurgicaux pour sonder sa blessure ; des informations particulières nous ont appris que la plaie avait 0m,02 d'étendue et non de profondeur, comme il est dit dans le récit de la Gazette des Tribunaux; ce n’était par conséquent qu’une égratignure. Au reste, ¡1 paraît qu’il est tout k fait remis, car il s’est marié, il y a quelques jours, avec M"° Possiu. Ainsi finit l'histoire.
— La commission issue du banquet mesmérien pour faire exécuter la médaille commémorative de cette pre-
mièrc célébration do l’anniversaire do la naissance de Mesmer, vient de terminer ses travaux. La médaille sera prochainement distribuée aux souscripteurs: le prix est arrêté à 6 francs, et le nombre des eSemplaires limité à celui des adhérents à la délibération de l’assemblée générale du I à juin dernier.
— Le Charivari du 4 apprécie très-exactement Irène. Cette analyse dénote dans la rédaction de ce journal la présence d’un ami du magnétisme, observateur éclairé des phénomènes somnambuliques. Nqus regrettons qu’il ne se fasse pas connaître.
— Un banquet a été donné le 7 à M. le baron du Po-tet, par ses élèves de Paris. Nous rendrons compte dans notre prochain numéro de ce qui s’est passé à cette réunion, inspirée par l’amitié. C’est la première manifestation de ce genre faite à Paris envers notre maître.
— Ceux qui croiraient que nous faisons à la vieille médecine une guerre injuste, que nos plaintes sont exagérées, nos paroles acerbes; que ceux-là, dis-je, lisent la nouvelle Gazelle de santé du 31 janvier; ils se convaincront que, tout âpres qu’elles paraissent, nos attaques sont modérées k côté des injures que le docteur H. R*** adresse aux adeptes de la science de Mesmer.
Il n’y a point de paix possible avec ces gens-là. On n’aura raison de leur mauvaise foi qu’en montrant leur ignorance. 11 faut les faire descendre du trône qu’ils ont usurpé, en nous passant de leur concours, en repoussant leur alliance, qui ne saurait être durable!
— La Tribune lyonnaise vient de finir sa seconde année. Elle renouvelle la promesse de donner plus d’extension à son bulletin magnétique. Ces bonnes dispositions lui vaudront les sympathies de tous les magnétistes dévoués.
— Un professeur de chimie k l’Université d’Edimbourg, M. W. Grégory, vient de traduire en anglais l’ou-
vrage du baron de Reichenbach, qui jette, dit-on, de vives lumières sur le magnétisme. L’éloge que Berzélius fait de ce mémoire nous fait regretter de n’en point avoir la traduction française.
— Nous avions le projet de traduire les principaux passages des Letters on mesmerism de miss Martineau ; mais nous y renonçons. M. Hildebrand de Villiers ayant traduit l’ouvrage en entier, nous en ferons seulement l’analyse lorsqu’il sera publié.
— La Démocratie pacifique du 8, dans son analyse d’Irène, s’étend sur le magnétisme d’une manière favorable à l’extension de nos idées.
— Dans le Siècle du 8, M. Pierre Durand, à propos d’Irène, parle du magnétisme comme un dévoué partisan. Ce feuilleton est excellent pour la propagande magnétique.
— Comme les avis sont divers! Le feuilletoniste du National, M. Albert Aubert, dans l’analyse d’Irène, trouve moyen de présenter le magnétisme comme uoe grossière mystification ; aussi trouve-t-il que les auteurs ont été fort mal inspirés dans le choix du sujet.
— M. Mageudie, ennemi déclaré de toutes les découvertes qu’il n’a pas faites, a fort diverti ses confrères de l’Académie en repoussant, au nom de la morale outragée, l’application de l’éther dans des opérations chirurgicales. 11 a prétendu qu’il y a immoralité dans l’emploi de ce procédé, qui, en enlevant la conscience, permet des abus. Ce singulier argument, si longtemps employé par les prêtres contre le magnétisme, est également sans valeur dans ce cas-ci. Le seul reproche qu'on püisse faire à ce procédé, c’est de perturber les fonctions au point que les accidents qui en résultent sont difficiles à maîtriser.
L’éther agit certes bien plus promptement et sur un plüs grand nombre d’individus que le magnétisme; mais
l’insensibilité qu’il procure est à la magnétique ce que la lumière artificielle esta celle du soleil : on s’en sert faute de mieux. Nous ne voyons ni dans l’une ni clans l’autre rien d’immoral, et nous ne comprenons pas que celui qui a enfoncé un stylet dans des yeux sains (I), pour s’assurer de la sensibilité de la rétine, ose parler de moralité.
— L'Abeille médicale, dans son dernier numéro, prend fait et cause pour le magnétisme contre les diatribes de Jean Raymond, le sceptique feuilletoniste dePUnion médicale. La guerre s’engage cette fois entre confrères, et promet d’ètre vive. L'Abeille fera sentir son aiguillon à V Union.
— La loi sur les professions médicales va être incessamment présentée à la Chambre des Pairs.
— Au moment de mettre sous presse, nous apprenons la mort de M. Cliardel, l’un des magnétologistes les plus distingués.
BIBLIOGRAPHIE.
Compte'Rendu des travaux du Congrès mkdicaï. de Praücr , tenu à Paris en octobre 18*5. 1 vol. iu-8*.
En lisant ce livre avec attention, on découvre facilement le but que les médecins se proposent d’obtenir. Voici comment se résument leurs vœux, sous forme de
(1) Voyez Lougvt : Anatomie et physiologie du système nerveux.
requête adressée à M. le ministre de l’instruction publique.
Monsieur le ministre,
Vous avez pris l’engagement de présenter aux Chambres un projet de loi pour garantir nos intérêts et établir sur des bases solides l’édifice médical qui menace ruine. Hâtez-vous, le temps presse; ne laissez point de fausses doctrines égarer davantage l’opinion du bon public; car, vous le savez, M. le ministre, nos intentions sont pures comme le fond de notre cœur.
Est-il nécessaire de vous rappeler ce que nous vous demandons? Non, vous le savez. Nous voulons seulement que pas un être humain puisse se soustraire aux droits que nous avons acquis de le traiter à notre fantaisie, de le tuer même, si cela nous plaît, en tant qu’il meurt selon les règles de l’art. 11 faut donc pour cela que sur tous les morts on reconnaisse les traces évidentes de nos traitements. Par exemple, tout décédé qui n’aura point les jambes écorchées, sur qui on ne trouvera les traces de vésicatoires, sétons, cautères, ventouses, etc., etc., sera soupçonné de s’être soustrait à nos soins; et l'on devra, par une enquête sévère, s’assurer s'il a été traité par les saignées coup sur coup ou par les remèdes que nous proclamons héroïques, tels que strychnine, morphine, acide prussique, etc., etc. Dans les cas où il y aura doute, nous serons autorisés à faire l’ouverture du cadavre pour analyser le sang s’il en reste. Ce droit, que nous exerçons daus les hôpitaux sur quiconque y vient mourir, doit être étendu au dehors. Le préjugé qui a conservé un certain respect pour les morts est si stupide qu’il est bon d’en guérir la’gé-néj^üpn actuelle. Tout mort subitement nous devra le
même tribut que s'il eût fai t une longue maladie. I.a famille est responsable envers nous, et le pharmacien, qui exerce les mêmes droits, pourra de son côté exiger le prix des drogues dont l’a frustré le défunt en mourant naturellement.
Une branche lucrative de notre industrie, les accouchements, étant, exercée par des femmes, il est bien entendu que l’on supprimera dans un bref délai cette superfétation, cette monstruosité. Nous sommes seuls capables de ces sortes d'opérations. Il est vrai qu’un sentiment qu’on appelle pudeur se révolte parfois contre notre ministère; mais ce sentiment est faux, ce n’est qu’une bégueulerie qu’il faut réduire à sa propre valeur. Toute femme donc qui accouchera seule ou qui recevra les secours d’une voisine ou d’une amie, ne nous en devra pas moins nos honoraires.
Comme il y a des gens fort habiles qui, sans diplôme, remettent les jambes et les bras, guérissent les entorses beaucoup mieux que les hommes de l’art; on les punira sévèrement.
Le peuple a la sottise de croire à la vertu de certaines plantes peu coûteuses que débitent les herboristes; nous exigeons qu’on supprime ces officines du pauvre.
Des curés de campagne se mêlent parfois de traiter des paysans, et font ainsi un tort considérable à nos confrères des champs; la loi les fera rentrer dans le sanctuaire, et, en cas de récidive, les punira de fortes amendes.
Il en sera de même de certains châtelains qui, ayant quelques connaissances des remèdes et des maladies, usent de cet heureux privilège que le riche possède de pouvoir soulager le pauvre ; n’ayant aucun droit de se traiter eux-mêmes, on les punira doublement lorsqu’ils soigneront autrui.
L'ordre des sœurs de charité sera aboli, comme se
.
mêlant, de temps immémorial, de faire ce qu’on appelle ]a petite médecine. D'ailleurs ces religieuses contrôlent parfois uos ordonnances, et se permettent d’avoir un avis, ce qui ne peut être toléré plus longtemps.
Tout épicier qui se permettra de vendre du sirop d’orgeat, de vinaigre, et même du sucre d’orge, verra fermer sa boutique. Nous lui permettrons seulement de vendre des pruneaux et de la mélasse.
Toute pharmacie portative est sévèrement défendue.
Enfin, il ne sera permis à aucun pharmacien de vendre quoi que ce soit sans l’ordonnance d’un d’entre nous. Ce n’est qu'à nous seuls qu’il sera permis de ne point prendre ce que nous ordonnons aux autres. Nous n’avons pas besoin, M. le ministre, d’en exposer les motifs à votre esprit judicieux.
Si parmi nous quelqu’un élève la voix ou ose transgresser la loi que vous ferez rendre, nous demandons à être juges de la cause, à le punir s'il a toléré l’usage d’une médecine domestique, et à l’acquitter toujours lorsque, pour des méfaits de sa pratique, il sera poursuivi par la vindicte publique. Nous ne relevons que de notre conscience et ne sommes aucunement responsables envers la société.
Tout ceci, M. le ministre, est, sans doute, beaucoup demander, mais nous espérons plus encore cependant. Notre art, qui ne peut soutenir la discussion, n’a, par conséquent, aucun besoin d'être discuté. Il sera même défendu d’innover, et tout docteur qui prétendra guérir par une méthode nouvelle sera impitoyablement rayé de la liste des médecins de la faculté, s’il n’aime mieux faire amende honorable et revenir aux bons principes. Il est vrai que l'Empereur a soutenu qu’ils étaient mauvais, nos principes; que nous avions tué plus de monde que toutes les guerres ensemble; mais cela ne mérite aucune attention de la part d'uu tel homme, puis-
que ses principes sont morts et que les nôtres survivent.
Une chose nous inquiète, M. le ministre : la loi nouvelle sera-t-elle rétroactive? Cela serait très-essentiel, et voici pourquoi. Deux inventions modernes, que nous n’osons point qualifier, agissent sur les faibles esprits de notre époque et semblent faire douter de nos sublimes talents. L’homœopathie et le magnétisme, puisqu’il faut les nommer, prétendent guérir lps maux avec peu ou point de remèdes.
Le congrès s'est vivement ému de ces deux prétendues découvertes; il les a trouvées ridicules, absurdes même, et sur ce sujet il n’y a eu aucune dissidence. Cet unanime accord doit vous toucher jusqu’aux larmes, M. le ministre,car il vous sera démontré que nous voulons tous le bien de notre prochain. Ainsi il serait bon de brûler tous les livres qui traitent de ces prétendues sciences et d’en punir sévèrement les fauteurs. De notre côlé nous déclarerons que les malades guéris ne le sont pas ou l’ont été par la nature seule, ce qu’il serait absurde de penser -, car si la nature pouvait guérir, à quoi serions-nous bons, nous vous le demandons, M. le ministre? On voudrait, de la sorte, ramener les hommes au régime des animaux, qui se portent bien et ▼¡vent sans médecins; c’est le comble de la sottise, car il faut que l’humanité se distingue des bêtes, ne serait-ce que par la souffrance.
Ainsi, M. le ministre, c’est une aggravation de peines que nous vous demandons pour les homœopathes et les magnétiseurs. Quant à ccs derniers, ils sont les plus coupables en rappelant les hommes aux lois naturelles. Mais à quoi donc serviraient la civilisation et la splendeur des pharmacies? Qu’il nous soit permis d’essayer sur eux l’efficacité de nos remèdes, et nous vous promettons qu’au bout d’un temps très-court ils demanderont merci, s'ils existent encore.
Il est bien entendu, M. le ministre, que pour détruire les germes de leur funeste doctrine, nous empêcherons tout malade d’être approche par un ami, de recevoir sa main dans la sienne. Une mère ne devra plus presser son enfant malade contre son sein; car ce sont des pratiques magnétiques susceptibles d’apporter quelque soulagement, et de créer des liens de reconnaissance qui doivent seulement exister entre nous et les gens assez heureux pour avoir survécu à nos traitements.
Plusieurs choses importantes, sur lesquelles nous aurions besoin d'appeler votre attention, restent encore; mais nous comptons sur votre habileté pour ménager dans notre charte future un article 14, afin qu’au besoin nous puissions dire uu jour : l'Etat, c’est nous. Pour vous prouver notre reconnaissance , nous vous promettons de redoubler de zèle, aün que ce qui reste de vigueur à la nation soit amorti de telle sorte que vous n’ayez plus à vous eu préoccuper. Et si l’on chante dans quelque temps la Marseillaise, ce sera d’une voix si enrouée, si éteinte, qu’on ne pourra l’entendre.
Permettez-nous d’appliquer nos emplâtres sur le côté gauche de la Chambre; les pharmaciens nos confrères s’assureront du juste-milieu. C’est leur affaire propre; ils s’y distingueront. Le côté droit sera abandonné k notre représentant Bouillaud et à ses aides; ils en viendront à Lout facilement.
Quant aux Pairs, vous n’avez point k vous en inquiéter; nous leur dorerons la pilule: ils y sont habitués; et si vous entendez des plaintes, elles viendront cette fois de leurs entrailles; car pendant qu’ils discuteront la loi, nous augmenterons la dose de nos spécifiques.
Ainsi tout marchera donc au gré de nos désirs, et vous n’aurez point k regretter de vous être montré le protecteur d’une science dont les ressources sont inü-
nies. Puissiez—vous, M. le ministre, avoir besoin de nos soins; chacun de nous, soyez-eu certain, fera tout ce qu’il pourra pour vous prouver qu’en sortant de nos mains on est guéri à jamais des soucis de la vie.
Nous avons l’honneur d’être, etc.
—Nous avons, sous une forme plaisante, présenté une chose très-sérieuse. Ce qu’on vient de lire n’est que trop vrai dans son fond; les médecins ne se proposent rien moins que d’obtenir de la faiblesse du pouvoir des lois propres à protéger leur ignorance et leur mauvaise foi. Mais un mécompte les attend pourtant, car les privilèges qu’ils pourront obtenir ne leur donneront pas la science lorsqu’il sera prouvé qu’elle est en dehors d’eux; leur déconsidération n’en sera que plus grande, leur nullité plus manifeste. Ne vaudrait-il pas mieux pour les médecins rechercher dans le magnétisme les principes de médecine naturelle qui s’y trouvent, et réformer ainsi la science de guérir. Là serait leur fortune et leur gloire; préféreront-ils le mensonge et l’erreur? Mais, nous y songeons, ne sommes-nous pas dans un temps où les faveurs s’accordent à qui n’y a point de droits, où l’erreur a le pas sur les vérités?
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (de Garnay).
Pari». — Imprimerie d'A. Kbnè cl Comp., rue de Seine, 3i,
PÉRÉGRINATIONS MAGNÉTIQUES.
§ II. — Lyon.
(Fin.)
Mes chers élèves, je vous ai bien longuement parlé, il est temps de conclure; c’est donc lin dernier mot que je vous adresse, une dernière leçon que je vais vous donner. J’espère que vous y verrez non l’orgueil du maître, mais la simplicité de l’homme qui cherche la vérité, et aime à communiquer ce qu’il a pu découvrir: heureux privilège que m’offre ce journal; car, tout en cherchant à tous inslruire, je puis aussi parler à d’aulrcs hommes qui sont en communion de pensée avec nous.
La fameuse maxime du connais-toi ! mise en têie de la philosophie de Socrate, est aujourd'hui presque oubliée. Le savant, le sot, l’homme vulgaire, s’ignorant eux-mêmes, ne voient dans tout ce qui nous entoure que l’œuvre du hasard. Les éléments, qu’ils sont loin de louscoa-naître, les forces physiques mortes et leur propre nature sont des objets à la connaissance desquels ils n'attachent d’importance que si elle flatte leur orgueil. Le savant orgueilleux, qui croit embrasser d’un coup d'œil tous les phénomènes de la nature, saisit bien quelques lois, découvre des vérités relatives; mais il est vile arrêté dans celtc-recherche ardue, car il a pris ses sens pour unique instrument d’investigation, et ne perçoit iica au delà di: TOME IV. —X° a»--25 FÉVRIER 18/|7. h
leur porlcc. Tout atleste que l’immensité est remplie de merveilles, que des forces invisibles, plus puissantes que celles connues, existent; mais,ses sens ne les saisissant pas, elles sont pour lui comme n’existant point.
Ainsi, chers élèves, vous êtes aujourd'hui possesseurs d’un merveilleux pouvoir que les savants nient, parce qu'il ne peut être aperçu autrement que par les effets qu’il produit. Ce pouvoir, le plus terrible eomme le plus utile de tous, se révèle h tout instant,et chaque jour nous rapproche des temps où nous verrons des œuvres sublimes et des crimes nouveaux naître de son emploi. Ce n’est donc point en vain que je vous ai enseigné des règles pratiques cl recommandé la prudence, puisque le bien comme le mal peut résulter de votre conduite.
Déliez-vous des opinions, mais’suivcz toujours la vé-rité. Ecoutez-moi : toutes les grandes révolutions sociales, scientifiques ou religieuses, ont eu uu commencement semblable à celui du magnétisme, c'est-à-dire sont parties de découvertes contestées d'abord, et qui n’avaient pour adhérents qu'un très-petit nombre d’hommes. Petit à petit le cercle s’estagrandi ; le combat s’est engagé d’abord entre de petits groupes, puis successivement entre des masses d’hommes de croyance ou d’intérêts opposés. La vérité a toujours vaincu l’erreur, jus-qu’àcc qu’elle devînt elle-même instrument de trompe -lie; car les hommes défigurent, altèrent toute chose-, il semble qu'ils ne peuvent vivre qu’avec des erreurs, ou plutôt le principe du mal, les flattant, leur plaît par cela seul plus que celui du bien. Ils se repaissent d’illusions; c’est pour cela que nous voyons les sociétés modernes aussi, si ce n’estplus, malheureuses que celle des temps antérieurs. Et telle est ma croyance au sujet du magné -lisme, que je parierais que cette découverte sublime servira à troubler l’entendement humain, au lieu d exercer sur la raison un salutaire empire.
Qu’a-l-on faitdes idées de justice et de liberté; qu’a-t-on tiré des vérités morales découvertes, enseignées, répandues par toute la terre? Les sciences elles mêmes ont-elles du moins répondu une salutaire influence sur ceux qui les ont cultivées? Non ; le savant est aussi malheureux que les autres hommes; les apôtres religieux ne se distinguent nullement deceux qui n’ont point de principes: ce n’est que confusion autour de nous. D’où vient donc ce mal? Assez de vérités sont pourtant découvertes, et Dieu ne cesse d’inspirer nombre d'hommes. Par où donc pèchent-ils? je vous l’ai dit: ils méprisent les lois de la nature après les avoir reconnues; ayant la lumière, ils veulent vivre daus l’obscurité.
La même loi régit les animaux et l’homme; ils ont en eux-mêmes le principe de leur conservation. En vain la science le chercherait ailleurs. L’homme seul dévie à la loi commune, la transgresse constamment; la civilisation lui en fait un devoir; il s’y courbe du reste avec plaisir, sans songer aux maux qui l’attendent, sans se soucier de cet avenir où il gémira, où, s’il est pauvre, il ira mourir dans un hôpital ; s’il'est riche, il n’en sera pas moins presque écorché vif. - -i
Le principe qui veille à notre conservation a beau se révolter contre ce traitoment barbare; pour le faire taire on lui donne une occupation nouvelle, en le mettant aux prises avec des substances délétères, mortelles, que l’on introduit dans la circulation comme agent secourable, comme spécifique. Cette folie, vous ne la verrez pas cesser; favorable k l’industrie médicale, elle s’est perpétuée, malgré tous les efforts, et durera longtemps encore ; mais vous n’en serez point victimes, car vous avez entrevu la lumière et vous vous guiderez désormais d’après les,nouveaux principes. Quelles que soient les maladies qui vous assaillent, ayez d’abord recours k la main d un ami, qui porte en vous la vio dont il peut disposer;
que celte main, dirigée avec art et méthode, aille trouver les parties ou les premiers obstacles au libre exercice des fonctions se sont fait remarquer, qu'elle y porte bien vile le stimulant nécessaire, celui que la nature y enverrait d’elle-même si elle était assez puissante, si des besoins impérieux ne la forçaient de diviser ses forces. C’est ainsi que vous arrêterez promptement le cours de désordres qui, en peu de temps, peuvent prendre une dimension effrayante.
La force ainsi introduite possède en rudiment toutes les propriétés des remèdes, car elle est celle même qui nous créa, et qui, dès les premiers' instants de notre vie, opéra les transmutations de la matière, du sang et des autres humeurs pour en former cet assemblage organique sans lequel l'âme n’aurait pu se manifester. Elle agit donc dès le principe comme médecine souveraine en réglant, pinçant toutes choses comme elles doivent être. Dans les phénomènes appelés magnétiques, nous la voyons obéir à sa loi et exécuter cet admirable travail médicateur. I.es crises qui se produisent, les douleurs apaisées, lachaleur revenant dans des parties qui en sont dépourvues et fuyant de celles où elle surabonde comme le mouvement qui revient dans des membres paralysés, n’en sont-ils pas l’indice le plus certain? Pourquoi celte abon.lance d’urine, ces sueurs, ces garde-robes fréquentes, si ce n’est pour nous montrer sa puissance médica-trice, ses efforts et sa vertu? Lu médecine scolaslique sait-elle au moins l’imiter? Elle eu a la prétention ; mais elle oublie trop qu’elle a besoin de son consentement bien plus qu’elle ne peut se passer de son concours : quand nature ne veut, médecine ne peut; et les médicaments même bien indiqués restent inactifs, si elle ne se prèle à distraire, séparer, saisir ce qu’il y a de bon en eux. Sans doute parfois elle lait ce travail, mais voyez la différence des résultats : tout n’était pas nécessaire de ce
qui a été introduit dans l’eslomac ; tout ce qui était impropre devient un embarras et la source de nouveaux désordres. Rien de semblable ne résulte du magnétisme. Dans les affections aiguës traitées par son secours, il n’y n point de convalescence; on passe de la maladie à la santé sans sabir la langueur, sans sentir les faiblesses qui accompagnent ordinairement les traitements qui font l’orgueil de la médecine. Il en est ici comme dos deux insensibilités: magnétique et éthérée. Dans la magnétique, aucune suite fâcheuse, point de fièvre traumati-que, point de résorption purulente; dans l’autre, tous ces accidents. Pourquoi ces différences? C’est que d’un côté la nature agit seule; de l'autre, des agents funestes à la santé, à la vie même. Un jüur nous aurons raison sur tonies ces choses; il faut avant que la folie humaine ait son cours. Je vous ai enseigné les rèjles d’une application rationnelle du magnétisme au traitement des maladies: c’est à vous maintenant de poursuivre.Comblez par ▼otre pratique et vos expériences les lacunes qui existent dans cette science. A u remier mois de l’année le soleil est éloigné de la terre; à l’origine d’une découverte la lumière n'est pas ce qu’elle sera plus tard, mais elle viendra aussi. Si vous voulez vons rendre utiles à vos frères souffrants, agissez et publiez vos œuvres, afin de trouver des imitateurs. L’avenir est à la vérité nouvelle, les phénomènes de la nature les plus cachés vont devenircom-préhensibles: assez longtemps l'humanité s’est courbée sous la loi de faux sages. Le grand livre de la nature va s’ouvrir devant vous; parcourez-en les feuillets sans crainte, et bientôt les docteurs qui l’ont fait parler à leur guise vous inspireront de la pitié. N’espérez point qu’ils reconnaîtront d'abord leurs erreurs; tout homme qui s’est nourri de préjugés les soutiendra jusqu’à la fin de savie: il est marqué d’un scean ineffaçable. Des hommes ont dit à d’autres hommes : ce monde est votre
proie; ils ont cru ces paroles, et ont resserré les liens qui nous enchaînaient. Brisez-les, vous le pouvez; puis émancipez l'étrc plus faible que vous: la femme, voire compagne, qni a besoin de croire et d’aimer, et dont on a perverti l’intelligence et le cœur. A ses douleurs si nombreuses opposez votre pouvoir magnétique; peut-être dans sa sensibilité trouverez-vous ce qu’il manque aux hommes les plus intelligents: un guide pour vous conduire. Rappelez-vous que dans l’antiquité elles exerçaient une partie du sacerdoce. Dans le drame de la vie, tout se succède sans que nous puissions rien prévoir ; la femme a souvent ce privilège; elle l’aura doublement dans l’état magnétique, et vous éviterez ainsi les embûches de la mauvaise foi et les inconvénients d’une marche dans l’obscurité.
Dans l’organisation des mondes tout a cté pesé, réglé, et s’exécute avec une précision infinie. Tout l’univers matériel obéit à des lois ; à l’homme seul il a été donné de connaître qu'un Dieu les avait établies. La conservation des êtres est de même réglée ; mais Dieu nous a laissé la faculté de transgresser cette loi ou d’y obéir, et de là est née cette incertitude qui nous accompagne, et les malheurs qui s’exhalent en plaintes de toutes les poitrines. La science avait pour mission d’éclairer les hommes. Elle s’est trompée : elle les a tous plongés dans l’erreur. Il faut désormais retourner aux sources primitives, renouer la chaîne des temps anciens à ceux-ci. Tout prouve que l'homme a eu la vraie lumière; mais elle s’est perdue ; peut-être a-t-il été lui-même l’instrument de sa propre ruine. Dans ces recherches nouvelles, aidez-nous, mes chers élèves, apportez votre tribut, votre pierre à l'édifice nouveau , afin que les générations qui vont venir bénissent notre mémoire.
Déracinons ensemble ces préjugés, honteux pour la dignité de l’homme, que la science et la religion laissent
subsister. Arrachons ces vieux arbres qui ne nous ont offert que des fruits empoisonnés, et remplaçons-les par de jeunes et vigoureux plants. Soulevons le voile de la nature qu'on a rendu opaque en le couvrant de sale vernis, et nous verrons clairement les destinées qui nous sont réservées. Surtout, ne nous laissons point attiédir par les résistances; elles viendront de beaucoup de ceux qui se diront nos amis et ceux de la vérité. Bon nombre ne s’emparera du magnétisme que pour l’obscurcir elle rendre méconnaissable. C’est ainsi que les siècles ont vu, au nom des religions , saccager les temples anciens, briser les symboles qui cachaient des vérités, détruire, brûler ce que les sages avaient édillé.
Ce n'était point assez pour ces nouveaux barbares : les plus éruditsd’cntre eux, les plus méchants sans doute, altérèrent les textes des monuments écrits qu’ils ne pouvaient détruire, et bientôt encore torturèrent, massacrèrent les hommes qui avaient une croyance différente de la leur. Et tout cela au nom d’un grand principe. Les vérités antiques cessèrent de guider l’humanité ; elles reparaissent aujourd’hui, et la guerre leur sera déclarée, car il existe des croyances; il est des hommes qui ne peuvent souffrir qu’on examine et réédifie le passé qui fut grand. Leur axiome n’est-il pas : Nous sommes le jtassi, le présent, le futur. Hélas.' ils ne représentent aujourd’hui que des intérêts égoïstes, car leurs croyances ne peuvent soutenir l’examen.
Pour moi, plein d'un noble zèle, j’espère, chers élèves, vous donner l’exemple cl vous encourager jusqu’à la fin de ma vie; car ma dernière pensée comme ma dernière parole sera pour proclamer la divine découverte que nous devons à Mesmer, pour en faire connaître les bienfaits.
J’annoncerai l’avenir de la régénération de l’espèce humaine par le changement dans nos moeurs, dans nos
croyances, dans nos lois; car ces changements sont un résultat forcé de rétablissement de nos principes, des faits que nous produisons, et de la lumière qu’ils doivent jeter sur le monde. Mais le magnétisme, soyez-en certains, n’a point encore passé scs mauvais jours, bien des ppreuves l’attendent encore. Plût à Dieu que ses défenseurs trouvent en eux les vertus nécessaires pour défendre une cause si grande et si juste, et puissé-jc moi-méme ne point faiblir avant l'âge! Mais j’entends une voix qui me crie :
Courage jusqu'au boni ! De Ion soir c'est la pente I El ne voiviu pus Le repos là-bas î Le terme uV*t plus loin ; si pour toi l'heure est lente,
Rude le chemin,
Voici li' matin,
A l'éternel levant point l'aube éblouissante I
Baron du Potet.
Paris, ÎO février 1847.
CLINIQUE MAGNÉTIQUE.
Hébiplècie. — Mme Krist, âgée de trente-deux ans, resta paralysée de tout le côlé droit h la suite d’une attaque d’apoplexie qu’elle cul le 23 mai dernier. La saignée d’abord, puis l’application de bottes pneumatiques apportèrent quelque soulagement du côlé de la téte. Mais la paralysie des membres subsistant, cette dame ne pouvait ni marcher ni travailler.
Un second médecin appelé lit une nouvelle saignée, puis ordonna beaucoup de bains de pieds, des lavements et des purgatifs; car on ne pouvait faire cesser une constipation opiniâtre. Loin de la guérir, ce traitement aggrava sa position.
Je la vis le \ octobre. Elle avait, outre la paralysie du bras cl de la jambe, la mâchoire inférieure déviée, pouvait à peine manger, et parlait avec difficulté; sa langue se mouvait avec peine, et l’un des côtés de la bouche s’élevait tandis que l’autre s’abaissait, ce qui la faisait baver. L’œil du côté paralysé était insensible à la lumière, la pupille en était immobile, et la malade, de ce côlé, ne voyait qu’un brouillard épais. Emu d’une telle position, je lui proposai d’essayer sur elle le magnétisme. Elle y consentit. Au bout d’environ un quart d’heure d’action, elle éprouva un tremblement dans tout le côlé gauche, et bientôt après elle me dit sentir des picotements dans le bras droit, ce qui me fit espérer d e la guérir. Encouragé par ce début heureux, je continuai d'agir, et produisis des secousses dans les différentes parties du corps où je dirigeais ma main. Cette première magnétisation dura une demi-heure, et la malade se trouva soulagée. Un point de côté qu’elle avait depuis quinze jours, et qui la faisait beaucoup souffrir, disparut dès ce jour, pour ne plus revenir.
Le lendemain, j’appris qu’elle avait ressenti toute la soirée les picotements du bras droit, et que son sommeil, de lourd qu’il était habituellement depuis sa maladie, avait été fort agité. Je la magnétisai encore, et obtins la reproduction des effets de la veille, plus une grande sensibilité du bras paralysé. Je déterminai de violentes secousses dans le tronc et les membres paralysés, et laissai à la malade de l’eau magnétisée à boire.
Celle eau magnétisée détruisit la constipation. La malade dormit, et le 6 au matin sortit, marchant assez
bien. Deux magnétisations avaient suffi pour obtenir ce résultat,que j’étais loin d'espérer aussi prompt.
Néanmoins il restait une certaine roideur des doigts. J’en ai triomphé en continuant quelques jours ce traitement simple, qui m’avait si bien réussi. Une chaleur brillante se répandit bientôt dans les parties ci-devant paralysées, et la sensibilité et le mouvement y devinrent plus libres. Les muscles de la face reprirent leur position normale, cl la vue affaiblie redevint intègre.
M"" Krist, ayant conservé une grande sensibilité magnétique, j’ai eu occasion de la magnétiser plusieurs fois depuis, et j’ai appris que, sons l’intluence de ce traitement indirect, de fortes migraines qu’elle avait à l’époque de ses règles, et de violentes coliques, qui duraient de six à huit jours, avaient disparu complètement.
Mme Krist demeure rue du Chantre, 18; sa maladie et sa guérison sont connues de toutes les personnes de la maison, qui attesteraient au besoin.
D. Lacoste.
— J’ai vu, mon bien-aimé frère, dans votre journal, n* 88 de cette année, que vous donnez un extrait de ma dernière lettre. J’y ai rencontré une erreur que je désire relever, relative à Mmo Cadet-Gassicourt : son mari tenait sa main gauche, et un second médecin lui tenait la main droite; un troisième était derrière madame, et le quatrième derrière moi. Ce dernier, chaque fois que je faisais quelque interpellation à la malade, venait toucher mes mains pour voir si elles étaient empreintes de quelque onguent. Us étaient étonnés de ce que je suivais les progressions de la malade sans qu’elle me dit le mal qu’elle éprouvait. Les misérables avaient dos yeux et ils ne voyaient point, des oreilles et ils n’entendaient point. C’est par la faculté qui est moi et par l’at-
traction que je connaissais soirétut, connue je connais celui de tous les malades pour lesquels je suis consulté, à quelque dislance qu’ils soient, et les malades sont môme soulagés dans l’instant où je m’occupe d’eux. Ces faits ont été constatés à l’infini.
Vous dites encore dans votre article : « Des centaines de malades ont eu recours à cet anachorète; » Vous pourriez dire que des milliers ont été guéris; et je crois même que, de tontes les maladies connues, il y en a eo de guéries dans ma cellule. Le mois de septembre dernier, me trouvant très-fatigué, j’ai à cette époque cessé de faire des séances continues -, je les ai réduites à quatre par semaine, le lundi, le mercredi, le vendredi et le samedi. Antérieurement à celle époque, ma cellule et les approches ne désemplissaient point. Je reconnais journellement que mes forces physiques s’épuiseut ; mou moral ne vieillit point, le même amour du bien est toujours en moi; je continuerai ainsi tant qu’il plaira au Seigneur.
II a été dit à Paris que ce temps-ci se rapporte à l’époque où Mahomet vivait, qu’il ne s’opère plus de miracles. Qu’ils ouvrent tes yeux, s’ils en ont, ils reconnaîtront tout le bien que vous fuites, et tous ceux qui opèrent comme vous. Que les aveugles voient, que les boileux marchent, qne les lépreux sont guéris, que les sourds entendent, que les morts ressuscitent, etc.
Le premier des morts que j'ai ressuscités (c’était eu décembre 1809) faisait partie d’une colonne qni était dirigée sur Saragosse. Il était adjoint à un sous-inspecteur aux revues ; aujourd’hui je crois qu’il est à Audi, rédacteur et imprimeur du journal de cette ville. En 1809, je commandais la vallée de Camfranc, à Jaca. Une colonne, venant de France et dirigée sur Saragosse, arriva h l’entrée de la nuit h Camfranc; le commandant me déclara qu’il était resté deux hommes eB
arrière; l'un était employé dans les administrations militaires, et l'autre négociant. Après que la colonne fut logée, j'envoyai un détachement avec une lanterne et deux brancards pour rapporter les hommes perdus dans le cas où ils auraient succombé. Un des deux fut trouvé dans la montagne ; on reconnut dans le même endroit des piétinements d’ours; alors on cessa les recherches, et on emporia celui qui restait, gelé, mort, sans pouls, sans mouvement, ni parole; il fut reconnu, arrivé dans mon logement, pour cire l’adjoint au sous-inspecteur aux revues. Je le lis mettre dans.uu lit, je lui donnai des soins tout particuliers qui le mirent en état de continuer sa route le lendemain à sept heures du matin. Dieu suit loué! Voilà le premier ressuscité.
Vous trouverez le deuxième dans le rapport que je fis à M. Deleuze, et qu’il inséra dans l'Hermès en 1829; c’élait M. Barat, aujourd'hui devenu mon voisin, qui, le \ septembre 1827, fut atteint d’nne apoplexie foudroyante : dans quinze minutes il ouvrit les yeux, et dans vingt-sept il parla pour nie remercier de ce que je lui avais rendu la vie.
Le troisième mort ressuscité est du 25 janvier dernier. Françoise Rey, première-née, âgée de quinze ans, eut une attaque d'apoplexie foudroyante le 23 du mois de janvier; elle fut portée le 25 chez moi après huit heures du matin par la veuve Kstrabeau, habitant à l’au, rue des Cultivateurs, chez qui ladite Françoise Rey était logée, et par Marie Souslau, dite Tasalet, qui était aussi logée chez la veuve Estrabeau. Klles déclarèrent, en présence de tous les malades qui remplissaient ma cellule et les approches (ils étaient au nombre de plus de cinquante), que ladite Françoise Rey n'avait poiul. pris d’aliments depuis trois jours, ni donné signe de vie. Je fis placer la chaise de la malade auprès de moi; les soins que je lui donnai furent couronnes d'un succès au-
delà de l'attente de ions les malades qui étaient présents. Elle mangea du pain et but de l’eau magnétisés, et elle fut en état de se retirer chez elle sans aucun secours, aux cris de tous les malades : Au miracle! au miracle! Dieu soit loué!
M. Levcrrier, par scs grands talents, nous garantira-t-il à l’avenir de tous les maux qui pèsent sur nos tètes, des inondations, des tempêtes, des orages, des grêles, des incendies, des trombes, des tourbillons, des guerres, des famines, des maladies contagieuses, etc-, etc.? Qu en pensez-vous, mon cher collègue?
En attendant, recevez l’assurance de mon amour bien sincère et de mon dévouement. Recevez aussi le baiser de paix que je vous donne. ■’
Laforgue.
Pau, 9 février i847.
SOCIÉTÉS SAVANTES.
CONFÉRENCES MAGNÉTIQUES.
Les expériences précédent es de magie magnétique ue pouvaient être continuées surles mêmes sujets; lénrca-ractère ne le permet point. Il était bon de les tenter, elles ont réussi ; cela suffit. Il faut maintenant poursuivre sous un autre aspect l'étude de ces faits singuliers, mais en évitant de trop exaller le système nerveux des • personnes qui se prêtent aux expériences. Nous allons suivre M. du Potet dans ses nouveaux essais et rendre
aussi fidèlement que possible les phénomènes observés.
M. du Potet trace avec de la craie trois cercles d’un diamètre d’un pied à peu près, figures ABC ci-dessous.
ABC
Son intention, dit-il, n’est pas de produire une action sur le moral des personnes qu'il va soumettre aux expériences , mais de rechercher quels vont être les effets physiques résultant du principe magnétique déposé sur le parcours des trois lignes circulaires. Il croit que ce fluide va être senti, et déterminera par conséquent une série d’accidents nervenx ou d’effets physiologiques dignes d'ôtre examinés. M. du Potet prend d’abord un homme de vingt-quatre ou vingt-cinq ans, trapu et fort; il le place au centre du oerde maîtriser
les effets qu’il pourrait éprouver tendant à le déplacer. Cette recommandation le fait sourire, et cependant, tout en causant, les muscles de son front se plissent, un rire singulier se fait remarquer, quelque chose de chevrot-tant a lieu dans sa voix, et tout en parlant avec les personnes qui l’entourent, il pivote; on voit qu’il résiste £ mais bientôt, dominé de plus en plus, il tourne comme une toupie d'Allemagne. Ce mouvement s’arrête brusquement; on engage le magnétisé h rester encore dans le cercle, et bientôt il pirouette comme la dernière fois, forcé qu’il est d'obéir à un pouvoir que tout à l’heure il méprisait, car il ne pouvait le comprendre.
L’agitalion de tout sou êlre dure une dizaine de mi-
nntes, et pendant oc temps M. dn Potet place un autre jeune homme au centre du cercle B. On s’éloigne, et l’on examine avec attention quelles vont être les sensations éprouvées. Bientôt les yeux de ce second expérimenté se ferment ; sa tête commence h décrire un jnouvement circulaire dont le rayon successivement s’agrandit. I.es pieds restent invariablement fixés au centre du cercle. I,e mouvement devient plus rapide, tout son corps y participe ; on voit qu’il va perdre son centre de gravité-M. du Potet engage une personne h prévenir sa chute. On examine celte continuité rapide de cercles infinis, et il tombe, malgré les précautions prises. On l'emporte loin du lien de l’expérience ; il ne sait rien, ne se rappelle que son arrivée sur le cercle; il n'a pas senti sa chute plus que les mouvements de tout son corps.
Jusqu’ici ce ne sont que des jennes gens sur qui on a expérimenté; on peut croire que leur système nerveux est plus influençable. Voyons, dit M. da Potet, si sur une personne âgée les effets seront les mêmes; et il prie M. le comte de B..., dontl’ige n’est pas contestable, car il a vu plusieurs fois Mesmer chez Marie-Antoinette, de vouloir bien se placer sur le cercle C, et de nous faire connaître scs sensations. Au bout d’un instant les membres inférieurs sont agités; on remarque un écartement des jambes et leur rapprochement subit ; il est enfia saisi partout le corps, et prêt à s’affaisser sur lui même, il s’écrie : «Aïe ! aïe! » C’est alorsseulement qu’on l’enlève du cercle ; mais loin de se plaindre de cette expérience, il en semble ravi ; une’doucc chaleur partout le pénètre,' et un de scs bras, peu flexible par suite d’affection rhumatismale, devint tout à coup aussi libre que s’il n'y eût jamais souffert.
Pendant toutes ces expériences, M. du Potet est resté entièrement passif. Ceux qui ne reconnaissent point les propriétés dont peut être revêtu l'agent magnétique
pourraient croire que l'imagination des expérimentés a été ici la productrice ou la motrice des phénomènes; il n'en est rien. Voici une nouvelle expérience bien propre à éclairer sur ce sujet. il. du Potet trace un nouveau cercle, figure ci-dessous.
I! fait partir une ligne du point. A au point B, puis une autre parallèle, du point G au cercle.
Ces deux ligues, ainsi que le cercle, sont magnétiques. M. du Potet a agi comme dans l’expérience précédente; sa volonté, son désira été d'imprimer fortement sur ces trajets une puissance d'action capable d’agir sur les personnes qui s’engageraient entre ces lignes. Voici les plus curieux résultats que l’on puisse imaginer, car ils vont jeter quelque lumière sur des points remplis d’obscurité. Le hasard seul en est cause, non les combinaisons de l'esprit du magnétiseur.
Trois personnes successivement se placent au point étoilé. Leurs jambes s’écartant ne lardent pas à toucher les lignes crayeuses; mais, chose singulière et digne d’attention, lune d'elles, celle A B,attire fortementles sujets vers Je cercle, tandis que celle C les attire, les reporte vers le point de départ, et c’est par un tiraillement continuel, les jambes écartées, qu’ils avancent vers lecerele. Tout le corps est tordu et incliné vers la ligne A Bsans que les pieds aient quitté les deux tracés; ils arrivent enfin jusqu'au milieu du cercle X, ou une sorte de suffo-
cation se fui! remarquer sur tous les sujets. Voici l’explication que donne M. du I'otet sur les irrégularités qu'ont présentées ces expériences.
« On a pu remarquer, dit-il, que pour tracer les lignes, je ne suis pas parti du même point: l'une a été tirée du point A vers le point 11; j’ai fait partir, au contraire, l'autre du poiut C, et l’ai dirigée au cercle. D« cette simple différence dans les deux points de départdo tracé résultent loulcs les contrariétés éprouvées par les personnes qui se sont prêtées aux expériences , uue ligne étant, attractive et l'autre répulsive par le seul fait de leur arrangement. Le magnétisme ici a obéi à une loi qu'il faut connaître, et-confirme cette vérité que j’ai souvent soutenue : l’agent employé a des propriétés inhérentes; livré à iui-méme, c’est a dire lorsqu'il n’est point revêtu dos qualités que l’âme ou l’esprit peut y imprimer, il agit conformément à sa nature physique, et présente quelque analogie avec l’aimant. Tout consiste donc pour établir l’art de magnétiser à reconnaître d’abord les propriétés fixes, inaltérables, de l’agent magnétique, puis toutes celles dont il peut se revêtir parl’em-preinte de notre volonté. On levoitdonc clairement ici: ce que nous croyons, dans notre peu de connaissance, être inexplicable et dù à des causes inconnues, résulte seulement du défaut d’observalion des règles connues, mais dont on ne se souvient plus en expérimentant.
«Celle expérience dernière est donc d'une grande importance en ce qu’elle nous fait apercevoir clairement la cause des irrégularités remarquées, et nous place sur la voie de phénomènes que nous pourrons expliquer désormais. »
Voici un autre résultat non moins intéressant:
• M. du Potet a engagé deux des personnes soumises aux expériences précédentes à se-placer sur uue seule ligue ; l’une d'elle restant immobile un peu en dehors du
tracé, i’nnlre touchant l'extrémité opposée comme l'indique le plan suivant.
La personne placée au point A est attirée et parcourt une*partie de la ligne, remuée* secouée par l’agent magnétique, tandis que celle au point B n’éprouve encore rien d’apparent. Mais à mesure que l’attraction s’exerce et rapproche l’expérimenté île l’extrémité B , celui qui s’y trouve éprouve un ébranlement nerveux de plus en plus marqué ; et an moment où les deux êtres vont se toucher,les commotions sontsi fortes qu’on est obligé de. les enlever, impuissants qu’ils sont d’eux mêmes à s’éloigner. On pouvait donc reconnaître l’action de l’un sur l’autre, d’autant plus vive, que l’atmosphère plus active de celui qui étaitattiré venait pénétrer le système nerveux de celui qui se trouvait dans sa sphère d’activité.
M. du Potet nous annonce que ces expériences sont pour lui une révélation; qu’il vient de découvrir un des mystères les plus cachés du magnétisme, et qu’il en donnera une preuve évidente dans la prochaine conférence.
SOCIÉTÉ DO MAGNÉTISME DE PARIS.
Nous avons appris que, par un changement de vues, la Société dn magnétisme, qoijnsqu’à ce jour n’avait point admis l’étude du magnétisme parla méthode expérimentale, venait de décider qu’elle se livrerait désormais à des expériences propres à l’éclairer sur les résultats qu’on dit avoir obtenus partout. Nous l’en félicitons.
On dit même qu’elle doit sous peu publier un journal: c’est un complément indispensable si elle veut que son œuvre soit complète. Il n’y avait donc dans nos observations sur cette société rien de malveillant, mais seulement l’expression d’une pensée qui ne nous a jamais
quittes: c'e9t qne pour faire marcher le magnétisme il faut en multiplier les phénomènes, afin qne ce qui reste d'incrédulité soit vaincu , afin qne la lumière vienne de toutes parts et réduise au silence tous nos antagonistes.
La physique, la chimie, comme toutes les sciences exactes, ne doivent leur progrès, lenr autorité, qu’aux principes fixes et aux lois qu’elles ont fait reconnaître. Et, quoique pensent certains esprits, le magnétisme, à son tour, aura des bases solides, inattaquables, mais seulement quand l'expérience sera venue les lui don-uer. Ce temps approche.
VARIÉTÉS.
Escarmouches. — Il se passe à notre époqne une chose étrange. La vérité que nous soutenons se répand partout, et le bruit qu’elle fait devrait imposer silence à ses antagonistes-nés. Qui le croirait pourtant? ils osent encore nier les faits si patents du magnétisme et dn somnambulisme. On pourrait s’imaginer qu’il y a là innocence et ignorance. Ignorance? Non, les médecins sont instruits; quant à leur innocence, personne ne veut y croire. Toute cette cohorte saignante se félicite, se congratule de l’inerédulité qu’elle affecte ; elle croit que son opinion prévaut au dehors, et que, quand l’un des siens a parlé, tout le monde est convaincu. Mais leurs écrits, comme leurs discours, ressemblent à leurs remèdes : ils sont sans efficacité.
Us se trompent encore s’ils pensent que tous seront
dociles au mot d'ordre, qu'aucun u'élèveia la voix pour prolestcr contre une conduite si coupable que pas une expression n’est assez forte pour la peindre. Nous donnons aujourd'hui un exemple de cette rébellion; d'autres s'y ajouteront, et bientôt ce journal ne pourra contenir les protestations qui s’élèveront de toutes parts.
M. le docteur Charpignon, déjà, a noblement répondu en publiant des faits de sa pratique. Voici comment M. le docteur Ordinaire, attaqué par ¡'Union médicale, répond , à son feuilletoniste. Nous donnons l’uttaque et la réplique, sûrs que nos lecteurs nous sauront gré de les tenir au courant de ces escarmouches qui précèdent toute grande bataille :
« La Mouche, dans son avant-dernier numéro, a vivement piqué un nouveau journal intitulé l'Union médicale, et lui a reproché de n'être j>as progressile , et de permettre à certain J'an Raymond, son 'feuilletoniste, d’attaquer le magnétisme. Il paraît que la Mouche ne s’est pas Itonvée le seul Hmcote hostile à l'Union; l'A-beille médicale a fait également sentir son aiguillon à la nouvelle feuille.
« Jean Raymond, bien qu'atteint de la grippe, ne s’est pas laissé piquer sans se plaindre. Après avoir répondu à VAbeille, il parle de la Mouche en ces termes :
« L’autre insecte, qui bourdonne autour de l'Union, « est une Mouche ordinaire (musca vulgaris), qui a pris la « peine, celle ci, de venir de Saône-ct-l.oire, de Mâcon, « d’où elle eût beaucoup mieux fait d’upporter quelques « bons flacons du cru. Cette Mouche ne manque ni de ta-
• lent, ni d'esprit, mais elle manque évidemment de «charité. C'est une Mouche magnétiseuse, qui se met a « bourdonner de colère quand on touche à cette arche « sainte des Mesmer et de Puységur. Elle ne pardonne
• pas h nu certain Jean Raymond de ne pas ajouter foi % à ce qu’elle peut croire, elle, en qualité de mouche, et
« elle me fait un fort vilain procès de vouloir rester dans « ma classe, d’être pensant el raisonnant, de l’ordre des
• bimanes. Pour un diptère, c’est fort prétentieux et tant t soit peu exorbitant.
« Quand celte Mouche rageuse aura pris la peine de « faire ce que j’ai fait, de scruter les plis et les replis du a magnétisme, d'éludier toutes les ficelles des magnétiseurs, d’assister aux innombrables expériences, d’m «avoir fait elle-même autant que moi, de s’être prêtée « avec une complaisance semblable à la mienne U tous « les essais sérieux ou burlesques, consciencieux ou pij « peurs, réels ou imaginaires, qui ont pu passer par la a lête de certaines gens, je lui pardonnerai alors de « m’accuser d’ignorance et de mauvaise foi. »
« Nous répondrons à M. Jean Raymond par ce dilemme : — Ou vous avez vu quelques-uns des phénomènes du magnétisme, ou voiis vous êtes laissé duper par de faux somnambules. Dans le premier cas, vous devez croire, parce que la vérité, qui est la vérité pour plus de trois cents de vos confrères, qui ne craignent pas de la proclamer tout haut, ne peut s’être transformée en mensonge pour vous seul.
« Dans le second cas, si vous avez été trompé, comme tout l'annonce, cela ne fait pas l'éloge de votre perspicacité.
« Vous dites : Quand la Mouche aura pris la peine de faire ce que j'ai fait, de scruter les plis et les replis du magnétisme, je lui pardonnerai de m’accuser d'ignorance, etc. Je vous accuse, monsieur Jean Raymond, précisément parce que j'ai fait mille fois, dix mille fois, cenl mille fois plus que vous n’avez fait et que vous ne ferez jamais en magnétisme.
« D’abord, d.fns un ouvrage que j’ai publié en 1810, j’ai attaqué le magnétisme, partie que j'avais été comme vous témoin d’expériences qui ne m’avaient semblé nul-
lemcnt concluantes. En 1812, j’ai vu Prudence, somnambule vraiment remarquable, et mon scepticisme est tombé. Cependant je n’admettais pas encore toutes les merveilles du somnambulisme, lorsqu’un beau jour je me suis trouvé en présence d’une crisiaque dont la lucidité s’est établie sous l’influence de 2 décigrammcs d’extrait gommeux d’opium. Oui, monsieur Jean Raymond, c’est à l’opium que je dois mes croyances magnétiques : aussi ai-je salué son frère, Véther sulfurique, comme uu bien-venu, comme une personne rêvée et attendue. Voyant avec mes deux yeux largement ou verts, jugeant avec ma raison nullement dérangée, touchant du doigt l’insensibilité, la transposition des sens, la transmission de pensée, la vision k travers les corps opaques, je me suis rendu à l’évidence et fai fait du magnétisme. J’en ai fait pendant deux ans, jour et nuit, en présence de plusieurs milliers de personnes et d’un grand nombre de médecins. J’ai eu à ma disposition des somnambules lucides comme Paris n’en possède pas ; j’en ai eu de tous les âges, de tous les sexes. J'ai, depuis cinq ans, répété, multiplié les expériences ; j’ai rencontré comme vous de faux somnambules qui jouaient leur rôle k tromper tout autre moins clairvoyant. Je les ai sans pitié démasqués. J’ai bravé, pour mes nouvelles croyances, le sarcasme et le ridicule dont on m’a longtemps poursuivi; j’ai fait du magnétisme publiquement; j’ai soumis à mes somnambules [dus de trois mille malades; j’ai donc pu trois mille fois juger, observer le magnétisme en action. Je lui dois une vie nouvelle, mes croyances religieuses, l’espérance d'une vie meilleure f je lui dois trop pour ne pas eu être reconnaissant. Jamais je n’ai rien tiré pécuniairement du magnétisme, auquel je sacrifiais cependant une belle clientèle, parce que le magnétisme, comme vous le dites fort bien, est une arche sainte que la spéculation pollue. Vous voyez
donc bien, monsieur Jean Raymond, que j’ai fait plus que vous n’ayez fait avec quelques sujets d’une lucidité fort douteuse. Vous voyez donc bien, monsieur, que je suis autorisé à vous accuser d'ignorance, —je ne dirai plus de mauvaise foi, persuadé que si, comme saint Thomas, si, comme moi, vous eussiez vu et louché, vous croiriez.
» Permettez-moi un conseil. Avant deux ans la cause du magnétisme sera gagnée; l’influence del’éthcr va lui venir en aide ; ne vous exposez pas à être obligé de vanter bientôt ce que vous déchirez aujourd’hui. Attendez! Dites : Je me rendrai à l’évidence; mais ne dites pas : Je ne crois pas, parce qne j’ai vu; car, en vérité, je vous le dis, vous n’avez rien vu., et dès lors votre opinion est erronée.
« Je vous demanderais bien l’insertion de ce qui précède, mais je craindrais d’être indiscret. Les fondateurs de l'Union se sont dit : C’est en attaquant le magno-tisme, riiomœopathie, la phrénologie, toutes cesdécou-vertes qui comptent peu de partisans, que nous plai— ronsà la majorité des médecins et que nous mulliplierons nos abonnés; dès lors, il est de notre intérêt de les attaquer; d'ailleurs nous ne lutterons pas contre notre conscience, puisque nous ne croyons pas; et aussitôt dit, aussitôt fait. Les fondateurs de l'Union ont fort mal raisonné. Les vieux médecins antimagnétistes, ennemis des découvertes modernes, s’en vont; d’aillenr? ils ne s’abonnent guère ; les jeunes médecins sentent, savent que notre art est appelé à plus de perfection, et ils sont avides de nouveautés. Vons déclarant ennemi du magnétisme, vous parviendrez à réunir deux mille abonnés, vous en compteriez quatre mille en déclarant que vous n’êtes ennemi d’aucune idée, quelque excentrique qu’elle soit, lorsque celte idée pent se produire et rendre quelques services au genre humain.
« J'irai prochainement à Paris, monsieur Jean Raymond. je vous prendrai par lu main et je vous ferai toucher du doi^t ce que vous refusez d’admettre aujourd’hui. Votre conquête sera importante ; car, sans vouloir vous passer la rhubarbe, je vous reconnais comme homme de mérite et spirituel écrivain. »
Banquet. — Nous avons promis de rendre compte du banqneloffert à M. du Potet par quarante personnes, ses élèves et les plus assidus à ses expériences: c’est, un témoignage de sympathie donné à notre maître, et peut-être n'aurions pas déposé dans ce journal ce compterendu si l’on ne nous en eût fait un devoir; car toutes ces personnes honorables sont nos abonnés, et elles ont demandé avec instance qu’il fût inscrit comme un des faits propres à convaincre nos antagonistes du rapide progrès que fait le magnétisme et des sentiments de reconnaissance qu’éprouvent envers celui qui le répand cenx qui y sont initiés.
Quoiqu’il en soit, nous abrégerons ce récit, et nous garderons pour la fête de Mesmer, qui approche, des pages où éclatera la joie commune des magnétiseurs.
Nous mentionnons ici les discours qui ont été prononcés, car ils intéressent également un jeune artiste de mérité qui s’élait chargé, pour celte circonstance, de reproduire les traits de M. du Potet. Cet artiste, selon le sentiment de tous, a mérité des éloges; nous avions aies constater.
M. Audriveau s’était chargé, au nom de l’assemblée, déporter uu toast à son convié; il l’a fail dans les termes suivuuts :
« M. le Baron,
« Celle réunion de vos auditeurs les plus assidus, je dirais même de vos amis les plus dévoués, n a pas scu-
Icmentpoiir objet de glorifier une science dont vous ¿tes à nos yeux le plus digne représentant.
« Ce que nous nous sommes proposé aujourd'hui, c'est surtout de rendre un hommage au maître bienveillant qui nous a initiés aux mystères de cet art sublime, de cette force immense dont nous faisons chaque jour de merveilleuses, de salutaires applications. Ce que nous avons à cœur c'est d’honorer autant qu'il est en nous, c’est d’exalter l’homme éminent qui a si puissamment contribuéaux progrès du magnétisme, et dont la vie s’est usée dans une lutte de trente ans contre l’erreur, la sottise et la mauvaise foi.
« Certes, monsieur, vous devez être fier, car il y a loin d'une existence si noblement, si utilement remplie, à l’inactive indifférence de ces hommes qui, tout occupés des soins matériels, laissent s’accomplir autour d eux, saus y prendre part, le grand travail des idées et ré-mancipation intellectuelle ; il y a loin surtout de celte vie de sacrifices et de dévouement à 1 égoïsme impur, à la coupable industrie de ceux qui, parés d’un vain titre, exploitent à leur profit l’ignorance et la crédulité. Douaniers de la pensée, ils ont mis le veto sur tout ce qui ne porte pas la marque de leur fabrique. Eux, les gardiens de la science, ils n’en sonique les geôliers ; le dos tourne au progrès, ils ont écrit sur leur bannière : Immobilité.
« .Mais vous le savez, monsieur, les novateurs, comme les martyrs de toutes les croyances, connue tous ceux qu’a touchés le souffle inspirateur, ccux-lii sont doués d'une force d'impulsion irrésistible: Les yeux fixés sur un point de l'horizon, but de leur mission providentielle, poureux les souffrances ne sont rien, les obstacles n’exis-tent pas. Vous appartenez, monsieur, à ces hommes d é-lite qui, résumant eu eux toutes les vérités utiles, passionnent, entraînent le genre humain vers do meilleures destinées, nouveaux Moïses auxquels il n’est pas tou-
jours donné de contempler de loin la terre promise.
« Cependant, au milieu de la joie que nous éprouvons à tous payer ce tribtitsi mérité, et peut-être un peu tardif, quelque chose nous trouble et nous inquiète : nous craignons d'être restés au-dessous de notre tâche et de no pas avoir assez dignement célébré celui qui, dans le cours de ses voyages scientifiques, a recueilli de si magnifiques marques d’estime et d’admiration.
« Heureusement, monsieur, votre modestie nous rassure, votre cœur nous comprendra ; vous voudrez bien considérer cette réunion comme une fête de famille, et vous nous rendrezeette justice que si l’éloquence et l’en-tliousiasme nous ont fait défaut, au moins nous n’avons pas manqué de reconnaissance.
• Oui, monsieur, il nous tardait de pouvoir vous offrir en commun l’expression de nos sentiments. Notre jeune artiste, M. Lerolle, nous en a fourni l’occasion. Grâces lui soient rendues, tant sur son heureuse inspiration que pour le talent remarquable dont il a fait preuve en reproduisant les traits de notre maître bien-aimé. Qu’il reçoive ici nos félicitations et nos remerciements ! Qu’encouragé par de tels débuts, il se livre avec une nouvelle ardeur à l’étude, qui seule fait les grands artistes; nos vœux l’accompagneront dans une carrière où l’attendent certainement les plus brillants succès.
• Qu’il nous permette de nous unir à lui dans cet hommage qu’il vous fait des prémices de son talent. Désormais ce buste sera, dans notre pensée, inséparable de celui de Mesmer, comme votre nom sera lié dans la mémoire des hommes aux noms vénérés des Deleuze et des Puységur.
« Sans la crainte de vous déplaire et de blesser votre modestie, nous aurions déposé sur ce buste un symbole de notre sincère admiration ; mais si nous résistons à nos élans sympathiques, la postérité ne craindra pas d’être
juste, elle vous destine une couronne plus glorieuse encore et bien moins périssable : celle qu’elle décerne aux hommes de progrès et aux bienfaiteurs de l’humanité.
« Buvons, messieurs, an courageux, h l’éloquent défenseur du magnétisme, à notre maître, à notre ami, à RI. le baron du Polet! »
Ce discours, flatteur pour M. du Polet et pour le jeune artiste, fut vivement applaudi par tous, et on pouvait juger combien il avait ému, et celui qui l'avait prononcé, et ceux dont on exprimait si bien les sentiments.
M. du Potet s’est levé et a répondu k cet éloge.
« Messieurs, a-t-il dit, le champ des sciences exige plus de labeur, il est d’une culture plus difficile que celui que le laboureur arrose de ses sueurs. Celui-ci jette son grain dans un terrain presque toujours favorable, fertile; l'homme de science, au contraire, jette souvent le sien sur des ronces et des épines. Et la divine semence qui est ainsi perdue, il ne l’a point trouvée ou reçue comme l’homme des champs; il a fallu qu’ill’allAt chercher dqns un monde inconnu; qu’il remontât à la source de toute vérité; qu’il bût de cette eau aûn d’èlrc inspiré. Que de peines, que de soins, que de recherches , avant que son génie fasse entendre sa voix, avant que son intelligence lui ait fait comprendre les divines paroles et fécondé les nouveaux germes!
« Ce n’est rien encore, messieurs. L'artisan, le laboureur, dorment tranquilles après la fin de leur journée. L’homme qui aime les sciences 'et qui les cultive voit ses jours tourmentés et ses nuits sans sommeil. Puis, lorsqu’il possède enfin ce qu’il cherchait avec persévérance et fatigue, une vérité nouvelle, il s’aperçoit
que ce fruit de sou génie ne le rend point heureux; il faut que, tout en marchant à de nouvelles conquêtes, pour qu'il soit satisfait, qu’il voie ses idées partagées, admises, et régner sur les esprits.
« Vous le savez, messieurs, découvrir, c'est chose difficile; faire adopter, plus difficile encore. Il faut donc que le novateur possède un douhle courage, une double constance, cl sa vie dès lors doit être un sacrifice; ce n’est qu’à ce prix que l’on peut espérer de triompher des obstacles et du temps.
« Heureux, messieurs, l’homme qui, sur son déclin, peut ainsi jeter un regard sur la roule qu'il a parcourue, lorsqu’il est certain d’y voir des hommes qui marchent sur scs traces, s’apprêtant à le déliasser lorsque la fatigue l’aura saisi. Une sorte d’attendrissement, causé par la joie qu’il en éprouve, fait battre son cœur, et le remplit de contentement et d’espérance.
« Ainsi, messieurs, chaque labeur obtient sa'récompense. A celui-ci Dieu accorde d’abondantes récoltes, riche fruit du travail; à cet autre, qui a suivi une carrière différente, ce n’ijst pas l’or qui peut le satisfaire : la fortune lui sourit aussi, mais elle est particulière; il lui faut le témoignage des sympathie's d'autrui, l’amour des autres hommes; plus encore, il fantiqu’il voie ses découvertes honorées. Oh! alors, messieurs, lorsque ces choses arrivent, il oublie ses peines et tout ce qu’il a souffert; il trouve même qu’il n’a pas trop chèrement payé les jouissances qu’il éprouve, les faveurs dont il
jouit. !l. . ,
* C’est ainsi, messieurs, que vous m’avez distingué, que vous avez voulu me prouver vos sympathies, votre amitié, et la part que vous prenez à me* travaux. Ce jour est beau pour moi, messieurs, et je vous remercie. Seulement je dois vous détromper sur quelques points. Je ne suis pas l’homme de génie que je viens dedépein-
dre. Je n’ai fait, comme vous, qu’entrer résolument dans la science, la cultiver avec ardeur; vos hommages donc devraient èlre pour Mesmer.
« Pourquoi faut-il que les hommes laissent toujours passer le génie sans le glorifier? pourquoi faut-il que ce soit l’élève qui reçoive ce qui était dû au maître?
o Permettez-moi donc, messieurs, de n’accepter vos hommages que pour les reporter en grande partie sur notre maître à tous, sur Mesmer. Et puisqu'ici les traits de votre collègue, de votre compagnon, de votre ami, ont été reproduits par un jeune artiste dont la carrière, s’ouvre pour d'autres travaux, permeltc/.-moi de lui offrir, comme récompense de son talent précoce, tin toast auquel vous vous joindrez tous pour l’encourager dans sa noble entreprise, afin qu'un jour il reproduise, non plus l'image d'un homme ordinaire, mais ceux d’hommes qui y ont plus de droit, ceux à qui Dieu a accordé le génie.
» J’ai l’honneur de porter un toast à M. Alphonse Lerolle, qui entre si dignement dans la carrière des arts; qu'il y soit heureux autant qu'il le mérite, autant que nous le désirons tous!
« Au jeune Lerolle ! »
Après ce discours, ou a porté un toast à la mémoire de Mesmer, de l’uységur et Deleuze. On a rappelé le souvenir de ces hommes de bieu qui souffrirent pour la cause que nous défendous.
M. Laporte, chargé de porter un toast au magnétisme, l'a fait eu ces termes :
« Au magnétisme!.... à cette science divine qui prouve que l'homme a reçu du Créateur la faculté de soulager et de guérir!...
« Permettez-moi, messieurs, de vous faire connaître une définition que je dois à la lucidité d’une somnambule. Celte définition, si pittoresque, si poétique, répondra mieux que tout ce que je pourrais vous dire à ce que vous attende/, de moi en cette circonstance :
« Le magnétisme est dans la nature. Le zépliir qui « agite le feuillage, l'air qui purifie l’atmosphère, l’in— fluence des astres, le soleil sotiriaut dans les plaines « azurées, l'équilibre et l'attraction qui sont les lois des « mondes, les antipathies et les sympathies dans les « trois règnes attestent des moyens et des effets univer-« sellement magnétiques. C’est en puisant aux sources « intellectuelles qu’on peut acquérir la vraie science.
» Le magnétisme détache l'âme des sens et fait admi-« rer les merveilles du Créateur. De même que la cha-« leur et la lumière, source delà vie et de la fécondité, « émanent de la puissance divine, de môme les effets « merveilleux du magnétisme sont un présent du Ciel.
« L’homme ne doit point se les attribuer. Le magné-« tisme est une émanation du Créateur. Le bien ne peut
• provenir que du bien. »
«Messieurs, les sensations que je dois à la pratique du magnétisme m’ont rempli de reconnaissance pour celui qui m’a initié à cette science. Qu’il me soit donc per mis de la lui témoigner dans cette fêle de famille. El d’ailleurs, lui, l’apôtre le plus zélé, le plus persévérant, le plus savant du magnétisme, n’cst-ilpasle magnélismo personnifié?
« Au magnétisme donc et à M. du Potet! »
La salle du banquet, où retentirent en ce jour tanl de vœux pour la prospérité du magnétisme, était ornée de diverses emblèmes en l’honneur de M. du Potet -, un sur-
(oui frappait les regards par cette inscription qu'il por -lait :
Ail novateur hardi qui d’une aveugle rogo Brave les efforts impuissants;
Au maître dont la voix a de nobles accents Pour la vérité qu'on outrage;
Au savant généreux, au philosophe, au sage,
Scs élÊves reconnaissants.
M. le comte de Beaumont avait clé choisi pour présider cette fête. où la cordialité la plus franche n’a cessé de régner. Avant de se séparer, chacun s’est promis de généraliser avec une ardeur nouvelle les connaissances magnétiques, et de se retrouver au 23 mai.
Chronique. — I.a presse anglaise commence à réparer scs torts envers le magnétisme. Le Morning-Chro-nitle, qui fut le plus hostile lors des expériences de M. du Potet à Londres, consacre «ne colonne au magnétisme dans son numéro du 17. Cette justice tardive doit faire le plus grand bien à notre cause. Le fond de l’article est consacré à la fondation de l’hôpital de Calcutta, dont ce journal félicite le gouvernement, en même temps qu’il déplore que les quarante mille médecins de la Grande-Bretagne, qui devraient connaître le mesmérisme, soient précisément ceux qui l'ignorent.
— La Presse du 8, dans son analyse d'Irène, se déclare franchement pour le magnétisme.
— Le Corsaire-Salati a fait sur Irène un feu roulant de plaisanteries que tous les magnétiseurs devraient connaître. La Mouche a reproduit cet article, qui nous a lait beaucoup rire. C'est une députation de magnétiseurs et de somnambules allant féliciter les auteurs de la pièce. Un langage approprié est mis avec adresse dans la bou-
clic de chacun des membres de cette immense députation.
— Un nouveau journal de médecine espagnol, cl Te-legrafo medico, parle du magnétisme en termes favorables, et promet de s'en occupera l’occasion.
— Los journaux scientifiques rapportent celte phrase de M. Magendie dans sa croisade académique contre l’c-tlier : » De tels faits ne reportent-ils pas !csprit vers les convulsionnaires de Saint-Médard, le baquet de Mesmer et les pratiques du magnétisme moderne? » Vous reconnaissez donc le magnétisme, monsieur Magendie? car ce qui n’existe pas ne saurait avoir de dangers.
— L'Union médicale rapporte presque en entier, dans son numéro 7, le discours de M. Lacordairc sur le magnétisme. Jean Raymond est l'ùlre le plus versatile : tantôt il est pour et tantôt contre nous.
— Le projet de loi sur la médecine annoncé depuis longtemps a été présenté a la Chambre des Pairs, lin le lisant attentivement, on y reconnaît que, sans que le mol de magnétisme y soit prononcé, sou enseignement cl sa pratique peuvent être frappés par certains paragraphes qui peuvent être interprétés contre nous. Lors de la discussion nous reviendrons sur ce sujet. Mais en atlendant nous pouvons dire que toutes les lois seront impuissantes à empêcher la propagation de noire doctrine comme la pratique du magnétisme que l'on fera descendre dans la famille. Nous avons mille moyens pour qu’il en soit ainsi. Des pétitions se préparent, déjà nous en avons reçu une d'un médecin de province ; nous la publierons prochainement .
Le Propriétaire-Gérant : I1ÉBEUT (de üarnay).
rarU. — Imprimerie ci'A. Rusé cl Comp., rue le Seine, 3i.
MANUSCRITS DE MESMER.
Notion«* élémentaires sur la morale, l’éducation
et la législation, pour servir » l’instruction
publique en France, par F.-A. Mesmer.
§ VI. — Justice crimiselle.
Si cependant il y a des individus hors de l’école de l’éducation qui commettent des fautes assez graves pour troubler la société, la législation doit y pourvoir d’après les principes suivants.
On répète'ici que le seul mobile des actions est l’intérêt personnel, mais que cet intérêt peut être mal entendu lorsque la représentation en est confuse ou obscure, soit:
1° Par l’ignorance;
2° Par la dépravation des sens;
3° Par les passions;
4° Par les mauvaises habitudes.
11 est donc nécessaire que cette représentation soit contrebalancée par des intérêts opposés qui paraissent plus forts.
Pour prévenir cet égarement do la volonté, pour y remédier .et réparer en même temps les aberrations de la règle de la société, il a fallu attacher à certaines actions qui troubleraient trop fortement l’ordre, des motifs assez puissants et frappants pour n’être pas confondus ni
ignorés. La société, pour cet effet, affecte certains maux ou peines aux actions qu’elle veut empêcher , et les règles d'après lesquelles elle inlligeces maux sont les lois criminelles.
Les lois criminelles doivent avoir deux objets : remédier et préserver.
Remédier au mal, c’est le faire cesser, soit dans sa cause, soit dans son effet.
Préserver, c’est éloigner les intérêts qui porteraient à l’action défendue, ou les détruire par une connaissance sûre et certaine des motifs, soit naturels, soit déterminés par la sociélé.
De cette manière, la société doit faire en sorte que ses membres connaissent distinctement et puissent sc représenter comme certains et inévitables tous les effets des actions défendues.
Les moyens de la justice ou des lois criminelles sont donc:
1° De renforcer les motifs en attachant des maux à ces actions défendues -,
2°En prouvant que ces maux sont des effets certains et inévitables de ces mêmes actions.
La justice n’ayant le droit naturel d’infliger un mal que pour en éviter un plus grand, la mesure de ce droit sera dans tous les cas la stricte nécessité.
Ce mal étant une exception particulière de la règle générale qui veut le bonheur de tous les membres, les législateurs et les ministres de la justice criminelle sont responsables à la société de cette rigoureuse nécessité.
La procédure doit donc être publique, soit pour prouver la nécessité du mal, soit pour démontrer que çe mal attaché par les lois à l’action prohibée est certain et inévitable. Celte publicité doit être absolue ou respective. Si le crime intéresse la société en général, la justice ayant toujours pour objet de rélablir par l’exemple l’or-
dre et de corriger le coupable, la procédure et la peine doivent être aussi publiques que la faute. Si le crime n’intéresse qu’une société en particulier, un corps on une famille; partant du même principe, il est également juste que la procédure et la punition soient circonscrites dans les mêmes bornes : une publicité plus étendue, dans ce dernier cas, deviendrait inutile et même scandaleuse.
La procédure criminelle étant la règle d’après laquelle la justice criminelle doit s’exercer', elle a pour objet :
1° Connaître le crime;
2° Connaître son auteur ;
3° Juger la moralité de l’action;
4° Remédier au désordre ;
5° Prévenir le crime.
Le crime étant une action par laquelle l'ordre de la société est troublée; pour en avoir la connaissance, il faut :
1° Avoir une juste idée de la règle de l’ordre;
2° Reconnaître les changements ou les effets de l’action ;
3° Le degré du désordre ou du mal qui en est résulté dans la société.
L'énormité du crime est en raison composée
1° Du mal résultant de l’action;
2° De la difficulté de l’éviter ;
3° De la difficulté de le découvrir.
L’auteur d'un crime est celui qui, directement ou indirectement , a déterminé l’effet par lequel l’ordre a été troublé.
Juger la moralité de l’action est déclarer à quel degré l’action a dépendu de la liberté, et par conséquent à quel point le mal peut être imputé à son auteur.
Le remède, ayant pour objet de faire cesser la cause et de réparer le désordre et ses effets, doit ayoir pour objet :
1" La société qui a été troublée ;
2’ Le citoyen qui a commis le crime.
L’abus de la liberté étant la cause du mal, pour la faire cesser, le plus naturel et le plus juste de tous ces moyens est de suspendre l’usage de cette liberté.
Le coupable comme citoyen dépravé doit attendre de la société les moyens de se corriger.
Le droit naturel de correction qu’il a sur lui-ménie ne peut lui être enlevé par la société. C’est pour cela que l’exercice de la liberté ne peut être suspendu que pour un temps.
Ainsi la punition du coupable ne doit jamais être le but de la justice criminelle, mais seulement un moyen de correction qu’elle lui doit.
On préviendra le crime
1° En éloignant les occasions et les motifs;
2° En renforçant les motifs et les intérêts contre l’action prohibée ;
3° Si, outre les effets et les suites naturelles de l’action prohibée, les peines qu’on y attache sont suffisamment connues pour exciter l’attention de tous les citoyens. Celte conséquence nécessite encore la publicité de la procédure.
Pour que la peine soit il faut :
1° Qu’elle soit telle qu’elle puisse être en même temps le remède et le préservatif;
2° Qu’elle soit plus appropriée à la personne qu'au crime v
3° Qu’elle soit proportionnée à la sensibilité et à la disposition du coupable ;
4" Qu’elle ne dure pas plus longtemps que l’exemple dans la société et la correction de l’individu ne l’exigent.
Car si le but de la justice criminelle doit être, en punissant le coupable, de le rendre meilleur, il faut aussi que, cet objet une fois rempli, elle le rende à la société
dont il n’a été retranché que par une malheureuse nécessité.
Par une suite de ccs principes, toute peine par laquelle l’homme perd sa vie, sa patrie, quelque partie de son corps, sa santé ou la sûreté de ses mœurs, est contre le droit de la société, et par conséquent un crime dont les ministres de la justice sont responsables.
Les seules peines que la société ait le droit d’infliger selon VcnormiU et la qualité du crime sont:
1° La perte de l'estime qui résulte de la publicité de la procédure qui manifeste le crime ;
2° La prison ;
3° La prison et la privation graduée des différents objets de l’aisance ;
4° La privation de la lumière;
6° La privation de l’usage de scs membres;
6” Les travaux publics. - •
La sensibilité de l’homme est nécessairement altérée par l’idée habituelle des supplices, et les plus grands qu’on puisse se permettre de l’application des peines consistent moins dans leur dureté que dans leurs nuances et leur exacte gradation.
Or, si on trouvait quelques difficultés pour l’exacte application de ccs peines, il serait facile de les surmonter en convertissant toutes les prisons en maisons de correction, dont le nombre et l’institution seraient déterminés d’après les différentes classes de crimes, et dans lesquelles on assurerait par des règlements sages les traitements individuels des coupables.
Toutes peines devant être un remède, doivent avoir un terme, et ce terme ne paraît pas devoir se prolonger au delà de cinq ans :
1- Parce que ce terme est une portion de la vie humaine pendant lequel la constitution physique éprouve
des variations certaines et assez considérables pour changer les passions et les habitudes;
2° Parce qu’une peine plus longue devient elle-même une habitude, qu’elle fait successivement une moindre impression sur le coupable et ne produit plus d’effet sur la société ;
3° Parce que la peine ne doit pas lui ôter le droit, après s’être corrigé, de rentrer dans la société. Une plus longue absence l’exposerait à lui devenir étranger.
Sur les prisons ou les instituts de correction, on doit observer qu’il serait utile de faire d’avance une impression sur les esprits en donnant à l’extérieur de chaque maison de correction des signes frappants et indicateurs de la nature des délits et de punition, et de la qualité des coupables; l'effet naturel de cette impression serait, de frapper vivement et constamment l’imagination du peuple et d’exciter en lui l’horreur du crime, tandis que l'intérieur de ces mêmes établissements , toujours disposé dans des vues de correction, offriraient sans cesse aux coupables l’espérance consolante devoir finir leurs peines, et des moyens de rapprocher le terme par la plus exacte conformité de tontes leurs actions à ces règles établies. Ces règles doivent être telles qu’elles se plient, en quelque sorte, "a l’immoralité des prisonniers, et cependant qu’elles tendent par leur nature, leur gradation et une sorte de liberté laissée au coupable, à lui faire contracter des habitudes et adopter des principes opposes à ses premières dispositions. Par exemple, dans la maison où sont détenus les voleurs, les portes des armoires seront sans serrures, les comestibles à leur discrétion. Les hommes dangereux, assassins par irrascibi-lité, se trouveraient en société de leurs semblables ; on laisserait aux ivrognes toutes les facilités de s’enivrer, les joueurs passionnés, les calomniateurs, se trouveraient dans les circonstances et occasions propres à satisfaire
leurs inclinations. Pour cet effet il sera tenu un registre rapportant la conduite de chaque prisonnier; l'exactitude aux règles, par exemple, pendant huit jours, lui fera gagner autant sur le temps de sa punition; quinze jours de bonne conduite lui vaudront quinze autres jours, et ainsi de suite. Par ce moyen l’on nourrirait dans les prisonniers des motifs assez puissants pour leur faire changer leurs habitudes vicieuses.
Dans les cas où ces moyens de correction deviendraient insuffisants ou impraticables, on devrait encore éloigner toute idée de cruauté, et supposer plutôt quelques vices physiques de conformation ou quelques maladies contre lesquelles il fautchercherdes ressources dans la médecine.
On peut supposer d’ailleurs avec certitude que la plupart des crimes dans la société ne sont pas de la nature de l’homme, que l’on se permet de calomnier comme dépravée et disposée au mal; mais qu’elle est plutôt le résultat dè l’éducation et plus encore d’une législation vicieuse.
On finit donc par cette assertion que les principales causes de la plupart des crimes dans la société sont:
Io la trop grande inégalité des fortunes et des facultés, de là la tyrannie, les injustices ; 2° le défaut de travail ; 3° l’oisiveté; 4° les excès des passions ; 5° les mauvaises habitudes.
{La tuile prochainement.)
ÉTUDES SUR LE SOMNAMBULISME.
, § X. — PÜYSÊGURISME.
Sixième observation.
Il est contraire il la rnison et nuisible 5 Ja science de déclarer impossible et faux un fait quelconque, par cela seul qu'il sort de l'ordre commun cl des lois connues.
DE LiMFHHAlf.
Dans un premier article sur le zoomagnétisme, j’ai fait l’aveu de ma primitive incrédulité et des quolibets dont, à l’imitation de la foule, j’avais accablé magnétiseurs et magnétisés. J’ai reconnu mon erreur après avoir assisté aux séances publiques et particulières de MUe Prudence, et surtout après avoir obtenu moi-môme des effets surprenants. Afin de réparer mes torts, j’ai publié dans le Journal de Saône-et-Loire deux articles qui m’ont valu de la part de quelques-uns de mes confrères le reproche d’appuyer de mon titre de docteur le charlatanisme d'un industriel; mes deux articles m’ont aussi valu des lettres anonymes, et d’autres par lesquelles le magnétisme et ses prôneurs étaient habillés de main de maître. Reproches, lettres anonymes et lettres signées ne firent que m’encourager â continuer mes essais avec la ferme intention de découvrir la vérité.
J’avouerai qu’un doute involontaire plana sur mes nouvelles croyances tant que je ne pus obtenir par moi-
même ce qui m’avait tant étonne dans les Calixtc, les Pi-geaire, les Prudence. Je demandais une somnambule lucide à toutes les jeunes filles nerveuses et souffreteuses qui voulaient bien, dans l’espoir d’une guérison, se soumettre à mes expériences magnétiques. Je trouvais facilement des dormeuses parlant dans le sommeil et devenant insensibles à la douleur; mais je ne rencontrais pas celle somnambule-de mes rêves, s’identifiant avec moi, obéissant à mes plus secrets désirs, à mes moindres volontés, sans que désirs et volontés fussent exprimés autrement que par ma pensée. Je cherchais vainement cette somnambule voyant sans le secours des yeux, trouvant à l'eau pure le goût qu’il plaît au magnétiseur de lui donner mentalement,'devinant ce qui se passe à des distances très-éloignées, découvrant dans le corps humain les lésions les plus cachées, enfin présentant ces phénomènes si surnaturels qu’ils épouvantent celui même qui les détermine. Mon scepticisme ne cédait qu’en partie aux expériences remarquables de Prudence, lorsque, tout à coup, j’ai trouvé le trésor que je cherchais. J’ai rencontré une somnambule parfaitement lucide et plussurpre-nante encore que celle qui m’avait tant étonné, et alors je me suis reproché d’avoir mis un seul instant en suspicion la bonne foi de l’intéressante et simple fille, et celle deM. Laurent, son magnétiseur. Aussi je saisis avec plaisir cette occasion de leur rendre pleine et entière justice, car j’ôbliens journellement plus qu’ils n’ont montré.
Voici comment j’ai fait ma précieuse découverte :
Je donnais, depuis plusieurs mois, des soins h une jeune fille de vingt-quatre ans, brune, bien constituée, atteinte d’une gastralgie tellement violente que plusieurs fois je passai la nuit auprès d’elle, lui prodiguant les soins les plus empressés sans parvenir à la soulager. Dans sa dernière crise, je lui administrai 5 centigrammes d’extrait gommeux d’opium, et, sous l’influence de cette
médication, tous les symptômes du somnambulisme naturel se montrèrent. Elle parla d’une foule de choses incohérentes, répondit cependant sensément à toutes les questions qui lui furent adressées, se leva, chantant, riant et pleurant alternativement, d’après les pensées qui se succédaient dans son esprit. Quelques vomissements survinrent, et tous ces symptômes disparurent, après m’avoir confirmé dans l’opinion que la malade serait magnétisable. Deuxjours après, M11” Marguerite allait beaucoup mieux, et, dans une de mes visites, je parlai de magnétisme à plusieurs de ses amies qui l’entouraient; l’une d’elles, très-curieuse d’en connaître les effets, consentit à se soumettre à un essai, et je me mis de suite à l’œuvre. La convalescente était placée à une petite distance, et tandis que je magnétisais la curieuse, ce fut la malade qui s’endormit. Je ne doutai plus de l’impressionnabilité de la dormeuse, et'je la magnétisai sérieusement.
Dès la première séance, je la plongeai, en moins de huit minutes, dans le sommeil magnétique le plus complet, et j’en observai les effets les plus merveilleux.— L’avare qui retrouve son trésor qu’une main avide lui avait dérobé n’éprouve pas un saisissemen t plus heureux que celui que je ressentis lorsque, formulant en moi cette pensée : « Que votre main droite, placée sur vos genoux, se lève et se porte à la tête, » je vis cette main, docile à ma pensée, obéir à mon désir. Je fus bien agréablement surpris lorsque je vis ma somnambule, sous l’influence du sommeil de plomb qui semblait la clouer sur son fauteuil, s’animer, se lever, et venir en chancelant jusqu’à moi, parce que telle était ma volonté. Je passai de surprise en surprise à mesure que je tentai de nouvelles expériences. L’ayant priée de chanter, elle chanta. Je l’arrêtai mentalement au milieu d’un couplet, et ce fut en vain que les personnes présentes l’engagèrent à con-
tinuer. Elle ne le fit que Iorsqueje formulai cette pensée : « Vous pouvez continuer. » J’étais dans le ravissement.
— Je lui demandai si elle voyait; elle me répondit presque fâchée : « Je ne suis pas aveugle que je sache; » et, pour prouver sa lucidité, malgré le mouchoir épais dont j’avais couvert ses yeux, elle indiqua les places occupées par les personnes qui se trouvaient dans l’appartement. Je lui fis jouer une partie d’écarté qu’elle exécuta beaucoup plus habilement que Prudence. — Je n’avais qu’à vouloir pour être obéi, et obtenir les effets les plus surprenants.
Retraçons ici les principales facultés magnétiques que présente M"' Marguerite. Elle est plongée dans le sommeil à quelque heure que ce soit de la journée, et un aussi grand nombre de fois que je le désire, sans attouchement, sans passes, à dix et vingt pas de distance, même d’un appartement à un autre, par la seule influence de ma volonté, et en moins de dix minutes.
Elle est si éminemment magnétisable que ses amies abusaient dè sa complaisance pour l’endormir et lui adresser mille questions de jeunes filles curieuses délire dans l’avenir. J’ai voulu que ma somnambule ne pût être magnétiséequepar moi, ctcesdemoiselles, qui mettaient en doute l’influence de ma volonté, firent à mon insu de très-longs et de très-vains efforts pour recouvrer leur primitive puissance. Mon pouvoir est resté supérieur.
Pendant le sommeil magnétique, l’insensibilité devient telle chez M"* Marguerite qu’on peut lui placer un flacon d’alcali volatil sous le nez, la pincer jusqu’à l’ecchymose , enfoncer des épingles sous scs ongles, expériences que j’ai faites en présence de plusieurs de mes confrères de Mâcon, sans qu’elle en témoignât la moin -dre sensation.
Elle porte un bras à sa tête ou à ses pieds, soulève la jambe droite ou la jambe gauche, se lève, marche, s’ar-
rètc cl tombe d’après les ordres que je lui intime mentalement.
Fatiguée par un hoquet qui paraît avec le sommeil et disparaît au réveil, elle demande parfois un peu d’eau.
— Celle eau lui élanl présentée, je la transforme instantanément en vin ou en vinaigre, si une des personnes présentes m’a indiqué ce genre de transformation. Cette même eau, qu'elle aura rejetée en disant: « Vous me donnez du vinaigre! » se changera en lait, en eau sucrée, en éther, etc., etc., d’après mon désir.
La vision à travers les corps opaques est portée chez M"° Marguerite à un degré de supériorité remarquable.
— Jouant à l’écarté les yeux parfaitement clos, elle ne s’amuse pas à prendre une carte et à l’étudier pour la désigner; elle joue sans fixer son jeu, voit même celui de son adversaire, et, si elle se trompe, répare aussitôt son erreur.
Elle reconnaît ou dépeint de la manière la plus exacte les personnes qui entrent dans sa chambre, étant cependant placée de manière à ne pouvoir les distinguer dans le cas môme où elle se serait réveillée.
Les pouces d’un incrédule placés sur scs paupières, elle désigne le plus grand nombre des objets qu’on lui présente.
Elle indique ce que renferme une boîte, et voici comment clic prouva sa lucidité à la première épreuve. Une personne lui présenta un carton renfermant des dragées.
— La somnambule les reconnut, et indiqua que ces dragées étaient blanches,et que, parmi elles, s’en trouvaient quelques-unes roses. «Il y en a de toutes couleurs, prétendit celle qui cherchait à la tromper. —Je n’en vois que des blanches et des roses, » affirma la somnambule; et, en effet, la boîte ne renfermait que ces deux couleurs.
Elle distingue parfois ce qui se passe à des distances très-éloignées, et chaque fois que j'ai pu vérifier l’exac-
tiiude de ses assertions j'ai reconnu qu’elle avait dit vrai, et j’ai compris la seconde vue dont sont doués quelques Ecossais.
Mise en rapport avec un malade, elle en ressent pour ainsi dire les douleurs, et indique son affection avec une exactitude qui n’a pas encore fait défaut. Je lui ai présenté vingt malades, et jamais elle n’a donné à l’un une douleur qu’il n’avait pas, ou omis une souffrance qu’il éprouvait. — Elle prononce avec une précision telle, que ce n’est pas sans inconvénient que les personnes gravement affectées peuvent lui adresser des questions pressantes. Elle prononce un arrêt sans précaution oratoire.— Jusqu’à quel point l’arrêt est-il sans appel? c’est ce que l’observation m’apprendra bientôt.
Enfin M116 Marguerite est le phénomène le plus extraordinaire et le plus intéressant qui puisse frapper l’esprit humain.
Je vois sourire les sceptiques à l’annonce de tant de merveilles!.... Le docteur est un visionnaire, un halluciné , s’il n’est pas un fou, disent les uns. — Le docteur est la dupe de quelques supercheries, s’il n’a pas voulu faire un feuilleton amusant, pensent les plus honnêtes. — Us peuvent rire, les incrédules. — Je ne saurais le trouver mauvais, car j’ai,'comme eux, beaucoup ri avant d’avoir vu et expérimenté. Mais aussitôt que la lumière est venue m’éclairer je n’ai pas fermé les yeux, et il a bien fallu me rendre à l’évidence.
P.-G. OltDlKAIKE, D. M. P.
[La suite prochainement.)
CLINIQUE MAGNÉTIQUE-
— Nous extrayons d’une lettre d'un de nos abonnés de Lyon le passage suivant :
« Depuis votre départ, je n'ai cessé de me livrer, autant que je l’ai pu, à la pratique du maguétisme, ainsi que vous nie l’avez enseigné, et, grâce à vos instructions, j’ai réussi constamment.
« Ma première tentative fut la guérison d’une gastrite nerveuse, et depuis que j’ai cessé de magnétiser cette personne, les accès n’ont pas reparu. Trois semaines de magnétisation ont procuré ce résultat. J’ai enseigné au mari de la malade les éléments du magnétisme.
« Dans le mois de novembre, j’ai commencé le traitement d’une dame de trente-deux ans, affectée de crises nerveuses dans la tète, qui se manifestaient régulièrement à l'époque des menstrues; au bout de trois semaines le somnambulisme s’est déclaré, mais d’une manière assez bizarre. Il fut précédé par des cris aigus arrachés par la violence des douleurs que j’avais fait renaître, par la vision de fantômes tous plus effrayants les uns que les autres, qu’elle medépeignaitavec rapidité, son visage exprimant la frayeur et les angoisses dont elle était remplie; j’ai pu croire un instant qu’il y avait folie.
« Enfin un somnambulisme calme succéda à ces crises; elle put voir son mal, dont la cause était, selon elle, une grande quantité d’eau amassée depuis longtemps sur le sommet de la tète, du côté droit, ainsi qu’une poche de sang fixée à l’épigastre.
« Elle ne s’est indiqué que deux tisanes pendant
(ont son traitement, et de l’eau magnétisée. Elle m’a toujours dit que le magnétisme était chez elle plus puissant que les médicaments.
« J'ai pu donner à l’eau magnétisée la vertu des plantes qu’elle m’indiquait, en sorte qu’elle croyait boire, fendant son état de veille, une véritable tisane. Un jour elle ordonna à son mari de prendre une bouteille d’eau de Sedlitz pour le purger. Je lui demandai si je ne pouvais pas la faire moi-même, et si elle ne serait pas aussi salutaire que celle du pharmacien. Sur sa réponse affirmative, je magnétisai à l’instant de l’eau commune avec la volonté, l’intention de lui communiquer la vertu nécessaire. Et, chose merveilleuse, son mari fut tellement purgé qu’il s’en effraya, et ne voulut pas en boire une seconde bouteille.
«Elle est sensible à l’attraction et répulsion. Je l’ai endormie deux fois à distance , c’est-à-dire en me promenant dans la ville.
« Enfin, monsieur, depuis qué je la traité, elle n’a eu qu’une seule fois sa crise, qui n’a pas reparu en convulsions, mais en migraine; elle touche à Ja fin de son traitement, car je ne l’endors plu? que deux fois par semaine.
« J’ai rencontré un sujet que j’ai endormi en trois minutes, et en cinq il était somnambule; en six minutes: lucidité. Je l’ai magnétisé quinze jours pour des douleurs d’estomac, qui ont été guéries durant ce laps de temps.
a Voilà, M. le baron, ce que j’ai fait depuis votre départ de Lyon. »
SOCIÉTÉS SAVANTES.
ASSOCIATION DES MÉDECINS DE PA5IS.
Séance annuelle. — Nous trouvons dans le rapport du docteur Perdix, secrétaire général, l’approbation de la mesure qu’a prise la Société médicale du sixième arrondissement contre trois de ses membres. Après avoir rapporté le texte et les considérants de cette mesure despotique dont nous avons parlé (t. 111, p. 334), le rapporteur ajoute :
« Il n’est pas un de vous, messieurs, qui ne rende hommage à cette juste application des principes moralisateurs auxquels nous voulons de plus en plus nous attacher, etc.
«Malgré la surveillance de vos comités, malgré le zèle de votre commission générale, malgré le courage et la persévérante fermeté de votre président (M. Or-fda), le charlatanisme, comme ces fléaux meurtriers qu’on ne peut arrêter dans leur marche insidieuse, poursuit partout scs ravages. Magnétiseurs, somnambules, homeeopathes se jouent delà crédulitépublique,etc.,etc. » C’est ainsi, par des rigueurs et des déclamaiions outrées, injurieuses, que ces prétendus gens vertueux et éclairés attaquent, conspuent deux vérités-mères. Ce seul fait nuira plus à leur considération que les bonnes œuvres qu’ils se proposent de faire ne pourront la re* hausser. Ce qu’on demande au médecin, c’est son savoir; ce que le malade réclame de lui, c’est la guérison, n’importe par quelle méthode. Laissons-les donc
fulminer'; leurs clameurs ne sont qu’un vain bruit sur lequel le public ne se trompera nullement.
Les liomœopatlies S3 défendront de leur côté ; nous ne sommes point solidaires. Quant à nous, qui sommes attaqués d’une manière si outrageante, nous nous justifierons en montrant partout les faits qui établissent notre doctrine et montrent à nu l'impuissance des médecins qui l’ignorent.
Ce rapport ne fulmine pas seulement contre les ho-mœopathes et les magnétiseurs, il va jusqu’à censurer des œuvres de morale et de fraternité. Nous y trouvons encore ce passage :
«Je vous diraiqu’ils’estrencontré un homme (M. Yien-net), un écrivain, un législateur, qui, devant un auditoire nombreux et brillant, au sein même de l’Académie française qu’il présidait, en décernant un prix de vertu, n’a pas craint, par une imprudente apologie, d’encourager l’exercice illégal de la médecine. Ces encouragements s’adressaient à une femme (Catherine Quéron), qui, pour avoir gardé des malades, se croyait capable de traiter des maladies. «On assure même, disait-il « dans son rapport, qu’elle guérit des malades abandon-« nés par l’homme de l’art, et en attendant que la Fa-• culté la fasse punir de cette audace, (’Académie lui « envoie un prix de 2,000 francs, pour la récompenser o de tant de bienfaits. »
O docteurs vertueux! un semblable avertissement devrait vous éclairer, vous faire comprendre que l’art passe en dehors de vous, et qu’on sait vous le dire au besoin.
SOCIÉTÉ DU MESMÉRISME.
Séance du, 26 novembre. — L’expérience en tout est d’une uberté si grande, ses produits sont si précieux, les fruits qu’elle porte si délicieux qu’on ne saurait trop
haut proclamer son utilité. Sans son concours, en effet, les sciences, dont elle est la mère et la nourrice, dépérissent, languissent comme s’étiolent les plantes privées de lumière. Elle fait éclore les germes intellectuels comme la chaleur fécondante du printemps fait germer les graines que la terre recèle. C’est le levain qui transforme nos vagues conceptions en réalités tangibles et en vaporeuses fictions, comme le feu d’un alambic change les fleurs en parfum suave et en marc fétide. Celui qui veut suivre une marche sûre et rapide dans l'étude du magnétisme doit la prendre pour guide, car elle est la clef des mystères de la nature, le flambeau de la vérité, l’égide de l’investigateur intrépide, la pierre de touche de l’observateur attentif, qui n’acceptent les théories aux pompeuses promesses qu’après un examen sérieux, une vérification scrupuleuse, le critérium du savant, enfin, qui refuse l’endossement d’une valeur fictive qu’on appelle hypothèse!
Tant que la physique resta confinée dans les régions spéculatives elle ne progressa point; mais quand Galilée, quittant le sentier battu de l’abstraction pour entrer dans celui des faits, la rendit expérimentale, démonstrative, elle marcha si vite que ses vieux amants ne la purent suivre. De même pour les autres sciences physiques. Le mesmérisme, qui est de cetordre, doit avoir le même sort. On obtient effectivement, depuis qu’on multiplie les expériences, des résultats qu’on était loin de prévoir, qui sont incroyables même pour ceux qui n’ont point suivi le développement progressif de ces expérimentations.
Après des effets généraux obtenus sur six personnes différentes de sexe et d’âge, M. le docteur Cruxent magnétise M. Comas, somnambule exatique, sur lequel il exerce une action instantanée. Le sujet est dans la dépendance absolue du magnétiseur, qui lui fait exécuter
toutes sortes de mouvements, par un ordre mental; ainsi il tourne, avance, recule, lève les bras, les jambes, s’assied et se relève au gré du magnétiseur. Mais cette singulière domination ne s’arrête pas au corps, elle affecte l’esprit ou plutôt elle est morale avant de se traduire physiquement. Et, de même que l’argile prend toutes les formes que le potier lui donne, l’esprit du patient se place dans toutes les situations qu’il plaît au magnétiseur de lui donner ; ainsi l’idiotisme, l’hilarité stupide, la fureur, tontes les idées d’un maniaque ou d'un imbécile le dominent successivement; il est réduit à la condition de la brute asservie. On le plaint, on souffre de le voir dans cet état qui rappelle en tous points les descriptions lycanthropiques des sorciers. L’auditoire ému reste frappé de terreur en pensant aux conséquences funestes qui peuvent résulter d’une telle perturbation de l’entendement. Mais une modification de pensée fait évanouir tout ce désordre, et l’é-tonnement se peint sur tous les visages de voir dans son état normal, avec toute sa1 sérénité intellectuelle, celui dont, tout à l’heure, l’étrange situation excitait la compassion des assistants.
Séance du 3 décembre. — Réception de trois membres stagiaires, MM. Roigneau, Emile Jacques et Guilloux.
Séance du 10. — Les phénomènes d’attraction, de répulsion, de coma, d’insensibilité générale et spéciale, et quelques autres bien connus, s’observent sur sept personnes qui se présentent pour être magnétisées.
Séance du 17. — M. Lebrun, officier de santé et pharmacien, soutient sa thèse sur les maladies hystériques.
11 est admis membre titulaire.
M. Dalmas, docteur-médecin, et M. Ramel, sont aussi admis membres stagiaires.
M. Maeyens soutient sa thèse sur l'échange simultané du fluide nerveux, de magnétiseur à magnétisé. Ce tra-
rail, au milieu de beaucoup d'hypothèses, contient quelques aperçus nouveaux sur l’explication de certains phénomènes magnétiques, dans le détail desquels nous ne pouvons entrer maintenant. Comme toutes les questions obscures, peu ou mal étudiées, celle-ci donne lieu à une controverse; les esprits restent partagés, et le tout se termine par l’admission du candidat au nombre des membres titulaires.
CONFÉRENCES MAGNÉTIQUES.
Dans ses dernières expériences M. du Potet ayant cru découvrir une nouvelle loi magnétique, attendait avec, impatience le moment de s’en assurer par des faits sur lesquels aucun doute ne restât. Dans la conférence du 21 février, s’adressant à l’assemblée, notre maître a dit :
« Si le tracé des lignes influe sur le résultat de l’expérience, s’il n’est pas indifférent qu’elles soient faites de telle ou telle manière, nous avons fait une découverte magnifique, et uu progrès marqué doit en résulter dans la science magnétique. Nous allons donc, devant vous tous, tracer de nouvelles lignes de craie, et pour qu’il ne puisse y avoir d’incertitude, toutes partiront d’un point donné, sans irrégularité, afin que l’épreuve soit complète. Soit la flèche ci-dessous :
«Toutes les lignes de l’extrémité A, cônvergeant au point B, se prolongent jusqu’en C, où convergent égale-
ment les rayons D et E. Si je ne me trompe, il doit y avoir deux actions bien distinctes, l'une qui porte les expérimentés de A vers G; l’autre qui les empêche d’aller de C à A. Plaçons donc, pour avoir de suite un exemple, un sujet résolu dans les conditions supposées, et voyons les phénomènes qui vont se manifester. »
En conséquence, M. G*** est prié de se placer au point B et d’analyser avec tout son sang-froid les sensations qu’il y éprouvera. Bientôt une sorte de défaillance, de faiblesse se manifeste; il assure sentir par les pieds un écoulement de ses forces. Ma tête se vide, dit-il ; puis, ne pouvant plus se maintenir verticalement, il s’affaisse et l’on est obligé de le soutenir. Il accuse de plus en plus l’épuisement de tout son être; et l’on remarque un état syncopai, caractérisé par la pâleur du visage, la débilité, l’atonie générale et une respiration si courte qu’elle est presque insensible. On l’enlève immédiatement pour le placer au bout C de la flèche ; on voit aussi tôt^es phénomènes d’une vitalité puissante apparaître, chasser la faiblesse, comme quand un animal, un instant plongé dans le vide, rentre dans l’atmosphère. M. C*“ sent distinctement des courants fluidiqnes s’établir de la flèche à lui. Il éprouve là des sensations tout à fait opposées à celles ci-dessus décrites; il jouit de cet état, s’y complaît, manifeste sa joie et voudrait rester plus longtemps sur ce point.
M. du Potet, pour s’assurer que l’imagination n’entre pour rien dans la production de ce fait, prend un jeune homme nouvellement arrivé, qui n’a rien entendu ni vu de l’expérience précédente, qui ignore le but qu’on se propose. Mis au point C, à la place que vient de'quitter le précédent sujet, on voit avec une grande surprise qu il respire avec activité, qu’il éprouve une sorte d’excitation fébrile; ses yeux brillent; il semble vivre davantage. Prié d’avancer, il fait un pas sur le tracé, mais
ne peut poursuivre sa route; il multiplie ses mouvements; mais en vain scs muscles se gonflent, le dépit, la colère s’empare de lui et ses efforts sont inimitables comme indicibles. On le laisse cependant dans cette situation et 011 l’excite à poursuivre; mais quelque chose d’infranchissable le repousse, comme à la marée montante le flot repousse, rejette à la côte l’imprudent qui s’avance. Furieux, il s’élance la tête baissée; vains efforts! 11 ne va pas à la moitié de la flèche. Un homme que l’on eût placé sur une glace polie, ayant aux pieds des patins et retenu par des liens fixés solidement à un poteau et le ceignaut au milieu du corps, et voulant avancer, donnerait l’image des mouvements bien infructueux effectués par l’expérimenté, qui, suant à grosses gouttes, après avoir fléchi cent fois sans tomber, demande, prie qu'on le retire de cette position. Il accuse des sensations en tout analogues à celles de son prédécesseur ; son corps était parcouru par un fluide pénétrant qui portait par tout son trajet une excitation vitale, remarquée d’ailleurs par tout le monde dès les premiers instants. Il se sentait vivre doublement sans pouvoir comprendre par quel mystère, par quelle puissance ce fait s’était produit. Mais quelques minutes après l’opération, il éprouvait dans les bras et les jambes le sentiment de fatigue d'un homme qui a beaucoup lutté.
Une troisième expérience tentée fut moins concluante. On n’avait que le diminutif des précédentes, soit parce que cette personne est moins impressionnable ou plutôt parce que l’action des lignes était affaiblie. Cette supposition est très-probable, et l’on eût dû à chaque essai renouveler les lignes en partie effacées, car il doit y avoir soustraction du principe agissant par les corps mis en contact; c’est au moins ce qui arrive pour des agents analogues.
« Les conséquences à tirer de ces faits, ajoute M. du
Potel, sont nombreuses. Ces faits indiquent pourquoi dans la magnétisation directe et par contact, ou obtient du sommeil ou de l’excitation selon les procédés suivis. Ils justifient les principcsquc j'ai posés dans le Manuel de l’ctudianl magnétiseur, et reportent au système de Mesmer, qui admettait des pôles dans le corps humain ; car les effets produits par son baquet et scs verges de fer étaient tantôt positifs et tantôt négatifs. Ce grand homme n'avait pas eu le temps de découvrir les vraies lois du magnétisme; les crises convulsives dans lesquelles il mettait les malades résultaient d’une magnétisation mal dirigée, car il sera possible désormais de produire à volonté le calme ou l’agitation : nous eu donnerons les preuves les plus multipliées. Mais ce n’ést là qu’un fait de la découverte nouvelle ; voici qui est plus important.
«Lorsque nous avons parlé de magie nous en admettions l’existence, convaincu que sa source était dans le magnétisme, comme toutes les merveilles de la nature ont leur cause dans des agents ou des forces qui s’y trouvent; il n’est donc pas besoin de recourir à des interventions diaboliques ou divines pour expliquer les phénomènes. Un jour viendra où l’ignorance revêtue du manteau de la science sera à tout jamais bannie, où il sera reconnu que tout miracle est physique, qu’il a sa cause soit en nousmême,soitextérieurementendesagents d’un ordre élevé sans doute, mais dont l’action n’a jamais cessé d’exister.Trop longtemps les savants ont laissé dans l’oubli ou abandonné au vulgaire une étude si curieuse et si utile. Curieuse, car c’est par elle seule qu’on peut donner aux sciences ce qui leur manque : la connaissance des premiers principes; utile, car c’est par elle seule que les préjugés, que les erreurs, que des crimes même peuvent disparaître de la terre.
« Heureux nous sommes d’ouvrir le chemin, malgré les clameurs des gens qui se repaissent de chimères, quel
que soit le jugement des plus éclairés, qui semblent faire un crime à l’homme d’oser toucher à l’arche sainte, c’est-à-dire de porter une main sur ce que les siècles barbares nous ont transmis comme des vérités, et qui n’est à nos yeux qu’un défaut d’observation ou le fruit d’impostures intéressées. Pourquoi faut-il que ce soit un homme faible qui donne l’exemple? Tant de gens capables, pensants, auraient dû devancer et dire au monde ce que dans leur for intérieur ils reconnaissaient d’opposé aux superstitions régnantes. Il est vrai que l’on court risque d’étre placé au rang des fous, des méchants, des impies, tandis que Dieu ne cesse d’inspirer la tolérance et de crier aux hommes : la lumière luit dans les ténèbres; mais ils ne l'ont point comprise.
» C’est en vain que le travail que nous entreprenons a été tenté par le raisonnement : assurément les ouvrages des philosophes, des penseurs sont nombreux sur ce sujet; mais le raisonnement fait peu dans ces matières, souvent môme il augmente les difficultés; car, n’ayant pour appui que des abstractions, ils n’avaient point la puissance de commander à la croyance et d’em-pécher les sophistes de détruire le peu de bien qui résultait de leurs œuvres.
« Nous n’avons point la prétention d’imposer nos idées, mais d'amener ceux qui voudront s’éclairer à répéter les expériences qui ont jeté quelque lumière dans notre esprit. Ce n’est que petit à petit que le travail commencé aura quelque importance, et un jour d’autres hommes apparaîtront, qui, saisissant tous les faits, reconstruiront l’édifice des connaissances antiques. »
Dans le prochain numéco, nous donnerons un curieux article de M. du Potet sur la magie magnétique.
VARIÉTÉS.
Irène. — On est étonné, en voyant cette pièce, de la hardiesse des auteurs et de leur profond esprit d'observation.
Le jeu laisse beaucoup à désirer. L’acteur ne sait rien du magnétisme; il s’y prend en novice pour déterminer l’attraction; aucun magnétisé n’obéirait à un semblant d’énergie : il faut plus que des gestes. Mais au théâtre, le réel n’est pas nécessaire, le public ne le demande pas. Le succès immense de cette pièce atteste le progrès du magnétisme dans l’esprit des masses; chaque soir une foule compacte encombre la salle, et Rose Chéri reçoit les applaudissements qu’elle mérite.
Vous croyez peut-être, lecteurs, que ce succès éclairera les savants, qu’ils étudieront la science qui se traduit ainsi ;détrompezvo us : on magnétisera dans la rue, dans la loge du portier de nos grands hommes, avant qu’ils se décident à examiner cette force prodigieuse qui peut asservir un être à un autre être. Nous vous l’avons dit déjà : il faut que des crimes nouveaux apparaissent pour que les savants, maintenant pleins d’éther, se réveillent enfin de leur ivresse. Les secrets des temples anciens sont profanés et apparaissent sur le théâtre pour y être dévoilés. Relie chose ! ma foi. Nos Académies ne connaissent des primeurs que quand il s’agit de légumes ou de fruits; les grands faits, les découvertes du génie ne leur arrivent que quand tout le monde en est rassasié; c’est ainsi qu’ils remplissent leurs fonctions. La science n’est-elle point un sacerdoce? Voyez quels dignes mi-
nislrcs de cc culte recèlent l’institut et la rue de Poitiers.
Lecteurs, allez voir Ircne, c’cst un tableau ravissant. Irène ne dort pas ; mais songez qu’il y a aussi en dehors du théâtre beaucoup de somnambules qui ne dorment pas non plus, coûtent plus cher et sont moins belles.
L’éther. — Dès le premier jour nous avons dit que l’éther serait plus favorable que nuisible au magnétisme. Nos prévisions se réalisent. Les efTets de l’un contrôlent, sanctionnent ceux de l’autre, parce que les vérités sont sœurs et se prêtent un mutuel appui. Ainsi/éther a vaincu d’abord la résistance que le magnétisme rencontrait encore à l’égard de l’insensibilité. Maintenant l’ané-sthésie est un fait acquis pour tous; le magnétisme en a commencé la conquête, c’est l’éther qui l’achève : le triomphe est commun.
Nous avons souvent soutenu que le magnétisme détruirait les systèmes qui régnent en médecine; chaque jour en apporte la preuve. Un médecin américain, le docteur Cutter, de Nashua, observa il y a quelques années la continuité du travail parturitif durant le sommeil et l’insensibilité magnétiques. (Voyez tome Ier, page 116.) Ce fait, contraire aux données physiologiques régnantes, ne fut point cru, surtout à cause de son origine magnétique. Mais voila qu’aujourd’hui M. Paul Dubois obtient la même chose avec l’éther. Dans sa communication à l’Académie, le professeur d’obstétrique dit positivement que l’inhalation de l’éther ne suspend ni les contractions de l’utérus ni celles des muscles abdominaux!... Vous voyez bien que toujours la vérité triomphe, qu’une découverte en amène une autre, et qu’elles se contrôlent sans se nuire : la vérité est une et ne saurait être détruite.
Les premières éthérisations nous ont émerveillé. L’éther, agissant sur presque tous les individus, est d’une
application si prompte et si facile, que noos l’eussions de beaucoup préféré au magnétisme dans la pratique chirurgicale, si des suites funestes n’avaient soudain refroidi notre enthousiasme. Suivant assidûment les cliniques, nous avons vu toutes les plaies devenir baveuses, la cicatrisation languir, et les malades qui avaient le mieux supporté de grandes opérations mourir de résorption purulente. A l’Académie on ne parle pas de ces désastres, mais l’humble praticien qui les constate se tient en garde contre l’engouement général. Ayant fait observer à un grand chirurgien que les opérés mouraient tous de la même maladie, il nous fut répondu que c’était à l’encombrement, à l’air vicié de l’hôpital qu’il fallait attribuer ces ravages; qu’en ville les malades, mieux aérés, mieux soignés, n’éprouvaient aucun accident fâcheux. Celte raison est possible, mais ne nous paraît pas la seule; car l’éthérisation est une intoxication véritable, un empoisonnement amenant la mort par asphyxie, comme le gaz qui s’échappe des charbons ardents.
Ce moyen subira des perfectionnements, on trouvera sans doute l’antidote de ce poison; mais, en attendant, on l’applique à tort et h travers, sans même en connaître la dose, sans s’inquiéter nullement des suitès; c’est un marleau puissant avec lequel on frappe sur l’enclume humaine, cette chair à expérience, comme dit Lisfranc dans son langage pittoresque. La métacoloration du sang, qui s’échappe noir des artères, arrêtera peut-être ce débordement d’essais, et l’on finira par où l’on aurait dù commencer : l’expérimentation sur les animaux.
Sursensibilité. — Il y a en ce moment, salle Sainte-Marthe, à la Charité, une jeune fille, aveugle par amaurosc, traitée par la strychnine. Ayant observé qne la main de M. Gcrdy, approchée des yeux de la malade pour explorer la sensibilité de la rétine, faisait contrac-
ter spasmodiquement les muscles de la face, je pensai que cet effet était dû à une action magnétique spontanée. Quand la visite fut finie, je revins auprès de la malade, et, tout en lui causant, pour distraire son attention de l’essai que je voulais faire, j’approchai ma main de son front; elle en fut avertie par une violente secousse. Craignant que le déplacement de l’air ne fût la cause de cet effet, j’approchai de nouveau, avec précaution, une attelle de sa joue : je n'obtins rien; mais un de mes doigts étant dirigé de la même manière, sans intention de magnétiser, le premier effet se reproduisit.
Interrogée, la malade médit que cette extrême sensibilité lui venait environ une demi-heure après l’ingestion du médicament, et durait de trois à quatre heures, en s’affaiblissant de plus en plus. Le lendemain je m’assurai par une multitude d’expériences que, sous l’influence de la strychnine, la sensibilité générale et spéciale était très-exaltée, et que l’approche des corps animés était sentie sans contact. D’où je conclus qu’une émanation magnétique involontaire a nécessairement produit cet effet.
Il y a des substances qui engourdissent, endorment la sensibilité', d’autres qui l’exaltent; il serait bien curieux de les étudier à ce point de vue.
L’Homœopathie. — M. le docteur Léon Simon, qui fait un cours d’homœopalhie, avait pris le magnétisme pour sujet de sa dernière leçon. Beaucoup de magnétiseurs y assistaient. Après avoir exposé l’opinion de Hahnemann, qui regarde le mesmérisme comme une force curative (I), et dont il spécifie l’application, M. Léon Simon a dit qu’il était oiseux, puérile, indigne d’hommes instruits et sérieux, de controverse!- sur laréalité du magné-
(1) Vojei son Organon el ses Maladict chroniqua.
tisme. Â son avis, c’est un fail tellement évident, tant de preuves en ont été données, qu’il faut être devenu académicien pour le nier. Quant à son rôle thérapeutique, principal objet de cette leçon, il l’a limité aux affections sporadiques, qu’il peut guérir; aux typhoïdes débutantes, qu’il amende; quant aux chroniques, il le déclare souverainement impuissant à les guérir; mais, et cela paraît contradictoire, il le proclame supérieur à tout autre moyen dans certains cas compliqués ou rien n’agit : alors c’est un adjuvant utile, mais.voilà tout. En quittant cette terre solide, M. Léon Simon a voulu entrer dans l’examen du somnambulisme; mais il était facile de voir qu’il n’y connaît rien; il s’est embrouillé tellement, qu’il a présenté cet clal comme un agent. La clairvoyance, appliquée au diagnostic, a été mieux appréciée; il a constaté qu’elle était souvent fautive, et que le traitement est presque toujours conforme aux idées du médecin, en d’autres termes qu’il y a communication de pensée, motif qui la lui fait rejeter.
En fin de compte, le magnétisme ne peut être employé concurremment avec l’homœopathie dans les maladies aiguës qu’ils peuvent guérir ; il faut que l’un cède le pas à l’autre, et M. Simon accorde naturellement sa préférence à l'homœopathie. Que les magnétiseurs, dit-il, mettent de l’ordre dans leurs observations, dépourvues d’esprit d’analyse; jusque-là les guérisons qu’ils ont obtenues ne peuvent entrer en ligne de compte scientifique et lutter de pied ferme.
Il y a du vrai dans cette appréciation. C’est généralement par l’absence de connaissances médicales que pèche la relation des traitements magnétiques; mais, pour être mal narrées, ces guérisons n’en existent pas moins. Le gargon scientifique n’est qu’un bien maigre accessoire; ce qu’il importe, c’est de guérir, et il est incon. testable que les magnétiseurs ont guéri (et guériront)
sans les connaître ni les bien décrire, des maladies à' la cure desquelles les plus savants docteurs, même liomœo-patbes, avaient vainement épuisé leur grec et leur latin. Dénier aux écrits des magnétiseurs toute espèce d’autorité nous paraît, de la part d'un homme aussi éminent que M. Simon, une partialité que rien ne.justifie.
Autre chose nous a frappé. M. Simon affirme que le magnétisme est impropre à la curation des maladies chroniques, tandis que les magnétiseurs ne se sont presque appliqués qu’à la curc de ces maladies. L’espace nous manque pour discuter cette opinion; mais les bonnes dispositions que montrent messieurs les homœopathes nous fourniront l'occasion d’y revenir.
Chronique. — On va jouer aux Variétés une pièce intitulée : leHaschich, VEther et le Magnétisme. L’esprit en est, dit-on, favorable à la cause mesmérienne.
— L'Illustration du 13 février, dans son analyse d'Irène, badine un peu sur le magnétisme.
Il y a dans le même numéro la figure d’un vase grec représentant une scène magnétique.
— L’Esprit public du 24, à propos de l’éther, parle des magnétiseurs en termes peu flatteurs. Cette gentillesse nous vient d’un docteur microscopique... je voulais dire micrographc! N’importe la désinence, c’est toujours petit.
— L'Époque du 18 contient tout entier le rapport du docteur Perdrix, dont nous parlons page 144.
— Le Bulletin de thérapeutique, critiquant l’article du Médical Times, le premier qui a paru sur l’éther, dit que c’est.pour contrebalancer les tours de passe-passe des charlatans que M. Lcston a employé l’éther. Puis il ajoute : « Pauvres expériences!!! L’homœopathie et le « magnétisme animal se donnent la main aussi bien à « Londres qu’à Paris. »
Le Médical Times répond à cette invective en prenant la défense de la vérité magnétique.
Le même journal annonce que, vingt-quatre heures après une opération de 'lithotomie exécutée à l'hôpital de Suffolk etColchester, le patient, qui avait été endormi par l’éther, a succombé. Un vieux monsieur qui, la semaine dernière, a été opéré par M. Travers pour un mal de pied, a également succombé vingt-quatre heures après l’opération sans que l'on ait pu le faire sortir de la stupeur où l’éther l’avait plongé.
— Le Zoist, dans son dernier numéro, porte à cent trente-six le nombre des opérations faites à l’aide de l’insensibilité magnétique.
—LeMorning chronicle du 17 février, parlant des cent trente-six opérations citées par Ihe Zoist, dit :
« Comme publicistes, nous ne sommes pas appelés à « discuter les points controversés de la médecine ; mais, « en présence des faits qui se produisent de toutes parts, « uous sommes naturellement amenés à demander : « Pourquoi cette négligence de faits si importants? Pour-« quoi, depuis huit ans surtout, des milliers de patients « ont-ils enduré des tortures inutiles? Pourquoi les mé-« decins ont ils négligé le premier de leurs devoirs, l’al-« légemeutdes souffrances? Nous savons que cette insen-« sibililé est souvent difficile à produire; mais est-ce à dire « qu’on ne doive l’essayer? Mais surtout nous demandons : « Pourquoi cette soudaine conversion par l’éther? Nous a craignons qu’en cela, comme en toutes choses, ils aient « été guidés bien plus par leurs préjugés que par leur rai-« sou; et parce qu'au commencement des discussions « magnétiques quelques-uns ont ridiculisé et nié la nou-« velle vérité, la foule a suivi les chefs sans s’enquérir. « Nous avons de fréquentes occasions, en discutant d’au-« très matières, de dénoncer une telle conduite, et nous « devons exprimer ici notre étonuemeut de ce que les
« quarante mille médecins de l’Angleterre aient oublié « leur devoir envers l’humanité souffrante au point de « négliger l’étude d’un sujet aussi important. » Appréciant la création de l'hôpital magnétique de Calcutta et la nomination du docteur Esdaile à la direction de cet établissement, ce journal ajoute :
» Cela nous offre un curieux contraste : les chirurgiens « de l'Orient opposés h ceux de l’Occident. Les premiers « enlevant les membres sans douleur; les seconds sui-« vaut la bonne vieille méthode orthodoxe, qui considère « la douleur comme nécessaire. »
Plus loin il dit encore :
« Toutes les fois qu’une opération est inévitable et « qu'elle doit être longue, le sommeil magnétique est « préférable à celui de l’éthcr, parce que dans la grande « majorité des cas, ce sommeil peut être facilement prolongé, môme au delà de l’opération, et renouvelé, «sans inconvénient, à chaque pansement. Et si nous « ajoutons à ces puissantes raisons que le mesmérisme « est un remède pour beaucoup de maladies non amen-« dables par les moyens ordinaires, nous pensons que « nous en aurons assez dit pour sommer les médecins « d’examiner à fond cette matière. C’est un devoir qu’ils «ont contracté envers la société, et la voix'publique « saura bien en exiger l’accomplissement. Au reste, l’his-« toire de la médecine doit suffisamment montrer aux «jeunes membres de cette profession la nécessité qu’il « y a pour chaque homme d’examiner par lui-même un « tel sujet, etc. »
— La Démocratie pacifique et la Mouche ont reproduit notre article sur l’hôpital de Calcutta.
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (de Garnay).
P*ri». — Imprimerie d'A. Rué et Comp., rue de Scioe, 33,
THÉORIES.
A MONSIEUR LE BARON Dl' POTET.
Mon cher Maître,
Un des plus grands philosophes de l’antiquité disait à ses disciples : « Zo^Woç /ucytm» Miamit, sW&' to' Si 0;ùv Oipxirstx (1). C’est bien sage ii lui d’étudier la magic , car c’est véritablement la médecine des dieux. » Platon conseillait la recherche de ce grand problème, qui consistait dans la connaissance des prodiges dont les causes se perdent dans l'immensité de la nature (2), alors que la vérité étouffait sous le plus ténébreux chaos. Et maintenant que la déesse est sortie des Ilots toute rayonnante de beauté, maintenant qu’efte ne réclame que de l’amour et des caresses, du haut des chaires où l’on devrait nous convier à ses enivrements, on nous crie de fermer les yeux. Ainsi que tant d’autres j’allais suivre la route commune, quand un peu plus bas, selon les vues actuelles, mais bien autrement haut, selon les cœurs inities, j’entendis une voix qui disait : « Jeune homme, il v a danger de te perdre dans les ténèbres. Pourquoi ne le ceindrais*tu pas les reins? Pourquoi t’engager ainsi sans •lumière? » Cette voix avait le timbre de mon pays. Je
(1) Platon dans Aleibiadt. - (j) Id., Déf. de l„ nngir%
TOMEIV.— X» 4«.— 25 MAIIS 18/*7. c
penchai la tête.... et mes oreilles furent émerveillées, et mes yeux n’avaient plus assez (l’orbite.... J’étendis les mains, je me jetai à genoux.... Mais ce n’était point des hommages que vous vouliez, monsieur le baron, ce n’était que mon cœur à guider, que mon âme à réchauffer au souffle divin. Vous me sauvâtes du naufrage en me disant au seuil de l’école : « Ami, prends garde, n’avance pas que je n’aie dessillé tes paupières. Viens, que j’apprenne tes mains à disposer du trésor ignoré que recèle ton être. » J’ai puisé sans tribut à la source, j’y ai bu largement. Et pour merci, monsieur le baron, je n’ai rien, rien que la semence que vous m’avez donnée ; daignez en accepter les fruits. C’est la première fois que ma plume essaie la route; puisse-t-elle ne jamais courir que sous d’aussi nobles auspices!
Votre élève et concitoyen,
E. L.
DES PHÉNOMÈNES MAGNÉTIQUES DE TRANSITION.
§ 1. Théomèdisme.
« Nalura non copulat extrema sine medio. La nature ne réunitjamais deux extrêmes sans transition. » C’est là mon point de départ, et, dans tout le chemin que nous allons suivre, nous sentirons de plus en plus la vérité de ce précepte, qui marche de pair avec le suivant : une science ne saurait exister que le jour de son baptême, c'est-à-dire qu’à chaque pas nous trouverons du magnétisme avec des dehors si séduisants que nous nous dirons : comment se fait-il que la science compte si peu de jours? Eh! c’est qu’elle n'avait pas de nom. — Qui ne connaît Platon? Qui ne connaît César ? Otez le nom de ces hommes, qu’en reste-t-il? un philosophe, un vainqueur; vous les voyez déjà dans l’ombre de la généralité. Ainsi du
magnétisme : confondu parmi une foule de sciences qui le déchiraient, il n’existe réellement que depuis le jour où Mesmer le baptisa. La fable, une des plus belles portions de l’histoire; la poésie, reine des lettres; la philosophie, la médecine, la magie, la physique, l’environnaient de tant de feux, qu’il disparaissait au milieu d’elles. Mesmer le saisit par le front, et malgré les clameurs affamées de toutes ces sciences, il établit devant elles une rivale invincible, et accomplit par là le miracle le plus étonnant que je sache : tirer la mère du sein de ses enfants. Écoutez et vous jugerez.
Et d’abord, la Genèse en main, voici ce que je crois démêler de l’œuvre des six jours :
Le front de Dieu est le siège de l'esprit ; celui-ci donne la lumière, qui est l’âme du ciel. Ces trois principes, intarissables Iluidcs par excellence, sont réunis à la matière par l’intermédiaire de la vie, quej'nppellerai l’ensemble des existences manifestées par des propriétés d’esprit et de matière. Puis viennent les trois principes inertes, la terre, les ténèbres et enfin l’abîme (aëva-•70' : a, sans; ffuoco, poétique de SùCto;, fond) le vague des espaces où nage l’univers.
La vie est donc la transition de l'esprit à la matière. Mais l'homme n’cst-il pas le résumé de la vie? N'a-t-il pas dans sa tête esprit, lumière et ciel? Ne tient-il pas de son corps à la terre, aux ténèbres, à l’abîme? Donc c'est lui qui fait transition. Mais il est encore à nos yeux
Esprit.
Lumière.
Ciel.
Vie.
Terre.
Ténèbres.
Abîme.
Spiritus.
Lux.
Terra.
Tcnebrœ.
Abyssus.
Cœlum.
Vita.
de deux parts bien distinctes; la première qui tient de l’esprit, l’autre de la matière : deux extrêmes incompatibles. « Natura non copulal extrema sine medio. » Or, entre l'âme et le corps, substances de nature si inverse, il faut de toute nécessité une transition qui tienne à la fois de l’un et de l’autre; c’est dans la loi de la création, depuis la terre jusqu’à Dieu, depuis l’éponge jusqu'à l’homme.
Tous les philosophes en ont senti l’existence et l’ont décrit avec plus ou moins d’ambages. Aristote l’appelle corpuscule spirituel (tcoustíov irvsufMtT&ov.) « Son élément, ajoute-t-il, est divin, et répond proportionnellement au ciel el à la terre. » Sa nature n’est ni spirituelle ni matérielle, et pourtant elle découle de l’esprit et de la matière. Ce n’est point le corps, c’est déjà de l’âme ; ce n’est point l’âme, car c’est aussi du corps. « Non cor/nis, sed jam anima; seunon anima, etjam corpus. »
Le véhicule de la volonté de l’âme au corps, le lien des Ames, la cause d’antipathies et de sympathies invincibles, c’est le magnétisme. Selon le plus grand nombre, sinon selon tous ceux qui ont traité de cetLe matière, l'esprit médian ne se borne pas à l’homme. La raison en est toute simple. Qu’est-ce que l’homme? Le résumé de l’univers, le microcosme. Donc l'univers doit posséder toute« les propriétés de l'homme. L’âme des mondes ne peut agir sur eux que de la môme manière que l’âme de l’homme agit sur le corps. Il faut que ce tiers médiant soit partout : de sorte que la moindre parcelle de la nature soit vivifiée par une étincelle qui corresponde à ses besoins, étincelle qui communique le mouvement, la volonté aux particules inertes ; d’où tous les corps existants seraient ainsi liés entre eux par une sorte de parenté qui les ferait s’embrasser dans la constitution de la nature, et ce lien, par la môme raison, réunirait la nature au créateur. Aussi pourrons-nous
dire : « Ce n’est pas l’univers, c’esl presque Dieu ; ce n'est pas Dieu, car c’est presque l'univers. »
Ptoléinée, en traitant des astres, appelait àmoppgfm la force qui maintient l'harmonie parmi eux, c'est-à-dire force qui découle de l’un et de l’autre ( ztto, p/co), et qui est en raison de leur influence respective. Dieu étant le moteur de celle force, nous remontons toujours au principe par le même chemin.
Aristole (I) l’appelle la continuation des inférieurs aux supérieurs ( «CTràyiowffiç, complément ), force mé-diante qui, tenant au principe , l aide à gouverner ses œuvres en leur transmettant sa volonté.
Tout ceci peut se résumer en un seul mot : t/iéomér-(Usine (0£oç, divin; Mt&tç, régisseur). Toute l'antiquité respire celte atmosphère, et le paganisme, en résumé, n’est autre chose que la croyance mal entendue de cette idée primitive : « Dieu dans toutes ses œuvres. » Idée qui devient pour nous de la plus grande évidence par le théomédisme : « Dieu adhérant à toutes ses œuvres par un milieu transitoire. » Ainsi nous évitons le matérialisme et nous rattachons la matière au principe spirituel.
l’ourlant je ne veux pas pousser cette idée jusqu’à dire que le magnétisme soit justement dans tout; au contraire , je prends deux noms pour bien faire sentir que ce dernier est adhérent à l’homme; je ne le sépare pas non plus du théomédisme, car il me semble de nature tout une; c’est ce qui m’explique la transmission de cette force humaine à travers l’espace. Du reste, qui prendrait à la lettre ce que je viens de dire n’entrerait pas du tout dans le cadre que je me suis tracé; mais il faudrait être bien aveugle aussi pour ne pas reconnaître l’existence d’un certain éther communiquant du ciel à la terre, éther que le moyen âge appela : complément de la
(1) Lib. I, de Cceto, c. 9 cl 12; Métaph., c. 7, I. île mundo, 30,
forme extérieure, déterminant des corps, vertu médiante qui unit les corps entre eux, cause des effets admirables, des propriétés occultes, des œuvres secrètes, des rapports de sympathie et d’antipathie, enfin tout le domaine où la magic s'assied le sceptre en main. Le théomédisme posé, vous allez voir les conséquences que nos docteurs scolastiques surent en tirer, ou plutôt tout ce qu’ils embrouillèrent dans la même idée, eu ne raisonnant que par le syllogisme au lieu de regarder la nature et de faire du tout des cl parle essentiellement différents.
L’astrologue se dit : * Il existe dans la nature des affinités qui ne sauraient dépendre des éléments respectifs des corps, mais bien d’une irradiation de l'astre qui les vit naître, et qui, cejour-là, par l’intermédiaire de l'âme complémentaire, les doua de propriétés mystiques et très-secrètes (I). » D’où chaque individu, en recevant l’être sous une constellation particulière, acquiert, cil sus des qualités inhérentes à sa nature propre, des vertus particulières actives ou passives. D’où les diverses propriétés des pierres, des plantes, des hommes, qui ne se rencontrent ni dans Icjjenre, ni dans l’espèce, ni dans la constitution matérielle, qui émaneraient d’une influence céleste.
Le philosophe, à son tour, pose trois modes d’action :« Formel, éminent, virtuel. — Formel. Nulle action ne peut avoir lieu sans le contact de l’agent, et les effets ne sont point la pénétration de l’actif dans le passif, mais seulement le résultat, la propriété de vie ou de mouvement dont le ciel les aura doués; ce sera la victoire de la puissance active la plus forte sur celle qui lui résistait.
— Éminent. Tout agent, en son mode d'action, tend toujours à la perfection, et ne saurait dégénérer. Ainsi les plantes broyées, donnent la chair des animaux. — Virtuel.
(1) Van Helmonl, Disc, sur la magie.
Dans chaque résultat il y a toujours un excès de qualité qui, chez l'homme, tient à l'audace, à la crainte, à la colère, au courage, enfinà toute passion, toute vertu provoquant des effets; et il y en a de deux ordres : ceux qui tiennent à la matière, et que nos sens peuvent saisir, et ceux qui 11e se manifestent que sous certaines conditions en vertu de forces occultes (I). »
Arrive le physicien qui dit : « Les corps de la nature sont pénétrés d’amitié et d’inimitié, de telle sorte que les uns s’attirent et s’embrassent comme des parents et des proches, et que les autres se repoussent ainsi que des adversaires. Quand ces actions sc passent à distance, ce n’est point par un trajet vibratoire d’atome à atome, mais en raison du milieu de transition. Selon qu’il affecte les corps de symjftthie ou d’antipathie, on les voit s'entraîner ou s’entre-repousscr,et cela est porté si haut cl ez quelques-uns que, tout en gardant leurs propres forces, ils en transmettent l’équivalent à leurs sympathisants. Ainsi l’aimant, qui est une pierre, infuse aux anneaux de fer qu’il attire une force identique avec la sienne (2)! » Dans tout cela qu’avez-vous compris? Rien qu’une chose, le tliéomédisme; encore a-t-il fallu le poser en principe pour le démêler au milieu de tout ce fati as de raisonnements. C’est qu’au lieu de dire tout simplement les faits, de les noter dans un même tableau pour, d'un coup d’œil, en#saisir l’ensemble et déduire les conséquences, il fallait à tout prix faire de la scolastique, de la théorie, et comme le terrain était mouvant, ces braves gens ne faisaient que patauger. C’est ce que Matthioli rend fort bien par ces mots : a Quand il nous défaut le pouvoir de rendre raison, de là vient le commencement •le philosopher, puis de douter. » A force d’en dire ils embrouillaient l’horizon plus qu’ils ne donnaient le jour.
(1) Goclénius, Synarthrosii magndiea, — (2) Van Helmonl.
Pourtant nous allons tâcher de tirer quelques étincelles du sein de ce chaos.
Les sympathies et les antipathies y jouant le plus grand rôle, définissons-les d'abord.
La sympathie (njfi'Tra(/e:a, conformité d’humeurs) est l'harmonie, soit morale, soit physique, qui existe entre deux êtres, quelle que soit leur nature. Beaucoup d’auteurs l’appelèrent compalio, accord de sensation. Pour Galien (I), c’est amicilia, amitié, liaison d’humeurs. Pline (2) l’appelle concordia, entente des coeurs; Cicé-ron (3) : Convenientia nuturœque continualio, affinité, complément de la nature. Baptiste PorXa la détermine encore mieux par sens d'union. La métaphore la lient pour consensus, unanimité d’intention, lien naturel de bienveillance réciproque, etc. •
L’antipathie (àvr."sraOî:x, incompatibilité d'humeurs) est un instinct hors de réflexion qui fait que deux êtres se repoussent ou se fuient. Galien et Pline l’appelèrent repugnantia (combativité incessante), discordia, dissectio, divisibilité, dissidence mutuelle. Ceux qui la disent: « Qualité ennemie affectant certains principes naturels de causes mutuelles et aveugles de division, » ne s’éloignent guère de la vérité, non plus que d’autres qui la définissent : « Résistance interposée entre deux agents qu’on veut réunir. »
Et pour résumer avec lascolastique Sympathie naît sur terre cl ès-cieux des vertus et qualités des masses, et désordre d’icelles fait l’antipathie. »
Comme exemple de sympathie, regardez le monde, vous dirais-je. N’est-ec pas là un vaste organisme dont toutes les parties dépendantes d’un môme principe viennent se confondre dans les liens d’une communauté universelle? Regardez chez l’homme le cerveau, le cœur,
(1) Lib. IU, dtSimpl. med„ C. 5. — (S) Lib. XXXVII, c. ¿¡.-(3) De Fat.
les poumons, le foie, tous les viscères, habitants séparés qu’un même toit recouvre, compatissant, s’entr’aidant les uns les autres. Le mol patrie n’est-il pas le mobile do la sympathie des nations? Les partis se confondent, disparaissent dans l’union que ce seul mot réclame.
J appellerai encore sympathie le penchant irrésistible qui entraîne les Heurs sur les pas du soleil. Ainsi l'héliotrope regarde l’aurore au matin, et vers le soir le couchant. Le lupin suit si bien la course de cet astre que, même dans un temps nuageux, le laboureur expérimenté peut juger des heures.
C’est encore la sympathie pour la lumière qui dit aux chicorées d’ouvrir leurs corolles quand l’astre du jour monte a l’horizon, et de les fermer quand il disparaît sous les brumes du crépuscule ; dans cer laines fleurs cette propriété cstportéesi loin, que si un nuage vient s’interposer entre elles et le soleil, elles se ferment pour se rouvrir quand il est passé. Il y en a qui choisissent une heure particulière pour s’épanouir : aussi le solitaiTe, pour ordonner sa journée, n’a-t-il qu’à regarder le sein de Flore; d’autres craignent le jour, et semblent vouloir cacher leurs amours avec la brise des ombres, en ne découvrant leurs étamines qu’au sein des nuits.
C est une trame admirable que la poésie seule peut divulguer comme en ce passage, que j’extrais d’un manuscrit du XV°*sièclc :
O gculc pâquerette,
Tant aimes le soleil,
Qu’aux feux «le son réveil > Débrailles la feuillette.
Ainsi fais, vers cc soir,
Sur le sein de ma mie,
Par miracle de sympathie,
Comme fraische cueillie,
Demeures, ma loule chérie.
Si dis : Pourquoi rester fleurie?
Réplique : Pour te voir.
Le lierre dans les bois ne s’attache-t-il pas le préférence au chêne? et la vigne, de deux arbres qui tendent les bras pour ses pampres, se penchera sur le tronc des ormes.
Tout cet ordre de sympathies peut répondre au tliéo-médisme, tandis que chez l'homme c’est, an magnétisme plus spécialement, lin premier rang je mettrai chez nous l’amour. Ce mouvement, ce transport continuel qui enchaîne nos cœurs , maîtrise nos âmes et nous moule aux plis de ses volontés, l’amourdoittoutentier être rapporté au magnétisme, si l’on adopte ce que j'ai avancé que ce Cuide est la transition de l’âme au corps. Toute pensée d’amour entraîne avec elle une idée de beauté, de bonté et de bonheur; le corps y trouve ses plaisirs, l’âme ses délices, et les cœurs se confondent. Les cœurs font presque tous les frais par la raison bien simple qu'ils sont la transition de l’âme au corps en matière de sensation ; ou mieux : l’agent que l’âme a choisi pour répandre un peu deson essence dans ses parois de matière par où ils jouissent des voluptés qui l’enivrent et les expriment par ce langage muet, transition de la parole à la pensée. Cette sympathie d’union est si générale, que je ne comprends pas «leux hommes qui s’embrassent avec deux pensées, et pour moi ce serait un prodige qu’un homme et qu’une femme vinssent à enlacer leurs enivrements sans unité d’âme et d’esprit. Le fluide de transition en ces moments sublimes établit un courant de communication entre nos ames; le corps est anéanti; nous nageons dans un océan d’illusions toutes colorées de splendeurs, de félicités, d’espoir. Espoir, par rapprochement du principe où nous tendons sans cesse, et qui doit remplir l’immense vide de nos affections. « C’est l’esprit de transition qui nous fait sentir l’approche de l’objet aimé, c’est lui qui nous guide sur sa trace, qui constitue l’identité de nos désirs et réalise l’unité des êtres destinés l’un à l’autre ,
«mité qu’on devra connaître à l’intensité de sympathie qui se développe réciproquement (I). »
■ Il est un quelque chose en amour qui n’est ni l’âme ni le corps, niais qui doit tenir des deux et qui les subjugue l’un et l’autre, ce qui met la quenouille aux mains d’Hercule, le fard au visage de Surdanapale, ce qui livra les cheveux de Samson aux ciseaux de Dalila (2). »
Ainsi le fluide de transition présiderait au plus grand acte de la vie, la reproduction.
Le jardin que nous parcourons est vraiment si vaste, qu’on n'en sortirait pas avec line vie de recherches. Mais un peu à côté, dites-moi qni fait serrer la main des amis? Qui met un sens au bout de nos doigts? sens qui nous découvre 1rs individus au sein des ténèbres; et qui n’a reconnu, les yeux bandés, une main defi'ère, un souffle d’amie? Tout le monde connaît cela. Nous, enfants de Mesmer, nous disons : c’est du magnétisme. Avant, on disait : c’est à l’esprit de transition ; plus loin : c’est sympathie. Et ceci ne se borne pas aux êtres doués de propriétés vitales, mais se poursuit bien loiu dans la nature. Un homme qui ne connaîtrait pas l’aimant et. qui verrait marcher une statue de fer au gré de la main qui la dirigerait, dirait de toute nécessité: c’est du sortilège, c’est de la magic ; et pourtant quoi de plus simple que cette action par l’admission du magnétisme terrestre? Qui connaît les affinités chimiques peut, tous les corps lui étant donnés, dire : je vous rendrai tel et tel composé au sortir du creuset. N’est-ce pas un prodige?
Au moyen âge, un savant qui eût pris du potassium (s’il eût été connu) et l'eût jeté dans l’eau, infailliblement on lui eût crevé les yeux en disant : c’est le diable; il allume l’eau ! Mais un fait bien facile et qui ébahit bien des gens de notre époque, c’est l’inflammation
(1) Gogléciius, de Convient. — (2) Bouquet hislorial.
spontanée de plusieurs liquides, tels que les acides sul-furique, nitrique, et l'essence de térébenthine. Ce n'est lien que de fort simple pour le chimiste qui connaît les aflinités, mais pour le vulgaire!
Le plus bel exemple de sympathie existe parmi les astres ; là le degré en est mesuré pour chacun; ils tournent le soleil dans des orbes respectifs. Newton donne à cette sympathie le nom d'attraction ; je laisse tout à l’astronomie , mais ne reviens pas moins, au nom près, au théomédisme. Qu’on dissèque le corps pour en mieux connaître les parties, fort bien ; mais on devrait au moins tout considérer comme ensemble; mais quand 011 n’admet de création que les idées qu’on a émises, quand on ne croit pas à Dieu, comment rapporter au principe les oeuvres qui en découlent?
D'où vient que le serpent ne puisse supporter l'ombre même du frêne? Et Dioscoride dit à ce propos : « Vous feriez un cercle de feuilles de frêne et uu de ilammes, le serpent passerait dans le feu de préférence. »
D'où vient qu’un chêne meure à côté d’un olivier, et la fougère dans les roseaux?
Pourquoi le loup est-il si terrible aux animaux de nos campagnes, que le jeune poulain à la première odeur s’enfuit tout tremblant, que les génisses baissent leurs croissants, que le chien, plein d’inquiétude, va, vient autohrdu troupeau qui s'agglomère terrifié?
Pourquoi le jeune enfant pousse-t-il des cris épouvantés à la vue d’un reptile? Pourquoi celle vague horreur qui parcourt nos membres, dresse nos cheveux quand notre pied rencontre « stridentes lingud bi/idü serpentes?» N'est-cc pas un esprit de sympathie qui fait mouvoir en nous « des sucs d horreur et de crainte? »
« L’espril du sang sC fige en la'veine quand ès mains prenons le froid du serpent. » Qui n’a senti, au contact d'une main infâme, ce quelque chose qui serre le cœur?
N’est-ce pas sensation commune à nos mains que cette répugnance pour certaines natures, tandis que pour d’autres un attrait invincible les maintient sans fatigue dans le rude travail de la magnétisation? Et il y a là un phénomène que j'appellerai affinité magnétique, la sym- -pathie que le fluide affecte pour certains individus qui soutirent tout de nos mains, bien que le courant soit dirigé sur d’autres.
A chaque pas dans les sciences nous trouvons de ces exemples inexplicables.
«Le pouvoir de nuire et de secourir qui se trouve dans la nature des choses réside plutôt ès humeurs immédiatement adhérentes aux substances que non pas ès premières qualités d’icelles, dont inférons nécessairement que cette qualité de nuisance et de secours estant particulièrement attachée à un certain suc non susceptible de pourriture (x'^o;, d’Hippocrale), ne se peut séparer de la substance du corps que par le bénéfice de l'attraction spagyrique (I). »
Peut-on mieux tomber dans nos vues que ce bon chimiste de 1C64 ne l’a fait? Il ne lui manque que le mot de l’énigme, théomédisme. Mais écoutez ceci.
Une dame, dont je sais le nom et qui existe encore à Paris, avait en nourrice une petite iilie que ses yeux de mère trouvèrent gentille comme un amour quand on la lui amena; et de fait c’était vrai. Mais voici qu'au bout de quelque temps des convulsions atteignent cette enfant, lui contournent les membres et la rendent aveugle. La pauvre nourrice eut tout le faix à porter. Et cette darne, étant accouchée d’une autre fille, voulut la nourrir elle-même pour n’avoir rien à se reprocher. Mais voici que justement à la même époque que sa sœur les convulsions la mettent dans un état pareil ; et toutes
(1) Jean Béguin, Chimie’, préface.
«leux alors furent prises d'une telle antipathie, que si elles se touchaient, une crise de fureur se manifeslaii chez elles, et c’était iî les croire d’enfer venues. Selon les commères, c’était un sort.
Expliquez ce fait, vous qui voulez tout comprendre avec voire clairvoyante et admirable sagesse ; et qui croyez avoir tout dit quand vous vous êtes écrié : c'est un prodige de la nature; expliquez-le sans fluides intermédiaires. Vous qui levez le doigt du mépris sur le magicien, sur l’homme qui reconnaît les propriétés occultes sous le voile épais de la matière, et qui se nourrit du capul morluum que vos théories rejettent; vous n’y comprenez rien, vous qui n’étudiez pas, qui ne voulez pas étudier. Nous autres sorciers, fiers de ce nom, nous marchons le cœur plein dans ce temple de la nature, d’où l’on devrait vous chasser comme indignes de participer à tant de biens. Vous connaissez l’électricité, la lumière, le calorique, le magnétisme terrestre ; nous, en sus de tout cela, nous puisons chez l’homme un fluide plus grand encore, le magnétime animal ; et un jour viendra où tous se fondant dans un seul et même principe, constitueront le théomédisme. Heureux celui qui consommera celte œuvre ; car son front portera l’empreinte du souffle de Dieu.
Ev. Lesgaugris.
(Lu suite prochainement.)
CLINIQUE MAGNÉTIQUE.
Le doute, la crainte, la routine, empêchent tour à tour l’application franche du magnétisme au début des phleg-masies. La marche rapide et la terminaison si souvent funeste de ces maladies ne permettent point de tentatives hasardées, de pertes de temps, qui ajoutent au mal : « aux grands maux les grands remèdes ; >> il faut un secours prompt, énergique; à ce titre la lancette est toujours préférée. Son effet bien connu, le soulagement instantané qu’elle procure, lui ont assuré jusqu’ici la suprématie, le monopole, la priorité des maladies aiguës. Ce n’est que quand ce moyen, tant de fois inutile et si souvent meurtrier, échoue, que l’hésitation cesse, que l’on a recours à un succédané; mais il est souvent trop tard,les sourcesdela vie sont taries, etle moribond succombe dans la plupart des cas. Le magnétisme, employé dans de telles conjonctures, alors qu’on n’espère plus, produit constamment un mieux subit, mais presque toujours éphémère, parce que toute réaction du principe vital est devenue impossible. Pour un esprit méthodique, une telle épreuve est sans valeur; mais le public, jugeant superficiellement, ne tient pas compte de l’inégalité des chances ; et de ce que le magnétisme ne guérit pas tous les agonisants, il l’a cru impuissant à enrayer les maladies inflammatoires.
La conséquence de cette fausse conclusion, soigneusement entretenue par tous les médecins, est que le moyen universel de guérir indiqué par Mesmer est tout simplement un palliatif polychreste,' capable d’amender, mais non de guérir, quelques maladies.
Les magnétiseurs, battus de ce côté, durent forcément sc replier sur la nombreuse classe des affections dites chroniques, vaste abîme où viennent s’engoufrer tous les inconnus de la médecine ; les succès qu'ils y obtinrent dépassèrent toute attente, et la cure de ces maladies fut concédée ii la panacée mesméricnne. Cette concession s'accrédita tellement que le magnétisme devint bientôt la planche de salut des naufragés, le refuge des incurables de toutes les médecines.
Beaucoup de ces malheureux y trouvèrent la curation de leurs maux; mais il nevinl à la pensée de personne que si le mesmérisme guérit les affections chroniques, à bien plus forte raison il doit agir sur les aiguës, puisque, dans l’acception ordinaire du mot, une maladie chronique n'est autre qu’une aiguë dont la durée excède soixante jours. Ce qui surtout aurait dû faire revenir sur ce jugement illogique , c’est l'aggravation de la maladie sous l’influence magnétique, c’est-à-dire l'évanouissement des symptômes secondaires et la réapparition de l’état aigu , masqué seulement, circonstance qui effraie tous les malades. Mais aujourd’hui encore.la prévention est telle à cet égard que des magnétiseurs eux-mêmes suivent l’ignare routine, sans réfléchir que s’ils ont le moyen de faire plus, ils peuvent aussi faire moins. Ceci vient de ce qu’un esprit de sage critique ne préside pas toujours à leurs recherches , que la discussion n’est point ouverte sur leurs œuvres, et que, toujours militants, point de temps ne leur est laissé pour l’étude des sciences naturelles, qui rendent si forts leurs adversaires.
Soit heur, soit hasard, j’ai débuté en magnétisme par des cas désespérés de maladies aiguës ; j'ai réussi, et, méditant bien les mots guérir el préserver qui reviennent sans cesse dans les écrits de Mesmer, j'ai compris que son moyen universel n’est point un paradoxe. Plus tard je
démontrerai que l’aphorisme fondamental de la thérapeutique magnétique esl une vérité sublime, fondée en logique et justifiée par la pratique. Aujourd’hui je me borne à l’esquisse d’un cas de fièvre grave, ébauche que je donne à titre de simple exemple pour encourager les magnétiseurs à entreprendre le traitement des inflammations avec autant, même avec plus d’espoir que celui des affections auxquelles ils ont presque exclusivement consacré leurs soins.
En juillet 1842 , par un temps sec et chaud, un de mes collègues, élève de la pharmacie Pelletier-Duclou, âgé de vingt-trois ans, lymphatique et fort irascible, fut affecté d’une fièvre inflammatoire d’un mauvais caractère. Quatre médecins renommés furent appelés à donner leur avis commun sur cette grave maladie, et leurs prescriptions furent suivies avec une ponctualité sans égale. Outre le choix des médicaments, il lui fut prodigué des soins domestiques que l’affection maternelle la plus tendre n'aurait pu multiplier davantage ; mais malgré tout, les symptômes morbides se succédaient avec une rapidité terrible, rien n’en pouvait modifier la marche. Le quinzième jour, cette maladie, dont on ne s’était jamais dissimulé la gravité, empira tellement que tout présagea une issue funeste, et il fut écrit aux parents d’arriver au plus vile s’ils voulaient encore voir leur fils. La situation élail désespérée, les remèdes n’agissaient plus ; plusieurs grammes de jalap, de calomel successivement administrés et deux cruchons d’eau de Pullna n’avaient rien produit; tous les purgatifs s’accumulaient dans l’intestin comme dans un tube inerte, et le délire augmentait. Plus d’espoir 11e restant aux hommes les plus expérimentés; j’eus la téméraire hardiesse de leur proposer de le magnétiser! ! ! Cette proposition, faite avec toute la présomption d’uu novice qui n’a point eu le temps d’apprendre à compter avec
les difficultés, m’altira les railleries des vétérans de l’art. Ce premier échec, que je ne soupçonnais pas, me surprit sans me décourager; converti de fraîche date, plein de feu sacré, la parole du maître résonnait encore à mon oreille et rendait ma foi au succès invulnérable. J’étais enfin dans cet état de croyance virginale, d'exaltation fervente qui succède immédiatement à l’initiation magnétique. Dans cet enivrement, le néophyte n’admet point d'impossibilité ; il dédaigne toute prudence et méprise la réserve; il ne doute de rien, nul obstacle ne le rebute; il croit que tout être est magnétisable par lui et toute maladie curable par le moyen qu’il possède. C’est dans ces dispositions, plus faciles à comprendre qu’à décrire, que j'entrepris, contre tout avis, le traitement de mon ami. On en désespérait; que risquais-je?
C’était un jeudi, vers midi, moment solennel, prélude d’une œuvre ardue ; je m’approchai du malade,', dont l’état est présent à ma pensée comme si le fait était d’hier. Les grandes actions ont le privilège de laisser dans l'esprit des traces nettes, qui se présentent toujours fraîches à la récordation.
Il avait le pouls petit, fréquent ; la langue et les gencives couvertes d’un enduit épais, noir, fuligineux; l’ha-leine acide, la gorge sèche, le ventre extrêmement dur, ballonné. La stupeur du visage disparaissait parfois pour faire place à un délire furieux, revenant par accès, et la chaleur, inégalement répartie, se concentrait surtout vers la tête, siège d’une congestion sanguine continuelle. Les urines étaient rares, épaisses, fétides; les selles nulles. Il y avait encore bien d’autres symptômes ; mais, n’écrivant pas pour des médecins, je me borne à l’énoncé des plus apparents ; non que je considère de nulle importance ceux que je tais, mais parce que des détails minutieux donneraient à ce récit une allure pédantesqne
que je veux éviter. J’écris pour tous et tache de m’en faire comprendre, moyen que ne donnent pas les termes techniques, plus ou moins grecs d’origine, qui rendent la science ennuyeuse, d’attrayante qu’elle est naturellement.
Instinctivement je magnétisai comme si une expérience consommée eût guidé mes actes : des passes longitudinales du sommet de la poitrine à l’extrémité des jambes de manière à dégager le cerveau congestionné. Je pratiquais cette manipulation d'une manière lente et continue, lorsque le malade, dans un accès de délire, s’élança de son lit, annonçant l’intention de se précipiter par la fenêtre ; trois personnes luttaient pour le retenir, et sa fureur augmentait de leur résistance. Je lui appliquai la main sur le front el lui dis d’un ton impératif de s’aller coucher : il m’obéit avec la plus grande docilité. Encouragé par ce résultat, nouveau pour moi, je continuai mon opération avec une ardeur nouvelle, et ainsi durant quatorze heures successives.
Le résultat de cette longue magnétisation fut un grand calme et le changement du délire furieux en un paisible et loquace. J’étais charmé de mon ouvrage; mais, épuisé, je ne pouvais plus rien, et le malade le sentait bien, car il disait: «Encore.... encore....; » et si je m’éloignais de son lit, il étendait les'bras pour m’atteindre, et ne restait tranquille que quand il me touchait. Je crus d’abord que la crainte que je m’éloignasse était la cause d’une telle insistance à me retenir auprès de lui; mais je vis bientôt que sa raison était étrangère à cet acte, et je reconnus à mon extrême prostration qu’il me soutirait les forces au moyeu de ce contact, qui établissait un courant continu.
Fatigué, incapable d’agir davantage, j’invoquai le secours du maître. M. du Potet vint à mon aide et m’engagea de poursuivre, disant que je pouvais désormais
légitimement espérer la guérison. Puis, niellant la main à l’œuvre, il obtint tout à coup plus que je n’osais espérer : le somnambulisme. Les événements se succédaient si rapidement., avec une telle variété d’incidents, que je n’oublierai jamais ce moment où tant de faits me furent à la fois révélés. Le somnambule se prescrivit un bain de deux heures dans lequel il devait évacuer et s’évanouir, ce qui arriva ; puis annonça pour le lendemain seulement l’arrivée de sa mère, qui devait avoir lieu le jour même : celle prévision et d’autres encore se vérifièrent dans la suite.
M. du Polet revint le soir du même jour, et sous son influence naquirent de nouveaux phénomènes : le malade, devenu lucide, s’ordonna douze bouillons qui lui furent intégralement administrés dans les vingt-quatre heures. Il se prescrivit encore un bain pour le lendemain, ne voulut point d’autre drogue que le magnétisme, et se lit enlever la glace dont on avait entouré sa téte.
Le samedi matin, M. du Potet le magnétisa pour la troisième et dernière fois ; il était déjà beaucoup mieux, il prédit la lin de sa maladie et indiqua le jour de sa convalescence.
Tous les symptômes morbides diminuèrent graduellement sous rinüuence d’une ou deux magnétisations journalières, et Je huitième jour de ce traitement le malade faisait une petite promenade au bois de Boulogne.
Ainsi je goûtai pour la première fois les pures jouissances qu’éprouve celui qui sauve son semblable, son ami surtout.
Hébert (de Garnay).
SOCIÉTÉS SAVANTES.
CONFÉRENCES MAGNÉTIQUES.
Pour parvenir aux sciences plus qu'humaines, il faut s’appliquer à la divination.
Sociiate.
*
Lorsqu’un fait est lans toutes les croyances, lorsqu’il s’est présenté dans tous les lieux et qu’il s’est reproduit sous mille formes diverses ; lorsque les historiens de tous les peuples ont parlé de son existence, qu’importent les dénégations des savants? Elles ne servent qu’à le rendre plus évident, car les explications qu’ils donnent pour le combattre en établissent au contraire la réalité.
Ainsi la inagie, et sous ce nom nous comprenons des faits d’une occulte puissance, mal connus, mal définis et dont la source est en nous-mêmes, existe en Chine, dans l’Inde, en Orient; et ne la vit-on pas en Italie luiter de puissance avec le pouvoir spirituel? Dans tout le Nord, chez les plus petits peuples, les Lapons, on en constate encore l’existence aussi bien qu’ailleurs. C’est donc un fait digne d’étude; nous avons entrepris de le mettre en lumière et de reproduire, autant que nos faibles moyens nous le permettent, les phénomènes qui prouvent la réalité du pouvoir de l’âme humaine en dehors de l’organisation où elle s’est logée.
Sans nous inquiéter en rien des opinions diverses relatives à notre travail, nous dirons ici clairement, sans ambiguïté : Nous croyons à la magie. Et, pour appuyer notre croyance et la justifier, nous donnerons la série
d'expériences curieuses résultant de l’emploi raisonné que nous avons fait de la force psychique qui existe en nous, sans qu’aucune addition d’antres forces ou agents soit venue nous aider. Il faut ici que tout produit soit le résultat d'une seule cause.
Depuis longtemps nous soupçonnions que le magnétisme humain possédait des propriétés non encore connues des magnétiseurs; que ces propriétés étaient justement celles employées par les hommes qui, dans tous les temps et dans tous les lieux, opérèrent des prodiges. Nos soupçons, nous les eûmes dès le jour où, employant les procédés magnétiques, nous vîmes deux êtres humains obligés de céder à ce pouvoir et dormir dans nos mains. Us redoublèrent lorsque nous reconnûmes que ce pouvoir s’exercait au travers des murailles et pouvait saisir l'homme qui ignorait notre pensée et le dominait comme en notre présence. Nos doutes se changèrent en certitude quand nous fûmes mis à môme de nous assurer de la communication de nos pensées, sans parole ni signe quelconque; lorsqu’enfin il nous arriva de donner des qualités aux corps qui en possédaient de différentes à celles que nous avions conçues. Plus nous avancions dans l’étude du magnétisme vulgaire, plus nous découvrions de faits incompréhensibles, mais certains, qui rappelaient à notre mémoire les phénomènes merveilleux du passé et nous faisaient comprendre qu'ils avaient une commune origine avec ceux que nous produisions de nos mains.
Nos recherches n’étaient cependant point guidées par la détermination de trouver ces affinités de faits et d’analogies; nous avancions, sans nous en douter, dans cette route nouvelle où le magnétisme va lui-même être entraîné au grand profit de là science et de l’humanité, comme nous le démontrerons. En effet, l’ignorance fut toujours un mal; c’est par elle que les malheurs de
l’homme se perpétuent ; elle est la source de toutes nos calamités et de celte enfance des êlrcs qui vivent et meurent sans se connaître, dominés par des terreurs et. des craintes, soumis qu’ils sont à d’habiles imposteurs qui se gardent bien de les éclairer.
Eh bien, tout ce mal peut diminuer et l’humanité changer de face si la science le veut, si elle daigne s’occuper de nos recherches, prendre en main la défense de la découverte de Mesmer, en poursuivre l’étude et éclairer le monde avec la lumière pure qui en jaillira. Nous sommes.loin de l’espérer pour le présent ; l'avenir est à Dieu, il en ordonnera sans don le, et inspirera les hommes d’élite appelés pour accomplir ses desseins. Nous manquerions de courage si nous ne publiions ce que nous croyons vrai, par crainte des opinions contraires; car notre conscience nous dit que toute découverte est un bien utile aux hommes, que toute vérité vient, de Dieu, et que ne pas dire celle qu’on sait est un crime que les hommes ne peuvent punir, mais gue Dieu punira sans doute ! Ne savons-nous pas d’ailleurs qu’on attachera peu d’importance à nos paroles et à nos récits? Nos expériences passeront sans exciter beaucoup l’attention; ce n’est que plus tard, lorsque nous n’y serons plus, qu’elles seront considérées comme ayant quelque valeur. Mais peu m’importe ! je dois dire ce que je crois possible de réaliser avec la puissance découverte ; c’est d’ailleurs la seule roule ouverte à l’investigation. Il faut que les magnétiseurs fouillent dans le passé pour y trouver des vérités, car ce n'est pas avec les savants modernes qu’ils pourront apprendre quelque chose touchant le magnétisme. Que ceux qui veulent nous suivre méditent ces paroles :
« Les anciens admettaient dans l’homme l’intelligence naturelle, la spirituelle ou métaphysique, l’élhérée et la divine. Ils modifiaient ces degrés d’intelligence par le
mélange de l’un dans l’autre; comme le terrestre-magique ou la puissance physique servent de causes à des effets merveilleux, le terrestre-divin ou le miraculeux basé sur des causes matérielles, dont les principales étaient le vin, le laurier, le narcisse, etc. Ils ne regardaient rien'au delà de la puissance humaine, qu’ils ne renfermaient dans aucune borne, et qu’ils portaient jusque dans le sein de ladivinité suprême en l’identifiant avec elle; ils prétendaient même que l’âme de l’homme, enfermée dans son corps charnel, pouvait encore communiquer avec les intelligences dégagées de la matière, et tirer par elles les lumières les plus instructives. Enfin ils ne refusaient d’admettre aucun genre de divination qui pouvait contribuer à élever l’esprit humain au-dessus du degré matériel, qu’ils regardaient comme le plus malheureux état de l’humanité. »
Ce préambule demanderait un volume, tant les choses à dire sont nombreuses. L’intelligence du lecteur suppléera à notre discrétion forcée, car nous n'avons que quelques pages pour émettre nos pensées, ce journal étant consacré aux autres faits de magnétisme dont nous ne voulons point interrompre les récits si curieux et si pleins d’utilité.
Miroir magique.
Pour cette opération, nous prenons un morceau de braise; nous traçons un cercle plein, comme ci-dessus, en ayant soin que toutes ses parties soient noircies. Nos intentions sont bien formulées, aucune hésitation dans nos pensées ; nous voulons que les esprits animaux soient fixés d$ns ce petit espace et y demeurent enfermés ;
qu’ils y appellent des esprits ambiants et semblables, aün que des communications s’établissent entre eux et qu’il en résulte une sorte d’alliance. L’expérimenté attiré vers ce point, une pénétration intuitive, duc au rapport qui s’établira entre les esprits qui sont en lui et ceux fixés sur le miroir magique, doit, avoir lieu ; il doit, voir ies événements et tout ce qui l’intéresse comme s’il était dans l’extase ou dans le somnambulisme le plus avancé, bien que l’expérimenté soit libre de ses facultés comme de son être, et que rien chez lui ne soit enchaîné. Ce n’est peut-être pas là toute notre pensée, mais nous n’avons point de ternies pour l’exprimer autrement.
L’opérateur doit se tenir à distance, sans qu’aucune influence de sa part vienne désormais ajouter, se joindre à ce qui a été fait tout d’abord. Cette expérience est neuve pour nous comme pour toute l’assemblée, qui se compose, ce jour, de quatre-vingts personnes. Tous les yeux sont ouverts; c’est en plein jour, sur un parquet qui n’a reçu aucune préparation, qui n’est revêtu d’aucun enduit, que le rond est tracé, et le charbon qui a servi est déposé sur la cheminée, où tout le monde est libre de l’examiner. Aucun parfum, aucune parole, enfin rien que ce rond charbonné et l’occulte puissance qui y a été déposée au moment du tracé, tracé quia demandé quatre minutes de préparation seulement. Durant ce court espace de temps, des rayons de notre intelligence, poussés par d'autres rayons, ont formé un foyer invisible, mais réel; nous sentons qu’il existe au trouble inconnu que nous éprouvons, à l’ébranlement de tout notre être, plus encore à une sorte d'affaiblissement résultant d’une diminution de la somme de nos forces. Voici ce que l’on observe.
Premier fait.
Plein de confiance en lui, sûr de l’impuissance de cette
magie, un homme de vingt-cinq à vingt-six ans s’approche du rond fatidique, le considère d’abord avec un regard assuré, en examine les circonvolutions, car il est inégalement tracé, lève la tête, regarde un instant l’assemblée, puis reporte ses regards eu bas, à ses pieds. C’est alors qu’on aperçoit un commencement d’effet : sa tête se baisse davantage, il devient inquiet de sa personne, tourne autour du cercle sans le perdre nn instant de vue; il se penche davantage encore, se relève, recule de quelques pas, avance de nouveau, fronce les sourcils, devient sombre et respire avec violence. On a alors sous les yeux la scène la plus étrange, la plus curieuse. L’expérimenté voit, kn’en pas douter, des images qui viennent se peindre dans le miroir; son trouble, son émotion, plus encore scs mouvements inimitables, ses sanglots, ses larmes, sa colère, son désespoir et sa fureur, tout enfin annonce, prouve le trouble, ¡’émotion de son âme. Ce n’est point un rêve, un cauchemar, les apparitions sont réelles; devant lui se déroule une série d’événements représentés par des figures, des signes qu’il saisit, dont il se repaît; tantôt gai, tantôt rempli de tristesse, à mesure que les tableaux de l’avenir passent sous scs yeux. Bientôt même c’est le délire de l’emportement; il veut saisir le signe, il plonge en lui un regard terrible: puis enfin il s’élance et frappe du pied le cercle cbarbonné, la poussière s’en élève, et l’opérateur s'approche pour mettre fin à ce drame rempli d'émotions et de terreurs. Pour un instant on craint que le voyant n’exerce sur l’opérateur un acte de violence, car il le saisit brusquement par la tête et l’étreint avec force ; quelques paroles affectueuses et les procédés magnétiques apaisent, calment l’âme du voyant, et font rentrer dans leur lit ces courants vitaux débordés.
Ou entraîne dans une pièce voisine l’expérimenté; mais avant qu’il ait repris entièrement ses sens, on lui
ôle le souvenir de ce qu'il a vu et on achève de le calmer. Il ne lui reste bientôt qu'une douleur dans la partie supérieure du crâne , qui disparaît d’elle -même au bout d’une demi-heure. Malgré tout il conserve une vague pensée, une préoccupation de l'esprit; il cherche a se rappeler, il sent qu’il s’est passé en lui quelque chose d’étrange; mais quoi qu’il fasse, sa mémoire ne peut lui fournir un trait, une figure de tout ce qu’il a vu ; tout est confus en lui, et. les interrogations nombreuses qu’il subit n’amènent aucune révélation.
Rêvons-nous, sommes-nous nous-même sous le charme d'une illusion? Avous-nous bien vu ce que nous venons de décrire? Oui, oui, nous l’avons saisi, plein de calme et de raison ; tout est réel, et nous restons bien au-dessous de la vérité, ne pouvant entièrement la peindre dans ce récit, car les mots nous manquent, quoique notre mémoire soit fidèle.
Cette expérience a porté dans tous les esprits la conviction qu’une découverte venait de se. révéler, et que le magnétisme allait certainement s'ouvrir une nouvelle route. Les faits déjà si curieux offerts par le somnambulisme sont dépassés; car ici l’homme est éveillé, et par sa seule intelligence il peut dévoiler les secrets de l’avenir.
Deuxième fait.
Le rond noir étant en partie effacé, on y repasse à plusieurs reprises le charbon, jusqu’à ce qu’il soit bien rétabli. Indécis sur le choix d’un nouveau sujet, l’opérateur cherche des yeux dans l’assemblée la persanne qu’il croit apte à sentir l’influence occulte du miroir et à en manifester les effets. Pendant ce moment d’hésitation se présente de lui-même un jeune homme de vingt ans environ, qui depuis quelque temps suivait attentivement les mouvements de la main de l’opérateur et fixait ses
yens sur la plaque noire. Bientôt il se lève de son siège et cause un étonnement général; il approche lentement, muet, pâle; il tourne plusieurs fois autour du miroir magique, le considère attentivement, s’éloigne, se rapproche, se penche. Que voit-il dans cette plaque noire? nul ne le sait encore, mais il y voit. Il est pris d un rire sardónique inimitable; sa figure prend une expression bientôt sérieuse; il se trouble, tremble de tous ses membres, puis redevient calme. Différent du premier expérimenté, nulle fureur ne sc peint en lui; un sentiment de curiosité semble le dominer, et son regard est constamment plongé dans le miroir. Comment pourrions-nous traduire ici les gestes, les mouvements de ce jeune homme, l’expression peinte sur son beau visage ; toute une assemblée tenue dans une sorte de crainte et d’espérance, et semblant partager les émotions profondes du voyant? Il reste ainsi dix à douze minutes, murmurant, articulant quelques mots ; et c’est au moment où il va parler que l’opérateur intervient. Mais méconnu d’abord comme un étranger, il éprouve quelque difficulté à éloigner l’expérimenté du miroir. Comme au premier, on lui ôte le souvenir sans «au du Léthé (I).
Les prêtres d’Isis n’étaient donc point des imposteurs; ils connaissaient, sans nul doute, l’existence du principe magnétique, et s’en servaient pour opérer leurs prodiges. Dans certains cas ils obtenaient de ceux qui allaient subir les terribles épreuves de l’initiation des révélations propres à les guider dans la route de la vie; mais pour imprimer plus de respect, on attribuait aux dieux ce qui venait de l’homme lui-même. Peut-être aussi voulaient-ils exercer un salutaire empire sur le vulgaire et le tenir dans une sorte de crainte.
(1) Voyei tome II, pages 201 cl 261, Icsricits magiques de MM. Léon Je Lafcorde et Saint-Simoo.
Nous donnons ces réflexions sans y attacher une grande importance; c’est assez pour nous de posséder désormais le secret si longtemps caché d’entrer en communication avec un monde supérieur. D’autres hommes touilleront le passé, et lorsqu’ils referont l'histoire de ces temps reculés, ils n’attribueront plus au mensonge ou à l’imposture ce qui est dû à une loi éternelle de la nature. Le magnétisme comme ces forces, occultes encore, qui fécondent les germes et créent tout ce que nous voyons, rentrera dans le domaine des sciences.
Quelle profonde révolution nous entrevoyons pour l’avenir, et quelle pitié nous inspire le présent! Voyez les sciences, ce qu’elles savent des choses morales et des facultés de l’âme; elles se font gloire de leur ignorance en ces matières, et méprisent la vérité nouvelle. Le haschich, l’opium, l’éther! c’est avec ces moyens que le savant expérimente et prétend connaître ce que Dieu a caché en nous.... Magnétiseurs, vous avez en vous la cause, le principe de toutes les merveilles; le moindre de vos faits est supérieur en grandeur à tout produit académique. Allez donc en avant, passez sur ces vieux corps invalides, sur tous ces immortels à qui on a donné un fauteuil pour qu’ils soient plus commodément posés et qu’ils digèrent à l’aise. Laissez en paix toutes ces débilités humaines, semblables à ces bois pourris qui donnent des clartés phosphorescentes; on a beau souffler dessus, les frotter, ils ne donnent point de chaleur et ne projettent toujours qu’une lueur terne qu’ils doivent à leur corruption.
Nous nous laissons emporter et nous devenons injuste : les savants sont nécessaires; mais pourquoi donc leur temple nes’ouvre-t-il point à la vérité nouvelle? pourquoi n’est-clle point honorée?... Taisons-nous sur les motifs de celte conduite coupable et suivons notre chemin, emportant notre perle jusqu’à ce que nous ayons
trouvé un lapidaire qui en sache le prix : nous la lui donnerons sans demander un grain de mil, trop heureux de la voir accueillie et enchâssée avec les autres joyaux que le génie de l’homme a trouvés el fait briller par mille facettes.
Les secrets surpris pendant ces opérations magiques doivent être encore gardés; nous serions indigne de posséder la science si nous les divulguions à qui que ce soit; car ce n’est plus un fait d’homme à homme : des expériences faites devant une centaine de personnes commandent la réserve, c'est pourquoi nous nous sommes arrêté. 11 nous eût été facile de faire articuler hautement ce que la bouche des voyants murmurait tout bas, ce que nous seul avons entendu. Illusion, dira-t-on, rien n’était réel!!! Paroles d’insensés et de faux savants. Voici notre réponse à de grossières suppositions : le dernier expérimenté assistait pour la première fois à nos séances démonstratives ; son nom même nous était inconnu comme sa personne; il ignorait entièrement ce qui avait eu lieu précédemment. Eh bien, nous le vîmes après nos expériences, et lorsqu'il était redevenu très-calinc, suivre le trajet d'une ancienne ligne faite pour d’autres opérations il y avait déjà trois semaines, et sur laquelle la brosse avait passé plusieurs fois. C'est avec un sentiment indicible, partagé par tous, que nous le vîmes suivre cet ancien tracé, bien présent à notre mémoire, sans s’en écarter. Interrogé, il nous dit qu’il se sentait entraîné dans celle direction, mais qu’il en ignorait la cause : il étail alors sur l’extrémité du plan où la force magi-magnétique avait été déposée; nul effet ne s’était fait sentir en dehors.
11 faul donc chercher désormais d'autres explications aux phénomènes observés; ils ont, pour nous, leur cause dans ce fluide inconnu qui se revêt de nos pensées et les garde quelque temps emprisonnées en lui. Mais pour
aider l’esprit de recherche des hommes forts, nous rendrons compte successivement de toutes nos expériences. Qu’on ne croie point cependant que nous abandonnions l’étude des phénomènes simples du magnétisme ; bien au contraire, nous avons été conduit par eux à nos nouvelles explorations; nous espérons apprendre ainsi ce qui nous manquait pour perfectionner l’art de magnétiser. Nous avons l’espoir fondé d’y arriver.
Baron du Potet.
VARIÉTÉS.
Chronique. — Le n° 2 de l'Anthropologie catholique contient une menace contre nous. Voyez ce que c’est que de redresser un mensonge , faire connaître uu petit péché venant de l’oint du Seigneur. Le faux dévot ne pardonne point; on est sûr que ce qu’il y a de bile au fond du cœur va venir k la surface. Dame! tant pis; pourquoi se heurter à un jésuite? Il faut le reconnaître de loin, s’incliner devant sa personne , faire plus encore, se déranger pour lui livrer passage. Nous verrons si le sifflement que nous avons entendu sera suivi de morsure; peut-être trouverons-nous l’antidote au venin.....Attendons.
— Sur la foi d’une correspondance douteuse de la Gazette d'Auijsbourg, [plusieurs petits journaux ont annoncé que le pape se faisait magnétiser par un jeune ecclésiastique français, dans l’espoir d’obtenir la guéri-
son do sa terrible maladie. La Quinzaine démeut ce bruit absolument faux, qui est parti d’une officine allemande.
— La commission chargée de l’exécution de la médaille de la première célébration de la naissance de Mesmer a convoqué les membres du banquet du 23 mai dernier en assemblée générale pour le mardi C avril, à l’effet de faire son rapport et de statuer sur diverses mesures d’utilité générale. Nous invitons les fondateurs de cette solennité à ne point manquer à cette réunion.
— M. Alphonse Lcrolle a eu l’heureftsc idée de reproduire les traits de Mesmer dans un charmant médaillon qui a été rois en vente le 15 mars, jour anniversaire de la mort de Mesmer. Le prix est de 2 fr. ; plusieurs exemplaires en sont déposés au bureau du journal. Les magnétiseurs qui ne possèdent ni le portrait ni le buste de l’auteur de la découverte du magnétisme seront sans doute charmés d’acquérir le médaillon. M. Lerolle a traité son œuvre en artiste, et l’on doit désirer qu’il reproduise de même les traits des hommes qui ont marqué dans le magnétisme.
— Le Corsuire-Salan des 8 et 1G parle beaucoup du magnétisme, en style plaisant, bien entendu.
— De temps en temps quelque sommité littéraire ou artistique s’enrôle sous la bannière mesmérienne. Aujourd’hui c’est Alphonse Karr qui passe dans nos rangs. Il paie sa dette par six colonnes d’un récil apologétique des facultés somnambuliques inséré dans le Journal du dimanche du 21. Les savants ne pourront pas résister; ils seront entraînés par ce flot qui grossit sans cesse : en tout ils arrivent les derniers.
Le Propriétaire-Gérant : HjlBEIlT (de Camay).
Paris. — Imprimerie d'A, IUsé et Comp., rue de Seine, 3J.
CLINIQUE MAGNÉTIQUE.
Angine gangreneuse. — J’ai à rendre compte d’une maladie terrible,'destructive dans ses effets, prompte dans son action dévorante, ne laissant jamais d’espoir, car elle trouve toute médication impuissante. Adoptera-t-on lesprocédésmagnétiques qui me réussirent? Qu’importe! disons.
Une jeune femme d’une constitution bien développée souffrit dès son plus jeune âge d’affections de la gorge. Ces affections se passaient en peu de temps, mais revenaient souvent, jusqu’au moment de l’apparition des menstrues, où elles disparurent. Les moyens employés pour les combattre avaient toujours été de légères émissions sanguines par l’application de sangsues. A la suite de violents chagrins, cette riche nature s’altéra; mais, loin d’attribuer les accidents qui survinrent à des causes morales, les médecins consultés ne virent qu’une abondance de sang et conseillèrent d’abondantes saignées, qui furent pratiquées et souvent répétées. La malade avait fini par s’y habituer, les désirait même, éprouvant chaque fois un soulagement qui la,trompait toujours par son peu de durée. Telle était la constitution de cette personne, qu’elle supporta pendant plusieurs années cette sorte de traitement sans apercevoir une notable diminution de ses forces.
Il survint cependant un changement de coloration de la peau ; un reflet verdâtre apparut sur la face, pufo TOME IV.—K0 43.—10 AVRIL 1847. 7
bientôt une sorte de défaillance, et de là difficulté de marcher. Des douleurs dans le bas-ventre firent croire à une affection de cet organe, et les saignées furent encore indiquées,ainsiqu’un régime sévère; le repos absolu fut recommandé. Mais la malade, d’un caractère énergique, et d’ailleurs très-active et laborieuse, ne put s’accoutumer à ce régime; elle se fit magnétiser, et tous scs maux parurent se dissiper.
Veuve et jeune, elle se remaria; mais la lune de miel fut bientôt troublée par une affreuse maladie que nous allonsessayer de décrire. J’ai à noter avant, que, la veille de cette invasion, celte dame fut prise d’uae grande gaieté; elle chanta toute la journée, et le soir môme sa roix était pure et fraîche; elle assurait que jamais elle n’avait éprouvé une disposition semblable et aussi bien chanté.
Venant de faire des courses à pied, elle éprouva en rentrant un mai de gorge assez violent accompagné de douleurs de tète et d’oreilles. Elle s’efforça d’abord de surmonter le malaise qu’elle éprouvait, et même essaya de manger ; mais la difficulté d’avaler se fit sentir. On la mit au lit: la fièvre se développa rapidement; les yeux devinrent brillants, la figure s’anima, et la voix fut en grande partie éteinte. On appliqua quarante-cinq sangsues autour du cou, et on laissa le sang couler pendant plusieurs heures. Onmit force cataplasmes émollients sur les piqûres de saDgsues, autant pour calmer l’irritation qu’elles causaient que pour atteindre celle de la gorge, fies bains de pieds furent ordonnés ; on les rendit très' irritants avec de la moutarde. Malgré tout, l’indamma* tion de la gorge devint plus intense, et la difficulté d’avaler quoique ce soit vint compliquer les symptômes déjà si graves. Ce n’était encore que le commencement de plus cruelles souffrances. La malade fut prise d’une salivation opiniâtre et d’une telle abondance, qu’elle rem-
plissait par jour plusieurs grandes cuvettes, sans qu’il y eût une seule intermittence dans l’cxpuition. Appuyée sur scs coudes et courbée sur elle-même, nulle autre position ne lui était permise par son mal, qui, bien qu’angmentant à chaque instant, n’ôtait cependant rien de l’intelligence. Réduite au langage des signes, privée de tout sommeil, sentant des élancements dans la gorge et jusque dans la poitrine, la malade éprouvait de plus le sentiment de la soif, sans pouvoir satisfaire ce besoin. Forcée de balancer sa tête et de geindre, car elle ne se plaignait point, une sorte de grognement sourd, produit par le passage de l’air dans les fosses nasales, offrait le plus triste tableau. La mort était aux prises avec la vie, et la malade ne voulait pas mourir. Sentant qu’il s’opérait dans sa gorge une destruction partielle, elle luttait de puissance avec son ennemi, par une fermeté inébranlable. Les lèvres devinrent noires; la langue sortit d’elle-même hors de la bouche et devint également sèche et noire; la peau, comme brûlée, s’enlevait par parties, et bientôt un dépouillement complet de la langue et des lèvres eut lieu.
Que faire? Des saignées? Dans quel but? Il était évident que celte maladie était due aux émissions sanguines trop fréquentes ; d’ailleurs les sangsues avaient tiré une grande quantité de sang, et la maladie n’en avaitpoint été affaiblie. Des sinapismes, des mannluves, des cataplasmes? Belle ressource ! Autant vaudrait, pour éteindre un incendie considérable, jeter dans le foyer brûlant quelques verres d’eau. Chaque jour le terme fatal paraissait se rapprocher. Erreur 1 Dix jours se passent ainsi, puis cinq encore, et toujours une persistance des affreux symptômes jetait la désolation autour de la malade. Les forces diminuaient, les mouvements de balancement devenaient moins marqués, quoique aussi incessants. Rien n’avait pu être introduit dans l’estomac;
des lavements avaient été pris et rendus sans faire sentir leur action.
La gorge présentait extérieurement des saillies considérables. La malade avait senti jusque dans la poitrine de vives douleurs; mais vers le quinzième jour il n’y avait plus qu’un sourd battement, une sorte d’agonie; la respiration semblait à peine exister, la face devenait de plus en plus violacée; l’asphyxie était imminente; rien n’annonçait une crise favorable. On songea à faire la trachéotomie ; mais on pouvait douter de sou succès, les tumeurs paraissant s’étendrejusqu’à l’origine des poumons. La fièvre durait toujours, les angoisses étaient extrêmes. Dire la quantité de cataplasmes appliqués serait difficile; c’était l’occupation de tous les instants. Leur variété était grande, mais le succès que l'on se promettait de leur vertu n’arrivait point.
La mort semble moins affreuse lorsqu’elle arrive h la suite d’une maladie qui intéresse plusieurs organes et qui porte ses ravages jusque sur le cerveau. Ici c’est une sorte d’étranglement lent, une asphyxie progressive; c’est une fin atroce, car on se voit, on se sent mourir!
Témoin constant de cetteagonie, jene désespérais point pourtant : n’avais-jc point la vie avec moi, ne pouvais-je pas agir sur la malade sans avoir besoin du secours de ses organes? Sans doute, je ne pouvais empêcher la maladie de parcourir ses périodes; elle était due aux trop nombreuses saignées pratiquées ; elle venait d’une prédominance d'humeurs âcres qui ne pouvaient être expulsées que par une crise violente, et cette crise avait lieu. Abandonnée à elle-même, la malade succombait; soutenue, elle pouvait vivre, et c’est ce qui arriva : aussi ¿st-ce sans relâche que je lui appliquai le magnétisme. Instinctivement elle sentait que je lui étais nécessaire ; mon éloignement, même pour quêlques instants, lui devenait insupportable; ma présence seule la soutenait. Je
ne pouvais môme prendre un instant de repos, jouir d’un peu de sommeil; ce sommeil lui devenait fatal: aussi ne me laissait-elle pas reposer: il lui fallait toujours du magnétisme. Lorsque mes forces faiblissaient, elle s'affaissait; elle ne vivait donc que par la vie queje lui donnais. Les effets en étaient-ils sensibles, déterminais-je l’apparition de signes visibles de mon action? Aucun, malgré tous mes efforts. C’était une communication sourde, mais réelle, qui se prouvait, lorsqu’elle cessait. d’exister, par le sentiment plus profond que la malade éprouvait de sa destruction.
C’est ainsi que pendant dix-sept jours cette lutte fut prolongée. Quelques instants avant la fin de la crise, la malade prit quelques petits morceaux desuere couverts d’aspérités, et les introduisit d’une manière violente jusqu’à l’arrière-bouche. Bientôt un torrent de matière semblable à de la purée de pois sortit par la bouche, mélangée dç membranes et d’un peu de sang. Le pus, sur les derniers temps, semblait venir de la poitrine; la malade sentait ses sacs crever successivement, et l’écoulement de cette boue putride rendait petit à petit la liberté à la respiration. Pendant deux heures elle cracha de ces matières et en remplit une cuvette; elle put dès lors se nettoyer la bouche et avaler quelques gorgées de bière qu’elle avait instamment demandée. Elle éprouvait sur le trajet du liquide le sentiment de plaies vives, de nombreuses écorchures, mais plus de craintes: la langue était rentrée dans la bouche, et cette sorte de décomposition de son tissu disparaissait à vue d’œil. Une crainte cependant affectait la malade: elle croyait avoir avalé beaucoup de pus et être ainsi empoisonnée;- elle avait la certitude qu’une assez grande quantité en était descendue dans l’estomac. Elle redemanda de la bière, et en but rapidement une bouteille.
Le besoin de prendre des aliments devint bientôt im~
périeux : elle demanda des bouillons. On épuisa ce qui s’en trouvait à la maison, mais c’était loin d’apaiser celle sorlc de fringale; il fallut recourir aux marchands hollandais qu’on réveilla, car c'était à deux heures du matin que celte crise se termina. La malade en prit ainsi environ vingt-cinq tasses en quelques heures. Elle eût dû, selon M. Magendie, être empoisonnée ; mais voyez l’effet merveilleux du toxique (la gélatine, base du bouillon) ! le sommeil le plus doux vint surprendre la malade, et pendant plus de trente heures elle resta sans mouvement, sans sentiment. La respiration était pleine cl entière, la face avait perdu sa couleur bleuâtre, et rien ne paraissait la troubler dans ce bienheureux repos; les al-lanlset venants s’approchaient pour la coutemplcr, craignant qu’elle ne fût morte. Certain désormais que son état ne pouvait inspirer d’inquiétude, je ne la magnétisai plus.
La malade était guérie ; je participais à son borheur ; je lui avais été utile, peut-ôtre même le seul instrument de sa conservation: c’était ma pensée;j’étais donc heureux comme doit l'étre tout magnétiseur qui a fait une belle chose et qui s’extasie en contemplant son œuvre.
La réchappé« ressentit encore pendant plusieurs jours la présence de petites tumeurs dans la gorge ; toutes celles qu’elle annonça crevèrent successivement, et la matière en fut rendue. On purgea la malade avec de l’eau de Sedlitz,et je puis assurer qu’elle passa de la maladie la plus grave que l’on puisse voir à la santé la plus florissante , sans convalescence, et presque sans transition.
Une chose digne de remarque, un fait magnétique singulier : pour apaiser l’ardeur qu’elle éprouvait dans la bouche par suite de la salivation incessante, et calmer la chaleur atroce de la langue et des lèvres, elle portait mon bras à sa bouche, et promenait sur ma peau scs lè-
vres fit sa langue brûlantes ; c’était pour elle un grand soulagement. Celte action , tout instinctive, était d'un effet merveilleux ; la coloration noire s’effacait pour reprendre sans doule ; mais c’était beaucoup qu’un instant de soulagement.
Baron du Potet.
Ablation de tumeur. — Un Bengalais nommé Hurro-mundoo-Laha, âgé de vingt-sept ans, portant une de ces énormes tumeurs du scrotum si communes en Égypte et dans l’Inde, entra dernièrement à Native Hospital (Calcutta) pour y être opéré durant l’insensibilité magnétique. Sa tumeur portait 7 pieds de circonférence, et aucun médecin, depuis sept ans qu’il en était afTecté, n’avait osé se charger d’une telle opération. M. Esdailc l'entreprit, et après cinq magnétisations, l’insensibilité, de mille manières explorée, étant absolue, l’opération eutlieudevantla commission, composée deMM.'Halliday, Beadon, Young, Hume, des docteurs Pherson, Jackson, Stuart, Burt, Taylor et Huffnagle, chargée par le gouvernement de prononcer sur l’utilité du magnétisme appliqué à la chirurgie.
Cette opération devant être décisive, M. Esdailc resta simple magnétiseur et confia la partie chirurgicale.au docteur Duncan Stewart, l’un des commissaires. La tumeur fut enveloppée dans un drap, auquel était attachée une corde qui passait par une poulie fixée à une poutre. On tira la corde à l’effet de dilater le col ou sommet de cette tumeur, qui avait là 30 centimètres de diamètre. M. Stewart l'incisa alors, et au bout de six minutes la tumeur était enlevée et l’artère spermatique liée. Le patient, durant ce temps, n'a pas sourcillé, n’a fait aucun mouvement, ni senti la plus légère douleur.
La tumeur, une demi-heure après son ablation, pesait 103 pounds, et avec le sang, les liquides qu’elle conte-
nait, elle fut évaluée à upwards of eiyht stone, c’est-à-dire plus de 50 kilogrammes, le slone anglais équivalant à 6,349 grammes.
Dans une lettre publiée par le Zoist, M. Esdaile écrit à son frère : « Je vous prie de dire au docteur Elliotson que la tumeur lui a été votée par acclamation, et qu’elle est dans le rhum en attendant qu’il l’accepte. »
Quel plus beau trophée offrir aux regards des sceptiques?
SOCIÉTÉS SAVANTES.
ACADÉMIE DES SCIENCES.
Séance du 22 mars. — Le progrès du magnétisme, partout si rapide, vient de se manifester au sein de l’Académie. M. Matteucci vient d’adresser à ce corps savant les formules hypothétiques auxquelles l’ont conduit ses recherches sur les phénomènes électro-physiologiques. Ce n’est point encore du magnétisme dont parle le savant italien; mais l’agent dont nous avons mille fois démontré l’existence, la force qui nous sert à produire les phénomènes magnétiques, est mise hors de doute sous le nom déguisé de fluide nerveux. Que de temps il a fallu pour en arriver là I Espérons que les conséquences de ce remarquable travail seront bientôt déduites par nos adversaires, et que notre magnétisme tant contesté prendra enfin rang parmi les principes physiques dont l’étude
occupe ¡’Académie. Voici le résumé de la communication de M. Matteucci.
1° Le fluide nerveux se produit par les actions chimiques de la nutrition, c’est-à-dire par la combinaison de l’oxygène de l’air avec le carbone et l’hydrogène des aliments.
2° Ce fluide, principalement développé dans les muscles, s’y répaud, et, doué d’une force répulsive entre scs parties comme l’électricité, tient les éléments de la fibre musculaire dans un état de répulsion analogue à celui des corps électrisés.
3° Quand ce fluide cesse d’ètre libre dans les muscles, les éléments de la fibre musculaire s’attirent, se rapprochent.
4° Ce même fluide entre continuellement dans les nerfs qui le conduisent au cerveau, où il est modifié, prend un nouvel état qui n’est plus celui de fluide libre ; c’est de cette manière qu’il passe du muscle au nerf, et, selon la quantité qui cesse d’en être libre dans le muscle, la contraction est plus ou moins forte.
6° Cet état est celui du courant nerveux ou espèce de décharge qui va de l’extrémité des nerfs au cerveau, et revient en sens contraire par l’acte de la volonté.
6° Quand celte décharge a lieu, la contraction musculaire doit se produire, puisque le fluide cesse, comme il est dit plus haut, d’ètre libre dans les muscles où il se produit.
7° Cette décharge du fluide nerveux, agissant comme dans les poissons électriques, explique la contraction induite; dans les deux cas, et par la même disposition des parties, le courant nerveux produit une sorte de polarisation électrique, soit des éléments chimiques de la fibre, soit de l’appareil électrique ; la différence des effets résulterait du nombre différent des éléments, de leurs dimensions, etc.
8° Le courant galvanique empêche la décharge nerveuse s’il est dirigé dans le même seusqu’elle: c’est le cas du courant direct ; le fluide nerveux ne pouvant ni entrer ni se recueillir dans le nerf, celui-ci perd son excitabilité; le contraire a lieu pour le courant inverse qui va dans le même sens que la décharge nerveuse ; de cette manière, le fluide nerveux se trouve accumulé dans le nerf, dont l’excitabilité se trouve augmentée.
— Dans la môme séance, M. Froment a présenté un appareil électrique qui se rattache, quoique de loin, au sujet qui nous occupe : l’influence de l’électricité sur les phénomènes physiologiques. Ainsi, par de longs détours, les savants s'acheminent vers le magnétisme animal ; l’analogie les y conduit tout doucement; ils n’ont môme plus qu’un pas pour arriver à l’identité. Le nom de magnétisme les gênera bien encore; mais quand on est d’accord sur les faits, on s’entend facilement sur les mots. Que les magnétiseurs répondent à cette tendance, qu’ils étudient de plus en plus les sciences physiques, la pratique y gagnera beaucoup, la propagande encore plus; car celle étude les mettant en communion avec les deux mondes magnétique et savant, qui s’ab-horrent, ils en opéreront la fusion, et le grand jour de la justice luira pour Mesmer et sa découverte sublime.
IIédert (de Garnay).
CONFÉRENCES MAGNÉTIQUES.
• Il est des nœuds secrets, ¡1 est des sympathies,
• Qui, par le doux accord des âmes asservies,
• Se plaisent l’un ù l’autre et se lai-sent charmer
« Par un je ne sais quoi qu'on ne peut exprimer, t
Les attractions et les répulsions qui se manifestent entre les êlres, à quoi sont-elles dues? Pourquoi ces
aversions subites ou ces sympathies qui nous enchaînent? OU en est le principe, la loi ? Le jugement, la raison, ne peuvent répondre à ces questions ; les faits sont constants, l’explication n’est point encore trouvée.
Voyons si par le magnétisme nous pourrons jeter quelque lumière sur ces mystères et découvrir les causes secrètes qui agissent sur nous bien avant que la pensée et la réflexion aient pu s’exercer.
Si nous en croyons les historiens, et nous avons toute raison de les croire, des exemples sans nombre de sympathie comme d’antipathie, remarqués dans tous les temps, frappèrent vivement les imaginations comme elles agirent sur nous-mêmes. Qui donc oserait en nier la puissance et la réalité? Il n’est pas un seul ôlre qui n’ait senti cette influence occulte.
« Il y a des visages qui s’attirent les uns les autjres;il y en a qui se repoussent, » dit Lavater.
Le premier moment qu’une personne s’ofFre à vous vous prévient-il en sa faveur ; cette première impression n’a-t-elle rien qui vous blesse, qui vous cause aucune gêne, aucune contrainte; vous sentez-vous en sa présence plus libre, plus animé, et sans qu’elle vous flatte, même sans qu’elle vous parle, plus content de vous-même: cette personne, soyez-en sûr, ne perdra jamais dans votre esprit; elle y gagnera constamment, pourvu qu’un tiers ne vienne pas se placer entre vous.
Les philosophes sympathistes disent qu’il émane sans cesse des corpuscules de tous les corps, et que ces corpuscules, en frappant nos organes, font dans le cerveau des impressions plus ou moins sympathiques ou plus ou moins antipathiques. On voit deux femmes pour la première fois; et l’une, quoique moinsjolie que l’autre, nous plaît davantage.
Le mariage du prince de Condé avec Marie de Clèves se célébra au Louvre le 13 août 1572. Marie de Clèves,
âgée rie seize ans, de la figure la plus charmante, après avoir dansé assez longtemps et se trouvant un peu incommodée de la chaleur du bal, passa dans une garde-robe, où des femmes de la reine-mère, voyant sa chemise toute trempée, lui en firent prendre une autre. Un moment après , le duc d'Anjou (depuis Henri 111), qui avait aussi beaucoup dansé, y entra pour raccommoder sa chevelure, et s’essuya le visage avec le premier linge qu’il trouva : c’était la chemise qu’elle venait de quitter.
En rentrant dans le bal; il jeta les yeux sur Marie de Clèves, la regarda avec autant de surprise que s’il ne l’eût jamais vue; son émotion, son trouble, ses transports et tous les empressements qu’il commença de lui marquer étaient d’autant plus étonnants que, depuis six mois qu’elle était à la cour, il avait paru assez indifférent pour ces pâmes charmes qui, dans ce moment, faisaient sur son âme une impression si vive et qui dura si longtemps. Depuis ce jour il devint insensible à tout ce qui n’avait pas de rapporta sa passion; son élection à la couronne de Pologne, loin de le llalter, lui parût un exil; et quand il fut dans ce royaume, l’absence, au lieu de diminuer son amour, semblait l’augmenter ; il sepiquait au doigt toutes les fois qu’il écrivait à cette princesse, et pe lui écrivait jamais que deson sang. Le jour même qu’il apprit la nouvelle de la mort de Charles IX, il lui dépêcha un courrier pour l’assurer qu’elle serait bientôt reine deFrance ; et lorsqu’il y fut de retour, il lui confirma cette promesse et ne pensa plus qu’à l’exécuter; mais, peu de temps après, cette princesse fut attaquée d’un mal si violent, qu’il l’emporta à la fleur de son âge, et sa mort renversa les projets deson amant.
Le désespoir de Henri III ne peut s’exprimer ;il passa plusieurs jours dans les pleurs et les gémissements; et lorsqu’ 1 fut obligé de se montrer en public, il parut dans le plus grand deuil.
Il y avait déjà plus de quatre mois que la princesse de Condé était morte et enterrée à l’abbaye de Saint-Ger-main-des-Prés, lorsque Henri III, en entrant dans cette abbaye, où le cardinal de Bourbon l’avait convié à un grand souper, se sentit des saisissements de cœur si violents, qu’on fut obligé de transporter ailleurs le corps de cette princesse. Enfin il ne cessa de l’aimer, quelque effort qu’il fit pour étouffer cette passion malheureuse.
On raconte qu’un roi et une reine d’Arracan (dans l’Asie, au delà du Gange) s’aimaient éperdument; qu’il n’y avait que six mois qu’ils étaient mariés, lorsque ce roi vint à mourir; qu’on brûla son corps, qu’on en mit les cendres dans une urne, et que toutes les fois que la reine allait pleurer sur cette urne, ces cendres devenaient tièdes.... (SaintFoix.)
— Deux soldats juifs avaient fait plusieurs campagnes dansleifiômecorps.Leurscœurss’étaienttendromentunis par cette sympathie qui ne peut se définir.Toute l’armée les connaissait et les admirait sous le nom de frères de l’amitié. Ils vivaient, ils combattaient l’un pour l’autre. Leurs sentiments semblaient ne devoir jamais connaître de terme, lorsqu’un jeu de la fortune les divisa. La vanité cty plus âgé fut blessée de voir son cadet devenu centurion sous le fameux Jean, qui commandait un parti de Juifs mécontents.
Dès ce jour la haine remplaça l’amitié : ils furent membres de factions opposées, et se cherchèrent dans les combats avec une égale fureur. Deux années de suite^n les remarqua pleins d’une aversion réciproque et se vouant une haine implacable. Le parti où servait le simple soldat, ayant fait alliance avec les Romains, fut complètement victorieux et força Jean de se jeter dans le temple avec tous les siens. Les soldats romains l’entourèrent; le temple fut bientôt la proie des flammes, au milieu desquelles on voyait des milliers d’hommes qui
s’étaient réfugiés dans l'enceinte sacrée. Dans cet instant fatal, le soldat maintenant favorisé de la fortune aperçut sur les créneaux de la plus haute to ur son ancien ami, qui regardait avec horreur au-dessous de lui, et que le feu était prêt à dévorer.
Soudain toute sa première tendresse se réveille ; il n’envisage plus que l’homme de son cœur, au moment de périr. Incapable d’étouffer les mouvements généreux qui le transportent, il jette ses armes, étend les bras, et prie son camarade de se précipiter, pour trouver sur lui son salut. Le centurion refuse; mais, cédant à des prières redoublées, il s’élance dans les bras qui lui sont ouverts. Les deux anciens compagnons d’armes périrent, l’un écrasé sous le poids du corps qui tombait, l’autre mis en pièces par la grandeur de la chute. (Goldsmith.)
— Le poëte Burger, la veille de son mariage, voyant une jeune fille de quinze ans occupée près de sa fiancée, lai dit:
« Quelle est cette jeune fille? — C’est ma sœur, » répondit celle-ci. « Hélas! fit Burger, je me suis trompé: «c’est celle-ci que j’aime et que j’aimerai toute ma vie. » Paroles prophétiques! C'était Molly, à qui sont adressées toutes ses poésies d’amour. s Cependant le mariage eut lieu, et Burger, qui jusqu’alors avait peu connu son propre cœur, sentit bientôt toute la fatalité de son destin, car Molly aussi l’aimait. 11 lutta encore quelque temps aussi bien que Molly, qui dépérissait à vue d’œil. 11 cherchait à se distraire par le travail ; il se frappait la poitrine pour en extraire cette passion fatale. Vains efforts! Au milieu de ses études, Molly traversait la chambre, pâle, mais ravissante de jeunesse et de grâce, transparente de sentiments, comme il dit, et plongeant sur lui un regard d'azur et plein de mélancolie céleste. Burger pleurait comme un enfant, car il estimait sa femme. 11 allait quitter la maison maritale
et fuir au loin ; mais il rencontra encore Molly dans le jardin par lequel il passait, et là les amants se répétèrent en paroles ce qu’ils s’étaient dit cent fois par lesyeux.
Nous pourrions multiplier les exemples de ces sortes de sympathie irrésistible dans leurs effets, terribles dans leurs résultats; mais ce serait établir qu’il fait jour en plein midi : c’est donc un fait acquis. Voyons si par le magnétisme nous ne pourrons artificiellement déterminer quelque chose de semblable aux phénomènes de sympathie.
Il résnltedes principes que nonsavonsétablis, que des courants de fluide entrent et sortent de chaque individu, et que, par des affinités encore secrètes, ces fluides, lorsqu’ils ne sont point dirigés parla pensée, par l’intention, le vouloir, vont pourtant, comme s’ils étaient doués d’intelligence, se fixer dans des organisations de leur choix et y déterminer une série d’accidents bons ou mauvais. C’est ce qui résulte des faits cités plus haut. Maintenant que nous savons cela par le magnétisme, essayons si là encore il n’y a point une loi : pour nous tout est réglé dans la nature; nous n’admettons point le hasard, car il a été inventé pour venir au secours de l’ignorance et de la sottise.
Voici ce qu’on observe en faisant l’expérience suivante. Si je trace deux lignes parallèles A B partant da même point comme ci dessous :
A_B D__C A_B
les personnes qui les suivent n’éprouvent point de changements dans leur marche; elles peuvent se coudoyer, se heurter; on ne voitpoint d’effets moraux avoir lien. Si, au contraire, on trace une autre ligne partant du point C pour arriver à D, et que deux êtres marchent ensem-
ble, l’un sur la ligne A et l’aulre sur celle C, de manière à se rencontrer, tout ce qui se passe a un caractère étrange d’antagonisme et d'antipathie. Arrives à la limite de leurs lignes respectives, ils se considèrent, s’animent, la figure se colore ou pâlit, et le délire de l’emportement commence; au dédain succède la menace, et comme deux athlètes, les deux champions se préparent au combat. 11 faut alors intervenir et bien choisir son temps, car il devient difficile de séparer les deux êtres qui, tout à l’heure encore,se voyaient avec indifférence. Je dis plus: c’est qu’avec une sympathie naturelle, préexistante, l’effet sera le même. Voilà ce que nous avons vu plusieurs fois résulter de nos expériences.
Un effet non moins bizarre résulte de la disposition des lignes. Si vous placez à l’extrémité de l'une d’elles, mais sans qu’il bouge, un être quelconque ; celui qui parcourt la ligne depuis son extrémité est pris de sympathie pour celui qui est sur son chemin ; sa pantomime est expressive et témoigne toute la tendresse possible. Mais bientôt, s’apercevant que celui qui la cause n’y répond point, n’a point la même chaleur, il le retourne brusquement en signe de dédain et s’appuie nonchalamment sur ses épaules.
Toute description ne pourrait donner l’idée de ces phénomènes; il faut les déterminer soi-même ou assister k leur développement pour les concevoir. Les mouvements de l’âme ne peuvent se traduire par la plume, et nous y renonçons. Mais nous allons poursuivre l’étude de faits aussi curieux: nous avons été, nous osons le dire, impressionné comme-toute l’assemblée, car nous n’avions vu rien de pareil dans nos nombreuses expériences. Il est vrai qu’ici tout est combiné et est le résultat forcé d’une puissance agissant par courant contraire.
Nous sommes donc toujours sur le chemin des plus
grandes découvertes ; nos lecteurs nous sauront gré de les tenirau courant de nos explorations;car les résultats appartenant à la science du magnétisme, ce sont eux qui doivent l’étendre et en augmenter les bienfaits.
Baron du Potkt.
VARIÉTÉS.
Filles électriques. — Le 3 septembre dernier, le Constitutionnel donnait la nouvelle suivante :
« Depuis quelques jours une foule avide et serrée assiège les abords d’une maison de la rue Descartes et intercepte la circulation. L’autorité, représentée par des sergents de ville, veille au bon ordre et attend aussi avec une vivè anxiété l’explication du mystère qui attire un si grand concours de citoyens.
■ Dans une chambre de cette maison, habitée par une jeune fille, un bruit assez fort et d’une nature étrange se fait entendre jour et nuit par intervalles égaux et courts, et tient dans une constante et pénible émotion tous les' locataires épouvantés, etc.»
Aussitôt que celte nouvelle nous parvint, MM. de Walles de Montjay, Mahaut et moi, nous nous rendîmes sur les lieux pour examiner les circonstances de ce fait étrange. A notre arrivée, nous trouvâmes la jeune fille dans un accès de somnambulisme spontané, et son père, charbonnier, nous raconta que dans cet état elle montait et se promenait sur les monceaux de bois et de charbon avec une grande agilité, et sans qu’il fût possible de
la retenir. Actuellement elle était assise, tranquille, les yeux fermés, la tête penchée, dans l’attitude d’une personne qui dort. Au bout d’un quart d’heure environ, après avoir exécuté différents actes, elle sortit, prit une échelle, et se disposait à faire une promenade sur un toit, lorsque M. de Walles l’arrêta, non sans peine, car dans cet état elle était douée d’une force très-grande. Elle avait de treize à quatorze ans; nous pensâmes que sa nubilité était cause de tout ce désordre. Son médecin, le docteur Masson, qui arriva sur ces entrefaites, fut de notre avis, et nous étudiâmes ensemble le développement de cette crise. Dans tout le quartier elle passait pour ensorcelée, et deux sergents de ville, mis de gafde dans sa chambre, attestaient avoir entendu, par intervalles, un bruit analogue h des coups de marteau sur le dossier du lit de la jeune fille. En outre, le père et les voisines nous assurèrent que dans le jour les coups s’entendaient distincts sur les meubles qu’elle approchait. Nous restâmes trois.heures à l’examiner; elle commit tous les actes du somnambulisme, se montra fort lucide pour retrouver des objets que nous lui cachions, mais nous n’entendîmes rien. Depuis un jour déjà, et à la suite d’une magnétisation hasardée, la crise avait sensiblement changé de forme; le somnambulisme, d’intermittent, était devenu permafient, et plus d’action, dès lors, n’avait eu lieu sur les meubles. Nous n’avons rien entendu de ce bruit étrange ; mais si on s’en rapporte à des témoignages qui ont tous les caractères de la véracité, on ne peut s’empêcher de considérer ce fait comme analogue à celui de la petite Cottin.
Aujourd’hui, M. Meade nous transmet de Londres le récit suivant, extrait du Douglas Jerrold’s du 20 mars :
« Tout le voisinage de Black Lion-laneà Baytwaler retentit d'un événementextraordinaire, arrivé récemment chez M. Williams, dans Moscow-Road, et qui a la plus
grande ressemblance avec la célèbre affaire du revenant deStockwell,en 1772. La maison est habitée par la famille Williams seule, qui se compose de quatre personnes et nne petite Espagnole de neuf à dix ans, qu’ils élèvent charitablement. Il y a quelques jours, ils furent tons grandement surpris par un mouvement soudain et mystérieux de divers objets dans le salon et la cuisine. Aussitôt un pot accroché au dressoir se détache sans cause visible et se brise; un autre le suit de près, et le lendemain un autre encore. Une théière de porcelaine, pleine de thé qu’on venait de faire, et placée sur le manteau de la cheminée, fut renversée sur le parquet et brisée ; une autre en métal, qui lui fut immédiatement substituée, éprouva le même sort, et quand elle fut sur la table, on la vit sautiller comme si elle eût été ensorcelée, et fut aussi renversée. Quelque temps après que tout fut remis, un tableau se détacha du mur sans que le cadre se brisât. Tout était surprise et terreur alors, car les vieilles gens sont très-superstitieux, et attribuant cet effet à un agent supernaturel, on détacha les autres tableaux qu’on déposa sur le sol. Mais l’esprit de locomotion ne s’arrêta pas là : les assiettes, les pots continuèrent d’être agités sur leurs tablettes, de se déplacer, rouler au milieu de la pièce, et sautiller, comme s’ils eussent été inspirés par une flûte magique. Au souper, quand la tasse de la petite Espagnole fut pleine de bière, elle dansa sur la table et roula par terre; trois fois de suite elle fut remplie et replacée, et trois fois de même renversée. Il serait ennuyeux de relater les tours fantastiques qui ont été joués par les meubles de tout genre. Un vase égyptien se mit à sauter sur la table, alors que personne ne l’approchait, et se brisa en tombant; une bouillotte s’élança du foyer dans le cendrier, comme M. Williams venait de remplir la théière qui tomba de la cheminée. Des chandeliers, après une danse
sur la table, s’enfuirent au milieu de la chambre avec de petits meubles, les boîtes à chapeau, bonnets, etc., de la façon la plus singulière. Un miroir fut enlevé de la table de toilette, et suivi de peignes et de divers flacons de parfums. Une grande pelote à épingles a été éminemment remarquable par ses sauts incessants de côté et d’autre. Les amis de la famille Williams supposent que la petite Espagnole est la cause de tout cela, quoique cela soit très-extraordinaire pour son âge; mais jusqu'à cc jour le modut operandi est demeuré invisible. »
Notre collaborateur est allé sur les lieux s’enquérir de l’authenticité de ce fait, dont le récit qu’on vient de lire est parfaitement exact. Nous en reparlerons dans notre prochain numéro. (Pour les autres électriques, voyez tome II, page 79 à 229.)
Banquet mesmérien. — La réunion que nous avons annoncée dans notre dernier numéro a eu lieu le mardi G avril dans nos bureaux.
La commission chargée de régler tout ce qui se rattache à la médaille commémorative de la première célébration de la naissance de Mesmer, a fait son rapport à l’assemblée, présidée par M. le chevalier Mac-Sheehy.
Il résulte de ce rapport que la médaille ne sera frappée qu’en nombre égal à celui des personnes qui ont adhéré’ par écrit à la proposition faite au banquet du 23 mai 184 6, de consacrer le souvenir de cette première ovation à la science que Mesmer nous a léguée, par une médaille à l’effigie de cet homme illustre, de cet ami de l'humanité.
Chaque médaille portera le nom de celui à qui elle appartiendra. A cet effet, tous les souscripteurs sont priés de nous envoyer avaut le 10 mai leurs noms et prénoms lisiblement écrits.
La distribution en sera faite le 23 mai prochain.
Cette mesure a été d’autant mieux accueillie qu'elle a été jugée très-légitime et très-juste ; mais surtout parce qu'elle se rattache à une proposition faite par la commission à la suite de ce rapport.
Nous invitons donc une dernière fuis les personnes qui n'ont-point donné leur adhésion à la proposition du 23 mai de l'année dernière, à le faire avant le 10 mai prochain. Passé ce délai, il ne sera plus possible d'obtenir une médaille de fondateur.
La proposition faite à l’assemblée consiste à constituer une association, dont les possesseurs de la médaille seront seuls les fondateurs, a l’effet d’offrir chaque année, le jour anniversaire de la naissance de Mesmer, une médaille, à titre d’encouragement ou de récompense, à quiconque, de quelque pays qu’il soit, aura fait quelque chose d’utile ou de marquant dans le magnétisme. Cette médaille sera, comme la précédente, h l’effigie de Mesmer; le revers seulement sera changé. D’après la proposition, un comité serait chargé de recueillir tous les renseignements, et sur son rapport, l’association statuerait chaque année.
Cette proposition, dont toute l'assemblée a senti et apprécié l’importance, a été accueillie à lfunanimité.
L’association prendra le titre de Jury magnétique. Le premier comité a été à l’instant nommé; il est chargé de rédiger, d’ici au 23 mai, un projet de constitution qui sera ce jour-là soumis àla discussion de l’association, pour devenir, après qu’il aura été approuvé, la loi du Jury.
L’assemblée a ensuite arrêté que la seconde célébration, de l’anniversaire de la naissance de Mesmer aurait lieu, dans un banquet, le 23 mai prochain. M. du Potet a été élu président à l’unanimité ; MM. Laporte, Gally et Boullet ont été nommés commissaires.
Tous les membres présents ont signé la liste de souscription.
M. Laporte est charge de recueillir les souscriptions ou adhésions. Il sc propose d’écrire à toutes les personnes composant le banquet de l’année dernière, et à ceux des magnétiseurs ou partisans du magnétisme qu’il pourra connaître. Si quelques-uns de nos lecteurs jugeaient à propos de concourir à cette manifestation, ou d’indiquer quelques autres personnes qu’on pourrait avoir oubliées, nous les invitons à écrire à M. Laporte, cité Trévise, n° 5.
Tribunaux. — On écrit de Washington (Etats-Unis) à la Démocratie pacifique du 6 avril :
« Le docteur Oatman, voulant éprouver une somnambule très-célèbre de celte ville, Elisa Montgomery, et s’assurer si, pendant le sommeil magnétique, son insensibilité était complète, lui a placé brusquement sous le nez un flacon plein de poivre de Cayenne. La jenne fille ressentit aussitôt de violentes convulsions, et, s’élançant à la figure du doctçur, elle lui fit avec les ongles de fortes égratignures.
«Non satisfaite de cette vengeance, Elisa Montgomery et le magnétiseur qui l’assiste ont assigné M. Oatman devant la Cour dés plaids-communs en dommages-inté-rêts pour trouble apporté k leurs exhibitions.
« Le j ury a condamné M. Oatman à la modique somme de six cents a titre de dommages-intérôts, et à pareille somme pour les frais. Les cent» américains valent un peu plus d’un centime de France. »
Songe. — A Monsieur le Rédacteur du Journal du Magnétisme.
Monsieur,
Comme abonné à votre précieux journal, permettez-moi de vous faire connaître un fait assez remarquable
qui s’est passé dans la famille d’un de mes amis, et sur la vérité duquel je puis vous donner toute garantie, attendu que d’une part la nature du fait ne laisse aucun doute sur sa vérité, et que la position honorable, l’esprit élevé, autant que la douleur de la famille, sont une garantie suffisante delà véracité de ce triste récit.
Si vous jugez ces lignes de nature à intéresser vos lecteurs, je vous laisse tout-à-fait libre d’en faire ce que bon vous semblera.
Votre tout dévoué,
J.-M. de P.
Paris, 8 avril 18/|7.
L’année dernière, M. de W. vit s’éteindre entre ses bras sa douce et charmante fille, qui avait à peine dix-sept ans, et qui était toute brillante de bonheur et d’avenir ! En vain les trésors de l’amour paternel et maternel le plus éclairé lui furent-ils prodigués avec les secours de la médecine, rien ne put arrêter les rapides progrès d’un mal de poitrine qui au bout de peu de temps la conduisit au tombeau.
Il faut remarquer que rien ne pouvait faire pressentir une telle maladie, car aucun des membres de cette nombreuse famille n’en avait jamais été atteint.
La douleur profonde que causa une telle perte se comprend mieux qu’elle ne se décrit; mais ce qui ajouta encore à son effet déjà si pénible, fut la circonstance que je vais dire.
Peu d’années après la naissance de cette jeune personne, qui voyageait avec ses parents à l’étranger, le père eut un songe, et il vit d’une manière très-nette et fort distincte un tombeau sur les côtés duquel était écrit fort lisiblement : 23 juin 184..., avec des initiales qui paraissaient effacées, et qu’il ne put reconnaître.
Une telle vision avait dû singulièrement frapper son
esprit; car à son réveil, malgré ses efforts, il ne put effacer celte image de devant ses yeux; elle lui inspirait un effroi secret, quoiqu'il se piquât d’être un esprit fort. Toutefois, après avoir communiqué ce songe à sa femme, ils furent assez prudents l’un et l’autre pour renfermer dans leur cœur cette singulière circonstance, et par égard l’un pour l’autre, ils n’en parlèrent plus. Cependant aucun d’eux ne voyait approcher le 23 juin sans effroi; mais ils se gardaient bien de se communiquer celte pensée, dans la crainte d’éveiller un souvenir dont chacun avait l’espoir qu’il s’était effacé dans l'esprit de l’autre.
Cbmme les années.s’écoulaient sans que rien de fâcheux leur arrivât, joint à ce qu’avait d’inexplicable pour eux ce chiffre de 181..., dont ils ne pouvaient comprendre la signification, peu à peu leurs inquiétudes se calmèrent, et depuis quelques années ils n’y pensaient plus.
Ce fut aux fêtes de Pâques 1846 que leur fille commença à ressentir les atteintes du mal qui allait l’emporter ; mais à cet âge il y a tant d’espoir dans la jeunesse, ce mal lui-même est si mystérieux, que tout contribuait à entretenir leur quiétude, et que peu de jours encore ayant sa mort, personne ne songeait à une séparation si cruelle et si inattendue. Enfin le jour du départ arriva avec un déchirement d'autant plus affreux pour toute la famille, qu’il était plus brusque et imprévu.
Après les premiers élans de la douleur, le père dit à sa femme : « C’est aujourd’hui le 23 juin 1846! — Tu y pensais donc aussi! » lui dit-elle; et lous les deux s’avouèrent alors seulement leurs inquiétudes mutuelles et secrètes pendant tant d’années! Tous deux s’inclinèrent devant* une dispensation si mystérieuse de la Providence et adorèrent Dieu en pleurant.
Extase épidémique. — Dans le cours de l’année
1841, on vit apparaître dans le centre de la Suède une épidémie caractérisée par des spasmes, des contractions involontaires, des contorsions que précédait une sorte d’extase, dans laquelle les malades étaient irrésistiblement portés à prêcher la parole de Dieu, ce qui avait fait désigner cette maladie,sous le nom de : mal de prédication. Des médecins témoins de ces paroxysmes les ont assimilés à l’extase contemplative, à l’imitation, aux hallucinations, à la chorée, à la possession, au somnambulisme; d’autres y ont vu un mélange de tousçes états, et rappelé avec beaucoup de raison les convulsionnaires de Saiut-Médard, les trembleurs desCévennes, les sorciers, etc., tant à cause des signes corporels que des visions, prophéties, etc. (I).
Cette singulière maladie, qui s’éteignit peu à peu, a reparu l’année dernière dans le Smaland, la plus pauvre des provinces suédoises. La Gazelle évangélique de Berlin a publié sur cette apparition, qu’elle nomme réveil, par opposition au repos ou sommeil dans lequel les pasteurs berçaient leurs troupeaux, trois articles dont ¡'Espérance, journal protestant, dans son numéro du 1er avril, donne le résumé. En voici les traits principaux :
«.....Des gens sans instruction, de pauvres villageois
sachant à peine lire, des femmes de tout âge, et jusqu’à des enfants de dix ans (2), prêchent tout à coup la repentance et la foi à leurs compagnons....
« Ils se désignent eux-mêmes sous le nom de rœstar's, du verbe rœst, crier, et leur discours sous celui dero/>, voix, rappelant ainsi le passage de Jean, 1, 23. On s’étonne, on les entoure, on les écoute avec empressement, avec curiosité, souvent avec fruit.... Mais ce qu’il y a
(1) Voyez Gazelle médicale de Paris, tome XI, n°33, un Mémoire du doc* leurSoudeo, de Stockholm, sur ce sujet.
(2) Voyez l'analogue, Théâtre sacré des Cévennes, page 80.
de singulier, c’est le mode dont ces rcestar's sont instruits de leur vocation, et de la manière dont ils s’en acquittent.
«Ce sont des gens sans culture ; quelques-uns d’entre eux n’ont pas même lu la Bible; plusieurs sont incapables de s’cnoncer clairement sur les questions qui regardent les intérêts matériels, et pourtant leurs discours sont pleins de la vérité divine, conformes à la doctrine pure et simple, et surtout animés d'un esprit évangélique bien rare ; mais ce qui est surtout extraordinaire', ces hommes à langue pesante, à pensées confuses, sont armés d’une parole facile, prompte, abondante, lumineuse, toujours puissante, parfois même éloquente et poétique, lorsqu’ils entrent dans le ministère sacré. Ils y sont introduits par une espèce de préparation corporelle. D’abord ils souffrent d’une grande lassitude dans tous les membres; puis ils éprouvent des mouvements convulsifs; les épaules s’avancent sur la poitrine; ils s’étendent sur le dos ou restent debout; leurs sens se ferment aux impressions du dehors; ils sont dans un transport tranquille, et les voilà qui ouvrent leurs lèvres et font retentir leur voix pénétrante. Cet état dure communément plus de deux heures; ils en sortent spontanément. Alors ils sont comme des gens qui se réveillent d’un beau songe; leurs yeux brillent d'un feu calme qui s’éteint peu après ; ils se sentent extrêmement soulagés, joyeux, mais ils n'ont pas le souvenir de leurs discours. 11 y en a chez qui tout se borne à des saisissements d’esprit, accompagnés de convulsions qui se communiquent quelquefois aux assistants, et qui déjà se sont emparés d’assemblées entières. Si on demande à ces gens simples d’où leur vient ce subit et singulier changement, ils disent que c'est l’esprit de Dieu qui, se répandant sur toute chair selon la prophétie de Joël, les saisit d’une manière irrésistible, et que c’est en vain qu’ils cherchent à lutter contre lui, etc. ■>
Nécrologie. — Lorsqu’un académicien meurt, c’est un concert de plaintes le pins souvent fausses, c’est une hypocrisie dissimulée ; on s’apprête à hériter de scs places, de ses honneurs. Comme tous nos immortels accaparent autant qu’ils le peuvent les biens de ce monde, souvent l’homme ainsi placé a été l’antagoniste le plus acharné des vérités nouvelles, et c’est malgré lui qu’elles se sont répandues. Qu’importe ! une sorte de popularité l’entoure jusqu’à sa mort; on dépose même sur sa tombe la couronne réservée à la vertu.
Mais qu’un homme modeste meure après avoir consacré son temps, ses lumières, sa vie entière à la défense d’un grand principe, d’une vérité humanitaire; comme il n’était point membre de l’Académie, car on ne manque jamais de raisons pour lui fermer l’entrée du temple, on n’en parle point; l’oubli entoure son tombeau, tout est fini pour lui. Est-ce ainsi que les hommes sont reconnaissants du bien qu’on leur fait ? La civilisation est-elle un fruit qui corrompe le cœur et tue tout sentiment?
Pour nous, lorsque nous apprenons qu’un philosophe, qu’un homme de bien est descendu dans le tombeau, les regrets nous saisissent, nous sommes sensibles à cette perte, notre cœur est attristé, car nous savons que les bienfaiteurs des hommes sont rares, autant que ceux qui les exploitent sont nombreux. Aussi, la mort deM. Char-del, que nous ne connaissions pas personnellement, nous a-t-elle affligés profondément, car il fut le soutien de notre cause ; il plaida en sa faveur lorsque le ridicule pouvait encore l’atteindre, et lorsque les éloges étaient pour tout antagoniste.
M. Chardel laisse plusieurs ouvrages sur le magnétisme, parmi lesquels on peut distinguer son Esquisse de la nalure humaine, et un Essai de psychologie physiologique, Ami de Deleuze, comme lui il se distingua par son amour constant pour la vérité et par une probité qui ne
l’abandonna jamais dans les emplois divers qu'il occupa. Il fut magistrat, député; mais jamais ces liautesfonctions ne purentlui faire abandonner l’élude du magnétisme; il s’y livra jusqu’au jour oh ses facultés, usées par le travail, lui ôtèrent la possibilité de continuer.
Que cet homme de bien repose en paix, qu'il aille retrouver les nobles esprits qui l’initièrent aux pratiques magnétiques! L’avenir placera un jour son nom àcôlé du leur : car s’il est un temps d'oubli, il en est un autre où la mémoire se réveille; le inonde aime alors qu’on l'entretienne des hommes qui travaillèrent à lui préparer le bonheur dont il jouit.
— M™' veuve Tonchard, éditeur de l’ancien journal de magnétisme l'Hermès, vient de mourir aux environs dcBlois, où elle s’était retirée.Elle laisse des manuscrits précieux de Bruno et de Deleuze, qui seront probablement bientôt publiés. Sa bibliothèque magnétique passe pour la plus complète de France.
Chronique. — A la date de nos dernières nouvelles de l’Inde, l’hôpital magnétique de Calcutta était en pleine activité, et l’on s’occupait des moyens d’en ouvrir un autre à Madras.
— Dans le feuilleton du Siècle du 43 mars, Pierre Durand dit : « Depuis que l’éther triomphe, le magnétisme reprend une certaine faveur. Ce n’est plus ni (’étonnement, ni l’intérêt, ni l’enthousiasme, qui accueillirent la doctrine de Mesmer lors de son apparition ; mais Hne sorte de curiosité s’attache encore à dos expériences que des praticiens habiles savent entourer d’un mystérieux prestige. On multiplie les séances où le somnambulisme déploie ses talents et sa perspicacité. Les billets d’invitation pleuvent de toutes parts. C’est ordinairement une jeune fille qui subit l’épreuve démonstrative. On l’endort, et dès qu’elle est plongée dans le sommeil
magnétique^ elle obéit à l’opérateur, parle, marche, rit,
pleure au gré du maître.....La science médicale va sans
doute encore rompre quelques lances contre cet ennemi qui vient lui couper l'herbe sous le pied, etc. »
— L'Ak/ibar annonce que M. le ministre de la guerre n’a pas défendu absolument, mais seulement suspend» l’emploi de l’éther dans les hôpitaux et ambulances de l’Algérie. Cette mesure a été prise pour éviter dans l’armée les accidents qui arrivent de toutes parts.
— Le dernier numéro de la Tribune lyonnaise contient la suite d’un long article de M. lledde sur l’application du somnambulisme à la découverte des mines, question très-importante et qui ne tient qu’une toute petite place dans le travail de M. Hedde, presque exclusivement occupé de l’existence des anges gardiens et de leur action sur les somnambules. Cette opinion est d’une étroite parenté, ou plutôt n’est que la reproduction de celle du docteur Billot, qui subordonne le magnétisme à la théologie, la science à la religion, l’opinion au fait. M. Ch. Renard nous adresse à ce sujet les réflexions suivantes bien propres à détromper quelques personnes trop confiantes dans le dire de certains somnambules.
« Dieu est tout à tous. — Quand un magnétiseur a le dessein de faire explorer le monde intelligible par son somnambule extatique ou très-lucide , ce dernier percevra le Christ, la Vierge, les saints, des églises, des prêtres de tous les ordres, et tous les insignes de la religion romaine, si le magnétiseur est un chrétien romain. S’il est chrétien réformé, l’extatique aura la vue du Christ, des prêches, ministres, etc. Si le magnétiseur est Juif, le lucide verra Moïse, les tables de la loi, des rabins grands et petits; enfin l’extatique percevra Mahomet ou Ali, santons, marabouts, mosquées, croissants, sentences du Coran, derviches, etc., etc., si son magné-
tiseur est musalman, ce qui se résume par ces mots : communication dépensée.
« Au monde spirituel la liberté des cultes règne plus librement même que dans les Etats de l’Europe qui possèdent cette loi providentielle, charitable et éminemment civilisatrice. »
— Le Calcutta-Star et le Friend of India contiennent un si grand nombrede récits d’opérations exécutées sans douleur que nous renonçons à les traduire. Nous nous bornerons désormais à les mentionner et à signaler les particularités qu’elles présenteront.
— Un journal social de Madrid, intitulé l'Attraction, contient dans son premier numéro un long article sur le magnétisme. Ainsi peu à pcn nos idées pénètrent dans les pays qui paraissent leur être les plus inaccessibles, ceux où le christianisme mal entendu domine.
— Le Mauricien, journal de l’île de France, publie une lettre de Calcutta qui donne le détail de l’opération que nous relatons page 199. La Démocratie pacifique du 28 mars, qui résume la lettre du Mauricien, confond comme loi le nom du patient, qui est Laha et non Zeha.
— I/Union médicale, en voulant ridiculiser le magnétisme, en prouve la réalité. La Mouche lui répond victorieusement dans son numéro du 31 mars.
— M. Lafontaine vient de faire paraître son Art de magnétiser à la librairie Germer-Baillière. L’espace nous manque pour en présenter aujourd’hui l’analyse.
— Dans le feuilleton du Constitutionnel du i, M. de Balzac dit :
« L’astrologie judiciaire, la divination, a régné pendant sept siècles, non pas, comme aujourd’hui, sur les gens du peuple, mais sur les plus grandes intelligences, sur les souverains, sur les reines et sur les gens riches. Une des plus grandes sciences de l’antiquité, le magné-
tismeanimal, est sorti des sciences occultes, comme la chimie est sortie des fourneaux des alchimistes. La crâ-nologie, la physiognomonie, la névrologie, en sont également issues; et les illustres créateurs de ces sciences, en apparence nouvelles, n’ont eu qu’un tort, celui de tous les inventeurs, et qui consiste à systématiser absolument des faits isolés, dont la cause génératrice échappe encore à l’analyse. Un jour, l’Eglise catholique et la philosophie moderne se sont trouvées d’accord avec la justice pour proscrire, persécuter, ridiculiser les mystères de la Cabale ainsi que ses adeptes, et il s’est fait une regrettable lacune de cent ans dans le règne et l’étude des sciences occultes. »
— Le docteur Pidoux parle beaucoup du magnétisme dans un article sur l’éther, publié dans le Correspondant du 10 de ce mois.
BIBLIOGRAPHIE.
Traité des erreurs et des préjugés, par Gratien de Semur,
1 vol. in-lJ. Paris, 1813. Chez Lcvnvasseur, rue Jacob.
Les erreurs, les préjugés sont si fortement enracinés dans le monde que les livres môme qui devraient les détruire les propagent. L’autocratisme individuel, en fait de science, est une chose terrible 5 en rapportant tout à soi, on méconnaît tout ce qu’on n’a su ou pu approfondir. Les travaux des devanciers, comme les découvertes contemporaines qu’ils n’ont pu sacrifier, sont comme non
avenus pour beaucoup de gens, fort savants d’ailleurs, qui renouvellent sans cesse des objections réfutées mille fois. M. de Semur est de ce nombre ; il tient en 1843 le langage des contradicteurs de 1784, comme si le magnétisme n’avait pas progressé depuis lors. N’est-il pas étonnant d’entendre un ennemi des erreurs parler des somnambules de Mesmer? Conçoit-on qu’un homme de cette gravité ignore que Mesmer n’avait point de somnambules? M. Louis Lurine pousse, il est vrai, encore plus loin la licence, puisqu’il nous fait assister à la découverte du somnambulisme dans le jardin du Prater, à Vienne, en 1772, découverte qui eut lieu àBusancy en 1784; mais c’est dans un feuilleton ( 1 ) où l’on n’est pas tenu d’y dire toujours la vérité.
Il n’en est pas de même ici, car cet ouvrage estsérieux; et en présentant le magnétisme comme une chimère, il consacre une déplorable erreur, un préjugé dont tout l’odieux retombera sur son auteur; car il a préféré l’erreur qu’il devait détruire, à la vérité dont il devait être le propagateur.
Ce n’est du reste pas la seule erreur-que M. de Semur propage; il répète mot pour mot une prétendue mystification dont M. de Puységur aurait été la victime, qu’il emprunte à Y Histoire des sorciers de l’exorciste Don Mathias.
(1) Estafette du 10 août 1860.
Le Proprictaire-Gérant : HÉBERT (de Garnay). Pari». — Imprimerie d’A. Rbkb et Comp., rue do Seine, S*.
CLINIQUE MAGNÉTIQUE,
L’insensibilité est de tous les effets magnétiques celui qui a obtenu le plus de faveur chez les Anglais. La tangibilité de cet état satisfait pleinement leur esprit positif, et ils en propagent l’application chirurgicale avec une ardeur telle, qu’en moins de dix ans ils lui ont fait faire un progrès plus grand que nous en un temps plus que « double. C’est que les peuples, comme les individus, ont des aptitudes spéciales, et que la ténacité britannique contraste avec notre légèreté proverbiale. Ainsi, tandis que nous éparpillons nos forces sur tous les sujets, nos voisins les concentrent sur un objet unique : la soustraction des patients aux cruelles douleurs des opérations chirurgicales. Partout le succès couronne leur constance; la presse, d’abord hostile, enregistre maintenant avec un empressement qui lui fait éloge les faits qui prouvent l’existence de la vérité nouvelle et son utilité. En voici des exemples récents :
Amputation be la jambe. — l'n jeune homme nommé Allan Drew, ayant eu la jambe broyée sur le railway de la Flengarnock iron Compagny, la gravité de la blessure obligea le médecin de recourir à l’amputation. Ce que voyant, M. le docteur Miller proposa de magnétiser le patient, et obtint en peu de temps un état comateux qui permit de couper les chairs sans que celui-ci en eût connaissance; mais en sciant l’os il s’éveilla. Le TOME IV.— KO 44.-25 AVRIL 18/|7. 8
docteur assure que s’il eût pu magnétiser plusieurs fois ce jeune homme, le succès aurait été complot, c'est-à-dire qu’il aurait dormi durant toute l’opération.
(Kilmarnock Herald.)
Avulsion de dent. — Nous avons assuré dernièrement, qu’on avait extrait sans douleur une dent à une jeune personne dormant du sommeil mesmérien. Revenant sur ce faitsurprenant, nous ajoutons que cette dent était une molaire, et qu’ayant la racine parfaitement saine, elle ne céda qu’à une violente tractiou qui aurait causé à une personne éveillée la douleur la plus poignante. Cependant la contenance de celte demoiselle ne subit pas le moindre changement, et nul indice de sensibilité , ne se manifesta extérieurement. On la laissa dormir un peu après l’opération, et, réveillée, elle ne s’aperçut pas tout de suite que sa dent lui manquait.
(Northern Warder.)
Ablation de tonsili.es. — Nous trouvons dans ihe Zoisl le récil suivant, fait par M. Chandlcr, de deux ablations d’amygdales formant un contraste frappant :
« J’ai décrit dans ma précédente lettre au docteur ËllioUon l’extraction d’une amygdale par le docteur Key chez une enfant de trois ans et demi, opération qu’il m’a -vait promis de faire dans l’état magnétique, mais à laquelle il procéda sans m’en prévenir. Je n’ai pas besoin de décrire les souffrances et l’effroi delà petite patiente, il suffira de dire qu’elle les rappelle sans cesse.
« L’autre amygdale grossissant toujours, il devint nécessaire de l’enlever; mais l'enfant s’y refusait, ne voulant pas même se laisser approcher par le docteur, qui cependant résolut d'essayer le 21 octobre dernier.
« Vingt minutes avant l’heure fixée pour l’opération, je magnétisai l'enfant, qui dormit aussitôt, et le méde-
cin, en arrivant, la trouva dans un sommeil paisible qu'il jugea en tous points favorable à son dessein.
a Armé d’une spatule d’ivoire, j’essayai d’ouvrir la bouche à la patiente et de lui déprimer la langue; elle s’éveilla en partie, mais retomba immédiatement dans son profond coma. J’essayai de nouveau avec un peu plus de force, en lui disant tout bas d’ouvrir la bouche, ce qu’elle fit en partie. L’amygdale s’offrit ainsi distinctement à la vue de M. Kcy, qui la saisit et la disséqua promptement. Alors la petite patiente s’éveilla, mais sans crier ni se débattre. Elle ne s’aperçut pas de l’opération qui venait d’être faite, et ne manifesta ni crainte ni surprise de la présence du docteur, objet de sa terreur habituelle.
« Je fis alors part de mon stratagème à M. Key, qui se montra fort surpris de cette propriété qu’a le mesmé-ri sme de nous soustraire aux plus cruelles souffrances. «
Fièvre typhoïde;. — Yoici une guérison bien propre à convaincre ceux qui doutent de la puissance thérapeutique du magnétisme simple.
Un garçon jardinier de vingt ans, bilieux-sanguin, subitement prisd’éblouissemenls, de céphalalgie intense et d’un abattement extrême, se présenta le 6 août dernier h la consultation de Beaujon, où il reçut une entrée d'urgence comme atteint de fièvre typhoïde, fort commune alors. Le cas était pressant, chaque instant de retard était une aggravation; mais le malade, ne pouvant se résoudre à entrer à l’hôpital, se lit transporter chez moi. Il habitait Paris depuis un mois à peine, et j’étais le seul concitoyen, la seule personne qu’il y connut particulièrement. L’extrême gravité de son état excita vivement ma compassion, et malgré mes craintes sur l’issue d’une maladie si aiguë, j’en entrepris le traitement magnétique. Cette affection étant à son début, rien n’avait
été fait encore, et si le magnétisme ne réussissait pas tout de suite, la médecine classique me restait en perspective. Si les moyens de cette dernière étaient infaillibles, j’aurais certes compromis gratuitement l'existence du malade; mais convaincu de leur incertitude, je n’ai pas hésité à leur préférer le magnétisme, et je m'applaudis aujourd'hui de cette tentative ; elle m'a montré ce que peut le magnétisme employé à temps et avant tout autre remède.
L’invasion de celle maladie avait été soudaine et sa marche si rapide, qu’à dix heures du matin le malade, qui avait sonpé la veille comme d'ordinaire et bien dormi, était dans l’état suivant : air de stupeur, jaunisse prononcée, abattement extrême, céphalalgie intense, éblouissements, chaleur âcre et sèche à la peau, douleurs sourdes dans l’abdomen et principalement dans la région dn foie, qui faitsaillie au-dessous des fausses côtes, pouls petit et dur, langue couverte d’un enduit jaunâtre, soif ardente, etc.
Ma main, dirigée vers la tète avec intention magnétique, détermina de petits mouvements musculaires; la face se colora un peu, les yeux s’animèrent et les traits perdirent de leur immobilité en moins de cinq minutes. J’avais la certitude que mon action était sentie; je la dirigeai alors sur l’épigastre, et aussitôt le malade vomit une abondante quantité de bile, mêlée d’aliments mal digérés. Cette magnétisation, quelque temps soutenue, opprima la respiration ; le pouls devint plus large et moins dur. Je recommençai deux heures après, et un nouveau vomissement de bile pure eut lieu ; le mal fut dès-lors enrayé. Le malade s’endormit, et le soir, à la suite d’une troisième magnétisation, une selle copieuse
débarrassa l’intestin. La nuit, une transpiration abondante
survint, et le lendemain matin l’amélioration était très-manifeste : la céphalalgie avait beaucoup diminué, la
soif cédé à l'eau magnétisée; la fièvre était apaisée, et les symptômes lui formant cortège évanouis en partie. Je le magnétisai encore, deux fois ce jour, et les suivants une. Le rétablissement fut si prompt, «jue le cinquième jour il reprit son travail, qu’il eut soin de modérer; car de tous les symptômes, c’est l’abattement qui persista le plus.
Voilà donc une maladie grave, souvent mortelle, de longue durée, conjurée par quelques magnétisations, et le malade remis sur pied sans convalescence. M’objectera-t-on que cette maladie n’était qu’imminente, qu'elle n’était pas franchement déclarée, que l’inflammation caractéristique des glandes intestinales n’était pas formée'!1 Je répondrai que c’est là justement ce qu’il faut éviter à tout prix, parce qu’une fois déclarée, elle entraîne après soi des désordres qui ne cèdent que lentement.
Hébert (de Camay).
THÉORIES.
DES DESTINÉES PROBABLES DU MAGNÉTISME
thèse
Présentée à la Société du Mesmérisme, par h. DAI.UAS, médecin cl pharmacien.
Le magnétisme est un fluide dont les propriétés sont tellement remarquables, tellement caractéristiques, qu’il n’est plus permis à un homme raisonnable de douter de son existence.
La réalité du magnétisme n’a pas seulement l’importance d’une découverte curieuse, propre à amuser et distraire celui qui s’en occupe; il constitue encore une science naissante dont les applications diverses seront fécondes en résultats : ce que nous en connaissons nous porte à le croire.
Est-il possible de prévoir où ira cette science , ce qu’elle deviendra, quelles seront ses destinées? (Car, comme toute vérité, elle marchera plus ou moins vite, mais enfin il faudra qu'elle marche et fournisse sa carrière.) Assigner les limites précises qui doivent la circonscrire, édifier dans l’avenir le monument qu’elle doit définitivement exposer aux regards des dernières générations, ce serait prétendre à la solution d’un problème dont les données sont encore insuffisantes ; car savons-nous s’il ne nous reste pas à découvrir des phénomènes magnétiques plus ou moins importants, plus ou moins pratiques? Mais si, nous renfermant dans les probabilités, nous avions à suivre les développements futurs de celte science, nous pourrions dès aujourd’hui lui prédire d’assez brillantes destinées. C’est cc que nous allons tenter. Il est doux d’ailleurs de s’arrêter de temps en temps dans le cours d’un long voyage pour calculer le trajet à parcourir et les richesses encore inconnues que nous espérons en rapporter. Notre âme éprouve toujours un charme puissant à se porter dans l'avenir; c’est une faculté qui lui rappelle la divinité de son origine; il lui semble qu’alors les liens qui l’unissent à la matière s’allongent et se détachent; elle revient ensuite comme trempée d’une nouvelle énergie, et nous travaillons avec plus d’ardeur.
Si-
Lé magnétisme considéré sous le rapport thérapeutique.
Lu science de Mesmer doit-elle plus tard renverser
tout antre système de médication , et régner seule et pour toujours dans la thérapeutique; en d’autres termes, le magnétisme est-il capable de guérir toutes les maladies?
l.cs essais tentés jusqu’à ce jour ne nous autorisent pas à l’espérer-, mais nous pensons qu’aide du somnambulisme, il deviendra assez puissant pour obliger les médecins à l'étudier tout particulièrement; qu’il produira dans l’art de guérir une révolution profonde. Déjà nous pouvons constater tous les jours son action bienfaisante dans les affections nerveuses, oh souvent il opère de véritables miracles. Et ce qu’il y a de plus remarquable, c’est que ces effets prodigieux se produisent toujours dans les névroses idiopathiques, précisément dans des cas ou la médecine ordinaire est obligée d'avouer sa complète impuissance, où la prudence lui conseille de ne rien tenter, où, quand clic guérit, ce n’est que par hasard, après de longs et d’ennuyeux tàtonuements.
Ainsi le magnétisme doit être rangé dans la classe et à la tète des médicaments antispasmodiques, en attendant peut-être qu’il les fasse tomber tous dans un légitime oubli; il comblerait alors dans la thérapeutique un vide aujourd’hui vaste et désolant.
L’action magnétique ne se limitera certainement pas dans la classe des névroses; car, à part nos observations journalières et celles consignées dans les auteurs qui prouvent surabondamment cette assertion, nous savons que tout se lie dans les phénomènes de la vie quand on agit sur le système nerveux, qui pénètre dans tous les organes, préside à l’accomplissement de toutes les fonctions; l’action qu’on lui imprime doit retentir dans toute
I économie. Ainsi un organe enflamme, irrité, congestionné ou affaibli, peut-il rester indifférent à une modification quelconque de l'innervation qui le pénètre? I.e champ de l'observation et de l’expérimentation, comme
nous le voyons, est immense, et ne paraît pas stérile pour le médecin attentif qui tournera l’activité de son esprit vers le magnétisme. Le cadre que m’impose cette thèse ne me permet pas de développer ce sujet autant qu'il en serait susceptible; ic ne m’arrêterai par conséquent pas à la médecine somnambulique, d’autant plus que mou expérience propre date de trop peu de temps pour asseoir sur elle une opinion bien arrêtée.
Je ne terminerai cependant pas ce chapitre sans vous faire part d’une observation fort importante cl qui mérite un sérieux examen. C’est que le fluide magnétique 11e paraît pas doué chez tous de propriétés identiques. M. Lafontainc ctM.le baron du l’olet passent pour avoir guéri des sourds, cl j’ai vu beaucoup de magnétiseurs qui n’ont jamais pu obtenir ce genre de guérison. M. Aubin Gaulier (c’est le seul que je connaisse dans ce cas) affirme qu'il réussit dans les affections des yeux. Je n’ai encore jamais vu produire une insensibilité plus complète que par M. Lafontaine sur sfcs sujets.
Ceci nous conduit à présumer que plus tard la profession de magnétiseur comptera autant de spécialistes différents qu’on aura reconnu de qualités curatives dans le fluide magnétique, parce que chacun d’eux, après avoir déterminé par l’observation la qualité dominante du sien, adoptera la spécialité à laquelle la nature paraîtra l’avoir appelé.
Ainsi, ceux qui posséderont l’heureux privilège d’abolir la sensibilité seront appelés dans les opérations chirurgicales; les autres seront désignés par les médecins proprement dits, suivant les cas qu’ils seront appelés à traiter.
Nous voyons déjà dans le magnétisme une profession plus tard lucrative, honorable, presqu’un sacerdoce qui réduira le nombre des médecins, des pharmaciens et des médicaments; ce sera un grand progrès.
Su.
i.e magnétisme considéré sous le rapport de la psychologie.
Le sommeil magnétique présente le phénomène le plus curieux, le plus intéressant que puisse contempler le philosophe : il affermit sa conviction sur l’existence de l’âme en lui rendant presque palpable cette invisible partie de nous-méme.
En effet, qu’est-ce autre chose que différentes manifestations de notre âme que la vue à distance, celle à travers les corps opaques, la prévision, la communication de deux somnambules ensemble, à la volonté de l’un d’eux, malgré la distance qui les sépare ; les hallucinations déterminées d’avance par le magnétiseur? etc.
Qui jamais se serait douté que la psychologie eût pu faire des progrès, que la partie la plus hypothétique de la science qui a vu naître le scepticisme eût jamais pu penser à se placer à côté des sciences exactes?
Le somnambulisme sera pour la philosophie ce que le magnétisme sera pour la médecine : l’une s’applique à l’âme et l’autre à la vitalité organique; l’âme immortelle et l’âme végétative se rapprochent, puis se confondent dans ces deux sciences dont la source est commune.
s III.
l-e magnétisme considéré sous ledouble rapport delareligion et de la morale.
Le magnétisme est favorable à la morale dès qu’il prouve l’existence de l’âme, puisqu’il renverse le matérialisme, cette consolation des malhonnêtes gens. Il nous rend meilleurs et plus religieux en étendant le champ du spiritualisme, en découvrant à nos yeux de nouvelles
et sublimes harmonies, en nous pénétrant davantage de la sagesse du Créateur; car rien ne développe le sentiment religieux que nous apportons en naissant comme la contemplation des magnificences de la nature. '
Le magnétisme ne sera pas sans influence sur le catholicisme : en précisant nos connaissances psychologiques, il devra toucher quelque peu aux doctrines de la théologie. Il en résultera que le catholicisme, ne pouvant pas plus nier les phénomènes magnétiques que l’existence de la lumière, suivra le mouvement qu’imprime après elle toute importante vérité, devrait-il renier une partie de son passé, reconnaître comme erreur ce qu’il proclamait comme sacré. Le catholicisme, malgré ses répugnances, sortira sans doute de son immobilité, et l’humanité n’y pourra que gagner.
s IV.
Influences sociales dumagnitisme.
La magnétisation développe et fait naître une certaine sympathie entre le magnétiseur et le magnétisé ; elle produit ainsi un effet essentiellement social considéré sous un point de vue indifférent. Nous avons dit qu’elle constituerait plus tard une nouvelle profession; ce sera par conséquent, pour les classes infimes, luie échelle de plus pour s’élever dans la hiérarchie sociale.
S’il nous était permis d'espérer une infaillibilité certaine dans les facultés somnambuliques (et pourquoi, d'ailleurs, 11e trouverait-on pas quelques moyens de les perfectionner, si elles eu sont susceptibles, par une sorte d’éducation spéciale ou autrement?), de quelle utilité ne serait-elle pas ! Est-il possible de prévoir jusqu’où s'étendraient toutes les applications de cette divine lumière? Tout changerait dans les habitudes, les mœurs,
les rapports sociaux, la politique, la civilisation. Quelle immense portée aurait un semblable résultat! Où irions-nous ensuite? Que sortirait-il de tout cela, le chaos ou l’harmonie? Arrêtons-nous; ne pénétrons pas plus avant dans des hypothèses dont les conséquences n'ont point délimites; revenons au probable, d’oü nous étions partis. Mais je vois nia tâche tirer à sa fin ; il lie nous reste plus qu’à examiner de quelle utilité pourront être certains phénomènes magnétiques, comme l’attraction, la répulsion, la contracture, la catalepsie, la résolution des membres, les hallucinations.
Nous sommes forcé d’en convenir, nous ne voyons dans l’état actuel de nos connaissances aucune application pratique à faire dans ces modifications de l'innervation. Est-ce à dire pour cela qu’il n’en sera jamais autrement? Non, certainement non.
La vapeur, l’imprimerie, l'électriciLé, ces imposants leviers dont l'esprit humain se sert pour remuer le monde matériel et le monde des intelligences, ne sont encore que des conquêtes faites d’hier, dont les destinées ne pouvaient être prévues, alors que depuis le premier homme et depuis combien de milliers d’années elles n’avaient cessé de se manifester par des phénomènes sensibles, universels , et sous mille formes grossières. Pourquoi n’en serait-il pas de même des forces magnétiques encore récemment découvertes?
Quel que soit le rôle que doive jouer le magnétisme dans les destinées humaines, il est probable qu'il est appelé à faire plus de bien que de mal, parce que nous pensofls, et l’expérience nous le prouve, que l’erreur a toujours été funeste, et que toute vérité appartient sans distinction à tous les hommes; la leur cacher, c'est les frustrer d'une chose que la nature a faite pour tous, et dont elle ne nous a jamais fait les dispensateurs, parce «ju’elle ne nous a pas doté de lumières suffisantes. Ainsi
travaillons, messieurs, à l'accomplissement de la tâche que nous nous sommes imposée. L’esprit de notre Société est conforme à l'éternelle loi qui pousse toute vérité dans le sens du progrès; nous pourrons ainsi hâter l'accomplissement des destinées du magnétisme.
A. Dai.mas.
Paris,!" avril 1847.
ÉTUDES SUR LE SOMNAMBULISME.
§ X. — Pl'rSÉGURISHE.
Sixième observation.
A M. le baron du Potet.
Il y a deux ans, notre unique enfant étant très-malade, et tout remède impuissant, M. Tissot proposa à ma femme de la magnétiser, espérant qu’elle serait somnambule et pourrait indiquer le moyen de guérir son enfant. Cette manière d’improviser la science médicale lui parut absurde, impossible, et elle s’y refusa. Mais le désir de sauver son lils l’emportant bientôt sur sa répugnance, elle se soumit à la magnétisation, et auftout de vingt minutes elle était lucide. Endormie dans une chambre voisine de celle du malade, elle vit de là parfaitement son état, et s’écria eu fondant en larmes que dans trois jours il ne serait plus, que tout était inutile, et cette funeste prédiction s’est réalisée exactement.
Je rappelle celte séance parce que lant de lucidité en un premier sommeil m’a paru si surprenant, que je suis encore à me demander si elle n’a pas été produite par le grand désir qu’éprouvait la mère de sauver son enfant, ou par le chagrin qui l'avait rendue très-impressionnable, ou enfin par la grâce de Dieu; car lorsqu’on n’est pas avancé en science, l’on fait souvent bien des méditations sans approcher de la vérité.
Elle resta plus d’un an sans vouloir se laisser endormir; mais ayant moi-même appris à magnétiser, je la plongeai un jour dans le sommeil pour donner des soins à une dame de nos amies frappée d’apoplexie. Elle indiqua des remèdes convenables, et dans la même séance, par le rapport de famille, elle trouva en esprit le frère de cette dame, perdu depuis plus de trente ans; elle le trouva mort à l’affaire de Moscou, et dépeignit si exactement son visage, la coideur de ses cheveux, sa taille, sou caractère, ses habitudes, que tout le monde fut convaincu qu’elle le voyait réellement.
Le 22 août dernier, je la magnétisai à Villeurbane pour chercher un anneau perdu. Comme elle hésitait, craignant de ne pas réussir, après m’être mis en rapport, je lui dis :
« Je veux que tu dormes et trouves l’objet perdu; que les esprits célestes t'accompagnent, et que Dieu t’éclaire.... Tu dors maintenant, comment te trouves-tu?
— Bien.
— Puisque tu es bien, voilà un bonnet pour établir le rapport de la personne qui a perdu l’anneau à pierre de prix.
— Ah ! je vois ; ça appartient à madame D"\ Oh ! je la vois qui se lave les mains avec du savon, c’est sans doute ce qui aura fait couler l’anneau de son doigt; mais elle ne l’a pas laissé sur l’évier comme on le pense, car je la vois le mettre dans la poche de sa robe.
Non, je me trompe, elle atte int son mouchoir pour essuyer sa bague.... Tiens.... la voilà qui s'en va clans le jardiu avec trois daines ; elles vont au pré; tant pis, je ne veux pascourir après.... Ah ! ah ! elles sautent comme «les folles....
— Qu’est-ce que cette bague? La vois-tu? l’a—t-elle toujours ?
— Non, elle l’a perdue ; mais je la vois qui me tire les yeux, ça me fait mal, ça brille trop. (Elle se cache les yeux.)
— Mais, puisque tu la vois, dis-moi donc ce qu’elle est.
— Ce sont trois anneaux unis par des coulants. Oh ! qu’elle est lourde ! elle a dù coûter bien cher. Mais ces diamants brillent trop, je ne peux les regarder....
— Où la vois-tu? Pouvons-nous la prendre?
— Je la vois au milieu du pré, dans un endroit carré; mais elle n’est pas perdue, on la retrouvera dans une quinzaine de jours.
— Mais puisque tu la vois, tu peux bien l’aller chercher toi-même, et dans l’état où tu es, tu la trouveras probablement. D’ailleurs, c’est dans cette intention que tu t’es laissée endormir.
— Mais bien sûr, je la trouverai. Mais ça m’ennuie d’aller là-bas à cause du monde qui me verra marcher les yeux fermés.
— Non, non, tu me donneras le bras, et nous aurons l’air de nous promener. Allons, du courage, et puisqu'un esprit nous a inspiré de venir ici sans savoir que nous y étions désirés, allons jusqu’au bout avec l’esprit qui nous a dirigés, nous n’avons rien à craindre. »
Aussitôt elle se leva, et, refusant mon bras , s'achemina, en faisant mille détours, et disaut à chaq uc instant : «Elle a passé là. » Successivement elle traverse le jardin, le verger, el parvient dans le pré en suivant le mémo
chemin que madame D**\ Arrivée au milieu, elle fait un faux pas, se baisse et cherche dans l'herbe.
« Esl-ce là qu’elle est tombée, que tu la cherches?
— Non, je me suis trompée; madame D*" a fait un faux pas, et sa bague, qui est trop large, a failli tomber. » (Vrai.)
Je l’actionnai de nouveau, et elle continua son exploration. Arrivée au bout du pré, elle franchit en sautant un gazon de fleurs et dit encore : « Elle a sauté là. » Vingt pas plus loin elle éprouva mie violente secousse, se baissa et ramassa l’anneau en s’écriant : « Le voilà ! » Je vous prie, monsieur le baron, de donner de la publicité à ce fait, si vous le jugez convenable, non pour me glorifier, mais pour montrer que le magnétisme se répand dans la classe prolétaire, qui sait combien est grande la tâche que vous avez entreprise.
Votre tout dévoné, -P. Bicon.
I.yon, 8 oclobrtfd84fl.
VARIÉTÉS.
.Napoléon et les prophéties. — Que nos lecteurs ne s’étonnent point de trouver ki des matériaux déjà con nus.- Tout ce qui touche de près au magnétisme doit être soigneusement rassemblé, afin qu’un jour les hommes qui voudront écrire sur la science profonde, objet de toutes nos recherches, trouvent dans ce journal les idées et les faits des temps anciens comme des modernes.
Nous voulons que notre journal devienne la meilleure des bibliothèques et le livre indispensable à toute personne s’occupant du magnétisme, n'importe sous quel point de vue. Le philosophe devra y recourir comme le psychologiste ; le médecin, peut-être plus encore, y pourra puiser d'utiles renseignements, car notre première pensée a été l'enseignement de l’application du magnétisme à la thérapeutique.
Si la marche que nous suivons n’eût pas été dédaignée pendant vingt ans, nous posséderions aujourd’hui une masse de faits et d’opinions propres à confondre nos antagonistes et à réduire tout incrédule ; désormais il n’y aura plus de lacune.
Nous extrayons du Commerce du 22 octobre 1839 1e document suivant, que nous regardons comme très-curieux.
« Nous savons bien que les prétendus esprits forts n’admettent point les prédictions, et, en général, tout ce qui ne peut ni se discuter ni se toucher. On est incrédule, et, par le temps qui court, on a peut-être raison. Les esprits véritablement forts, quoique n’admettant pas les révélations outrecuidantes de certains cerveaux malades, croient cependant à quelque chose de supérieur et de divin qui régit l’univers, qui embrasse les destinées humaines, et que l’homme ne peut définir. Ce pressentiment de Bonaparte : « Le boulet qui doit me tuer « n’est pas encore fondu, » résume ses croyances à cet égard.
« Napoléon n’était pas superstitieux, ainsi que mademoiselle Lenormand a bien voulu le dire dans scs Mémoires; il avait trop de bon sens pour cela. Voici un trait qui servira à nous le faire connaître sous cet aspect.
« Quand il fut premier consul, il fit dire à madame de Montesson de se rendre aux Tuileries. Dès qu’il la vit, il
alla au-devant d’elle et la pria de demander tout ce qui pourrait lui plaire.
• Mais, général, je n’ai aucun droit à tout ce que vous » voulez m’offrir.
« — Vous ne savez donc pas, madame, lui dit-il, que «j’ai reçu de vous ma première couronne? Vous vîntes « à Briennc distribuer les prix, et en posant sur ma tète
o le laurier précurseur de quelques autres, vous me « dîtes : « PuisSc-t-il vous porter bonheur! »
« Madame de Montesson allait répondre; Bonaparte l’interrompit aussitôt.
« Je suis, dit-on, fataliste. Ainsi, il est tout simple que » je n’aie pas oublié ce dont vous ne vous souvenez « plus. »
« 11 la combla de biens et d’honneurs, et lui fit rendre sa pension de 60,000 francs.
» Certes, il serait à désirer que tous les souverains d’Europe fussent superstitieux etjatalistes à la manière de Bonaparte; ils seraient plus généreux et plus reconnaissants!
« On dit qu’étant très-jeune on lui prédit, comme à Sixte-Quint, qu'il était appelé à gouverner un jour le monde. Ce fait est faux ; c’est en Egypte que cette prédiction lui fut faite, lin jour que Bonaparte était plus gai que de coutume, il se rendit h Malmaison, où se trouvait Joséphine, et tous deux se mirent à causer avec abandon. Joséphine, naturellement superstitieuse, amena bientôt la conversation sur le terrain du merveilleux. Bonaparte se prit à rire ; mais Joséphine, avec sa grâce eufantine, lui ayant parlé d’une prédiction qui lui avait été faite autrefois, elle réclama quelques instants de silence.
« Il y a longtemps de cela, dit-elle; j’étais encore à » la Martinique. Me trouvant au milieu d’un groupe « d’esclaves, j’aperçois tout à coup une femme grande,
« vieille,sèche et ridée, qoi s’avancait vers moi. Elle me « prend la main, l’ouvre, regarde et paraît surprise.
« Qu’a-t-ellc d’extraordinaire? demandai-je.
* _ Vous ne me croirez pas, me répondit-elle, si je ■ vous le dis. »
» Je la rassurai. Alors elle leva les yeux au ciel avec o une expression singulière, et, d'une voix grave, elle « me dit :
0 Vous vous marierez bientôt; votre union ne sera « pas heureuse; vous deviendrez veuve (je tressaillis « malgré moi); vous aurez ensuite de belles années...»
« Bonaparte laissa échapper un sourire plein de finesse et d'esprit.
' o .... Et, sans être reine, vous serez plus que reine.
« La vieille s’éloigna aussitôt, et je ne la revis plus. »
« Bonaparte se leva, fit plusieurs fois le tour du salon, les bras derrière le dos; puis, avec gaieté, il dit à Joséphine :
1 11 m’est arrivé quelque chose d’à peu près semblable « en Egypte. Je me promenais avec quelques officiers, « quand une femme au teint noir et aux vêtements sales « vint à nous. Elle nous regarda longtemps, puis elle « me prédit, sans me connaître, que je deviendrais un «jour aussi grand que César et Mahomet. M’adressant a «ceux qui m’entouraient, je leur dis : « S’il fallait croire « aux prédictions de ces Bohémiens, tous les hommes « seraient des aigles et des géants. »
« Ainsi, d’après cette anecdote, Bonaparte n’était pas, comme veut le faire entendre mademoiselle Lenormand, un croyant superstitieux et fanatique.
o Voilà l’histoire de cette prophétie :
« Napoléon, pendant la guerre d’Egypte, ayant entendu parler d’une prophélesse en renom, la fit venir, et, vêtu d’un simple costume d'officier, il se présenta à
elle. La sibylle, après avoir placé sur la table plusieurs coquillages symboliques, lui dit :
« Tu auras deux femmes, lu en répudieras une à grand « tort : ce sera la première. La seconde ne lui sera point « inférieure par ses grandes qualités; elle te donnera un « fils. Peu après commenceront contre toi de sourdes « intrigues. Tu cesseras bientôt d’ôtre heureux et puis-» sant. Tu seras renversé dans toutes tes espérances. “Tu seras chassé par la force et relégué sur une terre « voleanisée, entourée de mers etd’écueils. Garde-toi, « mon fils, garde-toi de compter sur la fidélité de tes « amis. »
« Bonaparte, pour la récompenser, lui fit donner 27 sequins : c’était tout ce qu’avait sur lui Abd..., qui devint depuis culonel des Mamelucks.
« Nous ne savons vraiment pourquoi tous les auteurs de Mémoires ont voulu rendre le caractère de Napoléon faible et petit. Constant, qui lui était certes bien attaché, dit cependant que Joséphine tirait parti de la superstition de l’empereur, en lui disant : o On parle de ton « étoile, mais c’est la mienne qui l’influence; c’est à moi « qu’il a été prédit de hautes destinées. » Sans examiner sérieusement ce passage, ou voit qu’il est faux. Comment l’empereur, qui avait la conscience de sa valeur et de son génie, aurait-il souffert qu’on lui dît que l’étoile des autres, fût-ce même celle de Joséphine, influençait la sienne, quand cela n’était réellement pas? Constant s’est mépris : il est vrai que l’empereur parlait quelquefois de son étoile, mais en plaisantant. Au reste, en divorçant, il n’a tenu aucun compte de ces influences cabalistiques, puisque, astrologiquement parlant, il se séparait pour toujours de l’étoile de Joséphine.
»Comme on savait que Napoléon, le génie le plus vaste et le plus universel des temps modernes, s'occupait aussi des détails d’iutérieur. on a cru pendant longtemps qu’il
était superstitieux. On n’ignore pas qu’il avait horreur des portes ouvertes, et par une excellente raison : ce qu’il disait dans son cabinet, il ne voulait pas que cela courût les antichambres. Quand ou lui annonçait quelqu’un, il fallait frapper. S'il disait : « Qui est là? » on le lui disait au travers de la porte. S’il donnait la permission d’entrer, on ouvrait, et l’on refermait la porte aussitôt. Que de contes absurdes n’a-t-on point débités sur cette mesure d’ordre, tout h la fois juste et naturelle!
« Parlons du fameux Livre de prophéties de maître Noël Olivarius, présenté à l’empereur quelque temps après son sacre.
« Un soir, Napoléon se rendit à la Malmaison. Il aimait beaucoup à y causer merveilleux, surtout avec Joséphine, qu’il savait être très-superstitieuse. Un soir donc il arrive, parle de ses immenses projets, et termine en remettant entre les mains de l'impératrice un vieux livre manuscrit, écrit en 1542.
« Tiens, lui dit l’empereur en ouvrant cet in-12 relié » en parchemin et jauni par le temps, regarde et lis.
« Joséphine lut à haute voix :
PRÉDICTIONS DE MAISTRE NOËL OLIVARIUS.
» Eli bien? demanda Joséphine.
«— On dit qu’il est ici question de moi, répondit « l’empereur.
« — Comment, dans un livre publié en 1542 !
» — Lis donc. »
« L’impératrice essaya; mais comme le style était en vieux français et les caractères mal formés, elle resta quelques instants à parcourir des yeux les trois pages de ce chapitre; puis, d’une voix assurée, commença ainsi :
« La Gauie-Itale verra naître non loin de son sein un «être surnaturel; cet homme sortira tout jeune de la
« mer, viendra prendre langues et mœurs chez les Celtes-» Gaulois, s’ouvrira, encore jeune, à travers mille ob-« stades, chez les soldats, nn chemin, et deviendra leur « premier chef. Ce chemin sinueux lui baillera force « peines; s’en viendra guerroyer près de son natal pays « par un lustre et plus.
« Outre-mer sera un guerroyant avec grande gloire « et valeur, etguerroyera de nouveau le monde romain.
« Donnera lois aux Germains, pacifiera trouble et « terreur aux Gaulois-Celtes, et sera ainsi nommé, non « roy, mais par après appelé ùnperator par grand en-« thousiasme populaire.
e Batailleur partout dans l’empire, déchassera princes, « seigneurs, rois, par deux lustres et plus. Puis élèvera «de nouveaux princes et seigneurs à vie, et parlaut de « son estrade, criera : 0 sidera! ô sacra! Sera vu avec «une armée forte de quarante - neuf fois vingt mille « hommes, piétons armés qui porteront armes à cornets « de fer. Il aura sept fois sept fois sept mille chevaux «ainontés d’hommes qui porteront, plus que les pre-omiers, grande épée ou lance et corps d’airain. Il aura « sept fois sept fois deux mille hommes qui feront jouer « machine terrible, et vomiront et soufre et feu et mort. « La toute suppute de son armée sera de quarante-neuf « fois vingt mille hommes.
« Portera à dextre main un aigle, signe de la victoire « à guerroyer. Donnera maints pays aux nations, et de
* chacun paix. *■
« S’en viendra dans la grande ville, ordonnant force « grandes choses : édifices, ponts, ports de mer, aque-« ducs, canaux; fera à lui tout seul, par grandes riches-« ses, autant que tout Romain, et tout dans la domination « des Gaules.
« Aura femme par deux.... »
o Joséphine s’arrêta.
■ Continue, «lit l'empcrcur, qui n'aimait pas les inter-« ruptions.
«....El fils, un seul. S’en ira guerroyant jusqu'oii se
i croisent les lignes longitudes et latitudes, cinquante-« cinq mois. Là, ses ennemis brûleront par feu la grande
* ville, et lui y entrera et sortira avec siens de dessous « cendres. Force ruines, et les siens, n’ayant plus pain « ni eau, par grande et dicime froidure, qui seront si « malencontres, que les deux tierces parties de sou ar-« niée périront, et en plus par dénue et autres, là n’étant « plus dans sa domination.
a Lors, le grand homme abandonné, trahi par siens «amis, pourchassé à son tour à grandes pertes jusque
dans sa propre ville par grande population européenne, « à la sienne place sera mis le vieil roi de la cape.
« Lui contraint à l’exil dans la mer, dont est venu si «jeune, et proche de son sol natal, y demeurantpar onze « lunes avec quelques-uns des siens, vrais amis et sol-« dats qui, n’étant plus sept fois sept fois sept fois deux « fois de nombre, aussitôt les onze lunes parachevées, « que lui et les siens prendre navires et venir mettre « pied sur terre celte-gauloise.
« Et lui cheminera vers la grande ville où s'ôtre assis « le vieil roi de la cape, qui se lève, fuit, emportant avec « lui ornements royaux. Pose chose en son ancienne do-« mination, donne au peuple force lois admirables.
« Ainsi chassé de nouveau par trinité population euro-« péenne, après trois lunes et tiers de lune, est remis à « la sienne vieil roi de la cape, et lui cru mort par ses « peuples soldais qui, dans ce temps, garderont pénales « contrôleur cœur.
» Les peuples et les Gaulois comme tigres s’entregor-« geront. Le sang du vieil roi de la cape sera le jouet » des noires trahisons. Les malencontreux seront déçus, « et par fer et par feu seront occis. Le lys maintenu;
« mais les derniers rameaux du -vieil sang seront encore « menacés.
» Ainsi guerroyeront entre eux.
o Lors un jeune guerrier cheminera vers la grande « ville; il portera lion et coq sur son armure. Ainsi la « lance lui sera donnée par grand prince d Orient. Il c sera secondé merveilleusement par peuples guerriers « de la Gaulc-Bclgique, qui se réuniront aux Parisiens « pour trancher troubles et réunir soldats, et les couvrir « tuus de rameaux d’olivier.
. « Guerroyant encore avec tant de gloire sept fois sept « lunes, que trinité population européenne, par grande « crainte et cris et pleurs, offre leurs fds et épouses en « otages, et ploient sous les lois saines et justes et ai-« niées de tous.
a Ainsi paix dura vingt-cinq lunes.
«Dans Lutetia, la Seine rougie par sang; suite de « combats à outrance, étendra son lit par ruine et mor-
* talité; séditions nouvelles de malencontreux mail-« lotins.
« Ainsi seront pourchassés du palais des rois par « l’homme valeureux, et par après les immenses Gaules « déclarées par toutes les nations grande et mère nation. « Et lui sauvant les anciens restes, règle les destinées du «monde, dictant conseil souverain de toute nation et « de tout peuple, pose base de fruit sans fin et meurt. » «Joséphine, surprise de ce qu’elle venait de lire, s’arrêta, ferma le livre, et interrogea Napoléon sur cette étrange prédiction. Mais l’empereur, ne voulant donner grande importance h maître Olivarius en les commentant, se conterita de répondre :
« Les prophéties disent toujours ce qu’on veut leur «faire dire; cependant, j’avoue que celle-ci m’a beau-« coup surpris. »
011 changea la conversation et parla d’autres choses»
• A son retour de l’ile d’Elbe, l’empereur se rappela les coquillages d’Egypte et cette prédiction ; il en parla au colonel Abd....
« Je n’ai jamais voulu rien croire, lui dit-il ; mais je ■i conviens ici de lionne foi qu’il y a des choses qui sont « au-dessus de la portée des hommes, et que nonobstant « leur rare perspicacité, ils ne pourront jamais les approfondir; témoin cette singulière prophétie trouvée a chez les Bénédictins, soustraite pendant la Bévolution, « et que je connais. Que désigne-t-elle? Est-ce moi « qui en suis l’objet? En vérité nous devrions nous en « rapporter pour tout à celui qui régit l’univers, et faire « notre profit des étincelles de lumière réparties par-
i fois sur quelques êtres privilégiés pour nous éclairer sur la route véritable qu’il faut suivre et nous prému-« nir des écucilsqne_nous pourrions y rencontrer. »
« L’histoire de cette prophétie, qui n’a pas été écrite après coup, ainsi que nous le démontrerons tout à l’heure, est très-extraordinaire. Celui qui découvrit ce livre est François de Metz, cousin du fameux François de Neu-château, et secrétaire général de la commune de Paris. Comme cette histoire n’est rapportée nulle part, et que nous seuls avons été à même de la connaître, nous croyons faire plaisir à nos lecteurs en la leur donnant en entier.
« Tout le monde sait qu’à la fin de 1792 et au commencement de 1793, les maisons royales, les châteaux, les monastères, les abbayes et les églises furent pillées par ordre des Montagnards. En agissant ainsi, on voulait, suivant eux, dérober et anéantir tous les papiers qui avaient rapport soit aux prêtres, soit*aux nobles ou au roi. Les livres des bibliothèques publiques, et particulièrement les actes sur parchemin, les manuscrits de toute espèce, étaient apportés à la commune, et là on procédait à leur accusation, à leur mise en liberté ou à
leur condamnation ; les uns étaient gardés intacts, les autres brûlés sur l’heure.
o On avait, un jour du mois de juin 1793, pillé bon nombre de bibliothèques; la grande salle dans laquelle on déposait ces papiers était pleine; François de Metz et plusieurs employés procédaient au dépouillement de ces manuscrits de toute espèce, car il y avait ce jour-là peu de livres imprimés. Après avoir enregistré des livres de théologie, de physique, d'astronomie, etc., ils arrivèrent à un endroit où étaient étendus des iu-12, des in-8° et des in-4° tout reliés en parchemin, et portant un signe particulier. Quelques employés disaient que ces ouvrages provenaient de la bibliothèque des Bénédictins, d'autres pensaient qu’ils faisaient partie de la riche collection bibliographique des Génovévains. Quelle fut leur surprise, en ouvrant ces livres, de voir qu’ils contenaient des traités sur les sciences occultes, sur l’astrologie, l’alchimie, la nécromancie, la chiromancie et les prophéties.
« Ils avaient presque tous catalogué ces livres de peu d’importance, et qui ne devaient point recevoir les honneurs du bûcher, quand un petit in-12 frappa leur attention : c’était le Livre de prophéties composé par Philippe Olivarius, docteur en médecine, chirurgien et astrologue ; ce livre contenait plusieurs prophéties de peu d’importance, sans nom d’auteur, mais celle-ci était signée. A la dernière page, on lisait en gothique : Finis, et plus bas 15 i2, en chiffres du XVIesiècle.
« François de Metz la lut en entier, mais il n'en comprit pas le sens : il l’avoua plus tard lui-même à sa lille, madame de Maugirard. Cependant elle lui sembla si extraordinaire, qu'il la copia et la réunit à plusieurs autres prophéties copiées aussi par lui, et que nous avons retrouvées dans ses papiers. La copie textuelle de la prophétie d'Olivarius, écrite de la main même de François
,1c Metz, est datée tic l’an 1793 : ainsi il ne peut plus y avoir aucun doute à cet égard.
« Comme on doit bien le peuser, on parla beaucoup de cette prophétie, qui fut copiée par un grand nombre de personnes et conservée, ainsi que plusieurs autres ouvrages sur le même sujet, dans la bibliothèque de l’Hôtel-de-Ville. Quand Bonaparte monta sur le trône, on lui parla de celle prophétie; il voulut la voir, et depuis on ignore ce qu’elle esl devenue. Elle a été imprimée en 1815; 011 l’inséra dans les Mémoires de Joséphine, édition de 1320 et de 1827, et enfin Edouard Bricon, libraire, l’a publiée dans son Becueil de prophéties.
« Maintenant, si nous examinons cette prophétie avec quelque attention, nous trouvons qu’elle est bien extraordinaire. Tout ce qu’elle a prédit touchant le règne de Napoléon el le retour des Bourbons s’est parfaitement réalisé. Les troubles de 1827, les conspirations des libéraux et la Révolution de 1830 même s'y trouvent! mais elle va plus loin. Quel est ce jeune guerrier qui cheminera vers la grande ville et portera sur son armure un lion et un coq, emblèmes de la force et de la prudence?
— Que signifient ces paroles : la lance lui sera donnée par un grand prince, et il sera secondé merveilleusement par un peuple guerrier, qui se réunira aux Parisiens pour mettre un terme aux troubles et aux révolutions?
_Et ces malencontreux maillotins, qui doivent encore
une fois rougir la Seine de sang, quels sont-ils? —Et cet homme qui fera partout respecter la France, réglera les destinées du monde et posera les bases d’une société nouvelle, comment s’appelle-t-il? —avenir nous 1 apprendra.
« Tout le monde sait qu’il ne fut question, dans les dernières années du règne de Napoléon, que du petit homme rouge, qui avait promis de lui rendre trois visites. On ditque la première entrevue eut lieu au château des
Tuileries, trois jours avant le sacre; la seconde au retour de la campagne de Wagram, et la troisième à Fontainebleau, en 1811. Le petit homme rouge, qui n’est autre qu’une superstition populaire, s’est depuis réfugié dans les chansons de Béranger, où il existe réellement.
« A l'occasion de cette visite, on parla de l’affilialiou de Bonaparte à la secte universelle des francs-juges. La date de son premier serment fut fixée au Ier septembre 1795 ; on dit qu’il l'avait prêté dans une assemblée générale de frères qui s’étaient réunis dans la forêt de Fontainebleau ; il l'aurait renouvelé à l’époque de ses victoires en Italie. On s’entretint beaucoup de sa longue conférence avec le chef des Philadelplies au Caire.
« On raconte que pendant son séjour à Milan, Joséphine étant un jour à l'une des croisées du château de Plaisance, vit passer des hommes et des femmes d’une structure singulièrement grotesque. Us étaient très-pe-tits, avaient la tète grosse, de grands traits, la taille courte et difforme, les jambes torses. Elle remarqua que cette race devait être colère et fort méchante; qu’il était surpreuant que l’on permît à ces individus de se marier. Sur ses observations, un seigneur milanais, qui se trouvait par hasard à ses côtés, lui répondit, en lui faisant, regarder plus attentivement une de ces hideuses créatures, qui se vantait d’avoir à ses ordres un démon familier :
« C’est un esprit pénétrant, mais un caractère inquiet « et bizarre qui l’a favorisée pour établir les opinions les « plus extravagantes. Le gouvernement la tolère, parce « qu’elle maintient toujours la classe la plus prompte à « opérer un mouvement. Tenez, ajouta-t-il en s’adres-
» sant à madame de Camb....... elle semble vous fixer
« plus particulièrement. »
« La sorcière des Alpes, c’est ainsi qu’on la dénom-
noait, s'écria, en voyant sur un balcon une société parmi laquelle était madame Bonaparte :
« Retirez-vous promptement, un grand malheur vous « menace. »
«Effectivement, l’entablement qui soutenait une espèce de terrasse extérieure vint à manquer quelques minutes après, et entraîna en tombant plusieurs personnes, qui furent plus ou moins dangereusement blessées. Madame Bonaparte se jeta heureusement vers le côté opposé, qui se soutenait encore, et on eut le temps de venir la dégager, ainsi que les dames de sa suite. Le lendemain on lui amena cette femme. Madame Bonaparte dit à madame de Camb...... de feindre vis-à-vis
de la sorcière qu’elles étaient Lucquoises toutes les deux, et forcées de fuir de leur pays pour des causes majeures. Tous ceux qui sc trouvèrent présents lors de l’arrivée du monstre humain en furent efl'rayés. Elle avait un goitre qui pendait jusqu’à sa ceinture, et tenait par la main un petit crétin qui lui ressemblait. Chacun témoigna à l’instant le désir de la consulter. Elle était sourde, parlait très-difficilement; son ensemble tenait de l’imbécillité : cependant elle connaissait son monde. Elle prépara des herbes, demanda des œufs frais, et fit monter trois seaux d’eau.
« Après quelques mots d’un baragouin inintelligible, ellç dit à l’un des officiers : « Vous serez tué dans une bataille; » à l’autre : « Vous périrez de froid et de misère. »
'« Quand vint le tour de madame Bonaparte, car elle avait voulu être la dernière, elle lui annonça qu’elle serait un jour couronnée : elle lui montra dans le seau d’eau que les œufs avaient formé des fleurons qui, sc rejoignant ensemble, présageaient la royauté.
«J’en vois deux, lui dit-elle, mais vous n’en obtiendrez « qu’une.
« — C’est bien assez, » dit Joséphine.
« Chacun voulut voir cette couronne si fragile, et, en l'examinant attentivement, on remarqua qu’elle était à sept épis; et le petit crétin qui accompagnait cette femme, et qui passait pour son génie tutélaire, fit alors un signe d’approbation. On congédia la sorcière des Alpes, en la récompensant de manière à ne pas éveiller les soupçons.
«En rappelant cette prédiction, Joséphine disait un jour :
« Trois personnes m’ont prédit que je régnerais : l’Ir-« landaise David, la sorcière des Alpes et mademoiselle « Lenormaud ; mais elles ne m’ont pas dit si ma couronne « serait transmise à mes descendants. Probablement ma « royauté ne sera pas de ce monde, car le plus médiocre « Français laisse son héritage à ses enfants; quant aux « miens, il paraîtrait que leurs vertus deviendraient un «jour leur plus brillant apanage; que les grandes digni-« tés que je dois posséder tomberaient en quenouille de « mon vivant. Ce qui me console au moins dans tout « ceci, c’est qu’après moi mes actions pourront me faire « revivre dans le souvenir de mes amis, et j’aime à me « persuader que j’en laisserai quelques-uns. »
« De tout ceci concluons que ces différentes prophéties sont très-remarquables, puisqu’elles se sont réalisées; mais que Bonaparte les ait admises, c’est ce qu’il nous est impossible de croire; car, encore une fois, il n’était ni fataliste ni superstitieux. »
Conversion. — Les coryphées de la croisade ânti-magnétique peu à peu s’avouent vaincus, désertent leur poste maguéticide. Dernièrement c’était le rédacteur en chef de Brilish and foreign médical review, aujourd’hui c’est celui de l’Union médicale, M. Amédée Latour, autrement dit Jean Raymond, qui, l’année dernière, devait nousfla-
geller si rudement dans les colonnes du Constitutionnel, qui lui étaient ouvertes dans ce but. Depuis un an les chosesontbien changé, le magnétisme a fait d'excellentes recrues, etchaquejouril l errasse quelque nouvel ennemi. Poussé à bout par la Mouche, M. Amédée l.atour fait, dans un des derniers numéros de son journal, sa profession de foi en ces termes :
« Je délie toutes les mouches de Mâcon de me prouver que j’ai englobé dans ma réprobation aussi générale tous les magnétologistes et tous les phénomènes dits magnétiques. J’ai connu, je connais des partisans du magnétisme très-honorables, très-respectables, et dont les convictions sont aussi pures que sincères. Je sais, je crois que, dans certains cas pathologiques, il est possible de développer des phénomènes plus ou moins étranges, plus ou moins en dehors des principes connus de la physiologie. Mais entre ces hommes et les magnétiseurs de profession, entre ces phénomènes et les ridicules jongleries de nos salons, il y a un abîme de mensonges. »
A cette confession si catégorique, M. le docteur Ordinaire réplique dans la Mouche dernière :
« A la bonne heure, M. Jean Raymond ! nous commençons à nous comprendre. Nous sommes aussi ennemi du mensonge que vous, et c’est parce que nous sommes l’esclave de la vérité que nous défendons envers et contre tous, non les jongleurs, mais les croyants sincères qui ne cherchent pas à spéculer, mais à propager d’utiles croyances. »
Banquet mesmèrien.—Nous allons pour la seconde fois célébrer l’anniversaire de la naissance de Mesmer. Nous espérons que les partisans dévoués du magnétisme ne manqueront point à l’appel que nous leur avons fait. Ce n’est point pour une vaine cérémonie que nous les avons conviés, mais pour montrer à tous que nous soin-
mes forts et »ombreux, que notre science fait de rapides progrès.
I.a mémoire de Mesmer doit être chère aux hommes qui pratiquent sa doctrine. Le temps n’est-il pas venu où tout ce qui jouit des bienfaits de ses découvertes doit lui payer un tribut de reconnaissance? Nous savons que plusieurs sont indifférents, mais nous ne partageons point ces sentiments d’ingratitude; ces lâches héritiers de vérités fécondes nous inspirent une sorte de mépris. Qu’ils restent donc à l’écart ; la science nouvelle les désavoue, car elle ne leur doit ni ne leur devra rien.
La fête que nous allons célébrer doit être une manifestation vengeresse des calomnies jetées sur notre mai-Ire. Nos antagonistes apprendront que, pleins de loi, rejetant leurs mensonges et leurs principes, nous nous élançons vers l’avenir, persuadés que des changements heureux doivent être la suite de nos efforts et de nos travaux.
Magnétiseurs, venez établir avec nous une communauté de sentiments comme vous l’avez de croyances; cette fraternité, inspirée par la vérité, nous rendra plus puissants; avec elle nous ferons de grandes et nobles choses. Déjà cent douze noms sont inscrits sur la liste ; nous en espérons plus encore, car un grand nombre de partisans du magnétisme n'ont pu être prévenus.
Dans ce banquet, nous ferons connaître ce que nous espérons faire prochainement pour récompenser les œuvres utiles des magnétiseurs, leurs beaux faits comme aussi leurs découvertes.
Chronique. — M. W. Gregory (d’Edimbourg) publie dans le numéro d'avril du Phrenological journal un long article sur le véritable esprit scientifique dans lequel on doit examiner les prétentions du magnétisme animal et de la phrénologie. C’est bien pensé et bien dit;
avec île tels champions la vérité ne peut manquer de se faire jour. La double qualité de docteur-médecin et de professeur de chimie à l’üniversité donne à l’opinion, au dire de M. Gregory une valeur que tout le monde apprécie.
— Le Journal du Dimanche du II de ce mois reproduit un long extrait du Manuel do M. du Polet.
— La Mouche du l i reproduit le feuilleton d'Alphonse Karr sur le magnétisme, qu’elle accompagne de judicieuses observations.
A propos d éthérisation suivie d’opération douloureuse, le même journal, du 21. dit :
« Le magnétisme, qui serait mille fois préférable à l’é-thei, détermine une insensibilité absolue, qui se prolonge autant que le magnétiseur le veut. Pourquoi? Parce que l’âme du erisiaque est dominée, qu elle se détache en partie du corps, quelle n’a plus besoin de système nerveux, d'organes ; elle réunit tous les sens et les transporte à la volonté du magnétiseur. Le magnétisme fait toucher du doigt l’âme ; voilà pourquoi nous lui accordons une grande importance‘dans les études psychor logiques; voilà pourquoi nous le défendons avec tant d’énergie; voilà pourquoi nous le servons avec tant de zèle. »
_ I.a petite Espagnole électrique dont nous avons
parlé dans notre dernier numéro n’a pas trouvé grâce devant la superstition du pasteur du lieu. Ordre a été intimé à M. Williams de se défaire de cette enfant, qui a été envoyéedans une pension à la campagne. Il est probable que nous en entendrons parler de nouveau. Notre collaborateur nous donne des détails qui confirment en tout point l’exactitude du récit que nous avons traduit.
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (de Garnav).
Paris. — Imprimerie il'A, Keké et Comp., rue de Seine, SJ.
THÉORIES.
DES PHÉNOMÈNES MAGNÉTIQUES DE TRANSITION.
§ II. —Magie et astrologie.
La Magie, Magia, Motystcn, est, selon Platon, la connaissance des prodiges dont la cause se perd dans l’immensité de la nature.
Cette définition embrasse à la fois les phénomènes physiques, chimiques, astronomiques et psychologiques. Ces derniers concernent spécialement les rapports de l’âme avec le corps, et la divination, cet art des temples et des cavernes, vient s’y rattacher aussi. Mais d’autres définitions que l’histoire nous fournit sont indispensables pour bien comprendre toute l’espace que nous avons à parcourir.
Magia est arset facullas per quam ad elementorum corpo-rum proprietatem virium et abstrusarum operationum co-gnitionepervenitur. (Arnaud de Villeneuve.)
La magie est l’art et la faculté qui conduisent aux propriétés des corps élémentaires, par la connaissance des opérations et forces secrètes.
J.-B. Porta dit à ceux qui veulent s’instruire en cet art sublime : Nihil aliud magiœ opéra credatis, quam nature opéra, uti ars ministra et sedula famulatur. Ne croyez pas la magie Être autre chose que l’œuvre de la nature ;
TOME IV.— jyo 45. —10 MAI 1847. 9
l’art est serf d’ieelle et diligemment s’emploie à son service (traduction 1647).
La magie pour tous est une sage et parfaite connaissance des choses (rerum) de la nature (Van Helmont).
Toujours la nature dans ccs définitions, toujours elle, s’ouvrant comme un livre universelaux investigations du savoir. D’où, pour moi, le magicien serait un homme qui sait la nature. Je définirai la magie: science parfaite de la nature; et j'ai pour moi l’autorité de l’école égyptienne, qui l’appelait maga, parce que c’était elle qui fournissait à tous leurs besoins insatiables, à toute l'ardeur de leurs recherches, et c’est de là sans nul doute que vient le mot mage (ptayoç, magus).
Le magicien est ministre de la nature, magus naturœ minister est (Plotinus). Sa science embrasse tous les savoirs ; il doit être consommé en philosophie et bien en-langagé ès-choses d’icelle : consummatum in philosophid, consultissimumque (J.-B. Porta), et aussi connaître à fond la médecine: medicinœ quoque haud sit ignarus (Albert).
La médecine surtout était une des branches les plus fleuries de l’art magique, car le bien de l’humanité fut toujours nn rayon du sage. Eussent-ils porté cent ans le lourd bandeau de l’étude, ils s’endormaient tranquilles ; leur labeur était assez payé dès qu’ils avaient recueilli quelques gouttes de baume. Tous guérissaient, quelque nom qu’ils portassent: les remèdes étaient connus de leurs mains. Le philosophe, « contre les humeurs d’audace et vaillantise coléreuse, conseillait les prêlesd’eau, lesquelles sont nonchalantes en ce liquide et ne portent jamais de fruits. »
Le physicien, «contre les maux indignes et lâchement traîtreux qui resserrent le passage libre aux liquides et matières de nourriture, administrait le lupulus (houblon) qui grimpe et parcourt le bocage comme un écervelé d’imagination.»
I.’astrologue, « contre la fièvre qui rend piteux et lâche, avec jours de répit mêlés, la notre-dame ou benoîte, laquelle correspond en croissance aux Gémeaux et porte sa graine en la Vierge. »
Et ainsi de tous les remèdes; on les appliquait par analogie, et non par hasard. La colère est un vice toujours malheureux en ses suites : donnons les prêles stériles. Le tube digestif est malade, donnons le houblon, dont les contours sont analogues aux plis des intestins. Vous avez la fièvre intermittente, la benoîte naît au moment où ces affections paraissent d'ordinaire, et donne sa graine à l’époque où elles sont plus terribles , donnons cette plante. Et l’effet suivait la prévision presque toujours. Et remarquez, jeprends ces exemples au hasard, dans trois livres différents. Nos savants d’à présent prennent le visage qui sied si bien à leur aplomb, quand on leur parle de végétaux ou de magie pour guérir ; car la première fois qu’ils ont ouvert les vieux botanistes, ils ont ri de l’action du remède fondée sur de telles idées, et ce fut la dernière fois qu’ils s’en enquirent. Après avoir suivi la thérapeutique actuelle, et, comme tant d’autres, aimé les livres nouveaux, voici dans mes mains les pages enfumées de l'antique Diosco-ridc! J’ai lu d’abord, puis j’ai réfléchi, puis j’ai essayé; et pour conclusion maintenant, quand un professeur m’indique un remède, je cours à Dioscoride, voir s’il est content; je le mets bien au-dessus des amateurs de strychnine, de morphine et de sels mercuriels. Serait-il juste à Dieu d’avoir opposé à nos maux des remèdes qu’on fût quatre mille ans à inventer? Sont-ils dans la nature, ces remèdes ? Eh non ! elle ne le montre que trop : guérison par la chimie, longue convalescence ; par les végétaux ou le magnétisme, guérison sans convalescence : c’est la nature. Aussi n’a-t-on, pour bien connaître le fond dans tout cela, qu’à comparer le mode d’étudier des
temps passes avec celui d’aujourd’hui. On faisait les théories d’après la nature, maintenant c’est elle qui doit se plier aux théories : aussi, en lisant les premiers, nous rencontrons-nous sans cesse, bien que partis de points différents: noussommes dans la sphère du vrai; dans les seconds, comme les bras de l’angle, nous nous écartons de plus en plus.
Si les anciens et la plupart des magiciens du moyen Sge se fussent entendus sur les noms , les sciences eussent été portées au comble ; mais, séparés sans cesse par des périphrases sans fin, au lieu d’accumuler les faits et les recherches, ils passaient des vies entières à interpréter les mots. Ce qui les tourmenta le plus fut cette for ce ingénieuse que la nature nous cache: Tolaque naturœ vis ingeniosa latentis (Lucain). Cette force insaisissable, parce qu’ils n’admettaient pas les fluides; ce théome-disme qui unit la nature entière, et que* les Juifs seuls (ou plutôt Moïse) ont compris en rapportant tous les membres à un môme chef. La Grèce, cette terre d’imagination et de systèmes, donna naissance à une infinité de théories. L’Italie ne fut pas moins fertile, etl’école d’Afrique, pendant longtemps, fit dominer les siennes.
Avant de les parcourir, il est besoin de nous entendre sur le mot élément,qui ne doit pas être pris dans le sens de cause génératrice, mais plutôt alimentaire des phénomènes et des choses : Elemenla quasi alimenta, dit Cicéron.
Héraclides et Hippase deMétaponle donnèrent le feu comme élément.
Diogèue de Thrace et Anàximènes, l’air. Ce dernier professa que l’air était Dieu (xop .Otoç euti); mais Dieu, pour lui, était la cause des phénomènes naturels.
Thalès de Milet pensa que c’était l’eau. L’eau nourrissant les plantes, formant les pierres, les ciments, indispensable à l’alimentation des animaux qui nous engrais-
sent, avait quelque chose de séduisant, surtout dans la bouche d’un Thaïes.
Hésiode s’imagina que c’était la terre (n ¡xnrsipoi yr,).
Déjà plus détachés delà matière, Hippon et Gritiasse donnèrent aux vapeurs et aux exhalaisons.
Parménides envisagea le froid et le chaud.
Empédocles d’Agrigente pencha pour la sympathie et l’antipathie (concordia et litis).
Les Péripatéticiens émirent en principe que les vertus dépendaient des formes de la substance : Vir tûtes substan-tibus formis connatœ sunt.
Les Platoniciens et. les Académiciens se basèrent sur des idées génératrices. Iileee rerum formatrices.
Numerus est quo cuncta constant. Le nombre c’est tout, disait Pythagore.
Hermès s’appuie sur l’irradiation des astres.
Avicenne, sur les intelligences secrètes.
Albert, sur les formes spécifiques.
Puis en masse les médecins firent peser les causes du mal dans notre organisation, sur le froid ou le chaud, sur le sec ou l’humide.
On dirait qu’en une seule phrase Salomon aurait entrepris de les résumer tous : Omnia Deus in numéro, pondéré et mensurd exposait.
Numéro, c’est l'harmonie et ses lois : c’est Pythagore.
Pondéré, c’est l’eau de Thalès, la terre d’Ilésiode ou la matière.
Mensurd, les formes d’Albert et des Péripatéticiens.
Je ne saurais ici entrer dans les détails que chacune de ces opinions diverses semblerait exiger; seulement il est nécessaire de dire que tous presque, en dehors de la déité, admettaient une force inconnue, qui, examinée sous différents dehors, ne laissait pas que de les entraîner malgré eux h des conclusions qui dénotaient un même fonds. Aussi, quelque haut qu’ils aient sonné leurs
doctrines, disciples d’un môme cercle, leurs segments n’eurent jamais que des bras égaux.
Mais comme ils eussent marché vite s’ils se fussent entendus sur les noms et les classes des phénomènes; s’ils se fussent dit, par exemple : Dieu est notre créateur ; notre âme seule correspond à sa source ; tout phénomène de 1 ame, à Dieu. Il est une force qui tient de l’âme et de la matière. Nous différons sur le point de départ. Donnons un nom : théomédisme; maintenant toute force inexplicable, insaisissable, au théomédisme.
Voici les phénomènes qui semblent se rattacher à des types différents ; un nom pour chaque type, et marchons.
L'aimant attire le fer: magnétisme.
Le verre frotté donne des étincelles : électricité.
Le feu dilate les corps, fond les métaux : calorique.
L’eau dissout les sels, aide les combinaisons: afûniLé.
Les corps possèdent la transparence, l’opacité, la réfraction, la réflexion : lumière.
L’homme, sous l’influence d’une volonté, voit dans les ténèbres, suit la main qui l’attire, tremble de froid, verse des sueurs : magnétisme animal.
Et ne croyez pas qu’ainsi je m’éloigne de l’unité ; non, je ne fais que la diviser en fractions qui, réunies, constituent l’entier.
D’ailleurs ces différents ordres ne sont jamais si bien tranchés qu’on puisse les enlever sans tirailler les autres : l’aiguille aimantée abandonne ses pôles sous l’influence d’un courant électrique; il y a lumière et chaleur dans l’éclair; électricité, toutes les fois qu’un corps est soumis au calorique, toutes les fois que des atomes suivent l’impulsion de l’affinité, et l’affinité, pour moi, ne serait guère autre chose que le magnétisme terrestre ressuscité, pour ainsi dire, sous l’action du fourneau ou des dissolvants.
Que remarquons-nous chez l’homme que sature le fluide échappé de nos doigts? Ici secousses électriques, là chaleur; chez l’un antipathie, chez l’autre sympathie, affinité ou répulsion; enfin attraction de l’ai mant, lumière à travers les corps opaques, applica tion îles médicaments, connaissance des lois du ciel, science de l'organisme animal et universel, science de l’avenir... extase des saints quand l’âme, pure encore, est digue des visions célestes.
Quelle immense famille ! C’est vraiment la race de Jacob s’étendant comme les sables du désert vers l’occident, l’orient, le septentrion et le midi : Eritque semen ttium quasi pulvis lerrœ, dilataberis ad occidentem et orien-lem et septentrionem et meridiem!
Et dire qu’il fut des êtres capables de nier Dieu à la vue de cette loi générale de l’univers qui fait que tout se tient, tout s’enchaîne, tout s’embrasse à la fois! Est-il besoin d’autre preuve que cette vaste unité des mondes et des espaces?
Buflon avait tellement senti celte belle unité qu’il voulait, crainte de la troubler, que l’étude des êtres se fît grain à grain, sans ordre ni division. Ce vaste génie, qui mesurait la nature d’un seul embrassement, eût voulu que tous les homqies pussent étudier sur uneaussi grande échelle que lui. Mais l’unité d’un peuple se compose d’ignares, desavants et de génies. Seuls, ces derniers ont les grandes idées, les vastes conceptions; ceux-là répandent à loisir l’eau que le ciel laisse échapper. « Mais, pour boire aux fontaines, m’est avis qu’il en faut connaître le sentier, » et la méthode est le poteau indicateur. Ce que craignait Bufion arriva : les méthodes emportèrent chacune un membre du corps; mais ce qu’il n’avait pas prévu, c’est qu’il vint des êtres que chacun se disputa, êtres bâtards pour ainsi dire* qui font la transition d’un ordre à l’autre et nouent les fils de la
trame. L’unité parut Lien plus belle dès lors, puisque l'on pouvait ainsi faire des cartes animales comme des caries géographiques, dont les délimitations ne sont que conventionnelles. Suivons quelques-unes de ces filiations, en partant de l’homme blanc, qui tient le sommet de la chaîne.
Les races blanche, jaune, noire, passent de l’une à l’autre par des mélanges successifs. A mesure que lepiÿ-mentum se fonce en couleur, l’intelligence va décroissant, et l’angle facial fuit la perpendiculaire.
Les Européens, leslndiens, les Chinois, lesMantchoux, les Arabes, qui brunissent de plus en plus en avançant vers l’équateur; les Éthiopiens, les Cafres, les Holten-tots, les Alfourous. Ces derniers, habitants de l’Océanie, n’ont que la pensée en sus de l’orang-outang, des membres allongés et maigres, des idiomes pauvres comme leur cerveau. Autant la forme arménienne révèle de perfection dans l’œuvre du sixième jour, autant celle-ci, par sa dégradation, fait admirer l’immuabilité de la loi de transition.
Voulons-nous maintenant de l’homme passer à l’herbe des prés : Alfourou, chimpanzé, cynocéphale, chien, loutre, phoque, marsouin, anguille, lamproie, ver de terre, chiendent.
De l’homme désirons-nous passer aux oiseaux : homme, singe, sarigue, dyasure, ornithorynque, manchot, canard.
Aux reptiles : homme, singe, écureuil, fourmillier, tatou; de ce dernier à la tortue de terre, du pangolin au caret la ligne de démarcation est si mince qu’en mathématique on la négligerait. Il y aurait des volumes à écrire si une chose plus intéressante ne se présentait à nous. A la dégénérescence graduée des organes et des fonctions principales de la vie se joint la dégénérescence intellectuelle, et l’âme, ce rayon de la divinité infusé dans l’homme, va se perdant en instincts de plus en
pins froids, à mesure que l’on descend les filiations. L’esprit de transition va aussi eu faiblissant avec le rapprochement de l’âme et de la matière, et les sens finissent par n’être plus qu’à l’état latent. Mais la règle ici souffre bien des exceplions : là où toute sensation devrait avoir cessé, elle s’éveille comme pour nous exciter au travail ; la sensitive surgit tout à coup du sein des fleurs avec ses feuilles qui se ferment au moindre attouchement, ce que-les savants appellent de l’excitabilité; peu importe le nom. Pline, quia bien son autorité,'nomme cela adum-bratio tensus, ombre de sens; je me trouve tout amené à son avis. Et l’aimant donc? Une pierre devrait-elle, dans les conditions ordinaires, attirer le fer? Non, sans doute, et le matérialiste, s’il voulait être de bonne foi, succomberait sous le coup de ses propres armes. Comment expliquer les fluides?
Uneidéequidominebien des magiciens, c’estl’influence des astres. Tel individu né sous telle constellation reçoit-il un type particulier? Telle plante reçoit-elle une vertu de l’étoile qui préside à sa naissance?
Ces idées sont-elles pures illusions? Je n’ose répondre de front; mais voici : Galien, Pline. Dioscoride, tout le moyen âge avec eux, vous disent : la racine de pivoine guérit l’épilepsie si on la recueille à l’époque de sa floraison , sinon elle a les propriétés contraires, et cela tient à ce que l’astre de sa fleur ne peut plus irradier en elle une force anti-épileptique. Cet exemple est peut-être de mille le plus mauvais, et la réfutation semble venir d’elle-même : si la pivoine fleurie guérit l’épileptique, c’est qu'alors elle possède des sucs médicinaux qu'elle n’avait point auparavant, et qu’elle perd dans la suite. Mais, je vous prie, d’où vient la force qui distribue les sucs médicinaux, les sucs nutritifs des plantes? Demandez aux agriculteurs si les astres n’y sont pour rien, s’il n’est pas certaines lunes pernicieuses aux vignes et aux
moissons. Cela, direz-vous, ne tient point aux astres, mais à la température. Mais d’où viennent, les modifications de température, d’où viennent les pluies qui baignent les pléiades, comme dit Horace? D’où viennc.it les marées? Nierez-vous ici l’inlluenee sidérale? Eh bien, si la mer obéit à l’astre qui l’attire, la plante sera influencée, l'homme le sera, car il est une règle écrite sur la terre : toutse retrouve dans son roi. C’est pousser l’analogie bien loin; mais qu'on me réfute comme on voudra, je céderai aux armes de la conviction, comme ce voyageur au départ pour un lointain pays. Il sait ne rien oublier, ne rien laisser; il est seul, il est libre... et pourtant il y a entre lui et le vaisseau ce je ne sais quoi d’inexplicable qui met le cœur dans la tristesse : la Patrie.
« Mais est-il quelqu’un au monde qui, sentant le soleil, ne lève les yeux vers cet astre bienfaisant, tout parcouru de bénignes sensations? » Mettra-t-on jamais en doute l’influence du soleil sur les malades? Ne les voit-on pas revivre comme les fleurs après l’orage? Les septe-naires, correspondant à chaque phase de la lune, et l’aggravation ou la diminution des symptômes morbides, le soir etle ma tin, disent assez haut cette vérité. Le soleil, qui préside au partage des heures, répartit entre nous lajouis-sance de la vie : Ipse sol lemporum rector vitœque regimen est, dit Platon. Ce même auteur appelle encore cet astre: Sempilernum animal. Albumazar fait émaner toute vertu du soleil et de la lune. Après Dieu, dit Hermès, le soleil et la lune sont la vie de tous les vivants. Aris-tote, examinant les lois célestes, nous offre ce passage : Necessitale fuit hic mundus superioribus lalionibus contiguus ut uriiversa virlus inde gubernarelur. C’était nécessité que le monde s'enchaînât aux lois qui gouvernent le ciel, pour que de là toute puissance reçût le commandement. Pytliagore, ainsi que Platon et Aristote, admet l’influence des astres, et tous les philosophes après
eux, mais non pas comme les Chaldéens, qui leur attribuaient tous les phénomènes. Et, du reste, quoi d’éton-nant dans cette doctrine des plaines où coulent le Tigre et PEuphrate, dans ces vastes pays où le ciel est sans horizon, où les nuits n’ont jamais de nuages? Peut-on résister a la séduction quand l’harmonie qni roule sur nos têtes parle si haut le langage de la divinité? Mais l’athée, s’il regardait jamais le ciel, s’il était jamais capable de sentir un rayon de soleil, l’athée s’agenouillerait comme le sauvage devant le père des savannes et des forêts; il lui offrirait avec amour le premier épi de ses moissons. Éh! dites-moi, vous admettez le calorique. Quelle en est la source principale? N’est-ce pas le soleil? Où croyez-vous que l'homme absorbe plus de sucs, où la terre est-elle plus riche en produits, où la vie fleurit-elle, en un mot? Est-ce là, dans ces contrées de glace où le renne, pour ses repas, ne trouve qu’un peu de lichen, ou bien au pays des palmiers et des dattes? Chez qui les propriétés magnétiques sont-elles plus développées, du * Lapon ou de l’Arabe? C'est toujours là où le soleil est plus pur, où les astres sont plus doux.
Donc, alors, donc les astres ont une influence, soit directe, soit par la modification que la température imprime à nos constitutions. Nous sommes dans un filet : si l’on admet le roi, on admet les sujets : le soleil est roi, les astres ne sont que son ombre; ils n’agiront qne comme ombre, mais ils agiront ! Du reste, il y eut la comète des César et des Napoléon ; il y eut l’étoile qui guida les ma-gesau berceau du Christ.
Remarquez : en suivant cette voie nous sommes entièrement dans le théomédisme, fluide universel modifié selon qu’il émane de différents corps. C’est plaisir de marcher ainsi: on se croirait dans un vaste cirque où chacun peut voir la scène, mais sous des faces différentes et à des distances plus ou moins rapprochées.
A présent que nous tenons quelques antécédents, touchons un peu l’histoire de la magie. Arnaud de Ville-neuve nous lègue la tradition suivante :
« Adam, père de tous les arts, reçut de Dieu la connaissance du déluge. Ses enfants écrivirent, en conséquence, sur des tables hiéroglyphiques les arts naturels et leurs principes: Ulposleris etiam innoteseeret fuluro-rurn eventurum matura provisio, afin que leurs descendants pussent de bonne heure posséder la connaissance de l'avenir. Noach trouva en Arménie une de ces tables de pierre où le cours des astres était tracé ; et de là, en premier titre, la naissance de l’astronomie, de l’astrologie; puis, en enjoignant d’autres branches, la cabale, la chimie, etc.»
Que cette origine de l’art soit idéale ou non, elle a toujours le mérite de rapporter à Dieu la première science du monde, et elle se drape à la rigueur sous le manteau de la probabilité.
Vous cherchez la cause d’un phénomène, les étoi les vous reportent tout naturellement à Dieu. Dieu donc étant la cause de ce phénomène, les astres vous ayant conduit à la source, il est tout simple de penser qu’ils sont la cause transéante et non fondamentale, le bras et non la volonté. Maintenant ôlez Dieu, restent les astres, cause de tout événement, de tout phénomène ! Je ne sache pas qu’aucune science ait précédé l’astrologie. La Chaldée fut son berceau, la Perse la vit grandir, et l’Egypte put jouir de toute sa maturité. Là elle s’adjoignit diverses branches de sciences naturelles, secrètes et divinatoires, que les Hébreux adoptèrent autant que le permettait la loi de Dieu. Munis de tous les documents de leurs voyageurs, les Grecs constituèrent la fable ou Démonotechnic. Survint alors le christianisme, qui tira la vérité du milieu de l’ombre, mais simple et pure, dégagée de tout prestige : l’imposition des mains, le souflle
spirituel, l’exorcisme, etc. Le moyen âge effaça toute tradition pratique sous le souffle raisonné de la théologie, et enfin la science nous apparaît maintenant à l'abri de toute doctrine, en dehors d£ toute école, avec un nom particulier : mesmérisme ou magnétisme animal. Et voyez dans ce rapide exposé la vérité de ce que j’ai avancé dans mon premier article: Mesmer tira la mère du sein de ses enfants.
Le magnétisme était connu de tout temps, mais inabordable pour la plupart et caché sous des épines d’autant plus dures, qu’on ne les pouvait saisir. Populum fa-bulispascebanl sacerdotes Egyplii ;xpsi autemsub nominibus deorum patriorum philosophabantur (Origène, 1.1, contra Celsum). Les prêtres égyptiens amusaient le peuple par des fables, et ces fables, avec le nom des dieux du pays, servaient de voile à leur philosophie. »
Dans ces temps la science était portée bien haut dans le respect des peuples, et en Perse la royauté ne passait qu’en des bras experts de magie. Neminem apud Persas regno poliri solilum, qui prius magiam non percepisset (Cicerón). Ces rois portaient le nom de mages (¡ixyoç, ma-ffus), et leur profession comprenait tout ce qui concerne la théurgie(0eoî epyov, œuvre de Dieu), cette magie sublime qui embrasse l’étude des œuvres de Dieu. Sous la domination grecque on les appelle sages (uocpoi). Du reste, tjotpoç, en acception primitive, veut dire homme expérimenté dans la profondeur des choses naturelles ; et les coya (pxpnxya d’Hippocrate et de ses successeurs, au lieu d’étre des remèdes bonnement salutaires, comme on le traduit toujours, sont des remèdes magiques ou des remèdes de mage. Du reste, les rois persans de notre époque, qu’on appelle Sophis, ont bien conservé le privilège antique, à la science près.
L’astronomie occupait le premier rang dans leurs écoles; c’était, dit Platon, afin que les rois de Perse apprissent
à administrer leurs royaumes à l'instar de la république des astres.
Les Egyptiens, outre cela, possédaient toutes les sciences naturelles et surpassaient de beaucoup tous leurs voisins. Leurs prêtres s’appelaient Sacerdotes, selon les Latins, c’est-à-dire dépositaires des choses sacrées; et selon les Grecs, dans l’acception de Ieoe'tt.ç, ordonnateurs des sacrifices; en ce sens probablement qu’ils indiquaient l’époque favorable où l’on devait invoquer les dieux. Là on cumula les fonctions de roi, prêtre et magicien sur la tète du même homme, ainsi que l’indique le surnom d’Herinès Trismégiste, trois fois grand, trois fois maître (Tpio-fjsy.'ffTOç). L’Egypte est surtout ,1a patrie des énigmes et des hiéroglyphes. Comme il était important pour la race sacerdotale de ne point divulguer les secrets de la nature, ils imaginèrent de les traduire en caractères tout spéciaux, ou les initiés seuls auraient le don de l’intelligence.
Les Chaldéens et les Hébreux portèrent tour à tour les noms de Cabalistes (cabala ou cabbala, science traditionnelle et héréditaire), et de Prophètes (irptxprÎTTjç, de irpo(p7)Tsuo, affirmer à l’avance). Pourtant les prêtres juifs portèrent également le nom de Sacerdotes. Chez les Indiens, les représentants de la science divine et naturelle s’appelèrent Brachmanes ou Gymnosophistes ; chez les Celtes, les Gaulois et les Germains, ils eurent les noms de Druides, Bardes et Semnothes. Les Grecs eurent leurs Sacerdotes, leurs sages et leurs philosophes. Leurs sages (doepoî) étaient les élèves des mages ; leurs philosophes (pt>oç ffouoç), les amis des mages; leur philosophie (j>iXojof>eca), l’amour de l’étude en science magique; c’étaient des savants, comme l’indique le mot latin sapientes, hommes de science. Que firent en effet les Grecs? Manquant d’écoles où s’instruire, ils voyagèrent dans les pays étrangers, suivirent les doctrines et revin-
rent chargés d’nn butin qu’ils léguèrent à leurs compatriotes , sous le pli de leurs propres conceptions. Nous trouvons dans leurs écrits la théologie de Moïse, l’astrologie de Bulda et la science d’Hermès; et saint Jérôme, dans sa lettre à Paulin, indique parfaitement leur manière d’étudier. « Nous voyons, dit-il, les anciens traverser les mers, parcourir les provinces, aborder des peuples inconnus : ainsi Pythagore va puiser aux temples de Memphis ; ainsi Platon, dans les écoles d’Egypte ; Apollonius, qui de nos jours fait tant de bruit, le mage, comme dit le vulgaire, ou le philosophe, selon les Pythagoriciens, pénétra chez les Perses, traversa le Caucase, fut chez les Scythes, les Massagètes, puis gagna les opulents royaumes de l’Inde, traversa jusqu’au-delà du Phison chez les Brachmanes, et entendit Hiarchas, au milieu de ses disciples, discourir de la nature, du mouvement des astres, de l'enchaînement des jours. De là il passa chez les Elamithes, les Babyloniens, les Chaldéens, les Mèdes, les Assyriens, les Parlhes, les Syriens, les Phéniciens, les Arabes, les Israélites, revint à Alexandrie et atteignit l’Ethiopie pour voir la fameuse table du soleil. Voilà comme il vint à bout d’acquérir sa vaste science, et plus il allait, plus il se faisait meilleur. Invertit ille vir ubique quod disceret, et semper proficiens semper te melior fieret. »
C’est ainsi qu’on devenait philosophe. Nous pourrions bien nous écrier, en voyant ceux d’aujourd’hui, ) tem-pora ! 6 mores I Je ne pourrais terminer sans donner les noms des pères de la magie et de la philosophie naturelle :
- Zoroastre, chez les Perses; Hermès, en Egypte ; Bulda, chez les Babyloniens -, Zamolxis, chez les Thraces: Abba-ris, dans le nord de l’Europe ; Numa Pompilius, dans le Latium. L’école africaine nous donne Albumazar, Aben-zagal, Rhasis, Geber, et le célèbre Avicenne. L’école
grecque : Machaon, Podalire, Pythagore, Anaxagore,Dé-mocrite, Platon, Aristote, et les sept sages. Plus tard, à Rome et dans l’Italie, nous eûmes Pline, Celse, etc.
En résumé, toute l’antiquité futà la recherche du magnétisme, et il lui échappa parce qu’elle étudia la nature sans y comprendre l’homme. Elle découvrit l’électricité, le calorique, l’aimant, mais ne put jamais saisir le fluide qui l’inquiétait. Le moyen âge chercha beaucoup, trouva moins, car il fut trop ce que l’antiquité ne fut point assez : le spiritualisme domina. Nous tenons le milieu, et la vérité est en nos mains, et le mesmérisme est aussi difficile à nier aujourd’hui que la lumière. Vous admettez l’électricité, dirais-je aux plus entêtés, savants ou soi-disant tels, vous admettez le calorique, ce sont des fluides insaisissables. Comment se développent-ils? Au contact, par exemple, c’est-à-dire qu’entre deux portions hétérogènes de matière naît un agent subtil impondérable. Et, regardez donc, ne sommes-nous pas composés de deux portions,Tune de matière, l’aulre d’esprit? Pourquoi n’y aurait-il pas dégagement de fluide aussi bien qu’entre deux métaux? Donnerez-vous le pas à l’âme ou à la boue?... Mais, de toute nécessité, il faut un quelque chose dans cette action de l’esprit sur le corps, et quelque chose de beaucoup au-dessus de vos fluides, dégagés par des mécaniques inertes et sans vie. « Vous voyez donc le magnétisme? disais-je à une somnambule extatique.—Oh oui, je le vois bien ! Dieu, que c’est beau !—Et qu’est-ce donc? — Je ne puis vous le dire, on ne peut pas le révéler avec la langue des hommes. — C’est donc au-dessus de l’électricité? — L’électricité c’est bon pour la Sorbonne; mais le magnétisme, mon Dieu, que c’est beau!! — Définissez-le moi donc. —Oh! cela m’est impossible. — A cause? — Eh! je ne puis, c’est trop indéfinissable. » Je n’insistai pas davantage, et laissai cette âme heureuse dans la contemplation des beautés célestes,
car je pensai : c’est la plus belle réponse à ceux qui veulent tout savoir, et répètent sans cesse : Qu’est-ce donc que votre magnétisme?
E.-V. Lesgaugris.
(tn suite prochainement.)
CLINIQUE MAGNÉTIQUE.
A MONSIEUR I.E BARON DU POTET DE SENNEVOY.
Monsieur le baron,
Plusieurs médecins de Paris, de Caen, de Saint-Lô et de Bayeux, m’ayant écrit pour me prier de les prévenir aussitôt qu’on devra faire ici une opération dans l’état d’insensibilité magnétique , j’ai pensé qu'il vous serait agréable d’en être informé des premiers, afin d’en donner avis à nos amis communs que ce phénomène pourrait intéresser. Quelques-uns d’entre eux peut-être seraient bien aises de comparer les résultats obtenus par l’éther et par le magnétisme ; ils pourraient, à leur aise, constater la supériorité de celui-ci. En effet, tous ceux qui, comme nous, ont vu des opérations pratiquées avec le secours du sommeil magnétique etâ l’aide de l’ivresse produite par la vapeur de l’éther, trouvent qu’il y a une immense différence entre ces deux procédés $ et, tout en reconnaissant les précieux services que l’éther pourra rendre un jourà l’humanité, ils donnent, d’une voix unanime, la préférence au premier de ces moyens.
En conséquence, j’ai l’honneur de vous informer, monsieur le baron, que d'ici à trois semaines environ, maisk un jour dont la date exacte vous serait envoyée par moi en temps utile, si toutefois quelques personnes de votre connaissance en témoignaient le désir, deux ou trois opérations intéressantes seront pratiquées sur des personnes que je magnétise depuis peu de temps, et dont l’insensibilité est absolue. Ce sont des extirpations de glandes cervicales assez volumineuses.
J’aurai l’avantage de vous envoyer, comme à l’ordinaire, le procès-verbal de ces opérations auxquelles assisteront un grand nombre de témoins recommandables. Ces nouvelles opérations seront la dixième, la onzième et la douzième que nous aurons pratiquées k Cherbourg, dans l’état d’insensibilité magnétique la plus profonde, depuis le 2 octobre 1845, jour où Mlle d’Albanel subit l’imputation de Ja jambe. Des neuf précédentes, vous n’avez reçu que quatre procès-verbaux, parce que les cinq autres n’ont pas été faites publiquement, par des motifs que vous apprécierez, en examinant la nature de ces opérations, dont voici la liste et l’ordre :
1° Amputation de la jambe ;
2° Section du tendon d’Achille ;
3° Section de deux tendons au bras ;
4° Introduction d’une sonde dans la matrice;
5° Extirpation de deux tumeurs adhérentes k la vessie;
6° Extirpation d’un strongle géant ;
V Ouverture d’un abcès dans l’uretère;
8° Extirpation de sept glandes sous-maxillaires ;
9° Extirpation de trois glandes cervicales.
En outre, plusieurs dents molaires ont été extraites k différentes personnes que j’avais magnétisées et rendues complètement insensibles. 11 n’y a que quelques jours encore, M. Piat, l’habile chirurgien-dentiste des établissements publics de la Normandie, en a extrait à une jeune
dame sept en deux séances. L’état d’impassible inertie de cette personne a grandement émerveillé sa famille et les assistants, qui savaient qu’éveillée elle se serait trouvée mal à la vue de l’instrument tant redouté.
Je regrette beaucoup , monsieur le baron, de n’être pas à Paris en ce moment pour célébrer avec vous l’anniversaire de la naissance de Mesmer. La mémoire de cet homme éminent doit, comme vous le dites si bien, être chère h tous ceux qui pratiquent sa doctrine. Quoique éloigné, je serai cependant avec vous le 23 mai ; j’y serai de cœur et de pensée. Veuillez dire à tous les honorables convives du banquet présidé par vous, en leur communiquant l’objet de ma lettre, que je les prie, dans cette réunion solennelle, d’agréer l’expression de mes regrets, ainsi que mon amitié la plus dévouée et la plus sympathique.
Recevez, monsieur le baron, l’assurance de mou estime, de mon admiration et de mon sincère attachement.
L. Durand.
Cherbourg:, 6 mai 1847.
VARIÉTÉS.
Révélation.—Une lettre d’Odessa, 24 octobre 1842, adressée à la Gaieite des Tribunaux, contient le récit d’un fait ideniique à celui des deux amis de Mégare, rapporté par Cicéron. Le voici en entier.
ail y a de ces événements pour lesquels on doit se contenter du rôle de narrateur, quels que soient la stu-
péfaction et le monde de pensées qu’ils soulèvent. Souvent déjà la science, déliante d'abord, mais enfin convaincue par des preuves irréfragables, est restée muette devant l’explication d’un de ces faits surnaturels.
« Le fait n’est pas la démonstration, disent les mathématiciens. Nous renverrons les partisans de cet axiome à tout ce qui a été écrit, pour et contre, sur Mesmer et autres. En tout cas, nous donnons un récit exact et circonstancié d’une cause ténébreuse sur laquelle le Iribú-nal criminel d’Odessa va être appelé à prononcer. Voici les détails de cette affaire, à laquelle le merveilleux a donné un intérêt immense.
« Depuis dix ans les habitants d’Odessa connaissaient un vieillard aveugle qui venait s’asseoir tous les matins sur une poutre des chantiers, mettait à ses pieds une sébille et restait immobile toute la journée. Sitôt que la nuit commençait à envahir la ville, Michel l’aveugle faisait passer silencieusement, et sans même la compter, la recette du jour dans sa poche, et disparaissait jusqu’au lendemain malin. Tout ce qu’on savait de Michel, c’est qu’il avait été soldat, qu’il avait été incorporé dans les Cosaques réguliers, et l’on attribuait généralement sa cécité aux suites de nombreuses blessures qu’il avait reçues; lui-même n’avait jamais démenti ces conjectures, car, comme nous l’avons dit, il parlait très-rarement. Plusieurs fois des âmes charitables lui avaient offert un chien pour le garder, mais il avait laconiquement répondu : Je connais mon chemin.
■ Le terrain sur lequel Odessa est bâtie n’était, vers la fin du^iècle dernier, qu’une espèce de lande inculte; mais aujourd'hui de jolis villages et de nombreuses et productives plantations le sillonnent en tous sens. Michel, revenant un soir de la ville, trouva (c’est la véritable expression) une petite fille de dix ans qui se mourait de faim et de froid; il en fit sa compagne, son
Antigone, et depuis ce temps, guidé par elle, il se hasarda à parcourir les rues d’Odessa en mendiant aux portes des maisons.
« Il y avait cinq ans qu’il avait ainsi changé de manie, lorsqu’un vol fut commis dans une des maisons où la jeune orpheline avait conduit celui qu’elle appelait son père. Le soir même, Powleska fut arrêtée au moment où elle sortait de la ville. L’aveugle, désespéré, fut laissé libre, mais il ne reparut pas le lendemain ni les jours suivants. Cette disparition lit soupçonner qu’il était complice du vol, et, le troisième jour, Powleska fut amenée devant le juge pour être interrogée.
« — Savez-vous, lui demanda-t-on, cc qu’est devenu Michel?
« — Il est mort, » répondit-elle en versant un torrent de larmes.
« Cette réponse étonna vivement le juge. Comment celte jeune fille, enfermée depuis trois jours, pouvait-elle être certaine de la mort de l’aveugle? Toute communication avec les personnes du dehors avait été impossible.
« Nous allons donner un abrégé succinct de tous ses interrogatoires.
« — Qui vous a dit que Michel est mort?
« — Personne.
« — Comment Pavez-vous appris?
« — Je l’ai vu tuer.
« — Mais vous étiez en prison.
« — C’est égal, je l’ai vu.
« — Expliquez-nous comment.
« — Je ne peux pas.... Tout ce que je puis dire, c’est que je l’ai vu tuer.
« — Quand et comment?
« — Le soir même de mon arrestation.
■ « — C'est impossible; il était vivant auprès de vous quand on vous a arrêtée.
« — C'est vrai : aussi u’est-ce qu'une heure après qu’on l’a frappé à coups de couteau.
« — Où étiez-vous alors ï
« — Je ne sais pas trop, mais je l’ai vu. »
« Cette persistance, et le ton de franchise et d’assurance que mettait la jeune fdle dans ses réponses, donnèrent à penser qu’elle était atteinte d'aliénation mentale, ou peut-être qu’elle voulait, en la simulant, se faire mettre en liberté.
a Aussi fut-il résolu qu’on se renfermerait dans les questions relatives à l’accusation du vol.
« — Est-ce vous qui avez commis le vol dont vous êtes accuséè?
« — Oh! non.
« — Expliquez alors comment vous avez été trouvée nantie de l’argenterie volée.
« — Je ne sais, je n’ai vu que l’assassinat.
« — Mais rien ne donne à penser que Michel ait été assassiné comme vous le dites; on n’a point retrouvé son corps.
« — Il est dans l’aqueduc.
« — Connaissez-vous l’assassin? demanda encore le juge, entraîné malgré lui par cet accent de conviction.
« — Oui, c’est une femme.... Michel marchait tout doucement, bien désolédem’avoirperdue.... Une femme vint derrière lui, tenant à la main un large couteau de cuisine; mais il l'entendit venir et se retourna. Quoiqu’il ne pùt la voir, cette femme fut si effrayée de se trouver face à face avec lui, qu’elle lui jeta sur la tète un morceau d'étoffe grise qui l’enveloppa comme un voile, et frappa huit coups de suite à la place de la tête... Le sang a été pompé par l’étoffe et a fait dessus de grandes taches qui allaient toujours en s’élargissant....
Michel n’est tombé qu’au huitième coup, et cette femme a traîné le corps jusqu’à l'une des ouvertures de l’aqueduc et l’y a fait tomber sans môme oser enlever l’étoffe qui s’est collée sur le visage. »
« Des recherches furent faites au lieu indiqué par Powleska et confirmèrent jusqu’au moindre détail de ce récit. Michel avait été en effet assassiné, et la couleur grise du morceau d’étoffe désigné avait presque entièrement disparu sous les taehes de sang.
« Toutes les ressources d’un interrogatoire habilement conduit sur la manière dont elle avait pu apprendre ces détails échouèrent devant la naïve simplicité de la jeune fille, qui répondait toujours : Je ne sais pas.
« — Mais enfin vous connaissez l’assassin?
« — Pas tout-à-fait.... Mais c’est la femme qui lui a fait crever les yeux.... Mais il me dira peut-être son nom d’ici à demain, et s'il me le dit, je vous instruirai.
« — Qui entendez-vous par il?
o — Eh bien, Michel. »
«Pendant toute la nuit Powleska fut épiée dans sa" prison, et deux yeux furent continuellement braqués sur elle sans qu’elle pût s’en douter ; mais elle resta toute la nuit assise sur le grabat qui lui servait de lit; elle semblait en proie à un sommeil léthargique, et son immobilité eût été celle de la mort, si elle n’eût été interrompue de temps en temps par des mouvements nerveux qui semblaient agiter tout son corps comme sous l’impulsion d’une violente et unique secousse.
» — Je connais l’assassin.... Je vais vous dire le nom de cette horrible femme, cria-t-elle au juge avant môme que celui-ci l’interrogeât.
0 — Tout-à-l’heure, interrompit le juge. Michel ne vous avait-il pas confié avant sa mort par quel accident il avait perdu la vue?
« ~Non; mais le matin même du jour où j’ai été ar-
rêtée il m’avait promis de me faire celle confidence. C’est là ce qui a causé sa mort.
« — Comment cela?
«—Cette nuit Michel est venu.... Il m’a fait voir l’homme caché derrière la charpente sur laquelle Michel et moi étions assis le malin de sa mort.... Il m’a fait voir l’homme nous écoulant quand Michel a dit : « Je te conterai cela ce soir.... » Et puis de là l'homme....
« — Comment se nomme cet inconnu?
« — Luck!... Il a élé dans une grande rue large qui aboutit au port, et il s’est arrêté à la troisième maison à droite. •
« — Le nom de la rue?
« — Je ne sais pas, mais la maison est d’un étage moins haute que les autres. Luck a raconté à Catherine ce qu’il avait entendu, et Catherine lui a proposé d’assassiner Michel. Luck a refusé en disant : « C’est bien assez de lui avoir brûlé les yeux il y a quinze ans, pendant qu’il dormait devant voire porte.... et de l’avoir transporté dans la campagne. » Alors je suis entrée pour demander l’aumône pour Michel, et Catherine a mis dans ma poche une pièce d’argenterie pour me faire arrêter.... Puis elle a élé attendre Michel derrière l’aqueduc et elle l’a tué.
« — Mais, puisque vous avez vu tout cela, pourquoi avez-vous gardé l’argenterie dans votre poche, et pourquoi n’avez-vous pas porté plainte?
« — Mais ce n’est pas le jour même que je l’ai vu.... C’est Michel qui me l’a monlré cette nuit. »
«On le voit, Powleska ne se laissait point prendre aux questions les plus subtiles.
« — Mais dans quel but, dans quel intérêt Catherine agissait-elle ainsi ?
« — Parce que Michel élait son mari, et qu’elle l’avait quitté pour venir à Odessa, où elle s’était remariée....
Un soir, ¡1 y a quinze ans, elle a vu tout à coup Michel qui cherchait à la reconnaître; elle est rentrée vite chez elle. Michel, croyant qu’il n'avait pas été reconnu, voulut passer la nuit devant la porte, il s’y endormit; c’est alors qu’elle lui fit brûler les yeux par Luck, qui le porta assez loin pour le dépayser.
» — Et tout cela, dites-vous, c’est Michel qui vous l’a appris cette nuit?
« — Oui, il nie l’a fait voir.... Il est venu tout pâle et tout plein de sang; il m’a prise par la main et il me montrait tout cela avec son doigt. »
« Tant de récits extraordinaires, dont quelques-uns déjà avaient été justifiés par l’événement, autorisèrent l’autorité à s’assurer de Catherine, dont le nouveau mari se nomme P**\ Luck a été arrêté également.
o Une enquêle a prouvé qu’en effet Catherine avait été unie à Michel en 1819, dans la ville de Kherson , chef-lieu de ce nom. Les deux accusés se sont renfermés dans une dénégation absolue, et Powleska, de son côté, les a positivement reconnus.
« Le procès occupe toute la ville et même toute la province, et nombre de voyageurs sont déjà arrivés à Odessa pour connaître plus tôt l’arrêt.
« Au moment du départ du courrier, j’apprends que Catherine a tout avoué cc matin et qu’elle est presque folle. Luck a avoué pareillement. Quand on a appris cet événement à Powleska, elle a dit en souriant tristement:
— Je le sais depuis hier soir.
« La célébrité de ce procès va devenir toute scientifique. »
Emploi judiciaire du magnétisme. — On nous communique la note suivante, dont nous laissons l’appréciation à qui de droit et la responsabilité à l’auteur : « Bien que les phénomènes et les lois du magnétisme
soient encore enveloppés d'incertitude cl de mystères, on a cependant lieu de penser que le somnambulisme artificiel pourrait être utilement employé dans la recherche des crimes, lorsqu’il serait possible de mettre un somnambule exercé à ce genre de vision en rapport avec les lieux ou auraient été commis les attentats, les objets qui auraient servi à leur perpétration, les personnes qui s’en seraient trouvées les témoins. Des faits analogues permettent de croire que le contact de ces lieux, de ces personnes, de ces objets, fourniraient à un somnambule lucide de subtils indices au moyen desquels on pourrait retrouver les personnes, les objets, les incidents môme restés jusqu’alors inconnus. Un horrible forfait vient de consterner la ville de Toulouse. Si l’on n’est pas encore en droit d’affirmer, on est du moins autorisé à espérer que la justice obtiendrait de précieuses indications d’un somnambule amené, soit dans le dernier endroit où l’infortunée jeune fille a été laissée vivante au parloir des Frères, où la malheureuse enfant a été vue
• pour la dernière fois, soit, et plus encore, à la place où a été enfin retrouvé son cadavre.
« Il n’y aurait rien d'étonnant à ce qu’un sujet bien préparé et puissamment magnétisé parvînt à la suivre à la trace jusqu’aux lieux inconnus où a été consommé l’attentat. Mais il y aurait plus de chances encore pour que du cimetière où a été découvert le corps inanimé, le somnambule remontât, conduit par les fortes et abondantes émanations que la victime encore chaude a dû laisser sur son passage, jusqu’au rlpaire mystérieux où sa vie s’est épuisée dans les convulsions de la plus épou-vantable lutte. Le lieu témoin de l’horrible drame est, sans aucun doute et pour longtemps chargé, imprégné I d'exhalaisons, de fluides qui échappent à nos sens, mais . qui frapperaient vivement, douloureusement, les orga- [ nés surexcités d’un somnambule.
« Nous soumettons ces réflexions à la justice, à la société.
« Un grand crime attend aujourd’hui son châtiment; mais que de forfaits épargnés à l’avenir, si la passion frénétique et la perversité avaient à redouter dans le secret le plus absolu et le plus liabilemcut préparé, clans l’ombre la plus épaisse, la projection soudaine et rétrospective d’une lumière dont les clartés divines, perçant tous les voiles, même ceux du passé, seraient, comme l’œil et le témoignage de la Providence, mis au service de la justice! » (Démocratiepacifique.)
— Cet article d’un homme animé des meilleurs sentiments trouvera des approbateurs. Quant à nous, nous ne conseillons pas l’emploi du somnambulisme à la recherche des criminels.Jl est des choses dont il faut s’abstenir, et celle-ci est du nombre, si l’on ne veut voir le magnétisme proscrit, en abomination. Si l’assassin appartient h un corps puissant, on aura forcément le corps entier contre ces recherches, et, en supposant qu’on réussisse, pourrait-on aussi, sans danger, rechercher les crimes politiques, découvrir les consciences vendues, les concussionnaires, les faussaires, tous ceux qui dilapident la fortune publique? Ira-t-on chercher les adultères, les paternités douteuses, les empoisonnements, les avortements, etc.? etc.? Sansdoute, vous pouvezpresque en sûreté découvrir ce qui n’intéresse qu’une famille ; mais si vous sortez d’une individualité, malheur à vous, malheur à votre science, qui aurait contre elle la société tout entière, moins quelques hommes épars sur la surface du monde.
Laissez le magnétisme s’infiltrer clans les croyances, y prendre racine de telle sorte qu’on ne puisse plus l’en arracher, alors on avisera; peut-être aurons-nous un jour un pouvoir fort et respectable, ou plutôt une so-
ciété différente de celle d’aujourd'hui. Vous proposerez alors votre moyen d'investigation ; un gouvernement sage en adoptera les bases, se servira de vous, vous protégera; mais jusque-là, magnétiseurs, soyez réservés si vous ne voulez avoir contre vous jusqu’au dernier sacristain s’il s’agild'un crime d’église, et tout le pouvoir si un homme du gouvernement est en cause.
Naguère un de nos amis consulta sa somnambule pour savoir où gisait le corps du malheureux Sixdeniers, que l’on cherchait en vain dans la Seine (tome II, page 321) ; la place fut indiquée avec une telle précision que huit heures après le cadavre fut trouvé à l’endroit désigné. Aucun journal ne voulut rendre hommage à la vérité, et ce fait passa sans émouvoir d’autres personnes que les témoins. Le magnétiseur n’en recueillit nulle gloire, mais n’en souffrit pas; s’il se fût agi d’un criminel, et que les recherches eussent été heureuses, je le plaindrais.
La lumière est venue dans le monde, mais ce n'est que peu à peu qu’il la faut répandre. Un jour on ne se contentera plus de dire aux hommes : Dieu vous voit ; ils sauront que tous les crimes peuvent être dévoilés par l’homme lui-même... Le magnétisme servira à la régénération de l’espèce humaine, mais nous ne conseillons à personne de devancer les temps. Beaucoup blâmeront notre réserve; ils voudront servir la justice et prouver le magnétisme par une faculté merveilleuse du somnambulisme parfait; mais, soit qu’ils réussissent ou qu’ils échouent, ils seront punis de leur témérité. Ce n’est qu’après avoir profondément réfléchi que nous écrivons ces lignes; le vulgaire ne nous comprendra pas, mais l’homme instruit de ces choses sera de notre avis.
M. de Balzac magnètiste. — De tous les littérateurs en renom, M. de Balzac est celui qui a le plus étudié le magnétisme. Un des premiers, il a affronté le ri-
diculc attaché à cette question, et dans maintes occasions il en a parlé favorablement. Le récit qu’on va lire est extrait de la Presse du 14 avril dernier.
« On ne sait pas, disait le docteur à M. Gault en le quittant, tout ce qu’il y a de puissance nerveuse dans l’homme surexcité par la passion! La dynanique et les mathématiques sont sans signes ni calculs pourconslater cette force-là. Tenez, hier, j’ai été témoin d’une expérience qui m’a fait frémir, et qui rend compte du terrible pouvoir physique déployé tout à l’heure par celte petite dame.
« —Contez-moi cela, dit M. Gault; car j’ai la faiblesse de m’intéresser au magnétisme sans y croire, mais il m'intrigue.
« — Un médecin magnétiseur, car il y a des gens parmi nous qui croient au magnétisme, reprit le docteur Lebrun, m’a proposé d’expérimenter sur moi-même un phénomène qu’il me décrivait et duquel je doutais. Curieux de voir par moi-même une des étranges crises nerveuses par lesquelles on prouve l’existence du magnétisme, je consentis ! Voici le fait. Je voudrais bien savoir ce que dirait notre Académie de médecine si l’on soumettait l’un après l’autre ses membres à celte action qui ne laisse aucun échappatoires l’incrédulité. Mon vieil ami... Ce médecin, dit le docteur Lebrun en ouvrant une parenthèse, est un vieillard persécuté pour ses opinions par la Faculté, depuis Mesmer; il a soixante-dix ou soixante-douze ans, et se nomme Bouvard. C’est aujourd’hui le patriarche de la doctrine du magnétisme animal. Je suis un fils pour ce bonhomme, je lui dois mon état. Donc, le vieux et respectable Bouvard me proposait de me prouver que la force nerveuse mise en action par le magnétiseur était non pas inûnie, car l’homme est soumis à des lois déterminées, mais qu’elle procédait comme les forces de la nature, dont les principes absolus
échappent à nos calculs. « Ainsi, me dit-il, si tu veux « abandonner ton poignet au poignet d'une somnambule « qui, dans l'état de veille, ne te le presserait pas au delà
o d’une certaine force appréciable, tu reconnaîtras que, « dans l'état si sottement nommé somnambuliqne, ses « doigts auront la faculté d'agir comme des cisailles ma-« nœuvrées par un serrurier! » Eh bien ! monsieur, lorsque j’ai eu livré mon poignet à celui de la femme, non pas endormie, car Bouvard réprouve cette expression, maisiso/ée, et que le vieillard eut ordonné à cette femme de me presser indéfiniment et de toute sa force le poignet, j’ai prié d’arrêter au moment où le sang allait jaillir du bout de mes doigts. Tenez, voyez le bracelet que je porterai pendant plus de trois mois.
« — Diable ! dit monsieur Gault en regardant une ecchymose circulaire qui ressemblait à celle qu’eùtproduite une brûlure.
« — Mon cher Gault, reprit le médecin, j’aurais eu ma chair prise dans un cercle de fer qu’un serrurier aurait vissé par un écrou, je n’aurais pas senti ce collier de métal aussi durement que les doigts de cette femme ; son poignet était de l’acier inflexible, et j’ai la conviction qu’elle aurait pu me briser les os et me séparer la main du poignet. Cette pression, commencée d’abord par une manière insensible, a continué sans relâche en ajoutant toujours une force nouvelle à la force de pression antérieure; enfin, un tourniquet ne se serait pas mieux comporté que cette main changée en un appareil de torture. 11 meparaît donc prouvé que,sous l’empire de la passion, qui est la volonté ramassée sur nn point et arrivée à des quantités de force animale incalculables, comme le sont toutes les différentes espèces de puissances électriques, l’homme peut apporter sa vitalité tout entière, soit pour l’attaque, soit pour la résistance, dans tel ou tel de scs organes... Cette petite dame avait, sous la pression de
son désespoir, envoyé sa puissancé vitale dans ses poignets.
« — Il en faut diablement pour rompre une barre de fer forgé.... dit le chef des surveillants en hochant la tête.
« —Il y avait une paille!... fit observer M. Gault.
« — Moi, reprit le médecin, je n’ose plus assigner de limites à la force nerveuse. C’est d’ailleurs ainsi que les mères, pour sauver leurs enfants, magnétisent des lions, descendent, dans un incendie, le long des corniches où les chats se tiendraientà peine, et supportent les tortures de certains accouchements. Là est le secret des tentatives des prisonniers et des forçats pour recouvrer la liberté... On ne connaît pas encore la portée des forces vitales ; elles tiennent k la puissance même de la nature, et nous les puisons à des réservoirs inconnus ! »
Banquet mesmèrien. — Les adhésions sont plus nombreuses que nous n’osions l'espérer; elles dépassent de plus du double celles de l’année dernière. Les commissaires de cette fête sont en qnéte d’un local convenable, ce qui nous empêche d'indiquer aujourd’hui le lieu de la réunion. Les cartes d’entrée ne seront délivrées que jusqu’au 17 du courant, à notre bureau, de onze à cinq heures.
Nous avons omis de dire que, comme l’an passé, les dames seront admises à cette solennité ; c’est un avis que nous donnonsk toutes celles que le magnétismeintéresse.
— Au moment de mettre sous presse nous apprenons qu’un banquet s’organise aussi k Lyon. Nous rendrons un compte détaillé de ces deux fêtes en l’honneur de Mesmer.
Avions-nous tort lorsque nous annoncions le progrès de nos idées ? Il est la récompense de nos efforts et de notre persévérance. Puissions-nous amener nos antagonistes k des sentiments de justice qu’ils n’eurent jamais pour nous, et les déterminer à nous seconder !
Chronique. — Le Boston Advertiser vient de faire une analyse détaillée de l'ouvrage du révérend Townsend : l'acts in.mcsmcrism.
— Le Miroir, journal de Lyon, qui entretenait, une polémique acerbe avec la Mouche, vient de la cesser à propos du magnétisme. M. J. Ferney, le rédacteur principal de la feuille lyonnaise, ayant été convaincu par les expériences de M. Lafontaine, qui se trouve à Lyon en ce moment, il a été convenu que, partageant maintenant la même foi, tout antagonisme devait cesser, parce que le magnétisme a trop d'ennemis pour que ceux qui le défendent se déchirent entre eux. Cette mutuelle résolution fait dire au Miroir qu’il n’est plus possible de contester les merveilleux résultats du mesmérisme puisqu’il vient de le réconcilier avec la Mouche.
Ainsi voilà une nouvelle conquête des expériences publiques, un organe de plus ouvert par elles à nos idées. Qu’en diront les partisans du procul profani?
— La Réforme du 9 avril contient un feuilleton sur l’abus des remèdes. C’est une bonne page à lire.
— Les livres de magnétisme, d’abord prohibés en Sardaigne, entrent maintenant avec facilité, et tout annonce que d’ici peu de temps il en sera de même dans les États pontificaux. C’est une importante issue ouverte à la propagande mesmérienne. Mais, à côté de cette bonne nouvelle, nous en avons une mauvaise à enregistrer : le Manuel de l’étudiant magnétiseur, qui était seul toléré à Milan, vient d’y être défendu. Et c’est en Italie, à notre porte, que ce livre inoflensif est arrêté, tandis que dans la despotique Russie l'Essai, du même auteur, circule aussi librement qu’en France.
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (de Garnay).
Pari». — Imprimerie d’A. Rbnk et Comp., rue de Seine, Sï.
CLINIQUE MAGNÉTIQUE.
Opération chirurgicalepratiguéeà Poitiers, le 10 mars 184 7, à l'aide du sommeil magnétique, en présence de plusieurs médecins et des élèves de l'école.
Que dire du magnétisme? il y a si longtemps qu’on eu parle sans jamais s’ètre entendu! En Allemagne, on l’élève à l’état de science ; il fait partie des études médicales; on le pratique, on le professe.
Chez nous, on l’exalte ou on le bafoue, et cela, fort souvent, sans plus de raison d’une part que de l’autre.
Laissons donc l’enthousiasme aux fanatiques, les dédains à l’ignorance, à chacun ses idées, ses croyances, ses doutes ou son partipris, et souvenons-nous que pour démontrer le mouvement l’on n’a dit qu’une seule parole : marchez!...
Citons les faits, et que l'on juge.
Euphrosine Dardenne, jeune fille de quinze ans, demeurant à Saint-Maurice, près Gençay, s’est présentée, le 20 juin 1846, à la consultation de M. le professeur G*"; elle portait à la joue gauche une tumeur volumi-
* ueuse, dont l’ablation fut conseillée.
Euphrosine ne voulut pas y consentir, et vint trouver M. Henri Vallette, rue des Trois-Chcminées. Celui-ci la soumit immédiatement àux épreuves magnétiques, et elle put s’endormir au bout de vingt minutes; elle parla,
TOME IV.—KO 4«.— 25 MAI 1847.
10
dit qu'elle voyait son mal dont elle guérirait, mais qu’il faudrait en venir à une opération.
En cet état, elle fut montrée à un médecin de celle ville, M. le docteur 11'", qui approuva de tout point les prescriptions qu’elle avaiL faites, et reconnut, ainsi qu’elle l’avait annoncé, que son mal pouvait provenir d’une dent gâtée, et reconnut également qu’il y avait nécessité d'inciser la membrane gengivale .tapissant, à l'intérieur de la bouche, la cloison alvéolaire située au-dessus de la tumeur.
Celte première opération fut faite an jour indiqué; les gencives furent déchirées dans une étendue de 7 à 8 centimètres, et la malade, qui avait été mise en état de sommeil, ne manifesta ni douleur ni sensibilité.
Quelques jours après, la malade ayant prescrit pendant son sommeil l’extraction d’une grosse molaire avoi-sinant la tumeur, M. le médecin-dentiste K"‘ fut appelé, et déclara que cette opération était indiquée par la science, mais qu’elle seraitdiflicileet douloureuse, parce que les bords externes de la dent étaient recouverts par des fongosités, et qu’alors il devenait indispensable de se servir d’un instrument appelé ■pélican, lequel, ne pouvant fonctionner que par un mouvement de renversement au dehors, pousserait inévitablement la dent sur les plaies vives de la tumeur, et par là produirait de très vives souffrances.
L’opération se fit, et pendant qu’elle dura, Euphrosine ne jeta pas un cri, ne fit pas un geste. Son immobilité fut complète, et son obéissance aux moindres volontés de son magnétiseur ne se démentit pas un seul instant.
Plus tard, et la tumeur ayant progressé, la malade indiqua elle-même que le moment de l’opération était venu, et M. le docteur G*’* fut consulté. H constata que cette tumeur était formée par la moitié gauche de l’os maxillaire inférieur, aminci et dilaté par une substance
contenue dans son épaisseur, et ayant plus d’un décimètre de diamètre dans les deux sens; il dit que l’ablation était indispensable. En conséquence, le mercredi
10 mars, présent mois, à deux heures après midi, et devant les personnes sus-indiquées, l’opération s’est faile de la manière suivante :
Conduite, tout éveillée, dans le salon où l’ai tendaient plus de cinquante personnes, Euphrosine s’est assise dans un fauteuil, ayant à son côté madame Valette, qui lui tenait la main.
Au bout de vingt minutes, elle s’est endormie. Interrogée pourquoi elle avait mis un si long temps à s'endormir, elle a répondu : « C’est que j'étais préoccupée par la présence de tout ce monde.
— Voulez-vous être opérée?
— Oui.
— I,’opération se fera-t-elle bien et sans douleur?
— Oui.
— Etes-vous dans un état complet d’insensibilité?
— Oui.
— On peut donc commencer?
— Oui. »
Après cet étrange préliminaire, M. Vallette annonce à l’opérateur qu’ii peut agir, et tout le monde s’émeut en voyant le saisissant apprêt de cette véritable exécution.
On apporte une table chargée de nombreux instruments de chirurgie, pinces, scalpels, bistouris, tenailles, voire même une scie.
Et un long frémissement s'empare de l'assemblée, lorsqu'on voit l’opérateur agiter dans sa main un véritable couteau, qu’il promène avec calme autour de celle tête immobile.
Chacun se regarde et semble s’interroger. Le silence règne. Les pensées vacillent, et tous les yeux sont fixés sur ce corps plein de vie qui a l’insensibilité du cadavre.
Chacun retient son haleine, se resserre en soi, et a peur d’entendre uu cri. Ou craint d’assister à une horrible catastrophe.
Mais une tète est calme.... une main est sûre, une seule main ne tremble pas. Dieu ! qu'il faut de courage à un médecin ! Et le fer s’enfonce profondément dans les chairs vives, y fait une coupure de plus d’un décimètre de longueur, et partage en deux lèvres béantes cette masse tuméfiée et difforme. Cinq artères sont coupées, et le sang qui jaillit par cinq bouches ouvertes s'élance au front de l’opérateur, qui seul n’en voit rien. Il s’arme de longs ciseaux, et, après que ses aides ont fak les ligatures, il les enfonce dans la plaie, y va chercher le kyste, qu’il divise dans toute sa longueur, en soulève et excise les bords osseux, et, plongeant sa main tout entière dans la vaste cavité, il en extrait une masse gélatineuse du volume d'un œuf.
L’opération était terminée, mais le pansement restait à faire. Pour fermer la plaie, deux épingles sont placées à ses extrémités, et réunissent ses deux lèvres par une suture.
Celle partie de l’opération, disent les médecins, est la plus douloureuse, et, sauf quelques tressaillements des muscles de la face, que l’on peut justement attribuer à une sorte d'excitation galvanique des rameaux nerveux, la malade, ici comme dans tout, le cours de l’opération, n’a donné aucune marque de sensibilité.
Et pourtant ce long et cruel travail avait plutôt ressemblé à une leçon de dissection faite à des élèves sur un cadavre, qu’à une opération pratiquée sur un corps animé de la vie. Le savant professeur a pu tout voir, tout montrer, tout interroger, tout expliquer; la patiente s’est prêtée à tout; et c’était un étrange tableau que toute cette jeunesse avide, studieuse et pétrifiée d'effroi, d’admiration et d’enthousiasme.
Et une heure.... toute une heure s’écoule.... cl pas un cri, pas un geste, pas un frémissement; je me trompe, la pauvre malade témoigne de sa joie et de sa reconnaissance; elle presse et embrasse à plusieurs reprises la main de madame Valette, qu’elle n’avait pas quittée.
Enfin tout est fini. Les instruments sont enlevés. On réveille la pauvre endormie. El, après nous avoir tous regardés sans la moindre émotion, la voilà qui s’en va se promener dans la cour, ignorant complètement qu’aucune opération lui eût été faite.
Aujourd'hui 15, la malade va bien.
Ne terminons pas ce récit sans donner à chacun la part qui lui revient pour son généreux dévouement. M. le docteur G"“ n’avait point à prouver son incontestable habileté; mais il avait à vaincre un obstacle que ne savent point aborder les conceptions paresseuses et les vulgaires intelligences. D’un pas ferme il l’a franchi. Il n’a point superbement dédaigné l’aide du magnétisme, et il a vu se révéler devant lui un phénomène auquel il ne croyait pas. Honneur à lui!
Mais honneur aussi au dévouement plein de philanthropie de M. et madame Valette! Ils ont recueilli la pauvre lille, lui ont prodigué tous les soins, et ne l’ont pas abandonnée un seul instant ; madame Valette surtout, qui, durant celte longue torture de l’opération, n'a pas quitté la pauvre patiente, sa main dans la sienne, ses vêlements inondés de sang, et mêlant ses larmes et ses prières aux vœux de toute l’assistance..'.. Oh! que la charité est sublime ! (Journal de la Vienne.)
VARIETÉS.
1 13° ANNIVERSAIRE I)E LA NAISSANCE DE MESMER.
2' célébration à Paris. — Banquet du 23 mai.
Nous disions naguère : Le magnétisme trouvera ses plus cruels ennemis parmi ceux qui se diront scs partisans; ce jour est venu. Aujourd’hui nous les avons vus voulant dicter la loi à celui, à ceux qui avaient à y faire obéit. Le banquet mesmérien a été troublé par un homme qui, non content d’être admis à cette fête, voulait que deux individus que nous repoussons, que nous repousserons toujours, prissent part à la fête et se mêlassent û nos joies. Cette petite troupe était campée dans le voisinage, arrogante, le verbe haut, le poing sur la hanche. Ces maraudeurs s’emparaient au passage de chaque convié et cherchaient à le persuader qu’on avait commis à leur égard une grande injustice, qu’ils étaient de vrais magnétiseurs, que rien n’était plus pur que le fond de leur cœur. .
Ils firent tant qu’ils .persuadèrent quelques hommes, mais un surtout, qui leur promit de les faire entrer d’emblée dans le lieu de la réunion, et qu’ils prendraient place au banquet sans plus de cérémonie. Le coup monté, chacun des champions s’apprête pour le rôle qu’il avait accepté; les portes s’ouvrent, et tous les invités vont prendre la place que le sort leur a départie.
La salle est magnifique : cent cinquante personnes assises à la même table, dans une longue galerie, des
ili'iirs, de la lumière à éblouir l’œil le plus lerne, de la musique, l’odeur des mets préparés pour des estomacs soumis au jeûne, car le dîner s’était fait attendre, tout invitait an plaisir. Mesmer, le bon Mesmer, au fond de la salle et sur les cotés, car on avait multiplié son image, muet témoin, quoiqu’animé par le ciseau, le burin et le pinceau, paraissait joyeux comme les conviés.... Voyez comme les plus beaux jours sont parfois ternis par l’orage., Hélas ! 011 vit plus d’une fois des combattants l’estomac vide et eu présence d’une table bien servie, être obliges de regagner leurs rangs avant d’avoir pu prendre quelque chose. L’ennemi avait tiré quelques coups de feu, il fallait repousser l’insulte et la bravade.
Non, messieurs les émeutiers, on ne veut point île vous, et l’on ne voudra pas davantage de ceux qui ont pris votre défense ; qu'ils restent avec vous, qu’ils fraternisent, qu’ils vous reçoivent, et aucun de nous n’ira vous troubler, vous demander d’ouvrir vos portes. Vous croyiez faire du mal au magnétisme et déconsidérer ceux qui avaient organisé la fête ; vous vousôtes trompés, vous avez prouvé leur sagacité; on vous connaît maintenant. Le magnétisme y a gagné; vous avez ouvert la barrière, ôté vous-mêmes l’entrave qui l’empêchait de monter. Vous ne croyiez pas si bien faire, n’est-ce pas? Votre tapage, vos clameurs ne sont qu’un vain bruit; ou n’a point admis ceux que vous patroniez, ils sont restés cinq heures sous les fenêtres! Leur constance, vraiment,' méritait un meilleur sort.... Ils ont joui de la fête comme les gens affamés satisfont leur appétit à l’odeur qui s’exhale des cuisines. Triste rôle! Quels hommes est-ce donc qne ceux qui venaient ainsi, au noin de Jupiter hospitalier, nous demander de les recevoir parmi noos?
Que les hommes de bien et de conviction se réjouis-ent, notre cause est gagnée; on ne confondra plus les ommes, on saura les distinguer. Le magnétisme est
sali, pollue chaque jour, et ses partisans sincères, éclaires. étaient confondus avec des hommes pour qui il n’est qu’un moyen, un instrument, une industrie.
C'est assez sur ce sujet. Nous sommes heureux, car ce que nous désirions est arrivé ; ce que nous n’osions provoquer est. venu de lui-même. Le doigt de la Providence s’est montré, nous touchons au port.
La raison et le nombre ayant réduit au silence ces quelques hommes qui avaient résolu d’empêcher le banquet (I), le calme s'établit ; une sorte d'indignation frémissante animait l’assemblée, toute composée de personnes honorablement connues, et il eût été dangereux d’essayer de renouveler le tumulte.
AI. le baron du Potet, président, prit la parole, et d’une voix émue, mais forte, prononça le discours suivant :
Messieurs,
Des hommes pleins d’orgueil cf de vanité ont dit : Non, il n’est point de science en dehors de la nôtre ; au delà de nos conceptions tout est mensonge ou fruit de l'imposture! Et, trafiquant de leurs vaines connaissances, ils poursuivirent de leurs clameurs ceux qui cherchaient, à répandre une vérité nouvelle, les vrais principes de la médecine, l’art de calmer les douleurs.
Vous le savez, Messieurs, à chaque effort fait par nous pour remettre aux mains des savants le dépôt si précieux que nous avions reçu des disciples de Mesmer, ces hommes dont nous voulons parler nous repoussèrent et, nous flétrirent. Eh bien, nous avons reconnu, mais | bien tard, qu'il fallait nous adresser, pour réussir dans nos généreux desseins, non plus à de faux sages, à
(I) Les pièces ■justificatives sont dans le rapport de la commission orgatii-1 nlricc, qui sera envoyé à tous les membres.
des gens sans vertus, mais à la généralité des hommes.
Chacun île nous, dès ee jour, Messieurs, a travaillé avec ardeur, mais en silence , à répandre autour de lui la vérité magnétique, tantôt par des faits incontestables, des guérisons, souvent par la production de phénomènes qui attestent que l’honmie possède un grand pouvoir, attribut et de sa nature, et qu’il doit à la Divinité. Cette marche rationnelle a réussi au delà de notre espérance, et tandis que nos ennemis s’applaudissent entre eux de leurs persécutions, et pensent que le génie du mal, dont ils sont les ministres, remportera sur le génie du bien, nous nous assemblons en grand nombre pour honorer la mémoire de Mesmer, de cet homme illustre qu’ils couvrirent de mépris, et pour leur donner un sanglant • démenti.
Ainsi le veut lajnstice. Le vice et le mensonge peuvent bien tromper les hommes; mais il arrive un temps où la fourberie se découvre, et où le bon droit chasse devant lui ceux qui opprimaient la vérité.
Ce jour est un commencement de triomphe; cette fête en annonce déplus solennelles, où les conviés se compteront par milliers.
Messieurs, en m’accordant l’honneur de la présidence, vous m’avez donné le droit d’exprimer mes pensées; si mes sentiments obtiennent vos sympathies j’aurai, dans ce cas, accompli ma tâche, et je serai doublement heu- ^ reux.
Daignez donc m’écouter un instant.
Au milieu des ruines de l’antiquité existait un trésor caché. La science ne l’ignorait pas; mais tout son génie ne put le lui faire découvrir. C’est à Mesmer que Dieu permit de percer les ténèbres du monde ancien ; c’est en déchiffrant le langage mystérieux des hiéroglyphes qu’il trouva ce qui était enfoui depuis vingt siècles.
Glorieux de sa conquête, Mesmer s’empressa d'apporter parmi iious soii trésor, ces vérités si longtemps oubliées, et qui servirent pourtant à guider dans leur route les générations du vieil fige. Ce fut la France qu’il crut digne de recevoir le dé| ôt de ces connaissances. Noble caractère trop longtemps méconnu, génie persécuté! Mesmer devait mourir sans voir la renommée proclamer son nom, sans recevoir la récompense destinée à tout bienfaiteur des hommes.
Figurez-vous, Messieurs, cet homme au corps île fer et à l'âme Je feu! Mesmer abandonné à lui-même pendant tant d’années, sans amis, vivant retiré sur un coin de terre qu’aucun disciple ne vient visiter, torturant chaque jour sa pensée, et. voyant dans un lointain avenir le magnétisme régner sur le monde , mais sans l’espoir d’obtenir la réhabilitation qui devait consoler sa vieillesse et jeter quelques gouttes de baume sur son cœur ulcéré.
Messieurs, il faut avoir beaucoup sênti pour comprendre certains tourments de l’âme, comme il faut avoir beaucoup aimé pour connaître ce que c’est que notre cœur et ce qu’il peut souffrir.
Cruels savants! ingratehumanité! lorsque apparaît un homme à idées fortes et neuves, 011 !e flétrit, quelquefois même on le tue, tant notre stupidité s'effraie de ce qu’elle ne comprend pas !
Le génie nous fait peur ou nous révolte! Malheureux! c’est la lumière que nous éleiglions, sans songer que nous sommes encore dans l’obscuriLé!
Mais les leçons du passé 11c servent point. Après Mesmer viendra Fouricr, puis un autre : car de siècle en siècle un germe divin est jetésur la terre; c’est à quiI d’entre les humains foulera du pied la plante destinée à| nous offrir des fruits délicieux.
Messieurs, nous devons jeter un voile sur le deruiei l siècle. Cette époque a offert trop de contrastes, et pour-!
quoi réveiller de douloureux souvenirs? La tombe renferme les ennemis de Mesmer, ceux qui le persécutèrent. Leurs fds sont moins nombreux et moins puissants; c’est assez pour nous d’être désormais assurés du triomphe. T.a vérité s'établit; elle a pris depuis longtemps racine dans un sol fertile par les soins des de Puységur et Deleuze; les grandes choses promises ont commencé d'être ; nous voyons la vérité se répandre , et nous jouissons déjà du f'ruit de nos œuvres-, notre persévérance reçoit sa récompense.
Pleins d’admiration, nous venons aujourd’hui payer une dette sacrée, rendre à Mesmer un hommage cent fois mérité.
Quel beau jour, Messieurs! comme il est plein d’espoir! La vérité n’annonce-t-elle pas la régénération de ce qui fut glacé par une philosophie corruptrice ? N’est-ce point le réveil de l’homme jeté depuis longtemps dans la torpeur? Semblable au printemps, cette vérité échauffe, elle féconde tout ce qu’elle pénètre de scs rayons divins.
Oui, Messieurs, nous rapportons le flambeau qui fut éteint jadis par le souffle impur du fanatisme ; une divine étincelle l’a rallumé.
N’apcrcevcz-vous point sa clarté? N'avez-vous pas, comme moi, senti dans vos veines courir ce feu nouveau, et vu sortir de vos doigts ces jets brillants de flamme? Avez-vous remarqué que, sur leur trajet, tout reprenait la vie? Avez vous entendu ceux que vous aviez touchés exhaler la joie répandue dans leur cœur?
C’est la force, Messieurs, qui circule en nous, la vie dont Mesmer a rompu la digue, et qui s’échappe en jels plus rapides que l’électricité.
Voilà ce magnétisme découvert par Mesmer! N’est-il pas destiné à modifier l’homme, à régénérer sa nature?
Que vos voix s’élèvent avec la mienne, Messieurs, pour bénir Mesmer, auteur de tant de bienfaits ; car, dé-
sormais, nos œuvres ne seront plus mortes et semblables aux fruits desséchés de la fausse science: elles oui une plus noble origine. La science ne peut encore ni les produire ni les revendiquer, pas plus que celles produites par Jésus et ses apôtres.
C’est l’émotion de notre cœur, une émanation de noire âme qui opère ces merveilles; c’est un principe divin infusé par Dieu dans sa créature, et qui obéit à sa destinée première en se communiquant de l’un à l’autre ; c’est le lien rompu qui se renoue, afin que les membres d’un même corps ne soient plus étrangers entre eux, afin de rétablir la,fraternité sur la terre. Fraternité! principe conservateur des nations, sans lequel l’homme n’est plus qu’une brute et n’a plus que de grossiers instincts, viens enchaîner nos cœurs, afin que nous donnions l’exemple à d’autres hommes et que nous les gagnions à notre cause.
Oui, Messieurs, telle est notre croyance : nous pensons que rien de durable ne peut être fondé si la vérité que nous apportons ne sert de ciment. Pourquoi, de nos jours, voyons-nous ce relâchement des croyances en présence de l’immense développement des sciences? C’est que celles-ci manquent essentiellement de ce qui les rend attrayantes ; elles ne mènent qu’au doute ; le souffle de vie n’y est point.
La morale eut-elle jamais des hommes plus instruits, plus intelligents pour la faire comprendre? Cependant ces hommes distingués atteignent rarement le but. C’est qu’ils ne connaissent point le lien qui unit l’homme à Dieu ; c’est qu’ils ne savent plus interroger la nature, et ont perdu le secret de produire les œuvres qui autrefois prouvaient leur sainte mission. Pour eux la révélation est incomplète, quelque chose échappe à leur sagacité : aussi leur parole meurt après avoir louché nos oreilles.
Je ne puis ici, Messieurs, me livrera des critiques et combattre tout ce que je crois faux ou mensonger ; mais il m'est permis de vous montrer dans l’avenir des temps plus heureux que ceux-ci. Avons donc confiance en la Providence ; clic a permis qu’une grande découverte se fît : c’est qu’elle avait son but; il ne peut être que pour notre bonheur.
Sans doute, nous avons à combattre, mais nous aurons la vertu de nos devanciers. Marchons donc en avant ; une lumière nous guide, tandis qu’une voix secrète nous invite chaque jour à faire un effort nouveau.
Ne laissonsjamais éteindre ces nobles sentiments qui portent l’homme à secourir son frère, à lui tendre la main. Souvenons-nous qu’à l’heure de la prière saint Pierre, se rendant au temple, rencontra un paralytique qui lui demanda l’aumône, et que l’apôtre lui dit : Je n'ai ni or ni argent, mais ce que j’ai, je le te donne au nom de Jésus-Christ nazaréen : lève- toi et marche. Et le paralytique sur-le-champ se mit àmarcher.
Messieurs, nous avons la force qui opère les prodiges ; elle est supérieure à la richesse; mais le vice peut nous la ravir ou l’altérer. Conservons-la donc pure, et qu’elle soit répandue généreusement sur ceux qui souffrent ou languissent; puis, dans nos heures de repos, étudions toutes ses ressources, elles paraissent infinies. C’est ainsi que nous parviendrons à nous connaître et deviendrons meilleurs.
Honneur à Mesmer, Messieurs! que son nom soit im-| mortel comme sa découverte!
Mais évitons surtout que le charlatanisme vienne de ses doigts impurs salir la vérité; chassons-le de nos réunions, n’ayons aucun contact avec lui.
A Mesmer!.. Et puisse les échos dé cette enceinte
i franchir l’espace, porter à nos frères d’Amérique la nou-
velle de noire triomphe, alin qu’ils se. réjouissent en apprenant que le feu sacré ne s éteint point parmi nous.
A Mesmer !
Des marques nombreuses et non équivoques de sympathie éclatent dans l’assemblée. Tout le monde se lève pour porter un toast à Mesmer, au bienfaiteur des hommes. Dans ce moment, M. du Potet reçoit aussi le prix de sa persévérance. Les sentiments de justice et de longanimité qu’il n’avait cessé de montrer durant ces longues et insuportables discussions lui valent de nombreux témoignages d’affection.
L’ordre de cette cérémonie voulait qu’en cet instant on distribuât les médailles à l’effigie de Mesmer. On appelle les membres du premier banquet qui avaient voulu concourir aux dépenses nécessaires à l’exécution de cette œuvre. Ils viennent recevoir de la main d’une dame leurs insignes de fondateur du Jury magnétique. On sait que ce jury est créé pour offrir, le 23 mai de chaque année, un certain nombre de médailles de bronze, argent ou or aux personnes qui, dans le cours de l’année, soit par de beaux faits, des écrits, des découvertes ou des applications nouvelles de l’agent magnétique, auront concouru puissamment aux progrès de la science et de l’art (I).
M. du Potet, qui avait brigué la faveur de porter un toûst à M. Lassagne, au burin généreux duquel on doit la belle médaille de Mesmer, Le fait en ces termes :
Messieurs,
De tout temps les arts sont venus au secours du génie pour perpétuer la mémoire des héros ou des bienfaiteurs des hommes.
(1) Prochainement nous publierons l'acte de constitution (le ce Jury.
Les artistes sentent et aiment les grandes choses; c’est pour cela que l’inspiration les saisit.
Mesmer si longtemps oublié voit revivre son image, et c’est l’un de nous, Messieurs, qui généreusement s’offrit pour la rendre indestructible en la gravant sur l’acier.
Honneur à M. Lassagne, l'habile artiste ! Que notre reconnaissance lui soit témoignée comme nos sympathies! N’a-t-il pas élevé un beau monument à la gloire de Mesmer cl donné uu bel exemple?
A M. Lassagne, Messieurs; puisse son talent recevoir un commencement de récompense! Les magnétiseurs à venir ajouteront h notre tribut; car sans lui, Messieurs, l’honneur que nous leur réservons, quoique bien mérité, n’eût peut- être point eu de marque durable.
A M. Lassagne , tous les amis du magnétisme!
M. Lassagne se lève, exprime le désir qu'après Mesmer, le premier toast fût porté à M. du Potet; «car, dit-il, c’est à sa conduite toute philanthropique, à ses sages leçons que nous puisons les inspirations favorables au magnétisme : à lui donc avant tout autre. »
Cette proposition fut accueillie unanimement. M. du Potet remercia l’assemblée, puis reprenant, il dit :
Mkssieurs,
Un autre artiste, non moins modeste_et généreux, a voulu que la peinture comme le bronze nous offrît les traits de notre maître; ils sont là sur celte toile. Mesmer nous y est représenté dans son beau temps, plein de feu, de génie.
Sans doute, Messieurs, nous pouvons parler des grands hommes, mais les artistes ont le privilège de les peiudre aux yeux. .
A M. Paul Carpenticr ; puisse sa modestie ne point repousser nos hommages! Le magnétisme a ses poètes, ses artistes; nous pouvons tous reconnaître que la vérité les inspire ; ayons une àme pour les remercier. Tous les hommes ne peuvent pétrir le bronze et animer la toile ; distinguons ceux à qui Dieu réserva cette laveur.
A M. Paul Carpentier!
Après les artistes vint le tour des poètes. M. J. Lovy chanta avec sa gaieté habituelle les couplets qui suivent:
L’ÉTHER ET LE MAGNÉTISME.
Dans le monde académique Us oift fait un bruit d’enfer De cet alcool sulfurique Qui devait tuer Mesmer.
Ce bocal transatlantique.
Ce procédé d’outre-mer,
Ce magique spécifique Tant prôné depuis l’hiver,
Cet éther D’outre-mer Ne détrônera pas Mesmer !
A-t-on fait des dithyrambes Sur ce bocal merveilleux !
En a-t-on coupé, des jambes,
A nos pauvres malheureux !
Car pour cette clique aimable Qui du bistouri se sert,
C’est un bonheur ineffable Que de tailler dans la chair....
Mais l'éther D'outre-mer Ne détrônera pas Mesmer.
Prônez, vantez, niais la tombe Cache aussi bien des secrets :
Quand le malade succombe,
Les hôpitaux sont discrets.
J’ai vu ■— l’aveu m’est pénible — Amputer un homme hier;
On le rendit insensible.... il poussait des cris, mon cher !... Non, l’éther, etc.
Ces messieurs de la clinique Nourrissaient le fol espoir De faire à l'art magnétique Arborer le drapeau jioir.
Déjà leur espoir sublime Retombe au-dessous du pair,
Comme les coupons à prime De certains chemins de fer....
Non, l'éther, etc.
Ce procédé qu’on nous vante Est-il donc de si bon goût ?
Une vapeur enivrante Qui vous grise, et voilà tout Voyez la belle merveille Qn’on produit avec l'éther !
Autant prendre une bouteille De Cognac ou de porter.
Non, l’éther, etc.
Nous, messieurs, gouvernons l’âme, Vous, vous régnez sur des corps ;
A nojis la céleste flamme !
Mais à vous des ivres-morts !...
Puis, cet agqnt si terrible Que Jackson a découvert,
N’est qu’un point imperceptible Dans l’horizon de Mesmer.
Votre éther, etc.
Ils disent, dans leurs bravades, Que leur bocal enchanté Parfois insullle aux malades Et le rire et la gaîté.
C’est un fait, je le constate, Mais, messieurs, par Jupiter ! Vous desopilcz la rate Sans recourir à l'éther....
Votre éther, etc.
L’éther devient-il l’oracle,
Le tuteur de la santé ?
Fait-il surgir un miracle Au gré de sa volonté?
Sait-il découvrir la trace D’un objet perdu d'hier?
Me faire h travers l’espace Voir un ami qui m’est cher? Non, l’éther, etc.
Se trouvant sur un uavire,
Un matin mon cousin Paul Se lit insuffler, pour rire,
La vapeur de l’alcool.
On tenta l'expérience ;
Mais à peine de l’éther Eut-il senti la puissance Qu'il fut pris du mal de mer. Non, l’éther, etc,
L’autre soir, dans une loge, Un petit club d’ergoteurs,
A l'Odéon lit l’éloge De tous nos élhériseurs.
Je maîtrisai la cabale, Pourtant je n’en fus pas fier : Car, plaider dans cette salle, C’est prêcher dans le désert Non, l’éther, etc.
Mais, pendant (pic tu t'enflammes,
Pauvre ami, me direz-vous,
Tout ce grand bruit de réclames Est déjà bien loin de nous....
Oui, ces défis, ces tempêtes,
Qui partout grondaient en l’air.
Tout ce fracas, sur nos têtes,
A passé comme nn éclair.
Cet éther, etc.
Messieurs, l'éther sulfurique,
Quel que soit son sort futur,
De notre ciel magnétique Ne troublera pas l’azur.
Avant que ce spécifique Ait triomphé de Mesmer,
On nous écrira d'Afrique Qu’on a pris Abd-el-Kader..,.
Non, l'éther D’outre-mer Ne détrônera pas Mesmer.
Un ami du magnétisme, dont nous apprécions tous les sentiments généreux, a payé sa dette à la mémoire de Mesmer en lisant une pièce de vers de sa composition. Cetle lecture, faite avec émotion, nous devons le dire, émut vivement l’assemblée. Nos lecteurs, nons en sommes certains, nous sauront gré d’avoir obtenu du poète la faveur de reproduire son œuvre, que voici :
AUX PHARISIENS.
Toile! toile 1 Crucifige eum!
Ils ont dit : « Il est temps de réduire au silence Tous ces oracles imposteurs,
D’arrCter dans son cours la coupable démence De quelques modernes rêveurs.
Mais c’est peu de confondre une secte éphémère Dont le bon sens a fait raison ;
Il esi temps d’en finir, de leur vainc chimère 11 faut effacer jusqu’au nom. ■>
Des savants de nos jours tel est l’arrêt suprême! Les superbes Pharisiens,
Les docteurs d’autrefois, ils s’écriaient de même : Au cirque, au cirque les chrétiens !
C’est que la vérité, toujours humble et proscrite, En vain s’offre aux vœux des mortels,
Tandis que, s’adorant dans son propre mérite, L’erreur se dresse des autels.
Elle a lui devant vous, cette flamme céleste,
Et vous l’avez foulée aux pieds;
Et sur elle étendant votre doute funeste,
C’est la nuit que vous répandiez.
Et nous allions sans vous de rivage en rivage ;
Mais quand le pilote s’endort,
C’est aux hommes de cœur, c’est à tout l’équipage A guider le navire au port.
Sur des flots étrangers naviguant sans boussole, Nous avons erré bien souvent;
Mais la foi qui soutient, mais l’espoir qui console, Nous criaient sans cesse : En avant !
Eh ! qu’importe-, en effet, cette sagesse humaine, Qui n’est que mode ou que hasard ?
Qu’importe la science à celui que Dieu mène ?
Il doit arriver tôt ou tard.
N’a-t-il pas dans son cœur la divine semence D’où doit naître la vérité?
N’est-il pas un des points de cette orbite immense Où gravite l’humanité ?
0 toi qui, le premier, affrontas l’anathème D'une puissante faction,
Qui reçus du martyre un glorieux baptême,
Une orageuse mission ;
Oui, Mesmer, lu savais que la haine et l’injure Te feraient cortège en chemin ;
Mois tu savais aussi que celte nuit obscure Ne serait pas sans lendemain.
Et c’est quand nous avons, vers des mondes sublimes, Trouvé des sentiers inconnus ;
Quand, revenant chargés des dépouilles opimes De vingt siècles qui ne sont plus.
Nous avons soulevé de l’anlique magic Le voile épais ; quand h nos yeux,
Exhumé de sa tombe, apparaît le génie De. L’Orient mystérieux ;
C’est quand nous arrachons la nature épuisée A des traitements inhumains;
Quand4a santé jaillit en féconde rosée.
En rayons de feu de nos mains ;
C’est lorsque nous venons étaler des merveilles A faire trembler la raison,
Qu’on s’apprête à punir, qu’on ose, h nos oreilles, Parler d’amende, de prison!...
Vous n'avez donc voulu rien voir ni rien entendre? Mais vous ne comprenez donc pas?
Vous voulez attaquer quand il faut vous défendre; Allez, inhabiles soldats,
Contre les assaillants qui pressent votre enceinte, Elevez d’impuissants remparts;
D’un triple mur d’airain entourez l'arche sainte Qu’on menace de toutes parts.
Vains efforts, soins tardifs, tentative insensée,
Vous n’aboutirez qu’au néant,
Vous qui croyez qu’on met des fers à la j>enséc Commç une digue h l’Océan.
Allez, il n’est plus temps : du temple d’Epidaure Déjà l’herbe a couvert les murs;
Là plus d’autels debout, plus de dieu qu’on adore,
Plus rien que des débris impurs.
\insi s’csi affaissé sur sa base (l'argile Ce colosse an fronl dédaigneux,
Comme à la grande voix du Dieu del’Evangile Sc sont écroulés les faux dieux.
Loin de nous, cependant, un orgueil téméraire Qui nous perdrai! à notre tour ;
Mais ne cessons de rendre au Dieu qui nous éclaire Un tribut de gloire et d'amour.
Oui, la force ici-bas, Seigneur, n’est que faiblesse,
La toute-puissance est en vous ;
En vous est la bonté, l’éternelle sagesse,
Non, rien, Seigneur, rien n’est h nous.
L’homme est petit, mon Dieu, mais il est votre ouvrage,
Et seul vous ôtes infini ;
Mais l’homme est grand, pourtant, car il est votre image,
Que votre saint nom soit béni !
Un autre de nos amis, M. Thuillier de Saint-Marceau, a chanté avec verve les couplets suivants, qu’il avait composés pour la circonstance.
LES HIBOUX.
Airs : de Malvina, ou des Trois Couleurs.
Poëte obscur qu’un beau jour met en verve,
Saisis ton luth, le soleil a brillé !
Sur les oiseaux qu’abandonna Minerve Chante, il le faut, ton œil est dessillé.
De nos aïeux adoptant la manière,
Frappe enchantant sur des êtres ingrats :
Pauvres hiboux qu’aveugle la lumière,
Les yeux ouverts, non, vous n’y voyez pas !
Cruels oiseaux des vieux châteaux gothiques,
De vos donjons le pouvoir s’est enfui !...
Fauves hiboux des froides basiliques,
A votre voix nul ne tremble aujourd'hui.
Le temps n'est plus où votre fourmilière Couvrait le monde, effray ait les Etats :
Pauvres hiboux qu’aveugle la lumière,
Les jeux ouverts, non, vous n'y voyez pas!
Que de hiboux couverts d’ignominie.
Pour leurs pareils prodigues de bravos,
Sans examen, refusent au génie L’encens brûlé sur de pâles travaux !
Tout novateur au front reçoit la pierre;
Sa voix, souvent, redit jusqu’au trépas : Pauvres hiboux qu'aveugle la lumière,
Les yeuxou\erts, non, vous n’y voyez pas!
Vous qu’Esculape eût chassés de son temple, Vils trafiquants des humaines douleurs;
Lasse, à la fin, la nature contemple Avec effroi vos sanglantes erreurs !
Sceptiques vains à l'allure sifière,
Vous savez tout, hors guérir.... Mais, hélas! Pauvres hiboux qu’aveugle la lumière,
Les yeux ouverts, non, vous n’y voyez pas!
Lorsque partout la liberté s’avance,
Quoi ! des hiboux aux efforts impuissants Voudraient encor, poursuivant leur vengeance, Des passereaux étouffer tous les chants!...
La liberté trônera sur la terre ;
Fiers oppresseurs vous tomberez bien bas! Pauvres hiboux qu’aveugle la lumière,
Les yeux ouverts, non, vous n’y voyez pas !
Tout radieux, après bien des orages.
Quand du progrès le règne est arrivé, x Disparaissez, oiseaux de noirs présages,
¡Malgré vos cris le soleil s’est levé !
Fuyez ! fuyez! ou, sur votre poussière,
Demain le Temps imprimera ses pas!... Pauvres hiboux qu’aveugle la lumière,
Les yeux ouverts, non, vous n'y voyez pas!
Les applaudissements ne manquèrent point aux poètes; l'assemblée, tout à elle-même, car la joie la plus vive avait, succédé au trouble inattendu, laissait éclater des sentiments trop longtemps comprimés. La fête était alors ce quelle aurait dû toujours être. La coupe remplie délie présentée au commencement du banquet par l’avocat d’une mauvaise cause avait été renversée, et ceux qui avaient goûté de cette liqueur nons étaient devenus étrangers.
Ensuite un homme courageux qu’on a essayé, niais eu vain, de rendre victime de sa foi magnétique, M. Jules de Rovère, venu d’un département voisjn, porta le toast suivant :
Lorsque, pour le fêter, s’assemblent tes apôtres,
Lorsque ma voix s’unit à celles de tant d'autres,
Mesmer, je ne viens point, servile admirateur,
Brûler tout mon encens aux pieds du novateur.
Le premier, il est vrai, tu soulevas un voile,
Comme Le Verrier découvrit son étoile ;
• Riais pour aider Mesmer, servir le magnétisme,
Il fallait Puvségur et le somnambulisme ;
Il fallait plus encore, il fallait après eux,
Qu’un génie, un savant, un esprit sérieux,
Devînt, par les leçons qu’ardemment il nous donne,
De notre trinité la troisième personne.
Pour montrer aux docteurs le jour dans son éclat,
Il fallut qu’un docteur le premier s’immolât.
Dans un toast élev ons nos trois dieux à la fois ;
Disciples de leur culte imitons-les trois fois I A Mesmer, au doyen qu’ici chacun vénère,
Au Christophe Colomb d’un monde imaginaire!
A Puységur voguant vers ce monde inconnu !
A du Potet enfin, qui, le dernier venu,
A de ce monde entier déjà foulé la terre !
Au temple qu’il construit portons tous notre pierre,
Et de nombreux bienfaits dotons l'humanité,
Pour graver leurs trois noms dans la postérité.
Ce loast trouva beaucoup d’écho dans l’assemblée. De toutes parts on a demandé que M. de Rovère permit de publier ce qu’il venait d’exprimer avec tant d’âme. Ces idées neuves et hardies ont précédé la lecture d’un dernier morceau de poésie, que nous regrettons de ne pouvoir donner aujourd’hui k cause de son étendue. OEuvre d’un jeune homme doué d’un esprit chaleureux, que tout annonce comme devant être un défenseur courageux du magnétisme, ses essais seront un jour suivis de travaux plus sérieux; c’est donc une vie que nous croyons consacrée tout à la science.
Mesmer était parmi nous; ce n’était plus son ombre ou ses traits empreints sur le bronze ou la toile, mais, par une double fortune, nous avions au banquet sa vivante image : un neveu de cet homme illustre, découvert à Paris depuis trois jours seulement, avait été présenté à l'assemblée par la Société du mesmérisme, et réclamait la faveur de porter un toast à la mémoire de son oncle, à ceux qui adoptent scs principes, à l'extension du magnétisme.
Il prononça ces paroles avec âme; une sorte d’illumination l’avait saisi, et pour lui cet instant était une heure suprême. Chacun le regarda, et la surprise fut grande lorsqu’on vit que la nature lui avait donné les traits de celui dont on célébrait la fête.
Nous aurions voulu pouvoir donner un toast aux dames, par M. Derrien ; son étendue ne nous l’a pas permis. Cette improvisation chaleureuse et poétique fut vivement applaudie.
Des toasts étaient préparés pour les sociétés magnétiques de Paris, Cambrai, Lyon, Rouen, Maurice, Toulouse et Nouvelle-Orléans. Il y en avait d’autres à la prospérité des établissements magnétiques de Londres, Madras et Calcutta. Les heureux expérimentateurs de Cherbourg n’étaient point oubliés non plus.
Le jeune Alphonse Lerolle, à qui nous devons un beau
médaillon de Mesmer, devait aussi recevoir lin encouragement bien dû.
Le temps n’a pas permis toutes ces manifestations, si bien senties et méritées. Nous avons tous souffert lu tort de quelques uns qui, par une aveugle obstination, persistèrent trop longtemps à marcher dans une voie qui ne pouvait point avoir d’issue. Qu’ils portent donc la peine rie leurs méfaits. Chacun les a soumis à une appréciation rigonrense, et les hommes qu’ils protégeaient et voulaient introduire parmi nous ont été doublement punis.
Sans celte œuvre de folie, un grand et noble projet eût été soumis à l’assemblée, et la bienfaisance a perdu l’instant où elle pouvait se manifester.
Le magnétisme n’aura point à souffrir de la division qui s’est opérée; c’est au contraire un bien, une chose nécessaire, l’avenir le prouvera. Les exclus disent que nous sommes injustes et partiaux ; qu’ils justifient doue de leurs œuvres, qu’ils fassent de belles et grandes choses; nous les y invitons, et ils prouveront de la sorte notre mauvais jugement. Mais à côté de l’insolence et du mépris il y a tou jours l’impuissance et la faiblesse ; le. vrai mérite a toujours une sorte de dignité ; on ne le voit point se compromettre en s’associant à des projets que le délire enfante et que la sottise seule soutient.
Peut-être aurons-nous l’occasion de revenir sur ces détails. Nous sommes loin de craindre les hommes qui ont porté le trouble parmi nous. Nous voulons, au contraire, que tous ceux qui s’occupent de magnétisme avec honnêteté les connaissent.
LISTE DES PERSONNES COMPOSANT LE BANQUET MESMÉRIEN
nu 23 mai 1847.
MM.
Andriveau.
Bulliaul.
Itaïliaiil (Madame). Baudouin.
Baudouin (Madame). Beaumont (le comte J. de). Beuuvillain.
Botucliet (docteur). Blaucliai d (Mademoiselle). Bessou.
Blessou.
Blot.
Borel.
Borgnis.
Borguis (Madame). Boullct.
Briard (Alfred).
Brfaid (Lion).
Brossai d (Achille de). Brossard (Fernand de).
Bu met Camlacérèl.
Carpentier '.Paul). Carpentier (Madame). Clianibal.
Clianu (Madame). Chardon.
Chatriau.
Claverie (docteur). Corvasier.
Cosson,
Dalmas (docteur). Delacour.
Deiage (Henri),
Delande.
üerrien.
Dubois (Madame). Dumousscaux.
Dupuis.
Durieux.
Duval.
Fabre de Lagrange. Filassier (docteur). Filassier, frère.
Froidecour (Madame). Fromeut-Delormel.
Galiy.
Oéntlreau.
Gentil.
MM.
Gentil (Mademoiselle).
Georgi i (docleur;. Germei-Baillère.
Giliol de l’Étang. Girollel.
Girollet (Madami ). Goy.
Gria.
GrÉnicr.
Gru mot.
Gnérin.
Guilloui.
Halot.
Ilarel.
Hausey.
Hébert (de Camay). Henry.
Iloulct f'iis.
Iluiel (Adolphe).
Hurel (Jules).
Jamet del Breil.
Joqncl (de). Labertheillière (de). Laborde.
Lacaussade.
Lacoste.
Lamoureus.
Langlols.
Laporle.
Lassatine.
Lassagne (Madame). Le Brun.
Lecul.
U'ger
Li-maire.
Lecoq.
Leroy.
Leroy (Madame). Lerolle ainé.
Lerolle (Alphonse). Lerolle (LOon).
Lerolle (Tbimotée).
Le Sourd.
LeTaillant de Fiorivai. Levavasseur.
Livi (Madame).
Limai.
Logerotte.
Lovy.
M.M. M \f.
Mac-Sheehy (le chevalicr). Potei i Madame la baronne «Iti ).
Maeyens. Pouliain.
M,ahaii!. Poulot.
Marcila ml. Rainel.
Mernioud. Raisan,
Mesrner. Rcverclion.
Mùtua (Ludovic). Rioni).
Micliaux. lineard (Madame).
Mille! pére. Rousseau.
Millet tils. Itousselet.
Morot. Roustan.
Mourez. Ilovf.re (J. de).
Ni va it. Sanici.
Orsay (Ic vlcomted'). Simon.
Pallor. Simonneau.
POcbeur, Simon neau (Madame).
Péclieur (Madame). Slawin.
Pénoyée (dodciir). „ Taissière ile Sainl-Mare (doctcur).
Pénoyée (Madame). Tliuillier de Saiut-Mareeaii.
Pesterelle. Tranchant.
Philippe (iloctuur). ïruchy.
Picard (Eligùne). Vallenq.
Pichard. Warnaw.
Piron. Wertlieimer.
Piron (Madame). Williams (John).
Planet. Winnen.
Planet (Madame). Woog.
Potei ( le baron du?. Xavier.
Quarante-sept autres personnes avaient adhéré à cette manifestation, mais n’ont pu y prendre part. Plusieurs ont écrit pour en exprimer leurs vifs regrets. De ce nombre sont surtout MM. Laforgue, Tanazac, Dois-nel, et le docteur Desbois, président de la Société magnétique de Rouen.
Au moment de mettre sous presse, nous recevons de M. Laporte la lettre suivante :
Monsieur le directeur,
Si j’avais eu la possibilité de me faire entendre dimanche au banquet, comme c'était mon droit, la fête n’eùl pas été troublée, malgré les manœuvres déloyales mises en usage pour arriver à ces fins.
Je ne dois cependant pas, par mon silence. laisser
dans l’erreur quelques personnes honorables, qui ont pu être trompées sur mon compte par des bruits habilement répandus, ou par ce don-quichottisme grotesque dont nous avons été les témoins. Veuillez donc, monsieur le directeur, avoir la bonté d’annoncer dans votre journal qu’en ma qualité de commissaire seul chargé de l’organisation du banquet, je remettrai sous peu à chacune des personnes qui y ont assisté un compte-rendu de ma mission. Ce travail serait même déjà fait si je n’avais l’intention de publier quelques documents à l’appui.
Veuillez agréer, monsieur le directeur, l’assurance de ma haute considération.
Laporte. „
Paris, le 25 mai 1847.
Prédiction de Danton. — On ne lira pas sans intérêt lefragment suivant du dernier volume des Girondins, publié par M. de Lamartine :
« Vers cc temps (après la bataille de Valmv), le duc de Chartres, depuis roi des Français, se présenta à l’audience du ministre de la guerre, Servan, pour se plaindre d’une injustice que lui faisaient les bureaux. Servan, malade, était dans son lit ; il écoulait avec distraction le jeune prince. Danton était présent, et semblait commander au ministère de la guerre plus que le ministre lui-même. Il prit à part le duc de Chartres et lui dit tout bas :
« — Que faites-vous ici? vous voyez bien que Servan est un fantôme de ministre, et qu’il ne peut ni vous servir ni vous nuire. Mais venez demain chez moi, je vous entendrai, et j’arrangerai .votre affaire, moi. »
« Le duc de Chartres s’étant rendu le lendemain à la chancellerie, Danton le reçut avec une sorte de brusquerie paternelle :
« — Eh bien ! jeune homme, dit-il au duc de Chartres,
qu'ai-je appris? On assure que vous tenez des discours qui ressemblent à des murmures, que vous blâmez les grandes mesures du gouvernement, que vous vous répandez en compassion pour les victimes, en imprécations contre les bourreaux. Prenez-y garde, le patriotisme n'admet pas de tiédeur, et vous avez à faire pardonner un grand nom. »
« Le prince avoua, avec une fermeté au-dessus de son âge, que l’armée avait horreur du sang versé ailleurs que sur les champs de bataille, et que les assassinats de septembre lui paraissaient déshonorer la liberté.
„ — Vous êtes trop jeune pour juger cet événement, répliqua Danton avec un accent de supériorité; pour le comprendre, il faut être à la place où nous sommes. La patrie était menacée, et pas un défenseur ne se levait pour elle; les ennemis s’avancaient, ils allaient nous submerger; nous avons eu besoin de mettre un fleuve de sang entre les tyrans et nous ! A l’avenir, taisez-vous. Retournez à l’armée, battez-vous bien, mais ne prodiguez pas inutilement votre vie. Vonsavezde nombreuses années devant vous; la France n’aime pas la République, elle a les habitudes, les faiblesses et les besoins de la monarchie; après nos orages, elle y sera ramenée par ses vices ou par ses nécessités. Vous serez roi! Adieu, jeune homme. Souvenez-vous de la prédiction de Danton. »
Bizarre léthargie. — On écrit de Yironchaux (Somme) au Journal de Doullens : « Un singulier phénomène, pour ne pas dire une merveille, attire dans notre commune un grand nombre de curieux. Une fille âgée d une trentaine d’années, atteinte depuis longtemps d’é-pilepsie, tomba tont à coup dans une sorte d’insensibilité qui ressemble à une longue léthargie. Depuis trois ans qu’elle est dans cet état, elle n’a fait aucun mouvement ni manifesté aucun besoin. Assise sur son lit, la
bouche cl les veux entr'ouverts, le teint livide, elle présente à ceux qui la voient le spectacle de la mort, et cependant elle respire toujours. Cette existence singulière, qui met en défaut les secrets de l’art, ne'se soutient qu’au moyen d’une goutte d’eau, mêlée de sirop, prise (i líem e pii heure. Sans nous arréler à tous les contes plus ou moins ridicules que l’on fait circuler sur cette mystérieuse agonie, nous pensons qu’elle présente des circonstances assez extraordinaires pour être offertes aux méditations des hommes savants. »
—Ce qui embarrasse ici toute lascience officielle serait, pour un magnétiseur, un sujet de triomphe facile. Quelques heures démagnétisation feraient cesser ce phénomène. Et où tout l’art de la médecine est venu échouer, la nature, incitée à faire entendre son langage, révélerait bientôt les mystères qui entourent cette maladie.
Nous invitons les magnétiseurs qui se trouvent dans ces parages à tenter un essai ; nous leur promettons le plus grand succès.
Avis. — Nous avons l’honueur de rappeler que personne ne peut entrer sans billet à nos conférences du dimanche. L’affluence et la chaleur excessive nous obligent à prendre cette mesure, qui sera rigoureusement observée.
BIBLIOGRAPHIE.
L'étiieb et le magnétisme, brochure in-12, par le docteur Ed. Langlebert. Chez Boueh^d, rue Baciue, 1. Prix : 30 c.
L’anatomisme parisien est la pire des doctrines médicales; pour ses sectateurs, rien n’existe en dehors de la
portée du scalpel. Tout ce que celte bésiclc leur empêche de voir est comme n'existant pas. Ils poussent le culte de la matière à ses dernières limites; et, rampant toujours dans cet organicisme sans vie, ils sont ennemis de tout principe élevé, de toute idée grandiose. Comme appréciateurs de la science, ils font une guerre acharnée k tout ce qui n’est pas palpable; il leur faut de la matière partout, et le magnétisme n’a pu encore trouver grâce à leurs yeux. Plus les effets sont évidents, tranchés, plus leur résistance augmente. Us deviennent même injustes en niant les faits pour ne pas être obligés d’en admettre la cause intangible.
Ainsi le docteur Langlebert, que nous avons mis k même d’étudier les effets magnétiques, qui même a produit l’insensibilité, et que par cela seul nous croyions h jamais converti, vient aujourd'hui chanter les vertus inébiiantes, stupéfiantes de l’éther et dénigrer le magnétisme. Il ne met point de bornes à son admiration pour la nouveauté américaine, et rejette bien loin l’a— nesthésie magnétique, qui, depuis vingt-sept ans, en est encore à l’état de vague prétention. Les dangers de l’éther échappent à son admiration outrée; il ne voit pas que, bienfaisante dans ses effets immédiats, la découverte de Jackson est funeste dans ses conséquences. Comment l’idée ne lui est-elle pas venue que si l’éthéri-sation est un empoisonnement ayant l’insensibilité pour symptôme, elle sera un fléau dévastateur tant qu’on n’en aura pas trouvé l’antidote? Tel est le correctif à trouver, et en consacrant ses soins, son savoir k la recherche du contre-poison de l’éther, l’auteur de ce petit écrit servirait mieux qu'il ne le fait la science et l’humanité.
Le Propriétaire-Géraitt : HÉBERT (de Garnay).
Paris, — Imprimerie d’A. René cl Comp., rue do Seine, 3S.
JURY MAGNÉTIQUE
ll’EKCOUKAGKM EHiT ET DE KECOSIPEWSE.
A la première célébration à Paris, le 23 mai 1846, de l’anniversaire de la naissance de Mesmer, il fut proposé de consacrer le souvenir de cette première ovation à la science qu’il nous a léguée par une médaille frappée à l’effigie de cet homme illustre.
Les personnes ayant participé à cette manifestation, réunies en assemblée générale le 15 juin suivant, nommèrent une commission de cinq membres pour régler tout ce qui se rattachait k l’exécution de cette médaille.
Cette commission, en rendant compte de son mandat, dans une seconde assemblée générale, le 6 avril 1847, a proposé la création d'une association, dans le but d'offrir des médailles d’encouragement et de récompense à quiconque, de quelque pays qu’il soit, aura fait une découverte, application nouvelle, ou quelque chose de marquant dans le magnétisme. Cette proposition fut accueillie k l’unanimité.
En conséquence, la loi qui régit celte association a été adoptée dans les termes suivants, dans une troisième assemblée générale, tenue le 17 mai 1847.
11
ACTE DE CONSTITÜ TION.
CHAPITRE lct.
Dénomination, objet , composition.
Art. 1er. — Il est institué à Paris une association sous la dénomination de Jury magnétique d’encouragement
ET DE RÉCOMPENSE.
L’existence de ce Jury commencera le vingt-trois mai mil huit cent qiiaranle-sept.
Son siège sera au bureau du Journal du magnétisme.
Art. 2. — Cette institution a pour objet d'offrir une médaille à litre d’encouragement ou de récompense à quiconque, de quelque pays qu’il soit, aura fait une découverte, application nouvelle, ou quelque chose de marquant dans le magnétisme.
Art. 5. — Le Jury se compose des fondateurs de la médaille commémorative de la première célébration de l’anniversaire de la naissance de Mesmer, qui a eu lieu à Paris le 23 mai 1846. 1
Le personnel de ce Jnry se perpétuera par l’adjonction qui y sera faite, chaque année, des personnes qui auront reçu des médailles d’encouragement ou de récompense.
Ces nouveaux membres jouiront des mêmes droits et prérogatives que les membres fondateurs.
Abt. 4. — Les noms et demeures des membres du Jury seront inscrits, savoir :
Les fondateurs à la suite du présent acte de constitution;
Les fondateurs, et successivement les -membres arrivant chaque année, en vertu des dispositions du second paragraphe de l’article précédent, sur un tableau exposé
au bureau du Journal du magnétisme, par les soins du secrétaire général du Jury.
CHAPITRE II.
Président et secrétaire général du Jury; conseil d'administration; comité.
Art. 5. — Le Jury sera présidé par un de ses membres, auquel sera adjointun secrétaire général archiviste.
Ces deux fonctionnaires et le comité dont il va être parlé à l’art. 7 formeront le conseil d’administration, dont ils seront également président et secrétaire.
Art. 6. — Ce conseil sera chargé d’administrer les affaires du Jury, du soin de maintenir sa dignité et de défendre ses intérêts, ses droits ou prérogatives.
Art. 7. — Un comité composé de neuf membres sera chargé de recueillir, dans le courant de chaque année, tous renseignements pour arriver à la connaissance de tout ce qui aura été fait en magnétisme dans les termes de l’art. 2, soit en France, soit dans les pays étrangers.
Art. 8. — Au comité appartiendra le droit de sa constitution particulière. 11 devra élire dans son sein un président, un vice-président, un trésorier, un censeur, un secrétaire et un secrétaire adjoint.
Art. 9. — Excepté les cas où le comité réuni au président du Jury et au secrétaire général formera le conseil d’administration, les travaux du comité seront indépendants de ceux de ce conseil. En d’autres termes, le comité et le conseil d’administration seront deux ordres distincts.
Art. 10. — Chacun de ces deux ordres réglera le mode [de ses délibérations, de ses réunions, etci; mais toute décision de l’un ou de l’autre exigera la présence des deux tiers des membres. Les décisions seront prises
à la majorité des voix ; en cas de partage, celle du président sera prépondérante.
Art. 11. — Les procès-verbaux seront rédigés et signés par le secrétaire général pour le conseil d’administration , et par le secrétaire du comité pour le comité.
Le censeur veillera, dans toute circonstance, à la stricte exécution du présent acte de conslitulion.
Le trésorier sera chargé des recettes et des dépenses en général; celles-ci seront ordonnancées, soit parle président du Jury, soit par le président du comité. Il rendra ses comptes au conseil d’administration, chaque année, huit jours avant l’assemblée générale dont il va être parlé art. 22 ci-après.
Les archives resteront au bureau du Journal du magnétisme, mais sous la surveillance du secrétaire général.
Akt. 12. — Le comité, agissant dans ses attributions particulières,, devra rechercher tout ce qui aura été fait en magnétisme dans les termes de l’art. 2 , soit en entretenant collectivement ou séparément des relations dans les divers pays, suivant les dispositions de l'art. 7, soit par tous autres moyens; mais chaque membre devra communiquer chaque mois à ses collègues les renseignements qu’il aura recueillis, afin que le comité puisse s’assurer de leur exactitude et les coordonner pour les rapports annuels.
Art. 13. — Ces rapports seront délibérés dans une réunion du comité, huit jours avant l’assemblée générale prescrite par l’art. 22 ci-après, afin d’être présentés à cette assemblée.
Art. 14. — Il sera fait un rapport particulier pour chaque personne présentée pour un encouragement ou une récompense.
Chaque rapport indiquera d’une manière précise et bien circonstanciée les faits qui y auront donné lieu, il sera terminé parlas conclusions du comité.
Art. I j. — Il esl bien entendu que tout membre du Jury qui se trouvera dans les conditions énoncées à l’art. 2 devra, comme toute personne étrangère, faire le sujet d’un rapport du comité, sans toutefois que sa qualité lui donne droit à la moindre préférence.
CHAPITRE 11!.
Élection îles fonctionnaires.
Art. 16. — Le président du Jury, le secrétaire général et les membres du comité seront élus par l’assemblée générale des membres du Jury, au scrutin, par bulletins de liste, savoir :
Le président et le secrétaire général à la majorité absolue des voix des membres présents ;
Et les membres du comité à la pluralité des voix.
CHAPITRE IV.
Durée des fonctions.
Art. 17. — Le président et le secrétaire général du Jury seront élus tous les trois ans.
Art. 18. — Le tiers des membres du comité sera renouvelé chaque année. Le premier elle second tiers des sortants, pris sur les neuf premiers membres, seront désignés parle sort; les trois membres restants seront renouvelés la troisième année, et ensuite le renouvellement se fera d’après l’ordre des nominations. Les démissionnaires seront considérés comme membres sortants.
Art. 19. — Les fonctionnaires sortants, en vertu des dispositions des deux articles qui précèdent, pourront être réélus.
Encouragements et récompenses.
Aut. 20. — Les médailles offertes par le Jury à titre d’encouragement 011 de récompense, ainsi qu’il est dit à l'art. 2, seront en bronze, en argent ou en or.
Les médailles de bronze seront données à titre d’en-couragement, les médailles d'argent ou d’or à titre de récompense.
Art. 21. — Ces médailles auront 45 millimètres de diamètre.
Sur un côté sera l’effigie de Mesmer, autour de laquelle sera écrit en légende : Fréd.-Ant. Mesmer.
Sur le revers sera aussi en légende cet aphorisme de Mesmer : La nature offre un moyen universel de guériï et de préserver les hommes, et au milieu : Le Jury magnétique d’encouragement et de récompense (institué à Paris le 23 mai 1847) à M..........Un espace en blanc sera réservé pour y graver au burin le nom de la personne à qui elle sera destinée. •
CHAPITRE VI.
Assemblées générales.
Art. 22. — Chaque année, du 20 au 25 avril, sur la convocation faite par le secrétaire général, les membres du Jury se réuniront en assemblée générale, à Paris, dans le local qui sera indiqué par les lettres de convocation.
Art. 23. —Cette assemblée sera présidée par le président du Jury.
Le bureau sera formé des membres du comité, qui y
prendront place dans l’ordre de la dignité dont ils seront revêtus.
Le secrétaire général rédigera les procès-verbaux, qui seront signés par le président et par lui.
Art. 24. — Après la lecture par le secrétaire général du procès-verbal de la précédente réunion, les membres du comité donneront lecture des rapports qu’ils auront rédigés, conformément aux dispositions des art. 13,14 et 15, et |adiscussion sera immédiatement ouverte sur chacun de ces rapports en particulier.
Art. 25. — Nul membre ne pourra prendre la parole sans l’avoir demandée et obtenue du président, qui devra l’accorder dans l’ordre où elle aura été demandée.
Elle sera donnée au censeur toutes les fois qu’il la réclamera pour un rappel au présent acte de constitution, ou pour signaler quelque infraction.
Art. 26. — Toute proposition appuyée par trois mem-brfes sera mise en discussion, et, s’il y a lieu à décision, cette décision sera prise dans les termes de l’art. 29 ci-après..
Art. 27. — Le président prononcera la clôture de toute discussion, après avoir consulté le bureau ou l’assemblée.
Mais il devra consulter l’assemblée toutes les fois que la discussion concernera le conseil d’administration ou le comité.
Art. 28. —Il résumera la discussion avant de soumettre les questions à la décision des membres de la réunion.
La position des questions lui appartiendra. Il pourra cependant consulter le bureau ou l’assemblée.
Art. 29. — Toutes les décisions seront prises à la majorité des voix des membres présents. En cas de partage, la voix du président sera prépondérante.
Cette majorité sera constatée, soit par assis et levé,
avec contre-épreuve, soit par l'appel nominal, soit par le scrutin.
Il y aura lieu à voter au scrutin toutes les fois que la demande en sera faite par trois membres de l’assemblée.
Art. 30. — Après que l’assemblée aura voté sur chacun des rapports des membres du comité, et qu’elle aura décidé la nature des médaillesà offrir aux personnes qu’elle aura jugées dignes de cette distinction, le secrétaire général sera chargé de faire frapper les médailles et d’y faire graver les noms.
La délibération de l’assemblée devra exprimer pour chaque personne si la médaille est offerte à titre d’encouragement ou à titre de récompense.
Art. 31. — Le secrétaire général adressera immédiat tement à chacune de ces personnes une expédition du rapport qui la concernera, et un extrait de la délibération de l’assemblée générale , en l’invitant à sc trouver en personne, ou par un mandataire, à la fête anniversaire de la naissance de Mesmer, le 23 mai suivant, pour y recevoir la médaille des mains du président au nom du Jury.
Si quelqu’une de ces personnes ne sc trouvait point à cette fête, ou ne s’y faisait pas représenter, un membre du Jury serait chargé d’office, par le président, de la recevoir pour elle et de la lui faire parvenir.
Art«32. — Le conseil d’administration présenterai! l'assemblée le compte-rendu de sa gestion, et fera connaître la situation du compte du trésorier.
Art. 33. — Avant de clore la séance de l’assemblée générale il sera procédé, dans les formes prescrites par l’art. 16, à l’élection des fonctionnaires à remplacer eu vertu des dispositions des art. 17, 18 et 19.
Cotisations.
Art. 3 i. — Il sera pourvu aux frais de correspondance du comité, 'aux frais des médailles, et généralement à lotîtes les dépenses, an moyen d’une cotisation mensuelle île 50 centimes par chaque membre du Jury.
Cette cotisation sera payée d’avance, le 23 de chaque mois, à partir du 23 du présent mois de mai, dans les mains du trésorier.
CHAPITRE VIII.
Additions, changements ou modifications au présent acte de constitution.
Art. 35. — Le conseil d'administration devra signaler à l’assemblée générale annuelle les additions, changements ou modifications au présent acte de constitution que l'expérience lui aurait fait reconnaître nécessaires.
Et le Jury pourra, par une délibération prise à la majorité des deux tiers des membres présents, et après discussion, apporter à son acte de constitution tous les changements qui lui paraîtront utiles.
Art. 36. — Le présent acte de constitution, délibéré en assemblée générale, sera obligatoire pour (ous les membres composant le Jury, conformément aux dispositions des deux premiers paragraphes de l’art. 3.
A la suite du vote de l’acte ci-dessus, l’assemblée générale a élu pour président du Jury,
M. le baron du Potet de Sennevoy;
El pour secrétaire général.
M. le docteur Besuciiet de Saunois.
L assemblée a nommé un comité île neuf membres, lequel est ainsi constitué :
M. le chevalier Mac-Suekiiy, présidait.
M. Lassagnb. vice-président.
M. Derrhin, trésorier.
M. Hébert (de Garnay), censeur.
M. Asdhiveau, secrétaire.
M. Cosson, secrétaire-adjoint.
Et MM. Gally, Ladorde etLAPORTK, membres.
ÉTAT NOMINATIF DES MEMBRES FONDATEURS DU JURY.
MM.
Andrlrc.iu, 17, rue du Bac. Bergevin (de), 28, rue Tronche). Bergevio (Madame de), idem. Bctucbel, 14, rue Grange-Batelière. Bout let, 9 bis, rue dès Jeuneur.'. Bourdon, 8, rue N.-Slc-tienerttre. Brida, 28, rue Bourbon-Villeneure. Burnet, 38, rue Micbel-le-Conite. Carpenlier, 36, ltonler. du Temple. Chardon, 3, rue Racine.
Chardon fils, idem.
Cbarlron, »94, rue Saini-Marlln. Condor, à Cagliari.
Cosson, 10, rue Rambntoau. Cre»py-!e-Prince (ba ron de), 71, rue du Cherehe-Midi.
Delaconr, 6, rue Tiquetonne. Derrien, 1, rue Saint-Domioique-Snlnt-Germaln.
Durieui, à Cambrny.
Fromeut-Dcloi mcl, 19, r. du Bouloy. Gril;, 21, rue du Caire.
Gentil, 73, passage Choiscul. Germer-Baillère, 17, rue de l'École-de-Médecine.
Gillot-l’Étang, 18, rue Lafitle. Girollet, 23, rue Chapon.
Hauser, 8, rue d'Alger.
Hébert (de Garnay), 12, rue d’Antin. Henry, 60, rue de Bond;.
Laborde, 5, cilé Trévise.
Lacoste, 12, rue de la M ¿chaudière. Lapone, 5, cité Trévise.
Certifié conforme :
MM.
Lassagne, 1), rue Grange-nux-Belles. Lassagne (Madame), idem.
Le Brun, 7, me de Baitleul.
L'Eleu, 17, rue Sainte-Marguerite. Logerotte, 23, rue des Bourdomiais. Lor;, passage Colbert.
Mac-Shcehy (le cheialier), 25, rue Mironiénil.
Mabaut, 31, ruedu Pctit-Carreau. Marlin (Alex.), 3, rue des Francs-Bourgcois-Saint-Michcl.
Michaux, à Rouen.
Millet, 373, rue Saint-Honoré. Nivard, 60, ruc des Tournellcs. Penoyée, 8, rue Louvois Péreyra, ò Tillis.
Pbllippe. 43, rue N.-D.-de-Loretle. Picard, 25, ruc Gaillon.
Pichard, 60, r. du Four-S.-Germain. Plron, 11, rttcGH-le-Caiir.
Piron (Madame),idem.
Potet (baron du), 12, rue d'Antin. Potei (Madamelu barnnnedu),ifr»>. Poulot, 118, faubourg Poissonnière. Roustau, 14, rue du Marché-Sainl-Honoré.
Shaw, 1 bis, rue Neuvc-dc-Berrr. Shaw (Madame), idem.
Simon, à Ameuil.
Siinonneaii, 5, rue Tiranne.
Slassin, 9. ruc du Coq-Saint-Hoooré. Walles de Monlja; (de), ù Panlin.
Le prèsident du Jury, Baron du Potkt.
A'. Ii. Les personnes qui s’intéressent ira magnétisme sont priées d’adresser au siège du Jury (bureau du Journal du magnétisme, rue d’Anlin, n° 12, à Paris) tous les renseignements de nalure à mettre le comité à môme de remplir la mission qui lui est confiée par l’acte de constitution ci-dessus.
SOCIÉTÉS SAVANTES.
FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS.
J’ai suivi les belles leçons que M. Trousseau fait à l’Ècole de médecine avec toute l’assiduité, avec toute la passion qu’entraînent sa voix et son expérience. J’ai trouvé le nec plus ultrà de la science des médicaments, mais une lacune bien regrettable à l’arl\c\e tlectriciM. aimant, ambre, massage, et tou te cette médication singulière, comme il disait à sa leçon du 15 mai dernier; lacune d’autant plus impardonnable qu’après avoir touché chacun de ces agents inconnus et du doigt et de la pensée, le seul que je sache réellement bon reste dans l’oubli.
Est-ce mauvaise foi? Je ne crois point: M. Trousseau n’est pas de l’Académie.
Est-ce ignorance? J’ai ouï dire que sa main connaissait la marche du fluide.
Est-ce insuccès? Oh! quant à cela, il ne lui eût pas failli plus qu’à nous, et le succès moral qu’il obtient sur sa clientèle m’est un garant du contraire.
Est-ce la peur d'enseigner, à la face de l’école, la puissance thérapeulique de cet agi'ni, qu’èlle repousse?
On le dit, cl il nie parait bien coupable en ce sens. Oh! s’il voyait de mes yeux l’avenir... quelle belle couronne la postérité déposerait sur sou nom! Moins précieuse cent fois est celle dont le roi vient pour lui d'élargir les fleurons.
Je vais donc mesurer les leçons de ce maître profond, et les côtoyer au fur et à mesure avec une plume de mesmériseur. En franchise, c'esl peu engageant de tenter les remèdes dont le professeur ne comprend point le I moded’action. L’ainbre, le massage, sont pour M. Trous-seau des monstruosités quant aux effets curatifs, pour nous c'est de la plus grande simplicité; nous avons du I brillant où il n’a que du clair fort obscur, et cela tout bonnement avec nos idées de mesmérisme. I
Après avoir donné les expériences électriques de j Mauduyt et de Hallé comme les plus positives, en tant I qu’observations, il dit : « Sur 21 rhumatismes ils en j guérirent \, ils en soulagèrent 11 ; mais il fallut 10, 50, |J 100 séances. Quoi d'étonnant? Il y a des rhumatismes qui I j guérissent eu 100 riens. Sur un grand nombre de paralytiques 5 furent guéris; un seul cas de scrofule, quel- H ques paralysies locales, infections saturnines, contu- jj sions de nerfs, des aménorrhées subirent de notables I améliorations. •
Si M. Trousseau nous fait allusion par ses 100 riens. I je lui dirai : Prenez ce journal, il est semé de guérisons. I l Je ne sache pas un mesmériseur à qui l'on puisse repro- j cher d’avoir laissé un rhumatisant dans l’état où il l’avail H pris, que l’affection ait été inflammatoire ou non. J’ex- j ceple pourtant ceux qui, manquant des connaissances N nécessaires, ont traité pour sciatiquos ces vieilles affiec- j ¡ tions coxo-fémorales, pour rhumatismes ces articula- Ij c tions érodées, etc. Quant aux autres affections, nous ! s
comptons plus de succès que vous, et de vrais succès au moins-, car Van-Swiéten dit fort bien : « L’électricité ne fait que répercuter la maladie; d’autres lui succèdent quand elle ne réapparaît elle-même. » D'ailleurs nos succès ne dépasseraient pas les vôtres que nous avons l’avantage en nous passant d’appareils. A votre électricité, soit en courants continus, soit en chocs , il fallait une médication puissamment tonique, qui peut bien à elle seule avoir fait les frais de la guérison. Mais j’admets l’effet électrique. Sur un malade dans les mêmes conditions que vous, nous aurons les secousses de Nobili rien qu’avec nos mains; nous aurons les pansements de Hariss, aux vésicatoircs près, rien qu’avec nos mains; nous au-Tons aussi, pour plus de chance de succès, comme le veut Cavallo, un courant modéré autant qu’on le voudra, sans frotter la résine non plus que le verre. .
o L’électricité d’ailleurs, ajoute M. Trousseau, est d’une utilité fort contestable relativement à l’électro-poncture. » J’en dirai autant de l’un et de l’autre par rapport au mesmérisme; mais d’abord l’acuponcture. « L’acuponcture est un mode curatoire au moyen d’aiguilles enfoncées dans les chairs ! Les rhumatismes musculaires cèdent instantanément, mais reviennent le lendemain ; dès piqûres continuées plusieurs fois la journée, plusieurs jours, plusieurs semaines, finissent par en triompher. .Les névralgies temporales perdent momentanément leurs battements. Les spasmes du diaphragme s’apaisent, ainsi que le hoquet convulsif, etc. »
Quant aux névralgies temporales, cinq minutes suffisent au premier mesmériseur pour que les battements cessent de suite, et en sus la douleur environnante. Si le lendemain elle reparaît, idem, cinq minutes. Le malade s’v soumet bien plus volontiers qu’à des aiguilles enfoncées brusquement pour éviter la douleur, qui, dit-on, ne saurait être que légère. C’est fort bien pour qui ne la
sent pas; mais le patient... Quant à nous, jamais de grimaces, souvent le sommeil très-paisible (ce que M. Ma-gendie trouverait immoral; si c’était une jeuue fille, jugez!). Nous avons encore moins l'embarras du choix entre M. Cloquet et M. Bonnet, de Lyon, et jamais les inconvénients de leurs procédés. Le premier veut qu’on évite les troncs vasculaires, l'autre dit que ça n’y fait rien. Pour mon compte, je serais peu trait quille si je me voyais une série d’aiguilles sur le trajet de l'artère fémorale. M. Cloquet veut qu’on évite les troncs nerveux. Ah bien oui! fait M. Bonnet; c’est justement là qu’il faut piquer. Nous ne piquons rien, nous n’endommageons rien, et le bout de nos doigts sur le creux de l’estomac arrête le hoquet tout aussi bien que la paume de la main peut réveiller les contractions du cœur dans une asphyxie. Car on a beau me dire : Voyez ce chien, l’aiguille a traversé son cœur, elle a pénétré dans son cerveau, il n’a pas éprouvé le moindre inconvénient. Fort bien : c’est admirable comme le succès des moxas dans les arthrites : pas un cas guéri; et tout le monde les emploie sur la foi de cet aphorisme, qu’une douleur plus petite doit céder devant une plus grande.
La galvano-poncture est l’acuponcture, plus le galvanisme, plus les escarres, les phlegmons depirerespèce, les abcès toujours dangereux qui se développent autour de l’aiguille électrisée pour peu qu’on veuille pousser trop loin le ¿¿en, plus les secousses que le pôle cuivre produit jusqu’à luxer les articulations, plus les brûlures du pôle zinc, et bien d’autres avantages avec lesquels on réussit atsiz bien, selon M. Trousseau, dans les paralysies de mouvement, de la septième paire, des muscles du visage, et dans toutes celles qui ne paraissent pas liées à une affection grave de la moelle, c’est-à-dire dans toutes celles où nous réussissons fort bien.
«L’ambrejaune, dit M. Trousseau, est un agentàpro-
priétés bien singulières, qu’on portait en amulettes contre les maladies nerveuses, et que nous voyons encore de nos jours continué pour les enfants. Mais j’ignore totalement sa manière d’agir; seulement voici les faits que je vous citerai :
« Il y a sept ans, une dame des environs d’Ancy-le-Franc (Yonne) fut atteinte d’une maladie fort extraordinaire : elle était prise d’accidents convulsifs au bruit d’une sonnette, à l’aspect d’une lumière, au moindre cri, au point qu’elle était obligée de vivre à l’abri des commotions de l’air. Toute espèce de remèdes avait, échoué quand, un jour, une de ses nièces, en jouant sur son lit, passe à son bras un collier d’ambre. Immédiatement les spasmes cessèrent dans ce membre. Son médecin, étonné, lui met un collier à l’autre bras : plus de spasmes également. Encouragé, il lui met de l’ambre en jarretières, en ceinlure, et elle fut totalement guérie; et dès qu’elle l’ôte, les accidents reparaissent.
« Un Breton, vieux militaire, éprouve le même mal à un tel point qu’il est obligé de quitter toute occupatiou. 20 fhètres d’ambre le mirent dans une telle admiration pour son sauveur qu’il le proclama comme un dieu. Il put reprendre toutes ses occupations et rentrer dans la vie commune.
« Unedame de Rouen, au moindre attouchement, à la fumée de tabac, à tout bruit violent, h une porte qui se ferme, tombait dans des attaques épouvantables. Si on lu touchaitaux mains ou au visage, elle n’éprouvait rien ; mais si on portait l’index seulement aux bras ou aux ge-nonx, aussitôt les jugulaires gonflaient comme le pouce: Seul, son mari ne lui faisait aucun efTet. L’ambre la soulagea.
« Voilà, dit en terminant M. Tronsseau, des médicaments et des maladies à déconcerter les médecins et la science! »
Savez-vous pourquoi M. Trousseau est ainsi déconcerté? parce qu'il a guéri une maladie qu’il ne comprend pas avec un remède qu’il comprend encore moins. EU! de grâce, que faut-il de plus que guérir? Une théorie. Voici la mienne.
« Il est probable, dit Hallé, que l’électricité joue uu grand rôle dans beaucoup d’affections obscures de notre organisme. Un jour on sera peut-être conduit par cette voie à la révélation des mystères les plus admirables de la vie animale. » Or, moi qui admets l’existence d’un fluide dans l’homme devant une maladie semblable, je me dis : c’est par surabondance d’électricité : l’ambre donne de l’électricité; si elle est de nom contraire, la neutralisation des fluides et des symptômes est de toute rigueur. Je raisonne de même pour l’acuponcture : l’aiguille donne de l’électricité dès qu'elle est dans les chairs. Qui me prouvera que ce n’est point le surcroît d'électricité qui s'échappe par la pointe ou qui se.neutralise au contact du métal? Qu'est-ce queje remarque dans une sciatique que je mesmérise? La douleur, concentrée dans la région ischiatique descend vers les jumeaux , puis aux malléoles, et disparaît par les phalanges, et cela en procurant aux muscles des secousses cl ce mouvement veriuiculairesi bien connu, en me renvoyant fort souvent un courant frais qui produit l’éripilation des bras. Ne serait-ce pas le fluide maladif déplacé par celui que je transmets, ou du moins neutralisé quand il y a chaleur? Ne serait-ce point le nerf reconstitué dans sa condition première d’équilibre des fluides? Et quand je dis le nerf, j’entends que tout rhumatisme est névralgique. Le rhumatisme inflammatoire nous vient de l’école du cadavre, et ils oublient, ces observateurs anatomistes, qu’entre la vie et la mort il y a un abîme insaisissable pour l’homme. Quoi, je verrai la douleur fuser sur les trajets nerveux, et ils diront : Non, c’est le muscle sous
l'empire du génie rhumatismal ! Mais dès là qu’il y a douleur, il y a sensation; partout où il y a sensation, les nerfs sont en activité; donc partout où il y a douleur, les nerfs sont malades. Pourquoi portez-vous impunément 1« fer rouge sur I utérus? Y a-t-il trace de cordons nerveux? Oculos kabent et non videbunt. Je pousse plus loin; j’explique ainsi le soulagement que Marmont éprouvait dès qu'il entourait sa cuisse d’une armure aimantée : il avait une sciatique, surcroît de fluide, neutralisé par la présence d un aimant. Mais d’autres n’éprouvèrent rien du tout. C’est qu’ils ne se trouvaient pas dans les mêmes conditions que Marmont par rapport à l’aimant. Quand les anciens administraient l’aimant contre la chorée, contre les pôles couleurs, l’atrabile, comme ils disaient, ces maladies où nous voyons des cas d’électricité si remarquables, l’aimant pouvait bien agir là aussi dans mon sens. On médira avecM. Trousseau : Mais l’aimant pulvérisé perd ses propriétés, et n’est autre chose que du fer oxydulé, qui agit comme cminénagogue, ainsi que toutes les préparations de fer. Sans doute ; mais il est singulier de voir l’aimant guérir les cachexies des marais occasionnées à des époques où la vaporisation dégage tantd’électricité', et où les préparations ferrugineuses ne sont que fort modestes pour guérir. Il est bien plus singulier encore de voir les affections fuir devant le mesmérisme, et ce n’était guère lu peine à M. Trousseau, pour un agent si mince que l'aimant, de prononcer cette phrase : « Lenoble (l’abbé), jaloux de la vogue qu’obtenait un charlatan nommé Mesmer, se livrait à des expériences sur l’armure aimantée, expériences raisonnables et non ridicules comme celles du baquet! » Il est une chose qui juge ici, c’est que l’aimant et les armures dorment très-tranquilles dans une cour de la Faculté, et que le mesmérisme croît de jour en jour en guérisons et en adeptes. . .. . .1
Le massage est eucore une manière de guérir bien plus étrange pour M. Trousseau. Quoi! on fait du bien, oh soulage, on guérit avec rien! Au moins l’ambre c’est quelque chose, on peut envoyer chez le pharmacien! Mais le massage... rien qu’aVec les mains, les doigts... on guérit! M. Trousseau l'avoue franchement. «La vieille Laroche, dit-il, a guéri des maladies où toutes mes connaissances thérapeutiques ont échoué. Des femmes affectées de maux de reins, de douleurs lancinantes à l’hypo-gastre, et de tous ces symptômes qui traduisent une affection grave de l’utérus, furent trouver cette femme, qui leur dénoua les nerfs et les guérit. Quel que fût son moyen, elle les guérit; elles marchèrent librement. Moi, je les avais laissées au lit. » Que faisait cette bonne vieille? Elle pressait, tiraillait, remuait les entrailles des malades; scs mains, enduites de pommade, n’en dégageaient pas moins le fluide mesmérien. Les ligaments, excités par cette force vitale, reprenaient leur place première, et le nœud était dénoué. La douleur mécanique cessant, l'utérus ne pressant plus sur aucune paroi, la pesanteur et l’inflammation disparaissaient. La vieille Laroche magnétisait sans le savoir. De même,-pour les affections qui cédèrent au massage, c’est devant le fluide vital qu’elles s’enfuirent.
C'est par dérision que M. Trousseau dit : Elle dénoua les nerfs. Et pourtant rien n’est plus juste : elle dénouait, je ne dirai pas les nerfs, je ne sais ce que c’est. Mais de ces affections me sont tombées sous la main ; j’ai senti des nœuds que le mesmérisme faisait disparaître en amenant la guérison des malades. C’est de cette manière que, rebouteur consommé, j’ai guéri bon nombre d'entorses : je dénoue le nœud. Dites cela à la Faculté, à M. Trousseau : « Pauvres ignorants, vous diront-ils, allez donc voir sur l'amphithéâtre dénouer des nœuds I » Sans doute nous ne trouverons rien à dénouer dans un cadavre ; mais
il y a ccla de différence qu’entre la mort et le malade, l'un a des propriétés vitalçs qui, aidées par des agents subtils, occultes, constituent la bonne nature, comme on dit dans les hôpitaux; dans l’autre il y a la matière préludant à la putréfaction, et ils ne raisonnent que d’après Je scalpel et l’autopsie. Pour interpréter la nature il faut connaître sa langue, 'et ce sont des barbares! Le mesmérisme, tout entier dans la nature, est hors de leur globe; c’est un mythe, une constellation au delà de la nouvelle planète.
Le commentateur de Dioscoride dit : « Les habitants du Pô portoient au col force ambre enfilé en carcan , à raison que plusieurs d’iceux, pour la grande humidité, étoient sujets aux maux de nerf ou de gorge, ce qui n’est du tout hors de raison, puisqu’ils se trouvent fort bien- » Mais c’est hors de raison pour M. Trousseau, car il dit : « Remarquez, ces remèdes n’agissent que sur les gens nerveux; c’est un effet d’imagination! » Je demanderai à M. Trousseau ce qu'il entend par imagination ; car je ne comprends pas un malade qui, formant dans sa pensée l'image de sa guérison, pourrait atteindre ainsi à la réalité du fait. 11 faut avoir une fière imagination pour associer, à notre époque, des idées aussi illusoires ! Et, du reste, pourquoi, s’il admet la possibilité de guérir"eu frappant l’imagination, n’emploie-t-il pas ce moyen si facile et si peu coûteux? Pourquoi ne faisait-il pas imaginer aux malades que le massage lui a guéris, que leur maladie n'existait plus? Mais à quoi bon crierî Aures habent et non audieni-
C’est passer bien vite sur des sujets aussi dignes d’étude; mais j’ai rempli ma tâche dès que j'ai signalé des faits aux mesmériseurs, des faits qu’ils comprennent comme moi, et que le temps ne peut tarder à livrer à la lumière. A force de marcher, nous ne pouvons manquer d’atteindre le but.
E.-V. Lesgaugbis.
ATHÉNÉE MAGNÉTIQUE DE LYON.
Discours prononcé dans la séance du 17 mars 1817.
Messieurs,
Plusieurs d’entre vous, non contents de pratiquer le magnétisme et d’en manifester les plus puissants efTets, ont cherché à remonter a ses causes. J’ai essayé aussi de découvrir les ressorts de cet agent puissant et de me faire une théorie. Si vous voulez me le permettre, j’aurai l’honneur de vous l’exposer le plus succinctement possible, non dans le but de vous la faire adopter, mais seulement pour provoquer vos sages observations, et par là m’éclairer de vos lumières et les répandre sur la science que nous étudions.
Afin d’éviter de longs développements, je donnerai souvent ma théorie sous forme d’aphorismes. Je vous prie de porter votre attention sur ceux qui auraient besoin de plus de démonstrations, et de vouloir bicji me présenter vos observations.
Il existe un principe incréé, Dieu. Dieu est de lui principe de l'intelligence, de la vie ou force et de la matière. Il s’est manifesté par la création.
La création est donc un composé des trois principes existants en Dieu. La nature des différents êtres créés est le résultat de la combinaison en proportion variée des trois principes émanés de Dieu.
Ainsi, représentant par A l'intelligence, B la vie ou force, et C la matière, on peut déjà concevoir ces diverses combinaisons:
A B -+- G représentant l’homme, c’est-à-dire l’intelligence dominant, puis la vie, puis la matière.
B + A + C représentant les animaux, c’est-à-dire la vie dominant, puis l’intelligence, puis la matière.
B C -4- A représentant les végétaux, c’est-à-dire la vie dominant puis la matière, puis l’intelligence.
C -+- B -f- A représentant les minéraux, c'est-à-dire la matière dominant, puis la vie, puis l’intelligence.
Entre et au-dessus de ces quatre classifications, il existe une infinité de nuances différentes, soit pour les quantités, soit pour l’ordre des combinaisons; de là la variété des êtres et les différences qui existent entre ceux d’une même classe.
Les trois principes que nous avons reconnus exercent les uns sur les autres une action réciproque de laquelle résulte ce changement d’état d’un même corps, ce qui produit la naissance, la vie et la mort des êtres. Ainsi :
L’intelligence agit sur — la vie — la matière.
La vie agit sur — l’intelligence — la matière.
La matière agit sur — l’intelligence — la vie.
Ces actions réciproques sont rendues évidentes par un grand nombre de faits; il est donc inutile d’en faire ici la démonstration.
Les trois principes créés existent ensemble à l’état de fluide impondérable. Ce fluide est universel et remplit l’immensité.
Il est l’agent unique de la création, qui n’est que la spécification des diverses parties de cet agent en différents êtres, selon les combinaisons que nous avons indiquées.
Ce fluide, reconnu des physiciens et des chimistes comme agent de la matière, a reçu les divers noms de fluide électrique, galvanique, magnétique, etc., et sous
ces diverses dénominations on a découvert et étudié plusieurs des lois qui le régissent.
Comme agent vital; il a été reconnu des médecins sous le nom de fluide nerveux ou vital.
Comme agent intelligent, il a donné naissance à divers phénomènes que l’on a niés ou regardés comme surnaturels.
Enfin , quelques philosophes l’ont reconnu comme agent universel sous son triple point de vue, et l’ont appelé esprit universel, éther, archée, âme du monde, etc.
Les magnétiseurs doivent de même le considérer comme un fluide on principe unique et universel, étant par son essence intelligent, vital et matériel. Ce n’est qu’en le considérant ainsi que nous trouverons l’explication des divers faits qui résultent de la magnétisation, et dont quelques-uns sont si extraordinaires, qu’ils ont fait crier au sortilège ou au miracle. C’est aussi le senl moyen d’arriver à faire de cet agent les plus utiles applications.
La magnétisation produit des faits de trois ordres différents, qui démontrent évidemment à ceux qui ont eu l’occasion de les observer la réalité de la théorie qui vient d’être exposée succinctement, comme cette théorie explique les différents systèmes de magnétisation employés, quelquefois avec un égal succès, par plusieurs magnétiseurs. Ainsi on reconnaît des faits matériels, des faits vitaux et des faits intellectuels, selon la magnétisation employée ; car par suite de l’influence réciproque, on peut magnétiser :
La matière par la matière, ou par la vie, ou par l’intelligence.
La vie par la vie, ou par l’intelligence, ou par la matière.
L’iutelligence par l’intelligence, ou par la vie, ou par la matière.
De Ik la diversité des moyens employés et des tbéo-ries enseignées. Celle qui précède est pins large; elle réunit et explique toutes les autres, et indique quel est, selou les cas qui peuvent se présenter, le mode qu’il faut employer.
La magnétisation par la matière a été jusqu'à présent la seule employée par les médecins; c’est le mode de médication par l’application ou l’absorption de diverses substances auxquelles on ? cru reconnaître la qualité de remèdes (1).
La magnétisation par le principe vital est celle qui s’opère par le rapprochement de denx on d’un plus grand nombre d’individus, souvent à Pinsn les uns des autres, et sur laquelle est basée la méthode de traitement, quelquefois employée, de faire coucher des malades dans des étables, ou de les faire monter à cheval, ou encore de leur faire des applications d’animaux tués à l’instant de les employer (2).
Enfin, la magnétisation par l’intelligence est souvent pratiquée, même par les personnes qui ignorent l’existence ou les procédés du magnétisme, par des disconrs ou des actes qui raniment le moral dn malade et sonvcnt provoquent sa guérison (3).
(t) Ce moyen est le pire de tous; n'employant pour agent que la matière, il n’agit qu'indirectement, et par réaction, sur le principe vital et sur le principe intellectuel.
(2) Ce moyen, bien préférable au précédent, devient encore meilleur si le malade est mis en relation habituelle avec les animaui vivanls qui doivent lui fournir le principe universel, et s’il y a, pour ainsi dire, par un attachement réciproque, relation du principe intellectuel. Ainsi celui qui monterait un cheval qu'il aurait lui-même pansé, caressé et soigné, en retirerait plus d'avantages que celui qui emploierait dans le même but un cheval de location; car il y aurait alors action des trois principes de l'animal sur les trois principes du malade.
(3) Ce dernier mode est certainement le meilleur quant il est employé magnétiquement, mai* seul il est aussi imparfait, n'employant que l’un des trois principes comme actif, et agissant sur les autres par réaction, sans chercher l'intermédiaire du fluide universel.
La science du magnétisme consiste donc à savoir faire une application raisonnée de ces divers modes de magnétisation, et surtout à employer comme agent le magnétisme humain, c’est-à dire l'influence de l’intelligence, de la vie et du corps du magnétiseur au moyen du fluide universel, sur I intelligence, la vie et le corps du magnétisé, en observant que les effets sont différents, selon que le magnétiseur emploie plus ou moins de volonté, ce qui est un acte de l'intelligence; qu’il dépense plus ou moins de force, ce qui est l’acte vital; enfin qu’il emploie plus ou moins de frictions, d’attouchements, d’insufflations, ou que le malade est plus ou moins dans le rayon des émanations corpusculaires qui s’échappent de son corps, celte dernière manière constituant l’acte matériel.
Ce résumé succinct d’une théorie complète et générale de la science magnétique laisse clairement entrevoir les nombreux et longs développements dont elle est susceptible. En analysant séparément tous les éléments de celte théorie, on y trouvera d'une manière régulière toutes les lois qui régissent la nature, l’explication de tous les faits qui ont passé pour surnaturels, et les moyens d’appliquer le magnétisme de la manière la plus utile à l’humanité.
A.-R. Gcjinand.
VARIÉTÉS.
Le magnétisme à Rome. — L'Echo de la Nièvre du 21 avril publie la lettre suivante, adressée de Rome, 17 mars, k un curé du diocèse, par M. l’abbé Jeau Ro-satini, chanoine honoraire, avocat, doyen des avocats de la sacrée congrégation des rits.
Monsieur,
Il est temps désormais que les ennemis inexpérimentés du magnétisme et du somnambulisme finissent leur trop faible opposition, et que les ecclésiastiques ne s’en chargent plus dans le tribunal sacré de la pénitence, refusant injustement l'absolution à ceux qui en éprouvent ou qui en font éprouver les influences salutaires..
Dans le courant de l’année dernière, non-seulement je m’approchai de vous, en France, pour m’instruire du magnétisme, mais encore je me liai d’étroite amitié avec M. le docteur Charpignon , d’Orléans (1), M. Barreau, de Paris, etM. le docteur Jeptud, médecin au Pont-de-la-Beaume. J’eus par là occasion d’admirer souvent les effets du magnétisme et du somnambulisme.
De retour k Rome, je présentai au Saint-Père l’ouvrage de M. Barreau sur le magnétisme, et, après lui en avoir exposé le contenu, il l'accepta bénignement. Je lui dis ensuite qu’étant en état de soulager les malades par l’activité du fluide magnétique, je me prêtais déjà
(1) L'avocat Rosatini est venu en France, envoyé par Rome, pour l'instruction des procédures canoniques de li canonisation du bienheureux de la Salle, fondateur des frtres de la doctrine chrétienne.
au soulagement de beaucoup d'infirmités avec un heureux succès. Le Saint-Père ne s’opposa pas à la charité que j’exerce; car le Saint-Siège ne défendit jamais le magnétisme, si ce n’est dans certains cas, où d’après l’exposé qu’on en fit, il paraissait quelque chose de contraire aux bonnes moeurs.
Ainsi encouragé, et plus encore confirmé par l’opinion de plusieurs savants jésuites de cette capitale, ainsi que de l'archevêque de Reims, monseigneur Gousset, je me livre au magnétisme, et personne dans Rome ne s’y oppose, puisqu’au contraire MM. les prélats, les curés, les avocats sont enthousiasmés des guérisons qui s’opèrent et des sages réponses de la somnambule consultée en faveur des malades.
En outre, tous doivent savoir que monseigneur Gousset, ci-dessus nommé, reçut une lettre du cardinal Cas-tracane, grand pénitencier, qui favorise le magnétisme cl ferme ainsi la bouche aux adversaires.
Dans cet état de choses, que diront maintenant ceux du clergé français qui refusent capricieusement l’absolution sacramentelle aux pénitents qui magnétisent ou se font magnétiser?
Que diront ceux qui persécutent M. le docteur Char-pignon, auteur de plusieurs ouvrages sur le magnétisme, lui font perdre une partie de sa clientèle, elle font passer dans la ville presque comme un sorcier?
Que diront ceux d’une ville importante du diocèse de Bayeux, qui menacèrent madame P"* de la faire brûler toute vive parce qu’elle traitait, sans aucune rétribution, les malades dans son état lucide; et peut-être auraient-ils exécuté leurs menaces, si le prudent etsavant évêque n’en eût empêché l’excès? 0 aveuglement humain?... O ignorance crasse!
Mon cher ami, propageons de toutes nos forces le magnétisme, si utile à la santé des malades ; présentons le
somnambulisme aux incrédules de l’immortalité de l’âme, et, comme tant d’autres, aidés de la grâce de Dieu, ils se convertiront, et nous en aurons dans le ciel la récompense, pour nous être employés en faveur de l’humanité.
Avant de terminer cette lettre, je crois devoir vous faire part d’une surprenante guérison qui s’opère ici en présence de tous ceux qui veulent voir et qui en sont très-satisfaits.
Marianne ***, âgée de trente ans, demeurant rue San-Lorenzo in Mirando, n° 15, était affligée depuis cinq ans d’une énorme plaie qui lui couvrait toute la surface du pied ; cette plaie était si alarmante, qu’on la porta à l’hôpital des incurables, où quatre doigts de ce pied, qui menaçaient gangrène, lui furent coupés, et, après un assez long séjour dans cet hôpital, elle s’en revint chez elle avec l’ulcère ouvert, qui lui faisait souffrir des douleurs insupportables, ne pouvant faire quelques pas qu’en s’appuyant sur le talon. Plus d’un an s’était déjà écoulé depuis sa sortie de l’hôpital-, et cependant son mal allait toujours en empirant, abandonnée de tout le monde comme incurable.
Il y a à peu près denx mois que, passant devant sa maison, je fus tellement touché de compassion, en la voyant assise sur le seui^de sa porte, que je l’engageai à se soumettre à un traitement magnétique, à quoi elle consentit. Depuis lors, je la fais magnétiser constamment deux fois par jour par un jeune Français que j’ai auprès de moi, appelé André Gauthier, du bourg Saint-Andréol (Ardèche).
Je puis vous assurer que dès le premier jour la chaleur commença à se développer sur son pied, et l’énorme plaie à se sécher de jour en jour ; elle est maintenant presque cicatrisée, au grand étonnement de beaucoup de personnes instruites, qui vont la voir par curiosité ;
et tous s'en retournent partisans du magnétisme, ie publiant partout, jusque dans le palais apostolique, louant et bénissant le Seigneur qui, par un si faible moyen, montre le pouvoir qu’il a donné à l’homme pour l'utilité de ses semblables. Tout le monde voit avec plaisir le magnétisme se propager dans Rome. Fasse le ciel qu'il en soit de même partout!
Jean Rosatini.
Tribunaux. — « Il parait, dit le Clamor pul/lico du 22 mai, que le tribunal ecclésiastique de Santiago a lancé un mandat d’arrêt contre M. Cubi, qui exerce le magnétisme et professe la science du docteur Gall dans cette ville. On l’accuse de propager des doctrines qui tendent au matérialisme et à l'hérésie.»
Une lettre de la Corogne, publiée dans le Constitution? nel du 29, fait conuaître la suite de cette affaire dans les termes suivants :
« L’autorité ecclésiastique a requis le chef politique de procéder à l’arrestation de M. Mariano Cubi y Soler, à l’occasion de ses leçons et cours de magnétisme et de phrénologie. L’autorité civile y a obtempéré. Demain les élèves de Cubi, les signataires des certiOcats qui lui ont été donnés partout, auront à comparaître comme hérétiques ou suspects d'hérésie; ils seront emprisonnés. Bientôt l’autorité ecclésiastique rendra inutiles ou hief-ficaces les lois sociales et civiles, si l'on n’y met pas bon ordre. »
— Ce qui donne la preuve que ces ministres de la religion n'ont point compris le Christ, c’est leur ignorance qui ne leur permet pas de distinguer ce qui est condamnable de ce qui ne peut l’être, lndignesde leur ministère, ce sont ces hommes absurdes qui partout ont entravé la marche de l'esprit humain et produit des athées. Quand de toutes parts des hommes pieux répandent la lumière
nouvelle du magnétisme et que des ecclésiastiques écrivent chaque jour pour enregistrer et défendre cette nouvelle conquête de l’esprit humain, il est honteux d’avoir a consigner des faits de barbarie qui nous reportent au cocurdu moyen Age.
L Espagne, après l’Autriche, devient persécutrice des nouvelles idées. Il y a des fous et des insensés partout; mais la terre s’en débarrasse petit à petit. Nous croyions que la race de ces monstres humains qui ensanglantèrent la terre par des auto-da féétait éteinte; nous nous trompions : seulement elle a perdu une partie de son pouvoir. Voilà pourquoi les magnétiseurs ne courent plus le risque d être brûlés ; mais on peut encore les emprisonner et les rançonner; ceci durera jusqu’au moment où l’institut aura fait enteudre sa voix.
Chronique. — Le nouveau ministre, M. Jayr, à Lyon, protégeait le magnétisme; on espère qu’il en sera de môme ici, et que sa présence dans le Parlement ne sera pas sans influence sur l’avenir du mesmérisme. Nous saurons bientôt si cet espoir est fondé ; car on discute en ce moment le projet de loi sur la médecine à la Chambre des Pairs, et le paragraphe qui nous touche ne manquera pas d’éveiller l’attention.
— Le Siècle du 2 mai contient des strophes de Barthélémy sur l’éther qui s'adaptent parfaitement au magnétisme, quoique Mesmer y soit malignement raillé. Triste rôle que celui de l’écrivain qui, pour briller un peu, sacrifie la réputation d’un homme dont il ne connaît ni la vie ni les travaux?
— Aux régates de Bercy, le 9 mai, le premier prix a été remporté par le Mesmer, canot d'un de nos abonnés. Ceci fait dire à la Preste que maintenant Mesmer est partout vainqueur. Nulle année, en effet, depuis 1784, n’a été plus féconde en démonstrations d’admiration et de
reconnaissance; jamais peut-être on n’a fait davantage pour le triomphe de sa doctrine. Les arts, les sciences, la littérature, lui ont chacun payé tribut, et cette année pourra justement compter parmi les plus glorieuses pour lui.
— La Réforme des 6 et 7 mai, dans l’analyse qu’elle fait d’un ouvrage de M. Julien le Rousseau, rédacteur en chef du Conservateur de la Bordogne, déplore que l’auteur, pour expliquer quelques faits de physiologie cérébrale, s’appuie sur les données du somnambulisme. Comment, dit-elle, un homme de sens peut-il invoquer pareilles chimères?... Le docteur Elliotson, en lisant cette double appréciation du magnétisme et de la phré-nologie, demanderait : Beliversor desbelivers, who are the fools? A quoi tout esprit droit répondrait que ce sont les derniers.
— Il est question de la prochaine apparition d’un opuscule sur les mystères du magnétisme, par un philosophe incompris et tant soit peu pharisien.
— On lit dans la Mouche du 5 mai :
« Les adversaire* du magnétisme n’osent plus combattre en plein soleil, tandis que ses défenseurs marchent le front haut et au grand jour. Un certain M. R..., se disant docteur-médecin, a inséré dans le Censeur de Lyon une attaque contre la science mesmérienne à propos de la dernière séance de M. Lafontaine, et ce prétendu médecin s’est bien gardé de signer et de nous donner son nom. Une preuve, dit-il, que la somnambnle n’était pas insensible, c'est qu’un tlacon#d’ammoniaque, tenn sous le nez et les yeux, a déterminé un larmoiement. C’est dire : Une preuve qu’elle n’était pas insensible, c’est qu’un coup de bislonri, divisant les chairs, a occasionné la sortie de quelques gouttes de sang. Monsieur le docteur R..., vous nous devea votre nom, si vous ne
voulez pas qu'on vous applique l’épitliète qui convient à ceux qui frappent dans l'ombre. »
— L'Echo saumurois a reproduit le récit de l’opération pratiquée à Poitiers dans l’état anesthésique provoqué par le magnétisme.
— Lu Revue nouvelle du mois dernier contient un long article plus nuisible que favorable au magnétisme, tant sont mal choisies les preuves. L’auteur a eu une bonne intention , mais il s’est perdu dans le dédale des conceptions fantastiques qu’offre l’extase des somnambules naturellement contemplatifs. L’hallucination très-souvent se mêle à ces visions étranges, toujours impropres à convaincre, parce qu’on ne peut rien vérifier, et qu’en fait de science il faut des preuves évidentes, sans quoi l’édifice est hasardé et s’écroule tout entier au premier souille du scepticisme.
— Le Charivari du 2.5 mai rend compte, selon sa cou* turne plaisante, de l’incident fâcheux qui a signalé l’ouverture du banquet mesméricn. Il déplore qu’on ait consigné à la porte les auteurs du trouble ; son cœur compatissant aurait voulu voir tous les mesmériens rassemblés, et d’une parfaite entente, d’un accord unanime. Le même vœu était là dans tous les cœurs ; mais la loi des attractions s’y opposait : l’union ne peut avoir lieu, en morale comme en physique, qu’entre des éléments similaires. Les hétérogènes, si bien unis qu’ils soient, tendent toujours à se séparer; c’est une loi de nature que la sagesse des nations exprime si justement par ces mots : Qui se ressemble s'assemble.
Nous regrettons que l’indiscrétion de ce journal ait livré au public le nom de6 exclus; nous espérions qu’il aurait imité notre réserve : car les nommer, c’est les mettre indirectement à l’index. Le public ne doit point être mis dans la confidence de ces faits; ils doivent être enseveli« dans le milieu où ils se produisent. Ces mes-
sieurs sauront sans doute mauvais gré au Charivari du service qu’il a voulu leur rendre, et si quelque mal résulte pour la cause mcsmérienne, il en aura été la principale cause; car si d’une part il prêche la concorde, de l’autre il la reud impossible.
MM. les membres de la commission nous ont adressé ij.ee sujet la lettre suivante :
Monsieur le directeur du Journal du magnétisme,
Nous venons, en notre double qualité de partisans du magnétisme et de commissaires du dernier banquet mesmérien, exprimer ici publiquement — en nous associant, au surplus, à tout ce que vous avez dit et écrit touchant l’étrange et bien déplorable scandale qui a précédé la féte du 23 mai — que nous avons partagé toutes les intentions et approuvé les mesures d’ordre et de dignité arrêtées par M. Laporte, notre collègue et ami, lequel — si, comme on l’a dit, a une tête comme il y en a peu — a une âme comme il en faudrait une à beaucoup de magnétiseurs.
Veuillez agréer, monsieur le directeur, l’expression de nos sentiments les plus élevés et les plus affectueux.
Gally, Boüuet.
Paris, le 1" juin 1847.
— Sous le modeste titre de Mesmer and Swedenborg, il vient de paraître à New-York un volume qui traite des rapports existaut entre les révélations somnambuliques et les visions de l’extatique suédois. L’auteur de cet écrit est M. Georges Bush.
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (de Garnay).
ram. — Imprimerie d’A. Biné cl Comp., nie 4e Seine, St.
CLINIQUE
Brulure.— Le dimanche 9 mai, la chaudière du bateau à vapeur l'Eole, faisant le service d’Arles à Lyon, ayant eu une avarie à la hauteur de Valence, trois chauffeurs furent, à des degrés différents, brûlés par la vapeur qui s’échappait des crevasses de la chaudière. Le sieur Friboul, le plus maltraité des trois, avait les deux jambes et surtout la droite complètement brûlées, ne présentant qu’une plaie du milieu de la cuisse au cou de-pied. Ils furent dans ce triste état, souffrant cruellement, ramenés k Lyon, où ils n’arrivèrent que dans la nuit. Quoique le sieur Friboul demeure dans notre maison, nous n’apprîmes que le jeudi l’accident qui lui était arrivé. Mon père alla le voir; il lui dit avoir horriblement souffert durant ces quatre jours et ne pouvoir trouver un instant de sommeil. Mon père lui proposa de le magnétiser ; il y consentit, et au bout de quelques minutes il dormait d’un sommeil tranquille. A son réveil toute douleur avait disparu, il pressait lui-même les vessies pour en faire sortir une qu antité de sérosité qu’il évalue à un litre. Depuis ce jour il n’a plus souffert, le sommeil est revenu, et aujourd’hui la guérison est parfaite. Mais la grande sensibilité de la peau nouvellement formée l’empêche encore de vaquer k ses affaires.
Les deux autres victimes de cet accident sont encore tome iv.—K° 4 8«—25 juin 1847. 12
HOSPICE
I. A
MAGNÉTIQUE»
dans le plus fâcheux état, quoique primitivement moins gravement affectées que Friboul, ce qui me confirme dans l’opinion qu’il n’y a pas de plus prompt ni déplus sur remède que le magnétisme contre les brûlures. J’en ai fait souvent l’épreuve, et je crois qu’il est convenable de donner à ces faits le plus de publicité possible.
A.-R. Guinaud.
Ljon, 22 mai 1847.
Epilepsie.—Dans une lettre de remerciements adressée à M. AViart, président de la Société magnétique de Cambrai, touchant les conseils qu’il a donnés pour le traitement d’un enfant épileptique, nous trouvons une particularité remarquable, qui prouve que toutes les maladies se terminent par des crises.
L’enfant avait été magnétisé doucement, et une légère amélioration s’était fait remarquer, mais pas assez marquée pour donner l’espoir d’arriver à la guérison. Au mois de mai 1815, selon l’avis de M. AViart, on substitua une magnétisation énergique à celle qui avait été suivie ; l’enfant devint somnambule et donna d’utiles avis pour la conduite de son traitement, dont son père narre ainsi la fin : « Vous vous rappelez, saus doute, que mon fils, en somnambulisme, ainsi que madame Piron, somnambule de Paris, ont toujours prétendu que le siège de la maladie était au nombril, qu’il existait là du phlegme nerveux qui occasionnait les accès.
o M"" Piron, par sa lettre du 28 décembre 1845, m’annonçait que le mal du nombril élait évacué. Le lendemain, j’interrogeai mon fils à ce sujet; il me dit que son mal existait encore, et pour m’en donner la preuve il ajouta que l’évacuation n’en aurait lieu que le à janvier, après la magnétisation, à sept heures et demie du matin; il me prévint, en outre, que, dès son lever cejour-là, il serait indisposé, qu’il aurait même une faiblesse, des
tremblements, trémoussements de tous les membres, qui dureraient deux minutes; qu’il faudrait que je fusse seul à celte séance et que je n’eusse avant de communication avec qui que ce soit, qu’il faudrait beaucoup modérer mon action , m’éloigner de lui d’un mètre au moins et ne rien faire pour favoriser l’évacuation du principe du mal, ni calmer son agitation... Les jours suivants il me confirma cette prévision et les prescriptions.
« Le A janvier j’étais à Maubeuge; j’avais pris le soir toutes mes précautions pour n’être point interrompu ; niais à minuit une indigestion se déclare chez moi, je vomis beaucoup, et le matin je me trouvais hors d’état de magnétiser, ce qui me donnait d'autant plus de chagrin que j’attachais beaucoup d’importance à cette séance. Mon fils s’éveille à six heures, et remarquant mon indisposition, nous convenons ensemble que je m’abstiendrais de le magnétiser. Mais au môme instant il se plaint de malaise, dit qu’il est faible, qu’il a beaucoup de mal au nombril, que la douleur n’est pas ordinaire, qu’il se sent défaillir, et qu’il faut le lever parce qu’il ne peut plus tenir au lit. Je l’aidai à s’habiller promptement, le fis asseoir auprès du feu; et, après lui avoir dit quelques paroles alTectueuscs et consolantes, je me mis a réfléchir sur mon indisposition ; mais je fus vite tiré de mes ré-flexiunspar ces paroles, qu’il prononça avec l’accent de la conviction : a O mon Dieu, comme mon mal est blanc! » Il était, à ma grande surprise, tombé seul en somnambulisme. Je l'interrogeai ; il me dit que son mal allait s’évanouir comme il l’avait prédit ; qu’il fallait m’éloigner de lui et ne le pas magnétiser; qu’il s’était endormi seul parce que le sommeil magnétique élait nécessaire pour favoriser l’expulsion de son mal; que s’il ne s’était pas endormi, il aurait peine à supporter les douleurs qu’il allait endurer, ün instant après, les trémoussements le saisirent, il était sept heures un quart; il paraissait en proie
à des souffrances extrêmes, et revenu de cette crise il me dit : «Tenez, le voilà qui sc détache... il suit la direc-« tion des intestins.... Oh! que c’est singulier ! le voilà « tourné comme en eau... Maintenant je vais m’éveiller « tout seul; il 11e faut exercer aucune influence à ce su-« jet... » Il s’éveilla effectivement ainsi, ne conservant iis! souvenir de ce qui s’était passé et ne ressentant plus aucune douleur. Jugez de la surprise et de la joie que j’ai éprouvées! Depuis lors j’éloigne les séances de plus en plus; actuellement je ne le magnétise plus que tous les douze jours. »
Cette lettre est du 19mars 184 G. Depuis, on a cessé de magnétiser l’enfant, qui a continué de se bien porter, n’a eu aucune réminiscence de ses cruels accès. Le père, heureux d’être l’instrument d’une si belle cure, a voulu payer sa dette de reconnaissance envers la science qui enseigne à produire de si admirables faits, en propageant la connaissance du mesmérisme. Il veut procurer à d’autres le bonheur qu’il éprouve et ne néglige aucune occasion de répandre nos idées. La Société magnétique de Cambrai, pour encourager son zèle, soutenir son prosélytisme, l’a admis au nombre de ses correspondants.
Avtre cas.— Le nommé Lacomblé-Housquain, employé de l’octroi à Valenciennes, resta épileptique à la suite d’une chute suivie d’une grande frayeur. Cette maladie durait depuis trois ans , successivement traitée par les docteurs Manouvrier et Marbotin. Le malade avait souvent deux accès par jour. Le traitement médical n’avait aporté aucune amélioration. Trente magnétisations ont amené la complète guérison, si on en juge par le temps écoulé (vingt mois) sans qu’aucun accès ait reparu.
L.-A. Düriecx.
Insensibilité. — Nous lisons dans le Pliure de la Manche cl dans le Journal de Cherbourg du 13 de ce mois :
« Trois opérations fort intéressantes ont été pratiquées à Cherbourg, vendredi dernier 4 juin, avec un succès complet, par M. le docteur Loysel, assisté de M. le docteur Flcury, aidc-major au 62e régiment de ligne, qui lui a prêté le concours obligeant de scs talents et de son expérience. Trois personnes, un homme et deux femmes, mises dans l’état de sommeil magnétique, en quelques minutes, par M. L. Durand cl M. Loysel, en présence d’un grand nombre de témoins, ont démontré de nouveau, de la manière la plus évidente, qu’on peut, à l’aide de ce moyen, anéantir toute sensibilité dans les organes et éteindre entièrement la douleur. Cet étrange phénomène a produit sur l’assemblée une impression difficile à décrire. Le calme remarquable et l’étonne-ment des patients, qui, à leur réveil, aussi subit que l'avait été l’invasion du sommeil, sont tout surpris de voir terminée une opération si douloureuse ; qui n’ont, rien senli, rien perçu, et sont restés inertes et immobiles pendant que l’opérateur enfonçait vivement le bistouri dans les chairs, en disséquait les énormes lambeaux et pratiquait la ligature des artères : voilà, certes, un fait bien extraordinaire et qui mérite de fixer de plus en plus l’attention des physiologistes!
« I)e ces trois opérations, qui, du reste, présentaient le même caractère, la dernière était la plus importante par la profondeur et l’étendue de la plaie, et avait pour objet l’extirpation d’une masse très-volumineuse des glandes et des ganglions situés dans la partie latérale et postérieure du cou. Elle a été pratiquée sur mademoiselle Caroline Lemirc, âgée de vingt-six ans, née au Vré-tot, arrondissement de Valognes.
« Ces nouvelles opérations chirurgicales sont la dixième,
la onzième et la douzième qui ont été faites à Cherbourg, à l’aide du magnétisme, depuis le mois d’octobre 1845.
a La plupart des phénomènes magnétiques ne sc produisent pas toujours avec une constante régularité. Ce qu’il y a d’avantageux dans ce phénomène de l’insensibilité, que tant de personnes ont vu et constaté tout à leur aise, c’est que, lorsqu’on l’a une fois développée, ce qui arrive souvent dès les premiers essais, nulle influence étrangère n’est plus capable alors de la détruire ni môme de la diminuer, et qu’on peut la faire durer autant que l’exigent les opérations les plus longues. Il y a quelque chose de bien intéressant à observer dans ce passage instantané de la sensibilité la plus délicate à la torpeur la plus profonde et la plus absolue; mais il y a aussi dans cette invasion soudaine de l’insensibilité autre chose qu’un objet de vaine curiosité. En effet, donner aux chirurgiens, quand il s’agit d’opérations longues et douloureuses, des moyens plus certains de succès, en leur livrant un corps inerte, et pour ainsi dire un cadavre, au lieu d’un sujet toujours très-vivement impressionné par la vue des préparatifs et les terreurs de l’opération ; ranimer, à l’aide d’un sommeil paisible et prolongé à volonté, les forces vitales épuisées par une pareille secousse, et prévenir les accidents nerveux de toute nature qui surviennent quelquefois à la suite d’une opération grave et redouté, c’est, selon nous, réaliser un véritable progrès.
a Etaient présents messieurs :
« Noël-Agnès, sous-préfet de l’arrondissement et ancien maire de Cherbourg; — Le Maistre, receveur des finances et ancien sous-préfet de Cherbourg; — d’Alphonse, colonel du 62° régiment de ligne; — Obel, D.-M., P., membre correspondant de l’Académie royale de médecine ; — Henry, négociant, commandant de la
garde nationale, membre du conseil municipal ; — Lab-bey, D.-M., P. ; — Le Seigneurial, juge d’instruction au tribunal civil, membre du conseil d’arrondissement; — De» Rivos, sous-intcndant militaire, à Cherbourg; — vicomte de Tocqueville ; —Clictxci, «voué, membre du conseil d’arrondissement et du conseil municipal ; — lïériard, major du G2C régiment de ligne ; — de Mont-cla, chef de bataillon au 02' ; — De Rancourt, id. ; — l’abbé Faûn, aumônier de l'hôpital civil; —l’abbé de Gournay, aumônier du collège; — De Viaris, capitaine d’artillerie; — Rossignol, avocat, membre du conseil d’arrondissement et du conseil municipal; — Fleury, D.-M., aide-major au 62°; — Gehin de Yérusmor, rédacteur en chef du Phare de la Manche; — Mangin, ingénieur des constructions navales j — Hérouville, D.-M., P. ; — Nunia Marie, propriétaire, membre du conseil municipal ; — Bresson , ingénieur des travaux hydrauliques ; — Coulance, directeur des subsistances militaires; — Chevrel, receveur de l’enregistrement; — Drouet, avocat ; — Leroy, directeur des postes ; — Boissiere, propriétaire, membre du conseil municipal; — P. Marie, sous-principal du collège; — Jules Duprey, professeur de rhétorique ; — CénolT, professeur de mathématiques spéciales à l’Ecole de marine; — Henri Duchevreuil, capitaine de cavalerie ; — Edouard Duché-vreuil, propriétaire ; — Le Goupil, commis de première classe de la marine ; — Corrard, ingénieur des constructions navales ; — Boissière, greffier du tribunal civil ;
— Hélain, propriétaire ; — de La Tribonnière, receveur-entreposeur des tabacs ; — Gregory Cook, esquire ; — de Roussel, ingénieur de la marine; — Delente, directeur des lits militaires; —Uippolyte deRiencourt, propriétaire; — Turpain, percepteur des contributions directes ; — Dumont-Moulin, avocat ; — Charles Chevrel, clerc d’avoué ; — Raynal, professeur de mathématiques ;
— Lecocq, négociant; — Rodrigucz, colonel espagnol;
— Henri Jouan, lieutenant de vaisseau ; — A. Durand, écrivain du contrôle de la marine ; — Adolphe Lambert, propriétaire ; — Charles Loysel, nninîi'® , Martin , professeur: — * négociant; — Hippolyte Loysel, avocat, docteur en droit; — Gustave Lemagnen, négociant; — Le Rendu, ancien notaire; — Le Houguais, directeur de l’Ecole primaire supérieure ; — Feuardent, libraire; — Digard, propriétaire; — Le Carpentier, régisseur général de M. le comte du Moncel ; — L’Eveillé, écrivain de la marine; — Caillet üls, entrepreneur de travaux publics; — de Riencourt fils ; — Charles Le Ma-gnan ; — Leroy ; — Poittevin.
«P. S. Aujourd’hui 10 juin , les plaies résultant des trois opérations sont entièrement cicatrisées, et les opérées se portent très-bien. »
— Voioi un fait acquis à lajscience du magnétisme; il n’est plus besoin d’autres preuves, et nous ne pensons pas qu’il y ait de dénégations désormais. Ainsi le magnétisme verra successivement sanctionner tout ce qui d’abord fut contesté, comme révolutionnant la raison de nos grands savants; mais que de temps, que d’efforts il nous aura fallu pour obtenir ce résultat! Honneur à vous, monsieur Durand; vous avez servi puissamment la cause du magnétisme ; ceux qui vous ont aidé méritent aussi des éloges. Vous n’avez point redouté les faux jugements de l’incrédulité, en la prévenant que tel jour, à telle heure,’vous donneriez des preuves d’un phénomène contesté. C’est bien, très-bien ; c’est ainsi qu’il faut agir : le grand jour est favorable à la vérité. Soyez heureux et fiers, messieurs; vos noms resteront dans les annales du magnétisme à côté de Puységur et Deleuze. Longtemps encore le gouvernement fermera les yeux à la lumière; il ne fera rien pour ceux qui travaillent à établir
une vérité si féconde en grandes choses; mais, imitant les Anglais, nous ferons nous-mêmes ce que les hommes d’Elat devraient faire. Nous nous assemblerons, nous apporterons chacun notre tribut, afin que les belles œuvres ne soient point oubliées, et qu’il reste aux cœurs généreux qui les ont accomplies une marque de la sympathie qu'ils ont rencontrée.
Hystérie. — Une demoiselle de comptoir, âgée de vingt ans, d'une constitution sèche et délicate et d’un tempérament lymphatique, ayant eu dans sa famille plusieurs parents morts de phthisie pulmonaire, est entrée à l’hôpital de la Pitié il y a six mois, pour des accidents gastralgiques, et a présenté depuis cette époque des phénomènes bizarres dont nous allons chercher à retracer le tableau.
Nous dirons d’abord que celte jeune fille n’a jamais été bien réglée (les règles revenaient tanlôt tous les huit ou quinze jours, et tantôt se suspendaient pendant huit mois); quelle a eu en sa vie plusieurs maladies, et qu’elle a tou jours été très-npnetise, c’est-à-dire qu’elle pleurait facilement, se mettait aisément en colère, et présentait en celle dernière circonstance des tremblements et des contractions convulsives des doigts.
Cette jeune fille est venue à Paris, il y a dix mois, pour rentrer dans sa famille. A son départ de Tournay (Belgique), ses règles coulaient assez abondamment. Elles se suspendirent aussitôt qu’elle eut monté en voiture. Arrivée à Paris, elle trouva son frère mourant; son émotion fui telle qu’elle perdit connaissance pendant environ une heure et demie, mais sans mouvements convulsifs. Deux mois après, en apprenant la mort de ce frère, elle perdit de nouveau connaissance pendant sept heures. A partir de ce moment, tous les accidents de gastralgie et de chlorose, dont elle avait déjà éprouvé
les premières atteintes pendant son séjour en Belgique, prirent une grande intensité. La malade vomissait presque immédiatement tout ce qu’elle mangeait; en outre, au moindre exercice, elle avait beaucoup de gêne, de la respiration et de violentes palpitations de cœur. EnGn elle pâlit et maigrit beaucoup.
Cette jeune malade était depuis quinze jours à l’hôpital de la Pitié, où elle était traitée pour les accidents dont iious venons de parler, lorsque, à la suite d’une contrariété très-forte, elle fut prise de maux de ventre affreux, avec sensation d'une boule qui montait de la région épi-gastrique à la gorge, et déterminait immédiatement des accès de suffocation avec perte de connaissance et de violentes convulsions. Cette première attaque d’hystérie dura une demi-heure environ. Le lendemain et les deux jours suivants, elle eut, à la même heure, un accès convulsif parfaitement semblable au premier. Dès la troisième attaque, elle fut immédiatement paralysée de la vessie, du rectum et des membres inférieurs. La paralysie des membres inférieurs portait à la fois sur la mo-tilité et sur la sensibilité. La constipation était absolue, et la rétention d’urine telle qu’il était nécessaire de sonder la malade deux fois par jour. Ce n’était pas tout : le ventre prit immédiatement un développement énorme, et la peau de l’abdomen devint d’une sensibilité telle que la malade ne pouvait supporter même le contact de sa chemise, et que la moindre secousse amenait des douleurs effroyables.
Pendant dix-sept semaines on essaya contre ces divers symptômes les médications les pins variées, et, il faut l'avouer, sans aucun résultat satisfaisant : (’éthérisation, en particulier, détermina chez elle les accès convulsifs les plus violents, et fut suivie pendant quelques heures d’une insensibilité générale, qui portait même sur la peau de l’abdomen, mais sans avoir modifié la
tympanitc; les applications de morphine par la méthode endermique réussirent à émousser quelque peu la sensibilité de la peau du ventre, mais non a la détruire.
Cependant la paralysie persistait, lorsqu’un jeune élève du service proposa à M. Piorry d’essayer le magnétisme animal sur cette malade. A peine avait-il fait quelques passes qu’elle tomba dans un sommeil profond, dans un état d’insensibilité complète et dans une espèce de catalepsie. Après la première séance, la malade dit se trouver un peu mieux , et commença à faire un petit mouvement du gros orteil. Après dis autres séances, toutes suivies de catalepsie comme la première , elle cessa d’être paralysée d’une jambe; à la treizième, la paralysie avait complélementdisparu. Dès le mèmejour, elle commença à uriner sans cathétérisme. Depuis cette époque, elle a eu des espèces de raideurs dans les membres qui simulaient, jusqu’à un certain point, la paralysie, et qui disparaissaient chaque fois après le sommeil magnétique. Toutefois la tympanitc et l’hypé-resthésie de la peau de l’abdomen persistèrent (à peu de chose près) telles qu’elles étaient au moment de l’invasion.
L’état dans lequel se trouve aujourd’hui cette malade est loin d’être satisfaisant; les attaques d’hystérie se reproduisent à trois ou quatre jours d’intervalle et se prolongent pendant une demi- heure ou une heure ; chacune de ces attaques est suivie d'une perle de sensibilité générale, pendant laquelle la malade a remarqué qu’elle peut pincer toutes les parties du corps, même la peau du ventre, introduire les doigts dans les yeux, dans la bouche, dans les narines, sans eu ressentir la moindre impression. Cette insensibilité ne dure pas moins de sept ou huit heures. Le ventre est énormément ballonné, et le moindre contact, le moindre ébranlement de cette partie arrachent des cris à la malade et détermineraient
des accidents nerveux s'ils étaient prolongés. Chose bizarre! celte sensibilité exagérée est tellement limitée u la peau de l’abdomen, et finit si nettement, qu'on peut dans le voisinage presser, même pincer la peau, sans que la malade accuse autre chose que la sensation ordinaire. 11 y a, en outre, des élancemenls dans le ventre et des douleurs vives dans les reins; la nuit, surtout, l'hypéresthésie du ventre est telle que la malade est forcée de se coucher sur le lit sans couverture. Les digestions sont difficiles; pendant leur durée, il y a beaucoup de renvois, et le ventre augmente considérablement de volume. La malade va difficilement à la garde-robe.
La sensibilité et la motilité sont h peu près conservées partout, excepté dans quelques points très-circonscrits, par exemple sur le moignon de l'épaule droite, où l’on peut pincer ou piquer la peau sans que la malade paraisse s’en apercevoir. La muqueuse nasale du côté droit, les muqueuses oculaire et palpébrale, surtout à gauche, sont beaucoup moins sensibles qu’à l’état normal; on y porte, sans que la malade s’en plaigne, les barbes d’une plume ou la tête d une épingle. En pressant avec la main sur les apophyses épineuses de la colonne vertébrale, on détermine une vive douleur à la partie médiane de la région dorsale, dans une étendue de cinq ou six centimètres. Celle pression occasionne de violents élancements dans le ventre, qui décrivent un cercle autour du corps, surtout du côté gauche. Du reste, à l’exception de ces phénomènes, la malade ne paraît pas dans un très-mauvais état : elle est gaie ; sa peau est assez, colorée ; elle descend pour se promener dans les cours de l'hôpital, et mange avec appétit ; toutefois le pouls est lent et très-faible. Elle a de violentes palpitations de cœur et des accès de dyspnée lorsqu’elle monte l'escalier, et l’on trouve sur les parties latérales du cou un
murmure continu des mieux caractérisés, et à la base de la région du cœur [un bruit de souffle périsystolique très-doux.
Nous avons vu soumettre cette jeune malade à l’éthé-risation ; à peine avait-elle respiré l’éther pendant une minute et demie, qu’elle tomba dans l’accès d’hystérie le plus violent : cinq ou six personnes suffisaient à peine à la contenir; elle était sans connaissance, la sensibilité complètement abolie partout, même sur le ventre. Les accès convulsifs se sont reproduits à des intervalles de plus en plus éloignés, pendant trois heures, et l’insensibilité générale a persisté jusqu'à neuf heures du soir; la nuit a été fort agitée; le lendemain, la sensibilité du ventre, loin d’être diminuée, était aussi vive, sinon plus vive que la veille. (Union médicale.)
— Nous voyons ici le magnétisme en quelques instants -faire plus de bien que toutes les médications ensemble. Par des circonstances indépendantes de la volonté de M. Piorry, qui est parfaitement disposé, l’emploi du magnétisme a été suspendu ; mais on va recommencer. Nous suivrons attentivement les phases de ce traitement, et en tiendrons nos lecteurs au courant. Nous souhaitons vivement que le magnétiseur, qui est externe de l’Hôtcl-Dieu, soit instruit du magnétisme convenablement; car c’est là un cas difficile; il ne sufGl point de posséder la puissance magnétique, il est nécessaire d’en savoir bien diriger l’emploi. A coup sûr, le succès le plus grand couronnera ses efforts, si, cessant de chercher à calmer la malade seulement, il provoque, comme nous le faisons dans des cas semblables, des crises artificielles.
SOCIÉTÉS SAVANTES.
SOCIÉTÉ MAGNÉTOLOGIQUE DE TOUT-LOUIS.
Le mesmérisme, renié par ses pères naturels, s’est partout répandu sous la seule impulsion du prosélytisme individuel. Maintenant il réclame une protection plus étendue, qui favorise ses tendances, développe ses germes féconds, accélère son progrès. Où trouver cet appui? La tutelle des individualités lui serait aussi funeste qu’est nuisible aux plantes l'ombre des grands arbres. Les sciences personnifiées s’atrophient; il leur faut l’indépendance , l’air et la lumière. Les premiers magnétiseurs ont bien senti cette vérité, que les choses trouvent leur force dans le concours harmonique des éléments variés : aussi les voyons-nous, dès l’origine, se grouper autour de Mesmer, associer leur zèle, combiner leurs moyens. Leur Société de l'harmonie contient une grande pensée; par elle la propagande magnétique était organisée, une direction suivie présidait à l’œuvre, et tous les efforts convergeaient. Quand les événements politiques eurent détruit cette institution naissante, tout ne fut plus que confusiou ; les magnétiseurs, sans lien, épars, privés de centre, d’unité de vues, d’enteute enfin, s’abandonnèrent à leurs seules inspirations : l’un nia ce que l’autre affirmait. Des sectes rivales s'établirent, et faute de contrôle les procédés sc multiplièrent à l’infini, l’arbitraire prit la place de la règle, l’empirisme celle des principes. Chacun voulut être maître, attacher
son nom à une doctrine, faire prévaloir ses idées à l’exclusion des autres, et sans consulter les intérêts delà science, du principe qu’ils voulaient répandre. L’antagonisme de ces fougueux champions a été très-préjudiciable an progrès scientifique et à l’extension du mesmérisme, et ce n’est que dans ces derniers temps que les idées d’association, de collectivité de moyens, d’unité de vues ont repris faveur. Maintenant on reconnaît qu’il faut, pour vaincre, se servir de l’arme de ses ennemis. Et les corps faisant la force des sciences, comme la discipline celle des armées, tous les efforts tendent à l’organisation d’institutions pareilles. Depuis 1810 douze groupes mesmériens se sont ainsi formés ; mais, agissant chacun dans une sphère isolée, ils sont restés presque étrangers l’un à l’autre au lieu de s’entendre et de se prêter un mutuel secours. Ils perdent par leur isolement une grande partie des bénéfices de l’association , et font de très-grands efforts pour n’arriver qu’à des résultats médiocres; il faudrait que toutes ces petites sociétés magnétiques s’entendissent pour reconstituer ce qui existait à Paris avant la révolution : une société centrale, dont les autres, à l’instar des loges maçonniques, ne seraient qu’un prolongement.
Cette pensée nous est suggérée par l’un des moindres résultats du manque de centralisation dont nous parlons: l’ignorance où nous sommes restés depuis deux ans et demi qu’il existe à Port-Louis (île Maurice) une société de magnétiseurs, qui ignorent également les efforts que nous faisons ici, les succès obtenus à Cherbourg, Londres, Calcutta, etc. Notre voix peut-être trouvera de l’écho, et des communications plus fréquentes nous mettront an courant des travaux de nos frères d’outre-mer.
Il résulte des notes qui nous sont communiquées que cette Société fut fondée en janvier 1845 par un créole, M. Lacaussade, à son retour de Paris. Quelques guéri-
sons opérées par lui enflammèrent l’ardente imagination des habitants; on sait qu’ils n’accueillent jamais tièdement ce qui revêt un caractère merveilleux , un certain air de surnaturalilé. Le magnétisme, répondant parfaitement à leurs aspirations, fut porté jusqu’aux nues; tout le monde voulut étudier cette science simple et sublime, qui permet au moins académicien du monde de faire surgir à sa volonté des phénomènes dont les physiciens, avec toutes leurs machines, n'offrent pas l’analogue.
La Société se fonda avec vingt-quatre membres, parmi lesquels nous remarquons M. Plantin, (ils de la dame que M. J. Cloquet opéra d’un cancer au sein, en état d’insensibilité magnétique; M. Evenor Dupont, avocat, connu par son dévouement aux idées phalanstériennes; M. Liéuard, vieillard des plus considérés de l’île, et le plus ardent promoteur actuel du mesmérisme dans ce pays. Les autres nous sont inconnus autrement que par leur nom, mais tous occupent une position sociale qui indique des humines généralement instruits.
Le bureau se compose de :
Un président, M. Lacaussade;
Un vice-président, M. LéclézeaU;
Un orateur, M. Ev. Dupont;
Un secrétaire, M. Loliotte;
Un trésorier, M. Liénaru.
Nous voyons, par l’examen de quelques lettres et procès-verbaux, que de nombreuses guérisons ont été le fruit de la lucidité de trois personnes dont on a cultivé les facultés instinctives. L’une d’elles, mademoiselle Béaugendre, passe pour avoir, en moins d’un an, guéri plus de cent malades abandonnés. Un nombre presque égal est attribué à mesdemoiselles de Speville et Péri-chon. Les cures par le magnétisme direct sont bien moins
nombreuses. Le somnambulisme captive tous les commençants, dont l’enthousiasme est sans bornes à la vue de l’état physique et moral que leurs mains ont produit. La réflexion ne vient qu’après exercer son empire et donner la priorité à l’incitateur de ce phénomène admirable.
Il est bien entendu que tous ces soins ont été donnés avec désintéressement, le tout pour la plus grande gloire de Mesmer et l’extension rapide des connaissances magnétiques. Tant d’avantages assurent la prospérité de la Société; la connaissance qu’elle va prendre des travaux de ses émules excitera encore son zèle, et des faits nouveaux viendront s’enregistrer dans nos annales.
SOCIÉTÉ MAGNÉTOLOGIOUE DE PARIS.
Bien des faits se sont produits au sein de la Société depuis que nous n’avons parlé de ses travaux. Un grand nombre de membres ont été reçus, ce qui est la marque certaine du progrès que fait le magnétisme dans les classes laborieuses principalement, où peu d’efforts jusqu’ici avaient été faits pour l’établir. C’est pourtant là qu il est appelé à rendre les plus grands services ; mais c est toujours aux prolétaires qu’on pense les derniers, tort qu’on ne peut imputer à la Société , dont le début est signalé par des œuvres philanthropiques et immédiatement utiles. Elle vient d’élargir la base de scs opérations par l’adoption de diverses mesures tendant à répandre les connaissances mesmériennes sous le double rapport de l’utilité et de la curiosité.
En modifiant son but et ses injiyens, elle a aussi retranché de son titre la partie qui spécialisait ses fins exclusivement philanthropiques.
Nous ne pouvons résumer chronologiquement ses travaux, ce serait trop long; nous allons nous borner à
l’esquisse d’un fait rare, digne de tonte l’attention des magnétiseurs, de l’étude et des méditations des médecins, parce qu’il peut donner l’explication de bien des phénomènes morbides, contagieux, sympathiques et mé-tastatiques.
Nous avons déjà, tome III, page 354, parlé d’un état qui simulait la grossesse, récit corroboré par une observation de M. Laporte, insérée page 30 de ce volume-ci. L’expérience renouvelée dans ces derniers temps ayant prouvé à SI. Derrien la constance de ce phénomène, il s’offrit de le montrer publiquement, ce que la Société accepta avec empressement; car, quelle que soit la confiance qu’on ait en la bonne foi des gens, on craint l’exagération, l’cnthousiasmcj et l’on est bien aise d’appliquer ses sens, d’examiner, car alors on n’a plus seulement la croyance, mais la certitude.
Ces expériences délicates ont le don d’exciter prodigieusement la curiosité; l’homme est insatiable : plus il voit de faits excentriques, plus il en est avide; c’est dire que de nombreux magnétistes étaient là pour constater la réalité ou la nullité de l’effet annoncé.
La somnambule, mise en rapport avec une dame enceinte d’environ six mois, d’abord s’agite sur son siège, semble mal à l’aise, puis porte la main sur le ventre, qu’elle frictionne en différents sens avec un air de souffrance analogue à une colique modérée. Le ventre ce durant prend du développement, et modifie sensiblement la respiration. Enfin il parvient au volume de celui de la dame enceinte. En cet état il est dur et sonore ; la somnambule dit ne pas souffrir, et elle garde une attitude insimulable.
Quand tout le monde eut palpé, le résultat de cet examen fut consigné au procès-verbal, et signé de tontes les personnes présentes; puis deux ou trois passes longitudinales firent évanouir cet étrange phénomène.
Madame Froidcour, interrogée, n’a pas pu préciser son état, qui ressemble extérieurement à la tympanite, mais il en diffère en ce qu’il se résout subitement et sans aucun dégagement de gaz.
On pourrait peut-être ainsi greffer certains états, morbides ou autres, dont l’étude importe beaucoup; par exemple, le mécanismeparlequelopèrentHenriMondeux et autres étonnants calculateurs. Au point de vue physiologique et médical on en pourrait retirer des données non moins précieuses.
N. B. L’expérience dont on vient de lire l’exposé, répétée dans notre avant-dernière conférence, a pleinement réussi. Il y avait soixante-dix témoins, dont nous taisons les noms, parce que ce fait, destiné à se multiplier à l’inüni, n’a plus besoin d’être attesté; chacun pourra le voir désormais. On a remarqué que le développement de l’abdomen est toujours relatif à l'avancement de la grossesse, et tout fait croire que, le rapport établi à terme, la somnambule éprouverait toutes les douleurs de l’enfantement. Cette supposition est autorisée par le rapport de M. Laporte; l’occasion se présentera sans doute d’en vérifier la justesse.
HOPITAL MAGNÉTIQUE DE LONDRES.
Nous avons déjà parlé du projet de cet établissement philanthropique, à la réalisation duquel s’attache un si vif intérêt. Nous allons aujourd’hui en exposer littéralement les bases, afin que les magnétophiles français puissent en toute connaissance y porter leur offrande.
On lit dans le Zoist :
« Un meeting tenu, le 9 juillet 1846, chez M. le comte de Ducie, étant convaincu des immenses avantages retirés du mesmérisme pour la cure des maladies les plus
rebelles, el la prévention de la douleur dans les opérations chirurgicales, et désirant que le bénéfice en soit étendu aux classes pauvres, dans la plus large mesure des eflbrts individuels, décide :
« 1° Qu'un hôpital mesmérien (Mesmcric Infirmary) « sera établi par contribution volontaire pour le traite-« ment des maladies et la privation de la douleur des « opérations chirurgicales;
« 2° Que la direction en sera confiée à un comité, com-« posé d'un président, vice-présidents, secrétaire, tré-« sorier et commissaires.
« 3° Que le président sera
« Le très-honorable comte de Ducie ;
« Les vice-présidents :
« Baron de Goldsmid,
« Vicomte Morpelh,
« R. Mouckton Milnes,
« J.-N. Langston,
« Révérend G. Sandby, jeune;
« Le trésorier :
« M. Briggs;
» Les membres du comité :
« Docteur Ashburner,
« Docteur Elliotson,
« M. Chandler, o M. FlintolT,
« M. J. Hands,
« M. D. Hands,
« M. F.-G. Johnston,
« M. S)mes,
| médecins,
chirurgiens,
« Révérend docteur Nixon ,
« Major Buekley,
« Capitaine John James,
« M. Blyt.Ii,
« M. Fradellc,
« M. Kingdom,
« M. Topliam. »
« La liste de souscription publiée le 15 avril dernier porte les dons à 20,375 fr., et la rente à 3,724 l'r., fournis, savoir : lesdons par soixante-quatre, la rente par soixante-six souscripteurs, la plupart redevables au magnétisme de la santé dout ils jouissent. Nous ferons prochainement connaître leurs noms; et afin de rendre prochaine l’ouverture de cette institution, dont le but est si louable et la réussite si désirable, nous ouvrirons une liste de souscription, qui ne peut manquer d'accueil auprès des magnélisles français. »
VARIÉTÉS.
Hydroscopie. — Nous avons plusieurs fois soutenu la possibilité de remplacer avec avantage les sourciers par des somnambules magnétiques. Le fait suivant, publié par le Journal de la Marne, en est une preuve bien évidente :
« Nous, soussignés, propriétaires de la ferme de Pen-nemort, commune de Maule, canton de Meulan (Seine-et-Oise), certifions que cette habitation, qui est dans
une position très-élevée, était totalement privée d'eau, et qu’il fallait aller chercher tous les jours à un kilomètre de distance celle qui était nécessaire pour l’usage de la maison et pour abreuver un grand nombre de bestiaux.
« Depuis longtemps on avait tenté inutilement tous les moyens de s’en procurer, lorsque, dans le mois de mai 1845, MmeReobourg, somnambule magnétique, vint à Pennemorl. Son mari la magnétisa et la mit en crise somnambulique, et on lui demanda si elle voyait des moyens de se procurer de l’eau. Après y avoir réfléchi quelque temps, elle assura qu’il y en avait à 15 mètres (45pieds), qu’elle venait par inQltration du Bois-Henry, et passait sous les bâtiments de la ferme de Pennemort. (Nous observerons ici que Mmo Reobourg, étrangère au pays, ne connaissait ni la ferme du Bois-llenry, ni sa position.) Elle s’est levée ensuite avec précipitation et a été jusque dans la cour, pour marquer l’endroit où il fallait creuser le puits ; elle dit que quand on serait à 15 mètres, il faudrait poursuivre la fouille dans le sens du terrain mouillé que l’on trouverait à cette profondeur. On ne suivit pas cette indication, et on creusa jusqu’à 33 à 34 mètres (100 pieds). Cependant, à 15 mètres, il se manifestait un suiutement qui tombait sur les travailleurs et les incommodait.
« Le découragement allait faire suspendre les travaux, lorsque l’on écrivit à M"‘c Reobourg, qui demeure à Châlons-sur-Marne. Elle assura de nouveau qu’il y avait de l’eau et qu'il fallait l’aller chercher, non en profoudeur, mais latéralement à l’endroit où le suintement s’était montré, et dans le sens qu’elle avait indiqué; ce que l’on üL. On creusa donc dans cette direction un petit caveau dont on rejeta la terre dans le puits, et à mesure que l’on avançait, l'eau devenait de plus en plus abondante.
« Lorsqu’on eut enlevé latéralement environ 13 mè-
très, on s’arrêta, parce qu’on avait de l’eau en quantité suffisante pour les besoins de la ferme.
« Ce travail a été entièrement terminé au mois de février dernier, et l’habitation doit à la lucidité somnam-bulique de Mme Rcobourg un avantage qu’on avait en vain cherché jusqu’alors.
• Ferme de Pennemorl, 13 avril 1847.
» V' Gilbert, Gilbert fils.
« Le maire de la commune de Juneauville certifie le fait ci-dessus énoncé ( la ferme de Penuemort n’étant qu’à un kilomètre et demi de cette commune).
• Jumeauville, 17 avril 1847.
« TnEVENON, maire; Daveluy, adjoint; Leroy, curé desservant; Bonnert, instituteur; G. Verrier, prop. ; PERTnois, bourrelier. »
Phytologie. — Le Père Hervier rapporte qu’un arbre magnétisé par Mesmer conserva scs feuilles plus longtemps, et au printemps en produisit plus tôt que les autres. Ce fait, rapproché des phénomènes sensitifs propres à quelques plantes, fit croire à l’identité du principe vital chez tous les êtres organisés, à une réciprocité d’influence entre les végétaux et les animaux. Mais, malgré de louables efforts pour déterminer la limite d’action du magnétisme mesmérien, le vague des expériences a été tel qu’on en est resté aux conjectures. De récentes recherches, entreprises dans un autre but, ramènent la discussion sur l’intéressant chapitre de l’unité vitale, et nous paraissent devoir faire abandonner les épithètes restrictives de : animal, humain, etc., qui circonscrivent la sphère d’influence magnétique.
Voici, d’après la Démocratie pacifique, le résumé des travaux dont nous voulons parler.
« M. démens, professeur de sciences naturelles au collège de Vevey (Suisse), vient de communiquer, dans un mémoire adressé à la Société vaudoisc des sciences naturelles, les résultats de plusieurs expériences physiologiques qu’il a entreprises dans le but d’étudier l’eftet de l’éther sur les végétaux.
« Il résulte des travaux de M. démens que les plantes s’éthérisent aussi facilement que les hommes et les animaux. On ne peut guère se faire une idée de la précision des effets sans voir répéter les expériences sous ses yeux.
« Qu’on prenne une branche d’épine-vinette (berberis vulgaris) et qu'on la place sous un verre à boire renversé pendant une minute au plus, si c’est au soleil, et trois minutes au plus à l’ombre, mais à la température de 12° ltéaumur, qu’on la relire, et que l’on essaie ensuite de faire mouvoir les étamines en les touchant à leur base, l’irritabilité aura entièrement disparu, et elle ne reviendra, dans le premier cas, qu’après un assez long laps de temps, l’action de l’éther ayant élé plus énergique; dans le second cas, la plante recouvre sa propriété primitive au bout d’une demi heure. On peut immédiatement après l’élhériser de nouveau, et il ne faut pas plus de temps pour la seconde que pour la première éthérisation. Après une nouvelle demi-heure, la plante redevient ce qu’elle était.
« Pour éthériser une sensitive (mimose pudica), il faut huit ou dix minutes d’influence au soleil, et à l’ombre naturellement davantage. L’insensibilité devient complète et disparaît entièrement au bout de deux heures.
« Les éthers chlorhydrique, azotique et acétique agissent de la môme manière que le sulfuriquc. »
Tribunaux. — Six mois de silence pouvaient faire croire que le ministère public avait abandonné les poursuites dirigées contre la dame l’onson, somnambule,
dont nous avons parlé page 85 de ce volume; il n’en était rien. Elle a comparu samedi dernier devant la 8e chambre de la police correctionnelle , présidée par M. d’Harbclot.
On lit à cet égard dans VEstafette du 21 :
«Une affaire assez curieuse, dans laquelle le magnétisme joue un rôle , se présentait aujourd’hui devant la 8" chambre de police correctionnelle. Voici les faits qui ont donné lieu contre la prévenue à la double prévention d’homicide par imprudence et de l’exercice illégal de la médecine.
« Au mois de novembre dernier, un sieur Baffart, dont l’enfant était fort malade, après avoir inutilement eu recours h toutes les ressources de la médecine, voulut essayer du somnambulisme; il fit venir la dame Ponson, dont la lucidité magnétique était, disait-on, fort remarquable. Elle fut endormie, donna une consultation, indiqua la maladie, prescrivit le remède; de l’aveu même du sieur Baflard, une amélioration notable survint quelques heures après, une rechute eut lieu et l’enfant mourut. Tels sont les faits dont la dame Ponson vient répondre.
a Aux débats, on entend un grand nombre de témoins qui tous viennent attester qu’eux-mémes ou quelqu’un de leur famille ont été guéris par les soins de la dame Ponson de maladies contre lesquelles la médecine ordinaire avait échoué.
«Néanmoins M. Saillard, avocat du roi, soutient la prévention relative à l’exercice illégal de la médecine, tout en abandonnant la prévention d’homicide par imprudence.
« Me Charles Hello a présenté la défense de la prévenue. Ma cliente, dit-il, ne donne point de consultations ni d’ordonnances écrites; elle donne tout simplement
des avis et des conseils, avec la condition formelle que les remèdes indiqués par elle seront soumis à l’appréciation ultérieure des médecins. Est-ce là, aux tenues d0 la loi, l’exercice illégal de la médecine? S’il en était ainsi, ne serions-nous pas tous les jours coupables, quand nous-mêmes, avec nos faibles lumières et notre expérience, nous indiquons à notre ami malade le remède que nous croyons devoir lui être salutaire?
« Quelle est la différence? Ali! c’est que madame Ponson est une somnambule; c’est qu'on veut frapper le magnétisme! Le magnétisme! mot magique qui fait sourire, et qui cependant pourrait bien avoir son côté sérieux. Autrefois on brûlait les magnétiseurs comme sorciers. Aujourd’hui on ne les regarde plus comme des nécromans ; mais trop souvent011 les prend pour de faux médecins ou pour des escrocs; on les traduit en police correctionnelle ou on les tourne en ridicule.
a Est-ce là de la justice, messieurs? Cette science que l’on affecte tant de mépriser ne subirait-elle pas plutôt le sort de toutes les découvertes et de toutes les idées nouvelles? Entre ces idées récentes et les notions reçues se livre, depuis le commencement du monde, une éternelle bataille. C’est la lutte du passé contre l’avenir : si le premier l’emportait sur le second , ce serait un temps d'arrêt dans l’histoire de l’humanité, ce serait le statu quo de l'intelligence ; mais si le préjugé a lutté longtemps contre le progrès de toutes les sciences, il a toujours été vaincu. Dans le temps où la planète Lever-rier vient d’être découverte, peut-on se rappeler sans étonnement que Galilée a passé les derniers jours de sa vie à répéter dans sa prison : Et cependant la terre tourne !
« Dans le temps où la magnifique invention des chemins de fer va changer la face du monde, peut-on se rappeler de sang-froid que celui qui inventa la vapeur
fût enchaîné comme un fou dans les cachots de Bicêtre, qu’il n’y reçut qu’une visite, celle du duc de Buckin-ghani et de Ninon de l’Enclos, et que la seule consolation accordée au génie fut la pitié d’un Anglais et le sourire d'une courtisane.
« Messieurs, que ces exemples nous servent de leçon ; ne prêtons pas à chaque idée nouvelle un secours exagéré, mais ne Pétouflons pas systématiquement comme l’œuvre de la fraude et du charlatanisme, car nous ne savons pas le rôle qu’elle peut être appelée un jour à jouer dans le monde.
« Le tribunal, statuant après celte plaidoirie, a acquitté la dame Ponson de la prévention d’homicide par imprudence , et l’a condamnée seulement comme coupable d’exercice illégal de la médecine. »
— Le somnambulisme, produit d’une force dont on commence à comprendre la loi, se multiplie à l’infini; il est destiné à s’établir partout en concurrence de la médecine. Les doctes facultés, justement alarmées de sa supériorité, en défèrent les instruments à la justice; mais c’est en vain que les tribunaux frapperont ces prétendus coupables avec une loi qui fut faite lorsque cette découverte n’était point établie. Tout ce qui n’est pas défendu est permis, et c’est fausser l’esprit de la loi, qui fut faite contre l’homme qui a la conscience de ses actes, que de l’appliquer à une personne dont les révélations ou les conseils ne tiennent rien de la veille. Nous regrettons bien vivement qu’aucun avocat n’ait encore plaidé dans ces cas l’incompélence du tribunal, qui excède ainsi les prescriptions légales. Ce serait un plaidoyer qui aurait l’assentiment de tous les esprits judicieux. « Car, comme l’a dit Mesmer, celui qui démontre qn’il peut guérir ne doit pas être privé de la liberté de le faire. »
Nous osons prévoir qu’à une époque rapprochée, le
courant des choses amènera naturellement l’examen de la juridiction ancienne; et si les somnambules continuent d’être punis, on provoquera une loi nouvelle, différente de celle qui se discute en ce moment, car elle est absurde et place nos législateurs au rang des hommes les moins sages, les moins prévoyants, qui sacrifient les droits de l’humanité, la conservation des êtres à des intérêts de caste, à des besoins du moment.
a La médecine n’est pas un droit, mais une science, » et le temps viendra bientôt où dans chaque famille on verra s’exercer sur les membres souffrants les préceptes nouveaux. Nous sentons que si nous poursuivions le développement de celte thèse, nous donnerions cours à l'indignation que nous éprouvons; car nous avous souci des maux d'autrui, et notre douleur augmente en voyant protéger la fausse science qui les éternise pour les exploiter. Mais nous nous arrêtons ; nos plaintes ne feraient actuellement qu’irriter nos antagonistes et augmenter les entraves. Que ceux qui sont frappés se résignent; toute science, comme chaque religion, doit avoir ses martyrs : c’est la conséquence de leur rébellion contre l’ordre de choses établi. En attendant le triomphe solennel , ils doivent se féliciter de la modération des tribunaux , qui toujours ont condamné, mais au minimum de la peine, ce qui prouve qu'ils ne partagent point les passions du corps médical.
Les médecins, voyant leur domaine envahi, ont fait alliance offensive et défensive pour traquer tous les assaillants, mais surtout les somnambules, qu’ils ont juré d’exterminer. A peine le procès de madame Ponson est fini qu’un autre identique commence contre une jeune personne magnétisée par M. L‘‘\ Nous en entretiendrons ultérieurement nos lecteurs, quoiqu’on puisse dire d’avance qu’elle encourra la môme peine. — Quand il y en aura cent, nous ferons une croix.
Chronique. — L’Union monarchique et la Démocratie •pacifique du 18, le Journal de Coulanccs du 20, et la Mouche du 22, reproduisent en partie le procès-verbal des trois opérations qui viennent d’avoir lieu h Cherbourg.
—La Gazette des Tribunaux avait dit, dans son compterendu du procès de madame Pouson, que celle-ci avait été condamnée à quinze jours de prison au lieu de 15 fr. d'amende. Elle rectifie cette erreur dans sou numéro du 22.
— M. le professeur Ennemoser, de Munich, va incessamment mettre au jour un ouvrage en deux volumes sur le magnétisme animal, considéré comme principe physique.
— On édite en ce moment à Grenoble un livre de M. le comte Humbert de Beaumont-Brivasac qui doit être intitulé : Conférences magnêtologiques.
— La Revue gallicane d’avril et de mai fait d'inutiles efforts et de vains frais d’érudition pour prouver que le magnétisme animal vient d’une source détestable, c’est-à-dire satanique. Elle promet une suite d’articles sur l’identité du magnétisme et de la magie, «justement détestée de nos pères. » Le diable étant l’agent de l’un et de l’autre, la conséquence logique sera que nous méritons tous d’être brûlés. Ce qui se passe en Espagne va parfaitement venir en aide à son charitable raisonnement. Ceci nous fournira sans doute l’occasion d’entrer dans l’examen de la question religieuse pour réduire à néant ces misérables arguties des coryphées de la superstition.
— La Tr ibune lyonnaise de mai fait avec une remarquable précision le parallèle de l’insensibilité magnétique et élhéreuse.
BIBLIOGRAPHIE.
L'art de »iaunétiser, par M. Lafoxtaink. 1 vol. in-8®. Paris, 18i7, chez Germer-Baillière. Prix : Sfr.
Vonlez-vons des faits? en voilà. M. Lafontaine, armé de scs redoutables mains, frappe à tort et à travers. C’est un magnétiseur sans pareil; avec lui point de ménagement, jamais d’embarras, vienne lui résiste, l’affection la plus rebelle cède à ses efforts; guérir un sourd-muet n’est qu’un jeu pour lui, et les paralytiques sont capables de fuir rien qu’à son approche.... Dans notre simplicité, nous croyions ces choses plus difficiles ; mais nous n’étions que des enfants, marchant à peine et bégayant nos explications. Dans l’ouvrage que nous annonçons, l’explication suit de près l’expérience, et celui qui, après cette lecture, aurait encore des doutes, serait, ma foi, d’un limon bien grossier.
Dans chaque art il faut des manœuvres, qui sont utiles tant qu’ils ne sortent point de leur spécialité; ils préparent les matériaux : c’est à d’autres hommes de les faire servir à l’édiücc, d’en surveiller l’emploi.
il ne faut pas chercher dans le livre de M. Lafontaine l’explication des divers phénomènes magnétiques; il ne connaît qu’une chose, le fluide, qui, selon lui, est homogène. Il n’admet point que cet agent acquière des qualités morales; par conséquent, les effets qui en résultent sont toujours physiques, ce qui est coutrairoà l’observation. Il y a encore bien d'autres défauts à signaler, mais nous l’avons dit, ce livre contient des faits nombreux, des récits curieux; c’cst là son mérite, et à ce titre il doit faire partie de la bibliothèque des magnétiseurs.
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (de Garnay).
Paris. — Imprimerie d'A. Re>b eiCooip., rue do Seine, 33.
TABLE
DU QUATRIÈME VOLUME.
Ablation de sarcocèle. 199
— d’amygdales. 226
— de glandes. Î74, 837
Académie des sciences. 19,89, 200
— — de Stockholm. 76
— de médecine. 55
Affaire Cuny. 29, 87
Aimant médicinal. 337
Ambre — 334
Amputation du bras. 68
— de la jambe. 226
Angine gnngréneuse. 193
Antipathies. 168,207
Association des médecins de
Paris. 144
Art de magnétiser (1’). 882
Astrologie. 205
Athénée magnétique. 340
Avis aux abonnés. 27, 319
Avulsion de dents. 220
Banquet mesmérien. 212, 254, 287,
294, 351.
— offert à M. du PoleU 120
Brûlures. 353
Congrès scientifique. 31
— médical. 90
Catalepsie hytérique. 10
Cécité. 4»
Conjonctivite. 09
Céphalalgie. 02
Conversion de médecins. 253
Conférences magnétiques. 51, 70, 109, 140, 181, 202, 381 Chronique magnétique, 127, 158, 191, 220, 255, 288, 349 Destinées probables du magnétisme. 229 Epilepsie. 354 Emirs magnétiseurs. 61 Escarmouches médicales, 115 Electricité médicinale. 336 Ether ei le magnétisme (I’) 319 Ethérisation des animaux. 55, 89, 154, 159
— des plantes, 375
Extase épidémique. 216
Erreurs cl préjugés. 223
Faculté de médecine. 331
Fièvre cérébrale. 40
— typhoïde. 180, 227
— intermittente. 46
— hectique. 46 Filles électriques. 209, 256 Gastio^nléritc. 40 Gastralgie. 142 Grossesse fictive. 30, 370 Ilomœopalhic. 156 Hystérie tympanique. 301 Hydroscopie. 54, 373 Hémiplégie. 69, 104 Hôpital magn. de Londres. 371 Irène. 81>153
Insensibilité. Voy. Op. chirurg. Idiotisme provoqué. 147
Justice naturelle. 33
— criminelle. 129 Jury magnétique. 321 Lombago. 00 Léthargie. 318 Lucidité. Voy. Puységurisme. Magnétisme & Lyon. 3, 97
— Poitiers. 200
— Rome. 345
— Cherbourg. 274
— en Espagne. 348
— à Calcutta. 07 Manuscrits de Mesmer. 33,129 Migraine. 45, 68 Magie ancienne. *61, 257
— magnétique. Voy. Conférences.
Mort en somnambulisme. 80
Médecin-somnambule. 84
Massage. 338
Néologie. 24
Nécrologie. 26,219
Napoléon et les prophéties. 239 Opérations chirurgicales. 07, 274, 290, 357
Opinions de M. de Balzac. 284
Prévision. 10
Prophéties d'Olivnrius. 244
Pleurésie. 40
Paralysies. 47,69
Pénalités somnambuliques. 21 Puységurisme. 10, 37, 136, 23G Prédiction de Danton. 317
Phénomènes magnétiques transitoires. 162,257 Rétrospeclion. 13 Rhumatismes. 46, 6S Revue des journaux. 59, 86 Résurrections par M. Laforgue. 107 Révélation il Odessa. 275 Société du magnétisme. 16, 114
— magnétologique. 50, 309
— — de Port-Louis. 30G
— du mesmérisme. 145 Songes. 214 Sciatique. 46, 68 Suppression de règles. 45 Sursensibilité. 155, 304 Somnambulisme judiciaire. 281 Sympathies. 168, 203 Théomédisme. 162 Tribunaux français. 85, 376
— étrangers. 214. 275, 348
FIS DE LA TABLE.
JOURNAL
DU
MAGNÉTISME
RÉDIGÉ PAR
USE SOCIÉTÉ DE MAGNÉTISEURS ET DE MÉDECINS
BOUS LA DIRECTION DE
M. LE BARON DU POTET.
La vérité, n'importe par quelle bouche; le bien, n’imporle par quelles mains.
TOME Y.
PARIS
BUREAUX : BUE D'ANTIN, 12.
JOURNAL
DU
MAGNÉTISME.
STATUTS
DE LA
SOCIÉTÉ Dü MESMÉRISME DE PAIIIS.
Article F". — La Société du mesmérisme, fondée le 17 février 1814, sous le titre de : Société de •philosophie appliquée au magnétisme, a pour devise cet aphorisme de Mesmer :
CI la nature offre on moyen universel de guérir et de (I préserver les hommes. »
Art. II. — Elle a pour but:
1° La connaissance du magnétisme animal ou mesmérisme pur et appliqué;
2° La propagation de celte découverte dans les masses, selon les vues de Mesmer, Puységur, De-leuze et leurs disciples.
TOME V. — JV° 49--10 JUILLET 1847. 1
Art. III. — Les moyens qu’elle emploie pour arriver à ces fins sont :
1° L’étude en commun de tous les phénomènes magnétiques et analogues, considérés isolément et dans leurs rapports avec les diverses branches des connaissances humaines;
2° L’enseignement mutuel du mesmérisme théorique et pratique, ainsi que des sciences adjuvantes, telles que : physique, anatomie , physiologie, phrénologie, etc.;
8° La publication d’un résumé de scs travaux et l’enlretien d’une correspondance avec les sociétés magnétiques.
Art. IV. — Elle se compose de membres: honoraires, titulaires, correspondants, stagiaires et adhérents.
Les honoraires sont :
1* I)cs membres démissionnaires auxquels la Société décerne un titre honorifique qui les rattache perpétuellement à elle ;
2° Des magnétistes, connus par des travaux majeurs , dont elle récompense le mérite en se les associant.
Les titulaires sont des mesméristes reconnus aptes à concourir à l’accomplissement du double but que la Société se propose d’atteindre.
Les correspondants, nationaux ou étrangers, sont des mesméristes reconnus capables d’étendre les rapports de la Société, de l’instruire des faits qu’elle ignore, et d’asseoir son jugement sur ceux qu’elle ne peut examiner.
Les stagiaires sont des magnétiste9 dont les connaissances ont besoin d’être augmentées ou
améliorées avant qu’ils puissent être reçus membres titulaires.
Les adhérents sont des partisans du magnétisme qui n'ont pas les connaissances requises pour entrer membres actifs de la Société.
Aiit. V. — L’admission des membres sus-dési-gnés n’a lieu qu’aux conditions suivantes :
1° Le titre de membre honoraire ne peut être conféré qu’en raison de services éminents rendus à la Science ou à la Société, sur la proposilion ou avec l’agrément du Bureau et a la majorité des quatre cinquièmes des voix.
2° Tout candidat au grade de membre titulaire doit être majeur, stagiaire depuis trois, six ou douze mois et doit subir un examen théorique consistant à traiter par écrit et soutenir oralement, sons forme de thèse, une question choisie par lui entre celles que le Bureau propose pour cet objet.
3° Les candidats correspondants, quand ils sont présents, doivent subir un examen théorique et pratique. Absents, il leur suffit d’étre présentés par deux membres, honoraires ou titulaires, faisant connaître, dans un rapport écrit, leurs titres moraux et scientifiques.
4° Les membres stagiaires pouvant être requis comme auxiliaires ou suppléants des titulaires, les candidats à ce grade doivent être âgé de vingt ans et justifier de connaissances ■pratiques dans un examen ail hoc, c’est-à-dire qu’ils doivent magnétiser devant la Société d’après le programme arrêté par elle pour constituer une méthode expérimentale uniforme.
Leur demande d’admission doit être appuyée
par deux membres, honoraires ou titulaires, à moins qu’ils ne soient adhérents depuis trois mois.
5* Les adhérents, n’ayant aucun office à remplir, ne sont tenus à aucun eiamen ; il sufüt qu’ils soient présentés au Bureau par deux membres, au moins stagiaires.
Les dames peuvent être admises dans cette catégorie.
Akt. VI. — La durée du stage est de :
1° Trois mois pour les médecins, auteurs en mesmérisme, ou bacheliers ès-sciences physiques.
2° Six mois pour les bacheliers ès-leltres, gradués ès-sciences ou membres d’une société magnétique connue.
3° Un an pour tous ceux qui n’ont aucun des titres sus-énoncés.
Art. VII. — Les membres honoraires et titulaires jouissent de tous les droits. Les stagiaires sont privés de ceux de vote, d’élection et d’éligibilité. Les adhérents n’ont que celui d’assister aux séances.
Art. VIII. — Le Bureau, ou conseil chargé de la direction et de l’administration de la Société, «e compose d’un président, deux vice-présidents, un secrétaire, deux secrétaires adjoints, deux censeurs, un archiviste et un trésorier.
Art. IX. — Le Bureau représente la Société. 11 admet les membres adhérents, arrête le programme des cours et des examens, règle l’emploi des fonds, etc.; en un mot, il gouverne d’après les statuts et règlements, de manière à assurer le progrès de la Société.
11 a l’initiative des mesures imprévues; à l'expiration de ses fonctions il doit un compte détaillé de sa gestion.
Art. X. — Le président, ou en son absence l'un des vice-présidents, ouvre, dirige et clôt les séances, dont il a la police exclusive; c'est-à-dire qu’il accorde, continue et ôte la parole aux orateurs, expose l’état des questions à l’ordre du jour, désigne les expérimentateurs, résume les travaux des séances, et le tout ainsi que les circonstances lui paraissent l’exiger.
Il porte la parole au nom de la Société, dont il garde et appose le sceau.
Le secrétaire est chargé de la rédaction des procès-verbaux, des arrêtés, de la correspondance, etc. Il est suppléé par ses adjoints, excepté pour le rapport annuel du Bureau.
Les censeurs veillent au maintien de l’ordre et à l’exécution des statuts et règlements.
L’archiviste veille à la conservation des livres, archives et autres objets appartenant à la Société.
Le trésorier tient la comptabilité; il rend un compte trimestriel au Bureau.
Art. XI. — L es votes sur toute proposition ont lieu k la simple majorité par assis et levé, ou au scrutin secret sur la demande de trois membres.
L’admission des titulaires correspondants et stagiaires n’a lieu qu'à la majorité de deux tiers des voix.
Art. XII.—Toute proposition, pour être prise en considération, doit être écrite et appuyée par deux membres, honoraires ou titulaires. La discussion en est renvoyée à quinzaine , à moins que le
Bureau ne décide qu’il sera statué séance tenante.
AnT. XIII. — Tout membre. lors de son admission, prête serment d'observer les statuts et règlements de la Société; de n’employer le magnétisme que dans un noble but, s’interdisant tout moyen réprouvé par la morale et les convenances.
Art. XIV. — La Société a un conseil de discipline composé de cinq membres, devant lequel le président et un censeur peuvent traduire les membres dont la conduite leur paraît répréhensible.
Les peines que ce conseil peut prononcer, après l’avertissement et le rappel à l’ordre du président, sont: 1° la réprimande ; 2° la suspension ; 3* l’expulsion avec radiation.
Les formes dans lesquelles procède le conseil de discipline sont tracées par les règlements.
Art. XV. — Les membres du Bureau et ceux du conseil de discipline sont élus pour un an et rééli-gibles.
Art. XVI. — Les membres honoraires, titulaires et correspondants admis reçoiventun diplôme; les stagiaires et adhérents, une carte spéciale, sur lesquels il est perçu un droit déterminé par les règlements.
Art. XVII.—La Société pourvoit à ses dépenses au moyen d’une cotisation mensuelle, dont la quotité est fixée chaque année.
Art. XVIII. — Une caisse de prévoyance, alimentée par le produit des cartes et diplômes, et les dons volontaires, est établie pour venir au secours des magnétistes et faire face à des dépenses imprévues.
Art. XIX. — Les séances de la Société sont
hebdomadaires, et celles du Bureau mensuelles. Les preinièresont lieu tous les jeudis, les secondes le 17 de chaque mois.
Une séance annuelle est consacrée le 23 mai, jour anniversaire de la naissance de Mesmer, à une étude biographique sur cet homme illustre ou scs disciples, et à l'exposition des progrès généraux du mesmérisme.
Une autre séance également annuelle a lieu le 17 février, jour anniversaire de la fondation de la Société. Elle est consacrée au rapport annuel du Bureau, au renouvellement du conseil de discipline et du Bureau.
Toute autre séance ou réunion tenue sans 1 autorisation du président est nulle.
Art. XX. — Les présents statuts, adoptés pour trois ans, à partir du 17 février 1847, abrogent toutes les dispositions antérieures.
Ont été élus pour l’exercice 1847-48 :
Président, M. Aubin Gauthier.
( M. Hébert (de Garnay).
Vice-présidents, ^ M
Secrétaire, M. Maeyens.
(M. Grumet.
Secrét.-adjoints, J R(>|,t
( M. Girollet.
Censeurs,• .
’ { M. Lovy.
Trésorier, M. Lacoste.
Archiviste, M. Lebrun.
SOCIÉTÉS SAVANTES.
FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS.
Cours de M. Trousseau.
II y a entre la médecine et le magnétisme une con-nexité si grande qu’on ne peut toucher l’un sans éveiller l’autre. Les princes de l’Ecole, qui savent bien la valeur du proscrit mesmérien, en évitent les renconlres sérieuses et se bornent aux escarmouches. Un seul s’est montré plus osé : SI. Trousseau n’a pas craint de faire le parallèle de nos prétentions réciproques dans les névroses. Mais celle témérité lui a sans doute valu la réprimande académique; car nous l’avons entendu à la lin de son cours de 1815 contredire le début, en articulant des faits magnétiques positifs dont il déguisait les conséquences logiques par des comparaisons fausses, des rapprochements bâtards. Des réticences, des paradoxes peuvent bien donner le change à quelques personnes; mais les sophismes, les contradictions, mécontentent tous les esprits sérieux. Il faut opter, ou les immortels en courroux vont lancer la foudre. Que faire? Vite une victime pour apaiser leur colère... C’est sur d’Amador qu'est tombé le choix. Voici sa sentence prononcée dans une occasion solennelle : « On dira qu’il « s’est trouvé dans les universités médicales des pro-i fesseurs assez oublieux de leur gravité, assez ignorants « de la pathologie pour parler sérieusement de l’ho-« mœopathie. » Puis, pour éviter l’accusation de ma-
gnétismc et dérouter l’espoir des mesmériens, on s’empressera d’ajouter : « On demandera si le siècle de « l’homœopathie avait beaucoup à envier à celui des «astrologues, des sorciers, des convulsionnaires, des « magnétiseurs, etc. »
Si les magnétiseurs, scandalisés de telles oscillations de langage, se plaignent, élèvent, la voix, on les calmera avec quelques-unes de ces paroles mielleuses qui, comme l'o/fa mcllc soporata, endorment les imprudents qui les goûtent, et libéré de ce côt é, M. Trousseau prendra son vol vers d’autres régions, parcourra les plaines spas-modiques, où le musc, l'assa, l’éther, régnent en souverains. L’y voulez-vous suivre? Allons.
Voici d’abord un phénomène d’innervation portant sur les organes de nutrition, de génération et de myo-lilité, dont le premier degré se traduit par : se trouver mal ; la cime, par convulsion. Considéré d’une manière générale, on lui donne le nom de spasme, qui signifie tiraillement. 11 siège dans les troncs nerveux racliidiens et ganglionnaires, prenant diverses formes qu'on désigne par : convulsions, hystérie, êclampsie, épilepsie, etc.
Les médicaments qui parent aux accidents qui en résultent sont dits antispasmodiques, parce qu’ils agissent sur les nerfs en sens contraire de la cause perturbatrice. Les principaux sont : musc, assa-fœtida, castoréum, valériane,camphre, éther; lesquels, réuuis, forment le premier membre de l’équation algébrique suivante :
Médicam. : antispasmodiques = mesmérisme.
« S’en suit la démonstration d'icelle, d'autant mcil-« leure que la balance gît au front de chacun.»
La racine de valériane agit comme sédatif. Elle fait sur les tensions musculaires des hystériques l'effet de l’humidité sur une corde à boyau qui se relâche tout à coup. Là est le fond de la question. Qu’est-ce que l’hystérie?
Une maladie si vaste que je devrais la comparer à la tour de Babel, car elle amena la confusion des langues et des pathologistes; une maladie-mère, qui a sa demeure dans l’utérus, cet organe si peu connu dans scs phénomènes morbides, si incompréhensible de bizarrerie dans ses manières d'être. Une fois attaqué, c’est un foyer qui sème le mal par toute l’organisation, et ce mal, quand il est en dehors de la lancette et du spéculum, prend le nom général d’hystérie.
La valériane administrée « réussit, dit M. Trous-« seau, dans toutes les hystéries peu intenses et com-«mençantes, surtout peu compliquées en accidents « nerveux, 011 contre ceux-ci sans complication d’hys-« lé rie. » C’est-à-dire qu’elle ne guérit rien du tout en tant que spasme; voilà du moins ce que je comprends.
— Ce que je comprends mieux, c’est, que cette maladie est généralement mal traitée, par la raison toute simple qu’on prend scs différents aspects pour autant d’affections particulières, selon que tel ou tel pathologiste l’envisage de tel ou tel point de vue. Qu’on vous montre, par exemple, une à une les six faces d’un cube en cachant les autres, serez-vous jamais capable de dire: C’est un cube? De même on décrit l’hystérie sans parler de l’utérus, et cela parce qu’on n’a rien pour l’attaquer. Vaudrait beaucoup mieux dire : C’est nerveux; ordonner la campagne, la fleur d’oranger, que de longuement discourir pour conclure qu’on n’y peut rien.
Le seul remède bon dans ce cas est celui qui peut attaquer directement l'organe d’où s’irradie le désordre, non dans sa texture, comme le fer rouge, mais dans son dynamisme. Or, le premier qui se présente est le magnétisme, puisqu’on peut, à volonté, le diriger sur telle ou telle partie et produire tel ou tel elïet. Avez-vous des crampes, des convulsions? L’utérus fait des siennes, paralysez-le. Le fluide vital surabonde 011 manque,
prend les dehors du calorique ou de l’électricité? Neutralisez.
Fabricius Colomna prétend s’être guéri de l’épilepsie avec la valériane. Mais remarquons qu'en ces temps toute attaque spasmodique à cause indéterminée était de l’épilepsie. Aujourd’hui les convulsions accidentelles, durassent-elles quinze jours, ne sont que des attaques épileptiformcs. I.’épilepsie est intermittente, périodique, et se caractérise par la courbure en arrière de la colonue vertébrale, le carus, la céphalalgie, l’incontinence d’urine, durant souvent moins de deux minutes. Cette maladie est très-rare; la plupart des cas regardés comme véritablement épileptiques sont seulement des édampsies épileptiformcs. Ceci ne diminue en rien le mérite des cures faites par le mesmérisme; mais il est bon que les magnétiseurs le sachent.
L’assa-fœtida passe pour le spécifique des flatulences stomacales des gens de cabinet. Mais chaque magnétiseur sait assez l’empire du lluide dans les digestions, les gargouillements intestinaux, pour ne jamais recourir à si détestable drogue. Le nom seul de stercus diabolisuffit pour rejeter ce remède, tout persan qu’il est. Je laisse donc ce goût à l’Asie et le fromage de Marolles à M. Trousseau.
« Le musc, dit-il, est une odeur effroyable qui suffit à « donner la fièvre et le vertige, rien que d’y penser. — « Qu’une femme à musc pénètre dans un salon, au bout « de quelques secondes vous verrez huit 011 dix personnes « s’enfuir, l’une pour mal de tête, l’autre pour attaque « de nerfs, etc.
« 11 réussit merveilleusement dans le delirum Iremens « et l’hystérie. » Oui, mais il laisse aux malades pour deux ou trois ans l’odeur de chevrotain.
Castoreum s’emploie dans les mêmes cas, compliqués d’aménorrhée. Mais le magnétisme surpasse tous ces
remèdes, voire même le camphre, quoi qu'en dise M. Ras-pail, dont j’admire le savoir, mais dont on ne peut imiter la prodigalité en fait de cigarettes .
M. Trousseau dit que le camphre dissous dans l’éther apaise les névralgies temporales. Je crois plutôt que c’est l’étlicr, par la soustraction de calorique que son évaporation procure. Là encore le magnétisme est supérieur. Enfin, j’arrive à l’éther, l’éther si prôné , si vanté, que ses vapeurs ont peine à grossir assez vite pour remplir le cadre de sa réputation. Pas un chirurgien qui ne s’en parfume, pas un médecin qui ne le sente d’une lieue. L’éther ! Ecoutez donc M. Trousseau:
« C’est un des moyens les plus utiles dont l'humanité « puisse sc glorifier, s’applaudir. » Mais M. Trousseau ne l’emploierait pa9 sur lui-méme; il n’est point de l’humanité, il exerce l'humanité.
Entendons-nous sur ces mots.
L’insensibilité produite par le mesmérisme n’avait pas trouvé de rivalité; les médecins la niaient, mais c’était parti pris. L’éther surgit tout à coup d’Amérique ; on ne nie plus, bien au contraire, on attaque armes en main, en disant : Qu’ils vantent donc encore leur magnétisme; qn’ils osent le comparer avec l’éther; l'humanité triomphe avec nous, etc., etc. Oh! oh! messieurs, le charme ébrieux vous tient; vous oubliez que l’indolorisme de l’éther n’est pas neuf. Il y a dix ans, le docteur Pidoux signalait Yoblusion des sens; mais alors l’amour de l’humanité était trop obtus probablement, et l’on ne songea pas à l’inbalatiou. L’éther arrivant donc rendit les médecins philanthropes; tous les bistouris se levèrent comme une armée de lances et vinrent fondre sur les hôpitaux. L’amour de l’humanité prit soudain une si large extension qu’on se servit de l’éther jusque pour tailler, rogner les verrues. J’ai vu de vieilles et antiques ferrailles ouvrir leurs charnières ankylosées pour
un coup d’étber an piton des opérations. Dans ce coup de feu, en lit-on, grand Dieu!
Heureusement, cet amour de l’humanité s'affaiblit peu à peu ; on empoisonna moins de monde. Et quand je dis empoisonner, ce n’est pas sans raison. J’ai assisté aux débuts de l’éther en France, et depuis j’ai étudié dans toutes scs phases la fureur de l’éthérisation. Ne pouvant rapporter tous les cas fâcheux dont j ai été témoin, je vais en citer deux qui m’ont à jamais dégoûte de l’éther.
1° Un homme élliérisé à Saint-Louis pour un phlegmon à ouvrir fut pendant trois jours dans un état d’exaspération épouvantable, à quoi succéda une véritable prostration typhoïque. Le sixième jour, ce désordre disparut; mais s’il avait dépendu du malade de saisir le chirurgien, cclui-ci ne serait pas député aujourd’hui.
2° Un homme, ayant au bras une tumeur de 14 kilogrammes, éthérisé dans le même service, ne sent rien aux premiers coups de bistouri; mais quand on arrive aux ligaments articulaires, il pousse des vociférations et tombe dans une syncope telle qu’on le crut mort. Cependant l’opération s’acheva sans autres accidents, mais le malade trépassa le septième jour. Yoici les détails de l’autopsie...... Je comprends votre répugnance à poursuivre; mais on ne connaît l’arbre qu’à ses fruits ; assistez donc à la récolte de ceux-ci.
L’auscultation et la percusión ayant fait diagnostiquer de la péripneumonie, il devait se trouver une adhérence des plèvres et un épanchement considérable. Rien de tout cela; mais le poumon droit était gangrené dans toute sa partie inférieure; le gauche l’était moins; mais les bronches étaient fortement injectées, et la muqueuse s’en détachait comme des escarres. Les morceaux de poumon j étés U l’eau tombaient au fond comme du plomb.
Cet accident ne pouvait ótre attribué à l'inflammation de la plaie voisine, les intercostaux et les vaisseaux sous-claviers étant parfaitement sains. Le tissu du cœur était flasque et se déchirait comme de l'amadou ; il en était de même des muscles, surtout le psoas iliaque, ce qui n’a jamais lieu, le cadavre serait-il ouvert quinze jours après la mort, et celui-ci le fut au bout de vingt quatre heures. A l’ouverture du crâne on trouva des adhérences à l'arachnoïde, les lobes piquetés de sang, les méninges très-gonflées.
M. Richer, qui avait fait l’opération, dit, en faisant cette autopsie : « J’ai vu un cas pareil chez M. Velpeau ; « maintenantje n’élhériserai plus.—Vous concluez donc « que c’est l’éther qui a causé la mort? remarqua un « médecin présent. — Je ne dis pas cela, mais ma conci science me défend d'éthériser désormais. »
Voilà deux faits qui parlent sans ambages, deux faits qui prouvent tout ce que peut l’amour de l'humanité dirigé avec intelligence, deux faits qui font le triomphe du mesmérisme. En effet, avec lui pas un seul cas de ce genre; jamais aucun accident: au contraire, les plaies se cicatrisent avec toute la promptitude désirable; jamais de résorption purulente : elle n’est pas possible.
Outre que l’éthérisation est suivie d’accidents inflammatoires nombreux, de plaies baveuses, il y a une considération qui doit faire à jamais bannir l’éther, c’est qu’il noircit la pourpre des artères. Nos chirurgiens passent légèrement sur ce phénomène capital, qui n’est pour eux que de la rutilation à un degré moindre. — C’est vraiment abuser des mots! — Et, en entendant M. Trousseau dire que, « pour bien réussir, il faut que le malade soit ivre-« mort,» j’ai ressenti toute l’indignation de M. Magen-die; mais dans un autre sens, car lui c’est par scepticisme.
Somme toute, nous adressant à l’âme et nos adver-
saires au corps que la lumière divine ne soutient plus, l’équation que j’ai proposée n’est plus possible, et je l’abandonne pour clamer avec la phalange du 23 mai :
Non, l'éther D’outre-mcr Ne détrônera pas Mesmer.
E.-V. Lesgaugris.
ÉTUDES SUR LE SOMNAMBULISME.
§ X. — PUYSÉGIRISME.
Septième observation.
Les facultés humaines ne sont pas exactement pondérées; il y en a toujours de plus puissantes ou de plus actives dont l'exercice trouble l’équilibre, l’harmonie des fonctions cérébrales, et constitue les aptitudes natives ou tendances individuelles.
One ne furent à louts toutes grâces données ;
mais chacun reçut un don spécial, des aspirations diverses, afin que la variété se trouvât dans l’unité. Nous naissons différents; mais nous serions égaux si la société ne comprimait l’essor des penchants que la nature nous
donne, si nos dispositions pouvaient trouver l’objet qui leur correspond.
Quand nos virtualités rencontrent leur incitateur, elles se manifestent soudainement : le génie a été évoqué, l’inspiration latente éclate; la vocation est réveillée, le talent la suivra de près. Celui qui, à la vue fortuite d’un tableau, d'une statue, à l’audition inattendue d’un poëme, d’un discours, etc., se sent capable de les imiter, peut, sans grand labeur, produire des œuvres qui le feront paraître supérieur.
Au contraire, lorsque nul son ne frappe notre oreille, que mullc clarté n’arrive à notre œil, qu’aucun parfum n’émeut notre odorat, qu’aucune saveur n’Iiuinecte notre bouche, que nul contact n’éveille notre sympathie, nos instincts sommeillent toute la vie, et nous mourons comme des êtres iuûrncs, accusant Dieu d’injustice.
Quand nulle pensée n’a fait vibrer la harpe animique, qu’aucune idée du dehors n’a trouvé d'écho en nous, c’est que le clavier phrénique n’a point élé en entier parcouru. Le magnétisme en met en relief les touches vierges et les amène vite au rhythme normal. Sous son incubation vivifiante on voit éclore tout à coup des facultés instinctives, affectives et intellectuelles qu’on ne supposait point être en germe dans les individus soumis à son influence. Il en est des fonctions corporelles comme des spirituelles. Mais je ne puis les examiner en détail; c’est le fait d’une pluma mieux exercée, d’un cerveau pins meublé. Je ne veux, dans ce vaste tableau, prendre que l’instinct poétique dont j’ai vu ces jours-ci un bel exemple.
Sans remonter aux oracles antiques, dont la perfection est suspecte à Cicéron, nous trouvons bon nombre de somnambules répondant en vers aux questions qui leur sont adressées.
Le docteur Gorgeret en cite une qui fit plusieurs chansons, dont la plus remarquable a été publiée dans le journal la Tyrlèe du Midi. 11 l'ait remarquer qu’elle n’en faisait jamais qu’un couplet par sommeil ; qu'elle était sans éducation, et que son instruction se bornait à la lecture et à l’écriture.
Voici nn compliment en bouts-rimés qu’elle fit un jour à des personnes converties par une de ses séances : toutes les linales sont en en t.
Je dois, messieurs, en ce moment,
Vous faire mon remerciement
De tant de bien et soulagement
Que le magnétisme vient d’opérer vraiment.
Ali! que l’on a de jolis sentiments
Dans ce sommeil ! Dieu est toujours présent.
Prions-le donc ¡1 chaque moment De nous bénir au jour du jugement.
M. du Polet cite aussi, tome 1er, page 342 de ce journal, des vers russes composés en somnambulisme. La traduction révèle une grande élévation de sentiment; mais la personne étant instruite, on peut supposer l’intervention des réminiscences de la veille.
Il y a environ trois ans ou a représenté sur le théâtre de Barcelone une pièce composée en sommeil magnétique par une jeune personne de distinction, magnétisée secrètement. La pièce, quoiqu'anonyme, eut un grand succès; mais dans ce cas encore il y avait connaissance des règles poétiques, et le choix des expressions n'est pas plus remarquable que celui des idées : la pensée est toujours rendue par des images frappantes, des symboles d’une exacte portée.
Je ne m'arrête | as sur les autres exemples plus ou moins connus des pi rsonn 's qui s’occupent particulièrement du somnambulisme.
La personne qui compose les fragments que je vais transcrire est. extatique magnétique. Elle a de l'éducation: mais on verra facilement à la lecture de ses vers que les règles prosodiques lui sont étrangères. Elle n’a jamais rien composé durant la veille et ne s’occupe nullement de poésie; mais dans sa jeunesse elle apprenait aisément de longnes tirades.
Endormie, elle est sans prétention et poétise souvent sans s'en apercevoir; quand elle cherche, les vers sont moins riches.
Les suivants ont été faits sans le vouloir, en rentrant de l’extase dans le somnambulisme, pour répondre à la question : Où étiez-vous?
Mon bonheur élait sans mélange ;
Je parcourais l'immensité ;
J’étais là-haut avec les anges,
J’étais à l'immortalité.
Un autre jour, au sortir du même isolement extatique :
Avec une âme épurée On doit triompher (les revers.
Quand je suis avec ma pensée Je plane sur tout l’univers.
Elle est d’une perspicacité remarquable, saisit avec facilité le ridicule comme le mérite des gens, et dit sur leur caractère des particularités plaisantes, en fait parfaitement le portrait, et selon qu’on lui plaît ou non, tourne un compliment ou une causticité. Un jour, après avoir ainsi fait quelques portraits en vers, on lui demanda le sien. Elle le fit soudain, fidèle, sans ménagement; et lorsqu’elle eut fini, s’apercevant de l’étonne-ment des assistants, elle leur dit :
Vous m’écoutez tous en silence Et vous paraissez tres-surpris ;
Vous admirez mon éloquence Et vous cherchez ce que je suis.
Je vois bien que votre indulgence En ma faveur a prononcé,
Sans remarquer que la balance Penche beaucoup trop d’un côté.
Arrêtez-vous ! Tliémis s’irrite,
N'allez pas la mettre en défaut ;
Il faut me prêter du mérite,
Ou votre jugement serait faux.
Un grand montreur de phénoménalités magnétiques lui proposa naguère de l’exhiber dans les salons aristocratiques. Elle refusa tout net, et voyant qu’il est souvent humilié dans le monde, parce que le gaz manque à ses lucides, elle lui versifia un petit sermon qui se terminait ainsi :
I.a vérité n’a point d'atours.
Je transcris fidèlement ces vers pour montrer cet instinct dans toute sa virginité. I.es fautes mêmes ont du mérite, et l’on concevra qu’elle doive en faire beaucoup si l’on considère qu’elle n’hésite jamais, que ses réponses sont aussi promptes que les demandes. Quand on lui donne un sujet, elle s’y attache, est plus longue, mais fait quatre vers à la fois, en commençant souvent par le dernier. Le compliment suivant adressé à un magnétiseur dont elle vit intuitivement les travaux a été ainsi composé :
Vous employez votre science A propager la vérité ;
Du fruit de votre expérience Vous dotez la postérité.
A la suite «le cette pronostication flatteuse, celui qui en était l'objet la louant, elle lui dit avec un Ion île reproche :
De vos ("loges, en vérité,
Je me rois très-ainbilicusc;
Si vous flattez nia vanité,
Je vais devenir orgueilleuse.
Une jeune mariée la consultant sur son bonheur futur, clic lui dit :
Ecoutez ce que dit l’oracle :
Pour vous l'hymen a fait miracle,
Car je l'ai vu un certain jour Près de vous enchaîner l'amour.
Si l’on recueillait tout ce qu’elle fait, on en aurait promptement des volumes qui seraient curieux à lire; car toujours l'application aux personnes est exacte, et la conclusion sage, morale. Les genres lui sont indifférents, et voici une énigme composée à la demande d’une personne doutant qu’elle put promptement voiler sa pensée. Au bout de cinq minutes, c’était fini, et l'é-tonnement fut extrême quand on vit qu’au lieu d'un sens il y en avait deux : le temps et l’amour :
Tu nous enlèves nos plaisirs.
Tu nous ravis jusqu’à nos charmes,
Tu ne satisfaits nos désirs
Que pour nous faire verser des larmes.
Tu ne nous permets d’être heureux Que quelques instants dans la vie ;
Pour nous lu n’es pas généreux,
Et de te fuir nul n’a l’envie.
Interrogée par un jeune médecin sur la manière dont sa pensée se formule, ses vers se moulent, clic
lui donna de longues explications sur l'entendement, entra dans des considérations métaphysiques au-dessus de sa portée dans la veille. Elle s’est surtout appesantie sur la génération des idées, leur transmission et l’étendue possible du savoir humain. La destinée future l’occupa aussi beaucoup; elle n’était jamais montée si haut et semblait se complaire dans les célestes régions ; puis, revenant de ces hauteurs ou profondeurs extrêmes de la pensée, elle expliqua sa facilité de versifier, disant qu'elle voyait des étoiles (c’est ainsi qu’elle désigne les idées; elle a un langage énigmatique : ainsi, elle traduit mourir par 6ter, etc.) venir se ranger à la file transversalement dans la partie frontale du cerveau; que quand un vers est complet, un autre se forme au-dessus ou au-dessous jusqu’à ce que tous y soient; que si on l’interroge durant celte opération, elle ne livre que ceux qui sont achevés, et que c’est pour cela que l’ordre en est souvent renversé. Quand, au lieu d’attendre, elle cherche, évoque, l’opération est plus longue, parce que, désirant bien faire, il y a un grand va-et-vient d'étoiles qui s’essaient, ce qui cause une grande confusion et trouble sa vue. Si dans cette mêlée des vers formés disparaissent, elle les recherche et ramène en rang pour en ajuster bien les rimes, par où elle les commence lous. Cette génération, étant spontanée, ne la fatigue pas; c’est pour elle un amusement : elle s'v prête avec grâce.
J'ai dit que sa prestesse étonne encore plus que sa fécondité; j’en pourrais citer mille exemples, mais un seul me suffira. Endormie le 23 mai dernier, à deux heures, et priée par l’un des convives du banquet mesraé-rien de composer un morceau pour celte solennité, elle se mit à l’œuvre aussitôt et produisit d’emblée quarante-deux vers, les premiers faisant de Mesmer l’éloge pompeux, les derniers ainsi conçus :
Pour rendre hommage ïi sa mémoire J1 faut montrer sa dignité,
Et que chacun offre à sa gloire Un nouveau trait d'humanité.
Voilà son apôtre fidèle,
I.c plus zélé magnétiseur ;
De ses vertus le vrai modèle,
Et de scs droits le défenseur.
Il a sa force et sa puissance,
Sa grandeur d’âme et sa bonté ;
Et pour éclairer l'ignorance,
L'éloquence et la volonté.
Vous qui puisez h son école,
Offrez, pour un si beau sujet,
Au grand Mesmer une auréole.
Une couronne à du Potet.
Je viens de dire qu’elle ne rature jamais. Ses vers sont d’un seul jet, et elle s’indignerait si on en changeait un seul mot pour éviter uu hiatus ou autre faute. A toutes les observations sur ce sujet, elle répond : «C’est venu comme ça. »
Très-religieuse et ne faisant point métier de somnambulisme, j’espère qu’elle me laissera continuer à loisir cette étude psychologique, et si j'apprends de nouvelles choses, je les communiquerai.
Henri Ev...e.
VARIÉTÉS.
Loi sur la médecine. — La Chambre des Pairs vient de finir la discussion du projet de loi sur la médecine. On sait que, sans que le mot de magnétisme soit prononcé, plusieurs paragraphes sont clairement opposés à son exercice. Cette circonstance a donné lieu à un incident on ne peut plus favorable à la propagande magnétique. M. le marquis de Boissy, dans la séance du 28 juin, prononça ces paroles énergiques, que nous extrayons du Moniteur :
« Il y a dans la profession médicale esprit de corps à défaut de tout autre peut-être. (On rit.) Eb bien, aujourd’hui, il y a des systèmes différents qui se présentent, et si un docteur demande à faire un cours, on lui fera d’abord dire quel est son programme. On aura raison sous un certain rapport; mais nous savons quelle facilité on trouve pour déplacer les choses. Aujourd’hui on nous a démontré qu’il y a, je ne dis pas esprit rétrograde dans la société, mais un fait rétrograde. On vous a cité ce qui s’est passé en 1837 et ce qui s’est passé en 1847. Le corps médical, aujourd'hui, s’opposera à tout ce qui sera progrès ou amélioration, et il faudra rester dans la routine, qui combat de toutes les manières, jusqu’au point de poursuivre devant les tribunaux ceux qui guérissent sans elle, malgré elle, et souvent beaucoup mieux qu'elle.
«Aujourd’hui dans le corps médical il y a des prati-
cicns qui sont partisans de l'homceopathie. (Réclamations.)
« Je ne crois pas que ce que je dis là soit sans intérêt. Je crois qu’il y a beaucoup de personnes qui ont le tort de croire à l’iioniœopatliic, et de croire qu’elle guérit souvent. Je demanderai si jamais les professeurs qui seront appelés à juger, et le recteur de l’Académie sera du nombre, admettront renseignement d'un autre système que celui de la routine; je demande s’il sera permis d’enseigner une manière de guérir qui serait contraire à la règle; je demande si un homœopallie, qui ne se soumet pas au Codex, pourra faire prendre des remèdes de sa façon, de son système. Sachons bien, messieurs, que nous sommes à une époque rétrograde, il est vrai, sous certains rapports, mais de progrès sous beaucoup d'autres. Il y a différents systèmes en médecine ; les nouveaux sont-ils les meilleurs ou les moins bons? La mortalité est toujours la même. Si la mortalité est toujours la même, je ne vois pas pourquoi on s’opposerait à ces progrès qui sont de tous nos jours.
«Messieurs, il n’y a pas seulement riioinœopathie, il y a aussi l’hydropathie. (Oh! oh! A l’amendement!) Permettez : j’en demande bien pardon à MM. les savants, qui me paraissent bien pressés; nous le sommes un peu moins, nous, parce que nous défendons les intérêts généraux sans nous préoccuper des intérêts particuliers.
«Je suis partisan du progrès; je veux que tous les systèmes puissent se développer quand ils n’ont rien de contraire aux bonnes mœurs. Cependant, il y a des systèmes qui sont poursuivis. Nous avons reçu des protestations d’hommes honorables qui ont été poursuivis parce qu’ils avaient voulu soutenir dans le congrès médical des observations qu’ils appuyaient de preuves, qui contrariaient la routine ordinaire. Qiiaut à moi, je l’avoue en toute humilité, j’aimerais mieux être guéri par
un système nouveau que d’élrc tué par le système ancien. (Hilarité.)
o Je voudrais que M. le ministre eût la bonté de s’expliquer sur ce qu’il entend par contraire aux bonnes mœurs et sur les attributions qu’aurait le recteur; de nous dire si, dans son opinion, 011 devra continuer h faire comme je crois qu’on est oblige de le faire aujourd'hui, c’est-à-dire de donner des prescriptions, des remèdes, en un mot, d’exercer l’art de guérir, dit-on, seulement eu se conformant à ce qu’on appelle, il me semble, le Codex.
« Aujourd’hui, à ce que j’ai entendu dire, car j’avoue mon ignorance, il faut guérir suivant certaines règles imprimées, sous peine de s’exposer à des pénalités. On ne peut s’en affranchir. C’est là la garantie qu’on donne aux malades.
« Encore une fois, je m’en rapporterai au gouvernement, aux préfets, quoique je ne leur donne pas toujours toute confiance; mais je me fie davantage à l’agent du gouvernement, au préfet, qu’à un homme qui aura l’esprit de corps, et qui, en interdisant certaines choses, servira les intérêts de sa corporation.
«Je voudrais des éclaircissements sur ce point; j’en voudrais devant un plus grand nombre de membres, devant le nombre légal, afin que tous ceux qui délibèrent sachent bien ce qu’ils feront et ce qu’ils voteront. Je voudrais savoir si l’on s’en tiendra au système actuel, et si l’on ne verra pas se renouveler la persécution du progrès par la routine, comme cela a été facilement constaté par l’honorable M. de Montalembert, quand il a expliqué à la Chambre toutes les difficultés qu’on a éprouvées pour faire admettre le quinquina et l’émétique. Aujourd’hui, il y a différents systèmes, différents moyens parmi lesquels j’en citerai un qui fera rire; mais
cela m’est égal ; .je crois rendre un service : je veux parler de l’emploi du magnétisme. (Mouvement.)
o SI. LE MINISTRE DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE. Tout Cela n’est pas dans l’article.
» M. le marquis de Boissy. Je vois bien que je contrarie quelques personnes, mais j’en ai l'habitude, et j’appelle sur ce point l’attention de la Chambre. Ce n’est pas pour le vote, mais c’est aün de semer ici, et que nos discussions servent autre part. Beaucoup dans celle enceinte se sont très-bien trouvés de ce qui est proscrit parla médecine; beaucoup admirent ce moyen curatif nouveau qui vient détrôner, j’en conviens, de vieilles connaissances, mais qui est dans l’intérêt des populations. C’est toujours du magnétisme que je veux parler. Je le recommande donc à l’attention de la Chambre et du public, du public qui jugera en dernier ressort des questions qui s’agitent ici. «
— Ces aveux si francs, si loyaux, cet hommage rendu à la vérité n’ont point trouvé d’écho; mais nous sommes heureux de les recueillir comme un témoignage sur lequel nous ne comptions pas du tout; car, jusqu’ici, tout le monde ofliciel était resté sourd à nos appels, quoique jouissant dans le silence des bienfaits du magnétisme.
Aucun de ces hommes investis de hautes fonctions n’avait encore osé élever la voix et dit sa pensée sur un sujet qui avait surtout exercé le sarcasme et les railleries. On n’osait braver l’opinion de la science et se soustraire à son inique jugement.
Nous marchons donc très-rapidement, et nous croyons qu’à la Chambre des Députés d’autres hommes avancés imiteront M. de Boissy, afin qu’il y ait dans la loi une porte ouverte pour que toutes les idées nouvelles, les
découvertes utiles puissent s’étendre et se généraliser, malgré les intérêts et les préjugés scientifiques.
Nous préparons une pétition, qui sera adressée à la Chambre des Députés l’année prochaine quand le projet de loi lui sera présenté. Eu attendant, chacun doit redoubler de zèle, faire des prosélytes, afin que si les législateurs nous abandonnent, le public nous reste.
Chronique. — M. le comte de Mirville doit mettre prochainement au jour un ouvrage sur les sciences occultes, dans lequel le magnétisme occupera une large place. Les opinions religieuses de l’auteur feront lire son livre par le clergé, en général fort ignorant a Pendroit de ce qu’on appelle sciences occultes, et il en résultera un grand bien.
— M. le vicomte Adalbert de Beaumont se propose aussi de faire paraître incessamment un écrit sur la magie. Il a, comme M. de Merville, assisté à nos conférences, et vu les belles expériences magi-magnétiques de M. du Potet.
— 11 n’est bruit 'a Marseille que d’un procès entre des personnes qui cherchaient un trésor, à l’aide de somnambules, sous l’église de la Major.
Revue des journaux. — Le Journal des Débals du 20 juin rend un compte fidèle du procès de madame Pou-son.
— L'Union monarchique du 29 mentionne l’allocution de M. de Boissy à la Chambre des Pairs. Le Corsaire ajoute à cette mention ce petit trait de satire :
« Si l’excentrique marquis est en effet un des croyants « de la science de Mesmer, pourquoi donc empèche-t-il « son président, M. Pasquier, de dormir? »
— La Mouche a reproduit partie des couplets de
MM. I.ovy et Thuillier, chantés au banquet mesmérien de Paris.
— La Tribune lyonnaise rend compte brièvement du banquet mesmérien de I.yon, qui n’a pu avoir lieu que le 30 mai, à cause de la Pentecôte.
— Le Constitutionnel du 7 courant dit, dans une notice sur l’académicien Ballanche, qui vient de mourir, qu’il écrivait toujours dans une sorte d’extase ou de somnambulisme, qui lui était venu à la suite d'une affection nerveuse.
BIBLIOGRAPHIE.
L’homobopathie mise à la portée des gens du monde, par le docteur Gouré. Brochure iu-12. Paris, 1846.
L’illustre fondateur de la doctrine homœopathique en donnant son adhésion au principe mesmérien fit preuve d’un savoir qui a trouvé bien peu d’imitateurs parmi les partisans de sa doctrine. Quoique généralement mieux disposés que les allopatlies, les disciples d'Hahncmann n’ont que peu employé le magnétisme et n’en parlent jamais qu’avec une réserve dubitative ; quelques-uns seuls ont osé dire toute leur pensée, et de ce nombre est le docteur Gouré, qui s’exprime ainsi dans le petit traité qui nous occupe :
« Vous désirez connaître mon opinion sur le magné-
tisme elle somnambulisme : celte question est brûlante; je ne vous en dirai qu'un mot : ce sera ma profession de foi.
« Oui, le magnétisme existe ; il a été reconnu, nié, puis réhabilité, puis renié. Aujourd’hui tout le monde est d’accord, même les savants, sur la réalité de son existence.
« Il y a environ quarante-cinq ans qu’enfant, j’appelais cela de l’éleclricilé animale, ce qui m'avait fait surnommer par mes camarades, au Lycée impérial, la machine électrique. J'avais dit vrai instinctivement.
« Quant aux effets du magnétisme, on est moins d’accord; quelques personnes même les nient. Cependant s’il y a un fluide électrique, il doit se manifester d’une manière quelconque ; donc il doit y avoir des effets. C’était la réponse de Caus à ceux qui le plaisantaient sur les forces de la vapeur. Pour la peine d’avoir eu seul raison (cc qui est un tort dans tous les temps), il est mort, parmi les fous, dans un cabanon de Bicétre où les sages l’avaient fait enfermer.
« Je regarde le magnétisme comme un agent thérapeutique très-puissant, très-direct, dans certain cas. Son emploi m’a très-souvent réussi contre des suppressions de règles et de lochies, contre nombre de névralgies pures , etc. Seul, il peut souvent suffire dans les deux premiers cas.
« Son action ne paraît contrarier en rien celle des médicaments homœopathiques; je suis même convaincu qu’il est toujours un auxiliaire utile.
« Quant au somnambulisme, je serai plus bref, sans être moins vrai, ni moins consciencieux. Oui, le somnambulisme existe. Il y a le naturel, qui est selon moi le symptôme d’une affection morbide quelquefois grave. La magnétisation le guérit, j’oserai dire complètement et facilement. Il y en a un autre qui est produit par la
magnétisation, c’est l’artificiel. Je crois aussi à celui-ci, j’y crois autant qu’à Dieu ; mais je ne crois pas aux somnambules...
« Je m’explique.
« Un sujet magnétise présente tous les degrés de somnambulisme , depuis le simple engourdissement jusqu’à Fcxtaxe; par suite, tous les degrés de lucidité, depuis celui où il ne voit pas, jusqu’à celui où il offre les phénomènes les plus étonnant de clairvoyance.
« Or, le somnambule passe souvent et instantanément d’un degré à un autre plus ou moins grand. Comme il est impossible de suivre ces variations continuelles, d’en avoir la preuve et la mesure, il s’ensuit que le somnambule n’est point un instrument sûr pour celui qui cherche cette certitude.
« J’ai eu nombre de somnambules que j’avais formés; j’ai eu des sujets merveilleux, entre autres une fille V... dont la lucidité a été remarquable; mais peu à peu elle a diminué, et, malgré ma défiance, j’ai souvent été trompé. Dans les derniers temps que je m’en servais, j’ai été dupe de sa supercherie et de sa mauvaise foi. Une vie eu rapport avec les plus ignobles penchants a bien vite usé ce qui restait de lucidité, et j’ai rejeté avec dégoût cet instrument menteur.
« Si une mère de famille, devenue somnambule lucide, était consultée sur l’état de son enfant ou de son mari mourant, ou enfin sur l’état de quelqu’un qui lui fût cher, j’aurais en elle une confiance entière, complète, absolue ; mais c’est le seul cas. »
Le Propriétaire-Gérant : IlÉBEKT (de Camay).
Parii. — Imprimerie d'A. Rb.nû elComp., ru« de Seiue, 33.
CLINIQUE MAGNÉTIQUE
Des lettres de l'île Bourbon, où le magnétisme est très-anciennement connu et pratiqué avec succès par un grand nombre de personnes non moins dévouées à la science qu’à l'humanité, nous apprennent que la pratique magnétique a pris à Saint-Dénis un tel développement, que scs enuemis la qualifient de magnitomanie. Là, malgré les efforts contraires, le magnétisme est devenu la seule médecin*1- de beaucoup de familles, soit directement, soit par le somnambulisme. Les médecins, vaincus en plusieurs rencontres, commencent à réfléchir, et, se rendant à l’évidence des faits, ils reconnaissent des guérisons dites impossibles par eux.
On nous cite comme contribuant beaucoup à la propagande MM. François Gabourt, Lepervenclie, Villiers Adam, Pierre Lcgras, Anténor Acbar, d'Organi, de Jouvencourt, Grachet, etc., etc., tous pleins de zèle et ne négligeant aucune occasion de répandre la connaissance du magnétisme et de donner des preuves de sa propriété éminemment curative.
•Les détails nous manquent sur divers traitements magnétiques d’une issue heureuse. L’énoncé d'une cure n’est pas suffisante ; il faut tracer le tableau fidèle des symptômes morbides à l’origine et en suivre la diminution graduelle de manière à avoir l’image complète de la maladie et de sa marche. Nous nous bornerons donc, TOliEV.— KO 50.-25 JUILLET 1847. 2
pour les quatre cas suivants, au résumé de la correspondance dont nous parlons.
A. — Mademoiselle Eulalie de Peindray, paralysée des membres supérieurs et inférieurs depuis huit mois , ayant eu des applications répétées de moxas tout le long de la colonne vertébrale, des cautères, cl pris beaucoup de strychnine, était arrivée à un état de maigreur extrême, sans qu’aucun des nombreux moyens employés lui eût procuré le moindre soulagement. Magnétisée, elle marcha dès la cinquième séance ; et au bout de cinq mois de soins magnétiques et somnambuliques, elle avait recouvré son embonpoint et la faculté de se mouvoir, dont elle était privée.
15. — Mademoiselle Louise de Peindray, sœur de la précédente , affectée d’une ophthalmic chronique qui l'empêchait de voir à petite distance et de supporter l’éclat du jour, éprouvant en outre de violentes migraines et des palpitations avec douleur dans la région du cœur et des reins, devint somnambule et se guérit en moins de deux mois par le moyen du magnétisme et des médicaments combinés. Elle est restée somnambule après sa guérison, cl a été l’instrument de nombreuses cuics qui ont eu du retentissement à Saint-Denis.
C. —Madame veuve Nègre de Sainte-Croix, atteinte depuis quatre mois d’une paralysie du côté droit, avec rétraction des muscles poplités, guérie en vingt-trois minutes, en présence de sa famille et de MM. Delpit (ils et Anténor Achar, par une magnétisation générale.d’abord et locale à la fin.
D. — Madame Geslin, atteinte depuis sept ans d’une maladie qui faisait son désespoir et qu'elle s'efforcait de cacher, magnétisée fortuitement, devient soudain somnambule, décrit sans hésiter son mal, qui est un cancer utérin, et indique les médicaments nécessaires, qui sont diverses injections, tisanes et de la poudre de Labou-
rée, avec le magnétisme pour base et véhicule. Trois mois et demi de ce traitement ponctuellement suivi ont amené la complète guérison de cette cruelle maladie, que cette pauvre jeune femmeavait, par pudeur, dissimulée si longtemps, et n'aurait peut-être jamais dite sans cette circonstance qui la plaçait dans un état où la contrainte cesse, où l’on confesse naïvement ce dont les conventions sociales faisaient garder le secret.
N. B. — Ces quatre cures ont été obtenues par M. La-caussade, dont nous avons parlé comme fondateur de ia société magnétologique de Port-Louis (île Maurice).
On nous adresse fréquemment de longues lettres sur les cures prodigieuses qu’obtient M. Laforgue; mais il nous est impossible de les porter entières à la connaissance de nos lecteurs. Quelques extraits suffiront pour leur donner une idée de l’enthousiasme et de la reconnaissance qu’inspirent son dévouement et scs œuvres vraiment miraculeuses. Malheureusement, les forces de ce digne ami de l’humanité s’affaiblissent. II nous dit dans une lettre du 5 juin dernier :
«J’obtiens chaque jour des guérisons parfaites, qui m élonnent moi-même, ou de grands soulagements aux douleurs des malades qui ont recours à moi. Mais je suis très-fatigué; les forces physiques ne répondent pas toujours au grand désir que j’ai de soulager les douleurs humaines. Je suis contraint de réduire à trois par semaine mes séances de réunion; les jours de repos sont employés au soulagement des étrangers et des plus souffrants. »
M. Durandeau, d’Angoulème, blessé au genou par une machine hydraulique, en 1812, fut traité sans succès par les saignées générales et locales, les vésicatoi-resjles eaux de Baréges, et en dernier lieu par les bains
boueux de Dax, d’où il revint aussi souffrant et boiteux qu’il y était allé. Eu 184G, un de ses amis, témoin de cures opérées dans la cellule de M. Laforgue à Pau, l’engagea d’avoir recours il ce moyen. Lui, qui n’avait jamais ouï parler du magnétisme qu’en mal, rit beaucoup de la crédulité de son ami; mais, vaincu par l’insistance de ce dernier, ils allèrent ensemble chez M. Laforgue. Laissons-le narrer la suite:
« Je ne me présentai que trois jours chez ce digne homme, qui joint la prière à scs soins magnétiques. Je fus très-surpris de trouver chez lui tous les matins, à six heures, de vingt-cinq à trente personnes, malades de toutes infirmités; et, tout ébahi des cures opérées devant moi, je revins ne boitant presque plus.
«Je lui fis quelques questions touchant les hernies. Il me dit en avoir guéri beaucoup. Alors je lui parlai de ma femme qui en avait une du nombril depuis sa dernière couche, il y a quinze ans, qui, en premier lieu, ne causant point de douleur, n’avait donné aucune inquiétude, mais qui, augmentant toujours, occasionna il y a sept ans de violentes coliques. On en parla au médecin, qui la déclara incurable, disant qu’il fallait au plus vite appliquer un bandage, ce qui fut fait. Mais quelquefois le remède est pire que le mal, et la pression du ressort donnait de telles démangeaisons que souvent il venait des plaies à force de gratter. J’ai donc résolu cette année de conduire ma femme à Pau. M. Laforgue la magnétisa immédiatement, et le surlendemain lui fit enlever son bandage. Depuis lors (16 mai) elle n’a plus senti la nécessité de le remettre, allant chaque jour de mieux en niieux. Nous sommes restés douze jours à Pau, et depuis notre retour elle n’a plus souffert; elle est guérie et bénit chaque jour ce digne homme. , ,
« Connaissant une dame qui avait une descente ne matrice considérable, je lui lis part de ce que j avais vu
à Pau. lillc y alla sur ma recommandation, et au bout de trois jours elle revint guérie. Elle avait passé les sept huitièmes de sa vie couchée tant elle souffrait. Depuis un au elle reste levée, et quoique la descente soit encore un peu apparente, elle n’en souffre plus.
« Vous trouverez peut-être superflus tous ces détails, monsieur le baron; mais ayant été témoin oculaire de diverses cures merveilleuses, je dirai même miraculeuses, je trouve extraordinaire que, dans votre intéressant journal, il ne soit pas plus parlé de cet homme incomparable par son zèle, son courage et son travail aussi dur que pénible. Je vais vous esquisser quelques-unes des cures obtenues pendant mon dernier séjour.
« Deux paralytiques, dont l'un guéri en quatre ou cinq séances; l’autre qui, en outre, avait habituellement deux ou trois attaques épileptiques, n’en avait plus que les trois ou quatre jours.
«Une bonne d’hôtel, prise d’un hoquet si tenace qu’il ne la quittait ni jour ni nuit depuis huit jours, fut amenée chez M. Laforgue, après que MM. les médecins, qui n’avaient pu lui apporter aucun soulagement, eurent déclaré qu’elle en mourrait: deux magnétisations ont suffi pour la guérir.
« Deux femmes sont venues avec des goitres énormes ; en moins de dix minutes l’une était guérie.
« Un enfant de cinq ans, ayant une hernie plus grosse que le poing qui empêchait de distinguer de quel sexe il était, s’est trouvé au bout de cinq minutes dans un état naturel ; pourtant les médecins avaient dit à sa mère qu’il n’y avait rien a faire, qu’il fallait attendre jusqu’à dix ou douze ans pour faire l'opération.
« Une dame de Bordeaux qui ne pouvait retenir son urine a été guérie en huit jours de cette infirmité.
« Une jeune fille de dix-huit à vingt ans qui avait le
tétanos, qui était folle, idiote, tenait au bout de quelques séances raisonnablement conversation.
« Enfin une foule d'autres maladies moins graves qu’il serait trop long d’énumérer. »
Ce monsieur, dont l’admiration égale la reconnaissance, nous donne sur l'emploi du temps de M. Laforgue les détails suivants :
« A cinq heures et demie du matin il est à sa cellule, magnétisant l’eau et le pain des malades : à six heures il commence la prière, qui dure une heure et demie; immédiatement après commencent les opérations magnétiques, qui durent jusqu’à environ deux heures. Le soir, après six heures cl demie, il reçoit encore, et tout cela pour l’amour de Dieu, ne voulant recevoir d’argent de personne que des aumônes pour les pauvres... Quel mérite, grand Dieu! Qu’il est heureux de pouvoir faire tant de bien! Mais il devrait être immortel! C’est pourquoi, monsieur le baron, je regrette de ne pas voir scs œuvres figurer davantage dans votre intéressant journal. C’est sans doute sa modestie qui vous en empêche. » M. Subcrvie, de T.ons, nous donne le récit d’un fait extraordinaire, dont la véracité est attestée par plusieurs analogues contenus dans les nombreuses lettres qui nous parviennent journellement :
«Il y a environ quatre ans, j’étais dans la cellule de M. Laforgue, où je vais régulièrement tous les lundis, depuis environ vingt ans qu'il m’y a guéri du choléra, époque depuis laquelle la médecine n’a point visité ma famille.
«La cellule et les approches étaient encombrés de malades de différents pays. Deux bergers de la commune de Vielle étaient assis eu face la porte. Comme M. le commandant explorait une malade, une femme, pressant la foule, se montra à l’entrée de la cellule, ayaul un goitre qui lui couvrait tout le col. 31. Laforgue dit
aux bergers «le bien examiner la malade, qu'ils allaient voir diminuer son goitre ; alors il dirigea l’index vers la tôle de cette femme, et bientôt l’un des bergers reconnut, comme tous les assistants, la diminution de volume du goitre; mais l’autre berger contestant, M. le commandant lit asseoir auprès de lui la malade, et lui passa dans les oreilles une baguette de cristal, puis il toucha le col de la femme, qui au bout de dix minutes était presque réduit à son volume normal. Alors M. Laforgue dit à la femme de s’examiner à un trumeau qui se voit à la cheminée de sa cellule; celle-ci, en se voyant, s’écria : « Ali! je suis guérie! » Puis, s’adressant au berger incrédule, elle lui dit : «Eh bien! est-il diminué?» Ce dernier répondit : « Oui, je le vois, et je ne le peux croire. » Ce qu’entendant, M. Laforgue lui ordonna de découvrir son genou droit, où il avait une grosse loupe qui le gênait beaucoup, l’obligeant à marcher avec un bâton. Il releva son pantalon; mais la loupe avait disparu ; alors il fut ému, pleura et demanda pardon de son incrédulité à Dieu, à M. Laforgue et à tous les assistants. On cria au miracle.
« Si j'étais savant, je pourrais vous raconter une infinité de faits que j’ai vus dans la cellule de M. Laforgue, dont beaucoup me sont personnels ou à ma famille. Je fais des vœux pour le progrès du magnétisme, qui fait tant de bien dans les pays où on le met en pratique; je désire, par le bien que j’en ai éprouvé, qu’il soit reconnu tel qu’il est, comme le vrai remède à tous les maux. »
INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.
SOCIÉTÉ DU MESMÉRISME DE PARIS.
La Société vient de recevoir d’un vénérable prêtre, Espagnol réfugié, une lettre pleine d’onction, destinée à lever le doute, faire cesser la réserve des consciences timorées. Nous la publions sans commentaires; chacun en appréciera facilement la haute importance dans ce moment où divers organes du clergé soutiennent la thèse de l’infernalité du mesmérisme, et que leurs déclamations ont pour résultat d’en empêcher la pratique médicale dans les familles pieuses et jusque dans les hôpitaux, où, lorsque le médecin ordonne ce remède, l’aumônier le défend, et le zèle aveugle des Sœurs en rend, par mille petits moyens, l’exercice impossible, ainsi que nous l’avons vu à Besançon il y a quelques années cl la semaine dernière à Paris.
Le magnétisme a partout à combattre l’intérêt dans la médecine, l’ignorance dans le clergé; et de ces deux adversaires, le dernier est le plus difficile à vaincre. En voici la raison.
Ordinairement le médecin nie ; mais dans 1 ordre scientifique une négation ne détruit pas plus un fait qu’une affirmation ne l’établit. « 11 faut, dit Berzélius, tout aussi bien prouver que ce que l’on regarde comme erroné l’est réellement, que de démontrer que le vrai est vrai. » De là pour le médecin la nécessité de discuter, de raisonner sa croyance; à vous de fournir des arguments et de produire, sur lui ou sur d’autres, des faits
qui la renversent. Les témoins alors, comparant les résultats, jugent aisément qui a tort.
Avec le prêtre, c’est différent : il ne nie pas; il affirme, au contraire, que cette puissance existe, quelle n’est que trop réelle; car c’est une manifestation de Satan, un moyen de ravir les âmes à Dieu, et il ne veut pas examiner, encore moins se soumettre à l’expérience qui lui apparaît comme une tentation satanique. Puis, interprétant les textes sacrés dans ce sons, il sème l’effroi dans les tètes faibles, fanatise l’ignorant, qui, craignant d’être damnés, se refusent à tout examen. Mas-sillon avait bien raison de dire que l’ignorance chez les prêtres est plus dangereuse que chez les autres hommes.
On ne trouve bienveillants et sages que le vieux médecin et le vieux curé, parce qu’ils ont fait connaissance avec la nature, et appris à douter de la rectitude des préceptes enseignés et de l'efficacité de leurs moyens, comme l’a fait le digne ecclésiastique dont voici l épître.
L'abbé Almignana à la Société du mesmérisme.
Monsieur le président,
Aujourd’hui que le magnétisme est à l’ordre du jour; dans un moment où partout l’on en parle, soit pour l’exalter ou le ridiculiser, pour l’admirer ou le craindre, qu’il me soit aussi permis, à moi, vieux curé de campagne, de me faire entendre tant soit peu à ce sujet, non dans le but de flatter un parti quelconque, car j’ai toujours détesté un tel métier, mais pour dire franchement la vérité d’après ce qui s’est passé sous mes yeux dans une affaire qui intéresse l’humanité souffrante.
Curé rural pendant longues années, me plaisant toujours au doux soulagement des malheureux; regardant tous les hommes comme mon prochain, sans considérer s’ils sont Juifs ou Samaritains, et connu dans toutes les
contrées que j’ai habitées pour être amateur de sciences et de beaux-arts; j’ai dû à ces qualités, si avantageuses à un prêtre, que le riche et élégant château me lût toujours ouvert aussi bien que la pauvre et humble chaumière.
C’est dans les salons de ces fastueuses demeures, au milieu de savants cl de soi-disant philosophes que j’ai entendu parler maintes fois du magnétisme, mais d’un air moqueur et avec mépris. Tantôt on me le présentait comme une chose imaginaire, tantôt comme un vrai rêve, et tantôt comme un mensonge inventé au profit de certains magnétiseurs.
Voilà ce que j’ai entendu dans quelques-uns des châteaux que j’ai fréquentés. Mais si de ces hautes régions nous descendons au modeste presbytère, l’opinion sur le magnétisme est toute autre.
Les prêtres de campagne ont l'habitude de se réunir de temps en temps, soit en vertu d’ordonnances épiscopalcs pour conférer sur des points concernant leur ministère, soit spontanément, comme gage de 1 u-nion et fraternité qui doit régner parmi eux, quelles que soient d’ailleurs leurs opinions individuelles sur des matières non condamnées par l’Eglisc, réunions dont le but n’est que très-louable.
C’est dans ces réunions ecclésiastiques et lorsque, la conversation roulant sur le magnétisme, j’eus rapporté ce qu’à ce sujet j’avais entendu dire ailleurs, que plusieurs de mes confrères me firent entendre que, loin de partager l’opinion des savants et des philosophes, ils croyaient à l’existence du magnétisme, quoiqu’ils le considérassent comme l’ouvrage du démon, raison pour quoi le clergé devait de toutes ses forces le repousser, jusqu’à refuser l’absolution à ceux qui magnétiseraient ou se feraient magnétiser sans vouloir renoncer a Satan.
En présence de deux opinions si opposées sur une
question si nouvelle pour nioi, et sans rien trouver qui put me convaincre ni d’un coté ni de l'autre, homme à conviction comme je le suis, j’ai cru que le meilleur parti à prendre dans de pareilles circonstances était la neutralité, Cn attendant d’ultérieurs renseignements.
C’est ainsi que je vivais dans mon presbytère, occupé uniquement du ministère, lorsqu’un jour on vint me dire que trois membres de l’épiscopat français, après avoir examiné en personne différents phénomènes magnétiques, s’étaient prononcés pour le magnétisme. Ces trois honorables prélats sont : messeigneurs Bouvier, évoque du Mans: Gousset, archevêque de Reims, et de Donald, archevêque de Lyon.
Quant au premier, on m'assura avoir dit qu’il ne se permettrait pas de condamner ceux qui pratiquent le magnétisme.
Quant au second, on lit dans son excellent ouvrage de théologie morale cette thèse :
« Nous pensons qu’on doit tolérer l’usage du magné-« tisme jusqu’à ce que Rome ait prononcé, o
Par rapport au dernier, après avoir vu de ses propres yeux un somnambule et l’étendue de sa lucidité, Son Eminence déclara ne trouver rien en tout cela de surnaturel et de diabolique, mais des phénomènes naturels et physiques.
Enfin, 011 m’assura qu’un grand nombre de laïques orthodoxes et pieux, ainsi que plusieurs ecclésiastiques, pratiquaient le magnétisme avec succès.
Le témoignage de trois évêques aussi pieux que savants en faveur du magnétisme et la nulle difficulté à l’exercer de la part de plusieurs prêtres, contrastant avec ce que j’avais entendu au château et au presbytère, nn vif désir s’éveilla en moi de connaître la vérité dans une affaire sur laquelle les opinions se trouvaient si partagées, ne serait-ce que pour tranquilliser ma con-
science et celles dont j’étais aussi chargé en qualité de pasteur.
Mais à qui m’adresserais-je lorsque les hommes dans leurs disputes, tous, croient avoir raison? lorsque, par un effet d’amour-propre mal placé, et, cc qui est pire, par des intérêts privés, les hommes cachent bien souvent la vérité à ceux qui, de bonne foi, la cherchent, et je pourrais en dire beaucoup à ce sujet! Ce fut pour lors que, mettant de côté les hommes, j’eus recours au livre sacerdotal, c'est-à-dire à la divine Ecriture, parole d’un Dieu qui ne ment pas comme les hommes : Non est Dcus ut homo, ut mentiatur. (Num., cap. XXIII, v. 19.)
Après ce raisonnement, aussi simple que chrétien, et sans que rien put m’arrèter, je prends avec respect la sainte Bible, et, l’ouvrant au hasard, le premier oracle qui se présente à mes yeux fut celle sage maxime que saint Paul inculque aux Thcssaloniciens, en leur disant:« Mes « frères, examinez toutes choses; conservez donc ce qui a est bon et rejetez ce qui est mauvais.» Omnia probale; quod bonum est tenete, ab omni specie mala abstinele vos. (Ad. Thess. Ier, c. v.)
Autorisé par saint Paul à examiner par moi-même le magnétisme, d aulant plus que Rome n’avait pas encore parlé, pour, dans le cas d’existence, l’adopter s’il était bon et le repousser s’il était mauvais, je lis les démarches possibles pour me rendre témoin oculaire de quelques expériences magnétiques ; mais la campagne ne m’offrant pas ce plaisir, je fus forcé de rester sceptique à cet égard dans mon pauvre et petit village.
Retiré postérieurement à Paris et toujours dans l’intention d’examiner la question du magnétisme, ayant appris qu’il y avait à la rue d’Antin un fameux magnétiseur, sans autre recommandation que le vif désir de m’instruire, je suis allé trouver ce monsieur, qui me reçut très-poliment. Informé du but réel de ma visite,
après avoir magnétisé en ma présence deux malades soumis à son traitement, 'a ma prière, il voulut bien ni’admettre à son cours, qui devait avoir lieu prochainement.
C'est dans ce cours où pour la première fois j’ai entendu parler du magnétisme de manière à intéresser l’auditoire; car c’est sur des observations faites par le professeur lui-même pendant de longues années d’expériences qu’étaient basées les explications qu'il donnait à scs élèves.
C’est là où j’ai vu M. du Potet déterminer par des procédés simples l’insensibilité la plus complète sur la personne d’un de mes condisciples. Je dis la plus complète; car, pour bien me convaincre d’un phénomène aussi nouveau pour moi, j’eus la cruauté, je l’avoue, de pincer si fortement le magnétisé à sa main gauche, que, revenu à son état normal, il éprouva une douleur assez vive pour m’obliger à lui demander mille pardons de ma cruelle expérience, dont ce bon monsieur se ressentit encore plusieurs jours.
C’est là aussi que j’ai vu rendre somnambule un enfant de quatorze ans environ, qui, à mon grand étonnement, répondit à des questions métaphysiques faites sur ma dictée.
Mais qui le croirait? Extrêmement difficile pour me prononcer sur un point quelconque en question, malgré la force des faits aussi extraordinaires que frappants, il me fallait encore quelque chose pour me convaincre entièrement de l’existence du magnétisme : c’était d’éprouver par moi-môme quelques-uns de sesellels, ce qui ne se fit pas attendre longtemps.
En effet, comme si M. le professeur eût lu dans mon intérieur, il me demanda, dans une de nos suivantes séances, si je voulais ôtre magnétisé. Moi, qui ne de-
mandais pas mieux, je m'empressai d'accepter la proposition qui m’était faile.
Assis dune sur un fauteuil et M. du Potet sur une chaise vis-à-vis moi ; c'est ainsi (pie l'on commença d'agir sur ma personne.
31ais quel fui mou étonnement lorsque, au bout de dix minutes à peu près, une grande métamorphose s'opéra dans mon pauvre corps. Prostration de forces, immobilité de mains et de pieds, contraction de la mâchoire jusqu’à me priver de la parole, et un fourmillement très-sensible dans l'étendue de mon corps, tels furent les effets que, pour la première fois, le magnétisme produisit sur moi, ni plus ni.moins, mais assez pour me convaincre de son existence, ainsi que de l’ignorance de ceux qui me l’avaient dépeint comme un rêve et un mensonge.
Mais, tout en croyant au magnétisme, la question n’était cependant pas tout à fait vidée pour moi; il s’agissait encore de savoir si le magnétisme est l’ouvrage de Satan, comme on me l’avait fait entendre, et pour bien m’en assurer, il me fallait magnétiser par moi-même, ce qui eut lieu prochainement, et voici par quelle occasion.
Quelques jours après notre dernière leçon, par un de ces desseins providentiels, je me trouvais auprès d’une pauvre malade. Celle-ci, sachant que j’avais étudié le magnétisme, me pria de vouloir bien la magnétiser pour voir si elle trouverait quelque soulagement à ses souffrances. Moi, ne pouvant pas me refuser à un service que l’humanité réclamait de moi avec prière, j'y consentis très-volontiers.
Quoique, ni dans les explicalions de M. du Potet, ni dans ses procédés pour déterminer des phénomènes magnétiques, je n’eusse rien observé ni de diabolique ni même de superstitieux ; quoique trois pieux et savants
évêques m’assurassent ne rien trouver de satanique dans le magnétisme; quoique quelques-uns de mes confrères dans le sacerdoce exerçassent le magnétisme sans crainte et sans scrupule; néanmoins, pour rassurer ma conscience et m’éviter tout reproche d’avoir agi légèrement dans une affaire aussi sérieuse, avant que de rien entreprendre et après avoir fait le signe de la croix, je commence par faire une formelle protestation devant Dieu de ne pas vouloir agir ni directement ni indirccte-ment sous l’influence de Satan. Je récite ensuite l’oraison Visita guœsumus de Complies, et, à l’exemple de saint Paul, qui pria avant que d’imposer les mains sur le père de Publius pour le guérir de la fièvre et de la dyssenterie, je fis aussi ma prière avant que d’imposer mes mains sur mon infortunée malade, et ce n'est qu’après avoir été ainsi préparé que je commençai à pratiquer le magnétisme.
Mais quelle ne fut pas aussi ma joie lorsque, au bout de vingt minutes de magnétisation, la malade me dit éprouver une très-forte chaleur! Et combien cette joie n’augmenta-t-elle pas lorsqu’à celte chaleur succédèrent de nouveaux phénomènes magnétiques favorables à la malade, et tels que je les avais vus décrits dans le Manuel de l’étudiant magnétiseur.
Reconnaissant dès ce moment que le magnétisme n’était ni diabolique ni mauvais, mais naturel et très-utile à l’humanité en le pratiquant chrétiennement, avec sagesse et modération, tout en déplorant l’erreur de ceux qui y voient une œuvre infernale et satanique, je me suis empressé de bénir et de remercier le Seigneur, lorsque, malgré ma position imperceptible sur la terre, je me voyais déjà éclairé sur l’importante question du magnétisme, tandis que tant de savants sont encore à ce sujet dans l'ignorance et dans les ténèbres.
Confiteor tib!, Pater, Domine cœli et terrœ, qui abscondi-disti hœc à sapientibus et revelasti ea parvulis.
Si vous croyez, monsieur le président, que cette franche manifestation de ma pensée sur le magnétisme puisse être utile à la découverte mesméricnne dont vous êtes un des principaux propagateurs, et que , sous ce rapport, vous jugiez à propos de lui donner de la publicité, n’importe par quelle voie, j’y consens avec plaisir, et heureux, même très-heureux pour moi, si, par un moyen aussi simple, je puis servir les intérêts de la vérité et de la pauvre humanité, qui m'ont de tout temps été si chers.
Tout en réclamant votre indulgence sur cette mince pi'oduction française, écrite par une plume taillée au-delà des Pyrénées, je vous prie, monsieur le président, d’agréer l’expression du plus profond respect avec lequel j’ai l'honneur d'être
Votre très-huiublc serviteur,
Almignana,
Ancien curé du diocèse de Bcauvais.
ATHÉNÉE MAGNÉTIQUE DE LYON.
Le temps approche où les mesmériens auront des agapes solennelles, où tous, réunis dans des lieux consacrés, célébreront la naissance du révélateur de la médecine naturelle. 11 sera beau de voir, à jour dit, en tous lieux, ces assemblées reconnaissantes vénérer la mémoire, bénir le nom de celui qui a découvert les mystères de la vie et donné la clef des trésors de la santé. Il y a dans l’institution du modeste banquet mesmirien le germe d’une commuuion immense, d’où s’élèveront des
concerts de louanges envers l'auteur de l’art universel de guérir et de préserver. Qui n’y verrait qu’uft festin, qui n’en priserait que les mels, serait bien loin du vrai; car le but étant une manifestation sympathique, un tribut d’amour et de reconnaissance envers Mesmer, le moyen d’honorcr publiquement l’auteur de tant de bienfaits sera toujours simple pour être accessible à tous.
L'initiative de ces réunions appartient h Paris, et c’est Lyon qui donne le signal de l’imitation. Nos amis de F Athénée magnétique se sont assemblés pour la première fois en l’honneur de Mesmer, le 30 mai, sous la présidence de M. Guinaud. Plusieurs toasts ont été portés : A ¿Vcsmcr, à ses élèves, aux propagateurs du magnétisme, etc., etc.
Enfin cette réunion fraternelle s’est terminée par l’hommage suivant : A la mémoire de Mesmer, que M. C.-F. Devert avait adressé pour cette circonstance.
LE TRIOMPHE DU MAGNÉTISME.
Jadis le grand Mesmer, ce sublime génie,
Vit ses savants travaux dénigrés par l’envie ;
Et dans son siècle ingrat, proscrit, persécuté,
11 légua sa vengeance h la postérité.
Disons-le, toutefois, quelques esprits d’élite Réclamèrent l'honneur de marcher ïi sa suite,
A terminer son œuvre ils étaient destinés ;
Le maître les guida ; sur scs pas entraînés Ils vinrent après lui, remplis du même zèle,
Ouvrir à la science une route nouvelle.
Par d’obscurs détracteurs trop longtemps repoussés,
Leurs généreux efforts ne se sont point lassés;
Mais toujours le succès est le prix du courage ;
Au magnétisme, enfin, le monde rend hommage.
En vain des préjugés les nombreux défenseurs.
Ennemis du progrès, partisans des erreurs,
Voudraient nier encor la magique puissance Dont chaque jour nouveau révèle l'influence ! Sophistiques rhéteurs, tous vos vains arguments Tombent devant les faits... eux seuls sont éloquents... Cessez donc d’opposer d’impuissantes barrières Au fleuve débordé grossi par cent rivières;
Renoncez à l’espoir de détourner son cours;
La digue a disparu... le flot roule toujours!
A quoi bonde MESMER combattre la doctrine? L'expérience parle, et la raison s’incline...
Le temps a renversé les autels des faux dieux ;
Les peuples sont instruits... le monde ouvre les yeux. Comme l'on voit au ciel, après un long orage,
Le disque du soleil écartant le nuage Qui voilait de son front l’éclat, la majesté,
S'offrir ii nos regards tout brillant de clarté ;
Ainsi la vérité, sous l'erreur gémissante,
Fait un sublime effort... se lève triomphante, Terrasse le mensonge et se montre aux humains Belle de la splendeur de ses attraits divins.
Honneur a loi, Mesmer ! honneur à la mémoire !
Oui, ton œuvre immortelle a mérité ta gloire.
Ce jour où tu naquis est un jour vénéré.
Et vous qui, comme lui, pleins d'un zèle inspiré, Avez, du magnétisme embrassant la défense,
Préparé par vos soins son règne qui commence; Disciples de MESMER et de la vérité,
Vos noms seront l'orgueil de la postérité !
Honneur à vous enfin, membres de l'Athénée!
Dans scs fastes à peine il compte une journée,
Et déjà l'avenir lui promet le succès ;
Les peuples, à grands pas, marchent vers le progrès.
VARIÉTÉS.
Candides aveux. — Le procès de madame Ponson aura été, cn somme, beaucoup plus favorable que nuisible à la cause du magnétisme. Il s’est trouvé parmi les témoins deux médecins dont les aveux , l’opinion franchement exprimée, ont vivement impressionné le tribunal et l’auditoire. L’un d’eux, M. Victor Jacotot, fils de l’illustre fondateur de la méthode d'enseignement universel, ayant eu recours à la lucidité de la dame Pouson dans un cas grave, a répondu ainsi aux questions qui lui furent adressées.
D. — De quelle maladie était atteinte mademoiselle X"*, votre cliente, en 1844?
R. — D’une maladie qui resfa d’abord cachée, simulant une affection goutteuse du bras droit, avec palpitations, douleurs d’estomac, etc.
D. — A-t-elle été traitée par tous les moyens ordinaires de la médecine, et quel a été le résultat de ces traitements?
R. — La cause restant cachée, le traitement fut incertain et sans résultat.
D. — M. Jacotot a-t-il appelé quelques-uns de ses confrères en consultation relativement à la maladie de mademoiselle X**‘?
R. — Oui, plusieurs.
D. — M. Jacotot a-t-il demandé l’avis de madame Pouson, somnambule, afin de comparer son opinions celle de la médecine ordinaire?
R. — Oui, surtout pour trouver dans le somnambulisme des ressources que je ne trouvais pas dans mon art ni dans les conseils de mes confrères.
D. — Quelle a été son opinion sur le diagnostic énoncé par madame Pouson et les remèdes indiqués par elle?
R. — Madame Pouson ayant parfaitement indiqué les souffrances de la malade, je pensai que son diagnostic pouvait bien être vrai, et que les remèdes proposés par elle pourraient être efficaces; ils étaient d’ailleurs rationnels et sans danger.
D- —Quel a été le résultat des remèdes conseillés par madame Pouson ?
R- — Aussi avantageux qu’il pouvait l’étre. La maladie ne pouvait guérir que par un effort de la nature; madame Pouson avait annoncé que cet effort salutaire n’aurait lieu que dans un an ; cette prédiction se vérifia. Mais il fallait découvrir la véritable cause du mal, la tendance de la nature et la seconder; c’est ce que fit madame Pouson.
D. — Depuis la guérison, la maladie a-t-elle reparu?
R. — Quelques symptômes reparurent par suite d’interruption momentanée de la fonction nouvelle; mais cessymptômcs disparurent par le retour du même effort, secondé des mêmes remèdes, et ne se montrèrent plus après quelques mois.
D. — Quelle est l’opinion de M. le docteur Jacotot sur l’emploi du somnambulisme sous la surveillance d’un médecin?
R. — Je saisis avec empressement cette occasion d’exprimer mon opinion. Je pense que le somnambulisme devrait être invoqué dans tous les cas (malheureusement trop nombreux) où le diagnostic est obscur, où l’art est impuissant pour découvrir la cause du mal, la tendance de la nature qu’il faut seconder. Eà quovergil naluraest discemla, dit le père de la médecine. On devrait recourir
au somnambulisme dans les cas assez fréquents de maladies simulées ou dissimulées, cl enfin dans leseas de mort apparente, pour éviter les inhumations précipitées dont ]a pensée seule fait dresser les cheveux , et que pourtant on trouve trop souvent encore, en France, au XIX' siècle. »
M. le docteur Notre, interrogé pareillement, a confessé aussi qu’à bout de ressources médicales, il avait eu recours au somnambulisme, parce que celui qui est chargé de la conservation de ses semblables ne doit négliger l’emploi d’aucun moyen pour arriver à cette fin. Voici, au reste, les demandes et ses réponses.
D. — M. Notré a-t-il soigné madame Faston pour une pulmonie arrivée au deuxième degré?
R. — Oui.
D. — A-t-il consulté ses confrères au sujet de cette malade, et quelle a été leur opinion ?
R. — Deux de mes confrères ont corroboré mon opinion sur la nature de la maladie.
D. — Postérieurement à la consultation avec ses confrères, et croyant la maladie mortelle, a-t-il voulu's’éclairer plus amplement en consultant madame Pouson?
R. — Oui.
D. — Quelle a été l’opinion de la somnambule sur la maladie; Va-t-elle bien vue et définie?
R. — La maladie a été parfaitement décrite; mais l’intensité du mal, suivant elle, n’était pas aussi alarmante que nous le pensions.
D. —A-t-elle conseillé un traitement? était il conforme aux bonnes doctrines médicales?
R. — Le traitement proposé a reçu mon approbation, puisqu’il était conforme aux règles de l’art.
D. — Quel a été le résultat du traitement conseillé par madame Pousou?
R. —Huit jours après, la malade était entrée en pleine convalescence.
D. — M. Notre a-t-il assisté madame Pouson dans plusieurs consultations, et quelle est son opinion sur l’usage, par un médecin, des conseils de somnambule?
R. — Je pense que le somnambulisme ne doit pas être dédaigné par un médecin pour arriver à la connaissance de la véritable maladie, et que c’est une dotation de la divinité pour le soulagement de l’humanité. J’ai assisté à trois consultations depuis celle de ma cliente , et la description des maladies a toujours été exacte. »
— Ces témoignages, loin de disculper, prouvaient, au contraire le délit, et le tribunal, n’ayant pas à juger la bonté relative des systèmes médicaux, appliqua la loi. Nous ferons remarquer que ce jugement diffère essentiellement de ceux qui l'ont précédé, en ce que la responsabilité du médecin a été écartée. C’est un précédent fâcheux, d’après lequel nul médecin ne pourra consulter un somnambule sans exposer celui-ci à des poursuites, et ceux ou celles qui donnent des consultations sous la direction d’un médecin, signant même les ordonnances, ne seront pas à l’abri des atteintes de la loi. Ce fait, attentatoire à l’indépendance médicale, mérite une sérieuse attention. Avec une telle interprétation, la responsabilité qui permet au docteur l’emploi, sans contrôle, de tel ou tel moyen qu’il croit le plus propre, n’est plus qu’une fiction. Il y a urgence de réformes.
Hydroscopie. — On raconte, sur le voyage de M. l’abbé Paramelle dans les Vosges, une anecdote intéressante. Le savant hydroscope cheminait sur la route de Mirecourt; il avait hâte d’arriver dans cette ville, et c’était un jour où le soleil de mai brillait dans toute sa force. Dévoré par une soif ardente, il marchait d’un pas rapide sans découvrir |la plus petite source pour se ra-
fraîchir à son aise, Enfin une habitation isolée se présente au milieu des champs ; il y court et demande, par grâce, un seul verre d’eau. 1.a bonne femme qui gardait la maison lui répond : « Je suis bien fâchée, monsieur le curé,
« mais il n’y en a pas une goutte chez nous, et la fontaine « est trop loin! Si vous désirez un verre de vin,,je vous « le donnerai avec plaisir. » L’abbé Paramelle, un peu déconcerté, lui dit : « Va pour un verre de vin, puisque « l’eau est si rare. »
Pendant que l’bôtesse descend à la cave, le célèbre voyageur fait le tour du jardin. En rentrant dans la chambre il s'écrie : « Voulez-vous que je vous paie ce « viu avec de l’eau? » La villageoise ouvre de grands yeux et réplique : « C'est pour rire que vous me de-« mandez ça, monsieur le curé? — Nou, non; acceptez-o vous de l’eau pour du vin? — Mais.... je ne vous com-« prends pas.... Il ne faudrait pas vous moquer de moi, «monsieur le curé! — Eli bien! venez, ma bonne; « regardez à côté de la porte; vous avez une source « abondante qui doublera la valeur de votre jardin. « Faites seulement creuser à deux mètres et vous la « trouverez sûrement. Cela ne m’empêchera pas de payer « votre viu. » On devine assez quelle fut la joie de la pauvre femme. Depuis le départ de M. Paramelle, on a fouillé le terrain, et aujourd'hui une magnifique fontaine abreuve largement tous les habitants de la ferme, qui croient de tout leur cœur que le prêtre étranger est un sorcier. (Gazette de France.)
Vue à distance. — Le Sud de Marseille publie une lettre de Saint-Dénis (île Bourbon), datée du 10 mars, et dans laquelle nous remarquons un passage relatif à la disparition du navire le Berceau. Nos lecteurs doivent se rappeler que la trace de la Lilloise a été exactement suivie par un somnambule ( voy. t. IV, p. 13), ce qui
rend très-probable la réussite de la tentative dont voici la nouvelle.
« Je vais te raconter, dit l’auteur de la lettre, une chose bien extraordinaire, à laquelle tu n’ajouteras peut-être pas foi, car il s’agit de magnétisme. Voici ce dont il est question. M. Durand, commandant le bateau à vapeur l’Archimède, qui a visité toute la côte de Madagascar sans avoir pu recueillir aucun indice sur le naufrage présumé du Berceau, vient d’avoir une conversation avec madame ***, somnambule, au sujet de la perte de ce navire.
« Celte dame a dit qu’à la suite d’un ouragan qu’avait éprouvé te Berceau sur les côtes de Madagascar, ce navire s’était perdu, et que le commandant, une partie de son équipage et une dame (la femme du médecin en chef) étaient sur l’île au Sable, mourant de faim. Mais ce qu’il y a de plus surprenant, c’est que cette dame s’est servie dans sa narration des termes d’un marin expérimenté ; elle a même tracé sur la carie la route qu’a tenue le Berceau depuis son départ de Saint-Denis jusqu’au moment du naufrage. Il s’ensuit de cette conversation que l'Archimide est parti depuis quelques jours pour aller, dit-on, à l'île au Sable donner secours aux naufragés. »
Une pythonisse. — La trop célèbre mademoiselle Prudence vientd’ouvrirà Londres,dans HanoverSquare, des séances d'onéiromancie artistique. Assise sur un siège élevé, le front ceint de lauriers, les bras couverts de chaînes d’or, les pieds chaussés de sandales, la nouvelle-pythonisse et son associée, mademoiselle Laurent, donnent des représentations de mimique passionnelle. Sur la demande des spectateurs, transmise par écrit par mademoiselle Laurent, mademoiselle Prudence exprime, dans son état extatique, toutes les impressions désirées.
On raconte U ce sujet qu’un honnête cokney avait demandé que la pytlionisse représentât le désespoir de Calypso après le départ d’Ulysse, et qu’il fut fort étonné de lui voir feindre la terreur. De pareilles jongleries mériteraient bien un châtiment sévère. (Union médicale.)
_On sait que nous sommes loin d’approuver ces
exhibitions, toujours mal interprétées par la masse des spectateurs, qui n’y voient qu’une jonglerie savamment organisée, alors même que les expériences réussissent le mieux; c’est pourquoi, doutant de la compétence de Messieurs de VUnion, nous ne saurions nous associer à leur vœu tant soit peu magnéticide.
Tribunaux. — Jamais on n’a vu autant de procès magnétiques que cette année. 11 en éclôt presque simultanément sur tous les points du globe. Après ceux de Washington et de Santiago, en voici un non moins curieux qui sc mitonne à Marseille. Nous en empruntons les détails à un journal du pays.
« On s’entretient depuis quelques jours, dans les pas-perdus du palais, d’une aventure dont les piquants épisodes vont se dérouler devant la première chambre de notre tribunal civil. Voici le fait, dont nous pouvons garantir l’exactitude.
« Un docteur marseillais, connu par scs ardentes sympathies pour le magnétisme, reçut, l'an dernier, une confidence importante.
« Uue somnambule, par lui soumise au sommeil magnétique, lui révéla qu’un trésor considérable était caché sous les voûtes d’une antique bâtisse adossée à l’église de la Major, du côté de la mer, ancienne demeure des chanoines métropolitains, convertie en fabrique à savon depuis longtemps abandonnée.
« Sur ce précieux avis, le docteur s’entendit d’abord avec le propriétaire du local; un traité fut passé, par
suite duquel le docteur prenait ;i sa charge tous les travaux de recherche et s’obligeait à faire participer le propriétaire pour une moitié au trésor découvert.
« Avant de mettre la main à l’œuvre, le docteur voulut renouveler l’expérience, et deux somnambules renommées par la puissance du don de seconde vue furent conduites dans les souterrains de l’ancienne abbaye. Les indications lesplus précises confirmèrent l'existence d’un riche trésor.
« Les travaux commencèrent immédiatement; les ouvriers, mis dans la confidence du secret, devaient recevoir un salaire quotidien modéré et une petite gratification proportionnelle en cas de succès. Un de nos meilleurs serruriers s’empressa de fournir les instruments nécessaires pour les fouilles.
o Des mois s’écoulèrent; dans l’intervalle, le docteur avait découvert, sinon le trésor, du moins une nouvelle somnambule dont on citait des merveilles et avec laquelle il se hâta de se mettre en communication. Il la conduisit, la nuit, dans les souterrains, théâtre des travaux. La somnambule confirma également l’existence du trésor; mais, réformant avec beaucoup d assurance les indications des deux autres, elle déclara que le trésor ne se trouvait pas sous l’ancienne fabrique à savon, mais bien à quelques pas de là, dans l’église même de la Major, sous les sépultures reposées dans les caveaux de la cathédrale.
« Le docteur, justement préoccupé des dépenses déjà faites, quoique non encore payées, se garda bien de communiquer cette grave révélation à ses associés. Il comprit que le succès de ses espérances résidait tout entier dans une confidence épiscopale.
« On assure que la confidence fut très-bien accueillie et que, sous une haute direction , des fouilles très-profondes ont été faites pendant plusieurs semaines, et avec
le plus grand secret, dans les caveaux de la Major. Mais, soit indiscrétion dos travailleurs ou de toute autre personne, la mine a été éventée ; le secret du docteur et de ses co-inléressés est devenu le secret de la comédie.
« Cette publicité, en constalant la double mystification des premiers ouvriers, a produit chez eux une grande irritation. I.e serrurier surtout, qui n’avait pas encore reçu un centime, et qui est créancier d'une assez forte somme, a été le premier à prendre la mouche et à demander compte au docteur, devant la justice, de sa mystification et du mémoire dont il n’est pas payé.
« Cette cause bizarre sera prochainement appelée; les débats révéleront quelques autres détails fort piquants, que uous avons cru devoir taire ici, mais dont un de nos plus spirituels avocats, chargé de la défense des ouvriers, tirera sans doute un plaisant parti à l’audience. »
Revue des journaux. — Le numéro de niai du Journal de la médecine homéopathique résumant ce qu'on a dit pour et contre l’éther, termine ainsi :
0 Nous ajouterons, nous, qu’en attendant, et sans exclusion de l’emploi de ces divers moyens, nous aurions recours au magnétisme animal, dont nous osons croire qu’on obtiendrait de bous résultats. Nous disons plus: c’est que, dans le cas d’une opération, nous préférerions de beaucoup l’emploi du magnétisme à celui de l’éther pour stupéfier le malade. Nous avons l’expérience personnelle de l’avantage qu’il y aurait de recourir à ce moyen quand on a sous la main l’homme convenable.
« Eufin nous" dirons pour terminer, que l’usage de l’élher comme slupéfiaut dans les opérations ne devrait être qu’une exception, et le magnétisme animal la règle, non que ce dernier soit d’un emploi plus facile, mais parce que jamais personne n’est mort sous sonmüueuce,
ce qui est arrive avec l’éther; et ensuite parce que l’insensibilité produite par ce dernier n'a qu’une durée très-courte, beaucoup trop courte quelquefois, et que souvent encore il manque son but en ne produisant pas une insensibilité complète. Avec le magnétisme, au contraire, la durée de l’insensibilité est aussi longue que l'opérateur peut le désirer, et aussi complète que l’intérêt du patient l’exige.
»11 va aujourd’hui un si grand nombre de faits qui prouvent en faveur du magnétisme, qn'il faut être vraiment aveugle comme certains savants, ou entêté comme un académicien pour s’obstiner à fermer les yeux et les oreilles afin de pouvoir nier tout à son aise. Après cela, soyons juste: pour un vrai savant peut-il y avoir quelque chose de vrai hormis ce qui touche les sens? Eh bien alors, comment voulez-vous que le magnétisme soit vrai ? Est-ce que je vois, moi, quelque chose sortir de vos doigts et aller s’accumuler sur les nerfs des magnétisés ? A la vérité, j’ai bien vu des gens qui se laissaient extraire des dents, amputer un sein, couper des jambes, extirper des tumeurs très-douloureuses, supporter les opérations les plus terribles et les plus longues sans jeter un cri, saus faire un geste, sans cesser de conserver le plus grand calme; mais qu’est-ce que cela prouve, sinon le charlatanisme le plus éhonté, le compérage le plus indigne!...»
— Le Commerce du 12 et le Courrier français du 13 reproduisent la lettre publiée par le Sud concernant la recherche de la corvette le Berceau.
— On lit dans ¡‘Union médicale du 13 :
o Une somnambule, madame Pouson, vient d’être condamnée à 15 francs d’amende pour exercice illégal de la médecine. Elle était, en outre, accusée d’homicide involontaire, et voici dans quelles circonstances : un enfant était gravement malade; le médecin prescrivit un
traitement énergique. Les parents hésitèrent à suivre ce traitement et consultèrent la somnambule, qui prescrivit un traitement fort doux. L’enfant mourut.
« Sans doute le fait d’homicide involontaire n’est pas constaté, et le tribunal a bien jugé en n’appliquant pas la peine 5 mais on avouera que la présomption d’homicide est ici plus que légitime. Ce fait, qui paraît simple an premier abord, est cependant l’histoire de ce qui sc passe chaque jour, soit par les somnambules ou les charlatans, soit par les sœurs de charité, en un mot, par tous ceux qui se mêlent de faire de la médecine, et même de donner des soins et des conseils médicaux gratis. De par la loi, la Chambre des Pairs, en consacrant cet état déplorable, a mis entre les mains du premier individu venu le moyen de commettre un homicide involontaire. La charité est souvent aveugle. »
— Les magnétiseurs ont depuis longtemps reconnu l’existence d’émissions nerveuses s’effectuant sous 1 influence de diverses circonstances, telles que la peur, la surprise, les peines et la joie subites, et c’est ainsi qu’ils expliquent les cas de mort instantanée qu’on observe souvent sans lésions organiques. Nous sommes heureux de rencontrer la même pensée énoncée î» la suite d'un rapport de M. le docteur Brouzet, de Nîmes. Ce praticien, après avoir signalé l’heureux résultat d’une double amputation pratiquée coup sur coup sur un mécanicien qui eut les jambes broyées sur le chemin de fer de Montpellier, termine ainsi ses réflexions sur cette pratique chirurgicale, dans l'Abeille médicale.
« Cependant, si après la première opération le malade est plongé dans un état de torpeur considérable, ou s’il est doué d’un tempérament nerveux, sa sensibilité exaltée doit retarder la seconde, si l’on ne veut s’exposer a un étatspasmodique, même consécutif, qui peut devenir mortel. Il ne faut, en effet, jamais oublier qu’il y a des
pertes nerveuses comme des perles sanguines, et que la douleur tue aussi promptement que rhcmorrliagie. »
Quel poids ces réflexions donneraient à l'insensibilité si l’expérience déjà n’en avait démontré riinmense utilité ! N’est-ilpas évident, en effet, que si pas un des opé-r éspar ce procédé n’est mort, c'est à la privation de la douleur qu’est dû ce succès?
— La Dimocralic Pacifique du 18 public sur la navigation aérienne une apologue du savant Jobard, dont voici la morale :
Mes ainis, vous pouvez m’en croire,
Ce conte-ci n’est que l’histoire De tous les inventeurs,
Précurseurs ou fauteurs De quelque vérité nouvelle :
Colomb, de Causs, Fourier, Mesmer et Jacotot Ont montré leur ballon trop tôt.
Tous ces illuminés, comme on les appelle,
Seront toujours crucifiés pour elle.
BIBLIOGRAPHIE.
La gastrite, par le docteur Bésccuet de Saunois, 1 v. in-S». Paris, 1846, 5” édition. Chez Labbé, place de l'Ecole de Médecine.
La soif du savoir est si grande chez certains individus qu’ils en poursuivent, encore enfant, la réalisation avec une ardeur virile. Mais la vérité, souvent à dessein dissimulée, n’est pas toujours facile à dépister dans l’épais
fourre îles contradictions, et tous ceux qui cliassent ce précieux gibier n’en reviennent point chargés. L’auteur de cet écrit discerna de bonne heure, ce qu'il y avait de vrai dans la masse des faits dit magnétiques : aussi le voyons-nous, dès 1821, alors que tout le monde était opposé à l’admission de ces phénomènes, appelés rêves par les uns, fallacies par les autres, écrire avec autant de lucidité que de perspicacité l'article Zoomagnétisme, dans l’Encyclopédie moderne de M. Courtin. En 1829, nous le retrouvons, avec non moins d’indépendance d’idées et un savoir accru, soutenant la nouvelle science au sein de la Société de médecine pratique, et depuis en divers endroits de ses écrits. C’est par incidence qu’on trouve dans celui-ci ces quelques lignes :
« Passionné pour la science, je cherchais avec ardeur toutes les occasions d’étude; mais, imbu du matérialisme des écoles, je ne voyais pas beaucoup au delà des lois physiques de l’organisation humaine. Je croyais alors que toute la médecine était dans la pharmacie. Je savais le corps humain pour en avoir de mon scalpel suivi les fibres les plus déliées ; mais j’ignorais qu'il existât pour lui autre chose que l’arrangement anatomique de ses parties. Jeune encore dans la pratique médicale, l'influence de l’élément nerveux sur les maladies, sur le tempérament et sur tous les actes de la vie , était pour moi dans l’obscurité du chaos ; l’âge, la pratique et l’observation m’ont appris depuis sur cc sujet ce que j’aurais en vain cherché dans les livres, et qui ne se peut guère transmettre alors qu’on l’a appris.
« Quelle médecine pourrait se comparer à l’action du fluide magnétique, si l’art pouvait parvenir à en préciser les effets, à en indiquer l'usage et les moyens? Quelle médecine que celle qui se trouve dans tous les individus, qui se transmet par le seul fait du désir de soulager, qui ne fatigue aucun organe et semble être le principe
de vie lui-même répandu par la Providence sur toule la nature!
« Ah ! les médecins sont bien coupables de ne pas chercher par l’étude et l’expérience à démêler la vérité au milieu de ce chaos d’erreurs et d’obscurité(I) ; et les magnétiseurs, je dis les magnétiseurs de bonne foi, sont bien aveugles de ne pas comprendre qu’en ravalant les faits magnétiques à des séances de physique amusante, ils ne cessent de donner gain de cause à leurs ennemis.
« Au lieu de justifier les sarcasmes de leurs détracteurs en s’obstinant à traiter les malades par l’unique secours des conseils et des prévisions d’une somnambule, que les magnétiseurs appliquent le magnétisme directementf, avec foi et volonté, qu’ils l’appliquent surtout à ces affections si variées dont la cause réside dans l’altération, l’affaiblissement ou la surexcitation de l'élément nerveux : le succès parlera bientôt pour leur cause et fera taire ceux qui glosent sur tout sans savoir, ceux qui préfèrent nier ce qu’ils ne comprennent pas à l’étudier avec conscience et un véritable désir de s’instruire. »
(1) «Tant d'absurdités ont Ole dites cl imprimées depuis quelque temps sur le magnétisme, que j'ai cru devoir ajourner la publication d'un livre que j'avais prépare surcel intéressant sujet. Il faut un courage donl j'avoue ne pas me sentir capable pour s’exposer à être confondu avec ceux qui dressent des tréteaux jusque sur les place» publiques. Cette folie passera, j'espère, comme tant d'autres, et alors les hommes de science et de conscience pourront se faire entendre 4 leur tour. ■
Le Propriétaire-Gàiatil : 11ÉBEHT (de Camay).
l’aris, — Imprimerie d'A. Rbnb, rue de Seine, 33.
MANUSCRITS DE MESMER.
SoUoniü élémentaires sur la morale, l'éducation et la législation, pour servir à l'instruction l>ul)liiue en France, par F.-A. Mesmer.
§ VII. — Epoques de la vie.
D’après les principes de l’égalité, il faut déterminer et fixer les époques que la nature parait avoir tracées dans la vie de l’homme en société pour en faire parlie de la constitution propre aux Français.
Ces époques sont marquées, d’abord par sa formation, ensuite par le développement de ses forces et facultés, par son instruction progressive, par les fonctions qu’il est capable de remplir envers la société naturelle et civile; enfin par le terme de la carrière, vers lequel il s’approche en jouissant du bien auquel il peut se flatter d'avoir concouru pendant sa vie.
On distingue dans le cours de la vie de l’homme sept époques ou périodes qu’il a à parcourir en se conformant aux vues de la nature et de la société pour laquelle il est destiné. Il convient que chacune de ces époques soit distinguée par un costume qui lui soit particulier et privatif.
La première époque commence dès la naissance, et l’homme est regardé comme enfant jusqu’à neuf ans.
Les premières années seront consacrées au développement et à l’instruction naturelle.
TOME v. —A0 51.—10 AOUT 1847. 3
Comme il a été dit, les enfants seront toujours ensemble, et, autant que possible, à l’air libre, dans les champs, dans les bois et clans toutes les situations; exposés de manière à se former par eux-mêmes les premières notions et les habitudes dépendantes de la nature seule.
Us seront presque nus, dans la belle saison, jusqu’à l’âge de cinq ans, c’est-à-dire sans chapeau, sans manches et sans bas. Après ils seront toujours habillés en blanc; la tète, la poitrine, les bras et les pieds encore découverts, excepté l’hiver. — Les garçons en petit gilet et long pantalon de toile. — Les lilles eu longue robe de mousseline. — Les uns et les autres sans ligatures capables de gêner les mouvements de flexion et de comprimer dans leurs fonctions les muscles et les viscères.
En sortant de l’enfance, à l’âge de neuf ans, on sera appelé élève. Tout le cours des années jusqu’à dix-huit ans sera employé à l’instruction et à la pratique d’une profession ou aux travaux de l’agriculture.
L’élève sera habillé en petite veste, de toutes couleurs et étoffes, avec ceinture; un pantalon court et un espèce de.....ou blouse courte, qui laisse les bras libres
pour les exercices et les travaux. La tète sera nue ou couverte d’un petit chapeau rond.
De dix-huit jusqu’à vingt et un ans, ils seront tous sans exception défenseurs de la patrie. Cet âge, qui est celui des grandes passions et de la fougue de la jeunesse, sera contenu par la discipline militaire. Il s’habituera à une vie réglée et se fortifiera dans les principes constitutionnels et dans les vertus sociales.
Cette jeunesse instruite et exercée dans l’art militaire formera la pépinière ou première force armée de la république. Parmi ceux qui voudront se vouer à cet état, on choisira les officiers.
A l’âge de vingt et un ans les défenseurs de la patrie
retourneront chez eux pour se marier et pour exercer leur profession ou l’agriculture. Ils seront alors appelés pères de famille ou citoyens susceptibles d’étre électeurs s'ils sont propriétaires à cens suffisant.
Première réflexion. — Peut-être taxerait-on de singularité et de bizarrerie celle nouvelle méthode de vêlement proposée pour distinguer invariablement les sept époques de la vie, si l’on n’en déduisait pas les motifs les plus dignes de fixer l’attention des personnes réfléchies et sans prévention.
Dès qu’il s'agit de créer un esprit national, on doit commencer par chercher et employer tous les moyens de détruire les causes qui concourent à favoriser l’inconstance et la légèreté parmi les individus d'un peuple dont il faudrait d'abord régénérer les mœurs. Or, il est un point incontestable en matière de modes et de coutumes : c’est que depuis l’état de l’homme sauvage jusqu’à celui de l'homme parfaitement civilisé, depuis la classe des paysans jusqu'à celle des ordres monastiques, judiciaires et chevaleresques, chaque membre de ces corporations tient autant et souvent beaucoup plus à son sol, à son langage, à ses habitudes, à sa manière de vivre, en un mot à ses devoirs et à ses plaisirs, par les formes extérieures, que par une combinaison d'intérêts, de commodités et de jouissances bien appréciées.
En parcourant le cercle des générations passées et des nations qui existent, il n’est pas difficile de reconnaître que le peuple le plus disposé à changer de mode et d’allure est aussi le plus disposé à changer d’opinion et de maître, de doctrine et de mœurs : l’esprit d’imitation exclut rattachement à la patrie, la fidélité aux devoirs envers elle. 11 faut que tout contribue, dans les usages e' dans les rapports des âges entre eux, à rappeler aux hommes que régissent les mêmes lois, qui forment par leur aggrégation le corps social, à l’égalité des principes constituants et des droits constitués.
Il y aurait moins d'inconvénients politiques à laisser aux femmes la liberté de varier leurs ajustements au gré de leurs caprices, s’il était possible de borner entre elles et sur elles les influences funestes des modes et nouveautés.
Le costume sera une veste, de toutes couleurs, Ion-
gue, croisée et k manches étroites, avec une ceinture blanche. Un manteau à la romaine jusqu’aux genoux; le chapeau retroussé sur le devant, avec une plume dans les cérémonies et assemblées électorales.
Après avoir acquis l’expérience de l’intérêt public et ayant rempli la tâche de pères de fam ille par l’éducation de ses enfants, à l’âge de quarante ans, on entrera dans la classe des fonctionnaires publics, et l’on pourra être élu fonctionnaire jusqu’à soixante ans.
Deuxième réflexion. — II n’est pas nécessaire, sans doute, de préciser que cette uniformité de costumes et de vêtements ne serait exigée que dans les grands rassemblements des jours consacrés au repos, aux différentes fêtes solennelles et aux grandes époques, surtout des élections, où les Français sont appelés à exercer leurs droits de citoyens, déterminés par la loi.
Dans les grandes solennités et l’exercicc des fonctions le costume sera la veste et le manteau plus longs ; le chapeau retroussé comme celui du citoyen, et orné de trois plumes, couleur nationale.
De plus, les présidents, grands fonctionnaires, porteront l’écharpe et un bâton mince et long, qui les distingueront également dans les grandes assemblées nationales.
Troisième réflexion. — On ne doit pas inférer de cette uniformité de costumes prescrits qu’elle est de nature à rentrer dans les lois sonipluaires qui peuvent convenir à de petits gouvernements de peuples montagnards, mais non h une grande nation comme la France. Le seul but est de disposer les individus de chaque époque de la vie à ne voir dans leurs rangs que des Français jouissant des mêmes droits, des mêmes influences de température et d’usage, dans les formes et les distinctions d’âge, sans pour cela que l’on cherche à égaliser les forces et les moyens soit de corps, d’esprit ou de fortune.
A l’âge de soixante ans, dispensé de fonctions actives,
on sera considéré comme surveillant et éligible au conseil de la commune.
On s'occupera spécialement à veiller sur l’éducation, sous tous les rapports, et sur les mœurs, à donner de bons conseils à ses concitoyens.
L’habillement sera une veste fermée jusqu’aux genoux, manteau plus long et plus complet, ceinture blanche, souliers carrés, cravate à rabat, chapeau rond avec une plume blanche couchée autour.
A soixante-dix ans et jusqu’à la fin de scs jours on cessera de s’occuper. Honoré à cette époque, comme vieillard et vétéran de la commune, on jouira du repos et de la reconnaissance publique par les marques de respect que les autres membres de la société seront empressés de témoigner dans toutes les occasions k la vieillesse.
Le costume du vieillard sera en blanc ; une espèce de toge ou soutane fermée jusqu’au-dessous des mollets; un manteau long. Il sera toujours couvert d’un chapeau rond, gris, avec une plume blanche couchée, et une canne pour s’appuyer.
11 y aura un costume particulier pour chaque espèce de fonctionnaire, toujours analogue aux charges qu'il aura à remplir; mais la marque d’honneur commune à tous sera la chaîne plus ou moins pesante et ornée d’emblèmes éclatants, destinée à leur rappeler qu’ils sont liés à leurs devoirs indissolublement.
Dernière réflexion. — L’invasion de la dictature et le pouvoir arbitraire, caractérisé par l'expulsion de plusieurs membres du tribunat, qui lui faisaient ombrage, comme 'propres à constituer le parti de l'opposition, parmi lesquels sont en première ligne B., C. et Ganil.
Voilà l’événement qui force à couper court à tout projet, à tout espoir de fonder en France un esprit public, un type national!....
[La utile prochainement.)
CLINIQUE MAGNÉTIQUE,
Organiser la propagande magnétique sur des bases qui la rendent sûre et rapide, telle est la pensée qui domine actuellement los mesniériens soucieux de l’avenir de leur science. Aussi voit-on, sous l'empire de celle préoccupation, partout éclore des projets de centralisation de moyens et de direction d'efforts, basés sur l’association des capacités et le concours simultané des talents. Cette tendance à l’unité de doctrine par l’harmonie d’aclion présage la fin de l’anarchie et l’institution d’un ordre de choses régulier, stable, qui, par voie d’entente mutuelle et de consentement unanime, préside aux destinées du magnétisme. Déjà les préventions contre ces nouvelles idées s’éteignent; on commence à comprendre la nécessité, l’urgence d’institutions qui nivellent les dissidences, pondèrent les actions, substituent au caprice individuel la constance des vues collectives, transforment les rivaux en émules, récompensent le mérite et répriment l’abus.
Malheureusement tous ces projets pèchent, ou par étroitesse de vues, ou par pénurie de moyens de réalisation, Il y a du bon dans tous, mais pas assez dans chacun ; leur fusion pourrait seule satisfaire aux difficultés du présent etpourvoir aux exigences de l’avenir. Nous en avons successivement enregistré plusieurs; en voici un nouveau qui a, comme les autres, un commencement d’exécution. C’est une lettre; les termes peuvent n’en être pas parfaitement choisis, mais l’idée est assurément fort bonne et d’une application facile. Nous en recommandons la méditation et le commentaire à tous ceux qui s’occupent de l'organisation du corps mesmé-rien et de ses moyens d’action.
Voici ce document; ou lit sur la première page :
[iOllRESPOXDANCE PHÉNOMÉNOLOGIE UNIVERSELLE.
LÏÏIFIÜliB ET l’ül'LL.UIlE _
DUT 1.1 ¿r
ICMCNTER ET A RÉPANDRE Auxcrrcylc 1SA7.
ILCMÈRB BIENFAISANTE »c
iMBEAt MESMÉfUEN. JULES DE ROVÈRE,
Propagateur des viriles sublimes du SIcsmirisme. el
— démonstrateur des modifications physiologiques produites
par la volonté de l’homme sur ses semblables.
S/ xsSé (nom et demeure du malade.)
L’existence du mesmérisme trop longtemps négligé est enfin reconnue, mais on est encore bien loin d’apprécier l’importance et l’étendue de son application. Occupé depuis longtemps à répandre, dans le département de l’Yonne, les notions pures et anti-mystiques de cette science, je viens aujourd'hui, au nom de l'humanité souffrante, faire un appel à votre impartialité en faveur du progrès scientifique et du triomphe de la vérité sur les préjugés et l’erreur. Tout esprit droit, tout cœur sensible, toute âme élevée y répondra. Je ne doute donc pas de votre empressement à vouloir bien me faire connaître dans votre réponse, insérée à la suite de la présente, ce que vous avez observé, pensé et jugé relativement à mes démonstrations, soit que vous ou quelque membre de votre famille ayez vu ou éprouvé les effets de mon influence, faussement appelée magnétique.
J’ai l’honneur d’être, etc.
Le numéro cn marge correspond à l’inscription sur un livre matricule contenant l’exposé de l’état du malade au commencement du traitement magnétique, l’indication des causes, probables ou connues, de la maladie, l’énoncé du ou des traitements suivis, etc.: enfin, la marche de la maladie sous l’influence du magnétisme, le tout constaté de manière à former l’image complète et fidèle de l’affection, notice qui doit à la fin être confrontée avec la déclaration que le malade ou ses parents font au verso de ladite lettre.
De cette manière l’on a, non plus de simples affirmations verbales, mais des preuves écrites, régulières, qui restent pour attester la vérité des faits, et, ce qui est plus important pour l’avenir, le mode d’action du mesmérisme sur les maladies, comparé à celui des médicaments. Maintenant supposez qu'au lieu d'être adressées au magnétiseur qui a fait la cure, ces déclarations écrites soient envoyées à un comité central, celui-ci recevra de tous les points une masse de documents qui, publiés, répandront en tous lieux la connaissance des faits nouveaux, qui, partout vérifiés, reviendront, contrôlés ou infirmés, au comité chargé de les classer selon leurs affinités. Envisager la queslion sous ce point de vue c’est résoudre le problème d’une correspondance universelle, et nous félicitons, pour notre part, M. de llo-vère d'avoir appelé l’attention des magnétiseurs sur un sujet aussi digne de leurs méditations.
Nous allons, pour donner à nos lecteurs le mécanisme de cette correspondance, transcrire quelques attestations de malades guéris, et ils pourront ainsi apprécier à sa juste valeur le moyen proposé.
La première concerne madame Lcmoinc, sœur de M° Marie, ex-bâtonnier de l’ordre des avocats; c’est pour cette guérison que M. de Rovère fut, l’an dernier, traduit en police correctionnelle et en Cour royale, ou il
fut également acquitté (Voyez t. III, page 300). Elle porte le
N° 15.
Je dois trop au magnétisme pour ne pas faire connaître ce moyen de guérison à ceux qui auraient le malheur d’être attaqués d’une maladie aussi longue et aussi douloureuse que celle que ma femme vient d’éprouver.
C’est au talent de M. Jules de Rovère, dont on ne pourra jamais faire assez d’éloges pour les bons soins et la persévérance qu’il prodigue aux personnes qui ont recours à lui pour éprouver les effets curatifs de l’électro-magnétisme, que je dois l’entière guérison de ma femme.
En 1830, la révolution de Juillet avait fait une si grande impression sur madame Lemoine, qu’elle tomba malade. Je iis appeler les meilleurs médecins de Paris, qui déclarèrent que c’était un rhumatisme nerveux qui s’était fixé dans l’estomac et qui avait été occasionné par une suppression. Cet état dura trois mois, après lesquels le germe de cette maladie n’était pas détruit. Le rhumatisme prit son cours immédiatement dans toutes les parties du corps, jusqu’à l’époque où je lis l’heureuse rencontre de M. de Rovère, c’est-à-dire à la lin de février dernier 1846.
En 1838 ma femme s’était cassé la jambe, et depuis cette époque elle ne pouvait marcher qu’à l’aide de deux béquilles, malgré les efforts et les soins que les médecins avaient apportés pour sa guérison , tout avait été sans résultat. Cet état d’inaction lui avait arrêté la circulation du sang, et elle était menacée d’une hydropisiepour laquelle elle a subi un traitement de six mois. Ce traitement médical n’avait produitaucun effet, si ce n’est d'empêcher les progrès de la maladie. Cependant ma femme finit par tomber tout à fait en langueur, et étant accablée sous le poids des souffrances les plus aiguës, je con-
sultai de nouveau les médecins, dont les efforts furent sans résultat: le mal allait toujours empirant, le bras droit était paralysé, l’enflure du corps en général, et plus particulièrement des jambes, faisait des progrès effrayants et d’autant plus alarmants que les docteurs avaient déclaré qu’il n’y avait aucun espoir de guérison.
C’estdanscettetristeconjoncture que je m’adressai au magnétiseur Rovère,qui, sans mettre le moindre retard, commença à magnétiser la malade, et ne tarda pas à obtenir quelques légères améliorations.
Enfin, après huit mois de soins assidus, ce démonstrateur, aussi zélé que désintéressé, est parvenu, sans employer aucune sorte de médicaments, à triompher de tous les obstacles: paralysie, bydropisie et toutes les souffrances, en un mot, ont disparu, et ma femme marche saus béquille, sans canne, et jouit d’une bonne sauté.
Tout être assez malheureux pour éprouver pareille maladie, je l’engage à se mettre entre les mains de M. Jules de Rovèrc. Jamais on ne trouvera plus de délicatesse dans les procédés, plus de courage, plus de patience et de persévérance dans les soins, et quiconque saura apprécier le talent proclamera celui de M. Rovère afin de rendre hommage à la fois au savoir et au mérite.
Approuvé l’écriture ci-dessus et d’autre part:
J. Lemoine.— An nette Marie, femme Lemoine. — Femme veuve Lemoine. — L. Lemoine. — Onésime Séguin. —Femme Séguin.
Nous soussignés, témoins oculaires de tous les faits ci-dessus énoncés, nous nous empressons, pour rendre hommage à la vérité, de signer le présent certificat.
Approuvé l'écriture ci-dessus:
Monnot, ancien greffier de police simple.
J'ajoute en outre qu’il est en ma connaissance que
M. de Rovère a guéri un jeune homme qui était malade depuis plus de cinq ans.
Femme Monnot. — Denis, étudiant en droit.
Je déclare avoir vu madame Lemoine ne pouvoir marcher que très-difficilement et h l’aide de béquilles depuis plusieurs années, par suite d’une chute grave, et que, lui exprimant mou étonnement de la voir ingambe, il y a quelques mois, elle m’a dit qu’elle devait cette guérison à M. Jules do Rovère, qui s’occupe d’électro-magnétisme.
Lechin. — Y. Beron.
A literie, 7 décembre 18/iC.
La suivante est inscrite sous le N° 137.
Nous soussigné Descaves, capitaine retraité à Auxerre, certifie que M. de Rovère, magnétiseur, a donné les séances de son art à mon épouse, affectée depuis dis années consécutives d’une affection nerveuse et chronique dans toutes les parties du corps, depuis le haut de l’épine dorsale jusqu’à la pointe des pieds.
Que, pour cette cruelle et dangereuse maladie, elle a fait quatre fois le voyage des eaux à Bourbonnes-les-Bains, où elle a été traitée par M. Maguin, médecin habile, sans en avoir obtenu le moindre succès; seulement il a pu arrêter les progrès de la maladie.
Heureusement pour mon épouse, M. de Rovère est arrivé à Auxerre ; elle s’est confiée à ses soins et à son assiduité, dont elle en a obtenu une amélioration sensible.
Par le magnétisme, M. de Rovère a su habilement la débarrasser des eaux froides qui lui glaçaient le sang, ensuite est parvenu à rétablir la circulation du sang dans toutes les parties malades, et rétablir la chaleur qui depuis longtemps n’avait plus lieu. Cette chaleur s’est ré-
tablieà lel point, qu'elle a pu se débarrasser de toutes les flanelles dont elle s’était garnie les reins et les jambes; par conséquent les glaces sont entièrement disparues.
Nous espérons que M. de Rovère, à son retour de Paris, aura la complaisance de continuer à lui donner ses séances; par ce moyen nous arriverons à un résultat satisfaisant.
Pour quoi je lui délivre le présent pour lui témoigner de notre confiance et lui servir au besoin.
Descaves.
Auxerrc, 20 mai 1847.
N° 139.
En 1823, atteinte de maux d’estomac, toux, douleurs de poitrine, je fus traitée comme poitrinaire, soumise aux jeunes les plus sévères jusqu'en 1831. Ma santé, peu à peu ruinée, fut totalement détruite par une violente maladie, pendant laquelle on reconnut la présence du ténia. Pour le détruire, on administra l’éther sulfurique à haute dose, et des crises, convulsions et douleurs nerveuses dans la tète, qui furent le résultat de ce remède, les douleurs nerveuses de la tête me sont restées. Pendant ma convalescence j’habitai une maison neuve et malsaine, près de la rivière. Je devins enflée, un dépôt se forma sur la joue gauche, qui, depuis jusqu’aujourd’hui, resta toujours enflée, ainsi que la main droite elle bas-ventre. En 1812, congestion cérébrale, agonie de cinq heures; la rougeole se déclare et me sauve. Les bains et douches de Bourbonne, ordonnés à la suite, me laissent l’enflure telle que je l’ai désignée, et mes douleurs de tête. En 18-4-5, des glandes de la grosseur de la moitiéd’un œufseformentsnr les chevilles et lesgenoux, et reparaissent aux printemps suivants.
C’est de cet état douloureux, pour la guérison duquel
j’ai trop éprouvé la nullité des secours de la médecine et des eaux, que j’espère sortir par l’effet des moyens mes-mériques, dont les premières séances ont eu déjà pour résultat de dégager le cerveau et de me faire moucher en abondance, ce qui n’arrivait plus depuis plusieurs années. Pour la guérison des autres souffrances, j’attends avec espoir.
Mais, dès aujourd’hui, je suis heureuse de pouvoir rendre hommage à l'extrême bonté et délicatesse de M. de Kovère, qualités qui lui ont acquis de ma part toute la confiance et l'estime qu’elles méritent.
0. Monnet.
Cbablis, 19 mai 1847.
N° 141.
Monsieur de Rovère,
En se rendant à votre invitation et rendant hommage à la vérité, on est bien loin d’acquitter une faible partie de la reconnaissance que les habitants de Chablis doivent à votre dévouement et à vos lumières.
Homme généreux, désintéressé et bienfaisant, recevez donc en particulier le tribut de ma reconnaissance à la vérité.
Depuis deux ans mon épouse éprouvait des maux de cœur et des coliques affreuses, occasionnées par le sang, et en quelques séances que vous avez daigné lui consacrer, ces douleurs ont entièrement cessé.
Vous parlerai-je de ma mère, qui depuis trente ans était privée de l’usage de ses mains et qui maintenant se trouve soulagée et en voie de guérison ?
Vous parlerai-je aussi de ma tante, madame Nodiot, dont l’estomac paresseux digérait à peine et qu’à présent aucun aliment ne fatigue?
Nous vous devons tous ces résultats, et à vous seul!
Peines, revers, voyages, vous avez tout bravé pour soulager nos cœurs et nos souffrances.
Recevez donc, Monsieur de Rovère, notre hommage et notre amitié, nous vous en prions.
Folliot Rbgnauldin. Femme Folliot.
Chablis, 21 mai 4847.
N# 146.
Monsieur de Rovère,
Atteint depuis six années de grands maux de tête et d’estomac, et d’une diarrhée continue, j’ai mis en vain la médecine en pratique pour me guérir. Depuis environ deux mois que j’ai l'honneur de recevoir vos visites, ces trois affections ont entièrement disparu.
Je viens donc, Monsieur, reconnaître la vérité du mesmérisme et vous témoigner ma reconnaissance pour tous les soins que vous m’avez prodigués.
Recevez, Monsieur, les respects et les hommages de votre très-humble et dévoué serviteur,
Jeakniot.
Chablis, 21 mai 1847.
iY 148.
Je soussigné, Frédéric Guillau, aubergiste, demeurant à Courson (Yonne), certifie sur l’honneur, à qui il appartiendra, que M. de Rovère, magnétiseur, m’a donné depuis quelques temps ses séances, à l’effet de me traiter d’une paralysie dans toute la partie droite, que le magnétisme et l’assiduité de M. de Rovère m’a déjà mis dans le cas de pouvoir marcher, de me servir de mon bras et m’a rendu le libre usage de la parole.
J’ose croire, qu’en continuant de recevoir ses séances, j’obtiendrai une complète guérison.
Autorisée par mon mari, femme Guillau.
Auxtrre, 21 mal 1847.
INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.
SOCIÉTÉ DU SIESMÉlUSME DE PARIS.
Après la révision de ses statuts, le premier acte de la Société a été la nomination de M. le baron du Potet à la présidence honoraire, et de M. le docteur Cruxent à la vice-présidence.
Addition des mots : dé paris ayant été faite à son titre, elle a dù modifier dans le môme sens son cachet, dont voici la figure actuelle, que chacun pourra comparer à celle que nous avons fait connaître t. Ier, page 379.
Deux années de laborieuses recherches n’avaient pu mettre sur la trace de la famille de Mesmer, lorsque quelques jours avant la fête du 23 mai l’on découvrit à Paris un petit-neveu de ce grand homme, qui cherchait lui-même des renseignements sur la vie et les travaux de son oncle. Déférant à l’invitation de la Société, il s'est rendu dans son sein et y a donné les explications suivantes :
Ignorant l’origine de sa famille, mais ayant entendu dire vaguement ‘a sa grand’mère qu’elle avait un beau-frère médecin à Vienne ; il fit, sur Mesmer, une suite de recherches qui l’amenèrent à s’enquérir auprès du doc-
tenr Aubry, élève bien connu de ce dernier. Il lui écrivit eu conséquence, et le vieux docteur, qui était alors aux eaux, lui répondit :
i Plombii-res, 12aoClll841.
o Répondant, monsieur, à la vôtre du S courant, voici tout ce que je puis vous dire concernant le docteur Mesmer, dont j’ai été un des élèves en 1783, et avec qui j’ai été lié et conservé des relations d’amitié telles qu’il est venu chez moi à ma campagne, en 1808, où il a passé environ trois mois.
« Il a habité Vienne comme médecin, où il était en relation avec les médecins du pays, avec qui sa doctrine le brouilla. 11 quitta alors l’Allemagne pour venir en France, où il lit beacoup de partisans de ses principes, malgré la forte opposition qu’il trouva dans la Faculté et l’Académie de médecine.
« La Révolution nous sépara pendant plusieurs années qu’il employa à voyager dans différentes parties de l’Europe, et moi je fus appelé aux armées comme médecin. A mon retour, nous nous rencontrâmes à Paris, où nous avons renoué nos anciennes liaisons, et mômeà Versailles, où nous vivions ensemble. Il en partit pour aller en Suisse, où il avait un neveu, agent forestier à Frawendfel, dit vulgairement Fraufel; je me retirai moi-même à la campagne. lime parut par notre correspondance que son séjour en Suisse ne lui plaisait guère. Je l’engageai à venir vivre chez moi, persuadé que mon ermitage lui serait agréable. Il y vint avec une nièce à qui la campagne et l’éloignement de la Suisse ne plaisaient pas de môme. Cette femme, d’un caractère acariâtre, mit le trouble dans ma maison en brouillant tout le monde. Elle indisposa tellement son oncle contre ma maison qu’il aurait fallu renvoyer tous mes gens pour rester seuls tous les trois. Ça
m’était impossible, par la raison que je ferai valoir, et qu’il me fallait un nombreux domestique.
« M. Mesmer, à qui je ne pouvais pas accorder le renvoi de mes gens, se fâcha et retourna à Fraufel, où il a terminé sa carrière, nouvelle que j’ai apprise par les papiers publics, nos relations ayant cessé à l’époque de sa sortie de chez moi.
« Quant h sa fortune, les cours qu’il avait faits à Paris lui avaient formé un capital tel qu’il le plaça sur l’Etat, et ce placement lui faisait un revenu de 21,000 francs; la réduction des deux tiers le ramena à 7,000 francs de revenu.
«Voilà, monsieur, tout ce que j’en sais. Informez-vous en Suisse du sort de cette rente, s’il a fait un testament ou non. Quant à moi, je ne puis vous offrir d’autres renseignements, et je me borne à vous offrir mes salutations.
« Aubry. »
M. F. Mesmer est âgé d’environ quarante ans, et quoiqu’il soit à la troisième génération, il ressemble tellement à son oncle qu’étant allé pour voir M. Aubry à son retour de Plombières, celui-ci s’écria en le voyant entrer : o Vous êtes le parent de Mesmer ! »
Il n’était plus douteux que ce fût bien la même famille et non une simple homonymye. Alors le vieux docteur l’aida dans ses recherches, et le 2 mars 1842 il écrivait à M. Chabert, auquel il demandait des renseignements sur le lieu de la mort de Mesmer:
« Le porteur est le neveu de Mesmer ; il a même l’air mâle de son oncle. »
M. Chabert répondit par ces seuls mots :
« Antoine, né à Mersbourg (Souabe), 1734;
o Décédé au même lieu en 1815.»
L’indication était précise, mais en contradiction avec
les notices biographiques, qui répètent toutes, sur la foi l’une de l’autre, que Weiler, près de Stein, est le lieu de naissance de notre maître.
M. Aubry mourut sur ces entrefaites, et M. F. Mesmer, continuant ses recherches, apprit de MM. Dcles-sert et Compagnie « qu’à l’époque de la mort de Mesmer ils i avaient entre les mains le titre d’une rente ■viagère de « 6,120 francs au nom et sur la tète dudit docteur;
« Que le décompte depuis le dernier trimestre avait « été reçu par le Trésor au moyen de pièces envoyées « par J.-J. de G. mayer, de Sainl-Gall, constatant les « droits des héritiers, qui étaient :
« 1° Malhias Schorpp ;
« 2° Crescena Schorpp, veuve de Bernard Trost;
« 3° Cajetan Strohnijtyer ;
a 4° Thérèse Strohmaycr;
« 6° Auguste Slrohmayer, femme Fetscher ;
« 6° Antoine et Mina Slrohmayer. »
On était sur la voie positive, et M. F. Mesmer apprit sur sa famille les détails qui suivent :
Son bisaïeul avait quatre enfants, savoir:
Une fille, nommée Victoire;
Trois fils, dont un fut curé à Strasbourg; un autre (Antoine) médecin ; enfin Christophe, son aïeul;
Que Victoire s’étant mariée, avait eu une fille dont Antoine fit sa compagne, laquelle l’accompagna chez le docteur Aubry. Celle-ci épousa un nommé Slrohmayer, et en eut plusieurs enfants, dont une fille qui épousa Fetscher, actuellement bourrelier à Mersbourg, exécuteur testamentaire de feu Antoine Mesmer.
On ne sait rien de positif sur le curé.
Quant à Christophe, il se maria à Saint-Ouen-Lau-mone, près Pontoise, le 7 novembre 1769, ainsi qu’il résulte d’un extrait des registres de cette commune ainsi
conçu, que M. F. Mesmer dépose avec d’autres pièces authentiques aux archives de la Société :
« ....... Après avoir pris leur consentement mutuel,
Francz-Christophe Mesmer, jardinier de madame la marquise de Joüanne, en sa maison de Saint-Ouen, y demeurant depuis plusieurs années, âgé de vingt-neuf ans, ainsi qu’il nous appert par son extrait de baptême du 29 mars 1739, de la ville de Morspurg en Allemagne, délivré par messire Jean-Jacques Kreutzer, prêtre en ladite ville de Morspurg, en date du 17 septembre dernier, fils majeur de défaut Jean Mesmer, en son vivant maître et chef batelier en ladite ville de Morspurg, résidence de Son Altesse Sérénissime Monseigneur le cardinal de Rodf, prince et évêque de Constance, et de défunte Thérèse Euderin , comme il nous paraît par son certificat de vie et mœurs, h lui délivré par les bourgmestre et conseillers de ladite ville, en date du 9 septembre dernier, etc.....»
M. Christophe Mesmer mourut au bout de deux ou trois ans de mariage, laissant deux enfants, dont un fils, père de celui qu’on vient de trouver si h point, et une fille qui vit encore et habite Bellcville. Sa veuve, ayant eu connaissance de l’immense réputation d’Antoine, vint à Paris pour le voir ; mais c’était un de ses jours de lutte académique, elle ne put l'aborder, et, probablement froissée, elle ne revint plus. De là l’ignorance où se trouvait, sur l’origine de sa famille, celui qui communique ces détails.
Maintenant, la Société, qui procura aux convives du 23 mai l’agréable surprise de la présence deM. F. Mesmer, qu'elle comptera bientôt au nombre de ses membres, va continuer ses recherches; car ces documents jettent le doute sur tout : 1° en assignant un lieu de naissance autre que celui qu’on croyait; 2° en fixant la date de la mort au 5 au lieu du 15 mars 1815. Si ces
deux points sont faux, les autres peuvent aussi l’être; c’est pourquoi tout sera vérifié avec le soin qu’exige un tel sujet. C’est, pour la seule Société qui porte le nom de Mesmer, une occasion de montrer qu’elle est digne de son glorieux titre, et nous avons l’espoir qu’elle n’y faillira pas. Puissent ceux qui sont à même d’augmenter son butin, connaître son labeur et lui fournir les éléments ou le moyen d'une biographie complète et qu’on puisse présenter comme authentique.
— i4uis à MM. les membres : M. le président commencera le 19 un cours élémentaire de magnétisme.
HOPITAL MAGNÉTIQUE DE CALCUTTA.
La presse anglo-indienne commente longuement l’arrêt gouvernemental par lequel il est institué k Calcutta, sous le nom de Mesmeric hospilal, un établissement pour les opérations sans douleur et le traitement des maladies par le magnétisme. Nous ferons connaître dans nos prochains numéros le texte de ce décret et le rapport du comité qui a donné lieu à l’institution précitée. Londres aussi va avoir son hôpital ; quand Paris sera-t-il donc doté d’un pareil établissement?
ATHÉNÉE^MAGNÉTIQUE DE LYON.
On nous annonce que Y Athénée magnétique se propose de présenter une opinion au ministère pour solliciter l’établissement de quelques chaires de magnétisme, dont une à Lyon. (Tribune lyonnaise.)
VARIETÉS.
Le magnétisme à Lyon. — Nous recevons de Lyon des nouvelles alarmantes; M. Lafoutaine, revenu de Marseille à Lyon, où il avait si bien réussi il y a deux mois, a éprouvé un échec dont les magnétiseurs du lieu sont consternés. M. le docteur Ordinaire, dont on connaît l’impartialité, bien placé pour résumer cette impression, s’exprime ainsi dans la Mouche du \ août :
« Un certain M. Lafontaine vient de donner à Lyon des séances de magnétisme. Les premières, bornées à des effets qu’il a nommés physiques, ont eu du succès; les dernières, dans lesquelles il a voulu donner des preuves de clairvoyance, ont détruit les effets des premières. En sorte que le pauvre magnétisme a plutôt perduque gagné aux séances publiques de M. Lafontaine. Pourquoi? parce que M. Lafontaine est entièrement ignorant de la théorie de la scieflce mesmérienne. Il attribue à la matière, à un fluid^ce qui revient à l’esprit, à l’âme. Or, tout magnétiseur non spirilualiste éprouvera le déboire qui vient d’attrister M. Lafontaine et ses partisans.
“ La veille de ses deux séances publiques, M. Lafontaine avait r'éuni quelques médecins et quelques journalistes, qui ont admiré les beaux phénomènes de la clairvoyance. DèsJorsM. Lafontaine, matérialiste, s’est dit : Pourquoi n’obtiendrais-je pas demain les mêmes phénomènes du même individu; et ses annonces pompeuses promirent monts et merveilles. Dans la séance publique
la clairvoyance disparait, elle public maugrée, ctM. La-fontaine a un pied de nez. C'est bien fait pour ce magnétiseur, c’est fâcheux pour le magnétisme. M. Lafon-taine n'a pas encore compris que tout est animique dans le somnambulisme ; il n’a pas compris que l’âme du somnambule, détachée du corps parla magnétisation, subit les influences de toutes les âmes fortes qui l’environnent. Il n’a pas compris que dix volontés hostiles paralyseront la sienne, il a agi comme un ignorant], il reçoit le châtiment de son ignorance ; puisse la leçon lui profiter et ouvrir les yeux aux fluidistes. Le magnétisme n’en marchera pas moins, quelque entravé qu’il .soit par ces industriels nomades qui en font un si triste métier. »
Revue des journaux. — M. le docteur Leboucher, qui a si bien établi la supériorité du magnétisme sur l’éther dans le journal de la Société kahncmanienne, mentionne dans le numéro de juillet du môme journal les dernières opérations de Cherbourg, qu’il fait suivre de ces justes réflexions :
«Nous avons cru utile de rapporter ces faits, non-seulement parce qu’ils appuient notre opinion, mais surtout parce qu’ils n’onf^jcn de commun avec ce magnétisme si souvent et si utilement employé dans le but d’une curiosité banale ou d’un intérêt cupide et méprisable. Ce sont de telles considérations qui ont éloigné beaucoup de bons esprits de cet agent, si utile quand il est employé avec bienveillance et sagacité. Persuadé que nous sommes à une époque où nulle idée ne doit être repoussée à cause de quelque alliage impur, c’est avec confiance que nous essayons auprès de vous de dégager tout élément pur de ce qui peut ternir son éclat: Nous sommes bien aise de faire ces réserves pour ceux de nos lecteurs qui pourraient voir avec regret quelques mots en fa-
veur du magnétisme animal insérés dans notre recueil. » M. Lebouclier croit que nous sommes à une époque où toutes les sciences ont besoin les unes des autres et ne peuvent marcher isolées; c’est pour cela qu’il a entrepris de parler de magnétisme dans un journal d’homoeo-pathie. Nous l’en louons, tout eu craignant que ses collègues ne partagent pas cet avis.
Correspondance. — Nous avons l’honneur de prévenir nos abonnés que dorénavant nous correspondrons, autant que possible, par quelques mots ou abréviations d’un sens clair pour ceux qu’ils concerneront. En conséquence , nous les invitons tous à jeter les yeux, chaque fois, sur l’article petite correspondance, qu’à l’exemple de plusieurs journaux nous entretiendrons ainsi :
Saustens. — Madame de S“’. Les deux pers. en question vivent encore ; l'une, G., est toujours » Paris, l’autre, ou ne sait où.
— L’oubli n'est pas de nous, mais de vous.
ElûoTheux. — M. T‘". La visite qui v. a été ann. par ma dernière lettre ne pourra avoir lieu.
Beinu. — M. D"\ Informez-v. ù la poste ; nous envoy. exactement. Bomilly.-s.-s. — M. V"". La propriété mag. est commune à tous ;
essayez. — Nous v. écrirons prochainement.
Birkenhuad. — M. S'". Ali the magies process are raade publics, it is not a secret. — The baron’s Mirror totally differs wilh yours.
— It soon will be writen to you.
Pau. — M. L"'. Reçu vos tableaux. Merci. — Veuillez accueillir en frère notre ami Lap.
iiacourade__M. D‘*\ Reçu vos lettres. —Envoyé par Meisageries
gén. h M. l'r. le ballot, et par la poste les nos réel.
S.-»araire. — M. C’**. La mode de l'éther passe ; pressez l'envoi de votre art. annoncé.
Vernouï.—M. B"'., nons recevrons avec plaisir vos coinm.; envoyez quand v. voudrez.
Xondon. — M. M'”. Saw the gentleman of the'Canaries. Ishall intro-duce him lo the Baron.
N.-Orléam— M. Joseph B'”.Nous expédions les trois abonn. Bl'**, Gia*’*, Thi**’. Merci, idlle. — M. D-**. Reçu les pièces. — Merci.
BIBLIOGRAPHIE.
Mesmebism in India, by James Esdaii.e, M.-D. Lomlon, 1816. 1 vol. at Longinan et C°, Paler-nostcr-row.
L’aînée des nations, l’Inde antique et mystérieuse, n’offre pas seulement aux regards curieux de la connaître les vestiges matériels de sa grandeur passée. Après que le voyageur, artiste studieux, a contemplé les débris d’un temple auguste, où jadis se pressait la foule avide d’adorer des dieux qui ne sont plus, admiré les restes mutilés d’opulents édifices, considéré les ruines sombres et désertes qui gisscnl à la place de villes populeuses où tous les arts étalaient leur luxe ; philosophe méditant sur la desliuée des empires, il cherche dans la langue la tradition, les coutumes, l’empreinte des sciences autrefois florissantes en ces lieux.
Le savoir laisse partout des traces ineffaçables, et transmis d’âge en âge comme partie intégrante de l’homme, se renouvelant comme lui, il échappe ainsi k l’action du temps qui détruit, dégrade les monuments et livre leur poussière aux vents. La science, la plus belle conquête de l’homme, une fois acquise, est inaliénable; nulle vicissitude ne peut l’atteindre; elle est toujours vivante. Puissante quand on la cultive, chétive lorsqu’on la néglige, elle donne encore, délaissée, assez de fruits pour assurer sa perpétuité.
Mais que sont ces oscillations, ces changements rapides, ces élans sublimes, ces éclairs ingénieux et ces chutes soudaines qui replongent dans les ténèbres les peuples dont la gloire brillait du plus vif éclat? Que
sont-ce?.... Pourquoi?.... Un artiste-philosophe (1) répond :
« Le génie universel, toujours excellent et toujours triomphateur du génie du mal, compense de loin en loin, par de nouveaux bienfaits, les calamités dont ce dernier opprime l’humanité.... Et ces bienfaits sont surtout émanés de la charité dont le Christ a proclamé le principe trop délaissé jusqu’à lui. Ils émanent aussi des divines prédications de ce môme Christ libérateur, qui, en se posant comme chef de la régénération ou émancipation des âmes asservies aux vices dominateurs ou principes du mauvais génie, fait comprendre avec l’immortalité des âmes leurs mutuelles sympathies et puissances, leurs mutuels secours. Ainsi, parmi ces bienfaits récents, nous devons remarquer avec gratitude le magnétisme, la vaccine, etc., etc. »
Si ces bienfaits, découvertes ou sciences, n’importe le nom qu’on leur donne, dérivent du principe universel du bien ou de Dieu, il est évident qu’ils dureront autant que l’humanité pour laquelle ils ont été créés, car s’ils cessaient, ou elle flotterait dans une alternative perpétuelle de compensation fatale, ou rétrograderait; tandis qu’elle progresse. Les œuvres divines, d’ailleurs, ne sont point temporaires comme les humaines ; elles peuvent être déplacées, affaiblies, mais non détruites ; c'est pourquoi, si les premiers humains ont été dotés du bienfait magnétique, nous allons le retrouver ici.
Suivons donc pas à pas notre guide.
M. le docteur Esdaile, chirurgien civil au service de • la Compagnie des Indes orientales, nous apprend en commençant son livre qu’il s’est fait l’apôtre du magnétisme animal dans ce pays par ennui de la vie qu’on y mène. Magnétisant donc pour se distraire et sans grande
(1) M. de Monlabert, auteur du Traiti compiei de la peinture.
connaissance du sujet, il papillonna quelque temps sur les secrets que le mesmérisme dévoile sans intention de les approfondir; mais une fois sur la pente, son spleen s’est changé en prosélytisme, et en moins de deux ans il est parvenu k faire décréter l’établissement d’un hôpital magnétique, celui de Calcutta. Qui pouvait, d’un motif aussi futile, attendre un résultat pareil? Celui qui prend la voie de la nature ne sait jamais où il s’arrêtera.
Après avoir reconnu que la propriété magnétique est commune à tous les hommes et constaté la grande accessibilité des Bengalais à cette influence, M. Esdaile vint à penser que les magiciens et autres charmeurs dont l’Inde regorge n’étaient que des magnétiseurs, ignorant ou déguisant la cause de leur action. L’occasion d’éclair-cir cette question se présenta bientôt, et nous allons voir par l’extrait suivant que cette opinion n’est point une vaine spéculation, mais que le mesmérisme est actuellement pratiqué dans l’Inde, où probablement il est connu de temps immémorial.
» Le 9 juin 1845, j’eus l’honneur d’être présenté à un des plus fameux magiciens du Bengale, très-renommé pour guérir l’hystérie. Il avait été appelé auprès d’une de mes malades atteinte de cette affection, mais il arriva trop tard: le magnétisme, mon charme à moi, avait opéré un plein succès. A ma requête, Baboo Essanchun-dcr Ghosaul, magistrat suppléant de Hooghly, me présenta à lui comme un confrère distingué, ayant étudié la magie en différents lieux de l’univers, mais surtout en Egypte, où j’avais appris des mollahs, fakirs, etc., les secrets du grand Sooleyman, et que je désirais vivement m’assurer si son charme était identique avec le mien, parce que les hakimsde l’Europe, sachant que toutes les sciences sont venues de l’Orient, ont la plus haute estime pour les sages de cette partie du monde.
ojc lui proposai alors d’échanger nos secrets; mais ce
lie fut qu'après beaucoup de sollicitations qu’il consentit à me montrer sou procédé pour calmer les douleurs. Il fit apporter uue potée d’eau, un rameau qui conservait deux ou trois feuilles , et commença à marmoter, éloigné du patient d’environ deux pieds. Bientôt il plongea l’index dans l’eau, dont il lança, à l aide du pouce, quelques gouttes sur la face de la malade; puis il prit les feuilles et les promena lentement, de la tête aux pieds delà personne, ses doigts effleurant le corps. 11 me dit continuer cette pratique durant une heure, ou plus, s’il était nécessaire ; ce qui me prouva que si ces charmeurs font jamais du bien par de tels moyens , c'est qu’ils magnétisent sans le savoir.
«Je me déclarai convaincu de la grande efficacité de son charme et lui dis que j’étais prêt à lui communiquer le mien, mais qu’il le comprendrait mieux si je l’exécutais sur sa propre personne. Après quelques difficultés, nous le décidâmes à se coucher, et pour donner une solennité convenable à mon opération, j’entonnai, sous forme d’invocation, le chœur du Roi des tics cannibales! Ensuite je le priai de fermer les yeux, ce qu’il fit en serrant fortement les paupières pour que je ne trouvasse pas entrée au cerveau par cette ouverture. Au bout d’un quart d’heure il sauta brusquement, disant qu’il sentait quelque chose de désagréable qui venait sur lui et qu’il désirait s’en aller ; cependant on l’engagea tellement à se recoucher qu’il se laissa persuader, et je vis bientôt les muscles d’autour de l’œil graduellement se relâcher, ses traits devenir calmes et tout son être tranquille. J’étais sûr d’avoir pris à l’impraviste mon frère magicien. Mais cette sieste obligée dura peu ; au bout de quelques minutes il s’éveilla en sursaut, se leva brusquement, prit sa tête entre ses mains, disant qu’il se sentait ivre, et je ne pus venir h bout de le faire recoucher: ahïït excessit, evasil, erupit!
«Le lendemain je le revis et lui dis: « Eli bien ! vous « avez été trop fort pour mon charme, hier soir ; je n’iû « pu vous endormir. — Oh ! si, Saliib, répondit-il, vous
i m’avez endormi, je l’avoue; il m’est acquis que vous le « pouvez. »
« Un gentilhomme présent à cette opération reconnut immédiatement l’identité des deux procédés, et m’avoua qu’il avait été ainsi magnétisé sans le savoir par l’un des magiciens des environs qui l’avait graudement soulagé d’une douleur à la jambe. Mais son charmeur, outre la traine des feuilles, soufflait avec soin sur la partie douloureuse. On voit donc que les bienfaits du mesmérisme sont connus dans ces contrées, et le secret s’en est pro-bablemnet transmis depuis la plus haute antiquité dans certaines familles ou certaines castes. On verra même par la curieuse histoire que je donnerai, en parlant du somnambulisme, que le mal comme le bien du magnétisme est connu, et que des gens le pratiquent dans un but répréhensible. »
Ici l’auteur passe en revue les objections favorites de nos adversaires, qu’il réfute avec des arguments puisés dans l’ordre physique et dans l’ordre moral, offrant ainsi une double solution, scientifique et religieuse, qui satisfait à toutes les exigeances. C’est la partie philosophique de l’œuvre ; la nature, les avantages et les dangers du magnétisme y sont appréciés dans un sens équitable, a Ce pouvoir, dit-il, émane pur du Créateur et n’est perverti que par la créature. Or, l’objet de la vie humaine étant de séparer le bien du mal, d’éprouver toutes choses pour s'approprier celles qui sont bonnes, pourquoi ne ferait-on pas de même à l’égard du mesmérisme, puisque la tendance de tout agent dépend de la direction qu’on lui donne, et que c’est l’abus et non l’usage qui en est 'a craindre?
Le parallèle des phénomènes spontanés et provoqués
est la méthode de l’auteur ou la base de l’œuvre. Toujours M. Esdaile fait précéder la description d’un état magnétique par celle de son analogue, produit constant d’agents physiques ou chimiques, ou bien résultat accidentel de causes morales ou morbides. Puisaut presque toutes ses preuves dans l’observation médicale , à des sources connues et incontestables, il fait par ce rapprochement de semblables, celte comparaison d’effets naturels et artificiels, l’éducation physiologique des magnétiseurs et la conquête magnétique des médecins. C’est assurément le meilleur plan qu’on puisse suivre, puisqu’on bat scs ennemis avec leurs propres armes, et nous devons dire qu’il n’en a jamais été fait aussi bien usage que dans Mesmeristn in India. Citons un exemple qui mette cn relief cette manière d’exposer les faits.
A l’article Somnambulisme, après avoir donné les diverses définitions de cet état observé par les auteurs classiques, M. Esdaile narre les faits suivants:
«Dans les premiers jours de juin 1815, je vis,en traversant le bazar de Hooghly, un rassemblement considérable devant lebureau de police. J’en demandai la cause ; il me fut répondu qu’on venait d’arrêter un homme qui volait un enfant, et que les parties étaient dans le corps de garde. Ce qu’entendant, j’entrai aussi, et je vis un garçon de dix à douze ans assis sur les genoux d’un homme qu’on disait son libérateur. Il avait l’air hébété, 'a moitié stupide et un œil gonflé; c’est pourquoi j’ordonnai de le conduire à l’hôpital. Alors on me montra l’accusé: il me dit qu’il était barbier, et à l’appui de son assertion me présenta un paquet qui contenait ses outils. J’examinai très-soigneusement ce paquet, mais je n’y trouvai rien autre chose que les instruments ordinaires d’un barbier.
« Le garçon reprit bientôt connaissance, et me raconta, avec l’apparence de la plus grande bonne foi et sans hé-
siler nullement, le fait suivant, récit que je lui ai entendu répéter devant le magistrat et sans aucune variation. Il déclara qu’étaut allé le malin dans un champ voisin de la maison, un étranger quitta le chemin pour venir à lui, et l’aborda en marmottant des charmes, lui prit lu main, et presque aussitôt lui passa l’autre transversalement devant les yeux. Là-dessus il perdit connaissance, et se souvient seulement que cet étranger l’emmena, mais sans contrainte; il se sentait obligé de le suivre. Quand il revint à lui, il était à la porte de Chandernagor, à deux milles du lieu ou cet homme l'avait acosté. Il n’en savait pas davantage.
« Il n’avait ni bu. ni mangé,'ni fumé avec cet homme; et son maître, ses amis disaient tous que c’était un garçon adroit et d’une conduite régulière, n’ayant jamais eu d’attaques de nerfs ni de promenade nocturne.
« J’ai examiné ensuite l’homme qui disait l’avoir délivré, et son témoignage fut que le matin en question, ayant rencontré ce garçon, qu’il connaissait très-bien, suivant un étranger, il l’arrêta et lui demanda ce qu’il faisait là. Mais celui-ci, qui avait l'air d'un idiot, ne lui répondit point. Alarmé de le voir en cet état, il lui jeta de l'eau à la face, et chercha par divers autres moyens à lui rendre l’usage de scs sens, ce à quoi il parvint à la fin Alors le garçon, interrogé de nouveau, répondit qu’il ignorait pourquoi il était là; qu’il était obligé de suivre cet homme qu'il ne connaissait pas; et qu'après avoir dit cela, il était tombé et s’était meurtri l'œil. Dans cet intervalle l’homme s’enfuit, mais il fut arrêté et conduit à Hooghly.
« J’appelai enGn le barbier, qui, k son tour, déclara avoir rencontré sur la route cet enfant, qui avait l’air stupide et pleurait, disant qu’il avait perdu son chemin; sur quoi il l’avait engagé de le suivre jusqu’au bureau
de police, où il trouverait quelqu’un pour le reconduire à son domicile.
« La divergence des récits et la nature étrangfc du fait arrêtèrent fortement mon attention ; je désirais vivement savoir de quel côté était la vérité. Le métier de cet homme d’abord éveilla mes soupçons; j’avais ouï dire que les barbiers de ce pays peuvent endormir en exerçant leurs fonctions ennuyeuses, et le bruit court dans toute la contrée que diverses personnes, des femmes surtout, ont été obligées de suivre des gens qui les avaient charmées. Les barbiers, me disais-je, sont dans tous les pays des gens observateurs et artificieux; leur occupation les met en contact avec les surfaces les plus accessibles k l’influence magnétique; il est possible qu’ils aient le secret de cette influence depuis les temps les plus reculés, et peut-être leur a-t-elle été révélée comme un mystère de leur art. Mais n’importe comment je m’y prisse, je ne voyais que deux voies pour sortir de ce dilemme : ou c’était du somnambulisme naturel ou de l’artificiel); et si c’était le dernier quelle pouvait en être la cause autre que le magnétisme? » ^
La nature, toujours une, s’offre constamment la même, soit qu’on l’observe sur les rives embaumées du Gange ou dans les brumes de la Tamise, sous le ciel enflammé de la torride ou dans les plaines glacées du Nord : partout l’œil jacotique retrouve tout dans tout. M. Esdaile nous dit que la clameur publique accuse dans toute l’Inde des rapts pareils à celui qu’il rapporte. Voyons nous-même si ce fait est isolé, si nulle part on n’en trouve la trace.
On lit dans le Glaneur indou-chinois, journal de Ma-laca, du 2 juillet 1820 :
« La curiosité publique a été vivement excitée depuis quelques jours par la découverte d’une bande de voleurs d'enfants des deux sexes. Cette découverte a été faite
par le zèle d’un tisserand en soie, qui, en se promenant dans les rues de Canton, reconnut l’enfant de son maître, qui avait disparu depuis quelques jours. L’enfant tourna sur lui un regard stupide et refusa de le reconnaître.
« Le tisserand l’emmena de force chez son père. Il restait toujours comme sous le charme de la stupidité; mais on n’eut pas plutôt appelé les prêtres de Budha, et pratiqué les cérémonies efficaces célébrées en pareille occasion, que le charme disparut, et l’enfant, en versant des larmes abondantes, reconnut son maître et son père. L’affaire et le miracle furent immédiatement communiqués au gouvernement, qui fit cerner le rendez vous des voleurs d’enfants. On trouva six hommes et trois femmes, qui faisaient ce mélier depuis plus de vingt ans; ils avaient enlevé, pendant cette époque, plusieurs milliers d’enfants. 11 n’en restait plus que dix dans la maison, tous sous l'influence du même charme stupéfiant, qui disparut, comme celui jeté sur l’enfant du tisserand, par les prières et cérémonies des prêtres de Budha. »
Comparez cette narration avec celle qui précède, et vous verrez fjue c’est le même fait, que jusqu’aux expressions pour le rendre sont identiques. Et les prêtres de Budha ne remplissent-ils pas ici l’office des exorcistes juifs et des fakirs persans? Charme, sort, torpeur et possession sont enfants du même père; mais quel est-il? C’est ce que nous allons voir.
(La suite au prochain numéro.)
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (de Garaay). Paris. — Imprimerie d’A, Rbké, rue de Seine, SS.
INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.
STATUTS
DE _Ï.A
SOCIÉTÉ DU MAGNÉTISME DE LA NOUVELLE-ORLÉANS.
Article unique. — La Société a pour objet :
I" L’clude des phénomènes magnétiques et la recherche de leurs causes, ainsi que des procédés les plus propres à leur manifestation ;
2° La propagation du magnétisme, en instruisant le monde sur le moyen universel que la nature a donné à chacun de guérir et de préserver ;
3° L’application thérapeutique du magnétisme humain au traitement des maladies.
Pour atteindre ce but, la Société du magnétisme de la Nouvelle-Orléans, fondée le i) avril 1815, s’impose le règlement qui suit :
Chapitre Ier. — Composition de la Société.
Article 1er. — La Société se compose de membres titulaires, de membres correspondants et de membres stagiaires. Le nombre des uns et des autres est illimité.
Art. 2. — Les membres titulaires ont seuls voix déli-bérative.
Pour devenir membre (itulaire, il faut résider à la
T0J1E V.— j\0 5«. — 25 AOUT 18£i7. 4
Nouvelle-Orléans cl être membre correspondant ou membre stagiaire de la Société depuis un an au moins ; ou bien il faudrait être membre titulaire d'une autre société s'occupant du même objet.
Art. 3. —Les membres correspondants sont des résidants au dehors. Leur demande d’admission doit cire appuyée de deux membres titulaires.
Tout membre correspondant qui viendrait fixer son domicile à la Nouvelle-Orléans peut, sur sa demande, et conformément à l'article qui précède, devenir membre titulaire.
Art. i. — Les membres stagiaires sont des magné-tisles qui désirent s’instruire. Leur demande d’admission doit être appuyée de deux membres titulaires.
Les membres stagiaires ont voix consultative seulement, mais ils ont droit de discussion et d’expérimentation.
Art. 5. — L’admission dans la Société se fait par les membres titulaires, à la majorité. Le nombre des votants doit excéder la moitié de celui des membres titulaires inscrits.
Art. 6. — Un diplôme sera délivré à chaque membre titulaire et à chaque membre correspondant; et un tableau indiquant, par classe, le nom et la demeure de tous les membres, restera aftiché dans la salle des séances.
Chapitbe XI. — Régime de la Société.
Art. 7. — Les fonctionnaires de la Société sont :
Un Président, Un Secrétaire,
Un Vice-Président, Un Trésorier,
El un Bibliothécaire-Archiviste.
Ils sont nommés pour le terme d’un an, à l’assemblée
générale, sont choisis parmi les membres titulaires, et sont récligibles. Ils entrent de suite en fonctions.
Art. 8. — Le bureau se compose du Président, du Secrétaire et du Trésorier. L’administration de la Société est confiée au bureau, qui est chargé de l’interprétation et du maintien du règlement; qui reçoit et examine toute proposition relative au règlement; qui convoque la Société cn séances extraordinaires, et nomme les commissions chargées de faire’ des rapports sur les objets qui se rattachent aux études de la Société.
Art. 9. — Le Président, ou son suppléant, a la direction générale; il appose le sceau, soumet à l’approbation de l’assemblée le procès-verbal de la séance précédente ; règle l’ordre du jour et fait observer le règlement. Il est membre d’office de toutes les commissions, où il a droit d'assister avec voix consultative.
Art. 10. — Le Secrétaire rédige le procès-verbal de chaque séance et eu donne lecture à l’ouverfure de la séance suivante. Il est chargé de la correspondance.
Art. 11. — Le Trésorier est chargé des intérêts financiers de la Société. Il tient registre des recettes et dépenses et rend compte à la Société toutes les fois qu’il en est requis. A l’assemblée générale annuelle une commission de trois membres titulaires est nommée, à la majorité simple, pour examiner sa gestion et en faire un rapport à la séance ordinaire la plus prochaine.
Art. 12. — Le Bibliothécaire-Archiviste a la garde de tous les papiers, mémoires, rapports qui sont adressés à la Société. Il a aussi la garde de la bibliothèque, où sont admis tous les membres de la Société, ainsi que les amis du magnétisme qu’ils peuvent y amener; mais il ne permet à personne d’emporter aucun ouvrage hors de la salle des séances.
Art. 13. —La Société tient plusieurs sortes de séances:
1° Une assemblée générale chaque année, le 15 mars, jour anniversaire de la mort de Mesmer;
2° Les séances ordinaires qui ont lieu tous les lundis;
3° Les séances extraordinaires.
Tous les membres de la Société, quel que soit leur titre, assistent aux unes et aux autres de ces séances.
L'assemblée générale annuelle est consacrée à l’exposition des progrès que fait le magnétisme en général; au résumé des travaux dont la Société s’est occupée ; aux rapports des divers fonctionnaires, et enfin à l’élection de ses officiers pour la nouvelle année.
Dans chacune des autres séances, l’ordre du jour appelle d’abord : la lecture du procès-verbal de la séance précédente, la lecture de la correspondance, la présentation des candidats et l’admission de nouveaux membres. Le restant de l'ordre du jour est réglé par le Président.
Art. 14. — Lorsque les fonctionnaires sont absents, la présidence est dévolue au plus âgé des membres titulaires présents, et le plus jeune remplit les fonctions de ■ secrétaire. Le Président complète le bureau en y remplaçant le Trésorier, s’il est absent, par un des membres titulaires présents.
Art. 16. — Quand une expérience est terminée, tout membre peut demander à faire des observations. Le Président l’accorde par rang de demande ou d’inscription,
Ct selon le temps disponible.
((• — Toute motion tendant k suspendre 1 action du règlement, ou à la modifier, doit être prise à la majorité des deux tiers des votes.
Art. 17. — Les votes de la Société ont lien au scrutin, par boules blanches et boules noires, ou par bulletin individuel; mais ils peuvent aussi avoir lieu par acclamation toutes les fois «pie ce mode est réclamé par la majorité des votants.
Art. 18. — Toules les fois (jne la Société est appelée à donner son avis sur un objet relatif à ses travaux, la question soumise est renvoyée à une commission nommée par le bureau. Le rapport est fait et la décision prise à la plus prochaine séance ordinaire, ou dans une réunion spéciale convoquée à cet effet.
Chapitre IV. — Biens de la Société.
Art. 19. — Tout membre titulaire ou stagiaire paie un droit d’admission de deux piastres.
Il paie en outre une cotisation annuelle de six piastres, exigible par trimestre, et d’avance, tous les 1er janvier, I" avril, 1er juillet et 1er octobre. Elle est due depuis le commencement du trimestre, et jusqu’à démission par écrit.
Chaque diplôme se paie deux piastres.
Art. 20. — La Société forme une bibliothèque que tous les membres et le public en général peuvent augmenter de leurs dons. Les dons faits à la Société sont mentionnés aux procès-verbaux des séances, et le nom du donateur est inscrit sur l’objet donné.
CHAPITRE V. — Dispositions générale».
Art. 21. — Tous les membres doivent concourir, autant qu’il est en leur pouvoir, à la propagation du magnétisme, en en faisant connaître les effets et les soumettant à l’appréciation des personnes chez lesquelles
ils peuvent espérer de rencontrer un esprit impartial et un caractère bienveillant.
Art. 22. — Par le seul fait de son admission , chaque membre s’engage à observer les dispositions du présent règlement; à ne faire usage d'aucune épithèle blessante pour les autres membres, cl à n’employer que de nobles moyens dans la pratique du magnétisme.
Art. 23. — Tout fonctionnaire qui resterait un mois sans remplir son mandat, 'a moins d'une dispense obtenue de la Société, serait de plein droit déchu de ses fonctions, et la Société procéderait de suite à son remplacement.
Art. 24. — Tout membre dont la conduite ne serait pas en harmonie avec la moralité, la considération, le progrès du magnétisme et celui de la Société, serait mandé devant elle, et, selon qu’il serait justifiable ou non, il serait absous ou banni.
Art. 25. — Sont regardés comme démissionnaires ceux qui resteraient six mois sans justifier de leur absence, ceux qui négligeraient de payer leur quotité, et ceux enfin qui transgresseraient les règlements.
Art. 2G et dernier. — Celles des dispositions du règlement provisoire, adopté le 18 avril 1845, qui seraient contraires à celles du présent règlement, sont abrogées.
Adopté en séance le 11 janvier 1847.
Pour copie conforme :
Jos. BARTHET, Président. Jules MATHIEU, Secrétaire.
L’envoi du document qui précède était accompagné de la lettre suivante :
A M. le baron du Volet de Senncvoy.
Monsieur le baron,
Nous n’avons pas été moins affliges que vous en lisant (T. IV, p. 21 ) ce qu’a proposé M. Ordinaire, et nous nous sommes demandé si l’Académie a pu exercer sou in-lluence sur le rédacteur de la Mouche comme elle le fait si bien sur ses professeurs. Nous avons toujours considéré le docteur Ordinaire comme un homme du progrès, et par conséquent au-dessus des coteries académiques, et nous avons été vivement peines que ce soit lui qui ait proposé de placer le magnétisme entre les mains de ses ennemis et des hommes qui le nient -, de mettre la brebis sous la garde du loup; d'éteindre la lumière, enfin!... Voyez comme nous différons : tandis que vous vous obstinez à entourer d’honneurs quelques hommes patentes dont vos hommes d'esprit se sont moqués de tout temps, nos démocrates songent à ôter aux médecins tous leurs privilèges; le projet de loi en est devant la législature; la médecine serait un métier comme tant d'autres. Sans doute c’est tomber dans un autre excès; mais que penser, en effet, de ce prétendu art de guérir, après ce qu’en ont écrit tant de célébrités, entre autres Brous-sais,Bichat, Audin-Rouvière,Rostan, Fodera, Jahr, et ce qu’en a dit tout récemment encore M. Magendie, toutes gens qui ne sauraient être taxés d'incompétence en pareille matière !... Dans ce coin du monde, éloignés de vos Académies, ignorants et ignorés que nous sommes, nous pensons bien autrement que M. Ordinaire : nous comprenons l’antipathie insurmontable qui existe de la médecine au magnétisme; nous croyons que le Créateur, en donnant aux hommes un moyen universel de guérir et de préserver leurs semblables, ne les a pas astreints
à sc munir préalablement d’un diplôme de savant ; nous pensons enfin que la médecine et le magnétisme doivent continuer à faire chambre à part, comme la médecine a voulu qu’il en fût jusqu’ici.
Vous, Monsieur, continuez votre noble mission : éclairez le monde. Quand le magnétisme sera connu comme il mérite de l’être, on le pratiquera dans l’intérieur des familles; une main amie dissipera une indisposition commençante et préviendra ainsi une maladie; car les maladies commencent presque toujours par des indispositions, qu’on néglige parce qu’on espère que ce ne sera rien, et que ce n’est pas la peine de faire venir un médecin, toujours pressé, même quand il n’a pas de malades, et qui, du reste, ne se déplace pas ordinairement pour l’amour de Dieu. Si le temps et le défaut de soins aggravent quelquefois une affection légère, une médecine aveugle en fait bien plus souvent une maladie grave en essayant de la combattre. C’est aux déplorables erreurs de cette science toute de conjectures, vivant de systèmes qui durent un jour, renversant les systèmes de la veille, et à leur tour culbutés par les systèmes du lendemain, que l’humanité doit lantde maladies longues, souvent incurables; tant de malades vieux avant l’âge et rendus infirmes pour le reste de leur vie; tant de morts prématurées, enfin!... Tel ne pouvait être le vœu du Créateur! Il a donné aux hommes un moyen simple de se guérir et de sc préserver, voulant que l'homme en santé devienne le médecin de l’homme malade; que le mal cl le remède, le malade et le médecin soient toujours à côté l’un de l’autre, et non que l’art de guérir dégénère en une profession mercenaire. S’il se pouvait qu’il en fût autrement, l’œuvre de Dieu serait incomplète....
Poursuivez donc votre honorable mission : instruisez les hommes ; mais, au nom de l’humanité , protestez,
comme nous protestons, contre toute espèce de rapprochement qu'on voudrait tenter entre la médecine et le magnétisme. Dieu merci, on n’a pas besoin d’être un savant pour magnétiser, et bien moins encore d’un diplôme dont sont pourvus tant de gens qui ne sont pas des savants. Que le magnétisme, cet inappréciable bienfait du ciel, soit donc indistinctement pratiqué par tous les gens de bien, ignorants ou savants, médecins ou autres; ainsi le veut la nature, et on ne l’empêchera pas. Vouloir cn limiter l’exercice, comme le propose M. Ordinaire, c’esl pousser l’inconséquence à son comble. Bien plus, ce serait vouloir interdire à une mère le soin de son enfant, et cela est absurde autant que féroce.... D’ailleurs, les médecins n'ont pas le temps de magnétiser; c’cst en courant qu’ils donnent un peu de leur science, souvent, hélas! cn pensant à autre chose, et ce n’est pas ainsi qu’on magnétise. Non, jamais les médecins ne magnétiseront; le souci de leur fortune, leur défaut de santé quelquefois, et bien d’autres causes, font que la médecine et le magnétisme sont inconciliables.
Nos docteurs sont comme les vôtres : ils sortent de la même école. Ce sont d’excellents chirurgiens, la plupart, et fort honorables à ce point de vue, mais ils sont presque tous « magnétophobes; » ils ne veulent rien voir afin de pouvoir toujours nier, sous le misérable prétexte qu’ils n’ont pas vu ; ils semblent craindre d’être éblouis h la lumière magnétique ; ils sont atteints d une véritable photophobie. Quand on les pousse a bout, ils disent que la médecine admet l'action magnétique, mais non la clairvoyance somnanibulique, qui vient pourtant si souvent, mais pas assez souvent encore, hélas! donner un démenti plus ou moins éclatant au diagnostic et au pronostic de ces messieurs. En voici quelques exemples que vous pouvez joindre à tant d'autres :
Madame I). I/“, qui habite à quelques lieues de la Nouvelle-Orléans, avait, depuis une douzaine d’années, et ii la suite de couches, de fréquents accès de céphalalgie, souvent accompagnés d'horribles crises qui donnèrent beaucoup d’inquiétude à son mari et à sa famille. La médecine ne fui pas négligée, et elle fit bien tout ce qu’elle put, mais elle y perdit son lalin. « lille mourra dans une de ces crises, » avait-on dit. Je !a magnétisai quelques jours à la ville, et quelquefois aussi chez elle, peut être quinze fois dans l'espace de quatre à cinq semaines, et sansbeaucoup de suite. Cette dame était très-impressionnable : deux ou trois minutes d’action la plongeaient dans uncoma profond. Elle suivit aussi quelques indications d’un somnambule que je magnétisais alors, cl, en quelques semaines, il y eut apparence de guérison. lin effet, depuis bientôt trois ans, ni crises, ni maux do léte, rien n’a reparu. Madame I). L***, ainsi que son mari, se plut à reconnaître hautement les heureux effets du magnétisme en cette occasion; mais un jour, causant à ce propos avec le docteur D"", qui a été si longtemps et e>t encore le médecin de la famille, le docteur I)“*, ne pouvant douter du fait, me dit : « Que voulez-vous! je n'ai jamais lien vu de cela. —Eh bien, lui répondis-je, ce sera pour moi un plaisir de satisfaire votre curiosité, si cela peut vous être agréable. — Oh! ma foi non, me répliqua-t-il, je suis trop vieux. »
Ils sont presque tous les mêmes : Oculos habent....
Madame I)"" était fort souffrante il y a deux ans, et son médecin, le docteur D*", homme instruit et magnétiseur, dit-on, ne comprenant rien à ses maux, la faisait se préparer à retourner en France pour y respirer l’air natal, Elle consulta deux fois le somnambule dont je parlais tout à l’heure, et qui formulait avec tant de précision , que plusieurs médecins me dirent qu’il devait
être médecin lui même. Il n’en était cependant rien; mais ce jeune homme apprit à la malade qu'elle élait enceinte, tout simplement. Je sus pluS tard que le docteur B“* s'était moqué du somnambule, et peut-être aussi de moi ; mais madame I)*** no partit point, et bien-lot la naissance d’un garçon vint lever tous les doutes.
Mademoiselle A. V***eut le choléra vers 183iou (835. Traitée par le mercure, elle échappa au premier des deux lléaux, mais depuis lors elle eut toujours des vomissements. lille ne quitta plus le lit dès l’été dernier, et, vers la fin de novembre, à une consultation médicale, le docteur 1)"' et ie docteur G***, en voyant les matières vomies par la malade, furent unanimement d’avis qu elle avait un cancer d l'estomac, qu'elle irait ainsi peut-être quelques jours encore, mais qu’il n’y avait pas de ressource. Ce fut dans cette perspective que le docteur B“* vint chez moi le 3 décembre, de la part de la famille, pour me prier d’aller voir la malade et faire un essai du magnétisme, si je le croyais bon. Le docteur R*** ne me fit pas connaître la véritable situation des choses. « Le doc-« teur G*’*, me dit-il, croit à une affection fie la moelle « épinière; mais moi, je ne le pense pas.... » Fît cc n’a été que longtemps après que j’ai su dans quelle position on croyait la malade lorsqu’on vint inc chercher.
On faisait donc un appel au magnétisme parce que l’état de la malade était désespéré, qu'on la croyait perdue. C’est ce que conseillent, en cll’et, quelques professeurs de la Faculté. * Quand vous ne saurez plus que faire, magnétisez. » Et nous devons penser que dans une famille de médecin, et surtout d’un médecin qui n'est rien moins qu’un ami du magnétisme, on avait tout tenté.... Heureusement l’arrét de la science n’est pas infaillible; la malade n’avait pas de cancer, mais bien un abcès que la nature, plus forte que les révulsifs de la
médecine, conduisit à résolution dans l’œsophage ou l’estomac, malgré les drogues, malgré le séton et les deux cautères posés sur la poitrine de la malade, malgré les vésicaloires dont ses jambes étaient couvertes, et non grâce à leurs concours. Les souffrances de la malade auraient peut-être été de moins longue durée et moins atroces, sans l’emploi de ces moyens héroïques dont la tendance contrariait rationnellement les effets de la nature.... C’étaient d’horribles douleurs par tout le corps, mais plus spécialement au côté gauche ; une chaleur extrême, une sensation intolérable de brûlure aux mains et aux pieds quand on les touchait, des cris déchirants arrachés par tant et de si atroces souffrances, surtout quand il fallait mouvoir la malade.... Si la vie n’était pas absolument en danger, comme j’aime k le croire, malgré le pronostic des médecins-consullants, du moins la paralysie était imminente.
Je commençai k la magnétiser de suite, en présence du docteur R***, qui put constater une modification assez remarquable après quelques minutes, en prenant dans les siennes des mains qu’on lui abandonnait sans se plaindre. Je continuai depuis lors tous les matins, k très-peu d’exceptions près; séances d’une heure, que je terminais par la magnétisation d’une carafe d’eau, seule boisson que prît la malade, qui était toujours altérée. Mais le magnétisme avait plusieurs sortes d’ennemis k combattre; car, malgré l’assurance qu’on m’avait donnée, la médecine agissait eucore quelquefois, mais k mon insu; des o pilules calmantes » (ainsi appelait-on celles de Vallet) venaient parfois se trahir par quelques vomissements, et cela me décourageait. On m’avait promis qu’on ne donnerait plus de remèdes k cet estomac abîmé par d’inutiles et peut-être dangereuses drogues. Les frictions avec l’opodeldoch, le ûel de bœuf, la graisse aux vers de terre et au chou-gras, me contrariaient
aussi, et j’eus bien de la peine à obtenir qu’on me laissât agir seul. Je recommandai seulement quelques fumigations du bas du tronc avec de l’eau de lessive, afin d’aider au retour des menstrues, cl de la nourriture, ou, du moins, des bouillons.
Grâce à une longue persévérance, les douleurs diminuèrent peu à peu, et cessèrent enfin tout à coup, après soixante-douze séances, lorsque la menstruation se rétablit, le 17 février. Sept jours après, elles reparurent aux pieds et aux mains, quelque peu aux jambes, comme des crampes, et toujours plus intenses au côté gauche; mais elles ne persistaient pas, et c’était plutôt de l’engourdissement et de la faiblesse. Le 16 mars, la menstruation est revenue, régulière comme la première fois, et comme il était habituel à la malade lorsqu’elle était en santé.
Maintenant la malade a fort bon appétit, elle dort bien, passe ses journées entières hors de son lit, dans un fauteuil; elle se sert assez bien de ses mains pour manger seule, tenir son livre, jouer aux dominos; scs douleurs n’en sont pour ainsi dire plus : elle meut ses jambes avec beaucoup d’aisance et sans souflrir, mais elle n’y sent pas la force nécessaire pour supporter le poids du corps, ce qui ne devrait peut-être pas trop surprendre après neuf mois passés au lit. Cependant la malade s’en inquiète; quand elle souffrait beaucoup, dit-elle, elle avait peur de mourir; aujourd’hui elle se trouve malheureuse de ne pouvoir encore marcher, et son plus grand désir serait d’aller à la messe le jour de Pâques. Espérons que le ciel exaucera ses prières!
Jos. Bartiiet,
Président de la Société du magnétisme.
Nouvelle-Orléans, 19 murs 1847.
VARIÉTÉS.
Omromancie. — La divination par les songes occupe dans les livres de magnétisme une place beaucoup trop restreinte. A part les savantes dissertations du comte Abrial dans les Annales et la Bibliothèque du Magnétisme, on ne trouve que de pâles redites sur cet étonnant phénomène. Éblouis par les merveilles du somnam • bulisme, les magnétologistes négligeait trop l’étude des effets analogues qui naissent spontanément. Nous espérons qu’on lira avec intérêt l’article suivant que nous empruntons au Portique du XIX' siècle :
L’homme n’est, pas un animal aussi crédule qu’on le pense. La libre de l’orgueil, si sensible dans notre triste humanité, fait que nous sommes généralement portés à chicaner aux autres leur génie, tout en reconnaissant avec la plus grande franchise la supériorité de notre propre intelligence. Qu’un pauvre diable fasse une découverte, mille censeurs s’élèveront contre lui avant qu’il ait pu trouver un disciple. C’est un fou ! criera-t-on d’abord ; et un peu plus tard : Attendez! Puis lorsque nous sommes forcés à reconnaître enfin la supériorité de cet homme, notre orgueil fait que nous avons besoin d’admettre chez lui quelque chose de divin ; car chacun de nous veut rester dans sa conviction intime, la plus noble expression de l’intelligence humaine. Et quand une fois nous nous sommes mis à diviniser un homme,
nous le croyons sans examen; l'amour-propre étant, à couvert, la paresse seconde la foi.
Le progrès des sciences qui, dans notre siècle de bavardage, se fait au grand jour, a mis encore nu frein à notre crédulité. L’enthousiasme pour une illustration quelconque ne va pas chez nous jusqu’à l'idolâtrie, ca>-la science n’est plus un myslère. Or, la vérité la plu« sublime se rapetisse au grand jour, et la vérilé la ¡»lus simple grandit dans les lénèbres. Les travaux de l’Académie des sciences n’en imposent pas autant au commun des martyrs que les travaux d’une loge maçonnique.
Lorsque Christophe Colomb, réduit à la plus affreuse disette, aborda pour la première fois dans l’île de la Jamaïque, les naturels du pays s’enfuirent sur leurs montagnes ou se cachèrent dans leurs bois. La fatigue d’une longue et périlleuse navigation empêchant de les poursuivre, Colomb profila d’une éclipse de lune pour sauver son armée; il lit dire aux chefs des sauvages que s’ils ne lui procuraient à l’instant même des vivres, les éléments seraient troublés et la Jamaïque engloutie, et qu’enfin il allait commencer par priver la lune de sa lumière. Les sauvages rirent au nez de l’envoyé et prirent Colomb pour un fou ; mais dès qu’ils virent «pie la lune commençait en ellet à disparaître, frappés de terreur, ils reconnurent à l’unanimité Colomb pour un dieu et s’empressèrent d’obéir à ses ordres. Ces pauvres insulaires raisonnaient ainsi : Qui peut le plus peut le moins; comme il est bien plus facile à Colomb de submerger notre île qu’il a sous la main que d’éteindre la lumière de la lune qui se trouve sur sa tête, cet homme est nécessairement un dieu.
C’est à ce raisonnement que la divination doit naissance.
Il ne faut pas croire que les superstitions anciennes aient été généralement engendrées par la friponnerie;
la plupart reposent sur une vérité incontestable ou sur une observation judicieuse, dont l’esprit inquiet de l’homme a tiré de fausses conséquences.
Lorsque les Romains voulaient asseoir un camp ou fonder une ville, ils sacrifiaient religieusement des hécatombes pour consulter ce qu’on appelait la volonté des dieux. Vit ru ve nous donne le mot de cette énigme : Comme la première chose à laquelle on doit s’attacher, lorsqu’on veut camper ou bâtir une ville, nous dit-il, consiste à bien s’assurer de la salubrité de l’air et de la bonté des eaux, on sacrifiait des taureaux pris dans la localité, et si leur foie se trouvait pâle ou gâté, alors on n’avait garde de s’arrêter dans un lieu où l’inspection des entrailles des victimes ne présageait rien de bon pour ceux qui viendraient à s’y établir; car l’état maladif du foie était naturellement attribué par eux à la mauvaise qualité des eaux et à l’insalubrité de l’air; un foie vermeil présageait tout le contraire.
Les soldats, qui ne se rendaient point compte de la cause réelle de ces sacrifices, et qui ne voyaient dans la décision prise par les aruspices qu’une volonté arbitraire des dieux écrite sur le foie des victimes, crurent que ces mêmes victimes pouvaient aussi prédire les résultats d'une bataille, et les généraux profitèrent de celte croyance, soit pour animer leur armée en lui faisant promettre par les aruspices une victoire assurée, soit pour la contenir lorsque l’occasion ne concordait pas avec l’impatience belliqueuse du soldat.
Parmi les différentes divinations, l’oniromancie est la plus ancienne, comme nous l’apprend Plutarque, dans le Banquet des sept sages. La plupart des philosophes grecs, et Aristote le premier, ont cru à l’art de prédire l’avenir par l’interprétation des songes. Voici à peu près le raisonnement sur lequel on s’appuyait pour le prouver. S’il n’y a pas de cause sans effet, il n’y a pas aussi d’effet
sans motifs. Or, ce serait nier la sagesse suprême que d’admettre avec Epicure, Xénophane et Pindarc, que les songes ne sont que les vains fantômes de notre imagination, car ce serait admettre qu'il existe quelque chose d’inutile dans le monde.
I/oniromancie était en honneur chez les Égyptiens, du temps même des patriarches. Des arlomim ou devins étaient chargés d'expliquer aux Pharaons leurs songes royaux, et les particuliers s’empressaient de les consulter aussi pour connaître l’avenir, en faisant interpréter leurs visions. Un songe, en Egypte, était un avertissement qu’il ne fallait pas négliger.
Lorsque le panetier et l'échanson renfermés dans le même cachot que Joseph eurent songé des songes, comme ils ne pouvaient pas courir après les arlomim pour se les faire expliquer, ils tombèrent dans un morne abattement. Joseph leur servit d’interprète ; sa double prédiction s’étant réalisée, il fut bientôt appelé près du Pharaon régnant pour lui expliquer les deux songes qui étaient restés impénétrables à la sagesse des devins. L’interprétation de Joseph sauva l’Êgypte de la famine, augmenta la puissance royale, et fit asseoir sur les marches du trône le fils bien-aimé de Jacob.
Il fallait bien qu’il y eût dès lors en Egypte, sinon des règles certaines, du moins des règles arrêtées pour l’interprétation des songes; car si celte interprétation eût été livrée à l’arbilraire des artomim, et que ces devins n’eussent été que de misérables charlatans, ils n’eussent point hésité à donner une explication quelconque au Pharaon qui les avait d’abord consultés. Leur silence démontre que leur oniromancie reposait sur dés bases dont ils ne pouvaient pas se départir, et le triomphe de Joseph vient de ce qu’élant inspiré de Dieu, sa science dut nécessairement l’emporter sur la science que l'homme ne tire que de sa faible intelligence ou des tâtonnements de
l’observaüon. Joseph l’avait dit déjà à ses deux conipa-gnonsdecaptivité,qui regreltaienll’absenced’un homme verse dans la science des songes : « Les interprétations des songes ne viennent-elles pas do Dieu ? »
Les Grecs distinguaient l’oniropole de l’oniromante. L’oniropole était le songeur qui interprétait ses propres songes, et qui avait le don de prédire, comme Calchas dans le camp d’Agamemnon. L’oniromanle était celui qui expliquait les songes qu'on lui racontait. Ce dernier était peu considéré;on ne voyait en lui qu’un savant; tel était Lysimaqne, petit-fils d’Aristide, qui, réduit parla misère à faire le métier d’oniromanle, se tenait près du temple de Bacchiis avec ses tablettes, où étaient consignées les règles et les observations de l’art qu’il professait.
On comprend que celui qui faisait son métier de prédire l’avenir, non pas sur les songes qu’on lui racontait, mais d’après les songes qu’il avait ou qu’il prétendait avoir eus, pouvait dégénérer bien souvent en un fripon qui abusait de la crédulité publique.
C’est ( onlre les oniropoles que Dieu s’élève dans le Deuléronomc (I), en ordonnant que les songeurs de songes soient retranchés du milieu de son peuple, alors même que leurs prédictions se vérifieraient. C’était afin de soustraire les enfants d’îsraël à l'influence de ces hommes qui pouvaient les entraîner vers l’idolâtrie, que Dieu prononça contre eux l’anathème; mais cet anatlième n’atteignait, nullement les oniromantes. qui se bornaient, comme Daniel, à expliquer les songes qu’on leur racontait. « Car, pour me servir des expressions de ce pro-« phète (2), il y a un Dieu dans le ciel qui révèle ainsi « ce qui doit arriver dans les derniers temps. » En cela Daniel est d'accord avec l’opinion générale de l’anti-
(1) Chap, xii, rers. 1 et suiv. — (2) Chap, xi, vers. 28.
quité, et Homère nous dit aussi que les songes viennent de Jupiter.
Nous avons parlé des tablettes des songes qui servaient à Lysimaque pour exercer son métier d'oniromante : ces tablettes devaient être à peu près ce que sont nos livrets intitulés : Clefs des sauges, que consultent si avidement les coiumères, avec celte différence que nos Clefs des songes ne sont que le produit de l’imaginalion de quelque misérable charlatan , tandis que les lableltes des oniromantes étaient basées sur l'observation, et étaient, pour ainsi dire, des tables de probabilités.
Sous l’allégorie de la porte opaque ou d’ivoire, d’où sortent les songes trompeurs, et de la porte transparente ou de corne, d’où s'échappent les songes véritables, les anciens nôus apprennent qu'il faut distinguer différentes espèces de songes, et que la base première de l'oniromancie consiste à s'assurer si le songe est vrai, faux ou nul, avant môme de chercher une interprétation quelconque. Voici à cet égard les règles observées par les anciens.
Les songes des personnes mélancoliques sont, au dire de Plularque (1), généralement vrais. Les songes que procure un sommeil agité par une digestion laborieuse doivent être rejetés comme nuls : aussi n’acceptait-on jamais pour véritables les songes d’automne, parce que le fruit, comme le vin nouveau, entretient, à ce que prétend Aristotc, une fermentation dans le corps qui empêche, ainsi que les viandes pesantes et tous les légumes en général, et les fèves en particulier, d’obtenir des songes vrais, au moyen desquels on puisse prédire l’avenir avec certitude.
Pour plus de sûreté, on n’acceptait pour vrais que les songes faits vers la lin de la nuit, au moment où l’aurore
(1) Traité de la cessation des oracles.
va paraître, comme nous l’apprend Moschus dans son Idylle de Mégare. Enfin, par excès de précaution, les prêtresd’Amphiaraiisfaisaient purger ceux qui voulaient avoir des songes véritables, ainsi que le rapporte Pau-sanias en parlant de cet oracle. Il en était de même en Egypte; et les prêtres de cette superstitieuse contrée non-seulement avaient recours aux purgations, aux jeunes et aux macérations pour obtenir des songes vrais, mais encore ils avaient le soin de se faire un oreiller avec delà corne d’Ammon fossile qui, selon Pline (1), a la propriété de procurer des songes véritables.
La divination par les songes s’est trouvée universellement répandue. « Les Celtes passaient les nuits près « des tombeaux des hommes vaillants pour en recueillir « les oracles (2). » Julien, dans le Misopogon, parle des bonnes vieilles qui sc roulaient sur les tombeaux des saints pour les voir en songe et obtenir des visions; on croyait tellement aux révélations des songes, que dans le livre apologétique de saint Jean Damascène, pour convaincre les iconomaques, qui prétendaient que les figures des saints ne représentaient point leurs traits, mais que c’étaient des images dues à la fantaisie des artistes, on s’appuya sur la vision de saint Ambroise, qui, après un jeûne de trois jours, vit vers l’aurore, dans son sommeil, saint Paul absolument tel qu’on le représentait dans les églises.
Dans le moyen âge, on allait dormir de préférence sur les marches de l’autel pour avoir des songes véritables; et cette expression populaire : II n'a pas couché dans l’église, pour désigner un homme peu avisé et qui ne peut rien prévoir, vient de celte coutume des premiers chrétiens, qui d’ailleurs n’était qu’un reste des superstitions du paganisme.
(1) Liv. XXXVII, chap. x. — (2) Tcrtullicn, De anima liber.
Lorsqu’on avait en un songe qui présageait quelque malheur, le moyen le plus sûr pour en conjurer l’effet était de le raconter à liante voix au soleil, comme, le fait Clytemnestre, dans l'Electre de Sophocle.
L’oniromancie fut religieusement observée depuis la plus haute antiquité par tous les peuples, jusqu’à l’époque prédite par les Toscans, qui furent appelés à Rome pour expliquer les prodiges extraordinaires qui signalèrent le consulat de Sylia. Ces Toscans annoncèrent qu’il devait y avoir en tout huit races d’hommes de mœurs différentes, et que Dieu a marqué à chacune le temps de sa durée, qui n’est terminée que par la grande période appelée la grande année. Ils ajoutaient que dans cette succession de races, il devait arriver de grands changements, et que la divination, par exemple, honorée et respectée par l’une, à laquelle les dieux envoyaient des signes purs et sensibles de ce qui devait arriver, était méprisée par l’autre, qui ne tirait pas les prédictions du trésor de la science, mais seulement de simples conjectures, et suivant les caprices de l’opinion (1). Le christianisme a renouvelé la face du monde et accompli le changement moral prédit par les devins toscans. La divination, jusqu’alors en honneur, est tombée de jour en jour; cependant aujourd’hui le progrès des sciences semble venir en aide à ce que les sceptiques du dernier siècle appelaient des superstitions grossières. On n’ose plus nier l’intuition et les eflets du magnétisme, et l’on n’ose plus rejeter sur la fraude et l’ignorance les prodiges des premiers siècles. On étudie $ et il semble qu’un changement moral va s’opérer encore. Les Toscans auraient-ils eu raison? et finirons-nous par adorer ce que nous avons brûlé?
Un dernier motsuiToniromancie. Le bonheur constant
(1) IMularque, Vie de Sylla.
de Sylla est un fait unique dans les annales du monde. Or cet homme, qui ne rougissait pas d’avouer que tout son bonheur venait de sa fortune, conseillait à Lueullus, dans les mémoires qu’il lui dédia, de 11'écouter que les avertissements des dieux qui lui seraient envoyés en songes, et d’y ajouter plus de foi qu'à tous les conseils qu’on pourrait lui donner.
Je ne prendrai parti ni pour ni contre l’oniromancie; je laisse a d autres plus hardis le soin de décider la ques-
A. I).
Négresse somnambule. — Ou lit dans le Courrier tle la Louisiane du 18 juin :
« La police a arrêté la nuit dernière, dans la rue, une jeune mulâtresse de seize à dix-sept ans qui portait un gros paquet de linge sale. Cette esclave, conduit c sans mot dire au poste de la mairie et examinée, a été reconnue être dans un état parfait de somnambulisme. Elle avait les yeux fermés et jouissait cependant de la plénitude d’action de tous ses sens. Une heure après, réveil» lée en sursaut, elle eut une crise nerveuse des plus violentes et fut remise à ses maîtres. Il paraît que cette jeune fille allait, pendant son sommeil, laver le linge sale de la maisou. On découvrit alors que cette esclave était depuis plusieurs années dans cet état qui tient du phénomène, et que, pendant son sommeil lucide, elle avait exécuté des travaux de couture d’une incroyable perfection, bien supérieurs à ceux qu’elle faisait étant éveillée. »
Tribunaux. — Le Droit du 30 juin dernier rapporte que le tribunal de Mons (Belgique) a décidé que l'emploi du magnétisme, comme moyen curatif, ne constituait ui le délit d’escroquerie prévu par l’article 408 du Code pénal, ni une contravention à la loi du G mars 1818 sur l’exercice de la médecine.
Ce jugement, que nous approuvons complètement, appelle quelques réflexions qu’on nous permettra de faire, puisque l’occasion se présente.
La Belgique suit les luis françaises; comment se fait-il qu’en France ou fasse dire à ces lois ce qu’elles ne disent pas? Il faut espérer que les tribunaux français reviendront sur leur erreur. En effet, pour que l'article 4u8 du Code pénal fût applicable, il faudrait que l’individu qui prétend guérir par le magnétisme ne fût pas réellement magnétiseur, en sorte qu’il tromperait sur sa qualité le malade qui s’adresse à lui. Mais s'il est réellement, magnétiseur, lors même que le magnétisme serait une chimère, sa bonne foi, sa conviction, le mettent à l’abri de l’article 408, parce qu’il ne commet pas d’escroquerie.
Quant à l’exercice illégal de la médecine, la loi de 1818 est une loi de police qui a simplement voulu que personne, sans avoir le diplôme qui constate les études, put se dire médecin, et cela est juste. Mais le magnétiseur prétend-il faire de la médecine et guérir suivant les règles acquises dans les Facultés? Evidemment non! lise borne à soutenir que le magnétisme guérit. Or, le magnétisme n’est pas la médecine, tant s’en faut! c’est mie«® ou plus mal, comme on voudra, mais c’est autre chose. Par conséquent, on ne peut assimiler deux sciences totalement différentes.
Que faudrait-il donc faire pour rentrer dans un état normal ? assu jettir ceux qui veulent employer le magnétisme comme moyeu curatif, à prendre une patente. De celte manière tout le monde serait averti. Ceux qui auraient foi au magnétisme s’adresseraient aux médecins maynétiseurs; ceux qui n’ont pas foi continueraient de s’adresser aux médecins ordinaires.
(Tribune lyonnaise.)
BIBLIOGRAPHIE.
Mesherism in India, by Jamos Esdaii.e, M.-D. Lomlou, iSlfi. 1 vol. at Louginan et C°, Pater-nostcr-row.
(Suilc.)
Il appert du témoignage des voyageurs qui ont le mieux exploré l’Inde, que des voleurs, appelés thugs ou bheels, se servent de manipulations réfléchies, magnétiques, qui facilitent leurs larcins. On lit à cet égard dans les Lettres de Victor Jacquemont:
« Ils tourmentent le sommeil par des bruits, des attouchements, et font prendre au corps, à tous les membres, la position qui convient à leur dessein.»
M. le comte de Warren est plus explicite encore:
« Us vont, dit-il, jusqu’à vous dépouiller, sans interrompre votre sommeil, du drap même dont vous dormez enveloppé ; ceci n’est point une plaisanterie, mais un fait. Les mouvements du bheel sont ceux du serpent: dormez-vous dans votre tente avec un domestique couché en travers de chaque porte, le bheel viendra s’accroupir en dehors, à l’ombre et dans un coin, où il pourra entendre la respiration de chacun. Dès que l’Européen s'endort, il est sur de son fait: l’Asiatique ne résistera pas longtemps à l’attrait du sommeil. Le moment venu, il fait, à l’endroit même où il se trouve, une coupure verticale dans la toile de la tente ; elle lui suffit pour s’introduire. Il passe comme un fantôme sans faire crier le moindre grain de sable. Il est parfaitement nu et tout son corps est huilé. Un couteau poignard est suspendu à son cou : il se blottira près de votre couche ; et avec un
sang-froid, une dextérité admirables, pliera le drap en très-petits plis tout près du corps, de manière à occuper la moindre surface possible. Cela fait, il passe de l’autre côté et chatouille légèrement le dormeur, qu’il semble magnétiser; de manière qu’il se retire instinctivement et finit par se retourner en laissant le drap plié derrière lui. S’il se réveille et qu’il veuille saisir le voleur, il trouve un corps glissant qui lui échappe comme une anguille ; si pourtant il parvient à le saisir, malheur à lui! Le poignard le frappe au cœur; il tombe baigné dans son sang, et l’assassin disparaît. »
Outre ces maraudeurs qui tuent pour le butin qu’ils espèrent réaliser, il en est d’autres qui le font par piété!... C’est la secte des phanségars 011 étrangleurs qui adorent Bohwante, déesse ennemie de l’humanité.
Les Anglais donnant aux pratiques occultes des uns et des autres le môme nom de charme, il est difficile de décider à quel ordre de ces brigands appartient le barbier dont parle M. Esdaile; cependant tout porte à voir dans ces vols d’étres humains l’aliment de sacrifices à la sombre divinité. Quant au moyen dont ils se servent pour consommer ces crimes, notre auteur prouve, tout le monde l’a deviné déjà, que c’est le magnétisme ! Cruel abus, étrange perversion : l’élément du bien devenir l’instrument du mal! Rien n’est sacré pour l'homme dont on a laissé prédominer les instincts mauvais.
Ces digressions nous ont éloignés de la scène primitive; il y aurait encore bien des choses à dire, des faits à citer; mais il est temps de revenir, nous n’avons qu’à faire une analyse; laissons donc M. Esdaile continuer
son curieux récit :
« Ayant été, dit-il, accidentellement témoin de cette affaire, je présumai qu’011 m’interrogerait sur la possibilité d’un tel mode d’enlèvement, et comme j’ignorais entièrement le sujet, je résolus de faire des expériences
pour m’éclairer. Je pensais que si c’élait un effet magnétique, je pourrais peut-être l imiter, parce que le plus grand pouvoir renferme le moindre ; je n’avais pour cela qu'à magnétiser moins que pour produire l’insensibilité.
« Je me rendis donc à l'hôpital de la prison et j’y magnétisai un homme que j'avais endormi plusieurs lois déjà; mais je ne l’amenai qu'aux portes du sommeil, lui laissant la faculté de marcher et d’ouïr d'une manière très-imparfaite. En cet état je m’en fis suivre quelque temps, puis l'abandonnant, il alla en ligne droite jusqu’au bout de l'enclos, où il se heurta contre le mur; je le retournai, il marcha de nouveau jusqu'à un autre obstacle où il resta comme cloué. En l’y laissant tranquille quelques minutes, le sommeil augmenta; il devenait insensible aux sons. Je le ramenai au degré primitif eu soufflant sur les yeux et lui parlant sans cesse ; alors il répéta avec la plus grande exactitude ce que je lui disais en anglais et en indostan- Au réveil, il n’avait nulle connaissance de ce qui s'élail passé, et disait n avoir pas bougé de place, quoiqu’il se trouvât à l’extrémité de l’enceinte opposée à celle où nous avions commencé.
« Ainsi que je l’avais prévu, l’on m’assigna comme témoin devant le tribunal de police ; le magistrat me demanda si je croyais possible un enlèvement pareil ; je répondis que oui, parce que j’avais fait quelque chose d’analogue en me faisant suivre d’un prisonnier de l'hôpital saus qu’il le sût. Laffaire fut renvoyée au juge; mais quaud elle futsoumise aux mouluvis (conseillers indigènes), il me fut impossible de leur faire comprendre ma pensée ; c’est pourquoi le juge me demanda si je voulais leur montrer qu’une personne peut se faire suivre d une autre qui n’y consent pas, ainsi que je l’avançais. Ma réponse fut que je teulerais volontiers l’expérience, mais que je ne voulais pas en garantir le succès; que s’il
voulait ordonner l’appel de trois hommes queje nommai, j’essaierais d’obtenir ce résultat devant la Cour.
« Les patients furent tenus dans une ignorance abso lue de nos intentions ; et, un ou deux jours après, je fus mandé à la Cour du juge, qui était remplie d’Européens ci d indigènes. Nizir Mahomed fut amené le premier à la barre; je le magnétisai en peu d’instants, l’emmenai hors de l’audience et le fis marcher assez loin sur la route, en lui maintenant les bras catalcptisés aussi longtemps queje le voulus; ensuite je le ramenai à la barre, où le juge et les moulavis lui adressèrent la parole très-haut sans qu’il y prêtât la moindre attention : ils furent obligés de me prier de l'éveiller. J’accédai ; alors on lui demanda s’il n’avait pas quitté la salle depuis qu’il y était entré; il répondit « non » sans hésiter. Pendant qu’on l’inlerrogeait, je m’approchai de lui par derrière, sans qu’il s’en aperçût, et je le transis au moment de répondre. Les paroles expirèrent sur ses lèvres, et il devint sourd à toutes les voix ; puis je l’éveillai de nouveau.
« Ensuite l’on introduisit Màdub, qui ne me vit point en entrant. Le juge et les moulavis l’interrogèrent, et il répondit avec intelligence; mais au moment le plus animé de sa défense, je le cataleptisai si bien, qu’il demeura dans l’attitude suppliante des prisonniers à la barre. L’action fut si prompte, qu’il cessa soudain de parler et d’entendre; mais les personnes placées en face m’ont assuré qu’après avoir cessé de l’entendre on voyait ses lèvres s’agiter comme s’il parlait encore. Il était si profondément influencé, que les mouvements volontaires lui étaient presque interdits, et je fus obligé de le pousser avec la main par derrière pour le faire avancer. Après quelques pas mal assurés, il devint soudainement roide de la tête aux pieds, et tomba la face contre terre d’une manière effrayante. Cette rigidité tétanique l'avait si promptement envahi, que, ue m’en apercevant pas, la
moindre impulsion de ma main causa sa chutc. Il ne revint qu’avec difficulté; il ne s’était heureusement point blessé.
« Enfin l’on amena Sooroop-Chund. Comme je ne l'avais pas vu depuis un mois, je m’informai de sa santé, tout en le magnétisant d'intention. Au bout de quelques minutes, il cessa de me répondre; je le lis sortir de la salle et tourner comme un tolon, ayant les bras étendus et inflexibles; puis je le ramenai à sa place dans un état d’insensibilité totale, n’entendant personne et ne donnant aucun signe de vie. Quand je lui eus soufflé sur les yeux, il recouvra instantanément ses sens et déclara n’avoir jamais quitté sa place.
« Je ne veux pas conclure de celte expérience que le barbier s’est servi du mesmérisme pour emmener le garçon, mais ça m’a fourni l’occasion de montrera tous que la chose est possible. Personne n’a été tenté de nier publiquement que j’aie enlevé ces hommes; avec les facilités que possèdent les barbiers du pays, je pourrais presque sûrement m’engager de voler en plein jour un homme, femme ou enfant. Dès que je vis ces effets extrêmes du mesmérisme, je fus convaincu de l’égalité de sa puissance pour le bien et pour le mal, et je n’en ai poussé si loin la démonstration que dans l’espoir d’atlirer l’attention publique sur ses avantages et ses dangers. J’espère que le jour n’est pas loin où l’opinion publique flétrira tous ceux qui l’exerceront dans un but autre que l’utilité médicale ou l’investigation philosophique.
« L’évidence du rapt était telle, que le barbier, n’importe comment il l’ait effectué, fut condamné à neuf ans de travaux forcés, et son jugement confirmé par la Cour suprême. Mais le gouvernement, craignant que mes expériences n'eussent trop vivement impressionné les juges, gracia l’individu.»
Après avoir aussi victorieusement démontré l’identité
causale des phénomènes mesmériques et des charmes, M. Esdaile expose ses procédés et son opinion sur l’art mesmérien. C’est la partie la plus faible de ce livre, remarquable à tant d’égards : cependant il y a quelques passages bons à connaître; je vais essayer de les rendre dans toute leur originalité.
«On a beaucoup écrit, dit-il, sur les qualités morales et physiques nécessaires à un mesmériseur ; on en a fait le tableau d’un monstre parfait capable à lui seul d’effrayer ceux qui désirent magnétiser. Si l’on demandait de choisir un magnétiseur modèle, je le prendrais d’une taille élevée, robuste, ayant une égale activité des systèmes sanguin et nerveux ; doué d'une volonté ferme, résolu à tout faire pour réussir, humain et dévoué à la vé rité, capable enfin de ces actes sublimes qu’on fait par amour, mais non pour de l’or. Quand la route est tracée, il faut beaucoup moins d’énergie morale et de vigueur corporelle; des jeunes gens sains, bien portants, dociles et patients, lorsqu’ils veulent bien y mettre le degré d’attention nécessaire, réussissent parfaitement ù exécuter nos intentions. Ainsi, au bout d’un mois de magnétisations suivies, ne me sentant plus la force de continuer cette étude à cause de la fatigue de corps et d esprit que j’en éprouvais, car je n’épargnais ni l’un ni l’autre, je mis au courant mes infirmiers, jeunes Hindoux et inahoinétans, qui sont devenus habiles magnétiseurs. Maintenant je ne magnétise plus; j’ai une douzaine de ces aides-mesmériseurs qui exécutent tous mes désirs, soit que je veuille obtenir le coma, l’insensibilité, ou traiter des maladies par le mesmérisme seul. »
L’auteur de Memerim in India est ennemi de 1 exclusivisme en matière de procédés magnétiques; il les emploie tous selon les circonstances; peu lui importe le moyen, pourvu qu’il réussisse. Cette marche, essentiellement arbitraire, n’est pas exempte d’inconvénients ; le
savoir n'est pas égal chez tous les hommes, et l’absence déréglés, de principes d’application, n’est guère propre à les faire s’entendre. C’est ériger en dogme l’autocra-tisme individuel et faire que chacun ait son avis, sa doctrine, comme nous voyons en médecine la même maladie jugée d’autant de manières qu’on a consulté de docteurs. Cependant, avant de condamner celte doctrine, voyons comment elle fonctionne dans les mains de M. Esdaile.
«Tel exeile les symptômes mesmériens en dérangeant l’équilibre nerveux par une forte commotion de l’esprit, tel autre en regardant fixement comme un animal qui veut, saisir sa proie, un Iroisième au moyen de sensations monotones, etc.; preuve qu’on peut atteindre le même but par des moyens divers. Mais il n’est pas rare de voir entre gens qui suivent la même carrière des personnes qui s’attachent exclusivement à une manière d’agir qui leur est propre et repoussent toute innovation uniquement parce qu’elle contrarie leurs vues égoïstes: « Your
• way is not my icay, votre moyen n’est pas le mien, dit-« on, et l’amour-propre ajoute en secret : donc il est mau-
o vais, and thereforc il is terong. »
« Le public oyant tous ces dires de voyageurs qui prétendent arriver au même but par des voies différentes, dont chacun proclame la sienne seule vraie, conclut, selon sa coutume de logique tranchante, que nulle n’est bonne, et déclare que tous poursuivent une chimère. Le plus souvent pourtant ils ont tous raison, et leur seul tort est de considérer la chose d’un point devue trop restreint; leurs mérites combinés nous conduiront probablement à la vérité ; sachons donc nous servir de chaque procédé selon les circonstances. »
Finissons cette analyse par un exemple qui mette en relief cette pratique à base complexe, empiri-métho-dique, dont la valeur relative ne peut être justement appréciée que par des essais comparatifs.
Parlant du coma, M. Esdaile dit: « Je l'obtiens habituellement en transmettant au cerveau du patient, par tous les moyens possibles, le lluide simultanément sécrété par tous les organes de l'opérateur, et je peuse que cet état n’est si rare en Europe que parce qu'on ne magnétise pas suffisamment à la fois. L’efficacité de ce procédé est si grande, qu’avec uue attention soutenue et le degré de patience nécessaire, on peut ici,cn un jour, comaliser plusieurs personnes et les rendre insensibles à la douleur des opérations chirurgicales. Un essai d’une heure ne doit pas être considéré comme suffisant; deux heures valent mieux, et le succès ne vient souvent qu’après bien des échecs; mais l’insensibilité est quelquefois produite au bout de quelques minutes, preuve que des individus sont insensibles et peuvent être opérés sans dormir.
« Le patient consentant, priez-le de s’étendre sur le dos, comme s’il voulait dormir, cn évitant soigneusement, si vous voulez l'opérer, qu’il ignore votre intention ; car la crainte et l’attente sont nuisibles à l’impression physique désirée. Ceci fait, approchez lesommetde sa tête de l’extrémité du lit, et asseyez-vous de manière à pouvoir appliquer votre face contre la sienne, et vos mains sur le creux de l'estomac, quand il vous plaira; rendez la chambre obscure, commandez le silence, et, fermant alors les yeux de votre patient, commencez à passer lentement vos mains, étendues enforme de griffes, à environ un pouce de distance de la peau, du derrière de la tète à l’épigastre; restez quelques minutes sur les yeux, nez et bouche, puis passez une main de chaque côté du cou pour les ramener jusqu’au creux de l’estomac, où vous les laissez quelque temps suspendues. Continuez cette manipulation avec assurance, durant un quart d’heure environ, cn soufflant tout le temps légèrement sur les yeux. Les passes longitudinales sont
alors employées avec avantage pour terminer ; on peut aussi appliquer sans pression, mais avec une ferme intention, les mains sur l’épigastre et les côtés, o La sueur et la salive semblent aider l’action. »
Ce procédé rappelle les pratiques des Psyles de Cy-rène; M. Esdaile l'emploie aussi dans la magnétisation des objets : ainsi, à l’égard de l'eau, il dit:
« Comme il y a de bonnes raisons de croire que l’ha-lcine est imprégnée de fluide vital, je souffle avec un tube jusqu’au fond du vase qui la contient, et je tiens le bout de mes doigts plongé dans le liquide. Au bout de cinq minutes, l'eau est saturée. »
Le docteur Elliotson dit en quelque endroit du Zoist que ce livre est l’un des joyaux de littérature magnétique; c’est aussi mon avis, et je ne puis en donner une plus juste idée à ceux qui ne lisent point l’anglais qu’en le comparant à Y Instruction de Dcleuze et au Manuel de M. du Potet. 11 a même sur eux l’avantage d’une classification à la fois simple et physiologique, mais il leur est inférieur sous plusieurs autres rapports ; les faiblesses qu’on y rencontre à côté de beautés réelles font voir qu’il manque àM. Esdaile ce qui justement fait la supériorité des auteurs précités : une longue pratique. C’est un mérite que le temps seul donne, et nul n’est mieux placé que ce jeune médecin pour l acquérir vite, puisqu’il peut multiplier à loisir les faits que ses prédécesseurs colli-geaientsi péniblement. Nous serons, au reste, témoins de ses progrès, puisque nous recevrons désormais les bulletins cliniques de l’hôpital qu’il dirige.
Hébert (de Garnav).
Le Projmétaire-Géra/U : HLDElïT (de Garnay).
l’arij. — Imprimerie d'A. Rexb, rue lc Seine, 3J-
CLINIQUE MAGNÉTIQUE,
Etat des guérisons obtenues par le magnétisme et l'eau magnétisée, depuis le 19 novembre 1831 jusqu'au 21 décembre 1832, par M. LAFORGUE, chef de bataillon en réforme à Pau ( Basses-Pyrétiées).
1. Justine, épouse Belloc, jeune, domiciliée à Pau.
(Une descente de matrice et le charbon à la main gauche.)
2. Jeanne, fille Claverie, première née, de Pau, rue
Gassies.
(Un champignon à l’index de la main droite.)
3. Veuve Claverie, de Pau, rue Gassies.
(Choléra morbus ; elle n’a fait usage que de l'eau magnétisée.)
h. Catherine, fille Capdevielle, de Bizanos.
Suppression des règles, oppression de poitrine, palpitation de cœur et migraine permanente.)
5. Marthe Lassalle, épouse Laucué, de Bizanos.
(Mal de gorge violent, ayant perdu la parole, insomnie, ne pouvant rien avaler.)
6. Marie Courtale, épouse Bidot, de Pau.
(Maladie de langueur, fièvre lente, affection nerveuse.)
7. Marie, fille Binoî, enfant, de Pau.
(Migraine et palpitation de cœur.)
8. Marie Mirande, née Baron, de Geronce.
(Maladie d'yeux.)
9. Jeanne Labau, épouse Labourdette, de Bizanos.
(Hydropisie générale et diarrhée forte, grande faiblesse.) TOME V.—A'0 53.—10 SEPTEMBRE 1847. 5
10. Izabeau Bazemne, fille, de Bizanos.
(Hydropisie générale et diarrhée forte, grande faiblesse.)
11. JeanneJACOu, épouse Carrère, d’Aressy.
(Hydropisie avec palpitation de cœur violente et permanente, insomnie.)
12. Marie-Louise, veuve Labarrèiie, de Pau.
(Migraine permanente, insomnie, douleur au foie et palpitation de cœur, mal d'oreilles, etc,)
13. Marie Minvielle, épouse Boudenave, d’Aressy.
(Migraine continue, maladie d'yeux, d’oreilles, coliques et vents.)
là. Jean-Pierre Labourdette, allié à Péré, de Leurbe,
arrondissement d’Oloson.
(A la suite d'une longue maladie, un dépôt à la poitrine qu'il a rendu en vingt minutes.) (1).
15. M...., de Sarrance.
(Inflammation de poitrine'.et du ventre, affection nerveuse, palpitation du cœur, une chaleur insupportable, insomnie, etc.)
10. F...., de Sarrance.
(Fluxion de poitrine.)
•17. Anne Palaas, née Dubour, de Mages, département
des Landes.
(Obstruction de foie, oppression de poitrine , palpitation de cœur et hydropisie, bouflUsure générale.)
18. Grégoire Vigneau, de Mages, départ, des Landes.
(Fièvre lente et migraine.permanente.)
19. Marie Borde, épouse Borda, de Bizanos.
(Migraine permanente.)
20. Marie-Màrtbe Labanpedetite, de Pau.
(Fièvre lente, migraine permanente, insomnie et perte blanche depuis trois ans, palpitation de cœur.)
(!) Cet homme était abandonné depuis trois jours; on lui avail porte le
Saint-Vialiiiuu le 24février 1832.
21. Bidot, de Tau, rue Chantelle.
(Grande faiblç^se sans appétit, la langue paralysée et grande.)
22. Malliieu-Pierre Bergerot fils, de Lescar.
(I)cs glandes autour du cou très-grandes.)
23. Pauline Mirande, de Pau.
(Convulsion ncrvcu.»e à la tète, continuité de migraine, maladie d'yeux et d'oreilles.)
2/i. Thérèse, épouse IIeyd, de Pau.
(Maladie de foie, palpitation de cœur, douleurs de matrice et de rate, insomnie, sans appétit.)
25. JeauDc, fille Domëcq, de Pau.
(Inflammation de poitrine, point de côté, toux, insomnie, palpitation de cœur, migraine et mal d'oreilles, etc.)
20. Thérèse, fille Roc, de Poey.
(Suppression de règles, fièvre lente, migraine, inflammation de poitrine et déchirement de cœur.)
27. Anne, fille Andiko, de Pau.
(.Suppression de règles, migraine.)
28. Marguerite, épouse Vocso, de Bizanos.
(Maladie suite de couches.)
29. Jacques Labobde, de Lescar.
(¡Migraine permanente et mal d'oreilles.)
30. Marie Cuiboune, épouse Andîeu, de Pau.
(Maladie très-compliquée des femmes, suite de couches et lait répandu.)
31. Epouse Dufau, de Pau, rue du Pied.
(Suite de couches et luit répandu.) (1).
32. Anne, fille Ladorde, de Lescar.
(Migraine et palpitation de cœur.)
33. Angeline Baguette, de Bizanos.
(Suppression des périodes.)
(d) Elle n'a fait usage que de l’eau magnétisée.
34. Veuve Binoî, de Pau.
(Unpanaris au pouce de la main droite.)
35. Marie Escodbës, de Pau.
(Migraine permanente et maladie des nerfs.)
3(5. Marie Bellocq, épouse Baguette, de Bizanos.
(Inflammation dans les viscères et au bas-ventre, lait répandu, maladie d’yeux, d'oreilles, migraine cl mal de gorge.)
37. Epouse Ramon, de Bizanos.
(Affection nerveuse.)
38. Marie, fille Laborde, de Pau, rue Servies.
(Suppression des règles, les jambes très-entlécs et les pieds, migraine et insomnie.)
39. Mademoiselle Seguinotte, de Pau.
(Un panaris.)
/i0. P....,deLaseazères,Hautes-Pyrénées.
(Vomissement périodique, constipation permanente, maladie des nerfs très-compliquée.)
hl. Claudine, fille Labat, de Laseazères.
(Suppression des règles, obstruclion de foie, migraine, palpitation de cœur, fièvre lente, malaise général, très-faible, insomnie et sans appétit.)
k'2. Jean Borde, domestique, de Laseazères.
(Vomissement périodique.)
A3. Alexandre Darbon fils, de Vic-Bigone.
(Une loupe à la joue gauche.) *
Mi. C...., de Laloubise, près Tarbes.
(Palpitation de cœur permanente et toux.)
55. Pierre Bergerot, d’Arête.
(Douleurs rhumatismales.)
4(3. Anne Rey, de Bizanos.
(Fièvre lente, maladie des nerfs, migraine cl insomnie.)
47. Marie Salenave, épouse Tiieil, de Pau. .
(Migraine permanente, maladie d’yeux, (^'oreilles, palpitation de cceur, douleurs de rate et de matrice.)
4S. Marie Lacassy, épouse. Jouany, de Pau.
(Maladie des nerfs compliquée.)
'in. Louise, fille Bena, sergeut au U* de ligne,
(fn champignon au genou droit, le talon pris à la cuiscet,la jambe îïayantquela peauetles os.) V .A^j
80. Jean Pouciiak fils, deGelos.
(Des glandes au cou et à la poitrine, très-grosses.)
51. Jeanne Lasskrrs, épouse Lafargub, deCaubios.
(.Maladie de laogueur.)
52. Jean Bardé fils, de Gelos.
(Migraine et maladie d'yeux.)
53. Pierre Radarlet, dit Pkré, de Siros.
(Inflammation des intesljns «t maladie des nerfs, insomnie et vomissement périodique.)
54. Mademoiselle Barrère, de Pau.
(Vomissement périodique, migraine, mal d’oreilles et palpitation de cœur.)
55. Jeanne Ci.arens, épouse Lacroi x, de Pau.
(Migraine, mal d'oreilles, d’yeux, insomnie, palpitation de cœur, maladie des nerfs.)
56. Jeanne Piquette, épouse de Gelos.
(Fièvre tierce.)
57. Laurent Monda, de Vic-Bigorre.
(Migraine, mal d'oreilles, d’yeux, palpitation de cœur cl maladie des nerfs.>
58. Jeanne I.oup, épouse Micoulau, de Pau.
(Oppression de p.iitrine, douleurs de matrice, migraine, mal d'yeux, d’oreilles el des nerfs, vents.)
50. Thérèse, fille Taboan, de Pau.
(Palpitation de cœur permanente.)
00. Marie, fille Cazarré, de Mcillou.
(Dvssenlcrie.)
(31. Jeanne Lassalle, de Bizanos.
(Suppression des règles, etc.)
(52. 13. Moussicat fils, de Pau, rue Gassics.
(Fièvre lente, malaise, insomnie.)
63. Jeanne, épouse Monleru, de Pau.
(Migraine el palpitation de cceur.)
(54. Auguste Tarda« fils, de Pau.
(Migraine permanente.)
(55. Ursule Claverie, épouse Pieulet, d’Arète.
(Maladie de langueur et insomnie.,)
00. Jeanne Claverie, épouse Cazarré, de Meillou.
(Fièvre lente, obstruction du foie, mal dégorgé, migraine permanente, palpitation decœur, affection nerveuse, llueurs blanches, insomnie; sans appétit.)
07. Anne, fille Paulette, de Bizanos.
(Suppression des règles, etc.)
08. Catherine, fille Pieulet, d’Arète.
(line vieille plaie au bras droit.)
09. Marie Cazabak, épouse Labroüï, de Pau.
(Perte permanente et insomnie.)
70. Louise Dur,os, ¿peuse Duthil, de Vic-Bigorre.
(Flueurs blanches cl rouges permanentes, faiblesse générale, insomnie, migraine, mal d'oreilles, du cœur, maladie do matrice très-compliquée, affection nerveuse, etc.)
103)
71. Jeanne, fille Monleru, de Pau.
(Maladie d'yeux.)
72. Pierrç Moünaut, de Gelos.
(Douleurs rhumatismales.)
73. Jeanne, lillc Mounaot, de Gelos.
(Palpitation de caur «l migraine.)
lh. Denise-Mathilde L..., de Vic-Bigorre.
¡De'. glandes.)
75. Aune M...., do Vic-Bigorre.
{Migraine et maladie d'yeux.)
70. Joséphine, fille Labat, de Vic-Bigorre.
(Migraine permanente et palpitation de cœur.)
77. Jeanne, fille Fitter, de Vic-Bigorre.
(Mal de gorge très-violent, ne pouvaut rien avaler.)
78. Sophie-Catherine Castel, de Pau.
(Maladie, d’yeux.)
7i>. Jean Beysku, d’Arète.
(Oppression de poitrine.)
80. Marie Tiieil, de Pau.' .. «w
(Inllammation de poitrine et insomnie, sans appétit.)
81. Jean Fléc^de, de Pau, rue de Lamothe.
(Fièvie tierce.)
82. Jean Bellocq, journalier, de Pau. ,
(I)ouieurs rhumatismales.)
S3. Marie Bordehaux. épouse d’Arète.
(Maladie très-compliquée.) (1).
8fi. Domestique Courbet, ditCRACo, de Gan. (Inflammation au bas-ventre.)
85. Jeanne Loüstalot, épouse Lasaubette, de Poe*. (Ilydropisie.y (2).
Collationné conforme :
Laforgce.
(1) Malade depuis qaaranle ans.
(2) Elle a les jambes paralysées ; elle n’a été m agnélisée que six fois.
INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.
HOPITAL MAGNÉTIQUE DE CALCUTTA.
« Rapport de la commission nommée par le gouvernement pour examiner les opérations chirurgicales fuites par le docteur J. Esdaile sur des malades soumis à l'influence d'un agent supposé, dit mesmérique. »
Voici l’histoire de ce rapport qui nous parvient imprimé par ordre du gouverneur du Bengal. En janvier 1846, M. Esdaile adressa à l’Ecole de Médecine la relation de soixante-quinze opérations pratiquées sans douleur, offrant en même temps de donner toute facilité aux personnes qui voudraient observer ce phénomène. On ne lui accusa pas même réception de sa lettre. Ce procédé dédaigneux, si semblable à ceux des Académies envers Mesmer, ne le découragea pas j il publia dans VEnglisman le résumé de sa pratique, dont nous avons donné la traduction abrégée (t. IV, page 68), puis il partit pour l’armée , où ses devoirs de chirurgien 1 appelaient. Lorsqu'il eut réuni cent deux cas d’insensibilité a la douleur, il en adressa le rapport direct au gouvernement, lui offrant de convaincre de la réalité de ces faits un certain nombre de personnes dans lesquelles on aurait confiance. Le gouverneur, vu ce mémoire, nomma une commission: « To observe and report upon surgical opérations to be performed by docteur Esdaile in their pre-Se/ice,» dans la composition de laquelle il fit entrer trois
personnes bien connues par leur hostilité au mesmérisme, d’après ce principe que la conversion d'un pécheur est plus convaincante que le salut de mille saints.
Ces commissaires étaient :
J. Atkinson, esq., inspecteur général des hôpitaux, président de la commission;
E.-M. Gardon, esq. ;
J. Jackson, esq., chirurgien de Native-Tlospilal;
D. Stewart, esq., docteur-médecin, chirurgien de la présidence;
W.-B. O’Shanghnessy, esq., secrétaire-rapporteur ;
James Hume, esq. ;
A. Rogers, esq.
Ces messieurs se mirent immédiatement à l'œuvre, et le 9 octobre dernier ils adressèrent au gouvernement leur rapport, dont nous allons traduire les passages essentiels, les conclusions étant déjà connues de la plupart de nos lecteurs par les extraits que nous avons don -nés de divers journaux anglo-indiens. Nous espérons qu’on ne nous saura pas mauvais gré du développement que nous donnons à cette partie de notre publication : les magnétiseurs de tous les pays sont frères, et leurs travaux doivent être partout connus. D'ailleurs l’érection de Mesmeric-Hospital a été pour le magnétisme le signal d'un immense progrès, le point de départ d'une ère féconde dont nous devons suivre toutes les phases; c’est pourquoi nous renvoyons simplement à notre épigraphe les esprits étroits qui nous accusent d'anglopht-lie. Ce petit avis donné, commençons.
o Le docteur Esdaile, dit le rapport, stipula, avant de commencer, qu’il voulait avoir : 1° la direction médicale de l’hôpital, quel qu’il fût, où se feraient les expériences proposées; 2° les infirmiers qu’il employait comme magnétiseurs à Hooghly; 3° une séantie do la commission
chaquejour. Il répéta en outre son intention formelle de borner stri etement ses expériences ans indigènes de la classe habituellement reçue dans les hôpitaux, et refusa d’exécuter lui-même les manipulations mcsmériqucs, se basant sur le double motif que c’était inutile et cont raire à sa santé.
« La commission s’est réunie quatorze fois, une par jour, comme il était convenu, et a observé dix cas de chirurgie pris par M. Esdaile sur la totalité de salles du Native-Hospital et nécessitant tous des opérations plus ou moins graves.
«Tous ces paliens étaient des indigènes, hindous et uiahométans, de dix-huit à quarante ans, présentant tous les degrés de santé, depuis l’émaciation extrême jusqu’à la force ordinaire. Leurs maladies sont spécifiées dans le tableau ci-annexé.
Liste des patients soumis aux expériences mesmiriques du docteur Esdaile. '
Nom drl malade*. Abt. Date d'udaiiMion Nom de» mulnilirs. Duré» de a maladif».
CheGiam... Ilissonalli .. Nilmoney... iNcelchul. .. Doeloo..... Jahiroodccii. Ilohmun.. Ranùhuitd;.1 Ilvdcr-Khun. Murali-Dosa. 40ans. ¿0 » 45 > 05 • 40 . 33 -40 . 1« > 30 -30 « 7 septembre. 7 ■ 7 » 7 » 7 » 7 i* 10 . 1» ». 1« • 14 Ihdroeùlc double....... Tumeur du scrulum..... T » ...... Phimosis,............. Ilvdrocilc dèubl>....... Hypertrophie (/colii.. > du scrotum. 1 1 ' • i * GpDcrùne à |a jambe.,.. Ilypartrophli du scrofutn. i Plusieurs mois. , . • M Trois ans. Deux Plusieurs mois. DaU« mis.' • SEW- '
« Les magnétiseurs employés par M. Esdaile étaient de#jeunes gens de quatorze à trente ans; hiudous et ma-homélans, la plupart; aide-chit urgiuns et pharmaciens à l’hôpital de Hodghly. -h • ■. r.v . k
« Un mesmériseur fut assigné à choque malade. I.a chambre où ils opéraient était obscure; mais de temps en temps la commission pouvait examiner, par de petites ouvertures pratiquées à la porte, la manière dont l’opération était conduite. Le patient était couché sur le dos, nu jusqu’il la ceiuture et Jes jambes découvertes; le magnétiseur, assis à la tète du lit, se penchait de manière à avoir la face presque en contact avec celle du malade, la main droite étant généralement placée au creux do l’estomac, et les passes faites avec une seule ou les deux mains devant la figure, sur les yeux principalement. Le mesmériseur souillait doucement et fréquemment dans le nez, entre les lèvres et sur les yeux. Le silence le plus profond était observé. L'emploi de ces procédés fut cpntinué environ deux heures chaque jour dans tous les cas, même huit heures dans l’un, et six dans un autre, sans interruption.
«Sur ces dix individus, trois: Bissonalh, Deeloo et Neelchul furent abandonnés sans avoir obtenu d’eflets satisfaisants : Biçsonath, parce qu'il souffrait d’une petite toux à laquelle M. Esdaile attribua l’inefficacité de la mesmérisation ; Deeloo, pour avoir bu des spiritueux le cinquième jour ; et Ncelchul, comme ayant été incsmé-risé onze jours de suite sans résultat concluant.
« Les sept autres éprouvèrent, dans une période de une à sept séances, un profond sommeil à la suite des pratiques ci-dessÜs décrites.
« Ce sommeil différait de l’ordinaire en ce que : l*'le' dormeur ne pouvait être éveille par le plus grand vacarme; 2° la pupille était itisCnsrble à la lumière la plus vive; 3° la peau et d'autres organes sensitifs étaient absolument insensibles, dans quelques cas,aux!brûlures, piqûres, incisions, etc. 11 différait également de. celui produit pal; les narcotiques^ par 1° la promptitude avcc laquelle, dans huit en» sur dix, le malade fut éveillé à la
suite de certaines passes transversales et vèïililffases faites par le magnétiseur, qni sdlifflaitaussi sur la face et les yeux ; 2° l'état normal des prunelles et de la conjonctive, dans tous les cas, après le réteilj; l’ahsence de respiration stertoreuse, de délire subséquent on hallucination, et divers autres symptômes familiers à l’observation médicale, lesquels sont produits par les alcooliques, l’opium, le chanvre et autres drogues. Il est. juste pourtant d’ajouter que deux des patients montrèrent beaucoup de confusion et de répugnance à répondre, se plaignant d’un engourdissement qui durait quelque temps après qu’on les avait éveillés brusquement.
« Sept opérations chirurgicales furent faites dans l’état de sommeil particulier que nous venons de décrire.
« Dans le cas de Nilmoney, il n’y eut pas le plus léger indice de sensation, f/opération, qui consistait dans l’ablation d'un sarcocèlc, dura quatre minutes. Ni ses bras ni ses jambes n’étaient maintenus. 11 ne fit. aucun mouvement, ne gémit ni changea de contenance, et1 quand il fut. réveillé, il déclara n’avoir nul souvenir de ce qui s’é-(ait passé.
« Ilyder-Khan, émacié, ayant la jambe gangrenée, fut amputé de la cuisse sans qu’aucun signe décelât la douleur.
« Murali-Duss (l’opération étant très-grave) remua le corps et les bras, respira par saccades et changea d’aspect, sans pourtant que ses traits exprimassent la souffrance : aussi, éveillé, déçlara-t-il ignorer ce. qui, était advenu durant son sommeil, ,
• « La ponction d’un côté de l’un des deux càs de l’hÿ-drocèle double fut considérée comme insignifiante et non concluante, parce que l’autre côté ayant été ponctionné après le réveil, le malade n’en souffrit non plus. Cette opération d’ailleurs se fait journellement sans dou-
leurs matérielles sur un grand nombre de malades dans tous les hôpitaux.
« Dans les trois autres cas, la commission observa durant les opérations divers phénomènes qui ont besoin d'être mentionnés spécialement. Bien que les patients n’ouvrissent point les yeux, n’articulassent aucun son et n’eussent besoin d’être tenus, il y avait des mouvements vagues et convulsifs des membres supérieurs, contorsion du corps, distorsion des traits donnant à la face une bideuse expression de douleur comprimée; la respiration devint saccadée, longuement suspirieuse. 11 y avait tous les signes d’une souffrance intense, et l’aspect que devraitprésenter un muetsoumisà une opération, excepté la résistance à l’opérateur.
« Mais dans tous les cas, sans exception, les patients n’avaient ni connaissance ni souvenir de l'opération , niant avoir rôvé et n’accusant aucune douleur, jusqu’à ce qu’on eût attiré leur attention sur l’endroit opéré.
«■ Il reste à savoir si les contorsions et l’altération des traits, dans les trois cas ci-dessus mentionnés, doivent être regardées comme des preuves que les opérations occasionnaient la douleur actuelle dont ces symptômes sont l’évidence habituelle, ou si c’était simplement des mouvements instinctifs, comme les considère M. Esdaile.... Mais notre mission est de rapporter des faits et non d'empiéter sur le domaine des physiologistes et métaphysiciens.
« Le résultat général, dans la question de l’insensibilité, durant les opérations dont nous avons été témoins, est que dans trois cas il n’y a eu aucune preuve apparente de souffrance, et que, dans les trois autres, ces manifestations de douleur pendant l’opération sont annulées par l’affirmation positive des patients qu’ils n’ont rien ressenti. :> i .
* Le tableau suivant montre le fait curieux que dans
m
les trois cas où l'on no vit nulle indice de dffàleur, le pouls s’éleva notablement durant l'opération, tandis qu’il ne varia nullement dans les autres.
Etat ou pouls.
Patient». Maladies. Aient. Pendant. lininndijtcm. après. Opération*.
Nilmoiiey... Snrcocéle.......... 84 m Normal. Sans doul. appar.
• En pansant le 1-2 sept. 80 108 » » »
Dolimur. .. Snrcocclc.......... 72 7-2 » Douteux.
Jahiroodcn. Phimosis........ (XI 00 a »
Rtunchund.. Sarcocèle.......... G8 08 » »
HydcrKh.tn. Amputât, de la cuisse. 108 112 100 Sausüuul. appar.
Murali-Doss. Sarcocèle.......... 08 108 72 » t
« La commission, étant convaincue, par les exemples ci-dessus, qu’on peut rendre le sommeil magnétique assez profond pour permettre de faire les opérations les plus graves sans douleur, selon la déclaration des malades, pensa que son premier devoir, en constatant rëfücacité .des procédés de M. Esdaile, était de s'assurer de la ratio suceptibililatis à l'influence sur un grand nombre d’individus.
« En conséquence, M. Esdaile futinvité à prendre au hasard cent individus de la clinique du docteur Jackson, et à les faire mesmériser devant la commission pour faire voir combien sur ce nombre pourraient être insensibilisés : M. Esdaile s’y refusa..
« Quant à l’hémorrhagie, que M. Esdaile dit être beaucoup moindre dans les cas magnétiques que par la méthode ordinaire, trois des quatre médecins, membres de la commission, ont été d’avis qu’il n’y avait aucune différence matérielle appréciable.
« Tous lesdits commissaires, médecins, croient aussi que l’arrière-traitement des personnes ainsi opérées
n'est nullement amélioré ou la cure accélérée, quand les opérations ont été faites durant le sommeil puysé-gurique.
« A l’égard de la possibilité de faire les pansements pendant le même sommeil, sans troubler le patient, M. Esdaile y attacha beaucoup d'importance, en ce que l’absence de douleur accélérait la guérison. La commis-sion assista au pansement de quatre larges plaies de patients endormis, qui eut lieu sans douleur ; mais la douceur et le soin avec lesquels celle opération fut exécutée laissèrent supposer que les patients y avaient mis quelque complaisance.
« Daus un cas cependant, celui de r>amchund, un examen de la plaie qui consistait en deux incisions séparées, de nature essentiellement douloureuse, ayant été nécessaire, juste comme on finissait la première (ce qui avait duré un quart de minute environ et causé des con* torsio ns du corps et distorsions des traits), ils’éveilla, et en procédant à la seconde il jeta des cris de douleur et de terreur, et s’agita si fort que l’opérateur ne put continuer.
« L’incertitude du temps nécessaire pour produire l’état intense de sommeil puységurique, dans la majorité des cas, paraît très-défavorable à l’introduction générale du mestoérisme dans la pratique chirurgicale, spécialement dans les hôpitaux. Mais M. Esdaile dit positivement qu’en changeant fréquemment démagnétiseur et agissant constamment, on pourrait aisément obtenir en un jour le résultat qui, par les moyens suivis devant la commission, en a nécessité plusieurs. Dans les cas de Uyder-Khan et Murali-Dost, plusieurs mesmériseurs furent successivement employés, et le résultat nous a paru corroborer l’assertion du docteur Esdaile.
« La commission croit encore qu’un obstacle sérieux à l’application générale du procédé mesmérien existe
m
dans la résistance au sommeil, résistance que M. Esdaile reconnaît venir de la toux, de la souffrance, de l’excitation cérébrale, de la fièvre et de l'affaiblissement causé par une longue et douloureuse maladie.
« Tel est le cas de Bissonalk, qui fut renvoyé du traitement le cinquième jour, sur la demande de M. Esdaile, parce qu’il avait une petite toux habituelle que M. Esdaile déclara contrarier sa magnétisation et troubler celle des autres patients qui étaient dans la môme pièce.
« Il y avait encore d’autres considérations, non moins sérieuses, auxquelles la commission crut de son devoir de faire attention. Admettant l'existence d’an moyen naturel de produire le sommeil, il y a de fortes raisons, même dans les faits présentés à la commission, de supposer que les personnes ainsi traitées deviennent successivement de plus en plus accessibles à cette influence; il paraît que leur système nerveux est amené à un état d’impressionabilité morbide. Les cffmmissaires-méde-cins croient que ce point mérite une sérieuse attention. Si cette augmentation de sensibilité expose les patients à de nombreuses maladies nerveuses, trop de prudence ne peut être mise à en étendre la pratique aux maladies chirurgicales sans importance. Cependant ce n’est que par de longues expériences habilement pratiquées et fidèlement rapportées que l’on peut acquérir des données positives sur cette importante question.
« La commission croit devoir respectueusement exposer au gouvernement que, fortement convaincue de l’importance d’observer le plus scrupuleusement possible les faits qui lui seraient présentés, elle a cru nécessaire de s’assembler chaque matin de sept heures et demie à dix heures, durant quatorze jours consécutifs que dura l’observation des dix cas, dont trois furent sans résultat. Elle soumet aussi avec respect que les fonctions publiques dont la plupart des membres sont investis
durent subir une sérieuse interruption, parce que l’enquête à laquelle ils se livraient devait être suivie de près, avec une rigueur égale et l’extension requise pour juger les points douteux qu’ils avaient indiqués. En même temps la commission pense que le sujet exige un examen plus rigoureux et plus authentique de chaque expérience mentionnée. C’est pourquoi elle sollicite les instructions du gouvernement, afin de savoir si l’enquête sera arrêtée à ce point, e’fest-à-dire strictement limitée aux épreuves telles que les entend M. Esdaile, ou si le gouvernement désire que la commission pousse ses investigations jusqu’où elle croira devoir le faire.
«En résumé, la commission est unanimement d’avis qu’une grande gloire revient à M. Esdaile pour son zèle, son habileté et la hardiesse avec laquelle il a entrepris et poursuivi ces recherches. Sa sphère pourtant a été jusqu’ici limitée; mais la commission espère que désormais ses investigations s’étendront aussi bien h la pathologie interne qu’à l’externe, aux Européens qu’aux Indiens, et à l’élucidatiou de diverses questions qui ont été soulevées dans le cours de ce rapport. »
Nous donnerons, dans notre prochain numéro, l’arrêt du gouverneur par lequel le Nalive lfospilal fut tout entier mis à la disposition du docteur Esdaile pour y poursuivre ses recherches et démonstrations.
ÉTUDES SUR LE SOMNAMBULISME.
| X. — POYSÊGURISMF..
Huitième observation.
Voulez-vous me permettre de vous écrire une longue lettre sur ce qui s’est passé chez moi aujourd’hui? Cette lettre ne sera peut-être pas sans un certain intérêt de circonstance.
N’allez pas croire, par ces derniers npots, qu’il soit question du procès Teste, de l’assassinat Praslin ou des émeutes de la rue Saint-Honoré; il est tout simplement question de magnétisme. j i
Vous avez repris, depuis trois ou quatre jours, la publication de Joseph Balsamo ; et dans la première parlie de ce roman le magnétisme a joué un grand rôle.
Le rôle ne doit pas être moins important dans la seconde partie que dans la première. ,
L’introduction de ce nouveau moyen dramatique dans mon œuvre préoccupe bien des gens, je puis le dire sans vanité, ayant reçu une vingtaine de lettres anonymes, dont les unes me disent que si je ne crois à ce que j’écris, je suis un charlatan; et les autres, que si j’y crois je suis un imbécile.
Or, il faut que j’avoue une chose avec cette franchise qui me caractérise, c’est qu’avant aujourd’hui, à septembre 1847, je n’avais jamais vu une séance de magnétisme.
Il est jusle de dire, en revanche, que j’avais à peu près lu lout ce qui avait été écrit sur le magnétisme.
D’après ces lectures, une conviction était passée eu mon esprit, c’est que je n’avais rien fait faire à Balsamo qui n’eût été fait, ou tout au moins ne fût faisable.
Cependant, dans notre époque de doute, il me parut qn’nne seule conviction ne suffisait pas, ot qu’il en fallait deux : une conviction de fait, si l'on peut dire cela, et une conviction de droit.
J’avais déjà la conviction de droit; je résolus de rechercher la conviction de fait.
Je priai M. Marcillct de venir passer la journée à Monte-Cristo avec son somnambule Alexis.
C’est jeudi dernier,'je crois, que l’invitation avait été faite. Depuis jeudi un accident était arrivé dans la maison, qui m’eût fait désirer, si la chose eût été possible, de remettre la séance à un autre jour.
Mon pauvre Arabe Paul, que vous m’avez déjà aidé à illustrer sous le nom d’Eau de Benjoin, était tombé malade jeudi soir, et la maladie avait fait de tels progrès, qu’aujourd’hui il était sans connaissance. J’eusse donc, comme je vous le disais, désiré remettre la séance à un antre jour; malheureusement quelques amis étaient prévenus, à qui je n’eusse pas eu le temps de donner avis delà remise, et qui fussent venus inutilement à Saint-Germain. Or, aux amis qui font cinq lieues par la pluie, on doit bien quelque concession, et je leur fis celle de ne rien changer aux dispositions prises, malgré la triste préoccupation où me plongeait l’état désespéré du malade.
A deux heures, tout le monde était réuni.
La scène se passait dans uu salou, au second-
On prépara utfe table ; sur cette table on étendit un tapis ; sur ce tapis on posa deux jeux de cartes encore en-
fermés dans leur enveloppe timbrée de la régie, du papier, des crayons, des livres, etc.
M. Mareillet endormit Alexis sans faire un seul geste et par la seule puissance de sa volonté.
Le sommeil fut cinq ou sixminutes à venir. Quelques tressaillements nerveux et une légère oppression le précédèrent. Il y avait surabondance de fluide. M. Marcil-let enleva cette surabondance par plusieurs passes; le sommeil devint plus calme, et au bout d’un instant fut complet.
Alors, deux fampons de ouate furent faits et posés sur les yeux d’Alexis ; un mouchoir assura les tampons sur les yeux ; deux autres mouchoirs, posés cn sautoir et noués derrière la tête, détruisirent jusqu’à la supposition qu’il fût possible au somnambule de voir par l’organe naturel, c’est-à-dire par les yeux.
Le fauteuil où dormait le somnambule fut roulé vers une table; de l’autre côté de la table s’assit M. Bernard; une partje.d’écarté commença.
En touchant les cartes, Alexis déclara qu’il se sentait parfaitement lucide, que par conséquent on pouvait exiger de lui.tout ce qu’on voudrait. Il paraissait effectivement, au milieu de son sommeil, en proie à une vive agitation nerveuse.
Trois parties d’écarté se firent sans qu’Alexis relevât une seule fois ses caries ; constamment il les vit couchées sur la table, les retournant pour jouer et annonçant d’avance quelle carte il jouait. Pendant les trois parties il vit également dans le jeu de son adversaire, que son adversaire relevât ses cartes ouïes laissât sur la table. >
Plusieurs personnes manifestèrent le désir de voir M. Bernard céder sa place. M. Bernard se retira; M. Charles Ledru s’assit à son tour en face d'Alexis.
La lucidité allait croissant. Alexis »uooiieai^les cartes au fur et à mesure que M. Ledru les donnait.
Enfin il Wponssa le jèu en disant:
« C’est trop facile. Aulrel'tfiôse;
On prit, on livre au hasard parmi les volnnpc» posés«Mr la table,et. complètement inconnus au somnambule. C’ê*i tait un Walter Scott, traduction deLouiS Vivieil,/« Eaux de Saint-Runan.
Le somnambnlc'ronvrit au hasard, à la page 229.’;
«A quelle page voulez-vous que je lise? demanda-t-il.
_A la page 249, répondit Maquei. ' '*
_Peut-être sera-ce un peu difficile ; le caractère est
bien fin. N’importe, je vais essayer. »
Puis il prit un crayon; traça une ligne aux deux .tièrs
de la page. • '
« Jc vais lire ^cetiehanteiir, ajouta-t-ri'. 9» Ii aïolA
— Lisez, lui dit M. ¡Marc.illet. » ' ■‘
Etil lut sans hésitation, écrivant les yeux bandé«, les deux lignes suivantest !
« Nous ne nous arrêterons pas sur les difficultés inséparables^ transport. »
L’impatience fit qu’on ne lui laissa pas lire plus loin. Nous lui prîmes le livre dèamainS ; et à lapügè 240, aux deux tiers de la page, à la 35. ligne commençant un alinéa, nous lûmes exactement les mêmes paroles-que veriait d’écrire' Alexis: ilüvait lu à travers onze pages.
Maqiietfut invité à prendre le crayon, à écrire un inot et à renfermer le papier sur lequel il serait écrit âOtiÜ
double enveloppe. -Jasmob ,
Il se retira â l’écart, seul, et sans que personne sût ce qu’il devait écrire; le mot écrit et bien enfermé, i\rapporte la double enveloppe, pliée epeore en deux, au somnambule. « .enqrm
Alexis toucha l’enveloppe. . j iol n >
« C’est facile à lire, dit-il, car l’écriture. KSt ibelfcj » Alors, pfenant lo crayon à son tour, il écrivit dans Je
môme caractère, et comme s’il l’eut décalqué, le mot orgue sur la seconde enveloppe.
On tira le papier de son fourreau. Nou-seulomcntle mot orgue était écrit dessus, mais encore l’écriture de Maquet et celle d’Alexis étaient presque identiques.
Alors il me vint l’idée de lui parler du pauvre malade, et je lui demandai s’il croyait pouvoir distinguer à distance. Il me répondit qu’il se sentai t dans son jour de lucidité et qu’il ferait tout ce que je 1 ui ordonnerais de faire.
Je lui pris/lamain et lui ordonnai de voir dans la chambre de Paul.
Alors il se tourna vers un point du salon! et leva les yeux, cherchantà percer la muraille.
«Nobvil'n’estplus là, dit-il, on l’a changé déplacé. » C’était vrai; la veille on avait transporté le malade dans une autre chambre. . i
«Ah! il est ici, fit-il en s’arrêtant vers le point oil Paul se trouvait réellement.
i—Yoyez-vous? demandai-je.
— Oui, je vois. i , |
Ditçs ce quç. vous voyez., i t— Un ho,mme déjà vieux ; non, je me trompe^ j’ai cru qu’il était vieux parce qu'il est noir, pas nègre cependant, mulâtre. Je verrais mieux encore si l’on me donnait de ses cheveux.» oh
Un domestique monta et alla couper des cheveux au malade.
« Àli! dit le somnambule, on lui coupe les cheveux derrière la têle; les cheveux sont courts, noirs et crépus. »
On lui apporta les cheveux.
• Oh ! dit-il, il est très-malade, le sang se porte violemment à ses poumons, il étouffe. Oh! c’est singulier!
Qu’a-t-il donc sur la téte?Cela ressemble àambàurrelet.
— En effet, lui «lis-je, c’est une vessie pleine déglacé.
— Non, répondit-il, la glace est fondue,.iln’ya plus que de l’eau. I,e malade est atlciut d’une fièvre typhoïde.
— Croyez-vous que le médecin somnambule, M. Victor Dumels, puisse quelque chose pour lui?
— Beaucoup plus que moi ; je ne suis pas médecin.
— Croyez-vous qu’il ne soit pas trop tard de l’aller chercher demain? i/•,Ii
— Il est tard déjà, car le malade est en grand danger; mais demain il vivra encore. S’il lui arrive malheur, ccnc sera que mardi; mais s'il vit encore sept jours, il est sauvé. »
Trois femmes assistaient à la séance. • n >
J’emmenai l’une d’elle dans wne chambre séparée do salon par l’anticliamlire, et dans cette chambre,'.les portes fermées, elle écrivit quelques mots sur un morceau de papier, plia le papier, et posa une main de marbre sur le tout. Daiq Nous rentrâmes. iz**. A ,«»¡1 ■>.. -oi'I « Pouvez-vous lire ce: que madame vient d’écrire ? lui demandai-je.
— Oui, je lé crois, r
— Savez-vous ouest le papier sur lequel elle a écrit?
— Sur la cheminée ; je le «ois très-bien, il v —“Lisez alors.» : ’ i n: ni ftq •
- A« bout de quelques secondes: ;
.'«Il ya trois roots,'dit-jl.
— C’est vrai ; mais quels sont ces trois mots
Il redoubla d'efforts. 1 '-i lli.no'/I —
« Oli ! Je vois,: dit-il, je vois. »
Il prit an erpyon et écrivit: ioiiuom om li
« Impossible k lire. » «??ininn
On alla chercher le papier. C’étaient bien les tròis mots qui étaieotécritâdessus. Alexis avait io non-sdule-
ment à distance, mais a travers deux portes et une muraille.
« Pourriez-vous lire l’une des lettres qui se trouvent dans la poche de l’un ou de l’autre de tes messieurs? demanda M. Marcillet.
— Je peux tout dans ce moment-ci, je vois très-bien.
— Messieurs, uno lettre. » ,
M. Delaage tire une lettre de sa poche et la remit à Alexis.
ll l'appuya contre le creux de sou estomac.
« C'est d’un prêtre, dit-il. 1/
— C’estvrai.
— C’est de l’abbé Lacordaire. — Non. — Attendez. — Non.-»- Mais c'est de quelqu’un qui abeaucoup d’aualo-gië dans le talent avec lui. — Ah ! c'est de M. l’abbé Lamennais.
—Oui.
— « Voulez-vous que je vous en lise quelque chose? j
— Oui, lis-nous la première ligne. .
Presque sans hésitation, Alexis lut
«J’aireçii, mon U'ès-chsr aipi,;. »
On ouvrit la lettre, elle était de M. de Lamennais, et la première ligne était exactement ce qn’Alexis Venait delffàMcriheiriji -i i:j- *iqr.q9l teoüo 21107 . »768 —
« Une autre, » demanda le somnambule. •.! i„t — Esquiros tira de sa poche un papier pliéèn quatre.
« C’est la même écriture que l’autre. Ah! c'est singulier ; il y a un mot qui n’est pas de> la même ¡main. Tiens, c’est votre signature, n i . • .aup-.iüi. . -M
— Non, dit Esquiros, vous vous trompez;.: 1 n fi
— Ah! par exemple. Je lis Esquiros. Tenez,4énëa, et il me montrait le papier, ne lisez-vous pas là,,lày Esquiros? » .•¡•ni »: 'iMiiüoqml »
« Je ne pouvais pas lire, le papier était lermé^i;*-. K)
-■m .Ouvrez le papier, lut dis-je,! et voy«na. » iuj> "
Il ouvrit le papier.
Le papier contenait un laisser-passer de M. de Lamennais, et effectivement était contresigné Esquiros à l’un de ses angles. Esquiros avait oublié le contre-seing. Alexis l’avait lu.
Comme ou le voit, la lucidité était arrivée au plus haut degré.
Maquet s’appropha de lui, la main fermée.
« Pouvez-vous voir ce que j’ai dans la main? dit-il.
— Otez vos bagues, la vue de l’or me gêne. »
Maquet, sans ôter ses bagues, se retourna et passa
l’objet de la main droite dans la main gauche.
« Ah! très-bien, dit Alexis; maintenant je vois, c’est... une rosè... très-flétrie. »
Maquet venait de ramasser la rose à terre, et l’on avait marché dessus.
« Etes-vous fatigué? lui demandai-je.
— Oui, répondit-il ; mais si cependant vous deviez faire encore une expérience, je vois à merveille.
— Voulez-vous que j’aille prendre un objet dans ma chambre, et queje vous l’apporte dans une boîte î
-r—Très-bien.
— Pourrez vous voir à travers la boîte?
— Je le crois. »
J’allai dans ma chambre, seul. J’enfermai un objet dans une boîte eu carton, et je l'apportai à Alexis.
« Ah! c’est singulier, dit-il. Je vois des lettres, mais * ne puis pas lire. L’objet vient d’outre-mer ; cela a la forme d’uu médaillon, et cependant c’est une croix. Oh! que de pierres brillantes autour. Je ne puis pas dire le nom de l’objet, je ne le connais pas, mais je pourrais le deviner. »
C’était un Nishan ; ces lettres qu’Alexis ne pouvait pas lire, c'était la signature du bey de Tunis.
L’objet, comme on le voit, v,enait bien d’outre mer. Il
avait la forme d’un médaillon, et cependant c’était une croix, ört une décoration, ce qui est à peu près synonyme.
Après cette dernière expérience, Alexis était fatigué; on le réveilla.
Voilà ce qui s'est passé aujourd’hui chez moi. C’est ma réponse à toutes les questions qu’on peut me faire sur Balsamo. Je n’en connais pas de meilleure.
Alexandre Dumas.
Paris, 5 septembre 1847.
Ont signé avec moi, comme assistant à la séaooft et attestant la vérité do tout ce que je viens vous dire, MM. A. Maquet, A. Esquiros, Barryc, etc. (Presse.)
Les faits dont cette lettre est le récit ne sont pas rares; toiis les magnétiseurs les ont vérillés, car la plupart des somnambules en offrent l’exemple. Cette narration n’a pdur nous d’autre mérite que le nom de son auteur et 1’actualiié,' et nous ne l’aurions pas choisie sans les attaques de ¡'Union médicale, qui conteste à M. Dumas le savoir nécessaire pour examiner ces matières. Cette audace n’est pas étonnante de la part des hommes qui, dès lepriûfcipe, ont nié ces faits.
QucTMl. MarCillet soit heureux, il a été l’instrument d'ond œuvre qui, revêtue de la signature d’un homme âu&s/ distingué que l’anleur de Monte-Cristo, servira le ihagtf&tisme. Mais noos devons lui apprendre que semblables expériences n’offrent pas chaque jour les mêmes résultats, et qne de partout des plaintesnous arrivent sur ses fréquentes déconvenues. Ou voudrait trouver dans scs exhibitions la constance, la régularité qui s’observe dans les expériences de physique et de chimie -, mais cela ne sé peut. Le magnétisenr d’Alexis ne connaît nulle-
ment les conditions morales nécessaires; et quel que soit son désir, sa fermelé peut-être, l’insuccès sera pour lui toujours plus fréquent que la réussite. Quant à Alexis, on doit lui accorder un tribut d’hommages, car, de tous les somnambules, c’est loi qui a donné le plus constamment des preuves de clairvoyance.
VARIÉTÉS.
Lucidité spontanée. — Madame W***, épouse d’un chef d’employés de la Chambre des pairs, demeurant à Paris, rue d’Enfer, est affectée d’une si grande sensibilité nerveuse ou saturée d’une telle quantité d’élcctri-cité, qu’en temps d’orage elle est obligée de se placer sur un canapé isolé du plancher par des plateaux en Terre, pour éviter les commotions électriques qu’elle éprouve dans ces moments sans cette précaution, qui ne suffit pas toujours.
Celte dame est prise d’accès de somnambulisme à toute heure de jour ou de nuit, toutes les fois qu’elle se trouve frappée d’une émotion inattendue,, subite, saisissante, et dès lors est douée à un extrême degré du sens interne de seconde vuo. Voici deux faits qui serviront à prouver sa puissante lucidité. , . ..1 En avril 1843, M. Dèglos, imprimeur lithographe, demeurant dans lu même maison que cette dame, fut
atteint à la jambe gauche par la chute d’une persienne ■qui lui déchira profondément les chairs. La plaie, négligée, occasionna de vives douleursÆt prit un caractère si alarmant, que M. Dèglos dut recourir à la science de plusieurs médecins, dont le traitement fut. sans succès. Bientôt la gangrène survint. Il lut voir les dames de Saint-Thomas de la rue de Sèvres, donl l’expérience pratique lui inspirait une grande confiance. Ces excellentes sœurs lui appliquèrent des compresses enduites d’un onguent qui. en bien des cas, était d’une grande efficacité, mais ne produisit aucun efiet pour son rétablissement.
Il consulta ensuite ledoclemvDevilliers, rue d’Enfer, n° Cl, qui lui conseilla de se faire traiter à l'hospice de la Charité, où il se rendit au mois de juin. Après l’avoir examiné attentivement, le médecin de service lui déclara qu’il y avait urgence de procéder promptement à l’amputation du membre, la gangrène menaçant de gagner la cuisse, puis le tronc. M. Dèglos s’y refusa, rentra cheÉ lui-, et au moment où il pansait sa plaie, madame W‘** venant à entrer, fut frappée, de l’aspect «lu mal et de la tristesse du malade, encore sous l'impression de la déclaration du médecin de l’ho6pice, et tomba instantanément sous l’influence d'un- sommeijiîiirrésistible. Ses yeux se fermèrent un instant; sa tête, courbée en avant, se redressa lentement et s’inclina un peu en arrière; elle bâilla cinq ou six fois, mais d’une façon par-tiéulière semblable aux bâillements des ^cataleptiques, {tois, an bont d’un instant, elle proscrivit l’ordonnance suivante:
Cataplasmes de riz échaudé cinq minutes seulement.
Lotions fréquentes d’eau de Goulard. '
Renouveler souvent.
-•> Au bout de cent à cent vingt secondes (ou deux mi-
nutesÿ'madamc ..... rentra dans son ¡état-normal et
ne conserva aucun souvenir de ce qui lui était arrivé ni de ce qu’elle avait dit.
Deux ou trois jours après le malade éprouva un mieux sensible, au bout de huit jours il put s'appuyer sur la jambe, et fut guéri après vingt jours de ce traitement.
Le deuxième fait: la concerne personnellement. Atteinte d'une ophthalmie intense, elle avait une course à faire qui, quoique courte, dut être faite eu voilure, à cause de cette indisposition. Un accident en route l’ayant affectée de somnambulisme, elle ordonna au cocher de la conduire à une pharmacie dont elle désigna l’adresse, quoiqu’elle n’y eût jamais été et ne connût môme pas cette maison, se lit préparer une eau pour ses yeux et partit pour nese réveiller qu’en arrivant au premier but de sa sortie. En rentrant, elle fut étonnée de trouver l’eau préparée par un pharmacien à elle inconnu; mais elle comprit ce qui lui était arrivé en voyant ce qui était écrit sur la fiole. Le pharmacien, ayant reconnu qu’elle était en crise somuambulique (sans se douter qu’elle fût spontanée), en av^it expliqué l’emploi et la composition, en ajoutant ces mots : Selon la formule diclèe par une dame en élat de somnambulisme. Elle suivit la prescription et fut promptement guérie.
Comte de Fouciiécour.
Tribunaux. — Si le somnambulisme était invariable, la lucidité constante, l’application médicale en serait sans danger; mais la mobilité, la fugacité de cet état laisse toujours craindre des erreurs. 11 faut par conséquent, pour bien diriger cette crise, soumettre au contrôle scientifique les prescriptions intuitives , parfaitement connaître la dose à laquelle un médicament peut être administré sans causer d’accidents, autrement l’on s’expose à des poursuites du genre de celle qui suit.
« M. Mochez, propriétaire de l’hôtel Rubens, à Anvers, vient de mourir en quelques heures malgré la constitution la plus robuste.
« Les médecins appelés ont reconnu immédiatement qu’il avait succombé sons l’action d’un poison très-violent. Y avait-il suicide? Y avait-il crime? Voilà ce que la justice a recherché tout de suite avec activité. Ses investigations l’ont déterminée à faire arrêter une femme AV..., pratiquant le magnétisme, donnant des consultations en cette qualité, et indiquant des remèdes. Il paraît que, depuis quelque temps, M. Mochez lui avait demandé des avis, et qu’elle avait prescrit des recettes en état de somnambulisme. Un pharmacien aussi crédule que lui aurait fait l’amalgame des drogues, parmi les*-quelles figuraient des substances vénéneuses de la pire espèce, et ce serait après avoir pris de ces drogues que M. Mochez aurait succombé.
« L’autopsie a eu lieu, et l’on dit que le corps de madame Mochez, morte il y a quelques mois, sera exhumé pour en faire également l’autopsie ; il paraît qne la femme W... a traité aussi cette dame. Cettë affaire, dit le Précurseur, se complique singulièrement, et l’instruction qui se poursuit démontrera, dit-on, que bien des personnes ont encore la faiblesse, ou, pour mieux dire, la niaiserie de confier le traitement d'affections graves à des empiriques. La mort de M. Mochez est une terrible leçon pour les malades par trop crédules. »
C’est le Constitutionnel du 5 de ce mois qui donne ces détails. Il est inutile que nous en fassions ressorlir la malveillance; ceci n’est qu’une suite de l’hostilité que le magnétisme a toujours rencontrée dans la rédaclion de ce journal.
Nous écrivons pour avoir des renseignements précis sur cette affaire.
Revue des journaux. — L’Union de ta Sarthc annonce qu'Iréne a été jouée au Mans Je 19 août.
— M. Théophile Gauthier a donné dans le feuilleton de la Presse du 7 courant la description d’une scène d’extase magnétique, modifiée par la musique. C’est une belle page de plus en faveur de notre science, la profession de foi d'un homme de talent, une voix puissante qui s’ajoute à celle des Balzac, Scribe, Dumas, Karr, Janin, Sand, Soulié, Esquiros, etc. L’exiguité de nos colonnes nous interdit la reproduction de cet intéressant document, dont nous conseillons la Îecture à nos abonnés.
— Les quelques mots en faveur du magnétisme dits par le docteur Leboucher ont mis en émoi la Société ha-nemanienne. Il s’en est suivi une longue discussion rapportée dans le numéro 8 du Journal de la médecine ho-mœojHithiipic.
— Le New Orléans commércial Time du 20 juillet parle du magnétisme avec beaucoup d’imparlialité à propos de la guérison de mademoiselle V’", relatée dans notre dernier numéro, page 107. Çe journal étant très-répandu dans la population anglaise de ia Louisiane, ne peut que faire beaucoup de bien k notre cause.
Chronique. — La célèbre miss Martineauest de retour à Londres. Elle va incessamment publier le fruit de ses recherches sur le magnétisme en Egypte.
— M. Victor Idjiez, directeur de l’ancien journal belge le Magnétophile, est en ce moment à Paris.
— L’un de nos abonnés d’Edimbourg nous écrit : « Ce qui ne contribuera pas peu à dissiper ce qu’il y a de bigot dans les préjugés contre le magnétisme cn Angleterre, c’est que deux grands personnages du clergé, l’ar-chevéque de Dublin etl’évèque d’Oxford, s’y intéressent vivement depuis peu. »
— On parle de la prochaine publication d’un ouvrage intitulé : Arcanes de la vie future dévoilés, où l’existence de l’âme et ses occupations après la mort seraient prouvées par des perceptions en quelque sorte spectrales, vues par des somnambules extatiques de personnes décédées depuis longtemps. Le titre fait supposer que ce livre est analogue à celui du vénérable docteur Billot : Une exploration du monde spirituel. Nous en parlerons d’une manière plus explicite.
PETITE CORRESPONDANCE.
Paru. — ./toi* général. — La reprise de nos conférences dominicales est fixée au 3 octobre, à une heure précise. M. du Potet sc propose de continuer ses expériences de magie magnétique dont il s'est beaucoup occupé depuis la fermeture des conférences.
Rennes. — M. Mag. D***. Reçu les deux lettres et comrauniq. à la S. du M. qui vous écrira. — Continuez d’agir en évitant de froisser l'esprit relig.
Niort. — M. le marq. de S. V*“. Vu M. Gr. Nous alimenterons son désir de connaître par la vue des exp. magiques.
Tiflü. — M. P"*. Vous recevrez par l’amb. de F. votre médaille de fond, du jury mag.
Strathpeffer, — Miss. D*’*. The baron will write to yon.
P«n. — Reçu la triste nouv. ; courage ! la persécut. grandit les bom. et les choses.
Sax. — L’ami L**\ — Expédié 3 M. et 2 E.
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (de Garnay).
l’iris. —- Imprimerie d’A. RemÉ, rue de Seine, Si.
CLINIQUE MAGNÉTIQUE
A. M. LE BARON DU POTET.
Monsieur le baron,
Avant de terminer un traitement si fructueux pour moi, qu’il me soit permis d’en bénir la source et de remercier l’homme généreux qui se sacrifie avec tant de courage au bien de l’humanité. Une maladie cruelle avait brisé mon avenir, le bonheur n’était plus pour moi qu’une amère ironie; l’espérance, ce soutien de l’infortune, avait fui de mon cœur; nia vie s'échappait de mon . corps, brisé par des souffrances continuelles; mais vous êtes venu à mon secours, et dispensant en moi ce fluide vivifiant qui maîtrise la douleur, vous avez rendu le repos à mon corps en même temps que vous avez ramené le calme dans mon âme. Recevez-en, monsieur le baron, mes sincères remerciements, et afin que, d'après le bienfait, vous jugiez de la reconnaissance, permettez-moi d’esquisser à grands traits et ma maladie et ma guérison, que je considère au moins comme très-avancée.
Il est des êtres qui semblent placés sur la terre pour faire chérir la vie au reste des humains, en leur offrant le contraste de la douleur au bien-être dont ils jouissent ; je fus de ce nombre. Mon enfance se passa au milieu des milles maladies qui ne l’assiègent que trop souvent : à huit ans j’eus la fièvre cérébrale, un médecin fameux me mit à la diète la plus sévère et me condamna; un autre TOME V.—A'» 54.-25 SEPTEMBRE 18/|7. 0
médecin également célèbre me voyant mourir de faim me fit prendre des aliments; ma mère s’épuisa pour moi en soins les plus tendres, et je fus sauvé ; mais déjà mes parents remarquaient en moi cette irritabilité nerveuse qui se développa plus tard à un si haut point, et de plus des coliques incessantes firent déclarer une gastrite qui me fit souffrir pendant neuf années consécutives, gastrite suivie cependant de quelque temps de repos. Pendant ce calme mensonger je plongeais déjà dans l’avenir les regards avides de la jeunesse, et je bâtissais avec plaisir dans mes rêves l’édifice joyeux de mon existence, quand une nuit un songe affreux m'agita violemment et me laissa le matin en proie à une fièvre ardente; le frisson de l’insomnie parcourait tous mes membres, mes dents claquaient avec force, et les convulsions de ma bouche m’empêchaient de parler; en vain je voulus combattre le mal et me livrer à mes occupations journalières, je ne pus rester sur mon siège, je tombai, cl pour la première fois j’eus une crise nerveuse, une attaque d’épilepsie.
J’avais dix-huit ans; c’est l’âge où un jeune homme cherche à se créer un avenir honorable, et tout espoir me fut bientôt interdit! La maladie faisait de rapides progrès; j’abandonnai mes travaux pour jouir d’un peu de repos, et néanmoins mes crises prenaient de jour en jour des caractères plus inquiétants. Pendant les trois dernières années, à la tourmente du corps s’ajoutèrent des étouffements horribles; ma respiration, rendue extrêmement pénible, menaçait de cesser pour jamais; c’est alors que, m’agitant convulsivement, je poussais ces cris aigus que m’arrachait la douleur, et auxquels succédait le râle de l'agonie, puis mon corps tombait dans la plus complète inaction, jusqu’à ce qu’enfin je revinsse lentement à moi. A chacun de ces terribles moments je voyais la vie prête à s’enfuir avec mon dernier
souffle. Aussi, monsieur le baron, vous pensez que je dus avoir recours à la médecine; je vis plusieurs docteurs célèbres, et ma maladie allait toujours cn s’aggravant; l'un d’eux, qui traitait spécialement les maladies nerveuses, et qui mourut d’une affection de la moelle épinière, me donna ses soins pendant deux ans, eL me renvoya en me disant qu’il fallait vivre avec mon mal, plus grand encore, malgré un régime sévère et une médication suivie. Abandonné ainsi de M. Olivier d’Angers, je suivis le conseil amical de l’honnète médecin de ma famille, et j’allai passer une année à la campagne, où je cessai tout traitement. Je m’en trouvai assez bien; cependant une de mes crises, devenues du reste moins fréquentes, me tint pendant deux heures entre la vie et la mort, et fut plus forte que toutes celles qui l’avaient précédée. Ces accès me prenaient le plus souvent après le repas ; souvent aussi les contrariétés les déterminaient subitement. J’étais également incommodé par des maux de tôle, contre lesquels ne purent jamais agir efficacement les sangsues ni les saignées; ils disparurent presque entièrement à la campagne; mais j’avais toujours dans l’intervalle de mes attaques épileptiques ces mouvements des viscères que je ne puis décrire, et qui m’annonçaient le plus ordinairement une chute prochaine. Tel était l’état de ma santé quand, l’année dernière, je revins à Paris, où, comme vous le savez, je retombai en deux mois aussi mal que précédemment. Ce fut alors qu’un de mes bons parents, que vous connaissez si bien pour son cœur droit et bienfaisant, M. Simohneau, entreprit de me faire connaître la science de Mesmer, dans laquelle il avait la plus grande confiance; j’avoue que je ne la partageais pas avec lui. D’abord je ne connaissais le magnétisme que par des ouï-dire si souvent menteurs ou exagérés, et puis j’avais été traité par des mains si différentes, et avec si peu de succès, que j’avais pris mon
parti, comme me l’avait conseillé M. Olivier d'Angers; néanmoins j’allai avec M. Simonncau à vos belles conférences du dimanche, où je fus promptement convaincu de l’existence de l’agent cpie vous mettiez en jeu sur moi; car mon extrême sensibilité ne me permettait aucun doute à cet égard. A dater de ce moment je prenais dans vos leçons et dans vos ouvrages connaissance du magnétisme, lorsqu’un soir je tombai chez M. Simonncau dans une crise nerveuse; plusieurs de vos élèves étaient présents; c’était donc le moment de s’assurer do l'efficacité du magnétisme pour mon mal; un homme aussi aimable qu’intelligent, toujours prêt à faire du bien et à seconder les efforts des propagateurs de la nouvelle doctrine, M. Andrivcau. proposa de me soulager, et dirigeant ses mains sur mes membres convulsés il en calma bientôt l’agitation; l’oppression cessa aussi sous ses efforts, et je fus promptement en état de m’en retourner chez moi. Je me défie toujours des raisonnements des hommes, mais je me rends aux faits, et le magnétisme a cela de sublime, c’est qu’il parle de lui-même : aussi la semaine suivante, c’est-à-dirc dans les premiers jours de décembre, j’allai vous voir, et vous commençâtes à me
magnétiser régulièrement trois fois par semaine.
Je ne vous énumérerai pas toutes les particularités de mon traitement, le récit en serait trop long; il me suffira de vous dire qu’il forma pour moi trois périodes bien distinctes : dans la première, c’est-à-dire pendant une partie de l’hiver, la rigidité des membres était un des principaux caractères de la magnétisation ; ma sensibilité se manifestait après quelques minutes d’action par une grande agitation des différentes parties de mon corps, mais principalement des intestins, en même temps que des coliques aiguës me causaient parfois de cuisantes douleurs; il semblait que j’eusse dans le ventre un foyer fixe qui répandait autour de lui des courants de feu;
c'est ce qui vous fit juger que le siège de la maladie était au moins en grande partie dans les intestins, et depuis vous m’avez magnétisé spécialement cette partie; les effets les plus heureux s’en suivirent, car mes coliques disparurent; ma santé semblait renaître sous vos doigts, et en même temps ma sensibilité diminua. Déjà, au commencement du printemps, mes parents et mes amis constataient en moi une amélioration sensible, aucun accident ne m’était survenu depuis le commencement de mon traitement ; je n’avais plus de maux de lête, comme les années précédentes; je pouvais m’occuper sans fatigues ;i des travaux sérieux, et dès lors j’étais convaincu qu’il est un moyen universel de soulager et de guérir les hommes.
Ce fut vers le commencement d’avril que ma sensibilité diminua presque subitement; je ne vous vis plus que deux fois par semaine, et je donnai une série de phénomènes nouveaux. D’abord vous employiez un temps plus long pour m’impressionner; à ces mouvements brusques et répétés qui avaient lieu lors de mes premières magnétisations succédèrent des mouvements souples et lents; la catalepsie avait entièrement disparu. Ce fut à cette époque que vous remarquâtes chez moi les premières extases qui, allant toujours en croissant, vous donnèrent à observer des scènes si bizarres et si dignes des plus hautes réflexions. En effet, comme souvent vous me le dites, et comme purent l'observer. M. Hébert. et d’autres personne», tous mes mouvements donnaient l’expression d'une idée conçue, la joie ou la frayeur se dessinaient sur mon visage et dans mes différentes altitudes; quelquefois vous me vîtes me reculer avec effroi, souvent, au contraire, je souriais avec satisfaction, et parfois même, pressant de mes mains ma poitrine haletante, je fondais en larmes, comme ivre de joie et de bonheur. Cependant je n’étais pas somnambule; ces
expressions étaient données par une force particulière qui agissait en moi en dehors de ma volonté; j’entendais assez bien quand on parlait, mais je ne pouvais vouloir, et une demi-heure après être sorti de chez vous je me rappelais, quoique assez vaguement il est vrai, la scène dont j’avais été l’acteur, ou plutôt la machine vivante.
C'est là, je crois, une remarque intéressante; car, lorsque nous dormons, nous sommes isolés, séparés de ce qui nous environne, et si nos actions expriment parfois une pensée, notre cerveau l’a réellement conçue; en effet, si dans le cauchemar nous nous réveillons avec terreur, nous avons vu au moins l'image du poignard qui était prêt de nous frapper; mais, dans l’état que j’essaie de vous rappeler, mon esprit est encore au monde extérieur; j’entends vos paroles, quoique ne pouvant vous répondre, et, remis dans mon état habituel, je me rappelle les parties les plus étranges de mon extase; mais jamais je ne pus avoir le moindre souvenir de la force qui m’avait fait agir, des idées que j’ai exprimées tour à tour; aussi est-il pour moi hors de doute que, dans l’extase magnétique, nos actions expriment nettement des pensées, des idées que nous avons conçues, et dont nous n’avons cependant nullement la conscience; c’est là, ce me semble, une belle arme pour les spiritualistes, qui pensent que, dans certains cas, l’âme agit chez nous en dehors de ce que nous appelons notre volonté.
Ce furent, comme vous devez vous le rappeler, ces extases qui caractérisèrent si bien la dernière partie de mon traitement; car, de très-rares qu’ils étaient dans la précédente, ils devinrent dans celle-ci très-fréquents. 31a grande sensibilité, amoindrie pendant un certain temps, s’était de nouveau augmentée; je n’avais plus ni convulsions brusques, ni catalepsie, et, dans mon état normal, je n’éprouvais rien de mes douleurs passées.
Tel est, comme vous pouvez le voir, le résumé bien
succinct du traitement que vous entreprîtes avec tant de bienveillance; pendant les neuf mois que vous l’avez continué , je n’eus pas une seule de ces crises nerveuses qui m’elTrayaient à si juste, raison, et j’ai tout lieu de croire qu’elles ont à jamais disparu.
Comment, monsieur le baron, puis-je reconnaître le bien que vous m’avez fait? Mon avenir était brisé, ma vie n'était plus qu’un mal qu’il fallait prendre en patience; je n’envisageais qu’en tremblant l’avenir qui se déroulait, devant moi ; le bonheur de la famille était proscrit de mes projets; comment, en effet, aurais-je pu le goûter avec la pensée que mes enfants dussent hériter peut-être du mal de leur père? Du reste, quels projets pouvais-je faire étant moi-môme à chaque instant à deux doigts de ma perte? Mais maintenant un horizon plus vaste et plus lumineux m’entoure, et grâce à vous, monsieur le baron, je puis sans crainte en parcourir l’étendue. Recevez donc mes remerciements bien sincères, et si la Providence m’accorde un jour de jouir du bonheur domestique, permettez que mes enfants, dans les naïves actionsde grâce qu’ils adresseront au Créateur, joignent à son nom celui du bienfaiteur de leur père.
Daignez, monsieur le baron, recevoir l’assurance de ma plus haute considération.
Léon Lerolle.
Noyers, 20 septembre 1847.
A M. LE DIRECTEUR DU JOVRNAh VU MAGNETISME.
Monsieur le baron,
Les cures mentionnées dans votre excellent journal me suggèrent l’idée de vous faire part du plein succès que j’ai obtenu dans le traitement d’une ophtalmie chronique, guérie en cinq magnétisations et au moyen de
lotions d’eau magnétisée. Jusqu’à ce jour quelques personnes intimes ont eu seules connaissance du peu de bien que j’ai fait en magnétisant; néanmoins, si dans l’intérêt du magnétisme la relation de cette cure méritait une plus grande publicité, j’abandonne à votre judicieuse sagacité le soin d’en faire l’usage quelle jugera convenable.
Le 6 juillet dernier M. Lamotte, qui demeure dans mon voisinage, vint, sous la recommandation d'un de mes amis, me prier de le soumettre à un traitement magnétique. Agé de quarante-cinq ans, d’une constitution éminemment syphilitique, quoique la médecine vulgaire l’ait débarrassé à sa manière d'un virus sucé primitivement avec le lait, et contracté plus tard en d’autres circonstances, M. Lamotte, sans cause appréciable, si ce n’est une légère insolation, s’est vu pris soudainement d’une ophtalmie de l’œil droit le 2 juin de cette année.
Dès le début, l'intensité de la maladie nécessitait immédiatement les secours du médecin; il fut appelé, et hâte lui fut d’ordonuer force émissions sanguines générales et locales, vésicatoircs, pommades et collyres de toute espèce, etc.; mais, sous l'influence de ce traitement, les effets morbides ne s’amendèrent point, et les accidents consécutifs de l’inflammation sc montrèrent bienlùt dans toulc leur gravité. Enfin, tel était l’état de l’œil all'ecté, qu’il distinguait à peine le jour d’avec les ténèbres, lorsque je le soumis à un courant magnétique.
De ce moment le mal a disparu comme par enchantement; cinq magnétisations accompagnées de quelques lotions d’eau magnétisée oui suffi pour amener une guérison complète.
Agréez, monsieur le baron, etc.
Maualt.
Paris, 10 août 1847.
INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.
ATIIENÊE MAGNÉTIQUE DE LYON.
A monsieur le baron du Potel.
Notre cher professeur,
Le numéro 48 de votre journal, pages 366 et 367, émet en quelques lignes une idée à laquelle nous donnons l'assentiment le plus complet, celle d’une Société centrale de Magnétisme à laquelle se relieraient les diverses Sociétés existantes, soit en France, soit à l’étranger. L'Alliénée magnétique de Lyon vous prie donc de l'inscrire en première ligne des Sociétés qui probablement viendront bientôt se réunira celle que vous choisirez ou que vous formerez à Paris pour leur servir de centre.
En s’occupant de cette pensée et devançant peut-être les résultats à venir, Y Athénée magnétique a porté ses réflexions sur le titre à donner à cette vaste association, et, puisant encore dans l’article précité de votre journal, proposerait celui de Société magnétique de l'ilarmonie, qui précéderait celui des diverses Sociétésqui voudraient se relier à la Société centrale. Ainsi, à Lyon, nous dirions : Société magnétique de VHarmonie, Athénée de Lyon, et ainsi dans les autres localités. Cependant, nous n’attachons au titre qu’une importance très-secondaire, mais il nous semble que celui-ci nous fixerait dans une position con-
venable en nous posant comme les successeurs directs des anciennes loges de l’Harmonie qui ont rendu de si grands services au magnétisme. Mais quant à cela, nous nous en rapportons à votre sagesse, et dès à présent nous adhérons h tout ce que vous forez pour établir un centre d’action h tontes les Sociétés magnétiques, nous engageant à nous soumettre aux conditions qui seront ultérieurement déterminées pour rendre les relations du centre à la circonférence aussi fructueuses que possible, dans l'intérêt de la science et de l’humanité.
Recevez, cher professeur, l’assurance de rattachement sincère de tous vos dévoués élèves.
Le président de VAthénée magnétique de Lyon, A.-R. Guinasd.
Lyon, 14 août 1847.
JURY MAGNÉTIQUE.
L’acte de constitution dont nous avons donné le texte ( t. IV, p. 321 ) vient d’être publié il part avec le fac-similé de la médaille commémora ti ve d u premier banquet mesmérien. La ligure ci-contre avec le revers n° 1 constitue la médaille des fondateurs de l’institution; le revers n° 2 est celui des médailles qui seront offertes chaque année à titre d’encouragement et
de récompense aux magnétiseurs qui auront fait quelque chose de marquant dans l’art ou la science.
N° 2.
Le Comité invite les personnes qui s’intéressent au progrès du mesmérisme à lui signaler les magnétiseurs dont les œuvres sont susceptibles d’être encouragées ou récompensées par le jury. Les Staluts seront envoyés à ceux qui eu adresseront la demande franco au siège du jury, 12, rue d’Antin.
IIOPITAL MAGNÉTIQUK DE CALCUTTA.
A MM. J. Atkinson, président, et W.-B. O'Shaughnessy, secrétaire de la commission d’examen des expériences mes-mérigues du docteur Esdaile.
Messieurs,
Je suis chargé de vous accuser réception de votre lettre du 9 du mois dernier, parvenue avec le rapport, les minutes, procès-verbaux et divers autres documents
y relatifs, que M. le gouverneur a tous lus avec beaucoup d’iutérôt et d'attention.
Sa Seigneurie partage entièrement l’avis de la coin-mission que, quoique les investigations sur lesquelles est basé le rapport soient trop restreintes pour en tirer une conclusion définitive, relativement à l’existence de l'agent mesmérien et son applicabilité chirurgicale, cependant les résultats observés sont d’une importance suffisante pour autoriser la poursuite de l’examen. Mais Sa Seigneurie sait que les moments des commissaires sont précieux, et que, comme ils l’ont fait observer, leurs devoirs publics les empêchent de suivre toutes les expériences avec une égale rigueur, et l’extension requise pour décider les points douteux qu’ils ont indiqués.
C’est pourquoi Sa Seigneurie, ne voulant pas, sans nécessité, mettre à contribution le temps et la commodité de MM. les commissaires, les dispense de continuer, et me charge de leur témoigner sa reconnaissance. M. le président du Conseil leur exprime aussi sa satisfaction pour la manière dont ils se sont acquittés de leur mission dans cette importante question.
La publication du rapport a été ordonnée, et le gouverneur, s’associant pleinement aux remarques du président du Conseil, qu’il suffit que les faits soient reconnus pour que le mesmérisme sc répande de lui-même dans le public et parmi les gens de l’art, croit qu actuellement un encouragement plus direct de la part du gouvernement à l’introduction de la pratique magnétique serait prématuré. Mais la possibilité d'abolir la douleur des opérations a fait une telle impression sur 1 esprit de Sa Seigneurie, qu’elle croit nécessaire que le gouvernement prête à l’officier méritant et zélé par qui cet objet est venu à sa connaissance une assistance telle qu il puisse
continuer ses intéressantes recherches et expériences dans les conditions les plus favorables.
lin conséquence, Sa Seigneurie a déterminé, avec la sanction du gouvernement suprême, de mettre le docteur Esdaile à la tête d’un petit hôpital expérimental, dans une situation favorable de Calcutta, avec ordre qu’il peut, comme le recommande la commission, étendre ses investigations touchant l’applicabilité de cet allégeant à toutes les afTuclions, médicales ou chirurgicales, et aux individus de toutes classes, européens comme indigènes. M. Esdaile sera chargé d’encourager la fréquentation de son hôpital par toutes personnes respectables désirant se convaincre de la nature et de l’elTetdc ses expériences, et spécialement les médecins et savants au service de la Compagnie ou non. Sa Seigneurie nommera visiteurs des médecins de la Présidence, qui devront visiter l’hôpital de temps en temps, inspecter les procédés du docteur Esdaile, sans intervention, et à l’occasion, ou quand ils en seront chargés, en faire le rapport à l’École de médecine pour l’information du gouvernement. De ces rapports dépendra principalement l’attitude ultérieure de l’administration, et les pas qu’elle croira opportun de faire dans cette voie.
J’ai l’honneur d’être, messieurs, votre très-humble serviteur,
Fréd.-Jas. Halliday, Secrétaire du gouvernement du Bengale.
Calcutta, 14 novembre 184(i.
SOCIÉTÉ DU MES.ÌIÉKISJ1E DE PARIS.
Le plus grand obstacle à la propagation du mesmérisme en France est, sans contredit, le préjugé qui attri-
bue au diable la production des effets magnétiques. Celle vérité est d'une telle évidence qu'en Angleterre, où les croyances religieuses diffèrent, le progrès du mesmérisme a été cinq ou six fois plus rapide que dans les Étals catholiques. Cet important résultat constaté, c’est à lever cet obstacle que tous les efforts doivent tendre désormais. L’opposition médicale est vaincue de fait, mais celle du clergé est toute vivace, et nou de nature à céder à la simple démonstration. La première a bien élé réduite par l'autorité, la brutalité des fails; mais la seconde exige une autre tactique; il lui faut la persuasion, non la lulte, car ce qui détruit celle-là exaspère celle-ci. Tel est le but, trop négligé jusqu’ici à cause même de la rareté des moyens; car il faut, pour cette conquête, que chaque soldat soit versé dans les subtilités théologiques. Maintenant que la lumière magnétique a lui, c’est aux ecclésiastiques d’émanciper leurs pareils, s’ils veulent conserver le titre d’instituteurs du genre humain. Déjà plusieurs l’ont senti, et la lettre suivante est adressée dans ce but à la Société par M. l’abbé Almignagna :
Dieu csl charité, et celui qui demeure dans la charité demeure eu Dieu et Dieu eu lui.
(Epltrecadiolique de S. J«ài>, ch. iv).
Jésus-Christ, interrogé par un scribe pour savoir quel était le plus grand commandement de la loi, après avoir déclaré, dans sa réponse, que c’était l’amour de Dieu, ajouta qu’il y avait encore un second commandement semblable au premier, celui de l’amour du prochain : Vous aimerez votre prochain comme vous-même: (litiges proximumtmmiicut te ipsum (saint Math., chap. XXII).
D’après ce divin précepte, tout homme etsurtout tout chrétien, quel que soit le rang ou catégorie qu’il oc-
cupc dans l’Eglise on dans la société, est tenu an devoir sacré de la charité envers ses semblables, faits tous à l'image et ressemblance d’un même Dieu.
Pour que cet amour soit méritoire aux yeux de la Di-vinité, il faut qu’il soit agissant, c’est-à-dire qu’il ne se borne pas à des sentiments stériles, à des vœux et à de simples souhaits , mais qu’il se manifeste par des actions et par des faits, autant que cela se peut.
« Mes petits enfants, disait saint Jean aux nouveaux régénérés, en parlant de l’amour du prochain ; mes petits enfants, n’aimons pas de paroles et de langue, mais par des effets et en vérité. Filioli met, non diligamut verbo neque linguâ, sedopere etverilatc (Ep. de saint Jean, chap. III). *
Tel est l’enseignement du christianisme par rapport à l’amour du prochain. Et puisque cela est ainsi, quel trait plus sublime de charité agissante que celui de soulager ses semblables dans leurs maux et dans leurs souffrances? Jésus-Christ même nous apprend cette importante vérité dans sa touchante parabole du Samaritain, lorsqu’il nous présente cet homme charitable versant de l’huile et du vin sur les plaies du malheureux Juif, qui, tombé entre les mains sanguinaires des voleurs, fut couvert de contusions et de blessures.
Puisque des faits multipliés ont prouvé que le fluide magnétique dont Dieu enrichit l’homme à sa naissance est doué de propriétés curatives, et qu’une application sage et raisonnée de cette force médicatrice dans le traitement des maladies est un puissaDt moyen de soulager l'humanité souffrante, je ne saurais m’acquitter d’une manière plus conforme à l’esprit de l’Evangile de ce de-voircommandé par l’amour du prochain, qu’en magnétisant dans des vues de charité et en contribuant, dans les mêmes vues, à la propagation du magnétisme thérapeutique.
Telle est ma pensée, telle est ma conviction, et tels sont les sentiments que je puise dans la source divine de l’Evangile.
Conséquent dans mes principes, aussitôt initié dans les connaissances magnétiques, grâce aux leçons reçues de M. le lmron du Potet, j’ai voulu en faire une sage et rai-sonnée application sur des malades qui le désiraient ardemment. Et combien ne suis-je pas déjà récompensé des services rendus à mon prochain par le doux plaisir que mon âme éprouve en pensant au soulagement que j’ai procuré à des êtres souffrants autour de moi? Récompense qui s’accroîtra à mesure que de nouveaux bienfaits magnétiques viendront augmenter le nombre de ceux déjà opérés par la seule et simple imposition de mes mains.
Quant à la propagation du magnétisme, c’est dans ce but que je prends la plume aujourd’hui, et très heureux pour moi si je peux m’acquitter de cette seconde tâche envers mon proehain avec le même succès que je m’acquitte de la première, dont je viens de parler.
Il est vrai que je vois avec plaisir s’augmenter le nombre des magnétiseurs, mais je vois aussi avec peine la continuation de certains obstacles qui retardent les progrès du magnétisme au détriment de la pauvre humanité.
Ces obstacles sont de trois sortes: les uns sont le résultat de l’ignorance ; les autres sont motivés par des intérêts et par des besoins personnels ; et les derniers sont l’effet des préjugés religieux.
Les premiers obstacles sortent du rang de ces hommes soi-disant éclairés et progressifs, qui, pour se faire remarquer dans le monde, vont jusqu’à bouffonner le magnétisme, sans autre raison que celle de n’avoir rien lu en faveur du mesmérisme dans les ouvrages philosophiques du XVIII* siècle; mais les résultats multipliés des expériences magnétiques détromperont ces
pauvres gens et leur apprendront que ni eux ni leurs maîtres ne sont encore prêts d’arriver à l’apogée des connaissances humaines.
Quant au second genre d’obstacles, ils disparaîtront lorsque les gouvernements, éclairés par l’expérience sur l’utilité du magnétisme thérapeutique , lui assigneront nne place parmi les connaissances médicales. Le médecin. devenu pour lors magnétiseur à fortiori, avouera par des faits ce que, dans sa position actuelle, il est forcé de nier uniquement par des paroles.
Sous ce rapport, je crois que nous sommes déjà dans la voie, le gouvernement de la Grande-Bretagne en ayant pris l’initiative en établissant des hôpitaux magnétiques à Londres, à Calcutta et à Madras.
Le troisième obstacle que le magnétisme éprouve dans sa marche progressive, ce sont les préjugés religieux, obstacle le plus difficile à combattre.
Rien ne rend l’homme plus opiniâtre dans ses résolutions, rien ne (’éloigné tant de la raison et rien ne lui fait commettre autant d’imprudences, même contre sa propre vie, que les préjugés en matière de religion : l’histoire religieuse des peuples est là pour constater ce que je viens d’avancer.
Le préjugé religieux qui existe encore par rapport au magnétisme consiste en ce que l’on croit à l’intervention du dérnon dans la détermination des phénomènes magnétiques. Ce préjugé, que l’on voit aussi bien parmi les catholiques romains que parmi les protestants de toutes les communions, ainsi que parmi les schismatiqucs, est d’autant plus difficile à déraciner qu’il est partagé par un grand nombre de ministres de ces différents cultes.
Combien de personnes timorées atteintes d’affections nerveuses sont condamnées à l’incurabilité, crainte d’offenser Dieu en se soumettant à l’action du magnétisme, remède si efficace dans ce genre de maladies!
Eli bien ! moi qui m'honore du noble titre de chrétien apostolique romain, et encore plus de celui de ministre du Saint-Suaire, je vais essayer de combattre un préjugé si nuisible aux intérêts de la charité chrétienne.
Si par mes faibles eflbrls je puis y parvenir, tout en rendant grâce au Tout-Puissant, je me croirai richement récompensé par la seule pensée du bien que j’aurai pu faire à mes semblables en contribuant par ce moyen à la propagation des bienfaits du magnétisme thérapeutique ; car je ne m’occupe nullement du somnambulisme aujourd'hui. S’il en est autrement, je me serai toujours acquitté d'un de ces devoirs que l’amour du prochain m'impose, et j’aurai par là éloigné de moi cette responsabilité qu'un silence servile aurait attirée sur ma personne, sous le double rapport de chrétien et de prêLre.
Vœ mihi quia tacui.
IN’é dans le catholicisme et exerçant depuis longues années les augustes fonctions du sacerdoce catholique, je n’oserais pas révoquer en doute l’existence du démon, les Ecritures étant à cet égard très-explicites. Saint Pierre, saint Iside et saint Jean nous apprennent que les démons sont des anges prévaricateurs que Dieu a chassés du ciel et qu’il a précipités dans l’abîme ou ils sont tourmentés, et qu’il les réserve pour le jour du jugement.
Il est vrai que le nom collectif de (/¿mon reçoitdifféren-tesqualiGcalions dans les livres saints, car il y estappelé l’Esprit Malin, le Tentateur, le Leviathan, le Père du Mensonge, le Prtoce du Monde, le Prince de l’Air, le Grand Dragon, le Diable, Satan, l’Ancien Serpent, le Serpent Tortueux ; cependant toutes ces qualifications ne changent eu rien la nature de l’être qualifié.
Mais quoique l’Ecrilure nous apprenne l’existence et la nature du démon, rien dans ce livre saint ne nous force
à croire que l’homme peut avoir le démon a scs ordres pour le faire agir comme il lui plaît.
On nous parle des magiciens de Pharaon comme agissant ope demonum, pouvoir dont ils pouvaient disposer à volonté; mais à côté de ces interprètes il y en a d’autres qui pensent autrement, sans qu’ils en soient condamnés par l’Eglise.
Voici ce que nous lisons à cet égard dans un auteur très-remarquableparson orthodoxie, sa piété, ses talents etles services qu’il a rendus à lareligion,M. l’abbé du Clot :
« Lorsque Moïse fil des miracles en Egypte, il eslditque oies magiciens de Pharaon firent de même par leurs en-« chantements; ils imitèrent donc les miracles de Moïse «au point d’en imposer aux yeux des spectateurs; mais y
o eut-il réellement du surnaturel dans leurs opérations? « Nous ne sommes pas obligés de le supposer; le récit « de l’Ecrituresemble prouver le contraire ». (Bible Vengée, note XIII sur les chap. VII, VIII, IX de ¡'Exode).
En effet, si nous consultons l’Ecriture, on ne voit pas qu’il nous soit dit que les magiciens de Pharaon aient opéré leurs prodiges par le concours du démon, ope de-monum, mais par des enchantements et par des pratiques secrètes : Pcr incanlaliones œgyptiacas et arcana quœdam (Exode, chap. VII).
1° Per incantationes.
L’art d’enchanter les serpents soit par des drogues ou par quelques aulres moyens qui sont du domaine de la science, est de la plus haute antiquité ; car David dans le Ps. LVII, et Jérémie dans le chap. VIII, en parlent comme étant en usage dans l’Orient et comme une chose naturelle.
Par cet art, si connu dans l’Inde et dans l’Egypte, exercé aujourd’hui même par des hommes qui en font un métier , on appelle les serpents, on les cache dans le sein, on les habitue à plier autour du cou et du bras sans
mordre, on les habitue à faire le morl el à se tenir sur les derniers anneaux de leur queue, et on les fait danser.
Eh bien ! avec un pareil talent y a-t-il rien d’extraordinaire que les magiciens de Pharaon aient pu faire paraître au bout d’un bâton tout à coup un serpent, d’autant plus qu’ils étaient prévenus d’avance de ce qu'ils devaientfaire pour imiter Moïse?
2° Per arcana quœdam.
L’histoire nous apprend que l’Egypte possédait, du temps des Pharaons, des collèges sacerdotaux, et que Memphis, Héliopolis et Tlièbes cn étaient dotés; que dans le secret du sanctuaire les prêtres égyptiens cultivaient avec succès les sciences et les arts, que par la vaste étendue de leurs connaissances ils en imposaient aux peuples, et même aux rois ; qu’ils étaient nommés indistinctement prêtres ou magiciens, comme descendants de ces prêtres ou magiciens éthiopiens zaparugues venus d’au delà des monts delà Nubie en Egypte.
D’après ces faits historiques, je ne vois rien d’impossible que les magiciens de Pharaon aient pu imiter Moïse par des procédés naturels appris dans le secret mystérieux de leurs temples.
N'opère-t-on pas par le moyen de l’aimant, de l’électricité, du galvanisme, des encres particulières; par 1 optique , etc., des effets dont les causes sont si bien cachées que les plus grands clairvoyants sont bien embarrassés de s’en rendre raison? Pourquoi donc les magiciens de Pharaon, versés dans un grand nombre de secrets de la nature, et possédant des connaissances physiques et autres, pourquoi ces savants Egyptiens ne pouvaient-ils pas imiter Moïsejusqu’à un certain point, par des moyens naturels, sans avoir recours au démon?
Suivant l’opinion de M. l’abbé du Glot, les magiciens de Pharaon, ne voyant en Moïse qu’un ancien élève de l’école égyptienne, ne craignaient pas de rivaliser avec
lui sur des connaissances qu’eux-mêmes, ainsi que leur adversaire, avaient tous puisées d’une même source, eL ce ne fut que lorsqu’ils virent que Moïse opérait des prodiges qui étaient au-dessus des connaissances humaines qu'ils s’écrièrent : C’est ici le doigt de Dieu, digitus Dei est hic.
Lorsqu’on sait, par le chapitre VII des Actes 'des Apôtres, que Moïse avait été instruit dans toutes les sciences de l’Egypte; lorsqu'on connaît par l’histoire que ce fut chez les prêtres d’Héliopolis que le législateur hébreux lit son éducation scientifique; on voit que l’opinion du digne et savant défenseur de la religion n’est pas dépourvue de fondement.
On nous parle aussi de la pythonissc d'Endore évocant, opedemonum, les mânes du prophète Samuel; maissices interprètes voient le démon, qui, obtempérant à la voix d’une pytlionisse, fait monter le prophète ex sinuAbrahœ. il y a aussi des commentateurs de contraire avis, et qui nous disent que ce ne fut pas en vertu de l’évocation de la pytlionisse que Samuel apparut pour annoncer à Saül sa destinée, mais en vertu d’un décret de Dieu, qui voulut que son arrêt fût prononcé par le prophète dont il avait tant de fois méprisé les avertissements.
Moi, penchant pour ces derniers, je me fais ce raisonnement : Ce qui paraîtrait s’opposer à ce que Dieu se serve d’une pythonissc pour évoquer Samuel, ce serait que les pythonisses étaient en exécration aux yeux du peuple de Dieu, et que leur art était défendu parmi les Israélites.
Eh bien! Moïse avait défendu aussi aux Israélites d’é-couter les faux prophètes, quand même ils feraient des miracles, ordonnant en outre de faire mourir tout faux prophète partout où il se trouverait (Deutchap. XIII), et cependant Baal, tout faux prophète qu’il était, Dieu se servit de lui pour bénir son peuple et lui annoncer
son avenir, malgré les répugnances de Balac. (Nomb chap. XXIII).
Si donc Dieu a bien voulu se servir d’un faux prophète pour exécuter ses desseins à l’égard des Israélites, pourquoi ne voudrait-il pas se servir d’une pythonisse pour exécuter aussi ses desseins à l’égard d’un roi d’Israêl?
Ce qu’il y a de certain, c’est que, tandis que nous savons par le chapitre XXXI des Nomb. qu’une mort désastreuse fut la punition des crimes de Baal, l’Ècriturc garde silence sur la On dernière de la pythonisse d’Endore, ce qui nous ferait croire que la devineresse n’était pas aussi abominable aux yeux de Dieu que le fut le faux prophète.
Mais revenant à la pythonisse, M. l’abbé du Clot, et avec lui plusieurs autres, disent que le trouble dont cette femme fut saisie en apercevant le prophète est assez pour nous faire croire que Samuel ne lui apparut pas en vertu de l’évocation de la pythonisse, puisqu’elle fut étonnée elle- même du succès de l’évocation.
Quant à moi, je pourrais encore joindre a tout ce quia été dit sur la pythonisse d’Endore une dernière réflexion qui m’a été suggérée par le chapitre XLVI1 de l Ecclé-riastique. et qui pourrait bien trancher la question :
L’Esprit saint, qui dans le lieu cité nous présente Samuel comme le prophète chéri de Dieu : Dilectus a Domino Deo tuo Samuel propheta, après avoir fait l'éloge do son sacerdoce, de sa justice, de sa fidélité, de son courage et de son désintéressement pendant sa vie, voulant louer aussi leprophèteaprès son trépas, dit que Samuel annonça encore après sa mort à Saül la fin de sa vie, et qu’il fit entendre sa voix de la terre, prophétisant la ruine et la destruction de l’impiété des hommes : Exallavil vocem suamde terrd in prophétie delere tmpietatem gentis.
Peut-on croire que l’Esprit saint aurait loué Samuel dans son apparition et dans son arrêt contre Saül si tout cela eût été l’ouvrage du démon? Le démon mettrait-il
clans la bouche de Samuel un arrêt de mort contre son propre ouvrage, tel que l’impiété? Satan se condamnerait lui-même par la bouche d’un prophète pour le seul plaisir d’être agréable à une simple devineresse! C’est absurde, du moins suivant ma logique.
Si de PAncien-Testament nous passons au Nouveau, le chapitre VIII des Actes des Apôtres nous parle de Simon le magicien qui étonnait la Samaric par scs prodiges.
A l’égard de ce magicien, il y a des théologiens qui ne voient dans ses tours que l’ouvrage de Satan.
Mais il y en a aussi d’autres, très-orthodoxes, qui nous disent qu’on n’est pas forcé de croire à l’intervention du démon dans les prodiges par lesquels Simon étonnait la Samarie.
Moi, d’accord avec ces derniers, je me fais le suivant raisonnement : L’Écriture nous présente Simon le magicien comme exerçant l’art d’enchanter.
Or, en parlant des magiciens de Pharaon, nous avons prouvé que l’on peut exercer cet art par des moyens tout à fait naturels, et sans le secours du démon.
Donc Simon le magicien pouvait enchanter par des procédés naturels sans le secours de Salan. Donc rien ne nous force à croire que les enchantements de Simonie magicien sont l’ouvrage de Satan.
Mais je vais encore plus loin : si c’est au démon que Simon le magicien devait le pouvoir d’enchanter; si c’est par le concours du démon que Simon le magicien s’ac-quit tant de prestige parmi les Samaritains; si c’est à ces opérations diaboliques que Simon le magicien dût qu’on le regardât comme un Dieu en Samarie, comme dit le texte sacré, il est certain que Simon le magicien devait tenir beaucoup à l’alliance avec le démon. Comment se fait-il que lorsque les apôtres, se présentant en Samarie pour prêcher une religion qui détruisaitle règne du démon, une religion qui, en détruisant le règne du
démon, devait à fortiori dépouiller Simon le magicien du pouvoir si extraordinaire qu’il exerçait sur les Samaritains; une religion qui avec elle entraînait la perte de tous ces prestiges et de toute cette vénération dont Simon était entouré en Samarie, comment se fait-il que Simon le magicien, loin de mettre le moindre obstacle à l’établissement de la religion chrétienne, comme firent les prêtres juifs, les empereurs et les philosophes du paganisme, embrasse sur-le-champ la nouvelle croyance? Ne prouverait-on pas avec cela que Simon n’avait aucune alliance avec le démon? J'aime à le croire. Les hommes n'abandonnent pas tout à coup un ordre de choses qui les favorise par les prestiges, l’autorité, les honneurs et la vénération qu’ils lui offrent, pour embrasser une croyance qui non-seulement leur fait perdre tous ces avantages, mais qui flétrit encore leur aucienne conduite. Il faut ne pas connaître le cœur humain pour cn juger autrement.
Si je dois dire franchement mon opinion à l’égard des magiciens de Pharaon, ainsi que de Simon le magicien, la voilà ici : Lorsque j’ai vu par moi-même les tours extraordinaires exécutés avec autant de souplesse que d'étonnement par Robert Houdin, je ne suis pas surpris de tout ce qu’on pourrait me dire relativement aux magiciens de Pharaon et de Simon le magicien. Et, cependant, celui qui qualifierait les tours de Robert Houdin d’opérations sataniques ferait preuve de la plus crasse ignorance, et se ressentirait encore du temps de Jeanne d’Arc, de Galilée, et du marquis de Villena.
L’abbé Almignagna.
(La suite au prochain numéro.)
VARIÉTÉS.
Persécution. — Tous les amis de l'ordre et du magnétisme seront commeontètè tous les apôtres deJésus-Christ.
C’est hier, mon bien-aimé frère du Potet, que j’ai été assigné, après six heures trois quarts, pour huit heures très-précises du matin du même jour, pour comparaître devant M. le juge d’instruction du tribunal civil à L'au. Dans le moment où l’on me fît appeler j’étais en prière dans ma cellule avec mes malades, qui étaient en grand nombre ; j’ai aussitôt posé mon livre et je suis sorti pour voir celui qui demandait à me parler; j’ai trouvé un huissier, qui de suite me fit lecture des ordres dont il était porteur, et il m’eu remit uu double, ci-joint: je vous en envoie copie (I). Dès que je fus rentré dans ma
(I) Visé pour timbre de spUanUMÜx centimes à comprendre dans la liquidation des dépens.
A Pau, le 1" juin 1846, n° 93. Signé Laborie.
mandat
DE DE PAR LE ROI.
COMPARUTION.
Nous, juge ¿’instruction près le tribunal de première instance de l’arrondissement do Pau, mandons à l’huissier premier requis d'assigner le nommé (*) Laforgue, officier retraité, demeurant à Pau, pour
(*) 11 semblerait, d’aprôs celle «pression, que M. Laforgue est un aventurier inconnu à Pau, tandis que personne n’ignore sa double qualité île chef (le bataillon retraité et de chevalier de Saiut-Louis. L’huissier, au moins, lui donne la qualification de Monsieur. {Note de lu rédaction.) j
cellule, j’ai communiqué aux malades la signification que je venais de recevoir.
Me voici à la soixante-seizième année de mon âge sans que j’aie reçu d'assignation comme accusé jusqu’à ce jour. On m’accuse d’avoir exercé l’art de guérir sans diplôme de médecin nidecliirurgienjquoiqucje ne fisse rien payer aux malades, je devais néanmoins subir une punition; que la femme du plaignant était venue à trois différentes reprises chez moi, et qu’elle n’avait pas été guérie et qu’il n’était pas permis de faire courir impunément les gens quand on ne les guérissait point. Malheur aux magnétiseurs qui ne guériront pas tous les malades qui s’adressent à eux!...
Avant de me rendre chez M. le juge d’instruction, j’ai congédié tous les malades, et depuis ce moment je continue seulement à leur donner des consolations.
comparaître devant nous, en notre cabinet, le 10 septembre 18 57, à huit heures précises du matin.
Pau, en notre cabiuet, le 9 septembre 1817. Signé Fo-^emasOX.
L’an 1817, le 10 septembre, à six heures trois quarts du matin, à la requête de M. le procureur du roi près le tribunal civil do première instance séant à Pau, qui élit domicile en son parquet.
Nous, Jean Capdevicllc, huissier audiencier en la Cour royale séant à Pau, reçu et immatriculé au tribunal de première instance de la liîc ville, demeurant audit Pau, soussigné.
Avons signifié à M. Laforgue, officier retraité, demeurant cl domicilié à Pau, copie du mandat de comparution en date du 9septembre courant, signé de M. llonncmason, juge d'instruction près ledit tri-bunal. Et pour que M. Laforgue n’en ignore et qu’il ait à s'y conformer, nous lui avons délivré cette copie avec assignation à comparaître cejourd’hui 1» septembre, à huit heures précises du matin, dans le cabinet de mondit M. le juge d’instruction à Pau, dans la maison des ci-devant cordcliers.
Délivré celle copie dudit mandai de comparution et du présent audit M. Laforgue, dans son domicile à Pau, parlant en personne.
Signé Capdevielle, huissier. Coût, 1 franc.
J'attends tous les jours le frère Laporte, qui est à Dax en ce moment. Je le verrai avec plaisir.
Que tous les échecs qu’on nous fera éprouver, mon bien-aimé frère, ne diminuent point l’amour et le zèle que nous avons eus jusqu’à ce jour pour tendre nos mains secourables à l’humanité souffrante et aux malheureux.
Je persévérerai aussi comme vous dans le bien et dans la prière, malgré la malignité des méchants.
Je vous donne le baiser de paix, que je vous prie de transmettre au frère Hébert.
Je vous salue,
Laforgüe.
Pau, 11 septembre 1847.
— Les tribulations de M. Laforgue ne nous étonnent point; il est juste qu’il paie le bien qu’il fait. De quel droit soulage-t-il ceux qui souffrent? Pourquoi guérir des malheureux ?
Riches, cessez vos aumônes, vos actions sont aussi coupables : M. Laforgue doit cependant être seul condamné. Pourquoi empiète-t-il sur le domaine des médecins? Que son cœur soit sourd à la plainte, que les malheureux portent au loin leur douleur; ces misérables que la médecine a couverts de ses stygmates et remplis de ses poisons ne font plus partie de l’humanité: rien pour eux. La charité doit être bannie, et que personne n’ose se baisser pour ramasser le Samaritain. Ainsi le veut la
loi, ainsi semblent le prescrire les gens de la justice.
Retournons-nous à la barbarie? Quoi! un homme ne pourra plus tendre la main ù son frère souffrant, verser quelques gouttes de baume sur son cœur ulcéré, invoquer Dieu sur ses misères, c’est un crime? Car si ses vœux sont exaucés, malheur à lui ! Si Dieu a écouté sa prière, malheur à lui !
M. Laforgue, l’homme aux bonnes œuvres, Y homme qui
guérit sans que jamais scs mains se soient ouvertes pour en recevoir un salaire, doit se justifier, paraître devant la justice. Qu’a-t-il donc fait? Hélas! ce qu’ont fait les apôtres, ce qu’acommandé Jésus par ces paroles : «Ceux qui croiront en moi poseront les mains sur les malades, et les malades seront guéris. » Qu’a fait de plus M. Laforgue? Il croit qu’en lui existe une vertu que sa pensée porte sur les malades; il croit que l’intermédiaire de la religion est nécessaire pour cette œuvre, et chaque jour, par des aspirations, il demande à celui par qui tout vit et respire, de seconder ses vœux cl de venir a son aide pour l’accomplissement des œuvres que son cœur a conçues.
La foule accourt, elle est nombreuse et toute composée de victimes de la science. M. Laforgue doit-il fermer sa porte à ceux qui espèrent, et obéir aux prescriptions de la justice? Non, mille fois non ; il n’obéira qu’à la voix de sa conscience ; sa vie ne peut se démentir, et tant qu’il lui en restera un souffle ce sera pour les malheureux.
Les savants ne font rien de semblable, car ils ont le cœur desséché, et la justice, dans son matérialisme, ne voyant rien au delà du code des écoles, comme eux ne peut admettre un monde invisible; comme eux, rejette l'essence divine de notre être, qui, guidée par la volonté, opère des merveilles. Nous concevons la haine du médecin à la vue d'œuvres qu’il ne peut comprendre ni imiter. Les cœurs élevés sont donc bien rares, puisqu’on ne pardonne point à l’homme qui sait faire plus que nous.
On accuse M. Laforgue d’exercice illégal de la médecine, c’est une raillerie amère ; il ne se sert point de médicamen ts; ou l’accuse, on se plaint de ce qu’il se montre charitable.
Dans scs cures merveilleuses, qu’au grand jour il opère, une sorte de foi est nécessaire chez les malades. 11 demande celle qu’il possède ; c’est de cette conjonc-
lion tics âmes que résulte le travail merveilleux qui s’opère chez les êtres souffrants. Par cela même que celte disposition est nécessaire, tous ne peuvent guérir, tous ne peuvent êlre soulagés, car tous ne peuvent éprouver ces saints transports qui permettent à l'âme d’agir sur la matière.
Voici la cause des tribulations actuelles de M. Laforgue.
Une malheureuse, que la nature a délaissée, malgré froif appels de M. Laforgue, vient se plaindre de ce que la grâce n’a point opéré sur elle: sa conduite prouve bien qu’elle n’en élaitpoint digne. Celte femme s’est-elle jamais plainte des soins infructueux de la médecine ? Elle a payé pour l’aggravation de ses souffrances et demande la punition de celui qui a voulu la sauver. 11 s’est trouvé un procureur du roi pour recevoir celle plainte et pour troubler l’homme inoffensif plein de charité.
Jésus fut accusé d’avoir guéri un jour de sabbat, 011 lui fit un crime de ses pensées comme de ses œuvres divines; le juge, obéissant à la loi, se lava les mains, regrettant d’avoir prononcé une scutcncc qu’il trouvait injuste.
Ah ! si nous étions à la place de M. Laforgue, nous serions fort joyeux, et nos sombres pensées seraient chassées par ce divin rayon qui vient éclairer l’homme et le pénétrer lorsqu’il est persécuté pour des œuvres de bien.
M. Laforgue ne sera ni pendu, ni crucifié, ni même condamné; car il ne pratique pas plus la médecine qu’il n’enseigne de dogme nouveau ; partant, il n’est justiciable que de l’opinion publique, non de la justice. 11 fait ce que cherchent à faire maintenant des milliers d’êtres qui, pénétrés des vérités magnétiques, fout jaillir de leur organisation la force médiealrice que Mesmer a découverte.
La cellule de M. Laforgue continuera de recevoir les
estropiés, boiteux, sourds, aveugles, paralytiques, goutteux, rhumatisants, fiévreux-, elcetle foule d’incurables n’aurait-elle pour résultat que d’offrir un enseignement aux médecins touchant les bornes de leur art, et donner aux hommes les preuves évidentes des vérités que la science méconnaît, qu’elle serait un grand bien. Mais, quels que soient les doutes et le scepticisme, les guérisons les plus éclatantes ont lieu. M. Laforgue doit persister : les persécutions ne feront que rehausser ses vertus et lui amener des défenseurs.
Chronique. — Frédéric Soulié vient de mourir. Nous aurions voulu trouver dans cet homme, distingué à plus d’un titre, le philosophe et l’écrivain ; mais il n’avait que la dernière de ces qualités. Quand il publia son roman le Magnétiseur, le mesmérisme avait peu de partisans; c’était alorspresqu’une œuvre découragé d’avouer sa eroyance.il pouvait présenter la vérité mesmérienne grande et belle; il la üt monstrueuse et produisant le mal. Ainsi envisagée, la science nouvelle fut compromise, et M. Soulié se punit lui-même, car il ne la trouva point à son chevet quand la mort l’assiégea. La médecine que nous attaquons fut seule chargée de veiller sur lui, et il succomba à l’âge où la nature a des ressources infinies, ‘a l’époque où l’homme est assuré de vivre.
— Nos expériences de magie magnétique ont excité en Angleterre un enthousiasme général. Les lignes et surtout le miroir ont été très-diversement interprétés, et de toutes parts on nous adresse une multitude de questions auxquelles il sera prochainement répondu, car nous nous proposons de continuer le développement de nos idées sur ce sujet en rendant compte des expériences auxquelles va donner lieu la reprise de nos conférences. Nous espérons jeter quelque lumière sur celle obscurité, et ce n’est pas dans les livres du temps passé que
nous irons la puiser-, mais il faut qu’elle jaillisse des faits que nous produirons. Il faut que les phénomènes trouvent leur cause en nous-mêrue, et que le résultat de nos recherches soit le produit de ce que nous aurons tenté et exécuté. Il faut que des centaines de personnes soient témoins de nos œuvres, comme aussi les instruments de nos études.
— Nous avons la nouvelle officielle de la nomination d’un Comité d’enquête mesmérique à Madras. Ce résultat est dû aux efforts du docteur Johnslone. Nous publierons prochainement les faits qui y ont donné lieu.
— Au départ du dernier courrier, il était aussi question d’instituer à Bombay un Comité mesmériqueà l’instar de ceux de Calcutta et Madras. Les résultats magnifiques obtenus dans ces deux présidences étaient le sujet de tous les entretiens. Le magnétisme ne marche plus, il court.
Revue des journaux. — L’opinion générale de la presse politique peu à peu se transforme ; les journaux les plus hostiles à notre cause deviennent indifférents, et ceux-ci favorables. La preuve de cette vérité est dans le fait de reproduction entière de la lettre de M. Alexandre Dumas dans l’Union monarchique du 17 courant.
— Nous avons (T. IV, page 281) reproduit un article de M. le vicomte de Tascher sur l’utilité judiciaire du somnambulisme. 31. Victor Hennequin, le brillant orateur phalanstérien, qui se trouvait alors à Toulouse, dit à ce propos dans la Démocraticpacifique du 16 de ce mois :
«... Les esprits, à Toulouse, sont fort loin du calme ; la légitimistes y sont nombreux, les républicains ardents ; on s’y divise en plusieurs camps sur toutes les questions religieuses, politiques, sociales, scientifiques même ; le magnétisme animal y recrute beaucoup d’enthousiastes et autant de détracteurs. Je fus iuvité à plusieurs soi-
rées de somnambulisme; divers incidents m’empêchèrent d'y assister. Au surplus, je n’ai pas à y chercher des convictions nouvelles, et, malgré le caractère capricieux du somnambulisme, la réalité des principaux phénomènes signalés par les magnétiseurs m’est depuis longtemps démontrée.
« A Toulouse, dans plusieurs réunions adonnées aux expériences magnétiques, on a consulté des somnambules sur les auteurs de la profanation et de-l'assassinat dont Cécile Combette fut victime ; l’on avait obtenu, suivant les passions, les opinions préconçues des maguétiseurs, des résultats contradictoires. »
On se rappelle que nous différions d’avis avec l’auteur de la note précitée ; les dernières paroles de M. Henne-quin justifient pleinement nos prévisions et nos commentaires. Nous ne cessons de le répéter: la communication dépensée est une cause d’erreurs fréquentes eu somnambulisme. Très-souvent on prend pour lucidité ce qui n’est que le reflet des idées du consultant: de là nombre de déceptions.
PETITE CORHESPONDANCZ.
A tout. — Le relaril éprouvé dans l’envoi de nos derniers numéros venant de l'absence forcée de plusieurs collaborateurs, n'aura plus lieu à l'avenir.
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (de Garnay). Pari». — Imprimerie d'A. Rbüb, rue de Seine, 33.
CLINIQUE MAGNÉTIQUE.
Etat des guérisons obtenues par 1e magnétisme et l'eau magnétisée, du 1" janvier au 31 décembre 1833,/jnr M. LAbORGlE, chef de bataillon en reforme à Pau , envoyé à VAcadémie royale de médecine le !1 avril 183V, par Jf. Charonceuil, procureur i la Cour des comptes.
1. Jeannette, fille feu Rf.y, de Pau.
(Maladie d’yeux.)
2. Marie, épouse Buocsstr, de Saint-Faust.
(Dcsccnlc de matrice.)
3. Arnaud Sagardoïbubn, h. de Gan.
(Fièvres.)
■i. Jean Sartiiou, h. de Pau.
(Inflammation au bas-ventre et constipation, fièvre e( maladie des nerfs.)
5. Jeanne Mauüis, h. de Pau.
(Maladie de langueur, etc.)
0. Prosper, fils deLAtiDET, de Pau, rue Gassies. (Douleurs rhumatismales.)
7. Marie, fille Sartiiou, h. de Pau.
(Pâles couleurs, suppression de périodes, lièvre lente, migraine, palpitation de cœur, douleursdu foie, delà rate, etc.
8. Mounicat fils, deuxième né, de Pau, nie Gassies.
Ayant perdu entièrement l’usage du marcher, d'un rhunia-tisme au bas des reins, cuisses et jambes.)
tosie v. — j\° 55. — 10 or.TonnE 18!|7. 7
9. Marie, fille Bergeron, de Meillou.
(Fièvres; avec de l'eau nngnétisee seulement.)
10. Jeanne-Marie Salabbrtue, veuve Larreule, d’Ar-
tiguélouve.
(Maladie de langueur.)
11. Jean Gassiolle, d’Arliguélouve.
(Inflammalion dans les viscères.)
12. Pierre Bergerot, d’Arette.
(Douleurs rhumatismales.}
13. Bernard Domecq fils, premier né, d'Arelte.
(Inllammalion au ventre.)
1 i. Marie, veuve Claverie, de Pau, rue Gassies.
(Diari liée arrêtée par l'eau magnétisée.)
15. Clairine, fille Laudet, de Pau, rue Gassies.
(Une vieille croûte au nez, guérie avec l'eau magnétisée seulement.)
11). Fille Micoclas, h. de Pau.
(Des convulsions tr. s-forl’s et spasmes, qui n’ont cesse qu’après avoir fait usage d'eau magnétisée ; la crise a cessé de suite )|
17. Jeanne Claverie, de Pau, rue Gassies.
(Maladie d'yeux.)
18. Jeanne Hkngas, fille, de Jurançon.
(Ma adie d’yeux.)
19. Pierre Paleu, postillon, de Pau.
(Maladie d'yeux, lièvre lente, migraine permanente, insomnie sans appétit.)
20. Bernard Bénabé, charpentier, de Pau.
(Oppression de poitrine très-forte, insomnie sans appétit.)
21. Pauline Carles, fille, de Pau.
(Fièvre lente, maladie de langueur, etc.)
22. MaricDANASANS, épouse Pierre Hekgas,de Jnrançon.
(Suppression des règles, migraine, langueur, insomnie et surdité.)
23. Catherine Berge, ûlle, deuxième née, de Bosdarros.
(Inflammation île poilrinc, maladie du foie cl insomnie sans appétit, etc.)
24. Marie Prat, fdle, de I.oos.
(Fièvre lente, maladie de langueur, elc.)
25. Jeanne Hkmïas, fille, de Jurançon.
(Maladie d'yeux.)
20. Suzanne Pccueu , épouse Lapassade , d’Arligué-louve.
(Fièvre, migraine, maladie de matrice, etc.)
27. Alexis Cazaux, d’Ousse.
(Inflammation de poitrine.)
28. Denis Tiiii.le, deuxième né, de Jurançon.
(Surdité absolue depuis plus de di\ ans.)
29. Marie Duplech, épouseComon, deLallerade(Geis).
(Oh'truclion de l'oie, une fistule au dessous de l'œil droit, maladie de nerfs, sans appétit, insomnie.)
30. Bernardine Lapèze, épouse Jeau Gocis, de Lalte-
rade (Gers).
(Maladie d'yeux )
31. Bernard Baktiie, li. de Pau.
(InHaminnlion de poitrine, palpitation de cœur tendant à un anévrisme et maladie d'yeux.)
32. Marie Legrand, fille, deuxième née, d'Orlhez.
(Coliques très-fortes et maladie de nerfs.)
33. Jean Gassies, dit Hourcade, de Loos.
(Douleurs rhumatismales.)
34. Pierre Cazadx fils, d’Ousse.
(Maladie d’yeux très-compliquée.)
35. Anne, fille Rey, de Bizanos.
(Fièvres.)
36. Bergitte, fille Dadansens, de Pau.
(Maladie d’yeux.)
37. Jeanne Pascal, épouse Daniel Canton, deNarcastel.
(Maladie de femme compliquée.)
38. Jean Lapassade lils, deuxième né, d’Artiguélouve.
(Migraine cl fièvre continue.)
39. Marie-Gracieuse, fdle Larrieu, de Pau.
(Maladie d'yeux.)
40. Pierre Puyau fils, li. de Pau.
(Fièvre avec transport ei insomnie.)
41. Jean Lapassade lils, premier né, d’Artiguélouve.
(.Maladie du foie, migraine, insomnie, sans appétit.)
42. Marie Candau, épouse Bronca, tailleur, deBaringue.
(Maladie de langueur, forte palpitation de cœur.)
43. Jeannette Puyet, fille, de Casletbou.
(Epileptique.)
44. Isaac Minvielle, troisième né, de Monlestruc.
(Indainmation de poitrine.)
45. Pierre Bkoca fils, premier né, de Baringne.
(Inflammation de poitrine, fièvre lente, insomnie, sans appétit et palpitation de cœur.)
46. Jeau-Fabien Palissat lils, de Moumy.
(Fièvre continue ; avec de l'eau magnétisée seulement.)
47. Marie, épouse Jean Clouté, de Jurançon.
(I,e visage el le col couverts de croûtes.)
13. Marie Canuau, épouse Bhoca, de Baringue.
(Très-forte palpitation de cœur el maladie de nerfs.l
49. Marthe Nargassies, troisième née, de Jurançon.
(D. s croûtes aunci depuis longtemps ; l'eau magnétisée a sulh pour la guérir.)
50. Jadalie Amaré, épouse Danos, de Tarbes.
(Oppression de poilrine, toux sèche, maladie du
talion de cœur, des éblouissements a perdre connaissance
el convulsions nerveuses )
S1. Marie-Magdelaine, épouse Changé, de Pau.
(Maladie d’yeux.)
¿2. Jean-Baptisle Lapkine, deuxième né, de Pau. Ilnflammation de ; oilrinc et maladie de nerfs.)
¿3. Madame G'", née I."*, de Pau.
(Inflammatipn de poilrinc et maladie ds nerfs.)
¿4. Jeanne, (¡¡le Rey, de Bizanos.
(Fièvre lente.)
55. Marie Cavdevielle, de Bizanos.
(Migraine et palpitation de cœur continuelle.)
¿6. Anne, iille Rey, première née, de Bizanos.
(Fièvre tierce.)
57. Magdelaine Bhoca, de Baringue.
(Suppression des périodes, migraine, etc.)
58. Jacques IJagkt, meunier, de Lescar.
(Fluxion de poitrine, loux sèche et permanente, fièvre ienle, sans appétit, insomnie, deuxième degré de plithisie.)
5Ü. Victoire ,■ épouse Minvielle, troisième née, de Monlestruc.
(Maladie d’yeux, douleurs de foie, affection de nerfs.)
GO. Bernard Saukamia, d’Auzin.
(Inflammationau bas-ventre, sans appétit, insomnie et douleurs continue .)
CI. Pierre Saintciron, h. de Pau.
(Fièvre continue; l'eau magnétisée a suffi.)
02. Micliel-Henri Houneau. docteur, de Pau.
(Attaque d'apoplexie très-compliquée; guéri en quatorze jours.)
03. Jacqucs Sabatiié, deuxième né, de Motmassut.
(Douleurs rhumatismales.)
Ci. Geneviève-Gracieusc Souchet, épouse Cazkkave, de Lembeye.
(Maladie du fuie.)
C5. Jean Mouciiouret fils, premier né, de Monlcslruc.
(Maladie de langueur, fièvre lente, palpitation de cœur, migraine, affection nerveuse, insomnie, sans appétit, une faiblesse extrême.)
CG. Pierre Bkbdot fils, sixième né, d’Idron.
(Fièvre lente el migraine permanente; l’eau magnétisée a sufli pour le guérir.)
UT, Jean-Baptisle Ségot fils, de Pau.
(Inflammation au lias-ventre, palpitation de cœur, fièvre cl migraine, insomnie, sans appétit.)
08. Isabeau Bonnuiuaison, épouse Horgues, d’Angayes.
(Inflammation de poitrine, douleurs au foie, au cœur, au ventre, migraine permanente, lièvre lente, insomnie, sans appétit, toux cl grande faiblesse.)
09. Callierine Lahdiku, épouse SÉNtc, de Pau.
(Obstruction du fuie, fortes u ¡graines, affection nerveuse.)
70. Marie Trille, lillc, première née, h. de Gélos.
(Fièvre continue, insomnie, sans appétit )
71. Thérèse M'-ntauban, fille, de Pau.
(Palpitation de cœur permanente.)
72. Marie Biiival, épouse Saint-Arnous, Jacques, île
Pau.
(Migraine permanente, insomnie.)
73. Jean Sùguinoite fils, d’Artagua.
(Convulsions nerveuses à perdre connaissance, très-fréquentes, sans appétit ni sommeil.)
7i. Jeanne Dauga, veuve Lafille, h. de Pau.
(Migraine permanente, insomnie.)
75. Pierre Tisné fils, troisième né, de Pau.
(Maladie d'yeux.)
70. Jean Pon, domestique chez Cazenave, de Pau.
(Fièvre nt-rveuse et convulsions nerveuses, surdité, migraine et mal d’orcdlcs.)
77. Pauline Taton, fille, de Pau.
(Ilydropisic générale, toux continuelle, migraine, maladie du fuie, palpitation de cœur, insomnie, sans appétit, etc.
78. Marie, fille Pierre Bocrcq, deuxième née, de Ju-
rançon.
(Fièvrecontinue, migraine, insomnie, ete.)
79. Magdeleine Pkrmentier, épouse Bottv, de Jurançon.
(Maladie de langueur et maladie de nerfs.)
80. Jean Barbé, h. de Gélos.
(Inflammation au ventre, insomnie, sans appétit.)
81. Célesline, fille Pierre Pkrissou, de Jurançon.
(Maladie d’yeux et inflammation de poitrine, etc.)
82. Philippe, épouse Bkhdot, d'Idron.
(.Maladie de langueur.)
83. Jean Lauliié, premier né, cordonnier, de Pau, rue
des Cultivaleurs.
(Inflammation de poitrine, fièvre lente, insomnie, sans appétit.)
8î. Thérèse, lillc Soulé, cordonnier, de Pau, rue Royale.
(Lunatique ou épileptique.)
85. Berlrand-Louis Voiitier fils, de Pau.
(F.èvres.)
86. Marie Bordenave, fille, de Gélos.
(Glandes au cou.)
87. Jeanne Jourrb, épouse Pierre Piqcepeb, de Pau.
(Maladie d’yeux.)
88. Marie, fille Cuardies, dit Frances, d'Arbus.
(Convulsions nerveuses très-violentes.)
89. Jeanne Balade, dite Cazenavë, fille, de Buros.
(Fortes palpitations de cœur.)
90. Marie-Amélie-Alphonsine, fille Pwxtier , de Pau. (Fièvre# continue».)
91. Pierre Lacrouts, dernier né, «le Burdères.
(Mal dans le nez et au gosier.)
02. Jeanne CousrÉ-Lataii.lade, veuve Félix Segoi, «le Pau.
(Elle avait un rhume depuis plus de douze ans, et unpolypr au-dcssuus de l'œil droit, qui avait environ six lignes de diamètre.) il).
93. Marie Lacrouts, dernière née, de Bordères.
(Le nez et 1«: tour du nez couverts de croûtes. On avait mi' à cette lille six vesicatoircs.)
9 i. Marie Rocsskt, servante, de Pau.
(Rhumatisme gouteux au genou gauche.I 8ô. Marie Goyiiénêche, épouse Laffitte, de Pau.
(Panaris guéri dans deux séances.)
9fi. Magdeleine, fille Méricam, de Pau.
(Epileptique.)
97. Bernard Cassou, dit Claverie,d’Ousse.
(Fièvre lierce.)
98. Goyhenrk, chef de bataillon, de Pau.
(Rhume et mal de g: rgc violent.)
99. Pierre***, de Meillou.
(Inflammation de poitrine.)
100. Thérèse Broca, épouse Seguikotte, h. de Pau.
lUnedarlre à la paume de la main droite.)
101. Jeanne-Marie Bach, servante chez Hoirs, Jacques, de Serres-Gastel.
(Panaris.)
102. Pierre Rieupeyrous, h. de Gélos.
(Maladie de langueur, fièvre lente, sans appétit, insomnie, et'-
103. Catherine, lille Micoulajj, h. de Pau.
(Maladie de nerfs; elle mangeait des charbons cl des cendre-depuis longtemps.)
(1) Le polype est lombO eu cinquante-six jours,
lOÍ. Marie Buessolles, fille, première née, de Tarbes.
(Kpileptique; elle tombait tous les deux jours ; les crises duraient trois heures.)
105. Auguste Bressom.es fil«, dernier né, de Tarbes.
(Douleurs rhumatismales.)
106. Jeanne Caillau, lille, h. de Gélos.
(Suppression 'les règles, fièvre lente, palpitation de cœur, migraine permanente, toux continue, malaise général, insomnie, sans appétit.)
107. JeanneSassous, fille, première née, de Pau.
(Fièvre continue.)
108. Marthe, fille Séguinotte, li. de Pau.
(Des croûtes dans le nez et sous le nez depuis longtemps.)
109. Marguerite Fourcade, fille, de Pau.
(Suppression des règles, maladie de langueur.)
110. Thérèse Capdeboscq, h. de Gélos.
(Migraine permanente )
111. François Tourné, de Pau.
(Maladie de langueur depuis plus de quatre ans, fièvre lente, hydropique, insomnie, sans appétit.)
112. Marie Bouzom, fille, de Pau.
(Hydropisie générale et compliquée.)
113. Magdeleine-Euplirosine Touron, de Jtiillacq.
(Maladie de foie, lies nerfs l’estomac ne pouvant pas supporter les aliments, une tres-fortc inflammation à la gfirge, beaucoup de vents, des palpitations de cœur, n'ayant rien mangé depuis trois mois, insomnie.)
I li. Thérèse-JulieDulodm, deLenibeye.
Migraine, inflammation à la »orge, affection nerveuse, obstruction au foie, palpitation de cœur permanente, coliques très-fréquentes, le >ang très-enflammé, malaise général.)
115. Jeanne-Marie Cazkracq, épouse Fourou, de Jtiillacq.
(Iteaucoup de vents et migraine permanente.)
116. Joannès Hourticq, de Lembeye.
(Oppression de poitrine à perdre la respiration, une forte palpitation de cœur permanente.)
117. Jean-Auguste Foucques lils, premier né, de Pau,
rue du Palais.
(Fièvre lente, malaise, sans appétit, insomnie. L'eau magnétisée a suffi pour le guérir.)
118. Jean Micoulau fils, h. de Pau.
(Fièvres. L’eau magnétisée a suffi pour le guérir.)
110. Pierre Micoulau, h. de Pau.
(Fièvres. L’eau magnétisée a sufli pour le guérir.)
120. Jean Forgubs, de Pau, rue du Palais.
(Panaris au pouce de la main droite.)
121. Marie Pillard, fille, deuxième née, de Bilhère.
(Fièvre continue. L’eau magnétisée a suffi pour la guérir.)
122. Jeanne-Jeantin Minvielle, fille, première née, de
Bilhère.
(Maladie de langueur. L'eau magnétisée a sufli pour la guérir.)
123. Amélie Goyhknne, fille, quatrième née, de Pau.
(Fièvre continue.)
121. Pierre Goyuennb père, de Pau.
(Point de côté. Deux séances l’ont guéri.)
126. Louis Dat fils, premier né, élève an collège.
(Migraine, fièvre nerveuse. Il u é.é guéri dans deux jours.)
1.6. Laurent Bosdagorry, domestique, de Pau.
(Fièvre continue, insomnie, migraine.)
127. Marie Labarrère, fille, de Pau.
(Fluction très-forte. Guérie dans une séance.)
128. Pierre-Léon Cazenavh fils, de Pau.
(Maladie d'yeux.)
129. Marie Croux-Bouville, fille, deuxième née, li. de
Pau.
(Maladie des paupières )
130. Anne Cazekave, fille, première née, de Pan.
(Maladie d'yeux.)
131. Jean Saint-Pif.rrb, oncle, de Plaisance (Gers).
(Porte constipation, maladie de la vissie, rétention d’urine, coliques fréquentes, insomnie, sans appétit.)
132. Claudine Saint-Pierre, fille, de Plaisance.
(Maladie du foie, migraine et palpitation de cœur permanente.)
133. Marie Abadib, épouse Saint-Pikrre, de Plaisance.
(Migraine et douleurs dans les reins.)
131. Joseph d’Auriac, de Sauiazan (Gers).
(Fièvre lente et maladie de lauguour )
135. Marie Ori», fille, de Mont-de-Marsan.
(Migraine permanente, palpitation de cœur et maladie de langueur.)
13G. Catherine Barrère, épouse Lubet Larrouué, de Moul de Marsan.
(Obstruction du foie et maladie des femmes.)
137. Jean-Alexis IuquetTiIs, de Saiul-Faust.
(Hydrophie.)
138. Marie Singassan, fille, d’Abnos.
(Maladie de langueur et suppre-sion des règles.)
139. Marie Trii.le, dernière née, h. de Gélos.
(Fièvre continue. L’eau magnétisée a suffi.)
110. Marc-Jacques HustèüIs, h. de Gélos.
(Vomissement et coqueluche. L'eau magnétisée a sufû.)
Ml. Anne Bernadotte, fille, de Pau.
(Maladie d'yeux.)
112. Jean Loustalet, de Pau.
(F.èvrc lonle, migraine permanente, sans appétit, insomnie, giande faiblesse )
113. Honoiine-Calhcrine Cazenave, épouse Palissat, de
Motiiny.
(Inllininialion à la vessie, de violentes tranchées et très-fréquentes.)
I 14. Saura fils, d’Artiguéiouve.
(Fièvres, migraines )
115. Marguerite, fille Berdoulet, de Mazères.
(Fièvres, migraines.)
I iG. Jean I.assus, troisième né, de Serres-Mortaas.
(Rhumatisme à la cuisse droite.)
117. Jacques Larbusse fils, dit Pierrot, de Poey.
(Ficvre. L'eau magnétisée a suffi.)
118. Marie Larbussk fille, dit Pierrot, de Poey.
(Fièvre. L'eau magnétisée a suffi
119. Marie I.arrieu, épouse Bernard Cassou, h. de Pau,
chez Manerf.au.
(On avait porté le Saint-Viatique à la malade abandonnée, ne respirant qu’avec peine; le dépôt était formé; l’eau magnétisée lui fit rendre te dépôt en deux jours.)
150. Marie, fille LaCrouts, première née, de Pau.
(Pâles couleurs, perte blanche, suppression des règles, fièvre lente, migraine, insomnie, sans appétit.)
151. Marie Prat, veuve Hoürcade (57 ans), de Loos.
(Perle blanche continue, maladie de langueur, malaise général.)
152. Marie, née Ducasse, de Pau.
(Perle de sang continue. Depuis six semaines ‘elle gardait le lit ; au premier verre d’eau magnétisée la perte a cesse.)
153. Catherine, fille Boisson, de Thieste (Gers).
(Goitre ou bronchocèle.)
151. Catherine, fille Sol’birou, de l’an.
(Maladie d'yeux, îles paupières, des crofltcs dans le nez cl au-dessous ; la malade, depuis deux ans, avait des cécités par temps, de six à huit jours, par l'écoulement d’une hu meur, etc.)
155. Pascalin Bouville fils, li. de Pau.
(Hydropisie gén raie.)
156. Pierre Bidaiat fils, premier ne, de Bilhère.
(Fou.)
157. Jean-Antoine Monrepos fils, premier né, de Gélos.
(Migraine permanente cl fièvre lente.)
168. Marie Bkrgittr, épouse Monrepos, de Gélos. (Maladie de langueur.)
159. I'ascoline Forgues, fille, de Pau.
(Ilydropisie générale.)
160. Jeanne Menjoulet, fille, troisième née, de Louz.
(E-quinancie. Elle a été guérie dans deux séances et deut bouteilles d'eau.)
161. Claire, veuve Joanicou, de Louz.
(Ilydropisie. L’eau magnétisée a suOi.)
162. Marie Pierrot, épouse Pierre Plaa, h. de Pau.
(Esquinancie.)
163. Pierre-Louis Vignes fils, de Pau.
(Fièvres. L'eau magnétisée a suffi.)
164. Marie-Jeanne Canfranc, épouse Vignes, traiteur,
de Pau.
(Affection nerveuse, palpitation de cœur, migraine, venls, insomnie, sans appétit.)
165. Michel Barbé, premier né, de Jurançon.
(Rhumatisme, fièvre lente, migraine, insomnie, sans appétit.)
166. Bernard Malarpe fils, premier né, d’Assat.
. (Convulsions nerveuses.)
167. Pauline, fille Callet, de Pau.
(Maladie d'yeux.)
1 G8. Marie Lapeyre, épouse Sarra, d’Artiguélouye.
(Maladie de langueur, insomnie, sans appétit.) lf.9. Marie IIusté, première née, h. de Gélos.
(Maladie des femmes, suppression des règles.)
170. Jeanne Mür, fille, deuxième née, de Pau..
(L'nc croûte sons le nez et maladie de nerfs.)
(71. Suzanne Sbrgés, fille, de Pau.
(Indammalion de poitrine et du vcnlre, palpitation de cœur, insomnie, sans appétit.)
172. Pierre Labat, de Saint-Faust.
(Maladie d'jeux et de paupières.)
173. Jeanne Lafayk, veuve Chaules, de Pau.
(Le ventre couvert de croûtes, les cuisses, les janbes et les ¡lieds très-enflés, une démangeaison co .linue dans le- parties affectées, ne pouvant marcher qu’avec grande peine, insomnie.)
174. Anselme Saiiua fils, d’Artiguélouve.
(Fièvre lente continue.)
175. Guillaume Bory fils, de Lasseube.
(Cinq vieux ulcères à la cuisse droite.)
17C. Marie Recueu, fille, dernière née, Bos d’Arros.
(Migraine permanente, lièvre lente, palpitation de cœur, insomnie, sans appétit, malaise général.)
177. Marie Goua, fille, troisième née, de Gan, h Pau.
(Flueurs blanches continues, suppression dos périodes depuis six mois, fièvre continue, des douleurs très-aiguüs dans tous les viscères, point de sommeil.)
178. Marie Nougué, épouse cTArricac, de Bilhère.
(Coliques très-frcqucntes cl maladie de langueur )
179. Suzanue-Clémenee Lefèvre, fille, de Pau.
(Ilydropisie, les cuisses et les jambes paralysées, ayant entièrement perdu l’usage de marcher.)
180. François d’ARRtCAU fils, premier né, de Bilhère.
(Inilammation de poitrine et du bas-ventre.)
181. Jean Larroudk, h. de Gau.
(Epileptique.)
182. Magdelaine Tailleurrt, fille, de Pau. (Fièvres. Guéri« avec de l'eau magnétisée.)
183. Marie Prat, veuve Hourcade (57 ans), de Loos.
(Fluéurs blanches qui avaient mis la malade dans un accablement général.)
184. Catherine-Jeannc Laborde, fille, de Pau.
(Maladie d’yeux.)
185. Marie, épouse Lalanne, de Bilhère.
(.Maladie des femmes trcs-compliquée.)
186. Jean-François Days, de Pau.
(Maladie de langueur; le malade avait perdu l’usage de ses membres.)
187. Pierre Lartigue fils, d’Ydron.
(Fièvre cont nue. L'eau magnétisée a suffi.)
188. Jeanne Lartigue fille, d’Ydron.
(Fièvre continue. L’eau magnétisée a suffi.)
189. Marie Taillefer, épouse Lassus, de Bordères.
(Maladie d'yeux.)
190. Jeanne-Patiline Lalanne, d'Arbus.
(Elle avait perdu le lait, après ses couches, depuis plus de dix jours; son sein étaii ulcéré; l'usage de l'eau magnétisée a fait revenir le lait dans six jours.)
191. Jeanne d’ARJUiiD-CASSou, fille, de Lous.
(Perte continue depuis plusieurs jours; l’eau magnétisée l'a arrêtée et guérie de suite.)
192. Marie Passabat, épouse Seguinotte, de Boulignou.
(Mauvaise circulation, affection des nerfs )
193. Jeanne Bensibf.t, fille, troisième née, de Jurançon.
(Ayant les cuisses et les jambes paralysées depuis plus de dix ans, cl gardant toujours le lit. Cette lille a été guérie après huit mois; elle a repris ses travaux ordinaires.)
19i. Marie Barbe, épouse Jean Caussadb, h. de Gélos.
(Maladie de langueur, malaise général, sans appétit, insomnie.)
195. Jean Caussade, dit Laborde fils, neuvième né, h.
de Gélos.
(Convulsions nerveuses, insomnie, etc.)
190. Jeanne Cray, veuve Laprune, de Pau.
(Une forte contusion ü la u-tc, aux bra et aux genoux à la suite d'une chute qu’elle (it dans ta rue.)
Guérison d'animaux.
1. Pierre Tabarlet, dit Pbré, deSiros.
(La plus belle de ses vaches était depuis quelques jours sur la litière, prise des jambes de derrière; l'eau et une séance ont sufli pour la guérir.)
2. Bernard Mai.arpk, d’Assat.
(Une de ses vaches perdait du sang depuis qu'elle avait mis bas; les mamelles donnaient du sang au lieu de lait; dans deux jours elle a été guérie.)
3. Isaae Srgassies, d’Assat.
(Une de ses vaches tombait souvent comme les épileptiques ; elle .a été également guérie.)
4. Pierre Gassiot, dit Bordenave, h. de Gélos.
(Une génisse avait maigri beaucoup, elle était couverte de poux ; douze heures après avoir bu de l’eau magnétisée elle rendit une quantité de vers extraordinaire. Guérie.)
5. Ségpinotte neveu, de Pau.
(Une de scs vaches était sur la litière depuis deux jours; elle était prise des jambes de derrière; elle a été guérie dans une séance.)
6. Bsllocq, cultivateur, de Pau.
(Une de ses vaches était sur la litière depuis deux jours; elle était prise des jambes de derrière ; elle a été guérie dans une séance.)
Collationné conforme ;
Laforgue.
ÉTUDES SUR LE SOMNAMBULISME.
§ X. — PUYSÉGIIUSME.
Neuvième observation.
On lil dans le Manchester Guardian de la semaine dernière, sous le titre demi-plaisant de Moyen de faire trois Lind avec une seule, ou Magie du mesmérisme, méthode à l’usage des directeurs de thèûirc, la relation suivante d’un fait de somnambulisme qui ne manque ni d’intérêt ni d’originalité :
« Tous ceux qui ont vu, dans la Somnambula, Jenny Lind remplir le rôle ù’Aninu se rappelleront avec bonheur son admirable jeu et le caractère de cette représentation.
' « M. Braid, chirurgien, dont les découvertes en hypnotisme sont bien connues, ayant invité la belle imitatrice d’une somnambule à être témoin de quelques actes anormaux exécutés par une somnambule véritable, artificiellement plongée dans cet état extraordinaire ; l’on convint qu’une séance à laquelle »’assisteraient que mademoiselle Lind et ses amis, M. Braid et sa famille, aurait lieu vendredi soir. La réunion se fit vers minuit, et les expériences durèrent une heure environ. Les sujets étaient deux jeunes filles: l’aînée, qui est la plus curieuse, peut avoir dix-neuf ans. Elle est employée dans un magasin; elle a de l’esprit naturel, de bons talents, une grande énergie, mais peu d’éducation. Mademoi-
selle lind, après avoir sévèrement éprouvé son imitation phonique, car telle est simplement la faculté qu’elle possède magnétisée, manifesta son étonnement en même temps que sa satisfai tion de ce remarquable développement d’une faculté totalement latente à l’état de veille.
« L’un des assistants nous rapporte ainsi la scène.
« M Braid endormit simultanément les deux jeunes « filles en leur faisant regarder son lancetier, à petite «dislance. M. Braid s’assit ensuite au piano, qui était « passablement éloigné des dormeuses, et aussitôt qu’il
o en toucha elles se levèrent, s’approchèrent de lui et s'y «joignirent en chantant un trio. M. Braid alors éveilla « la plus jeune, et annonça que l’autre était dans l’état « qui lui permet de suivre correctement un chant quel-« conque, et dans quelque langue que ce soit. C’étail dire « qu'elle pouvait imiter la musique et les paroles, assez « rapidement pour accompagner le chanteur aussi exac-« lement que si elle avait l’habitude de chanter avec lui. « Cette promesse était exagérée, et le regard d’incrédu-« lité était manifeste chez tous les assistants, excepté « chez M. Braid, qui, très-calme, provoqua hardiment à « l’essai quelqu'un de l’assemblée, homme ou femme. « C’est pourquoi un gentleman s’assit au piano et exécuta, « en chantant, un morceau allemand que la somnambule «imita très-exaciement. Un autre gentilhomme ensuite « essaya avec un chant suédois, dans lequel elle réussit « non moins merveilleusement.
«Mademoiselle Lind, qui s’est acquise de si beaux «lauriers en imitant une somnambule, s’assit alors pour « éprouver la somnambule véritable. Toute son attention « était portée à atteindre les notes du rossignol suédois « et à peser sa rivale dans ce nouveau dno. Jenny chanta « divinement en suédois, je crois, un air lent, comme « un hymne dont toutes les notes et paroles étaient cor-
« rcctement données par la somnambule, absolument # comme si elles avaient coutume de chanter ensemble.
« Vint ensuite une leçon de clnnt, longue et très-diffi-« cile, dans laquelle mademoiselle Lind traversa toutes « les difficultés chromatiques que sa fertile imaginalion
i lui pouvait dicter, avec toutes les inflexions de force «et de sentiment dont la voix humaine paraît snscepti-« ble; mais, au grand étonnement de tous, la somnambule « ne fut point dépassée; l’accord de leurs voix était si « parfait, que durant une grande partie de l’exéculion il « était impossible de distinguer qu’il y en avait deux. « J'ai vu une dame qui était si sceptique à cet égard, « qu’elle ne voulut pas croire jusqu’à ce qu’elle eût vu «que deux voix étaient activement engagées dans cet « harmonieux débat.
«Ensuite mademoiselle Lind l’éprouva avec: « Casla « Diva » et « La bclla a me ritorni » dans lesquels ma « connaissance de l’italien me permet de dire que l’imi-« tation était parfaite.
« Après quelques autres épreuves aveedes motsélran-« gers d’une prononciation extrêmement difficile ou des «combinaisons de sons embarrassantes, on éveilla cette «jeune fille, ignorant complètement les faits extraordi-« naires qu’elle avaitaccomplis dans son sommeil, et n’o-«sant pas même essayer d'imiter ce qu’elle avait fait «avec tant de promptitude et de précision étant ma-« gnétisée.
a Lorsque JennyLind eut fini, M. Braid endormit les « deux sujets pour montrer ce qu’il appelle double con-« science, ou faculté de se'rappeler, endormi, cc qui s’est « passé dans le sommeil précédent, bien qu’on n’en ait «point eu connaissance durant la veille intermédiaire. « La patiente ne comprit point en effet la signiâcation « des mots étrangers qu’elle prononçait si bien, mais « cette seule imitation de prononciation était suffisam-
. ment étonnante de la part d’une fille aussi pauvrement « instruite.
« M. Braid présenta ce phénomène comme le résul-. tat d’une exaltation fonlionnelle des sens et d’une eon-« centration de l’attention de la somnambule sur ce « qu'elle faisait avec une entière confiance en scs pro-a près facultés. »
INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.
SOCIÉTÉ DU .MAGNÉTISME DE LA NOUV.-OHLÉANS.
Nous avons publié dernièrement les Statuts de cette active Société. Voici quelques détails sur ses travaux, qui nous sont fournis par M. J. Barthet.
.... La Société du Mesmérisme va bien; nos efforts tendent à vous imiter. Nuus faisons un cours àl usage de ceux qui ne savent pas magnétiser ; ccci est pour le public, gratuit conséquemment, comme tout ce que nous faisons, du reste. Nombre de malades demandent notre secours, et nous n’y pourrions suffire -, c'est pourquoi nous demandons qu’on nous envoie un parent, un ami, un voisin, et nous lui enseignons le peu que nous savons. Enfin nous faisons de notre mieux pour fournir notre contingenta l’édifice magnétique.
« Dans quelques cas, le magnétisme a été conseillé par les médecins -, mais vous devinez qu’alors seulement 1 af-
fection était très-grave ou le malade fort pauvre... L influence de ces messieurs est. toujours grande dans les familles; mais ils perdent un puissant auxiliaire dans le clergé... Dieu veuille que ce soit pour le mieux. •
Les fonctionnaires élus pour l’exercice 1847-48 sont :
MM. J. Bartiiet.président;
F. Dcjay, vice-président ;
J. Mathieu, secrétaire;
H. PEYRAT, trésorier;
F.-J. Leliévre, bUd.-archiviste.
L'Echo National, journal français de la localité, publie dans ses numéros des 15 et 18 juillet la relation abrégée du traitement magnétique de la demoiselle dont parle M. Barthet (Voy. page 107). Le même journal nous apprend quelle se nomme Vignaud, elle médecin qui conseilla de la magnétiser, Bancé. Ce récit est suivi des considérations ci-après, auxquelles nous nous associons pleinement:
« De tels faits ne sauraient avoir trop de retentissement. Mais pourquoi n’essaic.-t-on pas plus souvent de ce moyen énergique, mais naturel, qui ne peut jamais faire du mal, quand du moins on en étudie les procédés? Pourquoi surtout ne pas l’employer? Car, si dans les cas extrêmes, alors que les organes sont usés autant par les remèdes peut-être que par la maladie, le magnétisme est encore souverain quelquefois, quelle ne serait pas son efficacité lorsque les maladies ne font que commencer!...
a Nous savons bien que le magnétisme est encore l’objet de vives controverses; mais enfin l’Académie de Médecine de Paris l’adopta il y a seize ans; plus tard. M. FiIlassier, alors élève en médecine, soutint sa thèse inaugurale sur le magnétisme, et les savants médecins
qui l'examinaient ne lui refusèrent pas le bonnet doctoral !...
ail a paru, et il se publie Ions les jours, une foule d’ouvrages sur celle parlie encore si peu explorée de la science, et beaucoup sont écrits par des médecins. Pourquoi ne les lit-on pas? Pourquoi les médecins ne cherchent-ils pas plus souvent dans le magnétisme un puissant auxiliaire à leur art?.... Hâtons-nous de «lire que nous eu connaissons plusieurs |ui ne dédaignent pas entièrement ce moyen, malgré l'opposition de beaucoup de leurs confrères. Honneur à ceux-là! S’ils onl assez d’indépendance de caractère pour sacrifier quelquefois leur science à leur conscience, leurs malades s’en trouvent mieux, et le public, tôt ou tard, leur en tiendra compte. L’homme sage ne repousse aucune idée sans examen, parce qu’il y a du bon partout : il y en a dans la méde-cineordinaire, il y eu a aussi dans l’homœopalhie, il y en a enfin dans le magnétisme. Nous applaudissons donc à la formation de ces sociétés qui ont pour objet l’étude de cette science encore peu comprise, car nous aimons beaucoup cette devise de M. du Potet, ce fervent apôtre du mesmérisme:
« La Vérité n'importe par quelle bouche; le Bien n'importe par quelles mains.«
D’antre part on lit dans VAbeille de la Nouvelle-Orléans du 16 juillet l’article suivant, qui prouve que la presse américaine est favorable à nos idées. De tels auxiliaires assurent le triomphe du mesmérisme dans ce pays :
« Depuis quelque temps nous entendons souvent parler de guérisons ducs au magnétisme ou au somnambulisme, et nous nous proposons d’en entrelenir quelquefois nos lecleurs, lorsque, du moins, il n’y aura pas d’indiscrétion.
« Lundi dernier, à la Société du Magnétisme, il fut donné lecture d’un rapport de traitement. Celui qui en
faisait le sujet avait été invité à assister à la séance, et il attesta, devant une cinquantaine de membres ou visiteurs l'exactitude de l’exposé dont nous avons fait le résumé qui suit :
« M. Chaufleux, âgé de quarante-huit ans, armurier k l'arsenal, travaillait de l’autre bord du fleuve il y a huit ans, lorsqu’il prit un coup d’air en passant le Ferry. Sa transpiration arrêtée donna suite à nne irritation des intestins, qui dégénéra bientôt en un llux dyssentérique. La médecine le combattit, et elle avait réussi à le faire disparaître, lorsque le malade fut surpris par la fièvre jaune. Le désordre intestinal reparut, et continua depuis lors pendant fort longtemps : il fut accompagné de té-nesme l’espace de trois mois. Un des médecins les plus distingués de cette ville lui donna ses soins pendant cinq ans, et la maladie présenta une suite d’alternatives d’amélioration et de rechute; mais enfin la situation du malade empirait. Celui-ci pensait n’avoir plus « quatre jours à vivre, » lorsqu’on eut recours à un empirique : son moyen de traitement fut une tisane et un purgatif dont, il se réserva le secret. Celle médication fut suivie l’espace de six mois, et le malade allait beaucoup mieux, lorsque le traitement dût être interrompu par une maladie de l'empirique même. Reprise plus tard, cette médication n’eut plus aucun succès, et la mabidic fit des progrès incessants. Le malade ne marchait plus qu’avec une peine extrême, courbé sur son bâton, et son estomac n’admettait plus rien. .
o l.e malade compte qu’il avait pris une quantité considérable de remèdes dûs à la médecine classique ou aux commères; il avait même fait usage de la drogue de Le Roy, et la méthode Raspail avait été employée en dernier lieu, non sans quelque soulagement, mais le mal reparaissait bientôt.
« Le 28 mars dernier, le malade recourut à la Faculté
Somnambuliqne. Le somnambule prescrivit un traitement tout médical, mais assez simple, qu’il modifia dans les quatre séances à jour lixe, et les quelques séances d’occasion qu'il lui donna depuis cette époque jusqu’au 9 juin. A cette dernière il dit que le malade était guéri, et en ell'et, M. Chaufleux se trouve fort bien : il se tient fort droit, se sent gêné, dit-il, quand il prend la position voùlée où le tenait sa maladie; et il croit qu’il a été l’objet d’une cure remarquable autant qu’inespérée, ce dont il aime à témoigner, pensant que cela pourra être utile à d’autres malades. »
CONFÉRENCES DOMINICALES.
Magie.
Si vous avez lu les Ecritures; si vous avez médité sur l’histoire religieuse de tous les peuples; si vous vous êtes pénétré de la réalité des phénomènes qui servirent de base à toutes les croyances; si vous avez écouté en vous le jeu singulier des passions; si votre Ame émue a fait vibrer vos chairs et secoué votre cerveau; si, repassant dans votre esprit les pressentiments de votre jeune âge , vous vous rappelez les émotions que vous avez pu causer par votre approche à des êtres qui ne pouvaient deviner l’état de votre âme ni les pensées qui vous agitaient, vous étiez sur le point de découvrir la force secrète que Dieu a mise dans tous les êtres et qui s’est manifestée dans tous les siècles par des œuvres magiques.
Qui que vous soyiez, chrétien ou musulman, juif ou idolâtre, vous avez la force qui commande k la chair;
vous n’avez plus besoin que de la volonté, et la loi qui préside au développement des faits miraculeux peut se dévoilai’ à vos yeux.
Les barrières opposées par des préjugés ou de vaines croyances, vous pouvez les briser; et, franchissant la distance qui vous sépare des esprits, entrer en communication avec eux.
Ne vous arrêtez point aux impossibilités qu’a su trouver la science. Méprisez ces vains sermons de prêtres ignorants; ils n’ont rien compris aux Ecritures; le sens caché cri est resté voilé pour leurs faibles yeux. Une science grande, noble et venant de Dieu, est répandue sur toute la nature, car Dieu a dit à l’homme :
« Tu es mon lils et lu participeras de mes œuvres. Tu « pourras tout soumettre à la force de Ion esprit; et, « m’imitant de loin, créer des choses a mon image. »
Mais l’homme n’a pas compris, ou plutôt il a oublié les paroles du maître; et sa volonté, paralysée par 1 i-gnorance, est restée stérile. Aussi, tout est mort auprès de lui; aucune voix ne se fait entendre à ses oreilles; il vit au milieu de merveilles sans les comprendre; il a rompu le lien qui l’unissait à la création ; il est étranger dans un domaine qui fut fait pour lui.
Nous allons réveiller aujourd’hui les esprits engourdis. Il faut que l’antique magie revoie le jour par nos efforts. Il ne sera pas dit qu'une vérité profonde doit à jamais demeurer enfouie parce qu’elle déplaît à 1 ignorance et choque les hommes qu’on appelle distingués. Rien n’avance en ce monde que par le combat; nous trouverons des contradicteurs, mais nous espérons u être point seul dans la lutte. On n’assassine plus aujourd’hui les novateurs; on ne leur crève mêuie pas les yeux comme autrefois, le couteau sacré.est remis dans le fourreau pour ne plus en sortir; les bûchers sont éteints, tout est donc favorable à nos projets. La magie revivra,
car elle fut une science profonde , elle part d'une vérité inconteslable, comme nous le prouverons dans de prochains articles et par de nombreux faits.
VARIÉTÉS.
Propagande. — C’est merveille de voir comme soudain l’opinion d’un sceptique se transforme au contacL des faits. Tel incrédule aujourd’hui sera demain converti s’il assiste à une démonstration bien faite. Souvent même ces Thomas deviennent les plus zélés magnétiseurs ; les conversions de ce genre ne sont pas rares; mais quand elles concernent des hommes instruits elles méritent une mention spéciale ; c’est it ce titre que nous publions ce qui suit :
Etrt-rou» tellement étranger que vous igiioriri les choses merveilleuses qui vïeuneulde se passer dans Jérusalem?
(EviiteiLi.)
Ainsi, deux voyageurs dans leur simple éloquence Parlaient à ¡’inconnu, qui feignait l’ignorance,
Et suivait avec eux le chemin d Ëmmaüs,
Des miracles frappants qu'accomplissait Jésus....
Miracles imprimés dans toutes les mémoires,
Débattus, avérés, et tellement notoires,
Que, pour les ignorer, il eût été besoin Ou d être anachorète, on venir de bien loin.
Ainsi, tout récemment, apostrophait do même Un esprit convaincu, d'une clarté suprême.
A peu près en ces mois un professeur surpris D'etre pendant longtemps resté Welcbeà Paris :
« Etes-vous de si loin, ou d'un tel bcolisme,
« Que vous ne connaissez encor le magnétisme? a Ses progrès étonnants et les faits merveilleux « Qu'il opère üu grand jour et montre à tous les yeux?
« line telle ignorance en vous vraiment m’attriste 1 « C'est un fait, croyez-le, le magnétisme existe.
« lii ntùl des fai s pa ents dans leur sévérité « Viendront vous en prouver toute la vérité.
« Scs disciples nombreux, croyants' et pleins de zèle,
« De Ci tte vérité forment un corps II èlc « Qui, purgés des erreurs dont ils étaient imbus,
« L explique, ta propage, en combat les abus. »
Trevet d’AliiiermOi't.
Cctle courte, mais énergique apostrophe, piqua l’arnour-propre, éveilla la curiosité de noire incrédule ; il assistait à la dernière séance de la Société du Mesmérisme, d'où il est sorti à jamais convaincu et promettant de servir désormais une cause qu'il avait jusqu’alors dédaignée.
Enseignement. — On ne parvient à la science du magnétisme que par l’étude de ses principes et procédés; ne les point connaître, c’est s’exposer à des tentatives inutiles et perdre son temps dans de vaines applications. C’est pourquoi M. du Potet va ouvrir un cours élémentaire. Les personnes qui désirent le suivre peuvent se faire inscrire au bureau du journal. La durée est de 10 leçons ; le prix 25 francs.
Chronique. — M. l’abbé Bourgade, aumônier de la chapelle Saint-Louis k Tunis, était dernièrement à Paris. 11 s’y est beaucoup occupé de somnambulisme au point de vuç médical.
— 11 parait que le choléra exerce ses ravages dans le midi de la Russie. Trois médecins viennentd’étre envoyés
par le gouvernement pour examiner celte affreuse maladie. On pourrait bien prendre toule la fine fleur de l'A-cadémie de Médecine, sou secrétaire perpétuel compris, et parier d’avance que de très-beaux mémoires seraient faits sur la marche et la nature du fléau, mais que |ias un remède efficace ne serait trouvé. Ceci tient h des causes qui ne cesseront d'exister tant que la médecine parcourera le cercle vicieux où son matérialisme abject la tient enchaînée.
Quant à nous, nous saurons bien trouver dans la force vitale le moyen de paralyser les affreux symptômes de cette terrible maladie ; mais messieurs les savants n’auront aucun préservatif, et nous les verrons envahis par le mal, sc laisser mourir comme le simple vulgaire.
0 ignorance coupable! car c’est l’hnmanilé qu’on exploite avec des mots, continueras lu de régner parmi nous et faudra-t-il que la vérité mesiuérienne soit encore longtemps répoussée par ces douaniers de la pensée, qui paradent orgueilleusement au sein de nos Académies? Que n’ai-je le fouet vengeur de Néinésis? Pourquoi un autre Jésus ne vient-il parmi nous chasser les marchands du temple?...
— L’un des médecins qui ont examiné avec nous la maladie de la petite Cottin, M. Beaumont-Cliardou, qui a continué de suivre cette intéressante observation, nous écrit à cet égard :
« Des phénomènes anciens, quelques-uns se reproduisent rarement, mais quelquefois avec iutensité; la projection des ciseaux (Voyez T. Il, p. Oi) et de quelques parties de ses vêlements s’est faile plusieurs fois, il en a été de même d’une serpe qu'elle tenait à la main, d’un ballot de bruyère porté sur la tête ; des tuiles, des pavés, des pierres, des plairas; la terre formaat l’aire de la pièce où elle couche ont élé, comme dans certains cas d’orage, plus ou moins bouleversés.
« Elle a donné des preuves de lucidité dans le sommeil naturel.
« J’ai fait sur elle quelques essais d'influence magnétiques. Cet état, quoique moins violent qu’autrefois, lui devient pénible. »
— La reprise de nos conférences du dimanche ranime singulièrement le mouvement des esprits. La magie magnétique excite partout une curiosité impatiente. On se plaint que nous ne publions plus rien sur cet intéressant sujet : notre prochain numéro montrera que nous sommes en mesure de satisfaire ces légitimes exigeanees des esprits avancés.
Revue des journaux. — Le Journal des Débats du 25 septembre rapporte une audience de la Cour d'assises du Calvados concernant une fille Rogue, citée dans le Manuel de M. Teste (3® édition, page 402) comme la plus lucide qui se soit jamais vue. Elle avoua aux magistrats « qu’elle avait constamment feint, de posséder la a vertu magnétique et qu’elle n'avait jamais réellement « dormie -, elle signa cette déclaration, qui fut remise à h son confesseur. »
L’acte d’accusation relate soigneusement les supercheries magnétiques à l’aide desquelles elle était parvenue à voler 400 fr. à ses maîtres, les époux Létouzé, boulangers à Caeu. Elle a été condamnée a trois ans de prison. La justice est satisfaite; mais la science ne le sera que quand on aura fait disparaître du livre ci-dessus mentionné le pompeux éloge des prétendues facultés de cette misérable.
— La Tribune lyonnaise rapporte le commencement, d’expériences faites à Dieu-le-Fit (Drôme).
— La Revue Gallicane de septembre, scandalisée des cures opérées par M. Laforgue et des francs aveux de l’abbé Almignana; appelle sur eux les foudres du ciel.
Nous lui répondrons pour eux dans un prochain numéro.
— La Mouche du 7 courant réfute l’interprétation des pensées de M. Ordinaire par la Société du Magnétisme de la Nouvelle-Oiléans. Dispute de mots, confusion de faits.
— L'Illustration d’hier entretient ses lecteurs du mouvement qui s’opère dans les esprits à propos du magnétisme, qu’elle présente tantôt comme un fait, tantôt comme une jonglerie. A quelle contradiction s'assujettissent ceux qui n'oscut pas dire franchement la vérité-
— Le Corsaire du 25 septembre est à consulter.
PETITE CORRESPONDANCE.
Xondon. — M. Mra“\ — Saw Dr Sarm...to. And jour nephew. Rambouillet. — M. R***. Nous avons quelques-uns des I. qui vous manquent, on vous écrira lesquels, etc., etc.
Nantes. — R1. G..vé. — Une lettre pari pour vous.
Pau. — M. L***. — Nous attendons des nouvelles de votre aff. juilic.
BIBLIOGRAPHIE.
Notions de phrénologie, par M. Julien Le Rousseau, 1 vol. Paris, 1847, à la librairie Sociétaire, 25. quai Voltaire.
11 parait aujourd’hui peu d'écrits qui ne contiennent la notion ou l’expression du magnétisme. La plupart l’ap-
précient vaguement, il est vrai; mais enfin, vraie ou fausse, le mention qu’ils en font est utile ; elle prépare la terre intellectuelle à la réception de la bonne semence. La diffusion opérée par cette voie est infinie; c’est le symptôme le plus évident du progrès, le précurseur certain du triomphe de l'idée.
Tous ces auteurs, envisageant la question à des points de vue différents, trouvent des rapports, inaperçus des hommes spéciaux, qu’ils développent de manière à donner ii la chose un aspect nouveau. Ainsi M. Julien Le Rousseau met en relief un fait que nous n’avons trouvé nulle part apprécié- 11 admet presque en toutes actions une influence magnétique d'individu à individu qui modifie singulièrement leur manière d’être réciproque et la manifestation de leurs facultés. Par exemple, un joueur a-t-il ce qu’on appelle une veine, il est dans un état magnétique satisfaisant; il s’est établi une sorte de rapport entre lui et les instruments du jeu ; il exerce sur son adversaire lui-méine une influence personnelle qui le trouble et le rend hésitant. Par analogie, l’auteur pense que les jongleurs, les escamoteurs distingués doivent autant leurs succès à l'influence magnétique ou fascinatrice qu'ils exercent à leur insu sur les objets dont ils se servent et les personnes qui les entourent, qu’à leur adresse proprement dite.
Ces vues, tout à fait neuves, détruisent la tendance matérialiste du système de Gall et modifieront certainement lescroyances phrénologiques; car M. Le Rousseau, par de légers changements systématiques, a trouvé moyen de concilier les faits d’extase, somnambulisme, pressentiments, visions, apparitions,etc., avec les don-néesdela science; ceque Gall croyaitinconciliable, puisqu’il disait à M. de Puységur,en parlant des facultés som-nambuliques : a Si c’était vrai, mon système serait faux.»
On voit qu’une appréciation plus sévère, loin de nuire
au magnétisme ou à la phrénologie, a eu pour résultat de les servir tous les deux en les faisant sc contrôler mutuellement.
Initiation alx mystères di: magnétisme, brochure in-18, par II. Dei.aace. Rouc i, 1817.
Il n’y a plus d’enfants, nous sommes tous philosophes; la science est devenue si accessible aux intelligences, qu’au sortir de l’école on peut écrire sur ce que la nature a de pins mystérieux. Dans cet opuscule, M. Dc-Iaage.qui se donne gratuitement le litre de philosophe, prétend tout expliquer, tout faire comprendre. Il va ou plutôt il court comme un papillon sur les plus belles lleurs. Il ne dit de mal de personne, mais redresse tout le monde. Marcillet pour lui est un grand homme et l'esculape-somnamhule sans pareil. L’auteur paraît animé des meilleures intentions, et les sentiments qu’il exprime annoncent de la chaleur d’âme. Le temps calmera son ardeur 1111 peu trop poétique, et plus tard cet essai sera suivi de quelque bon traité ou de grandes erreurs, car M. Delaage n’est point homme à s’arrêter dans un chemin où il n’aperçoit point d’épines.
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (de Garnav).
. J . ! 1 II1. ! jc 11 :il ' ' •” 7 !. i ). ;, \ 1 l 'Ni
Paris, ». imprimerie d’A. Rinb, rue de Seine; JS.
INSTITUTIONS MAGNETIQUES
SOCIÉTÉ DU MESMÉRISME DE PARIS.
Lettre de M. l’abbé Almignana.
(Suite.)
Mais si, d’après l’Ecriture, rien ne nous oblige à croire que l’homme ait le démon à ses ordres, les livres sainte nous apprennent que celui-ci peut, de lui-mémeet avec la permission de Dieu, agir surl’homme, soit moralement en le tentant et l’induisant au mal, soit physiquement en tourmentant son corps.
Moralement, c’est le démon qui, sous la forme d’un serpent, conseilla à nos premiers parents la désobéissance aux ordres du Créateur (Gen., ch. m).
C’est Satan qui suggéra à David l’idée de faire un dénom* brement du peuple d’Israël contre la volonté de Dieu (Para-tip., ch. xxi).
C’est encore contre les tentations du démon que saint Paul nous avertit de nous prémunir (Ep. aux Eph., ch. vi).
Physiquement, c’est Satan qui ulcère Job (Liv. de Job, ch. ii) ; tourmente ce grand nombre de possédés dont parlo l’Evangile; et va jusqu’à souffleter saint Paul (Ep. aux Cor. ii, ch. xiii).
Après avoir constaté par l’Ecriture l’existence du démon et sa nature, qui est de pouvoir agir sur l’homme au lieu de lui être soumis, faisons maintenant l’application de cette doctrine à la question qui nous occupe, c’est-à-dire au magnétisme thérapeutique ou curatif.
TOME V. — V 5«. — 26 OCTOBIF 4847. 7
Nous avons fait voir que, d'après les livres saints, on n'est pas forcé de croire que l'homme ait pouvoir sur le démon pour le faire agir à sa volonté dans les opérations humaines.
Et, puisqu’il en est ainsi, de quel droit prétend-on nous faire croire que Satan, obtempérant à la voix des magnétiseurs, vient s’associer à eux, et que c’est en vertu de celte coopération que les phénomèes magnétiques sont déterminés?
Mais admettons pour un moment que les magnétiseurs aient le pouvoir d’évoquer le démon, et que les phénomènes magnétiques soieni le résultat du concours satanique dans les magnétisations.
Partant de ce principe, tandis que les opérations des magnétiseurs associés avec Saiau seraient fertiles en phénomènes, les magnétisations de ceux qui ne voudraient, ni directement ni indirectement, le moindre commerce avec le diable et qui, loin de l’évoquer, chercheraient à l'éloigner par tous les moyens possibles, resteraient tout à fait stériles; ear tublatâ causé tollitur effectut.
Eh bien ! je connais des magnétiseurs, et je suis de ce nombre, qui, loin d’appeler Satan à leur aide, commencent leurs opérations magnétiques en invoquant le Ciel, et se servant d'autres pratiques pieuses que la religion met entre les mains des fidèles pour chasser les démons -, et cependant, tout éloignés qu’ils sont du démon, ils déterminent des phénomènes extraordinaires qui ont pour résultat le soulagement de l'humanité souffrante.
Cela ne prouve-l-il pas que l’on peui magnétiser sans être secondé par le démon, ou plutôt que son action dan» les opérations magnétiques n’est qu'un rêve?
On me dira que le démon pouvant agii par lui seul et avec la permission de Dieu sur l’homme, comme moi-même je l’ai reconnu, il pourrait bien intervenir dans les opéia-tions magnétiques, soit en le* conseillant dans des buts sinis-
très, ou en modifiant par son concours le fluide magnétique.
Je vais essayer de répondre à celte double objection contre le pauvre mesmérisme.
Le soulagement des malades, unique but du magnétisme thérapeutique, est une action aussi bonne que louable. David, en parlant de l’homme bienfaisant envers l’affligé, dit que l'Elernel le soutiendra dans un lit de langueur, et que le Seigneur transformera son lit lorsqu’il sera malade {Ps. xi.). Par ce langage du roi-prophète, on voit que le soulagement des malades a quelque chose de divin.
L’Esprit saint, après nous avoir ordonné d’éviter toute action mauvaise, nous exhorte à consoler les malades.
Non te pigeai visitare infirmant (Ecclésiastique, ch. vu).
La touchante parabole du Samaritain pansant les plaies du pauvre Juif de Jéricho, nous fait voir combien le soulagement des malades est agréable à Dieu.
Enfin, Jésus-Christ môme nous déclare que le soulagement porté à un malade, l’est à lui-même, et qu’une récompense éternelle est attachée à ce noble trait de charité envers l’humanité souffrante.
D’un autre côté, Jésus-Christ nous parle, dans son Evangile, de deux arbres : l’un bon donnant de bons fruits, el l’autre mauvais en donnant de mauvais; et il ajoute que comme le bon arbre ne peut pas donner de mauvais fruits, le mauvais arbre ne peut pas non plus en donner de bons.
Non potesl arbor mata bonos frucliufacere.
Si le mauvais esprit, ne peut pas être le bon arbre, car mauvais est opposé à bon, il faut que le démon soit le mauvais arbre, vu qu’il n’y en a pas plus de deux.
Maintenant je me fais ce raisonnement. Le mauvais arbre ou démon, ne peut pas, d’après (’Evangile, nous donner de bons fruits. Or, nous avons prouvé par l’Ecriture, que le soulagement des malades, est une action bonne, sainte, ayant quelque chose de divin, c’est-à-dire un fruit que le mauvais arbre ne peot produire. Donc le magnétisme théra-
peuiique, étant un des plus puissants moyens de consoler les malades , ne peut pas Cire conseillé par le démon.
Mais on me dira que le démon peut conseiller une chose mauvaise sous les apparences de vertu.
Prêtre catholique, je ne saurais nier cela, les vies des saints m’en fournissant plusieurs exemples.
La grande difficulté consiste à me prouver que le soulagement des malades, est une chose mauvaise avec les apparences de vertu, sans se mettre en opposition avec David, l'Esprit saint et Jésus-Chrisl, dont je viens de rapporter le langage à cet égard.
D’ailleurs, si le soulagement des malades était une action mauvaise en soi, sous les apparences de vertu, ni les Jean de Dieu, ni les Roch, ni les Cosme et Damiain ne jouiraient de ce bonheur éternel dont ils se sont rendus dignes par leur charité envers les malades.
Pauvres sœurs de charité, s'il en était ainsi, combien seriez-vous déçues dans vos espérances sur un bonheur éternel lorsque, renonçant aux plaisirs du monde, et enfermées dans dans des maisons de douleurs, de gémissements et de tristesse, vous vous êtes entièrement vouées au soulagement des malades!
Mais rassurez-vous, anges de Dieu sur la terre, celte noble charité agissante qui, en vous unissant étroitement à Dieu, vous élève au-dessus des rois mêmes, sera un jour récompensée de la mêmi manière que le fut celle des illustres personnages dont je viens de parler, et que l’Eglise expose à la vénération des fidèles.
Passons maintenant à la modification satanique du fluide magnétique.
Après avoir satisfait de mon mieux à la première objection, je vais essayer maintenant de répondre à la seconde. Mais d’abord, si je demande comment celle modification a lieu, voici ce qu’on me répond :
« L« démon, l’ennemi du genre humain, tourne tou-
jours amour de nous, épiant le moment de pouvoir nou3 nuire, suivant l’expression de saint Pierre : Circuit quœrem quem devoret. Dans cet état d’espionnage, aussitôt que le fluide magnétique franchit la peau du magnétiseur, Lévia-Ihan 6'en empare et le modifie, lui donnant une propriété satanique en vertu de laquelle le fluide satanisé produit ce qu’on appelle le phénomène magnétique, et tout cela sans que le magnétiseur le plus adroit et le plus pieux s’en aperçoive. »
L’objection, en vérité, est ingénieuse, et si ingéniée, qu’elle nous amène à une nouvelle difficulté que voici :
Si Léviathan modifie le fluide magnétique en lui donnant une propriété satanique, ce fait suppose que le fluide, avant sa modification, avait d’autres qualités ; car toutes les choses ont une propriété quelconque. Or, quelle était donc celle du fluide magnétique avant que d’ôtre modifié par Léviathan, ou plutôt, quelle différence existe-t-il entre les propriétés du fluide simple eteeltes du fluide modifié.
J’ai d’autant plus besoin de m’éclairer sur ce point, que Ce n’est qu’en comparant les deux fluides dans leurs propriétés et dans leurs effets sur le corps humain, que je pour* rai répondre à celte seconde objection.
En attendant que l’on fasse le tour du monde pour trouver quelqu’un qui veuille bien faire cette double analyse, et en faire son rapport à (’Académie des »cience», je vais répondre à quelques autres objections qui m'attendent avec empressement.
On nous dit encore que les phénomènes magnétiques surpassent tellement l’imagination, qu’on est forcé de les croire surnaturels et diaboliques.
Voici ma réponse : Les phénomènes produits par le magnétisme thérapeutique, car je ne parle nullement du somnambulisme, surpassent l’imagination de celui qui est étranger à la connaissance de ce genre de magnétisme, con-cedo; surpassent l’imagination de celui qui s’est donné la
peine d'étudier le magnétisme ihérapeuliquc, el de l'approfondir autant qu’il lui a été possible, h ego. Avant de connailre ce magnétisme, lorsque j’entendais parler des guérisons opérées par cette force médicalrice, j'en étais vraiment surpris; mais aujourd’hui que, par la lecture, les notions qui m’ont été données par des magnétiseurs habiles, et surtout par l’expérience, je connais la théorie du magnétisme curatif, tout me parait naturel, conséquent el rien de surprenant ni diabolique.
D’ailleurs, quoi de plus surprenant que les effets de l’électricité, du galvanisme, de l’ambre, de l'aimant, du quinquina, de l'émétique, de la vaccine, etc., etc.? Et cependant il n’y a pas un seul théologien qui nous dise que dans tous ces agents physiques il y ail quelque chose de surnaturel et diabolique.
A côté des partisans de la modification satanique, se présentent d’autres adversaires du magnétisme; mais qui, dans l’impossibilité de le combattre avec leurs propres forces, faute de connaissances, ont recours aux arguments ab autoriiatc, el nous tiennent, d’un ton magistral, le suivant langage :
« Un grand nombre d’ecclésiasliques recommandables par leur piété et leur savoir, dont quelques-uns figurent à la tête des grands séminaires et même des évêchés, se sonl prononcés contre le magnétisme, le considérant comme un ouvrage satanique. Cet avis est partagé en même temps par un pareil nombre de ministres protestants, anglicans et schismatiques russes. Cette unité de pensée sur le magnétisme parmi des ministres de cultes opposés paraîtrait quelque chose de providentiel qui nous indiquerait qu’il s’agit d’une vérité commune à toutes les croyances, comme celle de l’existence d’un Dieu; raison pourquoi on peut établir d’une manière plus que probable, que le magnétisme est une œuvre satanique et diabolique, et c’est dans ce sens-Ià qu’il doit être combattu futtibus et armis. »
Celte objection, à première vue, parait très-forte; mais puisque ce ne sont pas tout les membres du clergé catholique, ni tout les ministres des autres cultes; puisque l’E-glise, colonne el soutien de la vérité, est encore muette sur le point en question, je vais essayer de répondre à cette grande difficulté.
Dans la célèbre dispute entre saint Augustin et saint Jérôme, sur l’intelligence de certains passages de YEpltre de taint Paul aux Galatet, saint Jérôme, ne pouvant pas éluder la force des arguments de saint Augustin, et voulant appuyer son opinion sur l’autorité de saint Chrysoslome et d’Ori-gène, ce fut pour lors que saint Augustin, prenant la parole pour répondre à saint Jérôme, lui dit entre autres choses ce qui suit :
Aliot autorei lego et quantalibet tanctitate doctrinaque per-polleant, non ideo verum puto quia ipti ita censuerunt, dlu quia mihi, probabili ratione, quod à vero non abhorreat, persuader: seopenmt (D. Aug., Ep. xxcii, ad Hier., num. 8).
On voit par ce langage de saint Augustin, que les opinions particulières des théologiens, même les plus recom-mandables par leur piété et leur savoir, ne sont pour le saint docteur un vrai argument théologique qu’autant que ces théologiens pourront, par la force de leurs raisonnements, porter dans l’esprit du saint évéque de la persuasion relativement à la véracité ou probabilité de leur doctrine; c’est-à-dire que dans les arguments ob autoritate, saint Augustin, loin d'imiter le magûter dixit des disciples de Pv-thagore, fait une application littérale de cet axiome aussi ancien que la saine logique : Non propier autorem doctrmam tectamur, tedpropter doctrinam autoribut adheer entes.
Je le demande maintenant : ces membres du clergé catholique et ces ministres du culte réformé, anglican et schis-matique, ont-ils exercé le magnétisme thérapeutique? ont-ils suivi des cours de magnétisme? ont-ils du moins étudié privatim le magnétisme thérapeutique sous la direction d’un
habile magnétiseur? A coup sûr, on va me répondre que non.
El, dans ce cas-là, quel argument peut-on établir contre le magnétisme thérapeutique sur l’opinion des hommes étrangers à cette science?
Quelle persuasion peut porter dans mon esprit l’opinion de ces hommes qui prétendent parler du magnétisme thérapeutique sans l’avoir jamais exercé ni étudié? Comment des hommes qui ne connaissent ni la nature, ni les propriétés, ni le siège du fluide magnétique, ni les moyens par lesquels son exhalation s’opère ; ces hommes qui n’ont jamais senti au bout de leurs doigts ces fourmillements précurseurs de l’émission du fluide magnétique, ni vu de leurs propres yeux des phénomènes magnétiques sur le corps des malades, ni jamais entendu de la bouche d’un malheureux souffrant : « Monsieur, que vous me faites de bien ! vous m’avez enlevé avec main cette douleur qui tout à l'heure était pour moi un vrai tourment; je vous en suis infiniment reconnaissant ; » et autres paroles touchantes qui portent la joie dans le cœur du magnétiseur chrétien et charitable; comment ces hommes osent-ils s’ériger en juges pour prononcer un arrêt de mort contre le magnétisme thérapeutique, comme étant une œuvre satanique?
Ces personnages en question pourront bien Cire très-pieux et très-savants dans beaucoup de branches scientifiques et dan9 la littérature; mais, tout en respectant leur piété et leur savoir, ne connaissant pas le magnétisme thérapeutique ni dans sa cause, ni dans sa nature, ni dans ses effets, leur opinion, contraire ou favorable à la nouvelle science, ne peut pas être pour moi d’un grand poids ; car ce n’est que perilit in arte quod credendum sit.
Mais si cette solution, toute logique qu’elle puisse être, ne satisfait pas, et que les adversaires du magnétisme en désirent une autre du même genre, c’est-à-dire appuyée sur l’autorité des hommes consacrés au ministère spirituel des
différents cultes professés en Europe, je vais satisfaire leurs désirs.
(¿a suite au prochain numéro.)
Errala. — Page 178, ligne 3, au lieu de saint suaire, lisez sanctuaire. — Môme page, ligne 22, au lieu de Rede, lisez Judc.
ATHÉNÉE MAGNÉTIQUE DE LYON.
L’académie française prit naissance par le concours de quelques savants dans le local de l'un d’eux. L’athénée magnétique de Lyon a suivi une voie pareille; nous ignorons quelle destinée l’avenir lui réserve, mais nous devons constater les progrès sensibles qu’il a faits dans le cours de cette première année de sa fondation. Ces progrès sont tels que bientôt il va être obligé de changer de local. Celui qu’il tenait de la complaisance d’un de ses membres ne peut plus suffire à l'aflluence des visiteurs.
L’athénée magnétique s’assemble tous les mercredis. L'un est consacré à un cours de magnétisme par M. Poulard, lequel sera suivi d’autres cours par différents membres, ainsi qu'aux affaires d’intérieur ; l’autre à des expériences démonstratives faites par MM. M... T... et F... De» cartes spéciales sont distribuées gratuitement pour chacune de ces séances. Cette méthode qui joint la théorie à la pratique est on ne peut plus rationnelle et a déjà produit d'heureux résultats. L’athénée, s’il continue d’ètre dirigé avec la même sagesse, sera le germe d’une faculté des sciences magnétiques.
Nous avon3 déjà publié un discours de M. Guinakd aîné, président; nous nous proposons de présenter le résumé du cours de M. Po ci. a un lorsqu’il sera terminé; aujourd’hui
nous offrons au* lecteurs Y Ode suivante à Mesmer, par M. C.-F. Devert, lue dans la séance du 4 août dernier.
ODE A MESMER.
A tra»ers les champ» de l’espace,
Dérobant son vol à nos yeux,
L’aigle, emporté par son audace,
Ose s’élever jusqu'aux deux.
Fixant un regard téméraire Sur l'astre éclatant de lumière,
Qui s'avance avec majesté,
Vers des régions inconnues,
11 plane, et voit du haut des nue»
L’humble berceau qu'il a quitté.
Ainsi dans ton essor rapide,
Noble fils de la liberté 1 Ta fuis le vulgaire timide,
Génib ! à toi l'immensité I Oui, dans ta marche triomphante Tu braves la haine impuissante De l'ignorance et de l’erreur.
A peine as-tu tracé ta route Qu’au sein des ténèbres du doute Jaillit un rayon créateur t
C’est en vain que la calomnie Contre toi dirigeant ses traits.
Arme la rage de l’envie Pour empoisonner tes succès!
La raison combat pour ta cause :
L’heure vient où l'apothéose Venge le génie insulté,
Les siècles protègent sa gloire,
Le seuil du temple de mémoire Conduit à l'immortalité!
Quand du fond de la Germanie Ta voix instruisait l’Univers,
Mesmer ! pendant ta noble vie Tu souffris l’exil, les revers!
Mais le flambeau de la science Survit et ta gloire commence.
L'expérience enfin a parlé! Vainement l'erreur furibonde Résilie encor : déjà le monde S'incline, et Dieu s'est révélé.
L'esprit humain n'est plus esclave Ou mensonge et des préjugés ;
La raison brisant toute entrave Triomphe et les temps sont changés... Désormais l'aveugle empirisme,
Au salutaire magnétisme.
Oppose un impuissant effort.
Salut, Salut, cre nouvelle !
Mesmer ! de Ion œuvre immortelle L’avenir bénira l'essor!
(Tribune lyonnnite.)
VARIETES.
lion fantastique. — Miracles, prophéties, rêves providentiels, visions, fantômes, pronoslics, pressenliments, coïncidences surnaturelles, etc., que faut-il penser de tout cela? Les esprit; foris s’en tirent aveedeus mois: mensonge 011 hasard. C’esl on ne peut plus commode. Les âmes su-perslilieuses s’en tirent... ou plutôt ne s’en tirent pas; ces pauvres âmes s’y jettent à corps perdu, elles n’ont foi qu’à ['inconcevable et se font un pelil ordinaire de phénomènes. C’esl un amusement qui a son charme el surtout son innocence. Je préfère de beaucoup ces Smes-ci à ces esprits-là. D'abord je rencontre moins des unes que des aulrcs; c’est luui bénéfice. En effel, il faut avoir do l'imaginuiion pour
qu'on puisse l’avoir malade, et n’a pas qui veut fci tète perdue dans les nuages; tandis qu’il suffit d’ètro électeurs et abonnés à deux ou trois journaux industriels pour en savoir aussi long et en croire aussi peu que Voltaire et Diderot ; et puis, j'aime mieux la folie que la sottise, la superstition que l’incrédulité, le chaos que le néant. Mais, ce que je préfère à tout c’est la vérité, la lumière et la raison; je les cherche avec une foi vive et un cœur candide. Dieu nie préserve de bâtir de3 systèmes pour y emprisonner son œuvre! Nier par orgueil, ou admettre par ignorance, j’en donne le choix, non pas pour une épingle (elfe a peut-être attaché quelque ceinture!...), mais pour un dictionnaire auquel n’est pa» attaché le nom de Charles Nodier. Je ne crois point un fait parce qu’il est vraisemblable; je ne le regrette point parce qu’il est incompréhensible. Je ne dis point : Telle chose doit être ou ne doit pas être; j’examine; et j’ai pris le parti de n’avoir de parti pris sur rien.
En fait de choses merveilleuses, sans doute, on ne saurait trop tenir sa croyance sur la défensive; car rien n’est plu» aisé à feindre ni plus difficile à constater; mais n’oublions pas que Dieu est grand. Quand on me raconte de ces choses, je me dis : Il y a mille à parier contre un que cela est faux ; mais il y a un à parier contre mille que cela est vrai. Voyons. — Et d'abord les prodiges sont-ils donc une absurde anomalie dans l’ordre naturel! une impossibilité démontrée? Les livres saints, au besoin, nous démontreraient tout le contraire. Mais si nous n’avons qu’à nous prosterner et à croire, ne perdons pas de vue que les incrédules sont debout, et que le raisonnement seul, et non l’autorité, peut leur courber la tête. — Quoi ! le monde visible est encombré d’impénétrables mystères, de phénomènes inexplicables, et on ne voudrait pas que le monde intellectuel, que la vie de l’àme, qui tiennent déjà du miracle, eussent aussi leurs phénomènes et leurs mystères? Pourquoi •elle bonne pensée, telle fervente prière, tel mauvais désir,
n’auraient-ils pas la puissance üe produire ou d'appeler cer-lains événements, des bénédictions ou des catastrophes, comme le gland produit le chêne, comme les fleurs attirent la rosée, comme l'aiguille aimantée appelle le tonnerre? Pourquoi n'existerait-il point des causes morales comme il existe des causes physiques dont on ne se rond pas compte? Et pourquoi des germes de toute nature ne seraienl-ils pas déposés et fécondés dans la terre du cœur pour éclore plus tard et se développer sous la forme des faits ! Nous aimons mieux tout attribuer à la volonté aveugle du hasard, parce que nous ne sommes pas dans le secret de celle fécondation impalpable, et que les instruments et les moyens nous manquent pour reconnaître et constater la corélation de l'idée-germe avec le fait résultat; ou pour établir les rapports intimes qui joignent tel acte accompli à tel acte qui s’accomplira, peut-être loin de là et longtemps après.
Combien de péripéties terribles, de dcnoùmcnts imprévus dans le drame toujours renaissant de la vie des nations, des familles ou de chaque individu !... Combien de fois se dit-on : Qui aurait cru cela? quel fléau sans nom ! quelle injustice du sort !... Ce n’est pourtant que la conséquence rigoureuse, la déduction nécessaire de quelque principe déterminant; la moisson fatale dequelquesmau vais grainsqu’on a semés, puis oubliés. Les maladies du corps ont aussi, dans nos imprudences ou nos excès, leurs motifs certains qui, souvent, échappent à notre souvenir ou à noire perspicacité. Il y a des comètes qui embarrassent fort les astronomes, et dont les retours ne sont pas calculés, tant est longue et indéfinie la parabole qu’elles décrivent. Est-ce à dire qu’elles ne soient pas soumises, comme tous les astres, à une loi régulière? Non, certes; mais l’homme n’a pu encore soumettre cette loi à son compas. Il en est ainsi de la loi qui régit les événements humains.
Mais quand Dieu, en de rares circonslances et pour quel» ques-uns de ses enfants, a daigné soulever un coin du voile
éternel, et répandre sur leur front un rayon fugitif du flambeau de la prescience, gardons-nous de crier à l’absurde, et de blasphémer ainsi la lumière et la vérité môineî
Voici une réflexion que j’ai faite souvent : il a été donné aux oiseaux et à certains animaux de prévoir et d’annoncer l’orage, les inondations, les tremblements de terre. Tous les jours, des baromètres nous disent le temps qu’il fera demain. Et l’homme ne pourrait point, par un songe, une vision, par un signe quelconque de la Providence, être averti quelquefois de quelque événement futur qui intéresse son âme, sa vie, peut-être son éternité? L’esprit n’a-l-il donc pas aussi son atmosphère, dont il peut pressentir les tempêtes et les variations?
Tous les peuples ont eu leurs devins, leurs pythonisses ; le peuple juif a eu ses prophètes. Nos demi-savants, enveloppant dans la même ironie le saint et le profane, le vrai et le faux , se contentent de rire et de nier. Et la preuve, ajouteront-ils peut-être, la preuve que tout cela n’était qu’un charlatanisme imposé à des temps d’ignorance et de superstition , c’est que les prophètes ne se hasardent plus à la grande lumière des temps modernes.
Sans répondre aux rieurs incrédules de la jeune France par l'affirmation et la prosternation, comme auraient fait les croyants de la vieille France, je leur ferai humblement observer qu’un prétendu mensonge de tous les peuples ressemble fort à une vérité. Les dogmes de l’existence de Dieu et de l’immortalité de l'âme ne sont guère fondés sur des bases plus solides, en fait de bases humaines. Je dirai plus, c’est qu’en me servant du simple bon sens qui me reste, les prophètes me paraissent aussi évidents, aussi nécessaires dans les premiers âges du monde, que les académiciens peuvent l’être de nos jours.
Quand le genre humain, tout jeune encore, n’avait point de passé, ou n’avait qu’un passé stérile, une histoire vide, que pouvaient savoir les savants, si ce n’est l’avenir, pour se
distinguer des ignorants? Ils devaient donc braquer la lunette de leur intelligence en avant, au lieu de la tourner en arrière comme leurs successeurs. La Providence les avait doués très-justement de celte faculté, la seule qui pût les séparer du grand troupeau des hommes. De là les prophètes. La divination, chez eux, n'était autre chose que la mémoire en sens inverse. Ces érudits des premiers jours voyaient ce qui n’est pas encore, aussi clairement que ceux d’à présent voient ce qui n’est plus; et selon la vigoureuse et poétique expression d’Amoni Deschamps,
Roulaient dans leur esprit les futures années.
Se sourenant de t’avenir.
Néanmoins, quelle que soit la misère du merveilleux dans ce siècle trop positif, il y aurait encore du charme et de l’utilité à en retirer si tous ceux qui en réfléchissent de faibles éclairs rapportaient à un foyer commua tous les rayons divergents; si chacun, après avoir consciencieusement interrogé ses souvenirs, rédigeait avec bonne foi, el déposait dans quelques archives le procès-verbal circonstancié de ce qu’il a éprouvé, de ce qui lui est advenu de surnaturel el de miraculeux. Peut-être quelqu’un se trouve-rait-il un jour, qui, en rapprochant les symptômes et les événements, parviendrait à recomposer en partie celte science perdue. En tout cas, il composerait un livre qui en vaudrait bien d’aulres.
Quant à moi, je suis apparemment ce qu’on appelle un sujet, car j’ai eu de tout cela dans ma vie, si obscure d’ailleurs; et je viens le premier déposer ici mon tribut, persuadé que cette vue intérieure du personnage le moins intéressant a toujours une sorte d’intérêt.
Donc, voici mon fantastique, c'est-à-dire un choix de mon fantastique; j’ai dû en élaguer les choses trop semblable*-entre elles qui feraient double emploi et triple ennui ; puis celles que l’on ne peut dire qu’à son confesseur, à moins qu’on ne soil un Jcan-Jacqucs Rousseau; enfin celles qui
se rapportent à des problèmes mystiques dont je n’ai pas en moi-môme la solution, et qui composent une espèce de lo-gogriphe sans mot, ou d’apocalyse pour un, entièrement dénuée d'importance pour les autres comme de clarté pour moi. Tout le petit merveilleux que je vous donne, lecteur, s’est vérifié dans ma vie réelle. Ceci n’a pas d’autre mérite que d’être vrai. Je ne vous demande qu’une grâce, lecteur : c’est de croire que, si j'inventais, j'inventerais mieux, quelque peu d’imagination que vous m’accordiez. Depuis que je me connais, depuis queje sais lire et écrire, tout ce qui m’arrivait de surnaturel, je le consignais sur le premier papier que je trouvais, comme par instinct et sans réflexions. Plus lard, j’ai rassemblé toutes ces feuilles volantes ; j’ai mis de l’ordre dans les récits, delà correction dans te style, et je continue toujours... Ce sont des mémoires d’un singulier genre. Je ne puis en ouvrir les premières pages sans pleurer beaucoup; il y est parlé de ma mère, qui m’a dit adieu sitôt! Ne riez donc pas, lecteur, des extraits que j'en mets sous vos yeux, tout naïfs el puérils qu'ils sont :
« La première chose plus qu’élonnante qui m’arriva, j'avais à peine huit ans. — J’étais, depuis la veille au soir, dans la ville d'Orléans, où l'on m’amenait de Paris pour faire mes études chez un bon prêtre, ancien ami de ma famille, qui venait d'y établir un pensionnat. Nous étions descendus chez une de mes parentes qui m’a toujours traité comme un fils chéri. Quand je fus bien reposé, quand je fus lesté d'un excellent déjeuner, elle me donna un domestique pour courir la ville avec moi el m'en montrer les curiosités. Je ne connaissais Orléans que par la peur et la haine que j'en avais. Voilà six semaines qu'avec mes huit ans je me disais le plus malheureux des hommes d'être condamné à partir pour Orléans. Orléans, c’élait pour moi ne plus jouer à la balle aux Champs-Elysées, ne plus effaroucher les rondes des petites filles aux Tuileries, ne plus embrasser tous les malins ma mère et mon père, c’élait un exil, une
prison, la pension enfin! Jamais il ne m'était venu à l’idée de demander si celle ville était belle ou laide. Je ne savais rien d’Orléans, et n’en voulais rien savoir. Seulement, ma terreur avait fini par se créer un fantôme de ville que je ne pouvais plus écarter de ma pensée ni de mes yeux pendant les derniers moments de mon séjour à Paris. J’étais comme enfermé dans cette ville d'imagination, je marchais dans ses rues, je lisais les enseignes de ses boutiques... Eh bien ! lorsque je sortis dans la véritable Orléans, je m’y reconnus tout de suite, rien ne m’embarrassait; j’allais... Je volais de rue en rue, de place en place, sans la moindre hésitation, les appelant toutes parleur nom ; la rue des Carmélite», la rue de la Bretonneric, la rue Banier, la place du tlarlroi. la rue Royale, la rue de Bourgogne, la ruede l'Evêché, la place de VEutpc, le Mail, le Cloître Saint-Aignan, etc., etc. Tellement que ce brave Popoclisk (c’est ainsi que se nommait le domestique de ma tante, pauvre prisonnier de guerre autrichien), tellement, dis-je que ce brave Popodish, tout ébahi de me suivre au lieu de me conduire, s’écriait à chaque détour :
« — Petit Français, sorcier. la, ia, sorcier, petit Français. D
« Je me rendis de cette manière jusqu’à la porte du pensionnat, dans une rue étroite derrière la magnifique église de Sainte-Croix, et je retournai de même à la maison. Ce qui n’est pas le moins étrange, c’est que cela me paraissait tout simple dans le moment. Celte inconcevable prévision des lieux a été remarquée depuis dans trois ou quatre personnes : mystérieuse faculté ou maladie, qu’on appelle, je crois la Loco......le nom m’échappe.
« Quelques mois après, l’abbé de Fonblaves (mon maitre de pension) entra un matin avant six heures, dans le dortoir des jeunes, comme la cloche du lever sonnait; il s’arrêta devant mon lit, et au milieu de beaucoup d’autre» paroles, il balbutia :
« — Votre mòie est malade.
« — Non, monsieur, elle est morie, repris-je avec force en me levant à moitié.
« _ Qui donc vous l’a dit, mon enfant? ce n’est que cette nuit... »
« Et alors ma tète tomba sur son épaule, et je demeurai immobile de désespoir, mais non de surprise; car cette nuit même, j’avais vu en rêve une femme, bien jeune encore, en longue robe blanche, qui s’enlevait au ciel, toute seule, une palme verte à la main, comme les saintes, et appelant,
* Emile, Emile, mon (ils! » avec une voix tròs-faible, mais si claire que je l’entendais tinter comme une petite clochette d’argent dans l’air. — Rien au monde ne m’avait préparé à celle nouvelle ni à ce rêve. Et la veille encore, ainsi que tous les enfants, je ne songeais pas même que ma mûre dût mourir un jour ! — Comment veut-on que mon cœur ne soit pas devenu superstitieux?
« Assis dans un fauteuil de maroquin très-élégant, la tôle coiffée et poudrée comme les petits maîtres d’autrefois, des pantoufles jaunes el pointues à ses petits pieds, dont il éiait coquet malgré ses soixante-dix ans, ou plutôt à cause de ses soixanle-dix ans, mon aimable et vénérable père s’occupait sans relâche d’affaires sérieuses ou des recherches littéraires, devant un grand bureau encombré de livres et de papiers. Et moi, je travaillais sur une petite petite allonge, à refaire mon éducation du collège, ne m’interrompant que pour écouter des anecdotes et des vers dont mon père avait la mémoire si bien remplie, ou pour aller l’embrasser cent fois par matinée. Il n’aimait pas que je sortisse, ni pour la promenade, ni pour des visites, ni pour le spectacle. Il avait peur de me voir perdre mon temp9, ou faire de mauvaises connaissances, ou prendre de mauvaises habitudes.... Il avait peur surtout de ne me voir plus là. Car, avec son cœur et son esprit si jeunes, il se sentait vieux pourtant, et quand je le quittais, il ne me grondait pas, oh ! non, mais
son regard suppliait cl semblait dire : Tu reviendras peut-être trop lard!... Mais je n’entendais pas toujours : j’avais seize ans et l’âme ardente au plaisir. — Un matin deux de mes camarades vinrent me prier de passer trois jours à la campagne de leur mère près de Sèvres. Nous devions y composer des proverbes et les jouer avec deux demoiselles dont j’étais amoureux fou, parce que l’une était blonde et rose et l’autre brune et pâle. Trois jours!... Je ne sais pas comment je iis pour partir, mais rien ne m’en eût empêché. Arrivé là-bas, je fus pris subitement d’une fièvre assez, violente. Il parait qu’on me veilla tou le la nuit. A la pointe du jour, élant plus calme, j’avançai ma tôle hors du lit. Il n’y avait personne dans la chambre en ce moment. Je vis bien la fenêtre à gauche avec ses rideaux blancs rayés de bleu ; la porte en face ; la cheminée avec une bouilloire devant le fou, à moitié couvert ; la grande commode de noyer avec ses mains de cuivre et sans marbie dessus; et au pied de mon lit, la chaise où j'avais jeté mes habits, enfin tout. J’étais éveillé corps et idées, autant qu’on peut l’être... La
porte s’ouvrit, une femme entra, c’était ma bonne..... oh!
bien bonne en effet, ma seconde mère, qui m’a sauvé de mille maux dans mon enfance, et de mille sottises dans ma jeunesse, car elle avait de la science et de l’éloquence à force de tendresse et de vertu. Elle courut droit à moi, m’embrassa très-fort, me rattacha mon madra9, me remit les bras dans mon lit, puis elle lira de son sac une lettre de mon père, qu’elle décacheta et tint devant mes yeux, et que je lus ainsi sans me déranger ni me découvrir. Ensuite je vis ma bonne se baisser à la cheminée comme pour y chercher quelque tisane, et le sommeil me reprit, et je ne vis plus rien. Quand je me réveillai au bout de trois grandes heures, mes deux camarades étaient là. Je leur demandai ma bonne. Ils me répondirent qu’ils ne l’avait pas vue, et queje n’élais pas assez près de ma fin pour qu’on eûleru devoir avertir ma famille. Je demandai la lettre de mon père... Il n’v avait
point de lettre. Alors je leur racontai ma vision, ils en rirent beaucoup. Ils riaient encore, lorsque ma bonne entra réellement et me donna une lettre de mon père, qui sans autre raison qu’une inquiétude vague, voulait avoir de mes nouvelles. — La lettre était mol pour mot celle que j’avais cru lire et que j’avais redite de mémoire à mes amis.—Nous nous regardâmes tous les trois, et personne n’eut plus envie de riro.
« Bien des fois il m’arrive dans les rues de me dire : Ah ! voilà monsieur un tel-, je ne le croyais pas ici. J’approche, je me trompais; mais je le renconire lui-même un peu plus loin, comme s’il eût été précédé du spectre de sa ressemblance.
« Le jour de ma première communion, j’entendis un concert aérien d’une douceur ineffable. Ces accords invisibles, qu’aucune musique de la terre ne peut reproduire, se renouvelèrent assez souveht, pour mon oreille, jusqu’à ce que j’eusse vingt ans, à tel point que je m’arrêtais tout court dans mes promenades pour écouter, en extase, la lointaine harmonie. Jusqu’à l’âge de vingt ans, ma vie fut sainte et pure. Hélas! la divine sérénade s’est changée depuis en infernal charivari.
« Dans l’été de 4824, vers minuit, je revenais, par les champs, à un château ort je devais passer quelques jours. Je m’étais égaré dans une longue course» et je hâtais la marche pour arriver avant que le gros chien fût lâché. La lune courait de nuage en nuage, comme un ballon lumineux , et, d’intervalle en intervalle, sa lumière se réfléchissait sur un grand mur blanc, à ma droite. Tout à coup, j'aperçois sur ce mur une silhouette gigantesque de femme voilée ei parée, qui allait du môme côté que moi ; je me retourne, il n’y avait personne sur le chemin. Je reporte mes yeux à la muraille : la grande silhouette marchais encore. Dix fois, je lis le même mouvement de tète, du chemin au mur et du mur au chemin : toujours b silhouette de femme, jamais per-
sonne. C’élait une ombre qui ne projetait aucun corps. Mon cœur battait comme le marteau d’une cloche, une sueur glacée coulait de mes cheveux sur mon visage. — Avant de quitter le mur, je voulus y jeter un dernier regard!... Le fantôme ne s’était pas évanoui ? Seulement, il se trouvait étendu dans une position horizontale, et avançait ainsi, comme soutenu et porté par des bras qu'on ne voyait point. Le profil de cette figure se dessinait vivement à la clarté de la lune, et je reconnus, à n’en pas douter, la sœur d’un de nos amis. — Huit jours après, j’assistais au mariage de cette jeune fille; encore huit jouis après j’assistais à son convoi.
t Un pauvre me suivait dans la rue en me demandant l’aumône. Je n’avais sur moi que deux pièces de vingt francs et deux pièces de vingt sous. Un ridicule accès d’avarice me saisit, el je refusai l’aumône parce que j'étais trop riche. A quelques pas de là, j’entrai dans la boutique d’un papetier pour y acheter des plumes métalliques. On me demanda un franc. Il faisait déjà nuit. Je jetai une pièce sur le comptoir et partis en courant, car on m’attendait à l’Opera. Au bureau des billets, je m’aperçus que j’avais donné une pièce d’or pour vingt sous. — C’était bien fait. Je me gardai bien d’aller réclamer.
* A quatre ou oinq reprises de ma vie, j’ai été doué d’une bizarre faculté : c'est de pouvoir dire, à une seconde près, l'heure qu'il est, dans quelque moment qu’on m'interroge, el dans quelque position que je me liouve, au bal, sur l’eau, à table, n’importe. Une fois même, pour m’éprouver, on m’a réveillé au milieu de la nuit en sursaut. « Quelle heure est-il? — Deux heures vingt-cinq minutes », ai-je répondu. —J’allais comme l’horloge des Tuileries! Dans ces sortes de paroxismes, j’ai en moi comme une pendule intérieure dont je sens et dont je compte involontairement les pulsations. Plaisir ou ennui, rien n’y fait. Le temps me semble avoir des pattes ou des ailes, il est vrai ; mais que je sois à entendre chanter une jolie femme ou psalmodier une tragé-
die mérovingienne, j’ai toujours la conscience de l’heure précise. — Je n’ai pas d'accès bien décidé depuis quelques années.
« A la dernière revue de la garde nationale passée par Charles X dans le Champ-de-Mars, au mois d’avril 1827, je venais d’être nommé capitaine; mais je ne faisais pas blanc de mon épée. Une vague tristesse m’obsédait ; j’étais absorbé dans une pensée qui se débrouillait péniblement; el je marchais comme un somnambule et avec cet air idiot qui précède el souvent accompagne l’inspiration chez les poêles. C’est qu’en effet je faisais à mon insu une complainte moitié funèbre, moitié burlesque sur le licenciement de ta garde nationale, dont, certes, personne ne se doutait alors dans le Champ-de-Mars, pas même le roi. Comment cette idée m'était-elle tombée de la tête? Dieu le sait. Je sais seulement que, lout en défilant, je ne pouvais m’empêcher d’ajouter, couplets sur couplets, jusqu’au douzième, qui prédisait positivement la chûte du trône. Les canons auraient été braqués sur moi, qu’il eût fallu que ma chanson s’accomplit. Le soir, je la chantai chez des personnes qui fermèrent les portes et tremblèrent de tout leur corps. On medii.au resle, que j’élais un faux prophète, car il venait de paraître un ordre du jour excellent pour la garde nationale... Le lendemain matin, une de ces personnes vinl faire amende honorable chez moi, en m’annonçant que l’ordonnance du licenciement avait été signée la nuit; moi, je n’y pensais plus. J'ai vingt témoins de ce fait. Ma complainte courut de mains en mains. Elle est si singulièrement applicable, que je regrette de ne pouvoir l’imprimer ici comme pièce fantastiquement historique, mais l’infortune et l'exil sont des censeurs dont je respecterai toujours l’auiorité.
« Par une froide matinée du mois de février 1832, je m’étais enfermé pour écrire un chapitre du livre des Cent-et Un. Cola s’appelait Une visite aux Invalides. Au commencement de ce chapitre, je suppose que je rencontre mou
remplaçant aux armées, qui se nomme Maurice. J’écrivais ce nom, lorsque j’entendis sonner, et aussitôt on vint me dire que quelqu’un me demandait. « — Mais j’avais défendu ma porte. — Mais la personne dit que si monsieur savait qui elle est, il no ferait pas difficulté de la recevoir. C’est un nommé Maurice qui se prétend le remplaçant... — Qu’il entre. » Et il m’embrassa et je lui montrai son nom sur mon papier, et il crut peut-être que je m’occupais de lui. Depuis dix ans je n’en avais pas entendu parler. 11 était passé dans les colonies et il en arrivait tout juste et comme évoqué par mon appel magique-, ou plutôt il y a des circonstances où notre pensée se porte d’avance et providentiellement sur un objet qui va se présenter à nous.
■ Dans la même semaine du mois de février 1852, je m’étais couché souffrant, et je me réveillai au milieu de la nuit en (toussant un grand cri. Je venais de voir beaucoup de jeunes gens se réfugier et se barricader dans un escalier tortueux, et un d’entre eux tirer un coup de pistolet dans la poitrine d’un sergent de ville qui venait pour les arrêter.
— Cette même nuit et à la même heure avait lieu l’affaire de la rue des Prouvaires, où un sergent de ville reçut en effet, de la main d’un jeune homme, une belle dans le corps. Je n’ai pas voulu voir ce jeune homme au tribunal, dans la crainte de reconnaître celui de mon rêve. — C’était bien assez comme cela.
« Parlons, pour finir de M. de Fonfgibu! Un dimanche qu’une dame d’Orléans m’avait fait sortir de ma pension, je trouvai là M. de Fontgibu, émigré, qui revenait d’Angleterre.— Parbleu! dit-il en me voyant, voilà un petit jeune homme à qui nous ferons goûter du plum-pudding ! c’était une importation nouvelle à laquelle M. de Fontgibu n’avait pas nui. Je trouvai le plum-pudding excellent, et je rentrai dans ma pension, et je n’entendis plus parler jamais de Fontgibu, ni de plum-pudding...
« Dix ans après, en 1815, je passais sur le boulevard
Poissonnière. J’avais faim, j’entrai chez un reslauraieur, et je demandai d’un plum-pudding qui était sur un plateau, et qui avait fort bonne mine. « Il est retenu, me dit le garçon, et nous n’en avons pas d’autre. » La dame qui était au comptoir, voyant ma grande contrariété et ma grande jeunesse, me sourit d’un air d’intelligence protectrice, et se tournant aussitôt vers une table à sa gauche : « Monsieur de Fontgibu, dit-elle, auriez-vous la complaisance, si vous ne mangez pas tout, de partager votre plum-pudding avec monsieur? » A ce nom de Fontgibu, mon attention c’était éveillée, et je vis un homme assez âgé, poudré à blanc, qui portait des épau-lettes de colonel très-minces, sur un habit bourgeois, gros bleu, avec des boutons d’uniforme et une épée d’acier. A travers ce déguisement et sous cet air martial, je reconnus pourtant mon Fontgibu d’Orléans, et m’approchant de lui : «Colonel... Monsieur le marquis, lui dis-je, c’est donc à vous que je devrai toujours l’avantage de goûter du plum-pudding! Je suis un tel.ee petit écolier que vous avez régalé ainsi chez madame une telle, à Orléan3, en telle année ; vous vous rappelez? » — Il rassembla un moment ses souvenirs, et me tendant la main avec cordialité : « En vérité, je ne vous aurais pas reconnu ; vous voilà si grand... C’est que je ne vous ai jamais revu. — Et moi, repris-je vivement, je n’ai jamais remangé de plum pudding. » Il me fit les honneurs du sien, en riant de cette singularité et me raconta, toujours en riant, comment, ayant été blessé trois fois à l'armée de Condé et ruiné une fois pour toutes par la révolution, il se trouvait en pension chez ce traiteur obscur, en attendant que le ministre voulût bien s’occuper de lui. Une rougeur de honte me monta au front en songeant que je m’étais moqué un instant de cet uniforme si peu militaire, sans prévoir quel brave et noble cœur pouvait battre dessous. Nous nous quittâmes, lui riant encore, moi presque pleurant... Et, depuis ce jour, plus de monsieur Fontgibu, partant plus de plum-pudding...
L’hiver dernier, je venais de lire, chez mes cousines anglaises quelques scènes de mon Macbeth tout shakespearien, qu’on jouera peut-être au Théâtre-Français dans quatre-vingt-dix ans : cela me fera bien plaisir. Comme je finissais, une autre dame anglaise m’aborda gracieusement avec quatre de mes vers qu’elle avait retenus par esprit de nationalité, et me dit : « Est-ce que pour l’amour de Shakespeare, monsieur, vous ne voudriez pas accompagner demain vos cousines qui viendront chez moi prendre leur pari d’un plum-pudding aussi bon anglais que votre Macbeth? » J’acceptai après les cérémonies d’usage. « Mais, prenez garde, ajoutai-je gravement, je doisvous prévenir d’unechose. Si j’ai l’honneur de dîner demain avec vous, M. de Fontgibu y viendra aussi, et il ne doit pas être jeune.—Qu’esl-ce que c'est que M. de Fontgibu? » —Et je racontai à ces dames mes deux anecdotes de plum-pudding pour les égayer un peu. Elles s’en égayèrent beaucoup; on n’est pas difficile en amusement, après lalec-tured’une tragédie.—«Je vous promets bien, reprit l’aimable lady, que nous n’aurons pas M. de Fontgibu. Je ne le connais nid’Éve ni d’Adam, et je vous attends demain tout seul. » Et elle sortit. — Le lendemain, j’étais chez elle, avec mes cousines, à six heures précises. Nous nous mettons à table; elle me fait asseoir à son côté, et devant un magnifique plum-pudding. Il y avait dix-huit couverts, et toutes les places étaient prises, comme au repas de Macbeth. — «Eh ! bien, vous voyez qu’on n’attend plus personne, me dit-on de toutes paits. — Et votre M. de Fontgibu?... » — « M. de Fontgibu! annonça un laquais d’une voix éclatante. Et un étranger parut entre les deux battants de la porte.
« Nou9 étions au plus fort du carnaval, el je compris tout de suite que c’était une mystification, une plaisanterie que ces dames m’avaient préparée... Cependant l’étranger, soutenu par un domestique presque aussi vieux que lui, circulait péniblement autour de la table, mettant ses deux mains devant ses yeux pour n’ètre pas ébloui des lumières, et cher-
chant sa place cl la maîtresse de la maison, d’un air lout désorienté. Il approche, il approche, il est à deux pas de ma chaise. Je regarde fixement... je me lève! — Celle douillette puce, ces luneties bleues, celle perruque rousse, c’était lui, lui-même, M. de Fonlgibu! je ne voyais plus personne. Don Juan, dans le chef-d’œuvre de Mozart, n’est pas plus pétrifié par son convive de pierre. * Parbleu, monsieur, m’écriai-je enfin, qui suis-je? qui êtes-vous? et qu’y a-t-il dans ce plat? (Je lui montrai le plum-pudding.) » M. de Fonlgibu, malgré le cornet qu’il appliquait à son oreille, n'avait pas entendu un mot, et tout cela ne lui présentait ’¡en. Pour toute réponse, il me demanda : « Où est madame de N***, je ne la vois pas. — C’est la porte en face, sur le même palier, dit ma voisine. — C’est la porte en face, sur le même palier, » répéta d’une voix de stentor, le vieux domestique dans le cornet de son maître. El M. de Fonlgibu s’éloigna tout aussi doucement qu’il était venu, en se confondant en excuses, et sans se douter de sa mission. — Il dînait cliez cette outre dame, et il s’était trompé de porte... parce que j étais-là, et que j’y étais avec on plum-pudding!...
— Ce n’était donc pas un jeu joué, une chose arrangée?...
— Pas plus par moi que par vous, roilady!
« Trois fois du plum-pudding dans ma vie, et trois fois M. de Fonlgibu! Pourquoi cela?-- Une quatrième fois.... et je suis capable de toul... ou je ne suis plus capable de rien. »
Emile DESCHAMPS.
Hallucinations. — La lettre suivante nous a été adressée dans un but confidentiel, mais le fait qu’elle relate nous a paru trop utile à connaître, et nous en avons résolu la publication tant parce qu’il esl instructif pour beaucoup de magnétiseurs que parce que nous en avons nous-mêmes observé plusieurs analogues. Voici cette lettre :
Je viens d'étre témoin el cause sans le vouloir d’un singulier effet d’hallucinalion dont l’imagination seule a fait tous les frais, car je ne pense pas que le magnétisme y soit pour rien. Voici les faits que jo livre à vos réflexions :
Il y a trois jours, je reçus la visite de M. B.., que j’ai toujours connu pour un homme parfaitement sensé. La conversation, engagée d’abord sur des sujets indifférents, prit insensiblement une autre tournure, et M. B... en vint à me parler de magnétisme. Un article, parM. Alexandre Dumas, qu’il avait lu quelques jours auparavant dans unjournal, l’avait fortement impressionné. En me voyant sourire de son étonnement et môme de son enthousiasme, il me prit pour un esprit fortet me dit : Riez tant que vous voudrez, j’étais comme vous incrédule, mais à présent je crois, et, qui plus est je crains. Je m’empressai de le désabuser, je lui iis comprendre que je partageais ses croyances, sinon ses crainteâ.et qu’il prêchait, comme on dit, un converti. Cependant, ajouta-t-il, si cette puissance existe réellement ello n’est pas sans danger; et le voilà qui se met à énumérer tous les cas où le magnétisme pourrait servir la malveillance. Selon lui il n’y avait plus de garantie possible contre une force qui frappait comme la foudre; la vie privée n’était plus murée aux yeux du somnambule lucide ; le libre arbitre était compromis, etc., etc. Il me fit plusieurs questions dans le même sens, sur lesquelles je l’édifiai de mon mieux, tout en le rassurant sur les dangers exagérés de cette puissance dont il n'avait encore qu’une idée si imparfaite. Je lui parlai de vos belles expériences, et je lui promis môme que je vous demanderais de vouloir bien l’admettre un dimanche à l’une de vos conférences. Il paraissait enchanté, et me quitta brus-
quemcnt en me disant qu’il était pressé, mais qu'il ne sc lasserait pas d’entendre parler de toutes ces merveilles.
Je ne pensais plus à lui ni à notre conversation, lorsque hier soir un commissionnaire m’apporte une lettre qu'on lui a recommandé, dit-il, de ne remettre qu’à moi. Je l’ouvre ; elle était de M. B..., juger, de mon étonnement en lisant ce qui suit d'une écriture tremblée et convulsive :
Monsieur,
Vous avez essayez votre force magnétique sur moi vous n’avez pas réussi mais vous pourriez avoir la temtation de recommencer je tiens donc à vous prévenir que j’ai prévenu plusieurs personnes et que j’ai écrit au préfet de police pour éviter que désormais vous ou d’autres cherchent à faire de pareilles expériences sur moi.
Votre serviteur,
B...
Ce 12 octobre (847.
Le (rouble, l’agitation étaient peints dans ce billet sans ponctuation el avec deux fautes d’orthographe qui. d’après le degré d'instruction que possède M. B..., ne peuvent être attribuées qu'à son désordre mental. Comme on attendait une réponse , je dis à l'envoyé que ne comprenant rien à ce qu'on m'écrivait je n’avais rien à répondre. Je fus tenté de courir de suite chez !U. B... pour avoir l'explication de son étrange missive, mais je fis réflexion que ma présence pourrait augmenter son excitation nerveuse ou lui donner une nouvelle crise .'et je remis ma visite au jour suivant. Le lendemain, monsieur le baron , vous me conseillâtes de ne pas y aller par le3 mômes motifs qui m'en avaient empêché la veille. Mais par une sorte de fatalité je devais le rencontrer ce jour là même. En effet, en sortant de chez vous je me rendis pour affaire dans un établissement public auquel
M. B... esl attaché. Le croyant retenu chez lui jene m’attendais pas à l’y trouver; il venait d’arriver; aussitôt qu’il m’aperçut il devint livide et tremblant, je lui fis sans doute l’effet d’une apparition effrayante, car il me cria de loin avec un geste d’horreur : Ne m’approchez pas! ne m’approchez pas! Sans m arrêter à celte injonction, je marchai vers lui en lui demandant ce que tout cela signifiait. Je ne pusob-tenir que des paroles sans suite à travers lesquelles je crus comprendre qu’il prétendait avoir été magnétisé par moi le jour de sa visite, que c’était uu abus de puissance dont il allait se plaindre au procureur du roi. Voyant qu’il me serait impossible de lui faire entendre raison, je cessai de m’occuper de lui, et je lui tournai le dos ; je n’eus pas plutôt fait quelques pas qu’il se glissa vers la porte et disparut comme une ombre. Alors j’interrogeai les peisonnesqui l’avaient vu la veille et l’instar.l d’auparavant, j’appris que depuis deux jours ce pauvre M. 8... était ainsi halluciné; il avait raconté notre conversation en détail, et il avait ajouté que pendant ce lemps-là, sans doute, je l’avais magnétisé sans qu’il s’en aperçût; car tout d’un coup, pendant que je lui parlais, il s’élait senti comme envahi par une atmosphère embrasée ; il lui avait semblé sentir des flammes circuler autour et en dedans de lui; il avait alors éprouvé une agitation telle qu’il serait tombé à la renverse s’il ne se fut soustrait à cette influence par une fuite précipitée. L’employé qui me donna ces détails voulut savoir ce que je lui avais fait; car lui aussi était persuadé que je l’avais magnétisé. Je lui affirmai sur l’honneur qu’il n’en était rien, que je n’en avais pas môme eu la pensée, et que tout cela était l’effet d’une imagination exaltée. Je lui demandai à mon tour si M. B... n’avait jamais donné liqu de penser qu’il eût la tête faible ; il me dit qu’on ne s’élait jamais aperçu de rien. Je lui recommandai alors de passer chez M. B.., de chercher à le calmer en lui répétant les assurances que je venais de lui donner. Il me l’a bien promis ; je ne l'ai pas encore revu.
K ce sujet ¡1 m’a raconté un fait qui lui csl arrivé à lui-môme étant jeune. Une dame lui dit un jour en plaisantant : Si vous voulez monter sur une chaise, je fais le pari de vous faire descendre sans vous loucher. La gageure étant acceptée, la dame allume un morceau de papier qu’elle place au pied de la chaise ; le jeune homme ne sachant pas ce qu'on voulait lui faire , s’imagine en un instant une foule de choses toutes plus extraordinaires les unes que les autres, sa tête se monte, il va jusqu’à penser que le papier allumé contient une substance qui en s’évaporant doil l’étourdir el le faire tomber. De la tête le trouble passe au cœur, et du cœur dans les jambes. Bientôt il tremble de tout son corps, et il est forcé de descendre. On n’avait pourtant voulu faire qu’un jeu de mots, faire des cendres avec un peu de papier brûlé ; mais l’imagination avait élébien au-delà. Pauvre raison!...
Agréez, Monsieur le Baron, l’assurance de ma haute considération.
Paris, ceS2 octobre 1817.
Revue de» Journaux. — La Presse du dimanche 26 septembre a reproduit la lettre deM. Alexandre Dumas, sur le Magnétisme, publiée dans la Presse du 16 sep* tembre.
— la Presse du 16 rapporle un fait de lucidité ayant pour objet la recherche d’objets perdus. Dans le feuilleton du môme jour se trouve un chapitre des Mémoires d'un médecin sur l’insensibilité à la douleur. Dans son numéro du 17, le même journal publie une nouvelle lettre de M. Alexandre Dumas qui annonce avoir lui-même produit divers effets magnétiques qu’il décrit minutieusement. Celle nouvelle manifestation de sa conviction a produit un bien immense.
— Le Droit du 20 parle de la déconverte d'un trésor par
une somnambule mandée de France à Haïti par le président de celte république.
— Le Siècle du 23 consacre trois colonnes de son feuilleton à démontrer que la lucidité somnambulique est une duperie; car, dit-il, si les lucides voyaient, ils diraient la cote des consolidés à Londres et les magnétiseurs feraient fortune, tandis qu’ils sont presque tous pauvres.
— Le National du 23 contient un long article sur le magnétisme où, à défaut d’esprit, on trouve beaucoup de malveillance. Pour satisfaire une mauvaise passion rien ne coûte au commun des hommes; ils prennent soin cependant de cacher leur nom : tant pis pour le journal qui ne se montre point assez scrupuleux; c’est lui qu’atte’nt la déconsidération. Se moquer aujourd’hui du magnétisme, signaler tous ceux qui le pratiquent comme des fourbes ou des trompeurs, c’est se montrer plein d’ignorance; et, pour des gens qui chaque jour cherchent à faire éclater leur haute vertu et leur zèle impartial, ma foi! c'est à faire douter du fond quand la forme est si outrageante ; heureusement le National ne prétend point être versé dans toutes les sciences, il n’y touche même qu’en passant et donne un coup de boutoir à celles qu’il ne peut comprendre.
PETITE CORRESPONDANCE.
Reim». — M. D.-B. Reçu le petit manuscrit. Nous agirons suivant indication.
Romilty 8. S. — M. V.....n. — Une lettre vous parviendra d’ici
deux jours.
Pari*. — Avis général. — Nous voudrions pouvoir admettre à nos conférences dominicales tous ceux qui désirent y assister; la propagande serait bien plus active. Mais l’exiguité de notre local, eu égard à l’afûuence des demandes, nous oblige à restreindre les entrées aux personnes préalablement autorisées. Cet avis est donné pour éviter un refus aux personnes non abonnées qui se présenteraient sans billet. Cette mesure est temporaire; nous espérons la faire cesser bientôt en agrandissant le lieu de ces réunions.
BIBLIOGRAPHIE.
Nous* avons parlé, page 160, d’un ouvrage qui doit paraître sous, le titre des : Arcanes de la vie future dévoilés. Nous promettions d’y revenir; nous sommes en mesure de l’an-nondër comme un livre très-sérieux. L’auteur s’est servi des somnambules extatiques pour communiquer avec des décédés et obtenir de ces derniers des preuves irrécusables de leur existence au monde spirituel. D’intéressantes conversations avec ces hommes-espriis résolvent au moins 1,200 questions tant sur la théologie, la psychologie et la métaphysique que sur les propriétés antérieures, présentes, et futures, de l'âme. Cet ouvrage renferme de curieuses révélations, dit-on, sur la nature des pensées, et du libre arbitre, l’astronomie et les sciences occultes. L’auteur a sacrifié 10 années de sa vie à la composition de cet ouvrage. N’ayant pas les moyens de le faire imprimer, le propose en souscription, dont voici les conditions : 4 vol. in-8° ou un format plus avantageux d’environ 300 pages. Prix : B francs pour Paris, payables en recevant l’ouvrage,
Onsouscritchezl'auteur,M. Alp. Cahagnet,17, rueTique-tonne, à Paris, et au bureau de notre journal. Ecrire (franco).
L’impression en sera commencée aussitôt que 100 souscripteurs auront été réunis ; il y en a déjà 54.
Le Propriétaire-Gtrant : HÉBERT (deGarnay).
Saint-Cloud. — Imprimerie de Belin-Mandar;
INSTITUTIONS MAGNETIQUES.
Lettre de M. l'abbé Almigmna.
(Suiteel fin.)
D’abord des ouvrages en faveur du magnétisme ont é!4 publiés par un membre du clergé calholique, magnétiseui lui-môme, SI. l’abbé Loubert, et dont voici les titres: i° Le Magnétisme devant les corps savants. la cour de Rome et les théologiens; 2“ Défense théologique du Magnétisme Immain.
Je connais plusieurs ecclésiastiques, les uns personnellement, les autres de réputation, parmi les curés doyens, chanoines titulaires, professeurs de sciences dans de grands séminaires, et dans des établissements universitaires en France et ailleurs, jusque dans l’Amérique, qui, loin de voir dans le magnétisme l’ouvrage du démon, le considèrent comme une force physique et médicairice dont l’homme est doué par son Créateur, et qui, loin de le proscrire, l’exei-cent dans l'intérêt de l'humanité.
J'en connais aussi qui, après avoir consulté la théologie, se sont soumis sans scrupule à l’action magnélique, et qui, dans leurs maladies, sont allés jusqu'à consulter des somnambules.
Des ministres du sanctuaire ne se sont-ils pas présentés chez des médecins magnétiseurs avec leurs sœurs malades, pour les faire magnétiser?
Moi-môme n'ai-je pas magnétisé deux respectables ecclésiastiques dans des vues de charité?
TOME Y — X” 5». — 10 NOVEMBRE 1847. 8
Un des modèles de l’éloquence sacrée, le R. P. Lacor-daire, n’a-t-il pas reconnu, du haut de la chaire de la vérité, l’existence de la force magnétique? N’est-il pas vrai que, loin de voir du satanique dans le magnétisme, l’éloquent oraieuradit que le magnétisme était une préparation divine pour humilier l’orgueil des matérialistes?
Si du simple sacerdoce nous passons à Fépiscopat, le magnétisme a en sa faveur le témoignage de trois pontifes recommaiidables par leur piété et leur science. Ce sont Mes-seigneurs Bouvier (1), évêque du Mans, Gousset, archevêque de Reims, et Son Eminence le cardinal Bonald, archevêque de Lyon, qui, loin déqualifier le magnétisme de satanique, le considèrent, après des expériences passées sous leurs yeux, comme une force naturelle et physique.
Moi-même n’ai-je pas porté à la connaissance de deux respectables prélats que, dans l’intérêt de l’humanité et même de la religion, j’avais appris le magnétisme, et que je l’exerçais dans des vues de charité, sans en avoir été
(4) Nous avons appris que Mgr Bouvier, évêque du Mans, venait de suspendre de ses fonctions ecclésiastiques M. l'abbé Dupré, supérieur du collège de Mayenne, uniquement parce qu'il 3'occupait de magnétisme.
Si cela est vrai, la conduite do ce Prélat, contraste avec l’opinion antérieurement émise par lui, et rapportée ainsi par M. l'abbé Lou-bert dans sa Défense Théologiqut du Magnétisme humain, page 224 : « En France, non-seulemeni les laïques en grand nombre se
• livrent à l'étude et à la pratique du magnétisme, mais déjà beau-
• coup d'ecclésiastiques ont cessé de lui être étrangers ; plusieurs
■ se sont déclarés en sa faveur, surtout depuis que le premier, » parmi tes théologiens français, Mgr Bouvier, évêque du Mans, a
■ osé écrire qu'il n'oserait pas condamner ceux qui font usage de
• cetU science.
Nous nous abstenons de réflexions sur la double conduite de Mgr l’évôque du Mans, jusqu’à ce que nous en ayons de plus amples renseignements.
{Note de la Rédaction).
blâmé le moins du monde par ces deux membres de l’épis-copat?
Monseigneur Fiaromonli, prélal romain, n’est-il [»s le plus zélé propagateur du magnélisme dans la capitale môme de la catholicité et sous les yeux de l’oracle du Vatican?
MM. les prélats, curés et avocats de Rome, loin de repousser le magnétisme comme satanique, ne sont-ils pas enthousiasmés des guérisons opérées par la médecine de la nature?
La Sainteté de Pie IX, après avoir fait examiner un ouvrage de M. Ferdinand Barreau, sur le magnélisme, e» l'avoir déclaré exempt de toute censure, ordonna que des remeicimenls fussent adressés à l’auteur dudit ouvrage, en lui envoyant la bénédiction papale. Cette conduite du successeur de saint Pierre à l’égard d’un magnétiseur et d’un ouvrage de magnétisme, ne prouve-t-elle pïts que le souverain ponlife est bien loin de croire le magnétisme l’ouvrage du démon? Mais passons maintenant aux ministres des autres culies.
Je sais bien que parmi les religionnaires, il y a une bonne dose de superstitions et de préjugés dont quelques-uns sont partagés par leurs propres ministres; mais je sais aussi que parmi les ministres protestants il y a des hommes éclairés qui, laissant leurs confrères dans l’ornière de l’ignorance, marchent dans la voie du progrès.
C’est dans celte dernière catégorie que j’en connais qui, loin de regarder le magnétisme comme l’ouvrage de Satan, le connaissant, l’ont adopté comme un moyen naturel de soulager les malades.
J 'ai suivi un cours de magnétisme, ayant pour condisciple un ministre protestant, et j’ai su postérieurement qu’il magnétisait dans l’intérieur de sa maison.
Malgré les préjugés des bigots d'Angleterre, il n’est pas moins vrai que deux grands personnages du clergé anglican, les évêques de Dublin et d’Oxford, se sont prononcés pour le
magnétisme, el aujourd’hui lui portent le plus vif intérêt.
Mais pourquoi prolonger une question qui peut être vidée sur-le-champ par des moyens aussi faciles qu'infaillibles?
Saint Chrysostome, dans son liumélie intitulée : bc l’A-doralion de la Croix, nous dit entre autres choses, que la croix, signe vénérable de notre rédemption, chasse les démons.
L’Eglise, par le langage mystérieux qu’elle tient dans les exorcismes et prières lors de la bénédiction de l’eau le dimanche, nous apprend que cette tau sanctifiée a la vertu de chasser les démons. Ut Jias aqua exorcízala ad effugandam omnein putestatem inimici et ipsum innnicum eradicare et ex-liluiilure ruinas......
lit crcalura tua.......ad abigendot dœmones, divina; tuœ
gratte sumat effectum. Voilà ce qu'on lit dans le Missel et dans le Rituel.
Jésus-Christ nous dit que par la prière et le jeune on chasse le démon (S. ilattli., ch. xvii).
Nous avons encore dans le Rituel la bénédiction des maisons infestées par les mauvais esprits : Henetlictionem domus tua: ù ifiiritibus infeuatur.
Celui donc qui, parmi les simples fidèles, désirerait s’assurer, pour la tranquillité de sa conscience, si effectivement le démon intervient personnellement dans les opérations magnétiques, n’aurait qu’à se préparer par la prière et par le jeûne, et dans cet état se présenter dans une séance magnétique (ce qui ferait grand plaisir aux magnétiseurs), muni d’une petite croix et d’un peu d’eau bénite, pour en faire l’aspersion sur tout le local. Un prêtre pourrait y ajouter la bénédiction des maisons infestées par les démons.
En mettant donc en pratique ces moyens si saints, que (’Eglise met entre les mains de ses ministres, et môme des simples fidèles, pour chasser les démons, il est certain que si le démon se trouve dans la chambre où les opérations magnétiques ont lieu, il s'enfuira, et le magnétisme exercé
par le plus habile magnétiseur restera sans effet; car si le démon est la cause des phénomènes magnéliqnes, sublatû r.atusâ tollitur effectus.
Si les moyens que je viens d’indiquer pour connaître si le démon intervient dans les opérations magnétiques, paraissaient tant soit peu gênants, il y en a encore un autre extrêmement facile.
Saint Athanase, pour prouver aux païens la puissance du saint nom de Jésus, leur parlait ainsi : « Que celui qui voudrait l’éprouver vienne.... Au seul nom de Jésus, il verra que les démons fuient. »
Le plus simple fidèle peut se présenter là où l’on magnétise, el prononcer avec foi le nom de Jésus; si le démon s’y trouve, il fuira, et les phénomènes magnétiques cesseront.
Lorsque quelqu’un, se servant de ces moyens saints pour chasser les démons, aura paralysé le cours des phénomènes magnétiques dans une séance, alors il sera en droit d’être cru sur l'intervention personnelle du démon dans le ma-gnélisme. Jusque-là, toutes les déclamations des adversaires du magnétisme ne seront que vox clumantis in deserto pour tout homme de bon sens.
Qu’il me soil permis, avant de finir celle longue lettre, de faire encore une et dernière réflexion.
Il y a des personnes qui nous disent que le magnétisme est diabolique dans le sens que l’on peut en abuser et s’en servir pour des actions coupables.
Quelle est donc la chose dans le monde don! 011 ne peut pas faire le plus mauvais usage? El pour cela doil-on dire que tout est diabolique dans le monde?
Parce que de grands criminels avalent de grosses doses d’arsenic pour se soustraire par le suicide aux châtiments exigés par la vengeance publique, faut-il défendre l'usage de l’arsenic comme une invention satanique, et priver la pharmacopée d’un de ces remèdes qui servent bien souvent à certaines préparations chimiques?
Parce qu’en place de se servir d’un couteau pour couper un morceau de pain pour donner à un pauvre, on s’en sert pour tuer un homme, faul-il proscrire l'usage du couteau comme une chose diabolique, lorsqu’il esl très-utile dans un ménage?
Je dirai plus, llien de plus saint dans son origine, dans sa cause et dans ses effets que les sacrements. Et parce qu’on s’en sert malheureusement quelquefois dans des buts tout à fait contraires à la sainteté de ces mêmes sacrements, que l’on profane, peut-on dire que les sacrements sont l’ouvrage du démon et, comme tels, doivent être proscrits de l’Eglise de Dieu, privant par là la généralité des fidèles de ces canaux mytérieux par où Jésus-Christ communique ses grâces aux vrais adorateurs? C’esl absurde et plus qu’absurde.
Pour éviter les abus que des cœurs corrompus pourraient faire jusque des choses les plus saintes, il y a de sages précautions à prendre.
Quant au magnétisme thérapeutique, au milieu de sa simplicité et de son innocence, pour le mettre à l’abri de la moindre tentative de corruption, on peut prendre des précautions convenables.
Ces précautions sont sagement indiquées par M. l’abbé Loubert, dans sa défense théologique; je me permets de les en extraire littéralement, afin qu’elles soient connues de tout le monde :
« Mais où mettra-t-on l’impureté, l’attrait des sexes, la » volupté dans le magnétisme, si c’est un homme qui ma-» gnétise un homme, si c’esl une femme qui agit sur une » personne de son sexe, si l’on admet une tierce personne » comme témoin, si 011 fait pour le magnétiseur magnéti-» sant une jeune fille, une femme, comme fait la mère, » l’époux accompagnant par sage et louable prudence sa » fille, sa femme dans le cabinel du dentiste, du notaire, de » l’avocat, du médecin? Or, non-seulement cela est possible, » mais cela est facile, el ce n’est pas seulement la moralité
» qui y gagne, mais encore les effets magnétiques, parce » qu’alors la volonté du magnétiseur est plus calme et plus » à ce qu’elle fait. »
M. le baron du Potet, dans les cours de magnétisme que j’ai suivis avec lui, n’a pas manqué de dire à ses élèves de ne jamais magnétiser sans qu’il y ait au moins un témoin oculaire, parce que la science ne ferait que gagner à ces sages précautions.
En voilà assez du magnétisme.
Pas d’orgueil, pas de vanité, pas de partialité. Charité, vérité, impartialité ei franchise doivent ôtre la devise de l’honnôte homme. Si quelqu’un, en lisant cette lettre, trouve que je me suis trompé dans mes assertions (car, faible mortel, je ne suis pas exempt d’erreurs), et veut, dans l’intérôt de la religion et moyennant une discussion théologique, me mettre dans la voie de la vérité, j’accepterai avec autant de plaisir que de remereiments la proposition.
Mais il faut que ce soit une discussion semblable à celles des évêques catholiques et donatistes d’Afrique, c’est-à-dire une discussion de corps à corps, verbale et publique, du moins en présence de plusieurs témoins.
Si je suis vaincu dans la lutte, je promets, in verbo sacer-dotis, de me rétracter, de vive voix et par écrit, de tout ce que je viens d’avancer dans cette lettre, et, avec la même franchise que j’écris en faveur du magnétisme thérapeutique , je saurai aussi écrire contre, car je ne suis vendu à personne dans ce monde, absit ; mais aussi, si je reste vainqueur sur l’arène, je ferai alors connaître, par la voie de la presse, toutes les faces de la discussion, avec les notes et commentaires que je jugerai à propos, pour éclairer les peuples qu’on tache de tenir toujours dans l’ignorance, contre l’exprès commandement de notre divin maître Jésus : ite ibcetc omnes gentes; et je sais pourquoi.
Celui qui désirerait entrer en discussion avec moi pourra m’écrire au bureau du Journal du Muynélime. A la récep-
lion de la lettre, nous conviendrons sur les moyens à prendre pour réaliser nos désirs.
Tel est le mince travail que j’ai cru devoir faire pour combattre certains préjugés qui s'opposent encore aux progrès du magnétisme thérapeutique, et dont je m’empresse de faire hommage à la Société du Mesmérisme île Paris, en échange de la confiance qu’elle a daigné m’accorder par sa lettre, si Ilalteusepour moi, du 17 août dernier, pour qu’elle en fasse l’usage qu’elle jugera à propos dans l’intérêt delà cause du magnétisme thérapeutique, synonyme de celle de l'humanité.
Je compte sur l’indulgence de la Société pour les fautes qui précisément doivent se trouver dans une pensée espagnole rédige"« en français par un Espagnol.
L’abbé Ai.hignan \,
Docteur ni droit cation.
Paris, eu 20 «rpleinlire I8i7.
Errata. — Page ¿31, ligne 1(i, au lieu de iftu, lise/, sed : et ligne 18, au lieu de Scoperunt, lisez pofucrunt.
Documents sur Mesmer.
L’appel fait a été entendu, et bientôt tous les éléments d’une biographie complète de Mesmer seront colligés. Ce qui suit est extrait du Moniteur universel; nul biographe n’en fait mention, c’est donc très-important pour l’histoire de la •vie et des travaux de cet homme illustre. Les épilhètes de fameux, célèbre, qui lui sont données dans ces extraits, donnent la mesure de l’opinion qu’en avaient nos pères , à cette époque déjà éloignée de celle de ses luttes avec les corps savants. Voici textuellement ce qu'on lit dans les :
N° 92, 2 nivôse an n (22 décembre 1793).
Paris, le \” nivôse.
Les lettres de Vienne en Autriche confirment la nou-
velle que le fameux Mesmer a été arrêté dans celle capitale, par ordre du gouvernement, el que les scellés ont été mis sur ses papiers.
N° 125, 5 pluviôse an ii (24 janvier 1794).
Vienne, le 1er janvier.
Le père du magnétisme, le fameux Mesmer, a reçu l'ordre de quitter Vienne el les Etais de l’empereur, dès qu’il aura arrangé ses affaires. On lui a, pour cet effet, accordé quelque temps. Le projet du célèbre professeur est de se retirer en Suisse.
N° 201, 21 germinal an vu (lOavril 1799).
Paris, 20 germinal.
Le fameux Mesmer se propose de faire hommage au gouvernement de sa découverte. Il a présenté au ministre de l’intérieur une pétition donl l'objel esl de demander un jury de savants , pour examiner contradictoirement avec lui le système du magnétisme animal ; s’il reçoit l’approbation du jury, Mesmer propose de professer sa doctrine en faveur de ceux qui se destinent à l’art de guérir, et de leur enseigner la pratique au lit das malades.
HOPITAL MESMÉRIQUE DE CALCUTTA.
Premier rapport du docteur Esdaile; traduit par M. le comte de Folt.hécohr.
Le gouvernement ayant approuvé la publication de rapports mensuels sur mon hôpital, comme le meilleur moyen de répandre dans le public des notions exactes sur un sujet qui l’intéresse tant, je fournirai désormais, chaque mois, un résumé de ma clinique, alin que le monde sache ce qui se passe à l’hôpital mesmérique et que mes relations puissent être corroborées ou contredites sur les lieux, tandis que les faits sont récents dans la mémoire des témoins.
Je ne puis nommer les personnes qui ont assisté aux opérations que je relate, par la raison que la plupart me sont inconnues, mais j’espère qu’elles rectifieront sans scrupule et de bonne foi celles de mes assertions qui seraienfcontraires à leurs propres observations sur des points essentiels.
Je regrette de n’avoir ce mois-ci rien de nouveau à consi-, gner : la raison en est que le succès obtenu dans l’ablation anesthésique des tumeurs scrolales, si communes en ce pays, attire tous ceux qui en ont, dans un rayon assez étendu, et que le bruit court même dans le public que mon charme n’est applicable qu’à ces cas. Ajoute/, à cela que les Indiens ignorent totalement l’efficacité thérapeutique du mesmérisme et vous comprendrez pourquoi je n’ai rien fait de nouveau depuis mon arrivée à Calcutta. L’horizon bientôt s’agrandira ; à mesure que le public se familiarisera avec le sujet, l’application s'en étendra aux maladies internes qu’aussi bien aux externes, je pourrai alors communiquer des observations plus intéressantes et plus variées.
Dans ce rapport, je vais d’abord exposer les faits du mois dernier, puis je les commenterai.
— Doahmony, paysanne, de 50 ans, est venue de Henares, le 7 décembre, pour se faire enlever un squirrhe énorme du sein droit. La tumeur apparut il y a deux ans ; elle est mobile, dure, élastique; il n’y a point d’engorgement des glandes axillaircs; la santé ne parait pas Uop mauvaise. y •
Endormie à la 7e mesmérisation, elle fut insensible et un peu cataleptique le même jour. Le lendemain elle fut endormie de nouveau et la tumeur enlevée aux deux tiers sans qu’elle remuât ou parût sentir; mais alors elle s’éveilla et sembla recouvrer íes sens avant la fin de l’opération. Nulle contrainte manuelle ne fut nécessaire pendant l’opération, mais immédiatement après elle entra dans une violente agitation qui obligea de la contenir pour faire la ligature arlé rielle.
Celte malade esl sortie le 29 décembre, sa plaie étant presque cicatrisée.
— Ram loch un Doss, tisserand, de Serampore, âgé de 60 ans, porte une tumeur depuis 50 ans. Endormi cinq jours de suite avant l’opération, il fut opéré le 1er décembre.
Il ne fit pas le moindre mouvement du corps ou des membres. Un gémissement indistinct s’échappa durant la section du cordon, mais le patient demeura totalement passif et immobile pendant et après la ligature des artères. Son pouls étant très-faible par suite du sang perdu, je crus utile de lui administrer un cordial el de l’éveiller.
Il fut très-difficile à éveiller; il ne voulait pas être dérangé ; enfin il ouvrit les yeux, et sa première demande fut pourquoi tant de monde l'entourait.
Il se trouvait bien et dit qu’il sentait une légère chaleur au siège de son mal, ce qui le fit y porter la main el savoir que l’opération était terminée.
Sa tumeur pesait 40 livres; il s’est rétabli sans accident; la plaie sera bientôt cicatrisée.
— Katick Doss, laveur, esl entré le 6 décembre; il a une tumeur depuis 16 ans. Endormi le cinquième jour, il fut opéré le septième. M’étant blessé à la main, je ne pus l’opérer; M. K. O’shaughnessy eut l’obligeance de me remplacer. I-adissection fut longue el difficile; le patient resla tranquille jusque vers le milieu de l'opération, mais alors il commença à s’éveiller et l'était tout à fait avant qu'elle fût terminée. Il se plaignit néanmoins longtemps de nu pas voir. ■— Ce fait singulier se représentera bientôt.
Cet homme a été dans un état très-alarmant. Il est survenu do la salivation, de la diarrhée et de la fièvre, mais je pense qu’il est maintenant hors de danger.
— J’espère que le lecteur apportera la plus grande attention au récit de l’étrange événement qui suit, dans lequel la nature soulève elle-méme un coin de son voile et nous ad-
met à un léger aperçu des mystères de la vie intérieure de l’homme.
Sheik Manick, laboureur, vint de Burwan, le 21 novembre, pour se faire amputer une tumeur énorme. Il est sujet à un accès de fièvre tous les quinze jours dont sa santé ne parait pas beaucoup souffrir. Nous le comatisâmes dés le troisième jour et nous le fîmes encore les quatre suivants, au bout desquels la fièvre survint et fut suivie de diarrhée, ce qui nous obligea d’interrompre le traitement préventif de la douleur.
La mesmérisation fut reprise le \ décembre, mais dans cet intervalle son organisme avait réagi contre l’influence magnétique et nous fûmes obligés de recommencer tout notre ouvrage. Le retour périodique de la fièvre me décida à profiter de la première occasion favorable à l’opération.
Le 12, ses bras, croisés sur sa poitrine, étaient rigidement fixés dans celte altitude et ne pouvaient être allongés; il était insensible aux piqûres que je lui fis en différents endroits; le moment me parut favorable, et je me mis en devoir de l’opérer.
Je dois noter qu’après avoir éprouvé sa sensibilité, je l'éveillais chaque fois pour m’assurer s’il avait conscience des piqûres queje lui avais faites en sommeil.
La tumeur était si volumineuse que je dus renoncer à l’espoir de conserver les organes profonds; j’opérai comme le docteur Stewart dans un cas analogue (celui de Hurromun-doo-Laha, au Native hospital. Voyez t. iv, p. 199).
Vers le milieu de l’opération il cria et donna divers signes de souffrance ; mais ses exclamations élaient ou inintelligibles ou sans rapport avec son état actuel. Peu de temps après le pansement, il vomit son dernier repas et le pouls devint imperceptible. 11 répondait avec rudesse et distraction ; tout ce que nous en pûmes obtenir c’est qu’il ne voyait pas, malgré qu’il eût les yeux grand ouverts. Lorsque je voulus lui donner un cordial, je trouvai ses dénis forlement serrées et ses
bras d’une ligidilé considérable. Il continua de se plaindre confusément durant une heure environ que je le gardai. — La tumeur pesait 100 livres.
L'opération eut lieu à midi ; je retournai le voir à 4 heures. Il dormait profondément; je l’éveillai. Il me dit qu’il était en pleine jouissance de tous ses sens, qu’il voyait très-bien; il parlait haut et ferme comme à son ordinaire. Il avait dormi profondément, disait-il, depuis 40 heures du matin (moment de sa mesmérisation) jusqu’à l’instant même. Je lui demandai quand il m’avait vu en dernier lieu :
— Hier, répondit-il, lorsque vous m’avez réveillé comme de coutume. Il ne se rappelait pas avoir été dérangé , et dit que certainement il n’avait point vomi aujourd’hui. Pressé de se rappeler si rien n’avait troublé son sommeil, il dit: « Ah ! oui, je me rappelle maintenant ; j’ai été éveillé un instant par des cousins qui me piquaient, mais je me suis rendormi jusqu’au moment où vous m’avez éveillé. » S'apercevant bientôt que le poids de son fardeau lui manquait, il se mit sur son séant pour le chercher, et en voyant l'état des choses il exprima la plus grande surprise, disant : « Pourquoi ne m’avez-vous pas prévenu que vous vouliez le faire aujourd’hui? »
Je le priai de se remémorer tous les événements de la journée jusqu’à ce moment. Il le fit minutieusement jusqu à 40 heures, passé lesquelles il ne se souvenait que des piqûres des cousins et de son réveil effectué par moi. Il répéta qu’il ne m’avait point vu depuis hier. — 11 était magnétisé quand j’arrivai à l'hôpital, voilà pourquoi je ne me trouvais pas dans ses souvenirs de l’état de veille. De 40 à 4 heures son existence était en blanc. Je pense qu il ne s’est point éveillé, mais seulement qu’il a passé de la trance mesméiique(extase) la plus intense au somnambulisme (caractérisé par l’absence de souvenir au réveil), dans lequel il y a eu réveil des facultés instinctives, causé par l’abondance et la soudaineté de l'hémorrhagie, sans que celles de
la vie de relation cessent d’être lorporeuses et comme enchaînées jusqu’au moment on je l’éveillai.
La plaie fut cousue le 15 décembre. Ses exclamations durant cette opération ne manquaient plus de sens, mais elles étaient emphatiques et appropriées : il injuriait tout le monde dans les termes les plus expressifs du Bengale. Le rétablissement se fit sans accidents consécutifs, et le28 il se promenait.
— Sheck Nemoo, âgé de 50 ans, a une petite tumeur. Venu le 4- décembre, il a été entrancè au bout de huit jours et opéré le surlendemain.
L’opération a été des plus graves el difficile à cause de la dureté presque cartilagineuse de la peau el de son étroite adhérence avec les parties sous-jacenles. Le patient, vers la fin, offrit les signes ordinaires de la douleur: il demanda de l’eau el un punkah; mais quand il fut complètement remis, environ 10 minutes après, il demanda quand el par qui il avait été opéré. — 54 décembre , il va bien.
— 11 résulte de ce qui précède que deux, sinon trois des patients revinrent à eux avant la fin de l’opération; je regarde le cas extraordinaire de Sheik Manick tout aussi satisfaisant que s’il eût joué le rôle d’un cadavre. Car quand ces mouvements convulsifs, qu’on observe souvent, ne laissent aucune trace dans la mémoire et que nulle partie du corps ne reste douloureuse lorsque la personne s éveille; de tels cas sont assurément pour lous les chirurgiens des opérations satin douleur. Si un homme n’a nulle conscience d’une opération, et qu’éveillé il ignore son effectuation, comment peut-on la qualifier si ce n’esl indouloureuse?
Comme praticien, je suis entièrement satisfait si les malades m’assurent qu’ils n’ont rien senti, surtout si chaque parole, regard, action s’accordent avec leur dire. Pour l’observateur soigneux, ces mouvements vagues, convulsifs, sonl tout aussi bien les signes spécifiques et caractéristiques d’un étal extraordinaire de l’organisme que la soumission
comme cadavérique aux plus cruelles tortures. Quand la irance ( sommeil) n’esl que troublée, les mouvements qui se manifestent sont aussi peu dignes d’attention que ceux d’un cadavre galvanisé ou les sauts d’une volaille dont on vient de couper le cou.
Les nerfs spinaux semblent être seuls irrités sans que le cerveau ou le système nerveux volontaire particij>e à cet état : car il n’y a point acte de volonté sans sensation : and as long as there is no volition, there h no sensation. Il n’y a de la part des patientsnu I essai de soustraire la partie à l'instrument, ni de repousser celui-ci avec leurs mains; il est donc tout à fait évident qu’ils n’ont nulle idée de la source de leur malaise. Si la volonté dictait ces mouvements, il en resterait quelque souvenir. Mais ordinairement il n’y en a pas. Il est, à mon avis, très-probable que cette irritabilité musculaire pourrait ûtre généralement amortie par la prolongation du traitement mesmérique; mais ça n’en vaut pas la peine, car le corps ne souffre pas plus que quand il n’y a pas un frisson. Bien convaincu que ce qui précède est vrai, j’ai toujours agi en conséquence. J’arrive maintenant à un fait également pratique, dont la découverte m’a coûté la plus grande partie du mois dernier.
Ce n’est certes pas un faible triomphe pour la science ni pour l’humanité un don de mince valeur que de rendre des hommes insensibles, ne fût-ce qu’à la moitié des horreurs de terribles opérations; mais habitué depuis longtemps à épargner à mes particuts mute notion des tortures que je leur infligeais, je fus très-vexé des demi-succès obtenus le mois dernier. Un seul mois ayant offert autant de résultats imparfaits que les dix-huit précédents, je soupçonnai l’existence d« quelque influence perturbatrice, qui m’aurait échappée ou inconnue, et je résolus de ne pas avancer que je n’eusse découvert la cause de ce trouble. Durant l’été les malades sont mesmérisés tout nus et opérés de même; mais le mois dernier on les magnétisa sous un drap et deux couvertures,
le visage étant seul découvert. Après s’êlre assuré de leur insensibilité dans la chambre à magnétiser on les portait sur leurs lits dans celle à opérer, traversée du nord au sud par un courant d’air froid, dans laquelle on les exposait tout nus alin que les assistants vissent tous leurs mouvements. J’ai remarqué en plusieurs occasions que cette exposition du corps à l'air froid était immédiatement suivie d’une inspiration profonde et de mouvements involontaires, quoique ces personnes eussent élé, l’instant d’avant, absolument indifférente* aux plus grands bruits, aux piqûres et pincements. L’action démagnétisante du froid, artificiellement appliqué, m’étant familière, comme on peut le voir dans mon Maniérisme in India, il paraîtra surprenant que je ne me sois pas mieux tenu en garde contre lui comme agent naturel. Ma seule excuse est la stupéfiante influence d’une routine heureuse ; l'échec reconnu instruit souvent plus que le succès.
Je suspectai le froid d’être l’ennemi secret de l’œuvre et je me mis immédiatement en devoir de m’en assurer par des expériences directes. Deux hommes préparés à être opérés furent soumis à la série d’épreuves qui suit :
Molhoor, portefaix à Cutiack, est affecté d’une tumeur ordinaire. Il m’a élé envoyé par son frère Bogobun Doss, que j’ai délivré d’une tumeur de 50 livres, il y a un an, à Hooghly, et qui m’a aussi envoyé Murali Doss, que j’ai opéré devant la commission mesmérique dans Native hospital.
Motlioor endormi le 27 décembre fut soumis à l’action de la machine électro-magnétique à aimant central intérieur ; ses mains et son corps tremblèrent synchroniquement avec les chocs, mais son altitude resta parfaitement calme; au bout de dix minutes sa lète se tourna convulsivement de cftté, mais ses traits n’en furent point altérés et il continua de dormir.
En lui prenant les bras je vis une cloche à l’un d’eux; j’y fis une incision cruciale sans qu’il frémît le moins du
monde. On le transporta alors avec ses couvertures, el son lit fut placé à la porte nord de la salle à opérer ; les couver-lures et le drap fuient subitement enlevés, ce qui l’ex|K»sa nu à l’air froid ; au bout de deux minutes environ il frissonna do tout le corps, la respiration se doubla, et il chercha à droite et à gauche ses couvertures, mais dormant toujours; 011 les lui approcha el il s’en couvrit, ou plutôt s'en empaqueta avec la plus grande satisfaction, quoique toujours dormant. On rapporta le lit dans la chambre à magnétiser où on l'éveilla par le procédé ordinaire. Il dit qu’il avait dormi profondément, sans même rêver, el venait de s’éveiller en sentant le froid. Quand on lui montra la plaie du bras, il en fut grandement étonné et dit qu’en donnant il avait sans doute heurté la vessie contre quelque chose qui l’avait crevée.
I.e lendemain, une nouvelle application de la machine électro-magnétique l’éveilla.
Le 29, magnétisé davantage, il resta immobile plusieurs minutes à l’air libre, puis il frissonna partout; sa respiration devint irrégulière, el il s’éveilla immédiatement avec la pleine jouissance de ses sens. Le froid, disait-il, l’avait éveillé.
Le 30, je couvris d’acide nitrique sa plaie du bras; la chair blanchit aussitôt, mais il ne tressaillit pas le moindrement : une épingle fut aussi enfoncée et laissée dans la chair entre les doigts, sans qu’il s’en aperçût. Il fut alors porté à l’entrée de la porte nord où il s’éveilla au bout d’une minute d’exposilion à l’air. Il dit encore que le froid l’avait éveillé.
L’épingle fichée entre ses doigts l’intrigua beaucoup; il l’arracha en manifestant autant de douleur que le feraient la plupart des gens en pareille occurrence. On lui montra ensuite sa plaie blanchie; il parut à l'instant en souffrir grandement, comme tous ceux dont une plaie vive est mise en contact avec des acides minéraux : la douleur était «i
aiguë que j’ordonnai de lui fomenter le bras avec de l’eau chaude.
Un poêle fut commandé pour la salle des opérations.
Le 31 , la salle étant agréablement chauffée, je l’opérai devant une nombreuse assistance, en ne découvrant que les parties malades. L’opération fut grave et longue, à cause de la dureté excessive de la masse infirme et de sa forte adhérence aux organes délicats qu’elle couvrait. Aucun souffle, pas le moindre tressaillement sous l’instrument; les seuls mouvements observés furent, m’a-t-on dit, quelques légères contractions du front et des orteils.
Environ -10 minutes après la ligature des artères, il s’éveilla comme naturellement, se détira, se plaignit d’ayoir les cuisses et les bras roides ; et en voyant son frère, Bogo-bun Doss, il le pria de les lui masser. Il dit qu’il avait très-bien dormi, que rien ne l’avait troublé el qu’il n’éprouvait nulle douleur. La plaie lui fut alors montrée ; il en exprima la plus grande horreur et crainte, s’écriant qu’elle le faisait souffrir terriblement. Un instant après je lui demandai si Bogobun Doss lui avait dit vrai ; « Oh ! oui, répondit-il, ça s’est fait exactement comme il me l’a décrit. »
— Chaud Khan, âgé de 36 ans, a la même affection. Nous commençâmes à le magnétiser le 8 décembre ; le 25, il était insensible aux piqûres. Le 27 , on porta son lit à la porte du nord. Je l’appelai très-haut et arrachai une pincée de sa moustache sans qu’il s’émût. Alors j’enlevai les couvertures; en moins d’une minute il frissonna, soupira profondément, comme une personne qui sort d’une douche froide ; chercha avidement à se couvrir et souleva ses paupières avec effort, mais en vain. Il s’éveilla bientôt et dit que c’était par le froid.
Le 28, il fut de nouveau exposé à l’air froid. Après les frissons, la recherche des couvertures, qu’il ne trouva pas, comme la veille, il se pelotonna comme un hérisson, fil
des efforts pour se réconforter, puis s’éveilla bientôt, disant que c’était le froid.
Le 50 il se comporta absolument de même.
Le."l je lui enfonçai une épingle dans le nez et l’y laissai un moment avant de le découvrir. Il s’éveilla comme les jours précédents. En se levant il se frotta le nez, et l’épingle en sortit, à sa grande surprise. Lorsqu’il fut levé, je lui piquai de nouveau le nez, il le sentit aussi vivement que qui que ce fût.
Le lendemain il fut opéré sans s’en apercevoir, et quoique l’opération fût moins formidable qu’on ne s’y attendait, elle fut très-curieuse et sera relatée le mois prochain.
— Des faits qui précèdent je me crois autorisé à dire : qu’il a été démontré que les malades en tranre (1) magnétique peuvent être insensibles
1° Aux plus grands bruits;
2° Aux piqûres et pincements douloureux ;
3° A la dissection des tissus enflammés;
A l’application d’acide nitriquesur les chairs vives;
5° A la torture d’une machine électro-magnétique ;
6" Aux plus douloureuses opérations chirurgicales,
Et cependant être rappelés à leur entière connaissance par l’exposition du corps à l’air froid durant quelques minutes, g? Toutes les personnes admises le mois dernier pour être opérées, ont été amenées à l’état mesmérique voulu, hors une.
James Esdaice, M. D.
Calcutta, l'r janvier 1847.
(1) Excellente expression qui n'a point d'équivalent en français. Les magnétistes anglais l’emploient pour dénommer l'état complexe nui est propre aux opérations, état qu’on ne peut rendre exactement ni par sommeil, ni par extase, ni par catalepsie, ni par coma, ni par léthargie, parce qu'il est analogue à tous, identique à aucun sut ye-neris enfin.
(Note de la Rédaction).
( :Oi\ F ÉREXCES M AG¡VÉT IQUES.
Magie (1).
Heureux les hommes dont l'esprit fertile sait créer pour toutes choses un langage plein de charmes. Heureux le romancier qui, sans souci de la vérité, fait sortir de son cerveau des faits imaginaires et les revêt d’un coloris brillant;, tout en trompant, il amuse el divertit. Et, ne sont point à plaindre, non plus, ceux qui, à défaut de science et de réalité, savent inventer un langage plus incompréhensible que les hiéroglyphes ; ils étonnent et confondent le jugement; on ne peut les accuser de tromperie, car on ne les comprend pas. Eax-même3, hélas! se comprirent-ils toujours? Vérité! erreur! où sont les hommes qui savent discerner ces deux choses dans les faits d’occulte puissance, reconnaître ce qui vienl de l’égarement de nos sens ou de noire imagination, distinguer ce qui appartient en propre à la nature, ce qui se rattache à une de ses lois.
Faiblesse humaine, c’est ici que tu apparais ; car il n’est jusqu’à présent aucune œuvre irréprochable, partout la vérité esl mélangée avec l’erreur; aucune gloire scientifique n’est sans tache. Trop heureux les savants qui n’ont point écrit, et les sages ont prouvé leur sagesse en instruisant seulement par la parole. Ils évitèrent par là des disputes sans nombre; leurs disciples seuls furent en butte aux sophismes des faux sages.
Ai-je à craindre pour ce que je vais écrire? !Non, car je ne suis pas savant, et je n’ai nulle autorité. Je puis, en liberté, faire sortir de la poussière des temples anciens une science oubliée, je puis lui rendre un commencement de
(1) Pour tous les faits sur lesquels ces considérations s'appuient, voyez les nombreux articles insérés dans les tomes n et iv.
vie ; la vérité est douée de ce pouvoir, et l’àme de celui qui la comprend n’a besoin que d’un peu de courage pour amener les hommes à son sentiment.
Qu’ils sont à plaindre les hommes qui croient qu’en nous tout est mortel ; qu’ils sont ignorants ceux qui pensent que le principe qui nous anime ne peut exercer aucun pouvoir en dehors de sa grossière enveloppe, comme si tout dans la nature avait, comme le caillou, une sphère d’activité bornée. Tout ne dit-il pas, au contraire, qu’au loin s’étend l’action de l’âme , qu’elle est en rapport avec sa nature et son principe, et que, créée pour une destinée encore inconnue, elle transmue la matière selon la loi prescrite. Lorsque son travail vient à cesser, et que la chaîne invisible qui retenait la matière se trouve rompue, l’âme ainsi dégagée n’ayant plus de poids à porter, agit alors en liberté. C’est ainsi qu’en vain vous tourmenterez le corps et insulterez à l’âme, l’un sera insensible à la souffrance, l’autre ne daignera point répondre. Mais planant longtemps autour de ce qui fut sa demeure, et touchant de son aile invisible les âmes qui, moins heureuses, sont encore enchaînées, elle cherche à les délier, à les détenir, enfin les appelle à elle. El c’est ainsi qu’une vague idée de l'immortalité vient se placer au cœur de la femme tendre et fidèle qui perd son mari, comme aussi le regard d’une mère aimante se dirige vers le ciel pour y chercher le filon de lumière laissé par son enfant, que la Parque a saisi. Sublime enchaînement! de ce qui cesse d’être, avec ce qui est encore, il n’y a d’anéanli que des organes. Une voix mystérieuse et qui charme entretient des rapports que nul ne peut entendre par les oreilles. Il faut que la nature ait développé en nous une corde sympathique, ou que par un pouvoir magique nous évoquions les
mânes de ceux qui ne sont plus. C’esi dans ces instants où l’homme, puissant de volonté comme de savoir, commande aux esprits d’apparaître. Ils descendent à sa voix des régions célestes, ou sortent des tombeaux. Rien ne les arrête, ils obéissent; mais malheur, cent fois malheur à celui qui les évoque seulement pour montrer sa puissance, et répandre au loin la terreur.
Les âmes des maudits sont les premières à répondre, car elles sont encoredisposées à servir de sinistres projets. N’exigez d’elles rien de plus, elles n’ont que ce pouvoir. Des hommes méchants, tel a été le délire et le destin, car l’antiquité les a vus servir pour de l’or le dérèglement des passions.
L’homme froid , l’académicien, ne pourront comprendre ces choses; chez l’un l’instinct seul fonctionne, chez l’autre la raison a coupé les ailes au génie, et détruit cet œil sans prunelle que Dieu a placé dans chaque être. Les sceptiques riront de nos assertions comme de nos alarmes, jusqu’à ce que, finissant leur carrière, leur bouche voulant parler, il leur soit défendu de retourner vers le passé. Semblable au criminel dont le tranchant du glaive sépare en un instant la tète, la mort met fin à leur pensée. Les sectaires vont nous crier : « Pourquoi dire ces choses, que prétendez-vous? laissez-nous nos croyances et nos dieux , ne troublez point nos âmes. Nous senlons en nous-mêmes la vérité que vous annoncez. Mais faibles, nous n’osons ni vous suivre ni vous entendre. » Seul d’abord j’irai dans ce chemin; guidé par mon intelligence, je sonderai l'avenir ; ne craignez rien , j’obéis à ma destinée. Ce germe qui en moi est éclos, ne grandira qu’avec les temps , mais je n’y serai plus. Ma cendre dispersée sera confondue avec la vôtre, mais tout ce qui est vrai survit, et vos descendants ayant plus de vertu que vous s'abriteront sous les rameaux de l’arbre nouveau. Ils verront Dieu, car ils seront purs et dégagés de cette rouille qui, aujourd’hui, ronge le cœur de toutes les nations.
Qui peutdonc me donner tant d’assurance? Eh ! mon Dieu, ce que j’ai vu, ce que j’ai fait. Socrate a dit : Dieu existe; c’était un fou; Galilée, la terre tourne; fou aussi; et le plus fou de tous, Jésus : Vous êtes tous les enfants de Dieu ; Aimez-vous. Fourier ajoutant à celte formule : Associez-vous, la terre sera votre conquête, et vos plus grands maux cesseront (t’exister; fou encore. Enfin Mesmer a dit : L’homme a pouvoir sur l’homme, l’âme sur la matière; autre fou. Mais ¡ouïes ces vérités prouvées ont confondu les innombrables faux sages. Ma pensée, comme la leur, survivra au jugement de mes contemporains, car elle est le reflet d’une lumière divine qui, pour un instant, a éclairé mon esprit. Impuissant et faible, je ne puis me comparer à ces grands hommes. Au premier échelon d’une échelle qu’ils gravirent, mon œil a pu les considérer, mais il me fut défendu d’en approcher, C’est assez pour moi. Comme l’enfant qui fait jaillir le feu d’un caillou, mon faible esprit aura fait paraître une étincelle, qui suffira, cependant, pour pénétrer quelques intelligences supérieures.
0 science, que lu es belle ¡avec toi, l’on pénètre l’immensité, l’on sent sa destinée, et môme avant la mort on est déjà dans le sein de Dieu.
Ce n’est point par ces nuits sombres où la nature voilée imprime aux âmes faibles une sorte de terreur ; ce n’est point au roulement du tonnerre ni à la lueui des éclairs que je me plais à opérer. Ici nulle préparation , aucun onguent, si nécessaire aux sorciers, nul réchaud allumé, et, comme je l’ai déjà dit, aucun parfum pour agir sur les sens. La lumière brillante m’est préférable et les nombreux spectateurs, quoique incrédules, ne sont point capables d’empêcher les résultats que je me promets. Que m’importe le doute de ces esprits forts; est-ce que je ne puis , avec une lentille, concentrer les riyons du soleil el leur faire sur la peau une profonde brûlure? De môme, rassemblant les rayons épars, lancés par le foyer qui gît dans mes organes, ne puis-je pas
déterminer en eux un changement subit el rendre à tous visible le trouble de leur âme; de môme encore, déposant sur une surface quelconque ce feu-principe, faire que ceux qui vont la considérer éprouvent le saisissement précurseur de la vision ?
Homme qui doutes, dis-moi si, avec les meilleurs instruments, tu vois le principe et la forme qui gissent dans ce grain de blé; dis-moi si dans cette goutte de liqueur séminale tes yeux savent distinguer l’être humain qui s’y trouve; il y esl cependant, qu’il prenne forme ou non. Semblable à l’idée qui n’ait en nous, son éclosion dépend de causes fortuites, mais il esl en puissance dans le sein de la nature, car rien ne se perd. C’est ton orgeuil qui obscurcit ton esprit, et ta vue bornée réduit tout à la mesure de les connaissances. Vois le chimiste retrouver dans des éléments impalpables, invisibles des corps matériels ; le physicien dans l’air puiser la foudre; est-ce que lu l’y apercevais? elle y était pour tanl. Dans celte pierre d’aimant ion œil a-l-il suivi les courants qui la parcourent? Non; et tu voudrais qu’on ne puisse croire aux esprits, comme s'il était possibe qu’ils fussent anéantis !
C’est donc en vain qu’on voudrait empêcher, par îles raisons d'impossibilité, cette propriété d’exisler el de se reproduire. car elle esl de l’essence même de notre nalure, comme il esl de l’essence des rayons du soleil de répandre au loin la fécondité et de donner à toute la nature un caractère de majesté. Sans eux les germes renfermés dans les semences resteraient endormis, comme sans les rayons de l'intelligence les germes des facultés .mimiques ne paraîtraient point et ces phénomènes si brillants que nous pouvons produire resteraient également dans leurs germes.
Qui peut dire ce qu’il existe encore d’inconnu dans un cerveau humain,[et combien de merveil les sont réservées aux temps à venir? Mais sans nous préocuper de ces choses,
donnons un exemple du pouvoir nouveau sur deux personnes dont le doute s’est manifesté.
WjC Magnétisme & lia*. — Nous regrettons que l’abondance dis matières ne nous ail pas permis de publier dans notre dernier numéro la lellre suivante :
Monsieur le Directeur du journal du Magnétisme,
I)ax est une petite ville à 200 lieues de Paris; son éloignement de la capitale, centre de loules les sciences, ne nous permet qu’à de rares intervalles de recevoir un reflet de celle lumière qui brille de lanl d'éclat dans ce lieu rendez-vous de lanl de célébrités. Nous devons donc des remercî-menlsà celui qui est venu nous éclairer sur cette admirable vérité à laquelle tant d'hommes honorables el vous particulièrement, Monsieur. consacrent leur vie.
Nous n’avions qu’une fausse idée du magnétisme; les personnes ici qui en avaient quelques notions étaient loin d'imaginer toute sa puissance. Celle science était considérée plutôt comme un amusement que comme une chose sérieuse et utile. M. Laporte, notre compatriote, qui a passé deux mois parmi nous, nous a ouvert les yeux. Entre autres choses il a entrepris la guérison d’une de ces
Baron uu Pot et.
(La suite prochainement.)
VARIETES.
trisles maladies nerveuses que l’on a honte d’avouer parce qu’elles sont déclarées incurables, qu’elles présentent des caractères affreux et que toujours elles amènent un résultat déplorable, il a exercé l’action magnétique sur un jeune homme de 23 ans atteint de celte cruelle maladie, et les phénomènes qui se sont manifestés sont si extraordinaires qu’ils ont laissé notre esprit dans une de ces situations diiïi-ciles à décrire. Les plus incrédules sont devenus fanatiques. Nous ne pouvons nous rendre compte de ce que nous avons vu; mais enfin nous avons vu et nous sommes forcés de croire; car rien n’est plus évident qu’un fait.
Ce jeu ne homme, qui ne dormait pas, qui conservait l’usage de sas sens et toute sa raison, était obligé d'obéir fatalement à la pensée du magnétiseur; c’est lui-même qui le disait ; et il ne souffrait qu’alors qu’il voulait résister; il était fatigué comme quelqu’un qui oppose une résistance à une force supérieure.
Plusieurs personnes avaient été témoins de ces faits; elles avaient vu M. Laporte faire obéir ce jeune homme à sa volonté, l’attirera lui dans toutes les directions, lors même qu’il en était séparé par des murailles et retenu par des hommes robustes.
Mais lorsque ces personnes racontaient ce qu’elles avaient vu, on les accusait d’ôtre dupes de quelque hallucination.
Pour mettre un terme aux doutes qui s’élevaient sur ces faits, M. Laporte voulut bien consentir à les produire devant quelques autres personnes. On avait choisi la salle du Conseil municipal; on pensait être une trentaine, mais le brui-t s’en étant répandu en ville , la salle se trouva envahie par plus de 250 spectateurs.
Nous fûmes tous contrariés de cette affluence, et M. Laporte surtout; mais il sentit qu’il ne pouvait pas reculer sans attirer le ridicule sur le magnétisme dont il est ardent apôtre; il se dévoua. Nous l’en remercions.
Une courte explication donnée par M. La porte fit comprendre à tout le monde qu’il s'agissait d’une chose très-sérieuse, et le plus grand silence régna dans l’assemblée.
Il fit venir à lui le jeune homme, lui fit lever les bras et les jambes sans le toucher; il ¡nia quelqu’un de robuste de le retenir; il sortit de la salle qui a au moins 20 mètres de long ; il ferma la porte sur lui ; le jeune homme se débarrassa de la personne qui le retenait, et, obéissant malgré lui à une force d’attraction occulte, il courut avec une telle violence vers la porte qu’il faillit la briser.
Ilseraitdifficiled’exprimer les sentiments divers qu’éprouvaient les spectateurs à la vue de cette puissance immense exercée par un individu sur un autre. M. Laporte ne voulut pas nous laisser croire que celte puissance était un privilège pour lui. Après nous avoir dit que chaque individu la possède, il proposa de la faire exercer par quiconque le voudrait. Un monsieur, parfaitement ignorant du magnétisme, se présenta, et en suivant les instructions qui lui furent données, il attira à lui le jeune homme, au grand étonnement de tout le monde.
Après nous avoir fait remarquer la puissance avec laquelle on pouvait agiter une autre organisation, M. Laporte, laissant à notre jugement à apprécier ce que pouvait produire celle agitation, nous affirma que loules les personnes qui avaient sérieusement étudié le magnétisme savaient qu’on pouvait la tourner au profit de la santé de celui qui l'éprouvait.
Il nous dit encore que bien que les effets ne se produisissent pas de môme chez lous les individus, ¡1 n’en résultait pas moins un bien pour eux, le fluide magnétique que l’on introduit chez le magnétisé étant essentiellement curatif.
M. Laporte magnétisa un autre jeune homme sur lequel se produisirent des effets tout différents.
Il nous témoigna combien il serait heureux que dans son pays on voulût étudier une science si utile à l’humanité el
«
qui procure à celui qui l’exerce des satisfactions qui n’ont pas leurs pareilles; et pour nous engager à le faire comme on le doit, il nous lut les conseils aux magnétiseurs qui se trouvent dans un île vos ouvrages : La philosophie du Magnétisme.
Après nous avoir défini celte science, M. La porte s’est attaché à détruire une erreur généralement répandue, à savoir que l’on ne peut pas être magnétisé si l’on ne dort pas, d’où il lira la conséquence que le somnambulisme n’est qu’un des nombreux effets dont le magnétisme est la cause.
Enfin il nous a expliqué comme quoi le magnétisme seul peut opérer des guérisons; qu’on pouvait aussi se servir pour la cure de beaucoup de maladies de la lucidité des somnambules, et il nous a fait comprendre combien il fallait être circonspect et prudent lorsque nous trouverions des somnambules lucides; nous recommandant surtout de ne jamais jouer ni avec le somnambulisme, ni avec le magnétisme qui sont des choses suintes et sacrées.
En un mot, M. Laporte a laissé dans l'esprit de ses concitoyens de telles idées du magnétisme que beaucoup d’entre nous aujourd’hui désirent étudier celte science admirable dans ses effets et qu’on dit si utile dans ses résultats.
Recevez, etc.
V*** et Z***
Da*, 20 octobre 1847.
€ lironiqtic. — L’un de nos amis et collaborateurs, M. Meade, nous écrit de Londres, qu’il vient de paraître à New-York un ouvrage fort extraordinaire dont un seul exemplaire est parvenu en Angleterre.
« Toute la Nouvelle Eijlise, dit-il, en est scandalisée ; les Swedenborgiens attendent avec la plus grande impatience ce qu’én dira le Rév. G. Bush dans son Mesmer
and Swedenborg , où vous savez qu'il eitc avec extase le lucide Davis comme confirmant la doctrine de son grand prophète; maintenant il parait que ce même Davis, dans l’ouvrage nouveau en question, intitulé Divines inspirations, renverse la Bible de fond en comble. C’est un libraire Swe-deuborgien qui m’en a l'ail le rapport; je l’ai prié de me faire venir deux exemplaires dont je vous enverrai un.
» Ce Swedenborgien, tout en frémissant d'horreur de la doctrine de Davis, m’a avoué que son langage est le plus beau qu’il ait jamais lu ou entendu de sa vie. « Davis, dit-» il, est sans douteinspiré par quelque esprit infernal : la-» Jluxes fromwelt. »
— Le K. P. Hillarion Tissot va sous peu faire paraître un journal hostile au magnétisme. Les RU. PP., de la rue des Portes, sont alarmés du progrès de celte vérité et veulent l'empêcher à tout prix ; nous verrons bientôt quels sont leurs moyens.
— Le nombre des souscripteurs aux Arcanes de la vie future dévoilés est maintenant de 58; si cette progression continue, l’ouvrage pourra être imprimé avant la lin «le l’année.
— Le conseil général de la Seine vient de mander l’abbé Paramelle, pour explorer le sol de Paris.
— Lue lettre de Sainte-Hélène nous apprend que M. La-caussade, passant dans cette île, en février dernier, a magnétisé à l’hôpital de Jamestown deux femmes très-malades qui ont éprouvé d'une seule magnétisation un soulagement prompt et considérable. Le docteur Nowell qui dirige cet établissement a manifesté la plus grande satisfaction de cette heureuse tentative, entreprise à sa prière.
— On imprime en ce moment la seconde édition de l’ouvrage du docteur Charpignon : Physiologie, médecine et métaphysique de magnétisme. On la dit double de la première et inclinant au catholicisme. Nous l’apprecierons aussitôt son apparition.
— Nous avons mille fois dit les eauses qui empêchent l'adoption franche du magnétisme parles médecins. Chaque jour en fournit des preuves. Leur haine contre un fait qui détruit leurs prérogatives se traduit le plus souvent par la négation ou l’injure. Mais quelques fois ils poussent le dépit jusqu’à poursuivre devant les tribunaux les audacieux qui se permettent de faire mieux qu’eux. Un procès de cette sorte est sur le point d’avoir lieu dans une petite ville de l’Aube. Nous tiendrons nos lecteurs au courant des incidents de cette affaire.
— On nous écrit de Lyon, qu’un Monsieur Hermann y donne avec sa femme des séances anii-magnéliques qui font grand bruit. C’est probablement dans le genre de Robert-Houdin, et quelques autres dont la double vue repose sur un langage de convention.
■le»ne des Journaux. — L’Echo de lu Charente, du 27 octobre, reproduit notre miroir magique avec les réflexions dont l’a fait précéder la Démocratie pacifique.
— Le Constitutionnel du 5, constatant divers faits d’hy-droscopie, s’étonne que le gouvernement ne fasse rien pour utiliser les facultés de l’abbé Paramelle.
— Nous avons déjà dit l’immense sensation qu’a fait en Angleterre la publication de nos expériences de magie. Le Court-Jornai du 6 contient un article sur ce sujet.
— Le feuilleton de Y Union monarchique des 28 et 29 octobre fait entrer le magnétisme comme élément dramatique dans plusieurs scènes dramatiques. C’est assez pâle d’expression, mais présenté de la sorte c’est encore favorable, eu égard au genre de lecteurs auxquels cette feuille s’adresse.
— Le Courrier de Marseille du 28 octobre met en regard la lettre de M. Alexandre Dumas et le factum du National, mentionnés dans notre dernière revue, alin que ses lecteurs jugent sur pièces le grand procès mestnérien. Cette louable impartialité n’a duré que trois jours. Le même journal du
2 novembre nie ¡es facultés somnambuliques avec des argumente si pauvres qu’ils ne valent pas la peine d’une réfutation.
— L’aumônier de Saint-Cyr écrit à la Presse du 50 octobre pour se plaindre que M. Alexandre Dumas l’ait fait figurer au nombre des témoins des expériences qu’il a faites. Il se fonde sur ce qu il n’en veut ni approuver ni contester les résultats. C’est une manière peu franche d’éclairer le monde; car de deux choses l’une ou M. Dumas a dit vrai, ou il a menti, et dans l’un et l’autre cas il est du devoir des personnes dont il invoque le témoignage d’affirmer ou d’infirmer nettement, afin qu’on sache de quel côté est la vérité. Agir autrement c’est être pusillanime ou perfide.
— Le Courrier français du 50 octobre rapporte des faits de vision magnétique sans importance.
— La Revue Gallicane d’octobre fulmine contre le magnétisme et nous particulièrement. Elle se défend d’être l’organe de la superstition. Nous croyons pourtant qu’on ne peut qualifier autrement sa persistance à ne voir dans le magnétisme qu’une diablerie dangereuse, et dans les passes magnétiques d'indécentes caresses. Nous n’aimons pas la guerre, mais la mauvaise foi de ce journal nous y oblige, et dans notre prochain numéro nous justifierons de ses attaques insidieuses deux hommes également respectables, MM. Laforgue et Almignana.
•— La Démocratie pacifique du 21 octobre nous emprunte la description du miroir magique et de ses effets , qu’elle fait précéder de réflexions dont la justesse et la franchise décèlent ses sympathies pour le magnétisme. Il y a du courage à publier des faits qui ne sont pas dans le domaine habituel des sciences, car ils rencontrent une opposition toujours très-grande. Nous devons des remercîments aux honnêtes et intelligents rédacteurs de cette feuille, par qui cette découverte ou rénovation a pris date; la lumière viendra chaque jour, se répandant davantage, éclairer un point très-obscur
de l'histoire, el, selon nous, il doit résulter de cette étude un bienfait immense pour l'humanité, car, faire connaître la cause de préjugés nombreux, guérir l’homme de ses terreurs, c’est le préparer à recevoir une culture favorable aux vérités découvertes par Fourier.
La Mouche du 23 octobre fait aux jongleurs une guerre acharnée, motivée par la présence à MAcon de magnétiseurs el somnambules ambulants dont la sincérité paraît plus que douteuse. M. Ordinaire fait ressortir cette pensée, qu’il faut que le magnétisme soit bien vivace pour ne point périr lorsque tant de gens le compromettent.
— La Revue ¡les Deux-Momies du 1er de ce mois, dans une revue bibliographique des sciences depuis dix ans, constate, à sou point de vue, le peu de valeur de la littérature magnétique dans cette période.
— Le Journal îles théâtres du 6, dont l’intelligent el consciencieux rédacteur, M. Victor Herbin, a donné tant de preuves d’attachement à la cause magnétique, nous emprunte le fait de somnambulisme relatif à M11“ Jenny Lind.
— La Tribune Lyonnaise de ce mois relate la suite d’expériences faites par M. Berthe à Dieu-le-Fit (Drôme).
PETITE CORRESPONDANCE.
toul. — M. D.....3. Wo write to you.
Mortagoe. — Dr B.-Cli. —Vu votre frère. Je vous écrirai incessamment sur tousles points.
Sauuens. — M. de S.......i. — M. L..i, doBoutigny, recevrait de
vous un mol avec grand plaisir.
Aguaditta. — D1 C.....t. —Envoyé la brochuredu DrG....... de
Stockholm. Lavez-vous reçue?
Pierrcfond*. — M. D......— Reçu les 20 50.
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (deGarnajJ. Sainl-Cloud. — Imprimerie de Belin-Mandar.
MANUSCRITS DE MESMER
XoliuiiM «‘■«‘menlnlras Mir la morale, l’^duration el lit l^xlMladon pour «ervlr A l'InMtriiclIon publique.
§ VIII. — Assemblées politique?.
Il a été dit que la souveraineté du peuple consiste da:;s la réunion des volontés des citoyens et de tous les moyens pour
I môme but. qui en général est le bonheur de tous.
C’est donc un droit essentiel de la souveraineté du peuple de s’assembler pour exprimer et pour accorder les volontés de ses membres sur les intérêts communs.
Si l’on prenait pour la volonté du peuple les expressions vagues et tumultueuses des individus pris au hasard, saus aveu, sans vocation, sans mœurs, sans intérêt pour le bien public, mais souvent sous les influences de l’intrigue et des passions; cette volonté ne serait pas moins despotique que celle du tyran, qui n’est que l’effet du caprice, de la faiblesse ou de l’ijitérôt privé.
Il faut donc une organisation positive des assemblées, dans laquelle on considère : i° la qualité des membres; 2° la manière de délibérer et de manifester la volonté.
A0 La qualité requise des membres de l’assemblée, c’est qu’ils soient d’une condition par laquelle leur intérêt particulier est lié à l’intérêt public, soit par des possessions ou des avantages existant dans la patrie commune. Qu’il soit père ou chef de famille, marié à une républicaine d’un Age fait à pouvoir sentir et peser les intérêts publics, à l’abri des grandes passions; ce serait âgée d’au moins 21 ans; qu’il ait TOME V. — X° 59. — 25 NOVEMBRE 847. tO
avant passé sous la discipline militaire : en un mol qu’il suil citoyen doué d'une volonté rationnée.
Par conséquent en seronl exclus :
A Les femmes, les enfants, les domestiques, qui tous sont représentés par le seul chef de famille.
B Les individus en étal d’ivresse, de démence, d’iinbécil-lité ; les hommes agités de fortes passions.
2° Sur la manière de proposer les objets. — La souveraineté du peuple étant fondée sur la liberté et l’égalité, il est également essentiel qu’aucun individu par un moyen quelconque ne puisse dominer, ou influencer!...ment les membres de l’assemblée. La lactique usitée jusqu’ici dans les assemblées publiques doit être proscrite : l’amour-propre, l’ambilion, la haine, la persécution, la jalousie, l'arrogance, la ruse, I......et la calomnie n’auront plus lieu par
les moyens simples que je propose.
Dans une assemblée de citoyens il ne s’agit que de déterminer el d’accorder la volonlé, conséquemmeni il ne faut point exalter celle-ci ni l’affaiblir, ni l’égarer par les artifices de la rhétorique ; que ce ne soil plus l’orateur qui, par ses moyens enchanteurs, devienne le tyran de l'assemblée. Ne suivons pas l’exemple des anciens peuples, dont la liberté si vantée n’existait que dans l’illusion ; le peuple ayant été le jouet du talent des orateurs, des augures, des auspices, de3 pontifes, n’a jamais cesséd’êtrela victime de ses oppresseurs.
Que la vérité pure et simple, présentée sans art et sans ornement, devienne le seul mobile de la volonté du peuple.
Les assemblées du peuple ont deux objets : 1° les élections de ses représentants et de ses fonctionnaires; 2° le gouvernement et l’administration de la république.
L’homme ne pouvant vouloir que ce qu’il connaît et la volonté ne pouvant non plus être déterminée que par les motifs, il esl nécessaire que l'objet sur lequel on délibère ninsi que les motifs soient connus de tous.
Dans les élections on procédera en celle manière. Il sera
mis à la tôle d’une feuille l'exposé de la charge du fonctionnaire à élire, exemple : d'un juge de paix, el sur la môme feuille seront écrites sur une colonne les qualités approba-tives ou celles qu’on exige ; et sur une autre les qualités im-probatives, c’est-à-dire celles qui lui donnent l’exclusion.
Chaque citoyen actif recevra une de ces feuilles; il y écrira le nom de l'individu qu’il voudra élire et le mettra au scrutin.
Pour les objets du gouvernement ou administration on procédera de la manière suivante : Le sujet sur lequel on veut connaître la volonté du peuple sera réduit par un comité choisi à une proposition sur laquelle chaque citoyen pourra appliquer sa volonté affirmative ou négative. Tous les motifs pour l’affirmative seront placés d’un côté el pour la négative de l’aulre côté. Toul cela sera imprimé et distribué parmi tous les membres de l’assemblée et en même temps exposé en public.
La discussion ne se ferait pas dans le lieu de l’assemblée, mais en famille, en conversation, en petite société. De cette manière les membres du peuple comme les mineurs, les femmes, les vieillards, les familiers, etc..pourront également contribuer à éclairer les citoyens actifs.
Les citoyens aclifs qui à la suite de celte sorte de discussion, ou de la méditation, auront trouvé de nouveaux motifs ou des mollifications, les écriront et les ajouteront aux autres motifs déjà connus.
Le jour de l’assemblée les feuilles de délibération seront déposées au bureau. Le secrétaire lira les nouveaux motifs publiquement afin d’en instruire chaque membre qui, en conséquence, déclarera sa volonté définitive par la voie du scrutin.
Voici une organisation exempte d’abus pour faire exercer au peuple sa souveraineté de la manière la plus simple.
(La suite prochainement.)
CLINIQUE.
Nous avons, tome iv, page -289, rapporté d’après Ajournai de la Vienne, un cas d’insensibilité dont nos lecteurs ont sans doute gardé le souvenir; car plusieurs se plaignirent alors que les auteurs de cette brillante opération ne fussent désignés par initiales. Cette grave affection vient de nécessiter une nouvelle opération, dont le magnétisme a de nouveau prévenu la douleur. Le même journal publie , dans son dernier numéro, la lettre suivante, qui relate cette seconde opération non moins merveilleuse que la première.
Monsieur le Rédacteur,
_Vous avez rendu compte dans votre numéro du 16
mars dernier, n° 52 , d’une opération chirurgicale faite a l’aide du sommeil magnétique et qui a parfaitement réussi.
Votre habile correspondant avait trouvé la fibre qui conduit au cœur poui faiie apprécier un fait qui pourra trouver place parmi les nombreux phénomènes qui sont notés, publiés, et cependant bien inférieurs, le plus souvent, comme celui-ci, à beaucoup d’autres qui passent inaperçus.
Je viens accomplir la double tache qu’il m’a imposée, de continuer le récit de l’opération, et donner à chacun la part qui lui revient dans la guérison parfaite d’un mal que la science humaine avait jugé incurable; c’était une tumeur cancéreuse, etc.
Celle première opération lit voir à l’œil exercé que le
virus n’étail pas enlevé; que toutefois, il convenait de sus-lien dre.
Enfin dix jours après , le 20 du mois de mars dernier, les mêmes chirurgiens sc présentent pour pratiquer une seconde opération, que les progrès du mal rendaient indispensable.
Il ne devait y avoir à cette séance que les personnes nécessaires.
A peine la jeune fille est-elle sous la fascination de son magnétiseur, que de grosses larmes tombent par intervalles de ses yeux; elle prévoyait intuitivement la torture qu’on lui préparait et à laquelle elle s’était elle-même et nécessairement condamnée sous peine de mort prochaine.
Enfin, après plus d’une demi-heure de magnétisations diverses et surtout d’insufllations chaudes en forme de croix qu’elle prescrivait de faire sur chaque instrument, elle fut livrée à l’opérateur; il s’agissait de lui enlever la moitié de la mâchoire inférieure, réceptacle infecte du cancer.
Celle seconde opéralion qui a duré plus de deux heures, à cause des préliminaires et du pansement, consistait, d’après une noie qu’a bien voulu me faire un ami de l’huma-nilé, « à couper les muscles recouvrant le menton, en in-» cisanten même temps la lèvre inférieure jusqu’au périoste » qui lapisse les alvéoles du haut en bas en faced# la canine » gauche.
» Celte dent et la petite molaire ayant été enlevées, l’os •> ayanl été dénudé, on a dû le scier dans toute son épaisseur ;
> le porter en avant, le détacher de tout ce qu’il pouvait y » avoir de muscles adhérents, dans toute l’étendue, non-» seulement de l’apophyse zygomalique, mais encore du co-» ronoïde auquel vienncnl adhérer les muscles volumineux a du masseter et du temporal.
» Ceci fait, on a dû trouver avec un scalpel le condyle de » la in&choire dans sa cavité, afin de trancher tous les liga-
* ments qui le retenaient ; et c’est là que l'opérateur avait
» à redouler une artère irès-forle, la maxillaire interne, » qui, si elle eût été attaquée, devait déterminer une mort » prompte. »
Pendant l’opération, elle a fait entendre très-souvent des cris aigus, alors que l’opérateur changeait d’insirumenl.
— Qu’avez-vous, Plirosine ? demandait le magnétiseur.
— J’ai Chaud ! bien chaud!
— Souffre/.vous ? — Non.
— Pourquoi vous plaignez-vous? Pourquoi des cris?
— Je vois que l’opération sera encore longue et tous les apprêts.
— Donnez-moi le moyen de vous isoler, puisque je ne puis le trouver moi-môme ?
— 11 h’existe plus ou je ne puis le voir, c’est trop tard ; je suis en rapport avec l’opérateur (il était couvert de sang et de sueur). Parce qu’on a empêché M"1’ Valette d’ètre auprès de moi ; de me donner la main comme je l’avais demandé. (MM. les médecins avaient insisté pour qu’elle ne rCstîkt pas.)
Rien ne pouvait la remplacer ; mais n’importe, l’opération réussira maintenant que Mmc Valette me donne la main (aux premiers cris elle était accourue).
Je souffrirai non à cause du mal lui-même, je ne le sens pas ni les instruments, mais à cause de la crainte du mal.
J’ai une espèce de cauchemar.
En effet, trois jours après, le chirurgien, qui avait suivi el pratiqué avec une tendre sollicitude les pansements, vit avec surprise que celte jeune fille n’avait plus de fièvre, comme elle l’avait annoncé; elle a continué à aller de mieux en mieux; elle boit et mange bien, a grandi de la tête et est radicalement guérie île sa tumeur cancéreuse.
En résumé, la jeu ne fille n’a eu, comme elle l’avait dit, que pendant trois jours, à chaque opéraiion , une lièvre légère, n’a ressenti aucune douleur, el a été radicalement el promptement guérie sans crainte du relour du mal.
Elle n’a été instruite, chose aussi étonnante que le reste, île ces deux dernières opérations que le \ 1 avril suivant, ou 21 jour3 après, par Mmc Vallette qui a dû employer les moyens indiqués par elle pour éviter des crises terribles. Dans son état de veille, elle ne voulait pas entendre parler .l’opération (elle croyait que c’était le résultat d’un emplâtre fondant pendant qu’on la pansait éveillée ou qu’elle voyait couler son sang).
Pour prouver que l’article que vous avez inséré n’est point un effet de l’imagination, mais bien un fait réel, vous saurez que K est l’initiale de M. Kiaro, inédecin-dentisle, que la ville de Poitiers met avec plaisir au nombre de ses habitants les plus utiles, môme nécessaires.
Et R celle de M. Ribault, docteur-médecin, demeurant alors à Ligugé, et qui est venu deux fois par semaine, pendant plusieurs mois, assister aux séances. Il a fait preuve d’un dévouement au-dessus de tout éloge.
Inutile de dire que le tout a été gratuit.
Chacun peut tirer quelle conséquence lui conviendra de ce fait.
Un jour j’aurai l’honneur de vous communiquer mes observations; mais M. Senemaud, l’habile jurisconsulte, attaché tout naguère au parquet de Lyon, auteur de l’article inséré et l’un des plus habiles et zélés assistants, ne laissera pas son travail inachevé.
Pourquoi n’a-t-il pu assistera la 2° opération?
La science magnétique dont il est un des adeptes y aurait encore beaucoup plus gagné.
Vallette.
INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES.
CONFÉRENCES MAGNÉTIQUES.
SI agie (soi le).
J'ai déjà dit quel esl le miroir magique, un petit disque de carton couvert d’un côté par une feuille d’étain, terne et sans aucun reflet. C’est sur celte surface que des images viennent se peindre. moi-mCme je n’y aperçois rien; mais je sens, lorsque l’expérience commence el qu’elle doit réussir, une sorte de frémissement singulier, mes doigts se crispent légèrement et lout mon être reçoit un choc. Tout cela esl indépendant de ma volonté, mon imagination n’y enlre pour rien, je suis froid el c’esl toujours avec surprise que l’émotion me saisit, car mon doute chaque fois accom pagne mes tentatives et je suis tout aussi étonné que les spectateurs en apercevant le résultat.
Je dis ces choses pour que l’on ne croie point à des dispositions de mon esprit ou de mon imagination. Je suis parfaitement calme au commencement de l’opération, mes impressions sont donc la suite naturelle de la vue du fail el delà force spirituelle mise en mouvement.
Une chose remarquable, c’est qu’ayant toujours joui d’une santé parfaite, j’étais affecté dans ces derniers temps de palpitations. Ce fail étant nouveau dans ma vie, j’en recherchai la cause sans la trouver d’abord, mais je la reconnus bientôt; ayant pris l’habitude de mettre dans ma poche le miroir magique, sa surface métallique appuyée sur la région du cœur, je soupçonnai qu’il pouvait donner lieu
au malaise que j’éprouvais ; je cessai de le porter, el depuis je n’ai plus rien ressenti.
Ces détails ne sont point oiseux , car j'écris pour des esprits attentifs et j’ai l’intention bien arrêtée de transmettre ce que je sais, comme ce que j’apprendrai, de la force occulte, cause des plus grandes merveilles.
Premier fait.
Ma main tient le miroir fatidique; elle tremble malgré mei, comme si une force secrète la secouait ; je me fais violence pour résister à ce choc inconnu, et présentant la surface du disque à une femme forte d’intelligence el de volonté, dont le doute provocateur a, malgré moi, donné lieu à celte épreuve, les effels commencent aussitôt. La lumière que reflète une glace ne se transporte pas plus vile, or ici l’action est instantanée. On voit les yeux de madame N*** devenir ternes , une couleur bilieuse se répandre sur ses traits; son corps a peine à se maintenir debout, car ses membres fléchissent; la mâchoire inférieure exécute des mouvements sans que lu voix se fasse en'.endre, bien que tout indique que madame IS*** veut parler. A celle prostration évidente succède rapidement une réaction terrible, les yeux deviennent brillants, les traits se conlraclcnt, et des sons guliuraux inarticulés, accompagnés de gestes indicibles, jettent la craiute au cœur de toutes les personnes présentes. Je veux arrêter l’expérience, el dans ce but m’éloigne desepl à huit pas, mais les effels continuenl ; les yeux de madame N*** se fixent allernalivement sur moi et sur le miroir magique où elle semble poursuivre de ses recherches les images qui s’y sont peintes ; elle fait même des efforts pour se rapprocher
de moi, mais ses pieds semblent avoir pris racine dans le sol : elle ne peut approcher d’un pas !
La pythonisse n’était pas plus animée ni son visage empreint de plus sombre terreur ! Madame N*** a vu, on ne peut en douter, et la communication avec des intelligence* spirituelles avait commencé d’exisler. Voulant mettre un terme à celle scène, jo romps le charme en cachant le miroir. Il était temps, nous n’avions plus alors sous les yeux qu’une femme évanouie : il fallut la soutenir et l’emporter. On s’empresse autour d’elle, on l’interroge, sa bouche reste muette, et comme saisie d’épouvante elle regarde à droite et à gauche, semblant chercher les ombres qu'elle a vues; efforts vains de son esprit! Tout en éprouvant de profondes secousses, elle ne peut plus rien saisir, la communication spirituelle a élé rompue : elle n’a plus qu’un vague souvenir, une terreur secrète. Elle est toujours semblable à un spectre qui sort d’un tombeau.....
Bien que cette expérience n’eût duré que quelques minutes, les suites s’en firent senlir plus de quatre heures. Un tremblement convulsif, une voix mal assurée, une faiblesse extrême, qu’il me fut impossible de détruire, nous laissèrent à tous un souvenir ineffable de cette épreuve.
Deuxième fait.
A peine remis de celle émotion, nous voulûmes tenter une autre expérience; nous éloignâmes madame N***. Nous prîmes pour sujet d’épreuve, non plus une personne éclairée et d’une éducation brillante, mais une fille de campagne, d’une instruction bornée et jouissant d’une santé parfaite. Elle n’avail point assisté à la scène qu’on vient de lire : elle en ignorait les résultats. C’élait en plein soleil et sur le même tertre qu’elle fut amenée. Je jette à terre le miroir et la prie de le regarder un instant. Elle est debout à trois ou quatre pas, riant de mon invitation, et quinze personnes forment un cercle autour de nous. Peux minutes ne sont point
•'■coulées que nous la voyons en proie à l'inquiétude, ges membres sont agités, elle avance et tourne autour du miroir, puis s’en éloigne, revient, fléchit et tombe à la plaçe première qu’elle occupait. Elle allonge les bras, enfonce ses ongles en terre et rampe en traçant un sillon avec tout son corps. Elle arrive enfin sur ce miroir, le considère avec une avidité sans pareille, mais n’ose le toucher. Tout est ému en elle, elle pleure, se lamente, cl nous avons sous les yeux le spectacle le plug étrange, la scène la plus incompréhensible qu’une imagination déréglée pourrait enfanter dans son délire.
Elle parle en s’agitant el chacun peut entendre des phrases qui paraissent sans suite, mais qui pour elle sont l’expression de la terreur de son esprit ; elle voit des choses qu’elle comprend et qui lui rappellent d’abord des laits oubliés de sa vie passée, puis des choses que le temps doit sans doute amener.
Je retire le miroir el on relève celle forle fille qui, comme hébétée, ne peut répondre de suite aux interrogations; ses traits sont empreints de tristesse et d’effroi, mais quoiqu’on s’empresse de la calmer, comme la précédente personne, elle reste affaissée et ne répond qu’environ une demie-heure après. Elle n’avoue qu’une partie des choses qu’elle a vues, lel que le tombeau de sa mère, puis, dit-elle, des choses hideuses qu’elle n’osera jamais nommer. Elle refuse opiniàtrément île satisfaire à noire extrême curiosité!
Quel est donc ce pouvoir, quelle esl celle nouvelle puissance qui secouent l’entendement et déterminent un changement si subit? Ce n’est plus le magnétisme seul, car je n’ai pas cessé d’ôlre passif, el la curiosité m’eût, dans le cas contraire, ôlé la volonté. C’esl donc quelque chose de plus mystérieux encore qui a développé ces phénomènes qui fixaient tanl noire pensée.
A la fin, cependant, l’inquiétude m’avait aussi gagné, el mon désir d’apprendre se changea en alarmes. Je la possède
donc celle vérité antique, el désormais elle ne se perdra plus. Qu’esl-ce que loul cela? Un monde nouveau apparaît à l’horizon, el ce monde est invisible pour mes yeux; je l’avais pressenti, mais aujourd’hui il m’est tout à fait démontré.
Que pourrait sur mon esprit le doute des sceptiques? Je ne suis point facile à émouvoir, je ne crois point sans preuves, et dans aucune de mes expériences je n’ai eu le désir de voir arriver les scènes que je viens de dépeindre. J’ai pu douter moi-mème, tout en produisant les premiers fails; mais maintenant mon doute serait une injure à la vérité, el je suis convaincu, certain, que l’âme existe et que des communications réelles peuvent avoir lieu avec des intelligences spirituelles.
En réfléchissant sur les fails ci dessus on pourra désormais s’expliquer rabattement des prophétesses de la Grèce, lorsqu’elles descendaient du trépied sacré, et deviner la cause de la faiblesse qu’éprouvaient ceux qui allaient dans l’antre consulter l’oracle. Venez, savants, réédifier le passé; venez assister aux mystères sacrés des peuples antiques; mais venez-y surtout avec le désir de connaître el d’apprendre, et vous cesserez enfin de vivre dans l’obscurité de vos temples ! Que cette lampe se rallume au souffle nouveau de la vérité, non plus pour guider quelques hommes, mais les générations; non pour enrichir des corporations, mais pour le bonheur du genre humain.
Baron diî Potet.
(La suite prochai' ment.)
VARIÉTÉS.
L/Alltl-liiagliétiKine. — Depuis deux ans environ, on voit aux fûtes des Champs-Elysées et des enviions de Paris, des baladins qui montrent ce qu’ils appellent la double vue, par imitation de Robert IIoudin. Ils ont tous soin de déclarer que ce fait n’est point magnétique, et, en effet, ils ne le manifestent pas dans les circonstances qui caractérisent la vision somnambulique; quoiqu’il en soit, ces anti-magnétistes font des choses qui étonnent grandement , môme les magnétiseurs; car nous ne sachons pas qu’on ait donné une explication satisfaisante de ces faits. I.’un de ces gens a été mandé au sein de la Société du Mesmérisme, où il a surpris tout le monde par la précision de ses expériences. Mais, poussé dans scs derniers retranchements, il a avoué que ce n’était pas une faculté mais un résultat d’éducation qui lui permettait de faire ces choses. Et il est certain qu’il se servait d’un langage particulier; car en lui imposant l’obligation de désigner des objets différents par une môme formule, il ne le put, mais tout ce qu il a fait ne peut s’expliquer par là; il parait souvent y avoir communication de pensé';, c’est-à-dire phénomène magnétique, quoique le contraire soit déclaré.
On lit à ce sujet dans la Mouche, du 13 de ce mois :
« Arriére Calixte! arrière Prudence! arrière Alexis! et vous tous dormeurs et dormeuses, qui vous croyez lucides et captivez l’attention publique el l’admiration de nos plus grands écrivains, l’anti-magnétisme vous éclipse et vous annihile.
» Vous n’entrez en somnambulisme qu'après une ma-
gnélisalion plus ou moins prolongée, et distinguez avec peine ce qu’on veul vous faire voir. La présence d’un incrédule vous contrarie et souvent paralyse votre clairvoyance. Votre vue à travers les corps opaques est contestée et trop souvent contestable, vos transmissions de pensées sont incertaines et échappent au moment même où vous croyez les tenir. Sur dix expériences, deux à peine sont satisfaisantes.
» L’anti-magnétisme est beaucoup plus habile et plus heureux, il se passe de passes. Le sujet ou la sujette (car l’anti-magnétisnie est des deux genres, ou si vous préférez des deux sexes) esl toujours éveillé bien qu’endormi. Sur cent ex|>ériences, qualre-vingt-dix-neuf trois quarts réussissent au milieu des acclamations el de l’enthousiasme d’une foule émerveillée. L’anti-magnélisme sape le scepticisme le plus inébranlable. M. el Mme liermann, Robert Houdin et son fils, étonnent mille fois plus que Marcillet avec Alexis ; mille fois plus que le docteur Laurent avec Prudence, mille fois plus que tous les magnétistes les plus renommés, et, en effet, ils obtiennent à l’aide de ce qu’ils nomment leur double vue des phénomènes vraiment prestigieux, et surtout infaillibles.
» Dans notre orgueil de novateur, nous nous élions attribué une certaine importance en fait de magnétisme; nous pensions avoir obtenu du somnambulisme ce qu’aucun Puy-ségurien n’avait obtenu; nous portions même notre suffisance jusqu’à croire que personne ne possédait mieux que nous l’art d’endormir les gens, lorsque est apparu l’anti-magnétisme , qui nous a renversé de noire piédestal sans inf;me nous crier garre !...
i Que ne se présente-t-il à l’Académie? Son titre seul serait pour lui une recommandation. Il ferait la conquête de loules les perruques on ne peut plus anti-magnétiques qui se hérissent au seul nom de Mesmer. Que ne se présente-t-il au bureau de l’Union Médicale, et que ne va-l-il dire à cer-
lain Jean Raymond, qui n’a vu jusqu’alors que du bleu, ou plutôt n’a rien vu en magnétisme, vide et lange! Vide! me voici bien autrement étonnant que mon antagoniste l’endormi; me voici bien autrement clairvoyant, el cela s’explique puisque j’ouvre les yeux. L’Académie, certainement se rendrait, et Jean Raymond, au risque de perdre dix abonnés, proclamerait que l’anli-magnélisme sape les lois physiques ; que ses phénomènes sont inexplicables, et cependant qu’il est obligé de les constater.
» Vous me demanderez, chers lecteurs : Mais quel miracle produit donc cet anli-magnélisme, pour que vous, magné' tiseur connu , vous fassiez en sa présence une telle amende honorable, pour lui vouer un tel culle, une telle adoration.
— Ecoulez, ou plutôt lisez, el vous admirerez.
» Samedi dernier, je cheminais paisiblement sur le quai Sud, lorsque j’aperçus en face le café de Paris un rassemblement. Tout à coup le rassemblement me regarde avec ses cent yeux, m’appelle avec ses cent bouches, el m’auire avec ses deux cenls bras. J’arrive, et c’est à qui me racontera les merveilles qua viennent d’étaler aux yeux de lous un monsieur et une dame enlrés au café pour y prendre l’un une tasse de café, l’autre un verre d’eau sucrée.
— Elle m’a dit le numéro que j’ai lire à la conscription, dit l’un.
— Elle m’a précisé le jour de ma naissance, dit l’autre.
— Elle a reconnu l’heure que marquait ma montre, qui ne marchait pas, ajoutait un iroisiôme.
— Elle a désigné l’argent que j’avais dans ma main, le nombre des pièces, leur valeur, les effigies des rois, jusqu’au millésime de chacune d’elles, affirmait un quatrième.
• La Mouche ; — Tout cela ne m’étonne pas le moins du monde. Le somnambulisme explique cette singulière faculté de voir.
— Mais elle ne dort pas ; elle ouvrait de grands yeux et
buvait tranquillement son verre d'eau sucrée en faisant l'inventaire de nos poches.
» La Mouche : — C’esl un peu plus surprenant, et je voudrais bien voir celle dame.
» Le lendemain malin je rendis visite à l’aimable sorcière, el j’appris que j’avais à faire à M. et Mme Hermann, du Hanovre, qui venaient de remporter un véritable triomphe sur les théâtres de Marseille et sur les deux théâtres de Lyon. J obtins de leur complaisance qu’ils viendraient passer la soirée chez moi, et je réunis une vingtaines de sceptiques, entre autres deux ecclésiastiques, très-décidés à découvrir les ficelles, si toutefois des ficelles s’y trouvaient.
» M"e Hermann a élé élonnante. Placée dans un angle du salon, tournant le dos à la société qui entourait son mari à
I aulre extrémité, elle a décrit avec l’exactitude la plus scrupuleuse les nombreux objets sur lesquels on voulait fixer son attention.
» Une tabatière l'a embarrassée une seconde, mais elle est sortie victorieusement d’embarras.
» Un sceptique : Dites-moi ce que je liens? — Une tabatière. — De quel méial esl-ello composée? — Elle est en
buis--Qui m'a donné celle tabatière? ... Hésitation. —
Attendez! C’est... c’esl... je ne peux articuler son nom. C est... le plus grand écrivain du siècle.
» Le sceptique avoua que celte tabatière lui avait élé donnée, il y a un mois à peine, par M. de Lamartine.
» Vingt, trente expériences ont élé faites avec succès. M. Hermann, bien autrement habile que les Philippe, les Itobin, les Bosco, nous a montré son adresse et plus lard sa puissance inagnélique en agissant sur un de nos amis, qui a fini par demander grâce au milieu des éclats de rire de l’assemblée. Chacun est reslé émerveillé.
» Jeudi dernier, M. el Mmo Hermann ont donné leur première représentation. L’assemblée n’était pas aussi considérable qu’on était en droit de l’espérer; mais, à Mâcon, on
mil savoir avant de voir. On laisse partir les éclaireurs, ci si ces dernieis sont satisfaits, ils commandent à la foule qui Ils suit.
» Los éclaireurs sont sortis dans le ravissement. C’est incroyable! disait l’un. C’est prodigieux! disait l’autre. C’est à \ous effrayer ! disait un troisième.
» En effet, le genre de spectacle donné par les deux artistes est en dehors de tout ce qui a été observé jusqu’à ce jour.
» M. Uennann déploie dans ses tours de prestidigitation une adresse, une aisance qui dépassent de cent cou lées les tours de Robin, qui dernièrement a obtenu sur notre scène un si beau succès.
» En la voyant vêtue d’une robe de velours noir, faisanl ressortir sa p&leel gracieuse ligure, en la voyant gravement s’asseoir dans un fauteuil placé sur la scène, nous avons cru voir une pythonisse venant rendre ses oracles.
— Quel est l'objel touché? — Une pièce romaine. — Quel est son millésime? — Elle n’en marque pas. — Quel est l’objet touché? — Une pièce d’or. — A quel pays appartient-elle? — A la Savoie. — Quelle est sa valeur? — l)ix francs. — Quel est le millésime? — 185-r.
n Et tout cela est exact, tl M”0 Hermann, eût-elle les deux yeux grandement ouverts, ne pourrait apercevoir la pièce, et encore moins en découvrir l’elïigie et le millésime.
— Quel 5ge a monsieur? — 77 ans.
— Le monsieur n’est pas fait d’hier.
— Quel numéro ai-je tiré à la conscription? — 126.
— Sur quelle carte ai-je fixé mon attention? — Sur le huit de carreau.
» Cent expériences en ce genre se succèdent au milieu de l’étonnement et des applaudissements des spectateurs, tous interrogés, tous à même déjuger de la valeur des expériences.
» C’est de la ventriloquie! disent les uns. Allons donc, répondent les autres, SI. Ilermann le plus souvent n’ouvre pas la bouche. Alors c’est... c’est...
> Voulez-vous savoir, chers lecteurs, ce que c’est? C’est la plus admirable découverte du xixe siècle, c’est un sens nouveau qui se manifeste, c’est un don que Dieu a fait à l’homme, et dont ce dernier n’a pas encore su profiter.
» A genoux, matérialistes ! el adorez l’esprit, l'âme, dans ces modestes expériences faites dans un simple théâtre, transformé tout à coup en un temple où se révèle l’Eternel.
» A genoux, magnétiseurs! L’anti magnétisme, qui est le magnétisme par excellence, montre ce que vous n’avez pas encore montré si clairement, si sûrement. »
Revenant sur cette question dans son numéro du 20, M. Ordinaire ajoute :
« Dans un feuilleton inséré dans le journal de Saone-et-I.ohre, le 30 avril 1842, je disais :
« L’action du magnétiseur se fait sentir sur le somnam-» bule même à l’état de veille. Ainsi, nous reprochions à » une crisiaque les fautes d’orlhographe qu’elle faisait. C’est » votre faute, nous dit-elle, ayez la volohté ferme que je » n’en fasse pas lorsque j’écrirai à l’état de veille, et j’écri-» rai correctement.
» Lorsqu’elle fut éveillée, nous ne la prévînmes pas de ce j qu’elle avait dit en sommeil, et nous l’engageâmes à écrire » une lettre sous notre dictée.
» Nous nous plaçâmes derrière elle pour suivre de l’œil
» lous les mots qu’elle tracerait, et nous dictâmes : Coin-« ment se fait-il ? etc.
» Bile écrivit commen se fait-il?
» Nous formulâmes celte pensée : il faut un T à comme», » et aussitôt la crisiaque, très-éveillee, comprit notre pensée, » et ajouta un T à commcn. »
« Cent fois, cette expérience a été représentée avec succès. Si j’eusse connu le mode d’agir de M. el Mme Hermann, au lieu de demander un t, un s, un b, j’aurais demandé quel objet louche monsieur? quelle carte a-t-il désignée? Enfin, j’aurais obtenu la double vue, prétendue anti-magnétique.
• M”e Ilermann est somnambule naturelle : elle se lève la nuit, travaille sans lumière à des travaux d’aiguille très-délicals. L’aciion de son mari sur elle est donc facile à expliquer. L’anti-magnétisme de Robert Houdin et celui de M. Hermann n’est donc que la faculté dont jouissent ces messieurs, de transmettre leurs pensées, l’un à son fils, l’autre à sa femme, bien que fils et femme ne soient pas endormis.
» Mais, me diront quelques lecleurs, pourquoi ces messieurs nomment-ils cette faculté de l’an tj-magnétisme? llélas! pour ne pas heurter le scepticisme de tant d’esprits forts, qui ne veulent pas encore admettre le magnétisme.
» M. et M“ Hermann, lors de leurs premières expériences publiques, appelaient leur seconde vue magnélique. Personne ne consentait à les visiter. Ils ont déclaré que c'élait de l’anti-magnétisme, la salle a été comble. Aussi, que font-ils? s'ils sont interrogés par des esprits forts, ils disent : ce n’est pas le moins du monde du magnétisme, c’est un tour que nous pouvons apprendre au premier venu. S’ils sont visités par des magnétiseurs, ils diront : c’est du magnétisme, non-seulement pur el simple, mais du magnétisme perfectionné, en ce qu’il s’obtient sans le sommeil. En agissant ainsi, M. et Mme Hermann ne heurlenl aucune croyance, el leur bourse se rempli!.
» Dimanche ils ont donné leur seconde représentation.
» M. Hcrmannaélédans ses tours de prestidigitation d’une adresse étonnante.
, njme nerman a été, comme toujours, merveilleuse. Elle a désigné, décrit avec minutie tous les objets présentés à son mari ; elle a redit toutes les pensées qui lui ont été communiquées, au milieu des bravos et des acclamations des spectateurs.
» Vous triomphez, me disait un témoin de ces faits si singuliers, et qui ne m’avait pas épargné les sarcasmes dans le temps où j’avançais la constatation de faits identiques. J’ai répondu : Je triomphe en effet el je jouis de voir enfin la vérité se faire jour; et, en effet, le passage de M. et M""- ller-mann, à Mâcon, m'a plus charmé que le passage de tous les rois et de tous les princes de la terre. »
Le Magnétisme nu Bïavrc. — Nous avons annoncé dans notre dernier numéro, qu’un magnétiseur distingué, qui se trouve au Havre depuis quelques jours, se proposait d'admeltre, dans une séance particulière, à être témoins do ses expériences, ceux de nos concitoyens qui s’occupent de cette science si merveilleuse qui se nomme le magnétisme animal. Une séance a déjà eu lieu, et les quelques élus qui ont été admis à y assister ont emporté l’idée la plus avantageuse de la science de M. Derrien et des facultés magnétiques véritablement extraordinaires de son sujet, M1"' Froidcour. M. Derrien a principalement étudié les applications thérapeutiques du magnétisme, c'cst-à-dire qu’il le considère surtout dans ses rapports avec l’art de guérir. Il dédaigne ces expériences frivoles d’une science sérieuse, qui consistent à faire deviner, sans l'intermédiaire des organes des sens, au sujet plongé dans le sommeil magnétique, les objets qu'on lui présente. Ces tours de passe-passe, il faut bien le reconnaître, ont été trop souvent le thème des objections et des arguments du scepticisme et de
l'incrédulité. Aussi, les magnétiseurs sérieux font-ils sagement de les abandonner à ceux qui foni de celle branche des connaissances humaines, non pas un sujet d’études el de réflexions, mais l'objet d’exhibitions triviales entourées de lotit le charlatanisme apparent des tréteaux.
I-es expériences de M. Derrien ont un tout autre caractère: le flambeau du magnétisme, entre Ers mains, jelle ses clartés sur les cas de diagnostic obscur, et c'est à cette science qu'il demande des notions sur la nature des maux qui affligent l’humanité, et sur les moyens curatifs qu’il convient d’employer pour les combattre !
Voici une de ces expériences qui a été faite dans la séance donnée par M. Derrien.
Une femme, enceinte de plusieurs mois, avait été mandée pour assister à celte séance ; M” Froidcour fut mise en rapport avec elle, et bientôt tons les phénomènes de la grossesse se produisirent chez la somnambule. Chose étrange; les symptômes extérieurs même se révélèrent de la façon la plus subite ! Le ventre était distendu et atteignait le même développement que celui de la personne avec la-qnelle elle se trouvait en rapport. Une sage-femme qui était présente, constata que tous les signes moins visibles qui caractérisent la grossesse se rencontraient chez elle. On sait, ou l’on ne sait pas, que les facultés magnétiques varient suivant le tempérament et l’organisation des sujets et donnent lieu à des phénomènes de la nature la plus diverse en raison de la nature spéciale des facultés des somnambules. Tel sujet a une aptitude particulière pour la vue à dislance ; tel autre subit les impressions que lui communique l’état des personnes malades avec lesquelles il esl mis en rapport. MmF Froidcour appartient à celle dernière catégorie. Elle doit au magnétisme le rétablissement de sa sanlé après avoir été en proie aux maladies les plus terribles el les plus difficiles à guérir, par les moyens thérapeutiques ordinaires ; à son tour, inslrumenl docile entre leo mains du magnétiseur
dont elle subit l’influence, elle fournil, grâce à sa lucidité, des indications précieuses à la science médicale.
Les autres expériences faites par M. Derrien ont présenté, à d’autres titres, un intérêt d’autant plus vif qu’elles s’éloignaient davantage du programme des magnétiseurs ordinaires. Les phénomènes de l’attraction magnétique ont surtout excité, au plus haut degré, la surprise des assistants.
Le défaut d’espace nous empêche, à notre grand regret, de traiter avec tous les développements qu’il comporterait ce sujet extraordinaire et bien fait pour fixer les méditation» des esprits sérieux.
(Journal de VArrondissement du Havre).
— Les lignes qui précèdent sont dues à la plume de M. Gaffeney, auteur des : Paroles d’un Croyant, article inséré dans notre tome 1er, page 415.
Nous sommes heureux de voir qu'enfin les magnétiseurs comprennent que les expériences de somnambulisme sont les plus mauvaises qu’on puisse faire en public. Mais notre joie redouble en voyant les nouveaux propagateurs entrer dans la voie des séances gratuites, seules compatibles avec la dignité d’une telle mission. Cette marche ration-nelle, conforme au but qu’on se propose, est seule capable d’assurer le triomphe du magnétisme, car outre qu’elle abrite contre tout soupçon de charlatanisme, enlève tout prétexte au doute, elle offre le moyen sûr de répandre dans les masses souffrantes la connaissance d’une découverte aussi essentielle à la santé publique qu’au bonheur individuel. Le jour où l’on suivra cette roule, que la cupidité seule repousse, le progrès du mesmérisme décuplera, centuplera peut-être, parce que tous el non plus quelques-uns seront conviés à la jouissance de ses bienfaits.
BIBLIOGRAPHIE.
Il s’opère dans l’intelligence de tous les peuples un travail favorable au progrès des idées nouvelles. L’Italie, restée jus-qu’ici presque étrangère au magnétisme, commence a en acccuillir les notions avec faveur. L’un de nos élèves, qui se trouve actuellement en Sardaigne, nous envoie l’article magnétisme de VEncyclopédie populaire italienne, livraison du 17 août 1846, dont voici la tradution :
Magnétisme. — Dénomination que l’on donne à celle force inconnue au moyen de laquelle un homme peut, dans certaines circonslances, exercer sur un autre individu un pouvoir tel, qu’il provoquera en lui un élal de somnambulisme artificiel et donnera lieu à la production de phénomènes aussi singuliers qu’inexplicables.
« L’existence de cet agent, ou de celte force inconnue, et la véracité des effets qui lui sont attribués furent et sont encore un objet de controverse entre les physiologistes et les médecins ; de sorte qu’il est excessivement difficile de traiter celle matière sans être taxé par les uns de pyrrhonisme, par les autres d’extrême crédulité, voire même d’imposture.
)- Toutefois comme le compilateur de cet article a, d’une part, élé témoin de quelques phénomènes magnétiques et que, d’autre part, il ne peut faire moins que de réputer absurdes plusieurs d’entre les prodiges attribués au magnétisme animal, il croit devoir prendre un juste milieu dans l'exposé de sa propre opinion au risque de voir cet article déplaire aux uns et aux autres.
« Que l'homme ¡misseexercer une influence plus ou moins grande sur quelques-uns de s«.* semblables; que ctlle in-lluence soit plus développée chez certains individus el s’étende sur un plus grand nombre de personnes, c’esl une vérité si bien démontrée par les faits qu’on ne peut, le moins du inonde, la révoquer en doule.
» En effet, comment expliquer le sentiment de sympathie que l’on éprouve au premier aspect d'une personne qui vous attire à elle et vous fait, en un moment, devenir son confident el son ami, comme si vous la connaissiez depuis des années?
»Comment expliquer le sentiment opposé, l'antipathie, qui naît à la vue de personnes qui, non-seulement ne vous ont jamais nui, mais vous comblent au contraire d’amabi-lilés, sans que ce sentiment soit, en aucune façon, suscité par des rapports défavorables?
» Comment expliquer le pouvoir que possèdent certaines personnes d'affliger{conquideie), par le simple regard, leurs plus cruels ennemis qui, loin d’elles, se montrent animés de colère, de haine et qui, à leur approche, deviennent muets et se plient à toutes leurs volontés?
» Comment expliquer cette attraction invisible vers une personne de sexe différent, qui vous rend son esclave et vous fait oublier voir; personne et vos intérêts en général ?
» Il est bien vrai que, dans certains cas, celte domination est due à la beauté du corps, à la douceur des manières, aux dons de l’flme et à d’autres qualités qui l’expliquent; mais bien souvent il n’y a pas môme une de ces qualités, el la fable de Joconde de l’Arioste devient vraie jusque dans scs moindres détails.
» Commcnl, dis-je, expliquer cette attraction, sinon par quelque puissance dont on ignore la nature? Enfin, les phénomènes mêmes que l’on observe dans l’amour n’en sont-ils pas une preuve évidente? Il est de fait qu’entre deux per-
sonnes qui s’aiment, ¡1 y en a toujours une active qui se laisse aimer et attire l’autre à soi ; puis, une passive qui se trouve irrésistiblement attirée vers la première à tel point qu’elle se plie en tout et pour tout à ses caprices. Ce fait s’observe jusque dans les femmes qui font de leurs corps une marchandise; puisqu’il n’est pas rare de les voir courtisées par un amant, digne, sous tous les rapports, d’être aimé d’elles et qui se dépouille de tout en leur faveur, répandant à profusion des trésors comme prix de quelque sourire, tandis qu’elles le méprisent et sont, elles, à leur tour, dépouillées par un autre privé de tout mérite et d’attraits, qui les courtise pour leur argent et le dissipe en débauches, ne se souciant nullement de ces malheureuses qui se sont cependant follement amourachées de lui.
» La véracité de cette influence d’une personne sur une autre étant reconnue, la possibilité et, qui plus est, l’existence d’un grand nombre de phénomènes attribués au magnétisme animai est ainsi prouvée.
» Il nerestedonc qu’à endéterminerl’extension, la nature, et à voir quelle utilité on en pourrait tirer au profit de l’humanité; ce qui est fort difficile à établir. Toutefois nous essayerons, autant que cela est possible, d’exposer brièvement l’histoire du magnélisme animal, les différents moyens employés pour magnétiser, les phénomènes attribués au somnambulisme magnétique, les applications qu’on en fit en médecine, el, de là, nous tâcherons d’émettre l’opinion qui nous paraîtra la plus conforme au vrai. »
1" Histoire du Magnétisme animal.
Ici le compilateur nous montre Mesmer reçu foidement à Vienne, traité d’imposteur par la faculté de Prague, de visionnaire par celle de Berlin , méprisé par les autres académies d'Europe; opérant des cures en Souabe et en Suisse sans y faire de prosélytes, retournant à Vienne où il fut rebuté une seconde fois, ce qui fil qu’en 1778. persuadé de
la vérité que renferme ce proverbe : itemo proplieta in pn-triü, il se dirigea vers Paris; mais malheureusement pour le magnétisme animal Mesmer arriva dans la capitale en môme temps que Cagliostro et le comte de Saint-Germain, et, en France comme ailleurs , il fut couvert de mépris et s’attira surtout les criailleries de ces tirâtes de gens que l'on nomme savants.
Viennent ensuite les 27 propositions de Mesmer, les moyens qu’il employait pour magnétiser; puis la méthode de Deleuze, que le compilateur nous donne comme la plus communément répandue, et il termine ainsi le chapitre relatif à l’histoire du magnétisme :
« On doit préférer, dans le principe, cette méthode; mais quand le malade a déjà été endormi une ou deux fois, il suffira de quelques mouvements de mains près de lui , sans le loucher, et du simple regard môme pour l’endormir. D’aucuns croient môme possible de magnétiser par la simple volonlé, à l’insu du malade, derrière un mur el môme à la distance de plusieurs milles ; mais à cela nous répondrons : Credai Judœtis Apella. Ce qui m’a bien l’air de vouloir dire : Va-l-en voir s’ils viennent, Jean...
2° Conditions nécessaires à l’obtention des phénomènes.
» Les plus chauds partisans du magnétisme avouent qu'on ne peut pas obtenir sur tous indifféremment les effets magnétiques. Selon eux, le sexe féminin, la constitution délicate, l’âge de l’adolescence, le tempérament nerveux, les maladies nerveuses, la confiance, la sympathie de la personne qu’on veut magnétiser, la tranquillité, le silence favorisent la production du somnambulisme magnétique. Les conditions opposées relardent le phénomène ou peuvent l’empêcher de se produire. »
D’après cet exposé, le compilateur eût mieux fait de mettre en titre : conditions favorables... el non nécessaires.
3° Effets produits pur le Magnétisme animal.
o. On prétend que ces individus éprouvent un sentiment de lassitude (stancliezza), de chaleur alternant avec un froid aigu (briuidi), bâillent et finissent par s’endormir. Durant ce sommeil, interrogés, ils répondent aux interrogations, et sans regarder ils voient les choies qui les entourent, ils connaissent leur état interne, prédisent ce qui devra leur arriver, découvrent des choses qui existent, à travers des obstacles mécaniques ou dans l’obscurité, et celles qui sont situées à des distances immenses, jugent de la saveur des substances appliquées à l’épigastre, voient (mirant) dans leur propre intérieur ou dans le corps des personnes présentes comme dans un miroir, connaissent les remèdes que l’on doit appliquer à leurs propres maux et à ceux des autres, prévoient enfin les choses qui doivent leur arriver après un temps plus ou moins long et, qui plus est, fixent même ce temps avec précision. Réveillés, ils n’ont plus souvenance de rien, pas même d’avoir rêvé.
4° Application thérapeutique du Magnétisme animal.
« Etant admise la réalité de toutes les choses ci-dessus mentionnées, il est facile de voir quelle est l’immensité de l’application dont le magnétisme est susceptible dans la pra* tique médicale.
» EnefTel, parlesimple sommeil magnétique, les sectateurs deCeitedoctrine affirment avoirguéri uneinfinitéde maladies telles que : asphyxies, paralysies, chloroses, surdités, gouttes, sciatiques, céphalalgies rebelles, rhumatismes, convulsions, épilepsies, frénésies, etc. En outre, profitant du somnambulisme lucide de quelques magnétisés, on en vient, disent-ils, à appliquer à ces malades ou à d’autres personnes des remèdes plus convenables à leurs maux, et l’on exerce ainsi avec sûreté l’art de guérir.
« Que l'homme el plus s|iécialemeni les femmes puissent, dans quelques c;is, loin ber dans un étal de somnambulisme ou de suspension des sens externes, avec celle exaltation des sens internes qui leur fait exécuter des choses fort difficiles, et qu’ils n’avaient pu exécuter en état de veille, de nombreux exemples rapportés par des auteurs dignes de foi nous le prouvent.
» Que, dans cet état, la transposition des sens externes ait lieu , on ne peut pas môme en douter.
» Qu’un individu exerce sur un autre une influence telle qu’il puisse, dans certains cas, ou par le contact ou par le regard, le mettre en cet éiat; c’esl un fait que l’on ne peut nier désormais.
» Que ce somnambule puisse, dans l’état où il se trouve, parler, répondre aux interrogations qui lui sont faites, el éprouver une exaltation telle des sens internes qu’ils puissent suppléer jusqu’à un certain point aux sens externes, est chose confirmée aujourd’hui par de si nombreux témoins oculaires que ce serait montrer de l'obstination que de ne pas y ajouler foi.
» Mais que l’on doive plutôt attribuer ces phénomènes à la transmission d’une espèce de fluide qu’à l'impression exercée sur les sens, et l’imagination par le contact el par le regard du magnétiseur, ceci ne peut se démontrer !
» Kl môme, si I ou réfléchiI que lu patient peut se soustraire aux effets des pratiques mises en œuvre pour l’endormir, moyennant une forle volonté de n’ôlre pas magnétisé, moyennant une distraction continuelle; si l’on vous avertit qu’une forte antipathie contre le magnétiseur rend l’opération nulle, el que pour le succès de celle opération on demande une disposition particulière chez l’individu, on sera plutôt enclin à croire que le somnambulisme magnétique esl l’effet d une commotion particulière du système nerveux, el doit
i ue considéré comme un accès de névrose déterminé par l'attention longuement sou Ici; ue, par le conlacl, par le regard du magnétiseur, sans recourir à l’hypoilièse du fluide magnétique. Celle opinion se Irouve encore plus fortement confirmée par les exemples du sommeil magnétique dans lequel d’aucuns tombent spontanément cl sans qu'il ait été nullement provoqué.
» Il semble qu’il ne doit plus rester le moindre doule à cri égard, et que le sommeil ou somnambulisme magnétique doit être jugé comme un accès de névrose spécial.
» Joseph Franck, reconnaissant qu’un individu peut difficilement ôlre magnétisé d’abord, tandis que par la suite le moindre signe et môme le simple regard suffit pour le réduire en cet état, fut le premier qui expliqua ce phénomène. De cette manière on pourra se rendre compte du somnambulisme provoqué par la seule volonté de l’opérant, à travers les murs d’une chambre ou de la plus grande distance; puisque, dans ce cas. le somnambulisme serait spontanée! pourrait être comparé à l’épilepsie qui en premier lieu est excitée par une forle commotion de l’esprit ou par simple imitation, et revient ensuite spontanément. De sorte que, sans nier le fait, nous pouvons croire que le somnambulisme provoqué, dit-on, par le simple vouloir, est un pur accident el que la volonté de l’opérant n’y contribue en rien.
» D'autant plus que cela s’obtient seulement, ainsi que l'avouent les plus chauds professeurs de magnétisme, chez les individus qui ont élé plusieurs fois déjà soumis à cette opération.
• Le défaut de souvenir, tel qu’on l’observe dans le» autres névroses, de celui qui est tombé dans cet état, démontre pleinement noire opinion que vienl renforcer encore d’une manière plus énergique la dégradation de la santé de ceux qui son! soumis trop souvent, et sans nécessité, à l’aciion du prétendu fluide magnétique.
» Maintenant, si nous venons à discourir sur les miracles
opérés par les somnambules, il sera difficile de leur assigner un terme el d’élablir ce qu’il y a de vrai, ce qu’il y a d'exagéré et ce qu’il y a de (aux. C’est pourquoi les imposteurs sont malheureusement nombreux cl savent profiler de la crédulité d’autrui, et il est facile que le guérisseur (il curante) soit trompé par le malade, ou que malicieusement il trompe les aulres.
» Toutefois, l’exaltation des sens internes au point de pouvoir voir, sentir, goûter, flairer sans leur secours, semble devoir être admise dans quelques cas raies. Le sentiment intime de tout ce qui se passe dans le malade même, révélé par le somnambule lui-même, semble aussi, dans quelques circonstances, démontré.
» Maisensuile, nous ne pourrons pas aussi facilement croire qu’une personne, dans l’état magnétique, ait la faculté de voir à travers les murs d’une chambre, de lire un billet enfermé dans une cassette, de savoir ce qui se passe à plusieurs milles de distance, de lire dans l’intérieur des autres les maux dont ils sont affligés, de leur suggérer des remèdes appropriés au cas, et moins encore de prévoir les événements futurs. Je ne balance pas à affirmer que ceux qui racontent ces choses ou furent trompés eux-mêmes, ou essayent de tromper les autres.
» Quant à la magnétisation des substances inanimées, comme par exemple d'un arbre, de l’eau, etc, je n’hésite pas à la considérer comme une chimère.
» De toutes ces considérations résulte clairement ce que l’on doit penser du magnétisme animal considéré comme remède.
» En premier lieu, on ne devra jamais essayer démagnétiser qui que ce soit par pure curiosité; puisqu’il s’agit de déterminer un premier accès d’une maladie encore inconnue dont le retour peut influer grandement sur la constitution de l’individu et être cause de maux graves. Le cas suivant le prouve à l’évidence.
» Une dame , sujelle à de fortes névralgies qui s’étaient montrées rebelles aux moyens ordinaires, fut magnétisée et éprouva un grand soulagement du sommeil artificiel dans lequel on la jetait, attendu qu’après celte opération elle souffrait moins de ses incommodités (incomdi). On la laissa en repos (tn pace) pendant longtemps; mais, un beau jour, une personne étrangère à l’art voulut, par pure curiosité, s’essayer de la magnétiser et fit naître en elle un accès d’épilepsie, maladie à laquelle elle n’avait point été sujette auparavant. En outro, les écrivains qui ont Irnilé du magnélisme animal, assurent que les personnes qui y ont élé assujetties en restent plus ou moins débilitées (spossate), et la facilité avec laquelle elles tombent ensuite dans le sommeil magnétique prouve que le système nerveux acquieri une sensibilité maladive.
» En second lieu, on pourra essayer le magnélisme animal sur les personnes affectées de maladies nerveuses, rebelles aux différents moyens de l’art, puisque le magnétisme a réussi plusieurs fois, el l’on sait que fort souvent il suffit d’opérer une mutation quelconque dans le mode d’étre du système nerveux pour parvenir à guérir ces maladies.
» En troisième lieu, nous ne devons pas nous fier au diagnostic des somnambules ni pour ce qui les concerne, ni pour ce qui regarde les aulres, el bien moins encore nous risquer à faire usage des remèdes qu’ils nous proposent, l’expérience nous ayant démontré qu’ils parlent au hasard et que fort souvent ils se trompent.
» Enqualrième lieu,landisqued’un côlé nous devons nous mettre en garde contre ceux qui cherchent à tirer parti ou à se moquer de la crédulité d’aulrui, nous ne devons pas, d’un autre côlé, mépriser les faits confirmés par des hommes pleins de bons sens (senno), et ce fait est assez important pour mériter d’étre approfondi par les personnes de l’arl.
» Mais il ne serait pas mal qu’on abandonnât tout à fait la croyance à l’existence d’un fluide opérateur des phénomè-
na dont on parle, et que l’on exécutât les expériences comme si un tel fluide n’existait pas; que l’on abandonnât la ter-minologie ele matjhélhme animal, se restreignant à dire avec les paroles ce que l’on sait et non ce qu’on suppose;'puisqu’une terminologie gratuite établie « priori peut facilement entraîner l’esprit dans une fausse voie, el le rendre lout à fait incapable d’expérimenler avec impartialité et indifférence. Enfin, on doit considérer comme coupables au moins de grave imprudence, pourne point dire plus, ceux qui, privés (diginni, à jeun) de tomes connaissances médicales, cherchent à inoculer dans leurs semblables un état de vraie maladie sans autre but que celui de satisfaire leur curiosité ou de se donner comme capables d’opérer des choses étranges et prodigieuses. »
— Si l’auleur de cet article avait plus lu et surtout plus vu, il n’eût point commis les erreurs que son Juste milieu lui inspire. Une heure passée à bonne école lui eût empêché d’écrire qu’il n’y a pas de fluide mesmérien et que la magnétisation des substances inanimées est chimérique.
L’élablissemenl du magnétisme rencontre partout les mômes raisonnements, éprouve les mômes incertitudes. Il y a vingt-cinq ans, en France, on écrivait sur le même ton, el les savants d’alors croyaient être très-éclairés. Le magnétisme est tout autre chose que le savant italien se l’est imaginé être; c’est-à-dire que ce qu’il approuve est contestai) U; et ce dont il doute liès-réèl. Il est déplorable devoir ainsi semer l’erreur à la place de lu vérité; mais comment rectifier lout à coup les idées des hommes qui doivent servir de guides au magnétisme, lui préparer la conquête du pays qu’ils habitent ?
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (deGai nay). Saint-Cloud. — Imprimerie de Bctin-Mandar.
CLINIQUE.
A M. le baron du Potet.
Monsieur le baron,
Lorsqu'un magnétiseur honnête et de bonne foi cherche à convaincre un adversaire de la vérité qu’il professe, qu’il le presse de se rendre à l’évidence, qu’il l’accable par une logique serrée, qu'il lui ferme toute retraite par l’exposé de faits nombreux, bien constatés, bien avérés : ne pouvant plus échapper autrement, l’adversaire ne manque jamais de dire alors : « Mais failes-moi voir ou sentir moi-même un fait comme ceux dont vous venez de me parler, ou reproduisez-le sur telle ou telle personne queje vous désignerai, et alors je croirai.» Et souvent le magnétiseur essaye en vain sa puissance, et malgré toutes ses réserves el ses protesla-tions de bonne foi el de véracité, il ne recueille pour prix de ses efforts généreux, quoique souvent inconsidérés, que le sourire d’une incrédulité confirmée, heureux encore quand il échappe à l’ironie ou au sarcasme, et souvent même au mépris.
Pauvre magnétiseur! qu’as-tu donc fait? lu t’étonnes de ton impuissance, el parce que lu étais pressé de produire, afin de cueillir celte palme de victoire qu’il te semblait si facile de remporter, tu es contraint de battre en retraite loi-même, accusant mille innocents de ton fâcheux méfait, tan-TOMF. Y. — Xo S®. — 10 DÉCEMBRE 1847. 11
dis que lu ne devrais en accuser que la propre impalienceet la légèreté, ion manque de foi el de persévérance ; lu as commencé ion œuvre sans l'être assez recueilli, sans avoir rassemblé les forces, sans avoir calmé Ion esprit agilé par la discussion, fixé ta pensée troublée par la lulle, rendu obéissanle ta volonté irritée par la résislance ; oublie l'adversaire que lu voulais vaincre, pour ne voir qu un ami à éclairer, et du bien à faire; lu voulais remporter un triomphe, sans avoir préparé les armes, et vaincre sans avoir pour loi ni droit ni puissance. Pourquoi t’élonner de ce mécompte, il faudrait plutôt s’étonner de ce que lu ne l’avais pas prévu.
— On le raille, — mais lu t’excuses en disant qu'il y a des natures rebelles au fluide mesmérien. — Eh ! qu’en sais-tu? qui le l’a dit? As-tu donc sondé dans toule leur profondeur les forces, les ressources insondables dont le Créateur loul-puissant a doté noire présomptueuse et ingrate humanité, pour priver d’un seul mol et avec tant d’assurance une portion de l’espèce humaine de la faculté que Dieu a accordée à un si grand nombre d’hommes. La nature a été plus sage que toi! Et comme elle veille soigneusement à ta propre conservation aussi bien qu’à celle du patient sur lequel tu voulais essayer les forces, elle s’est refusée à seconder les efforts, parce que tu n’étais pas dans une disposition convenable, et elle t’a chalié pour le rendre prudent. Ce résultat est dû aussi à un manque de persévérance et de foi, car il pourrait encore l’être réservé, même en te mettant pleinement dans les dispositions les plus convenables pour obtenir l’effet désiré. Le corps humain compte ses vaisseaux et ses canaux par milliers redoublés, el chacun y joue un rôle, son rôle, nécessaire à la perfection de l’ensemble. Et il me paraît, pour me servir d’une image propie à rendre ma pensée, que les rouages d’une montre sont l’emblème de ce qui se passe physiquement en nous. Dans la montre, il y a une mullitude de pièces de toutes natures, grandeurs, formes, qualités ; chacune d’elles a son mode de mouvement
et sa place. Telle fait sa révolution dans une demi-seconde, telle autre dans une minute, telle autre dans une heure, celle-ci dans un jour, celle-là dans un mois; et cependant, quelque petite qu’elle soit, chacune d’elles est aussi nécessaire à la santé parfaite de la montre que la plus grande, et sitftl que l'une d’elles est altérée en un point quelconque, immédiatement la machine entière souffre. Qu’un grain de poussière s’introduise entre scs divers éléments et vienne se fixer sur celte pièce dont le mouvement esl si lent qu’il esl insensible; la machine n’en conservera pas moins pour nn temps son activité et la précision de sa marche jusqu’à ce que ce grain de poussière ait été mis en contact avec une autre pièce, el soit venu altérer les rapports qni existaient entre elles, jusque-là rien n’avait fait soupçonner sa présence, et le plus habile ouvrier consulté à cet égard, voyant l’harmonie de l’ensemble, aurait peut-être affirmé son état parfait, tandis qu’à son insu se produisait peul-être dans son organisme une profonde perturbation. Nons ne voyons que les effets, Dieu seul voit les causes; et là où nous supposons qu’existe l’ordre el la perfection, se trouve souvent le désordre. Ainsi, tel magnétise un sujet, et parce qu’il n’aperçoit aucun effet, si petit qu’il soit, bientôt il perd courage el abandonne son entreprise, alors que justement commençait à s’opérer à son insu l’œuvre qu’il voulait produire, et qui n’attendait que le moment convenable pour se manifester extérieurement.
Il ne fallait que continuer avec résolution, patience, suite, et on aurait vu la merveille se produire! 0 légèreté! 0 manque de foi! O manque d’amour! c’est vous! oui, ce n’est que vous qu’il faut accuser de lotis nos insuccès !...
Voici un fait qui prouve d’une manière bien évidente cette vérité, et qui renferme un enseignement dont chacun pourra profiter pour soi. Je le tiens d’un de mes intimes amis dont je connais el puis garantir l’entière véracité et la bonne foi, autant que la solidité de caractère el la charité. Je
vais le rapporter tel qu'il me l’a raconté hier, et je le livre à la conscience el à la méditation de chacun.
Mon ami, M. S., s’occupe de magnétisme depuis un assez, grand nombre d'années. Un jour qu’il se trouvait à Strasbourg, son pays natal, au retour d’un de ses nombreux voyages, étant avec quelques amis, la conversation s’engagea sur le magnétisme, et bientôt ceux-ci le provoquèrent en répétant celle célèbre parole : « Si je ne vois, je ne croirai point. » Guérissez M°" W. et alors nous croirons. M"10 W. avait un magasin bien connu des jeunes gens de la ville, et elle portait depuis un grand nombre d’années la tèle complètement inclinée sur l’épaule (je ne me rappelle plus laquelle), par suite d’un abcès au cou qui avait élé mal soigné el dont enfin elle avait guéri; mais la plaie, en se cicatrisant, s’était tellement contractée qu’elles’élail comme ossifiée et avait privé la lôte de loul mouvement cn la forçant à garder la position incommode donl elle souffrait depuis si longtemps. En outre, celle daine éprouvait depuis une douzaine d’années environ do violenls maux de tôle qui 11e la quittaient qu’à de rares intervalles et pour quelques instants seulement. Telle était la position de celte personne lors de la provocation qui fut faite à M. S. Celui-ci, piqué au vif, résolut avec une volonté allemande d’entreprendre cette guérison; la malade y consentant, il commença sans tarder. Or, il faut remarquer qu’il avait une grande habitude d’opérer, que ses succès élaienl bien connus, qu’il savait posséder de la puissance, et sui tout qu’il avait une persuasion profonde de feflicacilédu magnétisme, comme ce qui suit le prouve bien , cl il ne fallait rien moins que loul cela pour le soutenir et lui donner tonte la persévérance donl il avait besoin, car, malgré des magnétisations d’une heure, faites avec régularité chaque jour, deux mois s’étaient déjà écoulés sans qu’il eût vu le plus petit symptôme, la moindre apparence de sensibilité ni d’effet produit. Cependant, armé de sa persévérance alsacienne, rien ne pouvait ni l’arrêter ni le
décourager ! Combien y a-t-il ,1e magnétiseurs, je le demande, qui auraient été disposés à en faire autant? Il continua donc, el, à peu près dans les quelques jours qui suivirent le commencement du troisième mois de traitement, les maux de tète disparurent peu à peu, et enfin complètement ; la malade ressentit alors dans les bras une légère fatigue, mais bientôt après tous ces commencements d’effets cessèrent, et elle parut de nouveau être insensible. Le troisième mois s’écoula sans décourager mon ami, mais sans voir paraître les prémices du résultat qu’il poursuivait. Ali! de quoi n’est pas capable la persévérance que donne la foi. Le roi David avait dit en parlant du secours qui vient de Dieu : « S’il larde, attends-le,» et c est ce que fil mon ami. Il commença donc le quatrième mois de traitement avec autant de confiance qu’au premier jour ; cependant bientôt une légère somnolence sembla se montrer, mais elle était de fort courte durée; à cet état succéda quelque apparence de sommeil somnambulique qui ne durait que quelques minutes; toutefois mon ami en profita pour interroger la malade et la faire se prescrire un traitement. Enfin, après trois mois el demi d’efforts quotidiens et réguliers, la malade ressentit pour la première fois de vives douleurs à sa plaie, bientôt celle-ci se rouvrit, suppura, s’enflamma môme, mais en même temps toute la liberté fut rendue 5 la tête, el la flexibilité au cou, cl au bout de dix jours la plaie se cicatrisa de nouveau, mais avec l’entière î'uérison de la malade el au grand étonnement de tout le monde.
Je laisse chaque lecteur méditer un tel fait, il parle assez éloquemment et est assez feilileen enseignements pour qu’il soil inulile de les faire ressortir. Permettez-moi cependant, Monsieur le b.iron, d’ajouter une observation que j’adresse aux magnétiseurs, el qui, je l’espère, aura votre approbation.
Trop souvent, il me semble, l’élude du magnétisme n’esi considérée par un grand nombre de personnes que comme
un nouvel agrément de société, que comme un joujou à l’usage de grands etifants; on n’y voit qu’un moyen de s’amuser, de voir ou de produire des choses curieuses, non point en vuede s’instruire, mais seulement pour se divertir, pour tuer le temps, pour remplacer dans une soirée les jeux de toute sorte dont on fait usage pour se distraire ! ! ! On cherche pardessus tout à produire le somnambulisme parce que cala est nouveau, qu’on peut faire ainsi des tours de force, qu’on peut savoir ce qui se passe chez le voisin ou la voisine, ce que les assistants ont dans leur poche, el mille autres niaiseries semblables!!! Ne demandez pas à de telles gens de consacrer une partie de leurs forces au soulagement de quelqu’une des mille douleurs qui tourmentent la pauvre humanité, \ous les ennuieriez; en effet, que leur importent les autres? tant pis pour eux s’ils sont malades, ils n’ont pas le temps des’en occuper; d’ailleurs le magnétisme ne peut rien surcette affection, et après tout, qu’on s’adresse à un homme spécial, car jiour eux ils ne veulent point se charger d’une telle entreprise ni d’une telle responsabilité!!! Si vous les pressez davantage ou qu’ils se sentent repris par leur conscience, ils essayeront bien, mais comme à contre-cœur, sans amour, sans foi, sans courage, sans confiance, et surtout sans persévérance, car ce sont des égoïstes ; ils magnétiseront bien pen dant trois heures de suite pour s’amuser, mais les soins qu’ils donneront à un malade seront toujours trop longs et trop nombreux, et ils auront toujours haie de dire que le magnétisme est inefficace pour ce cas! 0 injustice! 0 folie ! 0 inconcevable aveuglement du cœur de l’homme!!! Quoi ! le Créateur, souverainement sage et bon, nous aurait donné la sublime faculté, le pouvoir admirable de rétablir l’équilibre rompu par la maladie dans l’organisation d’un de nos semblables, cela ne dépendrait que de notre volonté, et nous ne le ferions pas! Les souffrances de ceux qui nous entourent ne nous toucheraient pas quand il nous serait si facile d'y metlreun terme! Lajoie qu’éprouve une bellcâmcà la pensée
d’avoir fail du bien à son semblable, d’avoir, sans espérance île retour, allumé dans le cœur de son frère le doux flambeau de la reconnaissance, d’avoir semé autour de soi le bonheur et la santé, tant de douceurs et de consolations n’ont donc pas d’attraits pour tout le monde!!! Ah ! de quoi le monde est-il donc fait? Il faut qu’on soit descendu bien bas pour ne pas sentir le prix infini de celte vie que Dieu a déposée dans celte enveloppe si fragile, notre corps, pour ne pas l’apprécier chez son semblable el pour consentir ou pré-lérer même la dépenser à des riens, à des frivolités sans valeur, au lieu d’employer ces forces au noble usage auquel Dieu lésa destinées en nous les donnant! Ne sonl-ce pas des dons qu’il nou9 a faits et dont nous aurons à lui rendre compte? Au dernier jour, qu’aura à répondre à son juge et que se dira à lui-môme celui qui, éclairé par l'éclatante lumière de la vérité qui brillera alors sur toutes choses, sera convaincu d’avoir élé infidèle à son devoir, el coupable de lèse-majesté envers son Dieu en ce qu’il reconnaîtra avoir reçu de son Créateur les moyens de le glorifier, d’accomplir l’œuvre de miséricorde dont sa bonté et sa sagesse l’avaient chargé afin de lui en faire recevoir la récompense, et que, bien loin d’avoir utilisé ces dons précieux qu’il avait ®n lui, et qu’il aurait pu faire servir à produire tant de bien, il verra qu’il ne les a pas seulement méprisés, mais bien plus, qu’il les a détournés de leur deslinalion en les faisant servir à satisfaire sa folie !
Ah! je le sais, et grâces en soient rendues à Dieu, tous les magnétiseurs ne pensent pas ainsi ; il en est, el il en est beaucoup qui réellement comprennent leur mission, et c’est vers ce but particulièrement, Monsieur le baron, que vous dirigez dans vos si inléressanles leçons les efforts de tous ceux que vous initiez à la plus grande et la plus belle de loules les sciences; mais si ces réflexions ne sont pas applicables à tous dans toute leur rigueur et toute leur étendue, serait-il bien vrai pourtani qu’il pût se trouver quelqu’un
auquel, à aucun degré, elles ne pussent convenir? J’ai lieu d’en douter; et je n’en veux pour preuve que le peu de progrès que fait le magnélisme autour de nous; que chacun compte , non pas combien il a eu de triomphes, mais combien il en a laissé échapper qu’il aurait pu remporier ; combien il y a eu de trailemenis qu’il a abandonnés parce qu’il a manqué de foi et de courage? Combien y a-t-il de magnétiseurs, reconnus cependant pour tels, qui, pour eux et pour les leurs, ne veulent ou n’osent, ou seulement ne pensent pas à se servir d’un moyen curatif si puissant et si efficace, ou à l’appliquer eux-mfunes, et méritent ainsi le plus poignant de tous les reproches , celui d’hypocrisie et de mauvaise foi, de propagateurs d’une doctrine à laquelle ils ne croient pas?
Ah! cessons de montrer une telle inconséquence; il n’est pas possible à une âme noble, élevée, aimant la vérité el la justice, de resler indifférente sur une telle question , si ce n’esl par ignorance; mais autrement on doil ôire, ou franchement partisan, ou honnêtement adversaire de celle doctrine. Ceux qui ne savent pas assez doivent chercher el s’éclairer, ceux qui croient doivent étendre constamment leurs propres connaissances cl les justifier en les appliquant partout où ils le pourront ; ce n’esl que de cette manière que le règne de la vérité mesmérienne s’étendra de proche en proche, qu’elle envahira et dominera l’opinion. — Nous aurons ainsi concouru à établir une vérité si essentielle au bonheur de l’humanité souffrante , bien plus rapidement, bien plus moralement et bien plus sûrement qu’en colportant de maison en maison un nouveau talent de société qui, en définitive, ne servira qu’à nous faire moquer, el qui, bien loin de gagner des partisans nouveaux à celle doctrine, fournit des armes contre elle, dégoûte les hommes de cœur et détourne de son étude les esprits élevés qui espéraient y Irouver quelque vérilé utile à l’humanité.
Qu’on ne croie pas cependant que je veuille interdire loule
espèce d’expériences pour n’engager à s’occuper que de la question médicale et pathologique; non, non, mille fois non! le magnétisme touche à tout, surtout aux mystères physiologiques et psychologiques , et son étude peut Cire appelée à rendre, sous ce rapport, des services pratiques éminents poulie bien de l’homme, autant que servir la science en général; mais ce contre quoi je m’élève, c’est contre l’abus, contre le mauvais esprit qui dirige ceux qui peuvent s’en occuper ainsi, contre l’emploi en pure perte de tant de forces qui n’ont élé utiles ni à la science, ni à l’humanité, et dont l’usage restera perpétuellement comme une accusation de lèse-humanilé formulée contre ceux qui auront ainsi méconnu, et leur devoir, et les intérêts de tous.
Mon désir le plus vif, mon souhait le plus sincère est de voir tous les magnétiseurs de cœur s’occuper avec toute la suite el toute la conscience dont ils sont capables, de l’application du principe mesmérien; je ne demande pas qu’ils fassent plus que leurs forces, leur temps el leurs affaires ne le leur permettent, mais que ce qu’ils auront entrepris, ils l’achèvent ; qu’ils fassent moins peut-être, mais qu’ils, fassent mieux et qu’ils n’oublient pas que la persévérance dans le irailement el l’égalité des dispositions sont les conditions importâmes pour le succès; c’est une vérité qu’on commence à sentir de toutes parts, dans l’Inde aussi bien qu’en Fiance. A Calcutta le docteur Esdaileobtient les plus magnifiques résultats en employant, sur un malade, successivement la force d’autant d’hommes qu’il en faut pour atteindre le bul qu’il s? propose. M. Jules de Rovère, qui a obtenu tant et de si intéressants succès dans le déparlement de l’Yonne, me disait que scs succès n’étaient dus qu’à sa persévérance, et qu’il ne quittait un malade que lorsqu’il était parvenu à produire sur lui l’effet qu’il cherchai!, dûl-il res-ler auprès de lui dix ou douze heures.
Mais je m’arrête, je crois en avoir assez dit pour encourager ceux qui parlagent mes senlimenls à redoubler de zèle
et d’efforts pour répandre la vérité que nous professons, et surtout pour les engager à régulariser leur action , et à ne pas craindre d’entreprendre de ces cures longues et difficiles qui seules pourront vaincre l'incrédulité des savants cn leur enlevant ce dernier refuge où elle se met à l'abri du reproche À’opposition systématique qu’on leur adresse avec raison, disant que, le magnétisme n’étant qu’un produit de l’imagination, les effets qu’il peut produire ne sont ni durables ni profonds, et qu’ils s’effacent bientôt pour laisser reparaître le mal qui n'avait été qu’atténué.
Les devoirs de tous les propagateurs d’une nouvelle doctrine sont plus graves cl plus difficiles qu’en toute autre circonstance, car ils ont à la fois à détruire des préjugés anciens, et à établir et prouver leurs nouveaux principes en faisant des efforts d'autant plus grands que les résultats sont plus contestés.
Veuillez excuser, Monsieur le baron, la liberté que j’ai prise de vous communiquer ces quelques idées; je ne m’y suis résolu que parce qu’il m’a paru qu’elles pourraient être aujourd’hui de quelque utilité pour les lecteurs de voire excellent journal ; si tel est votre avis, je me trouverai heureux d’avoir mérité votre approbation , et j’y puiserai un nouveau motif de travailler de plus en plus à me perfectionner dans l’étude et la pratique d’une science à laquelle vous m’avez initié et à laquelle je porterai, jusqu’à la fin de mes jours, l’intérêt le plus vif, bien convaincu de vous témoigner ainsi, de la manière qui vous sera la plus agréable, toute la reconnaissance que m’ont inspirée vos utiles el sages leçons.
Agrée/., Monsieur le baron, l’assurance de mes sentiments les plus respectueux.
Votre tout dévoué serviteur,
J. Mermoud de Poliez.
THÉORIES.
LE MAGXÉTISME ANIMAL EXPLIQUÉ.
Si l’on débarrassait le magnétisme organique de lout ce qu’il a d’extraordinaire el de fantastique, si ses innombrables phénomènes étaient réduils à une seule cause, el si ces phénomènes se rattachaient naturellement à ceux que la science a déjà reconnus et constatés, nul doute que les savants les plus positifs rie fissent plus aucune difficulté à l’enregistrer comme un fait de plus ajouté à la somme de nos connaissances actuelles ; tel est le but de celte nolice.
Deux conditions étaient nécessaires pour entreprendre une pareille tâche : la première était d’avoir étudié, suivi, et produit soi-même la plupart des phénomènes sous lesquels se manifeste le magnétisme; la seconde était d’avoir, en même temps, quelque connaissance des effets de Pélectro-magnélisme, et surtout du galvanisme, car c’est en partant de ce dernier que nous croyons pouvoir démontrer que le magnétisme vital n’offre rien de miraculeux, par conséquent de contestable à priori el à postmori, comme disent les savants. Nous comptons môme fur l'approbation des magnétiseurs instruits, qui sentent intérieurement comme nous, que toules les merveilles qu’ils produisent pourraient bien, à tout prendre, se réduire à un fait unique, celui de la transmission des sensations et des idées d’un individu à l’autre, par l’acte de la volition.
Nous admettons, mais non sans preuves, l’existence d’un fluide galvanique animal analogue au fluide magnétique mi-
lierai. Les commotions de la torpille cl de la gymnote, les expériences récentes de Matteucci ne laissent plus de doutes à cet égard aux physiologistes, qui savent qu’un filet nerveux d’une cuisse de grenouille appliqué cnire les lèvres d’une blessure faiie à un être vivant, met en mouvement ces cuisses privées de vie, et qu’il est possible de composer une pile musculaire. Il y a dans le premier cas transmission de l’influx nerveux d’un ôlre vivant à un individu mort ou passif, et dans le second cas, réaction du fluide restant, jusqu’à épuisement.
Une autre preuve de l’existence d’un fluide nerveux, c’esi qu'après la ligature d’un nerf, toute sensibilité est abolie au-dessous de la ligature.
Voyons maintenant comment procède le magnétiseur : N’est-il pas vrai que chacun peut envoyer à sa volonté le fluide produit par son cerveau, que nous comparons à un appareil galvanique composé de la substance grise et de la substance blanche, à l’extrémité de ses doigts, pour les faire mouvoir? N'esl-i! pas vrai, d’autre part, que si l’on met en contact un fil métallique partant d’une pile galvanique en action, avec un autre fil, le fluide se propage instantanément de l'un à l’autre de ces fils?
Pourquoi, en mettant en contact l’extrémité d’un doigt avec l’extrémité du doigt d’une autre personne, le fluide émané de votre cerveau n’envahirait-il pas le système nerveux de cette personne, comme le fluide électrique envahit la bobine de fils métalliques la plus enchevêtrée?
Il y a certaines conditions nécessaires pour que cet effet se produise; il faut que la pile ou le cerveau du sujet reste passif, pendant que celui du magnétiseur est actif : en un mot, il faut que la volonté de l’un domine la volonté de l’autre, pour qu’il y ail eflet. Voilà pourquoi un magnétiseur vigoureux au physique et au moral a plus de chances qu’un magnétiseur faible, et pourquoi un magnétiseur, quelque faible qu’il soit, produit de grands effets sur des
sujets vigoureux, mais passifs; pourquoi l’action est plus prompte sur les sujets débiles rt malades que sur des tires qui veulent et qui peuvent résister.
INous voilà donc en présence de deux individus en contact, l'un dont la pile est active et constante, tandis que la pile de l’autre n’est qu'intermittente ou passive : qu’arrive-t-il alors? c’est que tout le système nerveux el ganglionnaire, y compris le cerveau du sujet, se trouve envahi par le fluide du magnétiseur, de façon à ne faire de ces deux individus qu’un seul appareil mû par un même moteur. Que se passe-t-il alors? c’est que si le magnétiseur se place même hors de la vue du sujet qu’il vient de rendre somnambule par sa volonté, celui-ci répète, comme un automate , les mêmes mouvements, les mêmes gestes que le magnétiseur.
Par exemple, lève-t-il un bras, le sujet en fail autant, parce que la volonté du magnétiseur se propage, comme l'électricité, soit par les milieux ambiants, soit par le réservoir commun, jusqu’à son fluide nerveux endosmosé, à celui du sujet. C’esl la stagnation de ce fluide étranger, conquérant du sysième nerveux du magnétisé, qui produit celte prostration appelée improprement sommeil. C'est une ville prise d'assaut dans laquelle le vainqueur a placé une garnison qui n'obéit qu’à ses ordres. Tout est paralysé, opprimé, engourdi, jusqu’à ce que le chef ait ordonné, fût-il éloigné de cent lieues.
Le somnambule chargé d’un fluide oppresseur sur lequel sa volition est impuissante, est obligé d’attendre l’impulsion du cerveau d’où il est émané, ou l’action du temps qui finit par l’en délivrer plus ou moins promptement, comme un condensateur chargé se délivre de son électricité.
¡Nous ferons observer aux physiologistes qu’il ne s’agit ici que des nerfs du mouvement dépendants de la volonté de l’homme, et non des nerfs de la spontanéité qui continuent leurs fonctions sans trouble apparent.
Il résulte de ceci que le sujet magnétisé pense, imagine,
ügii de conserve avec son magnétiseur ou son délégué organique; mais je m'arrête pour éviter les clameurs de haro ! de la part des négateurs à parti pris.
Reprenons noire explicalion terre-à-terre.
Le magnétisme intentionnel produit exactement, d’une façon artificielle, tous les phénomènes névralgiques naturels les plus communs comme les plus rares, y compris ceux dont parle la mythologie el les vieilles légendes, ceux qui n’ont pas reçu la sanction exigée par le scepticisme de la science actuelle, aussi bien que les plus fréquents el les mieux constatés, sans être pour cela mieux expliqués. Nous pouvons déclarer qu’ils nous onl presque lous passé par les mains el sous les yeux, depuis une vingtaine d’années, à partir dis métamorphoses des temps fabuleux, des récits religieux du paganisme, des légendes du moyen âge, et des contes populaires, jusqu’aux attaques de nerfs el aux simples vapeurs de notre époque si fertile en névroses.
Nous ne sommes ni magnétiseur par étal, ni médecin diplômé, ni guérisseur marron, nous ne sommes qu’un simple curieux de la nature, comme disent les Allemands ; notre plus grand intérêt serait de mire ce que nous avons fait et ce que nous avons vu en magnétisme; cependant nous sentons qu’il y aurait de la pusillanimité à refuser l’appui de notre témoignage à des faits que tant de gens nient faute de les connaître.
Nous croyons donc, parce que nous nous en sommes assuré à satiété et jusqu’à n’y plus trouver le moindre alliait de curiosité, depuis plusieurs années, que :
La magnétisation intentionnelle peut produire le somnambulisme naturel, incontesté el incontestable aujourd’hui.
Cet état se complique de l’insensibilité, de la catalepsie, du trismus, de la roideur de ses membres, des hallucinations, de l’épilepsie, de la folie, de la lycanthropie, du vampirisme, de l’extase et de tous.les phénomènes nerveux phy-
siologiques, anciens et modernes, excepté que ces derniers sonl produils artificiellement et peuvent être destinés à guérir les premiers d’après la doctrine A’Hahneman, ce dont 011 a déjà plus d’un exemple. Ajoutons que ses phénomènes ne sont que passagers, et disparaissent comme ils sont nés, par la volonté du magnétiseur. Revenons à notre sujet dont le cerveau pourrait être comparé à une plaque du daguerréotype préparée à recevoir l’image produite dans leceiveau du magnétiseur, et de toutes les personnes que le magnétiseur touche ou désigne même mentalement.
Les expériences de mademoiselle Prudence confirment en tout point la réalité de cette théorie. Si les choses ne se passent pas toujours ainsi, c’est que le magnétiseur n’est pas bien maître de son sujet, ou qu’il ignore la théorie de la science qu’il exerce.
Partant de ce principe unique de la transmission des impressions ou des actions d’un cerveau actif sur un cerveau passif, tout s’explique, tout devient clair et facile à comprendre désormais dans le magnétisme; il n’y a plus ni miracle ni sorcellerie; toutes les branches de cet arbre immense se rattachent à un même tronc, et ce tronc se trouve, comme on voit, planté en pleine terre académique; il ne tient désormais qu’aux savants de le cultiver. Ce n’est qu’un pas de plus dans la science de l’électro-galvanisme.
Chacun peut étudier, vérifier el guérir sans se compromettre, s’il est reçu docteur.
Les personnes qui sonl épouvantées de ce qu’un somnambule leur a fait la description de leur maison ou de leur appartement, se rassureront en songeant que le sujet n’a faii que suivre dans leur cerveau les images qui s’y développaient à la suite les unes des autres.
Cela esl déjà bien assez extraordinaire ainsi, dira-t-on; sans doute, mais cela est el a toujours été.
Quant aux prédictions de l’avenir, c’est aussi ce que vous pressentez ou désirez qu’ils vous disent; il en est
île môme du passé, c’est ce que vous vous rappelez qui les impressionne.
Quant aux douleurs que vous éprouvez, rien de plus certain qu’ils les ressemenl aussi clairement que vos craintes et vos espérances ; car loul cela se peint sur le cerveau du questionneur.
Vous avez une pièce d’argent dans la main, un portefeuille, un billet dans votre portefeuille, vous le savez, vous y pensez, cela suffît pour qu’ils le disent quelquefois.
Un magnétiseur présente des cheveux d’un individu malade qu’il ne connaît pas, mais ii connaît celui qui les lui a remis; 1 esprit du somnambule procède alors par réflexion, et se porte d’un individu sur l’autre, comme la lumière dans un miroir, de manière à répercuter assez fidèlement l’image des objets les plus éloignés. Mais cela est sujet à erreur; les expériences manquent souvent, el le succès dépend des dispositions el de l'attention des questionneurs ou des intermédiaires, autant que de celles du sujet.
Pour l’explication des phénomènes du magnétisme trans-cendantal qu’on rencontre quelquefois sans pouvoir, dit-on, les expliquer par notre théorie; c'est comme si, après l’étude des éléments d’Euclide, on déclarait la géométrie insuffisante pour résoudre des questions de haute astronomie, qui, dans leur espèce, sont certes tout aussi merveilleuses que les phénomènes annoncés par les magnétiseurs.
Le magnétisme ne passera à l’état de science qu’après avoir fait son stage sous le nom de charlatanisme, comme la chimie, l’astronomie et la médecine ont fait le leur sous le nom d’astrologie el d'empirisme.
Mais les académiciens voudraient qu’on leur apportât une science toute faite, avec des résultats toujours infaillibles; ils ne veulent pas chez nous de ces nuages passagers qui les empêchent cependant assez souvent de nous faire voir l’éclipse qu’ils nous avaient annoncée à grandes fanfares.
Le psychisme n’a été jusqu’ici qu’un mot; mais il com-
mence à revêtir en quelque sorte une forme embryonnaire qui finira par se développer et grandir comme toules les autres sciences, par l'observation el l’expérience; mais il faut qu’on y travaille, elle ne se fera pas seule ni par les premiers pionniers qui se lancent à la découverte sans boussole et sans munitions.
I/étude de nos sensations est encore dans l’enfance : l’homme matériel qui boil, qui rit, qui s’amuse el ne réfléchit pas,n’est pas destiné à lui faire faire de grands progrès; mais l’homme d’élude qui n’a pas la vanité de connaître les derniers secrets de la nature, ne laissera pas cette branche de Vanthropologie en perpétuelle jachère.
Nous croyons avoir exposé rapidement, mais assez clairement pour les adeptes, les premiers rudiments d’une explication accessible à l’intelligence d’un certain uombre de physiologistes, el surtout de névropathes.
Si nos vues se trouvent partagées par les magnétiseurs instruits, nous pousserons nos investigations plus avant, sinon, non!
Jobard.
Nota. — Sur la demande de collaboration qui nous avait été adressée par un journal de magnétisme français, nous lui avions adressé l’article qui précède; mais comme il tendait à dépouiller le magnétisme (le ses merveillosités pour le ramener à des principes simples et intelligibles, il n’a pas été publié. Les prêtres d’Isis ne souffrent pas le moindre accroc au voile du temple qui couvre leurs mystères.
(Extrait du Mercure Françait).
— Notre dernier numéro contient un mémoire italien qui n’est que l’A, B, C, du magnétisme; en voici un autre plus avancé d’un savant Belge ou plutôt Européen ; cependant les erreurs y fourmillent encore et sont trop nombreuses pour être relevées toutes ici.
Nous l’avons dit mainies fois, il y a deux sciences dans le magnétisme : l’une toute physique qui se soude parfaitement à tout ce qu’on enseigne de positif dans les écoles ; l’autre plus relevée, qui par cela seul éloigne lout esprit positif. C’est donc de ne pas savoir ou vouloir distinguer ces deux ordres que vient l’explication forcée de certains faits, l’exclusion de certains autres.
Mais l’article de M. Jobard contient trop de vérités pour être dédaigné, et nous tiendrions à honneur d’entrer en communication avec un savant aussi estimable qu’il est illustre; nous ne comprenons pas qu’un journal de magnétisme ait refusé une collaboration pareille.
On le voit, le magnétisme partout s’établit victorieux, envahissant les plus belles intelligences. Après M. Jobard viendront d’autres hommes qui jugeront d’un autre point de vue les faits magnifiques qui n’entrent que mutilés dans son cadre. M. Jobard n’a saisi qu’une face, qu’un côté , qu’un aspect de cet ensemble complexe de faits qu’on appelle magnétisme ; mais nous croyons trop à son amour de la vérité pour penser que, quand des faits, annoncés de toutes parts et qui portent l’homme en dehors des lois physiques, seront venus à sa connaissance, il ne cherchera pas à les expliquer. Tout en disant je crois, sa plume a trop de puissance pour qu’on dédaigne ce qu’il affirme ; et, quelle que soit la résistance des corps savants, chaque coup porté à leur édifice par une main si ferme en détache une pierre : déjà on peut y apercevoir une large brèche !...
INSTITUTIONS MAGNÉTIQUES-
CONFÉRENCES MAGNÉTIQUES.
Magie (suite).
Les laits nouveaux qui ont déjà trouvé place dans ce journal vont s’augmenter chaque jour, car ils sont fondés sur un principe de la nature et se présentent comme une vérité consolante.
11 est donc vrai que tout en nous n’est point mortel et que cette vie n’est qu’un passage ; nous irons un jour retrouver les Êtres que nous avons aimés, comme aussi nous connaîtrons toutes choses, lorsque, dégagés de notre enveloppe, noire âme ira où des affinités d’un ordre intellectuel ont préparé son séjour. Quoi! magnétiseurs, vous n’avez point reconnu de suile ces faits immenses lorsque vous avez aperçu la communication de vos pensées -, ce n’était pourtant point la chair qui en recevait l’empreinte, el vos sens comme ceux de celui qui vous reflétait si bien y restaient étrangers. Lorsque la prévision des événements comme aussi la vue à distance venaient anéantir votre raison, vous ne deviniez donc point que là cessait tout ce qui esi physique, et qu’un ordre moral commençait à paraître. Comme le soleil qui chasse devant lui les ombres, l’âme, clarté bien supérieure, se dégageait des étreintes de la chair et venait éclairer les obscurités de cette vie terrestre.
Voilà donc la source d’une nouvelle puissance, l’âme humaine peut établir des rapports si certains que nous voyons
tous les arguments d’une fausse philosophie anéantis pour jamais. Des hommes avaient pris la raison pour critérium île toutes les connaissances humaines, et le génie qui habite dans chaque être avait été méconnu. Oh ! je n’ai fuit qu’entrevoir celte sublime vérité, mais d’autres viendront bientôt, levant toutes vos incertitudes, vous guider dans ce chemin qui n’a pour limites que l’infini.
Laissez, laissez la science des écoles à ces savants positifs, amants de la matière, qui ne voient rien au delà de leur idole. Quelque chose de plus noble, de plus relevé exisle dans ce monde : il s’ogil de s’y initier. Dans ces recherches, croyez-le bien, magnétiseurs, je ne suis animé que d’une pensée honnête, je n’ai point l’intention de vous surprendre ni de vous égarer. Aussi ma simplicité égalera-t-elle ma sincérité. On dit que plus on avance dans les sciences occultes et plus on devient discret ; ces sciences, dil-on encore, doivent être le patrimoine d'un petit nombre delus; j’ignore ces choses, peut-être son! elles-vraies, mais sans crainte comme sans remords, je veux aborder ce champ dans l'espace, el dire : J’ai vu ceci, j’ai fait cela , voici comment.
Mais quelque clarté que j’apporte, toi qui as le cœur corrompu, lu ne comprendras point mon enseignement : ton âme ne peut avoir de ces lumières que la pureté du corps enfante ; tu as détruit celte harmonie sans laquelle l’esprit ne peut s’élever; la souillure sera donc la cause de ton défaut d’intelligence. Ne m’accuse point d'un égarement semblable à celui dans lequel tu es ; tu as vécu de la vie de tous, tu dois partager leurs erreurs.
Et toi, qui veux qu’on le donne la science loule faite, qu’on te la serve comme un mets académique, est-ce qu'il peut en être ainsi?... Il est des choses de sentiment qui ne sont comprises que par des âmes d’élite, et ton cœur ne l’a jamais parlé que pour t’appeler à des convoitises charnelles, et lu as satisfait à ces désirs grossiers. Va! il est des choses qui ne s’apprennenl qu’en méditant longtèmpset en domi-
nanl sa nature. Celle science nouvelle n'esl donc |>oint pour lui non plus : rejellece livre, car il ne le dira rien ; ma parole sera pour loi sans portée, lu ne sentiras aucune vibration dans les chairs; crois-le, ce serait pour loi un malheur si lu apercevais la vérilé, car elle le deviendrait falalc.
El loi, médecin, lu devrais connailtc les ressorts secrets de lout Ion être, el comme les mages, c’esl-à-dire les sages, posséder la inaijie; mais tu dédaignes l’élude de lout ce qui esl occulte, sans songer que les plantes dont lu te sers ont loules une vertu cachée, sans songer encore que la plupart des maladies viennenl de celle âme dont lu nies l’existence ; car Ion scalpel ne l’a poinl rencontrée dans les cadavres. La nalure pour loi n’csl qu’une œuvre morie ; el loi-même, loui en marchant, lu parais sans vie; dans la personne comme dans les discours rien ne paraît sacré ; ion sacerdoce esl devenu un inélier, el lu l’exerces d’une manière vénale. Des hommes profonds de l’antiquité lu as usurpé les lilrcs; va donc sans nous, nous ne pouvons rien l’apprendre, car les oreilles sont bouchées comme ion intelligence.
Et vous, hommes d’argent, habiles calculateurs dont le cerveau récapitule chaque jour les combinaisons financières, vous n’éles émus qu’au linlemcni métallique, el les belles choses, les œuvres d’arlistes sont pour vous des chefs-d'œuvre inuliles. Complez voire or, c’esl votre lot, lot sublime de l'époque que lani de gens envient, mais rappele/.-vous que vous ôles créés pour subvenir aux besoins des esculapes modernes , sangsues qui s'attachent à vos chairs. Vous leur devez une partie du fruit de vos rapines, c’est votre imprévoyance qui les fait vivre; vous n’avez donc rien à prétendre ici ; cette science n’est pas non plus faite pour vous.
Il esl un lieu oil elle devrait Gtre accueillie, honorée; l’ins-lilut. Mais il semble que cel établissement, comme une grande nasse tendue sur les bords de la Seine, ne reçoive aucune des choses qui font concevoir la grandeur de Dieu et sa constante providence. Aucun des Cires qui entrent dans
ce lieu ne semble posséder le feu sacré, el son cerveau paraît avoir clé desséché par l’aridilé de ses études. Ces hommes qui déclarèrent que Mesmer était un visionnaire, nn charlatan, et qui, aujourd’hui encore, grimacent le rire lorsqu’on leur parle du magnétisme, que feraienl-ils de la magie, de cette science qui plane sur la leur comme le soleil sur notre horizon? Doit-on placer un collier de perles au cou de momies? Non, sans doute. Mais lorsque le jour sera venu où une main mystérieuse écrira en lettres de feu sur les murailles de ce temple le mot : Magnétisme, ¡1 sera ébranlé jusque dans ses fondements.
Ce n’esl donc que pour un petit nombre que celte vérité existera d’abord, mais cei héritage sera recueilli, el des prodiges apparaîtront plus merveilleux que loutes ces découvertes qui charment tant aujourd’hui nos grands esprits. *
Les amulettes, les pénates, les pierres consacrées, les talismans étaient dans l’origine des objets magiques ; des vertus s’y trouvaient empreinles, el, soit que la science ail guidé ces opérations mystérieuses ou que des faits d’observation.. transmis par tradition, eussent donné la connaissance de certains mystères de la nature; des faits merveilleux, des guérisons éclatantes se produisaient à chaque instant. L’antiquité est remplie de ces récits qui ne laissent aucun doute. Pouvons-nous aujourd’hui donner des preuves de la force secrète employée jadis? Oui, nous le pouvons. A.ux faits que nous .-wons cités, ajoutons-en d’aulres, mais simples d’abord pour ne pas intervertir l’ordre établi.
Premier exemple.
Essayons si ce disque magique aura perdu sa vertu, si la
force invisible, cause de son pouvoir, a cessé d’y rayonner. C’est un homme for! qui veut tenter l’épreuve, dans un moment où, tout entier à des expériences d’un autre oidre, j’ai des préoccupations qui, peut-être, peuvent nuire au résultat désiré; mais il s’avance el m’obsède : voyons.
A peine a-t-il considéré ce disque qu’irrésolu, on le voit chanceler; il cherche à détourner son attention, ses yeux se portent ailleurs que sur le miroir, mais je le suis dans tous ses mouvements, et bientôt arquant sa tête il rencontre la muraille et 8’y appuie fortement; c’est dans celte situation que nous pouvons considérer les effets merveilleux du miroir. M. Scott voit, son visage bouleversé en est un trop sûr indice; il s’agite, sa bouche s’entr’ouvre, ses yeux deviennent brillants, et la lividité de ses traits fait concevoir aux nombreux spectateurs que ce qu’il aperçoit est loin de le satisfaire. Tout tressaillant, plein d’émotion, il semble par gestes demander grâce; je cesse l’opération : elle était complète. Loin de dissimuler ses sensations, loin de craindre d’en faire l’aveu, il confesse qu’il a aperçu des objets qui passaient rapidement mais qu’il pouvait saisir néanmoins. Et, satisfait au dernier point, il témoigne à plusieurs reprises combien il est heureux d’êlre convaincu. Il dil même qu’il rendra hommage à la vérité en publiant le résultat de celle expérience; et cet homme, digne en toul de notre estime, car nous aimons la sincérité, comme il l’avait promis, n’a rien celé : tous les Anglais de distinction, se3 compatriotes et ses amis, ont recueilli de sa bouche plus de témoignages que nous n’en donnons ici.
Deuxième exemple.
Sur celle femme que deux cents personnes ont vue, chez moi, sensible au magnétisme, essayons si le miroir produira son effet. Placée debout, j’attire son attention sur la surface magique ; elle l’aperçoit, retourne la lêle pour ne la point regarder; mais sa vue, malgré elle, vient s’y fixer.
Elle approche par saccades, l’esprit de Python semble la dominer déjà. Elle veut saisir le miroir; j’évite ses étreintes en m’éloignant toujours; elle me poursuit, puis s’arrête, mais bientôt fuit entendre des paroles entrecoupées. Quelque chose de heurté se montre dans ses mouvements et sa voix : — Otez ce miroir, dit-elle, j’y vois la mort. — La mortde moi, demandai-je? — Non, la mienne. — Et, s’élançant de nouveau pour me saisir, nous la voyons en proie à de grandes alarmes. C’e3t en vain que j’ai caché le miroir et l’ai soustrait à sa vue, elle s'attache à mes vêlements et cherche à le prendre dans ma poche; ce n’est qu’avec effort queje brise le lien invisible qui l’attache à moi ; je calme sa colère; mais pleine de ressentiment, elle me regarde d’un air méchant el moqueur, et semble me provoquer. Le calme reparait sur son visage, elle change d’aspect, paraît honteuse et devient confuse. Elle a conscience des choses qu’elle a vues, mais refuse de répondre aux interrogations.
Pourquoi donc chez piesque tous aperçoit-on le chagrin et une sorte de désespoir ]>endanl et après l’opération? Celui qui voit l’avenir aperçoit donc toujours des choses tristes, et ce vase, qu’il soit d’or ou d’argile, ne contient donc que de la lie? Oh! c’esl qu’en effet l’humanité n’est pas belle, la douleur est la compagne de chaque génération ; chacun de nous eut à souffrir, souffre chaque jour, el jusqu’à son tombeau le chagrin le poursuit; si parfois la gaieté s’empare du voyant, ce n’est que comme une lueur, une douce espérance, l’image flatteuse disparaît aussitôt. C'est un rêve d’un instant de durée, le plaisir n’est-il pas suivi de soucis el de peines, el toujours chèrement acheté? Ah ! c’esl maintenant que je puis commencer à décrire ces images ; la science a coloré les passions sans rien nous apprendre du coeur humain. Ici il parle à tous les yeux ; nous pouvons lire dans tous ses replis.
Attendez, lecteurs, ceux qui voient parleront ; je n’aurai même pas besoin de les y contraindre. L’oiseau, par son ra-
mage, ses chanls, n’exprime-l-il pas tous ses besoins, toules ses passions; les animaux ont leur langage toujours vrai, mais l’homme seul dissimule; l’éducation, la fausse religion, les sophistes l’ont fait hypocrite; la nature va le rendre sincère; la magie ne vient-elle pas d’elle et de Dieu?
Baron du Potet.
(La suite prochainement.)
1XFIKMER1E MESMERIQUE DE LONDRES.
Nous avons fait connaître, tome iv, page 371, les bases fondamentales de cet établissement philanthropique, puis la composition du comité qui doit le diriger ; voici maintenant la liste des souscripteurs, au 45 octobre dernier.
DONS.
MM. fr. c.
Adams 255 •
Adare 26 75
Akroyd 122 50
Ashburner 255 .
Anonyme (un) de Hamp-
shire 122 50
W. Briggs 255 •
Brown 122 50
Buckley (un ami dc) 25 50
J. Bull 26 75
De Bully 25 50
Ed. Butler 25 50
Buxton 122 50
Clarck 26 75
A reporter 4,411 75
RENTE ANNUELLE.
MM. fr. c.
Adare 53 50
Aglionby (miss) 25 50
Ainslic 26 75
Barton 26 75
Bailliere 26 75
Benlinck (ladv) 255 »
Blyth 133 75
Briggs 133 75
Browne 26 75
VV. Browne 26 75
Brine 53 50
Brine(madaine) 53 50
Buckley 133 75
Chamber? 12 75
A reporter. 98« 75
DONS.
MM. fr. c.
Report. 1,411 75
Clarkson (miss) 122 50
Cook 122 50
Creyko 122 50
Croft 122 50
W. Davey 25 50
C. Dodsworth 122 50
Duberley (miss) 12 75
Ducie 2,550 »
Elliotson 1,275 »
J. A. Ellis 122 50
M. P. Ewart 127 50
F. Flinloff 127 50
Ch. Forbes 531 50
Frere 255 »
Goldsmid (baron de) 2,550 »
J. A. Gordon 1,275 »
W. H. Hamilton 127 50
J. Ilauds 133 75
D. Hands 133 75
S. Hayman 2G 75
E. Hadgson 25 50
E. Hussey 127 50
J. James 127 50
Jameson 127 50
F. G. Johnston 133 75
W. Kingdom 531 80
Kiste 127 50
M. P. Langston 2,550 »
Majendie 133 75
J. G. Marshall 1,275 »
Matthews (miss) 25 50
M. P. Moflast 127 50
Molesworth (lady) 127 50
L. Murray 1,275 »
Ormerud (miss) 25 50
E. Ormerod 12 75
Parker 26 75
G. Sandby 127 50
\V. Scarlett 133 75
A reporter. 18,339 50
RENTE ANNUELLE.
MM. fr. c.
Report. 988 75
Chandler Hi 75
Collier (miss) 53 50
Collins (miss) 26 75
Deverei 53 50
Edwards 26 78
Enfield 26 75
Ferrar (miss) 26 75
Frances (madame) 26 75
Frere 76 50
Ilonnen (madame) 26 75
J. T. Hewes 26 75
Hoar 26 75
J. Holland 26 75
James 53 50
J. James 26 75
H. W. Janson 127 50
Kingdom 133 75
VV. Lang 26 75
Lloyd 133 75
J. C. Luxmoore * 127 50
Majendie 26 75
R. Marlineau 26 75
W. Miller 26 75
Molesworth (lady) 26 75
Molesworth (miss) 26 75
R. Moore 26 75
N'ewnliam 26 75
H. F. Nicholls 26 75
Noyes 26 75
Paine 26 75
Peach 26 75
R. G. Peade 26 75
Pettit 267 50
T. Robertson 133 75
J. Ruck 26 75
S. Seife 26 75
T. A. Shaw 316 .
H. Skipper 133 75
Snewing 26 75
A reporter. 3,321 50
DONS
MM. fr. c.
Report. 18 ,339 50
Simpson (docteur) 637 50
II. B. Sims 127 50
C. Sim9 127 50
II. Skipper 267 50
G. Smilli 26 75
W. P. Stapleton 255 »
Stringer (madame) 51 *
J. Sullivan 26 75
Syroes 133 75
Tanner (madame) 133 75
J. Taylor 25 50
H. S. Thompson 531 50
W.Topham 127 50
C. Townshend 255 »
A. Treveylan 53 50
Wallon (madame) 26 75
Whitfield 26 75
Woods 127 50
Un Magnétophilede Chel-
tenham 25 50
Une dame guérie par le
magnétisme sous M. D.
Hands 531 50
Total. . . . «,858 60
RENTE ANNUELLE.
AIM. fr. c.
Report. 3,321 50
J. Spiller 26 75
C. W. Steele 26 75
E. G. Swam 53 50
Symes (madame) 25 75
Tanner (madame) 53 50
T. Taylor 26 75
M. Taylor 26 75
Thompson (madame' 53 10
F. S. Tubbs 53 50
Udall 53 50
W. Undervood 26 75
C. Underwood 26 75
Wallace (miss) 26 75
Walton 26 75
Total. . . . 3,808 35
Les souscriptions soni reçues , à Londres, chez M. H. Baillière, libraire, 219, Regeni-Slreet.
VARIÉTÉS.
:%Il3IIISmiiit*. — On lit dans la Démocratie Pacifique du 26 novembre :
« Nous avons, dernièrement, rendu compte des oeuvres de Mendelsohn Bartholdy, les journaux allemands nous apportent une particularité intéressante sur sa mort.
. Mendelsohn a été élevé avec une sœur qui s’est mariée à un peintre nommé Haensel. Lu ¡-môme a épousé, il y a dix ans, la fille d’un sénateur do Francfort. Ces deux familles n’en firent qu’une. Mendelsohn et sa sœur, Fanny Haensel, ne formaient qu’une seule âme, car cette femme était elle-même un compositeur distingué qui guida les premiers pas de son frère.
» Il y a neufmoisFanny Haensel composa une symphonie qu’elle dirigea elle-même dans scs salons. Arrivée au cinquième acte, M",e Haensel tomba morte, frappée d’uncaltaque d’apoplexie.
» Depuis ce temps, Mendelsohn erra comme une ombre parmi les vivants. Dans une lettre adressée à sa femme, il dit : « Notre âme commune s’est envolée vers le ciel, je » crains bien que je n’aille la rejoindre bientôt; car Fanny » m’a toujours promis qu’elle viendrait me prendre sur la » terre si elle mourait avant moi. »
» Deux mois après Mendelsohn est mort d’une attaque d’apoplexie. »
Ici se découvre ce lien invisible qui unit les âmes entre «■lies el qui n’a rien de commun avec la matière. Ce fait se lie parfaitement avec ceux que nous offrent le somnambu-
Usine avancé el l’extase ; ils nous introduisent doucement mais sûrement à une psychologie véritable où nous seront dévoilés les mystères de la vie terrestre comme ceux d’outre tombe. Que le sceptique rie si cela lui prête à rire, nous n’avons nul envie de l’en empêcher ; tout est lié par des milieux, le magnétisme, par ce que nous cn connaissons, peut nous conduire à l'inconnu ; que nos lecteurs veuillent nous suivre dans les développements successifs de notre science, et nous leur promettons de les rendre possesseurs d'une vérité qui vaut à elle seule toutes les autres , car elle est lîlle du ciel el donne la croyance en Dieu.
Nécrologie. — J’apprends par la Tribune que le Iroid de la mort a saisi l'un de mes élèves lyonnais, Ro-mano, dont le cœur, palpitant à tout ce qui était grand et beau, s’otmail à l’avenir. La misère, trop souvent compagne du génie, ne l’avait jamais quitté. Il a succombé; la terre couvre cette victime d’une organisation sociale malheureuse, qui n’offre de place qu'à l’intrigue et à la bassesse. Ro-înano, que ton ûme prenne son vol vers des régions plus douces! Oh! sans doute, lu voudias rester près de ton infortunée compagne que le chagrin acccable, que la détresse poursuit, à qui nul ne viendra offrir un allégement à ses (îeines.
Ainsi tout finit; riches et pauvres vont s'engloutir dans un vaste océan; mais Dieu distingue ceux qui lurent justes et bons, qui travaillèrent à éclairer leurs frère3. Romano, tu consacras ta vie à cette mission difficile, el tu y succombas. Entends l’adieu d'un homme qui ne lit que t'entrevoir mais connut les pensées généreuses. Il ira le rejoindre après sa journée finie, car il a, comme toi, travaillé; mais plus heureux, scs organes de fer auront résisté aux tortures infligées chaque jour aux novateurs.
Baron uu Potet.
Chronique. — La grande nouvelle du jour est la découverte d’un nouveau moyen de produire l’insensibilité. Il y a unanimité pour lui reconnaître tous les avantages de l’éther sans aucun de ses inconvéniens. Nous étudions les propriétés de ce nouveau corps, appelé chloroforme, pour offrir à nos lecteurs un tableau comparatif de l’insensibilité produite par différents agents.
— Nos nouvelles de l’île Bourbon sont très-favorables; le magnésisme y a fait de grands progrès, mais il parait que le charlatanisme commence à s’en mêler et détruit une partie du bien fait.
— Les Arcanes de la vie future dévoilés ont maintenant 88 souscripteurs ; l’impression en est commencée et l’ouvrage paraîtra vers la mi-janvier.
— Nous avons reçu les Divines inspirations du somnambule américain Davis. Ce livre est bien tel que nous le disait notre ami; il a suscité, aux Etats-Unis, une polémique épouvantable. Les gens d’église sont furieux.
Le magnétisme n’y occupe qu’une bien faible place (2 pages sur 800), encore sont-elles complètement erronées, ainsi que nous le démontrons en analysant ce livre et celui du professeur Busch, également inspiré par Davis.
Revue «les Journaux. — Le Siècle du 17 novembre publie une histoire du magnétisme, fabriquée par M. Debay.
On y trouve, au milieu de beaucoup de redites injurieuses contre Mesmer, quelques appréciations justes qui font de ce feuilleton un être hybride, mi-contraire, mi-favorable, dont l’effet moral sera, contre l’espoir de son auteur, plus utile que fâcheux.
— La Gazette de France du 21 novembre, contient une lettre où les différentes phases de l’histoire du magnétisme sont parfaitement exposées.
— El Telegrapho medico de novembre résume les opéra-lions chirurgicales faites à Cherbourg et Calcutta au moyen de l’insensibilité. C'est le premier journal scientifique espagnol qui aborde cette question.
— Le recueil du R. P. Hilarión Tissot, dont nous annoncions dernièrement la publication, a paru le 15 novembre, sous le titre de Journal de la Médecine théologique. Il est on ne peut plus hostile au magnétisme. Nous l’analyserons en détail si le R. P. répond à ces simples questions :
1" question. — Après avoir admis la clairvoyance des somnambules, vous dites que ce pouvoir de révélation esl un signe caractéristique de la possession du démon ; comment se fait-il que plus loin vous admettez pour principal caractère du démon, le tilre de esprit menteur, et d’après J.-C. et les apôtres, de père du mensonge ? Peut-il y avoir lumière el vérité là où l’esprit menteur seul esl en action ! Eclaircissez-nous, père II i larion.
2* question. — Comment se fait-il qu’en parlant des oracles vous dites : « Les sybiles s’assayaient sur des sièges qui les soumettaient à l’action immédiate de certaines vapeurs énivrantes, » pratiques démoniaques par lesquelles, suivant vous, elles acquéraient la faculté prophétique, tandis que sait Jérôme dit positivement que celle faculté élait la récompense de leur virginité?
Que faul-il penser de sainl Jérôme, qui n’esl pas d’accord avec vous? Répondez, père Hilarión.
— M. le docteur Marchai (de Calvi), en parlant de l’insensibilité produite par le chloroforme, dit dans \e Constitutionnel du ZG novembre :
« Qui ne sait que le sommeil magnétique a été invoqué pour enrayer la sensibililé dans les opérations chirurgicales? Des exemples affirmatifs ont été cités. Iæ nom de M. le professeur Jules Cluquel, celui de M. Oudet, membre de l’académie royale de médecine, garantissent suffisamment l’au-ihenlicilé de ces cas, sans parler des autres ; d’ailleurs le fait
essentiel de l’insensibilité mngnétiqueesl avéré, indubitable, MM. les professeurs Andral el Bouillaud, qui ne sont pas suspects, en proclament hautement la réalité. Pourquoi donc le magnélisme a-t-il été repoussé des salles de clinique chirurgicale ? Parce que nous ne savons pas, dans une doctrine, faire équitablement la part de la vérité et celle de l’erreur ou du mensonge. A côté de l’insensibilité magnétique, qui est réelle, il y a la lucidité magnétique, qui est un conle absurde ou une supercherie outrageante pour la morale publique; dés lors, au lieu de retenir le fait utile et de l’appliquer, en reléguant dans le mépris le fait inexact ou mensonger, on rejette tout, etc. t
M. Marchai n’est pas heureux dans le choix des preuves ; M. Bouillaud, qu’il cite comme autorité favorable, esl au contraire le plus grand magnétophobe de la terre. Quand à la lucidité, il n’y a d’outrageant que sa négation par les hommes mômes qui devraient en enseigner l’emploi.
— Le Corsaire du 27 novembre dit qu’on peut sûrement croire à l’insensibilité puisque le Constitululionnel l’admet, lui qui ne reconnaît les vérités nouvelles que quand elles ont de la barbe.
La Revue Gallicane a jugé prudent de se taire le mois dernier; nous attendrons de nouvelles attaques pour lui servir la réponse que nous lui avons promise.
— Le Constitutionnel du 3 de ce mois, en parlant de la marche du choléra en Russie, dit :
« Parmi les moyens employés pour la guérison, on cite les frictions sèches, avec la paume de la main, comme ayant produit quelquefois un allégement immédiat des souffrances, ce qui ne pourrait s’expliquer que par une action magnétique. »
Le Propriétaire-Gérant : HÉBERT (de Garoay).
Suint-Cloud. — Imprimerie de Belin-Mandar.
CLINIQUE.
C’esl le jeudi 12 novembre 1846 que je me décidai à suivre un traitement magnétique. „ Depuis plus de quatre ans des malaises continuels, des maux de tôle, incessants pendant l’été, m’ôtaient toute force, toute énergie, toute ardeur au travail, et m’empêchaient d’entreprendre rien de sérieux, sans pourtant me rendre malade alité.
Ignorant la cause de cet état du gêne, je m’y serais sans doute résigné, faute de moyens pour le combattre, quand il se compliqua d’une ophtalmie, déterminée peut-être par un coup d’air; l’œil gauche devint très-rouge et m’occasionna de vives démangeaisons que j’espérai d’abord calmer avec de l’eau de rose, de la guimauve, et des tranches de veau fraîches appliquées sur l’œil pendant la nuit. L’œil devenant de plus en plus malade, je consultai un oculiste qui me conseilla de le lotionuer soir et matin avec trois ou quatre gouttes de nitrate d’argent dissous dans l’eau. Une irritation beaucoup plus forte fut le résultat de ce collyre, et huit jours après un boulon blanc me vint sur la cornée ; un suintement avait lieu par ce bouton et l’œil diminuait de grosseur ; il va sans dire que la vue était très-obscurcie; je dis la vue, car l’œil droit s’était pris par sympathie ; enfin le mal devint tel que je me résignai à la cécité. Au bout de huit jours un peu de mieux se manifesta, je vis alors un autre oculisle; même ordonnance, même résultat, c’est-à-dire que le mieux disparut. J’y voyais cependant encore TOME v, — W «O. — 25 DÉCEMBRE 1847. 12
assez pour travailler quelques heures dans la journée. Mais Je 27 octobre une chute que je fis détermina une injection de sang dans les yeux, et je suspendis tout travail. Un troisième médecin consulté me conseilla de mettre un vésicatoire volant sur la tempe gauche, pensant qu’une humeur était la cause de l’ophtalmie, il se trompait; le vésicatoire ne prit même pas et je l’enlevai quatre jours après. Mon état s’era-pirait ; ne sachant qu’y faire, le médecin me conseilla le repos, la patience et la résignation ! Oh! j’en avais bien besoin, je n’espérais plus de guérison. J’avais suivi les conseils de la médecine et j’en étais réduit à des douleurs sourdes, mais sans relâche, el je pensais qu’elles n’auraient de terme que lorsque je serais devenu tout à fait aveugle. Il s’en fallait de peu alors; je me tenais forcément dans une chambre noire, ne pouvant supporter l’éclat du jour, ni la lumière le soir. Réduit à l’oisiveté, privé de la vue, le temps n’avait plus de fin pour moi ; tel était le sort qui m’attendait pour toute la vie, et je n’avais pas encore vingt ans!
Alors un de mes amis, M. Derrien, me conseilla de consulter son ancienne malade Mmo Froidcour, qui était restée somnambule ; elle me donna la consultation suivante :
Il y avait gonflement très-prononcé de la rate, irritation intense du foie, sur lequel se trouvaient de gros boutons» tumeur sous l’aorte, et hydrocéphale chronique. Du reste les yeux n’étaient pas attaqués, et leur état provenait de la corrélation qui existe entre les yeux et le foie. Le nitrate d’argent avait brûlé la cornée de l’œil gauche ; pourtant je devais arriver à guérison, dit M"° Froidcour, mais, ajou-ta-t-elle, par l’application directe du magnétisme, cet agent seul pouvant enrayer les maladies chroniques; elle finit en m’assurant qu’au bout de quinze jours je pourrais lire quelques lignes.
Celle assurance me donna bon espoir, et le vendredi 13 novembre je commençai mon traitement magnétique; au bout de huit jours les objets me paraissaient plus distincts,
el le brouillard que j’avais sur la vue se dissipait légèrement. Le quatorzième jour je pus lire l’adresse d’une lellre, et au bout de vingt-cinq jours je lisais quelques lignes. Les yeox n’étaient presque plus ronges; je les sentais en si bonne voie de guérison que j’étais ravi. La vue sauvée, je m'inquiétais médiocrement du reste; cependant le travail dans les organes malades s’annonçait bien ; des douleurs d’estomac sous la magnétisation me donnaient la mesure du mouvement qui s’opérait, l’eau du cerveau s’écoulait par les yen* el par le nez, et à tel point que pendant une heure je mouillais sot-vent plus d'un mouchoir. Le magnétisme simple avait seul été employé, el l’unique remède que j’avais fait fui de me laver les yeux avec de l’eau de laitue; plus tard , je pris qnelques bains de pieds au savon noir, el des lavements composés de deux cuillerées de graine de K* et an demi-verre de son, bouilli pendant un quart d’heure.
M“* Froidcour m’onlorma aussi des figues de Valence. N’ayant pu d’abord m’en procurer malgré mes reeherclies dans plusieurs magasins, M. Derrien lui 6t indiquer celwr où j’en pourrais trouver. Ce magasin, elle le désigna et de plus l'endroit où était placé le panier qui le» contenait.
Dans les derniers jours de décembre, unechule queje fis sur la place du Carrousel occasionna un changement, et moi qui n’avais pas encore dormi pendant la magnétisation, je dormis pendant huit séances en faisant des rêves délicieux. Deux jours de suite, je manquai à me rendre aux séances; et cette interruption fit disparaître le sommeil qui ee produisait.
M**e Froidcour était alors soulTrante; elle perdit momentanément sa lucidiléjet ne pul me revoir que le 9 janvier.
Ce jour sa lucidité était parfaite; elle alla jusqu'à découvrir l’origine et fa cause de ma maladie; c'était la gale dont j'avais hérité de mon père qui l’eut pendant la campagne d'Allemagne en 1812 ; il y avait donc 34 ans. Elle me recommanda de prendre le matin un verre de tisane faite
avec une pincée de valériane el autant de houblon, infusés pendant cinq minutes. Elle m’ordonna pour le neuvième jour un lavement fait avec une demi-feuille de vigne rouge, une cuillerée de son, deux feuilles de bouillon blanc, le tout bouilli quatre à cinq minutes.
Il me restait encore de l’eau dans la tète; je dus m’appliquer sur le crâne, el principalement à l’endroit du cervelet, une feuille de chou rouge chauffée sur une pelle.
Le loie allait mieux ; le mal élail principalement porté sur la rate qui se couvrait de gros boutons blancs.
Le 10 janvier, Mme Froidcour me prescrivit de continuer la tisane, les lavements, la feuille de chou, et ordonna des frictions longitudinales sur l’épine du dos el transversales sur les reins, faites avec une cuillerée de farine de moutarde, huit cuillerées d’eau bouillante, une cuillerée de vinaigre, une cuillerée à café de poivre, battre le tout ensemble et faire quatre frictions. Elle me défendit de manger des fruits crus el des légumes, et m’ordonna les viandes saignantes.
Le 12 janvier, elle me dit de changer les frictions pour en faire d’autres coni[>osées de douze gouttes d’un mélange de demi-once teinture d’arnica et demi-once huile de camomille.
Pendant les deux premiers mois de mon traitement, si je ressentis vivement l’aclion du magnétisme, j’en offris peu de traces visibles; mais ensuite un nouveau changement se manifesta en moi, non pas lant sous la magnétisation directe de Mme Froidcour que lorsque je me trouvais dans un appartement où l’on magnétisait une autre personne; je recevais l’action par irradiation et avec beaucoup de violence. Ainsi, le 10 janvier, me trouvant dans une réunion chez H. du Potel, j’eus une petite crise qui dura peu; mais le dimanche suivant, j’en eus une irès-forle donl la durée fut d’environ trois quarts d'heure ; la séance que donnait M. du Potel en fut interrompue, et trois fois sa présence fut néces-
saiie pour calmer cette crise. Pendant ces trois quarts d’heure, j’ignore presque complètement ce que je fis; il ne m’en reste qu’un souvenir vague et confus ; j’avais de fortes convulsions; mes bras, mes jambes se raidissaient ; mon corps se tordait de toute façon sans que je souffrisse. Celle extrême surexcitation avait beaucoup développé mes forces, el quatre personnes purent à peine m’enlever de dessus une chaise placée près d’un mur contre lequel je me ballais la lêle avec violence. La forte volonté de M. du Potet apaisa celle crise, qui ne céda que lorsqu’il eut cessé de magnétiser, bien que deux murs et une longue pièce nous séparassent.
A la suite de celle crise j’eus, durant neuf jours, de fories coliques suivies de diarrhée.
Le 3 février, je rendis des urines très-chargées, couleur de brique pilée et conlenant comme du plaire réduit en poudre.
Le 4 février, M“* Froidcour me recommanda de mettre le lendemain deux sinapismes froids, larges comme une pièce de cinq francs, l'un à la cheville externe du pied droit, l’autre à la cheville interne du pied gauche. Ils devaient être composés d’une cuillerée de farine de moutarde, d’une de vinaigre, el d'une cuillère'« de café de poivre.
Je pris trois fois de la magnésie anglaise pour me préparer à une purgalion, composée d’une demi-once de séné bouilli une minuie dans un verre d’eau qu’on devait passer et verser sur deux onces de manne.
J’en oblins un très-grand soulagement et beaucoup de bien-èlre. Endormie le 10 février, M"9 Froidcour présenta un beau fnil de lucidité, et reconnut que, par suite de cette purgalion, à la Iroisième selle, j’avais rendu des matières blanchâtres qui n’étaienl autres que le restant du dépôt de virus psorique que j’avais à la rate. Elle me pres-crivii, pour le soir, un grand calaplasme de farine de lin dans lequel je mis une lêle de pavol à bouillir, el me recommanda de boire de la lisane faite avec quatre branch'S
de véronique mâle, infusée un quart d’heure dans un demi-litre d’eao. Une lasse matin et soir.
Des douleurs que je ressentais dans les jambes , suite d’une fraîcheur gagnée près d’un mur frais, disparurent en m'entourant le bas de la jambe d’amadou magnétisée.
Le 4 mars, mes yeux allaient bien, et la vues’afTermissait; elle était aussi bonne qu’avant, cependant une légère rougeur sur le bord des paupières attestait un reste d’irritation.
Pour le détruire il fallait une pommade qu’elle cherchait depuis plusieurs sommeils ; elle la voyait, mais ne pouvait trouver où elle était, et en ignorait le nom. Ju3ques-là son emploi n’avait pas été jugé bien utile, et elle reculait devant la fatigue qu’entraînait la recherche du lieu où elle se débitait. Mais le 4 mars elle la crut nécessaire, et après avoir cherché plusieurs minutes, elle me dit que je m’en procurerais rue de la Fontaino-Molière, 18, chez un nommé Ma-boux (dont elle épela le nom), qui en était dépositaire. J’y ftie et trouvai cette pommade, composée par Mme veuve Famîer, et connue sous le nom de pommade île Bordeaux. Le dépositaire, auquel je fis part de la manière dont j’avais été conduit chez lui, m’assura que quatre à cinq personnes y étaient déjà venues également par suite de consultations somnambuliques.
J’en mis le soir du même jour, et le lendemain matin j'eus dans la tète une forte crise qui détermina une grande évacuation d’eau par les yeux et me soulagea.
Pendant plus d’un mois encore je continuai à mettre sur le haut de la tète la feuille de chou rouge ordonnée pour expulser le restant d’eau que contenait le cervelet.
Je continuai également à me faire magnétiser jusqu’au commencement de juin, époque à laquelle je dus partir pour Bordeaux ; mon traitement était pour ainsi dire achevé, et je n’eus plus 5 faire que quelques remèdes très-simples pour entretenir le mouvement imprimé et ne pas opérer uni transition Irop brusque.
Dans les derniers mois, ce que j'observais de plus remarquable sous la magnétisation élaient les tressaillements du foie, qui se contractait el produisait un soulèvement irès-visible du ventre. Les soins qu’exigea la guérison complète de cet organe, cause de douleurs souvent très-vives, retardèrent ma guérison générale.
J’éprouvai un très-grand regret de ne pouvoir achever ce traitement que par les remèdes. La continuation du magnétisme jusqu’à la fin aurait sans doute déterminé la venue du somnambulisme dont je ressentais les symptômes avant-coureurs. Un très-grand bien-être, une quiétude parfaite, quelquefois le sommeil et alors des songes délicieux, et parfois des éclairs d’une clarté éblouissante; tel était ce que je ressentais dqns les derniers temps, et j’ai la ferme conviction que le somnambulisme serait venu à la fin.
J’en aurais été heureux, car alors j’eusse été à même de rendre à mon tour quelques services à Mme Froidcour et à M. Derrien dont les soins généreux ne m’ont pas fait une seule fois défaut pendant las 7 mois qu’a duré mon traitement, malgré les ennuis et la fatigue qu’apportent 1er contraintes et le manque de docilité du malade.
Je les prie d’en recevoir ici tons mes remercîments ; '.’une pour les soins magnétiques el somnambuliques qu’elle m’a donnés, l’autre pour la complaisance avec laquelle il s’est prêté aux consultations, tous deux enfin pour la bienveillance et l’affection qu’ils n’ont cessé de me témoigner.
Ces quelques pages ne sont pas écrites avec l’intention de ma part de les publier; c’est une causerie dans laquelle je rends compte de mon traitement et de ce que j’y ai remarqué de plus important. Je les envoie à M. Derrien qui l’a suivi en entier, et rétablira les oublis involontaires que j’aurais pu commettre, s’il jugeait à propos de les faire insérer dans le Journal du Magnétisme. C’est simplement, je le répète, une note dans laquelle je me plais à rendre témoignage à la vérité, au magnétisme qui m’a rendu la vue el la santé, et je
remercie Mrae Froidcour et M. Derrien, dont le souvenir ne sortira jamais de ma mémoire reconnaissanle, de tous les soins qu’ils m'ont donnés avec tant d’affection et de dévouement.
Achille de Brossard.
Bordeaux, le 25 novembre 1847.
THÉORIES.
DES ORGANES AFFECTÉS PAR LE MAGNÉTISME (1).
Je ne dirai rien des procédés qui amènent l’état magnétique : ils sonl suffisamment connus, on les a pratiqués sur lés théâtres, au foyer domestique, et jusque dans les hôpitaux où ils ont délrôné la souffrance. Ils ne constituent pas encore un art; ils sont seulement à l’état d’empirisme; bientôt, je l’espère, ils prendront rang dans les sciences humaines.
Et d’abord, il y a entre tous ceux qui ont écrit sur celte intéressante matière un accord unanime sur I espèce d a-
(t ) L’article qu'on va lire esl extrait d'une thèse soutenue devant la société des Etudes diverses, au Havre, au commencement de cette année ; nous nous abstiendrons de commentaires, renvoyant pour cela à la note, tome i", page 1GO.
(Note de la Rédaction).
genl qui soumet le patient à son magnétiseur. C’est un fluide dont les propriétés l’assimilent aux fluides impondérables el incoercibles, sous les noms de Magnétisme terrestre, de Ca/o-rique, de Lumière, d’Electricité et de Galvanisme. La parfaite coïncidence de toutes les révélations des sujets magnétiques sur ce point, depuis Mesmer jusqu’à nos jours, à quelque nation qu’ils appartiennent et quel que soit le dialecte qui traduit leurs pensées, est trop remarquable pour qu’elle ne soit pas basée sur la vérité. Un enfant que magnétisait une dame de mes amies désignait les personnes scus le mot générique d e fluides. Voilà, disait-il, un fluide qui passe : Il y a dans setle chambre un fluide de plus que tantôt. Une pauvre fille que j’ai soumise à de nombreuses expériences, m’assura un jour qu’elle voyait les objets que j’avais touchés, empreints de mon fluide. Tous ceux que j’ai été à môme d’interroger dans l'état magnétique, se servent de la même expression et en décrivent l’objet comme étant d’un aspect lumineux et analogue à l’électricité que dégagent les machines de nos cabinets de physique.
M. de la Salzède, docteur en médecine, de la faculté de Paris, vient de publier un écrit sur le magnélisme animal, où la rigueur du raisonnement le dispute à la profondeur des aperçus. Il y démontre le principe magnétique présidant à l'évolution des phénomènes physiques el moraux dans le règne animal, comme président, dans l'ordre purement matériel, les principes jadis coniestés el maintenant professés sans contradiction dans toules les universités. Rapprochant sans cesse par l’analogie les effets communs à des causes de même nature, il écarte savamment le merveilleux qui soulevait les scrupules des esprits forts ou égarait la raison des enthousiastes.
Mais ce qui depuis longtemps excite ma surprise et me décide enfin à élever ma faible voix, au milieu d’enseignements qui ont pour eux l’autorité de grands noms, c’est qu'on n’ait pas encore songé à l’identité de phénomènes qui
éclatent dans tous les degrés de l’échelle animale et qui paraissent être produits par l’action de mômes organes, depuis le scarabée jusqu'à l’homme. Je céderais avec empressement une tftche qui dépasse mes forces et je ne prétends qu'à l’honneur d’indiquer une lacune qu’il sera facile à d’autres de combler. C’est une thèse dont je n’entreprends de tracer que le programme. Dieu permet parfois que la sagesse sorte de la bouche des enfants; et si l’on explore aujourd’hui avec tant de succès la profondeur des cieux, il ne faut pas oublier que ce fur un enfant qui, en se jouant avec un cylindre de carton, mit sur la voie de confectionner les télescopes.
■foutes les méthodes tendent à classer les êtres naturels dans un ordre progressif qui s’élève du simple au composé. Si l’on dispute encore sur le point où commence le règne animal, du moins est-il parfaitement entendu que l’homme domine toute la série des êtres que comprend ce règne; que l’homme résume dans la construction de son corps, tantôt par l’extension et tantôt par la réduction de ses organes, toutes Ie3 facultés réparties dans l’infinie variété des animaux. Il est l’harmonieuse combinaison d’éléments épars sur un vaste champ, le tableau perfectionné à la suite d’une multitude d’ébauches, le complément d’une grande œuvre.
A chaque organe répond une fonction ou une faculté. Gratifié d’organes analogues à ceux qui furent départis eux autres animaux, l’homme jouit en commun avec tux des propriétés qui y furent attachées par le Créateur. S’il exerce dans la nature une domination incontestable, c’est que, dans sa construction physique, et par suite, dans sa composition morale, existe un élément qui manque ailleurs. A tout effet il y a une cause.
En considérant les caractères de l’animalité, depuis ses manifestations rudimentaires, on voit successivement poindre, puis se développer, et, enfin, se combiner entre eux, ja contiactilité musculaire, l’instinct, l’intelligence et la moralité, suprême attribut de l’homme. Le zoophyte laisse
entrevoir des symptômes de contractilité ; l’insecte joint à une grande énergie musculaire la jouissance d’un instinct admirablement développé; les vertébrés réunissent à la fois la contractilité musculaire, l'inslinct à divers degrés d’expansion et l'intelligence, répartis à des doses inégales, soit entre les différentes espèces, soit d’un individu à l’autre. Enfin dans l’homme, à une intelligence incomparable relativement aux autres animaux, s’unit une faculté divine, la conscience de sa supériorité, le sentiment du beau et du bien; faculté morale qui établit des rapports entre lui et le reste de l'univers, entre lui elson créateur ; faculté sans laquelle, en un mot, la magnificence de la création serait demeurée une lettre morte, une énigme sans mot, le néant revêtu d’une forme.
Mais la chaine des combinaisons serait-elle rompue dans la créature la plus parfaite? Peut-on croire qu’il y ail une lacune dans l’admirable synthèse tracée de la main de Dieu, dans le microcosme vivant qu'il annoblit de son souffle? La raison répugne à l'admeltie, et, pour compléter le tableau des forces animales, dans l’énumération des caractères de l’humanité, il faut résolument y comprendre L'instinct.
Ainsi, l’homme est enrichi à la fois de tous les dons départis avec plus ou moins de profusion aux espèces qui composent le règne animal. 11 a tout ensemble, la contractilité, l’instinct, l’intelligence et la moralité.
On ne fera aucune difficulté pour attribuer au cerveau l’exercice des fonctions intellectuelles et morales; mais je m'attends à ce que, d’une part, on rejette la faculté de l’instinct chez l’homme, el ce que, de l’autre, on assigne exclusivement aux vices d’un encéphale incomplet, les aberrations de l’intelligence qui, chez quelques individus, sont rectifiées par des impulsions dont ils ne paraissent pas avoir la conscience.
Je crois qu’il est facile de démontrer que l'organe et la faculté coexistent en nous et concourent à notre état normal.
Dans une progression de causes el d’effets aussi merveilleusement graduée que celle que nous présente la nature, il est utile, pour nous faciliier les déductions que se propose la raison, de comparer entre eux des termes éloignés et qui, par leur contraste, frappent plus sûrement notre attention. Ainsi l’homme étant le type auquel on peut rapporter le degré d’intelligence des autres animaux, el les insectes en étant un autre qui peut servir à comparer les développements de l’inslinct, examinons en quoi les organes de ces deux types diffèrent ou se ressemblent.
Dans l’homme, le volume de l’encéphale correspond assez correctement au degré d’intelligence de l’individu. Ce rapport subsiste encore d’une manière sensible entre les diverses espèces de vertébrés. Mais dans la classe des insectes, l’encéphale est sinon complètement oblitéré, au moins réduit à un état purement rudimentaire. Or, il est démontré que ce sont de tous les animaux les plus surprenanls pour les exercices de l’instinct el en même temps les plus dénués d’intelligence, les plus rebelles à toute espèce d’éducation.
A défaut de l’organe auquel les vertébrés doivent leurs diverses doses d’intelligence, les insecles sont pourvus d’un appareil nerveux particulier auquel il faut bien rapporter les facultés qui leur sont éminemment propres. Cet appareil se compose principalement d’une double série de ganglions réunis entre eux par des cordons longitudinaires el disposés sur l’axe du corps de manière à correspondre, en quelque sorte, à l’axe cérébro-spinal des verlébrés.
D’un autre côté, le caractère distinctif de l’instinct est de ne relever que de lui-même, d’établir une relation directe entre un besoin el l’objet qui lui correspond ; d’imprimer à l'être qui lui est soumis une impulsion fatale, irrésistible, et indépendante de tout contrôle de la part de l’intelligence, quand, d’ailleurs, celle-ci existe concurremment avec lui.
(Jne jeune fdle donl toute l'instruction se bornait à savoir lire son missel, me disait pendant son sommeil magnétique :
« L’âme esl une essence distincte de la matière et qui lui est unie pour un temps; elle se manifeste dans l’exercice de la raison. Mais l’instinct, ajoutait-elle, c’esl la raison, moins la conscience (1). »
D’innombrables exemples du tyrannique empire de l’instinct, agissant sans connexité entre lui el l’intelligence, se passent constamment sous nos yeux. De; cannetons, à peine éclos sous l’aile d’une poule, se précipitent dans l’eau de la mare voisine qu’ils n’avaient jamais vue et se livrent incontinent à un exercice qu’ils n’ont pu apprendre. L’oiseau né dans une cage, d'où il n’est jamais sorti, construit un nid dont il n’a jamais vu le modèle. Une larve prépare un berceau et des aliments à une progéniture qu’elle ne connaîtra pas. En un mot, l’instinct agit sûrement mais fatalement , et ne saurait être détourné de son objet sans qu’il s’ensuive un désordre funeste à l’animal qui lui est soumis.
Dans le nombre des fonctions qui constituent la vie collective de chaque individu de la classe des vertébrés, y compris l'homme, il en est qui présentent les mômes caractères ; ainsi tous les viscères agissent à la façon de l’instinct et en dehors du contrôle de l’intelligence sans que la conscience en reçoive aucun avertissement. Toutes les fonctions de la vie organique sont ou totalement ou partiellement soumises à celle loi. La respiration, la digestion, la sanguification, les sécrétions biliaires, urinaires, lacrymales et autres se lonl sans que nous en ayons la conscience et sans que notre intelligence ait rien à y voir. Ce sont véritablement des actes de Vhutmct.
Et, par une coïncidence qui ne saurait être fortuite, tous
(1) C'est-à-dire un acte conforme à la raison sans que l'animal en lit la conscience; un acte tel que le lui dicterait sa raison s'il était doué de cette faculté.
(Note de l'Auteur.)
les organes qui président à ces fonctions instinctives son« enveloppés ou accompagnés, ou sous l’influence d’un immense réseau nerveux parsemé de ganglions que les physiologistes désignent sous les noms de Plexus Coronaire, llépathique, Splénit/ue, Mésenlérique, Diapliragmatique, Pulmonaire, etc., selon la région qu’ils occupent.
Les anciens devinaient la plupart des choses qu’ils n’étaient point parvenus à démontrer et souvent ils devinaient juste : il me semble d’un augure favorable à ma théorie qu’ils aient tour à tour assigné pour siège à l’âme chacun des viscères. Selon les uns, elle réside dans le foie; selon d’autres, dans l’estomac ; l’un la niche dans les intestins, l’autre dans le cœur. Substituez le mol Instinct à celui A’Ame et je serai d’accord avec les uns et les autres. Ils voyaient bien que les fonctions de ces organes ne se bornaient pas uniquement à des sécrétions, à la digestion, à des actions vitales et physiques : mais la confusion qui régnait de leur temps sur la diversité des facultés intellectuelles et sur le rapport de celles-ci avec l’encéphale ou un autre centre quelconque, dut les empêcher de conclure avec justesse sur les relations d’organes mal connus à des facultés mal définie.
L’inspection des entrailles des victimes immolées devant les autels, pour y découvrir la volonté des dieux, les secrets de l’avenir, ne serait-elle [»oint la symbolisation de l’instinct? le signe extérieur d’une vertu dont le siège aurait été entrevu? Assurément, si les connaissances physiologiques avaient pu amener une pareille découverte, il eût été con-orme à l'esprit du temps de le consacrer par un symbole, et de confier le soin d’en perpétuer le souvenir aux institutions éminemment conservatrices du culte religieux.
L’instinct se manifeste encore chez les vertébrés par des actes extérieurs qui ne se rapportent à aucun des organes de la vie animale. Ainsi, quand un pigeon est transporté de Bruxelles à Bayonne, dans un panier que recouvre la bâche
d’une diligence, on ne saurait supposer qu'il prenne connaissance de la route et de ses sinuosités par les yeux, les oreilles ou le nez; et cependant, il n'est pas plutôt affranchi de sa contrainte que, sans aucune hésitation, il dirige son vol en droite ligne vers la demeure qu'if affectionne. Pour prendre celle direction exclusivement à toute autre, il faut qu’il y ait en lui une perception quelconque en rapport avec ses mouvements ; il faut qu'il y ait une relation entre le lieu où il aspire et lui ; quelque chose d’analogue à ce qui s’établit entre notre cerveau, viscère affecté aux actes de l’intelligence, et le lieu que nous voyons ; entre cet organe et l’objet que nous flairons, entre ce môme organe et le corps sonore dont notre oreille recueille les vibrations. Sans ces relations indescriptibles, les animaux s'égareraient à chaque instant ; ils seraient le jouet de continuelles déceptions et périraient faute de savoir trouver l’aliment qui leur convient, le climat qui sied à leur constitulion, les objets propres à protéger leurs pelils. Quelle que soit la nature de ces mystérieuses relations, elles sont plus précises, plus nettes, plus parfaites que celles qu’ils doivent à l’intermédiaire des sens de la vie animale. Ces sens sont des sources d’erreurs que l’intelligence ne corrige que lentement et laborieusement quand elle y parvieni, tandis que les suggestions de l’instinct sont proverbialement promptes el infaillibles.
Un professeur de zoologie me raconta qu’il avait capturé dans les champs, à plusieurs lieues de sa demeure, un lépidoptère qui manquait à sa collection : il l’enferma dans une boite de carton qu’il déposa au fond d’une armoire vitrée, placée dans son cabinet, et à laquelle on ne parvenait qu’en traversanl plusieurs pièces. A quelques jours de là, un lépidoptère de même espèce, mais d’un sexe différent, s'agitait violemment contre les carreaux de la croisée du professeur. Celui-ci ouvrit successivement toutes les portes et fenêtres qui séparaient notre amoureux, car c’en était un, de l'objet de ses ardeurs , et quand il fut conslaté que sa visite
s’adressaii au prisonnier enfermé dans des murs de carlon, le couvercle fui levé, et les amants, après l’échange de quelques tendresses, reprirent ensemble le chemin des champs el de la liberté.
A la vue de pareils traits nous nous contenions d'un mouvement d’admiration et nous nous bornons à dire : C’est de l’itulinct.
Si les sens avaient pu agir et transmettre des perceptions à l’intellect, nous verrions le rapport entre cette série de mouvements el leur fin. Mais il est évident que les sens, tels que nous les connaissons, u’onl pu être affectés chez le petit animal dont je viens de raconter les exploits : seulement nous sommes assurés qu’une faculté quelconque, analogue à l’intelligence, a dû dicter des efforts coordonnés el qui avaient un but positif : Il est donc rationnel de conclure que cette faculté a ses organes propres el des affections sui generis. La loi des analogies nous oblige à accepter comme siège et organes de ces affections, le tissu nerveux dont la disposition particulière chez les insectes annonce une destination spéciale.
Eh bien, dans l’homme, se rencontre un système de nerfs ganglionaires subordonnés pour l’ordre de ses fonctions, au système nerveux cérébro-spinal, mais indépendant de lui pour l’accomplissement de ces mêmes fonctions. Il préside à la vie organique et en dirige tous les détails avec l’infaillibilité qui caractérise l’instinct. Je ne puis donc me défendre de lui attribuer aussi ces manifestations extérieures qui, chez l’espèce humaine, ne sauraient s’expliquer par des actes de l’intelligence ni par l'intervention d’aucun des cinq sens de relation.
.Le monde est rempli du bruit de ces anomalies qu’on nomme pressentiments. La raison est réduite à se contenter de ce mol pour désigner un effet dont elle n’aperçoit pas l’origine. Si l’oiseau à cent lieues de dislance, si l'insecte à travers les parois d’un mur, perçoivent des impressions qu’on
rapporte à l'instinct, pourquoi donc l’homme, pourvu d'un appareil qui agit évidemment à la manière de l’instinct dans les fonctions organiques, ne jouirail-il pas aussi de perceptions semblables? Il peut répugner d’abord à notre délicatesse d’admettre que quelques nodosités nerveuses, égarées dans le mésentère ou les cavités de la poitrine, soient le centre de perceptions résultant des rapports, du monde extérieur : mais la nature ne tient point compte de nos scrupules et elle ne se montrerait pas plus étrange dans cette hypothèse, que dans le choix d'une masse pulpeuse, profondément labourée de sillons, pour constituer un organe de la pensée.
Une mère, dans le calme de ses occupations domestiques et d’une vie roturière, reçoit tout à coup une impression indéfinissable. Elle se trouble : son enfant, absent depuis longtemps et bien éloigné d’elle, est frappé de mort : du moins elle l’annonce.....aucune nouvelle reçue, aucun indice dont se contente la raison ne justifie ses alarmes. On lui reprocherait volontiers l’absurdité de sa douleur. Cependant quelque temps se passe, et dans le cours ordinaire des événements une nouvelle survient qui confirme ses pressentiments. A l’inslant môme où elle ressentit la funeste impression, son enfant expirait sous des climats lointains.....Les
exemples de pareils faits ne sont pas rares. Ne pouvant les expliquer, on se paye d’un mot et l’on n’y songe plus. Si quelque chose de semblable se manifestait dans une bête, ce qui peut ôlre sans que nous le remarquions, on l’attribuerait de suite à l’instinct. Mais l’orgueil de l’homme se révolte contre l’application de ce mol à une classe de ses facultés. Si cet orgueil était logique, il nierait aussi la digestion dans l’homme, parce qu’elle est incontestable dans les animaux. Cependant, dans le cas cité, il faut se résigner à voir une communication quelconque entre la mère et l’enfant, un rapport analogue à celui qu’établissent les sens de la vie animale, mais pourtant différent dans ses moyens et sa fin; semblable, en un mot, à celui qui guidait le pa-
pillon à travers les plaines de l'air, qui traçait au pigeon sa course d’une frontière à l’autre, et qui présente à la larve le modèle du maillot qu’elle doit préparer à sa chrysalide.
Quand on n’aurait devant soi que le recueil de faits qui ne peuvent être attribués à l’action des sens ni à l’exercice des facultés intellectuelles, mais qui offrent une irrécusable analogie avec les manifestations de l’instinct, il faudrait bien conclure de leur certitude que l’organe existe; comme l'organe, une fois constaté, oblige à conclure qu’il est au service d’une faculté. Car la même nécessité lie la cause aux conséquences que les conséquences à la cause.
On me permettra de rappeler une autre anecdote dont je ne saurais garantir l’authenticité, mais qui, si elle est vraie, prouve qu’il peut y avoir des commmunications à distance, et nonobstant l’intervention des corps opaques, entre les facultés perspectives de l’homme et les objets extérieurs, sans l’intermédiaire des sens de la vie animale.
(1)
Il y a peu d’hommes à qui il ne soit arrivé quelque chose de semblable au moins une fois dans sa vie. Mais on confond la vision avec le rêve et l’on ne s’y arrête pas.
L’histoire raconte qu’Alexandre le Grand, arrêté devant la ville du roi Ambigere, dont les habitant blessaient ses soldats avec des fièches empoifonnées, vit en songe une herbe propre à arrêter l’effet du poison. Ptoléméeen prit une potion et fut à l’instant hors de danger; le même remède sauva la plus grande partie de l’armée. (Justin, lib. 12, cap. 10.) Tous les somnambules lucides exercent cette/a-culié instinctive : c’est elle qui donne au chien la sagacité infaillible qui lui fait découvrir, dans l’ordre des grami-
(4) Cette anecdote se trouve dans notre tome iv, page 37; nous la supprimons ici pour éviter une répétition.
(Note de la Rédaction.)
liées, précisément la plante qui doit le purger. Les Alexandre el les somnambules, à l’état de veille, ont assurément plus A'Intelligence qu’à l’état de Sommeil et de Songe; mais élant ainsi en dehors des conditions de VInstinct, ils restent privés des avantages attachés à celle faculté.
La variété dans l’unité est un élément du beau dans les arts : c’est un moyen de puissance dans la nature et une des règles qu’elle suit avec le plus de constance dans ses opérations. Une substance en apparence toute semblable constitue le cerveau et les plexus : l'un produit les phénomènes de l’intelligence, les autres sont aussi appropriés à ceux de l’instinct. Si la masse encéphalique se partage en circonvolutions qui paraissent présider à autant de modifications de l’intellect, le réseau plexiforme se répartit, avec des complications diverses, entre les viscères qui président, selon moi, à autant de modifications des perceptions instinctives. Une même masse cérébrale esl l’intermédiaire de cinq affections sensoriales sans analogie entre elles; et un même tissu nerveux, diversifié par des ganglions de différentes grandeurs, ayant en toute apparence des propriétés identiques, stimule l’action de viscères donf les formes, les tissus et les produits sont également variés. Il en résulte, enfin, des liquides qui ne se ressemblent en rien. Les uns et les autres sont essentiels à l’existence de l'individu; pourquoi ne le rattacheraient-ils pas concurremment à l’univers dont il fait partie, par les deux conditions immatérielles sous lesquelles ae présente la vie, c’est-à-dire Vinstinct et l'intelligence.
Dans l’état normal, les fonctions de la vie organique s’accomplissent sans que nous en ayons la conscience; mais qu’il survienne un trouble, et à l’instant la douleur en avertit l’intellect ; c’est la conséquence des communications > nerveuses qui relient les deux ordres d’organes el sur lesquels l’anatomie ne permet aucun doute.
Cependant une subordination existe entre les facultés de l'instinct et celles de l’intelligence. Celles-ci sont évidem-
ment d’un ordre supérieur : à leurs développement l’homme est redevable du rôle qu’il remplit dans la création : chez lui l’intelligence domine l’instinct ; c’esl le contraire chez, les animaux; el si par accidenl cet ordre se trouve interverti, nomme il arrive dans les êtres imparfaite, ou d’une organisation gravement altérée, tels que les crélins, les hypocondriaques, les hyslériques ; les aberrations de l'intellect sonl ordinairement compensées par la rectitude des suggestions de l’instinct.
Mainlenant, si l’on considère que les sujets magnétisables sonl tous, ou affectés de maladies organiques, ou remarquables, en dehors de cette condition, plutôt par la médio-crilé que par l’excellence de leurs facultés mentales, on comprendra que s’il existe un procédé qui surexcite les organes de Pinstinciivité, il en doit résulter des phénomènes qui, semblables dans leur nalure à ce qui se passe chez les animaux, ne nous surprennenl davantage que par la raison qu’ils se Iraduisent au moyen du langage. Sans aucun doute nous serions également émerveillés des perceptions instinctives et habituelles des animaux, dont une grande partie doit nous échapper si, au moyen de la parole, ils pouvaient nous en entretenir et nous dire les maladies qui se révèlent à eux, les remèdes qui s’y rapportent et qu’ils aperçoivent, les événements el les objets qui, malgré les dislances et l’interposition de corps opaques, ne peuvent être souslraits à leurs investigations.
Or, ce procédé existe : la magnétisation met en relation deux individualités dont l’une agit, tandis que l'autre est passive L’une donne et l'autre reçoit. Dans l’ôlre passif, les organes de la vie animale sont ou totalement ou partiellement assoupis, leurs fonctions suspendues dans la même proportion ; tandis que l’activité des fondions de la vie organique reçoit une impulsion inusitée, dont le résultat final esl presque toujours le rétablissement de lu santé.
Ce qui semble prouver, du reste, que ce sont bien les or-
ganes placés sous l’influence des plexus nerveux ou plutôt ces plexus môme qui se Irouvcm affectés par la magnétisation, c’est que les effets du fluide magnétique sont toujours plus sensibles et plus prompts quand il est dirigé vers l’é-pigaslre; que les patients témoignent souvent du malaise quand l’action magnétique s’attaque à la région céphalique et qu’ils sollicitent parfois, de leur propre mouvement, un soin particulier pour les poumons, le cœur, les reins, ou telle portion des intestins qui recèle la cause de leur maladie.
D’un autre côté, il arrive fréquemment que le magnétisé qu’on invite à décrire un objet, le pose sur sa poitrine, son estomac ou son abdomen, rarement à la hauteur de ses yeux.
Les perceptions ainsi reçues doivent, de toute nécessité, être différentes de celles qui nous arrivent, dans l’état normal, par les organes sensoriaux : aussi voyons nous les sujets lucides presque toujours pousser des exclamations de surprise quand on leur fait faire des explorations dans le monde inconnu où le magnétisme les introduit.
Le langage souvent leur fait défaut, el l’importance de leurs révélations est considérablement limitée par 1’insufli-sance des expressions. Une personne que je pressais de m’initier aux mystères qui, tour à tour, la faisaient passer de la terreur à l’extase, me répondit : « Je vois ce qui n’a jamais frappé les regards humains : Je vois ce qui n’a pas de ressemblance dans la vie, ce qu’aucun mol n’exprime, ce qu’aucune image ne peut peindre. »
E; je dois faire observer, que jusqu’à cette expression : Je vois, accuse l’impuissance du langage ordinaire : tous les magnétisés lucides emploient ce mot à défaut d’un plus convenable. Ils ne voient point réellement à la manière des sensations dont le nerf optique est l'intermédiaire ; ce nerf n’est, dans ce cas, nullement affecté. Les maguétiques ont une perception dont la nelieté et l’élendue parait avoir plus
d’analogie avec les sensations de la vision qu’avec celles des autres sens. C’est proprement l’action d’un sixième sens, dans le domaine duquel les cinq autres, limités au service de la vie animale et occupés à fournir des matériaux à l’intelligence, ne peuvent pas plus pénétrer que l’œil, en particulier, ne peut empiéter sur les attributs de l’ouïe, ou le toucher sur ceux de l’odorat (4).
Je résumerai ainsi les explications que je viens de donner :
l8 Tous les organes corporels qui concourent à composer la série des animaux se retrouvent dans l’homme, soil à l’état de contraction, soit à celui d’extension.
2° A chaque organe est attribuée une faculté : donc l’homme possède, avec plus ou moins de développement, l’ensemble des facultés départies au règne animal. On ne saurait faire d’exception en faveur de [’instinct.
3° Chez les animaux inférieurs, l’instinct prévaut sur l’intelligence : ces deux facultés sont réparties, dans des proportions diverses, sur les divers degrés de l’échelle zoologique. Dans l’homme, à son état normal, l’intelligence domine l’instinct. La raison est son caractère spécifique.
4° L’action magnétique, s’exerçant par l’intermédiaire d’un fluide impondérable et incoercible, n’esl que la surexcitation des facultés instinctives.
Auguste Marie.
(1) Je connais un médecin devenu aveugle, et qui, dans la conversation, se sert constamment de cette locution : Je vois bien. Il voit, c’esl-à-dire il perçoit par les facultés intellectuelles, comme les magnétisés voient, c'est-à-dire perçoivent par les facultés instinctives.
(Note de i Auteur.)
VARIETES.
Trlbuuaux. — Le 17 courant, à la huitième chambre de police correctionnelle, présidée par M. d’Herbelot, comparaissait une somnambule, M“e Sausserote, sous la double prévention d’escroquerie et d’exercice illégal de la médecine el de la pharmacie.
Après l’audilion des témoins, dans l’espril desquels la lucidité de la dame Sausserotte ne parait pas douteuse, quoique ses prédiction* ne se soient qu’en partie justifiées à leur égard. M. le président demande à la prévenue :
« Qu’avez-vous à répondre ?
« Un seul mot : J’ai guéri beaucoup de monde. Quant à la réalité de la puissance du magnétisme, elle n’est pas douteuse pour moi, car j’en ai éprouvé moi-mème les effets, et c’est parce que je me suis guérie toute seule, en allant consulier l’ancienne somnambule du docteur Dupuytren, M** Clotilde Saint-Marc, qui est morte maintenant, queje crois au somnambulisme. Je ne dis à personne de venir me consulter ; je ne donne mon adresse à personne, et je ne reçois que ceux qui ayant confiance en moi viennent me consulter. Je ne taxe personne, je' reçois ce qu’on me donne, tantôt plus, tantôt moins, mais ce que je reçois plus habituellement est de 10 à 20 francs par consultation.
M. le président : Mais vous contrevenez aux lois et règlements relatifs à l’exercice de la médecine.
La prévenue : Je ne croyais rien faire de contraire aux lois : j’agis de très-bonne foi, et si je ne croyais pas à l’efficacité du somnambulisme je ne ferais pas ce queje fais. Je ne me rappelle pas avoir vu la dame Brière qui est tenue me consulter pour ses chevaux.
Conformément aux conclusions de M. l’avocat du roi Mongis, qui abandonne les chefs de prévention d’escroquerie et d’exercice illégal de la pharmacie, pour s’en tenir à l'exercice seul illégal de la médecine, le tribunal condamne la dame Sausserotte à 5 francs d’amende.
Après le prononcé du jugement, M. le prèsi lent s’adressant à Mme Sausserotte : « Je vous engage, à l’avenir, à ne donner vos consultations qu’en présence d'un médecin, dont la signature en assumera la responsabilité. »
Ma‘ Sausserotte : Je n’y manquerai pas, Monsieur.
(Gazette des Tribunaux).
BIBLIOGRAPHIE.
Qui veut bien connaître une science, une doctrine doit la prendre à son origine, en suivre les évolutions successives. Nais d’ordinaire on n’étudie que la superficie des choses, dé-aissant le fond comme aride ou trop long. Ainsi les écrits de Mesmer, qui servent de base à l’édifice magnétique, sont aujourd'hui presque ignorés; très-peu de magnétistes les les étudient, beaucoup môme ne les ont jamais lus. Pourtant ils contiennent des vues, des principes qu’on ne trouve nulle part ailleurs. Il résulte de cet abandon des ouvrages du fondateur un grand domage pour la science, car la base historique manque à la plupart des croyants, ce qui les expose à de continuelles méprises. Notre intention est de rappeler l’attention sur ces œuvres dont les pages sont ornées des plus belles idées, mais le temps de le faire avec fruit n’est pas encore venu. En attendant ce moment opportun, il nous a paru qu’on ne lirait pas sans profil ni plaisir l’analyse suivante que nous avons trouvée en cherchant autre chose dans le n° 331 du Moniteur Universel, 1er fructidor an VII (19 août 1799).
Nous cilons textuellement :
Mémoire de M. F. A. Mesmer, docteur en médecine, sur les découvertes, \ vol. ,* a Paris. chez Fuchs, libraire, rue des Mathurins-Jacque,
Le nom de Mesmer et le magnétisme animal réveillent à la fois toutes les idées d’incrédulité; et c’est à peu près tout ce que la multitude connaît de l’homme et de sa doctrine. 11 serait temps enfin de renoncer au ridicule dont on a couvert l’un el l’autre, ce qui ne prouve le plus souvent que l’ignorance el la mauvaise foi, pour examiner sérieusement un système qui importe à la vie des hommes, et auquel 22 ans de succès suivis semblent donner quelque réalité.
Il a déjà subi un examen, dira-t-on. — On se souvient de quelle manière il fut fait : des commissaires qui en avaient été chargés, plusieurs n’assistèrenl point aux expériences, et l’un de ceux qui les suivit le plus constamment, refusa de signer le rapport que l’on fit contre la doclrine de Mesmer.
Je suis loin de récuser les jugements des savants; adeptes des sciences, ils peuvent mieux que personne nous révéler les secrets de celles dont ils onl reçu les faveurs ; mais lorsque je m'aperçois qu’ils n’onl pas mis dans leur examen tout le soin désirable; quand je vois qu’il y a dissentiment entre eux, alors il m’est permis de douter. Lorsque ensuite, sans être aussi versé dans les mystères, je trouve dans un ouvrage l’exposition, l’explication de choses que j’ai senties, que j’ai cherchées el qui m’ont conduit à soupçonner l’existence de ce qu’on me présente, j’en crois alors à mon propre jugemenl, je médis, il y a là quelque chose de vrai, et si je recours aux lumières de gens plus instruits que moi, ce n’esl plus que je doute de l’existence de la chose, c'est seulement pour en connaître mieux la nalure.
Au surplus l’incrédulité, en fait de sciences, est la doctrine la plus dangereuse pour les progrès de l’esprit humain; les sciences ont déjà produit tant de choses élon-
nantes, qu’il semble impossible d'affirmer ce qu’elles ne produiront pas. Je ne sais quel homme de mérite disait qu’il regarderait comme un extravagant, celui qui prétendrait leur fixer des limites; leurs bornes ne sont pas plus connues que celles de l’esprit humain ; el le jour où l’un et les autres ont fait le plus de progris, n’est souvent que la veille du jour où ils feront les plus grandes découvertes.
Au lieu de dire : cette doctrine est contraire à nos principes; pourquoi n’examine-t-on pas si ce ne sont point les principes reçus qui sont contraires à la doctrine. De celle épreuve, il ne peut résulter qu’un très-grand avantage pour nos connaissances : ou la nouvelle doctrine sera meilleure, et alors elle devra être préférée; ou l'ancienne sera confirmée, fortifiée par les attaques qu’elle aura reçues. Lorsque Galilée publia les lois de la chute des corps, les physiciens du temps disaient aussi que celle doctrine était contraire à leurs principes; ils le raillèrent, le ridiculisèrent; ils firent plus, ils le persécutèrent ; mais sa doctrine survécut, et elle est encore aujourd’hui celle de nos écoles. Si le système des influences est aussi étendu que le prétend Mesmer, sa découverte n’est pas seulement précieuse pour la santé de l’homme, elle l’est encore pour ses connaissances; elle simplifie sa nature, en l’assimilant à une autre espèce de matière; elle le soumet à une règle plus générale, et facilite enfin la recherche du principe des choses qui, depuis tant de temps, occupe les méditations des hommes les plus re-commandables ; c’est à ce but que doivent tendre tous ceux qui cultivent le vaste champ des connaissances humaines; ils doivent réunir leurs lumières, en faire un faisceau pour éclairer la route, et découvrir enfin l’objet de leurs recherches.
Comme nous venons de le dire, l’ouvrage de Mesmer n’est pas simplement destiné à la médecine; il entre aussi dans le domaine de la physique, cn expliquant les qualités occultes des corps. Son système laisse entrevoir l’existence d’un prin-
cipe unique d’après lequel tout se met, sc reproduit, se détruit el se reprodruit dans le inonde; son feu universel rappelle le principe unique de Zoroasire. La vie du monde n’est qu’une, dit-il, el celle de l’homme individuel n’en esl qu’une particule.
On doit dire que dans une matière si abstraite, si peu faite pour attacher ceux qui ne la possèdent pas, Mesmer a su être clair, facile et très-iniéressant. Il conteste l’existence de l’attraction, l’appelle l’effet apparent d’une cause qu’on n’aperçoit pas; remonte aux causes originelles des mouvements et à l’activité primitive du mécanisme de la nature; trouve le modèle de ce mécanisme dans les effets de l’aimant dont l’action, ainsi que celle du fluide délié qn’il appelle magnétisme, n’est que l’effet nécessaire du mouvement dans le plein.
Passant ensuite à l’application de son système à la médecine, il dit : la maladie n’est que le dérangement des organes, M le retour à l’état de santé est le rétablissement primitif de leur action. Il part de ce principe, el de même qu’il ne reconnaît qu’une espèce de mouvement dans l’univers, qu’une espèce de flux et de reflux qui se fait sentir dans tous les corps, qui agite le sang comme les eaux de la mer, il ne reconnaît aussi qu’une cause, une espèce de maladie, dont toutes celles auxquelles on a donné parmi nous une si grande quantité de noms, ne sont que des effets ou des dégénérescences. En cela Mesmer s’appuie sur le sentiment d’Hippo-ctate, qui avait aussi pensé que ce que nous appelons des maladies n’était que des symptômes ou des modifications de h grande et unique maladie qui affecte le corps humain , le dérangement de l’état sanitaire. Cette maladie est la gêne ou k» suspension du mouvement des humeurs, l’inaction de fa fibre musculaire qui, par son mécanisme particulier, est l’instrument de tout mouvement et le principe de toute action des solides sur les liquides. Quand la découverte de Mesmer ne serait pas fondée, on lui devrait au moins d’a-
voir rappelé les vrais principes en matière île médecine, d'avoir écarté celle nosologie confuse, espèce de chaos formé 5 plaisir pour effrayer les élèves, et dans lequel s’égarent souvent des hommes qui ont une grande pratique.
Pour une maladie unique Mesmer n’emploie qu’un remède unique, la direction et l’application des courants du fluide universel, du feu de la nature, du magnétisme animal . en un mot à l’organisation intérieure de la fibre musculaire pour rétablir l’harmonie dans les fonctions des viscères, renforcer en eux les propriétés analogues à leur organisation déterminée, régler el accélérer l’ordre et la marche dans lesquels les causes el les effets se succèdent, afin d’opérer le rétablissement de la santé.
En prouvant la possibilité de communication du magnétisme, Mesmer donne l’explication d’un phénomène très-singulier, celui du somnambulisme, et par suite celle de la dcmonargie, des oracles, des sybilles, etc. Il attribue cet état aux modifications de la matière et du mouvement, les facultés dont il est accompagné, telles que la découverte du passé, et la prédiction de l’avenir, à la faculté que nous avons de sentir tous les rapports que les événements et les êtres ont avec noire conservation; sensation qui lient beaucoup moins à la raison qu’à l’instinct, puisqu’elle nous est-commune avec tous les animaux. Aussi celle sensation est-elle moins sujelle à erreur, parce qu’elle a des règles physiques fondées sur nos sens, tandis que 9i elle n’était que le produit de noire raison, elle pourrait bien n’être quelquefois que les maladroites suppositions d’un esprit faux, ou les vains prestiges d’une imagination exaltée. La faculté qu’ont les somnambules de lire dans le passé et dans l’avenir , s’explique par la même raison que nous voyons souvent une personne à laquelle nous n’avons rien dit qui pût lui faire, deviner notre pensée ou noire volonté, avoir la même pensée et la même volonté que nous. Cela arrive même à , des distances très-éloignées. Mesmer attribue ce phénomène à
ce que les mouvements do la pensée modifiés dans le cerveau «;t dans la substance des nerfs, étant communiqués en môme temps à la série d’un fluide subtil avec lequel la substance des nerfs est en continuité, peuvent imlé|iendammenl, et sans le secours de l’air el de l’éther, s’étendre à des distan-ces infinies, et se rapporter immédiatement au sens interne d’un autre individu.
Celle doctrine, qui est fondée tout entière sur la loi du plein, explique parfaitement celte anecdote du lion échappé de la ménagerie de Florence, qui voyant lomber à genoux la mère d’un enfant qu’il allait dévorer, le lui laissa sans lui faire le moindre mal ; on pourrait croire que les mouvements de la pensée de la femme s’élaient communiqués au cerveau du lion, et que c’est là ce qui avait déterminé la clémence de l'animal ; celte doctrine mène droit à la découverte de la formation de la pensée el de la volonté. C’est par la môme loi el par les mômes moyens que Mesmer explique la communication du feu magnétique qu’il a su provoquer dans une série de matières les'plus subtiles.
Mais, dira-t-on, l’on conçoit que les somnambules connaissent le passé, mais comment peuvent-ils deviner ce qui n’est pas? Précisément parce qu’ils ont déjà vu ce qui est. Voir le passé, dit Mesmer, n’est autre chose que sentir la cause par l’effet; el prévoir l’avenir, c’est sentir l'effet par la cause. On peut lui objecter qu’il arrive souvent que le calcul des probabilités n’est point exact, que l’effet n’est pas toujours la déiivalion précise de la cause avec laquelle on aurait pu lui supposer le plus de rapport. Quoi qu’il en soit, si celte théorie ne donne pas précisément la vérité, elle a assez d’attraits pour inviter à en chercher la ruute.
Mesmer termine par une théorie des sens qui est absolument neuve el très-ingénieuse. Les gens du monde la liront avec plaisir ; ceux qui s’occupent des sciences naturelles la liront avec intérêt el avec fruit.
TABLE DES MATIÈRES.
Attraction magnétique, 281, 310 Animaux. — Magnétisés et gué-tis, par M. Laforgue. 208
Animisme. — Particularités sur la mort de Mendelsbon. 348 Antimagnètisme (l')- M. le Dr Ordinaire croit que la double vue de Mme Hermann, Robert Houdin, etc., n’est autre chose qu’une communication de pensée magnétique. 301 Arcanes de la vie future dévoilés, par M. Cahagnet. — Annonce et souscription. 160, 256 Athénée magnétique de Lyon. 48, 84, 169, 233 Banquet mesmérien : de Paris, 23 ; de Lyon. 48 Barbier charmeur. 93 Chronique. — Nouvelles el faits divers. 29,159, 190, 219 284, 330 Cancer. Utérin, 35; de l'estomac, 107 ; du sein, 266 ; de la mâchoire. 292 Charmeurs, voy. Thugs.
Choléra. — Sa marche et son traitement en Russie. 219, 352 Cottin (la petite). — Est toujours électrique. 220 Circulaire magnétique.— Mode de correspondance proposé par M. J. de Rovère. 71 Conférences. — Sur la magie. 216, 276, 296, 331 Correspondance ( petite). —
Avis divers. 87, 160, 192, 222, 255, 288 Cours de M. Trousseau à la faculté de médecine, il rétracte en partie ce qu'il a dit du magnétisme. 10
guéri ; réflexions sur ce sujet. 585 Decret du gouverneur du Bengale, créant un hopital ma-gnétique à Calcutta. 171
Discours de M. de Boissy, à la chambre des pairs, sur l’exer-cice illégal de la médecine et la pratique du magnétisme médical. 25
Documents sur Mesmer — Extraits du Moniteur, 264 ; fournis par son petit neveu. 87 Etrangleurs, voy. Phanségars. Ether. — Son emploi en médecine, 14; en chirurgie, 59; ses inconvénients. 16
Eludes sur le somnambulisme.
— Voy. Puységurisme.
Epilepsie, ses caractères, 13;
cures magnétiques. 161
Froid. — Son action démagnétisante, par M. le Dr Esdaile. 274 Fantastique (mon). — Curieuse relation de pressentiments, par M. Emile Des-champs. 235 Gastrite (la), par le Dr Besu-chet, analyse et extraits. 62 Grossesse fictive. 308 Guérisons (tableaux des) obtenues par M. Laforgue. 129, 193 Goitres. 37 Hallucinations. — Curieux exemple, ayant le magnétisme pour objet. 250 Homœopathie (l'), par le Dr Goure ; analyse el extraits. 80 Hôpitaux magnétiques — de Calcutta, 84,136, 171, 271; de Madras et Bombay, 191 ; de Londres. 345
Hydroscopie. — Faits. 54
Insensibilité, voy. opérations. Imitation phonique. 210
Initiation aux mystères du magnétisme, par M. Delaage; analyse. 224
Incrédule converti (l’). — Poésie. 218 Infirmerie mesmérique, — liste des souscripteurs; dons, rente. 345 Jury magnétique. — Modèles; effigies et reven des médailles qu’il donnera. 170 Jenny Lind, son duo avec une somnambule anglaise. 209 Lettre de M. de Brossard sur sa guérison. 324 Lettre du Dr Aubry sur Mesmer. 80 Lettre de M. Joseph Barthet sur l'enseignement et l'exercice du magnétisme. 103 Lettre de M. Léon Lerolle sur sa maladie et sa cure. 161 Lettre de M. Mermoud de Po-liez, sur la persévérance dans le traitement magnétique des maladies, 321 ; exemple à l’appui. 325 Lettres de l’abbé Almignana à la société du Me-mérisme sur la non intervention du démon dans les opérations magnétiques; preuves tirées des textes sacrés. 41, 174, 225, 257, 3 Lettre de l’Athénée magnétique ad Itérant au projet d’une société centrale. 169 Lettres d'Alexandre Dumas, sur le somnambule Alexis. 146 Littérateurs, célébrés, partisans du magnétisme. 159 Lucidité, spontanée, 155; magnétique. 55, 146, 358 Mémoires de Mesmer. — Analyse. 370 Magiciens de l’Inde. 96 Migraine. 108 Médecine (projet de loi sur la) voy. Discours.
Magie ; ancienne, 179; magnétique, 216, 276, 2396, 39, 345 Magnétisme (le) à Lyon : échec de M. Lafontaine, 85; à Dax :
Expériences et cures par M. La-porte, 281; à St-Denis (Bourbon) ; Cures diverses par M. Lacaussade , 33 ; vue à distance concernant la frégate le Berceau, 55. — Au Havre : expériences d’attraction, grossesse fictive, etc., par M. Derrien et Mme Froidcour.
308 ; — à Pan : nombreuses cures, par M. Laforgue, 36,
130, 193 ; — à Londres : exhibition de Mlle Prudence, 56; souscription à l'hôpital magnétique, 345;—à Marseille : procès scandaleux, 295 ; — à Mons : prévention d’homicide par imprudence, 158; — à Auxerre : Nombreuses cures par M. de Rovère, 73; — à Caen : procès. 227
Mesmerism in India , par M. le Dr Esdaile ; analyse et extraits. 88, 120
Manuscrits de Mesmer sur les époques de la vie, 65 ; les assemblées publiques. 289
Médailles des fondateurs et membres du jury magnétique. 170 Miroir magique, — expériences. 297, 339, 345 Magnétisme (article); extrait de l'Encyclopédie populaire italienne. 311 Magnétisme expliqué. — Dissi nation théorique, par M. Jobard. 331 Négresse somnambule. 118
Nécrologie. 190, 349
Opérations chirurgicales. — Nombreux exemples d’insensibilité à la douleur. 138, 265, 292 Ophtalmie. 37, 168, 359
Ode, à Mesmer, par Devert. 234 Onéiromante. — Dissertation sur la divination, par les songes. 110 Organes (des) affectées par le magnétisme, dissertation thé-rique par M. Marie. 368 Persécution de M. Laforgue; à Pau. — Réflexions & ce sujet. 185 Phrénologie (notions de), par