1845
JOURNAL
DU
MAGNÉTISME
PAR
UNE SOCIÉTÉ DE MAGNÉTISEURS ET DE MÉDECINS
SOIS LA DIRECTION DE
M. LE BARON DU POTET.
La vérité, n’importe par quelle bouche;
lo bien, n'importe par quetlea mains.
ON S’ABONNE A PARIS :
AU BUREAU DU JOURNAL, RÜE DE L’ODÉON, 33.
CHEZ A. RENÉ ET Cî, RUE DE SEINE 32.
JOURNAL
DU
MAGNÉTISME.
APPEL AU PUBLIC
SUR LE
Il existe un agent thérapeutique d’une grande puissance; il est & la portée de teus et peut guérir des maux désespérés. En vain avons-nous, par des appela successifs et cent fois renouvelés, sollicité les oorps savants de s’emparer de cette découverte; en vain nous avons également sollicité les Facultés de Médecine. de la faire enseigner dans les écoles et appliquer sur les malades. Un refus obstiné a toujours été le résultat de nos tentatives, et souvent de grossières injures et des démontis flétrissants sont sortiB du temple de la science, comme remerciements de nos généreux efforts. Cette indifférence pour le bien public et tant de mauvais vouloir no nous ont pas plus rebutés que les calomnies ne nous ont lassés. La vérité s'est ré-
panduo on dehors de la science; elle court le monde, niais sans guides, excitant l’étonnemcnt et l'enthousiasme partout où elle paraît, mais toujours dédaignée par les gens de qui un jour elle doit faire la fortune et la gloire. Sans doute ce succès devrait nous rendre fiers, car nous y avons contribué ; mais ce n’est point assez pour nous. Il faut que la découverte de Mesmer soit connue tout entière, comme le bien qu’elle peut faire. Il faut tracer des règles certaines pour l’emploi de l’agent magnétique et faire que ces connaissances pénètrent dans les familles et viennent au secours de ceux qui, pleins du noble désir de soulager ceux qui souffrent, manquent cependant de l’instruction nécessaire pour accomplir leurs généreux desseins.
Transmettre au public notre expérience, répandre la méthode de traitement qui nous a si souvent réussi, mettre à la portée de tous un moyen simple et facile de guérir les maladies , tel est le but que nous nous proposons d’atteindre par la publication de ce journal. Son prix peu élevé favorisera nos projets. Différent de tous ceux qui ont paru jusqu’à ce jour, il no contiendra rien de superllu. Le magnétisme et le somnambulisme dégagés de leur enveloppe mystérieuse, une méthode rationnelle pour se conduire dans tous les cas, et le progrès que fera chaque jour cette découverte, sont assez de matériaux pour rendre notre publication instructive et lui donner un puissant attrait.
Le 20 de chaque mois il paraîtra trois feuilles d’impression, ou quarante-huit pages, qui formeront un gros volume tous les ans.
INTRODUCTION.
Il n’en est pas du magnétisme comme des autres découvertes que l’homme a pu faire; cclle-ci, outre l’attrait si puissant qu’elle a, comme tout ce qui est occulte et caché, devient entre les mains de tous un instrument précieux comme moyen rie traitée les maladies ; d'une application facile, elle offre sous ce rapport des ressources que l’on chercherait ailleurs en vain. Nul doute que toutes les inventions humaines peuvent être utiles à l’homme, contribuer à son bien-être, montrer son génie; mais, nous le répétons, il n’en est aucune qui puisse, pour sa conservation et sa santé, égaler la découverte de Mesmer.
Le magnétisme n’aurait-il pour lui que la classe des infirmes et des malades, s’il les soulage ou les ■ guérit, jamais fortune n’aura été semblable à la sienne, car plus de la moitié de la société souffre et languit; un nombre considérable est sans espoir.
Tout est décoloré pour l’homme qui souffre ; ce qu’il demande avant tout, c’est la santé. Que lui parlez-vous des progrès des arts et des sciences? Il voit leurs splendeurs avec indifférence; vous aurez beau
étaler à ses yeux des chefs-d’œuvre, il restera froid et n’aura de voix que pour se plaindre. Ne l’accusez pas de manquer de sens ou d’être indifférent aux beautés des arts et de la nature ; car plus il sent, plus il est malheureux, et il voile son regard pour moins souffrir.
Gardez-vous d'insister auprès de l’homme ainsi disposé, car il vous maudira, vous et vos inventions. Mais si vous venez lui dire : « Une découverte s est faite; elle semble venir en aide aux faibles natures; par les moyens qu’elle nous offre, nous pouvons soulager ceux qui souffrent, guérir même ceux que la science, jusqu’à ce joür, n’a pu guérir;» vous verre* fies yeux «’ouvrir, sa figure s’animer; un rayon d’espoir sera descendu jusqu’à son cœur. Tout à l’heure vous étiet sans puissance sur cet homme; son oreille pour votre parole s’ôtait affaiblie ; maintenant il vous ôüoüte 3 il fera plus que vous entendre, il cherchera à Vous deviner j à savoir si voüs ôtes sincère* et vous demandera jusqu’aux moindres détails de l’art nouveau.
Quels que soient les préjugés qui s’opposent à Ift marche do la découverte nouvelle * si vous pouve* offrir des exemples authentiques de ses bienfaits* elle progressera. Quel que soit le jugement contraire dos savants et des médecins, ils seront dédaignés, soyez-en certain, car il est question de la santé, il s’agit de la vie.
Sahs doute la marche sera lente. Une voix ne peut rien d’abord contre cent mille, pas plus qu’un caillou ne peut détourner un torrent. Mais si dix, si vingt, si cent voix se joignent à la première, un léger mou-
vement est déjà établi en sa faveur. Le temps seul alors est nécessaire; il diminue le nombre des ennemis que la vérité avait rencontrés; iis sont remplacés par des hommes nouveaux qui ont d^jà moins de prévention, et les haineâ scientifiques se sont affaiblies.
Ainsi a commencé la découverte dont nous poursuivons l’étude ; elle a cheminé malgré les oent mille voix de la science qui furent d'abord opposées à un® seule. Elle a grandi avec lo temps, et aujourd’hui elle ne se défend plus ; elle menace, elle attaque à son tour. Qui l’a dono rendue si puissante? Les faits dont elle est la cause et le temps qui lui a fait «ubir son épreuve.
Lutte curieuse pour l’homme attentif» propre à ellt seule à développer son esprit, car elle lui apprend à
ne pas croire aveuglément au jugement des savants et lui donne la céMitnde d’une Providence.
Nous n’avons plus aujourd’hui besoin de prouver l’existence du magnétisme; grâce aux hommes qui nous ont précédé ou qui marchent avec nous, ses effets sont reconnus, non encore par la science (son témoignage qu’elle refuse est au reste inutile), mais par une masse d’hommes suffisamment éclairés pour les bien observer. Il serait.difficile de compter les adhérents que le magnétisme a, non-seulement en France, mais dans le monde entier. Il ne s’agit maintenant que de bien connaître cette nouvelle puissance, d’en bien régler les effets et de lui faire produire plus de bien qu’elle n’en a fait jusqu’à ce jour, quoiqu’elle en ait déjà fait beaucoup.
C’est notre expérience que nous voulons transmet-
tre à d’autrés hommes, c’est lo résultat de trente années d’études que nous voulons leur faire connaître, afin qu’ils puissent se préserver do quelques erreurs qui prirent naissance dans les premiers temps,et marcher d’un pas plus ferme dans la route où, de nos mains, nous avons arraché les épines.
D’autres leur enseigneront une science magnétique; nous, nous avouons tout haut qu’elle nous est encore inconnue; mais c’est l’aride magnétiser les malades, de les guérir enfin, que nous décrirons dans chaque page de ce journal.
Faire des magnétiseurs, voilà notre pensée ; les éclairer sur la force que leur organisation recèle, leur enseigner l’emploi qu’ils peuvent en| faire pour soulager les malheureux , voilà le but auquel nous tendons, et nous allons nous mettre à l’œuvre.
Baron Du Potet.
PROFESSION DE FOI DES REDACTEURS.
Lorsqu’on considère les désordres moraux de notre époque, l’affaiblissement successif de toute croyance et la dégradation physique de l’homme, il est doux de penser qu’une découverte s’est faite, et qu’il résulte de son étude la connaissance de nouveaux principes propres à guider la grande famille humaine dans la voie d’un meilleur avenir. Cette consolante pensée que le remède au mal qui nous dévore est trouvé nous a soutenus dans nos travaux, et nous fait entreprendre aujourd’hui une publication propre à généraliser les faits sur lesquels repose notre croyance.
Animés du désir d’être utiles à nos frères, nous allons mettre sous leurs yeux les pages merveilleuses d’une nouvelle science. Notre sincérité égalera la pureté de nos intentions; car, quels que soient les obstacles qui nous environnent, nous ne céderons rien aux erreurs que nous rencontrerons sur notre passage et nous dirons la vérité sur toutes choses.
Nous espérons que nos efforts seront secondés par les hommes qui, comme nous, travaillent à généraliser la connaissance du magnétisme. Nous de-
mandons leur concours; qu’ils viennent partager notre labeur,‘nous soutenir et nous prêter un appui nécessaire dans la lutte.
« La vérité ne pénètre en ce monde que par le combat, et la justice veut le combat au profit de la vérité. »
Ils savent, comme nous , combien cetto maxime de Frapart est vraie. Ce n’est donc que par des efforts multipliés et longtemps soutenus que la vérité pénétrera clans les croyances et y amènera cette révolution pacifique que, depuis longtemps, nous appelons de nos vœux.
Nous ne demandons que ce que demandent tous les magnétiseurs : Le triomphe d’une vérité méconnue et cependant utile à tous, son admission dans la science et son enseignement dans les écoles. Le succès est certain s’ils se joignent à nous. La résistance sera vaine si nous savons nous entendre. Les lumières répandues dans l’espace, étant réunies en faisceau, éclàireroht mieux nos pas; nous verrons nos antagonistes et nous leur porterons des coups plus certains.
Il nous appartient d'attaquer, et nous manquerions à notre devoir si nous n’attaquions ce qui fait obstacle à la propagation du magnétisme. Les hommes qui vivent avec des erreurs se soucient peu de la vérité, et les préjugés qui rapportent de l’or sont cultivés avec ardeur par ceux qui en profitent. Est-il un but plus moral que celui de détruire des mensonges qui servent à l’exploitation de l’homme? Non, sans doute; et ceci nous donne l’espoir d’un concours empressé.
C’est par la publication des œuvres de nos mains, des récits de faits faciles à produire et à constater,
c’est en dohnant des méthodes simples et i\ la portée de tous, que nous allons commencer notre nouvelle carrière. Les imitateurs des œuvres que nous proclamons viendront nous apporter les récits de leurs travaux ; nous les publierons pour en encourager d’autres, afin de montrer que la propriété magnétique 6st commune A tous, et que qui veut faire du bien le peut sans beaucoup de travail.
Le magnétisme, comme agent physique,' doit d’abord être étudié. 11 est la base et la cause première de tous les phénomènes que nous aurons à examiner. Le somnambulisme viendra ensuite, avec la série si nombreuse de faits curieux autant qu’instructifs qui l'accompagnent.
C’est sous le point de vue physiologique et médical que nous envisageons ces découvertes; leur rapport avec les autres connaissances humaines ne sera pas non plus négligé. Nous classerons à part et laisserons môme de côté certains faits qui se dérobent trop à nos sens, tout ce qui, dans le domaine de la psychologie, peut être interprété d’une manière différente et devenir le sujet de discussions sans fruit pour le magnétisme proprement dit.
Nous essayerons de systématiser les faits physiques dü magnétisme, afin d’en faciliter l’application au traitement des maladies; et c’est en prouvant tout le bien que le magnétisme peut faire que nous amènerons les hommes à le pratiquer.
Nous rechercherons le magnétisme dans l’antiquité, nous parlerons des hommes qui en possédaient la connaissance, mais nous nous attacherons surtout aux contemporains. Nous ne laisserons passer aucun Fait
de quelque importance sans en parler et le rattacher à ce qui est déjà connu. Nous tâcherons enfin que notre journal soit le livre où s’inscriront les travaux de ceux qui propagent le magnétisme, et qu’il serve de tribune à toutes les opinions raisonnables. N’ayant pas la prétention d’imposer aux autres notre jugement sur les conséquences des faits, notre tolérance sur les opinions sera aussi grande que notre désir d’être utile. Nous ferons cependant nos observations sur ce qui nous paraîtra erroné ; mais nous laisserons les magnétiseurs adopter ce qu’ils croiront le plus conforme à une saine doctrine.
Nous devons pourtant ajouter que, le magnétisme étant un fait acquis à la science et au-dessus de tout doute, nous n'accepterons aucun mémoire ayant pour but de nier son existence.
La vérité, n’importe par quelle bouche ; le bien, n'importe par quelles mains.
Telle est notre devise.
Qu’on ne croie point que nous voulions matérialiser le magnétisme ; nous le voudrions que nous ne le pourrions pas; il participe de la vie et se sépare ainsi do toute force physique de la nature. Aucun corps ne peut l’isoler ni l’empêcher d’agir. Si c’est un fluide, c’est le plus subtil; il se transmet sans conducteur et peut agir à de grandes distances.
11 emporte avec lui le rudiment physique et moral de l’organisation d’où il est parti; comme une enveloppe indélébile, il ne s’en sépare pas, môme dans le corps d’autrui; il s’assimile à celui qui s’y trouve,
concourt avec lui à des aclos do la vie et se perd avec
lo temps.
Ces faits d’observation, que l’on ne doit jamais perdre de vue, rendront facile l’explication de certains phénomènes.
En donnant les règles d’une méthode magnétique rationnelle, nous tâcherons que celui qui voudra appliquer le magnétisme trouve dans ce journal des exemples à suivre, qu’il puisse répéter les expériences citées, et qu’enfin sa croyance, comme la nôtre, repose sur des certitudes toutes physiques. C’est ainsi que notre journal pourra devenir un manuel précieux pour les magnétistes.
Nous ne désirons pas la guerre avec les apôtres de la médecine classique, de la science dite exacte; mais, si nous sommes provoqués, nous examinerons les œuvres de nos antagonistes, nous les mettrons en regard des nôtres, et le public sera juge.
L’arme de la plaisanterie s’est émoussée; on ne peut plus s’en servir contre une vérité qui a grandi et est entrée dans le monde, présentée et soutenue par des autorités. Il faut en venir à reconnaître ce qu’on a nié. Ce retour sur son propre jugement est pénible, et l’on discutera encore sur la valeur des faits, on en contestera môme quelques-uns.... Mais pourquoi prévoir ainsi le mal? Nos adversaires, devenus plus justes et plus raisonnables, nous seconderont peut-être dans notre mission. Nous voulons le bien; s’ils le veulent également, nous n’avons rien à redouter.
EXTRAIT D’UN RAPPORT
Du Professeur EMOSER
IIBF.R DIE VURDE UND DEN STANDPÜNCKT DES MAGNETISME IN ONSERE ZE1T
Lu dani 1« cUim phyiico-nuihémaiique de l'Acadimic roy«le de Munich, le U uiars IMS.
« La raison pour laquelle le magnétisme n’a pas été généralement apprécié jusqu’à présent gît en partie dans sa nature même et dans la singularité des phénomènes qu’il présente, en partie aussi dans les rapports, le but et le degré du développement des études académiques. Mais si l’on considère maintenant le magnétisme commo un fait qu’on ne saurait nier, malgré toutes les résistances et toute l’opposition, cela n’est pas seulement dû à la répétition continuelle et à la publication des phénomènes qu’il présente, mais plutôt au développement général des connaissances humaines dans le temps où nous vivons, surtout dans les progrès prompts et extraordinaires des science» naturelles. C’est pourquoi l’existence du magnétisme, placé sous la protection générale de la science, est dorénavant assurée à jamais d’une manière fixe et inébranlable, et il a maintenant son appui, non-seule-
ment on soi-môme, mais encore dans la puissance universelle des forces vitales et do la science.
a Le magnétisme étant, pour ainsi dire, le développement organique des forces implantées ù la nature humaine, il n’est nullement nouveau selon son essence, et on peut historiquement faire voir ses phénomènes dans tous les siècles, comme de même il n’y a nul besoin de nouvelles lois explicatives, ses phénomènes ne se présentant que quelquefois sous des formes inusitées et ne faisant voir aucune qualité qui serait étrangère à la nature do l’homme.
« La nouvelle doctrine appartiendra par conséquent au domaine do la physiologie en général, et quant aux phénomènes moins connus du somnambulisme, à celui de la psychologie. Et dans cet ordre de choses , le magnétisme deviendra surtout un moyen ex-plicatifnon-seulement de bien des énigmes considérées jusqu’à présent comme inexplicables (comme, par exemple, différentes maladies), mais plus encore par rapport à la sphère intérieure et mystique du sommeil et des songes , où la nature poétique de l’homme joue de sa cachette son rôle magique de tant de différentes manières.
«Le magnétisme viendra, sous ce rapport, à l’aide de l’historiographe et de la critique de l’histoire, et expliquera ces phénomènes mystérieux qu’on a considérés comme fables et comme égarements de périodes entières de l’histoire. Sous le rapport médical le magnétisme se qualifie, non pas à rejeter et à rendre superflues les différentes méthodes, souvent en opposition l’une à l’autre, mais ù les rapprocher et A les concilier entre elles.
« Comme la nature élevée de l'homme perce lumineusement dans les phénomènes du magnétisme de mainte luron, que le magnétisme d’ailleurs est digne sous tous les rapports qu’on lui prodigue des soins particuliers, il s’y rencontre aussi des abîmes qui peuvent mettre en danger le pilote inexpérimenté s'il ne sait conduire sa barque d’une main assurée. Il en résulte la grande question s’il n’est pas temps qu’enfin le zèle qui se manifeste généralement pour le développement et les progrès de la culture et de l’instruction vise aux moyens d’organiser dans les établissements publics de l’instruction publique des cours de l’étude théorique et pratique du magnétisme. »
M. LE BARON DU POTET A SES ÉLÈVES.
Mes chers Élèves,
Ma pensée se porte souvent sur vous, et je me rappelle les faits qui servirent à votre éducation magnétique. Je n’oublie point non plus qu’enflammés d’un zèle ardent pour la vérité, dont je venais de vous rendre dépositaires, vous formiez des vœux pour le succès de votre maître et encouragiez ses travaux par des marques nombreuses de votre sympathie.
Vos efforts et les miens ont puissamment contribué à agir sur l’opinion. Le magnétisme aujourd’hui est reconnu par la masse éclairée de la nation. Partout nous avons des représentantsde nos idées, et s’il existe des incrédules, c’est que ceux-ci n’ont point voulu se convaincre, car les faits se sont produits par milliers autour d’eux.
Laisseriez-vous votre ouvrage et le mien imparfait? Voudrez-vous que les phénomènes que vous avez produits retombent dans l’oubli, et que les matériaux que la science réclame soient à jamais perdus?
J’augure mieux des sentiments qui vous animent.
Vous voudrez, comme votre maître, publier les œuvres que vous avez produits , les faits qui servirent à baser votre croyance et le bien que vous avez fait. Un recueil special, sous la forme d’un journal, s’offre ù nous aujourd’hui pour seconder nos efforts et publier les résultats de nos investigations dans le domaine d’une science encore peu connue. Si vous acceptez ce concours que je désire, l’humanité vous devra des remerciements, car c’cst sa cause que nous plaidons. Moi, j’aurai parla contracté de nouveaux engagements avec vous, ceux de vous guider encore, autant que vous m’en croirez capable, dans cette carrière nouvelle.
Mes chers élèves, recevez l’assurance do mon estime et de mon dévouement bien sincères,
Baron Du Potet.
Btrlia, 2 décembre 1844.
AVIS DU DIRECTEUR
Beaucoup de revues et do journaux traitant du magnétisme ont déjà existé ; iis sont morts après une courte carrière en laissant toutefois des matériaux précieux pour l’histoire du magnétisme. Tous ces journaux ou recueils de pièces, malgré leur utilité incontestable, n’ont pu vivre qu’un certain temps; ceux qui les dirigeaient n’étaient sans doute point pénétrés de cette vérité : c’est que la durée d’un journal scientifique est en raison des faits nouveaux qu’il publie et du progrès qui en résulte. Il faut qu’il se rajeunisse chaque jour, qu’il ne retourne dans le passé que pour en conserver la mémoire, et non pour y prendre un point d’appui et s’y fixer. Sans cela, le lecteur se fatigue de cette lecture qui n’est qu’un accessoire qu’il regarde comme inutile, et dont, à la rigueur, il peut en effet se passer. Ce qu’il demande, ce qu’il exige même, ce sont des idées neuves, des fuits qui lui apprennent que la science fait chaque jour un nouveau pas en avant, qu’à des hommes remplis d’ardeur, que le temps, dans sa course rapide, a emportés, ont succédé de nouveaux champions de 1& vérité, animés du même esprit, mais ayant des coa-
naissances pratiques plus étendues, qui prouvent manifestement que la limite a été franchie.
Nous nous posons hardiment comme un de ces nouveaux hommes, et, quoique plein de reconnaissance pour nos anciens maîtres, et rendant justice à leur mérite et à leur vertu, nous disons aujourd’hui que l'on peut mieux faire qu’ils ne firent, et établir des principes plus certains.
Nous croyons que le temps nous a dévolu cette tâche; nous la remplirons avec zèle et courage, persuadé qu’il nous faut moins d’esprit qu’une grande simplicité de pensée ; nous puiserons en nous-même et dans lesœuvres que nous produisons les arguments et les faits qui doivent convaincre que l’orgueil n’entre pour rien dans le jugement que nous portons de notre personne. Tout prêt à reconnaître la supériorité de celui qui a fait ou qui fera mieux que nous en magnétisme, nous avouerons sans honte notre faiblesse. La supériorité d’autres hommes, lorsqu’elle nous sera démontrée, sera avouée et prononcée par notre bouche. C’est ainsi que nous prouverons que nous ne sommes animé que par de nobles passions : l’amour de la science et celui du bien public.
Pour nous juger, il faut donc attendre que nous ayons mis sous les yeux de tous les pièces qui prouvent que nous avons travaillé rudement dans le champ de la science magnétique et l’avons arrosé de nos sueurs. Il faut que le lecteur examine le grain que nous avons récolté, qu’il le compare à celui que lui offriront d’autres magnétiseurs, qu’il essaie notre méthode d’expérimentation; alors, seulement alors, il pourra recononitre de quel côté il doit faire pencher
la balance et accorder son tribut de reconnaissance.
Nous attendrons avec confiance son jugement ; s'il nous est défavorable, nous publierons notre défaite, et, sans pourtant cesser de magnétiser, nous chercherons la vérité, la lumière où l’auront trouvée nos heureux compétiteurs ; nous accepterons leurs règles, cl, après avoir enseigné comme maître, nous deviendrons le plus docile des écoliers.
Par un exposé clair et rapide, nous allons faire connaître nos procédés magnétiques, notre méthode; nous remplirons successivement dans cet ouvrage les lacunes que nous avons remarquées dans les traités sur le magnétisme.
Nous donnons à cette partie de notre travail le titre de Manuel du magnétiseur. Il est justifié par sa forme, et nous l’avions destiné à une publication à part. La création du Journal du Magnétisme a modifié nos idées à ce sujet. Nulle part ailleurs ce travail ne pouvait être mieux placé.
MANUEL DU MAGNÉTISEUR.
IL EXISTE UNE FORCE PHYSIQUE QU’ON APPELLE MAGNÉTISME.
SON ACTION EST CURATIVE.
CETTE FORCE EST SUSCEPTIBLE D’UNE APPLICATION RIGOUREUSE AU TRAITEMENT DES MALADIES.
Sans rechercher quel est celui qui a découvert l’agent dont nous poursuivons l’étude, sans parler des obstacles qu’il a rencontrés auprès des corps savants , voici, sans préambule, les faits physiques qui prouvent d’une manière positive et inattaquable l'existence de l’agent qu’on appelle communément magnétisme animal.
Première expérience.
Me prenant moi-même pour une machine magnétique , et agissant en vertu des propriétés que je possède, je produis, f/uand je veux, devant les plus incrédules, comme dans le silence et loin de tous, les phénomènes physiques qui suivent. Ce sont les plus concluants, car ils sont indépendants de toutes causes
étrangères et de toutes forces connues jusqu’à oe jour.
ACTION SUR DES ENFANTS ENDORMIS.
Il n’est aucun enfant endormi qui, magnétisé durant cinq ou dix minutes au plus , ne manifeste suffisamment le changement qui s’opère dans l’état habituel do son existence.
Pour obtenir ce changement voici comment je procède :
Je me place à un pied de distance environ de celui que jo veux impressionner. Je dirige mes mains sur toute la surface du corps, sans déranger les couvertures ou linges qui recouvrent l’enfant; puis, cessant mes mouvements, et approchant un seul de mes doigts d’une surface nue ou recouverte, et sans contact aucun, je détermine dans les muscles de cette partie de légères contractions. Des mouvements se manifestent dans les doigts si c’est la main que j’aotionne, et souvent môme tout le corps éprouve les effets de ce commencement de magnétisation.
Si j’ai choisi la poitrine comme point d’expérience, la respiration devient laborieuse ; la gêne commence sans que les contractions déjà signalées cessent de se manifester par instants.
Si je dirige sur la tète la force que je suppose en moi, le sommeil devient plus intense.
En insistant davantage sur la surface totale du corps, des phénomènes qui ressemblent à do légères décharges électriques ne tardent pas à se produire
visiblement, indubitablement, et l’enfant se réveille par l’agitation qu’il éprouve.
Ceci fait, je le laisse retomber dans son état de repos, et, m’éloignant à cinq ou dix pas, je reproduis la même chose en me servant des mêmes procédés.
Et, pour plus de certitude, si je place un corps opaque entre moi et l’enfant endormi, l’effet n’est en rien modifié.
Cette force, ainsi mise à découvert, ne peut plus être contestée. Néanmoins, voyons d’autres preuves.
Deuxième expérience,
ACTION SUR DES HOMMES ENDORMIS.
Le système nerveux d’un enfant pouvant être impressionnable et impressionné par des agents d’une faible puissance, essayons sur des hommes placés dans les mêmes circonstances, c’est-à-dire en état de sommeil naturel.
Je trouve qu’il n’en est encore aucun qui n’éprouve, presque dans le môme laps de temps, des phénomènes absolument identiques, c’est-à-dire trismus des muscles, secousses, gêne dans la respiration, sommeil plus profond ou réveil.
Dans l’état d’ivresse les mêmes phénomènes ont lieu.
Dans la syncope, la même chose. Cela ne suffit pas encore, suivons.
ACTION SUR DES ANIMAUX.
Lo chat,le chien, le singe, le cheval même, quel’on devrait supposer plus difficile à émouvoir à cause de sa masse relative, est sensible, et son système nerveux s’émcut au bout d’un instant d'action.
Je suppose ici que tous ceux qui voudront s’assurer du fait en cherchant à le produire eux-mêmes sauront magnétiser.
Quatrième expérience.
ACTION SUR DES MAGNÉTISÉS.
Souvent, pour m’assurer du sommeil de personnes qui me disaient être en état de somnambulisme, il m’est arrivé de diriger sur elles une de mes extrémités sans but apparent, niais intérieurement animé du désir d’exciter leur système nerveux. Eh bien , elles sentaient mon action , m’avertissaient que je les magnétisais, et éprouvaient des contractions ou des secousses qui du reste ne laissaient aucun doute.
Il en était absolument de même lorsque, me tournant le dos et causant avec d’autres personnes en rapport avec elles, j’agissais avec la môme intention, et que, par ma volonté, je chassais au dehors la force agissante venant de mes organes.
Ai-je été la dupe de mon imagination ? Mes sens ne m’ont-il point trompé? Non, car je puis, àloule heuie,
répéter ces expériences. Je me souviens même d'avoir plusieurs fois, le magnétisme étant nié devant moi par des autorités de la science, mis en doute, pour un instant, mes propres résultats. Jo recommençais avec plus de soin , plus de méfiance, et les mômes phénomènes physiques venaient de nouveau éclairer mon esprit. Rarement j’ai rencontré quelque être humain en état de sommeil naturel sans essayer aussitôt l’action du magnétisme , et, dans plus de mille expériences de ce genre que j'ai faites en ma vie, les phénomènes nerveux ont apparu de la même manière.
Voici au reste une expérience qui les résume toutes. Je la tire du rapport fait à Y Académie de Médecine en 1831, par le docteur Husson :
« C’est principalement sur M. Petit, âgé de trente-deux ans, instituteur à Athis, que les mouvements convulsifs ont été déterminés avec le plus de précision par l’approche des doigts du magnétiseur. M. Du Potet le présenta à la commission le 1G août 1826, en lui annonçant que M. Petit était très-susceptible d’entrer en somnambulisme, et que dans cet état, lui, M. Du Potet, pouvait, à sa volonté, et sans l’exprimer par la parole, par la seule approche de ses doigts, déterminer des mouvements convulsifs apparents. Il fut endormi très-promptement, et c’est alors que la commission , pour prévenir tout soupçon d’intelligence , remit à M. Du Potet une note rédigée en silence à l’instant même, et dans laquelle elle avait indiqué par écrit les parties qu’elle désirait qui entrassent en convulsion. Muni de cette instruction , il dirigea d’abord la main vers le poignet droit, qui entra en con-
vulsion ; il so pinça ensuite derrière le magnétisé et dirigea son doigt en premier lieu vers la cuisse gauche , puis vers le coude gauche, et enfin vers la tôte. Ces trois parties furent presque aussitôt prises de mouvements convulsifs. M. Du Potet dirigea sa jambe gauche vers celle du magnétisé; celui-ci s’agita de manière à ce qu’il fut sur le point de tomber. M. Du Potet dirigea ensuite son pied vers le coude droit de M. Petit, et ce coude droit s’agita; puis il porta son pied vers le coude et la main gauches, et des mouvements convulsifs très-forts se développèrent dans tous les membres supérieurs. Un des commissaires, M. Marc, dans l’intention de prévenir davantage encore toute espèce de supercherie, lui mit un bandeau sur les yeux, et les expériences précédentes furent répétées avec une légère différence dans les résultats!... MM. Thillaye ot Marc dirigèrent les doigts sur diverses parties du corps, et provoquèrent quelques mouvements convulsifs. Ainsi M. Petit a toujours eu, par l'approche des doigts, des mouvements convulsifs, soit qu’il ait eu ou qu’il n’ait pas eu un bandeau sur les yeux. »
Ces expériences étaient faites rue de Poitiers, dans le local même de l’Académie de Médecine.
Ces faits, quoique concluants, furent repris dans une autre séance pour obéir aux désirs des commissaires.
Voici comment le rapporteur s’exprime à leur sujet. Je passe sous silence toutes les expériences faites sur la vision.
« Pendant queM. Petit faisait une deuxième partie de piquet (en sommeil), M. Du Potet, sur l’invitation
de M. Ribes, dirigea par derrière la main sur son coude; la contraction précédemment observée eut lieu de nouveau. Puis, sur la proposition de M. Bour-dois, il le magnétisa par derrière, et toujours à un pied de distance, dans l’intention de l’éveiller. L’ardeur que le somnambule portait au jeu combattait cette action, et faisait que, sans le réveiller, elle le gênait et le contrariait. Il porta plusieurs fois la main derrière la tête comme s’il y souffrait. Il tomba enfin dans un assoupissement qui paraissait être un sommeil naturel assez léger; et quelqu’un lui ayant parlé dans cet état, il s’éveilla comme en sursaut. Peu d’instants après, M. Du Potet, toujours placé près de lui et à quelque distance, le plongea de nouveau dans le sommeil magnétique, et les expériences recommencèrent. M. Du Potet, désirant qu’il ne restât aucune ombre de doute sur la nature dune action physique exercée à volonté sur le somnambule, proposa de mettre à M. Petit tel nombre de bandeaux que l’on voudrait et d’agir sur lui dans cet état. On lui couvrit en effet la figure jusqu'aux narines avec plusieurs cravates, on tampona avec des gants la cavité formée par la proéminence du nez , cl on recouvrit le tout d’une cravate noire descendant en forme de voile jusqu’au cou. Alors on recommença de nouveau, et de toutes les manières, les essais d’action à distance, et constamment les mêmes mouvements se manifestèrent dans les parties vers lesquelles la main ou le pied étaient dirigés. »
(Rapport de l’académie.)
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Non; ils ont lieu sur les gens sains aussi bien que sur ceux qui souffrent, mais la condition pour qu’ils se produisent et se traduisent de la môme manière , c’est toujours le sommeil naturel. Entendez-vous bien? le sommeil ; cas qui détruit, anéantit toutes les explications qu’on a tenté de donner sur la cause de ces singuliers phénomènes: l'imagination, £ érotisme de la peau, la chaleur animale ai l’imitation. Dans ce cas aucune de ces causes ne peut être admise sans briser la raison. Mais nous avons bien d’autres faits; cet ouvrage en sera rempli.
Cinquième expérience.
ACTION SUR DES GENS BIEN PORTANTS.
Si je prends un être sain, bien éveillé, et que je le soumette à des expériences, fort ou faible physiquement, voici ce qu’il éprouvera.
Remarquons qu’ici les effets varient un peu parce que cet être est éveillé, que son imagination travaille, qu’il est dans des conditions où son corps ne peut obéir avec régularité à l’action d’un agent contrarié par une volonté souvent puissante, parce qu’enfin il n’y a plus passivité et que le magnétisme doit subir la loi de la plupart des agents de la nature, dont l’homme a, jusqu’à un certain point, la possibilité de contra» rier et souvent même de paralyser les effets.
Voyons néanmoins ce que l’on peut obtenir en laissant do côté les phénomènes si curieux d'attraction et de somnambulisme, quo nous retrouverons plus tard.
D’abord, le pouls augmente ou diminue d’intensité, malgré le repos du corps, car je suppose l’homme assis. Les pulsations ne restent pas au même degré; la chaleur varie, les yeux deviennent brillants; une exaltation de la sensibilité pourra survenir, comme aussi une prostration de forces, et souvent, à la fois, tous les phénomènes que nous avons observés sur des êtres endormis. Quelquefois même ces effets acquièrent un développement extraordinaire, ainsi qu’on en trouve un exemple dans le rapport du docteur Husson à l’Académie de Médecine en 1831.
« Une action magnétique plus prononcée a été observée sur un membre de la commission, M. Itard. Magnétisé par M. Du Potet, le 27 octobre 1827, il éprouva de l’appesantissement sans sommeil, un agacement prononcé des nerfs de la face, des mouvements convulsifs dans les ailos du nez, dans les muscles de la face et des mâchoires, un afflux dans la bouche d’une salive d’un goût métallique, sensation analogue à celle qu’il avait éprouvée par le galvanisme. »
Je me rappelle parfaitement que, vers la même époque, j’ai magnétisé au Val-de-Gràce un M. Desruelles, qui sentit les effets aussi vivement, si ce n’est davantage. Il était très-évcillé, et, avant mon expérience, il doutait aussi de l’existence de l’agent magnétique ; s’il doute encore, je pourrai renouveler l’expérience.
Lorsque vous n’ètos plus lù, et que le magnétisé, que je suppose de bonne foi et capable de bien observer, a dit n’avoir rien senti, ou seulement quelques effets obscurs, il arrive de l’insomnie ou un sommeil plus prononcé qu'habituellement, quelquefois aussi de l’exaltation ou expansion de la sensibilité morale.
Est-il des êtres qui no sentent absolument rien? Je ne le crois pas; car, ayant fait des expériences extrêmement nombreuses sur toutes sortes de gens, autant que j’ai pu le constater, quand le magnétisé assurait n’avoir rien senti, il se trouvait cependant dans la condition de quelqu’un qui, ayant bu une dose do vin qui ne l’a pas grisé, affirme que le vin ne lui produit aucun effet.
Des sécrétions abondantes et inaccoutumées viennent constater l’action du magnétisme, et même, sans cela, le physiologiste pourrait constater un grand nombre d’effets résultant d’une cause légère en apparence.
Le magnétiseur est dans le même cas : il peut constater l’augmentation ou la diminution du travail intérieur. Bien plus, j’ai vu apparaître presque subitement, à la suite de mes expériences, des affections de la peau qui n’attendaient, sans doute, pour se manifester, qu’un excitant de la sensibilité.
J’ai vu le même fait se reproduire sur quelques-uns des enfants que j’ayais magnétisés pendant leur som-
meil, et, je dois le dire, ces affections ont été toutes bénignes. La rougeole, des varioles même ont ainsi apparu, et ce n’est que la répétition de ce curieux phénomène qui m’y a fait croire, quoique dans le principe les parents se fussent aperçus que le magnétisme avait été la cause du développement subit de ces affections et m'en eussent fait part.
L’incrédulité empêche-t-elle la manifestation des phénomènes? Je n’ai jamais de ma vie tenu compte de cette disposition morale de la part de ceux que je magnétisais. Je laregarde comme ridicule; car, pour moi. nier le magnétisme était comme si l’on eût nié la lumière en plein midi.
Sixième expérience.
ACTION SUR DES MALADES.
Ici, je dois m’étendre davantage, car le but de cet ouvrage est de le rendre non-seulement utile en donnant les moyens de soulager ceux qui souffrent, et en enseignant à en guérir un bon nombre, mais encore d’établir matériellement la preuve que notre agent physique est la cause réelle des guérisons et des effets qui se produisent.
Nous allons mettre sous vos yeux l’ensemble de ces phénomènes, comme si nous les voyions sur un seul malade; puis, plus tard, nous essayerons de dire ce qui est propre à chacun d’eux en particulier, ce que nous avons observé enfin dans les cas de maladies que nous avons eu à traiter. Mous croyons que c’est là la seule
marche rationnelle. Disons d’abord qu’il n’est pas facile de constater l’action magnétique lorqu’elle est douce et tempérée, lorsqu’elle est exercée par un être faible,iorsqu’enfin la nature dirige d'elle-méme cette force sur les solides au lieu de la porter sur le système nerveux, ou bien encore lorsqu’on traite une maladie très-aiguë ou une affection chronique très-ancienne.
Avant d’aller plus loin, i! est essentiel de dire quels sont les procédés pour expérimenter, quels sont les principes qui nous dirigent.
MÉTHODE MAGNÉTIQUE.
Lorsque le malade peut s’asseoir, nous le plaçons sur un siège et nous nous mettons en face de lui, sans le toucher; plus tard on saura pourquoi. Nous nous asseyons et tâchons toujours d’être un peu plus élevé que lui, pour que les mouvements que nous avons à faire ne deviennent pas trop fatigants.
Lorsque le malade est couché, nous nous tenons debout près de son lit et l’engageons à se rapprocher de nous autant que possible. Ces conditions remplies, nous nous recueillons un instant et nous considérons le malade. Lorsque nous jugeons que nous avons la tranquillité d’esprit désirable, nous portons une de nos mains, les doigts légèrement écartés et sans être tendus et roides, vers la tète du malade, et, suivant à peu près une ligne droite, nous la descendons ainsi jusqu’au bassin, et, répétant ce mouvement d’une manière identique pendant un quart d’heure environ, nous expeetons avec soin quels sont les phénomènes qui se développent.
Notre pensée est active, niais n’a encore qu’un but : celui d’arriver à pénétrer les parties sur lesquelles nous promenons nos extrémités (car il est essentiel, lorsqu’un bras est fatigué, de se servir de l’autre) de cette émission d'un fluide que nous supposons partir de nos nerfs et suivre le trajet du conducteur naturel, le bras, et par suite les doigts.
Si les effets qui résultent ordinairement de cette pratique n’ont pas eu lieu promptement, nous nous reposons un peu, car nous avons remarqué que la machine magnétique humaine ne fournit pas d’une manière continue et selon notre volonté la force que nous exigeons d’elle. Après cinq ou dix minutes de repos, nous recommençons les mouvements de nos mains comme précédemment pendant un nouveau quart d’heure, et nous cessons tout à fait, pensant que le corps du malade est suffisamment saturé du fluide que nous supposons avoir émis.
Cette pratique si simple, si facile à suivre, si inoffensive en apparence, fournit pourtant la matière des plus grands résultats.
Commençons par la description des effets moindres.
ACTION DU MAGNÉTISME DANS LES AFFECTIONS CHRONIQUES
ANCIENNES, SYSTÈME NERVEUX PEU 1MPRESSIOSNABLE.
Premiers effets :
Légère chaleur, respiration plus marquée, yeux plus animés, sentiment de bien-être inaccoutumé, pandiculation, bâillement, réveil de douleurs anciennes, calme de celles présentes, qui, quelquefois,
cependant, s’exaltent, mais c’est le plus rarement; besoin d’expectorer, s’il y a quelque altération dans la poitrine; envie d’uriner, disposition au sommeil; s'il y a un émonctoire, le malade y sent des picotements et de la démangeaison; s’il y a eu dans les membres quelque fracture ancienne, une solution de continuité, il peut constater en cet endroit un travail singulier; il y sent quelque chose qui lui rappelle lo dérangement dont ces parties ont été le siège et les souffrances qu’il y a endurées.
Quelquefois la peau devient moite, les extrémités brûlantes, la salive abondante ; dans d’autre cas c’est le besoin de boire que le malade éprouve.
Nous avertissons ici que le malade que nous prenons avant l’opération ne ressentait rien de tous les symptômes d’actions que nous décrivons.
Tout cesse bientôt après l’opération magnétique, et le patient retombe dans son état habituel jusqu'à ce qu’une nouvelle magnétisation soit pratiquée.
Quelquefois l’action du magnétisme augmente le mal et replace l’individu qui y est soumis dans l’état aigu; c’est le plus favorable des symptômes. Souvent aussi les effets diminuent et la réaction, que vous avez cherché à opérer et que vous aviez commencée ne se continue pas; vous ne pouvez plus même reproduire lo sentiment des premiers effets.
Si la nature refuse de vous suivre et de vous seconder, le malade est incurable par vos procédés. Mais, avant de déclarer qu’il en est ainsi, vous devez répéter vos tentatives, car la nature est souvent paresseuse et a besoin d’être stimulée. Ces cas se présentent surtout lorsque vous avez à faire à des mala-
des qui ont épuisé toutes les ressources, ceux sur qui l’art a fait tous ses essais, en cherchant, comme vous, les réactions nécessaires. En épuisant les moyens on a aussi fatigué les organes ; celui qui veillait à leur conservation s’est lassé, et il ne répond plus aux nouveaux appels que vous lui faites. Ici pourtant, phénomène singulier, il s’aperçoit que c’est son analogue, que c’est un ami, un frère, qui est entré dans son domaine ; il ne s’insurge pas contre lui, ne cherche point à le repousser comme il l’a fait pour l’agent contraire qu’un médecin mal inspiré a pu introduire dans la circulation. Mais souvent ce principe de conservation n'est pas assez puissant pour seconder vos efforts ; il laisse faire alors, et c’est à vous seul qu’il confie la réparation de la machine; il garde ce qu’il a de forces pour entretenirlc mouvement et la vie, car quelquefois il est môme insuffisant pour ce travail de tous les instants.
Lorsque vous êtes parvenu à introduire assez de richesse et qu’il peut vous seconder, il se lie avec vous, devient votre auxiliaire, et, si la maladie est curable, il prend alors la direction des travaux. Il attend avec impatience l’heure à laquelle vous devez venir lui donner des matériaux essentiels; il cesse sa besogne si vous ne venez pas, et le malade éprouve l’inquiétude d’un besoin qui n’est pas satisfait.
Ces deux forces, bien différentes des forces mortes, comme l’électricité, le galvanisme, l’aimant ou magnétisme minéral, etc., etc., sont intelligentes ; elles s’allient pour marcher en commun. AinsiJe magnétisme animal ne s’enfuit pas du corps où vous l’avez
déposé ; il y reste, au contraire, pour servir aux opérations de la vie.
Le magnétiseur, ici, a déjà besoin de connaître son outil, car il peut, sans le savoir, contrarier la nature en voulant l’aider. Ailleurs nous développerons nos idées sur cette vérité.
ACTION DU MAGNÉTISME DANS LES AFFECTIONS AIGUËS.
Effets complexes :
Dans ces cas, les effets varient à l’infini et cela dépend : du genre d’affection, de la gravité du mal, des remèdes déjà pris et du moment que vous avez choisi pour agir; car le mal change souvent dans cette tourmente du corps, où rien ne reste pacifique et où chaque organe participe plus ou moins , bien que, dans certains cas, on ne soit atteint que d’un mal local.
Ce que je regarde comme un des plus grands bienfaits du magnétisme et qui sera considéré de même par la suite, c’est la propriété qu’il possède, en vertu de son action, de faire cesser immédiatement les affections secondaires ou sympathiques. Je me hâte de le dire, car je l’ai vu tant de fois produire ce résultat que ma conviction est entière, complète et n’aura jamais besoin de nouvelles preuves.
Prenant donc un malade comme type, car il n’est pas encore question du traitement des maladies ni de l’action thérapeutique du magnétisme, mais seulement du rôle qu’il joue comme agent physique sur les malades, voici la description des effets quel’o.n PEUT CONSTATER.
Si la circulation est accélérée, le pouls petit, irrégulier, la circulation diminue d’intensité; le pouls devient plus plein, moins fréquent, ne serait-ce que pour peu de minutes. La peau sèche cesse de l’être, mais pour un instant aussi. S’il y a des vomissements, ils peuvent s’arrêter ; le sommeil peut venir également lorsque le malade n’en éprouvait pas le moindre symptôme; mais si c’est du sorqmeil sans somnambulisme, il cesse aussitôt que vos forces diminuent.
Je sens combien il est difficile do suivre une description semblable. Il faut ici, plus qu’ailleurs, savoir bien distinguer le produit de la maladie et du travail naturel qui se fait dans l’organisation de celui de votre agent qui se confond avec le tout et souvent lorsque ses effets sont dominés par do plus puissants. Aussi, pour plus de clarté et de certitude, nous allons laisser la maladie se caractériser et la prendre ensuite lorsqu’elle a un nom. Notre marche sera plus assurée. On sait d’ailleurs que le magnétisme a été bien rarement employé au début des maladies graves; ce n’est jusqu’ici qu’à la fin et lorsqu’il n’y eut plus d’espoir qu’on essaya de ce moyen. Je n’ai moi-même que peu de fois dans ma vie pu précéder tout médecin.
FIÈVRE ATAXIQl'E.
Dans un cas où cette maladie avait parcouru ses périodes, je magnétisai pour ma propre instruction, pour essayer, et voici ce qui arriva :
Le malade était sans connaissance ; ses membres étaient d’une roideur extrême (il était au quatorzième jour de sa maladie). Ces symptômes alarmants étaient survenus a la suite d’un délire de plusieurs jours et d’une hémorrhagie considérable. La langue, les dents, les lèvres étaient couvertes d’une espèce d’enduit couenneux qui s’étendait jusque dans la gorge. La respiration était râleuse et fréquente, les yeuX vitreux, et les paupières ne s’abaissaient plus. Si le besoin de boire se faisait sentir, il était de toute impossibilité de le satisfaire â cause de l’enduit qui remplissait la bouche et l’arrière-bouche. Je magnétisais ce malade sans espoir de le guérir, comme je l’ai dit, pour expérimenter. Et quel ne fut pas mon étonnement? Ses yeux devinrent mobiles; il reprit connaissance ; nous Je vîmes mouvoir sa main, la porter à ses lèvres, arracher avec ses doigts les mucosités épaisses qui tapissaient sa bouche. Il demanda à boire, on lui en donna et le liquide passa. Une demi-heure de magnétisation avait suffi pour produire ces phénomènes. Je ne magnétisai que cette seule fois ce malade, qui succomba trois jours après.
AUTRE CAS.
Une jeune fdle appartenant à une honnête famille fut affectée d’une fièvre à peu près semblable. Je la vis avec son médecin, le docteur Desprcz ; comme il avait déclaré qu’il n’y avait plus d’espoir, je le tourmentai pour qu’il me la laissât magnétiser; il y consentit et les parents aussi. Le fait observé plus haut
se renouvela; elle arracha les mucosités de sa bouche, elle qui un instant avant était sans connaissance, elle but aussi, ce qui n’avait plus lieu depuis longtemps. Elle sentit vivement les parties sur lesquelles on avait appliqué de la moutarde et des vé-sicatoires, quoique avant ces parties fussent complètement insensibles. Je la laissai dans l’état que je viens de décrire. Mais bientôt après elle reperdit connaissance et retomba dans l’état où je l’avais trouvée. J’y allai de nouveau, la remagnétisai et obtins le retour des heureux symptômes. Encouragé de ce succès, je ne la quittai plus, et dès Je second jour on avait le plus grand espoir de la sauver par le moyen que j’employais. Elle guérit enfin. Il y a bien longtemps de cela, je l’ai perdue de vue; mais les parents doivent avoir, comme moi, conservé le souvenir du succès de mes heureux efforts. Quant au médecin, il était ravi et proclamait partout que cette jeune fille me devait la vie.
FIÈVRE MUQUEUSE INFLAMMATOIRE.
La comtesse de R... avait été atteinte d’une fièvre que les médecins nommèrent ainsi.
Depuis soixante jours au moins pas une seule gar-derobe en dépit de tous les remèdes employés ; pas un instant de sommeil malgré toutes les compositions soporeuscs.
La bouche était sèche, ulcérée, ainsi que la langue ; l’abdomen ballonné, chaleur sèche et âcroà la peau.
Je la magnétisai dans cet état. Ehabien, la nuit qui
suivit, elle eut quatre heures de bon sommeil et le matin deux selles. On la croyait sauvée, je l’espérais aussi; mais ses médecins (ils étaient cinq), n'ayant pas été prévenus de l’essai que j’avais fait, crurent que la nature seule était cause de ce changement heureux et voulurent l'aider. Ils administrèrent deux onces d’huiles de ricin et une tisane pour en favoriser l’effet. Le bien produit s’effaça rapidement; cependant je la magnétisai encore deux fois, mais c’était dès lors sans espoir. Je nje retirai, et cinq ou sixjours après j’appris que la malade était morte.
Je borne ici ces citations qu’il me serait facile de multiplier. Mais ces trois cas suffisent pour montrer les effets évidents de l’action physique que le magnétisme exerce sur les malades. Passons à son application thérapeutique.
COMMENT ON DOIT MAGNÉTISER DANS LES CAS EXTRÊMES.
Vos efforts de volonté doivent être puissants, prolongés, pour être efficaces. Il faut diriger voire action sur l’abdomen, ne magnétisor le cerveau et la poitrine que secondairement; tenir votre main sur ou en face de l’estomac le plus que vous pourrez. Cherchez, si vous avez des connaissances en médecine, l’organe principalement affecté et dirigez vos doigts en pointes sur sa surface lorsque vous l’aurez découvert.
Une magnétisation fait ordinairement peu do chose dansles affections aiguës; ce n’est que dans le commencement qn’on peut les enrayer en changeant les
symptômes par quelques heures de magnétisation. Mais maintenant que vous voulez voir plus que des effets curieux, il vous faut prolonger, répéter môme à de courts intervalles l’emploi du magnétisme. Soyez certain que, quelle que soit la gravité du mal, si une crise est possible elle aura lieu , et, si la nature a cherché ù la produire et n’y soit point parvenue, aidée de vous elle cherchera de nouveau à se débarrasser de ce qui l’opprime.
N’attendez pas qu’il y ait gangrène des intestins, que des organes soient détruits ou altérés profondément dans les tissus qui les constituent : le mal ainsi fait est irréparable.
(La suite au prochain numéro.)
TOÜT N’EST PAS PROFIT
DANS LA RECHERCHE DE LA VÉRITÉ.
Peu de temps après mon arrivée dans une ville étrangère, on vint me prier de venir magnétiser dans une maison un jeune homme qui, tous les soirs, tombait dans une espèce de somnambulisme extatique. Ces nuits se passaient sans que l’on osât l’interrompre, bien qu’il dépérissait à vue d’œil; cependant ce sommeil paraissait moralement lui être favorable. Il avait alors plus d’esprit; ses discours, remplis d’images, charmaient tous ceux qui les entendaient. Lorsqu’il prenait un violon, c’était le génie de la musique
qui semblait s’étrc emparé de l’instrument, tant les sons étaient ravissants, tant ses improvisations étaient supérieures à celles des plus grands artistes !
Des médecins avaient été consultés, mais leurs remèdes n’avaient point eu d’efficacité. Les accès continuaient ; d’ailleurs il en désirait ardemment le retour, car il s’y complaisait, chaque fois leur terminaison lui laissant une espèce de béatitude inexprimable. Lorsque je vis ce jeune homme pour la première fois, il était éveillé, et je lui parlai du magnétisme, cherchant ainsi à l’amener à en subir les effets sans surprise. Il ne voulut pas consentir à l’essai que je lui proposai, tant sa crainte d'être guéri était grande. Mais la famille, de plus en plus inquiète, vint de nouveau me prier de le magnétiser pendant son extase. J’y consentis, sachant que je faisais mal, car il m’avait repoussé; il était homme et libre, je n’avais nul droit sur sa personne.
J’y allai cependant. J’avais recommandé de ne m’in -troduire près de lui que lorsque son sommeil mystérieux serait complet, et que ses sens seraient entièrement fermés aux impressions extérieures.
Voici ce qui arriva :
Impatient de constater les phénomènes magnétiques, on n’attendit pas que le sommeil fût profond; on m’introduisit près de lui en me donnant l’assurance que la condition exigée par moi pour que j’entrasse existait déjà depuis quelque temps; mais cela n’était pas.
Je trouvai ce jeune homme couché sur un canapé, ayant les yeux ouverts, mais fixes; les muscles de la face dans un état de repos parfait; le pouls était petit,
fréquent ; il avait quelque chose de fébrile ; une sueur froide couvrait sa peau, et cc sommeil me parut si singulier, si différent de ce que j’avais vu jusqu’alors, que je ne pouvais m’empôcher de considérer celui qui le présentait. Je me mis en devoir de le magnétiser, sans m’approcher de lui, à la distance de trois pas environ ; mais, au bout de quelques instants, ce dormeur se leva ; je me reculai un peu pour lui laisser de la latitude et considérer ses mouvements. Il marcha dans ma direction, lentement, sans que sa physionomie changeât en rien. S’il était possible de faire marcher un mort, de le faire agir, et que cette scène se passât dans le silence et sans que le spectateur fût prévenu des moyens magiques qui auraient été employés, l’individu qui verrait cela serait impressionné singulièrement, comme je l’étais dans ce moment, et ne pourrait rendre les sensations qu’il aurait éprouvées. Je le vis donc avancer avec cette impassibilité automatique que je cherche à faire comprendre ; il vint près de moi et il allongea les bras pour s’assurer si c’était bien, en effet, l’objet qu’il cherchait ; je me laissai saisir par ces mains glacées, et cette espèce de spectre me repoussa doucement vers la porte par laquelle j’étais entré. Je cédai sans résistance; mais, lorsque j’y fus parvenu, je dégageai une de mes mains et la lui appliquai sur le front, en lui disant doucement : « Retournez à votre place, » et je le reconduisis ainsi comme il était venu, mais à reculons et toujours dans un état d’impassibilité que je n’avais vu de ma vie.
Je redoublai d’intention, voulant faire prédominer le somnambulisme magnétique sur cette espèce de
somnambulisme extatique et le faire ainsi parier sur lui-méme, espérant qu’il serait son médecin et pourrait facilement se guérir.
Quelques légers spasmes ne tardèrent point à se manifester; la mobilité de ses traits devint apparente, et, pour la première fois, il commença de parler. Je ne veux pas être magnétise, disait-il ; je ne veux pas être guéri. Allez-vous-en, monsieur. Les parents m’incitèrent à continuer, malgré mon peu d’envie; mais je recommençai de nouveau à le magnétiser sans geste, mentalement et à la distance de cinq pas. Il se leva plus promptenientque la première fois, et se dirigeasur moi sans hésitation, et, comme je restai immobile, il me saisit et me repoussa brusquement du côté de la porte. Je cherchai à me défendre doucement et lui parlai avec calme, cherchant ainsi à agir sur sa raison. Il s’irrita de mon insistance, et sa colère, bien que je nelemagnétisasse plus, devint d’une extrême violence. Il n’était pourtant point éveillé. Il brisa d’abord de petits meubles qui étaient à sa portée, et, comme je voulus l’en empêcher, il saisit une table assez grande, la mit en morceaux avec une facilité surprenante, puis en choisit un des pieds et vint sur moi pour m’en frapper. Ses coups étaient dirigés avec beaucoup d’adresse et une force terrible ; je les évitai d’abord, mais son insistance me fit bien voir qu’il en voulait à ma vie. Je n’avais pas la ressource d’attaquer à mon tour celui qui me traitait en ennemi.
Ses parents, ses amis, comme de braves gens, avaient fui, et, reculant moi-même, je gagnai la porte, étant assez heureux pour pouvoir la fermer sur lui. Sa voix devint terrible et menaçante, ses imprécations
celles d’un homme en délire ! La porte, fermée à clef, céda à ses premiers efforts, tant ils étaient violents. Une seconde porte, fermée de môme, s’ouvrit en un instant; aucune personne ne venait à mon secours , bien qu'il n’en voulût qu’à moi seul. L’obscurité et le grand nombre de pièces que j’avais à traverser n’étaient point un obstacle pour cet être singulier ; il suivait mes traces comme l'eût fait un chien , et les portes fermées semblaient s’ouvrir d’elles-mômes. Je n’ava s plus qu’une chambre à traverser pour être en sûretc, elle donnait sur l’escalier dérobé par où j’étais monté; la clef qui en ouvrait l’entrée se trouvait au dehors et nul moyen de l’ouvrir n’était à ma disposition. La redoutable voix arrivait toujours dans ma direction. Il n’y avait plus moyen d'échapper; je devais songer à défendre ma vie.
Ma position était doublement critique; je ne pouvais à mon tour devenir l’agresseur : dans aucun cas semblable on no doit y penser. J’avais d’ailleurs perdu la seule ressource que je possédais, celle d’anéantir ses facultés motrices, et cela en temps opportun. J’avoue que, resté seul avec lui, dès le premier moment de son exaltation, des scrupules me vinrent. La fuite de tous avait fait apparaître des craintes eu mon esprit, non sur le danger que je courais, car j’aurais pu m’y soustraire d’abord en abandonnant à lui-méme ce fou, mais sur la responsabilité qui pouvait m’atteindre. Il était homme et libre ; il n’avait pas voulu consentir à être magnétisé, sa santé le touchait peu. J’étais donc dans mon tort, et je n’eus pas dû écouter les conseils de la famille.
Toutes ces réflexions, je les lis rapidement et bien
d’autres encore ! Mais lo cours en fut interrompu par la présence de mon redoutable adversaire, qui, arme de son espèce de levier, commençait à frapper sur moi, en visant à la tète. Mes fuyards arrivèrent à la lin, non de face, mais par derrière, pour ne courir aucun risque. Ils avaient traversé la cour et monté l’escalier pour m’ouvrir cette fatale porte. Je pus gagner ainsi la rue. La colère de cet enragé, calmée un instant par ma disparition, reprit avec plus de force, et de loin j’entendais le rugissement du lion. C’est ému de pitié et non rempli de courroux que je m’éloignais; j’avais bien quelques contusions, car je n’avais pas pu parer tous les coups; mais je devais cependant me féliciter : je venais d’échapper à un péril certain.
J’appris quelque temps après qu’il s’était calmé une demi-heure après mon départ et qu’il fut deux semaines sans avoir d’accès de son somnambulisme, ce qu’il regrettait inCniment. Enfin ils revinrent et présentèrent à peu près le môme caractère. A la longue ces accès ont amené la faiblesse du cerveau et une espèce d’hébétement, trop faciles à prévoir. J’ai soupçonné depuis que cet homme faisait usage de préparations narcotiques, car l’action du magnétisme, si certaine et si efficace dans les cas de ce genre, mais naturels, n’avait pas produit d’abord ce que je devais en attendre.
C’était le cas de m’écrier, en sortant de chez ce forcené : Qu’allais-je faire dans cette maudite galère ! Mais le médecin va bien au milieu des fous et des pestiférés. Un missionnaire va bien, pour convertir à sa foi des infidèles, braver tous les dangers. Lors-
qu’on est clans le péril, il n’est pas temps de s’occuper des causes qui vous y ont conduit; c’est à l’éviter que l’on doit alors songer. On sait après si l’on n quelque courage. Se connait-on jamais sans épreuves ?
Je pourrais ici vous entretenir de cas non moins graves. Le docteur Pigeoire en cite un dans son ouvrage, où le magnétiseur courut aussi des dangers (il magnétisait un aliéné). Mais ils ne doivent point empêcher de faire des tentatives pour sauver un malheureux. L’homme qui se jette à l’eau pour retirer un infortuné qui se noie, celui qui pénètre dans une maison incendiée ne courent-ils pas aussi des dangers l’un et l’autre? La crainte ne pénètre point au cœur de celui qui veut faire le bien. Elle n’agit point non plus sur l’esprit de celui qui veut découvrir l’inconnu. Aujourd’hui même encore, pour revoir une pareille scène, je m’exposerais aux mêmes dangers ; j’en saisirais les principaux traits qui m’ont échappé, et peut-être serais-je assez heureux pour pouvoir les rendre à mes lecteurs, ce qui m’est impossible à présent, tant ce que j’ai vu a la forme d’un rêve.
Sl-Pétersbourg, 15 janvier 1843.
Baron Du Potet.
1-e prochain numéro contiendra un mémoire inédit, écrit de la main même de Mesmer.
Le Propriétaire-Gérant, HÉBERT.
JOURNAL
DU
MAGNÉTISME.
LETTRE DE MESMER
AL CITOYEN SEGRETIER
A Bissy, près Bonnellcs, par Limours (Se!ne-et-Olse).
SchufThousen, en Suisse, ce 20 avril 1798,
• Jenesçois que penser de votre silence, cher et respectable ami ; je vous ai envoyé les deux premières feuilles de mon mémoire pour servir d’introduction à mon sistème; dans l’incertitude qu’elles ne vous soit parvenues, je n’ai pas osé d’en continuer l’envoï.
J’apprends par les papiers publiques que le gouvernement va s’occuper des établissements d’écoles de médecine ; ces réformes se devront faire par les médecins ; il est à présumer qu’ils ne s’écarteront guère de leur routine. Je pense qu’il seroit bien à propos do faire en ce moment les offres de mes découvertes et de mes services à la République françoise, et qu’il seroit
(1) Toui ce que nous publierons de Mesmer étant écrit de sa main, il ne nous appartient pas d’y rien changer, quelle que soit la forme de style et d’orthographe. On doit se rappeler d'ailleurs que Mesmer était étranger, et qu’il y a pris de cinquante ans que ces pièces sont écrites.
de sa dignité que les autres nations, comme de la liberté, en soient redevables de ce premier bienfait de l’art infaillible de se préserver et guérir, g
Par l’influence bienfaisante du Directoire françois, nous sommes en république ici en Suisse et nous avons adopté la constitution qui nous a été proposée et dont je prends la plus grande part. Mais mes projets et mes plans ayant eu leur berceau en France, je n’ai pas voulu les présenter ici.
Je vous prie, mon cher ami, calmez les inquiétudes quej’ai, premièrement sur l’état de votre santé et de votre bien-être, et puis sur les motifs qui parois-sent avoir affoibli lo zeile pour les projets de l’humanité que nous avons concerté ensemble.
Je ne doute pas qu’à l’époque des élections on n’ait rendu justice à vos mérites pour la république. Veuillez bien m’informer de tout cela, et en même temps m’accorder vos bons conseils sur ce qui me convient de faire.
Avant la paix générale, ou plutôt avant d’être déterminé par vous, je n’ai pas voulu entreprendre le voyage de Paris.
En attendant, je me suis occupé à refondre mon sis-tème en grande partie. N’ayant donc plus de motifs ni occasion pour travailler, je suis désolé de mon inaction où je suis.
Après toutes les dispositions dont j’ai le bonheur d’être doué, vous avouerez qu’il est bien triste, faute d’étre suffisamment connu, de me voir condamné à être inutile.
Daignez me répondre le plutôt possible et de faire agréez à madame votre aimablé épouse, ainsi qu’au
toute la famille, mes respects. Je suis avec les sentiments du plus sincère attachement et d’estime, pour la vie, mon cher et respectable ami,
Votre très-humble serviteur,
MESMER.
MÉMOIRES DE M. MESMER
SUR SES DÉCOUVERTES,
ADRESSÉS AU Pl'BLIC FRANÇOIS.
La nature offre un mo;en universel de guérir «t de
préserver les hommes.
L'iCTEÏB.
AVIS AU PUBLIC S I"
L’importance et l’intérêt général d’une vérité quo j’annonce m’autorise et m’oblige à vous interpeller.
C’est un droit de l’homme, également éternel et imprescriptible comme la liberté, de se dégager des er eurset des préjugés pour adopter des vérités essentielles à la sûreté individuelle.
Une croyance antique et superstitieuse sur les moyens de se conserver pourroit être contradictoire
avec l'indépendance r*l la dignité d'un peuple organisé.
La médecine nous fait l'aveu qu'elle se trouve toujours dans son enfance, et que, malgré les efforts des siècles, sa pratique n’a pas cessé d’être incertaine et conjecturale.
C’est en vain qu’on a cherché jusqu’ici, dans les composés naturelles et artificielles de la matière, un remède capable d’agir d’une manière salutaire sur la substance des nerfs, le principal instrument du mouvement et des sensations, pour en rétablir l’harmonie lorsqu’elle a été troublée.
C’est encore en vain que tons les jours on immole des victimes aux essais et aux expériences pour avancer l’art de guérir vers sa perfection.
Comme l’existance de l’homme, sa conservation ne doit plus être l’appanoge exclusive d’une profession; elle ne sera plus exposée aux chances incalculables des drogues et de leur application.
La nature, de môme qu’elle a gravé dans le cœur de l’homme les droits et les obligations pour le bonheur sociale, elle a mis ce moyen à la portée de chacun, comme elle l’a placé au milieu des aliments pour le nourrir.
De même, comme la maladie considérée dans sa première cause n’est qu’//z?, ce moyen de. la nature n’est qu’««. C’est le principe qui agit sur la source de la vie, capable de rectifier toutes les aberrations dans l’œconomie animal.
La réalité de l’existance et l’utilité de ce moyen dans tous les genres de maladies paroît être suffisamment constaté depuis plusieurs années par vingt
sociétés philanthropiques qui se sont formées pour cet effet depuis ma première apparition en France; pour qu’on puisse se dispenser d’une longue énumération des faits et des expériences, un grand nombre en a été publié par les annales de ces établissements, comme par celles de Lyon, de Bordeaux, Strasbourg, Nantes,Grenoble, Paris, etc., etc.; ce seroit donc faire insulte au bon sens et à l’évidence que de s’obstiner à en douter plus longtemps. ;
Après avoir passé plus de vingt années à perfectionner des découvertes reconnues pour les plus sublimes et les plus utils qui jamais aient été faites, je me présante de nouveau pour en faire hommage à la nation glorieuse des exploits de tout ce qui peut faire le bonheur de l’humanité. Comme elle est la seule qui ait commencé à m’accueillir, je consacrerai le reste de mes jours pour contribuer à tous les moyens pour la faire en jouir le plus promptement et le plus parfaitement possible, et que ce soit aux François que les autres nations soient redevables d’une institution la plus précieuse de se guérir et de se préserver des maladies.
Les médecins, qui spécialement voudront se vouer à cette nouvelle doctrine, posséderont les talents, non-seulement de guérir, mais aussi de préserver, auront enfin un double droit à la reconnaissance de ceux qui leur auront accordé leur confiance.
Je vais vous proposer ici les moyens que je crois les plus propres à jouir des avantages de ces découvertes ; il seroient :
1° D’établir une école normale do l’art de guérir pour y former les officiers de santé par une instruc-
tion suivie dans mes principes, et la méthode de traiter toutes espèces de maladies tant internes qu’externes, et qui pourra servir de modèle à tous les établissements des hospitaux, hospices, etc., etc., en considérant que non-seulement on peut guérir, mais aussi préserver.
2° Les hospitaux seront telement disposés à recevoir les citoyens ouvriers, artistes, laboureurs,etc., qui, s’apperccvant dans le cours de la semaine des indispositions, pourroient se rendre les jours de décade dans l’établissement pour y être traités et guéris, dans l’espace de quelques heures , de maladies noissantes, et pour prévenir ainsi les maladies à se former.
Par cette mesure, on pourra empêcher les malheurs si fréquents des familles moins aisées, dont les chefs, ne voulant pas les abandonner, diffèrent communément jusqu’à la dernière extrémité le moment dé Se faire transporter aux hospitaux, craignant de n’en pas revenir ou de trouver leurs enfants désolés et Sans ressources. Je ne compte pas tant ici l’immense œconomie en drogues, pour lesquelles tout l'empiré sera dispensé d’ôtre tributaire de presque toutes les parties du monde, que la vie et le tems des citoyens précieux pour la félicité publique.
3° Que dans chaque commune, aux frais publiques, à l’instar des curés, soit établi un officier de santé chargé gratuitement : a de toutes les fonctions chirurgicales et de la médecine; b de l’instruction dans l’art de guérir et de préserver des maladies, faisant partie de l’instruction publique; c il sera surveillant et juge sur les conditions exigées, par la loi, des personnes qui veulent se marier; d il sera chargé dé la
protection et de la conduite des leinmes enceintes, relativement à leur étut de l’enfantement, comme uussi de voir tous les enfants dès leur noissance pour en régler d’abord par des procédés les dispositions physiques et en diriger tout ce qui peut convenir à leur développement.
4" Que comme les nations de l’antiquité avoicnt lié les lois de police relatives à leur conservation avec le culte religieux, il seroit également important de réunir avec le culte national certains procédés qu’on indiquera pour prévenir les maladies, pour guérir celles qui sont à leur noissance et pour consolider la santé, enfin pour rétablir et confirmer l’harmonie dans l’œconomie physique et morale de l’homme. Ce seroit sans doute l’objet le plus digne d’ôtre rapporté à l’auteuc de la nature, pour lui consacrer par là le culte d’admiration et de gratitude.
Mon intention est de donner une idée sommaire et précise de mes découvertes par le present mémoire, que j’ai destiné en même temspour servir d’introduction à mon sistème des influences, qui ne pouvant être bien saisi qu’à côté de l’expérience, je me propose d’enseigner, et j’ose me flatter de faire cesser les préventions et l’insouciance à cet égard dans lesquels on a été jeté légèrement par les circonstances.
Ne voulant point étonner, je me suis borné aux effets et aux applications utiles. J’ai pourtant joint à ce mémoire un autre, afin d’éclairer spécialement les phénomènes, qu'aujourd'hui on confond avec le magnétisme animal et don les abus multipliés de mes imitateurs ont donné lieu à des préventions contre ma doctrine et contre ma pratique. Ces phénomènes, qui
sont en effet réels et des développements critiques des certaines maladies , par leur apparence merveilleuse et inexplicable (1), ayant dans tous les tems égaré l’esprit humain ont fait dans les siècles passés les superstitions et la liranie du fanatisme des nations.
Loin d’etre le fauteur de tels erreurs, je réclame la justice en prouvant clairement que ça n’est que par l’application de mes principes qu’à l’avenir l'humanité sera préservé et garantie de ces fléaux qui l’avaient désolé jusqu’ici.
(La suite au prochain numéro.)
(I) Mesmer enlend, à la En de ce Mémoire, parler du somnambulisme! il ne pouvait encore lejuger; mais ses prévisions sont remarquables. Cetélat singulier a égaré plus d'un magnétiseur, et détourné beaucoup d’esprits de l’étude du magnétisme. Le merveilleux effraie la science, et nous aurons beaucoup de peine à faire comprendre aujourd'hui que le somnambulisme n’est qu’un accessoire du magnétisme, un de ses effets qui, nous espérons le démontrer en poursuivant son examen et son étude, n’est pas le plus important.
(Note du directeur.)
LES ÉVÉNEMENTS DE L’AVENIR.
« Voulez-vous, dit de Maistre, une nouvelle preuve de ce qui se prépare? Cherchez-la dans les sciences; considérez bien la marche de la chimie, de l’astronomie même, et vous verrez où elles nous conduisent. Croiriez-vous, par exemple, si vous n’en étiez avertis, que. Newton nous ramène à Pythagore, et qu’incessamment il sera démontré que les corps célestes sont mus précisément comme le corps humain par des intelligences qui leur sont innées sans qu’on sache comment? C’est cependant ce qui est sur le point de se vérifier, sans qu’il y ait bientôt aucun moyen de disputer. Cette doctrine pourra sembler paradoxale, sans doute, et même ridicule, parce que l’opinion environnante en impose; mais attendez que l’affinité naturelle de la religion et de la science se réunisse dans la tête d’un seul homme de génie ; l’apparition de cet homme ne saurait être éloignée, et peut-être même existe-t-il déjà. Celui-là sera fameux et mettra fin au XVIIIe siècle qui dure toujours, car les siècles intellectuels no se règlent pas sur le calendrier comme les siècles proprement dits. Alors des opinions qui nous paraissent aujourd’hui ou bizarres
ou insensées seront des axiomes dont il ne sera plus permis de douter, et l’on parlera de notre stupidité actuelle comme nous parlons de la superstition du moyen âge... Tout annonce, dit-il plus loin, je ne sais quelle grande unité vers laquelle nous marchons à grands pas... F.t ne mo dites point que tout est dit, que tout est révélé et qu'il ne nous est permis d’attendre rien de nouveau. Sans doute que rien ne nous manque pour le salut ; mais, du côté des connaissances divines, il nous manque beaucoup, et, quant aux modifications futures, j’ai, comme vous le voyez, mille raisons pour m’y attendre, tandis que vous n’en avez pas une pour me prouver le contraire. »
Si les phénomènes magnétiques et somnambuliques existent, si tant d’hommes ne se sont point trompés, no sommes-nous point à la veille du plus grand changement dans les sciences? Cette ère nouvelle n’est-elle pas prochaine? Qui pourrait ne pas en voir les symptômes? Nous, ouvriers obscurs, nous rassemblons les matériaux, les accumulons en attendant l’architecte qui les fera servir à la construction du nouvel édifice des sciences.
Dès nos premiers pas dans la carrière que nous poursuivons, nous avons senti qu’aucune des grandes découvertes, dont l’esprit humain s’honore à juste titre, ne peut égaler celle du magnétisme; aussi nous y sommes-nous attaché.
Le progrès des autres sciences nous charmait, pensant bien que celle de Mesmer aurait son tour; mais nous devons l’avouer, nous croyions que l'épreuve serait moins longue. Les savants, disions-nous, ne peuvent rester longtemps encore étrangers
aux faits nouveaux. Ce qui se produit sous leurs yeux éveillera leur attention, et, une fois les phénomènes magnétiques entrés dans le domaine de la science, notre tâche sera finie. Erreur née d'un puissant désir! Ce n’était point ainsi que la vérité devait s’établir. En effet, Mesmer a passé âbr cette terre de France en répandant partout sa découverte; de Puy-ségur, Deleuze, f.eorgct, Bertrand et cent autres sont morts ; leur vie avait été un appel à la science, appel inutile, car ce n’est pas là qu'il fallait frapper.
Tant de travaux pourtant ne sont point perdus. Nous vivons à une époque où toutes les vérités peuvent se faire jour, où nulle puissance ne peut empêcher leur.développement, où enfin, à défaut des corps savants, l'opinion, cette reine du monde, peut dicter des arrêts qui brisent toute résistance. L’opinion publique aujourd’hui a prononcé; le magnétisme existe, les faits merveilleux du somnambulisme sont constatés; on peut être assuré que le génie qui doit les lier entre eux, s’il n’est déjà au milieu de nous, ne tardera pointa paraître. Et sur quoi fondons-nous cette opinion? Sur l’histoire, qui nous apprend que les hommes qui ont fait révolution dans les sciences sont venus dans les temps mêmes où ils étaient nécessaires : Dieu les inspire, et c’est ainsi que sa providence se manifeste.
Serait-il raisonnable aujourd’hui de quitter tout travail? Non. Il faut, au contraire, multiplier les ouvriers; d’abord pour le bien qui en résultera immédiatement, et ensuite pour que le monde s’habitue à voir et se familiarise avec les faits, toutes choses nécessaires pour que le génie qui apparaîtra soit
compris, et que tout d'abord sa doctrine trouve des hommes disposés à l’adopter et à vivre sous la loi qu’il aura tracée.
Courage donc, magnétiseurs, vous avez préparé un avenir plus heureux ; votre persévérance et vos efforts ont écarté les obstacles qui nous étaient opposés. C’est une grande conquête sur l’ignorance et la mauvaise foi ; mais la digue que vous avez opposée aux flots bourbeux peut être rompue. 11 faut la consolider en ajoutant à vos travaux. Nous vous dirons bientôt ce qu’il vous reste à faire.
Baron du Potet.
MEMOIRE
SUR DES
A M. LE BARON DU POTET.
Vous me faites l’honneur de me demander quelques détails sur la petite affaire qui a eu lieu récemment à l’hospice Saint-Jacques, à l’occasion du magnétisme animal. Je m’empresse de répondre à votre invitation; mais auparavant permettez-moi de vous dire quelques mots sur les antécédents de cette affaire, afin que vous en connaissiez mieux la cause et tout ce qu’elle renferme d’odieux et de ridicule.
Avant que vous ne vinssiez, Monsieur, nous faire part du fruit de vos recherches sur le magnétisme, des élèves de notre école de médecine avaient déjà quelques notions, bien imparfaites sans doute, de cet agent précieux et surprenant; déjà môme quelques essais heureux avaient été faits à l’hôpital sur un petit nombre de malades. Mais dès le commencement
FAITES A L’HÔPITAL SAINT-JACQUES, A BESANÇON.
le scrupule des hospitalières s était éveillé, et depuis il n’a jamais permis que des expériences fussent poursuivies avec assez de persévérance. Voici quelques-uns de ces essais les plus remarquables par la gravité des maladies. Vous y verrez se développer celte Imine qui m’a fermé, il y a peu de temps, la porte de l’hôpital, et qui s’acharne sur moi encore en ce moment.
En novembre 1838, une femme se présenta à l’hôpital avec uno perte complète de la faculté visuelle de l’œil droit, resserrement excessif de sa pupille et constriction convulsive des paupières. L’invasion de ces accidents avait eu lieu d’une manière presque subite, et avait été précédée uno semaine à l’avance par des douleurs vives au pourtour et au fond de l’orbite, alternant avec d’autres douleurs aux membres inférieurs, violentes au point d’arracher des cris. La plupart des moyens qu’on employa d’abord, saignées, évacuants, révulsifs, stimulants de plus d’une espèce, etc., n’eurent aucun succès. Les sels de morphine seuls, appliqués par la méthode endermique à la région surcillière, faisaient disparaître momentanément la plupart des symptômes. L’invasion et la forme de ceux-ci, la constitution éminemment nerveuse du sujet, les résultats avantageux des narcotiques et l’insuccès des autres moyens ne laissaient aucun doute sur la nature de la maladie. Le magnétisme, essayé plusieurs fois, se montra si efficace et si supérieur à tous les autres remèdes qu’avec raison l’on conçut l’espoir d’une guérison prompte et solide. Il fut donc prescrit et je fus chargé de l’appliquer. Mais, le môme jour, défense fut faite par la supérieure des religieuses d’y avoir recours. Aujourd’hui
l’œil de la malheureuse femme est perdu^ans ressource, et ses paupières sont frappées de paralysie complète.
Deux mois plus lard, uno femme était traitée, depuis plusieursjours, pour une hystérie parvenue àson summum d’intensité. File présentait des convulsions effrayantes et un tel trouble des facultés intellectuelles qu’on l’eût facilement prise pour une aliénée. Saignées, bains, affusions froides, révulsifs, antispasmodiques de toute sorte, etc., tous les moyens échouaient. Un soir cette malheureuse était dans un état de rigidité générale qui rappelait le tétanos, et durait depuis une douzaine d’heures. On ne pouvait en avoir aucun signe d’intelligence et de sensibilité. J’obtins de M. le professeur de clinique interne la permission de magnétiser, et je le fis en dépit d’une sœur de la sallo qui vint me le défendre d’un ton insolent. Au bout de huit minutes la roideur était disparue sans retour, et une demi-heure après la malade conversait d’une manière très-sensée. La guérison fut bientôt parfaite, quoique le magnétisme n’eût pu être employé que cette seule fois.
Au commencement du mois dernier, un cas semblable s’est offert à notre observa t ion .Depuis prèsde vingt-quatre heures une fille de vingt et un ans était en proie à des convulsions tétaniformes telles qu’on lui aurait plutôt brisé les membres que de les fléchir. L’intelligence et la sensibilité semblaient éteintes : le bruit leplus fort, la lumière la plus vivedirigéesur l’organe de la vision, les pincements et les piqûres ne paraissaient faire aucune impression. Le magnétisme appliqué pendant trois quarts d'heurçfit ççssçr tous lç$ ac-
eidents comme par enchantement,si bien que cette dernière expression était employée par une hospitalière pour désigner l’opération que je faisais en sa présence. La malade inondée do sueur était en somnambulisme, exprimait le soulagementqu’elle éprouvait, désignait les parties du corps qu’il fallait magnétiser, montrait de la main une personne qu’elle ne pouvait voir, scs yeux étant fermés, et enfin se servait du mot magnétisme comme d’une expression qui lui aurait été familière, et que nous avons su après lui être inconnue. Les jours suivans, aussitôt que quelques phénomènes morbides reparaissaient, ils étaient sur-le-champ dissipés par le magnétisme; quelques passes suffisaient pour calmer immédiatement une toux et une oppression nerveuses et suffocantes. Les règles, très-difficiles et irrégulières chez cette fille, parurent un matin pendant que je la magnétisais; elles coulèrent en abondance et ne contribuèrent pas peu à la soulager. Nul doute que, si ce traitement avait pu être continué, la malade ne se fût promptement guérie. Mais bientôt défense fut signifiée par les sœurs à M. le professeur de clinique de permettre le magnétisme , et à moi de l’appliquer. La malade fut donc remise à l’usago des moyens pharmaceutiques; on les lui continue en ce moment.
Tels sont, Monsieur, les cas les plus remarquables où le magnétisme a été employé à l’hospice Saint-Jacques. L’applicalien en a été faite sans tumulte, sans contact, avec toute la décence qu’on doit garder dans une salle de femmes, toujours en présencede plusieurs témoins, parmi lesquels on comptait des professeurs de l’école de médecine, plusieurs élè-
ves et des hospitalières. Les résultats n en étaient certes pas défavorables et susceptibles d inspirer de l’inquiétude ; et cependant vous avez vu comment ces dames les ont accueillis. Mais ce n’est pas tout : voyant qu’elles n’auraient pas assez d’empire pour empêcher elles seules l’emploi du magnétisme, elles ont réuni extraordinairement les membres de l’administration, et de cette assemblée vraiment extraordinaire est sortie cette décision remarquable :
« La commission administrative, informée que des élèves de l’école de médecine s'étaient permis de magnétiser des malades dans les salles de l’hôpital, et considérant que cette opération cause de Eagitation dans les salles et un dérangement nuisible aux malades;
« Délibère que Mme la supérieure sera invitée à veiller à ce que des opérations magnétiques n’aient pas lieu dans les salles de l’hôpital, et que M. le directeur de l’école sera prié de faire prévenir de cette défense messieurs les élèves, afin qu’ils s’y conforment. »
Je prends à témoins les personnes qui ont assisté aux opérations magnétiques, les religieuses y comprises , et je ne doute pas qu’aucune hésite à se joindre à moi pour proclamer que les administrateurs ont abusé de leur pouvoir en disant, pour justifier leur indéoente et ridicule délibération, que des élèves se sont permis de magnétiser ; c’est M. le professeur de clinique lui-même qui a donné cette permission, et la preuve, c’est qu’il a suspendu tout remède dans le dernier cas que j’ai cité; toutes crieront que ces messieurs étaient bien mal infor-
niés quand ils ont dit que celle opération causait de l'agitation dans les sa/les et un dérangement nuisible aux malades. Il fallait que ces messieurs justifiassent leur conduite, et il était moins ridicule, on le conçoit, d’avoir recours à ce moyen que de dire : « Nous proscrivons le magétisme parce que les sœurs, qui sont nos oracles, le rejettent comme l’œuvre de Satan et ont décidé qu'il vaudrait mieux laisser périr les malades que de leur rendre la santé par ce moyen diabolique. »
Mais ces accusations, dictées par la plus impudente calomnie, ne sont pas ce qui m’irrite davantage. Ce qui me révolte, ce qui couvre d’infamie un de ces mêmes administrateurs, c’est qu’il ait cherché à rejeter le ridicule qu’il vient de s’attirer avec ses dignes confrères sur un homme distingué par des talents et une science rares, sur un vieillard honorable et respecté de tous, M. Vertet, directeur de l’école de médecine, en l’accusant d’avoir provoqué cette proscription du magnétisme à l’hôpital. Je sais que M. Vertet lui-même a été mandé dans l’assemblée sans savoir les motifs de cet appel; je sais encore qu’il a fait observer aux administrateurs qu’il ne leur convenait pas de juger le magnétisme, et que même il leur a dit que si lui (qui n'y croit pas) était convaincu de l'efficacité de cet agent, il le prescrirait quand il le jugerait utile et malgré leur défense. Il est inutile d'insister, après M. Vertet, sur l’absurde prétention qu’ont ces messieurs, entièrement étrangers à l’art de guérir, puisqu’il n’y a pas, chose digne de remarque, un seul médecin parmi eux, de discuter une question aussi élevée que celle de l’utilité dû
magnétisme considéré comme moyen thérapeutique.
Nous voici arrivés à la plus belle époque du magnétisme humain à l’hospice Saint-Jacques. Vous venez de voir, Monsieur, que la supérieure des religieuses était chargée (I) de surveiller les élèves en médecine dans les salles de l’hôpital. On ne dit nulle part qu’elle ait reçu le soin de punir ceux qui se rendraient coupables de magnétisation ; quoi qu’il en soit, elle s’est dignement acquittée de l’une et de l’autre fonction.
Le 16 février, dans la matinée, une observation de catalepsie se présenta à la salle des femmes. Le cas est si rare et si curieux que je m’arrêtai longtemps à l’examiner, et j’étais encore au lit de la malade quand déjà M. le professeur de clinique interne était sorti avec mes condisciples. Je me rappelais une expérience singulière, non moins curieuse que la névrose elle-même, et que je vous avais entendu raconter ; je posai mon pouce sur le front de la cataleptique, et celle-ci, dont, quelques minutes auparavant, on ne pouvait obtenir un signe de sensibilité, m’entendait et me répondait. Dans le moment arriva une hospitalière; je lui Ils part de l’expérience et lui proposai, avec bonne foi, de la répéter en sa présence ; elle accepta, et le succès fut le même. Etonnée, elle m’accusa, d’un ton assez malhonnête, d’avoir magnétisé. Je lui répondis que non. «Sivous ne l’avez fait par des passes, vous l’avez fait par le regard. » Je lui dis que je le pourrais même sans le regard,
(1) Je voudrais bien savoir si ceux qui lui oui donnii celle commission en ont le droit. Je considère les sœurs comme de simples infirmières, très honorable«, il est vrai, quand toutefois elles ne sortent pas de leurs deToIrs,
par la seule pensée. « Vous ne le feriez pas, ajouta* t-elle. — Je le ferais si je le voulais. — Je tirerais le rideau. — Ce serait un faible obstacle. — Vous ne le feriez pas? — Personne ne saurait l’empêcher; la pensée est au-dessus de tous les pouvoirs; Dieu seul a le droit d’y commander ; l’intelligence et la volonté sont inaccessibles à la tyrannie et à toutes les puissances humaines. Ainsi, si j’avais la volonté de magnétiser, personne ne saurait et ne pourrait y mettre obstacle. » Moins d’une heure après cette conversation, le portier de l’hôpital avait ordre de m’en refuser l’entrée, et même, si je faisais violence, de me faire saisir par la garde. Cet ordre venait de M“11' Lami, supérieure des hospitalières.
Voilà le fait, tel qu’il s'est passé. Je yous l’ai raconté avec franchise, sans y ajouter ni en retrancher aucune circonstance. Je l’ai rapporté tel que vous venez de l’entendre à MM. les professeurs de l’école do médecine, à qui je demandais justice, et qui, tout indignés qu’ils étaient, n’ont pas eu le courage de prendre ma défense, soit qu’ils craignissent de causer du scandale, soit, ce qui est plus vraisemblable, qu’ils eussent peur de se compromettre dans l'esprit des religieuses et partant dans celui de l’administration. Je puis et je dois même me taire ici ; le fait est assez odieux et révoltant par soi-même pour que je m’abstienne de toute explication. Il est inutile d observer combien il est injuste de sévir contre quelqu’un sur qui on n’a que des soupçons, car certainement il y a impossibilité de prouver que j’ai magnétisé; combien il est injuste qu’une supérieure do couvent se permette de traiter de 1» sorte un élève de l’I'niversité,
qu’une décision ministérielle seule peut faire sortir d'une école; enfin, il est inutile d’observer combien il est indécent, combien il est scandaleux qu’une femme, vouée par son état à la vertu de charité, ordonne de me faire saisir par la garde, moi dont la conduite est, comme vous le savez, aux yeux de tous irréprochable.
Monsieur, vous avez rencontré des obstacles à Besançon, comme partout où vous avez passé; mais au milieu de ces obstacles vous avez trouvé aussi des motifs de joie et de consolation. Ceux-là ne vous ont été suscités que par des gens ignorants, dont l’esprit est trop, bas et trop étroit pour que vous eussiez à vous en occuper. Ceux-ci, au contraire, vous sont venus de la classe même de ces hommes qui jusqu’ici se sont déclarés les ennemis de la science sublime que vous répandez avec tant de zèle : c’est par les médecins que çes motifs vous ont été fournis. Peu d’entre eux se sont montrés hostiles à la doctrine nouvelle; ils en reconnaissent la vérité et 110 contestent point la vertu médicatrice du magnétisme ; les expériences que je viens de citer en sont la preuve, car la plupart de MM. les professeurs ont encouragé mes essais à l'hôpital, et si je suis banni de cet établissement, c’est bien certainement contre leur aveu. Honneur donc à ces hommes ! ils se sont montrés supérieurs à ceux qui se disent les génies de notre siècle.
Recevez, Monsieur, l’expression de ma vive reconnaissance. Je vous dois un moyen de plus de faire du bien à mes semblables, dont je suis appelé, par l'état que j’embrasse, à soulager les misères, et ce
moyen est, je n’en doute pas, le plus puissant de ceux que la nature nous a mis entre les mains, ou plutôt c'est la nature elle-même que vous nous ave/, livrée, et ce n’est pas en vain que les anciens l’ont nommée nature mèdicatrice.
J’ai l’honneur d’être, avec la considération la plus parfaite, permettez-moi de dire aussi les sentiments les plus affectueux,
Mon cher Monsieur du Potet,
Votre élève tout dévoué, F.-A. Goux,
Officier de sanlé.
Besançon, le 26 février 1840.
P. S. J’ai oublié de dire que M. Pécot, professeur de clinique chirurgicale, avait demandé comme une faveur la permission de faire magnétiser une femme qu’il devait opérer d’un cancer au sein, et que la supérieure la lui avait refusée.
SOMNAMBULISME MAGNÉTIQUE ANORMAL.
On nous écrit de Newcastle :
«Une jeune dame de cette cité s’était fait magnétiser lundi (28 novembre 1843) vers huit heures du soir, et, à la grande consternation de ses amis, elle ne s’éveilla que lo lendemain matin à huit houres et demie. Le mardi 29, le jeune homme qui l’avait magnétisée alla chez elle le soir avec un de ses amis et se fit magnétiser à son tour devant cette jeune dame ; elle regarda pendant quelques minutes faire les passes nécessaires à l’opération, mais bientôt elle tomba dans le sommeil magnétique; celte fois elle ne s’éveilla qu’au bout de quarante et une heures et demie, malgré tous les efforts que l’on fit pour chasser le fluide. On appela un médecin le mercredi soir ; il trouva la jeune dame dans un élat de roideur complète,
et, les moyens ordinairesdelamédecinen’ayanfpoint
suffi, on employa des ventouses. La roideur fut en quelque sorte détruite, mais le sommeil continua.
« Pendant la nuit de jeudi, des symptômes d’épilep-sie qui s’étaient déclarés dans la nuit du mercredi continuèrent d éli e très-violents. On la mit au lit et elle
dormit parfaitement toute la nuit. Lorsqu'elle se réveilla, elle demanda à manger, prit en efTet quelque nourriture, puis un instant après dit : Je vais retourner d’où je viens; » et en prononçant ces mots elle retomba dans ce singulier sommeil qui dura encore vingt-quatre heures, au bout desquelles elle se réveilla et se trouva parfaitement bien et sans souvenir de ce qu’elle avait enduré; les traces des ventouses purent seules la convaincre qu’on lui avait retiré du sang. »
SOMNAMBULISME naturel.
On lit dans le Journal de Belfort, du 26août 1843 :
« Une scène nocturne aussi singulière que plaisante s’est passée récemment dans' l’un des faubourgs de notre ville.
« Un maréchal des logis d’un régiment de chasseurs d’Afrique logeait chez un aubergiste, dont la salle à manger est décorée d’une tenture qui représente les faits d’armes les plus glorieux accomplis par notre jeune armée sur le territoire africain. Le sous-officier regarde avec amour la peinture des combats auxquels il a assisté; au brillant de ses yeux, à la fierté de son maintien, à l’agitation fébrile de ses muscles, on devine que ce tableau ravive en son sein d’anciens souvenirs : aussi va-t-il se coucher en lançant un regard furibond aux soldats du moderne Ju-gurtha.
« Au milieu delà nuit, l’aubergiste entend un va-
carme épouvantable dans lu salle à manger; il descend... que voit-il? Le maréchal des logis dans le costume du héros de la Manche, c’est-à-dirc en chemise, qui s’était relevé, jouet d’une hallucination, et qui, une bûche à la main, donnait force coups de revers et coups de seconde aux Arabes... de la tapisserie; il pourfend, éventre, écrase et mutile un grand nombre de Bédouins , de Bédouines et de Bédouinos. Dans sa fureur d’extermination, il s’en prend aux tables, aux chaises, aux vitres, etc. On ne sait trop où se serait arrêtée cette horrible boucherie, si un agent de police ne fût venu faire comprendre à ce militaire que les Arabesétaienten Afrique, que ceux-ci étaient en France... et en papier, et qu’il n’était pas nécessaire de pousser l’enthousiasme jusqu’à les battre en effigie. »
GUÉRISON D’UNE ÉPILEPSIE
M. T. Hartshorn, qui a traduit en anglais Y Instruction pratique de Deleuze, a ajouté à la seconde édition, publiée à Providence (Etats-Unis), un appendice plein de phénomènes curieux observés en Amérique. Nous en traduisons le passage suivant:
« Miss *** de cette ville (Providence) , atteinte de cette cruelle maladie, a été traitée avec succès par le docteur Brownell. Il a commencé à la magnétiser dans le mois de janvier dernier (1837) et a continué le traitementjusqu’à présent. Cette jeune personne a présenté, dans le cours de son traitement, des traits de lucidité des plus frappants. On cite surtout, au nombre des personnes qui ont eu occasion de les vérifier, le révérend John A. Clark, de Philadelphie; les révérends docteurs Yates et Potter, de Schenectady ; le révérend A. Kaufman, de Charleston, et le docteur Josué B. Flint, de Boston. Dans scs consultations elle a eu le bonheur d’indiquer les causes et l’état de bien des maladies. L’exactitude de ses observations a inspiré tant de confiance que peu de ceux qui connaissent les circonstances hésiteraient de s’y lier dans des cas de dislocation ou de maladies qui affectent les
os, etc. Ce n’est pas une somnambule (le profession. Aussi est-elle exempte du soupçon qu’entraîne la considération d’un intérêt pécuniaire.
« J’ai dû, pour rendre un compte exact de ce cas, aller voir le docteur Brownell, de la conversation duquel j’ai recueilli les particularités suivantes.
«Lasanté de cetto jeune personne a été, environ six ans, troublée par des accès d’épilepsie, irréguliers d’abord; ils apparurent bientôt tous les quinze jours, et à la fin tQutes les semaines, et toujours d’autant plus intenses qu’ils étaient plus rapprochés. Pendant huit mois qu’elle a été soumise au traitement magnétique, il ne lui a été administré aucun remède médicinal.
« A la première séance, qui dura environ trois quarts d’heure, la magnétisation ne produisit aucun effet apparent ; à la seconde, le sommeil apparut au bout de vingt minutes; à la troisième, au bout de dix, et enfin, à la quatrième, une minute suffit pour la plonger dans le sommeil magnétique sans que lo magnétiseur, placé à huit pieds de distance, fit aucun mouvement de ses mains. Depuis ce jour on n’a plus employé le procédé manipulatoire ou passes.
« On peut la démagnétiser en lui faisant des passes transverses, mais elle se réveille aisément par la seule volonté du magnétiseur. Si on lui dit de s’éveiller au bout d’un temps donné, elle le fait ponctuellement. .Une fois le docteur Brownell la laissa chez lui en état de somnambulisme et en communication avec beaucoup de personnes : en s’en allant il lui ordonna de s’éveiller à cinq heures. Il prit sur-le-champ le steamer FallRiver, qui partait à trois heures, se propo-
sant d’étrc environ vingt-quatre heures absent. Le bateau était déjà ù environ dix milles de la ville lorsque le docteur, craignant que les visiteurs qu’il avait laissés chez lui pussent, par leurs expériences et leurs entretiens, empêcher la patiente de s’éveiller à l'heure dite, et étant d’ailleurs désireux d’essayer, de mesurer l’étendue de son influence, dit au révérend Frédéric A. Farley, qui était avec lui sur lo bateau, qu’il s’efforcait de «rompre la communication qu’il avait établie entre la patiente et les visiteurs.» A son retour il apprit, en effet, qu’elle avait cessé do parler à quatre heures quinze minutes, après quoi aucun des assistants n’avait pu obtenir de réponse aux questions qui lui étaient faites. Elle s’éveilla au temps juste (cinq heures), et après le départ des visiteurs elle donna pour raison de sa conduite que le docteur Brownell lui avait défendu de leur répondre.
« La santé de cette jeune personne paraît parfaitement rétablie maintenant. Elle n’a pas eu d’attaque épileptique depuis le commencement du traitement. Dans l'état magnétique elle déclare qu’elle est complètement guérie et qu’elle n’aura plus aucun retour de ce mal cruel. »
On doit remarquer ici que cette guérison est due tout entière à l’action curative propre au magnétisme. La malade, quoique somnambule lucide, n’a point eu recours aux remèdes médicinaux.
M. Hébert.
MANUEL DU MAGNÉTISEUR.
(Suile.)
ROUGEOLE, SCARLATINE, VARIOLE.
Dans ces affections si nombreuses, et qui ont quelquefois une terminaison si funeste, vous pouvez obtenir des résultats qui dépasseront vos prévisions.
Lorsque la marche de ces affections languit, lorsque les éruptions se font attendre, ou que, s’étant montrées, elles semblent rétrograder au lieu d’avancer, c’est là surtout que vous constaterez l’efficacité du magnétisme.
Ne craignez pas la fièvre, ni la chaleur qui pourra se manifester; elle n’est que le résultat du travail qui se fait par vos efforts et de l’augmentation du mouvement nécessaire.
Dans ces cas votre magnétisation est simple; elle doit être générale et de courte durée; quinze ou vingt minutes pour chaque fois, et cette application ne dérange en rien le traitement qu'un médecin judicieux aura indiqué ou suivi dans pareil cas.
Ce que vous pouvez l'aire dans ces cas graves est encore immense. Votre action diminue, si elle ne neutralise complètement, l’arrivée des fluides que l’irritation appelle de toutes parts.
La paralysie, l’absence de la parole , la rigidité des membres, et même, dans certains cas, les convulsions ne doivent point vous empêcher de tenter la guérison. Ne sauveriez - vous qu’un malade sur six, vous le pouvez. N’est-ce pas un résultat qui doit vous encourager ?
GASTRITE AIGL'E.
Quelle que soit l’opiniâtreté des vomissements, il est presque certain que vous les arrêterez par quelques applications du magnétisme. Vous n’aurez pas guéri encore; mais l’estomac qui, malgré ses efforts, n’avait pu parvenir à rejeter les liquides ou toutes autres substances qui causent les désordres dont il est atteint, aidé du magnétisme, les expulsera par des voies différentes.
Dans presque toutes les névroses de l’estomac vous soulagerez certainement, si vous ne guérissez pas. Toutes les fois que cet organe ne sera affecté que sympathiquement, soit par une maladie du cerveau , de l’utérus ou des reins, vous ferez cesser presque sur-le-champ les vomissements.
Duns CCSaffections qui, parfois , causent des douleurs si atroces, vous réussirez encore.
Votre magnétisation doit encore être simple ici; vos doigts en pointe dirigés sur l’organe en souffrance, votre main à plat appliquée sur lui et touchant la peau si vous pouvez le faire, sont des procédés dont l’efficacité est depuis longtemps connue.
DIARRHÉE AIGUË, DYSSENTERIE.
Les frictions magnétiques, c’est-à-dire votre main, promenée légèrement de place en place et lentement, diminueront les ténesmes et les coliques, et pourront empêcher le développement d’une maladie qui mène souvent et rapidement à la mort.
MEMBRES PARALYSES, HÉMIPLÉGIE, PARAPLÉGIE.
Vous avez affaire ici à des parties d’où la vie s’est retirée ; la circulation nerveuse n’a plus lieu, ou du moins fort imparfaitement. Qu’arrive-t-il ? D’abord de la chaleur dans le membre froid, puis des picotte-ments, et si vous persistez , après quelques instants démagnétisation , vous obtiendrez des contractions, toujours des contractions, et souvent aussi, comme je l’ai déjà dit, une sorte de commotion qui ressemble à de légères décharges électriques.
En continuant la magnétisation les secousses aug-
mentent d'intensité, et le malade ne tarde pas à ré-couvrer la souplesse et l’usage du ou des membres paralysés.
RHUMATISME MUSCULAIRE ET ARTICULAIRE.
Dans ces affections si douloureuses, si communes, et qui se reconnaissent si facilement, le magnétisme, plus que tout autre remède, est appelé à rendre d’é-minents services. Déjà des cures nombreuses ont eu lieu là où la médecine avait échoué complètement.
La lièvre no doit point empêcher ou retarder l’emploi du magnétisme. L’exaspération de la douleur est souvent apaisée subitement; mais il est certains cas où le magnétisme la fait naître ; alors elle n’est que critique, et annonce que les fluides épanchés vont changer de lieu, ce qui est un symptôme favorable.
Quand ces affections sont héréditaires, elles reparaissent .Mais si vous avez eu le bonheur de les atteindre par votre action, les crises sont alors moins fréquentes, comme aussi moins douloureuses, et cèdent plus promptement à l’emploi du magnétisme.
Le rapport magnétique établi par une magnétisation de cinq à dix minutes, vous dirigez vos doigts en pointe dans la direction des nerfs qui sont affectés ou sur l’articulation qui est le siège de la maladie, et vous descendez vos mains lentement comme si vous vouliez attirer quelque chose vers les extrémités. Vous reprenez ensuite une magnétisation générale pour revenir encore au siège de la maladie. Et surtout ne craignez nullement, je vous le répète, les douleurs que vous aurez ainsi fait naître.
On peut, dans ccs maladies, constater les phénomènes physiques les plus curieux. De loin, l’on peut, en dirigeant un doigt sur une partie douloureuse, y développer une sensibilité si prodigieuse qu’un corps quelconque, placé entre vous et le malade, ne pourra l'empécher de vous sentir.
CHOLÉRA-MORBUS.
« M. le docteur Douin , sujet depuis dix ans à une névralgie atroce, qui lo forçait à prendre soixante-dix grains d’opium par jour, était, depuis trente-six heures, en proie à toutes les horreurs du choléra bleu. Je me joignis, pour le traitement, à MM. Louyer-Villermay et Piron, ses médecins. Afin de combattre des vomissements verdâtres, accompagnés de vives angoisses à la région épigastrique, je choisis ce moment pour magnétiser le malade. Il ne pouvait assez se louer de cette salutaire influence : «Combien votre main me soulage , disait-il; partout où elle se porte toute douleur disparaît, j’éprouve un bien-être inexprimable (1).»
Le même médecin rapporte encore les deux üaits suivants dans son ouvrage, pages 531-533.
M. le comte de Mont"*, témoin, dans son enfance, des merveilles de Buzancy, fut frappé d’une attaque de choléra porté à un très-haut degré, dans la nuit du 13 au 14 avril. Je ne négligeai aucun des moyens que la médecine conseillait en pareil cas,
(1) Foissac, Rort sur le magnitisme, page 532. Voir aussi UOlre Essai tur l'enseignement philosophique du magnétisme, page 152.
mais j'espérais surlout dans le magnétisme, que j'employai tantôt en frictionnant les membres avec la main pour y rappeler la chaleur, tantôt en faisant des insufflations sur la région du cœur pour y ranimer la vitalité de cet organe. Enfin, après plusieurs heures d’angoisses et de souffrances, tout danger disparut; et le lendemain M. Fouquier, appelé en consultation, déclara qu’il venait assister à une convalescence. Cette convalescence fut longue, sans doute, mais une demi-heure de magnétisme par jour en abrégea de beaucoup la durée, et M. le comte de Mont*** recouvra une santé parfaite. »
« Je fus appelé, le 14 juillet, pour une jeune fille âgée de onze ans, qui venait d’être prise du choléra. En quelques minutes le pouls avait cessé de battre; la peau était d’un froid glacial et offrait cette coloration bleuâtre qui caractérisait les cas les plus graves; les vomissements et les garde-robes se succédaient sans interruption : de toutes les souffrances, la plus insupportable était une soif inextinguible. Aux sangsues, à la glace et aux excitants extérieurs, je joignis un magnétisme de tous les instants, tantôt en réchauffant les mains de la malade dans les miennes, tantôt en frictionnant doucement la région du cœur et de l’estomac. Au bout de douze heures un peu de vie revint aux extrémités; les vomissements se calmèrent, et la circulation se rétablit. Le soir, un hoquet ayant paru, j’exécutai quelques passes, et immédiatement le hoquet se dissipa. Cette maladie, qui avait fait craindre pendant deux jours les suites les plus fâcheuses, guérit presque sans convalescence.»
Bien qu’on se vante d’avoir, dans tous les cas de
maladies, obtenu des guérisons surprenantes, ce qui est vrai, je ne veux vous parler que de ce qu’il y a déplus évident dans le magnétisme et de plus fréquent dans son application, de tous les cas enfin où vous pouvez vous rendre compte de votre action.
AFFECTIONS NERVEUSES EN GÉNÉRAL.
Vous pourrez, dans ces maladies, reconnaître encore l’efficacité du magnétisme. Et, parmi les affections si nombreuses de l’appareil nerveux, vous constaterez les résultats que vous obtiendrez dans le traitement de lépilepsie, de la catalepsie, de l’hystérie, de la chorée, de F hypocondrie, et enfin de toutes les affections spasmodic/ues.
Ces maladies ont de tout temps été traitées par le magnétisme; elles font le désespoir de la médecine, qui est, en général, impuissante. Les traités sur le magnétisme renferment un nombre prodigieux de guérisons obtenues dans ces maladies; je ne vous en offre pas le tableau pour ne point sortir de la limite que je me suis tracée.
« Mais, dit M. Rostan (1), la puissancedu magnétisme sera-t-elle bornée aux maladies du système nerveux? Nous savons que le cerveau étend son empire sur tous nos organes, sur toutes nos parties. Cet organe roi, étant par ce moyen profondément modifié, ne peut-il pas à son tour opérer quelques changements avantageux dans un organe souffrant ? En suspendant la douleur, ne .produira-t-il pas d’abord un premier
(1) Grand Dictionnaire de MMtcinr, article IHagniliimt,
bienfait! I.a douleur étant suspendue, l'appel des fluides qu’elle détermine ne sera-t-il pas aussi suspendu? les matériaux de congestion, d’irritation, d'engorgement", queces fluides apportent, et qui augmentent le mal local, parce que l'effet augmente la cause, ne cesseront-ils pas d’arriver? Ne s’opposera-t-on pas, de celte manière, aux progrès ultérieurs du mal, et ne favorisera-t-on pas sa résolution? Nous supposons seulement la douleur suspendue, et cet effet est incontestable, et déjà nous voyons que les résultats sont immenses : que sera-ce si les expériences physiologiques prouvent d’une manière incontestable que le magnétisme active l’absorption? » Bientôt nous parlerons de ces cas et do bien d’autres qui ont échappé à la sagacité des magnétiseurs.
ACTION DU MAGNÉTISME DANS LES AFFECTIONS NERVEUSES DITES INCURABLES.
Il est si naturel de chercher un soulagement lorsqu'on souffre que, quoique la science ait dit : Il n’y a point de remède, l’on doit pardonner môme les tentatives insensées que les -malades font presque toujours. Les magnétiseurs ne sont pas plus coupables que les malades en cherchant à produire un soulagement, quelquefois une guérison, là où la science médicale a reconnu son impuissance.
La nature a môme tant de voies qui nous sont encore inconnues, quelque chose de si mystérieux
accompagne scs opérations, que l’on ne peut jamais prononcer absolument et dire : ceci est impossible. Sans ramener nos lecteurs aux miracles, sans leur parler de ce qu’a pu produire dans certains cas une cause morale ou physique, majeure ; sans chercher enfin à leûr présenter le magnétisme comme une panacée, nous devons cependant leur affirmer ce qui est vrai, savoir : Que, dans des cas désespérés, la nature, aidée du magnétisme, a quelquefois triomphé complètement.
Abandonnant tous les cas qui paraissent surnaturels, nous ne parlerons que de ce qui peut être soumis au jugement de la raison, et est évidemment le résultat certain d’une cause purement physique.
Mais ici il se présente bien des questions à résoudre. Quelle est donc cette cause physique? Quel est ce magnétisme, agent de tant de^phénomènes? D’où vient-il? Comment peut-il se lier avec la force médicatrico qui sert à nous maintenir? Est-il un corps qui empêche l’action si puissante do cette agent, qui l’isole enfin (I)? Hélas! tout ceci est du domaine do la science, et nous ne sommes pas savant. C’est au physicien, au physiologiste surtout à étudier ces choses et à nous les enseigner.
Maintenant nous sommes magnétiseur, rien de plus. Plus tard nous essaierons de donner des explications sur la nature du magnétisme, quoique cette tâche nous effraie et ne nçus ait pas été dévolue. Si
(1) Je n'en ai point trouvé qui remplisse ce bul d'uue manière absolue. Le papier superposé, un gros livre, par exemple, est le seul corps qui m’ait paru . faire dévier les courants magnétiques, qui finissent cependant par s'y frajer un passage.
nous ne réussissons pas au gré de nos désirs et selon l’importance du sujet, on ne devra pas nous accuser, puisque, d'avance, nous prévenons de notre impuissance. Tournons, puisque nous ne pouvons la résoudre, la difficulté qui se présente ici, et reprenons le cours de notre description.
En supposant, pour un instant, qu’on nous ait mis entre les mains un appareil électrique ou galvanique, et que nous sachions nous en servir avec habileté, serions-nous obligé de dire : l’agent que nous employons vient de telle ou telle source; il obéit à telle ou telle loi, etc., etc.? Non. Il suffirait que nous fussions éclairé sur sa force et l’étendue des phénomènes qu’il produit.
Le médecin à qui on pose ces questions : Comment se fait-il que le suc de pavot endorme?-Comment le nitre agit-il sur les reins? Comment l’émétique pro-voque-t-il les vomissements? balbutie dans ses réponses, car, quelles que soient son habileté, sa sagacité, il emploie des agents d’une grande puissance sans savoir précisément quels sont leur nature et leur mode d’action.
Nous nous plaçons dans le cas de ce médecin, et, sans plus chercher, nous provoquons, comme lui, l’apparition de phénomènes qui ne peuvent venir sans l’emploi du moyen que la nature a mis à notre disposition. Et nous disons à ceux qui Veulent nous imiter : « Procédez de telle manière ; faites ceci; agissez d’après ce que l’expérience a fait connaître de positif, et ne prenez point la peine de donner des explications. »
Ne perdez pas de vue quo la gravitation existait avant Newton, et que l’aimant attirera le fer encore
longtemps peut-être avant qu’on sache par quel mystère il le peut.
Soyez circonspects si vous vous permettez de donner des explications sur les phénomènes magnétiques que vous aurez produits, car il se trouvera des hommes très-savants qui prouveront que votre explication est mauvaise, et, par cela seul, rejetteront ou parviendront à faire rejeter le fait lui-même, ce qui est absurde, mais pourtant très-commun.
Revenons aux maux incurables.
Les maladies ont, en général, un commencement obscur. Ce sont souvent de petites causes, des agents d’une faible puissance qui déterminent à la longue les plus grands changements, les perturbations les plus considérables. Le médecin le plus clairvoyant, la sagacité la plus exercée ne les aperçoivent pas toujours lorsqu’elles commencent à troubler l’cxercice des fonctions. Les malades eux-ifiêmes ne s’arrêtent point lorsqu’ils éprouvent des malaises, souvent même ils n’y font pas attention. Le malaise augmente ; alors on agit, sur qui? sur quoi? car, le plus souvent, la cause est inconnue.
Je dis ceci seulement parce que j’ai remarqué que, dans les affections chroniques qu’on a le bonheur de guérir, la marche rétrograde du mal suit exactement le chemin qu’il avait pris pour arriver au point de menacer la vie. De sorte que l’on voit clairement ou que la nature a été impuissante, ou bien que ses forces ont dévié, et que l’on n’a pas su ou pu lui donner la puissance qui lui manquait, ou la redresser dans ses écarts. La cause réelle se laisse alors apercevoir.
11 y a tout un système nouveau de médecine à faire
ici s’il est vrai que l’agent magnétique reforme, redresse la nature lorsqu’elle s’égare ou dévie à ses lois. Quoi qu’il en soit, voici
COMMENT OS DOIT PROCÉDER DANS LES AFFECTIONS CHRONIQUES.
Chercher à augmenter la vitalité; ceci obtenu, produire des crises-, je ne veux pas parler de convulsions, mais de mouvements dans les fluides. Il faut que le malade soit replacé dans l’état aigu , c’est-à-dire dans la disposition où la maladie, montrant toute sa gravité, appelait les secours puissants de la médecine. Je ne puis ici espérer être compris que d’un très-petit nombre d’hommes. C’est un travail curieux que de semblables magnétisations ; il faut, pour s’en expliquer les effets, les voir, les revoir encore; alors on conçoit la possibilité d’une espèce de rajeunissement, causé par l’expulsion, souvent moléculaire, des matériaux hétérogènes séjournant dans l’organisation. On conçoit comment des humeurs indolentes, inactives, souvent d’une grande ténuité et ne jouant sur l’organisme d’autre rôle que celui d’un corps étranger inerte, acquièrent cependant tout à coup , par des courants vitaux, des propriétés physiques et chimiques nouvelles, et peuvent ainsi être expulsées.
Les fondements de cette vérité jetés en passant, suivons les procédés.
Pendant huit ou dix jours vous appliquez la méthode pure et simple, vous ne cherchez lo développement d’aucun effet, voi^f abandonnez môme coux
qui surgissent, sans en chercher l’augmentation ou ln diminution. Lorsque vous pensez que tout le corps a été parcouru par lo magnétisme, vous changez de procédé; vous dirigez de préférence lo magnétisme sur le siège du mal, s’il est bien connu ; dans le cas contraire, sur la région où vous le supposez. Il faut y développer de la chaleur, do la douleur môme, et no rien craindre des nouveaux symptômes qui apparaîtront. Rappelez-vous qu’ils ont existé anciennement; le malade vous dira qu’il les a déjà sentis. Continuez. Vous ne devez vous arrêter que dans un seul cas, celui où le travail médicateur est trop considérable, où la fièvre se développe, lorsqu’enfin il y a trop de souffrance; ces cas sont rares. Il faut alors doser votre magnétisme de manière à entretenir le mouvement imprimé; bien voir ensuite où se dirigent les matériaux détachés ainsi, les suivre; s’ils se portent sur un organe dont le jeu est nécessaire, donner de la force, de la vie à cet organe, en même temps que vous soutiendrez les efforts qui sont faits au siège même du mal.
Soyez assuré que l’émonctoire qui doit servir de voie d’expulsion se découvrira à vos yeux; la peau, par des transpirations, les reins, par des sécrétions, la 'poitrine môme peut, dans certains cas, jouer le même rôle ; il survient aussi des garde-robes plus fréquentes et plus abondantes.
C’est ainsi que j’ai vu, après plusieurs années d’existence, disparaître des douleurs ostéocopesqui étaient la suite de l’inoculation du virus vénérien et do l’administration de préparations mercurielles. Le travail était évident : des plaques cuivrées survenaient à la
peau; la vessie, tranquillo jusqu'alors, devenait douloureuse, les reins également, mais le sommeil avait reparu; la chaleur du lit, si insupportable avant la magnétisation, n’incommodait plus le malade. Un travail singulier avait lieu dans les os, qui avaient augmenté de volume; les urines se chargeaient et servaient de véhicule à l’expulsion de ce que les forces médicatrices avaient détaché. Le malade enfin guérissait.
J’ai vu aussi des tumeurs blanches, des engorgements glanduleux se résoudre après avoir été le siégo de douleurs critiques causées par le magnétisme. Il survenait un dévoiement, une diarrhée séreuse qui amenait une diminution sensible dans le volume, et enfin la résolution complote de ces engorgements avait lieu avec la réapparition de ces heureux symptômes.
Des paralysies des membres et môme des nerfs optiques avaient cessé après des crises, des surdités aussi, mais en petit nombre. On pouvait toujours suivre la marche et se rendre compte du travail critique qui avait lieu. La nature, renforcée, aidée, no cachait point ses opérations; l’œil le moins exercé pouvait les apercevoir.
Ces traitements n’excluent point les remèdes ordinaires, mais il faut les laisser au choix du dormeur lorsque vous avez été assez heureux pour provoquer le sommeil lucide.
Voici deux cas où vous pourrez constater le travail critique dont je vous parle; ils contiennent aussi des faits singuliers qui doivent ôtre l'objet de vos méditations.
Ce sont des exemples à suivre.
LE DOCTEUR CHARP1GN0N AU DOCTEUR FRAPART.
Orléans, le 15 décembre 1840.
« Le docteur Georget disait que la médecine des somnambules était la plus parfaite. Vous avez soutenu cette opinion avec le plus heureux succès, dans des occurrences difficiles ; je vais vous contera ce sujet co qui vient de m’arriver tout récemment.
«..... Une demoiselle de vingt-trois ans, après
avoir passé par les traitements de quatre médecins, me fit demander ; voici comment je la trouvai : bouffissure générale, hydropisie du ventre, toux sèche, fréquente, par accès de cinq minutes de durée, et recommençant par intervalle de deux à trois minutes j difficulté très-grande de respirer, douleurs aiguës par tout le thorax, surtout du côté gauche; battements de cœur précipités, sourds, mais réguliers à la main. Il était impossible do chercher quelque indice par l’auscultation, attendu la fréquence de la toux; il survenait des syncopes deux à trois fois dans les vingt-quatre heures, elles duraient deux, quatre et cinq heures; l’estomac ne gardait aucune boisson. Cetétat était le même depuis près d’un mois, mais la toux et les palpitations avaient plusieurs années de date.
«Ce que j’avais à faire en pareille circonstance, c’était de ne pas tourmenter la moribonde par une nouvelle médication, car la mort me semblait ne pas devoir tarder; la famille du reste s’y attendait à la
première syncope. Qu’aurais-je tenté après les mille moyens employés par ceux qui m’avaient précédé?... La malade, qui n’avait entendu parler du magnétisme que depuis peu de jours, me conjurait de l’endormir, car c’est là ce qu’elle désirait par-dessus tout, pour obtenir quelques moments do repos. Après avoir longtemps lutté avec moi-même, je me décidai à la satisfaire, au risque de me faire accuser de vouloir ressusciter un mort... Cinq minutes sont à peine écoulées que la toux est arrêtée, et que mademoiselle Rose semble dormir. Je lui parle, elle ne me répond pas. Plus tard, elle s’agite pour marquer qu’elle entend. Après uno heure de sommeil, je la réveille; mais aussitôt tous les accidents reparaissent. Cependant la nuit a passé sans accès. Le magnétisme provoque instantanément le sommeil ; bientôt la malade m’entend, puis me répond... Elle est somnambule! « Où souffrez-vous le plus ? » Elle prend ma main et la pose sous le cœur... « C’est donc là votre mal? Qu’y a-t-il donc ? — Du sang... il y en a bien trois cuillerées. 11 est liquide... Il est entre la pointe du cœur et le plancher (entre le diaphragme et l’extrémité du péricarde). — Est-ce toute la cause de votre maladie? — Non; mon ventro est aussi bien mal, mais je n’y vois pas. »
« Après une dizaine de minutes de silence, elle me dit spontanément : « Voyez-vous ces sangsues? — Où donc? — Là, à mon cœur. — Comptez-les. — J’en vois dix ; elles vont bien me soulager; demain je n’aurai plus de battements de cœur, plus de toux. — Voulez-vous être réveillée? — Oui, à moitié seulement ; il l'aut que je dorme toute la nuit sans sentir
nies sangsues ni le sang qui coulera jusqu'au matin. » « Cette intention était un ordre pour moi; je fis exécuter la prescription, et le lendemain la toux et les palpitations avaient disparu. Nouvelle magnétisation ; M11® Rose ne voit plus de sang au cœur, mais elle aperçoit dans son ventre une grande abondance d’eau; puis son estomac qui est distendu par des glaires, ses membranes sont piquetées de sang. Ces désordres l’affligent. Tout à coup elle dit : « Ces eaux s’en iront, car voilà quatre choses pour composer une tisane. Ceci c’est de la graine de lin et du cerfeuil, cela de la racine d’asperge; cette autre racine je n’en connais pas le nom... et vous? » Moi je no voyais rien, et je ne pus dire ce qu’étaient ces petits
morceaux de racine noire..... 0 docte médecin!!!
« Vous me ferez avec cela une tisane, et vous passerez dessus les mains comme sur moi, parce qu’il en sort quelque chose de semblable aux rayons du soleil qui pénètre dans une chambre.—Comment se fait-il quo les sangsues d'hier vous aient si promptement guérie, quand vous en aviez eu tant de fois inutilement? — Sans doute on m’en a mis souvent, mais jamais à la place qu’il fallait... Ma toux provenait aussi d’une grosseur que j’avais dans la poitrine, à droite... C’est une boule de sang caillé môlé d’humeur, grosso comme une noix; elle n’est pas dans le poumon, elle est entre lui et la toile qui le sépare de l’autre... Cette boule s’est beaucoup fondue par votre magnétisme ; demain je cracherai du sang et do l’humeur. » « Il survint, en effet, une expectoration muqueuse môlée de sang coagulé; les urines furent très-abondantes, glaireuses et fétides durant les premiers
jours. Au douzième, la somnambule assurait no plus rien voir de malade en elle, et ses paroles étaient du reste confirmées par tout ce que l’œil pouvait constater. La convalescence fut franche, sar„s rechute , et depuis le quatorzième jour de traitement M11« Rose est rendue à la vie ordinaire.
« Cette observation, mon cher maître, est à enregistrer à côté de celles que vous avez déjà faites, et de leur nombre doit forcément naître cette conclusion :
« Le somnambule magnétique voit les organes malades, et il a l’instinct des remèdes qui lui conviennent.
« Cuarpignon, médecin. »
Nous prenons, autant que possible, nos exemples en dehors de notre pratique, pour montrer que le magnétisme n’est point le patrimoine de quelques-uns, mais qu’il appartient à tous. Les faits que nous citons ont un double avantage : ils justifient notre croyance et montrent jusqu’à la dernière évidence que le magnétisme a des propriétés qui lui sont propres, propriétés existant en dehors do la croyance du magnétiseur ou de sa foi.
Le fait qui suit est extrait do l’ouvrage du docteur Besuchet sur la gastrite. Cet habile praticien a fait dans cette maladie d’heureuses applications du magnétisme.
Ecoutons son récit.
(La suite au prochain numéro.)
Nous traiterons successivement dans co journal :
Des différentes espèces de sommeil;
Du somnambulisme magnétique ;
Du sommeil produit par les narcotiques;
Du somnambulisme naturel;
Des hallucinations, des rêves, des songes, des visions et des pressentiments.
Lorsque ces matériaux auront été publiés, nous montrerons la liaison qu’ils ont entre eux, et nous chercherons une explication de ces divers états du cerveau et de l’intelligence.
De la surdi-mutité et de son traitement par le magnétisme.
Expériences de M. le baron du Potet à l'institution royale des Sourds-Muets de Paris.
Examen de l’Académie.
De l’état actuel du magnétisme en France, en Allemagne et en Russie.
Tableau synoptique des faits physiques et moraux produits par le magnétisme. •
Analyse des ouvrages remarquables sur le magnétisme qui ont paru dans ces derniers temps, etc., etc.
AVIS.
Comme tous les recueils scientifiques spéciaux, le Journal du Magnétisme ¡s’adressant à un petit nombre d’adeptes zélés, nous avions, par approximation, cru devoir fixer le prix de l’abonnement à 15 fr. par an. Mais ce recueil ayant été favorablement accueilli de beaucoup de personnes éclairées, jusqu’alors étrangères au magnétisme, il nous est parvenu un nombre d’abonnements qui excède celui sur lequel nous croyions pouvoir compter.
Cet important résultat nous permet de réduire le prix de notre abonaement et de mettre ainsi à la portée d’un plus grand nombre de lecteurs notre publication, qui, nous l’espérons, contribuera à répandre do plus en plus la pratique du magnétisme dans les familles, où Mesmer et Deleuze voulaient surtout la faire descendre.
Pour ceux de nos abonnés qui ont souscrit aux premières conditions, les 5 fr. qu’ils se trouvent, par suite de cette réduction, avoir versés en plus, leur seront rendus, ou reversés sur un autre abonnement, selon leur gré.
JOURNAL
DU
MAGNETISME
.A M. LE MINISTRE DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE Monsieur lo Ministre,
Depuis bientôt soixante ans une découverte qui date de la plus haute antiquité se répand dans la nation, grâce au zélé dévoué d’hommes convaincus du v bien qu’elle peut faire.
Cette propagation, à cette heure si rapide, a lieu, je dois le dénoncer à voire esprit élevé et libéral, en dehors de la science, qui, malgré d’innombrables appels, a voulu resier étrangère aux faits merveilleux que la vérité nouvelle révèle au monde.
Si cette résistance opiniâtre ne devait avoir pour résultat que la justification du reproche adressé dans tous les temps aux corps savants de se montrer opposés aux découvertes nouvelles, je confierais au bon sens public le soin de vous signaler celte conduite coupable.
Mais les faite qui se produisent, et à une inteili-
gencc aussi haute que celle ù laquelle je m’adresse en ce moment il est inutile de le démontrer, ont les plus graves conséquences pour l’avenir de la société.
Il ne faut pas se le dissimuler, si ces faits vraiment prodigieux , bien compris parce qu’on aura étudié leur cause et apprécié leurs effets, peuvent apporter à l’humanité souffrante des soulagements et des bienfaits inappréciables, l’abus ou la fausse application de cette force nouvelle, peu connue, pourrait causer les plus graves désordres; semblable pouvoir placé sans garantie dans des mains ignorantes ou indignes serait nn fléau redoutable, tcrr.ble, pour la société.
C’est un des beaux et enviables piiviléges de votre position, Monsieur le Ministre, d’empêcher le mal en favorisant le bien. Ouvrez-nous un lieu où nous puissions, tout en soulageant les humaines misères, enseigner une saine doctrine capable d’arrêter l’ignorance qui compromet, la passion qui pervertit en la travestissant la science la plus honorable. -Créez une chaire de magnétisme animal à la Faculté de Médecine pour qu’on y enseigne comme complément des études médicales les effets thérapeutiques et moraux du magnétisme. Cette découverte descendra alors dans les masses sans y porter le trouble ou l'effroi et sans passer par les mains impures du charlatanisme.
Monsieur le Ministre, tout pouvoir fort et éclairé se montre prévoyant; or, aujourd’hui un homme vous offre de consacrer sa vie à démontrer par des phénomènes naturels, vrais, positifs , la réalité d’une découverte qui transporte l’imagination du vulgaire dans les régions de l’inconnu. U ne do-
mande aucun salaire, pour s'abriter contre tout soupçon et lever tout obstacle. Ne rejetez passa demande, Monsieur le Ministre, car elle resterait pour accuser le temps présent, et dans l’avenir s’élèverait comme une charge terrible contre les hommes, qui, prévenus qu’une digue pouvait se rompre, n’auraient rien fait pour empêcher le torrent de s’échapper.
Nous avons, Monsieur le Ministre, longtemps examiné la découverte de Mesmer; nous en avons pesé toutes les conséquences et saurons remplir avec discrétion et intelligence la mission dont nous vous demandons le fardeau. Mais si un autre vous en parait plus digne que nous, nos éloges et nos remerciements ne vous en seront pas moins acquis, car la demande que nous avons l’honneur do vous faire est pour la science que nous étudions et non pour nous-méme.
Baron du Potet
MÉMOIRES DE M. MESMER
SL'R SES DÉCOUVERTES,
ADRESSÉS AÜ FCBLIG FRANÇOIS.
(Suite) (»).
§ Ît.
1797.
Les connoissances sur l’aimant, l’électricilé, le phénomène du flux et reflux, sur l’œconomie animale et plus encore ma triste conviction de 1 imperfection de l’art de guérir, que je professois, m’ont conduit sar une route nouvelle pour pénétrer dans les secrets de la nature.
L'activité de l’esprit humain dans les siècles passés suppléa par la métaphisique aux connoissances du mécanisme des propriétés des corps, qu’on n’avoit pas. Les découvertes que j’ai faites et qui sont le su-
(t) En annonçant la publication de pièces écriles de la main de Mesmer et qui sont en noire possession, nous ignorions que l'une d'elles, le p> éscut mémoire, eût été publié. Cependant la différence des leites nous engage il le reproduire.
Tout ce qui se raltache à Mesmer est tellement important qu'on nom * saura gré de n'aroir point réservé pour nous seul les pensées de cet homme célèbre. {Note du directeur.)
jet de cel ouvrage reculeront les bornes de notre sça-voir en physique, plus encore que l’invention des microscopes et des télescopes ne l’a fait à l'égard de nos ancêtres.
Elles font connoitre : le principe qui lie tous les êtres de l’univers, que c’est à ce principe que nous devons notre conservation, que le corps humain a des propriétés par lesquelles il est sensible aux influences des corps les plus éloignés comme de ceux qui l’environnent; qu’il est susceptible d’un ton de mouvement qui lui donne encore des propriétés analogues à celles de l'aimant, et le rend capable, par là, d’agir sur d’autres corps ; que cette propriété, une fois déterminée, peut être communiquée à d’autres substances; que son action peut être propagée, concentrée, réfléchie comme la lumière, communiquée par le son ; qu’enfin le principe de cette action, considéré comme un agent sur le corps animal, peut devenir un mojen de guérir et de préseiver des maladies.
Voilà en substance les principales découvertes que j’avois annoncées depuis vingt-trois ans sous la dénomination de magnétisme animal, dénomination pleinement justifiée par la nature de la chose. Comme c’est à la postérité’que j’en appelle pour lui faire juger l’esprit de ce siècle, qui fut généralement celui d’un despotisme présomptueux ou d’une incrédulité outrée, je ne dois pas laisser ignorer quel a été depuis le sort de ces découvertes ainsi que de son auteur.
La singularité de cette nouveauté révolta d’abord les physiciens et les médecins, les électriseurs et les gens qui manioient l’aimant. On traita d’insolence les premières annonces faites par un homme inconnu
parmi eux On contesta ces prétendus phénomènes comme étant contraires aux principes reçus en physique. Au lieu d’amuser la curiosité, je m’empressai d’arriver au point de les rendre utiles, et ce ne fut que par les faits que je voulus convaincre.
Les premières guérisons obtenues sur quelques maladies regardées comme incurables enfantèrent l’envie et l’ingratitude, qui se réunirent pour répandre dans les pays des préventions contre ma personne et la nouvelle méthode de guérir ; en sorte qu’un nombre dessçavants se liguèrent pour faire tomber, sinon dans l'oubli, au moins dans le mépris, les ouvertures qne je fis sur cet objet. On cria, comme on crie encore aujourd’hui, ù la charlataneric, à l'imposture; on a voit mis l’auteur en parallèle avec les fripons reconnus.
J’ai rendu compte dans un mémoire, l’an 1779, des motifs qui m’avoient fait m’expatrier pour me rendre en France.
Chez une nation quoique plus éclairée et moins indifférente pour les nouvelles connoissances, j’éprou vois des adversités et des persécutions de toutes espèces, que mes compatriotes m’avoient préparé de longue main, mais qui, loin de me décourager, ne firent que redoubler mes efforts pour le triomphe des vérités que je regardois comme essentielles au bonheur de l’humanité.
Un grand nombre de malades qui, depuis dix à douze années consécutives, avoient éprouvé les effets salutaires de cette méthode ; des personnes instruites cl exécutantes cette pratique bienfaisante, rendirent justice et bénirent cette nouvelle médecine. Mais quel-
ques sçavunts de ce pays, Taisant profession de gouverner l’opinion, en affectant une incrédulité insultante, se sont pour ainsi dire confédérés avec les étrangers pour mettro au nombre des illusions tout cc qui se présentoit dans cet objet.
Un ministre du règne passé, odieux par son despotisme, abusa de tonie sa puissance pour détruire l’opinion naissante. Après avoir soudoyé une commission ridicule pour condamner une doctrine (malgré mes protestations) dans la pratique d’une autre personne que je désavouois, il fit célébrer son triomphe à l’Académie des Sciences, où il fut flagorné pour avoir préservé les sciences d’une grande erreur, qui, disoit-on, faisoit la honte du siècle. Il innonda l’Europe entière d’un rapport rendu Jiar cette commission. Il finit enfin par livrer à la dérision publique sur les théâtres et la nouvelle doctrine et la méthode de guérir.
La grande nation à laquelle je consacre le fruit de mes découvertes, après avoir glorieusement secoué ses fers, souffrira-t-elle plus longtemps que le dernier ministre de l’ancienne tyrannie lui ail enlevé par de lâches intrigues l’opinion consolante de l’nc-quisilion d’un moyen de conserver et de rétablir la santé, dont elle commençoit à jouir, pour la replonger dans l’erreur sur un objet si essentiel à sa liberté et à son bonheur?
En effet, on uura de la peine à croire que vingt trois années d’eflbrls n’ayentpas pu dégager ces précieuses découvertes de l’incertitude dans laquelle elles furent enveloppées par les circonstances- Faudra-t-il laisser écouler ce siècle sans faire un pns en avant
cil physique, en restant stationnaire sur l'électricité et l’aimant? Et comment peut-on se réunir pour s’opposer à une révolution quo je voulois opérer dans l’art le moins avancé et pourtant le plus nécessaire aux hommes.
On verra que ces découvertes ne sont pas une rencontre du hazard, mais le résultat de la méditation et l'observation des lois de la nature; que la pratique que j’enseigne n’est pas un empirisme aveugle, mais une méthode raisonnée.
Quoique je pense que le premier principe de toute connoissance humaine soit l’expérience, que c’est par elle qu’on peut constater lu réalité des suppositions, je me suis occupé à prouver d’avance, par un enchaînement de notions simples et claires, la possibilité dos faits que j’ai annoncés et dont un grnnd nombre a été publié sous différentes formes par ceux qui ont sçeu profiter de ma doctrine.
Des phénomènes sur lesquelles j'avois surpris la nature, je suis remonté à la source commune de toute chose. J’ose me flatter d’avoir ouvert une route simple etdroite pour arriver à la vérité, et d avoir dégagé en grande partie l’étude de la nature des illusions de la métaphisique.
Il paroit que la langue de convention, le seul moyen dont nous nous servons pour communiquer nos idées, contribue beaucoup à la défiguration de nos connoissances. Nous acquérons toutes les idées par les sens; mais les sens ne nous apprennent que des propriétés, des caractères, des accidents, des attributs. Les idées de toutes ces sensations s’expriment par un adjectif ou épithôtfl, comme chaud, froid, fluide, solide, subtil,
léger, clair, luisant, sonore, coloré, etc. On substitua à ces épithètes, pour la commodité de la langue, des substantifs; bientôt on subslantifîa les propriétés; bientôt on dit la chaleur, la gravité, la lumière, le son, la couleur, etc., et voici l’origine des abstractions métaphisiques. Ces mots représentent confusément des idées des substances, c'est-à-dire qu’on se persuade avoir l’idée d’une substance, lorsqu’elle n’est, en effet, que d’un substantif; ce sont les qualités occultes et aujourd’hui les propriétés des corps.
A mesure qu’on s’éloignoit de l’expérience, ou plutôt avant que d’avoir des moyens d’y parvenir, on ne se contentoil pas de les multiplier, ces substances; mais encore on les personnifia. Des substances rem-plissoient toutes les espaces; elles présidèrent et dirigèrent les opérations de la nature ; de là les esprits, les divinités, les démons, les génies, les arc fiées, etc.
La philosophie expérimentale en a diminué le nombre, mais il nou^ reste encore beaucoup à faire pour arriver à la pureté de la vérité. Nous y serons lorsque nous serons parvenusà ne rcconnoitre d’autre substance phisique que le corps ou la mutière organisée et modifiée de telle ou telle manière. Il s agit donc de connoitre le mécanisme de ces modifications, et les idées qui en résulteront seront des idées physiques les plus conformes à la vérité.
«Une aiguille non aimantée, mistfen mouvement, ne répondra que par hasard à une direction déterminée; tandis qu’au contraire celle qui est aimantée, ayant reçu la même impulsion, après différentes oscillations proportionnées à l’impulsion et au magnétisme qu’elle n reçus, ret rouvera sa première direct ion et s’y fixera.
C’esl ainsi que l’harmonie des corps organisés, une fois troublée, doit éprouver les incertitudes de ma première supposition , si elle n’est appelée et déterminée par l'agent general dont je reconnois 1 existance ; lui seul peut rétablir cette harmonie dans 1 état naturel (I). »
Qu’est-ce donc que cet agent général?
« Il existe un fluide universellement répandu et continué de manière à ne souffrir aucun vide, dont la subtilité ne permet aucune comparaison, et qui, de sa nature, est susceptible de recevoir, propager et communiquer toutes les impressions du mou#-ment (2). »
Quoique l’état de fluidité de la matière soit un état relatif, il est évident qu’après avoir épuisé par l’imagination toutes les nuances de fluidité possible, on sera forcé de s’arrêter au dernier degré de la subdivision, qui sera ce fluide qui remplit tous les interstices résultants des ligures des molécules composées, lesquelles constituent les moins fluides. Le sable, par exemple, a un degré de fluidité respective. La figure de ses grains forme nécessairement des interstices qui peuvent être remplis par l'eau ; les interstices des molécules de l’eau le seront par l’air; ceux de l'air, par ce que nous appelons l’éther; ceux do l’éther, enfin, seront comblés par une substance encore plus fluide, et dont nous n’avons pas fixé la dénomination.
(1) Vovci Mémoire (ur If» découvertes du docteur Mesmer. Paris, 1779.
(2) Idem.
{La mile au prochain numéro.)
PRÉVISION SINGULIÈRE.
Quelque étranges que paraissent les faits de révélation du somnambulisme lucide, quelque incroyables qu’ils soient, ils doivent être décrits et publiés. Qu’importe le scepticisme des savants qui les rejette? ils serviront dans l’avenir; rien n’est perdu dans la science; ce qui n’est pas compris aujourd’hui le sera demain ; tout fait vrai, quoique dénié, aura sa sanction un jour. Aussi nous embarrassons-nous peu des dénégations du présent. Que ceux qui veulent s’instruire nous croient sincère ; c’est tout ce que nous demandons.
Il m’arrivait souvent de laisser mes somnambules consultants se reposer après leurs consultations; c’est ainsi qu’ils sortaient do leur sommeil sans fatigue et jouissant d’un bien-être qui n’eût pas existé si l'état de somnambulisme eût été rompu immédiatement après le travail d’exploration.
Cet état de calme, que je me gardais d’interrompre par des questions adressées anx dormeurs, a été souvent pour moi le sujet d'observations curieuses et tout à fait inattendues. C’esl ainsi qu’un jour une somnambule, que je croyais inactive d’esprit comme
elle l'était du corps, m’adressa la parole pour me dire • qu'elle apercevait quelqu'un qui se dirigeait chez moi pour me demander-une consultation de somnambule, mais qu’il fallait absolument la lui refuser. Elle me donna des détails sur ce personnage, qu’éveillée elle ne connaissait pas, mais qu elle apercevait distinctement en ce moment.
« Il vient, me dit-elle ; il monte, il va sonner ; mais renvoyez-le, je vous en supplie ; quand il sera parti, je vous dirai ce qu’est cet homme. » A ma grande surprise, on sonna effectivement, et un monsieur, que je ne connaissais point non plus, me pria de le mettre en communicalion avec un somnambule, me disant qu’il était souffrant. Je lui exprimai le regret de ne pouvoir satisfaire à sa demande et l’ajournai ; il me laissa son nom, son adresse, et partit.
Rentré auprès de la somnambule, je vis la satisfaction qu’elle éprouvait de ce que j’avais éconduit le visiteur. Elle me dit alors : « Cet homme est un empoisonneur; je le sens, je le vois. » Et continuant, elle me détailla les circonstances les plus minutieuses sur deux meurtres qu’il avait commis. Remplie d’effroi, les mains et les traits crispés, comme si elle eût été elle-même en proie à l’action de quelque poison, elle souffrait dans l'estomac et les intestins.
Je fis cesser cet état que je croyais un désordre de ses idées; redevenue calme, elle persista dans ses aveux, et me pria surtout de ne pas permettre que cet homme l’approchât jamais. «Je lui dirais tout, disait-elle; c’est un monstre abominable. »
Eveillée, je l’interrogeai adroitement pour savoir si réellement elle ne connaissait point le personnage qui
venait d'être l’objet de son effroi : son nom no lui rappela aucun souvenir et ne lui donna pas la moindre animation. Dans un autre sommeil, elle me parla encore de l’empoisonneur et me remercia de ne point lui avoir écrit. Je lui on avais caché la demeure, mais elle ne lui était point inconnue en somnambulisme, et elle sut fort bien me dire qu’il demeurait près de la rue Mandar; cç qui était vrai.
Craignant toujours que ce fût une hallucination duc à des rêves qui ont quelquefois lieu en somnambulisme , je fis taire en moi toute réflexion propre à me convaincre de la réalité d’une vision surnaturelle. Jo préférais le doute. Mais, à quelque temps de là, quelle ne fut pas ma surprise ! un homme du même nom que celui dont j’avais la carte fut traduit en cour d’assises pour fait d'empoisonnement sur deux femmes. La justice l’acquitta n’ayant que des preuves morales. Mais elles étaient tellement accablantes qu’en en entendant l’exposition on dut croire qu’il serait condamné.
Les crimes cachés n’échapperont pas toujours au glaive de la loi. Il viendra un temps où le somnambulisme sera l’auxiliaire de la justice dans la recherche des coupables; mais celui qui, maintenant, voudrait en préconiser l’emploi serait regardé comme un insensé. La vérité se distingue de- l’erreur en ce que celle-ci va vite et parcourt rapidement le monde, l’autre chemine lentement ; cependant elle arrive et reste, tandis que l’erreur s’évanouit. Le magnétisme, un jour, sera la gloire de la science; mais, hélas ! ce jour est loin encore, et nous ne le verrons pas.
Baron du Potet.
ÎR AIT EM ENTS MAGNÉTIQUES
Du Doclenr Cutler, de Nashua 'New-Hampshire;.
Depuis plusieurs années, je m’occupe de magnétisme dans ma pratique, et je suis maintenant bien convaincu que l’imagination ne joue aucun rôle dans ses effets. En d’autres termes, le magnétisme repose sur une vérité; c'est une science réelle. J’ai surtout dirigé mon attention vers son emploi comme agent médicinal. J’ai vu plusieurs intéressantes expériences -touchant les opérations qu’on peut faire pendant le sommeil magnétique; je ne les rejette pas de la science, mais je ne me suis occupé que de la puissance thérapeutique du magnétisme dans le traitement des maladies où je pense qu’il est de la plus grande utilité.
Je vais citer quelques maladies où j’ai réussi, et faire connaître quelques effets que j’ai reconnus dans ma pratique. Ce sont l’augmentation de l’activité circulatoire des capillaires,lachaleuret!a libre transpiration, ainsi que le déplacementdela douleur etlasom-nolence, quoique moinsfréquenteque les autres effets.
Je vais relater quelques laits où l’imagination rie peut être pour quelque chose dans les résultats.
PARALYSIE.
Première observation.
E. Bnrret, Agé de vingt-quatre ans, était, depuis huit ans, affecté d’une paralysie du bras droit, et depuis trois environ souffrait beaucoup de douleurs de tète etdedos, accompagnées de dyspnée et toux. Depuis plusieurs mois il me tourmentait de l’endormir par curiosité. Je le magnétisai enfin, et produisis le sommeil en moins de quinze minutes. La chaleur de la peau et la circulation des vaisseaux capillaires furent de beaucoup augmentées, une libre transpiration survint, et le bras paralysé devint chaud et moite. Je répétai quatre fois cette expérience. Les doulpurs de téte, du cou et de la poitrine disparurent en même temps que la dyspnée et la toux, et la sensibilité et la mobilité furent rétablies dans le bras paralysé. J’ai obtenu le même résultat dans deux cas analogues.
Deuxième observation.
II y a quelques mois, je fus consulté par Miss S. H., qui, depuis plus de quatre ans, était en proie à de violentes douleurs de la partie occipitale de la téte, avec perte de la sensibilité et de la puissance musculaire d’un côté, ce qui lui faisait tenir le cou de travers. Comme elle avait été soumise sans aucun
succès à différenles méthodes do traitement, je lui conseillai d'essayer l’emploi du magnétisme. Elle y consentit. A la première séance, il se produisit un sommeil imparfait, à la suile duquel survint une très-abondanle transpiration de la partie paralysée. Je répétai la magnétisation plusieurs jours de suite; la douleur de tète disparut, et Insensibilité et la mobilité revinrent dans la partie affectée. Dans ce cas, j’ai observé le somnambulisme le plus complet. La malade est maintenant parfaitement bien.
ULCÈRE.
Miss R. Meintyre était, depuis deux ans, affectée à la cheville du pied d’un ulcère d’environ deux pouces de diamètre. La douleur était si violente qu’elle passait la plupart du temps sans sommeil. Le pied était très-enflé; d’habiles chirurgiens avaient donné leurs moyens, mais sans succès. En juin 1837, cette demoiselle s’adressa à moi pour essayer les effets du magnétisme. Je lui magnétisai l’ulcère et le pierl sans chercher à produire le sommeil. L'effet immédiat fut la cessation de la douleur qui la faisait tant souffrir, une diminution visible de la rougeur qui bordait l’ulcère et la réduction de l’enflure. Le pied, qui avait été froid depuis plusieurs mois, devint chaud ; et, sans l’emploi d’autres moyens que le magnétisme, l’ulcère fut rapidement guéri. Cette jeune personne est maintenant très-bien ; sa santé n’a nullement souffert de la guérison de cet ulcère. Ce fait et phénomène intéressant de la diminution de te rougeur qui Rocomp«$we l’ififlâm-
mntion des parties voisines du foyer ulcéré, sous l'action immédiate du magnétisme, a été constaté par plusieurs, personnes présentes, et nommément les docteurs Ebenezer, Dearborn de Nashua, Hartlett et Kimhall de Lowel.
Si l'agent magnétique, quel qu'il puisse être, enlève immédiatement la douleur, l’enflure, la rougeur et la chaleur qui accompagnent l’auréole inflammatoire de cet ulcère, qui veut qu’il n’en soit pas de même dans l'inflammation du cerveau, des poumons, de l'estomac, du foie ou de tout autre organe? Quelques autres faits, qui sont parvenus à ma connaissance, me portent à croire qu’il en est comme dans ce cas. Les faits comme celui-ci ouvrent un intéressant champ de recherches pour les médecins philanthropes et amis de la science. Je désire bien sincèrement que quelques médecins instruits emploient leurs talents d’investigation à s’enquérir de ces faits et publient leurs observations dans l’intérêt général de l’humanité, et surtout de ceux qui souffrent.
Dans plusieurs circonstances, j’ai réussi à guérir sans produire même le sommeil, ni même la somnolence, des personnes incrédules au magnétisme. Ces expériences sont intéressantes et importantes, parce qu’elles montrent le pouvoir qu’ont les bons magnétiseurs d’agir sur les organes malades, sans troubler les fonctions normales des autres parties de l’organisme, ce qui augmente beaucoup la valeur du magnétisme comme agent thérapeutique. Car tous les médecins savent parfaitement bien que, pour guérir tel organe, la médecine met souvent le trouble dans les fonctions de quelque autre d’une importance vitale 5
et bienheureux alors pour le patient si le désordre fonctionnel ainsi causé ne devient point organique. Si nous pouvons, par des expériences cl observations faites avec soin, montrer que les effets que nous avons relatés plus haut sont vrais, le pouvoir médicatpur du magnétisme est un don qui n’est pas à dédaigner. Comme il est probable que la plupart des maladies fatales commencent souvent par une simple irritation de quelque organe, comme tout porte à le croire, cette irritation n'est, à son début, qu’une augmentation de la sensibilité, causant un afflux de fluides dans celte partie ; et l’effet direct, et évidemment spécifique du magnétisme, étant de diminuer la sensibilité et l’activité vasculaire, ne peut-on pas espérer du soulagement de l’emploi de ce moyen dans l’inflammation et irritation des organes? Ce soulagement, moi, je l’ai obtenu dans l'inflammation tlu cerveau, des bronches, des poumons, du foie, de Yestomac et des membres. Je veux mentionner ici une ebosebien digne de remarque: c’est que les patients que j'ai magnétisés pour les maladies ci-dessus désignées se servaient du même langage pour décrire les effets du magnétisme sur eux ; comme, aussi, la chaleur et la transpiration consécutives à la paralysie magnclie/ue sont analogues à celles qui suivent la paralysie pathologique traitée magnétiquement, d’où j'infère que l’action du magnétisme est la même sur les organes d’une importance vitale que sur les membres. C’est là, pour moi, un intéressant champ de recherches.
Je vais détailler encore quelques cas.
M™' Ober, respectable personne de cette ville, fut atteinte, il y a environ dix huit mois, d’une maladie de peau invétérée, accompagnée d’une intolérable démangeaison, à tel point que souvent cette pauvre dame restait plusieurs jours et nuits sans pouvoir prendre un instant de sommeil. A la requête de sa famille, et particulièrement de son fils, M. Benjamin Ober de Montcville (Maine), j’entrepris de la magnétiser dans le mois de juin dernier; je continuai quelques jours, et la malade devint bonne somnambule. A !a surprise de tous, l’intolérable démangeaison fut enlevée immédiatement et ne reparut plus. L’éruption cutanée diminua beaucoup sous l’emploi du magnétisme; mais, ayant cessé de magnétiser cettedame, j’appris plus tard qu’elle était morte de dyssenterie dans le mois d'août suivant.
ACCOUCHEMENT.
En juin 1837 je fus appelé comme accoucheur auprès de Mme Fern, qui était en couches depuis qua-ranle-huit heures. La marche des douleurs ordinaires était irrégulière et elle n’avait pas eu de sommeil depuis trois nuits. A sa prière et en présence de M"1" Lawrence et Waston , je la magnétisai. Elle tomba dans le sommeil magnétique en moins d’une minute. Je dois faire observer que je n’avais jamais vu cette dame auparavant. Son sommeil fut très-paisible et elle dormit environ trois beuies, et à son ré-
vcil elle se trouva beaucoup soulagée. A ma propre surprise et à l'étonnement de ces dames, nous observâmes cet intéressant fait et phénomène, savoir : que les coiilraclions spéciales et régulières de l utérus qui accompagnent l'accouchement continuaient avec une régularité parfaite.
NÉVRALGIE OU TIC DOULOUREUX.
Appelé auprès de miss E. M... de celte cité, je trouvai que la maladie avait son siège dans le côté droit de la face; la portio dm a des anatomistes étant affectée de longue date, je proposai l’essai du magnétisme.
Elle y consentit. Le somnambulisme se développa au bout de quelques minutes; je la laissai dormir quelque temps, et quand je l’éveillai la douleur avait disparu. Je la magnétisai encore quelques fois, et depuis la douleur n'a plus reparu.
NÉVRALGIE DENTAIRE.
Miss D... s’était adressée à un habile dentiste, le docteur Reed, pour une dent cariée, qu'il jugea devoir remplir avec une feuille d’or. Mais le nerf étant découvert et très-sensible, on fut obligé d’enlever la feuille d’or, qui fut ensuite remise et enlevée plusieurs fois. Cette demoiselle ne pouvait endurer la pression de l’or sur le nerf malade. Toutes les ramifications du trifacial étaient devenues douloureuses, et, ne pouvant rester dans cet état, cette personne me fit appeler pour obtenir quelque soulagement par le Magnétisme. Dès la première séance la douleur fut
enlevée; mais il ne se manifesta pas le moindre symptôme de sommeil. Quelque temps après il y eut un retour partiel de la douleur; je la magnétisai de nouveau. A cette séance il y eut un commencement de somnambulisme lucide et la douleur n'a plus reparu. D’après ce résultat et quelques autres, je pense que le magnétisme devrait fixer l’attention des chirur-giens-dentisles.
DELIRIUM TREMENS.
M. L..., affecté d’un delirium tremens, causé par le fréquent usage des boissons alcooliques, s’adressa à moi pour obtenir quelque soulagement. Il avait passé plusieurs nuits sans sommeil, et les opiacés ne lui avaient produit aucun bien. J’essayai l’emploi du magnétisme, qui, en peu de temps, fit cesser le tremblement et procura du sommeil. Je le magnétisai encore deux ou trois fois, et cet homme fut en état de reprendre ses travaux ordinaires. Dans ce cas, où il y a augmentation d’action avec diminution de la puissance musculaire, je pense que les malades peuvent éprouver le plus grand bien de l’usage du magnétisme.
BRONCHITE.
Miss A. C... depuis deux ans souffrait cruellement d’une bronchite chronique caractérisée par la toux, dyspnée, douleur dans la poitrine et entre les épaules. Après avoir essaye de plusieurs choses, elle se décida à se faire magnétiser; elle fut magnétisée plusieurs fois, et à chaque séance la dyspnée, la toux el
les douleurs diminuèrent sensiblement, et cela sans influencer une autre partie de l’organisme Les paroxysmes de toux et de dyspnée devinrent moins intenses et aussi moins fréquents; mais sa position ne lui permettant pas de continuer, elle cessa de se faire magnétiser. Elle est maintenant beaucoup mieux , mais non guérie.
DYSPEPSIE HT IIUIITATION SPINALE.
Miss F. F... était affectée, depuis quelques années, de douleurs dans l’estomac et le dos, accompagnées d’un malaise général; l'appétit était capricieux et les aliments difficilement digérés. Je la magnétisai dans cet état. Le sommeil apparut bientôt; puis une abondante transpiration suivie d’une diminution sensible »le la douleur. Je continuai quelque temps ; la douleur du dos, de l’estomac et le malaise qui survenait après 1 ingestion des aliments furent complètement enlevés. Pendant son traitement, cette demoiselle devint somnambule lucide, mais, la maladie guérie, je vis disparaître la lucidité et même toute influence magnétique. Ceci est un fait digne de remarque dans l’emploi du magnétisme comme agent thérapeutique.
CÉPHALALGIE ET DYSPEPSIE.
Je fus, il y a quelque temps, appelé auprès d’uno dame de Chelmsford, qui, depuis deux ans, était affectée de douleurs violentes et de chaleur brûlante dans l’estomac et la poitrine,et aussi d’une pesanteur de tête contre laquelle elle' avait essayé différentes choses qui n’avaient produit aucun soulagement. La
peau était pâle cl les extrémités glacées. Je conseillai une médication légèrement apéritive et le magnétisme. A la première magnétisation, la douleur de têle el celle de l'estomac surtout augmentèrent beaucoup; mais peu après il survint une transpiration abondante, de la chaleur à la peau et aux extrémilés, et la malade se trouva soulagée Je continuai de la magnétiser chaque jour pendant deux semaines environ. Chaque magnétisation était suivie des mêmes elîets que la première. Mais l’augmentation principale de la douleur diminua graduellement au point que l’action magnétique cessa d’être désagréable. En moins de trois semaines les douleurs de la tête, des poumons et de l’estomac ont complètement disparu, et depuis cotte dame a continué d’être bien.
HÉPATITE CHRONIQUE.
M"' A... me consulta dernièrement pour une douleur qu’elle éprouvait à la tête et dans la région du foie avec digestions nénihles. Ces malaises avaient plusieurs années de date «telle avait pris sans succès un grand nombre de médecines. Je la magnétisai selon son désir, et au bout de quelques jours la douleur do tète disparut sans retour; mais il n’en fut pas de même pour celle du côté, qui n’éprouva aucune amélioration. .l’appliquai alors un vésicatoire sur l’hy-pocondre droit; je continuai de magnétiser, et j’eus la satisfaction de voir bientôt cesser la douleur hépatique. Celte malade est très-bien maintenant. Dans ce cas, le magnétisme et la vésication se sont aidés mutuellement.
Après avoir usé de tous les moyens, Mmf S. A... me x)t appeler pour la magnétiser. Ce cas est un des plus ■compliqués quej’aijamais vus. Depuis plus de quatre , ns cette dame était affectée de douleurs de tête violantes, vertiges, insumnie portée à tel point que la malade disait ne pas avoir passé une seule bonne nuit depuis plusieurs années, et elle passait fréquemment plusieurs nuits consécutives sans aucun sommeil. Il v' avait une douleur constante dans le côté gauche et ;;:s intestins, accompagnée du cortège ordinaire de .¡jette maladie, c’est-à-dire de fréquents accès de vomissements de sang et des selles de môme matière, ^’inflammation des entrailles était grande ; les coliques intenses et l’expulsion des urines douloureuse. >es aliments, soit liquides, soit solides, s’ils n'étaient :;iistantanément vomis, causaient de violentes dou-Vturs.
Tels étaient les symptômes les plus apparents.
Je commençai donc son traitement par 1 influence *iu magnétisme. Le troisième jour le sommeil fut '-omplet, et au bout de quelques jours elle dormait déjà mieux; les douleurs céphaliques et abdominales Wiminuaient d’intensité.
De temps en temps j’administrai quelques médicaments que les cas semblaient réclamer et cherchai à Produire une révulsion externe. Cette dame devint acide, s’examina et indiqua plusieurs choses comme devant lui être salutaires; j'adoptai ses prescriptions,-qui me parurent, en effet, convenables. Elle est main-
tenant incomparablement mieux ; elle dort bien et a pu depuis quelques mois manger quelques aliments sans incommodité. Les douleurs générales et les vertiges sont de beaucoup diminués. L’hématémèse, les selles sanguines ont disparu complètement, et le trouble des fonctions urina iras esl amendé beaucoup. Il y a quelques jours elle s’examina dans l’état magnétique et dit que le magnétisme lui avait été d’un grand secours, mais que les médicaments qu’elle avait pris lui avaient aussi été utiles. Elle dit que le rejet des aliments venait d’un ulcère dans l’estomac et non dans les intestins, comme je l’avais supposé, et qu’il était guéri par le magnétisme et une médecine particulière. C’était aussi, selon elle, la cause de ses indigestions. Elle affirma qu’il y avait dans les entrailles huit grandes escarres à la place des ulcères et que la vessie ne serait jamais bien, quoiqu’alors elle fût mieux. On l’a informée de ses assertions à chaque fois qu’elle s’est examinée. Je dois encore mentionner qu’elle trouva que sa tête avait été beaucoup soulagée par le magnétisme, mais qu’elle ne serait jamais complètement bien. Elle annonça que son côté irait bien, et c’est ce qui s’est en effet vérifié.
Je pense que dans ce cas l’union du magnétisme avec la médecine a été très-heureuse et a contribué à produire un résultat bien satisfaisant en luttant avec avantage contre une telle complication de maladies que plusieurs juges expérimentés avaient jugées incurables. Ce cas et quelques autres donnent de la force aux remarques de l’excellent Deleuze sur l’union du magnétisme avec la médecine.
ACTION DES NARCOTIQUES SUR LE CERVEAU.
TROUBLE DE ^INTELLIGENCE, HALLUCINATIONS.
Études préparatoires du somnambulisme magnétique.
II n'est aucun des singuliers états que nous allons d’abord décrire qui soit lucide ou prophétique. Ce sont des fruits acerbes ou empoisonnés, mais ils doivent être étudiés avec soin et rapprochés de l’extase et du sommeil magnétiques; on jugera mieux de ceux-ci. C'est lr- jour et la nuit de l'intelligence que nous allons exposer ici. Ces matériaux précieux pour le physiologiste et le psychologue intéressent aussi le magnétiseur et doivent servir à son instruction. Les réflexions suggérées par ces faits trouveront leur place à la fin de la série des phénomènes magnétiques et somnambuliques qui sortent de la ligne commune, qui cessent d’être purement physiques.
§ I. — EFFETS DU HACHISCH.
Première observation.
De tout temps, les Orientaux, à qui leur religion interdit l’usage du vin, ont cherohé à satisfaire par
diverses préparations ce besoin d’excitation intellectuelle commun à tous les peuples, et que les nations deTOccidcnt contentent nu moyen de spiritueux et de boissons fermentées. Le désir de l'idéal est si fort chez l’homme qu’il tâche, autant qu’il est en lui, de relâcher les liens qui retiennent l'âme nu corps, et comme l’extase n'est pas à la portée de toutes les natures, il boit de la gaité, il fume de l’oubli et mange de la folie, sous la forme du vin, du tabac et du hachisch. — Quel étrange problème ! un peu de liqueur rouge, une bouffée de fumée, une cuillerée d’une pâte verdâtre, et l'âme, celte essence impalpable, est modifiée à l'instant; les gens graves font mille extravagances, les paroles jaillissent involontairement de la bouche fies silencieux, Hérédité rit aux éclats et Démocrite pleure.
Le hachisch est un extrait de la fleur de chanvre (cannabis Indien) (l), que l’on fait cuire avec du beurre, des pistaches, des amandes et du miel, de manière à former une espèce de confiture assez ressemblante à lu pâte d'abricot et d’un goût qui n’est pas désagréable. — C’était du hachisch que faisait manger le Vieux de la Montagne aux exéculcurs des meurtres qu’il commandait, et c’est de là que vient le mot assassin,— hachacliin (mangeur de hachisch).
La dose d’une cuillerée suffit aux gens qui n’ont pas l’habitude de ce régal de vrai croyant. — L’on arrose le hachisch de quelques petites tasses de café sans sucre à la manière arabe, et puis l’on sc met à
0 ) Scion M. Ralier, le chanvre do nos pays a la même propriété. De là le danger de t'endormir dans des champs qui en »oui piaules. Le houblon, qui e>l delà même agll au«si de '»ênc.
table comme à l’ordinaire, — car l’esprit du chanvre n’ngit qu’au boui de quelque temps. — L’un de nos compagnons, le docteur *“*, qui a fait de longs voyages en Orient, et qui est un déterminé mangeur de hachisch, fut pris le premier, en ayant absorbé une plus forte dose que nous; il voyait des étoiles dans son assiette et le firmament au fond de la soupière; puis il tourna le nez contre le mur, parlant tout seul, riant aux éclats, les yeux illumin 's et dans une jubilation profonde. Jusqu’à la fin du diner je me sentis parfaitement calme, bien que les prunelles de mon autre convive commençassent à scintiller étrangement et à devenir d’un bleu de turquoise tout à fait singulier. Le couve.t enlevé, j’allai m’asseoir, ayant encore ma raison, sur le divan, où je m’arrangeai euti» des carreaux de Maroc le plus commodément possible pour attendre l’extase. Au bout de quelques minutes, un engourdissement général m’envahit. Il me sembla que mon corps se dissolvait et devenait transparent. Je voyais très-nettement dans ma poitrine le h chisch que j’avais mangé sous la forme d’une én.eraude, d’où s’écliaj paient des millions de peti.es étinci.les; les ci’.s de mes yeux s’ul rongeaient imléf. nim.?nt, s’enroulant comme (.’es fi s d’or sur de petits rouets d’ivoire qui tournaient tout seuls avec une éblouissante rapidité. Autour de moi, c’étaient des ruissellements et des écroulements de pierreries de toutes couleurs, des arabesques, des ramages sans cesse re. ouvelés, que je ne saurais mieux comparer qu’aux jeux du kaléidoscope; je voyais encore mes camarades à certains instants, mais difigurés, moitié hommes, moitié plantes, avec des airs pensifs d’Ibis
debout sur une patte, d'autruche battant des ailes, si étranges que je me tordais de rire dans mon coin, et que, pour m’associer à la bouffonnerie du spectacle, je nie mis à lancer mes coussins en l’air, les rattrapant et les faisant tourner avec la dextérité d’un jongleur indien. L’un de ces messieurs m’adressa en italien un discours que le hachisch, par sa toute-puissance, me transposa en e.-pagnol. Les demandes et les réponses étaient presque raisonnables et roulaient sur des choses indifférentes, des nouvelles de théâtre ou de littérature.
Le premier accès touchait à sa fin. — Après quelques minutes je me retrouvai avec tout mon sang-froid, sans mal de tête, sans aucun des symptômes qui accompagnent l’ivresse du vin et fort étonné de ce qui venait de se passer. — Une demi-beure s’était à peine écoulée que je retombai sous l’empire du hachisch. Cette fois la vision fut plus compliquée et plus extraordinaire. Dans un air confusément lumineux voltigeaient avec un fourmillement perpétuel des milliards depapillons dont les ailcsbruissaientcomme des éventails. De gigantesques fleurs au calice de cristal, d’énormes passe-roses, des Iis d’or et d’argent montaient et s’épanouissaient autour de moi avec une crépitation pareille à celle des bouquets de feux d’artifices. Mon ouïe s’était prodigieusement développée ; j’entendais le bruit des couleurs. Des sons verts, rouges, bleus, jaunes, m’arrivaient par ondes parfaitement distinctes. Un verre renversé, un craquement de fauteuil, un mot prononcé bas, vibraient et retentissaient en moi comme des roulements de tonnerre ; ma propre voix me semblait si forte que je
n’osais parler, de peur de renverser les murailles ou de me faire éclater comme, une bombe; plus de cinq cents pendules me chantaient l’heure de leurs voix flûtées, cuivrées, argentines. Chaque objet effleuré rendait une note d'harmonica on de harpe éolienne. Je nageais dans un océan de sonorité où flottaient comme des îlots de lumière quelques motifs de la Lu-cia et du Barbier. Jamais béatitude pareille ne m’inonda de ses effluves : j’étais si fondu dans le vague, si absent de moi-même, si débarrassé du moi, cet odieux témoin qui vous accompagne partout, que j'ai compris pour ¡a première fois quelle pouvait être l'existence des esprits élémentaires, des anges et des âmes séparées dû corps. J’étais comme une éponge nu milieu de la mer; à chaque minute, des flots de bonheur me traversaient, entrant et sortant par mes porcs, car j’étais devenu perméable, et jusqu'au moindre vaisseau capillaire tout mon être s’injectait de la couleur du milieu fantastique où j'étais plongé. Les sons, les parfums, la lumière m’arrivaient par des multitudes de tuyaux minces comme des cheveux, dans lesquels j’entendais siffler les courants magnétiques. — A mon calcul, cet étal dura environ trois cents ans, car les sensations s’v succédaient tellement nombreuses et pressées que l’appréciation réelle du temps était impossible. — L'accès passé, je vis qu’il avait duré un quart d’heure.
Ce qu'il y a de particulier dans l’ivresse du hachisch,c’est qu’elle n’est pas continue; elle vous prend et vous quitte, vous monte au ciel et vous remet sur terre sans transition, — comme dans la folie on a dea moments lucides. — Un troisième accès, le der-
nier et le plus bizarre, termina ma soirée orientale. — Dans celui-ci ma vue se dédoubla. — Deux images de chaque objet se réfléchissaient sur ma rétine et produisaient une symétrie complète; mais bientôt la pâle magique tout à fait digérée agissant avec plus de force sur mon cerveau, je devins complètement fou pendant une heure. Tous les songes pantagruéliques me passèrent par la fantaisie : caprimulges, coquesigrues, oisons bridés, licornes, griffons, cauchemars, toute la ménagerie des rêves monstrueux trottait, sautillait, voletait, glapissait par la chambre; c’étaient des trompes qui finissaient en feuillages, des mains qui s’ouvraient en nageoires de poisson, des êtres hétéroclites avec des pieds de fauteuil pour jambes et des cadrans pour prunelles, des nez énormes qui dansaient la cachucha montés sur des pattes de poulet; moi-même je me figurais que j’étais le perroquet de la reine de Saba, maîtresse de défunt Salomon. Et j’imitais de mon mieux la voix et les cris de cet honnête \olatile. Les visions devinrent si baroques que le désir de les dessiner me prit, et que je fis en moins de cinq minutes, avec une vélocité incroyable, sur des dos de lettres, sur des billets de garde, sur les premiers morceaux de papier qui me tombaient sous les mains, une quinzaine de croquis les plus extravagants du monde. L’un d’eux est le portrait du docteur"*, tel qu’il m’apparaissait, assis au piano, habillé en Turc, un soleil dans le dos de sa veste. Les notes sont représentées, s’échappant du clavier, sous forme de fusées et de spirales capricieusement tircbouchonnées. Un autre croquis portant celte légende, — un animal de l'avenir, — re-
présente une locomotive vivante avec un cou de cygne terminé par une gueule de serpent d’où jaillissent des flots de fumée, avec des pattes monstrueuses composées de roues et de poulies; chaque paire de pattes est accompagnée d’une paire d’ailes, et sur la queue de l’animal, — on voit le Mercure antique qui s’avoue vaincu malgré ses talonnières. Grâce au hachisch j’ai pu faire, d’après nature, le portrait d’un farfadet. Jusqu’à présent, je les entendais seulement geindre et se remuer la nuit dans mon vieux buffet.
Mais voilà bien assez de folies. Pour raconter tout entière une hallucination de hachisch, il faudrait un gros volume, et un simple feuilletoniste ne peut so permettre de recommencer l’Apocalypse !
(Presse du 10 juillet 1843.)
[La tuile au prochain numéro.)
à m. le DiwxTti’R ni ¡mm w mmetisbf,
Monsieur,
Tous les magnétiseurs devant concourir à l’édification de la science magnétique par la publication de leurs travaux et de leurs observations,je vous adresse dans ce but les réflexions suivantes.
Emanation volontaire de l’homme, le magnétisme possède, comme agent thérapeutique, des propriétés où l’âme alu plus grande part. 11 peut, en rétablissant dans nos organes le principe spirituel, immatériel, qui nous anime, comme on remonte le moteur d’un rouage mécanique, retenir la vie, quand, prête à s’échapper, elle abandonne la lutte et menace'de ne laisser dans nos mains qu’un cadavre froid.
Depuis Mesmer, bien des preuves évidentes de ce fait se sont présentées à l’observation de ceux qu’uüe partialité systématique n’a pas empêchés d abaisser leurs regards sur les malades, après que l’oreîlle, ïes instruments investigateurs de la vie, ou tout atftfe moyen de la science, avaient présagé la mort comhle prochaine cl inévitable.
Un seul fuit de celte nature, vu et vérifié par des hommes compétents, jurait dû suffire pour attitfér
sur les autres l'attention de tout médecin réellement humanitaire. Mais, hélas! il n’en a point encore été ainsi ; et si toutes les bonnes choses ont été difficiles à introduire dans le domaine de l’humanité, aucune, jusqu'à ce jour, n’a rencontré plus de contradictions que le magnétisme vital. Un refus obstiné a toujours été l’écueil où sont venus échouer nos eflorls. Et quand nous avons prié, sollicité de voir, de bien voir, d’examiner attentivement, d’apprécier personnellement les résultats qu’on peut obtenir a^c uno volonté ferme, une bienveillance sans bornes et une constance à toute épreuve, qu’avons-nous obtenu? toujours le mépris et quelquefois la haine.
Malgré l’arme du ridicule, dont on nous a si souvent flagellés, nous avons senti que la noble mission que nous adonnée l’auteur de toutes choses doublait notre courage, et que lu vérité devait être la seule déesse de notre culte. Nous avons plaint ceux qui ont voulu rester aveugles lorsque la lumière pouvait briller pour tous, et nous avons pardonné quand des hommes, qui pouvaient devenir le flambeau de lu science, n’ont répandu sur nous que le sarcasme et le mépris.
Maintenant qu'un cortège imposant de faits militent en faveur des doctrines nouvelles, nous espérions que l’aveuglement cesserait; mais il n’en est rien, et nous avons, à la dernière séance annuelle de la Société phrénologique, entendu M. Mège, membre de l’Aca-démie de Médecine, prononcer un discours où il nie la puissance thérapeutique des doses infinitésimales et la faculté qu’ont les somnambules magnétiques de voir à distance.
A entendre des dénégations aussi positives, on
pourrait croire que c’est par une enquête sévère, des expériences minutieuses, un examen consciencieux qu’on a acquis le droit de parler ainsi. Il n’en est rien ; cependant, pas une tentative de ce genre n’a été fuite. Il est, en effet, bien plus facile de nier ce qu'on n’a pas voulu voir que de suivre attentivement les effets produits par les forces dynamiques des médicaments homœopathiques, ainsi que les facultés qui se développent sous l’influence du fluide magnétique chez certains sujets où ce fluide devient le milieu servant d’intermédiaire à toutes les perceptions, même à la communication de la pensée, qui peut ainsi se manifester sans la parole ou tout autre signe de convention.
Cette communication est admise , et pourtant elle est aussi difficile à concevoir que la vue d’événements passés ou futurs, dont on ne peut avoir cennaissan.ce dans l’état de veille, parce qu’ils ne s’enchaînent, soit comme cause, soit comme effets, avec rien de ce que l’on connaît.
Voilà le grand mot lâché : prévoir les événements futurs !
Comment expliquer cette prévision singulière? Jusqu’à ce jour, on l’a tenté vainement ; mais voici la réponse d’un somnambule devant qui celte question s’agitait; elle contribuera peut-être à jeter quelque jour sur ce fait important. « L’idée de la toute-« puissance répond à toutes ces objections. Nous « la voyons journellement tirer d’un seul type une « multitude de formes diverses. La même pensée qui, « dans l’immensité de l’univers, a soumis la matière « à ces formes innombrables, l’a sans doute organisée
« flans les mémos rapports. Ainsi, les sens, sans changer tle destination, peuvent également être « modifiés à l’infini. Le seul être immuable dans tous « les mondes est ce qui ne peut revêtir aucune forme, « est un être simple dont l'essence tient à l’essence « divine, et cet être immuable et simple, dit-il dune * voix élevée, c’est l’âme. »
Tout prouve que le principe de l’intelligence est immatériel, et peut agir sur la matière. C’est aussi l’idée prédominante dans toutes les religions, et il n’est pas plus permis à M. Mège de nier la puissance de l’âme sur la matière que les modifications qu’elle exerce sut les organes cérébraux dont l’action seule est sensible^
Si tou« les efforts de ce médecin tendent à propager la philosophie phrénologique, qu’il a reconnue et q«i est loin d’être acceptée par tous, qu'il agrandisse donc le champ de ses observations, et bientôt il sera eonvaincu des vérités que nous défendons ; il en acceptera les conséquent es; alors notre force sera ang-mentée, et la marche de la lumière grandira en raison des moyens investigateurs que nous réunirons.
D. PlCHARD,
Fondateur« tice-président de lu Société Pbiljnthropicu-MagnCtologiyue.
MANUEL DU MAGNÉTISEUR.
(Suite.)
-GUÉaiSOM d’i’NE GASTRO-ENTÉIIITE AIGUË AVEC CONGESTION CÉRÉBRALE (ÉTAT DÉSESPÉRÉ.)
Pendant l’hiver Je 1830, M""' F..., jeune femme de vingt-quatre ans, fut prise d’une maladie inflammatoire des plus intenses. Tous les viscères du ventre étaient le siège d’une phlegmasie portée au degré le plus violent qui se puisse voir. Bientôt les fâcheux symptômes qui caractérisaient son état se compliquèrent de violentes douleurs de téte qui furent suivies d’une congestion cérébrale des plus graves. M1“'1 F... était d’un tempérament sanguin très-prononcé, vive, impatiente à l’éxcès et d’un caractère, par conséquent, très-irritable ; je n’ai pas besoin de dire que la médecine la plus active fut employée par moi dés le début de la maladie, mais malheureusement sans aucun succès; les saignées réitérées, les applications nombreuses de sangsues, les bains, etc., etc., tout fut inutile, ou du moins né parvint point à entraver la marche de la maladie. M. le professeur Fou-quinr, appelé en consultation, joignit ses efforts aux miens; mais des vésicatoiivs ftux cuisses, qu’il pro-
posa, lurent obstinément repoussés par la malade ; ¡1 ne paraissait plus possible de tenter de nouvelles saignées, à cause de l'état de faiblesse où se trouvait la malade. Nous jugeâmes le cas tellement grave que nous annonçâmes à la famille que nous prévoyions une catastrophe comme infiniment probable et prochaine. Je voyais la malade trois fois par jour ; elle déclinait sensiblement, et dans les derniers jours on accourait souvent en toute hâte chez moi, me priant d’y aller bien vite, car on croyait à tout instant qu’elle allait périr.
Un soir qu’elle était extrêmement mal, je voulus la voir une dernière fois avant de rentrer chez moi; il était entre dix et onze heures ; la journée avait été mauvaise, toute la famille épuisée de fatigue prenait un peu de repos ; la garde même, luttant contre le sommeil, veillait à moitié sur son siège. Ma venue ne dérangea personne et je m’approchai de ma malade qui était sans mouvement; je m’assis en silence à côté d’elle et contemplai quelques instants cette intéressante femme, dont la mort semblait déjà s’emparer. Sa belle ligure était à peine éclairée par la lueur d’une bougie qui finissait ; c’était le calme précurseur du néant. La malade fit un léger mouvement ; je lui pris la main et lui fis connaître que j’étais près d’elle; elle me reconnut, mais ne me parla pas. 11 me vint tout à coup la pensée de la magnétiser ; je ne sais en vérité comment cette idée me vint, car il y avait bien deux ans que je n’avais eu occasion de renouveler des expériences magnétiques, et je n’aurais certes point songÆ à proposer un pareil moyen dans de telles circonstances. Enfin, je magnétisai, je puis
bien dire en présence (le Dieu seul, car la garde, contenle de me savoir là, s'abandonnait au sommeil en toute sûreté de conscience, et ma malade à coup sûr n’était guère en étal de s’occuper de ce que je faisais. Je magnétisai donc et je magnétisai avec cette confiance résolue que donne une bonne intention. Vingt minutes environ s’écoulèrent pendant lesquelles le silence le plus profond régnait dans l’appartement ; je n’avais certes pas envie de le rompre ; j’avais trop peur, en cherchant à interroger ma malade, de détruire l’espoir que je commençais à prendre en voyant un calme bienfaisant s’emparer d’elle peu à peu. Je continuai jusqu’à ce que la fatigue me contraignit à m’arrêter pour reposer un peu mes bras; alors je remarquai que la malade était comme inondée par une sueur abondante qui couvrait son visage et sa poitrine ; mais craignant de me tromper à cause de l’obscurité qui nous enveloppait presque, je portai la main sur son front; aussitôt elle me dit d’une voix à peine articulée : Mon Dieu ! quel bien vous me faites'.... Puis un peu après : Que faites-vous donc qui me Jail tant de bien? J’avouo que ces paroles et la manière dont elles furent prononcées produisirent sur moi un sentiment indéfinissable de plaisir; je lui répondis: « Ne vous occupez d’aucune « autre chose que de yous rétablir; vous avez une « forte transpiration qui vous sera salutaire; on va • vous changer de linge, et la nuit sera bonne, j’es-« père. » De suite je réveillai la garde qui se mit en devoir de donner à sa malade les soins dont elle avait besoin, et je me retirai l’esprit forf occupé do ce qui venait de ne passer.
Le lendemain de très-bonne heure je courus chez la malade; je la trouvai sensiblement mieux; elle n’avait qu’un souvenir très-confus de l’état où elle s’était trouvée la veille; seulement elle se souvenait m’avoir vu pendant la nuit et que je lui avais donné ou fait quelque chose qui lui avait fait beaucoup de bien. « Alors, lui dis-je, vous voulez bien que je continue? — Oh ! sans doute, » répondit-elle. J'étais un peu contrarié de magnétiser en présence d’nn tiers, et j’avoue que je regrettais de ne pas me trouver sous ce rapport dans les mêmes conditions que la veille. Il y a dans le magnétisme quelque chose d’intellectuel qui fait qu’on a presque honte de le prodiguer en présence de gens qui ne le comprennent pas, et d’ailleurs je me souciais fort peu que cette garde-malade allât rapporter de maison en maison que je traitais mes malades par le magnétisme (celle considération est certainement la cause que beaucoup de médecins, qui auraient envie peut-être d’expérimenter le magnétisme, ne l’osent pas dans la Crainie du qu'en dira-t-on; et moi-même j’avoue que je me suis vu souvent arrêté par cette crainte mondaine, dont il est difficile de se garantir entièrement). Cependant le désir de sauver ma malade l’emporta sur là puérile considération de ce qu’on pourrait dire de moi. Je magnétisai de nouveau en présence de la garde toute ébahie; la malade ne tarda pas à enlrer dans l’état de somhambul'snte complet ; quelques instants après je l’interrogeai; elle m’assura que je lui avais sauvé la vie, mais me dit qu’il fallait que je fisse une nouvelle saignée. J’eus beau lui faire observer qu’elle était extrêmement faibli», que je erai-
gnais d'interrompre la crise salutaire qui semblait vouloir s'opérer; elle n’en persista pas moins dans l’opinion qu’il lui fallait une saignée. Réveillée, elle n’eut aucune connaissance de ce qu’elle m’avait dit; elle me confirma seulement qu’elle se sentait beaucoup mieux; elle connaissait par ouï-dire le magnétisme, mais ne l'avait jamais vu pratiquer. Cependant je n’osai pas saigner ; le soir, profitant d’irti moment où il n’y avait point d’importuns, nous finies une nouvelle séance et de nouveau ma malade se prescrivit une saignée, en me faisant des reproches sur ce que jo n’avais point encore exécuté sa prescription. La journée s’était assez bien passée, mais la douleur de tête persistait avec beaucoup d'intensité. Je me décidai donc à faire la saignée le soir môme; lo lendemain la malade fut si bien que chacun autour d’elle s'étonnait d’un changement aussi prompt et aussi complet. A partir de ce moment, rien n’arrêta le progrès-de la convalescence ainsi que le retour à une santé parfaite, et M""' F..., que j’ai depuis perdue de vue, si elle a oublié le médecin, dpit garder au moins quelque bon souvenir du magnétisme.
Docteur Bésuchet.
11 y a des milliers de faits senblahles, et nous pourrions en grossir cet ouvrage. Tous sont réels, authentiques et le résultat d’une force physique qui existe en nous-mêmes. Cette force est à notre disposition; par des actes de volonté, elle franchit notre enveloppe, non par jet continu, mais par des espèces d’émissions que la volonté rend plus ou moins abou-
dantes, selon l’énergie du vouloir et la perfection des instruments qui servent à la transmission.
Chaque être possède celle force. Les enfants en ont même une quantité suffisante pour agir sur dos hommes faits cl sur des animaux.
La nature n’a point accordé de privilège : c'est une loi.
Pour développer des phénomènes et opérer quelques guérisons, nous avons déjà dit qu’il n'est pas nécessaire de connaître la nature du magnétisme. Ce n’est que lorsqu’on veut avancer dans l'étude de la science, cesser d’èlre machine magnétisante, et obtenir des effets physiques et moraux qui sortent de la ligne commune, que de nouvelles connaissances sont nécessaires. Le commençant peut s'en passer. Tous les hommes n’ont pas la capacité de les bien saisir, et des connaissances imparfaites ne sont propres qu’à jeter le trouble dans les idées des magnétiseurs et des personnes qu’ils magnétiseront. Il y a un noviciat à faire, et il doit durèr un certain temps.
Il y a donc deux sciences dans le magnétisme?
— Non. Il y a un art et une science seulement.
Les médecins devraient posséder la science, et des hommes sains, bien disposés de coeur et d'àme, avant suffisamment de sensibilité pour être émus à la vue des souffrances d'autrui, devraient exercer seulement l'art de magnétiser, c’est-à-dire avoir une méthode régulière sans laquelle aucune application rationnelle de la force magnétique dont ils disposent ne peut avoir lieu.
Cette force étant utile aux malades, ils pourraient 6n disposer selon les intentions du médecin, et les in-
dications que scs connaissances spéciales lui permettraient de donner; c’cst-à-dire, pour être mieux compris, qu’il devrait y avoir un artiste pour tracer le plan et un ouvrier qui exécutât les travaux, en fournissant les matériaux nécessaires. L un, le génie, qui conçoit une chose; l’autre, l’habileté, qui l'exécute. En voici les motifs. Il se présente des cas difficiles où l’observation de toute une vie suffit à peine pour trouver les moyens de lever les obstacles que la nature et la maladie opposent à nos efforts. Il faut quelquefois forcer la nature à revenir sur scs desseins et à reprendre en sous-œuvre son premier ouvrage. Cela ne se peut faire sans une connaissance profonde de l’organisation humaine, des lois qui président au développement des êtres, de la marche ordinaire des maladies, et enfin des propriétés nouvelles dont peut se revêtir l'agent magnétique, lorsqu’une penser créatrice a dit, comme Dieu : Je veux que ceci s'accomplisse.
Mais ici tout est rempli de mystères, et dans co manuel nous n’en voulons approfondir aucun. Le magnétisme, c’est-à-dire l’agent ainsi nommé, ayant, par lui-même, des propriétés thérapeutiques par excellence, pouvant, par conséquent, guérir un grand nombre de maladies sans que celui qui l’applique ait besoin de sortir de son rôle d’instrument de magnétisation , c’èst à ceux qui voudront s’avancer dans cette connaissance k lire d’autres écrits et à chercher des vérités d’un ordre moral qui seraient ici mal placées.
Seulement, pour satisfaire le lecteur qui ne prétend pas devenir magnétiseur,'mais qui néanmoins veut
avoir une définition du magnétisme, voici, pour lui, nos idées sur ce sujet : Nous donnons le nom de magnétisme à rinfluence occulte que 1rs corps organisés exercent il distance l’un sur l’autre, soit par attraction, soit par répulsion. Le moyen ou véhicule de celte influence n'est point une substance qui puisse cire condensée, mes/uée, pesée. C'est un fluide éthéié, pur, vital, qui pénètre tous les corps et parait agiter la masse de l’univers.
Il n'est pas lancé à la manière des émanations corporelles, mais comme une lumière imperceptible qui se porte par irradiation d'un objet sur un autre qui lui convient, lorsque la VOLONTÉ ne sait pas le régler; dans le cas contraire, il obéit, et produit ce que vous exigez de lui, quand, toutefois, ce que vous demandez et voulez est dans le domaine du possible.
En voilà assez pour les curieux, reprenons le cours de nos travaux.
L’agent magnetioue, ayant pénétré dans un
COUPS SAIN OU MAI,ADE, Y DEVELOPPE UNE SÉRIE DE PHÉNOMÈNES APPRÉCIABLES; ET, SOUS CE RAPPORT, IL RESSEMBLE AUX Al TRES AGENTS DE LA NATURE.
Maintenant voyons :
Comment diriger l’application de clt agent? Quel est le moment d’agir et celui de cessek la
MAGNÉTISATION ?
Jusqu'ici aucun auleur n'a tracé de règles. On a magnétisé sans s'informer en rien si le moment était opportun, et la durée de la magnétisation a été non
pas selon le besoin du malade, mais suivant le caprice du magnétiseur. Nous allons essayer de remplir clte lacune en prévenant toutefois que nous sommes loin de connaître toutes les conditions nécessaires.
L'ml de magnétiser se perfectionnera avec le temps; mais, en attendant, voici ce que nous tenons de l'observation.
RÈGLES GÉNÉRALK8.
Dans toutes les maladies accompagnées de crises ou de redoublement, et elles sont nombreuses, l'application du magnétisme doit précéder l'accès.
Dans les fièvres intermittentes , par exemple, il faut que la magnétisation précède de deux heures au moins l’accès féb: ilc.
Dans d’autres cas, où vous n’avez que de courts instants, il faut profiter du peu de temps qui vous est laissé. Soyez assuré que vous ferez peu de chose si vous attendez que le trouble a^l priç tout son développement. Dans ce cas, il est laissé peu de prise au magnétisme ; car l'activité qui existe dans lu circulation est un obstacle à vos efforts. Au lieu que si cette effervescence ne fait que se préparer, ou bien que les matériaux de la fièvre soient en repos, vous en dérangez, à coup sûr, les dispositions, les combinaisons, si je puis dire. Vous avancez ou retardez l’invasion. Ce premier pas fait, vous ôtes bientôt maître du mal.
Dans toutes les affections où, par des causes naturelles ou maladives, la sensibilité est vivement excitée par le magnétisme, c’est par dose infiniment pe-
tite que vous devez procéder ; je n’excepte qu'un cas, celui où le malade lui-méme, en somnambulisme, vous engage à poursuivre. J’ai vu quelques malades se plaindre, avec raison, de 1 inhabileté de leurs magnétiseurs, qui, de bonne foi, croyaient bien faire, mais agissaient trop.
Dans toutes les maladies passées à l'état chronique, une heure de magnétisation suffit pour un laps de temps d’aw moins dix heures. Ordinairement on laisse vingt-quatrè heures, et l’observation prouve que cela suffit; mais en laissant moins d'intervalle le travail médicateur est plus sensible et la guérison plus prompte.
Dans les cas désespérés, ne craignez rien, marchez; la vie s’en va, donnez des foi ces; cinq, six heures de magnélisation si vous lo pouvez. Reposez-vous , recommencez ensuite ; de cette manière des crises salutaires, bién au-dessus des ressources de la nature seule, se produiront sous vos efforts, et la vie que vous auiez versée rattachera au corps du moribond celle qui, effrayée des désordres qu’elle s’était en vain efforcée de détruire, abandonnait la lutte et quittait le domicile qu’un feu intérieur minait sourdement et qui menaçait ruine.
Dans la plupart des affections nerveuses et surtout dans Vépilepsie, Xhystérie, la catalepsie, etc., où vous n’êtes pas prévenu de l'arrivée des accès, il faut les faire apparaître, et vous le pouvez dans beaucoup de circonstances, comme je vous l'indiquerai tout à l’heure.
Dans les suppressions de. règles, il faut magnétiser trois ou quatre jours avant l’époque naturelle quo les
femmes pressentent et savent fort bien indiquer, ef, dans le cas de non succès , recommencer le mois suivant. Combien de fois n'ai-je pas ainsi rélabli la mensl mal ion après que tous les remèdes avaient échoué ! Dans d nulres circonstances où les menstrues étaient ou précédées ou suivies de douleurs intolérables, j’ai fait cesser ces douleurs et rétabli l’état naturel par celle seule pratique.
Dans tons les cas de maladies que vous aurez à traiter chez les femmes, le flux menstruel ne doit pas empocher la continuation du traitement. Ceux qui ont écrit le contraire étaient daus l’erreur; souvent même la nature attend cette époque et profite de ce véhicule pour rejeter des matériaux viciés, que, sans les efforts que vous avez ajoutés aux siens, elle n’aurait pu expulser par cette voie.
Dans les affections scrofuleuses et lymphatiques vous ne pouvez craindre de trop magnétiser ; c’est un terrain fruid qu’il faut échauffer, et lorsqu'il y a des désordres tels que tumeurs blanches, engorgement des glandes, etc., etc., vous ne ferez rien avec quelques minutes de magnétisation; c’est par mois qu’il faut compter et avoir une constance à toute épreuve.
Les liemon/iugies seules doivent vous effrayer; vous ne devez agir qu’en tâtonnant. Quelques essentielles que je ne saurais préciser cèdent très-promp-ment; il en est d’autres, au contraire, où le magnétisme agit comme excitant, et des réactions efficaces ne pouvant avoir lien à cause de désordres organiques, vous devez craindre qu'il soit tout à fait contraire. Ce n’est qu’en tremblant, je dois l’avouer, que j’ai quelquefois expérimenté dans ces cas graves.
J’avais soin de tenir un doigt sur une artère, et lorsque la circulation prenait du développement, je cessais.
Des magnétiseurs assurent avoir réussi dans tous les cas ; moi, non. Peut-être ont-ils îles propriétés que je n’ai pas. Mais ici no confondez pas l'hémopli-sie, où vous réussirez complètement, et les hémorrha-gins symptomatiques, que vous arrêterez aussi, mais qui reviendront à coup sûr si vous ne guérissez l’organe malade. {/a suite au prochain numéro.)
LAFAYETTE A WASHINGTON.
Dans los fl/emoirs, correspondence and manu-scripts of général Lafayette, pubtished by hisfamiljr, se trouve, à l’adresse de Washington , une lettre où on remarque un passage qui a trait au magnétisme. En voici la traduction :
« Un docteur allemand, nommé Mesmer, vient de faire uno très-grande découverte : lo magnétisme animal. 11 en a instruit un certain nombre d’élèves parmi lesquels votre humble serviteur est dit un des plus enthousiastes. Je sais maintenant plus que n’a jamais su certain sorcier, qui me rappelle l’entrevue que notre ami eut, à Fishkill, avec le diable, et dont nous avons tant ri chez lui. Avant de m’en aller, je veux obtenir la permission de vous laisser en possession du 6ecret de Mesmer, »pii. vous pouvez le croire, est une grande découverte philosophique. »
Jj€ Propriétaire-Gérant, HÉBERT.
JOURNAL
IH.I
MAGNÉTISME.
MÉMOIRES DE M. MESMER
SUR SES DÉCOUVERTES,
ADRESSÉS AU PUBLIC FRANÇOIS.
S II - (Suite).
Il est difficile de déterminer où s’arrête cette divisibilité. C’est cependant d’une de ces séries de la matière k plus divisée par le mouvement intestin dont je veux parler ici.
On peut comparer l’opiniâtreté des physiciens aujourd’hui, à rejeter l’idée d’un fluide universel, à celle des poissons qui s’élèveroient contre celui d’entre eux qui leur annonccroit que l’espace entre le fond et la surface de la mer est rempli d’un fluide; qu’ils habitent, qu’ils vivent dans l’eau, que ce n’est que par ce milieu qu’ils se rapprochent, qu’ils, s’éloignent, qu’ils se communiquent, qu’ils s’enchaînent} oui leur annonceroit, en un mot, qu’il existe ùn Duide universel.
Cependant quelques physiciens sont parvenus à reconnoitre son existence, mais à peine ont-ils fait ce premier pas qu’entrainé au delà du vrai ils ont prétendu caractériser ce fluide, le surcharger de propriétés et de vertus spécifiques, en lui attribuant des qualités, des puissances, des tendances, des vues, des causes finales, enfin des puissances conservatrices, productrices, destructrices et réformatrices.
La vérité n’est que sur une ligne tracée entre les erreurs. L’esprit humain, par son activité inquiète, est comme un cheval fougueux : il est également difficile de mesurer avec justesse l’élan qu’il lui faut pour atteindre cette ligne, sans courir risque de la dépasser et de s’y contenir longtemps, de manière à n’avancer ni à reculer ses pas.
Il n’est donc pas permis de douter de l’existence d’un fluide universel, qui n’est, ainsi qu’il a été dit, que l’ensemble de la matière la plus divisée par le mouvement intestin. En cet état, il remplit les interstices de tous les fluides, ainsi que de tous les solides contenus dans l’espace. Par lui l’univers est fondu et réduit à une seule masse. La fluidité constitue son essence. N’ayant aucune propriété, il n’est ni élastique, ni pesant, mais il est le moyen propre à déterminer des propriétés dans toutes les séries de la matière qui se trouve plus composée qu’il ne l’est lui-même. Ce fluide est, à l’égard des propriétés qu’il détermine dans tous les .corps organiques, ce que l’air est au son et à l’harmonie, ou l’éther à la lumière, etc., c’est-à-dire qu’il reçoit les impressions et les modifications (lu mouvement, qu’il les transmet, qu’il les transfère, qu’il les applique et les insinue dans les molécules or-
ganisées. C’est ainsi qu’il produit des effets, et ces effets ne sont que le résultat du mouvement et de l’organisation des corps.
Ce fluide, par là même, n’est donc pas précisément un agent : c’est un milieu indifférent à toutes les impressions et modifications du mouvement. On peut encore leconsidérer comme l’eau dirigée sur un moulin; pour déterminer le mouvement et modifier les fonctions de cette machine, d’une manière relative à son mécanisme et à l’organisation de ses parties, il est indifférent que l’eau soit trouble ou limpide, imprégnée de telle ou telle matière, qu’elle soit le véhicule d’un autre fluide, qu’elle soit agitée d’un mouvement intestin et particulier. L’eau ne contribue à l’effet du moulin que par la communication d’une plus ou moins grande quantité de mouvement, c’est-à-dire par une application plus ou moins considérable de masse et de célérité.
L’air qui passe à travers les tuyaux d’un orgue en reçoit des vibrations proportionnées à leur grandeur et à leurs formes. Ces vibrations ne deviennent un son qu’après qu’elles sont propagées et communiquées à un organe de l’animal disposé à les recevoir. L’air, dans ce cas, n’est donc que le conducteur du mouvement vers l’ouïe, do même qu’un autre fluide, plus délié que lui, réfléchi par une surface, y reçoit des vibrations qui, transférées à l’organe de la vue, y détermine des sensations, des formes, des couleurs, lesquelles n'existent certainement ni dans ce fluide, ni dans la surface des corps.
Nous ne devons donc voir autre chose dans ce fluide que la faculté de recevoir et de communiquer les mou-
vemcnts et les modifications opérées dans les organisations des corps. Ce fluide ne devient et ne peut êlrc agent qu’autant qu’il est appliqué comme conducteur du mouvement aux corps organisés, et qu’il en détermine par là les propriétés.
En conséquence de cette théorie, je démontrerai dans le système des influences comment ce fluide, cette ip&tière subtile, sans être pesante, détermine l’effet que nous appelons gravité ; comment ce fluide, sang êtfo élastique, concourt à Y élasticité; comment, en remplissant tous les espaces, il opère la cohésion sans êtro lui-méme en cet état. Je démontrerai de même que l’attraction est un mot vide de sens et que l’attraction n’eyiste pas dans la nalure, en quoi consiste l’électricité, le feu, la lumière, etc. ; qu’enfin, toutes les pmpriétés sont le résultat combiné de torganisation des corps et du mouvement du fluide dans lequel ils sont plongés.
On comprendra comment une impulsion une fois donnée sur la matière a dû suffire au développement successive de toutes les possibilités, et que les impulsions particulières, qui n’en sont que la continuité, deviennent l’origine de nouvelles organisations ; comment enfin le mouvement est la cause du repos, et le repos, à son tour, accélère le mouvement de la matière fluide pour opérer de nouvelles combinaisons, et que c’est par la simplicité de l’ordre dans un cercle perpétuel entre les causes et les effets que la nature est illustrée ainsi que son auteur.
En remontant ainsi par une marche simple aux plus grandes opérations de la nature, on reconnolt que le magnétisme ou Y influence mutuelle est l’action
la plus universelle, et que c’est l'aimant qui nous offre le modèle du mécanisme de l’univers ; que ce n’esl que 1 'effet du mouvement dans Le plein.
Comme toutes les vérités se tiennent, il est impossible de faire des progrès dans l’élude de la nature sans avoir embrassé tout l’enchaînement de ses principes; c’est pourquoi j’ai cru nécessaire de produire le système de la nature dont le corps humain fait partie intégrante, en même temps que de proposer les moyens conservateurs. Les lois par lesquelles l’univers est gouverné sont les mêmes qui règlent l’économie animale. La vie du monde n’est qu’une, et celle de l’homme individuel en est une particule.
Toutes les propriétés, je le répète, sont le résultat combiné de l’organisation des corps et du mouvement du fluide dans lequel ils se trouvent plongés.
L’action de ce fluide ainsi défini, si elle est considérée comme appliquée au corps animal, elle y devient le principe du mouvement et des sensations.
La nature et la qualité de toutes les humeurs du corps animal dépendant uniquement de l'action des solides, des diverses machines et instruments, des vaissaux qui les contiennent, ce sont eux qui les élaborent, on dirigent et règlent le mouvement, les mélanges, les proportions, les sécrétions, les excrétions , etc. Il est aisé de concevoir que ce n’est que dans l’irrégularité de l’action des solides sur les liquides, ou dans l’imperfection du mécanisme ou du jeu des viscères et des organes, qu’exislc la première eause de toutes les aberrations ou maladies , et que conséquemment le remède, également commun et «nique, se irouve dans le rétablissement de l’action
(les organes et des machines, lesquelles seules peuvent changer et corriger les vices et les imperfections des humeurs, qu’on doit regarder comme des effets de cette première eause.
Il s’en suit, comme on verra encore, qu’au lieu de recourir par un choix vague et incertain aux spécifiques et aux drogues innombrables assorties par la * théorie des humeurs, dans tous les cas on n’a que deux indications à remplir : la première, de rétablir l’action des solides sur les liquides ; la seconde, d’empêcher et de lever les obstacles qui s’y opposent.
Mais il reste à déterminer quel est le principe du mouvement et le ressort commun des fonctions des différentes machines agissantes sur le liquide dans un corps.
C’est la fibre musculaire qui, par son mécanisme particulier, est l’instrument de tout mouvement et le principe de toute action des solides sur les liquides. Les courrants du fluide universel étant dirigés et appliqués à l’organisation intime de la fibre musculaire, précisément comme le vent ou l’eau l’est au moulin, en déterminent les fonctions. Les fonctions de la fibre musculaire consistent dans l’alternative de se raccourcir et de s’allonger. Se raccourcir est proprement son action positive, comme s’allonger est l’effet négatif de la cessation de cette action. Cette faculté de la fibre est Y irritabilité.
C’est à cette faculté que nous devons le mouvement de systole et de diastole du cœur et de toutes les artères. Le jeu alternatif de la dilatation et de la contraction des vaissaux sur la liqueur qu’ils contiennent est la cause de la circulai ion des humeurs
et conséquemment do la vie animale. Le défaut de l’une de ces deux actions ou do cette réaction en arrête le cours.
Aussitôt que les humeurs sont privées du mouvement local et intestin elles s’épaississent et se consolident. Cet épaississement ou repos se répand en se communiquant à une partie plus ou moins considérable des canaux. Un autre effet du repos des humeurs est leur dégénération; en se décomposant elles s’arrêtent dans des canaux dont la capacité est impropre à les contenir. L’état des vaissaux dans lesquels le cours des humeurs est ralenti ou aboli est nommé obstruction.
La fibre musculaire animée par le principe de l’irritabilité est encore susceptible d’une affection externe qui est appelée irritation.
L'effet ordinaire de cette affection est le raccourcissement do la fibre.
Toute affection do la libre musculaire peut être considérée comme dépendante, soit de l’irritabilité, soit de l'irritation, soit de l’une et de l’autre ensemble. Il existe par conséquent deux causes immédiates d’obstructions : la première, lorsqu’un vaisseau a perdu de son irritabilité, ce qui le met dans l’impuissance de se contracter; la seconde, lorsqu’un vaisseau est dans un état d’irritation qui l’empêche d’être dilaté. Ainsi, dans les deux cas, les conditions nécessaires pour le jeu alternatif des vaisseaux sunt contrariées et leur action arrêtée.
Sans entrer duns les détails de cette aberration, qui est la plus générale et presque la seule dans le corps vivant, il est nécessaire, d’après une loi géné-
raie, que la cause du mouvement soit toujours un effort contre la résistance, et qu’il doit lui être proportionné pour la vaincre. Cet effort est appelé crise, et tous les effets qui résultent directement de cet effort sont appelés les symptômes critiques, et ils sont les vrais moyens de guérison 011 qui proprement forment la cure de la nature; tandis qu’au contraire les effets provenant de la résistance contre cet effort de la nature sont dits les symptômes symptomatiques, et forment ce qu’on doit appeler la maladie (l).
ACTION DES NARCOTIQUES SUR LE CERVEAU.
TROUBLE DE 1,’INTELLIGENCE, HALLUCINATIONS.
§ I. Effets du Hachisch. — {Suite.)
Deuxième observation.
« Il y a environ deux ans, dit M. le docteur Brierre deBoismont(2), je publiai dans un numéro du Journal des Débats quelques détails sur la composition du hachisch, d’un usage si général en Orient et qui avait
(1) Ici s'arrête ce qui nous esl parvenu de cet important mémoire. Ce soni le» deui premières Feuilles doni Mesmer annonce l'envoi dans sa letlre au citoyen Ségrétier. Nous ignorons ce qu'en est devenue la suite. Nous publieront d'aulres pièces manuscrites de Mesmer. (Note du directeur.) li) De> Hallucination, p. 373 et suivantes.
produit chez trois jeunes gens de Marseille des effets fort remarquables.
« Ce fait, qui avait alors excité la curiosité, était oublié comme tant d’autres, lorsque je reçus avant-hier de M. A. de G..., connu par sa traduction de Pline dans la belle édition des classiques latins de M. Panckoucke, l'invitation d’assister à des expériences produites par l’ingestion d’une substance qui déterminait, disait-on, tous les phénomènes qu’on avait observés chez les adeptes du Vieux de la Montagne.
« Lorsque j’arrivai, la réunion se composait d’environ trente personnes , parmi lesquelles je citerai MM. Esquirol, Ferrus, Cottereau, Bussy, professeur à l’école de pharmacie; les autres étaient des hommes de lettres, des savants, des artistes. 11 y avait là par conséquent tous les éléments d’une bonne observation et la certitude que les expériences seraient réelles.
« Trois personnes avaient pris la liqueur à onze heures, MM. A. K..., romancier célèbre, d’une organisation très-forte; D..., avocat, un des meilleurs élèves de l’Université, et B..., peintre et musicien. Deux heures s’étaient écoulées et aucun effet sensible ne s’était encore manifesté. Une nouvelle dose fut administrée. Une demi-heure après, voici les phénomènes que nous observons sur deux de ces messieurs : M. A. K... a résisté à l’action de la substance, et n’a, de son aveu, éprouvé qu’un léger serrement de tête et d’épigastre ; peut-être aussi le second repas qu’il a fait, car ces trois messieurs avaient déjà déjeuné, a-t-il entièrement neutralisé la substance.
• On avait négligé de constater l’état du pools au début de l’expérience ; son accélération plus tard et
l’état de la pupille ont suffisamment démontré les effets de la substance.
« M. B..., le premier chez lequel les effets du médicament se firent sentir, éprouva de l’aridité à la gorge et des tiraillements dans les jambes; le pouls battait quatre-vingt-seize pulsations par minute; la figure était injectée. Bientôt M. B... ferma les yeux pour mieux se recueillir ; ses idées lui semblaient se développer avec une extrême rapidité. Un moment il offrit le singulier phénomène de l’homme double qu’on avait déjà constaté chez d’autres expérimentés; il entendait, disait-il, la musique d’un côté et les conversations de l'autre ; mais ce fait ne persista point. La musique qui était exécutée par M. C..., premier prix du Conservatoire, n’a point paru agir d’une manière appréciable sur les expérimentés. Les pupilles étaient alors très-dilatées. Interrogé par les assistants sur ce qu’il éprouvait, M. B... disait qu’il avait des sensations voluptueuses. 11 devenait très-gai par suite de son bien-être et de l’activité qui le travaillait. Il aurait voulu être seul dans un endroit sombre; il avait une répugnance invincible à parler, à faire quelque chose; toutes les figures lui paraissaient ridicules.
« Jusqu’alors M. B... s’était entretenu avec les autres personnes ; il allait, il se promenait, riait quelquefois aux éclats; mais ces actions étaient tout au plus celles d'un homme fortement excité par une liqueur. Tout à coup il se précipite sur un canapé, ne veut plus répondre, supplie qu’on le laisse tranquille ; il désire n’être point troublé dans les sensations délicieuses qu’il éprouve; il a des mouvements spasmodiques des
membres, du diaphragme; il soupire, gémit, pleure et rit tour à tour. Le pouls bat cent vingt fois par minute; la figure est fortement colorée. Un sentiment d'inquiétude se manifeste parmi les assistants; mais il est promptement dissipé, en entendant M. B... répéter à différentes reprises qu’il est très-heureux, qu’il n’éprouve aucune souffrance. M. le docteur Cot-tereau suit avec le plus grand soin le développement des symptômes; il*paraît constant que M. B... n’a que des sensations agréables qu’il rapporte à l hypo-gastre. Tous les phénomènes qu’il présente sont ceux de l’extase; ses traits annoncent le plus grand bonheur; il ne peut trouver de termes pour exprimer ce qu’ii sent; il ne voudrait pas sortir de cet état; il est si heureux ! « Que je remercie celui qui m’a fait prendre ce délicieux breuvage! —Confiez-moiceque vous éprouvez, lui demande un des assistants. — Je ne puis le rendre. » L’influence du tempérament de M. B... se fit remarquer dans cette expérience; il est surtput porté à la sensibilité; mais en lui parlant de choses gaies, en lui montrant des images riantes et agréables, ses idées se mettent aussitôt-en harmonie avec ces objets; il rit aux éclats et témoigne unegrande gaîté. II est évident que dans ce cas l’expérimenté subit l’influence de la personne qui lui parle et que celle-ci pourrait lui imprimer la direction quelle voudrait. M. B... a acquis dans cette expérience une acuité d’oreille excessivement remarquable ; il entend très-distinctement ce qu’on dit loin de lui et à voix basse. Au milieu de son extase, il n’a perdu ni le sentiment des personnes ni celui des choses; il répond juste à toutes les questions qu’on lui adresse,..
connaît ceux qui l’environnent; mais on voit que c’est avec peine qu’il parle; il serait bien plus heureux qu’on l’abandonnât à son extase. A quatre heures et demie le pouls est à quatre-vingt-dix pulsations ; les rêveries extatiques continuent ; il n’a plus de corps, son esprit est tout à fait libre, et cependant il a des sensations délicieuses. M. A. de G... dit qu’il voulait faire prendre un antidote pour le ramener à son état naturel; suivant lui, ce sentiment de bien-être durera un jour ou deux. Toutes les personnes que j’ai interrogées et qui ont été soumises â l’expérience m’ont assuré qu’elles n’avaient eu les jours suivants aucun malaise et que ce sentiment de bien-être s’était prolongé pendant deux et trois jours.
« M. D.i., le second expérimenté, est arrivé avec la conviction que la substance ne produira aucun effet sur lui et avec la ferme volonté de résister à son action. Pendant deux heures et demie aucun symptôme n’a lieu. La physionomie de M. D... est fort grave. Il est d’un caractère sérieux, rit rarement et sa livre habituellement à des études métaphysiques. Vers les deux heures son pouls s’accélère (cent pulsations); il a des battements de coeur fréquents. Plusieurs personnes ont éprouvé des palpitations. M. D..., jusqu’alors fort calme et qui causait de sujets très-différents avec les personnes de la réunion, s’écrie qu’il est dans le délire ; il se met â chanter, prend son crayon et cherche à rendre les sensations qu’il éprouve. Voici quelques fragments de ces notes : C'est drôle ; mes sensations sont très-vives, et ce qui m’a décidé à prendre cet excellent breuvage, cesl que je puis sans crainte être utile ; je suis singulier. Les
voilà qui rient de moi; je renonce à écrire. Il jette son papier. Le délire éclate. Les traits de M. D... sont devenus très-mobiles ; il a un rire sardónique ; l’expression de l’œil est animée, la figure est colorée, le pouls bat cent vingt, la pupille est dilatée. Comme M. B... il a l’air excessivement content; il rit, chante, gesticule, parle avec une volubilité extrême. Les idées se suivent avec rapidité : c’est le désordre du maniaque gai ; mais au milieu de cette abondance, de cette mobilité, de cette inconstance d’idées, on voit cependant dominer celles qui font la base de ses études. Ces sujets sérieux sont entremêlés de plaisanteries, de bons mots, de calembourgs. La langue est sèche; il crachote souvent: les extrémités inférieures sont agitées de mouvements convulsifs légers. L’expérimenté en fait lui-même la remarque et dit : « Voilà une folie bien singulière. • Comme MM. A. K... et B..., il a une (inesse extrême de l’ouïe et de la vue. Il confond le temps et l’espace, mais reconnaît toutes les personnes présentes et répond très-juste par moment aux questions qu’on lui adresse. Il lire sa montre et dit avec le plus grand calme : II est telle heure. Il a une multitude d’idées qui se pressent dans sa tête ; il ne trouve pas de termes pour les exprimer. «Je voudrais, dit-il, que vous m’otassiez une oreille et un œil pour me donner une langue de plus, afin de rendre ce que je sens.*
« Le pouls descend ; il est plus mou et ne bat que quatre-vingt-dix fois par minute. Le délire continue; on lui donne de l’eau, il s’écrie : «Cela fera venir des grenouilles qui avaleront la liqueur. » Les phrases se
succèdent incohérentes avec une volubilité inconcevable.
« Laforinodu délire deM. D... change; il s’asseoit dans un coin, ferme les yeux et se parle à lui-même5 il a l’air d’un inspiré. Nous l’entourons; il parle de science, donne des définitions ; puis, comme un homme qui prélude et s’essaie, il prononce quelques mots entrecoupés et récite toutàcoup unevingtainede vers fort harmonieux. La conviction où nous sommes que ces vers sont connus nous empêche de les recueillir; mais bientôt nous lui demandons si Victor Hugo n’en est pas l’auteur; il répond que non. « Ils sont donc de vous?» Il fait un signe d’assentiment. Sa physionomie exprime la gaîté, la satisfaction ; la peau a pris une teinte très-pâle; le pouls donne cent pulsations; les yeux sont fermés et il les ouvre sur la demandé de son frère; la pupille est moins dilatée.
« 11 abandonne l’improvisation pour parler des pays étrangers. On nous avait affirmé que les expérimentés voyaient se développer le phénomène de seconde vue. M. D... décrit parfaitement comme présentes les contrées et les villes qu’il a visitées ; il se rappelle les particularités qu’il a observées dans ses voyages; ainsi il nous dit qu’il voit élever les pierres du Panthéon de Naplcs et nous peint d’une manière fort poétique les sites et les campagnes qui ont frappé son attention ; mais, malgré toutes nos questions, il ne peut nous faire la description des endroits qu’il ne connaît pas. Il aperçoit des objets qui n’existent pas. Son frère lui demande s’il voit dans son cerveau; non, il est vide; puis il ajoute : « Comment veux-tu
que je voie dans ion cerveau? Il y a des voiles, des objels entre lui et moi. » 11 se lève ensuite en disant : « Tout cela est un rêve ; cet état d’aberration a donné une impulsion plus vive à mes idées, mais n’a rien ajouté aux connaissances que j’avais.» Le délire, qui pendant quelque temps avait lieu sur une série d’idées, redevient général. M. D... chante, rit, parle avec une grande vivacité; il n’a aucune souffrance; il se dit très-heureux. Le pouls est à quatre-vingt-dix pulsations; la sputation continuait. M. D... avait souvent besoin de boire ; Cinterlocuteur pouvait également le faire parler et agir comme il le voulait...
« Aucun symptôme de douleur ne s’est manifesté pendant l’expérience ; ces personnes paraissaient, au contraire, parfaitement heureuses, et elles n’ont cessé de faire une peinture délicieuse des sensations qu’élles éprouvent ; mais en voyant leur état d’excitation, tout le monde a été'd’avis que ces expériences ne sauraient être renouvelées sans inconvénient sur le même sujet, et que de pareils symptômes devaient nécessairement produire une surexcitation morbide et à la longue un affaiblissement du système nerveux.»
(Au prochain numéro les effets de l’opinm.)
FACULTÉS DE l’amB.
Un être, c’est tout ce qui est susceptible de mouvement; et comme le mouvement ne peut s’effectuer sans changer de pièce, il s’ensuit que tout ce qui se meut ou est susceptible de mouvement occupe de la place.
( s. nriniAr I la Volonté d’un être vivant, «gts»
Mon Tentent. } p > *«nt d'une manière directeoa bien
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Pensée. J C’est la formation { d’image».
Le« Un âge» | »ont de Téritable» substances, risibles & l’âme seulement.
Par conséquent, imaginer, c’est bien réellement créer. Ce n’est qu’admettant cette doctrine que l’on peut concevoir les effets surprenants du magnétisme animal.
(1) Son» ce titre il y aura toujour», dans notre journal, une place pour le» opinion» diverse» et l'exposition de doctrines, en tant qu’elles se rapportent au magnétisme. Par cette publication, on ne doit pas inférer que nous adop-tons lé» idée» ainsi émises ; nous le» insérons, voilà tout.
(Noie du Mretleut.)
Les œuvres, o’est-à-dire les images, les pensées de l’âme de l’univers, ou Dieu, qui constituent la partie appelée matérielle du monde, sont visibles à nos yeux ; les images ou les pensées de l’homme ne le sont pas; mais je crois néanmoins que ces images ont une existence substantielle plus ou moins durable.
Je ne sais pas si l’âme forme ses images de sa propre substance ou bien de la substance qui l’environne et qui peut-être la pénètre sans en être partie. Cette théorie admise, c’est-à-dire accordant à l’âme la faculté de créer et le pouvoir (par la volonté) de donner impulsion à ses créations, il est évident que l’homme pourra faire que ses pensées (étant des images substantielles) aillent se mettre en contact avec l’âme d’une personne absente ; et, dans ce cas, il n’y a pas de prodige à ce que celte personne absente aperçoive ces pensées ; il y aurait prodige, au contraire, si elle ne les apercevait pas.
A l'homme qui a celte croyance, le magnétisme animal, loin de lui paraître un phénomène incompréhensible, lui paraît, au contraire, la chose la plus naturelle du monde.
Dans toutes les langues il y a un équivalent du proverbe français : « En parlant du loup, on en voit la queue. » Peut-on dogmatiquement affirmer que ce souvenir soudain, sans aucune cause apparente, ne soit pas dans plusieurs cas, sinon dans tous, produit par le contact des pensées (images substantielles) des personnes absentes? D’ailleurs, l’âme étant nne substance réelle, quoique invisible, serait-il impossible qu’elle (conjointement avec notre corps) fût entourée d’une espèce d’atmosphère magnétique qiii, en (ou-
chant l’atmosphère de la personne vers laquelle nous marchons, la rendît sensible de notre approche?
Je sais bien que des personnes timorées seront scandalisées de ce que je matérialise la pensée, parce qu'elles ont le matérialisme en horreur; mais je suis persuadé qu’on cesserait en général d’avoir cette horreur si l’on faisait une juste distinction entre la doctrine qui n’accorde la pensée et la volonté qu’à la matière organisée visible et celle qui établit pour principe qu’il y a une substance fluide invisible et impondérable, semblable, par exemple, à celle qui attire l’acier vers l’aimant; laquelle substance est en môme temps intelligente, sensible et douée de volonté.
Je considère cette doctrine comme la seule capable de diminuer le nombre des athées, qui se révoltent, à juste titre, contre les grossières contradictions dont sont hérissées la philosophie et la théologie des purs spiritualistes. An lieu de vous évertuer à leur prouver que la Divinité est un être qui, quoique se trouvant dans tous les lieux, n'en occupe aucun, et que cet être est le Père, le Fils et le Saint-Esprit, demandez-leur s’il n’est pas raisonnable de croire (raisonnant par analogie) qu’il y ait dans la totalité de l’univers une substance voulant et agissant proportionnellement à son extension d’une manière analogue à celle dont veut et agit en nous, en petit, la substance que nous appelons l’âme.
S’ils vous l’accordent, assurez-lcur que cette âme universelle est précisément ce que vous entendez par Dieu
Quant à moi, il m’est aussi impossible de nier que,
dans chacun de nous, la volonté ne soit une source de mouvement, qu’il m’est impossible de concevoir que le mouvement en général, le mouvement universel, puisse émaner de toute autre source que d’une volonté quelconque.
La conviction de l’existence d’une substance ou matière, dont la volonté, Y intelligence et la sensibilité sont des qualités essentielles, ne peut manquer d’être consolante pour ceux qui, tels que moi, ne voudraient pas tomber dans le néant ; car, l’impossibilité de l’anéantissement de la matière sert de base, dans ce cas, à l’espoir de ce que notre âme existera toujours.
En résumé, je divise la matière en deux classes : la pondérable et visible, et Y impondérable et invisible. Ce sont des êtres de cette dernière nature, doués de volonté, A'intelligence et de sensibilité, que je substitue à ceux que l’on appelle de purs esprits ; car, pour moi, exister et remplir un espace sont des termes synonymes.
N. B. Je dois faire observer que je ne teui pas dire que tous les êtres invisibles et impondérables sont sensibles et intelligents! j’avance seulement que même les êtres intelligents les plus purs sont suhtmtibu.
§ H.
ÉTERNITÉ DE LA MATIÈRE.
J’entends par espace l’absence de tout obstacle à la marche de la matière dans tous les ser* qu’elle puisse se mouvoir, et, par points de l’espace, j’entends les dimensions de cette même matière mouvante ou en marche.
J’emploie la marque = pour signifier équivaut h ; au lieu de.
1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8,9, 10, II, 12, etc., elc., etc.
La série de chiffres ci-dessus représente différents points dans l’espace, c'est-à-dire le nombre de fois que les dimensions d’un atome en marche peuvent élre répétées.
Proposition.
L’anéantissement de la matière est impossible.
P/'euves.
L’anéantissement d’une port ion quelconque de matière équivaudrait à son départ successif de tous les points de la série ci-dessus; mais cette série étant interminable, il s’ensuit que la carrière de cette portion de matière ou atome, une fois commencée, n’aurait pas de terme.
Carrière i !"ot abs,rail- métaphysique, do"1 I _ Alom„ f eiislant en j le sens concret, physique, réel, j = Atomc } mouvement.
Carrière sans lerme | _ j Atome existant en mouvement
ad sternum | = ( ad œlernuni.
Donc l’atome anra beau courir, il n’arrivera jamais à 0 (zéro); il ne tombera jamais dans le néant : il est donc éternel; car, supprimant la circonstance du mouvement comme accidentelle, il restera toujours: atome existant ad œternum.
Le mouvement étant un mot abstrait qui n’exprime qu’une manière accidentelle d’être de l’atome, le
mouvement enfin n’étant rien sans l’atome, ¡1 est évident que le gérondif, ou participe présent existant, appartient essentiellement à l’atome, et non pas au mouvement. Dire: « le mouvement existe dans l’atome, » c’est se servir d’une expression métaphorique aux dépens du bon sens, de la vérité. C’est par l’emploi de pareilles métaphores dans leurs syllogismes que les métaphysiciens prétendent prouver l’existence des purs esprits. Ces métaphores étant la source des sophismes, il faut toujours, en logique, se tenir eu garde contre elles.
Partir d’un lieu, c’est cesser d’être présent dans ce lieu ; c’est s’absenter, c’est se séparer de ce lieu ; c'est aller ailleurs. Dans chacun de ces verbes et dans tous leurs synonymes, le verbe se mouvoir est nécessairement, quoique tacitement, impliqué ; car, s’il n’y avait pas eu de mouvement, le corps partant serait toujours resté inerte au même endroit.
Mais se mouvoir c’est l’acte d’un corps dont la totalité change de place ou dont les parties changent de position. Ce verbe n’a ni ne peut avoir d’autre signification, car nous avons plus haut prouvé que le mouvement n’est qu’un mot abstrait, ne signifiant rien considéré séparément d’un corps. Comment les métaphysiciens entendent-ils donc l'anéantissement ?
Ne pouvant se refuser d’admettre que cessa d’être fj/vsent daus ce lieu est synonyme d'aller ailleurs, il ne leur reste d’autre alternative que de dire que l’atome va au néant pu qu’il va a un autre point de la série.
S’ils optent pour le voyage au néant, je leur répondrai':
Néant topogruphique — nulle part.
Aller au néant •=■ aller à... nulle part, = figure de rhétorique signifiant ne pas aller du tout.
S’ils préfèrent le voyage de l’atome à un autre point, je les renverrai à ce que j’ai plus haut dit à l’égard de la série.
Les arguments que j’ai employés contre l’anéantissement de la matière sont également valables contre sa création ; car venir de nulle part est aussi contradictoire qu'aller à nulle part, puisque cela signifie venir et aller sans se mouvoir.
La matière existe donc ab œtcrno et ad œternum.
J.-P. Meade.
N. B. Messieurs les lliéologiens voudront bien observer que celle assertion n’esl pas hérétique, puisqu’il n’est dil nulle part dans la Bible que le chaos rot le néant. Organiser la matière et la trier soiil deu« actes bien différents l'un de l'atilro.
MANUEL DU MAGNÉTISEUR.
(Suite.)
DEUX OllDHES BIEN DISTINCTS DE PHÉNOMÈNES rHYSIQUKS ONT LIEU DANS LA MAGNÉTISATION,
„ _ ... l’èpiirastre et le Ironc,
baver : Lorsqu on magnétise j el ,a poilri„e seu|emenl.
Cela vient indubitablement de l’existence en nous de deux systèmes nerveux séparés, ayant chacun leurs fonctions et présidant chacun à une série de phénomènes vitaux bien différents. Ils se partngent ainsi les opérations que nécessite la vie.
La communication entre ces deux systèmes nerveux a lieu sans doute, mais cela s’opère lentement, et,dans certains cas, l’on détruit d’une main ce que l’on a fait de l’autre , jusqu’à ce que la nature, plus habile que vous, ait compris ce que vous voulez, quels sont vos desseins. Le magnétisme, quoique le plus délié, le plus subtil peut-ôtre des agents, rencontre ici une loi et y obéit avant de s’y sousiraire. Mais laissons de côté cette vérité que nous retrouverons plus loin. Ici se rencontre encore un autre ordre de phénomènes que nous devons examiner. Outre les deux systèmes nerveux dont je viens de vous parler, il y a les netfs de la sensibilité, bien distincts de ceux de la volonté, et qui sont influencés d’une autre manière par le magnétisme. Vous voyez qu’ici la difficulté se complique; mais elle rend l’explication des anomalies qu’on rencontre en magnétisant plus facile et éclaire un peu votre marche. J’en ui dit assez sur ce point; plus tard je parlerai avec plus d’étendue de l’organisation de l’homme physique.
Je viens de vous donner une explication que nul magnétiseur n’a donnée, et ce, parce que ces messieurs n’ont jamais tenu compte de la différence des effets, qu’ils ont toujours prise pour une disposition particulière au sujet soumis à leur magnétisation, tandis quelle résulte évidemment des organes sur lesquels on agit ou qui reçoivent l’influence magnétique.
La marche, comme vous voyez ici, devient déjà plus facile, plus expérimentale; on voit, on sait ce qu’on fait.
Ainsi, lorsque je voudrai produire le sommeil ma-
gnétique, je me garderai bien d’insister sur le plexus épigastrique, et je dirigerai toute mon action vers la tête, en descendant seulement jusqu’au thorax.
Si je veux obtenir des réactions vers les intestins, l'estomac, le foie, je 11e magnétiserai point la tête. ,
Si jo veux produire des crises convulsives, les plexus m’en offrent le moyen.
Encore une vérité.
Il existe un fait général : c'est que, si vous magnétisez ci giaiuls courants, c’est-à-dire sans vous arrêter, du sommet de la têle à l’extrémité des pieds, le magnétisme suit lu toute ¡¡lie vous lut tracez. 11 s’en va en grande partie, ou plutôt il ne reste qu’une saturation du système nerveux, trop faible pour les réactions que vous cherchez.
Exemple pour fixer nos idées.
Toutes les fois que vous ne produirez point le réveil aussitôt que vous aurez jugé devoir faire cesser le sommeil magnétique, magnétisez les jambes, en les touchant ou non, jusqu’aux pieds. L’agent magnétique y est attiré et s’écoule en grande'partie.
Preuve :
Plus de vingt fois je me suis trouvé en grand embarras; je ne pouvuis éveiller à ma volonté des personnes que j’avais mises en somnambulisme. Mais m’étant aperçu qu’en magnétisant, soit pur distraction, soit parce que je croyais bien faire, les extrémités inférieures des personnes soumises au traitement magnétique, leurs yeux s’ouvraient, si déjà il y avait eu un commencement de sommeil, cet effet me paraissant singulier, je répétai le procédé avec intention ; alors je vis clairement de quoi dépendait ce
réveil subit. Depuis, dans des circonstances semblables, j’ai l’ait usage de ce procédé que je dois à l’observation, et toutes mes craintes ont disparu (I).
Cette curieuse observation m’a conduit à une autre découverte bien plus importante; la voici :
Il m’est maintenant démontré que, dans beaucoup d’affections nerveuses de nature convulsive, les désordres qui apparaissent sont produits par une véritable rétention des fluides nerveux ou farces vives qui n’ont pu s'écouler par les extrémités, leur route naturelle. Il suffit d’une cause morale pour produire cet accident. Ces forces ainsi deviées occasionnent dans les parties où elles séjournent une espèce de congestion nerveuse, bien différente sans doute des congestions sanguines, mais tout aussi réelle, tout aussi appréciable. Les désordres qui en résultent n’ont pas non plus les mêmes dangers, mais ils deviennent pour le médecin plus difficiles à combattre, car contre eux la lancette ne peut rien.
Tous ces accidents disparaissent lorsqu’une voie nouvelle s’est ouverte à la circulation des fluides ainsi retenus; mais avant qu’il en soit ainsi, que de trouble! que de cris! que de mouvements! que de sensations bizarres et singulières éprouvent les malheureux chez qui ce fait arrive!
Quelquefois ce sont dos altérations d'organes qui produisent ces rétentions, ainsi qu’on l’observe dans quelques cas, heureusement rares, d’épilepsie, de catalepsie, d’hystérie, etc. Mais il suffit de la compression d'un nerf pour que le fait que je signale puisse
(i) Vi'ir mon Court de magnétisme en sept leç us.
avoir lieu. Peut-être même, dans les amputations, le tétanos traumatique, qui arrive si souvent et qui amène toujours la mort, tient-il à la ligature de quelques nerfs ou au spasme des parties voisines de l’amputation. C’est a vérifier, et s’il en est ainsi, il serait facile de faire cesser cet état par un quart d’heure de magnétisation.
Cet aperçu, que je ne veux pas pousser plus loin, va pourtant recevoir un peu plus de'lumière par les faits qui suivent.
Voyons si, par le magnétisme, en établissant des courants artificiels, ou en rétablissant la circulation naturelle du fluide nerveux dévié, nous n’allons pas obtenir les plus grands résultats.
Rien n’est si facile, pour le magnétiseur, que de faire cesser les spasmes, des attaques de nerfs, A'épilepsie même. Eh bien , comment s’y prend-il ? Il magnétise de la tête aux extrémités inférieures; rien de plus. Que sentent alors les malades? un dégagement quelquefois subit dans l’organe qui était opprimé. Ils éprouvent la sensation d’une véritable' circulation nerveuse vers les extrémités, et il est même facile d'y constater des mouvements qui n’y avaient point lieu avant cette simple opération. La chaleur revient bientôt dans les membres froids, souvent même il survient de la transpiration aux pieds. On aperçoit de légers mouvements convulsifs sur le trajet que parcourt le fluide qui avait été retenu, comprimé, emprisonné par les spasmes ou contractions des conducteurs où il aurait dû passer pour redescendre. Ces spasmes cessant tout à coup, la route est rouverte, les fluides s’y précipitent ù Ilots, et la partie congestion-
née d’une manière si singulière, mais pourtant si compréhensible, se trouve débarrassée.
La plupart des affections nerveuses peuvent donc trouver un remède? Oui; même celles qui, dans le jeune âge, tuent une grande partie des enfants. J’ai essayé tant de fois avec succès qu’il ne me reste plus un doute.
11 y a ici le livre le plus utile, peut-être, quo l’on puisse faire; s’il m’était libre d’expérimenter dans un hôpital comme je le voudrais, et de telle manière qu’il me plairait, je ferais ce livre,appuyé sur des faits que je rendrais d’une vérification facile.
Vous le voyez, plus nous avançons, et plus la force, dite magnétique, se dévoile et se montre â vos yeux.
Nous avons vu le résultat obtenu en magnétisant la tête, celui non moins positif, mais différent, en magnétisant les plexus épigastriques, le solaire surtout; passons à un autre ordre de faits.
Lorsqu’on magnétise avec beaucoup d’attention et d’une manière intelligente, on découvre encore ceci :
La main dirigée dans la région du diaphragme et maintenue avec quelque persistance amène de singuliers effets ; le rire convulsif, et par suite une sorte de suffocation, quelquefois un épanouissement de la sensibilité avec un état de bien-être inaccoutumé.
Le foie, que l’on pourrait croire tout à fait insensible à cause de sa structure et du peu de nerfs qui en parcourent le tissu, h la longue se contracte, comme un muscle, et ceci est bien précieux dans les maladies de cet organe, d’ailleurs si indolent. On niera ce fait parce qu’il ne s’explique pas. Mais qu’im-porle !
Les intestins grêles éprouvent aussi leurs effets particuliers , lorsque, quittant la magnétisation générale, vous vous attachez avec persévérance à diriger sur la cavité intestinale vos doigts en pointe. Les malades qui peuvent vous rendre compte de leurs sensations vous disent sentir comme si une sorte de galvanisation y était dirigée; d’ailleurs, le phénomène est visible extérieurement, et les contractions remuent bientôt tout le tronc.
Les yeux; j’ai obtenu aussi des contractions des muscles du globe oculaire, toujours sans contact et sur des aveugles, en dirigeant mes doigts vers les orbites.
Pour le cuir chevelu, la même chose, et cependant il n’y avait point de sommeil, et tout le reste du corps était tranquille.
Maintenant procédons par voie d’analyse.
Vous demandiez la preuve de l’existence du magnétisme, vous l’avez eue.
II vous importait de savoir s’il est susceptible d’une application rigoureuse. Vos doutes doivent être dissipés...
Guérit-il? Voilà la dernière question.
Ecoutez ce que dit le professeur Rostan :
« Ils étaient bien peu médecins, peu physiologistes et peu philosophes, ceux qui ont nié que le magnétisme pût avoir des effets thérapeutiques. Ne suffit-il pas qu’il détermine des changements dans l'organisme pour conclure rigoureusement qu’il peut jouir de quelque puissance dans le traitement des maladies?
Il n’est pas une de nos molécules qui ne soit pénétrée par quelqu’une des ramifications nerveuses ; en modi-
fiant le système nerveux, comme on le fait par le magnétisme, il doit survenir des changements fort remarquables dans nos organes. »
•le pourrais vous renvoyer aux ouvrages des magnétiseurs ou vous citer cette liste, maintenant si nombreuse, de malades que l’on a guéris et qui, du reste, l'affirment eux-mêmes.
Je pourrais mettre sous vos yeux les guérisons éclatantes que j’ai obtenues moi-même en agissant comme machine magnétique ; vous rappeler Y Hôtel-Dieu et la fille.1Samson, si authentiquement guérie à l’heure où l’on n’attendait plus que sa fin. Les exemples sont faciles à trouver, mais je veux plus que vous convaincre, je veux que vous magnétisiez vous-mêmes, que vous soulagiez vos frères, et que votre conviction ne repose que sur vos œuvres.
Je veux que, si vous êtes médecin, ou si vous voulez le devenir, vous sachiez quelle ressource le magnétisme peut vous offrir comme moyen de traitement, et combien d’instruction vous pouvez puiser dans l’étude de cette force nouvelle et des lois qui la dirigent.
Je veux enfin que vous fassiez entrer de force dans la science une vérité féconde en grands résultats.
Il ne s’agit plus de faits isolés, d’un, de dix ou vingt êtres ayant les propriétés magnétiques que je viens de faire connaître, mais de la généralité des hommes qui les ont ou peuvent les acquérir. Il ne s’agit plus d'un genre de maladies spéciales pouvant être influencées heureusement par le magnétisme, mais bien du plus grand nombre de nos infirmités.
Faut-il désormais se jeter à corps perdu dans le magnétisme et abandonner tous secours venant de la
médecine? Non, sans doute. Mais il faut forcer les médecins à étudier les ressources qu’offre le magnétisme; il faut, et sans être coupables ils ne peuvent s’y refuser, qu’ils appliquent ou fassent appliquer devant eux l’agent magnétique d’abord clans les cas désespérés, ensuite dans tous ceux où les remèdes, quoique bien indiqués, laissent pourtant les malades languissants, et enfin dans la plus grande partie des affections nerveuses où, de l’aveu même du médecin, les remèdes sont impuissants et inefficaces.
Le magnétisme n’a-t-il pas subi l’épreuve du temps, les préjugés qu’il a rencontrés ne sont-ils pas vaincus én grande partie? Aucun malade aujourd’hui ne repousserait ce nouveau moyen de guérir s’il était présenté ou conseillé par un médecin honorable. Il est temps, pour l’honneur de la médecine, que des préventions injustes cessent d’exister. Les remords viennent à la suite de toute action coupable. Ici n’en est-ce pas une quand un infortuné meurt par impuissance du médecin qui a voulu rester impuissant, qui, lorsque la lumière luit à ses yeux, baisse la paupière pour ne pas voir le jour ? Je sens que j’irais trop loin, je m’arrête; j’ni promis de faire un manuel, d’enseigner une méthode, et je rentre dans mon sujet. Si ma plume obéissait aux impulsions de mon cœur, ce serait un plaidoyer en faveur des droits de l’humanité que j’écrirais ici. J’ai besoin de me rappeler souvent que la science ne veut point de chaleur d’àme, aucun enthousiasme. II faut, pour lui plaire, rester froid en présence de vérités qui vous transportent et vous élèvent jusqu’à Dieu. Et pourlant il ne s’agit ici ni d’algèbre, ni d’arithmétique; sans chaleur d’ftme, sans
pensées brûlantes, point de succès dans des cas extrêmes. On pardonne à un artiste l’enthousiasme qu’il éprouve lorsque, d’un bloc de marbre, son ciseau a fait un chef-d’œuvre. Nous serions inexcusables, nous, si nous manifestions les saints transports que nous éprouvons lorsque notre main, dirigée avec art, a chassé le froid de la mort et donné de la vie à l’être qui se voyait mourir ; n’est-ce point pourtant un chef-d’œuvre capable d’exalter l’artiste?
N’ouvrons point celte soupape aujourd’hui; l’ébul-lition de nos pensées généreuses la soulèvera de force un jour, et le feu longtemps contenu rejaillira au loin.
Revenons à la description de nos procédés, et, pour inciter davantage à la pratique et à l’étude du magnétisme ceux qui. nous liront, agrandissons le champ des phénomènes, parlons du somnambulisme.
(La suite au prochain numéro.)
OPÉRATIONS CHIRURGICALES
FAITES SAN8 DOULEUR, DANS UN ÉTAT MAGNÉTIQUE.
Rapport lu à l’Académie royale de Médecine, le 11 juillet 1843.
Le samedi 10 juin 1843, à trois heures de relevée, en la demeure de M. Cohen, dentiste, place du Palais-Royal, 243, M. Lafontaine nous a présenté Mme Levau, demeurant à Paris, avenue Marhœuf, 27,affectée d’une
bouleui- insupportable produite par lu carie d’une dent, qui l’avait décidée à demander l’opération.
AI. Lafontaine nous a déclaré qu’il allait magnétiser ladite malade, et la mettre, par ce moyen, dans un tel état d’insensibilité que l’extraction de la dent cariée pourrait avoir lieu sans douleur. Alais, avant de procéder ù la magnétisation, il nous a engagés à constater l'état de la dent.
L’examen nous a fait voir la dent, petite molaire du côté droit de la mâchoire supérieure, cariée d’un tiers à lu partie latérale gauche, bien fixe et bien solide dans son alvéole. De légères percussions pratiquées sur ladite dent produisaient des douleurs intolérables qui annonçaient l’inflammation du périoste.
Après cet examen, M. Lafontaine a commencé la magnétisation , et au bout de vingt minutes ladite dame était insensible, à tel point, qu’on pouvait lui enfoncer des épingles dans le cuir chevelu, le menton, les joues et sous les ongles,- sans qu’elle donnât le moindre signe de souffrance. On a pu percuter impunément la dent qui avant la magnétisation produisait de vives douleurs. Dans cet état, M. Cohen a procédé à l’extraction de la dent; il l’a d’abord déchaussée et arrachée ensuite, sans que le moindre signe, la moindre altération des traits accusât lu plus légère souffrance de la part de la patiente. Interrogée si elle avait souffert ou si elle souffrait encore, elle a répondu négativement.
A son réveil, la brèche qu’elle a trouvée à la mâchoire supérieure lui a appris l’extraction de la dent malade. L’alvéole a saigné, comme il arrive toujours lors d’une semblable opération.
Les personnes soussignées, en présence de qui ont eu lieu ces faits, se font un plaisir de les confirmer.
Taris, cc 12 juin 1843,
Berganier, d.-m. P. - Ch. Place, d.-m. P.;Dalibon, d.-m. P.; docteur Fossati ; Cohen, dentiste; baron de Munchhausen; J. Vimeux; B. Rigaud.
Le 22e numéro du XIT volume du Boston medical and surgical Journal contient la description détaillée d’une extraction de dent faite sans douleurs sur un jeune épileptique magnétisé paï un savant français, M. Bugard. L’opération fut faite par un chirurgien renommé, le docteur Harwood, de Boston, en présence des docteurs Teadwell, professeur à l’Univer-sité d’Harvard, Ware, Lewis, Lodge, Parker, d’un grand nombre d’élèves en médecine, et enfin de l’auteur de l'article, le docteur Benjamin West.
On lit dans le Taunthon whig:
« Un jeune homme qui avait une dent cariée, désirant se la faire extraire pendant qu’il serait sous l’influence du magnétisme, se proposa lui-même poür cette expérience. Il fut mis en état de sommeil magnétique complet, en moins de .cinq minutes et à la distance de huit pas, par un ami qui l’avait magnétisé plusieurs fois déjà. En cet état, il trouva que la chambre était trop éclairée, et, quoiqu’il eût les yeux clos, on les lui banda avec un foulard. On lui demanda alors s’il voulait toujours avoir la dent arrachée, et il répondit affirmativement. Quelques minutes après, le magnétiseur, qui se tenait à distance, voulut qu’il
ouvrît la bouche, oc qu’il lit en demandant si elle était ouverte assez grande.
» Le magnétiseur se retira dans une chambre voisine, et l’opération fut faite en son absence. Je m’étais placé auprès du patient, et à son insu je l’ai examiné soigneusement et n’ai observé aucun signe de souffrance. Il n’y eut pas la plus légère contraction musculaire, soit de la face, soit des membres, pendant l’opération, ni changement de contenance ou de respiration; son corps entier resta aussi bien que dans le sommeil naturel le plus tranquille. On lui mit une cuvette sous le menton, mais il ne fit aucun mouvement pour rejeter le sang qui coulait par la commissure des lèvres, jusqu’à ce que le magnétiseur, revenu, voulût mentalement qu’il le crachât.
« Il demanda qu’est-ce qui le faisait tant cracher, et un instant après se plaignit qu’il lui coulait quelque chose dans le gosier. On lui demanda alors s’il savait ce que c’était, et il répondit négativement.
« On convint de le laisser encore quelque temps dans cet état, et, quand on jugea devoir l’éveiller, le magnétiseur s’en alla dans une pièce attenante, en disant aux assistants qu’il voulait qu’il s’éveillât au bout de dix minutes. On observa l’heure avec soin, et, ce temps précisément écoulé, le magnétisé fit un mouvement des yeux, mais ne put les ouvrir, et l’état magnétique dura trois minutes de plus.
« Bientôt après son réveil il aperçut la cuvette pleine de sang, et, portant instinctivement les doigts à la bouche, il demanda avec l’apparence de la plus grande surprise si sa dent avait été arrachée, et déclara qu’il ignorait que l’opération fût faite.
« Celle dent était une grosse molaire de la mâchoire inférieure avec deux longues racines.
« J’ni communiqué celte relation à MM. C.-R. Atwood, Il i ram M., Barnav, Samuel C., West, Horatio Gilbert, Francis S., Munroe, Jonatham llodges, qui étaient présents, ainsi qu’au docteur Nahun Wasli-burn, qui a fait l’opération, ils reconnaissent que c'est le récit fidèle des incidents de la scène, et m’autorisent à le publier avec leur approbation. « G***. »
M. Prideaux, étant appelé auprès d’une femme qui avait les dents en très-mauvais état, imagina d’essayer le magnétisme pour rendre possible une opération dont elle redoutait trop les souffrances pour oser s’y soumettre. L’ayant donc endormie, il enleva d’abord deux des dents qui causaient le plus de douleur. La malade ne témoigna aucune sensibilité. Frappé de ce résultat, M. Prideaux voulut le rendre authentique par l’assistance de témoins compétents. Il réunit donc quelques hommes de l’art, et procéda une seconde fois, avec le même succès, à l’extraction de deux dents et de trois chicots. Dans trois autres séances il enleva successivement encore sept dents et huit chicots. La malade (jeune personne chez laquelle les dents étaient très-adhérentes) ne manifesta aucune douleur. Réveillée après chaque opération, elle en conservait si peu le souvenir qu’en se regardant à la hâte dans une glace elle ne pouvait s’empêcher de rire à la vue de la grotesque apparence que lui donnait sa bouche dégarnie.
M. Prideaux a répété la même opération sur deux
autres personnes. L’une d’elles, dit-il, ¿tait à ce point insensible que, engagée, durant l’extraction, dans une conversation, elle ne cessait pas de parler, et le moment de l’avulsion n’était marqué que parce que l’articulation des paroles devenait alors un peu moins distincte à cause de la présence des instruments.
Jusque-là sansdouto ce sont de forts jolis résultats, et l’on ne peut que féliciter l’auteur en lui souhaitant des opérations plus graves pour augmenter ses succès, et un public plus nombreux pour les constater et les applaudir. Au reste, il n’y a pas lieu de s’étonner autant qu’on serait tenté de le faire, quand on songe aux ressources vraiment merveilleuses dont le magnétisme possède le secret. La sensibilité des.malades, .dit-il en terminant, est de deux sortes : sensibilité à la température, etsensibilité à l’effet d’une lésion trau-matique, telle que piqûre et déchirure. «Or j’ai,con-« tinue-t-il, le moyen Ac suspendre, à mon gré, l’une « ou l’autre de ces facultés, l’autre restant intacle, ou « de les éteindre toutes deux, ou de les laisser sub-« sister. »
(Gazette médicale de Paris, 17 février I 844.) ——
PRÉVISION.
VUE SOMNAMBULIQUE.
J’ai déjà, dans ce journal, cité un fait de vue som-nambulique. En voici deux autres non moins curieux. La fille Samson, que je rendis somnambule à l’Hôtcl-
Dieu, conserva cette disposition quoique guérie. Quelques années après son traitement, le hasard me la fit rencontrer; j’obtins d’elle qu’elle se laisserait magnétiser île nouveau, et elle me rendit ainsi quelques services ; des malades se trouvèrent bien des traitements qu’elle leur prescrivit. Difficile à réveiller, elle restait plongée, malgré moi, dans son sommeil, et souvent il lui arrivait de parler sans être interrogée. Un jour elle se prit à dire: « Mais on vole des livres chez un libraire du boulevard, je vois le voleur, il cache ses livres, il les emporte ! — C’est un rêve, lui dis-je, vous ne pouvez voir cela. —Je le vois certainement. — Quels sont les livres qu’il vole? — Je vais
vous le dire, attendez____i Antigone et le Mérite des
Femmes. » Puis elle se tut, et ne vit plus rien. Cette fille ne savait ni lire ni écrire, et jamais elle n’avait pris connaissance de ces ouvrages. Réveillée, je l’interrogeai et lui demandai si elle connaissait Y Anti-gone, elle me dit « que oui, que c’était un grand oiseau hupé. » l e Mérite des Femmes, ello ne savait ce que je voulais lui dire! Je ne fis point de démarches pour reconnaître si sa vision était réelle : je doutais alors, mais aujourd’hui je suis convaincu qu’elle avait vu, bien vu, et qu’un vol avait été commis, et que les deux livres désignés avaient été dérobés.
Un autre jour, l’ayant laissée en sommeil et étant sorti, elle appela la bonne et lui dit: « More Pillon, mettez à la loterie le n° 20; il sortira demain le premier à la loterie de Paris. Je le vois. » Rentré, j’appris ce que la fille Samson avait dit, mais je n’engageai point la femme Pillon à mettre à la loterie ; au contraire, je l’en détournai, toujours entêté do celte fausse maxime :
On ne /¡eut voir ce r/ui n'existe pas. Mais quel fut mon étonnement le lendemain! Jetant les yeux sur les numéros que chaque buraliste placardait à sa porte le jour du tirage, je vois le n° 26 le premier sur la liste. Je rentrai ; la fille Samson n’était pas encore sortie ce jour; elle n’avait, du reste, aucun souvenir de celte vision et ne s’occupait point de loterie. Je l’endormis, et sa première parole fut celle-ci: « Eh bienj le 72° 26 est sorti, je le vois. — Vous pensez donc voir les numéros?— Certainement. — Alors dites-nous ceux qui doivent sortir au premier tirage. » Elfe en donna quatre, en disant : a Je les vois, mais ils sont tout petits, tout petits. — Qu’importe, si vous les voyez? » Le tirage venu, il n’en sortit pas un seul. Mais ces numéros sortirent successivement, et dans l’ordre qu’elle avait indiqué. C’est, que, comme je l’ai dit dans mon Essai philosophie/ne (I), la lucidité est soumise à des règles. Dès le moment où l’influcncc du magnétiseur commence, les images se troublent ; plus vous voulez alors, moins vous obtenez. Et voici pourquoi ce qui vient naturellement est presque toujours certain, et ce qui résulte d'un travail de l’esprit no présente plus la même garantie. Je citerai d’autres exemples à l’appui de mon opinion. Qu’importe, répéterai-je, queccs faits soient rejetés actuellement? l’avenir leur appartient; ils sont vrais, ils auront leur sanction. L’éducation est lente et difficile; placez un homme entre une vérité et des préjugés ou des erreurs, il laissera la vérité pour suivre les opinions vulgaires. Ainsi je me suis conduit longtemps et je fermais les.
(ij Pages 1 i1! et Miivoule..
yeux à la lumière, satisfait de mon scepticisme, car il obtenait l’approbation de ceux qui m’environnaient. J’ai perdu ainsi l'occasion qui s’offrit à moi plusieurs fois de constater des faits merveilleux et d’avancer rapidement dans la connaissance des facultés de l'âme
Réflexions.
Il n’y a point d’homme au monde qui n’ait changé de sentiment dans un temps ou dans un autre. Que ce soit une preuve de sagesse ou de folie, de connaissance 011 d’ignorance, de varier de cette manière, l’expérience nous apprend qu’il y a bien peu de gens qui croient, vieux, ce qu’ils ont cru, jeunes.
Il y a des idées qui naissent avec nous, et d’autres qui nous sont inspirées par nos parents, par nos nourrices et par nos gouverneurs. Notre enfance est tendre flexible, et, comme l’or qui reçoit toutes les empreintes qu’un nouveau souverain veut lui donner, elle est susceptible de toutes sortes d’impressions. La conversation humaine est comme une monnaie, où ceux que nous fréquentons donnent la forme à nos idées. Comme un livre nouveau que nous aimons change entièrement la raison que nous avions aupa ravant, et donne une nouvelle forme à toutes nos facultés , aussi est-il certain que le genre humain prend plaisir à la nouveauté.
Que ce soit un effet de la faiblesse de la naturo humaine en général, ou do mon inconstance en particulier, ou enfin d’un jugement plus droit el plus mûr, c'esi ec que je ne déciderai point ; mais je suis bien certain qu’il v a dos choses que je ne saurais concevoir
comme j’ai l'ait autrefois, sans faire beaucoup de violence ù ma raison présente. Quoi qu’il en soit, il me paraît évident que l’expérience perfectionne chacun dans ses études, et que ceux qui cherchent à s’avancer dans l’étude de la philosophie sur le fond de leurs découvertes sont en plus beau train de se perfectionner que ceux qui ne travaillent absolument que sur le crédit des conceptions d’autrui.
Ces derniers ne sont à la sagesse que ce qu’un facteur est à un marchand. On peut, si vous voulez, dans les sciences, les appeler frères, ou, si vous l’aimez mieux, banquiers des idées d’autrui. Ils fréquentent les assemblées des savants, ils lisent les livres des anciens, ils sont en commerce avec les plus beaux esprits du siècle ; cependant, après tout, ils n’en retirent qu’un profit médiocre, ils ne feront rien de plus tant qu’ils n’auront pas la hardiesse de hasarder quelque chose du leur.
C’est tout autre chose des premiers. Ils s’embarquent hardiment sur le vaste océan du monde bizarre et critique, et, courant les risques du naufrage et des corsaires, les vents et les tempêtes de la malice humaine ne les épouvantent plus, non plus que tous les rochers de la superstition uutorisée par les lois des nations ; ni les bancs, ni les écueils, ni aucun intérêt particulier ne sauraient abattre leur courage, pendant qu’ils ont pour eux le vent de la vérité et la marée de la rai son primitive, car alors ils savent que la fortune sera ‘ leur pilote et les tirera de tout.
Baron Du I’otkt.
REVUE MENSUELLE W.
SOCIÉTÉ DU MESMÉRISME.
Séance du 25 mars. — Les membres de la Société de philosophie appliquée au magnétisme, réunis extraordinairement pour statuer sur une proposition faite par M. le président de changer le tilre actuel de la société, adoptent, après un long débal, le litre de Société du Mesmérisme. Les statuts sont aussi modifiés; en voici les principales dispositions:
Arl. 1«.
La Société du Mesmérisme, dont le siège est à Paris, rue Tiquetonne n° 10, a pour objet: 1° de rechercher la nature du magnétisme animal; 2° ses rapports avec les autres sciences; 3° de l’appliquer comme agent ihérapeulique.
Art. XI.
La Société reçoit à ses séances des malades qui sont soumis à l'action magnétique ou électro-magnétique par l’un des membres auquel le malade est confié, son étal ayant été préalablement constaté par l’un des médecins membres de la Société.
A chaque séance, le membre qui s’est chargé du malade est tenu de faire par écrit un rapport des procédés magnétiques mis en pratique pendant la huitaine, et des phénomènes qui so sont manifestés sous l’inlluencti de ces procédés.
(1) Nous publierons désormais le comple-rendu des travaux des sociétés savantes qui ont rapport au magnétisme. (JVote du directeur.)
Des cours élémentaires du physique, d'anatomie, de physiologie eide magnétisme seroul faits au siégede la Société par plusieurs de scs membres. L'ouvcriurc de ces cours sera ullé-rieurcment fixée par une délibération de la Société cl annoncée (1).
On procède à l’élection des membres du bureau pour l’année courante.
Sont élus:
MM. Dussacx, président. MM. Perrody, trésorier.
Hébert, vice-président. Warnaw, censeur.
Lemaire, secrétaire archiviste.
Séznce du 27 mars.— M. Lacoste, jeune homme de dix-neuf ans, d’un tempérament nervoso-sanguin, demande à être magnétisé. Avant de commencer, l'on constate quatre-vingts pulsations; M. Courantes! chargé de l'expérience. Bientôt les yeux se closent, la tète se penche, les bras sont pendants, et tous les signes de l'action magnétique sc développent. On essaie l’attraction sur le bras gauche, mais en vain. Le magnétisé, interrogé dans cet état, dit qu’il entend tout, qu’il ne dort pas, qu’il ne peut ouvrir les yeux, qu’il est engourdi et dans un état singulier d’assou pissement; il sent aussi un fourmillement dans le bras gauche. Après un quart d’heure de magnétisation, on ne compte plus que soixante-cinq pulsations.
On démagnétise ce jeune homme, qui déclare s’ôtre soumis passivement à l’action du magnétisme afin d'en étudier les effets sur lui-môme. 11 ajoute qu’il eût pu, s'il eûl voulu, se soustraire à l’action de ce quelque chose de lourd et chaud qui lui tombait sur la tôle et les yeux surtout.
Le docteur I>u>saux magnétise ensuite une jeune femme, RI"" Sainte-Marie.Le somnambulisme ayant été précédemment
(1) Les personnes qui désirent assister soit aux séances, soit aux cours, doivent se faire préseuler par l'un des membres du la sociélé.
constaté, on procède à dus expériences tendant à montrer l’étendue de sa lucidité. Trois verres d'eau, dont deux seulement sont magnétises, lui sont apportés d’une pièce voisine. Ellcen-boit une gorgée de chacun cl indique sans hésilalion celui qui n’est pas magnétisé. On la met ensuite en rapport avec cinq ou six assistants, au nombre desquels se trouvent les deux magnétiseurs d’eau. Non-seulement elle les distingue, mais elle désigne même le verre qu’ils ont respectivement magnétisé.
Séance du 5 avril.— M. llurnel entretient fa société d’un fait qui lui est arrivé hier. Pendant qu’il cherchait à magnétiser une personne incrédule, une autre, placée auprès, fut prise de convulsions, quoi qu’il n’ait eu aucune intention d’agir sur cette dernière.
Al. Dussaux donne lecture d’un p.issage d’un ouvrage allemand intitulé An de prolonger la vie. L’auteur, Hufeland, y traite Mesmer d’une manière peu digue. Le docteur Cruxen fait observer que ce môme auteur, qui s’est déchaîne avec une égale inconvenance contre Hannmann, a maintenant reconnu ses torts envers ses deux illustres compatriotes.
M. Warnaw, analysant un ouvrage récent de Mgr Gousset, archevêque de Reims, en lit l’extrait suivant : « Comment doit « se comporter un confesseur à l’égard de ceuxqui magnétisent « ou qui se font magnétiser? Il s'agit du magnétisme animal, « dont les effets, plus ou moins surprenants, exercent en ce « moment les savants et les naturalistes.
« Il nous est difficile de répondre catégoriquement; car quoi-« qu’il existe deux décisions, dont l'unedela sacrée Pénitencerie « et l’autre du Saint-Office, en réponse à des cas particulier, la « question générale do la licite ou de l'illicite du magnétisme,
« considéré en lui-même, demeure encore indécise.
« En 1842, nous avons consulté le souverain pontife sur la > question de savoir si, sepositis abusibus rei et rejeclo ontni « cum dœmonifœdere, il était permis d’exercer le magnétisme,
« et d’y recourir comme à un remède t/nc plusieurs estiment na-
a lurel et utile à lit santé. Son Eminence le cardinal, grand-pé-« nitencier, a bien voulu nous écrire que la solution que nous « avions sollicitée se ferait attendre, parce que la question n’a-« vait pas encore été suffisamment examinée par le Saint-« Siège. N’ayant pas reçu d’autre réponse, nous pensons qu'on «doit tolérer l'usage du magnétisme jusqu’à ce que Home ail « prononcé. Quand nous examinons de près les effets du magné-« tisme, il n'est pas évident pour nous qu’on doive tes attribuer « à l'intervention du démon. Mais la réponse du vicaire de Jé-« sus-Christ, quelle qu’elle soit, lèvera toutes nos difficultés.
« En disant qu'un confesseur doit tolérer l’usage du inagné-a tisme, nous supposons : 1° que le magnétiseur et le magné-« tisé sont de bonne foi; 2° qu’ils regardent le magnétisme « animal comme un remède naturel et utile; 5“ qu’ils ne se « permettent rien, ni l’un ni l’autre, qui puisse blesser la mo-« destie chrétienne; 4° qu’ils renoncent à toute intervention « de la part du démon. »
— L’ouverlure des cours est fixée au 20 avril. Le premier sera fait par M. lléberl.
SOCIÉTÉ PIIILANTIIROPICO-MAGNÉTOLOGIQUE.
Cette société, fondée en 1841, a son siège rue Louvois, 8, chez le docteur Penoyée. On est admis aux séances sur la simple présentation de l’un des membres.
Les statuts ayant été publiés, nous nous abstenons de les analyser. D’ailleurs, le nom de cette société indique son but. Elle a pour devise :
CllEllCIIONS LE Vil AI , FAISONS LE U1EN.
Le bureau, pour l’année 1845, est ainsi composé:
MM. Deligny, président. MM. Dëlacoub, trésorier.
Dussaux, vice-président. Pgnoyée, archiviste.
PiCiuiiD, idem. Mili.et, censeur.
I.eclerc, secrétaire. Winbnn, idem.
Séance du 2 avril. — MM. NVinenn el Millet rendent compte de l’état de deux pauvres malades que la société a confiés à leurs soins.
M. Winenn rapporte un fait de prévision : une somnambule mise en rapport avec un monsieur qui babite à quatre-vingts lieues de Paris-, lui a prédit que son père, qu’il a laissé bien porlanl, mourrait avant quinze jours. Quand ce monsieur arriva chez lui, il acquit la triste preuve de celte prévision singulière.
M. Millet rapporle un cas de transposition des sens qu’il a observé: le somnambule voyait par le boul des doigts, en sorte que, le bras étant considéré comme la branche mobile d’un grand compas, il pouvait, en le dirigeant en haut, en lias, à droite, àgauche, par devant, parderrière, etc., etc., voir dans toutes ces directions.
M. le comte Des Nos, auteur d’un petit ouvrage sur le magnétisme, rapporte que, dans son pays (confinsdu Maine etdc la Bretagne), il a guéri des dartres vives en trois jours par le magnétisme. Des guérisons aussi promptes dans ces maladies, ordinairement si rebelles, sont chose fort surprenante; et il est bien à regretter que rauteurdecettecommunication n’aitdonné aucun délail sur l'espèce et la marche critique d“ ces affections. Cependant, on sait que dans le Perche, le Maine, la Basse-Normandie, etdans une grande partie, sinon dans toute la Bretagne, il y a des guérisseurs qui font disparaître en quelques joursdes dartres, différentes maladies de la peau, et môme certaines affections scrofuleuscs. C’est de là qu’on les appelle touchcurs d’ÉCROL'ELLES, mot qui indique qu'ils louchent les malades, et il est bien probable qu’ils magnétisent sans le savoir. Mais on manque de données positives, el M. le comte promet de faire des recherches pour élucider cette question.
A propos de ces guérisseurs si nombreux dans différents dé-partemenis, M. Possin dit qu’il y a à Lyon un homme très-connu sous le nom de Joseph l’extatique.
Voici comment il procède: Se tenant debout devant mit-
lade, il so passe les mains sur la tète en frottant et tournant rapidement pendant trois 011 quatre minutes, s’arrête, et sans avoir interrogé auparavant le malade, lui dit: Vous avez telle chose. Puis, recommençant son flottement palmaire sur la téle, il indique successivement tous les symptômes et les remèdes nécessaires.
M. Durieux annonce qu’il vient de se former une société de magnétisme sous la présidence de M. Wiart, à Cambrai. Cette société, composée d’hommes actils et dévoués, publie ses travaux dans un recueil intitulé : Archives de la Société Maunciùjnc de ('.ambrai.
M. Divet, assistant pour la première fois aux séances, déclare qu’il y a environ un an le docteur l.acbaise, de Cherbourg, observa chez lui une fixité de regard qui tient du serpent, qu'il peut, en effet, fixer un objet durant trois heures et demie sans lu moindre clignottcment, et affirme qu’en cet état il n entend rien de ce qui se passe autour de lui. Sur l’observation qui lui fut faite que celle fixité de regard pourrait peut-être lui permettre de magnétiser, il s!exerça dès lors à cette pratique, et obtint bientôt, sur des personnes assez facilement magnétisables, le développement d’effets magnétiques à dix pas de distance. Il propose d’en donner un exemple sur une personne de l’assemblée; le doclcur Dussaux se présente , mais la passivité réclamée par M. Divet et promise par l’expérimenté n’est point observée; l’expérience n’a rien de concluant et est remise à une séance suivante.
M. Divet se lient debout devant la personne qu’il veut magnétiser et à quelques pas de distance, demande au magnétisé de le regarder attentivement, et lui, de son côté, le fixe avec son regard fascinateur. Nous avons observé qu’en cet état M. Divet a la pupile notablement dilatée; c’est la seule particularité appréciable.
Séance du 9 avril.— Après l’adoption du procès-verbal, il. est donné lecture d’un rapport sur une guérison de névralgie
lombaire. M. Chrétien, peintre décorateur, lue dos Petits-Ilôtels, 5, était depuis cinq à six jours atteint de violentes douleurs dans les lombes, lesquelles se répétaient dans la partie postérieure dos jambes. Le jour, tout travail lui est impossible; la nuit, tout sommeil interdit. La chaleur du lit lui était insupportable; il passait ses nuits sur une chaise et sans sommeil. Dimanche dernier, il s’adressa à M. Hébert, qui le magnétisa. Quoiqu’il ne se soit manifesté, comme indice de l’action magnétique, que de légères contractions dia-phragmatiques, le malade se sentit immédiatement soulagé et fit une assez longue course. Il fut encore magnétisé le soir à dix heures, se coucha et dormit toute la nuit. Lundi matin , il reprit ses travaux habituels, ne conservant de ses douleurs que le souvenir.
Il s’engage ensuite une assez longue discussion sur uno opinion émise par plusieurs membres , qui, à ‘propos de la communication faite à la séance précédente par H. le comte Des Nos, relativement à des dartres guéries en trois jours, pensent que certains magnétiseurs ont le pouvoir de guérir telle maladie de préférenceà telle autre, et expliquent les guérisons obtenues si promptement pr.r le comte Des Nos, en disant qu’il a la propriété de guérir les dartres. Le docteur Penoyée , s’élevant avec énergie contre celte opinion, montre tout ce qu’elle a d’erroné et de contraire aux faits observés. Enfin, M. Mialle, à l’appui de ces paroles sublimes et consolantes de Mesmer : « La nature offre un moyen universel do guérir, d rappelle un fait d’observation, savoir: que les magnétiseurs les plus connus ont guéri des maladies diamétralement opposées, parlant que la puissance magnétique de chaque homme n’est pas bornée à une maladie spéciale. Ce qui est l’expression des faits. •
M. l’abbé Lcray, chargé de traduire de l’italien un décret du Saint-Office concernant le magnétisme, fait un rapport sur ce sujet.
M. NVincnn, donl l’aclivilé est bien connue, entretient la Société de l’élal de différents malades.
M. Millet dit quelques mois sur une expérience faite devant lui par M. Divet.
La séance, csl levée.
Les sociétés de magnétisme se multiplient sur plusieurs points de la France. Nous avons annoncé celle de Cambrai ; il yen a aussi une à Grenoble, présidée par le docteur Crépu. On nous promet des renseignements sur deux qui viennent de se former l’une fi Cherbourg, et l’autre à Versailles; le président de cette dernière est M. Vannson.
AVIS.
Un jeune médecin qui réunirait à ses études médicales les connaissances pratiques du magnétisme, et qui voudrait utiliser ses facultés, peut de suite trouver à se bien placer. Un de nos abonnés de province nous prie, en donnant cet avis, d’assurer en même temps qu’un concours empressé de plusieurs honorables personnes rendrait la position que l’on offre avantageuse et pourrait par la suite procurer un bon établissement.
Pour plus amples renseignements , s’adresser au bureau du journal.
Le Propriétaire-Gérant, HÉBERT.
JOURNAL
DU
MAGNÉTISME.
MANUEL DU MAGNÉTISEUR.
(Suite.)
SOMNAMBULISME.
Le magnétisme, outre les propriétés que nous avons décrites, possède une vertu sédative, et. par suite, exerce une action soporeuse ou dormitive sur un grand nombre de magnétisés.
Il n’est pas rare de voir tomber, lentement ou tout . à coup, un être bien éveillé dans un sommeil profond, sans avoir pris d’opium, ou toute autre substance qui puisse faire expliquer ce phénomène. Vous n’avez fait que promener vos doigts en face de lui, et tous ses sens se sont assoupis, et toutes les impressions du dehors n’arrivent plus à lui; il est dominé, anéanti, comme mort; il ne sent plus rien, excepté vous; une espèce de rapport mystérieux s’est établi entre vos deu* systèmes nerveux (1).
(1) Voir mon Suai philosophique, page 73 et suir.
Voici la description, à peu près exacte, de cet incommensurable phénomène. Ce sont des autorités scientifiques qui vont vous la donner.
M. le docteur Ilusson, parlant à l’Académie royale île Médecine, s’exprime ainsi :
« Lorsque le magnétisme produit le somnambulisme, l’être qui se trouve dans cet état acquiert une extension prodigieuse dans la faculté de sentir. Plusieurs de ses organes extérieurs, ordinairement ceux de la vue et de l’ouïe, sont assoupis, et toutes les opérations qui en dépendent s’opèrent intérieurement.
« Le somnambule a les yeux fermés; il ne voit point par les yeux, il n’entend pas par les oreilles; mais il voit et entend mieux que l’homme éveillé. — Il ne voit et n’entend que ceux avec lesquels il est en rapport. Il ne voit que ce qu’il regarde; et ordinairement il ne regarde que les objets sur lesquels on dirige son attention. Il est soumis à la volonté de son magnétiseur, pour tout ce qui ne peut lui nuire, et pour tout ce qui ne contrarie point en lui les idées de justice et de vérité. —11 sent la volonté de son magnétiseur. —11 voit ou plutôt sent l’intérieur de son corps et celui des autres; mais il n’y remarque, ordinairement, que les parties qui ne sont pas dans l’état naturel et qui en troublent l’harmonie. Il retrouve dans sa mémoire le souvenir des choses qu’il avait oubliées dans l’état de veille. 11 a des prévisions et des présensations qui pouvent être erronées dans plusieurs circonstances, et qui sont limitées dans leur étendue. Il s’énonce avec une facilité surprenante. Il n’est point exempt de vanité. Il se perfectionne de lui-même pendant un certain temps, s’il est conduit avec sagesse;
il s’égare, s’il est mal dirigé. Lorsqu’il rentre dans l'état naturel, il perd absolument le souvenir de toutes les sensations et de toutes les idées qu’il a eues dans l’état de somnambulisme; tellement que ces deux états sont aussi étrangers l’un à l’autre que si le somnambule et l’homme éveillé étaient deux hommes différents. »
Puis, continuant, il ajoute :
« Des observateurs modernes assurent que, dans cet état de somnambulisme, dont nous venons d’exposer analytiquement les principaux phénomènes, les personnes magnétisées ont une lucidité qui leur donne des idées positives sur la nature de leurs maladies, sur la nature des affections des personnes avec lesquelles oh les met en rapport, et sur le genre de traitement à opposer dans ces doux cas. »
Lisez encore ce qu’ont écrit, sur ce sujet, de Puysé-gur, Deleuze, Rostan, Georget, Bertrand, etc.
El, pour plus de sûreté, n’acceptez aucun de ces puissants et nombreux témoignages ; magnétisez vous-inéme; vous obtiendrez, n’en doutez pas, la production singulière du somnambulisme magnétique. J’étais comme vous, je n’y croyais point; ma raison rejetait au loin toutes ses merveilles; mais, les ayant produites, j’ai bien dû en accepter la réalité. Plus de cinq cents personnes ainsi endormies în’ont passé par les mains ou ont été soumises à mon examen.
J’ai magnétisé d’abord sans avoir appris; j'ai répété les gestes d’un magnétiseur qui savait à peine son métier. 11 ignorait bien des choses, mais il produisait des faits, en vertu de cette loi que je vous ai fait connaître, à savoir : que tout homme possédé syf-
Jîsomment de force magnétique pour, lorsqu'il a la VOLONTÉ, agir sur le système neiveux d’un autre, et y déterminer des DÉSORDRES momentanés ; plus, le dernier fait que je viens de vous citer, le somnambulisme.
Mais, prenez garde! pour avoir produit l’effet, vous n'aurez pas la science. Celle-ci ne vient pas tout à coup; ici, comme en toutes choses, il faut travailler. Vous possédez un instrument, il faut apprendre à vous en servir!
En vous recevant médecin, on vous dit : Vous connaissez un peu de grec, de latin; vous possédez votre anatomie; la pathologie vous est familière, la matière médicale aussi. Allez, vous êtes médecin. Et pourtant vous ne l’êtes pas encore; il vous faut l’observation, la pratique, que sais-je? le génie, peut-être!
Un homme à qui l’on donne une palette, un pinceau, des couleurs, une toile, etc., etc., n’est pas pour cela peintre ; il faut qu’il s’exerce longtemps, et souvent, malgré son labeur, il reste médiocre. Il fait des tableaux comme beaucoup de médecins font de la médecine, sans art, sans science, sans génie. Peut-être avait-il en lui ce qui fait le grand artiste, une âme ardente, un désir passionné d’apprendre de la nature et de la vérité; il n’a pas su, on ne lui a pas dit comment arrive le génie !
Ici, croyez-moi, l’étude, toujours l’étude !
Le repos n’est lait dans la vie que pour les laboureurs, les marchands et ceux qui supputent des chiffres. Le médecin, comme l’artiste, doit toujours travailler; ce n’est qu’à ce prix que la nature lui vend
ce quon croit quelle lui donne: une supériorité marquée sur tout ce qui l’entoure.
Je voudrais, dans l'étude que je vous propose de faire, vous éviter les inquiétudes, les embarras qui vont vous assaillir. Je voudrais être votre compagnon, peut-être votre maître, afin de vous initier promptement à quelques secrets de l’art nouveau. Mais ce ne peut avoir lieu que par un écrit imparfait, pâle reflet d’une vérité qui n’a encore trouvé aucun homme qui puisse faire sentir sa grandeur et scs bienfaits.
L’enfant qui apprend à marcher fait des chutes, mais se relève ; vous serez comme lui, et, plus tard, vous marcherez aussi dans votre force et votre liberté.
N’écoutez pas surtout ces magnétiseurs qui, méprisant toute étude, vous diront : Il ne faut point de science en magnétisme, cet agent fait tout ! Rappelez-vous que la nature elle-même s’égare parfois, et qu’il n’appartient qu’au savoir et à l’expérience de pouvoir la redresser dans ses écarts et déviations. Le magnétisme doit cesser d’être exercé à la manière des tou-cheurs et rebouteurs des campagnes. L’ignorance ne produit qu’une foi aveugle et un fanatisme imbécile. M. de Puységur avait fait de son cuisinier un magnétiseur; mais il était là pour surveiller ses œuvres et lui donner des conseils. Je me rappelle avec amertume, mais je l’avoue sans honte, qu’une croyance exagérée m’a fait dire des absurdités, et magnétiser, avec obstination, des personnes dont les maladies ne pouvaient en rien être modifiées par le magnétisme. En voilà assez sur ce sujet, qu’il était nécessaire cependant de toucher en passant.
La chose 1h plus difficile est de savoir gouverner le somnambule. Vous le croyez tenir, mais c’est un Protée; aujourd’hui il esl constant, régulier, vous en tirez des choses merveilleuses; demain il sera plein d’imperfections. Et ne pouvant prévoir une chute si soudaine, vous vous désespérez! Laissez-le, il redeviendra sublime, et vous l'admirerez comme si rien ne s'était passé.
J’ai d’abord besoin de vous dire qu’il y a plusieurs degrés de somnambulisme; mais en cela comme pour les sens, quand on veut les décriro, ils augmentent de nombre, et vous, vous y perdez. Cependant, voici ce que vous observerez le plus communément :
Sur beaucoup de magnétisés : — Sommeil Seulement.
Sur un certain nombre: — Sommeil avec commencement de perception, mais confuse, et n’apprenant rien.
Sur un petit nombre! — Vue pour eux-mêmes; prévisions pour ce qui les touche et concerne.
Sur quelques privilégiés : — Tout ce qui manque aux hommes et qui doit être l’attribut de l’âme dégagée de la matière, c’est-à-dire que la vue intérieure est sans limites, et que l’on peut tout voir.
Cette classification des facultés somnambuliques ost incomplète ; chaque jour des faits nouveaux se révèlent, et il est impossible d’en fixer les limites.
Jamais il ne m’est arrivé de produire cette crise singulière sans éprouver une sorte de frémissement nerveux, auquel succédait bientôt une joie secrète, un contentement, comme si mon âme eût voulu m’avertir
que je venais do faire une grande chose et que de nouveaux mystères allaient m’étre révélés. En eliet, il y a tant à apprendre ici! Chaque somnambule est un instituteur nouveau qui agrandit pour vous le domaine de la nature et qui vous monlre la perfection des ouvrages de Dieu. Vous éprouverez le sentiment que je cherche à peindre, non quand vous produirez le sommeil seulement, mais le véritable somnambulisme lucide. Il y alors un choc d'âme à âme que vous sentez parfaitement, une sorte d’illumination subite de votre esprit; vous n’étes plus le même homme que tout ô l’heure ; quelque chose de divin est sorti de vos mains. Bien des magnétiseurs me comprendront, car ils auront éprouvé ce que je cherche vainement à rendre par des mots. Vous tous qui avez un ardent désir de faire du bien, magnétisez, et je vous promets les plus doux moments qu’un mortel puisse éprouver; voliv âme s'unira à une autre âme, et un voile mystérieux dérobera aux profanes cette sainte union!
Le somnambulisme est contemporain des premiers hommes. Au commencement du monde, il a dû être permanent; aujourd’hui il no se produit que par une déviation des forces vives, certaines maladies et l’emploi du magnétisme. Sa durée est limitée. Il est le complément de la vie; c’est par lui seul que l’homme peut se connaître et remonter à son auteur, Diou; et les plus grandes découvertes qui se feront successivement auront pour point de départ cet état moral où rien n’est inconnu.
Lo sommeil, et tout ce qui y a rapport, devraient trouver ici une place ; mais ces questions, qui exigent du développement, seront traitées à port dans ce jour-
nal. Elles eussent allongé ce petit écrit, qui s'adresse aux commençants, auxquels nous n’avons à tracer que des règles pour qu’ils puissent, sans s’égarer, se livrer à la pratique du magnétisme.
Voyons d’abord
COMMENT LES BONS SOMNAMBULES PERDENT LEUR LUCIDITÉ.
Nous sommes quelquefois injustes envers le somnambulisme; nous exagérons ses défauts, sans considérer qu’ils viennent en partie de nous-mêmes. Faites Farbre bon, le fruit sera bon. Comment espérer un bon résultat d’une direction mauvaise?
11 est bien difficile de conserver le sommeil lucide dans son état de pureté. Ceux qui consultent les somnambules n’apportent ordinairement qu’un sentiment peu propre à la manifestation des facultés de ces êtres singuliers : le désir de les trouver en faute. Ils détournent autant que possible l’attention du dormeur pour l’appliquer à des niaiseries : « Quel âge ai-je? suis-je marié? ai-je des enfants? Voyez ce que j’ai dans ma poche. Pouvez-vous lire les yeux fermés? » Et mille autres questions aussi oiseuses.... Tu veux consulter Yoracle? laisse-le donc parler et t’examiner en silence; laisse-le fouiller en toi, y poursuivre ce qu’il a découvert à l’entrée; peut-être saisira-t-il quelque chose de ta destinée, te donnera-t-il des avis bons à suivre pour ta santé ou la conduite de ta vie? Tu veux donc qu’il te trompe, et qu’il soit pour toi ce qu’est un tireur de cartes, qu’il t’amuse et te fasse mille histoires? Retire-toi, tu n’es pas digne d’approcher celui qui voit; la science divine n’est pas faite pour
(les pantins......Mais vous aurez de la peine à éviter
ces communications, elles sont maintenant dans les habitudes; le somnambulisme est devenu un joujou, on l’a mis entre des mains d’enfants. Il faut être sévère pour les consultations, ne permettre qu’un petit nombre de questions et donner le temps d’y répondre : tout travail forcé est mauvais.
Il faudrait aussi que, lorsque les somnambules sont éveillés, tout entretien avec ceux qui les consultent fût interdit ; que pas un mot sur ce qu’ils ont pu dire ou faire ne parvînt à- leur connaissance; car, voici ce qui arrive : les magnétisés qui tombent dans l’état extraordinaire de sommeil lucide, ne pouvant, éveillés, se douter de ce qui se passe durant leur crise, n’ont, par conséquent, nul souci et ignorent leur valeur. Mais que l’on vienne leur dire : Vous avez des facultés merveilleuses ; que vous devez être joyeux de pouvoir rendre tant de services! quel bonheur pour moi de vous connaître ! que de bien vous m’avez fait! etc., etc. La première fois qu’on leur tient ce langage , ils en sont peu impressionnés, peu touchés; ils doutent de leurs facultés. Mais qu’une autre personne, tenant le même discours, lève leurs doutes; l’orgueil commence alors à se développer; ils croient à leur mérite, prennent pour eux ¿veillés ce qui n’est dû qu’à eux endormis ; ils deviennent capricieux, exigeants, ne se laissent endormir qu’avec répugnance , s’occupent d’eux-mêmes plus qu’ils ne le devraient; et, finalement, vous devenez leur esclave, lorsque, pour le bien des deux, vous n’auriez pas dû cesser d’être le maître. Mais vous n'êtes pas au bout. Ces somnambules croient toujours que
vous leur cachez quelque chose; ils vous soupçonnent fie profiter de leur sommeil pour obtenir des révélations qu’ils croient sans prix, et s’imaginent que vous gagnez des monceaux d’or. Vos protestations sont sans résultat ; vous ne pouvez les convaincre, car, à chaque instant, on exalte ce qu’ils croient leur propre mérite. La fréquence des communications établit bientôt une intimité avec les consultants; c’est alors que les propositions leur arrivent de toutes parts; c’est à qui leur demandera de les magnétiser. Ils cèdent promptement, curieux qu’ils sont de savoir si on peut exercer le même pouvoir que vous , magnétiseur en titre. Envahis par deux actions différentes, ils perdent le sens exquis qu’ils possédaient. Mus par deux volontés, ils sont distraits dans leur sommeil, qui devient moins profond , moins régulier, et bientôt il s’établit entre le sommeil et la veille une sorte de communication qui, d’imperceptible qu’elle était d’abord, devient plus visible. Ces somnambules cachent quelque temps ces réminiscences, mais ne sentent plus qu’imparfaitement. C’est dans ce moment qu’il faut de la défiance; car ils vous disent que rien n’est changé, qu’ils y voient de même. Erreur voisine de la tromperie !...
Cependant, longtemps encore ils verront assez pour étonner, pour surprendre; mais les moyens qu’ils indiquent ne sont plus certains: ils se sont composés une sorte de pharmacopée à eux, et, pour s'éviter tout travail, ils vous ordonnent, à vous qu’ils voient pour la première fois, le médicament qui leur a réussi pour un autre malade. Tant mieux pour vous s’ils rencontrent juste, si vous arrivez dans un de
leurs bons moments; car ce n’est plus, dès lors, que de la médecine ordinaire, et, comme telle, accompagnée de dangers.
Ce sont, il faut bien l’avouer, pour la plupart, des magnétiseurs qui vous détraquent ainsi vos somnambules ; ils sont constamment en quête de sommeil lucide, et tous les moyens sont bons pour vous ravir l’instrument précieux que vous avez formé. Lorsqu’ils le possèdent, on ne s’informe point où ils l’ont trouvé, et on les regarde comme des gens habiles, tandis qu’il n’en est rien. Un magnétiseur m’en a ainsi enlevé deux, sans façon : l’une dont le traitement avait été si long, si laborieux, qu’il m’avait occasionné des crachements de sang. L’autre sujet avait été guéri d’un cancer de l’estomac, à la suite de sommeils qui durèrent quelquefois trente heures, et pendant lesquels mes angoisses étaient grandes. Je ne dis pas ceci pour me plaindre, mais pour montrer combien il est difficile de conserver le sommeil lucide. Les parents, les amis môme du dormeur ou de la dotmeuse convoitent ce trésor nouveau , et la pensée de suppléer lo magnétiseur leur vient vite en l’esprit. Il en est autrement, sans doute, lorsque vous développez ce sommeil lucide sur des personnes qui oc** eupent un rang élevé dans la société; vous êtes le seul arbitre, le seul régulateur; mais les servicesque vous pouvez rendre sont bornés à la famille , à quel*-que8 amis, et encore ici que de précautions, que de craintes; on redoute les indiscrétions de la somnambule! on tremble qu’elle ne s’inocule les maux des personnes qui demandent à être mises en rapport avec elle; la plus grande sollicitude l’entoure, et le
bien qu’elle peut faire ne se fait pas, parce qu’on y met trop d’obstacles.
Ainsi, le magnétiseur parvient à former un instrument; et, de deux choses l’une: ou on le lui gâte, ou on ne lui permet pas de 4’utiliser. Souvent aussi, n’ayant que des connaissances magnétiques très-imparfaites, il altère lui-méme, par des expériences oiseuses ou inutiles, la pureté d’une lumière intérieure qui ne demandait que de la réserve et de la prudence pour se répandre au dehors.
Malgré tant de difficultés et d’empêchements, nous voyons cependant parfois le somnambulisme public (j’appelle ainsi celui qui s'exhibe dans Paris) jouir d’une grande réputation, devenir, par des traitements qui réussissent, la cause de conversions au magnétisme. Nous n'en sommes nullement surpris; mais, mieux conduit, le bien qu’il pourrait faire serait incalculable.
Nous venons de signaler les écueils, passons maintenant à l’application.
Dans la majeure partie des cas, la lumière des somnambules ne dépasse pas cependant les bienfaits du magnétisme ; car, c’est lui qui donne la vie, la puissance et enlève les douleurs. Ai-je besoin de m’appesantir sur ces faits? Non, sans doute; mais je dois vous les signaler. Les remèdes ici ne font qu’aider bien peu; la lucidité vous guide ou plutôt sert à vous encourager. Ce que vous me faites est bony je vois le travail qui s’opère en moi ; continuez, je guérirai; telle est la réponse des personnes endormies magnétiquement. C’est donc vous qui êtes l’instrument de la guérison. Les remèdes que s’ordon-
nent les somnambules, quoique bien indiqués , manqueraient leur effet s’ils n’étaient secondés, soutenus par une augmentation du travail médicateur. Il est probable même que l’on arriverait souvent au but sans médicaments. Les plus belles cures que j’ai faites en ma vio ont eu lieu chez des personnes qui n’étaient point somnambules.
Il faut apprendre à se passer de cette lumière som-nambulique, et vous le pouvez en étudiant bien la marche du magnétisme, sa force, sa direction ; et vous acquerrez vous-même une sorte d’intuition qui vous fera voir dans les cas obscurs. Le somnambulisme vous manquera souvent, et si vous n’avez appris à vous en passer, comment ferez-vous? Laisserez-vous les malades sans secours ? Rechercherez-vous la lucidité d’une autre personne pour vous aider? Mais comment vous garantirez-vous des erreurs qui pourraient être commises ? Comment oserez-vous prendre la responsabilité des remèdes ordonnés? Comme vous le voyez, il faut encore beaucoup d’études pour savoir ce que c’est que le somnambulisme, sa valeur réelle, et surtout bien apprendre à le régler.
Ce que je vous dis ici n’est dicté par aucune prévention ; car qu’importe que le bien soit fait par les remèdes ou par le magnétisme, pourvu qu’il se fasse, ce bien? J'ai vu des erreurs graves commises par les somnambules, et elles ont refroidi l’enthousiasme que j’avais d’abord pour leur étonnante faculté. La confiance due aux somnambules doit être en raison de leurs connaissances médicales; c’est de celles-ci dont il faut s’assurer avec soin, et ne donner de consultations à autrui qu’après un sévère examen. Même avec
ses erreurs, le somnambulisme magnétique est la plus étonnante merveille, et je voudrais pouvoir le louer sans réserve; niais mon devoir exige que jo vous éclaire, que je vous lasse éviter les écucils. Soyez prudent ot toujours calme, si vous voulez que vos idées et votre jugement acquièrent de la netteté ; interrogez sobrement, et vous obtiendrez des réponses qui vous guideront dans la recherche des véritables principes du magnétisme. Je vous offre ici la conversation d’un magnétiseur avec sa somnambule ; méditez-la, car elle est propre à votre instruction. En parcourant les ouvrages qui traitent du somnambulisme, vous pourrez y puiser de grandes lumières, surtout si vous lisez avec attention les réponses des somnambules à des questions qui, pour la plupart, n’étaient pourtant point dictées par un esprit de recherche.
Méditez ce qui suit, el tâchez de vous pénétrer des vérités que ce peu de paroles renferme.
« Mes convulsions ont été un peu fortes, c’est un « peu votre faute si elles ont duré si longtemps, w « Dites-m’en la raison? — Vous avez eu peur, vous « vous êtes troublé et découragé, vous vous ôtes défié « de \os forces. — Mais cela peut-il faire quelque « chose, quand on a la volonté de faire le bien? ~r+-« Oui, sans doute; il ne suffit pas d’avoir la volonté « de faire le bien, ij le faut faire; chaque pensée mo* « difievos nerfs et votre fluide, la crainte ou le trou-« ble les amollit, votre fluide perd sa force; par con-« séqucnt, vous ne faites pas le bien, puisque vous « voulez imparfaitement. — On ne magnétiserait donc « jamais mieux que quand on est en colère, puisque « jamais les nerfs ne spnt mieux tendus? —* C’est tout
« lo contraire ; les nerfs sont tendus, à la vérité ; mais « le fluirle acquiert par la colère une modification vi» « cieuse, do môme que toutes les autres passions, qui a ne sont souvent, dans le système de la société, a qu’une combinaison do préjugés; l’instinct n’en a « pas ; la nature est simple, et ne doit pas être fort-« cée, etc., etc. »
(La suite au prochain numéro.)
ACTION DES NARCOTIQUES SUR LE CERVEAU,
TROUPJ.E DE L’INTELLIGENCE, HALLUCINATIONS. (Suite.)
§ H.— Effets de l’opium.
Première observation.
Dans un ouvrage étranger, l’Anglais mangeurd o* pium *, se trouve un récit des sensations éprouvées par l’auteur lui-même, à la suite de l’usage prolongé de cette substance. Nous ep extrayons les passages suivants.
« La première chose qui me força de remarquer en moi un changement notable lut le retour de ces visions auxquelles l’enfance seule ou les grands états d’irritabilité sont sujets. La nuit, lorsque j’étais
(1) Traduit de l'aogla'u par À. D. M. 1 »pl. io-12. Pri* 80 c. Pari*, 1828.
éveillé dans mon lit, de longues processions passaient avec une pompe lugubre autour do moi ; je m’entendais raconter d’interminables histoires plus tristes et plus solennelles que celle d’avant Œdipe ou Priam. Dans le même temps, un changement s’opéra dans mes rêves ; un théâtre semblait tout à coup s’ouvrir et s’éclairer dans mon cerveau, et me présentait des spectacles de nuit d’une splendeur plus qu’humaine.
« Au moment où s’augmentait la faculté de créer dans mes yeux, une espèce de sympathie s’établissait entre l’état de rêve et l’état réel où je me trouvais.
« Tous les objets qu’il m’arrivait d’appeler et de me retracer volontairement dans l’obscurité étaient aussitôt transformés en apparition. J’avais peur d’exercer cette faculté redoutable; car, dès qu’une chose pouvait se présenter aux yeux, je n’avais qu’à y penser dans l’obscurité; je la voyais paraître comme un fantôme; et, par une conséquence apparemment inévitable , une fois ainsi tracée en couleurs imaginaires, comme un mot écrit en encre sympathique, elle arrivait jusqu’àun'éclat insupportable qui me brisait le cœur.
« Ceci, comme tous les autres changements, était accompagné par une inquiétude et une mélancolie profondes, impossibles à exprimer. 11 me semblait chaque nuit que je descendais, non pas en métaphore, mais littéralement, dans des souterrains et des abîmes sans fond, et je me sentais descendre sans avoir jamais l’espérance de pouvoir remonter. Même à mon réveil, je ne croyais pas avoir remonté, a Le sentiment de l’espace, et, plus tard, le sen-
timcnt de la durée, étaient tous deux excessivement augmentés. Les édifices, les montagnes s’élevaient dans des proportions trop vastes pour étro mesurés par le regard. La plaine s’étendait et se perdait dans l’immensité. Ceci pourtant m'effrayait moins que le prolongement du temps; je croyais quelquefois avoir vécu soixante-dix ou cent ans en une nuit; j’ai même eu un rêve de milliers d’années, et d’autres qui passaient les bornes de tout ce dont les hommes peuvent so souvenir.
« Les circonstances les' plus minutieuses de l’enfance, les scènes oubliées de mes premières années revivaient souvent dans mes songes; je n’aurais pu me les rappeler ; car, si on me les avait racontées le lendemain, je les aurais cherchées vainement dans ma mémoire comme faisant partie de ma propre expérience. Mais, placées devant moi-même comme elles étaient dans mes rêves et des apparitions, et revêtues de toutes les circonstances environnantes, je les reconnaissais sur-le-champ. Un de mes propres parents me racontait un jour que, dans son enfance, il était tombé dans une rivière, et qu’au moment où la mort allait l’atteindre, sans un secours imprévu, il avait vu en un instant sa vie entière, jusqu’aux plus petits accidents, se présenter à ses yeux comme dans un miroir, et qu’il s’était senti en même temps la faculté singulière d’en saisir l’ensemble aussi bien que les parties. J’ajoute foi à ce récit, d’après les expériences que l’opium
m’a fait faire.....Je retrouve la même chose dans les
livres modernes, accompagnée d’une remarque que jp crois également vraie, c’est que Le livre tvdouiablc
du compte dont parle lEcriture est Pâme elle-même de chaque individu (J).
« Avec le pouvoir do s'agrandir et de se multiplier, l’architecture s’introduisit dans mes songes. Dans les derniers temps de ma maladie surlout, je voyais des cités, des palais que l’œil ne trouva jamais que dans les nuages. A mon architecture succédèrent des rives de lacs, d’immenses étendues d’eau. Je souffris horriblement de la têle pendant deux mois. Les eaux changèrent de caractère; ce lurent maintenant des mers et des océans. Il se fit encore un changement plus terrible, qui me promettait de longs tourments, et ne me quitta , en effet, qu’à la fin de ma maladie. Jusqu’alors la face humaine s’était mêlée à mes songes sans aucun pouvoir spécial do m’effrayer; mais alors ce que j’appellerai la tyrannie de la face humaine vint à se découvrir. Ce fut sur les Dots soulevés de l’Océan qu’elle commença de se montrer; la mer était comme pavée d’innombrables figures tournées vers le ciel ; pleurant, désolées, furieuses, se levant par milliers, par myriades, par générations, par siècles. Mon imagination était sans bornes ; mon âme s’élançait avec
lêd flois. 1
« J’avais vu, dans ma jeunesse, un cadavre étendu sur une table de dissection ; celte ancienne impression donna lieu à un rêve que j’avais assez fréquemment.
a 11 me semblait que j’étais couché et que je m’étais éveillé dans la nuit. En posant la main à terre pour relever mon oreiller, je sentais quelque chose
(1) C’est un grande Térilé que j’ai laissé entreroir dans mon Esini jihUoto-phique lur le magnétitme, ïtiilé que ¡’espère mettre hors de dout« un jour.
(Sole de M. Du Poltl.)
qui cédait lorsque j'appuyais dessus : c’était un cadavre élendu à côté de moi. Cependant, je n’cn étais ni effrayé, ni môme étonné. Je le prenais dans mes bras et je l’emportais dans la chambre voisine, en me disant : Il va ôtrc là couché par terre; il est impossible qu’il renlre si j’ôte la clef de ma chambre.
« Là-dessus, je me rendormais; quelques moments après, j’étais encore réveillé : c’était parle bruit de tna porte, qu’on ouvrait; et cette idée qu’on ouvrait ma porte, quoique j’en eusse pris laclefsur moi, me faisait un mal horrible. Alors je voyaisen trer le même cadavre que tout à l’heure j’avais trouvé par terre. Sa démarche était singulière; on aurait dit un homme à qui l’on aurait ôté ses os sans lui ôter ses muscles, et qui, essayant de se soutenir sur ses membres pliants et lâches, tomberait à chaque pas. Pourtant il arrivait jusqu'à moi sans parler, et se couchait sur moi ; c’était alors une sensation effroyable, un cauchemar dont rien ne saurait approcher; car, outre fe poids de sa masse informe et dégoûtante, je sentais une odeur pestilentielle découler des baisers dofat il me couvrait. D’autres fois le cadavre venait lire par-dessus mon épaule le livre que je tenais à la main. Je sentais Sés poils dégoûtants m’effleurer le cou éi le visage.
« Qu’on juge de là terfcur que doit Jnspjrét1 une vision pareille ! Je restais immobile dans la position où je me trouvais, n’osant pas tourner la page, et leâ yeux iixés dans la glace stir la terrible apparition. Une sueur froide coulait sur tout mon corps ; puis la porte s’ouvrait, et je voyais (dans la glace encore) entrer une procession sinistre : c’étaient des squelettes horribles, pestant d’une main leurs têtes horribles, et
le l'autre de longs cierges, qui, à lu lueur d’un feu rouge et tremblant, jetaient une lumière terne et bleuâlre, comme celle des rayons de la lune. Ils se promenaient en rond flans ma chambre, qui, de très-chaude qu’elle était auparavant, devenait glacée, et quelques-uns venaient se baisser au foyer noir et triste, en réchauffant leurs mains longues et livides, et en se tournant vers moi, pour nie dire : 11 fait froid. » La dose que prenait le mangeur d’opium variait de 50 à üO grains par jour, et allait parfois jusqu’à 150.
THÉORIES.
DE la source du fluide magnétique.
Il est à peu près démontré que le cerveau est l’organe de l’âme, puisqu’il est l’ensemble de toutes les facultés humaines, que l’on peut diviser en penchants, sentiments, intelligence.
Bien que la localisation établie par Gall et Spurz-heim nous ait fait connaître que chaque portion de l’organe cérébral sert à une manifestation quelconque des àctes de l’esprit ou du corps, nous sommes loin de tout savoir sur le cerveau.
Qui ne connaît les discussions des philosophes do l’antiquité et des temps modernes sur l’usage de cet organe? Chaque homme ayant sa manière de penser ,
les spirilualistes et les matérialistes nous ont donné le spectacle de ce que peut l’esprit de discussion lorsque le sujet ne peut être prouvé physiquement.
Les anciens ont voulu trouver dans l’une des différentes parties de l’encéphale le siège de l’âme. Les uns avaient pris la glande pinéale , d’autres le corps calleux , les corps striés , le centre ovale et les ventricules. On avait poussé l’aberration jusqu’à le placer dans les membranes du cerveau, entre la pie-mère et la dure-mère (1).
Do nos jours on connaît mieux les phénomènes do l’unie et les conditions sous lesquelles ils ont lieu, ainsi que les appareils organiques qui servent à la manifestation de ses facultés. Mais tous ne sont pas connus, et de ce nombre sont surtout ceux que je viens de citer et où les anciens avaient fixé le siège de l’âme.
Il est certes bien d’autres choses que nous ne connaissons pasdansl’homm«; mais, de tous les organes, le cerveau est le plus difficile à étudier, puisque la lésion la plus simple suffit pour troubler les corrélations de tout l’organisme.'
Il est naturel de penser que ce viscère, siège de tout ce qui est l’homme, ne doit pas borner ses fonctions à ce qui nous est connu. Voyons donc s’il ne serait pas possible de trouver, à l’aide de quelques suppositions et des analogies, quelque chose encore inconnu, mais pressenti par quelques auteurs modernes.
(1) Un brillant écrivain du siècle dernier, Voltaire, disait : • L’on a placé l’Ume dam la glande pinéale, dons le cœur, danj la poitrine, dans le foie, i l’épigaslre, dan» la raie. Maintenant il n'y a plut de place. • Nous espérons que l'élude du magnétisme frea découviir l’organe d'où cl'c dirige les opérations de noire machine. (Noie du directeur.)
Tous les liquides connus, tels que le sang, la bile, le suc gastrique, la salive, les larmes, la synovie, le sperme, etc., sont indispensables à l’accomplissement des fonctions auxquelles ils président. Il en est un autre dont l’usage est entièrement inconnu ; je veux parler de celui qui est contenu dans les ventricules du cerveau et dont aucun auteur n’a jusqu’à ce jour indiqué la destination.
Un homme studieux, un de ces génies dont la nature est avare, a dit les nerfs creux : sa vie s’est usée à celle étude ardue, et ses contradicteurs l’ont vu descendre au tombeau avant que le succès n’ait couronné ses recherches. Depuis on a pensé que ce que de son vivant on appelait une vision pourrait bien être une vérité; mais là se sont bornées les découvertes sur cette matière.
D’un autre côté la plupart des magnétiseurs, ainsi que tous les somnambules, se sont accordés sur l’existence d’un fluide nerveux qui se transmet du magnétiseur au magnétisé et dont l’accumulation produit les phénomènes magnétiques.
Quelques magnétiseurs ne soot pas d’aocord sur l'existence de ce fluide, mais leurs raisonnements ont toujours été combattus victorieusement.
Les somnambules ont la faculté de voir la quantité, la qualité et la couleur des fluides des personnes avec lesquelles ils sont en rapport.
Si tous, ou presque tous, s’accordent sur l’existence du fluide ne/veux ou magnétique, il n’en est pas de même pour le réservoir qui le contient. Mais il n’est pas utile à mon sujet de rechercher les diverses opinions de ceux qui ont écrit sur cette matière, il
nie suffit d’avoir établi l'état de la question que je veux traiter. Et d’ailleurs je ne désire que vous entretenir d’une opinion qui s’est formulée dans mon esprit, et que je vous donne pour ce que vous voudrez bien la prendre.
Je m’explique.
Les ventricules cérébraux contiennent un liquide dont la destination est inconnue. En adoptant l’opinion que les nerfs sont creux, cette disposition m’a conduit à penser qu’un liquide doit nécessairement circuler dans leur intérieur.
Chaque liquide, selon les fonctions organiques auxquelles il est approprié, diffère de nature, de saveur, etc., etc., et celui dont je vous entretiens doit ôtre le fluide ne/veux, cause des modiGcalions que l’on peut apporter dans les maladies et princpale-nient dans celles du système nerveux ; il est peut-être aussi le principe de chaleur vitale.
Bien que cette opinion soit peu digérée, voyons si, on la considérant sous ce double rapport, nous ne pourrions pas découvrir la vérité.
1° Ce fluide nerveux que recèlent les ventricules du cerveau est incoloro et d’une nature très-déliée; c’est lui qui donne aux nerfs leur onctuosité et leur souplesse. Il s’infiltre partout à l’aide du canal interne que l’on aperçoit dans les gros cordoiis nerveux , et qui doit se continuer dans les plus pétits filaments où les instruments les plus précis en perdent la trace. Il rayonne à chaque ganglion et est en plus grande quantité où les filaments nerveux sont aussi plus nombreux. Les mains et les pieds sont dans cette condi-
lion, et c’est certainement à cette disposition que sont dus les faisceaux de fluide magnétique que l’on peut émettre par ces parties et que les somnambules voient si facilement (I).
Le gros cordon qui s’épanouit dans l’œil (nerf optique ) se divise en ramifications infinies , et les liquides et le cristallin sont facilement traversés par le fluide magnétique.
N’cst-cc pas à la quantité considérable de fluide réuni dans cet organe qu’est duc la puissance qu’il, exerce sur l’homme et les animaux ? L’abbé Faria ne magnétisait que du regard , et sa puissance était telle qui^sans gestes, et d’un mot, il foudroyait presque les individus qui se soumettaient à ses expériences.
Tous ceux qui sont parvenus à dompter des animaux féroces doivent leur puissance à l’énergie de leur regard. Plusieurs animaux dits fascinateurs ont aussi cette faculté. Et il y a mille exemples et observations, auxquels on ne fait pas suffisamment attention, qui prouvent que le fluide nerveux est bien réel, qu’il est lancé au dehors des organes, et que le cerveau peut en être le réservoir, car l’on ne connaît nulle autre place, nul autre viscère qui lui soit approprié.
2° Il n’est pas aussi facile de démontrer qu’il est le principe de la chaleur animale; pour cela il faut que j'invoque le secours de la physiologie.
L’on sait qu’en faisant une^section dans les filets nerveux antérieurs et inférieurs de la moelle rachi* dienne, les membres situés au-dessous de la section
(!) lino somnambule décriait un ¡our dan! son sommeil: ■ Quelle merveille que ce fluids! Je le vois pénétrer dans (oiiles I»1* porlies de mon corp^j ii n'j n rien dans la noturo qui iui soil semblable. « (i\ole du direclntr.)
sont à l’instant privés do mouvement et de sentiment. Alors la chaleur diminue dans ces parties en raison directe de la lésion.
Dans tous les actes où les muscles fonctionnent, les nerfs agissent aussi, et ce concours d’action imprimant un mouvement aux liquides, la transpiration s’établit. Pendant l’acte magnétique, ce fluide nerveux, que je considère ici comme principe de chaleur, est attiré aux extrémités, qui s'échauffent beaucoup. La transpiration vient aussi quelquefois, mais c’est surtout à la paume des mains des magnétises qu’on l’observe, et parfois en assez grande quantité pour être appréciée sous forme de goutte d’eau. Et s’il est vrai que le magnétisme se produit à l’aide du fluide nerveux, il est impossible qu’il ne soit pas le principe de la chaleur vitale, et par conséquent de la vie elle-même, puisque, plus il y a de vitalité chez l’homme, plus il possède de fluide magnétique.
Par induction ne pourrait-on pus penser que c’esi encore ce fluide qui, dans une forme nouvelle, donne la vie au fœtus? Mais je m’arrête ici; ce sujet est grave et a besoin d’être médité et considéré sous toutes les formes pour savoir s’il s’accorde avec les données de la science.
D. PtCHARD.
Fondateur et «¡coprésident de la Société phihnlhropico-niagnelologMjiip.
VOYAGE A SAINT-PÉTERSBOURG.
La vérité m’a dit : « Marche, marche s'en t’arré-ter... » Et j’ai marché sans pouvoir m’arrôterun seul jour. Étais-je maudit de Dieu? Avais-je blasphémé? Non, sans doute. Maisd’ou vient ce feu qui me brûle? D’où me vient cette ardeur que nul travail ne peut éteindre? Où ai-je puisé cette force qui se renouvelle sans cesse? Pourquoi chercher des entraves nouvelles? Qui me pousse donc enfin vers des lieux qui me sont inconnus?
Ne cherchons point à découvrir ce mystère; obéissons sans murmure. Déjà trente années de ma vie ont passé, et, semblable à cet homme antique, je vais sans songer au lendemain. 11 faut que je trace un sillon et que j’arrache les épines d’un champ où d’autres viendront moissonner : c’est là mon lot sur celte terre. Dieu m’accordera sans doute une récompense si j’ai bien rempli ma tâche.
Passez donc devant moi, gens riches et heureux; je ne jouirai d’aucun de vos biens, et je vous vois sans envie! Et vous, savants orgueilleux, ce ne sont pas les honneurs et la fortune dont on vous comble qui m’éblouissent. Je sais que pour posséder ces faux biens vous avez blanchi sous le harnais; soyez heureux, je n’en serai point jaloux !
Je vais, moi, vous préparer une plus grande ri-
chesse; votre domaine va s’augmenter par mon labeur, et jo ne vous demande en retour que votre tolérance; me l’accorderez-vous? Je la désire suns l’espérer. Mais, crainte puérile! les savants ne font la guerre qu’aux savants, et je ne le suis pas; ils ne poursuivent que le génie; pourquoi donc m’effraierai-je?
C’est cependant à des hommes de science que jo vais avoir affaire ; c’est à eux que je dois m’adresser ; c’est, enfin, un fou qui va chercher des sages. Le monde est rempli de ceux-ci. Partout où je vais porter mes pas , je vuis en rencontrer ; heureusement pour moi je ne suis ni Galilée ni Socrate, et on me laissera passer sans m’outrager. Les temps ne sont plus, d’ailleurs, où les bûchers s’allumaient au souffle de ceux qui savaient. La barbarie seule aujourd’hui est capable de pareil crime; elle ne règne plus maintenant que sur quelques coins de la terre, je n’ai donc rien à redouter. Si la doctrine que je vais répandre repose sur des erreurs, on va me désabuser et m’é-clairer; si j’ai la vérité avec moi, je jouirai bientôt du triomphe qui lui est: réservé.
Mais pourquoi quitter ainsi la France? Les découvertes n’y sont-elles plus encouragées ? N’est-elle plus la patrie des arts et des sciences? Hélas! sans doute, la France est le refuge de tout ce qui possède une grande pensée. Mais pour la vérité mesmérienne les académies sont toujours rebelles j c’est de force que la vérité doit un jour entrer dans le sanetaire do la science. C’est en vain cependant que l’on voudrait empêcher la croyance qui s’établit en France; cette croyance au magnétisme se base sur des faits qui se
produisent chaque jour, et les organes qui doivent les généraliser sont nombreux et connaissent leur mission. J’ai aidé autant que je l’ai pu à l’accomplissement de ce travail, et nul ne peut se flatter aujourd’hui d’avoir fait plus que moi. J’ai payé avec usure la dette que tout homme doit à son pays. Quitte envers lui, le reste de ma vie m’appartient. Cherchons un autre peuple, et pénétrons-lc de la vérité; la récompense sera la môme, qu’importe? Ne sais-je pas le peu de durée de cette vie ? Ne sais je pas que le repos l’abrége plus que le travail? Ne suis-je pas convaincu que la fortune corrompt et amollit le cœur’.’ Étais-je d’ailleurs le maître de choisir ma destinée? L’homme s’agite, etDieu le mène. C’est en vain qu’il se révolte contre les décrets de la Providence; elle a voulu, je le sais, que je suivisse cette carrière, et-déjà je sens combien ma docilité m’a été favorable. Sans elle, aurais-je pu connaître les hommes, leurs préjugés, leurs erreurs? Comment aurais-je pu sauver quelques êtres, leurs victimes? Gloire à vous, Seigneur, même pour les maux que j’ai soufferts ! Pardonnez-moi si parfois je me suis plaint comme un enfant; on ne devient homme qu’à la condition de souffrir, mais longtemps jo l’ignorai. Vous m’avez enflammé pour soutenir une cause juste, car c’est celle de l’humanité; vous avez voulu qu’un peu de poussière que vous avez animée concourût à l’élévation d’un nouvel édifice. Que votre volonté soit faite !
Adieu, Paris, ville aux cent palais; tout s’anime dans ton sein aux inspirations de la science et de l’in dustrie. Le frottemeut des intelligences développe en toi une force intellectuel le qui te galvanise chaque
jour; cclte force, semblable à celle des feux souterrains, prépare en silence de nouveaux bouleversements et de terribles catastrophes, car l’abus de la science amène le doute, le doute le mépris des choses saintes et sacrées; l’homme reniant son Dieu renie bientôt après la vertu.
En partant je ne puis m’empêcher de jeter un dernier regard sur cette ville qui a été témoin de mes premiers efforts pour établir une vérité sublime. Hôtel-Dieu , asile de l’infortune, où le malheureux va souffrir et mourir, c’est là que mon âme expansive a pour la première fois plaidé la cause de l’humanité. Et toi, jeune 011e que j’y ai guérie, lu n’as pas sans doute oublié ce bienfait? moi, je me rappellerai toujours le lieu de mon triomphe et de mes premiers succès.
Fuyez donc, triste et douloureux souvenir d’une vie passée dans une lutte contre des hommes animés par de mauvaises passions, faites place à des chagrins nouveaux ; désormais je ne puis ôtro joyeux que lejour où la vérité aura vaincu l’erreur, mais ce jour..i je ne le verrai pas !
Magnétisme ! souffle du Créateur, tous les hommes le possèdent, ils vivent par toi, et meurent quand tu leur échappes! allons justifier de ton existence. Apprenons aux hommes à faire un noble usage de leur puissance, de ce feu divin soumis à la volonté. Et tandis que tant de gens, dans leur délire, cherchent tout ce qui est propre à détruire, enseignons, nous, les moyens de conserver.
(La tuile nu prochain numéro.)
LES HYDROSCOPES.
M. l’abbé Paramclle vient de parcourir les cantons de Saint-Amour et de Saint-Julien-en-Montagne; les sources semblent naître sous ses pas (I). Tous les journaux les plus sceptiques en fait d’excentricité s’accordent à reconnaître la spécialité singulière du savant hydroscope; mais ce qui est plaisant à observer, c’est que, lui refusant une faculté particulière, ils attribuent ses découvertes à une étude approfondie de la géologie et du cours des eaux souterraines. Pouvoir à l'aide d’une semblable élude dire : Une source est là plutôt qu’à un mètre plus loin ; eüe est à telle profondeur, elle fournira telle quant ité d’eau, nons semblerait encore plus prodigieux, plus fantastiqae, que d’admettre que M. l’abbé Paramelle voit à travers la terre. Écoutons cet hydroscope dans ses explorations.
« J'aperçois trois sources à trois mètres de distance les unes des autres ; il sera facile de réunir ces trois sources en une seule qui produira tellequantité d’eau. » On creuse aux lieux indiqués, et les trois sources découvertes et réunies remplissent les conditions annoncées.
Nous demandons si l’étude géologique peut amener
(!) Les journaux locaux üc celle semaine annoncent que déjù on a découvert trente-huit sources d'après scs indicalious. (Noie du directeur).
de telles indications sur des emplacements souvent sans accident de terrain. A ceux qui l’interrogent, M. l’abbé Paramelle répond qu’il ne doit sa science qu’à l’observation, parce qu’il craint, avec juste raison, le ridicule et les quolibets qui l’accueilleraient s’il disait : « Jo vois à travers le sol. » Et cependant il voit comme voient certains crisiaques, certaines
somnambules.
Un de nos amis qui, après avoir été comme nous antimagnétiste, s’occupe actuellement de la nouvelle science si controversée, et qui possède un sujet lucide, se promenait dernièrement avec son somnambule sur une grande route, lorsque celui-ci se baissa et voulut ramasser une pièce de 5 francs, qui cependant n’était pas apparente. « C’est singulier, dit-il, je vois une pièce, et jenepeux la saisir. —Erreur, répliqua notre ami, car je ne l’aperçois pas. — Jo la distingue parfaitement, et je l’aurai, reprit le crisiaque. » On creuse à un demi-mètre de profondeur, et l’t>n découvre une pièce de 5 francs, noircie par son séjour prolongé dans la terre. Notre ami a essayé la clairvoyance de son sujet à l’état de veille et a découvert plusieurs sources à la même profondeur. Le crisiaque endormi ' annonce qu’avant un an il sera aussi savant hydroscope que l’abbé Paramelle. Notre ami nous a écrit dernièrement, pour nous exprimer l’étonnement dans lequel l’avait jeté cette spécialité de son sujet. Nous lui avons répondu que nous avions déjà recueilli une quinzaine de faits semblables, beaucoup plus extraordinaires que celui qu’il a observé; faits dont 1 un, la découverte de plusieurs pièces d’argenterie, u fait assez de bruit à Màcon pour mériter les honneurs du
feuilleton que nous nous proposons de lui consacrer prochainement.
Un nouvel hydroscope, M. l’abbé Chatelard, do Chambéry, se montre le digne émule de M. l’abbé Paramelle. Il vient de faire quelques excursions dans les environs de Lyon, et scs premières indications ont été couronnées de succès. Il a découvert deux sources abondantes dans la propriété de M. Bonevcnt, maire de Vaugneray. L’eau a été trouvée à la profondeur désignée. El cependant M. l’abbé Chatelard n’a jamais fait d’études géologiques, nous a-l-on assuré.
On pourra nous objecter que, si les hvdroscopes voient à travers le sol, ils peuvent facilement découvrir des mines cl s’enrichir rapidement. Nous répondrons que la faculté de voir sc borne, pour le plus grand nombre, aux courants d’eau, et qu’il est réservé à quelques crisiuqucs seulement d’apercevoir les métaux enfoui^. Pourquoi cette faculté de voir est-elle ainsi bornée? Dites-moi pourquoi l’électricité, qui soulève le sol et renverse des villes, esl arrêtée par une simple feuille de verre; et si vous me répondez, je tâcherai de vous satisfaire à mon tour. Nous n’admettons pas que les hydroscopes voient avec leurs yeux, mais ils voient avec l’âme, avec ce sixième sens dont l’homme jouira, a dit l'ourier, dans la période harmonique, c’est-à-dire à l’époque où l’homme aura acquis toute la perfection dont il est susceptible.
Les faits qui prouvent que l’homme jouit de facultés encore peu connues sc multiplient tellement que les sceptiques n’oseront plus les mettre en doute. Matérialistes, appuyés sur vos organes, vous n’admettez que cc que peuvent ces organes; tout ce que vous ne
voyez pas est inaperçu, tout ce que vous ne pouvez toucher n’existe pas. L’avenir, et un avenir prochain, vous démontrera que la matière a assez régné, que lo règne de l’âme est arrivé. Nous sommes fiers el heureux d’ôtre l’un des apôtres de ce nouveau symbole : le spiritualisme physiquement démontré.
Docteur Ordinaire.
(Extrait de la Mouche de Saône-et-Loire.)
OPÉRATIONS CHIRURGICALES
PENDANT L’ÉTAT MAGNÉTIQUE.
A Monsieur le Directeur du Journal du ¡Magnétisme, Monsieur,
Mes idées sur le magnétisme vous sont connues. Toutes mes études sur cette branche de la physique médicale m’ont prouvé et me prouvent chaque jour que l’électricité est cet agent que l’homme a la faculté de développer sur son semblable et de pouvoir modifier, suivant sa volonté, pour en faire un des moyens les plus puissants de la thérapeutique.
D’après cette théorie, mes idées sont toutes opposées à celles des magnétiseurs mes devanciers, et môme mes contemporains. Mais jo n’ai pas 1 intention de vous exposer actuellement cette nouvelle théorie, que je me propose de faire connaître par la voie de votre intéressant journal, si vous vous voulez bien le permettre. Pour aujourd’hui je me bornerai à vous
communiquer un l’ait d’insensibilité magnétique sur un jeune homme de quinze ans, auquel j’ai enlevé une tumeur enkystée pendant le sommeil magnétique.
Je ne vous apprendrai rien de nouveau, seulement c’est un fait de plus à constater; je pourrais les multiplet j’en possède de nombreux exemples.
Mirra (Joseph), âgé de quinze ans, portaità la partie supérieure de la tête une tumeur enkystée, de la grosseur d’une forle noix. Elle était mobile et insensible au toucher.
Le jeune Mirra passait facilement à l’état somnam-bulique. Je proposai donc à la mcrc de l’opérer pendant lo sommeil, ce qui fut acceplé.
Le 20 mai 1844, je procédai à l’opération, ainsi qu’il suit :
Ayant placé le malade dans un fauteuil et dans la direction du méridien magnétique, c’est-à-dire le dos tourné du côté du nord, je le magnétisai, avec l’intention d’obtenir le sommeil magnétique et l’insensibilité. Après cinq ou six minutes, Mirra était profondément endormi. Interrogé par moi, il me répondit qu’il dormait, qu’il était entièrement isolé, mais qu’il éprouvait de la gêne à respirer; quelques passes faites sur la poitrine suffirent pour le calmer.
Pour m’assurer s’il dormait réellement, et désirant savoir s’il était sensible à l’action de l’ammoniaque, je lui en présentai sous le nez un llacon à large ouverture; après deux ou trois inspirations, la face se colora. Interrogé sur ce qu’il ressentait, il répondit : • Ça picjuè, ça pique. » Après cette épreuve, je demeurai bien convaincu de son insensibilité.
Je coupai les cheveux et rasai la tumeur et ses en-
virons. Une incision longitudinale d’arrière en avant fut Faite, sans déterminer, de la part du malade, le moindre mouvement; seulement il dit : « Vous me faites mal. » Chaque lambeau fut incisé, et à chaque incision il répéta : « Vous me fuites mal ; » mais la tête resta immobile. Chaque lambeau fut disséqué jusqu’à sa base, et la tumeur, parfaitement isolée, fut enlevée, sans que le patient exécutât le moindre mouvement. Je rapprochai les lambeaux, et un pansement méthodique termina l’opération.
L’opération terminée, je fis quelques passes, dans l'intention de calmer le malade, et le laissai dormir dix à douze minutes, après lesquelles je lui demandai s’il désirait s’éveiller. « Comme vous le voudrez, » fut sa réponse. Jo l’éveillai et lui demandai comment il se trouvait. «Très-bien! » Je lui montrai la tumeur que je venais de lui enlever; il ne voulait pas croire que ce fût la sienne, et il porta de suite la main sur sa tête, pour s’en assurer. Je lui arrêtai la main et lui recommandai de ne pas toucher à sa tête et de me venir voir le surlendemain pour se faire panser.
Le deuxième jour, mon petit malade fut exact au rendez-vous. Je le pansai sans l’endormir, et le pansement fut douloureux. Il se glissait sur son siège, comme pour fuir la douleur que lui causait le décollement de la charpie, qui adhérait fortement aux bords de la plaie.
Au deuxième pansement je l’endormis ot procédai au pansement sans qu’il donnât le moindre sigpe de sensibilité. Je jugeai devoir procéder ainsi pour les autres pansements, afin d’éviter la douleur. Au dixième jour, la guérison fut complète.
J’espère, monsieur, que, grâce à votre obligeance, et par la voie do votre journal, cette observation arrivera à la connaissance de mes confrères, et les engagera à suivre mon exemple, ne doutant nullement qu’ils n’obtiennent comme moi un entier succès.
Votre tout dévoué,
J.-C. Dussaux.
U. M. P., ancien élève particulier cl projecteur de M. Dupuytren, etc., etc.
Paris, 12 mai 1845.
Un de nos abonnés nous communique une lettre qu’il vient de recevoir de Londres, et où se trouve relaté un cas d’insensibilité. Une jeune personne endormie par un mesmériseur, M. Vernon, a eu un jour trois et le lendemain deux dents molaires extraite» sans manifester la moindre douleur.
BIBLIOGRAPHIE.
Facts in Mesmerism, with reasons for a dispassionate inquiry into it, by the reverend E.-H. Town-SHEND, A. M. (1)
Depuis les mémorables expériences de M. Du Potet à Londres, le magnétisme, dont nos voisins n’avaient
(1) London, H. Baillüre, 219, Regent-street. Paris, J.-B. Boillière, ruede l'Eco le de Médecine.
aucune idée, a fait des progrès très-rapides. Cette importante question ayant fixé l'attention des médecins, des théologiens et des philosophes les plus considérés de la Grande-Bretagne, plusieurs ouvrages remarquables ont été publiés depuis quelques années. Celui que nous analysons est un des plus estimés, et la deuxième édition en est bientôt épuisée.
Le premier livre traite du mesmérisme, des causes qui l’ont rendu impopulaire, et en font un sujet difficile à traiter. L’auteur cite à l’appui de ces assertions des faits qui lui sont particuliers et augmente par là le nombre des preuves et des arguments favorables au magnétisme en général.
Le second livre est consacré au somnambulisme, que l’auteur propose d’appeler et appelle sleepwa&ing, d’après le docteur Llliotson, qui, dans sa Physiologie, au chapitre magnétisme, a le premier employé ce terme. La dénomination de somnambulisme est fort impropre pour désigner les faits qu’elle représente; plusieurs magnétiseurs l’ont parfaitement senti. De là les mots de noctambule, somnilo/jue, onéroscope, hjpnoscope qu’ils ont tenté d’y substituer. Une bonne langue scientifique est chose précieuse, elle sert à bien s’entendre sur la valeur des faits, et ces mots nouveaux appliqués chacun à une nuance du somnambulisme eussent,nous n’en doutons pas, été utiles; mais l’usage a prévalu, et ils sont restés dans l’oubli. Celui qui nous occupe en ce moment signifie littéralement sommeil veillant. Comme il n’a point d’équivalent dans notre langue, nous le traduisons par som-nilucie (sommeil lucide). Puisse-t-il avoir un sort meilleur que ses prédécesseurs.
Tout ce second livre est rempli d’observations de somnambulisme, desornnilucic, de provision, d'insensibilité, de communication mentale des pensées, etc., que l'auteur a laites dans dilîérentes parties de l’Europe. Toutes ces observations, claires et précises, méritent de fixer l’attention des magnétiseurs et des psychologues.
Enfin, dans le troisième livre, l’auteur, en sa double qualité de magnétisto et de théologien, examine dans sa nature, dans ses rapports avec ce que nous connaissons en général, ce fluide magnétique qu’il appelle Mesmeric medium. Tout est bienjusque-là. Le révérend, déduisant les conséquences logiques des faits qu’il a rapportés dans les deux livres précédents, attaque avec une logique serrée les préjugés scientifiques et mondains qu’il rencontre sur son passage. Mais, arrivé à la théologie, il s’arrête, il hésite; on voit qu’il sait, mais il n’ose dire; et pour ménager quelques préjugés religieux, il se contredit. Ce n’est plus Townshend l’homme, c’est Townshend le prêtre qui parle.
C’est ici que commence 1a lecture philosophique de cet ouvrage d’ailleurs si remarquable. Nous eussions voulu continuer cette courte analyse jusqu’au bout du livre, mais un compatriote de l’auteur, M. Meade, ayant fait ce travail, nous allons en donner la traduction.
« A la page 282 on lit : « Ce qui est immatériel ne peut, par sa vraie définition, mouvoir des masses de matière. » Cette proposition, parfaitement correcte, équivaut à dire : « Ce qui est immatériel ne peut, par
sa vraie définition, être uni à un corps, c’est-à-dire
ne peul pas plus so mettre en contact avec lui qu il n’est capable do le mouvoir. » L’auteur ajoute encore :
« Ce n’est que quand l’esprit est mystérieusement uni à un corps qu’il est en rapport avec l’espace ou extension.» Mais ici il est évident que, par le moyen ou plutôt ù l’abri de l’adverbe mystérieusement, M. Townshend détruit sa définition, et de cette manière, quoique tacitement, admet l’impossibilité de l’existence d un esprit. Cette destruction de la définition entraîne la destruction de la chose définie, ou, en d’autres termes, c’est la négation de son existence. Immatérialité implique impossibilité d’union. Union par conséquent implique la nécessité de matérialité; et comme matérialité est la négative d’immatérialité, elle l’est aussi de son synonyme spiritualité ; le mot union, non métaphoriquement employé , signifiant contact immédiat ou médiat des corps, ce qui n’est pas corps ne peut être uni. C’est pourquoi union implique nécessairement l’existence d’au moins deux corps. Tout ce qui renferme une contradiction directe de termes n’est pas un mystère, c’est une fausseté.
« Voici le même sujet traité mathématiquement.
« Les termes auxquels M. Townshend applique ses arguments sont au nombre de trois, savoir : spiht , OUR BODY , MATTER IN GENERAL.
« Représentons l’esprit par A,
Notre corps par B,
La matière en général par C ;
« Nous avons tous en l’esprit cet axiome que deux objets qui sont respectivement égaux ou in-
égaux , compatibles ou incompatibles , d’union possible ou impossible avec un troisième, sont dans le même rapport égaux ou inégaux, etc.,etc., entre eux-mêmes.
a Or, comme, d’après la proposition de M. Townshend , l’addition de l’esprit est ce qui constitue la différence essentielle entre l’homme et la matière en général, il suit que A + B — A = B = C.
« Maintenant quand il dit que « ce qui est immatériel ne peut mouvoir la matière , c’est-à-dire ne peut se mettre en contact avec la matière en général C , il établit clairement que A -+- C = une impossibilité.
« Mais comme C = B il suit nécessairement que A+C - A -+- B — UNE IMPOSSIBILITÉ.
o M. Townshend est trop strict logicien, trop correct mathématicien pour avoir commis une inconséquence telle que celle que je viens de relever. Je ne puis me l’expliquer qu’en supposant qu’il s’est servi de cette union mystérieuse et merveilleuse de l’esprit et du corps comme d’un masque pour échapper à Fa-nathème des prêtres fanatiques et ignorants ou à la censure des philosophes de bas étage.
« A la page 114 M. Townshend dévie encore à son profond raisonnement en approuvant la définition de l’àme; selon M. A. E", «L’âmen’est pas une chose,c’est une pensée. » Pourma part je pense qu’une pensée sans penseur est chose que tout homme qui pense ne pourra concevoir. Si l’âme est un être indépendant, produisant elle-même la pensée et capable de contact avec notre corps, cette pensée est à toutes intentions ou desseins un tangible ou mieux un agent tangent, et étant ainsi tangent elle doit elle-même être un corps.
«Cette conclusion est la conséquence inévitable de la destruction do la définition que je viens d’attaquer.® Disons en terminant qu’à part quelques points discutables l’ouvrage du révérend Townshend est fort instructif, et certainement ce qu’on a publié de mieux en Angleterre. Beaucoup de questions y sont présentées sous un jour nouveau. Les faits qu’il rapporte doivent, pour les incrédules outrés, cesser d’ôtre, de paraître incroyables, et pour les chrétiens timorés, supernaturels.
Les Facts in Mesmerism contiennent une innovation fort importante et qu’il est bien à désirer qu’on imite. C’est de rapporter les réponses et tous dires des somniluces dans leur idiome, et d’en donner la traduction à côté. De cette manière il ne peut pas y avoir malentendu, puisque l’on peut toujours considérer les paroles mêmes du somniluce. C’est ce qui fait qu’il n’y a pas de page des Facts in Mesmerism où l’on ne trouve plusieurs phrases françaises.
M. IIÉBERT.
REVUE MENSUELLE.
La fin du mois dernier a vu s’accomplir un fait d’une portée immense pour l’avenir du magnétisme. Le grand amphithéâtre de PEcolede Médecine, ordinairement désert malgré l’éloquence et le savoir des professeurs, se trouva tout à coup encombré. Lo mot de magnétisme circulait de bouche en
bouche; à l'anxiété qui régnait dans l'assistance, il élaii facile de voir quel puissant intérêt excite celle importante question. M. Trousseau, professeur de thérapeutique, parut bientôt.
Un silence comme jamais je n’en ai vu en ce lieu s’établit aussitôt. Alors l’éloquent professeur commença son discours. Mais au mots de magnétisme thérapeutique quelque chose d’é-tectriquc s’empare de l’auditoire; les faces sont empreintes d’un sentiment d’étonnemeni difficile à décrire. On s’interrogea du regard comme pour se dire: Où veut-il en venir? tant on est habitué aux sarcasmes qui partent de cette tribune.
M. Trousseau, rangeant le magnétisme au nombre des moyens singuliers de guérir, établit d’abord la réalité des effets magnétiques, qu’il confond â tort avec les somnambtili-ques. 11 cite dans ces derniers des cas de lucidité que bien des magnétiseurs taisent, dans la crainte d’ôtre taxés d’exagération.
La leçon finie, de nombreux groupes se forment dan* la cour de l’Ecole. On discute ayec chaleur sur ce qu’pn,¡vient d’entendre; et tous ces jeunes gens, élevés daus le mépris de celle science, qu’on nie toujours devant eux, se disent : Mais si ce qu’il avance est vrai, on nous a indignement irompés.
Dans la seconde leçon, M. Trousseau, contenant l’examen du magnétisme, cite des guérisons nombreuses, cl s'exprime à peu près en ces termes : « Toutes les fois que vous ne saurez plus que faire, magnétisez, et vous obtiendrez des résultats qui vous surprendront. Mais ne dites à personno ce que vous faites, lâchez même que, ni passes, ni aucun geste ne puisse indiquer voire action ; car les parents et les malades eux-mêmes n'y ajouteraient pas foi. 11 faut, dans ce cas, les guérir sans qu'ils sachent comment, s
En présence de déclarations aussi positives faites par un professeur estimé, on demande de loutes parts des expéricn-
ces-, mais il faudrait pour cola l’agrémeni du conseil académique, qui, à n’en pas douter, refuserait.
Le 26, M. Trousseau devant conclure, l’afluenceétait encore plus grande qu’aux leçons précédentes. Après avoir posé en principe que le magnétisme est un agent thérapeutique utile surtout dans les affections nerveuses, il dit de ne rien conclure des guérisons qu’il a rapportées, parce qu’on ne sait pas si, à la longue, elles ne sc seraient pas guéries d’elles-mêmes, et que les guérisons ne prouvent rien. Nul ne s’en va satisfait de cette conclusion; les magnétistes lui reprochent de n’ûlre pas franc, les sceptiques de n’être pas logique, d’autres de ne pas oser soutenir jusqu’au bout les faits qu'il a annoncés. Quels que soient les motifs d’une conclusion aussi inattendue, non» considérons les leçons de M. Trousseau comme une démonstration très-favorable et le premier pas fait vers l’examen et l’étude du magnétisme.
— A la suite des leçons de M. Trousseau à l’Ecole de Médecine, il s’est ouvert, rue des Poitevins, n. 10, un cours de magnétisme à l’usage des étudiants en médecine.
— On lit dans la Mouche du 22 avril :
« Un singulier cas de somnambulisme a été observé, il y a quelques jours, à Mâcon.
« Une journalière, après avoir chauft'é une lessive dans la rue Municipale, se jette sur un lit à trois heures du soir, se lève une heure après, ùte les cendres du cuvier, prend une énorme charge de linge qu’elle porte à la plate, bien persuadée qu’il est quatre heures du malin. Elle est désolée de voir que les laveuses, qu’elle avait retenues la veille, ne soient pas venues, et elle annonce à la maîtresse de la maison qu’il faudra en retenir d’autres. Elle explique son -embarras à deux personnes qui ne parviennent pas à la dissuader. Arrivée au bateau, cllo voit les laveuses sur lesquelles elle comptait, qui travaillaient pour d’autres, et leur fait d’amers reproches.— Puis, tout â coup, elle sort de l’étal de somnambulisme où elle se trouvait, elle reconnaît son emjur et fond en larmes.
Elle veut reprendre sa charge de linge, mais celle charge est au-dessus de ses forces-, il faut qu’une personne complaisante lui aide à la reporter à la maison, en en prenant la moitié.— Qu’en diront les sceptiques?
— Nous recevons, de l’un do nos abonnés, la lettre sui-vanie :
a Monsieur,
« Le premier des faits que je viens porter à la connaissance du public, par la voie de votre journal, celle tribune de la plus grande, de la plus belle, delà plus admirable vérité, m’a fait sentir qu’on ne saurait donner trop de publicité à de pareilles actions; car l’exemple encouragera les personnes bien intentionnées que la timidité ou la crainte du ridicule reiien-nent souvent dans la manifestation d'un acte d’humanité; et, ici, l’exemple a d’autant'plus de valeur que l’auteur de la première action que je vais signaler est une dame.
« Les deux autres faits sont analogues au premier; et si j’ai attendu une circonstance pour les publier, c’est que, d'un côté, je n’y suis pas étranger, et, d’un autre, qu’il est peu de gens qui croient ce qu’ils lisent, quand il s’agit de fails de celte nalure, comme si ceux qui les produisent avaient intérêt à les (romper. D'ailleurs, ces fails ne sont pas jusqu’à ce jour restés ignorés de tous; car, chaque fois qu’ils se sont produits, j'étais dans la rue entouré de nombreux témoins, et j’ai proclamé hauiement devant eux que le magnétisme élait l’agent qui avait opéré ce qu’ils regardaient comme un prodige.
« Il y a quelques jours, sous la porte cochère du n° 51 de la rue du Faubourg-Saint-Denis (entreprise des voituresMau-comble), élait une jeune fille de onze à douze ans, se roulant à terre, se tordant et se débattant depuis une demi-heure entre trois ou quatre personnes qui la tenaient par les membres; elle avait une attaque de nerfs. Beaucoup de monde stationnait dans la rue devant celle porte. Une dame, passant par là,
s'informe du sujet do ce rassemblement, et, lorsqu'elle en est instruite, elle fend la foule, arrive près de la jeune fille, la magnétise, et,au bout de quelques minutes, celle-ci se trouve soulagée, et même si bien qu’elle put reprendre son chemin et s’en aller seule chez elle, carré Saint-Marlin.
« Un monsieur, qui se trouvait là et qui avait compris ce que faisait celte dame, lui fit compliment de ce qu’elle avait Bfavé les sarcasmes qu’aurait pu lui attirer son acle de dévouement si elle n'avait pas réussi. C’était, en effet, du courage pour une dame; mais celle-ci a contracté une dette envers le magnétisme, et on voit qu’elle ne l’oublie pas. Elle doit à celte médecine de la nature la guérison d’une complication de maladies qui aurait déjoué le talent de beaucoup de célébrités dans l’art qu’on appelle l'art de guérir. Cette dame possède, depuis lors, celte précieuse faculté que la nature accorde à quelques êtres privilégiés dont elle se fait ainsi des instruments qui indiquent l'aide qu’elle réclame pour rétablir la santé chez les malades. Elle est ce qu’on appelle somnambule magnétique lucide.
Sur le boulevard du Temple était, il y a quelques jours, une foule qui, près de la queue du théâtre do Franconi, formait un rassemblement considérable. Au milieu de cette foule s'agitait une femme soutenue par plusieurs personnes; je m’avançai. Cette femme, dont le costume indiquail une paysanne de la Normandie, avait une attaque d’épilepsie. Je la magnétisai, el, treize ou quinze minutes après, au grand étonnement de ceux qui nous entouraient, elle s’en alla sans se ressentir en rien de celte attaque; ce qui paraissait surprendre beaucoup l’individu qui l’accompagnait.
Il a trois ans, pareil cas s'est présenté. J'ai magnétisé dans la rue, à l’entrée de la rue des Vieux-Auguslins par la rue Montmartre, un homme alteinl d’une attaque d’épilepsie, et cet homme a pu aussi continuer son chemin au bout de vingt minutes. Lapo&te.
Pari», 10 mai 1845.
— On lit dans la Sylphide du 11 mai 1815.
« Il y a à Syra, chef-lieu de Pile du môme nom, un somnambule qui, depuis quelque lemps, est devenu très-intéressant. C’est un jeune homme de dix-huit ans, né à Silistrie, sur les bords de la mer Noire; il est d’une taille assez haute et d’une constitution saine et forte. Il est venu â Syra depuis neuf mois pour faire ses études au gymnase, dont il suit les cours très-régulièrement. Souvent, dès les premiers moments de son sommeil, il sc lève et fait des harangues remarquables. Il déclame avec une grande facilité de longs morceaux de Xénophon, tandis que, quand il est éveillé, à peine peut-il en réciter quelques lignes. Une nuit qu'il.s’était levé, il lit le thème qui lui avait été donné la veille. Le matin, s'étant éveillé un peu lard, il se plaignait de «’avoir pas en le temps de faire son thème, lorsque, à son grand étonnement, il le vil sur sa table, écrit de sa propre main, plié et prêt à être présenté à son maître. Il s’est trouvé si bien fait que le professeur en fut étonné, et d’autant plus que le jeune sommtmbule ne pouvait répondre aux questions qu’il lui adressait. Son compagnon, qui couche dans la même chambre que lui, l'a observé pendant la nuit, assis, écrivanl et priant son père de l’aider à faire son thème. Ce somnambule jo«e aux caries avec ses camarades, mais il gagne toujours. Cela vient sans doute de ce qu’il devine les caries des autres joueurs. Quelquefois, dans son somnambulisme, il se rend dans un restaurant, accompagné de quelques camarades, et, après y avoir bu et mangé, il s’éveille tout étonné de s’y trouver. D’après (onfesles observations qui ont été toiles, il parait que, pendant qu’il est dans cet état de somnambulisme, le sens du lact est profondément endormi, tandis que les quatre autres sens sont en mouvement; car lorsqu’il a commencé à être somnambule, il y a quelques mois, à peine le touchait-on qu’il s’éveillait aussitôt ei reprenait ses sens. Mais maintenant il en est tout autrement; on a beau le secouer, le frapper, on a môme essayé de l’arroser de la tôle aux pieds, lous ces moyens n’ont aucun succès,
cl il csl impossible de l’éveiller. Un soir qu’il était en état Je somnambulisme, après avoir fait plusieurs choses extravagantes, il mil sun pieil nu snr une lampe allumée, et, en le regardant brûler, il cherchait à imiter avec scs lèvres le bruit léger que faisait son pied en brûlant. Cependant, lorsquel’ac-tion du feu eut pénétré à un certain point dans les chairs, il s’éveilla, harassé de lassitude et tout étonné de se voir en cet étal. En général, quand il sort de l’élat de somnambulisme, il csl tellement accablé, tellement affaibli, qu'il tombe en défaillance. Enfin on cite de lui un fait étonnant : un jour il annonça que trois personnes, qu’il désigna par leurs noms, allaient venir le voir; en eflfei, une heure pins lard, les trois personnes qu’il avait désignées étaient dans sa chambre. »
SOCIÉTÉ PHILANTHROPICO-MAGNÉTOLOGIQUE.
Séance du\ 6 avril.— Le docteur Penoyée rapporte qu’hier on lui apporta un enfant de trente mois, fils du portier du n. i, rue Coquillère; cet enfant, en jouant, avait eu le bras blessé assez gravement pour qu’on crût qu’il l’avait fracturé. M. Penoyée, après avoir reconnu qu'il n’y avait ni fracture, ni luxation, mais que le bras, collé le long du corps, ne pouvait exécuter de mouvements sans de vives douleurs, résolut de le magnétiser. F.n moins de cinq minutes l’enfant remua le bras en disant qu’il ne lui faisait plus mal.
Le docteur Clavery cite une guérison de douleurs de reins obtenue en deux jours.
Le docteur Cruxcn raconte qu’il a essayé si une somnambule, qu’il a eu occasion de magnétiser, pourrait indiquer la propriété de médicaments qu’elle ne connaii pas dans l’état de veille. Il a essayé sur le platine et l'aconit; le résultat est satisfaisant.
SOCIÉTÉ DE MESMÉRISME (1).
Séance du 10 avril. — Cinq personnes demandent â être magnétisées; irois éprouvent des effets vagues, deux des effets très-marqués. L’un, M. Bulla, âgé de vingt-cinq ans, d’un tempérament nerveux, éprouve, au bout de deux minutes, une grande accélération du pouls, de violentes palpitations du cœur; les yeux *e ferment, la bouche s’ouvre, la lôte est rejetée en arrière et la face se colore d’une manière effrayante; quatre minutes ont suffi pour produire ces effels. On arrête la magnétisation, et l’expérimenté dit que, avant de perdre connaissance, il a éprouvé d’abord un malaise général, puis chaque passe lui semblait un fer chaud tenu à une irès-petite distance de la peau. Il demandes revenir à la séance suivante.
L’autre, M. Bailly, est atteint de palpitations de cœur depuis plusieurs années. Le pouls est très-irrégulier. Le malade hésite à sc faire magnétiser, dans la crainte, dit—il, que ça augmente ses palpitations. On le rassure à ce sujet, et, au bout de quelques minutes, il ferme les yeux sans pouvoir les ouvrir. Les ex l rémi tés supérieures sont d’un froid glacial. Le malade entend tout ce qu'on dit, éprouve un bien-être indéfinissable, sent ses palpitations considérablement affaiblies et demande qu’on continue tant il se trouve bien.
N. B. L’abondance des matières nous obligea renvoyer au prochain numéro la suite de ce compte rendu.
(1) M. le docteur Dussaux a commencé son cours d'anatomie physiologique élémentaire le 15 mai, el le continuera les lundis et jeudis à sept heures du soir.
Dans noire dernier numéro il s’est glissé une faute typographique qu’il est important de corriger. A la page 1G0, ligne 3, lisez place au lieu de pièce.
Le Propriétaire-Gérant, HÉBERT.
JOURNAL /f'
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DU |~ Il
magnétisme
RÉPONSE IIE M. LU MINISTRE DE LISTRIM P11BLI0CB
A LA LETTRE DE M. LE BARON DU POTET, DU 20 MARS 1815.
Monsieur le Baron,
J’ai reçu la lettre par laquelle vous m’avez exprimé le vœu qu’une chaire de magnétisme animal fût créée à la Faculté de Médecine de Paris.
J’ai examiné cette demande avec attention, et je regrette de ne pouvoir y donner suite. Il m’a paru que le magnétisme animal, n’étant pas encore parvenu à l’état de science, ne pouvait faire l’objet d’un enseignement destiné à la jeunesse des écoles.
Recevez, Monsieur le Baron, l’assurance de ma considération distinguée,
Pour le ministre de rinstriiclion publique, ffrand'maUre de l'Universilé,
Le conseiller d'Etat directeur, Delebecque.
MANUEL DU MAGNÉTISEUR.
I Suite.)
INSENSIBILITÉ PENDANT LE SOMMEIL MAGNÉTIQUE.
Le premier fait d'insensibilité bien constaté, authentiquement constaté, eut lieu à 1 «llôtel—Di«.*u île Finis en 1820, pendant les expériences magnétiques que je faisais alors dans ce lieu rempli de douleurs, (le fut donc moi qui en offris, sur la fille Samson, le premier exemple à la curiosité et à l’incrédulité des médecins. Je dois ajouter quo ces expériences eurent lieu malgré moi; mais mon opposition devait céder devant des considérations d’un ordre majeur.
J’ai publié ces premiers faits dans mon premier écrit : Expériences de l’Hôtel-Dieu, et j’ai, dans mon Cours en sept leçons, ajouté les expériences qui furent faites successivement depuis par plusieurs médecins ou magnétiseurs. Je ne pense pas qu'on eût, avant 1820, coupé, brûlé, taillé les chairs des dormeurs, sans qu’ils poussassent la moindre plainte. Si j’ai bonne mémoire, les magnétiseurs de ce temps craignaient, au contraire, de laisser toucher leurs somnambules; on apercevait chez les dormeurs une sensibilité qui s’exaltait par le moindre contact étranger, et le rapport, pour être établi, demandait certaines précautions que tous les livres publiés alors recommandaient avec soin.
Mais nous ne sommes pas au bout des découvertes; cet état nouveau nous en fournira bien d’autres encore.
Sans m’occuper davantage de celle origine de l’insensibilité, citons des fails nouveaux; car maintenant ce n’est plus qu’un jeu de produire cet état si singulier ; chaque magnétiseur possède une masse de faits qui ne laisse plus de doute sur cette acquisition de la science magnétique ; ce fait de réalité est constaté surabondamment.
« Vous n’avez, dit M. Roslan, qu’à vouloir inter-« dire le mouvement à un membre : deux ou trois gestes « le jettent dans l’immobilité la plus parfaite; il est « tout à fait impossible à la personne magnétisée de « se remuer le moins du monde. Vous avez beau l’ex-« citer à le vouloir: impossible; il faut la déparalyser « pour qu’elle puisse s’en servir. Pour cela, il faut « faire d’autres gestes. Ne croyez pas cependant que « cette immobilité ne soit que le résultat des gestes « magnétiques, et que le somnambule, en voyant ces « gestes, ne comprenne ce que vous voulez, et fasse « semblant d’ôtre paralysé ; la volonté seule, l'inten-« lion de paralyser un membre, la langue ou un sens, « m'a suffi pour produire cet effet, que parfois j’ai eu (■beaucoup de peine ù détruire. J’ai plusieurs fois, « devant témoins, paralysé mentalement le membre « qu’on me désignait ; un spectateur mis en rapport «commandait les mouvements: impossibilité absolue « de mouvoir le membre paralysé. »
« A Montpellier, M. le docteur Kuhnholtz , pour s’assurer de l’insensibilité, laissa, à trois reprises, briller et «’éteindre de la cire d’Espagne sur le dos de
la main d’une somnambule, sans qu'elle ait témoigné la moindre sensation.
« M. le docteur Lal'fon, de Toulouse, a eu une somnambule qui a supporté sans sourciller l’ustion de la peau dans toute son épaisseur, sur l’avant-brasgauche, dans l’étendue de six lignes carrées. »
On se rappelle l'extraction d’une dent molaire faite par M. le docteur Oudct à une somnambule, qui ne s'en aperçut pas seulement (I).
« M. le docteur Saura rapporte que M. Martoret, dentiste, passage Delorme, a fait la même opération à M. Prost, en présence de M. deLntouret de M. Emmanuel de Las-Cases. Le somnambule fut très-étonné de ne pas trouver sa dent à son réveil. »
« M. Roubière, dentiste de Montpellier, arracha une grosse molaire à Philippine Bernard, mise en somnambulisme par M. Kuhnholtz, sans qu'elle fit le plus léger mouvement indiquant qu'elle avait ressenti de la douleur. »
M. Varney, de Gray (Haute-Saône), l’un do mes élèves, m'écrit que, sa femme étant magnétisée, un dentiste de Besançon, M. Petey, a pu, pendant une heure, lui limer les dents sans qu’elle ait senti la plus légère douleur; huit ou dix personnes étaient présentes à l’opération.
Le docteur Fillassier nous apprend qu’une femme qui n’avait jamais voulu se faire opérer d’une tumeur qu’elleavait.au cou, tant elle redoutait l’instrument tranchant, se soumit à l'opération pendant qu’elle était en somnambulisme. Cette tumeur assez saillante,
(1) Voyei l’ouvrage du D'Pigeairr, p. 301.
qui avait deux pouces de longueur sur un demi de largeur, lut enlevée lentement, cl le pansement fuit, sans exciter la moindre douleur.
Le docteur Elliotson, do Londres, a démontré publiquement l’insensibilité sur une jeune somnambule, Miss O’Key, que je lui avais laissée à mon départ de cette ville.
Toutes ces expériences ont une limite; ce n’est, si je puis m’exprimer ainsi, que le premier échelon de l’insensibilité ; mais lisez attentivement ce qui suit. M. Ilusson, s’adressant un jour à l’Académie de Médecine (il en était alors le président), lui disait : « On est «parvenu pendant ce singulier élat (le somnambu-« lisme) à paralyser, à fermer entièrement les sens o aux impressions extérieures, à ce point qu’un fla-«con contenant plusieurs onces d’ammoniaque con-» centrée, était tenu sous le nez pendant cinq, dix, « quinze minutes ou plus, sans produire le moindre «effet, sans empêcher aucunement la respiration, « sans môme provoquer l’éternuement ; à ce point que « la peau était insensible à la brûlure du moxa, à la « vivo irritation déterminée par l'eau chaude très-« chargée de moutarde; brûlure et irritation qui étaient « vivement senties et extrêmement douloureuses lors-« que la peau reprenait sa sensibilité normale. »
Ici encore je devrais vous citer de grandes opérations chirurgicales: l’amputation do membres; mais vous les trouverez dans le journal. Plusieurs de ces opérations ont été faites en Angleterre , d’où j’en attends les rapports. Je pourrais ajouter plus de cinquante cas d’insensibilité qui, mis à côté de ceux que j’ai publiés dans mes autres ouvrages, en rendent le
nombre immense. Je borne cet aperçu à une dernière observation qui m’est personnelle.
Une jeune Anglaise, nommée Lucie Clark, affectée d’une maladie épileptique, me fut amenée pendant que j’étais à Londres ; soumise à un traitement magnétique, elle tomba dans le somnambulisme et nous présenta l’exemple de l'insensibilité la plus prononcée.
Kilo portait au cou un séton qui, par le développement d’un énorme bourrelet charnu, la faisait beaucoup souffrir. Ce bourrelet, traversé par le ruban du séton, était très-enflammé, et sur* ses bords une sensibilité excessive existait. Elle jugea, endormie, que le séton devait être entretenu, mais qu'il fallait couper les chairs qui l’entouraient : elle nous dit qu’elle 110. consentirait point à cette opération lorsqu’elle serait réveillée. En effet, elle s’y refusa positivement, lorsqu’à son réveil on l’assura qu’elle avait elle-même ordonné celte opération.
Duns un de ses autres sommeils, un chirurgien anglais était chez moi et je lui fis part de l’ordonnance do la somnambule : je lui proposai de faire sur-le-champ la coupure jugée nécessaire. Ravi, car il était incrédule, il tira sa trousse, prit un bistouri, et tuillu sur la chair vive, comme s'il eût coupé la pelure d’une pomme, et, pendant ce temps, la somnambule s’entretenait de choses insignifiantes avec une personne qui était en rapport avec elle. Rien no nous put déceler qu’elle sentait, par la plus petite contraction des muscles de la face; un rire naturel qui était la suite des impressions qu’elle recevait de la conversation ; aucun mouvement dans la circulation. L’opération, que le chirurgien faisait durer avec intention, se ter-
mina nu bout de six ou sept minutes. Le sang coulait en abondance ; on mit de la charpie, on banda la plaie, et, un instant après, la malade fut réveillée. On lui dit ce qu’on avait fait ; elle 11e nous crut pas d'abord, mais, voyant son fichu ensanglanté, elle se trouva mal. Le chirurgien incrédule avait alors un visage où se peignaient tant de sentiments divers, sa contenance était si singulière, qu’il prêta à rire à l’assemblée, qui était fort nombreuse.
COMMENT OBTIENT-ON L’INSENSIBILITÉ ?
Le magnétisme souvent la détermine seul par ses propriétés : il stupéfie la sensibilité; il refoule au loin, dans d’autres cas, le principe qui sent; il paralyse la fonction du système nerveux de manière à la rendre nulle; mais quelquefois ce n’est que par art que l’on obtient l’insensibilité. Il faut l’emploi de la volontéy il est nécessaire que vous projetiez sur la partio que vous voulez rendre insensible une plus grande quantité de force, et que cette émission soit soutenue par t intention qui vous fait agir.
L’insensibilité ainsi obtenue peut durer longtemps; le réveil même, si vous le voulez, ne La détruit pas, et vous pouvez enfoncer des épingles profondément dans les chairs; le magnétisé, aussi surpris que vous, les voit et ne sent rien. Notez bien que rien ne parait changé dans l'organisation : le pouls est régulier, il n’augmente ni ne diminue; la chaleur est naturelle dans les parties rendues insensibles, la flexibilité des muscles est la même, et n’offre aucune différence de l’état ordinaire.
Vous voyez que nos grands physiologistes ne connaissent point la vie, et, croyez-le, je ne touche ici que les plus petits faits produits parle magnétisme. 11 annonce une si grande révolution dans les sciences, confondra tant de grands esprits, qu’il faut être sobre de merveilles. Seulement il faut constater chaque fait, et les laisser se produire en grand nombre; le temps les fera adopter.
Pour obtenir l'insensibilité, il faut une certaine résolution, une volonté énergique ; si la peur vous prend lorsque l’instrument tranchant est dans les chairs, l’individu peut tout à coup sentir. Voici un fait récent propre à fixer votre jugement; vous allez reconnaître pourquoi l’individu opéré a pourtant senti lorsqu’on faisait la ligature des artères : la faute en est à coup sûr au magnétiseur, qui n’avait rempli qu’à moitié les conditions qui assurent le succès. C’est un cas d'amputation; je l’extrais du Dundei JVarder.
« L’opération fut faite, au mois de mars 1845, à Alyth, en Ecosse, par le docteur Fenton, aidé de plusieurs médecins, sur un jeune homme âgé de dix-huit ans, qu’une tumeur blanche retenait couché depuis deux ans et demi. L’enllureayant beaucoup augaienlé, le docteur Fenton fut d’avis d’amputer la jambe, et aussi de magnétiser son malade, afin de s’assurer jusqu’à quel point on pourrait, en pareil cas, empêcher la douleur. Lc25junvier,donc,on magnétisa la première fois le malade, et il le lut presque tous les jours depuis. Lundi 24 mars, l’opération ayant été faite, on eut la preuve «les bienfaisants résultats du magnétisme. Pendant l’amputation le malade ne donna aucun signe de douleur : il était assis clans un état do
tranquillité parfaite, mais quand les médecins firent la ligature des artères, il poussa un faible cri, ce qui a pu arriver de ce que, n’ayant été magnétisé que pendant quelques minutes, le sommeil ne fut pas assez profond ; si pendant toute l’opération on eût continué de le magnétiser, il est probable qu’il n’aurait pas crié.
« L’opération, qui dura une demi-heure, fait honneur à l’habileté de MM. les docteurs Fenton et Stir-ton, de lilairgowrie. Le jeune homme, soigné pendant toute sa maladie avec une extrême bonté et générosité par le docteur Fenton, jouit à présent d’un sommeil paisible pendant la nuit, el promet une prompte guérison. »
Ayez soin de réveiller le dormeur aussitôt l’opération terminée. Une seule opération, jusqu’ici, a été funeste, l’ablation d’un sein cancéreux; la malade est morte, non pendant l’opération, mais quelques jours après; cependant elle n’avait point senti. Peut-être le sommeil magnétique avait-il été trop longtemps prolongé; peut-être aussi était-il trop tard; car, dans ces affreuses maladies, le sang est souvent corrompu, et alors l’opération retarde seulement une fin devenue inévitable.
11 est bien rare que l’on n’abuse pas de cet état d’insensibilité : c’est un si bon moyen de conviction; il détruit bien mieux que la lucidité toute espèce d’objection; mais souvent je n’ai pu m’empèeber de plaindre ces nouveaux martyrs; car, s’ils ne souffrent point endormis, les chairs conluscs, brûlées ou meurtries par des expériences de pure curiosité, sont douloureuses en état de veille, et ne reviennent à l’état
primitif qu’en parcourant la période inflammatoire des plaies ou des contusions ordinaires. Dans la carrière d’enseignement du magnétisme par la pratique que j’ai parcourue, on ne me reprochera jamais un seul acte de cruauté; je dois dire cependant qu'il est une foule d'expériences que I on peut se permettre; elles n'entraînent avec elles nulle responsabilité, elles ne sont suivies d’aucun mauvais effet ; mais plus loin je reviendrai sur ce sujet.
Vous pouvez donc, dans un grand nombre de cas, anéantir toute sensibilité, fnapper d’inertie toute la surface du corps, et faire pénétrer profondément dans les chairs une force qui annihile toute sensibilité. Quel singulier phénomène! combien il est digne d’examen! combien de recherches ne devraient-elles pas être faites pour connaître le mécanisme d’un si prodigieux changement, d’une altération si profonde des lois de la vie !
Ne croyez point pourtant qu’il y ail destruction de quoique ce soit. Non. Vous avez repoussé, refoulé au loin le principe qui donne la sensibilité à toutes les parties; mais il n’est point anéanti; il reparaît lorsque vous vous retirez; un fort inexpugnable lui sert de refuge; vous pouvez envahir la place, empêcher que rien n’en sorte, et tenir l’âme assiégée un certain temps, mais vous vous affaiblissez bientôt, el l’âme recouvre son domaine.
Chose singulière, il est des cas où toute la vio est à la surface; la sensibilité alors semble doublée; on sent, on perçoit ce qui échappe dans l’état d’équilibre des forces. C’est un nouveau sujet d’études. Arrêtons-nous un instant pour l'examiner.
Le docteur Brière de Boismont, «près avoir rapporté une foule de faits d’exaltation de la sensibilité, ajoute : « On ne saurait nier «pic, dans certaines maladies, il ne se développe une surexcitation do la sensibilité, qui donne aux sens une (inesse et une acuité prodigieuse. Ainsi des individus perçoivent à des distances considérables ; d’autres annoncent lus personnes qui arrivent, quoique les assistants n entendent aucun bruit. »
Mais quel est le médecin qui n’ait [tas observé ce phénomène singulier? Ajoutons à notro récit; peut-être plus tard rendrons-nous compréhensibles tous ces faits.
« Je crois nécessaire, dit Cabanis (1), de rappeler ici particulièrement ces maladies aiguës singulières, dans lesquelles on voit naître et se développer tout à coup des facultés intellectuelles qui n’avaient point existé jusqu’alors... L’on voit aussi, duns quelques maladies extatiques et convulsives, les organes des sens devenir sensibles à des impressions qu’ils n’apercevaient pas dans leur état ordinaire, ou môme recevoir des impressions étrangères à la naturo do l’homme. J’ai plusieurs fois observé, chez des femmes qui eussent étéd’exccllentes pythonisses, les cITets les plus singuliers des changements dont je parle. Il est de ces malades qui distinguent fut ilement à l’œil nu des objets microscopiques; d’autres qui voient assez
(1) Cabanis, T mémoire : de l'influence des maladies sur la formation des idées et des affections morales.
nettement dans la plus profonde obscurité pour s’y conduire avec assurance. 11 en est qui suivent les personnes à la trace, comme un chien, et reconnaissent à l’odorat les objets dont ces personnes se sont servi ou qu elles ont seulement touches. J’en ai vu dont le goût avait acquis une finesse particulière, et cjui désiraient ou savaient choisir les aliments et môme les remèdes qui paraissaient leur ôtre véritablement utiles, avec une sagacité que l’on n’observe que chez les animaux... »
Quel jeu singulier des forces vives!... Il n’est pas douteux pour nous que le principe de la vie, l’ensemble des forces peuvent se transporter sur une seule partie du corps, sur un seul organe, et s’échapper tout à coup comme le fluide électrique que contient une bouteille de Leyde.
Un célèbre chirurgien devait faire l’opération de la taille sur un homme dans la force de l’âge. Ce malheureux était fixé sur la table fatale, et dans la position favorable à l’opération ; il examinait attentivement les préparatifs du chirurgien, et en suivait tous les mouvements. Son angoisse cl ses appréhensions étaient grandes; il s’exagérait la douleur, et redoutait l’instrument dont pourtant il attendait sa délivrance. Voulant enseigner les procédés opératoires dont il allait faire usage, ce chirurgien parlait aux élèves, et leur montrait la partie qu’il allait inciser la première; le patient redoublait alors d’attention ; sa vie, je puis dire, était près de l’organe qui allait souffrir; car, au moment où le chirurgien toucha légèrement avec le doigt l’endroit que devait parcourir l’instrument, cet homme expira instantanément. Une
mort si prompto, h que rien ne semblait justifier, car l'opération n'avait pas même été commencée, surprit l’opérateur; un lit avec soin l’ouverture du cadavre, mais on ne découvrit aucune altération, et le mystère tic cette mort si subite ne fut point deviné (I ).
Je vais vous rendre cette mort plus compréhensible par un autre exemple, et ces faits si étranges, que je pourrais multiplier si je voulais faire la moindre recherche, vous convaincront, que, dans certains états magnétiques et dans certaines exaltations morales que cet agent peut produire, des catastrophes sont à craindre. Ceci, sans doute, sera capable de retenir quelques magnétiseurs qui ne doutent de rien ; ils de-,*» viendront plus prudents s’ils méditent ce chapitre; d’ailleurs, il n’est guère sage de dépasser certaines limites. Des craintes nous prirent, à nous-môme, plus d’une fois, malgré notre prudence bien connue ; nous vîmes le danger et nous reculâmes épouvanté.
(I) Il n'eslpas rare, à l'armée, de voir des soldais mourir subitement au moment d'une bataille, sans qu’on puisse constater aucune blessure. On dit dans ce cas que c’est un buulcl «lui a passé près d’eux.
Une joie subite produit le même effet que l'annonce d’une fâcheuse nouvelle. Quelquefois, dans ces deux cas, la mort est instantanée.
L’aversion des sens, ù l'aspect d'un objet hideux, peut aussi causer lo mort.
Beaucoup de personnes sont mortes à la vue d’un cadavre ensanglanté. Ce que les maladies et les tortures les plus cruelles lie peuvent faire, un seul mol peut le produire. Des boulines sonl morts à l'instant d’un outrage. Mais pourquoi s'étendre sur ces faits? Ils sout de tous les temps, car lu vie ue change pas.
l!n violent coup porté sur un barreau aimanté détruit sa propriété magnétique. Une commotion morale très-forte produit en nous la cessation de la vie sans qu’il y ait rien d’altéré dans l’organisation i rien n'est déchiré, la vie a fui épouvantée; l’anatomiste le plus expérimenté ne peu!, avec ses moyens d’investigation, découvrir 1a moindre lésion. Ce n’est pas seulement la faiblesse qui succombe; l'organisation la plus robuste n’en est point exempte.
Voici l’exemple récent dont nous voulons vous parler : Nous le tirons du Journal du Havre (1844):
« Hier, un bien fâcheux accident n attristé la distribution des prix au couvent des Ursulines. M"' Mon-nier, épouse du propriétaire du café des Abattoirs, assistaità celle solennité, qui, d’après son espoir, devait être pour sa jeune nièce une occasion de triomphe. La foule était nombreuse, et de sa place la dama Monnicr, n’ayant pu suivre les détails de la distribution, s’informa aux personnes qui l’avoisinaient si le nom de sa nièce avait été appelé. Sur la réponse qu’elle n’avait rien obtenu, la malheureuse tanie, qui * était debout, tomba de son haut comme prise d’évanouissement. On s’empressa autour d’elle, mais quelle fut la consternation des assistants quand, essayant de la relever, ils reconnurent qu’elle ne donnait plus signe de vie! Immédiatement transportée à son domicile, elle a reçu la visite des gens de l’art, qui ont constaté ce cas de mort subite, d’autant plus étrange que la dame Monnier, âgée d’environ trente ans, paraissait jouir d’une excellente santé, et que la cause qui l’a déterminée semble avoir relativement peu d’importance. »
11 n’y a point de magnétisme là-dedans, nous dira-t-on; non sans doute, et nous le savons bien , niais il y a le même jeu des forces, les mêmes déviations, les mêmes perturbations, et il faut avoir magnétisé en aveugle pour ne les avoir point reconnues. Je n’insisterais pas sur ces faits étranges; mais il est urgent d’enseigner le magnétisme autrement qu’on ne l’a fait jusqu’à ce jour par des traités qui ne contiennent que l’ombre de la vérité, et vous égarent à
chaque pas. Mais, lira-t-on, pour tenir un (el langage, êtes-vous donc plus éclairé que beaucoup de magnétiseurs:' Sans doute, mais chaque jour je sens néanmoins qu’il me manque des connaissances bien nécessaires, et je cherche qui pourrait me les apprendre. Soyez-en certain, j’irais à Vécole si je savais trouver un maître plus habile, et ne m’en croirais point humilié. Le magnétisme n’est point pour moi une connaissance qui dispense de toute instruction ; et je serai bien heureux si ce petit traité peut engager les magnétiseurs à l’étude physique du magnétisme. Ce qui me reste à dire devra confirmer les hommes dans cette idée : c’est que la plus grande des sciences est en germe dans le magnétisme. Et, selon les somnambules, cette vie même où nous croyons être si fort éveillés, entendre, voir, goûter, flairer, sentir et jouir des plaisirs de l’univers, n’est qu’un songe ou une vision; on ne trouvera la véritable vie que lorsque tous les secrets que renferme lo magnétisme seront connus. Quelque hardie que soit cette dernière assertion, ne la rejetez pas d’abord; attendez le développement de nos idées sur ce curieux sujet.
(La suite au prochain numéro.')
ACTION DES NARCOTIQUES SUR LE CERVEAU.
TROUBLE DE ^INTELLIGENCE, HALLUCINATIONS.
§ II. — Effets de l'opium.
(Suite.)
I)ei nicres observations.
Dans un voyage en Morde, publié par le docteur Poqueville, ou trouve un tableau effrayant des effets produits par l’opium. Entre autres effets, ce médecin raconte ce qui suit :
« Un ambassadeur anglais, envoyé dans l’Inde, fut conduit, à son arrivée, au palais du souverain, à travers un grand nombre d'appartements décorés et remplis d'officiers vêtus d’une manière splendide, dans une petite chambre dont les ornements et les meubles dépassaient encore en richesses ceux qu’il avait déjà vus.
« On le laissa seul; peu de lemps après, deux hommes d’un extérieur distingué arrivèrent; ils précédaient une litière portée par des esclaves, et recouverte par de riches soieries et des cachemires d un grand prix. Sur cette couche était étendue une forme humaine, que l'on aurait prise pour un cadavre si l’on n’avait vu la tête se balancer à chaque mouvement des porteurs; deux officiers tenaient des plateaux en
lit d'or, sur lesquels étaient une coupe et une fiole remplie d’un liquide bleuâtre.
« L’ambassadeur, pensant qu’il était l’involontaire témoin de quelque cérémonie funèbre, voulait se retirer; mais il fut bientôt détrompé en voyant les officiers soulever la tète de ce qui semblait un être inanimé, rentrer la langue qui sortait de la bouche, et faire avaler ainsi une certaine quantité de liquide noir, en refermant les mâchoires et frottant doucement la gorge pour le faire descendre. Lorsque ce manège eut été répété cinq ou six fois, lu figure ouvrit les yeux et ferma la bouche volontairement, puis avala d’elle-même une grande dose de liquide, et, en moins d’une heure, un être animé s’assit sur la couche, ayant recouvré la couleur et un peu de pouvoir dans les articulations. Il s'adressa alors en persan à l’envoyé, et lui demanda les motifs de son ambassade. Deux heures après, ce personnage extraordinaire était complètement actif, et son esprit capable de se livrer aux affaires les plus difficiles. L’ambassadeur anglais prit la liberté de lui adresser quelques questions sur la scène étrange dont il avait été témoin.
« Monsieur, lui répondit-il, je suis mangeur d’o-« pium de vieille date; je suis tombé par degrés dans « ce déplorable excès. Je passe les trois quarts de la «journée dans l’état de torpeur où vous m’avez vu. « Incapable de me mouvoir ou de parler, j’ai pourtant «encore ma connaissance, et ce temps s’écoule au « milieu de visions agréables; mais je ne m’éveillerais « jamais si je n’avais des serviteurs zélés ou affection-« nés qui veillent sur moi avec un soin religieux. Dès « que, par l’état de mon pouls, ils reconnaissent que
« mon cœur so ralentit, ci lorsque m'a respiration de-« vient presque insensible, alors ils ine font avaler « la solution d’opium, et me fonl revivre comme vous « l’avez vu. Pendant ces quatre heures j’en aurai « avalé plusieurs onces, et peu de temps s’écoulera « encore avant que je ne retombe dans ma torpeur « habituelle \ »
L’amiral Dumont d’Urville rapporte dans son voyage des détails curieux sur les effets de l’opium, observés par lui aux îles Célèbes (archipel indien). Nous extrayons seulement de ces mémoires le fait .suivant :
« Les Makasses jouent avec frénésie : hommes libres, femmes, enfants, tous sont infectés de celte funeste passion. Tous les brelans de Makassar sont tenus par des Chinois, qui, moyennant une forte redevance qu’ils paient au gouvernement hollandais, pressurent ces malheureuses populations et font l’usure à des taux énormes.
« Comme le jeu, l’usage de l’opium est répandu dans toute la Malaisie. L’ivresse de l’opium produit des effets divers suivant les différents tempéraments. Il abrutit le flegmatique Chinois. Tous ceux qui en font usage sont lourds, hébétés, stupides, et finissent par mourir dans un état d'idiotisme complet. Pour les Malais, au contraire, gens vifs et à passions ardentes, ccst 1 excitant le plus violent. Il y a deux périodes bien distinctes dans 1 ivresse de l'opium : la première est un état assez doux; on tombe dans une somnolence agréable, mille images bizarres et fantastiques s emparent de l’imagination; c’est comme un de ces
(I) i’oquetille, l'oyoge en Murce, IJibliolhèque de Genève, (841.
rêves confus qui arrivent dans un demi-sommeil. Après celle sorte de bien-être, les fumées de l’opium gagnent le cerveau : alors les Malais sont comme des bêtes féroces qu’il faut assommer sur l’heure; ils saisissent la première arme à leur portée, et, poussant leur terrible cri : Amock (tue), ils s’élancent à travers champs, tuant, détruisant tout ce qu’ils rencontrent sur leur passage. Les Hollandais ont institué une espèce de garde qui est spécialement chargée de les arrêter. Les hommes qui la composent sont armés d’une longue fourche à branches très-acérées; ils se placent sur le passage du furieux, l’attrapent par le cou ou le milieu du corps, le renversent, lui attachent fortement les mains, puis le laissent dans cet état cuver tranquillement son opium. Ce sont les Chinois qui profitent de ces deux passions prédominantes à Makassar, et dont les excès réduisent souvent à la misère la plus complète les plus riches habitants de ce pays. »
§ III. — Effets d’ageists divers.
Le docteur Otto, de Copenhague, qui s’est beaucoup occupé de l’action que les différents agents médicamenteux, et particulièrement les narcotiques, exercent sur le cerveau, a publié le résultat de ses recherches, dont voici le résumé.
Tous les narcotiques n’agissent pas de la même manière.
L'opium active l’instinct érotique, ainsi que les facultés intellectuelles, et spécialement l’imagination; à dose légère, il fait naître des idées et provoque des hallucinations, de telle sorte que l’esprit semble
continuer à veiller, tandis que les organes sont en repos.
Le chlorhydrate de morphine, outre les vertus de l’opium, a encore celle d’exciter prodigieusement la loquacité. Le docteur Grégory affirme avoir observé ce phénomène chez tous les individus auxquels il a fait prendre cet agent médicamenteux, et l’ayant éprouvé lui-même, il dit qu’il sentait se développer en lui, après l’administration de ce sel, une loquacité irrésistible, avec une facilité d’élocution remarquable. Aussi va-t-il jusqu’à conseiller l’ingestion d’une légère dose d’opium à tous ceux qui ont à parler devant un auditoire nombreux.
La belladone, au contraire des opiacés, amoindrit l’action intellectuelle.
La jusquiame rend les individus tristes, violents et colériques.
La ciguë porte une atteinte profonde à l’activité de l’intellect.
Le tabac exerce, même sur les individus qui en font usage, une action analogue à celle de l’opium; aussi les fumeurs s’accordent-ils tous à dire qu’il leur fait naître des idées.
La digitale agit comme les aphrodisiaques.
Le chanvre enfante une gaîté intarissable, et c’est pour cela que les Indiens et les nègres le font entrer dans la composition de plusieurs boissons enivrantes.
L’amanite, fausse oronte, excitait, chez les anciens guerriers Scandinaves, une fureur sauvage, un courage qui tenait de la férocité et leur faisait défier la mort.
L’ammoniaque et ses préparations, le musc, le cas-
toreum, les alcooliques, Y éther sulfurique, développent l’imagination et facilitent l’exercice de la méditation.
Les huiles pjrogénées disposent à la mélancolie, à la mauvaise humeur, aux hallucinations.
Le phosphore et Yiode stimulent les organes de la génération, en môme temps qu’ils amènent une notable diminution des facultés intellectuelles.
L'arsenic et. ses préparations déterminent la tristesse.
L’or et ses préparations engendrent la gaîté.
Le mercure et ses sels entretiennent une sensibilité morbide, un dégoût prononcé pour quelque occupation que ce soit.
De protoxyde d'azote, surnommé gaz gai, provoque l’hilarité; il fuit naître, à chaque inspiration,des sensations délicieuses.
Nous donnerons dans le prochain numéro les effets de Y ivresse-, puis, approchant de plus en plus du but que nous voulons atteindre, nous examinerons le sommeil naturel, mais troublé par des causes encore inconnues. Ensuite, nous parlerons du somnambulisme naturel, de Y extase non magnétique, des songes, des prévisions, etc., etc.
Enfin , arrivant aux œuvres du magnétisme confondues avec la magie, nous essayerons de dégager notre science de tout ce qui s’y trouve soudé et de la montrer dans toute sa pureté.
VOYAGE A SAINT-PÉTERSBOURG.
(2* article.)
Esl-il un lieu où la vérité puisse être présentée dépouillée de son enveloppe, et si aujourd'hui, par exemple, je venais vous dire : Les merveilles qui servirent à baser vos principes religieux nous sont connues, nous pouvons les produire ; nous ne respectons point les objets de votre foi, car ils ne représentent point Dieu : on vous a trompés. Si ces assertions étaient soutenables et appuyées sur des faits qui les rendissent inattaquables, croyez-vous qu’on nous laisserait en liberté établir la vérité que nous aurions découverte? Vous n’oseriez l’assurer, ou plutôt il faudrait être fou pour croire à une tolérance non-seulement de la part du pouvoir, mais des masses aveugles et fanatiques qui se croient éclairées par le passé et la sanction que les siècles semblent avoir donnée à leurs croyances. Dieu merci, il ne s’agit pour nous de rien de semblable ; cependant récemment on a prêché contre nous : qu’avions-nous donc dit, qu’avions-nous donc fait ? Mais simple que je suis, je croyais que l’erreur seule avait pour ennemis les prêtres du vrai Dieu, tandis qu’ils ne sont occupés qu'à combattre des vérités éternelles.
L’erreur esi même avec eux, et, de leur propre aveu, ils ne savent ou 11e veulent s’en séparer.
Quelle sûreté avoir au milieu de tels hommes? Où porter nos pas sans les rencontrer ? car ils forment un immense réseau, et c’cst de leur jugement, de leurs opinions même que les sociétés reçoivent les influences qui doivent les diriger. Est-ce notre faute à nous si la vérité que nous défendons renverse des préjugés? Sommes-nous coupable parce que Dieu l’a ainsi faite, et. devons-nous expier l’ignorance qu’ont les hommes des lois de la nature?
C’est donc en connaissance de cause si aujourd'hui je dirige mes pas vers le Nord au lieu de marcher vers le Midi. Home me ferait payer cher l’envie qu’il me prendrait d’aller dans la sainte cité. L’Espagne, le Portugal, tous ces pays où 011 a perfectionné tellement la religion du Christ qu’elle serait méconnaissable pour lui s’il revenait visiter la terre, ne souffriraient point un homme qui guérirait les malades en imposant les mains; il serait lapidé! Civilisation menteuse, tu n’as fait que corrortipre l’homme et lui ôter ce que la nature lui avait donné : Un sens droit, un inslinft sûr!
La science n’a jamais prêté »in appui secoura-ble aux hommes qui apportent des vérités, elle les rejette avec mépris; c’est ainsi qu’elle poursuivit Mesmer, le chassa de l’Allemagne, et l’abreuva de üel et de dégoût à Paris.
C’est, je le vois bien, sans aucun appui que je dois marcher; je ne dois non plus lever qu’un petit coin du voile qui cache la vérité; mais en tout soyons prudent et sachons gré à Dieu de no nous avoir point
donné l'habileté qui peut paraître redoutable. Les gens éclairés qui nous disent : N’allez point do ce côté, jugent mal des choses ; la suite le démontrera.
La tristesse cependant restait dans mon âme, mais une pensée me tenait en éveil. La route que je suivais, quoique rappelant tant de souvenirs, n’était pour moi le motif d'aucune distraction; je ne voyais point les curieux édifices semés çà et là, mais je considérais les hommes qui habitent ces contrées immenses que je traversais sans m’arrêter. J’eusse voulu dire à tous : Une découverte s’est faite, elle doit un jour soulager vos misères; je vais d’où, dit-on, vient la lumière, elle rejaillira bientôt sur vous.
M’attendait-on au but pour courir si vite? Non, mais comme un messager fidèle je tâchais d’arriver sans retard. Cependant il faut que parfois l’âme et le corps se reposent, Dieu l’a dit ; oui, mais il fit une exception pour les novateurs. Pour ceux qui possèdent une pensée pleine d’avenir il n’est point de repos; ces hommes que le destin conduit ne doivent jouir d’aucun plaisir; ils sont toujours seuls au milieu de la foule et du tumulte, car personne ne les comprend d’abord. Ils voient d’un œil morne l*ut ce qui n’est pas dans le domaine qu'ils cultivent; ils auront chaud quand il fait froid, froid lorsqu’il fait chaud. Que voulez-vous! il faut qu’ils souffrent pour sentir, ce n’est qu’à cette condition qu’ils peuvent découvrir ce qui échappe au vulgaire, et contribuer au bonheur des autres hommes en payant un double tribut.
Sur la môme route et vers le même lieu que moi voyagent aussi un chanteur, un pianiste, un joueur de flûte, un danseur ; ils courent tous à la fortune,
elle leur sera propice, (les couronnes les attendent; ils lo savent et sont joyeux. Celui-ci essaie son gosier, celui-là scs jambes, cet autre regarde avec amour son tube de bois d’ébène que l’argent et l’ivoire embellissent ; instrument divin dans la main qui te tient, lu charmeras les oreilles un instant ; puis on oubliera les sons mélodieux que tu auras fait entendre, mais l’argent sera lù pour consoler celui qui te donne la vie.
Le magnétiseur ne changerait pas son existence avec aucun de ces favoris de la fortune et du beau monde ; sa science dédaignée lui paraît au-dessus de tous les prix. On dira aux artistes : Vous m’avez fait plaisir, vous m’avez charmé. Et moi, j’entendrai ces douces paroles : « Comme vous me faites du bien ! Vous dissipez mes douleurs et me rendez l’espoir. »
Aux artistes 011 donnera des bagues, des tabatières enrichies de diamants. Le magnétiseur recevra, lui, non d’un empereur ou d’un prince un semblable présent, mais, dans un hôpital, une malheureuse, se voyant guérie, lui donnera une bague de cuivre , lo seul bijou qu’elle possède, et cette offrande si simple fera battre son cœur; il conservera ce présent, qui sera pour lui la source d’émotions douces et paisibles, et lui rappellera une bonne action.
Le nom de tous ces voyageurs retentira dans les journaux ; la renommée pour eux embouchera sa trompette. Un faible écho redira les œuvres du magnétiseur; son nom éveillera quelque souvenir peut-être. Puis un jour, quittant cette terre et dépouillés de leur enveloppe, rois, princes, danseurs, joueurs de flûte, chanteurs, magnétiseur partiront
pour un pays sans limites, emportant de cette planète, celui-ci sa renommée, celui-là ses titres; mais tous laisseront leurs richesses. Le magnétiseur, seul, laissera une découverte que le-temps fécondera. Lorsque les hommes seront meilleurs et plus éclairés, ils se rappelleront ses efforts et scs peines, et ne pourront comprendre que la science si utile qu'il portait partout n’avait droit d’asile nulle part; qu’on la tolérait seulement, espérant que le temps la ferait oublier.
Il semble que les peines morales, épanchées au dehors, diminuent la tristesse de l’âme; l'homme souffrant aime à conter ses peines. Arrêtons-nous, cependant ; tous ceux à qui nous nous adressons ne pourraient nous comprendre : pour plaindre ceux qui aiment, il faut avoir aimé. Et qui, autant que moi, aimant la vérité, éprouva jamais si vive passion pour la science ?
Sainl-Pclirsbourg, décembre 1842.
C'est ici, c’est dans cette ville que jo dois m’arrêter. Il faut que, par mes eflbrs, la vérité mesmérienne s’y établisse. Mais je suis étranger; où vais-je frapper, pour qu’on lui donne asile ? qui va 1a recueillir? comment la présenter? 11 ne s’agit pas de discours, mais de faits; laissons les intelligences libres de raisonner sur la valeur et les conséquences des phénomènes produits; la discussion, la lutte sont toujours au profit de la vérité : l’indifférence est seule à redouter.
Cependant, il s’agit d'une propriété de mon être ; pourrai-je, sous ce climat de fer, la manifester? Le
froid ne va-t-il pas Iaffaiblir ou la détruire? Mais pourquoi cette crainte ? L’homme n’est-il pas un être à part? ne s'habitue-t-il pas partout? Que lui importe le froid 011 lechand; il en souffre d’abord , mais ensuite il se rit des éléments et les brave, ici surtout. Voyez : la neige tombe et obscurcit la lumière, les rues sont remplies de glace, on glisse dessus avec la rapidité que donne la vapeur; la neige, la pluie ne peuvent pénétrer jusqu’à la peau, que protègent de triples couches de vêtements fourrés. On a, ici, plus chaud qu’ailleurs; dans les appartements règne un été perpétuel ; dehors, il est vrai, le cœur se serre et la poitrine s’oppresse, mois pour un instant seulement. On injurie le temps d’abord, mais l'habitude prise, cette vie plaît ensuite. L’activité n’est pas sur la place publique, mais dans les demeures. Voyez-vous ces milliers de tralnaux rapides portant des personnages muets? Il semble que co soient des ombres qui passent, tant le silence est grand. Laissez faire, ce n’est qu’une apparence : tout à l’heure chacun secouera son manteau, car au logis le confortable de la vie existe plus peut-être que partout ailleurs. Mais quelle surprise! Dans toutes ces demeures somptueuses on parle ma langue avec autant de pureté que moi-même. Suis-je à Paris? Est-ce un rêve que cette distance qu’il m’a fallu franchir? Non , sans doute. C’est donc une autre Lutèce? Les habitants sont polis, obligeants; ils pratiquent l’hospitalité. Je n’ai donc rien perdu en quittant la France, si la force magnétique ne m’a point quitté.
Dans quelques jours on viendra au-devant de mes vœux. On me mettra à même de prouver la réalité de
la découverte que j’apporte; on m’offrira l’entrée dos hôpitaux pour y essayer l’application de ma doctrine au traitementd es maladies. Que pouvais-je désirer de plus ?
Historien de mes propres faits, je ne dirai ici et ne rendrai compte que de mes œuvres. Que les hommes honorables qui m’ont précédé dans la carrière ne m'en veulent point de taire ce qu'ils ont fait pour la science, ce qu’ils ont tenté de faire pour établir le magnétisme et soulager ceux qui souffrent. Inhabile à bien dire, je ne pourrais parler dignement de leurs ouvrages , et laisse à un autre ce soin. J’ai cependant à les remercier d’avoir préparé, par leur pratique, les esprits à l’étude du magnétisme à Saint-Pétersbourg ; car, déjà, les faits y sont connus, rien n’y est étranger de cette étrange découverte. En arrivant, je trouve à qui parler : mes travaux, ma pratique aussi m’ont été profitables; mon nom est venu jusqu’ici; ma mission sera donc facile à remplir.
J’étais, à mon arrivée, inquiet, je dois l’avouer, de savoir comment le gouvernement, le corps enseignant allaient accueillir lo nouveau venu, quelle idée ils auraient de lui. Car là ce n’est pas l’opinion qui commande. Il y a un pouvoir plus fort et tout le monde se soumet à ce qu’il exige. Laissera-t-il le magnétiseur agir en toute liberté, et la science, partout si rebelle au magnétisme, ne prendra-t-elle pas ombrage de sa présence dans la capitale des Tsars? En peu d’heures j’avais déjà appris bien des choses, et si j’eusse écouté certaines personnes je serais reparti sans faire aucune tentative d’enseignement. Ils me disaient : « Vous allez être repoussé, le gouverne-
ment ne souffrira pas votre pratique; le terrain ici n’est pus favorable à la culture du grain que vous apportez... Le temps enfin n'est pas venu pour vous ; vous l’avez trop devancé.....»
Pourquoi donc partirais-je? Il faut que l’on me chasse; et qui donc assumera sur lui cette responsabilité? Les temps ne sont plus où il suffisait d’avoir un secret ou une vérité pour être persécuté. Maintenant on comprend mieux ses intérêts. Un homme s’annonce-t-il comme possédant une découverte : au lieu de le chasser, 011 le tourne, on le retourne en tous sens. S’il y a du bon dans ce qu’il apporte, on le prend, c’est le mot ; car quelquefois on le lui vole; dans quelques cas rares on le récompense, et le plus souvent on l’oublie tout en jouissant de son travail. Mais dans l’un et l’autre cas on ne renvoie ce novateur quo lorsqu’il est dangereux ou commet de mauvaises actions. Ce dernier cas était celui que je redoutais le moins. Mais j’avais à redouter les conseils donnés au pouvoir par des gens animés de mauvaises passions, car partout le magnétisme fait exception à la règle commune. En agissant autrement qu’on ne l’a fait avec moi, ce n’est pas moi d’ailleurs que l’on eût flétri, on eût ajouté une vilaine page ù l’histoire de la science, et résigné je serais parti en en appelant à l’avenir qui rend toujours justice.
J'eus des émotions, des moments de doute, car dès le lendemain de mon arrivée je fus mandé chez le gouverneur, qui me pria d’écrire à l’instant même une note circonstanciée sur ce que je venais faire à Saint-Pétersbourg : cette déclaration devait sur-le-champ être mise sous les yeux de l’empereur. Cette demande
inattendue me donna quelque inquiétude ; j’étais ému ; mais, comme je n’avais rien à cacher, j’écrivis la déclaration suivante :
« Je suis venu à Saint-Pétersbourg pour y enseigner « le magnétisme, découverte que j’ai soutenue par des « expériences nombreuses faites devant les corps sait vants et par des ouvrages. Si je suis encouragé, je » resterai; dans le cas contraire, je partirai avec le « regret de n’avoir pu faire un bien qu'un autre fera • plus tard, etc., etc. » Et je signai.
Mes intentions, si elles étaient défavorablement accueillies, allaient à l’instant provoquer une répulsion ; je n’eusse plus eu dès lors qu’à songer au retour. Malgré le tableau peu favorable, peu attr ayant qu’on m’avait fait du pays, je restai, n’eus point à m’en plaindre, et, je dois le dire on toute justice, on me laissa parfaitement tranquille.
Ne rapetissez donc point votre chef à votre taille; il est plus grand que vous, et son caractère noble et généreux ne consentira pas qu’on frappe un homme qui n’a rien fait encore ; prévoyant pour vous tous il se montrera plus éclairé.....
Une publicité orale avait répandu partout le bruit de l’arrivée du magnétiseur, si bien qu’un ancien médecin de la jioste, qui lui-méme avait autrefois magnétisé, m envoya chercher pour lui, car il était paralysé et pensait que je pourrais le guérir. Comme je ne connaissais point ce malade, je me laissai conduire, sans savoir chez qui et où j’allais. Mais quand je vis |e traîneau entrer dans l’établissement des postes, je me crus pris et dirigé sur la route do la frontière. S’il en est ainsi, pensai-je, mes peines sont Unies ici, et,
loin de me plaindre, j’étais presque joyeux.......Mais
tout s’expliqua bientôt en face du moribond.
Vous rirez de moi, gens heureux. C’est que vous ne connaissez pas les formes expéditives du pays. La position de l’homme qui écrit ces lignes, ses tribula-lations ne vous toucheront point. C’est pourtant votre cause qu’il va plaider tout ù l’heure, et sa vie n’est qu’un long sacrifice qu'il a fait à la défense d’une vérité qui pourra vous être utile un jour.
Pauvre novateur, tu n’es pas au bout. Un homme va s’attacher à toi, te suivre comme ton ombre; par-tout où tu dois te montrer il te précédera et tu l’y rencontreras. Il voudra saisir les fils qui te servent à faire mouvoir tes compères et te prendre en flagrant délit de charlatanisme. Évite-bien ses embûches si tu veux n’être pas découvert. Il est d'autant plus dangereux pour toi que ce n’est pas un homme vulgaire et qu’on croira ce qu’il affirmera, car son caractère est franc et loyal ; il dira la vérité, tant pis si elle le blesse ou lo tue.
Ah ! monsieur le diplomate, je plaindrais le gouvernement qui aurait à ses trousses un homme semblable à vous. Toutes ses ruses seraient bientôt découvertes, et, avant de livrer bataille, tous ses plans seraient connus. Les gouvernements 01^ quelquefois besoin do tromper les hommes pour les conduire, et c’est souvent entre les grands corps d'État ruse contre ruse. Mais moi, je n’ai pas cette ressource, on ne me permettra pas le plus petit mensonge : il faut toujours que la vérité sorte brillante et pure de ma bouche.
Ah ! monsieur B......... je ne me doutais pas de vos
projets; tontes vos avances me touchaient jusqu'à l’âme : voyez comme la diplomatie est trompeuse. Et
pourtant, monsieur le chargé d’affaires do S........,
c’est vous qui allez être pris, car ma sincérité ne vous laissera, je l’espère, aucun doute, et rempli vous-même des faits merveilleux que vous aurez vus, vous deviendrez, sans vous en douter, mon meilleur instrument de propagation.
Naviguons donc sans nous étonner sur cette mer pleine de récifs, et la lumière de ce phare trompeur va nous servir, au lieu de précipiter notre naufrage. Fais ce que peut, advienne (pie veut, doit toujours être notre devise.
HOPITAL D’OBOUGOFF.
Expériences magnclùnies.
(Février 1843.)
Jamais ces lieux ne chôment, chaque être doit son tribut de douleur; il faut que la plainte et les angoisses nous assaillissent sur le chemin de la vie. Hélas ! pourquoi donc redouter ces épreuves? En voyant le luxe de ces palais, on est presque tenté d’y entrer comme dans une hôtellerie... Voyez aux portes les valets galonnés : les marches ont des tapis, ces couloirs sont chauffés avec soin; voici des bains propres et qui font envie; les parquets sont cirés, les murailles blanches comme de l’albâtre, et le linge ne luisse rien à désirer. Vous ôtes vraiment saisi d’admiration et tenté de vous écrier : Ma fui! ceux t/ui vivent ici sont bien heureux !
Mais voyez-vous ces fioles étiquetées, numérotées? Elles contiennent, non du vin du Rhin, mais d’amers breuvages; de savants Allemands les ont préparés, et pourtant, croyez-moi, ils ne sont pas meilleurs.
Voyez-vous ces instruments rangés avec méthode? Ces scies sont destinées à scier vos membres lorsque la gangrène s’y sera mise ou que vous les aurez eus brisés. Ces trépans, ces pinces, ces couteaux, ces sondes rangés avec art doivent un jour entrer dans vos chairs. Ah! vous changez de visage! Rassurez-vous, vous ôtes en bonne santé, et ces scalpels ne sont pas là pour vous. D’ailleurs on sait se servir de tous ces instruments; aujourd’hui on coupe artis-tement un membre: l’art du chirurgien a fait de réels progrès, et les douleurs sont abrégées.
Malgré tous ces avantages, je vois que vous vous trouvez mal à l’aise ici ; mais restez encore un instant; sachez que votre empereur visite souvent ces lieux, et que, pour s’assurer si les malades sont bien soignés, il vient sans s’y faire annoncer. Il interroge, il regarde, il s’inquiète, non pour lui, mais pour ses sujets, et sa sollicitude est ici celle d’un père pour ses enfants.
Ma surprise fut sans égale la première fois que j’entrai dans un hôpital à Saint-Pétersbourg. Ici, me disais-je après avoir parcouru des yeux cet asile de l’infortune, on a tout fait pour adoucir les misères humaines, la charité s’est surpassée; car elle a mis du luxe dans ses dons. Doit-on se plaindre de ce trop de richesses? dort-on restreindre ces bienfaits? Non, car il n’est aucun de ces avantages qui vaille la santé. Rendez, rendez la mort moins affreuse aux pauvres,
dirai-je aux riches, et soyez plutôt bénis que maudits par ceux qui quittent cette terre. Montrez du moins que votre civilisation est bonne à quelque chose. Mais que parlai-je de civilisationPjjlci ces institutions se sont fondées lorsque son germe était à peine en embryon. Mieux qu’à Londres et à Paris on a compris la loi de Jésus, cl ces barbares, comme les appellent nos écrivains beaucoup trop civilisés, entendent assez bien la charité, car elle est entre leurs mains prévoyante pour le malheur.
Choisissons parmi ces infortunés ceux que noire art peut soulager ou guérir.
Le cas le plus curieux de maladie s’offre à mon observation; après avoir justifié de mon pouvoir, j’essaierai d’en décrire les effets.
« Le ton correspondant seul fait vibrer la corde ; « on éveille la vie intérieure môme sans l’avoir tou-« chée ; un verre éclate sous le ton sympathique « quand on le fait résonner trop fort. C’est de même » que le cœur de l’homme; si on touche le ton cor-« respondant, il est ébranlé, ému; il peut répondre, « éclater. »
Je vais vous montrer deux jeunes filles montées au même ton et ressentant les mêmes effets au même instant,quoique éloignées et sans aucunecommunica-tiort. Mais comment m’y prendre pour vous parler de cette magie et vous la rendre compréhensible ?
(La suite au prochain mrniro.)
REVUE MENSUELLE.
Il y a quelques années, les journaux parisiens ne voulaient point publier de faits de magnétisme. Le Globe, en 18-13, publia un article qui eut beaucoup de retentissement. Depuis lors, le Courrier Français, la Démocratie Pacifique, etc., l’ont imilé, et dans les premiers jours de ce mois toute la presse périodique a retenti d’un (ait de somnambulisme bien remarquable que nous reproduisons.
La presse des départements n’est pas restée en arrière. La Mouche de Mùcon contient souvent d’intéressants articles. Le Journal de la GuiUotière (Il mai) contient aussi un article , et la Tribune lyonnaise du 5 juin annonce que désormais elle publiera les travaux des membres actifs de l'Athénée électromagnétique de Lyon.
On lit dans la Presse du 5 juin :
« Voici une aventure qui, depuis quelques jours, failgrand bruit dans les environs de Paris, où son authenticité est attestée par nombre de gens.
« Mercredi dernier, 28, un jeune homme de dix-neuf ans, le sieur (ils unique d’un riche fermier de la commune de Wuissons, près Antony, canton de Lonjumeau , partit de chez son père avec une voilure attelée de trois chevaux, sous la conduite d’un charretier, pour aller charger une voilure de pavés sur le rocher de Saulx-lcs-Chartreux, dont la distance de la commune de Wuissons est de huit kilomètres.
« Le chargement de la voiture effectué, le charretier part avec l'équipage pour Paris; le jeune R... suit la voilure jus-
qu’à Lonjumeau; là, il rcnconlre un jounn fermier de ses amis, le sieur lt..., de la commune do Chilly. Après une coiirie station dans un café de Lonjumcau, II... invite B... à dîner chez, lui, dont la demeure n'esl éloignée de la commune de Wuissons que de deux kilomètres; on dina bien, mais sans excès. A huit heures du soir, R... reconduisit B... jusqu'à moitié chemin ; il ne restait pas à faire à ce dernier plus d'un quart d'heure de chemin pour arriver sous le toit paternel.
«Cependant, le lendemain matin, les sieur et dame B... étaient dans une mortelle inquiétude ; leur fils n’était pas rentré à la maison. Sans perdre de temps, ils rassemblèrent plus de soixante habitants do Wuissons et l’on fit des recherches. Près d’une marc assez étendue cl très-profonde, appelée la Gironde, on trouva une lettre de voiture dont le fils B... était porteur; celte découverte fit soupçonner qu’un crime avait été commis ; on sonda la mare avec de longues perches, on ne trouva rien.
« Les recherches continuèrent pendant trois jours : on explora à pied, à cheval, et môme en charrette, pour découvrir de plus loin, tous les champs des environs, sans arriver à aucun résultat. On eut l’idée d’aller à Paris chercher des chiens de Terre-Neuve pour les faire plonger dans la mare; l’expérience fut faite et n’amena rien. Chaque jour on venait à Paris, on s’informait, on allait à la Morgue; la gendarmerie de Lonju-meau, la garde nationale furent mises sur pied ; on battit la campagne dans tous les sens, le jour et la nuit.
« Dans la nuit du vendredi au samedi, 011 rencontre deux braconniers qui, à l’aide de filets, chassaient aux cailles et dénichaient les œufs de perdrix; on les arrête, et ils sont conduits à Lonjumeau.
a Ce môme jour, samedi, dans la matinée, M. le préfet de Seine-et-Oise était à Lonjumeau, présidant le conseil de révision des jeunes conscrits. On oui recours à lui, et à l’instant
il transmit des ordres à la plus grande partie des brigades de gendarmerie du département.
« Désespérés de si longues recherches, demeurées jusqu’alors sans résultal, les sieur et dame B... se rappelèrent avoir entendu parler des merveilles du magnétisme, et, dans leur désolation, ils se rendirent à Paris écouler le rêve d’une somnambule. Ceci se passaii toujours dans la journée de samedi.
« Voire fils n’est pas mort, leur dit la somnambule; je le « vois sur un rocher; il en descend, il suit une voilure jusqu’à » un bourg. Là, il va dîner avec un de ses amis ; je les vois « tous deux à table; ils se quittent sur la route.... Un peu « après, je vois votre fils arrêté par deux hommes ; ils l’em-« mènent; ils le font boire, mais je ne sais quelle boisson... « Dès ce moment je perds votre fils de vue ; je ne sais ce qu’il « devient, mais il n’est pas mort; il reviendra, et lui-même « ne saura ce qu’il est devenu pendant ces trois jours; il re-« viendra demain matin dimanche. »
« De retour à Wuissons, les parents du jeune B... firent part aux habitants du faible espoir que leur avait donné la somnambule. La nouvelle se répand dans les communes environnâmes; la singularité delà disparition de ce jeune homme, aimé de tous, le merveilleux des paroles de la somnambule, la coïncidence des deux hommes arrêtés avec ce qu’elle raconte, échauffent toutes les têtes, exaltent toutes les imaginations. Le dimanche matin, toutes les roules sont couvertes de monde; tous les sentiers, toutes les issues par lesquels 011 peut se rendre à Wuissons sont garnis de curieux. On attend, on regarde, on craint, on espère... Enfin, à onze heures du malin, la diligence d’Orsay passe, s’arrête; un jeune homme en descend et se jette dans les bras de sa mère : c’était le jeune B....
« On le questionne; il confirme en lous points le récit de la somnambule ; après avoir quitléson ami H... et se rendant à Wuissons, il a été arrêté par deux hommes qui l’onl fait
boire. Depuis ce moment il ne se rappelle lien , il ne sait ce qu’on a fait de lui pendant trois jours ni où on l’a mené. Seulement, dans la nuit du samedi, une femme l’a conduit du lieu où il avait clé déposé au village de Saint-Aubin. I.à, elle le laissa au milieu de la rue en lui disant : « Une voiture passe dans ce village, qui vous rendra chez vous. » B... exé-cuia ce que lui avait dit cette femme et revint ainsi chez ses parents.
«Toutes les questions qui lui ont été adressées n’ont pu amener d’autres réponses. A ces renseignements bien vagues, il faut cependant ajouter cette circonstance importante que sa montre et 10 fr. qu'il avait sur lui ont été volés. »
Nous avons jugé nécessaire de rapporter ce fait de somnambulisme lucide, dont un heureux hasard a produit la publicité. C’est ainsi que se produiront successivement au grand jour tons les phénomènes dont nous avons annoncé et soutenu l’existence. Im science cessera ses démentis, et peut-être à la fin nos Acidémies daigneront se baisser pour ramasser une vérité féconde.
La justice, un jour, ne sera plus exposée à frapper l’innocent, et le coupable n’échappera point à son glaive. î,e magnétisme a commencé une nouvelle ère pour l'humanité. C’est une lueur qui apparaît au milieu des ténèbres.
La Presse du Ü juin, revenant sur ce fait, ajoute:
« Nous avons donné, d’après la Gazelle des Tribunaux, du -1 juin , les détails d’un étrange et mystérieux événement arrivé à Wuissons, près Anlony. Un jeune homme nommé Ba-ticle avait disparu depuis plusieurs jours ; toutes les recherches faites par sa famille avaient été infructueuses, et une somnambule consultée avait annoncé que le jeune Baticle reparaîtrait le lendemain , ce qui eu elïet se réalisa.
«Nous avons pris de nouveaux renseignements sur ce fait, dit la Gazelle des Tribunaux, que les partisans du magnétisme ne manqueront pas sans doute de signaler comme un des plus
merveilleux résultats obtenus jusqu’à ce jour. Ces rensigne-mcnts, (|iie nous recevons de témoins oculaires et de la famille même du jeune Baticle, ont complètement confirmé la véracité de noire récil ; et, sans avoir à nous prononcer sur un fait aussi étrange, nous devons en maintenir l'authenticité.
«C’est le mercredi que Baticlc avait disparu, et le samedi suivant on n’avait pu encore obtenir aucune nouvelle. Tout ce qu’on savait, c’est qu'il était parii avec un charretier pour aller charger une voilure de pavés dans une commune voisine. Depuis, on ne l’avait pas revu , el la disparition de ce jeune homme, connu par tons pour un excellent sujet, avait jelé l’alarme dans tonte la commune. Après d’inuliles recherches, la mère do Baticle eut la pensée de consulter une somnambule, et samedi elle se rendit chez M. Marcillet, rue Sainl-Lazare, 55, qui est connu depuis longtemps par les curieuses expériences d’Alexis, son somnambule ordinaire, et qui, en l’absence d'Alexis, mil M“* Balicle en rapport avec la somnambule Marie.
« D’après ce que nous rapporte un témoin oculaire de celle séance, il ne fut rien dit à Marie du fait sur lequel elle était consultée, et son premier mol fut pour rassurer M"* Balicle sur l’existence de son fils. Elle commença par désigner le costume du jeune Balicle au moment où il avait quitté la ferme de son père ; elle indiqua la couleur des chevaux atlcJés à la charrette. « Il s’est arrêté près d’une mare, dit-elle ; mais rassurez-vous, son corps n’y est pas... » On avait, en effet, irouvé près de celle mare une lettre de voilure dont était porteur Balicle, et‘l’on avaii cru qu’il avait pu y ôlre précipité. Enfin , la somnambule donna lous les détails que nous avons déjà reproduits, indiquant qu’elle voyait Balicle avec deux hommes dont elle donna le signalement, etdaus un lieu qu’elle désigna aussi ; enfin, elle annonça que, le leudemain dimanche, Baticle reviendrait à Wuissons.
« On sait le resle el comment tous les habitants de la corn-
muno. prévenus de celle étrange propliélie, virent Baticle descendre de voiture le lendemain à neuf heures. Son pantalon était déchiré comme l’avait indiqué la somnambule. Un aulrc détail avait été donné: c’était qu’il avait reçu un coup au bras. Aussi, l’un des parents, émerveillé de la réalisation des faits prédits, I’intorrogea-t-i 1 vivement sur cette blessure. Baticle déclara qu’il n’était pas blessé. Nous avons dit par erreur que Baticle avait été victime d’un vol; le bruit en avait, en effet, couru dans le pays, mais ce fait était inexact; il n’a été ni pronostiqué par la somnambule, ni déclaré par Balicle. Ce jeune homme, interrogé sur l’emploi de son temps, a donné, de son côté, des détails qui sont venus confirmer ceux annoncés.
«Voilà les faits. Que la science les commente, les interprète, les explique : ce n’est pas notre affaire. Nous tenons seulement à maintenir l’exaclilude de notre récit. »
—Nous avons déjà parlé de l’étonnante faculté de l’abbé Paramelle(l), qui s’est acquis une si prodigieuse réputation comme hydroscope. Les journaux du Doubs et du Jura continuent de signaler ses découvertes. Voici ce qu’en dit le Nouvelliste du 28 mai :
o Attendu impatiemment par une population pleine de confiance dans sa science merveilleuse, M. Paramelle a élé reçu partout avec des témoignages de respect et d’admiration.
« De nombreux cours d’eau souterrains ont été indiqués : trois dans la commune des Combes, trois dans celle de la Grand’Combe, huil dans celle de Montlebon, el cinq dans celle de Morteau.
a M. Paramelle a prouvé son savoir et étonné les habitants par l’indication exacte, à grande dislance, des sources et cours d’eau, el de la qualité bonne ou mauvaise de leurs eaux.
« Dans la commune de la Grand’Combe, une remarque a
(1) Page 222 et suir.
frappé, peut-être épouvanté les habitants. « Dans tout le dé-« partemenl du Doubs, a dit le savant géologue, je n’ai pas « rencontré une aussi grande étendue de terrain à l’état d’ébou-«leinent que coin i sur lequel est située une grande partie de « ce village, el je suis sûr que presque toutes les maisons, pour o peu que les murs soient élevés, sont lésardés, non sur les « façades, mais sur les côtés. »
« Vérification faite, la chose s’est trouvée telle.
« Au centre du hameau de Pissenavache M. l’abbé Para-inelle a trouvé, à cinq mètres de profondeur, une source abondante et bonne au milieu même du hameau.
« Un banquet a élé oflért au savant hydroscope au presbytère de Morteau (Doubs), el un habitant de Montlebon lui a fait hommage de l’acrostiche suivant :
A M. L’ABBÉ PARAMELLE,
LE CANTON DE MORTEAU RECONNAISSANT.
•oortnnt aux souterrains le flambeau du génie,
>ux savants étonnés tu montres l’harmonie Wégnant sous notre sol. — Là, ton œil scrutateur > surpris des trésors, bienfaits du Créateur, gerveilleux hydroscope!... 6 gloire de la France, mile bénit tes pas 1...Par ta rare science ra terre ouvre son sein, et ses fécondes eaux,
C“ibresde leur prison, partout, avec l'aisance, npandent la richesse en fertiles canaux.
Ces faits sont en tout semblables à ceux qui se produisirent dans le siècle dernier. Bleton et d’autres sorciers furent accablés do railleries et de mépris par les corps savants. Ces gens étaient sincères ; ilsavaienl une faculté utile aux hommes, mais on les repoussa en les traitant de charlatans.
Courage, magnétiseurs ! l’avenir est à vous. Mais purgez voire science des erreurs qui s’y trouvent; déyagez-la de tout
mystère ; enseignez des principessimplescomme la vérité ; le bien que vous ferez ainsi sera immense.
— Dans son Journal du 10 juin, le docteur Ordinaire rapporte le fait suivant :
« Un de nos amis, persuadé qu’il a placé une somme de 200 francs dans le tiroir de son secrétaire, et voulant disposer de cette somme, est douloureusement surpris de ne pas la trouver où il croyait l’avoir déposée. Ayant renvoyé la veille une domestiqne, des soupçons de vol se portent tout naturellement sur elle ; mais, avant de commencer des investigations, il nous prie d’amener chez lui notre somnambule et de l’interroger. La somnambule, endormie en face du secrétaire, répond aussitôt : « La somme que l’on suppose avoir été volée est dans une pièce voisine : je l’aperçois dans le tiroir île la commode, où elle a été mise primitivement. » (Sotie ami court s’assurer de l’exactitude de la révélation, el trouve son argent, qu’il croyait bien perdu sans retour.
— L’hiver dernier, M"" L..., de W'issembourg, apprenant qu’un petit garçon, d’environ deux ans et demi, Henri Ver-gnier-IIerberl, auquel elle portail un très-vif intérêt, était malade, le magnétisa à diverses reprises sans que cet enfant témoignât en éprouver la moindre sensation.
Quelque temps après, le même enfant vint chez Mm* L... avec sa mère, qui le portait sur son bras. Le croyant encore malade, aussitôt qu’elle l’aperçut, cette dame se mit en devoir de le magnétiser de nouveau. Mais quelle 11e fut pas sa surprise en voyant cet enfant soustraire sa jolie petite tète à l’action magnétique en se renversant en arrière; puis, ramenant la main de M“e L... sur la (ôte de sa mère, lui dire d’un air pénétré : «A maman, à maman, » qui effectivement se trouvait être très-mal portante, tandis que son fils était entièrement rétabli.
Il paraîtrait donc résulter de ce qui précède que dans son étal de maladie cet enfant aurait évidemment éprouvé les bons
effets du magnétisme ; sans quoi quel autre motif l’eût porté à le requérir en faveur de sa mère?
SOCIÉTÉ PIIIL ANTHROPICO-M AGNÉTIQ U E.
Séance du 23 avril.—L’important de cette séance est la lecture d’un rapport envoyé par M. Druet, demeurant rue Mon-lorgueil, 11. Blessé, en 1824, à la cheville du pied par la chute d'un lingot de plomb, il garda le lit six mois consécutifs, au bout desquels il reprit ses travaux, quoique toujours souffrant. En 1842, il fut repris de douleurs très-vives; trois trous s’ouvrirent en cet endroit el la suppuration s'établit. Son médecin habituel lui ayant déclaré qu'il no pouvait le guérir, il s’adressa à quelques autres dont il reçut la môme réponse. Il eut alors recours au magnétisme et s’adressa à l’un dos membres de la société, M. Simon, dont l’obligeance lui était connue par des précédents semblables. Le bien qu’il éprouva de ce traitement fut presque instantané, car il ajoute en terminant son récit : « Après la sixième magnétisation, je « mis des souliers (ce que je n’avais pu faire depuis quatre « mois), el m’allai promener jusqu’au Gros-Caillou. M. Si-o mon a continué, et aujourd'hui je ne ressens aucune (lou-« leur. Je fais de très-longues.courses, et, quand je suis fa-« ligué, je le suis davantage de la jambe qui n'a pas été o magnétisée. »
Ce malade adresse des remerciements h la société tout entière et à M. Simon en particulier. Son état de maladie a été consulté par le docteur Penoyée, membre de la société, el sa guérison peut l’être par tout le monde.
Séance du 50 avril.— Toute cette séance est employée à des discussions sur l’importance, des procédés de magnétisation
conseillés par lus auteurs, et notamment ceux de M. le baron Du Poiet. L’espace nous manque absolument pour entrer dans le détail de ce débat, auquel MM. DelignyrPichard, Cruxen, l'ossin et Hébert prennent une part active.
Séance du G mai.— M. Botiau, ancien secrétaire général de la société, rapporte qu’ayant habité temporairement Dourdan, il y a, au nom de la société, magnétisé plusieurs malades pauvres recommandés par le curé de l’endroit. Vient ensuite le rapport deM. Pichard sur un fragment du Manuel du Magnétiseur, « qui a semblé si bien approprié à la nature des « travaux de la société que notre collègue s’est cru obligé de « le lire en entier. C’est qu’en effet il est à la portée des pra-« ticiens comme des gens de science, et que chacun peut y « puiser une instruction qui manque le plus souvent dans les « nombreux ouvrages qui ont été publiés sur cette matière. « Nous devons donc en remercier l’auteur en l’engageant à « continuer son œuvre. » (Extrait du procès-verbal.)
Séance du 14 mai. — La société décide qu’elle consacrera, par mois, deux de ses séances à des expériences faites sur des personnes étrangères qui voudront se faire magnétiser (1).
Séance du 21 mai. — Deux malades réclament les soins de la société; MM. Delacour et Millet en sont chargés. M. Winen entretient la société de l’état d’un épileptique qu’il magnétise depuis trois semaines. Cet homme, chez qui les accès étaient provoqués par l’ivresse, lui a confessé qu’hier, s’étant mis dans ce déplorable état, il n’avait, à son grand étonnement, point éprouvé d’accès.
Séance du 28 mai. — M. Simon, rendant compte de l’état d’une dame paralytique qu’il magnétise à Auteuil, ajoute qu’il a magnétisé ces jours derniers M. Klein, acteur du Gymnase, atteint d’une goutte sciatique des plus aiguës. La douleur,
(1) Ces séances sont gratuites. On peut avoir dus billets chez. M. Leclerc, 48, rue Neuve-des-Pelits-Champs, et au bureau du Journal du Magnétisme.
d’abonl calmée, se déplaça, descendit dans le pied, mais tellement anémiée qu’à la sixième magnétisation il reprit son service au théâtre.
Séance du 4 juin.— C’est la première séance expérimentale; l’assemblée est nombreuse; plusieurs assistants se font inscrire pour ôlre magnétisés. L’expérience commence d’abord sur quatre personnes qui éprouvent des effets vagues, comme bail, lemenls, assoupissemenls, difficulté de mouvoir les membres, elc. Ces expériences eussent probablement amené quelques résultats, si l’atlention des magnétisés et des magnétiseurs n'eùt pas été distraite par la singularité des effets produits par M. Simon sur une autre personne, M. Roche fort, homme de petite taille, nerveux, à l’air vif et à la parole brève. En moins de deux minutes, le corps s’arque en arrière, les yeux se ferment, les mâchoires se serrent; il gesticule, bondit sur son siège. M. Simon cesse de l’actionner et les effets se calment; mais cet homme est d’une sensibilité telle que la seule approche du magnétiseur renouvelle de fortes secousses. On l’interroge de toutes parts, croyant'qu’il a beaucoup souffert ; mais, au grand étonnement des assistants, il dit que non, et qu’il désire qu’on recommence pour mieux analyser cequ’il éprouve. C’est alors que M. Hébert, se plaçant à l’autre bout de la salle, le magnétise avec la main d’abord, et cet homme semble comme frappé de la foudre, ensuite avec le pied dirigé vers l’épigastre ; dans ce dernier cas, les effets plus hauts décrits se reproduisent, mais avec moins d’intensité.
SOCIÉTÉ DU MESMÉRISME.
Séance du 17 ami. — M. le docteur Dussaux rapporte qu’ayant magnétisé une jeune dame atteinte d’une phlogmasie blanche, suite d’une couche, elle s'est endormie au bout de dix minutes el lui a donné des preuves de lucidité dont il donne la relation.
M. Hébert magnétise M. Perrody, atteint de vives douleurs dans l’oreille gauche et la mâchoire supérieure. L'expérimenté tombe vile dans un état de torpeur et d’abattement; la tôle se penche et la respiration devient laborieuse. Alors, dirigeant une main sur la tête et l’aulre sur les articulations des phalanges de la main gauche, M. Hébert détermine une violente commotion du tronc et des membres. Le malade s’éveille, on l’interroge alors; il dit avoir ressenti dans le cerveau l’effet d’une décharge électrique. La sueur ruisselle sur la face du magnétisé, qui se trouve immédiatement soulagé.
Pendant celle expérience, une dame, assise au bout du salon, est prise de légères convulsions qui sont promptement calmées.
Séance du 24 avril.— Cette séance est en grande partie employée à la réception de nouveaux membres et à l’adoption de règlements administratifs.
M. Perrody esi de nouveau magnétisé; les effets qu’il éprouve sont infiniment moindres. Ses douleurs d’oreilles ont complètement disparu à la suile de la magnétisation à laquelle il aélé soumis au sein de la société.
Séances des 2 el 8 mai. — Ces deux séance ont élé presque exclusivement consacrées à des expériences sur une somnambule présentée par M. Dupont, qui annonce produire sur
elle des ellois intéressants. Après l’avoir magnétisée quelques minutes, il sc plaça derrière elle, et, à un signal donné par le président, le magnétiseur agissant, la somnambule éprouva une violente secousse des bras et des jambes. Sur l’observation que la somnambule voyait ou entendait peut - être, M. Dupont passa dans une pièce voisine dont on ferma la porte, et de là il produisit, à plusieurs reprises, les mômes secousses. Enfin, ne voulant laisser aucun doute sur cette action à distance, sans contact et au travers des murailles, que M. le baron Du Potd a si bien démontrée par ses admirables expériences à l’Hôtel-Dieu de Paris, M. Dupont sortit de 1 appartement, alla sur l’escalier avec le docteur Cruxen, chargé de lui donner le signal : le même résultat eut lieu à l’admiration de l’assemblée, qui était fort nombreuse.
Dans chacune de ces expériences on a cherché à calculer le temps qui s'écoule entre le moment où le magnétiseur agit et celui où la magnétisée éprouve la secousse, mais en vain} l’instantanéité de l'action rend cotte fraction de temps inappréciable.
On soumet encore cette personne à diverses expériences sur lesquelles nous reviendrons dans les séances suivantes.
A la suite de ces expériences s’engage une assez longue discussion sur un article de M. Meade, inséré dans le quatrième caliier du Journal du Magnétisme. Plusieurs personnes prennent la parole, sans bien s’entendre sur le sens de cet article, uniquement fait pour expliquer les phénomènes de lucidité magnétique et amener ainsi par le raisonnement les sceptiques à reconnaître la lucidité do certains magnétisés, qu’ils rejettent l«r cela seul qu’on ne la leur explique pas. C’est enfin un essai de théorie, do généralisation des faits observés, et comme tel il mérite une sérieuse attention, et, bien qu il choque certaines idées généralement admises, on ne doit pas moins savoir gré à l’auteur de la tentative qu’il fait pour porter les esprits obsersateurs sur la généralisation des faits, afin d en
trouver la loi. Sans lois, sans principes, sans théories qui lient les faits entre eux, le magnétisme serait un empirisme aveugle, cl c’esl ce qu'il faut éviter si l’on veut qu’il progresse.
Scance du 15 mai. — SI. Courant entretient la société de l’état d’un enfant qu’il a magnétisé.
M. Dupont a obtenu en trois jours la cessation presque totale de douleurs vives venues à la suite d’une foulure ou entorse du bras droit depuis environ un an.
On décide que le portrait de Mesmer sera mis en tête de chaque diplôme.
Séance du 22 mai. — M. Dupont renouvelle les expériences dont nous avons déjà rendu compte ; elles réussissent également. H fait marcher ou s’arrêter, entendre ou non la magnétisée par sa seule volonté. Il l’envoie plusieurs fois prendre sur le bureau des plumes ou autres objets dont il lui dit avoir besoin. Pendant son trajet, on lui barre le passage avec des cordes tendues qu’elle enjambe sans hésitation, et, soit qu’elle aille en avant ou en arrière, elle évite tous les obstacles.
On magnétise d’autres personnes qui éprouvent des effets qui ne présentent rien de remarquable.
Séance du 29 mai.— M. Boliaulitune critique remarquable sur la théorie que M. Meade a donnée des phénomènes som-nambuliques lucides. Une vive discussion s’engage entre le préopinant et l'auteur, qui donne des explications et ramène à son sens, sur quelques points, plusieurs membres, et M. Boliau lui-mûme.
Le Propriétaire-Gérant, HÉBERT.
P*ri»,— Imprimerie il'A. RKNK el Cie, rue de Seine, Si.
JOURNAL
DU
MAGNÉTISME.
VOYAGE A SAINT-PÉTERSBOURG.
(3* article.)
SUITE DE L’HOPITAL D’OBOUGOFF.
GUÉRISON DE DEUX AFFECTIONS ÉPILEPT1F0RMES.
Est-ce vous qui prétendez faire ce que Dieu lui-même ne ferait paj, el former un nœud sur uue corde tendue?
Carnot à Jacquart.
Et quand le nœud fut fait, lorsque la machine fonctionna et qu’elle allait enrichir le pays, le jury de VExposition de 1801 donna à Jacquart une médaille de bronze... L'indifférence à Paris, à Lyon la persécution. Jacquart Jaillit plusieurs fois être lapidé.
Je prétends, non pas, comme Jacquart, faire un nœud sur une corde tendue, mais guérir des maladies rebelles à la médecine, sans employer aucun remède.
Je ferai ces choses qui passent pour impossibles, et n’aurai pas même unp médaille de bronze. Les magnétiseurs ne sont pas encore arrivés au temps où on leur accordera cette liante distinction. Mettons-nous à l’œuvre cependant, et, puisque nous sommes placés au milieu de tant d’ijifortunés renfermés,groupés ensemble, dans un étroit espace, choisissons les plus capables d’émouvoir la pitié.
Voici deux jeunes filles qui se distinguent par leurs genres de douleurs; elles troublent les autres malades par leurs cris déchirants: plus de nuits tranquilles depuis qu’elles sont à l’hôpital. Les garde-malades et les infirmiers suffisent à peine pour contenir leurs membres convulsés. Spectacle affreux à Voir ! après s'être débattues un instant, ces deux malades retournent sur elles-mômes leur propre fureur, elles s’arrachent les cheveux, se mordent les bras, les doigts, d^chijcnt |eurs vêtements. La force de plus de six personnes est impuissante pour les contenir dans leurs brusques mouvements; il faut des liens et des camisoles de force, et, quoique ainsi attachées, fixées, emmaillftttées, on est encore obligé de les contenir. Leurs crises se continuent presque sans interruption pendant tpois ou quatre heures, quelquefois même plus de six heures. L’une de ces malades est un étrç faible en apparence ; il semble, lorsqu’elle est en repos, qu’il lui serait impossible de lever un poids de dix livres. L’autre, quoique mieux organisée, est tellement courbaturée, brisée par la fréquence de ces accès, sa voix est si faible, qu’on jugerait qu'il n’y a plus pour elle possibilité physique de se mouvoir.... Attendez... dans un instant ces deux corps incompré-
Iicnsibles vont s’agiter d’une étrange manière. Vous croyez un repos prolongé nécessaire, indispensable, pour qu’elles retrouvent les forcesépuisées... Comme vous connaissez peu la vie! La vie, la voici qui reparaît, elle vient de je ne sais où... un flux et reflux agite continuellement ce navire dans le port; il casse ses amares et va porter de rudes coups à tout ce qui l’environne. Ici de môme une puissance mystérieuse agile ces deux corps par un flux et reflux de forces inr connues. Qu’importe pour elle que vous sépariez ces deux malades, elle saura les trouver n’importe où vous les aurez placées ; de vastes bâtiments ne lui opposent aucun obstacle; elle se rit de vos moyens. Tenez: semblable aux esprits, elle vient de passer sans être aperçue, elle a touché ce membre devant vous; un léger mouvement vient de vous l'indiquer, et la poitrine se gonfle, les dents se serrent, les yeux se convulsent. Les malades sont loin 1 une do l’autre, mais envoyez vers celle que vous ne pouvez voir ni entendre, calculez le temps qu'il faudra pour que l’on arrive près d’elle, on arrivera trop tard ; l’esprit vous aura devancé en route, le messager aura entendu les cris de la convulsée, qui, il y a un instant, était peut-être dans un profoud sommeil. Sa langue sera saignante, et toutà l'heure, avant qu’on ait eu le temps de la garrotter, ses membres auront reçu de uouvelles meurtrissures.
L'esprit a commencé par lune, demain il commencera par l’autre, il changera ensuite sa marche et les frappera toutes deux en môme temps. Diminuez tant que vous le voudrez la vie de ces deux malades, saignez-les, mettez-les à une diète rigoureuse; votre
science va se trouver en défaut ; le délire, les convulsions seront plus forts après vos remèdes ; vous pouvez tourmenter, tuer ces infortunées, mais par votre médecine vous ne les guérirez pas.
Vos tractions les plus fortes ne peuvent désunir les doigts de leurs mains, comme de leurs pieds, sondés ensemble. Les membres ont la roideur du bois ; et si vous parvenez à les faire fléchir, l’arc n’est pas plus prompt à revenir sur lui-même, lorsque la corde qui le tenait captif a été mise en liberté. Ces corps vont se mettre en cerceau, tandis que la bouchejeltera au loin une abondante écume. Ces phénomènes auront la durée qu’il plaira à Y esprit de déterminer, et vous, médecins, vous êtes condamnés à être les spectateurs de tant de souffrances, sans pouvoir les abréger. Si, dans cet état, des paroles s’échappent, c’est pour vous instruire du trouble de la raison : entendez-vous leurs cris sauvages ? ces jeunes filles ne savent ni ce qu’elles disent, ni ce qu’elles font ; elles vous mordront si elles le peuvent, et s’applaudiront des ruses qu’elles auront employées pour y parvenir. Pendant leur lugubre paroxysme, une odeur nauséeuse s’échappe de leur corps et atteint au loin l’odorat.
Ces jeunes filles sont-elles jumelles ou sœurs pour être frappées en môme temps du môme mal? Non, l’une est Allemande, l'autre Russe; elles ne se connaissent que depuis qu elles sont à l’hôpital. L’une est réglée, l’autre ne l’est pas, mais elles ont à peu près le môme âge : dix-huit ou vingt ans.
J’abrége cette description.
Voilà pour le magnétiseur une maladie propre à exercer son savoir et sa patience; car, lorsqu'il croira
au succès de ses efforts, les crises reparailrout avec plus tic violence.
Un agent inconnu cause tous ces désordres. A une autre époque 011 exorcisa des malheureuses affectées de maladies en tout semblables à celles dont je viens de vous offrir le tableau ; Y esprit malin était en elles, les agitait à sa fantaisie et se jouait des exorcismes; voyons s’il se jouera du magnétiseur. On doit le laisser agir en toute liberté, sans contrarier son action par des remèdes, on l’a promis... C’est en présence de plus de trente médecins qu’il se livrera à ses opérations et que les faits doivent se passer. Le conseil supérieur de médecine a nommé trois commissaires, hommes distingués, pris dans son sein,, pour suivre les expériences et examiner la méthode du magnétiseur. Les malades sont connues depuis longtemps, leur examen ne peut pécher par défaut d’exactitude; commençons donc; puisse le ciel favoriser mes tentatives pour le succès du magnétisme.
Qu’ai-je donc à opposera une cause de maladie inconnue dans sa nature:' Je n’ai qu'uneforce au pouvoir de ma volonté; il faut que, par une énergie soutenue, une résolution à toute épreuve et qu’aucun doute ne peut ébranler, je change la nature de deux systèmes nerveux. Tout à l’heure, pour vaincre ces cris et ces mouvements désordonnés, bannissant toute crainte d’insuccès,je dirigerai simplement mes mains sur les malades. Ces gestes seraient sans aucune valeur s’ils ne servaient à conduire, par l’intermédiaire d’un fluide subtil, le rudiment de ma volonté. Par des actes simples de ma pensée, je vais porter le désordre dans le désordre, contrarier dans sa marche l'agent
du tourment terrible, et le forcer enlin à céder la place, à celui que nies mains conduisent. Faculté merveilleuse démon être, je vais encore te mettre à l'épreuve en présence déjuges éclairés; ne me fais point défaut ; mais que l’orgueil de posséder seul cette vertu ne s’empare pas de moi : tant d’hommes la possèdent à un degré supérieur et l’ignoreront, toujours, que je dois être humble et. reconnaissant.
Choses incompréhensibles, je parviens à chasser d’un corps le mauvais principe qui l’agite, il va dans l’autre; je viens à celui-ci pour le poursuivre, il retourne à celui que j'ai quitté. Mais déjà je domine; les convulsions en ma présence sont peu durables; tant que je reste au lit des malades, les muscles conservent. leur souplesse, les doigts des pieds et des mains recourbés n’entrent plus dans les chairs, mais en tant seulement que je reste là. Comprenez, lecteurs... Je sens votre embarras, mais je vais être plus explicite.
Pour éviter toute supercherie sur la coïncidence Singulière de ces crises, se communiquant sans contact, à une grande distance, et malgré toutes les précautions, j’arrive à des heures différentes de celles accoutumées, je m’introduis la nuit ou le jour à pas de loup dans l’hôpital, accompagné seulement d’un ou do deux internes, et parfois des commissaires; nous arrivons sans bruit jusqu’au lieu qui recèle l’une des malades ; qu’elle soit éveillée ou non , je la magnétise à une distance de plusieurs pas, et aussitôt je détermine une crise. Cette crise est sentie par l’autre malade , et bientôt on vient nous avertir de son état de convulsion. Je laisse cellè ei calme; mai$ nu moment
où, triomphant, je m’approche de l’autre, celle que je viens de quitter retomberiiiiis son premier état; il nie faut y revenir. Les crises que je fais Hàitre passent presque à ma volonté, mais les naturelles me donnent plus de peine.
Qui donc peut instruire l'ennemi du repos de ces filles que je suis venu, que j'ai commencé mon opération ? Il lit donc dans ma pensée, car si je reste prtssif il est lui-même inactif tout le tëmpS qü’il m’a pïti d’ÿ rester.
Pour ceux qui ont vu les liedx, qui ont mesuré lës distances, le phénomène est (olit à fait inexplicable, car l’impossibilité de se correspondre est trop facile à constater. 11 faut être magnétiseur pour ne point s’étonner. Pour nous, la vie n’est ptiiiit empriàorihëë dans le Corps; cette enveloppe de chair en laisse échapper lës rayons, qui, comme ëëiix d’une lumière matérielle, voht au loin éclairer les objets, mais diffèrent sfliis Ce rappoht que les corps Opaques fie sflnt püiiit un Obstacle à la transmission et l\ la pénétration.
La science, ici, dihi non. Que voulez-vous? il faut la laisser nier ce qu’elle ne peut comprendre.
A force de persévérance, les crises artificielles jjretinerit le desSiis cbe/, mes malades, et les naturelles sont facilement calmées. Du sûmmeil magnétique apparait, léger d’abord, et Sans Ôtrë acëdmpagné tic perceptions. Plus tard cëpëHdant Füftë avance dans cet état, et peut prédite les crises qit’felfe doit encore avoir ; elle s’ordonne des bains et ahhonce sa guérison prochaine; les règles paraissent; ëllé prévoit aussi la fin des douleurs de sa inalhédfeosë compagne.
■ !Ne parlant ni l'allemand ni le russe, je ne puis interroger moi-même cette jeune somnambule. J’éprouve nne grande répugnance à développer son somnambulisme; plus on me pousse dans cette voie, plus je refuse d’avancer. Que voulez-vous, chers lecteurs, il m’a semblé que ma tranquillité dépendait, dans ce moment, de ma conduite réservée. Un oracle aurait trop remué les esprits; une indiscrétion, et peut-on toujours les empêcher, aurait des conséquences fatales ; j’aime mieux rester en deçà que d’aller au delà : c’est beaucoup plus sûr.
Enfin le jour arrive où les crises cessent de paraître; plus de troulile de la raison ; les deux malades peuvent se voir et causer ensemble ; elles sont entièrement guéries. L’une me remercie en quelques mots de français qui me vont jusqu'à l'âme; l’autre, sans doute, avait la môme intention, mais la pauvre fille me serre seulement les mains, elle sait que je ne pourrais comprendre son langage ; elle accentue mon nom, et je vois une larme; ne suis-je pas dédommagé de toutes mes peines?
11 faudrait un gros volume pour contenir tout ce que mes commissaires ont écrit ; ce serait sans doute très-intéressant à lire, plus que cette imparfaite relation. Rapport de mes expériences a été lu au conseil supérieur de médecine; les conclusions m’étaient favorables. J’eusse pu en avoir une copie, mais à quoi bon pour moi? dois-je me glorifier d’un fait qui n’a pas plus d’importance que ceux que je produis tous les jours? Sont-ce des certificats que je demande à ceux qui veulent bien se rendre témoins de mes expériences? Non ; mais je les prie de répandre la connaissance
du magnétisme, de soulager et guérir des malades en m’imitant. Hélas! je suis bien à plaindre, car si je puis convaincre de l’existence du magnétisme et de son efficacité, je ne puis donner du cœur el de lasen-sibilitéà ceuxqui n’en ont point assez pour comprendre le but de mes expériences.
Que mes commissaires veuillent bien recevoir mes remerciements. Je les ai souvent dérangés de leurs travaux habituels; ce sacrifice leur était, il est vrai, imposé par l’Académic, mais ils ont rempli leur mission avec un zèle dont les médecins de mon pays of-rent rarement l’exemple.
Je ne dois point non plus oublier Son Excellence SI. Charles Mayer, médecin en chef d’Obougoff; il a favorisé mes essais, et n’était contrarié que lorsque la difficulté du traitement se laissait trop apercevoir.
Ces deux guérisons ont été solides et durables : l’une des deux malades s’est mariée et habite Reval, l’autre n'a pas quitté Pétersbourg.
MAINTENANT UN MOT POUH LES MAGNÉTISEURS.
Tant que je n’ai fait que chercher à calmer les crises des malades, par une application paisible des procédés magnétiques enseignés par mes devanciers, je n’ai en rien changé les symptômes des maladies. Il m’a fallu provoquer, dans les moments de calme, le système nerveux, et obtenir violemment la manifestation des crises; el, quelquefois, usant de ce procédé, j'ai renouvelé plusieurs fois de suite leur apparition. J’ai changé ainsi les heures de leur arrivée, modifié la sensibilité, fait perdre aux nerfs l’habitude qu’ils
avaient de su contracter sous l'empire d’une Force occulte, celle force ayant donné une fausse direction à la circulation des fluides, el imprimé dans la mémoire un souvenir trop facile.
Ma volonté, d’abord contrariée, a lini par agir avec une grande promptitude; mes principaux efforts ont été dirigés du côté du cerveau. La rigidité des membres convulsés cessait en faisant simplement des passes longitudinales sur les parties contractées, contre l’attente de tous les spectateurs, qui, par leurs efforts musculaires, ne pouvaient l’obtenir. Je ne touchais jamais qu’au front mes malades, souvent méfiie je ne les magnétisais qu’à distance. Leurs yeux étaient difficiles à ouvrir, et les muscles, quoique revenus à leur état habituel, conservaient une sensibilité douloureuse que je ne pouvais faire cesser.
L’une de ces malades nié voyait avec plaisir. L’autre, jusqu’à la fin, avait conservé une très-forte aversion; on a pu voir que ce sentiment ne cédit que, le. dernier jour du traitement.
baris leur état de maladie, rapprochées ou éloignées, elles s’accusaient mutuellement de leurs souffrances, elles se frappaient comme si elles eussent pu s’attein-dre, et, chose curieuse, dans leur délire toutes deux semblaient sentir l’effet de coups qui n’avaient pu être tefUS. Elles se plaignaient vivement, et portaient leurs mains sur les parties de leurs membres qu’elles croyaient avoir été frappées.
Deux mois el demi m’ont été nécessaires pour leur guérison, et souvent je les ai magnétisées deux fois dans un jour.
(/,i suite nu prochain numéro.)
MANUEL DU MAGNÉTISEUR.
(Suite.)
CONDITIONS DE TEMPS ET DE LIEUX.
Bien que l’on paisse magnétiser partout, à toute heilrede la journée, oti a cependaht constaté quelqütî dilTérence dans lo développement des effets. Outre lés causes naturelles, celles qui tiennent à la constitution du magnétiseur, à son éducation, etc.', on doit mentionner celles-ci.
Dans notre climat, le temps seti et chaud parait être le plus favorable à la magnétisation. Le milieu dit jour fait gagner quelque chose.
L’hiver on doit magnétiser plutôt dans une pièce trop Chauffée qué pas assez; préférablcmenten plein air que dans un courant d’air.
Les hommes qui paraissent avoil' profondément réfléchi sur le magnétisme, les prêtres de l'antiquité, l’appliquaient loin du bruit, dans des temples, où l’âme recueillie permettait au corps d'en ressentir d’une manière plus puissante encore les énergiques effets. Lemagnétiseurégalement éprouvait aussi moins de contrainte, moins de distraction, et sa pensée n’était nullement contrariée.
Souvent 011 a vu, il est vrai, des faiseurs de miracles opérer sur les places publiques ; mais, outre qu’ils ne
s’adressaient qu’à des malades affectés de maladies nerveuses, et par conséquent impressionnables, ils avaient pour eux ln fon\n\ remue l’âme, et une force morale qu’ils tenaient de leur genre de vie ; car l’austérité, qui donne peu aux sens, affine l'esprit et développe singulièrement lu propriété magnétique.
J’ai observé que le temps brumeux, pesant, celui qui vous porte vous-môme au sommeil, à la paresse, diminuait les forces magnétiques.
Si, dans une chambre où vous magnétisez, plusieurs personnes occupent votre attention, celle sur qui vous dirigez votre action se ressentira de vos distractions et sera moins impressionnée.
Si des personnes déjà magnétisées antérieurement sont placées près d'un autre sujet d’expérimentation nouveau pour vous, il suffit même qu’elles soient dans la même chambre, vosémissions magnétiques peuvent être détournées de leur direction et aller frapper leur système nerveux.
Vous réussirez plus sûrement, plus promptement, dans une chambre où vous magnétisez souvent que dans un lieu toujours nouveau. Le magnétisme, comme les odeurs, semble s’attacher aux corps et y rester très-longtemps.
Vous remarquerez qu’il est des jours où les effets s’obtiennent plus tôt en employant une main que l'autre; les malades sentent la différence qu’il y a dans l’action de ces conducteurs. Mais vous-même, si vous faites attention, vous reconnaîtrez ce fait d’observation que j’ai eu l’occasion de constater plus de cent fois.
J’ai remarqué que certains jours tous ceux que je magnétisais étaient vivement impressionnés, et cela, en quelques minutes, tandis que dans d'autres temps, où je n’apercevais en moi aucune différence, j'avais beaucoup de peine à obtenir quelques effets appréciables dans un temps plus que double.
CONDITIONS NÉCESSAIRES POUR QU’UN TRAITEMENT MAGNÉTIQUE RÉUSSISSE DANS LES AFFECTIONS CHRONIQUES.
Constance du magnétiseur, son abnégation.
Passivité du magnétisé pendant l'opération.
Résolution de l'un et de l’autre dans les douleurs critiques (crises).
Ne pas mesurer le temps, car il ne doit pas se compter par jours, mais par mois.
Bien se garder d’user, par de forts travaux ou applications de l'esprit, les forces déposées dans l’organisation. Plus le magnétiseur a le sentiment de sa puissance, moins il doit en user tout à coup. Il faut seulement qu’il dépose graduellement, et par des actes de volonté réglés, dans l’organisation malade, une somme de force suffisante : l’excès n’est pas utile.
Plus il rencontre de sensibilité et moins il doit agir. Il est des malades à qui cinq minutes de magnétisation suffisent; le plus longtemps que l’on doit accorder, dans les cas ordinaires, c’est d une demi-heure à une heure, en partageant en deux cette séance, c’est-à-dire que le repos du magnétiseur est néces-
sa ire pendant quelques instants, lorsque la magnétisation dure plus de trente minutes.
Dans des circonstances graves, le temps ne doit point èlrc mesuré, la prolongation de lu \ie dépend souvent des efforts que vous ferez.
J'ai cité de ces eus, le choléra, par exemple.
Il faut éviter que le malade ail des accès de colère ou de violentes contrariétés; il arrête ainsi le travail de la nature, lorsqu’il no détruit pas ce qui u déjà été produit de bon.
Il faut que le magnétiseur ne se laisse point influencer par la crainte. La responsabilité qui pèse sur lui ne doit point l’effrayer, ou il n’est plus qu’un instrument inutile. Puisque la crainte ôte les forces, il a beau vouloir, le fluide magnétique ne franchit plus les extrémités. Celte émission, au reste, quand elle a lieu, n’a plus les qualités requises.
La douleur, les cris, le délire, l’agonie môme doivent trouver le magnétiseur impassible; qu’il garda sa pitié, ce n’est pas cela qu’on lui demande, mais sa force. Sou œuvre accomplie, c’ost seulement alors qu’il doit plaindre, si la nature n’a pas répondu à ses efforts, ou se réjouir s’il a réussi.
Il ne faut pas que le magnétiseur soit depuis trop longtemps» jeun, ni qu’il ait l’estomac trop chargé.
S’il cause trop sa besogne s’arrête. Le mieux serait de ne rien dire pendant l’opération; seulement recevoir les observations du malade sur les effets qu’il ressent.
Il ne faut pas que le magnétiseur soit fatigué avant l’opération, sans cela il fera peu de bien. 11 en est de môme du malade; il doit ménager les forces qu’il pos-
série, et ne pas dépenser sans un impérieux besoin lu richesse qu’on lui apporte.
11 csi extrêmement rare que le magnétiseur n’abuse point de l'état magnétique qu’il a développé; si c'est du somnambulisme, il le prolongera outre mesure, il fera du dormeur un instrument d’observation, le forcera à chercher et à voir des choses qui ne sont point utiles à son rétablissement.
Si c’est seulement une sensibilité phénoménale, il l’exagérera encore pour montrer su puissance, il fera cent essais qui fatigueront le magnétisé. D'un côté il y aura faiblesse, de l’autre abus coupable.
Les traitements les plus désagréables sont ceux qui n'offrent aucun signe physique de la marche de la nature; bientôt la confiance du malade l’abandonne, le zèle du magnétiseur se ralentit; cependant c'est souvent par un travail sourd, moléculaire, que la nature procède; la vie est en plus pourtant, mais on ne l’aperçoit point, pas plus que l’on ne se sent croître ou décroître, et cependant, dans ces cas, que de choses se passent en nous.
Il est nécessaire de bien étudier ces cas embarrassants. J’ai guéri des malades, bien gravement malades, et pour lesquels la nature depuis longtemps ne faisait rien. Je les ai vus, dis-je, revenir à la santé sans que l'on ait fait emploi d aucune drogue; ils n’avaient été que magnétisés, et rejetaient le magnétisme comme cause de leur rétablissement; c’était bien lui pourtant, et, pour m’en assurer, dans des cas semblables, j’ai suspendu mon traitement, et le mieux qui existait déjà eut bientôt disparu. Puis, je recommençai la magnétisation, et j’amenais ainsi, en reproduisant l’amé-
lioration perdue, le malade ù croire à 1 efficacité du magnétisme.
Cependant je ne puis autoriser des traitements sans fin et être cause de l’exploitation de quelques malades; il faut que l’on sache que deux mois suffisent pour s’assurer que le magnétisme agit et modifie sourdement l’organisation.
Quelquefois le magnétisme aggrave les symptômes du mal; le magnétisé et le magnétiseur s’effraient; il n’y a cependant rien à craindre , mais il faut savoir bien distinguer ce qui est le produit de vos efforts ou de la marche naturelle d’une maladie dont la gravité se manifeste de plus en plus. Ici il faut nécessairement des connaissances en médecine; heureux sont alors les magnétiseurs qui les possèdent: leur jugement peut être un oracle.
(ha suite au prochain numéro.)
SOMNAMBULISME.
Notre devoir est non-seulement de produire, mais aussi de recueillir tous les faits de magnétisme et de somnambulisme que la presse enregistre dans scs colonnes et porte à la connaissance du public. La sanction qu’ils reçoivent ainsi leur donne une autorité qui corrobore les faits semblables que nous avons déjà publiés et augmente les matériaux que nous accumulons pour l’histoire du magnétisme. Mais que nos lecteurs 11e s’enthousiasment pas à leur lecture: car rien n’est parfait ici-bas, et des erreurs graves sont sorties ou sortiront de la bouche du nouvel oracle. Nous serions heureux de nous tromper sur ce point et voudrions que nos hommages fussent affranchis de toute contrainte; mais malheureusement il 11e peut en être ainsi : trop d’imperfections existent dans la direction des somnambules.
Voici un extrait du journal la Pandore du 1er juin. Nous supprimons de la narration tout ce qui est étranger au fait principal. Cet article a pour titre :
UN DOCUMENT EN l'AVE Lit DU MAGNETISME.
.... Rien n’est brutalement concluant comme un lui!.
iilKiUSSAM.
C'est le colonel Gurvvood, gouverneur de la Tour de Londres, qui parle.
.......Quelques instants après. mon hôte,
par la seule lixilé de son regard, endormait dans un fauteuil 1111 jeune homme pàlc, dont les mouvements nerveux causaient aux spectateurs une pénible sensation. Après une lutte de courte durée, le patient s’endormit, et bientôt au sommeil naturel succéda cette disposition somnamhulique qui permet de parler et d’agir.
Le magnétiseur était M. Marcillet, le magnétisé Alexis Didier.
Je passerai sous silence une partie, d’éearté jouée contre moi et gagnée à carte nommée par Alexis, à qui j’avais moi-môme attaché sur les yeux un triple bandeau. Je ne m’étendrai pas non plus sur l’état tétanique des jambes du magnétisé, devenues roules et insensibles sous l’influence du fluide. J’ai liàte d’arriver à l’exposition de faits qui me sont personnels.
Après divers exercices, je m'assieds à côlé d’Alexis, ma main dans sa main, el nous voilà causant.
« Mon ami, lui dis-je, je suis incrédule, mais je le suis de bonne loi; ainsi ne craignez pas do ma part une opposition systématique.
— Oh ! je le sais bien ! vous avez trop de bon sens pour nier l’évidence et trop de cœur pour ne pas aimer qui vous aime— lit je vous aime bien, moi, tout Anglais que vous ôtes; je vous aime parce que vous avez généreusement sauvé la vie à un Français.»
Singulièrement ému à celte parole, je le prie de continuer....
> Oui, reprend Alexis, il y a longtemps de cela! — Il y a, ajouta-t-il après une pause, il y a trente
ans! L\*iffaire se passe là-bas. dans |p midi, pendant i hiver.... lepnvs est sauvage.... Voici !a nuit, et vos troupes, mmiii's •!'«'•: h«'lîr- se i iul(“iil sons les murs d’iuiepince forte.... Dieu ! quel bruit, quelle mêlée....
— Pauvre homme, vous êtes blessé, dit Alexis en posant sa main sur ma tôle; c'est là que porta le coup.
— Mais votre blessure ne vous arrête pas____Je vous
vois plus loin montant à l’assaut.... sur la brèche.... des cris étouffés parviennent, à vos oreilles : des soldats anglais entourent un François qu’ils veulent tuer. — Vous accourez bravement, vous relevez avec votre bras les armes qui menacent sa tête, et vous commandez qu’on respecte ses jours.... — Oh! ullez! je vous aime bien ! — L’oflicicr vous suit à une tour carrée où plusieurs de ses camarades sont faits prisonniers. — Vous traversez la ville pour aller trouver votre général, à qui, sur votre ordre, le général français rend son épée....
— Et celte épée, qu'est-elle devenue?
— Votre général vous en lit don.... et vous l'avez encore à Londres, suspendue au mur de votre cham-b1’®- — Lu lame seule date d alors ; le fourreau a été changé en 1827.
— Et l’officier à qui je sauvai la vie, existe-t-il encore ?
— Oui, il existe, et depuis longtemps vous faites d’inutiles recherches pour le retrouver. —Mais ayez bon espoir, revenez demain et nous le découvrirons.»
Emu, troublé par ce que je venais d’entendre, je sortis de chez M. Marcillet, la tête en feu, ne sachant plus que penser el que croire, car enfin Alexis avait dit vrai.
Oui, le 1!) janvier 1812. au siège (le Ciudad-Ro-i/iigo, eu Espagne, je lus blessé à lu lèteel à l'endroit même indiqué par Alexis.
Oui, dans la même nnil, j’eus le bonheur de sauver la vie à un ofiicier français.
Oui, je reçus de lord Wellington l’épée du général Barrié, après l'assaut delà place.
Oui, le fourreau de celte épée a élé changé vers l’époque fixée par Alexis.
Oui, je faisais des recherches pour retrouver l’officier français sauvé par mes soins, attendu que le général Napier (dans son Histoire dp la Guerre de la péninsule) me refuse l'honneur d’avoir conduit l'assaut de Ciudud-llo/lrigo, et désigne le major Machis comme ayant droit à l’épée qui m’a élé donnée par lord Wellington. —Jugez donc de quelle importance il était pour moi de retrouver un témoin qui put certifier la vérité de faits déjà vieux de trente ans! — Malheureusement, je n'avais plus sur cet officier la moindre notion qui m’aidàt dans mes recherches.
Le lendemain, je revins près d’Alexis, que je pressai de questions touchant l’officier français.
« J'avoue, me répond le somnambule, que j’éprouve quelque embarras à le suivre dans toutes les phases de sa carrière militaire : il se trouve mêlé dans mon esprit à d’autres officiers qui assistaient comme lui au siège dont j’ai parlé.... — Cherchons bien, cependant.... Oui, je vois notre homme, environ huit ans plus tard, à Paris, rue.... Saint-Antoine, pendant
la nuit____—Voilà qu'on lui remet un avis très-pressé,
et, avec la compagnie qu'il commande comme capitaine, il se rend dans la rue Richelieu, près la Biblio-
thèque royale, où jfî vois la loulu ameutée.....\h!
c’est qu’il vient «le so passer un événement sinistre....
— Que s’est-il donc passé ?
— Un crime, 1111 assassinai commis sur un illustre personnage....
— Voyons, Alexis, suivez le capitaine jusqu’à nos jours, et dites-moi où je le dois chercher....
— C’est en vain que je le poursuis....; ma vue ne peut l’atteindre....; mais écoutez : adressez-vous au colonel du de ligne, en garnison à Valenciennes. Pourtant, vous pouvez 11e pas vous presser; car, si vous lui écriviez aujourd’hui, il 11c recevrait pas immédiatement votre lettre : il est à Mauheuge. »
Curieux de vérifier ces faits, je consulte l’Annuaire et j'adresse ma lettre à M. Ilusson, colonel du 42' de ligne, en garnison à Valenciennes.
Cinq jours après, je reçois du colonel Ilusson une réponse dans laquelle il s’excuse de son retard, occasionna pur une tournée d’inspection. — Ce n’est pas lui qui se trouvait au siège de Ciudad-Rodrigo, mais son frère, dont il indique l’adresse à Paris.
J’écrivis donc immédiatement à ce frère, et voici le résumé de sa réponse :
Après avoir constaté sa présence au siège de Ciudad-Rodrigo, M. Ilusson continue ainsi : « Il me fut rapporté et j'ai ouï dire par plusieurs officiers anglais, pendant mon séjour au quartier général, qu’un officier de la compagnie des voltigeurs, chargé de ia défense de la petite brèche, fut assailli et près dôtre accablé par des soldats; alors il lit le cri de detresse maçonnique, un officier le sauva el eut pour lui des attentions suivies; il le recommanda à ses camarades
sur la roule que la garnison suivit, je crois, même jusqu’à Lisbonne. — L'est sans doute vous, colonel, qui, au milieu d’une action vive, avez sauvé la vie à cet officier, dont je n’ai jamais su le nom.
Paris, 17janvier 1M3.
.. Sivllt! tllSSO.N, coiomi (l’ai-lillci ic ( n retraite. »
Le même jour, je communiquai cette lettre à Alexis.
«Courage! me dit-il, nous sommes sur la bonne voie. A votre retour à Londres, consultez les documents relatifs aux mois de janvier et février 1812, el je réponds du succès. »
Un mois plus tard, j etais dans la Tour, à Londres, furetant dans les papiers de lord Wellington tous les dossiers relatifs aux affaires d’Espagne de ladite époque....; tout à coup mes yeux se portent sur un endossement ainsi conçu :
Ho mi mi, 34" léger.
Ce nom me frappe comme un trait de lumière, et, me sentant saisi d’une conviction inexplicable, j ouvre la lettre en m’écriant : plus de doute, c est lui !
Par cette lettre, signée Bonfilli, un officier Irançais faisait à lord Wellington la demande d’envoyer ses lettres aux avant-postes....
11 n’y avait là rien qui servit à me fixer; néanmoins, poussé par une voix intérieure, j’écris au colonel d’Artois, secrétaire au comité des tonifications à Paris, en le priant de faire des recherches dans les bureaux de la guerre.
I.e colonel d’Artois me répond qu'il n’existe per-
sonne du nom do Honlilh dans les cadres do l'armée; mais il m’envoie un certificat constatant que le commandant llonlilh, (jiii a servi dans le 34' léger, reçoit sa retraite à Villeneuve-d’Agen, et demeure à Villa— réal (Lot-et-Garonne).
Le 23 avril 1844, j’adresse au commandant Hon-lilli une lettre dans laquelle je Ini fais part de mes recherches el de mes espérances, et le 7 mai I «S-44 je reçois la réponse suivante :
Villaréal (Lul-tl-Gamniio), rr mai 184-1.
«Monsieur le colonel Gimvood,
«J’ai reçu de vous une lettre datée du 23 avril, dans laquelle j’ai lu avec le plus vif intérêt les détails sur la prise de Ciudad-Rodrigo.
« D’après les citations que vous me fuites, Monsieur le colonel, il n’y a plus de doute, je suis l'officier français à qui vous avez si noblement sauvé la vie, el que depuis si longtemps vous cherchez____
« Je me rappelle que, lorsque vous arrivâtes à mon secours, j’étais couché par terre, entouré de six ou huit soldats anglais dont les uns me tenaient la baïonnette sur le corps, tandis que les autres m’arrachaient les babils ou me prenaient l’argent que j’avais sur moi. Vous accouru tes, Monsieur le colonel, et, faisant retirer ces soldais, vous me prîtes sous voire protection. Nous nous rendîmes à la Tour carrée, près la porte d’Almeida, où M. le général Harrié se rendit à vous en vous disant : Respoctez mes soldats ! —l.e général vous offrit même sa montre, mais vous lui répondîtes : Conservez votre montre, géné-
rai : l'honneur m’a comliiit ici, ‘l non If* pillage. — Il voulut aussi vous remettre son épée, el vous la refusâtes en disant : Il faut nie suivre; vous la remettrez à M. le général duc de Wellington.
« J’ajouterai, Monsieur le colonel, que, lorsqu 011 nous conduisait prisonniers, en nous dirigeant vers le Portugal, vous me fîtes entrer dans une maison d’un petil village, Jll Coclon, où l’on 111e donna une lasse de rhum et un pain de munition pour la route. Enfin, vous eûtes la bonté de m’accompagner jusqu’à la colonne des prisonniers, qui était en avant, et sans vous, Monsieur le colonel, les Espagnols 111 auraient infailliblement égorgé avant que j’eusse pu rejoindre mes camarades d’infortune.
« Je nxi suis souvent reproché, Monsieur le colonel, de n’avoir pas eu soin de demander le nom de mon bienfaiteur; sans cela, croyez-le bien, j’aurais pris l'avance pour vous écrire et vous témoigner ma vive et éternelle reconnaissance. Enfin, je fais des vœux 'pour votre bonheur, et vous prie de me sacrifier un moment de vos loisirs pour m’écrire.
0 Celui qui vous doit la vie,
« Signé I5onfii.ii, chef (le bataillon en retraite, officier de la I.éj'ion il’Honneiir. »
Enfin ! je recevais le prix de mes démarches! La lettre de ce brave commandant me rendit si heureux que je me promis bien de l’aller voir à mon premier vovage en France, et vous me voyez, mon jeune ami, revenant de Villaréal, où j’ai passé quelques jours que je compte au nombre de mes plus fortunés. — Oh! que n’éliez-vous présent à notre mutuelle recon-
naissance! vous auriez pris une vive |mrl à la joie (le toute celle famille, donl j'emporte les bénédictions! — Avec quels charmes de souvenir M. Bonfilh ma entretenu des événements de sa vie, entièrement conformes, du resle, à la narralion d’Alexis.... — C’est ainsi, par exemple, que le 13 février 1820, M. Bon-lilh, eapilaine au •/i7" de ligne, en garnison à Paris, faisait, le soir, un service de ronde dans la rue Sainl-Anloine, lorsqu’on vint lui apprendre l’assassinat du duc de Bcrry. Aussitôt il se rendit avec sa troupe dans la rue Richelieu, cl alla passer la nuit au poste de la Bibliothèque royale...........
Colonel, je resle confondu.... — I.e magnétisme joue un si grand rôle dans le récit que je viens d’entendre que vous m’avez presque converti : aussi, à mon arrivée à Paris, ma première visite sera-t-elle réservée à M. Marcülct.
.Mon aimable compagnon s'arrêta à Orléans, où il devait séjourner, et j’arrivai seul à Paris, vers sept heures du malin.
A deux heures de l’après-midi, le même jour, je frappai chez M. Marcillel, où, par un hasard heureux, Alexis endormi donnait une séance—
Le maître du logis me fit un accueil plein de bienveillance el consentit à me mettre en rapport avec le somnambule.
Alors, m’adressant à Alexis :
« Mon cher Monsieur, lui dis-je, pourriez-vous deviner qui je suis?____ »
Voici ses premières paroles :
« Vous ôtes un ami du colonel Curwood! »
l.-S. de Cosse.
UN INCRÉDULE CONVERTI.
Telle est la signature d’un arliele publié dans /• Courrier- français des premiers jours de mai et reproduit dans différents journaux, notamment le ( our-rier de Lyon el la Tribune lyonnaise, où on peut lire en entier cet article, dont voici les principaux traits :
Nous avions été invité à celle séance, qui eut lieu chez M "' 1)...., boulevard des Italiens. Une somnambule nommée Marie, après avoir dit ce que nous savons tous, c’est que le rapport s’établit infiniment mieux avec un interlocuteur bienveillan':, c’esl-à-dirc passif; car l’hostilité agissant sur les magnétisés, ils eh sont quelquefois si impressionnés qu’ils perdent leur lucidité, qui revient quand l’hostilité cesse, c’est-à-dire quand le consultant redevient lui-même passif. C’est par cette action qu’on explique comment tant d’expériences publiques manquent.
On a constaté dans cette séance un cas de vue ri dislance. La lucide a pu lire le titre d’un feuilleton qui s’imprimait au moment même chez M. B...., imprimeur, qui s’était mis en rapport avec elle.
C’esl un cas de plus à enregistrer dans les annales du magnétisme.
II. Mauti.n.
ÉTUI)IÜS IMIÉl’ARATOIItËS
DU
SOMNAMBULISME MAGNÉTIQUE.
§ I. — IVRESSE.
Pour nous conformer nu plan que nous nous sommes tracé et sans lequel on no pourrait bien juger de la différence qui existe entre le phénomènes physiques et physiologiques produits par les différents agents de la nature et le magnétisme animal, nous donnons un exemple rie l’action que le vin et tous les alcooliques exercent sur le cerveau, et, par suite, sur l'intelligence.
Le sujet de celle observation écrivait à un rie ses amis :
« Je l'avoue franchement que jo. bois riu vin, largement et souvent. La quantité en est mauvaise et non pas la qualité. Pour en avoir pris plus que rie raison, le diable, je crois, s’apparut à moi la semaine passée durant la nuit. J’avais bu comme un Allemand pendant plusieurs heures rie suite; cependant je ne me trouvais nullement en désordre, et qui que ce soit ne s'aperçut que je lisse rien contre la civilité. J’étais seulement un peu plus gai qu’à l’ordinaire.
« L’cxtrémo chaleur de la saison m’obligea, aussi bien que ceux de ma compagnie, de nous régaler le plus fraiehemenl qu’il nous lut possible d’imaginer. Nous bûmes d’une liqueur composée de vin, d’eau, de jus de citron, et de tous les autres ingrédients qui pouvaient rendre celle boisson rafraîchissante, délicieuse au palais el salutaire au cerveau, au cœur cl à l’estomac.
« Je ne te tiendrai point dans l'impatience par un détail plus long et plus circonstancié. J’ai seulement jugé à propos de te dire de quelle manière je bus, pour le mettre en état de mieux juger ce qui m’arriva la nuit du vendredi au samedi, après avoir cessé de boire le vendredi. J’allai me coucher dans une profonde tristesse-, je dormis jusqu’à minuit. Ensuite, m’étant éveillé, je fus surpris de voir un vieillard qui avait fort de mon air. Il me parut fort studieux et. fort inquiet, assis sur une chaise, et appuyé sur la table, habillé justement comme moi, avec une barbe comme la mienne, et fait, en un mot, de manière qu’on pouvait dire que c’était mon véritable portrait. Je rêvai environ vingt minutes sur cet objet surprenant qui occupait tous mes yeux. J’appelai à mon secours tout mon peu de philosophie pour considérer la nature des fantômes. Je raisonnai en moi-même, je rappelai toute ma raison et tous mes sens; je m’assis sur mon lit. J’avançai la tôle autant qu’il me fui possible sans tomber du lit; et plus je me levais, plus clairement voyais-je celle ligure si semblable à la mienne, à la clarté d’une lampe que je laissai allumée dans ma chambre toute la nuit.
« Comme je crois difficilement les contes qui se font
ordinairement des apparitions d’esprits et de spectres, etc., je croyais encore ou que je dormais, ou «pic, du moins, si je ne dormais pas, mon imagination riait prévenue et se faisait illusion. Pour donc me mieux éclairer, je sautai hors du lit. Mes pieds n’eurent pas plus tôt touché le plancher de la chambre ipie je fus saisi d’horreur, et que je commençai à trembler d'une vision plus apparente. Prenant néanmoins courage, et me résignant au bon plaisir de Dieu, j'avançai ot m’approchai si près du fantôme qu’il se trouva à portée de ma main, que j’étendis pour le toucher, croyant par là me détromper. Mais il n’v a point de langue, point de plume qui puisse jamais exprimer l'horrible métamorphose que je vis. Au lieu d’un visage que je venais de voir, je ne vis plus qu’un lion d’un aspect épouvantable, qui grinçait des dents el qui jetait par les yeux de véritables étincelles de feu, sans parler des affreux mouvements de sa tête, non plus que des autres agitations de cet animal lorsqu’il est en fureur. Sur cela je pris honnêtement congé, tournai le dos et revins à mon lit.
« Je ne suis point peureux île mon naturel, et l’imagination d’un esprit, d’un spectre, ou de ce qu’il vous plaira de nommer, ne me fait point trembler, persuadé que je suis que c’est un pur effet de l’imagination. Mais je me retirai par complaisance pour mon imagination que je sentais vouloir entrer en goguette. Car je puis dire que j’étais alors en état de peindre sur les murailles toutes les figures qui se présentaient à mon esprit échauffé.
« Dans ces occasions-là les yeux tiennent lieu de pinceaux. Les nerfs optiques ainsi fermentés, un
homme peindrait les saints ou les diables, et lout oc (|iii peut so nommer, à la réserve de h: source éternelle do loules choses, etc.
S H. — CAUCIIIIIWAH.
Nous ne vr iur.s pas ici tracer le tableau do Imites les variétés du . auchemur, mais seulement laire passer sous les yeux du lecteur quelques faits ayant rapport avec l'objet de nos études, le .somnambulisme. Nous avons ili! quelque part : Tout donneur est en somnambulisme commencé.
Si cela est vrai, on s’est trompé sur les causes des faits singuliers que nous allons citer; ils seront, au reste, soumis à un examen. Mais disons de suite cependant qu’il n’y a pas toujours hallucination dans le cauchemar, et qu’il est quelquefois dù, non à des causes physiques, mais animiques. Il atteint tous les âges, tous les individus, et peut se présenter sous toutes les formes. Quelques personnes sujettes à cette disposition ont la conscience de ce qui se passe en elles ; elles raisonnent comme si elles étaient éveillées, mais ne peuvent se soustraire à ce qui les agite et les maîtrise qu’en s’éveillant. Quelques-unes de ces situations sont quelquefois si pénibles que le souvenir en reste toute la vie.
La nature n’a point de bouche, elle ne peut s’exprimer que par des images; les rêves ont toujours une signification, mais les hommes ne comprennent point. Ilippocrate avait dit : Celui i/ui comprend les songes possède les clefs de la sagesse.
« Le 1" bataillon du régiment de Latour-d’Auver-gne, dont j’étais chirurgien-major, dit le docteur l’a-
mil, se trouvant «mi garnison à Palmi, on Calabre, reçut l’ordre do partir à minuit de cette résidence pour se rendre 011 Imite diligence à Tropea, afin de s’opposer au débarquement d’une llollillc ennemie qui menaçail ces parages. C’était au mois de juin; lu troupe avait à parcourir près de quarante milles du pays. Elle partit à minuit, et 11c parvint à sa destination que vers sept heures du soir, ne s'étant reposée que peu de temps et ayant souffert considérablement de l’ardeur du soleil. Le soldat trouva en arrivant la soupe faite et son logement préparé.
« Comme le bataillon était venu du point le plus éloigné et était arrivé le dernier, on lui assigna la plus mauvaise caserne, et huit cents hommes furent placés dans un local qui, dans les temps ordinaires, n’en aurait logé que la moitié. Ils lurent entassés par terre, sur de la paille, sans couvertures, et par conséquent ne purent se déshabiller. C’était une vieille abbaye abandonnée. Les habitants nous prévinrent que le bataillon ne pourrait rester dans ce logement, parce que toutes les nuits il revenait des esprits, et que déjà d’autres régiments on avaient lait le malheureux essai. Nous ne finies que rire de leur crédulité; mais quelle fut notre surprise d'entendre à minuit dos cris épouvantables retentir en même temps dans tous les coins de la caserne, et de voir tous les soldats se précipiter dehors et fuir épouvantés ! Je les interrogeai sur lo sujet de leur terreur, el tous me répondirent que le diable habitait dans 1 abbaye; qu’ils l’avaient vu entrer sous la forme d’un très-gros chien à longs poils noirs qui s’était élancé sur eux, leur avait passé sur la poitrine avec la rapidité de 1 éclair,
et avait disparu par li* côté opposé à celui par lequel il s’était introduit.
« Nous nous moquâmes île leur terreur panique, et nous cherchâmes à leur j?rouvor que ce phénomène dépendait d’une cause toute simple et toute naturelle et n’était qu’un effet de leur imagination trompée. Nous ne pûmes ni les persuader ni les faire rentrer dans leur caserne; ils passèrent le reste i!e la nuit dispersés sur le bord tic la mer et dans tous les coins de la ville. Le lendemain j'interrogeai de nouveau les sous-officiers el les pins vieux soldats. Ils m’assurèrent qu’ils étaient inaccessibles à toute espèce de crainte, qu’ils ne croyaient ni aux esprits ni aux revenants, et me parurent persuadés que la scène de la easerne n’élait pas un effet de l’imagination, mais bien la réalité. Suivant eux, ils n’étaient pas encore endormis lorsque le chien s’était introduit; ils l’avaient bien vu et avaient manqué en être étouffés au moment où il leur avait sauté sur la poitrine.
« Nous séjournâmes tout le jour à Tropea, et, la ville étant pleine de troupe, nous lûmes forcés de conserverie même logement; mais nous ne pûmes y faire coucher les soldats qu’en leur promettant de passer la nuit avec eux. Je m’y rendis en effet à onze heures el demie du soir avec le chef de bataillon; les officiers s’étaient, par curiosité, dispersés dans chaque chambrée. Nous ne pensions guère voir se renouveler la scène de la veille. Les soldats, rassurés par la présence de leurs officiers, qui veillaient, s’étaient livrés au sommeil, lorsque vers une heure du matin, et dans toutes les chambres à la fois, les mêmes cris de la veille se renouvelèrent, et les hommes qui avaient
vu le môme chien leur sauter sur la poitrine, craignant d’en être étouffés, sortirent de la caserne pour n’y plus rentrer. Nous étions debout, bien éveillés et aux aguets pour observer ce qui arriverait, et, comme il est facile de le supposer, nous ne vîmes rien parai (re.
« La flottille ennemie ayant repris le large, nous retournâmes le lendemain à Palmi. Nous avons, depuis cet événement, parcouru le royaume de Naples dans tous les sens et dans toutes les saisons, nos soldats ont souvent été entassés de la môme manière, et jamais ce phénomène ne s’est reproduit (I).
OPÉRATIONS CHIRURGICALES
PENDANT I.’ÊTAT MAGNÉTIQUE.
Mémoire sur une amputation de la cuisse, lu ù la Société royale de Médecine et de Chirurgie de Londres le 22 nov. 18/|2 (2).
I iicver suid it nas true possible. 1 only said iu
M. G. Lisais.
Ce Mémoire est divisé en deux parties. La première
(4) Grand Dictionnaire des sciences médicales, I. XXXIV, arl. Incub.', observation du docteur Parent.
(2) Account ofu case of succcsslul amputation of tbetliigh during tlic mc-merie slate, witlioul tlie knowledge oflhu patient. By VV. Topliam, Esq. and W. S. Ward, E«|. Loudon, II. Baillierc, 21», Regent-Street. Paris, J. II. Baillièie, 17, rue de l’Ecole de-Médicine.
appartient à M. Topliam, le magnétiseur, el l'autre à M. Ward, l'opérateur.
Le patient est un honune d'un bon tempérament, Agé de quarante-deux ans, agriculteur, portant au genou une tumeur blanche dans un état fort avancé. L’opération fut faite à son insu et sans qu’il manifestât. le plus léger signe de souffrance ou de sensibilité.
M. Topliam est avocat; il déclare d’abord à la Société qu’étranger aux connaissances médicales il ne veut rien préjuger sur la cause des phénomènes mes-mériques; il ne s’attache qu'aux faits, qui parlent beaucoup plus haut que les raisonnements, ce qui justifie l’épigraphe : «Je ne dis pas que le fait est possible, j’affirme seulement qu’il est vrai. »
M. Topliam rend ensuite compte des différentes circonstances remarquables de la magnétisation depuis le 9 septembre jusqu’au 1" octobre, jour de I o-pération. Le calme vint bientôt succéder à l’agitation des nuits; l’appétit perdu revient, la susceptibilité magnétique augmente, une minute suffit bientôt pour produire le sommeil ; enfin le patient ne sent pas du sel volatil (carbonate d’ammoniaque) qu’on lui met sous le nez. Les piqûres d’épingles ne sont pas senties. Plus de doute, l’opération pendant le coma magnétique est décidée.
Laissons le chirurgien terminer cette relation; il parle à la Société.
o Les circonstances sous lesquelles cette opération a été faite sont si nouvelles par leur nature qu’elles pourront fournir de puissants éléments de discussion, si les membres de la profession à laquelle j’ai l’hon-
neur d'adresser ces observations veulent examiner sans préjugé et délibérer impartialement sur ee sujet, qui (si l’expérience ultérieure confirme l«s espérances que l’heureux résultat de cette tentative fait concevoir) offre au chirurgien, appelé par son art et ses éludes à diminuer les souffrances de ses semblables, un aussi puissant moyen d’arriver à cette fin.
« Le cas sur lequel j’appelle votre attention était une ulcération des cartilages do l’articulation fémoro-tibiale, d’une grande étendue, et qui durait depuis quatre uns et demi. Cette maladie est la suite d’une inflammation de la membrane synoviale , négligée d’abord, et ensuite traitée pur un charlatan jusqu'à l’époque où le malade entra au District Hospilal of iVellow (near Ollcrton, Nottinghamshire),
« Le plus léger mouvement de l’articulation était accompagné des douleurs les plus aiguës; les nuils étaient presque sans sommeil par suite de l’intensité des douleurs. Le pouls était faible et rapide, la langue chargée, l’appétit nul el le teint étique.
« Je lui fis appliquer un appareil convenable, ordonnai des cataplasmes, des fomentations, etc., puis portant mon attention sur sa santé générale, je lui administrai des opiacés, du quinine, du vin, etc., pour le mettre en état de supporter l’opération, que je jugeais inévitable. Mais il n’éprouva de ce traitement aucun bien apparent C’est alors qu’apprenant l’arrivée rteM. Topham dans les environs, je résolus de le prier d’essayer sur cet homme les effets du mesmérisme, dans le but non-seulement de le calmer, mais aussi de l’amener à un tel degré d’insensibilité qu’il put supporter l’opération sans 1« savoir, dési-
reux que j’étais de voir accomplir ce fait que je considère comme le summum ùomun du magnétisme.
= Je m'absentai alors, el quoique je reçusse journellement un rapport sur son état, ù mon retour je lus aussi étonné qu’heureux de le trouver dans une condition de santé infiniment meilleure; à tel point que, si je n’eusse pas connu l’histoire de cette maladie, beaucoup de doute eût dû naître en mon esprit sur l’opportunité de l’amputation immédiate.
« Il y avait, il-est vrai, toujours les mêmes douleurs que faisait naître le plus léger mouvement de 1 articulation, et malgré cette amélioration de^*«a santé en général, je jugeai que le mal avait fait trop de ravages pour espérer une guérison, et je me déterminai tout à fait à faire l’opération pendant que le patient serait sous l’influence magnétique, pourvu que je fusse assuré qu’il ne pouvait lui arriver aucun mal, et que je le visse auparavant dans cet état.
« M. Topliam le magnétisa, et je fus surpris de son impressionnabilité. Quand il fut endormi (si je puis employer ce terme), sa respiration était régulière, son pouls calme donnait environ quatre-vingts pulsations. Son réveil fut lent, graduel et sans souffrance. Je trouvai qu’il était insensible à la piqûre d’une épingle. Cette circonstance ne laissant chez moi aucune place ni à l’hésitation ni ù la peur, le patient d’ailleurs non-seulement consentant, mais même me pressant, je fixai le 1" octobre pour l’opérer. » Suivent les détails techniques de l’opération ; puis M. Ward continuant son récit ajoute :
. En outre de ce qui a déjà été dit par M. Topliam, j’ai besoin d’ajouter qu’en raison de la position défa-
vorable de la jambe, ¥ opération dura plus longtemps (/ne d’habitude et t/n il n’y eut de contractions musculaires ni sur le membre amputé ni sur les autres. Je (lois aussi noter qu’era pinçant deux ou trois fois le bout divisé du nerf sciatir/uc, je n'ai pu déterminer la moindre douleur, arracher le moindre, gémissement.
« La levée du premier appareil eut aussi lieu dans l’état magnétique, et le malade est maintenant (18 novembre) parfaitement bien, et il n'a pas eu un seul mauvais symptôme depuis l’opération, pas même de ces irritation^ nerveuses qu’on observe si fréquemment chez les malades qui ont sulii des opérations douloureuse* et dont l’anxiété a vivement agi sur leur esprit.
« Je ne veux pas occuper plus longtemps les précieux moments de la société, n’ayant pas l’intention do me poser comme le champion du magnétisme en général, tâche pour laquelle je me sens totalement incompétent. Longtemps j’ai été sceptique et longtemps j’ai demandé cui bono, lorsqu’il y a quelques mois je dus à l’obligeance du docteur Elliotson de pouvoir examiner par moi-même le pouvoir de cet agent qui produit le coma, rend les muscles rigides et jusqu’à un certain point l’insensibilité à la douleur. Je vis, je fus convaincu que mon opposition était mal fondée, et le premier résultat de cette conviction est l’heureux essai dont je vous entretiens, et qui, par le peu de bien qui en résulte, répond suffisamment aux incrédules : il y aura maintenant, même parmi les plus entêtés, peu d’objecteurs qui hasarderont de nier la production de ce coma.
« Et qu’on ne croie pas, comme on le suppose fré-
quemment, qu’il ne soit applicable qu'à de jeunes femmelettes d’un système nerveux très-développé. Le bienfait appartient à tous, ainsi que j’en donne l’exemple sur ce laboureur de quarante-deux ans.
« Quoique la simple expérience que nous venons do détailler à la société soit à peine suffisante pour décider complètement la question, n’est-elle pas d’une nature assez attrayante pour en demander la répé-tion immédiate à ceux de mes confrères à qui les splendides institutions de la métropole offrent de si fréquentes occasions?
« W. esquare Wart. »
G A L VANO-MAGNÉT i SM E.
INSENSIBILITE l)’UN MAGNÉTISÉ A |/ACTION I)E LA l’ILE VOTAÏyUK.
Nous avons promis d’emprunter aux diverses brandies des sciences humaines tous les matériaux propres à éclairer la marche de ceux qui cherchent les lois du magnétisme. Voici une première observation empruntée aux sciences physiques. Nous la ferons suivre de nouvelles non moins intéressantes.
Celte expérience, quoique d’une date déjà ancienne, est inédite; elle eut lieu en avril 1841, dans le cabinet de physique de l’académie de Caen, sur un jeune somnambule magnétisé par M. Lafontaine-
La pile, d’invention allemande, était composée do douze plaques d’environ 33 de diamètre; six de platine plongeaient dans de l’acide azotique, les six autres de /.inc dans de l’acide sulfurique étendu d’eau. Chaque plaque communiquait par un crochet à un réservoir de mercure, comme dans l’appareil de Daniel. Ainsi disposée, cette pile avait une puissance électro-dynamique considérable.
Le magnétisé, les mains mouillées, prit les deux conducteurs, un dans chaque main; alors le professeur de chimie, pharmacien distingué de la ville, fit agir la pile, le magnétisé ri éprouva pas la moindre secousse.
Alors lo docteur Lebidois, non convaincu de celle expérience, croyant que l’action n’était pas assez forte, voulut essayer sur lui-môuie. lin conséquence, il prit l’un des conducteurs, cl fut, au moyen d'une chaîne, mis en communication avec le magnétisé qui tenait toujours l’aulre pôle. On fit agir la machine, et le docleur fut littéralement renversé, tandis que le magnétisé, resté debout, la chaîne d’une main et le pôle de l’autre, n'éprouva aucun signe appréciable de sensation ni de secousse.
Cette expérience a été répétée plusieurs fois en présence de juges éclairés; notamment M. le professeur de physique et les docleurs Leclere, Lecœur. Valel, Lebidois, Terrier et Raisin, des magistrats, des journalistes, des ecclésiastiques, etc.
Tous ces détails nous ont été fournis par M. Lafon-taine, qui en supporte la responsabilité comme il en a recueilli l’honneur.
Voilà assurément un fait d’une haute importance
cl que nous ne saurions trop engager de répéter; car, si l’expérience le confirme, l’électricité circulerait au travers ou à la surface du corps humain magnétisé absolument comme elle le fait à l'égard des métaux, sans y déterminer les phénomènes physiologiques ordinaires.
M. le baron Du Potet a été témoin à Londres, chez le docteur Eiliotson, d’une expérience à peu près pareille. Le magnétisé reçut la décharge d'une forte machine électrique sans en rien éprouver. Mais néanmoins ces deux cas doivent être regardés comme isolés, puisque l’un est le produit de l’électricité statique, et l’autre de l’électricité dynamique.
Hébert (de Camay).
PRESSENTIMENTS.
a Le vrai n’esl pas toujours vraisemblable. ■
N’ayant jamais éprouvé de pressentiments, tout en respectant le caractère et la bonne foi des personnes qui m’avaient fait part de ces avertissements mystérieux qui leur étaient arrivés, j’étais toujours resté sceptique, dans la croyance où j’étais que c’était un pur effet de leur imagination.
Ceux qui liront ce récit ont le droit de se conduire à mon égard comme je l'ai fait à l’égard des autres; je ne puis m’en fâcher. Je ne veux point non plus décider s’il est des messagers chargés de nous avertir
île l’hcur ou du malheur de ceux que nous affectionnons; si la pensée ou l’àme de ceux qui nous sont sympathiques se détache du corps pour venir nous instruire, ou bien si Dieu nous accorde momentanément une seconde vue pour voir ceux qui nous sont chers. Quoi qu'il en soit, voici ce qui m'est arrivé il y a trois semaines.
Un de mes amis, habitant Vierzon, étuit depuis quelque temps malade; n’en recevant pas de nouvelles, j’espérais qu’il allait mieux. Mais un jour je fus pris d’une inquiétude très-grande et inexplicable. Je le croyaisen voie de guérison, et pourtant j’allai chez différentes personnes de ses connaissances pour avoir de ses nouvelles; elles n’en avaient pas.
Avant beaucoup réfléchi sur la singularité de l’im-prçssion que j’éprouvais, je ne m’endormis qu’à une heure fort avancée. Pendant mon sommeil, je rêvais qu’étant allé chez mon ami je frappai longtemps et fus très-surpris et effrayé de voir en sa place deux étrangers, qui me dirent qu’il n’habitait plus là. « Ah! mon Dieu, serait-il mort? » me disais-je, lorsque je fus tiré de ce rêve par un violent coup de sonnette. C’était une lettre qu’on m’apportait, et dans laquelle on m’annonçait la mort de mon ami. Or le moment de son enterrement correspond exactement à celui où, très-inquiet de son état, j’allais de maison en maison demander de ses nouvelles.
A.-T. de Saint-Marceau.
AUTRE CAS.
Un négociant de Manicrs, M. J....., dont la loyauté
est bien connue, nous rapporte qifétant un jour à Rouen dans un hôtel, rue des bons-Enfants, un voyageur des environs de Rayonne, père de famille, racontai! qu’il avait fait la nuit un rêve bien pénible; qu’il avait rêvé que son enfant était mort et qu'il voyait les cierges allumés autour du cercueil do son fils. Le surlendemain le malheureux père recevait la nouvelle fatale. Tout s’était passé comme il l’avait rêvé, et à la même heure.
AUTRE CAS.
Plusieurs journaux ont rapporté le fait suivant, qui a beaucoup étonné dans le pays.
« Un jeune homme de Saint-Omcr, faisant partie du recrutement de 18 /5, avait hautement prédit qu’il amènerait le numéro 25, et, afin de donner plus d’éclat à sa prédiction, il avait écrit ces chiffres sur la porte de la maison paternelle. Le jour du tirage arrivé, le jeune conscrit tira de l’urne le numéio 25. »
REVUE MENSUELLE.
Nous recevons du «locleur Cruxen, médecin lioméopaihe espagnol, venu en France pour éluilicr à fond la question du magnétisme, el qui vient de doter son pays d'un livre sur celle science, la lettre suivante :
Monsif.uk,
« Dans le sixième numéro de voire Journal, page 265, Voyaye à Saint-Pétersbourg, M. le baron Du Potel s’exprime ainsi : « C’est donc en connaissance de cause si aujourd’hui « je dirige mes pas vers le Nord au lieu de marcher vers le « Midi. Rome me ferait payer cher l’envie qu’il me prendrait « d'aller dans la sainte cité. L’Kspagne, le Portugal, tous ces « pays où 011 a perfectionné tellement la religion du Christ « qu'elle serait méconnaissable pour lui s’il revenait visiter « la terre, ne souffriraient point un homme qui guérirait les « malades en imposant les mains; il serait lapidé! »
u Je viens, Monsieur, en ce qui louche mon pays, protes-ler, comme magnétiseur espagnol, contre une erreur de M. Du Potel, que je suppose involontaire. On pourrait croire, d’après lui, que non-seulement le magnétisme est inconnu en Espagne, mais qu’il y est défendu. C’esl tout le contraire.
« l.e magnétisme ne compie pas encore à Madrid, fi Barcelone, à Valence, à Porlo-Rico, des hommes aussi expérimentés que M. Du Poiei ; mais il n’en est pas moins vrai que ses |Kii'lisans sont déjà très-nombreux, et qu’ils pratiquent publiquement sous les yeux de l’autorité, qui ne s’est jamais op-
posée à l’usage «l’une mélluule présentée comme un nouveau moyen de combattre les maladies.
» Il esi vrai que Ferdinand VII, influencé par des hommes qui, en Espagne comme en Franco, comme partout ailleurs, ont agi un tout temps dans le sens d'empécherel l'instruction el les progrès des sciences, lança un décret contre les magnétiseurs; mais je ferai observer à 11. Du Potel que, maigre les défauts sociaux qui nous restent encore à corriger, l'Espagne d’aujourd'hui ne ressemble pas plus à l’Espagne de Ferdinand VII que la France de Luuis-Philippe ne ressemble à la France delà Restauration.
« M. Du Potel peut aller en Espagne quand il le jugera convenable; il y trouvera des admirateurs de la science et de zélés praticiens. Quelque particulier pourra se déclarer ennemi de ses idées, mais, quant au gouvernement, il n’encourage ni ne défend. Il n'y a rien de moins ni dè plus qu’en France.
« Agréez, Monsieur, mes civilités sincères.
• C. Cruxen. »
Paris, le 15 juillet 1815.
Un négociant d’une pelile ville de la Saillie, connaissant le magnétisme par ses merveilleux effets ihérapeuliques, essaya d'abord sur quelques malades l'action de cet agent. Le succès qu’il obtint lui amena bieniôl de nouveaux infortunés, venant aussi lui demander le soulagement ou la guérison de leurs maux ; el le bruit s’en répandant, on vint bientôt des environs. C’est alors que, se voyant dans la cruelle alternative de refuser de rendre la santé à des malheureux souvent abandonnés des médecins, ou bien de négliger ses affaires personnelles, il eut l’idée de donner de l’eau magnétisée aux moins malades et à ceux qui étaient en voie de guérison, se réser-
vaut «lu magnétiser seulement les plus malades. Le bien qui résulta de ce moyen fut certainement moins prompt (pie si Ions eussent «'ilé magnétisés-, mais eulin, des six cents personnes venues implorer les bienfaits de la découverte de Mesmer, un grand nombre a guéri, et il esl curieux de voir le malin Inus ces invalides venir avec leurs cruches chercher de l’eau magnétisée.
Il esl à remarquer que sur tous ces malades aucun n’est devenu somnambule, el qu’aucun médicament n’a élé administré ^ «lu magnétisme direct ou par l’intermédiaire de 1 eau, voilà loui. Quel est donc, dans toute la matière médicale, un agent capable de produire de tels résultats?
N'ayant vu qu’en passant ce traitement magnétique, il nous a été impossible de prendre des noies assez, étendues sur chaque ex-malade; mais nous nous proposons d’aller exprès recueillir de la bouche de ces braves gens les particularités «le leurs maladies el de leur traitement. Nous publierons le résultat de notre enquête, et nous espérons que l'exemple de ce philanthrope trouvera des imitateurs.
Un des grands corps savants du monde, le Congrès scientifique , de France, qui se réunira celle année à Reims, le Ier septembre, vient de mettre le magnétisme dans son ordre du jour. La question est celle-ci : De l'état du Magnétisme en France. C est là une belle occasion pour les magnétiseurs. Nous espérons qu’ils en sentiront l'importance et qu'ils répondront à l appel du Congrès. Nous tiendrons, au reste, nos lecteurs au courant «le celte question importante.
Après le Voyage à Saint-Pétersbourg, dont nous avons encore deux longs articles à donner à nos lecteurs, M. le baron Du Polet rendra compte de son enseignement et de ses expé-
ricnees magnétiques à Melz, Besançon, Dijon, Gray, Vesoul cl Nancy, pour faire suite à l’ouvrage qu’il publia en 1810 sous le litre île Mugnétisme opposé ù la médaille, ou Mémoire pour servir à l'histoire du Magnétisme en France et à l'étranger.
Il esl bruit dans le monde magnétique de la découverte d’un moyen de démontrer chimiquement l’existence du fluide magnétique. Des expériences entreprises pour cet objet se poursuivent avec activité. Si ce qu’on nous annonce esl vrai, si les observations ont été faites avec exactitude, une nouvelle ère de progrès s’ouvrirail pour le magnétisme, que l’on démontrerait avec plus de facilité que l’électricité. Mous devons assister à ces expériences, et nous instruirons nos lecteurs de ce que nous aurons appris.
SOCIÉTÉ MAGNÉTIQUE DE CAMIIKA1.
Paris n’est pas le seul endroit où les magnétiseurs se réunissent en société pour se communiquer leurs observations. Nous avons déjà annoncé la création, dans différentes villes, de sociétés que nous invitons à nous donner des renseignements sur leurs statuts et la nature de leurs travaux. La plus ancienne, celle de Cambrai, dont plusieurs membres sont correspondants de la Société philanlhropico-magnétique, sentant l’importance el le bien qui peut résulter de se mettre, par l’intermédiaire de la publicité, en communication avec les membres de la famille mesmérienne, a la première répondu à notre appel. Le président, auteur connu par ses recherches sur la nature essentielle du medium magnétique, en nous adressant les statuts, ajoute : « La Société est destinée à é«u-» dier le magnétisme sons le rapport de ses effets thémpeuli-
« quos, à rt'aliser dos laits et ù 1rs publier, à l’exclusion de » Uius principes théoriques.
« nais si l:i théorie est exclue de notre publication (I ) elle « n’en préoccupe pas moins la plupart de mes collègues. « Avide de recueillir les lumières que voire Journal est des-« tiné à répandre sur la science ù laquelle nous nous sommes « voués, la Société vous prie de l’inscrire au nombre de vos « abonnés. Travaillez, en vertu de celte aspiration synthétique o vers laquelle tendent toutes les intelligences, à ramener à « une loi générale, à un principe essentiel les faits matériels « dont nous sommes chaque jour témoins. Malheureusement u les déductions de faits aussi variables que ceux qui résultent « du magnétisme sonl lentes, difficiles, el presque toujoursen-a lâchées d’incertitudes. Si toutefois i! nous arrivait dedécou-« vrir à ce sujet quelque chose capable d’intéresser les progrès o du magnétisme, nous nous ferions un devoir de vous en in-« former, b
Le président de la Société magnétique, H. WlART.
Cambrai, 12 juin 1815.
Nous avons sous les yeux les six premières livraisons des Archives de la Société miujtiétique. Il y a plusieurs cures très-remarquables. Nous les analyserons.
L’abondance dos matières nousublige à renvoyer au prochain numéro le comptc-remlu des sociétés Philunthropico-magnétique et du Metmérime.
(I) Annotes de la Société magnétique de Cambrai, une livraison par mois. Prix, par au, 2 fr. 50 c., chez M. Lévêque, imprimeur, à Cambrai.
BUSTE DE MESMER.
La Revue Mugncltquc contiini l’annonce d’une souscription duni lo produit sera destiné à l'exécution, par un artiste distingué, du buste de Mesmer, dont chaque souscripteur aura le duplicata.
Nous associant à cette heureuse idée, nous donnerons dans notre prochain numéro les détails nécessaires pour que nos abonnés prennent connaissance de ce projet et puissent concourir, comme nous le ferons nous-mêmes, «à son exécution.
Le temps approche où l’on rendra à Mesmer de plus grands hommages. Quant à nous, qui concevons d'une manière grande et large sa sublime découverte, nous appellerons bientôt les cœurs généreux à notre aide pour fonder une institution pour l'enseignement public et gratuit du magnétisme. Nous solliciterons tous ceux qui savent à venir y communiquer leurs lumières. Cet asile sera ouvert aux malades que la médecine a maltraités, et, par des leçons basées sur l’expérience, nous enseignerons aux autres hommes ce que nous savons en 1 art magnétique; heureux nous serons alors de faire remonter jusqu’à Mesmer le bien qui se lera ainsi. L’institution fondée portera son nom, et sur la porte nous graverons sa devise :
LA NATURE OFFRE l:N MOYEN UNIVERSEL DE GUÉRIR ET DE PRÉSERVER LES HOMMES.
Baron Du Potet.
U Propriétaire-Gérant, HÉBEKT (de Camay).
JOURNAL
DU
MAGNÉTISME.
VOYAGE A SAINT-PÉTERSBOURG.
(4* article.)
Mais par la vérité mes recherchej guidées S'écartent des sentiers battus :
Le jeune Pline allait ù la chasse aux idées,
Je Tais il la chasse aui vertus.
Lorsque, par lu pensée, on sort pour un instant du groupe des partisans du magnétisme, on s’aperçoit avec douleur que le travail qu’il y a à faire pour que la vérité règne sur les esprits est encore immense, que plus d’un siècle est nécessaire pour obtenir ce résultat. Pourquoi cette lenteur dans la marche d’une découverte aussi importante que l’est celle du magnétisme? qui peut empêcher un plus rapide progrès ? Mon Dieu ! l'obstacle vient moins encore des antagonistes du magnétisme que des préjugés aveugles et do la routine des hommes en général. Pourquoi y aurait-il exception en notre faveur? Ne savons-nous pas avec quelle lenteur on adopte la meilleure chose?
Découvrir, ce n’est presque rien; la plus grande difficulté est de la faire accepter. Nous ne voulons pas ici rappeler l’histoire de toutes les découvertes, les suivre dans leur marche; un semblable travail n’apprendrait rien de nouveau : on snil, et les hommes ne se corrigent point par l’enseignement des siècles passés.
Les magnétiseurs ne sont pas plus heureux que tous les novateurs qui ont paru depuis que le inonde existe. Un rude travail les attend, quoiqu’ils marchent à une conquête assurée.
La vérité n’est pas toujours amusante; il faut tâcher de la rendre supportable et de montrer ses attraits, afin que la ferveur de ses nouveaux amants ne se refroidisse pas. Qu’importe pour la plupart des hommes que le magnétisme soit un agent curatif? Ils s’en moquent pas mal tant qu'ils se portent bien. Beaucoup ne voudraient point se donner 1rs peines d’un traitement et feraient plutôt l’aumône de leur bourse que d’un peu du superflu de leur vie. C’est donc par la curiosité qu’il faut prendre les égoïstes et les indifférents, races trop nombreuses. Il faut les allécher par des récits merveilleux, leur montrer une mine riche et facile à exploiter; ils viendront à vos enseignements. Faites quelques expériences afin que l'envie leur prenne d’essayer le pouvoir que vous venez de leur révéler. C’est souvent ainsi que vous réussirez â en amener quelques-uns à votre doctrine. Leur coeur s’ouvrira â des sentiments qu’ils ignoraient; la pitié peut-être pénétrera dans leur âme à la vue d’un être souffrant, car vous leur aurez dit : Vous pouvez le guérir! S’ils agissent, ils seront émus.
Le principe moral que vous avez semé a germé et porté ses fruits.
C’est ainsi que je conçois l’enseignement du magnétisme : attirer les oisifs comme les gens vraiment désireux de connaître; faire des expériences, mais rester en deçà du possible; faire essayer devant soi quelques-uns des auditeurs, afin qu’ils ne se récusent point, car beaucoup doutent qu’ils aient quelque pouvoir. S’ils le reconnaissent enfin, votre triomphe est assuré comme celui de l’établissement de la science. Parler peu de somnambulisme, mais insister sur la cause physique qui le produit. Il sembleque cette marche est facile, cependant elle présente des difficultés. Ici, par exemple, à Saint-Pétersbourg, on ne parle, on ne veut que du somnambulisme. Chacun a une demande à faire pour s’assurer des sublimes facultés des dormeurs.
Forcé d’obéir, sous peine de passer pour un im-puissant magnétiseur, je découvre une jeune Française qui, à Paris, avait été déjà endormie, et conservait un reste de faculté encore surprenant. C’est une Française ! Les soupçons s’élèvent. Nous voulons une Russe : Ceci complique les difficultés! Les faits, comme l’or pur, devraient avoir la même valeur; il n’en est point ainsi cependant. Cherchons donc un ou une Russe. Chacun se prête d’abord à des expériences propres à développer ce phénomène. Mais, chose trop facile à prévoir, lorsque le sommeil apparaît, l’être qui le présente ne veut plus consentir à être magnétisé; il craint de parler, on lui a fait peur, il recule; l’assurance que je lui donne d’empêcher toute demande indiscrète ne peut être mise en balance
avec la crainte de révéler ses secrets 011 ceux des autres.
Lors môme que des effets physiques seulement ont présenté dans leur développement quelque chose qui fixe l’attention , c’est vainement que dans une séance suivante je cherche mon sujet : il s'est éclipsé.
C’est ainsi que la belle Mmc Pouchkine, à la suite d’une magnétisation avec le sommeil, n’a plus voulu paraître et se soumettre à d’autres magnétisations.
Il en est de mémo de la comtesse Potoska, deux fois endormie d’un sommeil si profond et si insensible que j’avais de la peine à la réveiller. Aucune parole ne pouvait être entendue; le comle, doutant de mon pouvoir, appelle de toute la force de sos poumons sa femme endormie, mais, vains efforts! Quelques minutes avaient suffi pour fermer tous ses sens;
La princesse Lab....., endormie deux fois, 110 se
soumit plus au magnétisme; cependant elle assurait, dans son sommeil, qu’elle était parfaitement bien, et qu’elle deviendrait clairvoyante.
On semble me dire : « Nous vous faisons venir • pour vous soumettre à un examen, c'est-à-dire « votre art ; car vous prétendez avoir une faculté pré-« cieuse. Mais nous allons vous retirer successivc-« ment tous vos instruments; ceux qui ne pourront « vous échapper, nous les gâterons si bien que vous « ne pourrez vous en servir. Mais il faut que vous « réussissiez malgré les difficultés que nous ferons « naître. Si vous échouez, nous dirons que vous ôtes « un médiocre artiste, que vous ne savez nullement « votre métier. Allons! mettez-vous à la besogne; « voici de nouveaux sujets. »
Et vous, mademoiselle K...... votre sensibilité magnétique me permet do faire les expériences les plus curieuses. Vos doigts et vos mains semblent appartenir plutôt à moi qu’à vous ; tout ce qu’il me plaît de commander, vous l’oxécutez à l’instant; vos yeux se convulsent, et si vous ôtes debout vous fléchissez et perdez connaissance. Beaucoup d'expériences faites devant votre mère, sur des personnes amies, devraient la rassurer sur vous, mais elle tremble et suit tous mes mouvements. Que sa crainte se calme; mon pouvoir magnétique est reconnu, on ne doute plus. Pourquoi vous magnétiserais-je désormais? C’est pour moi un travail forcé, et au fond ces expériences me répugnent à faire.
Cependant il mo faut céder encore.
Vous, madame la comtesse Rostopchine, qui avez un si grand désir d’étro endormie, vos vœux ne seront qu’en partie satisfaits. Vous sentirez les atteintes du sommeil, ou plutôt, bercée par de doux rêves, vous irez jusqu’à la porte d’ivoire; le temple ne vous sera pas ouvert par la faute des importuns. La nature a été troublée dans ses opérations; un génie vous touchait déjà de son aile, mais il s’esl enfui à l’approche des profanes.
Le souvenir de ce que vous aviez déjà vu vous est resté, vous l’avez écrit, permettez-moi de trahir votre secret et de publier vos vers. C’est pour moi désormais que seront les regrets, car si j’eusse poursuivi vous eussiez écrit un poëme et divulgué quelques secrets du ciel : je suis un grand coupable.
Mon ncpBbiü ManiemniicKin con'b '.
Thxcao n actko . ... ml BOAiienbn /ijuia OmoûBambC» æe^aemb otnb mli.ia ;
Rbemb KpbiAaMii oaa bcô KyAa-mo cn'Buia;
Bo.uo-fTb 4amb en, onalib vAemliAa!
Ppi3M xoAam”b .... n Manant!» n 30Bym’b. II 30Bym b 3a npcAÈAM 3eMiiaro.
TaKT) iicacHbi oh1j, n manb MHoro flaioml» rpycmnocAaAKaro, meMiio-cBatnaro !!
M BomT> 3epKaAO BApyrb tiOBBnAOCb mh’Ë,
Mb£ rOAOcb uieniiyAb Gc3Caobcciimü :
« IIocMonipn, nocMompn, bT> slugen mou rAyCiin'B « ÎKpcoin mBoü ompa3iimca wyACCHO. »
fl, nocAymno cMy, bT) poKoaoe cmeKAo J/l Aynioio n OKoab BimKaio,
Ho noo3p'ËRbe Moe iic‘,wnoAbiio CBlimAO ;
BîiAMx'b npii3paKOB'b cuucAa ne 3Haio !
M 4‘BmT) (ÎOAbnic cMompio, m'Èsi'b 6oAbuic moü B30pl> yrAyGAHemca Bb paMb Apoxaujen,
TÜmIj ciiAbR‘Bâ mou nopbiBl), m’ËM'b boaibBo mou npocmopT), II 3a6um b y*h Bccb Mipb Hacmoajiyn.
Ho m'ÈAecHHa yTinn bcü Aepxaml) Mena,
Ho OKOBbi 3cmam ne nycEatoinb,
Eÿje wurb .... n a CHosa qyio rpy3’b 6umia,
A mysiaHu — Mipb cnoub 3aemoAaioni'b.
Tpa^nua I. Pocraonuinna.
C. nemepGyprb, 6-ro renBapa 1843 r.
(d) Pour éviter tonie fausse interprétation de ces vers, j’ai cru devoir fair • Imprimer l’original, dont je donne la traduction prosaïque et littérale ci contre. Baron do Poux.
Oppressée el pourtant à l'aise... mon âme agitée Semble vouloir briser ses liens matériels;
Elle bat des ailes, elle a hâte de prendre son essor...
Si on la libérait elle s’envolerait vers des régions inconnues.
Des rêves glissent à l’cnlour.....ils l’attirent; ils l’appellent,
Ils l’appellent au delà dos bornes terrestres....
Ils sont si confus... et, pourtant, ils lui offrent Quelque chose de si tristement doux, de si mystérieusement saint !...
Et voilà qu’un miroir m’apparaît,
El une voix sans paroles murmure à mon oreille :
« Regarde, regarde! Dans celte mystique profondeur,
« Ta destinée se retracera miraculeusement. »
Obéissante, je plonge dans la glace fatidique Mon œil el mon âme attentive ;
Mais ma vue n’est pas assez lucide ;
Je 11e connais poinl le sens de ces mirages fugitifs.
El plus je m’absorbe, et plus mon regard Plonge dans ce cadre vacillant,
Plus vif est mon élan, plus libre est ma poitrine.......
Et le monde réel esi oublié par moi.
Mais les liens du corps me retiennent toujours !
Mais les chaînes terrestres ne se relâchent point;
Encore un instant..... et de nouveau je sens le poids de
l'existence,
Et des brouillards voilent le monde des rêves !...
Comtesse J. Rostopchine. Saint-Pélersbourg, 8 = 18 janvier 1943.
Mme la comtesse ***, femme impressionnable, magnétiquement parlant, M. de Balzac vous a distinguée entre toutes les femmes en vous déiliant un de ses plus charmants feuilletons. Vous voilà sur la fatale sellette; chacun vous regarde et sourit, car les singuliers effets magnétiques quo vous éprouvez ne peuvent s’expliquer et on les met en doute. Je n’abuserai pas de mon pouvoir, no craignez rien; cependant de vous sortirait ce que je cherche à montrer: cette assemblée en est-elle digne? Jo ne le crois pas et je cesse de poursuivre.
Eh ! vous, jeune fdle, que Mmc la générale Soldainea confiée à mon habileté, ce que vous éprouvez, à part le sommeil, devrait être vu par des physiologistes : il n’y en a pas dans cette assemblée, et l’interprétation des gens du monde traduirait mal les émotions qui naissent d’un premier regard jeté vers le ciel.
Vous, monsieur le baron Bul..., vous êtes pâle comme un mort ; il faut vous laisser un peu dans cet état, mais lorsqu’il me plaira de faire revenir la vie à la surface, on dira que c’était l’ennui, l’émotion, que sais-je? Tant de gens, tant de personnes sont habiles à trouver l’explication de faits inexplicables.
M. le comte Woronzoff m’assure que la comtesse sa femme a élé guérie dans sa jeunesse d’une affection extrêmement grave qui avait résisté à tous les traitements. L’honneur de cette cure revient à une somnambule parisienne. Cependant il reste encore une certaine faiblesse du système nerveux : magnétisée quelques instants, la comtesse éprouve quelque douleur dans la région du cœur.
Homme européen par sa fortune, Demidoff enfin,
puisqu’il faut le nommer, magnétisé debout, est sensible à l’attraction magnétique: c’est tout ce que j’ai distingué en lui La princesse sa femme n’éprouve aucun effet, elle est au reste d’une santé parfaite.
Mais voici une jeune Anglaise, mon pouvoir sur elle est sans limites; à travers les portes et les murailles elle suit ma direction. Je l’attire, elle se lève pour s’approcher de moi; la voyez-vous, les traits immobiles, se lever par un mouvement presque insensible? Le sommeil magnétique engourdit ses muscles; elle obéit sans le savoir, comme une paillette de fer à l’aimant qui l’attire.
Vous, jeune Marie Dolivodobrovolsky, vous m’avez prié de vous magnétiser un instant; vous voilà endormie, vous êtes heureuse de ce sommeil; des rayons célestes entourent votre face, vous semblez illuminée. Votre mère accourt effrayée, elle vous croit en danger; erreur excusable! car l’action magnétique a été prompte comme la pensée, et tous ceux qui vous ont vue ont, comme elle, été saisis d’effroi.
Voici maintenant 1111 page, issu d'une noble famille que j’aime et respecte. Ce n’est point, comme on pourrait se le figurer, un petit page espiègle et fripon, mais un jeune officier, d’une organisation robuste, et gare à celui qui le défiera un jour, car il a la poigne bonne. Mais, qu’importe? ici mes armes vont le vaincre sans combat.
A peine si je l’approche que déjà il fléchit, n’a plus d’yeux, plus de jambes ; il respire avec précipitation ; son corps est couvert de sueur. Etreint dans un cercle magique, il ne peut ni avancer ni reculer, il faut qji’il resle à la placo où je l’ai saisi. Si j’avance, il avance
aussi, mais malgré lui. H repèle de même tous les mouvements qu'il me plaît d'exécuter. Si on lui donne à tenir un objet que j’ai touché, il lui semble loucher du feu et il se plaint de vives douleurs. Mettons entre lui et moi une épaisse muraille. Vous voyez que mon pouvoir ne diminue pas sensiblement ; car en lui posant mon chapeau sur la tète il devient ivre, chancelle et ne peut plus se tenir debout.
Prions-le de résister. 11 le voudrait bien, car on l’accuse de céder par complaisance, mais il ne le peut. La volonté, comme je l’ai dit, s’annihile devant une volonté plus forte, et je ris de ses efforts. Je suis entré chez lui, c’est moi qui gouverne son corps, je puis le soumettre à toutes mes exigences.
Lecteurs, ce récit n’est point un jeu de l’esprit; c’est la relation sérieuse, exacte, d’un fait authentique, qui s’est passé devant les personnes les plus élevées et les plus respectables de Pétersbourg.
Mais je vais vous dire un secret que vous ne trouverez pointdans le Grand-Albert. Voyez-vous ce vaisseau qui fend l’onde à pleines voiles? Je vais, de loin, endormir le pilote; je prendrai sa place , commanderai une nouvelle manœuvre, et l’équipage obéira. Je conduirai le vaisseau sur des récifs ou lui ferai faire bonne route, selon ma volonté.
Ce secret est dans chaque homme qui sait vouloir. Essayez, vous ne réussirez point tout à coup , car il faut apprendre ce qu’est la volonté et comment elle se gouverne.
Suivez-nous, vous saurez, car souvent, par imitatif , on fait ce dont on se croit incapable. Quelquefois aussi la révélation nous arrive. Quant à moi ,
j’ai cherché, j'ai trouvé, et vous dirai-je toute ma faiblesse? C’est un petit homme rougi■ , tout contre fait, marchant avec une béquille, qui, lu nuit, dans un songe, m'est apparu II m'a dit : «Tu crois savoir « magnétiser ! Tu ne sais rien. Regarde-moi faire. » J’ai examiné, en effet, car j’étais curieux d’apprendre. J’ai vu qu’il exécutait des choses surnaturelles. Eveillé, troublé, j’ai cru à mon rêve, je me suis mis à répéter ce que j’avais vu faire; j’ai réussi en partie, et depuis lors je cherche à exécuter d’autres choses encore plus difficiles que le petit homme rouge fit avant de me quitter. J’espère qu’un jour il reviendra me visiter, car il ne m’a donnéqu’une leçon, et,quelque docile écolier que j’aie été, il doit sentir que ce n’est pas assez. J'attends.
Vous, M. ***, tout paré pour le bal de la noblesse, vous lancez avant de partir une provocation au magnétiseur; il ne répond pas, vous revenez à la charge. Eh bien, essayons nos forces. Moi je ne vous toucherai point. Ma main dirigée sur votre front imprime à vos idées un trouble inexprimable. Il vous prend l'envie de me mordre! Mais plus j’approche de vous, plus votre tête s’incline et s’arque. Vous me priez de cesser ! Vous vous rendez , croyez-vous au magnétisme maintenant? Jactance humaine, légèreté impardonnable, vous existez dans tous les pays. L’homme se croit fort parce qu’il a des doutes, tandis que celui qui ne doute pas a seul quelque puissance.
Et mon ami le philanthrope, le général Tchertkoff, écuyer de la cour, magnétisé dans le salon du grand-échanson, le comte de StrogonofT, est pris de spasmes violents et pleure comme un enfant.
Faut-il encore des exemples? Eh! mon Dieu, j’en ai de quoi faire un volume, ils sont ici inutiles; on ne doute plus du magnétisme, on le reconnaît; mais qu’en fera-t-on? C’est ce que nous allons examiner.
(l.n suite au prochain numéro.)
MANUEL DU MAGNÉTISEUR.
(Suite.)
CONDITIONS A OBSERVER DANS LES TRAITEMENTS OU LK SOMNAMBULISME SE PRÉSENTS.
J’ai toujours remarqué que, plus le sommeil magnétique était profond, isolé, plus aussi il y avait de lucidité. J’entends par sommeil profond l'état où il y a insensibilité, où les sens sont fermés complètement aux impressions extérieures. La personne ainsi endormie , placée près d’un malade , doit, lorsque le rapport est établi, sentir dans sa propre organisation les désordres pour lesquels on la consulte ; elle doit accuser les mômes souffrances. Il faut que le malade reconnaisse pour vraie la description des symptômes de son mal. Chez les somnambules parfaits on doit entendre exhaler les mêmes plaintes, sortir de leur bouche les mois mêmes dont se sert le malade pour caractériser son mal. Le rapport intime
doit faire éprouver et surgir ces phénomènes. Je l’ai souvent constaté; j’étais alors certain que le traitement qui allait être prescrit serait efficace.
Dans le cas où les phénomènes que je viens de décrire ne so présentent pas, on doit être en garde, car ce somnambule n’est plus que comme un médecin. Il impose encore une sorte de respect, mais il n’en est plus digne. Tel est le cas des somnambules ordinaires, qui ont un choix de remèdes qu'ils ordonnent tant bien que mal dans différentes affections.
Je ne veux pas ici vous parler davantage du sommeil magnétique qu'on a de nos jours rendu beaucoup plus curieux qu’utile. C’est surtout de l’agent qui le produit que je dois vous entretenir, c’est lui que vous devez d'abord et surtout étudier, parce qu’il est la cause primitive de tous les phénomènes. Sans cesse à votre disposition, il vous dispensera souvent d’auxiliaire, et, si vous savez l'employer avec sagacité, de magnifiques résultats sortiront de vos mains. C’est lui (fui guérit, el le somnambulisme ne saurait le remplacer. Je ne formule aussi nettement cette proposition que parce que j’ai observé maintes fois que les somnambules s’indiquent le magnétisme comme moyen de traitement et souvent n’ordonnent de médicaments à ceux qui les consultent que pour que le magnétiseur ne partage point ses soins.
Ne perdez jamais de vue ces faits d’observation ; ils vous préserveront de beaucoup d’erreurs et vous empêcheront d’abandonner, comme on le fait aujourd'hui , le certain pour le douteux , la cause pour l’effet. En ne voyant ainsi partout que phénomènes miraculeux, on retarde l’époque où le magnétisme,
comme principe physique, force naturelle, devra rentrer dans le domaine des sciences.
Ce n’est qu’avec réserve que vous devez parler des facultés merveilleuses de vos somnambules, car 011 vous demandera à vérifier les faits que vous annoncez. Vous voudrez qu’il ne resle aucun doute sur votre véracité; mais vous n’avez pas calculé que votre instrument n’est pas une machine dont le jeu constant et régulier permet à toute heure les observations. Ici la seule approche d’une personne étrangère dérange, altère l’état régulier du sommeil. Votre trouble augmente les désordres , vous voulez cependant ! Vain espoir! La lumière n’arrive plus, les facultés ont disparu! C’est là l’histoire de la déconvenue de beaucoup démagnétiseurs...
Il faut être bien sûr de sa volonté et que rien ne soit capable de débiliter moralement, ou bien que Y instrument soit d’une grande perfection, pour oser produire en public des phénomènes somnambuliques. L’ignorant magnétiseur peut dans un cas pareil être servi par sa propre ignorance; car, ne doutant pas, il agira avec calme; il rit des doutes; il a vu, il faut que vous voyiez aussi, et celte certitude qu’il a de lui-même le fera réussir.
Je ne vous parle pas ici des procédés pour établir le rapport cnire le somnambule et d’autres personnes. Il suffit qu’il y ait contact, souvent même il n'est pas nécessaire; le somnambule voit au loin quand on appelle son attention sur unêire souffrant. Une lettre, une mèche de cheveux, un vêtement quelconque que la personne a porté ou seulement louché suffisent duns bien des cas.
Abandonnant la direction du somnambulisme à votre sagesse, je vais encore vous faire connaître quelques autres résultats du magnétisme.
Voyons d’abord quels sont !es procédés à suivre dans les cas où notre marche n’est point éclairée par l’apparition de phénomènes physiques.
EFFETS MAGNÉTIQUES LATENTS.
Ces cas sont assez nombreux et demandent un examen. On ne se sent ni croître ni décroître; on voit le fait, il se produit, mais nous ne sentons pas le travail moléculaire qui se fait en nous. Cependant il est de tous les instants. Il esl des maladies qui procèdent comme la vie, à petit bruit, et qui disparaissent sans laisser apercevoir le travail qui s’accomplit en nous-méme. Lorsque la vitalité s’augmente par le magnétisme. elle ne change pus toujours cette disposition naturelle, et votre action, quoique réelle, peut être contestée ou vous laisser à vous-même des doutes sur sur son résultat.
Un magnétiseur exercé a des ressources infinies, il sait varier ses procédés. Les centres nerveux n étant point influencés, ou seulement d’une manière générale, il cherche ailleurs, il dirige son action tantôt sur le cœur, tantôt sur le foie, les intestins grêles, en abandonnant lo reste du corps. De cette manière il obtient quelquefois une sensibilité qu’il n’eût point découverte, et, peut rendre non-seulement visible, mais aussi activer son travail qui devient plus efficace.
Nous avons assez laissé apercevoir que certaines guérisons sont difficiles, impossibles même pour beau-
coup de magnétiseurs. C’est que le magnétisme glisse sur certains corps sans les pénétrer, comme si quelque chose d’idioéleotrique les enveloppait. Il faut s’y ouvrir une porte, chercher avec patience et persévérance la partie impressionnable. Lorsqu’on l’a trouvée, c’est un point d’introduction où placer le levier qui doit remuer la masse. C’est donc de l'intelligence et du savoir faire que tout dépend. On a égaré l’esprit en disant qu’il suffisait d’une bonne pensée, d’un désir soutenu do faire du bien; il faut plus que cela pour produire des œuvres merveilleuses. Il faut connaître l’étendue de son pouvoir, les ressources cachées qu’il possède, et suivre au besoin une ligne courbe, si sur la droite il existe un obstacle insurmontable.
Mais comment apprendre ces choses? Parle travail et en réfléchissant souvent sur les causes qui vous ont fait échouer ou réussir dans vos traitements. Chercher toujours à s’éclairer, sonder tous les organes les uns après les autres, diriger les doigts en pointe suffisamment de temps sur chaque partie, examiner le travail qui s’y fait, travail qu’il faut deviner parfois, car les sens apprennent peu. Que de joie alors on éprouve quand on a bien saisi ce que la nature cachait !
On est affligé lorsqu’on lit les ouvrages écrits sur le magnétisme; ils ne sont ni d’observateurs profonds, ni de magnétiseurs habiles. Sans doute, ils ont fait du bien, mais en suivant les maximes qu’ils renferment on ne fait que recueillir les paillettes d’or semées sur le sol. Ce qu’il cache encore, c’est la mine riche, et les ouvriers que nous avons examinés n’ont pas cherché à y pénétrer. Labeur peu profitable ! sueurs souvent inutiles!... 11 faut désormais des étu-
(les plus sérieuses, si les magnétiseurs ne veulent se déconsidérer aux yeux de la science !
A ceux qui me blâmeront de ma critique et de mes attaques, je répondrai : J’ai étudié avec persévérance les procédés enseignés, les effets qui résultent de leur emploi, et, pour les résumer, j’ai pris Deleuze pour modèle. Les phénomènes produits ont été ceux dont il enseigne l'existence, c’est-à-dire modérés, ne sortant pas d’un cercle étroit et n’élevant en rien la pensée. Je me suis mis alors à chercher moi-môme avec d’autres idées; l’horizon s’est agrandi, et la vérité, sans se montrer tout entière, m’est apparue avec d’autres formes ; une lumière plus vive a frappé mon esprit, et j’ai mieux jugé la grande découverte de Mesmer, que l’on a, il faut le dire, rétrécie un instant. Est-il beaucoup de magnétiseurs de ces écoles dernières qui sachent raisonner sur les effets qu’ils produisent, satisfaire l’esprit des hommes qui désirent s’instruire, les initier à des principes fixes, leur donner une bonne méthode? Suivant quelques-uns une séance expérimentale suffit pour faire des magnétiseurs et un livre creux pour leur enseigner toute la doctrine!... Comment voulez-vous donc que votre art progresse ainsi? Vit-on jamais une science se former avec des matériaux incomplets, mal recueillis, souvent tronqués, et des livres bien inférieurs à ceux qui parurent du temps de Mesmer et de Puységur, les Annales de Strasbourg, par exemple, qui donnaient wiiteaux savantes leçons de ces grands maîtres? Sans doute quelques hommes se sont distingués par des faits brillants et quelques aperçus; mais ils ont abandonné le travail commencé, comme des gens sans cou-
rage qui se sont montrés las dès la première journée.
Je manquerais à moi-môme si je ne disais ces choses , parce qu’elles sont vraies, et qu’à la lin la vérité doit trouver un écho.
Magnétiseurs, ne vous flattez pas de votre pouvoir : l’ètre le plus ingnorant peut en posséder autant. C’est de la science seule que vous pouvez vous prévaloir, car ceux qui parmi vous se distinguent doivent leur supériorité au travail et à la réflexion. Je voudrais que tous les magnétiseurs qui vont se former fussent pénétrés de ces idées, et que, dociles à écouter la voix de l’expérience, ils ne se crussent point d’une grande habileté après avoir produit quelques faits...
Tout en avouant l’action curative du magnétisme le monde ajoute que, s’il soulage beaucoup de malades, il en guérit cependant peu. Cela vient de ce que les magnétiseurs n’effacent que les symptômes et ne poursuivent point le mal-jusque dans sa source en attaquant les organes primitivement affectés. On sera, je l’espère, bien pénétré de cette vérité par l'exemple de quelques cas de maladies que je vais citer tout à l’heure. Ceci dit, je reviens aux procédés magnétiques à employer dans les cas qui nous occupent maintenant.
Il est des cas où la sensibilité au magnétisme a besoin pour être produite d’une magnétisation qui ne soit pas directe.
Je m’explique.
J’appelle magnétisation indirecte celle qui, contre votre attente, développe des effets sur une personne que vous ne magnétisez point, mais qui se trouve placée auprès d’une autre que vous actionnez. Eh
bien, ce l'ait singulier a lieu quelquefois, et des malades qui n’ont rien ressenti d’une forle magnétisa lion s’endorment ainsi, sans que vous ayez en rien cherché celle crise; d’aulres, sans dormir, sentent s’opérer en eux des changements que l’on a désespéré de produire. C’est donc une indicalion à suivre et que Ion ne doit point négliger lorsque l’on veut absolument agir sur une organisation maladive qui se montre rebelle.
Dans d’aulres circonstances, c’est en étant en rapport, par contact, avec un somnambule, qu’un malade peut éprouver un commencement de magnétisation inutilement cherchée jusqu’alors. Dans ce cas le magnétisme est soustrait et offre un rapport bien sensible avec les effets de Xélectricité, la décharge de la bouteille de Lejde. En voici un exemple :
« J’avais déjà, dit M. de Puységur (I), mis deux fois en crise magnétique (2) un homme de trente-trois ans, nommé / ouis Segar, de la paroisse de ! uj, près de Soissons. Cet homme, fort et robuste, d’une taille de cinq pieds huit pouces, avait uner fièvre quarte invétérée et qui résistait d’abord à l’effet du magnétisme : je voulus savoir un jour ce que pensait de lui un autre malade en crise; je pris, sans réfléchir, un jeune postillon de la poste de Braino, arrivé seulement à mon traitement de la veille, et qui venait pour la première fois de tomber dans cet état heureux de crise magnéti-qiie; je dis à ce jeune homme de loucher Louis Segar,
(1) Mémoire pour servir à l’histoire de l'établissement du magnétisme animal. 1786. page 50.
(2) Dénomination primitive du somnambulisme.
qui était flans l’état naturel. Ce jeune homme m’obéit sur-le-champ; mais, loin de me parler et de répondre aux questions que je lui faisais, il s’obstinait à garder le silence, et touchait toujours son malade. Enfin, après quatre minutes, il dit très-haut et d'un ton très-brusque : Eh! je ne vom trouve point de mal; au même instant il ouvre les yeux, et de l’air le plus étonné il continue : /lh ! me voilà réveille ; ou suis-je ici? Cette scène, la première que je voyais de ce genre, me surprit beaucoup... Ce jeune homme s’était débarrassé de la cause de sa crise d’une manière subite, sans que j'y eusse contribué ch rien. »
C’était le seul moyen d’agir sur Louis Segar et de le guérir. M. de Puységur ne nous dit pas s’il usa de ce procédé.
Vous devez, dans d’autres circonstances, recourir à un autre magnétiseur; il est des analogies, des sympathies secrètes qui favorisent singulièrement le développement des effets magnétiques. J’ai vu des personnes s’endormir promptement sous la main d’hommes qui se croyaient peu propres à devenir magnétiseurs. Plusieurs fois il m’est arrivé, car je cherchais ces cas pour mon instruction, d’endormir cl de faire éprouver tous les effets du magnétisme à des gens que l’on avait longtemps magnétisés en vain. On parviendra à montrer qu’il n’y a point contradiction dans tous ces faits. Toutes les sciences ont leur difficultés, à toutes les lois générales il y a des exceptions; c’est à l’esprit ingénieux à en chercher le pourquoi.
Nous dirons ici, sous forme d’avis, à ceux qui magnétisent :
La nature souvent .'puisée par le mal et les remèdes n’a plus la môme activité,; les symptômes d’action sont rares ou très-difficiles à reconnaître, surtout pour les observateurs peu exercés, dans le traitement des maladies. Le magnétiseur, dans ce cas, a donc tout à faire, puisqu’il n’est point aidé par la nature ; d’où il suit des difficultés sans nombre dans le cours de son traitement. C’est alors qu’il faut réfléchir sur sa position ; voir si l’on est dans le cas de sacrifier son temps, de prodiguer ses soins et ses peines aussi longtemps que peut l’exiger la suite d’une pareille cure, afin de ne jamais abandonner son malade avant sa guérison; car, sans cette résolution, il vaudrait mieux ne pas commencer à le magnétiser.
ACTION DU MAGNÉTISME SUR LES SOLIDES.
* Plus vous étudierez le magnétisme et plus cette découverte se montrera grande à vos yeux. L’expérience commence à être un flamheau pour moi ; je me trompe moins sur les opérations de la nature et j’apprécie avec un cœur reconnaissant le pouvoir que j’ai et qu’ont tous les hommes de venir en aide à leurs frères souffrants. Mais ce qui me ravit, c’est que j’aperçois mon ouvrage au travers de l’enveloppe du corps; dans certains cas même je puis porter un pronostic que le temps ne peut démentir, car l’effet que j’annonce est le résultat forcé d’un travail organique déterminé par l’agent magnétique agissant en vertu d’une loi.
Vous aurez donc un jour cette précieuse connaissance qui m’est venue à moi bien lard , car je n’ai
point eu de maître. Vous prendrez plaisir alors à vos magnétisations, car, outre leeliarmeque l’on éprouve toujours à faire le bien . un intérêt peut-être plus vif attachera voire esprit à voire œuvre.
Dans les affections chroniques rebelles à la médecine, dont je vous ai déjà parlé, c’est là qu’il vous faut toute l’attention possible pour ne point quitter votre ouvrage, lorsque, croyant la nature impuissante ou rebelle, tout se prépare pourtant pour la guérison.
Méditez les exemples qui suivent.
§ I. — AFFRETIONS SCROFIILF.USKS.
Ici le magnétisme montre rarement aux yeux son travail; il faut le deviner sur de petits signes à peine sensibles. Ainsi vos magnétisations paraissent sans importance, le malade n’éprouve rien d’apparent. Mais de petites modifications ont lieu dans le pouls ; la peau, par suite, devient plus chaude. Plus lard le ventre se ballonne un peu , des borborygmes se font entendre, la langue se charge d’un enduit mince, une petite fièvre bien irrégulière se manifeste. Attendez encore; tout se prépare. Ce n’est point la peau qui servira d'émoncloire , les urines non plus , car elles restent limpides ; mais le ventre devient un peu plus tendu; de légères coliques se font sentir, enfin surviennent des garde-robes toutes séreuses. Ne vous y méprenez point, n’aidez point la nature par des purgatifs, car tout se resserrerait bientôt. Le travail critique se fait bien seul. Des évacuations alvines plus abondantes vous l'annoncent ; la lymphe s’écoule, la
lièvre devient plus sensible ; ne craignez rien cependant; elle n’est que le résultat du travail qui s’opère dans les tissus , travail nécessaire à l’expulsion des fluides qui obstruaient les organes, et qui, n’ayant encore pu trouver leur écoulement, avaient engorgé les glandes dont la rupture produit les ulcères. Maintenant que les glandes deviennent plus flasques, plus molles , elles s'affaissent sur elles-mêmes, diminuent de volume, et les muscles se dessinent davantage.
J’ai ainsi vu se terminer une maladie scrofuleuse au bout de cinq mois de magnétisation , par un dé-voicmentqui dura quatoi-ze heures sans interruption. Il avait fallu ce temps pour le préparer et les symptômes décrits plus haut l’avaient seuls annoncé.
J’ai vu plusieurs autres de ces affections se terminer moins brusquement, mais toujours par des garde-robes séreuses , qui revenaient par intermittence.
Aucun médicament n’avait été administré pendant ces traitements, la nature agissait seule.
Ici je dois vous dire que les procédés magnétiques varient. C’est par une application prolongea de la main sur l'estomac et le ventre que VOUS devez agir, car c’est là que se fait le travail, qu’aura lieu la crise. Quels que soient les engorgements glanduleux ainsi que leur situation, n’en cherchez pas la cure autrement que je ne vous l’indique. En supposant que vous agissiez sur leur volume , ce n’est que faire refluer les humeurs ailleurs , les porter dans le torrent circulatoire, d’où elles se reportent sur d’autres points pour y causer les mômes désordres. L'insufflation qu’on a recommandée n’est utile que quand il n’y a qu’une seule glande; elle se pratique ordinairement
au travers d’un linge plié on quatre et appliqué sur la tumeur.
§ II. —MALADIE AUX MILLE NOMS.
Je me sers de cette définit ion , car, dans certaines affections, chaque médecin appelé donne un nom différent , selon qu’ils croient saisir la cause réelle des désordres et surtout l’organe affecté. Ainsi chez une malade que j’ai actuellement sous les yeux , tous les médecins appelés, et il y en eut beaucoup, car le mal est ancien, dure depuis plus de dix ans : hystérie, hypocondrie , mélancolie , maladie imaginaire , humorale , rhumatismale , affection de ta moelle épinière, mal à lu matrice , ver solitaire. Cette nomenclature serait trop longue , c’est pourquoi je m’arrête. Mais voici les symptômes : ordinairement inappétence , parfois appétit immodéré, constipation opiniâtre. Tic douloureux de la face, idées noires et chagrines. Fatigue extrême à 1a moindre marche, besoin de la solitude. Peau couverte de petites élevures écailleuses que le frottement détache, mais qui renaissent bientôt. Eructations très-fréquentes. Abattement, puis tout à coup développement de forces exagérées. Sommeil rare. Jamais de transpiration. Froid aux pieds. Pouls ordinairement petit. Difficulté de lire et de sontenir une conversation, malaise général, etc., etc.
Les traitements allopathiques suivis ont été nombreux comme les régimes. Il s'est parfois manifesté un peu de mieux, mais de peu de durée. Les voyages, les eaux, l’hydropathie n’ont point produit d’amélio-
rations; l’homœopalhie essayée a soulagé. Cependant le corps s’affaiblissait comme les forces, le pouls devenait plus petit, plus rare; la langue se couvrit d’un enduit d’un jaune foncé ; la peau devint plus sèuhc et une fièvre lente ne quitta plus la malade.
Tel était son état lorsque j'entrepris son traitement. On avait prescrit les aliments : mange:, mangez, forcez-vous, était un commandement. Je conseillai le régime contraire, car je reconnus bien vite que l’estomac et les intestins fonctionnaient difficilement ; des matières putrides s’étaient accumulées dans les voies digestives, l’haleine était aigreet fétide. Cependant j’eus à combattre toutes les préventions qui accompagnent un traitement magnétique. Je persistai et mis la malade au bouillon aux herbes pour toute boisson et alimentation.
Toute mon attention, mes forces magnétiques furent dirigées sur l’estomac et les intestins.
Ces parties semblaient ne plus exister, il fallait y ranimer la sensibilité; je ne l’espérai pas en vain. Ma main appliquée tantôt sur l’estomac, tantôt sur les intestins, et laisséesur ces parties jusqu’à ce qu’il s’y manifestât une vive chaleur, me fit remarquer un commencement d’action, mois j’attendis deux mois ce symptôme La Ji'erre avait considérablement augmente, la maigreur était plus apparente, les forces nulles, et des espèces de vertiges avaient lieu vingt fois dans la journée. J’assurai cependant hautement la guérison; mais, je dois le dire, sans convaincre la famille; la malade avait seule confiance en moi. Le sommeil devint meilleur, malgré tous ces signes fâcheux. F,a langue, quoique toujours jaune, était moins
sèche; des gaz commençaient à circuler dans les in-teslins. ce qui n’avait point eu lieu depuis longtemps.
Toujours avec la môme obstination, mes magnétisations étaient dirigées sur l’abdomen. Enfin la crise cherchée avec tant de persévérance se produisit. Des matières blanches et concrètes furent rejetées au dehors; elles étaient tellement abondantes, que la malade n’eu pouvait croire ses yeux. Ces premières déjections la soulagèrent; la langue fut moins pâteuse. De petits potages au beurre furent très-bien digérés, ainsi que du café de glands. Les garde-robes continuèrent, et, chose remarquable, celles critiques suivaient presque immédiatement les ordinaires, et toujours copieuses, sans que l’alimentation puisse les justifier. La fièvre diminua sensiblement alors ; seulement une légère chaleur annonçait le travail critique. Une amélioration sensible se lit de jour en jour remarquer, et il ne resta plus de doute sur la guérison prochaine; car les forces reparurent, quoiqu’il n’eût pas encore été introduit un atome de viande dans l'estomac.
Ce cas, des plus remarquables, offre plus d’un enseignement pour la pratique du magnétisme. Sans ma persévérance aurais-je pu guérir celte maladie rebelle à tous les genres de traitements? Et si je n’eusse pas pris sur moi la responsabilité d’un régime qui semblait contraire, mais favorable, la nature fût restée sourde ù mon appel. En vain j’aurais magnétisé avec toute la force possible! Les humeurs qui étaient passées dans les tissus, entrelenues parties matériaux riches, mais devenus putrides par leur séjour dans l’estomac et les intestins, véritable cloaque, eussent
inévitablement amené une lièvre «dynamique. Fallait-il croire à l'efllcacité des purgatifs? Non. On on avait usé largement, sans oublier mémo la médecine de leroy, et sans profit aucun. Lo magnétisme pouvait donc seul produire cette guérison. Heureux d'en être l’instrument, ç’a été pour moi l'objet d'une étude suivie, car je voyais le travail qui se faisait intérieurement, et toujours je l’annonçais d’avance.
Je vous citerais bien encore d'autres traitements, mais, quoique très-instructifs, ils allongeraient trop cet ouvrage que j’ai voulu rendre rapide.
(La suite .1 u profitai n numéro.)
ÉTUDES PRÉPARATOIRES
DU
SOMNAMBULISME MAGNÉTIQUE.
(Suite.)
§ III. — FANTOMES.
Lettre de Pline à Sara (l).
« Le loisir dont nous jouissons vous permet d’enseigner el me permet d’apprendre. Je voudrais donc bien savoir si les fantômes ont quelque chose de réel,
(1) Livre VII, Ipllrp 27.
s’ils onl une vrnie ligure, si ce sont des génies, nu si ce ne sont que de vaines images qui se tracent dans une imagination troublée par la crainte Ce qui me ferait pencher à croire qu’il y a de véritables spectres, c’est ce qu’on m’a dit être arrivé à Curtius Rufus. Dans le temps qu'il était encore sans fortune et sans nom, il avait suivi en Afrique celui à qui le gouvernement en était échu. Sur le déclin du jour, il se promenait sous un portique, lorsqu’une femme, dune taille cl d’une beauté plus qu’humaines, se présente à lui : la peur le saisit. Je sms, dit-elle, /’ Afrique ; je. viens te prédire ce qui doit t'arrivery tu iras a Home ; tu iempliras 1rs plu* grandes charges, et tu reviendras ensuite gouverner cette province, ou lu mourras. Tout arriva comme elle l’avait prédit; on conte même qu a-bordnnl à Carthage, et sortant de son vaisseau, la même figure se présenta devant lui et vint à sa rencontre sur le rivage. Ce qu’il y a de vrai, c’est qu’il tomba malade, et que, jugeant de l'avenir par le passé, du malheur qui le menaçait par la bonne fortune qu’il avait éprouvée, il désespéra d’abord de sa guérison, malgré la bonne opinion que tous les siens en avaient conçue. Mais voici une autre histoire qui ne vous paraîtra pas moins surprenante, et qui est bien plus horrible. Je vous la donnerai telle que je 1 ai reçue.
« Il y avait à Athènes une maison fort grande et fort logeable, mais décriée et déserte. Dans le plus profond silence de la nuit on entendait un bruit de fer qui se choquait contre du fer, el, si 1 on prêtait l’oreille avec plus d’attention, un bruit de chaînes qui paraissait d’abord venir de loin et ensuite s’approcher.
Bientôt on voyait un spectre fait comme un vieillard, très-maigre, très-abattu, qui avait une longue barbe, des cheveux hérissés, des fers aux pieds et aux mains, qu'il secouait horriblement. De la des nuits affreuses el sans sommeil pour ceux qui habitaient cette maison : l’insomnie, à la longue, amenait la maladie, el la maladie, en redoublant la frayeur, était suivie de la mort; car pendant le jour, quoique le spectre ne parût plus, l’impression qu’il avait faite le remettait toujours devant les yeux, et la crainte passee en donnait une nouvelle. \ la lin, la maison fut abandonnée et laissée tout entière au fantôme. On y mit pourtant un écriteau nour avertir qu’elle était à louer ou à vendre, dans la pensée que quelqu'un peu instruit d’une incommodité si terrible pourrait y être trompé. Le philosophe Athénodore vint a Athènes; il aperçut l’écriteau; il demande le prix. La modicité le met en défiance; il s’informe; on lui dit l’histoire; et loin de lui faire rompre son marché elle l'engage â le conclure sans remise. Il s’y loge ; et sur le soir il ordonne qu’on lui dresse son lit dans 1 appartement sur le devant, qu’on lui apporte ses tablettes, sa plume et de la lumière, et que ses gens se retirent au fond de la maison. Lui, de peur que son imagination libre n’allât, au gré d’une crainte frivole, se figurer des fantômes, il applique son esprit, ses yeux et sa main à écrire. Au commencement de la nuit, un profond silence règne dans cette maison comme partout ailleurs. Ensuite il entendit des fers s’entrechoquer, des chaînes qui se heurtaient. Il ne lève pas les yeux ; il ne quitte point sa plume, se rassure et s efforce d’imposer à ses oreilles. Le bruit s’augmente, s’ap-
proche; il semble qu'il se fasse près de la porte de la chambre même. Il regarde, il aperçoit le spectre tel qu’on le lui avait dépeint. Ce spectre était debout, et l’appelait du doigt. Alhénodore lui l’ait signe d’attendre un peu, et continue à écrire comme si de rien n'était. Le spectre recommence son fracas avec ses chaînes, qu’il fait sonner aux oreilles du philosophe. Celui-ci regarde encore une fois, et voit que l’on continue à l’appeler du doigt; alors, sans tarder davantage, il se lève,prend la lumière et le suit; le fantôme marche d’un pas lent, comme si le poids des chaînes l’eût accablé. Après qu’il fut arrivé dans la cour de la maison, il disparaît tout à coup, et laisse là notre philosophe, qui ramasse des herbes et des feuilles et les place à l’endroit où il avait été quitté, pour le pouvoir reconnaître. Le lendemain, il va trouver les ma- > gistrats et les supplie d’ordonner que l’on fouille en cet endroit. On le fait ; on y trouve des os encore enlacés dans des chaînes ; le temps avait consumé les chairs. Après qu’on les eut soigneusement rassemblés, on les ensevelit publiquement; et depuis que l’on eut rendu au mort les derniers devoirs il ne troubla plus le repos de cette maison. Ceci je le crois sur la foi d’autrui; mais voici ce que je puis assurer aux autres sur la mienne.
« J’ai un affranchi, nommé Marcus, qui n’est pas sans savoir : il était couché avec son jeune frère; il lui sembla voir quelqu’un assis sur leur lit, et qui approchait des ciseaux de sa tête, et même lui coupait les cheveux au-dessus du front. Quand il fut jour on aperçut qu’il avait le haut de la tête rasé, et ses cheveux furent trouvés répandus près de lui. l'eu après,
pareille aventure arrivée à un de mes gens no permit plus de douter de la vérité de l’autre, lin de mes jeunes esclaves dormait avec scs compagnons dans le \ieu qui leur est destiné ; deux hommes vêtus de blanc (c’est ainsi qu'il 1c racontait) vinrent par les lenôtre?, lui rasèrent la tête pendant qu’il était couché, et s’en retournèrent comme ils étaient venus. I.e lendemain, lorsque le jour parut, 011 le trouva rusé, comme on avait trouvé l’autre, et les cheveux qu’on lui avait coupés épars sur le plancher. Ces aventures n’eurent aucune suite, si ce n’est que je ne fus point accusé devant Domitien, sous l’empire de qui elles arrivèrent. Je ne l’eusse pas échappé, s’il eût vécu; car on trouva dans son portefeuille une requête donnée contre moi par Carus. De là on peut conjecturer que, comme la coutume des accusés est de négliger leurs cheveux et de les laisser croître, ceux que l’on avait coupés à mes gens marquaient que j’étais hors de danger. Je vous supplie donc de mettre ici toute votre érudition en œuvre. Le sujet est digne d'une profonde méditation; et peut-être ne suis-je pas indigne que. vous me fassiez part de vos lumières. Si, selon votre coutume, vous balancez les deux opinions contraires, faites pourtant que la balance penche de quelque côté, pour me tirer de l'inquiétude où je suis ; car je ne vous consulte que pour n’y plus être. Adieu. »
THÉORIES.
PSYCHOLOGIE MAGNÉTIQUE.
Un prodige dans la nature n’esl autre chose qu'uu elTct plus rare que les autres.
Bcrius.
§ I-
Quesonl les distances dans l’infini cl dans l'éternité? llicn. Un poinl, évidemment. Ceci esl un axiome.
L’âme de l’iiommi*, ce souffle de Dieu, peut elle;, dans certaines circonstances, recouvrer pour un temps donné on môme pour toujours le souvenir de connaissances oubliées? Nous répondrons, nous, qnf> cette idée paraît assez vraisemblable pour qu’un puisse s'arrêter à l'examiner sérieusement. Ainsi donc : serait—iI tout à fait impossible d'admettre que notre âme, ce composé de tant d'éléments divers, puisse, parfois et à l’insu de son grossier vassal, noire corps, puisse, loui â coup, illuminée, pour ainsi dire, dévoiler îles connaissances que nous ne soupçonnions poinl devoir exister en elle? Ne posséderions-nous pas enfin en nous le germe de toutes les connaissances de nos aïeux? Cela, à notre avis, n'est nullement inadmissible : o;i ne pourrait le nier positivement, car peut-ôtre serait-ce illogique.
L'âme humaine, suivant toutes probabilités, doit avoircn soi un foyer de connaissances qui, dans certains cas, par quelque ébranlement spontané, ou physique ou moral par exemple, peuvent, lentement d'abord, successivement ou tout d’un coup, se révéler comme par prodige; foyer que nous pouvons longtemps et même ijueliiuefois aussi toujours ignorer, et cela,
jusqu’à ce qu'un fluklc bienfaisant sans doute vienne, lui, réchauffer ou vivifier son engourdissement, y provoquer ou déterminer en un mot l’éclosion (si nous pouvons ainsi parler) de certaines facultés refroidies peut-être, endormies cl seulement en germe.
Nous ne croyons poinl forfaire à la raison en avançant ce qui précède, el nous dirons même à l’appui que nous reconnaissons que l’âme 011 Y esprit qui est en nous acquiert quelquefois, bien positivement, dans l'état de sommeil et aussi dans l’état de veille, l’intuition de mots, de faits même, donl il ne se reconnaissait poinl le dépositaire! Cela esl pour nous évident. Quel esl l’homme, par exemple, qui, se livrant à des travaux d’imagination, n’a pus trouvé, parfois el tout d’un coup, dans un pli ignoré de son cerveau, certaines connaissances de mots, de faits ou d’idées tellement nouvelles el inconnues pour lui qu’il en sera longtemps resté frappé? De bonne foi, bien sincèrement, 011 conviendra de cela. Tout pénétré de cette vérité nous la transcrivons ici.
Pourquoi, encore, l’homme n’aurait-il pas en soi le germe ou le souvenir des ton 11 a i ssa nces acquises par l’innombrable série des êtres dont il a la quintessence dans son enveloppe maté-térielle? Ne voil-on pas d’illustres familles qui se transmettent d’âge en âge le génie ou le talent? Une longue liste de noms célèbres pourrait Ctre justement donnée ici comme preuve de ce que nous avançons.
L’hérédité de talent et de génie ne peut évidemment avoir toujours lieu. Le contraire, sans doute, doit quelquefois exister, mais c’est, à notre avis, l’exception. Nous poserons maintenant celle question : L’homme d’esprit, l’homme de génie plutôt, aidera-t-il à la formation de la brute? Nous répondrons, nous : Non, non, généralement non. Il y u donc alors en nous un germe inné de connaissances qui se transmet et se souvient.
Mais une autre question: N’y a-l-il pas, comme le dit Mesmer, dans l’espace el dans l’air que nous respirons, « un principe universellement ugissani, » dont nous pouvons nous
emparer el que même nous pouvons diriger suivant le plus ou moins de force de notre volonté? Nous le croyons, nous, et ce principe ne nous semble devoir être que ce qu'on nomme le fluide magnétique.
Contrairement â l’idée généralement répandue, nous pensons que le fluide magnétique ne tire point uniquement sa source du siège de nos nerfs, mais bien, principalement, de l’air ou de l’espace d’où nous le dérobons, pour ainsi dire, constamment, sciemment ou non.
Destiné vraisemblablement à ouvrir une ère nouvelle aux progrès de l’esprit humain, le magnétisme n’est probablement autre chose que le principe de vie universelle qui se transmet, se conserve, et que Dieu, dans sa bonté infinie, n’a sans doute mis en nous, autour de nous et à notre disposition, que pour soutenir, réparer, vivifier nos forces abattues, et aussi, surtout, pour apprendre aux hommes à se secourir cl à s’aimer les uns les autres !
§ ».
• Homme, connais-toi I •
Nous sommes presque toujours plus capables que nous ne te croyonsI disait un jour le spirituel et savant M. Tissot, de l’Académie Française, à l’une des séances de l’institut oratoire, dont nous faisions partie.
Jetée au milieu d’un brillant discours roulant sur les bienfaits de l’art de la parole, la belle pensée que nous venons de mentionner fut alors malheureusement peu expliquée par celui qui la laissa brièvement tomber de son esprit à ses lèvres. Persuadé que nous sommes aujourd’hui qu’elle peut tendre à prouver ce que plus haut nous avançons sur la nature supposée de l'âme (presque toujours en possession de trésors qui nous sont inconnus), nous sommes heureux de la rappeler ici.
Faisons maintenant une autre citation remarquable.
Le tout est dans tout! de J. Jacotot, ce grand et pro-
fond principe qu’on a lani attaqué lors de son émission, et qui esl la base d’une méthode d’enseignement général justement devenue célèbre, vient surtout appuyer merveilleusement el confirmer mémo l’idée que nous nous formons de l’âme : qui doit évidemment renferma-, à l’élut latent, le germe ou le principe de toutes connaissances humaines, dont lentement, d'abord, successivement ou tout d’un coup, quelque cause déterminante ou occasionnelle peut nous faire découvrir les admirables sources. Esl-il besoin à ce sujet de rappeler que le silex frappé donne des étincelles, el que l’éleclriciié recélée par l’ambre ne se produit qu’à l’aide du froilement?
Quelques rapprochements encore.
Les ressemblances physiques dans les ôlres qui nous ont précédés viennent aussi fortemenl à l’appui de l’opinion ci-dessus émise. Ces ressemblances doivent môme, à noire avis, toujours exister. Ne voyons-nous pas, en effet, indépendamment de la ressemblance nalurellemenl la plus rapprochée, c’esl-à-dire celle que nous gardons de nos pères et mères, de tout petils enfants ressembler à leurs grands parents? C’est surtout dans les nombreuses galeries de tabeaux représentant les portraits successifs des rois, des princes ou des familles opulentes enfin, que le fait mentionné ici est surtout frappant. Les changements de types physiques n’existeraient donc pas en principe, sauf pourtant l’exception qui est dans tout.
Parmi les types qui se sont conservés sans altération depuis un grand nombre de siècles, il est esssenliel de rappeler ici celui du peuple juif. Le sang juif n’est à la vérité pasmôlé, el, par ce fait, plus apte à reproduire constamment un type originel; mais en est-il de môme chez beaucoup d’autres peuples dont le type se reconnaît toujours parfaitement, des Espagnols, des Anglais, des Russes, par exemple? Non.
Nous dirons donc maintenant :
Puisque la ressemblance ou forme physique sc transmet, c’est qu'évidemment l'âme se souvient.
Ne reconnaîtrait-on pas, d’après ceci, que, malgré la grande
fusion des êtres pensants (el indépendamment sans doute des influences clinvaiériques), l’homme n’a réellement qu’un lypc vers lequel il tend toujours à revenir, c’est-à-dire vers celui qui estsorli palpitant des mains du Créateur? La Genèse alors ne serait que Valpha de l'histoire de tous les peuples, dont Dieu seul voit l’oméga!
Am. Thuillier (de Sainl-Mnrccau).
(La suite au prochain numéro.)
INFLUENCE DE LA MUSIQUE
SUR I.ES MAGNÉTISÉS.
11 m’a toujours semblé que l'homme insensible aux charmes de la musique était privé d’un sens, qu’il élait incomplet; mais c’esl l’exception, puisque généra lemen t nous sommes tous plus ou moins impressionnés par l’harmonie musicale en raison de notre organisation, de notre susceptibilité nerveuse el des conditions dans lesquelles nous sommes placés.
Je ne puis accepter complétemenl cette proposition d un de nos spirituels écrivains: Que la musique n’a été mise au monde que pour la femme et l'amour.
Les deux sexes y sont également sensibles et en sont charmés à tous les «âges de la vie. Le cœur ne vieillit pas; si pour les uns c’est encore l’amour, pour les autres c’esl le souvenir, ce qui a bien aussi ses charmes.
Chez les êtres bien organisés l’effet produit par la musique est tendre, vif ou puissant, selon lerhylhme, mais il est susceptible d’un aulre développement dans quelques circonstance particulières, ainsi qu’on pourra en juger par le fait dont nous avons été témoin et que nous allons rapporter.
Tout récemment, étant en visite un matin chez la chas-mante comlessede V‘**,elle me proposa de l'accompagner fo
soir chez M. Lafonlaine, pour assister à quelques expériences de; magnétisme. Nous n’arrivâmes pas des derniers; et là, complètement captivé pendant plus d’une heure, je restai frappé d'étonnement en présence des prodiges que je serais incapable de bien exprimer, tant les termes sont insuffisants pour rendre dans toute leur vérité certains phénomènes.
Deux jeunes personnes du moins de vingt ans, remarquablement belles, dont l’une avait été présentée chez M. La-fontaine par M°“ la comtesse de V“*, se livrèrent successivement, avec une grâce parfaite, â l’expérimentateur, pour nous offrir la preuve de Vinfluence de la musique dans l'état de somnambulisme. Après avoir été endormies par les moyens ordinaires du magnétisme, elles ne tardèrent pas â se trouver dans l’état de lucidité désirable. Alors un savant instrumentiste se mil au piano, el, selon le rhylhmede l’air qu’il faisait entendre, il agitait à volonté, exaltait, calmait ou pénétrait d'attendrissement les jolies somnambules, qui le prièrent plusieurs fois de ne jouer que des airs tendres, el de préférence des airs religieux. L’une d’elles demanda à plusieurs reprises V Ave-il aria; alors elles arrivaient à la plus complète, à la plus haute exlase. Quelque chose de ravissant, de céleste se montrait à ce moment sur leur figure et dans leur pose; ce n’étaient plus desmorlelles, c'étaient desanges !...ÉTu ne voyait sa mère qu'elle a perdue récemment; elle se trouvait en communication avec elle, lui tendait les bras en tombant â genoux, se relevait avec élan, s’exhaussait sur la poinle des pieds comme pour atteindre. Ah! quel ravissement inimitable se peignait dans cet ensemble, sur cette angélique ligure.
L’autre voyait son ange gardien qui la charmait et un jeune cousin qu'elle a perdu. Les objets affectueux qui en ce moment captivaient leur esprit possédaient loul leur être; cet état attendrit l'auditoire et le loucha même jusqu’aux larmes. Rappelées un peu de cet étal extrême d'exaltation par une légère transition de la musique, elles furent questionnées et ne dirent que leur vision seulement ; quant aux détails qu’on
leur demanda, elles répondirent qu’elles n’avaient point d’expressions pour rendre les merveilles qui s’offraient à leurs yeux, ei que d’ailleurs 011 ne voudrait pas les croire.
Ramenées à I état normal, elles ne gardèrent pas la moindre souvenance de leur vision. Dès ce moment elles ne se montrèrent pas plus sensibles que les autres personnes présentes aux charmes d’une excellente musique que l'on continua de jouer.
Comme ces deux jeunes personnes ne furent poinl endormies ensemble, mais bien séparément, chacune d’elles, à son tour à l’étal de veille, témoin des manifestations de l’autre, montrait le môme éionnement que tout le monde de ce qu’elle voyait.
Nous ne croyons pas qu’on puisse mettre en doute celte expérience, l'éducation et la bonne condition dans le monde de ces jeunes personnes les plaçant à l’abri de toui sou|tçon do tromperie, el de s’élre voulu prêter à une jonglerie. L’une est devenue extatique en la magnétisant contre l’épilepsie, dont elle a élé guérie en quarante jours.
Cet étal extatique produit par une musique tendre, nous dit M. Lafonlaine, porle invariablement le sujet à l’idée de Dieu, cl le pénèlre profondément du sentiment religieux. Il n’est plus de ce monde : il esl dans le ciel et 11e revient sur la terre qu’à regrel.
Les deux jeunes personnes que nous avons vues se plaisaient uniquement à entendre des airs pathétiques et religieux. Jouez, jouez, je vous en prie,\’Ave-Maria, répétait dans son sommeil magnétique l’une des deux intéressâmes somnambules, et dans ce moment elle éprouvait la plus ravissante exiase.
Combien le tableau de sainte Thérèse eûl été plus expressif et plus vrai, si son savant auteur avait pu voir avant des extases semblables aux deux dont nous avons élé lémoin el que nous venons de rapporter dans des termes si faibles.
Le colonel ch" Mac Sheeiiy.
P.iris, 1” onftt.
revue mensuelle.
SOCIÉTÉ DU MESMÉRISME.
Séance du 5 juin. — Discussions sans importance scientifique.
Séance du i2 juin. — M. Perrody magnétise un jeune homme présenté comme cataleptique et insensible à la douleur; son élat laisse des doutes de simulation. On l’invite à revenir se soumettre à de nouvelles expériences, mais il n’est pas revenu. M. Hébert lit un rapport sur un ouvrage de M. Chardel, intitulé ; Psychologie physiologique, dans lequel l’auteur examine longuement el avec un rare savoir l’impor-lante question du somnambulisme magnétique.
Séance du 19 juin. — Un appienli bijoutier, de douze ans environ, magnétisé, présente le phénomène de lucidité au travers des corps opaques. Les yeux tamponnés avec du coton el couverts de trois épais bandeaux, il fait plusieurs parties d’écarté en indiquant les cartes de son adversaire.
Sur la question de savoir si, dans l’eau magnétisée, le fluide esl dissous dans le liquide ou simplement à la surface, une discussion s’engage, et M. Dupont affirmant que, d après des expériences qui lui sont propres, il y est dissous, M. le président, sans en donner les raisons, dit que c’est impossible. Vile, à l'œuvre! s’écrie-t-on, et l’on fait venir une somnambule avec qui on a déjà fait des expériences de ce genre (page 187). M. Dussaux conduit lui-méme l’expérience, el à son grand étonnement la réponse de la magnétoscope est
celle-ci : « i.c fluide, connnc un morceau de sucre, se dissout dans toutes les parties de J’eau. »
Stances des 20 juin et 5 juillet. — Discussions réglemen-taiivs. M. le censeur rappelle M. le président à l’observation des statuts et règlements et l'accuse d'y substituer sa volonté. M. Hébert fait observer à cette occasion qu’il y a toujours assez île règlements pour celui qui n’a pas l'intention de s’y soustraire, et qu’on perd ainsi en discussions stériles un temps précieux pour la science.
Séance du 10 juillet. — Par suite de la démission écrite de M. Dussaux, membre et président du la société, on procède à l’élection d'un nouveau président. M. Hubert esl élevé à cette dignité, et remplacé à la vice-présidence par .M. le docteur Cruxen. On décidequu le lieu de réunion sera changé (1 ).
Séance du 17 juillet. — M. Wailly rapporte qu'un de ses parents guérit par le magnétisme des brûlures jusqu’au troisième degré, et cela si promptement qu’il propose de se brûler devant la société pour lui montrer la rapidité de son action. La société accepte la proposition. M. Burnct cite un cas qui, tout en confirmant l’observation précédente, n’est pas d'accord sur le leinp-;. M. Aniy rapporte divers cas de guérison et irails de lucidité magnétique.
Séance du 24 juillet.—Les alchimistes cherchant la transmutation des métaux ont enrichi la chimie d’une foule d'agenls à qui celte science est redevable de ses progrès ultérieure. Il en sera peut-être de même en magnétisme. Mais quels tâtonne* menis! du Lulle à Lavoisier, que de travaux inutiles! quelle lenteur en tout ! De IV;).c'xrpov frotté de Thalès ù la pile galvanique, la distance est immense! \ combien d’essais infructueux ne sommes-nous pas encore exposés avant la venue du Volia du mesmérisme?
La cause inconnue dus phénomènes auxquels Mesmer a donné le nom de magnétisme animal est-elle une propriété dus
(0 II est maintenant rue de Gri’iielle-Saint-Ilonoré, n" 10.
corps, comme celled cire pesant, sonore, coloré, eic., ou bien est-ce un agent spécial, comme ceux qu’on appelle impondérables (calorique, électricité, lumière, aimant)?
Mesmer croyait que c’éiaii une propriété du corps animal, et par magnétisme animal il entendait, non la cause, maisl'en-semfr/eîles phénomènes, 011, comme il le dit, « tant lo système « des influences en général que ladite propriété du corps ani-. mal, ainsi que le remède et la méthode de guérir. » Puis, prévenant contre le penchant qu'a l’esprit aux abstractions, il ajoute : « Je vois avec regret qu'on abuse légèrement de celle « dénomination : dès qu’on s’est familiarisé avec le mot ma-« gnétisme, on se flatte d’avoir l'idée ilcla cliosc, tandis que l’on « n’a que l'idée du mol. »
L’idée d’un agent spécial appartient aux successeurs de ce grand homme. C'est une grande révolution dans la chose. Presque tous s’accordent sur son existence et lui ont donné les noms de fluide magnétique, nerveux, vital, électricité animale, etc.
D’autres, au contraire, nient que ce soit ou nue propriété du corps animal ou un agent spécial. Ils regardent l'électricité statique, le galvanisme, le calorique, l’aimant, la lumière et la cause encore inconnue des phénomènes du magnétisme animal, comme autant de modifications d'un fluide unique et universel qu’ils nomment l'éther.
De ces trois hypothèses, laquelle est la vérité? Tel est le problème sur lequel l’expéiience esl appelée â prononcer.
Les choses en étaient là quand M. Dussanx, assurant qu’il a reconnu que l'aimant, l'électricité, le galvanisme et le fluide magnétique ne sont qu’une seule el môme chose, annonça une nouvelle théorie dont on n’a encore pu lui arracher que quelques lambeaux sur lesquels il n’est pas possible de se prononcer.
La Société de Philosophie appliquée au magnétisme entreprit sous sa direction une série d’expériences qui semblèrent confirmer son opinion. De là l'annonce d’un moyen chimique de
constater l’exislcnce du fluide magnétique et son identité avec l'électricité (1).
Voici la proposition :
L’eau magnétisée el l'électrisée rougissent le bleu de tournesol. Or, te fluide magnétique et V électricité sont identiques et de plus ACIDES.
Quoi de plus précis si on voulait accepter sans contrôle? Mais on s'est servi d’eau commune; ne contenait-elle pas des sursels, calcaires ou autres, qui ont pu occasionner cetteréaction sur le tournesol? L’expérience est inexacte; il faut la recommencer, et c’est ce qui a lieu aujourd'hui au sein de la Société du mesmérisme.
Voici de l’eau distillée sur de l’oxyde de calcium, privée d’air el d’acide carbonique; les réaclifs ordinairesn’y décèlent rien d’hétérogène, elle esl chimiquement pure el la réaction ne peut venir d’elle.
On l’a magnétisée à plusieurs reprises, avec tous les soins possibles, et le Jait annoncé ne se produit pus.
L’essai fait avec de l’eau commune resle également sans résultat. A quoi cela tient-il? C’est bien simple, répond M. Hébert: la transpiration cutanée étant acide, il suffit d’avoir touché avec les doigts moites la partie du papier qu’on a plongée dans l’eau pour que la réaction observée ail lieu. Après de nombreux essais, on reconnaît qu’en effet le simple contact de la peau avec le papier de tournesol le fait rougir aussitôt qu’on le met dans l’eau (eorpora non agunt nisi si ni soluta). Sur la langue il rougit immédiatement. Le doigt mouillé produit le même effet.
On doit des remerciements à M. Dussaux pour les recherches auxquelles il s’esl livré; mais il s’est trompé, il a pris la sueur pour le fluide magnétique. Son erreur, au resle, sera profitable à ceux qui s’occupent de recherches analogues. L’écueil esl signalé.
(1) Voyez pages 22.r> et 334.
La société décide ensuite qu’on fera cnnnailre la ligure ci-conlre lu sceau qu'elle a adopté en rcniplacemeni de celui qu’elle a perdu ; déclarant qu’elle ne reconnaîtra, à l’avenir, comme émanés il'elle, que les actes el documents revêtus de celle nouvelle empreinte.
SOCIÉTÉ PHILANTHROPICO-MAGNÉTIQUE,
Séante du 11 juin. — Les mnlailcs qui se préseiïvjnt sopt confiés aux soins de MSI. Possin, Roustan, Millet. M. SrtncuL donne des détails sur l’élal d’une paralytique qui offre un intéressant exemple de la puissance magnétique. Celte dame a l’abdomen assez volumineux, mais tellement sensible que la seule approche ou l'éloignemeni de la main imprime au paquet intestinal un mouvement de va el vient assez semblable à celui d'un soufflet de forge. L’élal de cette malade s’améliore de plus en plus.
M. Hébert esl nommé président, en remplacement de M. Deligny, à qui 011 décerne le litre de membre honoraire. C’esl, aux termes des statuts, la plus haute marque d'estime.
Séance du i 8 juin. — Un lionune qui avait en vain épuisé toutes les ressources de l’art contre une affection ophthulmiqucà laquelle de nombreux médecins consultés ont donné un nom différent, M.Rochefort, dont il aétêparléâ la séance du •ijuin, offre à la société l'exemple d'un fait qui n'est pas rare, mais qui n’a pas assez fixé l'attention : la diminution graduelle de la sensibilité magnétique. Tous les jours, depuis le 4, cet
homme n (MO magnétisé; ses veux vont de mieux on mieux ; mais aussi, sentant l'action magnétique de moins en moins, il en esl arrivé aujourd’hui à ne plus éprouver qu’un peu de calme, de bien-être, lui que le pied dirigé vers son épigastre renversait à terre avec une promptitude inouïe. On a lant d’observations de ce genre qu’on en pourrait formuler la lui ainsi : l'aptitude des malades i ressentir l'action magnétique diminue d'autant plus qu’ils approchent davantage de leur guérison.
M. Osleau magnétise ensuite un homme fort el d’une taille élevée. Après un certain balancement de la tète d’arrière en avant, le magnétisé tombe dans un coma profond, et sur le commandement mental de M. Osleau il va s’asseoir sur un siège désigné au préalable par M. le président.
Celle opération continuée amène l'état de roideur cataleptique des membres. Les bras, insensibles à la douleur, restent horizontalement étendus durant vingt minutes environ. Le réveil ne détruit ni l’insensibilité ni la catalepsie, au grand étonnement de ce colosse qui s’indigne de ne pouvoir se servir de ses bras.
M. le président, faisant remarquer à l’assemblée que ces expériences ne sont pas instituées pour satisfaire une vaine curiosité et servir de spectacle aux oisifs, énumère les divers avantages qu’on peut retirer de cet étal d’insensibilité dan? les amputations el 'outes les opérations chirurgicales, ordinairement si douloureuses qu’elles laissent dans un étal nerveux, tétanos traumnlique, par exemple, qui entraîne souvent la morl.
Un autre se soumet à l'expérience; c’est encore M. Osleau qui agit. Une série de phénomènes non moins curieux que les précédents captivent l'attention générale. D’abord, convulsions du globe oculaire; la pupille dirigée en haut el en dehors; abaissement des paupières avec impossibilité de les mouvoir. L’entendement esl parfait. Le plient a conscience de son étal -, il entend tout ce qui s: dit el se fait autour de lui. Aucun trouble, aucune cène dans l’exercice des fonctions cé-
rébrales, excepté pour la volonté qui n'exerce déjà plus son empire sur les brus, les jambes. Il n’a pas la force ni le pouvoir (le résister à l’action qui l'envahit; inCine soutenu par Jeux hommes il ne peut se maintenir dans la station verticale; sis jambes fléchissent sous le poids de son corps; il s’affaisse, cl tout atteste qu’il obéit malgré lui aux lois gravitatives.
Séance ilu -> juin.—Discussions réglementaires. Réception de M. Duteil cl des docteursComellas et Zulueta.
Séance du 2 juillet. — M. Possin fait son rapport sur un malade que la société a confié à ses soins, .M. Anphronsky, médecin polonais, qui va de mieux en mieux.
M. Henry rapporte un cas de guérison de rhumatisme chronique, de vingl ans de date, obtenue en huit magnétisations.
M. Lapone rapporte un trait de lucidité confirmant lous ceux précédemment observés. Une somnambule,consultée sur une mèche de cheveux d’un malade qui habile le midi de la France, indiqua les mômes remèdes qu’un médecin appelé extraordinairement île Toulouse. Ce qui donna grande confiance au malade de voir qu’à deux cenls lieues de distance, et sur la seule indication d’une mèche de cheveux, la lucide était d’accord avec le nouveau médecin. Le traitement fui suivi, et au bout d’un mois, contre l'attente de ses proches qui le croyaient perdu, ce malade fut bien.
Séance du 9 juillet. — Election d'un secrétaire. M. Possin réunit la majorité des suffrages. Rapports de MM. Winnen, Roustan,Simon, Millet, sur les malades dont la société leur a confié le traitement. Lecture d’une lettre adressée de l’île Bourbon, contenant la relation d’un cas de somnambulisme lucide, obtenu durant la traversée sur un passager affecté d’un clignotement involontaire et fréquent des paupières. Guérison de celte infirmité par le simple emploi du magnétisme.
Séance du 16 juillet. — On magnétise successivement huit ou dix personnes qui éprouvent des effets sans importance.
LE MAGNÉTISME A CHERBOURG.
Le Journal de Cherbourg des 20 et 24 juillet contient deux longs articles sur des expériences faites par M. Marcillei, dans le local du cercle magnétique. La lucidité d’Alexisa vivement impressionné, remué les intelligences normandes;sur la place publique, dans les cafés, dans les salons, partout, le magnétisme est le sujet des conversations. Ces articles, signés U.....
sont d’un observateur profond; il fait remarquer, avec beaucoup de justesse, à ses concitoyens que le somnambulisme n’est qu’un des nombreux effets du magnétisme. 11 parait n’ôtre pas étranger aux phénomènes magnétiques non plus qu’aux connaissances médicales. Les nombreux cas de ludicilé, avec les considérations qui les accompagent, auront exercé une influence favorable sur les esprits cherbourgcois, mais ils n’apprendraient rien aux magnétiseurs. C’esl pourquoi nous ne les reproduisons pas. Notre devoir étant de ne rien laisser passer sous silence, nous signalons la source à ceux de nos lecteurs qui seraient désireux de détails circonstanciés sur ce point.
HYDROSCOPIE.
Les dernières explorations de M. l’abbé Paramelle dans notre arrondissement ont élé fructueuses. Accompagné de M. le maire, de plusieurs conseillers municipaux et de M. L. Girod, architecte de la ville, il les a terminées lundi dernier en désignant d’une manière précise les sources qu’il n’avait fait qu’indiquer à son premier passage à Pontarlier. Il a trouvé trois sources sur le territoire de celte ville : l'une près de la tuilerie; une seconde près des sources qui servent actuellement aux besoins des habitants; une troisième, enfin, â Côie-Jeunet, à trois ou quatre cents pas de la ville. En réunissant ces trois sources au moyen de. tranchées, on obtiendrait un volume d’eau assez considérable pour alimenter une popula-
lion do 20,000 habitants. Ces eaux sont do bonne qualité cl peuvent facilement Cire amenées en ville.
L'administration municipale, semant l’inlériH d’une aussi grande découverte, a accepté sans hésiter les trois sources indiquées. Les recherches su feront prochainement.
En quittant le terrain, M. Paramelle a déclaré que sa dernière découverte était une des plus importantes do celles qu’il avait faites dans tout le département.
(Nouvelliste de Pontarlier.)
— Nous avons dit que l’abbé Paramelle, si connu par la faculté incontestable d’apercevoir les sources à des profondeurs diverses dans le sol, no devait pas cette faculté à des éludes géologiques, mais à une propriété magnétique, ou, si l’on préfère, (mimique. Voici venir, pour prouver notre assertion, un jeune ouvrier du nom de Tannigor, né à Bercher (canton de Vaud), qui opère avec le même succès, et qui n’a pas la moindre prétention à se dire géologue. Il a indiqué el trouvé lui-méme des sources à deux cents loises sous terre. Appelé dans lo Jura, il a étonné par la justesse de ses indications. Les maires des communes où il opère, les préfets eux-mômes, s’empressent de lui donner des certificats. Ce sieur Tannigor procède d'une autre manière que l’abbé Paramelle; il n’exige rien pour l'indication de la source réelle, el moyennant un prix convenu, aidé de plusieurs ouvriers, il mel la main à l’œuvre et exécute les travaux nécessaires pour amener l’eau au point désiré. Il habile en Suisse, mais il se rend dans les communes de France où on le faii appeler.
(Mouche de Saône-et-Loire.)
NÉCROLOGIE.
M. I-anoix, ancien pharmacien, esl morl à Monlplaisir, près do l.yon, le 20 juillet, 5 105 ans et demi. Il était élève de Mesmer. Le magnétisme perd en lui un adepte dévoué.
(Tribune Lyonnaise.)
BUSTE DE MESMER.
line commission composée de MM. Gauthier, Cruxen et Brice de Beauregard a arrêté ainsi qu'il suit les conditions de souscription :
. Le buste esl commandé à l’un des bons artistes de Paris. Il sera - en plâtre et exécuté sur la gravure que possède M. Brice.de Beau-
• regard (celte gravure représente Mesmer dans les derniers temps de
■ sa vie). La surveillance d’exécution en est dévolue à M. Gauthier.
• Chaque buste, tiré avec soin à l’aide d'un creux, coûte 20 francs;
• mais la commission en fera tirer cinquante, et elle s'engagea livrer
• gratis le buste de l'illustre défunt à toute personne qui souscrira « pour dix francs.
• Les souscriptions les plus minimes seront reçues; elles doivent « être adressées à M. le comte Brice de Beauregard, rue de l’Echi-. quier, 23 ( bureau de poste D), ou au bureau de la Revue magné-« tique. •
L'excédant des six cents francs nécessaires à l’exécution de cette œuvre sera «attribué à des bustes supplémentaires qui seront tirés
• au sort cnlre les souscripteurs au-dessous de dur francs. ■
LISTE DES SOUSCRIPTIONS OPÉRÉES.
M. Voirin.dc Nancy............................................................................100 fr-
JH. Aubin Gauthier................•..........................................2S
M. Winncn..........................................................................................5
M. de Willierj.....................................................................................20
M. Brice de Beauregard......................................................................ss
M. Cruxen............................................................................................25
M. Possin...............................................
M. üesbois, d.-m-, de Rouen............................................................,0
M. Paquenot, de Troyc»....................................................20
M. Ruffin, de Noisy-lc-Grand............................................................2»
Société du Mcsmcrismc de Paris........................................................*0
— philanthropico-magnétique de Paris......................................10
— du magnétisme de Rouen....................................................10
Total............30»
Le Propriétaire-Gérant, HÉBERT (de Garnay).
JOURNAL
1)U
MAGNÉTISME.
VOYAGE A SAINT-PÉTERSBOURG.
(Fin.)
« J'ai vu le mal, mais n’aime que le bien. ■
Maintenant le magnétisme est partout; qu’en va-t-on faire? Vous croyez que la science va s’en occuper, l’étudicr? Pas (lu tout, les savants ont trop d’esprit. D’ailleurs cette découverte est utile, et c’cst une raison de plus pour ne point l’examiner. Pensez-vous que les malades vont accourir en l'oule chercher la santé près de cette source nouvelle? Comme vous connaissez peu les hommes! Tenez : une princesse souffre, languit, se meurt; vous croyez qu’on va essayer de la soulager; vous vous trompez : on est occupé à faire bouillir des petits chiens pour en administrer la gélatine à la mourante, line autre personne plus auguste encore est dans un état nerveux qui inspire la pitié et vous donne à vous-môme de lagône et de la douleur. Vous ôtes fondé à croire qu’on va
chercher dans le magnétisme une ressource que vous croyez presque infaillible pour la guérir! Non, non; un grand médecin a rendu en liant lieu le magnétisme ridicule. Trompé par une parade magnétique, on dédaigne l'homme qui possède la science, et 011 s’en ira par une lente agonie, malgré les secours de la médecine, retrouver d’illustres aïeux. Partout la mort moissonne. Ah ! tant mieux, sourions à la mort, c’est un puissant remède, toute douleur cesse!... Cruels que vous ôtes! La société n’est pas composée d’indifférents seulement ; il y a des êtres sympathiques qui ne peuvent se consoler de la perte d’un enfant, d’une sœur, d’un frère, et que les chagrins minent et usent avant le temps.
Vous qui vous trouvez dans un de ces cas, madame D***, vous vous présentez à ma pensée; et comment aurais-je pu vous oublier? vous avez souffert cruellement delà perte d’un fds. La maladie, profitant de l’épuisement causé par la douleur, est venue frapper à votre porte et vous a saisie. Nul médecin ne put vous guérir. La fièvre vous dévorait, car en voulant la faire cesser on a doublé ses ravages, et vous u’éliez plus que l’ombre de vous-môme. Vous guérirez par mes soins; j’aurai besoin de vous les prodiguer longtemps, mais qu’importe : vous serez guérie par l’étranger. La Providence est venue à votre secours, j’ai été choisi par elle; j'ai vu votre agonie, et, inébranlable dans ma foi, j’ai chassé le froid qui glaçait déjà vos membres. Vous vivez! soyez heureuse désor-mdis. L’étranger n’oubliera point que vous fûtes reconnaissante; une pensée de lui ira souvent vers vous pour témoigner de son souvenir.
Dira-t-on que je suis lu seul à opérer de telles guérisons, ù faire de si belles choses? Mais voici une malade (1) couchée depuis huit ou neuf ans et ne pouvant faire un seul pas ; elle marche maintenant, grâce au magnétisme. Le général Paclikoffa fait celte guérison aux yeux de toute la ville. Mais telle est la sottise humaine. Ce général, à tort ou à raison, comme homme privé, n’inspire nulle confiance. Il faudrait, dit-on, i/uü ce fut un autre homme pour qu'on appréciât le fait. Mais qu’importe l’homme ici, c'est la chose qu’il faut voir!... Comment comprendre les motifs d’un tel aveuglement? N’est-ce pas à se briser la tête?
Dans Moscou des cures merveilleuses se firent aussi, mais les magnétiseurs trahirent la science en en abusant. A qui s’en prit-on? n l’instrument, à l’homme vicieux? pas du tout. C’est à la découverte elle-même; 011 la rejeta au loin, tandis que les coupables devaient seuls être punis.
A Berlin la même chose. Un abus, un crime, qu’importe, vint détruire ce que dix années d’expérience avaient établi !...
Insensés, proscrivez donc le feu parce qu’il a causé et causera des incendies; rejetez les couteaux, car ils ont servi à commettre des assassinats; chassez donc aussi les médecins en masse, parce qu’il s’est trouvé des Casting et d’autres grands scélérats. Les prêtres n’ont-ils pas eu aussi dans leur sein des monstres qui ont épouvanté la terre? Pourquoi ne les rendez-vous pas tous solidaires do tant de crimes?
(1) I,a sœur du prince d'OndotikofT-Korsakofr, vice-président del'Acadé-mie impériale des Sciences,
Ne serez-vous injustes que pour la découverte de Mesmer? Faut-il que la raison vous abandonne quand il s’agit de magnétisme ?
Partout où il y a des hommes il y aura des vices et des abus. Mais est-il défendu de prendre des précautions? N’existe-t-il point do lois pour punir les coupables, et fuut-il que les gouvernants obéissent eux-mêmes à d’aveugles préjugés?
La plainte que j’exhale ici trouvera un écho, sans doute, comme toute plainte légitime. Poursuivons donc notre carrière et prenons confiance. Ne nous a-t-on pas laissé agir en toute liberté ? avons-nous eu à lutter contre les entraves du pouvoir? Non, et c’est un progrès à constater. Je remercie de tout mon cœur le monarque puissant qui règne sur ce pays. J’ai pu dire et faire tout ce que j’ai voulu. Mes efforts ne seront point perdus ; les mots magnétisme, somnambulisme, sont passés dans le langage avec leur valeur et les faits qu’ils représentent. Là encore c’est une croyance que j’ai établie, et si tous les élèves que j’ai pu faire ne deviennent point tous instruments de propagation, quelques-uns cultiveront et répandront la doctrine magnétique. Mon nom ne sera non plus oublié, car riches et pauvres ont appris à le prononcer, et il en sera ainsi jusqu’à ce qu’un magnétiseur plus habile achève la conquête des intelligences rebelles.
Le froid, remarque curieuse, avait d’abord diminué ma force magnétique. C’est ainsi que, dans un hôpital situé fort loin de la ville, dans l’île du vieux Péters-bourg (hôpital de Pierre et Paul), toutes les expériences que j’y ai pu faire n’ont été que de pâles
ébauches. Elles avaient lieu le matin après une course rapide en traîneau, par un froid très-intense. Malgré que j’eusse choisi les malades, à peine si j’ébranlais le système nerveux de quelques-uns, bien propres pourtant à être remués par l’agent de la nature. La volonté, les désirs ne suffisent point, je l’ai dit ailleurs : il faut encore des conditions physiques, et lo climat, pour un instant, me les avait ôtées. Petit à petit je me suis fait au climat, je suis devenu Russe et j’ai pu reconquérir toutes mes forces.
Aucun peuple peut-être n’est mieux disposé que les Russes pour recevoir et pratiquer le magnétisme. 11 est dans les croyances, et comment y est-il entré? pur les traditions populaires et par les pratiques magnétiques existantes dans les campagnes depuis la plus haute antiquité. Et si ce n’était le doute philosophique que la noblesse rapporte de ses voyages, on retrouverait en elle toutes les idées populaires sur le sujet qui nous occupe. Chaque Russe a quelque chose de mystique dans ses croyances; il a à vous raconter des pressentiments, des prévisions venant de lui ou des siens, et qui se sont justifiés.
Nos philosophes diront quec’est apparemment parce que ce peuple est dans l'enfance. Mais nous leur répondrons que les peuples qui ont vieilli en état de civilisation sont plus près de l’enfance que les Russes, mais d’une enfance sénile qui approche de la décrépitude. Leurs instincts se perdent de plus en plus; il est vrai qu’ils ont lascience; ma foi,j’allais l’oublier! Savez-vous, lecteur, que rien n’est bête comme un savant, et que personne n’a plus de préjugés; il no sait ni se conduire ni se gouverner; il a perdu d’un
côté ce qu’il ii ga.'nié ilo l'autre. Presque étranger au sol qui le nourrit, le plus sotties paysans en sait sur les choses vraiment utiles infiniment plus que lui. C’est pour cela qu’il faut surtout se garder de la médecine savante, qui est la plus cruelle do toutes les sciences. Qu’on me pardonne cette boutade ; je n’entends parler que de la généralité des savants; je sais qu’il va des exceptions très-lionoraldes, je connais des hommes dont le vaste esprit embrasse toutes choses; mais ceux-là se croient peu savants qui le sont vraiment; ils sont comme des demi-dieux qui veulent qu’on les croie hommes.
Dans ce pays, des gens simples (mougiks) savent des mots qui chassent les douleurs; ils ont des signes à eux connus, ils promènent les mains sur les malades, et ces pratiques toutes magnétiques guérissent parfois des gens regardés comme incurables. Il est vrai de dire qu'ils se trompent sur la cause de ces guérisons, mais qu’importe; peut-être nous-môme nous trompons-nous aussi lorsque nous assurons formellement l'existence en nous d’une force physique que nous avons appelée magnétique; car les hommes qui auraient pu redresser nos erreurs sur les causes do notre action sur les malades sont restés étrangers à l’objet do nos études.
Quoi qu’il en soit, le résultat de mes efforts sera bientôt apparent. Voyez en effet ce qui se passe en Angleterre, pays du doute el de l’incrédulité. Pendant vingt mois j’ai enseigné au milieu des rires la vérité mesmérienne, dont personne no voulait admettre l’existence. La presse écrivait môme qu’il fallait me jeter en prison, car je trompais les hommes, et main-
tenant les opérations les plus graves sc font sans douleur, les maladies rebelles â la médecine sont guéries par le magnétisme; bien plus, les ex-malades en publient cux-mt'tnes la relation. N’cst-cc point un beau triomphe? Les cendres de Mesmer doivent tressaillir, car il a voulu et prédit lebien qui se fait actuellement. Le bien ! ah! faisons-cn remonter jusqu’à Dieu l’origine; ceux qui le pratiquent ne sont que les instruments de son infinie bonté, c’est lui qui les inspire.
Seul et recueilli en ce moment, je médite sur mon art. Je voudrais aussi contribuer à rendre les hommes plus heureux et les doter des moyens de sc conserver en santé. Pourquoi faut-il que mon intelligence soit rebelle? N’ai-je donc point en moi de nobles désirs? Vienne la clarté chasser l’obscurité, et, lorsque je verrai distinctement le jour de l’intelligence, je tracerai des règles que je crois exister, et je tâcherai d’établir les lois qui président à la santé comme à la maladie. Il est temps cette nuit de cesser tout travail. Remettons au lendemain... Mais quel bruit sc fait entendre?!^ canon gronde, sa puissante voix annonce-t-elle la paix 011 la guerre? Pourquoi ce bruit de mille cloches? Pourquoi cette foule à minuit dans les rues? Quel grand danger menace la ville? La crainte trouble-t-elle tous les esprits? Non, non, c’est la joie. Une population immense se rend dans les temples pour entendre des chants d’allégresse, pour se donner un baiser de paix et d’oubli. Tout à l'heure un puissant monarque va donner l’exemple : il embrassera le plus humble de ses sujets, et les échos de ces voûtes saintes vont retentir ail bruit des étreintes do cette fraternité. Par quel prodige cette fusion des
cœurs s’esl-ellc opérée? Un seul souvenir y donne lieu. L’homme-Dieu mourant sur la croix a dit il y a deux mille ans : Tous les hommes sont frères; aimez-vous les uns les autres, c’est la loi et les prophètes. Ces paroles et cette fin sublimes n’ont point élé oubliés des hommes; ils fraternisent chaque année pour les éterniser. C’est un jour de bonheur dont la foi seule est cause, et jamais la science et la philosophie ne produiront rien de pareil. Moquez-vous donc de ces cérémonies si vous le pouvez, sceptiques et rieurs; votre tranquillité apparente ne vous donnera jamais une heure de joie sans mélange, et en mourant aucun de vous n’éprouvera celte douce sérénité, présage d’une vie plus heureuse.
Mais j’oublie qu’ici ma lâche est finie; parlons pour d'autres pays.
Baron du Potet.
MANUEL DU MAGNÉTISEUR.
(Suite.)
ACTION DU MAGNÉTISME A DISTANCE.
Lorsque vous n’avez point de sommeil magnétique à craindre, vous pouvez user do ce moyen. Ce n’est pas ici le lieu d'expliquer par quel mystère l’agent magnétique peut se transporter, envoyé et soutenu
par la pensée, à une gronde distance; c’est un fait reconnu. Bien que par ce développement les phénomènes magnétiques perdent un peu de leur efficacité, ils suffisent cependant pour entretenir une action commencée et faire du bien. J’ai moi-même plusieurs fois usé de ce moyen, et les malades (bien que souvent ils ne fussent pas prévenus) sentaient en eux-mêmes naître les symptômes qu’une magnétisation directe et rapprochée leur avait appris à reconnaître. Mais lorsqu’il y a sommeil magnétique, vous devez craindre sa reproduction, et, comme vous n’êtes plus là pour diriger et maintenir cette crise dans certaines limites, vous devez éviter de l’abandonner au hasard. — Le dormeur magnétique tombe quelquefois, n’étant point maintenu, dans une espèce de somnambulisme naturel ; il en commet les actes, et la durée de son sommeil ne peut vous être connue. Il y a là plus de motifs qu’il n’en faut pour que vous soyez réservé dans de semblables expériences, ou plutôt pour que vous n’en risquiez jamais uno. Je conçois que le désir de convaincre des incrédules et de montrer un grand pouvoir ait fait risquer cette expérience. Beaucoup de magnétiseurs peuvent être cités, qui ont réussi pleinement, mais tous ont eu des craintes fondées sur les suites, quelques-uns mômes s’en sont cruellement repenti. Un tel pouvoir demande de la sagesse et de la prudence, et le désir de faire du bien ne suffit pas toujours.
OBJETS MAGNÉTISÉS.
Dans certains cas 011 peut tirer un grand parti
d’objets que l’on a magnétisas : du coton, des mouchoirs, des vêtements mêmes, peuvent ainsi être utiles. Déposés sur une partie malade, ils entretiennent un mouvement tonique fort sensible, et on peut obtenir la résolution d’engorgements qui résisteraient aux cataplasmes, aux emplâtres, quelque bien combinés qu’ils fussent.
‘ On prend l'objet que l’on veut magnétiser entre les deux mains; on projette par la volonté la force magnétique, comme si l’on magnétisait une personne malade. Dix ou quinze minutes suffisent.
L’eau magnétisée est aussi d’une grande utilité. On dirige les doigts en pointe sur le vase qui la contient pendant un peu moins de temps.
Ceci m’a fourni de curieuses expériences.
Donnant à tenir à des personnes qui dormaient l’objet que je voulais magnétiser, elles n’éprouvaient rion pendant la première minute, mais successivement, etau fur et â mesure que le magnétisme complétait la saturation, le surplus suivait les mains, puis les bras, et enfin gagnait tout le système nerveux du somnambule et l’agitait. — Si c’était un verre d’eau, il éprouvait un sentiment de brûlure aux doigts et cherchait à diminuer la surface sentante, ou bien changeait l’objet de place; si l’on insistait, il souffrait visiblement. D’autres phénomènes bien plus curieux se manifestent ici lorsque par la pensée on veut donner à l’eau une vertu, une qualité. — Pour comprendre ce fait, il faut déjà être avancé en magnétisme, etjc dois ajourner mes aveux.
Comme toute force, comme tous les agents, le magnétisme a aussi ses dangers.
Je dois vous signaler ceux que j’ai pu apercevoir; ils sont de deux sortes, physiques et moraux.
§ I. — DANGERS PHYSIQUES.
Lorsque le magnétisme rencontre une disposition impressionnable, et qu’il ne la domine pas, il l’augmente et produit un fâcheux excès. Il irrite, agace les nerfs, et vous place ainsi dans une situation qui n’est pas sans dangers. Ou vous devez renoncer à toute magnétisation, et par conséquent abandonner le traitement, ou bien, si vous continuez, vous exposez le malade à des crises qui ne sc calment qu’avec des précautions et du temps.
Il est des personnes tellement sensibles au magnétisme que vingt ou trente secondes suffisent pour les mettre en crise, et l’agitation ainsi causée peut durer plusieurs heures, malgré tout ce que vous emploierez de volonté pour la calmer. J’ai renoncé à de semblables traitements; car, contre les règles que j’avais reconnues comme efficaces, les procédés que j’employais pour diminuer cet état ne faisaient que l’augmenter. Le plus sûrestefe vous éloigner et d’attendre qu’une modification sc soit opérée. Ce sont des cas exceptionnels qui, ayant été aperçus par le médecin, lui ont fait dire que le magnétisme irritait toujours les nerfs. Ces cas sont extrêmement rares ; ils se ren-
contrent aussi dans la médecine; il est des malades dont les organes s’irritent à l’ingestion du la substance la plus faible; il en est qu’un vingtième de grain d'émétique superpurge. On change de mode, de traitement, voilà tout.
C’est ici le lieu do vous entretenir de la contagion ou inoculation des maladies. Le sujet est grave cl mérite une sérieuse attention.
Par cette espèce d’exaltation de la sensibilité dont les somnambules ont souvent besoin pour sentir les maux d’autrui, ils sont exposés h prendre et à s'inoculer les maladies des personnes avec lesquelles on les met en rapport, soit avec, soit sans contact.
1°. — Inoculation par contact.
Parmi les faits que j’ai constatés, je puis citer ceux-ci. Une femme malade d’une affection arthritique goutteuse, et qui par suite avait vu ses articulations se souder, ses membres perdre leur flexibilité, sa mâchoire môme ne pouvoir plus s’ouvrir entièrement, fut mise en rapport avec une de mes somnambules ; celle-ci, après avoir parfaitement bien vu le mal et indiqué les eaux thermales qui devaient le guérir, se plaignit de souffrir dans les mômes parties qui étaient affectées chez la malade. Je ne fis pas beaucoup d’attention, car pour d’autres maux il en avait été de môme, et aucune suite fâcheuse n’en était résultée. Je la réveillai, mais quelle ne fut pas ma surprise : elle ne put se mouvoir, elle ne pouvait ouvrir la bouche. J’essayai vainement de faire cesser ce mal, que je croyais passager. Après plusieurs heures, son état persistant, nous fûmes obligés de la descen-
dre, comme on avait descendu lu malado, tout d’uno pièce cl roide, de la meltrc ainsi dans une voiture et de la conduire chez elle. Elle resta ainsi trois jours. Pendant ce temps on fut obligé de la faire manger comme un enfant et de lui donner du potage par petites cuillerées, sa bouebe étant fermée aux trois quarts. Peu à peu le mal la quitta.
Une autre somnambule, après avoir touché un malade dont le sang était corrompu par un virus syphilitique et scrofuleux, perdit tousses cheveux quelques heures après le contact seulement.
Un hoquet convulsif, une toux, un point de côlé furent transmis par le contact à une autre dormeuse.
Une autre, pour avoir tenu pendant quelque temps la main d’un idiot, resta hébétée pendant quelques jours. Ce n’est qu’à ce prix pourtant que souvent les somnambules trouvent des moyens de guérison. Plus ils sentent, mieux ils trouvent. Us causent très-peu, mais ils cherchent; leur médication est singulière, mais efficace. Endormis, ils n’onl aucune peur du mal qui leur arrive dans cet état; réveillés, ils ont les mômes craintes que si le mal devait ôtre durable.
Voici à ce sujet ce que dit JI. do Puységur :
« La susceptibilité qu’ont les malades en crise niait gnétique de gagner avec promptitude certaines ma-« ladies m’a été plusieurs fois démontrée. J’ai vu des a somnambules magnétiques, au milieu d'un essaim « nombreux de malades, demander à quitter leur « place, en disant que leurs voisins leur faisaient mal; « d’autres s’en éloigner d’eux-mêmes avec précipi-o tation. Et souvent j'ai eu à réparer des accidents « causés par l’approche do certains individus.
« Un inconvénient aussi grand m’a fait prendre « une idée défavorable des traitements nombreux ; et « lorsqu’il m’est arrivé depuis un an de rassembler « plusieurs malades ensemble, j’ai toujours eu la « précaution de n’v pas admettre des sujets dont «j’eusse à craindre l'influence.
« J’ni consulté un jour mon somnambule Vielet sur « les espèces de maladies qui pouvaient le plus aisé-« mont se communiquer aux somnambules ; lui-mème « en avait lait deux ou trois fois la triste expérience. « Sa réponse, qu’il me fit par écrit et que je conserve, « lut que les plus dangereuses étaient /'épilepsie, le « scorbut, la diarrhée, la paralysie froide, la goutte « sciatique, la catalepsie, la gaie, les humeurs froides, « et tous les maux vénériens. 11 ne convient, ujoutait-« t-il, qu’aux magnétiseurs de traiter ces espèces do « maux, parce que leur volonté el leur action en repous-« sent les influences, au lieu que les crises donnent et « reçoivent lafluidité, la transpiration, et que, l’action « du mal arrivant chez elles en môme temps que la « sensation, elles sont susceptibles de prendre bien « vite cc qu'elles ont voulu faire dissiper. »
Vielet écrivit ceci le 19 novembre 1784.
Moi-môme je n’ai jamais magnétisé un poitrinaire et un malade qui ait pris du mercure sans, dans le premier cas, ressentir des douleurs de poitrine, et, dans le second, en éprouver également dans les os et les articulations, surtout des doigts et du poignet.
Magnétisant un jeune homme qui avait une luxation du fémur par suite d’un dépôt lymphatique formé dans l’articulation, jo fus pris en sortant de chez lui
do douleurs très-vives dans lo membre du même côté. Croyant que cela m’était personnel, je n’y fis d’abord pas beaucoup d’attention ; lo mal se passa promptement, mais le jour suivant il en fut de môme encore. Cependant en entrant chez lui je ne souffrais aucunement ; je ne pouvais croire à ce singulier phénomène. Je voulus m’assurer de sa réalité : je suspendis deux jours le traitement, je n’éprouvai rien. Je repris, mon articulation fut malade, et je commençai à traîner la jambe. Je trouvai un prétexte pour ne pas me charger de ce traitement. J'ignorais alors qu’en magnétisant sans contact l’action était de môme efficace, et que celle inoculation pouvait être évitée.
Faisant unjour des expériences sur un jeune homme affecté d’une maladie syphilitique dont j’ignorais l’existence, «es genoux étaient entre les miens (selon les procédés de >1. Deleuze). Au bout d’un quart d’heure environ j’éprouvai de vives douleurs dans les jambes, je le priai de me dire s’il n’y souffrait pas lui-même; il me répondit que depuis un instant il n’y souffrait plus, mois qu’habituellement le mal qu’il y sentait était intolérable. Je cessai mes expériences, et les douleurs que j’avais prises ainsi persistèrent une partie de la journée.
Par suite (le cette découverte, il m’est arrivé plusieurs fois de dire aux malades que je magnétisais : Vous souffrez dans telle partie de votre corps; cela se trouva vrai chaque fois. N’ayant jamais eu de maladie, n’ayant jamais souffert, lorsque je sens quelques douleurs en magnétisant, je sais qu’elles ne viennent pas de moi, et je m’éloigne du malade suffisamment pour discontinuer l’effet de celte inoculation.
D’autres magnétiseurs m’ont raconté le môme fait; j’avoue que pendant longtemps j’ai refusé de croire à leurs témoignages ainsi qu’au mien môme. Aujourd’hui cela n’est plus possible, j’ai trop de faits pour conserver un doute.
Un dernier fait semblable à ceux cités plus haut s’est produit sur moi pendant que j’écrivais ce traité. Magnétisant une dame gravement malade d’une fièvre nerveuse et putride, étant obligé de m’approcher souvent d’elle et de la toucher, j’eus une espèce d’é-panchement de sang dans tout le tissu cellulaire des paupières. Je n’éprouvais aucune douleur, mais ces larges ecchymoses durèrent près dequinzejours. C’est seulement le jour où cette dame fut dans un danger réel, et où la putridité de ses humeurs avait acquis un grand développement et devait faire craindre une décomposition totale, que ce mal m’arriva. J’éprouvais en sortant de chez cette malade des picotements aux paupières, et pendant un trajet d’un quart d’heure de marche l’épanchement s’était complètement produit. Mais j’affirme que pendant cette séance j’ai senti en moi quelque chose qui m’était étranger, et j’aurais pu dire qu’une espèce d’inoculation venait d’avoir lieu.
(Im suite au prochain numéro.)
OPÉRATIONS CHIRURGICALES
PENDANT L’ÉTAT MAGNÉTIQUE.
g I. — INTRODUCTION D’UN SÉTON.
Je suis très-heureux d’avoir été consulté par M. Ward avant d’entreprendre l’opération qu’il a faite dans l’état magnétique (I). Originairement consulté sur la possibilité et la sûreté d’opérer, durant l’état mesmérique, sans douleur, je donnai mon opinion formelle que produire cet état et y exécuter les opérations les plus douloureuses, sans douleur et avec un succès partait, étaient deux choses très-praticables, ainsi que j’en ai témoigné moi-même, il y a cinq ans, par l’introduction d'un séton à la nuque, chez Elisabeth Okey, dans les circonstances suivantes. Comme elle souffrait d’une manière intolérable d'une douleur névralgique dans la tète, je prescrivis un séton. N’en ayant été nullement prévenue, elle était (en état mesmérique) debout, devant moi et d’autres personnes, jasant avec esprit sur des sujets frivoles, quand M. Wood, qui était derrière elle, lui prit soudainement les chairs de la partie postérieure du cou, y enfonça une large aiguille à séton avec un écheveau de soie, et y mit un emplâtre, sans r/uelle s'interrompit un moment dans ses plaisanteries el gaillardises ou qu'un signe quelconque dénotât quelle eut senti! et
(I) Vove» pages 321 et suivantes.
pourtant nous l’épiions très-minutieusement. En dissipant cet étal el la ramenant dans les conditions normales, elle s'aperçut bien vile qu'il y avait quelque chose d’étrange à cet endroit el y porta la main, disant que quelqu'un devait l’y avoir pincée. Dans son profond coma ainsi que dans celui de sa sœur, il y eut toujours insensibilité ; les ventouses et les plus larges ampoules de brûlures et de vésicatoires ont été complètement ignorées d’elles.
Elliotson, M. D.
§ II. — EXTRACTION DE DENTS.
Nous avons déjà cité plusieurs extractions de dents faites sans douleur. Ces faits sont maintenant acquis à la science. Us n’ont désormais d’autre importance que de montrer qu’ils se produisent partout, et toujours avec les mêmes circonstances. Nous traduisons le cas suivant du Zoist, journal de magnétisme publié à Londres par le docteur Elliolson.
« A Caen, chez M. Talbot-Descourty, en présence des docteurs Raisin, doyen de la faculté, — Perrier; de MM. Fuugeroles, avocat,— Bertrand, membre de l’Académie, — Courty, journaliste,— Angot père et fils, négociants, M Lafonlaine initie jeune Clianal dans le sommeil magnétique avec insensibilité. Le docteur Perrier, après s’être assuré de la réalité de cet état en pinçant inopinément le patient, constata cent pulsations. Alors M. Talbot, dentiste, procéda à l’extraction de la dent, première molaire gauche de la mâchoire inférieure. Comme elle était cassée, M. le docteur Talbot fut obligé d'inciser la gencive et
le patient ne donna aucun signe de sensation. Après quoi il arracha la dent, qui était barrée, et par cela plus susceptible de faire souffrir. Le pouls était alors ù soixante-seize. On ne remarqua aucun tremblement des mains, comme il arrive quand on veut déguiser les signes de sensibilité. Le patient rinça sa bouche et fut ensuité éveillé. A son réveil il prie le magnétiseur de ne pas permettre qu’on lui enlève sa dent parce qu’il ne souffre plus; mais, portant la main à sa bouche, il s’aperçoit, en voulant la toucher du doigt, qu’il n’a plus sa dent. Le docteur Perrier trouve le pouls remonté à quatre-vingt-huit. »
Les variations pulsatives sont à considérer dans cet exemple.
— On lit dans le Hampshire Telegraph :
Ayant été interrompu dans le cours de certaines expériences mesmériques par une violente rage de dents d'une de mes patientes (que j’ai présentée aux docteurs Ellioston et Engledue), je pensai que Vin-sensibilité, qui est la concomitance invariable du véritable somnambulisme puységurique, m’offrirait une admirable occasion d’éviter la souffrance aux malades et d’étendre l’application du mesmérisme. Mon ami le docteur Engledue obtint l’assistance d’un dentiste de Portsmouth, M. Martin, qui, par ouï-dire, connaissait un peu le mesmérisme, mais n’y croyait point, et décidément doutait de la praticabilité de l’opération proposée. 11 vint cependant. En deux minutes la patiente fut dans une catalepsie mesmérique parfaite et tout à fait insensible. M. Martin saisit une dent avec l’instrument, prolongea à dessein la torsion et la lui arracha. Pas un signe ou symptôme de souj-
fiance! Au bout d’un instant je ramenai la patiente à son état normal; et quand 011 lui dit que ses dents étaient arrachées, elle s’écria : Did Ifeel it? M. Martin alors lui examina la bouche et lui conseilla 1 extraction d'une autre dent. La patiente consentit en riant et se replaça. En une minute et demie je la plongeai dans la même insensibilité qu avant. La dent, étant carriée à un degré avancé, fut broyée sous l’instrument, et les fragments enlevés avec difficulté.
Durant toute cette opération aucune plainte ni cri de la part de la patiente. Aussitôt après je la démagnétisai, et elle courut à la glace s’assurer si elle avait réellement perdu sa seconde dent ! 11 serait difficile de déterminer de ces deux cas lequel a produit le plus grand degré de plaisir et d’étonnement : l’un montrant le plus étonnant phénomène, l’autre délivrant indouloureusement, presque magiquement, la malade de ses tourments.
Je me suis renfermé dans le simple narré des faits et n’anticiperai pas sur vos colonnes pour détailler les phénomènes généraux du mesmérisme, qui sont néanmoins de la plus haute importance.
Toutes les fois qu’on avance une vérité nouvelle, des myopes intellectuels demandent : Cuibono? Ce récit doit leur servir de réponse.
John. B. W. S. Gardineh.
§ 111. —INSENSIBILITÉ SPONTANÉE.
Nous avons rapporté (1) un cas d’insensibilité à l’ustion de la peau et des chairs chez un jeune Grec
(1) Page 288.
somnambule naturel. Nous trouvons dans le Constitutionnel du 11 mars 1845 la relation d’un cas arrivé dans des circonstances différentes, mais qui offre tant de traits de ressemblance avec celui que nous rappelons qu’il n’est pas douteux pour nous qu’il soit dû à la môme cause.
« Une jeune personne de dix-sept ans, Élisa Cerf, de Saint-Esprit, près Bayonne, était endormie près du feu en attendant son frère, qui était au théâtre; le feu prit à ses vêtements. Un voisin, attiré par la vive lueur que répandait la flamme attachée aux vêtements de cette infortunée, entra dans la chambre, saisit un enfant qui dormait, et l’emporta sans s’occuper de la jeune Élisa.
« Ce qui paraîtra bien extraordinaire, quoique nous le tenions de source très-certaine, c’est que la malheureuse jeune lille ne s’éveilla pas complètement; elle allait et venait dans l’appartement, luttant à la fois contre le sommeil et l’horreur de sa situation. Au moment où un second voisin entra, elle disait : « Est-ce un rêve? Est-ce que je brûle réellement? Mon père, regardez-moi donc; ô mon Dieu ! »
« Mais il était trop tard. Malgré tous les soins dont elle a été entourée, elle est morte après deux jours d’horribles souffrances. »
En examinant les circonstances de cette fin tragique, il est impossible de ne pas reconnaître les caractères que présente quelquefois le somnambulisme naturel et que l’on observe si fréquemment sur les magnétisés.
théories.
PSYCHOLOGIE MAGNÉTIQUE.
(Suilc.)
§ III.
I.c corps perd, l’ûmn regagne Sa première liberté;
Le savoir qui raccompagne,
Plus parfait, la fait compagne Du la sainte éternité!...
MALHERBE.
Qu’on admette ou non l’existence fl’un monde de récompense et d’un monde de punition, l’âme humaine doit Cire reconnue immortelle ; et, comme un Dieu ne peut être que juste, le bien doit être récompensé, le mal puni : ceci est hors de tout doute.
L'idée généralement répandue des âmes qui reviennent n est évidemment qu’une pensée éminemment philosophique, détournée par l’ignorance de sa véritable et sublime application. Ainsi donc • l’infini est bien probablement peuplé par d’innombrables pléiades d’âmes qui, pour un temps donné, -doivent, ont dû ou devront habiter en compagnie de la matière.
Qui nous dit maintenant que ces âmes, qui nous semblent ptupler l’espace, ne doivent poinl avoir entre elles les plus douces et les plus sublimes sympathies, ou, aussi, les plus saisissantes et les plus terribles répulsions? Les récompenses ou les punitions infligées aux âmes bonnes et mauvaises ne seraient-elles point alors basées sur le plus ou moins d’'éloignement ou de rapprochement de ceux qui leur sont sympathiques ou
anlipathiqncs? L'Enfer cl le Paradis sont peut-être là tout entiers!... D’après ceci, les pressentiments heureux ou malheureux, les vues à distances, les voix intérieures, qui, bien probablement, ne résultent que des communications d'âme à âme, pourraient trouver leur explication.
La phrase vulgaire du Je sentais ça! vient encore parfaitement et surtout naturellement à l’appui de ce qui précède :
Les âmes alors se souviennent, sc communiquent, et par conséquent peuvent avertir. Que sont pour elles les dislances dans l'infini ou l'immensité de l’espace? Rien, un point, évidemment.
Terminons cet article et disons :
L’âme est bien réellement immortelle. Im véritable mort n'est qu’un mot. F.a dalle qui tombe du palmier se gâte bientôt, mais, sous une enveloppe inattaquable à la destruction, se trouve le germe qui devra monter de nouveau pour produire à son tour, suivant l'ordre éternellement régulier de la nature, l’arbre majestueux du désert (1) !
(1) L'abondance de pensées dont celui qui étudie la psychologie est assailli nous enlraine à communiquer celle qui suit, quoiqu’elle fasse scission avec les précédentes.
Tout en respectant religieusement les idées généralement reconnues par le christianisme sur la Théodicée ou Justice de Dieu, ne pourrait-on pas un instant supposer que, par l'impénétrable volonté de ses décrets, les âmes ne reviennent sur la terre et en compagnie d’un corps que pour y expier ce qu'elles ont de fautes, et qu’elles ne peuvent retourner vers la Divinité que retrempées et purifiées? La terre alors, ce lieu d'exil et de misère, ne serait pour elles que te Purgatoire ou chemin d’expiation. Il y a ici, on le sait, une croyance populaire qui mérite la plus haute attention. La voici d’ailleurs: On fait son purgatoire sur la terre !
Les souffrances de l'âme sont évidemment les plus poignantes. Telle âme ne souffre-t-pllo pas en une tierce plus que telle autre en dix ans? Une âme ne saurait souffrir de la même manière qu’un corps. Ainsi donc, les peines réservées â chaque âme devant être proportionnées à la punition méritée, on pourrait peut-être croire que le plus ou moins d'existence de chaque corps est en raison de l'étendue des peines infligées à l’âme qui est en lui. Suivant reci, alors, l’âme d’un tout petit enfant qui meurt pourrait bien n’être qu'à la fin d’une punition cruellement expiée par elle, et loin du ciel, pendant
Une âme ne (aurait dormir I
Voici maintenant quelques-unes de nos pensées sur les rêves, les songes et les révélations prophétiques, ces labyrinthes de l'esprit humain, où tant de penseurs sont venus el viendront encore longtemps s'égarer ou se perdre.
Comme il y aurait, pour nous surtout, les plus grands dangers de chercher à pénétrer trop avant dans ce dédale hasardeux, nous lâcherons, si cela nous esl possible, d’arriver seulement jusqu’à son entrée.
Les rêves et aussi les songes, qui, fort souvent, nous semblent résulter de certains troubles purement physiques, ne sont, très-fréquemment aussi, que le reflet de nos souvenirs les plus frappants, lesquels amènent après eux des perceptions qui doivent naturellement tirer leurs sources des impressions reçues.
Ainsi donc : la mémoire, ce grand livre de l’intelligence, est presque toujours pour beaucoup dans les rêves et surtout dans les songes (qui ne sont, eux, pour la plupart, que des rêves raisonnables); mais celui pourtant qui dirait que, parfois aussi, les songes sont plus que le résultat des souvenirs matériels el deviennent quelquefois des révélations positives ou des prédictions qui, souvent, ont dû, doivent ou devront se réaliser parfaitement, celui-là, enfin, serait-il fou? Nous répondrons non, sans doute, quoi qu’on en puisse penser.
Les anciens, nos pères enfin, que dans notre orgueil nous mettons au-dessous de nous pour toul ce qui louche à la perfection possible de l’intelligence, nos pères, disons-nous,
une longue suile de siècles, ou encore, el seulement, quelques jours d'exil.
Faisons ici un rapprochement pour appuyer celte pensée.
Ne dit-oo pas tous les jours d'un enfant qui meurt au berceau : C’est an ange de pim au ciel! Phrase frappante qui n’est peut-être qu'uue révélation I
croyaient à la réalisation de bien des songes et à 1 accomplissement de certains oracles prononcés dans leurs temples. Dans l'Inde, en Egypte, en Grèce, en Italie et dans d’autres pays ouverts à la gloire et au génie, 011 croyait religieusement à ces choses. Pourrait-on dire que la sagesse antique était aveugle? Non. Les grands prophètes encore dont nous devons garder avec respect le souvenir : Llie, Ezéchiel, Daniel, Jérémie, saint Jean, et tant d’autres saints extatiques, étaient-ils des fourbes el des imposteurs? Non, non, sans doute; il est impossible d’admettre cela, car ce serait alors vouloir ternir la sainteté des traditions que l’histoire nous a transmises, sainteté, du reste, devant laquelle, ce nous semble, on doit plier le genou.
Mais posons celle question :
Que sonl vraisemblablement les prophéties? La conséquence de faits retenus ou intuitivement devinés par l’âme, et aussi le résultat de l'exaltation que certains fluides (magnétiques tupposa-blement) (1) peuvent parfois, en songe ou autrement, apporter à notre insu sur nos organes, el, par contre-coup, communiquer à l'âme.
Disons maintenant : des prophéties célèbres de l’antiquité aux simples pressentiments que beaucoup de personnes ordinaires éprouvent encore aujourd’hui, la différence nest point vraiment aussi grande qu’on pourrait d'abord le penser, car, au fond, la cause doit être de même nature ou à peu près. L’essentiel dans ceci esl que la chose prévue ou prédite se réalise. Le fait alors est, nous le répétons, presque le même, qu’il se rencontre chez l’homme du monde d’aujourd'hui ou chez l’ascète prophète de l’antiquité. Tel esl, du moins, notre avis. Les prophéties alors ne seraient que de véritables pres-senlimenls.
Ainsi donc : les rôves résultent de certains effets tout ma-
(1) Il est important de ne pas confondre les fluides : magnétique terrestre, électrique, galvanique, avec le magnétique animal, qui, quoiqu'ayant plusieurs liens de parenté, diffère cependant de nature cl d’action.
lériels. Los songes, eux, ne sont le plus souvent que le résultat de la mémoire des faits qui nous ont frappés, récemment surtout ; mais quelquefois aussi les songes sont ou touchent de plus près à des symboles que l’âme, ce fluide élhéré et parlant si poétique, peut se plaire à créer capricieusement, et à dévoiler ou cacher suivant le plus ou moins de perfection de la matière qui l'environne.
Les symboles dont nous parlons, si occultes pour beaucoup d’ètres, peuvent pourtant, parfois, à l'aide d’une lucidité propre à de certaines natures ordinairement très-nerveuses, et, par conséquent, impressionnables au plus haut degré, trouver une explication frappante de vérité. De là la croyance aux hiérophantes, aux pythies, aux sibylles, aux devins de l’antiquité et de nos jours, lesquels, bien vraisemblablement, n’étaient ou ne sont que dos somnambules placés dans de certaines conditions magnétiques.
Résumons-nous maintenant et répétons :
En songe ou autrement, les âmes peuvent s’avertir, puisqu'elles pressentent, se souviennent et se communiquent 1...
Ara. Thuillieii (do Saiut-Marceau).
Paris, 27 juillet 18/15.
REVUE DU MOIS.
VOYAGE E.\ SI RIE, — Un voyageur anglais, M. ElliotWar-burton, vient d’être l'introducteur involontaire du mesmérisme dans ces contrées. Se trouvant à Danws en conférence avec des savants du pays, il fit, à la prière de l’un d’eux, un essai de magnétisation dont il rapporte les principaux traits dans son ouvrage : The Crescenl and the Cross. Voici sa narration.
LE XÊüRE EXTEII1II\.ITEIR. — Après un long entretien roulant sur des sujets de médecine, un médecin arabe s'informa avec instance de ce que pouvait être le magnétisme, dont il entendait tant parler, sans pouvoir jamais savoir ce que c’était, et me supplia de l’initier à la connaissance de cet art. Vainement j'alléguai mon incompétence, mon ignorance sur ce sujet; rien ne put calmer son désir enthousiaste, et je consentis à lui donner simplement une idée des procédés.
Il donna aussitôt l’ordre à un esclave de s’approcher. Ce nègre, grand et maigre, s’agenouilla devant moi, et toute l’assemblée formant un cercle autour de nous regarda avec la plus grande attention ; le silence était tel qu'on osait à peine respirer. Dès que j’eus fait quelques passes sur les yeux de mon patient, à ma propre surprise et à l elonnemenl de tous, cet esclave, d’un stature vraiment gigantesque, fut pris d’un tremblement convulsif el tomba à la renverse dans un abandon comateux, uu anéantissement tel qu’il ressemblait moins à un homme renversé qu’à un manteau noir déposé à
terre. Une libère exclamation do wallali s'échappa do la bouche dos assistants, qui tour à tour s'efforceront de l’éveiller en le remuant, l’agitant, elc. Mais voyant que leur tentatives étaient vaines, ils dirent doucement : II est mort, puis reprirent leurs pipes ot se réinstallèrent sur le divau comme si celle mort n’avait rien d’irrégulier. Mon hôte resta auprès du magnétisé dans un étonnement extrême; il m’accabla d’une multitude de questions auxquelles je ne répondis qu’avec ce burlesque et indifférent hochement de tèto qui laisse toute la responsabilité de l'interprétation au questionneur et l’éloigne de celui ù qui il s’adresse. Le médecin alors contempla quelque temps en silence la masse noire informe de chair humaine qui, étendue sur le plancher, ne semblait plus vivre; puis, avec une grande déférence el de nombreuses excuses, il me pria de vouloir bien ramener à la vie cet esclave qui valait près de 2,500 francs. J’étais loin, je l’avoue, d’èlre certain comment ou si je pourrais faire cesser l’état que j’avais produit, el plus l’on me poussait plus j’en différai la tentative; mais à la fin j’essayai el je me tirai de ce pas difficile en me vengeant ! ! ! !
Comme au sortir de mille sommeils, la conscience du patient, longtemps exilée, sembla soudain éclairer son esprit sur son étal; il se lova brusquement en poussant un cri plaintif, étendit les bras, rejeta sa lûte en arrière, el, en môme temps que ses yeux s’agitaient convulsivement dans leurs orbites, il jota un cri éclatant, sorte de ris d’une acuité terrible. Alors saisissant un grand vase d’eau il le brisa en mille morceaux sur le plancher, déchira le divan, fil sauter les lanternes en nombreux éclats, et s'élança vers la cour à la poursuite des Turcs terrifiés qui se cachaient ou fuyaient dans toutes les directions. Comme j’observais leur contenance, leur air frappé d’horreur, leurs allées et venues précipitées, â la lueur blafarde de la lune et des lanternes restantes, leurs longues draperies s’entortillant dans les arbres, leur nègre qui les poursuivait comme s’il eût été engagé dans une partie de colin-maillard, les cris de ces maniaques courant de tous côtés au
milieu du silence de la nuit, les gémissements que la frayeur arrachait aux femmes dans le harem, les pas précipités des fuyards el du nègre acharné â leur poursuite dans les palmiers et les mimosas; lout, dans l’aspecl étrange de celle cour, me sembla un rêve pénible dont j’altcndais l'issue avec une anxiété douloureuse. Epuisé enfin par la violence de ses émotions, cet esclave tomba à terre et soupira comme si son cœur voulait se rompre. l'eu à peu il revint â lui, regarda avec embarras la scène de dévastation qu’il avait causée el reprit une attitude paisible, les bras croisés sur sa poitrine nue.
L’ordre élant rétabli, les spectateurs de celte scène étrange sortirent de leurs cacheiles ; des lanternes et de nouvelles pipes furent allumées cl nous reprîmes tous nos places, exceplé deux prêtres Arméniens qui avaient disparu dans la mêlée. On interrogea alors le nègre, qui décrivit ses sensations comme étant exquises ; mais à son réveil il n’avait absolument aucune connaissance de ce qu'il avail fait ! ! !
Comme je m’étais efforcé de garder un air d’indifférence complète (que j’étais loin d’avoir) durant la transaction, les Orientaux, quoique la chose fui loule simple, me traitèrent avec le plus grand respect. Mon hôte, se montrant aussi reconnaissant qu’il était élonnéde l’opération, me pria de revenir la nuit suivante pour recommencer l'expérience. » Dieu m’en garde, » pensai-je, et, comme j’avais pris congé de mon hôle, le lendemain je Ils de même de Damas.
E. Warbcrton.
LA PROVIDENCE DÛS SOMXAV.BILES. — Dans la nuit du 6 au 7 juillet, â Charmes (Vosges), un jeune domestique d’environ dix-sepl ans se lève dans un état de somnambulisme, ouvre la fenêtre de sa chambre, et de là hasarde un saut sur le pavé de la rue à une hauteur d’environ quarante pieds. Eveillé par le bruit de sa chute, son maître, qui le croit s'non tué, du moins très-dangereusemeni blessé, envoie chercher M. le docteur Chevreuse, (fui, à son arrivée, trouve le somnambule
sur pied, occupé à essuyer quelques gouttes de sang qui dégouttaient de sou ne/.; il avait en otilre une petite égralignure à l’oreille. Ne sachant coin ment il se trouvait là, surpris de la présence du médecin, el sans doute étonné de son accoutrement, 11e comprenant rien aux soins qu’on lui offrait, le malade remonte dans sa chambre, se remet dans son lit et se rendort. ( Démocratie pacifique. )
Le récit de la Démocratie suggère à M. le docteur Ordinaire les réflexions suivantes, dont chacun appréciera la justesse :
« Les chutes qui se font dans l’état de somnambulisme sont beaucoup moins dangereuses que dans l’état normal, parce que la sensibilité a disparu complètement dans le plus grand nombre des cas, ou, du moins, s’est considérablement modifiée. La sensibilité vient de l’âme qui a pour agent le système nerveux. L’âme sc détachant de la matière dans le somnambulisme et lui faisant éprouver d’étranges modifications, la douleur disparaît, et les plus cruelles opérations peuvent Être pratiquées sans déterminer la moindre impression. »
LE MAG\ÉTISMF ÂÜ II WRE. — L'intérêt qui s'attache au magnétisme va toujours croissant. Partout où un fait magnétique de quelque importance se produit, il a lo privilège d’exciter 1 attention la plus vive. Il n’y a plus d’intelligence assez tiède pour voir avec indilïérence la production de. tels phénomènes. On veut voir, examiner, et, la curiosité satisfaite, on se demande pourquoi, à quoi bon, puis chacun discute, affirme ou nie, car les contradicteurs 11e manquent pas. Le Journal de L arrondissement du Havre du 27 août, à propos de la présence d’Alex s, dont la lucidité a beaucoup étonné, publie l’article suivant :
PAIIOI.CS D'US CROYANT. — I.ts découvertes de In science moderne reculent chaque jour les limites du possible el ouvrent à l'intelligence humaine, à travers des horizons nouveaux, d’é-
blottissantes perspectives. Le génie du l’invemion, guidant de sa main puissante le char du progrès, s’élance de conquête en conquête, et, sur les ruines des vieux systèmes, des vieilles méthodes, des erreurs traditionnelles, des procédés incomplets el vicieux, îles routines et des préjugés, il élève les impérissables monuments de sa fécondité et de sa grandeur. L’humanité stupéfaite assiste, incrédule encore, au merveilleux spectacle de ces transformations qui s’opèrent autour d’elle, el se demande si les nouveaux Titans, plus heureux que leurs aînés, parviendront à escalader l’Olympe el à ravir au Créateur les secrets de sa puissance!
En présence des faits accomplis cl des résultats obtenus depuis moins d’un siècle, résultats qui étonnent l’imagination et confondent la raison, comment fixer un terme aux envahissements du génie de l'homme? Déjà il franchit la distance avec la vitesse de l’oiseau! Déjà la pensée humaine, ce rayon de l’âme, se transmet, rapide comme un rayon de soleil, à travers l'espace qu’elle dévore ! i.a vapeur, l’électricité ont réalisé les prodiges de ces contes merveilleux qui ont bercé notre crédule enfance; l’industrie, ce génie bienfaisant; la science, celle fée ingénieuse et libérale, enrichissent chaque jour de quelque nouveau talisman l’humanité reconnaissante!
Mais, fatalement soumis à la loi du progrès, l'esprit humain, insatiable el pacifique conquérant, marche, marche encore, marche toujours en avant. 11 renverse les barrières qu’élève devant lui l’ignorance impuissante et jalouse; il dissipe, aux clartés de son magique (lambeau, les ténèbres épaisses du doute incrédule ; il côtoie sans trébucher les abîmes que l’erreur a creusés sous scs pas; il détruit les frontières resserrées dans lesquelles la réalité autrefois avait circonscrit son empire. Colomb nouveau, il pressent, il découvre des continents inexplorés, des régions inconnues dans le monde des idées, il les soumet à ses lois, il y plante son drapeau!
Aussi, déjà, comme une pléiade de splendides constellations, voyez briller aux avant-postes de l 'humanité la inajes-
tueuse théorie des créations des temps modernes! la chimie décomposant la matière dans son magique creuset el la reconstituant de toutes pièces par scs ingénieux artifices! la physique désarmant la main loule-puissanle qui tient la foudre, et paralysant les effets de ses redoutables carreaux! la médecine promenant dans les n isies débris de l’humanité matérielle son scalpel investigateur el demandant à la morl les secrets de la vie! la physiologie soulevant le voile qui couvre les mystérieux ressorts de noire organisation si complexe, et formulant le code de ces lois, jadis inconnues, qui régissent chacun des phénomènes de la vitalité! l’astronomie s’élançant dans les plaines de l’infini, jusqu'aux limiies de l'espace, et découvrant le principe immuable qui préside aux révolutions des mondes !
Qu'il esi splendide et grandiose l’avenir que présagent à l’homme ces miraculeuses découvertes, filles de son intelligence , de son génie , de sa puissante volonté!... Sa volonté, avons-nous dit. Oui; car voilà le secret de toutes ces merveilles! La volonté humaine, celte mystérieuse puissance trop longtemps méconnue, el, comme le diamant enfoui dans la mine, voilée par les ténèbres qui ont entouré l’enfance de l’humanité, la volonté humaine, brillant enfin d’un éclat plus vif, brisant ses liens et ses entraves, vient revendiquer la gloire de toutes ses conquêtes ! Ne faut-il pas reconnaître enfin la grandeur du rôle que joue, depuis que le monde existe, cet agent puissant? N’est-ce pas la volonté, une volonté inébranlable el persévérante, qui a animé de loin en loin les esprits supérieurs dont les noms sont restés burinés en lettres d’airain dans les annales de l'humanité et qui leur a permis de réaliser ces vastes projets, ces immenses desseins, ces œuvres impérissables donl les générations les plus reculées garderont le souvenir? Les conquérants et les philanthropes, les philosophes et les savants, les réformateurs et les sages ont du à leur volonté seule de pouvoir dégager leurs théories des sphères nébuleuses de l’abstraction pour les faire passer dans
le monde positif dis faits. Lu volonté humaine, colt»; puissance qui a dominé toutes les époques, qui a élé l'élément de toutes les révolutions, doit être désormais considérée Comme une force active, comme la force la plus active dont notre faiblesse dispose !
Quelle que soit la nature de ce principe qui enfante chaque jour les plus étonnants phénomènes, et (pii par sa nature rentre dans les causes premières, comme celui de la lumière, de la chaleur, du mouvement, de la vie, ce principe existe; nous en trouvons des traces dans chacun de nos actes. C’esl lui qui donne à notre bras le degré de force nécessaire pour soulever tel objet, tel fardeau. C'est lui qui donne à nos muscles telle ou telle puissance de contraction suivant les résistances que nous devons rencontrer! C'est lui qui donne aux éclairs qui jaillissent des yeux de l’homme courageux cet éclat fascinateur qui fait pâlir le lâche! C’est lui fonde les écoles el les religions en faisant passer dans les esprits des disciples les doctrines, ces manifestations saisissables de la volonté du mallre! C’esl lui qui, en politique, fonde les partis en réunissant dans un même faisceau mille volontés éparses qui subissent la loi d'une volonté suprême et supérieure. C'est lui qui range sur les champs de bataille d’innombrables bataillons qui sc précipitent devant la bouche des canons pour le triomphe d'une idée que parfois ils ne comprennent pas, el cela parce qu’une volonté, contre laquelle se débattent en vain tous les intérêts de conservation de notre nature, leur a crié : « En avant. »
l.a science qui a pour objet l’étude et les applications de ce principe se nomme magnétisme. Elle a élé définie par les savants qui se sont consacrés à son élude : « La manifestation de la faculté que possèdent tous les êtres organisés d’agir les uns sur les autres et chacun sur soi-même. »
La volonté est son moyen d’action comme fa chaleur est le moyen d'action du calorique. Ces! par la volonté, a dit un homme qui a beaucoup étudié le magnétisme, qu’on met en
jeu le principe, qu’on l’envoie avec plus «le force du ccnlrc aux extrémités, qu’on le dirige et qu’on imprègne le corps où l’on veut le fixer... Née depuis moins d’un siècle, cette science, qui contrariait tant d’idées reçues, a dû nécessairement soulever aulour d’elle les clameurs de l’incrédulité, les défiances du scepticisme, les résistances de l’esprit de routine; mais elle a eu aussi ses courageux prosélytes, ses ardents avocats , ses persévérants apôtres, el les hommes les plus recommandablcs parleur moralité, les plus inattaquables par leur position, les plus illustres par leurs lumières, n’ont pas redouté de la prendre sous leur patronage. Leurs noms seuls, I existence de cette doctrine qui a survécu à tant d'attaques, suffisent pour écarter toute idée de compérage ou de supercherie.
Celte science nouvelle donne une immense extension aux facultés de l'homme, ci cela se conçoit; elle supprime le ministère des sens, ces organes grossiers dont les (onctions sont nécessairement limitées comme tout ce qui est matière, et, dégageant l'âme humaine de sa prison charne'lc, elle la met en rapport, directement et sans agent intermédiaire, avec la nature, avec les objets extérieurs, avec les idées intimes de l’homme! Voilà pourquoi pour le somnambule il n’y pas de distance, de temps, d'espace; voilà pourquoi il peut voir dans les ténèbres, à travers les corps les plus opaques; car le principe immatériel, éthéré, universel, qui perçoit ses diverses sensations, ne s’arrête pas devant les obstacles matériels, qui n’en sont que pour nos sens matériels comme eux.
Les dénégations de l’incrédulité reposent presque tontes sur des arguments qui ne peuvent soutenir le choc d’une discussion sérieuse, bien loin de tenir compte aux magnétiseurs de leurs triomphes, ils leur opposent leur insuccès pouV nier leur puissance. Le somnambule a pu, à travers une triple el épaisse enveloppe, ainsi que nous l’avons vu nous-mème le faire, épeler les premières lettres d’un mol;... pourquoi, vous objecteront-ils , ne peut-il lire le mot tout entier? A nos yeux il n’y a rien d’étrange à ce qu’il n’ait pu déc|iilïrer les dernières
lettres; mais qu’il ail pu lire les premières, vuilàcequi nous semble miraculeux! Pourquoi, disent-ils, puisqu’il u’j a pas de secrets pour vous, pourquoi, au lieu d'aller de ville en ville moissonner de stériles Iriomplies, récolter île maigres recettes, ne pas découvrir des trésors, lire dans l’avenir le cours de la renie et vous enrichir à coup sur, sans soucis, sans fatigue, sans mécompte?... Pourquoi? parce que celle science est encore au berceau, comme l’industrie il y a cent ans, avanl 1rs applications de la vapeur; parce qu’on ne peut se flaltor, lorsque ceux qui la pratiquent en sont encore aux essais cl aux tâtonnements, de l’appliquer toujours à loul avec le même succès. Tlialès, qui vivait sepl cents ans avanl Jésus-Chrisl, découvrit el constata l’électricité comme une des propriétés de l'ambre; mais songeai t-il à la bouteille de Leyde? Non, à coup sûr, el c’est deux mille cinq cenls après lui que la science a songé à appliquer son principe â la transmission de la pensée de l’homme el que le premier télégraphe électrique a élé établi ! Cadmus,ce mythologique inventeur de l'écriture,avait-il pressenti la découverte doGuttembergqui donne à cet art dépeindre la parole un si immense développement? N’y a-t-il pas un abîme entre le premier instrument à cordes, le testudo, celle œuvre informe d’un luthier primitif, qui, au moyen de quelques cordes tendues sur l'écaille d’une tortue, obtenait des sons sans harmonie, et les accords splendides d’un piano du XIX' siècle?
Pourquoi, vous objecte encore le sceptique, pourquoi le somnambule n’a-l-il pu répondre à mes questions, comme il a répondu à celles que vous lui avez adressées?... Pourquoi? parce qu’il y a entre voire incrédulité el lui ce jeu mystérieux des sympathies el des antipathies qui existe dans la vie ordinaire? parce que, à voire insu el malgré vous peut-être, voire désir de le mettre en défaut rayonne autour du vous, le trouble, le déconcerte, el obscurcit les yeux de son intelligence, comme la colère, l’impatience font monter le sang au cerveau el font passer des éblouissemens devant les yeux du corps! Prenez le
causeur le plus spirituel, l'i-spril lo plus gai, lo plus pétillant : placez-le au milieu d’une réunion dont il sera l'âme... ou écoute ses saillies, on admire la forme heureuse de se pensées, l'originalité de ses reparties, sa verve intarissable... Mais quel changement brusque vient de s’opérer en lui? Sa phrase esl devenue traînante tout à coup; ses idées sont confuses et ne jaillissent plus avec netteté, les facettes de cet esprit chatoyant sont ternes, son débit est embarrassé el froid!... Pourquoi? parce que là-bas, à l’autre bout du salon, il a aperçu la physionomie d’un auditeur malveillant; en vain il veut détourner ses yeux, son attention, de cette ligure antipathique: ils reviennent invinciblement s’y arrêter. Il a vu, à chacun de ses traits les plus heureux, un ironique sourire abaisser les coins d’une lèvre dédaigneuse! il a compris la critique muette de chacun île ces haussements d’épaules, imperceptible, mais impitoyable; enfin il voit l’ennemi se baisser pour murmurer tout bas, à l’oreille de son voisin, quelque sinistre épigramme sans doute! Dès lors il n’y tient plus, il divague, il balbutie, il s’embarrasse, il se déconcerte; le talisman esl brisé, le charme est rompu, la verve esl tarie : adieu le succès! L’influence magnétique de l’auditeur malveillant l’emporte! Ainsi du somnambule qui, dans le sommeil magnétique, esl mille fois plus irritable, plus susceptible, plus impressionnable que l’organisation la plus timide, la plus nerveuse, la plus délicate dans l'état de veille.
Comment se fait-il que les effets du magnétisme rencontrent tant d’incrédules, quand il faut bien admettre des faits semblables et tout aussi extraordinaires, observés chez des somnambules naturels. I.eur élal esl un phénomène naturel, dit-on, mais ne peut être produit par la fixité du regard, la tension de la volonté, les passes, en un mol, des magnétiseurs. Pourquoi? La science n’a-t-elle pas prouvé en mille circonstances qu’elle avait surpris à la nature le secret de ses procédés? Les narcotiques ne produisent-ils pas le sommeil? Ne peut-on pas, avec l’élcclricité, produire lesolïetsde la foudre?
INe sait—un |>as ijd’îin moyen de errlaiucs substances un peut développer chez l'homme le plus robuste el le mieux portant des symptômes de la lièvre, de l’épilopsie, de la folie? Esprits stationnaires, intelligences indolentes, ne niez pas le progrès quand lout marche autour de vous! Ne niez pas ce que votre cerveau étroit et faible ne saurait ni embrasser, ni concevoir !
11 y a dans l’âme de l'homme une disposition continuelle qui le porte à s’élancer au delà de la sphère dans laquelle sa nature l’a enfermé. Un besoin contre lequel il voudrait vainement luller le pousse sans cesse vers de nouvelles découvertes; peut-être les vagues souvenirs de son origine le dominent à ïon insu, et son âme, travaillée par une inquiète curiosité, s’élance sans trêve et sans repos vers celte lumière qui éclaire les mystères de sa nature et dont ses yeux éblouis démêlent confusément quelques rayons! I.e magnétisme répond à ce. besoin, à ces aspirations. Peut-être en est-il de l'humanité comme de l'individu ? Peut-être sa raison parcourt-elle lentement ses premières phases avant d’arriver à sa virilité, el peut-êlre que l’intelligence éternelle qui nous a créés a voulu- no faire éclore ce principe nouveau que lorsque l’esprit humain, qu’il devait compléter, mûri par le long travail des générations, serait assez fort pour cueillir sans danger ce dernier fruit de l’Arbre de la Science.
C’est à ce poinl de vue que quelques lignes ont été écrites par un Croyant, donl la foi ne s'appuie ni sur les livres, ni sur des faits observés; car une seule fois, et il y a de cela bien des années, il a parcouru un ouvrage qui Irailait du magnétisme ; une seule fois il a élé le spectateur de ses étonnants phénomènes, et pourtant il croit, parce qu’il rêve que chaque génération qui s’écoule rapproche l'humanité de la perfection, qui esl sa (i 11 cl son but. Celle théorie esl un gouffre pour noire raison encore ignorante; mais, comme tous les gouffres, elle nous fascine, nous donne le vertige el nous entraîne fatalement au fond de scs abîmes!
LE MKXÊTISM \ l'Illl AS. — Pigault-I.ebum, de joyeuse mémoire, sc moqua longtemps du magnétisme cl des mil-guétiseurs; il publia même contre ces derniers une longue diairibe dans laquelle il les irailail de charlatans, d'insignes jongleurs. Bientôt après un grand partisan de celte nouvelle science, le célèbre Dcleuze, je crois, l’ayant rendu témoin de quelques expériences propres à détruire son incrédulité, il eu devint fanatique. Je me souviens que, dans les dernières années de sa vie, sa plus douce jouissance consistait à magnétiser les personnes qui allaient le voir. Il ne réussissait pas toujours dans ses essais ; je dirai même «pi'en plusieurs occasions il échoua complètement â mon égard; aussi, quelque confiance que j’eusse dans ses talents i l dans ses luiuièris, il me fut impossible de partager scs opinions à l'endroit «lu magnétisme. Rien de ce que je lus depuis, ni de ce qui me fut rapporté par des gens dignes de loi, ne put détruire en moi une prévention qui avait excité souvent la bile de l’irascible el spirituel auteur de \'Eufanl du Carnaval.
C’est sous l’iiilluence de celle même prévention que j’assistai mardi dernier à une séance de magnétisme offerte à quelques personnes de ma connaissance par un voyageur de mes amis. Voici ce qui se passa :
M. Ch..., à un précédent voyage à Privas, avait magnétisé im enfant du pays nommé Régis, âgé de quinze à seize ans. Le lendemain toute la ville parlait des choses merveilleuses qu’il en avait obtenues pendant son sommeil magnétique. Revenu parmi nous, M. Ch... fut prié de renouveler ses expériences. Il y consentit de la meilleure grâce du monde.
Le jeutte Régis fut amené à l’hôiel Saussac vers neuf heures du soir. Au boni de quelques instants, M. Ch... l’endort et l’envoie au restaurant de M“” veuve Vernet, situé sur la place de l'HiMel-de-Ville. L’enfant se rend de lui-même, monte l’escalier qui conduit nu rez-de-chaussée, au premier étage, entre dans le salon, s’assied sur une chaise et laisse
tomber sa tète sur une table. En vain les personnes qui l'entourent s'efforcent de l'arracher au sommeil, soit en lui pinçant la chair, suit en lu piquant avec dus épingles ; rien ne peut lu rüvuillur.
Une heure s’écoule, M. Ch... arrive. « Eh bien, lu dors? dit-il au magnétisé. — Oui, » répond aussitôt celui-ci. Après lui avoir adressé différentes questions et reçu les réponses du l’enfant, il lui perce l'oreille avec une longue épingle d'or; lu sang coule el l’enfant n’a pas fait le moindre mouvement qui pût déceler la plus légère émotion. Son sommeil esl toujours paisible, toujours profond. Il lui ordonne de se lever; le magnétisé obéit. M. Ch... lui fait prendre successivement plusieurs postures plus difficiles, plus pénibles les unes que les autres, et dans lesquelles il se maintient aussi longtemps que le magnétiseur l’exige. Il le fait tour à tour, et presque eu même temps, rire aux éclats et pleurer à chaudes larmes. M. Ch... lui demande ensuite l'heure qu’il est au cadran de l’ilôlel-de Ville; l’enfant fait quelques pas dans lesa-lon el répond : « Il est dix heures el deux ou trois minutes. » Le fait vérifié est reconnu parfaitement exact.
« A présent, reprend le magnétiseur, va voir s’il n’y a point de malade à l’hôtel île M. Saussac. » Le magnétisé se tourne du côlé de la porte d’entrée el répond : a 11 y a un Monsieur au n° 2 qui se couche en se plaignant d'un grand mal de tôle. » Ce second fait également vérifié se trouve aussi rigoureusement exact.
« Tu vas compter maintenant, poursuit le magnétiseur, i, 2, 3, 4, el ainsi de suite, jusqu’à ce que Monsieur qui me tient le pouce le serrera fortement. » L’enfant compte jusqu’à 3: le pouce du magnétiseur venait d’être pressé. Deux fois l’épreuve se renouvelle, et deux fois l’enfant cesse de compter dès que le pouce du magnétiseur reçoit une pression. Il est à remarquer que M. Ch... était à quatre pas du magnétisé. Il s’en rapproche; il inet une main de M. Camille T... et une main de M. D... dans celles du jeune Régis en]lui disant:
« Magnétise bien ces deux Messieurs, et souviens-toi que je veux qu’ils soient pour toi invisibles, et que lu ne puisses les sentir ni les entendre, s'ils le touchent ou s’ils te parlent, lorsque tu seras réveillé. »
L’enfant esl arraché au sommeil par le magnétiseur. Les assistants, au nombre d'une vingtaine, forment un cercle autour de lui. M. CI)... l'invite à les compter du doigt, ce qu’il fait en évitant de comprendre dans cette opération les deux personnes devenues invisibles pour lui. L’expérience est répétée plusieurs fois, toujours même omission à l’égard de celles-ci.
Les invisibles sc placent devant l’enfant, lui donnent alternativement des croquignoles, des tapes, el, lorsque le magnétiseur lui demande qui l’a frappé, il nomme leurs voisins avec un Ion de bonne foi qui annonce la plus profonde conviction. Ce jeu continue, elle magnétisé accuse MM. Fill... et Pont... avec une vivacité et une persévérance qui excitent l’hilarité de tous les spectateurs. Ces deux Messieurs lui montrent leurs mains pendant que les atteintes se renouvellent de la part des invisibles toujours placés devant lui. «C’esl vous, s’écrie-t-il avec dépit en désignant lanlôl une personne, tantôt une autre-, c’est bien vous, je vous ai vu. »
On lui donne successivement des pièces de monnaie pour aller chercher des cigares; mais à peine a-t-il fait deux pas que l’un des invisibles les lui enlève aussitôt; alors il s’arrête cl redemande de l’argent avec un air confus, sans pouvoir dire comment a disparu celui qu’on venait de lui confier.
Enfin on fait une cueillette à son profit; le produit est mis dans son chapeau. L’un des invisibles y introduit ostensiblement sa main el enlève les espèces. L’enfant n’y trouvant plus rien promène autour de lui un œil inquiet el chagrin en se plaignant de la disparition de son argent. L’invisible le lui présente, l’enfant ne le voit pas; mais à l’instant où le pécule passe des mains de l’invisible dans celles d’un autre specia-
leur, lo magnétisé lt- saisit Icstemonl en s’écriant avec ssitis-faction : « I.c voici ! »
«Connais-Hi MM. Camille T... cl !>.••? demande le ma-gnéliseur au jeune Régis. — Oui. Monsieur. — Alors tu vas me les montrer, car ils sont ici. »
L’enfant fait le tour du cercle, nomme chacune des personnes dont il se compose, cl quoiqu'il ait passé plusieurs fois devant MM. T... el I)..., il déclare qu’ils ne sonl pas là. Vainement MM. T... el I)... lui parlent et le touchent; il ne les voit pas, il ne les entend pas et demeure insensible à leur contact. Enfin, mis en rapport par le fluide magnétique avec M. T..., le charme cesse el l’enfant jette un cri de surprise en le reconnaissant.
Restait M. I)..., toujours invisible pour lui. M. Ch... dit à l’oreille de chacun : «Je vais le mettre eu rapport avec M. mais il ne verra que sa tôle. En effet, après quelques gestes magnétiques de M. Ch..., l’enfant, d’un accent qui annonce la surprise et la terreur, s’écrie : « Ah! voilà une tète sans corps!... C’esl celle de M. D.... »
M. Ch...continue ses gcsles, et M. D... est enfin rendu complètement visible au magnétisé.
Tels sont les principaux faits dont j’ai élé témoin avec vingt autres personnes qui peuvent en attester l’exactitude.
L’incrédulité la plus tenace doit céder à l’évidence; aussi suis-je sorti de cette séance tout à fait convaincu de la réalité du magnétisme, el je m’explique maintenant l'enthousiasme de Pigaull-Lebrun pour une science qu’il avail d'abord méconnue el décriée.
(Courrier de la Drôme et de l’Ardèclic.)
LES CHERCHEURS D'OR. — Depuis quelques jours, des habitants de Lyon, excités par l’appât d’un trésor enfoui, dil-on, avant la Révolution par les religieux de PObscrvancc, s’occupent à creuser la terre au boni du chemin decenom. Unesomnambule a élé amenée sur les lieux et consultée sur l’endroit précis où
esl situe le Irésor. Sur sn déclaration affirmative 011 s'esl mis it l'œuvre, el l’on esl déjà parvenu à (|iiarnnte pieds. Les travaux continuent. (Courrier Français.)
Il esl à craindre qu’il se renouvelle à Lyon ce qui esl arrivé pour les douze saints en or massif qu’on dit enfouis dans la bulle du moni Jalus, près lionéiable (Sarlhe), Il y a tantôt vingt ans qu’on fouille toujours sur des indications de somnambules prétendus très-lucidcs, et 011 n’a encore rien trouvé. Il y a probablement là 1111 phénomène psychique qu’on 11’a pas reconnu : la vue d’images dans la |>ensée.
CONfillÈS SCIENTIFIQUE HE FRANCE. — Dans un paragraphe du programme on avait glissé cette question : Quel est l'éhit actuel du magnétisme en France? M. Aubin Gauthier s’était chargé de la traiter, cl, par une faveur que l’on doit à monseigneur l’archevêque, il avait obtenu de lire son discours en assemblée générale. Mais, nous devons le dire, le discours de M. Gauthier était trop hérissé de dates, de noms, el peu propre à satisfaire la curiosité de plus de douze cents personnes avides d’émotions, car on attendait des magnétiseurs un récil brillant de leur science merveilleuse. M. Gauthier dut cesser sa lecture, qui n’était goûtée que d’un petit nombre d’hommes.
Par une de ces hardiesses communes à nos adversaires, 1111 médecin demanda la parole, l’obtint, et sa bouche, «n paroles féconde, lança l'aiiailiéme sur tous les magnétiseurs, traita Mesmer de charlatan el le magnétisme comme une niaiserie indigne de l’attention des savants. Ce discours, rempli d’aign ur el de bile, avait provoqué une sorte de répulsion générale qui se manifesta par des signes non équivoques de mécontentement. La question du magnétisme allait être cependant passée à l'ordre du jour, lorsque M. le baron du Potel, arrivé seulemenl depuis quelques instants, s’élança à la tribune, el, dans une improvisation chaleureuse, vengea Mesmer et les magnétiseurs des outrages dont on venait de les accabler. La question fui laissée pendante; on dut enten-
dre M. ilu Potot puisqu’il so chargeait «le traiter île nouveau la question en la présentant sous un nouveau jour. La section de médecine, après quelque hésitation, accorda une séance spéciale pour traiter du magnétisme. Là M. le baron du Potel, après avoir exposé ce qu'rst le magnétisme, selon lui, cl répondu avcc calme à toutes les questions qui lui furent faites, obtint un aveu précieux de tous les assistants. Le bureau, composé de médecins, et l'assemblée, oiï on remarquait un grand nombre d’ecclésiastiques, furent unanimes pour reconnaître l’extislence du magnétisme comme principe physique. Seulement on voulait désormais ôlre éclairé sur les phénomènes somnambuliqucs les plus rares et les plus curieux, el qui laissent, par cela seul, encore des doutes. A la fin de la séance on proposa de nommer une commission pour vérifier ces faits et d’inviter M. du Potel à les produire. Celte proposition honorable pour M. du Potel ne put être acceptée par lui. C’était peut-être un mois do son temps qu’on lui demandait, car les phénomènes psychologiques ne s’improvisent poinl, ils résultent ordinairement de magnétisations longues et laborieuses. Il est des nécessités cruelles auxquelles on esl obligé d’obéir contre ses intérêts les plus chers. En rcfasanl, M. du Potel ne reculait point, car 011 demandait une chose non prévue par lui, et des engagements sacrés ne lui permettaient point de disposer d’un temps aussi considérable que celui rigoureusement nécessaire à l’obtention des phénomènes demandés.
En voyant une foule de jeunes ecclésiastiques avides de s’instruire du magnétisme el venus â Reims pur entendre débattre celte question, M. du Pot et éprouva un double regret. Mais il a promis de satisfaire autant qu’il dépendra de lui à des désirs si honorables et partant de cœurs vraiment animés par l’Evangile. Il retournera donc à Reims dans un temps plus opportun, pour se placer au milieu de celte jeunesse et mettre son Sme à l’unisson de celles d’hommes qui sc sont si bien fait connaître à lui.
Kn «suuii; le magnétisme n’a rien perdu dans la lullc |iii s’est ouverte au congrès : il y a élé souienu d'uni; manière digne el ferme. Nous reviendrons sur ce sujet encore trop palpitant; de son côté, M. (îaulhicr dira, sans doute, ce qu'il 11e lui lut pas permis d’exprimer, el le public jugera, lliims, 5 e1 6 septembre 18/|5.
l'IlHKMtlIKSSIKHISlIE. — Si Mesmer a ouvert à la médecine une ère nouvelle de progrès, son disciple, de Itusancy, n’a pas rail moins pour la philosophie. Kn enseignant un moyen simple et facile de provoquer artificiellement el à chaque inslani le somnambulisme, étal psychique anormal, jusqu’alors produil spontané de névroses diverses, rare, complexe et trop fugace pour être étudié à loisir dans sa nature el scs rapports, M. de Puységur a convié tous les savants à l'étude d’un fait qui offre à leurs investigations un horizon sans limites.
Ce singulier étal d'aberration dans les rapports de l’âme avec les sens, en plaçant l’homme dans des conditions physiques el morales nouvelles, touche à tout; c’esl ce qui explique la diversité et la multiplicité des recherches auxquelles il a donné lieu. On esl étonné quand on pense qu’en un demi-siècle le somnambulisme puységurique a plus appris que l'observation constante des siècles, la science el la sagesse antiques n’ont confié au burin de l’histoire. Quelles espérances ne pourrait-on pas fonder sur la virilité d’un fait qui s’annonce si brillant à son aurore, si, comme loul ce qui lient à l’essence humaine, il n’était susceptible de fausses interprétations, parlant capables d’engendrer les plus grandes erreurs? Mesmer, dont les pensées profondes n’ont pas toujours trouvé d’interprètes, le regardait comme dangereux aux progrès de sa découverte. Ce grand homme, appliquant au magnétisme ces mots célèbris de Newton : «Oh! physique, garde-toi de la métaphysique! >. sut éviter un écueil, où, faille de l’avoir compris, d’aulres sont venus cchouer. «Nu voulant pas éion-
ner, dit-il, je me suis borné aux effets et applications utiles. »
l,e disciple n'approuva pas la réserve du maître ; les uns l’en ont blâmé, les autres loué. Mais il esl certain que, l’effet étant dans la cause, il devait se produire et un autre l’eût fait connaître le lendemain peut-être.
De la yision au travers des corps opaques, â dislance, dans le corps d'autrui el dans ses propres organes , l’instinct des remèdes, etc., etc., facultés inhérentes à l’étal puységurique, aujourd’hui devenues vulgaires, l'esprit humain, dévoré par son activité inquiète, dirigea son enquête vers la métaphysique et d'autres directions.
On vil d’abord paraître l'angélisme, dont les adeples cherchaient à former une secte sous le nom de spirilualisles chrétiens. Dans cette doctrine, liée en Allemagne il y a une trentaine d'années, 011 admet l'existence d'êtres métaphysiques (anges), bons ou mauvais, dirigeant les somnambules. L'existence do ces êtres intermédiaires entre les hommes el la Divinité esl conforme aux saintes Ecritures, mais loin d'être admise par un grand nombre de psychologues, qui objeelent que, l'esprit élant universel dans le lemps el dans l’espace, ces anges doivcnl exister pour lous, indépendamment do la religion qu’ils professent, ou bien l’œuvre divine serait spéciale el non générale, contrairement à (oui ce qu’on connaît. Quoi qu’il en soit, la question, qui compte de zélés avocats, est loin d'être vidée, el il ne serait pas sage île se prononcer avanl de plus amples moissons.
Aujourd’hui, c'e^l le lour des phrénomagnétistes, prenant également le magnétisme, ou plutôt le puységurisme, pour base de la démonstration des véri'és phrénologiques. L’idée primitive de celle nouvelle branche île recherches appartient à Spincer-llall, compositeur d’imprimerie. Également versé dans la connaissance des découvertes de Mesmer et de Gall, il se mil, il y a environ trois ans, à parcourir l'Angleterre comme promoteur d’une science nouvelle, née du mesmérisme el de la phrénologio. L’ordre particulier de phénomènes
produits par Spinccr-Hall reçut lo nom de phrénomesmémme, cl fil do nombreux prosélytes, entre autres le docteur Elliol-son, dont lu talent et l’autorité scieiilifit|ues ont donné une vigoureuse extension à la chose. Sur ces entrefaites, le docteur Ldwin Lee. publia deux ouvrages où la question esl exposée en entier. Depuis 011 a beaucoup écrit, beaucoup expérimenté, et si 011 n’a pas démontré la localisation cérébrale, on a du moins mis dans un plus grand jour l'action volontaire qu’un être exerce sur un autre être, question qui touche à la liberté du moi, cl n’est pas encore assi'/. mûre pour être bien Irailée.
Les phrénomesmérislcs pensent que, eu magnétisant isolément chaque organe phrénologique durant lesomnambulisme, on peut le stimuler, le surexciter à un degré extrême, ce qui prouve, selon eux, la localisation ; el, en outre, ils expliquent le» phénomènes puységuriques par une concentration vitale dans les grnu[ies d'organes afiectés aux instincts, aux sentiments el à l’intelligence.
L’arrivée â Paris d’une jeune Anglaise qui présente à un haut degré les phénomènes dont il s’agit nous a permis de vérifier les moyens el les effets. Nous en rendrons compte dans notre prochain numéro.
NÉCROLOGIE
M. Caviglia, Italien, ancien capitaine de corvette nu service de l'Angleterre, est morl à Paris, qu’il habitait depuis longtemps, le 7 de ce mois, dans un ftge fort avancé. Depuis plus de quarante ans il s’occupait de magnétisme, surtout au point de vue du spirituel. Il axait expérimenté beaucoup cl prenait un grand nombre de notes, ce qui fait supposer qu’il laisse des manuscrits précieux à consulter. On pense généralement qu’il a dû les léguer à sou ami, l’abbé Lapommeiaye. Comme il élail seul, sa mort n’a été connue que de ses intimes, au
nombre desquels MM. Osleau, Possin et Lodin deLalaire, qui a prononcé sur sa lonibc le discours suivant.
Mw Kafcnss,
Qu'il me soit permis, après les cérémonies (le la religion, de venir jcler quelques Meurs sur la lon.be «l’un ami.
Il était auss:, lui, ilu nombre de ces Ames inquiètes, de ccs esprits-agités par le désir .le connaître, el de connaître beaucoup, et que ne satisfont point les diverses théories humaines, uuc fois qu’ils les approfondissent un peu. !,ui aussi avait prétendu parvenir ù atteindre, par les seuls efforts de sa raison, le principe cl la lin de tout cc qui existe i et, après des recherches pénibles, bien d’inutiles efforts, de graves écarts, d'après son propre témoignage, il est venu sc reposer de scs fatigues ù l'ombre auguste de 1a croix 11 :
C'est là, sous cet ombrage mystérieux, dans le secret de la méditation, qu’il a trouvé cnl'm uuc solution satisfaisante à tous ces problèmes difficiles que l'humanité, abandonnée à elle-même, a vainement essayé de résoudre dans leur entière harmonie, aux diverses phases de son développement. Venir, ù l’occasion d’une tombe, célébrer l’excellence du Christianisme dans uu siècle qui rend les honneurs divins à une nouvelle idole qu’on nomme le Pro-qvt's, n'csl-ce pas vouloir se faire passer pour être arriéré?.... On pourrait répondre que ce dieu de fabrique récente u’c-t que la déification d une facile .lue l’homme possède de rentrer péniblement eu possession d’une parue des biens qu'il a perdus; mais auprès de ceux auxquels je m’adresse, cc sera, t un nouveau litre ù mériter le reproche dont nous voudrions nous justifier, n estons donc toujours arriérés, mes frères, dans la «oie du Christianisme, et nous verrons plus lard quels seront ceux qui arriveront les premiers.
Mais revenons à la tombe ; c'est là que se trouvent les rotes de celui que nous honorons el que nous regrettons. Disons, sans llatlerie, quelles furent ses qualités, cl si nous l avons suivi quelque jour dans ses écarls, mutons-le du moins dans son relou, sincère et affectueux au culte de la vérité. 11 était doux, bienfaisant, humain; trop sévè.e peut-être pour lu.-mOine, .1 était
len.p i oe tolé.ance pour les autres; il sc rappelai, sans doute qu'en s;.....a-
lité d'homme rien de ce qui affeele l’humanité ne devait lu. Cire étranger. .Et puis ajoutait-il souvent lui-même, pourquoi serais-je intolérant ? Celui nue je repousserais sera peuMirc dans un instant plus agréable que mo. a la Divinité.. Ou ne pouvait se lasser d admirer sa douce résignation au mil:vu des souffrances qui uni terminé sou exislei.ee terrestre.
Quoique n’appartenant pas par la naissance à la nation française, quoi-qu’au service même d'une nation rivale de celle puissance, .1 accueillit toujours favorablement les Français; U les aimait, et sembla,l prendre pla.s.r t leur rendre les services que ses hautes fonctions dans la marine mettaient A sa disposition. C'est qu'il appartenait de cœur ù celle f.alemlié universelle dont la source est divine, et pour laquelle les distinctions du temps et des lieux ue peuvent être des motifs d'aversion ou de haine.
Ainsi, après avoir cherché l:i vérité eu dehors du Christianisme, il est nmrl chrétien, el chrétien philosophe, car il acceptait ses souffrances comme une conséquence nécessaire de l’oubli di s préceptes de eetlc sublime doctrine, et ne se lassait pas d’admirer celte touchante bonté delà Providence, qui Trappe, il est vrai, le contempteur de sa profonde el bienveillante économie, mais en lui donnant les moyens de se relever.
Adieu, digne vieillard, ou mieux au revoir, non pas là, dans cette tombe, la dépouille mortelle seule s’y trouve, mais au ciel, auquel nous aspirons tous de nous rendre un jour ! Adieu.
AVIS. — I,e magnétisme, comme science anthropologique, exige la connaissance de l’analomie el de la physiologie. Malheureusement la plupart des magnétiseurs sont étrangers à ces sciences, pourtant si nécessaires ou plutôt indispensables.'Il en résulte un préjudice grave pour le progrès du magnétisme et la considération personnelle de ceux qui s'en occupent. L'administration du Journal du Magnétisme, vigilante pour tout ce qui touche à l’avenir du mesmérisme, a pensé rendre un service à lu cause qu'elle soutient en fondantdcs cours permanents d'anatomie physiologique dont M. Icdocleur Iîd. I.angleliert, ancien membre de l’école pratique de médecine, professeur d’anatomie cl de physiologie, a bien voulu se charger.
Les démonstrations seront laites sur les pièces d’anatomie clastique du docteur Auzoux.
Le cours commencera le dimanche 5 octobre, à une heure, el sera continué tous les dimanches à lu même heure.
Les personnes qui desirenl le suivre devront sc faire inscrire il l’avance au bureau du journal, tous les jours de uiidi il trois heures.
Le prix de l’inscription est de 5 francs, destinés il couvrir les frais qu'entraîne la location des pièces anatomiques.
La nouvelle liste des souscriptions au buste de Mesmer, l’analyse des travaux hebdomadaires des sociétés du Mesmérisme el pliilanthropico-magnélique, ainsi que le programme de \'Athénée électro-magnétique de Lyon, sont renvoyés au prochain numéro.
Le Propriétaire-Gérant, HÉBERT (du Camay).
JOURNAL
nu
MAGNÉTISME.
2o — Inoculation sans contact.
Par un jeu singulier des forces magnétiques, et peut-être par l’analogie de deux systèmes nerveux, il arrive parfois des phénomènes inattendus. Ainsi j’ai vu plusieurs fois un rapport s’établir entre des magnétisés qui ne se connaissaient point, et ce qu’éprouvait l’un était senti par l’autre, quoique souvent ils fussent séparés par des murailles. Ceci vous met dans un grand embarras ; car, tandis que prodiguant vos soins à celui qui se trouve affecté sympathiquement, l’autre, que vous avez laissé calme, reprend l'agitation et les crises déjà passées, et vice versa. Des heures s’écoulent ainsi dans un travail inutile et très-fatigant ; il faut alors changer les heures ou vous faire suppléer près de l’un des deux malades. Ne croyez
MANUEL DU MAGNÉTISEUR.
(Suile.)
pas que l’imagination soit ici pour quelque chose. D ins un liôpii I à S; int-Pétcrsbourg, où l’on m’avait dorré à t-riter deux affections nerveuses épilepti-l'ormes, ma/a 1rs (/re j'ai guéries, quoique leur maladie fût grave cl de'’à ancienne, eh Lien, quoiqu’elles fussent sé] arées par une grande distance, et que l’une occupât le premier étage et l'autre le second, aussitôt que je magnétisais l’une, l'autre tombait en crise. Ki n cependant n’avait pu avertir celle que jo ne magnétisais pas, et cc n’est pas une fois, mais vingt, et le jour ou la nuit, que nous pouvions observer ce singulier phénomène. Mon entrée était mystérieuse, pas le plus léger bruit, souvent môme elles étaient toutes deux en sommeil naturel, et n’importe quelle qre fût celle que je magnétisais d’abord, celle à laquelle je ne songeais pas sortait bientôt de son sommeil et poussait des cris affreux. J’ai laissé, pour mon instruction, durer cette sympathie pendant quelque temps, puis je l’ai rompue en produisant des crises artificielles, plusieurs de suite. J’ai détruit ainsi la sensibilité trop vive de leur système nerveux, entretenu par une trop grande abondance de fluide nerveux qui ne trouvait point son écoulement à cause des crampes et des spasmes qui existaient presque continuellement.
Voici un fait plus incroyable, mais pourtant non moins vrai.
Le magnétisme est destiné à exercer pour longtemps la pensée du physiologiste et du psychologiste. Des faits nouveaux et incompréhensibles se manifesteront à chaque instant par les singulières propriétés de l’agent employé.
Je donnais mes soins à un malade qui demeurait à Paris, rue des Mauvaises-Paroles. Il était peu sensible au magnétisme, lin soir seulement il éprouva des commotions assez violentes; je 1e laissai calme. Lo lendemain soir môme phénomène; mais un autre malade auquel je donnais aussi mes soins, et qui ne connaissait point le premier, était parti pour Fontainebleau depuis deux jours. Il était aussi très-peu sensible au magnétisme. Mais quel fut mon étonnement, lorsqu’il revint le troisième jour à Paris, d’entendre ses aveux. Il avait éprouvé des secousses violentes à la mémo heure, au môme instant et pendant le môme espace de temps. Je ne fis aucune réflexion sur le moment, mais le soir môme je le magnétisai, lui; il demeurait habituellement rue Coq-Héron. Celui de la rue des Mauvaises-Paroles éprouva les mômes accidents nerveux. Je cessai, plus rien ne se manifesta; je repris à d’autres heures, et ce singulier rapport fut rompu. Je le répète, ils ne se connaissaient point, et ils ignorent l’observation curieuse qu’ils m’offrirent ainsi.
§ II. — DANGERS MORAUX.
Je ne puis toucher cette corde que faiblement ici; j’ai d’ailleurs développé, autant que je l’ai pu, mes idées sur ce sujet dans mon Essai philosophique.
Si vous magnétisez avec un cœur corrompu, vous vous exposez à corrompre; c’est un fait autant moral que physique.
Une vérité que vous reconnaîtrez plus tard dans la vie est celle-ci : c’est qu’à mérite égal, en opérant de
la môme manière et dans des cas identiques, deux hommes d’une même nature en apparence obtiendront des résultats différents. Et je ne dis pas ceci pour le magnétisme seulement, mais en toutes médecines, et môme en chirurgie. Cela vient des principes moraux qu'ils peuvent avoir, el qui ont une influence qui s’étend sur leur ouvrage. Vos mains doivent être pures de souillures. On rira de ceci, car on ne comprendra pas; mais c’est un fait. La liqueur qui sortira d’un vase malpropre ne sera jamais bonne; elle agira sans doute, mais ses effets seront mauvais; quelquefois elle peut empoisonner. II est des hommes qui ont des propriétés malfaisantes; on ne les aperçoit souvent que lorsqu’il n’est plus temps d’en empêcher les effets. Quelquefois môme c’est à leur insu, ils no savent pas.... Mais je le répète, il ne s’agit pas seulement de magnétisme. Placez-vous en dehors et méditez ceci.
Par quel mystère s’opère la réunion des cœurs? On sent le travail commencer en nous ; un regard, une main qui touche la vôtre, un mot enfin ! et souvent votre sort est décidé. Vous aimerez ou vous serez aimé ! La vertu n’a rien à faire ici, la volonté non plus. Ce n’est pas elle qui décide, pas plus que la raison. C’est une espèce de maladie qui vous prend, vous domine, et n’a souvent pour cause qu’une émanation de vos nerfs projetée par les yeux ou exhalée par la peau. On ne peut s’en défaire qu’en fuyant, qu’en changeant de lieu promptement.
Quelques hommes et quelques femmes ont ce triste privilège d'inoculer des passions fiévreuses, et la durée de leurs enchantements ne peut être calculée.
Circé avait ce pouvoir, et ce n’est point une pure allégorie. J’ai connu dans ma vio des hommes supérieurs qui étaient les jouets de femmes indignes et qui ne pouvaient se soustraire à cette domination qui les abrutissait. D’autres hommes, bien inférieurs, dominaient des femmes d’un esprit élevé, et les tenaient ainsi dans un honteux esclavage.
11 n’est que trop vrai que certains êtres exercent une action malfaisante sur ce qui les entoure; il en est d’aytres qui ont des propriétés contraires. Les somnambules savent très-bien les distinguer, les malades aussi parfois. Mais que d’obscurité il reste encore ici!
MENSTRUATION, CI1LOBOSE OU PALES COULEUHS.
Malgré mon désir de rendre court ce petit traité que je destine moins aux magnétiseurs qu’à ceux qui veulent le devenir, je ne puis passer sous silence encore quelques affections quelquefois très-rebelles à la médecine, et où lo magnétisme réussit parfaitement.
Qu’on ouvre, en effet, les écrits sur le magnétisme, ou qu’on écoute les récits journaliers des magnétiseurs; on est accablé de preuves que les suppressions de règles cèdent presque toutes à l’emploi du magnétisme. En outre, lorsqu’une jeune fille est lente à se former, et qu’elle souffre parce qu’un émonctoire naturel ne peut s’établir, soit par faiblesse de tempérament ou d’autres causes inconnues, aidée par le magnétisme elle devient nubile, et ce flux si nécessaire, si important, se régularise parfaitement. Dans
cc cas le père ou la mère, s’ils savent magnétiser, peuvent être les médecins de leurs enfants.
Il est des cas qui paraissent devoir être rebelles, comme les affections de poitrine anciennes, qui retiennent, empêchent le sang de se porter vers le bassin. Cependant, contre toute probabilité, dans ces cas extrêmes, la nature, par un puissant effort, détermine quelquefois le sang à prendre cette direction. Seulement dans cc cas le résultat n’est pas heureux; la nature épuisée fait preuve de bon vouloir, mais on avait trop attendu, il est trop lard ; elle ne peut plus que vous laisser des regrets.
Dans les affections séniles où la faiblesse est extrême, et où cependant les règles paraissent, la nature, aidée par le magnétisme, les supprime. Elle retient ainsi, sans augmenter en rien le mal qui existe, des forces nécessaires. Vous ne devez pas vous en étonner; il n’y a pas contradiction dans sa marche, quoique cela apparaisse ainsi à notre faible intelligence.
J’ai constaté trois cas qui corroborent cc que j’ai dit plus haut en traitant des jeunes filles pour des pâles couleurs ou même pour des affections différentes. Tombées dans le sommeil magnétique, elles annonçaient le jour et l’heure de l'apparition de leurs règles ; et comme elles ignoraient ce que c’était, elles jetaient des cris d’effroi en apercevant du sang aussi distinctement que s’il eût été sous leurs yeux. Et au jour indiqué, ù l’heure précise, les mamans, qui étaient dans le secret, obtenaient la preuve d’une prévision parfaite.
Un homme de cinquante ans environ, ayant perdu la faculté virile, magnétisé pour une affection rhumatismale, vit en n éme temps que la cessation de ses douleurs revenir une faculté qu’il ne possédait plus depuis longtemps.
Une femme de trente-cinq ans, stérile, devint grosse à la suite d'un traitement magnétique qui lui avait été ordonné pour une maladie qui n’avait point son siège dans l’abdomen.
Deux autres exemples sur des femmes qui avaient déjà eu des enfanls, mais qui, par le temps qui s’était écoulé (dix ou douze ans), semblaient devoir ne plus être mères, le sont devenues de nouveau, et dans tous ces cas l’accouchement a été très-heureux.
Le magnétisme ravive la sensibilité, il la porte même sur des organes manquant de celle qui leur est nécessaire, el leur fait de cette sorte retrouver le ton convenable. Je ne cite que des cas positifs; je n’ai commencé à les observer que lorsque plusieurs autres de même nature avaient eu lieu, mais je ne les attribuais pas alors au magnétisme.
VÉS1CAT0IRES, CAUTÈRES, SÉTONS.
11 est un fait précieux que n’ignore aucun de ceux qui magnétisent : c’est que les malades chez qui on a établi un ou des émonctoires les voient, durant le traitement magnétique, sécher ou suppurer beaucoup plus abondamment. On acquiert ainsi une donnée
certaine sur leur opportunité. Dans le premier cas on peut les supprimer sans danger, car ils sont inutiles. Dans le second, il faut bien sc garder d'y toucher; ils sont nécessaires, et celui qui les avait ordonnés avait bien jugé. La nature dirige sur ce point des humeurs viciées 01: superflues; il faut laisser la source s’en tarir.
Vous voyez que c’est rapidement, à grands traits, et embrassant les caractères généraux de l’action du magnétisme, que je cherche à transplanter cette découverte dans vos esprits. Quel que soient, au reste, les descriptions, les exemples que l’on puisse citer, un livre est toujours imparfait. L’essentiel est de se pénétrer des vérités mères, et de grouper ensuite soi-même les faits de moindre importance près de ceux principaux. Les sciences sont mobiles, et, quoique s’appuyant sur une base souvent solide, elles varient dans leur aspect. Mais ce que je vous ai dit est suffisant pour mettre en évidence la force mystérieuse qui est en \ous, quoi que vous fassiez, quelle que soit la teinte de vos idées, les procédés qu’il vous plaira suivre; les faits pourront se présenter avec des nuances distinctes, mais en les dépouillant vous reconnaîtrez qu’ils viennent d'un fonds commun et qu’ils ont même origine. Marchez sans crainte; la nature, plus sage que nous, a donné des propriétés constantes à notre agent; nous pouvons les affaiblir, mais non les détruire. Le magnétisme sera toujours un principe tonique; il aura également la propriété de produire ce qu’on appelle le sommeil magnétique. Jamais ces qualités ne changeront, pénétrez-vous-en bien. Toutes les maladies par lui peuvent être influen-
cées, modifiées; c’est enfin l’agent de la nature donné à l’homme comme moyen de se guérir et de se préserver.
Ne bannissez cependant point les auxiliaires, les moyens qui peuvent lui venir en aide. Ce sera un jour le rôle de la médecine; elle étudiera avec plus de fruit l’art de guérir, car elle ne le connaît point encore, tandis que vous, au contraire, dès vos premiers pas, vous produirez des faits que votre esprit comprendra, dont il connaîtra la cause, et qui vous empêcheront de vous égarer. Mais quoi que vous fassiez, jamais vous ne guérirez tous les malades; plusieurs sont sortis incomplets des mains de la nature; les uns devront avancer en se traînant jusqu’à un certain âge et mourir jeunes encore; d’autres, tout en vivant, éprouver les ennuis de vivre, car l’étui où l’âme avait été logée manquait des proportions nécessaires. Au milieu de tous ces infortunés se trouvent placés ceux que vous pouvez soulager ou guérir; il n’appartient qu’à l’étude de pouvoir les distinguer du premier coup d’œil. Jamais un livre, quel qu’il soit, ne vous donnera cette connaissance; elle arrive en nous lorsque les sens ont été exercés longtemps, et ne peut se transmettre, pas plus que le génie. C’est à vous d'avancer dans le pays dont nous vous offrons la topographie, de suivre la route que nous vous avons tracée: votre intelligence fera le reste. Dirigez-vous d’où vient la lumière. Il est des hommes qui veulent vivre et mourir dans les ténèbres, ne soyez point comme eux; ils sont placés dans l’échelle des êtres plus bas que l’animal, car celui-ci, en avançant en âge, se perfectionne, il développe ses moyens, son
instinct acquiert de la justesse, tandis que l’homme qui n’étudie point sc dégrade visiblement.
DU CONCOURS DES MÉDECINS ORDINAIRES DANS LES TRAITEMENTS MAGNÉTIQUES.
Question délicate aujourd’hui, à causo de l’état actuel des croyances. 11 est rare, en effet, de trouver un médecin parfaitement disposé pour le magnétisme, et le serait-il, fera-t-il abnégation de ses principes? réduira-t-il son rôle à une passivité d’expectation ? et si des remèdes sont jugés nécessaires, pourra-t-il consentir à s en entendre avec le magnétiseur? Ne doit-on pas craindre que le char embourbe soit tiré tantôt à droite, tantôt à gauche, et qu’il reste ainsi dans 1 ornière? 11 ne faut pas ici une demi-croyance, que le magnétiseur soit seulement toléré par les médecins, et que les mauvaises passions entrent en lice. Comment établir une confraternité que la médecine repousse, et marcher d’un pas égal vers le même but, s’il se présente des cas comme celui-ci, par exemple?
Traitant sous les yeux d’un médecin un jeune enfant affecté d’une maladie nerveuse, mon traitement était agréé par le médecin ; il croyait au magnétisme, mais il jugeait qu’on devait donner au malade un purgatif. Moi je pensais qu’aucun médicament n’était nécessaire, car l’enfant allait bien; ses convulsions étaient apaisées. Il s’éleva une discussion à ce sujet, et nous ne pûmes tomber d’accord. Les parents de l’enlant finirent parôtre do mon avis. Mais que fit le médecin ? il s’en va faire préparer un purgatif où il
entrait du calomelas, rentre lorsque je n’y étais plus, fait avaler de force ù l’enfant le contenu de la fiole dont il s’était muni, et les convulsions reviennent. Qu’avais-je à faire en pareil cas? me retirer. La raison le conseillait, mais ma conscience réprouvait cette conduite; l’humanité me faisait un devoir de continuer, et j’y cédai. Devais-je me fâcher contre un homme qui était de bonne foi, qui croyait au magnétisme, niais aussi à l’efficacité du moyen qu’il proposait?
Sans citer d’autres exemples, on peut voir combien de difficultés peuvent naîtro de deux volontés, de deux systèmes mis en présence ; il faut que l’un finisse par céder le pas à l’autre, et que de vertu, que de philosophie il faut avoir pour ne point murmurer.
Si je voulais sortir du cercle que je me suis tracé, combien je pourrais citer de faits où le magnétisme était employé mystérieusement, c’est-à-dire des cas où le médecin, continuant de venir au chevet du malade et paraissant jouir de toute sa confiance, ordonnait des prescriptions qui n’étaient point suivies, et s'attribuait souvent l’honneur d’un changement heureux qui n’était dû qu’à mes efforts. Souvent môme je faisais un choix dans cc qui était ordonné, et à linsu du médecin j’étais le régulateur de son traitement. Que de fois, retiré dans le cabinet voisin, j’entendais scs discours, la description minutieuse de l’état du malade, et porter un pronostic dont j’appréciais la valeur. Honteuse supercherie ! dira-t-on, rôle indigne.... Non, mille fois non; car, avant d’en agir ainsi, on avait sondé le docteur sur le magnétisme; il s’en était moqué el avait cherché à détourner le ma-
latle do l’emploi d’un moyen dont il niait l'efficacité. Mais pourquoi continuer de voir le médecin?... Pour des êtres indifférents la question est toute simple; mais lorsqu’on a affaire à un ami et qu’on veut conserver son amitié, lorsque cette amitié est fondée sur des services rendus antérieurement, lorsqu’on est enchaîné à lui pur des secrets de famille, par des relations journalières qui durent depuis plusieurs années ; dans ce cas, ne doit-on pas ménager son propre orgueil et une susceptibilité trop grande parfois pour être vaincue? Croyez-vous que dans cette circonstance le médecin était le plus malheureux? non, c’était le magnétiseur, qui, forcé de se cacher pour faire une action louable, sentait battre son cœur et voyait abaisser un homme qu’il eût voulu relever.
Le magnétisme n’est plus autant repoussé aujourd’hui ; on avoue sa croyance sans craindre le ridicule, mais il n’en a pas toujours été ainsi, et les difficultés que je signale existeront longtemps encore. Lors même que l’agent magnétique sera reconnu, par les facultés, avoir des propriétés thérapeutiques, les médecins ne céderont pas pour cela leurs malades aux magnétiseurs. Il y aura lutte, guerre sourde ou apparente. Ce serait mal connaître l’humanité que d’en juger autrement. Sans doute le temps mettra toute chose à sa place ; il n’y aura plus que des oppositions individuelles; mais bien des malades, qui pourraient guérir, périront avant qu’il n’y ait entente cordiale entre les magnétiseurs et les médecins.
Nous terminerons cette digression en disant comme M. de Puységur :
« La vérité ne peut perdre ses droits, et la confusion est toujours le partage de ceux qui, par mauvaise foi, ne la veulent pas reconnaître.
o Une vérité est toujours une vérité, et tôt ou tard son flambeau perce les nuages de l’erreur, de l’ignorance ou de l’envie. Si la science du magnétisme animal n’était qu’un système, je sentirais toute mon insuffisance de la faire adopter. Un système n’est souvent que le fruit d’une imagination exaltée, dont le succès ne tient qu’au plus ou moins d'éloquence de son auteur; mais ici c’est une pratique à la portée des hommes les plus bornés ; tous ont la puissance de l’exercer, par cela seul quils sont hommes. »
(La suite au prochain numéro.)
ÉTUDES PRÉPARATOIRES
DU
SOMNAMBULISME MAGNÉTIQUE.
(Suite.)
§ III. — FANTOMES.
Deuxième observation.
« Le marquis de Rambouillet et le marquis de Per-cy, tous deux âgés d’environ vingt-cinq à trente ans, étaient intimes amis et allaient à la guerre, comme y
vont en Franco toutes les personnes de qualité. Un jour qu’ils s’entretenaient des affaires de 1 autre monde, après plusieurs discours qui témoignaient assez qu’ils n’étaient pas très-persuadés de tout cc qui s’en dit, ils se promirent l’un à l’autre que le premier qui mourrait en viendrait apporter des nouvelles a son compagnon.
« Au bout de trois mois le marquis de Rambouillet partit pour la Flandre, où la guerre était alors, et le marquis de Percy, arrêté par une grosse fièvre, demeura à Paris. Six semaines après Percy entendit, sur les six heures du matin, tirer les rideaux de son lit, et, se tournant pour voir qui c'etait,.il aperçut le marquis de Rambouillet en buffles et en bottes. Il sortit de son lit et voulut sauter à son cou pour lui témoigner la ;oie qu’il avait de son retour ; mais Rambouillet, reculant quelques pas en arrière, lui dit que ses caresses n’étaient plus de saison, qu’il ne venait que pour s’acquitter de la parole qu’il lui avait donnée, qu’il avait été tué la veille, que tout ce qu’on disait de l’autre monde était très-certain, qu’il devait songer à vivre d’une autre manière, et qu’il n’avait point de temps à perdre parce qu’il serait tué dans la première affaire où il se trouverait.
« On ne peut exprimer la surprise où fut le marquis de Percy à cc discours. Ne pouvant croire ce qu’il entendait, il fit de nouveaux efforts pour embrasser son ami, qu’il croyait le vouloir abuser, mais il n’embrassa que le vent; et Rambouillet, voyant qu’il était incrédule, lui montra l’endroit où il avait reçu le coup, qui était dans les reins, d’où le sang paraissait encore couler. Après ccla, le fantôme disparut, et
laissa Percy dans une frayeur plus aisée à comprendre qu’à décrire. il appela son valet de chambre et réveilla toute la m. ison par ses cris.
« Plusieurs personnes accoururent, à qui il raconta ce qu'il venait de voir; tout le monde attribua cette vision à l’ardeur de la lièvre, qui pouvait altérer son imagination, et le pria de se recoucher, lui remontrant qu’il fallait qu’il eût rêvé ce qu'il disait. Le marquis, au désespoir de voir qu’on le prît pour un visionnaire, raconta toutes les circonstances qu’on vient de lire; mais il eut beau protester qu’il avait vu et entendu son ami en veillant, on demeura toujours dans la même pensée jusqu’à ce que la poste de Flandre, par laquelle on apprit la mort du marquis de Rambouillet, fut arrivée. Cette première circonstance s’étant trouvée véritable et de la manière dont l’avait dit Percy, ceux à qui il avait conté l’aventure commencèrent à croire qu’il en pouvait bien être quelque chose, parce que, Rambouillet ayant été tué précisément la veille du jour qu’il l'avait dit, il était impossible qu’il l’eût appris naturellement. Dans la suite Percy ayant voulu aller, pendant les guerres civiles, au combat de Saint-Antoine, y fut tué. »
[La luile au prochain numéro.)
REVUE DU MOIS.
LE MAGNÉTISME Al HA\RE. —Los zélateurs du mesmérisme sont plus nombreux qu’on ne le pense. Dans quelque lieu qu’un fait se produise, il trouve d'éloquents interprètes. Les pérégrinations magnétiques oui cela d’avantageux qu’outre la propagande des fails, beaucoup plus éloquents aux yeux des masses que les considérations scientifiques, elles font entrer dans l'arène des discussions les défenseurs et les adversaires de cette science. Le mois dernier nous avons publié les Pawlcs d'un croyant; aujourd’hui un autre organe, le Journal du H aire, nous apporte un article remarquable. Nous n’avons qu’un regret à exprimer: c’est que lesauteurs, hommes dont le talent est si vigoureux, l’esprit si encyclique, partant capables derendredesi éminents services à la cause magnétique, n’aient fait connaître que leur initiale. Ecoutons ce nouvel avocat :
Nous vivons dans un temps où l’on croit peu aux miracles, et s’il y avait par-ci par-là quelque chose d’analogue, cc n’est pas sur la foi d’autrui que nous serions convaincus, mais d’après l’évidence des faits. Les phénomènes du magnétisme sont à peu près dans ce cas, et, loin de nous fier au témoignage de ceux qui les attestent, c’est à peine si nous nous en croyons nous-mêtne, lorsqu'ils sc manifestent sous nos yeux. Comme on le voit, la tâche du magnétiseur est rude; car ce n'est pas une petite affaire que de chercher â convaincre les autres; il est douteux qu’on y puisa' réussir, même en prenant les hommes un à un. Les fails dont nous parlons sont d'une na-
turc si extraordinaire, si propre ù heurter ce que nous appelons sacrnmentellement notre raison, que c’est toujours avec l’impatience ou le rire de l'incrédulité que nous les accueillons, lorsqu'on les propose à noire croyance.
Toutefois, comme en général il y a plus à parier pour une imposture que pour un miracle, 011 n’en est que plus à l’aise pour regarder comme un enthousiaste ou une dupe celui qui est convaincu et affirme- quelle que soit la rareté d’un phénomène, nous n’avons pas la folle idée de croire qu’il {Riisse intéresser chacun au môme degré. Les hommes sont Irop partagés par la diversité de leurs goûts pour que certains fails qui piquent la curiosité des uns les attirent tous. Pour le plus grand nombre, il n’y a que ce qui est reçu dans le monde, et porte patente cl diplôme, qui puisse faire autorité auprès d’eux. C’est pourquoi nous avons donné l’avis à MM. Marcil-let et Alexis, autant dans leur intérêt que dans celui du magnétisme, de ne point donner de séances publiques.
Tant que le magnétisme n’aura pas pris ses inscriptions, obtenu ses grades, il ne pourra se flatter d’êlre cru sur sa parole. Il n’est que le bonnet doctoral pour imprimer le respect et commander la confiance. Hors de là, il n’y a que des traverses à essuyer pour quiconque, sans mission officielle, se môle de propager une vérité. On ne peut compter ici que sur les suffrages d’un petit nombre d’hommes, car lesmyslères dont sont enveloppés les phénomènes du magnétisme ne peuvent guère s’adresser qu’à des esprrls sérieux el réfléchis. Mais dès que magnétiseur et magnétisé se donnent en spectacle à la foule, il n’y a plus là qu’une espèce de physique amusanle, fort ennuyeuse la plupart du temps pour une grande parlie des spectaieurs.
Le tort du magnétisme ou plutôt son malheur, c’est de vouloir appeler tout le monde indistinctement. Il devrait savoir qu’en tout la raison commune est tardive, que ce n’est que par les routes battues qu’elle arrive à comprendre une idée nouvelle. Les effels miraculeux dont il s’agit sont telle-
ment au-dessus des idées habituelles, et si en désaccord avec les principes sur lesquels reposent nos connaissances, qu’il faut bien faire un peu grâce à la nature humaine. Quant aux objections que chacun peut se permettre, elles sont de nulle valeur; car, pour démontrer, contre celui qui affirme, parce qu’il a vu et bien vu, qu’une chose n'existe pas et ne doit pas exister, il faudrait avoir en soi la prescience, être dans le secret des mystères de la nature. Que l’on persévère dans son incrédulité systématique tant que le fiai lux ne s’est pas fait dans notre esprit, il n'y a là rien que de naturel ; mais qu’on veuille argumenter au nom de sa raison individuelle pour nier la possibilité d’un fait, c’est là, s’il nous est permis de le dire, une outrecuidance à nulle autre pareille.
Le magnétisme animal, tel que l'expérimentation journalière le constate, est, à n’en pas douter, le premier mol d’une science à faire, le rayon échappé d'un foyer de lumière placé loin de nous dans les profondeurs d’un monde intelligible, et dont la lucidité des somnambules serait l’indice et la première révélation. Nous croyons que la méthode employée dans les sciences pour la recherche et la classification des fails peut s’appliquer à l’étude des phénomènes du magnétisme. Il est un moyen de faire marcher cette science : ce serait de la reconnaître, de la légitimer en lui créant un centre d’activité d’où partirait l'impulsion. Depuis quarante années qu’on se livre en France à la pratique du magnétisme, 011 ne pourrait dire la multitude de faits qui sc sont produits, et qui, faute d’avoir élé recueillis, se trouvent perdus pour la science. Aidé de cette ample moisson délaissée pour ainsi dire sur le sol qui l’a produite, on serait peut-être en mesure de jeter les premiers fondements d’une science nouvelle. Il serait bien temps de créer une organisation propre à régulariser les travaux d’une foule de praticiens, en général moins intéressés à l’avancement de la science qu’à exploiter â leur profil ce qu’elle offre de curieux et de surnaturel. C’esl à produire des faits, à les étudier qu'il faut s’attacher si l'on veut eu faire
sorlir une bonne théorie. Déjà même un homme qui s’esl fait un nom dans le magnétisme, s'occupe activement derassem. bler des matériaux pour poser enfin les bases de l’édifice. La science telle qu’elle sc fait de nos jours, c'est-à-dire depuis que, renonçant aux hypothèses, on a pris l’observation pour le plus sûr guide, est la somme et l’enchaînement catégorique de fails rangés sous la bannière des principes. Sans cesse elle amasse, elle multiplie, de telle sorte qu'on pourrait dire de l'ensemble des fails, el des luis qui en sont déduites, qu’ils sont entre eux comme les puissances sont aux racines.
Mais nous vivons dans un temps où tout a une tendance à sc diviser, et où les génies spéciaux oni le pas sur tout. Proposez ù ces rameaux de la science, dépourvus assez communément de loute vue générale el philosophique, un fait nouveau lani soil peu en dehors de la sphère de leurs idées habituelles, et ne se liant pas immédiatement à la spécialité de leurs éludes, ils vous éconduiront magistralement, ils vous accuseront de poursuivre une chimère. Docteurs de la science toute faite cl apprise, parlant incapables de découvrir l’origine de ce fail ni sa raison d’ètre, ils vous diront que toute recherche ultérieure esl sans utilité, comme si l'uiiliié d'une chose pouvait être trouvée avanl celle chose môme, et que ce fait isolé, sans filiation aucune, ne saurait ôlrc inscrit dans les registres de l’état civil delà science. Les faits auront beau remplir le monde du bruit de leur singularité prestigieuse, montrer les aspects divers d’un principe inconnu, en appeler à un examen sérieux : on les dédaignera, on en méconnaîtra le caractère scientifique. Ainsi, la pragmatiquo-sanction des corps savants ne venant poinl en aide, les phénomènes si intéressants, si merveilleux de la lucidité, ressemllieront à ces feux errants qui courent çà et là sans nous éclaiivr. Telle esl la posilion du magnétisme en France. Au reste, il y a peu lieu d’en être surpris; il arrive à la découverte de Mesmer ce qui esl advenu à une foule de grandes vérités présentement installées dans le monde. De quel droit, en effet, la découverte du ma-
gnétisnie ser.iil-elle mieux traitée que celle de la vaccine, de la circulation du sang, cl du mouvement de la terre autour du soleil? Toutes ces immortelles découvertes n’ont-elles pas payé leur tribut à l’ignorance contemporaine, et les hommes sont-ils changés de nature?
Jusqu’ici le magnétisme n’a eu qu'une existence défait; il est errant, sans appui, sans asile scientifique, el pourtant il subsiste. N’ayant d'autres ressources pour soutenir une existence délaissée que ce que font pour lui, d’un côté, la curiosité publique qui s’en fait un amusement, de l’autre, des malades abandonnés cherchant remède à leurs maux, ne pourrait-on pas se demander comment il a fait pour vivre et se perpétuer? Ce qui a lieu à cet égard est la preuve mille fois répétée que ce qui esl profondément vrai est de sa nature indestructible, et que la vérité esl un flambeau dont on peut bien faire pâlir la clarté, mais que le souffle de l’ignorance et des préjugés ne saurait éteindre. La conduite des corps savants est donc incompréhensible, elle esl même une honte à une époque qui se largue de lumière et de philosophie.
En quoi donc les fails surprenants de la lucidité, auxquels l’action magnélique donne naissance, viendraient-ils, ainsi qu’on le répète à tout moment, renverser los notions acquises en physique comme en histoire naturelle? Il faudrait pourtant se faire à l’idée que les fails du magnétisme sont d’un ordre tout différent, et qu’appartenant à un autre état de l’homme ils ont leurs lois propres et distinctes. On ne voit pas en quoi les principes sur lesquels nos connaissances sont établies se trouveraient compromis ou renversés.
Encore une fois, le phénomène de la clairvoyance ne saurait trouver aucune assimilation avec celui de la vision ordinaire, el s’il était permis de s’exprimer ainsi, nous dirions qu’il se passe dans l’autre hémisphère de notre existence, monde inconnu avanl M. de Puységur, à qui est due cette grande découverte. Dès lors donc que notre existence présente deux faces, sc dédouble eu quelque sorte, il y aurait contre-
sons de raisonner îles lois d’un élat à celles d’un antre, on d’opposer la règle à l’exception.
Ainsi, pour prendre un exemple dans le fait ordinaire de la vision, nous ne voyons pas que les lois de la perspective soient changées ou contredites; ces lois demeureront .toujours ce qu’elles sont tant que nous nous servirons de l’appareil oculaire pour voir les objets extérieurs; et si ces objets, dans un cas donné, peuvent être vus sans le secours decet appareil, vus directement, instinctivement, devrons-nous être étonnés qu’ils ne nous apparaissent pas de la môme manière? Dans cet état si spécial, la forme et les dimensions des objets ne sont nullement affectées par les distances. Il n’y a plus là de rayon visuel ni d’angle optique, par la raison fort simple et facile à concevoir : c’esl qu’entre nous et les objets il n’y a plus d’instrument pour intermédiaire, instrument d’optique qui réfléchit les images des objets dans des conditions particulières et propres à la nature d’un corps réflecteur. Le somnambule lucide devrait, ce nous semble, lorsque son attention est arrêtée sur un objet, peu importe la distance, en avoir une perception plus nette et plus précise, par cela môme qu’il n’a point affaire à un organe qui se trompe, à un sens qui a ses illusions. Dans l’état de veille, et cela est certain, ce ne sont pas les objets eux-mêmes que nous percevons, mais leurs images.
A tout prendre, le fait de la vision par l’organe de la vue est tout aussi inexplicable que le fait de la clairvoyance sans cet organe; car, assurément, ce n'est pas notre oeil qui voit, c’est quelque autre chose placée en arrière, dans les cavités du cerveau ; ce quelque autre chose, auquel on ne songe guère, c’est le moi. Savons-nous comment sc transmettent, de la rétine au moi intérieur, les images que nous recevons du dehors? Le nerf optique en est, dit-on, le conducteur; soit; mais cela ne résout pas la question. Sous quelle forme se fait cette transmission? Est-ce une image infiniment (>etile qui se glisse, comme dans un tube, le long de cc nerf optique? Ne
dites pas que l'image est portée dans laine an moyen d’un fluide quelconque, car nous tomberions dans une autre espèce de lucidité non moins incompréhensible que la première. Quand on aura expliqué nettement comment l’âme voit l’image qui est placée sur l’œil, 011 pourra peut-être avoir des données certaines sur la cause ou sur l’état qui lui permet de voir à nu les objets eux-mômes. Il y aurait celle différence, tout à l’avantage des lucides : c’est que leurs perceptions par la vue sont absolues, et que, dans l’état ordinaire, l’état de veille, elles sont relatives, dépendantes de l’organe qui, lui-môme, est soumis à des lois mathématiques.
En résumé, sommes-nous bien certains qu’il 11’y ait pour nous qu'une seule manière d’être, de sentir et de connaître, et s'il y a en nous ou chez quelques-uns deux états différents, bien caractérisés, faut-il les confondre, donner à l’un les attributs de l'autre? Nous avons cinq sens, c’est chose avérée. Supposez néanmoins un on deux sens de plus : il est concevable qu’il y aura là une nouvelle source de connaissances, car la nature aura pour nous un aspect nouveau : les corps nous offriront des propriétés que nous 11e leur connaissions pas.
Or, le somnambule lucide nous paraît doué, au suprême degré, d’un sixième sens, sensus commuais, sens général, sens intime et direct, qui remplace à la fois tous les autres, et qui a sa manière d’être en relation avec la nature. Ce que nous venons de dire relativement aux objets qui se rapportent à la vision, nous en dirons autant des choses qui se rapportent à la pensée, à la perception des choses qui ont eu lieu dans le passé, dans le temps. Nous ne poursuivrons pas plus loin, bien qu’il 11e nous soit pas impossible d'en fournir une explication tout aussi plausible. La conclusion de tout ceci nous amène forcément à reconnaître, quelque violence que nous nous fassions pour repousser cette idée, que le temps et l’espace n’existent pas pour le somnambule dans l’état de lucidité. C’est là, assurément, quelque chose qui doit choquer la raison, la révolter. Mais qu’y faire, si cela esl, si la vue à
distance est une chose certaine, positive, ainsi que beaucoup de personnes eu sont convaincues, depuis que le sujet Alexis séjourne parmi nous? car depuis un mois la cause du magnétisme a fait plus de progrès qu’on ne le pense.
On a fait grand bruit du refus des corps savants d’admettre de tels faits; mais les corps savantsont des raisons de conduite qu’en son particulier un membre de ces corps n’a pas. Le magnétisme compte au nombre de ses partisans des hommes les plus éminents par leur savoir, faisant môme partie de ces corporations dont on parle. S'il y a des savants d’un côté, il y en a aussi de l'autre. Il y a des esprits, nous le savons, qui ne se rendront pas, dont les idées sont aussi arrêtées que si leur savoir était le dernier mot des choses, avait scruté tous les mystères de la création. Plaisante chose, vraiment, de vouloir assigner aux œuvres de Dieu les bornes de notre intelligence !
On lésait, du resle, ce n’est pas aux corporations savantes, aux académies, que sont dues les grandes découvertes qui font le plus d'honneur à l’intelligence humaine; leur rôle consiste plutôt à enregislrcr celles des autres. Semblable à sa sœur, l’Académie Française, chargée de la confection du dictionnaire de la langue, l’Académie royale de Médecine se fait, à ce qu’il parait, arbitre de la vérité, comme l’autre se dit la législatrice du langage. Pour le docte corps médical, une découverte nouvelle, celle du magnétisme, par exemple, est un néologisme barbare que nul usage, si prolongé qu’il soit, ne saurait consacrer, ni faire admettre dans son vocabulaire.
Elle se contenterait bien, la respectable et savante compagnie, de transiger avec le magnétisme, s’il n’apporlaitavec lui que le simple somnambulisme, ou quelque fait de somnolence, quitte à prendre le magnétisme pour un Morphée médical; mais la malencontreuse lucidité l’éblouit, la trouble, et vient tout gâter. En effet, et voyez les conséquences, si celle faculté des somnambules était admise, le moyen de s'arrêter sur celle pente rapide sans tomber dans un spiritualisme
inévitable, cl devant lequel reculent épouvantés ceux qui en sont peut-être encore à donner à la matière organisée les attributs de la pensée? N’en douions pas, tout le secret des aversions qu’on a pour le magnétisme est ici, et pas ailleurs. Oui, si le fait merveilleux de la clairvoyance et delà prévision, appelé la lucidité, ne jetait pas autant de lumière sur la nature el la spiritualité de notre âme, peut-être se serait-on arrangé ; car la question, prenons-y garde, est autant psychologique que médicale. Et puis, comment espérer qu’il soit pris acle d’une découverte qui porte un si rude coup aux doctrines de ceux qui on sont encore à la philosophie de Locke et de Condillae, et, pour couronnement de l'œuvre, à l’école du baron d’ilolbach et de Cabanis.
Pour terminer, nous dironsque cet étal de choses est d’autant plus regrettable que le magnelisme peut être un grand auxiliaire pour le traitement des maladies. Ce qui nous fera toujours insister sur ce point, et nous en appelons au témoignage des hommes sincères et éclairés qui ont appris à connaître les effets du magnétisme, c’est la tendance naturelle, jointe â une grande facilité de percevoir le siège du mal, qu'ont les somnambules magnétisés à se porter au bien, au soulagement de leurs semblables. 11 semblerait même que c'est une vocation chez eux, qu’ils ne sont dans cet état que pour cela seulement. Nous ne prétendons pas dire qu’ils sont infaillibles, car ils se trompent aussi; mais on en peut appeler d’eux à eux-mêmes par des magnétisations répélées tous les jours, lesquelles seront comme des contre-épreuves, cl l’on se persuadera qu’ils finissent par mettre le doigt sur la vérité. Nous croyons qu’un médecin éclairé, el ils lesonl tous aujourd’hui, qui aurait quelque sujet à sa disposition, trouverait de l’aide dans bien des cas, surtout pour les maladies intérieures et dont l’indication n’est pas toujours facile. Mais dans cette atmosphère de préjugés qui nous enveloppe et nous presse en tous sens de son poids écrasant, quel médecin oserait se servir du magnétisme, sans que son imagination épouvantée ne
lui fasse voir le lire moqueur de ses confrères, la confiance ébranlée de sa clientèle?
Enfin, ci il faut l’espérer, les temps s’accompliront pour le magnétisme; le jour viendra oïl la vérité qu’il porte dans son sein luira sur le monde, el l’on se convaincra que ce qui était, comme on le dit avec tant de suffisance, hors des lois de la nature, esl une loi suprême de la nature devant probablement jeter une grande lumière sur le mystère des autres.
L****.
LE I.1GRÉTISIE A IIEIUS. — La vérité dénaturée dans le procès-verbal de la séance de la section des sciences médicales concernant le magnétisme a donné lieu à une longue polémique entre M. le secrétaire et les amis du magnétisme. Nous extrayons des divers documents publiés par le Journal de Reims la protestation suivante.
A Mgr l’archevêque de Reims, président général du congrès scientifique de France, séant à Reims.
« Monseigneur,
• Le règlement du congrès me défendant de prendre la parole à la séance publique, pour une rectification à faire au rapport du secrétaire de la section des sciences médicales, et ce rapport me paraissant inexact en des points essentiels qui touchent à la probité, à l'honneur el à la réputation de MM. Du Polet et Aubin-Gaulhier, ma conscience m’oblige d'en écrire à Votre Excellence. J’étais présent 5 la séance extraordinaire qui a eu lieu au sujet du magnétisme. Voici quelques-unes des choses omises par M. le rapporteur :
« 1° Entre autres choses M. Du Polet a ditque les charlatans dans son arl avaient attiré beaucoup de mépris aux magnétiseurs sincères, comme les charlatans en médecine avaient beaucoup nui à la réputation des vérifables médecins; qu’on ne doit point juger d’une chose par les abus; qu’autrement
il n'y aurail rien de bon, puisqu’il y a des hommes qui abusent do tout, même des choses les plus respectables et les plus saintes.
o2°M.I)u Poteladit aussi que plusieurs matérialistes, ayant reconnu avec certitude les faits psychologiques produits évidemment par le magnétisme, s’étaient vus forcés d’admettre la spiritualité de l'âme humaine.
«5° Quand MM. les médecins présents à la séance de la section lui eurent affirmé qu’ils admettaient l'existcnee du ma-gnélisme el celle de ses effets ordinaires, mais qu'ils rejetaient ses effets extraordinaires ou psychologiques, M. Du l'otet leur répliqua, entre autres choses, que dans le principe on avait nié l'existence du magnétisme et de ses effets ordinaires, qu’on l’avail traité de pure jonglerie; que, ce refus de croyance n’ayant pas empêché le •magnétisme de marcher, on s’élail vu par le temps et par l’évidence obligé de l’admettre, lui et ses effets ordinaires et extraordinaires ; que de même ceux qui aujourd’hui refuseraient de croire à scs effets psychologiques ne l’empêcheraient pas d’en produire, et que par le temps et par l’évidence ils seraient bien forcés d’y ajouter foi ; que tels étaient les hommes : ils ont de la peine à admettre des choses qui contrarient leur manière de voir, et finissent pourtant par se rendre â leur évidence.
« li° Lorsqu’on eut proposé à M. Du Potet et â M. Aubin-Gau-thier de produire des effets extraordinaires devant une commission déléguée par la section, M. Du Potet a effectivement refusé, ainsi que M. Aubin-Gauthier, mais ils onl motivé leur refus : ils ont dit qu’ils n’étaient venus qu’en passant pour ré|iondre 5 la question du programme ainsi conçue : Quel est l'état actuel du magnétisme en France? mais non pour faire des expériences.
«Sur l’insistance réitérée des membres de la section auprès de M. Du Potet, celui-ci a répondu qu’il lui était impossible d'accepter la proposition qu’on lui faisait, parce que, ne l’ayant pas prévue, il avait laissé à Paris des personnes qui récla-
niaient ses soins, (!t que d'ailleurs, pour produire des effets extraordinaires par le magnétisme, il lui Fallait plus de jours qu’il n’en restait nu congrès; qu’il avait besoin de plus de leinps pour y disposer le sujet qu’on lui donnerait à magnétiser.
« M. Du Polet promit ensuite que, si l’on voulait établir une commission, lui donner le lemps el convenir avec lui d’une époque fixée, il s’arrangerait en conséquence; qu’il ne reculerait devant aucun obstacle, devant aucune opposition des volontés de la part des spectateurs, attendu que depuis longtemps il s’était cuirassé contre do tels empêchements; mais que pour aujourd’hui la chose lui était impossible. Or, Monseigneur, il y a loin de cela aux conclusions du rapport tout à l’ait déshonorant pour M. Du Polel. Ces conclusions oui présenté le refus de M. Du Polet comme une défaite honteuse; il n'y a élé nullement question dos motifs donnés par l'honorable el célèbre magnétiseur, qui m’a paru montrer la plus grande bonne fui dans l’exercice de son art el une ferme conviction dans la production de ses effets tant ordinaires qu’extraordinaires, qui affirme avec le Ion de la plus grande sincérité qu’il ne reculera jamais devant aucune démonBlralion de la puissance du magnétisme.
«Témoin oculaire de l'impression défavorable que la lecture de ce rapport inexact et d’un style vifoi mordant a produite sur l’a>semblée, sachant que celle fâcheuse impression contre MM. Du Polel el Aubin-Gauthier resterait dans l’âme des auditeurs, qu’elle serait communiquée à d’aulres el qu'elle serait éternisée, en quelque sorte, par la voie de l'imprimerie, j’ai cru qu'en nia qualité do membre adhérent du congrès, qu’en aile d’honnéte homme et surtout de prêtre, je devais protester el demander que, vu l’absence de MM. Du Potel et Aubin-Gauthier, qui ne pouvaient se défendre, une réclamation en leur faveur fût lue en séance générale à haute el intelligible voix.
« Cependant ma démarche ne doit pas faire conclure que je
sois partisan du magnétisme; je fais mes réserves à cet égard; elle n’est de ma pari que l'accomplissement d’un devoir de conscience envers mon prochain : l'ais aux autres ce que tu voudrais qu’on te fasses à toi-méme.
« Je ne prétends pas non plus que l’inexactitude du rapport ait été une chose volontaire de la part de l’honorable rapporteur. Je pense ou qu’il n’a pas entendu toutes les paroles de MM. Du Potet cl Aubin-Gauthier, ou qu’il les a oubliées. Il n’y a pas de déshonneur à se tromper, puisque c’est la triste condition de notre nature, tous tant que nous sommes ; il n’y en aurait qu'à mentir. Ainsi, honneur à MM. Du Potet el Aubin-Gauthier, sauf l'honneur de M. le rapporteur !
« Daignez, Monseigneur, agréer le profond respect avec lequel j’ai l’honneur d’étre, de Votre Excellence, le très-humble et très-obéissant serviteur.
« L’abbé Th..., membre adhérent du congrès. »
Un congrès scientifique n’est rien ou presque rien. Son jugement esl sans valeur aucune, son autorité zéro. Mais il faut y aller pour être témoin de ce pêle-mêle de savants et avoir une idée de la tour de Babel.
Là 011 trouve autant d’amis de la vérité que de gens qui y sont contraires. Pour notre part, nous y avons rencontré nos ennemis implacables, calomniant, mentant selon leur habitude, et surpassant dans celte circonstance tout ce que nous pouvions attendre d’eux. Que ces honnêtes gens jouissent un instant du fruilde leur mensonge, qu’ils soient heureux comme les méchants; nous n’essaierons pas môme de nous justifier el de les troubler dans leur triomphe. La lettre de ce digne ecclésiastique, désintéressé dans la question du magnétisme, sera notre seule réponse aux calomnies répandues sur nous, sur nous dont la conduite a été si réservée el les aveux si sincères. Ah ! que la vérité que nous enseignons ne soit jamais possédée par ces génies du mal revêtus de la robe de docteurs. Grand Dieu ! que feraient-ils de cette vérité? Malheur aux familles
où ccs êtres sans vertus iraient s’impatroniser avec le pouvoir magnétique! Qu’ils restent dans l’aveuglement, car s’ils font le mal en parole ils pourraient le faire en action. Nous devons nous féliciter de notre conduite; nous étions tout prêt de leur divulguer les secrets de notre art, lorsque la Providence a créé des empêchements à ce qu’il en soit ainsi. Mais nous irons uu jour, sous les yeux de ces vertueux et véridiques médecins, répandre la doctrine magnétique et prouver au grand jour les faits merveilleux que nous avons annoncés. Eux seuls ne seront point admis à nos enseignements. Ils peuvent dès à présent prendre acte de nos paroles.
Nous remercions le digne prêtre qui nous a si bien compris; il sera l’ami de tous les hommes honnêtes, car il l’est lui-même de la vérité.
Baron Du Potet.
SOCIÉTÉ DU MESMÉRISME. — Séance du 31 juillet. — On savait, depuis longtemps déjà, donner à un même verre d eau successivement le goût de vin, bière, alcool et liqueurs de toutes espèces. C’était le premier échelon de l'influence volitive exercée par le magnétiseur sur le magnétisé ; la lucidité était faussée, on aurait dû s’en apercevoir; mais non.
En 4841, M. le docteur Charpignon, connu par l’excellence de ses observations, dit (1) : « Ayant présenté à des somnam-
i bules trois oranges, dont une avait été magnétisée et entourée
« d’une couche épaisse de fluide, avec Vintention qu’elle res-« tât invisible, cette orange le fut, en effet, lorsque cessom-« nambules furent rendues à l’état normal. En vain j'aflir-« mais que le plateau portait trois oranges ; elles riaient de « moi, et me présentaient les deux oranges qu’elles saisis-« saient. Enfin, tâtonnant de la main, elles rencontrent un « corps qu’elles prennent; le charme disparait : les trois oranges a deviennent visibles.
(I) Physiologie, médecine et métaphysique du magnélitme, page 65.
« Demandant à une autre somnambule si elle voit la pe-o lile table qui esl au milieu de mon salon, elle répond : Oui.
« Alors, enveloppant tout le pied de fluide, elle s’étonne de o voir un dessus de table suspendu. Au réveil, l’étonnemcnt « ne peut être décrit. Cette demoiselle presse de tous côtés « cette table aérienne ; elle la trouve solide, et s en va de « chez moi fort inquiète sur mon compte.
« J’ai varié de mille façons ces expériences que je crois « très-peu connues, cl j’ai toujours réussi, lorsque j’avais af-o faire à un somnambule très-lucide, s
Plus tard, M. le docteur Teste publia un fait analogue.
Récemment M. le docteur Ordinaire, qui a beaucoup étudié le côté psychologique du somnambulisme, à propos des expériences faites à Privas, s’exprime ainsi :
« La première fois que nous tentâmes l’expérience de la dis-« parition des objets, nous magnétisâmes le poêle de notre « somnambule, en ne laissant visible que les cornets; lorsque o le sujet fut réveillé, il manifesta unegrandesurprisede l’en-« lève ment de son poôle, et il en demanda l’explication. Nous « lui dîmes que le poèlicr était venu, se plaignant de n’avoir « pas été payé, et avait enlevé sa marchandise. « C’est un im-t posteur, s’écria-t-il, je ne lui dois rien; j’irai chez lui le « réclamer. » Enfin le poêle, par notre volonté, reparut, au « grand étonnement du magnétisé. Une autre fois, nous ren-« dîmes invisible une porte, et nous étant livré à d’autres ex-• périences, nous avions oublié cette circonstance en le ré-« veillant, lorsque notre sujet, voulant passer dans la pièce « voisine, n’apercevant pas la porte fermée, se heurta le front «contre cette porte avec tant de violence qu’il en tomba à la « renverse et se releva avec une effrayante contusion de la a face. Ce fait s’est passé devant des personnes honorables de « Mâcon qui peuvent l'attester. Très-souvent nous avons fait a disparaître des personnes présentes que nos somnambules «éveillés ne pouvaient apercevoir, bien que ces personnes « fussent très-visibles.
o Nous placions M. C..., brigadier dos eaux cl forêls, dans « une pièce voisine de celle que nous occupions; une personne o nous désignait secrètement un chiffre, cl le sujet comptait 4, « 2, 5, 4, jusqu'au chiffre désigné. Nous le faisions rire et « pleurer par noire seule pensée; nous lui donnions un verre « vide el nous lui servions mentalement les liqueurs les plus « diverses qu'il dégustait et nommait exactement. Nous le je-« lions ainsi dans une ivresse complète, et, instantanément, « nous le ramenions à la raison par notre seule volonlé men-« talement exprimée. Nous le brûlions, sans feu, à le faire « crier. Enfin nous lui faisions percevoir toutes les sensations o que nous voulions qu’il éprouvât.
« Dans ces diverses expériences que se passait-il? Notre âme, « dominant l’âme du sujet, imprimait à cette âme ses désirs : « l’âme dominée donnait aux organes les impressions voulues. « — Le magnétisme, comme nous l'avons dit, prouve tan-« giblement le spirilualisme. »
Ces observations réunies forment un faisceau déjà compacte que vient encore augmenter le phrénomagnétisme qui tient à la môme cause : l'influence volitive. Mais tout cela n’est que l’alpha des expériences auxquelles s’est livré le docteur Come-lin, de Saint-Quenliu. Habitant les Antilles depuis vingt ans, ce médecin, resté étranger au mouvement ascensionnel de la science magnétique en France, seul et livré aux ressources uniques de son imagination, s’est engagé dans cette voie investigatrice qu'il croyait inexplorée. Mais retenu par des craintes légitimes sur l’emploi qu’on pourrait faire des phénomènes qu’il avait observés, il garda longtemps le silence. Enfin, au mois de février dernier, il résolut d’en communiquer quelques-uns, et il écrivit à la Société philanlhropico-magnétique qu’il avait trouvé le secret ou la loi des charmes, fascinations, talismans , et tout ce quon regardait comme sorcellerie. Il espérait détruire bien des préjugés en montrant que tous les sortilèges ne sont que des effets magnétiques qu’on peut reproduire â volonlé. Mais soit que la portée de celte communication n’ait
pas été comprise, o» qu’on n’ait pas voulu l'approfondir, la question passa presque inaperçue. Tenant cependant â ce que ses observations soient étudiées, examinées, contrôlées, avant d’étre livrées à la publicité, il chargea alors son ami, M. le docteur Cruxen, de s’adresser à la Société du Mesmérisme. Celle-ci, en attendant un rapport plus détaillé sur l’ensemble des phénomènes soumis à son observation, s’est livrée à l’examen d’un fait déjà connu par les exemples précités, elle le livre à la méditation des hommes que cette question préoccupe.
Un jeune enfant est magnétisé par M. Burnet, dans le but de vérifier l’expérience de la métamorphose des objets magnétisés.
Cel enfant, magnétiquement isolé, est abandonné dans un coin de la salle, le dos tourné aux assistants.
M. le président écrit sur une liste qu’il remet à M. Burnet la transformation que doit éprouver chacun des assistants : tous sont magnétisés conformément à celte indication. Le somnambule fut alors démagnétisé incomplètement, c’est-à-dire laissé dans un élat semi-magnétique, ne différant en apparence de l’état normal que par une extrême dilatation de pupilles.
Interrogé sur le nombre des assistants, il en omit un qu’on avait voulu rendre invisible. Ensuite, il vit un cheval, un lion, une levrette et différents animaux exactement désignés par l’indication de M. le président. Une dame avait élé décapitée par la pensée; cet enfant fui pris de convulsions à la vue du corps sans tôle el du sang qui l’inondait. Une passe transversale faite dans l’espace, entre l’enfant et la décapitée, fit disparaître ce trouble, et, ramené à l’état normal, le patient n’eut plus aucun souvenir de la scène qu’il avait vue.
On a varié ces expériences de diverses manières, elles ont pleinement réussi, et le fait de la transformation des objets parla volonté du magnétiseur a été surabondamment constaté.
M. le docteur Comelin tire de la production de ces charmes des conséquences qui seront ultérieurement publiées.
Séance du 7 août. — Il résulte de l:i discussion engagée sur les expériences indiquées par M. le docteur Comelin que, quoique tenant à la même cause, les phénomènes diffèrent des précités par leur mode de production. Ces derniers, en effet, ont eu lieu sur des somnambules que M. le docteur Charpignon qualifie très-lucides, tandis que M. le docteur Comelin agit sur des patients démagnétisés graduellement jusqu’à un état singulier, voisin du normal, dont ils accomplissent les actes si naturellement qu’il est difficile de reconnaître s’ils sont ou non influencés magnétiquemenl.
M. le docteur Cruxen annonce en môme temps qu’il est parvenu à reproduire les phénomènes en question sur des sujets peu sensibles au magnétisme et sans les faire jxisser préalablement par le somnambulisme. Cette observation donne un grand poids à l’opinion de M. Comelin sur l’origine et la manière d c jeter des sorts, opinion que fortifie encore l'anecdote suivante rapportée par M. Meade :
Vers 1820, dansune ville duMexique,lemagistrat compétent reçut d’un Espagnol une accusation de sorcellerie contre deux indigènes, qui lui avaient fait apparaître dans sa propre maison des animaux et des monstres de toutes espèces. Les deux sorcières mandées devant le magistrat avouèrent avec l’accent de la surprise le crime qu’on leur imputait, protestèrent de leurs bonnes intentions; el, pour se disculper d’un acte qu’elles regardaient comme tout naturel, elles proposèrent de répéter le fait sur le magistrat lui-môme. Il accepta ; mais, un peu avant l’heure convenue, la peur le gagna, et il envoya dire aux sorcières qu’il était convaincu de leur innocence el les dispensait des preuves qu'elles devaient lui donner.
Séance du 14 août. — Effets négalifs sur deux personnes soumises à la magnétisation. Sur une troisième, développement d'effets physiques ou purement mesmériques, tels qu’engourdissement général, locomotion impossible, obéissance du corps à l’attraction gravilalivc, augmentation de quatorze pulsations, transpiration abondante à la paume des mains, occlu-
sion des paupières, etc. L’entendement est parfait. Au sortir de l’ctat mesmérique les pulsations baissent subitement de vingt.
M. le président fai! observer à l’assemblée en général, et en particulier à M. le docteur Mathieu, qui voit ces singuliers effets pour la première fois, que cc sont les plus concluants, et qu’il est important de ne les pas confondre avec les puysê-gurique» ou somnambuliques.
Séance du 21 acnU. — M. Cosson magnétise un visiteur dont les pulsations s’élèvent de soixante-douze à cent en quelques minutes.
Le sommeil magnétique, avec ses concomiliants, l’insensibilité et la catalepsie, se développe sur un adulte, M. Illot, que magnétise M. Wailly. M. le docteur Mathieu, pour s’assurer de la réalité de cet état, enfonce des épingles dans les chairs, sur la face, les bras, etc., du patient qui ne manifeste aucune sensibilité. Le médecin avoue sa surprise de la singularité de ce phénomène dont il se déclare bien convaincu. Les bras du patient, mis dans un étal cataleptiforme et dans une position cruciale, restent ainsi un temps fort long et plus que suffisant pour convaincre les assistants de la contraction permanente et artificielle des muscles. Au réveil nulle connaissance de ce qui s’est passé. M. Warnaw agissant à distance sur une dame qui n’a non plus jamais été soumise à ces expériences, on voit au bout de quelques minutes se développer un spasme violent, avec agitation convulsive et menace de suffocation. Quelques passes font évanouir ces symptômes effrayants pour la patiente comme pour les assistants.
Séance du 28 août. — La quesiion complexe du phrénomesmé-rismeavait attiré un grand nombre dephrénologisteset démagnétiseurs, également désireux de vérifier les assenions de Spencer-IIall. La patiente est une jeune Anglaise déjà connue à Londres pour des expériences faites au sein de la Society for the investigation of mesmerisme, au mois d’avril dernier, ainsi qu’en témoigne le journal the Critic qui, rendant compte d’une
séance, s’exprime en ces termes : « Miss*** fut plongée instan-« tanémcnl dans l'état mesmérique parM. Vernon, qui assura « pouvoir paralyser l’ouïe de cette jeune personne el lui ren-« dre l’exercice do ce sens à volonté et à un signal convenu. « Agissant en conséquence sur l’oreille, il affirma au bout d'un « instant qu'elle était complètement sourde. On convint se-« crètement du signal auquel elle devait entendre. M. le » président lui adressa diverses questions auxquelles elle ne « répondit point; mais le signal pour qu’elle entendît étant o donné, M. le président continua : When did you Last read « the history of England ? Elle se retourna brusquement de son « côlé et lui répondit : A very long time ayo. Pour plus de « précaution on répéta l’expérience en donnant le signal par « derrière, ce qui ne changea rien. M. le président lui disant : « Who was the first king of French ? elle répondit: I don’t « know, i’m sure.
« Passant ensuite à des expériences phrénologiques, nous « en avons constataté deux qui ont réussi pleinement. 1° L’or-« gane de la mélodie ayant été stimulé, la patiente se mit à « chanter: Softly smeling; puis, par l'excitation de l'organe de « la vénération, elle quitta soudainement la musique mondaine « pour la religieuse et entonna : 0 corne let us uiorships ! 2° Mise « en rapport avec deux messieurs qu’elle tenait par la main, « on stimula, surexcita la combativité du côlé gauche et \'adhé-« sivité du droit, conformément à des instructions écrites « d’avance el tenues secrètes. La patiente entra dans une vio-o lente colère, une grande exaltation contre l’un desgentle-o men, en même temps qu’elle choyait, caressait l'autre. »
Celte jeune personne n'est pas lucide; magnétisée en moins de deux minutes, elle a les yeux clos, le globe oculaire convulsé; sensible à l'attraction magnétique, son magnétiseur, placé derrière elle, à seize pas de distance, la fait avancer ou reculer, selon les indications écrites que lui donnent différents assistants. Ensuite on lui met le bras droit en catalepsie avec
une chaise suspendue aux doigls; cette position dure environ cin« minutes sans la moindre flexion du bras.
Les procédés propres à la manifestation d"S phénomènes phrénomesmériques sont extrêmeiu ni simples, ainsi qu’on en peut juger par l’expérience suivante. La magnétisée est assise; le magnétiseur lui dirige sur la tôle, sans contact et à quelques centimètres de distance, un doigt à l’endroit correspondant de l’organe phrénologique qu’on veux surexciter. Dans le cas qui nous occupe c’est l'organe de la vénération qui a été désigne (quoique la patiente ne connaisse pas le français, les indications sont données par écrit au magnétiseur); la patiente presqne instantanément se jette à genoux. Sur une autre indication le doigt fut dirigé sur l’organe de la mélodie, et un chant religieux anglais fut aussitôt entonné, puis interrompu par un rire immodéré, causé par la stimulation de l’organe de la gaieté. Sur la demande dç M. le docteur Mathieu on fit recommencer léchant pour l’interrompre à volonlé; l’expérience réussit.
La combativité stimulée fait entrer la patiente dans une colère extrême contre le magnétiseur ; elle se lève avec fureur, lui met une main à la gorge, tandis que de l’autre elle tient une chaise pour l’en frapper. Mais le doigt dirigé sur la bienveillance fait cesser cette exaltation par degrés, jusqu’au calme parfait.
L’estime de soi vient ensuite; la magnétisée se lève, marche, prend des attitudes dédaigneuses el critique avec amertume l’exéculiou d’un morceau de musique qu’on entend à l’étage supérieur.
Le fait de la sympathie ot de l’antipathie se reproduit sur plusieurs personnes avec les mêmes circonstances qu’à Londres, dans l’expérience citée plus haut.
M. le docteur Cruxen demande à procéder lui-même; sur l’affirmative qui lui est donnée, il agit sur la destructivité; la magnétisée le saisit aussitôt par l’habit qu’elle tire avec force en sens divers, de manière à le déchirer. Puis, tout à coup, elle
quitte l’habit, porte la main à la montre qu'elle enlève avec une dextérité étonnante. Lo docteur dirige alors .son action sur la vénération; l’habile voleuse remet la montre où elle l'a prise, se repent et commence à pleurer ; mais, en stimulant la gaieté, le calme revint sur scs traits.
Le développement de ces sentiments et la succeseion de ces actes produisent une impression profonde sur l'auditoire émerveillé.
L'action dirigée ensuite sur Vamativilé se manifeste par des démonstrations non équivoques dont on arrête le complet développement.
Séance du 4 septembre. — Relativement aux expériences phrénomesmériques qui ont rempli la séance précédente, l’opinion générale de la Société est que la volonté seule est tout dans le développement de ces curieux phénomènes ; qu’ils se produisent indépendamment de toute connaissance phrénologique ou idée de localisation cérébrale. La direction du doigt Sur l’organe phrénologique est insignifiante ; bien plus on peut développer un sentiment en dirigeant le doigt sur un organe diamétralement opposé. On fait encore sur la même personne quelques expériences qui ne sont que la répétition des précédentes.
M. Adolphe Didier, frère d’Alexis, magnétisé parM. War-naw, présente le phénomène de la clairvoyance somnambuli-que. Après lui avoir tamponé les yeux avec du coton et couvert la face de trois foulards croisés en tous sens, de manière à ce qu’il y ait impossibilité de voir, soit au travers, soit dans les intervalles, on le fai: jouera I écarté successivement avec quatre partenaires qu'il gagne en indiquant d’avance leurs cartes. Ces expériences ont eu un plein succès. On lui présente ensuite des imprimés à lire, malgré l’épaisseur de ses bandeaux. Sur l’un il lit : Démocratie pacifique, ce qui était exact ; sur un autre, après quelque hésitation : Avis aux patentables. Ces épreuves ayant satisfait, on lui enlève ses bandeaux dont il se trouve incommodé. Un instant après on lui présente des
mois mis sousd’ëpaisscs enveloppes el soigneusement cachetés, ainsi que des boites renfermant des objets connus seulement de la personne qui les présentai!. Après avoir touché, flairé ces différents objets, il en prend un, le porte de nouveau à l’épigastre, et dit : Je vois un S à la fin du mot, puis un U avant, puis un T en deçà ; ce qui fait TUS. C’est drôle, dit-il, un mot qui finit par tus. Alors,Appliquant l'objet sur le front, puis à l’epigastrc, il ajouta : Ce mol commence par un P, mais il y a encore plusieurs autres lettres dont je ne puis désigner la forme; elles m’apparaissent confuses. On décacheta le pli et on trouva le mot PcospccTLS.
Séance du 11 septembre. — M. le président annonce l'arrivée de M. le baron Du Potet en même temps que le résultat de la lutte qu’il vient de soutenir à Reims, au congrès scientifique de France. Une commission composée de MM. Warnaw, Burnet, Cruxen et Perrody lui est députée pour le féliciter de son retour et le remercier des services qu’il ne cesse de rendre à la cause magnétique.
Séance du 18 septembre. — Mlle Marceline, soumise à l’expérimentation par M. Meunier, se plaint d'une somnolence extrême. L’altraction magnétique essayée sur un bras a pour résultat l’extension de ce dernier avec roideur cataleptique el insensibilité à la douleur.
M. le docteur Cruxen présente une jeune personne qu’il a magnétisée déjà. Après dix minutes d’action elle présente le double phénomène d’insensibilité à la douleur et de catalepsie dans Vital de veille. Tout son corps, excepté la tôle, est soumis à l'action de la pesanteur absolument comme un cadavre; deux hommes robustes essaient de la lever et de la maintenir dans la station verticale, mais ils ne le peuvent. Les articulations paraissent disloquées. Elle est en outre couverte d’une transpiration abondante.
Quatre autres personnes sont magnétisées sans succès.
Séance du 25 septembre. — Après quelques discussions réglementaires, il est donné lecture de la lettre suivante :
« Messieurs,
« Disciple, comme vous, do l'immortel Mesmer, (le ce grand homme qui nous a ouvert l’entrée de celte noble el incommensurable science, qui renferme tant el de si belles choses... encore sous l’impression du danger quelle vient de courir, qu’il me soit permis, maintenant que je respire à 1 aise, de vous témoigner toute l’inquiétude qu’ont éprouvée lous les amis de l’humanité, tous les amis de la vérité. Le magnétisme nous a paru en quelque sorte abandonné dans ce moment solennel. A Paris, ce centre des lumières, vous vous croyez forts parce que vous ôtes nombreux, parce que vous vous donnez tous la main; mais, Messieurs, le magnétisme intéresse le monde entier, cl ses défenseurs doivent courir partout où il se présente une lutte. Comment sc fait-il donc que vous n’êtes pas accourus en masse pour soutenir celle qui s est présentée ici?... Votre confiance vous aurait causé des regrets bien amers, si lu Providence n’avait envoyé un pilote expérimenté pour nous sauver du naufrage.... Mais que de transes, que d’angoisses jusqu’au moment où notre sauveur a paru !
«Nousnous attendions avoir quelques-uns de ces éloquents avocats du magnétisme descendre dans l’arène en ce jour solennel, et devant une assemblée imposante, où devait s’agiter une question si palpitante d’intérêt et d’actualité.... Un homme, un seul homme se présente!... Les magnétiseurs comptent donc bien sur ses forces ou sur son talent pour soutenir cette grande queslion?... Il monte à la tribune; douze cents personnes attendent avec une impatience mêlée d’espoir el de crainte; leur physionomie exprimait ces deux sentiments; toutes les poitrines étaient oppressées.... Cest par un discours écrit que M. *** prélude à la discussion du magnétisme.... Pâle reflet de tout ce qu’on a dit et écrit sur
celle science depuis Mesmer; n'apprenant rien à personne, lourd el décoloré, ce discours ne pul ôlre entendu jusqu'au boni. On retira la parole à l’orateur. M. ***, compianl peul-êlre trop sur la justice de sa cause, laissa sans réponse pc-reniptoiro el les questions et les objections. L’audace des ennemis se ranima : un médecin, croyant voir chanceler le magnétisme, essaya il- l’abattre tout à fait, et dans un discours plein d’ironie, de sarcasmes el d’injures, jela l'outrage à la Face de lous les magnétiseurs.... Tons les amis de l'humanité restèrent conslernés. La victoire se dessinait en faveur des adversaires du magnétisme, lorsqu’un homme, que personne n’avait encore remarqué dans l’enceinte, s’élança â la tribune, et dans une chaleureuse improvisation cet homme, animé du feu sacré, vengea Mesmer et ses disciples; il sauva la question d'un ordre du jour flétrissant pour le magnétisme; il obtint qu’elle serait de nouveau traitée publiquement dans la section de médecine. Pendant deux heures, et avec cet accent de conviction qui gagne toutes les consciences droites, il a parle du magnétisme, des fails dont il est la cause, du bien qu’il a fait, de celui qu'il fait tous les jours, de celui qu’il promet pour l'avenir. Aucune objection n’est restée sans réponse. En un mot, il a tracé de main de maître les progrès de celle science, et il a planté son drapeau sur ce champ de bataille, où, grâce à ce soldat intrépide, la victoire nous est restée.
« Honneur donc, trois fois honneur à M. le baron Du Polel! car vous ave/, lous reconnu cel apôtre fervent qui vient de porter cette science admirable dans les pays lointains, et qui, toujours aux avant-postes, esl arrivé tout jusle pour sauver le magnétisme.
o M. Du Polet n’a pas pu nous rester; il a voulu sans doute se soustraire aux ovations qu’il mérite. Vous l’avez près dn vous, Messieurs; veuillez, je vous prie, en mon nom et au nom des magnétiseurs de Heims, dont je suis l’interprète,
nous associer aux témoignages de sympathique reconnaissance et d’admiration dont vous l’entourez.
« En mon particulier, Messieurs, je vous offre l’expression d’une cordiale confraternité. D*’*, d.-m. P.
Reims, le 14 septembre 1845.
« P. S. Ne connaissant pas les lieux où se réunissent les autres sociétés de magnétisme de Paris, ni môme toutes les sociétés où l’on s’occupe de celte science, je ne puis écrire qu’à vous; mais vous voudrez bien leur communiquer ma lettre. Les actions comme celle donl nous venons d'ôtre témoins ne doivent pas rester ignorées des magnétiseurs, et nous savons ici que la modestie d; M. Du l’olel laisserait celle-ci en oubli. » La Société, par l’organe de son secrétaire, a répondu :
Monsieur le docteur,
« Malgré le succès qu'ont obtenu les expériences que M. le baron Du Potel fil, il y a dix ans, à l'IIôlel-Dieu de Reims, el la certitude qu’il avait laissé dans cette ville de zélés défenseurs, nous n’aurions pas laissé échapper l’occasion offerte par le Congrès scientifique, si nous n'avions eu l’assurance que M. Du Polel lui-mômes’y rendrait, et que nous pouvions compter sur lui.
« l.escurieux détails que vous nous avez transmis sur cette orageuse séance ne nous ont point surpris. Habitués à la lutte, nous nous attendons à tout, el si notre mission n’était dé-clairer les hommes sans les dégrader, nous mettrions souvent au pilori de l’histoire le nom d’hommes tels que celui qui vient de déverser lanl d'injures et de sottises. Médecin, il doit avoir les connaissances de son art, et on ne peut logiquement l’accuser de myopie : une telle conduite, selon nous, ne peut être imputée qu’à la photophobie.
Avec ses remerciements pour les renseignements que vous lui avez adressés, la Société vous prie, Monsieur, d’agréer l’expression sincère de ses sentiments amicaux.
« Le Secrétaire, Cossow. »
SOCIÉTÉ P1IILAMHROPICO-MA6RÉIMHJB. — Séance du 23 juillet. — M. Millet, entretenant Ja société de l’étal d’un jeune épilepti-que qu’il magnétise, soulève une discussion sur la préférence à donner aux procédés conseillés pour combattre celle affreuse maladie. Plusieurs membres opinent pour une magnétisation douce, calmante, de manière à ne point surexciter le système nerveux déjà malade. M. Pichard, comme homœopathe, et s’appuyant en outre sur les diverses observations contenues dans les ouvrages de M. Du Polet, pense, aucontraire, qu’il faut remuer puissamment l’organisation, provoquer des crises artificielles el changer fréquemment l’heure de la magnétisation, comme l’auleur qu’il ciie l'a fail à l’hôpital d’Obougoff. M. llébeu appuie les opinions émises par M. Pichard, en rappelant que la première appartient à Mesmer, selon le témoignage de d’EsIon qui, à la page 46 de ses Observations, dil : « M. Mesmer n’entend guérir qu’à l’aide des crises, cest-à-« dire en secondant ou provoquant les efforts de la nature. « De là il suit que, s’il entreprend la cure d’un fou (je suis, « comme lui, dans l’opinion que la plupart des folies ne sont « que des crises imparfaites de maladies), il ne le guérira « qu’en lui occasionnant des accès de folie. Les vaporeux au-« roni des accès de vapeurs; les épileptiques,d’épilepsie,etc., « elc. »
L’observation journalière prouve incontestablement qu on guérit sans provoquer de crises, môme sans eflets magnétiques apparents; néanmoins la plupart des praticiens sont d’avis que non-seulement il y a utilité, mais même urgence de provoquer le développement de crises toutes les fois que la sensibilité du malade le permet.
Sur la question de savoir quelle esl, dans l’état actuel des connaissances magnétiques, la substance la plus propre à re-lenir, conserver le fluide mesmérique, pour, quand 011 ne peut magnétiser directement, avoir recours à un intermédiaire, M. Possin place le cristal en première ligne. M. Dclacour dil, au contraire, qu’ayant fail un grand nombre d essais avec des
disques de verre (1), il n’a obtenu qu’un seul résultat heureux accompagne de circonstances qu’il croit utile de rappeler.
Une malheureuse femme, traitée infructueusement pendant douze ans pour une douleur gastrique compliquée de céphalalgie frontale surorbilaire, vint implorer le secours du magnétisme; M. Delacour lui donna, comme à tant d’autres, un disque de verre magnétisé [tour se l’appliquer à l'épigastrc. Un soulagement presque subit fut la suite de cette application, el le lendemain le disque, dans ses points de contact, adhérait si fortement à la peau qu’il y resta collé douze jours, après lesquels, remagnélisé, il adhéra de nouveau. Une transpiration très-abondante s’établit au pourtour et la malade fut guérie.
M. Millet a essayé des mômes disques à lui donnés par M. Delacour, et il a, par ce moyen, obtenu la résolution d’in-filtrations du tissu cellulaire des jambes, adections qu il croit liées à une maladie du cœur.
D’aulres membres préconisent l'emploi de l’eau, de la ouate, du fer, de l’or, etc., etc.
M. le président, résumant la discussion, fail observer que, loules les expériences dont il s’agit n’ayant pas été suivies d une manière rigoureuse, on doit s’abstenir de prononcer : 1° par ce que l’action galvanique dont lous ces corps sont doués, et particulièrement les métaux, s’ajoute très - probablement à l’action de l'agenl magnétique dont elles sont seulement imprégnées; 2° parce que, vu les divers traits de ressemblance du magnétisme avec le calorique et 1 eleciricilé, il serait bon de faire des expériences comparatives sur les substances en même lemps aihermales el mauvaises conductrices de 1 électricité, telles que l’alun el les aluminates, le sable, les silicates cl les corps vitrifiés en général, lesuccin, le corail, la soie, les peaux mégies, la laine, les ongles, les cornes el lous les pro-
(1) Le cristal est composé de lilharge, sable cl poltisie; le verre de table, ■ haux el loude.
duits immédiats animaux ; ainsi que quelques produits végétaux : les résines, le coton, le charbon, etc., etc.
M. Possin termine la séance par la lecture d’un rapport qu’il avait été chargé de faire sur le dernier ouvrage de M. Du Potet.
Séance du 00 juillet. — De trois personnes magnétisées, une seule éprouve des effets bien manifestes. Ce sont : l’obéissance du corps ù la gravitation , la sueur abondante surtout à la paume des mains, l’insensibilité à la douleur, l’impossibilité de locomotion, l’occlusion des paupières, la convulsion du globe oculaire et l’attraction magnétique. A propos de ce dernier phénomène qui détermine la conviction d’un grand nombre d’assistants qui manifestent hautement leur admiration, M. le président leur fail observer que le mot magnétisme peint justement cc qu’ils admirent; [xayvr,ç, en grec, signifie attraction.
Séance du 5 août. — M. Koustan rapporte qu’avant eu à traiter un cas d’emphysème pulmonaire, le malade pendant les magnétisations élait sans cesse menacé de suffocation el pris d’éructations fréquentes, mais il n’est pas guéri.
M. richard, connaissant une jenne personne qui depuis l’âge de neuf ans avait constamment les pieds froids, lui a fait, selon le conseil de Deleuze, appliquer une bouteille d’eau magnétisée, et par ce simple moyen la chaleur naturelle est revenue aux extrémités. M. Millet a obtenu le môme résultat sur un hémiplégique. M. le docteur Tesser de Saint-Marc, tout en admettant que celte cure est due au magnétisme, fait observer qu’elle n’a pas le degré de précision voulu, parce que l’eau froide produit quelquefois seule ce résultat. C’est ainsi que les hydropalhes l’emploient et que Hahnemann l’a conseillé.
On reçoit ensuite deux nouveaux membres, MM. Hotilel e* Nivard.
Séance du lô août. — Sur sept personnes inscrites pour être
magnétisées, deux seulement tombent dans un coma si profond qu’il est très-difficile de les en tirer. .
Séance du 20 août. — M. Simon lit un rapport sur la guérison qu'il a faite à Au leu il, sur une batelière affûtée depuis longtemps de douleurs rhumatismales dans la partie rénale.
M. Possin, comme preuve du mouvement qui s’opère dans les esprits, lit différents extraits d’un feuilleton de lu Presse et de la Gazette de France, articles pleins de comparaisons et d’emprunts aux faits journaliers du magnétisme.
Séance du 28 août. — M. le secrétaire donne lecture du mémoire suivant adressé à la Société par M. Picard, médecin à Saint-Quenlin. Dans une lettre accompagnant son mémoire l'auteur déclare que la plupart des fails qu’il annonce ont élé vérifiés par M. Wiart, membre correspondant de la Société et président de celle de Cambrai. Voici ce travail en entier, il a pour titre :
APPLICATION DU MAGNÉTISME AUX VÉGÉTAUX.
o Frappé de l’unité du principe vital chez tous les êtres organisés auxquels revenaient sans cesse mes somnambules passés à l’état d'extase, je résolus de faire l'application du magnétisme animal sur les végétaux et d'étudier ses effets.
« Quoique ayant peu de confiance, je me décidai à expérimenter sur des greffes; voici ce qu'il en advint.
« Le 5 avril je greffai en fente six rosiers sur six beaux et vigoureux églantiers. Je les avais choisis au môme point de végétation, ce qui m’était facile, en ayant planté quinze cents en octobre.
« J'en abandonnai cinq à leur marche naturelle, et je magnétisai le sixième (un rosier de la reine) matin ci soir, environ cinq minutes seulement. Le 10, le magnétisé, que je désignerai sous le n" 1, avait déjà développé deux jets d'un
centimètre de long, et le 20, les cinq autres entraient à peine en végétation. .
« Au 40 mai, le n° 1 avait deux beaux jets de 40 centimètres de baut, surmontés de dix boutons, les autres avaient de 5 à 10 centimètres, et les boutons étaient loin de paraître. Enfin, 1e premier fleurit le 20 mai, et donna successivement dix belles roses!... Ses feuilles avaient environ le double d’étendue de celles des autres rosiers.
« Voici leur mesure : 18 centimètres de longueur à partir de la lige à l’extrémité de la foliole terminale, qui avait 8 centimètres de longueur sur 6 de largeur.
• Je le rabattis aussitôt la fleur passée, et en juillet il avait acquis 42 centimètres, et me donnait, le 25, huit nouvelles roses. Je le rabattis de nouveau à 15 centimètres, et aujourd’hui, 26août, il forme une belle tète, par douze rameaux florifères de 64 centimètres de haut.
« Ainsi, cette greffe faite le 5 avril, ayant donné en deux floraisons dix-huit belles roses, esl sur le point de fleurir pour la troisième fois, et j’ai tiré des rameaux que j’ai rabattus trente-huit écussons, dont plusieurs ont déjà donné des fleurs depuis trois semaines, tandis que les cinq autres n’ont fleuri qu’à la fin de juin, et leurs rameaux n’avaient acquis que 15 à 20 centimètres; un seul en avait acquis 20!...
« Encouragé par ces essais faits dans le doute et voulant expérimenter d’une manière plus précise et plus concluante, je posai, le 14 mai, trois écussons de la rose Devoniensis.
« Je les désignerai par les n°* 1, 2 et 5. Le n° 1 fut de suite magnétisé, et j’abandonnai les deux autres à la nature.
« Le 10 juin, le n° 1 avait un seul rameau de 33 centimètres el trois boutons, le n° 2 avait 2 centimètres, le n° 3 en avait 3.
« Je changeai alors de méthode, et magnétisai les nos 1 et 3 pour lesarrêler, le n° 2 pour le faire partir.
« Au 20 juillet, le n° 1 était resté à 33 centimètres; deux boutons avaient avorté, et le troisième avait donné une ché-
livc rosc presque simple. Le n° 2 avait deux beaux jets de f>P> centimètres, surmontés de 52 boutons. Le n° 5 avait seulement 4 centimètres, cl ses feuilles avaient à peine 5 centimètres de longueur de la lige à l’extrémité de la foliole terminale; celle dernière n’avait qu’un centimètre.
« Le n° 2 avait, le 25 juillet, une belle rose de -12 centimètres de diamètre, bien double, bien pleine; les pétales étaient presque aussi épais que ceux d’un camélia. Tous ceux qui l’ont vue l’ont admirée; le 44 août, il y avait quinze roses ouvertes, la plus petite avait 8 centimètres de diamètre. Les 32 boutons avaient parfaitement fleuri !
* Outre ceux désignés, j'ai magnétisé assez bon nombre de sujets sans y mettre beaucoup de suite, cl lous sonl bien supérieurs aux autres par leur belle végétation el leur floraison.
o Enfin je voulus pousser à l’extrême et savoir si je pourrais agir seulement sur une partie d’un végétal.
« A cet effet, sur un beau pécher de grosse mignonne en espalier, je choisis un rameau du centre sur lequel il y avait trois pèches : je les magnétisai lous les jours pendant environ cinq minutes, et au bout de quelques jours seulement ces trois pêches se faisaient déjà remarquer par leur volume! Je continuai, et le 24 aoûl je cueillis ces trois pèches en parfait état de maturité; elles avaient 24, 22 et 21 centimètres de circonférence, grosseur que presque jamais celte espèce de pêche n’atteint dans notre pays froid et retardataire: les feuilles de ce rameau étaient sensiblement plus épaisses que les autres, et leurs nervures avaient le double de grosseur; le reste du fruit de ce pêcher esl d’une belle venue, il est au même point de maturité que celui des autres jardins du pays, c esi-à-dire qu’elles ont toutes environ 44 à 45 centimètres de circonférence, et que très-probablement on n’en cueillera pas avant le 20 eu le 25 septembre, ce qui fait près d’un mois d’avance sur le môme arbre et sur tous ceux des environs.
« Je vous abandonne tous ces fails sans aucun commentaire. Plus habile que moi décidera du mode d’aclion, etc., etc.
« Mon but est seulement, en faisant connaître ces observations, de faire naître à d’autres magnétiseurs l’envie de les renouveler.
« PiCAnu,
• Médecin à Saint Quentin. ■
Saint-Qucntin, 26 août 18/|5.
BIBLIOGRAPHIE.
Il vient de paraître simultanément quatre ouvrages nouveaux que nous analyserons successivement. Ce sont :
SOMNOLOGIE MAGNÉTIQUE, par M. Loisson de Gui-nacmont, ancien député de la Marne, un vol. in-8. Reims, 1845.
MESMER, GALVANI ET LES THÉOLOGIENS, par
M. l’abbé comte de Robiano, 1 vol. in-8. Bruxelles, 1845.
ESSAI SUR LE MAGNÉTISME VITAL ET SOMNAM-BULIQUE, par M. Ph. Hedde, brochure in-8. Saint-Etienne, 1845.
MESMÉR1SM TRUE.—MESMERISM FALSE, by John Forbes, M. D.; F. R. S., etc., in-8. London, 1845.
Nous renvoyons, faute d'espace, au prochain numéro, les détails d’une amputation de la jambe, faite dans l’état magnétique, sans douleur, par les docteurs Loysel et Gibon, de Cherbourg, surM11' d’Albanel.
Le Propriétaire-Gérant, HÉBERT (de Garnay).
JOURNAL
nu
MAGNÉTISME.
MANUEL DU MAGNÉTISEUR.
(Suite.)
I'EUT-ON SE FAIRE REMPLACER DANS UN TRAITEMENT?
Il n’est que bien peu de cas où le magnétiseur puisse, sans faire souffrir son malade, le remettre en d’autres mains. C’est un fail d’observation qui fut saisi dés les premiers temps. Mesmer, et M. de l'uy-ségur à son exemple, prenaient des précautions infinies. Ils magnétisaient celui qui devait les suppléer, alin de lui communiquer le ton de mouvement qu’ils avaient eux-mémes.
Cette précaution, alors que les pensées qui animaient les magnétiseurs étaient homogènes, pouvait suffire; car l’action, rendue uniforme par ce moyen, n’apportait que peu de différence, assez pourtant pour que les malades la sentissent. Mais aujourd’hui que
chacun a ses idées à lui, son syslèmo, sa doctrine*, qu’il est venu ù l’esprit de tous de se croire aussi grands, plus grands que les maîtres, et de chercher partout des phénomènes en dehors de ceux qu’ils ont fait connaître, il ne saurait en être de môme; et ce changement d’aclion affecte le malade d’une manière différente.
Ceci, dira-t-on, est contraire aux principes que vous avez établis. Vous avez dit que le magnétisme se comportait à la manière des autres agents physiques; que son action était fixe, et que, quelles que fussent la croyance et les idées de celui qui l’exerce, les résultats étaient, identiques. Oui, je l’ai dit, je le répéterai souvent, et voici en passant un fait qui le confirme :
Mandé un jour à PAcadémic de médecine pour y magnétiser des malades devant plusieurs membres, au lieu de malades je n'y trouvai que ces messieurs qui me mirent dans l’obligation de les soumettre, eux académiciens, à l’action du magnétisme. Je leur lis observer qu’il s’agissait de malades : « Mais nous le sommes tous, » répondirent-ils, et un rire ironique effleurait leurs lèvres. Poussé à bout par cette plaisanterie que je trouvais déplacée , je me promis de tourmenter autant que je le pourrais le premier d’entre eux qui serait sensible à mon action. Je n’avais, je dois l’avouer, aucune bonne intention. La personne que je magnétisai dans celte disposition était un médecin célèbre, M. ltard. Je le mis bien vile dans un état qui rendit ses confrères fort sérieux et le laissai ainsi. Mais quelle ne fut pas ma surprise! le lendemain il vint me voir, m’assura que je lui avais fait
beaucoup de bien , qu’une affection intestinale Tort ancienne avait subitement disparu, el qu'enfin il était venu à pied, lui qui ne pouvait depuis longtemps sortir qu’en voiture. Je le félicitai, en lui avouant que tel n’était pas mon désir, et que j’avais voulu seulement lui faire sentir énergiquement l’action magnétique.
Plusieurs fois depuis des gens m’ont avoué qu’en les magnétisant dans le seul but d’expérimenter ils avaient éprouvé des modifications heureuses dans leur état habituel. Un jeune homme, qui avait un tic douloureux , en fut ainsi débarrassé.
J’ai placé là cet exemple pour vous faire sentir la différence des cas, vous faire remarquer qu’ici j’ai agi seul, au lieu que, dans un traitement commencé, l’action est complexe ; il y a un fait préexistant, des modifications ont lieu, et elles se sont opérées sous l’empire d’idées, d’intentions qui, cessant tout à coup d’ôlro les mêmes, doivent nécessairement produire un changement. La magnétisation sera d’abord différente, el, le nouveau magnétiseur ne suivant pas la marche du premier, le travail critique qui s’opérait dans les organes sera contrarié, s’il n’est tout à fait interrompu. Puis, outre ses propriétés physiques, l’agent magnétique en revêt de morales, si je puis m’exprimer ainsi, qui, différentes selon les individus, doivent aussi modifier les forces médicatrices du malade.
Mais, sans entrer dans plus d’explications, disons que, malgré la similitude des effets physiques faciles à observer qui se développent sur le même individu sous l’influence d’actions différentes, le bien qui en résulte n’est pas le même, el qu’on doit tenir compte
do colle différence, grande quelquefois ; pour l'ordinaire , petit à petit on efface son devancier et le traitement marche.
Ce n’est donc, vous lo voyez, qu’avec précaution, et seulement lorsqu'il y a nécessité absolue, que 1 on doit se faire remplacer; autant vaudrait n’avoir pas commencé.
llappelez-vous bien aussi que tout somnambule lucide perd de sa clarté quand il sc fait magnétiser par des magnétiseurs différents, quoique le sommeil paraisse en tout semblable. C'est un maître nouveau qui est entré dans le domicile, on lui obéit ; mais les ordres n’étant plus les mêmes, la confusion règne dans le service. Ces organes sont de même : ils obéissent mieux aux impulsions d’une volonté permanente et leur jeu en est plus régulier, plus parfait.
C’est dans ce cas ou jamais l'occasion d’indiquer l’utilité que l’on peut retirer de l’emploi des objets magnétisés.
Forcé parfois de manquer une magnétisation, il m’est arrivé souvent île laisser ou d’envoyer au malade un objet magnétisé pour se l’appliquera l’heure habituelle des magnétisations. Rien, sans doute, ne peut remplacer une magnétisation directe, mais la pratique que je viens d’indiquer empêche un trop grand vide. Lo mouvement imprimé continue, plus faiblement il est vrai ; mais ce peu est bien important; car les malades attendent votre arrivée, et si vous ne venez, ils s’irritent, s’impatientent, etc. Or, comme ce trouble esl nuisible, vous devez l’empécher de naître par le procédé que je vous indique ici.
Parmi les objets magnétisés, l’eau est des plus uti-
les ; vous pouvez en laisser à votre malade, mais vous seul ôtes absolument nécessaire : vous êtes son pain quotidien II puise dans voire organisation les forces qui lui manquent, et, lorsque le rapport entre vos systèmes nerveux esl bien établi, votre approche est sentie. Que vous ayez ou non alors la volonlé, le désir d’agir, le fait d'action a lieu par une attraction secrète qui existe entre lui et vous. Il vous vole sans le savoir; ci il m’est souvent arrivé de sortir aussi épuisé que si j’eusse fait des elîorls de volonté d’auprès des malades que je n’avais eu aucune intention de magnétiser.
Que de médecins magnétisent ainsi leurs malades sans s’en douter! Et, dans la société, combien d’actions magnétiques ont lieu , sans que ceux qui les exerçent s’en aperçoivent! Que Dieu garde encore longtemps un semblable mystère ! Nous qui cherchons la science par amour pour elle, nous avons quelquefois la crainte de trop découvrir el de trop dire.
PEUT-ON SE MAGNÉTISER ET SE GUÉRIR SOI-MÊME?
Sans nul doute. Ouvrez les Annales du Magnétisme, page 255, tome II; M. Birot y dit : « J’éprouvais de-« puis un an , dans le genou droit, une douleur assez «vive dont la constance me causait quelque inquiétude; je me suis magnétisé pendant quelques jours « et la douleur a disparu. »
J'aurais pu, à la rigueur, vous taire celte citation que j’ai prise entre mille ; car il n'est pas un magnétiseur quelque peu instruit qui n’ait, dans un but de recherche, essayé sur lui-môme les procédés magnétiques , et ne vous dise qu’il s'est vu modifié par l’a-
gent qu’il avait lui-mâme émis. Cela paraît singulier, inexplicable, mais cela est ; et sans vous citer les extatiques (le l’Inde qui savent parfaitement sc mettre en crise magnétique sans le secours d'aucun magnétiseur, j'ai vu deux exemples de cette ipso-magnétisation , sur les résultats de laquelle jusqu’alors j’avais gardé des doutes.
Voici un de ces exemples :
Un jeune étudiant en droit, témoin des soins que je prodiguais à sa mère paralysée, se mit à répéter seul dans sa chambre, et sans en faire la confidence à personne, les gestes qu’il m’avait vu faire. Il s’exerça ainsi plusieurs jours à se tourner les mains sur lui-même avant de se coucher. Il survint bientôt une exaltation morale que l’on ne savait à quoi attribuer, et, à la suite, un délire furieux qui nécessita l’appel d’un médecin et l’emploi d’une camisole. Ses forces étaient surhumaines et son langage avait suivi la môme progression ; il étonnait, confondait la raison par des improvisations sur des sujets quo l’on ne pensait pas qu’il eût jamais approfondis. Il se moquait de la médecine, disait qu’il était moins fou qu’elle, qu’il se guérirait bien quand il le voudrait, et que personne, non plus qu’aucun remède, ne pouvait agir sur lui. On le saigna, le baigna sans succès; son état paraissait alarmant; le délire n’avait pas diminué. Je fus appelé pour l’examiner cl le magnétisai.
Durant que j’agissais sur lui il se met à retourner ses mains sur lui-môme, quoiqu’elles fussent enveloppées, et il portuit sa propre action magnétique sur les plexus du creux de l’estomac. 11 y avait un fait bien curieux à examiner : la lutte évidente do deux
volontés, de doux actions. Je lo calmais par moments, mais il détruisait lui-même co calme, ce demi-sommeil, et, sûr de sa puissance, il riait de mes efforts. Il nous avoua alors la cause de ce dérangement, et nons dit comment il l’avait produit; mais nous ne pûmes obtenir la promesse qu’il ne sc livrerait plus à ce dangereux exercice.
Il avait dans cet état de lièvre nerveuse des facultés surprenantes dont il appréciait la valeur. Aucun raisonnement ne restait sans réfutation, rien ne lui paraissait inconnu; il .se réjouissait de l’étonncment qu’il causait par une supériorité intellectuelle qu’on ne lui connaissait poinl.
Il passa ainsi trois ou quatre jours, la langue sèche, les yeux enflammés, et sans rien manger. Il fut, dans cet étal, transporté dans une maison de santé. Là on lui donna des douches , et la contrariété qu’il en éprouva le lit cesser. Il redevint calme, tranquille, et finalement fut guéri; non par les douches, sachez-le bien, mais parce que le système nerveux ne recevant plus l’excitation qu’il avait su lui donner se calma, et cette excitation elle-même cessa faute de cause prolongatricc. Alors, cc pauvre jeune homme s’éveilla, j’emploie ce mot à dessein, ignorant où il était, ce qu’il avait fait, ce qui s’était passé, etc. ; il n'avait plus que les facultés intellectuelles assez bornées qu'on lui connaissait, et les forces surprenantes qu’il avait montrées avaient également disparu. Je rendis 51. Deleuze témoin de cc fait singulier; il en connut la cause, et me dit qu’il en avait déjà vu un pareil.
Nul, je pense, ne sera tenté d’imiter ce jeune homme, mais chacun fera bien d’essayer sur soi une
magnétisation do quelques instants. Lorsqu’un trouble quelconque se manifeste dans la région ou l’organe que l’on actionne, on l’influence davantage en y portant un surcroît de forces et de mouvement; mais on ne doit jamais chercher à se mettre en crise complète, parce que la volonté sc dérègle, et que cet état, dès lors, n’est plus qu’une sorte d’ivresse morale, dangereuse pour l’intelligence qu’elle peut affaiblir.
CONTRAIREMENT A CE QII’ONT DIT LES MAGNÉTISEURS :
1° Il existe autant de disposition au somnambulisme puységurique chez les hommes que chez les femmes.
2° La croyance au magnétisme est indifférente au succès de l’opération.
3n I.a santé n’exclut point la susceptibilité au magnétisme; je pense même qu’elle est favorable au prompt développement des phénomènes. J’ai réussi dans un si grand nombre de cas ce genre qu’ayant à choisir, pour expérimenter, je prendrais de préférence l’individu bien portant; car, chez les malades, ce n’est souvent qu’après avoir produit une sorte de richesse vitale factice qu’apparaissent ces effets magnétiques et le sommeil. Influencé par les opinions des magnétiseurs, j’ai pu, au commencement de ma carrière, penser comme eux; mais aujourd’hui je vois qu’ils étaient dans l'erreur sur les faits que je signale.
4° Le rapport par contact n’est nullement nécessaire: toucher les ponces, passer les mains sur les épaules, les descendre le long des bras, appuyer les genoux contre ceux du magnétisé, sont des procédés
constituant une mainmise méthode qu’il faut réformer. Qu’elle ail pour origine Deleuze 011 de Puv-ségur, cela importe peu dès qu’elle est vicieuse.
Je m’attends aux objections comme aux contradictions que va soulever cette série de propositions ; aussi pour les prévenir j’ai réservé pour cet endroit l'examen et rénumération des
SYMPTÔMES PRÉCURSEURS DU SOMMEIL MAGNÉTIQUE.
Ce sont : immobilité des traits, changement de coloration de la face, abaissement fréquent des paupières. Les yeux plus brillants prennent un caractère de fixité singulier qu’il est impossible de dépeindre. Quand on a l’habitude de magnétiser on s’aperçoit que l’action a pénétré dans le cerveau lorsqu un léger soubresaut du bord libre de la paupière supérieure a lieu. On est certain dès lors de pouvoir produire, en persistant, tous les phénomènes magnétiques, et surtout l’attraction. Je n’avais point d’autre indication quand, interrompant mon opération, j’annonçais avec certitude que l’incrédule soumis à mon action était en ma dépendance, et les preuves ne s’en faisaient jamais attendre si j’étais sollicité de les fournir.
QU’EST-CE QUI PROUVE L5EXISTENCE DU SOMMEIL MAGNÉTIQUE? COMMENT S’ASSURER QU’lL N'EST PAS SIMULÉ?
Lorsqu’un magnétiseur novice a obtenu quelques accès de somnambulisme, i! s’exalte, pense que rien n’est plus facile que !c produire cette crise, n’examine plus, et il suffit qu’on ferme les yeux pour qu il s’imagine que le sommeil a lieu. J’ajoute qu il esl extrêmement facile à tromper; sa bonne foi est si grande
et il croit si fermement à l'impossibilité de lui résister qu’il néglige toute règle de prudence.
Ce n’est pas ainsi que nous avons agi au début de notre carrière, et aujourd’hui encore, quoique nous n’ayons pas été trompé, nous prenons nos précautions comme si nous devions I'ôtre, et jamais nous n annonçons l’existence de ce sommeil qu après un examen attentif.
Comment croire à une simulation....? Eh! mon Dieu, les honnêtes gens qui vous accusent d imposture vous en fourniront les premiers 1 exemple. S ils parviennent à vous tromper ils convaincront ceux qui les entourent qu’il n’y a rien de réel et que tous les prétendus dormeurs ont fait comme eux. Cette mystification, comme ils l’appellent, a eu lieu plusieurs fois; ce piège grossier a été tendu à beaucoup de magnétiseurs; certuins s’y sont laissé prendre, et le rire, la moquerie ont récompensé leur zèle prosélvtique. Je pourrais en ce genre citer maintes anecdotes qui passent pour piquantes, mais j’ai honte de pareils faits, et lorsqu’on a, devant moi, essayé l’effet d un semblable manège, devinant la pensée avant qu’elle ne se traduisît en actes, je savais faire rougir de honte l’homme sans morale qui avait conçu le dessein de me tromper.
Lorsqu’on veut bien se servir de ses sens pour examiner, lafraude ri est pas possible. Les prodrômes de ce sommeil sont si caractéristiques et il survient tant de changements dans l'habitude du corps que la seule inspection doit suffire pour décider a priori.
Le pouls, à la rigueur, peut aussi fournir une indication, car il est toujours fortement élevé ou abaissé.
La respiration n’est plus la même, et par suite la
chaleur animale subit des modifications profondes.
Les paupières ne sc ferment jamais sans que les symptômes que nous avons désignés se soient manifestes. Mais à quoi bon nous arrêter ici? Finissons par une comparaison qui résume tout : une pièce de monnaie fausse n’est prise pour une de bonne aloi que par celui qui ne l’examine point ou qui s’en rapporte ii la personne qui la lui donne.
(La suite au prochain numéro.)
OPÉRATIONS CHIRURGICALES
PENDANT L’ÉTAT MAGNÉTIQUE.
Le premier fail d'insensibilité magnétique bien observé eut lien à l’IIülel-Dieu de Paris en 18:20, pendant les belles expériences de M. le baron Du Potet. Depuis celte époque, ce phénomène a élé constaté un grand nombre de fois, el il a tini par être d’un utile secours dans quelques opérations chirurgicales. Ainsi, on sait que plusieurs magnétiseurs oui fait extraire des dents molaires et extirper des tumeurs enkystées à dos personnes mises en éUit de somnambulisme, el ces personnes n'eu ont pas éprouvé la moindre douleur.
Dès 1829, M. Jules Cloquet profila du sommeil magnétique pour faire l'ablation d’un sein cancéreux à une dame qui n’en a rien ressenti, et n’a pas cessé, pendant tout ce temps, de s’entretenir avec l’opérateur.
Depuis 1829, à Paris, à Montpellier, à Toulouse, en Angleterre, en Allemagne, aux Etats-Unis, on s’est servi avec avantage, el pour un grand nombre d’opérations douloureuses, de l’insensibilité qui accompagne le somnambulisme ’arlifi-
ciel; niais ce fui on 1842 seulement que, pour la première fois, on pratiqua l'amputation d’un membre sur un malade mis dans l'élal magnétique. Il n'y a encore eu que deux opérations de ce genre faites en Angleterre sur des hommes robustes, l ime par le docteur Ward, le Ier octobre 18-42, l'autre par le douleur Fenton, le 24 mars 1815. La troisième est celle que nous allons rapporter : elle a eu lieu à Cherbourg le 2 octobre de cette année; c’est la première qui ait élé laite en France. Mlle a été pratiquée, avec un succès remarquable, par M. le docteur Loysel, et fail le plus grand honneur à ce jeune médecin et à M. le docteur Gibon, qui l’a assisté, avec le concours obligeant deM. Arsène Delente. Le magnétiseur, de son côlé, n’a pas commis la faute de prolonger le sommeil au delà de l’opération.
Voici les faits tels qu’ils se sont passés; ils sont attestés par les deux médecins, la malade, et par toutes les personnes présentes à l'opération.
Procès-verbal d'une amputation de la jambe, adresse à 11 le baron Du Polel par un admirateur de son talent el de se^ ouvrages, L. Durand.
Mademoiselle Marie ü’Albanel, ùgée do dix-sepl ans, souffrait depuis plusieurs années d’une afTection arthritique du pied droit, occasionnée pur une entorse. Il y a déjà plus de trois ans qu’on avait reconnu que l'amputation de la jambe était inévitable. Mais, malgré les progrès du mal, cette jeune lilie n'avait jamais voulu consentir à une opération que les hommes les plus courageux n’envisagent jamais sans effroi. On se décida enfin à recourir au magnétisme, clans le but de la rendre insensible à la douleur, et afin que l’on pût, à son insu, pratiquer l’amputation, qui devenait de jour en jour plus imminente. Lu malade fut magnétisée par M. Durand, qui comp-
liiil fermement sur une entière réussite : le résultat n’a pas trompé son attente.
Les premiers effets de la magnétisation eurent l'avantage (le rendre à mademoiselle D'Albanel l'appétit et le sommeil, dont elle était privée depuis bien longtemps. L'insensibilité ayant été explorée à plusieurs reprises et obtenue telle qu'on la désirait, la malade consentit, pendant son état de somnambulisme, à se soumettre à l'opération , ou plutôt elle le demanda elle-même avec instances. Il fut donc décidé que l’amputation de la jambe aurait lieu le jeudi suivant, 2 octobre 1845, à midi et demi.
Au jour fixé, à onze heures du matin, mademoiselle D’Albanel lut endormie en moins de trois minutes, puis placée sur une table. Un commença aussitôt, même en sa présence, à s'occuper des préparatifs; el lorsque M. Durand eut bien la certitude que l’insensibilité était profonde et absolue, il avertit les médecins qu'ils pouvaient, avec une entière sécurité, commencer l’opération. Alors, au milieu d un silence solennel, et pendant que tous les assistants jetaient un coup d'œil attentif et scrutateur sur le visage paisible de la malade, le docteur Loysel fil une large incision circulaire avec le couteau, qui, en pénétrant profondément dans les clmirs, et jusqu'à l’os, laissa ii découvert la plus grande partie du tibia et du péroné. Le sang coulait en abondance. Les deux lambeaux furent incisés et disséqués, le périoste coupé, les os sciés; la ligature des artères, le nettoiement et la réunion de la plaie, l’application des bandelettes et de la charpie, tout cela fut fait sans que la malade ait donné le plus léger signe do
douleur. Son visage n’a pas cessé d’èlre calme et impassible; ses mains sont demeurées entièrement libres, cl elle a causé plusieurs fois, en souriant, avec son magnétiseur, même dans les instants les plus douloureux de. l'opération, laquelle, y compris le pansement, a duré plus d’une demi-heure. L'insensibilité a été complète ; la malade na même pas eu connaissance de ce qui se passait, et le pouls n’a subi aucun changement notable, tant pour la force que pour la fréquence.
Mademoiselle D’Albanel fut aussitôt transportée dans son lit, et on la laissa tranquille un moment. Au bout d’un quart d’heure elle fut réveillée, comme les jours précédents, seulement par la volonté de son magnétiseur, en trois ou quatre secondes, et à la distance de deux mètres. Elle ouvrit tout à coup les yeux, se mit à sourire à ceux qui l’entouraient, et demeura ainsi plus de dix minutes sans s’apercevoir de ce qui avait eu lieu, et n’éprouvant aucune souffrance; puis enfin elle dit, sans manifester une trop vive émotion : « Ah ! je vois que c’est fini; quel bon-« heur!... Oh! merci! merci! Messieurs. »
Priée de dire ce qu’elle avait senti ou éprouvé pendant son sommeil, elle répondit : a Je ne sais rien; je n’ai ressenti aucune douleur; je ne me souviens de rien, d
On lui demanda encore : « Comment donc avez-« vous su, tout à l’heure, que l’opération était faite?
« — Sans cette élévation qui est au-dessus de mes a genoux, dit-elle, je ne m’en serais pas aperçue si « tôt, car je ne souffre pas du tout en ce moment. »
La malade fut très-paisible le reste do la journéo,
et dormit tranquillement une bonne partie de la nuit. 11 en a été de même les jours suivants. Lundi, G octobre, le premier appareil lut levé à deux heures, et l’on lit le pansement de la plaie pendant le sommeil magnétique. A ce pansement, ordinairement fort douloureux, la malade n’a rien senti; au réveil elle n’a pas eu non plus la conscience de ce qui venait de se passer. Depuis le moment de l’amputation ( et il y a déjà dix jours d’écoulés), elle a été constamment d’une sérénité et d’une gaîté remarquables. Elle n’a pas éprouvé un seul symptôme fâcheux, ni même cette excitation nerveuse que l'on observe si fréquemment chez les personnes qui ont subi des opérations douloureuses. Enfin, la plaie est à peu près cicatrisée, et tout fait espérer une prompte et heureuse guérison.
Il est donc aujourd’hui bien démontré par l’expérience que le magnétisme, développant dans les organes l’insensibilité la plus absolue, peut être d’un précieux secours, et rendre de grands services dans les opérations chirurgicales el les amputations toujours si douloureuses, en ce qu’il épargne au malheureux patient des terreurs et de la souffrance. Et après l’opération, dont la douleur a causé au malade une irritation quelquefois très-dangereuse, combien on est heureux de pouvoir, à l’aide du sommeil magnétique, prévenir les accidents nerveux, le tétanos, par exemple, qui amène souvent la mort, et ranimer les forces vitales qu’une pareille secousse vient d’é-puiser. C’est ce qui arrive toujours lorsque le somnambulisme est produit, et c’est cc qui a eu lieu, d’une manière bien remarquable, dans le cas d’amputation dont nous venons d’être témoins à Cherbourg.
Ainsi, quels heureux, quels bienfaisants résultats! Terreurs qui précèdent ordinairement l'amputation , douleurs atroces qui l’accompagnent, souvenirs cruels qui la suivent : la magnélisution annihile cl détruit tout, cela!
Quel élonnnnt phénomène, et combien il mérite de lixer l'attention des savants! Malheureusement pour la science, le magnétisme, celle puissance inconnue, mais réelle, cet agent mystérieux et impondérable, échappe à l’observation ; et les hommes qui scsont livrés avec le plus d’ardeur à l’étude de celle branche intéressante de l’anlhropologie n’ont pu découvrir encore les causes d’un si prodigieux changement, d’une altération si profonde des lois de la vie.
Cherbourg, 11 octobre 1845.
P. S. Hier dimanche, dixième jour de l’opération, la malade s’est levée et est restée assise à sa croisée depuis midi jusqu’à cinq heures. Aujourd’hui lundi, 13 octobre, elle a descendu de sa chambre et a fait un tour de promenado dans le jardin du voisinage, où elle est demeurée ensuite assise pendant plus do deux heures. Elle est parfaitement bien maintenant et sort tous les jours.
Cherbourg:, 13 octobre ISi5.
Le quatorzième jour de l’opération la cicatrisation était complète et tout pansement a été supprimé.
Cette amputation, pratiquée dans des circonstances si extraordinaires, cl la guérison rapide qui l’a suivie, ont produit ici une vive sensation.
Chciboui'tc, £0 octobre 18/|5.
Giron, il.-m. P.— L. Durand, professeur. — I.oïsf.i., il.-ni. P. — L. Daraoon, professeur. — Maria D’Aldanei.. — Delente, directeur des lils militaires.
CLINIQUE MAGNÉTIQUE.
A MOXSIF.I II l.i: niRKCTKI a 1)L JOURS AL nr MAHSHTISVIî.
MoNSIEI'H,
L’intérêt de l’humanilé exige que tous les magnétiseurs réunissent leurs efforts pour propager les bienfaits du magnétisme. C’est ce sentiment qui me porte à prendre la liberté de vous faire connaître que depuis six ans je ne traite aucun malade sans consulter une somnambule que je liens à gages; c’est un sujet très-distingué, et avec son secours j’ai poussé la connaissance du magnétisme et du somnambulisme magnétique à un haut degré; avec son secours aussi, j’ai obtenu un grand nombre de guérisons de maladies déclarées incurables par des médecins qui jouissent d’une grande réputation, telles que phtliisies pulmonaires, cancers, épilepsies, pleuro-pneumonies chroniques, gastrites chroniques, névralgies de tout genre, etc. Elle m’a conduit à des découvertes pathologiques et physiologiques très-importantes.
Je laisse cette somnambule presque toujours dans l’état magnétique, et lorsque je la réveille je ne la laisse réveillée qu’une 011 deux heures. Magnétisée, elle est comme dans l’état normal : elle mange, elle boit, elle voyage, elle s'occupe du ménage, elle se
rend sur la place pour faire scs provisions, cause avec tout le monde, sans que personne puisse reconnaître si elle est ou non magnétisée. Lorsqu’on arrive pour consulter, elle s’absorbe pour examiner les malades; elle n’a pas besoin de les toucher, ni aucun objet leur ayant appartenu, pour se mettre en rapport. Si lo malade est présentée n’ai besoin que de lui dire : « Examine ce malade. » S’il est absent, il laut qu 011 indique positivement le lieu où il esl au moment de la consultation. Si elle le connaît d’avance, elle ne peut se tromper; mais si elle ne le connaît pas, elle peut le confondre avec un autre malade, c’est-à-dire qu’elle peut prendre un malade pour un autre, parce qu’elle ne devine pas, de sorte que, pour la consulter pour un malade éloigné, il est nécessaire qu’il y ait quelqu’un présent à la consultation, qui connaisse les symptômes apparents de la maladie, pour reconnaître si elle ne se trompe pas de malade.
Pour les consultations, elle commence par se palper toutes les régions du corps avec ses mains; elle imite au parlait toutes les souffrances des malades; elle imite les convulsions, les contorsions des épileptiques et des hystériques, la danse de saint Guy, la toux des pbthisiques, des asthmatiques, des pleuréti-ques, etc.; les vomissements, les crachements, mémo de sang et do pus, les régurgitations , le hoquet, les rots, les bâillements, les pcndiculalions, les gestes des aliénés, les emportements, les plaintes, les soupirs, les gémissements, en un mot, tout ce que lont les malades, et sans rien dire. Pendant cela, elle est sourde à ma voix comme à celle des autres; elle est insensible à tout, sauf â quelque indécence; car dans
ce cas elle se lèverait furieuse contre la personne qui l'aurait commise. Après avoir imité tous les gestes du malade pour lequel on consulte, elle décrit les symptômes, désigne le siège et la nature des douleurs, les lésions internes, l’état des viscères et des humeurs, l’état de tous les organes; mais elle ne désigne point les viscères et les organes par leurs noms propres, mais bien par des noms vulgaires ou par leurs formes, leur siège et leurs fonctions. Après cela, elle remonte aux causes des maladies, les désigne avec les circonstances, et ordonne le traitement. Elle n’ordonne rien sans dire : « J’en attends tel elï'et. «
Si je propose quelques médicaments, avant de les approuver ou de les rejeter, elle examine et donne les motifs de son approbation ou de son rejet.
Voici quelques observations auxquelles j’en joindrai un grand nombre d’autres si vous le désirez.
ÉPILEPSIK.
A la fin île juillet 1840, j’étais à Frontignan ; 011 se présente pour consulter pour Marie Biau, âgée de quatorze ans. Cette demoiselle était prise chaque jour d’une ou deux attaques épileptiques; elle tombait soudain où elle se trouvait, sans aucun pressentiment, sc débattait dans des convulsions pendant quelques minutes; ensuite son corps entier devenait roide comme une barre de bois et restait dans cet état pendant deux heures au moins. L’heure des attaques n’était point régulière, elles arrivaient à toute heure du jour; cela durait depuis environ quatre ans. On l avait mise à l’hôpital Saint-Eloi à Montpellier,
où elle était restée quatre mois et demi, et d’où elle était sortie dans le môme étal qu’elle y était entrée : on déclarait sa maladie incurable. La somnambule magnétisée simule les attaques de la malade en présence de MM. Kiihnholtz, professeur agrégé et bblio-tbécaire de la Faculté de Médecine de Montpellier, Blondin, Cliapotin, Rimbaud et autres propriétaires à Frontignan, et dit : « Cette malade :i été mal soi-« gnée ; on lui a fait des saignées qui lui ont aggravé «sa maladie. Nimportc, clic sera bientôt guérie si « on la magnétise au moment de ses attaques; le « magnétisme détruira l’éretisme nerveux, el elle « tombera dans le somnambulisme. Je pense qu’il « n’est nécessaire d’aucun médicament, le magné-« tisme suffira; il faut la magnétiser tous les jours et « la laisser, chaque fois, une heure dans le sommeil. « La cause de celte maladie est une frayeur. »
Au bout de quinze jours la malade fut guérie; je la gardai en qualité do domestique pendant huit mois pour bien m’assurer de la guérison, et pendant co temps elle n’eut aucune attaque.
C ASC EU MAMMAIHR.
Madame R‘", du canton de Viviers, sc présente pour consulter pour sa demoiselle Alhalie, ûgée de vingt et un ans. La somnambule, magnétisée le 25 septembre 1841, dit : « La malade pour laquelle on me « consulte est atteinte d’un cancer au sein gauche, « dont la cause est un coup qu’elle s’est donné contre « un prunier dans son jardin, il y a quatre à cinq v ans; mais le nuicor n’a paru que depuis deux ans.
« Jai besoin de palper la tumeur, alin de bien préci-« ser la position des racines, dont une se dirige vers « le cœur, une vers la colonne vertébrale, une troi-« sième vers l’estomac, cl une quatrième vers la rate; « il faut un cautère sur la direction de chaque ra-« cine. Néanmoins, le sein supurera malgré les cau-« tères; il faut aussi attaquer le sang, car il y a « diathèse cancéreuse. »
On alla chercher la malade. Le sein avait le double de volume de celui du côlé opposé, sans altération de la peau, d’une consistance très-dure. Le pouls offrait quatre-vingt-dix pulsations par minute; la face était amaigrie et terreuse, l’appéiit dépravé depuis quelque temps.
Je plaçai les cautères cl fis une ordonnance pour le traitement interne. Le soin perça un mois après, et la guérison fut radicale au bout de quatre mois; depuis lors elle a joui d’une bonne santé. Cependant plusieurs médecins avaient déclaré la maladie incurable.
CANCER CARDIAQUE.
Au mois de mars 1845, madame Meunier, de Roche-maure, se présente pour consulter; elle éprouve une douleur à la base de la poitrine; la déglutition se fait, mais lorsque soit les solides, soit des liquides, arrivent au bas de l’œsophage, la mahde éprouve une forte douleur. Depuis six mois la maladie s’aggrave chaque jour; la voix est presque éteinte. K lie a consulté plusieurs médecins et subi di\ers traitements sans pouvoir arrêter les progrès de la maladie. La
somnambule, après avoir examiné la malade spirituellement, simulé les souffrances et décrit les douleurs, dit : « 11 y a un cancer au cardia. » Quinze jours do traitement ont produit une amélioration bien grande, et trois mois ont suffi pour la guérison.
LUXATION.
Le 15 septembre 1845, madame Saint-Romain, de Cbomerar, se présente pour consulter pour un malade qui est à son château. Lu somnambule magnétisée sc transporte en esprit auprès du malade ( c'est M. Rodvviski, Polonais); elle simule une chute sur le siège, et dit : « Le malade est tombé sur le siège, s’est « luxé incomplètement l'avant-dernière vertèbre lom-« baire. Le nerf se trouve comprimé; il y a presque « paralysie delà cuisse, paralysie de la vossie et «lu « rectum. 11 faut que je me rende auprès du malade « pour réduire la luxation. » C’était exact. Le malade était alité depuis quatorze jours; les urines étaient suspendues depuis huit jours; on l’avait déjà fait examiner par un rabilleur, qui avait dit ne reconnaître aucune luxation. Nous nous rendons auprès du malade, et dans ciuq minutes la somnambule le guérit.
Recevez, Monsieur, l’assurance de la considération distinguée de votre tout dévoué.
Maurice,
Médecin-magnétiseur.
Privas, 7 octobre 1845,
A votre dernier séjour dans notre ville, j’ai eu l’honneur de vous voir avec M. Clin, et de vous entretenir du traitement magnétique que j’exerce sur plusieurs personnes, et notamment sur deux, dont le terme de leur guérison approchait.
Comme ces deux personnes sont (depuis votre départ) radicalement guéries, je me fais un plaisir de vous donner un abrégé des principales circonstances de leurs maladies, et de ce qui s’est passé dans lo cours des séances.
PREMIER FAIT.
M"e T..., âgée do vingt-trois ans, demeurant à Reims, rue de la Coutine, éprouvait depuis dix-huit mois de continuelles douleurs à l’estomac, suivies do vomissements; elle ressentait en outre des picotements au sein gauche. Un docteur fut appelé, lui ordonna des cataplasmes et des potions calmantes : elle fut ainsi traitée pendant prés de quinze mois sans éprouver aucun soulagement ; les vomissements devinrent plus fréquents, et une grosseur sur le sein devint extrêmement visible.
Dans cet état de souffrance, elle n’avait pas do sommeil, ne pouvait supporter la plus légère nourriture; le laitage, qu’elle aimait beaucoup, se coagulait aussitôt, et provoquait alors des vomissements; les sangs no venaient pas régulièrement.
Voyant que les remèdes de la médecine ne lui
donnaient aucun soulagement, il lui vint dans l’idée de se faire magnétiser; elle consulta à cet effet, on le lui conseilla, cl vint me trouver fin d’octobrc 1814.
Je la magnétisai le jour même, d’abord à grands courants, puis par des passes longitudinales, la pose des mains sur les genoux ; et, en commençant mes passes au-dessous du cœur, elle éprouva du soulagement. Et la séance suivante, la frictionnant à deux pouces de distance, je sentis, en mettant mes doigts au-dessus du sein, une sensation de froid, ce qui m’indiqua qu’il y avait engorgement; puis, faisant quelques passes médianes jusqu’au creux de l’estomac, j’éprouvai un engourdissement aux doigts, et je conçus alors que le siège du mal était tout à la fois depuis le soin jusqu’à l'estomac.
Je dirigeai alors toute mon action sur ces deux points, magnétisant activement pour établir des courants, et j’actionnai ensuite sur les jambes.
Après vingt jours de magnétisation, les vomissements devinrent moins fréquents, et l’insomnie fut remplacée par un sommeil de plusieurs heures, doux et paisible.
Au bout de six semaines de magnétisation, la petite grosseur qui était sur le sein disparut, ou pour mieux dire se concentra dans l’intérieur.
Peu de jours après mon sujet devint somnambule; je profitai de sa lucidité pour m "éclairer sur sa position ; elle médit « que le magnétisme lui était bien « nécessaire, qu’elle ne voyait point d'autre remède à « sa guérison, qu’il fallait la magnét iser tous les jours « el lui donner â boire île l’eau magnétisée, et qu’elle
« serait guérie dans dix mois ; > dans les séances ultérieures elle tint toujours le inéme langage.
Le 25 mai, elle me dit qu’elle aurait trois crises le 2juin, une à huit heures du matin, une à trois heures, et une à sept heures et demie;—qu’elle en aurait deux le 3 juin, une à cinq heures du matin, et une à huit heures et demie du soir; — le 4 juin, quatre crises, une à neuf heures, une à onze heures, une à cinq heures et demie du soir, et une à neuf heures et demie; — enfin, le 5 juin, trois crises, une à six heures du matin, une à une heure, et une à six heures et demie du soir, et qu’elle resterait calme jusqu’au 15 juillet où elle vomirait deux fois.
Je me suis rendu auprès d’elle aux jours et heures indiqués, et ses crises ont toujours eu lieu; elles lui duraient une heure.
Dans la séance du 15 juillet, je lui demandai la cause de ses vomissements, elle me répondit que c’était cette tumeur qu’elle ressentait dans l’intérieur de son sein, qui obstruait le passage ; qu’elle la voyait déjà aussi grosse qu’un œuf; qu’il fallait détourner cette glande par le contact de la paume de la main, puis tirer vers les extrémités.
Elle dit encore dans le cours de cette séance qu’elle aurait de fortes crises du 20 juillet au 15 août, et que sa dernière crise, celle de sa guérison, aurait lieu le lundi 13 octobre, à dix heures du malin; que cette crise ne durerait qu’une demi-heure, et que la douleur ferait éclater celte glande qu elle voyait enveloppée comme un œuf dont récaille n’est point encore formée, (pie tout cela était noir, tirant vers les extrémités sur un vert foncé; que, quand le fluide était
lancé avec force vers lo sein , cette glande frappait contre elle et la faisait alors bien souffrir.
Toutes ces crises ont également eu lieu aux heures indiquées.
Le 20 septembre, clic prédit encore de nouvelles crises qui commenceraient le 25 septembre jusqu’au 13 octobre, jour de sa délivrance.
Plusieurs de MM. les ecclésiastiques de noire ville et autres personnes notables qui assistaient à celle séance prirent note de ees prévisions, et vinrent à différents jours pour s’assurer de la réalité do ces prédictions qui n’ont jamais manqué.
Le jeudi 2 octobre, elle me dit qu’elle devait cesser dèsee jour de prendre toute espèce de nourriture, pas même de bouillon, et qu’il ne fallait que la magnétiser activement jusqu’au 13, ajoutant qu’elle vomirait cinq fois le 5 octobre, — trois fois le 6, — deux fois le 7, — et le 11 trois fois; que le dimanche 12 octobre elle serait très-faible, qu’il lui serait impossible de se tenir sur ses jambes, qu’elle aurait de fortes douleurs, et qu’il serait convenable de la faire dormir toute la journée, et que le lundi 13, â dix heures, serait sa dernière crise; que cette tumeur se détacherait et s’évacuerait par le bas. « Aussi, ma crise « passée, je boirai du lait ; cette boisson, qui provo-« quait toujours mes vomissements, n’en excitera » plus ; je la boirai avec plaisir, et ce sera la preuve « de ma guérison.
« Mais il me faudra tenir bien chaudement et me « magnétiser encore pendant six semaines deux et « trois fois par semaine. »
Le 13 octobre, à l’heure indiquée, plusieurs pré-
très et autres personnes étaient à la maison, et tout s’est passé comme elle l’avait dit. Vers les quatre heures du soir elle alla à la selle, on recueillit les excréments, el 011 vil en effet des débris d’une tumeur noire comme elle avait annoncé.
DEUXIÈME FAIT.
L’autre personne aussi guérie est une demoiselle de vingt-quatre ans, demeurant aussi à Reims, boulevard Gérés, n° 42, qui depuis plusieurs années tombait dans de fréquentes et douloureuse attaques de nerfs qui l’empêchaient de sortir et de se livrer au travail.
Tous les remèdes de la médecine ayant été sans succès, elle entendit parler du magnétisme, et vint nie voirie 14 mai 1845.
Je la magnétisai à l’instant même et à grands courants; après plusieurs passes elle tomba en crise, cl je ne pus la calmer qu’après une demi-heure de travail.
A la séance suivante j’employai les mômes procédés et j’obtins le même résultat.
Voyant sa sensibilité au magnétisme, je pensai qu’il lui était nécessaire, et je continuai le traitement avec mon fds, qui lui donna ses soins.
Quelques jours après elle devint somnambule, et, dans cet état, nous lui demandâmes pourquoi e!le était si agitée dans les séances précédentes.
Elle nous répondit :
« Les passes que vous me faites à distance m’irri-
« tcnt. Il faut me les faire (le près, et même par un « léger contact. »
Nous procédâmes alors de cette manière, et elle fut en effet plus calme.
Je lui demandai ensuite si nous parviendrions à la guérir, el si le magnétisme lui était favorable. Elle nous répondit : « Oui, je guérirai. —A quelle époque!' « — D;ins quatre mois, le 13 septembre, à six heures « du soir, j’aurai ma dernière crise. A partir du « 5 septembre, ajouta-t-elle, je serai folle pendant « huit jours ; ma folie ne m’agitera pas. Je ne serai « pas méchante, je serai gaie. Le magnétisme m’est « très-bon. Il faut encore me magnétiser tous les « jours. »
Elle s’ordonna pour boisson de l’eau magnétisée et une infusion de feuilles d’oranger, s’abstenant de tous aliments gras, excepté le bouillon, cl s’est en outre ordonné, pour son repas du matin, du lait avec une infusion de sauge et une pincce de poivre au lieu de sucre.
En effet, elle eut, au jour indiqué, une folie qui dura le temps annoncé; dans cet intervalle elle fut gaie, s’amusa avec une poupée et autre jouets d’enfants, resta au lit pendant ces huit jours, et eut sa dernière crise le (3 au soir.
Depuis ce jour elle se porte bien, n’a point eu de nouvelles attaques, malgré différentes frayeurs qu’elle a eues.
Je dois encore la magnétiser pendant un mois et demi deux fois par semaine seulement.
N. B. Je traite en ce moment une personne qui a un anévrisme et qui est hydropique. Malade depuis
quinze ans, abandonnée entièrement de la médecine, je la magnétise depuis le 2~> mai ; sa magnétisation est pénible; ses crises durent de quatre heures à quatre et demie ; elle tombe faible pendant une demi-heure, puis revient; les passes à distance l'irritent plutôt que de la calmer; elle a été lucide jusqu’à l'arrivée do M. Aubin Gauthier, (pii est venu me voir et l’a magnétisée. Depuis ce jour elle n’a pu retrouver sa lucidité.
Elle va mieux; l’enflure baisse beaucoup, les jambes s affaiblissent, et mes séances ne durent plus qu’une heure; elle n’a plus de faiblesse.
Je vous en donnerai des nouvelles ultérieurement.
Je compte sur le manuel du magnétiseur que vous m’avez promis.
Beaucoup de prêtres viennent me voir magnétiser et sont satisfaits. Le Journal de Reims, dans son numéro du 7 novembre, parle des deux faits dont j’ai l’honneur de vous entretenir.
Veuillez, Monsieur, croire aux sentiments respectueux de votre très-dévoué serviteur,
Dallier-Bon.nette.
Reims, 9 novembre 1845.
ÉTUDES PRÉPARATOIRES
DU
SOMNAMBULISME MAGNÉTIQUE.
(Suite.)
§ IV. — RÊVES.
Première observation.
« Mlle c....., clouée d’un excellent jugement, religieuse sans bigoterie, habitait, avant d’ôtre mariée, la maison de son oncle, médecin célèbre, membre de l’institut. Elle étaitalors séparée de sa mère, atteinte, en province, d’une maladie assez grave. Une nuit, cette jeune personne ré va qu’elle l’apercevait devant elle, pâle, défigurée, prête à rendre le dernier soupir, et témoignant surtout un vif chagrin de no pas être entourée de scs enfants, dont l’un, cury d’une des paroisses de Paris, avait émigré en Espagne, et dont l’autre était à Paris. Bientôt elle l’entendit l’appeler plusieurs fois par son nom de baptême; elle vit dans son rêve les personnes qui entouraient sa mère, s’imaginant qu’elle demandait sa petite-fille, portant le môme nom, aller la chercher dans la pièce voisine; un signe de la malade leur apprit que ce n’était point elle, mais sa fille qui habitait Paris quelle désirait voir. Sa ligure exprimait lu douleur qu'elle éprouvait
(le son absence; tout à coup ses traits se décomposèrent, se couvrirent do la pâleur de la mort; elle retomba sans vie sur son lit.
« Le lendemain, JI1'® G.... parut fort triste devant
I)....., qui la pria de lui faire connaître la cause do
son chagrin; elle lui raconta dans tous ses détails le
songe qui l'avait si fortement tourmentée. D...... la
trouvant dans celte disposition d’esprit, la pressa contre son cœur en lui avouant que la nouvelle n’était que trop vraie, que sa mère venait de mouwr; il n’entra poinl dans d’autres explications.
« Plusieurs mois après, G...... profitant de
l’absence de son oncle pour mettre de l’ordre dans ses papiers, auxquels il n’aimait pas qu’on louchât, trouva une lettre qui avait élé jetée dans 1111 coin. Quelle ne fut pas sa surprise en y lisant toutes les
particularités de son rêve que D..... avait passées
sous silence, 11c voulant pas produire une émotion trop forte sur un esprit déjà si vivement impressionné.
« Il convient, sans doule, de se tenir ici dans une réserve prudente, et l’explication pour le songe du ministre dont parle Abercrombic pourrait, à la rigueur, être invoquée dans ce cas; mais nous dirons franchement que ce sujet, dont nous nous sommes beaucoup occupé, n’est pas toujours d’une explication aussi facile, et si nous voulions citer lous les noms des personnages connus, ayant une haute position dans la science, 1111 jugement excellent, des connaissances très-étendues, qui oui eu de ces pressentiments, il y aurait matière à plus d’une réllexion (l). »
(1) Brierre de Boismont, des UaUucinaliuns.
Deuxième observation.
« Le célèbre compositeur Tnrlini s’était endormi après avoir essayé en vain de terminer une sonate; celte préoccupation le suivit dans son sommeil; au moment où il se croyait, dans un rêve, livré de nouveau à son travail, cl désespéré de composer avec si peu de verve et de succès, il voit tout à coup le diable lui apparaître et lui proposer d’achever sa sonate s'il veut lui abandonner son âme. Entièrement subjugué par cette hallucination, il continue son rôve, accepte le marché proposé par le diable el l’entend alors très-distinctemenl exécuter sur le violon cette sonate tant désirée, avec un charme inexprimable d'exécution ; il se réveille alors, dans le transport, de son plaisir, court à son bureau et écrit de mémoire la fameuse Sonate du Diable, qu’il avait terminée en croyant l’entendre (1). »
Beaucoup des ouvrages que nous admirons ont élé composés dans cet état de l’esprit, mais il n’en existe peut-êtrepasunseul autre exemple aussi remarquable.
(La suite au prochain numéro.)
THÉORIES.
A MONSIEUR LE BARON DU POTET.
Je prends, Monsieur, la liberté de vous adresser mes opinions sur la cause du magnétisme et sur scs curieux et aihni-
(I) Moreau («le la Saillie), Mélanges (te Littcralure.
rallies phénomènes, f.c magnétisme m’a convaincu de l’existence de l’ami-, de son immortalité et d'une vie future. Avant, j’étais matérialiste; je ne pnuva's croire à des écrits remplis d’allégories «t de mystères. Mou cœur était froid â la pensée de l’avenir, et la mort était pour moi l'anéantissement du moi. Je croyais à un principe do toute existence, mais jms â autre chose. Les phénomènes du magnétisme m’ont révélé une âme immortelle et un monde où elle continue d’exister el progresser indéfiniment. Mais, si je suis maintenant spiritua-liste, ma croyauce diffère beaucoup de celle des théologiens en général, ma psychologie esl basée sur des expériences magnétiques.
L’Essai qui suit esl l’expression de ma conviction ; vous le publierez si vous l’en jugez digne.
ESSAI PSYCHOLOGIQUE AVANT RAPPORT Al) MAGNÉTISME.
L’âme, l’esprit est l’homme parfait; l’homme spirituel, réceptacle de la vie, existant premièrement sur cette terre matérielle à l’état d’enfance, de noviciat, premier degré préparatoire â la progression éternelle, l’âme anime son enveloppe matérielle ; lorsque ce corps ou homme matériel esl lésé, le spirituel ne pouvant le faire fonctionner pour ses relations avec les autres corps matériels, il est forcé de l’abandonner; alors il est cadavre; ainsi, le musicien laisse l'instrument brisé en l'une de ses parties. Si l'homme matériel est boiteux, iiveugle, sourd, manchot, le spirituel ne l’est pas, car il est insensible et nullement sujet aux accidents du corps, composé de molécules matérielles; aussi est-il l’homme parfait. Lorsqu'un homme esprit en magnétise un autre, sa volonlé lait émaner de sa sphère un fluide qui assoupit, rend insensible le corps du magnétisé; plus il esl insensible, plus l’âme ou l'homme spirituel esl libre. Il n'a plus besoin des yeux de son corps matériel pour voir, et il n’aurait vraisemblablement pas besoin aussi des oreilles matérielles pour entendre (je ne sais
si 011 a fait des expériences sur l’ouïe). L'ùinc n’est pas sous les lois de l’espace et iu temps; ces notions si sensibles à l’homme matériel ne sont qu’une apparence pour l’homme spirituel ; la vue à distance le prouve pour l’espace, la rétro-spection el la prévision le prouvent également pour le temps. C'est l’àuie qui existe réellement, qui fonctionne au moyen de son corps matériel sur une terre de même nature que ce dernier; la pensée de I aine libre esl voyante, le sujet de son désir est perçu par elle, n'importe la distance, car pour elle il n’y a p;is d’espace; elle esl avec ce qu’elle aime cl éloignée de ce quelle a en aversion. L'âme exécute ses actions avec son corps matériel; la pensée, but et cause de l’elïel, reste imprimée en quelque sorte sur l’homme spirituel, el elle’est perceptible aux autres hommes spirituels lorsqu’ils sont en extase. Donc, lorsque dans cet étal ils sont en rapport ou fixés sur un autre homme, ils peiçoivent scs pensées. L'extatique voit ses parents, ses amis décédés, il les reconnaît, leur parle et les touche, il les perçoit en la forme qu'ils avaient sur la terre ; ce n’est pas le cadavre décomposé qu’ils voient, il est donc très-probable que c'est ce que l’on nomme ordinairement âme (homme spirituel). Les extatiques ou lucides de tous les temps ont vu les décédés en leur forme qu'ils avaient sur celle lerre, avec leur physionomie. Ces vues, ces perceptions d’hommes sur une lerre entourée d'objets semblables à ceux qui existent sur celle où nous sommes présentement est la preuve d’une région ou lerre spirituelle analogue à la nature de l'homme spirituel. Ces belles et sublimes expériences nous donnent la certitude que la mort n’est qu’un phénomène de transition, un dédoublement des deux natures. Les somnambules de M. Chardel virent un feu s’exhaler chez des agonisants; c’était le fluide spirituel de l’âme qui restait encore aux cadavres, une étincelle de vie où ils n’élaienl pas assez lucides pour percevoir l’homme spirituel en sa forme, ils ne voyaient que le rayonnement de sa sphère; enfin il esl plus que probable, il est môme plus que certain pour moi que la vie de
l’homme spirituel ou âme se continue «près la mort dans un momie pareil à sa nature, où il exerce les mûmes fonctions organiques que sur lerre, avec plus de liberté, parlant avec progression. Chacun s’attend à un changement extraordinaire dans les fonctions de l’homme, comme si dans l'univers tout ne marchait pas par poids el mesure, sans secousse ; chaque chose vient en temps et lieu ; l’Elernel n'est pas précipité dans ses œuvres: n’a-t-il pas l’éternité ? L’homme spirituel se perfectionne, peu à peu il progresse; il n’est plus sous la suggestion de l’espace ni du temps, comme il était ayant un corps matériel ; débarrassé de son instrument de noviciat, il est avec ceux qu’il aime et voil l’objet de sa pensée sans translation. Dieu esl la vie même, la sagesse, l’amour el la puissance mêmes; de lui sont émanés tous les hommes; ils reçoivent la vie complètement; leur intelligence rend chez eux l’être et l’exister indissolubles; donc ils sont immortels, ils sont créés pour le bonheur auquel ils arriveront en temps et lieu. Nous sommes lous dans un état d’enfance dans celle vie ; des enfants décoléré, n’ayant ni rime ni raison, ont, par politique ou mauvais cœur, condamné leurs pauvres frères criminels à des lour-ments sans (iu ; ils ont fail Dieu plus inlolérani, plus meehaul qu’eux. Ces enfanls colériques ont prélé leurs vengeances ù celui qui esl l’amourmème, qui ne permet les malheurs de celle vie que pour nous faire connaître le bonheur : la maladie l'ail chérir la santé el la possession n’a de prix que par la privation. Les opposés l’onl la nolion des opposés; ils se contrôlent mu-luelleuienl, ils sont la base de nos connaissances, le bien el le mal, le vrai el le faux, la lumière el les'ombres, le bonheur et le malheur, etc., etc.
Ch. Renard.
Rambouillet, l" octobre 1843.
revue du mois.
IDIOTISME. — Nous ne pouvons pas nous dispenser de dire un mot de la divination par le magnétisme animal ; divination qui confond les esprits forts et qui tourne aujourd’hui à l'état de science positive.
Il esl hors de doute que le magnétisme animal n’ait été connu des anciens ; les pylhonisses n’étaient autres que des sujets avec lesquels les prêtres de Delphes mettaient en rapport ceux qui venaient consulter l'oracle. On sait d ailleurs que ces prêtresses, plus ou moins lucides, plus ou moins nerveuses, ne montaient qu’à regret sur le trépied prophétique et qu’elles vivaient fort peu.
La puissance de Uédée lui venait principalement de la fascination de son regard, et lorsque les Argonautes s'apprêtent à combattre Tallus, qui défendait l’abord de son Ile,
,Uédée les arrête, monte sur le pont du navire, et, se plaçant en face du géant, écarte son voile, et fixe sur lui des regards ardents. Tallus ébloui chancelle, lo sommeil magnétique le gagne, et il se tue en tombant sur la pointe d’un rocher.
Si nous nous rappelons qu'Apollonius do Tj ane el tous Ips crisiaques en général avaient le don de ressusciter les morts; surtout si nous examinons de près la manière dont opéraient cos imposteurs, en suivant la description d'un do ces miracles raconté par Apulée, nous ne pourrons pas nous empêcher d’admellre que le magnétisme fût connu des anciens, el que l'état d'insensibilité om.plèle qui permet aujourd'hui de faire sur un magnétisé les opérations les plus douloureuses, comme
de couper une jambe nu d'enfoncer une aiguille tout emière entre la cliai r el l’ongle (ce que j'ai vu île mes propres yeux) ( 1 ), n’ait pu permettre aux charlatans magnétiseurs d’autrefois de faire passer aux yeux du vulgaire leur sujet pour un cadavre, cadavre qu’ils ressuscitaient à volonlé...........
Les Egyptiens avaient poussé la science du magnétisme à des limites auxquelles la science moderne n’est pas encore parvenue; ils avaient remarqué que les idiots, qu’ils considéraient comme des saints toujours en extase, étaient les sujets les plus lucides, et ils se servaient d'idiots nourris dans le lemple pour communiquer de Thèbesà Héliopolis, ainsi qu’on peut l’inférer de la traduction d’un papyrus où il esl question d’une invasion sur la Terre-Sainte par lesNephlis, Arabes du désert.
J’ai hâte de raconter un fait dont je laisse la responsabilité au docteur Guepin, instituteur des idiots à Bicôtre.
Le docteur Guepin , qui esl parvenu à force de ténacité philanthropique à donner aux idiots une somme d intelligence el une certaine instruction, ne parut nullement étonné de ce que je lui disais ail sujet des idiots magnétisés des temples égyptiens. « J’ai été curieux, me dit-il, d'expérimenter les effets du magnétisme sur un idiot, et pour cela je choisis pour sujet un jeune enfant auquel j’élais parvenu à faire épeler quelques mots dans un livre élémentaire, et quelle fui ma surprise en voyant que dans le sommeil magnétique mon jeune idiot lisait couramment, et que pour lire dans son livre ou dans un autre il n’était pas nécessaire de le placer sous scs yeux; il suffisait que, lenanl le livre ouvert derrière lui, ma
(1) On se souvient de la séance publique que I" docteur Grandroinel. président de l’Atliénéi'électro-magnétique, adonnée dans la salle île la F.icnllédw Sciences de Lyon, en présence d’une nombreuse assemblée ; l’insensibilité la plus complète d'un sujet magnétisé a élé démontrée aux plus incrédules.
(Noie du rédacteur de la Tribune tyonnain.)
volonlé so porlâl sur une phrase pour l'entendre lire ou dire par mon idiot.
« Je communiquai ce fail à l'un de nos plus célèbres médecins, (|ui, en sa qualité de membre de l’Acadéinie, esl un des adversaires les plus acharnés du magnétisme. Inutile de dire qu’il 110 voulut pas me croire, il refus.".il même de venir voir; enfin il se décida, prit dans sa bibliothèque un livre qu’il me cacha soigneusement, et, après s’élrc mis en communication avec l'idiot magnétisé, il ouvrit son livre, el mon idiot murmura des paroles inintelligibles pour moi. —Le livre tomba des mains de l’académicien pétrifié. — Celait un livre allemand que l'idiot lisait couramment. —Je priai mon savant confrère du vouloir bien faire 1111 rapport sur cette expericnccà ('Académie de Médecine.— « Mon cher monsieur, « me répondit-il, l'Acndémie verrait lofait qu’elle ne voudrait « pas y croire; je vous conseille même de 11’en rien dire. » (Aquitaine, numéro de septembre.)
MAGNÉTISME HISICAL. — J’ai assisté, mercredi dernier, à une séance do magnétisme de M. Lafonlaine; je 11e parlerai pas des expériences d’insensibilité, expériences nécessaires pour convaincre les incrédules, mais fort pénibles pour ceux qui les voient faire. L'expérience qui m’a intéressé est celle de Veffet de la musique sur les somnambules.
Celte expérience m’a prouvé que le sou n’est pas, comme on le dil, produit par la vibration de l'air, mais que, comme l’électricité, le magnétisme, etc., le son est un fluide subtil répandu dans l’air, idée que j’ai déjà émise dans un travail sur l'influence de la musique inséré dans la France musicale.
Figurez-vous une personne en étal de somnambulisme et dans une insensibilité telle qu’on lui enfonce des aiguilles entre les ongles et la chair sans la voir sourciller, sourde à toutes les paroles, même au bruit d'un coup de pistolet, mise en extase par une musique suave qui la porte â des idées de religion ; puis, par une transition subite, un changement d’air
l'entraîne à danser une polka échevelée. Voilà certes un phénomène qu’il faut étudier.
Ad. de Pontécoulant (France musicale).
I.F. BlfiNÊTISïB EN IHUfltE. — Au mois de janvier dernier, je fus appelé à Kilkenny pour donner des soins à la fille d’un honnête artisan de la rue des Gardes, Marguerite Stoleen, affectée de pneumonie. Remarquant dans la période décroissante de sa maladie une grande tendance à l'hystérie, je résolus de la magnétiser pour combattre ce fâcheux symptôme. Au bout de huit jours, elle était d’une sensibilité telle qu’une demi-minute me suffisait pour la mettre dans l’éiat comateux mes-mérique. Ayant reconnu qu'elle était lucide, je la présentai à deux médecins de mes amis, les docteurs Duncan, de Kells, et Alcock, de celle cité: le premier, aussi distingué par Imminence de son savoir en médecine que par l'élévation de ses vues libérales el philanthropiques ; l’autre incrédule en mesmérisme. Ce dernier banda les yeux de la patiente el lui présenta un album contenant les principaux édifices de Kilkenny ei siles des environs ; elle reconnut le château, la cathédrale, l'abbaye des Dominicains, el quelques autres. M’étant aperçu, à ma grande surprise et entière satisfaction, qu’elle pouvait décrire minutieusement les lieux connus des personnes mises en rapport avec elle, je commençai par le gouverneur de la prison de ville, incrédule et n’ayant jamais assisté à des expériences de ce genre ; sachant bien que celle jeune fille n avait jamais entré dans la geôle, il la pria de lui faire la description de sa maison (terme employé pour la tromper). Je pris note du dialogue suivant, que je transcris exaclemenl « D. Me connaissez-vous? — R. Je ne sais pas voire nom. — Me voyez-vous en ce moment? — Oui, je vous vois.— Dépeignez-moi. — Vous êtes très-gras. (Vrai.)— Voulez-vous venir chez moi ?
_Oui. — Voyez-vous ma maison?— Je vois l’extérieur,
mais ce n’esl pas une maison, c'est une prison. — Y êles-vou9 entrée? — Non. — Voulez-vous y entrer maintenant ?—Oui,
si vous venez avec moi. —Qiif» voyez-vous devant vous?_
Un Ion" passage avec des grilles en fer. (Vrai.) —Que voyez-vous de chaque côlé?— Une porte près de l'cnirée. —Entrez avec moi à droite; qu’y voyez-vous? — Lue chambre voûtée (vrai) avec deux lits en fer. (Faux.) — Etes-vous sûre qu’il y en ait deux?—Oh! non, c'est un lit et une table. (Vrai.) — Qu’y voyez-vous en outre? — Des chaînes accrochées aux murs, des serrures et des clefs. — Quoi encore? — D’aulres choses en fer qui ressemblent à des crémaillères (menottes d’une forme particulière). »
Le docteur Duncan, quoique trouvant ces réponses satisfaisantes, désira constater par lui-môme la clairvoyance, el lui dil : a Voulez-vous venir à Kells? — Oui. — Décrivez-moi l'extérieur de ma maison. — C’est une jolie petite chaumière avec une barrière de bois. (Vrai.) — Voulez-vous entrer? — Oui. — De quel côlé du corridor est la porte? — A gauche. — Maintenant que nous sommes entrés, veuillez me décrire ma chambre. — Il y a une grande fenêtre ronde donnant sur le jardin (vrai), une cheminée de marbre noir avec un grand feu et deux gros dogues qui dorment auprès. — Que voyez-vous d’un côté de la cheminée? — Le portrait d’un officier. (Vrai.) — Que remarquez-vous autour de la chambre? — De grandes planches avec des livres. — Que voyez-vous sur la table à rôté? — Une grande chose en verre comme une bouteille avec des garnitures en cuivre (appareils électriques). — Et soui la table, qu’y voyez-vous?—Un chien qui regarde très-drôlement. — Etes-vous sûre que ce soit un chien? —Je ne sais, mais ça y ressemble (c’est une loutre empaillée). »
Le docteur Duncan. ton! à fait satisfait de ces réponses, présenta ensuite à la clairvoyante la sentence grecque suivante : AoÇoç ev ©£>) ; puis, lui demandant ce que c'était,
elle répondit: » Je nu sais pas; quelles drôles de lettres! » Poussant plus loin l'expérience, le docteur traduisit mentalement celle phrase avec la volonté que la patiente en comprit le sens; alors elle s’écria : G/orij lo God in the liiyliest.
Le doc1 tour Alcock fui très-éionné, mais continua cependant de penser qn'il devait y avoir quelque collusion.
(A médical man correspondant o/'tiik Ciiitic.)
LE CONGRÈS MÉDICAL DE PARIS est terminé; il a fait beaucoup de bruit, mais peu de besogne. Les bâtards d'Esculape, sous les dehors d’une grande idée philanthropique tendant à établir une organisation médicale, mais réellement pour étayer leur édifice qui chancelle, viennent de se disputer à outrance. La vérité mesmérienne, c’est-à-dire la vraie médecine, quand il en a été question dans cette curieuse assemblée, a élé considérée, non plus comme une erreur indigne de l’attention de tant de grands hommes, mais comme une découverte dont il faut s’emparer, parcequ’el le rapporleàcettxqui la possèdent!...
Qu’ils aillent donc jusqu’au bout du chemin où l’erreur les mène; nous, qui considérons leur marche, cherchons à soulager les malades victimes de leur science vaine, el continuons d’enseigner l’arl qu’ils ignorent.
La lumière déjà commence à pénétrer dans le monde, l’opinion des masses nous encourage au lieu de nous repousser; toutes ces démonstrations de la vieille médecine ne changeront rien aux choses. A un ordre ancien doit succéder un ordre nouveau, et les matériaux de l'édifice s’accumulent chaque jour. Courage donc, magnétiseurs; peut-être avant deux ans nous aurons aussi notre congrès, mais il n’y sera point question de nos intérêts personnels; le code du magnétiseur y sera discuté, et on tâchera d’opposer des bornes au ch.irlata-nisme qui envahit chaque jour davantage la pratique de toutes lus médecines.
Nous portons ombrage à nos adversaires; la pensée leur est venue d'cmpécher la pratique du magnétisme; bientôt ils solliciteront le gouvernement d'intervenir en leur laveur. Ils voudront (plusieurs en ont émis le vœu) être les seuls dispensateurs du l’art nouveau et l’appliquer à leur manière, c'est-à-dire créer une branche d’exploit.ition nouvelle; car ils ne veu-
lent vion de plus. Mais lo gouvernement ne peut rien ici : la pratique du magnétisme sera toujours libre dans noire pays, et c’esl à qui de nous braverait la loi qui serait imposée, car elle serait barbare. Il sera curieux de voir les mêmes classes d'hommes qui ont rejelé le magnétisme el chassé de leurs académies des confrères honorables, qui voulaient les mettre en possession de celle science, dire à la face du monde qu’ils doivent désormais seuls la posséder, qu’eux seuls sont dignes d’en ôlre les dispensateurs... Ali ! que ce jour arrive pendant que j'ai des organes et la possibilité de me faire entendre! qu’il vienne ce temps do nouvelle hypocrisie, afin que je puisse venger la vérité de ses oppresseurs. Telle est la marche de l’esprit humain que ces jours de combat sont inévitables; il les faut, ils sont nécessaires; c’est seulement alors que le monde saura ce que c’esl que le magnétisme, et qu’il apprendra à connaître la médecine des écoles. Nous exposerons scs monstrueuses erreurs et ses nombreuses contradictions. Nous dirons le mal qu’ellea fail, le bien qu’elle pourrait faire, el, celte mission accomplie, nous attendrons le jugement des hommes impartiaux, de ceux que les préjugés n’aveuglent point, sûr que nous sommes que la balance de leur justice s’inclinera de noire côlé.
llonle donc ù ces hommes qui, en plein congrès, jettent encore l’injure à la face de ceux qui, remplis de dévouement pour leurs frères, soutiennent la vérité!
Baron nu Potet.
LE MUl.VÉTISMB A LO.VDRES. — Les ga/.eltes médicales de Londres nous apportent le récit détaillé de deux nouvelles opérations chirurgicales faites avec le plus grand succès dans l’élal d'insensibilité magnétique : l’une, l’ampulalion du bras par le doclour Jolly sur madame Norihway ; l’aulre, l'amputation de la cuisse sur mademoiselle Lakin, par le docteur Tosswell. I.e défaut d’espace nous oblige à en renvoyer les détails aux numéros suivants.
LE JUMÊTIS11E A flï.OCESTER. — Lo Chcltenham Examiner con-lient un Ion" article sur îles expériences failes dans celle ville par le docteur Owens sur une jeune (îlle nommée Knowles, dont le développement des forces musculaires sous l'influence de la magné!is.ilion offre une différence bien digne de remarque : Pélat normal, comparé au magnétique, a donné le rapport de M à 200.
Adolphe Didier, magnétisé par M. Vornon, a donné des preuves muliiplesde clairvoyance au travers des Corps opaques. Mais toui le monde n’a pas élé convaincu, comme il arrive toujours avec ces sortes d’expériences, ce (pii a donné lieu à une polémique enire les partisans du magnétisme, le Médical limes, et le docteur Cardew, de Calh. Le rédacteur «le VExaminer, après avoir bienfait comprendre qu’il lie veul rien expliquer, mais seulement bien constater la réalité des fails, s’écrie avec le poêle :
o fian siicli lliings lie,
• Ami overcome us liko a summers cloud,
• Willioulour spécial wundor?»
SOCIÉTÉ MllLAîiTlinOPICO-BACXÉTIQÜB. — Séance du 3 septembre. — M. Brilloin fait la relation détaillée d'un cas d’inoculaliort d'accès épileptiques transmis an magnétisé par le magnétiseur , quoique cc dernier n’ait pas eu d'accès depuis plus do sept ans et soit considéré comme guéri. L’expérience, plusieurs fois répétée, n’a laissé aucun doute sur ce poinl.
M. Hébert émet le vœu que l’on constate publiquement l’insensibilité des magnétisés à l’action des courants électro-dynamiques el électro-staliques comparés.
Séance du 10 septembre. — Pendant que M. Simon magnétise madame Chatillon, une jeune personne, assise derrière elle, éprouve une suffocation qui l'obligede s’éloigner au plus vile. Cet incident donne lieuà une remarque curieuse. Il semble que tout le fluide émis fût absorbé par celle jeune fille, car la dame Chalillon, qui n’avait jusque-là éprouvé que des
effets vagues, offre tout à coup le double phénomène d'attraction magnétique el de rigidité cataleptoïde des bras et des jambes, qui restent douze minutes étendues horizontalement.
M. le docleur Cruxen présente sur mademoiselle Hortensc un cas d’insensibilité à la douleur et de paralysie dans l’état de veille. (Voir Société du Mesmérisme, 18 septembre.)
Séance, du i 7 septembre. — M. Brilloin fait part du résultat de ses recherches sur la pratique du magnétisme dans l’antiquité. Il recommande aux méditations des magnétophiks le de Mys-teriis Caldeorum, édition de 4516.
M. le docteur Cruxen analyse très-succinctement un ouvrage tout récent : Mesmer, Gatvani el les Théologiens, par l'abbé comte de Robiano.
Sésnce du 24 septembre. — La dame Chalillon , magnétisée dans la séance du 10, présente les mêmes phénomènes dans un plus haut degré de développement. Le somnambule Charles donne ensuite des preuves d’une lucidité assez étendue.
Séance du 1er octobre. — Plusieurs membres discutent sans pouvoir s’entendre sur la conduite à tenir dans le cas où un malade doil être soumit» simultanément à un traitement magnétique el médicamenteux.
Séance du 8 octobre. — Un somnambule, mis en rapport avec un jeune enfanl dont la mère ne veut pas dire la maladie, est immédiatement pris d’accès épileptique. Cet accès calmé, on rétablit le rapport pour savoir quel serait le remède à opposer à une maladie dont la nature s’est révélée spontanément â l’esprit des hommes exercés; mais un nouvel accès beaucoup plus intense se manifeste, et l’on ne parvient à le faire cesser qu’en éloignant l'enfant qui en est l'auteur. Cette inoculation, dont les exemples ne sont pas rares, fournit à M. le président l’occasion d’un exposé rapide sur ce mode particulier des perceptions somnambuliques.
Séance du lo octobre. — Des détails administratifs absorbent toute cotte séance.
Séance du 22 octobre. — M. lo président rappelle ou quelques mots le but des séantes expérimentales instituées pour démontrer l’existence et l'utilité du magnétisme « t non pour exposera la curiosité publique les facultés somnainbuliques. Il invite en conséquence ceux qui désirent acquérir une conviction profonde à se soumettre à une magnétisation de courte durée. Plusieurs assistants se rendent à son invitation. Tous éprouvent des effets légers, fugaces, el l'état comateux, sorte decarus, appelé sommeil magnétique, se développe chez l’un d'eux, magnétisé par M. Millet.
Séance du 29 octobre. — MM. Winenn, Simon, Millet, llous-tan et Brilloin relatent des guérisons d'épilepsie, de laryngite, de lièvre typhoïde, de noctambulisme et d’entorse, etc.
SOCIÉTÉ DU MESMÉRISME. — Séance du 2 octobre. — Une expérience, commencée par M. Meunier, esl interrompue par l’arrivée de M. Du Potet. M. le docteur Cruxen, appelé par le» sympathies de la société à la présidence de celte séance , la dernière de son séjour en France, le reçut avec une aménité parfaite; puis, s’adressant aux membres , il leur dit : « Si « j’avais, messieurs, ambitionné l'honneur que vous me fai. i les aujourd'hui, jamais je ne l'eusse plus désiré qu’en- c* « jour solennel. Déjà profondément touché de toute» ta « marques d’estime dont vous m'avez entouré, je vous dois « encore l’honneur de pouvoir offrir au magnétiseur înfa-n tigable, au savant propagateur de nos doctrines, qui daf-•• gne nous honorer de sa présence, le fauteuil que j'occupe » en cc moment avec orgueil et le titre de président honoraire I. de la Société du Mesmérisme de Paris. »
Après avoir pris place au fauteuil qui lui était offerf, $1. Du Pi.üsl a répondu qu’il était ému , touché de cette marque, de déférence el d'honneur, mais que ses écrits publiés ou à publier pouvant contenir des idées, une doctrine peu en rapport
avec les croyances actuelles, parlant sujettes à contestation, pourraient attirer une sorte de responsabilité sur la société qui l’aurait placé à sa lele; qu'il avait besoin d’une entière liberté, et que la crainte de nuire à qui que ce fût le retiendrait toujours en dehors des sociétés, quelque peine qu’il en dût éprouver. Il a ajouté qu'il prendrait la plus vive part à leurs succès, qu’il serait flatté d’être aussi parfois dans leur sein , mais à titre de simple magnétiseur.
l.a Société a compris les motifs honorables de cc refus.
M. Ou Potet a ensuite exposé le magnétisme comme il le comprend; puis, passant de la théorie ù l'application , il a magnétisé deux personnes, dont l'une, au bout de quelques minutes, a offert de curieux effets d’attraction magnétique, l'autre une violente suffocation, résultats évidents de l’action magnétique qui les avait envahies.
Séance du 0 octobre. — Travaux administratifs. Vote de la réimpression des Statuts (1).
Séance du 1C octobre. — Quatre visiteurs magnétisés éprouvent les effets ostensibles les plus simples qui se développent au commencement de toute magnétisation. Al. Burnet magnétise à distance el attire à lui l’en faut dont il esl question à la séance du 31 juillet, cl on répète sur lui les expériences déjà connues de la métamorphose des objets magnétisés.
Séance du 25 octobre. — Réception de deux membres stagiaires. M. Hébert lit un rapport sur une amputation delà jambe, Tait à Cherbourg (voir page 490). Il recommande à l'attention de la société l’examen de l'ouvrage de M. le comte de Itohiano.
(1) Il en est adressé franco un exemplaire à toute personne qui fuit la demande iiUVunctiic au bureau du journal, rue d'Aulin, 12.
SOUSCRIPTION AU BUSTE I>E MESMER.
La souscription sera close le 1" décembre.
Un portrait de Mesmer, peint et gravé par Quénedey, vient d’être envoyé à M. Aubin-Gauthier par M. le marquis de Salperwick, qui le tenait de madame la marquise de l’uvsé-gur. Sur le cadre se lit l’inscription suivante : « Donné pur Mesmer ù M. le man/iiisde Puységur. »
Il y a tout lieu de croire qu’avec des documents aussi précis la commission fera reproduire fidèlement les traits de l’illustre magnétiseur. Mais à quel âge sera-t-il représenté? La commission esl, dit-on, divisée d’avis sur ce point. Nous pensons, nous, qu’on doit préférer le Mesmer de 1784, celui dont d'Eslon dil : « C'esi une âme de feu dans un corps de fer. » Si la commission inclinait de notre avis , elle pourrait consulter une gravure du temps, au bas de laquelle on lit :
« Lo voilà ce morti'l dont tu siècle s’honore,
• Par qui sont replongés un séjour infernal
• Tous les fléaux vengeurs que tlécliaiua Pandore.
o Dans son art bienfaisant il nVut poinl de rival,
« El la Grèce Pe&l pris pour le dieu d’EpiJaure. i
M. le doclcur Ordinaire, de MAcon............................20 fr.
M. le docteur Perrier, de Carn................10
M. le docteur Comelin, de Porlo-llico................15
M. le docteur Jounin, direrlem de L'si venir médical.. .... 10
M. Barlliel, président de la Société du Magnétisme de la Nou-
velle-Orléans.................................................10
M. Javary, professeur de cliimie à l'école vétérinaire d'Aliou-
Zabel (Egypte)......................................5
M. Perreau, ancien ollicierdc ta marine royale, ù Saumur. . 10
M. JulTey aîné, de Mainers.................. 10
M. le baron Du Potet................................10
M. Ilébert (de Camay).................... 10
110
Report de la première liste.............305
Total.........415 fr.
AVIS ESSENTIEL.
I.e Bureau du Journal du Magnétisme vient d’êlro transféré rue d’Antin, 12, au coin do la rue Ncuvo-Sainl-Augustin.
Ce changement a pour molif la reprise des travaux d’en-scignement deM. le baron Du Potel, qui auront lieu désormais au bureau du journal. Nous croyons faire plaisir â nos lecteurs en leur annonçant que nous fondons une école I'iiatique de magnétisme où plusieurs leçons auront lieu par semaine. Le magnétisme, comnio toute science, peu l s'en-seigner d’une manière rationnelle, el désormais ceux qui voudront étudier ou perfectionner leurs connaissances, en s’initiant de plus en plus aux merveilles de cet art, trouveront un lieu toujours ouvert où ils pourront puiser une instruction solide.
Des leçons d’anatomie, de physiologie et de pathologie, connaissances accessoires, mais indispensables quand on veut bien juger son ouvrage, seront faites séparément pour les élèves et les gens du monde. De celte manière nous formerons non-seulement des instruments habiles dans l’art de guérir par le magnélisme, mais aussi suffisamment éclairés pour justifier aux yeux do lous les bienfaits de l’art nouveau et lo défendre contre lus utlnqucs do l'ignorance et de la mauvaise foi.
Nous allons ainsi faire entier le, magnétisme dans une nouvelle phase et constater son incontestable progrès.
Le Propriétaire-Gérant, HÉBERT (de Garnay).
JOURNAL
DU
MAGNÉTISME.
MANUEL DU MAGNÉTISEUR.
(Suite.)
- 1 DÉSORDRES MAGNÉTIQUES.
Bien souvent j’ai été appelé pour faire cesser des crises terribles, et d’une nature tellement singulière que nulle plume ne saurait les décrire. Ces crises avaient pris naissance pendant ou à la suite de magnétisations laites en jouant. C’étaient souvent des jeunes gens qui, ayant vu magnétiser, appliquaient en riant les procédés dont ils avaient vu faire l’emploi. Les jugeant sans conséquences, ils ne pouvaient s’imaginer que leurs gestes à eux, ignorants du magnétisme , pourraient agir et provoquer quelques effets. L’apparition des phénomènes, loin de les avertir du danger où ils allaient se trouver, ne faisait (pie les inciter davantage à continuer, et ce n’est que
lorsque des convulsions effroyables avaient li>'ii que la crainte remplaçait le rire. Ce nouvel état fie l’esprit lu magnétiseur venait augmenter le trouble du magnétisé, et bientôt la folie la plus prononcée apparaissait avec ses cris, ses transports et ses hurlements. Il n’était plus temps alors de revenir à une action régulière, la volonté du magnétiseur novice étant également déréglée. Que faire dans ces moments où tout esl en désordre, où un être quelquefois faible soulève les plus lourds fardeaux, où les bras de plusieurs personnes ne peuvent contenir ses mouvements multipliés ? Le temps manque pour aviser. Les médecins ne peuvent rien dans ces cas ; vainement ils ont essayé les moyens mis à leur disposition, et l’état furieux se prolonge. Accourez, vous qui avez enseigné la règle qu’on a dédaignée, vous qui avez fait connaître des dangers que l’on ne croyait exister que dans votre esprit ; accourez, car vous seul êtes capable de rétablir l’ordre et de faire cesser un état de choses qui menace la raison. Ne vous effrayez point, car vous serez d’abord repoussé comme tous. Tâchez de toucher le cerveau ; que votre main puisse être fixée sur le front; commandez le calme ; soyez impérieux, mais surtout faites éloigner au plus vile celui qui a causé le trouble; qu’il parte, qu’il aille au loin ; alors vous deviendrez maître, on entendra votre voix, 011 sentira votre action bienfaisante et régulière; mais surtout ne quittez pas tant que les effluves de l'imprudent sont encore dans les nerfs ; chassez-les par des passes à grands courants faites jus/piaux ex!remités; souillez sur le front, faites cesser le sommeil, voyez s’il reste le souvenir de ce qui s’est passé, et
ilnus ce cas rendormez, car à coup siir nn retour îles mômes crises aurait lieu. I„e souvenir effacé, et vous le pouvez, ne soyez poinl inquiet «le lacourlm-*ure, de la lassitude qui suivent; ce sont de bons symptômes; ils dureront deux 011 trois jours; mais vous n’avez plus à vous occuper du magnétise : il sera dès lors dans son état moral habituel.
Dans d’autres circonstances le magnétiseur, voulant guérir un malade, ne sait pas toujours à quoi il doit son insuccès. Qu’il médite cc qui suit.
LA VOLONTÉ, LES DÉSIRS ONT BESOIN D’ÊTRE RÉGLÉS.
Je regarde comme unechose importante une grande constance dans les idées. Il ne faut pas varier à chaque instant dans votre sentiment el dans votre volonté; il faut que le lendemain vous trouve ce que vous étiez la veille, et que vous repreniez l’ouvrage où vous l’avez laissé. C’est avec cette conduite, c’est pénétré de cette vérité que vous ferez de grandes choses. Songez que les déterminations de votre esprit se traduisent eu actes, et qu’à peine vous avez pensé qu’un messager invisible a déjà transmis le rudiment de votre vouloir. Qu’arrivera-t-il si vous variez a chaque instant? Un tiraillement dans l'organisation que vous êtes chargé de réédifier, le déplacement des mulériaux posés la veille, et le principe on l’ouvrier principal ne saura plus comment diriger les travaux. C’est le médecin qui modifie chaque jour son traitement; qui, sans patience aucune, s'étonne qu’une chose qui demande parfois plusieurs semaines pour se produire n’apparaisse pas dans un jour; vous
serez comme lui. Soyez patient el constant ; sans ces deux qualités vous serez médiocre magnétiseur, et vous ne réussirez que dans des maux légers et de peu de durée ordinairement.
Plus j'avance, plus je me convainc que le magnétisme est une grande science, un grand art. Avec le secours des phénomènes qu’il produit, 011 expliquera par analogie les effets attribués à l’imitation, à la sympathie, ces espèces d’inoculations de désordres nerveux qui effrayèrent dans tous les temps et portèrent l’effroi dans tant de familles, dans tant de communautés el de pensionnats. Où on ne voit qu’imitation il y a un agent vicié, subtil, qui se transmet de l’un à l’autre sans contact et par la seule approche, la seule vue, un seul regard. 0 ignorance des hommes, quand cesseras-tu? Faut-il donc que les médecins restent dans l’obscurité, tandis que le flambeau de la découverte de Mesmer est là pour les pénétrer de sa vive lumière ?
DOIT-ON FAIRE DUS EXPÉRIENCES PUBLlQUliS?
Oui, bien qu’elles aient des inconvénients. Mesmer en a fait continuellement; d’Eslon imitait Mesmer. M. de Puységur, en disant : « Nous ne serons jamais que des tourneurs de manivelle, » cherchait à s’éclairer par des expériences, et ses somnambules étaient soumis à l’observation des gens qui doutaient. C’est par des expériencesque les Lutzelbourget toute l’école de Strasbourg s’étaient avancés dans la connaissance du magnétisme. Plus récemment, Bertrand, Georget, llostan, Koissac publièrent, au milieu de judicieuses
observations, les expériences qu’ils tirent, soit pour arriver à une conviction, soit pour sonder le champ des découvertes.
L'immobilité, tandis que tout marche, vous place en arrière; et ceux qui, en magnétisme, ont dit : point d’expériences, ne méritent pas qu’on s’arrête poulies écouter sur ce qu’ils ont pu apprendre; leurs livres, s’ils en ont écrit, sont nuls pour la science. Comment peut-on espérer établir une croyance sans preuves? Comment faire pénétrer la vérité dans les intelligences sans les pénétrer de la vive lumière jetée par les faits? N’est-ce pas à l’alchimie que la chimie est redevable de la plus grande partie des découvertes qui l’honorent? Dans les autres sciences n’est-ce pas aux tentatives, aux expériences réitérées d’esprits aventureux que l’on doit de merveilleuses inventions? Comment ai-je acquis moi-môme une certitude do diagnostic qui manquera longtemps ù beaucoup de magnétiseurs, si cc n’est par d’ingénieuses expériences ? Et, pour tout dire enfin, il n’est pas possible de s'éclairer sans cela. Aussi prié-je tous ceux qui me liront de répéter d’abord toutes celles citées au commencement de ce livre et dans mes autres ouvrages.
Ce n'est pas dire pour cela qu’il faille tout se permettre et compromettre, pour votre propre instruction 011 la conviction des autres, la vio des malades ou la santé des patients qui se sont confiés à vous en se livrant à vos investigations. Un instinct vous arrête lorsque vous êtes sur le point de faire le mal ; si vous n’obéissez pas au frein qu’il vous oppose, jamais les conseils de la prudence ne vous eussent arrêté. Médecin, vous eussiez essayé vos poisons sans souci
(les malades; magnétiseur, vous les torturerez sans vous inquiéter des suites que peuvent produire vos iniques procédés.
Les guérisons, en tant qu’expériences privées, ne suffisent point pour arriver au but capital : la propagation du magnétisme. Tous les malades, d’ailleurs, ne rendent pas hommage à la vérité; quelquefois même ils contestent que vous ayez été l’instrument de leur guérison. Mais seraient-ils tous animés d’une noble reconnaissance que cela n’agirait que faiblement sur l’opinion. Aux yeux d’un médecin, une guérison ne signifie rien ; il objecte qu’il a vu des malades guérir, contre toutes probabilités, par les seules forces de la nature. L’homme du monde dit, en voyant le résultat do vos efforts, que c’est l’imagination du moribond qui a tout fait. Que dire quand l’un et l’autre sont de bonne loi?... C’est donc de l’agent que vous employez qu’il faut à chaque instant donner des preuves physiques ; c’est l’étendue de votre pouvoir, la mesure de vos forces qu’il faut faire reconnaître, et vous ne le pouvez qu’en agissant devant ceux qui contestent vos assertions et les propriétés de votre être.
Celte marche offre sans doute des difficultés; quelques magnétiseurs chercheront à vous en détourner; ce sont des esprits timides et sans beaucoup de pouvoir magnétique; ils ne connaissent ni le temps ni l’époque où ils vivent. Ils n’ont point de foi en eux-mêmes; la crainle d’un insuccès leur donne la fièvre, et le grand jour leur fait peur.... Ah! je remercie Dieu de m’avoir donné le courage qui leur manque!
CONDITIONS ESSENTIELLES A OBSERVER DANS LES EXPÉRIENCES PUBLIQUES.
Faites vos expériences avec la plus grande simplicité; annoncez peu; que vos discours ne soient point ceux d’un enthousiaste i't vos gestes ceux d'un acteur. Disputez le moins que vous pourrez sur la valeur des faits : la réflexion fera admettre ce que le raisonnement n’aurait pu démontrer. Ne forcez point les croyances, elles viendront d’autant plus vite que vous aurez été plus sobre d’explications, et vos défenseurs seront ceux que vous croirez peu persuadés. Tout eo qui semble contradiction ne l’est pas, car c’est ainsi que les choses se passent et doivent se passer. Pour le démontrer il faudrait entrer dans une explication, dévoiler les secrets du cœur humain, en sonder tous les replis; je n’aurai que trop d’occasions d’accomplir cette besogne, mieux placée ailleurs qu’en ce Manuel.
Lorsque vous serez bien assuré que vous avez la force, l’agent, ne craignez rien; allez, mais surtout évitez jusqu’à l’ombre du charlatanisme, et que l’on ne puisse dire que vous avez des compères.
CHANCES DE SUCCÈS.
Sur dix personnes que vous magnétiserez au hasard, trois peuvent être endormies magnétiquement, quatre autres éprouver des effets ostensibles, mais point de sommeil; les trois dernières enfin ne sentiront. (pie faiblement votre action, et par conséquent ne pourront rendre témoignage. 11 faut donc que vous
ayez assez de puissance pour magnétiser do suite plusieurs personnes. Vous vous attachez à celle qui sent le plus vivement, et les expériences que vous pouvez faire sont si nombreuses et peuvent être si concluantes que les doutes doivent cesser.
Je n’ai pas besoin de vous dire que ces expériences publiques doivent être faites sans abus de puissance. Vous qu’on a prié, sollicité de magnétiser avec toute votre force, vous serez accusé d’avoir produit 1 g fait extrême que les incrédules vous demandaient avec instance. Restez à la limite où la souffrance commence.
Ne prélevez surtout aucun salaire, que tout soit gratuit dans ces sortes de démonstrations. Si vous faites du magnétisme une profession, et que vous soyez habile, les malades viendront vous trouver, car vous aurez opéré des convictions, et vous trouverez ainsi une compensation au temps que vous aurez consacré à l’enseignement, une récompense honnête el légitime à votre travail.
DIFFICULTÉS QUE PRÉSENTENT LES EXPÉRIENCES PUBLIQUES.
Elles sont nombreuses et puissantes, quelquefois même insurmontables. Essayons de les décrire, car elles doivent être connues de tous les magnétiseurs.
Magnétiser et obtenir des effets est chose facile lorsque les conditions de succès se trouvent réunies. Je place en première ligne le silence de l’assemblée, le recueillement et une passivité complète du magnétisé. J’ai bien rarement obtenu qu’il en fût ainsi. Notre caractère est si léger, si moqueur, si rieur, qu’à peine assis le magnétisé a à répondre à des agaceries,
ù des signes d'intelligence de toutes les personnes de l'assemblée, et vous entendez bientôt les mots : « 11 dort, il ne dort pas. » Les conversations s’établissent d’abord à petit bruit, le mouvement des chaises commence, les rires se font entendre; puis c’est une personne qui entre el dérange tout le monde pour se placer; une toux incommode ou simulée prend l’un des assistants; les portes s’ouvrent, sc ferment sans précaution, et le magnétisé, placé en face du publie, considère toutes choses, cherche ù comprendre ce que l'on dit de lui, puis il s'écoute pour analyser les changements qui s’opèrent, les effets qui se manifestent en lui, etc., etc. Mais quelle puissance est-ce donc que le magnétisme? Vous réussissez malgré toutes ces causes d’insuccès, si vous savez, vous magnétiseur, ne rien voir, ne rien entendre, et fonctionner comme une machine toute physique.
L’individu endormi ou commençant seulement à sommeiller, on se lève, on s’approche malgré vous. Si l’action, portant d’abord sur le système nerveux, le perturbe, en homme prudent vous arrêtez le développement des effets pour ne point effrayer. Si, au contraire, la même action, engourdissant le système nerveux, amène un sommeil profond, vous êtes obligé d’interroger le dormeur bien avant le temps où vous pourriez raisonnablement vous le permettre. Chacun a une demande à faire, une question ù poser, une mèche de cheveux à la main.... Vous ne pouvez vous refuser à quelques expériences! ! ! Il faudrait du temps, on ne vous en accorde pas; et lorsque le magnétisé est fatigué par des demandes et des questions oiseuses, vous le réveillez. Il n’a point satisfait la curiosité,
mais co que vous avez fait est immense : vous avez provoqué le sommeil, prouvé l’existence du magnétisme; que voulez-vous de plus? Les esprits deviendront plus sages; une autre lois ils vous laisseront conduire convenablement votre opération. Déjà ils reconnaissent que vous êtes sincère, vous n’avez plus à vous justifier du soupçon de charlatanisme; le temps fera le reste.
DIFFICULTÉS DE RÉUSSIR DAXS LES TRAITEMENTS.
Llles sont nombreuses également; je n’en veux ici décrire qu’une seule, mais elle est majeure, et m’a causé, à moi, bien des perplexités. La voici : Ce n’est jamais sans un travail critiquo qu’une guérison s’opère ; mais ce travail, vous, seul l’appréciez, le reconnaissez. Pour ceux qui entourent le malade, ce travail n’est autre chose qu’une aggravation de la maladie. Vos raisons seront sans puissance sur des gens prévenus ou peureux. On vous avait abandonné le malade parce qu’il n’y avait plus de ressources ; on est tout prêt de vous le retirer parce que vous développez ce qui peut seul le sauver. Quelle autorité avez-vous? aucune. Vous ôtes un empirique, on vous traite en conséquence. Il faut que vous sachiez imposer votre croyance, que vos explications soient simples, claires, compréhensibles, et, plus encore, que votre pronostic soit toujours justifié.
Voici, entrecent autres, un fait qui va vous éclairer.
Un malade soutenu par deux domestiques, car il ne pouvait marcher, tant il était accablé de goutte, vint chez moi me demander les secours de mon art.
Scs jambes étaient gonflées et tout son corps rempli d'humeurs. Depuis longtemps i! était rions cet état, et la science ne pouvait rien pour lui. 4'enhepris son traitement. Bientôt des crises se manifestèrent ; dix, vingt, trente garderobes survinrent; le malade s’affaiblissait ù vue d’œil ; la famille en alarmes entourait le moribond; c’était à qui consulterait un nouveau médecin et demanderait mon expulsion. Le malade avait de la fortune, et par conséquent on s’occupait beaucoup de lui dans la ville. Les médecins qui précédemment lui avaient donné leurs soins étaient aux aguets; ils blâmaient mon traitement, et, sur les faits qu'on leur rapportait, ils annonçaient la fin prochaine de celui qui m’avait confié le soin de sa vie. Je défendis tout médicament, annonçant hautement que j’abandonnerais immédiatement le malade si une seule drogue lui était administrée. Mais outre les évacuations alvinesqui continuaient, des sueurs abondantes sc déclarèrent, la faiblesse augmenta et les craintes redoublèrent; ce n’était plus qu’avec une sorte d’effroi qu’on me voyait prodiguer mes soins au malade. Il le tue, il l'assassine avec son magnétisme, disait-on de toutes parts. J’avoue que j’eus des moments do découragement; cependant j’étais convaincu de la marche régulière du traitement; je n’espérais sa continuation que si le malade ne perdait point confiance, car j’avais été assez heureux pour lui en inspirer beaucoup. Mais, pour parvenir jusqu’à lui qui était si faible, il fallait passer^ous les regards terribles de la famille. Enlin, la criso s’arrêta. Le malade qui, depuis quelques jours, sur ma recommandation, ne prenait que de l’eau, peut prendre du bouillon de
poulet, un potage, etc., etc. Les forces revinrent et le malade fut sauvé. Il avait perdu plus de la moitié de son poids, il marchait droit. C’était un miracle du magnétisme; mais que de peines, que d’angoisses pour celui qui l’avait opéré !
Croyez-vous que l’on fut reconnaissant, que l’on rendit témoignage ? Non ; excepté le malade, qui avait la conscience de ce que j’avais fait pour lui, la haine sourde et cachée de certaines gens, dont les pronostics avaient été démentis, me poursuivit. Quelle bonne fortune pour eux si le malade était mort entre les mains du magnétiseur!
Vous lo voyez, ce n’est qu’au milieu d’écueils que le pauvre magnétiseur conduit sa barque; mais il les signale à d’autres navigateurs. Lui en sauront-ils gré? qu’importe?
Ne perdez pas de vue ce fait-ci. Le magnétisme produit des crises heureuses, sachez les discerner, distinguer du travail destructeur qui a lieu dans toute maladie grave. Prononcez-vous alors, annoncez le succès si vous y croyez, et, dans le cas contraire, montrez la maladie, plus forte que vous, amenant à grands pas la fin de la vie. Ne vous flattez pas d’ètre fort et puissant en dehors du possible, car souvent la mort a rendu son arrêt, la vie s’en va, et lorsque vous croyez la tenir et la fixer il ne vous resle qu’un cadavre qui n’a plus que les propriétés de tissus. Votre magnétisme peut le faire mouvoir, mais il n’exerce plus qu’une action galvanoïde que votre éloignement ou le froid fait disparaître.
(La suite au prochain numéro.)
PÉRÉGRINATIONS MAGNÉTIQUES.
Il est un âge dans la vie où les forces demandent à s’épancher au dehors; une sorte d'ébullition se manifeste à l’intérieur, et l’activité intellectuelle, comme celle physique, est souvent un besoin importun. La force qui vous anime vous incite au travail, et la pensée vous tient malgré vous en éveil. Heureux alors celui qui rencontre sur son chemin une vérité; avec quel bonheur il la contemple, comme son cœur bat à l’espoir delà faire adopter! Enrichir son pays d’une découverte, être la cause de la diminution des souffrances qui accablent les hommes, comme cette espérance s’empare vite de ses facultés! comme elle le domine et le berce d’un heureux avenir !
C’est une foi vive qui le rend capable de supporter le martyre; il s’élance au-devant des difficultés, il brave les opinions des hommes. Que lui importe leur résistance ; ne sait-il pas qu’un jour de triomphe l’attend et que la postérité, si ce ne sont scs contempo-rains, rendra justice à ses efforts? 11 semble encore pour lui qu’un Dieu le soutiendra dans la lutte, car il croit qu’un Dieu s’occupe des affaires des hommes, et que ce qui esl juste et bon lui plait. L’àme alors ne connaît point le mensonge, el I égoïsme n’a pas encore flétri le cœur.
Age heureux, disions-nous, où tout se colore en beau, où on plaint ceux qui vous outragent et par-
donne à sps ennemis. J’ai vécu tic celte vie que je cherche à dépeindre. Animé par un t'eu sacré, j’eusse hravé les tortures pour soutenir à la lace de tous la vérité qui s’était emparée de tout mon être. Le temps m’a-t-il changé? ai-je élé courbé sous la loi commune? le souffle empoisonné des méchants a-t-il altéré mon désir de bien faire ? Je ne le pense pas, car je n’ai pas quitté un instant le sentier épineux où je suis entré au début de ma carrière, et mes pensées, comme jadis, partent de la môme foi et sont soutenues par la môme espérance.
Racontons aujourd’hui quelques traits de notre vie si active, comme un navigateur décrit les lieux où il a touché ; disons ce que nous avons observé dans nos pérégrinations. Ces observations feront suite aux récits contenus dans nos autres ouvrages et serviront un jour â celui qui voudra écrire une histoire sur l’établissement du magnétisme en France.
§ I. — BESANÇON.
(Janvier 1840.)
Aucun n’est sans défaut, aucun n'csl sans faiblesse ;)
Aucun n’est sans besoin d’appui ;
Aucun n’est assez sage de sa propre sagesse :
Aucun n'est assez fort pour sc passer d'autrui.
Il faut donc s'entr'oider, il faut donc s'eiitr’inslruire ;
Il faut donc s'entre-secourir;
Il fauls’cntrc-pretcr des yeux pour se conduire;
11 fauts’enlre-douner un aide ù sc guérir.
COBMILLE.
A peine arrivé, j’annonce le but de ma venue.
L'autorité est incertaine si elle doit empêcher ou souffrir mon enseignement.
i.*> recteur de l'Académie me mande chez lui; il n'est pas certain que j'aie le droit d'enseigner, il est même tout disposé à me fermer la bouche, mais je lui affirme que je ne tiendrai aucun compte de ses ordres, ou plutôt que je les braverai. L’Université, dont le recteur de celte Académie est le représentant, a déjà essayé sur moi son arbitraire. A Montpellier, elle m’a fait deux procès; elle perdit, c’était justice. L’Université, cette bonne vieille qui donne tant de leçons, en reçut une dans cette circonstance; mais tels sont sa rancune et son entêtement qu’elle veut absolument faire de moi un savant pour pouvoir me condamner à quelque peine. Je fléchirais le genou en demandant pardon que ce ne serait point assez; il lui faut une amende. J’ai beau protester que je ne suis qu’un ignorant indigne de ses faveurs, etc. — Allons donc, semble-t-elle dire, puisque je vous dis que vous êtes savant, c’est que vous l’êtes; j’ai donné des brevets bien moins mérités; laissez-vous donc revêtir d’un titre brillant : j'ai besoin que vous sachiez.... pour être en mesure de vous punir.
Mon obstination rustique me sauve des caresses de l’Université, j échappé à sa tendresse; mais los pharmaciens me regardent de mauvais œil parce que je guéris sans médicaments.
Les prêtres peu éclairés n’osent frôler mon habit, car selon plusieurs mes vêtements sentent le soufre et je liante Satan.
Les médecins ricanent en entendant mon nom. Je suis magnétiseur; c’est moi qui devrais rire en les voyant, car je n’ai encore tué personne, et j’ai souvent guéri leurs malades. Comme il y a beaucoup de
pharmaciens, de prêtres, do médecins, et que ces personnages sont essentiels dans la grande comédie humaine qui se joue chaque jour sur la terre, ce vaste théâtre, je ne vois qu’un seul moyen de succès pour moi : c’est de me passer de leur concours; aussi bien je n’ai pas l’esprit de leur rôle.
Puisque nous sommes à peu près dégagé des entraves de l’autorité, cherchons des auditeurs libres; mais il en est peu d’abord. Le prêtre retient les dévots, le médecin ceux qui soutirent et languissent, les savants arrêtent les demi-savants, el la crainte de passer pour crédules empêche quelques hommes distingués d’assister à mes démonstrations; les sots n’éprouvent aucun attrait à voir ce qui pourrait les éclairer ; d’autres enlin ont peur de moi. Si j’étais sorcier, magicien, je pourrais leur jeter un sort; car on croit ici aux sorciers. Malgré tout, je vais avoir un auditoire choisi. Le magnétisme a déjà fait tant de bruit dans le monde qu'il donne l’envie d’examiner les effets qu’il produit. Il excite la curiosité; prenons dans nos filets les curieux, qu’ils soient tous magnétisés! Tout à l’heure on leur dira : « Vous n’avez rien senti, vous n’avez rien vu ; le charlatan vous a fascinés, les faits que vous racontez sont impossibles; pour détromper vos esprits, nous allons vous accompagner; nous vous montrerons les ressorts secrets qu’il fait agir, et vous verrez tomber comme un voile le prestige qui vous a séduits. » Et bientôt la foule est chez moi; j'ai triomphé de la résistance des plus opiniâtres; ils m’éeoutent, examinent mes mouvements, et doutent bientôt s'ils sont eux-mêmes bien éveillés, car ils voient ce qu’ils avaient contesté exister. Plu-
sieurs éprouvent les effets do ma puissance, et je pourrais, en en mésusant, les placer dans la situation la plus fausse, et faire reconnaître, par les hommes qu’ils ont raillés, que leur jugement n'avait pas le sens commun.
C est ainsi que les choses se sont passées dans chaque ville où il m’a plu d’aller. Après m’avoir condamné sans m’entendre ni prendre connaissance des pièces du procès, j’obtenais, à force do persévérance, une réhabilitation complète, et je faisais aimer la vérité et rechercher l’homme qui s’en était rendu le propagateur. L’envie, l'impuissance étaient réduites au silence, mais elles attendaient mon départ pour prendre leur revanche ; elles appelaient à leur secours la calomnie, et, ainsi renforcées, la trace do mes pas était effacée, les plus beaux faits dénaturés. De.j*jj£c que je ne savais plus moi-môme si vraiment j'avais produit les choses merveilleuses qu’on m’avait d’abord attribuées; car après le plus chaud enthousiasme, les démonstrations d’amitié, do sympathie les moins équivoques, un peu do temps suffisait pour tout oublier. il y a dans ce fait bien plus de magie que dans les phénomènes que je produis. Mais n’ai-jo pas vu vingt fois une assemblée émue par un sermon verser des larmes aux récits d’œuvres morales, admirer et se prosterner? puis un instant suffisait pour tout attiédir; on rentrait dans la vie habituelle, rien n’y était changé; celte illumination soudaine éteinte, l'homme redevenait matière. Ne sait-on pas que Jésus lui-même, après une vie constamment accompagnée de miracles et consacrée à renseignement de la morale divine, ne laissa que quelques disciples ? Le se-
erel pour produire des conversions suliiies esl depuis longtemps connu, mais celui de les rendre durables esl encore à trouver.
(La suite au prochain numéro.)
ÉTUDES PRÉPARATOIRES
DU
SOMNAMBULISME MAGNÉTIQUE.
(Suite.)
§ V. — PRÉDICTIONS.
Tous les phénomènes de prévision que nous offre le somnambulisme artificiel se manifestent quelquefois spontanément, et sans que l’agent magnétique paraisse en cire la cause. Mais des effets identiques relevant nécessairement d’une cause unique, nous prouverons bientôt que, malgré la multiplicité des moyens que la nature emploie, tous ces phénomènes viennent de la même source. En attendant nos explications, nos lecteurs nous sauront gré de faire passer sous leurs yeux quelques-uns de ces faits, notre recueil étant le greffe où doivent êlre déposées les pièces du grand procès qui s’instruit.
Première observation.
Treize ans avant la Révplution française, le savant
prédicati-er l'ère Beauregard lil retentir Ion voûtes de Notre-Dame de ces singulières paroles (I) : « Oui, « vos temples, Seigneur, seront dépouillés et détruits, «vos lûtes abolies, votre nom blasphème, votre «culte proscrit. Mais qu’enlends-je? grand Dieuî
- que vois-je?____Aux saints cantiques qui faisaient
« retentir ces voûtes sacrées en votre honneur suc-« cèdent des chants lubriques et profanes. Et loi, « divinité infâme du paganisme, impudique Vénus! « tu viens ici même prendre audacieusement la place « du Dieu vivant, t’asseoir sur le trône du Saint des « saints, et recevoir l’encens coupable de tes nou-« veaux adorateurs. »
Deuxième observation.
La prédiction de Cazotte, garantie par I.a Harpe, madame de C.enlis, la comtesse de Beauharnnis, et reproduite par M. Deleuze dans son Mémoire sur la faculté de prévision, ne doit pas être passée sous silence, tant à cause du rang des personnages que de la gravité des événements maintenant acquis à l’histoire.
c 11 me semble que c’était hier, dit La Harpe (2), et c’était cependant au commencement de 1788. Nous étions à table chez un do nos confrères à l’Académie, grand seigneur et homme d’esprit. La compagnie était nombreuse et de tous gens, gens de cour, gens de robe, gens de lettres, académiciens, etc. On avait fait grande chère, comme de coutume. Au dessert,
(lj Biographie uneerselle, t, III, p, 421. (j) (U ni rr> choiain el pti'htimci.
les vins de Malvoisie et de Constance ajoutaient à la gaîté de la bonne compagnie cette sorte de liberté qui n'en gardait pas toujours le ton. On en était alors venu dans le monde nu point où tout était permis pour faire rire. Chamfort nous avait lu de ses contes insipides et libertins, et les grandes dames avaient écouté sans avoir recours à l’éventail. De là un déluge de plaisanteries sur la religion. L’un citait une tirade de la Pucelle, l’autre rappelait ces vers philosophiques de Diderot :
F.l dos boyaux du dernier prëtrc
Serrer le cou du dernier roi.
Kt d’applaudir. Un troisième sc lève, et, tenant un verre plein : Oui, Messieurs, s’écrie-t-il, je suis aussi sur qu’il ri y a pas de Dieu que je suis sur qu’Homère est un sot; et, en effet, il était sûr de l’un comme de l'autre La conversation devient plus sérieuse; on se répand en admiration sur la révolution qu’avait f;iile Voltaire, et l’on convient que c’est le premier titre de sa gloire. Il a donné le ton à son siècle, et s’est fait lire dans l’antichambre comme dans le salon. Un des convives nous raconta, en pouffant de rire, que son coiffeur lui avait dit, tout en le poudrant : Voyez-vous, Monsieur, quoique je ne sois qu’un misérable carabin, je n'ai pas plus de religion qu’un autre. On conclut que la Révolution ne tarderait pas à se consommer, qu’il faut absolument que la superstition t le fanatisme fassent place à la philosophie, et l'on en est à calculer la probabilité de l'époque et quels seront ceux de la société qui verront le règne de !,i raison. Les plus vieux se plaignaient de ne pouvoir
s'en flatter ; les jeunes se réjouissaient d’en avoir une espérance très-vraisemblable, et l’on félicitait surtout l’Académie d’avoir préparé le grand œuvre, et d’avoir élé le chef-lieu, le centre, le mobile de la liberté de penser.
« Un seul des convives n’avait point pris de pari à toute la joie de celle conversation, et avait même laissé tomber doucement quelques plaisanteries sur notre bel enthousiasme : c’était Cazotle, homme aimable et original, mais malheureusement infatué des rêveries des illuminés. 11 prend la parole, et du Ion le plus sérieux : « Messieurs, dit-il, soyez satisfaits, « vous verrez tous cette grande et sublime Révolu-« tion que vous désirez tant. Vous savez que je suis « un peu prophète ; je vous le répète, vous la verrez. » On lui répond par le refrain connu : « Faut pas être « grand sorcier pour ça. — Soit; mais peut-être faut-il « l’être un peu plus pour ce qui me reste à vous dire. « Savez-vous ce qui arrivera de celte Révolution, ce « qui en arrivera pour vous lous, tant que vous êtes « ici, et ce qui en sera la suite immédiate, l’effet bien « prouvé, la conséquence bien reconnue? — Ah ! « voyons, dit Condorcet avec son air sournois et « niais ; un philosophe n’esl pas fâché de rencontrer « un prophète. — Vous, Monsieur Condorcet, vous «expirerez étendu sur le pavé d’un cachot; vous « mourrez du poison que vous aurez pris pour vous « dérober au bourreau, du poison que le bonheur de « cc temps-là vous forcera de porter toujours sur « vous. »
« Grand étonnement d’abord ; mais on se rappelle que le bon Cazotle est sujet à rêver tout éveillé, et
l'on rit de plus belle. » Monsieur Cazolte, le conte « (pie vous nous fuites ici n'est pas si plaisant que « votre Diable amoureux.
- — Mais quel diable vous a mis dans la tête ce « cachot, ce poison et ces bourreaux? Qu’est-ce que « tout cela pont avoir de commun avec la philosophie « et le règne do la raison? — C'est précisément cc « que je vous dis; c'est au nom de la philosophie, de « l’humanité, de la liberté, c’est sous le règne de la « raison qu’il vous arrivera de finir ainsi, et ce sera « bien le règne do la raison, car alors elle aura des « temples, et mémo il n’v aura plus dans toute la « France en ce temps-là que des temples de la raison. « — Par mu foi, dit Chamfort avec le rire du surcas-« me, vous ne serez pas un prêtre de ces temples-là. ■ — Je l’espère; mais vous, Monsieur Chamfort, qui « en serez un et très-digne de l’étre, vous vous cou-« perez les veines do vingt-deux coups de rusoir, et « pourtant vous n’en mourrez que quelques mois « après. » On sc regarde et on rit encore. » Vous, « Monsieur Vicq-d’Azyr, vous ne vous ouvrirez pus • les veines vous-même, mais vous vous les ferez ou-« vrir six fois dans le même jour au milieu d’un accès « de goutte, pour être plus sûr de votre fait, et vous « mourrez dans la nuit. Vous, Monsieur Nicolaï, vous ■ mourrez sur F échafaud ; vous, Monsieur Railly, sur «l'écluifaud; vous, Monsieur de Malesherhes, sur « l’échafaud. — Ah! Dieu soit béni, dit Roucher, il « paraît que Monsieur n’en veut qu’à l’Académie; il « vient de faire une terrible exécution ; el moi, grâces « au ciel !... —Vous? vous mourrez aussi sur l’écha-« faud. — Oh! c'est une gageure, s’écrie-t-on de
« tonies paris, il a juré de ton! exterminer. — Non, « ce n’est pas moi qui l'ai juré. — Mais nous serons « donc subjugués par les Turcs ou par les Tnrtarcs? « — Encore.... Point du tout; je vous l'ai dit, vous « serez alors gouvernés parla seule philosophie, par « la seule raison; ceux qiii vous traiteront ainsi se-« ronl tous des philosophes, auront à tous moments « dans la bouche les mômes phrases que vous débitez « depuis une heure, répéteront lous vos maximes, « citeront (ont comme vous les vers de Diderot et de « la Pucelle. »
« On sc disait toujours à l’oreille : Vous voyez bien qu’il est fou; car il gardait toujours le plus grand sérieux. Est-ce que vous ne voyez pas qu’il plaisante? et vous savez qu'il entre toujours du merveilleux dans ses plaisanteries. « Oui, répondit Chamfort, mais son « merveilleux n’est pas gai, il est trop patibulaire. « Et quand tout cela arrivera-t-il ? — Six ans ne se « passeront pas que tout ce que je vous dis ne soit « accompli. —Voilà bien des miracles (et cette fois « c’était moi-même qui parlais), et vous ne m’y met-« tez pour rien ? — Vous y serez pour un miracle tout « au moins aussi extraordinaire : vous serez alors « chrétien.iiGrandesexclamations. «Ah! reprit Cham-« fort, je suis rassuré; si nous ne devons périr que « quand La Ilarpe sera chrétien, nous sommes im-« mortels. — Pour ça, dit alors madame la duchesse « deGrammont, nous sommes bien heureuses, nous « autres femmes, de n’être pour rien dans les révolu-« lions ; quand je dis pour rien, ce n’est pas que nous v ne nous en mêlions toujours un peu, mais il est reçu « qu’on ne s’en prend pas à nous, et notre sexe....
„ — Voire sexe, mesdames, no vous défendra pus a celle fois, et vous aurez beau ne vous mêler de rien, a vous serez traitées lout comme les hommes, sans o aucune différence quelconque. — Mais qu est-ee « que vous nous dites donc la, Monsieur Cazotle?
« C’est la fin du monde que vous nous prêchez. — Je « n’en sais rien, mais cc que je sais, c est que vous,
« madame la duchesse, vous serez conduite à l’écha-« faud, vous et beaucoup d’autres dames avec vous,
« dans la charrette du bourreau, et les mains liées « derrière le dos. — Ah ! j’espère que dans ce cas-là « j’aurai au moins un carrosse drapé de noir. —Non, «Madame; de plus grandes dames que vous iront « comme vous en charrette, et les mains liees comme « vous. — De plus grandes dames! quoi! les prin-« cesses du sang?.... — De plus grandes dames en-« core. » Ici un mouvement très-sensible dans la compagnie, el la figure du maître sc rembrunit! Un commençait à trouver que la plaisanterie était forte. Madame de Grammont, pour dissiper le nuage, n’insista pas sur cette réponse, et se contenta de dire du ton le plus léger : « Vous verrez qu’il ne me lais-« sera pas seulement un confesseur. —Non, Madame, « vous n’en aurez pas, ni vous, ni personne. Le der-« nier supplicié, qui en aura un par grâce, sera.... » 11 s’arrêta un moment. « Eh bien ! quel est donc «l’heureux mortel qui aura cette prérogative? — « C’est la seule qui lui restera, et ce sera le roi de « France. »
« Le maître de la maison fc leva brusquement, et toul le monde avec lui. Il alla vers Cazotle, et lui dil d’un ton pénétré : « Mon cher Monsieur Cazotle. c'est
«assez i'airo durer celle facétie lugubre; vous la « poussez irop loin, et jusqu’à compromettre la so-« ciélé où vous êtes et vous-même. » Cazottc ne répondit rien, et sc disposait à sc retirer, quand madame deGrammont, qui voulait toujours éviter le sérieux et ramener la gaîté, s’avança vers lui. « Monsieur le « prophète, vous nous dites à lous noire bonne aven-« ture, vous ne nous dites rien de la vôtre. » Il fut quelque temps en silence et les yeux baissés. « Mail dame, avez-vous lu le siège île Jérusalem dans Jo-« sèphc? — Oh ! sans doute; qu'est-ce qui n’a pas lu « cela? mais faites comme si je ne l’avais pas lu. — « Eh bien, Madame, pendant cc siège, un homme lit « sept jours de suite 1e lour des remparts à la vue « des assiégeants et des assiégés, criant incessamment « d’une voix sinistre et tonnante : Malheur à Jcrusa-« le/n! malheur a moi même! et dans cc moment « une pierre énorme, lancée par les mac hines enne-« mies, l’atteignit elle mit en pièces. »
« Après celle réponse, Cazotle fit la révérence et sortit. •>
(La suite au prochain numéro.)
CLINIQUE SVîAGNÉTIQUE.
Avec le nombre de ses partisans le magnétisme voit chaque jour s'accroître sa sphère d'application.
L activité, lo zèle des adeptes se traduisent partout pur des cures admirables et aussi diverses (pie nombreuses. L’isolement paralysant leurs efforts généreux, plusieurs magnétiseurs ont eu la pensée de se réunir en corps pour mieux résister aux attaques insensées de l’ignorance. Celte heureuse idée commence à porter ses fruits, ainsi qu’on en peut juger par la rapide analyse que nous allons faire des Archives de la Société magnétique de Cambrai.
PREMIER SEMESTRE.
NÉVROSES.
1“ Madame B...., affectée (Yhystérie-ancienne, et rebelle à tous les traitements, ressentait des douleurs atroces dans la région lombaire, des tiraillements dans l’hvpogastre et la cavité pelvienne. Elleavaitdes tranchées, des convulsions, des syncopes, le hoquet etlerûle. Malgré l’imminence de la mort, M. Sauvil-lez la magnétisa et obtint pour premier résultat le sommeil, dont la moribonde était privée depuis huit jours. Les jours suivants, les douleurs diminuant, l’appétit, les forces revinrent, et au bout d’un mois de traitement la dame B..., que tout le monde croyait perdue, put reprendre ses occupations habituelles. Elle est maintenant parfaitement bien.
2' Madame T..., malade depuis quatre ans, avait des crampes d'estomac, des vomissements, un point de côté presque continuels. Successivement traitée par un médecin de Paris et trois de Cambrai, elle avait eu des sangsues, puis des bains sans aucun
Mjulagemonl. Dès lu seconde magnétisation, diminu-tion notable des crampes et vomissements, qui disparurent complètement le cinquième jour. Le point de côté, au contraire, persista opiniâtrement jusqu’au quinzième jour. M. D... P..., l’auteur de cette guérison, fait remarquer qu’elle offre la plus grande analogie avec celle de M. Boismarsas, rapportée par M. Du Potet dans ses Expériences tic Cli6Ici-Dieu, page 3.
3" Madame B..., de Marcoing, affectée depuis dix jours d’une névralgie Jronlale des plus vives, qui la privait de tout sommeil, s’adressa ù M. Wiart pour être magnétisée. Au bout d’un quart d’heuro de magnétisation sans contact, la douleur sembla se diviser, diminuer d’intensité et se fixer définitivement à l'occiput, en laissant parfaitement libre la région primitivement envahie. L’aclion dirigée de la même manière, et pendant un temps égal, expulsa la douleur de ce dernier refuge, où elle occasionnait des tiraillements très-pénibles avec l’impossibilité de tourner la tête.
Le surlendemain lu douleur reparut au front, mais une nouvelle magnétisation Pcn expulsa sans retour.
4° line autre dame “* de Cambrai, magnétisée également par M. Wiart pour des douleurs de reins fort « anciennes, ne dormait plus, ne mangeait plus, était «presque toujours couchée, et par moments ses « souffrances étaient tellement aiguës que deux ou « trois personnes avaient grand'peine à la maintenir « dans son lit. Les moyens de Ih médecine étaient
« impuissants, non-seulement à guérir, mais môme à « atténuer ces douleurs. »
Après quelques instants de magnétisation, elle sc sent presque guérie; clic marche, et sa joie esl difficile à dépeindre, car 011 l’avait transportée à bras. Le lendemain la douleur reparaît moins intense, et ainsi,après cinq magnétisations, ce n’élailplus qu’une gène légère. L’appétit, le sommeil avaient reparu, et madame ***, sc croyant complètement guérie, cessa ce traitement, contrairement à l’opinion formelle de son magnétiseur. Au bout d’une quinzaine, les douleurs avaient recouvré leur intensité première; nouvelles magnétisations, et guérison complète au bout de trois semaines.
Hlll'MATlSME AKTICULAIRK.
Madame Wargnies, demeurant rue Tavelle, affectée d’un rhumatisme articulaire aigu bien caractérisé, subissait sans succès depuis dix jours le traitement conseillé en pareil cas : sangsues, saignées, purgatifs, etc. « Les doux jambes, le bras gauche étaient « extrêmement enflés; les genoux surtout étaient « d’une grosseur extraordinaire, ainsi que le poignet « droit. » Les douleurs intolérables, l’insomnie faisaient dire à la malade, déjà atteinte deux fois do cette maladie, (pic cet. état durerait six semaines. Après une magnétisation de trois quarts d heure, la maiade remua son bras droit et dormit la nuit, au bout de cinq jours elle se leva, marcha, et avant la quinzaine elle faisait un voyage en Belgique. Le mé-dtein qui lui avait prodigué inutilement ses soins
suivit la marche du traitement magnétique avec attention. el se montra très-étonnédune guérison aussi prompte. Puisse cet exemple lui servir dans des cas analogues!
L'honneur de cette cure revient à M. C. Evrard.
PARALYSIE.
Un incrédule, mettant M. P____ en demeure de lui
démontrer la puissance curative du magnétisme, le défia de guérir une pauvre femme de soixante-dix ans, paralytique du bras et abandonnée des médecins.
M. P.... consent à tenter l’expérience, et au bout de dix minutes dit à la vieille : « Essayez de mouvoir votre bras. » Celle-ci obéit, non sans crainte, élève et baisse son bras sans douleur, et fond en larmes de joie, car elle croyait l’usage de son membre perdu à tout jamais.
LÉSIONS TRAl’VIATIQUES.
De toutes les lésions, celles-ci paraissent les plus difficiles à guérir, et pourtant presque toutes cèdent très-promptement à l’action magnétique. L’acuité du mal et sa prolongation, quand on emploie les moyens conseillés par la médecine, ne permettent pas de douter que l’action thérapeutique du magnétisme soit la cause immédiate et unique de leur prompte résolution.
Les Archives relatent avec détail les guérisons obtenues, en une ou deux séances, de :
1° Trois cas d’entorses ;
2" Six cas de contusions;
3 / // cas ili- plaie c.onliise ;
\' l n cas du hrùhire an second degré avec de ia lessive bouillante. La magnétisation arrête le développement des phlyctènes.
RHUMATISMES MUSCULAIRES.
1" Le nommé Coupez, ouvrier brasseur, atteint d’un rhumatisme musculaire aigu des plus intenses, en fut guéri en dix minutes de magnétisation par M. Sauvillez. Le malade ne pouvait supporter le contact, et il éprouvait de la magnétisation à distance une sensation de froid très-pénible;
2° Un maréchal des logis au 2“' régiment de cuirassiers, nommé Roy, affecté de la même maladie, mais moins intense, en est guéri en deux magnétisations d’une demi-heure chacune. Dans ce cas la douleur se déplaça des cuisses dans les genoux, et par suite dans les pieds.
OP1ITUALMIE CHRONIQUE.
« Une humeur visqueuse très-visible couvrait l’œil de mademoiselle I. C..., et ne lui permettait d a-« percevoir les objets qu’indistinctement et comme «au travers d'un brouillard. Les paupières, sans « cesse clignotantes, étaient fort enflammées, et les a glandes lacrymales engorgées. Céphalalgie intense « et éruption de pustules à la partie supérieure de la « tôte. Cet état durait depuis quinze ans. Traitée à « l’hôpital Saint-Julien, on lui avait appliqué sans « succès vingt-cinq vésicatoires et deux scions, »
L. amélioration se manifeste rapidement sous l’influence curative du magnétisme; l'exanthème dont la tôle était ulcérée sèche, la photophohie cosse, la viscosité sc tarit, l'inflammation des paupières, la céphalalgie disparaissent, et cette demoiselle peut travailler à la clarté d’une lampe.
lois sont les cas les plus saillants publiés par la Société magnétique. Lu général bien détaillées et accompagnées de réflexions judicieuses, ces observations, dont nous n’avons pu qu’effleurer la description, sont dignes de l’attention des magnétologues.
En examinant attentivement tous les détails des cas de lésions traumatiques mentionnés plus haut, on est porté à croire qu’il s’est produit deux ou trois cas d'insensibilité, quoique les observateurs n’en fassent pas mention. Nous les engageons à faire cette remarque à l’avenir.
Hébert (de Garnay).
LE PROGRÈS MAGNÉTIQUE.
La voyez-vous celte lumière qui se montre à l’horizon? Entendez-vous la voix des hommes dont les yeux en sont ravis? Les clameurs des gens intéressés à ce qu’elle n’arrive point à lous vont s’élever de toutes paris. Ainsi on voit à chaque progrès humain, à chaque invention, à toute découverte, des hommes s’élever pour protester et pour mau-
dire. Croyez-vous qu’ils soient mus par de nobles pensées, et que le seul intérêt «le leur prochain les anime au combat? Non, c’esl l'égoïsme; c’est parce que, heureux cl tranquilles dans leurs foyers, en exploitant une industrie qui leur rapporte ou en vivant des préjugés des hommes, préjugés qu’ils ont avec habileté entretenus, parce qu'ils en ont tiré du profit el des honneurs. Comment verraient-ils avec indifférence! s’élever et grandir ce qui doil les détruire ou diminuer les maux sur lesquels ils spéculent? Ne vous étonnez point do celle résistance opiniâtre; elle a élé, elle est et sera toujours la môme. Le sang humain a souvent coulé pour satisfaire des passions cupides el empêcher d’heureuses découvertes, des vérités utiles de s’établir sur la lerre. Vains efforts ! Ceux que Dieu a inspirés succombent, mais ils ont des continuateurs. Le flambeau de la vérité, une fois allumé, ne peut plus s’é-teindre ; il faut que l'humanité jouisse des choses découvertes, des fruits de son génie.
Souvent aussi on a vu des vérités méconnues ou persécutées par des hommes qui n’avaient rien à perdre à leur établissement. Mais des noms nouveaux devaient surgir dans la science, de faux systèmes devaient être renversés, cl ces motifs l'emportaient sur l'utilité générale, sur le bonheur social.
C'est en vain que tous les corps savants ligués ont repoussé, persécuté Mesmer;d'Eslon est venu, M. de Puységur ensuite, ei mille autres se sont présentés pour soutenir les mômes idées et produire les mêmes faits. Après ceux-ci, d’aulres plus nombreux, animés du même zèle, ont apparu pour braver le jugement des savants, le casser à la face du monde el proclamer le mesmérisme. Et savez-vous quels hommes ils avaient à combattre? Les Hailly, les Lavoisier, les Francklin et cent, autres non moins illustres. Ils avaient encore à vaincre la résistance du pouvoir cl les philosophes du XVIIIe siècle, qui, sur le théâtre et dans mille ouvrages divers, jetaient le ridicule à pleines mains sur les partisans du magnétisme.
Vous le voyez, celui qui ferme les yeux à la lumière
n'empêche [ias qu'elle soilj cl celui i|iii veut sa servir île sis sens, examiner, a bientôt fait justice des sophismes de la science, lorsque celle-ci s’obstine à nier l’évidence môme.
N'esl-il pas déplorable de voir aujourd’hui les plus beaux phénomènes de la vie, les faits si curieux de physiologie, se produire journellement, on peut dire à chaque instant, eu dehors de la science? pas un des grands savants de nos académies ne prendre connaissance des faits magnétiques? Tant d’opiniâtreté mérite d’être signalée afin que le postérité flétrisse un jour leur mémoire.
Pour nous, il ne nous resle plus qu'à poursuivre notre tâche; le progrès de nos idées est sensible, la vérité mesmé-mérienne s’infiltre de plus en plus dans les croyances; des ouvrages remplis de faits et d'aperçus nouveaux paraissent chaque jour; la presse ne nous est plus hostile, elle enregistre dans ses colonnes les fails saillants du somnambulisme. Des sociétés récemment formées sc développent et grandissent en employant la seule méthode rationnelle : la production des phénomènes magnétiques devant ceux qui veulent s’éclairer, et en traitant gratuitement des pauvres malades. Le ministre de l’instruction publique 11e nous a-t-il pas dit récemment : l-'aites une science de vos faits, et je créerai une chaire de magnétisme?
Mais ce n’est plus seulement à Paris, celle mère des autres cités, que le magnétisme reçoit une sorte de consécration ; plusieurs villes ont leurs journaux de magnétisme, des expériences dirigées ou faites par des hommes éclairés nous parviennent tous les jours. Ces expériences ont un but humanitaire, celui de soustraire les malheureux que l'on doit amputer aux cruelles douleurs, compagnes constantes des opérations. Des résultats magnifiques sont ainsi obtenus, et nous enregistrons dans notre journal des faits nouveaux.
L’Angleterre, après avoir élé longtemps rebelle à la découverte nouvelle, semble nous devancer dans son application
aux affections qui nécessitent l’emploi des instruments tran-clianls.
L’Amérique ne resle point en arriére du progrès que nous signalons.
L’Espagne possède maintenant plusieurs magnétiseurs dévoués qui saisiront bientôt les occasions de justifier aux yeux de leurs compatriotes les principes si féconds de la science qu’ils sont venus étudier parmi nous.
Partout enfin où nous jetons les yeux nous constatons un progrès réel. Les ennemis du magnétisme doivent tomber avec le temps-, la médecine des écoles doit se transformer ou elle sera anéantie, car le (lambeau qui éclaire ses erreurs est allumé, car nous possédons ce qui esl seul durable et éternel : une vérité physique susceptible d'une démonstration rigoureuse par des faits.
Nous avons vu naguère s’assembler les hommes contre lesquels nous luttons; réunis en grand nombre, comme ils eussent élé imposants, s'ils fussent venus dire au monde, du liant de leur tribune : « La véritable médecine esl enfin décou-« verte-, celle que nous avons tant cherchée à travers tant de « siècles s’est laissé saisir, elle est entre nos mains pour ne « plus en sortir. Tous les systèmes fruits de nos inventions, « nous les abandonnons, car s'ils avaient séduit nos esprits «comme le fait la vérité, ils n’étaient que des illusions de « coeurs honnêtes et convaincus. La nature procède autre ment « que nous ne l’avions soupçonné; nous avions méconnu ses « lois jusqu’à ce jour, mais désormais nos œuvres auront un « caracière de certitude et de grandeur en harmonie avec elles. « Nos fautes n’épouvanteront plus les familles, et les pleurs, « si nous en faisons verser, seront des larmes de joie. Que l'on « ne nous maudisse poinl pour nos erreurs passées; l'avenir « réparera nos fautes, et Dieu nous absoudra, car nous étions «dans l'ignorance. Notre premier tribut de reconnaissance « est pour Mesmer, le bienfaiteur des hommes, et chacun de
« nous doit contribuer à l’élévation de la statue de ce bien— « faisant génie. »
Mais loin de là. C’est pour river les chaînes du pouvoir monstrueux que sc sont arrogé les médecins qu'ils se sont assemblés; c’est pour qu’aucun homme n'échappe à leurs tortures.
Ne vous y trompez pas, magnétiseurs, il n’y a là rien pour vous que le mépris; la vérité que vous défendez sera chassée île leur temple, parce qu’elle est. Vous n’avez de recours que dans l'opinion des masses. Hâtez-vous de faire entrer le magnétisme dans les familles, d’apprendre aux hommes bien portants comment ils peuvent, sansl’emploi de poisons, soulager et faire cesser les douleurs des êtres moins heureux qu’eux et qui les entourent, llâlez-vous, ne perdez aucun temps, car ceux qui vous sont hostiles cherchent les moyens d’empêcher la vérité de s’étendre et de prendre racine. Ayez confiance en vos efforts, mais sachez que tout progrès est le résultat d'un long combat. Si vous voulez, vrais magnétiseurs, que notre cause soit chaudement défendue, que nous ayons des hommes distingués à notre tôle, séparez-vous des charlatans qui salissent la vérité en la prostituant sur des tréteaux. Rouen, Lille, La Rochelle, Lyon, Toulouse, Paris, comme toutes les grandes cités, voient ou ont vu des hommes se disant magnétiseurs, et qui n’en sont que le rebut, attirer la foule pour lui montrer leurs parades magnétiques. Remplis de dégoût, les esprits qui étaient disposés à recueillir la vérité s'en sont éloignés pour qu’on ne les confondit pas avec ces charlatans. Il est donc temps que votre voix s’élève pour protester et dire au monde que ce que vous défendez n’est point ce que l’on méprise, et que vous n’avez rien de commun avec les hommes que la police surveille et que la justice attend.
Baron De Potet.
REVUE DU MOIS.
SECONDE VIE. — Tous les magnétiseurs à somnambules sont pétrifiés, anéantis; on leur enlève d'un seul coup leur gloire et leur renommée. Un enfant terrible apparaît, faisant plus que lous les somnambules ensemble (j’entends parler ici de ces infortunés dormeurs dressés pour amuser, étonner, surprendre). Un enfant (1), dis-je, exécute sans magnétisme, ou plutôt en état magnétique naturel ou spontané, des choses qui sont du domaine de la seconde vue.
Ce fait, dont les montagnards écossais offrent tant d’exemples, n’a rien qui nous étonne; nous nous attendons à voir se produire des choses plus merveilleuses encore. Ces phénomènes, spontanés ou morbides, loin de nuire au magnétisme, lui servent d'appui et en facilitent l’étude. Ils auront une influence salutaire, celle d’empêcher l’exhibition saltimbanique chaque jour plus grande du somnambulisme,, et le magnétisme gagnera dans l'opinion publique.
SOCIÉTÉ 1)1! «ESMÉIIISIIE. — Séance du 30 octobre. — M. l’abbé comte de Itobiano s’esi dernièrement révélé au monde magnétique par un ouvrage qui a rempli lous les cœurs d’allégresse. 11 annonce qu’il a résolu le problème tant cherché d’une vuichine magnétique capable de produire tous les effets qui résultent des procédés ordinaires. L’appareil esl extrêmement simple, et son action « constante, infaillible, instantanée, » fail dire à l’auteur qu’il est « entré entièrement dans
(t) Le (ils de Robert Hourtin,
le domaine île la physique la plus matérielle; n que le magnétisme est devenu dans ses mains une science exacte, mathématique, qu’il propose d’appeler nêyrurgie. Restait à vérifier; on l’a fait, et malheureusement l'événement n’a pas complètement répondu à l'attente générale. Les effets produits ont bien, Comme ceux des différents baquets, réservoirs proposés, une certaine analogie, mais non l’idkntitê. De nouvelles expériences seront laites pour éclairer ce point important.
Séance du G novembre. — Affaires administratives.
Séance du 1 o novembre. — Par une coïncidence bizarre, la volonté, dont les expériences de M. de Robiano ont pour but d’exclure !a participation dans la production des phénomènes magnétiques, semble elle-même revendiquer ses droits. Plusieurs cas s’offrent où son rôle est mis dans la plus grande évidence.
D’abord 1111 jeune homme, magnétisé parM. Perrody, obéit â tout ce qui lui est commandé mentalement. Successivement attiré, repoussé dans des directions déterminées par écrit el communiquées seulement au magnétiseur, le magnétisé veut s’asseoir, lorsqu’un ordre mental intervenant l’en empêche, et il reste ainsi le corps fléchi au-dessus de sa chaise, jusqu’à ce que l’action, cessant à un signe donné au magnétiseur, lui permette d’accomplir son désir.
Une jeune fille, mise ensuite dans l’état magnétique par M. Wuilly, chante à un ordre mental, el s’arrête, parle même moteur, sur telle syllabe qu’on désigne à son magnétiseur ; le tout avec une précision qui étonne toujours, quoique ces expériences soient bien connues.
Séance du 20 novembre. — Sur la proposition de M. Girol-lel, la Société vote l’impression du procès-verbal de l’amputation faite à Cherbourg sur mademoiselle D’Albanel, et une lettre de félicitations aux hommes qui ont enrichi la science de ce fait admirable.
Séance du'27 novembre. — Mademoiselle Gobin, magnéli-
sde par M. Dubois, indique à une demi-minute prè& l’heure cju'il esl à deux montres dont on a dérangé les aiguilles.
M. Du Polet, pour prouver que les perceptions somnambu-liques ne s’opèrent pas par les sens qui leur sont affectés dans l’état normal, pose, sans prévenir de son dessein, une prise de tabac sur la main d'une autre personne magnétisée, madame Beker, qui éternue aussitôt, comme si le narcotique eût touché le nerf olfactif.
Sliss Budd, dont nous avons parlé à l’occasion des expériences phrénomesmériques, est de nouveau magnétisée, et l’instantanéité de l’action étonne à un haut degré ceux qui n’ont jamais vu ces sortes de phénomènes. Nous ne décrirons pas ce qui a été fail aujourd’hui; c’est à peu de chose près la répétition de ce qui a déjà fait l’objet d’une séance. Gomme si la volonté du magnétiseur commandait à deux corps à la fois, sa pensée esl à peine formulée qu’elle sc traduit en acte chez la magnétisée. Il est difficile d’admettre, avec M. l’abbé de Hobiano, que des plaques de cuivre, d’argent, d’or, de zinc, etc., produisent des effets de celte nature.
Séance du \ décembre. —M. Warnaw donne leclure d’un long article publié dans la Revue de Paris, critiquant au poinl de vue théologique l’ouvrage de l’abbé Louberl.
Propositions réglementaires et admission de quatre membres stagiaires.
M. Ilippeau, professeur à la Faculté des Lettres de Strasbourg, est nommé membre honoraire; il a été président de la Société.
SOCIÉTÉ PIIILANTIIROPICO-MAGXÊTIQl'E. — Séance du 5 novembre. — M. Millet met dans un état cataleptiforme un bras seulement d’une jeune fille.
Un homme robuste, magnétisé par M. Simon, ne parait rien éprouver, mais quand on lui demande cc qu’il éprouve, il fait de vains efforts pour répondre. Les masseters étaient contractés au poinl de l'empêcher de parler.
Madame Jaminct, magnétisée en quelques secondes par son
mari, offre le triple phénomène de lucidité, de catalepsie et d’insensibilité, dont il est donné des preuves irrécusables, sauf pour le diagnostic, dont on n’a |>u vérifier la valeur.
M. Du Polet prend place au fauteuil de la présidence que lui offre M. Pichard, en le priant, au nom de la Société, de vouloir lui donner quelques explications sur les phénomènes observés sur madame Jaminet; ce qu’il a fait en termes qui ont satisfait l'auditoire.
Séance du 42 novembre.—Rapports sur différents cas de guérison. Discussions théoriques sur la manière dont les somnambules perçoivent les sons. Réception d’un membre, M. Duval.
Séance du 1!) novembre.— Sur sept individus soumis à la magnétisation, aucun n’éprouve d’effets saillants. Par contre, deux dames, placées assez près des opérateurs, sont prises de convulsions qui ne sc calment que par l'éloignement. On peut considérer ces deux cas de magnétisation indirecte comme la cause de la nullité des effets tentés sur les sept patients; c’est au moins ce qui arrive souvent.
Séance du 26 novembre.— M. W'innen rapporte qu’il a ma-gnétisé six fois un instituteur devenu sourd et idiot à la suite de profonds chagrins, et qu’il remarque une amélioration sensible dans l’état de son esprit, 'mais qu’il s’est développé des douleurs d'oreilles très-aiguës. Le resle de la séance est consacré à l’examen d’articles additionnels aux statuts.
Séance du 3 décembre.— Dans la séance expérimentale précédente on avait magnétisé sans succès sept individus, aujourd’hui on agit seulement sur quatre, et lous offrent des effets très-développés d’insensibilité, de somnambulisme lucide et de catalepsie. Ce dernier effet présente une exception peut-être unique : c’esl que la contraction musculaire n’a pas lieu pour l’extenseur commun des doigts.
Enfin , M. Duval présente une jeune fille de quatorze ans, épileptique depuis l’ftgc de cinq ans, guérie par le magné-
tisme en moins de vingt séances. Kilo esl lucide et déclare, dans son sommeil, être parfaitement guérie.
PROPHÉTIES. — Un homme qui a quelque temps habité Lyon, et qui joue aujourd’hui un rôle dans la secte des momiers, à Genève, s’est déclaré prophète. Attaqué par le Journal île Genève, il répond, entre autres choses, cc qui suit :
«Que mes prophéties excitent l’hilarité, je ne m’eu dé-» fends pas, et personne n'est plus disposé à le supporter « avec patience que moi. Mais je voudrais pourtant dire aux « rieurs: Rions ensemble, si vous le voulez, démon appa-# rence de folie; mais après que nous aurons ri, attendons, « avant de prononcer, que celte apparence soit une réalité, el « voyons ce que seront les événements. Bien des témoins sen. « sés à Genève vous affirmeraient que, le jour môme où com-« mençèrenl les échecs des Français en Algérie, je les ai an-« noncés. Voulez-vous, monsieur le rédacteur, faire vous-« même l’épreuve? Voici trois prophéties que je livre à votre « examen :
« 1° M. Casimir Prylïer sera reconnu innocent du meurtre « de Leu ; le principal auteur du crime échappera à la pu-« nition.
« 2° Comme vous l’avez dit, le maréchal Bugeaud ne rc-« viendra pas; il mourra hors du combat.
« 3° La cause libérale triomphera en Suisse au gré des hom-(i mes les plus libéraux, mais ce ne sera pas par des moyens « violents. Toute tentative violente pour délivrer le peuple de « ses souffrances échouera.
« Voilà, Monsieur, ce que j’annonce et ce que vous pouvez « publier.
« Beceve/., etc. G. Monod, pasteur. »
--.--------------(Coiisiiuiiioniiel du 28 novembre. )
UI.N HU l'RËMICIt VOLUME.
AUX ABONNÉS.
L’appel que nous avons fait a été entendu, et beaucoup do magnétiseurs nous ont adressé la relation de faits que le peu d'espace nous a forcés jusqu’ici d’ajourner. Pour satisfaire à la publication de ces matériaux, dont le nombre ne peut que s’accroître maintenant, Je Journal du Magnétisme paraîtra désormais deux fois par mois par cahier de deux feuilles, cl formera ainsi deux volumes au lieu d’un. Le prix d’abonnement n’en sera pas changé.
Le cours d’anatomie physiologique annoncé dans notre numéro d’oclobre recommencera au commencement de janvier.
La Propriétaire- G intnt, HÉBERT (de Garuay).
ERRAT A.
Page 18, ligne 2, produits, lire : produites.
160, 3, pièce, place.
281, 30, sorciers, sourciers.
321, 17, lire : I never said il was possible, I only said it was true.
482, 1, ses, lire : des.
490, 19, a descendu, est descendue.
501, 20, cardiaque, au cardia.
513, 26, insensible, insécable.
TABLE DES MATIÈRES.
Accouchement. 114
Action du magnétisme sur les enfants endormis. 23, 280
— — hommes endormis. 24
— — animaux. 25
— — magnétisés. 26
— — organes en particulier. 166
— — malade;. 32
— — solides. 317
— — dans les affections aiguës. 37
— — — chroniques. 34
— — — dites incurables. 84
— — à distance. 287, 392
— des narcotiques sur le cerveau. 152
— de l’opium. 206
— du hascliiclu 152
— d'agents médicamenteux divers. 259
Affections nerveuses en général. 83
— scrofuleuses. 358
— cutanées. 113
Amputation de la cuisse. 321, 522
— de la jambe. 248, 492
— du bras. 322
Angélisme. 429
Anévrisme. 508
Attraction magnétique. 347
— — sur M. Petit. 26
Archives de Cambrai ( Analyse des). 554
Brûlures. 376, 558
Bronchite 117
Cancer au cardia. 500
— au sein. 501
Catalepsie pathologique. 67
— magnétique ou artificielle. 380, 466
Cardialgie. 79
Céphalalgie intense. 119, 555
Choléra bleu. 82
— -morbus. 81
Chloroses; voir Pales couleurs. 417
Congestions nerveuses. 169
Congestion cérébrale. 133
Convulsions tétaniformes. 68
— magnétiques. 187
Comment magnétiser dans les cas extrêmes. 41
— — — affections chroniques. 88
— les somnambules perdent leur lucidité. 200
— on obtient l’insensibilité. 247
— s'assurer que le somnambulisme est vrai. 489
Conditions de temps et de lieux. 299
— pour réussir dans les traitements. 301
— à observer à l’égard du somnambulisme. 348
— — dans les expériences publiques. 535
Chances de succès — — Id
Causes inconnues. 301
Concours du médecin et du magnétiseur. 442
Cautères. 439
Chercheurs d'or (les). 425
Crises magnétiques. 299
Congrès scientifique de Reims. 426
— médical du Paris. 321
Clignotement des paupières. 381
Dangers physiques et inoraux du magnétisme. 395, 435
Dartres. 175
Delirium tremens. 117
Dents (extraction de). 175, 288, 402
Difficultés des expériences publiques. 536
— des traitements magnétiques. 538
Diarrhée aiguë. 79
Dispositions du somnambulisme. 488
Dyspepsie. 118
Dyssenterie. 79
Documents en faveur du magnétisme. 305
Désordres magnétiques. 529
Eau magnétisée. 294, 333
Eau électrisée. 375
Effets magnétiques latents. 354
— — se produisant en dehors du magnétiseur, 31
— — propres à chacun des systèmes nerveux » cérébro-spi-
nal et ganglionaire. 166
Emphysème pulmonaire. 476
Entorses. 556
Essai psychologique. 513
Etudes préparatoires du somnambulisme. 122
Éternité de la matière. 163
Ecrouelles ; voyez Affections scrofuleuses. 358
Épilepsie. 74, 111, 229, 236, 284, 289, 499, 507, 524, 567
Exaltation de la sensibilité. . 251
Extase; voyez Influence de la musique, 372
Evénements de l’avenir (les ). 57
Expériences à l’hôpital Saint-Jacques de Besançon. 61
— — d’Obougoff, à Saint-Pétersbourg. 272
— — de Pierre el l’aul, — 388
Fantômes. 363, 445
Facts in mesmerism (analyse des). 228
Fascination. 190
Fécondité. 439
Fièvre ataxique. 38
— muqueuse inflammatoire. 40
Faut-il être malade pour éprouver dis effets magnétiqnes ? 29
Facultés de l’âme. 160
Facultés somnambuliques (classification des). 198
Fluide magnétique; sa nature. 375
— — ses propriétés. 85
— — sa source. 212
Galvano-mesmérisme. 326
Goutte sciatiqne. 284
Gastro-entérite chronique. 120
- aiguë. 133
Gastrite aiguë. 79
Gastralgie. 80
Hallucinations par les narcotiques; voyez Haschieh. 152
— par le magnétisme. 461
Hystérie. 63
Hémorrhagies. 143
Hépatite chronique, 119
Hydropisie. 509
Hémiplégie. 79, 476
llydroscopcs (les). 222
Hydroscopie (cas d'). 281, 2f12
Introduction. 3
Incrédule convelli (un). ,".14
ivresse. 315
Ipso* magnétisation. 485
Insensibili lé spontanée. 405
— magnétique. 21,2
— ù l'iislion des chairs. 238
— à la douleur; voir Amputations.
— il l'action de l'ammoniaque. 245
— aux décharge« électriques. 320
Inoculation dcsnialadics par coniaci. 896, 524
— — sans contact. 438
Influence de la musique sur les magnétisés. 372
Inflammations du cerveau. 79
Idiotisme. 50C
Irritation de la moelle épinière. 118
Lettre de M. Du Polet à ses élèves. 17
— — à M. le Ministre de l’instruction publique. 07
— M. le docteur Cliarpignon au docteur Frapart. 01
— M. le docteur D*** à la Société du mesmérisme. ' 471
— M. le Ministre de l'instruction publique à M. Du Polet. 2/.1
— M. le général I.afayctle ù Washington. 144
— M. Richard sur b somnambulisme. 129
— M. Mesmer au citoyen Ségrétiir. 19
— M. l'abbé Th... il Mgr l’arclicvéque du Rein)«. 457
Luxation vertébrale. 502
Laryngite. 525
Lombago, 191
Lucidité; voyi î Somnambulisme lucide.
Leçons de M. Trousseau ù la Faculté de médecine. 2.13
Lésions Iraumatiques. 657
Mémoire de Mesmer sur ses découvertes. 51, 100, 145
— de M. le professeur Ennemoser, de Munich. H
Magnétisme musical. 518
— ù Besançon. 450
— ii Cherbourg. 380
— à Privas; voyci aussi Hallucinations par le magnétisme. 422
— à I.ondivs. 522
— au llavre. 448
— ù Glocester, 523
— ii Reims. 457
Magnétisme en Espagne. 331
— en Irlande. 517
— en Syrie. 411
— appliqué aux végétaux. 477
Menstruation. 437
Méthode magnétique de M. Du Potet. 33
Maladie aux mille noms. 360
Névralgie frontale. 555
— dentaire. 116
— rénale. 239, 555
— brachiale. 239
Névroses de l'estomac. 431, 553
Nécrologie. 383, 430
Nègre exterminateur (le). 411
Noctambulisme. 525
Objets magnétisés. 393, 475
Odontalgie. . 116
Ophthalmie. 379, 558
Œdème de femmes en couches. 286
Profession de foi des rédacteurs. 9
Pressentiments, 338
Prévision. 107, 179, 187, 214,, 275, 282, 381
Phlegmasia alba dolens, 286
Plaie contuse. 283, 558
Paralysie. 79, 111, 557
Paraplégie. 80
Providence des somnambules (la). 413
Paroles d’un croyant. 415
Phrénomesmérisme. 428
— (expériences de). 467, 566
Prédictions. 546
Prophéties. 568
Pérégrinations magnétiques 541
Peut-on se magnétiser soi-même ? 486
Peut-on se faire remplacer dans un traitement ? 481
Psychologie magnétique; 1er article. 368
— — 2er article. 406
Pâles couleurs; voyez Chloroses. 417
Règles générales. 141
Rêves. 510
Rhumatismes musculaires et articulaires. 80
— rénal ; voyez Lombago, 477
— articulaire aigu. 556