(1886) Archives de neurologie [Tome 12, n° 34-36] : revue mensuelle des maladies nerveuses et mentales
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(1886) Archives de neurologie [Tome 12, n° 34-36] : revue mensuelle des maladies nerveuses et mentales

ARCHIVES

DE

NEUROLOGIE

Í-;vnFUX, 11Pnr\lEn¡E DE CHAULES uo,mssrv.

ARCHIVES

DE

NEUROLOGIE

REVUE

DES MALADIES NERVEUSES ET MENTALES

PUBLIEE SOUS LA DIRECTION Uh : K

.1.-11. CHAHCOT

·8C LA GULLAIIUIIATIU\ IIB

MM. BABINSKI, BALLET, Il ITNAII 131TOT (l ? A.). BLANCIIAIU),

T)owAlltr.;r..), 130(lillEitiAil, BItInNU(al.),I)ILn : oWr.), BIIISSA IID (1(.),

H«0).tA)U))i ! .(P.), ATSAJtAS, ruAltPl : N'rlelt, COTAIID, uruovr. Il (AI.), DELASIAUVE,

DENY, DUItI : T, UU1'Al. (\IATIIIAS), 111t1t11 ? It, GAUTICZ,GIsItIiNTI ? ,

GILLES DELA TOUCHETTE, G011LISAl : L'l', GIIASSET, 1101LI ? , IIUBLI;, lll f.If.lltU,

JENDRA%IK, JOFFIIOY (A.), KAI1X (T.), KI.LLEI1, IuéllA V A 1. (P.), KOJE\HiIKOI'.

LA : 1170117.1', LAN\OIS, LECOKOtH, LEGUAIS, LEMOINNE. 11ABILLr., MAGNAN,

MAillET, MA) ! AN ! )0 1)1,1 1110NT1'I ? L, Jlnltlli, MA 1'<' : III EII, .11 A 1'011, nlllsll ? I : JI ? \1'SIW'.

nIUSGItAI'E-( : LA1', OSCILETIC01\SI>,Y, l'A IIIi\ALJD, PIEIIIII : T, pITIlIIS, 1'01'01'1>',

ltAlIA1711 ? 1t,1(A1'NON17, ILI : GNAItU (l'.). HEGi\AHIJ (A.), IIICIIEII (l'.), SI\GLAS.

SEGUIA (E.-C), SIICO1LS1CY, SOUUI ? 1'ICLNR, SOUZA LCITE,'T'ALnnlON, TAILNO11SK1',

TE1NTlIHlEil (1 : .), TfIIlLII\ (Il.), TIIOISIEII (1 ? .), vAILLAltl7, 1'IGOUROIIX (Il.),

VOISIN (A.), \OISIN (J.), ZOHUAC.

Rédacteur en chef : It()UItNt3vn.LE

Secrétaire de la rédaction : Cil. FÉIIÉ

Dessinateur : LEUBA.

Tome XII. - 1886.

Avec 5 piancues et 24. ligures dans le texte. -

PARIS

B U 1\ EAU UU U P 110 G Il ÈS MÉDICAL L

14, ¡'/le des Carmes.

1886

Vol XII. Juillet 1886. N" 34.

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

CLINIQUE NERVEUSE

DE L'ATROPHIÉ MUSCULAIRE DANS LES PARALYSIES

HYSTERIQUES ' 1

Par le Dr J. BABINSKI,

Chef de clinique de la Faculté (le médecine, a Id Salpètrierc '

Il semble que toutes les manifestations possiblesde

l'hystérie aient déjà été signalées et même que leur

nombre en ait été exagéré, car il n'est peut-être pas un

seul trouble fonctionnel qu'on n'ait dans certains cas

rapporté à tort ou à raison à cette névrose. - Pour-

tant malgré la multiplicité des manifestations attribuées

à l'hystérie il est un groupe de phénomènes que l'on

a toujours systématiquement distrait de son cadre en

se fondant sur la nature essentiellement mobile de ses

accidents - elle paraît avoir été considérée jusqu'à

présent comme incapable de produire une modifica-

tion dans la nutrition des tissus ; l'absence de trou-

1 Un résumé de ce travail a déjà paru dans le Progrès médical, an-

née 1886, no 6. -

Archives, t. XII. 1

, , CLINIQUE NERVEUSE.

bles trophiques dans l'hystérie semble constituer un

caractère négatif, qui fait, pour ainsi dire, partie de

sa définition. Le présent travail est destiné à mon-

trer que c'est là une donnée beaucoup trop absolue,

et que tout au '-moins une des* variétés -des troübles

trophiques, l'atrophie musculaire, peut être sous la

dépendance de l'hystérie et être observée dans les pa-

ralysies hystériques. Plusieurs faits observés dans ces

derniers temps à la Salpêtrière ont amené, en effet,

mon maitre M. Charcot, à faire des leçons sur ce su-

jet et à établir ce point. - Nous commencerons par

l'exposé des observations, dont la plupart ont été ana-

lysées par M. - Charcot dans ses leçons cliniques, et

nous chercherons à démontrer que les malades dont il

est question sont, des hystériques, qu'ils sont atteints

de paralysie hystérique, et que l'amyotrophie qu'ils

présentent ne peut être attribuée à une autre cause

que l'hystérie. Après avoir passé en revue ces obser-

vations, nous chercherons, en les comparant les unes

aux autres, à voir si cette amyotrophie offre quelques

caractères qui lui soient propres, et nous essayerons

de pénétrer sa nature intime, son mécanisme.

Observation 1 (résumée). - Jeune homme de vingt et un ans, né

- d'une mère aliénée; d'un caractère très mobile, très irritable;

.sujet à des accès de colère violents, suivis d'hémorrhagies;

fait la campagne du Tonkin où il éprouve toutes sortes de

.souffrances et où il est blessé à la tempe ; il revient du Tonkin

affaibli, mais sans éprouver aucun trouble nerveux, sinon

des maux de tête assez fréquents. Il tombe un jour dans la

. rue brusquement, sans avoir senti aucun phénomène précur-

seur; il perd connaissance; il ne revient à lui que le lendemain

matin, et il présente à ce moment une monoplégie complète du

membre supérieur gauche, avec anesthésie absolue. Cette pa-

de l'atrophie musculaire. 3

ralysie persiste plus de deux mois avec des alternatives- de

flaccidité et de contracture ; elle s'accompagne d'une amyo-

atrophie assez prononcée, qui se développe une semaine en-

viron après le début de la paralysie, et qui a les caractères

électriques de l'atrophie simple. A côté de cette monoplégie,

viennent se grouper d'aubes phénomènes qui sont : un léger

affaiblissement du membre inférieur gauche; des attaques à

formes variées, de nature hystérique, et qui peuvent être pro- '

voquées sous l'influence de la compression de quelques zones;

de l'hénzianestlaésie sensitivo-sensorielle ; du mutisme hys-

térique transitoire ; de la rétention d'urine transitoire. La

monoplégie disparaît à la suite de quelques séances de

massage dans lesquelles on pratique la flagellation dans la

région temporo-pariétale droite. L'amyotrophie ne tarde pas

et s'atténuer à la suite du retour des mouvements.

Cab..., àgé de vingt et un ans, israélite, entre le 16 février

1886 dans le service de M. Charcot, à la Salpêtrière.

Antécédents héréditaires. - Côté paternel. Rien de particu-

lier à signaler au point de vue des affections nerveuses. -

Côté maternel. De ce côté, tous ses parents se distinguent par

un caractère très violent. - Mère a été enfermée pendant

quelque temps dans un asile pour aliénation mentale; elle

était sujette à des accès de colère violents, à la suite desquels

survenaient des hématémèses et des névralgies faciales. -Père

de la mère mort en vingt-quatre heures à la suite d'une atta-

que d'apoplexie. - Soeur du malade morte à la suite de con-

vulsions à l'àge de quatre ans et demi.

Antécédents personnels. - Le malade est sujet, depuis son

enfance, à de violents accès de colère qui sont suivis, comme

chez sa mère, d'hémorrhagies; il sent le besoin de vomir

et il rend du sang par la bouche et le nez. - Son carac-

tère a toujours été très mobile. - Il fait des études clas-

siques au collège de Liège et il va jusqu'en rhétorique.

A cette époque, - il à alors seize ans etdemi -, il devient

éperdûment amoureux, il veut se marier ; mais, ne pouvant

y parvenir, il ressent un très vif chagrin, et sans savoir

pourquoi, il quitte brusquement Liège et vient à Paris. Il

reste à Paris huit jours et s'engage dans la légion étran-

gère - cela se passe en 188>. Il reste un an en Afrique.

4 CLINIQUE NERVEUSE.

A la fin de 1883, on l'envoie au Tonkin. Au' bout

de six mois, il est pris de fièvre intermittente qui dure trois

mois. - Vers cette époque, c'est-à-dire vers le milieu de 1884,

il reçoit à la tempe. gauche une blessure qui paraît avoir été

superficielle, et dont il reste encore une cicatrice déprimée, de

l'étendue d'une pièce de cinquante centimes, douloureuse à

une pression même légère. A la suite de cette blessure, il est

tombé sans connaissance sur le champ de bataille ; il est resté

vingt-quatre heures sans connaissance et pendant quatre jours

il a eu du délire; il est resté une quinzaine de jours à l'infir-

merie pour cette blessure; pendant vingt jours, il y a eu chute

de la paupière gauche. Depuis cette époque, sa mémoire a di-

minué, son sommeil est devenu agité, et il a éprouvé des dou-

leurs de tête assez fortes, limitées au côté gauche, qui ont per-

sisté avec la même intensité jusqu'au mois de septembre 1885.

- A ce moment, le malade a quitté le Tonkin, renvoyé de là

pour cause de faiblesse, il est retourné à Oran, où sa santé

s'est améliorée; les maux de tête ont diminué d'intensité. -

Notons, avant d'aller plus loin, que le malade n'est ni syphi-

litique, ni alcoolique.

- Le 4z8 décembre 1885, le malade va se promener en ville;

il se sent très bien et n'éprouve pas ce jour-là de céphalalgie

ni aucun trouble d'aucune sorte, quand tout à coup, sans avoir

éprouvé préalablement aucune sensation de vertige, sans avoir

senti aucun phénomène précurseur quelconque, il perd con-

naissance et tombe sur le côté droit (ce sont ses camarades

qui lui ont donné ce renseignement). Le jour suivant, à six

heures du matin, il revient à lui; il lui semble simplement

qu'il sort d'un profond sommeil; il ne se souvient aucunement

de ce qui s'est passé la veille et il est très étonné de se trouver

à l'hôpital. En voulant s'habiller, il s'aperçoit qu'il ne peut

plus du tout remuer le membre supérieur gauche. - Le mé-

decin l'examine à la visite du matin. - Le membre supérieur

gauche pendait le long du corps; il était raide, les doigts dans

l'extension; tout mouvement était impossible; la sensibilité

à la piqûre avait complètement disparu; avec la machine à in-

duction, il a senti un peu de douleur; mais, le jour suivant, il

ne sentait plus, du tout le passage du courant électrique. Il

avait sur le bras plusieurs plaques rouges que le médecin a

qualifié, dit le malade, de vaso-motrices. - Le malade a eu

depuis de fréquentes attaques; celles-ci n'ont .as toujours

DE ¡,'ATROPHIE MUSCULAIRE. Ô

eu les mêmes caractères; les médecins ont distingué chez lui,

dit-il, cinq variétés d'attaques; quelques-unes d'entre elles res-

semblaient, d'après les renseignements qu'il nous donne, à

celles qu'il a à la Salpêtrière; nous en indiquerons plus loin

les caractères. L'attitude du membre supérieur a subi de-

puis le début quelques modifications. Les doigts qui étaient

au début dans l'extension, se fléchissaient parfois, et pendant

plusieurs jours, les ongles s'enfonçaient dans la paume de la

main, puis les doigts s'étendaient de nouveau; d'autre part,

le membre était tantôt flasque, tantôt contracturé. Sept jours

après le début de sa paralysie, le médecin lui a appliqué sur

la tempe gauche et sur la région antéro-externe du bras gau-

che des plaques de zinc, et sur la partie antéro-interne du bras

une plaque d'argent. Au bout de vingt-trois heures, il y a eu

un translert de la sensibilité qui a duré neuf heures. Vers la

même époque, c'est-à-dire une semaine environ après le début

de la paralysie, le membre supérieur a commence à s'atrophier.

(le malade affirme que les deux côtés du corps avaient été jus-

que'là semblables et même que le côté gauche était plus fort, car

il est gaucher), et cette atrophie a été en s'accentuant rapide-

ment ; elle a été suivie par le médecin au moyen de mensura-

tions. Le malade remarqua encore, à cette époque, que le mem-

bre inférieur gauche, qui jusque-là avait conservé toute sa

force, commençait à saitaiblir. - Le 6 janvier, à la suite

d'une attaque, le malade est resté aphone pendant trois jours;

l'aphonie u disparu à la suite d'un accès de colère. - 11 a eu

aussi, pendant six jours de la rétention d'urine qui a néces-

sité le cathétérisme. ?

Etat actuel (Examen pratiqué le 19 février 1886). - Le

malade est un nomme d'une taille au-dessus de la moyenne^

à la figure pàle, mais d'une constitution en apparence assez

vigoureuse, à la physionomie exprimant la vivacité et l'intel-

ligence. Ses réponses sont tres nettes, très précises, ne se

contredisant jamais les unes les autres ; il nous a donné tous

les renseignements qui précèdent avec une grande clarté. Voici

ce que l'on observe actuellement chez lui en l'examinant d'une

façon méthodique : '.

Le membre supérieur gauche est complètement paralysé; les

mouvements de l'épaule, du coude, du poignet et des'doigts

sont absolument impossibles. Le bras pend inerte et flasque

le long du corps ; les doigts, sont dans -, l'extension et ils pré,-

si CLINIQUE NERVEUSE.

sentent un peu de raideur. - Le membre supérieur gauche

est beaucoup plus grêle que le droit; la différence est frap-

pante, sans même qu'il soit besoin de recourir à la mensura-

tion, et on la constate facilement, quelle que soit la situation

dans laquelle on place le malade; cette diminution dans le

volume du membre parait tenir principalement sinon exclusi-

vement à l'atrophie des masses musculaires et celle-ci s'ob-

serve dans tous les segments du membre à partir de l'épaule

jusqu'à la main. L'épaule est aplatie et le deltoïde est mani-

festement très atrophié; la paroi antérieure du creux de l'ais-

selle est notablement amincie et le grand pectoral fortement

atrophié; le côté gauche de la paroi thoracique antérieure

présente une dépression; en arrière, les régions sus et sous-

épineuses sont aussi légèrement déprimées et le bord interne

de l'omoplate se détache de la paroi thoracique un peu plus à

gauche qu'à droite, mais cela dans de si faibles proportions

que'l'on ne peut dire au juste s'il s'agit là d'une disposition

due l'état pathologique actuel ou s'il ne s'agit pas là simple-

ment d'une asymétrie ancienne non imputable à l'affection

présente. La diminution de volume du bras est considérable;

la plus grande circonférence du bras gauche est de 22 centi-

mètres et celle du bras droit de 25 centimètres ; l'atrophie

semble porter à peu près également sur les muscles anté-

rieurs et postérieurs du bras ; en pressant entre les doigts les

muscles biceps et triceps et en les comparant à ceux du côté

opposé on constate une notable atrophie. L'atrophie de l'avant-

bras est moins marquée que celle du bras ; la plus grande

circonférence est de '-)le centimètres à gauche et de 25 centi-

mètres à droite ; il est difficile de dire si l'atrophie s'est faite

plutôt àux dépens des muscles de la région antérieure ou de

èeux de la région postérieure de l'avant-bras. Les éminences

thénar et hypothénar sont plus grêles à gauche qu'à droite.

- Les muscles atrophiés ne présentent pas de secousses fibril-

laires. L'excitabilité idio-musculaire de ces muscles ne parait

pas modifiée. A l'électrisation, tous ces muscles atrophiés se

contractent plus faiblement que ceux du côté opposé, mais le

mode de contraction est absolument normal ; dans aucun

muscle, on n'a pu constater la réaction de dégénérescence. Il

y a 'du côté paralysé augmentation de la résistance électrique '.

1 L'examen électrique de ce malade comme aussi des autres malades

dont les observations suivent a été pratiqué par le Dr Vigouroux, direc-

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 7

La sensibilité est abolie dans le membre supérieur gauche,

comme l'indiquent les figures t et 2, sauf à la paume de la main

et à la partie palmaire des doigts où la sensibilité est toutefois

diminuée ; tous les modes de la sensibilité sont abolis. Il

semble au malade qu'il n'a pas de bras ni d'épaule. Le sens

musculaire fait aussi complètement défaut dans ce membre.

La température du membre supérieur gauche est plus élevée

que celle du côté opposé.

Il est bien plus facile de provoquer du côté gauche que du

côté droit par le grattage des raies vaso-motrices.

Les réflexes tendineux sont exagérés du côté malade. En

redressant les doigts on provoque de l'épilepsie spinale.

La sensibilité du reste du côté gauche du corps est conservée

mais très diminuée; et cela est surtout net en ce qui con-

cerne la sensibilité à la température.

Le membre inférieur gauche est un peu plus faible que le

droit. La circonférence maxima de la jambe gauche est de

33 centimètres, tandis que celle de la droite est de 34 centi-

mètres.

La face ne présente aucune espèce de déviation.

L'ouïe, l'odorat et le goût sont un peu plus faibles à gauche

qu'à droite. - Rien du côté des yeux ; pas de rétrécissement

du champ visuel. '

Attaques. - Elles surviennent spontanément ou à la suite

de la compression de certains points. Il existe deux zones hys-

térogènes : la nuque, au niveau de la septième cervicale, et les

globes oculaires; il suffit de mettre la main sur les, yeux pour

provoquer l'attaque. Dans la première attaque que nous avons

observée le malade est tombé brusquement; sans pousser .de

cri, à la suite de l'occlusion des yeux; son corps fait aussitôt

un arc de cercle ; l'attaque a, du reste, immédiatement' été

enrayée par la compression pratiquée au niveau des échan-

crures sus-orbitaires : le malade est aussitôt revenu à lui. Les

autres attaques ont eu des caractères différents; voici sous

quel aspect elles se présententhabituellement : le malade tombe

brusquement en avant et à droite; il place sa tête sur son

bras droit qui est dans l'extension et levé en l'air ; le poignet

est fermé et tout le bras est raide; généralement le malade

leur de l'établissement électrique de la Salpêtrière ; nous le remercions

vivement de son obligeance.

8 CLINIQUE NERVEUSE.

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE.

t0 CLINIQUE NERVEUSE.

mord son bras; la jambe droite est fléchie sur la cuisse et le

membre inférieur droit est raide comme le membre supérieur.

La raideur s'observe aussi du côté gauche, mais elle est moins

accentuée que du côté droit. En plus, la situation des membres

est différente ; le membre supérieur gauche est appliqué le long

du corps, les doigts dans la flexion; la jambe gauche est étendue

sur la cuisse. Le malade reste dans cette situation sans pousser le

moindre cri, les yeux fermés, la figure sans aucune expression

particulière, ni pâle ni congestionnée, pendant quelques mi-

nutes ; puis on voit survenir quelques mouvements cloniques.

mais peu accentués; enfin le malade pousse quelques cris étouf-

fés, sanglotte un peu, puis revient complètement à lui, sans gar-

der le moindre souvenir de l'attaque et sans éprouver la moindre

fatigue. Ajoutons que quoique le début de l'attaque paraisse

absolument brusque et que quoique le malade semble ne pas

en être prévenu, il existe en réalité une sensation spéciale qui

la précède ; le malade sent comme une boule qui de la région

épigastrique remonterait à la gorge ; mais l'attaque suit de si

près cette sensation que le malade n'a pas le temps de se

garer et qu'il tombe aussitôt. -

Après le 19 février, le malade a eu encore quelques attaques

différentes de celles-là; pour ne plus avoir à revenir sur les

attaques, nous indiquerons ici leurs caractères ; quelques-unes

d'entre elles se présentent sous l'aspect suivant : il y a d'abord

une phase épileptiforme calquée sur les attaques épilepti-

formes décrites plus haut; puis dans une seconde phase le.

malade semble revenir à lui, se lève, se met à marcher, quel-

quefois à courir, sort de la salle, mais il est étranger à ce

qu'on dit autour de lui, ne répond pas quand on l'interpelle ;

enfin il revient à lui et ne se souvient aucunement de ce qui

s'est passé. Parfois, après la phase épileptiforme, il est pris de

délire, crie, gesticule, se figure qu'il est en présence des Chi-

nois, et il est dangereux pour les personnes qui l'entourent.

24 février. A la suite d'une attaque, le malade est pris

de m,utisme ayant tous les caractères du mutisme hystérique

et qui ne dure que douze heures. Les doigts qui étaient raides

le premier jour, son aujourd'hui flasques.

27. L'affaiblissement du membro inférieur gauche n'est

plus appréciable; les deux jambes paraissent avoir la même

force. Mais la paralysie et l'anesthésie du membre supérieur

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 1 t

ne se sont pas encore modifiées, c'est-à-dire qu'elles sont ab-

- solues. - On prie alors le Dr Gautiez, ancien interne des

hôpitaux, qui pratique le massage avec succès, de masser le

malade. M. Gautiez masse le membre supérieur droit, c'est-à-

dire le membre sain, et on observe alors, au bout de cinq mi-

nutes environ, le retour de la sensibilité à la face dorsale des

doigts et à la partie inférieure de la face dorsale de la main,

sans retour de la motilité des doigts; en même temps la sen-

sibilité s'émousse dans les régions correspondantes du côté

opposé ; on continue le massage, mais le malade est pris d'une

attaque qui oblige de suspendre l'opération; la sensibilité per-

siste pendant quatre heures environ, puis disparait.

Le 28, à la suite d'une attaque, le malade est pris de nou-

veau de mutisme. Les doigts présentent aujourd'hui de la

raideur.

Le 10r mars. Le mutisme persiste et il a tous les carac-

tères du mutisme hystérique ; l'intelligence est tout à fait con-

servée ; le malade ne peut parler à voix basse, ne peut

émettre le moindre son, et écrit, au contraire, avec la plus

grande facilité ; il éprouve en même temps dans la gorge une

sensation de houle très pénible. - On pratique de nouveau le

massage, et il se passe exactement la même chose que le

27 février. La sensibilité revient dans la même région, et le

malade a une attaque. Lorsque le malade revient à lui, il

s'assied auprès du poêle et, quelques minutes après, il lui

semble que la boule qu'il sent dans la gorge se déplace,

descend et disparait, et en même temps son mutisme se dis-

sipe. « C'est fini, dit-il, ma boule a disparu » ; et il parle comme

par le passé. -

4. - Paralysie et anesthésie du membre supérieur gauche

dans le même état. M. Gautiez pratique alors ce qu'on appelle

dans le massage la flagellation, dans la région temporo-parié-

tale droite (l'opération est commencée à onze heures du matin),

et voici ce qu'on observe alors : au bout de. quelques minutes,

la sensibilité reparaît à la face dorsale des doigts, gagne la

main, puis l'avant-bras et enfin le bras et l'épaule ; on dit à ce

moment au malade de mouvoir ses doigts, son poignet ou son

coude, mais il ne peut y arriver ; on fait faire alors aux doigts

et à la main paralysée des mouvements passifs en disant au

malade de regarder ce que l'on fait et de faire exécuter en

même temps aux doigts et à la main du côté opposé les mêmes

1 2 CLINIQUE NERVEUSE.

mouvements; au bout de quelques instants, quelques mouve-

ments spontanés sont possibles ; ils sont d'abord très limités,

mais deviennent de plus en plus étendus à mesure qu'on con-

tinue les manoeuvres que nous venons d'indiquer; parle même

procédé, on finit par faire mouvoir le coude et l'épaule et fina-

lement, vingt minutes environ après le début de l'opération,

tous les segments du membre supérieur peuvent se mouvoir

spontanément ; pourtant ces mouvements sont loin d'être

aussi étendus que du côté opposé; les mouvements de l'épaule

sont en particulier très limités ; et tout le membre supérieur,

en particulier la main et les doigts, présentent un tremble-

ment à oscillations assez étendues et assez fréquentes, mais

régulières. En même temps le membre supérieur du côté

opposé s'engourdit un peu, mais cet engourdissement est très

passager et disparaît rapidement. Une heure et demie après

cette opération, la motilité persiste, mais la sensibilité a déjà

très notablement diminué. On renouvelle pendant une minute

environ la flagellation dans la région temporo-pariétale droite

et la sensibilité revient aussitôt dans le membre supérieur

gauche.-Le malade est alors abandonné à lui-même; la moti-

lité persiste jusqu'à quatre heures de l'après-midi (en tout

cinq heures), et la sensibilité jusqu'à neuf heures du soir;

puis la paralysie et l'anesthésie se rétablissent avec les carac-

tères qu'elles présentaient avant l'opération.

5. - La flagellation est renouvelée dans la matinée,.et on

observe les mêmes phénomènes que la veille avec les diffé-

rences suivantes : des que la sensibilité a gagné la partie inté-

rieure de l'avant-bras on fait exécuter aux doigts et a la main

des mouvements passifs, et les mouvements spontanés revien-

nent avant que la sensibilité ait gagné le bras ; on lait exécuter

ce jour à l'épaule des mouvements passifs avec plus de persis-

tance que la veille, et les mouvements spontanés arrivent à

ètre plus étendus que la veille ; on recommande enfin au ma-

lade de continuer à exercer son membre supérieur pendant la

journée.

Le malade est examiné deux heures après l'opération : il

s'est conformé aux indications qu'on lui a données et les mou-

vements sont plus étendus qu'ils ne l'étaient immédiatement

après l'opération. La sensibilité est déjà un peu obtuse. La

sensibilité va sans cesse en diminuant, et disparait complète-

ment vers quatre heures du soir. La motilité persiste.. Le ..ma-

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 13 3

lade a dans la soirée, une attaque épileptiforme suivie de délire

et, lorsqu'il revient à lui, la motilité persiste encore.

6. - Les mouvements spontanés du membre supérieur

gauche persistent encore, et ils sont même un peu plus éten-

dus que la veille ; le tremblement a diminué; mais l'anesthésie

est complète ; le sens musculaire est aboli. On renouvelle

la flagellation et, comme les jours précédents, la sensibilité

reparaît de bas en haut ; la sensibilité reparaît en même

temps que le sens musculaire. La sensibilité ne persiste pas

plus de deux heures. Le malade s'endort le soir pouvant mou-,

voir son bras.

7. 11 se réveille absolument impotent de son membre su-

périeur. Le bras et l'avant-bras sont flasques. La main est

fléchie et contracturée; les doigts sont aussi fléchis et contrac-

turés.

10. - Le malade depuis le 7 mars est redevenu paralysé du

membre supérieur gauche. Il s'endort dans l'après-midi et, à

son réveil, il s'aperçoit avec étonnement qu'il peut de nouveau

le mouvoir.

13. On prend les mesures des membres et voici ce qu'on

constate : la circonférence de la jambe gauche est pareille à

celle de la jambe droite ; entre le bras gauche et le bras droit,

au lieu de trois centimètres de différence, il n'y a plus que

deux centimètres ; l'épaule et le thorax se présentent à peu

près sous le même aspect que le premier jour où le malade a

été examiné.

14. La paralysie reparaît au réveil du malade.

21. La paralysie persiste.

On recommence la flagellation ; il survient une attaque ;

mais à la suite de l'attaque, la paralysie et l'anesthésie dispa-

raissent pendant une heure, après quoi elles reparaissent de

nouveau, sauf à la main. '

2. - La sensibilité reparaît spontanément jusqu'au coude,

mais la main seule peut se mouvoir. M. Gautiez recommence

la flagellation, cette fois non plus sur la tète mais sur la partie

sensible du bras malade ; quinze minutes après le début de

l'opération, retour de la motilité et de la sensibilité; cette der-

nière disparaît de nouveau au bout d'une heure ; mais la

motilité persiste. 1

14 CLINIQUE NERVEUSE.

25 avril. -Depuis plus d'un mois la motilitépersiste toujours.

L'amyotrophic s'est très notablement atténuée : l'épaule est

beaucoup moins aplatie que le jour de l'entrée du malade à

l'hôpital, le deltoïde s'est développé et le muscle grand pecto-

ral est bien plus volumineux ; entre les régions sus et sous-

épineuses du côté droit et celles du côté gauche, il n'y a plus

de bien grande différence ; entre les deux bras il n'y a plus,

dans la circonférence, qu'un centimètre de différence; l'avant-

bras qui n'était, il est vrai, que peu atrophié, ne s'est guère

modifié ; les éminences thénar et hypothénar sont à peu près

aussi volumineuses que celles du côté opposé.

Nous donnons cette observation comme un exemple

de paralysie hystérique avec amyotrophie; mais il faut

fonder ce diagnostic et démontrer rigoureusement que

les différents phénomènes que présente le malade ne

peuvent être mis sur le compte d'aucune autre affection

que l'hystérie. L'amyotrophie est évidemment de

nature à éloigner de l'esprit l'hypothèse d'hystérie, et

fait penser à une lésion organique. Examinons donc

cette dernière hypothèse. Si ou a bien présente à l'es-

prit l'observation du malade, la supposition la plus ad-

missible que l'on puisse faire est certainement celle

d'une lésion siégeant dans l'écorce cérébrale au con-

tact des méninges, intéressant la zone motrice bra-

chiale et n'atteignant que très légèrement la zone cru-

rale ; et au premier abord rien ne semble contredire

ce diagnostic : on s'explique en effet très bien de

cette façon la prédominance des troubles fonctionnels

dans le membre supérieur, le peu d'intensité des trou-

bles observés du côté du membre inférieur et enfin.

l'intégrité de la face ; la contracture initiale peut être

mise sur le compte de l'irritation des méninges et l'é-

pilepsie spinale ainsi que la rigidité observées ultérieu-

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 15 j

rement seront attribuées à la dégénération descendante;

l'atrophie musculaire se comprend très bien puisque

cette complication dans la paralysie d'origine cérébrale

a été fréquemment signalée (Charcot, Pierret, Bris-

saud) ; - le début de l'affection aurait été marqué

par une attaque apoplectique et les crises que le ma-

lade a eues à plusieurs reprises seraient des crises épi-

leptiformes. Eh bien, toute cette argumentation

n'est que spécieuse; il est facile de prouver que cette

hypothèse ne peut être longuement soutenue et que

les accidents divers présentés par le malade sont bien

de nature hystérique.

Passons en revue ies divers arguments que nous

venons d'invoquer en faveur de la lésion corticale, et

voyons s'ils résistent à une analyse rigoureuse.

A propos de la contracture, nous venons de dire

comment on peut expliquer ce symptôme soit au début

de la paralysie, soit dans ses phases ultérieures; mais,

pour que cette interprétation ait de la valeur, il fau-

drait qu'il y ait eu réellement trois périodes bien dis-

tinctes dans le cours de cette paralysie, et échelonnées

comme il suit : 1° paralysie avec contracture; 2" para-

lysie flasque; 3° paralysie avec contracture; enfin, la

contracture établie cette dernière fois, ne devrait plus

être susceptible de rétrocession. Or, il n'en est rien;

ces trois périodes ne sont qu'imaginaires, et la con-

tracture tardive observée chez le malade n'est pas du

tout permanente; depuis le début de l'accident, la flac-

cidité et la rigidité se succèdent à chaque instant, et

ce caractère est déjà tout à fait en rapport avec l'idée

d'hystérie.

16 CLINIQUE NERVEUSE.

Nous venons de supposer que les crises dont nous

avons indiqué les caractères étaient des crises épi-

leptiformes, mais c'est là encore une supposition

gratuite, et il est facile de relever des particularités

qui indiquent nettement que ces crises sont bien de

nature hystérique quoiqu'il ne s'agisse pas de grandes

attaques hystériques; c'est ainsi qu'il nous suffira de

rappeler que le début de ces attaques, quoique sou-

dain en apparence, est précédé par une sensation de

boule à la gorge, que ces attaques peuvent être

infailliblement provoquées par la pression sur cer-

taines zones, telles que les globes oculaires et la nu-

que, que dans ces attaques le malade exécute parfois

un arc de cercle, qu'à la fin de l'attaque il pousse

des sanglots, et qu'enfin, il revient presque brusque-

ment à lui, reprend connaissance sans éprouver la

moindre fatigue; tout cela est bien de nature hysté-

rique.

La paralysie de notre malade, si on l'étudie attenti-

vement, est accompagnée de quelques symptômes qui

n'appartiennent pas à la paralysie corlicale. Si nous

examinons en particulier la paralysie brachiale, en

négligeant les troubles moteurs du membre inférieur

qui sont tout à fait accessoires, nous voyons que la

sensibilité du membre supérieur est tout à fait abolie,

et il en est ainsi de la sensibilité superficielle, de la

sensibilité profonde et du sens musculaire; or, si dans

les paralysies corticales il peut y avoir quelques troubles

sensitifs, ces troubles sont très légers; jamais l'anes-

thésie n'est si profonde, et, d'un autre côté, si l'onjette

lès yeux sur les ligures 1 et 2, on voit que cette anesthésie

est presque calquée sur celle qui a été notée dans les

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 17

deux cas de monoplégie hystérique rapportés par

M. Charcot'.

Il nous semble que tous ces arguments sont déjà

plus que suffisants pour établir que cette paralysie

est bien de nature hystérique et pour rejeter l'hy-

pothèse de paralysie corticale. Mais il est encore

un fait plus important à relever en faveur de cette idée

et qui convaincrait les plus sceptiques, c'est que cette

paralysie, sous l'influence d'une simple flagellation

pratiquée dans la région temporo-pariétale du côté

opposé, a rétrocédé en l'espace de quelques minutes;

il est évidemment inutile d'insister sur la portée de ce

phénomène au point de vue du diagnostic.

Quant à l'amyotrophie, il nous paraît de toute évidence

qu'elle doit être rattachée à la paralysie hystérique et

qu'il ne peut être question d'une atrophie indépendante

de cette paralysie et qui ne ferait que coïncider avec elle;

en effet, cette atrophie est rigoureusement limitée aux

muscles paralysés, elle s'est développée peu de temps

après le début de la paralysie et s'est atténuée après

sa disparition.

Nous croyons qu'il n'est pas sans intérêt de relever

dans cette observation quelques particularités qui pour-

tant ne sont ici qu'accessoires, étant donné ce que

nous voulons démontrer dans ce travail. C'est ainsi que

nous appellerons l'atteution sur le mutisme dont le

malade a été atteint à plusieurs reprises, à la suite de

ses attaques, et qui présentait tous les caractères du

mutisme hystérique, sur la rétention d'urine qu'il a eue

1 Progrès Médical, 1885, nos 34, 37, 39, 40. Sur deux, cas de monoplégie

brachiale hystérique de cause traumatique chez l'homme, Leçons de

M. Charcot, recueillies par 11111. lltarie et Guinon.

Archives, t. XII. 2

18 ' CLINIQUE XERVELSE,

pendant quelques jours, sur ses colères violentes suivies'

parfois d'hémorrhagies. Enfin, on peut se demander

si la perte de connaissance, le délire et la chute de la

paupière gauche qu'il a présentés au Tonkin doivent

être rattachés à quelque lésion organique ou à l'hysté-

rie. Cette question est difficile à résoudre, et, comme

elle n'offre pour nous qu'une importance secondaire,

nous ne la discuterons pas.

Observation II (l'ésumée).- Homme âgé de trente-quatre ans.

- Antécédents héréditaires nerveux. - Convulsions dans

l'enfance. - A l'âge de dix-huit ans hémiplégie gauche avec

intégrité de la face et hémianestMsie; celte hémiplégie a un

début brusque ; le malade s'aperçoit qu'il est paralysé, un

matin, en se réveillant; elle dure six mois et demi pendant les-

quels le malade a de fréquentes attaques d'hystérie ; guérison

complète ; - à l'âge de vingt-cinq ans réapparition des atta-

ques hystériques ; - à l'âge de trente-quatre ans, à la suite

d'un traumatisme violent sur le côté gauche du crâne, perte

de connaissance de quatre heures de durée ; lorsqu'il revient à,

lui. il présente une hémiplégie gauche avec intégrité de la face

et ltémianesthésle gauche; il y a hémianesthésie sensilivo-sen-

. : so¡'ielle et un rétrécissement du champ visuel; le testicule

gauche est douloureux à la pression ; l'hémiplégie est absolue

pendant une durée de plusieurs mois, et il se développe du

- côté paralysé une amyotrophie assez accentuée, ayant les

' caractères électriques de l'atrophie simple; sous l'influence

. de l'application d'un aimant, les mouvements reviennent en

partie dans le côté paralysé et il y a en même temps trans-

' fert de la sensibilité; depuis ce moment, la paralysie a une

tendance à s'atténuer de plus en plus et l'amyotrcphzé tend

aussi à diminuer.

Met...; âgé de trente-quatre ans, artiste en cheveux, entre à

la Salpêtrière dans le service de M. Charcot le 22 février 1886.

Antécédents héréditaires.-Père goutteux, obèse, alcoolique,

a eu à plusieurs reprises des attaques apoplectiformes. En 1863

à la suite d'une attaque, il aurait eu une paralysie du côté

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 19

.gauche qui aurait duré deux ans. Mère très nerveuse, impres-

sionnable ; elle est hémiplégique du côté gauche depuis deux

ans. Grands parents maternels seraient morts paralysés.

Antécédents personnels. k eu des convulsions étant enfant.

Masturbation de très bonne heure. Pas d'affection vénérienne.

Pas d'alcoolisme. A dix-huit ans le malade s'engage ; il fait la

campagne de 1870, et souffre de toutes façons pendantle siège

de Metz. Prisonnier en Prusse, il couche sur la terre nue et se

réveille un matin avec tout son côté gauche, violacé, insen-

sible et paralysé. Pendant quatre mois, tout mouvement fut

impossible du côté gauche, mais la face semble ne pas avoir

été prise. Il eut pendant la durée de cette hémiplégie des atta-

ques précédées d'une céphalalgie intense; dans ces attaques, il

se débattait et perdait connaissance ; ces attaques se sont re-

produites parfois jusqu'à huit fois par jour. La paralysie du

bras disparut la première, puis la motilité revint aussi dans le

membre inférieur. En 1877, à la suite d'une grande frayeur, le

malade eut de nouveau des attaques, dans lesquelles il fallait

plusieurs hommes pour le maintenir.

En 1881, M. Berbez vit le malade à Beaujon, où il était

soigné pour de préfendues douleurs rhumatismales siégeant

dans le côté gauche, dont la sensibilité cutanée paraissait

émoussée et qui, de plus, était plus faible que le côté droit.

Le malade sortit de l'hôpital en assez bonne santé et il se

porta bien pendant quatre années.

Le 22 août 1885, le malade à la suite d'une discussion avec son

père, fut frappé par ce dernier avec un rouleau à pâtisserie; il

perdit aussitôt connaissance et tomba par terre : on l'apporta à

la Charité, dans le service de M. Després, où l'on constata une

plaie des téguments de la tête de douze centimètres de longueur,

s'étendant de quelques centimètres au-dessus de l'oreille gauche

à la nuque. Le malade serait resté quatre heures sans connais-

sance après le traumatisme. Quand il revint à lui, il était,

comme en Allemagne, hémiplégique du mouvement et de la

sensibilité à gauche. La plaie se cicatrisa repidement, mais la

paralysie persistant toujours le malade fut transféré dans le

service de M. Féréol, le 8 octobre 1885. - \l. Berbez, interne

du service, prit à ce moment son observation. Les membres

supérieur et inférieur sont presque complètement paralysés.

La face ne présente pas de troubles de la motilité. ,Le côté

20 CLINIQUE NERVEUSE.

gauche est plus grêle que le droit ; on note en prenant des

mensurations les différences suivantes :

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 21

La région antérieure du thorax est un peu déprimée; il en est

de même de la région postérieure ; les muscles sus et sous-

épineux sont atrophiés. Le périmètre du bras gauche à la par-

tie moyenne est de 19 centimètres, et celui du bras droit au

même niveau de 22 centimètres. L'atrophie semble porter sur

tous les muscles ; le biceps et le triceps sont très réduits de

volume. A la partie supérieure de l'avant-bras gauche le péri-

mètre est de 19 centimètres et au même niveau à droite le

périmètre est de 22 centimètres. L'atrophie paraît porter

davantage sur les muscles épitrochléens que sur les épicondy-

liens. Les éminences thénar et hypothénar gauches sont un

peu aplaties. La jambe gauche est plus grêle que la droite;

le plus grand périmètre à gauche est de 27 centimètres et de

28 et demi à droite. A la cuisse, pas de différence sensible

entre les deux côtés. Les muscles atrophiés ne présentent pas

de secousses fibrillaires. L'excitabilité idio-musculaire parait

normale. La contractilité électrique est un peu plus affaiblie ;

mais elle est tout à fait normale : l'examen pratiqué avec les

courants faradiques et galvaniques montre qu'il n'y a pas

de réaction de dégénérescence. La résistance électrique est

augmentée. - La sensibilité est complètement abolie dans le

membre supérieur gauche (sensibilité au tact, à la douleur,

à la température, sens musculaire); dans le reste du côté

gauche la sensibilité n'est que diminuée, plus ou moins, sui-

vant les régions (voir les fig. 3 et 4). - Le côté gauche du corps

a une température plus basse que le côté droit. - Les réflexes

tendineux sont plus faibles à gauche. - Il y a à gauche un ré-

trécissement du champ visuel très prononcé, mais il n'y a pas

de dyschromatopsie. L'ouïe est très affaiblie à gauche. Le

goût et l'odorat sont abolis à gauche. - Il y a anesthésie du

pharynx du même côté. - Les deux testicules sont très grêles;

le malade dit qu'ils ont toujours été dans cet état et que pour-

tant ses désirs sexuels étaient normaux autrefois ; actuelle-

ment, ils sont très affaiblis; le testicule gauche remonte jus-

qu'à l'anneau, et il est très sensible à la pression; la douleur

provoquée par la pression ne reste pas localisée au testicule,.

elle remonte jusque vers le creux épigastrique ? Depuis 1877,

le malade n'a pas eu d'attaques. - On prescrit au malade de

faire dans la journée des exercices de gymnastique et d'exé-

cuter en particulier des deux membres supérieurs des mouve-

ments synergiques. On prie d'autre part M. Gautiez de masser

et de flageller le malade. Les flagellations sont faites par

2 CLINIQUE NERVEUSE.

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 23

'»4 le CLINIQUE NERVEUSE.

M. Gautiez sur la région pariétale droite; après chaque séance,

a sensibilité reparaît au membre supérieur gauche pendant

plusieurs heures, et au bout de plusieurs séances elle persiste

d'une façon définitive, mais elle est toujours plus faible qu'a

droite. -

21 avril. Le malade a fait depuis son entrée à l'hôpital

les exercices qu'on lui avait recommandé de faire. Son état

général est toujours le même. Le membre supérieur gauche

paraît un peu plus fort qu'autrefois, mais il est toujours beau-

coup plus faible que le droit. Les muscles ont augmenté de

volume. Les mensurations prises dans les mêmes endroits

que le 23 février montrent les différences suivantes :

23 février.

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 25

l'esprit, quand on réfléchit aux conditions dans les-

quelles la paralysie s'est produite, est qu'elle dépend

directement du traumatisme et qu'elle résulte d'une

lésionmatériellede l'encéphale produite sous l'influence

dece traumatisme. -Nous allons donc commencer par

démontrer que cette dernière hypothèse n'est pas sou-

tenable si on analyse rigoureusement les faits et qu'il

ne peut s'agir ici d'une lésion organique du cerveau.

Remarquons d'abord que le malade, avant l'attaque de

paralysie pour laquelle il est entré à l'hôpital et que

nous avons pu constater, a eu déjà des accidents à peu

près semblables, il y a de cela seize ans; il avait alors

présenté une hémiplégie analogue à l'hémiplégie

actuelle, et elle avait disparu complètell1entsans laisser

de traces. Il est très vraisemblable que ces deux atta-

ques de paralysie se sont produites sous l'influence

d'une même cause et la disparition de la première

hémiplégie tendant à établir que celle-ci n'était pas

sous la dépendance d'une lésion organique, il devient

dès lors probable qu'il en est de même de la se-

conde hémiplégie. -,)fais il y a en faveur de cette opi-

nion des arguments plus puissants à invoquer. Exa-

minons, en effet, attentivement les conditions dans les-

quelles le traumatisme a agi : le choc a porté sur le

côté gauche de la tête et la paralysie des membres

s'est développée du même côté, dans le côté gauche

du corps. N'est-ce pas là déjà une objection impor-

tante contre l'hypothèse de lésion organique con-

sécutive directement au traumatisme ? Voici d'autre

part une autre objection dont la valeur est non moins

grande : Comment comprendre, avec l'hypothèse de lé-

sion organique, l'affaiblissement des réflexes tendineux

26 CLINIQUE ! OERYEUSE, - DE l/ ATROPHIE MUSCULAIRE.

et la flaccidité des membres paralysés ? Ne devrait-il

pas y avoir, dans une paralysie de cette nature, dont

le début remonte à plus de huit mois, exagération de

ces réflexes et contracture ? Ainsi donc, il nous semble

qu'il faut écarter cette hypothèse et admettre que cette

paralysie doit reconnaître pour cause quelque modifica-

tion dynamique des centres nerveux, et, eu rapprochant

cette donnée de ce que le malade est atteint, à n'en pas

douter, d'hystérie, il devient probable que la paralysie

est de nature hystérique. - C'est cette opinion qu'on

arrive à se faire par exclusion; mais on peuty arriver

aussi directement en montrant que cette paralysie

présente quelques caractères qui sont propres à l'hys-

térie, et sur lesquels nous allons appeler l'attention.

L'hémianesthésie que présente le malade n'est pas

complète, avons-nous dit, mais si l'on jette les yeux

sur les figures 3 et 4, on voit qu'au membre supérieur,

seul membre paralysé au moment où cette figure a été

dessinée, l'abolition de la sensibilité est complète et

que les limites de cette anesthésie absolue sont exacte-

ment semblables à celles que nous avons notées dans

l'observation précédente et à celles que 111. Charcot a

relevées dans son travail sur les monoplégies hysté-

riques ; la paralysie paraît donc en rapport intime avec

l'anesthésie et celle-ci, étant de nature hystérique,

il doit en être de même de celle-là. Voici maintenant

un argument qui, à lui seul, nous aurait presque per-

mis de nous dispenser de toute cette discussion, nous

voulons parler de l'action que l'aimanta exercé sur

cette paralysie, qui s'est atténuée sous l'influence de

son application. Il s'agit donc bien certainement d'une

paralysie hystérique.

DU TARES COMBINÉ. 27

Eu ce qui concerne l'amyotrophie, nousdirons,comme

dans l'observation précédente, qu'elle se lie de toute évi-

dence à cette paralysie et qu'elle ne peut relever d'une

autre cause. Elle est limitée, eu effet, aux membres

paralysés, elle est bien plus accentuée dans le membre

supérieur dans lequel la paralysie est plus tenace; elle

s'est développée après le début de la paralysie, et,

depuis que la paralysie a diminué d'intensité, elle s'est

atténuée à son tour. (A suivre.)

PATHOLOGIE NERVEUSE

DU TABES COMBINÉ (A'l'A\0-51 ? SIOUIQUI ? ), ou SCLÉROSE

POSTÉRO-LATÉRALE DE LA -MOELLE '

(contribution A l'étude CLIXIVUE des myélites .mixtes);

Par le professeur GRASSET (de Jtuutpellirr).

IV. ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES

De l'analyse des symptômes , tels que nous les

avons décrits et groupés dans le paragraphe précé-

dent, on peut déjà déduire le siège probable des lésions

de la moelle. -

Tout le premier groupe de phénomènes (incoordi-

nation motrice, douleurs fulgurantes, anesthésies) veut

dire lésion des cordons postérieurs et surtout de leur

partie externe (zones radiculaires, faisceaux de Bur-

' Voy. t. XI, p. 156 et 380.. ". ..

28 PATHOLOGIE NERVEUSE.

dach). Je ne crois pas qu'il y ait d'objection faite à ce

principe.

. Le second groupe de symptômes (paralysies et sur-

tout contractures) veut dire lésions des cordons laté-

raux et surtout des faisceaux pyramidaux.

, Cette dernière proposition n'est plus aussi généra-

lement admise qu'il y a quelques années et tout récem-

ment Raymond écrivait 1 : « Tous ces faits démontrent

qu'on ne saurait plus, comme l'a fait Grasset (de

Montpellier), admettre que la contracture permanente

est le symptôme de la lésion des cordons latéraux ».

Que sont donc ces faits qui infirmeraient cette loi ?

Ce sont des observations d'hydrocéphalie, de poren-

céphalie, de sarcome encéphalique et d'hystérie dans

lesquelles il y a eu des contractures permanentes

malgré l'intégrité des cordons latéraux. , -

00 ' "

Or, le principe que Raymond rappelle comme désor-

mais inacceptable n'a jamais été posé par moi que

comme un principe de séméiologie spinale. C'est en

étudiant, la symptomatologie de la moelle et de ses

divers systèmes queje l'ai formulé (après bien d'autres).

Donc, cela n'empêche pas que des névroses ou des

lésious extra-médullaires puissent aussi produire ces

contractures.

Je crois pouvoir maintenir mon ancienne phrase

en la complétant par ces trois mots (qui n'étaient pas

nécessaires dans mon livre, vu le chapitre où la loi

était indiquée) : « En pathologie spinale, la contrac-

ture permanente est le symptôme de la lésion des cor-

dons latéraux » .

1 Art. Tabès s}J/lsl11odique in Dict. encyclop., p. 432.

· DU TABES COMBINÉ. 29

. : On peut certes discuter encore sur la physiologie

pathologique plus fine du symptôme, se demander si

ce n'est pas (comme l'admet aujourd'hui M. Charcot)

par irritation des cellules motrices antérieures que la

lésion latérale entraîne la contracture. Ceci est une

autre affaire.

- Ce qui nous intéresse, nous cliniciens qui voulons

surtout apprendre à déduire des symptômes observés

le siège probable de la lésion médullaire, c'est que

aux contractures répond la lésion latérale, comme à

l'ataxie répond la lésion postérieure et comme aux

amyotrophies répond la lésion grise antérieure.

Aiusi comprise et expliquée, notre proposition dé

tout à l'heure garde donc sa valeur et nous pouvons

dire que, dans le tabes combiné, si les symptômes du

premier groupe font penser à une lésion des cordons

postérieurs, ceux du second font supposer une lésion

des cordons latéraux.

11 est donc probable, d'après la seule analyse des

symptômes physiologiquement interprétés , que la

lésion du tabes combiné est une sclérose postéro-laté-

rale.

Toutes les observations résumées dans nos tableaux

confirment cette manière de voir. Aucune ne fait

exception. Dans toutes les autopsies, la lésion intéres-

sait les cordons postérieurs et les cordons latéraux.

Jusque-là, du reste, aucune difficulté; tout le monde

admet cette double localisation de la lésion. Mais les

divergences commencent quand il s'agit d'interpréter

la nature de cette lésion.

S'agit-il là d'une myélite systématisée ou d'une

myélite diffuse ?

30 PATHOLOGIE NERVEUSE. ·

Pour les Allemands, Westphal et surtout Kahler et

Pick, ce serait une double sclérose systématisée. Pour

l'Ecole française, ce serait plutôt une myélite diffuse.

- Ballet et Minor, qui ont fortement défendu cette

dernière manière de voir dans le remarquable travail

que nous avons déjà cité, rapprochent de leur obser-

vation personnelle plusieurs des cas publiés, et con-

cluent que tous ces faits doivent être disjoints les uns

des autres et classés suivant cinq types.

Le premier type comprend des scléroses diffuses;

le second, des cas d'ataxie locomotrice dans lesquels

la lésion atteint non seulement les faisceaux de Bur-

dach, mais aussi les faisceaux cérébelleux, qui, quoique

dans les cordons latéraux, fout partie du système cen-

tripète ; le troisième, des cas d'ataxie locomotrice dans

lesquels la lésion primitivement systématisée aux cor-

dons postérieurs se diffuse ensuite (par l'intermédiaire

des méninges) aux cordons latéraux; le quatrième, des

faits.inverses dans lesquels la sclérose systématisée a

succédé à la sclérose diffuse; enfin le cinquième, les

faits proprement dits (mais très peu nombreux) de

double sclérose systématisée.

Ces divisions sont trop dissemblables et n'ont pas

toutes la même valeur. Le second type se sépare abso-

lument des autres; il appartient au tabes dorsal ordi-

naire et nullement au tabes combiné. Entre le troisième

et le quatrième types, au contraire, il n'y a pas de diffé-

rence fondamentale, c'est une question relativement

secondaire de savoir si la sclérose diffuse succède à la

sclérose systématisée ou si c'est l'inverse : c'est comme

si on séparait les tabétiques chez lesquels l'atrophie

optique précède la sclérose spinale, et ceux chez les-

DU TABES COMBINÉ. '-il

quels les lésions se succèdent dans l'ordre inverse.

Les questions secondaires ne doivent pas faire

perdre de vue le point principal. Y a-t-il ou non une

lésion du tabes combiné comme il y a une symptoma-

tologie ? . Ballet et Minor répondent non, détruisent

l'unité de cette maladie et en éparpillent les cas dans

des groupes disparates.

Sur ce point, je demande à mes éminents confrères

la permission d'être d'un avis différent.

L'objection vraie de Ballet et Minor aux travaux

des Allemands est la non-systématisation de la lésion

dans les cordons latéraux : cela est très juste : la sclé-

rose, systématisée aux cordons postérieurs, est diffusée

dans les cordons latéraux.

Mais cela n'empêche nullement son unité. Il suffit,

pour la comprendre, d'admettre des myélites mixtes,

en appliquant ce mot non à des myélites à la fois péri-

tubulaires et périvasculaires, mais à des myélites à la

fois systématisées et diffuses.

Cette idée des myélites mixtes, déjà émise en 1882

dans la thèse'de mon ancien interne Brousse, me

paraît jeter un grand jour sur ces questions.

. Il n'y a pas entre les myélites systématisées et les

myélites interstitielles de différence histologique radi-

cale qui en fasse-deux processus inconciliables sur le

même sujet. On les suppose l'une parenchymateuse,

l'autre interstitielle dans leurs origines. Mais, au fond,

la seule vraie caractéristique se tire de la topographie.

Donc, il est très naturel que les localisations spi-

nales d'états généraux (que nous appelons les mala-

dies de la moelle), se déterminent, chez les uns, par

une lésion systématique; chez les autres, par une lésion

32 PATHOLOGIE NERVEUSE.

diffuse; chez d'autres encore, par une double lésion,

diffuse en avant, systématisée en arrière. On a cité

des cas de lésion diffuse dans le cerveau et de lésion

systématisée dans la moelle (paralysie générale et

ataxie locomotrice); on peut aussi avoir dans. la même

moelle une lésion diffuse et une lésion systématisée

(ataxie locomotrice et sclérose en plaques).

Le tabes combiné est de cette dernière catégorie;

c'est une myélite mixte. -

Cette manière de concevoir les choses me paraît

correspondre aux faits et, en même temps, permet de

maintenir sur le terrain anatomique l'unité du syndrome

morbide que nous avons trouvé sur le terrain clinique.

Cela posé, arrive uue autre question, qui me paraît

secondaire, mais dont je ne veux pas cependant nier

l'intérêt : quelle relation y a-t-il entre les deux lésions

dont nous venons de parler ?

La lésion diffuse succède-t-elle à la lésion systéma-

tisée (3° type de Ballet et Minor), ou, au contraire, la

lésion systématisée succède-t-elle à la lésion diffuse

(4e type des mêmes auteurs) ? La propagation se fait-

elle plutôt par les méninges (Déjerine) ? La malaùie se

localise-t-elle séparément sur les deux régions sans

qu'il y ait propagation anatomique de l'une à l'autre ?

Tous ces processus sont possibles; il est même pro-

bable que les choses ne se passent pas toujours de la

même manière chez les divers malades.

Mais ces variétés dans le détail de la marche de la

lésion n'empêchent nullement l'unité anatomique de la

maladie elle-même.

Pour s'en rendre compte il n'y a qu'à se rappeler

ce qui se passe pour ce type clinique si admirablement

DU TABES COMBINÉ. 33

arrêté de l'ataxie locomotrice progressive. Chez l'un,

la lésion commence par les nerfs crâniens; chez l'autre,

par les cordons postérieurs; chez certains, les méninges

spinales jouent un grand rôle; chez d'autres, il y a une

méningo-encéphalite diffuse, soit initiale, soit tardive,

etc. Tout cela empêche-t-il l'unité du tabes dorsal ?

Nullement.

Il en est de même du tabes combiné.

Pour constituer légitimement un de ces syndromes

cliniques, qui prennent rang parmi les maladies de la

moelle, il faut deux choses : l'individualité symptoma-

tique et l'individualité anatomique.

Nous avons vu au chapitre précédent et nous rever-

rons dans le suivant (à propos du diagnostic), que

l'individualité symptomatique est parfaitement nette et

caractérisée par l'association des symptômes du tabès

ataxique avec ceux du tabes spasmodique. Le présent

paragraphe a démontré, croyons-nous, l'individualité

anatomique caractérisée par l'association dune sclérose

.postérieure systématisée avec une sclérose latérale diffuse

(myélite mixte).

Donc, le tabès combiné existe comme syndrome cli-

nique distinct, et mérite de figurer à part parmi les

maladies de la moelle.

Il resterait un dernier point de détail à étudier.

Après avoir fait la physiologie pathologique générale

de la maladie, il faudrait, dans chaque cas, mettre en

rapport la topographie particulière de la lésion avec

les symptômes spéciaux du cas.

Ce serait fort intéressant, mais cela nous entraînerait

trop loin. Contentons-nous de rappeler une proposi-

tion de Westphal, qui résume cette question : dans

Archives, t. XLI. 3

34 PATHOLOGIE NERVEUSE.

les lésions combinées des cordons postérieurs et laté-

raux, la rigidité musculaire et la contracture spastique

ne surviennent pas quand la lésion des cordons posté-

rieurs s'étend en bas jusqu'à la région lombaire et que

les zones radiculaires des cordons postérieurs sont

atteintes par la dégénérescence. Zacher a. exprimé le

même principe sous une forme plus synthétique etplus

générale en disant : Dans une lésion combinée des

faisceaux pyramidaux et postérieurs, les phénomènes

spastiques ne se développent pas dans les membres

supérieurs ou inférieurs, quand la lésion des cordons

postérieurs a atteint les zones radiculaires postérieures

dans les sections correspondantes de la moelle.

Il y. a là un chapitre très intéressant du tabes com-

biné, dont le développement ultérieur pourra être très

utile pour la physiologie pathologique générale de

l'axe spinal.

V. DIAGNOSTIC, PRONOSTIC ET TRAITEMENT.

Les documents sont encore trop peu nombreux pour

permettre d'écrire une histoire clinique complète du

tabes combiné.

La description détaillée des symptômes, principaux

et accessoires, l'histoire de la marche, de l'évolution

des phénomènes, les diverses variétés et les formes,

etc. ; tout cela se fera plus tard. Le présent travail n'a

pour but que de montrer l'existence de cette maladie

et de provoquer ainsi de nouveaux travaux qui en

compléteront l'histoire.

Il est bon cependant de rappeler les principes du

DU TABES COMBINÉ. ' ` 35

diagnostic différentiel : c'est la conclusion naturelle

de notre paragraphe de la symptomatologie. t

" Je ne parle pas des signes qui permettent de recon-

naître tout d'abord qu'on a affaire à une maladie de la

moelle : ce premier temps du diagnostic est commun

à toutes les autres maladies spinales.

Mais cette première partie du diagnostic posée, il

faut savoir distinguer le tabes combiné du tabès ataxique,

du tabes spasmodique, de la myélite diffuse transverse

et de la sclérose en plaques. '

Pour les deux premières maladies, on peut poser

un principe général : dans le tabes combiné, on élimine

le tabes ataxique par les symptômes du tabes spasmo

dique, et on élimine le tabes spasmodique par les symp-

tômes du tabes ataxique.

Ainsi les contractures et plus généralement les divers

phénomènes d'excitation motrice chez un malade pré-

sentant, d'autre part, des symptômes d'ataxie locomo-

trice feront penser au tabes combiné. De même les

anesthésies, les douleurs fulgurantes et l'incoordina-

tion chez un sujet présentant d'autre part le tableau

clinique du tabes spasmodique indiqueront aussi un

tabes combiné.

Je ne fais pas figurer ici les symptômes céphaliques

parmi ceux qui peuvent servir à ce diagnostic diffé-

rentiel. Car ils appartiennent aux trois tabes. C'est

l'opinion classique pour le tabes classique, mais non

pour le tabes spasmodique. Raymond, en effet, dans

son remarquable article consacré à cette dernière

maladie, exclut les phénomènes céphaliques du tabes

dorsal spasmodique; mais sur ce point je m'écarte de

36 PATHOLOGIE NERVEUSE.

sa manière de voir et me range plutôt à celle de Pierret l

et de Hervouet2 (de Nantes).

Les tabes sont, d'une manière générale, pour moi,

des maladies cérébro-spinales; c'est même là, à mon

sens, leur caractéristique. On pourrait même ajouter

aujourd'hui, après les travaux de Dejerine, que ce

sont des maladies du système nerveux tout entier.

La considération des réflexes rotuliens est au contraire

un symptôme qui, dans certains cas, aura une très

grande importance pour le diagnostic que nous étu-

dions.

La loi de Westphal sur l'abolition de ces réflexes

dans le tabes ataxique est très généralement vraie. De

plus, on peut ajouter que c'est là le plus souvent un

signe de début.

Donc, toutes les fois qu'on trouve, avec des symp-

tômes de tabes ataxique, la conservation, ou mieux

encore, l'exagération des réflexes tendineux, il faut se

méfier et penser plutôt à un tabes combiné.

L'inverse a beaucoup moins d'importance. Sans

doute l'abolition des réflexes rotuliens coïncidant avec

des symptômes de tabes spasmodique fera penser à un

tabes combiné; mais alors il y aura en général d'autres

troubles sensitifs qui enlèveront toute difficulté au

diagnostic.

Pour distinguer le tabes combiné d'une myélite dif-

fuse ordinaire, on se basera sur les symptômes des

tabes en général.

1 Association française pour l'avancement des sciences. Congr. de Gre-

noble, 1885. ! Remarques sur le tabes dorsal spasmodique. (Gaz. médic. de Nantes

1885.)

DU TABES COMBINE. 37

La myélite diffuse est ordinairement transverse; elle

est limitée, circonscrite dans un foyer, s'étendant en

largeur plutôt qu'en hauteur; elle frappe d'emblée tous

les systèmes au niveau d'une rondelle : tous les fais-

ceaux blancs et la substance grise perdent leurs pro-

priétés. Si même cette myélite diffuse est envahissante,

elle frappera les hauteurs successives de la moelle de

la même manière, c'est-à-dire en détruisant toujours

indistinctement tous les systèmes de l'axe spinal. De

plus, dans la myélite diffuse tout est continu dans les

lésions, et il n'y a pas de symptômes céphaliques ou

même mésocéphaliques.

Dans le tabes combiné, au contraire, la lésion s'élève

en hauteur, non en largeur; elle ne frappe jamais une

rondelle entière de moelle ; elle ne produit jamais ces

paraplégies complètes avecanesthésie, exagération des

réflexes et paralysie des sphincters qui montrent que

la partie inférieure de la moelle est séparée de la par-

tie moyenne par une zone détruite. Il y a au contraire

souvent des symptômes mésocéphaliques, et surtout

céphaliques, qui, à eux seuls, suffisent souvent à faire

diagnostiquer un tabes, quand on les rapproche des

phénomènes spinaux proprement dits.

Le diagnostic est plus difficile avec la sclérose en

plaques. Ceci est une maladie cérébro-spinale comme

les tabes, et, les plaques pouvant se rencontrer un peu

partout, on conçoit qu'elles puissent raisonnablement

simuler toutes les autres lésions des centres nerveux.

Je n'hésite pas à dire que bien souvent la distinction

doit être impossible.

Cependant il y a des signes qui, dans beaucoup de

cas, permettront un diagnostic.

38 PATHOLOGIE NERVEUSE.

Les lésions de la sclérose en plaques ne présentent

ni symétrie ni continuité. Une plaque pourra donner

des symptômes de tabes ataxique dans une jambe ;

mais l'autre jambe n'aura rien, ou présentera des

phénomènes tout différents. Alors même que les deux

jambes seraient prises, bien souvent alors un bras se

comportera différemment et présentera, par exemple,

ce tremblement caractéristique qu'a décrit Charcot et

qui enlèvera alors le diagnostic.

. Dans le tabès combiné, tout marche au contraire,

comme dans les maladies systématisées; la lésion se

propage de proche en proche d'une manière continue,

sans sortir des régions de prédilection. Il n'y a pas de

contraste, pas de discontinuité.. .

Je reconnais que ce ne sont pas là des signes dis-

tinctifs absolus, fixes et généraux ; ce sont plutôt des

jalons, des indications qui serviront dans beaucoup

de cas, et surtout quand on pourra suivre le malade

assez longtemps. Du reste, comme je l'ai dit tout à

l'heure, je crois qu'on se trompera encore souvent et

qu'on pourra confondre, dans beaucoup de cas, la

sclérose en plaques avec le tabes combiné comme on

l'a confondue avec le tabes spasmodique, c'est pour

cela que, pour établir ce travail, nous n'avons voulu

citer dans nos tableaux et utiliser que les observations

suivies d'autopsie.

Le pronostic est plus difficile que le diagnostic ;

mais c'est là un principe général. En présence d'une

maladie quelle qu'elle soit, on fait son diagnostic, on

indique le traitement : ce qui embarrasse le plus, c'est

toujours le pronostic.

Il est bientôt fait de dire que les tabes sont des

DU TABES COMBINÉ. 39

maladies progressives, très difficilement curables et

desquelles on meurt. Mais en combien de temps

mourra le sujet ? Il y a des temps d'arrêt, même des

rétrocessions, soit spontanées, soit thérapeutiques ? Ces

phases se produiront-elles ? Si oui, combien de temps

dureront-elles ? Si non, comment la maladie va-t-elle

s'étendre et avec quelle rapidité ? Montera-t-elle tou-

jours et la mort surviendra-t-elle par le bulbe ? Ou une

complication cérébrale terminera-t-elle la scène ? Ou

encore est-ce le marasme, la cachexie avec les eschares

ou même la phtisie pulmonaire, qui emporteront le

sujet ? Toutes ces questions, et mille autres semblables,

intéressent au plus haut point la famille; mais elles

sont souvent insolubles pour le médecin.

Seulement comme elles sont communes à toutes les

maladies, et que les éléments' particuliers d'apprécia-

tion particulière sont les mêmes que. dans les autres

tabes et n'ont rien de spécial au tabes combiné, je

n'insiste pas et passe au traitement.

Si ce dernier paragraphe est très court, ce n'est pas

que je considère le traitement comme nul et inefficace

dans le tabes combiné; c'est uniquement parce que

les indications sont, pour la plupart, les mêmes dans

cette maladie et dans les autres tabes. Et nous ne de-

vons insister ici que sur ce qui appartient en propre

au type clinique que nous étudions.

Ainsi les indications tirées de l'état morbide fonda-

mental, sont les mêmes dans le tabes combiné et dans

l'ataxie locomotrice : iodure de potassium, ou mieux

de sodium, chlorure d'or et de sodium, etc., suivant

les cas. Il en est de même des indications tirées de

l'acte morbide anatomique (lésion de la moelle) : ré-

40 PATHOLOGIE NERVEUSE.

vulsifs de tout genre, vésicatoires, pointes de feu,

hydrothérapie.

Il n'y a que les indications tirées des actes mor-

bides symptomatiques qui varient dans une certaine

limite. Les contractures, et, d'une manière générale,

les phénomènes d'excitation motrice, sont un élément

nouveau, qui n'existe pas dans l'ataxie locomotrice,

et dont il faut tenir grand compte ici.

Ainsi à l'iodure de sodium, on joindra utilement le

bromure de sodium; c'est là du reste, une association

extrêmement utile dans beaucoup de maladies chro-

niques du système nerveux. On prescrira les deux

médicaments, par exemple dans la proportion relative

suivante :

DU TABES COMBINÉ. 41

Ce moyen, très utile dans la plupart des cas d'a-

taxie locomotrice progressive, ne m'a pas réussi du

tout chez le premier des trois malades dont j'ai résumé

les observations plus haut. Si on l'emploie, ce devra

être, en tout cas, toujours avec une extrême prudence.

Les courants continus faibles et à courte séance ou

même le tabouret statique devront être seuls em-

ployés, et encore, je le repète, avec beaucoup de mo-

dération et une surveillance incessante.

Quant aux eaux minérales, on devra choisir soit

parmi les stations, soit parmi les sources, celles qui,

étant indiquées dans le tabes, sont plutôt sédatives et

calmantes (tout en étant toniques) que stimulantes ou

excitantes. C'est ainsi que la Matou ou Ragatz, vau-

dront mieux que Balaruc et encore à la Matou la

piscine tempérée vaudra mieux que la piscine très

chaude.

Ce paragraphe, à peine esquissé, ne pourra du reste

être utilement développé que quand la maladie mieux

connue, admise de tous et facilement diagnostiquée,

sera suivie dès le début et que, par suite, les observa-

tions contiendront l'analyse plus complète des divers

traitements essayés et des résultats obtenus.

VI. - CONCLUSIONS.

Les trois observations personnelles, résumées plus

haut, et surtout les trente-trois cas (suivis d'autopsie)

qui figurent dans nos tableaux me paraissent établir

l'existence d'un type clinique, distinct des autres ma-

ladies de la moelle, qui mérite une place à part dans

42 -) PATHOLOGIE NERVEUSE.

les cadres de la neuropathologie et que je propose

d'appeler Tabès combiné (ataxo-spasmodique).

Ce syndrome n'est nullement caractérisé par son

étiologie. Beaucoup de cas de maladie de Friedreich

doivent être rangés sous cette dernière dénomination;

mais ce n'est pas le fait d'être héréditaire qui les

caractérise.

L'individualité du tabes combiné est constituée par

son tableau symptomatique et sa lésion anatomique.

Symptomatiquement, il est caractérisé par l'associa-

tion des symptômes du tabes ataxique .(douleurs ful-

gurantes, anesthésies, incoordination motrice), des

symptômes du tabes spasmodique (paralysies ou pa-

résies et surtout contractures ou autres phénomènes

d'excitation motrice) et des symptômes communs à

tous les tabes (troubles céphaliques et méso-cépha-

liques).

Anatomiquement, il est caractérisé par une myélite

chronique à siège spécial et constant. Cette sclérose

occupe les cordons postérieurs et les cordons latéraux.

On ne peut considérer cette lésion ni comme entière-

ment systématisée ni comme entièrement diffuse. Elle

est systématisée dans les cordons postérieurs et diffuse

dans les cordons latéraux. Cette association constitue

donc une myélite mixte.

Il y a aussi dans beaucoup de cas des lésions méso-

céphaliques, céphaliques ou même périphériques. C'est

cette complexité anatomique (commune à tous les

tabes) qui nous fait préférer le nom de tabes combiné

(maladie cérébro-spinale) à celui de sclérose médullaire

posté.m-latérale, de même que le mot tabès. dorsal ou

de l'hypnotisme. 43

ataxique est préférable à l'expression de sclérose mé-

dullaire postérieure.

Le tabes combiné doit être distingué du tabes

ataxique, du tabes spasmodique, des myélites diffuses

et de la sclérose en plaques : les caractères cliniques

sont assez tranchés pour rendre possible le diagnostic

différentiel.

Le tabes combiné a beaucoup d'indications com-

munes avec l'ataxie locomotrice progressive; mais il

en a aussi de spéciales; ce qui prouve que la connais-

sance de cette maladie nerveuse particulière est im-

portante, non seulement au point de vue de la science

nosologique, mais encore au point de vue de la pra-

tique et de la thérapeutique 1.

DE L'HYPNOTISME 2

Par le D= ERNEST JENDRASSIK

Assistant de la 1,- clinique médicale de Buda-Pest.

L'opinion la plus générale explique les phénomènes

dont nous nous occupons par la cessation de la fonc-

tion de la substance corticale et en conséquence de

cette circonstance par l'augmentation des fonctions

réflexes. Mais nous n'avons pas sur quoi fonder la

le

1 Au moment où nous achevons la correction des épreuves de ce travail,

nous trouvons dans les Archives de Westphal (I88c,, xvu 217) un nouveau

mémoire de Strttmpell . Weber eine besttmmte FOl'1n del, p"Ï1ndl'en com-

biuirlen SysteizeiIci,anki4îg des Ruckenmarks, et dans le Progrès médical

(20 février 1886) le résumé d'un cas de sclérose combinée présenté à la

Société anatomique (8 janvier 1886), par Babinski et Charrin.

1 Voy. le t. XI, p. 362. -

44 4 pathologie NERVEUSE.

supposition d'une exagération de la fonction réflexe

dans la moelle, ou bien dans les organes subcorticaux

pendant la léthargie, parce que, à cause des réflexes

corticaux considérablement élevés, une investigation

dans ce sens est impossible. Pendant la catalepsie, nous

ne trouvons pas de réflexes du premier ordre, et dans

le somnambulisme, nous ne les rencontrons que dans

leur extension normale. J'ai déjà parlé de la fonction

de la substance corticale pendant l'état hypnotique; et,

en comparant tout ce que je viens d'alléguer, je ne

puis admettre cette explication.

A mon avis, l'opinion de plusieurs observateurs est

erronée, quand ils considèrent la fixation d'un objet

comme une irritation sensorielle par laquelle l'état

hypnotique serait provoqué, ainsi Brown-Séquard,

Heidenhain, etc. La physiologie du système nerveux

nous enseigne que se sont surtout les irritants

d'intensité variable qui ont une influence irritante,

tandis que pour les irritants continus la suscepti-

bilité des éléments nerveux se perd successivement.

Cette fatigue, qu'on éprouve en regardant l'objet fixé

de tout près n'est pas absolument nécessaire pour

amener le sommeil, c'est ce qui est prouvé par les

autres moyens d'hypnotisation, ainsi par le sommeil

provoqué par un son monotone, dont on ne pourrait

guère affirmer l'action irritante. Et puis, chez les indi-

vidus qui ont une grande aptitude pour être hypno-

tisés, il suffit d'un temps si court que vraiment on ne

pourrait supposer une irritation. L'objet brillant, le

son du diapason et les autres agents ne font que con-

centrer l'attention de l'individu qu'on veut endormir

et on parvient à hypnotiser seulement ceux chez qui

DE l'hypnotisme. 45

cette concentration de l'attention a réussi; dans ce

moment, non seulement l'irritation n'augmentera pas,

mais, au contraire, elle perdra peu à peu de son pou-

voir, parce que, pour une influence de force constante,

l'irritabilité du système nerveux diminue successive-

ment. Puisque toute fonction cérébrale du médium est

concentrée dans ce moment à l'objet fixé, - et cette

fonction s'efface lentement, à un instant donné, les

irritations corticales tombent dans un état d'équi-

libre d'intensité très petite'. Si, pendant la nuit, ne pou-

vant pas dormir, nous avons recours au moyen popu-

laire de compter de 1 à 10, et en sens inverse, nous

suivons le même procédé que celui qui hypnotise.

L'attention est concentrée à ces chiffres, et, si on réussit

de l'y maintenir, elle s'affaiblit peu à peu, parce que,

en continuant de répéter ces mots, ils ne donnent plus

d'irritation nouvelle, et le sommeil entre.

Donc, la manière d'endormir n'est pas différente

dans le sommeil ordinaire et hypnotique 2, mais il y a

une différence dans la forme et daus le degré des

deux états. Pendant le sommeil normal, c'est en vain

que nous parlons à l'individu endormi, c'est en vain

que nous le touchons; si nous ne franchissons pas cer-

taines limites l'individu ne réagira point; mais, agis-

sant un peu plus énergiquement, nous l'éveillerons à

un degré varié, selon la force de notre intervention; il

1 Je connais une hystérique qui, écoutant un diapason, s'endort tou-

jours au moment où le son du diapason se perd.

2 Chez une hystérique, j'ai réussi avec les moyens de l'hypnotisation

(fixation d'un objet, son du diapason ut ,, ut 3 ) à produire dans quel-

ques secondes un sommeil ordinaire très profond. Si on la réveillait, elle

s'endormait tout de suite, et elle continuait ainsi son sommeil, pendant

quelques heures, autant de fois que j'ai fait l'expérience.

i si pathologie NERVEUSE.

peut arriver que, de cet état, il s'éveillera tout à fait, ou

bien qu'il retombera dans son sommeil. Dans l'état

hypnotique, une influence au delà de certains limites

éveillera de même l'individu, par exemple si nous

soufflons contre son visage. Par ce moyen, nous faisons

entrer dans le cerveau une irritation, laquelle, -

quand elle est assez concentrée - peut troubler l'équi-

libre des irritations corticales : c'est ce qui est l'état de

veille. Un courant électrique appliqué à la tête aura

aussi le même effet. Rieger dut s'en servir pour éveiller

un hypnotisé.

Le moment principal de l'état de veille est le main-

tien d'un certain nombre d'images dans un état d'irri-

tation plus ou moins élevée; je crois donc que plu-

sieurs auteurs, et entre eux Beard et Môbius, ont tort

en soutenant que, pendant la veille, les irritations du

cerveau sont.en équilibre. Beard' compare l'état de

veille à un candélabre dont tous les becs sont allumés :

quand on éteint les flammes, le sommeil s'ensuit; mais,

si nous ne laissons brûler qu'un seul bec, celui-ci

donnera une flamme d'autant plus forte; ce der-

nier exemple serait le symbole du sommeil hypnotique.

Je me servirai de cette comparaison, toutefois en la

modifiant de la façon suivante. L'état de veille est

comparable à un candélabre dont une partie moindre

des becs donne des flammes fortes et vives; une autre

partie de nombre plus considérable répand une lu-

mière faible; le reste des becs - et c'est la plus grande

partie n'entretient que des flammes à peine sensi-

bles ; les deux dernières parties éclatent partiellement en

1

1 : ;chmidt'sJalu'úüchel', 1881, p. 74-91.

DE l'hypnotisme. 47

pleine lumière si leur robinet s'ouvre. Les grandes

flammes sont le symbole de notre pensée ou de notre

action récente, qui en même temps ne peut s'étendre

qu'à une petite partie des images empreintes en notre

mémoire; les flammes plus faibles représentent les ac-

tions soi-disant inconscientes (comme la marche, les

différentes poses du corps, etc.), ces actions sont rela-

tivement soustraites à notre connaissance; et enfin les

flammes les plus faibles sont les images qui sont à

l'instant hors de notre connaissance, mais toujours

prêtes à y entrer. Cette comparaison nous fait voir

aussi, si nous concentrons notre attention à quelque

chose c'est-à-dire si nous allumons ce bec, la flamme

des autres diminuera; c'est un fait connu, on ne peut '

faire attention qu'à une seule chose à la fois. Mais à

l'état normal, tout en s'efforçant de diriger l'attention à

un point étroit, on a toujours une série d'images assez

nombreuse dans sa mémoire, aussi l'association des

images est si vive qu'à chaque instant plusieurs autres

images entrent dans la scène et notre esprit compare

les unes aux autres. Le résultat de cette comparaison

est le jugement par lequel nous faisons la critique des

images qui viennent d'entrer. Cette fonction du cer-

veau est basée donc principalement sur la circonstance

que l'irritation qui vient d'entrer du dehors ne reste

pas limitée à un seul point, mais elle se répand à un

certain cercle et réveille des images antérieurement ap-

prises. Ce jugement est peu développé dans certains in-

dividus ; ceux-ci sont obligés d'accepter la dernièreim-

pression, parce que ou leurs images de mémoire sont

perdues, et en conséquence la dernière arrivée fait une

beaucoup plus grande impression que les anciennes,

is PATHOLOGIE NERVEUSE.

ou bien la faculté de comparaison manque-le premier

cas est le manque de mémoire, le deuxième le dé-

faut du jugement. Pendant l'hypnose, cet état est

développé à un haut degré dans la forme du défaut du

jugement, c'est qui se conçoit facilement. 11 est évi-

dent que, pendant le sommeil hypnotique les influences

extérieures peu énergiques produisent dans les images

de mémoire des irritations partielles, dont l'extension

varie selon la phase de l'hypnose, mais elle est tou-

jours entre des limites très étroites. De plus, nous

avons vu que ces irritations ne dépassent point les

limites de l'irritation extérieure et, si cela arrive, ce

n'est que sur les voies bien exercées. En conséquence

donc la comparaison et le jugement manquent, et les

images se présentent comme elles sont entrées. C'est

ainsi, quand on montre, par exemple, un oiseau fictif à

un individu hypnotisé, il le voit, le caresse, etc..

Si je voulais appliquer la comparaison avec le can-

délabre sur le sommeil ordinaire et le sommeil hypno-

tique, il faudrait supposer que durant le premier, le

robinet principal est presque tout à fait fermé, la plus

grande partie des becs est éteinte, seulement quel-

ques-uns ondoient de temps en temps produisant les

rêves. Pendant l'état de veille, le maniement des robi-

nets s'exécute par la volonté. Pendant le sommeil, il

est dirigé en apparence spontanément, mais en vérité

par des irritations sensitives, tandis que pendant l'état

hypnotique, c'est l'expérimentateur qui ouvre et ferme

à son gré les robinets.

Le sommeil hypnotique est donc un état d'équilibre

des fonctions de la substance corticale dans lequel

on parvient par des influences extérieures à irriter

DE l'hypnotisme. 49

partiellement l'écorce. Ces irritations ne s'étendent pas

au delà des limites étroites, tout au plus sur les voies

frayées par l'habitude et l'exercice. Cette extension est

en proportion inverse du degré du sommeil. L'in-

fluence extérieure fait fonctionner les parties corticales

qui échappent tout à fait à la volonté du sujet, et, ainsi

isolées fonctionnent très longtemps, si nous ne faisons

cesser l'irritation par une suggestion contradictoire.

Ainsi je trouve la cause des phénomènes hypnotiques

dans la perte ou la diminution de l'association.

En admettant la justesse de cette hypothèse, on

pourrait peut-être comprendre les phénomènes : pen-

dant la léthargie l'individu donne des réponses réservées

exclusivement aux lieux influencés par les agents

extérieurs, à peine s'il y a une petite distension par

des voies exercées. Dans la catalepsie l'harmonie des

poses différentes du corps et la correspondance de la

mine aux mouvements des extrémités, et vice versa,

prouve bien que nous sommes en présence d'une trans-

mission d'une certaine étendue dans la substance cor-

ticale. En considérant cette circonstance, il est facile

de comprendre que l'irritatiou gagnant d'étendue, perde

d'intensité : il n'y a plus de contracture, et ce ne sont que

les poses données pendant l'expérience [qui persis-

tent. Enfin pendant le somnambulisme, on réussit aussi,

en adressant des paroles au sujet, à produire des irri-

tations restreintes dans les parties les plus différentes

de la substance corticale. Toutefois, l'extension de cette

irritation n'atteindra jamais le degré qu'elle a à l'état

de veille, et de là la spontanéité manque absolu-

ment.

En attribuant ainsi à la même cause les symptômes

Archives, t. XII. 4

50 Pathologie nerveuse.

moteurs et les symptômes soi-disant psychiques, je

crois que nous sommes autorisés à identifier la contrac-

ture motrice avec les images positives suggérées,

taudis que la paralysie serait identique avec les phéno-

, mènes produits paroles expériences négatives, c'est-

à-dire expériences qui ont pour but de faire dispa-

raître des images fictives provoquées ou des images

réelles. -

On peut réussir aussi à produire des suggestions

sans hypnotisation, au moins chez quelques individus,

et cette susceptibilité peut atteindre presque un degré

pareil à celui du sommeil hypnotique; mais il est hors

de doute que ce n'est pas un état normal. On en ren-

contre des exemples bien marqués dans l'hystérie, et ces

cas ont une grande importance dans la médecine

légale.

Si on a étudié ces suggestions, si on a observé com-

bien il est facile de les produire, on se gardera bien

de tirer des conclusions physiologiques des expériences

hypnotiques, ou bien on le fera avec une très grande

restriction. Sans nous en apercevoir nous guidons le

sommeil du sujet, et, si nous insistons à étudier les

phénomènes, nous produisons un grand nombre des

symptômes nouveaux. Voilà la cause pour laquelle il y a

presque autant de formes de sommeil hypnotique que

d'observateurs qui s'en sont occupés; après cela je

reviens à la question, que j'ai posée au commencement

de cette étude. En jetant un coup d'oeil sur les des-

criptions de l'état hypnotique des divers auteurs, on

trouve des différences telles qu'il faut se demander

s'il y a autant de formes de cet état, ou bien si les expéri-

mentateurs ont une influence sur les phénomènes.

DE LHYPNU'l'1W 1L ? 51

Cette circonstance prouve déjà qu'une très grande

partie des symptômes est due à l'intervention de l'ex-

périmentateur. Combien il est facile de guider un in-

dividu hypnotisé est assez démontré par les expériences;

en voici un exemple : on peut provoquer une paralysie

d'un membre sans mot dire, par quelques passés seule-

ment ; - on la peut aussi faire disparaître par le

même procédés

Lés expériences de Heidenhain et'Grütrner' prou-

vent aussi combien ces examens sont inaptes à donner

des résultats sur certaines questions physiologiques. Ces

scrutateurs ont produit par des passes sur le' visage

l'hémi-catalepsie, mais dans trois cas elle se présentait

au côté opposé des passes, dans un cas du même côté.

Touchant ces cas, Heidenhain et Grùtrner font remarquer

qu'on n'a pas une explication suffisante sur ces contra-

dictions, sinon qu'on veut recourir à l'irritation des vaso-

moteurs ; j'avoue franchement que, même avec cette

hypothèse, je ne pourrais pas les comprendre^ Et, dans

d'autres cas, cette explication donne des résultats plus

contradictoires encore : dans deux cas, en irritant lé

côté droit cette irritation fut suivie dé l'aphasie; dans

deux autres cas, l'aphasie accompagnait l'irritation du

côté gauche. De ce fait ils déduisent que, si l'entre-

croisement des voies sensitives est réelle, chez les

deux premiers, c'était l'hémisphère gauche où siégeait

la faculté du langage ; chez les deux autres, c'était

l'hémisphère droit; mais quelques' lignes plus bas, nous

lisons que, chez un vigoureux ! jeune homme, tantôt le

côté droit, tantôt le côté gauche devenaient cataleptiques

p 11" t

1 Bl'esl, I rat(. 7eüschri/'t. 980, 11, 4. ' r . ? 1 ! ,

: i2 PATHOLOGIE NERVEUSE.

et l'hémi-catalepsie des deux côtés était accompagnée

de l'aphasie.

Quant aux trois phases de l'état hypnotique de

M. Charcot, ils ont le grand mérite d'avoir complété

nos connaissances de cet état très précieux pour les

études de la fonction du cerveau; mais il est encore

difficile à juger s'ils sont produits artificiellement ou

s'ils correspondent de l'organisation de l'écorce céré-

brale. D'un côté, il y a tant de transitions, de formes

frustes, des états pour ainsi dire interposés entre les

phases typiques, qu'on est tenté de prendre ces phases

pour être produits par l'éducation involontaire de l'ex-

périmentateur. 1l plaide en faveur de cette opinion cette

circonstance qu'au commencement des expériences les

phases sont loin de se montrer aussi distinctes, comme

après des exercices souvent répétées; que, chez la plu-

part des sujets, on n'arrive pas à produire ces phases;

ni l'un ni l'autre ne tombent dans un état qui est cer-

tainement hypnotique, mais qui n'a pas les caractères

d'aucune phase, enfin il n'y a que très peu d'expéri-

mentateurs qui ont réussi à produire ces phases. De

l'autre côté, au contraire, M. Charcot a présenté tant

d'exemples, qui entre eux s'accordaient au moins pour

les principaux symptômes tout à fait, et d'ailleurs,

comme je viens de montrer ces phases correspondant

à des degrés différents de l'extension de l'irritation ex-

térieure dansle cerveau, -et puis, ces « grands hypno-

tiques » n'ont pas de transitions entre leurs phases -

tous ces points peuvent s'attacher aussi à l'organisation

du cerveau. C'est seulement une possibilité, que je

veux pourtant mentionner sans pouvoir l'affirmer,

mais qui me semble avoir quelque vraisemblance. Il

DE L HYPNOTISME. 53

est connu que les différentes parties de l'écorce sont

liées entre elles par des fibres d'association. Nous

sommes encore loin de les connaître toutes, mais nous

en connaissons déjà quelques systèmes. Il y a là le

réseau qui lie les cellules ganglionnaires entre elles,

puis les fibres qui établissent la communication entre

les circonvolutions voisines, et il y a des fibres qui

sont tendue entre des champs plus éloignés. Or, le rôle

physiologique de ces systèmes en particulier n'est pas

encore connu, et en conséquence on ne peut pas fonder

une hypothèse sur cette organisation anatomique, mais

il n'est pas tout à fait impossible que les diverses phases

de l'hypnotisme correspondent à la perte d'un ou plu-

sieurs de ces systèmes d'association. Selon ce que je

viens de relater, le sommeil le plus profond se rencon-

trera avec la plus grande perte de l'association. Ainsi

on pourrait supposer que chez ces « grands hypno-

tiques », on peut parvenir expérimentalement à para-

lyser, selon les phases de l'état hypnotique, les fibres

des divers systèmes d'association.

En terminant, je saisis avec plaisir l'occasion de

remercier M. le professeur Charcot delà libéralité avec

laquelle il m'a donné la permission, pendant mon

séjour à Paris en 1884, de travailler dans son labora-

toire et d'assister aux expériences hypnotiques de son

service.

RECUEIL DE FAITS

NOTES SUR, LES HÉMORRAGIES CUTANÉES

la ' PAR AUTO-SUGGESTION;

Par le Dry. MABILLE, directeur médecin en chef de l'asile de Lafond,

La Rochelle, et le Dr J. RAMAD1KR, médecin adjoint.

A la date du 29 août 1885, l'un de nous a publié dans le

Progrès médical une note sur les hémorragies cutanées par

auto-suggestion dans le somnambulisme provoqué.

« Il s'agit dans ce cas, disons-nous, d'une hémorragie qui

s'est produite durant le,somnambulisme provoqué ou plutôt

durant le sommeil provoqué par suggestion à terme, sans

aucun intermédiaire et au lieu et place de stigmates anciens,

parce que' nous croyons pouvoir appeler auto-suggestion...

Et cette auto-suggestion a été comme le réveil et l'extériori-

sation de, sensations antérieurement emmagasinées. »

A vrai dire,' dans ce cas, l'expression d'auto-suggestion

dans le sens propre du mot, pouvait prêter à discussion ; car

l'explication que nous donnions nous-même du fait produit,

laissait percer l'idée d'une origine purement mécanique, sans

que la volonté du sujet fût entrée d'une façon bien manifeste

dans l'accomplissement' de l'acte. Tout autre semble, dans

une certaine limite du moins et pour une part que nous déter-

minerons plus loin, l'ensemble de faits suivant :

Le 2 février 1886, vers une heure de l'après-midi, V... est

pris dé vomissements avec accès hystéro-épileptiques qui se

prolongent pendant près de trois heures. Vers sept heures el

demie du soir, nouveaux vomissements et crises nouvelles

pendant lesquelles nous observons divers déroulements de

personnalité2. Puis, à huit heures du soir, en présence de

1 H. Habille. - Notes sur les hémorragies cutanées par autosuggestion

dans le somnambulisme provoqué. (Progrès médical, t. Il, il,, 35.)

2 Dans un travail que nous publierons prochainement, nous décrirons

cet état spécial pendant lequel, spontanément et dans un temps très

DES HEMORRAGIES CUTANEES. 05

M. Chuvelot, interne, et des infirmiers de service, V... se com-

prime les lobes oculaires comme pour se mettre en léthargie,

les ouvre comme pour passer à l'état cataleptique, se fric-

tionne le vertex comme pour aboutir au somnambulisme et

prononce les paroles suivantes :

« V..., il y a quatre lettres à votre nom ; cinq minutes

après votre réveil, il faut que ça saigne à votre bras. » A son

réveil, légères démangeaisons au bras gauche. V... cherche

à se frotter le bras qu'on est obligé de maintenir; puis il

tombe dans l'état particulier que nous observons habituelle-

ment chez lui lorsque le terme d'une suggestion approche.

Quelques minutes après, on voit la peau de l'avant-bras

gauche se congestionner; il se produit une sorte de gonfle-

ment à l'endroit où bientôt vont apparaître des gouttelettes de

sang, formant les quatre lettres de son nom (lettres de un

centimètre et demi de hauteur). Quelques minutes après,

V... s'hypnotise par le procédé décrit plus haut et s'exprime

ainsi : « V..., dans cinq minutes, il y aura un A sur votre

front et cet A saignera ».

Au moment correspondant à la suggestion, en présence de

M. le Dr Ramadier, appelé par M. l'interne, les assistants

notent sur le front de V... d'abord une rougeur, puis du gon-

flement ; et enfin des gouttelettes de sang dessinent la lettre

A, sur la partie médiane du front, un peu à gauche (1 cen-

timètre de hauteur).

A partir de ce moment, état de crises avec déroulement de

personnalités diverses, crises de la vipère, une des phases de

son accès d'hystéro-épilepsie ; puis à dix heures du soir, nous

constatons que par une sorte d'auto-hypnotisme, V... s'en-

dort comme précédemment et tient le langage suivant :

« V..., il y a.quatre lettres à votre,nom. Un quart d'heure

après votre réveil, elles seront marquées sur votre cuisse

gauche et saigneront ». Quatre minutes seulement après cette

auto-suggestion , une rougeur commence à apparaître à la

cuisse gauche, puis après la période de gonflement, le nom de

V... est écrit sur la gauche (3 à 4 centimètres de hauteur) et

saigne.

Voilà donc au milieu de crises hystéro-épileptiques, l'appa-

court, le malade en état de crises se transporte à des âges divers et

successifs de sa vie, état psychique qui entraîne un état somatique tou-

jours le même.

56 RECUEIL DE FAITS.

rition spontanée de stigmates sanguinolents constatée par

nous pour la seconde fois sur le même malade. Comme nous

l'avons dit plus haut, lors des stigmates qui surgirent sponta-

nément le 29 août 1885, ces hémorragies se produisirent au

lieu et place de stigmates anciens antérieurement suggérés

au malade. Les stigmates du 2 février 1886, au contraire, ont

apparu alors que, depuis plusieurs mois aucune suggestion

de cette nature n'avait été faite à V... Et sur trois hémor-

ragies constatées, les deux dernières observées, celles du front

et celle de la cuisse gauche se sont produites en des endroits

qui n'avaient jamais été choisis, comme siège de la suggestion.

Il n'est pas douteux que, dans notre cas, l'apparition des

hémorragies cutanées ait lieu d'une façon à peu près méca-

nique. En effet, elles seront produites au milieu d'une série

de crises hystéro-épileptiques et il n'a pu dépendre du malade

d'empêcher leur production, pas plus qu'il n'est maitre de

s'opposer au déroulement de ses personnalités et de sa crise

elle-même. Elles ont bien été connues précédemment comme

le réveil d'anciens souvenirs. Néanmoins, il nous parait diffi-

cile de dire que la volonté de V... ne s'est pas manifestée dans

une certaine limite, puisque les hémorragies se sont produites

en des points non encore choisis par les expérimentateurs, et.

sous ce rapport, il n'y a pas eu de la part de V... qu'une

simple extériorisation de souvenirs emmagasinés. Il semble

y avoir eu dans ce cas une sorte d'auto-suggestion véritable.

Nous insisterons en terminant sur le lieu d'élection, chez

notre sujet, des hémorragies suggérées ou spontanées. Ces

hémorrhagies se produisent toujours du côté gauche du corps,

c'est-à-dire du côté hyperesthésié, l'autre côté étant anesthési-

que, fait signalé déjà dans le mémoire de MM. Bourru et Burot '.

Pour le démontrer d'ailleurs, l'un de nous a eu l'idée de

provoquer par suggestion le transport de la sensibilité et a pu

obtenir de cette façon des stigmates à droite, alors qu'il fut

impossible de les produire à gauche, ce côté étant devenu

-anesthésique.

* Bourru et Burot. - Des stigmates sanguinolents provoqués par sug-

gestion. (Congrès de Grenoble, 1885.)

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE

t. MYÉLITE SUBAIGUE DES CORNES antérieures. - Paralysie avec

ATROPHIE GRADUELLE DE TOUS LES MUSCLES DU CORPS, SAUF CEUX DE

LA FACE. ARTHROPAT111ES AIGUËS. - DISPARITION COMPLÈTE DE

TOUS LES ACCIDENTS AU BOUT DE TROIS MOIS ET DEMI ; par le Dr E.

DUFOURT, chef de clinique. (Lyon méd., 1885, t. XLVUI.)

Cette observation, relative à un jeune homme de dix-sept ans,

chez lequel la paralysie ne s'est complétée qu'au bout de quinze

jours, démontrerait, d'après l'auteur, l'existence d'une forme de

myélite des cornes antérieures, intermédiaire au point de vue de

sa marche entre la paralysie spinale de l'adulte et la paralysie

générale spinale, à marche diffuse et curable, décrite par Lan-

douzy et Dejerine.

Parmi les phénomènes les plus intéressants présentés par ce

malade signalons : 10 l'apparition de plusieurs arthrites aiguës ;

20 la persistance de l'abolition de la contractilité faradique après

le retour de la motilité; 3° une accélération du pouls semblant

appartenir à l'excitation de la région cervicale de la moelle.

G. D.

II. ERYSIPÈLE PÉRIODIQUE DES MEMBRES INFÉRIEURS AU COURS D'UNE

MYÉLIt'E chronique : par M. D. TEISSIER. (Lyon méd. 1885,

t. XVIII.)

III. Observation DE M6 : N1NG1TESUpI'URÉE par infection, A LA SUITE 1)*UNE

fracture DU CRANE compliquée DE plaie, indication de la trépana-

TION ; par.-Ni. le Dr GOULLIOUD, clef de clinique. (Lyon méd., 1885,

t. XLVI11.)

IV. DES CRISES d'épilepsie LIÉES A l'arthritisme ; par M. B. TEISSIER.

(Lyon méd., -1883, t. XLVIII.)

L'auteur rapporte en quelques mots l'observation de cinq ma-

lades qui, sans autre antécédent que le rhumatisme ou la goutte,

ont présenté à diverses repri ses et sans cause appréciable des crises

d'épilepsie. G. D.

58 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

V. Myélite chronique diffuse ; par le Dr Raymond, agrégé, médecin

de l'hospice des Incurables. (Gaz. met. de Paris, 1884.)

Cette observation de myélite classique est suivie d'une longue

étude micrographique de la moelle, des diverses parties de l'encé-

phale, des nerfs périphériques, des muscles et de la peau, etc.,dans

le but d'établir J'influence d'une destruction plus ou moins com-

plète de la moelle pendant vingt et trente ans sur l'état ana-

tomique du cerveau et de tous les organes en général. G. D.

VI. Contribution A l'étude DE l'aphasie; parM. 13ALZI,-R, médecin des

hôpitaux. (Gaz. '7 ! ëd. de Paris, <884.)

La première observation contenue dans cette note est un

exemple d'aphasie motrice avec un certain degré de surdité et do-

cécité verbales et d'amnésie générale. A l'autopsie, on trouva

deux petites plaques jaunes au niveau de la troisième circonvolu-

tion frontale gauche et un immense foyer de ramollissement occu-

pant presque toute la première circonvolution temporale et le pli

courbe du même côté.

Dans la deuxième observation, la suppression des opérations du

langage a été déterminée par une méningo-encéplialite tubercu-

leuse, dont les lésions sont restées exactement localisées à la partie

moyenne de l'hémisphère gauche (partie postérieure de la troi-

sième frontale, scissures de Sylvius, de Rolando et temporo-

frontale.

VU. SUR l'origine corticale du facial inférieur ; par le Dr Raymond,

agrégé, médecin de l'hospice des Incurables. (Gaz. méd. de

Paris, i 884.)

On trouve dans ce travail outre la relation de plusieurs cas de

paralysie faciale empruntés à différents auteurs une nouvelle ob-

servation de la même affection suivie d'autopsie, personnelle à

l'auteur. Comme dans les cas analogues, la lésion occupait la

circonvolution frontale ascendante (un tiers inférieur) du côté

opposé à la paralysie. Les considérations qui suivent sont des

tinées à montrer la concordance parfaite qui existe pour limiter

à la frontale ascendante dans son tiers inférieur le centre des

mouvements de la face. G. D.

VIII. UN cas d'hémianesthésie DE cause cérébrale avec MOUVEMENTS

anormaux du bras ET DE la jambe; par le Dr RAYMOND, médecin

de l'hospice des Incurables. (Gaz. méd. de Paris, 1884.)

La malade qui fait le sujet de cette observation ne rentre pas

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 59

dans le cadre des hémichorées symptomatiques vulgaires; le*

inconvénients qu'elle présente ne peuvent, en effet, être comparé*

àceux de la chorée, car ils ne soûl ni involontaires ni continus ;

ils ne se produisent qu'à l'occasion d'une excitation périphérique

volontaire ou sensitive et présentent une exagération allant pres-

que jusqu'à simuler l'épilepsie jacksonienne, ce qui prouve qu'à

la suite des lésions cérébrales, même lorsque la zone corticale est

indemne on peut observer tous les degrés dans les troubles de la

motilité. G. D.

IX. DES LOCALISATIONS MÉNINGÉES ET ENCÉPHALIQUES DES AFFECTIONS

catarrhales ; par le 1)' Raymond, médecin de l'hospice des

Incurables. (Gaz. méd. de Paris, z884.)

La conclusion de ce travail est, que le cerveau et les méninges

n'échappent pas, comme l'avait déjà démontré M. Marotte , aux

localisations des atlectlous catarrhales, saisonnières ou épidémi-

ques. A l'appui de cette conclusion se trouvent relatées plusieurs

observations de fièvre calarrbale accompasnées d'encéphalite et

même dans un cas de méningite suppurée.

X. DE LA MÉNINGITE 'fUI3EItCULEU31's SURYEKANr A LA SUITE D'OPERA-

TIONS CHEZ LES tuberculeux; service de M. VERNEUIL; leçon re-

cueillie par M. PAUL Berthod. (Gaz. m(M. de Paris, 4884.1

XI. Deux cas de lésion cérébrale; par le Dr A. Brousse, chef de

clinique de la faculté de Montpellier. (Gaz. mid, de Paris, 1884.)

Il s'agit de deux vieillard» morts hémiplégiques ; les lésions

trouvées à l'autopsie étaient conformes à la doctrine des localisa-

tions cérébrales.

XII. Ess Il DE localisation d'une cécité accompagnée D'HÉMICHORÉE ;

par H. 11ALLOPEAU, agrégé à la faculté (Union méd., l«811,

t. XXXIX.) -

Un homme âgé de quatre-vingt-trois uns, aortique, fut atteint

soudainement d'une cécité complète en même temps que d'une

agitation choréiforme dans la moitié gauche du corps et de mou-

vements de rotation. Ces accidents 'après avoir persisté pendant

quelques jours avec intensité, se sont peu à peu dissipés. L'auteur

pense qu'ils doivent être attribués à une embolie siégeant dans

une des artères, qui se distribuent aux tubercules quadrijumeaux

du côté droit et plus probablement dans l'une des branches an-

térieure". G. D.

60 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

XIII. LES localisations cérébrales DE L HERPÉTISÜE par le Dr LAN-

CEREAUX, leçon clinique recueillie par M. OEïTiNGER. (Union

méd., 1885, t. XXXIX.)

Cette leçon est consacrée à la description deo symptômes, de

l'évolution, des modes de terminaison et du traitement préventif

de l'ischémie, du ramollissement, et de l'hémorrhagie centrale. Ces

trois lésions, pour M. Lancereaux, ne correspondent pas à des

maladies distinctes, ce sont des accidents alternes d'un même état

général, l'athérome artériel ou endartérite généralisée. Cet

alhérome ne serait lui-môme qu'une manifestation avancée d'un

état morbide général que M. Lancereaux désigne sous le nom

d'herpétisme, et auquel il rattache des troubles nerveux multiples.

l'arthrite déformante, les varices des membres, etc... G. D.

XIV. Cas DE méningite cérébro-spinale chronique; par ? H. HADDEN.

(Trans. of the path. Soc. of London, f884-8,ï.)

Il s'agit d'un garçon de onze ans dont un frère était devenu

monoplégique à la suite d'une attaque et qui présenta les

premiers symptômes de méningite consécutivement à un trau-

matisme léger du crâne. Ca. F.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE

1. Base anatomique de L'ÉPILEPSIE; parWALTER HAY.

(Bulletin Médical de Philadelphie, févr. 1886.)

L'auteur désire appeler l'attention sur le pronostic de l'épi-

lepsie liée à une lésion anatomique de l'encéphale; ce qui

existe le plus souvent quand l'épilepsie date de longtemps. Les

traumatismes du crâne et du cerveau sont souvent suivis

d'épilepsie, qui, au début, peut être guérie par la guérison de

la lésion initiale. Il a trois cas d'épilepsie traumatique person-

nels : le premier est celui d'une femme, qui survint à la suite

d'une chute de cheval avec enfoncement des os. Il se proposait

d'appliquer le trépan, qui fut repoussé par un médecin consul-

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. () 1

tant. Plus tard, les lésions étaient devenues définitives. Le

second cas relate une chute sur le côté gauche de la tête,

ayant enfoncé la suture sagittale, sur une longueur de trois

quarts de pouce. Au bout de trois mois, l'épilepsie se développa

et durait déjà depuis douze semaines quand W. Hay vit la

malade. Il reconnut les traces d'une fracture sans dépression

notable et proposa le trépan, mais deux chirurgiens s'y refu-

sèrent. Le médecin ordinaire avait constaté un décollement

du cuir chevelu, mais niait la fracture-trépanation, constata-

tion de la fracture avec dépression. Pas de nouvelles postérieures

de la malade. Un autre cas, soigneusement examiné, était celui

d'un homme de trente-trois ans, épileptique depuis l'enfance.

Le nombre exact d'années était impossible à préciser. C'était

donc un épileptique permanent. Aucun renseignement ni du

malade, ni du médecin qui le soignait depuis fort longtemps,

ne pouvait faire penser à un traumatisme. Mais on sentait sur

la tète une large dépression en arrière de l'apophyse mastoïde.

Proposition de trépaner. On apprit alors que le malade avait

fait, avant l'âge de trois ans, une chute de cheval. Dans ce cas,

comme le montre l'opération, un fragment osseux d'un demi

pouce de long avait été projeté contre le cerveau et adhérait

par sa face externe à l'os nouveau, formé au-dessus de lui.

On enleva cette esquille sousle chloroforme. Quatre jours après

le malade pouvait se lever, mais les attaques continuèrent

comme devant. L'intervention était trop tardive car les lésions

cérébrales étaient définitives, mais elle n'en reste pas moins

une pratique recommandable. (,lIed. Bullet. de Philadelphie,

févr. 1886). P. C.

II. Contribution A L'ÉTUDE DE la folie épileptique; par F. FICHER.

(ArcA.y. Psych., aV, 3).

Deux observations prouvant que, quoi qu'en ait dit Samt, il

existe chez la femme une folie purement épileptique sans aucun

mélange d'hystérie. Quelles que soient d'ailleurs les combinaisons

entre elles des deux névroses, l'épilepsie se reconnaît à l'excita-

bilité impulsive, à l'absence de toute notion de morale élevée,

de là des actes pervers ayant toutes les allures de délits volon-

taires. L'épileptique agit au gré de déterminations extrêmes;

le raisonnement régulateur manque. Le caractère de la femme

épileptique diffère de celui de l'homme atteint de cette névrose

en ce que le mode d'accomplissement de l'acte procède chez elle

d'un certain raffinement. On y découvre encore un facteur d'or-

lU revue de Pathologie Mentale,

dr<' sexuel (fausses sensations locales). Si, en ce qui cuncerne les

accès rudimentaires, il est vrai qu'au premier abord, il semble

n'y avoir pas d'uniformité symptomatique chez un malade donné

(Witkowsky 1) à raison de la prédominance de tel ou tel élément

morbide aujourd'hui et demain, on réussit néanmoins par une

observation minutieuse à déceler les symptômes frustes et, par

suite, un ensemble psychopathique uniforme, non seulement

dans un cas particulier, mais chez tous les épileptiques. Quant a

la folie épileptique sans troubles de la connaissance, sans aucune

lacune de la mémoire, cela n'existe pas, mais il y a lieu de tenir

compte des observations de Fuerstner et d'observer à toutes les

minutes une atfection éminemment nuancée. P. K.

III. L'assistance des aliénés en ESPAGNE : par A. SCaMIT2. (Allg.

Zeitsch. f. Psych., XLI, 3.)

L'auteur conteste à Pinel le mérite d'avoir délivré les aliénés ,

en 1409, on aurait fondé à Valence la Casa de Orates ayant pour

but le traitement diététique, moral, humain, des aliénés. Suit

l'historique de la question en Espagne, sous tous ses aspects avec

analyse de documents, tableaux, statistiques. En 1847, on y

comptait 66 établissements hébergeant 1,626 aliénés, dont 1,475

entretenus par les communes et <31 pensionnaires; on ne comp-

tait que 4 établissements provinciaux ayant le caractère d'asile,

d'aliénés spéciaux. En -1880, il existe 26 asiles spéciaux contenant

' ? ,164 aliénés de plus que les 66 établissements en question. Citons

les asiles provinciaux de Mérida (fondé en 1852), Tolède (Badajoz.

1853), Valladolid (1852), Sarr,lgosse (1839), Cadix (1862), Grenade

(1855), Salamanque (1851), Séville (18p3), Teruel (1864). Valence

(1869). P.K.

IV. UN cas de porencépualie avec idiotie ET RIGIDITÉ spasmodique

congénitale DES membres; par R. OTTO. (Arch. f. Psych., XVI, 1.)

Garçon de quatre ans présentant une série de phénomènes

dont la suscription donne une idée suffisante (longue observa-

tion). Voici le résumé des altérations anatomo-palhologiques.

Crâned'unenfantdedix mois.Poids del'encéphale-470nr.,dont

130 gr. pour l'hémisphère droit, 180 gr. pour l'hémisphère

gauche. Lacunes porencéphaliques dans les deux hémisphères, et

cicatrices surajoutées dans l'hémisphère gauche. Les pertes de

substance porencéphaliques de droite affectent un trajet général

1 Voy. Archives de Seurulogie, t. X, p. 231 et 257.

2 Voy. Revues analytiques, t. V, p. 259. " '

REVUE DE Pathologie mentale. Ii : j

représenté par une ligne qui, placée en avant du sillon perpendi-

culaire externe, descendrait après avoir contourné la face interne,

entre le lobe pariétal et le lobe occipital pour se replier sous la

face inférieure du lobe temporal et de la gagner la pointe anté-

rieure de celui-ci; à gauche, la direction est la même, seulement

ici la ligne passe dans le sillon perpendiculaire lui-même et

occupe dans tout son trajet une situation plus postérieure. La

cicatrice de gauche porte sur le territoire de la scissure de Syl-

vius, à partir de la racine de la troisième frontale en enlevant un

morceau de la deuxième frontale. L'irrégularité des destructions

empêche la détermination précise partout des déficits. Ont mani-

festement disparu : à droite, la partie antéro-supérieure de

l'avant-coin, les segments inférieurs des 2° et 3° temporales, une

portion du pli courbe (gyrus angulaire) ; à gauche, la 2o et une

partie de la 3° temporale, un étroit morceau de la vira occipitale

et du gyrus angulaire, un étroit segment du début des 2" et

3e frontales. Toutes les parties voisines, si elles ne sont pas

détruites, ont perdu leur morphologie normale : l'insula n'est

plus, à droite ni à gauche, couverte par l'opercule. Anomalies

multiples dans le développement et la direction des circonvolu-

tions des divers lobes. (Voy. le mémoire et les planche*.) Intégrité

des autres parties du système nerveux, mais le pédoncule céré-

bral droit et la moitié droite du bulbe sont peu développées (pas

d'altérations microscopiques). M. Otto adopte les opinions de

Kundrat; dans l'espèce, l'anémie maternelle (surmenage moral

et physique) a déterminé l'ischémie foetale (ramollissement). L'état

psychique de cet idiot se rattachait aux déformations et agéné-

sies cérébrales; l'absence de la parole provenait de l'atteinte de

la circonvolution de Broca du côté gauche. Quant aux phénomènes

spasmodiques du tronc et des membres, sans anomalies de l'exci-

tabilité électrique, sans atrophies, sans troubles de la sensibilité

générale, sans perturbation dans le réflexe tendineux patellaire,

sans clonisme podalique, émanaient-ils des destructions des

ascendantes et de leur voisinage ? Les recherches d'Adamkiewicz

sur la pression cérébrale (Acad. des sciences de Berlin, t. LXXXV111,

III. Oct. 1883) permettent d'incriminer ces régions. P. K.

V. Communication concernant LES RECHERCHES SUR LES échanges

nutritifs (bilan physiologique) DES aliénés SITIOPHOBES pendant

LEURS périodes d'abstinence ; par F.TUCZEK (Arch. f. Psych., XV, 3)'.

Observation I. Folie systématique chez une demoiselle de

trente-deux ans. Hallucinations de l'ouïe. Idées de persécution

entées sur des idées de grandeur. Période d'abstinence absolue

1 Voy. Arch. de Neurologie, t. IX p. 106.

(;4 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

de vingt-trois jours; puis la malade se remet spontanément à

manger ; retour rapide du statu quo antérieur. - M. Tuczek

n'intervient pas parce que l'introduction de la sonde oesopha-

gienne nécessiterait une lutte (danger de lésion : pneumonie

alimentaire), parce que cette lutte entraînerait des troubles

trophiques et provoquerait de nouvelles idées délirantes, parce

qu'antérieurement un épisode identique s'était évanoui de lui-

même, parce qu'au début de- ce second épisode la nutrition de

la malade est en bon état, parce que, pendant son évolution,

l'aliénée demeure au lit dans une chambre chaude (conservation

de la provision de graisse de l'économie), parce qu'enfin aucun

phénomène menaçant ne se montre.

Observation Il. - Folie systématique chez une femme de trente-

huit ans. Idées de persécution greffées sur des idées de grandeur.

Abstinence incomplète de vingt-huit jours. Les mêmes motifs

s'opposent à l'intervention ; de plus, la malade prend presque

chaque jour de petites quantités de liquide. Guérison.

Tableaux très détaillés à tous égards dont les conclusions sont

consignées dans le compte-rendu du IX° Congrès des neurolotistes

et aliénistes de l'AI ! emagne du Sud-Ouest de 1884'. Les allures

stoechiologiques en question diffèrent-elles de celles que présen-

terait un individu psychiquement sain se trouvant dans les

mêmes conditions ? Il faudrait faire des essais parallèles 2. Il est

remarquable de voir la diminution de l'excrétion indiquant une

diminution de la nutrition (hibernation). Ces malades perdant

peu d'albumine, l'expectation a sa raison d'être à la condition

qu'on observe avec la plus grande conscience l'état des forces et

qu'on prévienne toute complication physique. P. K.

VI. Communications casuistiques DE l'asile D'ANDE1\NACH POUR

la province du RHIN; par 0. HEBOLD. (i ? 'Ch. %. Psych., XV, 3.)

Observation I. Gliome intramédullaire de la moelle épinière. -

Surprise nécroscopique. Homme de quarante-deux ans, atteint

d'aliénation mentale depuis six mois (mégalomanie, phénomènes

paralytiques, affaiblissement psychique). Il y a deux mois,

sensation d'oppression douloureuse dans la moitié gauche du

thorax; accès passagers d'affolement cardiaque, suicide. Autopsie.

Néoplasme occupant la portion centrale de la région cervicale

de la moelle. llIéningo-périencéphalit0. Dégénérescence secon-

daire des faisceaux pyramidaux dans les cordons anléro-latéraw

et des cordons postérieurs. Planche à l'appui.

1 Voy. Arch. de Neurologie, t. IX, p. 107.

2 Comparez avec le mémoire de Siemens, Arch. de Neurologie, t. IX,

p. 268.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 65

Observation IL Glio-sarcome cérébral. Epilepsie. Tumeur

occupant la couche optique et le corps strié d'un côté. Homme

de quarante-deux ans; modification intellectuelle depuis onze

ans; les premiers symptômes d'épilepsie datent de quatre ans;

ils sont suivis d'hébétude et d'agitation : affaiblissement de la

mémoire. Il y a trois mois, troubles de la vue, suivis de complète

cécité. Aphasie. Pendant le dernier mois, état de mal avec

hébétude permanente et secousses convulsives dans les extré-

mités droites. - Autopsie. Tumeur occupant à gauche une partie

des ganglions centraux et de la couronne rayonnante du

lobe temporal. Névrite étranglée des deux nerfs optiques, Hémor-

rhagies capillaires dans la substance grise de la moelle. Dégéné-

rescence secondaire des cordons latéraux et postérieurs.

Observations 111. Cysticerques du cerveau et de la moelle. -

Femme de soixante-trois ans. Parents indemnes, mais. soeur

idiote, hémiparétique. Originalité, hystérie, accidents mens-

truels. Il y a sept ans, agitation due à des hallucinations de l'ouïe

et à des idées de persécution. Gâtisme. Il y a six ans, première

attaque d'épilepsie; depuis lors, attaques fréquentes souvent

accompagnées de vomissements; il y a quatre ans, cécité. Phéno-

mènes paralytiques ; troubles de la sensibilité et de la parole.

Autopsie. Un cysticerquesous la pie-mère spinale; nombreux cysti-

cerques sous la pie-mère encéphalique et dans l'écorce du cerveau ;

un cysticerque libre dans le ventricule latéral et l'espace dure-

mèrien ; cysticerques dans le myocarde et sous la plèvre costale.

Deux dessins indiquent les endroits lésés. P. KÉRAVAL.

VII. Du SUICIDE DANS LES ASILES d'AHÉNÉS ; par HASSE (Alfy.

Zeitschr. f. Psych., XLI, 3).

Le suicide est le cauchemar du médecin d'asile. Statistique à

cet égard de l'asile de Koenigslutter depuis sa fondation (1 ? dé-

cembre 1865 au 1,,r janvier 4881); en tout dix suicides.'L'auteur en

relate les obsevations eu les accompagnant d'analyse critique

très complète. En somme, la proportion des suicides par rapport

aux 4089 malades traités ou hospitllisés en dix-huit ans, est de

0,00025 p. 100. Les observations prouvent : 10 qu'aucune forme

d'affection psychique n'échappe au suicide, à l'exception peut-être

de la manie pure; 2° que la mélancolie et la dépression doulou-

reuse avec les idées délirantes qui l'accompagnent et l'affectivité

passionnelle qui la concerne (angoisse) constitue le terrain géné-

rateur du suicide ; 3o que les hallucinations, notamment celles de

l'ouïe (voix de Dieu, d'une puissance suprême, d'un époux, d'un

parent, d'un enfant, de la loi) et aussi celles de la vue (apparitions

indicatrices ou menaçantes) favorisent son exécution; 4° qu'il peut

encore y avoir suicide dans les cas de dépression brusque, momen-

archives, t. XII. 5

6(; REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

tanée, d'obsession optative, de sensation, de réflexion subite, de

méchanceté impulsive, d'extase. Remèdes. Les faits du quatrième

groupe échappent à la répression prophylactique; on sollicitera

constamment la surveillance et l'on s'opposera à l'imitation

(hystérique) en enlevant sur-le-champ le corps du délit (cadavre

du suicidé), et en n'y faisant pas attention. On mettra dans un

quartier spécial les malades qui sont sujets à des impulsions dépres-

sives, soit qu'ils présentent une tournure d'esprit ou de délire pou-

vant y donner lieu, soit qu'ils offrent les caractères de l'imbécillité

ou de l'épilepsie. Même pratique à l'égard des anxieux, des hallu-

cinés dans ce sens. L'installation d'un service propre à ces malades

et aux nouveaux arrivants, constitue, de même que les chambres

d'isolement, l'appareil obligatoire de préservation. L'étude

complète de chaque malade et son traitement moral sont affaire

de technique médico-administrative, de tact, d'assistance, bonne,

attentive, intelligente. P. K.

VIII. SUR une épidémie DE fièvre typhoïde A l'asile provincial

D'OSLBRUC6 ; par 1.\TII (Allg. Zeitschr. f. Psych., XL[, 3).

L'affection fut importée par un des médecins de l'établissement.

L'auteur suit lacontagion pas à pas. Il attribue cette contamination

(culture du germe et sa propagation) à l'encombrement, à la

défectuosité partielle des latrines, à des lacunes hygiéniques

d'ordre architectural. Chose remarquable, le quartier d'infirmes

et de gâteux, les aliénés et les serviteurs occupés à la buanderie

demeurèrent indemnes. Aucune accusation à formuler contre

l'eau potable (puits à 70 mètres foré dans le roc), contre le sous-

sol (rocailleux, pur de toute souillure). La'contagion n'eut pas

lieu de personne à personne, mais d'un édifice à un autre, d'un

étage à un autre, de chambre à chambre : foyers d'infection

disséminés dus évidemment aux lieux d'aisance. Sur quatre cent

cinquante aliénés, vingt-quatre furent atteints, les trois quarts

étaient des femmes, dont la moitié avait de vingt-six à trente-

cinq ans. Sur quatre-vingt-cinq individus sains d'esprit, cinq tom-

bèrent malades. L'évolution, identique, comme type, chez tous,

parut plus atténuée et moins longue chez les aliénés; elle dura, en

moyenne, vingt-deux jours chez eux, aboutit à une convalescence

courte, ne détermina pas de lésions consécutives et se traduisit,

en général, par une éruption roséolique très peu marquée ainsi

que par des accidents typhiques bénins. La température rectale

fut classique dans la folie primitive et dans la folie systématique,

monta rapidement dans la démence consécutive, et persista en

plateau jusqu'à la fin, sans autres conséquences d'ailleurs. Le

bain froid abaissa la température de 4, 5 à 2o chez les typhiques

non aliénés et de 0,5 à I chez les typhiques déments. Durée to-

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 67

taie moyenne des typhiques sains d'esprit, trente et un jours. Une

démente profonde dA quarante-deux ans eut, le premier jour,

3f,6; ascension lente les deux jours suivants à 40",1, le quatrième

jour, 36°, puis réascension permanente ; les bains froids produi-

saient une hypothermie de quelques dixièmes; le thermomètre

marquant un jour 44 ,2 depuis douze heures, on la plonge dans

l'eau froide et on ramène la température à 40°; mais deux heures

plus tard on constate 41,1. Du reste pas de coma, défervescence

dès la quatrième semaine. Deux morts parmi les aliénés; en un

cas, il s'agissait d'un dément de quarante-deux ans (hypostase

pulmonaire à la quatrième semaine); dans l'autre, on avait affaire

à une démente épileptique de cinquante-quatre ans (état de mal

dèsle début de la fièvre typhoïde ; mortle dixième jour). Leur autop-

sie révéla dans les deux cadavres les altérations typhiques carac-

téristiques, plus, chez l'homme, de l'anémie avec oedème cérébral

et, chez la femme, de l'hyperémie cérébrale notamment des

ganglions centraux et de l'écorce. Cinq observations à l'appui.

Dix aliénés présentèrent, quelle, que fût la forme psychopa-

thique, de l'amélioration psychique au cours de la fièvre typhoïde

(aucun paralytique général ne fut atteint de fièvre typhoïde).

Dans la plupart des cas, cette amélioration commença dès les

premiers symptômes typhiques, par conséquent, il y aurait lieu

d'invoquer comme agent modificateur l'action excitante du

ferment bactério-typhoide. P. K.

IX. SUR LES TROUBLES DE la faculté DE LIRE CHEZ LES paralytiques

généraux ; par G. R.1BD.S (Allg. Zeitschr. f. Psych., XLI, 3).

A l'exemple de Weiss (Compendium de psychiâtrie de -1881,

p. liS) et sur les assertions de Rieger (communication orale),

M. Rabbas a déterminé l'état des facultés de ces malades à la

lecture. 11 a choisi dans ce but des morceaux de prose ou de vers

dépourvus de mots peu usités, faciles à lire et à comprendre pour

tous les prolétaires (voy. le mémoire), mais contenant à dessein

des vocables qui exigent une certaine peine et quelque attention.

Chaque malade lit celui qu'on lui propose sur une feuille choisie

et comme qualité de papier et comme valeur typographique,

tandis que l'examinateur suit le même texte sur une autre feuille

et note à l'aide d'un crayon les erreurs afin de transcrire, une

fois l'expérience terminée, le texte estropié. On veille à ce que

le patient suive exactement avec le doigt chaque ligne et chaque

mot, ou a examiné auparavant son acuité visuelle, sa réfraction,

son accommodation, son fond d'oeil, afin d'éliminer les cas dou-

teux, et de remédier aux perturbations dioptriques : l'activité

cérébrale est par conséquent seule en jeu. On interroge finale-

ment le malade sur le texte, le sens qu'il lui donne, les erreur Il

68 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

qu'il a commises. Dans ces conditions, les parai} tiques généraux,

du reste généralement convaincus de la correction de leur lecture,

substituent des mots dépourvus de sens aux mots corrects, et

leur substitution varie, pour chaque individu, avec chaque nou-

vel essai. 11 existe une progression morbide de la lecture en rap-

port avec la progression de la démence, avec les périodes d'exa-

cerbation ; un retour à la normale parfait se verra, par exemple,

dans les phases d'accalmie. Il s'agirait d'une paralexie spéciale

indépendante d'aucun trouble de la parole, différente de la pa-

ralexie par aphasie de Kussmaul, qui ne procède d'aucune alté-

ration dans la faculté de saisir les symboles écrits, de les arti-

culer ; cette paralexie résulterait de ce que le paralytique, alors

même qu'il parle avec aisance, qu'il comprend la valeur des

caractères typographiques isolés ou associés, est dominé par son

imagination qui, se donnant libre carrière, lui fait broder sur le

texte soumis à son examen; il introduit involontairement des

mots correspondant à des conceptions qui le préoccupent (pro-

fond délabrement du jugement et de la faculté de se critiquer

soi-même), cela au stade précoce comme au stade tardif de

l'affection. On note cependant que tous les autres aliénés conti-

nuent à pouvoir lire correctement de même que les gens les plus

avancés en âge alors même qu'ils ne s'exercentplus. P. K.

X. UN cas DE FOLIE ayant DURÉ SEPT ANS : traitement par L'ÉLEC-

TRICITÉ; par ALEX. ROBERTSON. (The Journal of Mental Science,

avril 1884.)

Ce cas est celui d'une femme de cinquante ans, atteinte de mé-

lancolie avec hallucinations de l'ouïe et idées de suicide. En 1882,

on commença le traitement par l'électricité (courant continu

fourni par une pile de Leclanché à 40 éléments). Le pôle positif

était appliqué au niveau du ganglion cervical supérieur du grand

sympathique, et le pôle négatif était promené lentement, du

même côté de la tête depuis la région sourcilière jusqu'àl'occiput;

les applications sur chacun des côtés de la tête duraient environ

sept minutes : elles étaient faites tous les deux jours. Au bout

d'environ cinq mois, la malade, qui était aliénée déjà six ans

avant son entrée à l'asile, était complètement guérie, et, un an

après sa sortie, la guérison s'était maintenue. Nous devons ajouter

qu'on avait commencé par un courant de 15 à 20 éléments pour

arriver progressivement jusqu'au courant fourni par 25 élé-

ments, mais avec ce dernier courant, la durée des applications

pour chaque côté de la tête était réduite à cinq minutes.

R. M. C.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 69

DE l'exaltation D\NS l'alcoolisme chronique; par BONVILLE

BRADLEY Fox. (The Journal of Mental Science, juillet 1884.)

Les conclusions de ce mémoire sont les suivantes :

« fol,a folie de l'alcoolisme chronique est très souvent caractérisée

« par de l'exaltation. - 2° Mais cette exaltation dans les idées

« fausses se rencontre également dans divers types de folie et ne

« peut par conséquent servir de base pour déterminer la classifi-

a cation. - 3° Cette exaltation, dans certains cas, ne présente

« aucun caractère qui puisse la faire distinguer de celle de la pa-

« ralysie générale. Il arrive aussi, dans quelques cas, que lessignes

« physiques des deux affections présentent entre eux une si com-

« plète ressemblance que le diagnostic différentiel ne peut être

« établi que par l'histoire antérieure du malade ou d'autres cir-

c constances se rapportant à la maladie; et même, dans quelques

« cas rares, l'étude de la marche de la maladie peut seule tran-

« cher la question. - 4° Dans l'alcoolisme chronique, les idées

« d'exaltation sont habituellement fixes, constantes , impos-

« sibles à déraciner. - 3° Cette persistance est due à ce qu'elles

« sont sous la dépendance d'altérations cérébrales consécutives à

« des hyperémies répétées. - 6° On ne peut rien, ou seulement

« très peu de chose, pour les faire disparaître. 1> R. M. C.

UN cas DE folie circulaire; par HERBERT PACKFR.

(The Journal of Mental Science, avril 1884.)

Il s'agit d'une femme de soixante et un ans qui présentait tous

les symptômes classiques de la folie circulaire : alternatives répé-

tées d'excitation et de dépression, avec intervalle très court de

santé mentale; cette malade avait subi deux condamnations, pro-

bablement pour des faits relevant de sa maladie; car on sait com-

bien sont fréquents les démêlés des fous circulaires avec la justice.

R. M. C.

XIII. UN cas DE manie aiguë s'accompagnant D'UNE affection quasi-

\phasique du langage; par Ii.-1S. IIIITCHELL. (The Journal of Mental

S ielace, avril 188.1.)

Le malade était âgé de cinquante ans et atteint de manie

aiguë; il est actuellement guéri. En dehors des symptômes ordi-

naires de la manie il a présenté des troubles spéciaux du langage.

L'articulation était parfaite : le langage parlé ne présentait ni le

caractère spasmodique, ni les espèces d'explosions fréquentes

dans l'aphasie; on n'y remarquait ni temps d'arrêt ni mots ina-

chevés. L'incohérence était absolue, plus complète 'même que

dans la plupart des cas de manie. Le pouvoir de formuler une

70 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

proposition était absolument détruit, età ce point de vue, malgré

les paroles qu'il prononçait fréquemment, il était entièrement

aphasique. L'attention, la perception ne paraissaient pas altérées;

il différait même sensiblement en cela des maniaques ordi-

naires. Il obéissait aux ordres donnés. Lorsque, au bout d'une

semaine ou deux, son état commença à s'améliorer, il ne répon-

dait que par oui ou par non; encore paraissait-il craindre d'em-

ployer ces deux mots mal à propos et l'un pour l'autre, et quand

il se trompait, il souriait de son erreur. Son écriture, les substi-

tutions de mots qu'on remarque dans une lettre à sa mère

étaient d'un aphasique. « Il semble que chez lui, dit M. Mitchell,

« les centres physiologiquement inférieurs du langage (je veux

« parler du langage intérieur) ayant été soustraits au contrôle

« des centres supérieurs (centres d'inhibition), les groupes nerveux

« qui servent au langage aient pris une activité automatique et

« ataxique; de là un flot de paroles incohérentes soit pour ré-

« pondre à une question, soit indépendamment de toute question

« posée; de là aussi une entière impuissance à choisir ces paroles

« ou à en diriger le sens. » R. M. C.

XIV. SUR QUELQUES symptômes mentaux DES affections cérébrales

ordinaires; par le Dr GASQUET. (The Journal of Mental Science,

avril 1884.)

C'est moins pour en tirer des conclusions que le petit nombre

des faits observés par lui justifierait incomplètement que pour

attirer l'attention sur une voie nouvelle ouverte aux recherches,

que M. Gasquet publie quatre observations (une de sclérose mul-

tiple, une de syphilis, une de ramollissement cérébral chronique

et une d'hémorrhagie cérébrale suivie d'hémiplégie), dans les-

quelles il a pu constater l'existence de symptômes mentaux. Dans

ces quatre cas, les troubles intellectuels étaient caractérisés par

des idées de grandeur, variables dans leur nature et dans leur

degré.

Sans parler de l'importance considérable que ces faits peuvent

avoir au point de vue du diagnostic de la paralysie générale au

début, l'auteur fait remarquer qu'il y a la un terrain clinique

encore peu ou point exploré, et que beaucoup de praticiens

passent ainsi probablement à côté de faits dont l'étude et le

groupement seraient d'un grand intérêt, simplement parce que

leur attention n'a pas été attirée sur ce point. R. M. C.

XV. Manie aiguë CHEZ UN JEUNE garçon DE treize ANS;

par S.-A.-K. Strahan. (The Journal of Mental Science, juill. 1884.)

Cette observation est surtout intéressante en raison du très

jeune âge du sujet; on sait en effet que les cas de manie aiguë

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 71

sont extrêmement rares avant la puberté. Les symptômes de la

manie n'ont point été différents de ceux que l'on observe à un

âge plus avancé; il est à noter seulement que la mère et le frère

de ce jeune malade étaient tous deux aliénés et internés dans un

asile. R. M. C.

XVI. Sur quelques CaS DE paralysie générale avec sclérose latérale

de la MOELL1 : épinière ; par G.-H. Savage.' (The Journal of Mental

Science, avril 1884.)

L'auteur rapporte cinq observations (dont quatre suivies d'au-

topsie) de paralysie générale s'accompagnant chez de jeunes su-

jets, de sclérose des cordons latéraux.

A l'autopsie, on trouvait chez ces sujets plusieurs circonvolutions

atrophiées, sans toutefois que l'auteur puisse préciser quelles sons

celles sur lesquelles porte le plus souvent cette atrophie; il incline

à penser pourtant que ce sont les circonvolutions frontale et pa-

riétale ascendantes. Souvent aussi, on trouve la moelle très

atrophiée; il existe, en outre, une altération grave descordons laté-

raux et quelquefois de la colonne de Turck dans le cordon anté-

rieur. Il serait très intéressant de savoir si l'atrophie des cordons

latéraux est primitive ou secondaire, ascendante ou descendante.

L'auteur pense que, dans certains cas, les altérations sont d'origine

primitivement médullaire, tandis que dans d'autres, la sclérose

latérale est consécutive à une atrophie ou à une dégénérescence

des aires motrices corticales.

Plusieurs des hommes dont l'observation a été recueillie étaient

incontestablement syphilitiques, et il est digne de remarque que,

parmiles femmes, les unes étaientdemeuréesstériles etles autres

n'avaient point d'enfants vivants.

Enfin, l'auteur signale un dernier fait, en se demandant toute-

fois s'il ne s'agit pas là d'une simple coïncidence : presque tous

les malades observés présentaient aux pommettes une congestion

capillaire très vive, et rappelant les plaques que l'on observe dans

la cirrhose hépatique. R. M. C.

\\ IL DE l'alcool, CONSIDÉRÉ SURTOUT comme BOISSON, dans LES asiles

d'aliénés; par D. HACK TUEE, (The Journal of Mental Science,

janvier 1385.)

L'auteur a fait, auprès des médecins directeurs des asiles d'An-

gleterre, une enquête collective relativement à l'emploi ou à l'a-

bandon des boissons alcooliques (principalement de labière). Nous

ne pouvons le.suivre dans l'examen détaillé des réponses qui lui

ont élé adressées; nous nous hornerons à noter que M. Hack Tuke

72 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

a été étonné de constater qu'un nombre de médecins beaucoup

plus considérable qu'il ne l'avait supposé avaient totalement sup-

primé dans leurs asiles (sauf, bien entendu, à titre de médicament)

l'usage des boissons alcooliques; il a été plus surpris encore de

voir la plupart d'entre eux insister énergiquement sur les avan-

tages qu'ils avaient retirés de cette suppression tant au point de

vue de la santé des malades qu'à celui du bon ordre et de la disci-

pline de l'établissement. R. ! 11. C.

XVIII. LES évasions, la LIBERTÉ, LE BONHEUR, et LES « PORTES

OUVERTES » ; LEUR INFLUENCE SUR LES MALADES DES ASILES par

C.4MPBELL. (The JOUI nal of Mental Science, juillet 188r.)

Après avoir étudié les évasions au point de vue des dangers

qu'elles présentent pour les malades eux-mêmes, pour les per-

sonnes qui avoisinent l'asile, M. Campbell étudie les conditions de

liberté qui peuvent contribuer au bonheur, au bien-être plutôt des

aliénés internés, et il traite la question du système dit des portes

ouvertes ». Mais il se déclare insuffisamment éclairé actuellement

pour la résoudre, et exprime le voeu qu'elle soit sérieusement ap-

profondie dans ses conséquences et dans ses résultats.

R. 11. C.

XIX. Guérisons inattendues : deux cas ; par le U Willeit. (The

Journal of Mental Science, juillet 1 R8 L)

Le premier cas est celui d'un ecclésiastique de trente ans. qui,

après un surcroît de travail, fut pris de troubles intellectuels

caractérisés surtout par de la mélancolie religieuse (idées de

possession, de damnation éternelle, etc.); peu de temps après

son entrée à l'asile, il refusa de manger, devint malpropre, et

l'on craignit que son état n'aboutit à la démence. Mais peu à peu

cet état s'améliora, et, au bout d'un an, il put quitter l'asile

complètement guéri.

Le second cas est celui d'un homme de vingt ans, présentant les

symptômes ordinaires de la démence, et entièiement gâteux qui

fut interné en 185(i ; en 1857, on note chez lui un accès de manie

aiguë; on constate à la même époque qu'il se livre à la mastur-

bation ; en 1858, nouvel accès de manie. Ces accès se reprodui-

sent à des intervalles plus ou moins éloignés jusqu'en 1882; les

habitudes de masturbation persistent; survient une affection chi-

rurgicale suivie d'une opération (castration unilatérale pour remé-

dier aux accidents causés parl'enclavementdans le canal inguinal

d'un testicule non descendu); à partir de ce moment, l'état du

malade s'améliore, et, sans recouvrer son intelligence, il est délivré

de ses fréquents accès de manie et devient calme, propre et

docile. R. 111. C.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 73

XX. IMPEl\FECrlll : \ mentale congénitale avec idées DE persécution

chez DES jumeaux; par T.-VV. Ai4E DONALL. (The Journal of Mental

Science, Juillet 4884.)

Observation détaillée de deux jumeaux qui non seulement se

ressemblent physiquement au point qu'on est littéralement dans

l'impossibilité presque absolue de les distinguer l'un de l'autre.

mais qui présentent en outre une forme de délire absolument

identique et caractérisée par des idées de persécution greffées sur

un état d'imbécillité déjà ancien. R. M. C.

XXI. UN cas de paralysie générale avec P.ICÜYMÉNINGIT1 : : par <'h0

H. Sauvage. (The Journal of Mental Science, Juillet 1884.)

L'observation peut se résumer ainsi :

Homme de soixante-el-uu ans, malade depuis six mois, irritable,

confondant les jours de la semaine, paraissant avoir eu deshallu-

cinations de la vue, incapable d'enchaîner ses idées, de répondre

aux questions, de dire son nom. Tremblement très marqué de la

langue et des muscles de la face, grande hésitation de la parole,

incertitude de la démarche. Deux mois après son entrée, il com-

mence à avoir des séries d'attaques épileptiformes, et meurt vers

le sixième mois. A l'autopsie, on constate sur le côté gauche du

cerveau de la pachyméningite avec hémorrhagie : membrane

nettement formée, et dont l'aspect donne à penser qu'une fine

membrane s'est constituée et qu'il est survenu récemment une

hémorrhagie nouvelle qui n'a pas dépassé la période de coagula-

tion. A la base, la membrane fine se détache facilement de la

dure-mère. R. 11. C.

XXII. IIÉiII-CISOItÉE POST-nÉMtPLÉGtQUE ASSOCIÉE A LA FOLIE ; par

W. BEVAN LEWIS. (The Journal of Mental Science, juillet 1884.)

Les réflexions dont l'auteur fait suivre cette observation en si-

gnalent les principaux points intéressants; nous nous bornerons à

les résumer ici :

Cette femme, âgée de soixante et un ans, est un exemple de

cette association de la chorée et de la folie qu'il n'est pas très

rare de renconlrer dans les asiles d'aliénés. Elle était manifeste-

ment choréique, mais la chorée se présente sous des formes mul-

tiples, el il n'était pas facile de savoir à quel genre on devait rat-

tacher les symptômes qu'elle présentait. Elle avait eu du rhuma-

tisme articulaire, en sorte qu'on trouvait ici la diathèse habituelle-

ment concomitante de la chorée; de plus si les émotions nerveuses

sont capables de déterminer l'apparition des phénomènes choréi-

ques, toutes les misères dont cette femme avait souffert pouvaient

être considérées comme rattachant sa maladie à cette cause. -

74 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

Si l'on passe en revue les symptômes, on note que lesphénomènes

convulsifs étaient limités au côté droit, et l'on s'attend par consé-

quent à trouver une distribution hémisphérique des lésions expli-

quant le caractère unilatéral des spasmes choréiques. On note

d'autre part que le début et les progrès de la maladie remontent

à une hémiplégie droite partielle, avec aphasie : cette hémiplégie

portait sur la face et le bras; la jambe en était indemne; la

guérison fut lente, et lorsque le bras droit eut recouvré une cer-

taine force, il devint, ainsi que la jambe, les muscles de la face et

ceux de l'articulation de la parole, le siège de mouvemenls

choréiques. Cela étant, on pense de suite à un cas ordinaire de

chorée post-hémiplégique, tels que ceux où il existe une lésion

massive dans le segment postérieur de la capsule interne, avec

propagation à la couche optique : mais il faut remarquer qu'ici,

le spasme choréique ne s'accompagnait d'aucune rigidité tonique : il

faut donc rayer ce cas de la catégorie des mouvements choréi-

formes consécutifs à une lésion des fibres convergentes en éventail

voisines de la capsule. On ne peut pas davantage le ranger parmi

les cas décrits par Gowers sous le nom d'hémi-ataxie, le sens muscu-

laire et la direction des mouvements étant parfaitement conservés.

L'auteur signale d'autre part l'extrême paresse des réflexes cru-

raux profonds, et l'abolition presque complète duréflexe du genou

des deux côtés; en revanche le réflexe du triceps, aboli à gauche,

était très exceptionnellement vif au bras droit, et le biceps du

même côté donnait la réaction de dégénérescence. S'appuyant sur

ces faits, et par des motifs qu'il déduit, l'auteur n'hésite pas à attri-

buer à cette chorée une origine cérébrale plutôt que spinale.

Recherchant ensuite la nature de la lésion, et rappelant que l'at-

taque n'avait pas été accompagnée de perte de connaissance, que

la malade était âgée de soixante et un ans, qu'il n'y avait pas

d'albumine dans l'urine, qu'il existait une diathèse rhumatismale,

M. Lewis conclut à un ramollissement consécutif à une obstruction

par embolie ou à une thrombose.

L'autopsie montra des plaques de ramollissement disposées

d'une façon parfaitement symétrique sur l'aire motrice des deux

hémisphères, au niveau du tiers moyen de chacune des circonvo-

lutions pariétales ascendantes : ce ramollissement paraissait lié à

une thrombose veineuse résultant d'une obstruction partielle du

sinus latéral et de l'extension d'un caillot organisé et ancien aux

petites veinules de la région du vertex : la circonvolution supra-

marginale gauche et le pli courbe étaient également atteints. En

dehors même de la distribution significative de ces ramollisse-

ments, l'auteur rappelle que les conditions qui se trouvaient t

réunies sont précisément celles qui, suivant Hughlings-Jackson et

Broadbent, doivent se réaliser pour que la chorée apparaisse.

Par une erreur regrettable, le cerveau et la moelle ne furent

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 75

l'ohjet d'aucun examen microscopique : mais il existait une petite

hémorrhagie intéressant le ganglion lenticulaire gauche, et une

extravasation sanguine beaucoup plus considérable à la région

préfrontale; M. Lewis considère ces faits comme révélateurs d'une

obstruction veineuse générale dans le cerveau, obstruction que

l'examen microscopique aurait probablement permis de rattacher à

des oblitérations capillaires des régions ganglionnaires de la base.

Au point de vue mental, le phénomène le plus intéressant était

une apathie extrême, allant presque jusqu'à la torpeur. C'est là

un symptôme mental que l'auteur dans un précédent mémoire,

avait rattaché à l'atrophie des lobes frontaux; il rangerait volon-

tiers le cas actuel parmi ceux qui viennent à l'appui de cette opi-

nion. R. M. C.

R111. Remarques sur LES résultats DE l'enquête collective sur LES

causes DE la folie; par Herbert C. Major. (The Journal of

Mental Science, avril 1884.)

Cette enquête annuelle a commencé à fonctionner en 1876 ;

M. Herbert Major estime que les résultats qu'elle a déjà donnés et

ceux qu'elle donnera dans l'avenir présentent un intérêt réel;

nous reproduisons ici, d'après son mémoire, les plus importants

de ces résultats; ils ont trait à la proportion des différentes causes

de folie dans les deux sexes.

Chagrins de famille (y compris la perte de parents ou d'amis) :

le tableau suivant montre que la proportion des cas dus à cette

cause est très uniforme, qu'elle est plus élevée (et il faut ajouter :

réeulièrement Dlus élevée) chez la femme crue chez l'homme.

76 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

Inquiétudes et peines morales (d'autre nature que dans les deux

paragraphes précédents) et excès de travail. Ce groupe de causes

parait avoir dans les deux sexes une proportion sensiblement

égale; aussi la proportion est-elle donnée pour les deux sexes

réunis :

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 77

viron 1 p. 100. L'auteur ne trouve à cet abaissement qu'une

explication plausible : il pense que peut-être, depuis quelques

années, on tend à faire de la. masturbation un symptôme des

troubles cérébraux bien plutôt qu'une cause d'aliénation.

L'excès de fatigue physique donne pour toutes les années etpour

les deux sexes une très faible proportion. M. Herbert Major pense

que l'on pourrait supprimer cette cause; peut-être, en effet, serait-

il plus conforme à la réalité des faits d'incriminer l'insuffisance

que l'excès d'exercice physique. '

L'insolation fournit chez les hommes une proportion uniforme

qui n'excède que peu 2 p. 100; chez les femmes, cette proportion

est à peine appréciable.

Les accidents, les blessures donnent une proportion d'environ

5 p. 100 par an pour les hommes, et de 1 p. 100 pour les femmes.

La grossesse, l'accouchement, l'état puerpéral et la lactation réu-

nis en un seul groupe donnent une proportion de 9 à 10 p. 100.

Les privations, {'inanition, prédomineut chez la femme comme

cause d'aliénation mentale.

La vieillesse (qui ne figure dans le questionnaire que depuis

1878) fournit les chiffres suivants :

78 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

talée chez l'homme que chez la femme, ce qui confirme d'ailleurs

l'opinion exprimée par Boyd et plusieurs autres auteurs ; le tableau

suivant en indique la fréquence :

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 79 1)

ne se préoccupe guère de l'opinion publique lorsque la guérison

des malades est en question, et il pense qu'il vaut mieux courir

le risque de voir un malade se suicider que de compromettre,

par des mesures inopportunes, le salut des autres malades qui

sont susceptibles de guérison. R. M. C.

XXVI. Un cas DE démence avec aphasie. ATROPIIIE(uvecsclérose7) DE

l'hémisphère cérébral GAUCHE; par Arthur RANNIE. (The Joumal

of Mental Science, avril 1884.)

Voici les points les plus saillants de l'observation clinique :

L» amnésie avec agraphie; 2° parésie des membres supérieur et

inférieur droits; 3° accès convulsifs affectant les membres du

côté droit et les muscles de la face du même côté; 4° nystagmus

horizontal à droite. Corrélativement aux trois premiers symp-

tôme, il est intéressant de noter que les circonvolutions parié-

tale ascendante, sus-marginale, angulaire et Lemporo-sphénoi-

dale supérieure étaient les plus atrophiées de toutes. L'examen

microscopique n'a malheureusement pas pu être fait; il est plus

que probable qu'il aurait révélé de profondes altérations des

éléments du tissu nerveux.

L'observation du malade et l'autopsie sont relatées avec détail

dans ce mémoire qu'accompagne une planche intéressante.

R. M. C.

XX VIII. Note sur un cas DE folie impulsive; par Richard UREESE.

(The Journal of Mental Science, octobre 1883.)

Le cas rapporté par M. Greene ne s'écarte guère du type des

actes homicides dus à la folie impulsive. Il s'agit d'un jeune

homme de dix-neuf ans, très bon sujet, n'ayant présenté jusques

là que des troubles mentaux à peine appréciables et méritant

plutôt la qualification de simples bizarreries, qui, un soir, en sor-

tant d'une réunion religieuse, et après une lecture pieuse, commit

sans motif appréciable une tentative d'homicide sur la personne

de sa mère qu'ilaimait beaucoup et pour laquelle il s'était montré,

ce soir-là particulièrement affectueux. Il déclara qu'il avait fait

tout ce qu'il avait pu pour résister à l'impulsion homicide, à la-

quelle il avait malheureusement fini par succomber. L'acte commis,

« quelque chose l'avertit qu'il avait commis une mauvaise action

et il se sentit le cerveau en feu ». Il témoigna d'ailleurs une

grande joie lorsqu'il apprit que sa mère n'avait pas succombé à

ses blessures.

Il fut acquitté, mais l'auteur signale avec raison comme au

moins étrange, au point de vue médical, l'opinion formulée par

80 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

le magistrat, qui, en s'adressant au jury, déclara que, pour ac-

quitter l'accusé pour cause de folie, il ne suffisait pas que sa folie

fût démontrée, mais qu'il fallait encore avoir la certitude que, par

suite de sa folie, il était incapable de savoir que l'action qu'il

commettait était mauvaise. Ainsi, dit M. Greene, « le fait seul de

la folie ne suffirait pas pour plaider la folie », et il s'étonne avec

raison que le juge criminel se montre si exigeantsur les preuves de

l'aliénation, alors que le moindre soupçon de trouble intellectuel

suffit au magistrat pour annuler un contrai civil. Il rappelle en

terminant que les dispositions du Code français sont beaucoup

plus conformes à la logique des faits. 13. \I. C.

XXIX. Contribution a L'Ét'IOLOGIE DE la paralysie IIOGRES51VE, en

TENANT PLUS p.\nTlCULrÈl\E1 ! E'-¡T COMPTE DE L'INFLUENCE DE LA

syphilis ; par C REI,1;11.IRD. (Allg. Zeitsclv. f. Psych. XLI, 4-.1.)

Les causes de la paralysie générale sont en première ligne la

lutte pour la vie, puis l'ivrognerie (du moins pour les femmes) ;

la syphilis n'occupe que le troisième rang et l'hérédité le qua-

trième ; au dernier plan viendraient les professions nocives, les

traumatismes céphaliques, les maladies aiguës, etc. il. K.

XXX. Guérison D'UNE PSYCHOSE SOUS L'INFLUENCE D'UN érysipèle DE

la TÈTE ; par H. LANDEIIER. (Allg. Zeitschr. f. Psych., XLI, 4-5).

Mélancolie en voie d'évolution vers la démence incurable, chez

une jeune fille ; sur ces entrefaites, apparaît un érysipèle de la face

qui gagne le cuir chevelu et entraîne une suppuration profonde

et étendue; peu de fièvre. A mesure que l'érysipèle gagne, les

troubles psychiques rétrocèdent. Finalement, l'accident somatique

et l'aliénation mentale guérissent complètement. La malade

était folle depuis sept mois, quand survint l'érysipèle; sa santé

mentale n'a plus rien laissé à désirer depuis plus de deux ans.

Peut-être, dans les cas de psychopathie inquiétants, serait-il bon

de provoquer un foyer de suppuration céphalique quand les forces

physiques des malades le permettent, à la condition de surveiller

minutieusement, à l'aide de la méthode antiseptique, lasuppura-

tion provoquée. P. K.

XXXI. UN cas DE prolifération DE l'épendyme, avec sclérose sous

ÉPENDYMAIR6 : dans LE domaine DES ventricules latéraux, dans la

paralysie générale (Contribution à l'étude de l'hyperplasie fibreuse

pathologique); par M. Friedmann. (Arch. f. Psych., XVI, 2.)

L'intérêt de cette observation, très complète, au triple pointde

vue clinique, analomo-pathologique, histologique nit dans les

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 81

conclusions qu'en tirez. Friedmann. Les cellules-araignées, dit-il,

sont fibro-plastiques; c'est d'elles qu'émane le tissu scléreux; les

couches de fibres conjonctives de nouvelle formation procèdent

des prolongements fins et moyens qui partout sortent du corps

même de la cellule et de la pointe de ses pôles les plus puissants;

là, on constate une moindre consistance que dans les tractus

réellement scléreux, c'est que la texture est un peu différente, les

cellules-araignées se trouvant plus espacées et pour ainsi dire

séparées les unes des autres par de nombreux vaisseaux. Pour

suivre pas à pas la genèse de la lésion et les interprétations de

l'auteur, il est indispensable de lire le mémoire. P. K.

XXXII. De l'influence exercée parla grossesse sur LES TROUBLES

PSYCHIQUES; par J. PERETTI. (Arch. f. Psych., XVI, 2.)

Sur vingt-trois cas de grossesse chez les aliénées, quinze obser-

vations seulement remplissent les conditions favorables à l'appré-

ciation de l'influence en question. L'auteur les relate en les

résumant; voici ses conclusions. Il est exceptionnel de voir la

guérison de l'aliénation mentale survenir pendant une grossesse

engendrée au cours d'une psychose curable : dans la pluralité des

cas, l'état de gravidité exerce une influence défavorable sur la

folie, sans que la grossesse aggrave absolument toujours le pro-

nostic, généralement l'aliénation mentale devient, sous son in-

fluence, plus grave, la guérison plus douteuse, et cela d'autant

plus que la perturbation psychique a précédé de plus longtemps

la conception. Il va de soi que la gravidité n'exerce aucune action

sur des psychoses ayant entraîné la démence; mais alors, il est

assez fréquent de voir la délivrance suivie d'une plus grande agi-

tation passagère; parfois en revanche, grossesse et délivrance

évoluent chez une aliénée avec une bénignité, une aisance re-

marquable, même si on compare leur évolution à celle des gros-

sesses et délivrances antérieures à l'aliénation mentale. P. K.

XXXIII. Contribution A l'étude DE l'incohérence ou DÉSORDRE dans

LES idées hallucinatoire aigu; par E. KONRAD. (Arch. f. Psych ,

XVI, 2.)

M. Konrad sous ce titre prétend constituer une entité clinique

souvent méconnue et confondue par les auteurs anciens et mo-

dernes avec la manie et la mélancolie. Il en trace les caractères

de la façon suivante. Un stade hallucinatoire précède générale-

ment les autres, assez souvent tout se borne à ce stade qui alors

se termine d'emblée par guérison ou démence définitive; ce stade

débute par un état dé dépression en rapport avec des hallucina-

tions ; puis, le genre des hallucinations changeant, se montre une

agitation maniaque à forme gaie; finalement la tristesse reparait,

Archives, t. XII. 6

82 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

etc...; les actes et les idées sont d'une incohérence notoire due

à la multiplicité et à l'évolution protéiforme des hallucinations

sensorielles. Durée : depuis quelques heures à quelques semaines,

voire quelques mois. Il n'est pas rare alors de voir le malade

s'incarner dans la peau de grands personnages, émettre des

idées de grandeur et de persécution, désordonnées, confuses, non

systématiques et toujours passagères (Ohs. 1) à l'occasion d'asso-

nances, d'association d'idées quelconques, puis subir les effets de

l'hyperidéation et entrer alors dans la forme maniaque du second

stade. Ce second stade est d'ailleurs un stade tantôt de manie

aiguë (disparition des hallucinations, suridéations, besoin de mou-

vement (Obs. II); tantôt de stupidité avec ou sans phénomènes

musculaires cataleptoïdes ou létanoïdes (catatonie), stupidité

parfois si précoce qu'il semble ne pas y avoir eu de stade hallu-

.cinatoire aigu (Obs. 111); tantôt enfin de manie compliquée de stu-

peur (état mixte de l'Obs. Il). Cette maladie, qui porte surtout sur

des sujets de vingt à trente ans, se termine généralement par la

démence; la démence frappe surtout dans les cas d'évolution

compliquée ou d'état mixte ainsi que dans la forme se bornant

au stade hallucinatoire; elle se montre assez souvent à la suite

du stade de stupidité (démence apathique); le passage du stade

hallucinatoire à celui de manie aiguë comporte un pronostic

favorable; la guérison, qui a généralement lieu dans les trois à

huit premiers mois, peut encore s'effectuer au bout d'un an ou

deux. Pour le reste, voir le mémoire. P. K.

XXXIV. Contribution A l'étude DE la folie transitoire; par DE

KR.LFPT-Ei31.G. (Jtf/M'6MC/t. f. Psych., VI, 1.)

Deux rapports médico-légaux : 40 Un individu de quaraute-sept

ans, ayant, il y a vingt-quatre ans, reçu en plein front un coup de

pied de cheval, et, il y a quatre ans, été atteint d'une affection

grave avec phénomènes cérébraux (vingt-cinq jours de durée)

d'un caractère irritable, supportant mal la chaleur et les boissons

alcooliques, est le 12 mai 1884 accusé de larcin. Il boit et frappe

l'accusateur d'une brique à la têle. On trouve, aptes celte vio-

lence, étourdi, sans voix, sur l'herbe; il n'a conservé qu'un vague

souvenir de ce qui s'est passé. Aucun signe d'épilepsie. L'auteur

conclut à l'irresponsabilité. 2° Un homme de quarante-quatre ans,

atteint depuis plusieurs mois de faiblesse irritable, peiné et irrité

des débordements conjugaux de sa femme, se rencontre avec

l'amant de celle-ci, le provoque en duel; sur son refus blessant,

il tire un revolver et blesse son épouse. Amnésie incomplète du

temps qui s'est écoulé entre le moment où il a tiré, et celui où il

a repris conscience de lui-même, sous l'influence des gémisse-

. ments de sa femme. Irresponsabilité. P. K.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 83

XXXV. L1 sensation sexuelle contraire (inversion du sens génital)

devant L4 üÉDECINE légale; par DE KR.1PFT-EBING. (Jnlarbitch. f.

Psych., VI, 1.)

Rien de nouveau, si ce n'est l'autobiographie de deux invertis

hommes, brûlant d'amour pour de beaux mâles. La construction

psychique spéciale de ces individus, au point de vue de l'esthé-

tique sexuelle, exige qu'on prenne à leur égard un parti médico-

légal et social. Ils sont, en effet, réduits ou à garder une continence

fatale à leur santé, ou à se masturber, ce qui les ruine au même

degré, à moins qu'ils ne se suicident. L'auteur appelle l'atlen-

tion des savants, des jurisconsultes, des socialistes, des méde-

cins, des philanthropes sur ces malades qui ne sont ni des

aliénés, ni des pervers. Mais il ne propose pas de solution. Actuel-

lement on connaîtrait trente-deux observations d'hommes sentant

comme des femmes, et cinq observations de femmes sentant

comme des hommes. L'inverti, ajoute-t-il, se contente de tâter

son ami, de se frotter, de se placer sur lui comme dans le coït,

ou de se faire masturber très légèrement, il lui suffit de peu de

chose pour éjaculer et éprouver l'orgasme vénérien au même

moment que son conjoint anormal. Il en est de même pour

l'invertie. 11 n'y a donc pas là de crime contre nature, nocif; la

loi n'a donc rien à y voir, surtout lorsqu'il s'agit de majeurs fonc-

tionnant à huis clos. Sources littéraires : Mademoiselle Giraud, ma

femme -Fridolin's heimliche Ehe, par A. Wilbrand - Brick and

Brack oder Licht im Scllatten. E. Stadion. P. K.

XXXVI. DES troubles DE la motilité volontaire dans IA folie

0 simple; par C.-F.-W. ROLLEB. (Allg. Zeisschr. f. Psych., XLII, 1.)

C'est-à-dire examen des mouvements volontaires ou conscients

dans des formes psychopathiques où il n'existe ni convulsions,

ni paralysies, ni ataxies. L'auteur passe en revue les troubles de

la voix, les troubles de la parole, les actes impulsifs, les actes para-

doxaux (allures gaies d'un malade triste, par exemple), les actes

automatiques (auxquels le moi est parfaitement étranger), les actes

dus à l'excès d'innervation involontaire des muscles antagonistes

(étals cataleptoïdes et cataleptiques; tel malade refusera d'aller

au lit, de se mettre au bain, qui, une fois au lit et dans le bain,

ne voudra plus en sortir), les mouvements occasionnés par des hal-

lucinations, les troubles de la motilité chez de très jeunes aliénés

(trois exemples de mouvements automatiques chez des enfants de

moins de dix-huit ans), l'action du mouvement des muscles sur la

conscience (l'activité musculaire provoquerait souvent ou augmen-

terait l'excitabilité psychique ; de là l'alitement cpmme traitement

de l'agitation, de là la production ou la modification des rêves).

'H4 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

Dans un dernier paragraphe intitulé : Complexité et autonomie

de l'appareil moteur, il tente, à la lumière des notes précédentes,

de coordonner les connaissances anatomiques et physiologiques

pour expliquer le mécanisme de lafolie; la motilité jouerait, d'a-

près lui, un grand rôle dans la genèse des troubles psychiques,

de même que les perturbations psychiques sont les génératrices

de troubles moteurs. a Une grande catégorie de troubles moteurs

- sont réellement primitifs, parce qu'ils ont indirectement engen-

dré, par réaction sur la connaissance du sujet, des entités vésa-

niques complexes » et, plus loin, : « la folie est un processus déter-

miné par des états pathologiques des centres subordonnés. »

P. K.

XX.iVIt. LA VARIABILITÉ DES CONCEPTIONS DÉLIRANTES ET DES HALLU-

CINATIONS SENSORIELLES, AVEC AUTRES REMARQUES SUR CELLES-CI ;

par J.-L ? 1. Kocii. (Allg. Zcitschi,. f. Psych., XLII, 1.) .)

' Dissertation, dépourvue d'observations, aboutissant à la thèse

que, de même que maintes névralgies, maintes migraines qui

durent des années chez des individus atteints de tares hérédi-

taires, les conceptions délirantes, émanées d'hallucinations, pré-

sentent chez un malade donné des variations en qualité, inten-

' site, étendue; il faudrait donc rayer du langage le terme d'idée

fixe, même dans les cas de conceptions irrésistibles, de folies

systématiques, de délires partiels; certes, alors, les idées déli-

rantes tournent dans un même cercle, mais leur teneur exacte

varie sans cesse. Les hallucinations sensorielles ou images déli-

rantes de la perception émanent, comme les images de la per-

ception normale, de l'écorce; leur genèse exige le concours des

appareils sous-corticaux; dans l'hallucination, c'est l'écorce qui

entre la première en jeu; dans l'illusion, c'est le centre sous-cor-

tical qui est le premier sollicité par un objet véritablement pé-

riphérique (du monde extérieur) ou relativement périphérique

' (corps étrangers ou néoplasmes d'un nerf ou du centre sous-cor-

tical lui-même). P. K.

XXXVIII. Un cas DE folie aiguë MORTELLE avec CONVULSIONS

localisées; par S. LÉvy '(AlLg. Zeitschr. f. Psych., XLII, 1.)

Observation de psychose suraiguë chez une jeune fille de dix-

neuf ans, issue d'une mère hystérique, mais n'ayant, jusqu'alors,

présenté aucune anomalie à aucun point de vue. Quelques se-

maines après avoir assisté au suicide de son amant, apathie

physique, caractère très-violent, céphalalgies fréquentes. Sept

mois plus tard, à la suite d'un refroidissement très prononcé,

. hallucinations de la vue et accès de manie. Trois jours après,

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 85

grande attaque épileptiforme. A partir de ce moment, convul-

sions quasicontinues dans la moitié gauche de la face et le bras

gauche; rigidité intervallaire, privation de sentiment, rotation

de la tête et des yeux à gauche, langue déchiquetée; de tempsà

autre, les compulsions gagnent le côté droit; en cinq jours, la tem-

pérature atteint 40,7; on constate finalement de la matité et des

râles à la base droite, le coeur se ralentit et s'arrête. L'autopsie

révèle l'intégrité des méninges, l'existence de kystes dermoides

dans les ovaires dégénérés, de l'uophorite chronique fibreuse.'

' P. K.

XXXIX. Contribution CE QU'ON appelle : DÉLIRE systématique HAL-

LUCINATOInE; par P. MAYSER, (Allg. Zeitschl·. f. Psych., XLII., 1.) }

M. Mayser montre qu'en Allemagne comme ailleurs, la termi-

nologie varie suivant les auteurs. L'épithète systématique dont

nous décorons le mot délire pour rendre, conformément à l'ex-

pression des faits décrits par les aliénistes allemands modernes,

l'idée contenue dans le mot usité par Mayser, Griesinger, Snell,

Schuele, doit disparaître quand on consulte les observations 'de

Krafft-Ebing, et céder la place au vocable de vésanie qui ne pré-

juge d'aucun autre élément pathologique que de l'hallucination.

Mayser, pour mettre de la clarté dans la question, applique le

terme qui nous occupe à un délire général d'ordre asthénique,

tantôt aigu, tonlôt chronique, affectant la forme d'agitation ma-

niaque, avec désordre dans les idées, idées de persécution basées

sur des hallucinations multiples, léger affaiblissement intellec-

tuel, ou celle de folie périodique; mais, en même temps, l'auteur

fait des conceptions délirantes, c'est-à-dire des idées de persécu-

tion fugaces de l'alcoolisme aigu, et même du délire des persécu-

lions incurables des buveurs, autant de variétés de ce délire gé-

néral, ce qui ramène sur le terrain l'élément de systématisation,

d'abord relégué au second plan. ' P. K.

XL. DES évasions ET DES tentatives d'évasion DES aliénés hors DES

endroits ou ILS sont soignés; par L. Schlager. (Allg. Zeitschr.

r. Psych. XLII, 2.)

Les aliénés essaient de s'évader et s'évadent en effet des asiles

d'aliénés et des établissements hospitaliers où ils sont séquestrés;

mais il arrive bien plus fréquemment, comme l'enseigne l'expé-

rience, que les aliénés essaient de s'évader et s'évadent en effet

de leurs habitations privées et du sein de leurs familles. Il ne

faut donc pas toujours attribuer les tentatives de fuite et les éva-

sions des aliénés à une impulsion subjective qui les porte à quit-

ter les endroits où ils sont retenus contre leur gré; cette impul-

86 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

sion est, dans bien des cas, altribuable à d'autres causes qu'à la

recherche irrésistible de la liberté. L'auteur examine d'abord les

évasions des aliénés qui ne sont pas traités dans des asiles d'aliénés

ni dans des établissements hospitaliers; cette revue porte : 1° sur

les aliénés confiés à des soins particuliers, mais jouissant d'al-

lures assez libres; 2° sur les aliénés confiés à des soins particu-

liers dont les troubles psychiques et les manifestations extérieures

ont nécessité, de la part de leur entourage, l'emploi des engins

de séquestration et une rigoureuse surveillance. Il passe ensuite

aux évasions d'aliénés internés dans des établissements hospitaliers

et dans les asiles. Le mode des évasions, leur raison, leur cause et

les remèdes sont judicieusement exposés, conformément à l'étude

des diverses formes de l'aliénation mentale et aux principes mé-

dicaux les plus élevés. 11 conclut qu'un médecin doit avoir en

mains le service administratif. P. K.

XLI. Notes sur L'EGYPTE; par E. MENDEL (Allg. Zeitschr.,

XLII, 2.)

Le Caire a à sa porte un asile, unique d'ailleurs pour les six

millions d'habitants de l'Egypte, fussent-ils riches; c'est un vieux

cloître aménagé, amélioré par le Dr Battaglia, malgré la pau-

vreté des finances de l'Etat. On y a reçu, en 1884, 460 malades se

décomposant en 367 hommes et 93 femmes; 120 hommes y sont

entrés pour délire consécutif à l'usage du haschisch, 13 pour dé-

lire alcoolique, 6 pour paralysie générale; 403 sont sortis, parmi

lesquels 94 guéris et 27 améliorés qui avaient été amenés pour

intoxication cannabiuique. P. K.

XLII. Sur LES rapports ENTRE la paralysie PROGRESSIVE ET la

syphilis ; par M. GOLDSTEIN. (Allg. Zeitschr. f. Psch ? XLII, 2.)

L'étude de 466 malades montre d'abord que, lorsque les hommes

qui ont eu la syphilis sont atteints d'affections psychiques, ils sont

bien plus fréquemment atteints de paralysie générale que de toute

.autre psychose ; en secondlieu, le nombre des paralytiques généraux

qui ont eu la syphilis plus ou moins longtemps avant l'explosion

de la psychose est remarquablement élevé. Mais la syphilis est-

elle le facteur propre, direct, de la paralysie générale ? Comme

la plupart des paralytiques généraux en question ici avaient

également subi l'influence d'autres éléments pathogénétiques

(traumatisme, abus alcooliques, exagération de travaux intel-

lectuels, émotions morales), comme il n'existe aucune différence

-clinique entre la paralysie générale qui succède à la syphilis et

celle qui se produit sans qu'il y ait eu préalablement syphilis,

comme il n'existe pas non plus de signe anatomo-pathologique

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 87

de la paralysie générale syphilitique, comme le traitement mer-

curiel, si merveilleux contre toutes les localisations encéphaliques

de la syphilis, aggrave la situation, quelques précautions que

l'on prenne, le mercure, par exemple, venant à houtchez un pa-

ralytique général d'une iritis syphilitique, alors que, sous son

influence, la démence marche rapidement ; c'est tout au plus si

l'on est en droit de supposer que la syphilis diminue la force de

résistance du cerveau et peut ouvrir la porte à la paralysie géné-

rale, à l'égal d'une influence nocive quelconque. La cause de la

paralysie générale nous reste donccomplètement inconnue. P. K.

XLIII. De l'hérédité directe DES maladies mentales ;

par E. ScoLl. (Arc%. f. Psych., XVI, 1, 2, 3.)

L'auteur a étudié des familles dont les père et mère ont été à

un même établissement, par conséquent sur lesquelles il trouvait

d'importants renseignements; il a réussi de cette façon à posséder

un ensemble d'observationssur l'hérédité directe (cas le plus sim-

ple) appuyées sur des documents permettant l'analyse critique

exacte. La section principale A comporte quatorze familles dont

les descendants sont atteints de psychopathies de par l'hérédité,

seule ou principalement ; elles se décomposent en quatre groupes :

4 psychoses simples, pures, légères (mélancolie, manie) 3 fa-

' milles ; 2° psychoses semblables aux précédentes, mais plus com-

plexes en ce sens que des symptômes spéciaux (tels, les signes de

dégénérescence) viennent se surajouter aux autres éléments et

que l'évolution et l'issue diffèrent : 4 familles ; 3° psychoses pério-

diques 2 familles ; 4° folie systématique ou types à peu près purs

de vésanie organisée : 5 familles. Des observations complètes se

dégagent les conclusions suivantes :

La forme de la maladie des descendants concorde avec celle des ascen-

dants, tant en ce qui concerne le caractère général de la psychopathie

qu'en ce qui a trait au détail des symptômes (espèces morbides); un

ascendant atteint de folie systématique ne transmettra jamais une manie,

ni une mélancolie simple, réciproquement un maniaque ou un mélanco-

lique ne transmettra pas la folie systématique, mais la manie et la mé-

I uicolie se peuvent remplacer, un fou systématique peut transmettre une

vésanie cristallisée. Cette proposition est vraie pour les formes atypiques,

mixtes, impures avec ce correctif que plus la psychose d'un ascendant

est baroque, atypique, plus l'hérédité se traduit chez le descendant par

une psychose différente, s'éloignant complètement de celle de l'ascendant,

ainsi une psychose périodiqueémauera suit d'un psychose périodique, soit

d'une foime atypique. L'hérédité s'accomplit des ascendants sur les des-

cendants, quelle que soit l'époque à laquelle a été conçu le descendant

par rapport à l'explosion de la folie chez son générateur ; c'est le terrain

qui se transmet avant même que le générateur soit devenu fou. Le ter-

rain ou la prédisposition, la tare héréditaire se reconnaît avant l'explo-

88 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

sion de l'aliénation mentale au caractère de l'individu (tendance à la dé-

pression exagérée pour le motif le plus futile), à l'existence d'une débilité

mentale dès la jeunesse, à un ralentissement dans le développement phy-

sique. Ces signes sont d'autantplus accentués, que l'on a principalement

affaire à des cas dans lesquels l'ascendant a été atteint de psychoses

complexes atypiques, ou d'une folie systématique quelconques. Il en est

de même pour des signes dégénératifs qui se confondent avec ceux-ci

ou se montrent par 1 évolution et la marche moins correctes de la psy-

chose (aggravation, tendance précoce à la démence chez les descendants,

les phénomènes dégénératifs les plus intenses apparaissant surtout chez

les descendants, dont les générateurs ont présenté des psychoses com-

plexes ou systématiques. En revanche : les jeunes générations peuvent

s'améliorer par exemple, un ascendant atteint d'un psychose chronique

a pu transmettre iL son ascendant une psychose curable, tandis qu'il

n'y a pas d'exemple qu'un ascendant complètement guéri de sa psy-

chose ait transmis une psychopathie chronique.

La section B envisage cinq familles dans lesquelles la perturba-

tion mentale paraît produite moins par l'hérédité que par des

causes extérieures perceptibles (pneumonie, puerpéralité, causes

diverses). On voit ici que l'héritage se transforme surtout quand,

chez les ascendants, il existait des psychoses atypiques tendant à

une évolution défavorable incurable, et que, dans ces circons-

tances, si d'autres éléments nocifs s'adjoignent, qui affaiblissent

la résistance des descendants et favorisent la genèse d'une psy-

chose, la maladie tend encore plus à revêtir une forme grave.

La modalité dépend alors surtout de l'action des causes occa-

sionnelles.

D'une manière générale, les entités psychopathiques suivent

chez les héréditaires, dans leur proportion centésimale respec-

tive, les mêmes rapports que chez les aliénés en général ; les

formes atypiques semblent cependant plus fréquents chez les pre-

miers. Le suicide, l'ivrognerie, le nervosisme, les dépravations,

l'imbécillité, la transmission de l'aliénation mentale seule appa-

raissent chez eux ; on n'y constate ni l'épilepsie, ni l'idiotie, ni

la stérilité. P. K.

XLIV. DE l'aphasie ET DE SES relations avec la perception ;

par Grashey. (A·ch. ? Psych., XVI, 3.)

Analyse psychophysiologique d'une observation concernant un

homme de vingt-sept ans qui, à la suite d'une fracture de la base

du crâne, présentait une surdité presque absolue, l'abolition totale

de l'odorat et quasi complète du goût du côté droit ; l'oeil, du

même côté, percevait encore les mouvements de la main ; l'acuité

de l'oeil gauche était égale aux trois quarts et il existait une dimi-

nution concentrique du champ visuel : paralysie du facial droit,

parésie de l'hypoglosse et de tous les muscles de ce côté. C'est

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 89

quatorze jours après l'accident, lorsque le malade reprend con-

naissance, qu'on s'aperçoit du trouble de la parole. Il bégaie

quand il s'agit de répéter un mot, parcé qu'il est contraint,' dès

qu'il est parvenu à en trouver la première syllabe ou les pre-

mières lettres, à attendre que le reste lui vienne. La lecture est

courante, le malade comprenant bien et articulant parfaitement.

11 montre sans hésitation sur un livre d'images les objets qu'on

lui demande, mais n'en saurait trouver l'appellation; il explique

ce qu'on fait avec les objets désignés, sans plus de succès d'ail-

leurs ; même manière d'être à l'égard des adjectifs et des verbes,

de sorte que, dans la conversation, à tout instant il perd le mot

et le remplace par une périphrase. Il en est ainsi lorsqu'il écrit,

mais, pour cet exercice, les mots lui arrivent en général plus

aisément, sinon on le voit attendre que la mémoire les lui ait

fournis; il n'est au reste pas rare qu'il s'arrête au milieu d'un

mot, et qu'il lui faille le prononcer pour continuer à l'écrire.

D'ordinaire, ni en écrivant, ni en parlant, il ne se trompe d'ex-

pression, cet état s'aggrave pendant les quatre mois suivants, au

point qu'il ne se souvient plus durant trente secondes d'un mot,

d'une injonction, qu'il devient incapable de pratiquer les quatre

régies de l'arithmétique sur des nombres de plus de trois chiffres,

les seuls qu'il lise encore, qu'il est obligé de compter sur ses

doigts, sa mémoire ne lui présentant que sa table de multiplica-

tion ; que, tout en distinguant bien les monnaies les unes des

autres, il ne saurait manier l'argent. M. Grashey démontre qu'il

s'agit, dans l'espèce, d'une aphasie, non par impotence fonction-

nelle des centres, non par arr êt de la conductibilité des voies de

connexion, mais par simple diminution dans la durée des im-

pressions sur les éléments sensoriels, ceux-ci, altérés dans leurs

qualités, ne retenant pas assez longtemps l'imprégnation sensible

pour que les fractions d'incitation dont se compose un tout donné

fusionnent en une image unique représentative de l'objet, du

mot, etc. La période d'acmé de cette aphasie persista pendant

neuf mois, puis en quatorze jours s'effectua une guérison à peu

près entière.. P. K.

XLV. Contribution A la casuistique A,-îATOUO-11.ITHOLOGIQUP, DES

cerveaux DE criminels ET DE SUICIDES; par M. FLESCH. (Arch.

f. Psych., XVI, 3.)

Chez un homme de cinquante ans, vigoureux, qui le 13 novembre

1879, se tuait en avalant du cyanure de potassium, sans raison

valable, on trouvait que toute la moitié antérieure de la faux du cer-

veau faisaitdéfaut. Les deux hémisphères dans la moitié antérieure

du cerveau n'étaient donc séparées que par la pie-mère; au-dessus

d'eux passait comme un pont une lame d'arachnoïde. L'hémis-

90 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

phère gauche paraissait plus volumineux que l'hémisphère droit,

mais on n'a pas procédé à la coupe, afin' de conserver la pièce

dans son intégrité. P. K.

XLVI. Sur les facteurs DYSCIIASIQUE3 qui JOUENT UN rôle dans

LA GENÈSE DES NÉVROSES ET DES PSYCHOSES par 0. MUELLER. (Nc2G-

1'ol, Cent1'(llbl., z885.;

Les dyscrasies chroniques qui sont capables d'engendrer des

troubles psychiques se groupent sous deux catégories : 1e celle de

l'intoxication hétérogène, c'est-à-dire par des matières étrangères

à l'organisme (bactéries, syphilis), malaria, alcool, ergotine,

narcotiques, gaz toxiques; 2° celle de l'intoxication autochtone,

autogène, ou par des substances pathogénétiques originaires de

l'organisme même (acétonémie ou diabète, choléine, urémie,

goutte, rhumatisme, déchets dans les cas de dyspepsies, dans les

maladies de la respiration). La revue est intéressante. Sa conclu-

sion est qu'il faut faire de la chimie physiologique ainsi que de

l'analyse spectrale. c P. K.

XLVII. Identité DE l'épilepsie avec la folie morale ET avec la CRI-

FINALITé congénitale ; par C. Lo\tBnoso. (Nettrol. Cenlmlbl. 1885.)

On constate dans l'épilepsie comme dans la folie morale une

augmentation dans le poids du corps, de l'asymétrie et de la

sclérose crâniennes fréquente ? , l'existence également fréquente de

la fosse occipitale moyenne, une diminution de la capacité intra-

crânienne et, parmi les anamr.estiques, une grande proportion

de méningo-encéphalites pendant l'enfance. La physionomie des

deux espèces de sujets est identique : saillie des arcades zygoma-

tiques et des bosses frontales, oreilles détachées de la tête, mas-

culinité de la femme, analgésie, daltonisme, dyschromatopsie,

inégalité pupillaire, exagération des réflexes tendineux, tempé-

rature axillaire de 37°2 à 37°3, fréquence (6 p. 100) du type cri-

minel. Tous sont paresseux , impulsifs, privés de mémoire ,

dépourvus de sens moral, émotifs, excitables; fréquemment, ils

boivent et ils se tuent, ils ont aussi l'habitude du tatouage. La

statistique montre que sur cent délinquants il y a cinq épilep-

tiques, tandis que sur mille individus normaux, il n'y a que cinq

épileptiques. En Italie, ce sont les régions qui fournissent le plus

grand nombre d'épileptiques où l'on rencontre la plupart des

criminels. Les attaques convulsives peuvent être remplacées, sur-

tout pendant les quinze premières années de la vie, par des

impulsions attentatoires à la morale et à la vie des semblables ;

dans ce cas, il y a transmission héréditaire, soit que les parents

aient été épileptiques eux-mêmes, soient qu'ils aient été des

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 91 L

ivrognes. L'atavisme est d'ailleurs, quel que soit le mécanisme

intime de la modalité morbide, le substratum primordial de la

criminalité congéuiale identique avec la folie morale. Le sens

moral, qui apparaît le dernier dans l'ensemble du développement,

disparait le premier au début des affections cérébrales, dans la

vieillesse, dans l'alcoolisme, et l'on sait qu'à la suite de leurs

accès, les épileptiques se livrent à des actes de pure animalité : -.

ils aboient, miaulent, mordent, dévorent de la viande crue et

de la chair humaine. P. K.

XLVIII. Sur QUELQUES QUESTIONS DE principe EN électrothérapie;

par C.-W. Mueller. (Neurol. Ce7atralbl., 1885.)

Il s'agit du traitement périphérique dans les allections cen-

trales du système nerveux. 1 le traitement périphérique symp-

tomatique ne soulage jamais quand le traitement central n'exerce

aucune action sur le foyer morbide ; 2° il n'a jamais le même

effet curatif que le traitement central ; 3° jamais le traitement

périphérique n'entrave les progrès d'une maladie centrale;

4° certaines lésions organiques récentes font exception aux règles

établies dans les conclusions 2° et 3°; ces lésions récentes peuvent

être influencées par l'action réflexe de l'agent électrique sur les

vaisseaux sanguins des centres nerveux (faradisation selon la

méthode de Rumpf '); la même exception doit être faite en

faveur des divers troubles fonctionnels du système nerveux cen-

tral (neurasthénie, hystérie); 5° le triomphe du traitement

périphérique symptomatique, ce sont maintes névralgies d'ori-

gine centrale (tabes); l'électricité redonne de la vigueur à ce qui

reste encore des éléments musculaires et nerveux, et imprime un

coup de fouet à la convalescence. P. K.

XLIX. SUR LE TEMPS QUE demandent CHEZ LES aliénés LES PROCESSUS

rSYCIIIQUES simples; par W. DE TSCHISCH. (1X e211'Ol. CentlTCLlfil., 1883.)

Quel temps faut-il pour qu'un individu réagisse à une excitation

sensorielle le signal étant donné par une boule qui tombe soit de

5,7 centimètres (son fort) soit de 3 centimètres (son léger) ? Cent

cinquante expériences ont démontré que chez un individu sain,

il faut 0 Se°. 1 ; ; un paralytique général examiné dans une

période de rémission 0 sec. 08 - 0,10 ; à un persécuté halluciné

penchant vers la démence 0, 4 ? ; à un jeune homme en pleine

guérison d'un long accès de manie 0,07 0,11 ? Les mêmes

sujets mettront pour réagir et distinguer la valeur de la sollicita-

tion 0,30; 0 ? 7; 0,3.'r,; 0,24 (deux cents essais). L'association

1 Voy. Archives de Neurologie.

92 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

d'idées simples exigera, dans le même ordre : O,iO; 0,23; 1,39;

0, 28 (300 épreuves). La gènèse d'un jugement demandera : 0,8;

0,29; 1,89 ; 0,31 (200 épreuves). Conclusion : Quand les forces

vives de l'intelligence ont diminué, l'association des idées se fait

plus vite; si à l'affaiblissement intellectuel se joignent des con-

ceptions délirantes qui nuisent à l'attention de l'individu, le pro-

cessus d'association se ralentit considéralement. P. K.

SUR LE traitement DE la SITIOPHOBIE chez LES aliénés,

par Siemens (Neurol. Central6l., 1885.)

Répétition de ces communications antérieures*. Il persiste à

dire que les cas dans lequel l'alimentation forcée est indispensable

sont très rares. P. K.

REVUE DU THÉRAPEUTIQUE

1. De l'influence qu'exerce sur l'activité volontaire, L'INIlA-

litron DE l'amylnitrite ; par le D Tippel.

Le but que se propose le 1Jr Tippl est d'étudier au moyen de

l'expérimentation de quelle manière se manifeste l'influence de

l'amylnitrite sur la volonté, chez différents sujets.

Les recherches faites jusqu'à ce jour se divisent en deux

groupes : le premier envisage la question au point de vue physio-

logique, c'est-à-dire l'action de l'amylnitrite sur la circulation, la

respiration, etc., la seule chose qui nous intéressera là-dedans,

c'est son effet sur la circulation crâniene.

Le second groupe envisage la question au point de vue psycho-

logique, son action sur la volonté ; le travail le plus important et

le plus complet à ce sujet est celui de Dr Kroepelin, cité dans les

« Eludes philosophiques » de Wundt.

Le Dr Tippel commence par étudier l'effet physiologique de

l'amylnitrite sur le cerveau. Nous ignorons, dit-il, l'effet direct

de cette substance sur le cerveau, c'est-à-dire son action chimi-

que sur la substance cérébrale. Nous ne connaissons que son

effet sur certains vaisseaux artériels qui consiste dans l'augmen-

tation de leur volume; la distension des vaisseaux de la tête a

1 Voy. Archives de Neurologie.

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 93

pour résultat d'amener la rougeur de la face et une élévation

locale de température.

Cette action est attribuée aux vaso-moteurs. Les controverses au

sujet de l'action des vasomoteurs ne nous arrêteront pas, ce que

nous voulons savoir , c'est l'état des vaisseaux dans la boite

crânienne.

Pour étudier cette question, nous devrons nous servir de l'expé-

rimentation et voir ensuite quels sont les résultats psychiques

produits après l'inhalation de l'amylnitrite. Avant d'aborder cette

étude, nous devons éclaircir s'il y a des changements dans le vo-

lume des vaisseaux du cerveau après inhatation de l'amylnitrite,

et en quoi consistent ces changements.

Dans le premier chapitre intitulé : Considérations sur les change-

ments produits dans la circulation du cerveau à la suite de l'inhalation

de l'amylnitrite, le Dr Tippel dit qu'une observation directe du

cerveau était indispensable; l'examen du fond de l'oeil peut rendre

des services, cet examen avait été fait d'abord par Pick et décrit

dans sa dissertation sur l'amylnitrite et son action thérapeutique

(Rome, 1874); des expériences de Pick, contrôlées par le profes-

seur Semisch, montrèrent qu'il n'y avait aucun changement dans

les vaisseaux du fond de l'oeil. Ruger et Forster prouvèrent au

contraire qu'à la suite d'inhalation de l'amylnitrite. les vaisseaux

du fond de l'oeil devenaient plus volumineux et l'on apercevait

une petite branche invisible auparavant, il en était de même de

l'artère centrale de la rétine ; donc les deux carotides étaient

également affectées. Ces observations ne sont pourtant pas pro-

bantes pour nous, parce qu'il n'y a aucune raison qui prouve

que les vaisseaux du cerveau soient toujours hyperémiés -en

même temps que ceux de l'oeil. Les expériences sur le cerveau ont

été faites sur des animaux trépanés ; de plus Mosso a eu l'occasion

d'observer directement un malade qui avait une fracture du

crâne.

Expériences avec des animaux trépanés.

a. Expérience du Dr Maximilien Schuller, 1874, dans la Bel'linel'

\Voche nsch1'ilt : il faisait inhaler à des lapins trépanés de l'amyl-

nitrite au moyen d'une petite éponge ; après 3-5 inspirations, on

constatait une dilatation des vaisseaux de la pie-mère, veines et

artères ; le cerveau augmentait de volume au point de faire

saillie par l'orifice ; on constatait des pulsations dans les artères ;

dans un cas. on a pu les voir même dans les veines.

Dans l'Al ! gemeim' Zeitsclcrift sur Psychiatrie, se trouve une com-

munication du professeur Jolly (de Strasbourg); il avait fait des

expériences sur des lapins trépanés et avait obtenu les mêmes

résultats. Ce sont les deux seules observations qui existent.

94 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

6. Expérience personnelle : un lapin est trépané, on lui fend la

dure-mère et l'on met la pie-mère à nu. Température rectale au

commencement 36°,8. - On lui met devant le nez un morceau de

ouate imbibé d'amylnitrite, aussitôt l'on aperçoit l'augmen-

tation de volume de la substance cérébrale ; ce phénomène dis-

paraît quand l'on éloigne l'amylnitrile, il y a aussi augmentation

de la quantité de liquide céphaloracbidien. Les artères de la pie-

mère deviennent de plus en plus volumineuses, on aperçoit des

petites branches invisibles avant, après vingt-cinq minutes d'inhala-

tions ininterrompues il y a réplétion des vaisseaux de la pie-mère,

de violentes convulsions, crampes dans le museau; les oreilles, la

queue et les membres; dilatation des pupilles ; température rec-

tale 39°,8.

Pour sauver l'animal, on eut recours à la respiration artifi-

cielle.

Expérience de Massa. Il eut l'occasion d'observer(un homme qui à

la suite d'un traumatisme, avait le crâne fendu, avec perte de

substance osseuse, l'observation directe était impossible, mais l'on

se servit de la méthode graphique. On constata, ici aussi une

augmentation de volume de la masse cérébrale ; pendant douze

pulsations la courbe ne se modifia pas, les pulsations devinrent

ensuite de plus en plus rapides, le volume du cerveau augmenta

de trois centimètres. Les résultats sont donc les mêmes chez

l'homme et les animaux; cette hyperémie dans la boîte crâniene

produit une diminution de pression du sang dans les artères, et

nécessite une impulsion cardiaque plus énergique; ces faits ont

été signalés par plusieurs observateurs, et sont d'accord avec

mes observations personnelles ; rarement on a conslaté le ralen-

tissement du pouls et des battements du coeur. Cette accumula-

tion du sang et du liquide céphalo-rachidien dans la boite crâ-

niene, produit une telle augmentation de volume du cerveau que

si la boîte crânienne était extensible, on aurait pu constater une

augmentation de volume de toute la tête, comme on constate la

tuméfaction et la rougeur de la face. Cet état est désigné sous le

nom d'oedème cérébral. La circulation gênée par la réplétion des

vaisseaux et l'accumulation du liquide céphalo-rachidien rend

l'afflux de nouvelles ondées sanguines très difficile, et produit

une anémie cérébrale qui est la cause des attaques épileptoïdes

que l'on observe chez tous les animaux à la suite d'expériences pro-

longées.

Ces attaques sont plus fortes chez les animaux qui n'ont pas

subi l'opération du trépan. Ces expériences nous prouvent qu'il y

a modification de la circulation cérébrale à la suite d'inhalation

d'amylnitrite.

La seconde partie de l'article du Dr Tippel est consacrée aux

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 95

recherches sur l'influence que p.'oduitl'amyinitrite sur les actes

volontaires.

a. Sensations subjectives. L'influence de l'amylnitrite est varia-

ble selon les sujets; ses nombreuses observations s'étendent à

des sujets normaux, àdes sujets anormaux. Depuis longtemps, on

a constaté que certaines personnes inhalent cette substance

volontiers, d'autres s'en détournent avec horreur. La plus grande

majorité, tant parmi les sujets normaux que les sujets malades

nerveux ne s'oppose pas à l'inhalation ; même des personnes très

impressionnable le subissent. D'autres au contraires, se détournent

aussitôt qu'on approche d'eux un mouchoir imbibé d'amylnitrite.

Cette idiosyncrasie, comme on pourrait la nommer, s'observe sur-

tout chez les alcooliques . Quelques-uns ne consentaient qu'à

grande peine à des inhalations nouvelles, se plaignant d'avance

de douleurs de tête aussitôt qu'on les introduisait dans une chambre

où il y avait une odeur d'amylnitrite.

Les symptômes connus, tels que rougeur, chaleur de la tête,

augmentation des sécrétions des muqueuses oculaires, nasales,

battements des artères de la tête, s'observaient toujours. Une

fols, on observa ces phénomènes d'un seul côté de la face chez

l'intéressant malade Dulcring, cité dans la première partie de cet

ouvrage; cette rougeur était plus marquée du côté de sa contrac-

ture, la conjonctive de l'oeil gauche était plus irritée. -- Quant à

la manière dont les différents sujets sont affectés par l'amylni-

trite, elle est connue très variable : les uns n'éprouvent aucun

changement, sauf des mouches volantes devant les yeux; d'autres

au contraire, perdent complètement connaissance; et, à la suite de

nombreuses expériences on constata que les personnes pléthori-

ques en sont plus affectées lesanérniques, au contraire, le suppor-

tent très bien. Il y a cependant de nombreuses exceptions. Les

sujets normaux et les malades ne présentaient aucune différence

quant à la réaction. Il est à remarquer que chez certains mélanco-

liques il se produisait comme une secousse qui les faisait sortir de

leur apathie et produisait un état de surexcitation. Après le si-

lence dans lequel ils étaient plongés, ils se mettaient subitement

à parler et donnaient quelquefois des renseignements sur leur état.

Un épileptique se sentait toujours soulagé après l'inhalation

d'amylnitrite. Cet état de soulagement cessait quinze minutes

après que l'inhalation avait cessé. Le malade cité plus haut,

Duhring, éprouvait aussi du soulagement; ses crampes devenaient

moins douloureuses. D'autres, au contraire, se plaignent de

douleurs sourdes de la têle et d'un sentiment général de ma-

laise. Ceci était plus marqué chez les alcooliques, qui, après quel-

ques inspirations, étaient pris de titubation, malaise général,

sensation de dépression qui se prolongeait pendant plusieurs

heures après l'inhalation et rendait tout travail intellectuel im-

96 'REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

possible. L'âge et le sexe ne paraissaient exercer aucune

influence.

b. De l'influence qu'exerce l'amylnitrite sur les actes volon-

taires.

D'après ce que nous venons de dire, nous pouvons affirmer

que l'amylnitrite exerce une influence sur la volonté ; mais nous

devons la rechercher méthodiquement, et, pour cela, nous nous

servirons de la méthode des courbes du Dr Rieger, décrite dans la

première partie de ce livre. Avant de parler de l'influence de

l'amylnitrite, j'ai tenu à essayer d'autres substances pour voir si

l'influence produite n'était pas due à la substance odorante ; j'ai

pris de l'eau de Cologne, du camphre, sans obtenir aucun ré-

sultat ; si je dis que le chloroforme ne produisit non plus aucune

influence, j'aurai le droit d'affirmer que l'influence exercée sur

l'activité musculaire, après l'inhalation d'amylnitrite était réelle-

ment due à ce corps, et que cette influence s'exerçait sur le cer-

veau.

Je commence par montrer des courbes sur lesquelles l'amylni-

trite ne semble avoir produit aucune influence (comme toujours

je mets en a une courbe avant l'inhalation et une courbe en b

pendant l'expérimentation).

I a et 16 a sont les résultats de nombreuses courbes d'un collègue

qui connaissait l'effet produit. Quand la sensation de chaleur

' atteignait son maximum, les battements des carotides devenaient

intenses, quand le sensoriel11 commençait à être affecté, le sujet

en expérience nous le communiquait, et l'on prenait le tracé.

Quoique, dans ce cas, tous les autres effets de l'amylnitrite surve-

* liaient, son action sur la volonté était nulle. Il en est de même

'des courbes 2 a, 2 6 qui provenaient d'un docteur.

3 ca et 3 6 sont les courbes d'un homme simple, d'un certain

âge, dont les courbes à l'état normal étaient assez satisfaisantes ;

ici aussi l'amylnitrite tout en produisant les modifications physio-

logiques que nous connaissons, ne semble pas avoir influencé la

' volonté. A côté de ces trois exemples, j'en cite d'autres où la vo-

lonté est affectée.

' Lacourbe 4 a et4 6 est celle d'un garçon de quatorze ansqni,pour

des raisons qui ne nous intéressent pas, respire avec force ce qui

se voit sur la courbe. Ici nous voyons pour la première fois l'ac-

tion de l'amylnitrite. '

Pendant que 4 a s'abaisse régulièrement, 4 b s'abaisse au com-

mencement avec rapidité jusqu'à b; à 'ce point, on éloigne

l'amylnitrite du nez du sujet, le tracé remonte immédiatement ;

on rapproche de nouveau la ouate du nez et la courbe s'abaisse

immédiatement. A la fin, la courbe se relève, devientirrégulière.

5 a et 5 b sont les courbes d'un mélancolique qui comprenait

ce qu'on exigeait de lui et dont le tracé était ordinairement assez

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 97

régulier. En 5 6 nousvoyonsl'influence de l'amylnitrite clairement.

6 a et 6 b, sont les courbes d'un jeune homme d'un intelli-

gence affaiblie, 6 a montre une grande faiblesse de volonté qui

est plus marquée dans 6 b.

7 a et 7 b, jeune fille d'intelligence affaiblie, est très irrégulière,

mais 7 6 s'abaisse tellement qu'on n'a pu en suivre l'ombre sur le

tambour. Il est à remarquer que cette jeune fille ne savait même

pas qu'on expérimentait sur elle : elle s'asseyait et laissait faire

tout ce qu'on voulait, sans opposer aucune résistance. Cette expé-

rience se rapproche de celles qu'on fait sur les animaux.

8 a et 8 6, sont identiques à la précédente.

9 a et 9 b, sont les courbes d'un étudiant de l'école normale; il

voulait être immobile, aussi fut-il très étonné de constater l'abais-

sement considérable de la courbe.

10 a, 10 6 est la courbe d'un jeune médecin ; b, s'abaisse con-

sidérablement.

11 a et Il b est la courbe d'un alcoolique en convalescence

d'un accès de délirium tremens. Le tremblement avait disparu,

mais on constatait chez ce sujet un phénomène dont il est ques-

tion dans la première partie de ce livre; ce patient avait une ten-

dance à fléchir le bras, ce qui fait remonter la courbe en a. Cette

élévation est assez régulière, mais en b, l'irrégularité est frappante.

- 1 ? a et 12 b, est la courbe d'un alcoolique en plein accès de

delirium tremens. Outre le tremblement, a se tient à une cer-

taine hauteur, b présente des irrégularités, puis la courbe finit par

devenir impossible. Les mêmes faits s'observent en 13 a et 13 b.

Egalement un alcoolique qui, n'ayant pas bu d'alcool depuis long-

temps, était très affaibli.

On constate, en général, chez les alcooliques, une modifica-

tion dans la courbe sous l'influence de l'amylnitrite telle, que le

tracé en devenait impossible.

J'ai observé un phénomène très curieux chez les épileptiques,

sous l'influence de l'amylnitrite, leur courbe devenait plus régu-

lière, de 14 a et 14 b, de la planche VIII sont un des nombreux

exemples que j'ai observés. - a, est très irrégulier, descend ra-

pidement, b est très loin de représenter une courbe normale,

mais la courbe démontre une activité volontaire plus grande.

Pour terminer, je montrerai aussi la courbe d'un malade qui à la

suite d'une lésion du crâne, avait une hémiparésie. Le malade

avait aussi une aphasie motrice, et, comme c'est le cas dans ces

maladies, il était d'humeur variable; même dans les courbes du

bras gauche qui était normal, l'influence de l'humeur se faisait

voir. Sous l'influence de l'amylnitrite, il a toujours été impossible

de prendre de tracé parce que l'état de surexcitation du malade

devenait considérable; il suffisait d'approcher de ce malade, 2' à

3 gouttes d'amylnitrite pour produire un état d'ivresse, tel que, le

Archives, t. XII. 7

98 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

jour suivant le malade ne se souvenait de rien. Je termine parla, mon

énumération des nombreuses courbes, les exemples suffisent pour

démontrer que l'influence de la volonté par l'inhalation de l'amyl-

nitrite présente les plus grandes variétés individuelles, tandis que

les effets physiologiques sont les mêmes chez tous les sujets.

Plusieurs personnes ont présenté des courbes aussi régulières,

sous l'influence de l'amylnitrile, qu'à l'état normal. D'autres, au

contraire en furent profondément affectées ; l'influence est sur-

tout marquée sur les alcooliques. De plus, un phénomène intéres-

sant, c'est l'effet produit sur le sujet atteint de lésion du crâne ;

plusieurs savants ont dû constater que des sujets atteints de lésions

du crâne opposaient moins de résistance aux influences conges-

tionnelles ; le médecin légiste, Krafft-Ebing. par exemple, trouve

que ce phénomène pourrait être démontré expérimentalement.

Cette méthode pourrait donc dans ce sens rendre des services

considérables.

Dans ces recherches, sauf les cas où l'amylnitrite n'a produit

aucun effet, nous avons toujours trouvé comme règle générale,

que l'amylnitrite produisait un affaiblissement de l'activité volon-

taire. Le bras qui normalement pouvait rester immobile un temps

donné, s'abaissait généralement avec rapidité sous l'influence de

ce corps. IR.1CLIDY.

II. Un cas DE trépanation du crâne pour épilepsie; par A. ERLEN-

MEYER (Centralbl. f. Neruenheilk., 1885.)

Epilepsie survenue à la suite d'une chute sur la tête, ne recon-

naissant aucune autre cause. Le pariétal gauche est le siège

d'une cicatrice de 2 centimètres de long, blanche, dépourvue

d'adhérences, non douloureuse à la pression, parallèle à la suture

sagittale et située à 3 centimètres au-dessous d'elle; une ligne

menée perpendiculairement de la suture sagittale au conduit audi-

tif externe coupe la cicatrice en son milieu. On constate en ce

point un enfoncement eu rigole, large comme le doigt, sensible

à la pression, mais non épileptogène. D'ailleurs, il s'agit d'une

épilepsie ordinaire; on diagnostique simplement les phénomènes

d'excitation générale dus à un enfoncement osseux troublant la

circulation générale de l'encéphale. On enlève l'endroit incriminé

sur un diamètre mnyen de 3 centimètres; on ne constate aucune

saillie de la lame vitrée, aucune anomalie de la dure-mère;

néanmoins l'épilepsie disparaît. P. K.

III. Un nouveau rhéostat transportable; par 1 ? Hecker (Neurol.

Centralbl., 1885.)

Cet instrument qu'emploie M. Hecker tous les jours depuis un

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 99

au sans mécomptes ni inconvénients est constitué par une simple

bande de toile humide sur laquelle on fait glisser un coulant

armé de charbon qui porte une anse conductrice. P. K.

IV. Contribution au traitement DE l'attaque d'hystérie;

par Albert RuAULT (Franee médicale, 4885, n° 86).

M. Ruault a réussi très souvent à arrêter l'attaque hystérique

par la compression d'un nerf à son point d'émergence des par-

ties profondes. Le cubital en arrière de l'épitrochlée et surtout

le nerf sus-orbitaire sont les plus accessibles à cette manoeuvre.

Les phénomènes observés sont analogues à ceux produits par la

compression de l'ovaire dans les mêmes circonstances. L'auteur

a pu arrêter ainsi non seulement des attaques légitimes d'hystérie

convulsive, mais aussi d'autres mauifestatioes de la même névrose

délire, hallucinations, dyspnée. Cu. F.

V. SUR l'action DE la cocaïne dans LE sevrage DES morphinomanes;

par A. ËRLSNMEYEU (Centralbl. f. Nervenheilke, 1883.)

Il La cocaïne à la dose maxima de 0,10 par jour en injection

sous-cutanée n'exerce aucune espèce d'action sur le système ner-

veux cérébro-spinal (motilité et sensibilité) : 2° à la dose hypo-

dermique de 0,005 milligr. les centresvaso-moteurs sont touchés;

le pouls augmente de fréquence, les artères se dilatent, la tension

artérielle baisse (dicrotisme), il se produit une sudation abon-

dante, la température monte; mais ces effets ne durent que

quinze à vingt minutes; 3° le patient manifeste alors une sensa-

tion subjective de chaleur soit à l'épigastre, soit par tout le corps,

mais si l'estomac est vide, il accuse aussi une pesanteur ou une

crampe désagréable dans la région épigastrique; la répétition

fréquente de petites doses ou une quotité de 0,05 centigrammes

provoque un sentiment d'angoisse et de lipothymie des plus

désagréables; 4° chez les morphinomanes sevrés de leur poison,

la cocaïne assoupit pour un temps les malaises qu'ils éprouvent ;

par conséquent il en faudrait répéter l'injection plusieurs fois

par jour ; sa cherté ne correspond donc pas aux effets de ce subs-

titutif léger. Ainsi, un morphinomane, tout en absorbant des

doses de 0,40 centigrammes de cocaïne, n'avait réussi qu'à dimi-

nuer de 1 milligramme les 0,80 à un gramme de morphine qu'il

lui fallait par jour; et cependant il avait éprouvé des angoisses

extrêmement violentes et des tremblements de mains l'empê-

chant presque d'écrire. Au reste, Panas a prouvé qu'il existe deux

produits dans les feuilles de coca : la cocaïne commune, émanée

d'un premier traitement pharmaceutique n'est ni mydriatique, ni

antimorphinique; l'éther hygrinique qu'on extrait des feuilles de

100 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

coca déjà manipulées, mydriatique, pourrait bien être l'antago-

niste de la morphine, au sens de Richter '. P. K.

VI. CONTRIBUTIONS pratiques A L'EMPLOI DE L'ÉLECTRICITÉ chez les

aliénés; par HEYDEN. (Allg. Zeitschr. f. Psych., XLII, 1.)

Six ans de pratique à l'asile d'Eudenieh. Vingt-quatre observa-

tions. On doit employer : soit la galvanisation céphalique descen-

dante, tantôt transversale(chacun des pôles derrière les oreilles),

tantôt longitudinale(anode au front, cathode à la nuque (3, 5, 8,

éléments de Stoerer); soit la galvanisation et la faradisation gé-

nérales (anode à la nuque ou sur le rachis, cathode dans l'eau d'un

bain de pieds à- 36 à 38° C.), soit enfin les méthodes périphé-

riques classiques. Dans ces conditions, l'électricité débarrasse

les aliénés de symptômes nerveux périphériques ayant une ori-

gine centrale, surtout dans le domaine uro-génital (aménorrhée,

incontinence d'urine, constipation opiniâtre), active la circula-

tion podalique (pinceau électrique), produit du sommeil (2 cas

de paralysie générale). P. K.

VII. Traitement DES psychoses A l'aide de l'électricité; par TIGGES

(Allg. Zeitschir. f. Psych., XLI, 4-3.)

C'est, comme le dit l'auteur, la partie spéciale du mémoire déjà

analysé par nous 2. On y trouve les observations accompagnées de

la mise en relief des résultats thérapeutiques (tableaux, analyses,

etc.). Les courants continus ont particulièrement réussi dans cinq

cas de mélancolie; sous leur action, les sensations anormales, les

troubles parétiques, les tremblements ont complètement disparu

et la maladie a guéri en 11, 14, 18, 49, 30 jours. Trois cas de

mélancolie stupide ont guéri sous l'influence de l'électricité. Dans

la folie systématique, on n'a obtenu tout au plus qu'un effet mo-

mentané ou partiel ; même observation à l'égard de la démence,

dont cinq malades se sont trouvées radicalement améliorées.

Dans la manie, quelqu'en fût le mode, l'électricité exerça réelle-

ment une influence favorable sur les symptômes, notamment sur

les sensations pathologiques; elle agit aussi, mais très peu et

passagèrement, sur l'agitation et l'état de l'humeur, n'exerçant

d'ailleurs aucune action sur l'évolution. Dans l'épilepsie, précédée

d'accès maniaques, l'effet obtenu a été médiocre. Dans tous les

faits où l'existence de symptômes moteurs laissait supposer le

tabes, le courant continu a amélioré, au moins pour un temps,

l'ensemble des symptômes nerveux et psychiques. P. K.

1 Voy. Archives de Neurologie.

2 Id., t. IX, p. 85.

REVUE DE THERAPEUTIQUE. 101

VIII. SUR L'EMPLOI DU FER EN INJECTIONS SOUS-CUTANÉES dans LES

psychoses; par W. NASSE (Allg. Zeitschr. f. Psych. XLI, 4-5.)

L'oxyde de fer soluble, préparé par Finzelberg, s'obtient ainsi :

on fait digérer de la viande dans de la pepsine pure additionnée

d'acide chlorhydrique ; on porte le tout dans un dialyseur; on

évapore à siccité, la poudre rouge-brun qui résulte de ce traite-

ment contient 25 p. 100 d'oxyde; on la fait bouillir dans de

l'eau dans la proportion de 1,10. Une seringue de Pravaz,

(I gramme), contient alors 0,10 de peptonate de fer, on filtre

soit 0,025 mill. d'oxyde. L'injection hypodermique de cette solu-

tion claire ne présente aucun inconvénient, elle tonifie, répare,

réconforte les mélancoliques anémiques, cachectiques, hydrémi-

ques, à la condition qu'on prolonge le traitement pendant deux,

trois, voire six mois (1879-1885.) P. K.

IX. Cas DE paralysie DE LANDRY guérie par L'ERGOTINF

par SORGENFREY. (Neurol. Centrabl., 1885.)

Une semaine après avoir été soumis à un refroidissement

humide de la région dorsale, on constate chez le malade, qui fait

le sujet de cette observation, de l'abattement, de l'inappétence, de

la lourdeur des extrémités inférieures, de la faiblesse de la mar-

che ; il est obligé de s'aliter. T =37°,5; couché sur le dos, il meut

péniblement les jambes, mais ne présente aucune anomalie du

côté de la sensibilité; le phénomène du genou a disparu; les

réflexes cutanés persistent. Malgré l'institution d'un traitement

anticongestif, les troubles augmentent; il se produit une paraly-

sie complète d'abord des membres inférieurs, puis des extrémités

supérieures; dyspnée; parole inintelligible (aphonie); dysphagie;

facies hippocratique. Au bout de trois jours la mort est devenue

imminente. On ordonne, par cuillerées à thé toutes les heures,

la solution suivante : ergotine Bonjean, I gr. 25, eau de cannelle,

60 grammes. Le lendemain matin, les symptômes bulbaires ont L

disparu; la motilité a reparu, quoique faible, dans les bras;

Ifs jambes tendent à récupérer leurs fonctions. Une semaine plus

Lard, sans qu'on fût obligé d'ordonner une nouvelle médication,

le malade s'améliore, puis guérit. La paralysie de Landry ne

résulterait-elle pas de troubles vaso-moteurs ? P. K.

X. Encore UN cas DE paralysie par INJECTION sous-cutanée d'éther;

par H. NEUMANN. (Neurol. Centralbl., 1885.)

Un phthisique en état de collapsus reçoit deux injections sous-

cutanées d'éther sur les deux avant-bras. Le troisième jour sui-

102 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE.

vant, les endroits piqués sont douloureux et légèrement tuméfiés ;

les mouvements déterminent des douleurs sur la face postérieure

de l'avant-bras ; il lui est impossible d'étendre les médius, surtout

à droite; en même temps, il existe une sensation d'engourdisse-

ment sur le bord cubital de la face dorsale des avant-bras, sur

le dos des mains, au niveau du troisième métacarpien, du troi-

sième doigt dans les épiphyses et à un moindre degré sur la face

palmaire du même dos, ainsi que dans la paume de la main

(même région); puis, tout disparait, si ce n'est la paralysie du

ventre de l'extenseur commun des doigts qui commande aux

médius. Pendant l'examen objectif, le patient désigne fort net-

tement comme étant l'endroit des piqûres une zone qui, sur

les avant-bras, .occupe le bord cubital de la face dorsale du

membre, à 10 ou 12 centimètres au-dessous de la pointe de

l'olécrâne; intégrité de la sensibilité et de la motilité, si ce n'est

en ce qui concerne le mouvement volontaire et l'excitation gal-

vanique et faradique dans le domaine du radial et de l'extenseur

commun des doigts (parésie surtout frappante à droite). Aucun

signe de lésion du système nerveux central. P. K.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE

I. CONTRIBUTION A L'ANAT031fE DES tubercules quadrijumeaux;

par L. D.4RIiSCHER'ITSCII. (Neurol. Centralbl., 1885.)

Préparations empruntées à des lapins, colorées par la méthode

de Weigert, qui montrent très nettement la répartition et la

terminaison des bandelettes optiques dans les tubercules quadri-

jumeaux supérieurs. La bandelette se distribue surtout aux deux

tiers antérieurs du tubercule antérieur du côté correspondant;

elle en occupe la périphérie externe, le segment interne de la

périphérie de ce dernier organe donnant naissance à des fibres

qui se dirigent vers l'écorce. P. K.

II. NOUVELLE contribution expérimentale A L'ANATOMIE DU ruban

DE REiL, communication provisoire; par de AIoN.\EOV. (Neurol.

Centrcclbl., 1885.)

Conclusion : 1° Une partie des irradiations blanches des parties

inférieures du lobe occipito-temporal se termine, chez le chat

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE. 103

dans le segment latéral du corps genouillé interne. Quand ce der-

nier organe est intact, il y a lieu de supposer que les faisceaux

temporo-occipitaux mentionnés sont indemnes. Une autre partie

des faisceaux temporo-occipitaux inférieurs gagne, suivant toute

probabilité, le bras du tubercule bijumeau inférieur, avec les

zones marginales duquel il entre en un rapport intime. - 2° Le

ruban de Reil inférieur (Forel) possède des faisceaux dont un

premier se relie aux lacis de substances grises sis au-dessous du

tubercule bijumeau inférieur, un second gagne les couches trans-

verses et inférieures de l'S de l'étage supérieur; un troisième

enfin (faisceau aberrant du cordon latéral) se dirige dans les par-

ties marginales du cordon latéral du même côté, contiguës à la

corne postérieure, pour se terminer dans la substance grise de la

moelle épinière. La plus grande somme des trois faisceaux pro-

vient sans aucun doute du tubercule bijumeau inférieur. 3°

Les fibres du ruban de Reil latéral (partie constituante principale

du ruban de Reil ou ruban de Reil cortical issu des circonvolu-

tions pariétales d'après Monakow), conservant, par rapport aux

faisceaux pyramidaux, la situation dorso-latérale, jusqu'à l'entre-

croisement supérieur des pyramides de Meynert, pénétrent, au

niveau de la partie inférieure du bulbe, à l'état de fibres arci-

formes, dans le noyau des cordons de Goll du côté opposé, ainsi

que dans le segment médian du noyau opposé des faisceaux de

Burdach et s'unissent aux cellules nerveuses qui s'y trouvent.

P.K.

III. Contribution A La connaissance DE la couche intermédiaire

DES olives; par S. FREUD. (Neurol. Centralbl., 1885.)

Etude du bulbe de foetus de 5 à 6 mois par la méthode de

Weigert. Les racines de l'acoustique forment une série continue

affectant une direction extéro-interne et inféro-supérieuie (de la

moelle à la protubérance); elles se terminent dans les masses

grises du même coté. Les plus externes gagnent le noyau anté-

rieur de l'acoustique (ganglion acoustique); les moyens et une

partie des internes vont au noyau interne (à grandes et petites

cellules) de l'acoustique, le restedesracines internes passe, par in-

iloxion directe, dans le noyau externe (segment interne du pédon-

cule cérébelleux inférieur, racine ascendante de Roller). Parmi les

prolongements indirects de ces racines, on voit : 1° des faisceaux

qui joignent le ganglion acoustique au noyau interne; 2" des fais-

ceaux arqués qui unissent le noyau interne à l'entrecroisement des

noyaux du toit du quatrième ventricule; 3° des faisceaux qui, par-

tis du noyau interne, dépassent le raphé en s'enchevêtrant avec

le noyau commun au facial et à l'auditif ; ainsi qu'avec le faisceau

longitudinal postérieur (faisceaux arqués); 4° des fibres arci-

formes allant du noyau externe aux plans profonds ; 50 des fais-

ceaux du corps trapézoïde, sont venus du ganglion de l'acous-

tique (Flechsig). La couche intermédiaire des olives avoisine le

point d'entrecroisement des prolongements du corps trapézoïde;

elle est par l'entrecroisement supérieur des pyramides en rapport

de continuité avec les noyaux des cordons postérieurs : peut-

être y a-t-il dans son sein des fibres qui rattachent l'acoustique

aux tractus sensitifs de la moelle épinière. L'angle inférieur et

médian du noyau interne de l'acoustique du mêmecôté lui apporte

un contingent de faisceaux bien dessinés. P. K.

IV. QUELQUES remarques SUR les nouveaux travaux concernant

l'action DE la chaleur SUR LES CENTRES respiratoires ainsi QUE

sur les nerfs du COEUR ET des vaisseaux; par L. rOLDSTEIN.

(Centralbl. f. Nervenheilk., 188.)

Revue critique sur les travaux d'Ackermann (Deutsch. Arch. f..

Klin. bfed., 1886), de Geedstein (Ueber W<Bt'Me<.6'pn(B.Ver/t<t ? td<.d.

phys. meci. Gesellsclz. 3" WÜ1 ? bllrg, N. F.,llovol.), Sililer (On the so

called heat rlyspnoia.Journ.of. Physiolog., t. 11., P. v. Merlschnisky,

(Deitsay ZU1' Woermedyspnoe. Wûrzbourg, 1881). Senator (Uebcr

einize Wirkungen der Erwcermung au/' den Kreislauf, die Athmung

und ct'na6sonde)'u) : g'. Arch. f. Physiol., supplt. Rand., 1883),

A.-Fi(l. (liât Verwnderung derTemperntur des im llirn circulisen-

den Bluter Einfluss cenf die Centren deau Hel'z-und-Ge{oessllel'ven ?

Pflicgcr's Arch., v, 18tif.) P. K.

V. Sur l'origine centrale du NERF accessoire de VILLIS

par L. DARKsciiFWITSCII. (Neurol.Centrcclbl., 488.i.)

De l'examen d'embryons humains, il résulte qu'il émane d'une

colonne ininterrompue de cellules, qui, dans la moelle spinale,

est située en arrière et en dehors de la corne antérieure et dont

le bulbe occupe par rapport au noyau de l'hypoglosse vers lequel

elle se prolonge exactement la même situation. Cette colonne

commence en haut au tiers intérieur des olives ou à la région

dans laquelle se met à apparaître le noyau postérieur du nerf

vague; on la suit en bas jusqu'à l'extrémité finale du territoire

qui donne naissance à la cinquième paire cervicale. A quelque

hauteur qu'on l'examine, l'aspect des cellules composantes est

partout le même. La racine de l'accessoire, après avoir quitté la

colonne qui constitue son noyau, décrit toujours une concavité

qui regarde en bas et un peu en dehors. La onzième paire n'af-

fecte donc aucun rapport ni avec le noyau antérieur, ni avec le

noyau postérieur du pneumogastrique, pas plus qu'avec le

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE. 105

faisceau solitaire ou avec la formation réticulaire : mais, dans le

bulbe, à la hauteur des noyaux des cordons postérieurs, le fais-

ceau de Burdach envoie des fibres qui s'adjoignent à la racine de

l'accessoire et l'accompagnent à la périphérie (découverte de

Darkschewitsch) : P. K.

VI. SUR UNE modification apportée A la NOUVELLE méthode DE

coloration DE VE1GERT DESTINÉE aux FIBRES NERVEUSES A MYÉLINE

DES organes centraux; par M. FRIEDMANN. (Neurol. Centralbl.,

4 885.)

Association de l'acide osmique, de l'acide chromique, de l'alcool,

avant de soumettre les morceaux à la double élection de Wei-

gert. On verrait, par l'ensemble des traitementsrecommandés, les

fibres colorées bleu intense, ou bleu noire, selon larégion de la

coupe envisagée. Nous ne saurions copier les recommandations

techniques. P. K.

VII. SUR LES trousseaux DE FIBRES longitudinales DE la formation

réticulaire du BULBE ET de la protubérance; par W. BECHTEREW.

(Neurol. Centralbl., 1885.)

Ces trousseaux reçoivent les manchons de myéline qui doivent

les constituer par étapes correspondant à diverses périodes de la

vie foetale. Ces fibres longitudinales représentent les unes le

prolongement immédiat des fibres spinales qui ont trouvé dans

la formation réticulaire des relais de substance grise (interrup-

tion momentanée), les autres les tractus fournis par ces foyers

gris. La substance grise de la formation réticulaire se compose

d'une zone externe limitée dans le bulbe, en dedans par les

.racines de l'hypoglosse, en dehors par celles du spinal, du pneu-

mo-gastrique, du glossopharygien , et d'une zone interne, origi-

naire des cordons antérieurs, limitée dans le bulbe, en dedans

par le raphé, en dehors par les racines de l'hypoglosse, ou, dans des

couches inférieures de la protubérance, par les racines de l'oculo-

moteur externe. Dans la zone externe, on rencontre : 1° les noyaux

du cordon latéral du bulbe ; 2° les olives supérieures ; 3° unnoyau

.de cellules petites et moyennes situé dans le territoire de la

calotte du pédoncule cérébral, en arrière du noyau rouge, en

dedans du ruban de Reil (découvert par Bechterew). La zone

interne renferme : 1° le noyau central de Roller très développé,

au niveau de l'extrémité supérieure des grosses olives; 2° le noyau

réticulé tegmenti ponlis, situé dans le segment inférieur et un peu

dans le segment moyen de la protubérance, au voisinage du

106 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE.

raphé (Voy. B.ecl1tcr('w..inat. des pédoncules cérébelleux et, en parti-

culier, du pédoncule cérébelleux moyen) ' ; 3° le noyau central

supérieur, au niveau du tiers supérieur de la protubérance, des

deux côtés du raphé, qui occupe presque toute l'étendue com-

posée entre le faisceau longitudinal postérieur et le ruban de

Reil. 1. Fibres qui doivent être considérées comme le probn-

gemeutimll1édiat des fibres de la moelle. De la substance blanche

spinale il n'y a que le faisceau radiculaire du cordon antérieur

et ce qui reste du cordon latéral qui passe immédiatement dans

la formation réticulaire. Ils se rendent aux olives supérieures

(fibres issues de la partie postérieure du faisceau radiculaire' du

cordon latéral), au noyau central de Roller (fibres du reste du

faisceau radiculaire du cordon latéral et du faisceau radiculaire

du cordon antérieur), au noyau réticulaire (les deux espèces de

faisceaux radiculaires mais surtout celui du cordon antérieur),

au noyau central supérieur (faisceau radiculaire du cordon anté-

rolatéral). Le système latéral des débris du cordon latéral se

rendent à son noyau. Quantau système dorsolatéral (aire externe

de la formation réticulaire), il contient des fibres qui servent de

liens entre les noyaux de la formation réticulaire et les grosses

olives et les masses grises du cerveau moyen et antérieur; on y

rencontre aussi des fibres longitudinales issues, les unes de la

couche limitantelatérale de substance grise spinale et peut-être

également du système latéral des restes du cordon antérieur,

les autres de la moelle allongée (trijumeau) glosso-pliaryngien,

pneumo-gastrique ? noyau du cordon latéral ? ), qui gagnent, avec

l'épanouissement radié de la calotte pédonculaire, la capsule in-

terne et de là les hémisphères cérébraux. Il faut noter qu'il

n'y a que le système latéro-dorsal de la formation réticulaire

qui renferme des fibres émanées des débris des cordons latéraux

et se rendant au cerveau moyen et au cerveau antérieur (tractus

sensitif ? ). II. Fibres par lesquelles les noyaux de la formation

réticulaire entrent en relation avec les organes situés plus haut.

Ce sont en particulier les connexions du noyau réticulaire teg-

menti pontis qui sont envisagées ici ; ce noyau reçoit des fibres

qui le mettent en communication avec les cellules du segment

antérieur (cérébelleux) de la protubérance; il envoie des trous-

seaux fibreux au tubercule quadrijumeau postérieur, aux masses

grises qui environnent le troisième' ventricule (peut-être à la

couche optique ? ), à la partie médian du ruban de Reil (Reichert,

de Gudden) : ces derniers tractus aboutissent peut-être finale-

ment par l'intermédiare de la substance noire de Semmering

au corps strié. P. K.

Voy. Archives de Neurologie.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE. 107

VIII. De LI commissure posiérieure du cerveau, par L. de

D.\RSCII3NLTSCII. (11'ourol. I ? ztoulbl., 1885.)

La coloration d'encéphale de foetus d'un certain âge à l'aide de

la méthode de Weigert, montre que cette commissure renferme

divers systèmes de fibres; on devrait distinguer un plan inférieur l'

(ventral) qui de très bonne heure(foetus de vingt-huit centimètres

de long), contient des fibres à peu près parallèles ; ces fibres mé-

dianes (commissure vraie) descendent latéralement en côtoyant

le bord externe de la substance grise du canal encéphalo-médul-

laire, et en décrivant une courbe à convexité antérieure, jusqu'à

la région des faisceaux longitudinaux postérieurs ; elles se per-

dent alors, soit entre les fibres de ces derniers, soit dans un

groupe de petites cellules ganglionnaires, elles-mêmes en con-

vexion avec les grosses cellules de l'oculo-moteur commun. Le

groupe des petites cellules en question (noyau supérieur de l'ocu-

lo-moteur commun ? ) demeure en relation par plusieurs trousseaux

fibreux avec le réel noyau de l'oculo-moteur commun, avec les

faisceaux longitudinaux postérieurs, eux-mêmes traversés par des

fibres de l'oculo-moteur commun ; par conséquent le plan inférieur

de la commissure postérieure affecte des rapports intimes avec les

nerfs moteurs de l'oeil et, en particulier, avec le moteur oculaire

commun. Au-dessus de la commissure postérieure, les faisceaux lon-

gitudinaux postérieurs, réduits à de rarés fibres, reçoivent plus

haut encore des fibres issues du groupe des petites cellules qui

représentent une espèce de commissure nouvelle entrecroisée ( ? )

au sein de la substance grise du canal encéphalo-médullaire

(ville ventricule), où elles forment une convexité à direction infé-

rieure ; d'autres fibres passent, sur les côtés, dans l'anse du noyau

lenticulaire ou dans le corps de Luys. Il est impossible de confon-

dre les fibres du plan inférieur de la commissure postérieure avec

celles qui viennent de la substance blanche profonde du tubercule

quadrijumeau supérieur (antérieur), car ces dernières ne sont t

pourvues de myéline que bien après les premières. P. f.

IX. Contribution IL l'anatomie DES PÉDONCULES cérébelleux ET en

particulier des pédoncules cérébelleux moyens ; par W. Rech-

TEREW. (Neurol. Centralbl., 1885.)

Etude faite à l'aide de la méthode de Weigert sur des enfants à

terme âgés de quelques semaines. Il y a' lieu de distinguer

entre les fibres transverses de la protubérance qui appartiennent

aux pédoncules cérébelleux moyens deux parties manifestement

tout à fait différentes, d'après leur situation systématique. A

cet âge de la vie en effet il existe une couche dépourvue de myé-

108 revue d'anatomie le,'[' de PHYSIOLOGIE.

line ; c'est Itt moitié supérieure des fibres transverses de la protubé-

rance ou moitié cérébrale ; l'autre ne se compose que de fibres à

myélines c'est la moitié inférieure ou spinale des fibres transverses

de la protubérance. La première, située sur le côté du pédoncule

cérébelleux moyen, oblique par rapport à l'axe du corps, se dirige

d'avant en arrière; après son entrée dans le cervelet, elle occupe

d'abord la portion inférieure du segment externe de l'hémis-

phère correspondant, dans l'écorce duquel elle se termine en

arrière, à la base, et latéralement; une partie de ces fibres

gagne l'écorce de la face supérieure de l'organe, mais sans tou-

cher au vermis. La moitié spinale gagne, un peu en arrière de

l'autre, le plan médian du pédoncule cérébelleux moyen, se

trouve perpendiculaire à l'axe longitudinal de la protubérance,

et se rend d'arrière en avant à l'écorce de la face supérieure du

cervelet et du vermis. Le système spinal du pédoncule cérébel-

leux moyen est, de plus, relié de chaque côté aux deux moitiés

de la protubérance ou des masses grises de la région inférieure;

M. Bechlerew appelle à cet égard l'attention sur le noyau réticu-

laire tegmenti pontis de Flechsig ; les faisceaux raphéiques sont

chargés de transmettre aux nerfs moteurs de la moelle épinière

ou aux muscles correspondants les ordres du cervelet. Le cerve-

let communiquerait avec le cerveau par trois espèces de conduc-

teurs : 1° par plusieurs systèmes de fibres du pédoncule cérébel-

leux antérieures ou supérieures; 2° par le système cérébral du

pédoncule cérébelleux moyen ; 3° par le segment externe du pédon-

cule cérébelleux inférieur (corps restiforme) et notamment par

les fibres qui (entrecroisées) gagnent les olives ;des olives part de

chaque côté un trousseau compact de faisceaux (voie centrale de

la calotte de l'auteur) qui, traversant la protubérance dans toute

sa longueur, se rendent au cerveau. Toutes les fibres qui unissent

le cervelet au cerveau s'entrecroisent totalement; l'ensemble de

ces entrecroisements occupe toute l'étendue comprise entre le

tubercule quadrijumeau supérieur ;et l'extrémité inférieure du

bulbe. Si l'on attribue aux pédoncules cérébelleux supérieurs (et

inférieurs ? ) la fonction centripète de transmettre aux hémis-

phères cérébraux la sensation extérieure (notion de situation

de l'individu; sentiment de l'équilibre), le système cérébral du

pédoncule cérébelleux moyen, centi iftige,'devra transmettre les

commandements de l'écorce du cerveau aux hémisphères céré-

belleux, afin qu'ils pourvoient à l'harmonie du déplacement du

corps dans l'espace. P. K.

X. SUR LE segment interne DU CORPS RES'l'1FOR3fE ET la huitième

paire crânienne; par W. BRCHTEREW. (Neurol.Centralbl, 988a.)

Etude d'encéphales d'embryons. Le segment interne du corps

i REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE. 109

restiforme contient au moins deux faisceaux séparés. L'un se

garnit de myéline de très bonne heure (embryon ayant 28 à 30

centimètres de long), l'autre n'a de myéline que chez les em-

bryons de 38 centimètres de long). Ce dernier commence dans un

groupe de petites cellules nerveuses placées en arrière etau-dessus

du noyau de Deiters et peut-être aussi dans ce noyau; il monte en

côtoyant la paroi externe du quatrième ventricule, et se

dirige, après avoir abordé le cervelet, mi-partie entre les

fibres du pédoncule cérébelleux supérieur, mi-partie au-dessus

de celle-ci pour se perdre entre le noyau globuleux (Kuge

Il;ern) et le bouchon (Pfropf) du même côté; quelques trous-

seaux pénètrent le groupe des noyaux situés dans le toit

du quatrième ventricule (lobe central du cervelet); tel est

le faisceau spinal qui ne s'entrecroise jamais. Le faisceau

le plus précoce du faisceau cérébral placé en dehors et avant du

faisceau spinal, monte entre les petites cellules sus-mentionnées

et les fibres du segment externe du corps restiforme ; il vient des

olives supérieures du même côté et peut-être du côté opposé,

ainsi que de la région du noyau de Deiters, en un mot du bulbe,

et forme au-dessus des noyaux du toit du quatrième ventricule,

auxquels se rend un certain nombre de ces fibres, l'entrecroi-

sement de Meynert (grande commissure antérieure d'entrecroi-

sement du vermis de Stillingj ; quelques fibres pénètrent dans la

substance gélatineuse et la racine ascendante du trijumeau. Le

nerf auditif se compose, lui aussi, de deux segments : a, l'un

d'eux, pourvu de myéline chez des foetus de 23 centimètres de

long, se confond avec la racine postérieure des auteurs et comprend

l'ensemble des fibres situées au dedans du corps restiforme qui

pénètre dans l'organe central, il émane du nerf vestibulaire

(racine du nerf vestibulaire) ; - b, l'autre, qui n'a de myéline que

chez des foetus de 30 centimètres de long, se confond avec la

racine postérieure des auteurs, ce sont des fibres situées en dehors

des corps restiformes, émanant du nerf cochléaire (racine du nerf

cohcléaire). Aucune de ces racines n'a de communications directes

avec le cervelet. La racine du nerf vestibulaire se termine sur-

tout dans la substance grise qui occupe la paroi latérale du

quatrième ventricule (au-dessus du noyau de Deiters) et, en partie,

dans le bulbe, en suivant pendant une certaine étendue, les

fibres du segment interne du pédoncule cérébelleux inférieur.

La racine du nerf cochléaire se termine principalement dans le

noyau antérieur de l'acoustique (Meynert) ou noyau accessoire

de l'acoustique (Schwalbe), duquel émane le corps 'trapézoïde

(Flech'ig). P. K.

SOCIÉTÉS SAVANTES

SOCIÉTÉ DE PSYCHIATRIE ETMALADIES NERVEUSES

. DE BERLIN

Séance du 12 janvier 18851. - Présidence de M. VESTPriAL.

Réélection, par acclamation, du même bureau et du même co-

mité de réception.

M. 1lI0NAKOW. Contribution à l'anatomie des pyramides et du ru-

ban de Reil, avec présentation de pièces. - Il s'agit des rocher-

ches expérimentales sur des chats nouveaux nés par la méthode

de de Gudden 2. L'ablation du lobe pariétal droit et des faisceaux

blancs de la couronne rayonnante qui se rattachent aux pyra-

mides se traduit par l'absence totale des pyramides; mais, de-

puis l'entrecroisement de ces organes jusqu'à la moelle cervi-

cale, les cornes grises antérieures se montrent intactes.

Dégénérescence remarquable des cellules nerveuses qui occupent

l'angle compris entre les cornes postérieures et les cornes anté-

rieures (trousseaux gris des processus réticulaires), du côté op-

posé à la lésion. Cette dégénérescence est sur le chemin des al-

térations descendantes du faisceau pyramidal dans le cordon

latéral au niveau du segment supérieur de la moelle. La subs-

tance fondamentale au sein de laquelle sont plongées les cellules

qui nous occupent, est épaissie. Par conséquent, le faisceau py-

ramidal fournit des fibres aux cellules des processus réticulaires.

Il est donc possible que par l'intermédiaire des cellules en ques.

tion, les pyramides soient en rapport avec les cornes antérieures

grises; mais il est extrêmement probable que les pyramides ne

sont pas en rapport direct avec ces cornes. En ce qui concerne

le ruban de Reil et ses origines corticales (ruban de Reil cortical),

l'ablation du lobe pariétal entraîne la déchéance des trousseaux

de fibres depuis la mutilation corticale jusqu'à la partie infé-

rieure et postérieure de la couche optique partiellement atro-

1 Voy. AI'Clt. de Neurologie, t. X, p. 11G et suivantes

2 Id. t. VII, p. 125, t. V, p. 9t.

SOCIETES SAVANTES. lit 1

phiée et de là dans la même direction à travers la couche tÏn te 1'-

médiaire des olives (Flechsig), à travers les fibres circulaires qui

forment l'entrecroisement supérieur des pyramides de Meynert,

et, finalement, dans le noyau des cordons grêles du côté opposé.

Donc le lobe pariétal, au moyen de fibres fines médianes et laté-

rales du ruban de Reil, se rattache aux fibres circulaires et au

noyau des cordons grêles du côté opposé. Spitzka, de New-York,

a d'ailleurs rapporté que (The Medic. Record, t. XXVI, 15-18), dans

un cas de foyer hémorrhagique ancien, limité, dans la protubé-

rance à l'aire du ruban de Reil gauche, il existait une dégéné-

rescence secondaire, ascendante et descendante. La dégénéres-

cence s'étendait dans l'espèce jusqu'au noyau opposé des

faisceaux grêles; seulement, les altérations primitives étant plus

vastes que chez les chats mutilés, la destruction atteignait-elle

le' noyau des faisceaux de Burdach. Chez les animaux en expé-

rience, on n'a pu constater sûrement l'atrophie de ce dernier no-

yau. ,

M. Remak. Sur les rapports qui existent entre les phénomènes ten-

dineux et lu réaction dégénérative. - Mémoire publié à part'.

Séance du 9 mars 1883. Présidence DE il. WESTPHAL.

M. II%DLICII. Un cas de tétanos céphalique. Jeune garçon de

deux ans et quatre mois. Le 8 juin 1884, petite plaie au milieu

de la joue droite. Le 10, parésie faciale droite. Le 14, trismus.

Le 20, convulsions tétaniques. Le 21, légère torsion de la face à

gauche, surtout prononcée pendant les jeux de physionomie, le

côté droit demeurant lisse et immobile; fente palpébrale droite

plus étroite que celle de gauche; la commissure buccale gauche

reste seule un peu ouverte, tandis que celle de droite demeure

invariablement fermée; léger abaissement de la moitié gauche

de la lèvre inférieure; les ailes du nez, largement écartées, dé-

couvrent l'orifice des narines. Pourboire, l'enfant place la tasse

dans la gouttière gauche de sa commissure labiale et fait péné-

trer le liquide à travers ses dents serrées. Tout autre examen est

impossible. Pas de convulsions pharyngo-oesophagiennes. En

même temps que cette paralysie faciale droite, on note, outre

les phénomènes de contracture (1/2 droite de l'orbiculaire des

lèvres, des deux élévateurs et dilatateurs des ailes du nez),

de véritables accès tétaniques portant surtout sur le côté droit et

empiétant sur le bras et la jambe correspondants. Guérison com-

plète vers la fin d'août. Or, sur seize cas de tétanos céphalique

connus jusqu'ici, on relevé cinq guérisons et onze morls; toutes

1 Voy. Arch. de Neurologie, t. XI.

112 SOCIÉTÉS SAVANTES.

les guérisons se rattachent à l'enfance (2 ans et 4 mois 9 18

23 ans); les morts avaient de 28 52 ans.

Discussion :

M. REIiNHARDT en rapproche le fait qui vient d'être publié par

P. Wagner dans le Sclamirlt's Jahrbùçher, t. CCIV, 1885, p. 135.

M. ReMag. Comment expliquer l'existence de phénomènes spas-

modiques sur un territoire nerveux atteint de paralysie péri-

phérique ? Ce n'est d'ailleurs pas constant dans les cas qu'il a

fournis à GüLerbock; il y avait paralysie flasque complète du fa-

cial. Mais les mouvements associés se manifestent dans les para-

lysies faciales dès que la conductibilité volontaire s'est rétablie.

Il est difficile, lorsqu'on constate l'intégrité d'autres départements

nerveux, de penser à une lésion de noyaux du facial.

M. BERNHAItDT a publié, dans le Zeitschr. f. Klin. med., VU, 4,

un cas dans lequel, malgré l'existence d'une paralysie faciale

grave, il y a eu des convulsions. La plupart des observateurs,

en présence de tétanos de ce genre, regardent la paralysie fa-

ciale comme légère au point de vue électro-diagnostique. Du

reste, on a aussi signalé la participation d'autres domaines ner-

veux à l'affection ; aussi on a noté l'atteinte concomitante du tri-

jumeau. Néanmoins, on ne possède à ces questions aucune ré-

ponse satisfaisante.

M. UII1'HOFF. De la névrite optique dans la sclérose multiloculaire.

L'an dernier, Gnauck a fait une communication sur ce point 1.

Voici plusieurs cas nouveaux de sclérose en plaques, avec névrite

optique au niveau des papilles. Les développements de l'auteur

seront publiés par l'auteur sous forme de mémoire 2.

Discussion :

M. Hirschberg. 11 est rare que, dans la sclérose en plaques ou

dans une myélite chronique, on observe une vraie névrite op-

tique bien caractérisée; le plus souvent, il s'agit d'une simple dé-

coloration de la papille.

M UHTHOFF. Les cas présents ne donnent lieu à aucune espèce

de confusion diagnostique.

Séance du 11 mai 1883. Présidence de M. Westphal

M. WESTPHAL présente un malade atteint de sclérose latérale

amyotrophique avec paralysie bulbaire. - Homme de trente ans; à

la suite de refroidissements en 1882, aurait été affecté d'un allai-

1 Voy. Arch. de Neurologie, t. X, p. 229.

2 On les trouvera aux Revues analytiques. P. K.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 113

blissement dans les jambes qui, quelques semaines plus tard,

s'accroissait et se compliquait de roideur dans les articulations

des membres inférieurs. Une soeur est sourde-muette. Examen :

extrémités inférieures froides, notamment les jambes et les pieds,

avec coloration rouge bleuâtre des orteils du bord externe du

pied, de la surface correspondant au tendon rotulien. Raideur

musculaire extrême, exagération excessive du phénomène du

genou ; tremblement podalique suscité par les procédés que l'on

sait, mais irrégulièrement; amaigrissement des membres infé-

rieurs sans atrophie, même partielle ; mouvements volontaires

limités, faibles et tremblés, l'extension du genou avait par exem-

ple plus de champ que la flexion. En se tenant au bord du lit, il fera

quelques pas et encore la démarche est-elle spasmodique. Inté-

grité de la sensibilité de la vessie, du rectum ; atrophie des mus-

cles des extrémités supérieures, surtout à la ceinture, de l'épaule

et des petits muscles des mains; profonde dépression au niveau

des espaces interosseux ; aplatissement des éminences thénar et

hypothénar ; les articulations de l'épaule sont seules rigides, mais

le patient ne peut se servir de ses mains, il faut l'alimenter ; inté-

grité de la sensibilité. Parole fortement nasonnée et si mal arti-

culée que le malade est incompréhensible ; ralentissement mar-

qué de l'émission ; troubles de la déglutition (régurgitation nasale

et toux); les aliments solides occasionnent des efforts spéciaux. La

langue ne peut être projetée au-delà des arcades dentaires et

n'est mue que lentement et défectueusement. Intégrité du facial.

Rire exagérément facile, pour le motif le plus futile, à raison

probablement d'une débilité mentale congéniale. Intégrité des

muscles des yeux. Aucun trouble électrique, excepté dans les

muscles tout à fait atrophiés qui sont inexcitables par les cou-

rants ; absence de réaction dégénérative ; cependant dans certains

muscles le courant galvanique engendre, à la fermeture de l'anode,

des contractions plus vigoureuses quoique normales. C'est bien à

M. Charcot que revient l'honneur de la découverte de ce type cli-

nique ; il ne manque ici que la rigidité des bras.

Aux questions de MM. AtENDEL et REMAK, M. WESTPHAL répond

que les réflexes tendineux des membres supérieurs ne présen-

taient pas une exagération considérable, et qu'il n'y avait aucune

espèce de réaction dégénérative, sauf la constatation de An S Z

un peu plus forte que Ka S Z '.

M. WESTPHAL présente un homme atteint d'une névrose consécutive

à un accident de chemin de fer. Absolument sain jusqu'au 14 jean-

vier 1885, jour de l'accident, il est violemment projeté contre la

'paroi d'un wagon, retombe à terre sans connaissance, est retiré

1 Voy. pour l'explication des termes : Charcot, Leçons sur les maladies

du système nerveux, III, f. I, p. 135.

Archives, t. XII. 8

11 le SOCIÉTÉS SAVANTES.

d'entre les débris de la voiture et revient à lui au bout de cinq à

sept minutes. Il ne présente à ce moment aucune blessure exté-

rieure, mais reste très agité. Insomnie, cauchemars, douleurs

céphaliques et rachidiennes, paresthésies de diverses sortes, sen-

sations d'engourdissement. Ce qui frappe l'observateur, ce sont : .'

l'angoisse, la dépression, les conceptions hypochondriaques, l'in-

somnie et les cauchemars pendant lesquels revient sans cesse

'histoire de l'accident ; pendant la journée, le malade est pris

d'accès d'angoisse immotivée ou à l'occasion d'un coup de sifflet

de la locomotive ; de temps à autre, inquiétude occasionnée par

des visions. Tel est l'état depuis le 17 février jusqu'à ce jour.

Constance égale des altérations de la sensibilité qui finit par dis-

paraître par tout le corps, y compris les muqueuses ; on ne trouve

bientôt plus de sensibilité tactile et douloureuse, qu'au pourtour

des narines, aux lèvres, à la demi inférieure du sternum, en deux

places symétriques de la face antérieure du bras, en un point

sis à gauche de l'espace compris entre les septième et neuvième

vertèbres dorsales, en deux endroits symétriques de la face in-

terne des cuisses au-dessns des articulations du genou, au pénis,

sur le scrotum. Champ visuel des deux yeux remarquablement

restreint pour le blanc et les couleurs. Suppression presque com-

plète de l'odorat et du goût ; diminution de l'acuité auditive, sur-

tout à droite ; intégrité du fond de l'oeil ; photophobie et

flammes devant les yeux. Sens musculaire atteint, mais il est en-

core impossible de nettement se prononcer sur ce sujet. Intégrité

des muscles des yeux. Affaiblissement très notable de la force

des mains, tremblements à l'occasion des mouvements voulus, et

même souvent au repos. Démarche circonspecte, mesurée, pénible;

se fatigue facilement. Dans le décubitus dorsal, faible, raideur

dans les membres, phénomènes tendineux normaux ; mouve-

ments actif faibles. M. Westphal termine en s'inscrivant contre

les critiques de M. Charcot à propos du mémoire de Thomsen

et Oppenheim 1.

M. Westphal présente enfin un patient atteint de névralgie de

la cinquième paire avec troubles trophiques du côté droit, qui dure

depuis plusieurs années ; les douleurs sont surtout prononcées

dans les branches maxillaires des nerfs ; et des troubles trophi-

ques portent sur la gencive et les dents des deux maxillaires.

Discussion : .'

M. Oppenheim combat les critiques de M. Charcot.

1 Voy. Archives de Neurologie, XL, p. 80 et 83, et Progrès médical,

1885. A propos de six cas d'hystérie chez l'homme.

'1\1. Oppenheim a publié depuis un mémoire spécial que l'on trouvera

aux Revues analytiques, P. K.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 115

M. Hirschberg. Les feuilles destinées à consigner le champ

visuel ne représentent pas la véritable fonction de la rétine du

malade, qui arrive évidemment à s'orienter parfaitement; par

conséquent, possède une acuité visuelle relativement bonne.

M. SANDER, demande s'il y a eu dans l'espèce des états épilep-

toides. - Réponse négative.

M. REntAS. Y a-t-il sous roche une lésion organique ? Réponse

dubitative ; en tout cas, il s'agit non d'une hystérie, mais d'une

névrose spéciale (Westphal, Thomsen, Oppenheim).

M. Richter (de Dalledorf). De la dégénérescence secondaire des

trousseaux optiques, à la suite d'altération des lobes occipitaux.

Sera publié in-extenso 1.

Présentation et exposition du mécanisme du nouveau rhéostat a

bande de toile de Hecker 2. Avis favorable de M. BEI\ : <111ARDT.

Séance du 8 juin 1885. - Présidence de M. Westphal.

M. IlnscalsEnc. Présentation de malades : Sur le rapport qui

existe entre l'épicanthus congénitale et l'ophthalmoplégie 3.

M. WESTPHAL. Sur un cas remarquable de paralysie périodique des

quatre extrémités. Sera publié ailleurs*.

Discussion :

M. BENHARDT. N'y aurait-il pas eu des signes de fièvre intermit-

tente (tuméfaction de la rate, etc...). A-t-on essayé la quinine ?

Action possible du poison malarien analogue à celle du curare,

poison pouvant du reste appartenir à la classe des ptomaines

(Voy. les faits de Weber dans la thèse de Karting : Ueber einenF( ! 1l

von intermittirender paralysis spinalis. Halle. Anal. in. Centralbl.

d. medie. Wissensch.. 48î5, n° 428).

M. REIIAK. La littérature médicale renferme plusieurs exemples

de paralysie spinale intermittente semblables sans aucune altéra-

tion de l'excitabilité électrique. '

M. Senator. Ces paralysies malariennes se peuvent montrer

sans qu'il y ait eu auparavant d'accès de fièvre proprement dits.

M. `WESTPHAL. La maladie date de cinq ans. Il n'y a, pendant

tout ce temps, pas eu lieu de penser à la fièvre intermittente.

Des phénomènes passagers de ce genre ont été vus dans la sclé-

rose en plaques. L'intégrité de la sensibilité permet de rejeter

1 Nous analyserons alors. P. K.

2 Voy. Revues analytiques, in. Archives de Neurologie.

Id.

Nous l'analyserons alois.

116 SOCIÉTÉS SAVANTES.

l'opinion de W. Sander (convulsion des vaisseaux spinaux d'après

les expériences de Sten,on); d'ailleurs dans ces expériences, l'ex-

citabilité électrique disparaît quand survient la paralysie, et re-

paraît quand la circulation est rétablie.

M. REMAK présente une malade de trente ans, atteinte de névrite

généralisée avec altération électrique grave de divers territoires ne ? ,-

veux, y compris le facial qui, quoique demeuré indemne des deux

côtés, présentait les altérations électriques les plus graves. (Publié

in extenso dans la Neurol. Centralb. de 1885 '.)

Discussion :

M. OPPENHEIM. Peut-être s'agissait-il d'un alcoolique ? - Réponse

négative.- Et la sensibilité des nerfs ? Ils sont sensibles à la pres-

sion, mais on ne constate pas les sensations excentriques normales

que déchaîne d'ordinaire l'excitation électrique.

M. Jastrowitz communique un cas semblable.

Séance du 13 juillet 4 885. Présidence DE M. WESTPHAL.

M. LILIBVFELD. Un cas de névrite multiloculaire chez un alcoolique,

remarquable par un trouble de coordination extrême dans les

extrémités inférieures. En même temps, délire alcoolique et

donble paralysie de l'oculomoteur externe, de sorte qu'au début

le diagnostic était impossible. Plus tard se montrèrent les autres

signes d'une névrite multiloculaire, ainsi qu'une névrite optique

bilatérale. Actuellement, convalescence, il n'existe plus que de

l'ataxie des jambes et encore est-elle relativement faible.

Discussion :

M. REMAE. Dans le cas qu'il a communiqué à la dernière séance,

il y avait aussi névrite optique bilatérale sans trouble fonctionnel

considérable. Cela a déjà été signalé par Eichhorst, Struempell,

Loewenfeld.

M. l\IOEU. Remarques sur la réaction des pupilles - Cinq cents

paralytiques généraux observés en quatre ans se résument en :

SOCIETES SAVANTES. 117

pupille ne pas se contracter pendant l'acte de la convergence;

encore plus rare est la paralysie du muscle accommodateur.

Parmi les malades observés pendant plusieurs années, qui, à

raison de la rigidité des pupilles à la lumière, étaient soupçonnés

de paralysie générale, la moitié d'entre eux devint tabétique ou

paralytique général. Si l'on fait abstraction des malades affectés

de lésion cérébrale grossière, on rencontre la rigidité, l'immo-

bilité des pupilles à la lumière dans la syphilis et ce symptôme

se combine de la manière la plus variée quant au temps avec

d'autres paralysies de l'uculo-moteur commun, ou se rencontre

seul. L'immobilité des pupilles à l'égard de l'agent lumineux,

incomplète ou passagère, se rencontre tout à fait isolément dans

l'alcoolisme. La proportion de ce symptôme chez les aliénés non

paralytiques, chez les tabétiques ou dans les cas de lésion céré-

brale, est tout au plus de 1,4 p. 100 et probablement de moins.

Bien que la recherche des fibres qui occupent la paroi ventricu-

laire ait conduit à des résultats douteux, M. Moeli, se basant sur

l'observation d'une tumeur qui occupait le troisième ventricule,

et tenant compte des expériences de Christiani, Bechterew,

Gudden, tient pour probable que l'inertie des pupilles en pré-

sence de la lumière, se rattache à des altérations ventriculaires.

Discussion :

M. Thomsen a examiné à ce point de vue mil sept cent aliénés.

Sur trois cent soixante-six paralytiques généraux, 47 p. 100 pré-

sentaient l'immobilité de la pupille en présence des rayons lumi-

neux. Sur cent quatre-vingt-neuf épileptiques, la réaction de la

pupille se montra constante; un seul d'entre eux présenta une

rigidité, une immobilité pupillaire passagère pendant trente

heures. Sur deux cent quatre-vingt-dix-huit cas de folie systéma-

tique, quatre malades étaient allectés d'immobilité de la pupille

dans les mêmes conditions : un d'entre eux était soupçonné de

tabes, l'autre avait eu antérieurement la syphilis. Sur six cent

soixante-dix alcooliques, on rencontre chez quatorze d'entre eux

l'inertie immobile des pupilles. Au total, sur trois ceut soixante-

six paralytiques généraux, 47 p. 100 offraient le symptôme en

question, et, sur mil trois cent vingt-cinq aliénés non paralytiques,

29, c'est-à-dire 2,1 p. 100.

M. SIEMEIlL111G.lixamen de sept cent femmes aliénés dont quatre-

vingt-uue paralytiques générales. Chez les paralytiques généraux;

inertie pupillaire à la lumière en quarante quatre cas, soit 54

3 p. 100. Chez les autres aliénées, dix cas d'inertie pupillaire

portant sur trois démences séniles, trois labétiques, deux épilep-

tiques, un syphilis de la base, une folie systématique, soit une

proportion de 0,6 p. 100.

M. Oppenheim. Dans la section des maladies nerveuses l'inertie

118 SOCIÉTÉS SAVANTES.

pupillaire se rencontre de préférence chez les tabétiques et, en

particulier, chez les cérébraux syphilitiques : c'est peut-être le seul

symptôme de l'affection. Il l'a observé deux fois à la suite de

traumatisme céphalique et de commotion cérébro-spinale. Un

malade atteint de lésion cornéenne présentait une vive exagéra-

tion de la réaction pupillaire, due probablement à une hyperes-

thésie notable de la rétine.

M. Uhthoff. Il ne saurait y avoir d'inertie pupillaire trauma-

tique sans luxation cristallinienne; elle est généralement unila-

térale. Sur dix mille ophthalmiques, il a vu deux fois de l'inertie

pupillaire dans le cas d'arrêt de formation congénitale de l'écran

irien, et une fois chez un enfant atteint de syphilis héréditaire.

Il importe du reste, de bien distinguer l'inertie pupillaire de la

paralysie de l'accommodateur, car elles peuvent exister ou man-

quer indépendamment l'une de l'autre. L'inertie pupillaire se

rencontre de préférence chez les spinaux; quand l'accommoda-

tion fait aussi défaut, il s'agit généralement de syphilitiques.

M. JASTROWITZ, En dehors de l'alcool, d'autres poisons peuvent

nuire à la réaction des pupilles : voyez plutôt les morphino-

manes.

M. SANDER. Observation dans laquelle une tumeur développée

dans le segment postérieur du troisième ventricule n'avait dé-

truit que d'un côté la substance grise de la cavité : l'oeil corres-

pondant au côté lésé présentait de l'ineitie pupillaire. A ce pro-

pos, M. mati a-t-il toujours vu l'inertie pupillaire être bilatérale ?

Quelles sont les dimensions des pupilles observées par lui dans

ses recherches ? Comment se présentait le phénomène dans le

cas des pupilles inégales ? Quel était l'âge des individus examinés ?

M. MOELI. Dans 10 p. 100 des cas qui lui appartiennent, il y avait

des ditrérences entre les deux côtés. 11 est rare qu'une pupille ait

bien réagi quand l'autre demeurait inerte. Généralement, quand

une des pupilles réagissait mal, l'autre se montrait paresseuse.

Les instillations de cocaïne n'ont, malgré la dilatation obtenue,

exercé aucune action sur l'inertie pupillaire. Une pupille très

resserrée ne peut généralement plus se bien contracter, mais le

fait est loin d'être fréquent. Il y a myosis pour un diamètre pu-

pillaire de deux millimètres et au-dessous.

Séance du 9 novembre 1885. Présidence de M. Westphal.

M. Uhthoff présente une malade qui après avoir eu une névrite

du trijumeau droit (rameaux ophthalmique et maxillaire supérieur),

avec atteinte du nerf lacrymal, a conservé de 1'tici,iiiie lacrymale.

L'inflammation a commencé par l'incisive externe supérieure

SOCIÉTÉS SAVANTES. 119

droite, qu'il fallut enlever, et s'est propagée de bas en haut en

occasionnant déficientes douleurs dans les deux rameaux sus-

mentionnés (joue, front, oeil); puis, assez brusquement, la sécré-

tion lacrymale s'est tarie du même côté. Sensibilité très grande à

la pression du nerf sous-orbitaire à son point d'émergence, pen-

dant longtemps. Troubles de la sensibilité dans le domaine de la

branche maxillaire supérieure; ils rétrocédèrent du reste tandis

que s'installait à demeure l'acrinie lacrymale.

Discussion :

M. Oppenheim a vu un fait dans lequel, à la suite d'une paralysie

de l'oculomoteur commun et du trijumeau du côté droit, impu-

table à la syphilis, la malade ne pouvait plus pleurer qu'avec l'oeil

gauche; mais, en dehors des émotions, l'oeil gauche, sain demeu-

rait invariablement sec, alors que l'oeil droit était en permanence

lubréfié par les larmes. ,

M. Remak. Rappelons-nous l'hypersécrétion lacrymale unilaté-

rale dans les névralgies de la maxillaire supérieure du trijumeau.

M. 11RAUSE. Des troubles fonctionnels du larynx dans les affec-

tions du système nerveux central. Examen à ce point de vue plus

de 200 malades à la clinique neuropsychiatrique de Berlin. On

rencontre ces troubles dans la syphilis spinale, la chorée, les

tumeurs cérébrales, l'hémiplégie, la paralysie saturnine, l'hys-

téro-épilepsie, l'épilepsie, l'aphasie, le railwa3·-spine, la para-

lysie pseudo-bulbaire, la paralysie générale, la sclérose en plaques,

la paralysie bulbaire et le tabes. Dans la chorée, il s'agit presque

toujours d'un tremblement des cordes vocales, faiblement ten-

dues et d'une parésie des muscles des adducteurs ; les muscles du

larynx ne sont pas affectés de mouvements choréiques.

Syphilis spinale (un cas), immobilité de la corde vocale gauche,

près de la ligne médiane, puis elle reprend ses fonctions ainsi que

les extrémités du même côté, sous 1 influence des onctions mer-

curielles. - Paralysie saturnine : six cas sans altération ; un cas

caractérisé par une paralysie de la corde vocale gauche ; un autre

fait, dans lequel on constate un tremblement marqué des cordes

vocales et de la parésie des adducteurs. Tumeur cérébrale : un

cas de gliosarcome du corps strié et du lobe temporal gauches;

paralysie de la moitié droite du larynx; bien qu'on ne puisse le

faire servir à une localisation exacte, ce fait, de concert avec une

observation de paralysie pseudo-bulbaire, qui sera mentionnée'

plus tard, confirme l'existence d'un centre cerébial laryngien.

Hystérie, 7eystéro-éPilepsie, épilepsie : hémianesthésie de la mu-

queuse nasale, du voile du palais, du pharynx, du larynx, de la

trachée (généralement à gauche, de même que pour le reste du

corps ; en un cas, inversion de l'action des cordes vocales qui se

rapprochent pendant l'inspiration, tandis que, pendant l'expira-

120 SOCIÉTÉS SAVANTES.

tion et la phonation, elles s'écartent très largement. Railway-

spine : deux cas; anesthésie très étendue de la peau et de la mu-

queuse des voies aériennes supérieures, à l'exception d'un très

petit nombre d'endroits irrégulièrement disposés. Pseudo-

paralysie bulbaire ; un cas;-l'autopsie démontra plusieurs foyers

disséminés dans la substance blanche du cerveau; on avait

pendant la vie constaté une parésie très prononcée des adduc-

teurs d e la corde vocale droite ; la corde vocale gauche était tota-

lement paralysée, de même que les extrémités de ce côté.

Aphasie : 4 cas, un des malades observé pendant cinq semaines

présentait des troubles de la motilité du larynx, aggravation crois-

sante, parésie progressive des muscles delà glotte, d'où phonation

remarquablement pénible, voix grave, modification du timbre

(grosse). Paralysie générale, la parole nasonnée a paru sous ladépen-

dance du voile du palais ; la voix grave a semblé dépendre de la

flaccidité et de l'atrophie des rubans vocaux, tandis que les muscles

respirateurs, continuant à fonctionner par voie réflexe, conser-

vent leur aptitude pleine et entière. - Sclérose en plaques : état

semblable. Paralysie bulbaire progressive; fréquemment,paré-

sies unilatérales, ou paralysies totales du voile du palais, des cons-

tricteurs pharyngiens, de la charpente musculaire du larynx,

troubles de la sensibilité, parfois aussi des cordes vocales sont

d'un côté ou des deux fixées, immobiles au milieu du larynx,

c'est là ce qu'on appelle la paralysie postérieure due, d'après les

expériences de Krause, dans un grand nombre de cas, à une

contracture spasmodique des adducteurs des cordes vocales ; ce

mécanisme tout récemment admis par A. Koehler, erliardt et

Michael, a pour lui un fait dans lequel à la suite d'une infection

syphilitique, dans le cours d'une paralysie bulbaire, survint sou-

dain une sensation de constriction de la gorge qui laissa après

elle une dyspnée permanente ; les cordes vocales présentaient une

tension telle, une fixité si solide, près de la ligne médiane, que

le courant phonétique expiratoire faisait entrer en vibration non

les deux rubans vocaux, mais les cordes vocales supérieures : à

l'autopsie, on trouva une adhérence intime et terme de la dure-

mère a l'arachnoïde, au niveau de la partie inférieure du plancher

du quatrième ventricule. Le diagnostic ne pouvait hésiter qu'entre

une contracture spasmodique ou uue contracture réflexe consé-

cutive à une lésion du noau du laryngé supérieur. Dans un

autre cas, la dyspnée se montrait subite en pleine rue, et l'on de-

couvrait une contracture bilatérale des adducteurs. - Tabès :

sur trente-trois cas de trouble fonctionnel grossier, l'orateur à

observé 13 parésies ou paralysies de toute espèce qui parfois

viennent, s'en vont, reviennent; souvent il n'existe aucun trouble

grossier de la voix. Voici, par exemple, un professeur tabétique

qui, malgré la paralysie d'une corde vocale put continuer à en-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 121

seigner le chant. On est cependant frappé, en d'autres circons-

tances de l'occurrence d'une véritable ataxie des cordes vocales ;

mouvements spasmodiques de ces rubans qui occupent une situa-

tion intermédiaire à l'adduction et à l'inspiration (comparaison

avec le nystagmus ataxique de Friedreich). En trois cas de crises

laryngées chez des tabétiques, l'orateur a constaté des phénomènes

d'excitation spéciaux du larynx; en chaque cas, il existait une

contracture bilatérale des adducteurs des cordes vocales ; les

accès diminuèrent prodigieusement de nombre et d'intensité et

cessèrent par intervalles, tout à fait après le badigeonnage à la

cocaïne (cas de la clinique de Gerhardt). Si l'on rapproche l'ob-

servation des phénomènes d'excitation avec contracture des cordes

vocales, du résultat obtenu par l'électrisation du laryngé supérieur

qui, de même que les excitants mécaniques ou chimiques des

branches terminales du nerf en question dans la muqueuse laryn-

gienne, produit, par voie rétlexe, la fermeture de la glotte, si

l'on ajoute que les accès layngo-pasmodiques s'arrêtent par

application de cocaïne sur le larynx, et cessent totalement par

intervalles, on conclura tout naturellement que les accès sus-men-

tionnés résultent d'une excitation. Comme on constate dans l'es-

pèce une dégénérescence du nerf vague, on est contraint de for-

muler l'opinion que les crises laryngées émanent d'une contrac-

ture réflexe des adducteurs des cordes vocales, dueà une excitation

dégénérative du laryngé supérieur, contracture susceptible d'être

augmentée à l'occasion par des excitations périphériques ou

centrales et de se transformer en un spasme complet obturant

hermétiquement la glotte.

Discussion :

M. Thomsen. Dans un des faits de paralysie générale visés par

l'orateur il y avait eu, bien avant l'apparition de troubles psychi-

ques, des accès de dyspnée et des parésies de la charpente mus-

culaire du larynx.

il. lteuae combat l'upinion de il. Krause, relative à la tension

unilatérale des adducteurs, dans les processus centraux qui se

traduisent par des accès. La contracture serait, si l'on veut, se-

condaire, à peu près comme dans le pied-bot paralytique, en ma-

tière de paralysie spinale infantile ou de déchet congénital de

certains territoires de la moelle. (Voy. le cas de liemak : spina

bilida chez un enfant.)

M. 11R : 1USE. Je ne nie pas, d'une manière générale, l'existence

d'une paralysie postérieure centrale ou périphérique. Maïs la pa-

ralysie partielle du noyau du nerf vago-accessoire, acceptable

dans certains cas, n'explique ni la soudaineté de la contracture

des adducteurs, ni la constance des phénomènes. Celte constance,

au contraire, s'éclaire par la conception d'une lésion portant

122 SOCIÉTÉS SAVANTES.

uniformément sur toutes les fibres radiculaires et l'agent élec-

trique montre que les adducteurs l'emportent en tant que groupe

musculaire le plus puissant.

M. Oppenheim. Contribution à la pathologie de la névrite multi-

loculaire. - Préparation à l'appui. Il s'agit d'un cas de paralysie

atrophique des extrémités inférieures chez un homme de qua-

rante ans; cinq à six mois avant la mort, faiblesse dans les jam-

bes, avec douleurs lancinantes et paresthésies. L'examen décèle

de la tuberculose pulmonaire, de laparésie atrophique des mem-

bres inférieurs, des altérations électro-musculaires, l'absence du

phénomène du genou, de légers troubles de la sensibilité, l'inté-

grité de la vessie et du rectum. Au microscope, il existe une névrite

dégénérative, une atrophie musculaire, portant sur un grand

nombre de nerfs des membres inférieurs, une lésion circonscrite

de la corne antérieure droite, de la moelle lombaire supérieure.

Les lésions étendues de la périphérie ne pouvaient dépendre de

la moelle épinière, lésions centrales et périphériques provenaient

du même agent morbide. En même temps, l'orateur communique

plusieurs observations de paralysie alcoolique, les unes amélio-

rées, les autres guéries. Quoique les observations qu'on possède

jusqu'ici prouvent que l'inflammation ou la dégénérescence des

nerfs périphériques représente le substratum anatomique fonda-

mental du tableau morbide, on note fréquemment aussi des

symptômes qui indiquent une lésion centrale, et, dans un cas

donné, il est difficile d'exclure ou de diagnostiquer l'existence si-

multanée d'une lésion centrale.

Séance du 4 décembre 885. - Présidence DE M. WESTPHAL.

Discussion relative à la communication de M. Oppenheim.

M. SrEIERLING. Observation d'une alcoolique de trente-quatre

ans, atteinte de délire, de réaction paresseuse des pupilles, de

parésie des membres inférieurs; elle ne peut marcherqu'en s'ap-

puyant, à la condition d'élever anormalement les pieds et de pié-

tiner. Grande sensibilité au contact de la peau et des muscles.

Mort en état de collapsus. Les viscères sont parsemées de lésions

caractéristiques de l'alcoolisme chronique; intégrité de la moelle,

des racines antérieures et postérieures. Dégénérescence des

nerfs crural, sciatique. surtout dans leurs branches musculaires.

Multiplication extrêmement nette des noyaux des fibrilles mus-

culaires (droit antérieur de la cuisse, péroniers). Le processus

parait avoir débuté par les branches nerveuses périphériques.

M. Bernhardt. Les processus poliomyélitiques récents se dis-

tinguent très nettement des foyers anciens. Ce qui est remar-

quable dans le cas d'Oppenheim, c'est l'apparition finale de la

SOCIÉTÉS SAVANTES. 123

tuberculose (v. Joffroy). Peut-être y a : t-il, comme dans l'affection

semblable du kakké japonais, des micro-organismes (constata-

tion récente) ? Il serait bien difficile de rattacher le ralentisse-

ment du poids qu'il signalait au nerf vague; on eût dû, s'il en

était ainsi, trouver de l'accélération du poids.

M. Revue. On a sans doute confondu, jadis, souvent tabès et

polynévrite. Le diagnostic différentiel réside dans l'examen élec-

trique ; la réaction dégénérative ne survient jamais dans le tabes,

mais elle peut être très peu mai quée dans la névrite, notamment

dans la névrite alcoolique et ne consister que dans la lenteur de

n S Z L'orateur renvoie à son travail sur les rapports entre

les phénomènes tendineux et la réaction dégénérative 2.

M. llloer.t. Importance du mode de recherche de Jendrassik sur le

phénomène du genou ? - Son procédé permet de distinguer sa

névrite du tabes. Dans les premières atfections, un peut en l'em-

ployant réveiller l'apparition du réflexe tendineux rotulien inva-

riablement absent dans le tabes.

M. REMAE Joue le procédé de Jendrassik, mais il croit, contrai-

rement à ce dernier, que c'est la tension de la charpente muscu-

laire de la jambe occasionnée par la situation du malade qui

rend plus facile la provocation du phénomène du genou. D'ail-

leurs, dans le tabès pas plus que dans la névrite du crural, tl n'a

pu faire reparaître le réflexe rotulien.

M. QPPENHEIÙf. Les vieux foyers de poliomyélite qui datent de

plu,ieurs mois se traduisent par un tableau clinique exactement

semblable à celui de la névrite. Quant au pouls, il a insisté égale-

ment sur son accélération dans quelques cas; du reste, même au

début, de la névrite, on peut avoir affaire à des accidents d'exci-

tation du pneumo-gastrique qui entraînent du ralentissement du

pouls. Le réflexe rotulien a fait défaut dans ces observations,

sans qu'on ait constaté de troubles marqués dans les phénomènes

éleclio-musculaires du triceps fémoral. Jamais par le procédé

de Jendrassik, il n'a pu faire teveuir le phénomène du genou

absent, lorsque l'alcoolisme durait depuis un temps assez long.

M. Liman parle en détail du cas de Anna Rolher (procès Graef);

il montre que cette personne est une épileptique ou une bystero-

épileptique débile au point de vue mental qui n'est pas en état

de discerner la culpabilité de son parjure. Ce n'est pas une simu-

latrice. La simulation est d'ailleurs rare, car, d'après les observa-

teurs français, dans un espace de temps de cinquante années, sur

1 Voy. la note de la page t13.

2 Voy. Archives le Neurologie : lipvues analytiques.

M.

124 BIBLIOGRAPHIE.

43,000 prisonniers, il n'y a eu qu'un simulateur; on a, en revan-

che, observé 264 aliénés..

Discussion : .

M. FALK. Mais plusieurs des réponses de Rother sont en faveur

de la simulation, qui, du reste, n'exclut pas le diagnostic de débi-

lité mentale simultanée.

M. LmAN. Les réponses absurdes qui rappellent celles de simu-

lateur lui ont été faites à lui comme à d'autres experts.

M. Thomsen présente un homme de trente ans affecté d'anes-

thésie complète et persistante à la tête, aux mains, aux pieds,

atteinte des organes des sens. Au début même, et passagèrement

le sens musculaire et la perception des couleurs étaient affectés.

Ce malade fut séquestré pour incohérence hallucinatoire; il se

calma bientôt; plus tard il ne présenta plus qu'une légère

démence avec timidité sauvage. Bien portant jusqu'en 1881 ; c'est

alors qu'une blessure céphalique grave aboutit à une excitabilité

psychique et nerveuse; affaiblissement mental et nerveux. Aucune

convulsion, mais accès de céphalalgie. Depuis longtemps il sait

qu'il ne sent plus sa tête et qu'il a perdu le goût et l'odorat.

(Arch. f. Psych., XVII, 1.) P. KËRAVAL.

BIBLIOGRAPHIE

IF

1. Sur un cas de destruction du lobe temporal gauche pur un néo-

plasme sans aphasie, chez un gaucher; par C. WESTPHAL (Separat-

a6drucJ< aus der Berlin. klin. Wochen : ,clt1', n° 49, 488f).

Tout l'intérêt de cette observation git précisément dans l'habi-

tude du malade de se servir de la main gauche, habitude qui en

faisait un droitier du cerveau. C'est pourquoi la lésion siégeant à

gauche ne détermina pas de symptômes; elle en eût provoqué, si

elle eût siégé à droite. ' P. K.

11. Nature et traitement de la chorée; par Saric

(Thèse de Paris, 1885.)

Dans ce travail, l'auteur, qui s'est inspiré d'une leçon de

M. Joffroy, montre que les arguments qu'on a invoqués pour

faire de la chorée une affection rhumatismale sont insuffisants

BIBLIOGRAPHIE. 125

Les accidents rhumatismaux ont souvent manqué chez les cho-

réiques, c'est un fait qui n'est plus à démontrer : il. Bouchot, par

exemple, a depuis longtemps cité des cas où la névrose avait

succédé à un traumatisme. Bien que cette affection ne soit pas

exclusive aux jeunes gens, on peut d'une manière générale accepter

la dénomination de névrose de croissance adoptée par ? I. Jofl'roy.

M. Saric fait remarquer avec juste raison que le domaine de la

chorée se rétrécit à mesure que l'on connaît mieux l'hystérie; il se

rétrécira encore, croyons-nous, quand on connaîtra mieux l'hysté-

rie infantile : on retrouve, en effet, souvent chez les enfants mâles

et femelles atteints de chorée un certain nombre de stigmates

permanents de l'hystérie et en particulier l'anesthésie sensitivo-

sensorielle ; les zones douloureuses céphaliques, hypogastriques,

rachidiennes, etc. M. Saric signale d'après il. Jolfroy la fréquence

de l'abolition des réflexes rotuliens dans la chorée. Rapprochant

ce phénomène du signe de Westphal dans l'ataxie, on arrive à

comparer les arthropatliies de la chorée aux arthropathies de

l'ataxie au point de vue de leur pathogénie. C'est une déduction

qui mériterait de s'appuyer sur des données plus certaines.

cB. F.

III. De la névralgie des plexus lombaire et sacré, d'origine trauma-

tique (tour de reins); par P. TRICARD. (Thèse, Bordeaux 1886.)

M. Tricard, se basant sur l'existence d'irradiations ilio-fémorales

de la douleur, admet avec le professeur Nielly que l'affection vul-

gairement appelée tour de reins est une névralgie des plexus

lombaire et sacré et non une rupture musculaire. L'origine de

l'affection serait le pincement et le tiraillement auxquels sont

soumises les branches nerveuses dans les contractures exagérées

du psoas et des muscles des gouttières vertébrales. Cu. F.

IV. Des rémissions dans le cours de la paralysie générale ;]

par J.-R. Larroque. (Thèse, 1886.)

L'histoire des rémissions dans la paralysie générale date de

Boyle, et, depuis lors, elle a préoccupé un grand nombre de mé-

decins. Cette thèse, faite à Charenton sous la direction de M. Chris-

tian, comprend un résumé assez détaillé de la question, et aurait

constitué un document très intéressant si les vingt-six observa-

tions qu'elle contient avaient été plus explicites. Elle paraît ex-

primer l'opinion de M. Christian, qui s'est lui-même préoccupé de

ce point de clinique; elle mérite donc que nous donnions un

aperçu de ses conclusions.

Les rémissions de la paralysie générale dont l'existence ne peut

126 bibliographie.

être mise en doute n'ont pa jusqu'à présent été mises en rapport

avec un état anatomique quelconque. Ces rémissions qui s'obser-

vent environ une fois sur huit malades différent des rémissions

des autres maladies mentales; elles sont complètes ou incom-

plètes : ces dernières sont les plus fréquentes. Elles s'observent

dans toutes les formes de paralysie générale, mais principale-

ment dans les formes expansives, et au début. Elles durent en

général de six mois à un an, quelquefois deux ou trois ans; elles

s'effectuent lentement, et le plus souvent et plus complètement à

la suite d'affections incidente* et en particulier à la suite de lé-

sions suppuratives médicales ou chirurgicales dans les rémissions

incomplètes; les troubles qui persistent le plus souvent sont

l'embarras de la parole, les troubles pupillaires; la débilité men-

tale. - Les rémissions sont plus fréquentes chez les héréditaires,

et souvent elles se répètent chez le même malade sans que des

affections intercurrentes ou toute autre cause semblent jouer un

rôle dans leur production. On les voit surtout dans la paralysie

générale à double forme dont elles reculent le terme fatal. Elles

sont très fréquentes encore dans les pseudo-paralysies générales

alcooliques; il en est de même dans les pseudo-paralysies géné-

rales syphilitiques ou saturnines que l'auteur confond d'ailleurs avec

la paralysie générale vraie. - Chez les femmes qui présentent sou-

vent les formes dépressives, les rémissions sont plus rares. - Il

n'y a guère que les révulsions prolongées qui, en imitant le pro-

cédé de la nature (suppurations) aient quelquefois paru provoquer

des rémissions au début. Cil. F.

V. Contribution à l'étiologie de la chorée; par SAGUET. (Thèse, 1885.)

L'auteur résume lui-même sa thèse dans cette proposition

unique : « La chorée peut être consécutive aux maladies infec-

tieuses, un grand nombre d'observations le démontrent. » Si on

prend cette conclusion à la lettre. on sera de l'avis de l'auteur

M. S...; souvent la chorée se manifeste à la suite des maladies in-

fectieuses. L'auteur aurait pu consulter avec fruit sur l'étiologie

et la physiologie pathologique de la chorée les thèses des deux

élèves de M. le professeur Pierret, de Lyon (Foucherand, 1883;

.Sage, 4881). CH. F.

VI. De l'amblyopie liée à l'hémianesthésie et spécialement de l'am-

blyopie hystérique; par A.-F. Hrxma. (Thèse, 1886).

De ce travail fait à la Salpêtrière dans le service de ni. Charcot

et sous la direction de M. Parinaud, l'auteur tire les conclusions

suivantes :

BIBLIOGRAPHIE. 127

L'amblyopie hystérique est caractérisée :

Par le rétrécissement du champ visuel; par une dyschroma-

topsie spéciale qui n'est pas constante; par l'intégrité relative de

l'acuité visuelle; par la coexistence habituelle de troubles de l'ac-

commodation et de la polyopie monoculaire; par l'absence de

lésions du fond de l'oeil.

Cette amblyopie n'est pas absolument propre à l'hystérie; on

la rencontre dans toutes les affections qui intéressent l'appareil

sensitif dans son ensemble, particulièrement sous forme d'hémia-

nesthésie, mais elle n'en reste pas moins un symptôme de première

importance pour le diagnostic de l'hystérie. Dans l'épilepsie pure,

d'après nos recherches, elle est très rare, et il est probable que

plusieurs états nerveux où on l'a signalée doivent être rattachés

à l'hystérie.

Cette amblyopie. comme l'hémianesthésie dont elle fait partie,

doit être rapportée à une lésion de l'hémisphère opposé. Elle .

démontre qu'il y a un rapport croisé entre chaque nerf optique

dans sa totalité et l'hémisphère.

D'autre part, il y a des faits qui prouvent qu'une lésion de

l'hémisphère peut produire l'hémiopie. Il faut en conclure que

les rapports des nerfs optiques avec les centres visuels cérébraux

sont plus complexes qu'on ne l'a cru jusqu'ici. CH. F.

VII. Recherches expérimentales et cliniques sur l'action somnifère de

la boldo-glueine ; par R. Juranville. (Thèse, 1885).

D'après les expériences de MM. Laborde et Juranville, la boldo-

glucine possède une action hypnotique incontestable. Ce sommeil

peut être rapproché du sommeil naturel : 4° parce qu'il en a le

calme, l'absence à peu près complète d'anesthésie, etc.; 2° au

point de vue de l'état de la respiration, qui se régularise en

même temps que le nombre des inspirations diminue légèrement ;

3° au point de vue des échanges nutrilifs dont la diminution est

révélée par une diminution notable dans la quantité d'acide car-

bonique exhalé; 4° au point de vue de l'état de la circulation

encéphalique, le cerveau étant moins congestionné qu'à l'état de

veille, ce qui semble indiquer un apport moindre de sang artériel

dans la masse encéphalique. D'autre part, les résultats de l'expé-

rimentation physiologique ont été confirmés par l'observation

clinique : le boldo, administré à des malades agités, ne dormant

pas depuis un temps plus ou moins long (aliénés), a toujours

amené le sommeil.

Enfin nous rappellerons que, outre celte étude de l'action som-

nifère du boldo, qui constitue, à proprement parler, ce travail,

on y trouve une étude de l'état et les variations de la pression

128 VARIA.

sanguine sous l'influence de cette substance. Quant à l'action

physiologique générale, elle a été exposée d'après les recherches

des expérimentateurs qui se sont occupés précédemment du boldo.

cB. F.

VIII. Contributions à l'étude de l'influence des anesthésiques

sur la nutrition; par Drapier. (Thèse, 1886).

L'expérience de Cl. Bernard, de P. Bert et d'Arloing ont montré

que les anesthésiques ont une action marquée sur les phénomènes

de la nutrition; ils ralentissent les phénomènes d'oxydation :

1° les gaz du sang sont plus riches en oxygène et moins riches

en acide carbonique, dans la période d'état du sommeil anesthé-

sique ; 2° la quantité d'acide carbonique exhalée, mesure indi-

recte de l'intensité des combustions, est, à la même période, en

décroissance sensible; 3° les recherches cliniques montrent que

le taux de l'urée, bien que subissant des variations considérables,

parait baisser après l'action des anesthésiques. Chez les malades

soumis à ces agents, il se produit quelquefois l'hématurie, l'albu-

minurie et la glycosurie ; aussi doit-on être très réservé sur l'em-

ploi des anesthésiques chez les sujets atteints d'affections rénales

ou de diabète. CE. F.

INDEX BIBLIOGRAPHIQUE

Du sommeil et des médicaments hypnotiques proprement dits,

par J. Pineau. (Thèse de Paris, 1885.)

Contribution à l'étude des accidents laryngés chez les ataxiques,

par Munschina. (Thèse de Paris. 1885.)

Etude sur les troubles sensitifs dans la tuberculose aigue, par

Marguerite. (Thèse de Paris, 1885.)

Contribution à l'étude des paraplégies par troubles de circulation de

la moelle, par Meunier. (Thèse de Paris, 1885.)

Etudes sur le ptosis congénital, par MITRY. (Thèse de Paris, 1885.)

VARIA

Codes pour LES infirmiers d'asiles d'aliénés; par SHULTTEWORTH,

médecin en chef de l'asile royal Albert, Lancastre.

On a beaucoup parlé ces derniers temps, tant dans ce journal

qu'ailleurs, de l'enseignement systématique des infirmiers d'asile.

VARIA 129

Il m'a semblé, l'automne dernier, qu'il serait utile pour tout le

monde de publier ce que nous entendons, dans cet asile, par ins-

tl'u0tion, sur les secours à donner aux blessés, telles qu'elles sont

formulées dans l'association ambulancière de Saint-John. Aussi

j'ai obtenu, avec l'assentiment et les secours de mon comité, de

réaliser mon désir, qui était d'établir rapidement deux classes,

l'une de 2S hommes et l'autre de 39 femmes, les règlements de

l'association interdisant les classes mixtes. Le taux des leçons fut

fixé à 2 schellings pour les hommes, et 1 schelling et 6 pences

pour les femmes. Dans ce prix était compris un tableau anatomi-

que, et chaque élève dut acheter le manuel de Sherherd sur les

premiers soins adonner, pour 1 schelling, et un bandage trian-

gulaire illustré, du prix de 6 pences Le service des infirmiers et

des infirmières était si désireux de suivre les cours, que notre

unique difficulté vint d'en réserver pour les malades un nombre

suffisant. Les cours avaient lieu le jeudi soir à huit heures. Cha-

que cours était d'environ une heure , et il y avait ensuite environ

une demi-heure employée aux travaux pratiques, dans lesquels

je reçus l'aide du Dr Taylor. Les sujets compris dans le cours

étaient une esquisse générale de la structure et des fonctions du

corps avec quelques détails sur le squelette, la circulation, la res-

piration et le système nerveux. L'instruction pratique consistaiten

l'application des bandages, surtout du bandage triangulaire, les

divers moyens d'arrêter extemporanément une hémorrhagie, de

protéger et de soutenir les os fracturés, la conduite à tenir dans

les accidents d'urgence, tels que l'asphyxie, les noyades, les brû-

lures, etc. Il faut y joindre les instructions sur le transport des

blessés sur des brancards ou autrement, et, pour les femmes, une

rapide vue d'ensemble, sur le transport des blessés au moyen des

divers brancards d'ambulance. Nous y ajoutons pour les femmes

un coup d'oeil sur les fonctions d'ambulancière; il y avait, de

temps en temps, des inteirogations sur le sujet de ces cours

sous l'inspection d'une surveillante pour tout ce qui con-

cerne les travaux pratiques des femmes. Par ces derniers

moyens, je pense pouvoir affirmer que les élèves reçurent une

bonne éducation, et, à l'examen fait par le chirurgien-major

Ilutton, un des inspecteurs de l'association, sur les 15 hommes et

19 femmes qui se présentèrent, 15 hommes et 18 femmes passé-

rent avec éloges. L'examen avait surtout un caractère pratique;

les femmes ayant, en plus des questions orales, une liste de six

questions écrites auxquelles elles devaient répondre par un de-

voir écrit, et les hommes étant soumis à un examen étendu sur

les manoeuvres d'ambulance. On a fait à ces cours que j'ai insti-

tués des objections telles que celle-ci : « Un petit savoir est chose

dangereuse ». On a dit également que les subordonnés seraient

disposés à employer leur petit savoirindépendamment du médecin.

Archives, t. XII. 9

130 VARIA

Je puis seulement dire que le cours des événements n'a pas jus-

tifié ce pronostic. Il arrive au contraire que, pendant les trois

mois qui se sont écoulés depuis que les cours ont été institués,

les ambulanciers ont, dans deux occasions, rendu des services si-

gnalés. Une semaine après leurs examens, ils furent appelés pour

ramasser et porter à l'infirmerie un homme qui était tombé d'une

échelle de 20 pieds, pendant des manoeuvres d'incendie, et qui

avait subi une fracture (Fr. de Colles) et d'autres blessures, et,

tout récemment, ils ont rendu des services de premier ordre à un

médecin qui fut jeté hors de son cabriolet en passant devant

l'asile. Mais ce n'est pas absolument pour ces cas graves et ur-

gents, qui doivent pourtant arriver assez souvent dans un éta-

blissement de l'importance du nôtre, que nous donnons l'instruc-

tion à nos infirmiers. Nous leur donnons les connaissances ana-

tomiques et physiologiques élémentaires, les instructions sur la

façon de manier les malades avec soin et discrétion, pour la pra-

tique journalière de l'hospice.

Je crois que ces leçons judicieusement faites, loin de dé-

tourner les subordonnés de l'exactitude, auront de la valeur,

en leur permettant de réclamer intelligemment les soins des

médecins, et d'exécuter habilement leurs instructions, nécessai-

rement. Des leçons, telles que celles données à Saint-John, ne

peuvent remplacer l'instruction spéciale donnée à chaque em-

ployé ; mais il y a un certain avantage en ce que les certificats

délivrés par l'association ont une valeur réelle, d'autant plus que

le système d'examen est unique pour tout le Royaume-Uni, etcon-

fère un grade absolument défini. Je crois pouvoir affirmer que,

dans nos grands asiles, en tout cas, la préparation de ces confé-

rences sera intéressante pour quelques-uns mêmes des membres

du corps médical; et si l'expérience des autres s'accorde avec la

nôtre, les soins donnés à ces cours seront tout à fait appréciés

par les infirmiers et les infirmières qui forment l'auditoire. z

(Journal of mental science, 1886.)

CÉRÉMONIE POUR LA CURE DES ÉPILEPSIES LA NUIT DE LA SAINT-JEAN.

CI Les dévots passaient ordinairement la nuit dans l'église ; on y

disait la messe ce jour-là à trois heures du matin; mais pour

rendre la chose plus mystérieuse, ou se détermina à la célébrer

à minuit. Le peuple, toujours esclave du mystère, s'imagina que

la nuit de la Saint-Jean était très favorable aux miracles. Les

moines, secondant ces dispositions superstitieuses, exposèrent les

reliques de Saint-Maur, qui avaient, dans ce temps-là, la faculté

de guérir les épilepsies; et on y transporta les personnes atta-

quées de cette maladie.

FAITS DIVERS. 131

« Premièrement, retentissait dans l'église, lebruitdestambours

et de la décharge des armes à feu; puis, pendant quatre heures

que duraient la messe de minuit et les matines, on n'entendait,

dit M. l'abbé Lebeuf, que des cris, des hurlements continuels des

malades, ou prétendus tels, des deux sexes, que six ou huit

hommes promenaient étendus sur les bras, tout autour de la cha-

pelle de Saint-Maur.

« Les malades criaient de toutes leurs forces : « Saint-Maur,

grand ami de Dieu, envoyez-moi guérison, s'il vous plaît ' ; les

porteurs faisaient encore plus de bruit, en criant : « Du vent, du

vent » ; et des personnes charitables éventaient les malades avec

leurs chapeaux; d'autres criaient : « Place aux malades, gare le

rouge », parce qu'on prétend que cette couleur est contraire aux

épileptiques. Quand un malade avait répété trois fois de suite sa

prière, on le comptait guéri, et l'on criait à haute voix : « Mi-

racle, miracle ! » Enfin c'était un vacarme si grand, que l'on n'en-

tendait point le clergé chanter, et qu'il se formait trois ou

quatre chants dans les différentes parties de l'église.

« Pendant cette nuit, il y avait, dans la même église, de petits

marchands de bougies et d'images, des mendiants de toute

espèce, des vendeurs de tisane qui criaient : « A la fraîche, à la

fraîche » : tout cela augmentait le désordre ; et, après la grand'-

messe, les pèlerins et les pèlerines les plus sages couchaient dans

l'église, sans se gêner de leurs petits besoins ; les autres allaient

passer la nuit dans les cabarets ou aux marionnettes, ou bien à

la danse; ainsi se passait cette prétendue dévotion ». (Dulaure,

Histoire des environs de Paris, notice sur Saint-Maur-des-Fossés.)

FAITS DIVERS

Asiles d'aliénés. - Par suite de la mort de M. LEGRAND du

SAULLE, les mutations suivantes ont eu lieu en juin dans le

service médical des aliénés dépenda.it de l'Administration géné-

rale de l'Assistance publique à Paris : M. Jules Voisin passe de

l'hospice de Bicêtre à l'hospice de la Salpêtrière; M. Derny, mé-

decin adjoint à l'hospice de Bicêtre, passe médecin titulaire dans

le même établissement.

Asile d'aliénés DE C.1DILLAC. M. le DT CMUSET, directeur-

médecin de l'asile de Saint-Alban (Lozère) vient d'être nommé

médecin en chef de l'asile de Cadillac (Gironde).

132 FAITS DIVERS.

Asile d'aliénés DE Pierrefeu. M. Gueit a déposé dans la séance

du 6 mai, au nom de la commission spéciale de l'asile d'aliénés,

un projet selon lequel l'asile comprendra 290 lits de malades.

Concours pour une place DE médecin-aliéniste des hôpitaux de

paris. Ce concours, qui avait primitivement été fixé au lundi

28 juin, a été retardé à cause de quelques irrégularités dans le

tirage du jury qui a été définitivement constitué par MM. Bou-

chereau, Dagonet, Vallon, Voisin (Auguste), Empis, Lancereaux

et Straus.

Plusieurs journaux hebdomadaires ont adressé à l'adminis-

tration de vives protestations sur la présence parmi les juges de

M. Vallon qui n'avait pas maintenu sa candidature au dernier

concours. Quoi qu'il en soit, les candidats, au nombre de trois :

MM. Gilson ? mel et Séglas. ont subi la première épreuve à la date

fixée. Le sujet de la composition écrite était -.^Substance grise de

la moelle épinière.

Maison nationale DE CsARENTON. Il sera ouvert, le lundi

26 juillet prochain, au Ministère de l'Intérieur, un concou : s pour

l'internat de la Maison nationale de Charenton. On trouvera chez

le concierge de la Faculté et au Secrétariat de la Maison natio-

nale de Charenton, des exemplaires de l'arrêté qui fixe les condi-

tions d'admissibilité et le programme du concours. Voici les con-

ditions de ce concours :

Article premier. - Il est établi un concours pour la nomination

aux emplois d'interne en médecine de la Maison nationale de

Charenton. Art. 2. Sont autorisés à concourir, les éludiants en

médecine de nationalité française, âgés de moins de trente ans

révolus le jour de l'ouverture du concours et pourvus de douze

inscriptions, qui auront été agréées'par le directeur et par le

corps médical de la Maison nationale. Les docteurs en médecine

ne pourront pas prendre part au concours. - Art. 3. Les candi-

dats qui voudront concourir devront se présenter au secrélaiiit

de la Maison nationale pour obtenir leur inscription, en y dépo-

sant : 1° leur acte de naissance; 2° les certificats constatant

qu ils remplissent les conditions prescrites par l'article et qu'ils

sont de bonnes vie et moeurs. La liste des candidats seia close

8 jours avant la date de l'ouverture du concours. - Art. 4. Le

jury est composé de MM. les médecins et chiruigiens de la Maison

nationale auxquels seront adjoints deux membres nommés par

nous palmi les médecins inspecteurs généraux des services admi-

nistratifs, les médecins de l'administration centrale ou des éta-

blissements généraux de bienfaisance. Art. 5. Sur la piopo-

sition du directeur de la Maison nationale de Charenton, le jury

sera composé par nous et réuni au ministère de l'iiiléi ietir toutes

les fois qu'il sera nécessaire. Il dressera la liste des candidats ad-

FAITS DIVERS. 133

mis, qui seront nommés au sur et à mesure des vacances, dans

l'ordre de leur classement. Cette liste, certifiée conforme, sera

adressée, aussitôt après le concours, au directeur de l'étab issement

par le président du jury. Art. 6. La durée de l'internat est

fixée à trois ans. Tout interne titulaire est autorisé à se faire

recevoir docteur en médecine dans cet intervalle, sans être forcé

de quitter ses fonctions, mais le candidat inscrit sur la liste des

admis qui aura passé sa thèse avant d'être titularisé aura ainsi

renoncé implicitement à sa nomination. Art. 7. Les épreuves

du concours seront les suivantes : -I° composition écrite de trois

heures sur un sujet d'anatomie et de physiologie du système ner-

veux ; 2° l'épreuve orale de quinze minutes sur un sujet de pa-

thologie interne et de pathologie externe, après quinze minutes

de préparation. Il sera attribué 20 poiuls à cette épreuve.

Art. S. Le sujet de la composition écrite est le même pour tous

les candidats. Il est tiré au sort entre trois questions qui sont rédi-

gées et arrêtées par le jury, avant l'ouverture de la séance. Pour

les épreuves orales, la question sortie est la même pour ceux des

candidats qui sont appelés dans la même séance. Elle est tirée au

sort comme il est dit ci-dessus. L'épreuve orale peut être faite en

plusieurs jours si le nombre des candidats ne permet pas de le

faire subir à tous dans la même séance; dansce cas, les questions

sont rédigées par le jury chaque jour d'épreuves, au nombre de

trois, avant d'entrer en séance. Les noms des candidats qui doi-

vent subir l'épreuve orale sont tirés au sort à l'ouverture de

chaque séance. - Art. 9. Les candidats sont surveillés pendant

la composition écrite par des membres du jury. Tout candidat qui

s'est servi pour sa composition de livres ou de notes apportés à

la séance, ou qui, en lisant sa composition, en a sensiblement

changé le texte primitif, est exclu du concours. Les compositions

sont recueillies et mises sous cachet par le président; elles sont

lues publiquement par leurs auteurs sous la surveillance de l'un

des membres du jury. - Art. 10. A la fin de chaque séance, il

peut être donné connaissance aux candidats du nombre de points

qui leur sont attribués. - Art. il. Le jugement définitif portera

sur l'ensemble des deux épreuves (écrite et orale). - Nota. L'al-

location accordée aux internes de la Maison nationale de Cha-

renton est : pour la ire année, de 1,300 fr.; pour la 2e année,

de 1,600 fr.; pour la 3° année, de 1 ,¡DO fI', En dehors de l'interne

de garde, qui est nourri et logé, les internes ont droit au dé-

jeuner.

Nécrologie. Le Dr von GUDDEN. - Le corps médical vient

d'éprouver une grande perte en la personne du Dr v. GUDDEV, un

des ahénistes les plus distingués de notre époque. Il est mort le

14 juin courant, victime de son devoir professionnel. Gudden

134 FAITS DIVERS.

était né à Clèves le 7 juin 1834 ; il fit ses études à Berne, à Berlin

et à Halle; reçu docteur en -1848, il fut nommé en 1855 directeur

de l'asile d'aliénés de Werneck. En 1869, nous le retrouvons pro-

fesseur de psychiatrie à Zurich ; en 1872, il occcupe à Munich la

même chaire et est directeur de l'asile d'aliénés. Les travaux de

von Gudden sont connus et appréciés de tous ; son microtome se

trouve dans la plupart des asiles de l'étranger. Von Gudden pre-

nait une part active aux discussions du Congrès annuel de la

Société des aliénâtes allemands. - Le public médical regrettera

avec nous qu'une mort prématurée vienne nous priver des tra-

vaux que nous étions en droit d'attendre encore de lui, et qu'une

intelligence aussi grande soit tombée sous les coups inconscients

d'un dégénéré, le roi Louis Il de Bavière. - Nous citerons de

von Gudden : Beitrüge zur Lehre von dei, durch Parasitez bedingten

Haut-Krankheiten, Stuttgard, 185p; Beitrag zur Lehre von der

Scabies, Wurzburg 1863; Experimentelle Untersuchungen uber das

Schadelwachàthum, Munich, 1874; le même traduit en français, par

le professeur Forel z6); Experimentclle - Anatomische Untersu-

chungen ùber das periphere und centrale Nervensyslem dans : Archiv.

f. Psychiatrie.

L'Amel'ican Journal of Insanity (avril) nous annonce la mort

du Dr R.-H. SmTx, superintendant de l'asile d'aliénés de l'Etat

de Missouri.

Société médico-psychologique. - Cette Société a tenu sa séance

solennelle le lundi 10 mai sous la présidence de M. Semelaigne.

Elle a décerné les récompenses suivantes :

,Prix Esquirol. - Ce prix, de la valeur de 200 francs, plus les

oeuvres d'Esquirol, a été décerné à M. Larroque, interne de la

maison de Charenton, pour un mémoire intitulé : Des rémissions

dans la paralysie générale. Une mention honorable a été accor-

dée à M. Dumas, interne de la maison de Charenton, pour un

mémoire intitulé : Des transformations de la personnalité et des

erreurs de personnes chez les aliénés.

Prix Moreau (de Tours). - Ce prix, de la valeur de 200 francs,

a été décerné à M. le Dr Bernard, ancien interne des hôpitaux de

Paris, pour sa thèse : De l'aphasie et de ses diverses formes. -

Une mention honorable a été accordée à M. le Dr Rouillard,

pour sa thèse : Essai sur les amnésies. Etiologie des troubles de la

parole.

Prix Belhomme. - Ce prix, de la valeur de 1,200 francs, a été

décerné à M. le Dr Paul Balcon, médecin à Paris. La question

posée était : « De l'idiotie et en particulier des lésions anatomiques

des centres nerveux dans l'idiotie »

Prix Aubanel. Ce prix, de la valeur de 2,400 francs, n'a pas

été décerné. La question proposée était la suivante : « De la

FAITS DIVERS. 135

coexistence chez un même malade, de délires d'origine différente

(alcoolique, épileptique, paralytique. vésanique, etc.), au point

de vue du diagnostic, du pronostic, du traitement et de la méde-

cine légale ». Deux récompenses ont été accordées : la première,

de 800 francs, au mémoire de M. Dericq, interne de l'asile Sainte-

Anne ; la seconde, de 400 francs, au travail de MM. Roland et

Bezançon, internes des hôpitaux de Paris.

Société française DE tempérance. Cette Société a tenu sa

séance solennelle le 30 mai 1886, sous la présidence de M. A.

DUVBRGEIi, professeur à la faculté de droit de Paris.

Après avoir entendu une allocution chaleureuse de M. le pro-

fesseur A. Duverger, le rapport sur la situation morale et finan-

cière de l'oeuvre par M. le Dr Motet, secrétaire général, les

rapports de MM. Decaisne, Boyer et Bouebereau et celui de M. Gui-

gnard sur les récompenses, la Société a décerné une médaille

d'argent à M. Marambat, des médailles de bronze à MM. les D"

Séjournet et Legendre, 500 fr. répartis entre Julien Bottet,

procureur de la République, le Dr A. Barrabé, François Delattre

et le Dr A.-J. Devoisins; 468 diplômes de membre associé hono-

raire, 6 médailles d'argent, 180 médailles de bronze, 11 livrets

de caisse d'épargne postale (1 15 fr.) et 536 diplômes de témoi-

gnages de satisfaction, 157 volumes de ses bulletins, 116 exem-

plaires de l'Essai sur l'Intempérance de M. Edmond Bertrand,

115 manuels Picard, 20 exemplaires de la Conférence Homais,

205 exemplaires du Mécanicien Gerbas, de M. Paul Timon, et 4,00

exemplaires des années 1880 à 1885 du Bon Conseiller, publié sous

son patronage.

Autopsie du ROI Louis de BAVIÈRE. La Gazette hebdomadaire

nous apprend que le résultat de cette autopsie donne avec une

remarquable netteté la clef des manifestations cliniques observées

depuis des années chez le roi de Bavière, atteint d'une aliénation

mentale dans laquelle l'hérédité a également joué son rôle. Les

lésions du crâne et du cerveau sont de beaucoup les plus intéres-

santes. Le cuir chevelu est épaissi, le crâne petit et un peu asy-

métrique. La voûte crânienne est extrêmement mince, les sutures

frontale et sagittale ossifiées à la face interne; le frontal présente

des ostéophytes de volume variable à sa face interne; le sinus

veineux longitudinal supérieur est énormément dilaté en arrière,

rétréci en avant au niveau de l'ethmoïde, les granulations de

Pacchioniy font saillie. La dure-mère est épaissie, surtout au ni-

veau du frontal, et très hypérémiée; le sphénoïde et les rochers

présentent des exostoses; la selle turcique est asymétrique, po-

reuse et friable. Les sinus de la base sont gorgés d'un sang noir

et fluide. Le poids du cerveau est de 1,349 grammes. L'arach-

noïde est épaissie sur une grande étendue. Au niveau de la cir-

136 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

convolution frontale ascendante gauche dans sa partie antérieure

et du début de la première circonvolution frontale, l'arachnoïde

et la pie-mère ont contacte des adhérences et forment un épais-

sissement de la dimension d une pièce de 4 franc; à ce même

endroit, la voûte crânienne est réduite à l'épaisseur d'une feuille

de papier. Plusieurs circonvolutions sont atrophiées par place.

La substance cérébrale est hypérémiée et présente un certain

degré de ramollissement. Dans les autres organes, les lésions

sont insignifiantes; l'estomac présente les lésions du catarrhe

chronique (Gaz. liebd.).

F £ né(Cii.) Trailcèlcmentaired'anatomiemédicale du système nerveux.

- \'oliiiiiein-1 ? o de 496 pages, avec 2 13 figures dans le telte. - Prix : 10 fr.

Aux bureaux du Progrès médical, 14, rue des Carmes. - Pour nos abon-

nés, 7 fr.

Bl,.AU,Nls (H.) - Le somnambulisme p1'ovnl]ué. - Etudes physiologiques^,

et psychologiques Volume in-12 de 250 pages. - Prix 3 fr. - Paris,

1SS6. - Librairie J.-B. Baillirrc.

tlec (G ). Classification of mental diseases. Report of the progress.

Brochure In-8" de 1S pages. - New-York, 18a6, chez l'auteur, 37, Broad-

way.

DUVAL (M.). - Le Darwinisme, leçons professées à l'école d'anthropo-

logie. Volume in-8' de b76 pages, avec 7 figures. Prix : 10 fr. Pans, 1885.

- A. Delahaye etE. Lecrosnier.

Grasset. Traité pratique des maladies du système nerveux, suivi d'un

appendice sur l'électrothérapie, par IIEGntBE\U (3- édition). Volume in-so

de 1,190 pages, avec73 figures et 16 planches. Prix : 28 fr. Paris, 1895. -

A. Delahaye et E. Lecrosnier.

KOSTJUHll ! (S.) - Die senilen f'err7ndertengen der GI'osslll1'n1'inde, Bro-

chure ui-8" de 9 pages. Wien, 1886. 'Hotder.

LEGnaxn du S.1L1LLE, Bebryer (G.) et l'oucm : T (G.) Traité de méde-

cine léga'e, de jurisprudence médicale et de toxicologie. Deuxième édi-

tion. Volume iu-8" de 1680 pages, avec 9 ligures dans le texte et 2 plan-

ches. - Prix : 27 francs. - Paris 186. Librairie A. ])elal1<l\e et Emile

Lecrosnier. '

ilkli[FT et CoMBEMtLE. Recherches sur l'action physiologique etthéra-

pelttil]ue de l'acétophénone (Ilyl)tiose). Brochure in-8n de 61 pages. Mont-

pellier, isba. - Imprimerie Boehm et fils.

PEUGNIEz. De l'hystérie chez les enfants. Volume in-8° de 181 pages.

Prix : 4 fr. Paris, 1885. - A. Del;th.iyu et Lecrosnter.

R\YMO : i'D. Anatomie pathologique du système nerveux. Cours com-

plémeutatre, professé à la Faculté de médecine de Paris. Volume tn-8"

de 400 pages, avec 114 figures et 2 planches. Prix : 9 fr. Paris, 1885. -

A. Delahaye et E. Lecrosnier.

Wundt (\V.). Eléments de psychologie physiologique. Traduit de l'alle-

mand sur la 2' édition, avec l'autorisation de l'auteur par le Dr E. flou-

lnen, précédé d'une nouvelle préface de l'auteur et d'une introduction

par D. NOL EN. Un volume in-8^ de 57t pages, avec 123 figures. Pans,

1885. - Librairie Félix Alcan.

Le rédacteur-gérant, BUUlIIOEYlLLL

Evrem (Il Ilwnaer, 1--P - -98g.

Vol. XII. Septembre 1886. N° 35.

ARCHIVES DE NEUROLOGIE r !

CLINIQUE NERVEUSE

DE L'IDIOTIE COMPLIQUÉE DE CACHEXIE PACHYDERMIQUE

(idiotie CRÉTlN01DE);

Par BOURNEVILLE et P. BKICON.

Parmi les formes déjà nombreuses que l'on peut

distinguer dans l'idiotie, l'une des plus curieuses et

des moins connues est assurément celle qui a été dési-

gnée par quelques auteurs anglais, entre autres par

MM. Fletcher Beach et Ireland, sous le nom d'idiotie

crétinoïde et que, nous fondant sur la découverte d'une

maladie nouvelle, le myxoedème ou cachexie paclaJder-

mique, nous proposons de désigner sous le nom d'idiotie

avec cachexie paclaydermique. \

Les cas authentiques que nous avons recueillis

et peut-être y en a-t-il qui nous ont échappé sont

assez rares et plus rares encore sont ceux dans les-

quels l'autopsie a été pratiquée. Ceux-ci se réduisent, en

effet, à quatre, et, fait capital, da : is ces quatre cas on

a relevé l'absence de la glande thyroïde. D'où il suit,

d'après ces faits, qu'il paraît y avoir une relation évi-

dente entre l'abseuce de cette giande et l'existence du

Archives, t. XII. 10

13 CLINIQUE NERVEUSE.

myxoedème, ou de la cachexie pachydermique. Ce

qui ajoute encore de l'intérêt à ces constatations, c'est

que, chez un certain nombre d'individus ayant subi

la thyroïdectomie totale, on a vu se produire un

myxoedème opératoire'.

La physiologie expérimentale, ainsi que cela résulte

des expériences de M. Horsley, vient également

appuyer la corrélation entre l'absence de la glande

thyroïde et l'existence de la cachexie pachydermique

décelée par la clinique et l'anatomie pathologique.

Nous sommes donc amenés, naturellement, à diviser

notre travail en deux parties : la première sera consa-

crée à l'exposé des observations d'idiotie avec cachexie

pachydermique ; la deuxième, à l'examen des cas

d'extirpation de la glande thyroïde, suivie de cachexie

pachydermique.

I. IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE

Les deux premières observations en date, et non

les moins intéressantes, sont dues à Curling : nous les

traduisons textuellement.

Observation I. Aspect crétinoïde. - Gonflements sur les parties

latérales du cou et en avant des aisselles. - Persistance des fon-

tanelles. - Erysipèle. Phlegmon de la cuisse. - Mort.

Autopsie. Composition et texture des gonflements. - Absence

de corps thyroïde.

En juillet 1849, le Dr Litle, dit Curling, m'invita à examiner un

malade, qu'il considérait comme un crétin, à l'asile des idiots de

1 D'après les faits qui nous ont été communiqués par M. J. Reverdin,

ce myxoedème aurait une allure particulière et tendrait à s'atténuer; l'un

de nous a pu voir à Genève une des malades de M. lteverdin chez

laquelle, à part une certaine lenteur corporelle et intellectuelle, on ne

retrouvait plus les autres symptômes de la cachexie pachydermique.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 139

Highgate et d'examiner plusieurs gonflements situés de chaque

côté du cou, dont la nature était douteuse, mais que l'on croyait

devoir attribuer à une hypertrophie de la glande thyroïde ou des

ganglions lymphatiques. L'enfant, âgée de dix ans, était née à

Lancashire; elle était grosse, rabougrie, mesurait deux pieds six

pouces (63 c. 51); son corps était épais, ses membres dispropor-

tionnellement larges et longs. Les membres et le dos étaient poi-

lus. La tête était grosse; les fontanelles n'étaient pas fermées. Le

front était plat. L'expression était désagréable et celle d'une

idiote. La bouche était large, la langue épaisse et protubérante.

De chaque côté du cou. en dehors des muscles sterno-cleïdo-

mastoïdiens, il existait deux gonflements sensiblement symétriques

qui donnaient à la palpation une sensation molle, pâteuse,

dépourvue d'élasticité. Des gonflements semblables, mais plus

petits et moins difformes, existaient en avant des aisselles. On ne

constatait aucun gonflement au devant du cou et la glande thyroïde

ne pouvait être trouvée à la palpation. L'enfant ne marchait que

très peu et ne pouvait aller de chaise en chaise qu'avec l'assis-

tance d'une autre personne. La parole était nulle, mais l'enfant

reconnaissait ses parents et manifestait quelques signes de volonté ;

elle cherchait à se faire asseoir sur les genoux du médecin rési-

dent et s'y aidait elle-même. Durant son séjour à l'asile, elle fut

atteinte d'un premier érysipèle; son intelligence parut plus déve-

loppée à la suite de cette affection 1. Soignée ensuite pour un

phlegmon considérable de la cuisse, phlegmon qui suppura forte-

ment durant plusieurs semaines, elle fut de nouveau atteinte, après

la guérison de la plaie, d'un nouvel érysipèle accompagné de glos-

site et de stomatite. Elle mourut dans le marasme six mois après

le début de la maladie et environ quinze mois après son entrée à

l'asile.

Autopsie (vingt-quatre heures après le décès, faite par M. Cal-

laway). - Le corps était très émacié. Les gonflements cervicaux

avaient beaucoup diminué de volume; ils étaient composés de

graisse et occupaient le triangle postérieur de chaque côté du

cou; ils s'enfonçaient en bas sous les clavicules, remplissaient les

aisselles et pouvaient être suivis jusque sous les muscles sous-

scapulaires et vers l'angle inférieur de l'omoplate ; ils n'étaient

pas enkystés. La graisse qui les composait paraissait, au micros-

cope, formée'de tissu coritiectif et de cellules adipeuses. 1/ n'y

avait pas la plus légère trace de glande thyroïde 2.

1 On verra que Th..., dont nous rapportons l'observation plus loin,

fut également atteint d'érysipèle, mais son état intellectuel ne parut nul-

lement modifié par cette maladie intercurrente.

2 Voir plus loin les observations de Th... est de Gra ..

140 CLINIQUE NERVEUSE.

Observation II. Idiotie. Gonflements anormaux de la région

cervicale. - Convulsions. Mort.

Autopsie. Composition des gonflements cervicaux. Absence

de glande thyroïde. -

En 1849, on m'adressa un enfant de six mois pour quelques

gonflements anormaux de la région cervicale. Les parents étaient

sains; mère, âgée de vingt-huit ans, avait eu une autre enfant.

Cette enfanl était forte, elle présentait une expression marquée

d'idiotie; la face était large, le front fuyant et la tête petite. La

langue large pendait en dehors de la bouche. De chaque côté du

cou, en dehors des muscles sterno-cleïdo-mastoïdiens, il existait

deux gonflements symétriques, obliques de forme ovale, durs au

toucher et dépourvus d'élasticité. Ils s'étendaient des bords du tra-

pèze au milieu des clavicules. Je fus frappé de la ressemblance de

ce cas avec celui du crétin de Highgate. La mère me dit que

l'enfant était inhabile à se servir de ses membres inférieurs,

qu'elle n'était pas aussi forte que son autre enfant. Elle tomba ma-

lade quelque temps après, refusa toute nourriture, et mourut dans

les convulsions le 7 décembre 1849.

Autopsie. Le cerveau ne présentait d'autres anomalies qu'un

arrêt de développement des lobes antérieurs. Malgré un examen

très attentif de la région cervicale, on ne trouva pas de glande

thyroïde; on ne put en découvrir aucune trace. Les gonflements

cervicaux consistaient en amas superficiels et non enkystés de

graisse lâchement unie aux parties environnantes.

M. Curling attribuait le développement des boules

graisseuses anormales à l'absence du corps thyroïde et,

par suite, à l'imperfection des processus d'assimilation.

Il exprimait l'espoir que ces faits pourraient diriger

les recherches futures sur les fonctions de la glande

thyroïde. Ces deux cas sont, sans aucun doute, deux

cas types d'idiotie crétinoïde, ou mieux d'idiotie compli-

quée de cachexie pachydermique avec absence du corps

thyroïde.

Vingt ans plus tard, M. Hilton Fange publiait dans

les « Medico-c/zirurgicaITransactions) de 1871 un autre

cas de cachexie pachydermique chez un enfant idiot.

1 Hilton Fagge. On sporadie cretiraisns, occuring in Enyland. (p. 155)

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE 11l

Observation III. - Idiotie avec arrêt de développement du corps et

type crêtineux de lu face d'origine congénitale ( ? ). - Pas de goitre.

- Tumeurs molles et mobiles de chaque coté du cou en dehors des

muscles ste1'llo-cléido-m(tstoidiens.

Edmond D..., âgé de huit ans, est entré le 26 novembre z870

à l'hôpital des enfants malades Evelina (service de M. Fagge).

Il avait déjà été vu à la consultation externe par le Dr Baater. Le

père et la mère étaient bien portants; sobres, ils menaient une vie

régulière, et une enquête sérieuse n'a pu révéler d'excès de bois-

son soit habituels, soit même occasionnels. Leurs autres enfants

élaienl bien portante.

L'accouchement eut lieu au forceps. -1 la naissance, l'enfant

était fort; il perça ses premières dents à deux ans; il n'es-

- I·'iJ. à.

142 CLINIQUE nerveuse : ".

saya de marcher pour la première fois qu'à trois ans et demi. '

Pendant sa première enfance, on n'observa aucun, autre phéno-

mène anormal chez cet enfant. Mais, plus tard, sa mère s'aperçut

qu'il voulait toujours s'asseoir où qu'il fût, et que ? silencieux, il

gardait souvent la même position plusieurs heures de suite. La

croissance s'arrêta, et la mère prétend qu'il n'a pas grandi depuis

deux ans et demi. Actuellement, quoique âgé de huit ans, il a-

l'apparence d'un enfant de deux à trois 'ans.' Il pèse 25 livres

(9ka1'75) et mesure 2 pieds 7 pouces 3/4 (environ Ow,76). Il est tran-

quille ; il s'assied et reste immobile à'quelq'ue place qu'on le

mette. 11 se tient rarement debout,de : son propre mouvement. Un

air de contentement stupide le caractérise' généralement; parfois

sa face s'illumine d'un sourire-passager., Depuis. qu'il est habitué

aux choses et aux personnes du service, il sourit toujours dès que

l'on fait attention à lui; il sourit sans motifs si on le lui commande.

11 parle peu* et semble ne connaître que quelques mots; mais il

nomme correctement divers objets qu'on lui présente. Il est propre

et paraît susceptible d'affection. (Fig. 5)

La tête est grosse et ronde; la face large; les yeux sont très

écartés; le nez à sa naissance est plat et large; son extrémité est

relevée;'les ouvertures des narines sont arrondies. La bouche est

grande et ordinairement ouverte, mais il n'y a pas d'écoulement

de salive. Les lèvres sont épaisses. L'enfant possède toutes ses

dents de lait. La langue est de grandeur naturelle.

De chaque côté du cou, juste au-dessus des clavicules, il existe des

gonflements 'mous, mobiles et dépourvus d'élasticité. Ces masses

peuvent être attirées à une certaine distance en bas au-delà des

clavicules, elles semblent faire corps avec les tissus sous-cutanés

plutôt qu'avec les tissus sous-jacents. Il n'y a aucune prolongation

de ces masses vers les aisselles.

Il n'existe pas de goîlre; on ne peut percevoir à la palpation

aucune trace de glande thyroïde.

Le thorax est bien conformé. Les membres sont courts et gros;

les tibias, quelque peu courbés, mais on ne constate pas d'épais-

sissements rachitiques des épiphyse<. Les mains et les doigts sont

très larges, courts, épais; il en est de même des pieds et des or-

teils. La peau, sauf celle de la face, est rugueuse et présente par

places des parties dures, de peu de dimension, de couleur

brillante gris brun ; les cheveux et les cils sont longs, noirs et

abondants.

Telle est la troisième observation publiée sur l'idio-

tie crétinoïde; les symptômes se rapportent exactement

à la cachexie pachydermique.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE 143

Le quatrième cas est dû à M. Fletcher Beach '.

Observation IV. Crétinisme sporadique. - Absence de glande

THYROÏDE.

Il s'agissait d'une enfant de quinze ans du poids de 11 kil. 530

(taille : 38 pouces (0 m. 78). Elle était très grasse ; la tête, aplatie

au vertex, était très large latéralement (voir la fig. 6) : diamètre

longitudinal : 11 pouces (0 m. 23); -circonférence : 19 pouces»

(0 m. 40). Les dents étaient régulières et bien conformées. L'en-

fant ne parlait presque pas; elle était d'un caractère enjoué, et

se livrait avec plaisir à différents amusements.

E ivoyée à l'école de l'asile, elle apprit l'alphabet, put épeler

quelques mots de trois lettres et écrire deux lettres sous la dictée ;

elle additionnait jusqu'à 5, complait jusqu'à 50, multipliait par 2

jusqu'à 12; elle pouvait distinguer trois couleurs. Elle apprit un

peu à ourler. Elle possédait donc une certaine intelligence. Elle

était propre; l'appétit et le sommeil étaient bons, elle avait été

menstruée deux à trois fois.

A J'autopsie on constata que le trou occipital était plus petit qu'à

t Fletcher Beach. - Notes of a case of sporadic cretinism with an

account of the Autopsie (rite Journal of mental Science, vol. XXII, 18 îG,

p. 2f1).

l'rg. 6.

il ? CLINIQUE NERVEUSE.

l'étal normal ; il présentait sur ses bords une petite saillie de

forme circulaire. La sulure sphéno-basilaire était encore cartila-

gineuse. Le cerveau pesait 34 onces (434 gr. 06). Les circonvolu-

tions étaient très distinctes et grossières mesurant un demi-pouce

de largeur. A l'examen histologique d'une circonvolution on ne

découvrit ni dégénérescence totale ni inflammation. Les vaisseaux

étaient tortueux ; la substance corticale elait plus épaisse qu'à

l'état normal.

Il n'y avait pas traces DE GL\NDE thyroïde. Les tumeurs gl'ais-

seuses cervicales n'étaient pas enkystées; elles se prolongeaient

sous les sterno-cléido-masloirlieus et les clavicules. (Voir fig. 7).

Nous nous abstiendrons de consigner ici les autres

cas d'autopsie de myxcedèl1le parce qu'ils ne se rap-

portent pas au myxoedème congénital ou de la pre-

mière enfance, le seul que nous voulons étudier dans

Fig. 7. - FigUl'e montrant la trachée, la langue, l'absence du corps

thyroïde, et les masses graisseuses.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERM1QUE. 145

ce travail'. Nous donnons de suite les deux cas d'i-

diotie crétinoïde qu'il nous a été donné d'observer. De

ces deux malades l'un Gr... est encore vivant, l'autre

Th... Et le Pacha, a succombé il y a quelques mois.

Observation V.. Père : incontinence nocturne d'urine jusqu'à dix-

huit ans ; - Alcoolisme, colère, tuberculeux. - Tante paternelle

tuberculeuse. - Mère migraineuse et tuberculeuse ; oncle maternel

alcoolisme et suicide. .Frère et sceur un peu arriérés. - Etat

crétinoïde; symptômes de cachexie pachydermique.

Gr... (Emile), né le 13 avril 1858 à Strasbourg, est entré le

25 mais 1874 à l'hospice de Bicêtre. (Service de M. Bourneville.)

Renseignements fournis par une tante paternelle (12 mars 1880).

- Père né à Strasbourg ', mort en 1 878 de la poitrine, à l'âge de

quarante-neuf ans; s'était engagé à dix-sept ans, avait sa retraite

depuis un an dans la garde républicaine. Alcoolisme, absinthisme;

se mettait souvent en colère; n'a jamais monté en grade; a pissé

au lit jusqu'à dix-huit ans. [Son père, journalier aux champs, ne

savait ni lire ni écrire; il était sobre, bien conformé et est mort

d'une fluxion de poitrine; sa mère, de taille ordinaire est morte

à soixante-quinze ans « de vieillesse ». Une bOElI1' qui nous donne

les renseignements est intelligente; une deuxième morte pmtri-

naire. Pas de nerveux ni de difformes, etc., dans la famille.]

Mère, née à Lille, morte en ! 877, a trente-neuf ans, de tuberculose

pulmonaire, très intelligente, de taille assez élevée, était sujette

aux migraines. - [Père ? Mère serait encore vivante et habite-,

rail Lille; deux frères, l'un d'eux se serait jeté à l'eau à la suite

d'alcoolisme et de deux SOEUI'S bien portantes. Pas de ner-

veux, ni de difformes dans la famille]. -Pas de consanguinité.

Cinq enfants : I° Louis, vingt-deux ans, de faille élevée, peu in-

telligent, employé aux chemins de fer, pas de convulsions, a des

migraines; - : 1° notre malade; - 3° une fille de dix ans, grosse,

ne grandissant pas, peu intelligente, n'a marché qu'à trois ans,

pas de convulsions, a pissé au lit jusqu'à neuf ans et y pisse encore

quelquefois; - 4° et ou d'autres enfants morts, l'un du croup,

l'autre de la rougeole :

Notre malade, Gr... Ernest, est né à Strasbourg le 13 avril 1858

où sa mère était allée faire ses couches, bien qu'habitant Paris

1 Les autopsies de cas de cachexie pachydermique ne sont du reste

actuellement qu'au nombre de 10 : 2, de Curling (1850); 1, de Fletcher-

Beactl (t876); 3,de Urd; l, de Lloyd; t, deGreenfield; 1, de Heul'ot; 1, de

Br.unles (I88'i). Ceu\ de Curling et de Fletcher-Beach et le nôtre appar-

tiennent à des idiots crétinoides.

1 Il y a quelques goitreux il Strasbourg.

H6 CLINIQUE NERVEUSE.

depuis son mariage; la grossesse n'avait rien eu d'extraordinaire;

né à terme. A la naissance, il était gros, mais paraissait dil-

forme ; la tête surtout était « horrible à \oir ». -Il a été élevé

au biberon à Strasbourg et avait plus de quatre ans lorsqu'il a

commencé à marcher; vers cette époque il eut la rougeole. Il est

venu à Paris à l'âge de cinq ou six ans, et n'a pas été trop tardif

à parler. Il a pissé assez tard au lit. 11 n'est jamais allé à l'école,

les autres eufants se moquaient de lui. Il restait à la caserne,

faisait des commissions, car sa mémoire est bonne ; il était assez

affectueux, et se chagrinait facilement; il dormait bien et n'était

pas peureux. Point de kleptomanie, de pyromanie, d'onamsme;

ni de scrofulides.

1880. 17 mars. - Tète très volumineuse, le crâne est assez ré-

gulièrement conformé et symétrique ; le front est bas, très large

et semble se continuer directement avec la face. Les arcades

sourcilières sont peu marquées et au dessous d'elles se trouve une

encoche facilement perceptible.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. z47

La voûte palatine est large, a sa profondeur habituelle, mais le

voile du palais n'est pas symétrique, la luette est un peu reportée

vers la gauche, l'arcade qui la sépare du pilier gauche est beau-

coup plus étroite que l'arcade du côté droit.

Le thorax est constitué d'une façon particulière. Vu de face, on

remarque que les dernières côtes forment, au niveau des hypo-

Ji1g. 8. - Celle figure représente trois cas d'idiotie : le premier (à

gauche) avec goitre, les autres accompagnés de cachexie pachydermi-

que. Le sujet de droife est Gr... -

148 CLINIQUE NERVEUSE.

chondres, une saillie marquée en dehors, la base de la poitrine

est ainsi latéralement élargie; le sternum n'offre pas de saillie

anormale, mais les attaches des côtes à cet os, surtout les plus

inférieures, sont très saillantes; elles semblent s'articuler au ster-

num de la même manière que les clavicules.

La colonne dorsale au niveau de la base du thorax, forme une

dépression très marquée ; lorsque l'enfant est debout, il existe à

ce niveau un sillon vertical assez profond pour contenir le doigt.

Membres. Etant donnée la taille exiguë de Gr.. (1m,20) les

membres tant supérieurs qu'inférieurs sont réguliers, égaux, pro-

portionnés, ainsi que le montrent les mensurations ci-après :

Longueur du bras mesurée del'acromion à l'épicondyle, 19 cent.

Longueur de l'avant-bras de cet épicondyle à l'apophyse styloïde

du radius, 19 cent.

Longueur de l'apophyse styloide du radius à l'extrémité du

médius, ,15 cent.

Longueur de la cuisse, de l'épine iliaque antéro-supérieure au

bord externe du plateau tibial, 3 ? cent. et demi.

Longueur de la jambe au bord extérieur du plateau tibial à la

pointe de la malléole externe, il cent, et demi.

De la malléole externe à l'extrémité de l'orteil médian, 16 cent.

Gr... mane assez proprement, se sert de la cuiller, de la four-

chette et du couteau; l'appétit est bon, les digestions sont nor-

males, les selles régulières; il n'y a pas de vomissements.

Respiration et Cil'culalioll.-AusculLation du poumon et du coeur

normale. Pouls à 78 au moment de l'examen avec des inégalités

très grandes, il n'est pas perceptible au niveau de la radiale, on

ne le sent qu'au niveau de l'humérale.

La peau présente sur les membres et la plus grande partie du

tronc des altérations qui rappellent un peu l'icthyose. Elle est

rugueuse au toucher et couverle de line> squames épidermi-

ques. Sa couleur générale est basanée. A la face, un remarque de

très nombreuses taches de lentigo, principalement sur le nez et

le front, ainsi que sur les paupières inférieures. Il n'existe aucune

pigmentation ni des organes génitaux, ni du mamelon; pas de poils

au pubis ou sous les aisselles. Les cheveux sont assez fournis. Ils

sont durs, jaune rougeâtre, secs et gros. Ils descendent très bas

sur le front; les sourcils sont à peine marqués, les cils lins et peu

épais; pas le moindre poil de barbe bien que Gr... ait vingt-deux

ans. On remarque, en outre, diverses tuméfactions mollasses

semblables à de petits lipomes diffus ( ? ). L'une d'elles est située

à la partie droite de la base du cou, au niveau même de la clavi-

cule. Elle a le volume d'une petite orange, une consistance gélati-

niforme et se déplace avec la peau; du côté gauche, il en existe

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 149

une deuxième analogue à la première remontant en arrière jus-

qu'au bord antérieur du trapèze, mais moins volumineux que celle

de droite. Au niveau du creux axillaire et sur la paroi thoracique,

le tégument présente une disposition analogue.

Organes génitaux. - Le testicule droit est rendu au fond des

bourses; il est de la grosseur d'une noisette. A gauche, le scrotum

est vide, on sent à une certaine distance, dans le canal inguinal,

une petite tumeur assez dure, mais non douloureuse à la pression

qui parait être le testicule droit. A droite, au-dessus du testicule,

sur le trajet du cordon, on sent une tumeur du volume d'un oeuf

de pigeon sous laquelle bute ce testicule quand il remonte vers

l'anneau (hernie inguinale). - La verge ne semble pas anormale-

ment conformée; toutefois, il est impossible de découvrir le gland.

Le prépuce est fort long, et, quand on essaie de le repousser en

arrière, on détermine une vive douleur.

La sensibilité cutanée paraît normale dans ses différents modes.

Organes des sens. -Yeux normaux; pupilles régulières, iris jaune

brun foncé et contractile; Gr... dit voir mieux de l'oeil gauche

que de l'oeil droit. En ell'et, on remarque, sur la cornée de ce

dernier, une petite tache d'albugo qui couvre la région inférieure

de la pupille. Il raconte du reste qu'il aurait eu, à une époque

qu'il ne peut préciser, une maladie de l'oeil pour laquelle il serait

resté dix-huit mois à l'hôpital des Enfants. Il connait les cou-

leurs - Ouïe, odorat, goût normaux.

1880. 2 ! ¡, Juin. Le caractère est d'une susceptibilité extrême :

Gr... se considère comme un homme et ne tient plus aucun

compte des observations, il se met facilement en colère, il

demande à passer aux hommes, aux vieillards.

16 septembre. - Poids : 30 kilo,. Taille : lm,20.

Octobre. Vient à l'école depuis quatre ans; sous tous les rap-

ports ses progrès sont presque nuls; n'a pas de mémoire, ne peut

faire ni gymnastique, ni escrime.

21 septembre. Ne vient à l'école que par contrainte et ne fait

aucun progrès; il est convaincu qu'à son âge on doit lui laisser

une entière liberté, ne sait pas encore lire, mais écrit un peu;

stationnaire sous tous les rapports ; il est très frileux.

1881. 4 juillet.- Gr... ne fait à l'école que des apparitions dont

le résultat est nul au point de vue des progrès : à la gymnastique ;

il connaît maintenant tous les mouvements d'ensemble.

. 31 juillet. Poids : 29 kilog. 900. Taille, 1m.2l.

6 novembre. Gr... apris cette année régulièrement les douches,

qu'il prenait et cessait alternativement depuis deux ans; et, tan-

dis qu'autrefois il essayait de s'échapper, maintenant il les prend

seul. Il cherche à s'occuper un peu, aide au réfectoire à essuyer la

vaisselle et semble un peu moins lourd : on supprime les douches.

150 CLINIQUE NERVEUSE.

28 décembre. - Nous voyons le frère et la soeur de Gr... le

premier, qui a été soldat, a vingt-sept ans, mesure 4m,67, est

élancé, intelligent; sa soeur est âgée de treize ans, mesure ,je,40,

pèse 39k00; traits réguliers , elle est assez intelligente.

1882. 24 janvier. - A fait un peu de progrès en classe et en

gymnastique. Lecture courante, mais peu intelligente, calcul et

mémoire, néant. Poids : 3UwO0. Taille : lm,21.

9 mvl.- Lecture courante, mais peu expressive; calcul, ne con-

naît que l'addition et la soustraction; mémoire presque nulle, ne

peut apprendre ni histoire, ni géographie ; a quelques notions très

usuelles; en résumé, progrès peu appréciables; il prend assez de

plaisir à l'escrime, mais ne peut pas apprendre a danser. Il va à

l'école une heure, matin et soir; le reste du temps, il est occupé

au réfectoire à balayer et à laver la vaisselle.

Juin. - Poids : 3k800. Taille : 1m.22.

7 juillet. - Sorti en permission le 4, on lui a surpris, le 6, un

flacon d'eau-de-vie que ses parents lui avaient donné.

` ? 5 juillet.- Les deux testicules sont dans le scrotum. Le gauche

rentre facilement dans le canal inguinal; le droit ne peut pas

rentrer par suite d'une hernie qui descend dans les bourses et est

assez difficilement réductible. Les deux testicules sont 'gros

comme des billes. Pas de poils au pubis.

7 décembre.- Le teint a une coloration jaune cireux de plus en

plus prononcée; les paupières sont toujours légèrement bouffies.

Gr.. a delà répugnance au mouvement, surtout à la marche, ainsi

il n'aime pas les promenades, sauf celles où la voiture suit, ce

qui semble indiquer une fatigue rapide.

1883. Janvier. - Poids : 33k100. Taille : 4m,3.

30 juin. - Poids : 33k 300. Taille : lm,23 fort.

1884. 16 janvier. - Entré à l'infirmerie pour des douleurs du

côté de sa hernie (inguinale droite) et des douleurs aussi du côté

opposé. La hernie paraît réductible. Bain d'une heure. Soir : T.

R.37»,7.

17 janvier. Les douleurs ont disparu. T. R. 37°,5. - G... se

plaint de tousser un peu; voix enrouée; rien à l'auscultation.

30 janvier. - Poids : 31 kilog. Taille : ,lu.23.

Juillet. Poids : 34k5OO; Taille : i m24.

4885. Janvier. Poids : 38SO; Taille : 1m,24.

Juin. Poids : 36k" ? 00; - Taille : 1m2o.

16 décembre. Il est procédé à un nouvel examen du malade.

La peau du cuir chevelu est sèche, couverte d'écailles brunâtres,

principalement depuis le vertex jusqu'au voisinage du front qui

est ridé. Entre le tiers moyen du crâne, dans toute cette par-

tie, les cheveux, un peu roux, sont plus clair-semés. Les sour-

cils sont noirs, larges, assez bien fournis; les cils sont longs,

IDIOTIE AVEC CACHEXIE P1CH1'DEH1111QUIr. ' I

assez abondants par place; paupières supérieures très bouffies

diminuant considérablement l'ouverture des yeux, sans trace

d'oedème, mais rappelant les gonflements des paupières des

albuminuriques. Patte d'oie très prononcée. - La peau de la

face est sèche, squameuse, rugueuse au toucher d'une pâleur ci-

reuse avec de nombreuses macules. - Amygdales petites; mu-

queuse buccale pâle; langue un peu épaissie. Gr... dit qu'il ne

peut sortir la langue. La parole est très pâteuse, lente, monotone.

De chaque côté du cou, qui est très court, dans le creux sous-

claviculaire, existent des masses adipeuses, comme gélatini-

formes, tremblante ? , au toucher. La glande thyroïde, si elle existe,

serait très peu développée. Les aisselles sont complètement

glabres; à leur partie antérieure on trouve des masses adipeuses

tremblotantes se prolongeant jusqu'au sein que l'on croirait tout

d'abord très développé, mais on ne sent pas la glande.

Organes génitaux. Bourses pendantes, de niveau; testicules de

la dimension d'un petit oeuf de pigeon. Le testicule droit parait

un peu plus gros que le gauche, mais de ce côté il existe une

hernie assez volumineuse qui, lorsqu'elle n'est pas réduite, fait

descendre la bourse plus bas. Pénil glabre, mais au-dessus

quelques poils et de chaque côté une touffe. - Verge. Prépuce

long, verge déviée à gauche (hernie); circonférence, 90 millim.,

longueur, 90 millim. environ, car elle est assez difficile à appré-

cier à cause du tire-bouchon formé par le prépuce et du phimosis

qu'on ne peut pas réduire. -Quelques poils à la partie inférieure

de l'anus.

Sensibilité très vive au froid ; même à l'atelier il se couvre beau-

coup et vient se placer le plus près possible du poële.

Langueur corporelle; il fait tout avec lenteur. Il range avec

ordre toutes ses affaires; s'habille seul, assez bien, mais très len-

tement. La démarche est lourde ; parfois il court, mais très lour-

dement ; depuis quelque temps il a pris la manie de s'aider d'un

bâton pour marcher. Pas de céphalalgie; mémoire très médiocre;

il ne peut rien apprendre par coeur; sa mémoire est conservée

pour les faits et les choses usuelles. Entré à l'atelier de tailleur

en 1883, il y a fait des progrès, mais lents; actuellement il fait

bien les coutures et sait se servir du fer.

20 déc. L'urine contient 25 gr. 63 d'urée par litre. 1

22. Gr... est souffrant depuis ce matin; vers neuf heures et

demie, frisson assez violent; en arrivant à l'infirmerie vomisse-

ment de glaires, de'lait coagulé, etc., il n'a pas mangé ce matin

et se plaint d'une douleur siégeant au niveau de la fosse iliaque

droite. Partout ailleurs le ventre est médiocrement douloureux; il

152 " CLINIQUE NERVEUSE.

existe un tympanisme léger. - Langue légèrement saburrale;

deux garde-robes ce matin. La hernie se réduit avec une grande

facilité; pas de céphalalgie, ni d'épistaxis. - Teint bouffi et jau-

nâtre, coloration normale des conjonctives. Traitement : deux

verres d'eau de Sedlitz.

29. - L'urine examinée de nouveau contient 16 gr. 65 d'urée

par litre.

4886. f février. Angine très légère.

Juin. - Poids : 37 kil.; taille : 1 m. 26.

9 août. T. R., 37°,4. Soir : 37°,6.

10. - T. R. 37°,6. -Soir : 37°, 4.

11. - T. R. 37^,4. - Soir : 37 ? 4.

12. T. R. 37°,4. - soit- 37°.8.

13. T. R. 37°,8. - Soir : 37°, 8.

14. T. R. 37°,rz. Son- : 37°,4.

4â. - T. R. 37°,6. - Soir : 37°,6.

16. - T. R. 37°,4.

23 août. Un nouvel examen du malade montre peu de chan-

gements dans son état. Les paupières gauches sont plus bouffies

qu'à droite, aussi l'oeil droit est-il plus ouvert. A la lèvre supérieure,

aux extrémités, il existe un léger duvet : aux joues, rien. Les ais-

selles et le pénil sont glabres; à la racine des bourses se trouvent

quelques poils longs disséminés sur une hauteur d'un centimètre

et demi. Les bourses sont très pendantes. un peu plus à gauche

bien qu'il y ait une hernie signalée à droite. Le méat est normal.

Les organes génitaux ne présentent aucune autre particularité

qui n'ait déjà été signalée. Le pouls, un peu mou, est à 80; la

respiration à 24.

La sensibilité générale parait nor male sous toutes ses formes.-

L'ouïe parait plus développée à droite; l'odorat est un peu obtus;

le goût est normal, et Gr... distingue les couleurs également des

deux côtés.

Gr... s'occupe dans le service, nettoie les boutons des portes,

les cuivres des bains. Il travaille, en outre, toujours à l'atelier

du tailleur; il sait faire n'importe quelle couture, mais non les

rabattements, il sait repasser les boutonnières. Dans une séance

de quatre heures il peut faire un mètre cinquante de couture, ce

qui vaut à peu près quinze centimes; parfois il boude le maître

tailleur parce qu'il n'est pas assez payé; on lui donne dix centimes

de récompenses chaque samedi pour son travail à l'atelier. Il

est du reste avare, ne dépense rien et, avec les quelques sous

qu'on lui donne, il a accumulé 9 fr. 55, plus tard il s'achètera des

vêtements pour sortir; en attendant sa grande préoccupation est

de passer aux hommes.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE l'ACHYDERMIQUE. 153

A l'école Gr... a fait quelques progrès ; il écrit mieux ; sa lec-

ture est à peu près courante; il sait additionner, mais connaît

peu la soustraction ; sa tenue est bonne, et il est propre. Son ca-

ractère est toujours un peu irascible, grognon, ronchonneur,

parfois grossier dans son langage.

24. - Poids : 37 I : il. fort; taille : 1 m. 27 fort. L'urine est

claire, ne contient ni sucre, ni albumine. La température prise

sur chaque cuisse avec un thermomètre de surface est de 3 ? t,

à droite comme à gauche.

Le cas de Gr... est un exemple de myxoedème a

forme légère se rapprochant sous beaucoup de rap-

ports, comme nous le verrons plus loin, des formes

observées à la suite de l'extirpation totale de la glande

thyroïde. Nous appellerons dès maintenant l'attention

sur l'absence probable de laqlandelliyroïde, sur les boules

graisseuses cervicales et sur le développement tardif

et encore imparfait de la puberté; il semble toutefois que

uotre malade continue encore à se développer, quoique

lentement, ainsi que le montrent les mensurations se-

mestrielles de la taille : l ? 20en 1880; 1 DI ,22 en 1882;

fD',23 en 1884; 1mu5 en 1885; 1 ? 7 en août 1886.

L'état intellectuel de Gr... s'est aussi amélioré; la

mémoire paraît meilleure, il semble un peu plus vif,

surtout en été, et il a fait des progrès tant à l'école

qu'à l'atelier. ,

L'observation de Th..., que nous publierons dans

le prochain numéro, est au contraire un cas de myxoe-

dème type, où aucun symptôme ne fait défaut.

(A suivre.)

Archives, t. XII. 1 1

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE DANS LES PARALYSIES

HYSTÉRIQUES'; (suite et fin). ,

Par le Dr BABLNSKI,

Chef de clinique des maladies nerveuses à lu Sdtpctriere.

Observation III (résumée). R..., botaniste, est atteint, ci

l'âge de quarante et un ans. d'une hémiplégie gauche avec

hémianesthèsie gauche sensitivo-sens01'ielle qui s'atténue très

notablement un an après son début, à la suite d'une vive émo-

tion ; pendant ce temps, il est sujet à des attaques convulsives.

A quarante-trois ans, il est pris brusquement dans la rue

d'une attaque convulsive qui est suivie d'laémorrlaagies mul-

tiples et d'une hémiplégie gauche avec intégrité de la face;

celle hémiplégie subit plusieurs alternatives d'amélioration et

d'aggravation et voici sous quel aspect elle se présente plus de

trois ans après son début : le membre inférieur est complète-

ment paralysé; le membre supérieur est très affaibli; les

muscles du côté gauche, particulièrement ceux du membre

inférieur, sont atrophiés ; au point de vue électrique, il s'agit

d'une atrophie simple; les réflexes tendineux sont plus faibles

à gauche qu'à droite; en même temps, il a une hémines-

thésie sensitivo-sensorielle ; des plaques d'hyperesthésie, de

l'anesthésie du pharynx. Depuis le début de sa deuxième

hémiplégie, le malade a eu, à plusieurs reprises, des attaques

hystériques.

R... (Albert), botaniste, âgé de quarante-cinq ans, entre le

17 février 1886 dans le service de M. Charcot, à la Salpêtrière.

Antécédents héréditaires . Rien de spécial à signaler.

Antécédents personnels. Rougeole dans l'enfance. Pas de

syphilis. Pas d'alcoolisme. Le malade depuis 1871 a mené une

vie assez agitée. A partir de cette époque jusqu'en 1879, il a

voyagé en Australie, chargé par des sociétés savantes de réunir

des collections de botanique. En 1879, au mois de septembre,

il se laisse entraîner dans la fameuse expédition du marquis

de Rays, et part pour la colonie fictive de Port-Breton.

1 Voir tome XII, page 1.

DE l'atrophie musculaire. 155

Le récit que le malade fait de l'histoire de sa vie, à dater de

cemoment, etqui rappelleles aventuresdu capitaine Pamphile,

est en partie en contradiction avec des renseignements bien

positifs que nous possédons. Nous les passerons donc sous

silence, et nous n'indiquerons que les faits dont la réalité

parait solidement établie. Notons toutefois que le malade pré-

tend avoir reçu en Nouvelle- Guinée, dans un combat avec les

nègres, un coup de massue sur le côté gauche de la tète; il

aurait perdu connaissance et se serait réveillé paralysé de la

sensibilité et du mouvement dans tout le côté droit ; cette

paralysie aurait duré près d'un an et aurait disparu il. la suite

d'une trépanation faite à Saint-Thomas, Ilospital. Il nous a été

impossible de vérifier ce récit ; aussi ne le donnons-nous qu'en

faisant des réserves.

Ce qui semble en tout cas bien certain c'est que le voyage

de R... a été pour lui l'occasion de souffrances sans nombre et

de toutes sortes.- Arrivons tout de suite au mois de juillet

1881, époque à laquelle le malade, de retour en Europe, est

entré dans le service du Dr Wilks, à Londres.

L'observation de R... est, en effet, relatée dans les leçons

publiées par ce médecin', et voici les particularités les plus

intéressantes qu'on y trouve : le malade se plaignait d'une

douleur de tète du côté gauche; il était hémiplégique du mou-

vement et de la sensibilité du côté gauche, l'hémianesthésie

était sensitivo-sensorielle, les réflexes étaient abolis à gauche,

il y avait une hyperesthésie tout le long de la colonne verté-

brale, le malade était sujet à des crises pendant lesquelles les

membres se raidissaient et à la suite desquelles les membres

supérieurs et inférieurs gauches restaient contracturés pendant

quelques jours; il la suite d'une vive émotion, l'hémiplégie

s'est très atténuée. Le malade était morphiomane. Il a

quitté le service de M. Wilks imparfaitement guéri. Arri-

vons maintenant au mois de février 1883. Le 8 de ce mois, le

malade fut pris, dans la rue, d'une attaque convulsive très

violente à la suite de laquelle il vomit une grande quantité de

sang noir; on l'apporta à la Charité dans le service de M. Fé-

réol où il resta plusieurs mois, et son observation fut publiée

par l'interne du service, M. Leprévost 2. Voici ce qu'il y a de

1 Lectures on the Neruous ? 6'<c))t diseases ; par Eastes Wilks.

2 France médicale, )),année 1884.

156 CLINIQUE NERVEUSE.

plus essentiel à noter dans cette observation : à son entrée à

l'hôpital, le malade avait des hématémèses, des épistaxis et des

hématuries qui durèrent plusieurs jours; le côté gauche du

corps, sauf la face, était complètement paralysé, la parole était

embarrassée. Au bout de quelques semaines, son état s'amé-

liora notablement; mais, le 31 mars, survint une nouvelle

crise caractérisée, comme la précédente, par des hémorragies, et

l'hémiplégie, qui était en voie de guérison, reparut aussi com-

plète que le premier jour; au bout d'un certain temps, l'état

s'améliora de nouveau; la paralysie du membre supérieur

finit par disparaître; le membre inférieur gauche resta seul

paralysé , et M. Féréol fit construire pour lui, un pilon

avec lequel la marche devint possible; le 10 août, nouvelle

crise caractérisée par des hématémèses et une très vive cépha-

lalgie ; le 25 août, survient une crise caractérisée par un spasme

laryngé, qui amène presque l'asphyxie.

Le 8 septembre, le malade quitte la Charité.

Après sa sortie de la Charité, le malade alla dans un hôpi-

tal protestant à Neuilly où M. Monod le vit et d'où il l'amena

dans son service à Ivry vers la fin de 1883. M. Berbez, interne

à Ivry à ce moment, prit son observation, et voici quel était.

alors l'étatdeR... : le membre supérieur gauche est absolument

flasque; aucun mouvement n'est possible de ce côté; il en est

de même du membre inférieur gauche, et lorsque le malade

progresse au moyen de béquilles, il traîne après lui ce membre

comme un corps inerte qui balaye le sol; il se sert d'habitude

du pilon que M. Féréol a fait construire pour lui; le membre

inférieur droit parait un peu affaibli, le membre supérieur droit

se meut normalement; - rien au point de vue de la motilité du

côté de la face ; le pharynx et le voile du palais paraissent d'ha-

bitude très bien fonctionner, mais parfois les liquides revien-

nent par le nez. Il y a une hémianesthésie gauche absolue

qui comprend aussi la moitié gauche de la cavité buccale

et du pharynx. Les réllexes tendineux sont plus faibles à

gauche qu'à droite. La vision est plus faible à gauche, et de

ce côté l'odorat et le goût sont nuls. Il y a une hyperalgésie

tout le long des apophyses épineuses et une douleur très vive

dans la région pariétale gauche. Pendant son séjour à Ivry,

le malade eut plusieurs attaques se présentant à peu près sous

le même aspect et se développant dans les mêmes conditions :

DE l'atrophie musculaire. 157

le malade est adonné à la morphine ; toutes les fois que pour

une raison ou pour une autre on ne lui fait pas une de ses

injections habituelles, il est pris de douleurs vives dans la tête

et dans le rachis, ses membres se raidissent, se contracturent, t,

puis le côté droit est agité de secousses rapides, de mouvements

cloniques ; enfin le'malade revient à son état normal; mais peu

de temps après, la même série de phénomènes se reproduit et

il en est ainsi plusieurs fois de suite ; à la fin de l'attaque sur-

viennent des hématémèses et des hématuries qui persistent

plusieurs jours après l'attaque; le malade reste aussi contrac-

ture de ses membres pendant plusieurs jours et parfois sa

langue est contracturée et paraît tordue sur elle-même, de

telle sorte que la face inférieure est tournée en haut. Le malade

reste plusieurs mois à Ivry, puis quitte cet hospice et va en

Algérie, dit-il, et de là revient de nouveau en France; son

hémiplégie n'aurait jamais complètement disparu depuis cette

époque. Vers la fin de 1885, le malade entre de nou-

veau à la Charité dans le service de 11. Féréol où M. Berbez

interne du service l'examine de nouveau; et enfin dans le mois

de février 1886, le malade est envoyé de la Charité à la Sal-

pêtrière. Son état ne s'est pas modifié depuis sa dernière entrée

à la Charité et il est constitué comme il suit :

Etat actuel 18 février 1886. - Le malade, de taille moyenne,

parait très affaibli et présente un aspect qui dénote la fatigue

et la dépression ; il semble avoir toute sa lucidité d'esprit et

répond très bien aux questions qu'on lui pose; nous avons

pourtant fait remarquer déjà que certains renseignements

qu'il donne sont en contradiction flagrante avec les renseigne-

ments provenant d'autres sources et dont la réalité nous a

paru certaine; c'est pour ce motif que dans les antécédents

nous avons passé sous silence presque tout ce qui n'était pas

susceptible de vérification. Il existe une hémiplégie gauche,

flasque, incomplète. La face est absolument normale en ce qui

concerne la motilité. La motilité du membre supérieur est

très affaiblie; le malade peut faire exécuter à son épaule, son

coude, son poignet et ses doigts quelques mouvements, mais

ceux-ci sont très limités. Le membre inférieur est complète-

ment paralysé dans tous ses segments; pour marcher, le ma-

lade est obligé de se servir de l'appareil que lui a fait faire

M. Féréol et qui consiste en un pilon sur lequel repose le

genou du malade et qui est fixé au pourtour de son corps par

158 CLINIQUE NERVEUSE.

un cerceau d'acier; lorsque le malade marche, il avance le

membre inférieur droit en prenant un point d'appui sur le sol

au moyen de son pilon, et il avance le membre inférieur

gauche en inclinant son tronc à droite et en avant et en proje-

tant ainsi son membre sous l'influence de la pesanteur ; lorsque

le malade ôte son pilon et qu'il cherche à marcher avec des

béquille ? , pour avancer son membre inférieur gauche, il

incline son tronc en avant, et il entraine ainsi son membre, le

pied étant tourné en dehors et balayant le sol. Le membre

inférieur gauche est notablement plus grêle que le droit;

les masses musculaires sont manifestement atrophiées à

gauche et l'amyotrophie porte sur la fesse, la cuisse et la

jambe. Voici les chiffres qu'on obtient en faisant des mensura-

tions : .

DE l'atrophie musculaire. 15j

160 CLINIQUE NERVEUSE.

de l'atrophie musculaire. 161 t

ses modes (tact, douleur, température, sens musculaire). Dans

la région occipitale gauche existe une zone extrêmement dou-

loureuse qui est le siège des douleurs les plus vives lorsque le

malade omet de faire une de ses piqûres de morphine habi-

tuelles ; le long du rachis à gauche existe une hande d'hype-

resthésie. (Voir fig. 9 et 10.)

Le testicule droit est un peu douloureux à la pression. Dans

le flanc droit existe un point très douloureux.

Yeux. Le malade ne distingue pas les objets de l'oeil gau-

che ; il voit seulement s'il est dans l'obscurité ou à la lumière;

mais il voit mieux avec les deux yeux qu'avec l'oeil droit seul.

A droite il y a un rétrécissement du champ visuel très pro-

noncé, et de la diplopie monoculaire.

Ouïe. A gauche le malade n'entend le tic-tac de la mon-

tre que lorsqu'on l'applique sur l'oreille; à droite, il entend

bien.

Odorat. Le malade ne sent pas de la narine gauche.

Goût. Il est aboli à gauche. - Anesthésie du pharynx

Le malade est toujours adonné à la morphine, mais il a di-

minué sa ration quotidienne.

1° juillet. Depuis le mois de février le malade a eu à

plusieurs reprises des attaques semblables à celles qu'il avait

eues autrefois. Plusieurs tentatives à l'aide du massage et de

l'aimant ont été faites pour chercher à modifier l'état du ma-

lade, mais jusqu'à présent aucun résultat n'a été obtenu; il

faut noter seulement qu'après une application de l'aimant du

côté du bras gauche pendant douze heures ; on a obtenu un

transfert incomplet de la sensibilité. La paralysie est tou-

jcurs dans le même état; l'amyotrophie est restée station-

naire.

Il nous semble qu'il est possible de démontrer, à

l'aide d'arguments analogues à ceux dont nous nous

sommes servis dans les observations précédentes, que

la malade dont il est ici question est atteint d'une

paralysie hystérique avec amyotrophie.

162 CLINIQUE NERVEUSE.

Nous commencerons par établir que cet homme est

un hystérique et pour cela, il nous suffira d'énumérer

les divers stigmates qu'il présente : l'hémianesthésie

sensitivo-sensorielle, subissant un transfert incomplet,

il est vrai, sous l'influence de l'aimant, le rétrécisse-

ment du champ visuel, les plaques d'hyperesthésie,

l'anesthésie du pharynx, les attaques convulsives. En

ce qui concerne ces dernières, les caractères qu'elles

offrent permettent d'affirmer qu'elles sont de nature hys-

térique ; elles présentent pourtant quelques particula-

rités assez rares, que nous croyons intéressant de re-

lever : les hémorragies, hématémèses, hématuries et

épistaxis constituent, en effet, des épisodes très remar-

quables de ces attaques; d'autre part, nous ferons re-

marquer que l'apparition de celles-ci est généralement

liée à la suppression d'une des piqûres de morphine

que le malade a l'habitude de faire depuis plusieurs

années. Nous n'insisterons pas du reste sur ces divers

points n'intéressant qu'indirectement le sujet dont

nous nous occupons. Nous devons maintenant prouver

que la paralysie de ce malade est bien de nature hys-

térique et n'est pas imputable à une autre affection.

Supposons en effet qu'il s'agisse là d'une paralysie

due à une lésion organique, à une lésion de l'encé-

phale par exemple , et c'est évidemment eu égard au

mode de début de l'hémiplégie, à la perte de connais-

sance qui l'a précédée, c'est, disons-nous, à une lésion

siégeant dans cet organe qu'il faudrait songer. Eh

bien ! pourrait-on comprendre avec cette hypothèse les

caractères de cette hémiplégie et son évolution ? `1

Comment s'expliquer ces alternatives d'amélioration

et d'aggravation, l'intégrité de la face, la prédomi-

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 163

nance de la paralysie dans le membre inférieur, et la

diminution des réflexes tendineux du côté paralysé

dans une hémiplégie qui remonte à plus de trois ans ?

II nous semble qu'il est même inutile de discuter la

possibilité d'une affection organique de la moelle ou

des nerfs. Il suffit, en effet, de lire attentivement

l'observation pour rejeter d'une façon absolue de

pareilles hypothèses. Il s'agit donc là d'une affection

purement dynamique, et le malade étant un hystéri-

que, il est logique de mettre cette paralysie sur le

compte de l'hystérie; du reste, cette hémiplégie s'est

développée à la suite d'une attaque hystérique. Nous

ferons encore remarquer que l'aspect de la paralysie

du membre inférieur présente exactement les carac-

tères que Todd a assignés aux paralysies crurales, de

nature hystérique. Voici, en effet, comment Todd

s'exprime en comparant l'attitude que présente dans

la marche un sujet atteint d'hémiplégie organique et

celle qu'offre un malade atteint d'hémiplégie hystéri-

que'.

« Si l'on examine, pendant la marche, une per-

sonne atteinte d'hémiplégie en conséquence d'une

lésion organique du cerveau,'on voit que, pour porter

le membre inférieur paralysé en avant, cette personne

incline le tronc du côté opposé à la paralysie, faisant

reposer tout son poids sur le côté sain; et alors, par

un mouvement de circumduction, projette en avant la

jambe paralysée, de telle sorte que le pied décrit un

arc de cercle. L'hystérique ne marche pas de cette

façon, elle traîne lourdement (she drags) le membre

' Todd. Lect. on diseases of Nel'V01tS System. (Lcct. 1, p. 20.)

161 CLINIQUE NERVEUSE.

paralysé après elle, comme s'il s'agissait d'un corps

inerte.

« Il n'y a pas d'acte de circumduction, aucun effort

quelconque pour détacher le pied du sol. Ce dernier

en réalité sioceps) balaye le sol dans l'acception

rigoureuse du mot. »

Quant à l'amyotrophie, il nous semble qu'il est

impossible de contester qu'elle dépend étroitement de

l'hystérie; elle est, en effet, limitée au côté paralysé,

elle prédomine de beaucoup dans le membre inférieur,

dans lequel la paralysie est le plus marquée , et les

caractères de cette atrophie musculaire sont exacte-

ment semblables à ceux que nous avons relevés dans

les observations précédentes.

OBSERVATION IV (résumée). Boin..., palefrenier, est sujet de-

puis l'enfance à des maux de tête. A l'âge de vingt ans, après

avoir dormi une nuit en hiver dans une carrière, il se réveille

avec une hémiplégie gauche, la face étant indemne. La para-

lysie du membre inférieur disparaît rapidement. Il persiste

seulement une monoplégie brachiale qui flasque d'abord, s'ac-

compagne ensuite de contracture. Il y a en même temps de

l'hémianesthésie gauche sensitivo-sensorielle. Tout ces phéno-

mènes disparaissent petit à petit et le malade revient à la santé

au bout de quatre mois et demi. Environ six mois après, à la

suite d'une chute de cheval, se développe une nouvelle para-

lysie gauche, analogue à la précédente; le membre inférieur

est très peu atteint, la face est indemne; le membre supérieur

gauche est complètement paralysé ; en même temps on cons-

tate une hémianesthésie gauche sensitivo-sensorielle. La pa-

ralysie flasque au début se transforme bientôt en paralysie

avec contracture et les muscles du côté malade s'atrophient .

Puis la contracture disparaît; les mouvements reparaissent

progressivement et l'atrophie s'atténue en même temps.

Boin... (Victor), âgé de vingt et un ans, palefrenier, entre le

le 25 janvier 1884 dans le service de M. Bucquoy, à Cochin.

DE l'atrophie musculaire. 163

Antécédents héréditaires. - D'après ce que dit le malade, sa

mère aurait eu des attaques de nerfs, mais il est impossible de

déterminer s'il s'agit d'hystérie ou d'épilepsie.

Antécédents personnels. A seize ans, fièvre typhoïde qui

n'a pas été suivie de complications. Depuis l'enfance le ma-

lade a de fréquents maux de tête.

Au mois de février 1883, le malade ayant passé la nuit dans

une carrière, la température étant très froide, s'est réveillé le

matin, paralysé du côté gauche, ayant des fourmillement sdans

tout ce côté.

Pendant une demi-heure environ il lui a été impossible de se

lever. Au bout de ce temps, la faiblesse du membre inférieur

s'était très atténuée si bien qu'il pût se lever et retourner chez

lui. A ce momentvoici dans quel état il se trouvait : le membre

supérieur était complètement paralysé; il lui était imposible

de faire le moindre mouvement. Le membre inférieur était

simplement affaibli. 11 n'y avait rien à la face; pas de dévia-

tion de la commissure; le malade se rappelle seulement qu'il

lui était difficile de fermer l'oeil gauche. La sensibilité était

complètement abolie au membre supérieur; au membre infé-

rieur et à la face elle était simplement affaiblie. Le malade

a remarqué aussi que le goût était absolument aboli de côté

gauche et la vue affaiblie de ce côté. Quant aux autres sens il

ne peut donner de renseignements. Il n'y avait pas de troubles

psychiques. Huit jours après le début de cette paralysie le ma-

lade est entré dans le service de M. Moizard, à Cochin. Son

état du reste ne s'était pas modifié depuis le début et il per-

sista tel quel encore quinze jours environ. A ce moment. le

malade remarqua que le membre supérieur gauche devenait

raide, les doigts commencèrent à se fléchir, la main se fléchit

sur l'avant-bras et il devint impossible au malade de modifier

cette attitude; la raideur alla en augmentant, les doigts se flé-

chirent de plus en plus, si bien que les ongles finirent par pé-

nétrer dans la paume de la main et provoquèrent des excoria-

tions assez accentuées. L'état du malade ne se modifia plus

pendant une durée de deux mois.

Trois mois après le début de la paralysie, commença une

nouvelle phase, la contracture diminua d'intensité; puis les

mouvements spontanés qui jusqu'alors avaient été abolis au

membre supérieur, reparurent; la sensibilité reparut de son

166 clinique NERVEUSE.

côté, tant la sensibilité générale que la sensibilité spéciale, et

un mois et demi après le début de cette amélioration, le malade

était complètement guéri. La paralysie avait duré en tout

quatre mois et demi.

Le 2 janvier 1884, le malade après s'être enivré, était monté

à cheval et il tomba à terre; il affirme que la chute tenait à ce

que, étant ivre, il n'était pas fixé solidement sur son cheval,

mais qu'il ne s'était pas senti du tout étourdi avant de tomber,

qu'il n'avait éprouvé étant à cheval aucune sensation de ver-

lige, et qu'il n'avait pas perdu connaissance, car il se rappelle

très bien tout ce qui s'est passé jusqu'au moment où il fut

étendu sur le sol.

Une fois à terre, le malade perdit connaissance et resta dans

cet état pendant quatorze heures environ. Quand il revint à

lui, il lui fut possible de se lever, de- marcher, mais pourtant

le membre inférieur gauche était, dit-il, manifestement plus

faible que le droit. La face ne présentait rien de particulier,

elle n'était pas déviée, mais la vue lui paraissait plus trouble

à gauche qu'à droite. Le membre supérieur était complète-

tement paralysé : les mouvements des doigts, de la main, de

l'avant-bras et du bras étaient tout à fait abolis. Il resta dans

cet état jusqu'au moment de son entrée à l'hôpital.

Etal actuel (· ? 3 janvier 1886). Le malade parait jouir

d'une santé parfaite, il a toute sa lucidité d'esprit, et il semble

doué d'une excellente mémoire et d'une intelligence assez

vive.

Le membre supérieur gauche est complètement paralysé

comme le jour de l'accident, et cette paralysie est flasque. Le

membre inférieur gauche est un peu affaibli. La face est abso-

lument normale au point de vue de la motilité. La sensibilité,

au tact, à la température, à la douleur, et le sens musculaire

sont absolument abolis au membre supérieur gauche. Au

membre inférieur gauche, la sensibilité est affaiblie. A la

face il y a hémi anesthésie gauche complète. Abolition du goût

et de l'odorat à gauche. Légère diminution de l'ouïe et do la

vue à gauche. La contractilité faradique, est conservée du

côté paralysé. - Les réflexes tendineux sont conservés.

5 février. Le membre supérieur gauche, qui était flasque

au début, devient raide. Les doigts se fléchissent sur la main,

la main sur l'avant-bras et l'avant-bras sur le bras, ,

DE l'atrophie musculaire. 167

10. - La raideur s'est accentuée; le membre est contrac-

turé, les ongles des doigts s'enfoncent dans la paume de la

main, et pour empêcher l'ulcération de la peau, on interpose

entre les doigts et la paume de la main une pelote de ouate.

15. - On s'aperçoit que le membre supérieur gauche est

beaucoup plus grêle que le droit. Entre la plus grande cir-

conférence du bras droit et celle du bras gauche il y a 3 cen-

timètres de différence; à la partie supérieure de l'avant-

bras, il y a entre les deux côtés une différence de 3 centi-

mètres, comme au bras. La contractilité faradique persiste,

mais elle est un peu diminuée à gauche.

Le malade se plaint de fortes douleurs dans la nuque et le

bras gauche.

tel mars. Les douleurs ont disparu.

15. - On remarque que l'état du membre supérieur se mo-

difie, la contracture est moins accentuée.

30. - La contracture qui avait été en s'atténuant sans cesse

depuis le 15 mars, a complètement disparu, la paralysie est

redevenue flasque.

3 av2,il.- Depuis deux jours est survenue une modification

importante dans l'état du membre supérieur; quelques mouve-

ments des doigts très limités, il est vrai, sont possibles.

lorsqu'on exerce une traction sur les doigts, on provoque une

légère douleur ; quant aux mouvements de la main sur

l'avant-bras, de l'avant-bras sur le bras et du bras sur l'épaule,

ils sont toujours absolument impossibles.

On examine aussi ce jour-là le membre inférieur gauche, il

ne présente plus rien d'anormal, il est aussi fort que celui du

côté opposé.

La sensibilité du membre supérieur sauf aux doigts est tou-

jours complètement abolie ; il en est de même à la face, au

membre inférieur elle est simplement émoussée.

Les sens spéciaux sont toujours dans le même état.

9. Le malade commence à mouvoir l'avant-bras sur le

bras.

0. Le malade commence à mouvoir un peu le bras sur

l'épaule.

5 mai. Le malade demande à sortir, et voici dans quel.

état il se trouve : . le membre supérieur gauche n'est plus para-

168 CLINIQUE NERVEUSE.

lysé; les mouvements des divers segments sont possibles, mais

ils sont moins étendus que ceux du côté opposé. L'atrophie

est moins accentuée qu'autrefois; entre les circonférences des

bras et des avant-bras droits et gauches il n'y a plus que 2 au

lieu de 3 centimètres de différence.

La sensibilité de la face du côté gauche est revenue en par-

tie. Pour le reste, pas de modifications.

Depuis sa sortie, le malade n'a pas été revu.

Le malade avait été examiné à une époque où l'hys-

térie chez l'homme n'était VIS encore connue, et le

diagnostic exact n'avait pas été porté à ce moment;

c'est ce qui explique aussi pourquoi il n'est pas fait

mention, dans le cours de l'observation, de certains

stigmates hystériques, de certains phénomènes qui

n'ont pas été recherchés chez ce malade, et qui peut-

être existaient chez lui ; tels que rétrécissement du

champ visuel , polyopie monoculaire, etc. Nous

publions pourtant cette observation, car ce qui y est

consigné nous paraît absolument suffisant pour établir

rigoureusement qu'il s'est agi chez lui d'une paralysie

hystérique, avec amyotrophie. Il nous semble même

que, pour le démontrer, il n'est pas nécessaire de faire

une longue argumentation. Si l'on suit avec tant soit

peu d'attention les diverses phases de la maladie, on

est amené fatalement à rejeter l'hypothèse d'affection

organique. Supposons pourtant un instant qu'il en

soit ainsi et que les diverses manifestations motrices

et sensitives aient été sous la dépendance d'une lésion

organique de l'encéphale ; dans cette hypothèse, on

considérerait la contracture développée dans le mem-

bre supérieur comme due à une dégénération secon-

daire. Mais alors, où localiser la lésion ? Il faudrait

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 169

évidemment la placer flans l'hémisphère droit, puis-

que la paralysie est à gauche ? L'hémianesthésie sensi-

tivo-sensorielle serait en rapport avec l'idée d'une

lésion de la partie postérieure de la capsule interne ;

et l'on admettrait que cette lésion empiète sur la par-

tie antérieure de la capsule interne pour produire les

troubles moteurs. Mais une pareille hypothèse nous

semble difficile à soutenir ; car, la localisation pres-

que absolue de la paralysie au membre supérieur

n'est guère conciliable avec les données anatomo-

pathologiques que nous possédons . Il serait encore

plus vraisemblable de supposer la présence de deux

foyers, l'un dans la partie postérieure de la capsule

interne, en rapport avec l'hémianesthésie, l'autre dans

les circonvolutions, en rapport avec la paralysie. Mais

avec cette hypothèse comment pourrait-on comprendre

la disparition de la contracture et le retour des mouve-

ments ? Une semblable évolution des accidents est

inadmissible; cette supposition est en contradiction

absolue avec les connaissances précises que nous

possédons sur la dégénération descendante.

On est donc dans la nécessité même, après une

courte analyse des faits, de rejeter l'hypothèse de

lésion* organique et de mettre la paralysie sur le

compte d'une affection dynamique des centres nerveux.

Quant à l'hémianesthésie, il nous paraît tout naturel

de la rattacher à la même cause que la paralysie ; du

reste, l'hémianesthésie sensitivo-sensorielle, d'origine

organique est tout à fait exceptionnelle, tandis qu'elle

est très fréquente, dans le domaine dynamique et

constitue un des stigmates les plus importants de l'hys-

térie, et presque suffisant à lui seul pour établir son exis-

ARCHIVES, t. XII. 12

170 CLINIQUE NERVEUSE.

tence. Dans le cas actuel cette bémianesthésie jointe

à la vive céphalalgie éprouvée par le malade, nous

permet, croyons : nous, d'établir que nous avons affaire

à un hystérique. Dès lors, il devient évident que la

paralysie doit être aussi mise sur le compte de l'hys-

térie. Ainsi donc, les caractères présentés par la

paralysie nous ont conduit à établir qu'elle relevait

d'une affection dynamique . Nous avons été ainsi

amenés à considérer de même l'hémianesthésie comme

dynamique . Nous avons montré ensuite que cette

hémianesthésie dépendait de l'hystérie , et enfin,

revenant sur nos pas, nous nous sommes fondé

sur ce que le malade est un hystérique, pour sou-

tenir que la paralysie devait être aussi de nature hys-

térique.

L'amyotrophie étant limitée au membre paralysé,

ayant débuté peu de temps après le commencement

de la paralysie et s'étant atténuée lorsque les mouve-

ments sont revenus, il est de toute évidence qu'elle se

rattache étroitement à la paralysie hystérique et qu'elle

ne peut relever d'une autre cause.

Observation V (résumée). - Dem..., garçon boucher, trente

ans; pas d'antécédents nerveux, soit héréditaires, soit per-

sonnels. A la suite d'un traumatisme sur le membre supérieur

gauche, ayant, selon toute vraisemblance, occasionné une

fracture de l'avant-bras, on applique au malade un appareil

plâtré qu'il garde quarante-cinq jours. Lorsqu'on lui enlève

l'appareil, on constate que le membre supérieur est contrac-

turé. Le malade est examiné à la Salpêtrière quatre mois

environ après l'accident; la contracture persiste toujours, les

mouvements du membre supérieur sont presque complètement

abolis. Il existe en même temps une hémianesthésie sensitivo-

sensorielle ; un rétrécissement du champ visuel. Le malade

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 171

est sujet à des attaques de dyspnée, de nature hystérique. Il

existe une amyotrophie dans le membre paralysé. A la suite

d'une séance de massage de dix minutes, la contracture

s'atténue très notablement, et les mouvements reviennent en

partie.

Dem..., garçon boucher, trente ans, entre, le 18 mai 1885,

dans le service de M. le professeur Charcot, à la Salpêtrière.

Antécédents héréditaires. Grands-parents morts âgés.

Père, mort à cinquante ans, d'une maladie aiguë. Mère,

morte à quarante-six ans; pas nerveuse. Un frère de la

mère a du sable dans les urines. Frère et sceur bien portants

ainsi que leurs enfants.

N'a jamais entendu dire qu'il y ait eu aucun cas de paralysie,

ni d'attaques d'aucune sorte, ni d'aliénation dans la famille.

Antécédents personnels. Lui-même n'a jamais été malade.

Il est né à Saint-Victor, près de Ribérac (Dordogne), et est

resté à la campagne jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans, gardait

les moutons, allait aux foires. A été au service militaire pen-

dant un an. Habite Paris depuis cinq ans; a travaillé chez

différents bouchers de la ville, ainsi qu'aux abattoirs chez les

bouchers.

Pas d'alcoolisme : chez lui, il ne buvait jamais; à Paris, il ne

buvait pas plus d'une chopine par jour. Boit habituellement

deux verres de sang le matin, depuis qu'il est à Paris. Pas

de syphilis. Il travaillait en dernier lieu aux Halles cen-

trales ; c'est là que lui est arrivé son accident.

Il y a quatre mois et demi (le malade ne peut dire au juste

la date), il était en train de décrocher un demi boeuf à l'étal

avec un camarade, lorsque le crochet cassa, et le malade fut

renversé, son bras gauche pris sous le boeuf. Il dit avoir entendu

craquer quelque chose dans son poignet; il n'a pas perdu

connaissance, seulement il était étourdi, ne savait plus au

juste où il était ; il est resté par terre cinq minutes, jusqu'à

ce que l'on eut enlevé le demi boeuf, dont le poids était

considérable (ce boeut avait été primé aux concours des ani-

maux gras).

Il était cependant assez mal pour qu'on le transportât chez

le pharmacien voisin, qui lui donna une potion cordiale, et

172 Z CLINIQUE NERVEUSE.

lui enveloppa le bras de compresses phéniquées. Le malade

n'a jamais éprouvé de douleurs dans son bras, ni au moment

où il était pris sous le boeuf, ni les jours suivants. Mais, voyant

que son bras enflait toujours, il se décida à entrer à l'hôpital,

quatre jours seulement après l'accident.

Non seulement le malade n'éprouvait pas de douleurs dans

le bras même, mais il ne le sentait pas, le bras était comme

mort, à partir de l'épaule. Il lui semblait avoir, dit-il, au lieu

de bras un poids de quarante livres à supporter. Aucun mou-

vement n'était possible, il n'y avait aucune raideur dans le

membre.

A Saint-Antoine, on lui a mis pendant quinze jours des

compresses, des cataplasmes; le poignet, la main, les doigts

étaient très enflés, légèrement fléchis ; il ne pouvait pas les

redresser lui-même, mais on pouvait les étendre passivement.

Quinze jours après son entrée, on l'aurait endormi au

chloroforme « pour lui recasser le poignet » dit-il, puis on

lui a mis un appareil plâtré qu'il a gardé quarante-cinq

jours. A cette époque, on l'a renvoyé de l'hôpital, faute

de place, et on lui a dit de revenir plus tard, pour se faire

enlever l'appareil plâtré. Il est sorti et est allé à la mairie pour

demander des secours. Là, le médecin de la mairie l'a vu, et,

comme le malade lui disait qu'il avait son appareil depuis

quarante-cinq jours, le médecin a jugé à propos de lui enlever

l'appareil. C'est alors que les doigts se sont fléchis, contractu-

rés dans la main, dans l'état où ils sont aujourd'hui.

Huit jours après, il est retourné à la mairie; le bras était

dans le même état.

Puis il est entré à Lariboisière, où on l'a endormi pour lui

étendre la main sur une planchette, mais la main ne s'est pas

maintenue dans cette situation. Quelques jours après, on a

renvoyé le malade, qui est retourné chez lui en Dordogne,

avec sa contracture, à Ribérac, puis à Bordeaux, où il est

resté quinze jours à l'hôpital. Le malade revint à Paris. Il alla

trouver M. Périer, qui l'a envoyé à la Salpêtrière le 18 mai.

Etat actuel (18 mai 1886). - Homme de taille moyenne,

bien constitué. Pas de troubles viscéraux. Ne présente rien

d'insolite au point de vue mental. Intelligence moyenne, cul-

ture rudimentaire, sait à peine lire et écrire. Il a un peu d'am-

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 173

nésie : il ne peut pas dire ni le jour ni le mois où son acci-

dent a eu lieu. Quand on lui demande son adresse, il ne peut

répondre, et cherche dans sa poche un papier sur lequel elle

est inscrite.

Le malade porte son bras gauche en écharpe.

L'avant-bras est légèrement fléchi sur le bras, en faisant

avec lui angle obtus; il est dans la supination; le coude est

presque complètement immobilisé dans cette position. Le

bras est dans la position normale, le long du corps, légèrement

contracture; on ne peut l'écarter du tronc que d'une façon

très limitée. Les doigts sont fortement fléchis sur la main,

allongés et contracturés. Ils sont serrés les uns contre les

.autres, avec une tendance à se recouvrir en se portant

vers l'axe longitudinal du médius. Le pouce est fortement

fléchi vers la main, l'ongle incrusté sur la face externe de

l'index. ,

Les mouvements volontaires sont très limités, pour ainsi dire

nuls, dans toute l'étendue du membre.

Les mouvements passifs ne sont guère plus étendus.

Lorsque l'on essaie de redresser les doigts, le malade accuse

une certaine douleur, au niveau de l'extrémité des doigts.

Les réflexes du coude et du poignet sont exagérés à gauche.

On détermine facilement une trépidation des doigts, surtout du

pouce, en cherchant à les redresser; par moment cette trépi-

dation est spontanée pour le pouce et rappelle l'aspect du

tremblement dans la maladie de Parkinson.

La sensibilité cutanée à la piqûre et au froid est abolie ou du

moins amoindrie dans toute la hauteur du membre, sauf à

la face palmaire des doigts et dans un triangle qui descend de

l'aisselle vers le bras. Il en est de même de la sensibilité pro-

fonde et du sens musculaire. Le coude, le poignet, l'épaule

peuvent être impunément tordus, tirés en tous sens, le mala-

de ne sait pas ce qu'on lui fait; il ignore la position qu'occu-

pent les divers segments du membre. Il n'en est, pas de même

des doigts dont la sensibilité est conservée et même exagérée

à la face palmaire. (Voir les figures 11 et 12.)

Lorsqu on tord l'épaule, le malade ne sent qu'un tiraille-

ment au niveau de l'extrémité interne de la clavicule et à

l'omoplate.

1711. 1· CLINIQUE NERVEUSE.

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 175

176 CLINIQUE NERVEUSE.

Les divers segments du membre sont manifestement

atrophiés.

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 177

Il revient le 18 juin. Son état, depuis sa sortie, ne s'est

guère modifié.

En ce qui concerne la paralysie avec contracture, pas de

changement. L'amyotrophie n'a pas augmenté. La région de

l'épaule qui était complètement insensible a recouvré en partie

sa sensibilité. Le malade nous dit qu'il a eu, le 16 juin, une

attaque de dyspnée.

Le 21, le malade demande à sortir. On essaye, avant de le

laisser partir, d'agir sur sa contracture au moyen du massage.

Voici ce que l'on fait : on pratique sur les téguments du bras

gauche des frictions avec les mains enduites de glycérine, et,

en même temps, on cherche par des tractions à redresser les

doigts et à faire mouvoir le poignet, le coude et l'épaule; celte

opération provoque des douleurs assez vives au niveau de la

face palmaire des doigts, mais elle amène rapidement un résul-

tat très satisfaisant; la contracture s'atténue en peu de temps,

les doigts se redressent et le malade arrive, au bout de dix

minutes, à faire exécuter spontanément à ses doigts, son poi-

gnet, son coude et son épaule, des mouvements relativement

assez étendus. A cause des douleurs que le malade ressent dans

les doigts, on suspend le massage en recommandant au malade

de revenir le lendemain à l'hôpital. Mais celui-ci qui, d'après

les renseignements que nous avons eus sur son compte, s'est

habitué depuis son accident à vivre dans l'oisiveté et à se ser-

vir de sa paralysie pour se livrer à la mendicité, craignant

sans doute d'être guéri, ne s'est plus présenté à l'hôpital.

Après les discussions dans lesquelles nous sommes

entrés à propos des observations précédentes, il nous

semble que nous n'aurons pas besoin de discuter lou-

guement pour démontrer qu'il s'agit la encore d'une

paralysie hystérique avec amyotrophie. L'existence de

l'hystérie chez ce malade ne peut être contestée. L'hé-

mianesthésie seusitivo-sensorielle, le rétrécissement

du champ visuel, les attaques de dyspnée, sont des

arguments tout à fait suffisants».

Quant à la paralysie, elle présente des caractères

qui permettent d'affirmer qu'elle est de nature hysté-

178 CLINIQUE NERVEUSE.

rique, et qu'elle ne peut relever d'une lésion orga-

nique. Il nous suffira de faire remarquer qu'une séance

de massage de dix minutes a suffi pour ramener en

grande partie les mouvements dans un membre qui,

depuis plus de deux mois, était complètement paralysé.

II existe une amyotrophie dans le membre paralysé

qui doit être de toute évidence rattachée à la paralysie

hystérique. Les muscles devaient être examinés élec-

triquement, mais le départ précipité du malade nous

a empêché de le faire.

Observation VI (résumée). 119ouill..., âgé de vingt-neuf ans,

homme de peine au chemin de fer; pas d'antécédents ner-

veux, soit héréditaires, soit personnels. A la suite d'un violent

traumatisme sur l'épaule droite, est atteint d'une paralysie

complète du bras droit. Dans les premiers jours, il y avait en

même temps, un affaiblissement du membre supérieur gauche

et dps membres inférieurs, mais ces phénomènes ne furent que

transitoires. Trois mois après l'accident, le malade est exa-

miné à la Salpêtrière et on constate les symptômes suivants : .'

monoplégie droite complète avec abolition absolue de la sen-

sibilité sous toutes ses formes dans le membre supérieur droit.

Diminution de la sensibilité dans tout le reste du corps. A bo-

lilion du goût et de l'odorat. Affaiblissemeut de l'ouïe. Rétré-

cissement double du champ visuel et diplopie monoculaire.

Anesthésie du pharynx. Amyotrophie légère du membre para-

lysé, simple au point de vue des réactions électriques.

Mouill... (François), âgé de vingt-neuf ans, entre le 1° mars

1886 dans le service de M. Charcot, à la Salpètrière.

Antécédents héréditaires. Aucun des membres de sa

famille qu'il connaît (père, mère, trois soeurs, tantes, oncles)

ne présente ni n'a jamais présenté de phénomènes nerveux.

Antécédents personnels. -N'a jamais eu de maladie sérieuse.

N'est ni syphilitique, ni alcoolique.

Le 1er décembre 1885, le malade, travaillant comme homme

de peine dans une gare, a, dans une manoeuvre, l'épaule droite

prise entre les tampons d'un wagon et d'une locomotive; la

DK L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 179

région sous-claviculaire jusqu'au mamelon, et le bras droit

auraient été aussi comprimés. Les ouvriers présents, s'aperce-

vant de l'accident, firent signe au machiniste qui, aussitôt, fit

reculer la locomotive et l'éloigna ainsi du wagon, mais le

patient tomba à terre immédiatement après qu'il cessa d'être

pressé par les deux tampons, et il resta ainsi vingt minutes

sans connaissance. Lorsqu'il revint à lui après ce laps de

temps, il sentait, dit-il, sa respiration très gênée, il était très

oppressé, il lui semblait en même temps que son membre su-

périeur droit, était absentet il avait en place la sensation d'un

corps très lourd qu'on aurait appendu au côté droit du tronc;

dès son réveil, il s'est aperçu qu'il lui était impossible de mou-

voir l'épaule, le bras, l'avant-bras et la main; les mouve-

ments des doigts seuls étaient possibles; à ce moment aussi la

région comprimée n'était pas dutout tuméfiée; le malade pré-

tend même qu'elle était aplatie, mais cet aplatissement n'a

pas été constaté par un médecin ni par les assistants; c'est lui-

même qui, en portant la main gauche sur l'épaule droite, s'est

figuré que son épaule était aplatie. Il fut aussi impossible

au malade de se lever après son réveil, et il fut transporté

immédiatement à Lariboisière dans un service de chirurgie

dirigé à ce moment par M. Brun, chirurgien du Bureau cen-

tral. Il arriva à l'hôpital à huit heures du soir, et le lendemain,

à la visite, il fut examiné par M. Brun.

A ce moment, l'épaule était déjà un peu enflée; il y avait

une ecchymose occupant la région de l'épaule, la région sous-

claviculaire et une partie de la face; la sensibilité à la piqûre

du membre supérieur était complètement abolie, mais le ma-

lade éprouva des douleurs lorsqu'on fit sur son membre des

tractions assez fortes pour voir s'il y avait fracture ou luxa-

tion ; la motilité du membre supérieur était, comme au début,

abolie; les doigts seuls pouvaient se mouvoir un peu; la moti-

lité des doigts persista encore deux jours, puis disparut à son

tour. Le bras fut mis en écharpe. Le lendemain, le gon-

flement devint encore plus considérable et dura environ huit

jours. Pendant les treize premiers jours, le malade se sentait

un peu étourdi; en même temps, les membres inférieurs

étaient assez affaiblis. Le malade essaya de se lever le huitième

jour, mais il lui fut impossible de se tenir debout; le membre

supérieur gauche était aussi affaibli, et le malade ne s'en servait

qu'avec difficulté.

180 CLINIQUE NERVEUSE.

Le malade au bout de treize jours peutse lever, son membre

supérieur gauche avait recouvré sa force ; le membre supérieur

droit seul restait paralysé et d'après ce que dit le malade, il

était dans la situation dans laquelle il se trouve actuellement.

- On l'électrisa, mais sans succès, et M. Brun supposant une

paralysie hystéro-traumatique, l'envoya à l'Hôtel-Dieu dans

le service des. Merklen, médecin du Bureau, central, qui con-

firma le diagnostic de M. Brun et qui, après avoir gardé le ma-

lade quelque temps dans son service, voulut bien l'en-

voyer à la Salpêtrière et nous remettre l'observation qui

avait été prise par son interne. Voici dans quel état se pré-

sentait le malade le jour de son entrée à l'Hôtel-Dieu, le 13

janvier 1886.

Le malade est un homme vigoureux, bien musclé, ayant

toute sa présence d'esprit, mais paraissant d'une intelligence

au-dessous de la moyenne.

Le membre supérieur droit pend flasque et inerte le long du

corps; l'épaule est abaissée. A la meusuration on trouve qu'à

18 centimètres au-dessus de l'apophyse coracoïde la circonfé-

rence du bras est de 31 cent. à gauche et de 30 cent, à droite;

à l'avant-bras à 16 cent. au-dessous de l'épicondyle, on trouve

24 c. et demi à gauche et 23 c. et demi à droite. Les mus-

cles se contractent très bien au moyen des courants induits.

La sensibilité au tact, si la douleur, à la température, est

complètement abolie dans les mêmes limites que lors de l'en-

trée du malade à la Salpêtrière ; nous y reviendrons plus

loin.

Les réflexes tendineux du coude et du poignet sont con-

servés.

Le membre supérieur droit est un peu violacé et il est plus

froid que celui du côté opposé.

L'ouïe est un peu moins forte du côté droit que du côté gau-

che.

La sensibilité gustalive semble diminuée à droite.

Les yeux paraissent normaux des deux côtés.

Le malade n'a jamais eu d'attaques de nerfs.

Le pression au niveau des fosses iliaques , du rebord costal

droit et du testicule droit est douloureuse, mais la douleur

reste localisée dans la zone où l'on pratique la compression.

Toutes les autres fonctions s'effectuent d'une façon nor-

male.

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 181

On soumet le malade à l'électrisation. mais ce traitement

n'amène aucun résultat. Il entre à la Salpêtrière le 1er mars

1886, et voici ce que l'on constate alors :

Le malade est à peu près dans le même état que lors de son

entrée à l'Hôtel-Dieu. - Son état général est toujours très

bon. La paralysie du membre supérieur droit est complète

et flasque. Les mouvements de l'épaule, du coude, du poignet,

des doigts, sont tout à fait abolis. La sensibilité au tact, à

la température, à la douleur est abolie, dans les limites indi-

quées sur les figures 13 et 14. Le sens musculaire est

aboli. Les réflexes tendineux sont affaiblis à droite.

Le membre supérieur droit est plus froid que le

gauche. La main droite est plus rouge que la gauche. A

la mensuration on trouve les mêmes chiffres qu'à l'Hôtel-Dieu

et la diminution de volume du bras et de l'avant-bras parait

due à \' atrophie des muscles, mais il est impossible de déter-

miner si l'atrophie porte plus particulièrement sur tel ou tel

muscle. Il n'y a pas de secousses fibrillaires. Pas d'exa-

gération de l'excitabilité idio-musculaire. A Yélec Irisation,

les muscles se contractent normalement ; il n'y a pas de réac-

tion de dégénérescence. Il y a augmentation de la résistance

électrique..

La sensibilité des autres parties du corps n'est pas normale;

elle est très affaiblie dans toute la partie supérieure du corps,

un peu affaiblie dans la partie inférieure.

La sensibilité dupharynx est abolie. Le goût et l'odorat

sont abolis des deux côtés. L'ouïe est affaiblie des deux côtés.

Il y a un rétrécissement du champ visuel double et très prononcé;

de la diplopie monoculaire ; pas de dyschromatopsie. -Pas de

pointsbystérogènes. Pas d'attaques. -

Différents moyens ont été employés pour chercher à faire

disparaître cette paralysie (massage, électrisation, flagellation

sur la région temporo-occipitale du côté opposé à la mono-

plégie, mais rien n'a réussi, et plus de quatre mois après l'en-

trée du malade à la Salpêtrière son état ne s'est encore aucu-

nement modifié. L'amyotrophie n'a pas augmenté.

Cette observation est presque calquée sur les deux

cas de monoplégie hystéro-traumatique publiés par

M. Charcot et dont nous avons déjà parlé. Nous ne

182 CLINIQUE NERVEUSE.

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 183

18 \ CLINIQUE NERVEUSE.

discuterons même pas le diagnostic. Il s'agit là, sans

qu'il soit possible de le contester, d'une paralysie hys-

térique. Mous relèverons particulièrement l'amyotro-

phie qui est ici bien plus atténuée que dans les obser-

vations précédentes, et qui aurait pu passer inaperçue

si notre attention n'avait pas été spécialement attirée

de ce côté.

Nous nous sommes efforcé de démontrer, à propos

de chacune des observations que nous avons rappor-

tées, qu'il s'agissait bien là de paralysies hystériques,

que l'atrophie musculaire dépendait étroitement de

ces paralysies, et que, par conséquent, elle était de

nature hystérique. Nous devons maintenant, comme

nous l'avons annoncé, chercher par une étude compa-

rative de ces diverses observations si cette amyotrophie

présente quelques caractères propres qui permettent

de la classer dans un cadre spécial.

Et tout d'abord, en ce qui concerne l'intensité de

cette amyotrophie, y a-t-il quelque chose de particulier

à signaler ? L'examen des divers cas que nous avons

observés montre que l'atrophie musculaire présente à

ce point de vue d'assez grandes différences. Rappelons

quelques-unes des mensurations que nous avons faites.

Observation 1

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 185

Observation II l

186, . CI,INIQUE NERVEUSE. 1, ,

si on la compare aux atrophies musculaires que l'on

observe dans la maladie d'Aran-Duchenne, dans la

paralysie spinale de l'adulte, dans les myopathies

primitives, on remarque qu'elle est relativement modé-

rée ; elle est loin d'atteindre les proportions qu'elle

peut présenter dans les affections que nous venons de

citer. Cela tient-il à ce que le nombre des observations

de ce genre est encore limité, et ne rencontrera-t-on pas

plus tard des cas contredisant la proposition que nous

venons d'énoncer ? Il est impossible de répondre à

cette question; mais, du reste, nous ne prétendons

pas établir ici des règles absolues, nous cherchons

seulement à noter ce qui nous semble ressortir de

l'examen de nos malades. Dans l'Observation VI,

l'amyotrophie est extrêmement faible et on pourrait

presque se demander s'il ne s'agit pas là d'une asy-

métrie puur ainsi dire normale, c'est-à-dire antérieure

à la paralysie. Nous ne le croyons pas, car le malade

est droitier et que par conséquent, selon toute vrai-

semblance, le côté droit était, ayant l'accident, le plus

développé. Nous sommes d'autant plus porté à admettre

que l'atrophie est bien, dans ce cas, attribuable à l'hys-

térie, que, dans. plusieurs^ autres observations que

nous ne publions pas pour ne pas donner à ce mémoire

'1 < ' . j J t ? J 1) t

une trop grande longueur, nous avons relevé une

diminution de volume analogue, et il nous semble

que dans un grand nombre de cas de paralysie hysté-

rique, sinon dans la majorité, il existe une amyotror

phie qui peut rester, pour ainsi dire, en germe pen-

dant toute la^durée de l'affection.

.. ,... 'olt 1 ? '. ' ., ?

Passons maintenant à l'examen des autres carac-

, '.1 t r : 1 . Á. (.. , 1.. t J J , > . , 1 t . t J fui

tères de cette amyotrophie. , . \,

de l'atrophie musculaire. 187

On ne constate pas de secousses fibrillaires dans les

muscles atrophiés.

L'excitabilité idio-musculaire est normale.

La contractilité électrique est diminuée en proportion

de l'atrophie musculaire, mais il n'y a pas de réaction de

dégénérescence; nous avons recherché soigneusement,

avec l'aidede M. Vigoureux, les différents caractères de

cette réaction, le résultat a été, dans tous les cas, absolu-

ment négatif. Il s'agit donc là d'une atrophie simple au

point de vue électrique. Cette donnée pourrait servir

au diagnostic dans un cas où l'on serait dans le doute

pour savoir s'il s'agit d'une amyotrophie hystérique

ou bien d'une amyotrophie musculaire due soit à une

lésion spinale, soit à une lésion des nerfs, et coïn-

cidant avec l'hystérie. -

L'amyotrophie hystérique envahit-elle en masse tous

les muscles des membres paralysés ou se localise-t-elle

particulièrement dans tel ou tel muscle, dans tel ou tel

groupe musculaire ? Si uous passons en revue nos obser-

vations en les examinant à ce point devue, voici ce que

nous constatons. Dans l'Observation I, tous les muscles

du membre supérieur gauche paralysé depuis l'épaule

jusqu'à la main paraissent atteints; le bras est plus

atrophié que l'avant-bras; mais si on envisage en par-

ticulier chaque segment du membre, on ne note pas

de prédominance dans une région quelconque.

Dans l'Observation II, tous les muscles du membre

supérieur gauche paralysé sont atrophiés, mais à

l'avant-bras il' semble que les muscles épitrochléens

sont plus affectés que les muscles épicondyliens.

Dans l'Observation III, il est dit, en ce qui concerne

l'atrophie du membre supérieur gauche, qu'elle ne

188 clinique NERVEUSE.

semble pas porter particulièrement sur tel ou tel

groupe musculaire. Dans les autres observations,

on ne relève pas de prédominance de l'amyotrophie

dans quelque région en particulier. Ces observa-

- tions semblent donc montrer que l'atrophie dans un

membre paralysé peut prédominer dans tel ou tel seg-

ment du membre, mais que dans chaque segment,

cette atrophie semble envahir uniformément tous les

groupes musculaires; ce n'est, en effet, que dans

l'Observation II que l'on relève une prédominance

de l'atrophie dans les muscles de la région épitro-

chléenne, et encore n'est-elle pas très accentuée.

Le facies de cette atrophie diffère donc essentielle-

ment de celui de certaines atrophies musculaires, de

l'atrophie Aran-Duchenne, par exemple, dans laquelle

un muscle ou plusieurs muscles d'un membre peuvent

avoir subi une notable diminution de volume, alors

que les muscles voisins ont conservé leur relief normal.

L'évolution de l'amyotrophie hystérique présente

des caractères dignes d'intérêt. Le début de cette

atrophie paraît être généralement rapide. Dans l'Ob-

servation I, quinze jours tout au plus après le début

de la paralysie, elle était déjà appréciable, et un

mois et demi après, elle était très accentuée, puis-

qu'il y avait trois centimètres de différence entre les

périmètres des deux bras. Dans l'Observation II

comme dans la précédente, un mois et demi après

le début de la paralysie, il y avait entre les bras et

les avant-bras gauches et droits une différence de

trois centimètres dans le périmètre. Dans l'Obser-

vation III, le développement de l'amyotrophie est tout

aussi rapide. La rétrocession de l'atrophie semble

DE l'atrophie musculaire. i 89

pouvoir être rapide comme son développement, et elle

coïncide avec le retour des mouvements. Dans l'Ob-

servation I, dix jours après la disparition de la para-

lysie qui avait été brusque, la circonférence du bras

avait déjà augmenté d'un centimètre, et un mois

après le membre atteint avait recouvré presque son

volume normal. -Dans l'Observation IV, unmoisalirès

le moment où la paralysie avait commencé à s'atté-

nuer, la diminution de l'amyotrophie était déjà facile

à constater. Malgré la rapidité du développement

de l'atrophie musculaire, celle-ci, comme nous l'avons

dit plus haut, ne paraît pas dépasser certaines limites;

ce fait tient sans doute à ce que les paralysies hysté-

riques n'ont pasd'habitude une très grande durée, mais

cette raison est insuffisante pour expliquer cette parti-

cularité. On peut voir, en effet, dans plusieurs de nos

observations, l'atrophie rester stationnaire, alors même

que la paralysie persiste, et n'a aucune tendance à ré-

trocéder. C'est ainsi que dans l'Observation 111, depuis

le mois de février jusqu'au mois de juillet, le membre

inférieur gauche est resté complètement paralysé, et

pourtant l'amyotrophie, pendant ces cinq mois, ne

s'est pas du tout accentuée. Dans l'Observation VI,

où il s'agit d'une monoplégie brachiale droite absolue,

l'atrophie musculaire, malgré la persistance de la

paralysie, ne s'est pas exagérée depuis que le malade

est entré à la Salpêtrière, et cela remonte à plus de

quatre mois. Ainsi donc, en ce qui concerne la

marche de cette amyotrophie, voici ce qui nous semble

la caractériser : lorsque, dans une paralysie hystérique,

elle doit se développer, elle le fait rapidement, acquiert

en peu de temps le maximum de son développement,

190 CLINIQUE nerveuse.

reste alors stationnaire, lors même que la paralysie

persiste; enfin, lorsque la motilité. revient, elle rétro-

cède avec rapidité.

Est-il possible de prévoir, en présence d'une paraly-

sie hystérique, s'il se développera oui ou non une

amyotrophie ? Nous ne connaissons pas de caractères

qui permettent de résoudre cette question dès le début;

mais,, d'après ce que nous venons de dire, on ne tarde

pas à être fixé sur ce point.

Les observations que nous avons rapportées ont

trait à des sujets adultes et, par conséquent, ce n'est

qu'à eux que peut s'appliquer ce que nous venons

de dire des caractères de l'amyotrophie hystérique.

Et, en effet, si l'amyotrophie hystérique se dévelop-

pait chez un enfant, son évolution pourrait être diffé-

rente à cause de l'âge du sujet. Il ne s'agit pas là,

du reste, d'une simple vue de l'esprit; M. Chauf-

fard a publié une observation très intéressante de

monoplégie hystérique, avec atrophie consécutive du

membre, survenue chez un enfant de treize ans'. La

monoplégie dura trois ans, puis disparut brusquement

sous l'influence du massage. Or, trois ans après la

guérison de la paralysie, l'atrophie musculaire était

encore notable. En plus, et ce caractère fait absolu-

ment défaut dans nos observations, en raison des con-

ditions d'âge du sujet, dit M. Chauffard, la monoplé-

gie, survenant en pleine période de croissance du

squelette, avait retenti jusque sur les os du membre

paralysé, en produisant non pas une atrophie, le terme

serait peu exact, mais un arrêt de développement.

1 Société médicaledes hôpitaux. Séance du il mai 1886. Voy. le numéro

du 21 mai 1886 de la Gazette hebdomadaire. .

DE l'atrophie musculaire. 191 I

Quelle est la nature de cette amyotrophie hystérique ?

Nous avons déjà dit plus haut qu'à l'examen élect

trique il n'y·avait pas de réaction de dégénérescence..

Il s'agit donc d'une 'atrophie simple, c'est-à-dire d'une

atrophie indépendante de toute lésion matérielle de là

substance grise de la moelle et des nerfs périphéri-

ques. ?

C'est là une première donnée très' importante, mais

il faut aller plus loin et chercher expliquer le méca-

nisme de cette lésion. ' ..

Il semblerait au premier abord assez naturel de

l'attribuer à l'impotence fonctionnelle, mais, pour peu

qu'on y réfléchisse, on voit qu'une pareille interpréta-

tion serait erronée." . " ,

On sait, en effet, que l'amaigrissement des masses

musculaires qui résulte de la suppression simple de la

fonction des muscles est lente à se produire, qu'elle

n'est jamais très accentuée et qu'elle peut manquer

complètement même quand une paralysie dure depuis

longtemps déjà. C'est ainsi que chez un malade, le

nommé Porcen... atteintde monoplégie hystéro-trauma-

tique (il s'agit d'un des deux malades sur lesquels

M. Charcot s'est fondé pour établir cette variété de

paralysie, et dont les observations ont été publiées

dans le Progrès médical de 9 885), les muscles du mem-

bre supérieur, quoique leurs fonctions aient été sus-

pendues pendant une année entière, n'avaient pas

subi la moindre atrophie. Or, chez les malades dont il

est ici question, l'atrophie s'est développée très rapi-

dement et a pris en peu de temps des proportions très

accentuées. Ces caractères indiquent d'une façon bien-

évidente que cette diminution dans le volume des

192 CLINIQUE NERVEUSE.

muscles appartient à la catégorie des phénomènes dits

trophiques.

Une pareille assertion peut pourtant paraître étrange;

car est-il possible de comparer l'atrophie dont nous

nous occupons ici avec l'amyotrophie qui résulte

d'une lésion organique des cornes antérieures de la

moelle ou des nerfs moteurs, et qui constitue le type

de la lésion trophique ?

Il est sans doute indispensable d'établir entre ces

deux variétés d'atrophie, une distinction fondamentale.

Mais il faut aussi bien remarquer que l'expression de

« trouble trophique » n'implique pas fatalement

l'idée d'une altération matérielle du système nerveux,

appréciable à nos moyens d'investigation; elle signifie

simplement que l'action incontestable exercée par ce

système sur la nutrition des tissus est modifiée ou sup-

primée ; or, cette modification ou cette suppression

peut être purement dynamique, et c'est évidemment à

un phénomène de cet ordre que nous avons affaire ici.

On connaît déjà, du reste, des atrophies comparables

à ces atrophies hystériques.

Les amyotrophies qui sont consécutives aux affec-

tions articulaires sont aujourd'hui considérées par la

généralité des médecins, conformément à l'opinion

que MM. Charcot et Vulpian soutiennent depuis long-

temps, comme reconnaissant une origine réflexe et

résultant d'une modification dans l'état des cellules

des cornes antérieures de la moelle; il est vrai que ce

n'est encore là qu'une hypothèse, car on ne saurait

guère fournir une démonstration absolument rigou-

reuse de cette manière de voir; mais elle s'appuie sur

de très grandes probabilités. Or, il s'agit là d'une

DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 193

altération purement dynamique du système nerveux ;

les centres gris de la moelle et les nerfs périphériques

sont normaux, l'atrophie musculaire est, comme dans

l'hystérie, une atrophie simple.

On peut encore rapprocher l'atrophie hystérique

d'une variété d'atrophie que j'ai récemment signalée

et qui s'appuie sur un fait observé à la Salpêtrière. Il

s'agit d'une amyotrophie développée du côté para-

lysé, dans une hémiplégie de cause cérébrale, suivie

de dégénération descendante, et qui était indépen-

dante de toute lésion des cornes antérieures de la

moelle et des nerfs moteurs'.

Dans ce cas, il ne peut même plus y avoir de con-

testation au sujet de l'origine de l'atrophie muscu-

laire, comme dans l'amyotrophie articulaire ; il est

certain qu'elle dépend du système nerveux central;

or, puisque les cornes antérieures de la moelle cons-

tituent le centre trophique des muscles et qu'elles ne

sont pas altérées organiquement, il faut bien admettre

qu'elles le sont dynamiquement. La seule différence

entre cette variété d'atrophie et l'atrophie hystérique

est que, dans le premier cas la modification dynamique

des cornes antérieures est consécutive à une altération

organique du cerveau et du faisceau pyramidal, tandis

que, dans le second cas, les modifications du système

nerveux sont toutes dynamiques.

Du reste nous n'attachons qu'une médiocre impor-

tance aux hypothèses que l'on peut soulever au sujet

de cette amyotrophie. Nous avons tenu surtout à éta-

t Société de Biologie. Séance du 20 février 1886. Depuis la publica-

tion de ce fait, j'ai eu l'occasion d'en observer deux autres semblables

qui sont encore inédits.

194 CLINIQUE NERVEUSE.

blir, au moyen de ces observations, que l'atrophie

musculaire peut relever directement, contrairement à

l'opinion régnante, de l'hystérie et nous avons cherché

à montrer quels sont ses caractères. Si on en juge

par le nombre des observations que nous avons re-

cueillies dans un laps de temps assez restreint, il

semble même que cette amyotrophie doit être très

fréquente. Nous croyons pourtant devoir, avant, de

terminer, répondre à une objection qui peut, à ce

sujet, se présenter tout naturellement l'esprit du

lecteur. 1

N'est-il pas étrange, en effet, qu'un phénomène

aussi facile à observer ait jusqu'à présent passé com-

plètement inaperçu, pour ainsi dire, car s'il a été noté

dans quelques cas, il a été relégué à un plan tout à

fait secondaire et n'a pas été mis en lumière comme

il semble cependant le mériter. Ne pourrait-on pas

supposer qu'il est exceptionnel, et la présence simul-

tanée à la Salpêtrière de plusieurs malades atteints de

cette atrophie ne pourrait-elle pas être mise exclusive-

ment sur le compte du hasard ? Nous ne croyons pas

que ce soit là qu'il faille chercher la cause du silence

que les auteurs ont gardé à son sujet. Et, tout d'abord

il faut remarquer que ce que nous disons là au sujet

de l'atrophie hystérique s'appliquerait tout aussi bien à

tous les faits que l'on peut observer en médecineet

dans les autres sciences. La première fois qu'on a l'at-

tention dirigée de leur côté et que l'on constate leur

existence, on se croit en présence d'anomalies, alors

qu'ils sont absolument vulgaires. Mais cette modifica-

tion qui s'opère tout d'un coup dans l'esprit et en

vertu duquel un phénomène qui avait échappé jusque

, DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 195

là à l'observation vient à être perçu, lient vraisembla-

blement, entre autres causes, à ce que les conditions

dans lesquelles se trouve l'esprit de l'observateur ont

été préalablement modifiées, et qu'il devient ainsi

apte à voir ce qui était pour lui autrefois obscur. En

ce qui concerne particulièrement l'hystérie et ses

diverses manifestations, nous nous trouvons, depuis

quelques années, dans des conditions beaucoup plus

favorables qu'auparavant pour constater leur existence

et apprécier leur signification, et pour en revenir à

l'atrophie hystérique, rappelons les motifs invoqués

plus haut pour établir sa réalité, et voyons en nous

reportant quelques années en arrière, s'il eût été pos-

sible à ce moment de se servir d'arguments semblables.

Les hommes auxquels nous avons eu affaire sont des

hystériques : voilà un premier point qu'il a été facile

de démontrer, et cette constatation n'a même pas coûté

le moindre effort. Nous savons, en effet, péremptoire-

ment aujourd'hui, depuis les travaux de M. Charcot',

que l'hystérie est fréquente chez l'homme.

Or, que disait-on autrefois à ce sujet ? L'hystérie,

disait-on, est l'apanage presque exclusif de la femme;

chez l'homme elle est exceptionnelle et l'hystérie mâle

est absolument négligeable. Le sexe de nos malades

aurait donc été déjà une première objection fondamen-

tale contre l'hypothèse d'hystérie, et qui aurait paru

suffisante à beaucoup de médecins pour la rejeter.

Mais admettons qu'un esprit plus clairvoyant, en se

fondant sur la présence des stigmates hystériques, ait

osé affirmer que ces malades, quoique mâles, étaient

bien des hystériques, et poursuivons notre parallèle.

' Voyez aussi 13oui'ne\ille. Comptes rendus de Birgtre, 1880-1885.

196 CLINIQUE NERVEUSE. DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE.

Nos malades étaient atteints de paralysie hystéri-

que ; c'est là un second point qu'il a été facile d'éta-

blir. Nous connaissons, en effet, grâce surtout aux

récentes études de M. Charcot sur ce point, les ca-

ractères spécifiques de ces paralysies, nous savons les

différencier de toutes les autres variétés de para-

lysies, et nous pouvons dire en présence d'un hysté-

rique paralytique, si la paralysie est indépendante de

cette névrose et ne fait que coïncider avec elle, ou

bien, au contraire, si elle est sous sa dépendance.

La nature hystérique de la paralysie ainsi démontrée

chez nos malades, il devenait évident que l'amyotro-

phie dérivait de la même origine.

Aurait-on pu, il y a de cela quelques années, sou-

tenir une pareille argumentation. Le médecin qui se

serait décidé à rompre avec les traditions et à porter

chez ces malades le diagnostic d'hystérie, aurait-il osé

aller plus loin et attribuer ces paralysies à l'hystérie ?

Ne connaissant les caractères propres des paralysies

hystériques que d'une façon très imparfaite, il lui au-

rait été impossible, si cette idée lui était venue à l'es-

prit, d'être affirmatif dans son diagnostic, et en pour-

suivant l'examen de ses malades, il aurait été tout

naturellement entraîné par le fait même de l'amyotro-

phie à écarter d'une façon absolue cette hypothèse.-

Il est vraisemblable que l'on a procédé autrefois de

cette façon avec les malades de cette catégorie, et nous

croyons que c'est à cette cause, et non pas à la rareté

de cet ordre de faits, qu'il faut attribuer le silence

qu'o.i a gardé à leur égard.

RECUEIL DE FAITS

CAS DE PARALYSIE SPINALE ASCENDANTE AIGUË (Paralysie

LANDRY), observé à la clinique thérapeutique du professeur

Lacnxcmrcu ;

Par M. SOUDEYKINE, à Karkoff.

Depuis 1859, époque à laquelle Landry a, le premier, décrit

la paralysie ascendante aiguë spinale jusqu'à nos jours, on a

publié beaucoup d'observations sur les maladies en question.

Ainsi les observations de Kussmaul, de Vulpian, de Cornil, de

Ranvier et de Westphal se rapportent à ces publications. Dans

tous ces cas l'autopsie n'a découvert aucune lésion pathologo-

anatomique dans le système nerveux; bien plus, l'investiga-

tion microscopique la plus scrupuleuse a donné des résultats

absolument négatifs. Par le fait de cette dernière circonstance,

le cas que je vais décrire acquiert un véritable intérêt, parce

que les modifications trouvées au moyen d'examens micros-

copiques de la moelle épinière expliquent suffisamment le

tableau clinique de la maladie, quoique notre cas s'éloigne

peut-être du type régulier de la paralysie ascendante aiguë.

Voici le cas :

Le malade Nicolas Marozolf, âgé de cinquante-quatre ans, pro-

fesseur de piano, est entré à la clinique, le 5 novembre 1884, en

se plaignant de la perte du mouvement des membres supérieurs

et inférieurs. Quant aux antécédents, le malade affirme que ses

parents, sa mère ainsi que son père étaient atteints de la syphilis.

Le père est mort paralytique et la mère est morte par suite de

l'impossibilité de déglutition (sténose oesophagienne).

Un de ses frères avait des ulcères aux jambes. Le malade lui-

même souffrait, dans sa jeunesse, d'éruptions à la peau et il

s'adonnait souvent à l'usage immodéré du vin. Il y a environ

vingt-cinq ans, les hémorroïdes se déclarèrent chez le malade; au

début, le sang coula en petite quantité; mais au bout de trois

ans l'hémorragie du rectum augmenta à ce degré qu'au dire du

198 RBCUEIL DE 1A1'l'S.

malade, elle donna une fois environ Jeux cuvettes de sang. Le

malade s'affaiblit tellement qu'il ne pouvait lui-même faire un

pas dans la chambre. Mais bientôt, grâce au séjour de la campa-

gne les forces commencèrent peu à peu à revenir. A peu près à

cette époque, àlorozolf eut une gonorrhée et une plaie à la verge ;

la gonorrhée dura assez -longtemps, environ cinq mois, par

suite de l'absence de toute médication; elle disparut enfin

laissant après elle un rétrécissement de l'urèthre; mais la plaie se

ferma, après l'application de compresses d'eau de Goulard, en

laissant une cicatrice. Depuis lors, le malade jouit d'une bonne

santé, quoiqu'il souffrait de temps en temps de légères hémorra-

gies hémorroïdales. Le 28 mai 1884, sans la moindre cause appa-

rente, sensible, les hémorragies du rectum recommencèrent au

moment de la selle; et le malade ressentit de légères douleurs

dans la région du mésogastre. Ces douleurs s'étendirent aux jambes

et au pénis.

A la fin du mois d'août 1881, Morozoff commença d'éprouver un

sentiment de lassitude, auquel se joignirent des douleurs aux

jambes avec tranchées et tiraillements. Ces douleurs se montrèrent

uniformément toutes les vingt-quatre heures, et avec une telle

intensité que le malade eut recours aux spiritueux afin de retrouver

un peu de sommeil. Cet état se prolongea jusqu'au 10r novembre.

La veille de ce jour et pendant la nuit, le malade eut un peu de

fièvre, les tiraillements aux jambes augmentèrent; mais cependant,

sous l'influence de l'eau-de-vie, le malade s'endormit. Le lende-

main matin, à son réveil, c'était le 2 novembre, Marozoff voulut se

lever; ayant essayé de marcher il ne puise tenir debout et tomba.

Relevé par sa femme, il fit quelques' pas en s'appuyant sur elle,

et pendant ce' temps, sa main gauche était si faible qu'il pouvait

à peine la lever. Le jour suivant, les phénomènes de la paralysie

augmentèrent de telle façon que le malade pouvait à peine tenir

une soucoupe de la main droite. L'urine s'échappait'avec peine

et en même temps le malade était constipé. Tel était l'état du

malade le novembre, jour où il entra à la clinique thérapeu-

tique.

Le malade a une taille au-dessus de l'ordinaire, il est bien cons-

titué ; son visage est pâle, d'une nuance légèrement jaunâtre; les

membranes muqueuses sont pâles, la peau est pâle, sèche, Sur-

tout aux jambes et aux bras; le tissu cellulaire sous-cutané est

atrophié; les muscles ne présentent pas des modifications atro-

phiques sensibles. k ' .

Le coin gauche de la bouche est légèrement baissé; la langue

tremble, lorsqu'il la fait porter hors de labouche ; une conversation

prolongée fatigue tel lementle malade qu'il éprouve des accès d'élouf-

fement en parlant.On ne remarque aucune éruption sur la poitrine,

sur le ventre et sur le dos; sur le pénis près du frein, du côté

DE LA PARALYSIE SPINALE ASCENDANTE AIGUË. 199

droit, se trouve une cicatrice atrophique, il n'y a sur les jambes

ni plaies ni cicatrices. En examinant la poitrine, nous trouvons

que la matité cardiaque est diminuée par suite d'une emphysème;

en auscultant le deuxième interstice droit interosseux, et au-dessus

du manubrium sterni, on entend un faible bruit diastolique. La

rate a légèrement augmenté de volume. Dans les artères périphé-

riques, au toucher on constate une remarquable artériosclérose.

Le pouls est 81 ; la respiration à 18-20; la température à 36.

Le malade est constipé et l'émission de l'urine est difficile. Le

malade ne peut remuer la jambe gauche et le bras droit, tandis

qu'il peut légèrement ramener vers lui la jambe droite et remuer

un peu la plante des pieds. Il est en état de faire la flexion du

membre supérieur droit.

Les membres supérieurs ainsi que les inférieurs sont tout à fait

sans résistance.

Au toucher, les extrémités sont plus froides que la peau du

tronc. Le malade, soulevé sur le lit, ne peut s'asseoir, et il éprouve

une légère douleur dans la région lombaire. Quant aux fonctions des

muscles du visage, du cou et des organes respiratoires, à l'excep-

tion d'un léger abaissement du coin gauche de la bouche, on ne

peut signaler d'autres désordres. Quant à lasensibilité cutanée, on

y constate l'analgésie universelle, excepté la peau de la tête et de

la face où la sensibilité n'est pas troublée. Les autres. espèces de

sensibilité sur tout le corps sont intactes. L'excitabilité élec-

trique des muscles, dans les premiers jours de séjour à la clinique,

n'offre aucun changement; au contraire, la veille de la mort, elle

a diminuée et une légère manifestation de réaction de dégéné-

ration est constatée.

Les réflexes de la peau et des tendons ont fortement diminué.

Pas de désordres trophiques de la peau, pas de décubitus. La

quantité de l'urine pendant vingt-sept heures était 500 c. c. de

réaction acide; poids spécifique 1,017. Les premiers jours, l'urine

contenait de l'albumine en petite quantité. En outre, on remarque

encore une lésion vasculaire. La jambe droite se présente plus pàle

que la gauche; et celle de la température au toucher est plus basse.

L'exploration thermométrique des extrémités inférieures a montré :

OU RECUEIL DE FAITS.

température du corps pendant la maladie, elle a, d'abord nor-

male, commencé à s'élever avec un léger frisson; le 8 novembre,

elle atteint z : la respiration donne 34, le pouls 124; il est faible

et à peine sensible. La respiration est accélérée, superficielle,

gênée par suite de la paralysie du diaphragme ; la parole est

indistincte avec une nuance nasale. La déglutition est difficile;

une partie de la nourriture tombe dans la trachée provoquant de

faibles accès de toux et faisant sortir un liquide par le nez. En

auscultant les parties inférieures des deux poumons, sur un espace

restreint, nous trouvons l'expiration bronchique et une matité

obtenue par la percussion.

Le malade n'est pas en état d'expectorer. Le 9 novembre, la

température s'est élevée à 39, la respiration à 36, le pouls a 140; il

est à peine sensible.

La sécrétion de l'urine et de la selle est involontaire, la mort

survient à la suite des phénomènes de la paralysie du coeur et de

l'oedème des poumons. Le professeur Kryloff a pratiqué l'autopsie.

Autopsie. Passons aux changements pathologo-anatomiques

que nous montre l'autopsie de la moelle épinière et de ces mem-

brancs.

La dure-mère, au renflement lombaire, présente une tache

oblongue d'un rouge foncé, formée par la membrane néoplasma-

tique tranchée par les vaisseaux (Pachym. extern.). La dure-mère

est tendue par les adhérences compactes des côtés de l'épine dor-

sale; le même phénomène est à remarquer dans l'intumescence

brachiale. L'arachnoïde est anémique à toute son étendue, et par

places adhère à la dure-mère. Les vertèbres de la région lombaire

du côté du canal vertébral dévoilent des taches d'un rouge foncé,

et à cet endroit, le corps des vertèbres est tellement poreux que

la pointe du scalpel peut être enfoncée sans efforts jusqu'à un

centimètre, et davantage. La substance grise de la moelle dans

la partie lombaire est d'une couleur rouge foncé, et les cornes

antérieures sont bien conservées, tandis que celles de derrière

sont à peine visibles. Dans la partie spinale de la moelle épinière

la substance grise est d'une couleur jaunâtre et les cornes anté-

rieures sont plus prononcées que celles de derrière.

5 centimètres plus haut que l'intumescence lombaire, la moelle

épinière, sur l'étendue de 4 centimètres, présente un ramollisse-

ment blanc. '

La cavité crânienne présente les adhérences totales de la dure-

mère avec les os de voûte. La pie-mère est en état d'hyperémie

stasique. Il est rappeler que la moelle oblongue et le début de la

moelle épinière sont plus solides. L'olive gauche est tout à fait

aplatie. On trouve outre l'oedème, dans le poumon droit l'hépa-

tisation rouge, dans le poumon gauche la splénisation de la partie

inférieure. Le coeur n'offre aucun changement, tandis que, dans

DE LA PARALYSIE SPINALE ASCENDANTE AIGUË. '201

l'aorle, on trouve la dégénération athéromaleuse avec la dila-

tation dans la partie initiale. Les organes digestifs ne présentent

aucune altération.

Exposons maintenant aux données fournies par ['examen micros-

copique. La moelle a été endurcie dans le liquide millérique, et

ensuite dans l'alcool. Les préparais étaient colorés par le carmin

et éclaircis dans l'huile de girofle.

Les altérations trouvées dans la moelle épinière, au moyen des

recherches microscopiques, étaient surtout très accentuées dans la

partie lombaire.

La première chose qui saute aux yeux à l'examen des préparats

microscopiques, c'est la grosseur inégale des cornes antérieures

de la substance grise. La corne antérieure gauche est plus petite

que la droite ; il y a moins d'éléments cellulaires à la corne gauche

qu'à la droite et les cellules, dans l'une comme dans l'autre, se

trowentdans un état atrophique; mais celle altération est cepen-

dant pius sensible dans la corne gauche. Les cellules ont perdu leur

forme arachnoïdienne ordinaire. Elies sont un peu arrondies, et

plusieurs d'entre elles tout à fait privées de ramifications. De

plus, on remarque encore dans les cellules, des granules de pig-

ment, qui tantôt remplit toute la cellule de façon que le nucléole

devient tout à fait invisible, et tantôt s'amasse dans un coin de

la cellule écartaut ainsi le nucléole.

Les cellules des cornes postérieures sont arrondies ou de forme

triangulaire sans ramifications et contiennent aussi une grande

quantité de pigment.

Les cornes postérieures elles-mêmes de la substance grise ont

diminué de volume et sont plus minces que leur mesure normale;

elles contiennent très peu d'éléments cellulaires et présentent un

épaississement du tissu conjonctif. Les cylindres axes sont, a cer-

tains endroits, d'une épaisseur inégale, et cette épaisseur s'ac-

centue en particulier dans les colonnes postérieures.

Le canal central est oblitéré et offre dans la circonférence un

amas d'éléments cellulaires granuleux. Les parois vasculaires sont

inégalement épaissies et cette altération est aussi fortement pro-

noncée du côté gauche de la moelle épinière.

L'examen microscopique de la moelle épinière a été fait au

laboratoire de professeur Kryloff, auquel je suis heureux d'ex-

primer ma cordiale reconnaissance.

En considérant les données de l'autopsie et les résultats

des recherches microscopiques de la moelle épinière il est

clair que nous avons devant nous deux processus pathologo-

anatomiques de cet organe : l'un chronique, ayant pour

cause la syphilis et développé sur le terrain syphilitique et de

Archives, t. Xi[. 14

202 RECUEIL DE FAITS.

l'alcoolisme; l'autre aigu et qui s'est terminé en neuf jours

avec une rapidité foudroyante. La maladie chronique de la

moelle épinière consistait dans une hyperémie stasique du

canal dorsal entraînant après elle l'atrophie du tissu osseux

dans les corps vertébraux. La dure-mère, sur la surface exté-

rieure, est couverte d'excroissances unies à l'arachnoïde et aux

corps vertébraux. Cette maladie chronique se traduisait pen-

dant la vie du malade par une faiblesse assez considérable

dans les jambes et par les élancements qu'il y ressentait. Mais

le processus aigu, consistant dans une métamorphose dégéné-

rative, des éléments cellulaires de la moelle épinière et qui

s'est accompli en neuf jours avec un résultat si rapide, est

une maladie postérieure démontrée par lesdésordres amyotro-

phiques observés seulement deux jours avant la mort. Bien

que la maladie s'éloigne du caractère classique de la paralysie

Landry, puisque des modifications chroniques de la moelle

épinière ont été constatées, il n'en est pas moins vrai que le

tableau clinique conclusif de la maladie qui a conduit Maro-

zoff à une terminaison fatale rentre absolument dans le cadre

de tous les cas connus sous le nom de paralysie ascendante

aiguë, ou paralysie Landry.

EXPLICATION DE LA PLANCHE I

Frg. 1. - Coupe transversale 'le la moelle. (Insumesc. bracliialis.)

Fig. 2 Coupe transversale de la moëlle (région lombaire).

Fig. i. Cellules nerveuses des cornes antérieures de la substance

grise en voie de dégénération pigmentaire.

Fig. 4. Les vaisseaux et les cellules nerveuses des cornes antérieures

de la substance grise.

a, Corne gauche. b, Corne droite.

MONOPLÉGIE HYSTÉRIQUE AVEC CONTRACTURE DU MEMBRE

SUPÉRIEUR DROIT DATANT DE SIX MOIS, GUÉRIE EN UNE

DEMI-HEURE PAR LA SUGGESTION HYPNOTIQUE ;

Par le,Dr Auguste VOISIN, médecin de la Salpêtrière.

L'observation qui suit, bien que fort incomplète en raison

des conditions très défectueuses dans lesquelles elle a été re-

DE LA MONOPLÉGIE HYSTÉRIQUE. 203

cueillie, n'en est pas moins digne d'attention, car elle constitue

un exemple très net de l'action thérapeutique toute puissante

exercée dans certains cas par la suggestion hypnotique sur les

accidents de l'hystérie, si graves et si invétérés qu'ils soient.

11 n'est pas superflu' d'ajouter, à l'usage des sceptiques, que

les circonstances du fait et la qualité de la malade, paysanne

ignorante qui n'a jamais quitté son village, excluent toute

possibilité de simulation.

Le 13 décembre 1885, je me trouvais dans une petite localité

de la côte méditerranéenne et après avoir terminé lesaflaires qui

m'y amenaient il me restait une heure et demie à peu près avant

le passage du train, quand on m'amena une femme des environs,

paralysée depuis six mois du bras droit.

On m'apprit qu'elle était âgée de quarante ans et que depuis

deux ans elle avait présenté à diverses reprises des crises ner-

veuses avec sensation de boule rétro-sternale, constriction de la

gorge, et autres symptômes manifestement hystériques. C'est à

la suite d'une de ces attaques survenue il y avait six mois qu'elle

était restée paralysée du bras droit; quelques jours après une

nouvelle attaque avaitproduit de la contracture de la main droite

et cette contracture avait persisté depuis.

La malade, que je dus examiner très rapidement, semblait

intelligente; sa mémoire ne laissait rien à désirer; sa parole très

nette, n'avait jamais été troublée depuis le début des accidents.

Le membre supérieur droit était le siège d'une paralysie avec

contracture rappelant tout à fait comme aspect les paralysies

cérébrales de date ancienne. Le bras absolument inerte était in-

capable du moindre mouvement : l'avant-bras dans la demi-flexion

le poignet et les doigts fortement fléchis ; les ongles incrustés

dans la paume de la main y avaient creusé des ulcérations qui

exhalaient une fétidité repoussante; les articulations phalan-

giennes étaient tuméfiées et douloureuses. Les tentatives qu'on

faisait pour obtenir l'extension des divers segments du membre

ne servaient qu'à provoquer de vives douleurs et semblaient exa-

gérer encore la contracture. La sensibilité était du reste conservée

dans tous ses modes; il n'existait pas d'atrophie musculaire.

Les autres membres, le tronc et la face ne présentaient rien

d'anormal; ni paralysie, ni anesthésie. Sauf l'impotence absolue

du bras droit la malade était valide et paraissait bien portante.

Cependant elle était depuis six mois atteinte d'une conslipation

opiniâtre et d'une rétention d'urine nécessitant l'emploi de la

sonde.

En présence des caractères de cette monoplégie brachiale et des

antécédents de la malade il me parut évident que j'avais affaire à

204 RECUEIL DE FAITS.

une paralysie hystérique, et bien que le temps me pressât je vou-

lus essayer si la suggestion hypnotique n'en aurait pas raison.

Je me mis donc aussitôt en devoir d'endormir la malade parla

fixation des yeux, et j'y réussis au bout de vingt minutes environ;

je produisis un sommeil complet, avec analgésie et flaccidité ab-

solue des quatre membres. Je lui enjoins alors, d'une voix forte,

d'étendre le petit doigt de sa main droite; elle le fait avec beau-

coup de difficulté et en manifestant de la douleur; ce premier

résultat obtenu je lui enjoins d'étendre l'annulaire; elle le fait;

puis le médium, mais ici la difficulté et la douleur semblent beau-

coup plus grandes; la suggestion doit être très énergique, les deux

autres doigts sont aiséments étendus. La main est alors dans une

extension à peu près complète, bien qu'évidemment gênée par le

gonflement des jointures, mais la malade peut mouvoir ses cinq

doigts avec une facilité rapidement croissante et toute trace de

contracture a disparu. Les ougles d'une longueur démesurée sont

noirs et sales, la paume de la main est exulcérée et sanieuse, en

raison de la pression prolongée qu'elle a subie et de la macéra-

lion épidermique.

Le bras et l'avant-bras étaient toujours immobiles ; j'ordonne

à la malade de les mouvoir, en lui assurant qu'elle peut le faire;

elle y réussit d'abord avec peine, puis plus aisément, et bientôt

le bras droit se meut aussi librement que le gauche.

Avant de la réveiller, je lui suggère d'aller se laver la main et

de se faire couper les ongles. Elle est retournée seule chez elle

après ce lavage.

Au mois d'avril dernier, c'est-à-dire quatre mois après celte

guérison, qui parut miraculeuse aux assistants, j'ai eu des nou-

velles de la malade et j'ai su que depuis mon intervention elle

s'était servie librement de ses deux mains pour les soins du mé-

nage et les travaux des champs. Mais détail à noter, la rétention

d'urine dont je n'avais pas eu le temps de m'occuper, continuait.

Je suis convaincu qu'elle aurait cédé tout comme la monoplégie

sij'en avais suggéré la disparition.

FAIT POUR SERVIR A L'HISTOIRE DES LOCALISATIONS

FONCTIONNELLES DU CERVEAU;

Par M.-E.-A. HO11ÈN,

Professeur agrège d'a.^.atomic pathologique a l'iuhersite de lIelsingfurs.

Comme le nombre des différentes lésions corticales bien

limitées, est encore assez restreint, le cas suivant ayant pour

DES LOCALISATIONS FONCTIONNELLES DU CERVEAU. 205

cause probable une altération de cette espèce, aura peut-être

quelque intérêt, d'autant plus que la cause en est un peu sin-

gulière.

Grant... étudiant en médecine à l'Université d'Helsingfors.

Né en l83o. Le père, mort à soixante-quatorze ans d'une hé-

moi rhagie cérébrale, avait toujours été bien portant. sauf qu'il

souffrit de vertiges pendant les dernières années de sa vie. La

mère vit encore et est bien portante; elle a soixante-dix ans. Une

tante maternelle a été aliénée. G... croit que les grands parents qui

sont arrivés à un âge assez avancé ont joui d'une santé parfaite.

Excepté quelques maladies d'enfance, G... a joui en général

d'une bonne santé. Il n'a jamais eu de rhumatismes articulaires

ni de battements de coeur. Il a une constitution ordinaire, le teint

un peu pâle.

Vers la fin d'une excursion de quelques jours, faite en bateau à

voiles (de Helsingfors à Reval, aller et retour), le 0 septembre

1883, il a eu un assez grave mal de mer pendant quatre ou cinq

heures, avec des vomissements très violents qui ont duré encore

le lendemain, bien qu'à un degré moindre. Les trois premiers

jours qui suivirent le débarquement, il fut forcé de garder le lit

à cause d'un violent mal de tête, qui augmentait à chaque mou-

vement qu'il faisait. Ce mal lui semblait un peu plus localisé dans

le côté gauche de la tête; outre cela, il ressentait une certaine

rigidité et une douleur dans la musculature de la nuque. Les pre-

miers jours, le malade a senti un certain trouble dans la parole.

Certains mots et certa : nes syllabes lui étaient difficiles et même

impossibles à prononcer; ils étaient comme perdus pour lui, de

sorte qu'il était arrêté net en parlant, ne pouvant articuler le mot

quoiqu'il l'eût sur les lèvres. Ce trouble de la parole a duré pen-

dant des mois. Aucune élévation de la température n'a été

observée. La force dynamométrique de la main droite a été cons-

tatée un peu affaiblie le 2b septembre. Alors le malade a observé

que, lorsqu'il voulait écrire, des secousses involontaires et très

prononcées se produisaient immédiatement dans les doigts qui

tenaient la plume et l'empêchaient d'écrire. Environ dix ou

quinze jours plus tard, il lui était déjà impossible de bien prendre

et de bien tenir la plume; mais en écrivant, il survenait très vite,

quelquefois même immédiatement, des secousses surtout dans

l'index; il lui était pourtant possible par la volonté de modérer

un peu ces secousses. Quant à la main gauche, le malade n'a

observé rien d'anormal.

Le mal de tête a, peu à peu, disparu dans l'espace de quelques

semaines et G... a repris ses occupations ordinaires, les études

médicales, pourtant avec beaucoup de prudence, car il a obsené

206 RECUEIL DE FAITS.

que tout travail intellectuel le fatiguait très vite; ainsi, il était

pour lui difficile de fixer sa pensée longtemps et, après une con-

versation un peu animée, il se sentait fatigué; il a aussi observé

une certaine irritabilité du caractère. Les camarades de G... l'ont

trouvé aussi un peu irritable et déprimé; mais il est observer

qu'il s'est lui-même beaucoup inquiété de sa santé et de son ave-

nir.

Le 17 décembre 188'3, G... vient pour me consulter. Il éprouve

alors encore presque la même fatigue pour tout travail intellec-

tuel. L'embarras de la parole a diminué. Cet embarras consiste

en ceci que le malade ne peut pas, surtout quand il parle vite,

prononcer certains mots et certaines syllabes bien qu'il les sache

très-bien; de sorte qu'il est tout d'un coup arrêté dans sa conver-

sation, essayant en vain de les prononcer. En lisant à haute voix

et vite, il lui arrive quelquefois aussi, qu'il ne peut pas articuler

certains mots ou syllabes. Mais lorsqu'il s'arrête pour un moment

dans sa lecture ou dans sa conversation, et puis recommence à lire

ou à parler très lentement et avec attention, il réussit parfois

à prononcer les mêmes mots. Aucune déviation de la face, de

la langue ni de la luette. Aucun trouble dans les mouve-

ments de la langue et des lèvres, il peut bien souffler et siffler.

Les pupilles réagissent normalement. Aucun trouble de la vision,

de l'ouïe, de l'odorat ou du goût; conservation parfaite de l'in-

telligence, de la vision et de l'ouïe. Le trouble dans l'écriture

a diminué un peu, de telle sorte que le plus souvent, il peut

écrire pendant une minute ou même pendant quelques minutes

avant que les secousses s'établissent, ceci dépendant pourtant

beaucoup de la force avec laquelle il prend la plume, de la tran-

quillité de son esprit, etc. Cet embarras de l'écriture consiste en

ceci : que les doigts qui tiennent la plume, surtout à leurs der-

nières phalanges, se dressent et fléchissent involontairement avec

une certaine rapidité et presque avec un certain rhythme. Cette

rapidité des secousses est pourtant un peu variable; elles peuvent

n ? uter jusqu'à 100 et beaucoup plus, par minute, s'il continue à

tci ir la plume. A l'exameu des difiéreuls doigts, quand il tient

la plume, l'index semble être le plus exposé et le troisième doigt

le moins exposé à ces secousses. Ces secousses surviennent

aussi à tout autre mouvement des doigts pour prendre ou tenir

quelque chose pendant un peu de temps. S'il tient un verre d'eau

assez légèrement, les secousses ne se produisent pas, au moins

pas vite, mais s'il le serre un peu, elles surviennent. D'ailleurs,

les mouvements des doigts sont libres. S'il applique ses deux

mains, l'une contre l'autre, les doigts opposés l'un il l'autre, et

qu'il essaie d'éloigner chaque doigt l'un de l'autre, les doigts de

la main gauche peuvent faire un mouvement un peu plus pro-

noncé que ceux de la droite. A un examen soigneux de la main

DES LOCALISATIONS FONCTIONNELLES DU CERVEAU. 207

et du bras, examen consistant en mouvements et en exercices

les plus différents, rien d'anormal à observer. Du côlé gauche,

les doigts ainsi que la main et le bras fonctionnent normalement.

La force dynamométrique de la main droite est un peu plus

faible que celle de la main gauche. G... dit qu'il lui est arrivé

quelquefois de remarquer un léger sentiment anormal, pas bien

localisé, uni à un sentiment de fatigue dans le bras droit, qui a

pu durer quelques heures pour disparaître ensuite spontanément.

A l'examen des différentes qualités de la sensibilité du bras, de la

main et des doigts, rien d'anormal à constater, pas d'altération

du sens musculaire; un examen électrique des différents muscles

et nerfs a donné aussi un résultat négatif. Des organes internes.,

rien à remarquer. Le pouls régulier à î0. Le ceeura le volume nor-

mal, sans bruit de souffle. Pas de battements de coeur.

Diagnostiquant, comme vraisemblable, pourtant sous toute

réserve, une légère altération dans l'écorce, et principalement

localisée danscertaines parties de la zone psychomotrice gauche,

j'ai seulement, comme essai, proposé une galvanisation à cou-

rants assez faibles de la zone motrice gauche, en appliquant le

pôle positif sur cette place. La galvanisation a été continuée

jusqu'au 27 janvier 1884; pendant ce temps, le trouble de l'écri-

ture a beaucoup diminué, de sorte que G... maintenant, surtout

quand il est assez tranquille, peut ecrire assez longtemps avant

que les secousses surviennent, le sentiment anormal dans le bras

droit est devenu aussi très rare. Le trouble de la parole a presque

disparu. Pourtant l'amélioration ne s'est pas faite d'une manière

évidemment plus rapide qu'avant la galvanisation.

G... dit qu'il a remarqué quelquefois, surtout quand il a veillé

ou travaillé plus que d'habitude, un sentiment anormal, ressem-

blant à une lourdeur dans l'arrière-tête.

28 mars 1884. G... a poursuivi ses études comme d'ordinaire,

pourtant avec une certaine prudence; et en général, il a observé

une vie très régulière. La fatigue pour le travail intellectuel, l'ir-

ritabilité et la dépression du caractère, ont presque disparu; de

même le sentiment anormal dans le bras droit. Quant à l'é-

criture, G... peut souvent écrire presqu'aussilongtemps qu'il veut

sans que les secousses surviennent, tandis que, quelquefois, elles

se produisent très vite, mais sont beaucoup plus faibles qu'aupa-

ravant. La force dynamométrique des deux mains, est

presque la même.

fer octobre 1884. Encore un peu, même embarras de l'écri-

ture, et aussi, bien que très rarement, même embarras de la

parole, quand G... est un peu irrité et parle vite.

15 janviei- 1886. - G... dit que son intelligence, sa mémoire, sa

faculté de Iravailler et son caractère sont absolument intacts,

comme avant l'attaque. Il dit pourtant qu'il a eu encore quelque-

08 RECUEIL DE FAITS.

fois des secoures, bien que minimes, dans les doigts; secousses

qui pourtant ne l'ont pas absolument empêché d'écrire, mais ont

troublé son écriture. Pour la parole, il n'a plus rien observé.

Le printemps dernier, G... a passé son examen pour le doctorat

en médecine, avec succès.)

Ce qui, dans ce cas, a un certain intérêt, c'est que, après

disparition des symptômes ordinaires d'un assez grave mal de

mer, vomissements et maux de tête, il reste encore quelques

symptômes qui semblent indiquer une légère altération bien

limitée de l'écorce cérébrale, c'est-à-dire le trouble peu marqué

de la parole et les secousses des doigts de la main droite à

chaque mouvement où ceux-ci sont employés pour tenir quel-

que chose. Mais ce qui doit être ici tout spécialement relevé,

c'est que ces troubles moteurs sont absolument limités aux

doigts de la main droite, sans participation d'aucune autre

partie du corps, et sans aucune altération de la sensibilité dans

les doigts mêmes. Il faut rattacher probablement ces troubles

à une légère altération d'une partie bien circonscrite de la

zone psychomotrice gauche, ainsi que l'aphasie, à une altéra-

tion de la circonvolution de Broca; altérations provoquées sans

doute par certains troubles de la circulation dans l'artère syl-

vienne gauche ou dans quelques-unes de ses branches. Ces

troubles, difficiles à préciser, pourraient être produits par les

graves efforts de vomissements faits pendant le mal de mer.

Ce diagnostic est naturellement donné sous toute réserve.

La rigidité et la douleur dans la nuque sont sans doute rhu-

matismales.

Quant à la légère aphasie motrice et aux secousses des doigts,

qui, peu à peu, ont disparu, il semble y avoir une certaine

parenté entre ce cas-ci et le cas de M. Charcot de cécité ver-

bale et hémianopsie droite ' survenue après une vive émotion,

où, au commencement, il y avait une légère aphasie ainsi

qu'une paralysie du côté droit; avec cette distinction que la

place de la lésion était en partie différente et plus étendue dans

le cas de M. Charcot.

Quant à l'affaiblissement de l'énergie intellectuelle, qui était

bien prononcé, surtout les premiers temps après l'accès, il peut

être rattaché à la lésion locale (supposée), conformément à une

règle à peu près générale qu'un pareil affaiblissement se trouve

' Progrès médical, 1883, 11- 23, etc.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 209

presque toujours à un certain degré, lorsqu'une lésion, même

circonscrite, s'est développée sur un point quelconque des

hémisphères cérébraux, et qu'il se produit, à plus forte raison,

et pour ainsi dire à coup sûr, quand la lésion intéresse les

lésions où siège l'appareil du langage '.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE

XIV. Contributions A l'étude DES scléroses systématiques

combinées de la moelle ; par le privat-docent ERLITZICY et

le docteur Ribilkine. ( TŸestnik) (le Messager de psychiatrie,

de M. le professeur Mierzejewsky, 1885, t. I.)

Les points à relever dans l'observation de ces auteurs sont

les suivants, à l'examen microscopique.

Dégénérescence des faisceaux pyramidaux croisés dans toute

la hauteur de la moelle. Intégrité des faisceaux cérébelleux et

des cordons latéraux limitant le faisceau pyramidal. Absence

complète de toute altération des cordons de Türk. Sclérose des

cordons postérieurs et de la substance grise des cornes posté-

rieures envahissant une partie de la colonne vésiculaire de

Clarke. Epaississement de la pie-mère des cordons postérieurs.

D'après ces auteurs la sclérose pyramidale serait indépen-

dante de la sclérose postérieure et la lésion de la substance

grise serait due à la sclérose des faisceaux et cornes posté-

rieures.

Dans le tableau clinique nous trouvons à signaler la con-

servation complète de la sensibilité et avec une dégénérescence

presque complète des cordons et faisceaux postérieurs et la

perle du sens musculaire avec la conservation de la sensibilité

cutanée. N. Skwortzoff.

1 Voir Charcot, /. c.

210 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

XVI. DE la pression cérébrale et DE la compression du cerveau.

par A. AD.\MK[t : wtcx (\Vielle ! ' Klinik, cali. Vlll et IX, août,

sept. 1884).

Leçons du professeur de Cracovie, résumant ses communica-

tions sur le même sujet à l'académie de Vienne. D'après ses

expériences, il n'y a pas de transmissions de pression à travers

l'ensemble des centres nerveux par l'intermédiaire du liquide

céphalo-rachidien. Exerce-t-on une compression en un point de

l'encéphale, il se produit de proche en proche des phénomènes

inflammatoires qui aboutissent à une hyperplasie d'abord des

couches nerveuses, immédiatement soumises à l'agent com-

presslf, puis de l'ensemble des régions en continuité avec elles, si

bien que dès que la limite de compressibilité de la substance est

dépassée, on voit successivement survenir de l'épilepsie jackson-

nienne du côté opposé, de l'hémiplégie vraie, également croisée,

de la paraplégie : à ce moment, les muscles paralysés sont tendus,

on constate de l'exagération des réflexes tendineux, de l'épilepsie

spinale, des tremblements spontanés. Même alors, tout peut

rentrer dansl'ordre, si la compression cesse; si au contraire, elle

persiste, la masse du cerveau tout entier se détruit, mais à aucun

degré on n'observe de papille étranglée. Jamais, par conséquent,

la tension n'augmente à l'intérieur des cavités intra-crâuiennes,

le liquide céphalo-rachidien n'exsude du sang que dans les limites

exactes de l'espace laissé libre entre le cerveau et le crâne; dès

que la tension augmente dans les vaisseaux infra-crâniens, le

liquide céphalo-rachidien rentre dans les vaisseaux lymphatiques

par l'intermédiaire de la cavité arachnoïdienne. P. K.

XVII. Un cas de convulsions réflexes statiques ; par A. I : RLE\llE1'b : R.

(Ceiiti-albl. f. \'erverlheilk., 1885.)

Les convulsions réflexes statiques sont celles qui surviennent à

l'occasion des mouvements de locomotion du corps; c'est pour-

quoi elles sont généralement limitées aux muscles des extrémités

inférieures bien qu'elles puissent englober les muscles du tronc

nécessaires a certains actes d'ensemble. Bien différentes sont-elles

des convulsions professionnelles coordonnées qui se manifestent,

à propos d'actes spéciaux n'ayant rien à voir avec les mouve-

ments de déplacement total, sur des muscles surmenés desquels

part l'irritation. La convulsion statique part dès l'abord du centre;

tantôt tonique, tantôt clonique, elle se localise un groupe muscu-

laire nécessaire pour exécuter un ensemble donné, ou s'étend à

plusieurs groupes musculaires antagonistes, voire d'un domaine

étendu. Les formes pures de convulsions statiques sont relative-

ment rares. L'exemple détaillé par l'auteur concerne un homme

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. -)Il t

jeune (vingt-huit ans), qui à la suite d'excès de travaux intellec-

tues, est pris de troubles circulatoires encéphaliques (insomnie,

excitation générale, syncope, dysurie, sensibilité extrême des

nerfs optiques et auditifs, inégalité pupillaire, accélération du

coeur, dépression psychique); puis se montrent les accès carac-

térisés par une flexion forcée, impérieuse, du corps entier sur les

articulations des genoux, flexion forcée immédiatement suivie de

projection de l'individu qui exécute ainsi deux, trois, quatresauts

uniformes, sans douleur aucune. Le développement de la mala-

die, ses particularités, sont à lire dans le mémoire, ainsi que

l'examen objectif du patient et la pathogénie. M. Erlenmeyer

prononce le mot de faiblesse irritable d'abord cérébrale, puis

spinale. La guérison eut lieu par la suppression des fatigues in-

tellectuelles, des faux-cols trop étroits, par l'administration de

K. Br., bains de siège à <6° et -18° R., par la galvanisation descen-

dante de la moelle lombaire, l'ingestion d'opium et l'extension

forcée du genou gauche par lequel avait débuté la convulsion

(rétraction des tendons des triceps, semitendineux et semimem-

braneux). P. KBR4VAL.

XVIII. Contribution A la connaissance DES fonctions du CORPS

calleux avec UN apport de faits ; par C. Reinhard. (CtnII'rrlbl.

f'.Nervenheilk., l8aa.)

A la suite d'une levue critique portant sur la bibliographie,

l'auteur détaille une observation de tumeur du corps calleux chez

un homme de soixante-cinq ans. On constate progressivement,

céphalalgies, lassitudes, élancements dans les jambes, affection

rhumatismale avec troubles mentaux, diminution de J'acuité au-

ditive bi-latérale, légère parésie du pli naso-Iabial et de la joue

gauche avec légère plaque d'atrophie grise brunâtre, trem-

blement modéré des mains à l'occasion des mouvements inten-

tionnels, oscillations pendant la station debout, signe de

liornberg, impossibilité de localiser les piqûres, les pincements,

les compressions, perte de la notion de temps et de lieu, absence

de discernement, de jugement, de mémoire, démence rapidement

croissante, impossibilité de marcher sans tomber et de se tenir

debout dès qu'il diminue sa base de sustentation ; gâtisme. Le

malade finit par s'aliter, perte des réflexes, analgésie. Pendant

les deux derniers jours, convulsions cloniques de la face et des

extrémités du côté droit avec perte de connaissance et' fièvre,

coma, envahissement du côté gauche par les convulsions. Mort

après trois semaines de maladie avérée. L'autopsie révèle une

gêne de la circulation en retour dans l'encéphale; les hémis-

phères, infiltrés de sérosité sont parsemés de fines hémorrha-

212 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

gies punctiformes. La plus grande partie du corps calleux est

transformé, dans ses trois quarts postérieurs, en une mase gris

rougeâtre molle qui pénètre à peine çà et là de quelques millimè-

tres dans la substance blanche du cerveau ; le bourrelet de l'or-

gane est indemne, de même que toute la partie antérieure à un

plan perpendiculaire passant par la commissure antérieure du

cerveau. Le tissu malade est du gliosarcome (sarcome granuleux

de Virchow) . La cloison transparente et la voûte à trois piliers

tendaient, comme le reste du corps calleux, à être envahies par

le néoplasme (points ramollis). Intégrité de la circonvolution de

l'ourlet, des corps optostriés, des commissures, des tubercules qua-

drijumeaux, des cornes d'Ammon, des pédoncules cérébraux, de la

protubérance, du bulbe, des circonvolutions, etc. De l'analyse de

ce fait, M. Reinhard tire que : 1° le trouble de l'équilibre (sans

vertiges) et le tremblement dans les mouvements synergiques se

rattachent très probablement à la destruction du corps calleux ; z

1° peut-être la même lésion est-elle responsable des phénomènes

relatifs à la personnalité et à la vie mentale; 3° il n'y avait dans

l'espèce ni ataxie, ni troubles proprement dits de la motilité (pa-

ralysie), de la sensibilité spéciale et générale, des fonctions trophi-

ques, sécrétoires, vasomotrices. il. K.

XIX. SUII LA COMPLICATION DE LA PARALYSIE FACIALE PÉRIPHÉRIQUE PAR

LE ZONA DE L\ FACE; par A. EULENBURG. CONTRIBUTION A L\

PATHOGÉNIE DES PARALYSIES FACIALES PÉRIPHÉRIQUES A L'OCCASION

du zona COIPLIC.4'l'FUIt ; par E. RKMAK. (Cwtralbl., t'. Neruen-

heilk., 1885.)

Observation originale. Paralysie faciale gauche s'étant gra-

duellement développée à la suite de six à sept jours de douleurs

auriculaires (courant d'air ? ) ; simultanément apparait un herpès

qui, parti du trou stylo-mastoïdien du même côté, descend dans

la région latérale du cou. le long des vertèbres cervicales et dor-

sales, sans dépasser la ligne médiane (rougeur et douleurs accou-

tuméesl. Points douloureux à la pression dans le domaine du tri-

jumeau (sus-orbltaire); douleurs suivant le trajet du facial, du

sympathique cervical, au niveau des apophyses épineuses et trans-

verses, en particulier des troisième et cinquième cervicales : in-

tégrité de l'excitabilité électrique. Au demeurant, forme légère

évolution hénigne. Cette complication extrêmement rare d'un

herpès zoster lacio-cervical révèle une étiologie commune au zona

et à la paralysie; il y a eu dans l'espèce inflammation de fibres

nerveuses, trophiques, que le tronc du facial pourrait bien con-

tenir sur une certaine étendue. Remak innocente le facial,

quant à l'herpès zoster, dans le fait qu'il a observé et qu'a publié

E. Voigt (Sl/1wt-Pete1's/,u1'g. Iletl. 11'ochenschr., 11° 45, 1884); car,

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 213

dans l'espèce, le zona occipito-collaire atteignait le bord antérieur

du trapèze et remontait à la partie supérieure de la nuque jus-

qu'au cuir chevelu, l'analgésie cutanée était trop profonde, et

la topographie, de même que l'intensité des phénomènes para-

lytiques localisaient la névrite à ce segment du facial compris

à l'intérieur du canal de Fallope, entre le ganglion gentculé et

l'origine du rameau destiné du muscle de l'étrier. Mais il est cer-

tam qu'une affection du tronc du facial même est capable d'en-

gendrer un zona. En voici un court exemple. Après huit jours de

douleurs dans l'oreille droite, s'installe une paralysie périphéri-

que complète, du même côté; en même temps se montre un zona

des deux tiers antérieurs du bord droit de la langue. La lésion,

rhumatismale, -IL, au-dessus du rameau de l'étrier (son muscle

est temporairement paralysé) a l'intérieur du canal de Fallope ;

le zoster lingual remplace ici les altérations du goût (atteinte de

la corde du tympan.) P. K.

XX. Un cas DE névrite multiloculaire avec athétose ;

par LCFWENFELP. (tYezerol. CentralGl., 4 b8.)

Le diagnostic est basé sur l'évolution de la maladie. Un homme

jusque-là bien portant est pris de manifestations fébriles et en

même temps d'affaiblissement des membres inférieurs ; puis

rapidement surviennent : une parésie des membres supérieurs,

des troubles de la sensibilité dans les quatre extrémités, sur le

tronc, à la face, troubles de la sensibilité subjectifs et objectifs

qui suivent le territoire de nerfs déterminés et s'accompagnent

bientôt d'atrophie musculaire : les nerfs dorso-lombaires sont

eux-mêmes malades (douleurs en ceinture, sensibilité extrême à

la pression de certaines apophyses épineuses et d'une partie des

muscles de la nuque, troubles trophiques de la peau.) Intégrité

de la vessie et du rectum, des facultés sexuelles, des pupilles ; par

conséquent, intégrité de la moelle. En fait de particularités remar-

quables, l'auteur insiste sur l'absence de douleurs proprement

dites le long des troncs nerveux, les phénomènes fulgurants étant

plutôt agréables que désagréables au malade , la persistance

des perturbations subjectives du côté du trijumeau sans troubles

objectifs, la parésie de l'oculomoteur externe gauche, l'absence

de paralysie complète et de reaction dégénérative, l'ataxie des

membres supérieurs quand on obstrue les yeux du patient. Enfin

il attribue à des mouvements incoercibles des doigts des mains

le diagnostic d'athétose primitive bilatérale périphérique, par

excitation névritique ascendante des faisceaux pyramidaux. Ce

diagnostic est vivement critiqué par E. Remake à propos d'un

Voy. Archives de Se urologie, t. XII, p. 21 y.

91 le REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

autre cas de névrite rapporté par lui dans le même recueil. (Voir

cette analyse plus loin.) P. K.

XXI. UN second cas DE CO-ATTEINTE DES muscles DE la face dans

l'atrophie musculaire juvénile ; par F. MOSSDORF. (Neurol. Cen-

t¡'albl., 1885.)

Homme de trente-trois ans, indemne de toute tare héréditaire

névro ou myopathique. Jeunesse surmenée dès l'âge de quatorze

ans par des travaux physiques rigoureux et le port de lourds far-

deaux. = A dix-huit ans. légère fatigue rachidienne; se sert moins

utilement de ses bras, se redresse et soulève des poids diffci-

lement ; amaigrissement progressif, sans autres phénomènes. - A A

vingt-huit ans, grande peine il marcher; impossibilité de tenir

solidement les objets, surtout avec la main gauche, souvent inca-

pacité de se vêtir. Il ne s'est pas aperçu des troubles de la face.

Allure : corps exagérément fléchi en arrière, ventre proéminent

en avant, bras et épaules pendantes. il lance pour marcher les

pieds en avant pour détacher les extrémités digitales qui pendent;

les genoux sont tournés en dehors; la tête estdroite, mais le men-

ton s'applique vers le sternum. Le thorax, excessivement amaigri,

révèle une saillie latérale exagérée des rebords costaux; l'abdomen

parait rétracté sur les côtés des muscles droits présentant une

tension uniforme ; atrophie irrégulièrement disséminée des mus-

cles du tronc et des membres supérieurs ou inférieurs. Asymétrie

faciale témoignant surtout de la même altération des muscles du

côté droit : intégrité de la langue, du voile du palais, des organes

de la déglutition. Il n'existe nulle part de réaction dégénérative.

Malade en traitement. Le diagnostic émane de l'âge auquel ap-

parurent les premierssymptômes, de la localisation de l'atrophie

(voir le mémoire), de l'absence de convulsions fibrillaires et de

réaction dégénérative. Il est vrai que les petits muscles des mains

participent, dans une certaine mesure, à l'affection, que les ex-

tenseurs des mêmes extrémités commencent à être atteints, mais

il faut tenir compte de la longue durée de la maladie et surtout

de sa marche régulière, sans saccades, du tronc vers la périphérie.

C'est une atrophie quasi-acquise par exagération de travaux

physiques. Cette constatation, jointe à l'absence de tout trouble

de la sensibilité et de l'excitabilité électrique (malgré l'atrophie

extrême) permet d'exclure l'idée d'une névrite chronique multi-

loculaire et de songer à une myopathie ; d'autre part, la parésie

faciale émane de l'atrophie musculaire et non d'une lésion des

noyaux des nerfs bulbaires, car elle est unilatérale, s'étend jus-

qu'au front et laisse intacts le palais et la langue. Néanmoins, la

participation de la face ne permet pas de se prononcer sûre-

ment sur la nature de la maladie. ' P. K.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 215

XXII. Contribution A la théorie DE l'ataxie spinale ; par \y, l : ns.

(Neurol. Centralbl., 1885.)

Toutes les fois qu'il y a ataxie de mouvements pour lesquels, à

raison d'une longue habitude et d'un long exercice, tout contrôle

sensoriel est de la partdel'individu qui les exécute absolument inu-

tile ou impossible, notamment quand le malade est ataxique les

yeux ouverts, la cause de l'ataxie doit être cherchée dans la partie

des conducteurs moteursqui unitl'org3ne de la volonté aux racines

antérieures ; mais les fibres qui joignent directement, sans passer

par les centres coordinateurs, l'écorce aux muscles ne paraissant pas

atteintes dansl'ataxie, on est contraint de supposer qu'il existe des

conducteurs centrifuges spéciaux qui veillent à la conductibilité coor-

dinatrice (faisceaux coordinateurs). Quant à la théorie par trouble

delasensibilité, elle tombe devantlesfaitsqui témoignent soitd'une

perturbation de la sensibilité spinale sans ataxie, soit d'une ataxie

spinale marquée sans trouble de la sensibilité. Voici, par exemple,

un cas du second genre : ataxie spinale pure exclusive, si ce n'est,

de temps à autre, douleurs légères et fugaces dans les mollets et

diminution douteuse, tout à fait minime, du sens musculaire.

L'ensemble symptomatique ne permet de songer ni à une lésion

cérébrale, ni à une affection cérébelleuse, mais ce n'est pas un

tabès commun; absence de tous les symptômes initiaux classiques

malgré trois ans de durée, absence d'alcoolisme, absence de

syphilis. L'hypothèse d'une maladie de Friedreich survenue à un

âge avancé est, pour les motifs exposés suprà, insoutenable, et la

simulation doit être écartée à raison de la profession du malade

(charpentier) et des détails intimes de son ataxie. Il est encore,en

traitement. P. K. -

XXIII. Contribution A l'anatomie pathologique du tabès dorsal.

Communication provisoire; par ED. KRAUss. (Neurol. Central6l.,

1885.)

L'auteur résume les propositions qui lui paraissent émaner de

treize observations suivies avec le plus grand soin et analysées, au

point de vue anatomo-pathologique, par les nouvelles méthodes

de coloration. Ce sont les altérations vasculaires qui constituent

généralement le corps du délit, mais il n'y a aucun motif de re-

jeter l'opinion d'après laquelle le tabes aurait pour substratum

anatomique. un processus parenchymateux chronique (altération

vasculaire secondaire ou, tout au moins, concomitante); l'opinion

de Struempell (affection systématique combinée) est assez sédui-

sante, car on trouve une lésion adéquate dans les deux cordons

21 si REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

postérieurs, la dégénérescence de chacun des districts des cordons

postérieurs se succède assez régulièrement, et la palhogénie des

symptômes cliniques en rapport avec eux présente un attrait

légitime, mais il faudrait justifier physiologiquement l'existence

de ces systèmes dans les cordons postérieurs. M. Krauss a cons-

tamment enregistré la diminution des fibres dans les colonnes de

Clarke, mais il est fréquent d'en constater la parfaite intégrité.

Pour juger de la localisation des symptômes du tabès à l'aide de

faits précis et nouveaux, l'auteur rapporte deux faits. L'un d'eux

concerne un cas de tabès typique sans ataxie; dégénérescence

évidente des colonnes de Clarke ; altération modérée des cordons

postérieurs; la substance grise ne présente pas plus de lésion que

dans le tabes accompagné d'ataxie, elle n'est donc pas le foyer

de l'alaxie. Dans la seconde observation, il s'agit d'un tabes trau-

matique avec conservation des réflexes patellaires des deux côtés;

dégénérescence classique de la moelle lombaire et dorsale infé-

rieure, (double raie entre le sillon médian postérieur et le bord

interne de la corne postérieure); dégénérescence de la marge

externe des colonnes de Clarke; dans la moelle dorsale supé-

rieure, on rencontre une dégénérescence qui suit le sillon longi-

tudiual postérieur, une atrophie partielle des fibres radiculaires

au point où elles s'étalent dans la corne postérieure; la partie

externe des cordons postérieurs, ou mieux la zone radiculaire

moyenne peut être, par suite, atteinte sans que les réflexes patel-

laires disparaissent forcément; impossible de localiser les douleurs

lancinantes et les troubles vésicaux. Tels sont les points prin-

cipaux de ce travail. P. K.

XXIV. Des troubles nerveux observés A la suite DE l'empoisonne-

MENT par l'oxyde de carbone; par le Dr W. SARDINE. IVFStnik de .

psychiatrie, de M. le professeur Mieuzejewsky, '1885, t. 1.)

Dans ce travail, l'auteur a réuni quarante cas (publiés par diffé-

rents auteurs), d'empoisonnement par l'oxyde de carbone chez

l'homme, en y ajoutant un certain nombre d'expériences person-

nelles failes sur des chiens. En comparant les résultats de ces

expériences avec ce que l'on trouve chez l'homme on voit que :

I. Les phénomènes graves observés chez l'homme à la suite d'un

empoisonnement unique et déjà souvent liés à une lésion orga-

nique sont très passagers chez le chien; les lésions organiques

ne se montrent chez ce dernier qu'à la suite d'une série d'empoi-

sonnements successifs.

II. Les lésions en foyer, très fréquentes chez l'homme, n'ont

jamais été observées chez le chien qui présente, au contraire, babi-

tuellement une myélo-encéphalite généralisée. Pour M. Hardine,

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 2t7

cette différence n'est, du reste, qu'apparente. Deux ordres de

phénomènes se rencontrent, en effet, chez l'homme dans cet

empoisonnement : 1° Immédiatement après les premiers accès

d'empoisonnements, on voit un affaiblissement de l'activité men-

tale (phychique); 2° Beaucoup plus tardivement apparait le carac-

tère inflammatoire de la lésion se manifestant cliniquement par

la fièvre, les convulsions et le coma. A l'autopsie on trouve dissé-

minés des foyers de ramollissement multiples.

. Le processus organique produisant l'affaiblissement psychique

pourrait d'après, l'auteur, être rapproché de la dégénérescence

des cellules nerveuses observées chez les chiens sacrifiés avant

l'apparition de symptômes graves, ou morts à la suite d'un

empoisonnement unique accompagné d'une forlehémorrhai'ie.

Les symptômes tardifs aboutissant au ramollissement en foyer

seraient identiques à l'inflammation généralisée des vaisseaux que

l'on trouve chez les chiens soumis à un empoisonnement pro-

longé. Il est bon d'ajouter au point de vue de l'excitabilité élec-

trique du cerveau, sous l'influence de l'oxyde de carbone que si

l'empoisonnement se produit lentement (par un mélange d'air

ne contenant que 1/2 p. 100 de Co) l'excitabilité de la couche cor-

ticale augmente d'abord; puis cela s'amoindrit pour aboutir à

l'inertie. La couche blanche résiste plus longtemps de sorte qu'en

l'excitant, on provoque des contractions musculaires alors même

que l'excitation de la couche corticale reste silencieuse. Les nerfs

hériphériques résistent encore d'avantage à l'action de l'oxyde de

carbone. N. SKWORTZOFF.

XXV. Contribution A l'anatomie pathologique du système nerveux

central, par Tu. RUMPF. (A9'CIE. f. Psyeh., XVI, 2.)

I. De lu syphilis du cerveau et de la moelle. - Un homme de trente

et un ans, atteint un an auparavant, d'accidents infectants, est

atteint brusquement d'hémiplégie droite, rebelle à tout traite-

ment spécifique ou électrique. Six mois plus tard, il présente suc-

cessivement de la paralysie spasmodique de la jambe gauche,

une incontinence complète de l'urine et des matières, des douleurs

en ceinture, de l'analgésie des extrémités inférieures, des acci-

dents du décuhitus. L'autopsie révèle un vieux foyer apoplectique

occupant l'extrémité interne du corps strié gauche et descendant

dans la capsule interne; le faisceau pyramidal du cordon latéral

droit présente la dégénérescence secondaire classique. Au milieu

de la moelle cervicale, juste à l'entrecroisement des pyramides,

le cordon latéral gauche est dégénéré. Cette lésion, qui ne se

rattache en rien à celle du cordon latéral droit, qui n'a rien à faire

avec l'hémisphère cérébral droit indemne, augmente en étendue à

Archives, t. XII. la a

18 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.-

mesure qu'on descend vers la moelle dorsale et s'accompagne

alors de l'altération des cordons de Goll et bientôt des faisceaux

cunéiformes. Il y a donc eu, dans l'espèce, deux sortes de lésions

presque contemporaines; un ramollissement cérébral et une

myélite transverse ayant débuté par l'entrecroisement des pyra-

mides. Ces deux espèces de lésions émanent d'altérations inflam-

matoires syphilitiques des vaisseaux en des régions distinctes.

Du moins, c'est l'avis de M. Rumpf.

II. Atrophie des circonvolutions ascendantes ci la suite de para-

lysie infantile spinale. Examen du cerveau et de la moelle

d'un individu de dix-huit ans, mort de phthisie pulmonaire, at-

leint depuis l'âge de trois ans d'une paralysie infantile à forme

hémiplégique (légère atteinte du facial et de la troisième paire)

occupant le côté droit. Les cellules de la corne antérieure droite

présentent les altérations connues sur toute la hauteur de l'or-

gane ; intégrité des faisceaux blancs, quoique le cordon latéral

droit paraisse atrophié au niveau de la partie supérieure de la

moelle cervicale, des noyaux des nerfs moteurs de l'oeil, du

bulbe. Il existe une diminution de volume manifeste indubitable,

de la capsule interne, du noyau lenticulaire, et des deux ascen-

dantes du côté gauche, sans altérations microscopiques. Il est im-

possible de dire s'il y a eu arrêt de développement par cessation

de fonction ou dégénérescence véritable (Rumpf). Figures à l'ap-

pui.

Il ! . Contribution à lit pathologie cérébelleuse. Examen ana-

tomique d'un chat de huit semaines ayant présenté une ataxie

très prononcée, avec chute et projection en avant, absence de

paralysie : intégrité de la vue et de l'ouie; absence d'attaques

épileptiformes; pas de vomissements, de fièvre, d'amaigrisse-

ment ; rien du côté de la vessie et du rectum. On tue l'animal par

narcose prolongée. Atrophie portant uniformément sur toutes les

parties du vermis (voir les figures); parallèlement la base osseuse

du crâne est le siège d'une hypertrophie indiscutable. P. K.

XXVI. Contribution A l'anatomie pathologique du tabès dorsal ET au

trajet des FIBRES DE la moelle épinière de l'homme. Communica-

tion provisoire; par Il. Lissauer. (Neurol. ! 'e7zlrul5l., 188j.)

Méthode histochimique de Weigert. Disposition particulière

d'une partie des fibres nerveuses fines contenues dans les racines

postérieures. Ces libres se réunissent au côté externe de chacun

des lroncs radiculaires, pour se disposer à entrer dans la moelle;

les faisceaux ainsi produits, composés exclusivement de fibres

extrêmement fines, après être sortis de la pie-mère, se détour-

nent du tronc radiculaire principal en dehors en paraissant se

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 21q

diriger vers le cordon latéral, mais bientôt, s'infléchissant vertica-

lement, ils se condensent en vne couche propre située à la pointe de

la corne postérieure, entre le cordon postérieur et le cordon latéral :

ils montent ainsi et pénètrent dans la substance gélatineuse et

dans les régions profondes de la corne postérieure. Dès qu'ilsont

adopté la direction longitudinale, on voit leurs fibres affecter une

telle complexité, former un lacis si enchevêtré qu'il devient

impossible d'en suivre le trajet individuel. Treize cas de tabes

dorsal ont décelé l'atteinte constante de ces fibres fines sous

forme d'une petite plaque intermédiaire aux cordons latéraux et

postérieurs, qu'il s'agit d'une ataxie précoce ou déjà avancée.

Néanmoins il est permis de dire que leur altération dépend du

stade du tabès, et que la lésion y est d'autant moins avancée

qu'on examine les couches les plus antérieures de la corne posté-

rieure, ce qui montre que le processus marche, dans la corne

postérieure, de la périphérie il la base de l'organe. P. K.

XXVII. LE professeur : DAll611 \V1CZ E'l' LETABES dorsal; pal' SCHUL'l'ZE.

M. LE professeur Schultze 1'1' ses critiques : par A. Adamkiewicz.

Remarques sur LE thème précédent D'ÂD.UlKIt.WtCZ ; par Schultze.

(Neurol. Cenl1'itlbb¡tt, 158.)

Adamkiewicz, dans un travail intitulé : Die uncttomischetz Pro-

cesse der Tubes dorsztnlis (Silzungsbcrkht D. K. K. Atad. Wissenseh.

7ti lVien; t. XC), prétend constituer un lype de tabès dû il

une dégénérescence parenchymateuse atteignant primitivement

la fibre nerveuse dont elle tuerait d'abord la myéline dans

les faisceaux de T3mdacli. Il se sert dans ses recherches de la sa-

1 qui colore aussi nettement, mais en leur imprimant une

leinle différente, les fibres nerveuses et les éléments conjonctifs.

A côté de cela, il existerait un second type de tabès dans lequel

l'altération primitive consisterait en la prolifération du tissu con-

jonctif, se développant le long des truucs artériels dans les cor-

dons postérieurs (déchéance des fibres par compression ; absence

de lacunes] [V. Die Rückenma1'ks-Schwindsuc'ht. Vienne, 1885.]

Sur ce sujet, critiques et réponses acerbes. P. K.

XXVIII. Contribution A L'ÉTIOLOGIE ET A la SYMPTUIdTULUG1E du

. tabès, par VotGT. (Ccnt1'Ulbl. f. Nervenheilk, 1883.)

Cent cas de tabès frai tés par l'auteur, ou 1883 et 1884 comprenaient L

cinquante-neuf faits de syphilis secondaire ayant précédé l'ataxie

locomotrice; dans la plupart des observations en question, le tabes

1 Voy. Archiva de Seurulugie, L. ? 1, p. 'JS eL l'noynes médical lbs5.

220 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

avait directement suivi l'infection syphilitique; chez quarante des su-

jets contaminés on ne pouvait incriminer aucun autre élément ta-

bétogène que levirus. Dans le tabès syphilitique, on a noté les symp-

tômes initiaux suivants : hébétude, sensation de tension, de pression

de douleur céphalique, état de mauvaise humeur, d'hypochondrie,

de mélancolie, et paralysie d'un ou de plusieurs des muscles

droits ou obliques de l'oeil; ces symptômes, fréquents dans la série

envisagée, ne s'observeraient jamais ou presque jamais chez les

tabétiques non syphilitiques. L'auteur passe ensuite en revue les

symptômes d'un Labes quelconque et leur fréquence, soit comme

troubles du début, soit comme perturbations se montrant au cours

de la maladie. Il en conclut que le tabès se compose de symp-

tômes presque constants (catégorie la plus chargée) et de symp-

tômes rares (le plus petit nombre). En dehors du tabès héréditaire

de Friedreich, il est impossible d'établir d'autres types cliniques

à moins d'utiliser à cet effet les symptômes rares. En effet, alors

même que tel ou tel des symptômes rares parait revêtir un autre

caractère qui change un peu les allures du tabes (exemple : l'atro-

phiedu nerf optique), on rencontre presque toujours simultanément

certains symptômes cardinaux (douleurs lancinantes, absence de

réflexe patellaire, diminution de la sensibilité à la douleur et ra-

lentissement de la conductibilité à l'égard des impressions dou-

loureuses). P. K.

XXIX. Tabès dorsal ILLUSOIRE; par P.-J. KOWALEWSKY. (Centmlbl. f.

Nervenheilk, 1885.)

Histoire d'un individu mystique (il s'agit d'un prêtre du schisme

grec), chez lequel l'imagination a, de par son éducation, subi un

développement exagéré. Après avoir vu son beau-frère, père de

huit enfants, subir les premières atteintes d'une ataxie locomo-

trice à laquelle il succomba sous ses yeux, il éprouve tous les

symptômes subjectifs de la maladie. On le soigne comme vérita-

blement malade pendant vingt-trois jours ; il s'en va guéri. Con-

clusions : 1° Les symptômes (subjectifs) du tabès se sont, chez ce

patient, montrés sous l'influence de l'idée qu'il allait être en

proie à cette affection et de l'angoisse que cette perspective lui

procurait. Tout en se rapprochant de la paraplégie chimérique,

ce fait se rattache à la pathophobie ou anxiété pathologique. 2°

On doit faire jouer un rôle prépondérant aux exercices mécani-

ques, tels que le travail à la terre, et à l'agriculture dans le trai-

tement de maladies semblables à celle-ci, par exemple dans les

conceptions irrésistibles, l'hypochondrie, la neurasthénie. Et il

importe que ces exercices aient un sens déterminé, saisissable par

le patient : ainsi la gymnastique de chambre n'est pour lui qu'un

jeu ridicule. Il. K.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 221

XXX. Clinique et anatomie pathologique de la maladie de thomsen.

. Communication provisoire; par W. Erb. (Neurolog. CentralbL.

1885.)

Examen minutieux de deux frères de quatorze à quinze ans

atteints de cette maladie. La diminution de l'énergie du mouvement

volontaire est chez eux manifeste; elle contraste avec la charpente

athlétique de leurs muscles; en dehors des accès de contractures

et de roideurqui formentla maladie deThomsen etqui se montrent

dès qu'à la suite d'un long repos le patient veut se mouvoir,il il existe

pendant la marche, principalement quand l'exercice a obligé

à des flexions nombreuses, de petites crises constituées par

une augmentation de tension des groupes musculaires, augmen-

tation de tension se transformant en contracture de quinze à

vingt-cinq secondes, si, au lieu de s'arrêter, un veut vaincre la

crampe. Diminution de l'excitabilité mécanique des nerfs

moteurs. Ces conducteurs réagissent quantitativement bien aux

courants faradiques, mais les plus forts courants ne déterminent

que des contractions brèves, éphémères, qui n'acquièrent de la

durée que par la sommation des excitations ; le courant galva-

nique ne décèle aucune anomalie au point de vue- de la quantité

de la réaction, mais, pour obtenir une contraction tonique à la

fermeture de la cathode, il faut se servir de courants forts et

encore cette contraction est-elle peu évidente et très peu persis-

tante ; on n'engendre de contraction tonique soutenue que par

la sommation d'excitations disséminées le long du cubital. Les

muscles, extrêmement sensibles aux excitants mécaniques, obéissent

facilement aux courants faradiques et exagérément à l'électricité

galvanique; les courants faradiques n'engendrent, de quelqne

façon qu'on s'y prenne, que des contractions passagères, tandis

que de minimes traînées galvaniques à peines perceptibles

déchaînent à la fermeture des deux pôles des convulsions lentes,

persistantes, transformant le muscle en une masse inégale, dure,

contournée, comme rampante et quelquefois (fléchisseurs des

doigts, vaste interne, vaste externe) en un bloc ondulant ; en un

mot, modification dans la forme de la contraction musculaire

(paresse, ralentissement du temps perdu, persistance de la con-

traction) et réaction électrique myotonique. M. Erb a réséqué sur

un de ses malades un morceau du biceps brachial; ce muscle, qui,

frais, semblait normal, présentait, après durcissement, une ! typer-

trophie énorme de la fibre (de près du triple) jevenue presque

ronde, cylindrique; intégrité du tissu conjonctif et de ses noyaux,

mais multiplication considérable des noyaux du sarcolemme; la stria-

tion transversale paraissait plus fine et souvent un peu moins

nette. Il. IL

222 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

XXXI. Contribution A la pathologie DE la maladie DE Thomsen

(expression consacrée); llarnl. BERNHARDT. Contribution A L4

maladie DE 'II011SEN : Lettre DE Thomsen A M. Bernhardt. (Cen-

li-aibl. f. Nervenheilk, 1885.)

M. Thomsen, en décrivant l'affection dont il était atteint, lui

et les siens, niait l'influence des mariages consanguins, au moins

dans sa famille, et insistait sur la diversité des origines sociales

de chacun des membres envisagés. Le petit mémoire de M. Ber-

nhardt, gros de faits, prouverait tout Je contraire. Les grands

parents des malades présentés, bien que cousin et cousine, ne

paraissent pas a\oir souffert de cette maladie; les parents mêmes,

quoique consanguins, étaient demeurés indemnes. Mais la tante

paternelle, issue de père et mère consanguins, en est affectée et,

après elle, ses nièceset neveux. Le cousin du père de ces derniers

épouse sa cousine, qui est la soeur de leur père, ou leur tante;

deux enfants issus de ce mariage sont également atteints, de

même qu'un de leurs fils (troisième génération). L'aulre branche

généalogique, qui brille encore par des mariages consanguins,

est fauchée par la phthisie pulmouaire ou mutilée par des névro-

pathies (surdinrutilé, lésions du nerf optique, etc.). M. Thomsen

écrit une lettre spéciale pour confirmer à nouveau la non-consan-

guite des mariages dans sa famille, et cependant l'hérédité de

la perturbation nerveuse, qu'il a le premier éprouvée, continue

persistante, avec celte particularité que l'affection réside surtout

sur les membres inférieurs et que les muscles de la motilité

volontaire présentent un développement exagéré. Détails sur ses

enfants et petits-enlanls : la chaleur du lit et l'exercice, les suda-

tions dissipent l'état de rigidité; en revanche, l'appréhension, la

crainte du ridicule en public l'appellent et l'exagèrent (panopho-

bie, comme chez les agoraphobes). Il s'agit, dans l'espèce, d'in-

dividus vigoureux indemnes de toute tare, de toute infection,

de phthisie pulmonaire; lui-même porte vaillamment ses soixante-

dix ans malgré cette infirmité des plus imporluues. P. K.

XXXII. Sur LE rapport qui existe ENTRE L'UPICANTOUS E1' L'OPHTIIAL-

tOPLI.GIE; par J. HiR<CHBKRG (Nu ? 'ol·CC1lGralbl., 1885.)

Homme de trente et un ans; ophthaluioplégie totale typique :

blépharoplose bilatérale (les paupières supérieures ont une

largeur de 28 millimètres); les sourcils jont très élevés; il faut

que le muscle frontal remplace l'élévaleur de la paupière supé-

rieure ; mouvements d'élévation, d'adduction, d'abduction de la

pupille impossibles; pour abaisser le globe oculaire, le patient se

sert de ce qui lui reste du grand oblique et, parsuite, l'oeil tourne

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 233

autour de son axe du côté de la tempe; les axes des deux yeux

divergent légèrement quand ils demeurent tranquilles et cepen-

dant, ni diplopie, ni troubles de l'accommodation, ni modifica-

tions pupillaires, ni lésion du fond de l'oeil, acuité visuelle mo-

dérée (astigmatisme) Intégrité du système nerveux. Il s'agit d'un

état congénital héréditaire; la mère du sujet en question vient

de procréer un enfant actuellement âgé de neuf mois qui pré-

sente un épicanthus paralytique, lerepli cutané oculo-nasal fait

défaut ; le bébé ne peut ni élever la paupière, ni regarder en

haut, lesmouvements d'abduction, d'adduction, d'abaissement des

globes sont conservés : alternative de divergences et de conver-

gences convulsives;sous l'influence d'une émotion, le petit malade

arrive à faire cesser la blépharoptose. P. K.

XXXIII. Un cas DE paralysie DES MUSCLES DE L'OEIL A la suite DE

diphthérite DE la gorge; par W. IIIiTHOFF. Contribution A

l'étude DES paralysies DIPIITIIÉRITIQUES : par B. AIENDEL (Neurol.

Centralbl.,1885.)

Il s'agit d'un enfant de dix ans atteint d'une ophthalmoplégie

externe et bilatérale accompagnée de parésie de l'accommoda-

teur de chaque côté, sans modification dans la réaction des pu-

pilles ; presque en même temps, parésie des membres supérieurs

et inférieurs (impossibilité de marcher sans appui) ; le tout con-

sécutif à une diphthérite légère n'ayant pas nécessité l'alitement,

mais ayant laissé après elle un nasonnement assez prolongé. Ces

complications se montrèrent douze jours après l'évolution de la

diphthérite. progressèrent pendant trots semaines, puis dispa-

rurent graduellement dans l'espace de six semaines (Observ. de

M. Uhthoff). Le fait de M. Mendel concerne un malade de huit

ans affecté du 2 ? -' ? 8 septembre 1883 de diphthérie pharyngée

modérée; le 4 octobre, on constatait une paralysie du voile du

palais; le 2 novembre, commencèrent à se produire des accidents

oculaires et des troubles delà m otiii té volontaire aboutissant aune

paralysie bilatérale absolue de l'ensemble des muscles des globes

oculaires, avec parésie du facial droit, parésie pharyngo-palatine,

parésie des muscles de la nuque, ataxie et affaiblissement des

quatre membres, signe de Romberg, disparition des réflexes

tendineux, fièvre (P = 100. T = 38). Sur cet ensemble symplo-

matique se greffe une bronchite catarrhale diffuse de l'albumi-

nurie ; la paralysie s'étend et se complète ; le pneumo-gastrique

cesse de fonctionner, le patient meurt le 11 novembre. L'examen

anatomo-pathologiquc de l'encéphale révèle la réplétion exagérée

des petilesartères etdes capillaires, depuis les tubercules quadri-

jumeaux jusqu'à l'entrecroisement des pyramides : dans l'espace

adventice de Virchow et Robin, on trouve .le ? l1'lohnlc'i blancs et

2 : H e REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

rouges accumulés; ces. lexsudais, qui existent également en

dehors des vaisseaux proprement dits, s'accompagnent, sur plu-

sieurs points, de véritables hémorragies capillaires assez nom-

breuses, notamment à l'intérieur de la protubérance, le long de

l'oculomoteur externe droit. Intégrité des noyaux des nerfs crâ-

Iliens et en particulier des noyaux de l'oculomoteur commun, de

l'oculo-moteur externe, du pneumogastrique, de l'hypoglosse. Les

branches périphériques et les troncs sont atteints de névrite

parenchymateuse ou interstitielle (multiplication des noyaux du

névrilemme, hémorrhagies le long des filets, altération de la

myéline), soit à l'extérieur du crâne, soit en pleine protubérance,

soit au coeur du bulbe (pneumogastrique, oculomoteur externe,

oculo-moteur commun). Le poison diphthéritique atteint donc

aussi bien les parois des vaisseaux que le névrilemme, et cela

du même coup. P. K.

XXXIV. UN cas DE névrite généralisée avec altérations électriques

GRAVES, MÊME DU CÔTÉ DU FACIAL TOUJOURS INDEMNE; par E. RE-

MAK. - QUELQUES remarques SUR la communication DElil. REMAK,

intitulée : Un cas de névrite généralisée, par L. LOEWENFELD.-

Réplique aux remarques précédentes; par E. REMAK. (Neurol.

liei2t ? ·Clfll., 4885.)

A la suite d'un rhumatisme articulaire siégeant sur les deux

articulations tibiales inférieures, on voit s'installer une paralysie

incomplète, accompagnée de troubles de la sensibilité et d'atro-

phie dégénéiative partielle des muscles des membres inférieurs;

absence de phénomènes tendineux; démence; trouble de la

parole; tremblement à l'occasion de mouvements voulus; cou .

vulsions ; et, particularité caractéristique, altérations électriques

graves ( d'abord forme moyenne, puis forme grave de la réac-

Lion dégénérative, enfin suppression de l'excitabilité électrique),

occupant non seulement les territoires neuro-musculaires où a

siégé la paralysie, mais ceux qui n'ont cessé de se montrer

indemnes (facial) des deux côtés. Le diagnostic de iiévrite iiiulli-

loculaire subaiguë émane de la constatation des douleurs ini-

tiales, de l'existence des troubles de la sensibilité qui, d'abord

considérables, ont rétrocédé graduellement en même temps que

l'atrophie musculaire dégénérative des extrémités, après une

durée d'un an, de la genèse des phénomènes morbides consécu-

tivement à un rhumatisme articulaire. La participation de tous

les rameaux des deux nerfs facial aux altérations électriques,

déjà observée dans la polynévrite aiguë (Pierson) n'indique pas

dans l'espèce l'existence d'une poliomyélite antérieure ou d'une

polioencéphalite, parce qu'il y a suppression de l'excitabilité élec-

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 225

trique presque complète; tout cela est d'ordre périphérique

comme dans l'atrophie musculaire héréditaire : genèse myopa-

thique, puisque le bulbe est intact. Conclusion. Névrite mulli-

loculaire généralisée, dégénérative, ayant englobé, au début,

quelques nerfs moteurs de l'oeil (diplopie de trois mois) et attei-

gnant actuellement le facial et l'hypoglosse; les nerfs crâniens,

non paralysés, sont presque complètement inexcitables et cepen-

dant ils ont conservé leur conductibilité. Peut-être y a-t-il lieu

de penser qu'en ce cas les manchons de myéline sont seuls alté-

rés (Erb; et névrite segmenlaire périaxile de Gombault). Légère

inflammation des deux nerfs optiques conformément aux obser-

vations de Struempell, Eichhorst, Loewenfeld. Cependant l'exis-

tence dans les extrémités supérieures de mouvements spasmo-

diques, de sautillements tendineux, de tremblements intention-

nels rappelle, quand on les rapproche de la démence, la

sclérose en plaques. A ce propos, Remak critique l'expression

d'athétose que Loewenfeld a appliquée* à des mouvements irrésis-

tibles, mais de peu d'ampleur, découverts accidentellement et,

par suite, dépourvus d'originalité frappante, et, en tout cas, ne

consistant pas en cette rotation lente et caractéristique de tous

les doigls de la main autour des articulations ulélacarpopba-

langiennes : « la main placée au repos et à plat sur un support

exécute incessamment contre son gré, à des intervalles de quel-

ques secondes, soit de légers mouvements spasmodiques, soit des

mouvements de flexion, d'extension et d'abduction de tels ou tels

doigts isolés ou groupés», etc. (voir Hammond par comparaison).

P. Kéraval.

XXXV. CONTRIBUTION A L'TUDb : des névrites multiples; par A. HOVÉN.

(Centralbl. t. tYcrvenheil ? A88;i.)

Observation se distinguant de la poliomyélite avec laquelle la

névrite est le plus souvent confondue, en ce que les troubles de la

sensibilité étaient très accentues, les troubles de la molilllé et

de la réaction électrique n'atteignant pas le degré qu'on a cou-

tume de noter dans les lésions de la moelle. Conclusion. Névrite

multiloculaire à début subaigu sous forme de deux attaques

séparées, puis devenue stationnaire. Cette névrite a néanmoins

présenté des particularités qui ne lui sont pas habituelles : tels le

début par les extrémités supérieures et l'épaule, l'insignifiance

des troubles moteurs, surtout par comparaison avec les troubles

de la sensibilité excessifs, la diplopie (insuffisance congénitale

des muscles des yeux), la tuméfaction inlermitlanle des mains

1 Voy. Archiv. de Neurol. Un cas de névrite multiloculaire avec atlié-

tuçe. t. xu, p. '207.

226 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

et des pieds (troubles vasomoteurs), la rapidité du pouls (atteinte

du pneurno-gastrique). Guérison d'une promptitude remarquable,

ce qui confirme encore le diagnostic et exclut l'idée d'une lésion

des centres nerveux. L'auteur insiste sur l'action favorable du

pinceau faradique dans les cas récents ou anciens de névrite

quelconque ou traumatique où prédominent des troubles de la

sensibilité. Au point de vue de l'étiologie, il n'y avait ici lit

refroidissement m maladie infectieuse, ni alcoolisme, ni aucun

élément prédisposant. P. K.

XXXVI. Sur LES paralysies du nerf 31ÉD1 \N par M. BERNHARDT

(Centrcal6l. f. Nervenheilk., 1885.)

L'auteur montre à l'aide de cinq observations de blessures que le

médian innerve non pas seulement la face palmaire des doigts,

niais celle de la face dorsale des phalangettes etdes phalangines de^

deuxième, troisième doigts ainsi que le côté externe des phalangines

du quatrième doigt. L'auteur insiste, en outre, sur l'inégalité dans

les zonesaneslltésiques raltachables aux blessures du médian(ques-

tion de degré et d'étendue de la lésion en chaque cas particulier),

sur l'atteinte, dans un des cas de la face dorsale de la phalange

unguéale du pouce. Ces faits sont encore intéressants au titre

que voici : l'élément moteur souffrit moins que l'élément sensitif ;

on voit notamment l'éminence thénar toute atrophiée conserver

ses propriétés motrices, ce qui semble en même temps récuser la

ré,istance des fibres trophiques (Luederilz); au fond, quatre obser-

vations décèlent ici l'atteinte des fibres trophiques et sensitives

eL l'intégrité des libres motrices. De l'ensemble des analyses

de chaque fait, il résulte que la séparation absolue du nerf n eut

généralement pas lieu et que le processus inflammatoire con-

sécutif à la section détermina après coup une destruction plus

étendue, et dans le sens transversal et sur la longueur du tronc

(névrite) jusque dans les plus fins ramuscules intramusculaires

(réaction dégénérative due à la myite ou nlyosite propagée) ; -1

mais en même lemps la paralysie complèle a pu être empê-

chée, ou la restitution rapide de la conductibilité motrice a

pu être effectuée soit par la conservation d'un pont de libres

normales, soit par la prompte régénération d'un petit segment

de fibres. P. K.

XXXVII. Un cas DE sclérose HTHUALE .\\fV'OTROI'IiIQUE; par A. Kos-

chewnikoff. (Ccnt1'aLlil. f. Nervenheilk., 188.)

Sous-litre : Dégénérescence des faisceaux pyramidaux dans tout

le il ll ? I1'l el de du cerveau en iiti)l)oi-1 avec ce sysliiiie.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. -2-)7

A rapprocher du cas publié par le même auteur dans les Archives

de Neurologie de 43, n° 18). Naturellement les cellules ner-

veuses des cornes antérieures sont aussi atteintes. Intégrité abso-

lue des petites cellules nerveuses de la moitié supérieure de l'é-

corce des circonvolutions ascendantes. P. K.

XXXVIII. CONTRIBUTION A la symptomatologie DES Lf,3TONS DE

la protubérance; par J. 1'IIERZE.1E1VSICY et Rosenbacii.

(Neurol. Centrabl., 1885.)

Les lésions de la protubérance peuvent produire de nom-

breux symptômes; néanmoins le diagnostic se trouve relative-

ment facilité par l'association de certains phénomènes dans le

domaine de l'encéphale. Tel est le cas de l'existence dela para-

lysie du muscle droit externe d'un des yeux, de concert avec

la paralysie du muscle droit interne de l'autre oeil sans que

l'ocumoloteur commun,dont dépend le droitinterne, se trouve

atteint. Ce syndrôme se rattache comme on sait à une lésion

unilatérale du noyau de l'ocumoloteur externe'. Nouvelle-

observation à l'appui. Paralysie du facial droit dans sa totalilé :

hyperexcitabilité des muscles paralysés à l'égard des courants

faradiques et galvaniques, les courants continus engendrant des

contractions très lentes : Ka S Z > An S Zz. Du côté droit, para-

lysie du droit externe; parésie du droit interne de l'oeil gauche.

Double névrorétinite. L'autopsie révèle, dans la substance delà

protubérance, la présence d'une tumeur qui, comprise dans la

moitié droite de son plan supérieur comprime le raphé et la

moitié gauche de l'organe, fait saillie en haut dans la cavité

du quatrième ventricule, dont elle rejette les fibres raphéiques

à gauche, gagne ira presque la zone intermédiaire au ventri-

cule et à l'aqueduc de Sylvius, et arrive en bas, à une distance

de 3 millimètres des stries acoustiques; topographiquement,

elle occupe la région de la calotte et ne pèse ni sur les fais-

ceaux pyramidaux, ni sur les fibres transverses. Ce néoplasme

n'a pas détruit de fibres, mais il a engendré tout autour de

lui une inflammation chronique qui, tant dans la moitié

droite du IV ventricule, que dans une partie de sa moi-

tié gauche, a détruit la substance grise du segment supé-

' Voy. NotUnael : Maladies de l'encéphale, p. 115.

= Voy. pour ces symboles, Charcot, Leçons sur les Maladies du système

nerveux, 111, 1, p. 135 et 136, Arc/m'es rit' Seurotogia, I, 74 ct pa.ssrnr,

228 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

rieur du plancher et les noyaux des Vla et VU" paires

droites; on constate en outre une infiltration lymphoïde des

noyaux de la VIII, paire droite des VIe et VIle paires gauches,

ainsi qu'un simple ramollissement des noyaux des IX, X, XI,

XII" paires. Intégrité des portions externes et antérieures des

coupes transversales de la protubérance et du bulbe, des

racines du trijumeau, des trousseaux de fibres appartenant

aux pédoncules cérébelleux moyens, des olives, des faisceaux

pyramidaux; destruction des fibres du faisceau longitudinal

postérieur sur une grande étendue des deux côtés. P. K.

XXXIX. UN CAS DE TUMEUR CÉRÉBRALE (GLIOSARCOME DE LA

glande pinéale 1885, par L. FEILCHENFELD (Neurol. Centralbl.).

Individu très intelligent, présentant successivement de la

céphalalgie, des vertiges, des vomissements, de l'apathie, de

la faiblesse accentuée des membres inférieurs, des convulsions

généralisées l'empêchant de boire et de manger seul, de la

diplopie, de la diminution des réflexes sphinctériens anovési-

caux (constipation), de l'ataxie dans les jambes, du ralentisse-

ment dans laperceplion des impressions sensibles, de la para-

lysie des muscles soumis à l'oculomoteur commun des deux

yeux excepté de l'élévateur de la paupière supérieure, de la réac-

tion lente des pupilles, des papilles étranglées, une légère

parésie du facial. Tel fut l'ensemble symptomatique de mai 1884

au 24 mars 1885 : courbe fébrile le jour de la mort. L'autopsie

décèle tous les signes de la stase encéphaloméningée avec

oedème interstitiel. Il existe un sarcome à cellules fusiformes

qui, originaire de la glande pinéale et de son pédoncule,

englobe le pédoncule cérébelleux supérieur, l'extrémité anté-

rieure du tubercule quadrijumeau antérieur, empiète sur les

couches optiques au milieu de la commissure postérieure et

du ganglion de l'habenula, mais sans en altérer la substance

fondamentale, non plus que celle du pied des pédoncules céré-

braux. P. K.

XL. CONTRIBUTION A la méthode DE RECHERCHE DU phénomène

du genou ; par E. JENDRASSIK (Neurol. Centralb. 1885).

Voici la meilleure méthode à l'aide de laquelle on puisse se

rendre compte de l'existence bien avérée ou de l'absence incon-

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 229

testable du phénomène du genou. Asseoir l'individu sur le bord

d'une table, de façon à ce que les jambes pendent mollement,

aussi mortes que possible ; inviter le patient à entrelacer les

doigts des deux mains et,en tendant les bras horizontalement,

à tirer aussi fort que possible sur ces mains, ainsi unies,

comme pour rompre l'entrelacement; c'est à ce moment qu'on

frappera sur le tendon rotulien. Ce procédé repose sur le

double fait d'observation : 1° que l'on ne peut obtenir un

relâchement parfait des muscles des membres inférieurs que

lorsqu'ils pendent librement, ce que l'on peut contrôler en pla-

çant sa main au-dessus de la cuisse près de l'articulation du

genou; 2° que, dans ces conditions, le phénomène du genou

et les réflexes tendineux en général n'acquièrent leur degré

de développement que si l'on force les autres muscles du corps

à déployer une grande force. L'examen de 1,000 individus

sains ou malades (non névropathes) indique qu'il est extrême-

ment probable que le phénomène du genou apparaîtrait chez

tous ces individus indemnes d'affections du système nerveux :

on n'enregistrerait pas dans l'espèce de cas nuls ou douteux.

' P. K.

XLI. CONTRIBUTION A l'étude DE la névrite multiloculaire

chez LES buveurs; par R. ScIIULZ (Neurol. Centralbl. 1885).

L'observation relatée concerne un buveur acharné indemne

de toute tare héréditaire névropathique, de syphilis, en proie à

du désordre dans les idées, qui en un mois présenta une para-

lysie atrophique extrêmement marquée dans les quatre extré-

mités ; intégrité de la sensibilité, sauf une légère anesthésie;

intégrité du sens musculaire ; douleurs dans les bras et les

jambes; gros troncs nerveux sensibles à la pression; affection

articulaire passagère avec fièvre ; quelques accidents ataxi-

formes ; disparition des réflexes patellaires, conservation des

réflexes cutanés; parésie vésico-rectale; les muscles et les nerfs

des membres ne réagissent plus sous l'influence des deux espèces

de courants; paralysie passagère bi-latérale de l'ocumoloteur

externe : guérison complète en six mois de traitement. L'au-

teur discute le diagnostic différentiel entre la poliomyélite

antérieure subaiguë (paralysie atrophique étendue, dès le début,

avec diminution extrême de l'excitabilité électrique, troubles

minimes de la sensibilité, suppression du réflexe patellaire) et

230 revue DE pathologie nerveuse.

la névrite multiloculaire (dissémination des phénomènes, con-

servation des réflexes cutanés, sensibilité à la pression des

gros troncs nerveux); il analyse comparativement les faits du

même genre, et pose les éléments à l'aide desquels on peut

distinguer l'ataxie d'une paralysie alcoolique (paralysie atro-

phique se montrant dès le début et marchant rapidement, hy-

perexcitabilité électrique avec ou sans modification qualita-

tive, absence de fixité, d'immobilité pupillaire, de douleurs en

ceinture, de troubles vésico-rectaux), et l'ataxie d'un tabes

(atrophie tardive, lente; à l'hyperexcitabilité électrique du

début succède une diminution de l'excitabilité sans modifica-

tions qualitatives ; pupilles inertes, douleurs en ceinture,

troubles vésico-rectaux). Il est impossible de déterminer si ces

névrites sont d'origine centrale ou périphérique, malgré les der-

niers efforts de Déjerine, si les lacunes vacuoliques de la moelle

sont en relation avec elles (lacunes anatomopathologiques

artificielles ? ) si les dégénérescences cellulaires, trouvées dans

des moëlles autrement normales (Eisenlohr) et cliniquement

saines se rattachent à des poussées névritiques. Deux tableaux

finaux résument les cas de Struempell, Mueller, Ioeli, Schulz,

Fischer, Loewenfeld, Krueche, Déjerine, Lilienfeld au double

point de vue de la nosographie et de l'anatomie. P. K.

XLII. SUR une FORME DE trouble DE la sensibilité DÉCOU-

verte dans LES LÉSIONS unilatérales du cerveau A l'aide

d'une méthode d'examen jusqu'ici non mise .\ PROFIT EN CLI-

nique; par H. Oppenheim. (Neurol. Centrabl., 1885).

Voici cedontils'agit chez quatre individus atteints d'affections

en foyer. Quand on soumet simultanément les deux côtés du

corps à des sensations d'égale intensité, le côté du corps para-

lysé est manifestement rebelle à la conductibilité de la sensa-

tion, alors qu'examiné seul, il perçoit encore d'une façon

satisfaisante ; cette constatation s'applique à la sensibilité

générale comme à la sensibilité spéciale. Si l'on veut que les

éléments centraux qui reçoivent les impressions du côté para-

lysé perçoivent aussi rapidement et aussi nettement que ceux

qui ressortissent au côté sain, il faut augmenter l'intensité de

l'excitant du côté qui est ou qui a été atteint; or, ceci n'a pas

ieu chez les individus normaux. Tel est le fait brut. On devra

continuer les expériences. P. K.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 31 1

XLIII. Un cas DE tumeurs SYPHILITIQUES ( ? ) dans LES méninges

cérébrales ; par J. ALTHAUS. (Arch. f. Psych., XVI, 2.)

Une fillette de quatorze ans issue de parents très honnêtes

qui l'ont élevée, voit ses règles se supprimer; en même temps

elleprésentedesphénomènes encéphaliques : céphalagie, vomis-

sements, paralysie à évolution lente se rapportant à la zone

motrice du cerveau droit, hyperesthésie indiquant une irrita-

tion des zones sensorielles. Tumeur probable, quoi qu'il

n'existe ni accidents épileptiformes, ni convulsions quelcon-

ques, ni papille étranglée. L'absence d'ictus jointe à la consta-

tation du marasme élimine l'idée d'une hémorrhagie ou d'une

embolie. Le développement des mamelles fait penser instincti-

vement à des coïts antérieurs, à une grossesse possible, et

partant à une infection syphilitique, quoique ni le milieu, ni

les commémoratifs, ni-l'examen ne fournissent aucune trace

de signe en faveur de ce diagnostic. Mort malgré la prescrip-

tion de K I et sublimé. Durée, sept mois. L'aulopsie montre à

droite : adhérence de la pie-mère, de l'arachnoïde et de l'é-

corce ; dans les mailles de la pie-mère, le long des vaisseaux

dilatés ou allongés en fuseaux; dans les parois vasculaires une

collection de nodosités plus ou moins disséminées, plus ou

moins confluentes, qui ne sont que des gommes syphilitiques

entées sur de l'artérite syphilitique (tableau microscopique des

lésions décrites par Heubner), l'écorce congestionnée présente

une traînée de ramollissement dûe à l'oblitération complète

d'une des artères terminales par l'ensemble du néoplasme ; en

un point, la dure-mère participe à l'adhérence générale. Intégri té

des cellules nerveuses et des éléments des diverses couches cor-

ticales ; artérite syphilitique demème nature. Intégrité du reste

de l'encéphale. -Par où s'est éffectuée la contagion ? Résulte-

t-elle d'un simple accident ? La jeune fille était elle nceinte au

moment de sa mort ? Pourquoi la genèse de gommes a-t-elle

suivi de si près l'infection ; remarquez que la fillette n'a été

réglée qu'à douze ans. Comment n'a-t-on pas constaté de phé-

nomènes intermédiaires entre la grossesse et le premier signe

de la syphilis passée, dans l'espèce, inaperçue ? Est-ce que

par hasard des gommes de méninges se pourraient engendrer

sur un terrain non spécifique ? Autant de questions insolu-

bles. En tout cas ici, il faut éliminer la tuberculose ou tout

232 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

autre cachexie. L'auteur appelle l'attention sur l'existence

du coma et l'héllliparesie gauche qui excluent le diagnostic

d'hystérie. En ce qui a trait aux allures du phénomène du ge-

nou, il signale que, lorsqu'il y a des différences entre les deux

côtés du corps, on peut être certain qu'il existe des altérations

de structure dans certaines régions du système nerveux; pour

localiser ces altérations, on prend en considération, comme

dans l'observation précédente, l'exagération du réflexe patel-

laire (indice d'affection cérébro-spinale) ; la lenteur relative du

réflexe qui s'étend ensuite très loin (indice d'affection céré-

brale) tandis que sa rapidité dépourvue de propagation plaide

en faveur d'une lésion spinale. - P. K.

XLIV. Communications casuistiques ; par 0. HEBOLD. (Arch.

f. Psych. XVI, 2.)

I. Foyer de ramollissement dans l'insula gauche. -Aphasie.

Femme de soixante et onze ans ayant présenté, il y a un an

et demi, un ictus apoplectique (troubles de la motilité à droite

affaiblissement de la mémoire) ; il y a six mois, nouvel ictus

apoplectique (hémiplégie droite, aphasie); il y a dix jours,

ictus apoplectiforme avec perturbations du côté droit. Autopsie

La couche optique gauche renferme le plus vieux foyer ; ra-

mollissement hrun-gris, gros comme un noyau de cerise;

dégénérescence (cellules granuleuses) dans la partie postérieure

de la capsule interne gauche et dans le faisceau pyramidal du

même côté, à travers la protubérance et le bulbe, d'où la pa-

résie et les mouvements choréiformes postparétiques du côté

droit. Hématome de la dure-mère au niveau du lobe temporal

gauche, et foyer de ramollissement brun-rouge dans l'insula

du côté gauche ; de date plus récente que l'altération de la

couche optique, ces lésions expliquent l'aphasie (très légère

atteinte de la troisième frontale contiguë). La circonvolution

du corps calleux contient, dans sa partie antérieure, un kyste

gros comme une lentille.

II. Sarcome du lobe frontal. Observation dans laquelle,

une tumeur occupant une grande partie du lobe frontal, les

symptômes se rapprochèrent des accidents expérimentaux pro-

voqués par Munk chez les singes et les chiens (muscles de la

nuque et du rachis). Femme de soixante-treize ans. Il y a seize

mois, affaiblissement de la mémoire ; depuis neuf mois, dé-

revue DE pathologie nerveuse. 233

marche raide attribuée à des douleurs dans les genoux ; incon-

tinence d'urine, céphalalgie; plus tard, maintien permanent

de la tète et de la face dans une sorte d'inflexion en avant,avec

rotation constante à droite (l'animal auquel on a extirpé le

lobe frontal gauche tient constamment la tête tournée à gau-

che et la colonne dorso-lombaire présente une incurvation anor-

male à droite) ; finalement coma. Autopsie. Dans le lobe fron-

tal droit, existe une tumeur qui a principalement détruit la

substance corticale des deux frontales supérieures, sauf leurs

parties antérieures et postérieures, qui a envahi la substance

blanche de la même région (forme et volume d'une pomme),

qui a pénétré à travers la faux de la dure-mère dans la pre-

mière frontale. P. K.

XLV. Remarques sur LE mémoire de Déjerine INTITULÉ : Du rôle joué

par la méningite spinale postérieure des tabétiques dans la patho-

génie des scléroses combinées; par C. Westphal (drch. .Psych.

XYI, 2).

Dans toutes les lésions combinées, dit Déjerine, l'atteinte des

cordons latéraux a lieu par la propagation d'un processus in-

flammatoire de la pie-mère (leptoméningite) sur ces cordons;

de l'altération primitive, autonome, des cordons postérieurs du

tabétique part un processus d'irritation méningitique qui, diffu-

sant le loug de laméninge, se développe et frappe secondairement

les cordons latéraux. Telle est l'interprétation de M. Westphal

sur le mémoire de 1\1. Déjerine; M. Westphal revendique lapriorité

de l'idée; il ajoute qu'il a jadis conclu négativement, du moins à

la lumière de la généralité des faits, contre la théorie posée par

lui dans des termes semblables. P. K.

XLVI. CONTRIBUTION A la casuistique DES TUMEURS DU CER-

veau ET A LA CONNAISSANCE DES LOCALISATIONS CÉRÉBRALES J

par TH. SOELAN. (Allg. Zeitschr. f. Psych., XLII, 2).

Il s'agit d'un cas de tumeur unique (solitaire) du cerveau :

sarcome de la dure-mère au niveau du tiers moyen de la parié-

tale ascendante droite, à ce niveau la pariétale ascendante est

pâle, anémiée. On constata principalement de la lypémanie

avec agitation, des hallucinations de l'ouïe, et du jour où le

petit néoplasme (1 cent. de diamètre) pressa suffisamment

contre la zone motrice, des contractures de la main et des

Archives, t. XII. 16

234 REVUE DE pathologie NERVEUSE.

doigts du côté gauche accompagnées de sensations de tremble-

ment dans le bras et la jambe, du même côté. Aux diverses

phases d'amélioration et d'aggravation correspondent, de même

que dans toutes les tumeurs, des séries de poussées et d'arrêts

néoplasiques. On rencontre encore de la pachyméningite

pseudo-membraneuse au niveau des deux lobes frontaux,

un hématome sous-dure-mérien récent au milieu du lobe frontal

gauche. Telles sont les principales particularités de ce fait à lire

en entier. P. K.

XLVII. Communications NEUROPATHOLOGIQUES DE l'hôpital de

BRUNS\VICK; par R. SCHULZ (Arc%. f. Psych., XVI, 3).

I. Hémianopsie temporale gauche unilatérale. Diagnostic

erroné de tumeur cérébrale. La constatation successive de ce

symptôme, puis d'une hémianopsie homonyme latérale du

même côté, d'hémiparésie droite puis de paraparésie et presque

de paraplégie des quatre extrémités avec contracture des mem-

bres inférieurs, exagération excessive des réflexes tendineux,

clonus dorsal des deux pieds, troubles de la sensibilité justifie-

raient en quelque sorte le diagnostic de tumeur à progression

lente siégeant dans la glande pituitaire et comprimant la bande-

lette optique droite; la mort a lieu dans la démence compli-

quée 'd'idées de persécution, de divagations complètes, avec

paralysie absolue de la vessie et du rectum, gangrène du décu-

bitus acutus. L'autopsie révéla deux foyers morbides : l'un

constitué par une méningite chronique, à son maximum de

développement autour du chiasma, à laquelle on peut attribuer

la série des accidents visuels tout en s'étonnant que la cécité

n'ait pas été complète, l'autre, représenté par une pachymé-

ningite cervicale hypertrophique, auquel M. Schulz rattache les

phénomènes spasmodiques d'origine spinale, et la paralysie

vésico-rectale imputés à tort à la compression de la protubé-

rance. On constatait encore de l'encéphalite interstitielle ;

peut-être la lésion du lobe occipital est-elle en rapport avec

les syndrômes oculaires; un examen plus complet aurait peut-

être fourni entre les mains d'un psychiatre des points de repère

satisfaisants ; tel est l'avis de l'auteur.

II. Convulsions dans le territoire du facial droit. Aphasie

amnésique. Foyer du volume d'une noisette dans la circonvolution

de Broca du côté gauche. Individu indemne d'hérédité neuro-

REVUE DE pathologie NERVEUSE. 235

psychique. A la suite d'un accident de voiture, qui cependant

ne l'atteignit point àla tète et ne lui fit pas perdre connaissance,

il se plaint de crampes stomacales violentes, commence à ne

plus pouvoir s'exprimer et à grimacer. Puis, s'installent des

convulsions clomques de la moitié droite de la face affectant

bientôt la forme subintrante : chaque accès est précédé d'un cri

spécial suspirieux, la tète est également tirée en arrière à droite

et l'inspiration se montre bruyante, la perte de connaissance

est complète, les pupilles ne réagissentplus, on note de la dévia-

tion conjuguée des yeux à gauche et en haut. Simultanément,

aphasie amnésique parfaite ; le malade comprend, s'exprime

par gestes, mais ne peut trouver les mots qui lui sont néces-

saires pour émettre ses,idées.Le troisième jour des convulsions,

les accidents, qui ont débuté par le facial inférieur, et ont pro-

gressivement monté, passent concurremment à gauche (pau-

pière) pour envahir finalement le tronc lui-même (opistho-

tonos, trismus, tétanisme) ; asphyxie mortelle. Un tubercule

caséeux occupe exactement la place de la circonvolution de

Broca et le sillon prsecentralis (frontal parallèle), mais il est

probable, dit M. Schulz, que le néoplasme irritait par propaga-

tion les zones 7, 8, 11 d'Exner, et le centre 11 de la première

temporale. Les convulsions générales du dernier jour sont dues

à la méningite récente généralisée.

III. Tétanie. Observation de convulsions toniques symé-

triques des extrémités survenant de temps à autre chez une

femme grosse et affectant particulièrement les bras. Ni perte

de connaissance, ni troubles de la sensibilité, hyperexcitabilité

mécanique du facial, hyperexcitabilité électrique énorme des

nerfs des extrémités à l'égard du courant constant. Sous l'in-

fluence des bains chauds, du bromure de sodium, la malade

guérit à la suite de son accouchement.

IV. Sarcome primitif de la pie-mère de la moelle épinière sur

toute la hauteur de l'organe*. - Hérédité neuropathique et

notamment, dans la famille, propension à faire des néoplasmes

dans le système nerveux central ; un oncle est mort de gliome

de la protubérance; une nièce a succombé à un sarcome de la

moelle épinière. La femme qui fait l'objet de cette observation

paraissait, selon la nomenclature deFried. Schultze, en proieà

une paralysie mixte aiguë, à la fois descendante,' à la fois ascen-

1 Voy. Archives de Neurologie, t. XI, p. 160.

236 REVUE DE pathologie NERVEUSE.

dante; c'est-à-dire que la parésie des extrémités supérieures,

accompagnée de légère paresthésie, fut bientôt suivie de para-

lysie complète des mêmes membres avec anesthésie et troubles

vasomoteurs; sur ce, parésie, puis paralysie absolue, des extrémi-

tés inférieures avecpertedela sensibilité, suppression partielle

des réflexes patellaires et des réflexes cutanés, parésie vésicale

(rétention d'urine) et douleurs très prononcées tout le long du

rachis; mort par paralysie de la respiration. Diagnostic ainsi

formulé : méningo-myélite aiguë ; la myélite ayant commencé

par la moelle cervicale s'était probablement étendue inférieure-

ment, puis elle avait monté, avait gagné le faisceau respiratoire

de Krause qui s'étend jusque dans la moelle cervicale. La

promptitude de l'évolution ne permettait pas rie supposerl'exis-

tence d'un néoplasme occupant toute la hauteur de l'organe ;

SI. Schulz croit que la tumeur a dû se développer il y a quatre

mois, qu'elle a pris naissance dans la pie-mère lombaire, qu'elle

s'est graduellement étendue en haut jusqu'à la partie inférieure

du bulbe (figure à l'appui). P. K.

XLVIII. Sur une FORME TOUTE particulière DE paralysie SPAS-

MODIQUE accompagnée DE PHÉNOMÈNES cérébraux, ENTÉE

sur un fonds D'HÉRÉDITÉ (SCLÉROSE multiloculaire) ; par

F. PELizOEus (Arch. f. Psych., XVI, 3).

Il s'agit d'un enfant de huit ans présentant du nystagmus

bilatéral, de la bradylalie, quelques troubles de l'innervation

dans les extrémités supérieures, de la paralysie spasmodique

des membres inférieurs, sans atrophie ni perturbation de la

sensibilité ; conservation de l'excitabilité faradique et galva-

nique des muscles ; exagération des phénomènes tendineux. Le

nystagmus daterait de l'âge de trois mois; à l'âge de six mois,

les mouvements parurent maladroits; l'enfant ne présentait

pas cette allure vive des membres caractéristique de l'état

normal; quand on voulut le faire marcher, on s'aperçut qu'il

ne commandait pas à ses extrémités inférieures, et c'est alors

que se développa graduellement l'attitude présente (flexion

des cuisses sur le bassin, des jambes sur les cuisses, pieds

varus-équin) ; la parole ne devint mauvaise qu'à partir de la

troisième année. Débilité mentale, mais intégrité de la mé-

moire. La famille compte cinq membres atteints de la même

forme morbide, ayant exactement suivi la même marche, sévis-

REVUE DE pathologie nerveuse. 237 7

sant sur les mâles et passant à travers les femmes sans les

toucher. Le nystagmus, la bradylalie, la paralysie spasmo-

dique, l'absence d'atrophie, rapprochent cette affection de la

sclérose en plaques dont elle diffère par le type régulier de sa

symptomatologie, de son évolution, de son hérédité, de sa

précocité. Malheureusement, on manque d'autopsies. M. Peli-

zoeus analyse, critique, révise l'ensemble des faits connexes, y

compris les observations de sclérose multiloculaire pendant

l'enfance. Après la sclérose en plaques, l'hydrocéphalie serait,

d'après lui, capable d'engendrer de semblables phénomènes,

mais l'examen des crânes de deux patients encore vivants (âgés

de huit et vingt-huit ans) contredit à cette hypothèse. P. K.

XLIX. NOUVELLES communications sur LES affections DU SYS-

TÈME NERVEUX QUI SE RATTACHENT A DES LÉSIONS CÉPHALIQUES

ET A DES commotions CERÉI3ROôPINALESdCIYtS l'espèce, accidents

des voies ferrées); par M. H. Oppenheim (Arch. f. Psych.,

XVI, 3).

Ce mémoire constitue une réponse à la manière de voir de

M. Charcot, sur les faits déjà présentés par l'auteur en com-

mun avec M. Thomsen. L'auteur y voit un type morbide spé-

cial caractérisé par un état de dépression anxieuse, avec

insomnie ou sommeil agité par des rêves cruels, précédé de

visions terrifiantes; par de l'hypochondrie qui nuit à la viva-

cité des facultés intellectuelles (préoccupations sans affai-

blissement de la mémoire); par des phénomènes épileptiformes

de tout genre accompagnés d'obnubilation de la connaissance;

pardes sensations subjectives importunes, des sensations anor-

males bizarres, des vertiges, des douleurs avec sentiment de

tension rachidienne et sacrée, des élancements zoniformes,

de la raideur et de l'embarras dans les mouvements, de l'affai-

blissement du sens génésique, de l'anesthésie générale et

spéciale irrégulièrement distribuée, variée quant à sa moda-

lité, enfin par de la dysurie et de la constipation habituelle.

Les sous-genres nosographiques les plus communs sont consti-

tués par une hypochondrie pure sans phénomènes objectifs,

par des lésions surtout atrophiques du nerf optique, par de la

torpeur des pupilles, par des accidents fébriles. Conclusions.

1 Voir Charcot. Leçons du Progrès médical, t835. A propos de six cas

d'hystérie chez l'homme et Archives de Neurologie, t. XI, p. 80 et 83 § I V).

238 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

Les traits fondamentaux de l'ensemble des syndrômes consécu-

tifs aux accidents de chemin de fer en font, dans beaucoup de

cas, une entité spéciale qui ne se confond avec aucune des ma-

ladies connues. Dans un certain nombre de cas, ils repré-

sentent une forme mixte de psychonévrose (hystérie, épilepsie,

neurasthénie, folie), sans que l'assimilation soit permise. z

Dans une assez forte proportion d'observations, il existe des

signes morbides qui indiquent certainement une lésion orga-

nique du système nerveux à évolution insidieuse. Est-ce à dire

qu'on doive parler de petits foyers myélitiques ou encéphali-

tiques (Westphal) ? qu'on puisse penser à une sorte de sclérose

en plaques spéciale ? On n'en saurait décider. Il parait, en tout

ras, ne pas exister de guérison complète; loin de là, les désor-

dres opiniâtres, mais mitigés durant la première année qui

suit l'accident, s'aggraveraient plus tard. P. KÉRAVAL.

L. De la paralysie saturnine; par SCHULTZE (Arch. f. Psych.,

XVI, 3.)

Un homme de vingt-cinq ans, saturnin depuis cinq ans, est,

en juin C882, atteint de paralysie de l'avant-bras droit; six

mois après, l'avant-bras gauche est pris. Dès lors, la paralysie

porte surtout : à droite, sur les extenseurs des doigts et de la

main, le long extenseur du pouce, le premier interosseux,

l'opposant et le court fléchisseur du pouce, le court abducteur

du pouce (moins affecté); à gauche, sur l'extenseur commun des

doigts, le premier radial externe, le cubital postérieur, les

longs abducteur et extenseur du pouce. Atrophie extrême et

réaction dégénérative complète des muscles malades. Le del-

toïde, le biceps et le triceps brachial, sains, présentent

néanmoins, sous l'influence de l'électricité galvanique, des

tremblements violents, mais de courte durée. Intégrité de la

sensibilité, des réflexes cutanés et tendineux (très nets). Mort,

le 6 janvier 1885, de néphrite interstitielle avec foyers de pneu-

monie. L'autopsie révèle : hypertrophie du coeur gauche ; pneu-

monie catarrhale bilatérale; récent foyer hémorrhagique, du

volume d'un pois, dans la protubérance; dégénérescence très

étendue (en bandes) ou totale des muscles de l'avant-bras ;

dégénérescence grise évidente des deux nerfs radiaux à l'avant-

bras ; décoloration légèrement grisâtre des racines les plus

inférieures de renflement cervical et de quelques trousseaux

delà queue de cheval. Au microscope, épaississement des vais-

REVUE DE pathologie NERVEUSE. 239

seaux méningés; asymétrie congéniale de la moelle spinale

dont les segments lombaires et cervicaux sont pauvres en cel-

lules nerveuses, mais aucune trace de poliomyélite; çà et là,

dans la substance grise intacte, cellules-araignées développées,

névrite parenchymateuse du nerf radial droit, commençant au

niveau de l'origine de la branche destinée au long supirateur

et descendant avec elle; névrite atrophique disséminée, en

plaques, dans le plexus brachial gauche ; atrophie des éléments

contractiles dans les muscles sus-mentionnés avec multiplica-

tion des noyaux. Après l'étude analytique et critique des obser-

vations de Erb, Remak, Vulpian, Oeller, Oppenheim, de

Monakow, l'auteur conclut que d'ordinaire le plomb a l'air

d'atteindre les nerfs périphériques les premiers, et que c'est

lorsque la paralysie se généralise que l'on rencontre une lésion

centrale des cornes antérieures. Mais il est impossible de for-

muler une règle relative à l'altération primitive des cellules

qui commandent au radial, du radial lui-même, des cellules

centrales ou des tractus nerveux périphériques quelconques.

L'envahissement simultané du centre et de la périphérie,

l'élection du poison pour certaines zones, pour le système vas-

culaire, l'hypothèse de la nécrobiose vasculaire et de la trans-

mission ascendante par la gaine de Schwann (Gombault)

attendent encore des réponses probantes et explicatives. Le

plomb lèse-t-il le muscle avant de toucher le nerf; la présence

d'une réaction dégénérative avant la paralysie ou même sans

qu'il existe de paralysie plaiderait en faveur de la myopathie

primitive, tandis que l'anatomie pathologique affirmerait la

névrite préalable. Enfin, M. Schultze insiste, à propos de l'ob-

servation présente, sur l'évolution progressive de la paralysie,

malgré le changement de milieu, évolution qu'il rattache à la

complication néphritique ; surl'atteinte partielle des supinateurs

qui pourraient bien se montrer invariablement affectés si l'on

possédait des moyens cliniques de juger exactement de leur

force; sur la légère altération des nerfs sensitifs (une branche

sensible du radial, une racine postérieure du renflement cervi-

cal) ; sur l'apparition de tremblements en des muscles anatomi-

quement sains à l'occasion de l'excitant électrique et de l'effort

(genèse, mécanisme inconnus). P. K.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE

LI. LE crime ET la FOLIE; par le Dr P. DUKoFF. (Le lVestnz'k

(le Messager) de psychiâtrie, du professeur J. Mierzejewsky,

1885, t. II.)

Après un aperçu historique sur les relations entre le crime

et la folie et l'analyse d'un certain nombre d'observations per-

sonnelles sur les aliénés criminels, l'auteur arrive aux conclu-

sions suivantes :

I. Le crime a beaucoup de ressemblance avec la folie, mais

il ne lui est nullement identique; les points qui les rapprochent,

relatifs à l'anatomie pathologique et à l'étiologie, ne suffisent

pas à compenser les différences radicales qui les séparent.

II. La fréquence des affections mentales, chez les criminels

détenus, dépend non seulement de causes individuelles (l'hé-

rédité, mauvaise éducation, habitudes vicieuses), mais aussi des

conditions mêmes de l'emprisonnement. III. Les formes

des maladies mentales qui se développent chez les criminels

emprisonnés étant, au fond, identiques aux formes observées

chez les sujets qui jouissent de leur liberté, offrent souvent

néanmoins quelques particularités, quant au contenu de leur

délire, qui se trouve entrelacé avec divers événements de leur

vie criminelle, mais ces particularités ne changent pas le

caractère général de la maladie mentale. IV. Un fou peut

commettre un crime parfaitement identique à celui que commet

un homme sain; seulement, le crime du premier, étant le résul-

tat d'une maladie mentale, aura un caractère accidentel, tandis

que celui du second aura toujours un aspect prémédité ayant

pour cause des tendances vicieuses ou une passion quelconque.

V. Les criminels devenus aliénés ne doivent pas être pla-

cés avec des malades ordinaires à cause de la différence de

leur nature et de l'influence corruptrice qu'ils peuvent exercer

sur ces derniers. VI. On ne peut s'attendre à améliorer les

criminels que si des hommes compétents se font un devoir

' REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 241

d'étudier le côté moral de ces individus et d'indiquer le mode

de détention, d'occupation, etc., qui convient le mieux à la

nature des sujets. Le système, qui ne poursuit que l'idée de

punition, ne peut jamais s'attendre il modifier favorablement

l'état moral du détenu dans les cas mêmes où celui-ci n'offre

originellement aucune défectuosité cérébrale. SARDINE.

LU. Automatisme EPILEPTIQUE ; par le Dr ALTHAUS (Analyse).

(The 73ritisïe med. Jo2c·n., 27 févr. 1886, p. 29 ? )

W... (E.), âgé de vingt-trois ans, célibataire; employé de

chemin de fer, admis à l'hôpital en octobre 1885. Aucune ten-

dance nerveuse héréditaire. Convulsions à la première denti-

tion. A six ans, il entra dans les chemins de fer. Première

attaque à sept ans trois mois, sans cause appréciable. Les

accès étaient extrêmement variés, mais présentaient toujours

de l'automatisme, soit après une attaque, soit sans attaque

apparente. Aussi le patient, après s'être couché le soir tout à

fait bien portant, se lève vers le milieu de la nuit, inconscient,

et se promène plusieurs heures hors de sa chambre. Il tourne

pendant des heures sans reprendre conscience. Quand ces

accès le prennent le jour, il se heurte aux passants. Si on ne

le gêne pas, il ne s'ensuit aucun trouble ; mais, arrêté, il de-

vient violent, frappe, s'agite, si bien qu'il faut cinq ou six

hommes pour le contenir.

Dans ces cas, on l'a vu, assis tranquillement à son bureau,

prendre un air égaré, se lever, courir hors de la station, se

heurter aux gens, tomber ensuite à terre et rester insensible.

Il a aussi des attaques où la conscience persiste; il trébuche

comme un homme ivre, injurie les passants. Il ne mord pas

sa langue, mais écume; une fois, il a uriné involontairement.

Il avait aussi des attaques avec demi-conscience et paralysie

de la langue. Il peut encore prononcer des sons, mais n'arti-

cule rien d'intelligible. Quelquefois il a un aura d'une durée

variable et dont le point de départ n'est pas constant. Le plus

souvent, l'accès est instantané. Le malade a eu jusqu'à cinq

accès par jour, rarement il a été plus d'une semaine sans en

avoir.

Le patient a une bonne mémoire, et a dressé un véritable

graphique de sa maladie. Il a perdu son emploi, non pour in-

conduite, mais à cause du trouble que sa maladie apportait

343 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

dans son service. Il écrit bien, mais son regard a quelque

chose de particulier. La face est couverte d'acné pustuleux

dû au traitement par le bromure de potassium. Les autres

fonctions normales; hypertrophie et dilatation du ventricule

gauche, la pointe battant dans le sixième espace intercostal;

'sans souffle. Traitements multiples, mixture composée de

borax, digitale, bromure d'ammonium ; l'acné traité par le

mercure ammoniacal. Le résultat a été vraiment favorable,

l'acné s'est guéri, et le malade est resté sans attaques pendant

ses trois mois de séjour à l'hôpital.

Remarques du Dl rlllhaus. L'importance au point de vue de

la médecine légale de ces faits d'automatisme et de vertige

épileptique, ne saurait échapper. C'est à la manie épileptique

qu'il faut rattacher les pertes prolongées de conscience; ces

chutes, accès dans lequel le meurtre, le vol, le suicide, sont

possibles. L'attaque épileptique, dans ces cas, affecte surtout

les parties du cerveau, lobes frontaux, chargés du contrôle

intellectuel et moral, qui restent pendant un certain temps

paralysés; quand les ganglions centraux de la base du cerveau

sont au contraire hyperexcités, d'où l'impulsion et les actes

automatiques dépourvus de contrôle. Ces malades ne sont

évidemment pas responsables, dans leurs accès, ce cas est

fort semblable à celui du convict Havy Patrick commenté

dans le British Médical Journal, de janvier 2° éd. L'épilepsie

automatique constitue une terrible maladie, où les jours du

malade sont sans cesse en danger, et qui réclame un traite-

ment actif. PILLIET.

LUI. CONTRIBUTION A la symptomatologie DE l'épilepsie

bénigne (epi7epsia milior); par A. MERCKLIN (/t)'<'/t ? Psycle.,

XVI, 2).

Jeune garçon de treize ans présentant une tare névro-

pathique héréditaire, se mettant, à la suite de lectures, à

s'hypnotiser lui-même. Ces pratiques répétées déterminent des

accidents nerveux; pendant plus d'un an, on constate des

accès de trouble rapidement passager de la connaissance, voire

de perte complète de connaissance ; puis, se montrent des phé-

nomènes, d'abord localisés à la tête, et finalement généralisés

d'un parfait caractère (épilepsie). L'auteur en tire que les pre-

miers phénomènes étaient, non des accidents autonomes en

REVUE DE pathologie mentale. 2t3

relation avec l'hypnotisme, mais des ictus rudimentaires, et que

les symptômes cataleptiformes, observés au début, ont été

indiqués par les auteurs comme éléments épileptiques ou post-

épileptiques (baumier). Dans l'espèce, les pratiques de l'hyp-

notisation volontaire chez un individu à prédisposition hérédi-

taire ont altéré directement sa santé; ce dommage s'est d'abord

traduit par un état de nervosisme général que relate le malade

(exemple conforme à ceux de Boeumler, Drosdow, Heidenhain,

Finkelnburg, Wiebe, Holst) et qui a favorisé la genèse de

l'épilepsie. On note encore chez lui, que chaque accès de petit-

mal est, aune certaine période de l'évolution morbide, en rap-

port avec certaines influences psychiques, et peut être produit

volontairement par les influences en question, ainsi quand

il pense à l'hypnotisation et à son état pathologique. Alors

que le début de sa maladie remonte à la contemplation d'objets

brillants, ceux-ci ne provoquent aucun accident dès que l'épi-

lepsie convulsive est constituée et, tout à fait à la fin, l'épilep-

togénie volontaire disparait elle-même (voy. Delasiauve,

Westphal, Fischer, Mendel, Siemens, Gowers, Boeumler).

L'évolution, la constatation dela modalité des accidents (perte

de connaissance absolue) et de leurs caractères (voy. le texte)

élimine, d'après M. Mercklin, le diagnostic d'hystérie. Le

malade est encore en observation. P. K.

LIV. UNE remarque relative A l'épilepsie alcoolique;

par MOE[,1 (Neurol. Centralbl., 1885).

Magnan dit qu'il faut incriminer l'absinthe dans l'épilepsie

des buveurs. Or, à Berlin, parmi les individus séquestrés pour

alcoolisme, le chiffre des épileptiques parait être bien supérieur

à celui de Paris ; la proportion serait de 1/3 à 2/5 (Westphal,

Fuerstner et Moeli), alors qu'à Paris elle comporte 5 à 8 p. 100

(Magnan et Bouchereau). De là l'idée de dresser une statistique

relative au genre de boissons alcooliques ingérées. En élimi-

nant de ce relevé les malades qui, avant l'intoxication, ont été

en proie à des troubles nerveux, ou chez lesquels d'autres

causes ont pu provoquer l'épilepsie, l'auteur arrive à collecter

600 cas sur lesquels 420 faits comprennent des indications

formelles à l'égard du genre de boisson exclusivement absorbé.

De ce tableau, dans lequel les forts buveurs sont ceux qui

quotidiennement consomment pour 30 pfennigs, soit 40 cen-

244 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

times d'alcool, nous extrayons que le vin et la bière sont

relativement moins nocifs (1 épileptique seulement sur 21

observations; puis vient le Kùmmel pur, la moins nuisible des

boissons alcooliques(3 épileptiques sur 20 buveurs); les accès

d'épilepsie se sont principalement montrés chez les buveurs

d'eaux-de-vie saturées de plantes amères ou aromatiques (14

épilepsies sur 30). P. K.

LV. Sur les signes DE dégénérescence dans la folie; par FROEN-

KEL (Allg. Zeitschr. f. Psych., XLII, I ).

Revue critique dont voici les conclusions. Les signes de dégéné-

rescence offrent la plus grande importance surtout en justice; il

faut, dans les rapports, insister sur ces éléments d'appréciation

tout matériels, principalement lorsqu'il s'agit des criminels qui

appartiennent au vaste domaine de la débilité mentale congé-

niale. Il faudrait seulement que les magistrats se convainquissent

de la valeur de toutes les anomalies de formation ou signes phy-

siques de dégénérescence (adhérence du lobule de l'oreille, obli-

quilé et asymétrie de la face, incurvation, surnumérariat, des

doigts et des oiteils, goitre, etc.). En effet Knecht n'a-t-il pas

signalé que parmi 41 forçats atteints d'insuffisance intellectuelle

il y avait 2 idiots très avancés, plusieurs imbéciles épileptiques,

,l 1 déments séniles. Le temps viendra toutefois où tout le monde

se ialliera à cette devise : « Mind is body ». P. K.

L \"1. Note sur un cas d'épilepsie congestive; par M. Truc, interne

des hôpitaux. (Lyon méd., 1885, t. XLVIII.)

Le sujet de cette observation est un prêtre, âgé de trente-cinq

ans, porteur d'hémorrhoides. Lorsque celles-ci donnent lieu à un

écoulement sanguin, à peine constate-t-on quelques absences,

mais le tlux habituel se supprime-t-il, aussitôt, des crises d'épi-

lepsie apparaissent. Enfin toutes les fois qu'on provoque une dé-

perdition sanguine ou séreuse, l'amélioration se manifeste.

Telles sont les raisons sur lesquelles l'auteur s'appuie pour

admettre qu'il s'agit d'une épilepsie d'origine congestive.

G. D.

LVII. Cas d'épilepsie trutés par LE borax; par Ch.-F. CoLSOe.

Quoique le nombre des remèdes proposés pour l'epilepsie soit

considérable, la plupart des médecins accordent la préférence

aux bromures, dont l'emploi produit souvent de l'amélioration,

SOCIÉTÉS SAVANTES. 245

quelquefois la guérison. Mais leur usage s'accompagne souvent

d'inconvénients nombreux, quelle que soit la préparation qu'on

emploie. Ils ôtent l'appétit, donnent de la débilité mentale et

physique, de l'amaigrissement, de la fatigue musculaire, et même

parfois l'exagération des convulsions. Le nombre des remèdes

proposés pour les remplacer est considérable L'auteur parlera

du borax, essayé dans quelques cas à l'hôpital des épileptiques

et des paralytiques de Londres, et qu'il essaye depuis trois ans :

1" cas. Femme, trente ans, intelligence conservée. Ses accès

tombent de 36 en 1875 à 6 en 1882, en suivant une marche pro-

gressivement décroissante. 28 cas. Sur une femme de trente-

six ans. La décroissance est moins nette. Le tableau des accès

relevé par mois, donne des résultats moins nets. Le bromure

diminuait les attaques, mais le petit mal redoublait. Le borax a

paru donner quelquefois de la diarrhée, mais il ne produit pas

l'affaiblissement nerveux des préparations bromées. Les doses

employées ont été, au début, de dix grains trois fois par jour,

jusqu'à la dose maxima de 30 grains trois fois par jour. (Boston

met. sur jurg. Journal, 18 fév. 1886.) P.

SOCIÉTÉS SAVANTES

SOCIÉTÉ MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE

Séance du 12 avril 1886.

Présidence DE M. SÉ11EL.11G ? E.

Le Président fait part à la Société de la perte qu'elle vient de

faire en la personne d'un de ses anciens présidents M. Legrand

du Saulle, décédé récemment, et propose de lever la séance en

signe de deuil. La proposition est acceptée par acclamation.

Séance solennelle.

Présidence DE M. Sémelaigne.

La Société décide qu'en raison du deuil qui vient de la frapper,

le banquet annuel n'aura pas lieu.

246 SOCIÉTÉS SAVANTES.

MM. Féré, Briand, Charpentier, donnent lecture de leurs rap-

ports sur les prix Belhomme, Esquirol, Moreau (de Tours) et

Aubanel. Les noms des lauréats sont proclamés. (Voirie n° 31.

p. 134.)

Séance du : 11 mai 1886.

Présidence DE M. SE11EL.11G1G.

M. Delasiauve communique le discours qu'il a prononcé sur la

tombe de M. Bourdin, dont la mort vient d'être annoncée en

termes émus par le Président. 1

M. RITTI donne lecture d'un mémoire sur la curabilité de la

démence qui lui a été adressé par M. Kowaleski.

Cette communication soulève une discussion à laquelle pren-

nent part MM. Motet, Magnan, Christian et Delasiauve, d'où il

résulte que la Société, ne pouvant l'argumenter en l'absence du

présentateur, il y a seulement lieu de faire des réserves sur le

fond même du mémoire.

M. Dufour envoie une note pour contribuer à l'étude des gué-

risons de la folie par l'hypnotisme.

Des signes physiques, intellectuels et moraux de la folie héréditaire

(suite de la discussion).

M. CHRISTIAN. Au point où en est arrivé la discussion qui a déjà

rempli plusieurs de nos séances, tout ou presque tout a été dit,

et j'en suis presque à regretter l'imprudente promesse que j'ai

faite de venir, moi aussi, m'engager dans le débat. Après l'exposé

magistral de M. Magnan, auquel M. Falret a donné l'appui de sa

parole convaincue et autorisée, vous avez entendu les objections

de MM. Cotard, Charpentier et Bouchereau. Quels arguments

nouveaux pouvais-je vous apporter ? Il m'a semblé cependant que

nos divergences ne sont pas aussi profondes, en réalité, qu'elles

le paraissent au prime abord et que, dans le problème si com-

plexe dont nous discutons les termes, il y a une partie clinique

sur laquelle nous sommes bien près de nous entendre et une partie

étiologique plus sujette à controverse.

Après s'être étendu sur la question, M. Christian combat surtout

le terme héréditaire. L'hérédité ne lui semble pas avoir une

influence aussi générale qu'on est tenté d'admettre. C'est, selon

lui, un facteur éliologique important, mais dont il faudrait limiter

et surtout préciser la sphère d'action. Ils croient que, si l'on n'y

prend garde, l'hérédité devienne quelque chose de vague, de

flottant, d'insaisissable, qu'on invoquera d'autant plus facilement

SOCIÉTÉS SAVANTES. 2 M 7

qu'elle échappera à toute délimitation rigoureuse. Il faudrait

savoir limiter son rôle à l'état du père au moment de la con-

ception, ou à celui de la mère pendant la grossesse, car c'est là

que l'on trouve la cause principale des dégénérescences, du moins

de celles qui, en existant au moment de la naissance, peuvent être

qualifiées d'héréditaires.

Régulateur automatique de la température des liquides. Présenta-

tion d'appareil.

M. BRIAND, après avoir exposé toutes les tentatives faites en

France et à l'étranger par les médecins d'asile pour régler auto-

matiquement la distribution de l'eau chaude dans les baignoires

et éviter ces terribles accidents qu'on a souvent signalés par suite

de la négligence du personnel des bains, présente ! un appareil des-

tiné à maintenir constante la température des liquides. Cet appa-

reil construit sous son inspiration par M. André, ingénieur en chef

de la Société des ateliers de Neuilly, est actuellement à l'exposi-

sition de la Société d'hygiène ; il repose sur la propriété qu'ont les.

métaux de se contracter on de se dilater suivant qu'on abaisse ou

élève leur température et est par conséquent automatique. Il peut

se réglera volonté suivant le nombre de degrés qu'on veut obte-

nir et, donnant dans la pratique de bons résultats, il permet

d'espérer que maintenant les aliénés ne risqueront plus d'être

échaudés dans leur baignoire. M. B.

I

Sautée du 28 Juin 1886.

Présidence de M. Sémelaigne.

Des signes physiques intellectuels et moraux de la folie héréditaire

(suite de la discusion).

M. Magnan. Les intéressants commentaires que vous avez enten-

dus dans les précédentes séances, montrent combien la question

était importante. Malgré les objections qui ont été soulevées, je

pense que nous ne tarderons pas à nous entendre et alors l'accord

ne sera pas loin de se faire entre nous sur ce que l'on désigne du

nom de vésanies.

Je vais d'abord m'expliquer avec M. Falret qui me reproche de

trop étendre le cadre des folies héréditaires et d'y faire entrer des

êlres anomaux n'offrant que quelques bizarreries sans conséquences

graves. Si cependant nous les examinons de près nous retrou-

verons chez eux des caractères atténués, mais analogues à ceux

que nous observons communément chez les vrais aliénés hérédi-

taires. Quel sera alors la limite ? Prenons par exemple un désé-

quilibré qui, à un moment donné, projette impulsivement un mot

248 SOCIÉTÉS SAVANTES.

qu'il ne peut retenir, et comparons-le à celui qui projette un coup

et frappe sans raison un passant inconnu. Ne verrons-nous pas

là deux phénomènes analogues ? Ne sont-ce pas là deux malades

presques identiques ? Comparons un onomatomane qui recherche

avec angoisse et sans trêve ni merci un mot, à un dipiomane qui

recherche avec la même fureur une boisson. L'un et l'autre sont à

la poursuite d'une sensation qui doit remettre momentanément

un terme à leur désir. Ils appartiennent donc tous les deux à un

même groupe. Si j'ai aussi poursuivi mon enquête sur ces gens

classés dans ce qu'on appelle les frontières de la folie en com-

mençant par les idiots, pour continuer par les imbéciles et les

faibles d'esprit, c'est pour faire mieux comprendre, par l'étude des

derniers l'état mental des autres.

L'avantage de cette méthode c'est que l'on a pu réunir dans un

même cadre des malades à manifestations différentes, mais reliés

entre eux par un caractère commun, qui n'est autre qu'un état

hériditaire et de pouvoir ainsi, par l'examen facile des uns, s'expli-

quer l'attitude des autres.

La clinique nous offre du reste parfois plusieurs de ces syn-

dromes réunis chez le même individu. Rappelez-vous de cette

malade queje vous ai présentée. Elle ne pouvait réprimer certains

mouvements, ni retenir certains mots grossiers; elle riait ou

pleurait alors que son état normal du moment était en opposition

avec ses rires ou ses pleurs. A d'autres moments c'étaient des

discours intarissables qu'elle prononçait malgré elle, ou bien

encore elle avait des impulsions homicides et des observations

génésiques. Il ne lui manquait rien.

M. Cotard me cherche, comme il le dit lui-même, une querelle

de mots, mais sous cette apparence modeste son argumentation

ne cache rien moins qu'une discussion de doctrine rondement

menée. Pour ma part j'accepte très volontiers le mot de dégénérés

qu'il me propose pour désigner ce groupe d'individus dont nous

nous occupous; mais pourquoi ne pas nous servir du terme d'héré-

ditaire qui est impropre, j'en conviens, mais qui a l'avantage

d'être employé par tout le monde, y compris M. Falret. Pour

éviter toute confusion et pour satisfaire tout le monde, appelons,

si vous le voulez cet état : folie des héréditaires dégénérés. M. Cotard

me reproche aussi d'établir une doctrine d'après laquelle un

ascendant donnerait naissance à un être dissemblable. Il n'en

est pas toujours ainsi. J'ai observé une dame toujours à la pour-

suite d'un mot et dont le père offrait la même bizarrerie. Vous

connaissez aussi cette dame qui toute la nuit tourmente son mari

par des discours sans suite; son père obligeait de même sa

femme à l'entendre des heures entières. L'impulsion à faire des

acquisitions inutiles se retrouve souvent chez plusieurs membres

de la même famille. J'ai encore dans mon petvice un homme qui

SOCIÉTÉS SAVANTES. 249

a une passion pour les tabliers blancs; sa mère adorait les rubans

rouges. Morel enfin rapporte l'histoire d'un père et de sa fille qui

ne pouvaient toucher a un chien ni à un chat. 11 faut bien accorder

à ces faits une influence qui justifie l'expression à' héréditaires .

M. Cotard pense enfin que c'est à la précocité du début des acci-

dents qu'on doit attribuer la bizarrerie des impulsions et il

m'oppose des cas choisis dans la pathologie ordinaire. Ses

exemples n'infirment pas ma théorie; et j'espère qu'il admettra

avec moi qu'un enfant qui, dès l'âge de cinq ans, a des érections à

la vue d'une tête de vieille femme et qui plus tard est obligé d'in-

voquer cette image pour cohabiter avec sa femme est un être dont

l'hérédité seule a pu altérer sitôt la conformation normale.

Lacritique de M. Charpentier nous reproche surtout, à Il. Falret

et à moi, d'avoir réuni sous la même étiquette plusieurs formes

de folies disparates. Qu'il se rassure, nous n'avons jamais eu l'in-

tention de mettre tant de choses dans la folie de* héréditaires. N'y

entre pas qui veut ! Je me range à l'opinion de M. Bouchereau

qui fait intervenir ajuste litre, pour expliquer l'explosion d'un

délire aussi prématuré, les maladies de la grossesse; mais il

existe aussi d'autres causes.

Enfin vous avez entendu la magnifique plaidoirie de M. Christian

enfaveur de M. Cotard.11 ne conteste pas l'influence de l'hérédité;

mais il voudrait la limiter à l'élat intellectuel du procréateur au

moment de la conception, car tous les aliénés sont, dit-il, entachés

d'hérédité, et, pour faire une classe spéciale de quelques-uns, il

faudrait leur accorder des caractères spéciaux. Ce n'est là qu'un

petit côté de la question ; peu importe pour la doctrine que l'in-

fluence pathologique se fasse sentir dans telle ou telle condition.

L'important, c'est qu'elle existe. Pour ce qui est des caractères

spéciaux aux héréditaires, ils existent : ce sont ceux accordés par

Christian aux dégénérés et je me suis déjà mis d'accord avec lui

en acceptant pour nos héréditaires le qualificatif de dégénérés.

MARCEL BItIAND.

SOCIÉTÉ PSYCHIATRIQUE DE BERLIN

Séance du 15 juin 1885 '.

M. LOEHR, senior, ouvre la séance en se faisant l'interprète des

collègues qui n'ont pu assister à cette réunion. 11 résume les

z Voy. Archives de Neurologie, t. XI, p. 265.

Archives, t. XU. 17 7

250 SOCIÉTÉS SAVANTES.

actes de l'année sociale qui vient de s'écouler, et invite l'as-

semblée à élire un nouveau président. Il est renommé par accla-

mation.

11f. MKNDKL, empêché, ne peut faire la communication qu'il

avait annoncée sur l'épilepsie jacksonienne et la folie.

M. KNECHT. Des phénomènes catatoniques dans la paralysie géné-

ruile. - Dans ces dernières années, on a observé quelques cas de

psychoses présentant, pendant leur évolution, tantôt le tableau

de la paralysie générale, tantôt celui de la catatonie au sens de

Kahlbaum '.

On en peut distinguer deux groupes : Le premier groupe est

caractérise par la manifestation dès le début et pendant les

quelques mois qui suivent du syndrome de la stupeur mélanco-

lique très net, puis, soudain se montrent des symptômes d'une

paralysie générale rapidement progressive qui termine la vie du

malade. Dans le second groupe, nous trouvons d'abord l'aspect

clinique de la paralysie générale ultérieurement remplacée par

des accidents catatoniques entrecoupés d'attaques congestives

répétées; ici la marche est extraordinairement traînante; dans

le seul cas qui jusqu'ici ait terminé son évolution, la mort

résulta d'une affection intercurrente, et malgré toute l'habileté des

aliénistes consommés, dans la pluralité des faits, il a été impos-

sible d'établir un diagnostic et un pronostic convenables.

L'auteur communique les détails relatifs à deux observations

du premier groupe dans lesquelles le dernier épisode, rapproché

de l'examen nécroscopique, ne laisse aucun doute sur l'existence

d'une paralysie générale finale. Mais avail-on affaire à une para-

lysie générale complicatrice d'une stupeur, ou les deux aspects

cliniques doivent-ils être tenus pour des stades successifs d'un

même processus ? Dans l'une des observations (la seconde) on ne

saurait méconnaître, en serrant de près l'histoire du malade, la

cohérence, l'enchaînement de l'ensemble des échelons de la

maladie. Si en effet, l'on fait abstraction d'un premier accès d'a-

gitation qui eut lieu en 1881 et ne dura que cinq semaines (quel-

ques idées de persécution concomitantes), on a eu sous les yeux,

depuis janvier 1883 jusqu'au 27 août 1881, un processus continu

dépourvu de toute espèce d'intermittence ou de rémission, dont

la terminaison a été une démence paralytique caractéristique.

La première observation se présente moins nette en ce qui

concerne le rapport de chacune des phases de l'ensemble mor-

bide ; il est incontestable qu'on y rencontre une longue rémission,

de plus d'une année, mais il suffit de la rapprocher cliniquement

de la seconde observation, pour être obligé de considérer l'en-

1 Voy. Archives de Neurologie, t. XI, p. 265.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 251 t

semble de la marche de Id maladie, connue sous la dépendance

du même processus. Car dati, les deux cas la psychopathie com-

mence par une courte agitation accompagnée d'idées délirantes

mélancoliques, puis s'effectue une rémission assez longue qui

semble complète, après laquelle reparait une lypémanie vraie

avec profonde stupeur; cette lypémanie stupide dure assez long-

temps, s'améliore ensuite rapidement ainsi que dans la catatonie-

type de Kahlbaum, et parait guérie (po observation) ou laissée à

sa suite un évident affaiblissement intellectuel (2° observation);

voici alors qu'interviennent les éléments symptomatiques de la

paralysie progressive, la déchéance psychique et physique mar-

chent à pas de géants, le patient succombe en quelques mois.

Cette graduelle et successive aggravation des épisodes dans les

deux faits témoigne du rapport intime qui lie les phases les unes

aux autres, et celles-ci à un processus pathologique univoque. Il

importe aussi d'insister sur la présence des phénomènes catato-

niques tels que les a décrits Kahlbaum, même au cour du dernier

stade de palalysie générale : telles sont la répétition prolongée

de séries de mots sonores et les promenades circulaires de ce

genre d'aliénes. Il est d'ailleurs impossible de saisir les éléments

pathologiques qui permettraient à un stade précoce de prévoir

l'issue finale, quoique, dans la première observation, on constate

un trouble profond de la sensibilité générale (le malade se croit

pourri, il n'a pas de tête) et dans le second fait, une angoisse à

motif grotesque (crainte d'être dévoré vivant), tous phénomènes

indicateurs d'une notable perturbation des fonctions encépha-

liques.

Passons maintenant à deux observations du second groupe :

début par des symptômes de paralysie générale, et plus lard

calatouie typique avec attaques congestives intercurrentes. Symp-

tômes connus aux deux cas : d'abord, dépression mélancolique

précédée, dans la première observation, d'accès vertigineux;

puis, agitation modelée avec idées de grandeurs mobiles et fré-

quents changements d'humeur immotivés; ce stade est hanté,

chez le premier patient, par une paraplégie spinale aiguë; chez

le second, par une légère attaque congestive. Le premier fait se

fait remarquer par l'ensemble des signes de la catatonie typique

de Kahlbaum : mutisme, isolement, pi omenades constantes sur

le même chemin à pas raides, les épaules élevées, la bouche sou-

vent effilée en forme de groin, va et vient en reniflant bruyam-

ment, port du bras gauche fléchi à angle droit; souvent, pendant

des heures entières le malade lui imprime des secousses tandis

qu'il exécute avec les jambes des mouvements de fronde, enfin,

la raideur croissant, il conserve longtemps les attitudes qu'on lui

impose et doit être incité à s'alimenter. Dans le second cas, on

reconnaît aussi la catatonie bien marquée dans ses traits princi-

252 SOCIÉTÉS SAVANTES.

paux, malgré l'aflaiblissement psychique précoce du patient; ce

malheureux demeure assis raide et figé, il s'oppose et résiste à

toute modification de situation qu'on veut lui imprimer, il tient

sa bouche avancée en forme de trompe, ses pupilles rigides et

immobiles sont fortement dilatées; de temps à autre, son corps

et sa face sont secoués par des tremblements convulsifs qui par-

fois ne se manifestent qu'à gauche, quelquefois aussi légèrement

agité, il se promène à grands pas et imprime à ses mains rap-

prochées l'une de l'autre des mouvements perpétuels de torsion.

Sa trompe buccale exécute également des mouvements de masti-

cation. Après une durée de quatre ans, il se produisit brusque-

ment chez le premier aliéné un ictus apoplectiforme grave, suivi

de déchéance psychique et somatique profonde et d'hémiparésie

droite assez tenace; il semble qu'on assiste au stade terminal de

la paralysie générale, et cependant tout disparait presque complè-

tement, une rémission totale se manifeste, si bien que la mort

n'a lieu que cinq ans plus tard de pthisie pulmonaire au milieu

de la déchéance la plus complète, sans qu'il soit survenu de para-

lysie généralisée. Le manque presque absolu de lésions céré-

brales, la durée et les phénomènes principaux de l'évolution mor-

bide permettent à peine de regarder la première observation

comme une paralysie générale, c'est plutôt un cas de catatonie

ou si l'on préfère une autre terminologie de vésanie systématique

avec stupeur modifiée, par intervalles, par des lésions intercur-

rentes ; c'est ainsi que la paraplégie spinale brusque des pre-

miers mois devrait, conformément au cas récent de Hitzig être

rattachée, quoique la moelle n'ait pas été examinée, à une hémor-

rhagie des méninges spinales, quant à l'hémiparésie tardive,

elle ne se rapporte certainement pas à un épanchement sanguin

(aucun signe nécroscopique). Dans le second cas, la rapidité de

la démence, l'absence du phénomène du genou, l'immobilité

pupillaire permanente, sont en faveur d'une paralysie générale

très probable quoique pour le moment (le malade n'est pas mort)

l'ensemble des symptômes rappelle au premier abord la catatonie.

Remarquons enfin l'âge relativement peu avancé des malades du

second groupe à l'époque où ils furent atteints (vingt-six et

trente et uu ans) tandis que, dans le premier groupe, il s'agit de

l'âge classique des paralytiques généraux (trente-quatre et trente-

cinq ans).

Discussion :

On s'inquiète surtout de savoir si la catatonie forme un type

morbide autonome. Non, disent MM. F¡"l\OENKEL et IDRLER, car les

'1 Voy. Congrès des naturalistes et médecins de Magdebourg, 1884.

(Archives de Neurologie.)

SOCIÉTÉS SAVANTES. 253

paralytiques généraux groupent, enfilent sans cesse les uns aux

bout des autres des mots dépourvus de sens (Froenkel); les cas

de catatonie seraient donc des cas de paralysie générale pro-

longée (Ideler).

M. ,TASTItOWITZ. Il n'y a que les émotions psychiques de nature

anxieuse qui ne procèdent pas des état» catatoniques.

M. EDFL. La rigidité catatonique des muscles est un symptôme

qui se montre aussi en d'autres cas.

M. Knecht. Il existe cependant des formes mixtes dans les-

quelles il est difficile de distinguer s'il y a catatonie ou paralysie

générale.

M. Vogelgesang. Une paralytique générale s'adonnait à l'excès

à la répétition de mots dépourvus de sens.

M. JASTROWITZ. C'est là une observation fréquente dans la para-

lysie progressive avancée.

M. LOEIIR, senior. La catatonie, d'après son expérience, ne se

montre pas autonome; elle n'entraîne un pronostic fàcheux que

lorsqu'il s'y ajoute des signes de paralysie générale.

M. HANS LOEllR. Action du système de traitement de Mitchell Play-

fair sur le bilan physiologique de la nutrition. Pour provoquer

l'élaboration des aliments dont on multiplie l'ingestion, dans ce

procédé, il faut faire intervenir le massage et l'électricité. L'au-

teur a examiné l'influence de ces deux agents chez deux individus

physiquement bien portants auxquels on administrait une nour-

riture constante, principalement liquide ; il a trouvé que les effets

de la faradisation échappaient à l'analyse. En revanche, ceux

du massage étaient extrêmement nets ainsi qu'on le peut voir

d'après les tableaux qui montrent la surexcrétion d'urine. d'urée,

d'acide sulfurique et phosphorique, et de chlore. Ce travail sera

publié plus tard, de concert avec d'autres recherches ultérieures.

Discussion :

M. Knecht. Il est très intéressant de comparer les faits de mas-

sage précités qui concernent le massage d'organes normaux

chez des aliénés, avec ceux qui ont trait au massage chil'ur1Ólcal.

Il convient d'insister sur l'hyperexcrétion d'urée qui suivent le

massage pratiqué pour des exsudats de la cavité abdominale.

M. LOEIIR, senior. Et les pesées du corps entier ?

M. Hans La : un. Dans un cas on a pu établir un accroissement

de poids de 3 kilogr. ; dans un autre cas, au bout de 8 jours le

malade avait diminué de 1 kilogr.

M. VOGRLGES.4NG. De la cnnna61none Les parties constituant

1 Comparer avec les travaux sur le même sujet dans les Archives de

Neurologie. --

251 SOCIÉTÉS SAVANTES.

l'action du chanvre indien sont : une résine neutre (cannabine

ou haschischine) et une huile liquide composée de deux carbures

d'hydrogène, le cannabène et l'hydrate de cannabène. Bombelon

extrait du chanvre indien une préparation qu'il appelle canna-

binone ; d'après ses indications, ce produit est la partie du com-

posé cannabique auquel il convient d'attribuer le maximum de

l'action narcotique véritablement surprenante. Elle a la consis-

tance d'une résine liquide, ne contient ni matière grasse, ni

chlorophylle, ni sels, possède une odeur caractéristique, un goût

amer et racle la gorge; insoluble dans l'eau, elle se dissout aisé-

ment dans l'alcool, J'éther, le chloroforme, l'huile, la graisse

(solution or-brun) et se divise fort bien dans la poudre de café.

Les tablettes de Bombelon se composent de 9 parties de café en-

poudre et de 1 partie de cannabinone. M. Bombelon nous a donné

pour nos recherches en injections hypodermiques une solution'

constituée par : cannabinone, 1 partie ou 2 parties ; huile d'a-

mandes douces, 9 parties. Le médicament a été essayé dans ces

conditions à la section des femmes de l'asile de Dalldorf depuis

le mois de novembre de l'année dernière jusqu'à ce jour sans

discontinuer. On l'a d'abord fait absorber sous deux formes à

l'aide d'injections hypodermiques et par la voie gastrique ; mais,

à présent, depuis longtemps il est exclusivement administré par

l'estomac. En effet, l'injection hypodermique à des doses maxi-

mum de 0,20 produisait une irritation du tissu cellulaire et

de la peau fort tenace quoique sans occasionner de douleurs

(8 femmes). Pour l'administrer à 52 femmes d'âges variés, atteintes

de différents états d'agitation (chronique ou maniaque aiguë)

on employa la formule suivante : cannabinone 3 gr.; huile

dolives 150 gr. On put ainsi administrer à la fois 0,15 à 0,60.

Généralement si la dose de 0,30 est devenue sans effet on n'a rien

à attendre d'une quotité plus élevée. Le résultat le plus favorable

fut obtenu dans les angoisses d'une hystérique accusant des hal-

lucinations de la vue et de l'ouïe, et tendant au suicide; on les

évite en maintenant la malade au lit dès le début de l'agitation,

et en lui donnant 0,30 à 0,b0 de cannabinone ; un quart d'heure

à une demi-heure à la suite de l'administration, il se produisit

un sommeil calme, prolongé, durant souvent jusqu'à cinq heures,

puis la patiente se réveille en paraissant très fatiguée pour être

reprise bientôt d'un sommeil assez prolonge. Cette hystérique,

dans un intervalle de pleine lucidité, raconta que un quart d'heure

après l'ingestion médicamenteuse elle sentait ses membres lourds,

puis c'etait le tour de sa tête : il lui était impossible d'ouvrir

les yeux, elle était prise d'une lassitude effrayante, se croyait

ivre; sa langue était quasiparalysée, sa parole difficile; elle

éprouvait le sentiment bizarre de l'éloignement des objets et

chancelait, Sa bouche était tellement remplie de salive qu'elle

SOCIÉTÉS SAVANTES. 255

exécutait une série de mouvements de déglutition, mais la gorge

demeurait sèche; finalement elle s'endormait tout. doucement,

sans rêves ni vision. Elle conclut que la cannabinone est le plus

agréable de tous les agents hypnotiques de la pharmacie qui lui

aient été administrés. Ces assertions ont été confirmées par

d'autres aliénés intelligents. En outre, une gardienne en chef

après avoir pris 0,15 s'est sentie d'humeur excessivement gaie;

surexcitée, elle a d'abord constaté que le mécanisme de la pensée

s'opérait plus facilement ; puis une série de conceptions l'ont

assaillie confusément; àla suracuité visuelle et auditive a succédé

l'apparition de globes lumineux ascendants et descendants, de

montagnes, animaux, fantasmagories bizarres de toute espèce;

un bruissement intense s'est manifesté dans les oreilles, il lui a

élé impossible de lever les bras, une légère timbale lui paraissait

lourde comme un broc en zinc et les membres eux-mêmes avant

acquis la pesanteur du plomb; bientôt son corps semble ceint

d'une sangle, elle ne peut parler et n'ouvre les yeux qu'avec

peine, et tout en entendant ce qui se passe autour d'elle, est

hors d'état de réagir d'une façon quelconque. Parmi les phéno-

mènes accessoires désagréables il faut citer la toux, la brûlure

à la gorge, quelques vomissements : ce dernier devrait être attri-

bué au véhicule huileux et non au principe médicamenteux. C'est

tout ce qu'il convient de relever en fait d'inconvénients. Les allé-

gations de l'hystérique sus-énoncés ont été contrôlées de la

manière que voici : on lui a sans le lui dire administré pendant

plusieurs jours de l'huile pure. La cannabinone n'a comparative-

ment rien produit chez une anxieuse mélancolique, pleurant,

gémissant, s'agitant. Dans la lypémanie animée, la cannabinone

n'a exercé aucun effet sur les idées délirantes, n'a pas calmé les

patientes (Voy. Ricliler de Panl : ow) Il ne serait pas prudent

de vouloir substituer la cannabinone au poison des morphino-

manes, parce que les sensations désagréables qui se montrent à

la suite de son administration, sensations que tout individu non

morphinomane déclare parfaitement supportables, prennent une

allure tellement intense que l'avantage de la cannabinone est évi-

demment douteux. Voici par exemple une tabetique accoutumée

à de hautes doses de morphine; pendant quatre jours, le soir,

on substitue à l'injection de morphine, une injection de canna-

binone ; la malade demande alors qu'on ne la torture pas et

tente de s'éttangler. Une autre malade jadis habituée à l'absorp-

tion de 0,0;5 de morphine, qui avait déjà subi les commence-

ments du sevrage, si bien qu'on ne lui en injectait plus que 0,015

consent à la remplacer par 0, : 10 de cannabinone; elle refuse de

continuer cette substitution parce que, suivant elle, le sommeil

1 Voy. Arch. de Neurol.

256 SOCIÉTÉS savantes.

qui succède à la morphine est bien plus calme, tandis qu'après

la cannabinone l'air lui manque complètement, elle se sent sur

le point de mourir; ces plaintes persistent tout le lendemain : il

est juste d'ajouter qu'elle ne sait pas qu'on a abaissé sa forte

dose de morphine. La plus grande prudence, et même l'abstention

s'imposent chez les cardiaques. Une cardiaque après avoir reçu

O,Oi5 c'est-à-dire une très faible dose, en une fois est prise d'un

collapsus qui oblige à une médication excitante.

En somme, la carmabinone, innocente chez l'adulte, dans les

proportions indiquées, possède une extrême activité chez les su-

jets très anémiques, dont l'activité cardiaque apparaît faible,

ainsi que chez les vieilles gens. A ces individus il suffit souvent de

prescrire le soir avant le coucher, 0,30 pour les faire dormir la

nuit et, le jour suivant jusqu'au soir, incapables de rien, de

quitter leur conche, on les voit, si contre leur gré, on les force à

se lever, chanceler, prendre d'assaut le premier siège vacant où

ils s'endorment presque sur-le-champ ; leur aspect est celui de

cens n'ayant point suffisamment dormi, la parole est encore

lourde. Bien que la cannabinone ne soit pas appelée à occuper

parmi les hypnotiques un rang égal à celui qu'occupent la mor-

phine et le chloral, il faut l'introduire dans notre arsenal théra-

peutique, parce que, à la dose moyenne de 0,30 chez les aliénées,

et de 0,10 chez les individus sains d'esprit, elle fournit, en bien

des cas, un résultat qui contente patients et médecins. Un insuccès

vous laisse toujours le champ libre à l'égard du choix d'autres

narcotiques. Mais la cannabinone mérite d'être essayée ; elle est,

d'ailleurs acceptée volontiers de la plupart des aliénés quand ils

se sont habitués au véhicule huileux.

Discussion :

M. FALK. Quels sont les cas d'aliénation mentale dans lesquels

le médicament doit être employé ?

MM. Vogelgesang et IDELFR. Il est à employer dans l'hystérie.

M. LOEIIR senior. Usez-en dans tous les cas où un hypnotique

doux est indiqué.

M. Mueller. Combien de fois faut-il répéter la dose de 0,30 ?

M. VOG6LGESANG. On peut atteindre dans vingt-quatre heures

0,80; mais, généralement, quand u.fi0 n'ont déterminé aucune

action, il convient de ne pas pousser la quantité plus haut.

M. Guttstadt communique l'histoire d'un individu amené d'of-

fice à l'asile d'Ilildesheim, qui y vécut huit ans sans qu'on ait jamais

rien pu savoir sur sa personnalité civile et sa nationalité, maigre les

moyens d'information dont on dispose. On l'avait trouvé le

18 octobre 1816, dans la rue du village de Wendhausen, près

Hildesheim. C'était le matin de bonne heure, il avait plu forte-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 257 7

ment pendant la nuit et les chemins étaient boueux , cependant

ses vêtements et ses chaussures étaient secs et propres, il avait

donc dû être transporté la nuit en voiture. Il ne parlait aucune

langue. Age apparent : trente ans. Les traits de son visage déno-

taient peu d'intelligence, mais il connaissait les monnaies, dési-

gnait les pièces qu'on lui demandait, entendait correctement,

comprenait tous les motsetsemontrartaussr accommodant qu'as-

sidu aux occupations intérieures et aux travaux de ? jardins. Mais

impossible de le faire parler. On eut beau expédier sa photo-

graphie dans toutes les directions, prendre toute espèce d'inlor-

mations, organiser mille enquêtes, on ignora toujours son lieu

d'origine. On fut oblige de le désigner sur les actes et registres

sous le nom d'inconnu, bien qu'il répondit au nom de Conrad.

Bon travailleur, d'humeur et de caractère excellents et toujours

égaux, très calme, il ne fut jamais agité. De temps à autre, son

faciès souriait et il remuait légèrement les lèvre. Il succomba à

une pneumonie sans cesser, même pendant les derniers jours, de

garder le silence elle mutisme. Il fallut sur les registres mor-

tuaires le désigner sous le titre d'inconnu.

M. jASTROWtïz. A l'instigation du comité d'enquête, institué par

la Société de médecine inlerne, il importe de colliger des rensei-

gnements sur l'occurrence de la tuberculose chez les aliénés.

M. t''ALK fait la notion suivante : Les membres de la société

sont invités à fournir un rapport sur les cas qui leur sont per-

sonnels, en ce qui concerne l'application effectuée du paragraphe

de la loi, relatif au « transport dans un asile public dts prévenus

dontl'rz/faire s'instruit, afin d'examiner leur état mental au besoin

pendant six semaines ». Quel résultat a donné cet examen dans ces

conditions ? L'assemblée décide qu'on demandera à M. le mi-

nistre de la médecine de vouloir bien inviter le bureau royal de

statistique à procurer les matériaux nécessaires à la solution de

cette question, matériaux empruntés aux données statistiques

des asiles d'aliénés. Il n'est pas bois de propos de rappeler que le

§ 81 du Strafp roc essoi-tiiitti2.q /ti dns rlcutsche Reich du '1 cr fevrier

1877, est ainsi conçu :

En ce qui concerne la préparation d'un rapport sur l'état mental de

l'inculpé, le tribunal, peut sur la proposition d'un spécialiste compétent

et après avoir entendu la défense, ordonner que l'inculpé soit transféré

dans un asile public d'aliénés où il sera mis en observation. Quand

l'inculpé n'a pas d'avocat on lui en constituera un. La séquestration

dans rétablissement ne devra pas dépasser six semaines.

Dès que ces matériaux seront prêts, M. Guttstadt voudra bien

écrire un rapport sur le sujet.

La séance est levée à cinq heures et demie (Allg. Zcilsch. f.

Psych., XLII. 4). P. K.

VARIA

DISTRIBUTION DES PRIX A L'ÉCOLE DÉPARTEMNTALE D'INFIR-

miÈaEs ET D'INFIRMIERS A L'ASILE CLINIQUE (SAINTE-ANNE).

La distribution des prix aux élèves de l'Ecole d'infirmières

de Sainte-Anne a eu lieu le 25 août, sous la présidence de

M. le Dr Bourneville, député de la Seine, membre de la com-

mission de surveillance des asiles d'aliénés de la Seine. Il

était assisté de MM. Roux, directeur des affaires départemen-

tales à la préfecture de la Seine; A. Regnard, inspecteur général

des établissements de bienfaisance; Dr Taule, directeur de

l'asile Sainte-Anne. Nous avons remarqué dans l'assistance :

MM. Davoust, conseiller municipal, D" Bouchereau, Magnan,

Quesneville, Dubuisson, Wallon, Barroux, directeur de l'asile

de Villejuif, les internes de l'asile, etc., etc.

Après avoir ouvert la séance, M. le Dr Bourneville a pro-

noncé le discours suivant :

Mesdames, Messieurs,

L'Assistance publique de Paris, comprend : 10 Les bureaux de

bienfaisance chargés de distribuer les secours à domicile pour

les malades, les enfants, les nourrices, les infirmes et les vieil-

lards ; '2° Les hôpitaux destinés au traitement des maladies

aiguës; 3° Le* hospices consacrés aux personnes atteintes de

maladies chroniques et aux vieillards; 4° Le service des enfants

assistés. Elle devrait comprendre aussi le service des aliénés;

mais il y a une douzaine d'années, pour des raisons théoriques,

le Conseil général a distrait ce service de l'Assislance publique et

l'a placé à la Préfecture de la Seine, tout en conservant trois sec-

tions d'aliénés à Bicêtre et la Salpêtrière. Les partisans de la

séparation auraient même voulu supprimer ces sections renfer-

mant, selon les circonstances, z à z1,800 aliénés des deux sexes.

Un homme qui a exercé une influence néfaste en ce sens, feu

l'inspecteur Lunier, était parvenu à faire supprimer deux sections à

la Salpêtrière. Peut-être aurait-il réussi complètementsi l'on n'avait

réfléchi aux difficultés de placer ailleurs ces nombreux malades.

Cette mesure est regrettable à différents points de vue; nous ne

VARIA 259

parlerons que de ceux qui vous intéressent et qui justifient notre

brusque preambule. En premier lieu, si les asiles d'aliénés dépen-

daient de l'Assistance publique, la question de la retraite pour

les sous-employés, les infirmiers et les infirmières, serait tranchée

depuis longtemps ou même ne se serait pas posée : les uns et les

autres en effet, vous auriez droit au repos ou à la pension repré-

sentative, comme tout le personnel secondaire de l'Assistance pu-

blique.

En second lieu, tandis qu'aujourd'hui encore, malgré nos récla-

mations réitérées, il ne vous est pas tenu compte de vos années

de service dans les asiles, si, les quittant, vous entrez dans les

hôpitaux; tandis que, de même, il n'est pas tenu compte aux

infirmiers ou aux infirmières des hôpitaux qui viennent ici de

leurs années passées dans les établissements de l'Assistance publi-

que ; si l'Assistance avait l'administration des asiles, il ne serait

causé aucun prejudice ni avons ni a vos camarades des hôpitaux,

et toutes vos années de service vous profiteraient. C'est là une

anomalie d'autant plus choquante, que, pour les employés qui

vont de la Préfecture à l'Assistance publique ou inversement, les

années passées dans l'une ou l'autre de ces administrations, sont

valables pour la retraite.

Enfin, si le service des aliénés était resté dans les attributions

de l'Assistance publique, il n'aurait pas été utile de créer dans cet

asile une école d'infirmiers et d'infirmières, celles de Bicêtre, de la

Salpêtrièrp et de la Pitié auraient suffi. Tout au plus, y aurait-il

eu lieu d'installer ici une école de perfectionnement. C'est parce

qu'il y a en quelque sotte deux administrations de l'Assistance

publique, que nous avons été amené en 1881 à demander au Con-

seil général la création de cette École départementale d'infirmiers

et d'infirmières.

L'inauguration a eu lieu le 14 février 1882, sous la présidence

de M. Ch. Floquet, alors préfet de la Seine et qui a voulu témoi-

gner du vif intérêt qu'il portait à la laïcisation. L'école a fonc-

tionné depuis lors, à peu près régulièrement. Vos chefs de ser-

vice, aidés de leurs internes, se sont dévoués àvotre instruction,

car ils savent, eux, combien il leur est indispensable d'avoir de

bons auxiliaires pour 1 accomplissement de leur tâche. Les dis-

cours prononcés par M. Dagonet aux précédentes distributions

des prix, discours qui résumaient l'opinion de tous ses collègues,

le prouvait surabondamment. Cette nécessité d'avoir des auxi-

liaires sérieux, dévoués, instruits, connaissant tous les détails de

leur profession, est hautement reconnue dans divers pays, non

pas par quelques individus lités, mais par la généralité des méde-

cins et des administrateurs. En Angleterre, par exemple, c'est de

l'Association médico-psychologique, qu'est parti le mouvement en

faveur de la création dans les asiles d'un enseignement profes-

260 VARIA

sionnel spécial pour les infirmières et les infirmiers. C'est un

comiténommé par cette association qui a fait le manuel, dont on

se sert pour l'enser; : nement,manuel dont je me permettrai de vous

envoyer la traduction.

Malheureusement, si la plupart des médecins aliénistes se plai-

gnent de ne pas avoir le- personnel capable, instruit et dévoué

qu'ils souhaitent dans l'intérêt des malades, bien peu se préoccu-

pent de l'obtenir. Il faut dire que les administrations n'ont pas

paru jusqu'ici se faire une idée exacte des besoins, et se préoc-

cuper, non pas d'innover, mais d'étudier ce qui se fait à l'étranger

et de l'imiter. A Paris, l'administration préfectorale n'est pas

encore suffisamment convaincue, file a encore des hésitations.

Nous espérons pouvoir les dissiper en nous appuyant sur votre

travail, sur vos efforts, pour perfectionner votre instruction pri-

maire, pour acquérir l'instruction professionnelle et aussi sur

votre dévouement. Et quand la lumière sera faite dans tous les

esprits, nous avons la conviction que conformément aux désirs

exprimés par notre ami le Dr Bouchereau et par nous, c'est parmi

les élèves de cette école que l'administration prendra toujours les

sous-surveillants dentelle aura besoin. C'est ce que fait aujour-

d'hui M. Peyron, directeur de l'Assistance publique, et nous le

répétons, c'est ce que fera l'administration départementale lors-

que, débarrassée des restes du vieil esprit qui l'anime encore, elle

sera enfin inspirée par le véritable esprit républicain.

Le but de cette école n'est plus de fournir un personnel pour

remplacer les soeurs; c'est fait, puisque l'asile Sainte-Anne a été

laïcisé le 1er janvier 1884; l'asile du Ville-Evrard le ler janvier

1885;' l'asile de Vaucluse le le, juillet 1885 el que l'asile de Ville-

juif a été et sera donné au sur et à mesure aux laïques. Le but de

cette école, aujourd'hui, c'est de donner de bonnes surveillantes

aux asiles, chaque fois qu'il se produira des vacances; son but

c'est de fournir a l'occasion de bons surveillants à l'agile de Ville-

juif concurremment avec l'école de Bicêtre, aux asiles de la pro-

vince afin de les aider à se débarrasser des religieuses. C'est parce

qu'elles n'ont pas le personnel convenable, nécessaire, que diver-

ses administrations préfectorales de province hésitent à remplacer

les religieuses de leurs asiles par des laïques. Pour les aider, -il

n'est pas trop de toutes les bonnes volontés et il convient d'appe-

ler ici le plus possible d'élèves externes.

Ce serait un grand honneur pour le Conseil général, pour le

préfet de la Seine, pour les médecins et le directeur de cet asile,

pour la Commission de surveillance, si cette école devenait une

pépinière féconde de sous-surveillantes instruites.

Travaillez avec courage et aidez-nous à réaliser partout, le plus

vile possible, cette réforme si républicaine de la laïcisation de

tous les établissements hospitaliers.

VARIA. 261 i

Après ce -discours, très applaudi, M. le Dr Taule a pris la

parole, et s'est exprimé en ces termes :

Mesdames ET Messieurs,

J'assistais, il y a quelques jours, à la distribution des prix de

l'école de la Salpêtrière, et nous constations tous avec plaisir le

grand nombre des lauréates. II n'y a pas de comparaison à établir

entre cet établissement et celui de Sainte-Anne, dont les propor-

tions sont beaucoup plus restreintes. C'est la meilleure excuse que

je puisse donner de votre petit nombre J'ai l'espoir qu'il augmen-

tera l'année prochaine et que nous aurons à multiplier les récom-

penses. En attendant, je félicite ceux et celles d'entre vous qui

ont répondu à notre appel. Ce faisant, je crois être l'interprète

de.vos maîtres, à qui vous devez la plus grande part de vos succès,

de l'administration et du Conseil général, représentés ici par

M. le directeur des Affaires départementales et par M. le conseiller

Davousl, que je remercie en votre nom et au mien d'avoir bien

voulu s'y rendre. Nous devons surtout des remerciements à M. le

Dr Bourneville dont le précieux et puissant concours, ne nous a

jamais lait défaut. '

Le Conseil général vous a de nouveau manifesté sa sollicitude

cette année pour la création d'un cours d'instruction primaire à

l'usage des infirmières et dont profilent ainsi quelques malades.

Ce nouvel enseignement vous permettra de suivre avec plus de

fruit les cours pratiques, dont quelques-unes d'entre vous s'étaient

abstenues jusqu'à ce jour faute de connaissances élémentaires

suffisantes. Il vous sera ainsi doublement profitable. J'espère que

vous saurez vous en montrer reconnaissantes par votre assuidité

au travail.

Je dois d'au tant plus insister sur l'utilité de l'enseignement profes-

sionnel, qui vous est donné par MM. les internes en médecine et

en pharmacie, que cet enseignement va vous devenir de plus en

plus indispensable, car le diplôme d'infirmier et d'infirmière,

récemment institue par le conseil municipal pour le personnel

des hôpitaux de l'Assistance publique, deviendra bientôt exigible

sans doute pour l'admission aux nouveaux emplois de sous-sur-

veillanls et de sous-ernployés. Vous ne devez pas trop vous préoc-

cuper de cette mesure, qui n'a pas encore été mise en vigueur

par M. le directeur de l'Assistance publique et qui ne vous est

point applicable au moins pour le moment. Elle n'en aura pas

moins pour résultat, au prix de l'autre, de rendre votre avance-

ment plus difficile. C'est à vous de %ous prémunir contre cette

éventualité en vous y préparant par une bonne instruction pro-

fesstionnelle. '

Laissez-moi vous dire en finissant que cette instruction, si im-

262 FAITS DIVERS.

portante qu'elle soit à nos yeux, ne primera jamais les qualités

morales sans lesquelles il ne saurait y avoir ni bon infirmier ni

bonne infirmière. Ces qualités sont avant tout la patience, la

douceur et la bonté envers les malades. C'est en vous pénétrant t

de ces sentiments et par votre bonne conduite que vous remplirez

.dignement votre mission qui est des plus nobles, puisqu'elle vous

'donne chaque jour l'occasion d'alléger les souffrances de vos sem-

blables. Envisagée à ce point de vue, votre tâche, parfois si dure

et si répugnante, vous paraîtra légère et vous l'accomplirez avec

plaisir, en vous attirant avec l'estime de tous, l'affection et la

reconnaissance des malades.

Il a été procédé après ce discours à la distribution des prix,

consistant en livrets de la caisse d'épargne et en livres :

FAITS DIVERS

Nominations ET promotions. Arrêté du 15 février 1886. Ont

été promus pour prendre rang à partir du ler janvier 1886 : A la

classe exceptionnelle de son grade (8,000 fr.), M. le Dr Faucher,

directeur médecin en chef de l'asile de iVAUGEAT(Haute-Vienne); A

la 1ro classe de son grade (i,000 fr.), M. le Dr Homéry, directeur,

médecin en chef de Saint-Athanase (Finistère); A la 3e classe de

son grade (5,000 fr ), M. le Dr LONGEAUD, directeur, médecin en

chef de la ville de Rodez (Aveyron); Ont été promus à la 1 ro classe

de leur grade (3,000 fr.); pour prendre rang à partir du ("février

1886 : MM. les Dro GUILLE11N, médecin adjoint de l'asile de Dôle

(Jura); Paris, médecin adjoint de l'asile de Châlons-sur-Marne et

BELLAT, médecin adjoint de l'asile de Prémontré (Aisne).

Arrêté du 15 mai 1886. M. le Dr FABRE, directeur, médecin en

chef de l'asile de Saint-Lizier (Ariège), est nommé directeur, mé-

decin en chef de l'asile de Saiut-llban (Lozère), M. le De Lorr-

GEAUD, directeur, médecin en chef de l'asile de Rodez est nommé

directeur, médecin en chef de l'asile de Saint-Lizier. M. le

Dr CAMPAN, médecin en chef de l'asile de Cadillac (Gironde), est

nommé directeur, médecin en chef de l'asile de Rodez (Aveyron).

Arrêté du 20 mai 1886. m. le Dr CAMUSET, directeur, médecin

en chef de l'asile de Saint-Alban (Lozère), est nommé médecin en

chef de l'asile de Cadillac (Gironde), et promu à la 3° classe de son

grade (5,000 fr.) -

FAITS DIVERS. 263

Arrêté du 22 mai 1886. M. le DI DUBIEF, conseiller général de

Saône-et-Loire, est nommé directeur de l'asile public d'aliénés de

Saint-Pierre, à Marseille, en remplacement de M. CAnTOOx, décédé,

et placé dans la 2° classe de son grade (6,000 fr.)

Arrêté du 25 mai 1880. M. le Dr TncuET, directeur, médecin

en chef de l'asile des Lesvellec, près Vannes (Morbihan), est promu

à la 1 Il classe de son grade (7,000 fr.) ; pour prendre rang à partir

du 4 Il mai z886.'

Arrêté du 25 mai 1886. Ont été promus à la classe exception-

nelle de leur grade (4,000 fr.), pour prendre rang à partir du

1er février IS81s : MM. les D" SCUlLS, médecin ajoint de l'asile de

Ville-Evrard; IIIAUNlER, médecin adjoint de l'asile d'Aix : GARNIER,

médecin adjoint de l'asile de Bailleul : Dam, médecin ajoint de

l'asile d'armeutière·; Brun, médecin adjoint de l'asile de Bron;

MARTINENQ, médecin ajoint de l'asile de Saint-Yon et FEBVUE, mé-

decin adjoint de l'asile de Mont-de-Vergues.

Arrêté du 1r juiz 4 886. M. le Dr ADAM, médecin ajoint d'Ar-

mentières (Nord), est nommé adjoint de l'asile d'Auxerre (Yonne),

en remplacement de M. Chadzinski.

Arrêté du 22 juin 1886. M. le Dr Georges LEIOmE, interne à

l'asile de Bron, professeur agrépéà la Faculté de Médecine de Lille,

est nommé médecin adjoint al'asile d'Armeutières et placé dans la

2e classe de son grade (2,500 fr.) M. le Dr DUFOUR, médecin en

chef de l'asile de Saint-Robert, vient d'être nommé Vice-Président

de la Société de Médecine et de Pharmacie de l'Isère.

Concours pour LE PRIX Volta. Le ministre de l'Instruction

publique vient de fixer la date du concours du prix Volta Ce prix,

d'une valeur decinquante mille francs, a été institué par décret du

11 juin 1882 en faveur de l'auteur de la découverte qui rendra l'élec-

tricité propre à intervenir avec économie dans l'une des applica-

tions suivantes : comme source de chaleur, de lumière, d'action

chimique, de puissance mécanique, de moyens de transmission

pour les dépêches ou de traitement pour les malades. Le prix

sera décerné en décembre 1887. Le concours demeure ouvert jus-

qu'au 30 juin 4881. Les savants de toutes les nations sont admis

à coucoutir. Une commission, nommée par le ministre de l'Instruc-

tion publique, sera chargée d'examiner la découverte spécifiée

par chacun des concurrents et de reconnaître si elle remplit les

conditions exigées.

. Hospices DE Bicêtre ET la SALPÊTRIÈRE. - Le concours pour la

nomination d'un médecin adjoint des hospices de la Salpêtrière

et de Bicêtre vient de se terminer par la nomination de M. le Der Sé-

glas.

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE

Avis aux auteurs ET aux éditeurs. Tout ouvrage dont il nous sera

VI]VOlé UN seul exemplaire, sera annonce. il sera lait, s'il y a lieu, une

analyse de tout ouvrage dont nous recevrons neux exemplaires.

ALLIOT (E.). La suggestion mentale et l'nctioudes médicaments à dis-

tance. Brochure in-9 de R6 pages. - l'riv : 1 Ir. 50. - Paris, 1886. -

Librairie .l.-I3. Baillière et fils.

BLZZWD 'Th.). 0" some forms of paralysio from pcriphernl neuritio ;

of Gonl ? Alcoholic. Diphleritic and othe/' origin. Volume in-80 cartonné

de 147 pages, avec figures. - London, 1886. J. et A. Churchill.

HG WARD H. Toot.- Thepei-oizeal type of progressive nuzsculnr at>'Oph ?

Brochure in-8° de 43 pages, avec figures. Lonilon, 1886. - H.-K. Lewis.

La Possession de Jeanne Fery, religieuse professe du couvent des

Srrurs noires de la ville de Mons fit584). Un volume in-8a de H2 pages,

papier vélin, prix : 3 fr. Pour nos abonnés, 2 fr. 50 - Papiet- parcheminé,

prix : 4 fr. Pour nos abonnés, prix : : i fr. Papier Japon, prix : si tr.

Pour nos abonnés, prix : 5 fr. Ce volume publié, par la librairie du Pro-

grès Médical est le 4° ouvrage de la Bibliothèque Diabolique (collection

Bourneville). Les ouvrages précédents sont par ordre de publication :

1 Le Sabbat des sorciers; 20 La Possession de Françoise Fontaine;

3° Histoires et disputes des démons et sorciers, par Jean 1'iyerr.

LFc.nAiN (M.). Du délire chez les dégénères. Observations prises à

l'asile--SainLe-Anne (1885-th86), service de M. Magnan. Un volume in-8°

de t)91 pages. Prix : li fr. Pour nos abonnés, 2 fr. 75.

LELOIIt (H.) Leçons sur la srlphilis. Professées à i'liôpital Saint-

Sauveur. Un volume Ill-S' de 213 pages avec li figures. Prix : 5 fr.

Pour nos abonnés, 3 fil. 50.

Traité théorique et pratique de la lèpre. Un \olume in-4^ raisin de

360 piges, avec 48 figures, 7 tableaux dans le texte et 22 planches en

chromolithographie et héliogravure. - Prix : 30 Ir. Pournos abonnés,

22 Ir.

Raison (A.-G ). - Du traitement des phénomènes douloureux de f ata-

xie locomotrice progressive par pulvérisations d'ether et de chlorure de

méthyle. Volumein-8"de 42 pages. Prix : 2 fr. 5li. Pour nos abonnés,

1 fr. 70.

SIIAHKEY (S.-J.). - Spasm in chronic nerve discase; being the Gulsto-

nian lectures. Un volume in-8- cartonné de 99 pages, avec 15 figures. -

London, t8.s6. J. et A. Churchill.

Setrztc. - A contribution to the localizalion of focal lésions ln the poîts

oblongata transition. Brochure in-8" de 14 pages, avec figures Extrait

du louwnal of ne,'vous and mental dtscase. - New-York, 1886. - Put-

nam's sons.

How can we prevent false hydrophobia ? a paper. Brochure in-8°

de 41 pages. New-York, 1886. W. R, lenkins.

Le rédacteur-gérant, BOUItNEVILLE.

IneU1. C6. Il,,aI1l8 ? -1-P - 086.

Vol. XII. Novembre 1886. N" 36,

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

CLINIQUE NERVEUSE

QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES;

Par M. A.-J. OSERETZKOWSKY, de Moscou.

Depuis bien longtemps, l'hystérie était considérée

comme une maladie n'appartenant qu'aux femmes. La

confusion qui s'est introduite dans l'idée qu'on se faisait

de cette maladie vient évidemment du nom bien malheu-

reusement choisi IçTEPf4Ç, nom qui lui avait été donné

par suite de la fausse idée que l'hystérie était causée

par des maladies de l'utérus. Cependant, ces derniers

quinze ans, il s'est produit une réaction, et l'hystérie

chez les hommes adultes a été, plus d'une fois, le sujet

de travaux intéressants. Il a été défendu cinq thèses

traitant de ce sujet seul à l'École de médecine de

Paris, dans l'intervalle de 1875 à 1880.

Outre l'intérêt scientifique, la connaissance de l'hys-

térie chez l'homme a une importance pratique pour

les médecins militaires. Grâce aux accès bizarres et au

cours capricieux de la maladie, les cas d'hystérie chez

les soldats peuvent donner lieu, et cela arrive en effet,

aRCHmES, t. xo. 18

266 CLINIQUE NERVEUSE.

à une fausse interprétation de la maladie, au préjudice

du patient, à des malentendus entre les médecins

mêmes, et à de faux reproches du public, qui portent

atteinte à notre autorité en matière médicale. J'ai

appris tout cela par expérience. Je veux apporter

l'histoire de quelques cas d'hystérie observés à l'hô-

pital militaire de Moscou.

*/ Observation I. E..., conseiller titulaire, âgé de quarante-

quatre ans, est entré le 14/26 août 1883. Anamnèse : en 1878,

a eu la fièvre intermittente danubienne pendant neuf mois;

revenu de Bulgarie en Russie, a commencé à souffrir d'accès

de défaillances et de convulsions générales. Du 12/2'k novem-

bre au 22 décembre 1880/3 janvier 1881, à l'hôpital militaire

de Moscou, on a observé des accès de sténocardie et des con-

vulsions. Les médecins de service ont pu noter trois accès de

convulsions du caractère suivant : le malade commence à se

plaindre d'un sentiment d'angoisse et d'une oppression à la poi-

trine ; c'était suivi d'un tremblement de tout le corps et de con-

vulsions cloniques, auxquelles succédaient une tension des

muscles de la poitrine et du dos. Au commencement de l'accès,

le malade ne perdait pas la connaissance. L'accès durait une

demi-heure environ. On a pu constater que l'accès pouvait à

volonté être provoqué par une pression sur la région de l'épi-

gastre. Du 21 novembre/3 décembre au 14/26 décembre 1881, a

été à la clinique de l'hôpital militaire de Pétersbourg. Les accès,

dont nous venons de décrire le caractère, accompagnés, en outre,

du globe hystérique, y avaient été également remarqués. Le

7 décembre, on note : les douleurs des reins sont si fortes que

le malade ne peut marcher. En outre, nous apprenons du pa-

tient qu'en 1881 et en février 1883, il a été atteint de paraly-

sie : paralysie des deux jambes et du bras droit, la première

fois, paralysie des jambes, la seconde. Du 14 août à novembre

1883, E... se retrouve à l'hôpital de Moscou, mais avec de nou-

veaux symptômes. Il est atteint de paraplégie et de rétention

d'urine; les envies d'uriner sont douloureuses; il urine très

peu et avec beaucoup d'efforts. La sensibilité à la douleur des

jambes a presque disparu, et celle du toucher est moins déran-

gée ; l'atrophie musculaire n'existe pas; on constate une ten-

QUELQUES CAS D'IIYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 267

dance à des tiraillements et à des contractures dans les jambes.

En outre, E... souffre de vomissements irrésistibles qui ne dé-

rivent nullement de l'indigestion. L'hyperesthésie de la région

de l'épigastre existe. Tous ces phénomènes ne sont pas cons-

tants : tantôt la miction devient tout à fait facile, tantôt elle

se dérange; il en est de même des vomissements. Je dois dire,

à propos de la paraplégie, que lorsqu'on lui demande de soulever

la jambe, ou de faire mouvoir le pied, il ne répond point ; ce-

pendant, si on le prie de se retourner soit sur un côté, soit sur

l'autre, on voit que les extrémités se-meuvent activement. Je

dois ajouter que le malade, étant encore chez lui, voyant son

enfant tomber du lit, s'est mis sur les pieds, bien que ses jambes

fussent paralysées alors. Le malade a quitté l'hôpital sans que

les symptômes de paraplégie aient subi une modification quel-

conque ; les vomissements avaient seulement cessé et l'urina-

tion était devenue facile.

Résumant toute la série des dérangements nerveux

d'E..., nous devons signaler les caractères suivants :

1° la diversité et l'hétérogénéité des attaques ner-

veuses ; ce sont tantôt des convulsions, tantôt des

symptômes de sténocardie, tantôt des paralysies, des

rétentions d'urine, des vomissements rebelles, etc.;

2° l'inconstance des dérangemeuts nerveux : les jambes

d'E... ont été paralysées deux fois et la paralysie a

disparu sans laisser de traces ; la rétention d'urine

paraît et disparaît sans avoir de cause; il en est de

même des convulsions; 3° certains dérangements por-

taient le caractère de l'hystérie; les convulsions, par

exemple, se manifestaient sans perdre connaissance

et ne pouvaient, par conséquent, être attribuées à l'é-

pilepsie ; le globe hystérique et la facilité d'évoquer,

à volonté, les attaques en pressant sur la région de

l'épigastre (point hystérogène) sont des symptômes

appartenant exclusivement à l'hystérie. De même, il

est impossible d'expliquer autrement que le sujet,

268 CLINIQUE NERVEUSE.

privé de la faculté de remuer les jambes, se lève sous

l'empire de la frayeur. Tout cela et l'impossibilité de

rapporter l'ensemble des dérangements nerveux à un

trouble organique du système nerveux, m'a fait recon-

naître l'hystérie.

Observation Il.- Ch..., un jeune soldat, est entré à l'hô-

pital le 4 avril 1884. Il était complètement sourd et muet. J'ai

appris que la surdi-mutité s'était développée tout d'un coup

sans choc apoplectique. Le malade fit entendre par signes

qu'il avait été frappé de cette maladie sous l'influence de cer-

taines émotions morales. Le sujet parait peu développé, d'une

constitution féminine; les testicules sont très petits; la tête

aussi. Un examen laryngoscopique donne les résultats sui-

vants : la configuration de toutes les parties du larynx est

normale; les cordes vocales restent découvertes, malgré que

le pharynx et le larynx soient violemment irrités par le laryn-

goscope ; en général, on constate une anesthésie des muqueuses

du larynx et du pharynx (Kiriakoff). L'examen laryngosco-

pique est renouvelé le 17 juin par M. le Dr Kiriakoff et M. Za-

borowsky ; le résultat reste le même. L'examen de l'oreille

et de l'oeil donne des résultats négatifs. On n'observe pas

d'autres dérangements nerveux. Plus tard, on remarque une

grande instabilité de l'état moral : tantôt le malade pleure

sans motif, tantôt il rit et saute comme un enfant quand on

satisfait un de ses désirs. Le 5 mai, Ch... commence à se

plaindre de douleurs dans le bras gauche, la sensibilité tactile

et douloureuse est émoussée; ensuite, on remarque un état

paralytique qui ne dure pas. Le 11 mai, tous les troubles du

mouvement et de la sensibilité ont disparu. Après cela, le

malade éprouve des douleurs dans les muscles du cou, d'abord

à gauche, puis à droite, mais ces douleurs sont passagères. Le

18 mai, il a un accès tout particulier; Ch..., souffrant de vio-

lents maux de tête, se débat sur son lit, pleure, va et vient

dans la salle ; tout le corps tressaille; il a des tiraillements

dans les bras, il vomit de la bile; la température monte; tous

ces phénomènes durent presque toute une journée. Le 12 juin,

hémianesthésie complète à droite et hémiopie. Tous ces phé-

nomènes persistent jusqu'au 28 juin, jour de la sortie de l'hô-

pital.

QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 269

Un début rapide, sans choc apoplectique, la diversité et le

peu de stabilité des phénomènes maladifs dans la suite, l'hé-

mianesthésie caractéristique, qui apparaît sans perte du sen-

timent ; enfin l'impossibilité d'attribuer la surdi-mutité à une

lésion organique quelconque, me font reconnaître l'hystérie

de Ch... Ce cas a été montré dans son temps à notre confé-

rence médicale, ainsi qu'à beaucoup de collègues neuro-patho-

logistes.

L'été passé, j'ai appris que Ch..., après avoir obtenu son

congé, a recouvré l'usage de la parole et de l'ouïe, bientôt

après son retour dans ses foyers. De mon point de vue, cela

devait être; ça ne fait que confirmer que la surdi-mutité était

hystérique.

Observation III. R..., soldat de vingt-quatre ans, entre

à l'hôpital le 1°" novembre 1884. J'apprends qu'en octobre de

la même année, la chute d'une pierre lui a contusionné l'orteil

du pied gauche. Après le coup, il n'est resté qu'une légère

écorchure qui a disparu au bout de quelques jours. Mais, en

même temps, il commença à éprouver des douleurs dans la

jambe gauche, à Faîne, dans le dos. Ensuite, en présence d'un

médecin militaire, R... perdit l'usage des jambes et de la

parole. C'est dans cet état qu'on l'amène à l'hôpital. Le ma-

lade est d'une constitution robuste; la nutrition est suffi-

sante ; il a une expression pleurnicheuse; il a totalement perdu

l'usage de la parole; examiné au laryngoscope, la sensibilité

du larynx est normale, les cordes vocales sont bien tendues;

cependant il lui est impossible de prononcer la lettre A. L'en-

trée du pharynx est peu sensible. Le bas du dos est très sen-

sible à la palpation; le passage de la main sur la peau cause

aussi de vives douleurs; il se plaint aussi d'avoir mal lorsqu'on

presse les gros troncs nerveux des jambes. La sensibilité à la

douleur dans les jambes et dans la partie inférieure du tronc

a disparu; il n'éprouve pas de douleurs même lorsqu'on fait

passer un fort courant induit (les bobines étant entièrement

poussées). Dans la partie supérieure du tronc et dans les bras,

la sensibilité est aussi émoussée; il ne retire pas la main même

quand on transperce la peau avec une épingle. Les réflexes

tendineux de la rotule sont extrêmement exagérés. Les jambes

sont à moitié paralysées;- y a contracture des muscles posté-

rieurs de la cuisse, qui fléchissent la jambe, et rigidité des

270 CLINIQUE NERVEUSE.

pieds. Voici le cours de la maladie : le 8 novembre, la douleur

dans le dos disparait; couché, le malade peut facilement lever

les jambes et les tenir en l'air quelque temps. Il ne peut mar-

cher et n'essaie même pas de le faire. Pressé d'obéir, il se lève

cependant sur les jambes, mais elles sont fléchies dans les ge-

noux et à l'articulation coxo-fémorale. Il ne peut les redresser,

dit-il, à cause de douleurs qui se font sentir dans la direction

du bord intérieur des plantes des pieds. Le 10 novembre, R...

commence à marcher auprès de son lit, les jambes toujours

courbées; mais il ne marche que d'après l'ordre pressant. Il se

met sur les jambes d'une manière particulière : il appuie ses

bras sur le bord du lit, et, après quelques instants d'efforts vi-

sibles, il se redresse rapidement et jette le corps en avant de

manière que je craignais toujours de le voir tomber. De même,

R... s'asseyait sur son lit, non par degrés, mais d'un seul coup,

en séparant les'pieds du plancher. Le 17 novembre, il com-

mence à marcher facilement, mais sa démarche est étrange.

Les jambes sont un peu fléchies dans les genoux; le dos est

immobile et un peu renversé en arrière; les bras séparés du

corps; il les balance en marchant. Toutes les singularités de

sa démarche, aux mouvements spontanés, sont causées par

une certaine rigidité des muscles du dos et des jambes. Les

jambes sont encore faibles; après une marche de peu de du-

rée, on les voit trembler. Il serre la main faiblement, malgré

sa musculature développée. Le 19 novembre, il commence à

prononcer, avec des efforts évidents, de certaines voyelles; le

23 novembre, il articule indistinctement quelques mots. Le

27 décembre, il éprouve une vive douleur dans la région de

l'oeil droit, on observe même la ptosis qui dure près d'une

journée. La démarche est toujours la même; la sensibilité des

jambes est rétablie; mais on voit toujours la même faiblesse

et le même tremblement des jambes après la marche. L'anam-

nèse montre que le malade a éprouvé les mêmes affections

nerveuses quatre ans auparavant après une chute d'un arbre.

Le diagnostic ne pouvait hésiter qu'entre l'hystérie et une

maladie de la moelle épinière. Le début subit de la maladie

sans fièvre cependant, l'impossibilité d'expliquer l'existence

simultanée de l'aphonie et de la paraplégie, le manque évident

de volonté pour les mouvements spontanés, l'instabilité des

symptômes maladifs et les renseignements anamnestiques

parlent en faveur de l'hystérie.

QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 271

Observation IV. Le lieutenant B..., âgé de trente-quatre

ans, entré à l'hôpital le 9 janvier 1885, m'est confié pour être

examiné et traité par l'électricité le 15 janvier. Une prédispo-

sition névropathique héréditaire; sa soeur est hystérique. Le

sujet est extrêmement enclin à se croire malade; ayant appris

un jour qu'un de ses amis était mort d'une maladie du coeur,

il ressentit aussitôt des palpitations, des douleurs dans la ré-

gion du coeur et dans le bras gauche. A la fin de juillet 1884,

revenu de l'exercice, il se sentit tout à coup privé de l'usage

de la jambe gauche, ensuite de la droite; la paralysie dura

près de deux mois et disparut sans traces. Le 25 décembre de

la même année, la paralysie recommença aussi inopinément

que la première fois. Etat présent : la jambe gauche est com-

plètement paralysée ; les piqûres d'épingles n'y causent aucune

douleur; les réflexes tendineux du genou sont considérable-

ment exagérés des deux côtés. Couché, il peut relever la jambe

droite, la fléchir et remuer les doigts. Le pied gauche est con-

tracturé en dehors, à l'état d'extension. L'évacuation de l'urine

se fait au moyen d'un cathéter. Il a une prédisposition à la cons-

tipation. Le 15 janvier, lorsque le malade fut apporté pour

que je l'examine, la jambe droite était aussi tout à fait para-

lysée ; les réflexes cutanés sont exagérés; la sensibilité tactile

et douloureuse de la jambe gauche est notablement émoussée,

celle de la droite est normale; dans les jambes, on observe des

tiraillements et une rigidité musculaire considérable; pas

d'amaigrissement musculaire; la contractilité faradique des

muscles et des nerfs est normale; le malade n'éprouve presque

aucune douleur dans l'épine dorsale; pas d'autres troubles ner-

veux. Traitement : galvanisation du dos et faradisation des

jambes. Après quatorze séances, on observa un mieux telle-

ment évident, qu'il étonna les personnes qui supposaient que

B... souffrait d'une lésion organique de la moelle épinière. Le

patient peut alors facilement uriner, remuer les jambes dans

son lit, même se mettre sur les jambes lorsqu'on le soutient

et, en s'appuyant sur la table, quitter sa chaise et se placer

sur son lit; les tiraillements des jambes se sont affaiblis. Le

27 février, il pouvait se tenir debout et, à partir du 18 mars,

marcher avec une canne. La démarche offrait la particularité

suivante : B... avançait les jambes sans faire quitter le plan-

cher, par suite de la contracture des muscles; tantôt ses

pieds se déjetaient convulsivement de côté, tantôt ils s'ac-

272 CLINIQUE NERVEUSE.

crochaient l'un à l'autre. Le 19 mars, notre malade quitta

l'hôpital avec des indices à peine perceptibles de sa paraplégie

passée.

- Cette observation permet de constater l'hystérie :

une prédisposition héréditaire, les particularités du

caractère du patient, enclin à se croire malade, la

paralysie qui avait déjà eu lieu et qui avait bientôt

disparu, les singularités de la dernière paraplégie qui

n'avait pas été suivie d'un amaigrissement des muscles,

malgré que la maladie ait duré trois mois et malgré la

rétention d'urine qui ne pouvait être causée que par

de profondes lésions de la moelle épinière; enfin, l'a-

mélioration rapide de la maladie.

Observation V. G..., soldat de vingt et un ans, entre à

l'hôpital le 27 mai 1884, atteint d'une paralysie des deux

jambes. Des questions préalables expliquèrent qu'il venait de

sortir de l'hôpital, où il était entré à cause d'une paralysie de

la jambe droite. La maladie actuelle s'était déclarée subite-

ment : en revenant d'une revue, il perdit l'usage des jambes

et, cinq jours après son entrée, à l'hôpital, la paralysie s'em-

para aussi du bras droit. L'examen du malade donna les résul-

tats suivants : l'ouïe et la vue sont normales; les pupilles sont

dilatées; les nerfs faciaux ne présentent rien d'anormal; dans

la région des deux nerfs trijumeaux, de l'un et de l'autre côté,

le malade donne de fausses indications sur l'endroit que l'on

touche; la sensibilité dans la région du plexus brachial de

droite a entièrement disparu; du côté gauche elle n'est pas dé-

rangée. Une pression exercée sur le plexus droit et sur ses

nerfs devient douloureuse. La sensibilité dn tronc parait meil-

leure, mais le malade donne tout de même de fausses indica-

tions. La sensibilité des jambes a disparu. La faculté de mou-

voir le bras droit, de le soulever, de le fléchir au coude, ne

sont possibles qu'à un degré très restreint ; le poing est fermé,

la faculté de mouvoir les jambes est presque nulle; les mou-

vements passifs causent des douleurs.

Les réflexes tendineux sont très exagérés ; sur le pied droit

QUELQUES CAS D'HYSTÈRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 273

il existe un clonus dorsalis ; sur le gauche il n'y en a pas. Une

rigidité des muscles de la jambe droite, des tressaillements et

des tiraillements. L'épine dorsale est douloureuse dans la par-

tie supérieure et inférieure du thorax; les mouvements de la

tète et du tronc sont douloureux; la vessie urinaire est relâ-

chée. Du 19 au 20 juillet, on observe une faiblesse du bras

gauche; le sujet sent des fourmillements et des picotements.

Du 2 au 17 juillet, il éprouve des maux à l'épigastre, il a des

vomissements.Le 18 juillet, la sensibilité du bras gauche dispa-

rait aussi, de même que dans larégion des deux nerfs trijumeaux

de l'un et de l'autre côté. Le 21 juillet, le malade est en état

de soulever un peu les jambes dans son lit; la miction devient

plus facile; il y a moins de tiraillements. Le 1 cr août, le patient

est pris d'une attaque de vives douleurs dans le dos et de fortes

convulsions dans les jambes et le bras gauche. Les mêmes

crises se répètent du 2 au 9 août, et puis elles reviennent

presque quotidiennement jusqu'au mois de novembre. Le li te

novembre, on constate des convulsions toniques de tout le

corps, le dos courbé en arrière, les coudes fléchis, les poings

fermés, les jambes en état d'extension, perte de la connaissance.

Les mêmes attaques recommencent le 16, le 18 et le 23 no-

vembre. Un examen plus approfondi, fait le 25 novembre,

donne les résultats suivants : l'ouïe de l'oreille gauche est

affaiblie au point que le malade n'entend le tic-tac d'une montre

que quand on l'applique contre l'oreille ; la vue est normale.

La sensibilité tactile du côté gauche de la face est peu émous-

sée ; mais il ne sent pas de fortes piqûres d'épingle ni de l'un,

ni de l'autre côté; le goût est altéré; le patient ne distingue

plus ni l'acide, ni le salé. Le malade sent si on lui touche le

côté gauche du cou ; les piqûres ne provoquent pas de douleurs;

du côté droit il ne perçoit ni attouchement, ni douleurs. Les

deux bras présentent les mêmes phénomènes; le droit est in-

sensible pour les attouchements et les piqûres; le gauche ne

perçoit que l'attouchement, à l'exception de la main, où de

profondes piqûres produisent seulement des douleurs. La sen-

sation de la température n'existe plus ni dans l'un ni dans

l'autre bras; la sensibilité musculaire persiste dans le côté

droit. Les réflexes tendineux du triceps sont très exagérés. L'exci-

tabilité galvanique et faradique des nerfs et des muscles est con-

servée ; même la faradique parait plus forte. Le bras gauche garde

sa faculté de mouvement; le dynamomètre marque 60; le ma-

274 CLINIQUE NERVEUSE.

lade peut remuer les doigts de la main droite et la ramener au

corps. Une sent ni piqûres ni attouchement sur le côté droit

du tronc ni devant, ni derrière; dans la partie gauche la sensi-

bilité douloureuse a seulement disparu. Les courants les plus

forts ne provoquent pas de douleurs dans la moitié droite de

l'abdomen et du dos. Dansla jambedroiteon remarque l'absence

complète de la sensibilité tactile, douloureuse et musculaire;

la gauche n'a perdu que la sensation de la douleur et de la

température. Les réflexes tendineux des jambes sont fortement

exagérés; on observe un clonus dorsalis au pied droit; le ma-

lade peut fléchir la jambe gauche dans toutes les articulations,

et il est en état de la soulever un peu ; les mouvements de la

droite sont plus restreints; on y aperçoit un tremblement con-

tinuel. La réaction faradique et galvanique des nerfs et- des

muscles est normale. Au mois de décembre, arrive une suite

d'accès qui portent le même caractère, savoir : tremblement

du bras gauche; spasme tonique à la jambe gauche; flexion

du coude gauche ; la tête se rejette en arrière et le tronc se

courbe aussi en arrière, tandis que le malade se retourne

en même temps sur le côté gauche. Au commencement de

l'accès, la respiration s'arrête, la face se congestionne; la

connaissance ne disparaissait que vers la fin de l'accès et reve-

nait dans les intervalles. Les attaques se répétaient toutes les

cinq minutes; dans les intervalles, on observait l'opisthotonus.

Les attaques durèrent jusqu'à la fin de décembre, par séries

entières quotidiennes, dont chacune était composée de plusieurs

accès partiels. Le 14 décembre, par exemple, de sept à neuf

heures du soir, il y eut seize accès; le 16 décembre, de une

heure de l'après-midi à une heure du matin, il y eut quatre sé-

ries, l'une de neuf accès; la deuxième, de six, ainsi que la troisième

et la,quatrième dedeux. Après quelques attaques, on remarquait

une aphonie de peu de durée, etune difficulté àavaler. Pendant

l'accès du 29 décembre, le sujet, immobile jusque-là, sous l'in-

fluence d'une hallucination probablement, se mit tout à coup à

agiter les mains et faillit sauter du lit. Le 28 décembre, les

sensations de la douleur et de la température reparurent

dans la moitié gauche du corps, tandis que la droite recouvra

la sensibilité tactile. Le 2 janvier 1885, le malade essaie de

marcher, et alors apparaît une rigidité des muscles dans l'arti-

culation tibio-tarsienne et dans celle du genou, de manière

que le malade ne marche que sur le bord externe du pied.

QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 275

Au mois de février, il fait librement mouvoir ses jambes dans

son lit, il peut marcher à côté de sa couche, mais les contrac-

tures des jambes, quand il bouge, reparaissent comme aupara-

vant ; il lève le bras droit en haut. A la mi-mars, le patient

commença à marcher avec des béquilles; les contractures per-

sistaient encore. Au mois de mai, il marche avec une canne;

en marchant, il ccurbe le dos en arrière, agite fortement les

bras, glisse les pieds. Il ne peut s'asseoir lentement, il tombe

assis. Le malade a quitté l'hôpital avec une parésie des jambes,

le 8 juin 1885.

Dans ce cas, nous trouvons les accès d'hystéro-

épilepsie nettement accusés et les troubles capricieux

de la sensibilité qui ne peuvent avoir lieu que dans

l'hystérie; nous avons une anesthésie complète du côté

droit et une analgésie gauche. Il était possible de pro-

voquer à volonté les accès de convulsions : il suffisait,

pour cela, de faire passer un courant galvanique assez

fort dans le dos; de même, lorsqu'on fit deux fois des

cautérisations au moyen de l'appareil de Paquelin, on

amena les convulsions toniques, accompagnées d'une

perte de connaissance. Ce cas est évident et je ne

veux pas hésiter plus longtemps à établir le diagnostic

d'hystérie.

OBSERVATroN VL-5..., soldat de vingt-trois ans, entré à l'hô-

pital le 22 février 1885. L'histoire clinique, avec laquelle S...

arrive, note ainsi le commencement de la maladie : Couché la

nuit du 26 au 27 décembre, près d'une fenêtre dont le vasistas

était ouvert, le matin il a senti une faiblesse dans les bras et

dans la jambe gauches, et, le 30 décembre, ces membres

étaient tout à fait paralysés. Le 2 janvier, on a constaté une

faiblesse de la jambe et du bras droits. A son entrée à l'hô-

pital, on observe une hémianesthésie du côté gauche, avec

perte de toute espèce de sensibilité et une hémiopie, ainsi

qu'une impossibilité de mouvoir à volonté la jambe et le bras

gauches. Ce qui fait une différence bien tranchée avec les

276 CLINIQUE NERVEUSE.

hémiplégies ordinaires, c'est que le malade peut tout de même

marcher, malgré la paralysie de la jambe gauche. En marchant

il traîne la jambe malade; la jambe saine est fléchie au genou;

elle ne touche le plancher que de la pointe du pied ; un trem-

blement dans la jambe gauche ; le bras droit levé le plus haut

tremble aussi. La force de la main droite est affaiblie ; le dyna-

momètre ne marque que 30; pas de contractures; les réflexes

tendineux sont exagérés des deux côtés; le nerf facial est con-

servé. Le 4 mars, le malade commence à sentir des douleurs à

la faradisation avec un pinceau, à remuer les doigts de la main

et du pied, et à marcher sans béquilles. Le 10 mars,, la démarche

est plus libre ; le bras paralysé peut être un peu levé à l'épaule

et fléchi au coude. Dès le 14 mars, S... se plaint de maux de

tête, de reins et de l'insomnie. Le 23 mars, il marche facile.

ment; le bras au coude et la main fléchissent, ce n'est qu'à

l'épaule que le bras ne peut se relever. Sa démarche est carac-

téristique ; le dos est immobile; les genoux un peu fléchis; les

muscles des reins sont contracturés. Vers le 13 juin, les troubles

de la sensibilité ont disparu; la difficulté de mouvoir le bras à

l'articulation de l'épaule a duré jusqu'au 9 juillet et disparu

en une seule nuit.

N'avions-nous pas affaire, en ce cas, à une simula-

tion ? Je n'ai pu l'admettre à cause de l'hémiasnesthé-

sie et surtout de l'hémiopie. Ensuite, les réflexes ten-

dineux si exagérés, la démarche caractérisée par

l'immobilité du dos, démarche que nous avons déjà

vue chez d'autres malades, tout cela exclut la simula-

tion. On soupçonna S... d'avoir volontairement pro-

longé l'immobilité du bras droit, mais je ne puis pas

supposer que ce fût vrai. Quand on formula ce soupçon,

S... était encore atteint d'hémiopie, chose qu'on ne

peut simuler. N'avait-on pas affaire à un trouble orga-

nique du cerveau ? Mais je suis obligé d'écarter cette

supposition pour les raisons suivantes : une hémianes-

thésie complète ne pouvait se développer que grâce à

un choc apoplectique, lequel n'a pas eu lieu; le nerf

QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 277

facial est normal, ce qui arrive rarement dans les

cas d'hémiplégie cérébrale suivie d'anesthésie; malgré

une durée de deux mois de la paralysie, la contrac-

ture tardive ne s'est pas développée. Outre cela,

S... avait un affaiblissement du côté droit, mais- peu

accentué.

Observation VII. Soldat D..., de vingt-trois ans, entre

à l'hôpital dans la salle de chirurgie le 12 mai 1885, atteint

d'un phlegmon à l'avant-bras droit. Lorsque le phlegmon fut

guéri, D... commença à se plaindre de douleurs erratiques dans

différentes parties du corps; c'est pourquoi, le 2 septembre, on

l'installa dans la salle des maladies nerveuses. D... raconta

de sa vie passée qu'il s'était marié à dix-neuf ans et que, aus-

sitôt après le mariage, il était devenu démoniaque (kliconeha).

A l'église, lorsqu'on entonnait l'hymne chérubique, il poussait

des cris, tombait en convulsions et perdait connaissance. Cela

ne dura, du reste, que quelques mois, et alors apparurent

d'autres troubles. Le caractère de D..., devint tout autre; il

devint très irritable, se mit à haïr sa femme, la battit constam-

ment, et puis s'adonna à l'alcool, bien que, jusque-là, il n'ait

presque jamais rien bu. C'est vers cette époque aussi qu'il eut

de violentes trépidations des jambes. Tous ces phénomènes

disparurent vers la vingt et unième année, de sorte qu'il put

être enrôlé.

Etat actuel du malade. - D... est de haute taille, solide-

ment bâti; un beau brun ; mais la pâleur de la face , malgré la

vigueur de la constitution, fait supposer une grave lésion de

l'organisme. La vision et l'audition sont normales ; toutes les

espèces de sensibilité le sont aussi; il n'y a que la sensation de

la température qui est un peu troublée; dans l'avant-bras il ne

distingue pas une différence de 5°; pas de paralysies et de con-

tracture musculaire; mais les réflexes tendineux sont exagérés.

Le malade lui-même se plaint de douleurs sourdes dans tout

le corps : « J'ai tout le corps brisé », ce sont ses propres

paroles. Tous les organes intérieurs sont sains; pas d'autre

déviation que des envies fréquentes d'uriner. Il urine jusqu'à

4.000 centimètres cubes, bien qu'il s'abstienne de boire; la

pesanteur spécifique de l'urine est de 1.014; on n'y trouve ni

278 CLINIQUE NERVEUSE.

albumine, ni sucre. La polyurie dure jusqu'au 4 octobre. De

cette manière, les premiers temps on pouvait supposer que D...

était atteint d'un diabète insipide. Le 12 septembre, les jambes

de D... commencèrent à trembler; le tremblement n'avait

lieu que quand il marchait et, si fort, que le malade sautait à

chaque pas. Un examen plus minutieux fit voir une rigidité des

muscles de la cuisse et de la jambe, même lorsque D... était

couché; la sensibilité de la peau était normale comme aupara-

vant ; le champ de la vision (l'examen est fait sans périmètre)

était borné; la sensibilité des couleurs et la vision n'étaient

nullement troublées; la polyopie monoculaire, indiquée par

M. Parinaud, était nettement prononcée; en fermant un oeil,

de l'autre le malade voyait chaque objet répélé plusieurs fois;

l'anesthésie du larynx permettait d'introduire le doigt jusqu'à

l'épiglotte. Dans le cours ultérieur de la maladie, il eut plu-

sieurs accès de violents tremblements des jambes ; étendu sur

le dos, il jetait les jambes de différents côtés, frappait des pieds

le plancher avec force, ou les heurtait l'un contre l'autre; il

pâlissait et perdait à moitié connaissance. Les attaques avaient

une durée de deux minutes, en laissant une lassitude générale.

Il faut encore ajouter qu'il arrivait des jours où la polyurie

disparaissait subitement, les tremblements aussi; le malade

pouvait un peu marcher facilement, mais après il revenait au

même état. Moralement, il paraissait abattu, parfois la tristesse

s'emparait de lui ; il demandait à quitter l'hôpital ; la salle où

il se trouvait et tout ce qui l'entourait lui semblait dégoûtant;

il était prêt à passer des journées entières dans les lieux d'ai-

sance. Au mois de décembre dernier, le malade quitta l'hôpital.

L'anesthésie du pharynx a disparu ; la polyurie et les tremble-

ments n'existaient plus ; il marchait facilement et il n'est resté

qu'une rigidité des muscles à peine visible pendant la marche.

Considérant les faits de l'anamnèse, l'anesthésie

caractéristique du pharynx, la polyopie monoculaire,

l'instabilité de la polyurie, les particularités du carac-

tère du malade, j'ai dû reconnaître un cas d'hys-

térie.

jf Observation VIII.- 11..., soldat, est entré à l'hôpital le 2 août

1885. Il souffrait de douleurs sourdes dans les jambes. Un

QUELQUES cas d'hystérie dans LES troupes RUSSES. z79

examen constate une enflure peu considérable de l'articulation

du genou et de la tibio-tarsieulle. Deuxjours après son entrée il

se déclara une douleur à la deuxième phalange métacarpienne

droite, et neuf jours après, des élancements, plus forts à la

pression, dans le côté droit, sans aucune lésion ,dans les pou-

mons ni dans la plèvre. Dans le cours de la maladie ces dou-

leurs se renouvelèrent plusieurs fois, mais celles des jambes

l'impatientèrent excessivement. L'enflure des articulations et

les maux ne cédèrent ni à l'emploi du salicylate de soude à

l'intérieur, ni aux injections sous-cutanées de morphine, ni

aux compresses d'une dissolution de l'acide carbonique de

4.° ni aux bains chauds , ni aux onguents narcotiques,

etc. En général, les phénomènes douloureux ressemblaient

peu à ceux du rhumatisme que je supposai d'abord. Il me

fallut faire un examen détaillé du système nerveux. Cet examen

eut lieu le 7 novembre 1885, lorsque le patient revint dans

ma salle, et donna les résulats suivants : la sensibilité tactile

des deux jambes est bien affaiblie, celle de douleur a complète-

ment disparu ; en même temps, la répartition de l'anesthésie

est originale; les pieds sont sensibles à l'attouchement ainsi

qu'à la douleur; la sensibilité du côté droit du tronc, du bras

droit et du côté droit de la face est normale; mais, dans les

mêmes parties gauches l'attouchement d'une épingle est res-

senti beaucoup plus faiblement, comme s'il se faisait à travers

la chemise, comme le dit le malade lui-même, quoiqu'il puisse

distinguer la pointe d'une épingle de sa tête, mais il ne res-

sent pas de mal à la piqûre; la vision de l'oeil gauche est plus

faible que celle du droit; le champ de la vision est rétréci con-

centriquement (l'examen a eu lieu sans périmètre); la sensa-

tion des couleurs n'est pas troublée ; l'ouïe et le goût du côté

gauche sont aussi émoussés. Ainsi je trouve que le malade a

un trouble de sensibilité connu sous la forme de parahémianes-

thésie. D'ailleurs l'anesthésie de la muqueuse du pharynx est

constatée. Les réflexes tendineux du genou et du tendon

d'Achille sont très exagérés. On remarque une contracture

dans les deux genoux de manière que les jambes font un angle

aigu avec les cuisses. L'articulation tibio-tarsienne et celle du

genou ne présentent pas de modifications bien tranchées. La

flexion active du genou n'est possible qu'à un degré très

minime; les mouvements de l'articulation coxo-fémorale sont

un peu plus faciles; l'extension des jambes n'est que passive

280 CLINIQUE NERVEUSE.

jusqu'à un certain degré, et amène alors une forte trépidation

des jambes, accompagnée de douleurs. Les muscles des

jambes sont flasques, mais la réaction aux deux espèces de

courants ne fait voir aucun trouble dans l'excitabilité des

muscles et des troncs nerveux, bien que le malade, près de

quatre mois depuis le jour de son entrée à l'hôpital, soit alité.

De temps en temps, des douleurs passagères se manifestent

dans le dos, de même que dans les genoux et une douleur

sourde continuelle dans les jambes. L'anamnèse nous rapporte

que le sujet était resté trois mois alité à la maison avec la même

contracture des jambes et que les douleurs sourdes avaient été

les mêmes qu'à présent, La mère du patient avait souffert de

tiraillements convulsifs des jambes, de sorte qu'elle ne pouvait

tenir son enfant sur les genoux pour ne pas le faire sauter

en l'air par un de ces mouvements convulsifs, chose qui était

déjà arrivée une fois. Le frère aîné du malade était aussi sujet

aux mêmes contractures.

Prescription : solutio arsenicalis Fowleri, galvanisation du

dos et faradisation des jambes ; mouvements passifs des jambes.

Sous l'influence de ce traitement, au bout de dix-neuf jours, les

contractures diminuèrent d'abord dans le genou droit; à la fin

d'un mois, il marchait avec des béquilles. Assis, il balance

facilement les jambes sans qu'on puisse y remarquer de tremble-

ments ; mais lors qu'il marche, les muscles deviennent rigides,

re qui fait que le malade ne marche que sur la pointe du pied

en les faisant glisser sans les soulever et sans fléchir les

genoux; il s'y ajoute une trépidation des jambes. Les troubles

de la sensibilité sont restés les mêmes. L'amendement lent de

la démarche va jusqu'à présent (30 janvier/ 11 février 1886).

L'apparition subite des contractures-, le trouble

étrange de la sensibilité qui ne correspond à aucune

lésion organique du système nerveux ni central, ni

periphérique, les données, de l'anamnèse m'ont fait

diagnostiquer l'hystérie. Une amélioration rapide de

la maladie, due en partie à un traitement psychique,

a précisé mon opinion.

Observation IX. - 0..., ,jeune soldat, entre à l'hôpital le

28 décembre / 9 janvier 1885. L'examen du malade fait voir

quelques cas D'HYSTÉRIE dans LES TROUPES RUSSES. 281

que l'intelligence est intacte, mais qu'il ne peut répondre aux

questions. Lorsqu'on lui demanda par écrit : « Où as-tu mal ? » il

écrivit : «Je me porte bien, mais je ne puis parler. - Pourquoi

ne peux-tupas parler ? J'ai été au lazaret, j'ai eu un accès et

le médecin m'a effrayé. » Il n'existe pas d'autres troubles ni de la

sensibilité ni delà motilité. Le - janvier il commença à parler

d'une manière normale. De nouveau il répéta qu'il avait eu un

accès, après lequel il était resté muet; il ne pouvait parler

parce qu'il avait des spasmes dans la gorge. L'examen du

système nerveux, qu'on répéta, donna les résultats suivants :

la vision de l'oeil gauche est de -îü-; celle du droit est très faible ;

les sensations du goût sont troublées : il dit que la quinine est

acide; les réflexes de la muqueuse du pharynx sont tout à fait

abolis. La sensibilité cutanée tactile et douloureuse .est très

peu émoussée; le tact est conservé. Les réflexes de la rotule ne

présentent rien d'anormal. La motilité est aussi normale. Le

malade se plaint de douleurs sourdes dans les jambes.

Les antécédents montrent que, dix-huit mois auparavant,

étant encore chez lui, le malade avait été muet huit jours en-

tiers ; la mutité s'était alors développée aussi après une attaque

de convulsions. L'automne précédent, il avait eu aussi de ces

accès, mais non suivis de mutisme. On ne put constater ni

hérédité ni d'autre cause évidente de la maladie.

Dans ce cas, on ne pouvait supposer que l'hystérie ou la

simulation. Mais celle-ci ne peut être admise à cause de quel-

ques phénomènes qu'il est difficile de simuler; l'anesthésie

pharyngée, par exemple, et puis le malade ne voulait pas rester

à l'hôpital et demandait toujours à en sortir.

Observation X. F..., jeune soldat entré à l'hôpital le

20 décembre/1er janvier 1885, L'aide chirugien qui l'avait

amené dit qu'à peine était-il venu au régiment qu'il a eu un

accès convulsif. Arrivé à l'hôpital sans connaissance, dans la

salle de réception, il était pris de plusieurs attaques d'hystéro-

épilepsie, à ce que suppose le médecin de service. Le

21 décembre, je trouve notre malade dans l'état suivant : la

perte de connaissance ; les pupilles dilatées; lorsqu'on essaye

de soulever les paupières, le globe oculaire roule en bas. Un

tremblement des jambes; les muscles des membres inférieurs

sont relâchés ; les réflexes de la plante du pied n'existent que

sur le droit; le pouls, 5. Pendant l'examen, il est arrivé un

. AI(CIIIVES, t. Xll. 1. 19

282 --) CLINIQUE NERVEUSE.

trouble convulsif suivant : le malade, avec une force et une

rapidité extraordinaires, se retourne dans son lit, le dos en l'air,

prend la position à la vache et, jetant le tronc d'arrière en

avant, donne des coups de tête contre le chevet. La force

des mouvements est si violente que quatre serviteurs ont de

la peine à le contenir. L'attaque de convulsions dura une

couple de minutes, après quoi la jambe gauche, le bras du

même côté restèrent contracturés à toutes les articulations et la

moindre tentative de redresser un des membres provoquait une

nouvelle attaque. Dans l'espace d'une demi-heure, il y eut trois

accès; tout ce temps, le malade reste sans connaissance. Vers

le soir, il revient à lui; pendant plusieurs heures, il ne peut

parler et fait comprendre par signes qu'il a des- spasmes au

larynx et à la poitrine. Le 22 décembre, un nouvel examen du

système nerveux fait constater : la vision des deux yeux est

de 20/40; la sensation des couleurs n'est pas troublée; le

champ visuel est presque normal ; le goût aussi ; la

sensibilité cutanée est intacte; les réflexes tendineux ne sont

pas exagérés. On ne remarque de troubles de sensibilité que

sur la conjonctive des paupières et dans le pharynx ; un attou-

chement de la conjonctive avec le doigt ou une épingle ne

donne pas de réflexe; l'introduction du doigt dans l'arrière-

bouche et l'irritation de sa muqueuse restent également sans

réflexe. En outre, on constate une diplopie monoculaire.

Interrogé, le malade répond qu'auparavant il n'a jamais eu

d'attaques; que, de toute sa famille, il n'a qu'une soeur de

neuf ans sujette à ces convulsions. 11 n'a jamais fait aucun

excès de boisson et n'a jamais souffert de syphilis.

Le 22 décembre, à huit heures du soir, l'accès du matin se

répète. L'attaque est précédée d'un violent mal de tête, de

tremblements des jambes et d'un spasme douloureux du pha-

rynx. Dans la nuit du 27, le malade a des trépidations des

jambes et des hallucinations. Le 30 décembre, il se sent tout

à fait bien portant. A l'examen, on ne retrouve même plus

les légers troubles de la sensibilité, observés le 22 décembre.

Il n'a rien de particulier jusqu'au 8/20 janvier. Ce jour-là, à

six heures du soir, nouvelle attaque de convulsions. Le lende-

main matin, je lui trouve une anesthésie cutanée de tout le

corps. Les sensations tactiles et douloureuses sont abolies;

il est possible de transpercer un pli de la peau ; le malade ne

peut plus se représenter la position de ses membres au point

QUELQUES CAS D'HYS1`ERIE DANS LES TROUPES RUSSES. 283

que, les yeux fermés, il ne trouve plus son nez, ni son autre

bras, etc. 11 en est de même pour les membres inférieurs.

Néanmoins, il marche facilement , sans aucun symptôme

d'ataxie, aussi bien les yeux ouverts que fermés. Le champ p

visuel est beaucoup rétréci; le goût est aboli. Il existe une

anesthésie des muqueuses de l'oeil, du nez, de la bouche et du

pharynx. On constate la macropie : un objet mince, un crayon,

par exemple, éloigné à 8 ou 1 centimètres d'un oeil, l'autre étant

fermé, lui parait de la grosseur du pouce. Le 10 janvier, la

sensibilité cutanée, et celle des muqueuses s'est de nouveau

rétablie. Le 16 janvier nouvelle anesthésie du pharynx et de la

conjonctive; le soir de ce même jour, il lui survient une attaque.

Le lendemain, 17 janvier, anesthésie complète cutanée et

anesthésie des muqueuses sur tout le corps, avec un trouble

de la sensation musculaire, de même que le 9 janvier. Le

18 janvier, il ne reste plus qu'une insensibilité des muqueuses

de l'oeil et du pharynx, qui disparait le lendemain. Le 23, à six

heures du soir, encore uue attaque. De nouveau, après anes-

thésie sur tout le corps, qui dure jusqu'à présent(1/13 février).

Le 25 janvier pour la première fois, je trouve l'achromatopsie.

Le malade, de chaqueoeil à part, appelle bleu le rouge et jaune

le vert; rétrécissement du champ visuel; macropie comme le

9 janvier. L'achromatopsie ne s'observe que quand il regarde

d'un oeil ; des deux yeux ouverts ensemble il distingue parfai-

tement les couleurs.

Je crois que je n'ai pas besoin de prouver le dia-

gnostic de l'hystérie dans ce cas.

Observation XI. - F..., jeune soldat. Le 8/20 janvier 1886,

à trois heures de relevée, on amène F... en proie à une attaque

de convulsions, qui durèrent tout le reste du jour et toute la

nuit. Le lendemain, à l'heure de la visite du matin, le malade

présentait le tableau suivant : sans connaissance, les yeux

fermés; les pupilles dilatées; de temps en temps, apparaît un

spasme des muscles de l'oeil, ce qui fait que les globes

oculaires prennent des positions particulières; il a de la peine

à avaler de l'eau; il crache quand on tente de lui donner à

boire. Des convulsions continuelles présentent un tel carac-

tère : des tiraillements des muscles de la ceinture scapulaire

classique, régulièrement rhythmiques, dégénèrent subitement

284 CLINIQUE nerveuse.

en opisthotonus ou plcurosthotonus, de môme qu'en convul-

sions des jambes qui se fléchissent à toutes les articulations.

Pendant les accès de convulsions toniques, il pousse des sons

inarticulés; il éprouve des hallucinations. Une hyperesthésie

cutanée de tout le corps; les convulsions durent jusqu'à une

heure de l'après-midi, mais la connaissance ne revient que vers

les huit heures du matin du 10 janvier. Les attaques se répètent

quotidiennement; parfois, à deux reprises par jour. Ces phéno-

mènes persistent jusqu'au 2 février. Le 12 janvier, il devient

sourd des deux oreilles : le 14, il entend de l'oreille gauche

ce qu'on dit en forçant la voix; la surdité de l'oreille droite

reste jusqu'au 20 janvier, le jour où le malade recouvre l'ouïe.

Le 15 et le 16, il se trouve en état de stupeur, il est couché, les

yeux fixés sur un point; ne demande rien, ne se plaint pas.

Lorsque je tire ma montre pour compter le pouls, le malade

dirige ses regards dessus et ne la quitte plus des yeux, il se

retourne même dans son lit, se soulève, lorsque je la fais sortir

exprès de son champ visuel. Le 17 janvier, pour la première

fois, j'ai réussi à le faire marcher un peu; mais les jambes

tremblent; les muscles des membres inférieurs sont à l'état

de rigidité, les genoux fléchis; il glisse les pieds; les pas sont

menus, le dos redressé. Ce môme jours, on constate un affai-

blissement de la sensibilité cutanée de tout le corps, bien qu'un

examen détaillé du système nerveux soit bien difficile. Le 18, les

accès changent de caractère : l'attaque commence maintenant

par un tiraillement des muscles de l'abdomen, une respira-

tion accélérée. Ensuite, le malade étend subitement les bras et

les jambes, courbe le dos en arrière en arc de cercle, se frappe

du bassin contre le lit deux ou trois fois, et puis, pendant près

de quatre minutes, garde la position suivante : les jambes sont

à l'état d'extension, les bras aussi, éloignés du corps; les

poings sont fermés; le dos est recourbé en arrière, de sorte que

le malade ne touche le lit que par les reins; la tète est telle-

ment rejetée en arrière qu'il touche le cou de l'occiput; le som-

met de la tête s'appuie au coussin, le cou et le menton ne

forment qu'une ligne; la face est bleue; on voit la pulsation

des veines; la respiration est à peine sensible et se fait parle

nez à cause de la contraction des mâchoires. Les accès se

suivent, séparés par un relâchement des muscles momentané.

Le 24 janvier, on examine en détail le système nerveux. Le

champ visuel est rétréci concentriquement ; trouble dans

QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 285

la sensation des couleurs; l'oeil droit voit en vert des fils

rouges, bleus et noirs, l'oeil gauche les voit jaunes. Les deux

yeux ouverts distinguent bien les couleurs. Macropie, comme

chez le sujet n° 10. Abolition du goût; les muqueuses

des yeux, du nez, de la bouche et du pharynx sont anes-

thésiées. La sensibilité cutanée de toute espèce n'existe plus;

les sensations musculaires sont en désordre, comme dans le

cas précédent : il ne trouve pas son nez. Les réflexes tendi-

neux du genou et du tendon d'Achille sont exagérés. Pas de

paralysie. La démarche est restée comme au 17 janvier, mais

il peut marcher plus longtemps. L'activité psychique est

normale. L'état décrit est le même que jusqu'au 2 février,

excepté une seule amélioration, qu'il marche tout àfaitfacile-

ment les yeux ouverts et fermés. Il peut même courir.

Je ne m'étendrai pas sur le diagnostic : il est évi-

dent. ·

Faisons maintenant un résumé des symptômes de

l'hystérie chez les hommes, nous voyons qu'elle était

indiquée par :

1. La surdi-mutité (2° cas), qui a apparu subitement

et disparu avec la même rapidité sans qu'on pût obser-

ver aucune lésion de l'oreille;

2. Le mutisme (cas 3' et 9'). Le mutisme du 2° cas

était causé par la paralysie des cordes vocales; celui

du 3" paraissait être dû à un défaut d'énergie pour

articuler les sons, ou bien, peut-être, au trouble de

l'accord d'activité des cordes, causé par un spasme,

comme nous avons pu souvent l'observer sur les extré-

mités, mais il n'y avait pas de paralysie des cordes

vocales. Le troisième malade n'a pas été examiné au

laryngoscope ;

3. La surdité chez un malade (cas 11°) est passa-

gère, d'abord complète pour les deux oreilles, ensuite

pour la droite seule;

286 CLINIQUE NERVEUSE.

4. Des troubles de la vision sous forme de rétré-

cissement concentrique du champ visuel ou d'hé-

miopie accompagnée d'hémianesthésie (cas 1°, 6e, 7°,

8°; 1 Oe, 1 le); dans le 7° cas, nous avons eu une polyo-

pie monoculaire, et, dans les cas 10° et 11°, une macro-

pie. Ces deux derniers troubles ont été indiqués par

M. le professeur Charcot, l'année passée, dans une de

ses leçons sur l'hystérie des hommes. Je n'ai pu ob-

server la dyschromatopsie que dans les cas 10° et 11°.

5. L'anesthésie des muqueuses. Celle du pharynx

mérite une attention particulière parce qu'elle paraît

constante (7 cas sur 11); on ne l'a pas observé chez

les quatre'autres parce qu'ils n'étaient pas examinés.

Dans certains cas (7, 9 et 10), l'anesthésie du pharynx

présentait le seul trouble de la sensibilité; dans le

10e, cas cette anesthésie et celle de la conjonctive

étaient les avant-coureurs de l'accès.

6. Le trouble de la sensibilité cutanée sous la forme

d'une anesthésie de tout le corps, suivie de l'abolition

de toute espèce de sensibilité cutanée et musculaire,

de l'anesthésie des'muqueuses et de l'affaiblissement

de l'ouïe et de la vision (cas 10 et 11); l'hémiasnes-

thésie a été observée sur trois malades (cas 2, 6 et 8);

un trouble tout particulier de la sensibilité a été cons-

taté sur un malade (n° 5) : c'est l'abolition de la dou-

leur et de la température sur la moitié gauche du corps

et l'anesthésie complète sur la droite, comme les cas

d'hémianesthésie ordinaire. Les malades 1 cl, 3" et 4°

présentaient des cas d'analgésie, accompagnée de

troubles de motilité sous forme de paraplégie. L'hy-

peresthésie se rencontre bien plus rarement; le malade

11e présentait un cas d'hyperesthésie de tout le corps

QUELQUES CAS D'AYSTBRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 287

que remplaça, plus tard, une anesthésie complète;

les cas 3, 5 et 6 offraient une hyperesthésie des ver-

tèbres lombaires, si bien qu'au moindre attouchement,

le sujet se rejetait en arrière. Mais, en revanche, les

paresthésies sous la forme de refroidissement ou

engourdissement des extrémités, de douleurs sourdes

dans différentes parties du corps, de maux de tête

étaient constants.

7. Des troubles de la motilité sous la forme d'hémi-

plégie (cas 6); le 5e malade avait une paralysie des

membres inférieurs et du bras droit; cinq malades

étaient atteints de paraplégie (cas 1, 3, 4, 8 et 11).

Dans ces derniers cas, la paralysie était accompagnée

de phénomènes spasmodiques qui se faisaient surtout

voir à toute tentative de mouvement : les pieds glissent,

ne se soulèvent pas du plancher, se rejettent de côté,

les genoux sont fléchis, ou bien, au contraire, les

jambes sont raides, les muscles sont à l'état de tension.

Cela fait que la démarche des malades est très caracté-

ristique : en marchant, le tronc déjeté en arrière devient

raide, ils traînent les pieds sur le sol et balancent les

bras en les écartant du torse.

8. Les convulsions sous la forme de tiraillements

de différents membres, de tressaillements de tout le

corps, de tremblements pendant les mouvements volon-

taires et de véritables accès hystéro-épileptiques (cas

1, 5, 10, 11). Ordinairement, quelques heures avant

l'accès, le malade devient abattu, les yeux ternes; on

constate des anesthésies prodromiques soit de tout le

corps, soit bornées à quelques régions des muqueuses

(du pharynx, de la conjonctive); 15, 20 minutes avant

l'accès, le malade se couche, tombe en état de stupeur,

288 CLINIQUE NERVEUSE.

les yeux ouverts, fixés sur un point, et ne répond pas

si on l'appelle. En même temps, commencent des tirail-

lements de différentes parties du corps, puis arrive le

moment de la contraction tonique des muscles de tout

le corps qu'interrompent des mouvements extrême-

ment violents, sous la forme d'opisthotonus ou de

pleurosthotonus, ou bien le sujet frappe le lit de la

tête à plusieurs reprises, etc. En un mot, cette période

est caractérisée par des mouvements violents et exces-

sivement désordonnés. Cela dure de 3 à 5 minutes;

puis arrive un relâchement des muscles momentané;

le malade n'est pas encore revenu à lui que survient une

nouvelle attaque de grands mouvements, tout à fait

semblable à.la précédente. L'accès dure de 1 heure à

3 heures. Voilà un aperçu général des accès que j'ai

observés :

Le caractère de la période des grands mou-

vements n'est pas le même pour tous les malades et

se change parfois chez le même patient.

Vers la fin du trouble, on voit le sujet en proie à des

hallucinations il prononce des paroles incohérentes, pa-

raît saisir quelque chose avec les mains, ou bien il les

porte à la gorge, à la région du coeur, etc. Après l'accès,

les malades reviennent à eux, reprennent leurs occupa-

tions habituelles, contraste frappant avec les attaques

d'épilepsie, après lesquelles ils tombent dans un pro-

fond sommeil, ou se plaignent de violents maux de

tête, etc.

9. Deux malades (1, 4) souffraient d'une rétention

spasmodique qui a exigé l'emploi prolongé d'un ca-

théter. Le premier malade était sujet, en outre,

aux vomissements et aux accès d'angine de poitrine.

QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 289

10. Le malade n° 8 présentait des phénomènes d'ar-

thralgie, de violentes douleurs dans les articulations

du genou, qui ne voulaient céder ni à l'emploi du sali-

cylate de soude, ni à celui des narcotiques; une pression

superficielle des articulations causait des douleurs; la

peau est oedémateuse, mais elle n'est pas rouge; au-

cune indication d'amas liquide dans les articulations.

11. Dans les 5° et 8° cas, on pouvait observer une

élévation de la température sans qu'il y ait eu d'inflam-

mation locale. Quant à la température après les accès,

une seule fois (cas 5) elle monta à 39° '; dans tous les

autres cas, elle resta normale, ou 37°,6 - 37°,7.

Ainsi, les phénomènes cliniques de l'hystérie des

hommes ne sont pas moins variés que ceux de l'hystérie

des femmes. L'hérédité et la prédisposition semblent

jouer le principal rôle dans l'étiologie de l'hystérie.

Ainsi, dans les cas 1,3,4, 7, 8, 9, nous avons eu affaire à

des récidives de troubles hystériques qui avaient eu lieu

auparavant; les cas 3, 8 et 10 nous montrent une pré-

disposition de famille à l'hystérie. Parmi les causes

accidentelles dans le 3e cas, il a existé un léger trau-

matisme ; dans le 1° cas, une violente émotion morale,

peut-être, tient aussi à un traumatisme. Dans les autres

cas, on n'a pu trouver un motif évident ou accidentel.

Il est important de noter que, sur neuf soldats atteints

d'hystérie, il y en avait cinq qui venaient d'être enrô-

lés. Il est fort possible que le brusque passage de la

vie de famille à celle de soldat influence sur l'origine

de l'hystérie. Parmi les hystériques, il y avait des gens

d'une forte constitution, gras et musculeux, de ma-

1 C'est là une température tout à l'ait anormale (B).

290 0 CLINIQUE NERVEUSE.

nière que la constitution physique n'a pas d'importance

pour l'étiologie de la maladie.

Par rapport au diagnostic, on peut diviser tous les

cas ci-dessus en deux groupes : le premier renfermera

les accès accompagnés de convulsions hystéro-épilep-

tiques, où le diagnostic est extrêmement facile même

pour ceux qui ne sont pas spécialistes. Dans le second

groupe, il faut ranger les malades ayant des paraplé-

gies et des hémiplégies hystériques. C'est surtout les

paraplégies hystériques qu'on risque facilement de con-

fondre avec des lésions organiques de la moelle épi-

nière, lorsque la paralysie des membres inférieurs est

compliquée d'une rétention d'urine, de constipation

et de douleurs dans le dos. Ce qui caractérise ici l'hys-

térie, c'est la combinaison des paralysies de nature

cérébro-spinale à des affections de nature cérébrale,

la combinaison d'une paraplégie avec une hémianes-

thésie, d'une paralysie des cordes vocales, de la sur-

dité, la combinaison d'une hémiplégie avec une para-

piégé (cas 6). Ce qui contribue considérablement à

porter un diagnostic certain, ce sont les troubles par-

tiels de la sensibilité, troubles parfois très capricieux,

par exemple l'abolition des sensations de là douleur

et de la température; tandis que le sentiment de l'at-

touchement persiste (cas 5), l'abolition de la sensibilité

douloureuse seule; les anesthésies des muqueuses (du

pharynx) et les troubles bizarres de la vision (la ma-

cropie, la diplopie unioculaire, l'achromatopsie). Enfin

les paralysies elles-mêmes offrent des particularités frap-

pantes. Voici un exemple (cas 6) : le maladeestatteint

d'une hémiplégie complète, lorsqu'il est couché; il peut

cependant marcher en s'aidant un peu d'une béquille;

QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 291

quand il marche, on voit que l'autre jambe est aussi

contracturée à l'articulation tibio-tarsienne et à celle

du genou. Dans la suite, le diagnostic est confirmé

par la prompte disparition de toutes les affections de

la maladie. Pour exclure la simulation, on trouve tou-

jours assez de données, lorsqu'on examine attentive-

ment le malade.

Ajoutons quelques mots sur la thérapie. Le traite-

ment des accès d'hystéro-épilepsie a toujours été sans

résultat : ni l'eau, ni l'électricité, ni les narcotiques à

grandes doses n'ont influencé ni la fréquence, ni l'in-

tensité des attaques. Le traitement des paralysies a

eu plus de succès. L'exercice a été le plus efficace.

Dans le cas d'aphonie (cas 3), je demandais au ma-

lade à prononcer d'abord des voyelles séparées, en-

suite des syllabes, et j'obtenais des résultats satisfai-

sants ; dans tous les cas de paraplégie, j'excitais les

malades à faire des mouvements actifs et passifs avec

les membres paralysés, je les faisais promener en les

soutenant sous les bras, je les forçais de recourir aux

béquilles le plus tôt possible, etc. Je crois ce traitement

des plus efficaces, et, pour le prouver, je puis citer le fait

suivant que j'ai observé : dans les cas où le diagnotic

était retardé pour une cause ou une autre et où on

employait les remèdes ordinaires contre les paralysies,

ces dernières restaient au statu quo; mais, aussitôt que

le diagnostic était établi, et que j'avais recours aux

exercices, un mieux se faisait voir tout de suite. La

rigidité des muscles dans les mouvements volontaires

appartient aux symptômes les plus opiniâtres qui

cèdent fort difficilement.

Je dois ajouter, pour conclure, que les maladies

292 CLINIQUE NERVEUSE.

hystériques dans les troupes ne sont pas rares. Outre

les cas que j'ai cités, je pourrais rapporter encore

toute une série de cas où les malades étaient amenés à

l'hôpital comme épileptiques, où le caractère des accès

et les troubles de la sensibilité étaient typiques pour

l'hystérie. Je veux traiter ces cas dans un article pro-

chain, où je me propose de considérer les troubles de

la sensibilité dans l'épilepsie.

DE L'IDIOTIE COMPLIQUÉE DE CACHEXIE PACHYDERMIQUE

(idiotie CItÉTIN01DE (suite)1;

Par BOURNEVILLE et P. BRICON.

I. IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE (suite).

L'observation suivante a déjà été publiée par l'un

de nous, dans le n° 36 du Progrès médical de 1880;

elle a été ensuite reproduite dans la thèse de M. Ridel

Saillard 2, communiquée à la Société de biologie (1882)g;

enfin le malade qui en fait l'objet a été montré à leurs

cours par M. Charcot et par M. Magnan.

Observation VI. Idiotie et crétinisme. Arrêt de développe-

ment. Etat oedém,¡teux et rénilent de la peau (cachexie pczchl, -

dermique) avec tumeurs myxoedémalezcses disséminées. Exercices.

Amélioration. Erysipèles. Refroidissement. Tym-

panite. Atonie. - Mort.

Autopsie : OEdème pulmonaire. Hydrothorax et hydro-

péricarde. - Dilatation considérable du eoecum,. absence du

1 Voir le t. XII, p. 137. Cette étude sur l'idiotie crétinoïde est un

extrait revu et complété du mémoire présenté par l'un de nous en dé-

cembre 1885 à la Société médico-psychologique pour le prix Belhomme

relatif à l'idiotie et de préférence aux USIOns des centres nerveux dans

.'idiotie.

2 Voir aussi le Compte rendu de Bicêtre pour 1880.

3 Communication faite avec M. Gilles de la Tourette.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE · ? 93 3

corps thyroïde; dédoublement du cap de la troisième circonvolu-

tion frontale gauche; irrégularités et anomalies des circonvolu-

tions et des scissures ; petite tumeur siégeant sur un pli passage

allant delà deuxième à la troisième circonvolution frontale gauche.

Thén... (Eugène), né le 20 août 1861, placé à plusieurs

reprises par sa mère à l'infirmerie des idiots de Bicêtre, est entré

en dernier lieu le 16 juin 1879 (service de M. Bourneville), et y

est décédé le 18 novembre 1885.

Renseignements fournis par sa mère (22 octobre 't879). Père,

architecte, présentait une malformation du bras gauche, qui était

moins développé que le droit; ce bras se terminait par un moi-

gnon formé par la région métacarpienne et une portion des

doigts rudimentaires. Il travaillait beaucoup, même de nuit, ne

faisait pas d'excès de boisson, il n'était pas migraineux, n'avait

jamais eud'affectionscutanées; d'une santé habituellementbonne,

il éprouvait parfois des étourdissements et avait des épistaxis qui

ont cessé à quarante-huit ou quarante-neuf ans. Il est mort en

1871, à l'âge de cinquante-deux ans, des suites d'une hémiplégie

consécutive à une attaque d'apoplexie survenue dix-huit mois

auparavant. [Père, mort vers soixante-treize, ans d'une attaque

d'apoplexie. Mère, morte jeune du choléra. Un frère bien

portant, pas d'aliénés, pas d'épileptiques, pas d'autres difformes

ni d'alcooliques dans la famille.]

Mère, quarante-cinq ans, couturière, bien portante, n'offrant

aucune trace de goitre, n'a jamais eu qu'une fièvre typhoïde dans

l'enfance ; elle n'est pas migraineuse, mais depuis, quelques

années, elle est sujette à des céphalalgies qu'elle attribue aux

chagrins; elle est très impressionnable et pleure facilement. Il

ne parait pas que le goitre et le crétinisme soient endémiques

dans son pays (Courancelle). Elle a une cousine au troisième degré

porteuse d'un goitre très gros, intelligente, qui serait la seule goi-

treuse du village. Dans son pays, elle aurait vu autrefois un homme

ressemblant à son fils. [Père, cultivateur, sobre, mort à quatre-

vingts ans, d'une chute; il n'était pas en enfance. 111ère, morte

d'une bronchite à soixante-douze ans ; intelligente, n'était pas

nerveuse ; un frère bien portant, intelligent, a deux enfants sains,

bien portants et intelligents ; deux soeurs jouissant d'une bonne

santé, non nerveuses, ont l'une, trois garçons, l'autre, un garçon,

tous bien portants. Pas d'aliénés, etc... dans la famille.]

Pas de consanguinité. Le père est né à Paris, la mère est de

Courancelle (Meuse).

Trois enfants : 4 garçon, mort à quinze mois, la nourrice était

devenue tuberculeuse, n'a pas eu de convulsions ; 3° notre ma-

lude; 3° fille, bien développée, dix-sep tans, intelligente, s'exprimant

29' CLINIQUE NERVEUSE.

très nettement ; traits réguliers, figure agréable, pas de goitre;

elle ne présente aucun accident nerveux J.

Notre malade. - Durant la grossesse, à trois mois, la mère fut

renversée par une voiture ; cet accident sans conséquences graves

lui causa seulement peur; elle était triste parce qu'elle n'était

pas encore mariée à cette époque ; il n'y aurait jamais eu de

scènes violentes; le père était marié et ne l'a épousée qu'après

la mort de sa femme. Elle n'aurait pas vu de crétins pendant

qu'elle était enceinte. Accouchement à terme (à Neuilly-sur-

Seine), assez long ; on aurait cassé un bras de l'enfant, le droit,

croit-on, et démis un poignet. A la naissance, l'enfant était très

gros.

Il fut confié jusqu'à un an à une nourrice de Rambouillet, non

goitreuse, qui l'éleva au sein dans des conditions hygiéniques dé-

plorables (logement humide, etc.), et la mère soupçonne qu'il il

aurait eu à cette époque quelques convulsions. Quoi qu'il en soit,

elle le reprit chez elle et, vers quinze mois, il commença à mar-

cher ; il ressemblait alors, affirrue-t-elle, à tous les enfants de

son âge; il était affectueux, donnait quelques signes d'intelligence

et prononçait un petit nombre de mots. C'est à cette époque

qu aurait lait une chute dans un escalier et depuis lors, au dire

de la mère, il aurait complètement changé. Deux ans après cet ac-

cident, il pouvait encore marcher assez convenablement, tenu par

'Elle s'est mariée à 19 ans, fait une fausse couche ; en 1883, elle était

bien portante.

Fig. 95. - Th... à l'âge de 4 ans.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE 295

la main; il n'aurait que rarement marché seul dans l'appar-

tement, et rarement sorti dehors. Bien qu'aucune nouvelle atta-

que de convulsions ne soit survenue, néanmoins, la parole

n'avait fait aucun progrès. C'est dans ces conditions que l'enfant

fut amené pour la première fois à Bicêtre, où il fit un séjour

d'un mois (juillet-août 1863). La mère ne voulut pas le laisser

davantage, parce que, dit-elle, il s'ennuyait et que, d'ailleurs,

il était devenu gâteux depuis son entrée. Il marchait aussi

moins bien, mais était toujours très atfectueux. La dentition se

fit lentement; elle n'était pas complète à sept ans. En 1871, sa

soeur lui fit par imprudence de fortes brûlures à la figure et aux

mains. Il fut alors ramené à Bicêtre, d'où il ne sortit qu'en oc-

tobre 1878 pour y rentrer l'année suivante, comme il a été dit plus

haut.

État actuel (6 janvier 1880). L'enfant reste pendant tout le

jour assis devant une table, dans un état d'inertie et d'oblusion

intellectuelle complète; sa position habituelle, à l'extrémité de

la table qu'il a l'air de présider, son regard indifférent et son

Fig. 16. Th... à l'âge de 20 ans.

29S CLINIQUE NERVEUSE.

extrême apathie lui ont fait donner par les malades le sobriquet

de Pacha, sous lequel il est connu dans la maison.

La tête, légèrement fléchie sur le thorax, est volumineuse et

irrégulière et sa forme rappelle grossièrement celle d'un pain

de sucre. L'occipital forme en arrière une saillie notable du côté

gauche ; en avant, on note, au contraire, un développement plus

Fi ? 17.- Cette figure représente trois cas d'idiotie : le premier (à à

gauche) avec goitre, les autres accompagnés de cachexie pachydermi-

que. = Le Pacha est tenu par les deux autres idiots.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE 297

considérable de la bosse frontale droite; vu d'en haut, le crâne

présente ainsi une plagiocéphalte assez marquée. La partie posté-

rieure du crâne est très développée, les sutures fronto-pariétales

sont saillantes * et les dépressions sus-sourcilières très pronon-

cées. Le cuir chevelu est atteint d'une calvitie presque complète

et présente sur toute son étendue une desquamation analogue à

celle du pityriasis capots. Les cheveux sont courts, volumineux,

secs, presque noirs ; ce sont des cheveux d'adulte et leur rareté

contraste tristement avec la physionomie enfantine du malade.

Le visage est hideux; le front et la racine du nez sont couverts

de rides, les sillons naso-labiaux sont très accusés, le nez est ca-

mard, très déprimé a sa racine comme chez la plupart des petits

entants; sur toute l'étendue de la face, la peau est mate, d'une

couleur blanc jaunâtre et bouffie; cette bouffissure, surtout mar-

quée au niveau des joues qui sont pendantes, des lèvres et des

paupières, contribue à accuser les rides et donne à la physionomie

un air vieillot, contrastant encore avec l'apparence fine et cireuse

de la peau qui est absolument glabre; les sourcils sont à peine

marqués et les cils rares; les yeux restent constamment à demi

fermés et les paupières sont collées chaque matin par suite d'une

blépharite ciliaire double. Ajoutons, pour terminer ce portrait,

qu'il existe sous le menton une vaste cicatrice de brûlure s'éten-

dant d'une oreille à l'autre, à la manière d'une jugulaire; la

surface de cette cicatrice, qui présente une couleur violacée, est

parsemée de brides dont quelques-unes, insérées au niveau du pli

mento-labial, produisent le renversement de la lèvre inférieure,

l'écoulement presque continuel de la salive et achèvent ainsi de

donner à la physionomie l'air bestial qui la caractérise. L'enfant

peut néanmoins fermer la bouche qnand il le veut, mais un effort

parait nécessaire pour cela et il ne le fait guère qu'au moment

de la déglutition. Pendant la mastication, la lèvre inférieure reste

pendante et laisse s'écouler au-dehors une partie de la salive et

des aliments. Les dents sont, pour la plupart cariées et usées jus-

qu'au niveau des gencives; en haut, les deux incisives médianes

de lait persistent en avant des dents définitives correspondantes.

Il ne parait pas exister d'asymétrie de la voûte palatine, ni de

malformation du voile du palais. Les oreilles sont régulièrement

ourlées, symétriques et présentent un lobule bien développé;

elles s'écartent fortement de la tête en arrière.

La bouffissure de la face, mentionnée ci-dessus, ne parait pas

avoir existé toujours au même degré; il semble y avoir eu un

temps, d'après les renseignements fournis par la mère, où la

physionomie de l'enfant reflétait assez exactement ses sentiments.

1 Voir à l'autopsie la description du crâne.

Archives, LXII. 20

298 CLINIQUE NERVEUSE.

Aujourd'hui, la face bouffie parait avoir perdu beaucoup de sa

.mobilité et les rares phrases qui sont comprises n'excitent aucun

jeu de physionomie ; la joie s'exprime par un sourire grossier et

disgracieux. La douleur et souvent une légère contrariété suffi-

sent à provoquer des larmes et des cris. La parole est réduite à

.quelques monosyllabes; ajour pour bonjour, tenu pour gâteau, ci

pour merci et quelques autres. La voix est enrouée, nasillarde, la

prononciation confuse et ce n'est ordinairement qu'en pressant

l'enfant de questions ou eu lui présentant le bonbon attendu

qu'on obtient une réponse lente à venir et comme traînée.

L'habitus général du tronc et des membres est assez remar-

quable. Outre le défaut de taille déjà signalé, on remarque une

extrême brièveté du cou qui est en même temps très élargi, mais

ne porte aucune trace de tumeur thyroïdienne. On sent distinc-

tement le larynx sur la ligne médiane en plaçant la tête dans

l'extension et en déprimant fortement les téguments, notablement t

épaissis à ce niveau. Tout au plus peut-on sentir, sur le côté droit

Fig. 18. Th... à l'âge de 21 ans (mai 1882).

IDIOTIE AVEC CACHEXIE l'ACHYDERMIQUE. 299

du cartilage thyroïde, quelques nodules roulant sous le doigt et

appartenant peut-être au corps thyroïde, qui serait par conséquent

extrêmement atrophié.

Sur toute l'étendue du tronc, la peau est fine, d'un blanc mat,

assez résistante sous le doigt, comme infiltrée et paraît recouvrir

une épaisse couche de tissu cellulaire lâche; au devant du thorax

elle est sillonnée de petites veines et de nombreux capillaires.

Ainsi que l'a fait remarquer M. Hadden, la transpiration est

insensible et l'excrétion de la matière sébacée parait complète-

ment suspendue.

Au niveau des régions sus-claviculaires, au-dessous des aisselles

et en divers points du thorax, on la trouve soulevée par des

tumeurs molles, tremblotantes, d'apparence oedémateuse. Ailleurs,

elle est tendue, résistante sous le doigt et comme bouffie de

graisse. On ne constate pas à la main d'abaissement notable de

la température. Le thermomètre appliqué sur le devant de la

poitrine, puis sur une des tumeurs cervicales, a marqué successi-

vement 1°,6 et 36°, ? , la température extérieure étant de 250.

La température rectale, prise matin et soir pendant huit jours

consécutifs, est restée invariablement à 37o,2 le soir. Il parait

donc exister un léger abaissement de la température centrale.

Le ventre est volumineux.

Les membres sont gros, courts, empâtés, et la peau y présente

les mêmes caractères que sur le tronc; toutefois, on y observe

un abaissement de température, sensible même à la main; le

thermomètre, appliqué sur la face externe des bras, marque à

droite 33°,8, à gauche 34o,l.

La main droite est déformée par une brûlure dont la cicatrice

a produit la rétraction des trois derniers doigts. La préhension

est encore possible avec le pouce et l'index dont le malade se

sert encore assez adroitement pour saisir les pièces de monnaie

ou les bonbons qu'on lui présente. Sur le dos de cette main, la

peau, comme oedémateuse, forme une pelotte épaisse, mais ce

gonflement résiste sous le doigt et ne disparaît pas par la pres-

sion. La main gauche offre un état analogue, bien qu'à un

degré moins marqué.

Aux membres inférieurs, la bouffissure est surtout prononcée

aux jambes et aux pieds dont la peau est plus ou moins cyanosée.

Les deux membres sont de longueur égale. La voûte plantaire est

à peine marquée; la marche est difficile, lourde, mais cependant

possible lorsque l'enfant est tenu par la main.

Il est intéressant de remarquer ici que le Pacha a fait à cet

égard de réels progrès depuis le mois d'octobre : tandis qu'il

avait alors beaucoup de peine à exécuter quelques pas; que, pour

cela, il restait confiné au lit une grande partie de la journée, il

300 CLINIQUE NERVEUSE.

parvient aujourd'hui, après avoir été exercé pendant huit mois à

faire le tour de la salle, à marcher presque sans aide. Il peut

également se tenir debout pendant un temps assez long, en s'ap-

puyant aux barreaux d'une chaise ou d'un lit.

Les organes génitaux ne présentent pas de vice de conformation,

mais un arrêt de développement complet; la peau y est épaisse

et pseudo-oedémateuse, comme dans les autres régions; les deux

testicules sont dans les bourses et ont à peine le volume d'une

noisette. Pas d'onanisme.

L'urine, examinée à plusieurs reprises et avec soin par M. Barré,

interne en pharmacie du service, est claire, citrine et ne contient

ni albumine, ni glycose. L'enfant est grand gâteux et la difficulté

où l'on se trouve de recueillir isolément la quantité d'urine

rendue dans les vingt-quatre heures, n'a pas permis de doser

l'urée éliminée de ce côté.

Fig. 49. - Th... à 1 âne de 21 ans (mai 1882).

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 301

Sur le tronc et les membres, la peau est absolument glabre,

même aux aisselles et au pubis, bien que le malade soit entré dans

sa vingtième année. D'après les renseignements recueillis dans le

service, elle était, l'année dernière, le siège d'une desquamation'

continuelle, analogue à celle qui persiste encore sur le cuir che-'

velu. Cette desquamation, surtout marquée aux membres, au

tronc et à la face, était furfuracée. Elle a disparu sous l'influence

de soins hygiéniques mieux entendus et des bains salés, adminis-

trés deux fois par semaine depuis octobre 1819.

La sensibilité générale est conservée, mais peut-être légèrement

émoussée ; le chatouillement n'est généralement pas perçu. La

sensibilité au froid est très marquée. Quant aux sensibilités spéciales,

la vue et l'ouïe paraissent égales des deux côtés. Le goût semble

intact. Then... n'est pas salace, il écarte les saletés qu'il rencontre

dans son assiette. Il mange sa soupe seul, avec une cuiller qu'il

tient de la main gauche et les aulres aliments avec ses doigts. Il

boit également seul en tenant le gobelet avec ses deux mains.

Appareil digestif. - Il n'existe ni vomissements après les repas,

ni constipation exagérée. Une chute du rectum, qui s'est produite

il y a quelques mois, a pu être réduite et maintenue par des cau-

térisations au galvanocautère.

Nous avons déjà indiqué, chemin faisant, l'état de l'intelligence ;

notons encore que Then... reconnait sa mère, sa soeur et les

diverses personnes du service ; parfois, sa physionomie semble

s'éveiller un moment à la vue de la nourriture ou des bonbons.

Une poupée qu'il a eu pendant quelques semaines paraissait lui

procurer quelque plaisir.

Le sommeil est tranquille, l'après-midi tout entière se passe

dans un état de demie somnolence et d'immobilité. Jamais depuis

qu'il est à Bicêtre, cet enfant n'a présenté de phénomènes d'exci-

tation, ni d'accès convulsifs.

·1880. 8 décembre.- T. R. 37°,4.-Soir : 370,4 ; resp. 9; pouls 88.

9.-T. R. 37"; pouls 84.

1881. 24 février. - Etat fongueux des conjonctives, cautérisation

au nitrate d'argent.

23 mars. On constate à la partie antérieure du cuir chevelu,

laquelle est glabre, une teinte rosée ; cette région est légèrement

furfuracée; la rougeur et le gonflement se prolongent sur le front

et presque jusqu'à la racine du nez et l'arcade sus-orbitaire où

elle se limite par un léger bourrelet. L'état des téguments (par

suite de la cachexie pachydermique) empêche d'explorer les gan-

glions. -Peau chaude, état saburral des premières voies digestives.

24. Le malade parait un peu abattu, la rougeur s'est

étendue ainsi que le gonflement, qui va latéralement jusqu'à

302 CLINIQUE NERVEUSE.

l'antitragus et en avant envahit les paupières supérieures. T. R.

39°,8. Soir : 40°,3 (érysipèle).

25. - Hier dans l'après-midi, après la purgation, selles abon-

dantes ; nuit tranquille. Le cuir chevelu est dégagé; le front est

encore un peu gonflé ainsi que les paupières; le gonflement per-

siste au niveau delà portion moyenne de la joue droite ainsi que

dans la région temporale du même côté ; l'oreille droite est rouge,

les lèvres ne sont pas noires. T. R., 39°,2. - Soir : 40°, e.

26. L'érysipèle progresse du côté de la face, la joue droite est

beaucoup plus gonflée, plus rouge. T. R. 39°,6. - Soir : 40°,3.

27. T. R. 39o,4. Soir : 40°,3.

28. - Le cuir chevelu et la région faciale supérieure sont

redevenus normaux ; l'oreille droite, la lèvre inférieure etle bas du

visage couvert de cicatrices, de brûlures adroite, restent tuméfiées,'

une phlyctène pleine de sérosité recouvre le menton à gauche. Le

malade ne boit que du lait et du vin de quinquina. Traitement :

huile de ricin, compresses d'eau de sureau, etc.

2'J. La rougeur est moins vive ; la tuméfaction persiste, les

paupières sont gonflées et lesbords sont agglutinés. Thén... boit du

lait avec plaisir. T. R., 39°. -Soir : 40°,2.

30. - Le bas du visage n'est plus tuméfié ; la peau desquame

par place ; les paupières restent gonflées, les yeux larmoyants.

L'érysipèle a quitté la face pour devenir ambulant; il occupe,

en effet la partie postérieure du cou et de l'épaule droite. La

plaque d'érysipèle est rouge; le bourrelet n'est pas franc; les

bords vont en se perdant vers l'avant-bras, la pression digitale

laisse une empreinte blanche très fugace. Le malade semble gai,

mais il n'a pas d'appétit. T. R. 39°,2. - Soir : 39°,6.

31. - L'érysipèle commence à gagner la région pectorale ; il

est descendu jusqu'au tiers inférieur de l'avant-bras ; pas d'abat-

tement. - -Potion : extrait de quinquina, 3 gr.; rhum, 50 gr. ;

huile de ricin, 30 gr. T. R. 39 ? Soir : 39°,8.

1er avril. - L'érysipèle a pâli au niveau de l'épaule et du bras,

il prend un aspect rouge-clair moucheté; le bourrelet fait défaut;

la peau n'est ni chaude, ni résistante. La peau du bras est le siège

d'une desquamation furfuracée. Le malade boit du lait, dort bien,

est gai, et répond dans la mesure de son possible. T. R., 39°. -

Soir : 39°,8.

2. - Envahissement de la partie inférieure du bras et supérieure

de l'avant-bras droit par l'érysipèle; faible rougeur de la paroi

antérieure de la poitrine ; en arrière, rougeur légère de la région

scapulaire droite; rien à la face, si ce n'est une desquamation

légère et furfuracée. T. R. 39°, 2. - Soir : 40".

3. - T. R. 38°,6. - Soir : 39», 2.

4. -Il existe encore un peu de gonflement à l'avant-bras droit,

mais la rougeur a disparu. A l'avant-bras du côté gauche, l'éry-

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 303

sipèle n'existe que sur la face dorsale en arrière du cubitus et

dépasse de deux centimètres l'olécrâne en haut..T. R. 38°. -

Soir : 38,4.

19. L'enfant est levé et est assez gai ; on recommence à le

faire marcher.

4 °r juin. Hier, il était mal en train ; il semble que la peau du

côté droit de la tête, tempe, et région pariétale, est rosée et un peu z

oedématiée ; la pression du doigt laisse une empreinte. On ne peut

que présumer l'érysipèle, vu l'état ordinaire de la peau; pas d'ap-

pétit ; un vomitif. - T. R. 40°... '

2. - La rougeur occupe aujourd'hui toute la partie inférieure

de la joue droite, le menton, la partie inférieure de la joue

gauche et le lobule de l'oreille gauche; rien aux lèvres. L'érysipèle

marche de droite à gauche; langue humide; nuit tranquille; pas

d'agitation. Soir : T. R. 40°.

4. L'érysipèle descend, il quitte progressivement la face pour

suivre la nuque et le dos; toute la portion dorsale est prise. La

rougeur se limite à la première lombaire en avant et latéralement

à gauche de la ligne axillaire verticale. A droite, elle empiète

un peu sur le creux de l'aisselle. La rougeur de la face a disparu,

mais elle persiste encore dans la région précédemment indiquée;

de plus, elle descend en arrière, jusqu'à l'articulation sacro-verté-

brale environ. Du côté gauche, elle dépasse la ligne axillaire et

et gagne le mamelon. Du côté droit, elle atteint seulement le

mamelon; de plus, elle a envahi tout le bras et l'avant-bras, s'ar-

rêtant brusquement par une ligne circulaire à cinq centimètres du

poignet. Constipation, lait, lavement purgatif. T. R. 40 ? -

Soir : 400,8.

5. - T. R. 40°,1. - Soir : 40°,8.

6. - Th... est plus gai, et ne parait pas être accablé par la

fièvre. La rougeur de la face a disparu; elle persiste encore dans

les autres régions et de plus descend en arrière jusqu'à l'articula-

tion sacra-vertébrale environ; du cote gauche, elle gagne la ligne

axillaire antérieure et le mamelon ; du côté droit elle atteint éga-

lement le mamelon, a envahi tout le bras et l'avant-bras, s'arrê-

tant brusquement par une ligne circulaire à cinq centimètres du

poignet. Pas de vomissements; constipation. - T. R. 39°.

Traitement : Lavement purgatif, lait, etc.

7. Des deux côtés, l'érysipèle dépasse le mamelon, tendant à

gagner la ligne médiane. De même, la rougeur descend sur le

côté droit jusqu'au poignet; l'état général est bon. -T.R. 38°,6.

- Soir : 38°, 6. '

8. La rougeur a gagné la main droite; en même temps elle

disparaît en arrière, elle est moins nette sur le dos ; en avant

légère rougeur de l'abdomen. T. R. 38°,2. -Soir : 38°,8.

9. - La rougeur e^t limitée à la main et au poignet droits, les

30Î- le . CLINIQUE NERVEUSE.

autres parties atteintes sont en voie de desquamation. T.R., 38°,4.

- Soir : 38°, 6.

10. - Les doigts sont envahis par l'érysipèle, l'état général est

bon. T. R. 38',2. - Soir : 38°6.

17. - L'érysipèle est en voie de desquamation totale; la peau

a repris sa coloration et sa rénitence habituelles, la température

est stationnaire.

IL - T. R. 38°,2. - Soir : 38°,2.

12. - T. R. 38°. - Soir : 38".

13. - T. R. 37°,6. Soir 31°,6.

- 14. - T. R. 37°,6. - Soir : 37°,4.

15. - T. R. 37°,6. - Soir : 3-in,4.

16. T. R. 31 ? .

27. - Th... est revenu à son état habituel, et est très gai.

4881. Juillet. - Poids : 20 kilogr. 100.

Fig. 20. - Th... il (le 22 ans (octobre 1883).

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 305

1882. Janvier. Poids : 19 kilogr. 50.

1883. Janvier. - Poids : 19 kilogr. 800.

14 novembre, - Th... n'a rien présenté de particulier dans le

courant de l'année. On l'exerce à marcher, ce qu'il fait, tenu par

la main. La mémoiie paraît exister; il reconnaît les personnes

qui fréquentent le service, et même celles qui, ne venant que

rarement, lui donnent des sous. Le t4 juillet 1883, les enfants

ayant reçu un supplément de 15 centilitres de vin de Bagnols, il a

volé et bu la part de son voisin. Cet excès l'ayant excité, il cher-

chait à parler spontanément, chantonnant « Nicolas » et « l'Amant

d'Amanda ». Depuis, il se montre très satisfait, si on lui parle de

bagnols, il en boit avec plaisir, et, posant son verre avec satisfac-

tion sur la table, il dit : « Ça y est » ; « bon, ça ! ».

4884.31 janvier. -Poids : 20 kilogr. 700.

2 février. - Dentition. Mâchoire supérieure.- Permanence des

racines de la plupart des dents de lait sur lesquelles on ne trouve

que deux dents permanentes, les deux incisives centrales entières;

elles sont sorties en arrière des racines des dents de lait; très

inclinées en arrière; les molaires permanentes du fond de la

bouche sont profondément cariées; il ne reste plus que des débris

de racines.

illc2choire inférieure. On ne trouve comme dents permanentes

que les deux incisives centrales entières, une petite molaire droite

et une gauche; ces dents sont sorties en arrière des dents de

lait qui persistent. La canine de lait gauche persiste; les autres

dents de lait sont tombées sans être remplacées, peut-être cepen-

dant des dents permanentes cariées ont-elles été arrachées. L'ar-

ticulation du maxillaire est defectueuse; la mâchoire inférieure

est portée un peu en avant et les dents viennent mordre sur le

milieu des racines des dents de lait sans tomber au niveau de la

gencive.

Les gencives, un peu décollées, mais relativement en assez bon

état, forment un bourrelet autour des dents et des racines.

Août. - Poids : 20 kilogr. 300. Taille : 0m,90.

9 octobre. - On constate une tuméfaction du volume d'un petit

oeuf de pigeon entre les deux sourcils; à la palpatiou, cette tumeur

donne la sensation de l'oedème; elle présente à sa surface une

rougeur érysipélateuse ; les paupières sont tuméfiées. 'f. R. 31o,5,-

Soir : 37 ? i.

10. La tuméfaction notée hier a considérablement diminué,

mais les joues, surtout la gauche, sont oedématiées et présentent

une rougeur uniforme sans bourrelet périphérique; la peau n'est

ni chaude, ni douloureuse à la pression ; les ganglions sous-maxil-

laires ne sont ni tuméfiés, ni douloureux. T. R. 37°,6. - Soir :

31l,6.

11. Même état. T. R. 37°,4 . - Soir : 31°, .

306 CLINIQUE NERVEUSE.

12. - La tuméfaction des joues a diminué, la rougeur est loca-

lisée surtout au nheau du menton et de la lèvre inférieure; ni

douleur ni adénite. L'appétit a été conservé pendant toute la durée

de l'affection.

43. - T. R. 37°,5. Soir : 37",5.

- 14. - T. R. 37",4. - Soir : 37°,5.

15. - T. R. 37°,6. - Soir : 37°,7.

16. La face a repris son aspect habituel. Le malade est levé.

T. R. 37<-,4.

15 décembre. - Le malade, jusqu'ici en robe, aété habillé avec

un pantalon; il ne gâte plus durant le jour ; depuis. longtemps,

il a une selle tous les deux jours.

1885. Janvier. Poids : 20 kil. 500. - Juin. Poids : 20 kil. 700.

Juin. - Amélioration au point de vue de la marche ; il est plus

solide sur les jambes, mais manifeste toujours une grande répu-

Fig. 21. - Th... à l'âge de 23 ans (novembre 1884).

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 307

gnance à se mouvoir, et on y parvient en lui promettant soit une

friandise, soit surtout du vin de Bagnols. On lui fait fabriquer

une canne afin d'arriver à ce qu'il marche seul. Th... s'est amé-

lioré sous le rapport de la propreté et nous sommes parvenus à

remplacer la robe par le pantalon (fig. 21). Il est sujet à être

constipé et est très sensible au froid.

13 novembre. Th..., n'ayant pas été à la selle depuis quatre

jours (il ne mangeait pas depuis deux jours et paraissait souifrir),

est amené à l'infirmerie. Lavement.

14. La constipation persiste; ventre très ballonné, sonore;

le lavement de la veille n'ayant produit aucun effet, il lui en est

administré deux autres dont l'un purgatif, qui restent de même

sans effet.

15. - Le matin, purgatif, aucun résultat. Le soir, nouveau

lavement suivi d'une selle très abondante. Th... ne prend que du

lait. Gonflement très marqué de la lèvre supérieure et de la joue

droite, qui est rouge et luisante. Tympanite considérable. T. R.

39°; à 3 heures du soir : 3S°,8. - Soir : 40^,` ? .

16. - Le malade tousse un peu; l'auscultation, très difficile à

pratiquer, ne dénote rien de saillant; la lèvre.inférieure est le

siège d'un gonflement as·ez marqué; à l'inspection du thorax, du

reste très difficile, il ne semble y avoir rien d'anormal.1'. R. 38 ? ? ;

Soir : 38°,8.

47. - Pas de changement notable, pas d'évacuation : eau-de-vie

allemande, 20 grammes. Le soir, Th... n'ayant pas eu de garde-

robe, on lui administre un lavement purgatif. T. R. 38°,4.

Soir : 38°,2.

18. - L'eau-de-vie allemande et le lavement purgatif n'ont

produit aucun effet. Le matin, Th... a demandé le vase, mais il a

fait des efforts inutiles. - 1,'abdomen est ballonné, tympanique ;

les lèvres sont cyanosées, la respiration est plus courte et plus

fréquente; à la palpation, on croit sentir une tumeur assez dure,

de l'S iliaque irrégulière, bosselée et garnie probablement par

un amas de matières stercorales ( ? ).- L'examen est très difficile

par suite du ballonnement du ventre. Refroidissement notable;

pas de vomissements. Deux lavements simples donnés presque

coup sur coup ne sont pas rendus. Un lavement à la glycérine

amène des scybales dures. Pas d'émission de gaz. Le soir, deux

syphons d'eau de Seltz sont donnés par le rectum au moyen de

la sonde oesophagienne, ils ne produisent aucune évacuation.

Mort à 10 heures 35 du soir. Avant de mourir, le Pacha a

ouvert les yeux tout grands et a poussé plusieurs soupirs. T. R.

38°,2. Soir : 40^,` ? . Un quart d'heure après le décès : 36°,4. Une

heure après le décès : 3 ? 3. Deux heures après le décès : 30°.

Poids après décès : 21 kilogr. 400.

308 CLINIQUE NERVEUSE.

Note complémentaire. - Les cheveux sont noirs, moyennement

abondants à la région occipitale; ils vont en diminuant sur la

partie inférieure des pariétaux et la partie antérieure du tem-

poral. Sur la ligne médiane, ils s'avancent sur le milieu du frontal

en formant une houpette ; entre cette houpette médiane et les

parties latérales il existe une calvitie presque complète.

Le cuir chevelu, pâle, présente des rides nombreuses, des squames,

quelques croûtes sèches assez grosses, et d'autres petites en assez

grand nombre. Les sourcils sont peu fournis; les poils sont

implantés verticalement de bas en haut et de dedans en dehors.

Les cils sont assez rares à la paupière supérieure, très rares à la

paupière inférieure.

On constate une absence complète de poils sur tout le reste du

corps : aisselles, dos, thorax, anus, lèvres supérieures, joues. La

peau a un aspect cireux, pâle. Les ongles sont assez minces,

courts ; on n'a besoin de les couper qu'à des intervalles très

éloignés. La peau des bourses est épaisse, ridée et, au premier

abord, parait oedématiée, mais l'empreinte des doigts ne s'y des-

sine pas. ,

Il existe quelques poils rares et courts au pénil ; la peau de la

verge et surtout du prépuce est épaisse, ridée, comme boursouffléc,

sans oedème.

Le prépuce est allongé et sa moitié inférieure forme une sorte

de tablier qui dépasse la moitié antérieure de la largeur d'un

centimètre. La verge, relativement grosse, a cinq centimètres et

et demi de longueur et cinq centimètres de circonférence; le gland

est découvrable, le méat est normal. Les testicules ont la dumen-

sion d'une assez grosse noisette. Pas d'onanisme.

Crâne. - 11 appartient au type brachycéphale ; voici les princi-

pales dimensions :

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 309

cause du prolapsus de la lèvre inférieure, consécutif à la brûlure

dont il a été question. L'abdomen est toujours volumineux. Les

selles se faisaient tous les deux jours et étaient souvent dures.

Th... était devenu propre et demandait « Pot », « chier ».

Voici quelques mensurations supplémentaires :

310 CLINIQUE NERVEUSE.

partie moyenne, elle mesure 5 centimètres de largeur, sa lon-

gueur est de 13 centimètres.

A l'ouverture de la cavité abdominale, le ca;cmn se présente

tout d'abord ; il est très dilaté, recouvre une partie du colon ascen-

dant, du colon transverse et de l'estomac ; à 7 centimètres au-

dessus de l'appendice vermiforme, le colon ascendant est tordu

sur lui-même de façon que la surface antérieure du coecum se

trouve postérieure, et réciproquement, l'extrémité ceecale d'infé-

rieure est devenue supérieure. Le tout forme une tumeur qui

atteint une largeur de 11 centimètres 1/2. Le reste du colon

ascendant et le colon transverse dans sa partie droite ne sont

pas dilatés. La partie gauche du colon transverse, le colon descen-

dant et l'S iliaque sont assez dilatés, on y sent des matières

molles moulées; l'intestin grêle, non dilaté, occupe sa situation

normale; le grand épiploon est remonté; il n'est pas surchargé

de graisse. L'estomac est dilaté. Au niveau de la torsion et

ailleurs, on ne constate ni oedème, ni inflammation, ni ecchymo-

ses, etc. Le cæcum ponctionné laisse échapper une grande quan-

tité de gaz présentant l'odeur ordinaire, sans exagération. La

vessie est presque v ide. Le foie atteint le rebord costal ; le

diaphragme remonte au bord supérieur de la quatrième côte à

droite, au bord inférieur de la même côte à gauche. Les muscles

pectoraux sont très décolorés, et ont presque l'apparence de

muscles de grenouille; ils sont peu développés.

Cavité thoracique. A l'ouverture du thorax, on constate la

présence de brides longues et résistantes entre le sternum, les

cartilages costaux et le poumon droit. Le tissu cellulo-adipeux

qui recouvre le péricarde est oedématié, tremblotant. Le poumon

gauche est refoulé en haut; quelques brides relient sa face externe

aux côtes; la cavité pleurale gauche contient un liquide citrin

clair. A droite, on constate de même quelques brides lamelli-

formes, assez longues et assez résistantes; on trouve le même

liquide citrin clair dans la cavité pleurale. Au devant des vais-

seaux du cou, on trouve un peloton graisseux s'étendant jusque sur

la partie anttro-supérieure du péricarde, ce peloton adipeux

a la forme du lobe droit du thymus dont il semble occuper la

place.

La cavité du péricarde contient une assez grande quantité (un

verre environ) de liquide jaune citrin. Le coeur en systole est

petit; sa pointe est formée par le ventricule gauche; on trouve

sur la face antérieure, près de la pointe, une petite plaque lai-

teuse ; le ventricule droit est affaissé ; sur sa face antérieure se

trouve également une petite plaque laiteuse; les deux oreillettes

sont dilatées. La graisse qui se trouve à l'état normal dans les

sillons est ici beaucoup moins abondante que d'habitude. L'oreillette

droite renferme du'angtiquide noir et quelques caillots fibri-

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 311 t

neux. Le ventricule gauche contient un peu de sang liquide. Les

deux orifices auriculo-ventricuiaires admettent avec peine la pulpe

des deux doigts index et médius réunis de la main gauche. Les

valvules sont suffisantes et saines. Le myocarde est pâle, mais

celte pâleur est moins accentuée que celle des muscles de l'abdo-

men (épaisseur à droite, 12 mill.; à gauche, 3 mill. /2., Le trou

du Botal est obturé. Sur la crosse de l'aorte, au-dessus des

valvules, on trouve quatre larges plaques athéroinnteuses ; il en

existe une autre petite dans l'espace sous-aortique.

Poumons. - A la coupe des bronches, il s'écoule un liquide

muco-spumeux. A la partie postérieure du lobe inférieur gauche

existe quelques petites ecchymoses sous-pleurales. Le tissu

pulmonaire, très compacte au lobe inférieur, l'est moins au lobe

supérieur et est partout très oedématié. Les bronches sont légère-

ment hyperémiées, on les poursuit très facilement jusqu'à la

périphérie. - Le poumon droit possède ses trois- lobes ordinaires,

mais sur le lobe inférieur on rencontre une scissure profonde.

On constate sur ce dernier lobe quelques petites ecchymoses

ponctuées. Les lésions sont les mêmes qu'à gauche. Sur la

plèvre pariétale droite sont disséminées quelques petites ecchy-

moses. La musculature du diaphragme est pâle, mais moins

que celle du thorax.

Cavité abdominale. Rate (300 grammes), rien de particulier.

Pancréas, normal. - Uretères normaux, le gauche sinueux.

Capsules surrénales, saines. - Reins. Le tissu cellulaire péri-

néphritique est comme oedématié. Le rein gauche, entouré d'une

épaisse couche de graisse, se décortique facilement (quelques

étoiles de Verrheyen) ; il paraît au toucher plus dur que d'habi-

tude, sans qu'on puisse y constater à l'oeil nu de lésions de

néphrite interstitielle (épaisseur de la couche corticale : 4 millim.).

Le rein droit se décortique facilement; il est très lobulé, beau-

coup plus petit que le gauche, plus ferme à la coupe. Sur la

surface externe, on constate deux petites dépressions et un petit

kyste. ' ,

Le duodénum contient un liquide renfermant des grumeaux

blanchâtres. L'estomac est rempli d'une masse coagulée pro-

venant du lait; rien de particulier. Le canal cholédoque est

perméable ; il s'en écoule par la pression une bile claire, peu

visqueuse. Vésicule biliaire normale. - Le tissu hépatique

semble un peu plus ferme que normalement. - Les intestins ne

présentent rien à relever ; leur tunique interne, loin d'être hyper-

trophiée et infiltrée, parait d'épaisseur normale et plutôt sèche.

Pas de surcharge graisseuse du mésentère.

Le bassin est petit ; il mesure, dans le diamètre antéro-posté-

rieur, 6 centim.; dans le diamètre transverse, 6 centim. </2.

Dans l'aine gauche, on trouve deux paquets ganglionnaires, et un

ganglion isole dans une masse graisseuse.

312 CLINIQUE NERVEUSE.

Le larynx est étroit et présente un léger oedème des cordes

vocales. Le pharynx n'offre rien de particulier. Malgré une

recherche minutieuse, on ne peut trouver trace du corps THYROÏDE.

Les nerfs grands splanchniques, les ganglions semi-lunaires, la

partie inférieure du grand sympathique paraissent absolument

normaux ; les parties supérieure et dorsale du grand sympa-

thique sont de même normales ; peut être, cependant, sont-elles

un peu plus volumineuses qu'à l'ordinaire ( ? ).

Cavité crânienne. - Encéphale : 107S gr. Cervelet et isthme :

115 gr. - Isthme : 15 gr. - Protubérance assez petite, symé-

trique, ainsi que le bulbe.- Hémisphères cérébelleux, égaux. - La

glande pinéale a 4mIn environ de diamètre. Le corps pituitaire

a 15 a 16mm de largeur et 1 centim. de hauteur; il est assez épais;

paraît sensiblement hypertrophié. Lorsqu'on enlève le cerveau, il

s'écoule une assez grande quantité de sang et de liquide céphalo-

rachidien. La partie qui reste au fond de la calotte est d'environ

40 à 60 gr. La dure-mère est assez adhérente au crâne : elle est

gorgée de sang. - La pie-mère de la base est légèrement vascu-

larisée; celle de la convexité, surtout dans une largeur de 3 ou

4 centim. au voisinage de la grande scissure, l'est au contraire à

un degré très notable, d'un rouge bleuâtre et un peu oedémateuse.

Il n'y a pas de différence entre les deux côtés.

Lorsqu'on examine la base du cerveau, on constate une différence

très sensible de longueur entre les deux hémisphères : l'hémis-

phère cérébral gauche mesure 18 centim., l'hémisphère droit

déborde le gauche un peu en avant et davantage en arrière.

Les artères, nerfs, tubercules mamillaires, pédoncules, sont symé-

triques, ainsi que les nerfs olfactifs. Les deux hémisphères céré-

belleux sont égaux. -Pas de traces d'athérome.

La pie-mère est mince et s'enlève partout sans entrainer de

substance corticale, sauf en quelques points très rares; sur un des

plis de passage allant de la deuxième à la troisième circonvolu-

tion frontale, on trouve une petite tumeur de la grosseur d'une

lentille, faisant une saillie d'un -à deux millimètres.

Sur ['hémisphère droit, la pie-mère s'enlève facilement; elle est

très mince, en quelques points principalement; Je long de la

grande scissure, on entraine un peu de substance grise; à l'extré-

mité antérieure delà troisième frontale, on trouve une ecchymose

superficielle de la substance grise. L'aspect des circonvolutions

est luisant et rappelle, principalement sur les lobes temporaux et

occipitaux, l'aspect du cerveau des nouveau-nés, sorte d'aspect

gélatiniforme. Pas de lésion en foyer; pas d'induration de la corne

d'Ammon; pas de dilatation des ventricules. Rien aux plexus

choroïdes. - Les deux hémisphères cérébraux décortiqués son

égaux.

Crdne. - Aucune suture de la voûte n'est ossifiée, sauf la

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 313

suture bi-frontale, dont on voit encore distinctement la trace,

surtout sur la table externe; son tiers supérieur n'est pas ossifié

et forme la plus grande partie de la fontanelle. Les sutures sont

très apparentes; au niveau des sutures fronto-pariétales, et,

latéralement, les pariétaux sont quelque peu 'plus proéminents

que le frontal. L'occipital proémine de même sur.les pariétaux.

- La fontanelle antérieure est persistante, son angle postérieur

est cependant beaucoup réduit, elle a de ce fait une apparence

presque triangulaire. Les pariétaux sont minces, hyperémiés; le

frontal est d'une épaisseur moyenne, les deux tables sont peu

développées, le diploé l'est davantage. L'occipital est peu

développé. Vue par sa face interne, la calotte présente une

ossification incomplète, au point de réunion des pariétaux et du

frontal, correspondant à toute la fontanelle anterieure; sur les

côtés on note une ossification incomplète, en arrière des sutures

fronto-pariétales sur un espace d'environ un centimètre de lar-

geur ; l'artère méningée moyenne s'y est creusée des sillons

profonds. Sur le frontal, à droite et près de la suture bi-frontale

et à 4 centim. environ au-dessous du pariétal, on remarque une

dépression arrondie de -1 centim. environ de diamètre.

Hémisphère gauche.- La scissure de Sylvius (pal. III, Se. S.) laisse

à l'état frais une partie de l'insula àdécouvert; après un séjour de

plusieurs mois dans l'alcool tout l'insula et les plis de passage du

lobe temporal se trouvent à découvert. Elle possède deux rameaux

antérieurs ascendants (a', a") et un rameau antérieur horizontal

très profond et un peu sinueux. Le rameau postérieur horizontal

(a3) est très profond, large et se termine dans le lobule pariétal

inférieur après un trajet de 18 millimètres le long de son bord

inférieur.

Le sillon deRolando (S. R.), profond et sinueux,prend son origine

dans la scissure de Sylvius et est interrompu vers son quart infé-

rieur par un pli de passage allant de la frontale ascendante à la

pariétale ascendante.

La scissure perpendiculaire externe (Sc. p. e.) n'est séparée du pli

courbe que par un pli de passage se dirigeant du lobule pariétal

supérieur à la première circonvolution occipitale; son extrémité

inférieure se trouve située à un centim. de l'extrémité postéro-

supérieure de la scissure parallèle.

Lobzele orbitaire. La scissure olfactive est profonde. La scissure

orbitaire assez profonde figure deux accolés par l'un de leurs bords

et possédant deux barres transversales. - Legyrus rectus est peu

volumineux. Les première etdeuxième circonvolutions orbitaires sont

bien développées. La partie moyenne du lobule orbitaire, surtout

au niveau des deux branches transversales du double H, est très

concave. L'incisure qui sépare le lobule orbitaire de la deuxième

Archives, t. XII. 21

314 CLINIQUE NERVEUSE.

circonvolution frontale est trèsprofonde, mais est séparéedu sillon

fronto-marginal par une portion isolée de la deuxième circonvo-

lu41on frontale et atteint à peine la partie antérieure de la

scissure surcilière. -

Lobe frontal. - La scissure parallèle frontale (PL. III, Se. p. f.)

coupe la première circonvolution frontale près de la fente

interhémisphérique; elle est irrégulière, sinueuse, interrompue par

un pli de passage allant de la deuxième circonvolution frontale à

la circonvolution frontale ascendante; elle se continue en has

avec un sillon oblique qui va se jeter dans le sillon de Rolando.

La scissure frontale inférieure (Se. f. i.) sinueuse est interrompue

en avant par deux plis de passage reliant la deuxième circonvolu-

tion frontale à la troisième. - La scissure frontale supérieure

(Se. f. s.) est très irrégulière, très sinueuse, interrompue par de

nombreux plis de passage se rendant de la première circonvolu-

tion frontale à la deuxième.

La première circonvolution frontale (PL. III, F,), très irrégulière,

est découpée par des sillons enchevêtrés et il est par suite assez

difficile d'établir la limite exacte entre elle et la deuxième circon-

volution frontale; elle semble toutefois être dédoublée dans ses

trois quarts postérieurs, mais ce dédoublement est très irrégulier,

très sinueux, très sillonné et relié à la deuxième circonvolution

frontale par quelques plis de passage.

Cette première circonvolution s'insère à la circonvolution fron-

tale ascendante par un pli de passage à niveau, mais étroit, bor-

dant la fente interhémisphérique.

La deuxième circonvolution frontale (F,), qui s'insère à la circon-

volution frontale ascendante par un pli de passage à niveau est

elle-même très sinueuse, irrégulière, comme découpée en plu-

sieurs tronçons par des sillons transversaux et obliques profonds ;

un pli de passage (pp.) la- relie vers son tiers antérieur à la

branche postérieure du V antérieur de la troisième circonvolu-

tion frontale. C'est sur ce pli de passage que se trouve une petite

tumeur de la grosseur d'une lentille (t.), tumeur un peu surélevée,

énucléable et à la partie supérieure de laquelle la pie-mère est

adhérente. La troisième circonvolution frontale (F3) est remar-

quable par son développement, et le dédoublement de son cap;

en effet celui-ci représente un double V assez développé, coïncidant

avec les deux rameaux ascendants antérieurs de la scissure de

Sylvius, dont nous avons déjà parlé plus haut.

La circonvolution frontale ascendante (FA) assez maigre, sauf

vers sa partie médiane, est coupée par deux sillons antéro-posté-

rieurs. Cette partie médiane isolée est reliée à la deuxième cir-

convolution frontale par un pli de passage à niveau et semble la

continuer; il en résulte que celle-ci parait s'insérer par un pli de

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 315

passage à niveau, qui intenompt la continuité du sillon de Ho-

lando, sur la circonvolution pariétale ascendante. La partie infé-

rieure de la circonvolution frontale ascendante est accolée au

pied de la 3e circonvolution frontale, fait corps avec lui, 1, et ne

s'en dislingue que par un pli vertical à peme marqué. - La cir-

convolution pariétale ascendante (P A) est assez maigre.

Le lobule pariétal supérieur (P,) est sinueux, bien développé;

un pli de passage à niveau le relie au lobe occipital.

La scissure interpariétale (Se. i) prend son origine dans la profon-

deur de la scissure de Sylvius tout près du lobule de l'insula et

atteint presque par son extrémité supérieure et verticale la fente

interbénrispliérique; cette extrémité eslhifide et les deux branches

ne sont distantes de cette fente que de 8 millimètres. La branche

ascendante de la scissure représente un Y et forme ainsi une

sorte de scissure parallèle pariétale. La scissure interpariétale

après avoir décrit sa courbe normale se continue ensuite presque

dans le lit du premier sillon occipital.

Le lobule pariétal inférieur (P.) et le pli courbe (P,) sont sinueux,

assez bien développés; un pli de passage relie celui-ci au lobule

pariétal inférieur.

Le lobe occipital (L 0) nettement séparé du lobe temporal est

relié au lobule pariétal supérieur par un pli de passage à niveau

et au pli courbe par un autre petit pli de passage allant à la par-

tie inférieure et antérieure de la deuxième circonvolution occipi-

tale. Tous les sillons et toutes les circonvolutions de ce lobe, de

forme normale, occupent leur position ordinaire, et sont assez

bien développés. .

Le lobe temporal est assez. volumineux, sauf dans' son quar

postérieur, où la deuxième et surtout la troisième circonvolution

temporales se trouvent en retrait, e, sur le lobe occipital et les

parties antérieures du lobe temporal. - La première circonvolution

temporale (T,) se confond avec la partie postérieure du lobule

pariétal inférieur. La scissure parallèle (Se. p.) est sinueuse et très

profonde. La deuxième circonvolution temporale (T,) est bien déve-

loppée dans sa partie antérieure. - La deuxième scissure tempo-

rale (Se. t..) sinueuse, irrégulière, est interrompue par trois plis

de passage se rendant de la deuxième à la troisième circonvolu-

tion temporale qui, elle aussi, est assez bien développée dans ses

parties antérieures. L'incisure préoccipitale (ln, se réunit à la

partie la plus postérieure de la deuxième scissure temporale,

séparant ainsi nettement le lobe temporal du lobe occipital.

On trouve encore quatre circonvolutions temporales transverses,

3, ou plis de passage temporo-pariétuux qui, se dirigeant vers le

fond de la scissure de Sylvius en arrière de l'insula, viennent se

perdre dans le lobule pariétal inférieur.

316 CLINIQUE NERVEUSE.

La première scissure tempol'o-occipitale (Pl. Il, Se. to) est sinueuse,

peu profonde, irrégulière, interrompue par un pli de passage se

rendant de la troisième circonvolution temporale au lobule fusai-

forme (T 0,) peu développé, mais non atrophié. La deuxième

scissure temporo-occipitale (Se. to,) est sinueuse, assez profonde,

interrompue également par un pli de passage allant du lobule

fusiforme au lobule lingual (TOs) en sorte que la'partie postérieure

de la deuxième scissure semble se continuer directement avec la

partie antérieure de la première scissure.

Face interne. La scissure calloso-marginalc (Se. c.m.) est assez

profonde, normale dans ses différentes parties. La première cir-

convolution frontale interne (F,) est bien développée, très sinueuse.

Le lobule pa ? ,ace71ti,al(LP), moyennement développé surtout àsapar-

tie supérieure, présente vers son tiers inférieur un petitsillon super-

ficiel et horizontal de 4 millimètres, relié à la scissure calloso-

marginale par un petit sillon également superficiel partant de son

extrémité antérieure. La circonvolution du corps calleux (C. C. C.)

est bien développée, normale. Le lobe quadrilatère (L 0) est très

développé, en continuité par les plis de passage pariéto-limbiques

antérieur (p. p. a) et postérieur (p. p. p.) avec la circonvolution du

corps calleux, dont il est séparé à sa partie médiane par une scis-

sure sous-pariétale (Sc. sp.).-La scissure perpendiculaire interne

(Se. p. i.) est très profonde, béante. Le coin (C) paraît peu

développé. La fissure calcarine (F. ca), décrit une courbe à con-

vexité supérieure.

Le corps calleux, le corps strié, la couche optique, ne présentent

rien de particulier.

Hémisphère droit. - La scissure de Slvius (PL. V, Sc. S.), dont les

deux lèvres très écartées, laisse voir comme à gauche toutes les

circonvolutions de l'ipsula et les plis de passage temporo-parié-

taux. Elle est bifide à son extrémité postérieure. Les deux rameaux

antérieurs ascendant (a) et horizontal sont normaux et circons-

crivent le cap simple, normal, de la troisième circonvolution fron-

tale.

Le sillon deRolando (S. R.), sinueux, assez profond, est inter-

rompu vers son quart inférieur par un pli de passage allant de la

circonvolution frontale ascendante à la circonvolution pariétale

ascendante.

La scissure perpendiculaire externe (Sc. p. e) est complète et va

se perdre dans le lit de la scissure parallèle.

Lobule orbitaire.-La scissure olfactive est profonde. La scissure

orbitaire est simple, le lobule à son niveau est concave ; on ren-

contre en outre sur les circonvolutions orbitaires de nombreux

plis irréguliers; la branche interne de l'incisure en H vase perder

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 317

dans un petit sillon marginal antérieur. Les circonvolutions du

lobule orbitaire ne présentent rien autre chose de particulier.

Lobe frontal. Il existe de ce côté une scissure parallèle fron-

tale (PL. V, Se. p. t.) complète, ininterrompue, commençant à

4 millimètres de la grande scissure interhémisphérique pour

s'arrêter à 4 millimètres de la lèvre supérieure de la scissure de

Sylvius. La scissure frontale supérieure (Sc. f. s.) est sinueuse,

assez profonde, ainsi que la scissure frontale inférieure (Se. f. i.),

séparée de la scissure parallèle frontale par un pli de passage

allant de la deuxième circonvolution frontale à la troisième ;

cette scissure frontale inférieure est encore interrompue dans son

trajet par un autre pli de passage se rendant de la deuxième

circonvolution frontale au centre du cap de la troisième circon-

volution frontale. La première circonvolution frontale (F,) est peu

développée; la seconde (F,), très irrégulière par suite des nom-

breux plis qui la sillonnent, parait dédoublée et bien développée.

En avant du lobe frontal se trouve un pli de passage transversal,

réunissant les trois circonvolutions frontales et laissant en avant

de lui une petite portion des première et deuxième circonvolutions

frontales. La troisième circonvolution frontale (F,), sinueuse, est

assez bien développée. - La circonvolution frontale ascendante

(F A) également assez bien développée et sinueuse.

La circonvolution pariétale ascendante (P. A.) est maigre, surtout

à sa partie médiane. Le lobule pariétal supérieur (P,), irrégulier,

est très découpé; des plis de passage transversaux le rattachent

au lobule pariétal inférieur. La scissure interpariétale (Sc. i.)

prend son origine^dans la scissure de Sylvius et s'arrête à 12 mil-

limètres de la scissure in ter-hémisphérique; elle est bifide à

son extrémité supérieure et verticale et forme un ),, représentant

une sorte de scissure parallèle pariétale. Au niveau de sa courbe,

puis à sa partie médiane, elle est interrompue par les plis trans-

versaux dont nous venons de parler; elle se prolonge ensuite

presque dans le sillon occipital transverse. - Le lobule pariétal

inféi'icU1' (P ,J, est sinueux, très découpé, irrégulier; le sillon ver-

tical (b) qui le sépare du pli courbe se prolonge en haut au delà

de la scissure inter-liémispliérique. Le pli courbe (P3), irrégulier,

est divisé par le prolongement de la scissure perpendiculaire

externe (c) qui va se jeter dans la scissure parallèle.

Le lobe occipital (L, 0), nettement séparé des lobes pariétal et

temporal, est par suite dépourvu de plis de passage se rendant à

ces deux lobes ; il est assez irrégulier, peu développé, mais on y

retrouve les formes de ses scissures et de ses trois circonvolutions ;

enfin, il est un peu en retrait sur le lobe temporal.

Le lobe temporal est bien développé; sa première circonvolu-

318 CLINIQUE NERVEUSE.

tion (T,) se confond avec la partie postérieure du lobule pariétal

inférieur.-La scissure parallèle (Sc. p.) est sinueuse et très pro-

fonde. Les deuxième et troisième circonvolutions temporales (T, , T3),

sont bien développées, mais à leur partie postérieure elles sont

un peu chagrinées et en retrait comme de l'autre côté. -

La deuxième scissure temporale (Se. t,) est sinueuse, irrégulière,

interrompue par des plis de passage allant de la deuxième à la

troisième circonvolution temporale; en arrière, une de ses por-

tions isolées (sillon occipital antérieur (d) sépare nettement en se

réunissant à l'incisure préoccipitale (Izz. pré.) le lobe temporal

du lobe occipital. Il existe trois circonvolutions temporales (3),

transverses ou plis de passage temporo-pariétaux, situées à la

partie postérieure de l'insula, dont les circonvolutions sont bien

développées.

La première scissure temporo-occipilale (PL. IV, Sc. to) est

interrompue vers son milieu par des plis de passage se dirigeant

de la troisième circonvolution temporale à la première circonvolu--

tion temporo-occipitale (T 0,) sinueuse; un sillon oblique réunit

cette scissure à la moitié postérieure de la deuxième scissure tenz-

poro-occipitale (Sc. to,.). Un pli de passage relie le lobule fusi-

forme au lobule lingual (T. 0,) ; ces deux lobules sont assez bien

développés. ,

Face interne. - La scissure calloso-marginale (Se. c. m.), assez

profonde, est normale dans ses différentes parties; elle communi-

que par un sillon avec l'extrémité de la branche verticale de l'7

grec qui se trouve sur le lobule paracentral : elle se trouve isolée

par un pont de substance nerveuse de l'incisure préovalaire (e),

limitant en avant le lobule paracentral. La première CÏ1'C01WO-

lution frontale interne (F,) est bien développée, sinueuse. Le

lobule paracentral (L P) est plus large, plus développé qu'à

gauche, déborde en avant et en arrière les circonvolutions fron-

tale et pariétale ascendantes. On remarque un peu en avant de

sa partie médiane un sillon en y grec assez profond, et en arrière

un autre petit sillon transversal assez superficiel. La circonvo-

lution du corps calleux (C. C. C.) est bien développée, normale. -

Le lobe quadrilatère (L. Q.), très développé, présente en avant un

sillon transversal profond, communiquant avec la scissure sous-

pariétale (Se. s. p.) en avant et en arrière de laquelle se trouvent

les plis de passage pariéto-limbiques antérieur et postérieur

(p. p. a. p. p. p.).-Lascissure perpendiculaire interne (Sc. p. i.)

profonde se termine à 2 centimètres du bord supérieur de la

fente interhémisphérique, sans aller rejoindre la scissure calca-

rine dont elle est séparée d'un centimètre. En arrière et paral-

lèlement à elle, sur le coin, se trouve une autre scissure (d) plus

profonde qui vase jeter dans la scissure calcarine. Le coin (C.) est

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 3t9 4

assez développé. La fissure calcarine (F. ca.), en dehors des

anomalies déjà signalées, est assez profonde.

Le corps calleux, le corps strié, la couche optique, sont normaux.

Cervelet. ' Les hémisphères cérébelleux paraissent normaux.

Analyse de la peau. Nous avons fait faire deux

analyses de fragments de la peau; voici les notes qui

nous ont été transmises :

1 Analyse de Af. Yvon : .'

320 CLINIQUE NERVEUSE.

Dans les antécédents héréditaires de Th..., nous

ne trouvons aucun idiot ou épileptique; le père, intelli-

gent, présentait seul une malformation du bras gauche,

et, sauf une cousine de la mère au troisième degré, on

n'aurait jamais connu de goitreux dans la famille.

Jusque vers l'âge de quinze mois, le Pacha se serait

développé normalement; il inarchait un peu, était

affectueux et prononçait quelques mots. Il ne peut

donc être. question chez lui de crétinisme congénital

proprement dit. Peut-on faire.intervenir dans l'étiologie

de la maladie son séjour jusqu'à un an,danswn loge-

ment humide, les convulsions ( ? ) et la chute qu'il aurait

faite vers quinze mois ? C'est ce que nous ne saurions

dire. Toujours est-il que c'est vers cette dernière époque

que semble remonter le début de l'affection; la marche,

la parole, etc., loin de progresser, diminuèrent et, en

1880 (à près de vingt ans), nous le trouvons à Bicêtre,

présentant tous les signes de l'idiotie avec cachexie

acladernziue.

Durant le temps où il a été soumis à notre obser-

vation, Th... a été atteint à diverses reprises d'érsi-

pèle, de même que la première malade de Curling;

mais, contrairement à ce qui a eu lieu chez la malade

de Curling, ces érysipèles n'ont nullement amélioré

son état intellectuel. Le traitement (toniques, bains

salés, exercices) auquel il fut soumis permit cependant

d'obtenir une amélioration relativement assez accusée.

En 1879, lorsque l'un de nous a pris possession du

service, le Pacha était gâteux, atteint d'une chute du

rectum déjà ancienne et il demeurait confiné au lit sur

les recommandations de sa mère, sous prétexte qu'il

était très sensible au froid. Aussi avait-il désappris

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 321

à marcher. A l'époque de sa mort, il était propre,

marchait tenu simplement à la main; il était devenu,

au moins par moments, plus expansif, mais son état

intellectuel ne s'était pas sensiblement modifié; son

répertoire de mots restait toujours à peu près aussi

pauvre; souvent il fallait une excitation forte, c'est-à-

dire élever la voix et répéter les questions, pour attirer

son attention, pour le faire regarder; les réponses ne

se produisaient qu'avec lenteur et paresse. Parfois, à

la visite, lorsqu'il était bien disposé, si on ne s'arrê-

tait pas à lui, il regardait, puis poussait un cri pour

attirer l'attention.

Nous ajouterons que tout signe de puberté faisait

défaut et que Th..., tant au point de vue intellectuel

que physique, avait subi un véritable arrêt de dévelop-

pement.

Voilà pour le côté clinique. Si maintenant nous

examinons les faits principaux qui nous sont fournis

par l'autopsie, nous constaterons l'absence de toute

trace de glande thyroïde, la présence de différents

épanchements séreux dans les plèvres, le péricarde,

un météorisme intestinal en rapport avec l'atonie

musculaire des fibres lisses de l'intestin et des fibres

striées musculaires de la paroi abdominale.

Le tissu adipeux sous-cutané, abondant dans toutes

les régions, comme oedémateux, luisant, mais en réalité

non oedémateux, sur la paroi antérieure du thorax,

formait aux aisselles et au-dessus des clavicules ces

masses ou tumeurs mollasses, d'aspect lipomateux, que

nous avons décrites. Ces masses ne présentaient pas

de limites tranchées et se confondaient à leur péri-

phérie d'une façon diffuse avec le tissu adipeux sous-

322 CLINIQUE NERVEUSE.

cutané environnant. Elles avaient tous les caractères

qui sont représentés dans la figure 7 (p. 144).

Enfin, comme dans un certain nombre d'observa-

tions du même genre, celle de Curling entre autres,

nous trouvons la fontanelle antérieure persistante.

En ce qui concerne le cerveau, la description minu-

tieuse que nous avons donnée nous dispense de faire

de longues réflexions. Toutefois nous devons signaler,

d'une façon spéciale, les points suivants :

1° Les circonvolutions sont en général petites, et, en

particulier les circonvolutions frontales et pariétales

ascendantes. Nous insisterons spécialement sur la troi-

sième circonvolution frontale gauche, dont le cap est

dédoublé, cette circonvolution est, du reste, bien dé-

veloppée sauf le pied qui fait corps avec la frontale

ascendante et ne s'en distingue que par une scissure

très superficielle. Ce dédoublement n'avait encore été

signalé jusqu'ici que sur certains cerveaux d'hommes

distingués, entre autres sur celui de Gambetta; chez

celui-ci, le cap antérieur était plus développé, au con-

traire du Pacha où le cap postérieur est plus déve-

loppé ; on voit que ce dédoublement du cap peut aussi

se rencontrer sur des idiots à parole presque nulle.

Ce fait démontre une fois de plus que, si la forme des

circonvolutions est importante, leur structure intime

l'est encore davantage, et que ces deux choses ne

peuvent être séparées.

Nous appellerons encore l'attention sur les plis de

passage se rendant de la deuxième circonvolution fron-

tale à la frontale ascendante et qui, en allant par l'in-

termédiaire de celle-ci s'insérer à la pariétale ascendante,

semblent continuer la deuxième frontale jusqu'à la

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 323

pariétale ascendante. Cette disposition, qui est loin

d'être très rare est tantôt complète, tantôt incomplète.

Enfin nous trouvons quatre plis de passage temporo-

pariétaux à gauche, et trois à droite.

2° Les sillons sont remarquables par leur irrégu-

larité ; la scissure interpariétale se continue de chaque

côté dans le premier sillon temporal, et la scissure

perpendiculaire externe descend, comme chez la singe,

jusqu'au lobe temporal. La scissure de Sylvius laisse

des deux côtés le lobule de l'insula à découvert.

Les petites scissures sont également très irrégulières,

sinueuses, et ne permettent souvent que de limiter avec

peine les parties appartenant à telle ou telle circon-

volution. Nous appellerons seulement l'attention sur'

la forme étoilée de la scissure sous-pariétale gauche.

3° Enfin le corps pituitaire paraissait sensiblement

hypertrophié.

Nous reprenons maintenant l'exposé des cas d'idiotie

crétinoïde avec cachexie pachydermique, publiés par les

auteurs . Voici un cas de M. Bouchaud', paru en 1884,

et que nous reproduisons complètement en raison de

l'intérêt qu'il présente.

Observation VII. - Crétinisme sporadique compliqué de nanisme,-

Pas d'antécédents héréditaires. - Coqueluche et rougeole à sept

mois ; arrêt de développement physique et intellectuel consécutif.

Etat du malade à seize ans et demi. - Aucun signe de puberté. -

Idiotie : parole limitée à quelques monosyllabes; défaut d'at-

tention; marche très difficile; gâtisme; inertie physique. Ery-

thème; refroidissement progressif; mort. Autopsie : péricardite ;

absence du corps thyroïde.

W... (François), âgé de seize ans et demi, est admis à l'asile

de Lommelet, le 22 avril 1882. Son dossier ne contenant d'autres

1 Journal des sciences médicales de Lille, 1853, 5 et 20 décembre.

324 CLINIQUE NERVEUSE.

renseignements que ceux qui concernent son état actuel, M. Lalo,

étudiant en médecine, qui a bien voulu se charger de prendre

des renseignements sur les lieux, est parvenu à nous fournir les

documents suivants : Né à Béthune, V... a vécu dans une maison

qui est établie dans de bonnes conditions hygiéniques; elle est

aérée et propre ; il n'y a pas de marais dans les environs. Dans

la ville et le pays voisin, on ne rencontre pas de crétins; le goitre

y est rare et la population est saine. - Le père, âgé actuellement

de quarante-cinq ans, paraît très intelligent; il est d'une consli-

tution robuste et sa taille est de 1 m. 70. - La mère est morte à

l'âge de 40 ans, dix-huit mois après être accouchée de son dernier

enfant, à la suite d'une maladie dont il n'est pas possible de savoir

le nom. - Il y a eu cinq enfants; quatre filles et un garçon. Ils

sont tous vivants. Tous sont forts et bien constitués, sauf la fille

cadette, âgée de quinze ans, qui est un peu délicate. La fille ainée,

âgée de vingt-deux ans, qui a été nourrice à Paris, est bur lepoint

d'accoucher de son deuxième enfant et se propose encore de

redevenir nourrice. Le troisième enfant est un garçon, âgé de

treize ans, et les deux autres sont des filles, âgées de huit et cinq

"ans. Rien à noter du côté des autres parents; les ascendants du

côté du père et de la mère sont morts à un âge avancé.

W..., né à terme, est venu au monde bien développé ; il aurait

pesé, s'il faut en croire le père, 12 livres à sa naissance, ce qui

est assurément une exagération, mais donne une idée delà force

dusujet. La croissance fut normale jusqu'à l'àge de sept mois; à

celte époque l'enfant aurait eu la coqueluche et la rougeole, et, à

partir de ce moment, il aurait cessé de grandir d'une manière

sensible. L'intelligence a subi le même arrêt de développement

que le corps.

Etat actuel. - Vs... ressemble beaucoup à un petit enfant; il en

a le caractère et la taille ; on lui donnerait deux à trois ans, si sa

face n'offrait un air vieillot, bien différent de celui de cet âge, et

si la grosseur des diverses parties du corps, de la fête, du tronc,

des membres, n'était démesurément exagérée. La tête, en effet,

est volumineuse, le col est court, le tronc est trapu, et les membres

sont fort gros. - Le crâne n'est pas sensiblement déformé ; il est

symétrique et un peu aplati de haut en bas. La fontanelle anté-

rieure persiste ; on sent un espace membraneux à travers lequel

on pourrait passer le bout du doigt. La chevelure est blonde, peu

abondante. - La face est large, le front peu élevé; le ne ? déprimé

à son origine est très large à sa base. Les lèvres sont très épaisses

et l'ouverture buccale, ordinairement béante, donne issue à la

langue, qui est très volumineuse et semble ne pouvoir se loger

que très difficilement dans la bouche, aussi est-elle habituellement

en partie hors de cette cavité. Les dents sont petites, mal confor-

mées, il en manque plusieurs et la plupart de celles qui existent

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 325

sont cariées. Le ventre est saillant, arrondi, volumineux. Pas de

poils au pubis. La verge est celle d'un enfant; les testicules ont la

grosseur d'une petite noisette.

La peau est pâle, lisse et peu tendue ; elle est mobile sous les

tissus sous-jacents qui sont mous et flasques. On sent qu'il existe

une légère couche de graisse sur toute la surface du corps. Les

mains et les pieds sont potelés comme ceux d'un enfant ; la peau

y est même tendue et d'une teinte foncée, légèrement rougeâtre,

on dirait de ].'oedème. des nouveau-nés. - La muqueuse des lèvres

et des conjonctives est également pâle ; les paupières supérieures

sont légèrement gonflées.

L'intelligence a subi un arrêt complet de développement, c'est celle

d'un enfant qui'commence à parler, avec moins de vivacité et

plus de lenteur dans ses manifestations. Aussi les traits du visage

sont-ils peu mobiles et presque sans expression. Parfois cepen-

dant l'enfant sourit; il devient même gai dans certaines circons-

tances ; ainsi quand on lui met un chat entre les mains, il le

caresse et prend une figure riante et pousse quelques cris de joie;

il est toujours calme et habituellement silencieux ; il fait à peine

entendre par moment un bruit inarticulé, une espèce de gémisse-

ment (heen..., rarement il profère quelques mots faciles à pro-

noncer, tels que cat (chat), faim, etc. 11 prête une faible attention

.ù ce qui se passe autour de lui et ne comprend que quelques

expressions très simples, comme celle de donner la main, quand

on le lui demande, et autres semblables. Ces désirs sont très bor-

nés et peu nombreux. Il indique avec le doigt ce qu'il veut ob-

tenir ; s'il éprouve, par exemple, l'envie de monter sur sa chaise

ou en descendre. 11 est dénué de sentiments affectueux, il ne s'at-

tache à personne et ne parait pas reconnaître ceux qui lui don-

nent des soins.

La sensibilité physique est également fort obtuse; il se montre

très peu impressionnable quand on irrite la peau. Les sens sont

intacts ; il voit et il entend ; l'odorat et le goût paraissent cepen-

dant peu développés. Il est faible et très apathique, aussi

reste-t-il la plus grande partie du temps assis et immobile. Il

* peut à peine marcher seul, on est obligé de lui donner la main et

encore n'est-il capable de faire que quelques pas. Outre qu'ils

sont peu énergiques, tous ses mouvements se font remarquer par

leur peu d'activité.

L'appétit est médiocre, il mange peu et très lentement; l'em-

bonpoint est cependant relativement considérable. Incapable

d'avertir quand il a un besoin à satisfaire, il est naturellement

gâteux ; c'est à peine s'il mange seul les aliments qu'on lui sert.

Les battements du pouls sont extrêmement petits et faibles ; on

les sent difficilement au poignet. Ceux du coeur sont également

326 6 CLINIQUE NERVEUSE.

très faibles, mais réguliers. Quant aux bruits cardiaques, ils sont

nets, mais profonds, sourds. La respiration et la température

axillaire sont sensiblement normales. Voici les chiffres obtenus :

P. 80; R. 1S; T. ax. 361,9. Le poids du corps et les dimensions

de quelques-uns des organes les plus importants se résument

ainsi : .

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 327

pérature centrale; hier seulement elle a été prise et on a trouvé :

1 h. de l'après midi, T. ax. 32°,4. La température atmosphérique

est assez froide. Celte nuit le thermomètre est descendu vers 4 ou

5° au-dessous de zéro, mais dans les sallps de l'infirmerie, la tem-

pérature est toujours assez élevée et ne parait pas descendre au-

' dessous de 15°.

Ce matin, la peau est encore froide et le thermomètre placé sous

l'aisselle nous donne : à 8 h. du matin, T. 33°; P. 64, à 1 h. du

soir, T. 33°. L'inappétence persiste, W.... ne prend aucun aliment

solide; il accepte simplement un peu de lait. Il est affaissé, reste

couché sur le côté droit ou à demi assis dans son lit.

Il ne tousse pas, la respiration est un peu gênée. A l'ausculta-

tion, affaiblissement du murmure vésiculaire en arrière et en bas;

pas de râle; bruits du coeur sourds, profonds, difficilement per-

çus. Pouls presque insensible.

15. L'érylhème a à peu près entièrement disparu, mais

l'abattement est considérable. T. ax., le matin, à 8 h., 34°; le

soir, à 6 h. 1/2, 34°. Respiration lente et inégale.

16. Même état. Le matin, à 8 h., T. ax. 34° 6. Le soir, à

7 h., 34°,i. - Mort dans la nuit, à 5 heures du matin.

Autopsie. Nous procédons à l'examen cadavérique avec le

concours de deux de nos collègues. Des incisions faites à la peau

mettent à découvert une épaisse couche de tissu cellulo-graisseux.

Nulle part on ne trouve d'infiltration oedémateuse, ni aux mains,

ni aux pieds, ni à la face. On enlève la partie antérieure du tho-

rax et une poche globuleuse, d'un volume considérable, apparaît

sur la ligne médiane. C'est le péricarde distendu par une grande

quantité de liquide. Il présente 11 centimètres dans le sens de-la

hauteur et dans le sens de la largeur. Une ponction faite à l'aide

d'un trocart permet de retirer 450 gr. de sérosité claire, transpa-

rente, de couleur légèrement citrine où le refroidissement ne fait

naitre aucun nuage; mais qui, sous l'influence de la chaleur et

de l'acide nitrique, se coagule en masse. Le péricarde, incisé et vu

par sa face interne, parait légèrement opaque et un peu grisâtre.

Sur la crosse de l'aorte on remarque quelques petits vaisseaux

dilatés et gorgés de sang et même de petites ecchymoses. Le

coeur est dislendu par une grande quantité de caillots sanguins

qui remplissent les cavités droites et gauches. La valvule mitrale

est légèrement opaque, grisâtre et uu peu épaissie. Les valvules

sigmoïdes de l'aorte, leurs bords libres surtout, sont très épaisses,

légèrement rosées et demi-transparentes. On dirait une infiltration

de matière gélatineuse, de gelée de pommes; mais la consistance est

assez ferme; on trouve une certaine résistance quand on les com-

prime avec les doigts. A l'intérieur de l'aorte, dans toute son

étendue, près du coeur surtout et dans l'intérieur des carotides à

328 CLINIQUE NERVEUSE.

un degré moindre, on trouve une multitude de petites saillies, du

volume d'un petit grain de mil, d'un gris jaunâtre, non dures

comme les dépots crétacés, mais demi molles. -

Le foie, la rate, les reins, les poumons ne présentent pas de

lésions qui méritent d'être notées. Cependant, du côté droit, la

plèvre est le siège de nombreuses adhérences, déjà anciennes et

assez résistantes. '

Les testicules sont de la grosseur d'une petite noisette. Lalangue

est relativement énorm13; de l'extrémité du V lingual à ]a pointe,

elle mesure 7 cent. Sa largeur est de cent. et son épaisseur de

2 1 3 cent. Le larynx et la trachée ayant été enlevés en même

temps que les poumons et l'oesophage, après une incision de la

peau pratiquée sur la ligne médiane, on recherche le corps THY-

RoiDE entre la trachée et les muscles qui ont été assez bien con-

servés et on n'en trouve aucune trace.

Le grand sympathique de la région thoracique parait normal ;

au cou, on ne trouve que deux ganglions; l'inférieur a une lon-

gueur d'un centimètre et demi; le supérieur est beaucoup plus

volumineux : il a une longueur de 2 centimètres environ et une

largeur de 5 à 6 millimètres.

Les enveloppes du crâne s'enlèvent facilement. La boite crâ-

nienneayantété sciée, il devient impossible de le décoller de la

dure-mère. Celle-ci adhère très fortement aux sutures osseuses et

surtout à la fontanelle antérieure qui, n'étant pas ossifiée, est cons-

tituée par une membrane fibreuse, forte et étendue. Le cerveau

parait régulièrement développé et semblable à celui d'un adulte.

Les principales circonvolutions sont bien dessinées et volumineuses;

les sillons sont profonds et étroits.

La dentition est très défectueuse. Nous trouvons : Incisive,

,2-;cauine ? ; premi8remolaire,- a=a-;deuyièmemolaire,

-I'rr°;0,r . L'extraction de ces dents nous apprend que ce sont des

dents de la seconde dentition ; les premières n'ont qu'une racine

conique très longue, les grosses molaires sont plus ou moins

cariées; de quelques-unes il ne reste plus que la racine.

Les principaux organes ont été pesés et nous ont donné les

chiffres suivants : .

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 329

On fait macérer le squelette et on trouve, au bout de peu de

temps, que tous les os du crâne se sont séparés les uns desautres,

ce qui indique que la soudure des articulations était fort incom-

plète. Les epiphyses des os longs se séparent également de la

diaphyseavec une grande facilité.

M. Bouchaud, après avoir rapporté ce cas qu'il rat-

tache au crétinisme sporadique, croit devoir rejeter

l'hypothèse du myxoedème en se basant sur ce qu'il n'a

trouvé à l'autopsie ni sérosité, ni substance colloïde,

mais simplement une épaisse couche de graisse sous-

cutanée. Il est noter, dureste, que l'examen chimique

de cette peau n'a pas été pratiqué et que la présence

de la mucine a paru faire défaut dans un certain nom-

bre de cas de myxoedème. Tous les autres symptômes

observés par M. Bouchaud sont bien ceux de l'idiotie

crétinoïde avec cachexie pachydermique. L'auteur en a

lui-même le sentiment, car, à plusieurs reprises, il in-

siste sur le rapprochement qui peut être établi entre le

crétinisme et le myxoedème. Il est probable que, s'il

avait eu l'occasion de voir auparavant quelques cas

types de myxoedème, il n'aurait pas hésité. Nous ajou-

terons que l'absence de la glande thyroïde fournit un

argument puissant en faveur de notre interprétation.

Le Progrès médical a publié, le 4 février 188 ? un

autre cas d'idiotie crétinoïde, observé par M. Char-

pentier dans le service de Legrand du Saulle. Nous le

relatons tel qu'il a paru à cette époque.

Observation VIII. Oncle paternel aliéné; tante maternelle rachi-

tique. Carie lombaire à cinq mois, puis convulsions jusqu'à

onze mois; affaiblissement physique et intellectuel. Idiotie com-

plète ; alitement ; gdtisme; marche et parole nulles; bouffissure de

1 Charpentier. Nouveau cas de myxoedème ou cachexie pachydep-

mique.

Archives, t. XII. 22

330 CLINIQUE NERVEUSE.

la face; tuméfaction des paupières; épaississement de la langue ; ,.

bave; oedème sur les mains ; cheveux rares; absence de goitre.

La nommée Sachse Elise, quatre ans, admise en février 1881,

présente un ensemble de symptômes qui rappellent la cachexie

pachydermique, expression heureuse de M. le professeur Charcot,

pour désigner le myxoedème des auteurs anglais ou une forme de

l'état crétinoïde de M. Baillarger.

La physionomie de la malade attira notre attention parla res-

semblance qu'elle offrait avec le Pacha, idiot de Bicêtre, dont

M. Bourneville a publié l'observation, comme cas de cachexie

pachydermique. En effet, elle a le visage bouffi, arrondi transver-

salement, en forme de boule ; les paupières sont tuméfiées, immo-

biles, les yeux à peine ouverts, chassieux, le regard est triste,

l'air pleurard ; le nez épaté est épaissi ; les joues violacées, froides,

tendues et bombées contrastent avec le fond blanc jaunâtre du

teint qui a une couleur de miel ; la langue, épaissie pend presque

constamment entre les dents et les lèvres qui laissent baver la

salive. La bouffissure de la face nous conduisit à l'examen général

de l'enfant, et nous constatâmes le même état de la peau sur

les membres supérieurs et inférieurs, à l'abdomen et aux reins,

mais, nullement à la région thoracique ; partout mêmes carac-

tères : sensation de froid désagréable au toucher de la peau qui

n'est ni sèche, ni écailleuse, ni gluante; teinte violacée surtout

aux lombes, aux fesses et aux extrémités ; celles-ci sont déformées

et massives. Aux mains, le creux palmaire est remplacé par une

surface bombée, la peau est épaissie, le pli que l'on y produit en

la prenant entre les doigts mesure plus d'un centimètre; l'im-

pression du doigt ne s'y marque pas comme dans l'oedème, mais

donne une sensation de résistance, mollasse et élastique à la fois.

Pas d'adhérences de la peau aux organes sous-jacen ts sur lesquels

on parvient à la faire glisser; pas de troubles appréciables de la

sensibilité cutanée. Les caractères pathologiques de la peau dimi-

nuent mesure que l'exploration remonte vers les parties supé-

rieures de l'abdomen et n'existent plus au thorax qui, ainsi que

le cou,'présente une peau normale; l'empâtement signalé des

régions sus-claviculaires comme caractéristique du crétinisme

congénital est nul.

Les cheveux sont rares, les ongles normaux, les dents jaunâtres;

absence des molaires; les narines sont à peine visibles ; rien aux

appareils digestif, respiratoire, circulatoire, biliaire et rénal;

rien au coeur,pas d'albumine dans les urines. Le cri est guttural,

enroué, d'ailleurs rare. Pas de goitre; pas de déformation crâ-

nienne, ni des oreilles; pas de déformation rachitique, sauf les

vestiges d'une carie lombo-sacrée, ainsi qu'en témoignent des ci-

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 331

caprices anciennes de cautérisation. Pas d'autres phénomènes

scrofuleux, pas de manifestations syphilitiques.

Quant aux troubles intellectuels, qui sont des plus-manifestes,

ce sont ceux de l'idiotie complète. La malade reste couchée dans

son lit, grande gâteuse, immobile, dans un état de mutisme

absolu, triste et silencieuse ; elle ne sait pas diriger son regard,

ne peut tenir la tête, remue les membres, mais sans les diriger,

ne peut se tenir debout : Depuis son entrée aucun changement ne

s'est produit, aucun trouble n'est survenu.

Voici le» renseignements que nous avons pu nous procurer.

L'enfant est née à Paris, de parents bien portants, ni crétins ni

goitreux. Dans la famille, un oncle paternel aliéné à Ville-Evrard,

une soeur maternelle rachitique; l'enfant a deux soeurs plus jeunes

qu'elle et bienportantes, sans vice de conformation. A la naissance,

l'enfant, de bonne santé, n'offrait rien d'extraordinaire et ressem-

blait aux autres enfants, le corps se développa régulièrement, une

chevelure assez forte apparut ; mais, à cinq mois, elle fut traitée

pour une carie lombaire qui se compliqua de crises convulsives,

répétées cinq fois par jour et qui durèrent six mois. C'est sur

ces entrefaites que la mère remarqua la bouffissure de la peau

qui, depuis, n'a pas diminué.

Ce ne fut que plus tard qu'elle remarqua l'empâtement des

membres inférieurs, qu'elle rapportait d'ailleurs à la carie verté-

braye. C'est aussi à la même époque que les cheveux commen-

cèrent à tomber, que le cri devint plus rauque et plus sourd, que

le regard perdit de sa vivacité, et que l'apathie et l'abattement se

manifestèrent. Voyant qu'aucun phénomène intellectuel ne se dé-

veloppait, la mère prit le parti de faire admettre son enfant à la

Salpêtrière.

La malade est morte un mois après la publication

de cette observation d'un érysipèle avec broncho-

pneumonie double. L'autopsie n'a pu malheureuse-

ment qu'être faite d'une façon imparfaite par suite de

circonstances particulières. L'attention de M. Char-

pentier n'ayant pas été attirée sur la glande thyroïde,

cet organe n'a pas été examiné. On constata un amin-

cissement très prononcé de la voûte crânienne, une

ménino-encéphalite(2). Le tissu adipeux sous-cutané

criait sous le scalpel, était plus développé sur la

moitié droite du corps; à la région lombaire il avait

332 CLINIQUE NERVEUSE.

deux centimètres d'épaisseur à droite, un centimètre

à gauche.

L'enfant dont il s'agit était évidemment atteinte de

myxoedème ; ce diagnostic avait été confirmé par

M. Charcot. Nous ajouterons que l'observation cli-

nique constate l'absence de tout goitre, et que Legrand

du Saulle avait porté le diagnostic de crétinisme.

Les deux cas suivants sont empruntés aux journaux

anglais. Le premier appartient à M. Coxwell et a été

présenté à la Société clinique de Londres comme étant

celui d'un enfant présentant des symptômes ressemblant

à ceux du myxoedème.

Observation IX. - Développement physique et intellectuel normal

jusqu'à <'< ! ? 6 de huit «Hs ; puis somnolence, perte de la mémoire,

parole pâteuse et indistincte, démarche incertaine; gonflement des

paupières inférieures. Diminution de la glande thyroïde ; abais-

sement de la température; insomnie : cris ; perte du langage arti-

culé; affaiblissement des facultés intellectuelles.

Il s'agit d'une enfant de treize ans présentant des symptômes

ressemblant à ceux du myxoedème. Jusqu'à l'âge de huit ans, elle

ne différait en aucune façon des autres enfants et elle pouvait lire

un chapitre de la bible ou une histoire aussi bien que sa mère ;

elle savait écrire et apprenait l'arithmétique. Survint alors un

grand changement; elle tombait souvent de sommeil, même en

mangeant; sa mémoire devint défectueuse, et si on l'envoyait

faire quelque commission, elle errait sans but. Dernièrement sa

parole devi nt épaisse et indistincte ; elle souffrait de maux de tête,

sa tête s'inclinait sur la poitrine; les mains et les pieds devinrent

très froids, les jambes très faibles et la démarche incertaine. Elle

fut admise dernièrement à l'hôpital national des paralytiques et

épileptiques, dans le service dur Hughlings Jackson. Son facies

donnait l'idée du myxoedème, sa peau était translucide avec une

tache circonscrite de rougeur au centre des joues; les paupières

inférieures étaient enflées; le nez large, les yeux proéminents et

bien formés. La glande thyroïde semblait diminuée, et il n'y

avait aucune tumeur graisseuse anormale, au cou ou ailleurs. La

t The British medical Journal, 20 janvier 1883.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 333

température tomba fréquemment à 3 : ï°, 4. Elle restait souvent t

sans repos la nuit et elle avait souvent des attaques de cris. La

force du langage diminua, au point, en dernier lieu ne pouvoir

articuler un son, on voyait les lèvres remuer sans résultat pen-

dant qu'elle essayait de parler. Elle ne pouvait embrasser sa mère

ou ne pouvait gonfler ses joues et la nourriture restait quelquefois

sept ou huit minutes entre les dents et les lèvres. On constata

enfin une obnubilation générale de l'intelligence.

Il nous paraît inutile d'insister sur les symptômes

présentés par cet enfant qui sont ceux du myxoedème,

il nous suffira d'appuyer sur la constatation faite par

l'auteur de la diminution de la glande thyroïde.

Le second cas est dû à M. Armand Routh, qui l'a

publié dans le Médical Press and Circular, sous le

titre de « Un cas de crétinisme sporadique, avec appa-

rence de myxoedème »'. '

Observation X. Rachitisme; absence probable du corps thyroïde,

tuméfactions lipomateuses sus-claviculaires et axillaires; marche

lente, indécise et chancelante; parole lente et monotone; idéation

lente; lecture et écriture, nulles; mémoire seulement des faits an-

té1'ieurs à l'tige de sept ans; absence de signes de puberté.

Elise H..., âgée de vingt-cinq ans, est une pensionnaire de la

maison des femmes incurables, Marylebone Road, elle est née

près de Southampton, dans le llampshire. Elle était l'ainée de

quatre enfants dont les parents, âgés .respectivement de vingt-

quatre et vingt-deux ans, étaient en pleine santé au moment de

sa naissance. Le père cependant mourut douze ans et la mère

seize ans plus tard de phthisie, maladie qui a causé aussi lamort

de la soeur de la malade à dix-sept ans et de la soeur de sa mère

à vingt-sept ans. Le père était né dans le Hampsphire etiamèrb

dans le Berkshire et il n'y avait aucune consanguinité entre

eux.

Jusqu'à l'âge de sept ans, la malade était comme les autres

enfants, mais plus grasse que d'ordinaire et on la comparait à

un « grand gâteau blanc » parce qu'elle était grasse, flasque et

couleur de pâte blanche. Pendant qu'elle étai t enceinte d'elle, sa

mère fut effrayée par un laureau. A sept ans, celle fille cessa de

' Médical Presse and Circulai', 14 niai 1884.

334 CLINIQUE NERVEUSE.

grandir, mais elle devint plus grosse et plus flasque, lente dans

ses mouvements et si stupide que toutes les tentatives pour lui

apprendre à lire et à écrire .furent vaines. A huit ans, elle vint

à Londres et devint moins habile à se conduire et plus niaise. Ses

amis disent que depuis il n'y avait eu peu ou point de change-

ments, excepté qne dernièrement elle commença à maigrir.

Antécédents héréditaires. - A l'exception de l'apparente héré-

dité de tuberculose, il n'y avait aucuns antécédents héréditaires

de maladies, tels que syphilis ou mal de Bright, aucun antécé-

dent d'alcoolisme, ni de folie ou de crétinisme dans la famille.

Une soeur de la malade, âgée de vingt-trois ans, jouit d'unebonne

santé, est bien développée, mais quelque peu anémique. Elle

présente une hypertrophie delà glande thyroïde, qui a diminué

par le traitement et un souffle systolique à la pointe se propageant

dans l'aisselle, endocardite valvulaire consécutive à une attaque

de rhumatisme articulaire dont elle fut atteinte. La malade a

aussi un frère bien portant âgé de dix-neuf ans, actuellement

soldat; tous les enfants sont nés dans IeHampshire.

Etat actuel. Taille : im05, taille moyenne d'un enfant de cinq

ans. Poids : 35 kilogr. 240. Elle est arrêtée dans sa croissance et

son squelette est altère par le rachitisme. Il existe une lordose

bien marquée. Les tibias sont courbés. Les épiphyses des os des

membres inférieurs sont quelque peu hypertrophiées, agrandies.

A leur union avec leur cartilage, les côtes présentent un chapelet

rachitique; dolichocéphalie.

La face est absolument sans expression et les traits effacés;

elle est gonflée; les lèvressont épaisses, très colorées et informes;

la bouche est généralement ouverte, le nez est épaissi et élargi

entre les yeux, les narines dilatées, les oreilles grandes et plates.

La tête ne pend pas en avant, mais le cou semble raccourci,

perdu dans la tuméfaction sus-claviculaire.

La peau est pâle et couleur de cire, excepté à la face où il y a

une légère rougeur, absente quelquefois; sur les joues pendantes

et flasques et sur les pieds et sur les jambes, où la circulation est

si pauvre qu'il y a un état chronique d'engelures. La (peau est

sèche etdure par places, mais la paume des mains est quelque-

fois moite. Les mains ont la forme d'une bêche. Il n'y a pas de

véritable oedème. Les cheveux sont couleur de jais, assez épais,

mais durs.

Sa température en moyenne est de 37" dans le rectum, mais la

température de la surface est toujours subnormale 35°ou 36°dans

l'aisselle et dans l'aine; une fois seulement elle s'est élevée à 37°,

mais après un séjour de quelques heures sous îles couvertures du

lit. il..

Le corps thyroïde ne peut pas être senti. Au-dessus de la 1 : lavi-

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 335

cule de chaque côté, immédiatement au-dessus de l'os, il y a les

tuméfactions bien marquées, qui glissent sous la pression et,

quoique donnant aux doigts la sensation du tissu lipomateux ou

myxomateux, rappellent également la sensation éprouvée en

saisissant un varicocèle.

Au-dessous des tuméfactions on entend un murmure respiratoire

claire, sans aucun bruit morbide. On trouve de pareilles tuméfac-

tions sous-cutanées sur la ligne axillaire postérieure. L'abdomen

est pendant, ce qui est dû en partie au bassin qui est très bas.

L'ombilic fait saillie et les droits de l'abdomen n'adhèrent pas à

la ligne médiane.

La malade peutmarche)- lentement et en chancelant pendant une

petite distance, mais souvent elle tombe subitement; aussi elle

ne marche jamais sans appui à sa portée. Les jambes semblent

incapables de porter le poids du corps et cèdent tout d'un coup

aux chevilles ou aux genoux. Les mouvements des bras sont

libres, mais elle fait tout lentement et avec méthode quoique sans

hésitation. Elle ne s'habille paselle-même, parce qu'elleprendrait

toute la matinée pour le faire, mais elle peut mettre et enlever

ses habits si on lui laisse tout son temps.

La parole est lente et monotone, mais sur un ton très élevé. Elle

répond assez correctement aux questions, mais lentement. Elle

parait mettre plus de temps que d'habitude pour comprendreune

question et, par suite, encore plus de temps pour formuler la

réponse. I

Système nerveux.-La malade ne peut ni lire, ni écrire, et tout

essai pour lui apprendre quelque chose a échoué; en fait il est

impossible de fixer son attention. Elle ne peut se rappeler les

faits récents', mais se souvient des faits arrivés avant son dé-

part de Hampshire à sept ans, la croissance et l'intelligence

semblant s'être arrêtée à cette époque. Le sommeil est bon et

lourd ; quoique presque inditlérente à la douleur, elle se plaint

souvent du froid. Les réflexes rotuliens sont exagérés. Rien ne

parait l'intéresser plus longtemps que quelques secondes, mais

quand on lui parle gaîment, une lueur 'de plaisir traverse sa

figure. Autrement sa physionomie est sans mouvements, dure et

quelque peu triste. La vue est bonne et l'examen opthalmosco-

pique ne décèle rien d'anormal. Ses pupilles sont un peu dilatées

et paresseuses.

Appareil urinaire. La malade rend en moyenne 708 gr. d'u-

rine (25 onces) en 24 heures. Poids spécifique, 1.015. Ni sucre, ni

albumine, ni dépôts. Quantité d'urée faible, à peu près Il de la

1 ]1 est à observer que le même phénomène se produit chez le vieillard

dont les facultés intellectuelles déclinent.

336 CLINIQUE NERVEUSE.

quantité normale 10,S grammes. Ce résultat est obtenu par la

méthode des Ors Russell et West.

Digestion.- La langue n'est pas notablement agrandie et pas

entamée par les dents. L'angle facial est grand, les dents sont

mauvaises et plusieurs ont été enlevées, par carie. Les alvéoles

* sont extraordinairementproéminentes et la muqueuse des gencives

est très épaisse. L'appetit est bon; l'haleine est généralement

mauvaise ; constipation. La malade se plaint continuellement

d'avoir la bouche amère.

Circulation. Pouls, 72. Il est très difficile de sentir le pouls

au poignet, à cause de sa distance de la surface et de sa faiblesse.

Bruits du coeur normaux mais faibles.

Sang. - Le sang examiné par le Dr Montagu-Murray au moyen

de rhoemocytomètre et de l'hoemodynamomètre de Gowers et au

microscope, le D' Murray dit que la proportion des globules

blancs ou globules rouges estde 1 à 90; que les globules rouges

du sang en proportion à l'échelle normale est de 86 p. 100, tandis

que l'hémoglobine est de 77 p. 100. Il n'y avait aucune altération

morbibe dans l'aspect des globules rouges ou blancs.

Respiration. - Tout à fait normale à tous les points de vue. -

Foie et rate, normaux; peu sensiblement hypertrophiés.

Organes génitaux. - Pas de règles. Pas de leucorrhée, organes

génitaux externes développés et dépourvus de poils. Petites

lèvres allongées et épaissies, faisant saillie à quelque distance de

la vulve. Les mamelles sont tout à fait enfantines. Vagin et col de

l'utérus normaux. Par le rectum, on constate que le bassin est

comme celui d'une enfant, quant à la forme et la position, et

l'utérus est la moitié de la grosseur normale, mais est normal

quant à la forme et la position. Les ovaires sont situés sur les

côtés du bassin plus bas et plus en arrière que normalement, et

enfin ils sont doubles de la grosseur normale; ils sont plus mous

que d'habitude et ne causent aucune douleur lorsqu'on les saisit

entre le doigt dans le rectum et la main placée sur l'abdomeu.

Il est probable que les ovaires ont subi des altérations semblables

au myxoedème qui rendraient compte de la persistance de l'amé-

norrhée et de l'état infantile des organes génitaux externes et

internes.

M. Routh a porté le diagnostic de crétinisme spora-

dique avec myxoedème, diagnostic qui fut confirmé

successivement par MM. Gowers, Ord, Barlow et

Routh père. Il insiste sur les analogies nombreuses

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 337

qui existent entre son cas et ceux de MM. W. Gull et

Hilton Fagge. « Les rapports exacts entre le myxoe-

dème et le crétinisme sporadique, écrit l'auteur, n'ont

pas encore été fixés. MM. W. Gull et Hilton Fagge

ont montré que le crétinisme sporadique était inva-

riablement associé à la présence de tumeurs symé-

triques dans la région sus-claviculaire et dans d'autres

régions, mais la priorité relative de ces accidents

pathologiques est inconnue. Dans les quatre cas de

M. Hilton Fagge, ceux dans lesquels le crétinisme a

duré le plus longtemps, ces gonflements symétriques

étaient le moins marqués et vice versa. De là il sem-

blerait que le myxoedème, si c'en est un, décroît lors-

que le crétinisme augmente». Ce rapport inverse entre

le degré de l'idiotie et le degré du myxoedème est

loin d'être démontré.

M. Routh termine en déclarant que, dans son opi-

nion, il est difficile de préciser la date du début de

l'atrophie de la glande thyroïde; toutefois, il lui paraît

vraisemblable que, dans son cas, on avait affaire à une

absence de développement congénital de la glande :

c'est à cette absence qu'il faut rattacher le myxoedème

d'abord, ensuite l'état crétinoïde.

Eu 1882, M. Bail a présenté à différentes sociétés

médicales un malade dont il a publié l'observation

dans l'Encéphale (1882, p. 253) sous ce titre : Le crétin

des Batignolles. L'un de nous a eu l'occasion de voir ce

malade qui lui a paru être un bel exemple d'idiotie

crétinoïde avec cachexie pachydermique. La véritable

nature de l'affection paraît avoir échappé à M. Bail.

Une circonstance particulière nous ayant mis en rela-

tion avec la famille de ce malade, nous avons fait une

338 CLINIQUE NERVEUSE.

enquête minutieuse auprès d'elle; de cette enquête et

de l'examen de la photographie qui accompagne la

publication de M. Bail, il nous semble résulter d'une

manière évidente que ce cas appartient à la catégorie

des idiots crétinoïdes. avec myxoedème (fig. 22). L'ob-

servation qui suit a été rédigée d'après nos renseigne-

ments personnels et d'après la note de M. Bail. Nous

y ajouterons, malgré les nombreuses et regrettables

lacunes qu'elle présente, un résumé de la relation de

l'autopsie communiquée à la Société d'anthropologie

en 1883.

Observation XI. - Père : quelques rares excès alcooliques; hémi-

plégie droite en 1886. - Grand-père paternel mort paraplégique.

- Mère plus âgée de dix ans que son mari. -Ni goitreux ni cré-

tins. - Deux soeurs du malade mortes jeunes de convulsions.

Conception à quarante et un ans; dentition tardive; convulsions

générales quotidiennes de onze mois à quatre ans. - Abolition de

la parole et de la marche; Retour de la parole à trois ans, et de la

marche à cinq ans. - Coqueluche, rougeole. Langue et lèvres

épaisses; gonflement des pieds et des mains; intelligence et mé-

moire presque nulles ; inaptitude manuelle pour les soins de pro-

preté, l'habillement, etc. - Pénil glabre : sensibilité au froid. -

Hémorroïdes. - Mort des suites d'une opération ( ? ) ou d'albumi-

nurie. Autopsie.

Chrest... (Victor), né à Pads-Batignolles, le 8 mars 1851, est

entré à Sainte-Anne le 4 mars 1882 (service de M. HALL) et y est

décedé le )2 août 1882.

Renseignements fournis par son père et sa mère (11 octobre 1886).

- Père, soixante-sept ans, a été pendant onze ans cocher du

chemin de fer, et pendant vingt ans cocher d'omnibus. Il est né

à Bavan (Calvados, à trois lieues de Caen), pays sain, .situé à deux

lieues de la mer, et où n'existent ni goitreux, ni crétins. Il n'a

pas eu de convulsions dans l'enfance; il a éprouvé parfois des

céphalalgies, mais pas de migraines; ni syphilis, ni rhuma-

trisme. etc. En 1878, coup de pied de cheval qui a laissé de la rai-

deur du genou gauche. Le 2 février 1886, hémiplégie droite avec

trouble de la parole qui était devenue indistincte ; la paralysie a

persisté pendant deux mois ; actuellement, il marche en traînant

un peu la jambe droite, soulève le bras droit, peut mettre la

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 339

main derrière la tête, mais les mouvements sont lents ; la parole

est redevenue distincte. Dans les dix dernières années, il a été

sujet à des étourdissements l'obligeant à s'asseoir pendant 5 à

10 minutes.- Quelques excès alcooliques très légers et très rares.

Il boit un litre de vin par jour ; accidentellement un petit verre

d'eau-de-vie le matin. Deux ou trois fois par an, il rentrait un peu

excité, jamais en ivresse complète. Sa femme, interrogée à pari,

affirme la rigoureuse exactitude de ces renseignements. Cet

homme a la tête un peu forte, mais régulière, nez aquilin. -

L'intelligence est ordinaire, les réponses sont précises ; il est un

peu emporté ; jamais de violences envers sa femme ou ses en-

fants. Il s'est marié à vingt et un ans. [Père, mort hydropique

à cinquante-sept ou cinquante-huit ans, journalier, sobre;

taille au-dessus de la moyenne; pas de maladies nerveuses, ni

de goitre. Mère, morte à quatre-vingt-sept ans, on ne sait de

quoi; elle n'était ni paralysée, ni démente ni goitreuse. - Grand-

père paternel, mort vers soixante-dix-huit ou quatre-vingts ai.s,

journalier, sobre. On ne peut donner de détails sur la grand' mère

paternelle. - Grand-père maternel, mort à quatre-vingt-deux

ans, était paraplégique depuis vingt-sept ans, charpentier, sobre.

- Grand'mère maternelle, morte paralysée à soixante-dix-huit

ans, ménagère, sobie. - Un frère mort à l'âge de six ans, du

croup. Une soeur morte a quarante-trois ans, on ne sait de

quoi, a eu trois enfants dont on n'a pas eu de nouvelles depuis la

mort de la mère en 1877. -Pas de maladies nerveuses, pas d'a-

liénés, pas d'épilepliqucs, pas d'idiots, pas de goitreux, de cré-

tins, 'de criminels, dans la famille.]

Mère, soixante-dix-huit ans, domestique, puis raccommpdeuse ;

assez grande, maigre, intelligente; physionomie régulière, rien

du type crétineux. Elle est née à Vannes; a été réglée à treize ans

facilement, s'est mariée à trente et un ans; la ménopause est

arrivée à cinquante et un ans sans accidents. Pas de convulsions,

pas d'attaques de nerfs, pas de névralgies, pas de migraines

(quelquefois des céphalalgies); aucune alfectlon cutanée. [Père,

couvreur, mort d'une chute à cinquanle-huit ans, sobre; était

né à Vannes et n'a jamais présenté d'accidents nerveux. - Hère,

ménagère, sobre, morte à quatre-vingt-huit ans sans paralysie, ni

démence. - Grands parents paternels et maternels pas de rensei-

gnements. Deux frères, morts de trois à quatre ans, on ne sait

de quoi. Deux sûrs bien portantes, sans goitre, l'une a deux

enfants, l'autre quatre qui n'ont rien présenté de particulier. [Pas

de goitreux, etc., dans la famille.] ,

1 La physionomie du malade se rapproche heaucoup plus de celle du

père que de celle de la mère.

340 CLINIQUE NERVEUSE.

Pas de consanguinité.

Cinq enfants : 1° garçon bien conformé, né à terme, mort à

six mois, en nourrice, de convulsions; 2° fille, née à terme, bien

conformée, intelligente, morte à trois ans de convulsions; 3° fille

mort-née à terme (présentation des pieds), bien conformée;

- 40 fille, morte à treize ans d'un abcès du foie; elle était née

à terme, était bien conformée, intelligente et ne paraissait que

son âge, contrairement à ce qu'écrit M. Bail.

5° Le malade, Victor Chré... Lors de la conception la mèreavait

quarante et un ans et le père trente et un ; ils étaient tous deux

bien portants et la conception n'a pas eu lieu durant l'excitation

alcoolique la plus légère,- Grossesse bonne, sans aucun accident.

Accouchement à terme, naturel, sans chloroforme. A la nais-

sance, l'enfant était fort et n'offrait pas le moindre signe d'as-

phyxies. Elevé au sein par sa mère, il venait bien, était frais,

rose, n'avait rien ni aux pieds ni aux mains, ressemblait aux

enfants de son âge. Victor commençait à marcher le long des

murs, était propre, gazouillait, disait « papa et maman ». Alors

qu'il avait près de onze mois, sa mère eut des abcès aux seins et

dut le sevrer. Pendant sa maladie, elle le mit chez une garde qui

l'aurait maltraité, mal soigné, et même fait jeûner. Quand, au

bout de vingt jours, sa mère le reprit, il avait considérablement

maigri et présentait des excoriations du siège. C'est quelques

jours après qu'il survint, pour la première fois, des convulsions

générales qui durèrent deux à trois heures. A partir de là jusqu'à

quatre ans, il a eu presque quotidiennement, aosure-t-on, des

convulsions générales analogues, d'une durée d'une à deux

heures.

La première dent est sortie à l'âge de onze mois2, les autres

apparurent vite, mais se cassaient dans lesconvulsions. Il a recom-

mencé à. parler vers deux à trois ans. il avait les lèvres épaisses

et la langue très grosse; celle-ci pendait alors en dehors de la

bouche; il a marché vers cinq ans. De six à sept ans, coqueluche,

puis rougeole. - Pas d'ophtalmie, d'adénite, d'otite, de maladies

cutanées, etc. - Vers neuf ans, les mains et les pieds épais et courts

se seraient gonflés davantage; on fut obligé de lui faire faire des

chaussures spéciales.

Mis à l'asile de six à huit ans, Victor n'y a rien appris, pas même

ses lettres; il n'aimait pas à jouer avec les autres enfants, dans

la crainte de tomber; il était affectueux. - Il bavait un peu,

avait un appétit régulier, mangeait seul avec la cuiller et la four-

1 L'asphyxie à la naissance est l'une des causes peut-être les plus fré-

quentes des lésions qui aboutissent il l'idiotie. (B.)

Les autres enfants avaient eu des dents avant onze mois.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 341 i

chette, mais ne savait pas se servir de couteau, il n'offrait aucune

lésion du tube digestif, sauf des hémorroïdes. Il ne pouvait

s'habiller, se boutonner, lacer ou nouer, ni se déshabiller, se laver

la figure ou les mains. - Il était très sensible au froid; les mains

et les pieds, surtout ceux-ci, étaient bleus et froids.

Les organes génitaux sont assez développés (fig. 22); le pénil

était glabre, ainsi que le visage et les aisselles. Pas d'onanisme,

pas de tics ni de grimaces, pas de grincement des dents, de

balancement; bave légère.

Etat du malade (1882), d'après M. Ball. - La figure est sans

expression, bouffie, terreuse ; le front est ridé, le nez aplati, les

yeux très écartés l'un de l'autre; les paupières, volumineuses et

plissées, tendent à maintenir les yeux à demi-fermés. La bouche,

largement fendue, offre des lèvres tuméfiées et pendantes, surtout

l'inférieure. La langue, très volumineuse, semble prête à s'échap-

per entre les arcades dentaires. V... Cri. ne possède que 19 dents,

Fig. 22. - Le crétin des Batignolles.

342 CLINIQUE NERVEUSE.

dont 9 la mâchoire supérieure et 10 à l'inférieure. Elles sont

d'ailleurs absolument ravagées par la carie. Deux d'entre elles

appartiennent à la deuxième dentition; ce sont les deux inci-

sives moyennes, à la mâchoire supérieure; les autres sont des

dents de lait'.

- Le visage est complètement imberbe. Par contre, la tête est

couverte d'une chevelure abondante et d'un châtain foncé. La

tête est grosse et irrégulière. Le front, fuyant en arrière, contri-

bue à rétrécir le diamètre antéro-postérieur du crâne. La réunion

de l'occipital avec les pariétaux est marquée par un sillon qui pa-

rait correspondre à la suture lambdoïde, et qui est surmonté, en

arrière, par une espèce de crête qui ressemble, pour me servir

d'une comparaison familière, au rebord que fait un peigne im-

planté dans les cheveux d'une femme. Malgré cette espèce de

chevauchement, l'occipital fait une certaine saillie en arrière, et

les fontanelles sont complètement ossifiées 2. Nons indiquons plus bas

les chiffres qui correspondent aux diverses mensurations prati-

quées sur le crâne. Le sujet est manifestement dolichocéphale,

contrairement à ce que l'on voit habituellement chez les crétins,

qui sont brachycéphales. Les oreilles sont moyennes comme

grandeur, mais le pavillon est replié sur lui-même, comme le

serait une feuille de papier qu'on aurait entr'ouverte après l'a-

voir pliée en deux. Le contour est un peu festonné, sans offrir

d'autre irrégularité.

Le menton est court et la disposition des dents qui sont placées

en éventail augmente la saillie des lèvres et la brièveté apparente

de la mâchoire inférieure. Les joues sont flasques et pendantes,

et la nuque, très forte pour la taille du sujet, présente deux plis

profonds séparés par un bourrelet de chair. Ace niveau, la troi-

sième vertèbre cervicale forme une saillie exagérée en arrière, ce

qui explique peut-être un raccourcissement extrême du cou.

La physionomie du malade est douce, bienveillante, mais sans

caraclère, et présente un peu l'expression d'un foetus conservé

dans un bocal. Quand il sourit, des plis extraordinaires viennent

creuser le visage, les yeux se ferment, les paupières s'allongent,

les lèvres s'écartent et deviennent plus saillantes, la langue s'é-

chappe et la bouche se fend jusqu'aux oreilles. En somme, on

voit à ce moment que les téguments de la face sont trop larges

dans tous les sens pour les os qu'ils recouvrent.

L'examen du corps présente d'autres particularités intéres-

santes. La taille est extrêmement cambrée, et l'on pourrait

presque prononcer à cet égard le nom de cyphose. Le ventre est

1 C'est ce que nous avons noté chez le Pacha.

z On verra plus loin à l'autopsie que l'ossification était, au contraire,

loin d'être complète. (B. et P. B.)

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 313

proéminent, mais la poitrine est normale et les bras sont bien

faits; les mains sont petites, ramassées, les doigts sont courts, et

les rides de la peau, plus abondantes sur ce point que partout

ailleurs, dénotent encore cette laxité des téguments que nous

avons déjà signalée. Les jambes sont assez bien conformées, mais

les genoux sont rapprochés. La région du cou-de-pied est empâtée

et présente des rides transversales; le pied est gros, court et ra-

massé, mais il est assez cambré, la jambe est plus longue que le

fémur et l'avant-bras est plus long que le bras. Les orteils ne

présentent rien de particulier, si ce n'est le volume un peu exa-

géré du deuxième.

Les organes génitaux sont très volumineux et semés de quelques

poils. Le gland est énorme, il est en forme de massue et entière-

ment découvert ; le testicule droit est plus fort que son congénète e

et descend jusqu'au niveau du bord supérieur de la rotule.

Absence de l'instinct génital (Pas d'onanisme).

La peau est terreuse, blatarde, écailleuse et sèche. Elle est com-

plètement glabre, sauf au niveau du pubis. Comme infirmité pro-

prement dite, nous ne trouvons à noter que des leéntorroàdes

externes qui datent de loin. - L'appétit est excellent, le sommeil

est bon et toutes les fonctions de la vie végétative s'accomplissent

avec régularité.

Tous les sens spéciaux paraissent être à l'état normal et la

sensibilité tactile ne laisse rien à désirer. V. Chr... comprend

assez bien ce qu'on lui dit, mais éprouve beaucoup de difficulté

à s'exprimer. Il reconnaît les personnes de son entourage, sait

apprécier les bons et les mauvais procédés. Il est affectueux,

doux et paisible. Ses goûts sont ceux d'un jeune enfant; il

s'amuse avec un fouet qu'il fait claquer sans cesse.

Diamètres du crâne :

344 CLINIQUE NERVEUSE.

Dimensions du thorax :

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 345

Dimensions des membres :

346 CLINIQUE NERVEUSE.

de la Société d'anthropologie de Paris, t. V, p. 509.)

Victor Ch..., par sa taille et par l'absence de presque

tout signe de puberté; par son développement intellec-

tuel et physique, l'aspect de la face, du cou, des pieds

etdes mains qui, d'après le récit des parents et d'après

la photographie, semblent avoir été atteints de pseudo-

oedème dur \ par l'état de la dentition, de la peau, la sen-

sibilitéau.froid, etc., présente tous les signes d'un idiot

crétinoïde ; il est vivement à regretter qu'une obser-

vation aussi intéressante n'ait pas été prise avec tout

le soin désirable et que les symptômes du myxoedème

n'aient pas attiré l'attention de M. Ball.

M. Bail à la fin de sa seconde communication à la

Société d'anthropologie avait relevé deux points pour

lui d'une importance capitale :

« Le premier, disait-il, c'est qu'il s'agissait d'un cerveau de

crétin et non pas du cerveau d'un idiot. En effet, nous ne trou-

vons pas ici de ces vastes lacunes, de ces malformations carac-

téristiques, qui sont les stigmate» de l'idiotie. Il s'agit d'un cer-

veau normal, mais engourdi, et par conséquent susceptible

d'éducation. C'est la grande différence qui sépare, au point de

vue moral, les crétins des idiots. »

Il nous suffit de citer ces quelques lignes pour

montrer que M. Bail ne paraît pas être au courant

des travaux publiés sur l'idiotie soit en France, soit à

l'étranger. L'idiot est loin de présenter toujours des

lésions macroscopiques grossières, beaucoup ne sont

atteints que de lésions structurales, ne se décelant

quelquefois à l'oeil nu que par des nuances délicates

de coloration, de consistance, etc. : nous citerons en

passant l'aspect gélatiniforme des circonvolutions noté

à l'autopsie dans un certain nombre de cas.

IDIOTIE AVEC CACHExIE PACHYDERMIQUE. 347

M. Bail s'appuie pour séparer les crétins des idiots

sur ce fait que les crétins sont susceptibles d'éduca-

tion, tandis que, à son avis, les idiots ne le seraient

pas. C'est là une opinion étrange chez un homme

chargé d'un enseignement officiel, car elle montre

que M. Bail ignore complètement tout ce qui se

fait dans les asiles consacrés aux idiots en Angleterre,

en Amérique, où depuis longtemps on applique les

méthodes d'enseignement dus à Edouard Seguin.

M. Bail paraît ignorer les résultats très sérieux obte-

nus dans ces pays et dans des établissements un peu

moins éloignés, à Bicêtre et à la Salpêtrière.

« Le second point, ajoute M. Bail, se rattache à l'état d'ossifi-

cation des parois crâniennes. D'après Virchow, l'ossification pré-

malurée des sutures, la synostose, serait l'une des principales

causes du crétinisme. Or, nous avons affaire, ici, à un état abso-

lument inverse : il y a défaut d'ossification et arrêt de dévelop-

pement. »

Justement, dirons-nous, parce que dans le cas spé-

cial, à supposer que le crétinisme vrai ne se rapproche

pas de l'état myxoedémateux, il s'agit d'un crétinisme

spécial, crétinisme sporadique, ou mieux d'idiotie

crétinoïde avec cachexie pachydermique.

Dans la discussion qui suivit la présention du mou-

lage de V. C... à la Société d'anthropologie, 11111. Bor-

dier et de Mortillet ont fait observer avec juste raison

que le sujet présenté ne ressemblait nullement à un

crétin ordinaire et qu'il se rapprochait des idiots.

M. Delasiauve rapporta alors, en quelques mots,

l'histoire d'un malade qu'il eut dans sou service de

Bicèlre et qui présentait encore plus, peut-être, que

348 CLINIQUE NERVEUSE.

celui deM. Bail, les attributs caractéristiques de l'idiotie

crétinoïde avec cachexie pachydermique.

Observation XII. - Coloration cachectique chez la mère et une

soeur. - Idiotie complète; surdi-mutité; taille petite; 1>rachi-

céphalie; épaississement des lèvres; absence de signes de puberté ;

marche nulle.

11 s'agit d'un nommé Pot..., né à la Chapelle-Saint-Denis

(Seine), le 25 août 1839, entré à Bicêtre le 25 septembre 486J,

décédé le 2 janvier 1873. Tous ses parents jouissaient d'une excel-

lente santé. Seules, la mère et une soeur offraient une teinte

cachectique prononcée de toute la surface cutanée. Sa taille était

de 0'"96 cent. La tête était assez volumineuse, plutôt brachycé-

phale, avec aplatissement notable de la région occipitale; les

cheveux étaient rares, le visage pâle, les paupières plissées, le

nez écrasé, les lèvres légèrement épaisses laissant sortir la langue

de temps à autre. Il avait un tic particulier consistant en une

sorte de grimace produite par des mouvements des lèvres et des

ailes du nez. L'abdomen était volumineux et flasque; les membres

étaient grêles, la peau était lâche ; aucune force. Ce malade restait

assis dans un fauteuil, ne parlait pas, était sourd ; il se montrait

hargneux si on le contrariait et aimait qu'on s'occupât de lui. Il

existait un léger empâtement. Au dire des personnes du service

encore à Bicêtre qui l'ont connu, ce malade était un type absolu-

ment semblable au Pacha.

Les différents certificats inscrits sur les registres portent les

diagnostics suivants : Idiotie avec arrêt de développement (Marcé,

L.bègue). - Idiotie avec arrêt de développement et rachitisme ;

aspect demi-crétiueux (Magnan), - Crétinisme (ralret).

En novembre 1872, le malade s'affaiblit et mourut en janvier

1873, d'une congestion pulmonaire.

Nous pouvons encore citer, parmi les cas de créti-

nisme sporadique avec myxoedème que nous avons

réunis, un cas de M. Goodhart 1.

Observation XIII. Absence d'antécédents héréditaires. - Idiotie

complète; parole et marche nulles; teinte cachectique de la peau;

brachycéphalie ; retard de la dentition; langue épaisse et pendante ;

1 Goodhart. Sporadic crétinism and myxoedema. {Médical Times and

Gazette, May, 1880, p. 474.)

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 349

développement exagéré du tissu adipeux sous-cutané; pseudo-

lipomes sus-claviculaires; existence douteuse de la glande thy-

roide; hernie inguinale.

X..., âgée de quatre ans; pas de consanguinitéentreles parents;

cinq frères ou soeurs en pleine santé, dont un bébé de seize mois

marchant déjà.

La peau, d'une pâleur jaunâtre, a attiré aussitôt l'attention.

Les viscères abdominaux étaient normaux. La tête était large et

d'une forme particulière; le front était petit et saillant, dans

chaque région frontale latérale et aussi au-devant de la fontanelle

antérieure. La partie postérieure de la tête était petite. Les traits

étaient lourds et épais; la face ronde et sans expression. Cette

petite fille ne pouvait parler, mais elle émettait desbruits inintel-

ligibles, la vue et l'ouie étaient normaux. Elle était incapable de

marcher et tombait dès qu'elle était sur ses jambes. Les tibias

étaient courbés en dehors quoique sans élargissement notable

des extrémités osseuses; elle avait une hernie ombilicale Le

palais était très arqué, la dentition était retardée ; les deux inci-

sives du haut et du bas étaient coupées, et il y avait une dent

double dans la mâchoire supérieure du côté gauche, la dent cor-

respondante du côté opposé apparaissait.

L'état de la langue était remarquable. Elle était trop grande

pour la bouche et faisait saillie entre les dents; à part cette lar-

geur exceptionnelle, elle était normale. Le corps était en bon état,

mais un peu petit. Ce bon état paraissait être dû à un excès de la

graisse sous-cutanée sans oedème. On constate dans les régions sus-

claviculaires deux masses lipomateases. Pour le goitre, l'existence

même de la glande thyroïde est douteuse. 11 n'y a pas d'apparence

d'hypertrophie des glandes médiastines. Il y avait un remar-

quable agrandissement des éminences thénar et hypothénar de

chaque main, ce qui leur donnait un aspect large et déformé,

cet élargissement semble dû à l'hypertrophie musculaire et non

à un excès de graisse. Les muscles de la cuisse sont bien déve-

loppés, contrairement à ceux du mollet. Le fond de l'oeil est nor-

mal. Mentalement, c'était une enfant lourde, ne prêtant que peu

d'attention aux objets environnants; elle reconnaissait cependant

ses parents et les objets brillants placés devant elle.

M. Goodhart pense que les symptômes présentés par

la malade sont suffisants pour justifier le diagnostic

de crétinisme sporadique qu'il considère comme dû à

1 Nous avons relevé chez nos deux malades l'existence de hernies

inguinales.

350 CLINIQUE NERVEUSE.

un développement défectueux du cerveau, mais sur-

tout à un développement irrégulier et asymétrique des

diverses parties du corps dont les unes se développent

avec excès, tandis que les autres subissent un arrêt de

développement.

' L'auteur, tout en faisant ressortir la ressemblance de

son cas avec le myxoedème de l'adulte, ne croit pas à

l'état crétinoïde avec cachexie pachydermique. Le

diagnostic de myxoedème nous paraît cependant

devoir être posé assez clairement, si l'on considère

l'état intellectuel et physique de la malade, les masses

lipomateuses sus-claviculaires, l'absence probable du

corps thyroïde, etc.

Aux cas de crétinisme avec myxoedème paraîtrait

aussi devoir se rapporter l'observation de M. A. Voisin

publiée dans la Revue photographique^ sous le titre de

Crétinisme chez une enfant née à Paris de parents pari-

siens. La taille de cette enfant était de 1D1,30; le cou

était large, gros; la peau commeoedématiée; les mains

ramassées; les doigts épatés étaient rouges, cyanosés,

comme infiltrés; l'abdomen était très gros. II n'existait

pas de goitre; les mouvements étaient lents, lourds;

la sensibilité et la force musculaire étaient diminuée ?

la parole était lente, indistincte; l'enfant était idiote.

Quant au cas de M. Baillarger il paraît plutôt s'agir

d'un myxoedème opératoire; nous aurons lieu d'en

reparler plus loin. - Le crétin de Charonne, observé

par Ferrus', semble appartenir au crétinisme avec

1 A. Voisin. - Revue photographique, 4ô année, 1872, p. 353.

' Ferrus. - Comptes rendus de l'Académie de médecine, 1850-51

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 3.')1 1

goître, quoiqu'il soit difficile de dire exactement ce

que Ferrus entendait par la tumeur volumineuse du

cou que présentait ce malade ! ' JI 1 '1 ' 1

Cet état crétinoïde des idiots myxoedémateux per-

met de penser que sous la dénomination decrétinisme

sans goître et surtout sous celle de crétinisme spora-

dique', il doit se rencontrer encore en grand nombre

d'idiots myxoedémateux. Les observations anciennes

de Curling, de Fagge, de Fletcher-Beach, et celles plus

récentes de MM. Bouchaud, Charpentier, Coxwell,

Routh, Bail, Goodhart, etc., et que nous avons rap-

portées plus haut, paraissent en fournir la démonstra-

tion.

Il ressort des observations précédentes que chez

tous les idiots crétinoïdes, l'absence ou l'atrophie de la

glande thyroïde paraît constante. Les quelques autopsies

de sujets atteints de cachexie pachydermique sans

accompagnement d'idiotie nous montrent aussi que

souvent, dans ces cas, le fonctionnement de la glande

thyroïde était rendu impossible par suite de son atro-

phie. En voici quelques exemples.

Dans le cas de M. Brandes, il s'agit d'un homme

de quarante ans dont le myxoedème paraissait remonter

1 La question de crétinisme mériterait du reste d'être remise à l'étude;

il serait intéressant de s'assurer de l'état de la glande thyroïde chez les

crétins complets, ainsi que chez les crétineux où la dégénérescence de la

glande peut avoir eu une marche et une distribution inégales; il va de

soi que surtout pour ces derniers, on ne pourrait tirer de conclusion

sans de nombreuses autposies.

2 Il va s'en dire que nous n'avons pas laprétention d'avoir relaté toutes

les observations de crétinisme sporadique, compliqué de myxoedème,

11 nous a même été impossible de reproduire un certain nombre d'obser-

vations publiées sous le nom de myxoedème et se rapportant à des

enfants (cas de Sliattock, etc.).

352 -1) CLINIQUE NERVEUSE.

à l'âge de quatorze ou quinze ans. A l'autopsie, outre

une atrophie glomérulaire des reins, il fut constaté

que la glande thyroïde était très atrophiée '. Il est éga-

lement à noter que la thyroïde était très atrophiée dans

le cas de Hale White et qu'elle était dégénérée' dans

les cas de Ord, Greenfield, Cushier s.

L'atrophie de la glande thyroïde est de même signa-

lée dans beaucoup d'observations publiées du vivant

des malades; nous citerons les observations de Dyce-

Duckworth \ Ord, Miller8, Hamiltone, Oliver', Abbott 8,

Hadden", etc.; dans quelques cas, l'atrophie était si

accusée que la glande ne pouvait être sentie à la pal-

pitation; enfin, dans d'autres, l'existence même de la

1 Brandes. Un cas de myxoedème. (Extrait des comptes rendus du

Congrès international de Copenhague.)

2 Hale White. - A case of myxoedema with a post mortem Exanzi-

nation. (titre British medical journal, 1885, p. '.381.) .Follicules clos atro-

phiés.

3 Cushier. - Case of myxoedema. {Archives o/'n : edecMe, 1882, p. 203.)

La glande thyroïde, plus petite qu'à l'ordinaire, présentait une atrophie

avec sclérose; absence de follicules clos; vaisseaux oblitérés.

4 Dans un autre cas du même auteur, le corps thyroïde paraissait nor-

mal. - Dans l'autopsie du cas de Ord, faite par Greeiirield, il est noté

que les cellules de la glande thyroïde sont comprimées par du tissu de

nouvelle formation. (Dyce-Duckworth. Two cases of myxoedema. Tran-

sactions of the clinical Society of London, 1e81, p. 53.)

1 Miller. - A case of myxoedenza (The British médical Journal, 28 fé-

vrier 1885, p. 429).

' Hamilton. A case of myxoedema with three illustrations (The me-

dical Record, New-York, 1882, 9 décembre, vol. XXII, p. 645).

7 Oliver. Clinical lecture on myxoedema (The British médical Journal,

17 mars 1883).

a Abbott. A case of myxoedema (The British médical Journal,

juin 1886).

9 Hadden. - A case of f myxoedema {Transactions of the clinical So-

ciety, 1881, p. 58). La glande thyroïde était considérablement dimi-

nuée de volume.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 353

glande a paru douteuse (Goodhart, Ridel-Saillard,

Ord, Gowans', Lunn 2, Sermon').

Il faut ajouter que, dans nombre de cas de myxoe-

dème, l'observation est incomplète; souvent, par

exemple, il n'y est fait aucune mention de l'état de la

glande thyroïde. Parmi les observations que nous avons

pu consulter, nous n'en avons trouvé que très peu où le

corps thyroïde ait été signalé comme normal, du moins

quant à son volume' (Edes5, Wadsworth \ Lane').

II. DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE OPÉRATOIRE.

Les faits avec autopsie que nous avons rapportés,

montrant l'absence de glande thyroïde et les observa-

z Gowans. Flisforg of a case of myxoedema (The British médical

Journal, 1882, I, p. 772).

' Lann. Cases of myxoedema (The British médical Journal, 24 dé-

cembre 1881, p. 1017).

3 Semon. A case of myxoedema {Transactions of the clinical Society

of London, 1881, p. 61).

à Nous ferons remarquer que, parmi les observations publiées sous le

nom de myxoedème, il en est qui se rapportent à d'autres affections, telles

que la néphrite, etc. (le cas de il. Braser, par exemple).

1 Edes. - Clinical Lectures on a case of myxoedema (The Boston med.

and Surg. Journal, 24 avril 1884, p. 385).

ô Wadsworth. A case of rnyxoedcl1 ! a with atrophy ofthe optic Ner-

ves (The Boston med. and Surg. Journal, 1885, p. 5).

7 Lane. J1Jyxoedema with remaries upon the eliologg of lhc disease.

(The Lancet, 14 juillet 1883, p. 56 ! . Le cas de M. Henrot, où laglande

thyroïde est notée comme ayant 4 à 5 fois son volume normal. doit être

léservé, car le diagnostic de myxoedème nous parait discutable.

Dans les cas de M. Morvan. il n'est pas fait mention de la glande thy-

roïde : deux des malades de ce médecin, à ce qu'il nous écrit, examinés

à nouveau récemment à ce point de vue, ne présentent rien d'anormal

dans la région thyroïdienne; il en résulterait, en tout cas, que si l'alr-

sence ou l'atrophie de la glande thyroïde n'existe pas, ce qui est difficile

à vérifier sur le vivant, ces malades ne présentent en tout cas pas d'hy-

pertrophie du corps thyroïde.

35 '( CLINIQUE NERVEUSE.

tions de malade encore vivants chez lesquels l'absence

de la glande thyroïde a été constatée ou dont l'existence

a paru très douteuse, semblent établir une relation évi-

dente entre la cachexie pachydermique et l'absence ou

l'atrophie delà glande thyroïde '. Nous sommes donc

.conduits naturellement à examiner les 'conséquences

de la thyroïdectomie.

Les cas d'extirpation totale de la glande thyroïde sont

déjà nombreux; si beaucoup d'opérés n'ont présenté

aucun phénomène se rattachant à la cachexie pachy-

dermique, il n'en n'est pas moins vrai que le chiffre

des thyroïdectomisés atteints de myxoedème est assez

considérable, et encore est-il juste de faire observer

qu'un certain nombre d'opérés ont souvent été perdus

de vue. Nous donnerons ci-dessous la statistique de

tous les cas qui sont parvenus à notre connaissance,

mais auparavant nous croyons nécessaire de relater,

en quelques lignes, un des rares cas de myxoe-

dème opératoire suivi d'autopsie* : il appartient à

MM. Bruns et Grundler3, et offre un grand intérêt

par suite de la constatation de lésions identiques à

celles qui ont été rencontrées dans les autopsies des

myxoedémateux idiopathiques .

1 L'atrophie du corps thyroïde, accompagnée de la destruction de ses

cellules, équivaut. fonctionnellement parlant, à son absence; a la même

conséquence l'hypertrophie avec altération cellulaire de toules les par-

ties de la glande.

2 Deux autres cas ont été suivis d'autopsies, mais ces autopsies, mal

faites ou dans des circonstances défavorables, ne présentent aucune

valeur, - M. W. Stokes vient de publier un nouveau cas a\ec autopsie

que nous analyserons plus tard.

3 Grundler. Contribution à l'étude de la carhexie crétinoïde (Zur

Cachexui slruinipriua in J)"¡Crll ! Jf' zur Idinischeii Chirurgie de V. Bruns;

Tubiugen, 1as, t. I, p. 420.)

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 355

Observation XIV. Goitre colloïde accompagné de dyspnée,- Extir-

pation totale en 1886 : gucrison de la plaie en deux mois. -

Diminution de l'intelligence dès le troisième mois de l'opération;

arrêt de développement et symptômes de cachexie pachydermique

de plus en plus accentués.

Il s'agit d'un adulte opéré à l'âge de dix ans, par M. P. Sick (de

Sluttgard), décédé le 13 août 1884, d'une attaque apoplectifornle

à la clinique de Tubingue à l'âge de vingt-huit ans. Il mesurait

I m 27 ; pesait 4 kil. et avait l'habilus crétinoîde. A I"AUTOPSIE,

pratiquée par M. Nauwerk, on constata les faits suivants :

Rigidité cadavérique; sugillalions sanguines étendues 'du

dos; peau assez pâle. Les veines des extrémités et du tronc

sont visibles; face cyanosée ; l'épidémie desquamme partout,

(excepté sur la face), et surtout aux parties latérales du tronc.

Le corps paraît atteint d'anasarque généralisé moyen.

l'ig. 23. - Niahide opéré par M. Sick.

356 CLINIQUE NERVEUSE.

Les extrémités supérieures et inférieures sont déformées; les

parties molles de la face sont épaissies, celle-ci a un aspect cré-

tinoïde caractérisé. Au cou, on trouve une cicatrice ancienne, allant

de l'os hyoïde au sternum. Ongles bleuâtres un peu recourbés en

griffe, organes génitaux, bien développés avec poils fins et foncés

à la base du pénis; quelques poils rares et plus forts, au scrotum;

quelques hémorroïdes au rectum, la peau du thorax et de l'ab-

domen n'est pas modifiée, le tissu adipeux sous-cutané est bien

développé, un peu oedématié, musculature du thorax oedémaliée,

très pâle, presque grise. Tissu graisseux sous-séreux de l'abdomen

fortement développé ; dans l'abdomen, environ 100 gr. de liquide

jaune, très peu trouble. Lntre les muscles, il y a encore beaucoup

de graisse. Les veines du cou sont gorgées de sang.

Les intestins sont météorisés. La séreuse de l'intestin grêle est

un peu injectée. Le mésentère et l'épiploon sont riches en graisse.

Le foie occupe sa position normale. Graisse du médiastin abon-

dante ; poumons libres.

Dans les plèvres, 400 à 150 gr. de liquide clair, séreux; pou-

mons normaux. Le péricarde est très découvert, et contient A 00 gr.

de liquide séreux, clair. - Cce2lz· volumineux, pointe formée par

le ventricule gauche surtout, mesurant de la pointe à la base

13 cent. ; largeur à la hauteur des orifices auriculo-ventriculaires,

A 1 cent. ; coeur droit mou, le gauche plus ferme; panicule adipeux

du coeur faiblement développé. - Dans le coeur gauche, beaucoup

de sang liquide, masses cruoriques rares, foncées. A droite, on

trouve en outre quelques caillots fibrineux mous. Les orifices

auriculo-ventriculaires sont normaux; les valvules intactes à

droite. Myocarde pâle, d'épaisseur normale. Le cône formé par

l'artère pulmonaire présente un épaississement circonscrit de

l'endocarde, pénétrant jusque dans le myocarde d'un millimètre

environ. La mitrale est peu modifiée; quelques lendons sont un

peu épaissis. Le myocarde gauche est d'épaisseur normale, de

couleur brun jaunâtre. Valvules aortiques intactes, mais avec

quelques taches graisseuses et des épaississements scléreux. Artères

coronaires minces. Poumon gauche, rougeur légère de la mu-

queuse bronchique. Dans les bronches, un peu de liquide spu-

meux, légèrement teinté de rouge; le poumon contient de l'air,

est oedémateux, assez riche en sang. Quelques sugillations pleu-

rales. - Poumon droit, mêmes lésions.

Rate : longueur : 8 c. et demi, poids 75 gr. - La pulpe est de

coloration cerise foncée, résistante ; les trabécules sont visibles;

les corpuscules de Malpighi petits. Rein gauche (1 gr.) forte-

ment entouré de graisse, de grandeur normale ; capsule non adhé-

rente : surface gris foncé, violette; parenchyme très épais.

L'écorce et surtout les pyramides sont injectées de sang veineux.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 357

La substance corticale est par-ci par-là trouble et gris jau-

nâtre. Rein droit (1415 gr.), mêmes lésions.

Langue hypertrophiée avec plusieurs impressions dentaires

présentant quelques petites hémorrhagies fraiches, sans cicatrices

profondes. La luette et les piliers sont gonflés, infiltrés, injectés.

Amygdales agrandies, la droite pâle, la gauche plutôt gris vio-

lette paraissant atteinte d'hyperplasie chronique. - OEsophage,

estomac, duodénum, pancréas, rien de bien particulier. Foie

un peu petit (1,200 gr.), normal.

La trachée est couverte inférieurement de mucosités. Muqueuse

un peu injectée, la partie inférieure de la trachée est rétrécie un

peu latéralement et déviée un peu à droite. L'aorte est relati-

vement étroite. Circonférence : 3, 4 cent., au-dessus du dia-

phragme, taches graisseuses et épaisissement scléreux ; il en est

de même des gros troncs descendants; aucune trace de tissu thy-

roïdien. '

Sur le cuir chevelu, nombreuses croûtes; cheveux rares. L'épais-

sissement de la calotte est surtout produit par le tissu adipeux

oedématié. - Dure-mère sans grands changements; à gauche,

adhérences nombreuses avec la voûte crânienne, surtout près de

la suture frontale, sinus longitudinal libre. - Voûte crânienne

d'épaisseur moyenne, sutures visibles, sillon de la méningée

moyenne, profond à gauche; du reste, pas de phénomènes de

résorption appréciables sur la table interne, asymétrie "légère

des diamètres. Vaisseaux de la base sans grands changements à

gauche. La configuration interne du cerveau ne présente rien de

spécial.

Les circonvolutions sont un peu maigres, les sillons sont très

accentués par suite de l'oedème des méninges. Quantité de sang

moyenne dans la dure-mère. L'arachnoïde est brillante, surtout

épaissie et tendineuse le long de la scissure itilerhémisphérique

et cela d'une façon diffuse. On y constate, en outre, beaucoup

d'épaississements miliaires atteignant quelquefois le volume d'une

tête d'épingle, en partie confluents, scléreux ; il y en a aussi bien

sur les sinus qu'au-dessus des circonvolutions. Les ventricules

latéraux sont peu dilatés. La substance cérébrale est légèrement

hyperémiée sans autres modifications. Poids avec la pie-mère,

après ouverture des ventricules : 1,435 gaz Ganglions de la base,

corps quadrijumeaux, normaux.

Testicules peu développés, hyperémiés. Prostate, vésicules

séminales normales. - L'humérus droit enlevé est normal. -

On distingue encore la limite des épiphyses. Il en est de même

pour l'extrémité supérieure du fémur. L'épiphyse du grand tro-

chanter est encore cartilagineuse.

Examen microscopique des organes fait par le Dr Nauverk.

358 CLINIQUM NERVEUSE.

1° Sang normal, autant qu'on eu peut juger sur le cadavre;

globules rouges de taille et couleur normales, pas d'augmenta-

tion des leucocytes. 2° Musculature normale au tronc et aux

extrémités; pas d'hyperplaste conjonctive. 3° Musculature de

la langue également normale : pas d'hypertrophie des fibrilles

musculaires; tissu adipeux interstitiel abondant. - 4° La peau

des diverses parties du corps (tête, tronc, membres, scrotum), est

normale, sauf un fort pannicule adipeux et un peu d'oedème. Pas

d'hyperplasie conjonctive ou de changement dans la distribution

des nerfs. Pas de transformation mucoïde même en présence de

l'acide acétique. 5° Crrurzd sympathique et nerfs périphériques

normaux. - 6° Rate, foie, reins, sans prolifération conjonctive.

On remarque une infiltratiou marquée des cellules hépatiques

surtout dans les parties centrales des lobules, par des granula-

tions pigmenlaires gnsesjaunîtres, souvent avec dépôt graisseux ;

7° Sur le cerveau soit frais, soit durci, on constate de la leplomé-

ningile chronique ordinaire, avec faible participation de la subs-

tance corticale. Le tissu de l'arachnoïde et surtout de la pie-mère

paraît forlement épaissi, mais en intensité variable, à fibres plus

fortes que d'ordinaire; il y a souvent des corpuscules pigmen-

taires et beaucoup de noyaux. Les parties périphériques de l'écorce

sont par place, surtout autour des vaisseaux, très riches en

noyaux. Les espaces périvasculaires lymphatiques sont souvent

élargis, et contiennent parfois des granulations laiteuses. A l'état

frais, les vaisseaux corticaux, enlevés à la pince sont souvent

couverts de granulations graisseuses fines.

M. Grundler croit que l'extirpation de la glande

thyroïde amène des troubles du sytème nerveux cen-

tral surtout en ce qui concerne son rôle dans les

échanges nutritifs.

Les premiers cas de myxoedème opératoire, c'est-à-dire

consécutif à l'extirpation totale de la glande thyroïde,

ont été signalés par M. J. Reverdin en octobre 1882 '.

Ce n'est que six mois plus tard (4 avril 1883), que

M. Kocher communiquait au Congrès de chirurgie de

Berlin le résultat de 102 opérations de goître prati-

1 J. Reverdin Revue médicale de la Suisse Romande, 15 octobre 1882,

p. 53 ! ) et 540. - Communication à la Société médicale de Cenève, 13 sep-

tembre 1882.

IDIOTIE ,AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 359

quées par lui, travail qui ne fut publié que plus lard

dans les « Arch. f. klin. Chirurgie, Bd. XXIX, H. 2 ».

Nous ne saurions donc nous élever avec trop d'éner-

gie contre le déni de justice fait à MM. Reverdin par

la plupart des auteurs d'autant plus que, en Alle-

magne, l'opinion a été égarée par le fait de la commu-

nication de M. Kocher, ce qui explique qu'on ait à

tort attribué à ce chirurgien une découverte qui n'était

pas sienne, ainsi que le démontrent les dates des pu-

blications.

MM. J. et A. Reverdin' ont complété peu après

(avril 1883) leur premier travail en faisant connaître,

les résultats des autres opérations pratiquées par eux,

confirmant d'ailleurs les précédentes. Dans la même

année M. Julliard' en publia brièvement deux nou-

veaux cas.

Il faut noter que la cachexie paraît d'autant plus

à craindre que l'opéré est dans la période de crois-

sance. Le myxoedème de nature traumatique semble

tellement sous la dépendance de l'extirpation totale de

la glande thyroïde que les chirurgiens contemporains

condamnent cette extirpation totale et ne pratiquent

plus que des extirpations partielles'.

. Nous donnons ci-après le tableau des cas de ca-

chexie pachydermique observés à la suite de l'extir-

pation totale de la glande thyroïde :

1 J.-L. et A. Reverdin.- Du myxoedème par extirpation de la thyroïde.

(Revue médicale de la Suisse Romande, 15 avril, 15 mai et 15 juin 1883).

* Julliard. - Trente et une extirpations de goitre. (Revue de chirurgie,

1883, p. 585.)

3 On a signalé, cependant, quelques cas de cachexie à la suite d'extir-

pations partielles; mais, outre leur rareté, on peut se demander si, dans

ce cas, les parties de la glande abandonnée étaient suffisamment saines

pour remplir leur rôle physiologique.

360 CLINIQUE NERVEUSE.

1° Baillarger 1. - Fille de vingt-quatre ans; extirpation pro-

bable de la glande thyroïde vers l'âge de six aus, suivie d'idiotie

crétinoïde. -

2° Reverdin.- Pauline C..., vingt L ans ; goitre kystique. Extirpation

totale le 4 mars 1881. En juin 1881 , on constate déjà une anémie

marquée; face, lèvres pâles, pas d'oedème; dyspnée avec plusieurs

accès. A l'examen laryngoscopique, rétrécissement de la glotte.

La malade ne peut plus parler ; on diagnostique de l'hystérie.

Traitement par les courants constants. La dyspnée et la parole

s'améliorent. Règles très irrégulières et douloureuses. Rien n'a

pu améliorer l'anémie 2.

3° Reverdin. - Henri 0..., vingt-quatre ans; goitre kystique,

extirpation totale le 6 octobre 4880. En mars 1881, symptômes de

cachexie pachydermique commençante, qui se développe en un an.

La force des mains diminue, surtout à droite; la marche s'appe-

santit, face vultueuse. Jambes infiltrées; sensation de froid; culo-

ration jaunâtre de la face; aspect crétinoïde; langue dure, lourde,

gênant la parole. - En 1882, tuberculose, abcès des ganglions

lymphatiques cervicaux. Matité aux sommets.

4° Reverdin. Mme F..., vingt-sept ans; goitre kystique, extir-

pation totale, 9 novembre 1880. - A la suite de l'opération, fai-

blesse générale avec syncopes commençantes, anémie; coloration

de la face, non oedématiée, plus pâle qu'avant l'opération. Fatigue

et crampes dans les jambes oedématiees; absence de mémoire de

plus en plus marquée; inattention; règles peu après l'opération

régulières.

5° Reverdin. - lime S..., trente-trois ans, goitre kystique, extir-

pation totale le 45 novembre 1880. Deux mois après, fatigues,

anémie, perte de forces, mains lourdes, peu agiles, surtout pour

les travaux fins. La voix se perd tout à coup. En février 4881,

anémie prononcée, faiblesse de la mémoire, mains engourdies.

En février 1883, les symptômes s'amendent, sauf pour la mémoire

et la voix.

6o Reverdm. - Arthur B..., quarante ans, goitre pa1'enhyma-

teux ; extirpation totale le 17 décembre 1880. Fin mars 1881,

cachexie pachydermique, faiblesse des jambes. Le malade fait

avec peine 2 kilom. L'anémie s'accentue, le visage s'infiltre, les

mains sont enflées, sans albuminurie; diminution de l'appétit,

de la soif et du goût, maladresse des mains, lourdeur des jambes.

1 Annales médico-psychologiques , mars 1884, p. 124.

2 Cette malade, d'abord améliorée à tel point qu'il était difficile de

constater les symptômes du myxoedème, à ce que nous rapporte

M. J.-M. Reverdin, présente à nouveau (octobre t886) des symptômes

de cachexie pachydermique.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 361

7° IÇocher. - Femme, trente-six ans; tumeur colloïde, extirpa-

tion totale le 25 mars 1881 ; guérison en trois semaines. Le mari

rapporte, le 19 février 1883, que sa femme n'aplusété un instant

bien portante. Le corps est gonflé, les membres sont anesthésiés,

elle a toujours froid; périodes menstruelles très irrégulières.

8° Kocher. - Femme, trente-huit ans; tumeur colloïde, extirpa-

tion totale le 3 juillet 1879; guérison en quinze jours. L'examen

microscopique fait croire peut-être à un carcinome. Le mari dit

Archives, t. XII. 21

Fig. 24. - Elle représente une opérée (cas 9) de 11. Kocher

et sa soeur jumelle.

362 CLINIQUE NERVEUSE.

en mars 1883 : « Ma femme ne peut écrire elle-même par suite

de douleurs nerveuses des pieds et des mains. Le cou est guéri,

mais elle est comme paralysée des extrémités, surtout depuis sa

dernière couche; en 1881, sa santé n'a fmt que décliner. »

9° Kocher. - Marie 13..., onze ans, tumeur folliculaire, extirpa-

tion totale le 8 janvier 1874; guérison en trois semaines. - En

février 1883, cachexie crétinoïde très prononcée.

Neuf ans après l'opération, c'est-à-dire en 1883, après que l'at-

tention de M. Kocher eût été attirée sur la question du myxce-

dème par les communications de MAL Reverdin, cette malade a

été photographiée à côté de sa soeur cadette (voir fig. 21). Avant

l'opération les deux soeurs se ressemblaient tellement, que leur mise

ne pouvait les distinguer l'une de l'autre. La simple inspection de

la photographie permet de se rendre compte dessuites de l'extirpa-

tion totale de la glande thyroïde. Il est regrettable que l'on ait cru,

dans la photographie, masquer les régions les plus importantes

au point de vue du myxoedème, ce qui ne permet que difficile-

ment dese rendre un compte exact de l'état du cou, des pieds, etc.

Toutefois, cette photographie met bien en évidence que si

M. Kocher n'avait reconnu qu'imparfaitement à cette époque la

nature de l'affection dont était atteinte son opérée, il n'en a eu

une notion exacte qu'à la suite de la communication orale

que lui fit M. J. Reverdin, lors du Congrès d'hygiène de Genève,

en septembre 1882. Depuis, M. Kocher a pu constater le myxoe-

dème sur un certain nombre de ses malades anciens ou nou-

veaux. Il semble du reste que M. Kocher n'ait pas bien dès

l'abord saisi le mécanisme de l'étiologie du myxoedème opéra-

toires, puisqu'en janvier 1883, il pratiquait encore des extirpa-

tions totales.

10° Kocher. Jean R..., dix-sept ans, goitre hyperplasique,

extirpation totale le 21 juillet 1877; guérison en six semaines, ré-

cidive naturelle en 1882; diminution des facultés mentales et

physiques.

44° gocher. - Anna D..., vingt-trois ans, goitre colloïde, extir-

pation totale le 4er novembre 1879; guérison en cinq semaines.

- En février 1883, cachexie crétinoïde très prononcée.

12° Kocher. - Jacques M..., quarante-cinq ans; goitre fibreux,

extirpation totale le 26 mars 1880. - Rapport médical du 22 fé-

vrier 1883; bonne santé jusqu'à la fin de 1881. Alors oedème pal-

pébral et des jambes jusqu'aux genoux, 'avec albuminurie passa-

gère. En mars 1883, cachexie crétinoïde très prononcée.

43° Kocher. - Elisa K..., douze ans; goitre colloïde, extirpation

totale le 14 novembre 1881. - En mars 1883, commencement de

la cachexie, attaques éliileptiques nombreuses.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 363

140 Kocher. - Rodolphe R..., dix-huit ans, goitre colloïde kys-

tique, extirpation totale le 19 février 1883. En mars 1883; cachexie

crétinoïde moyenne.

15° Kocher. Elisa W..., vingt-trois ans, goitre colloïde, extir-

pation totale le 26 juillet 1882. - Le 19 juin 1882, respiration et

déglutition libres; douleurs dans les épaules, 18 mars 1883 ; lèvres

et nez un peu gros; ni idiotie, ni cachexie.

46° Kocher. - Adolphe R..., quatorze ans, goitre fibreux, extir-

pation totale le 5 mai 1882. En mars 1883, anémie, gonflement,

cachexie crétinoïde.

17o Kocher. - Rosine B ? vingt-six ans, goitre hyperplasique,

extirpation totale le 31 mai 1882. - En février 4885, symptômes

très marqués de cachexie pachydermique.

18° Kocher. Anna G..., vingt-six ans, goitre hyperplasique,

extirpation totale le '1or juin 1882. - En février 1883, hydro-

anémie.

19° Kocher. Christian W..., seize ans, goitre folliculaire, extir-

pation totale le 15 juin 1882. - En février 1883, hydroanémie.

20° Kocher. - Elisa R..., douze ans, goitre folliculaire, extirpa-

tion totale le 19 juin 1882; en mars 1883, cachexie crétinoïde.

21° Kocher. -Enfant P..., fille de quinze ans, goitre kystique,

extirpation totale le 3 juillet 1882; en février 1883, cachexie pachy-

dermique commençante.

22° Kocher. - Marie IL ? vingt-huit ans ; goitre folliculaire,

thyroïde gauche enlevée autrefois ; excision de la thyroïde droite, le

27 septembre 1882. En mars 1883, cachexie crétinoide commen-

çante.

23° Kocher. - Emma G..., seize ans; goitre folliculaire, extir-

pation totale le 17 novembre 4882. Le 16 mars 4883, cachexie

crétinoïde modérée ?

24° Julliard. Caroline B..., soixante-six ; goitre colloïde, extir-

pation totale cinq à six mois après, forte anémie, pâleur de la

peau, faiblesse très grande et oedème des jambes ; au bout de

quelques mois, amélioration.

25° Julliard. Joseph C..., dix-sept ans ; goitre pt11'enc : hyma,

teux, extirpation totale en 1880. En janvier 1881, faiblesse, fatigue.

Le malade, autrefois gai et vif, devient taciturne et craintif; il

aime la solitude, ne grandit plus; frileux, il n'a même plus la

force de travailler, visage infiltré, pas d'albuminurie ni

1 Nous n'avons pas de détails sur un autre cas de Kocher remontaHt à

l'époque de sa première communication, ainsi que sur quelques autres

cas qu'il aurait observés depuis.

364 CLINIQUE NERVEUSE.

d'oedème marqué, mais épaississement de la peau du visage et

des mains.

26° Baumgartner 1. - Fille de seize ans, extirpation totale

d'un goitre de 4gag gr. en octobre 1881. Un an après, visage

infiltré; mains et pieds épais, dyspnée ; alourdissement corporel

et intellectuel; six mois après, l'état est encore plus marqué, la

dyspnée plus forte nécessite la trachéotomie; rapide améliora-

tion consécutive de l'état général. En nsss, les symptômes de la

cachexie persistent.

27° Baumgartner. - Femme de cinquante-six ans ; extirpation

totale en août l 881. Au bout d'un an, cachexia strumipriva consi-

dérable, puis dyspnée, trachéotomie suivie d'amélioration rapide.

En 1886, elle se plaint encore d'affaiblissement des facultés intel-

lectuelles et physiques. ? 8° Baumgartner. - Fille de vingt-trois ans ; extirpation totale

d'un goitre de 160 gr. en août 1882; quelques mois après, lour-

deur et froid dans les membres; pâleur et idéation ralenties,

visage infiltré, paupières épaisses, mains enflées le soir, pas d'al-

buminurie, paralysie de la glotte et aphonie qui cède à un traite-

ment électrique ; cachexie pachydermique considérable. Au bout

d'un an, le malade respire bien. Elle a succombé depuis à une

hémorrhagie pulmonaire.

29° Baumgartner. Fille de vingt-deux ans ; extirpation totale

d'un goitre de 390 gr. ; hémorrhagie très forte en octobre 1882;

six mois après, dyspnée en montant l'escalier, visage infiltré, ma-

ladresse des mains; elle ne peut plus tenir son aiguille; mains et

pieds enflés ; difficulté de parole et d'idéation. Au laryngoscope,

abduction des arythénoïdes difficille; électricité, ferrugineux;

amélioration de l'état général. Elle peut reprendre son travail de

couturière. En 1886, l'amélioration continue.

30° Koenig 2. Extirpation totale pour cause de dyspnée chez

un garçon; peu après, la dyspnée reparaît ; trachéotomie. Un an

après, le père écrit « qu'on renvoie tous les jours l'enfant de

l'école, car il devient toujours plus stupide ».

31° Bruns 3. - Homme de vingt-quatre ans, opéré depuis six

mois, présentait en 1885, lors de la publication du travail de l'au-

teur, les symptômes initiaux de la cachexie pachydermique.

1 Baumgartner. Zur Cachexia strunxspriva (XII1 Congrès des chi-

rurgiens allemands, Beilage Zur Centralbl. für Chirurgie, 1884, nez 23,

p. 57.)

2 Kônig. - XIlle Congrès des chirurgiens allemands (loc. cit.), p. 58.

3 Loc. cit. - Relaté par Grundler (p. 422).

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 365

32° Bruns. - Fille de vingt-six ans, opérée depuis quatre ans,

présentait en 4885 des symptômes très graves myxoedémateux '.

33° Bruns. C'est le cas dont l'autopsie a été relatée plus

haut (p. 355).

34° Kùster 2. Garçon de douze ans ; extirpation totale; trois

ans après l'opération, on note l'arrêt de la croissance, la pâleur

du teint, un oedème dur des mains, la décoloration des muqueu-

ses ; l'abdomen est ballonné, les testicules petits; absence de poils

au pénil ; cheveux rares, secs ; parole lente, physionomie stupide,

perte de la mémoire, lenteur des mouvements, etc. Trachée

réduite de volume ; en 1886, le malade est toujours cachectique.

35° Gordon 3. - Femme de cinquante-deux ans, opérée il y a

onze ans par Lister ; symptômes my.roedémateuæ très accentués ;

l'intelligence est cependant en partie conservée.

36° Pietrzikowski-Gussenbauer f,. Garçon, âgé de neuf ans ;

goitre parencbymateuv ; extirpation totale le 9 mai 1882, tétanie

légère, guérison en 14 jours. Deux ans et quatre mois et demi i

après l'opération, il présentait les principaux symptômes de la

cachexie pachydermique.

3' ? ° Pictrzikowski-Gussenbauer. Fille, âgée de dix-sept ans,

goitre colloïde kystique; extirpation totale le 17 janvier 1883,

tétanie, guérison en quatre semaines. - En 1884, début de la

cachexie pachydermique.

38° Piclrxikowski-Gussenbauer. - Fille, âgée de dix ans, goitre

vasculaire; extirpation totale, le 29 août. - Trois ans après

l'examen de la malade permettait de constater des symptômes

de cachexie pachydermique.

39° Baumgartner 5. - Fille de vingt-cinq ans; goitre circu-

laire ; extirpation totale; deux mois après, cachexie 6,

1 Un troisième cas de thyroidectomie totale, relaté par Grundler et ap-

partenant à Bruns, n'avait été suivi quatre mois après d'aucun acculent.

2 Hans Schmidt. - Fin Fait von Cachexia slrumipriva. (Berlirzer Idi-

nzsc'e JVochensch1'i{t, 2 août 1S86).

3 Gordon. - Myxoedema following zzpon removal of the thi;roïd gland.

(The Lancent, 1S86, n" 11). ).

' Pietrzikowski. - Beilrâge zur Kropfexstirpation nebst Beilrdgen

zur Cachexia <t'MH ? )r ! t)6[. (Prager 6Vocheuschrift, 1884, n°48 et suivants

et 1885 nos 1 et 2). 1

" Baumgdrtner. Congrès des naturalistes allemands, Berlin, 1886.

6 On a encore signalé quelques autres cas de myxoedème opératoire,

(W. Stokes; t cas avec autopsie), dont quelques-uns sans aucun détail

(cas d'Occhini, de Huggi, etc.).

366 CLINIQUE NERVEUSE.

Si la plupart des chirurgiens admettent que le

myxoedème peut être une conséquence de la thyroï-

dectomie totale, il se trouve encore quelques auteurs

pour contester ces résultats. Ainsi M. Miliulicz' ne

croit pas que l'étiologie opératoire de la cachexie pachy-

dermique soit complètement élucidée; quelques-uns

de ses malades présentaient, en effet, avant la thyroï-

dectomie soit un arrêt de croissance, soit l'aspect cré-

tinoïde. Ces derniers, au nombre de trois, étaient âgés

de dix-sept à vingt ans. L'auteur pense que si on les

avait opérés avant l'apparition de l'état crétinoïde,

celui-ci aurait été attribué à l'opération. L'objection

soulevée par.M. Mikulicz perd beaucoup de sa valeur

du fait qu'il ne donne aucun détail sur l'état des corps

thyroïdes extirpés; on comprend très bien qu'une ? glande thyroïde dont toutes les parties sont affectées

puisse, fonctionnellement parlant, amener les mêmes

modifications organiques que l'extirpation totale.

La cachexie pachydermique aurait encore, dans de

très rares cas, été observée à la suite de thyroïdectomies

partielles, mais ces observations sont souvent suscep-

tibles des mêmes critiques que celles de M. Milculicz.

Les cas parvenus à notre connaissance appartiennent

à MM. Tassi, Occhini et Poncet (de Lyon), celui-ci

aurait observé une cachexie pachydermique fruste à

la suite d'une résection de l'isthme. Ces cas se trou-

vent en partie expliqués par l'observation que vient

de rapporter M. J. Reverdin d'un de ses malades chez

qui l'extirpation du lobe gauche de la thyroïde fut

i Mikulicz. - l3eitrag zur Opération des K1'op(es, ( tViener med. Woch-

ezcsclzri/t, 2, 9, 16, et 2.5 janvier 18.S6 .

.IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 367

suivie de l'atrophie du lobe droit '; toutefois M.Pon-

cet dit ne pas avoir constaté l'atrophie de la glande

chez son opéré.

Sur 24 cas d'extirpation totale, Kocher aurait observé

18 fois la cachexie pachydermique; sur 11 cas,

MM. Reverdin ont noté 5 cas de cachexie; Baum-

gartner a eu 5 myxoedémateux sur 11 1 opérés ;

M. Julliard 2 cas également sur 11 opérés;

Küster 1 cas sur 4 thyroïdectomies totales; - Pietrzi-

kowski-Gussenbauer, 3 cas sur 9 extirpations totales,

etc. Soit en tout 39 cas, dont 13 hommes et 26 femmes

(en retranchant un cas de Kocher sur lequel les détails

nous manquent). - Le tableau suivant donne la

proportion selon l'âge :

368 CLINIQUE NERVEUSE.

malades de MM. Reverdin, quatre de leurs opérés

atteints consécutivement de myxoedème ont été revus

par eux en décembre dernier. Chez tous, l'amélioration

était notable; chez deux (1VI ? F... et 111"° S...), on

constata le développement tardif d'un lobule thyroï-

dien aberrant. Depuis le mois de décembre, une des

opérées (M"° Crott...) a été revue par l'un de nous avec

M. J. Reverdin, qui . nous écrivait peu après « que

l'amélioration est de plus en plus marquée' ». Tous ces

malades ont été opérés dans le courant des années

1880 et 1881 -.

Baumgartner a également constaté l'amélioration de

deux de ses cinq opérés atteints de myxoedème. Il

semble donc résulter de ces faits que le pronostic du

myxoedème opératoire est plus favorable que celui du

myxoedème médical dont la marche parait fatalement

progressive, si l'on en juge par les cas que nous avons

rassemblés.

De toutes les hypothèses émises jusqu'à ce jour sur

l'éliologie de la cachexie pachydermique, l'atrophie ou

l'absence de la glande thyroïde était celle qui rencon-

trait le plus grand nombre d'adversaires. Mais les cas

de myxoedème observés par MM. Reverdin, Kocher,

etc., à la suite de l'extirpation totale du corps thyroïde,

le cas du Pacha, ceux de Curling, de H. Fagge, etc.,

que nous avons rapportés plus haut, viennent donner

une grande valeur à la théorie qui fait dépendre le

1 Voir plus haut note 2, p. 360.

2 Voir, pour plus amples détails : Note sur vingt-deux opérations de

goitre par J.-L, et A. Heverdlll, Gellève, 1885, et le travail que \l..1. Re-

verdir vient de présenter sur ce sujet au Congrès français de chirurgie.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 369

myxoedème d'une lésion grave ou de l'absence de la

glande thyroïde. La révision des cas publiés par les

auteurs permet du reste d'affirmer que dans presque

tous ceux où il est fait mention de l'examen de la

glande thyroïde, celle-ci était lésée, que, dans les

observations non suivies d'autopsie il est souvent noté

qu'elle n'a pu être reconnue à la palpation.

Cooper', puis Schiff semblent les premiers avoir

entrevu autrefois les effets physiologiques de la glande

thyroïde; et récemment les nouvelles recherches des

physiologistes sont venues confirmer ée qu'avait du

reste démontré la clinique; on peut au surplus consi-

dérer la thyroïdectomie comme une expérience phy-

siologique pratiquée sur l'homme. Des expériences

faites sur les animaux, les plus concluantes et les

mieux conduites nous paraissent être celles de

M. Horsley, tant à cause de l'espèce animale à

laquelle il s'est adressé que par la façon dont elles

ont été dirigées. Dès le mois le décembre 1884,

M. Horsley publiait dans le British medical Journal

(p. 910) le résultat de l'extirpation du corps thyroïde

chez le singe. Chez ce primate l'extirpation de la glande

thyroïde, opérée avec les précautions antiseptiques (la

guérison de la plaie fut complète en trois jours) produit

des troubles nerveux généraux : convulsions, paralysie

fonctionnelle, hébétude mentale et enfin idiotie com-

plète, de la leucocytose, un abaissement de la tem-

' Mer.loel's Archio f. d. Physiologie, 1820, p. 185.

°- Schilf. - Unlersrcchuugrn übel' die Zuckrl'bildung in (1er Lrbel' unrl

der Einfliiss des Nerven-systeurs auf die E ? eugllng de* Diabètes. WU ! 'x-

bnrri, 18S5, p. 61.

370 CLINIQUE NERVEUSE.

pérature, etc., tous les symptômes enfin observés dans

le myxoedème. On pouvait constater de plus l'accu-

mulation de la mucine dans le tissu conjonctif.

Les nouvelles recherches de M. Horsley, entreprises

sur le chien, le chat et le singe, paraissent démontrer

que la glande thyroïde est d'autant plus nécessaire au

fonctionnement normal de l'animal, que celui-ci est

plus jeune; c'est ce que l'anatomie pathologique avait

déjà fait reconnaître sans qu'il eût été donné, jusqu'à

ces derniers temps, une explication satisfaisante du

développement plus considérable de la glande thyroïde

dans le jeune âge et de sou atrophie et de sa dégéné-

rescence chez le vieillard, qui, lui aussi, par certains

caractères, est myxoedémateux. Depuis longtemps déjà

notre attention a été appelée sur l'état de la glande

thyroïde chez les idiots, et sans pouvoir encore établir

de relation certaine (ce qui serait prématuré) entre les

faits trouvés à l'autopsie et quelques symptômes obser-

vés du vivant du sujet; nous avons pu constater que

chez la plupart de nos idiots la glande thyroïde est

petite et le plus souvent dégénérée. Les singes opérés

par M. Horsley ne survivent guère plus de six ou sept

semaines à l'opération. M. Horsley est cependant par-

venu à ohtenir chez ses opérés une survie de quatre à

cinq mois et même plus en les maintenant dans un

milieu porté artificiellement à une température élevée :

M. Horsley rapporte les symptômes observés par lui à

trois états successifs : 1° période nerveuse; 2° période

mucoïde; 3° période atrophique.

D'après l'auteur, cette évolution expliquerait pour-

quoi, chez certains idiots crétinoïdes ou dans les cas

très chroniques de myxoedème, la dégénérescence

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 371

mucoïde est peu apparente; c'est, en effet, ce que nous

avons obsetvé chez le Pacha.

Les expériences de M. Horsley montrent encore

que l'ablation de la glande thyroïde a une action évi-

dente sur les centres nerveux et expliquent les phé-

nomènes nerveux observés à la suite de ! a thyroïdec-

tomie totale, par exemple, le tétanos; que, de plus,

c'est avec raison que cette glande avait été classée (on

ne sait trop pourquoi) parmi les organes hématopoié-

tiques '.

Nous regrettons de ne pouvoir nous appesantir plus

longuement sur les recherches physiologiques de

M. Horsley qui trouveraient mieux leur place dans une

étude complète sur le myxoedème. Nous avons cru

cependant devoir les mentionner brièvement parce

qu'elles expliquent suffisamment les symptômes obser-

vés dans l'idiotie crétinoïde ou à la suite de la thyroï-

dectomie ; il reste toutefois à expliquer pourquoi,

chez l'homme, la thyroïdectomie semble produire un

état myxoedémateux susceptible d'amélioration, dont

il ne nous est pas même possible de déterminer la

durée exacte.

Le rôle physiologique de la glande thyroïde a encore

donné, dans ces dernières années, naissance à de

nombreux travaux que nous ne fèrons qu'analyser très

brièvement. M. Schiff2, un des premiers, a démontré

que les rongeurs supportent très bien la thyroïdecto-

1 La veine thyroïdienne inférieure contiendrait un plus grand nombre de

corpuscules rouges.

2 Schiff. - Résumé d'une série d'expériences sur les effets et l'ablation

des corps thyroïdes. (Revue médicale de 1ft Suisse Romande, un 2, 15 février

issu, p. ruz et n" S, 15 août 1884.) ,)

372 CLINIQUE NERVEUSE.

mie totale et simultanée, au contraire des carnivores

(chiens et chats) qui succombent après avoir présenté

des symptômes plus ou moins comparables à ceux qu'on

observe dans les cas de myxoedème ; opérés toutefois

à un intervalle de quinze jours, ces mêmes carnivores

peuvent survivre indéfiniment '.

Il a été opposé aux expériences de M. Schiff un cer-

tain nombre d'objections dont les principales se trou-

vent contenues dans le travail de M. Kaufimarrn 2, fait

sous la direction de M. Klebs. Qu'il nous suffise de

dire que cet auteur si sévère envers les autres, sauf

envers M. Kocher à qui il attribue la découverte du

myxoedème opératoire, a basé ses critiques sur de

prétendues extirpations de corps thyroïdes chez le

chien qui se trouvent n'être que des extirpations des

glandes sous-maxillaires ainsi qu'il ressort de son

travail même et des figures qui y sont annexées.

MM. Albertoni et Tizzoni3, Herzen 4, Fuhr5 confirment

en partie les expériences de M. Schiff. Les auteurs ita-

liens n'auraient observé aucune influence de l'âge et

du sexe des animaux opérés dont la survie aurait atteint

1 M. Niehans (de Berne) aurait observé deux cas de cachexie pachy-

dermique à la suite de l'extirpation du goitre en deux temps éloignés

(état qUI se rapprocherait de ce qui se passe dans le myoedème médical).

- Kaullmann. Die Schildrusenuxstirpation beillt llllnde und zlere Folge,

(A,'ch, ? exp. Pathologie und l'harnzalcologie, septembre 1881, p. 361,

IBI YVIII, III et IV, H.'). ,

3 Albertoni et Tizzoni. - Sugli effetti dell' estii-pazione della trlroide.

(arcs. per le Scienze mediche, t. X, no 1, 1886) et Archives italiennes de

Biologie, VU, fasc >.)

* Ilerzeu. -A A quoi sert la thyroïde (Semaine rn¿d" 11 août 1886).

5 Fuhr, Die Exstirpation dcr Schildruse (Archiu. f. Exp. Pathologie

Il, Pharmalcologie, 5 août 1886, p. 373 à aG0l. Nous avons eu connais-

sance de ce travail trop tardivement pour l'analyser d'une façon complète;

on y trouvera des renseignements bibliographiques intéressants en ce

qui concerne la physiologie de la glande thyroïde.

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 373

plusieurs mois et même un an soit après des ablations

simultanées, soit après des extirpations successives;

les résultats seraient comparables dans les deux cas.

Selon eux, il résulterait de leurs recherches que la

thyroïde aurait pour fonction de permettre à l'hémo-

globine de fixer l'oxygène Les chiens éthyroïdés de

M. Herzen n'ont succombé qu'après une période plus

longue que celle observée dans les premières expé-

riences de M. Schiff (ablation totale et simultanée).

Chez un des chiens opérés par M. Herzen, on nota une

survie de cinquante-deux jours; un autre chien dont

nous ignorons l'état ultérieur, ne présentait encore

aucun phénomène morbide lors de la publication de

ces expériences (quarante-deux jours après l'observa-

tion). M. Herzen admet que les effets de la thyroïdec-

tomie dépendent bien réellement de l'absence de la

thyroïde et qu'ils sont l'expression d'une affection céré-

brale probablement corticale.

Parmi les auteurs qui ont obtenu des résultats con-

traires à ceux de M. Schiff, nous devons encore citer

M. Philipeaux 2. Après avoir rappelé que, quinze ans

auparavant, il avait montré l'innocuité de l'extirpation

de la glande thyroïde chez le rat albinos, cet auteur

prétend avoir éthyroïdisé huit chiens sans qu'il s'en

soit suivi aucun trouble fonctionnel. Ces chiens avaient

été opérés les 1er et 15 septembre 1884 et M. Phili-

peaux donnait le résultat de ses expériences dès le

1 Bruns admet que le corps thyroïde joue un rôle dans la formation du

sang, soit un éliminant des substances nuisibles, soit en produisant des

substances nécessaires à la nutrition du système nerveux.

' Philipeaux. - De l'extirpation des corps thyroïdes des chiens. (Compte

rendu de la Société de Biologie, 8 novembre 188, p, 606.)

374 CLINIQUE NERVEUSE.

8 novembre de la même année. Les résultats obtenus

par M. Schiff seraient dus, selon lui, à des complica-

tions opératoires.

Pour M. Rogowitsch ', dont les expériences confir-

ment celles de M. Schiff en ce qui concerne les résul-

tats opératoires, les animaux succomberaient avec des

symptômes rappelant l'empoisonnement par le phos-

phore, l'arsenic, etc. Il aurait noté à l'autopsie une

encéphalomyélite parenchymatellse subaiguë résultant de

l'action d'un produit toxique (inconnu) de l'organisme

dont la neutralisation s'opérerait à l'état normal, dans

la glande thyroïde. La théorie toxique semble, du

reste, être actuellement adoptée par un grand nombre

de physiologistes. M. Schiff, qui d'abord considérait

avec Liebermeister, Zésas, Wagner, Sanquirico et Ca-

nalis, Colzi, la glande thyroïde comme un organe ré-

gulateur de la circulation cérébrale, s'y est rallié après

avoir montré, dans ses dernières expériences 2, que la

santé des animaux est conservée si on laisse un petit

morceau de la glande thyroïde ', ou, si l'on fait la

thyroïdectomie totale, après avoir greffé dans la cavité

péritonéale un petit morceau d'une glande thyroïde.

M. Allara' soutient que chez le poulet l'extirpation

1 Rogowitsch. Zur Physiologie der Schildruse (Centralbl. f. diemed.

Wissenschaften, 24 juillet 1886.)

2 Zésas. - D. med. Zeitung., nos 55, 56, 1886.

3 M. Cambria (Ueber die Schilddrusen-Reseklion nach Mickvliez) pré-

tend que les chiens supporteraient aussi bien que l'homme la résection

de la thyroïde si on a soin de laisser un petit morceau de la glande (sien-

med. loch" 31 juillet 18t6.) - Les résultats contradictoires obtenus

dans les expériences sur les chiens seraient du reste souvent expliqués

par l'existence d'une glande thyroïde aortique, accessoire fréquemment

observé chez cet animal

' AIlara. Sulla estil'¡J(¡ ? IOI1C della ti1'olde, lLo Sperimentale, mars

1885, p. 281.) .

IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 375

totale de la glande thyroïde n'amène aucun des trou-

bles remarqués chez le chien. Il attribue ce résultat à

la situation de la glande chez le poulet, qui permet de

les éthyroïdiser sans léser aucun rameau du grand

sympathique. On sait, en effet, que MM. Reverdin,

Baumgartner, etc., avaient cru pouvoir faire dépendre

les phénomènes myxoedémateux observés chez leurs

opérés de la section de nombreux ramuscules de ce nerf.

Plusieurs auteurs (Sanquirico, Canalis, Ughetti et Di

mattes ont cherché s'il existait quelque relation fonc-

tionnelle entre la glande thyroïde et la rate; les expé-

riences sont jusqu'ici restées négatives.

Un grand nombre d'hypothèses ont été émises au

sujet de la nature du myxoedème ; chaque observateur

a donné la sienne ; nous ne croyons pas devoir nous y

arrêter ; nous signalerons seulement les théories attri-

buant le myxoedème à l'anémie due à une dénutrition

consécutive au rétrécissement de la trachée, etc. (liga-

ture des artères thyroïdiennes inférieures, Kocher),

à l'anémie consécutive à la paralysie des dilatateurs

de la glotte, à une lésion des rameaux du grand sym-

pathique, à l'altération du corpspituitaire etde la glande

pinéale, à l'action de l'acide phénique pendant l'opé-

ration, à une lésion des troncs nerveux, situés dans le

voisinage de la glande thyroïde, à l'action de la mu-

cine sur les centres nerveux, etc., etc.

Si la physiologie de la glande thyroïde est encore

quelque peu obscure, il n'en reste pas moins établi

que son absence ou les altérations pathologiques, dont

1 Ughetti et Di Mattei. - Sulla spleno-hroidectomia nel cane net

coniylio. (AI'ch, per le sczezzze mediche, vol. IX, n" 11).

376 CLINIQUE NERVEUSE.

elle peut être le siège, en empêchant totalement son

fonctionnement, produisent un état crétinoïde assez

voisin du crétinisme avec ou sans goître.

Le myxoedème a pu être confondu avec un certain

nombre d'autres affections, la néphrite, la lipomatose

généralisée, les lipomes symétriques , la sclérodermie.

L'oedème néphrétique se différencie facilement par sa

nature, sa mobilité, son siège, par les caractères tirés

de l'examen des urines, etc., et enfin par l'absence

de signes importants rencontrés dans le myxoedème.

La lipomatose généralisée est également facile à dis-

tinguer du myxoedème, nous ne nous y arrêterons pas

non plus qu'aux lipomes symétriques qui ne peuvent

prêter à confusion que lorsqu'ils siègent dans les fosses

sus-claviculaires, mais alors l'absence des autres

signes myxoedémateux permet de faire facilement le

diagnostic.

Le. diagnostic entre le myxoedème et la sclérodermie

s'établit sans difficulté; dans la sclérodermie oedéma-

teuse la peau, inégalement dure, offre dans certaines

parties une résistance nullement comparable à celle du

myxoedème, ou est parfois franchement oedémateuse.

Nous reviendrons dans un prochain numéro sur

quelques nouveaux faits qui sont parvenus à notre

connaissance et nous donnerons l'examen histolo-

gique des différents organes du Pacha.

RECUEIL DE FAITS

TENTATIVE DE SUICIDE PAR PENDAISON. - AMNÉSIE

RÉTROACTIVE, MODIFICATION DU DÉLIRE;

Par CH. FÉRÉ et P. BRÉDA.

Nous avons observé pendant les vacances, dans la première

section des aliénés de l'hospice de la Salpêtrière, un épisode

qui nous a paru mériter une courte analyse. Nous ne nous

arrêterons pas sur les détails de l'affection mentale de cette

malade, qui est entrée dans la direction de M. A. Voisin; nous

ne ferons que rapporter succinctement les faits qui se sont

passés sous nos yeux.

OBSERVATION. - Tentative de suicide par pendaison. Accidents

d'oedème de la glotte et de distension du plexus brachial. -

Amnésie rétroactive. Modification momentanée du délire.

Antécédents héréditaires. -Père, bien portant; buveur, de temps

en temps a des névralgies, quelquefois très tenaces.

Mère. Très nerveuse, a eu de nombreuses attaques qui

persistent encore à l'heure actuelle, mais en moins grande quan-

tité depuis la ménopause.

Antécédents personnels. On ne relève chez M... aucune trace

d'affection nerveuse dans l'enfance; mais ses souvenirs ne pa-

raissent pas très précis. Elle a été réglée de bonne heure ( ? ) et

présentait, parait-il, une légère excitation au moment des

époques.

Premier accès.- Il y a dix-huit ans, elle entre dans le service de

M. Trélat, qui porte comme diagnostic : Manie hystérique.

On avait voulu la faire marier de force. Tentative de suicide.

Séjour de seize mois. Depuis, bonne santé, sauf un peu d'excita-

tion aux époques. Actuellement, on ne trouve plus de stigmates

hystériques, sauf peut-être un point ovarien du côté droit.

Deuxième accès. (18 septembre 1885.) Travaillait au Bon

Archives, t. XII. 25

378 RECUEIL DE FAITS.

Marché ; le prix de son travail est diminué; une personne, qui

avait promis de s'interposer, en profite pour se substituer à elle et

tenir surelle et son mari des propos désagréables, dit qu'elle se

vengera, tient des propos incohérents et est agitée. Toutefois elle

n'aurait point eu à ce moment d'idées de suicide.

Troisième accès. - Sortie le 9 octobre 1885, elle rentre à la

Salpêtrière quelques jours après et, si l'on en croit la famille,

l'amélioration qui avait autorisé sa sortie n'avait point duré plus

de vingt-quatre heures après; le 20 octobre, jour de sa rentrée,

même aspect, même physionomie, mêmes propos.

A ce moment apparaissent des idées de suicide, qu'elle essaie

de motiver en disant qu'elle est certaine de ne point guérir de sa

maladie et qu'elle est désespérée de ne pouvoir rester chez elle

pour soigner son enfant.

\" mars 1886. B... essaie de se suicider en avalant des

épingles : elle prétend en avoir avalé plus de 100; la malade

devient de plus en plus sombre; elle porte aussi au bras droit une

petite plaie qu'elle s'est faite avec des éclats de verre.

B... prétend qu'elle veut débarrasser son mari et la société d'un

membre inutile, puisqu'elle est assez dénaturée pour ne point

soigner son enfant et abandonner son ménage ; elle annonce

qu'elle s'étranglera. - Pas d'hallucinations.

11.-B... essaie de se suicider en avalant duverre pilé, qu'elle

vomit presque immédiatement. - Pas d'accidents. *»

16. - B... avale dans les cabinets du chlore qui y avait été

déposé quelques instants auparavant. Vomissements. Pas d'au-

tres accidents.

Depuis lors, la malade devient de plus en plus sombre, disant

qu'elle estune coquine, une misérable, que bien des gens qui ont

passé par la guillotine sont moins coupables qu'elle. - Insomnie

constante. '

Mélancolie s'accentuant chaque jour; de temps à autre diverses

petites tentatives de suicide qui toutes avortent successivement.

Pas d'hallucinations. - B... se trouvait le plus souvent dans le

service avec une autre malade, K..., hantée, elle aussi par des

idées de suicide; cette dernière était pour ce fait la plupart du

temps camisolée; leur entretien roulait presque constamment

sur le suicide et les moyens de le mener à bonne fin.

Le jeudi 26 août 1886, à une heure de l'après-midi, K... vient

trouver la surveillante de service, et lui dit que B... est montée

dans le dortoir des filles de service, et que très probablement elle

n'y était que pour se faire du mal; la surveillante se hâte de se

rendre à l'endroit désigné et y tiouve B... pendue à une barre de

fer de la fenêtre. Cotte fenêtre vitrée était ouverte, mais l'ouver-

TENTATIVE DE SUICIDE PAR PENDAISON. 379'

ture était fermée par un grillage qui laisse libre en dedans l'enca-

drementdela fenêtre. B... après avoir attaché la corde au barreau

supérieur du grillage s'était assise sur l'encadrement de la fenêtre,

le dos tourné en dehors, puis s'était laissé glisser. Dans ce glisse-

ment, elle s'etait portée du côté gauche, de sorte que le bras

gauche s'était tourné en arrière et en bas, et était pris entre le

corps et le mur. La tête s'était aussi portée du même côté. Aussi

le sillon que la corde forme sur le cou arrive-t-il en arrière jusqu'à

la ligne médiane à gauche, tandis qu'à droite il s'avance beaucoup

moins loin. La constriction a surtout porté du côté gauche, vers

lequel la tète était fortement fléchie : c'est ce qui peut expliquer

le tiraillement du plexus cervical du côté droit, dont nous retrou-

verons plus loin les conséquences.

La corde immédiatement coupée, B... est étendue par terre et

ne donne plus signe de vie ; on la flagelle avec des li nges trempés

dans du vinaigre; on lui promène de nombreux sinapismes sur

tout le corps et on finit par la ramener à la vie.

La voix est perdue; le cou est extrêmement gonflé et porteune

raie ecchymotique, beaucoup plus marquée à gauche qu'à droite.

A gauche, cette trace de la corde arrivée dans la région de la

nuque, se prolonge jusqu'à la ligne médiane, qu'elle dépasse

même un peu. A droite, la trace est beaucoup moins profonde, ce

qui est expliqué par la position dans laquelle B... a été trouvée.

A l'examen de la gorge, on constate que la luette est gonflée ainsi

que les piliers du voile du palais; deux incisives et une canine infé-

rieures sont très ébranlées. Il est impossible de porter les recherches

plus loin de ce côté à cause de la difficulté considérable de la res-

piration. B... est placée dans un fauteuil; la respiration est sif-

flante, rauque, on entend un bruit de drapeau dans le larynx ; la

suffocation est telle à de certains moments qu'on se tient prêt à

pratiquer la trachéotomie. La malade est absolument inconsciente;

elle ne s'occupe en aucune façon de ce qui se passe autour d'elle,

ne répondant pas aux questions qui lui sont faites; la sensibilité

parait très diminuée, au point que la malade ne retire point le

bras quand on la pince très fortement. .

Vendredi matin, 27 août. - Le cou est toujours gonflé, les

lèvres sont violacées, les yeux saillants; le tirage n'est point dimi-

nué et il y a toujours lieu de craindre la nécessité delà trachéoto-

mie. Injection de morphine.

Vendredi midi. - A la suite des injections de morphine, les

accès de suffocation ont diminué; la voix est légèrement revenue,

mais rauque, très voilée, éraillée et difficilement compréhensible ,

la malade respire toujours avec peine, mais le tirage est moindre.

Vendredi soir. - B... va beaucoup mieux; le cou est dégonflé,

le tirage a presque complètement disparu ; la malade parle, mai..

380 RECUEIL DE FAITS.

la voix est toujours très voilée. Boissous tièdes, ingérées assez

facilement.

Samedi 28. Le gonflement est à peu près complètement dis-

paru ; la respiration est devenue normale, la voix reste toujours

un peu enrouée; la malade toussote de temps à autre. Pas de

crachats.

B... se plaint de douleurs dans l'épaule droite. L'amélioration

que l'on constate au point de vue des accidents qui ont suivi le

suicide n'est point la seule; l'état mental lui-même est amélioré ;

B..., qui, antérieurement, était sombre, anxieuse, a maintenant

une physionomie ouverte; elle s'étonne de se voir camisolée et

dit qu'elle serait bien mieux à aider les filles du service à mettre

en ordre le dortoir. B... n'a repris vraiment conscience d'elle-

même qu'hier soir vendredi, c'est-à-dire trente et une heures après

l'accident; elle se rappelle avoir été oppressée à ce moment, mais

elle a perdu le souvenir de sa tentative de suicide.

Elle explique son enrouement par le froid qu'elle aurait pris la

veille en marchant les pieds nus dans l'eau.

Dimanche 29. L'amélioration continue.

Lundi 30. La malade est interrogée de nouveau, et l'on essaie

de lui faire rappeler son suicide et les circonstances qui l'ont pré-

céde. « Nous sommes montées, nous dit-elle, dans le dortoir, K...

et moi, pour reporter du linge, et là, nous avons fait la remarque

qu'il serait bien aisé de se servir de la barre des fenêtres pour se

pendre et débarrasser ainsi le monde de nous. » Nous poussons un

peu la malade et nous lui demandons si elle n'a pas essayé de

mettre son projet à exécution. Oh ! non, nous répondit-elle,

j'ai bien trop peur de me faire du mal; j'avais bien une corde,

mais je ne m'en suis pas servie. »

Sur de nouvelles instances auprès d'elle, B... se révolte, se plai-

gnant que la fille nous ait fait sur elle de mauvais rapports;

elle s'en prend à la surveillante, et lui reproche de la mal servir

auprès de nous.

A plusieurs reprises, le même sujet est abordé, mais il est im-

possible de la faire se souvenir de son suicide; sa mémoire se

perd au moment où, de concert avec K..., elles examinaient le

moyen de mener à bien leur suicide. Ce qui pourrait prouver la

sincérité de B..., c'est qu'elle a recherché plusieurs fois la corde

dont elle s'est servie, et qui était placée dans un sac à elle appar-

tenant.

Si l'on demande à B... l'explication de la raie noire que l'on

voit sur son cou et qu'on lui montre dans une glace. « Ceci, dit-

elle, c'est la camisole qu'on m'avait mise depuis deux jours, et

qui doit avoir été trop serrée. » L'état mental est changé;

B... suppliait autrefois qu'on ne la renvoyât pas dans sa famille,

TENTATIVE DE SUICIDE PAR PENDAISON. 381

parce qu'elle en était indigne; aujourd'hui, au contraire, elle

demande sa sortie. « J'étais venue ici, nous dit-elle, avec l'idée de

ne plus en sortir et de ne plus rien faire ; j'étais, en faisant cela,

bien criminelle; mais, maintenant, mon mari me pardonne tout,

et j'espère bien que vous allez me signer ma sortie pour me per-

mettre d'aller vivre au milieu des miens et de soigner mon en-

fant. » D'ailleurs, depuis sa tentative de suicide, elle a retrouvé le

sommeil qu'elle avait perdu depuis longtemps.

Samedi 4 septembre. B... se plaint de douleurs assez vives dans

le bras et l'épaule. L'ecchymose provoquée par la corde apresque

entièrement disparu du côté droit, tandis qu'à gauche, et sur un

espace de 7 à 8 centimètres de longueur, la peau du cou est sca-

rifiée ; la largeur de la plaie est de 4 millimètres environ. Cette

suppuration ne s'est point montrée à droite.

Les idées de suicide ont complètement disparu ; la malade n'est

plus tourmentée que par la question de savoir si l'on voudra la

laisser sortir de la Salpêtrière; elle craint de se voir refuser cette

sortie.

Mardi 7. - L'état général n'a pas changé ; seulement les idées

d'indignité semblent revenir, et la malade ne demande plus di-

rectement sa sortie; elle supplie qu'on la force à sortir, craignant

de ne pouvoir le faire elle-même, et ne pouvant se mettre dans

l'idée que ce jour arrivera jamais.

Les douleurs dans l'épaule droite et le bras sont devenues plus

grandes; cette douleur que la malade localisait dans l'articulation

scapulo-humérale, siège ailleurs. Quand on appuie en dehors du

sterno-mastoidien, au niveau des apophyses transverses, on déter-

mine une douleur assez vive, qui du reste se retrouve sur tout le

trajet du plexus brachial, dans le creux sus-claviculaire, dans

l'aisselle et au bras, sur tout le parcours des principaux nerfs :

médian, cubital et radial. On ne trouve pas de douleur à l'avant-

bras et à la main, mais seulement un léger engourdissement.

La même.douleur se trouve à la nuque tout le long des apophyses

épineuses, depuis l'occipital jusqu'à la proéminente.

Un premier vésicatoire est posé dans le creux sus-claviculaire le

mardi 7 septembre.

Un second vésicatoire est posé à la nuque et amène un grand

soulagement; pourtant les mouvements sont encore assez pénibles,

et il est difficile à la malade de porter la main sur la tête.

La légère amélioration que l'on avait constatée au point de vue

mental n'a point persisté, et n'a guère duré que huit jours ; aujour-

d'hui, B... semble être revenue à son ancien délire, et répète les

mêmes propos qu'avant sa tentative; néanmoins, les idées de sui-

cide paraissent disparues.

A partir du 16 septembre, à la suite d'une visite de sa mère,

382 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

qui lui a beaucoup parlé de sortie, B... a perdu de nouveau le

sommeil.

En résumé, cette tentative de suicide a déterminé des effets

locaux assez importants : 1° d'abord des accidents d'oedème de

la glotte, qui ont laissé le pronostic en suspens pendant près

de vingt-quatre heures; 2° une distension des racines cervi-

cales, laissant après elle une névralgie diffuse du plexus cervical

qui n'a pas encore complètement disparu.

Mais les phénomènes les plus intéressants se sont manifestés

du côté des fonctions psychiques :

1° Ce qui frappe tout d'abord, c'est l'absence de souvenir

pendant la période de trente heures environ qui a suivi l'acci-

dent ; mais on reconnaît bientôt que cette amnésie comprenait

le temps où se sont faits les préparatifs du suicide. Il semble

donc que nous retrouvions dans cette circonstance un des

caractères les plus importants des amnésies traumatiques, qui

souvent sont rétroactives, c'est-à-dire comprennent une cer-

taine période antérieure au choc.

2° Enfin un autre fait qui n'est pas moins remarquable, c'est

la modification du délire, qui a été telle pendant quelques

jours, qu'on aurait pu croire à une guérison complète. C'est

en quelque sorte la contre-partie des faits de dépression psy-

chique avec ou sans délire, que l'on observe quelquefois à la

suite de chocs violents.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE

LI. CHIRURGIE DU cerveau; par Victor HORSLEY, Bs. FR. SI.

A cause du peu de temps accordé à la lecture des communi-

cations, le mémoire suivant n'est nécessairement qu'une simple

description de la méthode que j'ai choisie comme surmontant

avec succès les difficultés et les dangers des opérations sur le

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 383

cerveau. Puisqu'en plusieurs points essentiels ma méthode

diffère de ce qui a été considéré par quelques-uns comme les

règles de la chirurgie, je crois que le sujet sera mieux traité

en décrivant avec détail le traitement d'un cas imaginaire, ac-

compagné des photographies et des spécimens pris sur les

malades que vous voyez devant vous et sur les animaux infé,

rieurs qui ont servi de sujet aux expériences.

Préparation du malade. - La veille de l'opération, la têt,

du malade est rasée et lavée avec du savon et de l'éther ; puis

la place de la lésion est constatée par des mesures et marquée

sur le cuir chevelu. La tète est alors couverte avec de la char-

pie, imbibée d'une solution au 20e d'acide phénique, du mac-

kintosh et de la ouate, et se trouve ainsi phéniquée au moins

douze heures avant l'opération. Enfin, on administre, la veille

au soir le purgatif ordinaire, suivi d'un lavement le matin de

l'opération.

Anesthésie. - La méthode de l'anesthésie est très impor-

tante, elle consiste en l'administration, par injection hypoder-

mique, d'un quart de grain de morphine, après quoi le malade

est chloroformisé. L'administration de la morphine a un double

but. D'abord, comme on le sait, cela permet de faire une lon-

gue opération sans donner une grande quantité de chloroforme.

En effet, j'ai trouvé que la quantité actuellement administrée-

pour une opération de deux heures est très petite. La seconde

raison pour employer la morphine est, peut-être, la plus im-

portante, puisqu'elle est basée sur ce fait, démontré par le

professeur Schafer et par moi, à la suite d'expériences sur des

singes, que la morphine produit une contraction très marquée

des artérioles du système nerveux central, et par suite si le

malade est sous son action, une incision dans le cerveau, ne sera

accompagnée que d'un très petit suintement. Je n'ai pas em-

ployé l'éther dans les opérations sur l'homme, craignant qu'il

ne produise une excitation cérébrale; le chloroforme, au con-

traire, produit une dépression marquée. Dans le cas d'une

complication cardiaque, ces considérations théoriques seraient

abandonnées pour l'emploi d'un anesthésique plus sûr. Dans

le cas de mon second malade, le coeur était déplacé en dehors,

et le lobe inférieur du poumon gauche ne servait que peu à la

respiration par suite de plusieurs attaques de pleurésie; mais

je n'ai pas considéré cet état comme une contre-indication

suffisante de l'emploi du chloroforme. Dans le cas où il y a

384 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

encore lésion cardiaque considérable, on doit faire une pareille

opération sous l'action de la cocaïne. Dans ce cas, on doit faire

attention d'employer une très forte solution lorsque la dure-

mère est exposée, puisque cette membrane est très sensible

(ses nerfs venant de la cinquième branche des nerfs crâniens),

fait qui semble inconnu aux cliniciens, quoi qu'il ait évi-

demment son importance comme cause de la douleur intra-

crânienne.

Quoique les solutions de cocaïne puissent être, dit-on, par-

faitement aseptiques, une plus ample confirmation de cette

assertion doit être faite avant qu'on l'emploie, comme je viens

de l'indiquer, car on saurait trop répéter que l'aseptie est le

point le plus important sur lequel repose la chirurgie du cer-

veau.

Traitement de la plaie. Il est notoire que, pendant ces

trente et quarante dernières années, la trépanation a été re-

gardée comme excessivement mauvaise à cause de la mortalité

élevée qui suivait son application. Cette mortalité tenait évi-

demment à la fréquence de la méningite septique qui suivait

l'ouverture de la dure-mère, le danger de ce procédé fut com-

plètement réalisé par Pott, et son école qui employait le trépan

très volontiers. Par suite, il s'est formé graduellement une

opposition contre l'intervention chirurgicale sur le cerveau.

Sans les précautions antiseptiques, la prudence est louable;

mais, grâce à l'enseignement de sir Joseph Lister, aucun de

ceux qui sont imbus des merveilleux principes de la chirurgie

scientifique découverts par son génie, n'hésitera à suivre les

préceptes de la raison et du sens commun et procédera à l'opé-

ration.

Je n'entrerai pas ici dans l'examen critique des appréciations

vagues que l'on voit dans nos journaux sur le traitement des

plaies; car je ne veux pas perdre le temps de la réunion à dis-

cuter les premiers principes de chirurgie. Je vais maintenant,

donner brièvement les résultats d'une assez grande expérience

de la question, acquise pour avoir pratiqué un assez grand

nombre d'opérations sur les singes, avec un seul insuccès, et

appliqué la même méthode à l'homme, où elle fut toujours

suivie de succès. Comme j'aurai à citer souvent les expériences

faites sur les animaux inférieurs, je désire faire ici une brève

appréciation. De l'opinion de ceux qui croient que le processus

de réparation des tissus chez les animaux inférieurs diffère

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 385

beauconp du même processus chez l'homme, et que, par suite,

une déduction juste ne peut pas être tirée de l'un à l'autre.

Quoiqu'admettant que les tissus des animaux inférieurs ne

sont pas si souvent le siège de la dégénérescence graisseuse et

des autres formes de dégénérescences, c'est la plus grande er-

reur possible de croire que les plaies guérissent par un proces-

sus différent de celui que nous avons vu chez l'homme.

En effet, pour obtenir la réunion par première intention

chez les animaux, le cheval par exemple, il est nécessaire de

prendre les précautions les plus grandes. Les vues stéréotypées

sur ce sujet ont sans doute entravé les progrès de la chirurgie

cérébrale jusqu'à ce que le Dr Ferrier et le professeur Yeo

aient démontré entièrement, au meeting de l'Association à

Cambridge, que les vues populaires sur les opérations sur le

cerveau étaient fausses. L'expérience que j'ai acquise pendant

les deux dernières années, comme Brown, professeur de patho-

logie à l'université de Londres, garantira mon opinion que

l'idée généralement reçue sur ce sujet est sans fondement.

Pour revenir à notre sujet, à cause de ce fait que presque

toutes les méthodes ont des inconvénients qui engagent la res-

ponsabilité du chirurgien, je crois que le mieux est d'employer

la méthode listérienne la plus stricte comprenant la vapeur

phéniquée, les lotions au vingtième, et, pour les premiers

jours, en tous cas, les pansements à la gaze phéniquée. Quoi-

qu'il y ait quelquefois des idiosyncrasies contre l'acide phéni-

que, qui amènent de temps en temps des inconvénients, il est

plus sûr de l'employer, jusqu'à ce qu'on en découvre un meil-

leur, car c'est le plus puissant et le plus sûr des désinfectants.

Je n'ai pas besoin de dire que l'usage de la ouate sublimée, la

peau étant protégée par la gaze phéniquée, peut rendre de

grands services; mais une bonne gaze phéniquée est assez

élastique pour obtenir des meilleurs résultats.

Ligne de l'incision. - On a l'habitude d'enlever les parties

molles du crâne par une incision cruciale. Je ferai remarquer

que pratiquement cette méthode est désavantageuse, car pour

maintenir relevés les quatre lambeaux distincts, il faut quatre

mains qui sont toutes très gênantes. Si, au contraire, on enlève

un lambeau circulaire, on peut simplement le rejeter en ar-

rière sans autre aide. Un ou deux détails ne seront pas dépla-

cés ici : 1° l'incision doit être faite verticalement sur l'os et

toutes les parties superficielles au périoste relevées avec le

lambeau; 2° l'incision doit être peu profonde, pour éviter de

38fi C) REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

couper les vaisseaux collatéraux; 3° elle doit être dessinée de

façon à ne point diviser les gros troncs artériels qui fournissent

le sang à cette portion du cuir chevelu. Ceci peut être facile-

ment fait sans toucher au drainage des vingt-quatre premières

heures, même si le lambeau tombe, puisque, le malade étant

sur le dos, l'écoulement peut se faire librement par le bord

postérieur. Le périoste doit être enlevé par une incision cru-

ciale, dans un espace correspondant à la première couronne de

trépan.

Trépanation de l'os. - Nos moyens actuels d'enlever l'os

sont susceptibles de grands progrès, sans doute, mais le moyen

le plus sûr et le plus rapide est d'appliquer deux couronnes de

trépan aux extrémités opposées de la surface à enlever, et alors

de couper à moitié les côtés d'une telle surface avec une scie

de Hey, et de continuer la division avec une puissante pince.

En supposant que la dure-mère a été séparée, par les ouver-

tures du trépan, aussi loin que possible de la surface inférieure

de l'os à enlever, je ferai remarquer que l'ouverture du cràne,

comme c'est habituellement le cas lorsqu'on fait une explora-

tion, a commencé par l'enlèvement d'un large disque par le

trépan. On trouvera, je pense, qu'un instrument dé cinq cen-

timètres de diamètre est le plus commode dans ce cas. Lors-

qu'on peut conserver la dure-mère intacte, les portions de

l'os enlevé doivent être conservées dans des éponges asepti-

ques chaudes et être replacées à la fin de l'opération entre la

peau et la dure-mère, après avoir été divisée en petits frag-

ments d'après la manière du . D' Macewen.

Traitement de la dure-mère. On doit inciser la dure-mère

sur les 4.5°e de la circonférence de la surface exposée à 3 milli-

mètres de distance du bord de l'os, pour l'empêcher ainsi de se

piquer sur ce bord. La meilleure manière est d'ouvrir la dure-

mère d'abord avec une incision au scalpel et ensuite avec des

ciseaux à pointes mousses, en prenant bien soin de ne point

blesser les méninges au-dessous. On met en sûreté les princi-

pales branches de la méningée moyenne, par une ligature

passée au travers de la dure-mère, juste sur le bord de l'incision

et nouée avant la division du vaisseau.

Traitement du cerveau. - Après la division de la dure-mère,

le premier point pratique est de remarquer si le cerveau fait

saillie ou non par l'ouverture du trépan. Quoique mon expé-

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 387

rience sur ce point ne soit fondée chez les hommes que sur cinq

cas, dont trois étaient des cas de tumeur du cerveau, je suis

porté à croire que le fait de la saillie très proéminente du cer-

veau dans la plaie indique une tension pathologique intra-

crânienne, - pièce d'évidence qui est, si elle est vraie, de la

plus haute importance, puisque, toutes choses égales d'ailleurs,

elle indiquera l'existence d'une tumeur. Je n'ai jamais observé

une telle saillie immédiate sur les animaux sains, et récipro-

quement elle n'a jamais fait défaut sur mes trois cas de tumeur.

(Les deux cas dont je ne tiens pas compte ici, sont : 1° le cas

des D" Bennett et Godle, publié dans les Medico-chi1'w'g¡'cal

Transactions; 2° un cas de tumeur cérébrale que je viens

d'opérer).

Si rien d'anormal ne se présente dans les membraneslesecond

point à voir, dans un examen systématique du cerveau, est sa

couleur. L'expérience seule donnera une familiarité suffisante

de l'aspect du cerveau vivant et, par suite, permettra à tout le

monde d'avoir un opinion certaine sur ce sujet. Comme je ne

suis pas de ceux qui considèrent qu'il est légitime de tenter

une expérience sur l'homme avant de l'avoir trouvée sans

danger sur les animaux inférieurs, je regrette que la législation

actuelle rende presqu'impossible aux chirurgiens d'acquérir

cette expérience fondamentale importante. J'appuie fortement

sur ce point, puisque l'existence d'une légère^teinte jaunâtre,

ou peut-être d'une teinte livide indiquerait, l'existence d'une

tumeur sous l'écorce, dans la couronne rayonnante.

On doit ensuite examiner l'état des vaisseaux et des lym-

phatiques périvasculaires, et surtout faire attention aux taches

blanc-jaunâtres sur leurs parois, qui indiquent une vieille

lésion. Je doit dire ici qu'il est nécessaire d'avoir une exacte

connaissance des artères et des veines du cerveau, parce qu'il

est très utile de voir quelles sont les parties du cerveau

privés de leur sang. On doit ensuite observer les altérations

dans l'épaisseur du cerveau, mais il faut se rappeler que les

tumeurs cérébrales situées sous l'écorce sont à peine visibles

sans l'incision exploratrice.

L'examen du cerveau exposé étant complet, on doit ensuite

considérer le mode d'enlèvement d'une partie du cerveau et

de la tumeur. Peut-être la peur d'opérer sur le cerveau a été

la crainte de l'hémorrhagie, ceci est aussi déraisonnable qu'il

est indispensable de prendre des précautions contre les altéra-

388 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

tions septiques dans la blessure. Cependant cette considération

nous arrêtera un peu, car on a coutume d'éviter ce danger

imposé par l'usage du cautère actuel, méthode barbare qu'ac-

compagnent naturellement des troubles inflammatoires secon-

daires, comme le prouvent les recherches expérimentales.

Un moment de réflexion nous montrera que, dans le cerveau

comme dans les reins, les vaisseaux (et ce sont les artérioles

à qui nous avons le plus affaire) sont dirigés perpendiculaire-

ment à la surface. Celui qui a l'habitude d'opérer sur les reins

sait qu'une libre incision dans cet organe est suivie d'une

hémorrhagie profuse et quelquefois alarmante , qui cesse

d'une façon permanente si la blessure est tamponnée quelques

minutes avec un morceau d'éponge.

Ayant ce fait en vue, il me semble que nous devons traiter

le cerveau exactement de la même manière, et ainsi, en étant

aussi conservateur que possible, on obtiendra en plus une sur-

face d'incision nette, favorable à une rapide réunion. On

notera, qu'en parlant de la chloroformisation du malade, j'ai

montré qu'on pouvait éviter beaucoup de sang par l'emploi

de la morphine. Peut-être qu'en considérant le caractère ter-

minal des artères du cerveau, il est à peine nécessaire de dire

qu'on devra laisser intact lorsque c'est possible, tout gros vais-

seau ; mais on peut me permettre de faire remarquer qu'à

cause de leur trajet dans la pie-mère, on peut les soulever de

la surface du cerveau et surtout de leur sillon, pour permettre

d'enlever la substance cérébrale sous-jacente, pendant que en

même temps la paroi vasculaire est si peu endommagée que

toute thrombose secondaire sera d'une nature provisoire.

De plus, en incisant le cerveau, les incisions dans l'écorce

doivent avoir une direction exactement perpendiculaire à la

surface et être dirigées sur la couronne rayonnante pouréviter

d'endommager ainsi les fibres venant de l'écorce et circonscrire

le siège de l'opération. Ceci se fait naturellement en se rap-

pelant les trajets des fibres de l'écorce à la capsule interne.

Il y a beaucoup d'autres points en rapport avec la physiologie

et la pathologie du cerveau qui régleront l'opération ; ainsi,

par exemple, de laisser, si c'est possible, les parties de chaque

centre de façon que la représentation des mouvements des

articulations ne soit pas entièrement détruite, car la destruc-

tion totale implique naturellement une paralysie permanente

des mouvements du côté opposé.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 389

Une portion normale ou anormale détachée du cerveau ne

laisse pas, comme on pourrait le supposer, une brèche perma-

nente à parois verticales, car, même dans un temps très court,

le fond de la fosse, c'est-à-dire la couronne radiée, fait saillie

presqu'au niveau de l'écorce environnante. De plus, les bords

de l'incision sont légèrement élevés et si on enlève moins de

cerveau que d'os, ils pénètrent dans l'ouverture du crâne; il y

a normalement une tendance à la hernie du cerveau comme

cela est bien montré sur les photographies du cerveau d'un

singe opéré avec succès dans ces conditions.

Je n'ai pas du tout l'intention de discuter la cause de la

hernie du cerveau, comme on la comprend d'habitude, puisque

cet état n'arrive seulement que lorsque le lambeau ne s'est

pas réuni par première intention, et le facteur nécessaire étant

la décomposition de la plaie et la conservation de cette der-

nière dans une cavité suppurante. L'avantage d'un grand

lambeau que l'on peut ensuite rabaisser comme le couvercle

d'une boite, paraît maintenant évident, puisque d'un seul

morceau, il offre une entière résistance à la pression du cerveau;

ce que ne peut faire la réunion des quatre lambeaux, de l'inci-

sion cruciale, qui favorise au contraire précisément la chose

que l'on veut éviter. Sa principale résistance à la hernie de la

substance cérébrale normale est faite autrement. (Voir Drai-

nage, Pansements, plus bas.)

Fermeture de la plaie. -Après avoir arrêté tout suintement

par des pressions avec des éponges fines, le lambeau doit être

rabattu et attaché au moyen de sutures de soie à la distance

d'un centimètre, et, entre elles, avec des crins de chevaux.

Avec la fermeture de la plaie, nous sommes amenés à

considérer l'importante question du drainage. Je crois que

maintenant je serai accusé de folie si je pose ce principe que,

en général, les cavités formées par l'ablation de portion du

cerveau ne doivent pas être drainées plus de z4 heures ; cepen-

dant j'ai l'intention de faire une telle proposition. Voyons les

conditions du problème. Nous désirons obtenir la réunion par

première intention, c'est-à-dire une réunion solide en 4 ou

5 jours. Nous désirons aussi établir une pression sur le cerveau

qui tend, comme nous l'avons vu, à sortir : et enfin nous dési-

rons arranger les choses de telle façon qu'après la guérison

de la plaie, le morceau de peau puisse être séparé du cerveau

par un coussin de tissu connectif normal doux (c'est-à-dire

390 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

non inflammatoire). Toutes ces conditions sont obtenues en

permettant un certain degré de tension de l'exsudation de la

blessure dans la cavité. Durant les premières 2t heures, il y a

un suintement continuel de sang et de fluide séreux des sur-

faces incisées. Ceci doit être enlevé, et je place un tube à draia

nage au point le plus déclive de l'incision (le malade étant

couché dans son lit). On doit enlever ce tube le jour suivant

et la plaie est pansée avec soin en maintenant une douce et

constante pression au milieu du lambeau. Si l'exsudation qui

se rassemble ensuite dans la cavité s'accumule à un point

appréciable, le troisième jour le malade se plaindra d'un peu

de douleur et de battements, dans la blessure qui mise à décou-

vert, est proéminente dans le centre, la périphérie étant bien

unie. Voici maintenant un point difficile du traitement : c'est

de savoir si on doit laisser la pression continuer ou s'arrêter.

En s'arrêtant à cette dernière mesure, on perdra les avantages

de la pression; aussi ce point réclame une attention spéciale.

Le point pratique sur lequel on s'appuie est très simple : c'est

de voir si la réunion par première intention menace d'être

empêchée par la pression ou non. Dans le premier cas, la

pression peut être facilement diminuée en ouvrant doucement

avec une sonde la trace du tube à drainage et en laissant ainsi

s'écouler un peu de l'exsudation. La valeur de la tension pour

réduire la tendance à la hernie n'est pas douteuse; mais on

désire attirer l'attention sur ce fait que la pression élevée,

jusqu'à l'absorption complète, a deux buts. D'abord, elle force

l'absorption par les lymphatiques des méninges, comme pour

les vaisseaux du péritoine après l'ovariotomie, en permettant

une union rapide de toute la plaie cutanée, et en second lieu,

elle agit comme un échafaudage pour la construction du tissu

connectif normal. Ce dernier point est très net chez les ani-

maux inférieurs, chez lesquels on trouve, en rouvrant la bles-

sure au bout de quelques jours, la cavité toujours remplie d'un

tissu connectif rosé, délicat, spongieux, dont les mailles con-

tiennent l'exsudation mentionnée ci-dessus. C'est le tissu

connectif qui formera une barrière élastique entre la peau et

le cerveau.

Règle générale, il n'est jamais nécessaire de dégager la

tension plus d'une fois. Au bout d'une semaine ou de cinq

jours, la plaie peut être légèrement couverte avec de l'acide

borique finement pulvérisé, de la ouate et du collodion; et

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 391 f

les points de suture peuvent être enlevés à n'importe quel

moment après la première semaine. On trouvera toujours que

le cuir chevelu tend à se déprimer à l'endroit de l'opération;

mais, en suivant les précautions décrites; la dépression sera

légère. On doit considérer comme un point d'une importance

pratique de savoir s'il n'y a aucun inconvénient professionnel

pour le malade d'avoir un trou dans le crâne. L'expérience a

montré que cela avait peu d'importance.

Il ne serait pas inutile d'observer ici que, dans le cas d'une

seconde opération, on trouverait le tissu cicatriciel plus vascu-

laire que les tissus normaux et que la dure-mère est légèrement

adhérente à la surface du cerveau près des bords de l'incision.

Enfin les vieilles cicatrices dans la substance de l'écorce céré-

brale, à l'exception de celles qui ont guéri par suppuration et

qui remplissent les cavités produites par la perte de substance,

déplacent souvent les gros vaisseaux et donnent passage à de

grosses veines. -

La précédente communication ne prétend être qu'une brève

esquisse des points principaux que j'ai trouvé pratique d'obser-

ver dans la chirurgie du cerveau, et je suis heureux d'avoir

l'occasion d'exprimer ma reconnaissance à l'Association, qui,

par ses grandes allocations scientifiques, a rendu possible l'exé-

cution des expériences sur lesquelles est basée cette méthode.

Trois cas servent d'exemple à cette communication. Les

trois cas que j'ai traités, suivant la méthode ci-dessus décrite,

ont un intérêt général et fournissent quelques idées qui ont

leur utilité pour les cas à venir. Peut-être je ferais mieux de

faire les réflexions comme elles se présentent naturellement

dans l'histoire clinique, cependant je récapitulerai à la fin les

points qui méritent une attention spéciale. Je désire cepen-

dant exprimer mes remerciments au Dr Wilson, interne de

l'hôpital national pour les paralysés et les épileptiques, pour

les soins assidus donnés aux cas suivants :

. Cas I. - Jacques B..., âgé de vingt-deux ans, fut admis à

l'hôpital dans le service du Dr H. Jackson et du Dr Ferrier. Anté-

cédents : à dix-sept ans, le malade fut renversé par un fiacre à

Edimbourg. Il fut aussitôt admis à la Royal Infirmary, dans le ser-

vice du professeur Annandale, qui trouvé une fracture en éclats,

avec enfoncement, avec perte de substance cérébrale, à l'endroit

indiqué plus bas. Les fragments osseux furent enlevés, et la

plaie finalement guérit, quoiqu'elle ait librement suppuré et

392 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

malgré la hernie du cerveau. Le malade a été hémiplégique, mais

petit à petit (sept semaines) la paralysie disparut. Vers quinze ans,

le malade a commencé à avoir des attaques, qui étaient très inter-

mittentes. Il fut admis à l'hôpital en 1885, ayant à cette époque

un nombre considérable d'attaques et se trouvant pendant quelques

jours dans le status epilepticus. Après sa sortie de l'hôpital, il

resta sept semaines sans attaque; à la fin de cette période, elle

revinrent, et pendant trois jours avant sa rentrée, il se trouvait de

nouveau dans le status epilepticus.

Etat actuel. - Sur le côté gauche du sommet delà tête (la place

exacte déterminée par mensuration est le centre du tiers supé-

rieur de la frontale ascendante, c'est-à-dire derrière la termi-

naison postérieure du sillon frontal supérieur) se trouvait une

cicatrice carrée, au centre de laquelle on pouvait percevoir l'ab-

sence de l'os, qui formait une ouvertue ovale dans le crâne, dont

le grand diamètre avait à peu près 25 milli.nètres et était paral-

lèle à la suture sagittale. La pression sur la cicatrice était toujours

douloureuse : la douleur augmentait lorsque le malade était dans

le paroxysme de ses attaques. Attaques : ces attaques qui arri-

vaient par séries (à cette époque le malade en avait eu trois mille

dans une quinzaine de jours) avaient toujours le même caractère;

elles commençaient habituellement dans le membre inférieur

droit; d'autres fois dans les deux membres droits simultanément.

Voici un exemple de la première catégorie :

« Le membre inférieur droit était étendu toniquement, et puis

il devenait le siège d'un spasme clonique. Le membre supérieur

droit était alors lentement étendu à angle droit, fixé au corps,

le poignet et les doigts fléchis; les doigts s'étendaient ensuite; et

tout le membre était pris de spasmes cloniques de flexion et d'ex-

tension, le coude se fléchissant graduellement. Un moment, les

spasmes dans le membre inférieur cessaient; mais ceux du

membre supérieur continuaient avec vigueur; le spasme affectait

graduellement l'angle droit de la bouche, s'étendait sur le côté

droit de la face et faisait tourner la tête et les yeux vers la droite. »

En somme, les différentes parties étaient prises dans l'ordre

suivant : le membre inférieur, le membre supérieur, la face et le

cou; le caractère des mouvements était d'abord l'extension, en-

suite une certaine confusion, et enfin la flexion : ce qui montre

clairement que le point de départ était situé vers la terminaison

postérieure du sillon frontal supérieur, point qui coïncide, comme

nous l'avons vu plus haut, avec celui qu'on trouve par mensura-

tion. Avant de décrire le traitement chirurgical, il faut noter que

le malade était nettement hémiplégique, même dix jours après

la dernière attaque, mais il pouvait accomplir tous les mouvements

dans les membres droits, quoiqu'avec moitié moins de force que

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 393

du côté gauche ; il n'y avait aucune altération de la sensibilité

dans le côté droit, et les réflexes superficiels et profonds étaient

exagérés dans les deux membres droits.

Opération (25 mai 1886). - Suivant la méthode décrite plus

haut, l'os autour de l'ancienne ouverture fut librement enlevé;

la dure-mère, l'arachnoïde et la peau formaient une mass homo-

gène de tissu fibreux; la dure-mère fut relevée avec le lambeau.

La cicatrice du cerveau était très vasculaire, de couleur rouge,

d'à peu près 3 centimètres de long et 2 de large. La membrane

qui ouvrait la partie avoisinante du cerveau, était très opaque, et

le cerveau était d'une couleur un peu plus jaunâtre que normale-

ment. La cicatrice à peu près à un demi centimètre de la subs-

tance cérébrale avoisinante, fut excisée sur une profondeur de

deux centimètres. On trouva alors que le tissu cicatriciel pénétrait

plus profondément de quelques millimètres dans les fibres de la

circonvolution marginale dans la couronne rayonnante. Cette

portion fut également enlevée et la plaie fermée. En enlevant

la masse cérébrale on a dû lier trois grosses veines venant du

centre du membre supérieur, parce qu'elles traversaient directe-

ment la cicatrice. La plaie a complètement guéri en une semaine.

La pression du sérum fut deux fois relâchée (une fois probable-

ment sans nécessité). Après l'opération, le malade fut d'abord

complètement paralysé des doigts du membre supérieur droit;

de plus, il y avait une grande flexion du poignet, et l'avant-bras

était en supination. Avec cette paralysie motrice, il y avait une

perte de la sensibilité tactile du dos, de deux phalanges des

doigts. Il ne pouvait localiser le toucher plus bas que le poignet;

enfin il ne pouvait dire la position d'aucune jointure de ses

doigts. Nous avons apparemment ici un exemple net de la perte

de la sensibilité tactile et du sens musculaire, accompagnée de

paralysie motrice, due à une lésion de l'écorce. On ne saurait

trop comprendre que quelques fibres allant du gyrus fornicatus

à la couronne radiée peuvent avoir été atteintes. Cette paralysie

sensitive et motrice avait disparu graduellement à la fin des deux

mois suivants. Jusqu'à présent, le malade n'a pas eu d'attaques.

Cas IL - Thomas W..., vingt-deux ans, fut admis à l'hôpital

National dans le service du Dr Haghlings Jackson. Antécédents

héréditaires; rien d'important à noter, à l'exception d'une tante

paternelle morte phthisique.

Antécédents personnels. Il a eu plusieurs attaques de pleu-

résies après quinze ans.

Etat actuel. - Il commença, en janvier 884, à avoir des

«crampes» dans le pouce et l'index gauche, qui consistaient en

une opposition clonique de ces doigts, et qui se répétaient deux

Archives, t. XII. 26

HJ4 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

fois par jour pendant trois mois. La première attaque grave eut

lieu en mars 1884. Le spasme s'étendait au bras et le malade

tombait. Il eut la seconde attaque en janvier 1885. Après survint

une série de rémissions; en août18S5, une autre grave attaque

commença une nouvelle série d'attaques qui arrivaient une ou

trois fois par semaine jusqu'à son entrée le 4 décembre 1885. La

nature de ces attaques était toujours la même. Elles commen-

çaient par une opposition spasmodique clonique du pouce et de

l'index gauche, ensuite le poignet, le coude et l'épaule se fléchis-

saient cloniquement, alors la face se contractait et le malade

perdait connaissance. La main et les yeux étaient tournés à

gauche et le membre inférieur gauche était élevé. Le membre

inférieur droit était ensuite pris, et enfin le membre supérieur

droit. La paralysie du membre supérieur gauche succédait sou-

vent à l'attaque. A de fréquents intervalles tous les jours, le

pouce du malade commençait à se contracturer, mais l'attaque

pouvait souvent être arrêtée en étendant le pouce ou en appli-

quant une ligature. En février et en mars 1886, les contractures

commençaient souvent par la face, mais en avril le pouce rede-

vint le siège le plus fréquent du commencement de l'attaque.

Etal actuel (très abrégé). - Mouvement. La force de la main

gauche était égale à 45; celle de la main droite à 85. Il pouvait

exécuter tous les mouvements avec.le membre supérieur gauche;

ceux de la main étaient un peu affaiblis. Le pouce gauche était

souvent dans un état de rigidité, alternant avec un spasme clo-

nique (on pouvait amener cet état en manipulant le pouce).

Sensibilité. - Pas d'altérations, excepté la perte du sens mus-

culaire dans le pouce gauche. Les réflexes profonds étaient exa-

gérés dans le membre supérieur gauche. Le malade avait souvent

des maux de tête intenses, commençant à l'occiput et s'étendant

surtout dans la région pariétale droite. Les disques optiques

examinés par M. Marcus Gunn étaient normaux quoique très

roses (hyperémie physiologique).

Diagnostic. Le Dr Beevor et moi nous avons montré que les

mouvements d'opposition du pouce et des doigts peuvent être

produits par une légère excitation des circonvolutions frontale et

pariétale ascendantes à la reunion du tiers inférieur et du tiers

moyen. Le Dr Hughlings Jackson a été témoin d'une de nos

expériences démontrant ce fait et nous a dit qu'il croyait que ce

malade souffrait d'une lésion irritative de nature inconnue, située

dans la région indiquée ci-dessus. Une opération exploratrice fut

décidée.

Opération (22 juin 1886). Le siège de la lésion a été déter-

miné par mensuration, une large couronne de trépan fut appli-

quée, et en enlevant la dure-mère on vit une tumeur. On enleva

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 395

un peu plus d'os en avant et en dessous, pour complètement expo-

ser la masse à laquelle la dure-mère était adhérente. Le bord de

la tumeur s'élevait d'à peu près trois millimètres de la surface

du cerveau, et la tumeur était beaucoup plus dure que la subs-

tance du cerveau. Elle paraissait large seulement de douze milli-

mètres ; mais, comme la substance cérébrale qui l'entourait pa-

raissait sombre et livide sur plus de douze millimètres de largeur,

j'ai enlevé librement tcutesles parties malades. (Comme le montre

la photographie et le spécimen, cette manière de faire était très

justifiée, puisque la tumeur s'étendait largement sous l'écorce).

Avant de fermer la plaie, le centre de la région du pouce fut en-

levé par une libre incision. Le Dr Jackson et moi nous avions

décidé d'exécuter ce détail dans le cas possible où il n'y aurait

pas de grosse altération pathologique évidente, pour empêcher,

autant que possible, le retour de l'épilepsie. De nombreux

vaisseaux furent ligaturés, surtout trois ou quatre sur le bord su-

périeur de la tumeur venant de la région de l'écorce pour les mou-

vements du membre supérieur. La plaie fut refermée comme

ci-dessus. Les 3/6 guérirent parpremière intention en une semaine

quoi qu'il y eût un oedème considérable du cuir chevelu, dû à

l'irritation de la gaze phéniquée (oedème qui disparut rapidement

en employant de la gaz l'eucalyptus). L'autre sixième, à l'extré-

mité inférieure du lambeau, cède et guérit par bourgeonnement,

après la réparation d'un petit morceau de peau sur le bord.

L'état du malade après l'opération était très intéressant et très

important. Le jour suivant, il y a eu une paralysie motrice par-

tiellede la face du côté gauche, une paralysie complète du membre

supérieur gauche depuis et y compris l'épaule. Le 27 juin, on

remarqua une hémianesthésie gauche à un léger toucher (la sen-

sibilité à la douleur était conservée), la localisation de la piqûre

d'épingle était très défectueuse sur tout le côté gauche, intact à

droite, et il y avait une perte complète du sens musculaire dans

le membre supérieur gauche, au-dessous de l'épaule. Le second

jour après l'opération, en faisant un effort pour remuer son

membre supérieur gauche, le malade a mis tout d'un coup sa

main à la blessure et a dit qu'il sentait un « bourdonnement ».

Quand on remuait le membre supérieur gauche, il se plaignait

que la douleur semblait frapper l'os du membre, le côté du cou,

et s'étendre de la main à la blessure. Les réflexes profonds étaient

très exagérés du côté gauche dans les deux membres. Cet état

s'améliora et, à l'époque de la réunion, tout était dans l'ordre,

excepté que l'étreinte de la main était moins forte qu'auparavant

et que les mouvements des doigts étaient un peu gênés. De plus,

les réflexes profonds étaient encore exagérés. De plus, en juillet,

le malade a eu quelques légères contractions dans trois doigts

droits, aucune dans le pouce ni l'index ; aucune attaque depuis

396 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

l'opération. Sa tumeur était composée d'un tissu fibreux dense,

avec deux foyers caséeux, reconnus tuberculeux à l'examen mi-

croscopique.

Cas III. George-W. J..., vingt-quatre ans, fut admis à l'hô-

pital National dans le-service du Dr Buzzard. Antécédents héré-

ditaires : Rien d'important à noter. Antécédents personnels : Au-

cun, excepté une otite moyenne. Histoire de la maladie actuelle.

- A cinq ans, la flèche d'une voiture lui tomba sur la tête, lui

fit une légère blessure et une légère fracture. A treize ans, le

malade reçut un coup de pied de cheval au même endroit. Trois

mois après, les attaques commençaient. Les attaques arrivaient

par séries de trois ou quatre toutes les trois semaines.

Etat actuel. - Le malade est grand, fort ; il porte de nombreu-

ses cicatrices sur la tête, dues à des chutes, etc., quand les attaques

arrivèrent (il avait aussi la plupart de ses dents enlevées par des

coups de pieds de chevaux quand il tombait auprès d'eux, étant gar-

çon d'écurie). Il y avait une cicatrice et la légère dépression d'une

fracture à l'angle supérieur et antérieur du pariétal gauche, près

de la ligne médiane. La cicatrice et le cuir chevelu environnant

étaient très sensibles à la pression. Le malade avait à ce point

souvent de très violents maux de tête, qui augmentaient (et aussi

la sensibilité) à l'approche des attaques. Il y avait aussi une hémi-

anesthésie droite presque complète au toucher et à la piqûre.

Quoique ceci ait son importance, je puis ne pas m'y arrêter en

disant que le Dr Buzzard ordonna l'application d'un fort courant

faradique qui fil complètement disparaitre l'hémianesthésie, mais

laisse intactes les attaques.

Caractères de l'attaque. L'aura était abdominale. Le malade

ressentait le besoin de défécation, accompagné quelquefois d'une

douleur vive dans le côté gauche de l'abdomen. Suivait un resser-

rement de la gorge et quelquefois une toux spasmodique. La tête

et souvent les yeux étaient tournés vers la droite; le bras droit

élait étendu par secousses, et le malade perdait connaissance.

Tous les membres étaient pris dans la flexion généralement; les

membres inférieurs, cependant, sont quelquefois fléchis. Après

l'attaque, le malade disait que son bras droit était faible pour

quelque temps.

Diagnostic. - Dans une communication (Proceedings of the Royal

Society, no 231, 1884), le professeur Schâfer et moi nous avons

montré que le centre des muscles du tronc était situé dans la

circonvolution marginale sur la surface moyenne de l'hémisphère

et que celui des muscles de l'abdomen est juste à l'extrémité pos-

térieure du sillon frontal supérieur. Le professeur Ferrier a mon-

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 397

tré que le centre des mouvements de la tête et du cou est au-

dessous de ce sillon et que celui de l'extension du bras était à peu

près à son extrémité postérieure. Ce dernier point a été confirmé

par le Dr Beevor et moi. Ces considérations amenèrent le Dr Buz-

zard à diagnostiquer une lésion située dans le tiers postérieur de

la circonvolution frontale supérieure, c'est-à-dire juste au-dessous

de la légère dépression du crâne. Faisant le même diagnostic, il

pratiquait l'opération exploratrice suivante :

Opération (13 juillet 1886). Un lambeau est relevé, et l'os est

trépané près de la dépression gauche; on trouve que la table interne

a été brisée en éclats qui forment une couronne dure autour de

l'orifice interne de la fistule du crâne, laquelle fistule était remplie

par du tissu cicatriciel. De plus, la dure-mère avait été déchirée

par la fracture primitive, et un petit morceau d'os avait été pro-

jeté dans une cavité du cerveau. Les fragments osseux furent

enlevés, la dure-mère incisée, on trouva que cette cavité était

cunéiforme et avait de un à cinq centimètres de profondeur, sur

un centimètre de large, et était remplie de tissu connectif lâche.

Elle était exactement située à l'endroit diagnostiqué. La cavité

fut enlevée au moyen d'une incision circulaire faite à la distance

de cinq millimètres.

La plaie fut complètement guérie en trois jours. Une semaine

après l'opération, le malade se plaignait de faiblesse dans tout le

membre inférieur droit. Tous les mouvements étaient atteints,

surtout ceux de la main. Cette parésie est intéressante comme

étant sans aucun doute un exemple de paralysie hystérique chez

un homme, et son rapport avec l'anesthésie fonctionnelle avant

l'opération est évident. L'intervalle de cinq ou six jours, écoulé

avant son apparilion, coïncide avec le temps indiqué récemment

par le professeur Charcot. Cette parésie, à la date de la réunion,

a complètement disparu.

Le manque de temps m'oblige à formuler sans plus amples

détails certaines déductions qui s'écoulent, je pense, des détails

ci-dessus :

1° Chez l'homme, une paralysie temporaire motrice corticale

et peut-être la perte du sens musculaire survient après la liga-

ture des vaisseaux qui fournissent le centre moteur des mou-

vements perdus;

2° Chez l'homme, une paralysie temporaire de la sensibilité

et de la moibilité du type hystérique ou fonctionnel survient

après des opérations pratiquées sur les centres moteurs;

3° L'arrêt des attaques épileptiformes commençantes, par

398 SOCIÉTÉS SAVANTES.

une ligature ou par l'extension de la partie contracturée ou

rigide, fait supposer que probablement le sens musculaire est

représenté dans le centre excito-moteur.

SOCIÉTÉS SAVANTES

SOCIÉTÉ MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE

Séance du 26 juillet 1886. - Présidence de M. SEMELAIGNE.

Des signes physiques, intellectuels et moraux de la folie hérédi-

taire (suite). - 111. rnr.aeT. On ne peut nier que l'hérédité imprime

un cachet spécial à une catégorie très nombreuse d'aliénés, mais

il ne faudrait pas cependant les faire entrer tous dans la famille

des héréditaires, car alors on serait fort embarrassé dans la clas-

sification de la folie. Je bais bien que M. Magnan admet plusieurs

catégories dans son groupe; aussi nos opinions ne diffèrent-elles

que sur la limite extrême à donner à ce groupe et sur le nombre

de ses subdivisions. Je ne place pas la limite aussi loin que lui et

j'augmente les chapitres, ce qui me permet une étude plus facile

des types.

La plupart des aliénés héréditaires n'ont pas d'hallucinations;

ils se font surtout remarquer par des excentricités. La folie des

actes, la périodicité et la remittence des accès leur appartiennent

en propre ; c'est incontestable et je ne crois pas plus que M. Ma-

gnan aux monomanies. Je sais qu'on a fait des distinctions à perte

de vue, basées sur l'objet du délire, mais ce n'est pas une raison

pour ne pas attribuer une place à part à la folie avec conscience,

la folie émotive, la folie du doute, le délire du toucher, etc., tou-

jours si semblables à eux-mêmes. Ces formes ne sauraient se

fusionner avec le groupe des héréditaires sans former une variété.

Qu'on vienne nous dire qu'un malade prend son mouchoir pour

toucher un bouton de porte, cela suffit pour qu'avec cette simple

indication nous connaissions tous les caractères de son état intel-

lectuel. Nous pourrons ajouter qu'il a de la répétition mentale,

qu'il compte à l'infini, et qu'il lui laut un souffre-douleur pour

écouter ses plaintes et ses histoires. N'est-ce pas la preuve qu'il y

SOCIÉTÉS SAVANTES. 399

a là une variété clinique bonne à conserver sans nier qu'elle ait

des caractères communs à toutes les autres formes héréditaires ?

M. Magnan a eu raison de créer une grande famille pour tous

ces malades. C'est un très grand progrès de les avoir groupés, mais

il n'a pas suffisamment distingué d'espèces et de variétés, comme

on le fait en histoire naturelle. Cette méthode appliquée à l'hé-

rédité aurait au moins l'avantage d'en faciliter beaucoup l'étude.

En résumé, il résulte de cette longue discussion que nous sommes

divisés en deux groupes : l'un comprend ceux qui, à l'exemple

d'Esquirol, n'admettent l'hérédité que comme cause déterminante

de la folie; l'autre qui comprend ceux accordant à tous les héré-

ditaires des caractères communs. Je me range à cette dernière

opinion, et j'ajouterai qu'il faut augmenter les divisions.

M. MAGNAN. - Je me suis surtout efforcé de démontrer que

l'hérédité imprimait aux aliénés des caractères généraux toujours

les mêmes, mais je n'ai jamais pensé qu'il fallût négliger l'étude

des variétés et sous-variétés du groupe. Je me suis aussi élevé

contre les tendances d'une certaine école à vouloir faire une entité

morbide d'un simple symptôme épisodique. Lorsque la question

du délire chronique reviendra en discussion, je me réserve de

faire des efforts pour en retirer tout un groupe de dégénérés, celui

des persécutés persécuteurs.

M. FALRET demande que cette discussion soit mise prochaine-

ment à l'ordre du jour. ' MARCEL BRIAND.

CONGRÈS DES NATURALISTES ET MÉDECINS

ALLEMANDS

SESSION DE STRASBOURG 4885 '

Séances des 18-23 septembre.

I. SECTION DE psychiatrie ET neurologie

M. DE GUDDEN (de Munich). Des nerfs optiques, des bandelettes

optiques, des rapports de leurs faisceaux entrecroisés ou non et de

leurs fibres optiques et pupilluires avec les centres de cesorgunes. -

1 Voy. Arch. de Neurologie, t. XI, p. 96.

400 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Pour isoler le faisceau non entrecroisé on fait pénétrer à travers

la suture sagittale d'un animal nouveau-né un petit couteau fin et

l'on va sur la base du crâne sectionner le chiasma. Nombreuses

préparations et planches sont présentées au Congrès. La situation

des faisceaux entrecroisés ou non est dans la bandelette optique

la même chez le chat que chez l'homme. (Voy. Arch. f. Ophthal-

molog., XXV, 4) 1. L'entrecroisement s'exécute chez cet animal sur

toute l'épaisseur de la coupe transverse du nerf optique émer-

geant du chiasma, ces faisceaux se séparent peu à peu dans le

trajet du nerf en question pour se rendre à leurs moitiés réti-

niennes respectives. I.e rapport de masse de chacune des deux

espèces de faisceaux est sur une coupe transverse, comme (fais-

ceau non entrecroisé) est à 3 (faisceau entrecroisé). L'oie ne pos-

sède pas de faisceau croisé. A Eisenach 2, de Gudden a prouvé

l'existence dans le nerf optique de deux systèmes de fibre.-) ; l'un

sert à la vision, l'autre commande aux mouvements de la pupille,

par voie réflexe; peut-être y a-t-il un troisième système ayant un

troisième centre. En tout cas, jusqu'ici l'on n'a trouvé que deux

centres, un dans le corps genouillé externe, l'autre dans le tuber-

cule quadrijumeau supérieur. Le nerf optique contient des fibres

de deux calibres différents : le chat se prête surtout à cette dis-

tinction ; l'homme et le lapin s'y prêtent moins bien. Cependant

chez le lapin privé du tubercule quadrijumeau supérieur d'un

côté, et par suite aveuglé du côté opposé (intégrité de la pupille), on

constate, à l'examen microscopique des nerfs convenablement

préparés un nombre prodigieux de fibres épaisses. Chez le chat

les fibres épaisses présentent le même rapport de volume en ce

qui concerne les faisceaux croisés ou non que les fibres minces.

M. GIIASHEY (de Wûrzbourg). De l'importance du liquide cérébro-

spinal pour la circulation du sang dans le crâne. - L'an dernier,

cet auteur montrait que 3 : '

Si l'on fait passer un tuyau élastique dans un tube fermé à parois

rigides et rempli il'eau, tout accroissement de pression imprimé à un

courant de liquide que l'on dirige continuellement dans ce tuyau [image

du sang et de sa pression) entraîne des vibrations toutes particulières du

tissu de ce tuyau élastique, vibrations qui, en se limitant à l'extrémité

périphérique de celui-ci, arrêtent le courant circulatoire. Cet arrêt de la

circulation au moment où l'on élève la pression [sanguine) ne se produit

que lorsque le tube enveloppant extérieur possède des parois rigides

(image de la boite crânienne) et se trouve fermé de toutes parts; si l'on

provoque l'écoulement de l'eau qu'il contient [image du liquide cé,'é61'o-

spinal), la circulation reprend dans le tuyau élastique.

t Voy. Arch. de Neurologie, t. XI, p. 96.

s Id., t. VI. p. '35.

3 Id., t. XI p. 103.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 401

Or, on peut également faire naitre les vibrations dans le tuyau

élastique et l'arrêt de la circulation. si le tube extérieur enve-

loppant (boite crânienne) n'est pas fermé de toutes parts, mais

alors la pression atteint dans ce tube [pression intra- crânienne) une

valeur positive, déterminée. Les effets restent les mêmes quelle que

soit la façon dont on s'y prend pour modifier la pression à l'inté-

rieur du tube (intru-c1't ! nienne) que l'on augiiienlela quantitéde li-

quide à l'intérieur du tube (liquide cérébro-spinal) ; qu'on s'oppose

à l'écoulement de ce liquide, qu'on exagère l'effort exercé sur le

tuyau élastique [vaisseau sanguin) qui se dilate [exagération de la

pression vasculaire), on enfin qu'on fasse intervenir les trois fac-

teurs, peu importe. Si l'on adapte an tube extérieur des mano-

mètres très étroits afin d'imiter le mode d'écoulement du liquide

céphalo-rachidien, on voit se produire la pression voulue pour

que l'arrêt de la circulation du tuyau s'effectue, pourvu que la

dimension de celui-ci soit relativement faible. Il peut donc surve-

nir des vibrations vasculaires arrêtant la circulation d'un vaisseau

élastique qui, de même que les vaisseaux sanguins, est entouré

d'un liquide mobile, dont l'écoulement varie sous une pression

positive. Ce liquide cérebio-apinat ? évacue de la cavité crânienne

ou y arrive en quantités différentes selon les individus; que son

évacuation subisse un ralentissement, sous l'iniluence, par exemple

des modifications de la pression du sang ou du diamètre des

vaisseaux exlen-ibles, voilà qu'il se peut produire un arrêt de la

circulation et conséquemment un tiouble de la nutrition. De là

à interpréter les lésions encéphaliques, il n'y a qu'un pas. On

peut se figurer que la prédisposition héréditaire aux psychoses

repose en partie sur l'insuffisance des voies d'écoulement du

liquide cérébro-spinal.

Discussion : MM. KROEPËUN, Mendel, .TOLLY. Ces expériences sont

propres à éclairer la genèse des troubles psychiques consécutifs à

l'extirpation de la glande thyroïde, car cette opération équivaut

à la suppression de canaux de dérivation sanguine et lympha-

tique.

M. BINSWANGEI\ (de Iéna). De l'histologie pathologique de l'écorce

cérébrale dans la démence paralytique. Préparations microsco-

piques de paralytiques généraux morts à la période terminale et

de malades ayant complètement perdu la parole. Chez tous ces

individus, les grandes cellules nerveuses de la troisième couche

de l'écorce, dans les parties comprises entre le rameau ascendant

de la scissure de Sylvius et la glande branche, présentent les

altérations suivantes : à un premier degré, tuméfaction trouble

et boursouflement du noyau, dont le contenu finement granu-

leux disparalt, finalement noyau homogène, brillant, clair, subis-

sant difficilement l'action des substances colorantes, altérations

402 SOCIÉTÉS SAVANTES.

graduelles du nucléole de la même façon, désagrégation de ces

organes; le corps de la cellule est tantôt recoquillé, atrophié et

tous ses prolongements disparaissant, il devient un corps informe

grumeleux, qui se colore fortement au carmin, ou bien se crevasse

en certains points de façon à apparaître comme déchiré, troué,

dissocié. Presque toujours en outre, ces éléments sont exagéré-

ment pigmentés, plus qu'à l'état normal. Le cerveau de'para-

lytiques généraux consécutivement à la syphilis décèle des alté-

ration, des gaines lymphatiques des vaisseaux de l'écorce :

épaississements, duplicalures, dénudations de certains de leurs

segments, prolifération des endothéliums lymphatiques dans les

espaces clos, accumulation de corpuscules lymphoides dans les

mêmes espaces.

M. PFLUEGER (de Berne). Des incitations et coincitations de divers

districts homonymes du champ visuel. - Communication des

recherches de M. Schiele sur le rétrécissement du champ visuel

sous l'influence de la fatigue chez les névropathes. On détermi-

nait la fatigue par des mensurations périmétriques répétées du

champ visuel. La fatigue d'une moitié, d'un quart, d'un secteur,

d'une rétine entraîne concurremment un rétrécissement de forme

analogue du champ visuel de la moitié, du quart, du secteur

homonyme de la rétine du côté opposé, mais jamais elle n'en-

traîne le rétrécissement du champ visuel de la seconde moitié de

l'oeil primitivement fatigué, jamais elle n'empiète sur les parties

limitrophes de la même moitié du champ visuel- Par conséquent,

la provocation ou l'abolition dans l'espèce d'une activité fonc-

tionnelle emprunte l'intermédiaire de la sphère visuelle du lobe

occipital ne s'effectue pas directement et dans la rétine; autre-

ment dit si l'on incite un méridien déterminé de la rétine on

agit sur les organes terminaux de l'écorce correspondants et

cette incitation retentit en même temps sur les organes ter-

minaux de l'écorce qui commandent au méridien homonyme de

l'autre rétine. Cependant il peut arriver que la fatigue des deux

moitiés d'un oeil n'engendre le rétrécissement du champ visuel

que sur la moitié du second oeil. Parfois aussi des examens

périmétriques réitérés amplifient au lieu de rétrécir, totalement

ou dans une moitié, le champ visuel. Le rétrécissement du

champ visuel par examen périmétrique atteint le plus ordinai-

rement 2° à 2°, 5 parfois même 40° et change chez le même patient

parallèlement à l'état de santé subjectif dans lequel il dit se

sentir. Par conséquent, les dimensions du rétrécissement et

leurs modifications permettent de déduire un jugement sur l'état

général actuel de l'écorce; en comparant les résultats de l'exa-

men objectif et les indications données par le patient on peut

obtenir un aperçu sur le mélange de l'état neurasthénique ou

hystérique avec les allégations mensongères (simulation). Le

SOCIÉTÉS SAVANTES. 403

mode d'action des examens périmétriques variera parfois chez le

même malade (rétrécissement partiel ou général, amplification

partielle ou générale, passagers ou permanents, du champ visuel)

cette allure fournira des éléments permettant de conclure à l'in-

citation ou non du reste de l'écorce. D'où la nécessité de com-

battre l'hypothèse de Wernicke etMunk d'après laquelle chaque

lobe occipital se décomposerait en deux territoires séparés, des-

tinés chacun à une moitié homomyne de la rétine. La sphère

visuelle se compose au contraire de tout petits champs fascicu-

lés mélangés entre eux; chaque moitié homonyme des deux

rétines comprend des points identiques communiquant entre eux

dans le cerveau à l'aide de deux organes centraux juxtaposés.

M. Stein (de Francfort). L'emploi de courants galvaniques faibles

en électrothérapie. S'il est important de se servir de galvano-

mètres fidèles et de tenir compte de la densité des effluves élec-

triques dans ses rapports avec leur transmission dans le corps de

l'homme, il est encore bien plus utile de préciser cette densité.

C'est ainsi que dans le Guide d'Eleclrothérapia de Mueller, on trouve

que la valeur de (8 correspond à une surface de rhéophore de

18 centimètres carres, chargées de transmettre une unité électri-

que d'un milliampère. Mais cette fraction estpurement arbitraire.

Il est généralement reconnu qu'on obtient les résultats les plus

favorables avec des courants galvaniques faibles et une densité

peu accentuée. La plus grande somme d'effets thérapeutiques

s'obtient avec un simple courant de 8 milliampères, en graduant

la' densité d'après la sensibilité de l'épiderme. Un faible courant

devra correspondre à une force électrotonique de 4/2 à 2 milliam-

pères ; un courant moyen de 3 à 4 milliampères suffit à la plu-

part des cas. On se servira de surfaces rhéophoriques, mesurées

au moyen du système décimal, ainsi que d'un type de pile ayant

peu d'effet chimique. M. Stein a dans ce but inventé une batterie

dont chaque élément se compose d'un cylindre en bioxyde de

manganèse et d'une barre de zinc; on y verse un mélange à

demi-solide de gélatine, glycérine, acide salicylique et ammo-

niaque. On a de cette façon une pile à faible action chimique,

d'un petit volume, sans acides et constante.

Discussion. M. JOLLY. On ne saurait doser avec cette exacti-

tude un courant continu, car les nerfs sur lesquels il faut agir

sont à des profondeurs très variables selon les individus.

M. Stein (de Francfort). Des )i1'ogrès de la technique à propos de

l'application des bains électriques. Les bains électriques sont prin-

cipalement indiqués quand il y a lieu d'agir sur l'ensemble de

l'économie par un autre moyen qu'en pratiquant l'électrisation

générale. En effet, le bain galvanique, calme, tout en sollicitant

l'organisme entier, car l'individu plongé dans l'eau éprouve des

404 SOCIÉTÉS SAVANTES.

contractions, convulsives à l'ouverture et à la fermeture du cir-

cuit et le galvanomètre marque par ses oscillations de l'aiguille

le lieu hanté par les effluves électriques. On peut se servir de

baignoires en métal bien vernies ou émaillées, pourvu que les

rhéophores soient suffisamment isolés de la paroi. Comme rhéo-

phores dorsaux, on emploiera des lames métalliques, entourées

de tuyau \ de caoutchouc insufflés d'air qui permettent en même

aux malades de s'appuyer confortablement ; pour assurer la dissé-

mination uniforme du courant sur le corps entier, on reliera un

pôle à l'électrode dorsale, un autre aux lames podaliques et IaLé-

rales, ainsi qu'à une plaque située perpendiculairement entre les

pieds, au milieu de la baignoire.

Discussion.- M. JOLLY fait une remarque à laquelle M. STEIN ré-

plique que la dernière plaque n'est employée que pour le bain

faradique.

M. GltasuEY. Les avantages du bain faradique s'étendent-ils chez

les neurasthéniques, aux troubles du sommeil. Réponse. L'a-

mélioration maintes fois observée est tantôt rapide, tantôt gra-

duelle.

M. tBrrwArrcEa. Chez les neurasthéniques apathiques, le bain

faradique sollicite la vitalité. Sous son influence, les malades se

promènent, se sentent meilleur appétit, sont de meilleure humeur,

du moins pendant quelques heures. Chez les mélancoliques hypo-

chondriaques, ne présentant pas d'excitation nerveuse spéciale,

on voit également l'humeur s'amélion r ; les malades prennent

confiance dans la méthode de traitement. Les bains électriques

ne lui ont, pas plus que l'électrothérapie en général, donné de

résultats favorables au point de vue du sommeil.

M. FIIEUSBERG (de Sarreguemines). Des symptômes du côté du

système locomoteur dans les psychoses simples'. Observations de

malades. Dans la folie simple, il peut se produire un stade initial

aigu constitué des accès paroxystiques de rigidité, ou des mouve-

ments convulsiformes qui ne prouvent nullement que la psychose

se complique d'éptiep-ie, d'hystérie, d'alcoolisme. Mais les

formes de transition de ce genre exigent l'exacte connaissance des

tableaux morbides qui constituent des types ; le clinicien qui veut

affirmer son diagnostic et distinguer entre les modalités psycho-

pathiques, doit observer avec la plus grande rigueur s'il veut se

mettre en garde contre l'extension qu'ont prise les troubles psy-

chiques qualifiés d'épileptoïdes.

M. Kuoepelin (de Dresde). Du désordre confus dans les idées.

Les caractères sont principalement : l'incapacité, pour le malade,

de s'orienter dans son milieu, l'incohérence dans l'échappement

Voy. Archives de Neurologie. t. XII, p. 83.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 405

des rouages qui président aux conceptions représentative». Mais

ces deux éléments, tout dépendants qu'ils soient l'un de l'autre au

point de vue psychologique, dominent cliniquement l'un ou

l'autre, de sorte que l'on peut distinguer un désordre de l'idéogé-

nèse sensoriel et un désordre intellectuel. Le premier repo-e sur

l'altération du processus de la perception ; il émane directement

d'hallucinations sensorielles ; à cette catégorie appartient une

modalité qui mériterait peut-être bien le nom d'illusionatoire,

car elle a pour particularité l'impossibilité où se trouve le patient

d'obtenir une représentation claire, quelconque, de la situation

présente, quoiqu'il en saisisse exactementles données fondaaten-

tales et qu'il fasse la plus grande attention au monde extérieur ;

on y trouve presque cunstamment des hallucinations de l'ouïe,

plus rarement des hallucinations de la vue, mais sans qu'elles

prédominent. Un désordre dans les idées intermédiaires est cons-

titué par cet état desomniation délirante que l'on remarque pen-

dant l'obnubilation psychique de l'épilepsie grave et des paraly-

tiques généraux, dans le délire fébrile. Le désordre dans les idées

intellectuel a pour symptômes : une succession pressée d'idées

passagères dans laquelle, à la place de l'évolution normale d'une

conception représentative, on remarque une série d'associations,

d'idées enchevêtrées et, partant, confuses; ou bien on assiste à des

combinaisons dues à ce que toute perception éveille irrésistible-

ment les suppositions, et les idées délirantes les plus embrouillées,

les plus fantaisistes, et des répliques contradictoires involontaires

qui suscitent à leur tour réclusion de nouvelles élucubrations,

la découverte de rapports mystiques imprévus, faits pour déso-

rienter au plus haut point le discernement; exemples : maint

cas de folie systématique primitive dans lesquels le système

du délire se développe au beau milieu de manifestations impé-

tueuses. Puis, le fil des conceptions s'use,elles n'évoluent plus avec

leur netteté première, la trame en est modifiée par les sensations

intimes et les émotions; ainsi se produit le désordre émotif dans

les idées, forme bien proche parente du désordre délirant.

Mais, à côté de ces perturbations, de ces syndromes, plutôt épiso-

diques,il existe un désordre dans les idées avec incohérence, tout

secondaire, dans lequel le mécanisme des facultés intellectuelles

ne subit aucun arrêt, ou, si la marche en est pervertie, n'est pas

anéanti. Le genre en est tout différent. On y pourrait encore

distinguer, selon le degré de la déchéance, un désordre « raison-

nant », un désordre généralisé (Griesinger), et finalement un dé-

sordre stéréotypé.

Le désordre dans les idées est, du reste, un trouble de l'intelli-

gence qui se traduit par les actes, les paroles, les écrits. Ces trois

ordres de pièces sont nécessaires pour permettre de juger de

l'existence du symptôme, car il est des fous systématiques qui sont

406 SOCIÉTÉS SAVANTES.

incohérents dans leurs actes, non parce qu'ils ont du désordre

dans les idées, mais parce que la nature de leur délire leur donne

cette apparence. Des individus dont l'intelligence est normale

agissent parfois aussi comme s'ils avaient du désordre dans les

idées, parce que leur volonté ne se transmet plus physiologique-

ment sur les conducteurs moteurs (paraphasie, paragraphie).

Discussion : lli. GRASHEY. Le complexus symptomatique en ques-

tion, qui résulte, en effet, de troubles de la perception (altérations

des impressions et des impressions sensorielles), n'est pas un élé-

ment morbide.

M. KRPEL1N. Evidemment, il résulte d'une somme de troubles

élémentaires.

M. RULPF (de Bonn). Du traitement du tabès dorsal. -L'auteur a

oblenu de très bons résultats du pinceau faradique combiné au

traitement antisyphilitique, dans les cas de tabes où il y avait eu

syphilis antérieure. Sur vingt-quatre malades, quatre guérirent,

tous les autres s'améliorèrent, parfois à un degréconsidérable. Le

pinceau faradique déterminerait les effets suivants :

10 Il apaise les douleurs i Ces deux particularités s'observent chez

2o Il relève la sensibilité ' l'homme normal.

3n Il exerce une action réflexe, en dilatant la pupille, venant à bout

du myosis et de la fixité, de l'immobilité de l'écran pupillaire.

- .\0 11 se pourrait qu'il modifiât la circulation des organes centraux.

qu'il transformât le centre régulateur de la chaleur, car on voit les ex-

trémités, froides avant son emploi, récupérer, sous l'influence du traite-

ment, leur chaleur normale et la conserver.

Discussion : M. JOLLY a vu, à côté des améliorations, se produire

plusieurs insuccès.

M. JEHN. Dans un cas de tabes survenu au cours d'une psychose

simple, le résultat a été excellent, mais on dut appliquer simulta-

nément de faibles courants continus sur la moelle. Quand l'affec-

tion médullaire eut rétrocédé, les accidents psychopathiques qui

avaient momentanément rétrogadé, reparurent.

M. NISSL (de Munich). Des méthodes d'examen de l'écorce du

cerveau'. La dissociation convient- pour la recherche des ano-

malies pigmentaires, dégénérescences graisseuses, etc., mieux

que la méthode des coupes. En revanche, les coupes seules

permettent de découvrir d'autres anomalies, surtout les lésions

fines. Parmi les liquides de durcissement, c'est l'alcool qui

met un évidence les plus beaux aperçus de cellules nerveuses,

mais il détruit les fibres. La solution de bichromate de po-

tasse conserve les fibres, mais détruit plus ou moins les cel-

1 V. Archives île Neurologie, t. X, p. 270.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 407

Iules. Pour observer les fibres à myéline, il n'y a rien de mieux

que la coloration à l'hématoxyline de Weigert, d'après son

nouveau procédé. L'examen des cellules nerveuses, des noyaux

du tissu conjonctif, des parois vasculaires exige l'emploi des

couleurs d'aniline; on pratiquera l'autopsie trente heures au

plus et, en été, vingt-quatre heures après la mort; on plongera

le petit morceau d'écorce, dont on déterminera avec soin le lieu

de provenance, dans de l'alcool à 93°, tandis que, pour commencer

le durcissement du cerveau entier, on se servira d'alcool faible. On

pratiquera l'inclusion dans la gomme, et on exécutera les coupes

à l'aide d'une lame imbibée d'alcool. On les jettera successivement

dans l'alcool à 95°, dans l'eau distillée, dans une solution aqueuse

d'aniline que l'on chauffe jusqu'à ce qu'il s'échappe de lé-

gères vapeurs; après avoir procédé à un refroidissement lent,

on aura de nouveau recours à de l'alcool à 95°, on éclaircira à

l'essence de girofle jusqu'à ce qu'on n'obtienne plus de gros

nuages (élimination de l'excès de couleur), enfin on chassera l'es-

sence par la benzine, et l'on montera dans le baume du Canada.

C'est le rouge de Magenta qui donne les meilleurs effets. Quand

il s'agit d'étudier les altérations pathologiques, il faut constam-

ment comparer avec les mêmes régions d'une écorce saine.

M. Exo ( d'Heidelberg ) montre des préparations de muscles

empruntées à un cas de maladie de Thomsen1. On y rencontre

l'hypertrophie des fibres, la multiplication de leurs noyaux. Il en

est de même pour les mêmes organes d'un homme, mort des

suites d'une opération chirurgicale, qui, d'après l'interrogatoire

de sa veuve aurait, certainement eu pendant sa vie une maladie

de Thomsen modérée. Voici maintenant des préparations de trois

muscles d'un garçon ayant été atteint d'une pseudohypertrophie

musculaire infantile (dystrophie musculaire progressive de Erb) ;

on trouve dans le gastrocnémien nombre de fibres hypertrophiées,

atrophie de certaines autres (quelques-unes semblant fendues

dans leur longueur), de l'hypergénèse des noyaux du tissu con-

jonctif, multiplication des noyaux des fibres musculaires; le

sous-épineux présente surtout de l'atrophie des fibres accompa-

gnée d'hypergenèse du tissu conjonctif sans aucune accumulation

de cellules de graise; le grand dorsal ne contient presque plus

de fibres, il comprend des masses de tissu conjonctif et de cel-

lules de graisse ; le processus commence donc non par la prolifé-

ration du tissu graisseux, mais par une hypertrophie musculaire

véritable, accompagnée d'atrophie de nombreuses fibres^et d'hy-

perplasie simultanée du tissu conjonctif.

M. SGHULTZE (d'Heidelberg) apporte des préparations emprun-

' V. Archives de Neurologie. Revues analytiques.

408 SOCIÉTÉS SAVANTES.

tées à un cas d'atrophie musculaire généralisée ; il pense que dans

l'affection désignée sous le nom de pseudohypertrophie on n'a

jusqu'ici pu constater que l'hypertrophie d'une fibre musculaire

en ait toujours précédé l'atrophie. Il montre encore des prépara-

tions dues à Weigert et préparées d'après sa méthode ou d'après

celle d'Adamkiewiez : la théorie des zones chromoleptiques serait

fausse. Enfin il discute un cas de porencéphalie.

Par l'intermédiaire de M. Freusberg, M. HACK TUKE (de Londres)

demande aux neurologistes allemands de lui prêter leur appui

dans son étude sur le somnambulisme provoqué, et de vouloir bien

lui communiquer des cas bien observés. - -

II. SECTION DE physiologie.

M. HERZEN (de Lausanne). De la décomposition du sens de la tem-

pérature en deux éléments différents Un bras profondément

engourdi a perdu non seulement le sens du tact, mais aussi la

faculté de percevoir le froid, tandis qu'il distingue encore nette-

ment la chaleur et les impressions douloureuses. Cette décou-

verte de M. Herzen est complétée par cette autre. La compression

permanente mais modérée d'une jambe, en déterminant dans les

régions innervées par le sciatique de l'anesthésie tactile, enlève

aussi la faculté de percevoir le froid ; ce n'estque bien plus tard,

que la chaleur et la douleur, sont plus senties. Si dans ces condi-

tions on touche une main et un pied soit avec un objet froid (0°),

soit avec un objet modérément chaud (40 à 45°), et si l'on s'étudie

à prendre sur le fait non la sensation occasionnée par le contact,

mais le moment où le sujet réagit à la sensation réelle du chaud

ou du froid, on constate que le temps exigé pour cette réaction

est toujours beaucoup plus long quand il s'agitde la chaleur, que

lorsqu'il s'agit du froid. Une femme qui était affectée d'anesthésie

tactile et d'insensibilité à l'égard du froid, tandis qu'elle sentait

les impressions douloureuses et distinguait parfaitement divers

degrés de chaleur entre 27° et 6u° présentait à l'autopsie une

myélite transverse des cordons postérieurs et de la moitié dorsale

des cordons latéraux surtout des faisceaux latéraux qui se rendent

au cervelet ; les cordons latéraux et la substance grise étaient de-

meurés normaux. L'auteur n'a pas encore eu l'occasion de prati-

quer l'autopsie de malades chez qui il avait constaté la perte de

la sensibilité tactile et des impressions de froid alors que la cha-

leur et la douleur étaient toujours perçues. Chez les chats et les

chiens, les lésions cérébro-spinales unilatérales qui ne nuisent pas

à la sensibilité tactile ne nuisent pas non plus à la sensibilité des

impressions froides; celles qui anéantissent la première troublent

aussi la dernière; telles la sectiou transverse des cordons posté-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 409

rieurs et l'extirpation des centres corticaux moteurs. Conclusions

fo La même région de l'écorce cérébrale (gyrus sigmoide) contient le

centre des sensations tactiles et frigorifiques ou des conducteurs qui les

apportent à ce centre; 2° les cordons postérieurs de la moelle trans-

mettent deux espèces de sensations; 3" ces deux espèces de sensations

sont supprimées quand on comprime les troncs nerveux périphériques;

4° la sensibilité à l'égard de la chaleur est chez l'homme transmise par

d'autres nerfs à d'autres tractus et de ceux-ci à d'autres centres céré-

braux que la sensibilité à l'égard du froid ; 5° le sens de la température

se compose donc de deux sens : un sens pour la chaleur, un sens pour

le froid, absolument indépendants l'un de l'autre au double point de vue

anatomique et physiologique.

11 ne faut pas non plus identifier le sens tactile et le sens des

impressions frigorifiques, non plus que le sens de la douleur et ce-

lui de la chaleur. 11 existe, en effet, divers points de l'économie

dont les uns perçoivent uniquement le froid, les autres la cha-

leur, d'autres enfin le contact. Le gland pénien, par exemple,

complètement insensible à l'égard du froid, perçoit les grossiers

contacts. La sensibilité frigorale et tactile s'effectue donc par des

nerfs spéciaux malgré la communauté des trajets et des termi-

naisons centrales des tractus nerveux.

M. GoLTz présente quelques chiens en vie auxquels on a enlevé

tant la sphère du sentiment, que la zone de la vue. En comparant

l'allure des animaux mutilés aux lacunes encéphaliques corres-

pondantes(les animaux sont sacrifiés ultérieurement), on peut voir

que Goltz a raison de combattre le point du vue de Munk 1.

III. SECTION DE médecine INTERNE.

M. Rumpf (de Bonn). Des monoplégies et des hémiplégies syphili,

tiques.- La communication porte sur deux observations de mono-

plégie typique du bras ou de la jambe avec épilepsie corticale.

Dans les deux cas le membre atteint présentait de la tension mus-

culaire et de l'exagération des réflexes tendineux. Intégrité par-

faite dela sensibilité. Dans deux autres cas de monoplégie syphi-

litique, la sensibilité commune était diminuée, ainsi que la

faculté de percevoir la situation et la position des membres affec-

tés ; parfois il se produisait des accès convulsifs dans le membre

atteint sans autres troubles de la motilité, L'auteur porte sur les

deux premiers faits le diagnostic de lésion du centre cortical mo-

teur, sur les deux derniers, celui de lésion corticale de la zone

sensible, conclusion, conforme à celle de Nothnagel *; les endroits

1 Voy. Archives de Neurologie, aliàs passim.

2 Voy. Traduction française, Paris, 1S85. Maladies de l'encéphale et

localisations.

Archives, t. Xll. 27

410 0 SOCIÉTÉS SAVANTES.

de la surface du cerveau qui commandent à la motilité et au sens

musculaire sont chez l'homme, tout près l'un de l'autre, mais non

identiques.

IV. SECTION DE GYNÉCOLOGIE.

M. H.-W. FaEUND (de Strasbourg). Des fines altérations des appa-

reils nerveux qui occupent le parametrium ', dans le cas d'atrophie

simple et p,ii,amét2,itique. - Dans le cas de puerpéralité normale,

l'auteur a trouvé une forte hyperplasie du ganglion cervical de

l'utérus (ganglion de Frankenhoeusu)2 ; dans les stades plus avan-

cés, il existait une métamorphose graisseuse du même organe.

Dans l'atrophie simple du tissu cellulaire du bassin, alliée du reste

à de l'atrophie utérine consécutive à des maladies rapidement

consomptives, à des couches et à des lactations se succédant à des

intervalles trop courts, à des affections puerpérales graves, les

cellules nerveuses ganglionnaires se sont montrées diminuées de

nombre et de volume, en partie atteintes de dégénérescence grais-

seuse ; leur forme, au lieu d'être polygonale, était devenue ar-

rondie, on n'en constatait pas toujours le noyau et le mucléole les

ramuscules nerveux étaient amincis et infiltrés de graisse. Dans

la paramétrite chronique, M. Freund a vu le ganglion qui nous

occupe, comprimé par des tractus de tissu conjonctif cicatriciel ;

les cellules en étaient recoquillées et pigmentées (couleur jaune-

brun), souvent on n'en pouvait reconnaitre le noyau qu'avec peine ;

au degré le plus extrême de la rétraction cicatricielle, à côté des

cellules nerveuses, soumises aux altérations les plus marquées,

on percevait des branches nerveuses clairsemées , amincies,

pauvres en éléments de relais. Importance de ces lésions pour l'in-

terprétation de l'hystérie.

V. SECTION DE pédiatrie

M. RANKE (de Munich). De la paralysie infantile cérébrale.- L'été

dernier, l'auteur a observé neuf cas de paralysie cérébrale corres-

pondant au tableau morbide de la poliencéphalite aiguë de

Struempeil 3. Six cas se rattachent à la forme hémiplégique ; trois

cas concernent la forme monoplégique. Dans la première forme

1 Voy. Manuel de Gynécologie, de Hart et Barbour, traduction fran-

çaise de Crouzat. Paris, 1886, p. 54.

= Voy. Ce même ouvrage, p. 83.

3 goy. Archives de Neurologie, t. XI, p. 112. H s'agit là d'une ma-

ladie qui a été décrite bien des fois Pn France par Bravais, Cotard, Bour-

neville et ses élèves.

BIBLIOGRAPHIE. 411 i

la paralysie était surtout accentuée sur le bras, arrêté dans sou

développement (il en était de même pour un cas de monoplégie

brachiale) ; le trouble de la nutrition portait sur les os et les mus-

cles, et non sur le tissu adipeux sous-cutané. Chez les six hémi-

plégiques, il y avait de l'athétose des doigts qui atteignait en

outre les orteils (trois cas) ; deux d'entre eux présentaient des

troubles intellectuels, un garçon devint, quatre ans après l'inva-

sion de la paralysie, épileptique. Dans tous les cas, la paralysie

n'était pas flasque, comme cela a lieu dans la poliomyélite, mais

elle s'accompagnait d'une légère tension musculaire. Persistance

des réflexes tendineux parfois même exagérés. Jamais d'altéra-

tions fondamentales de la sensibilité, du sens musculaire, de la

réaction électrique. Intégrité du facial. La maladie remontait in-

variablement à la première jeunesse; son stade initial, tantôt in-

diqué, tantôt formellement nié, serait caractérisé par des convul-

sions, de la perte de connaissance, de la fièvre. Chez trois enfants

venus au monde en etat d'asphyxie, l'affection doit remonter à la

naissance.

M. DEmi.E. Contributions à la connaissance des effets nuisibles des

excès alcooliques sur l'organisme de l'e71fttnt.- Sur cinquante-trois

enfants amenés à l'hôpital spécial de Berne, dans le cours des

années 4818-1884, et affectés d'arrêt de développement psychique

total ou partiel, 28, soit 54 p. 100 étaient issus de parents habi-

tuellement adonnés (généralement il s'agissait du père) à l'eau-

de-vie. M. Demme s'élève contre la coutume d'administrer des

boissons alcooliques aux enfants ; il indique deux cas de cirrhose

hépatique, pendant l'enfance et envisage plusieurs observations

relatives à l'épilepsie, à la chorée, aux terreurs nocturnes, comme

suites immédiates d'ingestion prolongée d'alcool. (allg. Zeitschr.

/. Psych., XLIL, 4). P. Kéraval.

BIBLIOGRAPHIE

IX. Traité élémentaire d'anatomie médicale du système nerveux ;

par Ca. Férié. (Au Progrès médical et chez Lecrosnier.)

L'urgence d'un pareil traité se faisait de plus en plus réclamer

en présence des recherches successives, éparses dans différents

recueils depuis dix ans, et ne se retrouvant dans aucun des traités

du système nerveux. Il y avait à tenter ce travail un double

412 BIBLIOGRAPHIE.

écueil, trop dire ou ne pas dire assez, écueil qui ne pouvait être

évité que par la compétence toute spéciale de l'auteur. Ce traité

tout en étant complet repose sur un sage discernement entre les

faits anatomiques courants, partout reproduits et sur lesquels

l'auteur ne fait que passer sans les négliger et entre les faits

récents, si sujets à discussion, difficiles à exposer et qui tous sont

reproduits avec une clarté qui n'existait pas toujours dans les

monographies de leurs auteurs. Le même esprit de méthode se

retrouve dans les questions physiologiques et pathologiques qui

en relèvent l'attrait de l'exposition, sans compter la présence de

nombreuses figures explicatives et schémas inédits ou empruntés

souvent aux meilleures sources. Les premiers chapitres sont con-

sacrés aux méninges et à la configuration extérieure et intérieure

de l'encéphale.

Le chapitre IV (les hémisphères cérébraux) comprend les des-

criptions nouvelles de la scissure de Sylvius, du lobule de l'insula

de la région rétro-insulaire et de ses plis de passage et un exposé

facile à suivre de la corne d'Ammon. Un article spécial sur la

topographie cérébro-crânienne, curieux par les détails crâniolo-

giques et les questions relatives aux applications du trépan, est

suivi d'une revue complète sur les localisations fonctionnelles. La

substance blanche des hémisphères et du centre ovale sont étu-

diées au moyen des coupes de Pitres; les chapitres les plus inté-

ressants sont ceux concernant les noyaux gris centraux et la cap-

sule interne; toute obscurité disparaît devant l'exposé facile et

clair des détails relatifs à l'isthme de l'encéphale et du cervelet;

tout un chapitre est consacré à la circulation cérébrale avec les

nombreuses questions physiologiques et pathologiques qui en

découlent. Le dernier chapitre sur le bulbe rachidien et la moelle

fait apprécier'en songeant aux précédents traités d'anatomie,

combien il était temps qu'une nouvelle revue d'ensemble fût faite

sur cette question.

La seconde partie, réservée au système nerveux périphérique,

relate toutes les recherches récentes relatives aux nerfs crâniens

au point de vue de la physiologie et de la pathologie. Charpentier.

X. Traité clinique du diagnostic des maladies de l'encéphale basé

sur l'étude des localisations; par Hermann NOTHNAGEL, traduit t

par P. Kéraval. - (Paris, 1885. Adrien Delahaye et Emile Le-

crosnier, éditeurs.)

Ce livre est un traité essentiellement clinique s'appuyant sur

les faits que fournit l'observation rapprochée des résultats de

l'autopsie pour faire le diagnostic topographique des lésions en

foyer de l'encéphale. La physiologie est ici reléguée au second

bibliographie. 413 3

plan, l'auteur se réservant de traiter cette question à part, parce

qu'il trouve qu'en définitive les faits cliniques seuls ont une im-

portance prépondérante en matière de pathologie humaine. Ob-

servation rigoureuse du malade avec autopsie complète, analyse

de chaque cas particulier, comparaison de tous les faits entre eux,

telle a été la règle de conduite de M. Nothnagel. Le choix des

observations a eté fait avec le plus grand soin, l'auteur recher-

chant de préférence les hémorrhagies ou ramollissements d'an-

cienne date, et se montrant très circonspect à l'égard des ménin-

gites même circonscrites, des encéphalites aiguës,des tumeurs, etc.

Nous regrettons de ne pouvoir donner ici une analyse com-

plète de ce traité spécial ; nous nous contenterons d'avoir indiqué

l'idée qui y préside. Dans une première partie M. Nothnagel

étudie la symptomatologie spéciale, chaque chapitre comprenant

l'exposé des observations, leur analyse, leur comparaison et les

déductions à en tirer.

Une seconde partie renferme un essai de séméiologie sur l'im-

portance de chacune des manifestations symptomatiques, symp-

tômes de déficit, phénomènes d'arrêt, phénomènes d'excitation

pour le diagnostic local, la localisation des lésions. Nous devons

savoir gré à M. Kéraval d'avoir voulu vulgariser dans notre pays

ce livre indispensable à tout médecin s'occupant de la pathologie

du système nerveux; plus que tout autre, par ses études spéciales

en neurologie et la connaissance approfondie de la langue alle-

mande, il était à même de mener celte lâche abonne fin. Sa tra-

duction tout en restant aussi conforme que possible au texte pri-

mitif, est écrite dans un style simple et facile qui en rend la lec-

ture singulièrement attrayante. - Mais M. Kéraval a fait plus

qu'oeuvre de traducteur ; il a semé au courant du livre de M. Noth-

nagel de nombreuses notes originales et il l'a mis, si l'on peut

dire, au courant de la science par les indications bibliogra-

phiques et le résumé des observations principales parues depuis

sur la matière. Signalons enfin l'excellente idée qu'il a eue de

joindre au texte un atlas d'anatomie normale des centres nerveux,

permettant au lecteur de se retrouver, sans effort d'esprit, dans la

topographie cérébrale et de déterminer rapidement le siège des

lésions en foyer successivement passées en revue dans le cours de

l'ouvrage. J. SI : GLas.

XI. La possession de Jeanne Féry, religieuse professe du couvent

des soew's noires de la ville de Mons (1584). [Bibliothèque Jil,bo-

lique). In-8° 1886. Aux bureaux du Progrès médical et chez Le-

crosnier, éditeur.

L'étude rétrospective de manifestations morbides n'a pas seule-

414 4 bibliographie.

ment un intérêt historique. On peut dire qu'elle apporte un

appui à la clinique, en ce sens qu'elle lui fournit des faits décrits

en toute sincérité par des observateurs non prévenus ; et lorsqu'il

s'agit de l'hystérie ces faits acquièrent une importance de pre-

mier ordre. Il faut donc louer M. Bourneville d'avoir pris l'ini-

tiative des publications relatives à l'histoire si riche de faits des

manifestations névropathiques, etconsidérées autrefois comme de

nature miraculeuse. Le succès des ouvrages précédemment publiés,

le Sabbat des sorciers, la Possession de Françoise Fontaine, l'oeuvre

de Jean Wier, est d'un bon augure pour l'accueil qui sera fait à

l'histoire de la Possession de Jeanne Féry, regardée de son temps

comme une victime du démon, et qui, en réalité, était une hys-

térique des mieux caractérisées, chez laquelle on retrouve les

grandes attaques convulsives, le délire, les hallucinations multi-

ples, l'anesthésie, les extases, les sensations viscérales étranges, etc.

Parmi les manifestations les plus intéressantes observées chez

cette malade, il faut remarquerle dédoublement de la personnalité.

La relation de la possession de Jeanne Féry est enrichie des notes

dans lesquelles M. Bourneville a pris soin de mettre en relief Jes

phénomènes plus intéressants, et de les rapprocher des faits de la

pathologie contemporaine. Co. F.

XII. Klinische Psychiatrie (Specielle Pathologie und Thérapie der

GeisLeskrankheiteil); par H. SCxUELE. (Leipzig, z1886. F.-C.-W,

Vogel, éditeur.)

Ce volume représente la troisième édition- de l'HattdLuch der

Geisteskrankheiten de-la collection Ziemssen (2e édition, 1880). J.

Quand M. Schuele fit paraître cet IIandi)uch, il nous souvient d'avoir

entendu critiquer son style et la nature de ses opinions qu'on

qualifiait de métaphysiques. On lui reprochait notamment d'avoir

conçu plutôt un traité de psychologie pathologique qu'un livre

propre à faciliter l'observation des malades. Sa Klinische Psychia-

trie semble être une réponse à ces critiques. Ce livre n'émane plus,

en effet, du remaniement de l'Handbuch de 1880; il constitue un

travail nouveau, tout entier consacré à la description des types

cliniques, de leurs variétés, des complexus séméiologiques et

épisodiques, de l'évolution de chacun d'eux, et du mélange des

modalités morbides, ainsi que de leurs formes de transition;

le pronostic et le traitement correspondants y trouvent égale-

ment droit de cité.

Aussi M. Schuele, après avoir consacré quelques pages aux

généralités, expose-t-il sans plus tarder sa classification. Nous la

ieproduisons.

BIBLIOGRAPHIE. 41,5

416 6 VARIA.

de ses discussions diagnostiques, ainsi que l'a fait M. de Krafft-

Ebing. P. KERAVAL.

VARIA

A propos DE la mort du ROI DE Bavière; par le Dr 1. V. ! \IUNDEY

(Wiener med. Wochenschr, n° 25, p. 910.)

Eviter de voir dans le petit-fils

. - ' les traits autrefois aimés et éloquents

dans leur silence, du grand-p8e.

Ainsi parlèrent les dieux.

(GOETHE).

Aussi bien dans l'histoire générale que dans les mille chapitres

des histoires spéciales de chaque pays, cet événement tragique se

trouve tout à fait isolé et Shakespeare, le peintre génial de la

folie dans les familles royales,' n'eût pas pu trouver un drame

plus poignant. Depuis le livre célèbre d'Erasme « de moria b, jus-

qu'aux ouvrages modernes de psychiatrie, rien de comparable à

cette catastrophe ! C'est une des causes qui rendent difficile d'étu-

dier cet épisode, même superficiellement.

La cause principale aussi est, qu'il en est, absolument nécessaire

d'avoir ici des documents provenant de témoins oculaires; en

même temps, la catastrophe même s'est passée loin de la présence

de ces témoins. Il est donc fort difficile de donner ici un jugement

valable.

Il faut cependant qu'un journal sérieux donne rapidement son

opinion sur un fait si extraordinaire au point de vue médical et

psychiatrique.

La première question à se poser est : Quand a-t-on pu s'aperce-

voir des premières manifestations de l'allection mentale ? ' ?

Nous en savons assez pour répondre que dès l'enfance, plus

encore dans l'adolescence, et progressivement jusqu'à l'âge mûr

(le malade a dépassé la quarantaine), on a pu observer des symp-

tômes morbides.

Les preuves sont innombrables et on les réunit actuellement.

La seconde question est celle de la prédisposition héréditaire.

Ici encore nous pouvons répondre affirmativement, avec mille

preuves à l'appui.

VARIA. 417 Î

Nous avons ainsi résolu Ips deux points cardinaux d'un examen

légal, s'appuyant sur des bases sûres. On pourrait encore sou-

mettre aux experts la.question de savoir comment il s'est fait que

les exécuteurs testamentaires ont pu permettre, à l'époque de

la mort du père, qu'un jeune homme accablé par la prédisposi-

tion héréditaire et déjà malade arrivât au pouvoir, tandis que

l'autre frère, pour des faits cliniquement peu différents, dut re-

noncer au pouvoir et fut interné ?

Bien que la question soit secondaire au point de vue psychia-

trique, elle était cependant justiciable de la médecine légale, à

cause de la grande responsabilité qui incombe à un souverain.

Pareils faits ont déjà été jugés, car le triste chapitre de l'irrespon-

sabilité chez les princes régnants ou non est même, dans les temps

modernes, important.

Il n'est pas du domaine médical d'élever une critique sur ces

faits dont le résultat a été que l'entourage responsable a pu pen-

dant vingt-cinq ans rester spectateur apathique d'une maladie

qui a consommé la perte du chef suprême de l'Etat.

Dans les dix dernières années, et plus spécialement depuis cinq

ans, la maladie de l'illustre aliéné a pris un caractère manifeste-

ment chronique, surtout à cause du genre de vie du roi qui ne fut

contrôlé par aucun médecin : aussi la volonté et une sûre apprécia-

tion des événements devaient-elles être annihilées par l'influence

prépondérante des passions.

C'était là une sorte de secret de Polichinelle (Offent liches

Gcheimniss), et il faut s'étonner qu'il n'ait été fait auparavant t

aucune tentative pour donner une solution équitable à ces événe-

ments.

Il faut, il est vrai, bien se mettre dans l'esprit qu'on ne peut

agir avec des malades exerçant un pouvoir royal et qui tombent

en démence, comme avec des mortels ordinaires. Le respect

témoigné au plus grand personnage du royaume, et bien des diffi-

cultés sociales et politiques, les croyances et les superstitions

d'un peuple loyal, rendent toute action difficile, poussent à la

temporisation et influencent les décisions.

Mais, dans le cas spécial on a temporisé plus que de raison,

semble-t-il, pour employer un terme peu énergique. Qu'il nous

soit permis d'émettre ici notre opinion sur ce qui aurait dû être

fait par l'entourage.

Il semble évident qu'on aurait dûavanttout avertir les autorités

locales du voisinage de la résidence royale, puis, aussi rapidement

et sans éclat, l'entourage et les domestiques du malade.

Auparavant, il y avait lieu d'appeler à la Capitale un ou plu-

sieurs coryphées de pays étrangers, pour que, en collaboration

1 Massgebande dans le texte. -

418 varia.

avec les collègues du pays, ils reconstruisissent l'histoire et l'état

actuel de la maladie, d'où auraient découlé les mesures à pren-

dre.

Nous trouvons extraordinaire que le savant aliéniste choisi par

les gouvernants, ait pu prendre sur lui une telle responsabilité et

ne l'ait partagée qu'avec quelques collègues du pays.

Nous trouvons aussi étrange qu'on ait cru avoir le droit de

traiter comme affaire domestique, ne regardant que le pays même

un événement d'où dépendait la conservation au pouvoir du roi.

alors que depuisdes années le télégraphe et les journaux portaient

journellement au loin les détails sur les particularités de l'exis-

tence royale.

Mais le gouvernement a aussi le devoir de tout mettre en oeuvre

pour obtenir que la lumière complète soit faite sur la forme, la

marche et le traitement convenable de la maladie.

Si dans ce cas tout a été fait, il n'est pas, nous semble-t-il,

encore temps de faire apparaître l'aliéniste avec ses gardiens,

mais bien le prince ou parent le plus agréable au malade. Lui

seul pourra accomplir le triste devoir d'annoncer au moment

opportun la triste nouvelle d'une déposition nécessaire. Ensuite,

il aura encore à présenter les médecins. Alors seulement, lesimé-

decins réunis font le diagnostic et le pronostic pour décider du trai-

dent en connaissance de cause. C'est ce que fit il y a peu de temps

encore une reine intelligente, lorsqu'il fallut prendre un parti au

sujet d'une belle-soeur impériale : aujourd'hui encore elle veille

pieusement à la santé de la malheureuse.

Un roi comme celui de Bavière avait, croyons-nous, le droit de

ne pas être traité selon les formes. On ne va pas se promener

quelques heures après qu'on a déposé un roi névropathe, avec lui

en calèche découverte, en plein jour, dans ses états, car il est

évident que le malade, bien que dûment aliéné, se rendait bien

compte que ce dernier voyage devait le mener à un château,

prison où il devait rester enfermé jusqu'à son dernier jour.

Bien des aliénés agités n'ont jamais atteint le but final ou ont

su, peu après l'arrivée à l' « asile », se délivrer de l'emprisonne-

ment par la violence, mais aucun d'eux ne J'a fait, cela est indu-

bitable, avec plus de préméditation, que le malade célèbre du

château de Berg.

A peine installé a l'asile-château depuis 48 heures, il a exécuté

son médecin, qui était forcé, par son savoir et son devoir profes-

sionnel à le condamner à la prison perpétuelle.

Puis il se donna lui-même la mort dans les flots où jadis son

clair regard aimait à s'arrêter.

Nous donnons ici le rapport' fait sur le terrible événement du

château de Berg. Rarement un cas n'a présenté plus spécialement

. varia. 419 J

un intérêt médical. Non seulement un médecin très connu a dû

partager la mort de son roi aliéné, mais le'sort du roi lui-même

est fort digne de réflexion. Le byzantinisme de la cour lui a fait

refuser pendant des années ce qu'on accorderait au dernier de

ses sujets, des secours médicaux, des soins appropriés et une sur-

veillance suffisante. On a ignoré ou caché des actes dont la plus

petite fraction eût suffi à exiger que Je roi et l'entourage fus-

sent soustraits aux dangers d'une puissance échappant au con-

trôle de l'intelligence et de la volonté. Pendant des années la

folie inconsciente a respecté les actes non contrôlés du roi, jus-

qu'à ce qu'un sujet d'excitation, les difficultés financières, eût

amené cette crise maniaque formidable. Ayant essayé de s'en-

tendre avec son médecin pour exécuter son plan, suicide ou fuite,

et ayant rencontré un obstacle, le malade royal décida de le sup-

primer.

Ou ne peut s'empêcher de considérer les actes du Dr Von Gud-

den comme imprudents. Croyant avoir une influence considé-

rable sur l'esprit du roi il a été trop loin dans l'oubli des pré-

cautions ; c'est ce qui a causé sa mort. Sa mémoire sera respectée

et son nom, non seulement à titre de savant et de médecin,

mais encore à titre de victime du devoir professionnel, honoré de

tous.

Bernard de Gudden est né le 7 juin 824 (il finissait donc sa

soixante-et-unième année), et fut reçu médecin à Halle en 1848.

Après avoir publié quelques travaux dermatologiques, il s'occupa

de psychiatrie et devint en 1855 directeur de l'asile de Werneck,

puis professeur de psychiatrie à Zurich (1869) : de là il fut appelé

en 18ï2 à Munich, où il dirigea en même temps l'asile départe-

mental d'aliénés. Depuis 1870 il a contribué à la publication des

Archives de psychiatrie. Comme directeur il était très humain et

un des premiers partisans du No restraint. Son regard noble, sa

haute stature ont eu une grande influence sur bien des malades

et ont été sans doule cause de son imprudence, qui lui a fait

accepter le désir du roi, d'être délivré de tout gardien. 11 a été

bien puni de sa trop grande confiance !

L'autopsie du corps du roi a prouvé que non seulement il

existait de graves lésions cérébrales, mais encore que l'état durait

depuis longiemps.

En voici le résultat :

Longueur du corps 191 centimètres, périmètre thoracique 103

centimètres, pannicule graisseux fort : musculature et déve-

loppement corporel très robustes. Le cadavre est un peu gonflé

à la face et au cou, la peau du crâne et des oreilles bleuâtre, à la

partie postérieure des membres et du corps des sugillations cada-

vériques diffuses. Pas de blessures, à l'exception de quelques éra-

420 varia.

tlures du genou. La langue est pincée entre les dents, ces dernières

en mauvais état.

La peau du crâne est très épaisse et gorgée de sang, le crâne

petit par rapport au corps, et un peu asymétrique. Le diamètre

diagonal depuis le front à gauche à la partie postérieure du

crâne est long de n,2 centimètres, le diamètre allant d'en avant

à droite en arrière à gauche est de 17,9 centimètres. Calotte

crânienne très mince, épaisseur maxima 3 millimètres. Les sutures

coronaires et sagittales ossifiées à la face interne. Une série

d'exostoses se trouvent à la partie interne du frontal. Le sinus

longitudinal supérieur s'élargit fortement en arrière, et se rétré-

cit vers l'avant d'une façon remarquable. Beaucoup de granula-

tions de Pacchioni entrant dans la lumière du sinus. La dure-

mère est très épaissie surtout vers le frontal, elle contient beau-

coup de sang et à l'intérieur elle est rude au toucher et villeuse.

Sur la selle turcique une exostose de 2 millimètres de hauteur.

Le rocher gauche présente un promontoire ayant un diamètre

d'un centimètre à la base correspondant à un enfoncement du

lobe temporal du cerveau. La selle turcique est asymétrique,

épaissie, poreuse et cassante; il en est de même du plancher des

fossettes antérieures. Les sinus de la base sont tous pleins d'un

sang noir liquide.

Poids du cerveau sans la dure-mère 4,349 grammes. Arachnoïde

épaissie sur de grands espaces. Sur le lobule paracentral gauche

antérieur et au commencement de la première frontale l'arach-

noïde et la pie-mère sont soudées sur une surface grande comme

une pièce d'un marc, et fortement épaissie. La pression de ce

bourrelet a aminci la voûte crânienne réduite à cet endroit à

l'épaisseur d'une feuille de papier. A la surface du cerveau, régu-

lièrement distribuées de chaque côté, on trouve des portions de

circonvolutions atrophiées, surtout au commencement des trois

frontales à l'extrémité médiane de la frontale antérieure et dans

le voisinage de la partie moyenne du sillon post central ( ? ) La

masse du cerveau gorgée de sang et assez molle.

Autres organes. Pas d'adhérences pleurales; poumons normaux

en dehors des effets provenant de l'aspiration d'eau. Coeur un

peu hypertrophié, mais bien musclé et peu de surcharge grais-

seuse. Catarrhe chronique de l'estomac qui contient encore des

aliments non digérés. Parois abdominales et foie congestionnés,

rate agrandie (en voie de décomposition), reins grands, très cya-

noses mais normaux.

FAITS DIVERS

Concours DÉ l'Internat DE la Maison nationale DE CHAAENTON. -

Un concours pour trois places d'internes à la Maison nationale

de Charenton a été ouvert le '26 juillet au ministère de l'Intérieur.

Le jury était composé de MM. les" Christian, Ritti, du Mesnil,

Ladreit de Lacharrière, Damalix. Sur quatre candidats inscrits,

trois seulement ont pris part aux épreuves, le quatrième n'ayant

pas répondu à l'appel de son nom.

Les épreuves comprenaient : une composition écrite de trois

heures sur un sujet d'anatomie et de physiologie du système ner-

veux ; une épreuve orale d'un quart d'heure sur une question de

pathologie externe et une de pathologie interne.

La question écrite tirée au sort était le nerf facial, anatomie et

physiologie. Les autres questions mises dans l'urne étaient : Nerf

pneumogastrique, anatomie et physiologie. Bulbe rachidien, anatomie

et physiologie.

Les épreuve orales faites le 28 juillet se composent des questions

suivantes : Signes et diagnostic de la fièvre typhoïde. Diagnostie de

la hernie inguinale. Attaque d'épilepsie, fracture de la clavicule.

Symptômes et diagnostic de la pleurésie aiguë. Fractures des côtes.

La question traitée par les candidats était : Signes et diagnostic

de la fièvre typhoïde et diagnostic de la hernie inguinale. A la suite

de ce concours, MM. Champeil, Doucet et Ferrière ont élé nommés

pour trois ans internes de la Maison nationale de Charenton.

Ecole d'infirmières DE l'asile DE Ville-Evrard. M. le Dr Espian

de Lamaeste, médecin-directeur de cet établissement, a organisé'

les cours au commencement du mois d'octobre.

Hospice DE UICTRE : CO4COURS. - Conformément aux votes du

Conseil général de la Seine et du Conseil municipal de Paris, le

service de M. Bourneville à Bicêtre, comprenant les épileptiques

adultes, les enfants idiots, imbéciles, arriérés, épileptiques,

hystériques et pervers, va être dédoublé le 1er janvier prochain.

Il s'ensuit la création d'une nouvelle place de médecin aliéniste

qui sera mise au concours soit à la fin de décembre, soit au com-

mencement de l'année. Avis aux candidats.

422 -) faits DIVERS.

La dormeuse de la SALPÈ'rRIÈRE. - Les journaux politiques ont

beaucoup parlé il y a deux mois, comme d'une nouveauté

d'un cas extraordinaire, d'une malade de la Salpêtrière, nommée

Eudoxie Hé.... Or les cas d'attaques de sommeil sont assez fré-

quents chez les hystériques, ainsi que nous l'avons montré dans

le tome III de l'Iconographie de la Salpêtrière (pages 1 à 145),

volume dans lequel nous avons rapporté tout au long l'histoire de

la dormeuse de la Salpétriére.

Folie RELIGIEUSE. On écrit de Vals-les-Bains : Un étrange

maniaque habitant Vals-les-Bains a été interné aujourd'hui. Un

sieur Jean Arlaud, qui depuis quelques années avait le cerveau

dérangé et était atteint de la folie de la persécution, s'imaginait

conjurer les mauvais esprits en accomplissant un singulier pèle-

rinage chaque année le vendredi saint. Il se rendait à Burzet, et

là, restant vêtu seulement d'une chemise, pieds nus, chargé

d'une croix, il montait au Calvaire.

Et chose à laquelle on ne voudra peut-être pas croire, il y avait

sur le parcours un individu qui l'accompagnait à coups de fouet.

... Et, à chaque coup, Jean Arlaud lui demandait de frapper encore

plus fort.

Quelques personnes ont prévenu la gendarmerie et, cette

année, la population a été privée de cette triste scène. Le malheu-

reux Jean Arlaud était d'ailleurs atteint d'une crise plus violente

que de coutume.Il saccageait toute sa maison, prétendant chasser

le diable. Les gendarmes ont eu beaucoup de peine à s'emparer

de lui. Cette victime de la folie religieuse a été internée à l'asile

de Privas. (Lanterne, mailles faits de ce genre ont un intérêt,

au point de vue de l'influence des idées religieuses, sur la pro-

duction de la folie.

SUR LA. statistique des maladies NERVEUSES ET mentales EN RUSSIE.

- Dans sa communication à la Société des Aliénistes de Saint-

Pétersbourg (séance du 21 décembre 1885), le Dr Hertzenstein a

présenté les résultats de ses recherches sur la statistique des ma-

ladies nerveuses et mentales en Russie. L'absence absolue des

documents immédiats à cet égard l'a fait recourir à une méthode

indirecte, notamment à l'énumération des malades de ce genre

parmi les conscrits. C'est ainsi que se fondant sur les comptes

rendus du Département médical relativement à l'état de santé

psychique des conscrits convoqués pendant quatre ans (48ï9-1882),

il a trouvé que sur 1,617,413 jeunes gens âgés de vingt et un ans,

15,72'i ont été reconnus comme atteints de maladies mentales ou

nerveuses, c'est-à-dire 9,72 p. 100. Prenant ensuite le rapport

pour chaque année séparément, M. Hertzenstein trouve qu'il est,

à peu de chose près, le même; il oscille entre 10,04 p. 100 et

FAITS DIVERS 423

9,58 p. 100. Ces considérations permettent à M. Herizenstein de

conclure que vu la constance (approximative) du rapport indiqué,

le peuple russe est exposé à une série de causes constantes qui

déterminent chez lui un nombre presque invariable des maladies

de dégénérescence ( ? ). (Wrutch, na 5, 1886, Saint-Pétersbourg.)

Ecole d'infirmières pour LES aliénés. - Une école d'infirmières

pour les aliénés a été établie par les directeurs du Iludson River

State hospital. Cette école est fondée puur l'instruction de celles

qui désirent prendre une specialité pour les aliénés soit dans les

maisons privées, soit dans les institutions publiques. Les infir-

mières pourvues du diplôme pour les hôpitaux généraux seront

admises à l'école pour une période d'une année à la fin de

laquelle après avoir passé un examen suffisant, elles recevront un

diplôme portant le cachet de l'hôpital et les signatures du prési-

dent du bureau, du directeur, du personnel médical et du directeur

de l'école. Elles seront payées 100 fr. par mois durant les six

premiers mois, et 125 fr. pendant les six autres mois. Pour celles

qui resteront au service de l'hôpital après ce laps de temps, il y a

des taux de rémunération spéciaux.

Les femmes entre vingt et trente ans qui n'ont pas le diplôme

de l'école pour les hôpitaux généraux, seront admises à l'école, et

recevront une instruction pendant deux ans. Après un examen

suffisant à la fin de cette époque, elles recevront un certificat

portant les mêmes signatures que le diplôme. Elles recevront de

50 à 85 fr. par mois suivant leurs progrès et le temps et la valeur

de leur service. Des appointements spéciaux seront accordés

après l'obtention du certificat pour le service de l'hôpital. En

rapport avec l'hôpital il y a aussi une école pour les hommes de

vingt à trente ans. La durée de l'instruction est de deux ans à la

fin desquelles des certificats sont accordés sur la preuve de leur

capacité. Les hommes sont payés de 80 à 140 fr. par mois sui-

vant les progrès et le temps et la valeur des services. Des arran-

gements sont faits avec ceux qui restent à l'hôpital après l'ob-

tention de leur certificat. Tous les élèves sont nourris, logés,

blanchis et soignés en plus. Les candidats à l'admission à l'école

doivent passer l'examen préliminaire réclamé par la commission

du New-York civil service. Cet examen est passé à l'hôpital par

les chefs de l'établissement qui constituent la commission provi-

soire d'examen. Les candidats doivent être d'une bonne consti-

tution, de moeurs sobres et morales; ils doivent présenter des

lettres certifiant leurs moeurs et leurs qualités de deux sources

honorables ou plus. Les diplômes de l'école d'infirmières sont

reçus à la place des lettres. Pour l'instruction des femmes, les

directeurs se sont assurés les services de Miss S. 1. Hawley, une

gradée de l'école de Bellevue-liospital avec une grande expé-

424 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

rience dans les hôpitaux d'aliénés. En qualité de maîtresse de

l'hôpital et de directrice de l'école, elle donne tous les jours des

leçons au lit du malade et fait des cours. (The med. Record N.-Y.,

25 sept. 1886.)

Hôpital pour les épileptiques. - Un hôpital pour les épilep-

tiques vient d'être créé récemment à Baldwinsville, état de Massa-

chusets, aux Etats-Unis. Les bâtiments qui coûtent environ 5,000

dollars (29,0001 fr.), contiennent quatorze chambres pour les ma-

lades et seront consacrés au traitement des enfants épileptiques.

(The New-York Méd. Journ., 23 oct.).

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE

La Possession de Jeanne Ferez, religieuse professe du couvent des Soeurs

noires de la ville de Mons (1584). Un volume in-8° de 112 pages, papier

vélin, prix : 3 fr. Pour nos abonnés, 2 fr. 50. - Papier parcheminé :

prix : 4 fr. Pour nos abonnés, prix : 3 fr. Papier Japon, prix : 6 fr.

Pour nos abonnés, prix : 5 fr. Ce volume, publié par la librairie du l'ro-

grès Médical, est le quatrième ouvrage de la Bibliothèque diabolique (Col-

tection BournevnIe).Lesouvrages précédents sontparordredepubUoation :

9 Le Sabbat des sorciers; 20 La Possession de Françoise Fontaine;

3° Histoires et disputes des démons et sorciers, par Jean Wier.

FÉRÉ (Ch.). - Traité élémentaire d'anatomie médicale du système ner-

veux. Volume in-8° de496 pages, avec 213 ligures dans le texte. Prix :

10 fr.. Aux bureaux du Progrès Médical, 14, rue des Carmes. Pour nos

abonnés, 7 fr. ,

BURCKHARDT (E.). - Trente-septième rapport sur la Maison de santé de

Préfar,gier (exercice 1885). Brochure in-8° de 26 pages. Neuchâtel,

1886. H. Wolfrath et C'e.

SOCIÉTÉ DE MÉDECINE MENTALE DE BELGIQUE. - Congrès de

phréniatrie et de neuropatologie, tenu à Anvers du 7 au 9 septembre 1885,

sous la présidence de M. le Dr V. DEsGuiN. Statistique internationale

des aliénés, par le professeur LEFEBVIIE. Relations entre la criminalité

et la folie, par le 1) SemaI. - Mémoires divers. Volume in-6a de 38 ?

pages; Gand, 1886. Imprimerie Eug. Vanderhaegnen. ·

VULPIAIQ (A). - Maladies du système nerveux (moelle épinière). Leçons

professées à ls Faculté de Médecine. Tome second. Volume in-8° de

798 pages. Prix : 16 fr. L'ouvrage complet, 2 volumes : 32 fr.

Le rédacteur-gérant, Bourneville.

TABLE DES MATIÈRES

Abstinence, 63.

Activité volontaire (action du

nitrite d'amyle sur l'), par

Tippel, 92.

Alcool comme boisson dans les

asiles, 71.

Alcoolisme chronique (exaltation

dans 1'), par Fox, 69, il I.

Aliénés (temps des processus

psychiques simples chez les),

par de Tschisch, 9 t ; - (trai-

tement de la sit : ophobie chez

les), 92; - (électricité chez

les), 100.

Amnésie rétroactive, 377. 1

Amblyopie hystérique, par Ili-

lier, 1»-)6.

Anatomie médicale du système

nerveux (trai té d'), pdrCh, Fét'é,

413.

Anesthésique (leur influence sur

la nutrition), par Drapier,

1 28.

Aphasie, par Balzer, 58; (et

démence), 79; - (et per-

ception), par Grashey, 88,

'23 ? 234.

Asile (d'Andernach), 64 ; z

(cours pour les infirmiers d'),

18; - (de Cadillac), 191 ; -

(de la Seine), 131 ; - de

Pierrefeu), 132;- (Concours

pour les - de Paris), 132;

(de Charenton), 132; (écoles

d'Infirmières de l' - Sainte-

Anne), 258.

Assistance des aliénés en Espa-

gne, 62.

1 Ataxiespinale (théorie del ? t 1 5.

Atrophie musculaire juvénile,

214.

Atrophie musculaire dans les

paralysies des hystériques, par

Babinski, 1,154.

Autopsie du roi de Bavière,

135.

Boldo-glucine (recherches expé-

rimentales et cliniques sur

l'action somnifère de la ! , par

Juranville, 127.

Borax dans le traitement de

l'épilepsie, 244.

Buveurs (névrite multiloculaire

chez les), 229.

Cachexie p;lChydermiqul1( et idio-

tie), parlJoul'l1evilie et Bricon.

137, °,39; - opératoire, 353.

Cannahinone, 253.

Catatonie, 250.

Cécité et hemichorée, par Hal-

lopeau, 59.

Cérébrales (localisations dans

l'herpétisme), par OEttinger,

60.

Cerveaux de criminels et de

suicidés, par Flescli, 89..

Chaleur (action de la sur les

centres respiratoires et circu-

latoires), 104.

Chirurgie du cerveau, 382.

Chorée (nature et traitement

de la), par Saric, 124; étio-

tosie de la), par Saguet, 126.

Cocaïne dans le sevrage de-

ARCHIVES, t, XII. -"

46 6 TAllLI. DES MATIÈRES.

morphinomanes, par Erleu-

meyer, ! JO,

Commissure postérieure du cer-

veau, 107.

Commotions cérébro-spinales,

237. -

Compression du cerveau, 210.

Congrès des naturalistes et mé-

decins allemands, 401.

Convulsions réflexes statiques,

210.

Corps calleux (fonctions du),

211.

Cràne (fracture du), 65.

Crime et folie, 240.

Criminalité congénitale (identité

de l'épilepsie, de la folie mo-

raleavecla), par Lombroso,90.

Dégénérescence dans la folie,

244.

Délire systématique hallucina-

toire, parMayser, 85.

Démence et aphasie, 79.

Diphthéritiques (paralysies), 223.

Dormeuse de la Salpêtrière, 422.

Dyscrasies, névroses et psycho-

ses, par Mueller, 90.

Egypte (note sur 1'), 86.

Électricité (folie guérie par 1'),

68; -(chez les aliénés), 400.

Électrothérapie (questions de

principe en), par ltiueller, 91,

405.

Encéphale (traité clinique des 1.

maladies de l'), par Noth nagel,

414.

Épilepsie (et arthritisme), 57;

(base anatomique de l'), par

Ilay, 60-, (trépanation dans

1'), par Erlenmeyer, 98;

(symptomatologie de l'

bénigne), 242; (alcoolique),

243; - (congestive), 244;

(traités par le borax), 244.

Épileptique (folie), par Fischer,

61; (automatisme), 241.

Ergotine et paralysie de Landrv,

101.

Érysipèle et psychose, 80.

Ether (paralysie par injection

sous-cutanée d'), 101 .

Évasions des aliénés, 85.

Facial inférieur (origine corti-

cale du), par Raymond, 58.

Faciale (paralysie), compliquée

de zona, 212.

Fibres nerveuses à myéline des

organes centraux (procédé de

coloration des), 105.

Folie (guérie par l'électricité),

par Robertsou, 68; - (circu-

laire), pal' Packer G9; (gé-

mellaire), 73, 78; (avec lié-

michorée posthémiplégique),

73; - (enquête collective sur

les causes de la), par Major,

75; (impulsive), par Green,

79; (transitoire), par Krallt

Ebing, 82; - (troubles de la

motilité volontaire dans la-

simple), par Roller, 83 ;

aiguë mortelle), 84; - (héré-

ditaire), ? 4G, 247, 400; reli-

gieuse), 422. ' ,

Formation réticulaire du bulbe

et de la protubérance, 105.

Gaucher (lésion du lobe tempo-

ral gauche sans aphasie chez

un), 124.

Gémellaire (folie), 73, 78.

Génital (inversion du sens), 83.

Genou (recherches du phéno-

mène du), 128.

Grossesse et psychoses, 8 I .

Guérisons inattendues, par Wil-

lett, 72.

Hallucinations (variabilité des),

parKoch, 84.

Hémianesthésie et hémichorée,

58.

Hémianopsie latérale gauche 234.

Hémichorée, .59 : - Iposlhémi-

plégique et folie), 73.

Hérédité directe des maladies

mentales, par Sioli, 187.

Hémorrhagies-cutanées par auto-

suggestion, par llabille et

Ramadier, 54.

Hypnotisme (de 1'), par Jendras-

sik, 43.

'l'.lltLti LU : MATIÈRES. 427

Hystérie (traitement de l'atta-

que dl par Ruault, 99; -

(dans les troupes russes), par

Oseretkowsky, 265.

Hystériques (paralysies), I, 154;

- (amblyopie), par lIitier,

126; - monoplégie hystéri-

que guérie par suggestion,

par Voisin, 202.

Idiotie avec cachexie pachyder-

tttique, par l3ournevUle et liri-

eoti, 157, 192.

Incohérence, par Konrad, 81.

Inconnu, 256.

Injections sous-cutanées dans

les psychoses, 101 .

Inversion du sens génital, par

Kralft Ebing, 83.

Laryngés (troubles - dans les

atleclions du système nerveux

central), 119.

Lectures (troubles de la chez

les paralytiques généraux), 67.

Liquide céphalo-rachidien, 402.

Localisations méningées et encé-

phaliques des affections catar-

l'hales, par ltaymoud, 59.

Localisations cérébrales (fait t

pour servir à t'histoire des),

par llomen, 204.

Manie aiguë (avec troubles du

langage), par llitchell, G9; -

(chez un garçon de treize ans),

par Strahan, 7U.

Méningite suppurée, 57; - (tu-

berculeuse), 59 ; (cérébro-

spinale chronique), 60.

Mentaux (troubles dans les

affections cérébrales ordinai-

res, par Gasquet,'70.

Morpfnomanes (de la cocaïne

dans le sevrage des), 99.

Motilité volontaire (troubles de

la - dans la folie simple),

par lioller, 83.

Myélite subaigue des cornes an-

térieures, pur Dufourt, 57.

Myélite (chronique), 57; (dif-

fuse), par Raymond, 58.

Nécrologie : Gudden, 133.

Nerf accessoire de Willis (ori-

gine centrale du), 104.

Nerf médian(paralysies du), 226.

Névralgie de la cinquième paire

avec troubles trophiques, -1 14.

Névralgie des plexus lombaire et

sacré, d'origine traumatiqne,

par Tricard, 1 â.

Névrite (optique dans la sclé-

rose multilnculaire), Il` ? , 12 ? ;

(multiloculaire chez un al-

coolique), 416; - (au triju-

meau), I 1S ; muitiloculaire

avec athétose), 13 ; - (réné-

ralisée), 224; - (multiples),

225; - (multiloculaire chez

les buveurs), 229.

Névrose consécutive à un acci-

dent de chemin de fer, 113.

Nitrite d'amyle (influence du

- sur l'activité volontaire),

par Tippel, 92.

Nominations et promotions, 262.

Olives (couche intermédiaire

des), 103.

OphLhalmoplégie (et épicanthus),

222, 223.

Optiques (origine des nerfs), 40 1.

Oxyde de carbone ( troubles

nerveux à la suite de l'em-

poisonuement par 1'), 216.

l'achyméningite et paralysie gé-

nérale, par Savage, 73.

Paralysie (de Landry, guérie par

l'ergoline), 101 ; (par in-

jecliollssous-cutanées d'éther,

101 ; -(bulbaire avec sclérose

latérale), 112 ; - (cas de spi-

nale ascendante aiguë de Lan-

dry), par Soudeykine, 197; -

(diplitliéntrques), 223 - (sa-

turnine), 238; -(syphiliques),

409.

Paralysie générale (troubles de

la faculté de lire dans la), 67 ;

- (et sclérose latérale), 71 ;

- (et pachyméningile), 73;

- (et syphilis), 80, 86 ; - (lé-

sons épendymaires dans la),

. 428 TABLE DES MATIÈRES '

par Friedmanu , 80 ; (ré-

missions dans le cours de la),

par Larroque, 125 : - (histo-

logie pathologique), 403.

Paralysies hystériques, 1, 154.

Pendaison (tentative de suicide

par) ; - (amnésie rétroactive,

modifications du délire), 377.

Pédoncules cérébelleux, 107.

Persécution (idées de), 73.

Pinéale (tumeur de la glande),

228.

Playfair (traitement de), 253.

Poliomyélites, 122.

Porencéphalie et idiotie , par

Otto, 62.

Portes ouvertes (système des),

par Campbell, 72.

Possession de Jeanne Féry, 415.

Protubérance (lésions de la),

227.

Psychiatrie clinique, par Schuele,

414. ,

Psychoses (et érysipèle), 80 ;

(et grossesse), 81 ; (injec-

tions sous-cutanées dans les),

dans les simples), 406.

Pupilles (réaction des), 4 16.

Restiforme (corps), 108.

Rhéostat transportable, 98.

Roi de Bavière (mort du), 416.

Ruban de Reil (anatomie du),

102, 110.

Sclérose (latérale et paralysie

générale), par Savage, 71 ;

(latérale avec paralysie bul-

baire, 112; (systématique

combinée), 209 ; (latérale

amyotrophique), 226 ; - (com-

binée), 233 ; (multdocu-

laire), 236.

Sensibilité (forme nouvelle de

troubles de la dans les lé-

sions unilatérales du cerveau),

230.

Sitiophobes (échanges nutritif

chez les pendant les pério-

I des d'abstinence), par Tuczek,

63.

Société psychiatrique de Ber-

lin, 249.

Société de psychiatrie et de ma-

ladies nerveuses de Berlin, 4 10.

Société médico-psycliologique,

134, 24 ? 400.

Société de tempérance, 135.

Suggestion ( hémorrhagies cu-

tanées, par auto-), 54; - (mo-

noplégie hystérique, guérie

par), par A. Voisiu, 202.

Suicide dans les asiles d'aliénés,

par Hasse, 65 - (surveillance

relative aux tentatives de) ,

78. j

Suicidés (cerveaux des), 89.

Syphilis et paralysie générale,

80, 86.

Système nerveux central (ana-

tomie pathologique du), 217.

Tabes (combiné ataxo-spasmodi-

que ou sclérose postéro-laté-

rale de la moelle), par Gras-

set, 27 ; (anatomie patbo -

logique du - dorsal), ), r15;

(étiologie et symptomato-

logie du), 219 ; -(dorsal illu-

soire), 280. ,

Tétanos céphalique, 111.

Thomsen (anatomie pathologi i

que de la maladie de), 221

222.

Trépanation dans l'épilepsie

98. I

Tubercules quadrijumeaux (au

tomie des), 102. I

Tumeurs (syphilitiques des m'

ninges cérébrales), 231 ; -r.

(sarcome du lobe frontal), : 1.2 1 !

233, 235. I

Typhoïde (épidémie de fièvre -J

à l'asile d'Osiiabruck),. p

Ratai, 66. j

Visuel (des incitations et coinc

talions des divers district

homonymes du champ), 40

TABLE

DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS

Adamkiewicz, 204, 213, ? 19.

AILhaus. 225, 231, 241. y

l3abinshi, 4,154.

Balzer, 58.

Bechterew, 1 Oï, 107, 4 08.

Bernhardt, 112, 2111, 220, 222,

226.

131nswaner, 403.

Bourneville, 137.

Rréda. 37 7.

Bricon, 137.

Briand, 247, 249,401.

Brousse, 59.

C1JllIpbell, 72.

Charpentier, 414.

Christian, 246.

Darkschewitsch, 102, 904-f07.

Delasiauve, 246.

Demme, 411.

Deny, 57, 58, 59, fi0, 244.

Drapier, 128.

Dufour, 24G.

Dufourt, 57.

Dukoii, 40.

1.r1, 209, `> I 5, 224 .

Erlenmeyer, 98, 99, 204.

Erlitzky, 203.

Eulenburg, 212.'

Falk, 257.

Feilchenfeld, 228. z

Féré, 60, 99, 125, 126, 127,128,

z.

Fischer,6t.

Flescli, 89.

Folsam, 244.

Fox, 69.' - '

Freud, 403, : 4f0.

Freusber ? 406.

Friedroann, 80, 105.

Froenk'el, 244.

Gasket, 70.

Goldstein, 86, 104.

Grashey, 88,402, 406.

Grasset, 27.

Greene, 79. ·

Gudden, 401.

Guttstadt, 256.

Haddcn, 60.

lladlicli, 41-I.

Hallopeau, 59.

Ilardiue, 216, 241.

liasse, 63.

Hav, 60.

Ilebold, 64, 232.

Hecker, 98.

lleydeu, 100.

Ilirschber2, 4 12, 222.

llitier, 126.

Homen, 199, 225.

llorsley, 384.

Iraclidy, 98.

Jastrowitz, 257.

Jendrassik, 43, 228.

Juranville, 127.

Kéraval, 62, 63, 64, 65, 66, 67,

68,80, 81, 82, 83, 84, 85, 86,

87, 88, 89, 90, 91, 9°3, 98, 99.

100, 101, 102, 103, 104, 105,

106, -107, IOS, 409, 124, 210,

211, 21>, 213, ,.114,21, 216, ? 1 S, ? I 9, 220. 221,222.223,

224, : 2 5, 226, 227, 228, 229,

230, 232, 233,234, 236, 237. ? 38, 239, 243, 24 ? 257, 49 3, 4-I G.

430 0 TABLE DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS.

Knecht. 250, 253. '

Koch, 84.

Konrad, 81. "

Koschewnikofr, 226. ,...

Kowalew«ky,220, .'

Kraffl-Ebing, 8 ? 83.' '

Iirause, 4 19, 121. · -

Krauss, 215.

Lancereaux, 60.

Landerer, 80.

Larroqne, 1 ? i.

Lévy, 84. .

Lewis (Bevan), 73.

Lilienfeld, 44.6. 1

-Liman, 123. ? ?

J,issauer, 218. '. * - -

l,aehr, 2 : i3. "

f.om broso, 90.

Loewenfeld, ` ? 13, 22L

Mabille, 54.

. Mac Dowall, 73.

Magnan, 247.

Major, 75.

Mayser, 85.

Mendel, 86, 223.

merlin, 243.

111erzejewshy, 227.

nlitchell, 69.

lI1oeli, 11 G, 243.

Monakow, 102, 4,1p.

Mossdorf, 214.

Mueller, 90, 91. -

Musgrave-Clav (de), 68, 09, 'i0,

7f, 'i ? 13,74, 78,79, 80,.

Nasse, 101.

Neumann, 101.

Nickle, 78.

Nolhnagel, 414.

OEttinrer, 60.

Oppenheim, 114,111,119, 122,

.) 23.230, 237.

Oseretkowsky, 26.

Otto, 63.

Pallier, 69.

Pereltif 81.

Pflueger, 404.

Pilliet. 61, 242, 345.

Poehtzoeus, 236.

Ralihas, 67.

Ramadier, 54.

Ranke, 410.

Bannie, 79.

Ryh; 118.

Raymond, 38. .

Remhard; 80, 2,1 J.

Remak, 112. 116, 119, 212,224.

Ribalkitie,"209.

Ritti, 246.

Robertson, 68.

Roller, 83.

RosenLach, 227.

Ruault, 99. ^ ,

Rumpf, 217, 409.

Sa¡ ! l1e t, 4 6.

Saui3èr, 118 ?

Saric, 12 Í.

Savage, 71,73, 78.

Schlager, 85.

Srhmltz, 62.

Schuele, 414.

Schultze, 219. 238.

Schulz, · ! ? 9, 23r.

Sellas, 4,1

Slmlttewortli, 128.

Siemens, 92.

Siemerling, ·I d î, 4 ? 2.

Sioli, 87. Ci1

Skwortzoff ,209, 217.

Sceau. 233. 1

Sorgenfrey, 101.

Suudeylciue, 491.

Stein, 405.

Sttahan, 70.

Teissier, 37. >

Thomsen, 117, 14, 222, .

Tigges, 100. - \,

Tippel, 92. ' ';

Tr'lcard, H5..

Truc. 244. '

Tschisch (de), 51.

Tuczek, 63, - ' .

Tuiez 71.

Uhthoif, 112, 118, 223.

Vel-Ilenil, 59.

Vogelgesang. 233.

Doigt, 219.

Voisin (A.), 196.

Westphal, Il 2, 113, 124, 233.

Willett. 72.

EXPLICATION DES PLANCHES

PLANCHE PREMIÈRE

Fig. 1. - Coupe transversale 'le la moelle. (Intumesc. brachials.)

Fig. 2. Coupe transversale de la moelle (région lombaire).

Fig. 3. - Cellules nerveuses îles cornes antérieures de la substance

grise pu voie de dégénération pynen ! ;rire.

Fig. 4. Les vaisseaux et les cellules nerveuses îles cornes antérieures

de là substance grise.

a, Corne gauche, - b, Corne droite.

432 EXPLICATION DES PLANCHES.

PLANCHE II.

Face interne de. l'hémisphère gauche.

Se. c. ni., Scissure calloso-marginale.

Sc. s.p., Scissure sous-pariétale.

Se. p. i. Scissure perpendiculaire interne.

F. ca., Fissure calcarine.

Se. to.. 1r° scissure temporo-occipitale.

Se. to., 2' Scissure tem poro-occipitale,

F" 1re circonvolution frontale interne.

C. C. C., Circonvolution du corps calleux.

C. Ç., Corps calleux. ? P., Lohule paracentral.

1,. Q., Lobule lluadralalère ou avant-com.

( ? Coin.

'l'o. tr. circonvolution temhoro-occipitale.

Ta" 2' circonvolution temporo-occipitale.

'l ? 3 circonvolution temporale.

p. p. a., Pli pariéto-limhiyue antérieur.

p. P. p., Pli pariéto-lilllbique postérieur.

EXPLICATION DES PLANCHES. 433 3

PLANCHE [[1.

Face externe ou convexe de l'hémisphère gauche

et de l'hémisphère droit.

Se. S., Scissure de Sylvius dont les deux lèvres écartées laissent voir

les circonvolutions de l'insula (,) et les plis temporo-panétanx (¡).

il., Rameau antérieur ascendant de la scissure de Sylvius.

a,, Hameau antérieur ascendant supplémentaire de la mPme scis-

sure.

a,, Rameau antérieur horizontal de cette scissure.

1, Ligne marquant la démarcation entre la 3- frontale et la pariétale

ascendante.

S. lt , Sillon de Rolando.

Sc. p. e., Scissure perpendiculaire externe.

Sc. p. ? Scissure parallèle frontale.

Se ? s., Scissure frontale supérieure.

Se. f. i., Scissure frontale inférieure.

Se. ? Scissure interpariétale.

Se p., Scissure parallèle.

Se. t" 2e scissure temporale.

In. p., Incisure préoccipit,tle,

1). 1)., Pli de passage allant de la 2e .5 la 3e frontale gauche sur lequel

se trouve la petite tumeur t.

L. 0., Lobule orbitaire.

p" l" circonvolution frontale.

F, 2" circonvolution frontale.

F,, 3' circonvolution frontale.

F. A., Circonvolution frontale ascendante. ,

P. A., Circonvolution pariétale ascendante.

P" Pli pariétal supérieur.

'1, Pli pariétal inférieur.

P.3, Pli courbe.

L. oc., Lobe occipital.

7 ? l,e circonvolution temporale.

T,, 2'' circonvolution temporale.

T3, 3e circonvolution temporale.

t3t 4 EXPLICATION DES PLANCHES.

PLANCHE IV.

- Face interne de l'hémisphère droit.

Les lettres ont la même signification que celles de la planche Il, sauf

les suivantes :

e., Incisure ! m'Jovalaire,

d., Sillon parallèle à la scissure perpendiculaire interne allant se jeter

dans la fissure calcarine.

EXPLICATION PES PLANCHES. » - ' 1 MO

1 .. , '

. (' l

PLANCHE V. ' , "

Face externe ou convexe de l'hémisphère droit .

Les lettres ont la même signification que celles de la planche III, il 1'0 : \-

ception de.-) suivantes :

d., Sillon occipital antérieur.

b., Sillon intermédiaire au pli pariétal inférieur et au pli courbe.

c., Sillon divisant le piicombe. -

iUt : : Uf \..1.1. UbuiMiiti, .inp 4186