ARCHIVES
DE
NEUROLOGIE
Í-;vnFUX, 11Pnr\lEn¡E DE CHAULES uo,mssrv.
ARCHIVES
DE
NEUROLOGIE
REVUE
DES MALADIES NERVEUSES ET MENTALES
PUBLIEE SOUS LA DIRECTION Uh : K
.1.-11. CHAHCOT
·8C LA GULLAIIUIIATIU\ IIB
MM. BABINSKI, BALLET, Il ITNAII 131TOT (l ? A.). BLANCIIAIU),
T)owAlltr.;r..), 130(lillEitiAil, BItInNU(al.),I)ILn : oWr.), BIIISSA IID (1(.),
H«0).tA)U))i ! .(P.), ATSAJtAS, ruAltPl : N'rlelt, COTAIID, uruovr. Il (AI.), DELASIAUVE,
DENY, DUItI : T, UU1'Al. (\IATIIIAS), 111t1t11 ? It, GAUTICZ,GIsItIiNTI ? ,
GILLES DELA TOUCHETTE, G011LISAl : L'l', GIIASSET, 1101LI ? , IIUBLI;, lll f.If.lltU,
JENDRA%IK, JOFFIIOY (A.), KAI1X (T.), KI.LLEI1, IuéllA V A 1. (P.), KOJE\HiIKOI'.
LA : 1170117.1', LAN\OIS, LECOKOtH, LEGUAIS, LEMOINNE. 11ABILLr., MAGNAN,
MAillET, MA) ! AN ! )0 1)1,1 1110NT1'I ? L, Jlnltlli, MA 1'<' : III EII, .11 A 1'011, nlllsll ? I : JI ? \1'SIW'.
nIUSGItAI'E-( : LA1', OSCILETIC01\SI>,Y, l'A IIIi\ALJD, PIEIIIII : T, pITIlIIS, 1'01'01'1>',
ltAlIA1711 ? 1t,1(A1'NON17, ILI : GNAItU (l'.). HEGi\AHIJ (A.), IIICIIEII (l'.), SI\GLAS.
SEGUIA (E.-C), SIICO1LS1CY, SOUUI ? 1'ICLNR, SOUZA LCITE,'T'ALnnlON, TAILNO11SK1',
TE1NTlIHlEil (1 : .), TfIIlLII\ (Il.), TIIOISIEII (1 ? .), vAILLAltl7, 1'IGOUROIIX (Il.),
VOISIN (A.), \OISIN (J.), ZOHUAC.
Rédacteur en chef : It()UItNt3vn.LE
Secrétaire de la rédaction : Cil. FÉIIÉ
Dessinateur : LEUBA.
Tome XII. - 1886.
Avec 5 piancues et 24. ligures dans le texte. -
PARIS
B U 1\ EAU UU U P 110 G Il ÈS MÉDICAL L
14, ¡'/le des Carmes.
1886
Vol XII. Juillet 1886. N" 34.
ARCHIVES DE NEUROLOGIE
CLINIQUE NERVEUSE
DE L'ATROPHIÉ MUSCULAIRE DANS LES PARALYSIES
HYSTERIQUES ' 1
Par le Dr J. BABINSKI,
Chef de clinique de la Faculté (le médecine, a Id Salpètrierc '
Il semble que toutes les manifestations possiblesde
l'hystérie aient déjà été signalées et même que leur
nombre en ait été exagéré, car il n'est peut-être pas un
seul trouble fonctionnel qu'on n'ait dans certains cas
rapporté à tort ou à raison à cette névrose. - Pour-
tant malgré la multiplicité des manifestations attribuées
à l'hystérie il est un groupe de phénomènes que l'on
a toujours systématiquement distrait de son cadre en
se fondant sur la nature essentiellement mobile de ses
accidents - elle paraît avoir été considérée jusqu'à
présent comme incapable de produire une modifica-
tion dans la nutrition des tissus ; l'absence de trou-
1 Un résumé de ce travail a déjà paru dans le Progrès médical, an-
née 1886, no 6. -
Archives, t. XII. 1
, , CLINIQUE NERVEUSE.
bles trophiques dans l'hystérie semble constituer un
caractère négatif, qui fait, pour ainsi dire, partie de
sa définition. Le présent travail est destiné à mon-
trer que c'est là une donnée beaucoup trop absolue,
et que tout au '-moins une des* variétés -des troübles
trophiques, l'atrophie musculaire, peut être sous la
dépendance de l'hystérie et être observée dans les pa-
ralysies hystériques. Plusieurs faits observés dans ces
derniers temps à la Salpêtrière ont amené, en effet,
mon maitre M. Charcot, à faire des leçons sur ce su-
jet et à établir ce point. - Nous commencerons par
l'exposé des observations, dont la plupart ont été ana-
lysées par M. - Charcot dans ses leçons cliniques, et
nous chercherons à démontrer que les malades dont il
est question sont, des hystériques, qu'ils sont atteints
de paralysie hystérique, et que l'amyotrophie qu'ils
présentent ne peut être attribuée à une autre cause
que l'hystérie. Après avoir passé en revue ces obser-
vations, nous chercherons, en les comparant les unes
aux autres, à voir si cette amyotrophie offre quelques
caractères qui lui soient propres, et nous essayerons
de pénétrer sa nature intime, son mécanisme.
Observation 1 (résumée). - Jeune homme de vingt et un ans, né
- d'une mère aliénée; d'un caractère très mobile, très irritable;
.sujet à des accès de colère violents, suivis d'hémorrhagies;
fait la campagne du Tonkin où il éprouve toutes sortes de
.souffrances et où il est blessé à la tempe ; il revient du Tonkin
affaibli, mais sans éprouver aucun trouble nerveux, sinon
des maux de tête assez fréquents. Il tombe un jour dans la
. rue brusquement, sans avoir senti aucun phénomène précur-
seur; il perd connaissance; il ne revient à lui que le lendemain
matin, et il présente à ce moment une monoplégie complète du
membre supérieur gauche, avec anesthésie absolue. Cette pa-
de l'atrophie musculaire. 3
ralysie persiste plus de deux mois avec des alternatives- de
flaccidité et de contracture ; elle s'accompagne d'une amyo-
atrophie assez prononcée, qui se développe une semaine en-
viron après le début de la paralysie, et qui a les caractères
électriques de l'atrophie simple. A côté de cette monoplégie,
viennent se grouper d'aubes phénomènes qui sont : un léger
affaiblissement du membre inférieur gauche; des attaques à
formes variées, de nature hystérique, et qui peuvent être pro- '
voquées sous l'influence de la compression de quelques zones;
de l'hénzianestlaésie sensitivo-sensorielle ; du mutisme hys-
térique transitoire ; de la rétention d'urine transitoire. La
monoplégie disparaît à la suite de quelques séances de
massage dans lesquelles on pratique la flagellation dans la
région temporo-pariétale droite. L'amyotrophie ne tarde pas
et s'atténuer à la suite du retour des mouvements.
Cab..., àgé de vingt et un ans, israélite, entre le 16 février
1886 dans le service de M. Charcot, à la Salpêtrière.
Antécédents héréditaires. - Côté paternel. Rien de particu-
lier à signaler au point de vue des affections nerveuses. -
Côté maternel. De ce côté, tous ses parents se distinguent par
un caractère très violent. - Mère a été enfermée pendant
quelque temps dans un asile pour aliénation mentale; elle
était sujette à des accès de colère violents, à la suite desquels
survenaient des hématémèses et des névralgies faciales. -Père
de la mère mort en vingt-quatre heures à la suite d'une atta-
que d'apoplexie. - Soeur du malade morte à la suite de con-
vulsions à l'àge de quatre ans et demi.
Antécédents personnels. - Le malade est sujet, depuis son
enfance, à de violents accès de colère qui sont suivis, comme
chez sa mère, d'hémorrhagies; il sent le besoin de vomir
et il rend du sang par la bouche et le nez. - Son carac-
tère a toujours été très mobile. - Il fait des études clas-
siques au collège de Liège et il va jusqu'en rhétorique.
A cette époque, - il à alors seize ans etdemi -, il devient
éperdûment amoureux, il veut se marier ; mais, ne pouvant
y parvenir, il ressent un très vif chagrin, et sans savoir
pourquoi, il quitte brusquement Liège et vient à Paris. Il
reste à Paris huit jours et s'engage dans la légion étran-
gère - cela se passe en 188>. Il reste un an en Afrique.
4 CLINIQUE NERVEUSE.
A la fin de 1883, on l'envoie au Tonkin. Au' bout
de six mois, il est pris de fièvre intermittente qui dure trois
mois. - Vers cette époque, c'est-à-dire vers le milieu de 1884,
il reçoit à la tempe. gauche une blessure qui paraît avoir été
superficielle, et dont il reste encore une cicatrice déprimée, de
l'étendue d'une pièce de cinquante centimes, douloureuse à
une pression même légère. A la suite de cette blessure, il est
tombé sans connaissance sur le champ de bataille ; il est resté
vingt-quatre heures sans connaissance et pendant quatre jours
il a eu du délire; il est resté une quinzaine de jours à l'infir-
merie pour cette blessure; pendant vingt jours, il y a eu chute
de la paupière gauche. Depuis cette époque, sa mémoire a di-
minué, son sommeil est devenu agité, et il a éprouvé des dou-
leurs de tête assez fortes, limitées au côté gauche, qui ont per-
sisté avec la même intensité jusqu'au mois de septembre 1885.
- A ce moment, le malade a quitté le Tonkin, renvoyé de là
pour cause de faiblesse, il est retourné à Oran, où sa santé
s'est améliorée; les maux de tête ont diminué d'intensité. -
Notons, avant d'aller plus loin, que le malade n'est ni syphi-
litique, ni alcoolique.
- Le 4z8 décembre 1885, le malade va se promener en ville;
il se sent très bien et n'éprouve pas ce jour-là de céphalalgie
ni aucun trouble d'aucune sorte, quand tout à coup, sans avoir
éprouvé préalablement aucune sensation de vertige, sans avoir
senti aucun phénomène précurseur quelconque, il perd con-
naissance et tombe sur le côté droit (ce sont ses camarades
qui lui ont donné ce renseignement). Le jour suivant, à six
heures du matin, il revient à lui; il lui semble simplement
qu'il sort d'un profond sommeil; il ne se souvient aucunement
de ce qui s'est passé la veille et il est très étonné de se trouver
à l'hôpital. En voulant s'habiller, il s'aperçoit qu'il ne peut
plus du tout remuer le membre supérieur gauche. - Le mé-
decin l'examine à la visite du matin. - Le membre supérieur
gauche pendait le long du corps; il était raide, les doigts dans
l'extension; tout mouvement était impossible; la sensibilité
à la piqûre avait complètement disparu; avec la machine à in-
duction, il a senti un peu de douleur; mais, le jour suivant, il
ne sentait plus, du tout le passage du courant électrique. Il
avait sur le bras plusieurs plaques rouges que le médecin a
qualifié, dit le malade, de vaso-motrices. - Le malade a eu
depuis de fréquentes attaques; celles-ci n'ont .as toujours
DE ¡,'ATROPHIE MUSCULAIRE. Ô
eu les mêmes caractères; les médecins ont distingué chez lui,
dit-il, cinq variétés d'attaques; quelques-unes d'entre elles res-
semblaient, d'après les renseignements qu'il nous donne, à
celles qu'il a à la Salpêtrière; nous en indiquerons plus loin
les caractères. L'attitude du membre supérieur a subi de-
puis le début quelques modifications. Les doigts qui étaient
au début dans l'extension, se fléchissaient parfois, et pendant
plusieurs jours, les ongles s'enfonçaient dans la paume de la
main, puis les doigts s'étendaient de nouveau; d'autre part,
le membre était tantôt flasque, tantôt contracturé. Sept jours
après le début de sa paralysie, le médecin lui a appliqué sur
la tempe gauche et sur la région antéro-externe du bras gau-
che des plaques de zinc, et sur la partie antéro-interne du bras
une plaque d'argent. Au bout de vingt-trois heures, il y a eu
un translert de la sensibilité qui a duré neuf heures. Vers la
même époque, c'est-à-dire une semaine environ après le début
de la paralysie, le membre supérieur a commence à s'atrophier.
(le malade affirme que les deux côtés du corps avaient été jus-
que'là semblables et même que le côté gauche était plus fort, car
il est gaucher), et cette atrophie a été en s'accentuant rapide-
ment ; elle a été suivie par le médecin au moyen de mensura-
tions. Le malade remarqua encore, à cette époque, que le mem-
bre inférieur gauche, qui jusque-là avait conservé toute sa
force, commençait à saitaiblir. - Le 6 janvier, à la suite
d'une attaque, le malade est resté aphone pendant trois jours;
l'aphonie u disparu à la suite d'un accès de colère. - 11 a eu
aussi, pendant six jours de la rétention d'urine qui a néces-
sité le cathétérisme. ?
Etat actuel (Examen pratiqué le 19 février 1886). - Le
malade est un nomme d'une taille au-dessus de la moyenne^
à la figure pàle, mais d'une constitution en apparence assez
vigoureuse, à la physionomie exprimant la vivacité et l'intel-
ligence. Ses réponses sont tres nettes, très précises, ne se
contredisant jamais les unes les autres ; il nous a donné tous
les renseignements qui précèdent avec une grande clarté. Voici
ce que l'on observe actuellement chez lui en l'examinant d'une
façon méthodique : '.
Le membre supérieur gauche est complètement paralysé; les
mouvements de l'épaule, du coude, du poignet et des'doigts
sont absolument impossibles. Le bras pend inerte et flasque
le long du corps ; les doigts, sont dans -, l'extension et ils pré,-
si CLINIQUE NERVEUSE.
sentent un peu de raideur. - Le membre supérieur gauche
est beaucoup plus grêle que le droit; la différence est frap-
pante, sans même qu'il soit besoin de recourir à la mensura-
tion, et on la constate facilement, quelle que soit la situation
dans laquelle on place le malade; cette diminution dans le
volume du membre parait tenir principalement sinon exclusi-
vement à l'atrophie des masses musculaires et celle-ci s'ob-
serve dans tous les segments du membre à partir de l'épaule
jusqu'à la main. L'épaule est aplatie et le deltoïde est mani-
festement très atrophié; la paroi antérieure du creux de l'ais-
selle est notablement amincie et le grand pectoral fortement
atrophié; le côté gauche de la paroi thoracique antérieure
présente une dépression; en arrière, les régions sus et sous-
épineuses sont aussi légèrement déprimées et le bord interne
de l'omoplate se détache de la paroi thoracique un peu plus à
gauche qu'à droite, mais cela dans de si faibles proportions
que'l'on ne peut dire au juste s'il s'agit là d'une disposition
due l'état pathologique actuel ou s'il ne s'agit pas là simple-
ment d'une asymétrie ancienne non imputable à l'affection
présente. La diminution de volume du bras est considérable;
la plus grande circonférence du bras gauche est de 22 centi-
mètres et celle du bras droit de 25 centimètres ; l'atrophie
semble porter à peu près également sur les muscles anté-
rieurs et postérieurs du bras ; en pressant entre les doigts les
muscles biceps et triceps et en les comparant à ceux du côté
opposé on constate une notable atrophie. L'atrophie de l'avant-
bras est moins marquée que celle du bras ; la plus grande
circonférence est de '-)le centimètres à gauche et de 25 centi-
mètres à droite ; il est difficile de dire si l'atrophie s'est faite
plutôt àux dépens des muscles de la région antérieure ou de
èeux de la région postérieure de l'avant-bras. Les éminences
thénar et hypothénar sont plus grêles à gauche qu'à droite.
- Les muscles atrophiés ne présentent pas de secousses fibril-
laires. L'excitabilité idio-musculaire de ces muscles ne parait
pas modifiée. A l'électrisation, tous ces muscles atrophiés se
contractent plus faiblement que ceux du côté opposé, mais le
mode de contraction est absolument normal ; dans aucun
muscle, on n'a pu constater la réaction de dégénérescence. Il
y a 'du côté paralysé augmentation de la résistance électrique '.
1 L'examen électrique de ce malade comme aussi des autres malades
dont les observations suivent a été pratiqué par le Dr Vigouroux, direc-
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 7
La sensibilité est abolie dans le membre supérieur gauche,
comme l'indiquent les figures t et 2, sauf à la paume de la main
et à la partie palmaire des doigts où la sensibilité est toutefois
diminuée ; tous les modes de la sensibilité sont abolis. Il
semble au malade qu'il n'a pas de bras ni d'épaule. Le sens
musculaire fait aussi complètement défaut dans ce membre.
La température du membre supérieur gauche est plus élevée
que celle du côté opposé.
Il est bien plus facile de provoquer du côté gauche que du
côté droit par le grattage des raies vaso-motrices.
Les réflexes tendineux sont exagérés du côté malade. En
redressant les doigts on provoque de l'épilepsie spinale.
La sensibilité du reste du côté gauche du corps est conservée
mais très diminuée; et cela est surtout net en ce qui con-
cerne la sensibilité à la température.
Le membre inférieur gauche est un peu plus faible que le
droit. La circonférence maxima de la jambe gauche est de
33 centimètres, tandis que celle de la droite est de 34 centi-
mètres.
La face ne présente aucune espèce de déviation.
L'ouïe, l'odorat et le goût sont un peu plus faibles à gauche
qu'à droite. - Rien du côté des yeux ; pas de rétrécissement
du champ visuel. '
Attaques. - Elles surviennent spontanément ou à la suite
de la compression de certains points. Il existe deux zones hys-
térogènes : la nuque, au niveau de la septième cervicale, et les
globes oculaires; il suffit de mettre la main sur les, yeux pour
provoquer l'attaque. Dans la première attaque que nous avons
observée le malade est tombé brusquement; sans pousser .de
cri, à la suite de l'occlusion des yeux; son corps fait aussitôt
un arc de cercle ; l'attaque a, du reste, immédiatement' été
enrayée par la compression pratiquée au niveau des échan-
crures sus-orbitaires : le malade est aussitôt revenu à lui. Les
autres attaques ont eu des caractères différents; voici sous
quel aspect elles se présententhabituellement : le malade tombe
brusquement en avant et à droite; il place sa tête sur son
bras droit qui est dans l'extension et levé en l'air ; le poignet
est fermé et tout le bras est raide; généralement le malade
leur de l'établissement électrique de la Salpêtrière ; nous le remercions
vivement de son obligeance.
8 CLINIQUE NERVEUSE.
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE.
t0 CLINIQUE NERVEUSE.
mord son bras; la jambe droite est fléchie sur la cuisse et le
membre inférieur droit est raide comme le membre supérieur.
La raideur s'observe aussi du côté gauche, mais elle est moins
accentuée que du côté droit. En plus, la situation des membres
est différente ; le membre supérieur gauche est appliqué le long
du corps, les doigts dans la flexion; la jambe gauche est étendue
sur la cuisse. Le malade reste dans cette situation sans pousser le
moindre cri, les yeux fermés, la figure sans aucune expression
particulière, ni pâle ni congestionnée, pendant quelques mi-
nutes ; puis on voit survenir quelques mouvements cloniques.
mais peu accentués; enfin le malade pousse quelques cris étouf-
fés, sanglotte un peu, puis revient complètement à lui, sans gar-
der le moindre souvenir de l'attaque et sans éprouver la moindre
fatigue. Ajoutons que quoique le début de l'attaque paraisse
absolument brusque et que quoique le malade semble ne pas
en être prévenu, il existe en réalité une sensation spéciale qui
la précède ; le malade sent comme une boule qui de la région
épigastrique remonterait à la gorge ; mais l'attaque suit de si
près cette sensation que le malade n'a pas le temps de se
garer et qu'il tombe aussitôt. -
Après le 19 février, le malade a eu encore quelques attaques
différentes de celles-là; pour ne plus avoir à revenir sur les
attaques, nous indiquerons ici leurs caractères ; quelques-unes
d'entre elles se présentent sous l'aspect suivant : il y a d'abord
une phase épileptiforme calquée sur les attaques épilepti-
formes décrites plus haut; puis dans une seconde phase le.
malade semble revenir à lui, se lève, se met à marcher, quel-
quefois à courir, sort de la salle, mais il est étranger à ce
qu'on dit autour de lui, ne répond pas quand on l'interpelle ;
enfin il revient à lui et ne se souvient aucunement de ce qui
s'est passé. Parfois, après la phase épileptiforme, il est pris de
délire, crie, gesticule, se figure qu'il est en présence des Chi-
nois, et il est dangereux pour les personnes qui l'entourent.
24 février. A la suite d'une attaque, le malade est pris
de m,utisme ayant tous les caractères du mutisme hystérique
et qui ne dure que douze heures. Les doigts qui étaient raides
le premier jour, son aujourd'hui flasques.
27. L'affaiblissement du membro inférieur gauche n'est
plus appréciable; les deux jambes paraissent avoir la même
force. Mais la paralysie et l'anesthésie du membre supérieur
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 1 t
ne se sont pas encore modifiées, c'est-à-dire qu'elles sont ab-
- solues. - On prie alors le Dr Gautiez, ancien interne des
hôpitaux, qui pratique le massage avec succès, de masser le
malade. M. Gautiez masse le membre supérieur droit, c'est-à-
dire le membre sain, et on observe alors, au bout de cinq mi-
nutes environ, le retour de la sensibilité à la face dorsale des
doigts et à la partie inférieure de la face dorsale de la main,
sans retour de la motilité des doigts; en même temps la sen-
sibilité s'émousse dans les régions correspondantes du côté
opposé ; on continue le massage, mais le malade est pris d'une
attaque qui oblige de suspendre l'opération; la sensibilité per-
siste pendant quatre heures environ, puis disparait.
Le 28, à la suite d'une attaque, le malade est pris de nou-
veau de mutisme. Les doigts présentent aujourd'hui de la
raideur.
Le 10r mars. Le mutisme persiste et il a tous les carac-
tères du mutisme hystérique ; l'intelligence est tout à fait con-
servée ; le malade ne peut parler à voix basse, ne peut
émettre le moindre son, et écrit, au contraire, avec la plus
grande facilité ; il éprouve en même temps dans la gorge une
sensation de houle très pénible. - On pratique de nouveau le
massage, et il se passe exactement la même chose que le
27 février. La sensibilité revient dans la même région, et le
malade a une attaque. Lorsque le malade revient à lui, il
s'assied auprès du poêle et, quelques minutes après, il lui
semble que la boule qu'il sent dans la gorge se déplace,
descend et disparait, et en même temps son mutisme se dis-
sipe. « C'est fini, dit-il, ma boule a disparu » ; et il parle comme
par le passé. -
4. - Paralysie et anesthésie du membre supérieur gauche
dans le même état. M. Gautiez pratique alors ce qu'on appelle
dans le massage la flagellation, dans la région temporo-parié-
tale droite (l'opération est commencée à onze heures du matin),
et voici ce qu'on observe alors : au bout de. quelques minutes,
la sensibilité reparaît à la face dorsale des doigts, gagne la
main, puis l'avant-bras et enfin le bras et l'épaule ; on dit à ce
moment au malade de mouvoir ses doigts, son poignet ou son
coude, mais il ne peut y arriver ; on fait faire alors aux doigts
et à la main paralysée des mouvements passifs en disant au
malade de regarder ce que l'on fait et de faire exécuter en
même temps aux doigts et à la main du côté opposé les mêmes
1 2 CLINIQUE NERVEUSE.
mouvements; au bout de quelques instants, quelques mouve-
ments spontanés sont possibles ; ils sont d'abord très limités,
mais deviennent de plus en plus étendus à mesure qu'on con-
tinue les manoeuvres que nous venons d'indiquer; parle même
procédé, on finit par faire mouvoir le coude et l'épaule et fina-
lement, vingt minutes environ après le début de l'opération,
tous les segments du membre supérieur peuvent se mouvoir
spontanément ; pourtant ces mouvements sont loin d'être
aussi étendus que du côté opposé; les mouvements de l'épaule
sont en particulier très limités ; et tout le membre supérieur,
en particulier la main et les doigts, présentent un tremble-
ment à oscillations assez étendues et assez fréquentes, mais
régulières. En même temps le membre supérieur du côté
opposé s'engourdit un peu, mais cet engourdissement est très
passager et disparaît rapidement. Une heure et demie après
cette opération, la motilité persiste, mais la sensibilité a déjà
très notablement diminué. On renouvelle pendant une minute
environ la flagellation dans la région temporo-pariétale droite
et la sensibilité revient aussitôt dans le membre supérieur
gauche.-Le malade est alors abandonné à lui-même; la moti-
lité persiste jusqu'à quatre heures de l'après-midi (en tout
cinq heures), et la sensibilité jusqu'à neuf heures du soir;
puis la paralysie et l'anesthésie se rétablissent avec les carac-
tères qu'elles présentaient avant l'opération.
5. - La flagellation est renouvelée dans la matinée,.et on
observe les mêmes phénomènes que la veille avec les diffé-
rences suivantes : des que la sensibilité a gagné la partie inté-
rieure de l'avant-bras on fait exécuter aux doigts et a la main
des mouvements passifs, et les mouvements spontanés revien-
nent avant que la sensibilité ait gagné le bras ; on lait exécuter
ce jour à l'épaule des mouvements passifs avec plus de persis-
tance que la veille, et les mouvements spontanés arrivent à
ètre plus étendus que la veille ; on recommande enfin au ma-
lade de continuer à exercer son membre supérieur pendant la
journée.
Le malade est examiné deux heures après l'opération : il
s'est conformé aux indications qu'on lui a données et les mou-
vements sont plus étendus qu'ils ne l'étaient immédiatement
après l'opération. La sensibilité est déjà un peu obtuse. La
sensibilité va sans cesse en diminuant, et disparait complète-
ment vers quatre heures du soir. La motilité persiste.. Le ..ma-
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 13 3
lade a dans la soirée, une attaque épileptiforme suivie de délire
et, lorsqu'il revient à lui, la motilité persiste encore.
6. - Les mouvements spontanés du membre supérieur
gauche persistent encore, et ils sont même un peu plus éten-
dus que la veille ; le tremblement a diminué; mais l'anesthésie
est complète ; le sens musculaire est aboli. On renouvelle
la flagellation et, comme les jours précédents, la sensibilité
reparaît de bas en haut ; la sensibilité reparaît en même
temps que le sens musculaire. La sensibilité ne persiste pas
plus de deux heures. Le malade s'endort le soir pouvant mou-,
voir son bras.
7. 11 se réveille absolument impotent de son membre su-
périeur. Le bras et l'avant-bras sont flasques. La main est
fléchie et contracturée; les doigts sont aussi fléchis et contrac-
turés.
10. - Le malade depuis le 7 mars est redevenu paralysé du
membre supérieur gauche. Il s'endort dans l'après-midi et, à
son réveil, il s'aperçoit avec étonnement qu'il peut de nouveau
le mouvoir.
13. On prend les mesures des membres et voici ce qu'on
constate : la circonférence de la jambe gauche est pareille à
celle de la jambe droite ; entre le bras gauche et le bras droit,
au lieu de trois centimètres de différence, il n'y a plus que
deux centimètres ; l'épaule et le thorax se présentent à peu
près sous le même aspect que le premier jour où le malade a
été examiné.
14. La paralysie reparaît au réveil du malade.
21. La paralysie persiste.
On recommence la flagellation ; il survient une attaque ;
mais à la suite de l'attaque, la paralysie et l'anesthésie dispa-
raissent pendant une heure, après quoi elles reparaissent de
nouveau, sauf à la main. '
2. - La sensibilité reparaît spontanément jusqu'au coude,
mais la main seule peut se mouvoir. M. Gautiez recommence
la flagellation, cette fois non plus sur la tète mais sur la partie
sensible du bras malade ; quinze minutes après le début de
l'opération, retour de la motilité et de la sensibilité; cette der-
nière disparaît de nouveau au bout d'une heure ; mais la
motilité persiste. 1
14 CLINIQUE NERVEUSE.
25 avril. -Depuis plus d'un mois la motilitépersiste toujours.
L'amyotrophic s'est très notablement atténuée : l'épaule est
beaucoup moins aplatie que le jour de l'entrée du malade à
l'hôpital, le deltoïde s'est développé et le muscle grand pecto-
ral est bien plus volumineux ; entre les régions sus et sous-
épineuses du côté droit et celles du côté gauche, il n'y a plus
de bien grande différence ; entre les deux bras il n'y a plus,
dans la circonférence, qu'un centimètre de différence; l'avant-
bras qui n'était, il est vrai, que peu atrophié, ne s'est guère
modifié ; les éminences thénar et hypothénar sont à peu près
aussi volumineuses que celles du côté opposé.
Nous donnons cette observation comme un exemple
de paralysie hystérique avec amyotrophie; mais il faut
fonder ce diagnostic et démontrer rigoureusement que
les différents phénomènes que présente le malade ne
peuvent être mis sur le compte d'aucune autre affection
que l'hystérie. L'amyotrophie est évidemment de
nature à éloigner de l'esprit l'hypothèse d'hystérie, et
fait penser à une lésion organique. Examinons donc
cette dernière hypothèse. Si ou a bien présente à l'es-
prit l'observation du malade, la supposition la plus ad-
missible que l'on puisse faire est certainement celle
d'une lésion siégeant dans l'écorce cérébrale au con-
tact des méninges, intéressant la zone motrice bra-
chiale et n'atteignant que très légèrement la zone cru-
rale ; et au premier abord rien ne semble contredire
ce diagnostic : on s'explique en effet très bien de
cette façon la prédominance des troubles fonctionnels
dans le membre supérieur, le peu d'intensité des trou-
bles observés du côté du membre inférieur et enfin.
l'intégrité de la face ; la contracture initiale peut être
mise sur le compte de l'irritation des méninges et l'é-
pilepsie spinale ainsi que la rigidité observées ultérieu-
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 15 j
rement seront attribuées à la dégénération descendante;
l'atrophie musculaire se comprend très bien puisque
cette complication dans la paralysie d'origine cérébrale
a été fréquemment signalée (Charcot, Pierret, Bris-
saud) ; - le début de l'affection aurait été marqué
par une attaque apoplectique et les crises que le ma-
lade a eues à plusieurs reprises seraient des crises épi-
leptiformes. Eh bien, toute cette argumentation
n'est que spécieuse; il est facile de prouver que cette
hypothèse ne peut être longuement soutenue et que
les accidents divers présentés par le malade sont bien
de nature hystérique.
Passons en revue ies divers arguments que nous
venons d'invoquer en faveur de la lésion corticale, et
voyons s'ils résistent à une analyse rigoureuse.
A propos de la contracture, nous venons de dire
comment on peut expliquer ce symptôme soit au début
de la paralysie, soit dans ses phases ultérieures; mais,
pour que cette interprétation ait de la valeur, il fau-
drait qu'il y ait eu réellement trois périodes bien dis-
tinctes dans le cours de cette paralysie, et échelonnées
comme il suit : 1° paralysie avec contracture; 2" para-
lysie flasque; 3° paralysie avec contracture; enfin, la
contracture établie cette dernière fois, ne devrait plus
être susceptible de rétrocession. Or, il n'en est rien;
ces trois périodes ne sont qu'imaginaires, et la con-
tracture tardive observée chez le malade n'est pas du
tout permanente; depuis le début de l'accident, la flac-
cidité et la rigidité se succèdent à chaque instant, et
ce caractère est déjà tout à fait en rapport avec l'idée
d'hystérie.
16 CLINIQUE NERVEUSE.
Nous venons de supposer que les crises dont nous
avons indiqué les caractères étaient des crises épi-
leptiformes, mais c'est là encore une supposition
gratuite, et il est facile de relever des particularités
qui indiquent nettement que ces crises sont bien de
nature hystérique quoiqu'il ne s'agisse pas de grandes
attaques hystériques; c'est ainsi qu'il nous suffira de
rappeler que le début de ces attaques, quoique sou-
dain en apparence, est précédé par une sensation de
boule à la gorge, que ces attaques peuvent être
infailliblement provoquées par la pression sur cer-
taines zones, telles que les globes oculaires et la nu-
que, que dans ces attaques le malade exécute parfois
un arc de cercle, qu'à la fin de l'attaque il pousse
des sanglots, et qu'enfin, il revient presque brusque-
ment à lui, reprend connaissance sans éprouver la
moindre fatigue; tout cela est bien de nature hysté-
rique.
La paralysie de notre malade, si on l'étudie attenti-
vement, est accompagnée de quelques symptômes qui
n'appartiennent pas à la paralysie corlicale. Si nous
examinons en particulier la paralysie brachiale, en
négligeant les troubles moteurs du membre inférieur
qui sont tout à fait accessoires, nous voyons que la
sensibilité du membre supérieur est tout à fait abolie,
et il en est ainsi de la sensibilité superficielle, de la
sensibilité profonde et du sens musculaire; or, si dans
les paralysies corticales il peut y avoir quelques troubles
sensitifs, ces troubles sont très légers; jamais l'anes-
thésie n'est si profonde, et, d'un autre côté, si l'onjette
lès yeux sur les ligures 1 et 2, on voit que cette anesthésie
est presque calquée sur celle qui a été notée dans les
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 17
deux cas de monoplégie hystérique rapportés par
M. Charcot'.
Il nous semble que tous ces arguments sont déjà
plus que suffisants pour établir que cette paralysie
est bien de nature hystérique et pour rejeter l'hy-
pothèse de paralysie corticale. Mais il est encore
un fait plus important à relever en faveur de cette idée
et qui convaincrait les plus sceptiques, c'est que cette
paralysie, sous l'influence d'une simple flagellation
pratiquée dans la région temporo-pariétale du côté
opposé, a rétrocédé en l'espace de quelques minutes;
il est évidemment inutile d'insister sur la portée de ce
phénomène au point de vue du diagnostic.
Quant à l'amyotrophie, il nous paraît de toute évidence
qu'elle doit être rattachée à la paralysie hystérique et
qu'il ne peut être question d'une atrophie indépendante
de cette paralysie et qui ne ferait que coïncider avec elle;
en effet, cette atrophie est rigoureusement limitée aux
muscles paralysés, elle s'est développée peu de temps
après le début de la paralysie et s'est atténuée après
sa disparition.
Nous croyons qu'il n'est pas sans intérêt de relever
dans cette observation quelques particularités qui pour-
tant ne sont ici qu'accessoires, étant donné ce que
nous voulons démontrer dans ce travail. C'est ainsi que
nous appellerons l'atteution sur le mutisme dont le
malade a été atteint à plusieurs reprises, à la suite de
ses attaques, et qui présentait tous les caractères du
mutisme hystérique, sur la rétention d'urine qu'il a eue
1 Progrès Médical, 1885, nos 34, 37, 39, 40. Sur deux, cas de monoplégie
brachiale hystérique de cause traumatique chez l'homme, Leçons de
M. Charcot, recueillies par 11111. lltarie et Guinon.
Archives, t. XII. 2
18 ' CLINIQUE XERVELSE,
pendant quelques jours, sur ses colères violentes suivies'
parfois d'hémorrhagies. Enfin, on peut se demander
si la perte de connaissance, le délire et la chute de la
paupière gauche qu'il a présentés au Tonkin doivent
être rattachés à quelque lésion organique ou à l'hysté-
rie. Cette question est difficile à résoudre, et, comme
elle n'offre pour nous qu'une importance secondaire,
nous ne la discuterons pas.
Observation II (l'ésumée).- Homme âgé de trente-quatre ans.
- Antécédents héréditaires nerveux. - Convulsions dans
l'enfance. - A l'âge de dix-huit ans hémiplégie gauche avec
intégrité de la face et hémianestMsie; celte hémiplégie a un
début brusque ; le malade s'aperçoit qu'il est paralysé, un
matin, en se réveillant; elle dure six mois et demi pendant les-
quels le malade a de fréquentes attaques d'hystérie ; guérison
complète ; - à l'âge de vingt-cinq ans réapparition des atta-
ques hystériques ; - à l'âge de trente-quatre ans, à la suite
d'un traumatisme violent sur le côté gauche du crâne, perte
de connaissance de quatre heures de durée ; lorsqu'il revient à,
lui. il présente une hémiplégie gauche avec intégrité de la face
et ltémianesthésle gauche; il y a hémianesthésie sensilivo-sen-
. : so¡'ielle et un rétrécissement du champ visuel; le testicule
gauche est douloureux à la pression ; l'hémiplégie est absolue
pendant une durée de plusieurs mois, et il se développe du
- côté paralysé une amyotrophie assez accentuée, ayant les
' caractères électriques de l'atrophie simple; sous l'influence
. de l'application d'un aimant, les mouvements reviennent en
partie dans le côté paralysé et il y a en même temps trans-
' fert de la sensibilité; depuis ce moment, la paralysie a une
tendance à s'atténuer de plus en plus et l'amyotrcphzé tend
aussi à diminuer.
Met...; âgé de trente-quatre ans, artiste en cheveux, entre à
la Salpêtrière dans le service de M. Charcot le 22 février 1886.
Antécédents héréditaires.-Père goutteux, obèse, alcoolique,
a eu à plusieurs reprises des attaques apoplectiformes. En 1863
à la suite d'une attaque, il aurait eu une paralysie du côté
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 19
.gauche qui aurait duré deux ans. Mère très nerveuse, impres-
sionnable ; elle est hémiplégique du côté gauche depuis deux
ans. Grands parents maternels seraient morts paralysés.
Antécédents personnels. k eu des convulsions étant enfant.
Masturbation de très bonne heure. Pas d'affection vénérienne.
Pas d'alcoolisme. A dix-huit ans le malade s'engage ; il fait la
campagne de 1870, et souffre de toutes façons pendantle siège
de Metz. Prisonnier en Prusse, il couche sur la terre nue et se
réveille un matin avec tout son côté gauche, violacé, insen-
sible et paralysé. Pendant quatre mois, tout mouvement fut
impossible du côté gauche, mais la face semble ne pas avoir
été prise. Il eut pendant la durée de cette hémiplégie des atta-
ques précédées d'une céphalalgie intense; dans ces attaques, il
se débattait et perdait connaissance ; ces attaques se sont re-
produites parfois jusqu'à huit fois par jour. La paralysie du
bras disparut la première, puis la motilité revint aussi dans le
membre inférieur. En 1877, à la suite d'une grande frayeur, le
malade eut de nouveau des attaques, dans lesquelles il fallait
plusieurs hommes pour le maintenir.
En 1881, M. Berbez vit le malade à Beaujon, où il était
soigné pour de préfendues douleurs rhumatismales siégeant
dans le côté gauche, dont la sensibilité cutanée paraissait
émoussée et qui, de plus, était plus faible que le côté droit.
Le malade sortit de l'hôpital en assez bonne santé et il se
porta bien pendant quatre années.
Le 22 août 1885, le malade à la suite d'une discussion avec son
père, fut frappé par ce dernier avec un rouleau à pâtisserie; il
perdit aussitôt connaissance et tomba par terre : on l'apporta à
la Charité, dans le service de M. Després, où l'on constata une
plaie des téguments de la tête de douze centimètres de longueur,
s'étendant de quelques centimètres au-dessus de l'oreille gauche
à la nuque. Le malade serait resté quatre heures sans connais-
sance après le traumatisme. Quand il revint à lui, il était,
comme en Allemagne, hémiplégique du mouvement et de la
sensibilité à gauche. La plaie se cicatrisa repidement, mais la
paralysie persistant toujours le malade fut transféré dans le
service de M. Féréol, le 8 octobre 1885. - \l. Berbez, interne
du service, prit à ce moment son observation. Les membres
supérieur et inférieur sont presque complètement paralysés.
La face ne présente pas de troubles de la motilité. ,Le côté
20 CLINIQUE NERVEUSE.
gauche est plus grêle que le droit ; on note en prenant des
mensurations les différences suivantes :
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 21
La région antérieure du thorax est un peu déprimée; il en est
de même de la région postérieure ; les muscles sus et sous-
épineux sont atrophiés. Le périmètre du bras gauche à la par-
tie moyenne est de 19 centimètres, et celui du bras droit au
même niveau de 22 centimètres. L'atrophie semble porter sur
tous les muscles ; le biceps et le triceps sont très réduits de
volume. A la partie supérieure de l'avant-bras gauche le péri-
mètre est de 19 centimètres et au même niveau à droite le
périmètre est de 22 centimètres. L'atrophie paraît porter
davantage sur les muscles épitrochléens que sur les épicondy-
liens. Les éminences thénar et hypothénar gauches sont un
peu aplaties. La jambe gauche est plus grêle que la droite;
le plus grand périmètre à gauche est de 27 centimètres et de
28 et demi à droite. A la cuisse, pas de différence sensible
entre les deux côtés. Les muscles atrophiés ne présentent pas
de secousses fibrillaires. L'excitabilité idio-musculaire parait
normale. La contractilité électrique est un peu plus affaiblie ;
mais elle est tout à fait normale : l'examen pratiqué avec les
courants faradiques et galvaniques montre qu'il n'y a pas
de réaction de dégénérescence. La résistance électrique est
augmentée. - La sensibilité est complètement abolie dans le
membre supérieur gauche (sensibilité au tact, à la douleur,
à la température, sens musculaire); dans le reste du côté
gauche la sensibilité n'est que diminuée, plus ou moins, sui-
vant les régions (voir les fig. 3 et 4). - Le côté gauche du corps
a une température plus basse que le côté droit. - Les réflexes
tendineux sont plus faibles à gauche. - Il y a à gauche un ré-
trécissement du champ visuel très prononcé, mais il n'y a pas
de dyschromatopsie. L'ouïe est très affaiblie à gauche. Le
goût et l'odorat sont abolis à gauche. - Il y a anesthésie du
pharynx du même côté. - Les deux testicules sont très grêles;
le malade dit qu'ils ont toujours été dans cet état et que pour-
tant ses désirs sexuels étaient normaux autrefois ; actuelle-
ment, ils sont très affaiblis; le testicule gauche remonte jus-
qu'à l'anneau, et il est très sensible à la pression; la douleur
provoquée par la pression ne reste pas localisée au testicule,.
elle remonte jusque vers le creux épigastrique ? Depuis 1877,
le malade n'a pas eu d'attaques. - On prescrit au malade de
faire dans la journée des exercices de gymnastique et d'exé-
cuter en particulier des deux membres supérieurs des mouve-
ments synergiques. On prie d'autre part M. Gautiez de masser
et de flageller le malade. Les flagellations sont faites par
2 CLINIQUE NERVEUSE.
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 23
'»4 le CLINIQUE NERVEUSE.
M. Gautiez sur la région pariétale droite; après chaque séance,
a sensibilité reparaît au membre supérieur gauche pendant
plusieurs heures, et au bout de plusieurs séances elle persiste
d'une façon définitive, mais elle est toujours plus faible qu'a
droite. -
21 avril. Le malade a fait depuis son entrée à l'hôpital
les exercices qu'on lui avait recommandé de faire. Son état
général est toujours le même. Le membre supérieur gauche
paraît un peu plus fort qu'autrefois, mais il est toujours beau-
coup plus faible que le droit. Les muscles ont augmenté de
volume. Les mensurations prises dans les mêmes endroits
que le 23 février montrent les différences suivantes :
23 février.
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 25
l'esprit, quand on réfléchit aux conditions dans les-
quelles la paralysie s'est produite, est qu'elle dépend
directement du traumatisme et qu'elle résulte d'une
lésionmatériellede l'encéphale produite sous l'influence
dece traumatisme. -Nous allons donc commencer par
démontrer que cette dernière hypothèse n'est pas sou-
tenable si on analyse rigoureusement les faits et qu'il
ne peut s'agir ici d'une lésion organique du cerveau.
Remarquons d'abord que le malade, avant l'attaque de
paralysie pour laquelle il est entré à l'hôpital et que
nous avons pu constater, a eu déjà des accidents à peu
près semblables, il y a de cela seize ans; il avait alors
présenté une hémiplégie analogue à l'hémiplégie
actuelle, et elle avait disparu complètell1entsans laisser
de traces. Il est très vraisemblable que ces deux atta-
ques de paralysie se sont produites sous l'influence
d'une même cause et la disparition de la première
hémiplégie tendant à établir que celle-ci n'était pas
sous la dépendance d'une lésion organique, il devient
dès lors probable qu'il en est de même de la se-
conde hémiplégie. -,)fais il y a en faveur de cette opi-
nion des arguments plus puissants à invoquer. Exa-
minons, en effet, attentivement les conditions dans les-
quelles le traumatisme a agi : le choc a porté sur le
côté gauche de la tête et la paralysie des membres
s'est développée du même côté, dans le côté gauche
du corps. N'est-ce pas là déjà une objection impor-
tante contre l'hypothèse de lésion organique con-
sécutive directement au traumatisme ? Voici d'autre
part une autre objection dont la valeur est non moins
grande : Comment comprendre, avec l'hypothèse de lé-
sion organique, l'affaiblissement des réflexes tendineux
26 CLINIQUE ! OERYEUSE, - DE l/ ATROPHIE MUSCULAIRE.
et la flaccidité des membres paralysés ? Ne devrait-il
pas y avoir, dans une paralysie de cette nature, dont
le début remonte à plus de huit mois, exagération de
ces réflexes et contracture ? Ainsi donc, il nous semble
qu'il faut écarter cette hypothèse et admettre que cette
paralysie doit reconnaître pour cause quelque modifica-
tion dynamique des centres nerveux, et, eu rapprochant
cette donnée de ce que le malade est atteint, à n'en pas
douter, d'hystérie, il devient probable que la paralysie
est de nature hystérique. - C'est cette opinion qu'on
arrive à se faire par exclusion; mais on peuty arriver
aussi directement en montrant que cette paralysie
présente quelques caractères qui sont propres à l'hys-
térie, et sur lesquels nous allons appeler l'attention.
L'hémianesthésie que présente le malade n'est pas
complète, avons-nous dit, mais si l'on jette les yeux
sur les figures 3 et 4, on voit qu'au membre supérieur,
seul membre paralysé au moment où cette figure a été
dessinée, l'abolition de la sensibilité est complète et
que les limites de cette anesthésie absolue sont exacte-
ment semblables à celles que nous avons notées dans
l'observation précédente et à celles que 111. Charcot a
relevées dans son travail sur les monoplégies hysté-
riques ; la paralysie paraît donc en rapport intime avec
l'anesthésie et celle-ci, étant de nature hystérique,
il doit en être de même de celle-là. Voici maintenant
un argument qui, à lui seul, nous aurait presque per-
mis de nous dispenser de toute cette discussion, nous
voulons parler de l'action que l'aimanta exercé sur
cette paralysie, qui s'est atténuée sous l'influence de
son application. Il s'agit donc bien certainement d'une
paralysie hystérique.
DU TARES COMBINÉ. 27
Eu ce qui concerne l'amyotrophie, nousdirons,comme
dans l'observation précédente, qu'elle se lie de toute évi-
dence à cette paralysie et qu'elle ne peut relever d'une
autre cause. Elle est limitée, eu effet, aux membres
paralysés, elle est bien plus accentuée dans le membre
supérieur dans lequel la paralysie est plus tenace; elle
s'est développée après le début de la paralysie, et,
depuis que la paralysie a diminué d'intensité, elle s'est
atténuée à son tour. (A suivre.)
PATHOLOGIE NERVEUSE
DU TABES COMBINÉ (A'l'A\0-51 ? SIOUIQUI ? ), ou SCLÉROSE
POSTÉRO-LATÉRALE DE LA -MOELLE '
(contribution A l'étude CLIXIVUE des myélites .mixtes);
Par le professeur GRASSET (de Jtuutpellirr).
IV. ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES
De l'analyse des symptômes , tels que nous les
avons décrits et groupés dans le paragraphe précé-
dent, on peut déjà déduire le siège probable des lésions
de la moelle. -
Tout le premier groupe de phénomènes (incoordi-
nation motrice, douleurs fulgurantes, anesthésies) veut
dire lésion des cordons postérieurs et surtout de leur
partie externe (zones radiculaires, faisceaux de Bur-
' Voy. t. XI, p. 156 et 380.. ". ..
28 PATHOLOGIE NERVEUSE.
dach). Je ne crois pas qu'il y ait d'objection faite à ce
principe.
. Le second groupe de symptômes (paralysies et sur-
tout contractures) veut dire lésions des cordons laté-
raux et surtout des faisceaux pyramidaux.
, Cette dernière proposition n'est plus aussi généra-
lement admise qu'il y a quelques années et tout récem-
ment Raymond écrivait 1 : « Tous ces faits démontrent
qu'on ne saurait plus, comme l'a fait Grasset (de
Montpellier), admettre que la contracture permanente
est le symptôme de la lésion des cordons latéraux ».
Que sont donc ces faits qui infirmeraient cette loi ?
Ce sont des observations d'hydrocéphalie, de poren-
céphalie, de sarcome encéphalique et d'hystérie dans
lesquelles il y a eu des contractures permanentes
malgré l'intégrité des cordons latéraux. , -
00 ' "
Or, le principe que Raymond rappelle comme désor-
mais inacceptable n'a jamais été posé par moi que
comme un principe de séméiologie spinale. C'est en
étudiant, la symptomatologie de la moelle et de ses
divers systèmes queje l'ai formulé (après bien d'autres).
Donc, cela n'empêche pas que des névroses ou des
lésious extra-médullaires puissent aussi produire ces
contractures.
Je crois pouvoir maintenir mon ancienne phrase
en la complétant par ces trois mots (qui n'étaient pas
nécessaires dans mon livre, vu le chapitre où la loi
était indiquée) : « En pathologie spinale, la contrac-
ture permanente est le symptôme de la lésion des cor-
dons latéraux » .
1 Art. Tabès s}J/lsl11odique in Dict. encyclop., p. 432.
· DU TABES COMBINÉ. 29
. : On peut certes discuter encore sur la physiologie
pathologique plus fine du symptôme, se demander si
ce n'est pas (comme l'admet aujourd'hui M. Charcot)
par irritation des cellules motrices antérieures que la
lésion latérale entraîne la contracture. Ceci est une
autre affaire.
- Ce qui nous intéresse, nous cliniciens qui voulons
surtout apprendre à déduire des symptômes observés
le siège probable de la lésion médullaire, c'est que
aux contractures répond la lésion latérale, comme à
l'ataxie répond la lésion postérieure et comme aux
amyotrophies répond la lésion grise antérieure.
Aiusi comprise et expliquée, notre proposition dé
tout à l'heure garde donc sa valeur et nous pouvons
dire que, dans le tabes combiné, si les symptômes du
premier groupe font penser à une lésion des cordons
postérieurs, ceux du second font supposer une lésion
des cordons latéraux.
11 est donc probable, d'après la seule analyse des
symptômes physiologiquement interprétés , que la
lésion du tabes combiné est une sclérose postéro-laté-
rale.
Toutes les observations résumées dans nos tableaux
confirment cette manière de voir. Aucune ne fait
exception. Dans toutes les autopsies, la lésion intéres-
sait les cordons postérieurs et les cordons latéraux.
Jusque-là, du reste, aucune difficulté; tout le monde
admet cette double localisation de la lésion. Mais les
divergences commencent quand il s'agit d'interpréter
la nature de cette lésion.
S'agit-il là d'une myélite systématisée ou d'une
myélite diffuse ?
30 PATHOLOGIE NERVEUSE. ·
Pour les Allemands, Westphal et surtout Kahler et
Pick, ce serait une double sclérose systématisée. Pour
l'Ecole française, ce serait plutôt une myélite diffuse.
- Ballet et Minor, qui ont fortement défendu cette
dernière manière de voir dans le remarquable travail
que nous avons déjà cité, rapprochent de leur obser-
vation personnelle plusieurs des cas publiés, et con-
cluent que tous ces faits doivent être disjoints les uns
des autres et classés suivant cinq types.
Le premier type comprend des scléroses diffuses;
le second, des cas d'ataxie locomotrice dans lesquels
la lésion atteint non seulement les faisceaux de Bur-
dach, mais aussi les faisceaux cérébelleux, qui, quoique
dans les cordons latéraux, fout partie du système cen-
tripète ; le troisième, des cas d'ataxie locomotrice dans
lesquels la lésion primitivement systématisée aux cor-
dons postérieurs se diffuse ensuite (par l'intermédiaire
des méninges) aux cordons latéraux; le quatrième, des
faits.inverses dans lesquels la sclérose systématisée a
succédé à la sclérose diffuse; enfin le cinquième, les
faits proprement dits (mais très peu nombreux) de
double sclérose systématisée.
Ces divisions sont trop dissemblables et n'ont pas
toutes la même valeur. Le second type se sépare abso-
lument des autres; il appartient au tabes dorsal ordi-
naire et nullement au tabes combiné. Entre le troisième
et le quatrième types, au contraire, il n'y a pas de diffé-
rence fondamentale, c'est une question relativement
secondaire de savoir si la sclérose diffuse succède à la
sclérose systématisée ou si c'est l'inverse : c'est comme
si on séparait les tabétiques chez lesquels l'atrophie
optique précède la sclérose spinale, et ceux chez les-
DU TABES COMBINÉ. '-il
quels les lésions se succèdent dans l'ordre inverse.
Les questions secondaires ne doivent pas faire
perdre de vue le point principal. Y a-t-il ou non une
lésion du tabes combiné comme il y a une symptoma-
tologie ? . Ballet et Minor répondent non, détruisent
l'unité de cette maladie et en éparpillent les cas dans
des groupes disparates.
Sur ce point, je demande à mes éminents confrères
la permission d'être d'un avis différent.
L'objection vraie de Ballet et Minor aux travaux
des Allemands est la non-systématisation de la lésion
dans les cordons latéraux : cela est très juste : la sclé-
rose, systématisée aux cordons postérieurs, est diffusée
dans les cordons latéraux.
Mais cela n'empêche nullement son unité. Il suffit,
pour la comprendre, d'admettre des myélites mixtes,
en appliquant ce mot non à des myélites à la fois péri-
tubulaires et périvasculaires, mais à des myélites à la
fois systématisées et diffuses.
Cette idée des myélites mixtes, déjà émise en 1882
dans la thèse'de mon ancien interne Brousse, me
paraît jeter un grand jour sur ces questions.
. Il n'y a pas entre les myélites systématisées et les
myélites interstitielles de différence histologique radi-
cale qui en fasse-deux processus inconciliables sur le
même sujet. On les suppose l'une parenchymateuse,
l'autre interstitielle dans leurs origines. Mais, au fond,
la seule vraie caractéristique se tire de la topographie.
Donc, il est très naturel que les localisations spi-
nales d'états généraux (que nous appelons les mala-
dies de la moelle), se déterminent, chez les uns, par
une lésion systématique; chez les autres, par une lésion
32 PATHOLOGIE NERVEUSE.
diffuse; chez d'autres encore, par une double lésion,
diffuse en avant, systématisée en arrière. On a cité
des cas de lésion diffuse dans le cerveau et de lésion
systématisée dans la moelle (paralysie générale et
ataxie locomotrice); on peut aussi avoir dans. la même
moelle une lésion diffuse et une lésion systématisée
(ataxie locomotrice et sclérose en plaques).
Le tabes combiné est de cette dernière catégorie;
c'est une myélite mixte. -
Cette manière de concevoir les choses me paraît
correspondre aux faits et, en même temps, permet de
maintenir sur le terrain anatomique l'unité du syndrome
morbide que nous avons trouvé sur le terrain clinique.
Cela posé, arrive uue autre question, qui me paraît
secondaire, mais dont je ne veux pas cependant nier
l'intérêt : quelle relation y a-t-il entre les deux lésions
dont nous venons de parler ?
La lésion diffuse succède-t-elle à la lésion systéma-
tisée (3° type de Ballet et Minor), ou, au contraire, la
lésion systématisée succède-t-elle à la lésion diffuse
(4e type des mêmes auteurs) ? La propagation se fait-
elle plutôt par les méninges (Déjerine) ? La malaùie se
localise-t-elle séparément sur les deux régions sans
qu'il y ait propagation anatomique de l'une à l'autre ?
Tous ces processus sont possibles; il est même pro-
bable que les choses ne se passent pas toujours de la
même manière chez les divers malades.
Mais ces variétés dans le détail de la marche de la
lésion n'empêchent nullement l'unité anatomique de la
maladie elle-même.
Pour s'en rendre compte il n'y a qu'à se rappeler
ce qui se passe pour ce type clinique si admirablement
DU TABES COMBINÉ. 33
arrêté de l'ataxie locomotrice progressive. Chez l'un,
la lésion commence par les nerfs crâniens; chez l'autre,
par les cordons postérieurs; chez certains, les méninges
spinales jouent un grand rôle; chez d'autres, il y a une
méningo-encéphalite diffuse, soit initiale, soit tardive,
etc. Tout cela empêche-t-il l'unité du tabes dorsal ?
Nullement.
Il en est de même du tabes combiné.
Pour constituer légitimement un de ces syndromes
cliniques, qui prennent rang parmi les maladies de la
moelle, il faut deux choses : l'individualité symptoma-
tique et l'individualité anatomique.
Nous avons vu au chapitre précédent et nous rever-
rons dans le suivant (à propos du diagnostic), que
l'individualité symptomatique est parfaitement nette et
caractérisée par l'association des symptômes du tabès
ataxique avec ceux du tabes spasmodique. Le présent
paragraphe a démontré, croyons-nous, l'individualité
anatomique caractérisée par l'association dune sclérose
.postérieure systématisée avec une sclérose latérale diffuse
(myélite mixte).
Donc, le tabès combiné existe comme syndrome cli-
nique distinct, et mérite de figurer à part parmi les
maladies de la moelle.
Il resterait un dernier point de détail à étudier.
Après avoir fait la physiologie pathologique générale
de la maladie, il faudrait, dans chaque cas, mettre en
rapport la topographie particulière de la lésion avec
les symptômes spéciaux du cas.
Ce serait fort intéressant, mais cela nous entraînerait
trop loin. Contentons-nous de rappeler une proposi-
tion de Westphal, qui résume cette question : dans
Archives, t. XLI. 3
34 PATHOLOGIE NERVEUSE.
les lésions combinées des cordons postérieurs et laté-
raux, la rigidité musculaire et la contracture spastique
ne surviennent pas quand la lésion des cordons posté-
rieurs s'étend en bas jusqu'à la région lombaire et que
les zones radiculaires des cordons postérieurs sont
atteintes par la dégénérescence. Zacher a. exprimé le
même principe sous une forme plus synthétique etplus
générale en disant : Dans une lésion combinée des
faisceaux pyramidaux et postérieurs, les phénomènes
spastiques ne se développent pas dans les membres
supérieurs ou inférieurs, quand la lésion des cordons
postérieurs a atteint les zones radiculaires postérieures
dans les sections correspondantes de la moelle.
Il y. a là un chapitre très intéressant du tabes com-
biné, dont le développement ultérieur pourra être très
utile pour la physiologie pathologique générale de
l'axe spinal.
V. DIAGNOSTIC, PRONOSTIC ET TRAITEMENT.
Les documents sont encore trop peu nombreux pour
permettre d'écrire une histoire clinique complète du
tabes combiné.
La description détaillée des symptômes, principaux
et accessoires, l'histoire de la marche, de l'évolution
des phénomènes, les diverses variétés et les formes,
etc. ; tout cela se fera plus tard. Le présent travail n'a
pour but que de montrer l'existence de cette maladie
et de provoquer ainsi de nouveaux travaux qui en
compléteront l'histoire.
Il est bon cependant de rappeler les principes du
DU TABES COMBINÉ. ' ` 35
diagnostic différentiel : c'est la conclusion naturelle
de notre paragraphe de la symptomatologie. t
" Je ne parle pas des signes qui permettent de recon-
naître tout d'abord qu'on a affaire à une maladie de la
moelle : ce premier temps du diagnostic est commun
à toutes les autres maladies spinales.
Mais cette première partie du diagnostic posée, il
faut savoir distinguer le tabes combiné du tabès ataxique,
du tabes spasmodique, de la myélite diffuse transverse
et de la sclérose en plaques. '
Pour les deux premières maladies, on peut poser
un principe général : dans le tabes combiné, on élimine
le tabes ataxique par les symptômes du tabes spasmo
dique, et on élimine le tabes spasmodique par les symp-
tômes du tabes ataxique.
Ainsi les contractures et plus généralement les divers
phénomènes d'excitation motrice chez un malade pré-
sentant, d'autre part, des symptômes d'ataxie locomo-
trice feront penser au tabes combiné. De même les
anesthésies, les douleurs fulgurantes et l'incoordina-
tion chez un sujet présentant d'autre part le tableau
clinique du tabes spasmodique indiqueront aussi un
tabes combiné.
Je ne fais pas figurer ici les symptômes céphaliques
parmi ceux qui peuvent servir à ce diagnostic diffé-
rentiel. Car ils appartiennent aux trois tabes. C'est
l'opinion classique pour le tabes classique, mais non
pour le tabes spasmodique. Raymond, en effet, dans
son remarquable article consacré à cette dernière
maladie, exclut les phénomènes céphaliques du tabes
dorsal spasmodique; mais sur ce point je m'écarte de
36 PATHOLOGIE NERVEUSE.
sa manière de voir et me range plutôt à celle de Pierret l
et de Hervouet2 (de Nantes).
Les tabes sont, d'une manière générale, pour moi,
des maladies cérébro-spinales; c'est même là, à mon
sens, leur caractéristique. On pourrait même ajouter
aujourd'hui, après les travaux de Dejerine, que ce
sont des maladies du système nerveux tout entier.
La considération des réflexes rotuliens est au contraire
un symptôme qui, dans certains cas, aura une très
grande importance pour le diagnostic que nous étu-
dions.
La loi de Westphal sur l'abolition de ces réflexes
dans le tabes ataxique est très généralement vraie. De
plus, on peut ajouter que c'est là le plus souvent un
signe de début.
Donc, toutes les fois qu'on trouve, avec des symp-
tômes de tabes ataxique, la conservation, ou mieux
encore, l'exagération des réflexes tendineux, il faut se
méfier et penser plutôt à un tabes combiné.
L'inverse a beaucoup moins d'importance. Sans
doute l'abolition des réflexes rotuliens coïncidant avec
des symptômes de tabes spasmodique fera penser à un
tabes combiné; mais alors il y aura en général d'autres
troubles sensitifs qui enlèveront toute difficulté au
diagnostic.
Pour distinguer le tabes combiné d'une myélite dif-
fuse ordinaire, on se basera sur les symptômes des
tabes en général.
1 Association française pour l'avancement des sciences. Congr. de Gre-
noble, 1885. ! Remarques sur le tabes dorsal spasmodique. (Gaz. médic. de Nantes
1885.)
DU TABES COMBINE. 37
La myélite diffuse est ordinairement transverse; elle
est limitée, circonscrite dans un foyer, s'étendant en
largeur plutôt qu'en hauteur; elle frappe d'emblée tous
les systèmes au niveau d'une rondelle : tous les fais-
ceaux blancs et la substance grise perdent leurs pro-
priétés. Si même cette myélite diffuse est envahissante,
elle frappera les hauteurs successives de la moelle de
la même manière, c'est-à-dire en détruisant toujours
indistinctement tous les systèmes de l'axe spinal. De
plus, dans la myélite diffuse tout est continu dans les
lésions, et il n'y a pas de symptômes céphaliques ou
même mésocéphaliques.
Dans le tabes combiné, au contraire, la lésion s'élève
en hauteur, non en largeur; elle ne frappe jamais une
rondelle entière de moelle ; elle ne produit jamais ces
paraplégies complètes avecanesthésie, exagération des
réflexes et paralysie des sphincters qui montrent que
la partie inférieure de la moelle est séparée de la par-
tie moyenne par une zone détruite. Il y a au contraire
souvent des symptômes mésocéphaliques, et surtout
céphaliques, qui, à eux seuls, suffisent souvent à faire
diagnostiquer un tabes, quand on les rapproche des
phénomènes spinaux proprement dits.
Le diagnostic est plus difficile avec la sclérose en
plaques. Ceci est une maladie cérébro-spinale comme
les tabes, et, les plaques pouvant se rencontrer un peu
partout, on conçoit qu'elles puissent raisonnablement
simuler toutes les autres lésions des centres nerveux.
Je n'hésite pas à dire que bien souvent la distinction
doit être impossible.
Cependant il y a des signes qui, dans beaucoup de
cas, permettront un diagnostic.
38 PATHOLOGIE NERVEUSE.
Les lésions de la sclérose en plaques ne présentent
ni symétrie ni continuité. Une plaque pourra donner
des symptômes de tabes ataxique dans une jambe ;
mais l'autre jambe n'aura rien, ou présentera des
phénomènes tout différents. Alors même que les deux
jambes seraient prises, bien souvent alors un bras se
comportera différemment et présentera, par exemple,
ce tremblement caractéristique qu'a décrit Charcot et
qui enlèvera alors le diagnostic.
. Dans le tabès combiné, tout marche au contraire,
comme dans les maladies systématisées; la lésion se
propage de proche en proche d'une manière continue,
sans sortir des régions de prédilection. Il n'y a pas de
contraste, pas de discontinuité.. .
Je reconnais que ce ne sont pas là des signes dis-
tinctifs absolus, fixes et généraux ; ce sont plutôt des
jalons, des indications qui serviront dans beaucoup
de cas, et surtout quand on pourra suivre le malade
assez longtemps. Du reste, comme je l'ai dit tout à
l'heure, je crois qu'on se trompera encore souvent et
qu'on pourra confondre, dans beaucoup de cas, la
sclérose en plaques avec le tabes combiné comme on
l'a confondue avec le tabes spasmodique, c'est pour
cela que, pour établir ce travail, nous n'avons voulu
citer dans nos tableaux et utiliser que les observations
suivies d'autopsie.
Le pronostic est plus difficile que le diagnostic ;
mais c'est là un principe général. En présence d'une
maladie quelle qu'elle soit, on fait son diagnostic, on
indique le traitement : ce qui embarrasse le plus, c'est
toujours le pronostic.
Il est bientôt fait de dire que les tabes sont des
DU TABES COMBINÉ. 39
maladies progressives, très difficilement curables et
desquelles on meurt. Mais en combien de temps
mourra le sujet ? Il y a des temps d'arrêt, même des
rétrocessions, soit spontanées, soit thérapeutiques ? Ces
phases se produiront-elles ? Si oui, combien de temps
dureront-elles ? Si non, comment la maladie va-t-elle
s'étendre et avec quelle rapidité ? Montera-t-elle tou-
jours et la mort surviendra-t-elle par le bulbe ? Ou une
complication cérébrale terminera-t-elle la scène ? Ou
encore est-ce le marasme, la cachexie avec les eschares
ou même la phtisie pulmonaire, qui emporteront le
sujet ? Toutes ces questions, et mille autres semblables,
intéressent au plus haut point la famille; mais elles
sont souvent insolubles pour le médecin.
Seulement comme elles sont communes à toutes les
maladies, et que les éléments' particuliers d'apprécia-
tion particulière sont les mêmes que. dans les autres
tabes et n'ont rien de spécial au tabes combiné, je
n'insiste pas et passe au traitement.
Si ce dernier paragraphe est très court, ce n'est pas
que je considère le traitement comme nul et inefficace
dans le tabes combiné; c'est uniquement parce que
les indications sont, pour la plupart, les mêmes dans
cette maladie et dans les autres tabes. Et nous ne de-
vons insister ici que sur ce qui appartient en propre
au type clinique que nous étudions.
Ainsi les indications tirées de l'état morbide fonda-
mental, sont les mêmes dans le tabes combiné et dans
l'ataxie locomotrice : iodure de potassium, ou mieux
de sodium, chlorure d'or et de sodium, etc., suivant
les cas. Il en est de même des indications tirées de
l'acte morbide anatomique (lésion de la moelle) : ré-
40 PATHOLOGIE NERVEUSE.
vulsifs de tout genre, vésicatoires, pointes de feu,
hydrothérapie.
Il n'y a que les indications tirées des actes mor-
bides symptomatiques qui varient dans une certaine
limite. Les contractures, et, d'une manière générale,
les phénomènes d'excitation motrice, sont un élément
nouveau, qui n'existe pas dans l'ataxie locomotrice,
et dont il faut tenir grand compte ici.
Ainsi à l'iodure de sodium, on joindra utilement le
bromure de sodium; c'est là du reste, une association
extrêmement utile dans beaucoup de maladies chro-
niques du système nerveux. On prescrira les deux
médicaments, par exemple dans la proportion relative
suivante :
DU TABES COMBINÉ. 41
Ce moyen, très utile dans la plupart des cas d'a-
taxie locomotrice progressive, ne m'a pas réussi du
tout chez le premier des trois malades dont j'ai résumé
les observations plus haut. Si on l'emploie, ce devra
être, en tout cas, toujours avec une extrême prudence.
Les courants continus faibles et à courte séance ou
même le tabouret statique devront être seuls em-
ployés, et encore, je le repète, avec beaucoup de mo-
dération et une surveillance incessante.
Quant aux eaux minérales, on devra choisir soit
parmi les stations, soit parmi les sources, celles qui,
étant indiquées dans le tabes, sont plutôt sédatives et
calmantes (tout en étant toniques) que stimulantes ou
excitantes. C'est ainsi que la Matou ou Ragatz, vau-
dront mieux que Balaruc et encore à la Matou la
piscine tempérée vaudra mieux que la piscine très
chaude.
Ce paragraphe, à peine esquissé, ne pourra du reste
être utilement développé que quand la maladie mieux
connue, admise de tous et facilement diagnostiquée,
sera suivie dès le début et que, par suite, les observa-
tions contiendront l'analyse plus complète des divers
traitements essayés et des résultats obtenus.
VI. - CONCLUSIONS.
Les trois observations personnelles, résumées plus
haut, et surtout les trente-trois cas (suivis d'autopsie)
qui figurent dans nos tableaux me paraissent établir
l'existence d'un type clinique, distinct des autres ma-
ladies de la moelle, qui mérite une place à part dans
42 -) PATHOLOGIE NERVEUSE.
les cadres de la neuropathologie et que je propose
d'appeler Tabès combiné (ataxo-spasmodique).
Ce syndrome n'est nullement caractérisé par son
étiologie. Beaucoup de cas de maladie de Friedreich
doivent être rangés sous cette dernière dénomination;
mais ce n'est pas le fait d'être héréditaire qui les
caractérise.
L'individualité du tabes combiné est constituée par
son tableau symptomatique et sa lésion anatomique.
Symptomatiquement, il est caractérisé par l'associa-
tion des symptômes du tabes ataxique .(douleurs ful-
gurantes, anesthésies, incoordination motrice), des
symptômes du tabes spasmodique (paralysies ou pa-
résies et surtout contractures ou autres phénomènes
d'excitation motrice) et des symptômes communs à
tous les tabes (troubles céphaliques et méso-cépha-
liques).
Anatomiquement, il est caractérisé par une myélite
chronique à siège spécial et constant. Cette sclérose
occupe les cordons postérieurs et les cordons latéraux.
On ne peut considérer cette lésion ni comme entière-
ment systématisée ni comme entièrement diffuse. Elle
est systématisée dans les cordons postérieurs et diffuse
dans les cordons latéraux. Cette association constitue
donc une myélite mixte.
Il y a aussi dans beaucoup de cas des lésions méso-
céphaliques, céphaliques ou même périphériques. C'est
cette complexité anatomique (commune à tous les
tabes) qui nous fait préférer le nom de tabes combiné
(maladie cérébro-spinale) à celui de sclérose médullaire
posté.m-latérale, de même que le mot tabès. dorsal ou
de l'hypnotisme. 43
ataxique est préférable à l'expression de sclérose mé-
dullaire postérieure.
Le tabes combiné doit être distingué du tabes
ataxique, du tabes spasmodique, des myélites diffuses
et de la sclérose en plaques : les caractères cliniques
sont assez tranchés pour rendre possible le diagnostic
différentiel.
Le tabes combiné a beaucoup d'indications com-
munes avec l'ataxie locomotrice progressive; mais il
en a aussi de spéciales; ce qui prouve que la connais-
sance de cette maladie nerveuse particulière est im-
portante, non seulement au point de vue de la science
nosologique, mais encore au point de vue de la pra-
tique et de la thérapeutique 1.
DE L'HYPNOTISME 2
Par le D= ERNEST JENDRASSIK
Assistant de la 1,- clinique médicale de Buda-Pest.
L'opinion la plus générale explique les phénomènes
dont nous nous occupons par la cessation de la fonc-
tion de la substance corticale et en conséquence de
cette circonstance par l'augmentation des fonctions
réflexes. Mais nous n'avons pas sur quoi fonder la
le
1 Au moment où nous achevons la correction des épreuves de ce travail,
nous trouvons dans les Archives de Westphal (I88c,, xvu 217) un nouveau
mémoire de Strttmpell . Weber eine besttmmte FOl'1n del, p"Ï1ndl'en com-
biuirlen SysteizeiIci,anki4îg des Ruckenmarks, et dans le Progrès médical
(20 février 1886) le résumé d'un cas de sclérose combinée présenté à la
Société anatomique (8 janvier 1886), par Babinski et Charrin.
1 Voy. le t. XI, p. 362. -
44 4 pathologie NERVEUSE.
supposition d'une exagération de la fonction réflexe
dans la moelle, ou bien dans les organes subcorticaux
pendant la léthargie, parce que, à cause des réflexes
corticaux considérablement élevés, une investigation
dans ce sens est impossible. Pendant la catalepsie, nous
ne trouvons pas de réflexes du premier ordre, et dans
le somnambulisme, nous ne les rencontrons que dans
leur extension normale. J'ai déjà parlé de la fonction
de la substance corticale pendant l'état hypnotique; et,
en comparant tout ce que je viens d'alléguer, je ne
puis admettre cette explication.
A mon avis, l'opinion de plusieurs observateurs est
erronée, quand ils considèrent la fixation d'un objet
comme une irritation sensorielle par laquelle l'état
hypnotique serait provoqué, ainsi Brown-Séquard,
Heidenhain, etc. La physiologie du système nerveux
nous enseigne que se sont surtout les irritants
d'intensité variable qui ont une influence irritante,
tandis que pour les irritants continus la suscepti-
bilité des éléments nerveux se perd successivement.
Cette fatigue, qu'on éprouve en regardant l'objet fixé
de tout près n'est pas absolument nécessaire pour
amener le sommeil, c'est ce qui est prouvé par les
autres moyens d'hypnotisation, ainsi par le sommeil
provoqué par un son monotone, dont on ne pourrait
guère affirmer l'action irritante. Et puis, chez les indi-
vidus qui ont une grande aptitude pour être hypno-
tisés, il suffit d'un temps si court que vraiment on ne
pourrait supposer une irritation. L'objet brillant, le
son du diapason et les autres agents ne font que con-
centrer l'attention de l'individu qu'on veut endormir
et on parvient à hypnotiser seulement ceux chez qui
DE l'hypnotisme. 45
cette concentration de l'attention a réussi; dans ce
moment, non seulement l'irritation n'augmentera pas,
mais, au contraire, elle perdra peu à peu de son pou-
voir, parce que, pour une influence de force constante,
l'irritabilité du système nerveux diminue successive-
ment. Puisque toute fonction cérébrale du médium est
concentrée dans ce moment à l'objet fixé, - et cette
fonction s'efface lentement, à un instant donné, les
irritations corticales tombent dans un état d'équi-
libre d'intensité très petite'. Si, pendant la nuit, ne pou-
vant pas dormir, nous avons recours au moyen popu-
laire de compter de 1 à 10, et en sens inverse, nous
suivons le même procédé que celui qui hypnotise.
L'attention est concentrée à ces chiffres, et, si on réussit
de l'y maintenir, elle s'affaiblit peu à peu, parce que,
en continuant de répéter ces mots, ils ne donnent plus
d'irritation nouvelle, et le sommeil entre.
Donc, la manière d'endormir n'est pas différente
dans le sommeil ordinaire et hypnotique 2, mais il y a
une différence dans la forme et daus le degré des
deux états. Pendant le sommeil normal, c'est en vain
que nous parlons à l'individu endormi, c'est en vain
que nous le touchons; si nous ne franchissons pas cer-
taines limites l'individu ne réagira point; mais, agis-
sant un peu plus énergiquement, nous l'éveillerons à
un degré varié, selon la force de notre intervention; il
1 Je connais une hystérique qui, écoutant un diapason, s'endort tou-
jours au moment où le son du diapason se perd.
2 Chez une hystérique, j'ai réussi avec les moyens de l'hypnotisation
(fixation d'un objet, son du diapason ut ,, ut 3 ) à produire dans quel-
ques secondes un sommeil ordinaire très profond. Si on la réveillait, elle
s'endormait tout de suite, et elle continuait ainsi son sommeil, pendant
quelques heures, autant de fois que j'ai fait l'expérience.
i si pathologie NERVEUSE.
peut arriver que, de cet état, il s'éveillera tout à fait, ou
bien qu'il retombera dans son sommeil. Dans l'état
hypnotique, une influence au delà de certains limites
éveillera de même l'individu, par exemple si nous
soufflons contre son visage. Par ce moyen, nous faisons
entrer dans le cerveau une irritation, laquelle, -
quand elle est assez concentrée - peut troubler l'équi-
libre des irritations corticales : c'est ce qui est l'état de
veille. Un courant électrique appliqué à la tête aura
aussi le même effet. Rieger dut s'en servir pour éveiller
un hypnotisé.
Le moment principal de l'état de veille est le main-
tien d'un certain nombre d'images dans un état d'irri-
tation plus ou moins élevée; je crois donc que plu-
sieurs auteurs, et entre eux Beard et Môbius, ont tort
en soutenant que, pendant la veille, les irritations du
cerveau sont.en équilibre. Beard' compare l'état de
veille à un candélabre dont tous les becs sont allumés :
quand on éteint les flammes, le sommeil s'ensuit; mais,
si nous ne laissons brûler qu'un seul bec, celui-ci
donnera une flamme d'autant plus forte; ce der-
nier exemple serait le symbole du sommeil hypnotique.
Je me servirai de cette comparaison, toutefois en la
modifiant de la façon suivante. L'état de veille est
comparable à un candélabre dont une partie moindre
des becs donne des flammes fortes et vives; une autre
partie de nombre plus considérable répand une lu-
mière faible; le reste des becs - et c'est la plus grande
partie n'entretient que des flammes à peine sensi-
bles ; les deux dernières parties éclatent partiellement en
1
1 : ;chmidt'sJalu'úüchel', 1881, p. 74-91.
DE l'hypnotisme. 47
pleine lumière si leur robinet s'ouvre. Les grandes
flammes sont le symbole de notre pensée ou de notre
action récente, qui en même temps ne peut s'étendre
qu'à une petite partie des images empreintes en notre
mémoire; les flammes plus faibles représentent les ac-
tions soi-disant inconscientes (comme la marche, les
différentes poses du corps, etc.), ces actions sont rela-
tivement soustraites à notre connaissance; et enfin les
flammes les plus faibles sont les images qui sont à
l'instant hors de notre connaissance, mais toujours
prêtes à y entrer. Cette comparaison nous fait voir
aussi, si nous concentrons notre attention à quelque
chose c'est-à-dire si nous allumons ce bec, la flamme
des autres diminuera; c'est un fait connu, on ne peut '
faire attention qu'à une seule chose à la fois. Mais à
l'état normal, tout en s'efforçant de diriger l'attention à
un point étroit, on a toujours une série d'images assez
nombreuse dans sa mémoire, aussi l'association des
images est si vive qu'à chaque instant plusieurs autres
images entrent dans la scène et notre esprit compare
les unes aux autres. Le résultat de cette comparaison
est le jugement par lequel nous faisons la critique des
images qui viennent d'entrer. Cette fonction du cer-
veau est basée donc principalement sur la circonstance
que l'irritation qui vient d'entrer du dehors ne reste
pas limitée à un seul point, mais elle se répand à un
certain cercle et réveille des images antérieurement ap-
prises. Ce jugement est peu développé dans certains in-
dividus ; ceux-ci sont obligés d'accepter la dernièreim-
pression, parce que ou leurs images de mémoire sont
perdues, et en conséquence la dernière arrivée fait une
beaucoup plus grande impression que les anciennes,
is PATHOLOGIE NERVEUSE.
ou bien la faculté de comparaison manque-le premier
cas est le manque de mémoire, le deuxième le dé-
faut du jugement. Pendant l'hypnose, cet état est
développé à un haut degré dans la forme du défaut du
jugement, c'est qui se conçoit facilement. 11 est évi-
dent que, pendant le sommeil hypnotique les influences
extérieures peu énergiques produisent dans les images
de mémoire des irritations partielles, dont l'extension
varie selon la phase de l'hypnose, mais elle est tou-
jours entre des limites très étroites. De plus, nous
avons vu que ces irritations ne dépassent point les
limites de l'irritation extérieure et, si cela arrive, ce
n'est que sur les voies bien exercées. En conséquence
donc la comparaison et le jugement manquent, et les
images se présentent comme elles sont entrées. C'est
ainsi, quand on montre, par exemple, un oiseau fictif à
un individu hypnotisé, il le voit, le caresse, etc..
Si je voulais appliquer la comparaison avec le can-
délabre sur le sommeil ordinaire et le sommeil hypno-
tique, il faudrait supposer que durant le premier, le
robinet principal est presque tout à fait fermé, la plus
grande partie des becs est éteinte, seulement quel-
ques-uns ondoient de temps en temps produisant les
rêves. Pendant l'état de veille, le maniement des robi-
nets s'exécute par la volonté. Pendant le sommeil, il
est dirigé en apparence spontanément, mais en vérité
par des irritations sensitives, tandis que pendant l'état
hypnotique, c'est l'expérimentateur qui ouvre et ferme
à son gré les robinets.
Le sommeil hypnotique est donc un état d'équilibre
des fonctions de la substance corticale dans lequel
on parvient par des influences extérieures à irriter
DE l'hypnotisme. 49
partiellement l'écorce. Ces irritations ne s'étendent pas
au delà des limites étroites, tout au plus sur les voies
frayées par l'habitude et l'exercice. Cette extension est
en proportion inverse du degré du sommeil. L'in-
fluence extérieure fait fonctionner les parties corticales
qui échappent tout à fait à la volonté du sujet, et, ainsi
isolées fonctionnent très longtemps, si nous ne faisons
cesser l'irritation par une suggestion contradictoire.
Ainsi je trouve la cause des phénomènes hypnotiques
dans la perte ou la diminution de l'association.
En admettant la justesse de cette hypothèse, on
pourrait peut-être comprendre les phénomènes : pen-
dant la léthargie l'individu donne des réponses réservées
exclusivement aux lieux influencés par les agents
extérieurs, à peine s'il y a une petite distension par
des voies exercées. Dans la catalepsie l'harmonie des
poses différentes du corps et la correspondance de la
mine aux mouvements des extrémités, et vice versa,
prouve bien que nous sommes en présence d'une trans-
mission d'une certaine étendue dans la substance cor-
ticale. En considérant cette circonstance, il est facile
de comprendre que l'irritatiou gagnant d'étendue, perde
d'intensité : il n'y a plus de contracture, et ce ne sont que
les poses données pendant l'expérience [qui persis-
tent. Enfin pendant le somnambulisme, on réussit aussi,
en adressant des paroles au sujet, à produire des irri-
tations restreintes dans les parties les plus différentes
de la substance corticale. Toutefois, l'extension de cette
irritation n'atteindra jamais le degré qu'elle a à l'état
de veille, et de là la spontanéité manque absolu-
ment.
En attribuant ainsi à la même cause les symptômes
Archives, t. XII. 4
50 Pathologie nerveuse.
moteurs et les symptômes soi-disant psychiques, je
crois que nous sommes autorisés à identifier la contrac-
ture motrice avec les images positives suggérées,
taudis que la paralysie serait identique avec les phéno-
, mènes produits paroles expériences négatives, c'est-
à-dire expériences qui ont pour but de faire dispa-
raître des images fictives provoquées ou des images
réelles. -
On peut réussir aussi à produire des suggestions
sans hypnotisation, au moins chez quelques individus,
et cette susceptibilité peut atteindre presque un degré
pareil à celui du sommeil hypnotique; mais il est hors
de doute que ce n'est pas un état normal. On en ren-
contre des exemples bien marqués dans l'hystérie, et ces
cas ont une grande importance dans la médecine
légale.
Si on a étudié ces suggestions, si on a observé com-
bien il est facile de les produire, on se gardera bien
de tirer des conclusions physiologiques des expériences
hypnotiques, ou bien on le fera avec une très grande
restriction. Sans nous en apercevoir nous guidons le
sommeil du sujet, et, si nous insistons à étudier les
phénomènes, nous produisons un grand nombre des
symptômes nouveaux. Voilà la cause pour laquelle il y a
presque autant de formes de sommeil hypnotique que
d'observateurs qui s'en sont occupés; après cela je
reviens à la question, que j'ai posée au commencement
de cette étude. En jetant un coup d'oeil sur les des-
criptions de l'état hypnotique des divers auteurs, on
trouve des différences telles qu'il faut se demander
s'il y a autant de formes de cet état, ou bien si les expéri-
mentateurs ont une influence sur les phénomènes.
DE LHYPNU'l'1W 1L ? 51
Cette circonstance prouve déjà qu'une très grande
partie des symptômes est due à l'intervention de l'ex-
périmentateur. Combien il est facile de guider un in-
dividu hypnotisé est assez démontré par les expériences;
en voici un exemple : on peut provoquer une paralysie
d'un membre sans mot dire, par quelques passés seule-
ment ; - on la peut aussi faire disparaître par le
même procédés
Lés expériences de Heidenhain et'Grütrner' prou-
vent aussi combien ces examens sont inaptes à donner
des résultats sur certaines questions physiologiques. Ces
scrutateurs ont produit par des passes sur le' visage
l'hémi-catalepsie, mais dans trois cas elle se présentait
au côté opposé des passes, dans un cas du même côté.
Touchant ces cas, Heidenhain et Grùtrner font remarquer
qu'on n'a pas une explication suffisante sur ces contra-
dictions, sinon qu'on veut recourir à l'irritation des vaso-
moteurs ; j'avoue franchement que, même avec cette
hypothèse, je ne pourrais pas les comprendre^ Et, dans
d'autres cas, cette explication donne des résultats plus
contradictoires encore : dans deux cas, en irritant lé
côté droit cette irritation fut suivie dé l'aphasie; dans
deux autres cas, l'aphasie accompagnait l'irritation du
côté gauche. De ce fait ils déduisent que, si l'entre-
croisement des voies sensitives est réelle, chez les
deux premiers, c'était l'hémisphère gauche où siégeait
la faculté du langage ; chez les deux autres, c'était
l'hémisphère droit; mais quelques' lignes plus bas, nous
lisons que, chez un vigoureux ! jeune homme, tantôt le
côté droit, tantôt le côté gauche devenaient cataleptiques
p 11" t
1 Bl'esl, I rat(. 7eüschri/'t. 980, 11, 4. ' r . ? 1 ! ,
: i2 PATHOLOGIE NERVEUSE.
et l'hémi-catalepsie des deux côtés était accompagnée
de l'aphasie.
Quant aux trois phases de l'état hypnotique de
M. Charcot, ils ont le grand mérite d'avoir complété
nos connaissances de cet état très précieux pour les
études de la fonction du cerveau; mais il est encore
difficile à juger s'ils sont produits artificiellement ou
s'ils correspondent de l'organisation de l'écorce céré-
brale. D'un côté, il y a tant de transitions, de formes
frustes, des états pour ainsi dire interposés entre les
phases typiques, qu'on est tenté de prendre ces phases
pour être produits par l'éducation involontaire de l'ex-
périmentateur. 1l plaide en faveur de cette opinion cette
circonstance qu'au commencement des expériences les
phases sont loin de se montrer aussi distinctes, comme
après des exercices souvent répétées; que, chez la plu-
part des sujets, on n'arrive pas à produire ces phases;
ni l'un ni l'autre ne tombent dans un état qui est cer-
tainement hypnotique, mais qui n'a pas les caractères
d'aucune phase, enfin il n'y a que très peu d'expéri-
mentateurs qui ont réussi à produire ces phases. De
l'autre côté, au contraire, M. Charcot a présenté tant
d'exemples, qui entre eux s'accordaient au moins pour
les principaux symptômes tout à fait, et d'ailleurs,
comme je viens de montrer ces phases correspondant
à des degrés différents de l'extension de l'irritation ex-
térieure dansle cerveau, -et puis, ces « grands hypno-
tiques » n'ont pas de transitions entre leurs phases -
tous ces points peuvent s'attacher aussi à l'organisation
du cerveau. C'est seulement une possibilité, que je
veux pourtant mentionner sans pouvoir l'affirmer,
mais qui me semble avoir quelque vraisemblance. Il
DE L HYPNOTISME. 53
est connu que les différentes parties de l'écorce sont
liées entre elles par des fibres d'association. Nous
sommes encore loin de les connaître toutes, mais nous
en connaissons déjà quelques systèmes. Il y a là le
réseau qui lie les cellules ganglionnaires entre elles,
puis les fibres qui établissent la communication entre
les circonvolutions voisines, et il y a des fibres qui
sont tendue entre des champs plus éloignés. Or, le rôle
physiologique de ces systèmes en particulier n'est pas
encore connu, et en conséquence on ne peut pas fonder
une hypothèse sur cette organisation anatomique, mais
il n'est pas tout à fait impossible que les diverses phases
de l'hypnotisme correspondent à la perte d'un ou plu-
sieurs de ces systèmes d'association. Selon ce que je
viens de relater, le sommeil le plus profond se rencon-
trera avec la plus grande perte de l'association. Ainsi
on pourrait supposer que chez ces « grands hypno-
tiques », on peut parvenir expérimentalement à para-
lyser, selon les phases de l'état hypnotique, les fibres
des divers systèmes d'association.
En terminant, je saisis avec plaisir l'occasion de
remercier M. le professeur Charcot delà libéralité avec
laquelle il m'a donné la permission, pendant mon
séjour à Paris en 1884, de travailler dans son labora-
toire et d'assister aux expériences hypnotiques de son
service.
RECUEIL DE FAITS
NOTES SUR, LES HÉMORRAGIES CUTANÉES
la ' PAR AUTO-SUGGESTION;
Par le Dry. MABILLE, directeur médecin en chef de l'asile de Lafond,
La Rochelle, et le Dr J. RAMAD1KR, médecin adjoint.
A la date du 29 août 1885, l'un de nous a publié dans le
Progrès médical une note sur les hémorragies cutanées par
auto-suggestion dans le somnambulisme provoqué.
« Il s'agit dans ce cas, disons-nous, d'une hémorragie qui
s'est produite durant le,somnambulisme provoqué ou plutôt
durant le sommeil provoqué par suggestion à terme, sans
aucun intermédiaire et au lieu et place de stigmates anciens,
parce que' nous croyons pouvoir appeler auto-suggestion...
Et cette auto-suggestion a été comme le réveil et l'extériori-
sation de, sensations antérieurement emmagasinées. »
A vrai dire,' dans ce cas, l'expression d'auto-suggestion
dans le sens propre du mot, pouvait prêter à discussion ; car
l'explication que nous donnions nous-même du fait produit,
laissait percer l'idée d'une origine purement mécanique, sans
que la volonté du sujet fût entrée d'une façon bien manifeste
dans l'accomplissement' de l'acte. Tout autre semble, dans
une certaine limite du moins et pour une part que nous déter-
minerons plus loin, l'ensemble de faits suivant :
Le 2 février 1886, vers une heure de l'après-midi, V... est
pris dé vomissements avec accès hystéro-épileptiques qui se
prolongent pendant près de trois heures. Vers sept heures el
demie du soir, nouveaux vomissements et crises nouvelles
pendant lesquelles nous observons divers déroulements de
personnalité2. Puis, à huit heures du soir, en présence de
1 H. Habille. - Notes sur les hémorragies cutanées par autosuggestion
dans le somnambulisme provoqué. (Progrès médical, t. Il, il,, 35.)
2 Dans un travail que nous publierons prochainement, nous décrirons
cet état spécial pendant lequel, spontanément et dans un temps très
DES HEMORRAGIES CUTANEES. 05
M. Chuvelot, interne, et des infirmiers de service, V... se com-
prime les lobes oculaires comme pour se mettre en léthargie,
les ouvre comme pour passer à l'état cataleptique, se fric-
tionne le vertex comme pour aboutir au somnambulisme et
prononce les paroles suivantes :
« V..., il y a quatre lettres à votre nom ; cinq minutes
après votre réveil, il faut que ça saigne à votre bras. » A son
réveil, légères démangeaisons au bras gauche. V... cherche
à se frotter le bras qu'on est obligé de maintenir; puis il
tombe dans l'état particulier que nous observons habituelle-
ment chez lui lorsque le terme d'une suggestion approche.
Quelques minutes après, on voit la peau de l'avant-bras
gauche se congestionner; il se produit une sorte de gonfle-
ment à l'endroit où bientôt vont apparaître des gouttelettes de
sang, formant les quatre lettres de son nom (lettres de un
centimètre et demi de hauteur). Quelques minutes après,
V... s'hypnotise par le procédé décrit plus haut et s'exprime
ainsi : « V..., dans cinq minutes, il y aura un A sur votre
front et cet A saignera ».
Au moment correspondant à la suggestion, en présence de
M. le Dr Ramadier, appelé par M. l'interne, les assistants
notent sur le front de V... d'abord une rougeur, puis du gon-
flement ; et enfin des gouttelettes de sang dessinent la lettre
A, sur la partie médiane du front, un peu à gauche (1 cen-
timètre de hauteur).
A partir de ce moment, état de crises avec déroulement de
personnalités diverses, crises de la vipère, une des phases de
son accès d'hystéro-épilepsie ; puis à dix heures du soir, nous
constatons que par une sorte d'auto-hypnotisme, V... s'en-
dort comme précédemment et tient le langage suivant :
« V..., il y a.quatre lettres à votre,nom. Un quart d'heure
après votre réveil, elles seront marquées sur votre cuisse
gauche et saigneront ». Quatre minutes seulement après cette
auto-suggestion , une rougeur commence à apparaître à la
cuisse gauche, puis après la période de gonflement, le nom de
V... est écrit sur la gauche (3 à 4 centimètres de hauteur) et
saigne.
Voilà donc au milieu de crises hystéro-épileptiques, l'appa-
court, le malade en état de crises se transporte à des âges divers et
successifs de sa vie, état psychique qui entraîne un état somatique tou-
jours le même.
56 RECUEIL DE FAITS.
rition spontanée de stigmates sanguinolents constatée par
nous pour la seconde fois sur le même malade. Comme nous
l'avons dit plus haut, lors des stigmates qui surgirent sponta-
nément le 29 août 1885, ces hémorragies se produisirent au
lieu et place de stigmates anciens antérieurement suggérés
au malade. Les stigmates du 2 février 1886, au contraire, ont
apparu alors que, depuis plusieurs mois aucune suggestion
de cette nature n'avait été faite à V... Et sur trois hémor-
ragies constatées, les deux dernières observées, celles du front
et celle de la cuisse gauche se sont produites en des endroits
qui n'avaient jamais été choisis, comme siège de la suggestion.
Il n'est pas douteux que, dans notre cas, l'apparition des
hémorragies cutanées ait lieu d'une façon à peu près méca-
nique. En effet, elles seront produites au milieu d'une série
de crises hystéro-épileptiques et il n'a pu dépendre du malade
d'empêcher leur production, pas plus qu'il n'est maitre de
s'opposer au déroulement de ses personnalités et de sa crise
elle-même. Elles ont bien été connues précédemment comme
le réveil d'anciens souvenirs. Néanmoins, il nous parait diffi-
cile de dire que la volonté de V... ne s'est pas manifestée dans
une certaine limite, puisque les hémorragies se sont produites
en des points non encore choisis par les expérimentateurs, et.
sous ce rapport, il n'y a pas eu de la part de V... qu'une
simple extériorisation de souvenirs emmagasinés. Il semble
y avoir eu dans ce cas une sorte d'auto-suggestion véritable.
Nous insisterons en terminant sur le lieu d'élection, chez
notre sujet, des hémorragies suggérées ou spontanées. Ces
hémorrhagies se produisent toujours du côté gauche du corps,
c'est-à-dire du côté hyperesthésié, l'autre côté étant anesthési-
que, fait signalé déjà dans le mémoire de MM. Bourru et Burot '.
Pour le démontrer d'ailleurs, l'un de nous a eu l'idée de
provoquer par suggestion le transport de la sensibilité et a pu
obtenir de cette façon des stigmates à droite, alors qu'il fut
impossible de les produire à gauche, ce côté étant devenu
-anesthésique.
* Bourru et Burot. - Des stigmates sanguinolents provoqués par sug-
gestion. (Congrès de Grenoble, 1885.)
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE
t. MYÉLITE SUBAIGUE DES CORNES antérieures. - Paralysie avec
ATROPHIE GRADUELLE DE TOUS LES MUSCLES DU CORPS, SAUF CEUX DE
LA FACE. ARTHROPAT111ES AIGUËS. - DISPARITION COMPLÈTE DE
TOUS LES ACCIDENTS AU BOUT DE TROIS MOIS ET DEMI ; par le Dr E.
DUFOURT, chef de clinique. (Lyon méd., 1885, t. XLVUI.)
Cette observation, relative à un jeune homme de dix-sept ans,
chez lequel la paralysie ne s'est complétée qu'au bout de quinze
jours, démontrerait, d'après l'auteur, l'existence d'une forme de
myélite des cornes antérieures, intermédiaire au point de vue de
sa marche entre la paralysie spinale de l'adulte et la paralysie
générale spinale, à marche diffuse et curable, décrite par Lan-
douzy et Dejerine.
Parmi les phénomènes les plus intéressants présentés par ce
malade signalons : 10 l'apparition de plusieurs arthrites aiguës ;
20 la persistance de l'abolition de la contractilité faradique après
le retour de la motilité; 3° une accélération du pouls semblant
appartenir à l'excitation de la région cervicale de la moelle.
G. D.
II. ERYSIPÈLE PÉRIODIQUE DES MEMBRES INFÉRIEURS AU COURS D'UNE
MYÉLIt'E chronique : par M. D. TEISSIER. (Lyon méd. 1885,
t. XVIII.)
III. Observation DE M6 : N1NG1TESUpI'URÉE par infection, A LA SUITE 1)*UNE
fracture DU CRANE compliquée DE plaie, indication de la trépana-
TION ; par.-Ni. le Dr GOULLIOUD, clef de clinique. (Lyon méd., 1885,
t. XLVI11.)
IV. DES CRISES d'épilepsie LIÉES A l'arthritisme ; par M. B. TEISSIER.
(Lyon méd., -1883, t. XLVIII.)
L'auteur rapporte en quelques mots l'observation de cinq ma-
lades qui, sans autre antécédent que le rhumatisme ou la goutte,
ont présenté à diverses repri ses et sans cause appréciable des crises
d'épilepsie. G. D.
58 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
V. Myélite chronique diffuse ; par le Dr Raymond, agrégé, médecin
de l'hospice des Incurables. (Gaz. met. de Paris, 1884.)
Cette observation de myélite classique est suivie d'une longue
étude micrographique de la moelle, des diverses parties de l'encé-
phale, des nerfs périphériques, des muscles et de la peau, etc.,dans
le but d'établir J'influence d'une destruction plus ou moins com-
plète de la moelle pendant vingt et trente ans sur l'état ana-
tomique du cerveau et de tous les organes en général. G. D.
VI. Contribution A l'étude DE l'aphasie; parM. 13ALZI,-R, médecin des
hôpitaux. (Gaz. '7 ! ëd. de Paris, <884.)
La première observation contenue dans cette note est un
exemple d'aphasie motrice avec un certain degré de surdité et do-
cécité verbales et d'amnésie générale. A l'autopsie, on trouva
deux petites plaques jaunes au niveau de la troisième circonvolu-
tion frontale gauche et un immense foyer de ramollissement occu-
pant presque toute la première circonvolution temporale et le pli
courbe du même côté.
Dans la deuxième observation, la suppression des opérations du
langage a été déterminée par une méningo-encéplialite tubercu-
leuse, dont les lésions sont restées exactement localisées à la partie
moyenne de l'hémisphère gauche (partie postérieure de la troi-
sième frontale, scissures de Sylvius, de Rolando et temporo-
frontale.
VU. SUR l'origine corticale du facial inférieur ; par le Dr Raymond,
agrégé, médecin de l'hospice des Incurables. (Gaz. méd. de
Paris, i 884.)
On trouve dans ce travail outre la relation de plusieurs cas de
paralysie faciale empruntés à différents auteurs une nouvelle ob-
servation de la même affection suivie d'autopsie, personnelle à
l'auteur. Comme dans les cas analogues, la lésion occupait la
circonvolution frontale ascendante (un tiers inférieur) du côté
opposé à la paralysie. Les considérations qui suivent sont des
tinées à montrer la concordance parfaite qui existe pour limiter
à la frontale ascendante dans son tiers inférieur le centre des
mouvements de la face. G. D.
VIII. UN cas d'hémianesthésie DE cause cérébrale avec MOUVEMENTS
anormaux du bras ET DE la jambe; par le Dr RAYMOND, médecin
de l'hospice des Incurables. (Gaz. méd. de Paris, 1884.)
La malade qui fait le sujet de cette observation ne rentre pas
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 59
dans le cadre des hémichorées symptomatiques vulgaires; le*
inconvénients qu'elle présente ne peuvent, en effet, être comparé*
àceux de la chorée, car ils ne soûl ni involontaires ni continus ;
ils ne se produisent qu'à l'occasion d'une excitation périphérique
volontaire ou sensitive et présentent une exagération allant pres-
que jusqu'à simuler l'épilepsie jacksonienne, ce qui prouve qu'à
la suite des lésions cérébrales, même lorsque la zone corticale est
indemne on peut observer tous les degrés dans les troubles de la
motilité. G. D.
IX. DES LOCALISATIONS MÉNINGÉES ET ENCÉPHALIQUES DES AFFECTIONS
catarrhales ; par le 1)' Raymond, médecin de l'hospice des
Incurables. (Gaz. méd. de Paris, z884.)
La conclusion de ce travail est, que le cerveau et les méninges
n'échappent pas, comme l'avait déjà démontré M. Marotte , aux
localisations des atlectlous catarrhales, saisonnières ou épidémi-
ques. A l'appui de cette conclusion se trouvent relatées plusieurs
observations de fièvre calarrbale accompasnées d'encéphalite et
même dans un cas de méningite suppurée.
X. DE LA MÉNINGITE 'fUI3EItCULEU31's SURYEKANr A LA SUITE D'OPERA-
TIONS CHEZ LES tuberculeux; service de M. VERNEUIL; leçon re-
cueillie par M. PAUL Berthod. (Gaz. m(M. de Paris, 4884.1
XI. Deux cas de lésion cérébrale; par le Dr A. Brousse, chef de
clinique de la faculté de Montpellier. (Gaz. mid, de Paris, 1884.)
Il s'agit de deux vieillard» morts hémiplégiques ; les lésions
trouvées à l'autopsie étaient conformes à la doctrine des localisa-
tions cérébrales.
XII. Ess Il DE localisation d'une cécité accompagnée D'HÉMICHORÉE ;
par H. 11ALLOPEAU, agrégé à la faculté (Union méd., l«811,
t. XXXIX.) -
Un homme âgé de quatre-vingt-trois uns, aortique, fut atteint
soudainement d'une cécité complète en même temps que d'une
agitation choréiforme dans la moitié gauche du corps et de mou-
vements de rotation. Ces accidents 'après avoir persisté pendant
quelques jours avec intensité, se sont peu à peu dissipés. L'auteur
pense qu'ils doivent être attribués à une embolie siégeant dans
une des artères, qui se distribuent aux tubercules quadrijumeaux
du côté droit et plus probablement dans l'une des branches an-
térieure". G. D.
60 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
XIII. LES localisations cérébrales DE L HERPÉTISÜE par le Dr LAN-
CEREAUX, leçon clinique recueillie par M. OEïTiNGER. (Union
méd., 1885, t. XXXIX.)
Cette leçon est consacrée à la description deo symptômes, de
l'évolution, des modes de terminaison et du traitement préventif
de l'ischémie, du ramollissement, et de l'hémorrhagie centrale. Ces
trois lésions, pour M. Lancereaux, ne correspondent pas à des
maladies distinctes, ce sont des accidents alternes d'un même état
général, l'athérome artériel ou endartérite généralisée. Cet
alhérome ne serait lui-môme qu'une manifestation avancée d'un
état morbide général que M. Lancereaux désigne sous le nom
d'herpétisme, et auquel il rattache des troubles nerveux multiples.
l'arthrite déformante, les varices des membres, etc... G. D.
XIV. Cas DE méningite cérébro-spinale chronique; par ? H. HADDEN.
(Trans. of the path. Soc. of London, f884-8,ï.)
Il s'agit d'un garçon de onze ans dont un frère était devenu
monoplégique à la suite d'une attaque et qui présenta les
premiers symptômes de méningite consécutivement à un trau-
matisme léger du crâne. Ca. F.
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE
1. Base anatomique de L'ÉPILEPSIE; parWALTER HAY.
(Bulletin Médical de Philadelphie, févr. 1886.)
L'auteur désire appeler l'attention sur le pronostic de l'épi-
lepsie liée à une lésion anatomique de l'encéphale; ce qui
existe le plus souvent quand l'épilepsie date de longtemps. Les
traumatismes du crâne et du cerveau sont souvent suivis
d'épilepsie, qui, au début, peut être guérie par la guérison de
la lésion initiale. Il a trois cas d'épilepsie traumatique person-
nels : le premier est celui d'une femme, qui survint à la suite
d'une chute de cheval avec enfoncement des os. Il se proposait
d'appliquer le trépan, qui fut repoussé par un médecin consul-
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. () 1
tant. Plus tard, les lésions étaient devenues définitives. Le
second cas relate une chute sur le côté gauche de la tête,
ayant enfoncé la suture sagittale, sur une longueur de trois
quarts de pouce. Au bout de trois mois, l'épilepsie se développa
et durait déjà depuis douze semaines quand W. Hay vit la
malade. Il reconnut les traces d'une fracture sans dépression
notable et proposa le trépan, mais deux chirurgiens s'y refu-
sèrent. Le médecin ordinaire avait constaté un décollement
du cuir chevelu, mais niait la fracture-trépanation, constata-
tion de la fracture avec dépression. Pas de nouvelles postérieures
de la malade. Un autre cas, soigneusement examiné, était celui
d'un homme de trente-trois ans, épileptique depuis l'enfance.
Le nombre exact d'années était impossible à préciser. C'était
donc un épileptique permanent. Aucun renseignement ni du
malade, ni du médecin qui le soignait depuis fort longtemps,
ne pouvait faire penser à un traumatisme. Mais on sentait sur
la tète une large dépression en arrière de l'apophyse mastoïde.
Proposition de trépaner. On apprit alors que le malade avait
fait, avant l'âge de trois ans, une chute de cheval. Dans ce cas,
comme le montre l'opération, un fragment osseux d'un demi
pouce de long avait été projeté contre le cerveau et adhérait
par sa face externe à l'os nouveau, formé au-dessus de lui.
On enleva cette esquille sousle chloroforme. Quatre jours après
le malade pouvait se lever, mais les attaques continuèrent
comme devant. L'intervention était trop tardive car les lésions
cérébrales étaient définitives, mais elle n'en reste pas moins
une pratique recommandable. (,lIed. Bullet. de Philadelphie,
févr. 1886). P. C.
II. Contribution A L'ÉTUDE DE la folie épileptique; par F. FICHER.
(ArcA.y. Psych., aV, 3).
Deux observations prouvant que, quoi qu'en ait dit Samt, il
existe chez la femme une folie purement épileptique sans aucun
mélange d'hystérie. Quelles que soient d'ailleurs les combinaisons
entre elles des deux névroses, l'épilepsie se reconnaît à l'excita-
bilité impulsive, à l'absence de toute notion de morale élevée,
de là des actes pervers ayant toutes les allures de délits volon-
taires. L'épileptique agit au gré de déterminations extrêmes;
le raisonnement régulateur manque. Le caractère de la femme
épileptique diffère de celui de l'homme atteint de cette névrose
en ce que le mode d'accomplissement de l'acte procède chez elle
d'un certain raffinement. On y découvre encore un facteur d'or-
lU revue de Pathologie Mentale,
dr<' sexuel (fausses sensations locales). Si, en ce qui cuncerne les
accès rudimentaires, il est vrai qu'au premier abord, il semble
n'y avoir pas d'uniformité symptomatique chez un malade donné
(Witkowsky 1) à raison de la prédominance de tel ou tel élément
morbide aujourd'hui et demain, on réussit néanmoins par une
observation minutieuse à déceler les symptômes frustes et, par
suite, un ensemble psychopathique uniforme, non seulement
dans un cas particulier, mais chez tous les épileptiques. Quant a
la folie épileptique sans troubles de la connaissance, sans aucune
lacune de la mémoire, cela n'existe pas, mais il y a lieu de tenir
compte des observations de Fuerstner et d'observer à toutes les
minutes une atfection éminemment nuancée. P. K.
III. L'assistance des aliénés en ESPAGNE : par A. SCaMIT2. (Allg.
Zeitsch. f. Psych., XLI, 3.)
L'auteur conteste à Pinel le mérite d'avoir délivré les aliénés ,
en 1409, on aurait fondé à Valence la Casa de Orates ayant pour
but le traitement diététique, moral, humain, des aliénés. Suit
l'historique de la question en Espagne, sous tous ses aspects avec
analyse de documents, tableaux, statistiques. En 1847, on y
comptait 66 établissements hébergeant 1,626 aliénés, dont 1,475
entretenus par les communes et <31 pensionnaires; on ne comp-
tait que 4 établissements provinciaux ayant le caractère d'asile,
d'aliénés spéciaux. En -1880, il existe 26 asiles spéciaux contenant
' ? ,164 aliénés de plus que les 66 établissements en question. Citons
les asiles provinciaux de Mérida (fondé en 1852), Tolède (Badajoz.
1853), Valladolid (1852), Sarr,lgosse (1839), Cadix (1862), Grenade
(1855), Salamanque (1851), Séville (18p3), Teruel (1864). Valence
(1869). P.K.
IV. UN cas de porencépualie avec idiotie ET RIGIDITÉ spasmodique
congénitale DES membres; par R. OTTO. (Arch. f. Psych., XVI, 1.)
Garçon de quatre ans présentant une série de phénomènes
dont la suscription donne une idée suffisante (longue observa-
tion). Voici le résumé des altérations anatomo-palhologiques.
Crâned'unenfantdedix mois.Poids del'encéphale-470nr.,dont
130 gr. pour l'hémisphère droit, 180 gr. pour l'hémisphère
gauche. Lacunes porencéphaliques dans les deux hémisphères, et
cicatrices surajoutées dans l'hémisphère gauche. Les pertes de
substance porencéphaliques de droite affectent un trajet général
1 Voy. Archives de Seurulogie, t. X, p. 231 et 257.
2 Voy. Revues analytiques, t. V, p. 259. " '
REVUE DE Pathologie mentale. Ii : j
représenté par une ligne qui, placée en avant du sillon perpendi-
culaire externe, descendrait après avoir contourné la face interne,
entre le lobe pariétal et le lobe occipital pour se replier sous la
face inférieure du lobe temporal et de la gagner la pointe anté-
rieure de celui-ci; à gauche, la direction est la même, seulement
ici la ligne passe dans le sillon perpendiculaire lui-même et
occupe dans tout son trajet une situation plus postérieure. La
cicatrice de gauche porte sur le territoire de la scissure de Syl-
vius, à partir de la racine de la troisième frontale en enlevant un
morceau de la deuxième frontale. L'irrégularité des destructions
empêche la détermination précise partout des déficits. Ont mani-
festement disparu : à droite, la partie antéro-supérieure de
l'avant-coin, les segments inférieurs des 2° et 3° temporales, une
portion du pli courbe (gyrus angulaire) ; à gauche, la 2o et une
partie de la 3° temporale, un étroit morceau de la vira occipitale
et du gyrus angulaire, un étroit segment du début des 2" et
3e frontales. Toutes les parties voisines, si elles ne sont pas
détruites, ont perdu leur morphologie normale : l'insula n'est
plus, à droite ni à gauche, couverte par l'opercule. Anomalies
multiples dans le développement et la direction des circonvolu-
tions des divers lobes. (Voy. le mémoire et les planche*.) Intégrité
des autres parties du système nerveux, mais le pédoncule céré-
bral droit et la moitié droite du bulbe sont peu développées (pas
d'altérations microscopiques). M. Otto adopte les opinions de
Kundrat; dans l'espèce, l'anémie maternelle (surmenage moral
et physique) a déterminé l'ischémie foetale (ramollissement). L'état
psychique de cet idiot se rattachait aux déformations et agéné-
sies cérébrales; l'absence de la parole provenait de l'atteinte de
la circonvolution de Broca du côté gauche. Quant aux phénomènes
spasmodiques du tronc et des membres, sans anomalies de l'exci-
tabilité électrique, sans atrophies, sans troubles de la sensibilité
générale, sans perturbation dans le réflexe tendineux patellaire,
sans clonisme podalique, émanaient-ils des destructions des
ascendantes et de leur voisinage ? Les recherches d'Adamkiewicz
sur la pression cérébrale (Acad. des sciences de Berlin, t. LXXXV111,
III. Oct. 1883) permettent d'incriminer ces régions. P. K.
V. Communication concernant LES RECHERCHES SUR LES échanges
nutritifs (bilan physiologique) DES aliénés SITIOPHOBES pendant
LEURS périodes d'abstinence ; par F.TUCZEK (Arch. f. Psych., XV, 3)'.
Observation I. Folie systématique chez une demoiselle de
trente-deux ans. Hallucinations de l'ouïe. Idées de persécution
entées sur des idées de grandeur. Période d'abstinence absolue
1 Voy. Arch. de Neurologie, t. IX p. 106.
(;4 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
de vingt-trois jours; puis la malade se remet spontanément à
manger ; retour rapide du statu quo antérieur. - M. Tuczek
n'intervient pas parce que l'introduction de la sonde oesopha-
gienne nécessiterait une lutte (danger de lésion : pneumonie
alimentaire), parce que cette lutte entraînerait des troubles
trophiques et provoquerait de nouvelles idées délirantes, parce
qu'antérieurement un épisode identique s'était évanoui de lui-
même, parce qu'au début de- ce second épisode la nutrition de
la malade est en bon état, parce que, pendant son évolution,
l'aliénée demeure au lit dans une chambre chaude (conservation
de la provision de graisse de l'économie), parce qu'enfin aucun
phénomène menaçant ne se montre.
Observation Il. - Folie systématique chez une femme de trente-
huit ans. Idées de persécution greffées sur des idées de grandeur.
Abstinence incomplète de vingt-huit jours. Les mêmes motifs
s'opposent à l'intervention ; de plus, la malade prend presque
chaque jour de petites quantités de liquide. Guérison.
Tableaux très détaillés à tous égards dont les conclusions sont
consignées dans le compte-rendu du IX° Congrès des neurolotistes
et aliénistes de l'AI ! emagne du Sud-Ouest de 1884'. Les allures
stoechiologiques en question diffèrent-elles de celles que présen-
terait un individu psychiquement sain se trouvant dans les
mêmes conditions ? Il faudrait faire des essais parallèles 2. Il est
remarquable de voir la diminution de l'excrétion indiquant une
diminution de la nutrition (hibernation). Ces malades perdant
peu d'albumine, l'expectation a sa raison d'être à la condition
qu'on observe avec la plus grande conscience l'état des forces et
qu'on prévienne toute complication physique. P. K.
VI. Communications casuistiques DE l'asile D'ANDE1\NACH POUR
la province du RHIN; par 0. HEBOLD. (i ? 'Ch. %. Psych., XV, 3.)
Observation I. Gliome intramédullaire de la moelle épinière. -
Surprise nécroscopique. Homme de quarante-deux ans, atteint
d'aliénation mentale depuis six mois (mégalomanie, phénomènes
paralytiques, affaiblissement psychique). Il y a deux mois,
sensation d'oppression douloureuse dans la moitié gauche du
thorax; accès passagers d'affolement cardiaque, suicide. Autopsie.
Néoplasme occupant la portion centrale de la région cervicale
de la moelle. llIéningo-périencéphalit0. Dégénérescence secon-
daire des faisceaux pyramidaux dans les cordons anléro-latéraw
et des cordons postérieurs. Planche à l'appui.
1 Voy. Arch. de Neurologie, t. IX, p. 107.
2 Comparez avec le mémoire de Siemens, Arch. de Neurologie, t. IX,
p. 268.
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 65
Observation IL Glio-sarcome cérébral. Epilepsie. Tumeur
occupant la couche optique et le corps strié d'un côté. Homme
de quarante-deux ans; modification intellectuelle depuis onze
ans; les premiers symptômes d'épilepsie datent de quatre ans;
ils sont suivis d'hébétude et d'agitation : affaiblissement de la
mémoire. Il y a trois mois, troubles de la vue, suivis de complète
cécité. Aphasie. Pendant le dernier mois, état de mal avec
hébétude permanente et secousses convulsives dans les extré-
mités droites. - Autopsie. Tumeur occupant à gauche une partie
des ganglions centraux et de la couronne rayonnante du
lobe temporal. Névrite étranglée des deux nerfs optiques, Hémor-
rhagies capillaires dans la substance grise de la moelle. Dégéné-
rescence secondaire des cordons latéraux et postérieurs.
Observations 111. Cysticerques du cerveau et de la moelle. -
Femme de soixante-trois ans. Parents indemnes, mais. soeur
idiote, hémiparétique. Originalité, hystérie, accidents mens-
truels. Il y a sept ans, agitation due à des hallucinations de l'ouïe
et à des idées de persécution. Gâtisme. Il y a six ans, première
attaque d'épilepsie; depuis lors, attaques fréquentes souvent
accompagnées de vomissements; il y a quatre ans, cécité. Phéno-
mènes paralytiques ; troubles de la sensibilité et de la parole.
Autopsie. Un cysticerquesous la pie-mère spinale; nombreux cysti-
cerques sous la pie-mère encéphalique et dans l'écorce du cerveau ;
un cysticerque libre dans le ventricule latéral et l'espace dure-
mèrien ; cysticerques dans le myocarde et sous la plèvre costale.
Deux dessins indiquent les endroits lésés. P. KÉRAVAL.
VII. Du SUICIDE DANS LES ASILES d'AHÉNÉS ; par HASSE (Alfy.
Zeitschr. f. Psych., XLI, 3).
Le suicide est le cauchemar du médecin d'asile. Statistique à
cet égard de l'asile de Koenigslutter depuis sa fondation (1 ? dé-
cembre 1865 au 1,,r janvier 4881); en tout dix suicides.'L'auteur en
relate les obsevations eu les accompagnant d'analyse critique
très complète. En somme, la proportion des suicides par rapport
aux 4089 malades traités ou hospitllisés en dix-huit ans, est de
0,00025 p. 100. Les observations prouvent : 10 qu'aucune forme
d'affection psychique n'échappe au suicide, à l'exception peut-être
de la manie pure; 2° que la mélancolie et la dépression doulou-
reuse avec les idées délirantes qui l'accompagnent et l'affectivité
passionnelle qui la concerne (angoisse) constitue le terrain géné-
rateur du suicide ; 3o que les hallucinations, notamment celles de
l'ouïe (voix de Dieu, d'une puissance suprême, d'un époux, d'un
parent, d'un enfant, de la loi) et aussi celles de la vue (apparitions
indicatrices ou menaçantes) favorisent son exécution; 4° qu'il peut
encore y avoir suicide dans les cas de dépression brusque, momen-
archives, t. XII. 5
6(; REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
tanée, d'obsession optative, de sensation, de réflexion subite, de
méchanceté impulsive, d'extase. Remèdes. Les faits du quatrième
groupe échappent à la répression prophylactique; on sollicitera
constamment la surveillance et l'on s'opposera à l'imitation
(hystérique) en enlevant sur-le-champ le corps du délit (cadavre
du suicidé), et en n'y faisant pas attention. On mettra dans un
quartier spécial les malades qui sont sujets à des impulsions dépres-
sives, soit qu'ils présentent une tournure d'esprit ou de délire pou-
vant y donner lieu, soit qu'ils offrent les caractères de l'imbécillité
ou de l'épilepsie. Même pratique à l'égard des anxieux, des hallu-
cinés dans ce sens. L'installation d'un service propre à ces malades
et aux nouveaux arrivants, constitue, de même que les chambres
d'isolement, l'appareil obligatoire de préservation. L'étude
complète de chaque malade et son traitement moral sont affaire
de technique médico-administrative, de tact, d'assistance, bonne,
attentive, intelligente. P. K.
VIII. SUR une épidémie DE fièvre typhoïde A l'asile provincial
D'OSLBRUC6 ; par 1.\TII (Allg. Zeitschr. f. Psych., XL[, 3).
L'affection fut importée par un des médecins de l'établissement.
L'auteur suit lacontagion pas à pas. Il attribue cette contamination
(culture du germe et sa propagation) à l'encombrement, à la
défectuosité partielle des latrines, à des lacunes hygiéniques
d'ordre architectural. Chose remarquable, le quartier d'infirmes
et de gâteux, les aliénés et les serviteurs occupés à la buanderie
demeurèrent indemnes. Aucune accusation à formuler contre
l'eau potable (puits à 70 mètres foré dans le roc), contre le sous-
sol (rocailleux, pur de toute souillure). La'contagion n'eut pas
lieu de personne à personne, mais d'un édifice à un autre, d'un
étage à un autre, de chambre à chambre : foyers d'infection
disséminés dus évidemment aux lieux d'aisance. Sur quatre cent
cinquante aliénés, vingt-quatre furent atteints, les trois quarts
étaient des femmes, dont la moitié avait de vingt-six à trente-
cinq ans. Sur quatre-vingt-cinq individus sains d'esprit, cinq tom-
bèrent malades. L'évolution, identique, comme type, chez tous,
parut plus atténuée et moins longue chez les aliénés; elle dura, en
moyenne, vingt-deux jours chez eux, aboutit à une convalescence
courte, ne détermina pas de lésions consécutives et se traduisit,
en général, par une éruption roséolique très peu marquée ainsi
que par des accidents typhiques bénins. La température rectale
fut classique dans la folie primitive et dans la folie systématique,
monta rapidement dans la démence consécutive, et persista en
plateau jusqu'à la fin, sans autres conséquences d'ailleurs. Le
bain froid abaissa la température de 4, 5 à 2o chez les typhiques
non aliénés et de 0,5 à I chez les typhiques déments. Durée to-
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 67
taie moyenne des typhiques sains d'esprit, trente et un jours. Une
démente profonde dA quarante-deux ans eut, le premier jour,
3f,6; ascension lente les deux jours suivants à 40",1, le quatrième
jour, 36°, puis réascension permanente ; les bains froids produi-
saient une hypothermie de quelques dixièmes; le thermomètre
marquant un jour 44 ,2 depuis douze heures, on la plonge dans
l'eau froide et on ramène la température à 40°; mais deux heures
plus tard on constate 41,1. Du reste pas de coma, défervescence
dès la quatrième semaine. Deux morts parmi les aliénés; en un
cas, il s'agissait d'un dément de quarante-deux ans (hypostase
pulmonaire à la quatrième semaine); dans l'autre, on avait affaire
à une démente épileptique de cinquante-quatre ans (état de mal
dèsle début de la fièvre typhoïde ; mortle dixième jour). Leur autop-
sie révéla dans les deux cadavres les altérations typhiques carac-
téristiques, plus, chez l'homme, de l'anémie avec oedème cérébral
et, chez la femme, de l'hyperémie cérébrale notamment des
ganglions centraux et de l'écorce. Cinq observations à l'appui.
Dix aliénés présentèrent, quelle, que fût la forme psychopa-
thique, de l'amélioration psychique au cours de la fièvre typhoïde
(aucun paralytique général ne fut atteint de fièvre typhoïde).
Dans la plupart des cas, cette amélioration commença dès les
premiers symptômes typhiques, par conséquent, il y aurait lieu
d'invoquer comme agent modificateur l'action excitante du
ferment bactério-typhoide. P. K.
IX. SUR LES TROUBLES DE la faculté DE LIRE CHEZ LES paralytiques
généraux ; par G. R.1BD.S (Allg. Zeitschr. f. Psych., XLI, 3).
A l'exemple de Weiss (Compendium de psychiâtrie de -1881,
p. liS) et sur les assertions de Rieger (communication orale),
M. Rabbas a déterminé l'état des facultés de ces malades à la
lecture. 11 a choisi dans ce but des morceaux de prose ou de vers
dépourvus de mots peu usités, faciles à lire et à comprendre pour
tous les prolétaires (voy. le mémoire), mais contenant à dessein
des vocables qui exigent une certaine peine et quelque attention.
Chaque malade lit celui qu'on lui propose sur une feuille choisie
et comme qualité de papier et comme valeur typographique,
tandis que l'examinateur suit le même texte sur une autre feuille
et note à l'aide d'un crayon les erreurs afin de transcrire, une
fois l'expérience terminée, le texte estropié. On veille à ce que
le patient suive exactement avec le doigt chaque ligne et chaque
mot, ou a examiné auparavant son acuité visuelle, sa réfraction,
son accommodation, son fond d'oeil, afin d'éliminer les cas dou-
teux, et de remédier aux perturbations dioptriques : l'activité
cérébrale est par conséquent seule en jeu. On interroge finale-
ment le malade sur le texte, le sens qu'il lui donne, les erreur Il
68 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
qu'il a commises. Dans ces conditions, les parai} tiques généraux,
du reste généralement convaincus de la correction de leur lecture,
substituent des mots dépourvus de sens aux mots corrects, et
leur substitution varie, pour chaque individu, avec chaque nou-
vel essai. 11 existe une progression morbide de la lecture en rap-
port avec la progression de la démence, avec les périodes d'exa-
cerbation ; un retour à la normale parfait se verra, par exemple,
dans les phases d'accalmie. Il s'agirait d'une paralexie spéciale
indépendante d'aucun trouble de la parole, différente de la pa-
ralexie par aphasie de Kussmaul, qui ne procède d'aucune alté-
ration dans la faculté de saisir les symboles écrits, de les arti-
culer ; cette paralexie résulterait de ce que le paralytique, alors
même qu'il parle avec aisance, qu'il comprend la valeur des
caractères typographiques isolés ou associés, est dominé par son
imagination qui, se donnant libre carrière, lui fait broder sur le
texte soumis à son examen; il introduit involontairement des
mots correspondant à des conceptions qui le préoccupent (pro-
fond délabrement du jugement et de la faculté de se critiquer
soi-même), cela au stade précoce comme au stade tardif de
l'affection. On note cependant que tous les autres aliénés conti-
nuent à pouvoir lire correctement de même que les gens les plus
avancés en âge alors même qu'ils ne s'exercentplus. P. K.
X. UN cas DE FOLIE ayant DURÉ SEPT ANS : traitement par L'ÉLEC-
TRICITÉ; par ALEX. ROBERTSON. (The Journal of Mental Science,
avril 1884.)
Ce cas est celui d'une femme de cinquante ans, atteinte de mé-
lancolie avec hallucinations de l'ouïe et idées de suicide. En 1882,
on commença le traitement par l'électricité (courant continu
fourni par une pile de Leclanché à 40 éléments). Le pôle positif
était appliqué au niveau du ganglion cervical supérieur du grand
sympathique, et le pôle négatif était promené lentement, du
même côté de la tête depuis la région sourcilière jusqu'àl'occiput;
les applications sur chacun des côtés de la tête duraient environ
sept minutes : elles étaient faites tous les deux jours. Au bout
d'environ cinq mois, la malade, qui était aliénée déjà six ans
avant son entrée à l'asile, était complètement guérie, et, un an
après sa sortie, la guérison s'était maintenue. Nous devons ajouter
qu'on avait commencé par un courant de 15 à 20 éléments pour
arriver progressivement jusqu'au courant fourni par 25 élé-
ments, mais avec ce dernier courant, la durée des applications
pour chaque côté de la tête était réduite à cinq minutes.
R. M. C.
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 69
DE l'exaltation D\NS l'alcoolisme chronique; par BONVILLE
BRADLEY Fox. (The Journal of Mental Science, juillet 1884.)
Les conclusions de ce mémoire sont les suivantes :
« fol,a folie de l'alcoolisme chronique est très souvent caractérisée
« par de l'exaltation. - 2° Mais cette exaltation dans les idées
« fausses se rencontre également dans divers types de folie et ne
« peut par conséquent servir de base pour déterminer la classifi-
a cation. - 3° Cette exaltation, dans certains cas, ne présente
« aucun caractère qui puisse la faire distinguer de celle de la pa-
« ralysie générale. Il arrive aussi, dans quelques cas, que lessignes
« physiques des deux affections présentent entre eux une si com-
« plète ressemblance que le diagnostic différentiel ne peut être
« établi que par l'histoire antérieure du malade ou d'autres cir-
c constances se rapportant à la maladie; et même, dans quelques
« cas rares, l'étude de la marche de la maladie peut seule tran-
« cher la question. - 4° Dans l'alcoolisme chronique, les idées
« d'exaltation sont habituellement fixes, constantes , impos-
« sibles à déraciner. - 3° Cette persistance est due à ce qu'elles
« sont sous la dépendance d'altérations cérébrales consécutives à
« des hyperémies répétées. - 6° On ne peut rien, ou seulement
« très peu de chose, pour les faire disparaître. 1> R. M. C.
UN cas DE folie circulaire; par HERBERT PACKFR.
(The Journal of Mental Science, avril 1884.)
Il s'agit d'une femme de soixante et un ans qui présentait tous
les symptômes classiques de la folie circulaire : alternatives répé-
tées d'excitation et de dépression, avec intervalle très court de
santé mentale; cette malade avait subi deux condamnations, pro-
bablement pour des faits relevant de sa maladie; car on sait com-
bien sont fréquents les démêlés des fous circulaires avec la justice.
R. M. C.
XIII. UN cas DE manie aiguë s'accompagnant D'UNE affection quasi-
\phasique du langage; par Ii.-1S. IIIITCHELL. (The Journal of Mental
S ielace, avril 188.1.)
Le malade était âgé de cinquante ans et atteint de manie
aiguë; il est actuellement guéri. En dehors des symptômes ordi-
naires de la manie il a présenté des troubles spéciaux du langage.
L'articulation était parfaite : le langage parlé ne présentait ni le
caractère spasmodique, ni les espèces d'explosions fréquentes
dans l'aphasie; on n'y remarquait ni temps d'arrêt ni mots ina-
chevés. L'incohérence était absolue, plus complète 'même que
dans la plupart des cas de manie. Le pouvoir de formuler une
70 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
proposition était absolument détruit, età ce point de vue, malgré
les paroles qu'il prononçait fréquemment, il était entièrement
aphasique. L'attention, la perception ne paraissaient pas altérées;
il différait même sensiblement en cela des maniaques ordi-
naires. Il obéissait aux ordres donnés. Lorsque, au bout d'une
semaine ou deux, son état commença à s'améliorer, il ne répon-
dait que par oui ou par non; encore paraissait-il craindre d'em-
ployer ces deux mots mal à propos et l'un pour l'autre, et quand
il se trompait, il souriait de son erreur. Son écriture, les substi-
tutions de mots qu'on remarque dans une lettre à sa mère
étaient d'un aphasique. « Il semble que chez lui, dit M. Mitchell,
« les centres physiologiquement inférieurs du langage (je veux
« parler du langage intérieur) ayant été soustraits au contrôle
« des centres supérieurs (centres d'inhibition), les groupes nerveux
« qui servent au langage aient pris une activité automatique et
« ataxique; de là un flot de paroles incohérentes soit pour ré-
« pondre à une question, soit indépendamment de toute question
« posée; de là aussi une entière impuissance à choisir ces paroles
« ou à en diriger le sens. » R. M. C.
XIV. SUR QUELQUES symptômes mentaux DES affections cérébrales
ordinaires; par le Dr GASQUET. (The Journal of Mental Science,
avril 1884.)
C'est moins pour en tirer des conclusions que le petit nombre
des faits observés par lui justifierait incomplètement que pour
attirer l'attention sur une voie nouvelle ouverte aux recherches,
que M. Gasquet publie quatre observations (une de sclérose mul-
tiple, une de syphilis, une de ramollissement cérébral chronique
et une d'hémorrhagie cérébrale suivie d'hémiplégie), dans les-
quelles il a pu constater l'existence de symptômes mentaux. Dans
ces quatre cas, les troubles intellectuels étaient caractérisés par
des idées de grandeur, variables dans leur nature et dans leur
degré.
Sans parler de l'importance considérable que ces faits peuvent
avoir au point de vue du diagnostic de la paralysie générale au
début, l'auteur fait remarquer qu'il y a la un terrain clinique
encore peu ou point exploré, et que beaucoup de praticiens
passent ainsi probablement à côté de faits dont l'étude et le
groupement seraient d'un grand intérêt, simplement parce que
leur attention n'a pas été attirée sur ce point. R. M. C.
XV. Manie aiguë CHEZ UN JEUNE garçon DE treize ANS;
par S.-A.-K. Strahan. (The Journal of Mental Science, juill. 1884.)
Cette observation est surtout intéressante en raison du très
jeune âge du sujet; on sait en effet que les cas de manie aiguë
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 71
sont extrêmement rares avant la puberté. Les symptômes de la
manie n'ont point été différents de ceux que l'on observe à un
âge plus avancé; il est à noter seulement que la mère et le frère
de ce jeune malade étaient tous deux aliénés et internés dans un
asile. R. M. C.
XVI. Sur quelques CaS DE paralysie générale avec sclérose latérale
de la MOELL1 : épinière ; par G.-H. Savage.' (The Journal of Mental
Science, avril 1884.)
L'auteur rapporte cinq observations (dont quatre suivies d'au-
topsie) de paralysie générale s'accompagnant chez de jeunes su-
jets, de sclérose des cordons latéraux.
A l'autopsie, on trouvait chez ces sujets plusieurs circonvolutions
atrophiées, sans toutefois que l'auteur puisse préciser quelles sons
celles sur lesquelles porte le plus souvent cette atrophie; il incline
à penser pourtant que ce sont les circonvolutions frontale et pa-
riétale ascendantes. Souvent aussi, on trouve la moelle très
atrophiée; il existe, en outre, une altération grave descordons laté-
raux et quelquefois de la colonne de Turck dans le cordon anté-
rieur. Il serait très intéressant de savoir si l'atrophie des cordons
latéraux est primitive ou secondaire, ascendante ou descendante.
L'auteur pense que, dans certains cas, les altérations sont d'origine
primitivement médullaire, tandis que dans d'autres, la sclérose
latérale est consécutive à une atrophie ou à une dégénérescence
des aires motrices corticales.
Plusieurs des hommes dont l'observation a été recueillie étaient
incontestablement syphilitiques, et il est digne de remarque que,
parmiles femmes, les unes étaientdemeuréesstériles etles autres
n'avaient point d'enfants vivants.
Enfin, l'auteur signale un dernier fait, en se demandant toute-
fois s'il ne s'agit pas là d'une simple coïncidence : presque tous
les malades observés présentaient aux pommettes une congestion
capillaire très vive, et rappelant les plaques que l'on observe dans
la cirrhose hépatique. R. M. C.
\\ IL DE l'alcool, CONSIDÉRÉ SURTOUT comme BOISSON, dans LES asiles
d'aliénés; par D. HACK TUEE, (The Journal of Mental Science,
janvier 1385.)
L'auteur a fait, auprès des médecins directeurs des asiles d'An-
gleterre, une enquête collective relativement à l'emploi ou à l'a-
bandon des boissons alcooliques (principalement de labière). Nous
ne pouvons le.suivre dans l'examen détaillé des réponses qui lui
ont élé adressées; nous nous hornerons à noter que M. Hack Tuke
72 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
a été étonné de constater qu'un nombre de médecins beaucoup
plus considérable qu'il ne l'avait supposé avaient totalement sup-
primé dans leurs asiles (sauf, bien entendu, à titre de médicament)
l'usage des boissons alcooliques; il a été plus surpris encore de
voir la plupart d'entre eux insister énergiquement sur les avan-
tages qu'ils avaient retirés de cette suppression tant au point de
vue de la santé des malades qu'à celui du bon ordre et de la disci-
pline de l'établissement. R. ! 11. C.
XVIII. LES évasions, la LIBERTÉ, LE BONHEUR, et LES « PORTES
OUVERTES » ; LEUR INFLUENCE SUR LES MALADES DES ASILES par
C.4MPBELL. (The JOUI nal of Mental Science, juillet 188r.)
Après avoir étudié les évasions au point de vue des dangers
qu'elles présentent pour les malades eux-mêmes, pour les per-
sonnes qui avoisinent l'asile, M. Campbell étudie les conditions de
liberté qui peuvent contribuer au bonheur, au bien-être plutôt des
aliénés internés, et il traite la question du système dit des portes
ouvertes ». Mais il se déclare insuffisamment éclairé actuellement
pour la résoudre, et exprime le voeu qu'elle soit sérieusement ap-
profondie dans ses conséquences et dans ses résultats.
R. 11. C.
XIX. Guérisons inattendues : deux cas ; par le U Willeit. (The
Journal of Mental Science, juillet 1 R8 L)
Le premier cas est celui d'un ecclésiastique de trente ans. qui,
après un surcroît de travail, fut pris de troubles intellectuels
caractérisés surtout par de la mélancolie religieuse (idées de
possession, de damnation éternelle, etc.); peu de temps après
son entrée à l'asile, il refusa de manger, devint malpropre, et
l'on craignit que son état n'aboutit à la démence. Mais peu à peu
cet état s'améliora, et, au bout d'un an, il put quitter l'asile
complètement guéri.
Le second cas est celui d'un homme de vingt ans, présentant les
symptômes ordinaires de la démence, et entièiement gâteux qui
fut interné en 185(i ; en 1857, on note chez lui un accès de manie
aiguë; on constate à la même époque qu'il se livre à la mastur-
bation ; en 1858, nouvel accès de manie. Ces accès se reprodui-
sent à des intervalles plus ou moins éloignés jusqu'en 1882; les
habitudes de masturbation persistent; survient une affection chi-
rurgicale suivie d'une opération (castration unilatérale pour remé-
dier aux accidents causés parl'enclavementdans le canal inguinal
d'un testicule non descendu); à partir de ce moment, l'état du
malade s'améliore, et, sans recouvrer son intelligence, il est délivré
de ses fréquents accès de manie et devient calme, propre et
docile. R. 111. C.
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 73
XX. IMPEl\FECrlll : \ mentale congénitale avec idées DE persécution
chez DES jumeaux; par T.-VV. Ai4E DONALL. (The Journal of Mental
Science, Juillet 4884.)
Observation détaillée de deux jumeaux qui non seulement se
ressemblent physiquement au point qu'on est littéralement dans
l'impossibilité presque absolue de les distinguer l'un de l'autre.
mais qui présentent en outre une forme de délire absolument
identique et caractérisée par des idées de persécution greffées sur
un état d'imbécillité déjà ancien. R. M. C.
XXI. UN cas de paralysie générale avec P.ICÜYMÉNINGIT1 : : par <'h0
H. Sauvage. (The Journal of Mental Science, Juillet 1884.)
L'observation peut se résumer ainsi :
Homme de soixante-el-uu ans, malade depuis six mois, irritable,
confondant les jours de la semaine, paraissant avoir eu deshallu-
cinations de la vue, incapable d'enchaîner ses idées, de répondre
aux questions, de dire son nom. Tremblement très marqué de la
langue et des muscles de la face, grande hésitation de la parole,
incertitude de la démarche. Deux mois après son entrée, il com-
mence à avoir des séries d'attaques épileptiformes, et meurt vers
le sixième mois. A l'autopsie, on constate sur le côté gauche du
cerveau de la pachyméningite avec hémorrhagie : membrane
nettement formée, et dont l'aspect donne à penser qu'une fine
membrane s'est constituée et qu'il est survenu récemment une
hémorrhagie nouvelle qui n'a pas dépassé la période de coagula-
tion. A la base, la membrane fine se détache facilement de la
dure-mère. R. 11. C.
XXII. IIÉiII-CISOItÉE POST-nÉMtPLÉGtQUE ASSOCIÉE A LA FOLIE ; par
W. BEVAN LEWIS. (The Journal of Mental Science, juillet 1884.)
Les réflexions dont l'auteur fait suivre cette observation en si-
gnalent les principaux points intéressants; nous nous bornerons à
les résumer ici :
Cette femme, âgée de soixante et un ans, est un exemple de
cette association de la chorée et de la folie qu'il n'est pas très
rare de renconlrer dans les asiles d'aliénés. Elle était manifeste-
ment choréique, mais la chorée se présente sous des formes mul-
tiples, el il n'était pas facile de savoir à quel genre on devait rat-
tacher les symptômes qu'elle présentait. Elle avait eu du rhuma-
tisme articulaire, en sorte qu'on trouvait ici la diathèse habituelle-
ment concomitante de la chorée; de plus si les émotions nerveuses
sont capables de déterminer l'apparition des phénomènes choréi-
ques, toutes les misères dont cette femme avait souffert pouvaient
être considérées comme rattachant sa maladie à cette cause. -
74 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
Si l'on passe en revue les symptômes, on note que lesphénomènes
convulsifs étaient limités au côté droit, et l'on s'attend par consé-
quent à trouver une distribution hémisphérique des lésions expli-
quant le caractère unilatéral des spasmes choréiques. On note
d'autre part que le début et les progrès de la maladie remontent
à une hémiplégie droite partielle, avec aphasie : cette hémiplégie
portait sur la face et le bras; la jambe en était indemne; la
guérison fut lente, et lorsque le bras droit eut recouvré une cer-
taine force, il devint, ainsi que la jambe, les muscles de la face et
ceux de l'articulation de la parole, le siège de mouvemenls
choréiques. Cela étant, on pense de suite à un cas ordinaire de
chorée post-hémiplégique, tels que ceux où il existe une lésion
massive dans le segment postérieur de la capsule interne, avec
propagation à la couche optique : mais il faut remarquer qu'ici,
le spasme choréique ne s'accompagnait d'aucune rigidité tonique : il
faut donc rayer ce cas de la catégorie des mouvements choréi-
formes consécutifs à une lésion des fibres convergentes en éventail
voisines de la capsule. On ne peut pas davantage le ranger parmi
les cas décrits par Gowers sous le nom d'hémi-ataxie, le sens muscu-
laire et la direction des mouvements étant parfaitement conservés.
L'auteur signale d'autre part l'extrême paresse des réflexes cru-
raux profonds, et l'abolition presque complète duréflexe du genou
des deux côtés; en revanche le réflexe du triceps, aboli à gauche,
était très exceptionnellement vif au bras droit, et le biceps du
même côté donnait la réaction de dégénérescence. S'appuyant sur
ces faits, et par des motifs qu'il déduit, l'auteur n'hésite pas à attri-
buer à cette chorée une origine cérébrale plutôt que spinale.
Recherchant ensuite la nature de la lésion, et rappelant que l'at-
taque n'avait pas été accompagnée de perte de connaissance, que
la malade était âgée de soixante et un ans, qu'il n'y avait pas
d'albumine dans l'urine, qu'il existait une diathèse rhumatismale,
M. Lewis conclut à un ramollissement consécutif à une obstruction
par embolie ou à une thrombose.
L'autopsie montra des plaques de ramollissement disposées
d'une façon parfaitement symétrique sur l'aire motrice des deux
hémisphères, au niveau du tiers moyen de chacune des circonvo-
lutions pariétales ascendantes : ce ramollissement paraissait lié à
une thrombose veineuse résultant d'une obstruction partielle du
sinus latéral et de l'extension d'un caillot organisé et ancien aux
petites veinules de la région du vertex : la circonvolution supra-
marginale gauche et le pli courbe étaient également atteints. En
dehors même de la distribution significative de ces ramollisse-
ments, l'auteur rappelle que les conditions qui se trouvaient t
réunies sont précisément celles qui, suivant Hughlings-Jackson et
Broadbent, doivent se réaliser pour que la chorée apparaisse.
Par une erreur regrettable, le cerveau et la moelle ne furent
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 75
l'ohjet d'aucun examen microscopique : mais il existait une petite
hémorrhagie intéressant le ganglion lenticulaire gauche, et une
extravasation sanguine beaucoup plus considérable à la région
préfrontale; M. Lewis considère ces faits comme révélateurs d'une
obstruction veineuse générale dans le cerveau, obstruction que
l'examen microscopique aurait probablement permis de rattacher à
des oblitérations capillaires des régions ganglionnaires de la base.
Au point de vue mental, le phénomène le plus intéressant était
une apathie extrême, allant presque jusqu'à la torpeur. C'est là
un symptôme mental que l'auteur dans un précédent mémoire,
avait rattaché à l'atrophie des lobes frontaux; il rangerait volon-
tiers le cas actuel parmi ceux qui viennent à l'appui de cette opi-
nion. R. M. C.
R111. Remarques sur LES résultats DE l'enquête collective sur LES
causes DE la folie; par Herbert C. Major. (The Journal of
Mental Science, avril 1884.)
Cette enquête annuelle a commencé à fonctionner en 1876 ;
M. Herbert Major estime que les résultats qu'elle a déjà donnés et
ceux qu'elle donnera dans l'avenir présentent un intérêt réel;
nous reproduisons ici, d'après son mémoire, les plus importants
de ces résultats; ils ont trait à la proportion des différentes causes
de folie dans les deux sexes.
Chagrins de famille (y compris la perte de parents ou d'amis) :
le tableau suivant montre que la proportion des cas dus à cette
cause est très uniforme, qu'elle est plus élevée (et il faut ajouter :
réeulièrement Dlus élevée) chez la femme crue chez l'homme.
76 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
Inquiétudes et peines morales (d'autre nature que dans les deux
paragraphes précédents) et excès de travail. Ce groupe de causes
parait avoir dans les deux sexes une proportion sensiblement
égale; aussi la proportion est-elle donnée pour les deux sexes
réunis :
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 77
viron 1 p. 100. L'auteur ne trouve à cet abaissement qu'une
explication plausible : il pense que peut-être, depuis quelques
années, on tend à faire de la. masturbation un symptôme des
troubles cérébraux bien plutôt qu'une cause d'aliénation.
L'excès de fatigue physique donne pour toutes les années etpour
les deux sexes une très faible proportion. M. Herbert Major pense
que l'on pourrait supprimer cette cause; peut-être, en effet, serait-
il plus conforme à la réalité des faits d'incriminer l'insuffisance
que l'excès d'exercice physique. '
L'insolation fournit chez les hommes une proportion uniforme
qui n'excède que peu 2 p. 100; chez les femmes, cette proportion
est à peine appréciable.
Les accidents, les blessures donnent une proportion d'environ
5 p. 100 par an pour les hommes, et de 1 p. 100 pour les femmes.
La grossesse, l'accouchement, l'état puerpéral et la lactation réu-
nis en un seul groupe donnent une proportion de 9 à 10 p. 100.
Les privations, {'inanition, prédomineut chez la femme comme
cause d'aliénation mentale.
La vieillesse (qui ne figure dans le questionnaire que depuis
1878) fournit les chiffres suivants :
78 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
talée chez l'homme que chez la femme, ce qui confirme d'ailleurs
l'opinion exprimée par Boyd et plusieurs autres auteurs ; le tableau
suivant en indique la fréquence :
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 79 1)
ne se préoccupe guère de l'opinion publique lorsque la guérison
des malades est en question, et il pense qu'il vaut mieux courir
le risque de voir un malade se suicider que de compromettre,
par des mesures inopportunes, le salut des autres malades qui
sont susceptibles de guérison. R. M. C.
XXVI. Un cas DE démence avec aphasie. ATROPIIIE(uvecsclérose7) DE
l'hémisphère cérébral GAUCHE; par Arthur RANNIE. (The Joumal
of Mental Science, avril 1884.)
Voici les points les plus saillants de l'observation clinique :
L» amnésie avec agraphie; 2° parésie des membres supérieur et
inférieur droits; 3° accès convulsifs affectant les membres du
côté droit et les muscles de la face du même côté; 4° nystagmus
horizontal à droite. Corrélativement aux trois premiers symp-
tôme, il est intéressant de noter que les circonvolutions parié-
tale ascendante, sus-marginale, angulaire et Lemporo-sphénoi-
dale supérieure étaient les plus atrophiées de toutes. L'examen
microscopique n'a malheureusement pas pu être fait; il est plus
que probable qu'il aurait révélé de profondes altérations des
éléments du tissu nerveux.
L'observation du malade et l'autopsie sont relatées avec détail
dans ce mémoire qu'accompagne une planche intéressante.
R. M. C.
XX VIII. Note sur un cas DE folie impulsive; par Richard UREESE.
(The Journal of Mental Science, octobre 1883.)
Le cas rapporté par M. Greene ne s'écarte guère du type des
actes homicides dus à la folie impulsive. Il s'agit d'un jeune
homme de dix-neuf ans, très bon sujet, n'ayant présenté jusques
là que des troubles mentaux à peine appréciables et méritant
plutôt la qualification de simples bizarreries, qui, un soir, en sor-
tant d'une réunion religieuse, et après une lecture pieuse, commit
sans motif appréciable une tentative d'homicide sur la personne
de sa mère qu'ilaimait beaucoup et pour laquelle il s'était montré,
ce soir-là particulièrement affectueux. Il déclara qu'il avait fait
tout ce qu'il avait pu pour résister à l'impulsion homicide, à la-
quelle il avait malheureusement fini par succomber. L'acte commis,
« quelque chose l'avertit qu'il avait commis une mauvaise action
et il se sentit le cerveau en feu ». Il témoigna d'ailleurs une
grande joie lorsqu'il apprit que sa mère n'avait pas succombé à
ses blessures.
Il fut acquitté, mais l'auteur signale avec raison comme au
moins étrange, au point de vue médical, l'opinion formulée par
80 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
le magistrat, qui, en s'adressant au jury, déclara que, pour ac-
quitter l'accusé pour cause de folie, il ne suffisait pas que sa folie
fût démontrée, mais qu'il fallait encore avoir la certitude que, par
suite de sa folie, il était incapable de savoir que l'action qu'il
commettait était mauvaise. Ainsi, dit M. Greene, « le fait seul de
la folie ne suffirait pas pour plaider la folie », et il s'étonne avec
raison que le juge criminel se montre si exigeantsur les preuves de
l'aliénation, alors que le moindre soupçon de trouble intellectuel
suffit au magistrat pour annuler un contrai civil. Il rappelle en
terminant que les dispositions du Code français sont beaucoup
plus conformes à la logique des faits. 13. \I. C.
XXIX. Contribution a L'Ét'IOLOGIE DE la paralysie IIOGRES51VE, en
TENANT PLUS p.\nTlCULrÈl\E1 ! E'-¡T COMPTE DE L'INFLUENCE DE LA
syphilis ; par C REI,1;11.IRD. (Allg. Zeitsclv. f. Psych. XLI, 4-.1.)
Les causes de la paralysie générale sont en première ligne la
lutte pour la vie, puis l'ivrognerie (du moins pour les femmes) ;
la syphilis n'occupe que le troisième rang et l'hérédité le qua-
trième ; au dernier plan viendraient les professions nocives, les
traumatismes céphaliques, les maladies aiguës, etc. il. K.
XXX. Guérison D'UNE PSYCHOSE SOUS L'INFLUENCE D'UN érysipèle DE
la TÈTE ; par H. LANDEIIER. (Allg. Zeitschr. f. Psych., XLI, 4-5).
Mélancolie en voie d'évolution vers la démence incurable, chez
une jeune fille ; sur ces entrefaites, apparaît un érysipèle de la face
qui gagne le cuir chevelu et entraîne une suppuration profonde
et étendue; peu de fièvre. A mesure que l'érysipèle gagne, les
troubles psychiques rétrocèdent. Finalement, l'accident somatique
et l'aliénation mentale guérissent complètement. La malade
était folle depuis sept mois, quand survint l'érysipèle; sa santé
mentale n'a plus rien laissé à désirer depuis plus de deux ans.
Peut-être, dans les cas de psychopathie inquiétants, serait-il bon
de provoquer un foyer de suppuration céphalique quand les forces
physiques des malades le permettent, à la condition de surveiller
minutieusement, à l'aide de la méthode antiseptique, lasuppura-
tion provoquée. P. K.
XXXI. UN cas DE prolifération DE l'épendyme, avec sclérose sous
ÉPENDYMAIR6 : dans LE domaine DES ventricules latéraux, dans la
paralysie générale (Contribution à l'étude de l'hyperplasie fibreuse
pathologique); par M. Friedmann. (Arch. f. Psych., XVI, 2.)
L'intérêt de cette observation, très complète, au triple pointde
vue clinique, analomo-pathologique, histologique nit dans les
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 81
conclusions qu'en tirez. Friedmann. Les cellules-araignées, dit-il,
sont fibro-plastiques; c'est d'elles qu'émane le tissu scléreux; les
couches de fibres conjonctives de nouvelle formation procèdent
des prolongements fins et moyens qui partout sortent du corps
même de la cellule et de la pointe de ses pôles les plus puissants;
là, on constate une moindre consistance que dans les tractus
réellement scléreux, c'est que la texture est un peu différente, les
cellules-araignées se trouvant plus espacées et pour ainsi dire
séparées les unes des autres par de nombreux vaisseaux. Pour
suivre pas à pas la genèse de la lésion et les interprétations de
l'auteur, il est indispensable de lire le mémoire. P. K.
XXXII. De l'influence exercée parla grossesse sur LES TROUBLES
PSYCHIQUES; par J. PERETTI. (Arch. f. Psych., XVI, 2.)
Sur vingt-trois cas de grossesse chez les aliénées, quinze obser-
vations seulement remplissent les conditions favorables à l'appré-
ciation de l'influence en question. L'auteur les relate en les
résumant; voici ses conclusions. Il est exceptionnel de voir la
guérison de l'aliénation mentale survenir pendant une grossesse
engendrée au cours d'une psychose curable : dans la pluralité des
cas, l'état de gravidité exerce une influence défavorable sur la
folie, sans que la grossesse aggrave absolument toujours le pro-
nostic, généralement l'aliénation mentale devient, sous son in-
fluence, plus grave, la guérison plus douteuse, et cela d'autant
plus que la perturbation psychique a précédé de plus longtemps
la conception. Il va de soi que la gravidité n'exerce aucune action
sur des psychoses ayant entraîné la démence; mais alors, il est
assez fréquent de voir la délivrance suivie d'une plus grande agi-
tation passagère; parfois en revanche, grossesse et délivrance
évoluent chez une aliénée avec une bénignité, une aisance re-
marquable, même si on compare leur évolution à celle des gros-
sesses et délivrances antérieures à l'aliénation mentale. P. K.
XXXIII. Contribution A l'étude DE l'incohérence ou DÉSORDRE dans
LES idées hallucinatoire aigu; par E. KONRAD. (Arch. f. Psych ,
XVI, 2.)
M. Konrad sous ce titre prétend constituer une entité clinique
souvent méconnue et confondue par les auteurs anciens et mo-
dernes avec la manie et la mélancolie. Il en trace les caractères
de la façon suivante. Un stade hallucinatoire précède générale-
ment les autres, assez souvent tout se borne à ce stade qui alors
se termine d'emblée par guérison ou démence définitive; ce stade
débute par un état dé dépression en rapport avec des hallucina-
tions ; puis, le genre des hallucinations changeant, se montre une
agitation maniaque à forme gaie; finalement la tristesse reparait,
Archives, t. XII. 6
82 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
etc...; les actes et les idées sont d'une incohérence notoire due
à la multiplicité et à l'évolution protéiforme des hallucinations
sensorielles. Durée : depuis quelques heures à quelques semaines,
voire quelques mois. Il n'est pas rare alors de voir le malade
s'incarner dans la peau de grands personnages, émettre des
idées de grandeur et de persécution, désordonnées, confuses, non
systématiques et toujours passagères (Ohs. 1) à l'occasion d'asso-
nances, d'association d'idées quelconques, puis subir les effets de
l'hyperidéation et entrer alors dans la forme maniaque du second
stade. Ce second stade est d'ailleurs un stade tantôt de manie
aiguë (disparition des hallucinations, suridéations, besoin de mou-
vement (Obs. II); tantôt de stupidité avec ou sans phénomènes
musculaires cataleptoïdes ou létanoïdes (catatonie), stupidité
parfois si précoce qu'il semble ne pas y avoir eu de stade hallu-
.cinatoire aigu (Obs. 111); tantôt enfin de manie compliquée de stu-
peur (état mixte de l'Obs. Il). Cette maladie, qui porte surtout sur
des sujets de vingt à trente ans, se termine généralement par la
démence; la démence frappe surtout dans les cas d'évolution
compliquée ou d'état mixte ainsi que dans la forme se bornant
au stade hallucinatoire; elle se montre assez souvent à la suite
du stade de stupidité (démence apathique); le passage du stade
hallucinatoire à celui de manie aiguë comporte un pronostic
favorable; la guérison, qui a généralement lieu dans les trois à
huit premiers mois, peut encore s'effectuer au bout d'un an ou
deux. Pour le reste, voir le mémoire. P. K.
XXXIV. Contribution A l'étude DE la folie transitoire; par DE
KR.LFPT-Ei31.G. (Jtf/M'6MC/t. f. Psych., VI, 1.)
Deux rapports médico-légaux : 40 Un individu de quaraute-sept
ans, ayant, il y a vingt-quatre ans, reçu en plein front un coup de
pied de cheval, et, il y a quatre ans, été atteint d'une affection
grave avec phénomènes cérébraux (vingt-cinq jours de durée)
d'un caractère irritable, supportant mal la chaleur et les boissons
alcooliques, est le 12 mai 1884 accusé de larcin. Il boit et frappe
l'accusateur d'une brique à la têle. On trouve, aptes celte vio-
lence, étourdi, sans voix, sur l'herbe; il n'a conservé qu'un vague
souvenir de ce qui s'est passé. Aucun signe d'épilepsie. L'auteur
conclut à l'irresponsabilité. 2° Un homme de quarante-quatre ans,
atteint depuis plusieurs mois de faiblesse irritable, peiné et irrité
des débordements conjugaux de sa femme, se rencontre avec
l'amant de celle-ci, le provoque en duel; sur son refus blessant,
il tire un revolver et blesse son épouse. Amnésie incomplète du
temps qui s'est écoulé entre le moment où il a tiré, et celui où il
a repris conscience de lui-même, sous l'influence des gémisse-
. ments de sa femme. Irresponsabilité. P. K.
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 83
XXXV. L1 sensation sexuelle contraire (inversion du sens génital)
devant L4 üÉDECINE légale; par DE KR.1PFT-EBING. (Jnlarbitch. f.
Psych., VI, 1.)
Rien de nouveau, si ce n'est l'autobiographie de deux invertis
hommes, brûlant d'amour pour de beaux mâles. La construction
psychique spéciale de ces individus, au point de vue de l'esthé-
tique sexuelle, exige qu'on prenne à leur égard un parti médico-
légal et social. Ils sont, en effet, réduits ou à garder une continence
fatale à leur santé, ou à se masturber, ce qui les ruine au même
degré, à moins qu'ils ne se suicident. L'auteur appelle l'atlen-
tion des savants, des jurisconsultes, des socialistes, des méde-
cins, des philanthropes sur ces malades qui ne sont ni des
aliénés, ni des pervers. Mais il ne propose pas de solution. Actuel-
lement on connaîtrait trente-deux observations d'hommes sentant
comme des femmes, et cinq observations de femmes sentant
comme des hommes. L'inverti, ajoute-t-il, se contente de tâter
son ami, de se frotter, de se placer sur lui comme dans le coït,
ou de se faire masturber très légèrement, il lui suffit de peu de
chose pour éjaculer et éprouver l'orgasme vénérien au même
moment que son conjoint anormal. Il en est de même pour
l'invertie. 11 n'y a donc pas là de crime contre nature, nocif; la
loi n'a donc rien à y voir, surtout lorsqu'il s'agit de majeurs fonc-
tionnant à huis clos. Sources littéraires : Mademoiselle Giraud, ma
femme -Fridolin's heimliche Ehe, par A. Wilbrand - Brick and
Brack oder Licht im Scllatten. E. Stadion. P. K.
XXXVI. DES troubles DE la motilité volontaire dans IA folie
0 simple; par C.-F.-W. ROLLEB. (Allg. Zeisschr. f. Psych., XLII, 1.)
C'est-à-dire examen des mouvements volontaires ou conscients
dans des formes psychopathiques où il n'existe ni convulsions,
ni paralysies, ni ataxies. L'auteur passe en revue les troubles de
la voix, les troubles de la parole, les actes impulsifs, les actes para-
doxaux (allures gaies d'un malade triste, par exemple), les actes
automatiques (auxquels le moi est parfaitement étranger), les actes
dus à l'excès d'innervation involontaire des muscles antagonistes
(étals cataleptoïdes et cataleptiques; tel malade refusera d'aller
au lit, de se mettre au bain, qui, une fois au lit et dans le bain,
ne voudra plus en sortir), les mouvements occasionnés par des hal-
lucinations, les troubles de la motilité chez de très jeunes aliénés
(trois exemples de mouvements automatiques chez des enfants de
moins de dix-huit ans), l'action du mouvement des muscles sur la
conscience (l'activité musculaire provoquerait souvent ou augmen-
terait l'excitabilité psychique ; de là l'alitement cpmme traitement
de l'agitation, de là la production ou la modification des rêves).
'H4 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
Dans un dernier paragraphe intitulé : Complexité et autonomie
de l'appareil moteur, il tente, à la lumière des notes précédentes,
de coordonner les connaissances anatomiques et physiologiques
pour expliquer le mécanisme de lafolie; la motilité jouerait, d'a-
près lui, un grand rôle dans la genèse des troubles psychiques,
de même que les perturbations psychiques sont les génératrices
de troubles moteurs. a Une grande catégorie de troubles moteurs
- sont réellement primitifs, parce qu'ils ont indirectement engen-
dré, par réaction sur la connaissance du sujet, des entités vésa-
niques complexes » et, plus loin, : « la folie est un processus déter-
miné par des états pathologiques des centres subordonnés. »
P. K.
XX.iVIt. LA VARIABILITÉ DES CONCEPTIONS DÉLIRANTES ET DES HALLU-
CINATIONS SENSORIELLES, AVEC AUTRES REMARQUES SUR CELLES-CI ;
par J.-L ? 1. Kocii. (Allg. Zcitschi,. f. Psych., XLII, 1.) .)
' Dissertation, dépourvue d'observations, aboutissant à la thèse
que, de même que maintes névralgies, maintes migraines qui
durent des années chez des individus atteints de tares hérédi-
taires, les conceptions délirantes, émanées d'hallucinations, pré-
sentent chez un malade donné des variations en qualité, inten-
' site, étendue; il faudrait donc rayer du langage le terme d'idée
fixe, même dans les cas de conceptions irrésistibles, de folies
systématiques, de délires partiels; certes, alors, les idées déli-
rantes tournent dans un même cercle, mais leur teneur exacte
varie sans cesse. Les hallucinations sensorielles ou images déli-
rantes de la perception émanent, comme les images de la per-
ception normale, de l'écorce; leur genèse exige le concours des
appareils sous-corticaux; dans l'hallucination, c'est l'écorce qui
entre la première en jeu; dans l'illusion, c'est le centre sous-cor-
tical qui est le premier sollicité par un objet véritablement pé-
riphérique (du monde extérieur) ou relativement périphérique
' (corps étrangers ou néoplasmes d'un nerf ou du centre sous-cor-
tical lui-même). P. K.
XXXVIII. Un cas DE folie aiguë MORTELLE avec CONVULSIONS
localisées; par S. LÉvy '(AlLg. Zeitschr. f. Psych., XLII, 1.)
Observation de psychose suraiguë chez une jeune fille de dix-
neuf ans, issue d'une mère hystérique, mais n'ayant, jusqu'alors,
présenté aucune anomalie à aucun point de vue. Quelques se-
maines après avoir assisté au suicide de son amant, apathie
physique, caractère très-violent, céphalalgies fréquentes. Sept
mois plus tard, à la suite d'un refroidissement très prononcé,
. hallucinations de la vue et accès de manie. Trois jours après,
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 85
grande attaque épileptiforme. A partir de ce moment, convul-
sions quasicontinues dans la moitié gauche de la face et le bras
gauche; rigidité intervallaire, privation de sentiment, rotation
de la tête et des yeux à gauche, langue déchiquetée; de tempsà
autre, les compulsions gagnent le côté droit; en cinq jours, la tem-
pérature atteint 40,7; on constate finalement de la matité et des
râles à la base droite, le coeur se ralentit et s'arrête. L'autopsie
révèle l'intégrité des méninges, l'existence de kystes dermoides
dans les ovaires dégénérés, de l'uophorite chronique fibreuse.'
' P. K.
XXXIX. Contribution CE QU'ON appelle : DÉLIRE systématique HAL-
LUCINATOInE; par P. MAYSER, (Allg. Zeitschl·. f. Psych., XLII., 1.) }
M. Mayser montre qu'en Allemagne comme ailleurs, la termi-
nologie varie suivant les auteurs. L'épithète systématique dont
nous décorons le mot délire pour rendre, conformément à l'ex-
pression des faits décrits par les aliénistes allemands modernes,
l'idée contenue dans le mot usité par Mayser, Griesinger, Snell,
Schuele, doit disparaître quand on consulte les observations 'de
Krafft-Ebing, et céder la place au vocable de vésanie qui ne pré-
juge d'aucun autre élément pathologique que de l'hallucination.
Mayser, pour mettre de la clarté dans la question, applique le
terme qui nous occupe à un délire général d'ordre asthénique,
tantôt aigu, tonlôt chronique, affectant la forme d'agitation ma-
niaque, avec désordre dans les idées, idées de persécution basées
sur des hallucinations multiples, léger affaiblissement intellec-
tuel, ou celle de folie périodique; mais, en même temps, l'auteur
fait des conceptions délirantes, c'est-à-dire des idées de persécu-
tion fugaces de l'alcoolisme aigu, et même du délire des persécu-
lions incurables des buveurs, autant de variétés de ce délire gé-
néral, ce qui ramène sur le terrain l'élément de systématisation,
d'abord relégué au second plan. ' P. K.
XL. DES évasions ET DES tentatives d'évasion DES aliénés hors DES
endroits ou ILS sont soignés; par L. Schlager. (Allg. Zeitschr.
r. Psych. XLII, 2.)
Les aliénés essaient de s'évader et s'évadent en effet des asiles
d'aliénés et des établissements hospitaliers où ils sont séquestrés;
mais il arrive bien plus fréquemment, comme l'enseigne l'expé-
rience, que les aliénés essaient de s'évader et s'évadent en effet
de leurs habitations privées et du sein de leurs familles. Il ne
faut donc pas toujours attribuer les tentatives de fuite et les éva-
sions des aliénés à une impulsion subjective qui les porte à quit-
ter les endroits où ils sont retenus contre leur gré; cette impul-
86 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
sion est, dans bien des cas, altribuable à d'autres causes qu'à la
recherche irrésistible de la liberté. L'auteur examine d'abord les
évasions des aliénés qui ne sont pas traités dans des asiles d'aliénés
ni dans des établissements hospitaliers; cette revue porte : 1° sur
les aliénés confiés à des soins particuliers, mais jouissant d'al-
lures assez libres; 2° sur les aliénés confiés à des soins particu-
liers dont les troubles psychiques et les manifestations extérieures
ont nécessité, de la part de leur entourage, l'emploi des engins
de séquestration et une rigoureuse surveillance. Il passe ensuite
aux évasions d'aliénés internés dans des établissements hospitaliers
et dans les asiles. Le mode des évasions, leur raison, leur cause et
les remèdes sont judicieusement exposés, conformément à l'étude
des diverses formes de l'aliénation mentale et aux principes mé-
dicaux les plus élevés. 11 conclut qu'un médecin doit avoir en
mains le service administratif. P. K.
XLI. Notes sur L'EGYPTE; par E. MENDEL (Allg. Zeitschr.,
XLII, 2.)
Le Caire a à sa porte un asile, unique d'ailleurs pour les six
millions d'habitants de l'Egypte, fussent-ils riches; c'est un vieux
cloître aménagé, amélioré par le Dr Battaglia, malgré la pau-
vreté des finances de l'Etat. On y a reçu, en 1884, 460 malades se
décomposant en 367 hommes et 93 femmes; 120 hommes y sont
entrés pour délire consécutif à l'usage du haschisch, 13 pour dé-
lire alcoolique, 6 pour paralysie générale; 403 sont sortis, parmi
lesquels 94 guéris et 27 améliorés qui avaient été amenés pour
intoxication cannabiuique. P. K.
XLII. Sur LES rapports ENTRE la paralysie PROGRESSIVE ET la
syphilis ; par M. GOLDSTEIN. (Allg. Zeitschr. f. Psch ? XLII, 2.)
L'étude de 466 malades montre d'abord que, lorsque les hommes
qui ont eu la syphilis sont atteints d'affections psychiques, ils sont
bien plus fréquemment atteints de paralysie générale que de toute
.autre psychose ; en secondlieu, le nombre des paralytiques généraux
qui ont eu la syphilis plus ou moins longtemps avant l'explosion
de la psychose est remarquablement élevé. Mais la syphilis est-
elle le facteur propre, direct, de la paralysie générale ? Comme
la plupart des paralytiques généraux en question ici avaient
également subi l'influence d'autres éléments pathogénétiques
(traumatisme, abus alcooliques, exagération de travaux intel-
lectuels, émotions morales), comme il n'existe aucune différence
-clinique entre la paralysie générale qui succède à la syphilis et
celle qui se produit sans qu'il y ait eu préalablement syphilis,
comme il n'existe pas non plus de signe anatomo-pathologique
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 87
de la paralysie générale syphilitique, comme le traitement mer-
curiel, si merveilleux contre toutes les localisations encéphaliques
de la syphilis, aggrave la situation, quelques précautions que
l'on prenne, le mercure, par exemple, venant à houtchez un pa-
ralytique général d'une iritis syphilitique, alors que, sous son
influence, la démence marche rapidement ; c'est tout au plus si
l'on est en droit de supposer que la syphilis diminue la force de
résistance du cerveau et peut ouvrir la porte à la paralysie géné-
rale, à l'égal d'une influence nocive quelconque. La cause de la
paralysie générale nous reste donccomplètement inconnue. P. K.
XLIII. De l'hérédité directe DES maladies mentales ;
par E. ScoLl. (Arc%. f. Psych., XVI, 1, 2, 3.)
L'auteur a étudié des familles dont les père et mère ont été à
un même établissement, par conséquent sur lesquelles il trouvait
d'importants renseignements; il a réussi de cette façon à posséder
un ensemble d'observationssur l'hérédité directe (cas le plus sim-
ple) appuyées sur des documents permettant l'analyse critique
exacte. La section principale A comporte quatorze familles dont
les descendants sont atteints de psychopathies de par l'hérédité,
seule ou principalement ; elles se décomposent en quatre groupes :
4 psychoses simples, pures, légères (mélancolie, manie) 3 fa-
' milles ; 2° psychoses semblables aux précédentes, mais plus com-
plexes en ce sens que des symptômes spéciaux (tels, les signes de
dégénérescence) viennent se surajouter aux autres éléments et
que l'évolution et l'issue diffèrent : 4 familles ; 3° psychoses pério-
diques 2 familles ; 4° folie systématique ou types à peu près purs
de vésanie organisée : 5 familles. Des observations complètes se
dégagent les conclusions suivantes :
La forme de la maladie des descendants concorde avec celle des ascen-
dants, tant en ce qui concerne le caractère général de la psychopathie
qu'en ce qui a trait au détail des symptômes (espèces morbides); un
ascendant atteint de folie systématique ne transmettra jamais une manie,
ni une mélancolie simple, réciproquement un maniaque ou un mélanco-
lique ne transmettra pas la folie systématique, mais la manie et la mé-
I uicolie se peuvent remplacer, un fou systématique peut transmettre une
vésanie cristallisée. Cette proposition est vraie pour les formes atypiques,
mixtes, impures avec ce correctif que plus la psychose d'un ascendant
est baroque, atypique, plus l'hérédité se traduit chez le descendant par
une psychose différente, s'éloignant complètement de celle de l'ascendant,
ainsi une psychose périodiqueémauera suit d'un psychose périodique, soit
d'une foime atypique. L'hérédité s'accomplit des ascendants sur les des-
cendants, quelle que soit l'époque à laquelle a été conçu le descendant
par rapport à l'explosion de la folie chez son générateur ; c'est le terrain
qui se transmet avant même que le générateur soit devenu fou. Le ter-
rain ou la prédisposition, la tare héréditaire se reconnaît avant l'explo-
88 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
sion de l'aliénation mentale au caractère de l'individu (tendance à la dé-
pression exagérée pour le motif le plus futile), à l'existence d'une débilité
mentale dès la jeunesse, à un ralentissement dans le développement phy-
sique. Ces signes sont d'autantplus accentués, que l'on a principalement
affaire à des cas dans lesquels l'ascendant a été atteint de psychoses
complexes atypiques, ou d'une folie systématique quelconques. Il en est
de même pour des signes dégénératifs qui se confondent avec ceux-ci
ou se montrent par 1 évolution et la marche moins correctes de la psy-
chose (aggravation, tendance précoce à la démence chez les descendants,
les phénomènes dégénératifs les plus intenses apparaissant surtout chez
les descendants, dont les générateurs ont présenté des psychoses com-
plexes ou systématiques. En revanche : les jeunes générations peuvent
s'améliorer par exemple, un ascendant atteint d'un psychose chronique
a pu transmettre iL son ascendant une psychose curable, tandis qu'il
n'y a pas d'exemple qu'un ascendant complètement guéri de sa psy-
chose ait transmis une psychopathie chronique.
La section B envisage cinq familles dans lesquelles la perturba-
tion mentale paraît produite moins par l'hérédité que par des
causes extérieures perceptibles (pneumonie, puerpéralité, causes
diverses). On voit ici que l'héritage se transforme surtout quand,
chez les ascendants, il existait des psychoses atypiques tendant à
une évolution défavorable incurable, et que, dans ces circons-
tances, si d'autres éléments nocifs s'adjoignent, qui affaiblissent
la résistance des descendants et favorisent la genèse d'une psy-
chose, la maladie tend encore plus à revêtir une forme grave.
La modalité dépend alors surtout de l'action des causes occa-
sionnelles.
D'une manière générale, les entités psychopathiques suivent
chez les héréditaires, dans leur proportion centésimale respec-
tive, les mêmes rapports que chez les aliénés en général ; les
formes atypiques semblent cependant plus fréquents chez les pre-
miers. Le suicide, l'ivrognerie, le nervosisme, les dépravations,
l'imbécillité, la transmission de l'aliénation mentale seule appa-
raissent chez eux ; on n'y constate ni l'épilepsie, ni l'idiotie, ni
la stérilité. P. K.
XLIV. DE l'aphasie ET DE SES relations avec la perception ;
par Grashey. (A·ch. ? Psych., XVI, 3.)
Analyse psychophysiologique d'une observation concernant un
homme de vingt-sept ans qui, à la suite d'une fracture de la base
du crâne, présentait une surdité presque absolue, l'abolition totale
de l'odorat et quasi complète du goût du côté droit ; l'oeil, du
même côté, percevait encore les mouvements de la main ; l'acuité
de l'oeil gauche était égale aux trois quarts et il existait une dimi-
nution concentrique du champ visuel : paralysie du facial droit,
parésie de l'hypoglosse et de tous les muscles de ce côté. C'est
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 89
quatorze jours après l'accident, lorsque le malade reprend con-
naissance, qu'on s'aperçoit du trouble de la parole. Il bégaie
quand il s'agit de répéter un mot, parcé qu'il est contraint,' dès
qu'il est parvenu à en trouver la première syllabe ou les pre-
mières lettres, à attendre que le reste lui vienne. La lecture est
courante, le malade comprenant bien et articulant parfaitement.
11 montre sans hésitation sur un livre d'images les objets qu'on
lui demande, mais n'en saurait trouver l'appellation; il explique
ce qu'on fait avec les objets désignés, sans plus de succès d'ail-
leurs ; même manière d'être à l'égard des adjectifs et des verbes,
de sorte que, dans la conversation, à tout instant il perd le mot
et le remplace par une périphrase. Il en est ainsi lorsqu'il écrit,
mais, pour cet exercice, les mots lui arrivent en général plus
aisément, sinon on le voit attendre que la mémoire les lui ait
fournis; il n'est au reste pas rare qu'il s'arrête au milieu d'un
mot, et qu'il lui faille le prononcer pour continuer à l'écrire.
D'ordinaire, ni en écrivant, ni en parlant, il ne se trompe d'ex-
pression, cet état s'aggrave pendant les quatre mois suivants, au
point qu'il ne se souvient plus durant trente secondes d'un mot,
d'une injonction, qu'il devient incapable de pratiquer les quatre
régies de l'arithmétique sur des nombres de plus de trois chiffres,
les seuls qu'il lise encore, qu'il est obligé de compter sur ses
doigts, sa mémoire ne lui présentant que sa table de multiplica-
tion ; que, tout en distinguant bien les monnaies les unes des
autres, il ne saurait manier l'argent. M. Grashey démontre qu'il
s'agit, dans l'espèce, d'une aphasie, non par impotence fonction-
nelle des centres, non par arr êt de la conductibilité des voies de
connexion, mais par simple diminution dans la durée des im-
pressions sur les éléments sensoriels, ceux-ci, altérés dans leurs
qualités, ne retenant pas assez longtemps l'imprégnation sensible
pour que les fractions d'incitation dont se compose un tout donné
fusionnent en une image unique représentative de l'objet, du
mot, etc. La période d'acmé de cette aphasie persista pendant
neuf mois, puis en quatorze jours s'effectua une guérison à peu
près entière.. P. K.
XLV. Contribution A la casuistique A,-îATOUO-11.ITHOLOGIQUP, DES
cerveaux DE criminels ET DE SUICIDES; par M. FLESCH. (Arch.
f. Psych., XVI, 3.)
Chez un homme de cinquante ans, vigoureux, qui le 13 novembre
1879, se tuait en avalant du cyanure de potassium, sans raison
valable, on trouvait que toute la moitié antérieure de la faux du cer-
veau faisaitdéfaut. Les deux hémisphères dans la moitié antérieure
du cerveau n'étaient donc séparées que par la pie-mère; au-dessus
d'eux passait comme un pont une lame d'arachnoïde. L'hémis-
90 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
phère gauche paraissait plus volumineux que l'hémisphère droit,
mais on n'a pas procédé à la coupe, afin' de conserver la pièce
dans son intégrité. P. K.
XLVI. Sur les facteurs DYSCIIASIQUE3 qui JOUENT UN rôle dans
LA GENÈSE DES NÉVROSES ET DES PSYCHOSES par 0. MUELLER. (Nc2G-
1'ol, Cent1'(llbl., z885.;
Les dyscrasies chroniques qui sont capables d'engendrer des
troubles psychiques se groupent sous deux catégories : 1e celle de
l'intoxication hétérogène, c'est-à-dire par des matières étrangères
à l'organisme (bactéries, syphilis), malaria, alcool, ergotine,
narcotiques, gaz toxiques; 2° celle de l'intoxication autochtone,
autogène, ou par des substances pathogénétiques originaires de
l'organisme même (acétonémie ou diabète, choléine, urémie,
goutte, rhumatisme, déchets dans les cas de dyspepsies, dans les
maladies de la respiration). La revue est intéressante. Sa conclu-
sion est qu'il faut faire de la chimie physiologique ainsi que de
l'analyse spectrale. c P. K.
XLVII. Identité DE l'épilepsie avec la folie morale ET avec la CRI-
FINALITé congénitale ; par C. Lo\tBnoso. (Nettrol. Cenlmlbl. 1885.)
On constate dans l'épilepsie comme dans la folie morale une
augmentation dans le poids du corps, de l'asymétrie et de la
sclérose crâniennes fréquente ? , l'existence également fréquente de
la fosse occipitale moyenne, une diminution de la capacité intra-
crânienne et, parmi les anamr.estiques, une grande proportion
de méningo-encéphalites pendant l'enfance. La physionomie des
deux espèces de sujets est identique : saillie des arcades zygoma-
tiques et des bosses frontales, oreilles détachées de la tête, mas-
culinité de la femme, analgésie, daltonisme, dyschromatopsie,
inégalité pupillaire, exagération des réflexes tendineux, tempé-
rature axillaire de 37°2 à 37°3, fréquence (6 p. 100) du type cri-
minel. Tous sont paresseux , impulsifs, privés de mémoire ,
dépourvus de sens moral, émotifs, excitables; fréquemment, ils
boivent et ils se tuent, ils ont aussi l'habitude du tatouage. La
statistique montre que sur cent délinquants il y a cinq épilep-
tiques, tandis que sur mille individus normaux, il n'y a que cinq
épileptiques. En Italie, ce sont les régions qui fournissent le plus
grand nombre d'épileptiques où l'on rencontre la plupart des
criminels. Les attaques convulsives peuvent être remplacées, sur-
tout pendant les quinze premières années de la vie, par des
impulsions attentatoires à la morale et à la vie des semblables ;
dans ce cas, il y a transmission héréditaire, soit que les parents
aient été épileptiques eux-mêmes, soient qu'ils aient été des
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 91 L
ivrognes. L'atavisme est d'ailleurs, quel que soit le mécanisme
intime de la modalité morbide, le substratum primordial de la
criminalité congéuiale identique avec la folie morale. Le sens
moral, qui apparaît le dernier dans l'ensemble du développement,
disparait le premier au début des affections cérébrales, dans la
vieillesse, dans l'alcoolisme, et l'on sait qu'à la suite de leurs
accès, les épileptiques se livrent à des actes de pure animalité : -.
ils aboient, miaulent, mordent, dévorent de la viande crue et
de la chair humaine. P. K.
XLVIII. Sur QUELQUES QUESTIONS DE principe EN électrothérapie;
par C.-W. Mueller. (Neurol. Ce7atralbl., 1885.)
Il s'agit du traitement périphérique dans les allections cen-
trales du système nerveux. 1 le traitement périphérique symp-
tomatique ne soulage jamais quand le traitement central n'exerce
aucune action sur le foyer morbide ; 2° il n'a jamais le même
effet curatif que le traitement central ; 3° jamais le traitement
périphérique n'entrave les progrès d'une maladie centrale;
4° certaines lésions organiques récentes font exception aux règles
établies dans les conclusions 2° et 3°; ces lésions récentes peuvent
être influencées par l'action réflexe de l'agent électrique sur les
vaisseaux sanguins des centres nerveux (faradisation selon la
méthode de Rumpf '); la même exception doit être faite en
faveur des divers troubles fonctionnels du système nerveux cen-
tral (neurasthénie, hystérie); 5° le triomphe du traitement
périphérique symptomatique, ce sont maintes névralgies d'ori-
gine centrale (tabes); l'électricité redonne de la vigueur à ce qui
reste encore des éléments musculaires et nerveux, et imprime un
coup de fouet à la convalescence. P. K.
XLIX. SUR LE TEMPS QUE demandent CHEZ LES aliénés LES PROCESSUS
rSYCIIIQUES simples; par W. DE TSCHISCH. (1X e211'Ol. CentlTCLlfil., 1883.)
Quel temps faut-il pour qu'un individu réagisse à une excitation
sensorielle le signal étant donné par une boule qui tombe soit de
5,7 centimètres (son fort) soit de 3 centimètres (son léger) ? Cent
cinquante expériences ont démontré que chez un individu sain,
il faut 0 Se°. 1 ; ; un paralytique général examiné dans une
période de rémission 0 sec. 08 - 0,10 ; à un persécuté halluciné
penchant vers la démence 0, 4 ? ; à un jeune homme en pleine
guérison d'un long accès de manie 0,07 0,11 ? Les mêmes
sujets mettront pour réagir et distinguer la valeur de la sollicita-
tion 0,30; 0 ? 7; 0,3.'r,; 0,24 (deux cents essais). L'association
1 Voy. Archives de Neurologie.
92 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
d'idées simples exigera, dans le même ordre : O,iO; 0,23; 1,39;
0, 28 (300 épreuves). La gènèse d'un jugement demandera : 0,8;
0,29; 1,89 ; 0,31 (200 épreuves). Conclusion : Quand les forces
vives de l'intelligence ont diminué, l'association des idées se fait
plus vite; si à l'affaiblissement intellectuel se joignent des con-
ceptions délirantes qui nuisent à l'attention de l'individu, le pro-
cessus d'association se ralentit considéralement. P. K.
SUR LE traitement DE la SITIOPHOBIE chez LES aliénés,
par Siemens (Neurol. Central6l., 1885.)
Répétition de ces communications antérieures*. Il persiste à
dire que les cas dans lequel l'alimentation forcée est indispensable
sont très rares. P. K.
REVUE DU THÉRAPEUTIQUE
1. De l'influence qu'exerce sur l'activité volontaire, L'INIlA-
litron DE l'amylnitrite ; par le D Tippel.
Le but que se propose le 1Jr Tippl est d'étudier au moyen de
l'expérimentation de quelle manière se manifeste l'influence de
l'amylnitrite sur la volonté, chez différents sujets.
Les recherches faites jusqu'à ce jour se divisent en deux
groupes : le premier envisage la question au point de vue physio-
logique, c'est-à-dire l'action de l'amylnitrite sur la circulation, la
respiration, etc., la seule chose qui nous intéressera là-dedans,
c'est son effet sur la circulation crâniene.
Le second groupe envisage la question au point de vue psycho-
logique, son action sur la volonté ; le travail le plus important et
le plus complet à ce sujet est celui de Dr Kroepelin, cité dans les
« Eludes philosophiques » de Wundt.
Le Dr Tippel commence par étudier l'effet physiologique de
l'amylnitrite sur le cerveau. Nous ignorons, dit-il, l'effet direct
de cette substance sur le cerveau, c'est-à-dire son action chimi-
que sur la substance cérébrale. Nous ne connaissons que son
effet sur certains vaisseaux artériels qui consiste dans l'augmen-
tation de leur volume; la distension des vaisseaux de la tête a
1 Voy. Archives de Neurologie.
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 93
pour résultat d'amener la rougeur de la face et une élévation
locale de température.
Cette action est attribuée aux vaso-moteurs. Les controverses au
sujet de l'action des vasomoteurs ne nous arrêteront pas, ce que
nous voulons savoir , c'est l'état des vaisseaux dans la boite
crânienne.
Pour étudier cette question, nous devrons nous servir de l'expé-
rimentation et voir ensuite quels sont les résultats psychiques
produits après l'inhalation de l'amylnitrite. Avant d'aborder cette
étude, nous devons éclaircir s'il y a des changements dans le vo-
lume des vaisseaux du cerveau après inhatation de l'amylnitrite,
et en quoi consistent ces changements.
Dans le premier chapitre intitulé : Considérations sur les change-
ments produits dans la circulation du cerveau à la suite de l'inhalation
de l'amylnitrite, le Dr Tippel dit qu'une observation directe du
cerveau était indispensable; l'examen du fond de l'oeil peut rendre
des services, cet examen avait été fait d'abord par Pick et décrit
dans sa dissertation sur l'amylnitrite et son action thérapeutique
(Rome, 1874); des expériences de Pick, contrôlées par le profes-
seur Semisch, montrèrent qu'il n'y avait aucun changement dans
les vaisseaux du fond de l'oeil. Ruger et Forster prouvèrent au
contraire qu'à la suite d'inhalation de l'amylnitrite. les vaisseaux
du fond de l'oeil devenaient plus volumineux et l'on apercevait
une petite branche invisible auparavant, il en était de même de
l'artère centrale de la rétine ; donc les deux carotides étaient
également affectées. Ces observations ne sont pourtant pas pro-
bantes pour nous, parce qu'il n'y a aucune raison qui prouve
que les vaisseaux du cerveau soient toujours hyperémiés -en
même temps que ceux de l'oeil. Les expériences sur le cerveau ont
été faites sur des animaux trépanés ; de plus Mosso a eu l'occasion
d'observer directement un malade qui avait une fracture du
crâne.
Expériences avec des animaux trépanés.
a. Expérience du Dr Maximilien Schuller, 1874, dans la Bel'linel'
\Voche nsch1'ilt : il faisait inhaler à des lapins trépanés de l'amyl-
nitrite au moyen d'une petite éponge ; après 3-5 inspirations, on
constatait une dilatation des vaisseaux de la pie-mère, veines et
artères ; le cerveau augmentait de volume au point de faire
saillie par l'orifice ; on constatait des pulsations dans les artères ;
dans un cas. on a pu les voir même dans les veines.
Dans l'Al ! gemeim' Zeitsclcrift sur Psychiatrie, se trouve une com-
munication du professeur Jolly (de Strasbourg); il avait fait des
expériences sur des lapins trépanés et avait obtenu les mêmes
résultats. Ce sont les deux seules observations qui existent.
94 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
6. Expérience personnelle : un lapin est trépané, on lui fend la
dure-mère et l'on met la pie-mère à nu. Température rectale au
commencement 36°,8. - On lui met devant le nez un morceau de
ouate imbibé d'amylnitrite, aussitôt l'on aperçoit l'augmen-
tation de volume de la substance cérébrale ; ce phénomène dis-
paraît quand l'on éloigne l'amylnitrile, il y a aussi augmentation
de la quantité de liquide céphaloracbidien. Les artères de la pie-
mère deviennent de plus en plus volumineuses, on aperçoit des
petites branches invisibles avant, après vingt-cinq minutes d'inhala-
tions ininterrompues il y a réplétion des vaisseaux de la pie-mère,
de violentes convulsions, crampes dans le museau; les oreilles, la
queue et les membres; dilatation des pupilles ; température rec-
tale 39°,8.
Pour sauver l'animal, on eut recours à la respiration artifi-
cielle.
Expérience de Massa. Il eut l'occasion d'observer(un homme qui à
la suite d'un traumatisme, avait le crâne fendu, avec perte de
substance osseuse, l'observation directe était impossible, mais l'on
se servit de la méthode graphique. On constata, ici aussi une
augmentation de volume de la masse cérébrale ; pendant douze
pulsations la courbe ne se modifia pas, les pulsations devinrent
ensuite de plus en plus rapides, le volume du cerveau augmenta
de trois centimètres. Les résultats sont donc les mêmes chez
l'homme et les animaux; cette hyperémie dans la boîte crâniene
produit une diminution de pression du sang dans les artères, et
nécessite une impulsion cardiaque plus énergique; ces faits ont
été signalés par plusieurs observateurs, et sont d'accord avec
mes observations personnelles ; rarement on a conslaté le ralen-
tissement du pouls et des battements du coeur. Cette accumula-
tion du sang et du liquide céphalo-rachidien dans la boite crâ-
niene, produit une telle augmentation de volume du cerveau que
si la boîte crânienne était extensible, on aurait pu constater une
augmentation de volume de toute la tête, comme on constate la
tuméfaction et la rougeur de la face. Cet état est désigné sous le
nom d'oedème cérébral. La circulation gênée par la réplétion des
vaisseaux et l'accumulation du liquide céphalo-rachidien rend
l'afflux de nouvelles ondées sanguines très difficile, et produit
une anémie cérébrale qui est la cause des attaques épileptoïdes
que l'on observe chez tous les animaux à la suite d'expériences pro-
longées.
Ces attaques sont plus fortes chez les animaux qui n'ont pas
subi l'opération du trépan. Ces expériences nous prouvent qu'il y
a modification de la circulation cérébrale à la suite d'inhalation
d'amylnitrite.
La seconde partie de l'article du Dr Tippel est consacrée aux
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 95
recherches sur l'influence que p.'oduitl'amyinitrite sur les actes
volontaires.
a. Sensations subjectives. L'influence de l'amylnitrite est varia-
ble selon les sujets; ses nombreuses observations s'étendent à
des sujets normaux, àdes sujets anormaux. Depuis longtemps, on
a constaté que certaines personnes inhalent cette substance
volontiers, d'autres s'en détournent avec horreur. La plus grande
majorité, tant parmi les sujets normaux que les sujets malades
nerveux ne s'oppose pas à l'inhalation ; même des personnes très
impressionnable le subissent. D'autres au contraires, se détournent
aussitôt qu'on approche d'eux un mouchoir imbibé d'amylnitrite.
Cette idiosyncrasie, comme on pourrait la nommer, s'observe sur-
tout chez les alcooliques . Quelques-uns ne consentaient qu'à
grande peine à des inhalations nouvelles, se plaignant d'avance
de douleurs de tête aussitôt qu'on les introduisait dans une chambre
où il y avait une odeur d'amylnitrite.
Les symptômes connus, tels que rougeur, chaleur de la tête,
augmentation des sécrétions des muqueuses oculaires, nasales,
battements des artères de la tête, s'observaient toujours. Une
fols, on observa ces phénomènes d'un seul côté de la face chez
l'intéressant malade Dulcring, cité dans la première partie de cet
ouvrage; cette rougeur était plus marquée du côté de sa contrac-
ture, la conjonctive de l'oeil gauche était plus irritée. -- Quant à
la manière dont les différents sujets sont affectés par l'amylni-
trite, elle est connue très variable : les uns n'éprouvent aucun
changement, sauf des mouches volantes devant les yeux; d'autres
au contraire, perdent complètement connaissance; et, à la suite de
nombreuses expériences on constata que les personnes pléthori-
ques en sont plus affectées lesanérniques, au contraire, le suppor-
tent très bien. Il y a cependant de nombreuses exceptions. Les
sujets normaux et les malades ne présentaient aucune différence
quant à la réaction. Il est à remarquer que chez certains mélanco-
liques il se produisait comme une secousse qui les faisait sortir de
leur apathie et produisait un état de surexcitation. Après le si-
lence dans lequel ils étaient plongés, ils se mettaient subitement
à parler et donnaient quelquefois des renseignements sur leur état.
Un épileptique se sentait toujours soulagé après l'inhalation
d'amylnitrite. Cet état de soulagement cessait quinze minutes
après que l'inhalation avait cessé. Le malade cité plus haut,
Duhring, éprouvait aussi du soulagement; ses crampes devenaient
moins douloureuses. D'autres, au contraire, se plaignent de
douleurs sourdes de la têle et d'un sentiment général de ma-
laise. Ceci était plus marqué chez les alcooliques, qui, après quel-
ques inspirations, étaient pris de titubation, malaise général,
sensation de dépression qui se prolongeait pendant plusieurs
heures après l'inhalation et rendait tout travail intellectuel im-
96 'REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
possible. L'âge et le sexe ne paraissaient exercer aucune
influence.
b. De l'influence qu'exerce l'amylnitrite sur les actes volon-
taires.
D'après ce que nous venons de dire, nous pouvons affirmer
que l'amylnitrite exerce une influence sur la volonté ; mais nous
devons la rechercher méthodiquement, et, pour cela, nous nous
servirons de la méthode des courbes du Dr Rieger, décrite dans la
première partie de ce livre. Avant de parler de l'influence de
l'amylnitrite, j'ai tenu à essayer d'autres substances pour voir si
l'influence produite n'était pas due à la substance odorante ; j'ai
pris de l'eau de Cologne, du camphre, sans obtenir aucun ré-
sultat ; si je dis que le chloroforme ne produisit non plus aucune
influence, j'aurai le droit d'affirmer que l'influence exercée sur
l'activité musculaire, après l'inhalation d'amylnitrite était réelle-
ment due à ce corps, et que cette influence s'exerçait sur le cer-
veau.
Je commence par montrer des courbes sur lesquelles l'amylni-
trite ne semble avoir produit aucune influence (comme toujours
je mets en a une courbe avant l'inhalation et une courbe en b
pendant l'expérimentation).
I a et 16 a sont les résultats de nombreuses courbes d'un collègue
qui connaissait l'effet produit. Quand la sensation de chaleur
' atteignait son maximum, les battements des carotides devenaient
intenses, quand le sensoriel11 commençait à être affecté, le sujet
en expérience nous le communiquait, et l'on prenait le tracé.
Quoique, dans ce cas, tous les autres effets de l'amylnitrite surve-
* liaient, son action sur la volonté était nulle. Il en est de même
'des courbes 2 a, 2 6 qui provenaient d'un docteur.
3 ca et 3 6 sont les courbes d'un homme simple, d'un certain
âge, dont les courbes à l'état normal étaient assez satisfaisantes ;
ici aussi l'amylnitrite tout en produisant les modifications physio-
logiques que nous connaissons, ne semble pas avoir influencé la
' volonté. A côté de ces trois exemples, j'en cite d'autres où la vo-
lonté est affectée.
' Lacourbe 4 a et4 6 est celle d'un garçon de quatorze ansqni,pour
des raisons qui ne nous intéressent pas, respire avec force ce qui
se voit sur la courbe. Ici nous voyons pour la première fois l'ac-
tion de l'amylnitrite. '
Pendant que 4 a s'abaisse régulièrement, 4 b s'abaisse au com-
mencement avec rapidité jusqu'à b; à 'ce point, on éloigne
l'amylnitrite du nez du sujet, le tracé remonte immédiatement ;
on rapproche de nouveau la ouate du nez et la courbe s'abaisse
immédiatement. A la fin, la courbe se relève, devientirrégulière.
5 a et 5 b sont les courbes d'un mélancolique qui comprenait
ce qu'on exigeait de lui et dont le tracé était ordinairement assez
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 97
régulier. En 5 6 nousvoyonsl'influence de l'amylnitrite clairement.
6 a et 6 b, sont les courbes d'un jeune homme d'un intelli-
gence affaiblie, 6 a montre une grande faiblesse de volonté qui
est plus marquée dans 6 b.
7 a et 7 b, jeune fille d'intelligence affaiblie, est très irrégulière,
mais 7 6 s'abaisse tellement qu'on n'a pu en suivre l'ombre sur le
tambour. Il est à remarquer que cette jeune fille ne savait même
pas qu'on expérimentait sur elle : elle s'asseyait et laissait faire
tout ce qu'on voulait, sans opposer aucune résistance. Cette expé-
rience se rapproche de celles qu'on fait sur les animaux.
8 a et 8 6, sont identiques à la précédente.
9 a et 9 b, sont les courbes d'un étudiant de l'école normale; il
voulait être immobile, aussi fut-il très étonné de constater l'abais-
sement considérable de la courbe.
10 a, 10 6 est la courbe d'un jeune médecin ; b, s'abaisse con-
sidérablement.
11 a et Il b est la courbe d'un alcoolique en convalescence
d'un accès de délirium tremens. Le tremblement avait disparu,
mais on constatait chez ce sujet un phénomène dont il est ques-
tion dans la première partie de ce livre; ce patient avait une ten-
dance à fléchir le bras, ce qui fait remonter la courbe en a. Cette
élévation est assez régulière, mais en b, l'irrégularité est frappante.
- 1 ? a et 12 b, est la courbe d'un alcoolique en plein accès de
delirium tremens. Outre le tremblement, a se tient à une cer-
taine hauteur, b présente des irrégularités, puis la courbe finit par
devenir impossible. Les mêmes faits s'observent en 13 a et 13 b.
Egalement un alcoolique qui, n'ayant pas bu d'alcool depuis long-
temps, était très affaibli.
On constate, en général, chez les alcooliques, une modifica-
tion dans la courbe sous l'influence de l'amylnitrite telle, que le
tracé en devenait impossible.
J'ai observé un phénomène très curieux chez les épileptiques,
sous l'influence de l'amylnitrite, leur courbe devenait plus régu-
lière, de 14 a et 14 b, de la planche VIII sont un des nombreux
exemples que j'ai observés. - a, est très irrégulier, descend ra-
pidement, b est très loin de représenter une courbe normale,
mais la courbe démontre une activité volontaire plus grande.
Pour terminer, je montrerai aussi la courbe d'un malade qui à la
suite d'une lésion du crâne, avait une hémiparésie. Le malade
avait aussi une aphasie motrice, et, comme c'est le cas dans ces
maladies, il était d'humeur variable; même dans les courbes du
bras gauche qui était normal, l'influence de l'humeur se faisait
voir. Sous l'influence de l'amylnitrite, il a toujours été impossible
de prendre de tracé parce que l'état de surexcitation du malade
devenait considérable; il suffisait d'approcher de ce malade, 2' à
3 gouttes d'amylnitrite pour produire un état d'ivresse, tel que, le
Archives, t. XII. 7
98 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
jour suivant le malade ne se souvenait de rien. Je termine parla, mon
énumération des nombreuses courbes, les exemples suffisent pour
démontrer que l'influence de la volonté par l'inhalation de l'amyl-
nitrite présente les plus grandes variétés individuelles, tandis que
les effets physiologiques sont les mêmes chez tous les sujets.
Plusieurs personnes ont présenté des courbes aussi régulières,
sous l'influence de l'amylnitrile, qu'à l'état normal. D'autres, au
contraire en furent profondément affectées ; l'influence est sur-
tout marquée sur les alcooliques. De plus, un phénomène intéres-
sant, c'est l'effet produit sur le sujet atteint de lésion du crâne ;
plusieurs savants ont dû constater que des sujets atteints de lésions
du crâne opposaient moins de résistance aux influences conges-
tionnelles ; le médecin légiste, Krafft-Ebing. par exemple, trouve
que ce phénomène pourrait être démontré expérimentalement.
Cette méthode pourrait donc dans ce sens rendre des services
considérables.
Dans ces recherches, sauf les cas où l'amylnitrite n'a produit
aucun effet, nous avons toujours trouvé comme règle générale,
que l'amylnitrite produisait un affaiblissement de l'activité volon-
taire. Le bras qui normalement pouvait rester immobile un temps
donné, s'abaissait généralement avec rapidité sous l'influence de
ce corps. IR.1CLIDY.
II. Un cas DE trépanation du crâne pour épilepsie; par A. ERLEN-
MEYER (Centralbl. f. Neruenheilk., 1885.)
Epilepsie survenue à la suite d'une chute sur la tête, ne recon-
naissant aucune autre cause. Le pariétal gauche est le siège
d'une cicatrice de 2 centimètres de long, blanche, dépourvue
d'adhérences, non douloureuse à la pression, parallèle à la suture
sagittale et située à 3 centimètres au-dessous d'elle; une ligne
menée perpendiculairement de la suture sagittale au conduit audi-
tif externe coupe la cicatrice en son milieu. On constate en ce
point un enfoncement eu rigole, large comme le doigt, sensible
à la pression, mais non épileptogène. D'ailleurs, il s'agit d'une
épilepsie ordinaire; on diagnostique simplement les phénomènes
d'excitation générale dus à un enfoncement osseux troublant la
circulation générale de l'encéphale. On enlève l'endroit incriminé
sur un diamètre mnyen de 3 centimètres; on ne constate aucune
saillie de la lame vitrée, aucune anomalie de la dure-mère;
néanmoins l'épilepsie disparaît. P. K.
III. Un nouveau rhéostat transportable; par 1 ? Hecker (Neurol.
Centralbl., 1885.)
Cet instrument qu'emploie M. Hecker tous les jours depuis un
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 99
au sans mécomptes ni inconvénients est constitué par une simple
bande de toile humide sur laquelle on fait glisser un coulant
armé de charbon qui porte une anse conductrice. P. K.
IV. Contribution au traitement DE l'attaque d'hystérie;
par Albert RuAULT (Franee médicale, 4885, n° 86).
M. Ruault a réussi très souvent à arrêter l'attaque hystérique
par la compression d'un nerf à son point d'émergence des par-
ties profondes. Le cubital en arrière de l'épitrochlée et surtout
le nerf sus-orbitaire sont les plus accessibles à cette manoeuvre.
Les phénomènes observés sont analogues à ceux produits par la
compression de l'ovaire dans les mêmes circonstances. L'auteur
a pu arrêter ainsi non seulement des attaques légitimes d'hystérie
convulsive, mais aussi d'autres mauifestatioes de la même névrose
délire, hallucinations, dyspnée. Cu. F.
V. SUR l'action DE la cocaïne dans LE sevrage DES morphinomanes;
par A. ËRLSNMEYEU (Centralbl. f. Nervenheilke, 1883.)
Il La cocaïne à la dose maxima de 0,10 par jour en injection
sous-cutanée n'exerce aucune espèce d'action sur le système ner-
veux cérébro-spinal (motilité et sensibilité) : 2° à la dose hypo-
dermique de 0,005 milligr. les centresvaso-moteurs sont touchés;
le pouls augmente de fréquence, les artères se dilatent, la tension
artérielle baisse (dicrotisme), il se produit une sudation abon-
dante, la température monte; mais ces effets ne durent que
quinze à vingt minutes; 3° le patient manifeste alors une sensa-
tion subjective de chaleur soit à l'épigastre, soit par tout le corps,
mais si l'estomac est vide, il accuse aussi une pesanteur ou une
crampe désagréable dans la région épigastrique; la répétition
fréquente de petites doses ou une quotité de 0,05 centigrammes
provoque un sentiment d'angoisse et de lipothymie des plus
désagréables; 4° chez les morphinomanes sevrés de leur poison,
la cocaïne assoupit pour un temps les malaises qu'ils éprouvent ;
par conséquent il en faudrait répéter l'injection plusieurs fois
par jour ; sa cherté ne correspond donc pas aux effets de ce subs-
titutif léger. Ainsi, un morphinomane, tout en absorbant des
doses de 0,40 centigrammes de cocaïne, n'avait réussi qu'à dimi-
nuer de 1 milligramme les 0,80 à un gramme de morphine qu'il
lui fallait par jour; et cependant il avait éprouvé des angoisses
extrêmement violentes et des tremblements de mains l'empê-
chant presque d'écrire. Au reste, Panas a prouvé qu'il existe deux
produits dans les feuilles de coca : la cocaïne commune, émanée
d'un premier traitement pharmaceutique n'est ni mydriatique, ni
antimorphinique; l'éther hygrinique qu'on extrait des feuilles de
100 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
coca déjà manipulées, mydriatique, pourrait bien être l'antago-
niste de la morphine, au sens de Richter '. P. K.
VI. CONTRIBUTIONS pratiques A L'EMPLOI DE L'ÉLECTRICITÉ chez les
aliénés; par HEYDEN. (Allg. Zeitschr. f. Psych., XLII, 1.)
Six ans de pratique à l'asile d'Eudenieh. Vingt-quatre observa-
tions. On doit employer : soit la galvanisation céphalique descen-
dante, tantôt transversale(chacun des pôles derrière les oreilles),
tantôt longitudinale(anode au front, cathode à la nuque (3, 5, 8,
éléments de Stoerer); soit la galvanisation et la faradisation gé-
nérales (anode à la nuque ou sur le rachis, cathode dans l'eau d'un
bain de pieds à- 36 à 38° C.), soit enfin les méthodes périphé-
riques classiques. Dans ces conditions, l'électricité débarrasse
les aliénés de symptômes nerveux périphériques ayant une ori-
gine centrale, surtout dans le domaine uro-génital (aménorrhée,
incontinence d'urine, constipation opiniâtre), active la circula-
tion podalique (pinceau électrique), produit du sommeil (2 cas
de paralysie générale). P. K.
VII. Traitement DES psychoses A l'aide de l'électricité; par TIGGES
(Allg. Zeitschir. f. Psych., XLI, 4-3.)
C'est, comme le dit l'auteur, la partie spéciale du mémoire déjà
analysé par nous 2. On y trouve les observations accompagnées de
la mise en relief des résultats thérapeutiques (tableaux, analyses,
etc.). Les courants continus ont particulièrement réussi dans cinq
cas de mélancolie; sous leur action, les sensations anormales, les
troubles parétiques, les tremblements ont complètement disparu
et la maladie a guéri en 11, 14, 18, 49, 30 jours. Trois cas de
mélancolie stupide ont guéri sous l'influence de l'électricité. Dans
la folie systématique, on n'a obtenu tout au plus qu'un effet mo-
mentané ou partiel ; même observation à l'égard de la démence,
dont cinq malades se sont trouvées radicalement améliorées.
Dans la manie, quelqu'en fût le mode, l'électricité exerça réelle-
ment une influence favorable sur les symptômes, notamment sur
les sensations pathologiques; elle agit aussi, mais très peu et
passagèrement, sur l'agitation et l'état de l'humeur, n'exerçant
d'ailleurs aucune action sur l'évolution. Dans l'épilepsie, précédée
d'accès maniaques, l'effet obtenu a été médiocre. Dans tous les
faits où l'existence de symptômes moteurs laissait supposer le
tabes, le courant continu a amélioré, au moins pour un temps,
l'ensemble des symptômes nerveux et psychiques. P. K.
1 Voy. Archives de Neurologie.
2 Id., t. IX, p. 85.
REVUE DE THERAPEUTIQUE. 101
VIII. SUR L'EMPLOI DU FER EN INJECTIONS SOUS-CUTANÉES dans LES
psychoses; par W. NASSE (Allg. Zeitschr. f. Psych. XLI, 4-5.)
L'oxyde de fer soluble, préparé par Finzelberg, s'obtient ainsi :
on fait digérer de la viande dans de la pepsine pure additionnée
d'acide chlorhydrique ; on porte le tout dans un dialyseur; on
évapore à siccité, la poudre rouge-brun qui résulte de ce traite-
ment contient 25 p. 100 d'oxyde; on la fait bouillir dans de
l'eau dans la proportion de 1,10. Une seringue de Pravaz,
(I gramme), contient alors 0,10 de peptonate de fer, on filtre
soit 0,025 mill. d'oxyde. L'injection hypodermique de cette solu-
tion claire ne présente aucun inconvénient, elle tonifie, répare,
réconforte les mélancoliques anémiques, cachectiques, hydrémi-
ques, à la condition qu'on prolonge le traitement pendant deux,
trois, voire six mois (1879-1885.) P. K.
IX. Cas DE paralysie DE LANDRY guérie par L'ERGOTINF
par SORGENFREY. (Neurol. Centrabl., 1885.)
Une semaine après avoir été soumis à un refroidissement
humide de la région dorsale, on constate chez le malade, qui fait
le sujet de cette observation, de l'abattement, de l'inappétence, de
la lourdeur des extrémités inférieures, de la faiblesse de la mar-
che ; il est obligé de s'aliter. T =37°,5; couché sur le dos, il meut
péniblement les jambes, mais ne présente aucune anomalie du
côté de la sensibilité; le phénomène du genou a disparu; les
réflexes cutanés persistent. Malgré l'institution d'un traitement
anticongestif, les troubles augmentent; il se produit une paraly-
sie complète d'abord des membres inférieurs, puis des extrémités
supérieures; dyspnée; parole inintelligible (aphonie); dysphagie;
facies hippocratique. Au bout de trois jours la mort est devenue
imminente. On ordonne, par cuillerées à thé toutes les heures,
la solution suivante : ergotine Bonjean, I gr. 25, eau de cannelle,
60 grammes. Le lendemain matin, les symptômes bulbaires ont L
disparu; la motilité a reparu, quoique faible, dans les bras;
Ifs jambes tendent à récupérer leurs fonctions. Une semaine plus
Lard, sans qu'on fût obligé d'ordonner une nouvelle médication,
le malade s'améliore, puis guérit. La paralysie de Landry ne
résulterait-elle pas de troubles vaso-moteurs ? P. K.
X. Encore UN cas DE paralysie par INJECTION sous-cutanée d'éther;
par H. NEUMANN. (Neurol. Centralbl., 1885.)
Un phthisique en état de collapsus reçoit deux injections sous-
cutanées d'éther sur les deux avant-bras. Le troisième jour sui-
102 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE.
vant, les endroits piqués sont douloureux et légèrement tuméfiés ;
les mouvements déterminent des douleurs sur la face postérieure
de l'avant-bras ; il lui est impossible d'étendre les médius, surtout
à droite; en même temps, il existe une sensation d'engourdisse-
ment sur le bord cubital de la face dorsale des avant-bras, sur
le dos des mains, au niveau du troisième métacarpien, du troi-
sième doigt dans les épiphyses et à un moindre degré sur la face
palmaire du même dos, ainsi que dans la paume de la main
(même région); puis, tout disparait, si ce n'est la paralysie du
ventre de l'extenseur commun des doigts qui commande aux
médius. Pendant l'examen objectif, le patient désigne fort net-
tement comme étant l'endroit des piqûres une zone qui, sur
les avant-bras, .occupe le bord cubital de la face dorsale du
membre, à 10 ou 12 centimètres au-dessous de la pointe de
l'olécrâne; intégrité de la sensibilité et de la motilité, si ce n'est
en ce qui concerne le mouvement volontaire et l'excitation gal-
vanique et faradique dans le domaine du radial et de l'extenseur
commun des doigts (parésie surtout frappante à droite). Aucun
signe de lésion du système nerveux central. P. K.
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE
I. CONTRIBUTION A L'ANAT031fE DES tubercules quadrijumeaux;
par L. D.4RIiSCHER'ITSCII. (Neurol. Centralbl., 1885.)
Préparations empruntées à des lapins, colorées par la méthode
de Weigert, qui montrent très nettement la répartition et la
terminaison des bandelettes optiques dans les tubercules quadri-
jumeaux supérieurs. La bandelette se distribue surtout aux deux
tiers antérieurs du tubercule antérieur du côté correspondant;
elle en occupe la périphérie externe, le segment interne de la
périphérie de ce dernier organe donnant naissance à des fibres
qui se dirigent vers l'écorce. P. K.
II. NOUVELLE contribution expérimentale A L'ANATOMIE DU ruban
DE REiL, communication provisoire; par de AIoN.\EOV. (Neurol.
Centrcclbl., 1885.)
Conclusion : 1° Une partie des irradiations blanches des parties
inférieures du lobe occipito-temporal se termine, chez le chat
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE. 103
dans le segment latéral du corps genouillé interne. Quand ce der-
nier organe est intact, il y a lieu de supposer que les faisceaux
temporo-occipitaux mentionnés sont indemnes. Une autre partie
des faisceaux temporo-occipitaux inférieurs gagne, suivant toute
probabilité, le bras du tubercule bijumeau inférieur, avec les
zones marginales duquel il entre en un rapport intime. - 2° Le
ruban de Reil inférieur (Forel) possède des faisceaux dont un
premier se relie aux lacis de substances grises sis au-dessous du
tubercule bijumeau inférieur, un second gagne les couches trans-
verses et inférieures de l'S de l'étage supérieur; un troisième
enfin (faisceau aberrant du cordon latéral) se dirige dans les par-
ties marginales du cordon latéral du même côté, contiguës à la
corne postérieure, pour se terminer dans la substance grise de la
moelle épinière. La plus grande somme des trois faisceaux pro-
vient sans aucun doute du tubercule bijumeau inférieur. 3°
Les fibres du ruban de Reil latéral (partie constituante principale
du ruban de Reil ou ruban de Reil cortical issu des circonvolu-
tions pariétales d'après Monakow), conservant, par rapport aux
faisceaux pyramidaux, la situation dorso-latérale, jusqu'à l'entre-
croisement supérieur des pyramides de Meynert, pénétrent, au
niveau de la partie inférieure du bulbe, à l'état de fibres arci-
formes, dans le noyau des cordons de Goll du côté opposé, ainsi
que dans le segment médian du noyau opposé des faisceaux de
Burdach et s'unissent aux cellules nerveuses qui s'y trouvent.
P.K.
III. Contribution A La connaissance DE la couche intermédiaire
DES olives; par S. FREUD. (Neurol. Centralbl., 1885.)
Etude du bulbe de foetus de 5 à 6 mois par la méthode de
Weigert. Les racines de l'acoustique forment une série continue
affectant une direction extéro-interne et inféro-supérieuie (de la
moelle à la protubérance); elles se terminent dans les masses
grises du même coté. Les plus externes gagnent le noyau anté-
rieur de l'acoustique (ganglion acoustique); les moyens et une
partie des internes vont au noyau interne (à grandes et petites
cellules) de l'acoustique, le restedesracines internes passe, par in-
iloxion directe, dans le noyau externe (segment interne du pédon-
cule cérébelleux inférieur, racine ascendante de Roller). Parmi les
prolongements indirects de ces racines, on voit : 1° des faisceaux
qui joignent le ganglion acoustique au noyau interne; 2" des fais-
ceaux arqués qui unissent le noyau interne à l'entrecroisement des
noyaux du toit du quatrième ventricule; 3° des faisceaux qui, par-
tis du noyau interne, dépassent le raphé en s'enchevêtrant avec
le noyau commun au facial et à l'auditif ; ainsi qu'avec le faisceau
longitudinal postérieur (faisceaux arqués); 4° des fibres arci-
formes allant du noyau externe aux plans profonds ; 50 des fais-
ceaux du corps trapézoïde, sont venus du ganglion de l'acous-
tique (Flechsig). La couche intermédiaire des olives avoisine le
point d'entrecroisement des prolongements du corps trapézoïde;
elle est par l'entrecroisement supérieur des pyramides en rapport
de continuité avec les noyaux des cordons postérieurs : peut-
être y a-t-il dans son sein des fibres qui rattachent l'acoustique
aux tractus sensitifs de la moelle épinière. L'angle inférieur et
médian du noyau interne de l'acoustique du mêmecôté lui apporte
un contingent de faisceaux bien dessinés. P. K.
IV. QUELQUES remarques SUR les nouveaux travaux concernant
l'action DE la chaleur SUR LES CENTRES respiratoires ainsi QUE
sur les nerfs du COEUR ET des vaisseaux; par L. rOLDSTEIN.
(Centralbl. f. Nervenheilk., 188.)
Revue critique sur les travaux d'Ackermann (Deutsch. Arch. f..
Klin. bfed., 1886), de Geedstein (Ueber W<Bt'Me<.6'pn(B.Ver/t<t ? td<.d.
phys. meci. Gesellsclz. 3" WÜ1 ? bllrg, N. F.,llovol.), Sililer (On the so
called heat rlyspnoia.Journ.of. Physiolog., t. 11., P. v. Merlschnisky,
(Deitsay ZU1' Woermedyspnoe. Wûrzbourg, 1881). Senator (Uebcr
einize Wirkungen der Erwcermung au/' den Kreislauf, die Athmung
und ct'na6sonde)'u) : g'. Arch. f. Physiol., supplt. Rand., 1883),
A.-Fi(l. (liât Verwnderung derTemperntur des im llirn circulisen-
den Bluter Einfluss cenf die Centren deau Hel'z-und-Ge{oessllel'ven ?
Pflicgcr's Arch., v, 18tif.) P. K.
V. Sur l'origine centrale du NERF accessoire de VILLIS
par L. DARKsciiFWITSCII. (Neurol.Centrcclbl., 488.i.)
De l'examen d'embryons humains, il résulte qu'il émane d'une
colonne ininterrompue de cellules, qui, dans la moelle spinale,
est située en arrière et en dehors de la corne antérieure et dont
le bulbe occupe par rapport au noyau de l'hypoglosse vers lequel
elle se prolonge exactement la même situation. Cette colonne
commence en haut au tiers intérieur des olives ou à la région
dans laquelle se met à apparaître le noyau postérieur du nerf
vague; on la suit en bas jusqu'à l'extrémité finale du territoire
qui donne naissance à la cinquième paire cervicale. A quelque
hauteur qu'on l'examine, l'aspect des cellules composantes est
partout le même. La racine de l'accessoire, après avoir quitté la
colonne qui constitue son noyau, décrit toujours une concavité
qui regarde en bas et un peu en dehors. La onzième paire n'af-
fecte donc aucun rapport ni avec le noyau antérieur, ni avec le
noyau postérieur du pneumogastrique, pas plus qu'avec le
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE. 105
faisceau solitaire ou avec la formation réticulaire : mais, dans le
bulbe, à la hauteur des noyaux des cordons postérieurs, le fais-
ceau de Burdach envoie des fibres qui s'adjoignent à la racine de
l'accessoire et l'accompagnent à la périphérie (découverte de
Darkschewitsch) : P. K.
VI. SUR UNE modification apportée A la NOUVELLE méthode DE
coloration DE VE1GERT DESTINÉE aux FIBRES NERVEUSES A MYÉLINE
DES organes centraux; par M. FRIEDMANN. (Neurol. Centralbl.,
4 885.)
Association de l'acide osmique, de l'acide chromique, de l'alcool,
avant de soumettre les morceaux à la double élection de Wei-
gert. On verrait, par l'ensemble des traitementsrecommandés, les
fibres colorées bleu intense, ou bleu noire, selon larégion de la
coupe envisagée. Nous ne saurions copier les recommandations
techniques. P. K.
VII. SUR LES trousseaux DE FIBRES longitudinales DE la formation
réticulaire du BULBE ET de la protubérance; par W. BECHTEREW.
(Neurol. Centralbl., 1885.)
Ces trousseaux reçoivent les manchons de myéline qui doivent
les constituer par étapes correspondant à diverses périodes de la
vie foetale. Ces fibres longitudinales représentent les unes le
prolongement immédiat des fibres spinales qui ont trouvé dans
la formation réticulaire des relais de substance grise (interrup-
tion momentanée), les autres les tractus fournis par ces foyers
gris. La substance grise de la formation réticulaire se compose
d'une zone externe limitée dans le bulbe, en dedans par les
.racines de l'hypoglosse, en dehors par celles du spinal, du pneu-
mo-gastrique, du glossopharygien , et d'une zone interne, origi-
naire des cordons antérieurs, limitée dans le bulbe, en dedans
par le raphé, en dehors par les racines de l'hypoglosse, ou, dans des
couches inférieures de la protubérance, par les racines de l'oculo-
moteur externe. Dans la zone externe, on rencontre : 1° les noyaux
du cordon latéral du bulbe ; 2° les olives supérieures ; 3° unnoyau
.de cellules petites et moyennes situé dans le territoire de la
calotte du pédoncule cérébral, en arrière du noyau rouge, en
dedans du ruban de Reil (découvert par Bechterew). La zone
interne renferme : 1° le noyau central de Roller très développé,
au niveau de l'extrémité supérieure des grosses olives; 2° le noyau
réticulé tegmenti ponlis, situé dans le segment inférieur et un peu
dans le segment moyen de la protubérance, au voisinage du
106 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE.
raphé (Voy. B.ecl1tcr('w..inat. des pédoncules cérébelleux et, en parti-
culier, du pédoncule cérébelleux moyen) ' ; 3° le noyau central
supérieur, au niveau du tiers supérieur de la protubérance, des
deux côtés du raphé, qui occupe presque toute l'étendue com-
posée entre le faisceau longitudinal postérieur et le ruban de
Reil. 1. Fibres qui doivent être considérées comme le probn-
gemeutimll1édiat des fibres de la moelle. De la substance blanche
spinale il n'y a que le faisceau radiculaire du cordon antérieur
et ce qui reste du cordon latéral qui passe immédiatement dans
la formation réticulaire. Ils se rendent aux olives supérieures
(fibres issues de la partie postérieure du faisceau radiculaire' du
cordon latéral), au noyau central de Roller (fibres du reste du
faisceau radiculaire du cordon latéral et du faisceau radiculaire
du cordon antérieur), au noyau réticulaire (les deux espèces de
faisceaux radiculaires mais surtout celui du cordon antérieur),
au noyau central supérieur (faisceau radiculaire du cordon anté-
rolatéral). Le système latéral des débris du cordon latéral se
rendent à son noyau. Quantau système dorsolatéral (aire externe
de la formation réticulaire), il contient des fibres qui servent de
liens entre les noyaux de la formation réticulaire et les grosses
olives et les masses grises du cerveau moyen et antérieur; on y
rencontre aussi des fibres longitudinales issues, les unes de la
couche limitantelatérale de substance grise spinale et peut-être
également du système latéral des restes du cordon antérieur,
les autres de la moelle allongée (trijumeau) glosso-pliaryngien,
pneumo-gastrique ? noyau du cordon latéral ? ), qui gagnent, avec
l'épanouissement radié de la calotte pédonculaire, la capsule in-
terne et de là les hémisphères cérébraux. Il faut noter qu'il
n'y a que le système latéro-dorsal de la formation réticulaire
qui renferme des fibres émanées des débris des cordons latéraux
et se rendant au cerveau moyen et au cerveau antérieur (tractus
sensitif ? ). II. Fibres par lesquelles les noyaux de la formation
réticulaire entrent en relation avec les organes situés plus haut.
Ce sont en particulier les connexions du noyau réticulaire teg-
menti pontis qui sont envisagées ici ; ce noyau reçoit des fibres
qui le mettent en communication avec les cellules du segment
antérieur (cérébelleux) de la protubérance; il envoie des trous-
seaux fibreux au tubercule quadrijumeau postérieur, aux masses
grises qui environnent le troisième' ventricule (peut-être à la
couche optique ? ), à la partie médian du ruban de Reil (Reichert,
de Gudden) : ces derniers tractus aboutissent peut-être finale-
ment par l'intermédiare de la substance noire de Semmering
au corps strié. P. K.
Voy. Archives de Neurologie.
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE. 107
VIII. De LI commissure posiérieure du cerveau, par L. de
D.\RSCII3NLTSCII. (11'ourol. I ? ztoulbl., 1885.)
La coloration d'encéphale de foetus d'un certain âge à l'aide de
la méthode de Weigert, montre que cette commissure renferme
divers systèmes de fibres; on devrait distinguer un plan inférieur l'
(ventral) qui de très bonne heure(foetus de vingt-huit centimètres
de long), contient des fibres à peu près parallèles ; ces fibres mé-
dianes (commissure vraie) descendent latéralement en côtoyant
le bord externe de la substance grise du canal encéphalo-médul-
laire, et en décrivant une courbe à convexité antérieure, jusqu'à
la région des faisceaux longitudinaux postérieurs ; elles se per-
dent alors, soit entre les fibres de ces derniers, soit dans un
groupe de petites cellules ganglionnaires, elles-mêmes en con-
vexion avec les grosses cellules de l'oculo-moteur commun. Le
groupe des petites cellules en question (noyau supérieur de l'ocu-
lo-moteur commun ? ) demeure en relation par plusieurs trousseaux
fibreux avec le réel noyau de l'oculo-moteur commun, avec les
faisceaux longitudinaux postérieurs, eux-mêmes traversés par des
fibres de l'oculo-moteur commun ; par conséquent le plan inférieur
de la commissure postérieure affecte des rapports intimes avec les
nerfs moteurs de l'oeil et, en particulier, avec le moteur oculaire
commun. Au-dessus de la commissure postérieure, les faisceaux lon-
gitudinaux postérieurs, réduits à de rarés fibres, reçoivent plus
haut encore des fibres issues du groupe des petites cellules qui
représentent une espèce de commissure nouvelle entrecroisée ( ? )
au sein de la substance grise du canal encéphalo-médullaire
(ville ventricule), où elles forment une convexité à direction infé-
rieure ; d'autres fibres passent, sur les côtés, dans l'anse du noyau
lenticulaire ou dans le corps de Luys. Il est impossible de confon-
dre les fibres du plan inférieur de la commissure postérieure avec
celles qui viennent de la substance blanche profonde du tubercule
quadrijumeau supérieur (antérieur), car ces dernières ne sont t
pourvues de myéline que bien après les premières. P. f.
IX. Contribution IL l'anatomie DES PÉDONCULES cérébelleux ET en
particulier des pédoncules cérébelleux moyens ; par W. Rech-
TEREW. (Neurol. Centralbl., 1885.)
Etude faite à l'aide de la méthode de Weigert sur des enfants à
terme âgés de quelques semaines. Il y a' lieu de distinguer
entre les fibres transverses de la protubérance qui appartiennent
aux pédoncules cérébelleux moyens deux parties manifestement
tout à fait différentes, d'après leur situation systématique. A
cet âge de la vie en effet il existe une couche dépourvue de myé-
108 revue d'anatomie le,'[' de PHYSIOLOGIE.
line ; c'est Itt moitié supérieure des fibres transverses de la protubé-
rance ou moitié cérébrale ; l'autre ne se compose que de fibres à
myélines c'est la moitié inférieure ou spinale des fibres transverses
de la protubérance. La première, située sur le côté du pédoncule
cérébelleux moyen, oblique par rapport à l'axe du corps, se dirige
d'avant en arrière; après son entrée dans le cervelet, elle occupe
d'abord la portion inférieure du segment externe de l'hémis-
phère correspondant, dans l'écorce duquel elle se termine en
arrière, à la base, et latéralement; une partie de ces fibres
gagne l'écorce de la face supérieure de l'organe, mais sans tou-
cher au vermis. La moitié spinale gagne, un peu en arrière de
l'autre, le plan médian du pédoncule cérébelleux moyen, se
trouve perpendiculaire à l'axe longitudinal de la protubérance,
et se rend d'arrière en avant à l'écorce de la face supérieure du
cervelet et du vermis. Le système spinal du pédoncule cérébel-
leux moyen est, de plus, relié de chaque côté aux deux moitiés
de la protubérance ou des masses grises de la région inférieure;
M. Bechlerew appelle à cet égard l'attention sur le noyau réticu-
laire tegmenti pontis de Flechsig ; les faisceaux raphéiques sont
chargés de transmettre aux nerfs moteurs de la moelle épinière
ou aux muscles correspondants les ordres du cervelet. Le cerve-
let communiquerait avec le cerveau par trois espèces de conduc-
teurs : 1° par plusieurs systèmes de fibres du pédoncule cérébel-
leux antérieures ou supérieures; 2° par le système cérébral du
pédoncule cérébelleux moyen ; 3° par le segment externe du pédon-
cule cérébelleux inférieur (corps restiforme) et notamment par
les fibres qui (entrecroisées) gagnent les olives ;des olives part de
chaque côté un trousseau compact de faisceaux (voie centrale de
la calotte de l'auteur) qui, traversant la protubérance dans toute
sa longueur, se rendent au cerveau. Toutes les fibres qui unissent
le cervelet au cerveau s'entrecroisent totalement; l'ensemble de
ces entrecroisements occupe toute l'étendue comprise entre le
tubercule quadrijumeau supérieur ;et l'extrémité inférieure du
bulbe. Si l'on attribue aux pédoncules cérébelleux supérieurs (et
inférieurs ? ) la fonction centripète de transmettre aux hémis-
phères cérébraux la sensation extérieure (notion de situation
de l'individu; sentiment de l'équilibre), le système cérébral du
pédoncule cérébelleux moyen, centi iftige,'devra transmettre les
commandements de l'écorce du cerveau aux hémisphères céré-
belleux, afin qu'ils pourvoient à l'harmonie du déplacement du
corps dans l'espace. P. K.
X. SUR LE segment interne DU CORPS RES'l'1FOR3fE ET la huitième
paire crânienne; par W. BRCHTEREW. (Neurol.Centralbl, 988a.)
Etude d'encéphales d'embryons. Le segment interne du corps
i REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE. 109
restiforme contient au moins deux faisceaux séparés. L'un se
garnit de myéline de très bonne heure (embryon ayant 28 à 30
centimètres de long), l'autre n'a de myéline que chez les em-
bryons de 38 centimètres de long). Ce dernier commence dans un
groupe de petites cellules nerveuses placées en arrière etau-dessus
du noyau de Deiters et peut-être aussi dans ce noyau; il monte en
côtoyant la paroi externe du quatrième ventricule, et se
dirige, après avoir abordé le cervelet, mi-partie entre les
fibres du pédoncule cérébelleux supérieur, mi-partie au-dessus
de celle-ci pour se perdre entre le noyau globuleux (Kuge
Il;ern) et le bouchon (Pfropf) du même côté; quelques trous-
seaux pénètrent le groupe des noyaux situés dans le toit
du quatrième ventricule (lobe central du cervelet); tel est
le faisceau spinal qui ne s'entrecroise jamais. Le faisceau
le plus précoce du faisceau cérébral placé en dehors et avant du
faisceau spinal, monte entre les petites cellules sus-mentionnées
et les fibres du segment externe du corps restiforme ; il vient des
olives supérieures du même côté et peut-être du côté opposé,
ainsi que de la région du noyau de Deiters, en un mot du bulbe,
et forme au-dessus des noyaux du toit du quatrième ventricule,
auxquels se rend un certain nombre de ces fibres, l'entrecroi-
sement de Meynert (grande commissure antérieure d'entrecroi-
sement du vermis de Stillingj ; quelques fibres pénètrent dans la
substance gélatineuse et la racine ascendante du trijumeau. Le
nerf auditif se compose, lui aussi, de deux segments : a, l'un
d'eux, pourvu de myéline chez des foetus de 23 centimètres de
long, se confond avec la racine postérieure des auteurs et comprend
l'ensemble des fibres situées au dedans du corps restiforme qui
pénètre dans l'organe central, il émane du nerf vestibulaire
(racine du nerf vestibulaire) ; - b, l'autre, qui n'a de myéline que
chez des foetus de 30 centimètres de long, se confond avec la
racine postérieure des auteurs, ce sont des fibres situées en dehors
des corps restiformes, émanant du nerf cochléaire (racine du nerf
cohcléaire). Aucune de ces racines n'a de communications directes
avec le cervelet. La racine du nerf vestibulaire se termine sur-
tout dans la substance grise qui occupe la paroi latérale du
quatrième ventricule (au-dessus du noyau de Deiters) et, en partie,
dans le bulbe, en suivant pendant une certaine étendue, les
fibres du segment interne du pédoncule cérébelleux inférieur.
La racine du nerf cochléaire se termine principalement dans le
noyau antérieur de l'acoustique (Meynert) ou noyau accessoire
de l'acoustique (Schwalbe), duquel émane le corps 'trapézoïde
(Flech'ig). P. K.
SOCIÉTÉS SAVANTES
SOCIÉTÉ DE PSYCHIATRIE ETMALADIES NERVEUSES
. DE BERLIN
Séance du 12 janvier 18851. - Présidence de M. VESTPriAL.
Réélection, par acclamation, du même bureau et du même co-
mité de réception.
M. 1lI0NAKOW. Contribution à l'anatomie des pyramides et du ru-
ban de Reil, avec présentation de pièces. - Il s'agit des rocher-
ches expérimentales sur des chats nouveaux nés par la méthode
de de Gudden 2. L'ablation du lobe pariétal droit et des faisceaux
blancs de la couronne rayonnante qui se rattachent aux pyra-
mides se traduit par l'absence totale des pyramides; mais, de-
puis l'entrecroisement de ces organes jusqu'à la moelle cervi-
cale, les cornes grises antérieures se montrent intactes.
Dégénérescence remarquable des cellules nerveuses qui occupent
l'angle compris entre les cornes postérieures et les cornes anté-
rieures (trousseaux gris des processus réticulaires), du côté op-
posé à la lésion. Cette dégénérescence est sur le chemin des al-
térations descendantes du faisceau pyramidal dans le cordon
latéral au niveau du segment supérieur de la moelle. La subs-
tance fondamentale au sein de laquelle sont plongées les cellules
qui nous occupent, est épaissie. Par conséquent, le faisceau py-
ramidal fournit des fibres aux cellules des processus réticulaires.
Il est donc possible que par l'intermédiaire des cellules en ques.
tion, les pyramides soient en rapport avec les cornes antérieures
grises; mais il est extrêmement probable que les pyramides ne
sont pas en rapport direct avec ces cornes. En ce qui concerne
le ruban de Reil et ses origines corticales (ruban de Reil cortical),
l'ablation du lobe pariétal entraîne la déchéance des trousseaux
de fibres depuis la mutilation corticale jusqu'à la partie infé-
rieure et postérieure de la couche optique partiellement atro-
1 Voy. AI'Clt. de Neurologie, t. X, p. 11G et suivantes
2 Id. t. VII, p. 125, t. V, p. 9t.
SOCIETES SAVANTES. lit 1
phiée et de là dans la même direction à travers la couche tÏn te 1'-
médiaire des olives (Flechsig), à travers les fibres circulaires qui
forment l'entrecroisement supérieur des pyramides de Meynert,
et, finalement, dans le noyau des cordons grêles du côté opposé.
Donc le lobe pariétal, au moyen de fibres fines médianes et laté-
rales du ruban de Reil, se rattache aux fibres circulaires et au
noyau des cordons grêles du côté opposé. Spitzka, de New-York,
a d'ailleurs rapporté que (The Medic. Record, t. XXVI, 15-18), dans
un cas de foyer hémorrhagique ancien, limité, dans la protubé-
rance à l'aire du ruban de Reil gauche, il existait une dégéné-
rescence secondaire, ascendante et descendante. La dégénéres-
cence s'étendait dans l'espèce jusqu'au noyau opposé des
faisceaux grêles; seulement, les altérations primitives étant plus
vastes que chez les chats mutilés, la destruction atteignait-elle
le' noyau des faisceaux de Burdach. Chez les animaux en expé-
rience, on n'a pu constater sûrement l'atrophie de ce dernier no-
yau. ,
M. Remak. Sur les rapports qui existent entre les phénomènes ten-
dineux et lu réaction dégénérative. - Mémoire publié à part'.
Séance du 9 mars 1883. Présidence DE il. WESTPHAL.
M. II%DLICII. Un cas de tétanos céphalique. Jeune garçon de
deux ans et quatre mois. Le 8 juin 1884, petite plaie au milieu
de la joue droite. Le 10, parésie faciale droite. Le 14, trismus.
Le 20, convulsions tétaniques. Le 21, légère torsion de la face à
gauche, surtout prononcée pendant les jeux de physionomie, le
côté droit demeurant lisse et immobile; fente palpébrale droite
plus étroite que celle de gauche; la commissure buccale gauche
reste seule un peu ouverte, tandis que celle de droite demeure
invariablement fermée; léger abaissement de la moitié gauche
de la lèvre inférieure; les ailes du nez, largement écartées, dé-
couvrent l'orifice des narines. Pourboire, l'enfant place la tasse
dans la gouttière gauche de sa commissure labiale et fait péné-
trer le liquide à travers ses dents serrées. Tout autre examen est
impossible. Pas de convulsions pharyngo-oesophagiennes. En
même temps que cette paralysie faciale droite, on note, outre
les phénomènes de contracture (1/2 droite de l'orbiculaire des
lèvres, des deux élévateurs et dilatateurs des ailes du nez),
de véritables accès tétaniques portant surtout sur le côté droit et
empiétant sur le bras et la jambe correspondants. Guérison com-
plète vers la fin d'août. Or, sur seize cas de tétanos céphalique
connus jusqu'ici, on relevé cinq guérisons et onze morls; toutes
1 Voy. Arch. de Neurologie, t. XI.
112 SOCIÉTÉS SAVANTES.
les guérisons se rattachent à l'enfance (2 ans et 4 mois 9 18
23 ans); les morts avaient de 28 52 ans.
Discussion :
M. REIiNHARDT en rapproche le fait qui vient d'être publié par
P. Wagner dans le Sclamirlt's Jahrbùçher, t. CCIV, 1885, p. 135.
M. ReMag. Comment expliquer l'existence de phénomènes spas-
modiques sur un territoire nerveux atteint de paralysie péri-
phérique ? Ce n'est d'ailleurs pas constant dans les cas qu'il a
fournis à GüLerbock; il y avait paralysie flasque complète du fa-
cial. Mais les mouvements associés se manifestent dans les para-
lysies faciales dès que la conductibilité volontaire s'est rétablie.
Il est difficile, lorsqu'on constate l'intégrité d'autres départements
nerveux, de penser à une lésion de noyaux du facial.
M. BERNHAItDT a publié, dans le Zeitschr. f. Klin. med., VU, 4,
un cas dans lequel, malgré l'existence d'une paralysie faciale
grave, il y a eu des convulsions. La plupart des observateurs,
en présence de tétanos de ce genre, regardent la paralysie fa-
ciale comme légère au point de vue électro-diagnostique. Du
reste, on a aussi signalé la participation d'autres domaines ner-
veux à l'affection ; aussi on a noté l'atteinte concomitante du tri-
jumeau. Néanmoins, on ne possède à ces questions aucune ré-
ponse satisfaisante.
M. UII1'HOFF. De la névrite optique dans la sclérose multiloculaire.
L'an dernier, Gnauck a fait une communication sur ce point 1.
Voici plusieurs cas nouveaux de sclérose en plaques, avec névrite
optique au niveau des papilles. Les développements de l'auteur
seront publiés par l'auteur sous forme de mémoire 2.
Discussion :
M. Hirschberg. 11 est rare que, dans la sclérose en plaques ou
dans une myélite chronique, on observe une vraie névrite op-
tique bien caractérisée; le plus souvent, il s'agit d'une simple dé-
coloration de la papille.
M UHTHOFF. Les cas présents ne donnent lieu à aucune espèce
de confusion diagnostique.
Séance du 11 mai 1883. Présidence de M. Westphal
M. WESTPHAL présente un malade atteint de sclérose latérale
amyotrophique avec paralysie bulbaire. - Homme de trente ans; à
la suite de refroidissements en 1882, aurait été affecté d'un allai-
1 Voy. Arch. de Neurologie, t. X, p. 229.
2 On les trouvera aux Revues analytiques. P. K.
SOCIÉTÉS SAVANTES. 113
blissement dans les jambes qui, quelques semaines plus tard,
s'accroissait et se compliquait de roideur dans les articulations
des membres inférieurs. Une soeur est sourde-muette. Examen :
extrémités inférieures froides, notamment les jambes et les pieds,
avec coloration rouge bleuâtre des orteils du bord externe du
pied, de la surface correspondant au tendon rotulien. Raideur
musculaire extrême, exagération excessive du phénomène du
genou ; tremblement podalique suscité par les procédés que l'on
sait, mais irrégulièrement; amaigrissement des membres infé-
rieurs sans atrophie, même partielle ; mouvements volontaires
limités, faibles et tremblés, l'extension du genou avait par exem-
ple plus de champ que la flexion. En se tenant au bord du lit, il fera
quelques pas et encore la démarche est-elle spasmodique. Inté-
grité de la sensibilité de la vessie, du rectum ; atrophie des mus-
cles des extrémités supérieures, surtout à la ceinture, de l'épaule
et des petits muscles des mains; profonde dépression au niveau
des espaces interosseux ; aplatissement des éminences thénar et
hypothénar ; les articulations de l'épaule sont seules rigides, mais
le patient ne peut se servir de ses mains, il faut l'alimenter ; inté-
grité de la sensibilité. Parole fortement nasonnée et si mal arti-
culée que le malade est incompréhensible ; ralentissement mar-
qué de l'émission ; troubles de la déglutition (régurgitation nasale
et toux); les aliments solides occasionnent des efforts spéciaux. La
langue ne peut être projetée au-delà des arcades dentaires et
n'est mue que lentement et défectueusement. Intégrité du facial.
Rire exagérément facile, pour le motif le plus futile, à raison
probablement d'une débilité mentale congéniale. Intégrité des
muscles des yeux. Aucun trouble électrique, excepté dans les
muscles tout à fait atrophiés qui sont inexcitables par les cou-
rants ; absence de réaction dégénérative ; cependant dans certains
muscles le courant galvanique engendre, à la fermeture de l'anode,
des contractions plus vigoureuses quoique normales. C'est bien à
M. Charcot que revient l'honneur de la découverte de ce type cli-
nique ; il ne manque ici que la rigidité des bras.
Aux questions de MM. AtENDEL et REMAK, M. WESTPHAL répond
que les réflexes tendineux des membres supérieurs ne présen-
taient pas une exagération considérable, et qu'il n'y avait aucune
espèce de réaction dégénérative, sauf la constatation de An S Z
un peu plus forte que Ka S Z '.
M. WESTPHAL présente un homme atteint d'une névrose consécutive
à un accident de chemin de fer. Absolument sain jusqu'au 14 jean-
vier 1885, jour de l'accident, il est violemment projeté contre la
'paroi d'un wagon, retombe à terre sans connaissance, est retiré
1 Voy. pour l'explication des termes : Charcot, Leçons sur les maladies
du système nerveux, III, f. I, p. 135.
Archives, t. XII. 8
11 le SOCIÉTÉS SAVANTES.
d'entre les débris de la voiture et revient à lui au bout de cinq à
sept minutes. Il ne présente à ce moment aucune blessure exté-
rieure, mais reste très agité. Insomnie, cauchemars, douleurs
céphaliques et rachidiennes, paresthésies de diverses sortes, sen-
sations d'engourdissement. Ce qui frappe l'observateur, ce sont : .'
l'angoisse, la dépression, les conceptions hypochondriaques, l'in-
somnie et les cauchemars pendant lesquels revient sans cesse
'histoire de l'accident ; pendant la journée, le malade est pris
d'accès d'angoisse immotivée ou à l'occasion d'un coup de sifflet
de la locomotive ; de temps à autre, inquiétude occasionnée par
des visions. Tel est l'état depuis le 17 février jusqu'à ce jour.
Constance égale des altérations de la sensibilité qui finit par dis-
paraître par tout le corps, y compris les muqueuses ; on ne trouve
bientôt plus de sensibilité tactile et douloureuse, qu'au pourtour
des narines, aux lèvres, à la demi inférieure du sternum, en deux
places symétriques de la face antérieure du bras, en un point
sis à gauche de l'espace compris entre les septième et neuvième
vertèbres dorsales, en deux endroits symétriques de la face in-
terne des cuisses au-dessns des articulations du genou, au pénis,
sur le scrotum. Champ visuel des deux yeux remarquablement
restreint pour le blanc et les couleurs. Suppression presque com-
plète de l'odorat et du goût ; diminution de l'acuité auditive, sur-
tout à droite ; intégrité du fond de l'oeil ; photophobie et
flammes devant les yeux. Sens musculaire atteint, mais il est en-
core impossible de nettement se prononcer sur ce sujet. Intégrité
des muscles des yeux. Affaiblissement très notable de la force
des mains, tremblements à l'occasion des mouvements voulus, et
même souvent au repos. Démarche circonspecte, mesurée, pénible;
se fatigue facilement. Dans le décubitus dorsal, faible, raideur
dans les membres, phénomènes tendineux normaux ; mouve-
ments actif faibles. M. Westphal termine en s'inscrivant contre
les critiques de M. Charcot à propos du mémoire de Thomsen
et Oppenheim 1.
M. Westphal présente enfin un patient atteint de névralgie de
la cinquième paire avec troubles trophiques du côté droit, qui dure
depuis plusieurs années ; les douleurs sont surtout prononcées
dans les branches maxillaires des nerfs ; et des troubles trophi-
ques portent sur la gencive et les dents des deux maxillaires.
Discussion : .'
M. Oppenheim combat les critiques de M. Charcot.
1 Voy. Archives de Neurologie, XL, p. 80 et 83, et Progrès médical,
1885. A propos de six cas d'hystérie chez l'homme.
'1\1. Oppenheim a publié depuis un mémoire spécial que l'on trouvera
aux Revues analytiques, P. K.
SOCIÉTÉS SAVANTES. 115
M. Hirschberg. Les feuilles destinées à consigner le champ
visuel ne représentent pas la véritable fonction de la rétine du
malade, qui arrive évidemment à s'orienter parfaitement; par
conséquent, possède une acuité visuelle relativement bonne.
M. SANDER, demande s'il y a eu dans l'espèce des états épilep-
toides. - Réponse négative.
M. REntAS. Y a-t-il sous roche une lésion organique ? Réponse
dubitative ; en tout cas, il s'agit non d'une hystérie, mais d'une
névrose spéciale (Westphal, Thomsen, Oppenheim).
M. Richter (de Dalledorf). De la dégénérescence secondaire des
trousseaux optiques, à la suite d'altération des lobes occipitaux.
Sera publié in-extenso 1.
Présentation et exposition du mécanisme du nouveau rhéostat a
bande de toile de Hecker 2. Avis favorable de M. BEI\ : <111ARDT.
Séance du 8 juin 1885. - Présidence de M. Westphal.
M. IlnscalsEnc. Présentation de malades : Sur le rapport qui
existe entre l'épicanthus congénitale et l'ophthalmoplégie 3.
M. WESTPHAL. Sur un cas remarquable de paralysie périodique des
quatre extrémités. Sera publié ailleurs*.
Discussion :
M. BENHARDT. N'y aurait-il pas eu des signes de fièvre intermit-
tente (tuméfaction de la rate, etc...). A-t-on essayé la quinine ?
Action possible du poison malarien analogue à celle du curare,
poison pouvant du reste appartenir à la classe des ptomaines
(Voy. les faits de Weber dans la thèse de Karting : Ueber einenF( ! 1l
von intermittirender paralysis spinalis. Halle. Anal. in. Centralbl.
d. medie. Wissensch.. 48î5, n° 428).
M. REIIAK. La littérature médicale renferme plusieurs exemples
de paralysie spinale intermittente semblables sans aucune altéra-
tion de l'excitabilité électrique. '
M. Senator. Ces paralysies malariennes se peuvent montrer
sans qu'il y ait eu auparavant d'accès de fièvre proprement dits.
M. `WESTPHAL. La maladie date de cinq ans. Il n'y a, pendant
tout ce temps, pas eu lieu de penser à la fièvre intermittente.
Des phénomènes passagers de ce genre ont été vus dans la sclé-
rose en plaques. L'intégrité de la sensibilité permet de rejeter
1 Nous analyserons alors. P. K.
2 Voy. Revues analytiques, in. Archives de Neurologie.
Id.
Nous l'analyserons alois.
116 SOCIÉTÉS SAVANTES.
l'opinion de W. Sander (convulsion des vaisseaux spinaux d'après
les expériences de Sten,on); d'ailleurs dans ces expériences, l'ex-
citabilité électrique disparaît quand survient la paralysie, et re-
paraît quand la circulation est rétablie.
M. REMAK présente une malade de trente ans, atteinte de névrite
généralisée avec altération électrique grave de divers territoires ne ? ,-
veux, y compris le facial qui, quoique demeuré indemne des deux
côtés, présentait les altérations électriques les plus graves. (Publié
in extenso dans la Neurol. Centralb. de 1885 '.)
Discussion :
M. OPPENHEIM. Peut-être s'agissait-il d'un alcoolique ? - Réponse
négative.- Et la sensibilité des nerfs ? Ils sont sensibles à la pres-
sion, mais on ne constate pas les sensations excentriques normales
que déchaîne d'ordinaire l'excitation électrique.
M. Jastrowitz communique un cas semblable.
Séance du 13 juillet 4 885. Présidence DE M. WESTPHAL.
M. LILIBVFELD. Un cas de névrite multiloculaire chez un alcoolique,
remarquable par un trouble de coordination extrême dans les
extrémités inférieures. En même temps, délire alcoolique et
donble paralysie de l'oculomoteur externe, de sorte qu'au début
le diagnostic était impossible. Plus tard se montrèrent les autres
signes d'une névrite multiloculaire, ainsi qu'une névrite optique
bilatérale. Actuellement, convalescence, il n'existe plus que de
l'ataxie des jambes et encore est-elle relativement faible.
Discussion :
M. REMAE. Dans le cas qu'il a communiqué à la dernière séance,
il y avait aussi névrite optique bilatérale sans trouble fonctionnel
considérable. Cela a déjà été signalé par Eichhorst, Struempell,
Loewenfeld.
M. l\IOEU. Remarques sur la réaction des pupilles - Cinq cents
paralytiques généraux observés en quatre ans se résument en :
SOCIETES SAVANTES. 117
pupille ne pas se contracter pendant l'acte de la convergence;
encore plus rare est la paralysie du muscle accommodateur.
Parmi les malades observés pendant plusieurs années, qui, à
raison de la rigidité des pupilles à la lumière, étaient soupçonnés
de paralysie générale, la moitié d'entre eux devint tabétique ou
paralytique général. Si l'on fait abstraction des malades affectés
de lésion cérébrale grossière, on rencontre la rigidité, l'immo-
bilité des pupilles à la lumière dans la syphilis et ce symptôme
se combine de la manière la plus variée quant au temps avec
d'autres paralysies de l'uculo-moteur commun, ou se rencontre
seul. L'immobilité des pupilles à l'égard de l'agent lumineux,
incomplète ou passagère, se rencontre tout à fait isolément dans
l'alcoolisme. La proportion de ce symptôme chez les aliénés non
paralytiques, chez les tabétiques ou dans les cas de lésion céré-
brale, est tout au plus de 1,4 p. 100 et probablement de moins.
Bien que la recherche des fibres qui occupent la paroi ventricu-
laire ait conduit à des résultats douteux, M. Moeli, se basant sur
l'observation d'une tumeur qui occupait le troisième ventricule,
et tenant compte des expériences de Christiani, Bechterew,
Gudden, tient pour probable que l'inertie des pupilles en pré-
sence de la lumière, se rattache à des altérations ventriculaires.
Discussion :
M. Thomsen a examiné à ce point de vue mil sept cent aliénés.
Sur trois cent soixante-six paralytiques généraux, 47 p. 100 pré-
sentaient l'immobilité de la pupille en présence des rayons lumi-
neux. Sur cent quatre-vingt-neuf épileptiques, la réaction de la
pupille se montra constante; un seul d'entre eux présenta une
rigidité, une immobilité pupillaire passagère pendant trente
heures. Sur deux cent quatre-vingt-dix-huit cas de folie systéma-
tique, quatre malades étaient allectés d'immobilité de la pupille
dans les mêmes conditions : un d'entre eux était soupçonné de
tabes, l'autre avait eu antérieurement la syphilis. Sur six cent
soixante-dix alcooliques, on rencontre chez quatorze d'entre eux
l'inertie immobile des pupilles. Au total, sur trois ceut soixante-
six paralytiques généraux, 47 p. 100 offraient le symptôme en
question, et, sur mil trois cent vingt-cinq aliénés non paralytiques,
29, c'est-à-dire 2,1 p. 100.
M. SIEMEIlL111G.lixamen de sept cent femmes aliénés dont quatre-
vingt-uue paralytiques générales. Chez les paralytiques généraux;
inertie pupillaire à la lumière en quarante quatre cas, soit 54
3 p. 100. Chez les autres aliénées, dix cas d'inertie pupillaire
portant sur trois démences séniles, trois labétiques, deux épilep-
tiques, un syphilis de la base, une folie systématique, soit une
proportion de 0,6 p. 100.
M. Oppenheim. Dans la section des maladies nerveuses l'inertie
118 SOCIÉTÉS SAVANTES.
pupillaire se rencontre de préférence chez les tabétiques et, en
particulier, chez les cérébraux syphilitiques : c'est peut-être le seul
symptôme de l'affection. Il l'a observé deux fois à la suite de
traumatisme céphalique et de commotion cérébro-spinale. Un
malade atteint de lésion cornéenne présentait une vive exagéra-
tion de la réaction pupillaire, due probablement à une hyperes-
thésie notable de la rétine.
M. Uhthoff. Il ne saurait y avoir d'inertie pupillaire trauma-
tique sans luxation cristallinienne; elle est généralement unila-
térale. Sur dix mille ophthalmiques, il a vu deux fois de l'inertie
pupillaire dans le cas d'arrêt de formation congénitale de l'écran
irien, et une fois chez un enfant atteint de syphilis héréditaire.
Il importe du reste, de bien distinguer l'inertie pupillaire de la
paralysie de l'accommodateur, car elles peuvent exister ou man-
quer indépendamment l'une de l'autre. L'inertie pupillaire se
rencontre de préférence chez les spinaux; quand l'accommoda-
tion fait aussi défaut, il s'agit généralement de syphilitiques.
M. JASTROWITZ, En dehors de l'alcool, d'autres poisons peuvent
nuire à la réaction des pupilles : voyez plutôt les morphino-
manes.
M. SANDER. Observation dans laquelle une tumeur développée
dans le segment postérieur du troisième ventricule n'avait dé-
truit que d'un côté la substance grise de la cavité : l'oeil corres-
pondant au côté lésé présentait de l'ineitie pupillaire. A ce pro-
pos, M. mati a-t-il toujours vu l'inertie pupillaire être bilatérale ?
Quelles sont les dimensions des pupilles observées par lui dans
ses recherches ? Comment se présentait le phénomène dans le
cas des pupilles inégales ? Quel était l'âge des individus examinés ?
M. MOELI. Dans 10 p. 100 des cas qui lui appartiennent, il y avait
des ditrérences entre les deux côtés. 11 est rare qu'une pupille ait
bien réagi quand l'autre demeurait inerte. Généralement, quand
une des pupilles réagissait mal, l'autre se montrait paresseuse.
Les instillations de cocaïne n'ont, malgré la dilatation obtenue,
exercé aucune action sur l'inertie pupillaire. Une pupille très
resserrée ne peut généralement plus se bien contracter, mais le
fait est loin d'être fréquent. Il y a myosis pour un diamètre pu-
pillaire de deux millimètres et au-dessous.
Séance du 9 novembre 1885. Présidence de M. Westphal.
M. Uhthoff présente une malade qui après avoir eu une névrite
du trijumeau droit (rameaux ophthalmique et maxillaire supérieur),
avec atteinte du nerf lacrymal, a conservé de 1'tici,iiiie lacrymale.
L'inflammation a commencé par l'incisive externe supérieure
SOCIÉTÉS SAVANTES. 119
droite, qu'il fallut enlever, et s'est propagée de bas en haut en
occasionnant déficientes douleurs dans les deux rameaux sus-
mentionnés (joue, front, oeil); puis, assez brusquement, la sécré-
tion lacrymale s'est tarie du même côté. Sensibilité très grande à
la pression du nerf sous-orbitaire à son point d'émergence, pen-
dant longtemps. Troubles de la sensibilité dans le domaine de la
branche maxillaire supérieure; ils rétrocédèrent du reste tandis
que s'installait à demeure l'acrinie lacrymale.
Discussion :
M. Oppenheim a vu un fait dans lequel, à la suite d'une paralysie
de l'oculomoteur commun et du trijumeau du côté droit, impu-
table à la syphilis, la malade ne pouvait plus pleurer qu'avec l'oeil
gauche; mais, en dehors des émotions, l'oeil gauche, sain demeu-
rait invariablement sec, alors que l'oeil droit était en permanence
lubréfié par les larmes. ,
M. Remak. Rappelons-nous l'hypersécrétion lacrymale unilaté-
rale dans les névralgies de la maxillaire supérieure du trijumeau.
M. 11RAUSE. Des troubles fonctionnels du larynx dans les affec-
tions du système nerveux central. Examen à ce point de vue plus
de 200 malades à la clinique neuropsychiatrique de Berlin. On
rencontre ces troubles dans la syphilis spinale, la chorée, les
tumeurs cérébrales, l'hémiplégie, la paralysie saturnine, l'hys-
téro-épilepsie, l'épilepsie, l'aphasie, le railwa3·-spine, la para-
lysie pseudo-bulbaire, la paralysie générale, la sclérose en plaques,
la paralysie bulbaire et le tabes. Dans la chorée, il s'agit presque
toujours d'un tremblement des cordes vocales, faiblement ten-
dues et d'une parésie des muscles des adducteurs ; les muscles du
larynx ne sont pas affectés de mouvements choréiques.
Syphilis spinale (un cas), immobilité de la corde vocale gauche,
près de la ligne médiane, puis elle reprend ses fonctions ainsi que
les extrémités du même côté, sous 1 influence des onctions mer-
curielles. - Paralysie saturnine : six cas sans altération ; un cas
caractérisé par une paralysie de la corde vocale gauche ; un autre
fait, dans lequel on constate un tremblement marqué des cordes
vocales et de la parésie des adducteurs. Tumeur cérébrale : un
cas de gliosarcome du corps strié et du lobe temporal gauches;
paralysie de la moitié droite du larynx; bien qu'on ne puisse le
faire servir à une localisation exacte, ce fait, de concert avec une
observation de paralysie pseudo-bulbaire, qui sera mentionnée'
plus tard, confirme l'existence d'un centre cerébial laryngien.
Hystérie, 7eystéro-éPilepsie, épilepsie : hémianesthésie de la mu-
queuse nasale, du voile du palais, du pharynx, du larynx, de la
trachée (généralement à gauche, de même que pour le reste du
corps ; en un cas, inversion de l'action des cordes vocales qui se
rapprochent pendant l'inspiration, tandis que, pendant l'expira-
120 SOCIÉTÉS SAVANTES.
tion et la phonation, elles s'écartent très largement. Railway-
spine : deux cas; anesthésie très étendue de la peau et de la mu-
queuse des voies aériennes supérieures, à l'exception d'un très
petit nombre d'endroits irrégulièrement disposés. Pseudo-
paralysie bulbaire ; un cas;-l'autopsie démontra plusieurs foyers
disséminés dans la substance blanche du cerveau; on avait
pendant la vie constaté une parésie très prononcée des adduc-
teurs d e la corde vocale droite ; la corde vocale gauche était tota-
lement paralysée, de même que les extrémités de ce côté.
Aphasie : 4 cas, un des malades observé pendant cinq semaines
présentait des troubles de la motilité du larynx, aggravation crois-
sante, parésie progressive des muscles delà glotte, d'où phonation
remarquablement pénible, voix grave, modification du timbre
(grosse). Paralysie générale, la parole nasonnée a paru sous ladépen-
dance du voile du palais ; la voix grave a semblé dépendre de la
flaccidité et de l'atrophie des rubans vocaux, tandis que les muscles
respirateurs, continuant à fonctionner par voie réflexe, conser-
vent leur aptitude pleine et entière. - Sclérose en plaques : état
semblable. Paralysie bulbaire progressive; fréquemment,paré-
sies unilatérales, ou paralysies totales du voile du palais, des cons-
tricteurs pharyngiens, de la charpente musculaire du larynx,
troubles de la sensibilité, parfois aussi des cordes vocales sont
d'un côté ou des deux fixées, immobiles au milieu du larynx,
c'est là ce qu'on appelle la paralysie postérieure due, d'après les
expériences de Krause, dans un grand nombre de cas, à une
contracture spasmodique des adducteurs des cordes vocales ; ce
mécanisme tout récemment admis par A. Koehler, erliardt et
Michael, a pour lui un fait dans lequel à la suite d'une infection
syphilitique, dans le cours d'une paralysie bulbaire, survint sou-
dain une sensation de constriction de la gorge qui laissa après
elle une dyspnée permanente ; les cordes vocales présentaient une
tension telle, une fixité si solide, près de la ligne médiane, que
le courant phonétique expiratoire faisait entrer en vibration non
les deux rubans vocaux, mais les cordes vocales supérieures : à
l'autopsie, on trouva une adhérence intime et terme de la dure-
mère a l'arachnoïde, au niveau de la partie inférieure du plancher
du quatrième ventricule. Le diagnostic ne pouvait hésiter qu'entre
une contracture spasmodique ou uue contracture réflexe consé-
cutive à une lésion du noau du laryngé supérieur. Dans un
autre cas, la dyspnée se montrait subite en pleine rue, et l'on de-
couvrait une contracture bilatérale des adducteurs. - Tabès :
sur trente-trois cas de trouble fonctionnel grossier, l'orateur à
observé 13 parésies ou paralysies de toute espèce qui parfois
viennent, s'en vont, reviennent; souvent il n'existe aucun trouble
grossier de la voix. Voici, par exemple, un professeur tabétique
qui, malgré la paralysie d'une corde vocale put continuer à en-
SOCIÉTÉS SAVANTES. 121
seigner le chant. On est cependant frappé, en d'autres circons-
tances de l'occurrence d'une véritable ataxie des cordes vocales ;
mouvements spasmodiques de ces rubans qui occupent une situa-
tion intermédiaire à l'adduction et à l'inspiration (comparaison
avec le nystagmus ataxique de Friedreich). En trois cas de crises
laryngées chez des tabétiques, l'orateur a constaté des phénomènes
d'excitation spéciaux du larynx; en chaque cas, il existait une
contracture bilatérale des adducteurs des cordes vocales ; les
accès diminuèrent prodigieusement de nombre et d'intensité et
cessèrent par intervalles, tout à fait après le badigeonnage à la
cocaïne (cas de la clinique de Gerhardt). Si l'on rapproche l'ob-
servation des phénomènes d'excitation avec contracture des cordes
vocales, du résultat obtenu par l'électrisation du laryngé supérieur
qui, de même que les excitants mécaniques ou chimiques des
branches terminales du nerf en question dans la muqueuse laryn-
gienne, produit, par voie rétlexe, la fermeture de la glotte, si
l'on ajoute que les accès layngo-pasmodiques s'arrêtent par
application de cocaïne sur le larynx, et cessent totalement par
intervalles, on conclura tout naturellement que les accès sus-men-
tionnés résultent d'une excitation. Comme on constate dans l'es-
pèce une dégénérescence du nerf vague, on est contraint de for-
muler l'opinion que les crises laryngées émanent d'une contrac-
ture réflexe des adducteurs des cordes vocales, dueà une excitation
dégénérative du laryngé supérieur, contracture susceptible d'être
augmentée à l'occasion par des excitations périphériques ou
centrales et de se transformer en un spasme complet obturant
hermétiquement la glotte.
Discussion :
M. Thomsen. Dans un des faits de paralysie générale visés par
l'orateur il y avait eu, bien avant l'apparition de troubles psychi-
ques, des accès de dyspnée et des parésies de la charpente mus-
culaire du larynx.
il. lteuae combat l'upinion de il. Krause, relative à la tension
unilatérale des adducteurs, dans les processus centraux qui se
traduisent par des accès. La contracture serait, si l'on veut, se-
condaire, à peu près comme dans le pied-bot paralytique, en ma-
tière de paralysie spinale infantile ou de déchet congénital de
certains territoires de la moelle. (Voy. le cas de liemak : spina
bilida chez un enfant.)
M. 11R : 1USE. Je ne nie pas, d'une manière générale, l'existence
d'une paralysie postérieure centrale ou périphérique. Maïs la pa-
ralysie partielle du noyau du nerf vago-accessoire, acceptable
dans certains cas, n'explique ni la soudaineté de la contracture
des adducteurs, ni la constance des phénomènes. Celte constance,
au contraire, s'éclaire par la conception d'une lésion portant
122 SOCIÉTÉS SAVANTES.
uniformément sur toutes les fibres radiculaires et l'agent élec-
trique montre que les adducteurs l'emportent en tant que groupe
musculaire le plus puissant.
M. Oppenheim. Contribution à la pathologie de la névrite multi-
loculaire. - Préparation à l'appui. Il s'agit d'un cas de paralysie
atrophique des extrémités inférieures chez un homme de qua-
rante ans; cinq à six mois avant la mort, faiblesse dans les jam-
bes, avec douleurs lancinantes et paresthésies. L'examen décèle
de la tuberculose pulmonaire, de laparésie atrophique des mem-
bres inférieurs, des altérations électro-musculaires, l'absence du
phénomène du genou, de légers troubles de la sensibilité, l'inté-
grité de la vessie et du rectum. Au microscope, il existe une névrite
dégénérative, une atrophie musculaire, portant sur un grand
nombre de nerfs des membres inférieurs, une lésion circonscrite
de la corne antérieure droite, de la moelle lombaire supérieure.
Les lésions étendues de la périphérie ne pouvaient dépendre de
la moelle épinière, lésions centrales et périphériques provenaient
du même agent morbide. En même temps, l'orateur communique
plusieurs observations de paralysie alcoolique, les unes amélio-
rées, les autres guéries. Quoique les observations qu'on possède
jusqu'ici prouvent que l'inflammation ou la dégénérescence des
nerfs périphériques représente le substratum anatomique fonda-
mental du tableau morbide, on note fréquemment aussi des
symptômes qui indiquent une lésion centrale, et, dans un cas
donné, il est difficile d'exclure ou de diagnostiquer l'existence si-
multanée d'une lésion centrale.
Séance du 4 décembre 885. - Présidence DE M. WESTPHAL.
Discussion relative à la communication de M. Oppenheim.
M. SrEIERLING. Observation d'une alcoolique de trente-quatre
ans, atteinte de délire, de réaction paresseuse des pupilles, de
parésie des membres inférieurs; elle ne peut marcherqu'en s'ap-
puyant, à la condition d'élever anormalement les pieds et de pié-
tiner. Grande sensibilité au contact de la peau et des muscles.
Mort en état de collapsus. Les viscères sont parsemées de lésions
caractéristiques de l'alcoolisme chronique; intégrité de la moelle,
des racines antérieures et postérieures. Dégénérescence des
nerfs crural, sciatique. surtout dans leurs branches musculaires.
Multiplication extrêmement nette des noyaux des fibrilles mus-
culaires (droit antérieur de la cuisse, péroniers). Le processus
parait avoir débuté par les branches nerveuses périphériques.
M. Bernhardt. Les processus poliomyélitiques récents se dis-
tinguent très nettement des foyers anciens. Ce qui est remar-
quable dans le cas d'Oppenheim, c'est l'apparition finale de la
SOCIÉTÉS SAVANTES. 123
tuberculose (v. Joffroy). Peut-être y a : t-il, comme dans l'affection
semblable du kakké japonais, des micro-organismes (constata-
tion récente) ? Il serait bien difficile de rattacher le ralentisse-
ment du poids qu'il signalait au nerf vague; on eût dû, s'il en
était ainsi, trouver de l'accélération du poids.
M. Revue. On a sans doute confondu, jadis, souvent tabès et
polynévrite. Le diagnostic différentiel réside dans l'examen élec-
trique ; la réaction dégénérative ne survient jamais dans le tabes,
mais elle peut être très peu mai quée dans la névrite, notamment
dans la névrite alcoolique et ne consister que dans la lenteur de
n S Z L'orateur renvoie à son travail sur les rapports entre
les phénomènes tendineux et la réaction dégénérative 2.
M. llloer.t. Importance du mode de recherche de Jendrassik sur le
phénomène du genou ? - Son procédé permet de distinguer sa
névrite du tabes. Dans les premières atfections, un peut en l'em-
ployant réveiller l'apparition du réflexe tendineux rotulien inva-
riablement absent dans le tabes.
M. REMAE Joue le procédé de Jendrassik, mais il croit, contrai-
rement à ce dernier, que c'est la tension de la charpente muscu-
laire de la jambe occasionnée par la situation du malade qui
rend plus facile la provocation du phénomène du genou. D'ail-
leurs, dans le tabès pas plus que dans la névrite du crural, tl n'a
pu faire reparaître le réflexe rotulien.
M. QPPENHEIÙf. Les vieux foyers de poliomyélite qui datent de
plu,ieurs mois se traduisent par un tableau clinique exactement
semblable à celui de la névrite. Quant au pouls, il a insisté égale-
ment sur son accélération dans quelques cas; du reste, même au
début, de la névrite, on peut avoir affaire à des accidents d'exci-
tation du pneumo-gastrique qui entraînent du ralentissement du
pouls. Le réflexe rotulien a fait défaut dans ces observations,
sans qu'on ait constaté de troubles marqués dans les phénomènes
éleclio-musculaires du triceps fémoral. Jamais par le procédé
de Jendrassik, il n'a pu faire teveuir le phénomène du genou
absent, lorsque l'alcoolisme durait depuis un temps assez long.
M. Liman parle en détail du cas de Anna Rolher (procès Graef);
il montre que cette personne est une épileptique ou une bystero-
épileptique débile au point de vue mental qui n'est pas en état
de discerner la culpabilité de son parjure. Ce n'est pas une simu-
latrice. La simulation est d'ailleurs rare, car, d'après les observa-
teurs français, dans un espace de temps de cinquante années, sur
1 Voy. la note de la page t13.
2 Voy. Archives le Neurologie : lipvues analytiques.
M.
124 BIBLIOGRAPHIE.
43,000 prisonniers, il n'y a eu qu'un simulateur; on a, en revan-
che, observé 264 aliénés..
Discussion : .
M. FALK. Mais plusieurs des réponses de Rother sont en faveur
de la simulation, qui, du reste, n'exclut pas le diagnostic de débi-
lité mentale simultanée.
M. LmAN. Les réponses absurdes qui rappellent celles de simu-
lateur lui ont été faites à lui comme à d'autres experts.
M. Thomsen présente un homme de trente ans affecté d'anes-
thésie complète et persistante à la tête, aux mains, aux pieds,
atteinte des organes des sens. Au début même, et passagèrement
le sens musculaire et la perception des couleurs étaient affectés.
Ce malade fut séquestré pour incohérence hallucinatoire; il se
calma bientôt; plus tard il ne présenta plus qu'une légère
démence avec timidité sauvage. Bien portant jusqu'en 1881 ; c'est
alors qu'une blessure céphalique grave aboutit à une excitabilité
psychique et nerveuse; affaiblissement mental et nerveux. Aucune
convulsion, mais accès de céphalalgie. Depuis longtemps il sait
qu'il ne sent plus sa tête et qu'il a perdu le goût et l'odorat.
(Arch. f. Psych., XVII, 1.) P. KËRAVAL.
BIBLIOGRAPHIE
IF
1. Sur un cas de destruction du lobe temporal gauche pur un néo-
plasme sans aphasie, chez un gaucher; par C. WESTPHAL (Separat-
a6drucJ< aus der Berlin. klin. Wochen : ,clt1', n° 49, 488f).
Tout l'intérêt de cette observation git précisément dans l'habi-
tude du malade de se servir de la main gauche, habitude qui en
faisait un droitier du cerveau. C'est pourquoi la lésion siégeant à
gauche ne détermina pas de symptômes; elle en eût provoqué, si
elle eût siégé à droite. ' P. K.
11. Nature et traitement de la chorée; par Saric
(Thèse de Paris, 1885.)
Dans ce travail, l'auteur, qui s'est inspiré d'une leçon de
M. Joffroy, montre que les arguments qu'on a invoqués pour
faire de la chorée une affection rhumatismale sont insuffisants
BIBLIOGRAPHIE. 125
Les accidents rhumatismaux ont souvent manqué chez les cho-
réiques, c'est un fait qui n'est plus à démontrer : il. Bouchot, par
exemple, a depuis longtemps cité des cas où la névrose avait
succédé à un traumatisme. Bien que cette affection ne soit pas
exclusive aux jeunes gens, on peut d'une manière générale accepter
la dénomination de névrose de croissance adoptée par ? I. Jofl'roy.
M. Saric fait remarquer avec juste raison que le domaine de la
chorée se rétrécit à mesure que l'on connaît mieux l'hystérie; il se
rétrécira encore, croyons-nous, quand on connaîtra mieux l'hysté-
rie infantile : on retrouve, en effet, souvent chez les enfants mâles
et femelles atteints de chorée un certain nombre de stigmates
permanents de l'hystérie et en particulier l'anesthésie sensitivo-
sensorielle ; les zones douloureuses céphaliques, hypogastriques,
rachidiennes, etc. M. Saric signale d'après il. Jolfroy la fréquence
de l'abolition des réflexes rotuliens dans la chorée. Rapprochant
ce phénomène du signe de Westphal dans l'ataxie, on arrive à
comparer les arthropatliies de la chorée aux arthropathies de
l'ataxie au point de vue de leur pathogénie. C'est une déduction
qui mériterait de s'appuyer sur des données plus certaines.
cB. F.
III. De la névralgie des plexus lombaire et sacré, d'origine trauma-
tique (tour de reins); par P. TRICARD. (Thèse, Bordeaux 1886.)
M. Tricard, se basant sur l'existence d'irradiations ilio-fémorales
de la douleur, admet avec le professeur Nielly que l'affection vul-
gairement appelée tour de reins est une névralgie des plexus
lombaire et sacré et non une rupture musculaire. L'origine de
l'affection serait le pincement et le tiraillement auxquels sont
soumises les branches nerveuses dans les contractures exagérées
du psoas et des muscles des gouttières vertébrales. Cu. F.
IV. Des rémissions dans le cours de la paralysie générale ;]
par J.-R. Larroque. (Thèse, 1886.)
L'histoire des rémissions dans la paralysie générale date de
Boyle, et, depuis lors, elle a préoccupé un grand nombre de mé-
decins. Cette thèse, faite à Charenton sous la direction de M. Chris-
tian, comprend un résumé assez détaillé de la question, et aurait
constitué un document très intéressant si les vingt-six observa-
tions qu'elle contient avaient été plus explicites. Elle paraît ex-
primer l'opinion de M. Christian, qui s'est lui-même préoccupé de
ce point de clinique; elle mérite donc que nous donnions un
aperçu de ses conclusions.
Les rémissions de la paralysie générale dont l'existence ne peut
126 bibliographie.
être mise en doute n'ont pa jusqu'à présent été mises en rapport
avec un état anatomique quelconque. Ces rémissions qui s'obser-
vent environ une fois sur huit malades différent des rémissions
des autres maladies mentales; elles sont complètes ou incom-
plètes : ces dernières sont les plus fréquentes. Elles s'observent
dans toutes les formes de paralysie générale, mais principale-
ment dans les formes expansives, et au début. Elles durent en
général de six mois à un an, quelquefois deux ou trois ans; elles
s'effectuent lentement, et le plus souvent et plus complètement à
la suite d'affections incidente* et en particulier à la suite de lé-
sions suppuratives médicales ou chirurgicales dans les rémissions
incomplètes; les troubles qui persistent le plus souvent sont
l'embarras de la parole, les troubles pupillaires; la débilité men-
tale. - Les rémissions sont plus fréquentes chez les héréditaires,
et souvent elles se répètent chez le même malade sans que des
affections intercurrentes ou toute autre cause semblent jouer un
rôle dans leur production. On les voit surtout dans la paralysie
générale à double forme dont elles reculent le terme fatal. Elles
sont très fréquentes encore dans les pseudo-paralysies générales
alcooliques; il en est de même dans les pseudo-paralysies géné-
rales syphilitiques ou saturnines que l'auteur confond d'ailleurs avec
la paralysie générale vraie. - Chez les femmes qui présentent sou-
vent les formes dépressives, les rémissions sont plus rares. - Il
n'y a guère que les révulsions prolongées qui, en imitant le pro-
cédé de la nature (suppurations) aient quelquefois paru provoquer
des rémissions au début. Cil. F.
V. Contribution à l'étiologie de la chorée; par SAGUET. (Thèse, 1885.)
L'auteur résume lui-même sa thèse dans cette proposition
unique : « La chorée peut être consécutive aux maladies infec-
tieuses, un grand nombre d'observations le démontrent. » Si on
prend cette conclusion à la lettre. on sera de l'avis de l'auteur
M. S...; souvent la chorée se manifeste à la suite des maladies in-
fectieuses. L'auteur aurait pu consulter avec fruit sur l'étiologie
et la physiologie pathologique de la chorée les thèses des deux
élèves de M. le professeur Pierret, de Lyon (Foucherand, 1883;
.Sage, 4881). CH. F.
VI. De l'amblyopie liée à l'hémianesthésie et spécialement de l'am-
blyopie hystérique; par A.-F. Hrxma. (Thèse, 1886).
De ce travail fait à la Salpêtrière dans le service de ni. Charcot
et sous la direction de M. Parinaud, l'auteur tire les conclusions
suivantes :
BIBLIOGRAPHIE. 127
L'amblyopie hystérique est caractérisée :
Par le rétrécissement du champ visuel; par une dyschroma-
topsie spéciale qui n'est pas constante; par l'intégrité relative de
l'acuité visuelle; par la coexistence habituelle de troubles de l'ac-
commodation et de la polyopie monoculaire; par l'absence de
lésions du fond de l'oeil.
Cette amblyopie n'est pas absolument propre à l'hystérie; on
la rencontre dans toutes les affections qui intéressent l'appareil
sensitif dans son ensemble, particulièrement sous forme d'hémia-
nesthésie, mais elle n'en reste pas moins un symptôme de première
importance pour le diagnostic de l'hystérie. Dans l'épilepsie pure,
d'après nos recherches, elle est très rare, et il est probable que
plusieurs états nerveux où on l'a signalée doivent être rattachés
à l'hystérie.
Cette amblyopie. comme l'hémianesthésie dont elle fait partie,
doit être rapportée à une lésion de l'hémisphère opposé. Elle .
démontre qu'il y a un rapport croisé entre chaque nerf optique
dans sa totalité et l'hémisphère.
D'autre part, il y a des faits qui prouvent qu'une lésion de
l'hémisphère peut produire l'hémiopie. Il faut en conclure que
les rapports des nerfs optiques avec les centres visuels cérébraux
sont plus complexes qu'on ne l'a cru jusqu'ici. CH. F.
VII. Recherches expérimentales et cliniques sur l'action somnifère de
la boldo-glueine ; par R. Juranville. (Thèse, 1885).
D'après les expériences de MM. Laborde et Juranville, la boldo-
glucine possède une action hypnotique incontestable. Ce sommeil
peut être rapproché du sommeil naturel : 4° parce qu'il en a le
calme, l'absence à peu près complète d'anesthésie, etc.; 2° au
point de vue de l'état de la respiration, qui se régularise en
même temps que le nombre des inspirations diminue légèrement ;
3° au point de vue des échanges nutrilifs dont la diminution est
révélée par une diminution notable dans la quantité d'acide car-
bonique exhalé; 4° au point de vue de l'état de la circulation
encéphalique, le cerveau étant moins congestionné qu'à l'état de
veille, ce qui semble indiquer un apport moindre de sang artériel
dans la masse encéphalique. D'autre part, les résultats de l'expé-
rimentation physiologique ont été confirmés par l'observation
clinique : le boldo, administré à des malades agités, ne dormant
pas depuis un temps plus ou moins long (aliénés), a toujours
amené le sommeil.
Enfin nous rappellerons que, outre celte étude de l'action som-
nifère du boldo, qui constitue, à proprement parler, ce travail,
on y trouve une étude de l'état et les variations de la pression
128 VARIA.
sanguine sous l'influence de cette substance. Quant à l'action
physiologique générale, elle a été exposée d'après les recherches
des expérimentateurs qui se sont occupés précédemment du boldo.
cB. F.
VIII. Contributions à l'étude de l'influence des anesthésiques
sur la nutrition; par Drapier. (Thèse, 1886).
L'expérience de Cl. Bernard, de P. Bert et d'Arloing ont montré
que les anesthésiques ont une action marquée sur les phénomènes
de la nutrition; ils ralentissent les phénomènes d'oxydation :
1° les gaz du sang sont plus riches en oxygène et moins riches
en acide carbonique, dans la période d'état du sommeil anesthé-
sique ; 2° la quantité d'acide carbonique exhalée, mesure indi-
recte de l'intensité des combustions, est, à la même période, en
décroissance sensible; 3° les recherches cliniques montrent que
le taux de l'urée, bien que subissant des variations considérables,
parait baisser après l'action des anesthésiques. Chez les malades
soumis à ces agents, il se produit quelquefois l'hématurie, l'albu-
minurie et la glycosurie ; aussi doit-on être très réservé sur l'em-
ploi des anesthésiques chez les sujets atteints d'affections rénales
ou de diabète. CE. F.
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE
Du sommeil et des médicaments hypnotiques proprement dits,
par J. Pineau. (Thèse de Paris, 1885.)
Contribution à l'étude des accidents laryngés chez les ataxiques,
par Munschina. (Thèse de Paris. 1885.)
Etude sur les troubles sensitifs dans la tuberculose aigue, par
Marguerite. (Thèse de Paris, 1885.)
Contribution à l'étude des paraplégies par troubles de circulation de
la moelle, par Meunier. (Thèse de Paris, 1885.)
Etudes sur le ptosis congénital, par MITRY. (Thèse de Paris, 1885.)
VARIA
Codes pour LES infirmiers d'asiles d'aliénés; par SHULTTEWORTH,
médecin en chef de l'asile royal Albert, Lancastre.
On a beaucoup parlé ces derniers temps, tant dans ce journal
qu'ailleurs, de l'enseignement systématique des infirmiers d'asile.
VARIA 129
Il m'a semblé, l'automne dernier, qu'il serait utile pour tout le
monde de publier ce que nous entendons, dans cet asile, par ins-
tl'u0tion, sur les secours à donner aux blessés, telles qu'elles sont
formulées dans l'association ambulancière de Saint-John. Aussi
j'ai obtenu, avec l'assentiment et les secours de mon comité, de
réaliser mon désir, qui était d'établir rapidement deux classes,
l'une de 2S hommes et l'autre de 39 femmes, les règlements de
l'association interdisant les classes mixtes. Le taux des leçons fut
fixé à 2 schellings pour les hommes, et 1 schelling et 6 pences
pour les femmes. Dans ce prix était compris un tableau anatomi-
que, et chaque élève dut acheter le manuel de Sherherd sur les
premiers soins adonner, pour 1 schelling, et un bandage trian-
gulaire illustré, du prix de 6 pences Le service des infirmiers et
des infirmières était si désireux de suivre les cours, que notre
unique difficulté vint d'en réserver pour les malades un nombre
suffisant. Les cours avaient lieu le jeudi soir à huit heures. Cha-
que cours était d'environ une heure , et il y avait ensuite environ
une demi-heure employée aux travaux pratiques, dans lesquels
je reçus l'aide du Dr Taylor. Les sujets compris dans le cours
étaient une esquisse générale de la structure et des fonctions du
corps avec quelques détails sur le squelette, la circulation, la res-
piration et le système nerveux. L'instruction pratique consistaiten
l'application des bandages, surtout du bandage triangulaire, les
divers moyens d'arrêter extemporanément une hémorrhagie, de
protéger et de soutenir les os fracturés, la conduite à tenir dans
les accidents d'urgence, tels que l'asphyxie, les noyades, les brû-
lures, etc. Il faut y joindre les instructions sur le transport des
blessés sur des brancards ou autrement, et, pour les femmes, une
rapide vue d'ensemble, sur le transport des blessés au moyen des
divers brancards d'ambulance. Nous y ajoutons pour les femmes
un coup d'oeil sur les fonctions d'ambulancière; il y avait, de
temps en temps, des inteirogations sur le sujet de ces cours
sous l'inspection d'une surveillante pour tout ce qui con-
cerne les travaux pratiques des femmes. Par ces derniers
moyens, je pense pouvoir affirmer que les élèves reçurent une
bonne éducation, et, à l'examen fait par le chirurgien-major
Ilutton, un des inspecteurs de l'association, sur les 15 hommes et
19 femmes qui se présentèrent, 15 hommes et 18 femmes passé-
rent avec éloges. L'examen avait surtout un caractère pratique;
les femmes ayant, en plus des questions orales, une liste de six
questions écrites auxquelles elles devaient répondre par un de-
voir écrit, et les hommes étant soumis à un examen étendu sur
les manoeuvres d'ambulance. On a fait à ces cours que j'ai insti-
tués des objections telles que celle-ci : « Un petit savoir est chose
dangereuse ». On a dit également que les subordonnés seraient
disposés à employer leur petit savoirindépendamment du médecin.
Archives, t. XII. 9
130 VARIA
Je puis seulement dire que le cours des événements n'a pas jus-
tifié ce pronostic. Il arrive au contraire que, pendant les trois
mois qui se sont écoulés depuis que les cours ont été institués,
les ambulanciers ont, dans deux occasions, rendu des services si-
gnalés. Une semaine après leurs examens, ils furent appelés pour
ramasser et porter à l'infirmerie un homme qui était tombé d'une
échelle de 20 pieds, pendant des manoeuvres d'incendie, et qui
avait subi une fracture (Fr. de Colles) et d'autres blessures, et,
tout récemment, ils ont rendu des services de premier ordre à un
médecin qui fut jeté hors de son cabriolet en passant devant
l'asile. Mais ce n'est pas absolument pour ces cas graves et ur-
gents, qui doivent pourtant arriver assez souvent dans un éta-
blissement de l'importance du nôtre, que nous donnons l'instruc-
tion à nos infirmiers. Nous leur donnons les connaissances ana-
tomiques et physiologiques élémentaires, les instructions sur la
façon de manier les malades avec soin et discrétion, pour la pra-
tique journalière de l'hospice.
Je crois que ces leçons judicieusement faites, loin de dé-
tourner les subordonnés de l'exactitude, auront de la valeur,
en leur permettant de réclamer intelligemment les soins des
médecins, et d'exécuter habilement leurs instructions, nécessai-
rement. Des leçons, telles que celles données à Saint-John, ne
peuvent remplacer l'instruction spéciale donnée à chaque em-
ployé ; mais il y a un certain avantage en ce que les certificats
délivrés par l'association ont une valeur réelle, d'autant plus que
le système d'examen est unique pour tout le Royaume-Uni, etcon-
fère un grade absolument défini. Je crois pouvoir affirmer que,
dans nos grands asiles, en tout cas, la préparation de ces confé-
rences sera intéressante pour quelques-uns mêmes des membres
du corps médical; et si l'expérience des autres s'accorde avec la
nôtre, les soins donnés à ces cours seront tout à fait appréciés
par les infirmiers et les infirmières qui forment l'auditoire. z
(Journal of mental science, 1886.)
CÉRÉMONIE POUR LA CURE DES ÉPILEPSIES LA NUIT DE LA SAINT-JEAN.
CI Les dévots passaient ordinairement la nuit dans l'église ; on y
disait la messe ce jour-là à trois heures du matin; mais pour
rendre la chose plus mystérieuse, ou se détermina à la célébrer
à minuit. Le peuple, toujours esclave du mystère, s'imagina que
la nuit de la Saint-Jean était très favorable aux miracles. Les
moines, secondant ces dispositions superstitieuses, exposèrent les
reliques de Saint-Maur, qui avaient, dans ce temps-là, la faculté
de guérir les épilepsies; et on y transporta les personnes atta-
quées de cette maladie.
FAITS DIVERS. 131
« Premièrement, retentissait dans l'église, lebruitdestambours
et de la décharge des armes à feu; puis, pendant quatre heures
que duraient la messe de minuit et les matines, on n'entendait,
dit M. l'abbé Lebeuf, que des cris, des hurlements continuels des
malades, ou prétendus tels, des deux sexes, que six ou huit
hommes promenaient étendus sur les bras, tout autour de la cha-
pelle de Saint-Maur.
« Les malades criaient de toutes leurs forces : « Saint-Maur,
grand ami de Dieu, envoyez-moi guérison, s'il vous plaît ' ; les
porteurs faisaient encore plus de bruit, en criant : « Du vent, du
vent » ; et des personnes charitables éventaient les malades avec
leurs chapeaux; d'autres criaient : « Place aux malades, gare le
rouge », parce qu'on prétend que cette couleur est contraire aux
épileptiques. Quand un malade avait répété trois fois de suite sa
prière, on le comptait guéri, et l'on criait à haute voix : « Mi-
racle, miracle ! » Enfin c'était un vacarme si grand, que l'on n'en-
tendait point le clergé chanter, et qu'il se formait trois ou
quatre chants dans les différentes parties de l'église.
« Pendant cette nuit, il y avait, dans la même église, de petits
marchands de bougies et d'images, des mendiants de toute
espèce, des vendeurs de tisane qui criaient : « A la fraîche, à la
fraîche » : tout cela augmentait le désordre ; et, après la grand'-
messe, les pèlerins et les pèlerines les plus sages couchaient dans
l'église, sans se gêner de leurs petits besoins ; les autres allaient
passer la nuit dans les cabarets ou aux marionnettes, ou bien à
la danse; ainsi se passait cette prétendue dévotion ». (Dulaure,
Histoire des environs de Paris, notice sur Saint-Maur-des-Fossés.)
FAITS DIVERS
Asiles d'aliénés. - Par suite de la mort de M. LEGRAND du
SAULLE, les mutations suivantes ont eu lieu en juin dans le
service médical des aliénés dépenda.it de l'Administration géné-
rale de l'Assistance publique à Paris : M. Jules Voisin passe de
l'hospice de Bicêtre à l'hospice de la Salpêtrière; M. Derny, mé-
decin adjoint à l'hospice de Bicêtre, passe médecin titulaire dans
le même établissement.
Asile d'aliénés DE C.1DILLAC. M. le DT CMUSET, directeur-
médecin de l'asile de Saint-Alban (Lozère) vient d'être nommé
médecin en chef de l'asile de Cadillac (Gironde).
132 FAITS DIVERS.
Asile d'aliénés DE Pierrefeu. M. Gueit a déposé dans la séance
du 6 mai, au nom de la commission spéciale de l'asile d'aliénés,
un projet selon lequel l'asile comprendra 290 lits de malades.
Concours pour une place DE médecin-aliéniste des hôpitaux de
paris. Ce concours, qui avait primitivement été fixé au lundi
28 juin, a été retardé à cause de quelques irrégularités dans le
tirage du jury qui a été définitivement constitué par MM. Bou-
chereau, Dagonet, Vallon, Voisin (Auguste), Empis, Lancereaux
et Straus.
Plusieurs journaux hebdomadaires ont adressé à l'adminis-
tration de vives protestations sur la présence parmi les juges de
M. Vallon qui n'avait pas maintenu sa candidature au dernier
concours. Quoi qu'il en soit, les candidats, au nombre de trois :
MM. Gilson ? mel et Séglas. ont subi la première épreuve à la date
fixée. Le sujet de la composition écrite était -.^Substance grise de
la moelle épinière.
Maison nationale DE CsARENTON. Il sera ouvert, le lundi
26 juillet prochain, au Ministère de l'Intérieur, un concou : s pour
l'internat de la Maison nationale de Charenton. On trouvera chez
le concierge de la Faculté et au Secrétariat de la Maison natio-
nale de Charenton, des exemplaires de l'arrêté qui fixe les condi-
tions d'admissibilité et le programme du concours. Voici les con-
ditions de ce concours :
Article premier. - Il est établi un concours pour la nomination
aux emplois d'interne en médecine de la Maison nationale de
Charenton. Art. 2. Sont autorisés à concourir, les éludiants en
médecine de nationalité française, âgés de moins de trente ans
révolus le jour de l'ouverture du concours et pourvus de douze
inscriptions, qui auront été agréées'par le directeur et par le
corps médical de la Maison nationale. Les docteurs en médecine
ne pourront pas prendre part au concours. - Art. 3. Les candi-
dats qui voudront concourir devront se présenter au secrélaiiit
de la Maison nationale pour obtenir leur inscription, en y dépo-
sant : 1° leur acte de naissance; 2° les certificats constatant
qu ils remplissent les conditions prescrites par l'article et qu'ils
sont de bonnes vie et moeurs. La liste des candidats seia close
8 jours avant la date de l'ouverture du concours. - Art. 4. Le
jury est composé de MM. les médecins et chiruigiens de la Maison
nationale auxquels seront adjoints deux membres nommés par
nous palmi les médecins inspecteurs généraux des services admi-
nistratifs, les médecins de l'administration centrale ou des éta-
blissements généraux de bienfaisance. Art. 5. Sur la piopo-
sition du directeur de la Maison nationale de Charenton, le jury
sera composé par nous et réuni au ministère de l'iiiléi ietir toutes
les fois qu'il sera nécessaire. Il dressera la liste des candidats ad-
FAITS DIVERS. 133
mis, qui seront nommés au sur et à mesure des vacances, dans
l'ordre de leur classement. Cette liste, certifiée conforme, sera
adressée, aussitôt après le concours, au directeur de l'étab issement
par le président du jury. Art. 6. La durée de l'internat est
fixée à trois ans. Tout interne titulaire est autorisé à se faire
recevoir docteur en médecine dans cet intervalle, sans être forcé
de quitter ses fonctions, mais le candidat inscrit sur la liste des
admis qui aura passé sa thèse avant d'être titularisé aura ainsi
renoncé implicitement à sa nomination. Art. 7. Les épreuves
du concours seront les suivantes : -I° composition écrite de trois
heures sur un sujet d'anatomie et de physiologie du système ner-
veux ; 2° l'épreuve orale de quinze minutes sur un sujet de pa-
thologie interne et de pathologie externe, après quinze minutes
de préparation. Il sera attribué 20 poiuls à cette épreuve.
Art. S. Le sujet de la composition écrite est le même pour tous
les candidats. Il est tiré au sort entre trois questions qui sont rédi-
gées et arrêtées par le jury, avant l'ouverture de la séance. Pour
les épreuves orales, la question sortie est la même pour ceux des
candidats qui sont appelés dans la même séance. Elle est tirée au
sort comme il est dit ci-dessus. L'épreuve orale peut être faite en
plusieurs jours si le nombre des candidats ne permet pas de le
faire subir à tous dans la même séance; dansce cas, les questions
sont rédigées par le jury chaque jour d'épreuves, au nombre de
trois, avant d'entrer en séance. Les noms des candidats qui doi-
vent subir l'épreuve orale sont tirés au sort à l'ouverture de
chaque séance. - Art. 9. Les candidats sont surveillés pendant
la composition écrite par des membres du jury. Tout candidat qui
s'est servi pour sa composition de livres ou de notes apportés à
la séance, ou qui, en lisant sa composition, en a sensiblement
changé le texte primitif, est exclu du concours. Les compositions
sont recueillies et mises sous cachet par le président; elles sont
lues publiquement par leurs auteurs sous la surveillance de l'un
des membres du jury. - Art. 10. A la fin de chaque séance, il
peut être donné connaissance aux candidats du nombre de points
qui leur sont attribués. - Art. il. Le jugement définitif portera
sur l'ensemble des deux épreuves (écrite et orale). - Nota. L'al-
location accordée aux internes de la Maison nationale de Cha-
renton est : pour la ire année, de 1,300 fr.; pour la 2e année,
de 1,600 fr.; pour la 3° année, de 1 ,¡DO fI', En dehors de l'interne
de garde, qui est nourri et logé, les internes ont droit au dé-
jeuner.
Nécrologie. Le Dr von GUDDEN. - Le corps médical vient
d'éprouver une grande perte en la personne du Dr v. GUDDEV, un
des ahénistes les plus distingués de notre époque. Il est mort le
14 juin courant, victime de son devoir professionnel. Gudden
134 FAITS DIVERS.
était né à Clèves le 7 juin 1834 ; il fit ses études à Berne, à Berlin
et à Halle; reçu docteur en -1848, il fut nommé en 1855 directeur
de l'asile d'aliénés de Werneck. En 1869, nous le retrouvons pro-
fesseur de psychiatrie à Zurich ; en 1872, il occcupe à Munich la
même chaire et est directeur de l'asile d'aliénés. Les travaux de
von Gudden sont connus et appréciés de tous ; son microtome se
trouve dans la plupart des asiles de l'étranger. Von Gudden pre-
nait une part active aux discussions du Congrès annuel de la
Société des aliénâtes allemands. - Le public médical regrettera
avec nous qu'une mort prématurée vienne nous priver des tra-
vaux que nous étions en droit d'attendre encore de lui, et qu'une
intelligence aussi grande soit tombée sous les coups inconscients
d'un dégénéré, le roi Louis Il de Bavière. - Nous citerons de
von Gudden : Beitrüge zur Lehre von dei, durch Parasitez bedingten
Haut-Krankheiten, Stuttgard, 185p; Beitrag zur Lehre von der
Scabies, Wurzburg 1863; Experimentelle Untersuchungen uber das
Schadelwachàthum, Munich, 1874; le même traduit en français, par
le professeur Forel z6); Experimentclle - Anatomische Untersu-
chungen ùber das periphere und centrale Nervensyslem dans : Archiv.
f. Psychiatrie.
L'Amel'ican Journal of Insanity (avril) nous annonce la mort
du Dr R.-H. SmTx, superintendant de l'asile d'aliénés de l'Etat
de Missouri.
Société médico-psychologique. - Cette Société a tenu sa séance
solennelle le lundi 10 mai sous la présidence de M. Semelaigne.
Elle a décerné les récompenses suivantes :
,Prix Esquirol. - Ce prix, de la valeur de 200 francs, plus les
oeuvres d'Esquirol, a été décerné à M. Larroque, interne de la
maison de Charenton, pour un mémoire intitulé : Des rémissions
dans la paralysie générale. Une mention honorable a été accor-
dée à M. Dumas, interne de la maison de Charenton, pour un
mémoire intitulé : Des transformations de la personnalité et des
erreurs de personnes chez les aliénés.
Prix Moreau (de Tours). - Ce prix, de la valeur de 200 francs,
a été décerné à M. le Dr Bernard, ancien interne des hôpitaux de
Paris, pour sa thèse : De l'aphasie et de ses diverses formes. -
Une mention honorable a été accordée à M. le Dr Rouillard,
pour sa thèse : Essai sur les amnésies. Etiologie des troubles de la
parole.
Prix Belhomme. - Ce prix, de la valeur de 1,200 francs, a été
décerné à M. le Dr Paul Balcon, médecin à Paris. La question
posée était : « De l'idiotie et en particulier des lésions anatomiques
des centres nerveux dans l'idiotie »
Prix Aubanel. Ce prix, de la valeur de 2,400 francs, n'a pas
été décerné. La question proposée était la suivante : « De la
FAITS DIVERS. 135
coexistence chez un même malade, de délires d'origine différente
(alcoolique, épileptique, paralytique. vésanique, etc.), au point
de vue du diagnostic, du pronostic, du traitement et de la méde-
cine légale ». Deux récompenses ont été accordées : la première,
de 800 francs, au mémoire de M. Dericq, interne de l'asile Sainte-
Anne ; la seconde, de 400 francs, au travail de MM. Roland et
Bezançon, internes des hôpitaux de Paris.
Société française DE tempérance. Cette Société a tenu sa
séance solennelle le 30 mai 1886, sous la présidence de M. A.
DUVBRGEIi, professeur à la faculté de droit de Paris.
Après avoir entendu une allocution chaleureuse de M. le pro-
fesseur A. Duverger, le rapport sur la situation morale et finan-
cière de l'oeuvre par M. le Dr Motet, secrétaire général, les
rapports de MM. Decaisne, Boyer et Bouebereau et celui de M. Gui-
gnard sur les récompenses, la Société a décerné une médaille
d'argent à M. Marambat, des médailles de bronze à MM. les D"
Séjournet et Legendre, 500 fr. répartis entre Julien Bottet,
procureur de la République, le Dr A. Barrabé, François Delattre
et le Dr A.-J. Devoisins; 468 diplômes de membre associé hono-
raire, 6 médailles d'argent, 180 médailles de bronze, 11 livrets
de caisse d'épargne postale (1 15 fr.) et 536 diplômes de témoi-
gnages de satisfaction, 157 volumes de ses bulletins, 116 exem-
plaires de l'Essai sur l'Intempérance de M. Edmond Bertrand,
115 manuels Picard, 20 exemplaires de la Conférence Homais,
205 exemplaires du Mécanicien Gerbas, de M. Paul Timon, et 4,00
exemplaires des années 1880 à 1885 du Bon Conseiller, publié sous
son patronage.
Autopsie du ROI Louis de BAVIÈRE. La Gazette hebdomadaire
nous apprend que le résultat de cette autopsie donne avec une
remarquable netteté la clef des manifestations cliniques observées
depuis des années chez le roi de Bavière, atteint d'une aliénation
mentale dans laquelle l'hérédité a également joué son rôle. Les
lésions du crâne et du cerveau sont de beaucoup les plus intéres-
santes. Le cuir chevelu est épaissi, le crâne petit et un peu asy-
métrique. La voûte crânienne est extrêmement mince, les sutures
frontale et sagittale ossifiées à la face interne; le frontal présente
des ostéophytes de volume variable à sa face interne; le sinus
veineux longitudinal supérieur est énormément dilaté en arrière,
rétréci en avant au niveau de l'ethmoïde, les granulations de
Pacchioniy font saillie. La dure-mère est épaissie, surtout au ni-
veau du frontal, et très hypérémiée; le sphénoïde et les rochers
présentent des exostoses; la selle turcique est asymétrique, po-
reuse et friable. Les sinus de la base sont gorgés d'un sang noir
et fluide. Le poids du cerveau est de 1,349 grammes. L'arach-
noïde est épaissie sur une grande étendue. Au niveau de la cir-
136 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
convolution frontale ascendante gauche dans sa partie antérieure
et du début de la première circonvolution frontale, l'arachnoïde
et la pie-mère ont contacte des adhérences et forment un épais-
sissement de la dimension d une pièce de 4 franc; à ce même
endroit, la voûte crânienne est réduite à l'épaisseur d'une feuille
de papier. Plusieurs circonvolutions sont atrophiées par place.
La substance cérébrale est hypérémiée et présente un certain
degré de ramollissement. Dans les autres organes, les lésions
sont insignifiantes; l'estomac présente les lésions du catarrhe
chronique (Gaz. liebd.).
F £ né(Cii.) Trailcèlcmentaired'anatomiemédicale du système nerveux.
- \'oliiiiiein-1 ? o de 496 pages, avec 2 13 figures dans le telte. - Prix : 10 fr.
Aux bureaux du Progrès médical, 14, rue des Carmes. - Pour nos abon-
nés, 7 fr.
Bl,.AU,Nls (H.) - Le somnambulisme p1'ovnl]ué. - Etudes physiologiques^,
et psychologiques Volume in-12 de 250 pages. - Prix 3 fr. - Paris,
1SS6. - Librairie J.-B. Baillirrc.
tlec (G ). Classification of mental diseases. Report of the progress.
Brochure In-8" de 1S pages. - New-York, 18a6, chez l'auteur, 37, Broad-
way.
DUVAL (M.). - Le Darwinisme, leçons professées à l'école d'anthropo-
logie. Volume in-8' de b76 pages, avec 7 figures. Prix : 10 fr. Pans, 1885.
- A. Delahaye etE. Lecrosnier.
Grasset. Traité pratique des maladies du système nerveux, suivi d'un
appendice sur l'électrothérapie, par IIEGntBE\U (3- édition). Volume in-so
de 1,190 pages, avec73 figures et 16 planches. Prix : 28 fr. Paris, 1895. -
A. Delahaye et E. Lecrosnier.
KOSTJUHll ! (S.) - Die senilen f'err7ndertengen der GI'osslll1'n1'inde, Bro-
chure ui-8" de 9 pages. Wien, 1886. 'Hotder.
LEGnaxn du S.1L1LLE, Bebryer (G.) et l'oucm : T (G.) Traité de méde-
cine léga'e, de jurisprudence médicale et de toxicologie. Deuxième édi-
tion. Volume iu-8" de 1680 pages, avec 9 ligures dans le texte et 2 plan-
ches. - Prix : 27 francs. - Paris 186. Librairie A. ])elal1<l\e et Emile
Lecrosnier. '
ilkli[FT et CoMBEMtLE. Recherches sur l'action physiologique etthéra-
pelttil]ue de l'acétophénone (Ilyl)tiose). Brochure in-8n de 61 pages. Mont-
pellier, isba. - Imprimerie Boehm et fils.
PEUGNIEz. De l'hystérie chez les enfants. Volume in-8° de 181 pages.
Prix : 4 fr. Paris, 1885. - A. Del;th.iyu et Lecrosnter.
R\YMO : i'D. Anatomie pathologique du système nerveux. Cours com-
plémeutatre, professé à la Faculté de médecine de Paris. Volume tn-8"
de 400 pages, avec 114 figures et 2 planches. Prix : 9 fr. Paris, 1885. -
A. Delahaye et E. Lecrosnier.
Wundt (\V.). Eléments de psychologie physiologique. Traduit de l'alle-
mand sur la 2' édition, avec l'autorisation de l'auteur par le Dr E. flou-
lnen, précédé d'une nouvelle préface de l'auteur et d'une introduction
par D. NOL EN. Un volume in-8^ de 57t pages, avec 123 figures. Pans,
1885. - Librairie Félix Alcan.
Le rédacteur-gérant, BUUlIIOEYlLLL
Evrem (Il Ilwnaer, 1--P - -98g.
Vol. XII. Septembre 1886. N° 35.
ARCHIVES DE NEUROLOGIE r !
CLINIQUE NERVEUSE
DE L'IDIOTIE COMPLIQUÉE DE CACHEXIE PACHYDERMIQUE
(idiotie CRÉTlN01DE);
Par BOURNEVILLE et P. BKICON.
Parmi les formes déjà nombreuses que l'on peut
distinguer dans l'idiotie, l'une des plus curieuses et
des moins connues est assurément celle qui a été dési-
gnée par quelques auteurs anglais, entre autres par
MM. Fletcher Beach et Ireland, sous le nom d'idiotie
crétinoïde et que, nous fondant sur la découverte d'une
maladie nouvelle, le myxoedème ou cachexie paclaJder-
mique, nous proposons de désigner sous le nom d'idiotie
avec cachexie paclaydermique. \
Les cas authentiques que nous avons recueillis
et peut-être y en a-t-il qui nous ont échappé sont
assez rares et plus rares encore sont ceux dans les-
quels l'autopsie a été pratiquée. Ceux-ci se réduisent, en
effet, à quatre, et, fait capital, da : is ces quatre cas on
a relevé l'absence de la glande thyroïde. D'où il suit,
d'après ces faits, qu'il paraît y avoir une relation évi-
dente entre l'abseuce de cette giande et l'existence du
Archives, t. XII. 10
13 CLINIQUE NERVEUSE.
myxoedème, ou de la cachexie pachydermique. Ce
qui ajoute encore de l'intérêt à ces constatations, c'est
que, chez un certain nombre d'individus ayant subi
la thyroïdectomie totale, on a vu se produire un
myxoedème opératoire'.
La physiologie expérimentale, ainsi que cela résulte
des expériences de M. Horsley, vient également
appuyer la corrélation entre l'absence de la glande
thyroïde et l'existence de la cachexie pachydermique
décelée par la clinique et l'anatomie pathologique.
Nous sommes donc amenés, naturellement, à diviser
notre travail en deux parties : la première sera consa-
crée à l'exposé des observations d'idiotie avec cachexie
pachydermique ; la deuxième, à l'examen des cas
d'extirpation de la glande thyroïde, suivie de cachexie
pachydermique.
I. IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE
Les deux premières observations en date, et non
les moins intéressantes, sont dues à Curling : nous les
traduisons textuellement.
Observation I. Aspect crétinoïde. - Gonflements sur les parties
latérales du cou et en avant des aisselles. - Persistance des fon-
tanelles. - Erysipèle. Phlegmon de la cuisse. - Mort.
Autopsie. Composition et texture des gonflements. - Absence
de corps thyroïde.
En juillet 1849, le Dr Litle, dit Curling, m'invita à examiner un
malade, qu'il considérait comme un crétin, à l'asile des idiots de
1 D'après les faits qui nous ont été communiqués par M. J. Reverdin,
ce myxoedème aurait une allure particulière et tendrait à s'atténuer; l'un
de nous a pu voir à Genève une des malades de M. lteverdin chez
laquelle, à part une certaine lenteur corporelle et intellectuelle, on ne
retrouvait plus les autres symptômes de la cachexie pachydermique.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 139
Highgate et d'examiner plusieurs gonflements situés de chaque
côté du cou, dont la nature était douteuse, mais que l'on croyait
devoir attribuer à une hypertrophie de la glande thyroïde ou des
ganglions lymphatiques. L'enfant, âgée de dix ans, était née à
Lancashire; elle était grosse, rabougrie, mesurait deux pieds six
pouces (63 c. 51); son corps était épais, ses membres dispropor-
tionnellement larges et longs. Les membres et le dos étaient poi-
lus. La tête était grosse; les fontanelles n'étaient pas fermées. Le
front était plat. L'expression était désagréable et celle d'une
idiote. La bouche était large, la langue épaisse et protubérante.
De chaque côté du cou. en dehors des muscles sterno-cleïdo-
mastoïdiens, il existait deux gonflements sensiblement symétriques
qui donnaient à la palpation une sensation molle, pâteuse,
dépourvue d'élasticité. Des gonflements semblables, mais plus
petits et moins difformes, existaient en avant des aisselles. On ne
constatait aucun gonflement au devant du cou et la glande thyroïde
ne pouvait être trouvée à la palpation. L'enfant ne marchait que
très peu et ne pouvait aller de chaise en chaise qu'avec l'assis-
tance d'une autre personne. La parole était nulle, mais l'enfant
reconnaissait ses parents et manifestait quelques signes de volonté ;
elle cherchait à se faire asseoir sur les genoux du médecin rési-
dent et s'y aidait elle-même. Durant son séjour à l'asile, elle fut
atteinte d'un premier érysipèle; son intelligence parut plus déve-
loppée à la suite de cette affection 1. Soignée ensuite pour un
phlegmon considérable de la cuisse, phlegmon qui suppura forte-
ment durant plusieurs semaines, elle fut de nouveau atteinte, après
la guérison de la plaie, d'un nouvel érysipèle accompagné de glos-
site et de stomatite. Elle mourut dans le marasme six mois après
le début de la maladie et environ quinze mois après son entrée à
l'asile.
Autopsie (vingt-quatre heures après le décès, faite par M. Cal-
laway). - Le corps était très émacié. Les gonflements cervicaux
avaient beaucoup diminué de volume; ils étaient composés de
graisse et occupaient le triangle postérieur de chaque côté du
cou; ils s'enfonçaient en bas sous les clavicules, remplissaient les
aisselles et pouvaient être suivis jusque sous les muscles sous-
scapulaires et vers l'angle inférieur de l'omoplate ; ils n'étaient
pas enkystés. La graisse qui les composait paraissait, au micros-
cope, formée'de tissu coritiectif et de cellules adipeuses. 1/ n'y
avait pas la plus légère trace de glande thyroïde 2.
1 On verra que Th..., dont nous rapportons l'observation plus loin,
fut également atteint d'érysipèle, mais son état intellectuel ne parut nul-
lement modifié par cette maladie intercurrente.
2 Voir plus loin les observations de Th... est de Gra ..
140 CLINIQUE NERVEUSE.
Observation II. Idiotie. Gonflements anormaux de la région
cervicale. - Convulsions. Mort.
Autopsie. Composition des gonflements cervicaux. Absence
de glande thyroïde. -
En 1849, on m'adressa un enfant de six mois pour quelques
gonflements anormaux de la région cervicale. Les parents étaient
sains; mère, âgée de vingt-huit ans, avait eu une autre enfant.
Cette enfanl était forte, elle présentait une expression marquée
d'idiotie; la face était large, le front fuyant et la tête petite. La
langue large pendait en dehors de la bouche. De chaque côté du
cou, en dehors des muscles sterno-cleïdo-mastoïdiens, il existait
deux gonflements symétriques, obliques de forme ovale, durs au
toucher et dépourvus d'élasticité. Ils s'étendaient des bords du tra-
pèze au milieu des clavicules. Je fus frappé de la ressemblance de
ce cas avec celui du crétin de Highgate. La mère me dit que
l'enfant était inhabile à se servir de ses membres inférieurs,
qu'elle n'était pas aussi forte que son autre enfant. Elle tomba ma-
lade quelque temps après, refusa toute nourriture, et mourut dans
les convulsions le 7 décembre 1849.
Autopsie. Le cerveau ne présentait d'autres anomalies qu'un
arrêt de développement des lobes antérieurs. Malgré un examen
très attentif de la région cervicale, on ne trouva pas de glande
thyroïde; on ne put en découvrir aucune trace. Les gonflements
cervicaux consistaient en amas superficiels et non enkystés de
graisse lâchement unie aux parties environnantes.
M. Curling attribuait le développement des boules
graisseuses anormales à l'absence du corps thyroïde et,
par suite, à l'imperfection des processus d'assimilation.
Il exprimait l'espoir que ces faits pourraient diriger
les recherches futures sur les fonctions de la glande
thyroïde. Ces deux cas sont, sans aucun doute, deux
cas types d'idiotie crétinoïde, ou mieux d'idiotie compli-
quée de cachexie pachydermique avec absence du corps
thyroïde.
Vingt ans plus tard, M. Hilton Fange publiait dans
les « Medico-c/zirurgicaITransactions) de 1871 un autre
cas de cachexie pachydermique chez un enfant idiot.
1 Hilton Fagge. On sporadie cretiraisns, occuring in Enyland. (p. 155)
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE 11l
Observation III. - Idiotie avec arrêt de développement du corps et
type crêtineux de lu face d'origine congénitale ( ? ). - Pas de goitre.
- Tumeurs molles et mobiles de chaque coté du cou en dehors des
muscles ste1'llo-cléido-m(tstoidiens.
Edmond D..., âgé de huit ans, est entré le 26 novembre z870
à l'hôpital des enfants malades Evelina (service de M. Fagge).
Il avait déjà été vu à la consultation externe par le Dr Baater. Le
père et la mère étaient bien portants; sobres, ils menaient une vie
régulière, et une enquête sérieuse n'a pu révéler d'excès de bois-
son soit habituels, soit même occasionnels. Leurs autres enfants
élaienl bien portante.
L'accouchement eut lieu au forceps. -1 la naissance, l'enfant
était fort; il perça ses premières dents à deux ans; il n'es-
- I·'iJ. à.
142 CLINIQUE nerveuse : ".
saya de marcher pour la première fois qu'à trois ans et demi. '
Pendant sa première enfance, on n'observa aucun, autre phéno-
mène anormal chez cet enfant. Mais, plus tard, sa mère s'aperçut
qu'il voulait toujours s'asseoir où qu'il fût, et que ? silencieux, il
gardait souvent la même position plusieurs heures de suite. La
croissance s'arrêta, et la mère prétend qu'il n'a pas grandi depuis
deux ans et demi. Actuellement, quoique âgé de huit ans, il a-
l'apparence d'un enfant de deux à trois 'ans.' Il pèse 25 livres
(9ka1'75) et mesure 2 pieds 7 pouces 3/4 (environ Ow,76). Il est tran-
quille ; il s'assied et reste immobile à'quelq'ue place qu'on le
mette. 11 se tient rarement debout,de : son propre mouvement. Un
air de contentement stupide le caractérise' généralement; parfois
sa face s'illumine d'un sourire-passager., Depuis. qu'il est habitué
aux choses et aux personnes du service, il sourit toujours dès que
l'on fait attention à lui; il sourit sans motifs si on le lui commande.
11 parle peu* et semble ne connaître que quelques mots; mais il
nomme correctement divers objets qu'on lui présente. Il est propre
et paraît susceptible d'affection. (Fig. 5)
La tête est grosse et ronde; la face large; les yeux sont très
écartés; le nez à sa naissance est plat et large; son extrémité est
relevée;'les ouvertures des narines sont arrondies. La bouche est
grande et ordinairement ouverte, mais il n'y a pas d'écoulement
de salive. Les lèvres sont épaisses. L'enfant possède toutes ses
dents de lait. La langue est de grandeur naturelle.
De chaque côté du cou, juste au-dessus des clavicules, il existe des
gonflements 'mous, mobiles et dépourvus d'élasticité. Ces masses
peuvent être attirées à une certaine distance en bas au-delà des
clavicules, elles semblent faire corps avec les tissus sous-cutanés
plutôt qu'avec les tissus sous-jacents. Il n'y a aucune prolongation
de ces masses vers les aisselles.
Il n'existe pas de goîlre; on ne peut percevoir à la palpation
aucune trace de glande thyroïde.
Le thorax est bien conformé. Les membres sont courts et gros;
les tibias, quelque peu courbés, mais on ne constate pas d'épais-
sissements rachitiques des épiphyse<. Les mains et les doigts sont
très larges, courts, épais; il en est de même des pieds et des or-
teils. La peau, sauf celle de la face, est rugueuse et présente par
places des parties dures, de peu de dimension, de couleur
brillante gris brun ; les cheveux et les cils sont longs, noirs et
abondants.
Telle est la troisième observation publiée sur l'idio-
tie crétinoïde; les symptômes se rapportent exactement
à la cachexie pachydermique.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE 143
Le quatrième cas est dû à M. Fletcher Beach '.
Observation IV. Crétinisme sporadique. - Absence de glande
THYROÏDE.
Il s'agissait d'une enfant de quinze ans du poids de 11 kil. 530
(taille : 38 pouces (0 m. 78). Elle était très grasse ; la tête, aplatie
au vertex, était très large latéralement (voir la fig. 6) : diamètre
longitudinal : 11 pouces (0 m. 23); -circonférence : 19 pouces»
(0 m. 40). Les dents étaient régulières et bien conformées. L'en-
fant ne parlait presque pas; elle était d'un caractère enjoué, et
se livrait avec plaisir à différents amusements.
E ivoyée à l'école de l'asile, elle apprit l'alphabet, put épeler
quelques mots de trois lettres et écrire deux lettres sous la dictée ;
elle additionnait jusqu'à 5, complait jusqu'à 50, multipliait par 2
jusqu'à 12; elle pouvait distinguer trois couleurs. Elle apprit un
peu à ourler. Elle possédait donc une certaine intelligence. Elle
était propre; l'appétit et le sommeil étaient bons, elle avait été
menstruée deux à trois fois.
A J'autopsie on constata que le trou occipital était plus petit qu'à
t Fletcher Beach. - Notes of a case of sporadic cretinism with an
account of the Autopsie (rite Journal of mental Science, vol. XXII, 18 îG,
p. 2f1).
l'rg. 6.
il ? CLINIQUE NERVEUSE.
l'étal normal ; il présentait sur ses bords une petite saillie de
forme circulaire. La sulure sphéno-basilaire était encore cartila-
gineuse. Le cerveau pesait 34 onces (434 gr. 06). Les circonvolu-
tions étaient très distinctes et grossières mesurant un demi-pouce
de largeur. A l'examen histologique d'une circonvolution on ne
découvrit ni dégénérescence totale ni inflammation. Les vaisseaux
étaient tortueux ; la substance corticale elait plus épaisse qu'à
l'état normal.
Il n'y avait pas traces DE GL\NDE thyroïde. Les tumeurs gl'ais-
seuses cervicales n'étaient pas enkystées; elles se prolongeaient
sous les sterno-cléido-masloirlieus et les clavicules. (Voir fig. 7).
Nous nous abstiendrons de consigner ici les autres
cas d'autopsie de myxcedèl1le parce qu'ils ne se rap-
portent pas au myxoedème congénital ou de la pre-
mière enfance, le seul que nous voulons étudier dans
Fig. 7. - FigUl'e montrant la trachée, la langue, l'absence du corps
thyroïde, et les masses graisseuses.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERM1QUE. 145
ce travail'. Nous donnons de suite les deux cas d'i-
diotie crétinoïde qu'il nous a été donné d'observer. De
ces deux malades l'un Gr... est encore vivant, l'autre
Th... Et le Pacha, a succombé il y a quelques mois.
Observation V.. Père : incontinence nocturne d'urine jusqu'à dix-
huit ans ; - Alcoolisme, colère, tuberculeux. - Tante paternelle
tuberculeuse. - Mère migraineuse et tuberculeuse ; oncle maternel
alcoolisme et suicide. .Frère et sceur un peu arriérés. - Etat
crétinoïde; symptômes de cachexie pachydermique.
Gr... (Emile), né le 13 avril 1858 à Strasbourg, est entré le
25 mais 1874 à l'hospice de Bicêtre. (Service de M. Bourneville.)
Renseignements fournis par une tante paternelle (12 mars 1880).
- Père né à Strasbourg ', mort en 1 878 de la poitrine, à l'âge de
quarante-neuf ans; s'était engagé à dix-sept ans, avait sa retraite
depuis un an dans la garde républicaine. Alcoolisme, absinthisme;
se mettait souvent en colère; n'a jamais monté en grade; a pissé
au lit jusqu'à dix-huit ans. [Son père, journalier aux champs, ne
savait ni lire ni écrire; il était sobre, bien conformé et est mort
d'une fluxion de poitrine; sa mère, de taille ordinaire est morte
à soixante-quinze ans « de vieillesse ». Une bOElI1' qui nous donne
les renseignements est intelligente; une deuxième morte pmtri-
naire. Pas de nerveux ni de difformes, etc., dans la famille.]
Mère, née à Lille, morte en ! 877, a trente-neuf ans, de tuberculose
pulmonaire, très intelligente, de taille assez élevée, était sujette
aux migraines. - [Père ? Mère serait encore vivante et habite-,
rail Lille; deux frères, l'un d'eux se serait jeté à l'eau à la suite
d'alcoolisme et de deux SOEUI'S bien portantes. Pas de ner-
veux, ni de difformes dans la famille]. -Pas de consanguinité.
Cinq enfants : I° Louis, vingt-deux ans, de faille élevée, peu in-
telligent, employé aux chemins de fer, pas de convulsions, a des
migraines; - : 1° notre malade; - 3° une fille de dix ans, grosse,
ne grandissant pas, peu intelligente, n'a marché qu'à trois ans,
pas de convulsions, a pissé au lit jusqu'à neuf ans et y pisse encore
quelquefois; - 4° et ou d'autres enfants morts, l'un du croup,
l'autre de la rougeole :
Notre malade, Gr... Ernest, est né à Strasbourg le 13 avril 1858
où sa mère était allée faire ses couches, bien qu'habitant Paris
1 Les autopsies de cas de cachexie pachydermique ne sont du reste
actuellement qu'au nombre de 10 : 2, de Curling (1850); 1, de Fletcher-
Beactl (t876); 3,de Urd; l, de Lloyd; t, deGreenfield; 1, de Heul'ot; 1, de
Br.unles (I88'i). Ceu\ de Curling et de Fletcher-Beach et le nôtre appar-
tiennent à des idiots crétinoides.
1 Il y a quelques goitreux il Strasbourg.
H6 CLINIQUE NERVEUSE.
depuis son mariage; la grossesse n'avait rien eu d'extraordinaire;
né à terme. A la naissance, il était gros, mais paraissait dil-
forme ; la tête surtout était « horrible à \oir ». -Il a été élevé
au biberon à Strasbourg et avait plus de quatre ans lorsqu'il a
commencé à marcher; vers cette époque il eut la rougeole. Il est
venu à Paris à l'âge de cinq ou six ans, et n'a pas été trop tardif
à parler. Il a pissé assez tard au lit. 11 n'est jamais allé à l'école,
les autres eufants se moquaient de lui. Il restait à la caserne,
faisait des commissions, car sa mémoire est bonne ; il était assez
affectueux, et se chagrinait facilement; il dormait bien et n'était
pas peureux. Point de kleptomanie, de pyromanie, d'onamsme;
ni de scrofulides.
1880. 17 mars. - Tète très volumineuse, le crâne est assez ré-
gulièrement conformé et symétrique ; le front est bas, très large
et semble se continuer directement avec la face. Les arcades
sourcilières sont peu marquées et au dessous d'elles se trouve une
encoche facilement perceptible.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. z47
La voûte palatine est large, a sa profondeur habituelle, mais le
voile du palais n'est pas symétrique, la luette est un peu reportée
vers la gauche, l'arcade qui la sépare du pilier gauche est beau-
coup plus étroite que l'arcade du côté droit.
Le thorax est constitué d'une façon particulière. Vu de face, on
remarque que les dernières côtes forment, au niveau des hypo-
Ji1g. 8. - Celle figure représente trois cas d'idiotie : le premier (à
gauche) avec goitre, les autres accompagnés de cachexie pachydermi-
que. Le sujet de droife est Gr... -
148 CLINIQUE NERVEUSE.
chondres, une saillie marquée en dehors, la base de la poitrine
est ainsi latéralement élargie; le sternum n'offre pas de saillie
anormale, mais les attaches des côtes à cet os, surtout les plus
inférieures, sont très saillantes; elles semblent s'articuler au ster-
num de la même manière que les clavicules.
La colonne dorsale au niveau de la base du thorax, forme une
dépression très marquée ; lorsque l'enfant est debout, il existe à
ce niveau un sillon vertical assez profond pour contenir le doigt.
Membres. Etant donnée la taille exiguë de Gr.. (1m,20) les
membres tant supérieurs qu'inférieurs sont réguliers, égaux, pro-
portionnés, ainsi que le montrent les mensurations ci-après :
Longueur du bras mesurée del'acromion à l'épicondyle, 19 cent.
Longueur de l'avant-bras de cet épicondyle à l'apophyse styloïde
du radius, 19 cent.
Longueur de l'apophyse styloide du radius à l'extrémité du
médius, ,15 cent.
Longueur de la cuisse, de l'épine iliaque antéro-supérieure au
bord externe du plateau tibial, 3 ? cent. et demi.
Longueur de la jambe au bord extérieur du plateau tibial à la
pointe de la malléole externe, il cent, et demi.
De la malléole externe à l'extrémité de l'orteil médian, 16 cent.
Gr... mane assez proprement, se sert de la cuiller, de la four-
chette et du couteau; l'appétit est bon, les digestions sont nor-
males, les selles régulières; il n'y a pas de vomissements.
Respiration et Cil'culalioll.-AusculLation du poumon et du coeur
normale. Pouls à 78 au moment de l'examen avec des inégalités
très grandes, il n'est pas perceptible au niveau de la radiale, on
ne le sent qu'au niveau de l'humérale.
La peau présente sur les membres et la plus grande partie du
tronc des altérations qui rappellent un peu l'icthyose. Elle est
rugueuse au toucher et couverle de line> squames épidermi-
ques. Sa couleur générale est basanée. A la face, un remarque de
très nombreuses taches de lentigo, principalement sur le nez et
le front, ainsi que sur les paupières inférieures. Il n'existe aucune
pigmentation ni des organes génitaux, ni du mamelon; pas de poils
au pubis ou sous les aisselles. Les cheveux sont assez fournis. Ils
sont durs, jaune rougeâtre, secs et gros. Ils descendent très bas
sur le front; les sourcils sont à peine marqués, les cils lins et peu
épais; pas le moindre poil de barbe bien que Gr... ait vingt-deux
ans. On remarque, en outre, diverses tuméfactions mollasses
semblables à de petits lipomes diffus ( ? ). L'une d'elles est située
à la partie droite de la base du cou, au niveau même de la clavi-
cule. Elle a le volume d'une petite orange, une consistance gélati-
niforme et se déplace avec la peau; du côté gauche, il en existe
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 149
une deuxième analogue à la première remontant en arrière jus-
qu'au bord antérieur du trapèze, mais moins volumineux que celle
de droite. Au niveau du creux axillaire et sur la paroi thoracique,
le tégument présente une disposition analogue.
Organes génitaux. - Le testicule droit est rendu au fond des
bourses; il est de la grosseur d'une noisette. A gauche, le scrotum
est vide, on sent à une certaine distance, dans le canal inguinal,
une petite tumeur assez dure, mais non douloureuse à la pression
qui parait être le testicule droit. A droite, au-dessus du testicule,
sur le trajet du cordon, on sent une tumeur du volume d'un oeuf
de pigeon sous laquelle bute ce testicule quand il remonte vers
l'anneau (hernie inguinale). - La verge ne semble pas anormale-
ment conformée; toutefois, il est impossible de découvrir le gland.
Le prépuce est fort long, et, quand on essaie de le repousser en
arrière, on détermine une vive douleur.
La sensibilité cutanée paraît normale dans ses différents modes.
Organes des sens. -Yeux normaux; pupilles régulières, iris jaune
brun foncé et contractile; Gr... dit voir mieux de l'oeil gauche
que de l'oeil droit. En ell'et, on remarque, sur la cornée de ce
dernier, une petite tache d'albugo qui couvre la région inférieure
de la pupille. Il raconte du reste qu'il aurait eu, à une époque
qu'il ne peut préciser, une maladie de l'oeil pour laquelle il serait
resté dix-huit mois à l'hôpital des Enfants. Il connait les cou-
leurs - Ouïe, odorat, goût normaux.
1880. 2 ! ¡, Juin. Le caractère est d'une susceptibilité extrême :
Gr... se considère comme un homme et ne tient plus aucun
compte des observations, il se met facilement en colère, il
demande à passer aux hommes, aux vieillards.
16 septembre. - Poids : 30 kilo,. Taille : lm,20.
Octobre. Vient à l'école depuis quatre ans; sous tous les rap-
ports ses progrès sont presque nuls; n'a pas de mémoire, ne peut
faire ni gymnastique, ni escrime.
21 septembre. Ne vient à l'école que par contrainte et ne fait
aucun progrès; il est convaincu qu'à son âge on doit lui laisser
une entière liberté, ne sait pas encore lire, mais écrit un peu;
stationnaire sous tous les rapports ; il est très frileux.
1881. 4 juillet.- Gr... ne fait à l'école que des apparitions dont
le résultat est nul au point de vue des progrès : à la gymnastique ;
il connaît maintenant tous les mouvements d'ensemble.
. 31 juillet. Poids : 29 kilog. 900. Taille, 1m.2l.
6 novembre. Gr... apris cette année régulièrement les douches,
qu'il prenait et cessait alternativement depuis deux ans; et, tan-
dis qu'autrefois il essayait de s'échapper, maintenant il les prend
seul. Il cherche à s'occuper un peu, aide au réfectoire à essuyer la
vaisselle et semble un peu moins lourd : on supprime les douches.
150 CLINIQUE NERVEUSE.
28 décembre. - Nous voyons le frère et la soeur de Gr... le
premier, qui a été soldat, a vingt-sept ans, mesure 4m,67, est
élancé, intelligent; sa soeur est âgée de treize ans, mesure ,je,40,
pèse 39k00; traits réguliers , elle est assez intelligente.
1882. 24 janvier. - A fait un peu de progrès en classe et en
gymnastique. Lecture courante, mais peu intelligente, calcul et
mémoire, néant. Poids : 3UwO0. Taille : lm,21.
9 mvl.- Lecture courante, mais peu expressive; calcul, ne con-
naît que l'addition et la soustraction; mémoire presque nulle, ne
peut apprendre ni histoire, ni géographie ; a quelques notions très
usuelles; en résumé, progrès peu appréciables; il prend assez de
plaisir à l'escrime, mais ne peut pas apprendre a danser. Il va à
l'école une heure, matin et soir; le reste du temps, il est occupé
au réfectoire à balayer et à laver la vaisselle.
Juin. - Poids : 3k800. Taille : 1m.22.
7 juillet. - Sorti en permission le 4, on lui a surpris, le 6, un
flacon d'eau-de-vie que ses parents lui avaient donné.
` ? 5 juillet.- Les deux testicules sont dans le scrotum. Le gauche
rentre facilement dans le canal inguinal; le droit ne peut pas
rentrer par suite d'une hernie qui descend dans les bourses et est
assez difficilement réductible. Les deux testicules sont 'gros
comme des billes. Pas de poils au pubis.
7 décembre.- Le teint a une coloration jaune cireux de plus en
plus prononcée; les paupières sont toujours légèrement bouffies.
Gr.. a delà répugnance au mouvement, surtout à la marche, ainsi
il n'aime pas les promenades, sauf celles où la voiture suit, ce
qui semble indiquer une fatigue rapide.
1883. Janvier. - Poids : 33k100. Taille : 4m,3.
30 juin. - Poids : 33k 300. Taille : lm,23 fort.
1884. 16 janvier. - Entré à l'infirmerie pour des douleurs du
côté de sa hernie (inguinale droite) et des douleurs aussi du côté
opposé. La hernie paraît réductible. Bain d'une heure. Soir : T.
R.37»,7.
17 janvier. Les douleurs ont disparu. T. R. 37°,5. - G... se
plaint de tousser un peu; voix enrouée; rien à l'auscultation.
30 janvier. - Poids : 31 kilog. Taille : ,lu.23.
Juillet. Poids : 34k5OO; Taille : i m24.
4885. Janvier. Poids : 38SO; Taille : 1m,24.
Juin. Poids : 36k" ? 00; - Taille : 1m2o.
16 décembre. Il est procédé à un nouvel examen du malade.
La peau du cuir chevelu est sèche, couverte d'écailles brunâtres,
principalement depuis le vertex jusqu'au voisinage du front qui
est ridé. Entre le tiers moyen du crâne, dans toute cette par-
tie, les cheveux, un peu roux, sont plus clair-semés. Les sour-
cils sont noirs, larges, assez bien fournis; les cils sont longs,
IDIOTIE AVEC CACHEXIE P1CH1'DEH1111QUIr. ' I
assez abondants par place; paupières supérieures très bouffies
diminuant considérablement l'ouverture des yeux, sans trace
d'oedème, mais rappelant les gonflements des paupières des
albuminuriques. Patte d'oie très prononcée. - La peau de la
face est sèche, squameuse, rugueuse au toucher d'une pâleur ci-
reuse avec de nombreuses macules. - Amygdales petites; mu-
queuse buccale pâle; langue un peu épaissie. Gr... dit qu'il ne
peut sortir la langue. La parole est très pâteuse, lente, monotone.
De chaque côté du cou, qui est très court, dans le creux sous-
claviculaire, existent des masses adipeuses, comme gélatini-
formes, tremblante ? , au toucher. La glande thyroïde, si elle existe,
serait très peu développée. Les aisselles sont complètement
glabres; à leur partie antérieure on trouve des masses adipeuses
tremblotantes se prolongeant jusqu'au sein que l'on croirait tout
d'abord très développé, mais on ne sent pas la glande.
Organes génitaux. Bourses pendantes, de niveau; testicules de
la dimension d'un petit oeuf de pigeon. Le testicule droit parait
un peu plus gros que le gauche, mais de ce côté il existe une
hernie assez volumineuse qui, lorsqu'elle n'est pas réduite, fait
descendre la bourse plus bas. Pénil glabre, mais au-dessus
quelques poils et de chaque côté une touffe. - Verge. Prépuce
long, verge déviée à gauche (hernie); circonférence, 90 millim.,
longueur, 90 millim. environ, car elle est assez difficile à appré-
cier à cause du tire-bouchon formé par le prépuce et du phimosis
qu'on ne peut pas réduire. -Quelques poils à la partie inférieure
de l'anus.
Sensibilité très vive au froid ; même à l'atelier il se couvre beau-
coup et vient se placer le plus près possible du poële.
Langueur corporelle; il fait tout avec lenteur. Il range avec
ordre toutes ses affaires; s'habille seul, assez bien, mais très len-
tement. La démarche est lourde ; parfois il court, mais très lour-
dement ; depuis quelque temps il a pris la manie de s'aider d'un
bâton pour marcher. Pas de céphalalgie; mémoire très médiocre;
il ne peut rien apprendre par coeur; sa mémoire est conservée
pour les faits et les choses usuelles. Entré à l'atelier de tailleur
en 1883, il y a fait des progrès, mais lents; actuellement il fait
bien les coutures et sait se servir du fer.
20 déc. L'urine contient 25 gr. 63 d'urée par litre. 1
22. Gr... est souffrant depuis ce matin; vers neuf heures et
demie, frisson assez violent; en arrivant à l'infirmerie vomisse-
ment de glaires, de'lait coagulé, etc., il n'a pas mangé ce matin
et se plaint d'une douleur siégeant au niveau de la fosse iliaque
droite. Partout ailleurs le ventre est médiocrement douloureux; il
152 " CLINIQUE NERVEUSE.
existe un tympanisme léger. - Langue légèrement saburrale;
deux garde-robes ce matin. La hernie se réduit avec une grande
facilité; pas de céphalalgie, ni d'épistaxis. - Teint bouffi et jau-
nâtre, coloration normale des conjonctives. Traitement : deux
verres d'eau de Sedlitz.
29. - L'urine examinée de nouveau contient 16 gr. 65 d'urée
par litre.
4886. f février. Angine très légère.
Juin. - Poids : 37 kil.; taille : 1 m. 26.
9 août. T. R., 37°,4. Soir : 37°,6.
10. - T. R. 37°,6. -Soir : 37°, 4.
11. - T. R. 37^,4. - Soir : 37 ? 4.
12. T. R. 37°,4. - soit- 37°.8.
13. T. R. 37°,8. - Soir : 37°, 8.
14. T. R. 37°,rz. Son- : 37°,4.
4â. - T. R. 37°,6. - Soir : 37°,6.
16. - T. R. 37°,4.
23 août. Un nouvel examen du malade montre peu de chan-
gements dans son état. Les paupières gauches sont plus bouffies
qu'à droite, aussi l'oeil droit est-il plus ouvert. A la lèvre supérieure,
aux extrémités, il existe un léger duvet : aux joues, rien. Les ais-
selles et le pénil sont glabres; à la racine des bourses se trouvent
quelques poils longs disséminés sur une hauteur d'un centimètre
et demi. Les bourses sont très pendantes. un peu plus à gauche
bien qu'il y ait une hernie signalée à droite. Le méat est normal.
Les organes génitaux ne présentent aucune autre particularité
qui n'ait déjà été signalée. Le pouls, un peu mou, est à 80; la
respiration à 24.
La sensibilité générale parait nor male sous toutes ses formes.-
L'ouïe parait plus développée à droite; l'odorat est un peu obtus;
le goût est normal, et Gr... distingue les couleurs également des
deux côtés.
Gr... s'occupe dans le service, nettoie les boutons des portes,
les cuivres des bains. Il travaille, en outre, toujours à l'atelier
du tailleur; il sait faire n'importe quelle couture, mais non les
rabattements, il sait repasser les boutonnières. Dans une séance
de quatre heures il peut faire un mètre cinquante de couture, ce
qui vaut à peu près quinze centimes; parfois il boude le maître
tailleur parce qu'il n'est pas assez payé; on lui donne dix centimes
de récompenses chaque samedi pour son travail à l'atelier. Il
est du reste avare, ne dépense rien et, avec les quelques sous
qu'on lui donne, il a accumulé 9 fr. 55, plus tard il s'achètera des
vêtements pour sortir; en attendant sa grande préoccupation est
de passer aux hommes.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE l'ACHYDERMIQUE. 153
A l'école Gr... a fait quelques progrès ; il écrit mieux ; sa lec-
ture est à peu près courante; il sait additionner, mais connaît
peu la soustraction ; sa tenue est bonne, et il est propre. Son ca-
ractère est toujours un peu irascible, grognon, ronchonneur,
parfois grossier dans son langage.
24. - Poids : 37 I : il. fort; taille : 1 m. 27 fort. L'urine est
claire, ne contient ni sucre, ni albumine. La température prise
sur chaque cuisse avec un thermomètre de surface est de 3 ? t,
à droite comme à gauche.
Le cas de Gr... est un exemple de myxoedème a
forme légère se rapprochant sous beaucoup de rap-
ports, comme nous le verrons plus loin, des formes
observées à la suite de l'extirpation totale de la glande
thyroïde. Nous appellerons dès maintenant l'attention
sur l'absence probable de laqlandelliyroïde, sur les boules
graisseuses cervicales et sur le développement tardif
et encore imparfait de la puberté; il semble toutefois que
uotre malade continue encore à se développer, quoique
lentement, ainsi que le montrent les mensurations se-
mestrielles de la taille : l ? 20en 1880; 1 DI ,22 en 1882;
fD',23 en 1884; 1mu5 en 1885; 1 ? 7 en août 1886.
L'état intellectuel de Gr... s'est aussi amélioré; la
mémoire paraît meilleure, il semble un peu plus vif,
surtout en été, et il a fait des progrès tant à l'école
qu'à l'atelier. ,
L'observation de Th..., que nous publierons dans
le prochain numéro, est au contraire un cas de myxoe-
dème type, où aucun symptôme ne fait défaut.
(A suivre.)
Archives, t. XII. 1 1
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE DANS LES PARALYSIES
HYSTÉRIQUES'; (suite et fin). ,
Par le Dr BABLNSKI,
Chef de clinique des maladies nerveuses à lu Sdtpctriere.
Observation III (résumée). R..., botaniste, est atteint, ci
l'âge de quarante et un ans. d'une hémiplégie gauche avec
hémianesthèsie gauche sensitivo-sens01'ielle qui s'atténue très
notablement un an après son début, à la suite d'une vive émo-
tion ; pendant ce temps, il est sujet à des attaques convulsives.
A quarante-trois ans, il est pris brusquement dans la rue
d'une attaque convulsive qui est suivie d'laémorrlaagies mul-
tiples et d'une hémiplégie gauche avec intégrité de la face;
celle hémiplégie subit plusieurs alternatives d'amélioration et
d'aggravation et voici sous quel aspect elle se présente plus de
trois ans après son début : le membre inférieur est complète-
ment paralysé; le membre supérieur est très affaibli; les
muscles du côté gauche, particulièrement ceux du membre
inférieur, sont atrophiés ; au point de vue électrique, il s'agit
d'une atrophie simple; les réflexes tendineux sont plus faibles
à gauche qu'à droite; en même temps, il a une hémines-
thésie sensitivo-sensorielle ; des plaques d'hyperesthésie, de
l'anesthésie du pharynx. Depuis le début de sa deuxième
hémiplégie, le malade a eu, à plusieurs reprises, des attaques
hystériques.
R... (Albert), botaniste, âgé de quarante-cinq ans, entre le
17 février 1886 dans le service de M. Charcot, à la Salpêtrière.
Antécédents héréditaires . Rien de spécial à signaler.
Antécédents personnels. Rougeole dans l'enfance. Pas de
syphilis. Pas d'alcoolisme. Le malade depuis 1871 a mené une
vie assez agitée. A partir de cette époque jusqu'en 1879, il a
voyagé en Australie, chargé par des sociétés savantes de réunir
des collections de botanique. En 1879, au mois de septembre,
il se laisse entraîner dans la fameuse expédition du marquis
de Rays, et part pour la colonie fictive de Port-Breton.
1 Voir tome XII, page 1.
DE l'atrophie musculaire. 155
Le récit que le malade fait de l'histoire de sa vie, à dater de
cemoment, etqui rappelleles aventuresdu capitaine Pamphile,
est en partie en contradiction avec des renseignements bien
positifs que nous possédons. Nous les passerons donc sous
silence, et nous n'indiquerons que les faits dont la réalité
parait solidement établie. Notons toutefois que le malade pré-
tend avoir reçu en Nouvelle- Guinée, dans un combat avec les
nègres, un coup de massue sur le côté gauche de la tète; il
aurait perdu connaissance et se serait réveillé paralysé de la
sensibilité et du mouvement dans tout le côté droit ; cette
paralysie aurait duré près d'un an et aurait disparu il. la suite
d'une trépanation faite à Saint-Thomas, Ilospital. Il nous a été
impossible de vérifier ce récit ; aussi ne le donnons-nous qu'en
faisant des réserves.
Ce qui semble en tout cas bien certain c'est que le voyage
de R... a été pour lui l'occasion de souffrances sans nombre et
de toutes sortes.- Arrivons tout de suite au mois de juillet
1881, époque à laquelle le malade, de retour en Europe, est
entré dans le service du Dr Wilks, à Londres.
L'observation de R... est, en effet, relatée dans les leçons
publiées par ce médecin', et voici les particularités les plus
intéressantes qu'on y trouve : le malade se plaignait d'une
douleur de tète du côté gauche; il était hémiplégique du mou-
vement et de la sensibilité du côté gauche, l'hémianesthésie
était sensitivo-sensorielle, les réflexes étaient abolis à gauche,
il y avait une hyperesthésie tout le long de la colonne verté-
brale, le malade était sujet à des crises pendant lesquelles les
membres se raidissaient et à la suite desquelles les membres
supérieurs et inférieurs gauches restaient contracturés pendant
quelques jours; il la suite d'une vive émotion, l'hémiplégie
s'est très atténuée. Le malade était morphiomane. Il a
quitté le service de M. Wilks imparfaitement guéri. Arri-
vons maintenant au mois de février 1883. Le 8 de ce mois, le
malade fut pris, dans la rue, d'une attaque convulsive très
violente à la suite de laquelle il vomit une grande quantité de
sang noir; on l'apporta à la Charité dans le service de M. Fé-
réol où il resta plusieurs mois, et son observation fut publiée
par l'interne du service, M. Leprévost 2. Voici ce qu'il y a de
1 Lectures on the Neruous ? 6'<c))t diseases ; par Eastes Wilks.
2 France médicale, )),année 1884.
156 CLINIQUE NERVEUSE.
plus essentiel à noter dans cette observation : à son entrée à
l'hôpital, le malade avait des hématémèses, des épistaxis et des
hématuries qui durèrent plusieurs jours; le côté gauche du
corps, sauf la face, était complètement paralysé, la parole était
embarrassée. Au bout de quelques semaines, son état s'amé-
liora notablement; mais, le 31 mars, survint une nouvelle
crise caractérisée, comme la précédente, par des hémorragies, et
l'hémiplégie, qui était en voie de guérison, reparut aussi com-
plète que le premier jour; au bout d'un certain temps, l'état
s'améliora de nouveau; la paralysie du membre supérieur
finit par disparaître; le membre inférieur gauche resta seul
paralysé , et M. Féréol fit construire pour lui, un pilon
avec lequel la marche devint possible; le 10 août, nouvelle
crise caractérisée par des hématémèses et une très vive cépha-
lalgie ; le 25 août, survient une crise caractérisée par un spasme
laryngé, qui amène presque l'asphyxie.
Le 8 septembre, le malade quitte la Charité.
Après sa sortie de la Charité, le malade alla dans un hôpi-
tal protestant à Neuilly où M. Monod le vit et d'où il l'amena
dans son service à Ivry vers la fin de 1883. M. Berbez, interne
à Ivry à ce moment, prit son observation, et voici quel était.
alors l'étatdeR... : le membre supérieur gauche est absolument
flasque; aucun mouvement n'est possible de ce côté; il en est
de même du membre inférieur gauche, et lorsque le malade
progresse au moyen de béquilles, il traîne après lui ce membre
comme un corps inerte qui balaye le sol; il se sert d'habitude
du pilon que M. Féréol a fait construire pour lui; le membre
inférieur droit parait un peu affaibli, le membre supérieur droit
se meut normalement; - rien au point de vue de la motilité du
côté de la face ; le pharynx et le voile du palais paraissent d'ha-
bitude très bien fonctionner, mais parfois les liquides revien-
nent par le nez. Il y a une hémianesthésie gauche absolue
qui comprend aussi la moitié gauche de la cavité buccale
et du pharynx. Les réllexes tendineux sont plus faibles à
gauche qu'à droite. La vision est plus faible à gauche, et de
ce côté l'odorat et le goût sont nuls. Il y a une hyperalgésie
tout le long des apophyses épineuses et une douleur très vive
dans la région pariétale gauche. Pendant son séjour à Ivry,
le malade eut plusieurs attaques se présentant à peu près sous
le même aspect et se développant dans les mêmes conditions :
DE l'atrophie musculaire. 157
le malade est adonné à la morphine ; toutes les fois que pour
une raison ou pour une autre on ne lui fait pas une de ses
injections habituelles, il est pris de douleurs vives dans la tête
et dans le rachis, ses membres se raidissent, se contracturent, t,
puis le côté droit est agité de secousses rapides, de mouvements
cloniques ; enfin le'malade revient à son état normal; mais peu
de temps après, la même série de phénomènes se reproduit et
il en est ainsi plusieurs fois de suite ; à la fin de l'attaque sur-
viennent des hématémèses et des hématuries qui persistent
plusieurs jours après l'attaque; le malade reste aussi contrac-
ture de ses membres pendant plusieurs jours et parfois sa
langue est contracturée et paraît tordue sur elle-même, de
telle sorte que la face inférieure est tournée en haut. Le malade
reste plusieurs mois à Ivry, puis quitte cet hospice et va en
Algérie, dit-il, et de là revient de nouveau en France; son
hémiplégie n'aurait jamais complètement disparu depuis cette
époque. Vers la fin de 1885, le malade entre de nou-
veau à la Charité dans le service de 11. Féréol où M. Berbez
interne du service l'examine de nouveau; et enfin dans le mois
de février 1886, le malade est envoyé de la Charité à la Sal-
pêtrière. Son état ne s'est pas modifié depuis sa dernière entrée
à la Charité et il est constitué comme il suit :
Etat actuel 18 février 1886. - Le malade, de taille moyenne,
parait très affaibli et présente un aspect qui dénote la fatigue
et la dépression ; il semble avoir toute sa lucidité d'esprit et
répond très bien aux questions qu'on lui pose; nous avons
pourtant fait remarquer déjà que certains renseignements
qu'il donne sont en contradiction flagrante avec les renseigne-
ments provenant d'autres sources et dont la réalité nous a
paru certaine; c'est pour ce motif que dans les antécédents
nous avons passé sous silence presque tout ce qui n'était pas
susceptible de vérification. Il existe une hémiplégie gauche,
flasque, incomplète. La face est absolument normale en ce qui
concerne la motilité. La motilité du membre supérieur est
très affaiblie; le malade peut faire exécuter à son épaule, son
coude, son poignet et ses doigts quelques mouvements, mais
ceux-ci sont très limités. Le membre inférieur est complète-
ment paralysé dans tous ses segments; pour marcher, le ma-
lade est obligé de se servir de l'appareil que lui a fait faire
M. Féréol et qui consiste en un pilon sur lequel repose le
genou du malade et qui est fixé au pourtour de son corps par
158 CLINIQUE NERVEUSE.
un cerceau d'acier; lorsque le malade marche, il avance le
membre inférieur droit en prenant un point d'appui sur le sol
au moyen de son pilon, et il avance le membre inférieur
gauche en inclinant son tronc à droite et en avant et en proje-
tant ainsi son membre sous l'influence de la pesanteur ; lorsque
le malade ôte son pilon et qu'il cherche à marcher avec des
béquille ? , pour avancer son membre inférieur gauche, il
incline son tronc en avant, et il entraine ainsi son membre, le
pied étant tourné en dehors et balayant le sol. Le membre
inférieur gauche est notablement plus grêle que le droit;
les masses musculaires sont manifestement atrophiées à
gauche et l'amyotrophie porte sur la fesse, la cuisse et la
jambe. Voici les chiffres qu'on obtient en faisant des mensura-
tions : .
DE l'atrophie musculaire. 15j
160 CLINIQUE NERVEUSE.
de l'atrophie musculaire. 161 t
ses modes (tact, douleur, température, sens musculaire). Dans
la région occipitale gauche existe une zone extrêmement dou-
loureuse qui est le siège des douleurs les plus vives lorsque le
malade omet de faire une de ses piqûres de morphine habi-
tuelles ; le long du rachis à gauche existe une hande d'hype-
resthésie. (Voir fig. 9 et 10.)
Le testicule droit est un peu douloureux à la pression. Dans
le flanc droit existe un point très douloureux.
Yeux. Le malade ne distingue pas les objets de l'oeil gau-
che ; il voit seulement s'il est dans l'obscurité ou à la lumière;
mais il voit mieux avec les deux yeux qu'avec l'oeil droit seul.
A droite il y a un rétrécissement du champ visuel très pro-
noncé, et de la diplopie monoculaire.
Ouïe. A gauche le malade n'entend le tic-tac de la mon-
tre que lorsqu'on l'applique sur l'oreille; à droite, il entend
bien.
Odorat. Le malade ne sent pas de la narine gauche.
Goût. Il est aboli à gauche. - Anesthésie du pharynx
Le malade est toujours adonné à la morphine, mais il a di-
minué sa ration quotidienne.
1° juillet. Depuis le mois de février le malade a eu à
plusieurs reprises des attaques semblables à celles qu'il avait
eues autrefois. Plusieurs tentatives à l'aide du massage et de
l'aimant ont été faites pour chercher à modifier l'état du ma-
lade, mais jusqu'à présent aucun résultat n'a été obtenu; il
faut noter seulement qu'après une application de l'aimant du
côté du bras gauche pendant douze heures ; on a obtenu un
transfert incomplet de la sensibilité. La paralysie est tou-
jcurs dans le même état; l'amyotrophie est restée station-
naire.
Il nous semble qu'il est possible de démontrer, à
l'aide d'arguments analogues à ceux dont nous nous
sommes servis dans les observations précédentes, que
la malade dont il est ici question est atteint d'une
paralysie hystérique avec amyotrophie.
162 CLINIQUE NERVEUSE.
Nous commencerons par établir que cet homme est
un hystérique et pour cela, il nous suffira d'énumérer
les divers stigmates qu'il présente : l'hémianesthésie
sensitivo-sensorielle, subissant un transfert incomplet,
il est vrai, sous l'influence de l'aimant, le rétrécisse-
ment du champ visuel, les plaques d'hyperesthésie,
l'anesthésie du pharynx, les attaques convulsives. En
ce qui concerne ces dernières, les caractères qu'elles
offrent permettent d'affirmer qu'elles sont de nature hys-
térique ; elles présentent pourtant quelques particula-
rités assez rares, que nous croyons intéressant de re-
lever : les hémorragies, hématémèses, hématuries et
épistaxis constituent, en effet, des épisodes très remar-
quables de ces attaques; d'autre part, nous ferons re-
marquer que l'apparition de celles-ci est généralement
liée à la suppression d'une des piqûres de morphine
que le malade a l'habitude de faire depuis plusieurs
années. Nous n'insisterons pas du reste sur ces divers
points n'intéressant qu'indirectement le sujet dont
nous nous occupons. Nous devons maintenant prouver
que la paralysie de ce malade est bien de nature hys-
térique et n'est pas imputable à une autre affection.
Supposons en effet qu'il s'agisse là d'une paralysie
due à une lésion organique, à une lésion de l'encé-
phale par exemple , et c'est évidemment eu égard au
mode de début de l'hémiplégie, à la perte de connais-
sance qui l'a précédée, c'est, disons-nous, à une lésion
siégeant dans cet organe qu'il faudrait songer. Eh
bien ! pourrait-on comprendre avec cette hypothèse les
caractères de cette hémiplégie et son évolution ? `1
Comment s'expliquer ces alternatives d'amélioration
et d'aggravation, l'intégrité de la face, la prédomi-
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 163
nance de la paralysie dans le membre inférieur, et la
diminution des réflexes tendineux du côté paralysé
dans une hémiplégie qui remonte à plus de trois ans ?
II nous semble qu'il est même inutile de discuter la
possibilité d'une affection organique de la moelle ou
des nerfs. Il suffit, en effet, de lire attentivement
l'observation pour rejeter d'une façon absolue de
pareilles hypothèses. Il s'agit donc là d'une affection
purement dynamique, et le malade étant un hystéri-
que, il est logique de mettre cette paralysie sur le
compte de l'hystérie; du reste, cette hémiplégie s'est
développée à la suite d'une attaque hystérique. Nous
ferons encore remarquer que l'aspect de la paralysie
du membre inférieur présente exactement les carac-
tères que Todd a assignés aux paralysies crurales, de
nature hystérique. Voici, en effet, comment Todd
s'exprime en comparant l'attitude que présente dans
la marche un sujet atteint d'hémiplégie organique et
celle qu'offre un malade atteint d'hémiplégie hystéri-
que'.
« Si l'on examine, pendant la marche, une per-
sonne atteinte d'hémiplégie en conséquence d'une
lésion organique du cerveau,'on voit que, pour porter
le membre inférieur paralysé en avant, cette personne
incline le tronc du côté opposé à la paralysie, faisant
reposer tout son poids sur le côté sain; et alors, par
un mouvement de circumduction, projette en avant la
jambe paralysée, de telle sorte que le pied décrit un
arc de cercle. L'hystérique ne marche pas de cette
façon, elle traîne lourdement (she drags) le membre
' Todd. Lect. on diseases of Nel'V01tS System. (Lcct. 1, p. 20.)
161 CLINIQUE NERVEUSE.
paralysé après elle, comme s'il s'agissait d'un corps
inerte.
« Il n'y a pas d'acte de circumduction, aucun effort
quelconque pour détacher le pied du sol. Ce dernier
en réalité sioceps) balaye le sol dans l'acception
rigoureuse du mot. »
Quant à l'amyotrophie, il nous semble qu'il est
impossible de contester qu'elle dépend étroitement de
l'hystérie; elle est, en effet, limitée au côté paralysé,
elle prédomine de beaucoup dans le membre inférieur,
dans lequel la paralysie est le plus marquée , et les
caractères de cette atrophie musculaire sont exacte-
ment semblables à ceux que nous avons relevés dans
les observations précédentes.
OBSERVATION IV (résumée). Boin..., palefrenier, est sujet de-
puis l'enfance à des maux de tête. A l'âge de vingt ans, après
avoir dormi une nuit en hiver dans une carrière, il se réveille
avec une hémiplégie gauche, la face étant indemne. La para-
lysie du membre inférieur disparaît rapidement. Il persiste
seulement une monoplégie brachiale qui flasque d'abord, s'ac-
compagne ensuite de contracture. Il y a en même temps de
l'hémianesthésie gauche sensitivo-sensorielle. Tout ces phéno-
mènes disparaissent petit à petit et le malade revient à la santé
au bout de quatre mois et demi. Environ six mois après, à la
suite d'une chute de cheval, se développe une nouvelle para-
lysie gauche, analogue à la précédente; le membre inférieur
est très peu atteint, la face est indemne; le membre supérieur
gauche est complètement paralysé ; en même temps on cons-
tate une hémianesthésie gauche sensitivo-sensorielle. La pa-
ralysie flasque au début se transforme bientôt en paralysie
avec contracture et les muscles du côté malade s'atrophient .
Puis la contracture disparaît; les mouvements reparaissent
progressivement et l'atrophie s'atténue en même temps.
Boin... (Victor), âgé de vingt et un ans, palefrenier, entre le
le 25 janvier 1884 dans le service de M. Bucquoy, à Cochin.
DE l'atrophie musculaire. 163
Antécédents héréditaires. - D'après ce que dit le malade, sa
mère aurait eu des attaques de nerfs, mais il est impossible de
déterminer s'il s'agit d'hystérie ou d'épilepsie.
Antécédents personnels. A seize ans, fièvre typhoïde qui
n'a pas été suivie de complications. Depuis l'enfance le ma-
lade a de fréquents maux de tête.
Au mois de février 1883, le malade ayant passé la nuit dans
une carrière, la température étant très froide, s'est réveillé le
matin, paralysé du côté gauche, ayant des fourmillement sdans
tout ce côté.
Pendant une demi-heure environ il lui a été impossible de se
lever. Au bout de ce temps, la faiblesse du membre inférieur
s'était très atténuée si bien qu'il pût se lever et retourner chez
lui. A ce momentvoici dans quel état il se trouvait : le membre
supérieur était complètement paralysé; il lui était imposible
de faire le moindre mouvement. Le membre inférieur était
simplement affaibli. 11 n'y avait rien à la face; pas de dévia-
tion de la commissure; le malade se rappelle seulement qu'il
lui était difficile de fermer l'oeil gauche. La sensibilité était
complètement abolie au membre supérieur; au membre infé-
rieur et à la face elle était simplement affaiblie. Le malade
a remarqué aussi que le goût était absolument aboli de côté
gauche et la vue affaiblie de ce côté. Quant aux autres sens il
ne peut donner de renseignements. Il n'y avait pas de troubles
psychiques. Huit jours après le début de cette paralysie le ma-
lade est entré dans le service de M. Moizard, à Cochin. Son
état du reste ne s'était pas modifié depuis le début et il per-
sista tel quel encore quinze jours environ. A ce moment. le
malade remarqua que le membre supérieur gauche devenait
raide, les doigts commencèrent à se fléchir, la main se fléchit
sur l'avant-bras et il devint impossible au malade de modifier
cette attitude; la raideur alla en augmentant, les doigts se flé-
chirent de plus en plus, si bien que les ongles finirent par pé-
nétrer dans la paume de la main et provoquèrent des excoria-
tions assez accentuées. L'état du malade ne se modifia plus
pendant une durée de deux mois.
Trois mois après le début de la paralysie, commença une
nouvelle phase, la contracture diminua d'intensité; puis les
mouvements spontanés qui jusqu'alors avaient été abolis au
membre supérieur, reparurent; la sensibilité reparut de son
166 clinique NERVEUSE.
côté, tant la sensibilité générale que la sensibilité spéciale, et
un mois et demi après le début de cette amélioration, le malade
était complètement guéri. La paralysie avait duré en tout
quatre mois et demi.
Le 2 janvier 1884, le malade après s'être enivré, était monté
à cheval et il tomba à terre; il affirme que la chute tenait à ce
que, étant ivre, il n'était pas fixé solidement sur son cheval,
mais qu'il ne s'était pas senti du tout étourdi avant de tomber,
qu'il n'avait éprouvé étant à cheval aucune sensation de ver-
lige, et qu'il n'avait pas perdu connaissance, car il se rappelle
très bien tout ce qui s'est passé jusqu'au moment où il fut
étendu sur le sol.
Une fois à terre, le malade perdit connaissance et resta dans
cet état pendant quatorze heures environ. Quand il revint à
lui, il lui fut possible de se lever, de- marcher, mais pourtant
le membre inférieur gauche était, dit-il, manifestement plus
faible que le droit. La face ne présentait rien de particulier,
elle n'était pas déviée, mais la vue lui paraissait plus trouble
à gauche qu'à droite. Le membre supérieur était complète-
tement paralysé : les mouvements des doigts, de la main, de
l'avant-bras et du bras étaient tout à fait abolis. Il resta dans
cet état jusqu'au moment de son entrée à l'hôpital.
Etal actuel (· ? 3 janvier 1886). Le malade parait jouir
d'une santé parfaite, il a toute sa lucidité d'esprit, et il semble
doué d'une excellente mémoire et d'une intelligence assez
vive.
Le membre supérieur gauche est complètement paralysé
comme le jour de l'accident, et cette paralysie est flasque. Le
membre inférieur gauche est un peu affaibli. La face est abso-
lument normale au point de vue de la motilité. La sensibilité,
au tact, à la température, à la douleur, et le sens musculaire
sont absolument abolis au membre supérieur gauche. Au
membre inférieur gauche, la sensibilité est affaiblie. A la
face il y a hémi anesthésie gauche complète. Abolition du goût
et de l'odorat à gauche. Légère diminution de l'ouïe et do la
vue à gauche. La contractilité faradique, est conservée du
côté paralysé. - Les réflexes tendineux sont conservés.
5 février. Le membre supérieur gauche, qui était flasque
au début, devient raide. Les doigts se fléchissent sur la main,
la main sur l'avant-bras et l'avant-bras sur le bras, ,
DE l'atrophie musculaire. 167
10. - La raideur s'est accentuée; le membre est contrac-
turé, les ongles des doigts s'enfoncent dans la paume de la
main, et pour empêcher l'ulcération de la peau, on interpose
entre les doigts et la paume de la main une pelote de ouate.
15. - On s'aperçoit que le membre supérieur gauche est
beaucoup plus grêle que le droit. Entre la plus grande cir-
conférence du bras droit et celle du bras gauche il y a 3 cen-
timètres de différence; à la partie supérieure de l'avant-
bras, il y a entre les deux côtés une différence de 3 centi-
mètres, comme au bras. La contractilité faradique persiste,
mais elle est un peu diminuée à gauche.
Le malade se plaint de fortes douleurs dans la nuque et le
bras gauche.
tel mars. Les douleurs ont disparu.
15. - On remarque que l'état du membre supérieur se mo-
difie, la contracture est moins accentuée.
30. - La contracture qui avait été en s'atténuant sans cesse
depuis le 15 mars, a complètement disparu, la paralysie est
redevenue flasque.
3 av2,il.- Depuis deux jours est survenue une modification
importante dans l'état du membre supérieur; quelques mouve-
ments des doigts très limités, il est vrai, sont possibles.
lorsqu'on exerce une traction sur les doigts, on provoque une
légère douleur ; quant aux mouvements de la main sur
l'avant-bras, de l'avant-bras sur le bras et du bras sur l'épaule,
ils sont toujours absolument impossibles.
On examine aussi ce jour-là le membre inférieur gauche, il
ne présente plus rien d'anormal, il est aussi fort que celui du
côté opposé.
La sensibilité du membre supérieur sauf aux doigts est tou-
jours complètement abolie ; il en est de même à la face, au
membre inférieur elle est simplement émoussée.
Les sens spéciaux sont toujours dans le même état.
9. Le malade commence à mouvoir l'avant-bras sur le
bras.
0. Le malade commence à mouvoir un peu le bras sur
l'épaule.
5 mai. Le malade demande à sortir, et voici dans quel.
état il se trouve : . le membre supérieur gauche n'est plus para-
168 CLINIQUE NERVEUSE.
lysé; les mouvements des divers segments sont possibles, mais
ils sont moins étendus que ceux du côté opposé. L'atrophie
est moins accentuée qu'autrefois; entre les circonférences des
bras et des avant-bras droits et gauches il n'y a plus que 2 au
lieu de 3 centimètres de différence.
La sensibilité de la face du côté gauche est revenue en par-
tie. Pour le reste, pas de modifications.
Depuis sa sortie, le malade n'a pas été revu.
Le malade avait été examiné à une époque où l'hys-
térie chez l'homme n'était VIS encore connue, et le
diagnostic exact n'avait pas été porté à ce moment;
c'est ce qui explique aussi pourquoi il n'est pas fait
mention, dans le cours de l'observation, de certains
stigmates hystériques, de certains phénomènes qui
n'ont pas été recherchés chez ce malade, et qui peut-
être existaient chez lui ; tels que rétrécissement du
champ visuel , polyopie monoculaire, etc. Nous
publions pourtant cette observation, car ce qui y est
consigné nous paraît absolument suffisant pour établir
rigoureusement qu'il s'est agi chez lui d'une paralysie
hystérique, avec amyotrophie. Il nous semble même
que, pour le démontrer, il n'est pas nécessaire de faire
une longue argumentation. Si l'on suit avec tant soit
peu d'attention les diverses phases de la maladie, on
est amené fatalement à rejeter l'hypothèse d'affection
organique. Supposons pourtant un instant qu'il en
soit ainsi et que les diverses manifestations motrices
et sensitives aient été sous la dépendance d'une lésion
organique de l'encéphale ; dans cette hypothèse, on
considérerait la contracture développée dans le mem-
bre supérieur comme due à une dégénération secon-
daire. Mais alors, où localiser la lésion ? Il faudrait
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 169
évidemment la placer flans l'hémisphère droit, puis-
que la paralysie est à gauche ? L'hémianesthésie sensi-
tivo-sensorielle serait en rapport avec l'idée d'une
lésion de la partie postérieure de la capsule interne ;
et l'on admettrait que cette lésion empiète sur la par-
tie antérieure de la capsule interne pour produire les
troubles moteurs. Mais une pareille hypothèse nous
semble difficile à soutenir ; car, la localisation pres-
que absolue de la paralysie au membre supérieur
n'est guère conciliable avec les données anatomo-
pathologiques que nous possédons . Il serait encore
plus vraisemblable de supposer la présence de deux
foyers, l'un dans la partie postérieure de la capsule
interne, en rapport avec l'hémianesthésie, l'autre dans
les circonvolutions, en rapport avec la paralysie. Mais
avec cette hypothèse comment pourrait-on comprendre
la disparition de la contracture et le retour des mouve-
ments ? Une semblable évolution des accidents est
inadmissible; cette supposition est en contradiction
absolue avec les connaissances précises que nous
possédons sur la dégénération descendante.
On est donc dans la nécessité même, après une
courte analyse des faits, de rejeter l'hypothèse de
lésion* organique et de mettre la paralysie sur le
compte d'une affection dynamique des centres nerveux.
Quant à l'hémianesthésie, il nous paraît tout naturel
de la rattacher à la même cause que la paralysie ; du
reste, l'hémianesthésie sensitivo-sensorielle, d'origine
organique est tout à fait exceptionnelle, tandis qu'elle
est très fréquente, dans le domaine dynamique et
constitue un des stigmates les plus importants de l'hys-
térie, et presque suffisant à lui seul pour établir son exis-
ARCHIVES, t. XII. 12
170 CLINIQUE NERVEUSE.
tence. Dans le cas actuel cette bémianesthésie jointe
à la vive céphalalgie éprouvée par le malade, nous
permet, croyons : nous, d'établir que nous avons affaire
à un hystérique. Dès lors, il devient évident que la
paralysie doit être aussi mise sur le compte de l'hys-
térie. Ainsi donc, les caractères présentés par la
paralysie nous ont conduit à établir qu'elle relevait
d'une affection dynamique . Nous avons été ainsi
amenés à considérer de même l'hémianesthésie comme
dynamique . Nous avons montré ensuite que cette
hémianesthésie dépendait de l'hystérie , et enfin,
revenant sur nos pas, nous nous sommes fondé
sur ce que le malade est un hystérique, pour sou-
tenir que la paralysie devait être aussi de nature hys-
térique.
L'amyotrophie étant limitée au membre paralysé,
ayant débuté peu de temps après le commencement
de la paralysie et s'étant atténuée lorsque les mouve-
ments sont revenus, il est de toute évidence qu'elle se
rattache étroitement à la paralysie hystérique et qu'elle
ne peut relever d'une autre cause.
Observation V (résumée). - Dem..., garçon boucher, trente
ans; pas d'antécédents nerveux, soit héréditaires, soit per-
sonnels. A la suite d'un traumatisme sur le membre supérieur
gauche, ayant, selon toute vraisemblance, occasionné une
fracture de l'avant-bras, on applique au malade un appareil
plâtré qu'il garde quarante-cinq jours. Lorsqu'on lui enlève
l'appareil, on constate que le membre supérieur est contrac-
turé. Le malade est examiné à la Salpêtrière quatre mois
environ après l'accident; la contracture persiste toujours, les
mouvements du membre supérieur sont presque complètement
abolis. Il existe en même temps une hémianesthésie sensitivo-
sensorielle ; un rétrécissement du champ visuel. Le malade
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 171
est sujet à des attaques de dyspnée, de nature hystérique. Il
existe une amyotrophie dans le membre paralysé. A la suite
d'une séance de massage de dix minutes, la contracture
s'atténue très notablement, et les mouvements reviennent en
partie.
Dem..., garçon boucher, trente ans, entre, le 18 mai 1885,
dans le service de M. le professeur Charcot, à la Salpêtrière.
Antécédents héréditaires. Grands-parents morts âgés.
Père, mort à cinquante ans, d'une maladie aiguë. Mère,
morte à quarante-six ans; pas nerveuse. Un frère de la
mère a du sable dans les urines. Frère et sceur bien portants
ainsi que leurs enfants.
N'a jamais entendu dire qu'il y ait eu aucun cas de paralysie,
ni d'attaques d'aucune sorte, ni d'aliénation dans la famille.
Antécédents personnels. Lui-même n'a jamais été malade.
Il est né à Saint-Victor, près de Ribérac (Dordogne), et est
resté à la campagne jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans, gardait
les moutons, allait aux foires. A été au service militaire pen-
dant un an. Habite Paris depuis cinq ans; a travaillé chez
différents bouchers de la ville, ainsi qu'aux abattoirs chez les
bouchers.
Pas d'alcoolisme : chez lui, il ne buvait jamais; à Paris, il ne
buvait pas plus d'une chopine par jour. Boit habituellement
deux verres de sang le matin, depuis qu'il est à Paris. Pas
de syphilis. Il travaillait en dernier lieu aux Halles cen-
trales ; c'est là que lui est arrivé son accident.
Il y a quatre mois et demi (le malade ne peut dire au juste
la date), il était en train de décrocher un demi boeuf à l'étal
avec un camarade, lorsque le crochet cassa, et le malade fut
renversé, son bras gauche pris sous le boeuf. Il dit avoir entendu
craquer quelque chose dans son poignet; il n'a pas perdu
connaissance, seulement il était étourdi, ne savait plus au
juste où il était ; il est resté par terre cinq minutes, jusqu'à
ce que l'on eut enlevé le demi boeuf, dont le poids était
considérable (ce boeut avait été primé aux concours des ani-
maux gras).
Il était cependant assez mal pour qu'on le transportât chez
le pharmacien voisin, qui lui donna une potion cordiale, et
172 Z CLINIQUE NERVEUSE.
lui enveloppa le bras de compresses phéniquées. Le malade
n'a jamais éprouvé de douleurs dans son bras, ni au moment
où il était pris sous le boeuf, ni les jours suivants. Mais, voyant
que son bras enflait toujours, il se décida à entrer à l'hôpital,
quatre jours seulement après l'accident.
Non seulement le malade n'éprouvait pas de douleurs dans
le bras même, mais il ne le sentait pas, le bras était comme
mort, à partir de l'épaule. Il lui semblait avoir, dit-il, au lieu
de bras un poids de quarante livres à supporter. Aucun mou-
vement n'était possible, il n'y avait aucune raideur dans le
membre.
A Saint-Antoine, on lui a mis pendant quinze jours des
compresses, des cataplasmes; le poignet, la main, les doigts
étaient très enflés, légèrement fléchis ; il ne pouvait pas les
redresser lui-même, mais on pouvait les étendre passivement.
Quinze jours après son entrée, on l'aurait endormi au
chloroforme « pour lui recasser le poignet » dit-il, puis on
lui a mis un appareil plâtré qu'il a gardé quarante-cinq
jours. A cette époque, on l'a renvoyé de l'hôpital, faute
de place, et on lui a dit de revenir plus tard, pour se faire
enlever l'appareil plâtré. Il est sorti et est allé à la mairie pour
demander des secours. Là, le médecin de la mairie l'a vu, et,
comme le malade lui disait qu'il avait son appareil depuis
quarante-cinq jours, le médecin a jugé à propos de lui enlever
l'appareil. C'est alors que les doigts se sont fléchis, contractu-
rés dans la main, dans l'état où ils sont aujourd'hui.
Huit jours après, il est retourné à la mairie; le bras était
dans le même état.
Puis il est entré à Lariboisière, où on l'a endormi pour lui
étendre la main sur une planchette, mais la main ne s'est pas
maintenue dans cette situation. Quelques jours après, on a
renvoyé le malade, qui est retourné chez lui en Dordogne,
avec sa contracture, à Ribérac, puis à Bordeaux, où il est
resté quinze jours à l'hôpital. Le malade revint à Paris. Il alla
trouver M. Périer, qui l'a envoyé à la Salpêtrière le 18 mai.
Etat actuel (18 mai 1886). - Homme de taille moyenne,
bien constitué. Pas de troubles viscéraux. Ne présente rien
d'insolite au point de vue mental. Intelligence moyenne, cul-
ture rudimentaire, sait à peine lire et écrire. Il a un peu d'am-
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 173
nésie : il ne peut pas dire ni le jour ni le mois où son acci-
dent a eu lieu. Quand on lui demande son adresse, il ne peut
répondre, et cherche dans sa poche un papier sur lequel elle
est inscrite.
Le malade porte son bras gauche en écharpe.
L'avant-bras est légèrement fléchi sur le bras, en faisant
avec lui angle obtus; il est dans la supination; le coude est
presque complètement immobilisé dans cette position. Le
bras est dans la position normale, le long du corps, légèrement
contracture; on ne peut l'écarter du tronc que d'une façon
très limitée. Les doigts sont fortement fléchis sur la main,
allongés et contracturés. Ils sont serrés les uns contre les
.autres, avec une tendance à se recouvrir en se portant
vers l'axe longitudinal du médius. Le pouce est fortement
fléchi vers la main, l'ongle incrusté sur la face externe de
l'index. ,
Les mouvements volontaires sont très limités, pour ainsi dire
nuls, dans toute l'étendue du membre.
Les mouvements passifs ne sont guère plus étendus.
Lorsque l'on essaie de redresser les doigts, le malade accuse
une certaine douleur, au niveau de l'extrémité des doigts.
Les réflexes du coude et du poignet sont exagérés à gauche.
On détermine facilement une trépidation des doigts, surtout du
pouce, en cherchant à les redresser; par moment cette trépi-
dation est spontanée pour le pouce et rappelle l'aspect du
tremblement dans la maladie de Parkinson.
La sensibilité cutanée à la piqûre et au froid est abolie ou du
moins amoindrie dans toute la hauteur du membre, sauf à
la face palmaire des doigts et dans un triangle qui descend de
l'aisselle vers le bras. Il en est de même de la sensibilité pro-
fonde et du sens musculaire. Le coude, le poignet, l'épaule
peuvent être impunément tordus, tirés en tous sens, le mala-
de ne sait pas ce qu'on lui fait; il ignore la position qu'occu-
pent les divers segments du membre. Il n'en est, pas de même
des doigts dont la sensibilité est conservée et même exagérée
à la face palmaire. (Voir les figures 11 et 12.)
Lorsqu on tord l'épaule, le malade ne sent qu'un tiraille-
ment au niveau de l'extrémité interne de la clavicule et à
l'omoplate.
1711. 1· CLINIQUE NERVEUSE.
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 175
176 CLINIQUE NERVEUSE.
Les divers segments du membre sont manifestement
atrophiés.
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 177
Il revient le 18 juin. Son état, depuis sa sortie, ne s'est
guère modifié.
En ce qui concerne la paralysie avec contracture, pas de
changement. L'amyotrophie n'a pas augmenté. La région de
l'épaule qui était complètement insensible a recouvré en partie
sa sensibilité. Le malade nous dit qu'il a eu, le 16 juin, une
attaque de dyspnée.
Le 21, le malade demande à sortir. On essaye, avant de le
laisser partir, d'agir sur sa contracture au moyen du massage.
Voici ce que l'on fait : on pratique sur les téguments du bras
gauche des frictions avec les mains enduites de glycérine, et,
en même temps, on cherche par des tractions à redresser les
doigts et à faire mouvoir le poignet, le coude et l'épaule; celte
opération provoque des douleurs assez vives au niveau de la
face palmaire des doigts, mais elle amène rapidement un résul-
tat très satisfaisant; la contracture s'atténue en peu de temps,
les doigts se redressent et le malade arrive, au bout de dix
minutes, à faire exécuter spontanément à ses doigts, son poi-
gnet, son coude et son épaule, des mouvements relativement
assez étendus. A cause des douleurs que le malade ressent dans
les doigts, on suspend le massage en recommandant au malade
de revenir le lendemain à l'hôpital. Mais celui-ci qui, d'après
les renseignements que nous avons eus sur son compte, s'est
habitué depuis son accident à vivre dans l'oisiveté et à se ser-
vir de sa paralysie pour se livrer à la mendicité, craignant
sans doute d'être guéri, ne s'est plus présenté à l'hôpital.
Après les discussions dans lesquelles nous sommes
entrés à propos des observations précédentes, il nous
semble que nous n'aurons pas besoin de discuter lou-
guement pour démontrer qu'il s'agit la encore d'une
paralysie hystérique avec amyotrophie. L'existence de
l'hystérie chez ce malade ne peut être contestée. L'hé-
mianesthésie seusitivo-sensorielle, le rétrécissement
du champ visuel, les attaques de dyspnée, sont des
arguments tout à fait suffisants».
Quant à la paralysie, elle présente des caractères
qui permettent d'affirmer qu'elle est de nature hysté-
178 CLINIQUE NERVEUSE.
rique, et qu'elle ne peut relever d'une lésion orga-
nique. Il nous suffira de faire remarquer qu'une séance
de massage de dix minutes a suffi pour ramener en
grande partie les mouvements dans un membre qui,
depuis plus de deux mois, était complètement paralysé.
II existe une amyotrophie dans le membre paralysé
qui doit être de toute évidence rattachée à la paralysie
hystérique. Les muscles devaient être examinés élec-
triquement, mais le départ précipité du malade nous
a empêché de le faire.
Observation VI (résumée). 119ouill..., âgé de vingt-neuf ans,
homme de peine au chemin de fer; pas d'antécédents ner-
veux, soit héréditaires, soit personnels. A la suite d'un violent
traumatisme sur l'épaule droite, est atteint d'une paralysie
complète du bras droit. Dans les premiers jours, il y avait en
même temps, un affaiblissement du membre supérieur gauche
et dps membres inférieurs, mais ces phénomènes ne furent que
transitoires. Trois mois après l'accident, le malade est exa-
miné à la Salpêtrière et on constate les symptômes suivants : .'
monoplégie droite complète avec abolition absolue de la sen-
sibilité sous toutes ses formes dans le membre supérieur droit.
Diminution de la sensibilité dans tout le reste du corps. A bo-
lilion du goût et de l'odorat. Affaiblissemeut de l'ouïe. Rétré-
cissement double du champ visuel et diplopie monoculaire.
Anesthésie du pharynx. Amyotrophie légère du membre para-
lysé, simple au point de vue des réactions électriques.
Mouill... (François), âgé de vingt-neuf ans, entre le 1° mars
1886 dans le service de M. Charcot, à la Salpètrière.
Antécédents héréditaires. Aucun des membres de sa
famille qu'il connaît (père, mère, trois soeurs, tantes, oncles)
ne présente ni n'a jamais présenté de phénomènes nerveux.
Antécédents personnels. -N'a jamais eu de maladie sérieuse.
N'est ni syphilitique, ni alcoolique.
Le 1er décembre 1885, le malade, travaillant comme homme
de peine dans une gare, a, dans une manoeuvre, l'épaule droite
prise entre les tampons d'un wagon et d'une locomotive; la
DK L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 179
région sous-claviculaire jusqu'au mamelon, et le bras droit
auraient été aussi comprimés. Les ouvriers présents, s'aperce-
vant de l'accident, firent signe au machiniste qui, aussitôt, fit
reculer la locomotive et l'éloigna ainsi du wagon, mais le
patient tomba à terre immédiatement après qu'il cessa d'être
pressé par les deux tampons, et il resta ainsi vingt minutes
sans connaissance. Lorsqu'il revint à lui après ce laps de
temps, il sentait, dit-il, sa respiration très gênée, il était très
oppressé, il lui semblait en même temps que son membre su-
périeur droit, était absentet il avait en place la sensation d'un
corps très lourd qu'on aurait appendu au côté droit du tronc;
dès son réveil, il s'est aperçu qu'il lui était impossible de mou-
voir l'épaule, le bras, l'avant-bras et la main; les mouve-
ments des doigts seuls étaient possibles; à ce moment aussi la
région comprimée n'était pas dutout tuméfiée; le malade pré-
tend même qu'elle était aplatie, mais cet aplatissement n'a
pas été constaté par un médecin ni par les assistants; c'est lui-
même qui, en portant la main gauche sur l'épaule droite, s'est
figuré que son épaule était aplatie. Il fut aussi impossible
au malade de se lever après son réveil, et il fut transporté
immédiatement à Lariboisière dans un service de chirurgie
dirigé à ce moment par M. Brun, chirurgien du Bureau cen-
tral. Il arriva à l'hôpital à huit heures du soir, et le lendemain,
à la visite, il fut examiné par M. Brun.
A ce moment, l'épaule était déjà un peu enflée; il y avait
une ecchymose occupant la région de l'épaule, la région sous-
claviculaire et une partie de la face; la sensibilité à la piqûre
du membre supérieur était complètement abolie, mais le ma-
lade éprouva des douleurs lorsqu'on fit sur son membre des
tractions assez fortes pour voir s'il y avait fracture ou luxa-
tion ; la motilité du membre supérieur était, comme au début,
abolie; les doigts seuls pouvaient se mouvoir un peu; la moti-
lité des doigts persista encore deux jours, puis disparut à son
tour. Le bras fut mis en écharpe. Le lendemain, le gon-
flement devint encore plus considérable et dura environ huit
jours. Pendant les treize premiers jours, le malade se sentait
un peu étourdi; en même temps, les membres inférieurs
étaient assez affaiblis. Le malade essaya de se lever le huitième
jour, mais il lui fut impossible de se tenir debout; le membre
supérieur gauche était aussi affaibli, et le malade ne s'en servait
qu'avec difficulté.
180 CLINIQUE NERVEUSE.
Le malade au bout de treize jours peutse lever, son membre
supérieur gauche avait recouvré sa force ; le membre supérieur
droit seul restait paralysé et d'après ce que dit le malade, il
était dans la situation dans laquelle il se trouve actuellement.
- On l'électrisa, mais sans succès, et M. Brun supposant une
paralysie hystéro-traumatique, l'envoya à l'Hôtel-Dieu dans
le service des. Merklen, médecin du Bureau, central, qui con-
firma le diagnostic de M. Brun et qui, après avoir gardé le ma-
lade quelque temps dans son service, voulut bien l'en-
voyer à la Salpêtrière et nous remettre l'observation qui
avait été prise par son interne. Voici dans quel état se pré-
sentait le malade le jour de son entrée à l'Hôtel-Dieu, le 13
janvier 1886.
Le malade est un homme vigoureux, bien musclé, ayant
toute sa présence d'esprit, mais paraissant d'une intelligence
au-dessous de la moyenne.
Le membre supérieur droit pend flasque et inerte le long du
corps; l'épaule est abaissée. A la meusuration on trouve qu'à
18 centimètres au-dessus de l'apophyse coracoïde la circonfé-
rence du bras est de 31 cent. à gauche et de 30 cent, à droite;
à l'avant-bras à 16 cent. au-dessous de l'épicondyle, on trouve
24 c. et demi à gauche et 23 c. et demi à droite. Les mus-
cles se contractent très bien au moyen des courants induits.
La sensibilité au tact, si la douleur, à la température, est
complètement abolie dans les mêmes limites que lors de l'en-
trée du malade à la Salpêtrière ; nous y reviendrons plus
loin.
Les réflexes tendineux du coude et du poignet sont con-
servés.
Le membre supérieur droit est un peu violacé et il est plus
froid que celui du côté opposé.
L'ouïe est un peu moins forte du côté droit que du côté gau-
che.
La sensibilité gustalive semble diminuée à droite.
Les yeux paraissent normaux des deux côtés.
Le malade n'a jamais eu d'attaques de nerfs.
Le pression au niveau des fosses iliaques , du rebord costal
droit et du testicule droit est douloureuse, mais la douleur
reste localisée dans la zone où l'on pratique la compression.
Toutes les autres fonctions s'effectuent d'une façon nor-
male.
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 181
On soumet le malade à l'électrisation. mais ce traitement
n'amène aucun résultat. Il entre à la Salpêtrière le 1er mars
1886, et voici ce que l'on constate alors :
Le malade est à peu près dans le même état que lors de son
entrée à l'Hôtel-Dieu. - Son état général est toujours très
bon. La paralysie du membre supérieur droit est complète
et flasque. Les mouvements de l'épaule, du coude, du poignet,
des doigts, sont tout à fait abolis. La sensibilité au tact, à
la température, à la douleur est abolie, dans les limites indi-
quées sur les figures 13 et 14. Le sens musculaire est
aboli. Les réflexes tendineux sont affaiblis à droite.
Le membre supérieur droit est plus froid que le
gauche. La main droite est plus rouge que la gauche. A
la mensuration on trouve les mêmes chiffres qu'à l'Hôtel-Dieu
et la diminution de volume du bras et de l'avant-bras parait
due à \' atrophie des muscles, mais il est impossible de déter-
miner si l'atrophie porte plus particulièrement sur tel ou tel
muscle. Il n'y a pas de secousses fibrillaires. Pas d'exa-
gération de l'excitabilité idio-musculaire. A Yélec Irisation,
les muscles se contractent normalement ; il n'y a pas de réac-
tion de dégénérescence. Il y a augmentation de la résistance
électrique..
La sensibilité des autres parties du corps n'est pas normale;
elle est très affaiblie dans toute la partie supérieure du corps,
un peu affaiblie dans la partie inférieure.
La sensibilité dupharynx est abolie. Le goût et l'odorat
sont abolis des deux côtés. L'ouïe est affaiblie des deux côtés.
Il y a un rétrécissement du champ visuel double et très prononcé;
de la diplopie monoculaire ; pas de dyschromatopsie. -Pas de
pointsbystérogènes. Pas d'attaques. -
Différents moyens ont été employés pour chercher à faire
disparaître cette paralysie (massage, électrisation, flagellation
sur la région temporo-occipitale du côté opposé à la mono-
plégie, mais rien n'a réussi, et plus de quatre mois après l'en-
trée du malade à la Salpêtrière son état ne s'est encore aucu-
nement modifié. L'amyotrophie n'a pas augmenté.
Cette observation est presque calquée sur les deux
cas de monoplégie hystéro-traumatique publiés par
M. Charcot et dont nous avons déjà parlé. Nous ne
182 CLINIQUE NERVEUSE.
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 183
18 \ CLINIQUE NERVEUSE.
discuterons même pas le diagnostic. Il s'agit là, sans
qu'il soit possible de le contester, d'une paralysie hys-
térique. Mous relèverons particulièrement l'amyotro-
phie qui est ici bien plus atténuée que dans les obser-
vations précédentes, et qui aurait pu passer inaperçue
si notre attention n'avait pas été spécialement attirée
de ce côté.
Nous nous sommes efforcé de démontrer, à propos
de chacune des observations que nous avons rappor-
tées, qu'il s'agissait bien là de paralysies hystériques,
que l'atrophie musculaire dépendait étroitement de
ces paralysies, et que, par conséquent, elle était de
nature hystérique. Nous devons maintenant, comme
nous l'avons annoncé, chercher par une étude compa-
rative de ces diverses observations si cette amyotrophie
présente quelques caractères propres qui permettent
de la classer dans un cadre spécial.
Et tout d'abord, en ce qui concerne l'intensité de
cette amyotrophie, y a-t-il quelque chose de particulier
à signaler ? L'examen des divers cas que nous avons
observés montre que l'atrophie musculaire présente à
ce point de vue d'assez grandes différences. Rappelons
quelques-unes des mensurations que nous avons faites.
Observation 1
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 185
Observation II l
186, . CI,INIQUE NERVEUSE. 1, ,
si on la compare aux atrophies musculaires que l'on
observe dans la maladie d'Aran-Duchenne, dans la
paralysie spinale de l'adulte, dans les myopathies
primitives, on remarque qu'elle est relativement modé-
rée ; elle est loin d'atteindre les proportions qu'elle
peut présenter dans les affections que nous venons de
citer. Cela tient-il à ce que le nombre des observations
de ce genre est encore limité, et ne rencontrera-t-on pas
plus tard des cas contredisant la proposition que nous
venons d'énoncer ? Il est impossible de répondre à
cette question; mais, du reste, nous ne prétendons
pas établir ici des règles absolues, nous cherchons
seulement à noter ce qui nous semble ressortir de
l'examen de nos malades. Dans l'Observation VI,
l'amyotrophie est extrêmement faible et on pourrait
presque se demander s'il ne s'agit pas là d'une asy-
métrie puur ainsi dire normale, c'est-à-dire antérieure
à la paralysie. Nous ne le croyons pas, car le malade
est droitier et que par conséquent, selon toute vrai-
semblance, le côté droit était, ayant l'accident, le plus
développé. Nous sommes d'autant plus porté à admettre
que l'atrophie est bien, dans ce cas, attribuable à l'hys-
térie, que, dans. plusieurs^ autres observations que
nous ne publions pas pour ne pas donner à ce mémoire
'1 < ' . j J t ? J 1) t
une trop grande longueur, nous avons relevé une
diminution de volume analogue, et il nous semble
que dans un grand nombre de cas de paralysie hysté-
rique, sinon dans la majorité, il existe une amyotror
phie qui peut rester, pour ainsi dire, en germe pen-
dant toute la^durée de l'affection.
.. ,... 'olt 1 ? '. ' ., ?
Passons maintenant à l'examen des autres carac-
, '.1 t r : 1 . Á. (.. , 1.. t J J , > . , 1 t . t J fui
tères de cette amyotrophie. , . \,
de l'atrophie musculaire. 187
On ne constate pas de secousses fibrillaires dans les
muscles atrophiés.
L'excitabilité idio-musculaire est normale.
La contractilité électrique est diminuée en proportion
de l'atrophie musculaire, mais il n'y a pas de réaction de
dégénérescence; nous avons recherché soigneusement,
avec l'aidede M. Vigoureux, les différents caractères de
cette réaction, le résultat a été, dans tous les cas, absolu-
ment négatif. Il s'agit donc là d'une atrophie simple au
point de vue électrique. Cette donnée pourrait servir
au diagnostic dans un cas où l'on serait dans le doute
pour savoir s'il s'agit d'une amyotrophie hystérique
ou bien d'une amyotrophie musculaire due soit à une
lésion spinale, soit à une lésion des nerfs, et coïn-
cidant avec l'hystérie. -
L'amyotrophie hystérique envahit-elle en masse tous
les muscles des membres paralysés ou se localise-t-elle
particulièrement dans tel ou tel muscle, dans tel ou tel
groupe musculaire ? Si uous passons en revue nos obser-
vations en les examinant à ce point devue, voici ce que
nous constatons. Dans l'Observation I, tous les muscles
du membre supérieur gauche paralysé depuis l'épaule
jusqu'à la main paraissent atteints; le bras est plus
atrophié que l'avant-bras; mais si on envisage en par-
ticulier chaque segment du membre, on ne note pas
de prédominance dans une région quelconque.
Dans l'Observation II, tous les muscles du membre
supérieur gauche paralysé sont atrophiés, mais à
l'avant-bras il' semble que les muscles épitrochléens
sont plus affectés que les muscles épicondyliens.
Dans l'Observation III, il est dit, en ce qui concerne
l'atrophie du membre supérieur gauche, qu'elle ne
188 clinique NERVEUSE.
semble pas porter particulièrement sur tel ou tel
groupe musculaire. Dans les autres observations,
on ne relève pas de prédominance de l'amyotrophie
dans quelque région en particulier. Ces observa-
- tions semblent donc montrer que l'atrophie dans un
membre paralysé peut prédominer dans tel ou tel seg-
ment du membre, mais que dans chaque segment,
cette atrophie semble envahir uniformément tous les
groupes musculaires; ce n'est, en effet, que dans
l'Observation II que l'on relève une prédominance
de l'atrophie dans les muscles de la région épitro-
chléenne, et encore n'est-elle pas très accentuée.
Le facies de cette atrophie diffère donc essentielle-
ment de celui de certaines atrophies musculaires, de
l'atrophie Aran-Duchenne, par exemple, dans laquelle
un muscle ou plusieurs muscles d'un membre peuvent
avoir subi une notable diminution de volume, alors
que les muscles voisins ont conservé leur relief normal.
L'évolution de l'amyotrophie hystérique présente
des caractères dignes d'intérêt. Le début de cette
atrophie paraît être généralement rapide. Dans l'Ob-
servation I, quinze jours tout au plus après le début
de la paralysie, elle était déjà appréciable, et un
mois et demi après, elle était très accentuée, puis-
qu'il y avait trois centimètres de différence entre les
périmètres des deux bras. Dans l'Observation II
comme dans la précédente, un mois et demi après
le début de la paralysie, il y avait entre les bras et
les avant-bras gauches et droits une différence de
trois centimètres dans le périmètre. Dans l'Obser-
vation III, le développement de l'amyotrophie est tout
aussi rapide. La rétrocession de l'atrophie semble
DE l'atrophie musculaire. i 89
pouvoir être rapide comme son développement, et elle
coïncide avec le retour des mouvements. Dans l'Ob-
servation I, dix jours après la disparition de la para-
lysie qui avait été brusque, la circonférence du bras
avait déjà augmenté d'un centimètre, et un mois
après le membre atteint avait recouvré presque son
volume normal. -Dans l'Observation IV, unmoisalirès
le moment où la paralysie avait commencé à s'atté-
nuer, la diminution de l'amyotrophie était déjà facile
à constater. Malgré la rapidité du développement
de l'atrophie musculaire, celle-ci, comme nous l'avons
dit plus haut, ne paraît pas dépasser certaines limites;
ce fait tient sans doute à ce que les paralysies hysté-
riques n'ont pasd'habitude une très grande durée, mais
cette raison est insuffisante pour expliquer cette parti-
cularité. On peut voir, en effet, dans plusieurs de nos
observations, l'atrophie rester stationnaire, alors même
que la paralysie persiste, et n'a aucune tendance à ré-
trocéder. C'est ainsi que dans l'Observation 111, depuis
le mois de février jusqu'au mois de juillet, le membre
inférieur gauche est resté complètement paralysé, et
pourtant l'amyotrophie, pendant ces cinq mois, ne
s'est pas du tout accentuée. Dans l'Observation VI,
où il s'agit d'une monoplégie brachiale droite absolue,
l'atrophie musculaire, malgré la persistance de la
paralysie, ne s'est pas exagérée depuis que le malade
est entré à la Salpêtrière, et cela remonte à plus de
quatre mois. Ainsi donc, en ce qui concerne la
marche de cette amyotrophie, voici ce qui nous semble
la caractériser : lorsque, dans une paralysie hystérique,
elle doit se développer, elle le fait rapidement, acquiert
en peu de temps le maximum de son développement,
190 CLINIQUE nerveuse.
reste alors stationnaire, lors même que la paralysie
persiste; enfin, lorsque la motilité. revient, elle rétro-
cède avec rapidité.
Est-il possible de prévoir, en présence d'une paraly-
sie hystérique, s'il se développera oui ou non une
amyotrophie ? Nous ne connaissons pas de caractères
qui permettent de résoudre cette question dès le début;
mais,, d'après ce que nous venons de dire, on ne tarde
pas à être fixé sur ce point.
Les observations que nous avons rapportées ont
trait à des sujets adultes et, par conséquent, ce n'est
qu'à eux que peut s'appliquer ce que nous venons
de dire des caractères de l'amyotrophie hystérique.
Et, en effet, si l'amyotrophie hystérique se dévelop-
pait chez un enfant, son évolution pourrait être diffé-
rente à cause de l'âge du sujet. Il ne s'agit pas là,
du reste, d'une simple vue de l'esprit; M. Chauf-
fard a publié une observation très intéressante de
monoplégie hystérique, avec atrophie consécutive du
membre, survenue chez un enfant de treize ans'. La
monoplégie dura trois ans, puis disparut brusquement
sous l'influence du massage. Or, trois ans après la
guérison de la paralysie, l'atrophie musculaire était
encore notable. En plus, et ce caractère fait absolu-
ment défaut dans nos observations, en raison des con-
ditions d'âge du sujet, dit M. Chauffard, la monoplé-
gie, survenant en pleine période de croissance du
squelette, avait retenti jusque sur les os du membre
paralysé, en produisant non pas une atrophie, le terme
serait peu exact, mais un arrêt de développement.
1 Société médicaledes hôpitaux. Séance du il mai 1886. Voy. le numéro
du 21 mai 1886 de la Gazette hebdomadaire. .
DE l'atrophie musculaire. 191 I
Quelle est la nature de cette amyotrophie hystérique ?
Nous avons déjà dit plus haut qu'à l'examen élect
trique il n'y·avait pas de réaction de dégénérescence..
Il s'agit donc d'une 'atrophie simple, c'est-à-dire d'une
atrophie indépendante de toute lésion matérielle de là
substance grise de la moelle et des nerfs périphéri-
ques. ?
C'est là une première donnée très' importante, mais
il faut aller plus loin et chercher expliquer le méca-
nisme de cette lésion. ' ..
Il semblerait au premier abord assez naturel de
l'attribuer à l'impotence fonctionnelle, mais, pour peu
qu'on y réfléchisse, on voit qu'une pareille interpréta-
tion serait erronée." . " ,
On sait, en effet, que l'amaigrissement des masses
musculaires qui résulte de la suppression simple de la
fonction des muscles est lente à se produire, qu'elle
n'est jamais très accentuée et qu'elle peut manquer
complètement même quand une paralysie dure depuis
longtemps déjà. C'est ainsi que chez un malade, le
nommé Porcen... atteintde monoplégie hystéro-trauma-
tique (il s'agit d'un des deux malades sur lesquels
M. Charcot s'est fondé pour établir cette variété de
paralysie, et dont les observations ont été publiées
dans le Progrès médical de 9 885), les muscles du mem-
bre supérieur, quoique leurs fonctions aient été sus-
pendues pendant une année entière, n'avaient pas
subi la moindre atrophie. Or, chez les malades dont il
est ici question, l'atrophie s'est développée très rapi-
dement et a pris en peu de temps des proportions très
accentuées. Ces caractères indiquent d'une façon bien-
évidente que cette diminution dans le volume des
192 CLINIQUE NERVEUSE.
muscles appartient à la catégorie des phénomènes dits
trophiques.
Une pareille assertion peut pourtant paraître étrange;
car est-il possible de comparer l'atrophie dont nous
nous occupons ici avec l'amyotrophie qui résulte
d'une lésion organique des cornes antérieures de la
moelle ou des nerfs moteurs, et qui constitue le type
de la lésion trophique ?
Il est sans doute indispensable d'établir entre ces
deux variétés d'atrophie, une distinction fondamentale.
Mais il faut aussi bien remarquer que l'expression de
« trouble trophique » n'implique pas fatalement
l'idée d'une altération matérielle du système nerveux,
appréciable à nos moyens d'investigation; elle signifie
simplement que l'action incontestable exercée par ce
système sur la nutrition des tissus est modifiée ou sup-
primée ; or, cette modification ou cette suppression
peut être purement dynamique, et c'est évidemment à
un phénomène de cet ordre que nous avons affaire ici.
On connaît déjà, du reste, des atrophies comparables
à ces atrophies hystériques.
Les amyotrophies qui sont consécutives aux affec-
tions articulaires sont aujourd'hui considérées par la
généralité des médecins, conformément à l'opinion
que MM. Charcot et Vulpian soutiennent depuis long-
temps, comme reconnaissant une origine réflexe et
résultant d'une modification dans l'état des cellules
des cornes antérieures de la moelle; il est vrai que ce
n'est encore là qu'une hypothèse, car on ne saurait
guère fournir une démonstration absolument rigou-
reuse de cette manière de voir; mais elle s'appuie sur
de très grandes probabilités. Or, il s'agit là d'une
DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 193
altération purement dynamique du système nerveux ;
les centres gris de la moelle et les nerfs périphériques
sont normaux, l'atrophie musculaire est, comme dans
l'hystérie, une atrophie simple.
On peut encore rapprocher l'atrophie hystérique
d'une variété d'atrophie que j'ai récemment signalée
et qui s'appuie sur un fait observé à la Salpêtrière. Il
s'agit d'une amyotrophie développée du côté para-
lysé, dans une hémiplégie de cause cérébrale, suivie
de dégénération descendante, et qui était indépen-
dante de toute lésion des cornes antérieures de la
moelle et des nerfs moteurs'.
Dans ce cas, il ne peut même plus y avoir de con-
testation au sujet de l'origine de l'atrophie muscu-
laire, comme dans l'amyotrophie articulaire ; il est
certain qu'elle dépend du système nerveux central;
or, puisque les cornes antérieures de la moelle cons-
tituent le centre trophique des muscles et qu'elles ne
sont pas altérées organiquement, il faut bien admettre
qu'elles le sont dynamiquement. La seule différence
entre cette variété d'atrophie et l'atrophie hystérique
est que, dans le premier cas la modification dynamique
des cornes antérieures est consécutive à une altération
organique du cerveau et du faisceau pyramidal, tandis
que, dans le second cas, les modifications du système
nerveux sont toutes dynamiques.
Du reste nous n'attachons qu'une médiocre impor-
tance aux hypothèses que l'on peut soulever au sujet
de cette amyotrophie. Nous avons tenu surtout à éta-
t Société de Biologie. Séance du 20 février 1886. Depuis la publica-
tion de ce fait, j'ai eu l'occasion d'en observer deux autres semblables
qui sont encore inédits.
194 CLINIQUE NERVEUSE.
blir, au moyen de ces observations, que l'atrophie
musculaire peut relever directement, contrairement à
l'opinion régnante, de l'hystérie et nous avons cherché
à montrer quels sont ses caractères. Si on en juge
par le nombre des observations que nous avons re-
cueillies dans un laps de temps assez restreint, il
semble même que cette amyotrophie doit être très
fréquente. Nous croyons pourtant devoir, avant, de
terminer, répondre à une objection qui peut, à ce
sujet, se présenter tout naturellement l'esprit du
lecteur. 1
N'est-il pas étrange, en effet, qu'un phénomène
aussi facile à observer ait jusqu'à présent passé com-
plètement inaperçu, pour ainsi dire, car s'il a été noté
dans quelques cas, il a été relégué à un plan tout à
fait secondaire et n'a pas été mis en lumière comme
il semble cependant le mériter. Ne pourrait-on pas
supposer qu'il est exceptionnel, et la présence simul-
tanée à la Salpêtrière de plusieurs malades atteints de
cette atrophie ne pourrait-elle pas être mise exclusive-
ment sur le compte du hasard ? Nous ne croyons pas
que ce soit là qu'il faille chercher la cause du silence
que les auteurs ont gardé à son sujet. Et, tout d'abord
il faut remarquer que ce que nous disons là au sujet
de l'atrophie hystérique s'appliquerait tout aussi bien à
tous les faits que l'on peut observer en médecineet
dans les autres sciences. La première fois qu'on a l'at-
tention dirigée de leur côté et que l'on constate leur
existence, on se croit en présence d'anomalies, alors
qu'ils sont absolument vulgaires. Mais cette modifica-
tion qui s'opère tout d'un coup dans l'esprit et en
vertu duquel un phénomène qui avait échappé jusque
, DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE. 195
là à l'observation vient à être perçu, lient vraisembla-
blement, entre autres causes, à ce que les conditions
dans lesquelles se trouve l'esprit de l'observateur ont
été préalablement modifiées, et qu'il devient ainsi
apte à voir ce qui était pour lui autrefois obscur. En
ce qui concerne particulièrement l'hystérie et ses
diverses manifestations, nous nous trouvons, depuis
quelques années, dans des conditions beaucoup plus
favorables qu'auparavant pour constater leur existence
et apprécier leur signification, et pour en revenir à
l'atrophie hystérique, rappelons les motifs invoqués
plus haut pour établir sa réalité, et voyons en nous
reportant quelques années en arrière, s'il eût été pos-
sible à ce moment de se servir d'arguments semblables.
Les hommes auxquels nous avons eu affaire sont des
hystériques : voilà un premier point qu'il a été facile
de démontrer, et cette constatation n'a même pas coûté
le moindre effort. Nous savons, en effet, péremptoire-
ment aujourd'hui, depuis les travaux de M. Charcot',
que l'hystérie est fréquente chez l'homme.
Or, que disait-on autrefois à ce sujet ? L'hystérie,
disait-on, est l'apanage presque exclusif de la femme;
chez l'homme elle est exceptionnelle et l'hystérie mâle
est absolument négligeable. Le sexe de nos malades
aurait donc été déjà une première objection fondamen-
tale contre l'hypothèse d'hystérie, et qui aurait paru
suffisante à beaucoup de médecins pour la rejeter.
Mais admettons qu'un esprit plus clairvoyant, en se
fondant sur la présence des stigmates hystériques, ait
osé affirmer que ces malades, quoique mâles, étaient
bien des hystériques, et poursuivons notre parallèle.
' Voyez aussi 13oui'ne\ille. Comptes rendus de Birgtre, 1880-1885.
196 CLINIQUE NERVEUSE. DE L'ATROPHIE MUSCULAIRE.
Nos malades étaient atteints de paralysie hystéri-
que ; c'est là un second point qu'il a été facile d'éta-
blir. Nous connaissons, en effet, grâce surtout aux
récentes études de M. Charcot sur ce point, les ca-
ractères spécifiques de ces paralysies, nous savons les
différencier de toutes les autres variétés de para-
lysies, et nous pouvons dire en présence d'un hysté-
rique paralytique, si la paralysie est indépendante de
cette névrose et ne fait que coïncider avec elle, ou
bien, au contraire, si elle est sous sa dépendance.
La nature hystérique de la paralysie ainsi démontrée
chez nos malades, il devenait évident que l'amyotro-
phie dérivait de la même origine.
Aurait-on pu, il y a de cela quelques années, sou-
tenir une pareille argumentation. Le médecin qui se
serait décidé à rompre avec les traditions et à porter
chez ces malades le diagnostic d'hystérie, aurait-il osé
aller plus loin et attribuer ces paralysies à l'hystérie ?
Ne connaissant les caractères propres des paralysies
hystériques que d'une façon très imparfaite, il lui au-
rait été impossible, si cette idée lui était venue à l'es-
prit, d'être affirmatif dans son diagnostic, et en pour-
suivant l'examen de ses malades, il aurait été tout
naturellement entraîné par le fait même de l'amyotro-
phie à écarter d'une façon absolue cette hypothèse.-
Il est vraisemblable que l'on a procédé autrefois de
cette façon avec les malades de cette catégorie, et nous
croyons que c'est à cette cause, et non pas à la rareté
de cet ordre de faits, qu'il faut attribuer le silence
qu'o.i a gardé à leur égard.
RECUEIL DE FAITS
CAS DE PARALYSIE SPINALE ASCENDANTE AIGUË (Paralysie
LANDRY), observé à la clinique thérapeutique du professeur
Lacnxcmrcu ;
Par M. SOUDEYKINE, à Karkoff.
Depuis 1859, époque à laquelle Landry a, le premier, décrit
la paralysie ascendante aiguë spinale jusqu'à nos jours, on a
publié beaucoup d'observations sur les maladies en question.
Ainsi les observations de Kussmaul, de Vulpian, de Cornil, de
Ranvier et de Westphal se rapportent à ces publications. Dans
tous ces cas l'autopsie n'a découvert aucune lésion pathologo-
anatomique dans le système nerveux; bien plus, l'investiga-
tion microscopique la plus scrupuleuse a donné des résultats
absolument négatifs. Par le fait de cette dernière circonstance,
le cas que je vais décrire acquiert un véritable intérêt, parce
que les modifications trouvées au moyen d'examens micros-
copiques de la moelle épinière expliquent suffisamment le
tableau clinique de la maladie, quoique notre cas s'éloigne
peut-être du type régulier de la paralysie ascendante aiguë.
Voici le cas :
Le malade Nicolas Marozolf, âgé de cinquante-quatre ans, pro-
fesseur de piano, est entré à la clinique, le 5 novembre 1884, en
se plaignant de la perte du mouvement des membres supérieurs
et inférieurs. Quant aux antécédents, le malade affirme que ses
parents, sa mère ainsi que son père étaient atteints de la syphilis.
Le père est mort paralytique et la mère est morte par suite de
l'impossibilité de déglutition (sténose oesophagienne).
Un de ses frères avait des ulcères aux jambes. Le malade lui-
même souffrait, dans sa jeunesse, d'éruptions à la peau et il
s'adonnait souvent à l'usage immodéré du vin. Il y a environ
vingt-cinq ans, les hémorroïdes se déclarèrent chez le malade; au
début, le sang coula en petite quantité; mais au bout de trois
ans l'hémorragie du rectum augmenta à ce degré qu'au dire du
198 RBCUEIL DE 1A1'l'S.
malade, elle donna une fois environ Jeux cuvettes de sang. Le
malade s'affaiblit tellement qu'il ne pouvait lui-même faire un
pas dans la chambre. Mais bientôt, grâce au séjour de la campa-
gne les forces commencèrent peu à peu à revenir. A peu près à
cette époque, àlorozolf eut une gonorrhée et une plaie à la verge ;
la gonorrhée dura assez -longtemps, environ cinq mois, par
suite de l'absence de toute médication; elle disparut enfin
laissant après elle un rétrécissement de l'urèthre; mais la plaie se
ferma, après l'application de compresses d'eau de Goulard, en
laissant une cicatrice. Depuis lors, le malade jouit d'une bonne
santé, quoiqu'il souffrait de temps en temps de légères hémorra-
gies hémorroïdales. Le 28 mai 1884, sans la moindre cause appa-
rente, sensible, les hémorragies du rectum recommencèrent au
moment de la selle; et le malade ressentit de légères douleurs
dans la région du mésogastre. Ces douleurs s'étendirent aux jambes
et au pénis.
A la fin du mois d'août 1881, Morozoff commença d'éprouver un
sentiment de lassitude, auquel se joignirent des douleurs aux
jambes avec tranchées et tiraillements. Ces douleurs se montrèrent
uniformément toutes les vingt-quatre heures, et avec une telle
intensité que le malade eut recours aux spiritueux afin de retrouver
un peu de sommeil. Cet état se prolongea jusqu'au 10r novembre.
La veille de ce jour et pendant la nuit, le malade eut un peu de
fièvre, les tiraillements aux jambes augmentèrent; mais cependant,
sous l'influence de l'eau-de-vie, le malade s'endormit. Le lende-
main matin, à son réveil, c'était le 2 novembre, Marozoff voulut se
lever; ayant essayé de marcher il ne puise tenir debout et tomba.
Relevé par sa femme, il fit quelques' pas en s'appuyant sur elle,
et pendant ce' temps, sa main gauche était si faible qu'il pouvait
à peine la lever. Le jour suivant, les phénomènes de la paralysie
augmentèrent de telle façon que le malade pouvait à peine tenir
une soucoupe de la main droite. L'urine s'échappait'avec peine
et en même temps le malade était constipé. Tel était l'état du
malade le novembre, jour où il entra à la clinique thérapeu-
tique.
Le malade a une taille au-dessus de l'ordinaire, il est bien cons-
titué ; son visage est pâle, d'une nuance légèrement jaunâtre; les
membranes muqueuses sont pâles, la peau est pâle, sèche, Sur-
tout aux jambes et aux bras; le tissu cellulaire sous-cutané est
atrophié; les muscles ne présentent pas des modifications atro-
phiques sensibles. k ' .
Le coin gauche de la bouche est légèrement baissé; la langue
tremble, lorsqu'il la fait porter hors de labouche ; une conversation
prolongée fatigue tel lementle malade qu'il éprouve des accès d'élouf-
fement en parlant.On ne remarque aucune éruption sur la poitrine,
sur le ventre et sur le dos; sur le pénis près du frein, du côté
DE LA PARALYSIE SPINALE ASCENDANTE AIGUË. 199
droit, se trouve une cicatrice atrophique, il n'y a sur les jambes
ni plaies ni cicatrices. En examinant la poitrine, nous trouvons
que la matité cardiaque est diminuée par suite d'une emphysème;
en auscultant le deuxième interstice droit interosseux, et au-dessus
du manubrium sterni, on entend un faible bruit diastolique. La
rate a légèrement augmenté de volume. Dans les artères périphé-
riques, au toucher on constate une remarquable artériosclérose.
Le pouls est 81 ; la respiration à 18-20; la température à 36.
Le malade est constipé et l'émission de l'urine est difficile. Le
malade ne peut remuer la jambe gauche et le bras droit, tandis
qu'il peut légèrement ramener vers lui la jambe droite et remuer
un peu la plante des pieds. Il est en état de faire la flexion du
membre supérieur droit.
Les membres supérieurs ainsi que les inférieurs sont tout à fait
sans résistance.
Au toucher, les extrémités sont plus froides que la peau du
tronc. Le malade, soulevé sur le lit, ne peut s'asseoir, et il éprouve
une légère douleur dans la région lombaire. Quant aux fonctions des
muscles du visage, du cou et des organes respiratoires, à l'excep-
tion d'un léger abaissement du coin gauche de la bouche, on ne
peut signaler d'autres désordres. Quant à lasensibilité cutanée, on
y constate l'analgésie universelle, excepté la peau de la tête et de
la face où la sensibilité n'est pas troublée. Les autres. espèces de
sensibilité sur tout le corps sont intactes. L'excitabilité élec-
trique des muscles, dans les premiers jours de séjour à la clinique,
n'offre aucun changement; au contraire, la veille de la mort, elle
a diminuée et une légère manifestation de réaction de dégéné-
ration est constatée.
Les réflexes de la peau et des tendons ont fortement diminué.
Pas de désordres trophiques de la peau, pas de décubitus. La
quantité de l'urine pendant vingt-sept heures était 500 c. c. de
réaction acide; poids spécifique 1,017. Les premiers jours, l'urine
contenait de l'albumine en petite quantité. En outre, on remarque
encore une lésion vasculaire. La jambe droite se présente plus pàle
que la gauche; et celle de la température au toucher est plus basse.
L'exploration thermométrique des extrémités inférieures a montré :
OU RECUEIL DE FAITS.
température du corps pendant la maladie, elle a, d'abord nor-
male, commencé à s'élever avec un léger frisson; le 8 novembre,
elle atteint z : la respiration donne 34, le pouls 124; il est faible
et à peine sensible. La respiration est accélérée, superficielle,
gênée par suite de la paralysie du diaphragme ; la parole est
indistincte avec une nuance nasale. La déglutition est difficile;
une partie de la nourriture tombe dans la trachée provoquant de
faibles accès de toux et faisant sortir un liquide par le nez. En
auscultant les parties inférieures des deux poumons, sur un espace
restreint, nous trouvons l'expiration bronchique et une matité
obtenue par la percussion.
Le malade n'est pas en état d'expectorer. Le 9 novembre, la
température s'est élevée à 39, la respiration à 36, le pouls a 140; il
est à peine sensible.
La sécrétion de l'urine et de la selle est involontaire, la mort
survient à la suite des phénomènes de la paralysie du coeur et de
l'oedème des poumons. Le professeur Kryloff a pratiqué l'autopsie.
Autopsie. Passons aux changements pathologo-anatomiques
que nous montre l'autopsie de la moelle épinière et de ces mem-
brancs.
La dure-mère, au renflement lombaire, présente une tache
oblongue d'un rouge foncé, formée par la membrane néoplasma-
tique tranchée par les vaisseaux (Pachym. extern.). La dure-mère
est tendue par les adhérences compactes des côtés de l'épine dor-
sale; le même phénomène est à remarquer dans l'intumescence
brachiale. L'arachnoïde est anémique à toute son étendue, et par
places adhère à la dure-mère. Les vertèbres de la région lombaire
du côté du canal vertébral dévoilent des taches d'un rouge foncé,
et à cet endroit, le corps des vertèbres est tellement poreux que
la pointe du scalpel peut être enfoncée sans efforts jusqu'à un
centimètre, et davantage. La substance grise de la moelle dans
la partie lombaire est d'une couleur rouge foncé, et les cornes
antérieures sont bien conservées, tandis que celles de derrière
sont à peine visibles. Dans la partie spinale de la moelle épinière
la substance grise est d'une couleur jaunâtre et les cornes anté-
rieures sont plus prononcées que celles de derrière.
5 centimètres plus haut que l'intumescence lombaire, la moelle
épinière, sur l'étendue de 4 centimètres, présente un ramollisse-
ment blanc. '
La cavité crânienne présente les adhérences totales de la dure-
mère avec les os de voûte. La pie-mère est en état d'hyperémie
stasique. Il est rappeler que la moelle oblongue et le début de la
moelle épinière sont plus solides. L'olive gauche est tout à fait
aplatie. On trouve outre l'oedème, dans le poumon droit l'hépa-
tisation rouge, dans le poumon gauche la splénisation de la partie
inférieure. Le coeur n'offre aucun changement, tandis que, dans
DE LA PARALYSIE SPINALE ASCENDANTE AIGUË. '201
l'aorle, on trouve la dégénération athéromaleuse avec la dila-
tation dans la partie initiale. Les organes digestifs ne présentent
aucune altération.
Exposons maintenant aux données fournies par ['examen micros-
copique. La moelle a été endurcie dans le liquide millérique, et
ensuite dans l'alcool. Les préparais étaient colorés par le carmin
et éclaircis dans l'huile de girofle.
Les altérations trouvées dans la moelle épinière, au moyen des
recherches microscopiques, étaient surtout très accentuées dans la
partie lombaire.
La première chose qui saute aux yeux à l'examen des préparats
microscopiques, c'est la grosseur inégale des cornes antérieures
de la substance grise. La corne antérieure gauche est plus petite
que la droite ; il y a moins d'éléments cellulaires à la corne gauche
qu'à la droite et les cellules, dans l'une comme dans l'autre, se
trowentdans un état atrophique; mais celle altération est cepen-
dant pius sensible dans la corne gauche. Les cellules ont perdu leur
forme arachnoïdienne ordinaire. Elies sont un peu arrondies, et
plusieurs d'entre elles tout à fait privées de ramifications. De
plus, on remarque encore dans les cellules, des granules de pig-
ment, qui tantôt remplit toute la cellule de façon que le nucléole
devient tout à fait invisible, et tantôt s'amasse dans un coin de
la cellule écartaut ainsi le nucléole.
Les cellules des cornes postérieures sont arrondies ou de forme
triangulaire sans ramifications et contiennent aussi une grande
quantité de pigment.
Les cornes postérieures elles-mêmes de la substance grise ont
diminué de volume et sont plus minces que leur mesure normale;
elles contiennent très peu d'éléments cellulaires et présentent un
épaississement du tissu conjonctif. Les cylindres axes sont, a cer-
tains endroits, d'une épaisseur inégale, et cette épaisseur s'ac-
centue en particulier dans les colonnes postérieures.
Le canal central est oblitéré et offre dans la circonférence un
amas d'éléments cellulaires granuleux. Les parois vasculaires sont
inégalement épaissies et cette altération est aussi fortement pro-
noncée du côté gauche de la moelle épinière.
L'examen microscopique de la moelle épinière a été fait au
laboratoire de professeur Kryloff, auquel je suis heureux d'ex-
primer ma cordiale reconnaissance.
En considérant les données de l'autopsie et les résultats
des recherches microscopiques de la moelle épinière il est
clair que nous avons devant nous deux processus pathologo-
anatomiques de cet organe : l'un chronique, ayant pour
cause la syphilis et développé sur le terrain syphilitique et de
Archives, t. Xi[. 14
202 RECUEIL DE FAITS.
l'alcoolisme; l'autre aigu et qui s'est terminé en neuf jours
avec une rapidité foudroyante. La maladie chronique de la
moelle épinière consistait dans une hyperémie stasique du
canal dorsal entraînant après elle l'atrophie du tissu osseux
dans les corps vertébraux. La dure-mère, sur la surface exté-
rieure, est couverte d'excroissances unies à l'arachnoïde et aux
corps vertébraux. Cette maladie chronique se traduisait pen-
dant la vie du malade par une faiblesse assez considérable
dans les jambes et par les élancements qu'il y ressentait. Mais
le processus aigu, consistant dans une métamorphose dégéné-
rative, des éléments cellulaires de la moelle épinière et qui
s'est accompli en neuf jours avec un résultat si rapide, est
une maladie postérieure démontrée par lesdésordres amyotro-
phiques observés seulement deux jours avant la mort. Bien
que la maladie s'éloigne du caractère classique de la paralysie
Landry, puisque des modifications chroniques de la moelle
épinière ont été constatées, il n'en est pas moins vrai que le
tableau clinique conclusif de la maladie qui a conduit Maro-
zoff à une terminaison fatale rentre absolument dans le cadre
de tous les cas connus sous le nom de paralysie ascendante
aiguë, ou paralysie Landry.
EXPLICATION DE LA PLANCHE I
Frg. 1. - Coupe transversale 'le la moelle. (Insumesc. bracliialis.)
Fig. 2 Coupe transversale de la moëlle (région lombaire).
Fig. i. Cellules nerveuses des cornes antérieures de la substance
grise en voie de dégénération pigmentaire.
Fig. 4. Les vaisseaux et les cellules nerveuses des cornes antérieures
de la substance grise.
a, Corne gauche. b, Corne droite.
MONOPLÉGIE HYSTÉRIQUE AVEC CONTRACTURE DU MEMBRE
SUPÉRIEUR DROIT DATANT DE SIX MOIS, GUÉRIE EN UNE
DEMI-HEURE PAR LA SUGGESTION HYPNOTIQUE ;
Par le,Dr Auguste VOISIN, médecin de la Salpêtrière.
L'observation qui suit, bien que fort incomplète en raison
des conditions très défectueuses dans lesquelles elle a été re-
DE LA MONOPLÉGIE HYSTÉRIQUE. 203
cueillie, n'en est pas moins digne d'attention, car elle constitue
un exemple très net de l'action thérapeutique toute puissante
exercée dans certains cas par la suggestion hypnotique sur les
accidents de l'hystérie, si graves et si invétérés qu'ils soient.
11 n'est pas superflu' d'ajouter, à l'usage des sceptiques, que
les circonstances du fait et la qualité de la malade, paysanne
ignorante qui n'a jamais quitté son village, excluent toute
possibilité de simulation.
Le 13 décembre 1885, je me trouvais dans une petite localité
de la côte méditerranéenne et après avoir terminé lesaflaires qui
m'y amenaient il me restait une heure et demie à peu près avant
le passage du train, quand on m'amena une femme des environs,
paralysée depuis six mois du bras droit.
On m'apprit qu'elle était âgée de quarante ans et que depuis
deux ans elle avait présenté à diverses reprises des crises ner-
veuses avec sensation de boule rétro-sternale, constriction de la
gorge, et autres symptômes manifestement hystériques. C'est à
la suite d'une de ces attaques survenue il y avait six mois qu'elle
était restée paralysée du bras droit; quelques jours après une
nouvelle attaque avaitproduit de la contracture de la main droite
et cette contracture avait persisté depuis.
La malade, que je dus examiner très rapidement, semblait
intelligente; sa mémoire ne laissait rien à désirer; sa parole très
nette, n'avait jamais été troublée depuis le début des accidents.
Le membre supérieur droit était le siège d'une paralysie avec
contracture rappelant tout à fait comme aspect les paralysies
cérébrales de date ancienne. Le bras absolument inerte était in-
capable du moindre mouvement : l'avant-bras dans la demi-flexion
le poignet et les doigts fortement fléchis ; les ongles incrustés
dans la paume de la main y avaient creusé des ulcérations qui
exhalaient une fétidité repoussante; les articulations phalan-
giennes étaient tuméfiées et douloureuses. Les tentatives qu'on
faisait pour obtenir l'extension des divers segments du membre
ne servaient qu'à provoquer de vives douleurs et semblaient exa-
gérer encore la contracture. La sensibilité était du reste conservée
dans tous ses modes; il n'existait pas d'atrophie musculaire.
Les autres membres, le tronc et la face ne présentaient rien
d'anormal; ni paralysie, ni anesthésie. Sauf l'impotence absolue
du bras droit la malade était valide et paraissait bien portante.
Cependant elle était depuis six mois atteinte d'une conslipation
opiniâtre et d'une rétention d'urine nécessitant l'emploi de la
sonde.
En présence des caractères de cette monoplégie brachiale et des
antécédents de la malade il me parut évident que j'avais affaire à
204 RECUEIL DE FAITS.
une paralysie hystérique, et bien que le temps me pressât je vou-
lus essayer si la suggestion hypnotique n'en aurait pas raison.
Je me mis donc aussitôt en devoir d'endormir la malade parla
fixation des yeux, et j'y réussis au bout de vingt minutes environ;
je produisis un sommeil complet, avec analgésie et flaccidité ab-
solue des quatre membres. Je lui enjoins alors, d'une voix forte,
d'étendre le petit doigt de sa main droite; elle le fait avec beau-
coup de difficulté et en manifestant de la douleur; ce premier
résultat obtenu je lui enjoins d'étendre l'annulaire; elle le fait;
puis le médium, mais ici la difficulté et la douleur semblent beau-
coup plus grandes; la suggestion doit être très énergique, les deux
autres doigts sont aiséments étendus. La main est alors dans une
extension à peu près complète, bien qu'évidemment gênée par le
gonflement des jointures, mais la malade peut mouvoir ses cinq
doigts avec une facilité rapidement croissante et toute trace de
contracture a disparu. Les ougles d'une longueur démesurée sont
noirs et sales, la paume de la main est exulcérée et sanieuse, en
raison de la pression prolongée qu'elle a subie et de la macéra-
lion épidermique.
Le bras et l'avant-bras étaient toujours immobiles ; j'ordonne
à la malade de les mouvoir, en lui assurant qu'elle peut le faire;
elle y réussit d'abord avec peine, puis plus aisément, et bientôt
le bras droit se meut aussi librement que le gauche.
Avant de la réveiller, je lui suggère d'aller se laver la main et
de se faire couper les ongles. Elle est retournée seule chez elle
après ce lavage.
Au mois d'avril dernier, c'est-à-dire quatre mois après celte
guérison, qui parut miraculeuse aux assistants, j'ai eu des nou-
velles de la malade et j'ai su que depuis mon intervention elle
s'était servie librement de ses deux mains pour les soins du mé-
nage et les travaux des champs. Mais détail à noter, la rétention
d'urine dont je n'avais pas eu le temps de m'occuper, continuait.
Je suis convaincu qu'elle aurait cédé tout comme la monoplégie
sij'en avais suggéré la disparition.
FAIT POUR SERVIR A L'HISTOIRE DES LOCALISATIONS
FONCTIONNELLES DU CERVEAU;
Par M.-E.-A. HO11ÈN,
Professeur agrège d'a.^.atomic pathologique a l'iuhersite de lIelsingfurs.
Comme le nombre des différentes lésions corticales bien
limitées, est encore assez restreint, le cas suivant ayant pour
DES LOCALISATIONS FONCTIONNELLES DU CERVEAU. 205
cause probable une altération de cette espèce, aura peut-être
quelque intérêt, d'autant plus que la cause en est un peu sin-
gulière.
Grant... étudiant en médecine à l'Université d'Helsingfors.
Né en l83o. Le père, mort à soixante-quatorze ans d'une hé-
moi rhagie cérébrale, avait toujours été bien portant. sauf qu'il
souffrit de vertiges pendant les dernières années de sa vie. La
mère vit encore et est bien portante; elle a soixante-dix ans. Une
tante maternelle a été aliénée. G... croit que les grands parents qui
sont arrivés à un âge assez avancé ont joui d'une santé parfaite.
Excepté quelques maladies d'enfance, G... a joui en général
d'une bonne santé. Il n'a jamais eu de rhumatismes articulaires
ni de battements de coeur. Il a une constitution ordinaire, le teint
un peu pâle.
Vers la fin d'une excursion de quelques jours, faite en bateau à
voiles (de Helsingfors à Reval, aller et retour), le 0 septembre
1883, il a eu un assez grave mal de mer pendant quatre ou cinq
heures, avec des vomissements très violents qui ont duré encore
le lendemain, bien qu'à un degré moindre. Les trois premiers
jours qui suivirent le débarquement, il fut forcé de garder le lit
à cause d'un violent mal de tête, qui augmentait à chaque mou-
vement qu'il faisait. Ce mal lui semblait un peu plus localisé dans
le côté gauche de la tête; outre cela, il ressentait une certaine
rigidité et une douleur dans la musculature de la nuque. Les pre-
miers jours, le malade a senti un certain trouble dans la parole.
Certains mots et certa : nes syllabes lui étaient difficiles et même
impossibles à prononcer; ils étaient comme perdus pour lui, de
sorte qu'il était arrêté net en parlant, ne pouvant articuler le mot
quoiqu'il l'eût sur les lèvres. Ce trouble de la parole a duré pen-
dant des mois. Aucune élévation de la température n'a été
observée. La force dynamométrique de la main droite a été cons-
tatée un peu affaiblie le 2b septembre. Alors le malade a observé
que, lorsqu'il voulait écrire, des secousses involontaires et très
prononcées se produisaient immédiatement dans les doigts qui
tenaient la plume et l'empêchaient d'écrire. Environ dix ou
quinze jours plus tard, il lui était déjà impossible de bien prendre
et de bien tenir la plume; mais en écrivant, il survenait très vite,
quelquefois même immédiatement, des secousses surtout dans
l'index; il lui était pourtant possible par la volonté de modérer
un peu ces secousses. Quant à la main gauche, le malade n'a
observé rien d'anormal.
Le mal de tête a, peu à peu, disparu dans l'espace de quelques
semaines et G... a repris ses occupations ordinaires, les études
médicales, pourtant avec beaucoup de prudence, car il a obsené
206 RECUEIL DE FAITS.
que tout travail intellectuel le fatiguait très vite; ainsi, il était
pour lui difficile de fixer sa pensée longtemps et, après une con-
versation un peu animée, il se sentait fatigué; il a aussi observé
une certaine irritabilité du caractère. Les camarades de G... l'ont
trouvé aussi un peu irritable et déprimé; mais il est observer
qu'il s'est lui-même beaucoup inquiété de sa santé et de son ave-
nir.
Le 17 décembre 188'3, G... vient pour me consulter. Il éprouve
alors encore presque la même fatigue pour tout travail intellec-
tuel. L'embarras de la parole a diminué. Cet embarras consiste
en ceci que le malade ne peut pas, surtout quand il parle vite,
prononcer certains mots et certaines syllabes bien qu'il les sache
très-bien; de sorte qu'il est tout d'un coup arrêté dans sa conver-
sation, essayant en vain de les prononcer. En lisant à haute voix
et vite, il lui arrive quelquefois aussi, qu'il ne peut pas articuler
certains mots ou syllabes. Mais lorsqu'il s'arrête pour un moment
dans sa lecture ou dans sa conversation, et puis recommence à lire
ou à parler très lentement et avec attention, il réussit parfois
à prononcer les mêmes mots. Aucune déviation de la face, de
la langue ni de la luette. Aucun trouble dans les mouve-
ments de la langue et des lèvres, il peut bien souffler et siffler.
Les pupilles réagissent normalement. Aucun trouble de la vision,
de l'ouïe, de l'odorat ou du goût; conservation parfaite de l'in-
telligence, de la vision et de l'ouïe. Le trouble dans l'écriture
a diminué un peu, de telle sorte que le plus souvent, il peut
écrire pendant une minute ou même pendant quelques minutes
avant que les secousses s'établissent, ceci dépendant pourtant
beaucoup de la force avec laquelle il prend la plume, de la tran-
quillité de son esprit, etc. Cet embarras de l'écriture consiste en
ceci : que les doigts qui tiennent la plume, surtout à leurs der-
nières phalanges, se dressent et fléchissent involontairement avec
une certaine rapidité et presque avec un certain rhythme. Cette
rapidité des secousses est pourtant un peu variable; elles peuvent
n ? uter jusqu'à 100 et beaucoup plus, par minute, s'il continue à
tci ir la plume. A l'exameu des difiéreuls doigts, quand il tient
la plume, l'index semble être le plus exposé et le troisième doigt
le moins exposé à ces secousses. Ces secousses surviennent
aussi à tout autre mouvement des doigts pour prendre ou tenir
quelque chose pendant un peu de temps. S'il tient un verre d'eau
assez légèrement, les secousses ne se produisent pas, au moins
pas vite, mais s'il le serre un peu, elles surviennent. D'ailleurs,
les mouvements des doigts sont libres. S'il applique ses deux
mains, l'une contre l'autre, les doigts opposés l'un il l'autre, et
qu'il essaie d'éloigner chaque doigt l'un de l'autre, les doigts de
la main gauche peuvent faire un mouvement un peu plus pro-
noncé que ceux de la droite. A un examen soigneux de la main
DES LOCALISATIONS FONCTIONNELLES DU CERVEAU. 207
et du bras, examen consistant en mouvements et en exercices
les plus différents, rien d'anormal à observer. Du côlé gauche,
les doigts ainsi que la main et le bras fonctionnent normalement.
La force dynamométrique de la main droite est un peu plus
faible que celle de la main gauche. G... dit qu'il lui est arrivé
quelquefois de remarquer un léger sentiment anormal, pas bien
localisé, uni à un sentiment de fatigue dans le bras droit, qui a
pu durer quelques heures pour disparaître ensuite spontanément.
A l'examen des différentes qualités de la sensibilité du bras, de la
main et des doigts, rien d'anormal à constater, pas d'altération
du sens musculaire; un examen électrique des différents muscles
et nerfs a donné aussi un résultat négatif. Des organes internes.,
rien à remarquer. Le pouls régulier à î0. Le ceeura le volume nor-
mal, sans bruit de souffle. Pas de battements de coeur.
Diagnostiquant, comme vraisemblable, pourtant sous toute
réserve, une légère altération dans l'écorce, et principalement
localisée danscertaines parties de la zone psychomotrice gauche,
j'ai seulement, comme essai, proposé une galvanisation à cou-
rants assez faibles de la zone motrice gauche, en appliquant le
pôle positif sur cette place. La galvanisation a été continuée
jusqu'au 27 janvier 1884; pendant ce temps, le trouble de l'écri-
ture a beaucoup diminué, de sorte que G... maintenant, surtout
quand il est assez tranquille, peut ecrire assez longtemps avant
que les secousses surviennent, le sentiment anormal dans le bras
droit est devenu aussi très rare. Le trouble de la parole a presque
disparu. Pourtant l'amélioration ne s'est pas faite d'une manière
évidemment plus rapide qu'avant la galvanisation.
G... dit qu'il a remarqué quelquefois, surtout quand il a veillé
ou travaillé plus que d'habitude, un sentiment anormal, ressem-
blant à une lourdeur dans l'arrière-tête.
28 mars 1884. G... a poursuivi ses études comme d'ordinaire,
pourtant avec une certaine prudence; et en général, il a observé
une vie très régulière. La fatigue pour le travail intellectuel, l'ir-
ritabilité et la dépression du caractère, ont presque disparu; de
même le sentiment anormal dans le bras droit. Quant à l'é-
criture, G... peut souvent écrire presqu'aussilongtemps qu'il veut
sans que les secousses surviennent, tandis que, quelquefois, elles
se produisent très vite, mais sont beaucoup plus faibles qu'aupa-
ravant. La force dynamométrique des deux mains, est
presque la même.
fer octobre 1884. Encore un peu, même embarras de l'écri-
ture, et aussi, bien que très rarement, même embarras de la
parole, quand G... est un peu irrité et parle vite.
15 janviei- 1886. - G... dit que son intelligence, sa mémoire, sa
faculté de Iravailler et son caractère sont absolument intacts,
comme avant l'attaque. Il dit pourtant qu'il a eu encore quelque-
08 RECUEIL DE FAITS.
fois des secoures, bien que minimes, dans les doigts; secousses
qui pourtant ne l'ont pas absolument empêché d'écrire, mais ont
troublé son écriture. Pour la parole, il n'a plus rien observé.
Le printemps dernier, G... a passé son examen pour le doctorat
en médecine, avec succès.)
Ce qui, dans ce cas, a un certain intérêt, c'est que, après
disparition des symptômes ordinaires d'un assez grave mal de
mer, vomissements et maux de tête, il reste encore quelques
symptômes qui semblent indiquer une légère altération bien
limitée de l'écorce cérébrale, c'est-à-dire le trouble peu marqué
de la parole et les secousses des doigts de la main droite à
chaque mouvement où ceux-ci sont employés pour tenir quel-
que chose. Mais ce qui doit être ici tout spécialement relevé,
c'est que ces troubles moteurs sont absolument limités aux
doigts de la main droite, sans participation d'aucune autre
partie du corps, et sans aucune altération de la sensibilité dans
les doigts mêmes. Il faut rattacher probablement ces troubles
à une légère altération d'une partie bien circonscrite de la
zone psychomotrice gauche, ainsi que l'aphasie, à une altéra-
tion de la circonvolution de Broca; altérations provoquées sans
doute par certains troubles de la circulation dans l'artère syl-
vienne gauche ou dans quelques-unes de ses branches. Ces
troubles, difficiles à préciser, pourraient être produits par les
graves efforts de vomissements faits pendant le mal de mer.
Ce diagnostic est naturellement donné sous toute réserve.
La rigidité et la douleur dans la nuque sont sans doute rhu-
matismales.
Quant à la légère aphasie motrice et aux secousses des doigts,
qui, peu à peu, ont disparu, il semble y avoir une certaine
parenté entre ce cas-ci et le cas de M. Charcot de cécité ver-
bale et hémianopsie droite ' survenue après une vive émotion,
où, au commencement, il y avait une légère aphasie ainsi
qu'une paralysie du côté droit; avec cette distinction que la
place de la lésion était en partie différente et plus étendue dans
le cas de M. Charcot.
Quant à l'affaiblissement de l'énergie intellectuelle, qui était
bien prononcé, surtout les premiers temps après l'accès, il peut
être rattaché à la lésion locale (supposée), conformément à une
règle à peu près générale qu'un pareil affaiblissement se trouve
' Progrès médical, 1883, 11- 23, etc.
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 209
presque toujours à un certain degré, lorsqu'une lésion, même
circonscrite, s'est développée sur un point quelconque des
hémisphères cérébraux, et qu'il se produit, à plus forte raison,
et pour ainsi dire à coup sûr, quand la lésion intéresse les
lésions où siège l'appareil du langage '.
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE
XIV. Contributions A l'étude DES scléroses systématiques
combinées de la moelle ; par le privat-docent ERLITZICY et
le docteur Ribilkine. ( TŸestnik) (le Messager de psychiatrie,
de M. le professeur Mierzejewsky, 1885, t. I.)
Les points à relever dans l'observation de ces auteurs sont
les suivants, à l'examen microscopique.
Dégénérescence des faisceaux pyramidaux croisés dans toute
la hauteur de la moelle. Intégrité des faisceaux cérébelleux et
des cordons latéraux limitant le faisceau pyramidal. Absence
complète de toute altération des cordons de Türk. Sclérose des
cordons postérieurs et de la substance grise des cornes posté-
rieures envahissant une partie de la colonne vésiculaire de
Clarke. Epaississement de la pie-mère des cordons postérieurs.
D'après ces auteurs la sclérose pyramidale serait indépen-
dante de la sclérose postérieure et la lésion de la substance
grise serait due à la sclérose des faisceaux et cornes posté-
rieures.
Dans le tableau clinique nous trouvons à signaler la con-
servation complète de la sensibilité et avec une dégénérescence
presque complète des cordons et faisceaux postérieurs et la
perle du sens musculaire avec la conservation de la sensibilité
cutanée. N. Skwortzoff.
1 Voir Charcot, /. c.
210 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
XVI. DE la pression cérébrale et DE la compression du cerveau.
par A. AD.\MK[t : wtcx (\Vielle ! ' Klinik, cali. Vlll et IX, août,
sept. 1884).
Leçons du professeur de Cracovie, résumant ses communica-
tions sur le même sujet à l'académie de Vienne. D'après ses
expériences, il n'y a pas de transmissions de pression à travers
l'ensemble des centres nerveux par l'intermédiaire du liquide
céphalo-rachidien. Exerce-t-on une compression en un point de
l'encéphale, il se produit de proche en proche des phénomènes
inflammatoires qui aboutissent à une hyperplasie d'abord des
couches nerveuses, immédiatement soumises à l'agent com-
presslf, puis de l'ensemble des régions en continuité avec elles, si
bien que dès que la limite de compressibilité de la substance est
dépassée, on voit successivement survenir de l'épilepsie jackson-
nienne du côté opposé, de l'hémiplégie vraie, également croisée,
de la paraplégie : à ce moment, les muscles paralysés sont tendus,
on constate de l'exagération des réflexes tendineux, de l'épilepsie
spinale, des tremblements spontanés. Même alors, tout peut
rentrer dansl'ordre, si la compression cesse; si au contraire, elle
persiste, la masse du cerveau tout entier se détruit, mais à aucun
degré on n'observe de papille étranglée. Jamais, par conséquent,
la tension n'augmente à l'intérieur des cavités intra-crâuiennes,
le liquide céphalo-rachidien n'exsude du sang que dans les limites
exactes de l'espace laissé libre entre le cerveau et le crâne; dès
que la tension augmente dans les vaisseaux infra-crâniens, le
liquide céphalo-rachidien rentre dans les vaisseaux lymphatiques
par l'intermédiaire de la cavité arachnoïdienne. P. K.
XVII. Un cas de convulsions réflexes statiques ; par A. I : RLE\llE1'b : R.
(Ceiiti-albl. f. \'erverlheilk., 1885.)
Les convulsions réflexes statiques sont celles qui surviennent à
l'occasion des mouvements de locomotion du corps; c'est pour-
quoi elles sont généralement limitées aux muscles des extrémités
inférieures bien qu'elles puissent englober les muscles du tronc
nécessaires a certains actes d'ensemble. Bien différentes sont-elles
des convulsions professionnelles coordonnées qui se manifestent,
à propos d'actes spéciaux n'ayant rien à voir avec les mouve-
ments de déplacement total, sur des muscles surmenés desquels
part l'irritation. La convulsion statique part dès l'abord du centre;
tantôt tonique, tantôt clonique, elle se localise un groupe muscu-
laire nécessaire pour exécuter un ensemble donné, ou s'étend à
plusieurs groupes musculaires antagonistes, voire d'un domaine
étendu. Les formes pures de convulsions statiques sont relative-
ment rares. L'exemple détaillé par l'auteur concerne un homme
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. -)Il t
jeune (vingt-huit ans), qui à la suite d'excès de travaux intellec-
tues, est pris de troubles circulatoires encéphaliques (insomnie,
excitation générale, syncope, dysurie, sensibilité extrême des
nerfs optiques et auditifs, inégalité pupillaire, accélération du
coeur, dépression psychique); puis se montrent les accès carac-
térisés par une flexion forcée, impérieuse, du corps entier sur les
articulations des genoux, flexion forcée immédiatement suivie de
projection de l'individu qui exécute ainsi deux, trois, quatresauts
uniformes, sans douleur aucune. Le développement de la mala-
die, ses particularités, sont à lire dans le mémoire, ainsi que
l'examen objectif du patient et la pathogénie. M. Erlenmeyer
prononce le mot de faiblesse irritable d'abord cérébrale, puis
spinale. La guérison eut lieu par la suppression des fatigues in-
tellectuelles, des faux-cols trop étroits, par l'administration de
K. Br., bains de siège à <6° et -18° R., par la galvanisation descen-
dante de la moelle lombaire, l'ingestion d'opium et l'extension
forcée du genou gauche par lequel avait débuté la convulsion
(rétraction des tendons des triceps, semitendineux et semimem-
braneux). P. KBR4VAL.
XVIII. Contribution A la connaissance DES fonctions du CORPS
calleux avec UN apport de faits ; par C. Reinhard. (CtnII'rrlbl.
f'.Nervenheilk., l8aa.)
A la suite d'une levue critique portant sur la bibliographie,
l'auteur détaille une observation de tumeur du corps calleux chez
un homme de soixante-cinq ans. On constate progressivement,
céphalalgies, lassitudes, élancements dans les jambes, affection
rhumatismale avec troubles mentaux, diminution de J'acuité au-
ditive bi-latérale, légère parésie du pli naso-Iabial et de la joue
gauche avec légère plaque d'atrophie grise brunâtre, trem-
blement modéré des mains à l'occasion des mouvements inten-
tionnels, oscillations pendant la station debout, signe de
liornberg, impossibilité de localiser les piqûres, les pincements,
les compressions, perte de la notion de temps et de lieu, absence
de discernement, de jugement, de mémoire, démence rapidement
croissante, impossibilité de marcher sans tomber et de se tenir
debout dès qu'il diminue sa base de sustentation ; gâtisme. Le
malade finit par s'aliter, perte des réflexes, analgésie. Pendant
les deux derniers jours, convulsions cloniques de la face et des
extrémités du côté droit avec perte de connaissance et' fièvre,
coma, envahissement du côté gauche par les convulsions. Mort
après trois semaines de maladie avérée. L'autopsie révèle une
gêne de la circulation en retour dans l'encéphale; les hémis-
phères, infiltrés de sérosité sont parsemés de fines hémorrha-
212 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
gies punctiformes. La plus grande partie du corps calleux est
transformé, dans ses trois quarts postérieurs, en une mase gris
rougeâtre molle qui pénètre à peine çà et là de quelques millimè-
tres dans la substance blanche du cerveau ; le bourrelet de l'or-
gane est indemne, de même que toute la partie antérieure à un
plan perpendiculaire passant par la commissure antérieure du
cerveau. Le tissu malade est du gliosarcome (sarcome granuleux
de Virchow) . La cloison transparente et la voûte à trois piliers
tendaient, comme le reste du corps calleux, à être envahies par
le néoplasme (points ramollis). Intégrité de la circonvolution de
l'ourlet, des corps optostriés, des commissures, des tubercules qua-
drijumeaux, des cornes d'Ammon, des pédoncules cérébraux, de la
protubérance, du bulbe, des circonvolutions, etc. De l'analyse de
ce fait, M. Reinhard tire que : 1° le trouble de l'équilibre (sans
vertiges) et le tremblement dans les mouvements synergiques se
rattachent très probablement à la destruction du corps calleux ; z
1° peut-être la même lésion est-elle responsable des phénomènes
relatifs à la personnalité et à la vie mentale; 3° il n'y avait dans
l'espèce ni ataxie, ni troubles proprement dits de la motilité (pa-
ralysie), de la sensibilité spéciale et générale, des fonctions trophi-
ques, sécrétoires, vasomotrices. il. K.
XIX. SUII LA COMPLICATION DE LA PARALYSIE FACIALE PÉRIPHÉRIQUE PAR
LE ZONA DE L\ FACE; par A. EULENBURG. CONTRIBUTION A L\
PATHOGÉNIE DES PARALYSIES FACIALES PÉRIPHÉRIQUES A L'OCCASION
du zona COIPLIC.4'l'FUIt ; par E. RKMAK. (Cwtralbl., t'. Neruen-
heilk., 1885.)
Observation originale. Paralysie faciale gauche s'étant gra-
duellement développée à la suite de six à sept jours de douleurs
auriculaires (courant d'air ? ) ; simultanément apparait un herpès
qui, parti du trou stylo-mastoïdien du même côté, descend dans
la région latérale du cou. le long des vertèbres cervicales et dor-
sales, sans dépasser la ligne médiane (rougeur et douleurs accou-
tuméesl. Points douloureux à la pression dans le domaine du tri-
jumeau (sus-orbltaire); douleurs suivant le trajet du facial, du
sympathique cervical, au niveau des apophyses épineuses et trans-
verses, en particulier des troisième et cinquième cervicales : in-
tégrité de l'excitabilité électrique. Au demeurant, forme légère
évolution hénigne. Cette complication extrêmement rare d'un
herpès zoster lacio-cervical révèle une étiologie commune au zona
et à la paralysie; il y a eu dans l'espèce inflammation de fibres
nerveuses, trophiques, que le tronc du facial pourrait bien con-
tenir sur une certaine étendue. Remak innocente le facial,
quant à l'herpès zoster, dans le fait qu'il a observé et qu'a publié
E. Voigt (Sl/1wt-Pete1's/,u1'g. Iletl. 11'ochenschr., 11° 45, 1884); car,
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 213
dans l'espèce, le zona occipito-collaire atteignait le bord antérieur
du trapèze et remontait à la partie supérieure de la nuque jus-
qu'au cuir chevelu, l'analgésie cutanée était trop profonde, et
la topographie, de même que l'intensité des phénomènes para-
lytiques localisaient la névrite à ce segment du facial compris
à l'intérieur du canal de Fallope, entre le ganglion gentculé et
l'origine du rameau destiné du muscle de l'étrier. Mais il est cer-
tam qu'une affection du tronc du facial même est capable d'en-
gendrer un zona. En voici un court exemple. Après huit jours de
douleurs dans l'oreille droite, s'installe une paralysie périphéri-
que complète, du même côté; en même temps se montre un zona
des deux tiers antérieurs du bord droit de la langue. La lésion,
rhumatismale, -IL, au-dessus du rameau de l'étrier (son muscle
est temporairement paralysé) a l'intérieur du canal de Fallope ;
le zoster lingual remplace ici les altérations du goût (atteinte de
la corde du tympan.) P. K.
XX. Un cas DE névrite multiloculaire avec athétose ;
par LCFWENFELP. (tYezerol. CentralGl., 4 b8.)
Le diagnostic est basé sur l'évolution de la maladie. Un homme
jusque-là bien portant est pris de manifestations fébriles et en
même temps d'affaiblissement des membres inférieurs ; puis
rapidement surviennent : une parésie des membres supérieurs,
des troubles de la sensibilité dans les quatre extrémités, sur le
tronc, à la face, troubles de la sensibilité subjectifs et objectifs
qui suivent le territoire de nerfs déterminés et s'accompagnent
bientôt d'atrophie musculaire : les nerfs dorso-lombaires sont
eux-mêmes malades (douleurs en ceinture, sensibilité extrême à
la pression de certaines apophyses épineuses et d'une partie des
muscles de la nuque, troubles trophiques de la peau.) Intégrité
de la vessie et du rectum, des facultés sexuelles, des pupilles ; par
conséquent, intégrité de la moelle. En fait de particularités remar-
quables, l'auteur insiste sur l'absence de douleurs proprement
dites le long des troncs nerveux, les phénomènes fulgurants étant
plutôt agréables que désagréables au malade , la persistance
des perturbations subjectives du côté du trijumeau sans troubles
objectifs, la parésie de l'oculomoteur externe gauche, l'absence
de paralysie complète et de reaction dégénérative, l'ataxie des
membres supérieurs quand on obstrue les yeux du patient. Enfin
il attribue à des mouvements incoercibles des doigts des mains
le diagnostic d'athétose primitive bilatérale périphérique, par
excitation névritique ascendante des faisceaux pyramidaux. Ce
diagnostic est vivement critiqué par E. Remake à propos d'un
Voy. Archives de Se urologie, t. XII, p. 21 y.
91 le REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
autre cas de névrite rapporté par lui dans le même recueil. (Voir
cette analyse plus loin.) P. K.
XXI. UN second cas DE CO-ATTEINTE DES muscles DE la face dans
l'atrophie musculaire juvénile ; par F. MOSSDORF. (Neurol. Cen-
t¡'albl., 1885.)
Homme de trente-trois ans, indemne de toute tare héréditaire
névro ou myopathique. Jeunesse surmenée dès l'âge de quatorze
ans par des travaux physiques rigoureux et le port de lourds far-
deaux. = A dix-huit ans. légère fatigue rachidienne; se sert moins
utilement de ses bras, se redresse et soulève des poids diffci-
lement ; amaigrissement progressif, sans autres phénomènes. - A A
vingt-huit ans, grande peine il marcher; impossibilité de tenir
solidement les objets, surtout avec la main gauche, souvent inca-
pacité de se vêtir. Il ne s'est pas aperçu des troubles de la face.
Allure : corps exagérément fléchi en arrière, ventre proéminent
en avant, bras et épaules pendantes. il lance pour marcher les
pieds en avant pour détacher les extrémités digitales qui pendent;
les genoux sont tournés en dehors; la tête estdroite, mais le men-
ton s'applique vers le sternum. Le thorax, excessivement amaigri,
révèle une saillie latérale exagérée des rebords costaux; l'abdomen
parait rétracté sur les côtés des muscles droits présentant une
tension uniforme ; atrophie irrégulièrement disséminée des mus-
cles du tronc et des membres supérieurs ou inférieurs. Asymétrie
faciale témoignant surtout de la même altération des muscles du
côté droit : intégrité de la langue, du voile du palais, des organes
de la déglutition. Il n'existe nulle part de réaction dégénérative.
Malade en traitement. Le diagnostic émane de l'âge auquel ap-
parurent les premierssymptômes, de la localisation de l'atrophie
(voir le mémoire), de l'absence de convulsions fibrillaires et de
réaction dégénérative. Il est vrai que les petits muscles des mains
participent, dans une certaine mesure, à l'affection, que les ex-
tenseurs des mêmes extrémités commencent à être atteints, mais
il faut tenir compte de la longue durée de la maladie et surtout
de sa marche régulière, sans saccades, du tronc vers la périphérie.
C'est une atrophie quasi-acquise par exagération de travaux
physiques. Cette constatation, jointe à l'absence de tout trouble
de la sensibilité et de l'excitabilité électrique (malgré l'atrophie
extrême) permet d'exclure l'idée d'une névrite chronique multi-
loculaire et de songer à une myopathie ; d'autre part, la parésie
faciale émane de l'atrophie musculaire et non d'une lésion des
noyaux des nerfs bulbaires, car elle est unilatérale, s'étend jus-
qu'au front et laisse intacts le palais et la langue. Néanmoins, la
participation de la face ne permet pas de se prononcer sûre-
ment sur la nature de la maladie. ' P. K.
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 215
XXII. Contribution A la théorie DE l'ataxie spinale ; par \y, l : ns.
(Neurol. Centralbl., 1885.)
Toutes les fois qu'il y a ataxie de mouvements pour lesquels, à
raison d'une longue habitude et d'un long exercice, tout contrôle
sensoriel est de la partdel'individu qui les exécute absolument inu-
tile ou impossible, notamment quand le malade est ataxique les
yeux ouverts, la cause de l'ataxie doit être cherchée dans la partie
des conducteurs moteursqui unitl'org3ne de la volonté aux racines
antérieures ; mais les fibres qui joignent directement, sans passer
par les centres coordinateurs, l'écorce aux muscles ne paraissant pas
atteintes dansl'ataxie, on est contraint de supposer qu'il existe des
conducteurs centrifuges spéciaux qui veillent à la conductibilité coor-
dinatrice (faisceaux coordinateurs). Quant à la théorie par trouble
delasensibilité, elle tombe devantlesfaitsqui témoignent soitd'une
perturbation de la sensibilité spinale sans ataxie, soit d'une ataxie
spinale marquée sans trouble de la sensibilité. Voici, par exemple,
un cas du second genre : ataxie spinale pure exclusive, si ce n'est,
de temps à autre, douleurs légères et fugaces dans les mollets et
diminution douteuse, tout à fait minime, du sens musculaire.
L'ensemble symptomatique ne permet de songer ni à une lésion
cérébrale, ni à une affection cérébelleuse, mais ce n'est pas un
tabès commun; absence de tous les symptômes initiaux classiques
malgré trois ans de durée, absence d'alcoolisme, absence de
syphilis. L'hypothèse d'une maladie de Friedreich survenue à un
âge avancé est, pour les motifs exposés suprà, insoutenable, et la
simulation doit être écartée à raison de la profession du malade
(charpentier) et des détails intimes de son ataxie. Il est encore,en
traitement. P. K. -
XXIII. Contribution A l'anatomie pathologique du tabès dorsal.
Communication provisoire; par ED. KRAUss. (Neurol. Central6l.,
1885.)
L'auteur résume les propositions qui lui paraissent émaner de
treize observations suivies avec le plus grand soin et analysées, au
point de vue anatomo-pathologique, par les nouvelles méthodes
de coloration. Ce sont les altérations vasculaires qui constituent
généralement le corps du délit, mais il n'y a aucun motif de re-
jeter l'opinion d'après laquelle le tabes aurait pour substratum
anatomique. un processus parenchymateux chronique (altération
vasculaire secondaire ou, tout au moins, concomitante); l'opinion
de Struempell (affection systématique combinée) est assez sédui-
sante, car on trouve une lésion adéquate dans les deux cordons
21 si REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
postérieurs, la dégénérescence de chacun des districts des cordons
postérieurs se succède assez régulièrement, et la palhogénie des
symptômes cliniques en rapport avec eux présente un attrait
légitime, mais il faudrait justifier physiologiquement l'existence
de ces systèmes dans les cordons postérieurs. M. Krauss a cons-
tamment enregistré la diminution des fibres dans les colonnes de
Clarke, mais il est fréquent d'en constater la parfaite intégrité.
Pour juger de la localisation des symptômes du tabès à l'aide de
faits précis et nouveaux, l'auteur rapporte deux faits. L'un d'eux
concerne un cas de tabès typique sans ataxie; dégénérescence
évidente des colonnes de Clarke ; altération modérée des cordons
postérieurs; la substance grise ne présente pas plus de lésion que
dans le tabes accompagné d'ataxie, elle n'est donc pas le foyer
de l'alaxie. Dans la seconde observation, il s'agit d'un tabes trau-
matique avec conservation des réflexes patellaires des deux côtés;
dégénérescence classique de la moelle lombaire et dorsale infé-
rieure, (double raie entre le sillon médian postérieur et le bord
interne de la corne postérieure); dégénérescence de la marge
externe des colonnes de Clarke; dans la moelle dorsale supé-
rieure, on rencontre une dégénérescence qui suit le sillon longi-
tudiual postérieur, une atrophie partielle des fibres radiculaires
au point où elles s'étalent dans la corne postérieure; la partie
externe des cordons postérieurs, ou mieux la zone radiculaire
moyenne peut être, par suite, atteinte sans que les réflexes patel-
laires disparaissent forcément; impossible de localiser les douleurs
lancinantes et les troubles vésicaux. Tels sont les points prin-
cipaux de ce travail. P. K.
XXIV. Des troubles nerveux observés A la suite DE l'empoisonne-
MENT par l'oxyde de carbone; par le Dr W. SARDINE. IVFStnik de .
psychiatrie, de M. le professeur Mieuzejewsky, '1885, t. 1.)
Dans ce travail, l'auteur a réuni quarante cas (publiés par diffé-
rents auteurs), d'empoisonnement par l'oxyde de carbone chez
l'homme, en y ajoutant un certain nombre d'expériences person-
nelles failes sur des chiens. En comparant les résultats de ces
expériences avec ce que l'on trouve chez l'homme on voit que :
I. Les phénomènes graves observés chez l'homme à la suite d'un
empoisonnement unique et déjà souvent liés à une lésion orga-
nique sont très passagers chez le chien; les lésions organiques
ne se montrent chez ce dernier qu'à la suite d'une série d'empoi-
sonnements successifs.
II. Les lésions en foyer, très fréquentes chez l'homme, n'ont
jamais été observées chez le chien qui présente, au contraire, babi-
tuellement une myélo-encéphalite généralisée. Pour M. Hardine,
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 2t7
cette différence n'est, du reste, qu'apparente. Deux ordres de
phénomènes se rencontrent, en effet, chez l'homme dans cet
empoisonnement : 1° Immédiatement après les premiers accès
d'empoisonnements, on voit un affaiblissement de l'activité men-
tale (phychique); 2° Beaucoup plus tardivement apparait le carac-
tère inflammatoire de la lésion se manifestant cliniquement par
la fièvre, les convulsions et le coma. A l'autopsie on trouve dissé-
minés des foyers de ramollissement multiples.
. Le processus organique produisant l'affaiblissement psychique
pourrait d'après, l'auteur, être rapproché de la dégénérescence
des cellules nerveuses observées chez les chiens sacrifiés avant
l'apparition de symptômes graves, ou morts à la suite d'un
empoisonnement unique accompagné d'une forlehémorrhai'ie.
Les symptômes tardifs aboutissant au ramollissement en foyer
seraient identiques à l'inflammation généralisée des vaisseaux que
l'on trouve chez les chiens soumis à un empoisonnement pro-
longé. Il est bon d'ajouter au point de vue de l'excitabilité élec-
trique du cerveau, sous l'influence de l'oxyde de carbone que si
l'empoisonnement se produit lentement (par un mélange d'air
ne contenant que 1/2 p. 100 de Co) l'excitabilité de la couche cor-
ticale augmente d'abord; puis cela s'amoindrit pour aboutir à
l'inertie. La couche blanche résiste plus longtemps de sorte qu'en
l'excitant, on provoque des contractions musculaires alors même
que l'excitation de la couche corticale reste silencieuse. Les nerfs
hériphériques résistent encore d'avantage à l'action de l'oxyde de
carbone. N. SKWORTZOFF.
XXV. Contribution A l'anatomie pathologique du système nerveux
central, par Tu. RUMPF. (A9'CIE. f. Psyeh., XVI, 2.)
I. De lu syphilis du cerveau et de la moelle. - Un homme de trente
et un ans, atteint un an auparavant, d'accidents infectants, est
atteint brusquement d'hémiplégie droite, rebelle à tout traite-
ment spécifique ou électrique. Six mois plus tard, il présente suc-
cessivement de la paralysie spasmodique de la jambe gauche,
une incontinence complète de l'urine et des matières, des douleurs
en ceinture, de l'analgésie des extrémités inférieures, des acci-
dents du décuhitus. L'autopsie révèle un vieux foyer apoplectique
occupant l'extrémité interne du corps strié gauche et descendant
dans la capsule interne; le faisceau pyramidal du cordon latéral
droit présente la dégénérescence secondaire classique. Au milieu
de la moelle cervicale, juste à l'entrecroisement des pyramides,
le cordon latéral gauche est dégénéré. Cette lésion, qui ne se
rattache en rien à celle du cordon latéral droit, qui n'a rien à faire
avec l'hémisphère cérébral droit indemne, augmente en étendue à
Archives, t. XII. la a
18 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.-
mesure qu'on descend vers la moelle dorsale et s'accompagne
alors de l'altération des cordons de Goll et bientôt des faisceaux
cunéiformes. Il y a donc eu, dans l'espèce, deux sortes de lésions
presque contemporaines; un ramollissement cérébral et une
myélite transverse ayant débuté par l'entrecroisement des pyra-
mides. Ces deux espèces de lésions émanent d'altérations inflam-
matoires syphilitiques des vaisseaux en des régions distinctes.
Du moins, c'est l'avis de M. Rumpf.
II. Atrophie des circonvolutions ascendantes ci la suite de para-
lysie infantile spinale. Examen du cerveau et de la moelle
d'un individu de dix-huit ans, mort de phthisie pulmonaire, at-
leint depuis l'âge de trois ans d'une paralysie infantile à forme
hémiplégique (légère atteinte du facial et de la troisième paire)
occupant le côté droit. Les cellules de la corne antérieure droite
présentent les altérations connues sur toute la hauteur de l'or-
gane ; intégrité des faisceaux blancs, quoique le cordon latéral
droit paraisse atrophié au niveau de la partie supérieure de la
moelle cervicale, des noyaux des nerfs moteurs de l'oeil, du
bulbe. Il existe une diminution de volume manifeste indubitable,
de la capsule interne, du noyau lenticulaire, et des deux ascen-
dantes du côté gauche, sans altérations microscopiques. Il est im-
possible de dire s'il y a eu arrêt de développement par cessation
de fonction ou dégénérescence véritable (Rumpf). Figures à l'ap-
pui.
Il ! . Contribution à lit pathologie cérébelleuse. Examen ana-
tomique d'un chat de huit semaines ayant présenté une ataxie
très prononcée, avec chute et projection en avant, absence de
paralysie : intégrité de la vue et de l'ouie; absence d'attaques
épileptiformes; pas de vomissements, de fièvre, d'amaigrisse-
ment ; rien du côté de la vessie et du rectum. On tue l'animal par
narcose prolongée. Atrophie portant uniformément sur toutes les
parties du vermis (voir les figures); parallèlement la base osseuse
du crâne est le siège d'une hypertrophie indiscutable. P. K.
XXVI. Contribution A l'anatomie pathologique du tabès dorsal ET au
trajet des FIBRES DE la moelle épinière de l'homme. Communica-
tion provisoire; par Il. Lissauer. (Neurol. ! 'e7zlrul5l., 188j.)
Méthode histochimique de Weigert. Disposition particulière
d'une partie des fibres nerveuses fines contenues dans les racines
postérieures. Ces libres se réunissent au côté externe de chacun
des lroncs radiculaires, pour se disposer à entrer dans la moelle;
les faisceaux ainsi produits, composés exclusivement de fibres
extrêmement fines, après être sortis de la pie-mère, se détour-
nent du tronc radiculaire principal en dehors en paraissant se
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 21q
diriger vers le cordon latéral, mais bientôt, s'infléchissant vertica-
lement, ils se condensent en vne couche propre située à la pointe de
la corne postérieure, entre le cordon postérieur et le cordon latéral :
ils montent ainsi et pénètrent dans la substance gélatineuse et
dans les régions profondes de la corne postérieure. Dès qu'ilsont
adopté la direction longitudinale, on voit leurs fibres affecter une
telle complexité, former un lacis si enchevêtré qu'il devient
impossible d'en suivre le trajet individuel. Treize cas de tabes
dorsal ont décelé l'atteinte constante de ces fibres fines sous
forme d'une petite plaque intermédiaire aux cordons latéraux et
postérieurs, qu'il s'agit d'une ataxie précoce ou déjà avancée.
Néanmoins il est permis de dire que leur altération dépend du
stade du tabès, et que la lésion y est d'autant moins avancée
qu'on examine les couches les plus antérieures de la corne posté-
rieure, ce qui montre que le processus marche, dans la corne
postérieure, de la périphérie il la base de l'organe. P. K.
XXVII. LE professeur : DAll611 \V1CZ E'l' LETABES dorsal; pal' SCHUL'l'ZE.
M. LE professeur Schultze 1'1' ses critiques : par A. Adamkiewicz.
Remarques sur LE thème précédent D'ÂD.UlKIt.WtCZ ; par Schultze.
(Neurol. Cenl1'itlbb¡tt, 158.)
Adamkiewicz, dans un travail intitulé : Die uncttomischetz Pro-
cesse der Tubes dorsztnlis (Silzungsbcrkht D. K. K. Atad. Wissenseh.
7ti lVien; t. XC), prétend constituer un lype de tabès dû il
une dégénérescence parenchymateuse atteignant primitivement
la fibre nerveuse dont elle tuerait d'abord la myéline dans
les faisceaux de T3mdacli. Il se sert dans ses recherches de la sa-
1 qui colore aussi nettement, mais en leur imprimant une
leinle différente, les fibres nerveuses et les éléments conjonctifs.
A côté de cela, il existerait un second type de tabès dans lequel
l'altération primitive consisterait en la prolifération du tissu con-
jonctif, se développant le long des truucs artériels dans les cor-
dons postérieurs (déchéance des fibres par compression ; absence
de lacunes] [V. Die Rückenma1'ks-Schwindsuc'ht. Vienne, 1885.]
Sur ce sujet, critiques et réponses acerbes. P. K.
XXVIII. Contribution A L'ÉTIOLOGIE ET A la SYMPTUIdTULUG1E du
. tabès, par VotGT. (Ccnt1'Ulbl. f. Nervenheilk, 1883.)
Cent cas de tabès frai tés par l'auteur, ou 1883 et 1884 comprenaient L
cinquante-neuf faits de syphilis secondaire ayant précédé l'ataxie
locomotrice; dans la plupart des observations en question, le tabes
1 Voy. Archiva de Seurulugie, L. ? 1, p. 'JS eL l'noynes médical lbs5.
220 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
avait directement suivi l'infection syphilitique; chez quarante des su-
jets contaminés on ne pouvait incriminer aucun autre élément ta-
bétogène que levirus. Dans le tabès syphilitique, on a noté les symp-
tômes initiaux suivants : hébétude, sensation de tension, de pression
de douleur céphalique, état de mauvaise humeur, d'hypochondrie,
de mélancolie, et paralysie d'un ou de plusieurs des muscles
droits ou obliques de l'oeil; ces symptômes, fréquents dans la série
envisagée, ne s'observeraient jamais ou presque jamais chez les
tabétiques non syphilitiques. L'auteur passe ensuite en revue les
symptômes d'un Labes quelconque et leur fréquence, soit comme
troubles du début, soit comme perturbations se montrant au cours
de la maladie. Il en conclut que le tabès se compose de symp-
tômes presque constants (catégorie la plus chargée) et de symp-
tômes rares (le plus petit nombre). En dehors du tabès héréditaire
de Friedreich, il est impossible d'établir d'autres types cliniques
à moins d'utiliser à cet effet les symptômes rares. En effet, alors
même que tel ou tel des symptômes rares parait revêtir un autre
caractère qui change un peu les allures du tabes (exemple : l'atro-
phiedu nerf optique), on rencontre presque toujours simultanément
certains symptômes cardinaux (douleurs lancinantes, absence de
réflexe patellaire, diminution de la sensibilité à la douleur et ra-
lentissement de la conductibilité à l'égard des impressions dou-
loureuses). P. K.
XXIX. Tabès dorsal ILLUSOIRE; par P.-J. KOWALEWSKY. (Centmlbl. f.
Nervenheilk, 1885.)
Histoire d'un individu mystique (il s'agit d'un prêtre du schisme
grec), chez lequel l'imagination a, de par son éducation, subi un
développement exagéré. Après avoir vu son beau-frère, père de
huit enfants, subir les premières atteintes d'une ataxie locomo-
trice à laquelle il succomba sous ses yeux, il éprouve tous les
symptômes subjectifs de la maladie. On le soigne comme vérita-
blement malade pendant vingt-trois jours ; il s'en va guéri. Con-
clusions : 1° Les symptômes (subjectifs) du tabès se sont, chez ce
patient, montrés sous l'influence de l'idée qu'il allait être en
proie à cette affection et de l'angoisse que cette perspective lui
procurait. Tout en se rapprochant de la paraplégie chimérique,
ce fait se rattache à la pathophobie ou anxiété pathologique. 2°
On doit faire jouer un rôle prépondérant aux exercices mécani-
ques, tels que le travail à la terre, et à l'agriculture dans le trai-
tement de maladies semblables à celle-ci, par exemple dans les
conceptions irrésistibles, l'hypochondrie, la neurasthénie. Et il
importe que ces exercices aient un sens déterminé, saisissable par
le patient : ainsi la gymnastique de chambre n'est pour lui qu'un
jeu ridicule. Il. K.
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 221
XXX. Clinique et anatomie pathologique de la maladie de thomsen.
. Communication provisoire; par W. Erb. (Neurolog. CentralbL.
1885.)
Examen minutieux de deux frères de quatorze à quinze ans
atteints de cette maladie. La diminution de l'énergie du mouvement
volontaire est chez eux manifeste; elle contraste avec la charpente
athlétique de leurs muscles; en dehors des accès de contractures
et de roideurqui formentla maladie deThomsen etqui se montrent
dès qu'à la suite d'un long repos le patient veut se mouvoir,il il existe
pendant la marche, principalement quand l'exercice a obligé
à des flexions nombreuses, de petites crises constituées par
une augmentation de tension des groupes musculaires, augmen-
tation de tension se transformant en contracture de quinze à
vingt-cinq secondes, si, au lieu de s'arrêter, un veut vaincre la
crampe. Diminution de l'excitabilité mécanique des nerfs
moteurs. Ces conducteurs réagissent quantitativement bien aux
courants faradiques, mais les plus forts courants ne déterminent
que des contractions brèves, éphémères, qui n'acquièrent de la
durée que par la sommation des excitations ; le courant galva-
nique ne décèle aucune anomalie au point de vue- de la quantité
de la réaction, mais, pour obtenir une contraction tonique à la
fermeture de la cathode, il faut se servir de courants forts et
encore cette contraction est-elle peu évidente et très peu persis-
tante ; on n'engendre de contraction tonique soutenue que par
la sommation d'excitations disséminées le long du cubital. Les
muscles, extrêmement sensibles aux excitants mécaniques, obéissent
facilement aux courants faradiques et exagérément à l'électricité
galvanique; les courants faradiques n'engendrent, de quelqne
façon qu'on s'y prenne, que des contractions passagères, tandis
que de minimes traînées galvaniques à peines perceptibles
déchaînent à la fermeture des deux pôles des convulsions lentes,
persistantes, transformant le muscle en une masse inégale, dure,
contournée, comme rampante et quelquefois (fléchisseurs des
doigts, vaste interne, vaste externe) en un bloc ondulant ; en un
mot, modification dans la forme de la contraction musculaire
(paresse, ralentissement du temps perdu, persistance de la con-
traction) et réaction électrique myotonique. M. Erb a réséqué sur
un de ses malades un morceau du biceps brachial; ce muscle, qui,
frais, semblait normal, présentait, après durcissement, une ! typer-
trophie énorme de la fibre (de près du triple) jevenue presque
ronde, cylindrique; intégrité du tissu conjonctif et de ses noyaux,
mais multiplication considérable des noyaux du sarcolemme; la stria-
tion transversale paraissait plus fine et souvent un peu moins
nette. Il. IL
222 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
XXXI. Contribution A la pathologie DE la maladie DE Thomsen
(expression consacrée); llarnl. BERNHARDT. Contribution A L4
maladie DE 'II011SEN : Lettre DE Thomsen A M. Bernhardt. (Cen-
li-aibl. f. Nervenheilk, 1885.)
M. Thomsen, en décrivant l'affection dont il était atteint, lui
et les siens, niait l'influence des mariages consanguins, au moins
dans sa famille, et insistait sur la diversité des origines sociales
de chacun des membres envisagés. Le petit mémoire de M. Ber-
nhardt, gros de faits, prouverait tout Je contraire. Les grands
parents des malades présentés, bien que cousin et cousine, ne
paraissent pas a\oir souffert de cette maladie; les parents mêmes,
quoique consanguins, étaient demeurés indemnes. Mais la tante
paternelle, issue de père et mère consanguins, en est affectée et,
après elle, ses nièceset neveux. Le cousin du père de ces derniers
épouse sa cousine, qui est la soeur de leur père, ou leur tante;
deux enfants issus de ce mariage sont également atteints, de
même qu'un de leurs fils (troisième génération). L'aulre branche
généalogique, qui brille encore par des mariages consanguins,
est fauchée par la phthisie pulmouaire ou mutilée par des névro-
pathies (surdinrutilé, lésions du nerf optique, etc.). M. Thomsen
écrit une lettre spéciale pour confirmer à nouveau la non-consan-
guite des mariages dans sa famille, et cependant l'hérédité de
la perturbation nerveuse, qu'il a le premier éprouvée, continue
persistante, avec celte particularité que l'affection réside surtout
sur les membres inférieurs et que les muscles de la motilité
volontaire présentent un développement exagéré. Détails sur ses
enfants et petits-enlanls : la chaleur du lit et l'exercice, les suda-
tions dissipent l'état de rigidité; en revanche, l'appréhension, la
crainte du ridicule en public l'appellent et l'exagèrent (panopho-
bie, comme chez les agoraphobes). Il s'agit, dans l'espèce, d'in-
dividus vigoureux indemnes de toute tare, de toute infection,
de phthisie pulmonaire; lui-même porte vaillamment ses soixante-
dix ans malgré cette infirmité des plus imporluues. P. K.
XXXII. Sur LE rapport qui existe ENTRE L'UPICANTOUS E1' L'OPHTIIAL-
tOPLI.GIE; par J. HiR<CHBKRG (Nu ? 'ol·CC1lGralbl., 1885.)
Homme de trente et un ans; ophthaluioplégie totale typique :
blépharoplose bilatérale (les paupières supérieures ont une
largeur de 28 millimètres); les sourcils jont très élevés; il faut
que le muscle frontal remplace l'élévaleur de la paupière supé-
rieure ; mouvements d'élévation, d'adduction, d'abduction de la
pupille impossibles; pour abaisser le globe oculaire, le patient se
sert de ce qui lui reste du grand oblique et, parsuite, l'oeil tourne
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 233
autour de son axe du côté de la tempe; les axes des deux yeux
divergent légèrement quand ils demeurent tranquilles et cepen-
dant, ni diplopie, ni troubles de l'accommodation, ni modifica-
tions pupillaires, ni lésion du fond de l'oeil, acuité visuelle mo-
dérée (astigmatisme) Intégrité du système nerveux. Il s'agit d'un
état congénital héréditaire; la mère du sujet en question vient
de procréer un enfant actuellement âgé de neuf mois qui pré-
sente un épicanthus paralytique, lerepli cutané oculo-nasal fait
défaut ; le bébé ne peut ni élever la paupière, ni regarder en
haut, lesmouvements d'abduction, d'adduction, d'abaissement des
globes sont conservés : alternative de divergences et de conver-
gences convulsives;sous l'influence d'une émotion, le petit malade
arrive à faire cesser la blépharoptose. P. K.
XXXIII. Un cas DE paralysie DES MUSCLES DE L'OEIL A la suite DE
diphthérite DE la gorge; par W. IIIiTHOFF. Contribution A
l'étude DES paralysies DIPIITIIÉRITIQUES : par B. AIENDEL (Neurol.
Centralbl.,1885.)
Il s'agit d'un enfant de dix ans atteint d'une ophthalmoplégie
externe et bilatérale accompagnée de parésie de l'accommoda-
teur de chaque côté, sans modification dans la réaction des pu-
pilles ; presque en même temps, parésie des membres supérieurs
et inférieurs (impossibilité de marcher sans appui) ; le tout con-
sécutif à une diphthérite légère n'ayant pas nécessité l'alitement,
mais ayant laissé après elle un nasonnement assez prolongé. Ces
complications se montrèrent douze jours après l'évolution de la
diphthérite. progressèrent pendant trots semaines, puis dispa-
rurent graduellement dans l'espace de six semaines (Observ. de
M. Uhthoff). Le fait de M. Mendel concerne un malade de huit
ans affecté du 2 ? -' ? 8 septembre 1883 de diphthérie pharyngée
modérée; le 4 octobre, on constatait une paralysie du voile du
palais; le 2 novembre, commencèrent à se produire des accidents
oculaires et des troubles delà m otiii té volontaire aboutissant aune
paralysie bilatérale absolue de l'ensemble des muscles des globes
oculaires, avec parésie du facial droit, parésie pharyngo-palatine,
parésie des muscles de la nuque, ataxie et affaiblissement des
quatre membres, signe de Romberg, disparition des réflexes
tendineux, fièvre (P = 100. T = 38). Sur cet ensemble symplo-
matique se greffe une bronchite catarrhale diffuse de l'albumi-
nurie ; la paralysie s'étend et se complète ; le pneumo-gastrique
cesse de fonctionner, le patient meurt le 11 novembre. L'examen
anatomo-pathologiquc de l'encéphale révèle la réplétion exagérée
des petilesartères etdes capillaires, depuis les tubercules quadri-
jumeaux jusqu'à l'entrecroisement des pyramides : dans l'espace
adventice de Virchow et Robin, on trouve .le ? l1'lohnlc'i blancs et
2 : H e REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
rouges accumulés; ces. lexsudais, qui existent également en
dehors des vaisseaux proprement dits, s'accompagnent, sur plu-
sieurs points, de véritables hémorragies capillaires assez nom-
breuses, notamment à l'intérieur de la protubérance, le long de
l'oculomoteur externe droit. Intégrité des noyaux des nerfs crâ-
Iliens et en particulier des noyaux de l'oculomoteur commun, de
l'oculo-moteur externe, du pneumogastrique, de l'hypoglosse. Les
branches périphériques et les troncs sont atteints de névrite
parenchymateuse ou interstitielle (multiplication des noyaux du
névrilemme, hémorrhagies le long des filets, altération de la
myéline), soit à l'extérieur du crâne, soit en pleine protubérance,
soit au coeur du bulbe (pneumogastrique, oculomoteur externe,
oculo-moteur commun). Le poison diphthéritique atteint donc
aussi bien les parois des vaisseaux que le névrilemme, et cela
du même coup. P. K.
XXXIV. UN cas DE névrite généralisée avec altérations électriques
GRAVES, MÊME DU CÔTÉ DU FACIAL TOUJOURS INDEMNE; par E. RE-
MAK. - QUELQUES remarques SUR la communication DElil. REMAK,
intitulée : Un cas de névrite généralisée, par L. LOEWENFELD.-
Réplique aux remarques précédentes; par E. REMAK. (Neurol.
liei2t ? ·Clfll., 4885.)
A la suite d'un rhumatisme articulaire siégeant sur les deux
articulations tibiales inférieures, on voit s'installer une paralysie
incomplète, accompagnée de troubles de la sensibilité et d'atro-
phie dégénéiative partielle des muscles des membres inférieurs;
absence de phénomènes tendineux; démence; trouble de la
parole; tremblement à l'occasion de mouvements voulus; cou .
vulsions ; et, particularité caractéristique, altérations électriques
graves ( d'abord forme moyenne, puis forme grave de la réac-
Lion dégénérative, enfin suppression de l'excitabilité électrique),
occupant non seulement les territoires neuro-musculaires où a
siégé la paralysie, mais ceux qui n'ont cessé de se montrer
indemnes (facial) des deux côtés. Le diagnostic de iiévrite iiiulli-
loculaire subaiguë émane de la constatation des douleurs ini-
tiales, de l'existence des troubles de la sensibilité qui, d'abord
considérables, ont rétrocédé graduellement en même temps que
l'atrophie musculaire dégénérative des extrémités, après une
durée d'un an, de la genèse des phénomènes morbides consécu-
tivement à un rhumatisme articulaire. La participation de tous
les rameaux des deux nerfs facial aux altérations électriques,
déjà observée dans la polynévrite aiguë (Pierson) n'indique pas
dans l'espèce l'existence d'une poliomyélite antérieure ou d'une
polioencéphalite, parce qu'il y a suppression de l'excitabilité élec-
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 225
trique presque complète; tout cela est d'ordre périphérique
comme dans l'atrophie musculaire héréditaire : genèse myopa-
thique, puisque le bulbe est intact. Conclusion. Névrite mulli-
loculaire généralisée, dégénérative, ayant englobé, au début,
quelques nerfs moteurs de l'oeil (diplopie de trois mois) et attei-
gnant actuellement le facial et l'hypoglosse; les nerfs crâniens,
non paralysés, sont presque complètement inexcitables et cepen-
dant ils ont conservé leur conductibilité. Peut-être y a-t-il lieu
de penser qu'en ce cas les manchons de myéline sont seuls alté-
rés (Erb; et névrite segmenlaire périaxile de Gombault). Légère
inflammation des deux nerfs optiques conformément aux obser-
vations de Struempell, Eichhorst, Loewenfeld. Cependant l'exis-
tence dans les extrémités supérieures de mouvements spasmo-
diques, de sautillements tendineux, de tremblements intention-
nels rappelle, quand on les rapproche de la démence, la
sclérose en plaques. A ce propos, Remak critique l'expression
d'athétose que Loewenfeld a appliquée* à des mouvements irrésis-
tibles, mais de peu d'ampleur, découverts accidentellement et,
par suite, dépourvus d'originalité frappante, et, en tout cas, ne
consistant pas en cette rotation lente et caractéristique de tous
les doigls de la main autour des articulations ulélacarpopba-
langiennes : « la main placée au repos et à plat sur un support
exécute incessamment contre son gré, à des intervalles de quel-
ques secondes, soit de légers mouvements spasmodiques, soit des
mouvements de flexion, d'extension et d'abduction de tels ou tels
doigts isolés ou groupés», etc. (voir Hammond par comparaison).
P. Kéraval.
XXXV. CONTRIBUTION A L'TUDb : des névrites multiples; par A. HOVÉN.
(Centralbl. t. tYcrvenheil ? A88;i.)
Observation se distinguant de la poliomyélite avec laquelle la
névrite est le plus souvent confondue, en ce que les troubles de la
sensibilité étaient très accentues, les troubles de la molilllé et
de la réaction électrique n'atteignant pas le degré qu'on a cou-
tume de noter dans les lésions de la moelle. Conclusion. Névrite
multiloculaire à début subaigu sous forme de deux attaques
séparées, puis devenue stationnaire. Cette névrite a néanmoins
présenté des particularités qui ne lui sont pas habituelles : tels le
début par les extrémités supérieures et l'épaule, l'insignifiance
des troubles moteurs, surtout par comparaison avec les troubles
de la sensibilité excessifs, la diplopie (insuffisance congénitale
des muscles des yeux), la tuméfaction inlermitlanle des mains
1 Voy. Archiv. de Neurol. Un cas de névrite multiloculaire avec atlié-
tuçe. t. xu, p. '207.
226 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
et des pieds (troubles vasomoteurs), la rapidité du pouls (atteinte
du pneurno-gastrique). Guérison d'une promptitude remarquable,
ce qui confirme encore le diagnostic et exclut l'idée d'une lésion
des centres nerveux. L'auteur insiste sur l'action favorable du
pinceau faradique dans les cas récents ou anciens de névrite
quelconque ou traumatique où prédominent des troubles de la
sensibilité. Au point de vue de l'étiologie, il n'y avait ici lit
refroidissement m maladie infectieuse, ni alcoolisme, ni aucun
élément prédisposant. P. K.
XXXVI. Sur LES paralysies du nerf 31ÉD1 \N par M. BERNHARDT
(Centrcal6l. f. Nervenheilk., 1885.)
L'auteur montre à l'aide de cinq observations de blessures que le
médian innerve non pas seulement la face palmaire des doigts,
niais celle de la face dorsale des phalangettes etdes phalangines de^
deuxième, troisième doigts ainsi que le côté externe des phalangines
du quatrième doigt. L'auteur insiste, en outre, sur l'inégalité dans
les zonesaneslltésiques raltachables aux blessures du médian(ques-
tion de degré et d'étendue de la lésion en chaque cas particulier),
sur l'atteinte, dans un des cas de la face dorsale de la phalange
unguéale du pouce. Ces faits sont encore intéressants au titre
que voici : l'élément moteur souffrit moins que l'élément sensitif ;
on voit notamment l'éminence thénar toute atrophiée conserver
ses propriétés motrices, ce qui semble en même temps récuser la
ré,istance des fibres trophiques (Luederilz); au fond, quatre obser-
vations décèlent ici l'atteinte des fibres trophiques et sensitives
eL l'intégrité des libres motrices. De l'ensemble des analyses
de chaque fait, il résulte que la séparation absolue du nerf n eut
généralement pas lieu et que le processus inflammatoire con-
sécutif à la section détermina après coup une destruction plus
étendue, et dans le sens transversal et sur la longueur du tronc
(névrite) jusque dans les plus fins ramuscules intramusculaires
(réaction dégénérative due à la myite ou nlyosite propagée) ; -1
mais en même lemps la paralysie complèle a pu être empê-
chée, ou la restitution rapide de la conductibilité motrice a
pu être effectuée soit par la conservation d'un pont de libres
normales, soit par la prompte régénération d'un petit segment
de fibres. P. K.
XXXVII. Un cas DE sclérose HTHUALE .\\fV'OTROI'IiIQUE; par A. Kos-
chewnikoff. (Ccnt1'aLlil. f. Nervenheilk., 188.)
Sous-litre : Dégénérescence des faisceaux pyramidaux dans tout
le il ll ? I1'l el de du cerveau en iiti)l)oi-1 avec ce sysliiiie.
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. -2-)7
A rapprocher du cas publié par le même auteur dans les Archives
de Neurologie de 43, n° 18). Naturellement les cellules ner-
veuses des cornes antérieures sont aussi atteintes. Intégrité abso-
lue des petites cellules nerveuses de la moitié supérieure de l'é-
corce des circonvolutions ascendantes. P. K.
XXXVIII. CONTRIBUTION A la symptomatologie DES Lf,3TONS DE
la protubérance; par J. 1'IIERZE.1E1VSICY et Rosenbacii.
(Neurol. Centrabl., 1885.)
Les lésions de la protubérance peuvent produire de nom-
breux symptômes; néanmoins le diagnostic se trouve relative-
ment facilité par l'association de certains phénomènes dans le
domaine de l'encéphale. Tel est le cas de l'existence dela para-
lysie du muscle droit externe d'un des yeux, de concert avec
la paralysie du muscle droit interne de l'autre oeil sans que
l'ocumoloteur commun,dont dépend le droitinterne, se trouve
atteint. Ce syndrôme se rattache comme on sait à une lésion
unilatérale du noyau de l'ocumoloteur externe'. Nouvelle-
observation à l'appui. Paralysie du facial droit dans sa totalilé :
hyperexcitabilité des muscles paralysés à l'égard des courants
faradiques et galvaniques, les courants continus engendrant des
contractions très lentes : Ka S Z > An S Zz. Du côté droit, para-
lysie du droit externe; parésie du droit interne de l'oeil gauche.
Double névrorétinite. L'autopsie révèle, dans la substance delà
protubérance, la présence d'une tumeur qui, comprise dans la
moitié droite de son plan supérieur comprime le raphé et la
moitié gauche de l'organe, fait saillie en haut dans la cavité
du quatrième ventricule, dont elle rejette les fibres raphéiques
à gauche, gagne ira presque la zone intermédiaire au ventri-
cule et à l'aqueduc de Sylvius, et arrive en bas, à une distance
de 3 millimètres des stries acoustiques; topographiquement,
elle occupe la région de la calotte et ne pèse ni sur les fais-
ceaux pyramidaux, ni sur les fibres transverses. Ce néoplasme
n'a pas détruit de fibres, mais il a engendré tout autour de
lui une inflammation chronique qui, tant dans la moitié
droite du IV ventricule, que dans une partie de sa moi-
tié gauche, a détruit la substance grise du segment supé-
' Voy. NotUnael : Maladies de l'encéphale, p. 115.
= Voy. pour ces symboles, Charcot, Leçons sur les Maladies du système
nerveux, 111, 1, p. 135 et 136, Arc/m'es rit' Seurotogia, I, 74 ct pa.ssrnr,
228 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
rieur du plancher et les noyaux des Vla et VU" paires
droites; on constate en outre une infiltration lymphoïde des
noyaux de la VIII, paire droite des VIe et VIle paires gauches,
ainsi qu'un simple ramollissement des noyaux des IX, X, XI,
XII" paires. Intégrité des portions externes et antérieures des
coupes transversales de la protubérance et du bulbe, des
racines du trijumeau, des trousseaux de fibres appartenant
aux pédoncules cérébelleux moyens, des olives, des faisceaux
pyramidaux; destruction des fibres du faisceau longitudinal
postérieur sur une grande étendue des deux côtés. P. K.
XXXIX. UN CAS DE TUMEUR CÉRÉBRALE (GLIOSARCOME DE LA
glande pinéale 1885, par L. FEILCHENFELD (Neurol. Centralbl.).
Individu très intelligent, présentant successivement de la
céphalalgie, des vertiges, des vomissements, de l'apathie, de
la faiblesse accentuée des membres inférieurs, des convulsions
généralisées l'empêchant de boire et de manger seul, de la
diplopie, de la diminution des réflexes sphinctériens anovési-
caux (constipation), de l'ataxie dans les jambes, du ralentisse-
ment dans laperceplion des impressions sensibles, de la para-
lysie des muscles soumis à l'oculomoteur commun des deux
yeux excepté de l'élévateur de la paupière supérieure, de la réac-
tion lente des pupilles, des papilles étranglées, une légère
parésie du facial. Tel fut l'ensemble symptomatique de mai 1884
au 24 mars 1885 : courbe fébrile le jour de la mort. L'autopsie
décèle tous les signes de la stase encéphaloméningée avec
oedème interstitiel. Il existe un sarcome à cellules fusiformes
qui, originaire de la glande pinéale et de son pédoncule,
englobe le pédoncule cérébelleux supérieur, l'extrémité anté-
rieure du tubercule quadrijumeau antérieur, empiète sur les
couches optiques au milieu de la commissure postérieure et
du ganglion de l'habenula, mais sans en altérer la substance
fondamentale, non plus que celle du pied des pédoncules céré-
braux. P. K.
XL. CONTRIBUTION A la méthode DE RECHERCHE DU phénomène
du genou ; par E. JENDRASSIK (Neurol. Centralb. 1885).
Voici la meilleure méthode à l'aide de laquelle on puisse se
rendre compte de l'existence bien avérée ou de l'absence incon-
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 229
testable du phénomène du genou. Asseoir l'individu sur le bord
d'une table, de façon à ce que les jambes pendent mollement,
aussi mortes que possible ; inviter le patient à entrelacer les
doigts des deux mains et,en tendant les bras horizontalement,
à tirer aussi fort que possible sur ces mains, ainsi unies,
comme pour rompre l'entrelacement; c'est à ce moment qu'on
frappera sur le tendon rotulien. Ce procédé repose sur le
double fait d'observation : 1° que l'on ne peut obtenir un
relâchement parfait des muscles des membres inférieurs que
lorsqu'ils pendent librement, ce que l'on peut contrôler en pla-
çant sa main au-dessus de la cuisse près de l'articulation du
genou; 2° que, dans ces conditions, le phénomène du genou
et les réflexes tendineux en général n'acquièrent leur degré
de développement que si l'on force les autres muscles du corps
à déployer une grande force. L'examen de 1,000 individus
sains ou malades (non névropathes) indique qu'il est extrême-
ment probable que le phénomène du genou apparaîtrait chez
tous ces individus indemnes d'affections du système nerveux :
on n'enregistrerait pas dans l'espèce de cas nuls ou douteux.
' P. K.
XLI. CONTRIBUTION A l'étude DE la névrite multiloculaire
chez LES buveurs; par R. ScIIULZ (Neurol. Centralbl. 1885).
L'observation relatée concerne un buveur acharné indemne
de toute tare héréditaire névropathique, de syphilis, en proie à
du désordre dans les idées, qui en un mois présenta une para-
lysie atrophique extrêmement marquée dans les quatre extré-
mités ; intégrité de la sensibilité, sauf une légère anesthésie;
intégrité du sens musculaire ; douleurs dans les bras et les
jambes; gros troncs nerveux sensibles à la pression; affection
articulaire passagère avec fièvre ; quelques accidents ataxi-
formes ; disparition des réflexes patellaires, conservation des
réflexes cutanés; parésie vésico-rectale; les muscles et les nerfs
des membres ne réagissent plus sous l'influence des deux espèces
de courants; paralysie passagère bi-latérale de l'ocumoloteur
externe : guérison complète en six mois de traitement. L'au-
teur discute le diagnostic différentiel entre la poliomyélite
antérieure subaiguë (paralysie atrophique étendue, dès le début,
avec diminution extrême de l'excitabilité électrique, troubles
minimes de la sensibilité, suppression du réflexe patellaire) et
230 revue DE pathologie nerveuse.
la névrite multiloculaire (dissémination des phénomènes, con-
servation des réflexes cutanés, sensibilité à la pression des
gros troncs nerveux); il analyse comparativement les faits du
même genre, et pose les éléments à l'aide desquels on peut
distinguer l'ataxie d'une paralysie alcoolique (paralysie atro-
phique se montrant dès le début et marchant rapidement, hy-
perexcitabilité électrique avec ou sans modification qualita-
tive, absence de fixité, d'immobilité pupillaire, de douleurs en
ceinture, de troubles vésico-rectaux), et l'ataxie d'un tabes
(atrophie tardive, lente; à l'hyperexcitabilité électrique du
début succède une diminution de l'excitabilité sans modifica-
tions qualitatives ; pupilles inertes, douleurs en ceinture,
troubles vésico-rectaux). Il est impossible de déterminer si ces
névrites sont d'origine centrale ou périphérique, malgré les der-
niers efforts de Déjerine, si les lacunes vacuoliques de la moelle
sont en relation avec elles (lacunes anatomopathologiques
artificielles ? ) si les dégénérescences cellulaires, trouvées dans
des moëlles autrement normales (Eisenlohr) et cliniquement
saines se rattachent à des poussées névritiques. Deux tableaux
finaux résument les cas de Struempell, Mueller, Ioeli, Schulz,
Fischer, Loewenfeld, Krueche, Déjerine, Lilienfeld au double
point de vue de la nosographie et de l'anatomie. P. K.
XLII. SUR une FORME DE trouble DE la sensibilité DÉCOU-
verte dans LES LÉSIONS unilatérales du cerveau A l'aide
d'une méthode d'examen jusqu'ici non mise .\ PROFIT EN CLI-
nique; par H. Oppenheim. (Neurol. Centrabl., 1885).
Voici cedontils'agit chez quatre individus atteints d'affections
en foyer. Quand on soumet simultanément les deux côtés du
corps à des sensations d'égale intensité, le côté du corps para-
lysé est manifestement rebelle à la conductibilité de la sensa-
tion, alors qu'examiné seul, il perçoit encore d'une façon
satisfaisante ; cette constatation s'applique à la sensibilité
générale comme à la sensibilité spéciale. Si l'on veut que les
éléments centraux qui reçoivent les impressions du côté para-
lysé perçoivent aussi rapidement et aussi nettement que ceux
qui ressortissent au côté sain, il faut augmenter l'intensité de
l'excitant du côté qui est ou qui a été atteint; or, ceci n'a pas
ieu chez les individus normaux. Tel est le fait brut. On devra
continuer les expériences. P. K.
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 31 1
XLIII. Un cas DE tumeurs SYPHILITIQUES ( ? ) dans LES méninges
cérébrales ; par J. ALTHAUS. (Arch. f. Psych., XVI, 2.)
Une fillette de quatorze ans issue de parents très honnêtes
qui l'ont élevée, voit ses règles se supprimer; en même temps
elleprésentedesphénomènes encéphaliques : céphalagie, vomis-
sements, paralysie à évolution lente se rapportant à la zone
motrice du cerveau droit, hyperesthésie indiquant une irrita-
tion des zones sensorielles. Tumeur probable, quoi qu'il
n'existe ni accidents épileptiformes, ni convulsions quelcon-
ques, ni papille étranglée. L'absence d'ictus jointe à la consta-
tation du marasme élimine l'idée d'une hémorrhagie ou d'une
embolie. Le développement des mamelles fait penser instincti-
vement à des coïts antérieurs, à une grossesse possible, et
partant à une infection syphilitique, quoique ni le milieu, ni
les commémoratifs, ni-l'examen ne fournissent aucune trace
de signe en faveur de ce diagnostic. Mort malgré la prescrip-
tion de K I et sublimé. Durée, sept mois. L'aulopsie montre à
droite : adhérence de la pie-mère, de l'arachnoïde et de l'é-
corce ; dans les mailles de la pie-mère, le long des vaisseaux
dilatés ou allongés en fuseaux; dans les parois vasculaires une
collection de nodosités plus ou moins disséminées, plus ou
moins confluentes, qui ne sont que des gommes syphilitiques
entées sur de l'artérite syphilitique (tableau microscopique des
lésions décrites par Heubner), l'écorce congestionnée présente
une traînée de ramollissement dûe à l'oblitération complète
d'une des artères terminales par l'ensemble du néoplasme ; en
un point, la dure-mère participe à l'adhérence générale. Intégri té
des cellules nerveuses et des éléments des diverses couches cor-
ticales ; artérite syphilitique demème nature. Intégrité du reste
de l'encéphale. -Par où s'est éffectuée la contagion ? Résulte-
t-elle d'un simple accident ? La jeune fille était elle nceinte au
moment de sa mort ? Pourquoi la genèse de gommes a-t-elle
suivi de si près l'infection ; remarquez que la fillette n'a été
réglée qu'à douze ans. Comment n'a-t-on pas constaté de phé-
nomènes intermédiaires entre la grossesse et le premier signe
de la syphilis passée, dans l'espèce, inaperçue ? Est-ce que
par hasard des gommes de méninges se pourraient engendrer
sur un terrain non spécifique ? Autant de questions insolu-
bles. En tout cas ici, il faut éliminer la tuberculose ou tout
232 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
autre cachexie. L'auteur appelle l'attention sur l'existence
du coma et l'héllliparesie gauche qui excluent le diagnostic
d'hystérie. En ce qui a trait aux allures du phénomène du ge-
nou, il signale que, lorsqu'il y a des différences entre les deux
côtés du corps, on peut être certain qu'il existe des altérations
de structure dans certaines régions du système nerveux; pour
localiser ces altérations, on prend en considération, comme
dans l'observation précédente, l'exagération du réflexe patel-
laire (indice d'affection cérébro-spinale) ; la lenteur relative du
réflexe qui s'étend ensuite très loin (indice d'affection céré-
brale) tandis que sa rapidité dépourvue de propagation plaide
en faveur d'une lésion spinale. - P. K.
XLIV. Communications casuistiques ; par 0. HEBOLD. (Arch.
f. Psych. XVI, 2.)
I. Foyer de ramollissement dans l'insula gauche. -Aphasie.
Femme de soixante et onze ans ayant présenté, il y a un an
et demi, un ictus apoplectique (troubles de la motilité à droite
affaiblissement de la mémoire) ; il y a six mois, nouvel ictus
apoplectique (hémiplégie droite, aphasie); il y a dix jours,
ictus apoplectiforme avec perturbations du côté droit. Autopsie
La couche optique gauche renferme le plus vieux foyer ; ra-
mollissement hrun-gris, gros comme un noyau de cerise;
dégénérescence (cellules granuleuses) dans la partie postérieure
de la capsule interne gauche et dans le faisceau pyramidal du
même côté, à travers la protubérance et le bulbe, d'où la pa-
résie et les mouvements choréiformes postparétiques du côté
droit. Hématome de la dure-mère au niveau du lobe temporal
gauche, et foyer de ramollissement brun-rouge dans l'insula
du côté gauche ; de date plus récente que l'altération de la
couche optique, ces lésions expliquent l'aphasie (très légère
atteinte de la troisième frontale contiguë). La circonvolution
du corps calleux contient, dans sa partie antérieure, un kyste
gros comme une lentille.
II. Sarcome du lobe frontal. Observation dans laquelle,
une tumeur occupant une grande partie du lobe frontal, les
symptômes se rapprochèrent des accidents expérimentaux pro-
voqués par Munk chez les singes et les chiens (muscles de la
nuque et du rachis). Femme de soixante-treize ans. Il y a seize
mois, affaiblissement de la mémoire ; depuis neuf mois, dé-
revue DE pathologie nerveuse. 233
marche raide attribuée à des douleurs dans les genoux ; incon-
tinence d'urine, céphalalgie; plus tard, maintien permanent
de la tète et de la face dans une sorte d'inflexion en avant,avec
rotation constante à droite (l'animal auquel on a extirpé le
lobe frontal gauche tient constamment la tête tournée à gau-
che et la colonne dorso-lombaire présente une incurvation anor-
male à droite) ; finalement coma. Autopsie. Dans le lobe fron-
tal droit, existe une tumeur qui a principalement détruit la
substance corticale des deux frontales supérieures, sauf leurs
parties antérieures et postérieures, qui a envahi la substance
blanche de la même région (forme et volume d'une pomme),
qui a pénétré à travers la faux de la dure-mère dans la pre-
mière frontale. P. K.
XLV. Remarques sur LE mémoire de Déjerine INTITULÉ : Du rôle joué
par la méningite spinale postérieure des tabétiques dans la patho-
génie des scléroses combinées; par C. Westphal (drch. .Psych.
XYI, 2).
Dans toutes les lésions combinées, dit Déjerine, l'atteinte des
cordons latéraux a lieu par la propagation d'un processus in-
flammatoire de la pie-mère (leptoméningite) sur ces cordons;
de l'altération primitive, autonome, des cordons postérieurs du
tabétique part un processus d'irritation méningitique qui, diffu-
sant le loug de laméninge, se développe et frappe secondairement
les cordons latéraux. Telle est l'interprétation de M. Westphal
sur le mémoire de 1\1. Déjerine; M. Westphal revendique lapriorité
de l'idée; il ajoute qu'il a jadis conclu négativement, du moins à
la lumière de la généralité des faits, contre la théorie posée par
lui dans des termes semblables. P. K.
XLVI. CONTRIBUTION A la casuistique DES TUMEURS DU CER-
veau ET A LA CONNAISSANCE DES LOCALISATIONS CÉRÉBRALES J
par TH. SOELAN. (Allg. Zeitschr. f. Psych., XLII, 2).
Il s'agit d'un cas de tumeur unique (solitaire) du cerveau :
sarcome de la dure-mère au niveau du tiers moyen de la parié-
tale ascendante droite, à ce niveau la pariétale ascendante est
pâle, anémiée. On constata principalement de la lypémanie
avec agitation, des hallucinations de l'ouïe, et du jour où le
petit néoplasme (1 cent. de diamètre) pressa suffisamment
contre la zone motrice, des contractures de la main et des
Archives, t. XII. 16
234 REVUE DE pathologie NERVEUSE.
doigts du côté gauche accompagnées de sensations de tremble-
ment dans le bras et la jambe, du même côté. Aux diverses
phases d'amélioration et d'aggravation correspondent, de même
que dans toutes les tumeurs, des séries de poussées et d'arrêts
néoplasiques. On rencontre encore de la pachyméningite
pseudo-membraneuse au niveau des deux lobes frontaux,
un hématome sous-dure-mérien récent au milieu du lobe frontal
gauche. Telles sont les principales particularités de ce fait à lire
en entier. P. K.
XLVII. Communications NEUROPATHOLOGIQUES DE l'hôpital de
BRUNS\VICK; par R. SCHULZ (Arc%. f. Psych., XVI, 3).
I. Hémianopsie temporale gauche unilatérale. Diagnostic
erroné de tumeur cérébrale. La constatation successive de ce
symptôme, puis d'une hémianopsie homonyme latérale du
même côté, d'hémiparésie droite puis de paraparésie et presque
de paraplégie des quatre extrémités avec contracture des mem-
bres inférieurs, exagération excessive des réflexes tendineux,
clonus dorsal des deux pieds, troubles de la sensibilité justifie-
raient en quelque sorte le diagnostic de tumeur à progression
lente siégeant dans la glande pituitaire et comprimant la bande-
lette optique droite; la mort a lieu dans la démence compli-
quée 'd'idées de persécution, de divagations complètes, avec
paralysie absolue de la vessie et du rectum, gangrène du décu-
bitus acutus. L'autopsie révéla deux foyers morbides : l'un
constitué par une méningite chronique, à son maximum de
développement autour du chiasma, à laquelle on peut attribuer
la série des accidents visuels tout en s'étonnant que la cécité
n'ait pas été complète, l'autre, représenté par une pachymé-
ningite cervicale hypertrophique, auquel M. Schulz rattache les
phénomènes spasmodiques d'origine spinale, et la paralysie
vésico-rectale imputés à tort à la compression de la protubé-
rance. On constatait encore de l'encéphalite interstitielle ;
peut-être la lésion du lobe occipital est-elle en rapport avec
les syndrômes oculaires; un examen plus complet aurait peut-
être fourni entre les mains d'un psychiatre des points de repère
satisfaisants ; tel est l'avis de l'auteur.
II. Convulsions dans le territoire du facial droit. Aphasie
amnésique. Foyer du volume d'une noisette dans la circonvolution
de Broca du côté gauche. Individu indemne d'hérédité neuro-
REVUE DE pathologie NERVEUSE. 235
psychique. A la suite d'un accident de voiture, qui cependant
ne l'atteignit point àla tète et ne lui fit pas perdre connaissance,
il se plaint de crampes stomacales violentes, commence à ne
plus pouvoir s'exprimer et à grimacer. Puis, s'installent des
convulsions clomques de la moitié droite de la face affectant
bientôt la forme subintrante : chaque accès est précédé d'un cri
spécial suspirieux, la tète est également tirée en arrière à droite
et l'inspiration se montre bruyante, la perte de connaissance
est complète, les pupilles ne réagissentplus, on note de la dévia-
tion conjuguée des yeux à gauche et en haut. Simultanément,
aphasie amnésique parfaite ; le malade comprend, s'exprime
par gestes, mais ne peut trouver les mots qui lui sont néces-
saires pour émettre ses,idées.Le troisième jour des convulsions,
les accidents, qui ont débuté par le facial inférieur, et ont pro-
gressivement monté, passent concurremment à gauche (pau-
pière) pour envahir finalement le tronc lui-même (opistho-
tonos, trismus, tétanisme) ; asphyxie mortelle. Un tubercule
caséeux occupe exactement la place de la circonvolution de
Broca et le sillon prsecentralis (frontal parallèle), mais il est
probable, dit M. Schulz, que le néoplasme irritait par propaga-
tion les zones 7, 8, 11 d'Exner, et le centre 11 de la première
temporale. Les convulsions générales du dernier jour sont dues
à la méningite récente généralisée.
III. Tétanie. Observation de convulsions toniques symé-
triques des extrémités survenant de temps à autre chez une
femme grosse et affectant particulièrement les bras. Ni perte
de connaissance, ni troubles de la sensibilité, hyperexcitabilité
mécanique du facial, hyperexcitabilité électrique énorme des
nerfs des extrémités à l'égard du courant constant. Sous l'in-
fluence des bains chauds, du bromure de sodium, la malade
guérit à la suite de son accouchement.
IV. Sarcome primitif de la pie-mère de la moelle épinière sur
toute la hauteur de l'organe*. - Hérédité neuropathique et
notamment, dans la famille, propension à faire des néoplasmes
dans le système nerveux central ; un oncle est mort de gliome
de la protubérance; une nièce a succombé à un sarcome de la
moelle épinière. La femme qui fait l'objet de cette observation
paraissait, selon la nomenclature deFried. Schultze, en proieà
une paralysie mixte aiguë, à la fois descendante,' à la fois ascen-
1 Voy. Archives de Neurologie, t. XI, p. 160.
236 REVUE DE pathologie NERVEUSE.
dante; c'est-à-dire que la parésie des extrémités supérieures,
accompagnée de légère paresthésie, fut bientôt suivie de para-
lysie complète des mêmes membres avec anesthésie et troubles
vasomoteurs; sur ce, parésie, puis paralysie absolue, des extrémi-
tés inférieures avecpertedela sensibilité, suppression partielle
des réflexes patellaires et des réflexes cutanés, parésie vésicale
(rétention d'urine) et douleurs très prononcées tout le long du
rachis; mort par paralysie de la respiration. Diagnostic ainsi
formulé : méningo-myélite aiguë ; la myélite ayant commencé
par la moelle cervicale s'était probablement étendue inférieure-
ment, puis elle avait monté, avait gagné le faisceau respiratoire
de Krause qui s'étend jusque dans la moelle cervicale. La
promptitude de l'évolution ne permettait pas rie supposerl'exis-
tence d'un néoplasme occupant toute la hauteur de l'organe ;
SI. Schulz croit que la tumeur a dû se développer il y a quatre
mois, qu'elle a pris naissance dans la pie-mère lombaire, qu'elle
s'est graduellement étendue en haut jusqu'à la partie inférieure
du bulbe (figure à l'appui). P. K.
XLVIII. Sur une FORME TOUTE particulière DE paralysie SPAS-
MODIQUE accompagnée DE PHÉNOMÈNES cérébraux, ENTÉE
sur un fonds D'HÉRÉDITÉ (SCLÉROSE multiloculaire) ; par
F. PELizOEus (Arch. f. Psych., XVI, 3).
Il s'agit d'un enfant de huit ans présentant du nystagmus
bilatéral, de la bradylalie, quelques troubles de l'innervation
dans les extrémités supérieures, de la paralysie spasmodique
des membres inférieurs, sans atrophie ni perturbation de la
sensibilité ; conservation de l'excitabilité faradique et galva-
nique des muscles ; exagération des phénomènes tendineux. Le
nystagmus daterait de l'âge de trois mois; à l'âge de six mois,
les mouvements parurent maladroits; l'enfant ne présentait
pas cette allure vive des membres caractéristique de l'état
normal; quand on voulut le faire marcher, on s'aperçut qu'il
ne commandait pas à ses extrémités inférieures, et c'est alors
que se développa graduellement l'attitude présente (flexion
des cuisses sur le bassin, des jambes sur les cuisses, pieds
varus-équin) ; la parole ne devint mauvaise qu'à partir de la
troisième année. Débilité mentale, mais intégrité de la mé-
moire. La famille compte cinq membres atteints de la même
forme morbide, ayant exactement suivi la même marche, sévis-
REVUE DE pathologie nerveuse. 237 7
sant sur les mâles et passant à travers les femmes sans les
toucher. Le nystagmus, la bradylalie, la paralysie spasmo-
dique, l'absence d'atrophie, rapprochent cette affection de la
sclérose en plaques dont elle diffère par le type régulier de sa
symptomatologie, de son évolution, de son hérédité, de sa
précocité. Malheureusement, on manque d'autopsies. M. Peli-
zoeus analyse, critique, révise l'ensemble des faits connexes, y
compris les observations de sclérose multiloculaire pendant
l'enfance. Après la sclérose en plaques, l'hydrocéphalie serait,
d'après lui, capable d'engendrer de semblables phénomènes,
mais l'examen des crânes de deux patients encore vivants (âgés
de huit et vingt-huit ans) contredit à cette hypothèse. P. K.
XLIX. NOUVELLES communications sur LES affections DU SYS-
TÈME NERVEUX QUI SE RATTACHENT A DES LÉSIONS CÉPHALIQUES
ET A DES commotions CERÉI3ROôPINALESdCIYtS l'espèce, accidents
des voies ferrées); par M. H. Oppenheim (Arch. f. Psych.,
XVI, 3).
Ce mémoire constitue une réponse à la manière de voir de
M. Charcot, sur les faits déjà présentés par l'auteur en com-
mun avec M. Thomsen. L'auteur y voit un type morbide spé-
cial caractérisé par un état de dépression anxieuse, avec
insomnie ou sommeil agité par des rêves cruels, précédé de
visions terrifiantes; par de l'hypochondrie qui nuit à la viva-
cité des facultés intellectuelles (préoccupations sans affai-
blissement de la mémoire); par des phénomènes épileptiformes
de tout genre accompagnés d'obnubilation de la connaissance;
pardes sensations subjectives importunes, des sensations anor-
males bizarres, des vertiges, des douleurs avec sentiment de
tension rachidienne et sacrée, des élancements zoniformes,
de la raideur et de l'embarras dans les mouvements, de l'affai-
blissement du sens génésique, de l'anesthésie générale et
spéciale irrégulièrement distribuée, variée quant à sa moda-
lité, enfin par de la dysurie et de la constipation habituelle.
Les sous-genres nosographiques les plus communs sont consti-
tués par une hypochondrie pure sans phénomènes objectifs,
par des lésions surtout atrophiques du nerf optique, par de la
torpeur des pupilles, par des accidents fébriles. Conclusions.
1 Voir Charcot. Leçons du Progrès médical, t835. A propos de six cas
d'hystérie chez l'homme et Archives de Neurologie, t. XI, p. 80 et 83 § I V).
238 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
Les traits fondamentaux de l'ensemble des syndrômes consécu-
tifs aux accidents de chemin de fer en font, dans beaucoup de
cas, une entité spéciale qui ne se confond avec aucune des ma-
ladies connues. Dans un certain nombre de cas, ils repré-
sentent une forme mixte de psychonévrose (hystérie, épilepsie,
neurasthénie, folie), sans que l'assimilation soit permise. z
Dans une assez forte proportion d'observations, il existe des
signes morbides qui indiquent certainement une lésion orga-
nique du système nerveux à évolution insidieuse. Est-ce à dire
qu'on doive parler de petits foyers myélitiques ou encéphali-
tiques (Westphal) ? qu'on puisse penser à une sorte de sclérose
en plaques spéciale ? On n'en saurait décider. Il parait, en tout
ras, ne pas exister de guérison complète; loin de là, les désor-
dres opiniâtres, mais mitigés durant la première année qui
suit l'accident, s'aggraveraient plus tard. P. KÉRAVAL.
L. De la paralysie saturnine; par SCHULTZE (Arch. f. Psych.,
XVI, 3.)
Un homme de vingt-cinq ans, saturnin depuis cinq ans, est,
en juin C882, atteint de paralysie de l'avant-bras droit; six
mois après, l'avant-bras gauche est pris. Dès lors, la paralysie
porte surtout : à droite, sur les extenseurs des doigts et de la
main, le long extenseur du pouce, le premier interosseux,
l'opposant et le court fléchisseur du pouce, le court abducteur
du pouce (moins affecté); à gauche, sur l'extenseur commun des
doigts, le premier radial externe, le cubital postérieur, les
longs abducteur et extenseur du pouce. Atrophie extrême et
réaction dégénérative complète des muscles malades. Le del-
toïde, le biceps et le triceps brachial, sains, présentent
néanmoins, sous l'influence de l'électricité galvanique, des
tremblements violents, mais de courte durée. Intégrité de la
sensibilité, des réflexes cutanés et tendineux (très nets). Mort,
le 6 janvier 1885, de néphrite interstitielle avec foyers de pneu-
monie. L'autopsie révèle : hypertrophie du coeur gauche ; pneu-
monie catarrhale bilatérale; récent foyer hémorrhagique, du
volume d'un pois, dans la protubérance; dégénérescence très
étendue (en bandes) ou totale des muscles de l'avant-bras ;
dégénérescence grise évidente des deux nerfs radiaux à l'avant-
bras ; décoloration légèrement grisâtre des racines les plus
inférieures de renflement cervical et de quelques trousseaux
delà queue de cheval. Au microscope, épaississement des vais-
REVUE DE pathologie NERVEUSE. 239
seaux méningés; asymétrie congéniale de la moelle spinale
dont les segments lombaires et cervicaux sont pauvres en cel-
lules nerveuses, mais aucune trace de poliomyélite; çà et là,
dans la substance grise intacte, cellules-araignées développées,
névrite parenchymateuse du nerf radial droit, commençant au
niveau de l'origine de la branche destinée au long supirateur
et descendant avec elle; névrite atrophique disséminée, en
plaques, dans le plexus brachial gauche ; atrophie des éléments
contractiles dans les muscles sus-mentionnés avec multiplica-
tion des noyaux. Après l'étude analytique et critique des obser-
vations de Erb, Remak, Vulpian, Oeller, Oppenheim, de
Monakow, l'auteur conclut que d'ordinaire le plomb a l'air
d'atteindre les nerfs périphériques les premiers, et que c'est
lorsque la paralysie se généralise que l'on rencontre une lésion
centrale des cornes antérieures. Mais il est impossible de for-
muler une règle relative à l'altération primitive des cellules
qui commandent au radial, du radial lui-même, des cellules
centrales ou des tractus nerveux périphériques quelconques.
L'envahissement simultané du centre et de la périphérie,
l'élection du poison pour certaines zones, pour le système vas-
culaire, l'hypothèse de la nécrobiose vasculaire et de la trans-
mission ascendante par la gaine de Schwann (Gombault)
attendent encore des réponses probantes et explicatives. Le
plomb lèse-t-il le muscle avant de toucher le nerf; la présence
d'une réaction dégénérative avant la paralysie ou même sans
qu'il existe de paralysie plaiderait en faveur de la myopathie
primitive, tandis que l'anatomie pathologique affirmerait la
névrite préalable. Enfin, M. Schultze insiste, à propos de l'ob-
servation présente, sur l'évolution progressive de la paralysie,
malgré le changement de milieu, évolution qu'il rattache à la
complication néphritique ; surl'atteinte partielle des supinateurs
qui pourraient bien se montrer invariablement affectés si l'on
possédait des moyens cliniques de juger exactement de leur
force; sur la légère altération des nerfs sensitifs (une branche
sensible du radial, une racine postérieure du renflement cervi-
cal) ; sur l'apparition de tremblements en des muscles anatomi-
quement sains à l'occasion de l'excitant électrique et de l'effort
(genèse, mécanisme inconnus). P. K.
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE
LI. LE crime ET la FOLIE; par le Dr P. DUKoFF. (Le lVestnz'k
(le Messager) de psychiâtrie, du professeur J. Mierzejewsky,
1885, t. II.)
Après un aperçu historique sur les relations entre le crime
et la folie et l'analyse d'un certain nombre d'observations per-
sonnelles sur les aliénés criminels, l'auteur arrive aux conclu-
sions suivantes :
I. Le crime a beaucoup de ressemblance avec la folie, mais
il ne lui est nullement identique; les points qui les rapprochent,
relatifs à l'anatomie pathologique et à l'étiologie, ne suffisent
pas à compenser les différences radicales qui les séparent.
II. La fréquence des affections mentales, chez les criminels
détenus, dépend non seulement de causes individuelles (l'hé-
rédité, mauvaise éducation, habitudes vicieuses), mais aussi des
conditions mêmes de l'emprisonnement. III. Les formes
des maladies mentales qui se développent chez les criminels
emprisonnés étant, au fond, identiques aux formes observées
chez les sujets qui jouissent de leur liberté, offrent souvent
néanmoins quelques particularités, quant au contenu de leur
délire, qui se trouve entrelacé avec divers événements de leur
vie criminelle, mais ces particularités ne changent pas le
caractère général de la maladie mentale. IV. Un fou peut
commettre un crime parfaitement identique à celui que commet
un homme sain; seulement, le crime du premier, étant le résul-
tat d'une maladie mentale, aura un caractère accidentel, tandis
que celui du second aura toujours un aspect prémédité ayant
pour cause des tendances vicieuses ou une passion quelconque.
V. Les criminels devenus aliénés ne doivent pas être pla-
cés avec des malades ordinaires à cause de la différence de
leur nature et de l'influence corruptrice qu'ils peuvent exercer
sur ces derniers. VI. On ne peut s'attendre à améliorer les
criminels que si des hommes compétents se font un devoir
' REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 241
d'étudier le côté moral de ces individus et d'indiquer le mode
de détention, d'occupation, etc., qui convient le mieux à la
nature des sujets. Le système, qui ne poursuit que l'idée de
punition, ne peut jamais s'attendre il modifier favorablement
l'état moral du détenu dans les cas mêmes où celui-ci n'offre
originellement aucune défectuosité cérébrale. SARDINE.
LU. Automatisme EPILEPTIQUE ; par le Dr ALTHAUS (Analyse).
(The 73ritisïe med. Jo2c·n., 27 févr. 1886, p. 29 ? )
W... (E.), âgé de vingt-trois ans, célibataire; employé de
chemin de fer, admis à l'hôpital en octobre 1885. Aucune ten-
dance nerveuse héréditaire. Convulsions à la première denti-
tion. A six ans, il entra dans les chemins de fer. Première
attaque à sept ans trois mois, sans cause appréciable. Les
accès étaient extrêmement variés, mais présentaient toujours
de l'automatisme, soit après une attaque, soit sans attaque
apparente. Aussi le patient, après s'être couché le soir tout à
fait bien portant, se lève vers le milieu de la nuit, inconscient,
et se promène plusieurs heures hors de sa chambre. Il tourne
pendant des heures sans reprendre conscience. Quand ces
accès le prennent le jour, il se heurte aux passants. Si on ne
le gêne pas, il ne s'ensuit aucun trouble ; mais, arrêté, il de-
vient violent, frappe, s'agite, si bien qu'il faut cinq ou six
hommes pour le contenir.
Dans ces cas, on l'a vu, assis tranquillement à son bureau,
prendre un air égaré, se lever, courir hors de la station, se
heurter aux gens, tomber ensuite à terre et rester insensible.
Il a aussi des attaques où la conscience persiste; il trébuche
comme un homme ivre, injurie les passants. Il ne mord pas
sa langue, mais écume; une fois, il a uriné involontairement.
Il avait aussi des attaques avec demi-conscience et paralysie
de la langue. Il peut encore prononcer des sons, mais n'arti-
cule rien d'intelligible. Quelquefois il a un aura d'une durée
variable et dont le point de départ n'est pas constant. Le plus
souvent, l'accès est instantané. Le malade a eu jusqu'à cinq
accès par jour, rarement il a été plus d'une semaine sans en
avoir.
Le patient a une bonne mémoire, et a dressé un véritable
graphique de sa maladie. Il a perdu son emploi, non pour in-
conduite, mais à cause du trouble que sa maladie apportait
343 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
dans son service. Il écrit bien, mais son regard a quelque
chose de particulier. La face est couverte d'acné pustuleux
dû au traitement par le bromure de potassium. Les autres
fonctions normales; hypertrophie et dilatation du ventricule
gauche, la pointe battant dans le sixième espace intercostal;
'sans souffle. Traitements multiples, mixture composée de
borax, digitale, bromure d'ammonium ; l'acné traité par le
mercure ammoniacal. Le résultat a été vraiment favorable,
l'acné s'est guéri, et le malade est resté sans attaques pendant
ses trois mois de séjour à l'hôpital.
Remarques du Dl rlllhaus. L'importance au point de vue de
la médecine légale de ces faits d'automatisme et de vertige
épileptique, ne saurait échapper. C'est à la manie épileptique
qu'il faut rattacher les pertes prolongées de conscience; ces
chutes, accès dans lequel le meurtre, le vol, le suicide, sont
possibles. L'attaque épileptique, dans ces cas, affecte surtout
les parties du cerveau, lobes frontaux, chargés du contrôle
intellectuel et moral, qui restent pendant un certain temps
paralysés; quand les ganglions centraux de la base du cerveau
sont au contraire hyperexcités, d'où l'impulsion et les actes
automatiques dépourvus de contrôle. Ces malades ne sont
évidemment pas responsables, dans leurs accès, ce cas est
fort semblable à celui du convict Havy Patrick commenté
dans le British Médical Journal, de janvier 2° éd. L'épilepsie
automatique constitue une terrible maladie, où les jours du
malade sont sans cesse en danger, et qui réclame un traite-
ment actif. PILLIET.
LUI. CONTRIBUTION A la symptomatologie DE l'épilepsie
bénigne (epi7epsia milior); par A. MERCKLIN (/t)'<'/t ? Psycle.,
XVI, 2).
Jeune garçon de treize ans présentant une tare névro-
pathique héréditaire, se mettant, à la suite de lectures, à
s'hypnotiser lui-même. Ces pratiques répétées déterminent des
accidents nerveux; pendant plus d'un an, on constate des
accès de trouble rapidement passager de la connaissance, voire
de perte complète de connaissance ; puis, se montrent des phé-
nomènes, d'abord localisés à la tête, et finalement généralisés
d'un parfait caractère (épilepsie). L'auteur en tire que les pre-
miers phénomènes étaient, non des accidents autonomes en
REVUE DE pathologie mentale. 2t3
relation avec l'hypnotisme, mais des ictus rudimentaires, et que
les symptômes cataleptiformes, observés au début, ont été
indiqués par les auteurs comme éléments épileptiques ou post-
épileptiques (baumier). Dans l'espèce, les pratiques de l'hyp-
notisation volontaire chez un individu à prédisposition hérédi-
taire ont altéré directement sa santé; ce dommage s'est d'abord
traduit par un état de nervosisme général que relate le malade
(exemple conforme à ceux de Boeumler, Drosdow, Heidenhain,
Finkelnburg, Wiebe, Holst) et qui a favorisé la genèse de
l'épilepsie. On note encore chez lui, que chaque accès de petit-
mal est, aune certaine période de l'évolution morbide, en rap-
port avec certaines influences psychiques, et peut être produit
volontairement par les influences en question, ainsi quand
il pense à l'hypnotisation et à son état pathologique. Alors
que le début de sa maladie remonte à la contemplation d'objets
brillants, ceux-ci ne provoquent aucun accident dès que l'épi-
lepsie convulsive est constituée et, tout à fait à la fin, l'épilep-
togénie volontaire disparait elle-même (voy. Delasiauve,
Westphal, Fischer, Mendel, Siemens, Gowers, Boeumler).
L'évolution, la constatation dela modalité des accidents (perte
de connaissance absolue) et de leurs caractères (voy. le texte)
élimine, d'après M. Mercklin, le diagnostic d'hystérie. Le
malade est encore en observation. P. K.
LIV. UNE remarque relative A l'épilepsie alcoolique;
par MOE[,1 (Neurol. Centralbl., 1885).
Magnan dit qu'il faut incriminer l'absinthe dans l'épilepsie
des buveurs. Or, à Berlin, parmi les individus séquestrés pour
alcoolisme, le chiffre des épileptiques parait être bien supérieur
à celui de Paris ; la proportion serait de 1/3 à 2/5 (Westphal,
Fuerstner et Moeli), alors qu'à Paris elle comporte 5 à 8 p. 100
(Magnan et Bouchereau). De là l'idée de dresser une statistique
relative au genre de boissons alcooliques ingérées. En élimi-
nant de ce relevé les malades qui, avant l'intoxication, ont été
en proie à des troubles nerveux, ou chez lesquels d'autres
causes ont pu provoquer l'épilepsie, l'auteur arrive à collecter
600 cas sur lesquels 420 faits comprennent des indications
formelles à l'égard du genre de boisson exclusivement absorbé.
De ce tableau, dans lequel les forts buveurs sont ceux qui
quotidiennement consomment pour 30 pfennigs, soit 40 cen-
244 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
times d'alcool, nous extrayons que le vin et la bière sont
relativement moins nocifs (1 épileptique seulement sur 21
observations; puis vient le Kùmmel pur, la moins nuisible des
boissons alcooliques(3 épileptiques sur 20 buveurs); les accès
d'épilepsie se sont principalement montrés chez les buveurs
d'eaux-de-vie saturées de plantes amères ou aromatiques (14
épilepsies sur 30). P. K.
LV. Sur les signes DE dégénérescence dans la folie; par FROEN-
KEL (Allg. Zeitschr. f. Psych., XLII, I ).
Revue critique dont voici les conclusions. Les signes de dégéné-
rescence offrent la plus grande importance surtout en justice; il
faut, dans les rapports, insister sur ces éléments d'appréciation
tout matériels, principalement lorsqu'il s'agit des criminels qui
appartiennent au vaste domaine de la débilité mentale congé-
niale. Il faudrait seulement que les magistrats se convainquissent
de la valeur de toutes les anomalies de formation ou signes phy-
siques de dégénérescence (adhérence du lobule de l'oreille, obli-
quilé et asymétrie de la face, incurvation, surnumérariat, des
doigts et des oiteils, goitre, etc.). En effet Knecht n'a-t-il pas
signalé que parmi 41 forçats atteints d'insuffisance intellectuelle
il y avait 2 idiots très avancés, plusieurs imbéciles épileptiques,
,l 1 déments séniles. Le temps viendra toutefois où tout le monde
se ialliera à cette devise : « Mind is body ». P. K.
L \"1. Note sur un cas d'épilepsie congestive; par M. Truc, interne
des hôpitaux. (Lyon méd., 1885, t. XLVIII.)
Le sujet de cette observation est un prêtre, âgé de trente-cinq
ans, porteur d'hémorrhoides. Lorsque celles-ci donnent lieu à un
écoulement sanguin, à peine constate-t-on quelques absences,
mais le tlux habituel se supprime-t-il, aussitôt, des crises d'épi-
lepsie apparaissent. Enfin toutes les fois qu'on provoque une dé-
perdition sanguine ou séreuse, l'amélioration se manifeste.
Telles sont les raisons sur lesquelles l'auteur s'appuie pour
admettre qu'il s'agit d'une épilepsie d'origine congestive.
G. D.
LVII. Cas d'épilepsie trutés par LE borax; par Ch.-F. CoLSOe.
Quoique le nombre des remèdes proposés pour l'epilepsie soit
considérable, la plupart des médecins accordent la préférence
aux bromures, dont l'emploi produit souvent de l'amélioration,
SOCIÉTÉS SAVANTES. 245
quelquefois la guérison. Mais leur usage s'accompagne souvent
d'inconvénients nombreux, quelle que soit la préparation qu'on
emploie. Ils ôtent l'appétit, donnent de la débilité mentale et
physique, de l'amaigrissement, de la fatigue musculaire, et même
parfois l'exagération des convulsions. Le nombre des remèdes
proposés pour les remplacer est considérable L'auteur parlera
du borax, essayé dans quelques cas à l'hôpital des épileptiques
et des paralytiques de Londres, et qu'il essaye depuis trois ans :
1" cas. Femme, trente ans, intelligence conservée. Ses accès
tombent de 36 en 1875 à 6 en 1882, en suivant une marche pro-
gressivement décroissante. 28 cas. Sur une femme de trente-
six ans. La décroissance est moins nette. Le tableau des accès
relevé par mois, donne des résultats moins nets. Le bromure
diminuait les attaques, mais le petit mal redoublait. Le borax a
paru donner quelquefois de la diarrhée, mais il ne produit pas
l'affaiblissement nerveux des préparations bromées. Les doses
employées ont été, au début, de dix grains trois fois par jour,
jusqu'à la dose maxima de 30 grains trois fois par jour. (Boston
met. sur jurg. Journal, 18 fév. 1886.) P.
SOCIÉTÉS SAVANTES
SOCIÉTÉ MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE
Séance du 12 avril 1886.
Présidence DE M. SÉ11EL.11G ? E.
Le Président fait part à la Société de la perte qu'elle vient de
faire en la personne d'un de ses anciens présidents M. Legrand
du Saulle, décédé récemment, et propose de lever la séance en
signe de deuil. La proposition est acceptée par acclamation.
Séance solennelle.
Présidence DE M. Sémelaigne.
La Société décide qu'en raison du deuil qui vient de la frapper,
le banquet annuel n'aura pas lieu.
246 SOCIÉTÉS SAVANTES.
MM. Féré, Briand, Charpentier, donnent lecture de leurs rap-
ports sur les prix Belhomme, Esquirol, Moreau (de Tours) et
Aubanel. Les noms des lauréats sont proclamés. (Voirie n° 31.
p. 134.)
Séance du : 11 mai 1886.
Présidence DE M. SE11EL.11G1G.
M. Delasiauve communique le discours qu'il a prononcé sur la
tombe de M. Bourdin, dont la mort vient d'être annoncée en
termes émus par le Président. 1
M. RITTI donne lecture d'un mémoire sur la curabilité de la
démence qui lui a été adressé par M. Kowaleski.
Cette communication soulève une discussion à laquelle pren-
nent part MM. Motet, Magnan, Christian et Delasiauve, d'où il
résulte que la Société, ne pouvant l'argumenter en l'absence du
présentateur, il y a seulement lieu de faire des réserves sur le
fond même du mémoire.
M. Dufour envoie une note pour contribuer à l'étude des gué-
risons de la folie par l'hypnotisme.
Des signes physiques, intellectuels et moraux de la folie héréditaire
(suite de la discussion).
M. CHRISTIAN. Au point où en est arrivé la discussion qui a déjà
rempli plusieurs de nos séances, tout ou presque tout a été dit,
et j'en suis presque à regretter l'imprudente promesse que j'ai
faite de venir, moi aussi, m'engager dans le débat. Après l'exposé
magistral de M. Magnan, auquel M. Falret a donné l'appui de sa
parole convaincue et autorisée, vous avez entendu les objections
de MM. Cotard, Charpentier et Bouchereau. Quels arguments
nouveaux pouvais-je vous apporter ? Il m'a semblé cependant que
nos divergences ne sont pas aussi profondes, en réalité, qu'elles
le paraissent au prime abord et que, dans le problème si com-
plexe dont nous discutons les termes, il y a une partie clinique
sur laquelle nous sommes bien près de nous entendre et une partie
étiologique plus sujette à controverse.
Après s'être étendu sur la question, M. Christian combat surtout
le terme héréditaire. L'hérédité ne lui semble pas avoir une
influence aussi générale qu'on est tenté d'admettre. C'est, selon
lui, un facteur éliologique important, mais dont il faudrait limiter
et surtout préciser la sphère d'action. Ils croient que, si l'on n'y
prend garde, l'hérédité devienne quelque chose de vague, de
flottant, d'insaisissable, qu'on invoquera d'autant plus facilement
SOCIÉTÉS SAVANTES. 2 M 7
qu'elle échappera à toute délimitation rigoureuse. Il faudrait
savoir limiter son rôle à l'état du père au moment de la con-
ception, ou à celui de la mère pendant la grossesse, car c'est là
que l'on trouve la cause principale des dégénérescences, du moins
de celles qui, en existant au moment de la naissance, peuvent être
qualifiées d'héréditaires.
Régulateur automatique de la température des liquides. Présenta-
tion d'appareil.
M. BRIAND, après avoir exposé toutes les tentatives faites en
France et à l'étranger par les médecins d'asile pour régler auto-
matiquement la distribution de l'eau chaude dans les baignoires
et éviter ces terribles accidents qu'on a souvent signalés par suite
de la négligence du personnel des bains, présente ! un appareil des-
tiné à maintenir constante la température des liquides. Cet appa-
reil construit sous son inspiration par M. André, ingénieur en chef
de la Société des ateliers de Neuilly, est actuellement à l'exposi-
sition de la Société d'hygiène ; il repose sur la propriété qu'ont les.
métaux de se contracter on de se dilater suivant qu'on abaisse ou
élève leur température et est par conséquent automatique. Il peut
se réglera volonté suivant le nombre de degrés qu'on veut obte-
nir et, donnant dans la pratique de bons résultats, il permet
d'espérer que maintenant les aliénés ne risqueront plus d'être
échaudés dans leur baignoire. M. B.
I
Sautée du 28 Juin 1886.
Présidence de M. Sémelaigne.
Des signes physiques intellectuels et moraux de la folie héréditaire
(suite de la discusion).
M. Magnan. Les intéressants commentaires que vous avez enten-
dus dans les précédentes séances, montrent combien la question
était importante. Malgré les objections qui ont été soulevées, je
pense que nous ne tarderons pas à nous entendre et alors l'accord
ne sera pas loin de se faire entre nous sur ce que l'on désigne du
nom de vésanies.
Je vais d'abord m'expliquer avec M. Falret qui me reproche de
trop étendre le cadre des folies héréditaires et d'y faire entrer des
êlres anomaux n'offrant que quelques bizarreries sans conséquences
graves. Si cependant nous les examinons de près nous retrou-
verons chez eux des caractères atténués, mais analogues à ceux
que nous observons communément chez les vrais aliénés hérédi-
taires. Quel sera alors la limite ? Prenons par exemple un désé-
quilibré qui, à un moment donné, projette impulsivement un mot
248 SOCIÉTÉS SAVANTES.
qu'il ne peut retenir, et comparons-le à celui qui projette un coup
et frappe sans raison un passant inconnu. Ne verrons-nous pas
là deux phénomènes analogues ? Ne sont-ce pas là deux malades
presques identiques ? Comparons un onomatomane qui recherche
avec angoisse et sans trêve ni merci un mot, à un dipiomane qui
recherche avec la même fureur une boisson. L'un et l'autre sont à
la poursuite d'une sensation qui doit remettre momentanément
un terme à leur désir. Ils appartiennent donc tous les deux à un
même groupe. Si j'ai aussi poursuivi mon enquête sur ces gens
classés dans ce qu'on appelle les frontières de la folie en com-
mençant par les idiots, pour continuer par les imbéciles et les
faibles d'esprit, c'est pour faire mieux comprendre, par l'étude des
derniers l'état mental des autres.
L'avantage de cette méthode c'est que l'on a pu réunir dans un
même cadre des malades à manifestations différentes, mais reliés
entre eux par un caractère commun, qui n'est autre qu'un état
hériditaire et de pouvoir ainsi, par l'examen facile des uns, s'expli-
quer l'attitude des autres.
La clinique nous offre du reste parfois plusieurs de ces syn-
dromes réunis chez le même individu. Rappelez-vous de cette
malade queje vous ai présentée. Elle ne pouvait réprimer certains
mouvements, ni retenir certains mots grossiers; elle riait ou
pleurait alors que son état normal du moment était en opposition
avec ses rires ou ses pleurs. A d'autres moments c'étaient des
discours intarissables qu'elle prononçait malgré elle, ou bien
encore elle avait des impulsions homicides et des observations
génésiques. Il ne lui manquait rien.
M. Cotard me cherche, comme il le dit lui-même, une querelle
de mots, mais sous cette apparence modeste son argumentation
ne cache rien moins qu'une discussion de doctrine rondement
menée. Pour ma part j'accepte très volontiers le mot de dégénérés
qu'il me propose pour désigner ce groupe d'individus dont nous
nous occupous; mais pourquoi ne pas nous servir du terme d'héré-
ditaire qui est impropre, j'en conviens, mais qui a l'avantage
d'être employé par tout le monde, y compris M. Falret. Pour
éviter toute confusion et pour satisfaire tout le monde, appelons,
si vous le voulez cet état : folie des héréditaires dégénérés. M. Cotard
me reproche aussi d'établir une doctrine d'après laquelle un
ascendant donnerait naissance à un être dissemblable. Il n'en
est pas toujours ainsi. J'ai observé une dame toujours à la pour-
suite d'un mot et dont le père offrait la même bizarrerie. Vous
connaissez aussi cette dame qui toute la nuit tourmente son mari
par des discours sans suite; son père obligeait de même sa
femme à l'entendre des heures entières. L'impulsion à faire des
acquisitions inutiles se retrouve souvent chez plusieurs membres
de la même famille. J'ai encore dans mon petvice un homme qui
SOCIÉTÉS SAVANTES. 249
a une passion pour les tabliers blancs; sa mère adorait les rubans
rouges. Morel enfin rapporte l'histoire d'un père et de sa fille qui
ne pouvaient toucher a un chien ni à un chat. 11 faut bien accorder
à ces faits une influence qui justifie l'expression à' héréditaires .
M. Cotard pense enfin que c'est à la précocité du début des acci-
dents qu'on doit attribuer la bizarrerie des impulsions et il
m'oppose des cas choisis dans la pathologie ordinaire. Ses
exemples n'infirment pas ma théorie; et j'espère qu'il admettra
avec moi qu'un enfant qui, dès l'âge de cinq ans, a des érections à
la vue d'une tête de vieille femme et qui plus tard est obligé d'in-
voquer cette image pour cohabiter avec sa femme est un être dont
l'hérédité seule a pu altérer sitôt la conformation normale.
Lacritique de M. Charpentier nous reproche surtout, à Il. Falret
et à moi, d'avoir réuni sous la même étiquette plusieurs formes
de folies disparates. Qu'il se rassure, nous n'avons jamais eu l'in-
tention de mettre tant de choses dans la folie de* héréditaires. N'y
entre pas qui veut ! Je me range à l'opinion de M. Bouchereau
qui fait intervenir ajuste litre, pour expliquer l'explosion d'un
délire aussi prématuré, les maladies de la grossesse; mais il
existe aussi d'autres causes.
Enfin vous avez entendu la magnifique plaidoirie de M. Christian
enfaveur de M. Cotard.11 ne conteste pas l'influence de l'hérédité;
mais il voudrait la limiter à l'élat intellectuel du procréateur au
moment de la conception, car tous les aliénés sont, dit-il, entachés
d'hérédité, et, pour faire une classe spéciale de quelques-uns, il
faudrait leur accorder des caractères spéciaux. Ce n'est là qu'un
petit côté de la question ; peu importe pour la doctrine que l'in-
fluence pathologique se fasse sentir dans telle ou telle condition.
L'important, c'est qu'elle existe. Pour ce qui est des caractères
spéciaux aux héréditaires, ils existent : ce sont ceux accordés par
Christian aux dégénérés et je me suis déjà mis d'accord avec lui
en acceptant pour nos héréditaires le qualificatif de dégénérés.
MARCEL BItIAND.
SOCIÉTÉ PSYCHIATRIQUE DE BERLIN
Séance du 15 juin 1885 '.
M. LOEHR, senior, ouvre la séance en se faisant l'interprète des
collègues qui n'ont pu assister à cette réunion. 11 résume les
z Voy. Archives de Neurologie, t. XI, p. 265.
Archives, t. XU. 17 7
250 SOCIÉTÉS SAVANTES.
actes de l'année sociale qui vient de s'écouler, et invite l'as-
semblée à élire un nouveau président. Il est renommé par accla-
mation.
11f. MKNDKL, empêché, ne peut faire la communication qu'il
avait annoncée sur l'épilepsie jacksonienne et la folie.
M. KNECHT. Des phénomènes catatoniques dans la paralysie géné-
ruile. - Dans ces dernières années, on a observé quelques cas de
psychoses présentant, pendant leur évolution, tantôt le tableau
de la paralysie générale, tantôt celui de la catatonie au sens de
Kahlbaum '.
On en peut distinguer deux groupes : Le premier groupe est
caractérise par la manifestation dès le début et pendant les
quelques mois qui suivent du syndrome de la stupeur mélanco-
lique très net, puis, soudain se montrent des symptômes d'une
paralysie générale rapidement progressive qui termine la vie du
malade. Dans le second groupe, nous trouvons d'abord l'aspect
clinique de la paralysie générale ultérieurement remplacée par
des accidents catatoniques entrecoupés d'attaques congestives
répétées; ici la marche est extraordinairement traînante; dans
le seul cas qui jusqu'ici ait terminé son évolution, la mort
résulta d'une affection intercurrente, et malgré toute l'habileté des
aliénistes consommés, dans la pluralité des faits, il a été impos-
sible d'établir un diagnostic et un pronostic convenables.
L'auteur communique les détails relatifs à deux observations
du premier groupe dans lesquelles le dernier épisode, rapproché
de l'examen nécroscopique, ne laisse aucun doute sur l'existence
d'une paralysie générale finale. Mais avail-on affaire à une para-
lysie générale complicatrice d'une stupeur, ou les deux aspects
cliniques doivent-ils être tenus pour des stades successifs d'un
même processus ? Dans l'une des observations (la seconde) on ne
saurait méconnaître, en serrant de près l'histoire du malade, la
cohérence, l'enchaînement de l'ensemble des échelons de la
maladie. Si en effet, l'on fait abstraction d'un premier accès d'a-
gitation qui eut lieu en 1881 et ne dura que cinq semaines (quel-
ques idées de persécution concomitantes), on a eu sous les yeux,
depuis janvier 1883 jusqu'au 27 août 1881, un processus continu
dépourvu de toute espèce d'intermittence ou de rémission, dont
la terminaison a été une démence paralytique caractéristique.
La première observation se présente moins nette en ce qui
concerne le rapport de chacune des phases de l'ensemble mor-
bide ; il est incontestable qu'on y rencontre une longue rémission,
de plus d'une année, mais il suffit de la rapprocher cliniquement
de la seconde observation, pour être obligé de considérer l'en-
1 Voy. Archives de Neurologie, t. XI, p. 265.
SOCIÉTÉS SAVANTES. 251 t
semble de la marche de Id maladie, connue sous la dépendance
du même processus. Car dati, les deux cas la psychopathie com-
mence par une courte agitation accompagnée d'idées délirantes
mélancoliques, puis s'effectue une rémission assez longue qui
semble complète, après laquelle reparait une lypémanie vraie
avec profonde stupeur; cette lypémanie stupide dure assez long-
temps, s'améliore ensuite rapidement ainsi que dans la catatonie-
type de Kahlbaum, et parait guérie (po observation) ou laissée à
sa suite un évident affaiblissement intellectuel (2° observation);
voici alors qu'interviennent les éléments symptomatiques de la
paralysie progressive, la déchéance psychique et physique mar-
chent à pas de géants, le patient succombe en quelques mois.
Cette graduelle et successive aggravation des épisodes dans les
deux faits témoigne du rapport intime qui lie les phases les unes
aux autres, et celles-ci à un processus pathologique univoque. Il
importe aussi d'insister sur la présence des phénomènes catato-
niques tels que les a décrits Kahlbaum, même au cour du dernier
stade de palalysie générale : telles sont la répétition prolongée
de séries de mots sonores et les promenades circulaires de ce
genre d'aliénes. Il est d'ailleurs impossible de saisir les éléments
pathologiques qui permettraient à un stade précoce de prévoir
l'issue finale, quoique, dans la première observation, on constate
un trouble profond de la sensibilité générale (le malade se croit
pourri, il n'a pas de tête) et dans le second fait, une angoisse à
motif grotesque (crainte d'être dévoré vivant), tous phénomènes
indicateurs d'une notable perturbation des fonctions encépha-
liques.
Passons maintenant à deux observations du second groupe :
début par des symptômes de paralysie générale, et plus lard
calatouie typique avec attaques congestives intercurrentes. Symp-
tômes connus aux deux cas : d'abord, dépression mélancolique
précédée, dans la première observation, d'accès vertigineux;
puis, agitation modelée avec idées de grandeurs mobiles et fré-
quents changements d'humeur immotivés; ce stade est hanté,
chez le premier patient, par une paraplégie spinale aiguë; chez
le second, par une légère attaque congestive. Le premier fait se
fait remarquer par l'ensemble des signes de la catatonie typique
de Kahlbaum : mutisme, isolement, pi omenades constantes sur
le même chemin à pas raides, les épaules élevées, la bouche sou-
vent effilée en forme de groin, va et vient en reniflant bruyam-
ment, port du bras gauche fléchi à angle droit; souvent, pendant
des heures entières le malade lui imprime des secousses tandis
qu'il exécute avec les jambes des mouvements de fronde, enfin,
la raideur croissant, il conserve longtemps les attitudes qu'on lui
impose et doit être incité à s'alimenter. Dans le second cas, on
reconnaît aussi la catatonie bien marquée dans ses traits princi-
252 SOCIÉTÉS SAVANTES.
paux, malgré l'aflaiblissement psychique précoce du patient; ce
malheureux demeure assis raide et figé, il s'oppose et résiste à
toute modification de situation qu'on veut lui imprimer, il tient
sa bouche avancée en forme de trompe, ses pupilles rigides et
immobiles sont fortement dilatées; de temps à autre, son corps
et sa face sont secoués par des tremblements convulsifs qui par-
fois ne se manifestent qu'à gauche, quelquefois aussi légèrement
agité, il se promène à grands pas et imprime à ses mains rap-
prochées l'une de l'autre des mouvements perpétuels de torsion.
Sa trompe buccale exécute également des mouvements de masti-
cation. Après une durée de quatre ans, il se produisit brusque-
ment chez le premier aliéné un ictus apoplectiforme grave, suivi
de déchéance psychique et somatique profonde et d'hémiparésie
droite assez tenace; il semble qu'on assiste au stade terminal de
la paralysie générale, et cependant tout disparait presque complè-
tement, une rémission totale se manifeste, si bien que la mort
n'a lieu que cinq ans plus tard de pthisie pulmonaire au milieu
de la déchéance la plus complète, sans qu'il soit survenu de para-
lysie généralisée. Le manque presque absolu de lésions céré-
brales, la durée et les phénomènes principaux de l'évolution mor-
bide permettent à peine de regarder la première observation
comme une paralysie générale, c'est plutôt un cas de catatonie
ou si l'on préfère une autre terminologie de vésanie systématique
avec stupeur modifiée, par intervalles, par des lésions intercur-
rentes ; c'est ainsi que la paraplégie spinale brusque des pre-
miers mois devrait, conformément au cas récent de Hitzig être
rattachée, quoique la moelle n'ait pas été examinée, à une hémor-
rhagie des méninges spinales, quant à l'hémiparésie tardive,
elle ne se rapporte certainement pas à un épanchement sanguin
(aucun signe nécroscopique). Dans le second cas, la rapidité de
la démence, l'absence du phénomène du genou, l'immobilité
pupillaire permanente, sont en faveur d'une paralysie générale
très probable quoique pour le moment (le malade n'est pas mort)
l'ensemble des symptômes rappelle au premier abord la catatonie.
Remarquons enfin l'âge relativement peu avancé des malades du
second groupe à l'époque où ils furent atteints (vingt-six et
trente et uu ans) tandis que, dans le premier groupe, il s'agit de
l'âge classique des paralytiques généraux (trente-quatre et trente-
cinq ans).
Discussion :
On s'inquiète surtout de savoir si la catatonie forme un type
morbide autonome. Non, disent MM. F¡"l\OENKEL et IDRLER, car les
'1 Voy. Congrès des naturalistes et médecins de Magdebourg, 1884.
(Archives de Neurologie.)
SOCIÉTÉS SAVANTES. 253
paralytiques généraux groupent, enfilent sans cesse les uns aux
bout des autres des mots dépourvus de sens (Froenkel); les cas
de catatonie seraient donc des cas de paralysie générale pro-
longée (Ideler).
M. ,TASTItOWITZ. Il n'y a que les émotions psychiques de nature
anxieuse qui ne procèdent pas des état» catatoniques.
M. EDFL. La rigidité catatonique des muscles est un symptôme
qui se montre aussi en d'autres cas.
M. Knecht. Il existe cependant des formes mixtes dans les-
quelles il est difficile de distinguer s'il y a catatonie ou paralysie
générale.
M. Vogelgesang. Une paralytique générale s'adonnait à l'excès
à la répétition de mots dépourvus de sens.
M. JASTROWITZ. C'est là une observation fréquente dans la para-
lysie progressive avancée.
M. LOEIIR, senior. La catatonie, d'après son expérience, ne se
montre pas autonome; elle n'entraîne un pronostic fàcheux que
lorsqu'il s'y ajoute des signes de paralysie générale.
M. HANS LOEllR. Action du système de traitement de Mitchell Play-
fair sur le bilan physiologique de la nutrition. Pour provoquer
l'élaboration des aliments dont on multiplie l'ingestion, dans ce
procédé, il faut faire intervenir le massage et l'électricité. L'au-
teur a examiné l'influence de ces deux agents chez deux individus
physiquement bien portants auxquels on administrait une nour-
riture constante, principalement liquide ; il a trouvé que les effets
de la faradisation échappaient à l'analyse. En revanche, ceux
du massage étaient extrêmement nets ainsi qu'on le peut voir
d'après les tableaux qui montrent la surexcrétion d'urine. d'urée,
d'acide sulfurique et phosphorique, et de chlore. Ce travail sera
publié plus tard, de concert avec d'autres recherches ultérieures.
Discussion :
M. Knecht. Il est très intéressant de comparer les faits de mas-
sage précités qui concernent le massage d'organes normaux
chez des aliénés, avec ceux qui ont trait au massage chil'ur1Ólcal.
Il convient d'insister sur l'hyperexcrétion d'urée qui suivent le
massage pratiqué pour des exsudats de la cavité abdominale.
M. LOEIIR, senior. Et les pesées du corps entier ?
M. Hans La : un. Dans un cas on a pu établir un accroissement
de poids de 3 kilogr. ; dans un autre cas, au bout de 8 jours le
malade avait diminué de 1 kilogr.
M. VOGRLGES.4NG. De la cnnna61none Les parties constituant
1 Comparer avec les travaux sur le même sujet dans les Archives de
Neurologie. --
251 SOCIÉTÉS SAVANTES.
l'action du chanvre indien sont : une résine neutre (cannabine
ou haschischine) et une huile liquide composée de deux carbures
d'hydrogène, le cannabène et l'hydrate de cannabène. Bombelon
extrait du chanvre indien une préparation qu'il appelle canna-
binone ; d'après ses indications, ce produit est la partie du com-
posé cannabique auquel il convient d'attribuer le maximum de
l'action narcotique véritablement surprenante. Elle a la consis-
tance d'une résine liquide, ne contient ni matière grasse, ni
chlorophylle, ni sels, possède une odeur caractéristique, un goût
amer et racle la gorge; insoluble dans l'eau, elle se dissout aisé-
ment dans l'alcool, J'éther, le chloroforme, l'huile, la graisse
(solution or-brun) et se divise fort bien dans la poudre de café.
Les tablettes de Bombelon se composent de 9 parties de café en-
poudre et de 1 partie de cannabinone. M. Bombelon nous a donné
pour nos recherches en injections hypodermiques une solution'
constituée par : cannabinone, 1 partie ou 2 parties ; huile d'a-
mandes douces, 9 parties. Le médicament a été essayé dans ces
conditions à la section des femmes de l'asile de Dalldorf depuis
le mois de novembre de l'année dernière jusqu'à ce jour sans
discontinuer. On l'a d'abord fait absorber sous deux formes à
l'aide d'injections hypodermiques et par la voie gastrique ; mais,
à présent, depuis longtemps il est exclusivement administré par
l'estomac. En effet, l'injection hypodermique à des doses maxi-
mum de 0,20 produisait une irritation du tissu cellulaire et
de la peau fort tenace quoique sans occasionner de douleurs
(8 femmes). Pour l'administrer à 52 femmes d'âges variés, atteintes
de différents états d'agitation (chronique ou maniaque aiguë)
on employa la formule suivante : cannabinone 3 gr.; huile
dolives 150 gr. On put ainsi administrer à la fois 0,15 à 0,60.
Généralement si la dose de 0,30 est devenue sans effet on n'a rien
à attendre d'une quotité plus élevée. Le résultat le plus favorable
fut obtenu dans les angoisses d'une hystérique accusant des hal-
lucinations de la vue et de l'ouïe, et tendant au suicide; on les
évite en maintenant la malade au lit dès le début de l'agitation,
et en lui donnant 0,30 à 0,b0 de cannabinone ; un quart d'heure
à une demi-heure à la suite de l'administration, il se produisit
un sommeil calme, prolongé, durant souvent jusqu'à cinq heures,
puis la patiente se réveille en paraissant très fatiguée pour être
reprise bientôt d'un sommeil assez prolonge. Cette hystérique,
dans un intervalle de pleine lucidité, raconta que un quart d'heure
après l'ingestion médicamenteuse elle sentait ses membres lourds,
puis c'etait le tour de sa tête : il lui était impossible d'ouvrir
les yeux, elle était prise d'une lassitude effrayante, se croyait
ivre; sa langue était quasiparalysée, sa parole difficile; elle
éprouvait le sentiment bizarre de l'éloignement des objets et
chancelait, Sa bouche était tellement remplie de salive qu'elle
SOCIÉTÉS SAVANTES. 255
exécutait une série de mouvements de déglutition, mais la gorge
demeurait sèche; finalement elle s'endormait tout. doucement,
sans rêves ni vision. Elle conclut que la cannabinone est le plus
agréable de tous les agents hypnotiques de la pharmacie qui lui
aient été administrés. Ces assertions ont été confirmées par
d'autres aliénés intelligents. En outre, une gardienne en chef
après avoir pris 0,15 s'est sentie d'humeur excessivement gaie;
surexcitée, elle a d'abord constaté que le mécanisme de la pensée
s'opérait plus facilement ; puis une série de conceptions l'ont
assaillie confusément; àla suracuité visuelle et auditive a succédé
l'apparition de globes lumineux ascendants et descendants, de
montagnes, animaux, fantasmagories bizarres de toute espèce;
un bruissement intense s'est manifesté dans les oreilles, il lui a
élé impossible de lever les bras, une légère timbale lui paraissait
lourde comme un broc en zinc et les membres eux-mêmes avant
acquis la pesanteur du plomb; bientôt son corps semble ceint
d'une sangle, elle ne peut parler et n'ouvre les yeux qu'avec
peine, et tout en entendant ce qui se passe autour d'elle, est
hors d'état de réagir d'une façon quelconque. Parmi les phéno-
mènes accessoires désagréables il faut citer la toux, la brûlure
à la gorge, quelques vomissements : ce dernier devrait être attri-
bué au véhicule huileux et non au principe médicamenteux. C'est
tout ce qu'il convient de relever en fait d'inconvénients. Les allé-
gations de l'hystérique sus-énoncés ont été contrôlées de la
manière que voici : on lui a sans le lui dire administré pendant
plusieurs jours de l'huile pure. La cannabinone n'a comparative-
ment rien produit chez une anxieuse mélancolique, pleurant,
gémissant, s'agitant. Dans la lypémanie animée, la cannabinone
n'a exercé aucun effet sur les idées délirantes, n'a pas calmé les
patientes (Voy. Ricliler de Panl : ow) Il ne serait pas prudent
de vouloir substituer la cannabinone au poison des morphino-
manes, parce que les sensations désagréables qui se montrent à
la suite de son administration, sensations que tout individu non
morphinomane déclare parfaitement supportables, prennent une
allure tellement intense que l'avantage de la cannabinone est évi-
demment douteux. Voici par exemple une tabetique accoutumée
à de hautes doses de morphine; pendant quatre jours, le soir,
on substitue à l'injection de morphine, une injection de canna-
binone ; la malade demande alors qu'on ne la torture pas et
tente de s'éttangler. Une autre malade jadis habituée à l'absorp-
tion de 0,0;5 de morphine, qui avait déjà subi les commence-
ments du sevrage, si bien qu'on ne lui en injectait plus que 0,015
consent à la remplacer par 0, : 10 de cannabinone; elle refuse de
continuer cette substitution parce que, suivant elle, le sommeil
1 Voy. Arch. de Neurol.
256 SOCIÉTÉS savantes.
qui succède à la morphine est bien plus calme, tandis qu'après
la cannabinone l'air lui manque complètement, elle se sent sur
le point de mourir; ces plaintes persistent tout le lendemain : il
est juste d'ajouter qu'elle ne sait pas qu'on a abaissé sa forte
dose de morphine. La plus grande prudence, et même l'abstention
s'imposent chez les cardiaques. Une cardiaque après avoir reçu
O,Oi5 c'est-à-dire une très faible dose, en une fois est prise d'un
collapsus qui oblige à une médication excitante.
En somme, la carmabinone, innocente chez l'adulte, dans les
proportions indiquées, possède une extrême activité chez les su-
jets très anémiques, dont l'activité cardiaque apparaît faible,
ainsi que chez les vieilles gens. A ces individus il suffit souvent de
prescrire le soir avant le coucher, 0,30 pour les faire dormir la
nuit et, le jour suivant jusqu'au soir, incapables de rien, de
quitter leur conche, on les voit, si contre leur gré, on les force à
se lever, chanceler, prendre d'assaut le premier siège vacant où
ils s'endorment presque sur-le-champ ; leur aspect est celui de
cens n'ayant point suffisamment dormi, la parole est encore
lourde. Bien que la cannabinone ne soit pas appelée à occuper
parmi les hypnotiques un rang égal à celui qu'occupent la mor-
phine et le chloral, il faut l'introduire dans notre arsenal théra-
peutique, parce que, à la dose moyenne de 0,30 chez les aliénées,
et de 0,10 chez les individus sains d'esprit, elle fournit, en bien
des cas, un résultat qui contente patients et médecins. Un insuccès
vous laisse toujours le champ libre à l'égard du choix d'autres
narcotiques. Mais la cannabinone mérite d'être essayée ; elle est,
d'ailleurs acceptée volontiers de la plupart des aliénés quand ils
se sont habitués au véhicule huileux.
Discussion :
M. FALK. Quels sont les cas d'aliénation mentale dans lesquels
le médicament doit être employé ?
MM. Vogelgesang et IDELFR. Il est à employer dans l'hystérie.
M. LOEIIR senior. Usez-en dans tous les cas où un hypnotique
doux est indiqué.
M. Mueller. Combien de fois faut-il répéter la dose de 0,30 ?
M. VOG6LGESANG. On peut atteindre dans vingt-quatre heures
0,80; mais, généralement, quand u.fi0 n'ont déterminé aucune
action, il convient de ne pas pousser la quantité plus haut.
M. Guttstadt communique l'histoire d'un individu amené d'of-
fice à l'asile d'Ilildesheim, qui y vécut huit ans sans qu'on ait jamais
rien pu savoir sur sa personnalité civile et sa nationalité, maigre les
moyens d'information dont on dispose. On l'avait trouvé le
18 octobre 1816, dans la rue du village de Wendhausen, près
Hildesheim. C'était le matin de bonne heure, il avait plu forte-
SOCIÉTÉS SAVANTES. 257 7
ment pendant la nuit et les chemins étaient boueux , cependant
ses vêtements et ses chaussures étaient secs et propres, il avait
donc dû être transporté la nuit en voiture. Il ne parlait aucune
langue. Age apparent : trente ans. Les traits de son visage déno-
taient peu d'intelligence, mais il connaissait les monnaies, dési-
gnait les pièces qu'on lui demandait, entendait correctement,
comprenait tous les motsetsemontrartaussr accommodant qu'as-
sidu aux occupations intérieures et aux travaux de ? jardins. Mais
impossible de le faire parler. On eut beau expédier sa photo-
graphie dans toutes les directions, prendre toute espèce d'inlor-
mations, organiser mille enquêtes, on ignora toujours son lieu
d'origine. On fut oblige de le désigner sur les actes et registres
sous le nom d'inconnu, bien qu'il répondit au nom de Conrad.
Bon travailleur, d'humeur et de caractère excellents et toujours
égaux, très calme, il ne fut jamais agité. De temps à autre, son
faciès souriait et il remuait légèrement les lèvre. Il succomba à
une pneumonie sans cesser, même pendant les derniers jours, de
garder le silence elle mutisme. Il fallut sur les registres mor-
tuaires le désigner sous le titre d'inconnu.
M. jASTROWtïz. A l'instigation du comité d'enquête, institué par
la Société de médecine inlerne, il importe de colliger des rensei-
gnements sur l'occurrence de la tuberculose chez les aliénés.
M. t''ALK fait la notion suivante : Les membres de la société
sont invités à fournir un rapport sur les cas qui leur sont per-
sonnels, en ce qui concerne l'application effectuée du paragraphe
de la loi, relatif au « transport dans un asile public dts prévenus
dontl'rz/faire s'instruit, afin d'examiner leur état mental au besoin
pendant six semaines ». Quel résultat a donné cet examen dans ces
conditions ? L'assemblée décide qu'on demandera à M. le mi-
nistre de la médecine de vouloir bien inviter le bureau royal de
statistique à procurer les matériaux nécessaires à la solution de
cette question, matériaux empruntés aux données statistiques
des asiles d'aliénés. Il n'est pas bois de propos de rappeler que le
§ 81 du Strafp roc essoi-tiiitti2.q /ti dns rlcutsche Reich du '1 cr fevrier
1877, est ainsi conçu :
En ce qui concerne la préparation d'un rapport sur l'état mental de
l'inculpé, le tribunal, peut sur la proposition d'un spécialiste compétent
et après avoir entendu la défense, ordonner que l'inculpé soit transféré
dans un asile public d'aliénés où il sera mis en observation. Quand
l'inculpé n'a pas d'avocat on lui en constituera un. La séquestration
dans rétablissement ne devra pas dépasser six semaines.
Dès que ces matériaux seront prêts, M. Guttstadt voudra bien
écrire un rapport sur le sujet.
La séance est levée à cinq heures et demie (Allg. Zcilsch. f.
Psych., XLII. 4). P. K.
VARIA
DISTRIBUTION DES PRIX A L'ÉCOLE DÉPARTEMNTALE D'INFIR-
miÈaEs ET D'INFIRMIERS A L'ASILE CLINIQUE (SAINTE-ANNE).
La distribution des prix aux élèves de l'Ecole d'infirmières
de Sainte-Anne a eu lieu le 25 août, sous la présidence de
M. le Dr Bourneville, député de la Seine, membre de la com-
mission de surveillance des asiles d'aliénés de la Seine. Il
était assisté de MM. Roux, directeur des affaires départemen-
tales à la préfecture de la Seine; A. Regnard, inspecteur général
des établissements de bienfaisance; Dr Taule, directeur de
l'asile Sainte-Anne. Nous avons remarqué dans l'assistance :
MM. Davoust, conseiller municipal, D" Bouchereau, Magnan,
Quesneville, Dubuisson, Wallon, Barroux, directeur de l'asile
de Villejuif, les internes de l'asile, etc., etc.
Après avoir ouvert la séance, M. le Dr Bourneville a pro-
noncé le discours suivant :
Mesdames, Messieurs,
L'Assistance publique de Paris, comprend : 10 Les bureaux de
bienfaisance chargés de distribuer les secours à domicile pour
les malades, les enfants, les nourrices, les infirmes et les vieil-
lards ; '2° Les hôpitaux destinés au traitement des maladies
aiguës; 3° Le* hospices consacrés aux personnes atteintes de
maladies chroniques et aux vieillards; 4° Le service des enfants
assistés. Elle devrait comprendre aussi le service des aliénés;
mais il y a une douzaine d'années, pour des raisons théoriques,
le Conseil général a distrait ce service de l'Assislance publique et
l'a placé à la Préfecture de la Seine, tout en conservant trois sec-
tions d'aliénés à Bicêtre et la Salpêtrière. Les partisans de la
séparation auraient même voulu supprimer ces sections renfer-
mant, selon les circonstances, z à z1,800 aliénés des deux sexes.
Un homme qui a exercé une influence néfaste en ce sens, feu
l'inspecteur Lunier, était parvenu à faire supprimer deux sections à
la Salpêtrière. Peut-être aurait-il réussi complètementsi l'on n'avait
réfléchi aux difficultés de placer ailleurs ces nombreux malades.
Cette mesure est regrettable à différents points de vue; nous ne
VARIA 259
parlerons que de ceux qui vous intéressent et qui justifient notre
brusque preambule. En premier lieu, si les asiles d'aliénés dépen-
daient de l'Assistance publique, la question de la retraite pour
les sous-employés, les infirmiers et les infirmières, serait tranchée
depuis longtemps ou même ne se serait pas posée : les uns et les
autres en effet, vous auriez droit au repos ou à la pension repré-
sentative, comme tout le personnel secondaire de l'Assistance pu-
blique.
En second lieu, tandis qu'aujourd'hui encore, malgré nos récla-
mations réitérées, il ne vous est pas tenu compte de vos années
de service dans les asiles, si, les quittant, vous entrez dans les
hôpitaux; tandis que, de même, il n'est pas tenu compte aux
infirmiers ou aux infirmières des hôpitaux qui viennent ici de
leurs années passées dans les établissements de l'Assistance publi-
que ; si l'Assistance avait l'administration des asiles, il ne serait
causé aucun prejudice ni avons ni a vos camarades des hôpitaux,
et toutes vos années de service vous profiteraient. C'est là une
anomalie d'autant plus choquante, que, pour les employés qui
vont de la Préfecture à l'Assistance publique ou inversement, les
années passées dans l'une ou l'autre de ces administrations, sont
valables pour la retraite.
Enfin, si le service des aliénés était resté dans les attributions
de l'Assistance publique, il n'aurait pas été utile de créer dans cet
asile une école d'infirmiers et d'infirmières, celles de Bicêtre, de la
Salpêtrièrp et de la Pitié auraient suffi. Tout au plus, y aurait-il
eu lieu d'installer ici une école de perfectionnement. C'est parce
qu'il y a en quelque sotte deux administrations de l'Assistance
publique, que nous avons été amené en 1881 à demander au Con-
seil général la création de cette École départementale d'infirmiers
et d'infirmières.
L'inauguration a eu lieu le 14 février 1882, sous la présidence
de M. Ch. Floquet, alors préfet de la Seine et qui a voulu témoi-
gner du vif intérêt qu'il portait à la laïcisation. L'école a fonc-
tionné depuis lors, à peu près régulièrement. Vos chefs de ser-
vice, aidés de leurs internes, se sont dévoués àvotre instruction,
car ils savent, eux, combien il leur est indispensable d'avoir de
bons auxiliaires pour 1 accomplissement de leur tâche. Les dis-
cours prononcés par M. Dagonet aux précédentes distributions
des prix, discours qui résumaient l'opinion de tous ses collègues,
le prouvait surabondamment. Cette nécessité d'avoir des auxi-
liaires sérieux, dévoués, instruits, connaissant tous les détails de
leur profession, est hautement reconnue dans divers pays, non
pas par quelques individus lités, mais par la généralité des méde-
cins et des administrateurs. En Angleterre, par exemple, c'est de
l'Association médico-psychologique, qu'est parti le mouvement en
faveur de la création dans les asiles d'un enseignement profes-
260 VARIA
sionnel spécial pour les infirmières et les infirmiers. C'est un
comiténommé par cette association qui a fait le manuel, dont on
se sert pour l'enser; : nement,manuel dont je me permettrai de vous
envoyer la traduction.
Malheureusement, si la plupart des médecins aliénistes se plai-
gnent de ne pas avoir le- personnel capable, instruit et dévoué
qu'ils souhaitent dans l'intérêt des malades, bien peu se préoccu-
pent de l'obtenir. Il faut dire que les administrations n'ont pas
paru jusqu'ici se faire une idée exacte des besoins, et se préoc-
cuper, non pas d'innover, mais d'étudier ce qui se fait à l'étranger
et de l'imiter. A Paris, l'administration préfectorale n'est pas
encore suffisamment convaincue, file a encore des hésitations.
Nous espérons pouvoir les dissiper en nous appuyant sur votre
travail, sur vos efforts, pour perfectionner votre instruction pri-
maire, pour acquérir l'instruction professionnelle et aussi sur
votre dévouement. Et quand la lumière sera faite dans tous les
esprits, nous avons la conviction que conformément aux désirs
exprimés par notre ami le Dr Bouchereau et par nous, c'est parmi
les élèves de cette école que l'administration prendra toujours les
sous-surveillants dentelle aura besoin. C'est ce que fait aujour-
d'hui M. Peyron, directeur de l'Assistance publique, et nous le
répétons, c'est ce que fera l'administration départementale lors-
que, débarrassée des restes du vieil esprit qui l'anime encore, elle
sera enfin inspirée par le véritable esprit républicain.
Le but de cette école n'est plus de fournir un personnel pour
remplacer les soeurs; c'est fait, puisque l'asile Sainte-Anne a été
laïcisé le 1er janvier 1884; l'asile du Ville-Evrard le ler janvier
1885;' l'asile de Vaucluse le le, juillet 1885 el que l'asile de Ville-
juif a été et sera donné au sur et à mesure aux laïques. Le but de
cette école, aujourd'hui, c'est de donner de bonnes surveillantes
aux asiles, chaque fois qu'il se produira des vacances; son but
c'est de fournir a l'occasion de bons surveillants à l'agile de Ville-
juif concurremment avec l'école de Bicêtre, aux asiles de la pro-
vince afin de les aider à se débarrasser des religieuses. C'est parce
qu'elles n'ont pas le personnel convenable, nécessaire, que diver-
ses administrations préfectorales de province hésitent à remplacer
les religieuses de leurs asiles par des laïques. Pour les aider, -il
n'est pas trop de toutes les bonnes volontés et il convient d'appe-
ler ici le plus possible d'élèves externes.
Ce serait un grand honneur pour le Conseil général, pour le
préfet de la Seine, pour les médecins et le directeur de cet asile,
pour la Commission de surveillance, si cette école devenait une
pépinière féconde de sous-surveillantes instruites.
Travaillez avec courage et aidez-nous à réaliser partout, le plus
vile possible, cette réforme si républicaine de la laïcisation de
tous les établissements hospitaliers.
VARIA. 261 i
Après ce -discours, très applaudi, M. le Dr Taule a pris la
parole, et s'est exprimé en ces termes :
Mesdames ET Messieurs,
J'assistais, il y a quelques jours, à la distribution des prix de
l'école de la Salpêtrière, et nous constations tous avec plaisir le
grand nombre des lauréates. II n'y a pas de comparaison à établir
entre cet établissement et celui de Sainte-Anne, dont les propor-
tions sont beaucoup plus restreintes. C'est la meilleure excuse que
je puisse donner de votre petit nombre J'ai l'espoir qu'il augmen-
tera l'année prochaine et que nous aurons à multiplier les récom-
penses. En attendant, je félicite ceux et celles d'entre vous qui
ont répondu à notre appel. Ce faisant, je crois être l'interprète
de.vos maîtres, à qui vous devez la plus grande part de vos succès,
de l'administration et du Conseil général, représentés ici par
M. le directeur des Affaires départementales et par M. le conseiller
Davousl, que je remercie en votre nom et au mien d'avoir bien
voulu s'y rendre. Nous devons surtout des remerciements à M. le
Dr Bourneville dont le précieux et puissant concours, ne nous a
jamais lait défaut. '
Le Conseil général vous a de nouveau manifesté sa sollicitude
cette année pour la création d'un cours d'instruction primaire à
l'usage des infirmières et dont profilent ainsi quelques malades.
Ce nouvel enseignement vous permettra de suivre avec plus de
fruit les cours pratiques, dont quelques-unes d'entre vous s'étaient
abstenues jusqu'à ce jour faute de connaissances élémentaires
suffisantes. Il vous sera ainsi doublement profitable. J'espère que
vous saurez vous en montrer reconnaissantes par votre assuidité
au travail.
Je dois d'au tant plus insister sur l'utilité de l'enseignement profes-
sionnel, qui vous est donné par MM. les internes en médecine et
en pharmacie, que cet enseignement va vous devenir de plus en
plus indispensable, car le diplôme d'infirmier et d'infirmière,
récemment institue par le conseil municipal pour le personnel
des hôpitaux de l'Assistance publique, deviendra bientôt exigible
sans doute pour l'admission aux nouveaux emplois de sous-sur-
veillanls et de sous-ernployés. Vous ne devez pas trop vous préoc-
cuper de cette mesure, qui n'a pas encore été mise en vigueur
par M. le directeur de l'Assistance publique et qui ne vous est
point applicable au moins pour le moment. Elle n'en aura pas
moins pour résultat, au prix de l'autre, de rendre votre avance-
ment plus difficile. C'est à vous de %ous prémunir contre cette
éventualité en vous y préparant par une bonne instruction pro-
fesstionnelle. '
Laissez-moi vous dire en finissant que cette instruction, si im-
262 FAITS DIVERS.
portante qu'elle soit à nos yeux, ne primera jamais les qualités
morales sans lesquelles il ne saurait y avoir ni bon infirmier ni
bonne infirmière. Ces qualités sont avant tout la patience, la
douceur et la bonté envers les malades. C'est en vous pénétrant t
de ces sentiments et par votre bonne conduite que vous remplirez
.dignement votre mission qui est des plus nobles, puisqu'elle vous
'donne chaque jour l'occasion d'alléger les souffrances de vos sem-
blables. Envisagée à ce point de vue, votre tâche, parfois si dure
et si répugnante, vous paraîtra légère et vous l'accomplirez avec
plaisir, en vous attirant avec l'estime de tous, l'affection et la
reconnaissance des malades.
Il a été procédé après ce discours à la distribution des prix,
consistant en livrets de la caisse d'épargne et en livres :
FAITS DIVERS
Nominations ET promotions. Arrêté du 15 février 1886. Ont
été promus pour prendre rang à partir du ler janvier 1886 : A la
classe exceptionnelle de son grade (8,000 fr.), M. le Dr Faucher,
directeur médecin en chef de l'asile de iVAUGEAT(Haute-Vienne); A
la 1ro classe de son grade (i,000 fr.), M. le Dr Homéry, directeur,
médecin en chef de Saint-Athanase (Finistère); A la 3e classe de
son grade (5,000 fr ), M. le Dr LONGEAUD, directeur, médecin en
chef de la ville de Rodez (Aveyron); Ont été promus à la 1 ro classe
de leur grade (3,000 fr.); pour prendre rang à partir du ("février
1886 : MM. les Dro GUILLE11N, médecin adjoint de l'asile de Dôle
(Jura); Paris, médecin adjoint de l'asile de Châlons-sur-Marne et
BELLAT, médecin adjoint de l'asile de Prémontré (Aisne).
Arrêté du 15 mai 1886. M. le Dr FABRE, directeur, médecin en
chef de l'asile de Saint-Lizier (Ariège), est nommé directeur, mé-
decin en chef de l'asile de Saiut-llban (Lozère), M. le De Lorr-
GEAUD, directeur, médecin en chef de l'asile de Rodez est nommé
directeur, médecin en chef de l'asile de Saint-Lizier. M. le
Dr CAMPAN, médecin en chef de l'asile de Cadillac (Gironde), est
nommé directeur, médecin en chef de l'asile de Rodez (Aveyron).
Arrêté du 20 mai 1886. m. le Dr CAMUSET, directeur, médecin
en chef de l'asile de Saint-Alban (Lozère), est nommé médecin en
chef de l'asile de Cadillac (Gironde), et promu à la 3° classe de son
grade (5,000 fr.) -
FAITS DIVERS. 263
Arrêté du 22 mai 1886. M. le DI DUBIEF, conseiller général de
Saône-et-Loire, est nommé directeur de l'asile public d'aliénés de
Saint-Pierre, à Marseille, en remplacement de M. CAnTOOx, décédé,
et placé dans la 2° classe de son grade (6,000 fr.)
Arrêté du 25 mai 1880. M. le Dr TncuET, directeur, médecin
en chef de l'asile des Lesvellec, près Vannes (Morbihan), est promu
à la 1 Il classe de son grade (7,000 fr.) ; pour prendre rang à partir
du 4 Il mai z886.'
Arrêté du 25 mai 1886. Ont été promus à la classe exception-
nelle de leur grade (4,000 fr.), pour prendre rang à partir du
1er février IS81s : MM. les D" SCUlLS, médecin ajoint de l'asile de
Ville-Evrard; IIIAUNlER, médecin adjoint de l'asile d'Aix : GARNIER,
médecin adjoint de l'asile de Bailleul : Dam, médecin ajoint de
l'asile d'armeutière·; Brun, médecin adjoint de l'asile de Bron;
MARTINENQ, médecin ajoint de l'asile de Saint-Yon et FEBVUE, mé-
decin adjoint de l'asile de Mont-de-Vergues.
Arrêté du 1r juiz 4 886. M. le Dr ADAM, médecin ajoint d'Ar-
mentières (Nord), est nommé adjoint de l'asile d'Auxerre (Yonne),
en remplacement de M. Chadzinski.
Arrêté du 22 juin 1886. M. le Dr Georges LEIOmE, interne à
l'asile de Bron, professeur agrépéà la Faculté de Médecine de Lille,
est nommé médecin adjoint al'asile d'Armeutières et placé dans la
2e classe de son grade (2,500 fr.) M. le Dr DUFOUR, médecin en
chef de l'asile de Saint-Robert, vient d'être nommé Vice-Président
de la Société de Médecine et de Pharmacie de l'Isère.
Concours pour LE PRIX Volta. Le ministre de l'Instruction
publique vient de fixer la date du concours du prix Volta Ce prix,
d'une valeur decinquante mille francs, a été institué par décret du
11 juin 1882 en faveur de l'auteur de la découverte qui rendra l'élec-
tricité propre à intervenir avec économie dans l'une des applica-
tions suivantes : comme source de chaleur, de lumière, d'action
chimique, de puissance mécanique, de moyens de transmission
pour les dépêches ou de traitement pour les malades. Le prix
sera décerné en décembre 1887. Le concours demeure ouvert jus-
qu'au 30 juin 4881. Les savants de toutes les nations sont admis
à coucoutir. Une commission, nommée par le ministre de l'Instruc-
tion publique, sera chargée d'examiner la découverte spécifiée
par chacun des concurrents et de reconnaître si elle remplit les
conditions exigées.
. Hospices DE Bicêtre ET la SALPÊTRIÈRE. - Le concours pour la
nomination d'un médecin adjoint des hospices de la Salpêtrière
et de Bicêtre vient de se terminer par la nomination de M. le Der Sé-
glas.
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE
Avis aux auteurs ET aux éditeurs. Tout ouvrage dont il nous sera
VI]VOlé UN seul exemplaire, sera annonce. il sera lait, s'il y a lieu, une
analyse de tout ouvrage dont nous recevrons neux exemplaires.
ALLIOT (E.). La suggestion mentale et l'nctioudes médicaments à dis-
tance. Brochure in-9 de R6 pages. - l'riv : 1 Ir. 50. - Paris, 1886. -
Librairie .l.-I3. Baillière et fils.
BLZZWD 'Th.). 0" some forms of paralysio from pcriphernl neuritio ;
of Gonl ? Alcoholic. Diphleritic and othe/' origin. Volume in-80 cartonné
de 147 pages, avec figures. - London, 1886. J. et A. Churchill.
HG WARD H. Toot.- Thepei-oizeal type of progressive nuzsculnr at>'Oph ?
Brochure in-8° de 43 pages, avec figures. Lonilon, 1886. - H.-K. Lewis.
La Possession de Jeanne Fery, religieuse professe du couvent des
Srrurs noires de la ville de Mons fit584). Un volume in-8a de H2 pages,
papier vélin, prix : 3 fr. Pour nos abonnés, 2 fr. 50 - Papiet- parcheminé,
prix : 4 fr. Pour nos abonnés, prix : : i fr. Papier Japon, prix : si tr.
Pour nos abonnés, prix : 5 fr. Ce volume publié, par la librairie du Pro-
grès Médical est le 4° ouvrage de la Bibliothèque Diabolique (collection
Bourneville). Les ouvrages précédents sont par ordre de publication :
1 Le Sabbat des sorciers; 20 La Possession de Françoise Fontaine;
3° Histoires et disputes des démons et sorciers, par Jean 1'iyerr.
LFc.nAiN (M.). Du délire chez les dégénères. Observations prises à
l'asile--SainLe-Anne (1885-th86), service de M. Magnan. Un volume in-8°
de t)91 pages. Prix : li fr. Pour nos abonnés, 2 fr. 75.
LELOIIt (H.) Leçons sur la srlphilis. Professées à i'liôpital Saint-
Sauveur. Un volume Ill-S' de 213 pages avec li figures. Prix : 5 fr.
Pour nos abonnés, 3 fil. 50.
Traité théorique et pratique de la lèpre. Un \olume in-4^ raisin de
360 piges, avec 48 figures, 7 tableaux dans le texte et 22 planches en
chromolithographie et héliogravure. - Prix : 30 Ir. Pournos abonnés,
22 Ir.
Raison (A.-G ). - Du traitement des phénomènes douloureux de f ata-
xie locomotrice progressive par pulvérisations d'ether et de chlorure de
méthyle. Volumein-8"de 42 pages. Prix : 2 fr. 5li. Pour nos abonnés,
1 fr. 70.
SIIAHKEY (S.-J.). - Spasm in chronic nerve discase; being the Gulsto-
nian lectures. Un volume in-8- cartonné de 99 pages, avec 15 figures. -
London, t8.s6. J. et A. Churchill.
Setrztc. - A contribution to the localizalion of focal lésions ln the poîts
oblongata transition. Brochure in-8" de 14 pages, avec figures Extrait
du louwnal of ne,'vous and mental dtscase. - New-York, 1886. - Put-
nam's sons.
How can we prevent false hydrophobia ? a paper. Brochure in-8°
de 41 pages. New-York, 1886. W. R, lenkins.
Le rédacteur-gérant, BOUItNEVILLE.
IneU1. C6. Il,,aI1l8 ? -1-P - 086.
Vol. XII. Novembre 1886. N" 36,
ARCHIVES DE NEUROLOGIE
CLINIQUE NERVEUSE
QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES;
Par M. A.-J. OSERETZKOWSKY, de Moscou.
Depuis bien longtemps, l'hystérie était considérée
comme une maladie n'appartenant qu'aux femmes. La
confusion qui s'est introduite dans l'idée qu'on se faisait
de cette maladie vient évidemment du nom bien malheu-
reusement choisi IçTEPf4Ç, nom qui lui avait été donné
par suite de la fausse idée que l'hystérie était causée
par des maladies de l'utérus. Cependant, ces derniers
quinze ans, il s'est produit une réaction, et l'hystérie
chez les hommes adultes a été, plus d'une fois, le sujet
de travaux intéressants. Il a été défendu cinq thèses
traitant de ce sujet seul à l'École de médecine de
Paris, dans l'intervalle de 1875 à 1880.
Outre l'intérêt scientifique, la connaissance de l'hys-
térie chez l'homme a une importance pratique pour
les médecins militaires. Grâce aux accès bizarres et au
cours capricieux de la maladie, les cas d'hystérie chez
les soldats peuvent donner lieu, et cela arrive en effet,
aRCHmES, t. xo. 18
266 CLINIQUE NERVEUSE.
à une fausse interprétation de la maladie, au préjudice
du patient, à des malentendus entre les médecins
mêmes, et à de faux reproches du public, qui portent
atteinte à notre autorité en matière médicale. J'ai
appris tout cela par expérience. Je veux apporter
l'histoire de quelques cas d'hystérie observés à l'hô-
pital militaire de Moscou.
*/ Observation I. E..., conseiller titulaire, âgé de quarante-
quatre ans, est entré le 14/26 août 1883. Anamnèse : en 1878,
a eu la fièvre intermittente danubienne pendant neuf mois;
revenu de Bulgarie en Russie, a commencé à souffrir d'accès
de défaillances et de convulsions générales. Du 12/2'k novem-
bre au 22 décembre 1880/3 janvier 1881, à l'hôpital militaire
de Moscou, on a observé des accès de sténocardie et des con-
vulsions. Les médecins de service ont pu noter trois accès de
convulsions du caractère suivant : le malade commence à se
plaindre d'un sentiment d'angoisse et d'une oppression à la poi-
trine ; c'était suivi d'un tremblement de tout le corps et de con-
vulsions cloniques, auxquelles succédaient une tension des
muscles de la poitrine et du dos. Au commencement de l'accès,
le malade ne perdait pas la connaissance. L'accès durait une
demi-heure environ. On a pu constater que l'accès pouvait à
volonté être provoqué par une pression sur la région de l'épi-
gastre. Du 21 novembre/3 décembre au 14/26 décembre 1881, a
été à la clinique de l'hôpital militaire de Pétersbourg. Les accès,
dont nous venons de décrire le caractère, accompagnés, en outre,
du globe hystérique, y avaient été également remarqués. Le
7 décembre, on note : les douleurs des reins sont si fortes que
le malade ne peut marcher. En outre, nous apprenons du pa-
tient qu'en 1881 et en février 1883, il a été atteint de paraly-
sie : paralysie des deux jambes et du bras droit, la première
fois, paralysie des jambes, la seconde. Du 14 août à novembre
1883, E... se retrouve à l'hôpital de Moscou, mais avec de nou-
veaux symptômes. Il est atteint de paraplégie et de rétention
d'urine; les envies d'uriner sont douloureuses; il urine très
peu et avec beaucoup d'efforts. La sensibilité à la douleur des
jambes a presque disparu, et celle du toucher est moins déran-
gée ; l'atrophie musculaire n'existe pas; on constate une ten-
QUELQUES CAS D'IIYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 267
dance à des tiraillements et à des contractures dans les jambes.
En outre, E... souffre de vomissements irrésistibles qui ne dé-
rivent nullement de l'indigestion. L'hyperesthésie de la région
de l'épigastre existe. Tous ces phénomènes ne sont pas cons-
tants : tantôt la miction devient tout à fait facile, tantôt elle
se dérange; il en est de même des vomissements. Je dois dire,
à propos de la paraplégie, que lorsqu'on lui demande de soulever
la jambe, ou de faire mouvoir le pied, il ne répond point ; ce-
pendant, si on le prie de se retourner soit sur un côté, soit sur
l'autre, on voit que les extrémités se-meuvent activement. Je
dois ajouter que le malade, étant encore chez lui, voyant son
enfant tomber du lit, s'est mis sur les pieds, bien que ses jambes
fussent paralysées alors. Le malade a quitté l'hôpital sans que
les symptômes de paraplégie aient subi une modification quel-
conque ; les vomissements avaient seulement cessé et l'urina-
tion était devenue facile.
Résumant toute la série des dérangements nerveux
d'E..., nous devons signaler les caractères suivants :
1° la diversité et l'hétérogénéité des attaques ner-
veuses ; ce sont tantôt des convulsions, tantôt des
symptômes de sténocardie, tantôt des paralysies, des
rétentions d'urine, des vomissements rebelles, etc.;
2° l'inconstance des dérangemeuts nerveux : les jambes
d'E... ont été paralysées deux fois et la paralysie a
disparu sans laisser de traces ; la rétention d'urine
paraît et disparaît sans avoir de cause; il en est de
même des convulsions; 3° certains dérangements por-
taient le caractère de l'hystérie; les convulsions, par
exemple, se manifestaient sans perdre connaissance
et ne pouvaient, par conséquent, être attribuées à l'é-
pilepsie ; le globe hystérique et la facilité d'évoquer,
à volonté, les attaques en pressant sur la région de
l'épigastre (point hystérogène) sont des symptômes
appartenant exclusivement à l'hystérie. De même, il
est impossible d'expliquer autrement que le sujet,
268 CLINIQUE NERVEUSE.
privé de la faculté de remuer les jambes, se lève sous
l'empire de la frayeur. Tout cela et l'impossibilité de
rapporter l'ensemble des dérangements nerveux à un
trouble organique du système nerveux, m'a fait recon-
naître l'hystérie.
Observation Il.- Ch..., un jeune soldat, est entré à l'hô-
pital le 4 avril 1884. Il était complètement sourd et muet. J'ai
appris que la surdi-mutité s'était développée tout d'un coup
sans choc apoplectique. Le malade fit entendre par signes
qu'il avait été frappé de cette maladie sous l'influence de cer-
taines émotions morales. Le sujet parait peu développé, d'une
constitution féminine; les testicules sont très petits; la tête
aussi. Un examen laryngoscopique donne les résultats sui-
vants : la configuration de toutes les parties du larynx est
normale; les cordes vocales restent découvertes, malgré que
le pharynx et le larynx soient violemment irrités par le laryn-
goscope ; en général, on constate une anesthésie des muqueuses
du larynx et du pharynx (Kiriakoff). L'examen laryngosco-
pique est renouvelé le 17 juin par M. le Dr Kiriakoff et M. Za-
borowsky ; le résultat reste le même. L'examen de l'oreille
et de l'oeil donne des résultats négatifs. On n'observe pas
d'autres dérangements nerveux. Plus tard, on remarque une
grande instabilité de l'état moral : tantôt le malade pleure
sans motif, tantôt il rit et saute comme un enfant quand on
satisfait un de ses désirs. Le 5 mai, Ch... commence à se
plaindre de douleurs dans le bras gauche, la sensibilité tactile
et douloureuse est émoussée; ensuite, on remarque un état
paralytique qui ne dure pas. Le 11 mai, tous les troubles du
mouvement et de la sensibilité ont disparu. Après cela, le
malade éprouve des douleurs dans les muscles du cou, d'abord
à gauche, puis à droite, mais ces douleurs sont passagères. Le
18 mai, il a un accès tout particulier; Ch..., souffrant de vio-
lents maux de tête, se débat sur son lit, pleure, va et vient
dans la salle ; tout le corps tressaille; il a des tiraillements
dans les bras, il vomit de la bile; la température monte; tous
ces phénomènes durent presque toute une journée. Le 12 juin,
hémianesthésie complète à droite et hémiopie. Tous ces phé-
nomènes persistent jusqu'au 28 juin, jour de la sortie de l'hô-
pital.
QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 269
Un début rapide, sans choc apoplectique, la diversité et le
peu de stabilité des phénomènes maladifs dans la suite, l'hé-
mianesthésie caractéristique, qui apparaît sans perte du sen-
timent ; enfin l'impossibilité d'attribuer la surdi-mutité à une
lésion organique quelconque, me font reconnaître l'hystérie
de Ch... Ce cas a été montré dans son temps à notre confé-
rence médicale, ainsi qu'à beaucoup de collègues neuro-patho-
logistes.
L'été passé, j'ai appris que Ch..., après avoir obtenu son
congé, a recouvré l'usage de la parole et de l'ouïe, bientôt
après son retour dans ses foyers. De mon point de vue, cela
devait être; ça ne fait que confirmer que la surdi-mutité était
hystérique.
Observation III. R..., soldat de vingt-quatre ans, entre
à l'hôpital le 1°" novembre 1884. J'apprends qu'en octobre de
la même année, la chute d'une pierre lui a contusionné l'orteil
du pied gauche. Après le coup, il n'est resté qu'une légère
écorchure qui a disparu au bout de quelques jours. Mais, en
même temps, il commença à éprouver des douleurs dans la
jambe gauche, à Faîne, dans le dos. Ensuite, en présence d'un
médecin militaire, R... perdit l'usage des jambes et de la
parole. C'est dans cet état qu'on l'amène à l'hôpital. Le ma-
lade est d'une constitution robuste; la nutrition est suffi-
sante ; il a une expression pleurnicheuse; il a totalement perdu
l'usage de la parole; examiné au laryngoscope, la sensibilité
du larynx est normale, les cordes vocales sont bien tendues;
cependant il lui est impossible de prononcer la lettre A. L'en-
trée du pharynx est peu sensible. Le bas du dos est très sen-
sible à la palpation; le passage de la main sur la peau cause
aussi de vives douleurs; il se plaint aussi d'avoir mal lorsqu'on
presse les gros troncs nerveux des jambes. La sensibilité à la
douleur dans les jambes et dans la partie inférieure du tronc
a disparu; il n'éprouve pas de douleurs même lorsqu'on fait
passer un fort courant induit (les bobines étant entièrement
poussées). Dans la partie supérieure du tronc et dans les bras,
la sensibilité est aussi émoussée; il ne retire pas la main même
quand on transperce la peau avec une épingle. Les réflexes
tendineux de la rotule sont extrêmement exagérés. Les jambes
sont à moitié paralysées;- y a contracture des muscles posté-
rieurs de la cuisse, qui fléchissent la jambe, et rigidité des
270 CLINIQUE NERVEUSE.
pieds. Voici le cours de la maladie : le 8 novembre, la douleur
dans le dos disparait; couché, le malade peut facilement lever
les jambes et les tenir en l'air quelque temps. Il ne peut mar-
cher et n'essaie même pas de le faire. Pressé d'obéir, il se lève
cependant sur les jambes, mais elles sont fléchies dans les ge-
noux et à l'articulation coxo-fémorale. Il ne peut les redresser,
dit-il, à cause de douleurs qui se font sentir dans la direction
du bord intérieur des plantes des pieds. Le 10 novembre, R...
commence à marcher auprès de son lit, les jambes toujours
courbées; mais il ne marche que d'après l'ordre pressant. Il se
met sur les jambes d'une manière particulière : il appuie ses
bras sur le bord du lit, et, après quelques instants d'efforts vi-
sibles, il se redresse rapidement et jette le corps en avant de
manière que je craignais toujours de le voir tomber. De même,
R... s'asseyait sur son lit, non par degrés, mais d'un seul coup,
en séparant les'pieds du plancher. Le 17 novembre, il com-
mence à marcher facilement, mais sa démarche est étrange.
Les jambes sont un peu fléchies dans les genoux; le dos est
immobile et un peu renversé en arrière; les bras séparés du
corps; il les balance en marchant. Toutes les singularités de
sa démarche, aux mouvements spontanés, sont causées par
une certaine rigidité des muscles du dos et des jambes. Les
jambes sont encore faibles; après une marche de peu de du-
rée, on les voit trembler. Il serre la main faiblement, malgré
sa musculature développée. Le 19 novembre, il commence à
prononcer, avec des efforts évidents, de certaines voyelles; le
23 novembre, il articule indistinctement quelques mots. Le
27 décembre, il éprouve une vive douleur dans la région de
l'oeil droit, on observe même la ptosis qui dure près d'une
journée. La démarche est toujours la même; la sensibilité des
jambes est rétablie; mais on voit toujours la même faiblesse
et le même tremblement des jambes après la marche. L'anam-
nèse montre que le malade a éprouvé les mêmes affections
nerveuses quatre ans auparavant après une chute d'un arbre.
Le diagnostic ne pouvait hésiter qu'entre l'hystérie et une
maladie de la moelle épinière. Le début subit de la maladie
sans fièvre cependant, l'impossibilité d'expliquer l'existence
simultanée de l'aphonie et de la paraplégie, le manque évident
de volonté pour les mouvements spontanés, l'instabilité des
symptômes maladifs et les renseignements anamnestiques
parlent en faveur de l'hystérie.
QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 271
Observation IV. Le lieutenant B..., âgé de trente-quatre
ans, entré à l'hôpital le 9 janvier 1885, m'est confié pour être
examiné et traité par l'électricité le 15 janvier. Une prédispo-
sition névropathique héréditaire; sa soeur est hystérique. Le
sujet est extrêmement enclin à se croire malade; ayant appris
un jour qu'un de ses amis était mort d'une maladie du coeur,
il ressentit aussitôt des palpitations, des douleurs dans la ré-
gion du coeur et dans le bras gauche. A la fin de juillet 1884,
revenu de l'exercice, il se sentit tout à coup privé de l'usage
de la jambe gauche, ensuite de la droite; la paralysie dura
près de deux mois et disparut sans traces. Le 25 décembre de
la même année, la paralysie recommença aussi inopinément
que la première fois. Etat présent : la jambe gauche est com-
plètement paralysée ; les piqûres d'épingles n'y causent aucune
douleur; les réflexes tendineux du genou sont considérable-
ment exagérés des deux côtés. Couché, il peut relever la jambe
droite, la fléchir et remuer les doigts. Le pied gauche est con-
tracturé en dehors, à l'état d'extension. L'évacuation de l'urine
se fait au moyen d'un cathéter. Il a une prédisposition à la cons-
tipation. Le 15 janvier, lorsque le malade fut apporté pour
que je l'examine, la jambe droite était aussi tout à fait para-
lysée ; les réflexes cutanés sont exagérés; la sensibilité tactile
et douloureuse de la jambe gauche est notablement émoussée,
celle de la droite est normale; dans les jambes, on observe des
tiraillements et une rigidité musculaire considérable; pas
d'amaigrissement musculaire; la contractilité faradique des
muscles et des nerfs est normale; le malade n'éprouve presque
aucune douleur dans l'épine dorsale; pas d'autres troubles ner-
veux. Traitement : galvanisation du dos et faradisation des
jambes. Après quatorze séances, on observa un mieux telle-
ment évident, qu'il étonna les personnes qui supposaient que
B... souffrait d'une lésion organique de la moelle épinière. Le
patient peut alors facilement uriner, remuer les jambes dans
son lit, même se mettre sur les jambes lorsqu'on le soutient
et, en s'appuyant sur la table, quitter sa chaise et se placer
sur son lit; les tiraillements des jambes se sont affaiblis. Le
27 février, il pouvait se tenir debout et, à partir du 18 mars,
marcher avec une canne. La démarche offrait la particularité
suivante : B... avançait les jambes sans faire quitter le plan-
cher, par suite de la contracture des muscles; tantôt ses
pieds se déjetaient convulsivement de côté, tantôt ils s'ac-
272 CLINIQUE NERVEUSE.
crochaient l'un à l'autre. Le 19 mars, notre malade quitta
l'hôpital avec des indices à peine perceptibles de sa paraplégie
passée.
- Cette observation permet de constater l'hystérie :
une prédisposition héréditaire, les particularités du
caractère du patient, enclin à se croire malade, la
paralysie qui avait déjà eu lieu et qui avait bientôt
disparu, les singularités de la dernière paraplégie qui
n'avait pas été suivie d'un amaigrissement des muscles,
malgré que la maladie ait duré trois mois et malgré la
rétention d'urine qui ne pouvait être causée que par
de profondes lésions de la moelle épinière; enfin, l'a-
mélioration rapide de la maladie.
Observation V. G..., soldat de vingt et un ans, entre à
l'hôpital le 27 mai 1884, atteint d'une paralysie des deux
jambes. Des questions préalables expliquèrent qu'il venait de
sortir de l'hôpital, où il était entré à cause d'une paralysie de
la jambe droite. La maladie actuelle s'était déclarée subite-
ment : en revenant d'une revue, il perdit l'usage des jambes
et, cinq jours après son entrée, à l'hôpital, la paralysie s'em-
para aussi du bras droit. L'examen du malade donna les résul-
tats suivants : l'ouïe et la vue sont normales; les pupilles sont
dilatées; les nerfs faciaux ne présentent rien d'anormal; dans
la région des deux nerfs trijumeaux, de l'un et de l'autre côté,
le malade donne de fausses indications sur l'endroit que l'on
touche; la sensibilité dans la région du plexus brachial de
droite a entièrement disparu; du côté gauche elle n'est pas dé-
rangée. Une pression exercée sur le plexus droit et sur ses
nerfs devient douloureuse. La sensibilité dn tronc parait meil-
leure, mais le malade donne tout de même de fausses indica-
tions. La sensibilité des jambes a disparu. La faculté de mou-
voir le bras droit, de le soulever, de le fléchir au coude, ne
sont possibles qu'à un degré très restreint ; le poing est fermé,
la faculté de mouvoir les jambes est presque nulle; les mou-
vements passifs causent des douleurs.
Les réflexes tendineux sont très exagérés ; sur le pied droit
QUELQUES CAS D'HYSTÈRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 273
il existe un clonus dorsalis ; sur le gauche il n'y en a pas. Une
rigidité des muscles de la jambe droite, des tressaillements et
des tiraillements. L'épine dorsale est douloureuse dans la par-
tie supérieure et inférieure du thorax; les mouvements de la
tète et du tronc sont douloureux; la vessie urinaire est relâ-
chée. Du 19 au 20 juillet, on observe une faiblesse du bras
gauche; le sujet sent des fourmillements et des picotements.
Du 2 au 17 juillet, il éprouve des maux à l'épigastre, il a des
vomissements.Le 18 juillet, la sensibilité du bras gauche dispa-
rait aussi, de même que dans larégion des deux nerfs trijumeaux
de l'un et de l'autre côté. Le 21 juillet, le malade est en état
de soulever un peu les jambes dans son lit; la miction devient
plus facile; il y a moins de tiraillements. Le 1 cr août, le patient
est pris d'une attaque de vives douleurs dans le dos et de fortes
convulsions dans les jambes et le bras gauche. Les mêmes
crises se répètent du 2 au 9 août, et puis elles reviennent
presque quotidiennement jusqu'au mois de novembre. Le li te
novembre, on constate des convulsions toniques de tout le
corps, le dos courbé en arrière, les coudes fléchis, les poings
fermés, les jambes en état d'extension, perte de la connaissance.
Les mêmes attaques recommencent le 16, le 18 et le 23 no-
vembre. Un examen plus approfondi, fait le 25 novembre,
donne les résultats suivants : l'ouïe de l'oreille gauche est
affaiblie au point que le malade n'entend le tic-tac d'une montre
que quand on l'applique contre l'oreille ; la vue est normale.
La sensibilité tactile du côté gauche de la face est peu émous-
sée ; mais il ne sent pas de fortes piqûres d'épingle ni de l'un,
ni de l'autre côté; le goût est altéré; le patient ne distingue
plus ni l'acide, ni le salé. Le malade sent si on lui touche le
côté gauche du cou ; les piqûres ne provoquent pas de douleurs;
du côté droit il ne perçoit ni attouchement, ni douleurs. Les
deux bras présentent les mêmes phénomènes; le droit est in-
sensible pour les attouchements et les piqûres; le gauche ne
perçoit que l'attouchement, à l'exception de la main, où de
profondes piqûres produisent seulement des douleurs. La sen-
sation de la température n'existe plus ni dans l'un ni dans
l'autre bras; la sensibilité musculaire persiste dans le côté
droit. Les réflexes tendineux du triceps sont très exagérés. L'exci-
tabilité galvanique et faradique des nerfs et des muscles est con-
servée ; même la faradique parait plus forte. Le bras gauche garde
sa faculté de mouvement; le dynamomètre marque 60; le ma-
274 CLINIQUE NERVEUSE.
lade peut remuer les doigts de la main droite et la ramener au
corps. Une sent ni piqûres ni attouchement sur le côté droit
du tronc ni devant, ni derrière; dans la partie gauche la sensi-
bilité douloureuse a seulement disparu. Les courants les plus
forts ne provoquent pas de douleurs dans la moitié droite de
l'abdomen et du dos. Dansla jambedroiteon remarque l'absence
complète de la sensibilité tactile, douloureuse et musculaire;
la gauche n'a perdu que la sensation de la douleur et de la
température. Les réflexes tendineux des jambes sont fortement
exagérés; on observe un clonus dorsalis au pied droit; le ma-
lade peut fléchir la jambe gauche dans toutes les articulations,
et il est en état de la soulever un peu ; les mouvements de la
droite sont plus restreints; on y aperçoit un tremblement con-
tinuel. La réaction faradique et galvanique des nerfs et- des
muscles est normale. Au mois de décembre, arrive une suite
d'accès qui portent le même caractère, savoir : tremblement
du bras gauche; spasme tonique à la jambe gauche; flexion
du coude gauche ; la tête se rejette en arrière et le tronc se
courbe aussi en arrière, tandis que le malade se retourne
en même temps sur le côté gauche. Au commencement de
l'accès, la respiration s'arrête, la face se congestionne; la
connaissance ne disparaissait que vers la fin de l'accès et reve-
nait dans les intervalles. Les attaques se répétaient toutes les
cinq minutes; dans les intervalles, on observait l'opisthotonus.
Les attaques durèrent jusqu'à la fin de décembre, par séries
entières quotidiennes, dont chacune était composée de plusieurs
accès partiels. Le 14 décembre, par exemple, de sept à neuf
heures du soir, il y eut seize accès; le 16 décembre, de une
heure de l'après-midi à une heure du matin, il y eut quatre sé-
ries, l'une de neuf accès; la deuxième, de six, ainsi que la troisième
et la,quatrième dedeux. Après quelques attaques, on remarquait
une aphonie de peu de durée, etune difficulté àavaler. Pendant
l'accès du 29 décembre, le sujet, immobile jusque-là, sous l'in-
fluence d'une hallucination probablement, se mit tout à coup à
agiter les mains et faillit sauter du lit. Le 28 décembre, les
sensations de la douleur et de la température reparurent
dans la moitié gauche du corps, tandis que la droite recouvra
la sensibilité tactile. Le 2 janvier 1885, le malade essaie de
marcher, et alors apparaît une rigidité des muscles dans l'arti-
culation tibio-tarsienne et dans celle du genou, de manière
que le malade ne marche que sur le bord externe du pied.
QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 275
Au mois de février, il fait librement mouvoir ses jambes dans
son lit, il peut marcher à côté de sa couche, mais les contrac-
tures des jambes, quand il bouge, reparaissent comme aupara-
vant ; il lève le bras droit en haut. A la mi-mars, le patient
commença à marcher avec des béquilles; les contractures per-
sistaient encore. Au mois de mai, il marche avec une canne;
en marchant, il ccurbe le dos en arrière, agite fortement les
bras, glisse les pieds. Il ne peut s'asseoir lentement, il tombe
assis. Le malade a quitté l'hôpital avec une parésie des jambes,
le 8 juin 1885.
Dans ce cas, nous trouvons les accès d'hystéro-
épilepsie nettement accusés et les troubles capricieux
de la sensibilité qui ne peuvent avoir lieu que dans
l'hystérie; nous avons une anesthésie complète du côté
droit et une analgésie gauche. Il était possible de pro-
voquer à volonté les accès de convulsions : il suffisait,
pour cela, de faire passer un courant galvanique assez
fort dans le dos; de même, lorsqu'on fit deux fois des
cautérisations au moyen de l'appareil de Paquelin, on
amena les convulsions toniques, accompagnées d'une
perte de connaissance. Ce cas est évident et je ne
veux pas hésiter plus longtemps à établir le diagnostic
d'hystérie.
OBSERVATroN VL-5..., soldat de vingt-trois ans, entré à l'hô-
pital le 22 février 1885. L'histoire clinique, avec laquelle S...
arrive, note ainsi le commencement de la maladie : Couché la
nuit du 26 au 27 décembre, près d'une fenêtre dont le vasistas
était ouvert, le matin il a senti une faiblesse dans les bras et
dans la jambe gauches, et, le 30 décembre, ces membres
étaient tout à fait paralysés. Le 2 janvier, on a constaté une
faiblesse de la jambe et du bras droits. A son entrée à l'hô-
pital, on observe une hémianesthésie du côté gauche, avec
perte de toute espèce de sensibilité et une hémiopie, ainsi
qu'une impossibilité de mouvoir à volonté la jambe et le bras
gauches. Ce qui fait une différence bien tranchée avec les
276 CLINIQUE NERVEUSE.
hémiplégies ordinaires, c'est que le malade peut tout de même
marcher, malgré la paralysie de la jambe gauche. En marchant
il traîne la jambe malade; la jambe saine est fléchie au genou;
elle ne touche le plancher que de la pointe du pied ; un trem-
blement dans la jambe gauche ; le bras droit levé le plus haut
tremble aussi. La force de la main droite est affaiblie ; le dyna-
momètre ne marque que 30; pas de contractures; les réflexes
tendineux sont exagérés des deux côtés; le nerf facial est con-
servé. Le 4 mars, le malade commence à sentir des douleurs à
la faradisation avec un pinceau, à remuer les doigts de la main
et du pied, et à marcher sans béquilles. Le 10 mars,, la démarche
est plus libre ; le bras paralysé peut être un peu levé à l'épaule
et fléchi au coude. Dès le 14 mars, S... se plaint de maux de
tête, de reins et de l'insomnie. Le 23 mars, il marche facile.
ment; le bras au coude et la main fléchissent, ce n'est qu'à
l'épaule que le bras ne peut se relever. Sa démarche est carac-
téristique ; le dos est immobile; les genoux un peu fléchis; les
muscles des reins sont contracturés. Vers le 13 juin, les troubles
de la sensibilité ont disparu; la difficulté de mouvoir le bras à
l'articulation de l'épaule a duré jusqu'au 9 juillet et disparu
en une seule nuit.
N'avions-nous pas affaire, en ce cas, à une simula-
tion ? Je n'ai pu l'admettre à cause de l'hémiasnesthé-
sie et surtout de l'hémiopie. Ensuite, les réflexes ten-
dineux si exagérés, la démarche caractérisée par
l'immobilité du dos, démarche que nous avons déjà
vue chez d'autres malades, tout cela exclut la simula-
tion. On soupçonna S... d'avoir volontairement pro-
longé l'immobilité du bras droit, mais je ne puis pas
supposer que ce fût vrai. Quand on formula ce soupçon,
S... était encore atteint d'hémiopie, chose qu'on ne
peut simuler. N'avait-on pas affaire à un trouble orga-
nique du cerveau ? Mais je suis obligé d'écarter cette
supposition pour les raisons suivantes : une hémianes-
thésie complète ne pouvait se développer que grâce à
un choc apoplectique, lequel n'a pas eu lieu; le nerf
QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 277
facial est normal, ce qui arrive rarement dans les
cas d'hémiplégie cérébrale suivie d'anesthésie; malgré
une durée de deux mois de la paralysie, la contrac-
ture tardive ne s'est pas développée. Outre cela,
S... avait un affaiblissement du côté droit, mais- peu
accentué.
Observation VII. Soldat D..., de vingt-trois ans, entre
à l'hôpital dans la salle de chirurgie le 12 mai 1885, atteint
d'un phlegmon à l'avant-bras droit. Lorsque le phlegmon fut
guéri, D... commença à se plaindre de douleurs erratiques dans
différentes parties du corps; c'est pourquoi, le 2 septembre, on
l'installa dans la salle des maladies nerveuses. D... raconta
de sa vie passée qu'il s'était marié à dix-neuf ans et que, aus-
sitôt après le mariage, il était devenu démoniaque (kliconeha).
A l'église, lorsqu'on entonnait l'hymne chérubique, il poussait
des cris, tombait en convulsions et perdait connaissance. Cela
ne dura, du reste, que quelques mois, et alors apparurent
d'autres troubles. Le caractère de D..., devint tout autre; il
devint très irritable, se mit à haïr sa femme, la battit constam-
ment, et puis s'adonna à l'alcool, bien que, jusque-là, il n'ait
presque jamais rien bu. C'est vers cette époque aussi qu'il eut
de violentes trépidations des jambes. Tous ces phénomènes
disparurent vers la vingt et unième année, de sorte qu'il put
être enrôlé.
Etat actuel du malade. - D... est de haute taille, solide-
ment bâti; un beau brun ; mais la pâleur de la face , malgré la
vigueur de la constitution, fait supposer une grave lésion de
l'organisme. La vision et l'audition sont normales ; toutes les
espèces de sensibilité le sont aussi; il n'y a que la sensation de
la température qui est un peu troublée; dans l'avant-bras il ne
distingue pas une différence de 5°; pas de paralysies et de con-
tracture musculaire; mais les réflexes tendineux sont exagérés.
Le malade lui-même se plaint de douleurs sourdes dans tout
le corps : « J'ai tout le corps brisé », ce sont ses propres
paroles. Tous les organes intérieurs sont sains; pas d'autre
déviation que des envies fréquentes d'uriner. Il urine jusqu'à
4.000 centimètres cubes, bien qu'il s'abstienne de boire; la
pesanteur spécifique de l'urine est de 1.014; on n'y trouve ni
278 CLINIQUE NERVEUSE.
albumine, ni sucre. La polyurie dure jusqu'au 4 octobre. De
cette manière, les premiers temps on pouvait supposer que D...
était atteint d'un diabète insipide. Le 12 septembre, les jambes
de D... commencèrent à trembler; le tremblement n'avait
lieu que quand il marchait et, si fort, que le malade sautait à
chaque pas. Un examen plus minutieux fit voir une rigidité des
muscles de la cuisse et de la jambe, même lorsque D... était
couché; la sensibilité de la peau était normale comme aupara-
vant ; le champ de la vision (l'examen est fait sans périmètre)
était borné; la sensibilité des couleurs et la vision n'étaient
nullement troublées; la polyopie monoculaire, indiquée par
M. Parinaud, était nettement prononcée; en fermant un oeil,
de l'autre le malade voyait chaque objet répélé plusieurs fois;
l'anesthésie du larynx permettait d'introduire le doigt jusqu'à
l'épiglotte. Dans le cours ultérieur de la maladie, il eut plu-
sieurs accès de violents tremblements des jambes ; étendu sur
le dos, il jetait les jambes de différents côtés, frappait des pieds
le plancher avec force, ou les heurtait l'un contre l'autre; il
pâlissait et perdait à moitié connaissance. Les attaques avaient
une durée de deux minutes, en laissant une lassitude générale.
Il faut encore ajouter qu'il arrivait des jours où la polyurie
disparaissait subitement, les tremblements aussi; le malade
pouvait un peu marcher facilement, mais après il revenait au
même état. Moralement, il paraissait abattu, parfois la tristesse
s'emparait de lui ; il demandait à quitter l'hôpital ; la salle où
il se trouvait et tout ce qui l'entourait lui semblait dégoûtant;
il était prêt à passer des journées entières dans les lieux d'ai-
sance. Au mois de décembre dernier, le malade quitta l'hôpital.
L'anesthésie du pharynx a disparu ; la polyurie et les tremble-
ments n'existaient plus ; il marchait facilement et il n'est resté
qu'une rigidité des muscles à peine visible pendant la marche.
Considérant les faits de l'anamnèse, l'anesthésie
caractéristique du pharynx, la polyopie monoculaire,
l'instabilité de la polyurie, les particularités du carac-
tère du malade, j'ai dû reconnaître un cas d'hys-
térie.
jf Observation VIII.- 11..., soldat, est entré à l'hôpital le 2 août
1885. Il souffrait de douleurs sourdes dans les jambes. Un
QUELQUES cas d'hystérie dans LES troupes RUSSES. z79
examen constate une enflure peu considérable de l'articulation
du genou et de la tibio-tarsieulle. Deuxjours après son entrée il
se déclara une douleur à la deuxième phalange métacarpienne
droite, et neuf jours après, des élancements, plus forts à la
pression, dans le côté droit, sans aucune lésion ,dans les pou-
mons ni dans la plèvre. Dans le cours de la maladie ces dou-
leurs se renouvelèrent plusieurs fois, mais celles des jambes
l'impatientèrent excessivement. L'enflure des articulations et
les maux ne cédèrent ni à l'emploi du salicylate de soude à
l'intérieur, ni aux injections sous-cutanées de morphine, ni
aux compresses d'une dissolution de l'acide carbonique de
4.° ni aux bains chauds , ni aux onguents narcotiques,
etc. En général, les phénomènes douloureux ressemblaient
peu à ceux du rhumatisme que je supposai d'abord. Il me
fallut faire un examen détaillé du système nerveux. Cet examen
eut lieu le 7 novembre 1885, lorsque le patient revint dans
ma salle, et donna les résulats suivants : la sensibilité tactile
des deux jambes est bien affaiblie, celle de douleur a complète-
ment disparu ; en même temps, la répartition de l'anesthésie
est originale; les pieds sont sensibles à l'attouchement ainsi
qu'à la douleur; la sensibilité du côté droit du tronc, du bras
droit et du côté droit de la face est normale; mais, dans les
mêmes parties gauches l'attouchement d'une épingle est res-
senti beaucoup plus faiblement, comme s'il se faisait à travers
la chemise, comme le dit le malade lui-même, quoiqu'il puisse
distinguer la pointe d'une épingle de sa tête, mais il ne res-
sent pas de mal à la piqûre; la vision de l'oeil gauche est plus
faible que celle du droit; le champ de la vision est rétréci con-
centriquement (l'examen a eu lieu sans périmètre); la sensa-
tion des couleurs n'est pas troublée ; l'ouïe et le goût du côté
gauche sont aussi émoussés. Ainsi je trouve que le malade a
un trouble de sensibilité connu sous la forme de parahémianes-
thésie. D'ailleurs l'anesthésie de la muqueuse du pharynx est
constatée. Les réflexes tendineux du genou et du tendon
d'Achille sont très exagérés. On remarque une contracture
dans les deux genoux de manière que les jambes font un angle
aigu avec les cuisses. L'articulation tibio-tarsienne et celle du
genou ne présentent pas de modifications bien tranchées. La
flexion active du genou n'est possible qu'à un degré très
minime; les mouvements de l'articulation coxo-fémorale sont
un peu plus faciles; l'extension des jambes n'est que passive
280 CLINIQUE NERVEUSE.
jusqu'à un certain degré, et amène alors une forte trépidation
des jambes, accompagnée de douleurs. Les muscles des
jambes sont flasques, mais la réaction aux deux espèces de
courants ne fait voir aucun trouble dans l'excitabilité des
muscles et des troncs nerveux, bien que le malade, près de
quatre mois depuis le jour de son entrée à l'hôpital, soit alité.
De temps en temps, des douleurs passagères se manifestent
dans le dos, de même que dans les genoux et une douleur
sourde continuelle dans les jambes. L'anamnèse nous rapporte
que le sujet était resté trois mois alité à la maison avec la même
contracture des jambes et que les douleurs sourdes avaient été
les mêmes qu'à présent, La mère du patient avait souffert de
tiraillements convulsifs des jambes, de sorte qu'elle ne pouvait
tenir son enfant sur les genoux pour ne pas le faire sauter
en l'air par un de ces mouvements convulsifs, chose qui était
déjà arrivée une fois. Le frère aîné du malade était aussi sujet
aux mêmes contractures.
Prescription : solutio arsenicalis Fowleri, galvanisation du
dos et faradisation des jambes ; mouvements passifs des jambes.
Sous l'influence de ce traitement, au bout de dix-neuf jours, les
contractures diminuèrent d'abord dans le genou droit; à la fin
d'un mois, il marchait avec des béquilles. Assis, il balance
facilement les jambes sans qu'on puisse y remarquer de tremble-
ments ; mais lors qu'il marche, les muscles deviennent rigides,
re qui fait que le malade ne marche que sur la pointe du pied
en les faisant glisser sans les soulever et sans fléchir les
genoux; il s'y ajoute une trépidation des jambes. Les troubles
de la sensibilité sont restés les mêmes. L'amendement lent de
la démarche va jusqu'à présent (30 janvier/ 11 février 1886).
L'apparition subite des contractures-, le trouble
étrange de la sensibilité qui ne correspond à aucune
lésion organique du système nerveux ni central, ni
periphérique, les données, de l'anamnèse m'ont fait
diagnostiquer l'hystérie. Une amélioration rapide de
la maladie, due en partie à un traitement psychique,
a précisé mon opinion.
Observation IX. - 0..., ,jeune soldat, entre à l'hôpital le
28 décembre / 9 janvier 1885. L'examen du malade fait voir
quelques cas D'HYSTÉRIE dans LES TROUPES RUSSES. 281
que l'intelligence est intacte, mais qu'il ne peut répondre aux
questions. Lorsqu'on lui demanda par écrit : « Où as-tu mal ? » il
écrivit : «Je me porte bien, mais je ne puis parler. - Pourquoi
ne peux-tupas parler ? J'ai été au lazaret, j'ai eu un accès et
le médecin m'a effrayé. » Il n'existe pas d'autres troubles ni de la
sensibilité ni delà motilité. Le - janvier il commença à parler
d'une manière normale. De nouveau il répéta qu'il avait eu un
accès, après lequel il était resté muet; il ne pouvait parler
parce qu'il avait des spasmes dans la gorge. L'examen du
système nerveux, qu'on répéta, donna les résultats suivants :
la vision de l'oeil gauche est de -îü-; celle du droit est très faible ;
les sensations du goût sont troublées : il dit que la quinine est
acide; les réflexes de la muqueuse du pharynx sont tout à fait
abolis. La sensibilité cutanée tactile et douloureuse .est très
peu émoussée; le tact est conservé. Les réflexes de la rotule ne
présentent rien d'anormal. La motilité est aussi normale. Le
malade se plaint de douleurs sourdes dans les jambes.
Les antécédents montrent que, dix-huit mois auparavant,
étant encore chez lui, le malade avait été muet huit jours en-
tiers ; la mutité s'était alors développée aussi après une attaque
de convulsions. L'automne précédent, il avait eu aussi de ces
accès, mais non suivis de mutisme. On ne put constater ni
hérédité ni d'autre cause évidente de la maladie.
Dans ce cas, on ne pouvait supposer que l'hystérie ou la
simulation. Mais celle-ci ne peut être admise à cause de quel-
ques phénomènes qu'il est difficile de simuler; l'anesthésie
pharyngée, par exemple, et puis le malade ne voulait pas rester
à l'hôpital et demandait toujours à en sortir.
Observation X. F..., jeune soldat entré à l'hôpital le
20 décembre/1er janvier 1885, L'aide chirugien qui l'avait
amené dit qu'à peine était-il venu au régiment qu'il a eu un
accès convulsif. Arrivé à l'hôpital sans connaissance, dans la
salle de réception, il était pris de plusieurs attaques d'hystéro-
épilepsie, à ce que suppose le médecin de service. Le
21 décembre, je trouve notre malade dans l'état suivant : la
perte de connaissance ; les pupilles dilatées; lorsqu'on essaye
de soulever les paupières, le globe oculaire roule en bas. Un
tremblement des jambes; les muscles des membres inférieurs
sont relâchés ; les réflexes de la plante du pied n'existent que
sur le droit; le pouls, 5. Pendant l'examen, il est arrivé un
. AI(CIIIVES, t. Xll. 1. 19
282 --) CLINIQUE NERVEUSE.
trouble convulsif suivant : le malade, avec une force et une
rapidité extraordinaires, se retourne dans son lit, le dos en l'air,
prend la position à la vache et, jetant le tronc d'arrière en
avant, donne des coups de tête contre le chevet. La force
des mouvements est si violente que quatre serviteurs ont de
la peine à le contenir. L'attaque de convulsions dura une
couple de minutes, après quoi la jambe gauche, le bras du
même côté restèrent contracturés à toutes les articulations et la
moindre tentative de redresser un des membres provoquait une
nouvelle attaque. Dans l'espace d'une demi-heure, il y eut trois
accès; tout ce temps, le malade reste sans connaissance. Vers
le soir, il revient à lui; pendant plusieurs heures, il ne peut
parler et fait comprendre par signes qu'il a des- spasmes au
larynx et à la poitrine. Le 22 décembre, un nouvel examen du
système nerveux fait constater : la vision des deux yeux est
de 20/40; la sensation des couleurs n'est pas troublée; le
champ visuel est presque normal ; le goût aussi ; la
sensibilité cutanée est intacte; les réflexes tendineux ne sont
pas exagérés. On ne remarque de troubles de sensibilité que
sur la conjonctive des paupières et dans le pharynx ; un attou-
chement de la conjonctive avec le doigt ou une épingle ne
donne pas de réflexe; l'introduction du doigt dans l'arrière-
bouche et l'irritation de sa muqueuse restent également sans
réflexe. En outre, on constate une diplopie monoculaire.
Interrogé, le malade répond qu'auparavant il n'a jamais eu
d'attaques; que, de toute sa famille, il n'a qu'une soeur de
neuf ans sujette à ces convulsions. 11 n'a jamais fait aucun
excès de boisson et n'a jamais souffert de syphilis.
Le 22 décembre, à huit heures du soir, l'accès du matin se
répète. L'attaque est précédée d'un violent mal de tête, de
tremblements des jambes et d'un spasme douloureux du pha-
rynx. Dans la nuit du 27, le malade a des trépidations des
jambes et des hallucinations. Le 30 décembre, il se sent tout
à fait bien portant. A l'examen, on ne retrouve même plus
les légers troubles de la sensibilité, observés le 22 décembre.
Il n'a rien de particulier jusqu'au 8/20 janvier. Ce jour-là, à
six heures du soir, nouvelle attaque de convulsions. Le lende-
main matin, je lui trouve une anesthésie cutanée de tout le
corps. Les sensations tactiles et douloureuses sont abolies;
il est possible de transpercer un pli de la peau ; le malade ne
peut plus se représenter la position de ses membres au point
QUELQUES CAS D'HYS1`ERIE DANS LES TROUPES RUSSES. 283
que, les yeux fermés, il ne trouve plus son nez, ni son autre
bras, etc. 11 en est de même pour les membres inférieurs.
Néanmoins, il marche facilement , sans aucun symptôme
d'ataxie, aussi bien les yeux ouverts que fermés. Le champ p
visuel est beaucoup rétréci; le goût est aboli. Il existe une
anesthésie des muqueuses de l'oeil, du nez, de la bouche et du
pharynx. On constate la macropie : un objet mince, un crayon,
par exemple, éloigné à 8 ou 1 centimètres d'un oeil, l'autre étant
fermé, lui parait de la grosseur du pouce. Le 10 janvier, la
sensibilité cutanée, et celle des muqueuses s'est de nouveau
rétablie. Le 16 janvier nouvelle anesthésie du pharynx et de la
conjonctive; le soir de ce même jour, il lui survient une attaque.
Le lendemain, 17 janvier, anesthésie complète cutanée et
anesthésie des muqueuses sur tout le corps, avec un trouble
de la sensation musculaire, de même que le 9 janvier. Le
18 janvier, il ne reste plus qu'une insensibilité des muqueuses
de l'oeil et du pharynx, qui disparait le lendemain. Le 23, à six
heures du soir, encore uue attaque. De nouveau, après anes-
thésie sur tout le corps, qui dure jusqu'à présent(1/13 février).
Le 25 janvier pour la première fois, je trouve l'achromatopsie.
Le malade, de chaqueoeil à part, appelle bleu le rouge et jaune
le vert; rétrécissement du champ visuel; macropie comme le
9 janvier. L'achromatopsie ne s'observe que quand il regarde
d'un oeil ; des deux yeux ouverts ensemble il distingue parfai-
tement les couleurs.
Je crois que je n'ai pas besoin de prouver le dia-
gnostic de l'hystérie dans ce cas.
Observation XI. - F..., jeune soldat. Le 8/20 janvier 1886,
à trois heures de relevée, on amène F... en proie à une attaque
de convulsions, qui durèrent tout le reste du jour et toute la
nuit. Le lendemain, à l'heure de la visite du matin, le malade
présentait le tableau suivant : sans connaissance, les yeux
fermés; les pupilles dilatées; de temps en temps, apparaît un
spasme des muscles de l'oeil, ce qui fait que les globes
oculaires prennent des positions particulières; il a de la peine
à avaler de l'eau; il crache quand on tente de lui donner à
boire. Des convulsions continuelles présentent un tel carac-
tère : des tiraillements des muscles de la ceinture scapulaire
classique, régulièrement rhythmiques, dégénèrent subitement
284 CLINIQUE nerveuse.
en opisthotonus ou plcurosthotonus, de môme qu'en convul-
sions des jambes qui se fléchissent à toutes les articulations.
Pendant les accès de convulsions toniques, il pousse des sons
inarticulés; il éprouve des hallucinations. Une hyperesthésie
cutanée de tout le corps; les convulsions durent jusqu'à une
heure de l'après-midi, mais la connaissance ne revient que vers
les huit heures du matin du 10 janvier. Les attaques se répètent
quotidiennement; parfois, à deux reprises par jour. Ces phéno-
mènes persistent jusqu'au 2 février. Le 12 janvier, il devient
sourd des deux oreilles : le 14, il entend de l'oreille gauche
ce qu'on dit en forçant la voix; la surdité de l'oreille droite
reste jusqu'au 20 janvier, le jour où le malade recouvre l'ouïe.
Le 15 et le 16, il se trouve en état de stupeur, il est couché, les
yeux fixés sur un point; ne demande rien, ne se plaint pas.
Lorsque je tire ma montre pour compter le pouls, le malade
dirige ses regards dessus et ne la quitte plus des yeux, il se
retourne même dans son lit, se soulève, lorsque je la fais sortir
exprès de son champ visuel. Le 17 janvier, pour la première
fois, j'ai réussi à le faire marcher un peu; mais les jambes
tremblent; les muscles des membres inférieurs sont à l'état
de rigidité, les genoux fléchis; il glisse les pieds; les pas sont
menus, le dos redressé. Ce môme jours, on constate un affai-
blissement de la sensibilité cutanée de tout le corps, bien qu'un
examen détaillé du système nerveux soit bien difficile. Le 18, les
accès changent de caractère : l'attaque commence maintenant
par un tiraillement des muscles de l'abdomen, une respira-
tion accélérée. Ensuite, le malade étend subitement les bras et
les jambes, courbe le dos en arrière en arc de cercle, se frappe
du bassin contre le lit deux ou trois fois, et puis, pendant près
de quatre minutes, garde la position suivante : les jambes sont
à l'état d'extension, les bras aussi, éloignés du corps; les
poings sont fermés; le dos est recourbé en arrière, de sorte que
le malade ne touche le lit que par les reins; la tète est telle-
ment rejetée en arrière qu'il touche le cou de l'occiput; le som-
met de la tête s'appuie au coussin, le cou et le menton ne
forment qu'une ligne; la face est bleue; on voit la pulsation
des veines; la respiration est à peine sensible et se fait parle
nez à cause de la contraction des mâchoires. Les accès se
suivent, séparés par un relâchement des muscles momentané.
Le 24 janvier, on examine en détail le système nerveux. Le
champ visuel est rétréci concentriquement ; trouble dans
QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 285
la sensation des couleurs; l'oeil droit voit en vert des fils
rouges, bleus et noirs, l'oeil gauche les voit jaunes. Les deux
yeux ouverts distinguent bien les couleurs. Macropie, comme
chez le sujet n° 10. Abolition du goût; les muqueuses
des yeux, du nez, de la bouche et du pharynx sont anes-
thésiées. La sensibilité cutanée de toute espèce n'existe plus;
les sensations musculaires sont en désordre, comme dans le
cas précédent : il ne trouve pas son nez. Les réflexes tendi-
neux du genou et du tendon d'Achille sont exagérés. Pas de
paralysie. La démarche est restée comme au 17 janvier, mais
il peut marcher plus longtemps. L'activité psychique est
normale. L'état décrit est le même que jusqu'au 2 février,
excepté une seule amélioration, qu'il marche tout àfaitfacile-
ment les yeux ouverts et fermés. Il peut même courir.
Je ne m'étendrai pas sur le diagnostic : il est évi-
dent. ·
Faisons maintenant un résumé des symptômes de
l'hystérie chez les hommes, nous voyons qu'elle était
indiquée par :
1. La surdi-mutité (2° cas), qui a apparu subitement
et disparu avec la même rapidité sans qu'on pût obser-
ver aucune lésion de l'oreille;
2. Le mutisme (cas 3' et 9'). Le mutisme du 2° cas
était causé par la paralysie des cordes vocales; celui
du 3" paraissait être dû à un défaut d'énergie pour
articuler les sons, ou bien, peut-être, au trouble de
l'accord d'activité des cordes, causé par un spasme,
comme nous avons pu souvent l'observer sur les extré-
mités, mais il n'y avait pas de paralysie des cordes
vocales. Le troisième malade n'a pas été examiné au
laryngoscope ;
3. La surdité chez un malade (cas 11°) est passa-
gère, d'abord complète pour les deux oreilles, ensuite
pour la droite seule;
286 CLINIQUE NERVEUSE.
4. Des troubles de la vision sous forme de rétré-
cissement concentrique du champ visuel ou d'hé-
miopie accompagnée d'hémianesthésie (cas 1°, 6e, 7°,
8°; 1 Oe, 1 le); dans le 7° cas, nous avons eu une polyo-
pie monoculaire, et, dans les cas 10° et 11°, une macro-
pie. Ces deux derniers troubles ont été indiqués par
M. le professeur Charcot, l'année passée, dans une de
ses leçons sur l'hystérie des hommes. Je n'ai pu ob-
server la dyschromatopsie que dans les cas 10° et 11°.
5. L'anesthésie des muqueuses. Celle du pharynx
mérite une attention particulière parce qu'elle paraît
constante (7 cas sur 11); on ne l'a pas observé chez
les quatre'autres parce qu'ils n'étaient pas examinés.
Dans certains cas (7, 9 et 10), l'anesthésie du pharynx
présentait le seul trouble de la sensibilité; dans le
10e, cas cette anesthésie et celle de la conjonctive
étaient les avant-coureurs de l'accès.
6. Le trouble de la sensibilité cutanée sous la forme
d'une anesthésie de tout le corps, suivie de l'abolition
de toute espèce de sensibilité cutanée et musculaire,
de l'anesthésie des'muqueuses et de l'affaiblissement
de l'ouïe et de la vision (cas 10 et 11); l'hémiasnes-
thésie a été observée sur trois malades (cas 2, 6 et 8);
un trouble tout particulier de la sensibilité a été cons-
taté sur un malade (n° 5) : c'est l'abolition de la dou-
leur et de la température sur la moitié gauche du corps
et l'anesthésie complète sur la droite, comme les cas
d'hémianesthésie ordinaire. Les malades 1 cl, 3" et 4°
présentaient des cas d'analgésie, accompagnée de
troubles de motilité sous forme de paraplégie. L'hy-
peresthésie se rencontre bien plus rarement; le malade
11e présentait un cas d'hyperesthésie de tout le corps
QUELQUES CAS D'AYSTBRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 287
que remplaça, plus tard, une anesthésie complète;
les cas 3, 5 et 6 offraient une hyperesthésie des ver-
tèbres lombaires, si bien qu'au moindre attouchement,
le sujet se rejetait en arrière. Mais, en revanche, les
paresthésies sous la forme de refroidissement ou
engourdissement des extrémités, de douleurs sourdes
dans différentes parties du corps, de maux de tête
étaient constants.
7. Des troubles de la motilité sous la forme d'hémi-
plégie (cas 6); le 5e malade avait une paralysie des
membres inférieurs et du bras droit; cinq malades
étaient atteints de paraplégie (cas 1, 3, 4, 8 et 11).
Dans ces derniers cas, la paralysie était accompagnée
de phénomènes spasmodiques qui se faisaient surtout
voir à toute tentative de mouvement : les pieds glissent,
ne se soulèvent pas du plancher, se rejettent de côté,
les genoux sont fléchis, ou bien, au contraire, les
jambes sont raides, les muscles sont à l'état de tension.
Cela fait que la démarche des malades est très caracté-
ristique : en marchant, le tronc déjeté en arrière devient
raide, ils traînent les pieds sur le sol et balancent les
bras en les écartant du torse.
8. Les convulsions sous la forme de tiraillements
de différents membres, de tressaillements de tout le
corps, de tremblements pendant les mouvements volon-
taires et de véritables accès hystéro-épileptiques (cas
1, 5, 10, 11). Ordinairement, quelques heures avant
l'accès, le malade devient abattu, les yeux ternes; on
constate des anesthésies prodromiques soit de tout le
corps, soit bornées à quelques régions des muqueuses
(du pharynx, de la conjonctive); 15, 20 minutes avant
l'accès, le malade se couche, tombe en état de stupeur,
288 CLINIQUE NERVEUSE.
les yeux ouverts, fixés sur un point, et ne répond pas
si on l'appelle. En même temps, commencent des tirail-
lements de différentes parties du corps, puis arrive le
moment de la contraction tonique des muscles de tout
le corps qu'interrompent des mouvements extrême-
ment violents, sous la forme d'opisthotonus ou de
pleurosthotonus, ou bien le sujet frappe le lit de la
tête à plusieurs reprises, etc. En un mot, cette période
est caractérisée par des mouvements violents et exces-
sivement désordonnés. Cela dure de 3 à 5 minutes;
puis arrive un relâchement des muscles momentané;
le malade n'est pas encore revenu à lui que survient une
nouvelle attaque de grands mouvements, tout à fait
semblable à.la précédente. L'accès dure de 1 heure à
3 heures. Voilà un aperçu général des accès que j'ai
observés :
Le caractère de la période des grands mou-
vements n'est pas le même pour tous les malades et
se change parfois chez le même patient.
Vers la fin du trouble, on voit le sujet en proie à des
hallucinations il prononce des paroles incohérentes, pa-
raît saisir quelque chose avec les mains, ou bien il les
porte à la gorge, à la région du coeur, etc. Après l'accès,
les malades reviennent à eux, reprennent leurs occupa-
tions habituelles, contraste frappant avec les attaques
d'épilepsie, après lesquelles ils tombent dans un pro-
fond sommeil, ou se plaignent de violents maux de
tête, etc.
9. Deux malades (1, 4) souffraient d'une rétention
spasmodique qui a exigé l'emploi prolongé d'un ca-
théter. Le premier malade était sujet, en outre,
aux vomissements et aux accès d'angine de poitrine.
QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 289
10. Le malade n° 8 présentait des phénomènes d'ar-
thralgie, de violentes douleurs dans les articulations
du genou, qui ne voulaient céder ni à l'emploi du sali-
cylate de soude, ni à celui des narcotiques; une pression
superficielle des articulations causait des douleurs; la
peau est oedémateuse, mais elle n'est pas rouge; au-
cune indication d'amas liquide dans les articulations.
11. Dans les 5° et 8° cas, on pouvait observer une
élévation de la température sans qu'il y ait eu d'inflam-
mation locale. Quant à la température après les accès,
une seule fois (cas 5) elle monta à 39° '; dans tous les
autres cas, elle resta normale, ou 37°,6 - 37°,7.
Ainsi, les phénomènes cliniques de l'hystérie des
hommes ne sont pas moins variés que ceux de l'hystérie
des femmes. L'hérédité et la prédisposition semblent
jouer le principal rôle dans l'étiologie de l'hystérie.
Ainsi, dans les cas 1,3,4, 7, 8, 9, nous avons eu affaire à
des récidives de troubles hystériques qui avaient eu lieu
auparavant; les cas 3, 8 et 10 nous montrent une pré-
disposition de famille à l'hystérie. Parmi les causes
accidentelles dans le 3e cas, il a existé un léger trau-
matisme ; dans le 1° cas, une violente émotion morale,
peut-être, tient aussi à un traumatisme. Dans les autres
cas, on n'a pu trouver un motif évident ou accidentel.
Il est important de noter que, sur neuf soldats atteints
d'hystérie, il y en avait cinq qui venaient d'être enrô-
lés. Il est fort possible que le brusque passage de la
vie de famille à celle de soldat influence sur l'origine
de l'hystérie. Parmi les hystériques, il y avait des gens
d'une forte constitution, gras et musculeux, de ma-
1 C'est là une température tout à l'ait anormale (B).
290 0 CLINIQUE NERVEUSE.
nière que la constitution physique n'a pas d'importance
pour l'étiologie de la maladie.
Par rapport au diagnostic, on peut diviser tous les
cas ci-dessus en deux groupes : le premier renfermera
les accès accompagnés de convulsions hystéro-épilep-
tiques, où le diagnostic est extrêmement facile même
pour ceux qui ne sont pas spécialistes. Dans le second
groupe, il faut ranger les malades ayant des paraplé-
gies et des hémiplégies hystériques. C'est surtout les
paraplégies hystériques qu'on risque facilement de con-
fondre avec des lésions organiques de la moelle épi-
nière, lorsque la paralysie des membres inférieurs est
compliquée d'une rétention d'urine, de constipation
et de douleurs dans le dos. Ce qui caractérise ici l'hys-
térie, c'est la combinaison des paralysies de nature
cérébro-spinale à des affections de nature cérébrale,
la combinaison d'une paraplégie avec une hémianes-
thésie, d'une paralysie des cordes vocales, de la sur-
dité, la combinaison d'une hémiplégie avec une para-
piégé (cas 6). Ce qui contribue considérablement à
porter un diagnostic certain, ce sont les troubles par-
tiels de la sensibilité, troubles parfois très capricieux,
par exemple l'abolition des sensations de là douleur
et de la température; tandis que le sentiment de l'at-
touchement persiste (cas 5), l'abolition de la sensibilité
douloureuse seule; les anesthésies des muqueuses (du
pharynx) et les troubles bizarres de la vision (la ma-
cropie, la diplopie unioculaire, l'achromatopsie). Enfin
les paralysies elles-mêmes offrent des particularités frap-
pantes. Voici un exemple (cas 6) : le maladeestatteint
d'une hémiplégie complète, lorsqu'il est couché; il peut
cependant marcher en s'aidant un peu d'une béquille;
QUELQUES CAS D'HYSTÉRIE DANS LES TROUPES RUSSES. 291
quand il marche, on voit que l'autre jambe est aussi
contracturée à l'articulation tibio-tarsienne et à celle
du genou. Dans la suite, le diagnostic est confirmé
par la prompte disparition de toutes les affections de
la maladie. Pour exclure la simulation, on trouve tou-
jours assez de données, lorsqu'on examine attentive-
ment le malade.
Ajoutons quelques mots sur la thérapie. Le traite-
ment des accès d'hystéro-épilepsie a toujours été sans
résultat : ni l'eau, ni l'électricité, ni les narcotiques à
grandes doses n'ont influencé ni la fréquence, ni l'in-
tensité des attaques. Le traitement des paralysies a
eu plus de succès. L'exercice a été le plus efficace.
Dans le cas d'aphonie (cas 3), je demandais au ma-
lade à prononcer d'abord des voyelles séparées, en-
suite des syllabes, et j'obtenais des résultats satisfai-
sants ; dans tous les cas de paraplégie, j'excitais les
malades à faire des mouvements actifs et passifs avec
les membres paralysés, je les faisais promener en les
soutenant sous les bras, je les forçais de recourir aux
béquilles le plus tôt possible, etc. Je crois ce traitement
des plus efficaces, et, pour le prouver, je puis citer le fait
suivant que j'ai observé : dans les cas où le diagnotic
était retardé pour une cause ou une autre et où on
employait les remèdes ordinaires contre les paralysies,
ces dernières restaient au statu quo; mais, aussitôt que
le diagnostic était établi, et que j'avais recours aux
exercices, un mieux se faisait voir tout de suite. La
rigidité des muscles dans les mouvements volontaires
appartient aux symptômes les plus opiniâtres qui
cèdent fort difficilement.
Je dois ajouter, pour conclure, que les maladies
292 CLINIQUE NERVEUSE.
hystériques dans les troupes ne sont pas rares. Outre
les cas que j'ai cités, je pourrais rapporter encore
toute une série de cas où les malades étaient amenés à
l'hôpital comme épileptiques, où le caractère des accès
et les troubles de la sensibilité étaient typiques pour
l'hystérie. Je veux traiter ces cas dans un article pro-
chain, où je me propose de considérer les troubles de
la sensibilité dans l'épilepsie.
DE L'IDIOTIE COMPLIQUÉE DE CACHEXIE PACHYDERMIQUE
(idiotie CItÉTIN01DE (suite)1;
Par BOURNEVILLE et P. BRICON.
I. IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE (suite).
L'observation suivante a déjà été publiée par l'un
de nous, dans le n° 36 du Progrès médical de 1880;
elle a été ensuite reproduite dans la thèse de M. Ridel
Saillard 2, communiquée à la Société de biologie (1882)g;
enfin le malade qui en fait l'objet a été montré à leurs
cours par M. Charcot et par M. Magnan.
Observation VI. Idiotie et crétinisme. Arrêt de développe-
ment. Etat oedém,¡teux et rénilent de la peau (cachexie pczchl, -
dermique) avec tumeurs myxoedémalezcses disséminées. Exercices.
Amélioration. Erysipèles. Refroidissement. Tym-
panite. Atonie. - Mort.
Autopsie : OEdème pulmonaire. Hydrothorax et hydro-
péricarde. - Dilatation considérable du eoecum,. absence du
1 Voir le t. XII, p. 137. Cette étude sur l'idiotie crétinoïde est un
extrait revu et complété du mémoire présenté par l'un de nous en dé-
cembre 1885 à la Société médico-psychologique pour le prix Belhomme
relatif à l'idiotie et de préférence aux USIOns des centres nerveux dans
.'idiotie.
2 Voir aussi le Compte rendu de Bicêtre pour 1880.
3 Communication faite avec M. Gilles de la Tourette.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE · ? 93 3
corps thyroïde; dédoublement du cap de la troisième circonvolu-
tion frontale gauche; irrégularités et anomalies des circonvolu-
tions et des scissures ; petite tumeur siégeant sur un pli passage
allant delà deuxième à la troisième circonvolution frontale gauche.
Thén... (Eugène), né le 20 août 1861, placé à plusieurs
reprises par sa mère à l'infirmerie des idiots de Bicêtre, est entré
en dernier lieu le 16 juin 1879 (service de M. Bourneville), et y
est décédé le 18 novembre 1885.
Renseignements fournis par sa mère (22 octobre 't879). Père,
architecte, présentait une malformation du bras gauche, qui était
moins développé que le droit; ce bras se terminait par un moi-
gnon formé par la région métacarpienne et une portion des
doigts rudimentaires. Il travaillait beaucoup, même de nuit, ne
faisait pas d'excès de boisson, il n'était pas migraineux, n'avait
jamais eud'affectionscutanées; d'une santé habituellementbonne,
il éprouvait parfois des étourdissements et avait des épistaxis qui
ont cessé à quarante-huit ou quarante-neuf ans. Il est mort en
1871, à l'âge de cinquante-deux ans, des suites d'une hémiplégie
consécutive à une attaque d'apoplexie survenue dix-huit mois
auparavant. [Père, mort vers soixante-treize, ans d'une attaque
d'apoplexie. Mère, morte jeune du choléra. Un frère bien
portant, pas d'aliénés, pas d'épileptiques, pas d'autres difformes
ni d'alcooliques dans la famille.]
Mère, quarante-cinq ans, couturière, bien portante, n'offrant
aucune trace de goitre, n'a jamais eu qu'une fièvre typhoïde dans
l'enfance ; elle n'est pas migraineuse, mais depuis, quelques
années, elle est sujette à des céphalalgies qu'elle attribue aux
chagrins; elle est très impressionnable et pleure facilement. Il
ne parait pas que le goitre et le crétinisme soient endémiques
dans son pays (Courancelle). Elle a une cousine au troisième degré
porteuse d'un goitre très gros, intelligente, qui serait la seule goi-
treuse du village. Dans son pays, elle aurait vu autrefois un homme
ressemblant à son fils. [Père, cultivateur, sobre, mort à quatre-
vingts ans, d'une chute; il n'était pas en enfance. 111ère, morte
d'une bronchite à soixante-douze ans ; intelligente, n'était pas
nerveuse ; un frère bien portant, intelligent, a deux enfants sains,
bien portants et intelligents ; deux soeurs jouissant d'une bonne
santé, non nerveuses, ont l'une, trois garçons, l'autre, un garçon,
tous bien portants. Pas d'aliénés, etc... dans la famille.]
Pas de consanguinité. Le père est né à Paris, la mère est de
Courancelle (Meuse).
Trois enfants : 4 garçon, mort à quinze mois, la nourrice était
devenue tuberculeuse, n'a pas eu de convulsions ; 3° notre ma-
lude; 3° fille, bien développée, dix-sep tans, intelligente, s'exprimant
29' CLINIQUE NERVEUSE.
très nettement ; traits réguliers, figure agréable, pas de goitre;
elle ne présente aucun accident nerveux J.
Notre malade. - Durant la grossesse, à trois mois, la mère fut
renversée par une voiture ; cet accident sans conséquences graves
lui causa seulement peur; elle était triste parce qu'elle n'était
pas encore mariée à cette époque ; il n'y aurait jamais eu de
scènes violentes; le père était marié et ne l'a épousée qu'après
la mort de sa femme. Elle n'aurait pas vu de crétins pendant
qu'elle était enceinte. Accouchement à terme (à Neuilly-sur-
Seine), assez long ; on aurait cassé un bras de l'enfant, le droit,
croit-on, et démis un poignet. A la naissance, l'enfant était très
gros.
Il fut confié jusqu'à un an à une nourrice de Rambouillet, non
goitreuse, qui l'éleva au sein dans des conditions hygiéniques dé-
plorables (logement humide, etc.), et la mère soupçonne qu'il il
aurait eu à cette époque quelques convulsions. Quoi qu'il en soit,
elle le reprit chez elle et, vers quinze mois, il commença à mar-
cher ; il ressemblait alors, affirrue-t-elle, à tous les enfants de
son âge; il était affectueux, donnait quelques signes d'intelligence
et prononçait un petit nombre de mots. C'est à cette époque
qu aurait lait une chute dans un escalier et depuis lors, au dire
de la mère, il aurait complètement changé. Deux ans après cet ac-
cident, il pouvait encore marcher assez convenablement, tenu par
'Elle s'est mariée à 19 ans, fait une fausse couche ; en 1883, elle était
bien portante.
Fig. 95. - Th... à l'âge de 4 ans.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE 295
la main; il n'aurait que rarement marché seul dans l'appar-
tement, et rarement sorti dehors. Bien qu'aucune nouvelle atta-
que de convulsions ne soit survenue, néanmoins, la parole
n'avait fait aucun progrès. C'est dans ces conditions que l'enfant
fut amené pour la première fois à Bicêtre, où il fit un séjour
d'un mois (juillet-août 1863). La mère ne voulut pas le laisser
davantage, parce que, dit-elle, il s'ennuyait et que, d'ailleurs,
il était devenu gâteux depuis son entrée. Il marchait aussi
moins bien, mais était toujours très atfectueux. La dentition se
fit lentement; elle n'était pas complète à sept ans. En 1871, sa
soeur lui fit par imprudence de fortes brûlures à la figure et aux
mains. Il fut alors ramené à Bicêtre, d'où il ne sortit qu'en oc-
tobre 1878 pour y rentrer l'année suivante, comme il a été dit plus
haut.
État actuel (6 janvier 1880). L'enfant reste pendant tout le
jour assis devant une table, dans un état d'inertie et d'oblusion
intellectuelle complète; sa position habituelle, à l'extrémité de
la table qu'il a l'air de présider, son regard indifférent et son
Fig. 16. Th... à l'âge de 20 ans.
29S CLINIQUE NERVEUSE.
extrême apathie lui ont fait donner par les malades le sobriquet
de Pacha, sous lequel il est connu dans la maison.
La tête, légèrement fléchie sur le thorax, est volumineuse et
irrégulière et sa forme rappelle grossièrement celle d'un pain
de sucre. L'occipital forme en arrière une saillie notable du côté
gauche ; en avant, on note, au contraire, un développement plus
Fi ? 17.- Cette figure représente trois cas d'idiotie : le premier (à à
gauche) avec goitre, les autres accompagnés de cachexie pachydermi-
que. = Le Pacha est tenu par les deux autres idiots.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE 297
considérable de la bosse frontale droite; vu d'en haut, le crâne
présente ainsi une plagiocéphalte assez marquée. La partie posté-
rieure du crâne est très développée, les sutures fronto-pariétales
sont saillantes * et les dépressions sus-sourcilières très pronon-
cées. Le cuir chevelu est atteint d'une calvitie presque complète
et présente sur toute son étendue une desquamation analogue à
celle du pityriasis capots. Les cheveux sont courts, volumineux,
secs, presque noirs ; ce sont des cheveux d'adulte et leur rareté
contraste tristement avec la physionomie enfantine du malade.
Le visage est hideux; le front et la racine du nez sont couverts
de rides, les sillons naso-labiaux sont très accusés, le nez est ca-
mard, très déprimé a sa racine comme chez la plupart des petits
entants; sur toute l'étendue de la face, la peau est mate, d'une
couleur blanc jaunâtre et bouffie; cette bouffissure, surtout mar-
quée au niveau des joues qui sont pendantes, des lèvres et des
paupières, contribue à accuser les rides et donne à la physionomie
un air vieillot, contrastant encore avec l'apparence fine et cireuse
de la peau qui est absolument glabre; les sourcils sont à peine
marqués et les cils rares; les yeux restent constamment à demi
fermés et les paupières sont collées chaque matin par suite d'une
blépharite ciliaire double. Ajoutons, pour terminer ce portrait,
qu'il existe sous le menton une vaste cicatrice de brûlure s'éten-
dant d'une oreille à l'autre, à la manière d'une jugulaire; la
surface de cette cicatrice, qui présente une couleur violacée, est
parsemée de brides dont quelques-unes, insérées au niveau du pli
mento-labial, produisent le renversement de la lèvre inférieure,
l'écoulement presque continuel de la salive et achèvent ainsi de
donner à la physionomie l'air bestial qui la caractérise. L'enfant
peut néanmoins fermer la bouche qnand il le veut, mais un effort
parait nécessaire pour cela et il ne le fait guère qu'au moment
de la déglutition. Pendant la mastication, la lèvre inférieure reste
pendante et laisse s'écouler au-dehors une partie de la salive et
des aliments. Les dents sont, pour la plupart cariées et usées jus-
qu'au niveau des gencives; en haut, les deux incisives médianes
de lait persistent en avant des dents définitives correspondantes.
Il ne parait pas exister d'asymétrie de la voûte palatine, ni de
malformation du voile du palais. Les oreilles sont régulièrement
ourlées, symétriques et présentent un lobule bien développé;
elles s'écartent fortement de la tête en arrière.
La bouffissure de la face, mentionnée ci-dessus, ne parait pas
avoir existé toujours au même degré; il semble y avoir eu un
temps, d'après les renseignements fournis par la mère, où la
physionomie de l'enfant reflétait assez exactement ses sentiments.
1 Voir à l'autopsie la description du crâne.
Archives, LXII. 20
298 CLINIQUE NERVEUSE.
Aujourd'hui, la face bouffie parait avoir perdu beaucoup de sa
.mobilité et les rares phrases qui sont comprises n'excitent aucun
jeu de physionomie ; la joie s'exprime par un sourire grossier et
disgracieux. La douleur et souvent une légère contrariété suffi-
sent à provoquer des larmes et des cris. La parole est réduite à
.quelques monosyllabes; ajour pour bonjour, tenu pour gâteau, ci
pour merci et quelques autres. La voix est enrouée, nasillarde, la
prononciation confuse et ce n'est ordinairement qu'en pressant
l'enfant de questions ou eu lui présentant le bonbon attendu
qu'on obtient une réponse lente à venir et comme traînée.
L'habitus général du tronc et des membres est assez remar-
quable. Outre le défaut de taille déjà signalé, on remarque une
extrême brièveté du cou qui est en même temps très élargi, mais
ne porte aucune trace de tumeur thyroïdienne. On sent distinc-
tement le larynx sur la ligne médiane en plaçant la tête dans
l'extension et en déprimant fortement les téguments, notablement t
épaissis à ce niveau. Tout au plus peut-on sentir, sur le côté droit
Fig. 18. Th... à l'âge de 21 ans (mai 1882).
IDIOTIE AVEC CACHEXIE l'ACHYDERMIQUE. 299
du cartilage thyroïde, quelques nodules roulant sous le doigt et
appartenant peut-être au corps thyroïde, qui serait par conséquent
extrêmement atrophié.
Sur toute l'étendue du tronc, la peau est fine, d'un blanc mat,
assez résistante sous le doigt, comme infiltrée et paraît recouvrir
une épaisse couche de tissu cellulaire lâche; au devant du thorax
elle est sillonnée de petites veines et de nombreux capillaires.
Ainsi que l'a fait remarquer M. Hadden, la transpiration est
insensible et l'excrétion de la matière sébacée parait complète-
ment suspendue.
Au niveau des régions sus-claviculaires, au-dessous des aisselles
et en divers points du thorax, on la trouve soulevée par des
tumeurs molles, tremblotantes, d'apparence oedémateuse. Ailleurs,
elle est tendue, résistante sous le doigt et comme bouffie de
graisse. On ne constate pas à la main d'abaissement notable de
la température. Le thermomètre appliqué sur le devant de la
poitrine, puis sur une des tumeurs cervicales, a marqué successi-
vement 1°,6 et 36°, ? , la température extérieure étant de 250.
La température rectale, prise matin et soir pendant huit jours
consécutifs, est restée invariablement à 37o,2 le soir. Il parait
donc exister un léger abaissement de la température centrale.
Le ventre est volumineux.
Les membres sont gros, courts, empâtés, et la peau y présente
les mêmes caractères que sur le tronc; toutefois, on y observe
un abaissement de température, sensible même à la main; le
thermomètre, appliqué sur la face externe des bras, marque à
droite 33°,8, à gauche 34o,l.
La main droite est déformée par une brûlure dont la cicatrice
a produit la rétraction des trois derniers doigts. La préhension
est encore possible avec le pouce et l'index dont le malade se
sert encore assez adroitement pour saisir les pièces de monnaie
ou les bonbons qu'on lui présente. Sur le dos de cette main, la
peau, comme oedémateuse, forme une pelotte épaisse, mais ce
gonflement résiste sous le doigt et ne disparaît pas par la pres-
sion. La main gauche offre un état analogue, bien qu'à un
degré moins marqué.
Aux membres inférieurs, la bouffissure est surtout prononcée
aux jambes et aux pieds dont la peau est plus ou moins cyanosée.
Les deux membres sont de longueur égale. La voûte plantaire est
à peine marquée; la marche est difficile, lourde, mais cependant
possible lorsque l'enfant est tenu par la main.
Il est intéressant de remarquer ici que le Pacha a fait à cet
égard de réels progrès depuis le mois d'octobre : tandis qu'il
avait alors beaucoup de peine à exécuter quelques pas; que, pour
cela, il restait confiné au lit une grande partie de la journée, il
300 CLINIQUE NERVEUSE.
parvient aujourd'hui, après avoir été exercé pendant huit mois à
faire le tour de la salle, à marcher presque sans aide. Il peut
également se tenir debout pendant un temps assez long, en s'ap-
puyant aux barreaux d'une chaise ou d'un lit.
Les organes génitaux ne présentent pas de vice de conformation,
mais un arrêt de développement complet; la peau y est épaisse
et pseudo-oedémateuse, comme dans les autres régions; les deux
testicules sont dans les bourses et ont à peine le volume d'une
noisette. Pas d'onanisme.
L'urine, examinée à plusieurs reprises et avec soin par M. Barré,
interne en pharmacie du service, est claire, citrine et ne contient
ni albumine, ni glycose. L'enfant est grand gâteux et la difficulté
où l'on se trouve de recueillir isolément la quantité d'urine
rendue dans les vingt-quatre heures, n'a pas permis de doser
l'urée éliminée de ce côté.
Fig. 49. - Th... à 1 âne de 21 ans (mai 1882).
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 301
Sur le tronc et les membres, la peau est absolument glabre,
même aux aisselles et au pubis, bien que le malade soit entré dans
sa vingtième année. D'après les renseignements recueillis dans le
service, elle était, l'année dernière, le siège d'une desquamation'
continuelle, analogue à celle qui persiste encore sur le cuir che-'
velu. Cette desquamation, surtout marquée aux membres, au
tronc et à la face, était furfuracée. Elle a disparu sous l'influence
de soins hygiéniques mieux entendus et des bains salés, adminis-
trés deux fois par semaine depuis octobre 1819.
La sensibilité générale est conservée, mais peut-être légèrement
émoussée ; le chatouillement n'est généralement pas perçu. La
sensibilité au froid est très marquée. Quant aux sensibilités spéciales,
la vue et l'ouïe paraissent égales des deux côtés. Le goût semble
intact. Then... n'est pas salace, il écarte les saletés qu'il rencontre
dans son assiette. Il mange sa soupe seul, avec une cuiller qu'il
tient de la main gauche et les aulres aliments avec ses doigts. Il
boit également seul en tenant le gobelet avec ses deux mains.
Appareil digestif. - Il n'existe ni vomissements après les repas,
ni constipation exagérée. Une chute du rectum, qui s'est produite
il y a quelques mois, a pu être réduite et maintenue par des cau-
térisations au galvanocautère.
Nous avons déjà indiqué, chemin faisant, l'état de l'intelligence ;
notons encore que Then... reconnait sa mère, sa soeur et les
diverses personnes du service ; parfois, sa physionomie semble
s'éveiller un moment à la vue de la nourriture ou des bonbons.
Une poupée qu'il a eu pendant quelques semaines paraissait lui
procurer quelque plaisir.
Le sommeil est tranquille, l'après-midi tout entière se passe
dans un état de demie somnolence et d'immobilité. Jamais depuis
qu'il est à Bicêtre, cet enfant n'a présenté de phénomènes d'exci-
tation, ni d'accès convulsifs.
·1880. 8 décembre.- T. R. 37°,4.-Soir : 370,4 ; resp. 9; pouls 88.
9.-T. R. 37"; pouls 84.
1881. 24 février. - Etat fongueux des conjonctives, cautérisation
au nitrate d'argent.
23 mars. On constate à la partie antérieure du cuir chevelu,
laquelle est glabre, une teinte rosée ; cette région est légèrement
furfuracée; la rougeur et le gonflement se prolongent sur le front
et presque jusqu'à la racine du nez et l'arcade sus-orbitaire où
elle se limite par un léger bourrelet. L'état des téguments (par
suite de la cachexie pachydermique) empêche d'explorer les gan-
glions. -Peau chaude, état saburral des premières voies digestives.
24. Le malade parait un peu abattu, la rougeur s'est
étendue ainsi que le gonflement, qui va latéralement jusqu'à
302 CLINIQUE NERVEUSE.
l'antitragus et en avant envahit les paupières supérieures. T. R.
39°,8. Soir : 40°,3 (érysipèle).
25. - Hier dans l'après-midi, après la purgation, selles abon-
dantes ; nuit tranquille. Le cuir chevelu est dégagé; le front est
encore un peu gonflé ainsi que les paupières; le gonflement per-
siste au niveau delà portion moyenne de la joue droite ainsi que
dans la région temporale du même côté ; l'oreille droite est rouge,
les lèvres ne sont pas noires. T. R., 39°,2. - Soir : 40°, e.
26. L'érysipèle progresse du côté de la face, la joue droite est
beaucoup plus gonflée, plus rouge. T. R. 39°,6. - Soir : 40°,3.
27. T. R. 39o,4. Soir : 40°,3.
28. - Le cuir chevelu et la région faciale supérieure sont
redevenus normaux ; l'oreille droite, la lèvre inférieure etle bas du
visage couvert de cicatrices, de brûlures adroite, restent tuméfiées,'
une phlyctène pleine de sérosité recouvre le menton à gauche. Le
malade ne boit que du lait et du vin de quinquina. Traitement :
huile de ricin, compresses d'eau de sureau, etc.
2'J. La rougeur est moins vive ; la tuméfaction persiste, les
paupières sont gonflées et lesbords sont agglutinés. Thén... boit du
lait avec plaisir. T. R., 39°. -Soir : 40°,2.
30. - Le bas du visage n'est plus tuméfié ; la peau desquame
par place ; les paupières restent gonflées, les yeux larmoyants.
L'érysipèle a quitté la face pour devenir ambulant; il occupe,
en effet la partie postérieure du cou et de l'épaule droite. La
plaque d'érysipèle est rouge; le bourrelet n'est pas franc; les
bords vont en se perdant vers l'avant-bras, la pression digitale
laisse une empreinte blanche très fugace. Le malade semble gai,
mais il n'a pas d'appétit. T. R. 39°,2. - Soir : 39°,6.
31. - L'érysipèle commence à gagner la région pectorale ; il
est descendu jusqu'au tiers inférieur de l'avant-bras ; pas d'abat-
tement. - -Potion : extrait de quinquina, 3 gr.; rhum, 50 gr. ;
huile de ricin, 30 gr. T. R. 39 ? Soir : 39°,8.
1er avril. - L'érysipèle a pâli au niveau de l'épaule et du bras,
il prend un aspect rouge-clair moucheté; le bourrelet fait défaut;
la peau n'est ni chaude, ni résistante. La peau du bras est le siège
d'une desquamation furfuracée. Le malade boit du lait, dort bien,
est gai, et répond dans la mesure de son possible. T. R., 39°. -
Soir : 39°,8.
2. - Envahissement de la partie inférieure du bras et supérieure
de l'avant-bras droit par l'érysipèle; faible rougeur de la paroi
antérieure de la poitrine ; en arrière, rougeur légère de la région
scapulaire droite; rien à la face, si ce n'est une desquamation
légère et furfuracée. T. R. 39°, 2. - Soir : 40".
3. - T. R. 38°,6. - Soir : 39», 2.
4. -Il existe encore un peu de gonflement à l'avant-bras droit,
mais la rougeur a disparu. A l'avant-bras du côté gauche, l'éry-
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 303
sipèle n'existe que sur la face dorsale en arrière du cubitus et
dépasse de deux centimètres l'olécrâne en haut..T. R. 38°. -
Soir : 38,4.
19. L'enfant est levé et est assez gai ; on recommence à le
faire marcher.
4 °r juin. Hier, il était mal en train ; il semble que la peau du
côté droit de la tête, tempe, et région pariétale, est rosée et un peu z
oedématiée ; la pression du doigt laisse une empreinte. On ne peut
que présumer l'érysipèle, vu l'état ordinaire de la peau; pas d'ap-
pétit ; un vomitif. - T. R. 40°... '
2. - La rougeur occupe aujourd'hui toute la partie inférieure
de la joue droite, le menton, la partie inférieure de la joue
gauche et le lobule de l'oreille gauche; rien aux lèvres. L'érysipèle
marche de droite à gauche; langue humide; nuit tranquille; pas
d'agitation. Soir : T. R. 40°.
4. L'érysipèle descend, il quitte progressivement la face pour
suivre la nuque et le dos; toute la portion dorsale est prise. La
rougeur se limite à la première lombaire en avant et latéralement
à gauche de la ligne axillaire verticale. A droite, elle empiète
un peu sur le creux de l'aisselle. La rougeur de la face a disparu,
mais elle persiste encore dans la région précédemment indiquée;
de plus, elle descend en arrière, jusqu'à l'articulation sacro-verté-
brale environ. Du côté gauche, elle dépasse la ligne axillaire et
et gagne le mamelon. Du côté droit, elle atteint seulement le
mamelon; de plus, elle a envahi tout le bras et l'avant-bras, s'ar-
rêtant brusquement par une ligne circulaire à cinq centimètres du
poignet. Constipation, lait, lavement purgatif. T. R. 40 ? -
Soir : 400,8.
5. - T. R. 40°,1. - Soir : 40°,8.
6. - Th... est plus gai, et ne parait pas être accablé par la
fièvre. La rougeur de la face a disparu; elle persiste encore dans
les autres régions et de plus descend en arrière jusqu'à l'articula-
tion sacra-vertébrale environ; du cote gauche, elle gagne la ligne
axillaire antérieure et le mamelon ; du côté droit elle atteint éga-
lement le mamelon, a envahi tout le bras et l'avant-bras, s'arrê-
tant brusquement par une ligne circulaire à cinq centimètres du
poignet. Pas de vomissements; constipation. - T. R. 39°.
Traitement : Lavement purgatif, lait, etc.
7. Des deux côtés, l'érysipèle dépasse le mamelon, tendant à
gagner la ligne médiane. De même, la rougeur descend sur le
côté droit jusqu'au poignet; l'état général est bon. -T.R. 38°,6.
- Soir : 38°, 6. '
8. La rougeur a gagné la main droite; en même temps elle
disparaît en arrière, elle est moins nette sur le dos ; en avant
légère rougeur de l'abdomen. T. R. 38°,2. -Soir : 38°,8.
9. - La rougeur e^t limitée à la main et au poignet droits, les
30Î- le . CLINIQUE NERVEUSE.
autres parties atteintes sont en voie de desquamation. T.R., 38°,4.
- Soir : 38°, 6.
10. - Les doigts sont envahis par l'érysipèle, l'état général est
bon. T. R. 38',2. - Soir : 38°6.
17. - L'érysipèle est en voie de desquamation totale; la peau
a repris sa coloration et sa rénitence habituelles, la température
est stationnaire.
IL - T. R. 38°,2. - Soir : 38°,2.
12. - T. R. 38°. - Soir : 38".
13. - T. R. 37°,6. Soir 31°,6.
- 14. - T. R. 37°,6. - Soir : 37°,4.
15. - T. R. 37°,6. - Soir : 3-in,4.
16. T. R. 31 ? .
27. - Th... est revenu à son état habituel, et est très gai.
4881. Juillet. - Poids : 20 kilogr. 100.
Fig. 20. - Th... il (le 22 ans (octobre 1883).
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 305
1882. Janvier. Poids : 19 kilogr. 50.
1883. Janvier. - Poids : 19 kilogr. 800.
14 novembre, - Th... n'a rien présenté de particulier dans le
courant de l'année. On l'exerce à marcher, ce qu'il fait, tenu par
la main. La mémoiie paraît exister; il reconnaît les personnes
qui fréquentent le service, et même celles qui, ne venant que
rarement, lui donnent des sous. Le t4 juillet 1883, les enfants
ayant reçu un supplément de 15 centilitres de vin de Bagnols, il a
volé et bu la part de son voisin. Cet excès l'ayant excité, il cher-
chait à parler spontanément, chantonnant « Nicolas » et « l'Amant
d'Amanda ». Depuis, il se montre très satisfait, si on lui parle de
bagnols, il en boit avec plaisir, et, posant son verre avec satisfac-
tion sur la table, il dit : « Ça y est » ; « bon, ça ! ».
4884.31 janvier. -Poids : 20 kilogr. 700.
2 février. - Dentition. Mâchoire supérieure.- Permanence des
racines de la plupart des dents de lait sur lesquelles on ne trouve
que deux dents permanentes, les deux incisives centrales entières;
elles sont sorties en arrière des racines des dents de lait; très
inclinées en arrière; les molaires permanentes du fond de la
bouche sont profondément cariées; il ne reste plus que des débris
de racines.
illc2choire inférieure. On ne trouve comme dents permanentes
que les deux incisives centrales entières, une petite molaire droite
et une gauche; ces dents sont sorties en arrière des dents de
lait qui persistent. La canine de lait gauche persiste; les autres
dents de lait sont tombées sans être remplacées, peut-être cepen-
dant des dents permanentes cariées ont-elles été arrachées. L'ar-
ticulation du maxillaire est defectueuse; la mâchoire inférieure
est portée un peu en avant et les dents viennent mordre sur le
milieu des racines des dents de lait sans tomber au niveau de la
gencive.
Les gencives, un peu décollées, mais relativement en assez bon
état, forment un bourrelet autour des dents et des racines.
Août. - Poids : 20 kilogr. 300. Taille : 0m,90.
9 octobre. - On constate une tuméfaction du volume d'un petit
oeuf de pigeon entre les deux sourcils; à la palpatiou, cette tumeur
donne la sensation de l'oedème; elle présente à sa surface une
rougeur érysipélateuse ; les paupières sont tuméfiées. 'f. R. 31o,5,-
Soir : 37 ? i.
10. La tuméfaction notée hier a considérablement diminué,
mais les joues, surtout la gauche, sont oedématiées et présentent
une rougeur uniforme sans bourrelet périphérique; la peau n'est
ni chaude, ni douloureuse à la pression ; les ganglions sous-maxil-
laires ne sont ni tuméfiés, ni douloureux. T. R. 37°,6. - Soir :
31l,6.
11. Même état. T. R. 37°,4 . - Soir : 31°, .
306 CLINIQUE NERVEUSE.
12. - La tuméfaction des joues a diminué, la rougeur est loca-
lisée surtout au nheau du menton et de la lèvre inférieure; ni
douleur ni adénite. L'appétit a été conservé pendant toute la durée
de l'affection.
43. - T. R. 37°,5. Soir : 37",5.
- 14. - T. R. 37",4. - Soir : 37°,5.
15. - T. R. 37°,6. - Soir : 37°,7.
16. La face a repris son aspect habituel. Le malade est levé.
T. R. 37<-,4.
15 décembre. - Le malade, jusqu'ici en robe, aété habillé avec
un pantalon; il ne gâte plus durant le jour ; depuis. longtemps,
il a une selle tous les deux jours.
1885. Janvier. Poids : 20 kil. 500. - Juin. Poids : 20 kil. 700.
Juin. - Amélioration au point de vue de la marche ; il est plus
solide sur les jambes, mais manifeste toujours une grande répu-
Fig. 21. - Th... à l'âge de 23 ans (novembre 1884).
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 307
gnance à se mouvoir, et on y parvient en lui promettant soit une
friandise, soit surtout du vin de Bagnols. On lui fait fabriquer
une canne afin d'arriver à ce qu'il marche seul. Th... s'est amé-
lioré sous le rapport de la propreté et nous sommes parvenus à
remplacer la robe par le pantalon (fig. 21). Il est sujet à être
constipé et est très sensible au froid.
13 novembre. Th..., n'ayant pas été à la selle depuis quatre
jours (il ne mangeait pas depuis deux jours et paraissait souifrir),
est amené à l'infirmerie. Lavement.
14. La constipation persiste; ventre très ballonné, sonore;
le lavement de la veille n'ayant produit aucun effet, il lui en est
administré deux autres dont l'un purgatif, qui restent de même
sans effet.
15. - Le matin, purgatif, aucun résultat. Le soir, nouveau
lavement suivi d'une selle très abondante. Th... ne prend que du
lait. Gonflement très marqué de la lèvre supérieure et de la joue
droite, qui est rouge et luisante. Tympanite considérable. T. R.
39°; à 3 heures du soir : 3S°,8. - Soir : 40^,` ? .
16. - Le malade tousse un peu; l'auscultation, très difficile à
pratiquer, ne dénote rien de saillant; la lèvre.inférieure est le
siège d'un gonflement as·ez marqué; à l'inspection du thorax, du
reste très difficile, il ne semble y avoir rien d'anormal.1'. R. 38 ? ? ;
Soir : 38°,8.
47. - Pas de changement notable, pas d'évacuation : eau-de-vie
allemande, 20 grammes. Le soir, Th... n'ayant pas eu de garde-
robe, on lui administre un lavement purgatif. T. R. 38°,4.
Soir : 38°,2.
18. - L'eau-de-vie allemande et le lavement purgatif n'ont
produit aucun effet. Le matin, Th... a demandé le vase, mais il a
fait des efforts inutiles. - 1,'abdomen est ballonné, tympanique ;
les lèvres sont cyanosées, la respiration est plus courte et plus
fréquente; à la palpation, on croit sentir une tumeur assez dure,
de l'S iliaque irrégulière, bosselée et garnie probablement par
un amas de matières stercorales ( ? ).- L'examen est très difficile
par suite du ballonnement du ventre. Refroidissement notable;
pas de vomissements. Deux lavements simples donnés presque
coup sur coup ne sont pas rendus. Un lavement à la glycérine
amène des scybales dures. Pas d'émission de gaz. Le soir, deux
syphons d'eau de Seltz sont donnés par le rectum au moyen de
la sonde oesophagienne, ils ne produisent aucune évacuation.
Mort à 10 heures 35 du soir. Avant de mourir, le Pacha a
ouvert les yeux tout grands et a poussé plusieurs soupirs. T. R.
38°,2. Soir : 40^,` ? . Un quart d'heure après le décès : 36°,4. Une
heure après le décès : 3 ? 3. Deux heures après le décès : 30°.
Poids après décès : 21 kilogr. 400.
308 CLINIQUE NERVEUSE.
Note complémentaire. - Les cheveux sont noirs, moyennement
abondants à la région occipitale; ils vont en diminuant sur la
partie inférieure des pariétaux et la partie antérieure du tem-
poral. Sur la ligne médiane, ils s'avancent sur le milieu du frontal
en formant une houpette ; entre cette houpette médiane et les
parties latérales il existe une calvitie presque complète.
Le cuir chevelu, pâle, présente des rides nombreuses, des squames,
quelques croûtes sèches assez grosses, et d'autres petites en assez
grand nombre. Les sourcils sont peu fournis; les poils sont
implantés verticalement de bas en haut et de dedans en dehors.
Les cils sont assez rares à la paupière supérieure, très rares à la
paupière inférieure.
On constate une absence complète de poils sur tout le reste du
corps : aisselles, dos, thorax, anus, lèvres supérieures, joues. La
peau a un aspect cireux, pâle. Les ongles sont assez minces,
courts ; on n'a besoin de les couper qu'à des intervalles très
éloignés. La peau des bourses est épaisse, ridée et, au premier
abord, parait oedématiée, mais l'empreinte des doigts ne s'y des-
sine pas. ,
Il existe quelques poils rares et courts au pénil ; la peau de la
verge et surtout du prépuce est épaisse, ridée, comme boursouffléc,
sans oedème.
Le prépuce est allongé et sa moitié inférieure forme une sorte
de tablier qui dépasse la moitié antérieure de la largeur d'un
centimètre. La verge, relativement grosse, a cinq centimètres et
et demi de longueur et cinq centimètres de circonférence; le gland
est découvrable, le méat est normal. Les testicules ont la dumen-
sion d'une assez grosse noisette. Pas d'onanisme.
Crâne. - 11 appartient au type brachycéphale ; voici les princi-
pales dimensions :
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 309
cause du prolapsus de la lèvre inférieure, consécutif à la brûlure
dont il a été question. L'abdomen est toujours volumineux. Les
selles se faisaient tous les deux jours et étaient souvent dures.
Th... était devenu propre et demandait « Pot », « chier ».
Voici quelques mensurations supplémentaires :
310 CLINIQUE NERVEUSE.
partie moyenne, elle mesure 5 centimètres de largeur, sa lon-
gueur est de 13 centimètres.
A l'ouverture de la cavité abdominale, le ca;cmn se présente
tout d'abord ; il est très dilaté, recouvre une partie du colon ascen-
dant, du colon transverse et de l'estomac ; à 7 centimètres au-
dessus de l'appendice vermiforme, le colon ascendant est tordu
sur lui-même de façon que la surface antérieure du coecum se
trouve postérieure, et réciproquement, l'extrémité ceecale d'infé-
rieure est devenue supérieure. Le tout forme une tumeur qui
atteint une largeur de 11 centimètres 1/2. Le reste du colon
ascendant et le colon transverse dans sa partie droite ne sont
pas dilatés. La partie gauche du colon transverse, le colon descen-
dant et l'S iliaque sont assez dilatés, on y sent des matières
molles moulées; l'intestin grêle, non dilaté, occupe sa situation
normale; le grand épiploon est remonté; il n'est pas surchargé
de graisse. L'estomac est dilaté. Au niveau de la torsion et
ailleurs, on ne constate ni oedème, ni inflammation, ni ecchymo-
ses, etc. Le cæcum ponctionné laisse échapper une grande quan-
tité de gaz présentant l'odeur ordinaire, sans exagération. La
vessie est presque v ide. Le foie atteint le rebord costal ; le
diaphragme remonte au bord supérieur de la quatrième côte à
droite, au bord inférieur de la même côte à gauche. Les muscles
pectoraux sont très décolorés, et ont presque l'apparence de
muscles de grenouille; ils sont peu développés.
Cavité thoracique. A l'ouverture du thorax, on constate la
présence de brides longues et résistantes entre le sternum, les
cartilages costaux et le poumon droit. Le tissu cellulo-adipeux
qui recouvre le péricarde est oedématié, tremblotant. Le poumon
gauche est refoulé en haut; quelques brides relient sa face externe
aux côtes; la cavité pleurale gauche contient un liquide citrin
clair. A droite, on constate de même quelques brides lamelli-
formes, assez longues et assez résistantes; on trouve le même
liquide citrin clair dans la cavité pleurale. Au devant des vais-
seaux du cou, on trouve un peloton graisseux s'étendant jusque sur
la partie anttro-supérieure du péricarde, ce peloton adipeux
a la forme du lobe droit du thymus dont il semble occuper la
place.
La cavité du péricarde contient une assez grande quantité (un
verre environ) de liquide jaune citrin. Le coeur en systole est
petit; sa pointe est formée par le ventricule gauche; on trouve
sur la face antérieure, près de la pointe, une petite plaque lai-
teuse ; le ventricule droit est affaissé ; sur sa face antérieure se
trouve également une petite plaque laiteuse; les deux oreillettes
sont dilatées. La graisse qui se trouve à l'état normal dans les
sillons est ici beaucoup moins abondante que d'habitude. L'oreillette
droite renferme du'angtiquide noir et quelques caillots fibri-
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 311 t
neux. Le ventricule gauche contient un peu de sang liquide. Les
deux orifices auriculo-ventricuiaires admettent avec peine la pulpe
des deux doigts index et médius réunis de la main gauche. Les
valvules sont suffisantes et saines. Le myocarde est pâle, mais
celte pâleur est moins accentuée que celle des muscles de l'abdo-
men (épaisseur à droite, 12 mill.; à gauche, 3 mill. /2., Le trou
du Botal est obturé. Sur la crosse de l'aorte, au-dessus des
valvules, on trouve quatre larges plaques athéroinnteuses ; il en
existe une autre petite dans l'espace sous-aortique.
Poumons. - A la coupe des bronches, il s'écoule un liquide
muco-spumeux. A la partie postérieure du lobe inférieur gauche
existe quelques petites ecchymoses sous-pleurales. Le tissu
pulmonaire, très compacte au lobe inférieur, l'est moins au lobe
supérieur et est partout très oedématié. Les bronches sont légère-
ment hyperémiées, on les poursuit très facilement jusqu'à la
périphérie. - Le poumon droit possède ses trois- lobes ordinaires,
mais sur le lobe inférieur on rencontre une scissure profonde.
On constate sur ce dernier lobe quelques petites ecchymoses
ponctuées. Les lésions sont les mêmes qu'à gauche. Sur la
plèvre pariétale droite sont disséminées quelques petites ecchy-
moses. La musculature du diaphragme est pâle, mais moins
que celle du thorax.
Cavité abdominale. Rate (300 grammes), rien de particulier.
Pancréas, normal. - Uretères normaux, le gauche sinueux.
Capsules surrénales, saines. - Reins. Le tissu cellulaire péri-
néphritique est comme oedématié. Le rein gauche, entouré d'une
épaisse couche de graisse, se décortique facilement (quelques
étoiles de Verrheyen) ; il paraît au toucher plus dur que d'habi-
tude, sans qu'on puisse y constater à l'oeil nu de lésions de
néphrite interstitielle (épaisseur de la couche corticale : 4 millim.).
Le rein droit se décortique facilement; il est très lobulé, beau-
coup plus petit que le gauche, plus ferme à la coupe. Sur la
surface externe, on constate deux petites dépressions et un petit
kyste. ' ,
Le duodénum contient un liquide renfermant des grumeaux
blanchâtres. L'estomac est rempli d'une masse coagulée pro-
venant du lait; rien de particulier. Le canal cholédoque est
perméable ; il s'en écoule par la pression une bile claire, peu
visqueuse. Vésicule biliaire normale. - Le tissu hépatique
semble un peu plus ferme que normalement. - Les intestins ne
présentent rien à relever ; leur tunique interne, loin d'être hyper-
trophiée et infiltrée, parait d'épaisseur normale et plutôt sèche.
Pas de surcharge graisseuse du mésentère.
Le bassin est petit ; il mesure, dans le diamètre antéro-posté-
rieur, 6 centim.; dans le diamètre transverse, 6 centim. </2.
Dans l'aine gauche, on trouve deux paquets ganglionnaires, et un
ganglion isole dans une masse graisseuse.
312 CLINIQUE NERVEUSE.
Le larynx est étroit et présente un léger oedème des cordes
vocales. Le pharynx n'offre rien de particulier. Malgré une
recherche minutieuse, on ne peut trouver trace du corps THYROÏDE.
Les nerfs grands splanchniques, les ganglions semi-lunaires, la
partie inférieure du grand sympathique paraissent absolument
normaux ; les parties supérieure et dorsale du grand sympa-
thique sont de même normales ; peut être, cependant, sont-elles
un peu plus volumineuses qu'à l'ordinaire ( ? ).
Cavité crânienne. - Encéphale : 107S gr. Cervelet et isthme :
115 gr. - Isthme : 15 gr. - Protubérance assez petite, symé-
trique, ainsi que le bulbe.- Hémisphères cérébelleux, égaux. - La
glande pinéale a 4mIn environ de diamètre. Le corps pituitaire
a 15 a 16mm de largeur et 1 centim. de hauteur; il est assez épais;
paraît sensiblement hypertrophié. Lorsqu'on enlève le cerveau, il
s'écoule une assez grande quantité de sang et de liquide céphalo-
rachidien. La partie qui reste au fond de la calotte est d'environ
40 à 60 gr. La dure-mère est assez adhérente au crâne : elle est
gorgée de sang. - La pie-mère de la base est légèrement vascu-
larisée; celle de la convexité, surtout dans une largeur de 3 ou
4 centim. au voisinage de la grande scissure, l'est au contraire à
un degré très notable, d'un rouge bleuâtre et un peu oedémateuse.
Il n'y a pas de différence entre les deux côtés.
Lorsqu'on examine la base du cerveau, on constate une différence
très sensible de longueur entre les deux hémisphères : l'hémis-
phère cérébral gauche mesure 18 centim., l'hémisphère droit
déborde le gauche un peu en avant et davantage en arrière.
Les artères, nerfs, tubercules mamillaires, pédoncules, sont symé-
triques, ainsi que les nerfs olfactifs. Les deux hémisphères céré-
belleux sont égaux. -Pas de traces d'athérome.
La pie-mère est mince et s'enlève partout sans entrainer de
substance corticale, sauf en quelques points très rares; sur un des
plis de passage allant de la deuxième à la troisième circonvolu-
tion frontale, on trouve une petite tumeur de la grosseur d'une
lentille, faisant une saillie d'un -à deux millimètres.
Sur ['hémisphère droit, la pie-mère s'enlève facilement; elle est
très mince, en quelques points principalement; Je long de la
grande scissure, on entraine un peu de substance grise; à l'extré-
mité antérieure delà troisième frontale, on trouve une ecchymose
superficielle de la substance grise. L'aspect des circonvolutions
est luisant et rappelle, principalement sur les lobes temporaux et
occipitaux, l'aspect du cerveau des nouveau-nés, sorte d'aspect
gélatiniforme. Pas de lésion en foyer; pas d'induration de la corne
d'Ammon; pas de dilatation des ventricules. Rien aux plexus
choroïdes. - Les deux hémisphères cérébraux décortiqués son
égaux.
Crdne. - Aucune suture de la voûte n'est ossifiée, sauf la
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 313
suture bi-frontale, dont on voit encore distinctement la trace,
surtout sur la table externe; son tiers supérieur n'est pas ossifié
et forme la plus grande partie de la fontanelle. Les sutures sont
très apparentes; au niveau des sutures fronto-pariétales, et,
latéralement, les pariétaux sont quelque peu 'plus proéminents
que le frontal. L'occipital proémine de même sur.les pariétaux.
- La fontanelle antérieure est persistante, son angle postérieur
est cependant beaucoup réduit, elle a de ce fait une apparence
presque triangulaire. Les pariétaux sont minces, hyperémiés; le
frontal est d'une épaisseur moyenne, les deux tables sont peu
développées, le diploé l'est davantage. L'occipital est peu
développé. Vue par sa face interne, la calotte présente une
ossification incomplète, au point de réunion des pariétaux et du
frontal, correspondant à toute la fontanelle anterieure; sur les
côtés on note une ossification incomplète, en arrière des sutures
fronto-pariétales sur un espace d'environ un centimètre de lar-
geur ; l'artère méningée moyenne s'y est creusée des sillons
profonds. Sur le frontal, à droite et près de la suture bi-frontale
et à 4 centim. environ au-dessous du pariétal, on remarque une
dépression arrondie de -1 centim. environ de diamètre.
Hémisphère gauche.- La scissure de Sylvius (pal. III, Se. S.) laisse
à l'état frais une partie de l'insula àdécouvert; après un séjour de
plusieurs mois dans l'alcool tout l'insula et les plis de passage du
lobe temporal se trouvent à découvert. Elle possède deux rameaux
antérieurs ascendants (a', a") et un rameau antérieur horizontal
très profond et un peu sinueux. Le rameau postérieur horizontal
(a3) est très profond, large et se termine dans le lobule pariétal
inférieur après un trajet de 18 millimètres le long de son bord
inférieur.
Le sillon deRolando (S. R.), profond et sinueux,prend son origine
dans la scissure de Sylvius et est interrompu vers son quart infé-
rieur par un pli de passage allant de la frontale ascendante à la
pariétale ascendante.
La scissure perpendiculaire externe (Sc. p. e.) n'est séparée du pli
courbe que par un pli de passage se dirigeant du lobule pariétal
supérieur à la première circonvolution occipitale; son extrémité
inférieure se trouve située à un centim. de l'extrémité postéro-
supérieure de la scissure parallèle.
Lobzele orbitaire. La scissure olfactive est profonde. La scissure
orbitaire assez profonde figure deux accolés par l'un de leurs bords
et possédant deux barres transversales. - Legyrus rectus est peu
volumineux. Les première etdeuxième circonvolutions orbitaires sont
bien développées. La partie moyenne du lobule orbitaire, surtout
au niveau des deux branches transversales du double H, est très
concave. L'incisure qui sépare le lobule orbitaire de la deuxième
Archives, t. XII. 21
314 CLINIQUE NERVEUSE.
circonvolution frontale est trèsprofonde, mais est séparéedu sillon
fronto-marginal par une portion isolée de la deuxième circonvo-
lu41on frontale et atteint à peine la partie antérieure de la
scissure surcilière. -
Lobe frontal. - La scissure parallèle frontale (PL. III, Se. p. f.)
coupe la première circonvolution frontale près de la fente
interhémisphérique; elle est irrégulière, sinueuse, interrompue par
un pli de passage allant de la deuxième circonvolution frontale à
la circonvolution frontale ascendante; elle se continue en has
avec un sillon oblique qui va se jeter dans le sillon de Rolando.
La scissure frontale inférieure (Se. f. i.) sinueuse est interrompue
en avant par deux plis de passage reliant la deuxième circonvolu-
tion frontale à la troisième. - La scissure frontale supérieure
(Se. f. s.) est très irrégulière, très sinueuse, interrompue par de
nombreux plis de passage se rendant de la première circonvolu-
tion frontale à la deuxième.
La première circonvolution frontale (PL. III, F,), très irrégulière,
est découpée par des sillons enchevêtrés et il est par suite assez
difficile d'établir la limite exacte entre elle et la deuxième circon-
volution frontale; elle semble toutefois être dédoublée dans ses
trois quarts postérieurs, mais ce dédoublement est très irrégulier,
très sinueux, très sillonné et relié à la deuxième circonvolution
frontale par quelques plis de passage.
Cette première circonvolution s'insère à la circonvolution fron-
tale ascendante par un pli de passage à niveau, mais étroit, bor-
dant la fente interhémisphérique.
La deuxième circonvolution frontale (F,), qui s'insère à la circon-
volution frontale ascendante par un pli de passage à niveau est
elle-même très sinueuse, irrégulière, comme découpée en plu-
sieurs tronçons par des sillons transversaux et obliques profonds ;
un pli de passage (pp.) la- relie vers son tiers antérieur à la
branche postérieure du V antérieur de la troisième circonvolu-
tion frontale. C'est sur ce pli de passage que se trouve une petite
tumeur de la grosseur d'une lentille (t.), tumeur un peu surélevée,
énucléable et à la partie supérieure de laquelle la pie-mère est
adhérente. La troisième circonvolution frontale (F3) est remar-
quable par son développement, et le dédoublement de son cap;
en effet celui-ci représente un double V assez développé, coïncidant
avec les deux rameaux ascendants antérieurs de la scissure de
Sylvius, dont nous avons déjà parlé plus haut.
La circonvolution frontale ascendante (FA) assez maigre, sauf
vers sa partie médiane, est coupée par deux sillons antéro-posté-
rieurs. Cette partie médiane isolée est reliée à la deuxième cir-
convolution frontale par un pli de passage à niveau et semble la
continuer; il en résulte que celle-ci parait s'insérer par un pli de
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 315
passage à niveau, qui intenompt la continuité du sillon de Ho-
lando, sur la circonvolution pariétale ascendante. La partie infé-
rieure de la circonvolution frontale ascendante est accolée au
pied de la 3e circonvolution frontale, fait corps avec lui, 1, et ne
s'en dislingue que par un pli vertical à peme marqué. - La cir-
convolution pariétale ascendante (P A) est assez maigre.
Le lobule pariétal supérieur (P,) est sinueux, bien développé;
un pli de passage à niveau le relie au lobe occipital.
La scissure interpariétale (Se. i) prend son origine dans la profon-
deur de la scissure de Sylvius tout près du lobule de l'insula et
atteint presque par son extrémité supérieure et verticale la fente
interbénrispliérique; cette extrémité eslhifide et les deux branches
ne sont distantes de cette fente que de 8 millimètres. La branche
ascendante de la scissure représente un Y et forme ainsi une
sorte de scissure parallèle pariétale. La scissure interpariétale
après avoir décrit sa courbe normale se continue ensuite presque
dans le lit du premier sillon occipital.
Le lobule pariétal inférieur (P.) et le pli courbe (P,) sont sinueux,
assez bien développés; un pli de passage relie celui-ci au lobule
pariétal inférieur.
Le lobe occipital (L 0) nettement séparé du lobe temporal est
relié au lobule pariétal supérieur par un pli de passage à niveau
et au pli courbe par un autre petit pli de passage allant à la par-
tie inférieure et antérieure de la deuxième circonvolution occipi-
tale. Tous les sillons et toutes les circonvolutions de ce lobe, de
forme normale, occupent leur position ordinaire, et sont assez
bien développés. .
Le lobe temporal est assez. volumineux, sauf dans' son quar
postérieur, où la deuxième et surtout la troisième circonvolution
temporales se trouvent en retrait, e, sur le lobe occipital et les
parties antérieures du lobe temporal. - La première circonvolution
temporale (T,) se confond avec la partie postérieure du lobule
pariétal inférieur. La scissure parallèle (Se. p.) est sinueuse et très
profonde. La deuxième circonvolution temporale (T,) est bien déve-
loppée dans sa partie antérieure. - La deuxième scissure tempo-
rale (Se. t..) sinueuse, irrégulière, est interrompue par trois plis
de passage se rendant de la deuxième à la troisième circonvolu-
tion temporale qui, elle aussi, est assez bien développée dans ses
parties antérieures. L'incisure préoccipitale (ln, se réunit à la
partie la plus postérieure de la deuxième scissure temporale,
séparant ainsi nettement le lobe temporal du lobe occipital.
On trouve encore quatre circonvolutions temporales transverses,
3, ou plis de passage temporo-pariétuux qui, se dirigeant vers le
fond de la scissure de Sylvius en arrière de l'insula, viennent se
perdre dans le lobule pariétal inférieur.
316 CLINIQUE NERVEUSE.
La première scissure tempol'o-occipitale (Pl. Il, Se. to) est sinueuse,
peu profonde, irrégulière, interrompue par un pli de passage se
rendant de la troisième circonvolution temporale au lobule fusai-
forme (T 0,) peu développé, mais non atrophié. La deuxième
scissure temporo-occipitale (Se. to,) est sinueuse, assez profonde,
interrompue également par un pli de passage allant du lobule
fusiforme au lobule lingual (TOs) en sorte que la'partie postérieure
de la deuxième scissure semble se continuer directement avec la
partie antérieure de la première scissure.
Face interne. La scissure calloso-marginalc (Se. c.m.) est assez
profonde, normale dans ses différentes parties. La première cir-
convolution frontale interne (F,) est bien développée, très sinueuse.
Le lobule pa ? ,ace71ti,al(LP), moyennement développé surtout àsapar-
tie supérieure, présente vers son tiers inférieur un petitsillon super-
ficiel et horizontal de 4 millimètres, relié à la scissure calloso-
marginale par un petit sillon également superficiel partant de son
extrémité antérieure. La circonvolution du corps calleux (C. C. C.)
est bien développée, normale. Le lobe quadrilatère (L 0) est très
développé, en continuité par les plis de passage pariéto-limbiques
antérieur (p. p. a) et postérieur (p. p. p.) avec la circonvolution du
corps calleux, dont il est séparé à sa partie médiane par une scis-
sure sous-pariétale (Sc. sp.).-La scissure perpendiculaire interne
(Se. p. i.) est très profonde, béante. Le coin (C) paraît peu
développé. La fissure calcarine (F. ca), décrit une courbe à con-
vexité supérieure.
Le corps calleux, le corps strié, la couche optique, ne présentent
rien de particulier.
Hémisphère droit. - La scissure de Slvius (PL. V, Sc. S.), dont les
deux lèvres très écartées, laisse voir comme à gauche toutes les
circonvolutions de l'ipsula et les plis de passage temporo-parié-
taux. Elle est bifide à son extrémité postérieure. Les deux rameaux
antérieurs ascendant (a) et horizontal sont normaux et circons-
crivent le cap simple, normal, de la troisième circonvolution fron-
tale.
Le sillon deRolando (S. R.), sinueux, assez profond, est inter-
rompu vers son quart inférieur par un pli de passage allant de la
circonvolution frontale ascendante à la circonvolution pariétale
ascendante.
La scissure perpendiculaire externe (Sc. p. e) est complète et va
se perdre dans le lit de la scissure parallèle.
Lobule orbitaire.-La scissure olfactive est profonde. La scissure
orbitaire est simple, le lobule à son niveau est concave ; on ren-
contre en outre sur les circonvolutions orbitaires de nombreux
plis irréguliers; la branche interne de l'incisure en H vase perder
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 317
dans un petit sillon marginal antérieur. Les circonvolutions du
lobule orbitaire ne présentent rien autre chose de particulier.
Lobe frontal. Il existe de ce côté une scissure parallèle fron-
tale (PL. V, Se. p. t.) complète, ininterrompue, commençant à
4 millimètres de la grande scissure interhémisphérique pour
s'arrêter à 4 millimètres de la lèvre supérieure de la scissure de
Sylvius. La scissure frontale supérieure (Sc. f. s.) est sinueuse,
assez profonde, ainsi que la scissure frontale inférieure (Se. f. i.),
séparée de la scissure parallèle frontale par un pli de passage
allant de la deuxième circonvolution frontale à la troisième ;
cette scissure frontale inférieure est encore interrompue dans son
trajet par un autre pli de passage se rendant de la deuxième
circonvolution frontale au centre du cap de la troisième circon-
volution frontale. La première circonvolution frontale (F,) est peu
développée; la seconde (F,), très irrégulière par suite des nom-
breux plis qui la sillonnent, parait dédoublée et bien développée.
En avant du lobe frontal se trouve un pli de passage transversal,
réunissant les trois circonvolutions frontales et laissant en avant
de lui une petite portion des première et deuxième circonvolutions
frontales. La troisième circonvolution frontale (F,), sinueuse, est
assez bien développée. - La circonvolution frontale ascendante
(F A) également assez bien développée et sinueuse.
La circonvolution pariétale ascendante (P. A.) est maigre, surtout
à sa partie médiane. Le lobule pariétal supérieur (P,), irrégulier,
est très découpé; des plis de passage transversaux le rattachent
au lobule pariétal inférieur. La scissure interpariétale (Sc. i.)
prend son origine^dans la scissure de Sylvius et s'arrête à 12 mil-
limètres de la scissure in ter-hémisphérique; elle est bifide à
son extrémité supérieure et verticale et forme un ),, représentant
une sorte de scissure parallèle pariétale. Au niveau de sa courbe,
puis à sa partie médiane, elle est interrompue par les plis trans-
versaux dont nous venons de parler; elle se prolonge ensuite
presque dans le sillon occipital transverse. - Le lobule pariétal
inféi'icU1' (P ,J, est sinueux, très découpé, irrégulier; le sillon ver-
tical (b) qui le sépare du pli courbe se prolonge en haut au delà
de la scissure inter-liémispliérique. Le pli courbe (P3), irrégulier,
est divisé par le prolongement de la scissure perpendiculaire
externe (c) qui va se jeter dans la scissure parallèle.
Le lobe occipital (L, 0), nettement séparé des lobes pariétal et
temporal, est par suite dépourvu de plis de passage se rendant à
ces deux lobes ; il est assez irrégulier, peu développé, mais on y
retrouve les formes de ses scissures et de ses trois circonvolutions ;
enfin, il est un peu en retrait sur le lobe temporal.
Le lobe temporal est bien développé; sa première circonvolu-
318 CLINIQUE NERVEUSE.
tion (T,) se confond avec la partie postérieure du lobule pariétal
inférieur.-La scissure parallèle (Sc. p.) est sinueuse et très pro-
fonde. Les deuxième et troisième circonvolutions temporales (T, , T3),
sont bien développées, mais à leur partie postérieure elles sont
un peu chagrinées et en retrait comme de l'autre côté. -
La deuxième scissure temporale (Se. t,) est sinueuse, irrégulière,
interrompue par des plis de passage allant de la deuxième à la
troisième circonvolution temporale; en arrière, une de ses por-
tions isolées (sillon occipital antérieur (d) sépare nettement en se
réunissant à l'incisure préoccipitale (Izz. pré.) le lobe temporal
du lobe occipital. Il existe trois circonvolutions temporales (3),
transverses ou plis de passage temporo-pariétaux, situées à la
partie postérieure de l'insula, dont les circonvolutions sont bien
développées.
La première scissure temporo-occipilale (PL. IV, Sc. to) est
interrompue vers son milieu par des plis de passage se dirigeant
de la troisième circonvolution temporale à la première circonvolu--
tion temporo-occipitale (T 0,) sinueuse; un sillon oblique réunit
cette scissure à la moitié postérieure de la deuxième scissure tenz-
poro-occipitale (Sc. to,.). Un pli de passage relie le lobule fusi-
forme au lobule lingual (T. 0,) ; ces deux lobules sont assez bien
développés. ,
Face interne. - La scissure calloso-marginale (Se. c. m.), assez
profonde, est normale dans ses différentes parties; elle communi-
que par un sillon avec l'extrémité de la branche verticale de l'7
grec qui se trouve sur le lobule paracentral : elle se trouve isolée
par un pont de substance nerveuse de l'incisure préovalaire (e),
limitant en avant le lobule paracentral. La première CÏ1'C01WO-
lution frontale interne (F,) est bien développée, sinueuse. Le
lobule paracentral (L P) est plus large, plus développé qu'à
gauche, déborde en avant et en arrière les circonvolutions fron-
tale et pariétale ascendantes. On remarque un peu en avant de
sa partie médiane un sillon en y grec assez profond, et en arrière
un autre petit sillon transversal assez superficiel. La circonvo-
lution du corps calleux (C. C. C.) est bien développée, normale. -
Le lobe quadrilatère (L. Q.), très développé, présente en avant un
sillon transversal profond, communiquant avec la scissure sous-
pariétale (Se. s. p.) en avant et en arrière de laquelle se trouvent
les plis de passage pariéto-limbiques antérieur et postérieur
(p. p. a. p. p. p.).-Lascissure perpendiculaire interne (Sc. p. i.)
profonde se termine à 2 centimètres du bord supérieur de la
fente interhémisphérique, sans aller rejoindre la scissure calca-
rine dont elle est séparée d'un centimètre. En arrière et paral-
lèlement à elle, sur le coin, se trouve une autre scissure (d) plus
profonde qui vase jeter dans la scissure calcarine. Le coin (C.) est
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 3t9 4
assez développé. La fissure calcarine (F. ca.), en dehors des
anomalies déjà signalées, est assez profonde.
Le corps calleux, le corps strié, la couche optique, sont normaux.
Cervelet. ' Les hémisphères cérébelleux paraissent normaux.
Analyse de la peau. Nous avons fait faire deux
analyses de fragments de la peau; voici les notes qui
nous ont été transmises :
1 Analyse de Af. Yvon : .'
320 CLINIQUE NERVEUSE.
Dans les antécédents héréditaires de Th..., nous
ne trouvons aucun idiot ou épileptique; le père, intelli-
gent, présentait seul une malformation du bras gauche,
et, sauf une cousine de la mère au troisième degré, on
n'aurait jamais connu de goitreux dans la famille.
Jusque vers l'âge de quinze mois, le Pacha se serait
développé normalement; il inarchait un peu, était
affectueux et prononçait quelques mots. Il ne peut
donc être. question chez lui de crétinisme congénital
proprement dit. Peut-on faire.intervenir dans l'étiologie
de la maladie son séjour jusqu'à un an,danswn loge-
ment humide, les convulsions ( ? ) et la chute qu'il aurait
faite vers quinze mois ? C'est ce que nous ne saurions
dire. Toujours est-il que c'est vers cette dernière époque
que semble remonter le début de l'affection; la marche,
la parole, etc., loin de progresser, diminuèrent et, en
1880 (à près de vingt ans), nous le trouvons à Bicêtre,
présentant tous les signes de l'idiotie avec cachexie
acladernziue.
Durant le temps où il a été soumis à notre obser-
vation, Th... a été atteint à diverses reprises d'érsi-
pèle, de même que la première malade de Curling;
mais, contrairement à ce qui a eu lieu chez la malade
de Curling, ces érysipèles n'ont nullement amélioré
son état intellectuel. Le traitement (toniques, bains
salés, exercices) auquel il fut soumis permit cependant
d'obtenir une amélioration relativement assez accusée.
En 1879, lorsque l'un de nous a pris possession du
service, le Pacha était gâteux, atteint d'une chute du
rectum déjà ancienne et il demeurait confiné au lit sur
les recommandations de sa mère, sous prétexte qu'il
était très sensible au froid. Aussi avait-il désappris
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 321
à marcher. A l'époque de sa mort, il était propre,
marchait tenu simplement à la main; il était devenu,
au moins par moments, plus expansif, mais son état
intellectuel ne s'était pas sensiblement modifié; son
répertoire de mots restait toujours à peu près aussi
pauvre; souvent il fallait une excitation forte, c'est-à-
dire élever la voix et répéter les questions, pour attirer
son attention, pour le faire regarder; les réponses ne
se produisaient qu'avec lenteur et paresse. Parfois, à
la visite, lorsqu'il était bien disposé, si on ne s'arrê-
tait pas à lui, il regardait, puis poussait un cri pour
attirer l'attention.
Nous ajouterons que tout signe de puberté faisait
défaut et que Th..., tant au point de vue intellectuel
que physique, avait subi un véritable arrêt de dévelop-
pement.
Voilà pour le côté clinique. Si maintenant nous
examinons les faits principaux qui nous sont fournis
par l'autopsie, nous constaterons l'absence de toute
trace de glande thyroïde, la présence de différents
épanchements séreux dans les plèvres, le péricarde,
un météorisme intestinal en rapport avec l'atonie
musculaire des fibres lisses de l'intestin et des fibres
striées musculaires de la paroi abdominale.
Le tissu adipeux sous-cutané, abondant dans toutes
les régions, comme oedémateux, luisant, mais en réalité
non oedémateux, sur la paroi antérieure du thorax,
formait aux aisselles et au-dessus des clavicules ces
masses ou tumeurs mollasses, d'aspect lipomateux, que
nous avons décrites. Ces masses ne présentaient pas
de limites tranchées et se confondaient à leur péri-
phérie d'une façon diffuse avec le tissu adipeux sous-
322 CLINIQUE NERVEUSE.
cutané environnant. Elles avaient tous les caractères
qui sont représentés dans la figure 7 (p. 144).
Enfin, comme dans un certain nombre d'observa-
tions du même genre, celle de Curling entre autres,
nous trouvons la fontanelle antérieure persistante.
En ce qui concerne le cerveau, la description minu-
tieuse que nous avons donnée nous dispense de faire
de longues réflexions. Toutefois nous devons signaler,
d'une façon spéciale, les points suivants :
1° Les circonvolutions sont en général petites, et, en
particulier les circonvolutions frontales et pariétales
ascendantes. Nous insisterons spécialement sur la troi-
sième circonvolution frontale gauche, dont le cap est
dédoublé, cette circonvolution est, du reste, bien dé-
veloppée sauf le pied qui fait corps avec la frontale
ascendante et ne s'en distingue que par une scissure
très superficielle. Ce dédoublement n'avait encore été
signalé jusqu'ici que sur certains cerveaux d'hommes
distingués, entre autres sur celui de Gambetta; chez
celui-ci, le cap antérieur était plus développé, au con-
traire du Pacha où le cap postérieur est plus déve-
loppé ; on voit que ce dédoublement du cap peut aussi
se rencontrer sur des idiots à parole presque nulle.
Ce fait démontre une fois de plus que, si la forme des
circonvolutions est importante, leur structure intime
l'est encore davantage, et que ces deux choses ne
peuvent être séparées.
Nous appellerons encore l'attention sur les plis de
passage se rendant de la deuxième circonvolution fron-
tale à la frontale ascendante et qui, en allant par l'in-
termédiaire de celle-ci s'insérer à la pariétale ascendante,
semblent continuer la deuxième frontale jusqu'à la
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 323
pariétale ascendante. Cette disposition, qui est loin
d'être très rare est tantôt complète, tantôt incomplète.
Enfin nous trouvons quatre plis de passage temporo-
pariétaux à gauche, et trois à droite.
2° Les sillons sont remarquables par leur irrégu-
larité ; la scissure interpariétale se continue de chaque
côté dans le premier sillon temporal, et la scissure
perpendiculaire externe descend, comme chez la singe,
jusqu'au lobe temporal. La scissure de Sylvius laisse
des deux côtés le lobule de l'insula à découvert.
Les petites scissures sont également très irrégulières,
sinueuses, et ne permettent souvent que de limiter avec
peine les parties appartenant à telle ou telle circon-
volution. Nous appellerons seulement l'attention sur'
la forme étoilée de la scissure sous-pariétale gauche.
3° Enfin le corps pituitaire paraissait sensiblement
hypertrophié.
Nous reprenons maintenant l'exposé des cas d'idiotie
crétinoïde avec cachexie pachydermique, publiés par les
auteurs . Voici un cas de M. Bouchaud', paru en 1884,
et que nous reproduisons complètement en raison de
l'intérêt qu'il présente.
Observation VII. - Crétinisme sporadique compliqué de nanisme,-
Pas d'antécédents héréditaires. - Coqueluche et rougeole à sept
mois ; arrêt de développement physique et intellectuel consécutif.
Etat du malade à seize ans et demi. - Aucun signe de puberté. -
Idiotie : parole limitée à quelques monosyllabes; défaut d'at-
tention; marche très difficile; gâtisme; inertie physique. Ery-
thème; refroidissement progressif; mort. Autopsie : péricardite ;
absence du corps thyroïde.
W... (François), âgé de seize ans et demi, est admis à l'asile
de Lommelet, le 22 avril 1882. Son dossier ne contenant d'autres
1 Journal des sciences médicales de Lille, 1853, 5 et 20 décembre.
324 CLINIQUE NERVEUSE.
renseignements que ceux qui concernent son état actuel, M. Lalo,
étudiant en médecine, qui a bien voulu se charger de prendre
des renseignements sur les lieux, est parvenu à nous fournir les
documents suivants : Né à Béthune, V... a vécu dans une maison
qui est établie dans de bonnes conditions hygiéniques; elle est
aérée et propre ; il n'y a pas de marais dans les environs. Dans
la ville et le pays voisin, on ne rencontre pas de crétins; le goitre
y est rare et la population est saine. - Le père, âgé actuellement
de quarante-cinq ans, paraît très intelligent; il est d'une consli-
tution robuste et sa taille est de 1 m. 70. - La mère est morte à
l'âge de 40 ans, dix-huit mois après être accouchée de son dernier
enfant, à la suite d'une maladie dont il n'est pas possible de savoir
le nom. - Il y a eu cinq enfants; quatre filles et un garçon. Ils
sont tous vivants. Tous sont forts et bien constitués, sauf la fille
cadette, âgée de quinze ans, qui est un peu délicate. La fille ainée,
âgée de vingt-deux ans, qui a été nourrice à Paris, est bur lepoint
d'accoucher de son deuxième enfant et se propose encore de
redevenir nourrice. Le troisième enfant est un garçon, âgé de
treize ans, et les deux autres sont des filles, âgées de huit et cinq
"ans. Rien à noter du côté des autres parents; les ascendants du
côté du père et de la mère sont morts à un âge avancé.
W..., né à terme, est venu au monde bien développé ; il aurait
pesé, s'il faut en croire le père, 12 livres à sa naissance, ce qui
est assurément une exagération, mais donne une idée delà force
dusujet. La croissance fut normale jusqu'à l'àge de sept mois; à
celte époque l'enfant aurait eu la coqueluche et la rougeole, et, à
partir de ce moment, il aurait cessé de grandir d'une manière
sensible. L'intelligence a subi le même arrêt de développement
que le corps.
Etat actuel. - Vs... ressemble beaucoup à un petit enfant; il en
a le caractère et la taille ; on lui donnerait deux à trois ans, si sa
face n'offrait un air vieillot, bien différent de celui de cet âge, et
si la grosseur des diverses parties du corps, de la fête, du tronc,
des membres, n'était démesurément exagérée. La tête, en effet,
est volumineuse, le col est court, le tronc est trapu, et les membres
sont fort gros. - Le crâne n'est pas sensiblement déformé ; il est
symétrique et un peu aplati de haut en bas. La fontanelle anté-
rieure persiste ; on sent un espace membraneux à travers lequel
on pourrait passer le bout du doigt. La chevelure est blonde, peu
abondante. - La face est large, le front peu élevé; le ne ? déprimé
à son origine est très large à sa base. Les lèvres sont très épaisses
et l'ouverture buccale, ordinairement béante, donne issue à la
langue, qui est très volumineuse et semble ne pouvoir se loger
que très difficilement dans la bouche, aussi est-elle habituellement
en partie hors de cette cavité. Les dents sont petites, mal confor-
mées, il en manque plusieurs et la plupart de celles qui existent
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 325
sont cariées. Le ventre est saillant, arrondi, volumineux. Pas de
poils au pubis. La verge est celle d'un enfant; les testicules ont la
grosseur d'une petite noisette.
La peau est pâle, lisse et peu tendue ; elle est mobile sous les
tissus sous-jacents qui sont mous et flasques. On sent qu'il existe
une légère couche de graisse sur toute la surface du corps. Les
mains et les pieds sont potelés comme ceux d'un enfant ; la peau
y est même tendue et d'une teinte foncée, légèrement rougeâtre,
on dirait de ].'oedème. des nouveau-nés. - La muqueuse des lèvres
et des conjonctives est également pâle ; les paupières supérieures
sont légèrement gonflées.
L'intelligence a subi un arrêt complet de développement, c'est celle
d'un enfant qui'commence à parler, avec moins de vivacité et
plus de lenteur dans ses manifestations. Aussi les traits du visage
sont-ils peu mobiles et presque sans expression. Parfois cepen-
dant l'enfant sourit; il devient même gai dans certaines circons-
tances ; ainsi quand on lui met un chat entre les mains, il le
caresse et prend une figure riante et pousse quelques cris de joie;
il est toujours calme et habituellement silencieux ; il fait à peine
entendre par moment un bruit inarticulé, une espèce de gémisse-
ment (heen..., rarement il profère quelques mots faciles à pro-
noncer, tels que cat (chat), faim, etc. 11 prête une faible attention
.ù ce qui se passe autour de lui et ne comprend que quelques
expressions très simples, comme celle de donner la main, quand
on le lui demande, et autres semblables. Ces désirs sont très bor-
nés et peu nombreux. Il indique avec le doigt ce qu'il veut ob-
tenir ; s'il éprouve, par exemple, l'envie de monter sur sa chaise
ou en descendre. 11 est dénué de sentiments affectueux, il ne s'at-
tache à personne et ne parait pas reconnaître ceux qui lui don-
nent des soins.
La sensibilité physique est également fort obtuse; il se montre
très peu impressionnable quand on irrite la peau. Les sens sont
intacts ; il voit et il entend ; l'odorat et le goût paraissent cepen-
dant peu développés. Il est faible et très apathique, aussi
reste-t-il la plus grande partie du temps assis et immobile. Il
* peut à peine marcher seul, on est obligé de lui donner la main et
encore n'est-il capable de faire que quelques pas. Outre qu'ils
sont peu énergiques, tous ses mouvements se font remarquer par
leur peu d'activité.
L'appétit est médiocre, il mange peu et très lentement; l'em-
bonpoint est cependant relativement considérable. Incapable
d'avertir quand il a un besoin à satisfaire, il est naturellement
gâteux ; c'est à peine s'il mange seul les aliments qu'on lui sert.
Les battements du pouls sont extrêmement petits et faibles ; on
les sent difficilement au poignet. Ceux du coeur sont également
326 6 CLINIQUE NERVEUSE.
très faibles, mais réguliers. Quant aux bruits cardiaques, ils sont
nets, mais profonds, sourds. La respiration et la température
axillaire sont sensiblement normales. Voici les chiffres obtenus :
P. 80; R. 1S; T. ax. 361,9. Le poids du corps et les dimensions
de quelques-uns des organes les plus importants se résument
ainsi : .
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 327
pérature centrale; hier seulement elle a été prise et on a trouvé :
1 h. de l'après midi, T. ax. 32°,4. La température atmosphérique
est assez froide. Celte nuit le thermomètre est descendu vers 4 ou
5° au-dessous de zéro, mais dans les sallps de l'infirmerie, la tem-
pérature est toujours assez élevée et ne parait pas descendre au-
' dessous de 15°.
Ce matin, la peau est encore froide et le thermomètre placé sous
l'aisselle nous donne : à 8 h. du matin, T. 33°; P. 64, à 1 h. du
soir, T. 33°. L'inappétence persiste, W.... ne prend aucun aliment
solide; il accepte simplement un peu de lait. Il est affaissé, reste
couché sur le côté droit ou à demi assis dans son lit.
Il ne tousse pas, la respiration est un peu gênée. A l'ausculta-
tion, affaiblissement du murmure vésiculaire en arrière et en bas;
pas de râle; bruits du coeur sourds, profonds, difficilement per-
çus. Pouls presque insensible.
15. L'érylhème a à peu près entièrement disparu, mais
l'abattement est considérable. T. ax., le matin, à 8 h., 34°; le
soir, à 6 h. 1/2, 34°. Respiration lente et inégale.
16. Même état. Le matin, à 8 h., T. ax. 34° 6. Le soir, à
7 h., 34°,i. - Mort dans la nuit, à 5 heures du matin.
Autopsie. Nous procédons à l'examen cadavérique avec le
concours de deux de nos collègues. Des incisions faites à la peau
mettent à découvert une épaisse couche de tissu cellulo-graisseux.
Nulle part on ne trouve d'infiltration oedémateuse, ni aux mains,
ni aux pieds, ni à la face. On enlève la partie antérieure du tho-
rax et une poche globuleuse, d'un volume considérable, apparaît
sur la ligne médiane. C'est le péricarde distendu par une grande
quantité de liquide. Il présente 11 centimètres dans le sens de-la
hauteur et dans le sens de la largeur. Une ponction faite à l'aide
d'un trocart permet de retirer 450 gr. de sérosité claire, transpa-
rente, de couleur légèrement citrine où le refroidissement ne fait
naitre aucun nuage; mais qui, sous l'influence de la chaleur et
de l'acide nitrique, se coagule en masse. Le péricarde, incisé et vu
par sa face interne, parait légèrement opaque et un peu grisâtre.
Sur la crosse de l'aorte on remarque quelques petits vaisseaux
dilatés et gorgés de sang et même de petites ecchymoses. Le
coeur est dislendu par une grande quantité de caillots sanguins
qui remplissent les cavités droites et gauches. La valvule mitrale
est légèrement opaque, grisâtre et uu peu épaissie. Les valvules
sigmoïdes de l'aorte, leurs bords libres surtout, sont très épaisses,
légèrement rosées et demi-transparentes. On dirait une infiltration
de matière gélatineuse, de gelée de pommes; mais la consistance est
assez ferme; on trouve une certaine résistance quand on les com-
prime avec les doigts. A l'intérieur de l'aorte, dans toute son
étendue, près du coeur surtout et dans l'intérieur des carotides à
328 CLINIQUE NERVEUSE.
un degré moindre, on trouve une multitude de petites saillies, du
volume d'un petit grain de mil, d'un gris jaunâtre, non dures
comme les dépots crétacés, mais demi molles. -
Le foie, la rate, les reins, les poumons ne présentent pas de
lésions qui méritent d'être notées. Cependant, du côté droit, la
plèvre est le siège de nombreuses adhérences, déjà anciennes et
assez résistantes. '
Les testicules sont de la grosseur d'une petite noisette. Lalangue
est relativement énorm13; de l'extrémité du V lingual à ]a pointe,
elle mesure 7 cent. Sa largeur est de cent. et son épaisseur de
2 1 3 cent. Le larynx et la trachée ayant été enlevés en même
temps que les poumons et l'oesophage, après une incision de la
peau pratiquée sur la ligne médiane, on recherche le corps THY-
RoiDE entre la trachée et les muscles qui ont été assez bien con-
servés et on n'en trouve aucune trace.
Le grand sympathique de la région thoracique parait normal ;
au cou, on ne trouve que deux ganglions; l'inférieur a une lon-
gueur d'un centimètre et demi; le supérieur est beaucoup plus
volumineux : il a une longueur de 2 centimètres environ et une
largeur de 5 à 6 millimètres.
Les enveloppes du crâne s'enlèvent facilement. La boite crâ-
nienneayantété sciée, il devient impossible de le décoller de la
dure-mère. Celle-ci adhère très fortement aux sutures osseuses et
surtout à la fontanelle antérieure qui, n'étant pas ossifiée, est cons-
tituée par une membrane fibreuse, forte et étendue. Le cerveau
parait régulièrement développé et semblable à celui d'un adulte.
Les principales circonvolutions sont bien dessinées et volumineuses;
les sillons sont profonds et étroits.
La dentition est très défectueuse. Nous trouvons : Incisive,
,2-;cauine ? ; premi8remolaire,- a=a-;deuyièmemolaire,
-I'rr°;0,r . L'extraction de ces dents nous apprend que ce sont des
dents de la seconde dentition ; les premières n'ont qu'une racine
conique très longue, les grosses molaires sont plus ou moins
cariées; de quelques-unes il ne reste plus que la racine.
Les principaux organes ont été pesés et nous ont donné les
chiffres suivants : .
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 329
On fait macérer le squelette et on trouve, au bout de peu de
temps, que tous les os du crâne se sont séparés les uns desautres,
ce qui indique que la soudure des articulations était fort incom-
plète. Les epiphyses des os longs se séparent également de la
diaphyseavec une grande facilité.
M. Bouchaud, après avoir rapporté ce cas qu'il rat-
tache au crétinisme sporadique, croit devoir rejeter
l'hypothèse du myxoedème en se basant sur ce qu'il n'a
trouvé à l'autopsie ni sérosité, ni substance colloïde,
mais simplement une épaisse couche de graisse sous-
cutanée. Il est noter, dureste, que l'examen chimique
de cette peau n'a pas été pratiqué et que la présence
de la mucine a paru faire défaut dans un certain nom-
bre de cas de myxoedème. Tous les autres symptômes
observés par M. Bouchaud sont bien ceux de l'idiotie
crétinoïde avec cachexie pachydermique. L'auteur en a
lui-même le sentiment, car, à plusieurs reprises, il in-
siste sur le rapprochement qui peut être établi entre le
crétinisme et le myxoedème. Il est probable que, s'il
avait eu l'occasion de voir auparavant quelques cas
types de myxoedème, il n'aurait pas hésité. Nous ajou-
terons que l'absence de la glande thyroïde fournit un
argument puissant en faveur de notre interprétation.
Le Progrès médical a publié, le 4 février 188 ? un
autre cas d'idiotie crétinoïde, observé par M. Char-
pentier dans le service de Legrand du Saulle. Nous le
relatons tel qu'il a paru à cette époque.
Observation VIII. Oncle paternel aliéné; tante maternelle rachi-
tique. Carie lombaire à cinq mois, puis convulsions jusqu'à
onze mois; affaiblissement physique et intellectuel. Idiotie com-
plète ; alitement ; gdtisme; marche et parole nulles; bouffissure de
1 Charpentier. Nouveau cas de myxoedème ou cachexie pachydep-
mique.
Archives, t. XII. 22
330 CLINIQUE NERVEUSE.
la face; tuméfaction des paupières; épaississement de la langue ; ,.
bave; oedème sur les mains ; cheveux rares; absence de goitre.
La nommée Sachse Elise, quatre ans, admise en février 1881,
présente un ensemble de symptômes qui rappellent la cachexie
pachydermique, expression heureuse de M. le professeur Charcot,
pour désigner le myxoedème des auteurs anglais ou une forme de
l'état crétinoïde de M. Baillarger.
La physionomie de la malade attira notre attention parla res-
semblance qu'elle offrait avec le Pacha, idiot de Bicêtre, dont
M. Bourneville a publié l'observation, comme cas de cachexie
pachydermique. En effet, elle a le visage bouffi, arrondi transver-
salement, en forme de boule ; les paupières sont tuméfiées, immo-
biles, les yeux à peine ouverts, chassieux, le regard est triste,
l'air pleurard ; le nez épaté est épaissi ; les joues violacées, froides,
tendues et bombées contrastent avec le fond blanc jaunâtre du
teint qui a une couleur de miel ; la langue, épaissie pend presque
constamment entre les dents et les lèvres qui laissent baver la
salive. La bouffissure de la face nous conduisit à l'examen général
de l'enfant, et nous constatâmes le même état de la peau sur
les membres supérieurs et inférieurs, à l'abdomen et aux reins,
mais, nullement à la région thoracique ; partout mêmes carac-
tères : sensation de froid désagréable au toucher de la peau qui
n'est ni sèche, ni écailleuse, ni gluante; teinte violacée surtout
aux lombes, aux fesses et aux extrémités ; celles-ci sont déformées
et massives. Aux mains, le creux palmaire est remplacé par une
surface bombée, la peau est épaissie, le pli que l'on y produit en
la prenant entre les doigts mesure plus d'un centimètre; l'im-
pression du doigt ne s'y marque pas comme dans l'oedème, mais
donne une sensation de résistance, mollasse et élastique à la fois.
Pas d'adhérences de la peau aux organes sous-jacen ts sur lesquels
on parvient à la faire glisser; pas de troubles appréciables de la
sensibilité cutanée. Les caractères pathologiques de la peau dimi-
nuent mesure que l'exploration remonte vers les parties supé-
rieures de l'abdomen et n'existent plus au thorax qui, ainsi que
le cou,'présente une peau normale; l'empâtement signalé des
régions sus-claviculaires comme caractéristique du crétinisme
congénital est nul.
Les cheveux sont rares, les ongles normaux, les dents jaunâtres;
absence des molaires; les narines sont à peine visibles ; rien aux
appareils digestif, respiratoire, circulatoire, biliaire et rénal;
rien au coeur,pas d'albumine dans les urines. Le cri est guttural,
enroué, d'ailleurs rare. Pas de goitre; pas de déformation crâ-
nienne, ni des oreilles; pas de déformation rachitique, sauf les
vestiges d'une carie lombo-sacrée, ainsi qu'en témoignent des ci-
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 331
caprices anciennes de cautérisation. Pas d'autres phénomènes
scrofuleux, pas de manifestations syphilitiques.
Quant aux troubles intellectuels, qui sont des plus-manifestes,
ce sont ceux de l'idiotie complète. La malade reste couchée dans
son lit, grande gâteuse, immobile, dans un état de mutisme
absolu, triste et silencieuse ; elle ne sait pas diriger son regard,
ne peut tenir la tête, remue les membres, mais sans les diriger,
ne peut se tenir debout : Depuis son entrée aucun changement ne
s'est produit, aucun trouble n'est survenu.
Voici le» renseignements que nous avons pu nous procurer.
L'enfant est née à Paris, de parents bien portants, ni crétins ni
goitreux. Dans la famille, un oncle paternel aliéné à Ville-Evrard,
une soeur maternelle rachitique; l'enfant a deux soeurs plus jeunes
qu'elle et bienportantes, sans vice de conformation. A la naissance,
l'enfant, de bonne santé, n'offrait rien d'extraordinaire et ressem-
blait aux autres enfants, le corps se développa régulièrement, une
chevelure assez forte apparut ; mais, à cinq mois, elle fut traitée
pour une carie lombaire qui se compliqua de crises convulsives,
répétées cinq fois par jour et qui durèrent six mois. C'est sur
ces entrefaites que la mère remarqua la bouffissure de la peau
qui, depuis, n'a pas diminué.
Ce ne fut que plus tard qu'elle remarqua l'empâtement des
membres inférieurs, qu'elle rapportait d'ailleurs à la carie verté-
braye. C'est aussi à la même époque que les cheveux commen-
cèrent à tomber, que le cri devint plus rauque et plus sourd, que
le regard perdit de sa vivacité, et que l'apathie et l'abattement se
manifestèrent. Voyant qu'aucun phénomène intellectuel ne se dé-
veloppait, la mère prit le parti de faire admettre son enfant à la
Salpêtrière.
La malade est morte un mois après la publication
de cette observation d'un érysipèle avec broncho-
pneumonie double. L'autopsie n'a pu malheureuse-
ment qu'être faite d'une façon imparfaite par suite de
circonstances particulières. L'attention de M. Char-
pentier n'ayant pas été attirée sur la glande thyroïde,
cet organe n'a pas été examiné. On constata un amin-
cissement très prononcé de la voûte crânienne, une
ménino-encéphalite(2). Le tissu adipeux sous-cutané
criait sous le scalpel, était plus développé sur la
moitié droite du corps; à la région lombaire il avait
332 CLINIQUE NERVEUSE.
deux centimètres d'épaisseur à droite, un centimètre
à gauche.
L'enfant dont il s'agit était évidemment atteinte de
myxoedème ; ce diagnostic avait été confirmé par
M. Charcot. Nous ajouterons que l'observation cli-
nique constate l'absence de tout goitre, et que Legrand
du Saulle avait porté le diagnostic de crétinisme.
Les deux cas suivants sont empruntés aux journaux
anglais. Le premier appartient à M. Coxwell et a été
présenté à la Société clinique de Londres comme étant
celui d'un enfant présentant des symptômes ressemblant
à ceux du myxoedème.
Observation IX. - Développement physique et intellectuel normal
jusqu'à <'< ! ? 6 de huit «Hs ; puis somnolence, perte de la mémoire,
parole pâteuse et indistincte, démarche incertaine; gonflement des
paupières inférieures. Diminution de la glande thyroïde ; abais-
sement de la température; insomnie : cris ; perte du langage arti-
culé; affaiblissement des facultés intellectuelles.
Il s'agit d'une enfant de treize ans présentant des symptômes
ressemblant à ceux du myxoedème. Jusqu'à l'âge de huit ans, elle
ne différait en aucune façon des autres enfants et elle pouvait lire
un chapitre de la bible ou une histoire aussi bien que sa mère ;
elle savait écrire et apprenait l'arithmétique. Survint alors un
grand changement; elle tombait souvent de sommeil, même en
mangeant; sa mémoire devint défectueuse, et si on l'envoyait
faire quelque commission, elle errait sans but. Dernièrement sa
parole devi nt épaisse et indistincte ; elle souffrait de maux de tête,
sa tête s'inclinait sur la poitrine; les mains et les pieds devinrent
très froids, les jambes très faibles et la démarche incertaine. Elle
fut admise dernièrement à l'hôpital national des paralytiques et
épileptiques, dans le service dur Hughlings Jackson. Son facies
donnait l'idée du myxoedème, sa peau était translucide avec une
tache circonscrite de rougeur au centre des joues; les paupières
inférieures étaient enflées; le nez large, les yeux proéminents et
bien formés. La glande thyroïde semblait diminuée, et il n'y
avait aucune tumeur graisseuse anormale, au cou ou ailleurs. La
t The British medical Journal, 20 janvier 1883.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 333
température tomba fréquemment à 3 : ï°, 4. Elle restait souvent t
sans repos la nuit et elle avait souvent des attaques de cris. La
force du langage diminua, au point, en dernier lieu ne pouvoir
articuler un son, on voyait les lèvres remuer sans résultat pen-
dant qu'elle essayait de parler. Elle ne pouvait embrasser sa mère
ou ne pouvait gonfler ses joues et la nourriture restait quelquefois
sept ou huit minutes entre les dents et les lèvres. On constata
enfin une obnubilation générale de l'intelligence.
Il nous paraît inutile d'insister sur les symptômes
présentés par cet enfant qui sont ceux du myxoedème,
il nous suffira d'appuyer sur la constatation faite par
l'auteur de la diminution de la glande thyroïde.
Le second cas est dû à M. Armand Routh, qui l'a
publié dans le Médical Press and Circular, sous le
titre de « Un cas de crétinisme sporadique, avec appa-
rence de myxoedème »'. '
Observation X. Rachitisme; absence probable du corps thyroïde,
tuméfactions lipomateuses sus-claviculaires et axillaires; marche
lente, indécise et chancelante; parole lente et monotone; idéation
lente; lecture et écriture, nulles; mémoire seulement des faits an-
té1'ieurs à l'tige de sept ans; absence de signes de puberté.
Elise H..., âgée de vingt-cinq ans, est une pensionnaire de la
maison des femmes incurables, Marylebone Road, elle est née
près de Southampton, dans le llampshire. Elle était l'ainée de
quatre enfants dont les parents, âgés .respectivement de vingt-
quatre et vingt-deux ans, étaient en pleine santé au moment de
sa naissance. Le père cependant mourut douze ans et la mère
seize ans plus tard de phthisie, maladie qui a causé aussi lamort
de la soeur de la malade à dix-sept ans et de la soeur de sa mère
à vingt-sept ans. Le père était né dans le Hampsphire etiamèrb
dans le Berkshire et il n'y avait aucune consanguinité entre
eux.
Jusqu'à l'âge de sept ans, la malade était comme les autres
enfants, mais plus grasse que d'ordinaire et on la comparait à
un « grand gâteau blanc » parce qu'elle était grasse, flasque et
couleur de pâte blanche. Pendant qu'elle étai t enceinte d'elle, sa
mère fut effrayée par un laureau. A sept ans, celle fille cessa de
' Médical Presse and Circulai', 14 niai 1884.
334 CLINIQUE NERVEUSE.
grandir, mais elle devint plus grosse et plus flasque, lente dans
ses mouvements et si stupide que toutes les tentatives pour lui
apprendre à lire et à écrire .furent vaines. A huit ans, elle vint
à Londres et devint moins habile à se conduire et plus niaise. Ses
amis disent que depuis il n'y avait eu peu ou point de change-
ments, excepté qne dernièrement elle commença à maigrir.
Antécédents héréditaires. - A l'exception de l'apparente héré-
dité de tuberculose, il n'y avait aucuns antécédents héréditaires
de maladies, tels que syphilis ou mal de Bright, aucun antécé-
dent d'alcoolisme, ni de folie ou de crétinisme dans la famille.
Une soeur de la malade, âgée de vingt-trois ans, jouit d'unebonne
santé, est bien développée, mais quelque peu anémique. Elle
présente une hypertrophie delà glande thyroïde, qui a diminué
par le traitement et un souffle systolique à la pointe se propageant
dans l'aisselle, endocardite valvulaire consécutive à une attaque
de rhumatisme articulaire dont elle fut atteinte. La malade a
aussi un frère bien portant âgé de dix-neuf ans, actuellement
soldat; tous les enfants sont nés dans IeHampshire.
Etat actuel. Taille : im05, taille moyenne d'un enfant de cinq
ans. Poids : 35 kilogr. 240. Elle est arrêtée dans sa croissance et
son squelette est altère par le rachitisme. Il existe une lordose
bien marquée. Les tibias sont courbés. Les épiphyses des os des
membres inférieurs sont quelque peu hypertrophiées, agrandies.
A leur union avec leur cartilage, les côtes présentent un chapelet
rachitique; dolichocéphalie.
La face est absolument sans expression et les traits effacés;
elle est gonflée; les lèvressont épaisses, très colorées et informes;
la bouche est généralement ouverte, le nez est épaissi et élargi
entre les yeux, les narines dilatées, les oreilles grandes et plates.
La tête ne pend pas en avant, mais le cou semble raccourci,
perdu dans la tuméfaction sus-claviculaire.
La peau est pâle et couleur de cire, excepté à la face où il y a
une légère rougeur, absente quelquefois; sur les joues pendantes
et flasques et sur les pieds et sur les jambes, où la circulation est
si pauvre qu'il y a un état chronique d'engelures. La (peau est
sèche etdure par places, mais la paume des mains est quelque-
fois moite. Les mains ont la forme d'une bêche. Il n'y a pas de
véritable oedème. Les cheveux sont couleur de jais, assez épais,
mais durs.
Sa température en moyenne est de 37" dans le rectum, mais la
température de la surface est toujours subnormale 35°ou 36°dans
l'aisselle et dans l'aine; une fois seulement elle s'est élevée à 37°,
mais après un séjour de quelques heures sous îles couvertures du
lit. il..
Le corps thyroïde ne peut pas être senti. Au-dessus de la 1 : lavi-
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 335
cule de chaque côté, immédiatement au-dessus de l'os, il y a les
tuméfactions bien marquées, qui glissent sous la pression et,
quoique donnant aux doigts la sensation du tissu lipomateux ou
myxomateux, rappellent également la sensation éprouvée en
saisissant un varicocèle.
Au-dessous des tuméfactions on entend un murmure respiratoire
claire, sans aucun bruit morbide. On trouve de pareilles tuméfac-
tions sous-cutanées sur la ligne axillaire postérieure. L'abdomen
est pendant, ce qui est dû en partie au bassin qui est très bas.
L'ombilic fait saillie et les droits de l'abdomen n'adhèrent pas à
la ligne médiane.
La malade peutmarche)- lentement et en chancelant pendant une
petite distance, mais souvent elle tombe subitement; aussi elle
ne marche jamais sans appui à sa portée. Les jambes semblent
incapables de porter le poids du corps et cèdent tout d'un coup
aux chevilles ou aux genoux. Les mouvements des bras sont
libres, mais elle fait tout lentement et avec méthode quoique sans
hésitation. Elle ne s'habille paselle-même, parce qu'elleprendrait
toute la matinée pour le faire, mais elle peut mettre et enlever
ses habits si on lui laisse tout son temps.
La parole est lente et monotone, mais sur un ton très élevé. Elle
répond assez correctement aux questions, mais lentement. Elle
parait mettre plus de temps que d'habitude pour comprendreune
question et, par suite, encore plus de temps pour formuler la
réponse. I
Système nerveux.-La malade ne peut ni lire, ni écrire, et tout
essai pour lui apprendre quelque chose a échoué; en fait il est
impossible de fixer son attention. Elle ne peut se rappeler les
faits récents', mais se souvient des faits arrivés avant son dé-
part de Hampshire à sept ans, la croissance et l'intelligence
semblant s'être arrêtée à cette époque. Le sommeil est bon et
lourd ; quoique presque inditlérente à la douleur, elle se plaint
souvent du froid. Les réflexes rotuliens sont exagérés. Rien ne
parait l'intéresser plus longtemps que quelques secondes, mais
quand on lui parle gaîment, une lueur 'de plaisir traverse sa
figure. Autrement sa physionomie est sans mouvements, dure et
quelque peu triste. La vue est bonne et l'examen opthalmosco-
pique ne décèle rien d'anormal. Ses pupilles sont un peu dilatées
et paresseuses.
Appareil urinaire. La malade rend en moyenne 708 gr. d'u-
rine (25 onces) en 24 heures. Poids spécifique, 1.015. Ni sucre, ni
albumine, ni dépôts. Quantité d'urée faible, à peu près Il de la
1 ]1 est à observer que le même phénomène se produit chez le vieillard
dont les facultés intellectuelles déclinent.
336 CLINIQUE NERVEUSE.
quantité normale 10,S grammes. Ce résultat est obtenu par la
méthode des Ors Russell et West.
Digestion.- La langue n'est pas notablement agrandie et pas
entamée par les dents. L'angle facial est grand, les dents sont
mauvaises et plusieurs ont été enlevées, par carie. Les alvéoles
* sont extraordinairementproéminentes et la muqueuse des gencives
est très épaisse. L'appetit est bon; l'haleine est généralement
mauvaise ; constipation. La malade se plaint continuellement
d'avoir la bouche amère.
Circulation. Pouls, 72. Il est très difficile de sentir le pouls
au poignet, à cause de sa distance de la surface et de sa faiblesse.
Bruits du coeur normaux mais faibles.
Sang. - Le sang examiné par le Dr Montagu-Murray au moyen
de rhoemocytomètre et de l'hoemodynamomètre de Gowers et au
microscope, le D' Murray dit que la proportion des globules
blancs ou globules rouges estde 1 à 90; que les globules rouges
du sang en proportion à l'échelle normale est de 86 p. 100, tandis
que l'hémoglobine est de 77 p. 100. Il n'y avait aucune altération
morbibe dans l'aspect des globules rouges ou blancs.
Respiration. - Tout à fait normale à tous les points de vue. -
Foie et rate, normaux; peu sensiblement hypertrophiés.
Organes génitaux. - Pas de règles. Pas de leucorrhée, organes
génitaux externes développés et dépourvus de poils. Petites
lèvres allongées et épaissies, faisant saillie à quelque distance de
la vulve. Les mamelles sont tout à fait enfantines. Vagin et col de
l'utérus normaux. Par le rectum, on constate que le bassin est
comme celui d'une enfant, quant à la forme et la position, et
l'utérus est la moitié de la grosseur normale, mais est normal
quant à la forme et la position. Les ovaires sont situés sur les
côtés du bassin plus bas et plus en arrière que normalement, et
enfin ils sont doubles de la grosseur normale; ils sont plus mous
que d'habitude et ne causent aucune douleur lorsqu'on les saisit
entre le doigt dans le rectum et la main placée sur l'abdomeu.
Il est probable que les ovaires ont subi des altérations semblables
au myxoedème qui rendraient compte de la persistance de l'amé-
norrhée et de l'état infantile des organes génitaux externes et
internes.
M. Routh a porté le diagnostic de crétinisme spora-
dique avec myxoedème, diagnostic qui fut confirmé
successivement par MM. Gowers, Ord, Barlow et
Routh père. Il insiste sur les analogies nombreuses
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 337
qui existent entre son cas et ceux de MM. W. Gull et
Hilton Fagge. « Les rapports exacts entre le myxoe-
dème et le crétinisme sporadique, écrit l'auteur, n'ont
pas encore été fixés. MM. W. Gull et Hilton Fagge
ont montré que le crétinisme sporadique était inva-
riablement associé à la présence de tumeurs symé-
triques dans la région sus-claviculaire et dans d'autres
régions, mais la priorité relative de ces accidents
pathologiques est inconnue. Dans les quatre cas de
M. Hilton Fagge, ceux dans lesquels le crétinisme a
duré le plus longtemps, ces gonflements symétriques
étaient le moins marqués et vice versa. De là il sem-
blerait que le myxoedème, si c'en est un, décroît lors-
que le crétinisme augmente». Ce rapport inverse entre
le degré de l'idiotie et le degré du myxoedème est
loin d'être démontré.
M. Routh termine en déclarant que, dans son opi-
nion, il est difficile de préciser la date du début de
l'atrophie de la glande thyroïde; toutefois, il lui paraît
vraisemblable que, dans son cas, on avait affaire à une
absence de développement congénital de la glande :
c'est à cette absence qu'il faut rattacher le myxoedème
d'abord, ensuite l'état crétinoïde.
Eu 1882, M. Bail a présenté à différentes sociétés
médicales un malade dont il a publié l'observation
dans l'Encéphale (1882, p. 253) sous ce titre : Le crétin
des Batignolles. L'un de nous a eu l'occasion de voir ce
malade qui lui a paru être un bel exemple d'idiotie
crétinoïde avec cachexie pachydermique. La véritable
nature de l'affection paraît avoir échappé à M. Bail.
Une circonstance particulière nous ayant mis en rela-
tion avec la famille de ce malade, nous avons fait une
338 CLINIQUE NERVEUSE.
enquête minutieuse auprès d'elle; de cette enquête et
de l'examen de la photographie qui accompagne la
publication de M. Bail, il nous semble résulter d'une
manière évidente que ce cas appartient à la catégorie
des idiots crétinoïdes. avec myxoedème (fig. 22). L'ob-
servation qui suit a été rédigée d'après nos renseigne-
ments personnels et d'après la note de M. Bail. Nous
y ajouterons, malgré les nombreuses et regrettables
lacunes qu'elle présente, un résumé de la relation de
l'autopsie communiquée à la Société d'anthropologie
en 1883.
Observation XI. - Père : quelques rares excès alcooliques; hémi-
plégie droite en 1886. - Grand-père paternel mort paraplégique.
- Mère plus âgée de dix ans que son mari. -Ni goitreux ni cré-
tins. - Deux soeurs du malade mortes jeunes de convulsions.
Conception à quarante et un ans; dentition tardive; convulsions
générales quotidiennes de onze mois à quatre ans. - Abolition de
la parole et de la marche; Retour de la parole à trois ans, et de la
marche à cinq ans. - Coqueluche, rougeole. Langue et lèvres
épaisses; gonflement des pieds et des mains; intelligence et mé-
moire presque nulles ; inaptitude manuelle pour les soins de pro-
preté, l'habillement, etc. - Pénil glabre : sensibilité au froid. -
Hémorroïdes. - Mort des suites d'une opération ( ? ) ou d'albumi-
nurie. Autopsie.
Chrest... (Victor), né à Pads-Batignolles, le 8 mars 1851, est
entré à Sainte-Anne le 4 mars 1882 (service de M. HALL) et y est
décedé le )2 août 1882.
Renseignements fournis par son père et sa mère (11 octobre 1886).
- Père, soixante-sept ans, a été pendant onze ans cocher du
chemin de fer, et pendant vingt ans cocher d'omnibus. Il est né
à Bavan (Calvados, à trois lieues de Caen), pays sain, .situé à deux
lieues de la mer, et où n'existent ni goitreux, ni crétins. Il n'a
pas eu de convulsions dans l'enfance; il a éprouvé parfois des
céphalalgies, mais pas de migraines; ni syphilis, ni rhuma-
trisme. etc. En 1878, coup de pied de cheval qui a laissé de la rai-
deur du genou gauche. Le 2 février 1886, hémiplégie droite avec
trouble de la parole qui était devenue indistincte ; la paralysie a
persisté pendant deux mois ; actuellement, il marche en traînant
un peu la jambe droite, soulève le bras droit, peut mettre la
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 339
main derrière la tête, mais les mouvements sont lents ; la parole
est redevenue distincte. Dans les dix dernières années, il a été
sujet à des étourdissements l'obligeant à s'asseoir pendant 5 à
10 minutes.- Quelques excès alcooliques très légers et très rares.
Il boit un litre de vin par jour ; accidentellement un petit verre
d'eau-de-vie le matin. Deux ou trois fois par an, il rentrait un peu
excité, jamais en ivresse complète. Sa femme, interrogée à pari,
affirme la rigoureuse exactitude de ces renseignements. Cet
homme a la tête un peu forte, mais régulière, nez aquilin. -
L'intelligence est ordinaire, les réponses sont précises ; il est un
peu emporté ; jamais de violences envers sa femme ou ses en-
fants. Il s'est marié à vingt et un ans. [Père, mort hydropique
à cinquante-sept ou cinquante-huit ans, journalier, sobre;
taille au-dessus de la moyenne; pas de maladies nerveuses, ni
de goitre. Mère, morte à quatre-vingt-sept ans, on ne sait de
quoi; elle n'était ni paralysée, ni démente ni goitreuse. - Grand-
père paternel, mort vers soixante-dix-huit ou quatre-vingts ai.s,
journalier, sobre. On ne peut donner de détails sur la grand' mère
paternelle. - Grand-père maternel, mort à quatre-vingt-deux
ans, était paraplégique depuis vingt-sept ans, charpentier, sobre.
- Grand'mère maternelle, morte paralysée à soixante-dix-huit
ans, ménagère, sobie. - Un frère mort à l'âge de six ans, du
croup. Une soeur morte a quarante-trois ans, on ne sait de
quoi, a eu trois enfants dont on n'a pas eu de nouvelles depuis la
mort de la mère en 1877. -Pas de maladies nerveuses, pas d'a-
liénés, pas d'épilepliqucs, pas d'idiots, pas de goitreux, de cré-
tins, 'de criminels, dans la famille.]
Mère, soixante-dix-huit ans, domestique, puis raccommpdeuse ;
assez grande, maigre, intelligente; physionomie régulière, rien
du type crétineux. Elle est née à Vannes; a été réglée à treize ans
facilement, s'est mariée à trente et un ans; la ménopause est
arrivée à cinquante et un ans sans accidents. Pas de convulsions,
pas d'attaques de nerfs, pas de névralgies, pas de migraines
(quelquefois des céphalalgies); aucune alfectlon cutanée. [Père,
couvreur, mort d'une chute à cinquanle-huit ans, sobre; était
né à Vannes et n'a jamais présenté d'accidents nerveux. - Hère,
ménagère, sobre, morte à quatre-vingt-huit ans sans paralysie, ni
démence. - Grands parents paternels et maternels pas de rensei-
gnements. Deux frères, morts de trois à quatre ans, on ne sait
de quoi. Deux sûrs bien portantes, sans goitre, l'une a deux
enfants, l'autre quatre qui n'ont rien présenté de particulier. [Pas
de goitreux, etc., dans la famille.] ,
1 La physionomie du malade se rapproche heaucoup plus de celle du
père que de celle de la mère.
340 CLINIQUE NERVEUSE.
Pas de consanguinité.
Cinq enfants : 1° garçon bien conformé, né à terme, mort à
six mois, en nourrice, de convulsions; 2° fille, née à terme, bien
conformée, intelligente, morte à trois ans de convulsions; 3° fille
mort-née à terme (présentation des pieds), bien conformée;
- 40 fille, morte à treize ans d'un abcès du foie; elle était née
à terme, était bien conformée, intelligente et ne paraissait que
son âge, contrairement à ce qu'écrit M. Bail.
5° Le malade, Victor Chré... Lors de la conception la mèreavait
quarante et un ans et le père trente et un ; ils étaient tous deux
bien portants et la conception n'a pas eu lieu durant l'excitation
alcoolique la plus légère,- Grossesse bonne, sans aucun accident.
Accouchement à terme, naturel, sans chloroforme. A la nais-
sance, l'enfant était fort et n'offrait pas le moindre signe d'as-
phyxies. Elevé au sein par sa mère, il venait bien, était frais,
rose, n'avait rien ni aux pieds ni aux mains, ressemblait aux
enfants de son âge. Victor commençait à marcher le long des
murs, était propre, gazouillait, disait « papa et maman ». Alors
qu'il avait près de onze mois, sa mère eut des abcès aux seins et
dut le sevrer. Pendant sa maladie, elle le mit chez une garde qui
l'aurait maltraité, mal soigné, et même fait jeûner. Quand, au
bout de vingt jours, sa mère le reprit, il avait considérablement
maigri et présentait des excoriations du siège. C'est quelques
jours après qu'il survint, pour la première fois, des convulsions
générales qui durèrent deux à trois heures. A partir de là jusqu'à
quatre ans, il a eu presque quotidiennement, aosure-t-on, des
convulsions générales analogues, d'une durée d'une à deux
heures.
La première dent est sortie à l'âge de onze mois2, les autres
apparurent vite, mais se cassaient dans lesconvulsions. Il a recom-
mencé à. parler vers deux à trois ans. il avait les lèvres épaisses
et la langue très grosse; celle-ci pendait alors en dehors de la
bouche; il a marché vers cinq ans. De six à sept ans, coqueluche,
puis rougeole. - Pas d'ophtalmie, d'adénite, d'otite, de maladies
cutanées, etc. - Vers neuf ans, les mains et les pieds épais et courts
se seraient gonflés davantage; on fut obligé de lui faire faire des
chaussures spéciales.
Mis à l'asile de six à huit ans, Victor n'y a rien appris, pas même
ses lettres; il n'aimait pas à jouer avec les autres enfants, dans
la crainte de tomber; il était affectueux. - Il bavait un peu,
avait un appétit régulier, mangeait seul avec la cuiller et la four-
1 L'asphyxie à la naissance est l'une des causes peut-être les plus fré-
quentes des lésions qui aboutissent il l'idiotie. (B.)
Les autres enfants avaient eu des dents avant onze mois.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 341 i
chette, mais ne savait pas se servir de couteau, il n'offrait aucune
lésion du tube digestif, sauf des hémorroïdes. Il ne pouvait
s'habiller, se boutonner, lacer ou nouer, ni se déshabiller, se laver
la figure ou les mains. - Il était très sensible au froid; les mains
et les pieds, surtout ceux-ci, étaient bleus et froids.
Les organes génitaux sont assez développés (fig. 22); le pénil
était glabre, ainsi que le visage et les aisselles. Pas d'onanisme,
pas de tics ni de grimaces, pas de grincement des dents, de
balancement; bave légère.
Etat du malade (1882), d'après M. Ball. - La figure est sans
expression, bouffie, terreuse ; le front est ridé, le nez aplati, les
yeux très écartés l'un de l'autre; les paupières, volumineuses et
plissées, tendent à maintenir les yeux à demi-fermés. La bouche,
largement fendue, offre des lèvres tuméfiées et pendantes, surtout
l'inférieure. La langue, très volumineuse, semble prête à s'échap-
per entre les arcades dentaires. V... Cri. ne possède que 19 dents,
Fig. 22. - Le crétin des Batignolles.
342 CLINIQUE NERVEUSE.
dont 9 la mâchoire supérieure et 10 à l'inférieure. Elles sont
d'ailleurs absolument ravagées par la carie. Deux d'entre elles
appartiennent à la deuxième dentition; ce sont les deux inci-
sives moyennes, à la mâchoire supérieure; les autres sont des
dents de lait'.
- Le visage est complètement imberbe. Par contre, la tête est
couverte d'une chevelure abondante et d'un châtain foncé. La
tête est grosse et irrégulière. Le front, fuyant en arrière, contri-
bue à rétrécir le diamètre antéro-postérieur du crâne. La réunion
de l'occipital avec les pariétaux est marquée par un sillon qui pa-
rait correspondre à la suture lambdoïde, et qui est surmonté, en
arrière, par une espèce de crête qui ressemble, pour me servir
d'une comparaison familière, au rebord que fait un peigne im-
planté dans les cheveux d'une femme. Malgré cette espèce de
chevauchement, l'occipital fait une certaine saillie en arrière, et
les fontanelles sont complètement ossifiées 2. Nons indiquons plus bas
les chiffres qui correspondent aux diverses mensurations prati-
quées sur le crâne. Le sujet est manifestement dolichocéphale,
contrairement à ce que l'on voit habituellement chez les crétins,
qui sont brachycéphales. Les oreilles sont moyennes comme
grandeur, mais le pavillon est replié sur lui-même, comme le
serait une feuille de papier qu'on aurait entr'ouverte après l'a-
voir pliée en deux. Le contour est un peu festonné, sans offrir
d'autre irrégularité.
Le menton est court et la disposition des dents qui sont placées
en éventail augmente la saillie des lèvres et la brièveté apparente
de la mâchoire inférieure. Les joues sont flasques et pendantes,
et la nuque, très forte pour la taille du sujet, présente deux plis
profonds séparés par un bourrelet de chair. Ace niveau, la troi-
sième vertèbre cervicale forme une saillie exagérée en arrière, ce
qui explique peut-être un raccourcissement extrême du cou.
La physionomie du malade est douce, bienveillante, mais sans
caraclère, et présente un peu l'expression d'un foetus conservé
dans un bocal. Quand il sourit, des plis extraordinaires viennent
creuser le visage, les yeux se ferment, les paupières s'allongent,
les lèvres s'écartent et deviennent plus saillantes, la langue s'é-
chappe et la bouche se fend jusqu'aux oreilles. En somme, on
voit à ce moment que les téguments de la face sont trop larges
dans tous les sens pour les os qu'ils recouvrent.
L'examen du corps présente d'autres particularités intéres-
santes. La taille est extrêmement cambrée, et l'on pourrait
presque prononcer à cet égard le nom de cyphose. Le ventre est
1 C'est ce que nous avons noté chez le Pacha.
z On verra plus loin à l'autopsie que l'ossification était, au contraire,
loin d'être complète. (B. et P. B.)
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 313
proéminent, mais la poitrine est normale et les bras sont bien
faits; les mains sont petites, ramassées, les doigts sont courts, et
les rides de la peau, plus abondantes sur ce point que partout
ailleurs, dénotent encore cette laxité des téguments que nous
avons déjà signalée. Les jambes sont assez bien conformées, mais
les genoux sont rapprochés. La région du cou-de-pied est empâtée
et présente des rides transversales; le pied est gros, court et ra-
massé, mais il est assez cambré, la jambe est plus longue que le
fémur et l'avant-bras est plus long que le bras. Les orteils ne
présentent rien de particulier, si ce n'est le volume un peu exa-
géré du deuxième.
Les organes génitaux sont très volumineux et semés de quelques
poils. Le gland est énorme, il est en forme de massue et entière-
ment découvert ; le testicule droit est plus fort que son congénète e
et descend jusqu'au niveau du bord supérieur de la rotule.
Absence de l'instinct génital (Pas d'onanisme).
La peau est terreuse, blatarde, écailleuse et sèche. Elle est com-
plètement glabre, sauf au niveau du pubis. Comme infirmité pro-
prement dite, nous ne trouvons à noter que des leéntorroàdes
externes qui datent de loin. - L'appétit est excellent, le sommeil
est bon et toutes les fonctions de la vie végétative s'accomplissent
avec régularité.
Tous les sens spéciaux paraissent être à l'état normal et la
sensibilité tactile ne laisse rien à désirer. V. Chr... comprend
assez bien ce qu'on lui dit, mais éprouve beaucoup de difficulté
à s'exprimer. Il reconnaît les personnes de son entourage, sait
apprécier les bons et les mauvais procédés. Il est affectueux,
doux et paisible. Ses goûts sont ceux d'un jeune enfant; il
s'amuse avec un fouet qu'il fait claquer sans cesse.
Diamètres du crâne :
344 CLINIQUE NERVEUSE.
Dimensions du thorax :
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 345
Dimensions des membres :
346 CLINIQUE NERVEUSE.
de la Société d'anthropologie de Paris, t. V, p. 509.)
Victor Ch..., par sa taille et par l'absence de presque
tout signe de puberté; par son développement intellec-
tuel et physique, l'aspect de la face, du cou, des pieds
etdes mains qui, d'après le récit des parents et d'après
la photographie, semblent avoir été atteints de pseudo-
oedème dur \ par l'état de la dentition, de la peau, la sen-
sibilitéau.froid, etc., présente tous les signes d'un idiot
crétinoïde ; il est vivement à regretter qu'une obser-
vation aussi intéressante n'ait pas été prise avec tout
le soin désirable et que les symptômes du myxoedème
n'aient pas attiré l'attention de M. Ball.
M. Bail à la fin de sa seconde communication à la
Société d'anthropologie avait relevé deux points pour
lui d'une importance capitale :
« Le premier, disait-il, c'est qu'il s'agissait d'un cerveau de
crétin et non pas du cerveau d'un idiot. En effet, nous ne trou-
vons pas ici de ces vastes lacunes, de ces malformations carac-
téristiques, qui sont les stigmate» de l'idiotie. Il s'agit d'un cer-
veau normal, mais engourdi, et par conséquent susceptible
d'éducation. C'est la grande différence qui sépare, au point de
vue moral, les crétins des idiots. »
Il nous suffit de citer ces quelques lignes pour
montrer que M. Bail ne paraît pas être au courant
des travaux publiés sur l'idiotie soit en France, soit à
l'étranger. L'idiot est loin de présenter toujours des
lésions macroscopiques grossières, beaucoup ne sont
atteints que de lésions structurales, ne se décelant
quelquefois à l'oeil nu que par des nuances délicates
de coloration, de consistance, etc. : nous citerons en
passant l'aspect gélatiniforme des circonvolutions noté
à l'autopsie dans un certain nombre de cas.
IDIOTIE AVEC CACHExIE PACHYDERMIQUE. 347
M. Bail s'appuie pour séparer les crétins des idiots
sur ce fait que les crétins sont susceptibles d'éduca-
tion, tandis que, à son avis, les idiots ne le seraient
pas. C'est là une opinion étrange chez un homme
chargé d'un enseignement officiel, car elle montre
que M. Bail ignore complètement tout ce qui se
fait dans les asiles consacrés aux idiots en Angleterre,
en Amérique, où depuis longtemps on applique les
méthodes d'enseignement dus à Edouard Seguin.
M. Bail paraît ignorer les résultats très sérieux obte-
nus dans ces pays et dans des établissements un peu
moins éloignés, à Bicêtre et à la Salpêtrière.
« Le second point, ajoute M. Bail, se rattache à l'état d'ossifi-
cation des parois crâniennes. D'après Virchow, l'ossification pré-
malurée des sutures, la synostose, serait l'une des principales
causes du crétinisme. Or, nous avons affaire, ici, à un état abso-
lument inverse : il y a défaut d'ossification et arrêt de dévelop-
pement. »
Justement, dirons-nous, parce que dans le cas spé-
cial, à supposer que le crétinisme vrai ne se rapproche
pas de l'état myxoedémateux, il s'agit d'un crétinisme
spécial, crétinisme sporadique, ou mieux d'idiotie
crétinoïde avec cachexie pachydermique.
Dans la discussion qui suivit la présention du mou-
lage de V. C... à la Société d'anthropologie, 11111. Bor-
dier et de Mortillet ont fait observer avec juste raison
que le sujet présenté ne ressemblait nullement à un
crétin ordinaire et qu'il se rapprochait des idiots.
M. Delasiauve rapporta alors, en quelques mots,
l'histoire d'un malade qu'il eut dans sou service de
Bicèlre et qui présentait encore plus, peut-être, que
348 CLINIQUE NERVEUSE.
celui deM. Bail, les attributs caractéristiques de l'idiotie
crétinoïde avec cachexie pachydermique.
Observation XII. - Coloration cachectique chez la mère et une
soeur. - Idiotie complète; surdi-mutité; taille petite; 1>rachi-
céphalie; épaississement des lèvres; absence de signes de puberté ;
marche nulle.
11 s'agit d'un nommé Pot..., né à la Chapelle-Saint-Denis
(Seine), le 25 août 1839, entré à Bicêtre le 25 septembre 486J,
décédé le 2 janvier 1873. Tous ses parents jouissaient d'une excel-
lente santé. Seules, la mère et une soeur offraient une teinte
cachectique prononcée de toute la surface cutanée. Sa taille était
de 0'"96 cent. La tête était assez volumineuse, plutôt brachycé-
phale, avec aplatissement notable de la région occipitale; les
cheveux étaient rares, le visage pâle, les paupières plissées, le
nez écrasé, les lèvres légèrement épaisses laissant sortir la langue
de temps à autre. Il avait un tic particulier consistant en une
sorte de grimace produite par des mouvements des lèvres et des
ailes du nez. L'abdomen était volumineux et flasque; les membres
étaient grêles, la peau était lâche ; aucune force. Ce malade restait
assis dans un fauteuil, ne parlait pas, était sourd ; il se montrait
hargneux si on le contrariait et aimait qu'on s'occupât de lui. Il
existait un léger empâtement. Au dire des personnes du service
encore à Bicêtre qui l'ont connu, ce malade était un type absolu-
ment semblable au Pacha.
Les différents certificats inscrits sur les registres portent les
diagnostics suivants : Idiotie avec arrêt de développement (Marcé,
L.bègue). - Idiotie avec arrêt de développement et rachitisme ;
aspect demi-crétiueux (Magnan), - Crétinisme (ralret).
En novembre 1872, le malade s'affaiblit et mourut en janvier
1873, d'une congestion pulmonaire.
Nous pouvons encore citer, parmi les cas de créti-
nisme sporadique avec myxoedème que nous avons
réunis, un cas de M. Goodhart 1.
Observation XIII. Absence d'antécédents héréditaires. - Idiotie
complète; parole et marche nulles; teinte cachectique de la peau;
brachycéphalie ; retard de la dentition; langue épaisse et pendante ;
1 Goodhart. Sporadic crétinism and myxoedema. {Médical Times and
Gazette, May, 1880, p. 474.)
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 349
développement exagéré du tissu adipeux sous-cutané; pseudo-
lipomes sus-claviculaires; existence douteuse de la glande thy-
roide; hernie inguinale.
X..., âgée de quatre ans; pas de consanguinitéentreles parents;
cinq frères ou soeurs en pleine santé, dont un bébé de seize mois
marchant déjà.
La peau, d'une pâleur jaunâtre, a attiré aussitôt l'attention.
Les viscères abdominaux étaient normaux. La tête était large et
d'une forme particulière; le front était petit et saillant, dans
chaque région frontale latérale et aussi au-devant de la fontanelle
antérieure. La partie postérieure de la tête était petite. Les traits
étaient lourds et épais; la face ronde et sans expression. Cette
petite fille ne pouvait parler, mais elle émettait desbruits inintel-
ligibles, la vue et l'ouie étaient normaux. Elle était incapable de
marcher et tombait dès qu'elle était sur ses jambes. Les tibias
étaient courbés en dehors quoique sans élargissement notable
des extrémités osseuses; elle avait une hernie ombilicale Le
palais était très arqué, la dentition était retardée ; les deux inci-
sives du haut et du bas étaient coupées, et il y avait une dent
double dans la mâchoire supérieure du côté gauche, la dent cor-
respondante du côté opposé apparaissait.
L'état de la langue était remarquable. Elle était trop grande
pour la bouche et faisait saillie entre les dents; à part cette lar-
geur exceptionnelle, elle était normale. Le corps était en bon état,
mais un peu petit. Ce bon état paraissait être dû à un excès de la
graisse sous-cutanée sans oedème. On constate dans les régions sus-
claviculaires deux masses lipomateases. Pour le goitre, l'existence
même de la glande thyroïde est douteuse. 11 n'y a pas d'apparence
d'hypertrophie des glandes médiastines. Il y avait un remar-
quable agrandissement des éminences thénar et hypothénar de
chaque main, ce qui leur donnait un aspect large et déformé,
cet élargissement semble dû à l'hypertrophie musculaire et non
à un excès de graisse. Les muscles de la cuisse sont bien déve-
loppés, contrairement à ceux du mollet. Le fond de l'oeil est nor-
mal. Mentalement, c'était une enfant lourde, ne prêtant que peu
d'attention aux objets environnants; elle reconnaissait cependant
ses parents et les objets brillants placés devant elle.
M. Goodhart pense que les symptômes présentés par
la malade sont suffisants pour justifier le diagnostic
de crétinisme sporadique qu'il considère comme dû à
1 Nous avons relevé chez nos deux malades l'existence de hernies
inguinales.
350 CLINIQUE NERVEUSE.
un développement défectueux du cerveau, mais sur-
tout à un développement irrégulier et asymétrique des
diverses parties du corps dont les unes se développent
avec excès, tandis que les autres subissent un arrêt de
développement.
' L'auteur, tout en faisant ressortir la ressemblance de
son cas avec le myxoedème de l'adulte, ne croit pas à
l'état crétinoïde avec cachexie pachydermique. Le
diagnostic de myxoedème nous paraît cependant
devoir être posé assez clairement, si l'on considère
l'état intellectuel et physique de la malade, les masses
lipomateuses sus-claviculaires, l'absence probable du
corps thyroïde, etc.
Aux cas de crétinisme avec myxoedème paraîtrait
aussi devoir se rapporter l'observation de M. A. Voisin
publiée dans la Revue photographique^ sous le titre de
Crétinisme chez une enfant née à Paris de parents pari-
siens. La taille de cette enfant était de 1D1,30; le cou
était large, gros; la peau commeoedématiée; les mains
ramassées; les doigts épatés étaient rouges, cyanosés,
comme infiltrés; l'abdomen était très gros. II n'existait
pas de goitre; les mouvements étaient lents, lourds;
la sensibilité et la force musculaire étaient diminuée ?
la parole était lente, indistincte; l'enfant était idiote.
Quant au cas de M. Baillarger il paraît plutôt s'agir
d'un myxoedème opératoire; nous aurons lieu d'en
reparler plus loin. - Le crétin de Charonne, observé
par Ferrus', semble appartenir au crétinisme avec
1 A. Voisin. - Revue photographique, 4ô année, 1872, p. 353.
' Ferrus. - Comptes rendus de l'Académie de médecine, 1850-51
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 3.')1 1
goître, quoiqu'il soit difficile de dire exactement ce
que Ferrus entendait par la tumeur volumineuse du
cou que présentait ce malade ! ' JI 1 '1 ' 1
Cet état crétinoïde des idiots myxoedémateux per-
met de penser que sous la dénomination decrétinisme
sans goître et surtout sous celle de crétinisme spora-
dique', il doit se rencontrer encore en grand nombre
d'idiots myxoedémateux. Les observations anciennes
de Curling, de Fagge, de Fletcher-Beach, et celles plus
récentes de MM. Bouchaud, Charpentier, Coxwell,
Routh, Bail, Goodhart, etc., et que nous avons rap-
portées plus haut, paraissent en fournir la démonstra-
tion.
Il ressort des observations précédentes que chez
tous les idiots crétinoïdes, l'absence ou l'atrophie de la
glande thyroïde paraît constante. Les quelques autopsies
de sujets atteints de cachexie pachydermique sans
accompagnement d'idiotie nous montrent aussi que
souvent, dans ces cas, le fonctionnement de la glande
thyroïde était rendu impossible par suite de son atro-
phie. En voici quelques exemples.
Dans le cas de M. Brandes, il s'agit d'un homme
de quarante ans dont le myxoedème paraissait remonter
1 La question de crétinisme mériterait du reste d'être remise à l'étude;
il serait intéressant de s'assurer de l'état de la glande thyroïde chez les
crétins complets, ainsi que chez les crétineux où la dégénérescence de la
glande peut avoir eu une marche et une distribution inégales; il va de
soi que surtout pour ces derniers, on ne pourrait tirer de conclusion
sans de nombreuses autposies.
2 Il va s'en dire que nous n'avons pas laprétention d'avoir relaté toutes
les observations de crétinisme sporadique, compliqué de myxoedème,
11 nous a même été impossible de reproduire un certain nombre d'obser-
vations publiées sous le nom de myxoedème et se rapportant à des
enfants (cas de Sliattock, etc.).
352 -1) CLINIQUE NERVEUSE.
à l'âge de quatorze ou quinze ans. A l'autopsie, outre
une atrophie glomérulaire des reins, il fut constaté
que la glande thyroïde était très atrophiée '. Il est éga-
lement à noter que la thyroïde était très atrophiée dans
le cas de Hale White et qu'elle était dégénérée' dans
les cas de Ord, Greenfield, Cushier s.
L'atrophie de la glande thyroïde est de même signa-
lée dans beaucoup d'observations publiées du vivant
des malades; nous citerons les observations de Dyce-
Duckworth \ Ord, Miller8, Hamiltone, Oliver', Abbott 8,
Hadden", etc.; dans quelques cas, l'atrophie était si
accusée que la glande ne pouvait être sentie à la pal-
pitation; enfin, dans d'autres, l'existence même de la
1 Brandes. Un cas de myxoedème. (Extrait des comptes rendus du
Congrès international de Copenhague.)
2 Hale White. - A case of myxoedema with a post mortem Exanzi-
nation. (titre British medical journal, 1885, p. '.381.) .Follicules clos atro-
phiés.
3 Cushier. - Case of myxoedema. {Archives o/'n : edecMe, 1882, p. 203.)
La glande thyroïde, plus petite qu'à l'ordinaire, présentait une atrophie
avec sclérose; absence de follicules clos; vaisseaux oblitérés.
4 Dans un autre cas du même auteur, le corps thyroïde paraissait nor-
mal. - Dans l'autopsie du cas de Ord, faite par Greeiirield, il est noté
que les cellules de la glande thyroïde sont comprimées par du tissu de
nouvelle formation. (Dyce-Duckworth. Two cases of myxoedema. Tran-
sactions of the clinical Society of London, 1e81, p. 53.)
1 Miller. - A case of myxoedenza (The British médical Journal, 28 fé-
vrier 1885, p. 429).
' Hamilton. A case of myxoedema with three illustrations (The me-
dical Record, New-York, 1882, 9 décembre, vol. XXII, p. 645).
7 Oliver. Clinical lecture on myxoedema (The British médical Journal,
17 mars 1883).
a Abbott. A case of myxoedema (The British médical Journal,
juin 1886).
9 Hadden. - A case of f myxoedema {Transactions of the clinical So-
ciety, 1881, p. 58). La glande thyroïde était considérablement dimi-
nuée de volume.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 353
glande a paru douteuse (Goodhart, Ridel-Saillard,
Ord, Gowans', Lunn 2, Sermon').
Il faut ajouter que, dans nombre de cas de myxoe-
dème, l'observation est incomplète; souvent, par
exemple, il n'y est fait aucune mention de l'état de la
glande thyroïde. Parmi les observations que nous avons
pu consulter, nous n'en avons trouvé que très peu où le
corps thyroïde ait été signalé comme normal, du moins
quant à son volume' (Edes5, Wadsworth \ Lane').
II. DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE OPÉRATOIRE.
Les faits avec autopsie que nous avons rapportés,
montrant l'absence de glande thyroïde et les observa-
z Gowans. Flisforg of a case of myxoedema (The British médical
Journal, 1882, I, p. 772).
' Lann. Cases of myxoedema (The British médical Journal, 24 dé-
cembre 1881, p. 1017).
3 Semon. A case of myxoedema {Transactions of the clinical Society
of London, 1881, p. 61).
à Nous ferons remarquer que, parmi les observations publiées sous le
nom de myxoedème, il en est qui se rapportent à d'autres affections, telles
que la néphrite, etc. (le cas de il. Braser, par exemple).
1 Edes. - Clinical Lectures on a case of myxoedema (The Boston med.
and Surg. Journal, 24 avril 1884, p. 385).
ô Wadsworth. A case of rnyxoedcl1 ! a with atrophy ofthe optic Ner-
ves (The Boston med. and Surg. Journal, 1885, p. 5).
7 Lane. J1Jyxoedema with remaries upon the eliologg of lhc disease.
(The Lancet, 14 juillet 1883, p. 56 ! . Le cas de M. Henrot, où laglande
thyroïde est notée comme ayant 4 à 5 fois son volume normal. doit être
léservé, car le diagnostic de myxoedème nous parait discutable.
Dans les cas de M. Morvan. il n'est pas fait mention de la glande thy-
roïde : deux des malades de ce médecin, à ce qu'il nous écrit, examinés
à nouveau récemment à ce point de vue, ne présentent rien d'anormal
dans la région thyroïdienne; il en résulterait, en tout cas, que si l'alr-
sence ou l'atrophie de la glande thyroïde n'existe pas, ce qui est difficile
à vérifier sur le vivant, ces malades ne présentent en tout cas pas d'hy-
pertrophie du corps thyroïde.
35 '( CLINIQUE NERVEUSE.
tions de malade encore vivants chez lesquels l'absence
de la glande thyroïde a été constatée ou dont l'existence
a paru très douteuse, semblent établir une relation évi-
dente entre la cachexie pachydermique et l'absence ou
l'atrophie delà glande thyroïde '. Nous sommes donc
.conduits naturellement à examiner les 'conséquences
de la thyroïdectomie.
Les cas d'extirpation totale de la glande thyroïde sont
déjà nombreux; si beaucoup d'opérés n'ont présenté
aucun phénomène se rattachant à la cachexie pachy-
dermique, il n'en n'est pas moins vrai que le chiffre
des thyroïdectomisés atteints de myxoedème est assez
considérable, et encore est-il juste de faire observer
qu'un certain nombre d'opérés ont souvent été perdus
de vue. Nous donnerons ci-dessous la statistique de
tous les cas qui sont parvenus à notre connaissance,
mais auparavant nous croyons nécessaire de relater,
en quelques lignes, un des rares cas de myxoe-
dème opératoire suivi d'autopsie* : il appartient à
MM. Bruns et Grundler3, et offre un grand intérêt
par suite de la constatation de lésions identiques à
celles qui ont été rencontrées dans les autopsies des
myxoedémateux idiopathiques .
1 L'atrophie du corps thyroïde, accompagnée de la destruction de ses
cellules, équivaut. fonctionnellement parlant, à son absence; a la même
conséquence l'hypertrophie avec altération cellulaire de toules les par-
ties de la glande.
2 Deux autres cas ont été suivis d'autopsies, mais ces autopsies, mal
faites ou dans des circonstances défavorables, ne présentent aucune
valeur, - M. W. Stokes vient de publier un nouveau cas a\ec autopsie
que nous analyserons plus tard.
3 Grundler. Contribution à l'étude de la carhexie crétinoïde (Zur
Cachexui slruinipriua in J)"¡Crll ! Jf' zur Idinischeii Chirurgie de V. Bruns;
Tubiugen, 1as, t. I, p. 420.)
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 355
Observation XIV. Goitre colloïde accompagné de dyspnée,- Extir-
pation totale en 1886 : gucrison de la plaie en deux mois. -
Diminution de l'intelligence dès le troisième mois de l'opération;
arrêt de développement et symptômes de cachexie pachydermique
de plus en plus accentués.
Il s'agit d'un adulte opéré à l'âge de dix ans, par M. P. Sick (de
Sluttgard), décédé le 13 août 1884, d'une attaque apoplectifornle
à la clinique de Tubingue à l'âge de vingt-huit ans. Il mesurait
I m 27 ; pesait 4 kil. et avait l'habilus crétinoîde. A I"AUTOPSIE,
pratiquée par M. Nauwerk, on constata les faits suivants :
Rigidité cadavérique; sugillalions sanguines étendues 'du
dos; peau assez pâle. Les veines des extrémités et du tronc
sont visibles; face cyanosée ; l'épidémie desquamme partout,
(excepté sur la face), et surtout aux parties latérales du tronc.
Le corps paraît atteint d'anasarque généralisé moyen.
l'ig. 23. - Niahide opéré par M. Sick.
356 CLINIQUE NERVEUSE.
Les extrémités supérieures et inférieures sont déformées; les
parties molles de la face sont épaissies, celle-ci a un aspect cré-
tinoïde caractérisé. Au cou, on trouve une cicatrice ancienne, allant
de l'os hyoïde au sternum. Ongles bleuâtres un peu recourbés en
griffe, organes génitaux, bien développés avec poils fins et foncés
à la base du pénis; quelques poils rares et plus forts, au scrotum;
quelques hémorroïdes au rectum, la peau du thorax et de l'ab-
domen n'est pas modifiée, le tissu adipeux sous-cutané est bien
développé, un peu oedématié, musculature du thorax oedémaliée,
très pâle, presque grise. Tissu graisseux sous-séreux de l'abdomen
fortement développé ; dans l'abdomen, environ 100 gr. de liquide
jaune, très peu trouble. Lntre les muscles, il y a encore beaucoup
de graisse. Les veines du cou sont gorgées de sang.
Les intestins sont météorisés. La séreuse de l'intestin grêle est
un peu injectée. Le mésentère et l'épiploon sont riches en graisse.
Le foie occupe sa position normale. Graisse du médiastin abon-
dante ; poumons libres.
Dans les plèvres, 400 à 150 gr. de liquide clair, séreux; pou-
mons normaux. Le péricarde est très découvert, et contient A 00 gr.
de liquide séreux, clair. - Cce2lz· volumineux, pointe formée par
le ventricule gauche surtout, mesurant de la pointe à la base
13 cent. ; largeur à la hauteur des orifices auriculo-ventriculaires,
A 1 cent. ; coeur droit mou, le gauche plus ferme; panicule adipeux
du coeur faiblement développé. - Dans le coeur gauche, beaucoup
de sang liquide, masses cruoriques rares, foncées. A droite, on
trouve en outre quelques caillots fibrineux mous. Les orifices
auriculo-ventriculaires sont normaux; les valvules intactes à
droite. Myocarde pâle, d'épaisseur normale. Le cône formé par
l'artère pulmonaire présente un épaississement circonscrit de
l'endocarde, pénétrant jusque dans le myocarde d'un millimètre
environ. La mitrale est peu modifiée; quelques lendons sont un
peu épaissis. Le myocarde gauche est d'épaisseur normale, de
couleur brun jaunâtre. Valvules aortiques intactes, mais avec
quelques taches graisseuses et des épaississements scléreux. Artères
coronaires minces. Poumon gauche, rougeur légère de la mu-
queuse bronchique. Dans les bronches, un peu de liquide spu-
meux, légèrement teinté de rouge; le poumon contient de l'air,
est oedémateux, assez riche en sang. Quelques sugillations pleu-
rales. - Poumon droit, mêmes lésions.
Rate : longueur : 8 c. et demi, poids 75 gr. - La pulpe est de
coloration cerise foncée, résistante ; les trabécules sont visibles;
les corpuscules de Malpighi petits. Rein gauche (1 gr.) forte-
ment entouré de graisse, de grandeur normale ; capsule non adhé-
rente : surface gris foncé, violette; parenchyme très épais.
L'écorce et surtout les pyramides sont injectées de sang veineux.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 357
La substance corticale est par-ci par-là trouble et gris jau-
nâtre. Rein droit (1415 gr.), mêmes lésions.
Langue hypertrophiée avec plusieurs impressions dentaires
présentant quelques petites hémorrhagies fraiches, sans cicatrices
profondes. La luette et les piliers sont gonflés, infiltrés, injectés.
Amygdales agrandies, la droite pâle, la gauche plutôt gris vio-
lette paraissant atteinte d'hyperplasie chronique. - OEsophage,
estomac, duodénum, pancréas, rien de bien particulier. Foie
un peu petit (1,200 gr.), normal.
La trachée est couverte inférieurement de mucosités. Muqueuse
un peu injectée, la partie inférieure de la trachée est rétrécie un
peu latéralement et déviée un peu à droite. L'aorte est relati-
vement étroite. Circonférence : 3, 4 cent., au-dessus du dia-
phragme, taches graisseuses et épaisissement scléreux ; il en est
de même des gros troncs descendants; aucune trace de tissu thy-
roïdien. '
Sur le cuir chevelu, nombreuses croûtes; cheveux rares. L'épais-
sissement de la calotte est surtout produit par le tissu adipeux
oedématié. - Dure-mère sans grands changements; à gauche,
adhérences nombreuses avec la voûte crânienne, surtout près de
la suture frontale, sinus longitudinal libre. - Voûte crânienne
d'épaisseur moyenne, sutures visibles, sillon de la méningée
moyenne, profond à gauche; du reste, pas de phénomènes de
résorption appréciables sur la table interne, asymétrie "légère
des diamètres. Vaisseaux de la base sans grands changements à
gauche. La configuration interne du cerveau ne présente rien de
spécial.
Les circonvolutions sont un peu maigres, les sillons sont très
accentués par suite de l'oedème des méninges. Quantité de sang
moyenne dans la dure-mère. L'arachnoïde est brillante, surtout
épaissie et tendineuse le long de la scissure itilerhémisphérique
et cela d'une façon diffuse. On y constate, en outre, beaucoup
d'épaississements miliaires atteignant quelquefois le volume d'une
tête d'épingle, en partie confluents, scléreux ; il y en a aussi bien
sur les sinus qu'au-dessus des circonvolutions. Les ventricules
latéraux sont peu dilatés. La substance cérébrale est légèrement
hyperémiée sans autres modifications. Poids avec la pie-mère,
après ouverture des ventricules : 1,435 gaz Ganglions de la base,
corps quadrijumeaux, normaux.
Testicules peu développés, hyperémiés. Prostate, vésicules
séminales normales. - L'humérus droit enlevé est normal. -
On distingue encore la limite des épiphyses. Il en est de même
pour l'extrémité supérieure du fémur. L'épiphyse du grand tro-
chanter est encore cartilagineuse.
Examen microscopique des organes fait par le Dr Nauverk.
358 CLINIQUM NERVEUSE.
1° Sang normal, autant qu'on eu peut juger sur le cadavre;
globules rouges de taille et couleur normales, pas d'augmenta-
tion des leucocytes. 2° Musculature normale au tronc et aux
extrémités; pas d'hyperplaste conjonctive. 3° Musculature de
la langue également normale : pas d'hypertrophie des fibrilles
musculaires; tissu adipeux interstitiel abondant. - 4° La peau
des diverses parties du corps (tête, tronc, membres, scrotum), est
normale, sauf un fort pannicule adipeux et un peu d'oedème. Pas
d'hyperplasie conjonctive ou de changement dans la distribution
des nerfs. Pas de transformation mucoïde même en présence de
l'acide acétique. 5° Crrurzd sympathique et nerfs périphériques
normaux. - 6° Rate, foie, reins, sans prolifération conjonctive.
On remarque une infiltratiou marquée des cellules hépatiques
surtout dans les parties centrales des lobules, par des granula-
tions pigmenlaires gnsesjaunîtres, souvent avec dépôt graisseux ;
7° Sur le cerveau soit frais, soit durci, on constate de la leplomé-
ningile chronique ordinaire, avec faible participation de la subs-
tance corticale. Le tissu de l'arachnoïde et surtout de la pie-mère
paraît forlement épaissi, mais en intensité variable, à fibres plus
fortes que d'ordinaire; il y a souvent des corpuscules pigmen-
taires et beaucoup de noyaux. Les parties périphériques de l'écorce
sont par place, surtout autour des vaisseaux, très riches en
noyaux. Les espaces périvasculaires lymphatiques sont souvent
élargis, et contiennent parfois des granulations laiteuses. A l'état
frais, les vaisseaux corticaux, enlevés à la pince sont souvent
couverts de granulations graisseuses fines.
M. Grundler croit que l'extirpation de la glande
thyroïde amène des troubles du sytème nerveux cen-
tral surtout en ce qui concerne son rôle dans les
échanges nutritifs.
Les premiers cas de myxoedème opératoire, c'est-à-dire
consécutif à l'extirpation totale de la glande thyroïde,
ont été signalés par M. J. Reverdin en octobre 1882 '.
Ce n'est que six mois plus tard (4 avril 1883), que
M. Kocher communiquait au Congrès de chirurgie de
Berlin le résultat de 102 opérations de goître prati-
1 J. Reverdin Revue médicale de la Suisse Romande, 15 octobre 1882,
p. 53 ! ) et 540. - Communication à la Société médicale de Cenève, 13 sep-
tembre 1882.
IDIOTIE ,AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 359
quées par lui, travail qui ne fut publié que plus lard
dans les « Arch. f. klin. Chirurgie, Bd. XXIX, H. 2 ».
Nous ne saurions donc nous élever avec trop d'éner-
gie contre le déni de justice fait à MM. Reverdin par
la plupart des auteurs d'autant plus que, en Alle-
magne, l'opinion a été égarée par le fait de la commu-
nication de M. Kocher, ce qui explique qu'on ait à
tort attribué à ce chirurgien une découverte qui n'était
pas sienne, ainsi que le démontrent les dates des pu-
blications.
MM. J. et A. Reverdin' ont complété peu après
(avril 1883) leur premier travail en faisant connaître,
les résultats des autres opérations pratiquées par eux,
confirmant d'ailleurs les précédentes. Dans la même
année M. Julliard' en publia brièvement deux nou-
veaux cas.
Il faut noter que la cachexie paraît d'autant plus
à craindre que l'opéré est dans la période de crois-
sance. Le myxoedème de nature traumatique semble
tellement sous la dépendance de l'extirpation totale de
la glande thyroïde que les chirurgiens contemporains
condamnent cette extirpation totale et ne pratiquent
plus que des extirpations partielles'.
. Nous donnons ci-après le tableau des cas de ca-
chexie pachydermique observés à la suite de l'extir-
pation totale de la glande thyroïde :
1 J.-L. et A. Reverdin.- Du myxoedème par extirpation de la thyroïde.
(Revue médicale de la Suisse Romande, 15 avril, 15 mai et 15 juin 1883).
* Julliard. - Trente et une extirpations de goitre. (Revue de chirurgie,
1883, p. 585.)
3 On a signalé, cependant, quelques cas de cachexie à la suite d'extir-
pations partielles; mais, outre leur rareté, on peut se demander si, dans
ce cas, les parties de la glande abandonnée étaient suffisamment saines
pour remplir leur rôle physiologique.
360 CLINIQUE NERVEUSE.
1° Baillarger 1. - Fille de vingt-quatre ans; extirpation pro-
bable de la glande thyroïde vers l'âge de six aus, suivie d'idiotie
crétinoïde. -
2° Reverdin.- Pauline C..., vingt L ans ; goitre kystique. Extirpation
totale le 4 mars 1881. En juin 1881 , on constate déjà une anémie
marquée; face, lèvres pâles, pas d'oedème; dyspnée avec plusieurs
accès. A l'examen laryngoscopique, rétrécissement de la glotte.
La malade ne peut plus parler ; on diagnostique de l'hystérie.
Traitement par les courants constants. La dyspnée et la parole
s'améliorent. Règles très irrégulières et douloureuses. Rien n'a
pu améliorer l'anémie 2.
3° Reverdin. - Henri 0..., vingt-quatre ans; goitre kystique,
extirpation totale le 6 octobre 4880. En mars 1881, symptômes de
cachexie pachydermique commençante, qui se développe en un an.
La force des mains diminue, surtout à droite; la marche s'appe-
santit, face vultueuse. Jambes infiltrées; sensation de froid; culo-
ration jaunâtre de la face; aspect crétinoïde; langue dure, lourde,
gênant la parole. - En 1882, tuberculose, abcès des ganglions
lymphatiques cervicaux. Matité aux sommets.
4° Reverdin. Mme F..., vingt-sept ans; goitre kystique, extir-
pation totale, 9 novembre 1880. - A la suite de l'opération, fai-
blesse générale avec syncopes commençantes, anémie; coloration
de la face, non oedématiée, plus pâle qu'avant l'opération. Fatigue
et crampes dans les jambes oedématiees; absence de mémoire de
plus en plus marquée; inattention; règles peu après l'opération
régulières.
5° Reverdin. - lime S..., trente-trois ans, goitre kystique, extir-
pation totale le 45 novembre 1880. Deux mois après, fatigues,
anémie, perte de forces, mains lourdes, peu agiles, surtout pour
les travaux fins. La voix se perd tout à coup. En février 4881,
anémie prononcée, faiblesse de la mémoire, mains engourdies.
En février 1883, les symptômes s'amendent, sauf pour la mémoire
et la voix.
6o Reverdm. - Arthur B..., quarante ans, goitre pa1'enhyma-
teux ; extirpation totale le 17 décembre 1880. Fin mars 1881,
cachexie pachydermique, faiblesse des jambes. Le malade fait
avec peine 2 kilom. L'anémie s'accentue, le visage s'infiltre, les
mains sont enflées, sans albuminurie; diminution de l'appétit,
de la soif et du goût, maladresse des mains, lourdeur des jambes.
1 Annales médico-psychologiques , mars 1884, p. 124.
2 Cette malade, d'abord améliorée à tel point qu'il était difficile de
constater les symptômes du myxoedème, à ce que nous rapporte
M. J.-M. Reverdin, présente à nouveau (octobre t886) des symptômes
de cachexie pachydermique.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 361
7° IÇocher. - Femme, trente-six ans; tumeur colloïde, extirpa-
tion totale le 25 mars 1881 ; guérison en trois semaines. Le mari
rapporte, le 19 février 1883, que sa femme n'aplusété un instant
bien portante. Le corps est gonflé, les membres sont anesthésiés,
elle a toujours froid; périodes menstruelles très irrégulières.
8° Kocher. - Femme, trente-huit ans; tumeur colloïde, extirpa-
tion totale le 3 juillet 1879; guérison en quinze jours. L'examen
microscopique fait croire peut-être à un carcinome. Le mari dit
Archives, t. XII. 21
Fig. 24. - Elle représente une opérée (cas 9) de 11. Kocher
et sa soeur jumelle.
362 CLINIQUE NERVEUSE.
en mars 1883 : « Ma femme ne peut écrire elle-même par suite
de douleurs nerveuses des pieds et des mains. Le cou est guéri,
mais elle est comme paralysée des extrémités, surtout depuis sa
dernière couche; en 1881, sa santé n'a fmt que décliner. »
9° Kocher. - Marie 13..., onze ans, tumeur folliculaire, extirpa-
tion totale le 8 janvier 1874; guérison en trois semaines. - En
février 1883, cachexie crétinoïde très prononcée.
Neuf ans après l'opération, c'est-à-dire en 1883, après que l'at-
tention de M. Kocher eût été attirée sur la question du myxce-
dème par les communications de MAL Reverdin, cette malade a
été photographiée à côté de sa soeur cadette (voir fig. 21). Avant
l'opération les deux soeurs se ressemblaient tellement, que leur mise
ne pouvait les distinguer l'une de l'autre. La simple inspection de
la photographie permet de se rendre compte dessuites de l'extirpa-
tion totale de la glande thyroïde. Il est regrettable que l'on ait cru,
dans la photographie, masquer les régions les plus importantes
au point de vue du myxoedème, ce qui ne permet que difficile-
ment dese rendre un compte exact de l'état du cou, des pieds, etc.
Toutefois, cette photographie met bien en évidence que si
M. Kocher n'avait reconnu qu'imparfaitement à cette époque la
nature de l'affection dont était atteinte son opérée, il n'en a eu
une notion exacte qu'à la suite de la communication orale
que lui fit M. J. Reverdin, lors du Congrès d'hygiène de Genève,
en septembre 1882. Depuis, M. Kocher a pu constater le myxoe-
dème sur un certain nombre de ses malades anciens ou nou-
veaux. Il semble du reste que M. Kocher n'ait pas bien dès
l'abord saisi le mécanisme de l'étiologie du myxoedème opéra-
toires, puisqu'en janvier 1883, il pratiquait encore des extirpa-
tions totales.
10° Kocher. Jean R..., dix-sept ans, goitre hyperplasique,
extirpation totale le 21 juillet 1877; guérison en six semaines, ré-
cidive naturelle en 1882; diminution des facultés mentales et
physiques.
44° gocher. - Anna D..., vingt-trois ans, goitre colloïde, extir-
pation totale le 4er novembre 1879; guérison en cinq semaines.
- En février 1883, cachexie crétinoïde très prononcée.
12° Kocher. - Jacques M..., quarante-cinq ans; goitre fibreux,
extirpation totale le 26 mars 1880. - Rapport médical du 22 fé-
vrier 1883; bonne santé jusqu'à la fin de 1881. Alors oedème pal-
pébral et des jambes jusqu'aux genoux, 'avec albuminurie passa-
gère. En mars 1883, cachexie crétinoïde très prononcée.
43° Kocher. - Elisa K..., douze ans; goitre colloïde, extirpation
totale le 14 novembre 1881. - En mars 1883, commencement de
la cachexie, attaques éliileptiques nombreuses.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 363
140 Kocher. - Rodolphe R..., dix-huit ans, goitre colloïde kys-
tique, extirpation totale le 19 février 1883. En mars 1883; cachexie
crétinoïde moyenne.
15° Kocher. Elisa W..., vingt-trois ans, goitre colloïde, extir-
pation totale le 26 juillet 1882. - Le 19 juin 1882, respiration et
déglutition libres; douleurs dans les épaules, 18 mars 1883 ; lèvres
et nez un peu gros; ni idiotie, ni cachexie.
46° Kocher. - Adolphe R..., quatorze ans, goitre fibreux, extir-
pation totale le 5 mai 1882. En mars 1883, anémie, gonflement,
cachexie crétinoïde.
17o Kocher. - Rosine B ? vingt-six ans, goitre hyperplasique,
extirpation totale le 31 mai 1882. - En février 4885, symptômes
très marqués de cachexie pachydermique.
18° Kocher. Anna G..., vingt-six ans, goitre hyperplasique,
extirpation totale le '1or juin 1882. - En février 1883, hydro-
anémie.
19° Kocher. Christian W..., seize ans, goitre folliculaire, extir-
pation totale le 15 juin 1882. - En février 1883, hydroanémie.
20° Kocher. - Elisa R..., douze ans, goitre folliculaire, extirpa-
tion totale le 19 juin 1882; en mars 1883, cachexie crétinoïde.
21° Kocher. -Enfant P..., fille de quinze ans, goitre kystique,
extirpation totale le 3 juillet 1882; en février 1883, cachexie pachy-
dermique commençante.
22° Kocher. - Marie IL ? vingt-huit ans ; goitre folliculaire,
thyroïde gauche enlevée autrefois ; excision de la thyroïde droite, le
27 septembre 1882. En mars 1883, cachexie crétinoide commen-
çante.
23° Kocher. - Emma G..., seize ans; goitre folliculaire, extir-
pation totale le 17 novembre 4882. Le 16 mars 4883, cachexie
crétinoïde modérée ?
24° Julliard. Caroline B..., soixante-six ; goitre colloïde, extir-
pation totale cinq à six mois après, forte anémie, pâleur de la
peau, faiblesse très grande et oedème des jambes ; au bout de
quelques mois, amélioration.
25° Julliard. Joseph C..., dix-sept ans ; goitre pt11'enc : hyma,
teux, extirpation totale en 1880. En janvier 1881, faiblesse, fatigue.
Le malade, autrefois gai et vif, devient taciturne et craintif; il
aime la solitude, ne grandit plus; frileux, il n'a même plus la
force de travailler, visage infiltré, pas d'albuminurie ni
1 Nous n'avons pas de détails sur un autre cas de Kocher remontaHt à
l'époque de sa première communication, ainsi que sur quelques autres
cas qu'il aurait observés depuis.
364 CLINIQUE NERVEUSE.
d'oedème marqué, mais épaississement de la peau du visage et
des mains.
26° Baumgartner 1. - Fille de seize ans, extirpation totale
d'un goitre de 4gag gr. en octobre 1881. Un an après, visage
infiltré; mains et pieds épais, dyspnée ; alourdissement corporel
et intellectuel; six mois après, l'état est encore plus marqué, la
dyspnée plus forte nécessite la trachéotomie; rapide améliora-
tion consécutive de l'état général. En nsss, les symptômes de la
cachexie persistent.
27° Baumgartner. - Femme de cinquante-six ans ; extirpation
totale en août l 881. Au bout d'un an, cachexia strumipriva consi-
dérable, puis dyspnée, trachéotomie suivie d'amélioration rapide.
En 1886, elle se plaint encore d'affaiblissement des facultés intel-
lectuelles et physiques. ? 8° Baumgartner. - Fille de vingt-trois ans ; extirpation totale
d'un goitre de 160 gr. en août 1882; quelques mois après, lour-
deur et froid dans les membres; pâleur et idéation ralenties,
visage infiltré, paupières épaisses, mains enflées le soir, pas d'al-
buminurie, paralysie de la glotte et aphonie qui cède à un traite-
ment électrique ; cachexie pachydermique considérable. Au bout
d'un an, le malade respire bien. Elle a succombé depuis à une
hémorrhagie pulmonaire.
29° Baumgartner. Fille de vingt-deux ans ; extirpation totale
d'un goitre de 390 gr. ; hémorrhagie très forte en octobre 1882;
six mois après, dyspnée en montant l'escalier, visage infiltré, ma-
ladresse des mains; elle ne peut plus tenir son aiguille; mains et
pieds enflés ; difficulté de parole et d'idéation. Au laryngoscope,
abduction des arythénoïdes difficille; électricité, ferrugineux;
amélioration de l'état général. Elle peut reprendre son travail de
couturière. En 1886, l'amélioration continue.
30° Koenig 2. Extirpation totale pour cause de dyspnée chez
un garçon; peu après, la dyspnée reparaît ; trachéotomie. Un an
après, le père écrit « qu'on renvoie tous les jours l'enfant de
l'école, car il devient toujours plus stupide ».
31° Bruns 3. - Homme de vingt-quatre ans, opéré depuis six
mois, présentait en 1885, lors de la publication du travail de l'au-
teur, les symptômes initiaux de la cachexie pachydermique.
1 Baumgartner. Zur Cachexia strunxspriva (XII1 Congrès des chi-
rurgiens allemands, Beilage Zur Centralbl. für Chirurgie, 1884, nez 23,
p. 57.)
2 Kônig. - XIlle Congrès des chirurgiens allemands (loc. cit.), p. 58.
3 Loc. cit. - Relaté par Grundler (p. 422).
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 365
32° Bruns. - Fille de vingt-six ans, opérée depuis quatre ans,
présentait en 4885 des symptômes très graves myxoedémateux '.
33° Bruns. C'est le cas dont l'autopsie a été relatée plus
haut (p. 355).
34° Kùster 2. Garçon de douze ans ; extirpation totale; trois
ans après l'opération, on note l'arrêt de la croissance, la pâleur
du teint, un oedème dur des mains, la décoloration des muqueu-
ses ; l'abdomen est ballonné, les testicules petits; absence de poils
au pénil ; cheveux rares, secs ; parole lente, physionomie stupide,
perte de la mémoire, lenteur des mouvements, etc. Trachée
réduite de volume ; en 1886, le malade est toujours cachectique.
35° Gordon 3. - Femme de cinquante-deux ans, opérée il y a
onze ans par Lister ; symptômes my.roedémateuæ très accentués ;
l'intelligence est cependant en partie conservée.
36° Pietrzikowski-Gussenbauer f,. Garçon, âgé de neuf ans ;
goitre parencbymateuv ; extirpation totale le 9 mai 1882, tétanie
légère, guérison en 14 jours. Deux ans et quatre mois et demi i
après l'opération, il présentait les principaux symptômes de la
cachexie pachydermique.
3' ? ° Pictrzikowski-Gussenbauer. Fille, âgée de dix-sept ans,
goitre colloïde kystique; extirpation totale le 17 janvier 1883,
tétanie, guérison en quatre semaines. - En 1884, début de la
cachexie pachydermique.
38° Piclrxikowski-Gussenbauer. - Fille, âgée de dix ans, goitre
vasculaire; extirpation totale, le 29 août. - Trois ans après
l'examen de la malade permettait de constater des symptômes
de cachexie pachydermique.
39° Baumgartner 5. - Fille de vingt-cinq ans; goitre circu-
laire ; extirpation totale; deux mois après, cachexie 6,
1 Un troisième cas de thyroidectomie totale, relaté par Grundler et ap-
partenant à Bruns, n'avait été suivi quatre mois après d'aucun acculent.
2 Hans Schmidt. - Fin Fait von Cachexia slrumipriva. (Berlirzer Idi-
nzsc'e JVochensch1'i{t, 2 août 1S86).
3 Gordon. - Myxoedema following zzpon removal of the thi;roïd gland.
(The Lancent, 1S86, n" 11). ).
' Pietrzikowski. - Beilrâge zur Kropfexstirpation nebst Beilrdgen
zur Cachexia <t'MH ? )r ! t)6[. (Prager 6Vocheuschrift, 1884, n°48 et suivants
et 1885 nos 1 et 2). 1
" Baumgdrtner. Congrès des naturalistes allemands, Berlin, 1886.
6 On a encore signalé quelques autres cas de myxoedème opératoire,
(W. Stokes; t cas avec autopsie), dont quelques-uns sans aucun détail
(cas d'Occhini, de Huggi, etc.).
366 CLINIQUE NERVEUSE.
Si la plupart des chirurgiens admettent que le
myxoedème peut être une conséquence de la thyroï-
dectomie totale, il se trouve encore quelques auteurs
pour contester ces résultats. Ainsi M. Miliulicz' ne
croit pas que l'étiologie opératoire de la cachexie pachy-
dermique soit complètement élucidée; quelques-uns
de ses malades présentaient, en effet, avant la thyroï-
dectomie soit un arrêt de croissance, soit l'aspect cré-
tinoïde. Ces derniers, au nombre de trois, étaient âgés
de dix-sept à vingt ans. L'auteur pense que si on les
avait opérés avant l'apparition de l'état crétinoïde,
celui-ci aurait été attribué à l'opération. L'objection
soulevée par.M. Mikulicz perd beaucoup de sa valeur
du fait qu'il ne donne aucun détail sur l'état des corps
thyroïdes extirpés; on comprend très bien qu'une ? glande thyroïde dont toutes les parties sont affectées
puisse, fonctionnellement parlant, amener les mêmes
modifications organiques que l'extirpation totale.
La cachexie pachydermique aurait encore, dans de
très rares cas, été observée à la suite de thyroïdectomies
partielles, mais ces observations sont souvent suscep-
tibles des mêmes critiques que celles de M. Milculicz.
Les cas parvenus à notre connaissance appartiennent
à MM. Tassi, Occhini et Poncet (de Lyon), celui-ci
aurait observé une cachexie pachydermique fruste à
la suite d'une résection de l'isthme. Ces cas se trou-
vent en partie expliqués par l'observation que vient
de rapporter M. J. Reverdin d'un de ses malades chez
qui l'extirpation du lobe gauche de la thyroïde fut
i Mikulicz. - l3eitrag zur Opération des K1'op(es, ( tViener med. Woch-
ezcsclzri/t, 2, 9, 16, et 2.5 janvier 18.S6 .
.IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 367
suivie de l'atrophie du lobe droit '; toutefois M.Pon-
cet dit ne pas avoir constaté l'atrophie de la glande
chez son opéré.
Sur 24 cas d'extirpation totale, Kocher aurait observé
18 fois la cachexie pachydermique; sur 11 cas,
MM. Reverdin ont noté 5 cas de cachexie; Baum-
gartner a eu 5 myxoedémateux sur 11 1 opérés ;
M. Julliard 2 cas également sur 11 opérés;
Küster 1 cas sur 4 thyroïdectomies totales; - Pietrzi-
kowski-Gussenbauer, 3 cas sur 9 extirpations totales,
etc. Soit en tout 39 cas, dont 13 hommes et 26 femmes
(en retranchant un cas de Kocher sur lequel les détails
nous manquent). - Le tableau suivant donne la
proportion selon l'âge :
368 CLINIQUE NERVEUSE.
malades de MM. Reverdin, quatre de leurs opérés
atteints consécutivement de myxoedème ont été revus
par eux en décembre dernier. Chez tous, l'amélioration
était notable; chez deux (1VI ? F... et 111"° S...), on
constata le développement tardif d'un lobule thyroï-
dien aberrant. Depuis le mois de décembre, une des
opérées (M"° Crott...) a été revue par l'un de nous avec
M. J. Reverdin, qui . nous écrivait peu après « que
l'amélioration est de plus en plus marquée' ». Tous ces
malades ont été opérés dans le courant des années
1880 et 1881 -.
Baumgartner a également constaté l'amélioration de
deux de ses cinq opérés atteints de myxoedème. Il
semble donc résulter de ces faits que le pronostic du
myxoedème opératoire est plus favorable que celui du
myxoedème médical dont la marche parait fatalement
progressive, si l'on en juge par les cas que nous avons
rassemblés.
De toutes les hypothèses émises jusqu'à ce jour sur
l'éliologie de la cachexie pachydermique, l'atrophie ou
l'absence de la glande thyroïde était celle qui rencon-
trait le plus grand nombre d'adversaires. Mais les cas
de myxoedème observés par MM. Reverdin, Kocher,
etc., à la suite de l'extirpation totale du corps thyroïde,
le cas du Pacha, ceux de Curling, de H. Fagge, etc.,
que nous avons rapportés plus haut, viennent donner
une grande valeur à la théorie qui fait dépendre le
1 Voir plus haut note 2, p. 360.
2 Voir, pour plus amples détails : Note sur vingt-deux opérations de
goitre par J.-L, et A. Heverdlll, Gellève, 1885, et le travail que \l..1. Re-
verdir vient de présenter sur ce sujet au Congrès français de chirurgie.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 369
myxoedème d'une lésion grave ou de l'absence de la
glande thyroïde. La révision des cas publiés par les
auteurs permet du reste d'affirmer que dans presque
tous ceux où il est fait mention de l'examen de la
glande thyroïde, celle-ci était lésée, que, dans les
observations non suivies d'autopsie il est souvent noté
qu'elle n'a pu être reconnue à la palpation.
Cooper', puis Schiff semblent les premiers avoir
entrevu autrefois les effets physiologiques de la glande
thyroïde; et récemment les nouvelles recherches des
physiologistes sont venues confirmer ée qu'avait du
reste démontré la clinique; on peut au surplus consi-
dérer la thyroïdectomie comme une expérience phy-
siologique pratiquée sur l'homme. Des expériences
faites sur les animaux, les plus concluantes et les
mieux conduites nous paraissent être celles de
M. Horsley, tant à cause de l'espèce animale à
laquelle il s'est adressé que par la façon dont elles
ont été dirigées. Dès le mois le décembre 1884,
M. Horsley publiait dans le British medical Journal
(p. 910) le résultat de l'extirpation du corps thyroïde
chez le singe. Chez ce primate l'extirpation de la glande
thyroïde, opérée avec les précautions antiseptiques (la
guérison de la plaie fut complète en trois jours) produit
des troubles nerveux généraux : convulsions, paralysie
fonctionnelle, hébétude mentale et enfin idiotie com-
plète, de la leucocytose, un abaissement de la tem-
' Mer.loel's Archio f. d. Physiologie, 1820, p. 185.
°- Schilf. - Unlersrcchuugrn übel' die Zuckrl'bildung in (1er Lrbel' unrl
der Einfliiss des Nerven-systeurs auf die E ? eugllng de* Diabètes. WU ! 'x-
bnrri, 18S5, p. 61.
370 CLINIQUE NERVEUSE.
pérature, etc., tous les symptômes enfin observés dans
le myxoedème. On pouvait constater de plus l'accu-
mulation de la mucine dans le tissu conjonctif.
Les nouvelles recherches de M. Horsley, entreprises
sur le chien, le chat et le singe, paraissent démontrer
que la glande thyroïde est d'autant plus nécessaire au
fonctionnement normal de l'animal, que celui-ci est
plus jeune; c'est ce que l'anatomie pathologique avait
déjà fait reconnaître sans qu'il eût été donné, jusqu'à
ces derniers temps, une explication satisfaisante du
développement plus considérable de la glande thyroïde
dans le jeune âge et de sou atrophie et de sa dégéné-
rescence chez le vieillard, qui, lui aussi, par certains
caractères, est myxoedémateux. Depuis longtemps déjà
notre attention a été appelée sur l'état de la glande
thyroïde chez les idiots, et sans pouvoir encore établir
de relation certaine (ce qui serait prématuré) entre les
faits trouvés à l'autopsie et quelques symptômes obser-
vés du vivant du sujet; nous avons pu constater que
chez la plupart de nos idiots la glande thyroïde est
petite et le plus souvent dégénérée. Les singes opérés
par M. Horsley ne survivent guère plus de six ou sept
semaines à l'opération. M. Horsley est cependant par-
venu à ohtenir chez ses opérés une survie de quatre à
cinq mois et même plus en les maintenant dans un
milieu porté artificiellement à une température élevée :
M. Horsley rapporte les symptômes observés par lui à
trois états successifs : 1° période nerveuse; 2° période
mucoïde; 3° période atrophique.
D'après l'auteur, cette évolution expliquerait pour-
quoi, chez certains idiots crétinoïdes ou dans les cas
très chroniques de myxoedème, la dégénérescence
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 371
mucoïde est peu apparente; c'est, en effet, ce que nous
avons obsetvé chez le Pacha.
Les expériences de M. Horsley montrent encore
que l'ablation de la glande thyroïde a une action évi-
dente sur les centres nerveux et expliquent les phé-
nomènes nerveux observés à la suite de ! a thyroïdec-
tomie totale, par exemple, le tétanos; que, de plus,
c'est avec raison que cette glande avait été classée (on
ne sait trop pourquoi) parmi les organes hématopoié-
tiques '.
Nous regrettons de ne pouvoir nous appesantir plus
longuement sur les recherches physiologiques de
M. Horsley qui trouveraient mieux leur place dans une
étude complète sur le myxoedème. Nous avons cru
cependant devoir les mentionner brièvement parce
qu'elles expliquent suffisamment les symptômes obser-
vés dans l'idiotie crétinoïde ou à la suite de la thyroï-
dectomie ; il reste toutefois à expliquer pourquoi,
chez l'homme, la thyroïdectomie semble produire un
état myxoedémateux susceptible d'amélioration, dont
il ne nous est pas même possible de déterminer la
durée exacte.
Le rôle physiologique de la glande thyroïde a encore
donné, dans ces dernières années, naissance à de
nombreux travaux que nous ne fèrons qu'analyser très
brièvement. M. Schiff2, un des premiers, a démontré
que les rongeurs supportent très bien la thyroïdecto-
1 La veine thyroïdienne inférieure contiendrait un plus grand nombre de
corpuscules rouges.
2 Schiff. - Résumé d'une série d'expériences sur les effets et l'ablation
des corps thyroïdes. (Revue médicale de 1ft Suisse Romande, un 2, 15 février
issu, p. ruz et n" S, 15 août 1884.) ,)
372 CLINIQUE NERVEUSE.
mie totale et simultanée, au contraire des carnivores
(chiens et chats) qui succombent après avoir présenté
des symptômes plus ou moins comparables à ceux qu'on
observe dans les cas de myxoedème ; opérés toutefois
à un intervalle de quinze jours, ces mêmes carnivores
peuvent survivre indéfiniment '.
Il a été opposé aux expériences de M. Schiff un cer-
tain nombre d'objections dont les principales se trou-
vent contenues dans le travail de M. Kaufimarrn 2, fait
sous la direction de M. Klebs. Qu'il nous suffise de
dire que cet auteur si sévère envers les autres, sauf
envers M. Kocher à qui il attribue la découverte du
myxoedème opératoire, a basé ses critiques sur de
prétendues extirpations de corps thyroïdes chez le
chien qui se trouvent n'être que des extirpations des
glandes sous-maxillaires ainsi qu'il ressort de son
travail même et des figures qui y sont annexées.
MM. Albertoni et Tizzoni3, Herzen 4, Fuhr5 confirment
en partie les expériences de M. Schiff. Les auteurs ita-
liens n'auraient observé aucune influence de l'âge et
du sexe des animaux opérés dont la survie aurait atteint
1 M. Niehans (de Berne) aurait observé deux cas de cachexie pachy-
dermique à la suite de l'extirpation du goitre en deux temps éloignés
(état qUI se rapprocherait de ce qui se passe dans le myoedème médical).
- Kaullmann. Die Schildrusenuxstirpation beillt llllnde und zlere Folge,
(A,'ch, ? exp. Pathologie und l'harnzalcologie, septembre 1881, p. 361,
IBI YVIII, III et IV, H.'). ,
3 Albertoni et Tizzoni. - Sugli effetti dell' estii-pazione della trlroide.
(arcs. per le Scienze mediche, t. X, no 1, 1886) et Archives italiennes de
Biologie, VU, fasc >.)
* Ilerzeu. -A A quoi sert la thyroïde (Semaine rn¿d" 11 août 1886).
5 Fuhr, Die Exstirpation dcr Schildruse (Archiu. f. Exp. Pathologie
Il, Pharmalcologie, 5 août 1886, p. 373 à aG0l. Nous avons eu connais-
sance de ce travail trop tardivement pour l'analyser d'une façon complète;
on y trouvera des renseignements bibliographiques intéressants en ce
qui concerne la physiologie de la glande thyroïde.
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 373
plusieurs mois et même un an soit après des ablations
simultanées, soit après des extirpations successives;
les résultats seraient comparables dans les deux cas.
Selon eux, il résulterait de leurs recherches que la
thyroïde aurait pour fonction de permettre à l'hémo-
globine de fixer l'oxygène Les chiens éthyroïdés de
M. Herzen n'ont succombé qu'après une période plus
longue que celle observée dans les premières expé-
riences de M. Schiff (ablation totale et simultanée).
Chez un des chiens opérés par M. Herzen, on nota une
survie de cinquante-deux jours; un autre chien dont
nous ignorons l'état ultérieur, ne présentait encore
aucun phénomène morbide lors de la publication de
ces expériences (quarante-deux jours après l'observa-
tion). M. Herzen admet que les effets de la thyroïdec-
tomie dépendent bien réellement de l'absence de la
thyroïde et qu'ils sont l'expression d'une affection céré-
brale probablement corticale.
Parmi les auteurs qui ont obtenu des résultats con-
traires à ceux de M. Schiff, nous devons encore citer
M. Philipeaux 2. Après avoir rappelé que, quinze ans
auparavant, il avait montré l'innocuité de l'extirpation
de la glande thyroïde chez le rat albinos, cet auteur
prétend avoir éthyroïdisé huit chiens sans qu'il s'en
soit suivi aucun trouble fonctionnel. Ces chiens avaient
été opérés les 1er et 15 septembre 1884 et M. Phili-
peaux donnait le résultat de ses expériences dès le
1 Bruns admet que le corps thyroïde joue un rôle dans la formation du
sang, soit un éliminant des substances nuisibles, soit en produisant des
substances nécessaires à la nutrition du système nerveux.
' Philipeaux. - De l'extirpation des corps thyroïdes des chiens. (Compte
rendu de la Société de Biologie, 8 novembre 188, p, 606.)
374 CLINIQUE NERVEUSE.
8 novembre de la même année. Les résultats obtenus
par M. Schiff seraient dus, selon lui, à des complica-
tions opératoires.
Pour M. Rogowitsch ', dont les expériences confir-
ment celles de M. Schiff en ce qui concerne les résul-
tats opératoires, les animaux succomberaient avec des
symptômes rappelant l'empoisonnement par le phos-
phore, l'arsenic, etc. Il aurait noté à l'autopsie une
encéphalomyélite parenchymatellse subaiguë résultant de
l'action d'un produit toxique (inconnu) de l'organisme
dont la neutralisation s'opérerait à l'état normal, dans
la glande thyroïde. La théorie toxique semble, du
reste, être actuellement adoptée par un grand nombre
de physiologistes. M. Schiff, qui d'abord considérait
avec Liebermeister, Zésas, Wagner, Sanquirico et Ca-
nalis, Colzi, la glande thyroïde comme un organe ré-
gulateur de la circulation cérébrale, s'y est rallié après
avoir montré, dans ses dernières expériences 2, que la
santé des animaux est conservée si on laisse un petit
morceau de la glande thyroïde ', ou, si l'on fait la
thyroïdectomie totale, après avoir greffé dans la cavité
péritonéale un petit morceau d'une glande thyroïde.
M. Allara' soutient que chez le poulet l'extirpation
1 Rogowitsch. Zur Physiologie der Schildruse (Centralbl. f. diemed.
Wissenschaften, 24 juillet 1886.)
2 Zésas. - D. med. Zeitung., nos 55, 56, 1886.
3 M. Cambria (Ueber die Schilddrusen-Reseklion nach Mickvliez) pré-
tend que les chiens supporteraient aussi bien que l'homme la résection
de la thyroïde si on a soin de laisser un petit morceau de la glande (sien-
med. loch" 31 juillet 18t6.) - Les résultats contradictoires obtenus
dans les expériences sur les chiens seraient du reste souvent expliqués
par l'existence d'une glande thyroïde aortique, accessoire fréquemment
observé chez cet animal
' AIlara. Sulla estil'¡J(¡ ? IOI1C della ti1'olde, lLo Sperimentale, mars
1885, p. 281.) .
IDIOTIE AVEC CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 375
totale de la glande thyroïde n'amène aucun des trou-
bles remarqués chez le chien. Il attribue ce résultat à
la situation de la glande chez le poulet, qui permet de
les éthyroïdiser sans léser aucun rameau du grand
sympathique. On sait, en effet, que MM. Reverdin,
Baumgartner, etc., avaient cru pouvoir faire dépendre
les phénomènes myxoedémateux observés chez leurs
opérés de la section de nombreux ramuscules de ce nerf.
Plusieurs auteurs (Sanquirico, Canalis, Ughetti et Di
mattes ont cherché s'il existait quelque relation fonc-
tionnelle entre la glande thyroïde et la rate; les expé-
riences sont jusqu'ici restées négatives.
Un grand nombre d'hypothèses ont été émises au
sujet de la nature du myxoedème ; chaque observateur
a donné la sienne ; nous ne croyons pas devoir nous y
arrêter ; nous signalerons seulement les théories attri-
buant le myxoedème à l'anémie due à une dénutrition
consécutive au rétrécissement de la trachée, etc. (liga-
ture des artères thyroïdiennes inférieures, Kocher),
à l'anémie consécutive à la paralysie des dilatateurs
de la glotte, à une lésion des rameaux du grand sym-
pathique, à l'altération du corpspituitaire etde la glande
pinéale, à l'action de l'acide phénique pendant l'opé-
ration, à une lésion des troncs nerveux, situés dans le
voisinage de la glande thyroïde, à l'action de la mu-
cine sur les centres nerveux, etc., etc.
Si la physiologie de la glande thyroïde est encore
quelque peu obscure, il n'en reste pas moins établi
que son absence ou les altérations pathologiques, dont
1 Ughetti et Di Mattei. - Sulla spleno-hroidectomia nel cane net
coniylio. (AI'ch, per le sczezzze mediche, vol. IX, n" 11).
376 CLINIQUE NERVEUSE.
elle peut être le siège, en empêchant totalement son
fonctionnement, produisent un état crétinoïde assez
voisin du crétinisme avec ou sans goître.
Le myxoedème a pu être confondu avec un certain
nombre d'autres affections, la néphrite, la lipomatose
généralisée, les lipomes symétriques , la sclérodermie.
L'oedème néphrétique se différencie facilement par sa
nature, sa mobilité, son siège, par les caractères tirés
de l'examen des urines, etc., et enfin par l'absence
de signes importants rencontrés dans le myxoedème.
La lipomatose généralisée est également facile à dis-
tinguer du myxoedème, nous ne nous y arrêterons pas
non plus qu'aux lipomes symétriques qui ne peuvent
prêter à confusion que lorsqu'ils siègent dans les fosses
sus-claviculaires, mais alors l'absence des autres
signes myxoedémateux permet de faire facilement le
diagnostic.
Le. diagnostic entre le myxoedème et la sclérodermie
s'établit sans difficulté; dans la sclérodermie oedéma-
teuse la peau, inégalement dure, offre dans certaines
parties une résistance nullement comparable à celle du
myxoedème, ou est parfois franchement oedémateuse.
Nous reviendrons dans un prochain numéro sur
quelques nouveaux faits qui sont parvenus à notre
connaissance et nous donnerons l'examen histolo-
gique des différents organes du Pacha.
RECUEIL DE FAITS
TENTATIVE DE SUICIDE PAR PENDAISON. - AMNÉSIE
RÉTROACTIVE, MODIFICATION DU DÉLIRE;
Par CH. FÉRÉ et P. BRÉDA.
Nous avons observé pendant les vacances, dans la première
section des aliénés de l'hospice de la Salpêtrière, un épisode
qui nous a paru mériter une courte analyse. Nous ne nous
arrêterons pas sur les détails de l'affection mentale de cette
malade, qui est entrée dans la direction de M. A. Voisin; nous
ne ferons que rapporter succinctement les faits qui se sont
passés sous nos yeux.
OBSERVATION. - Tentative de suicide par pendaison. Accidents
d'oedème de la glotte et de distension du plexus brachial. -
Amnésie rétroactive. Modification momentanée du délire.
Antécédents héréditaires. -Père, bien portant; buveur, de temps
en temps a des névralgies, quelquefois très tenaces.
Mère. Très nerveuse, a eu de nombreuses attaques qui
persistent encore à l'heure actuelle, mais en moins grande quan-
tité depuis la ménopause.
Antécédents personnels. On ne relève chez M... aucune trace
d'affection nerveuse dans l'enfance; mais ses souvenirs ne pa-
raissent pas très précis. Elle a été réglée de bonne heure ( ? ) et
présentait, parait-il, une légère excitation au moment des
époques.
Premier accès.- Il y a dix-huit ans, elle entre dans le service de
M. Trélat, qui porte comme diagnostic : Manie hystérique.
On avait voulu la faire marier de force. Tentative de suicide.
Séjour de seize mois. Depuis, bonne santé, sauf un peu d'excita-
tion aux époques. Actuellement, on ne trouve plus de stigmates
hystériques, sauf peut-être un point ovarien du côté droit.
Deuxième accès. (18 septembre 1885.) Travaillait au Bon
Archives, t. XII. 25
378 RECUEIL DE FAITS.
Marché ; le prix de son travail est diminué; une personne, qui
avait promis de s'interposer, en profite pour se substituer à elle et
tenir surelle et son mari des propos désagréables, dit qu'elle se
vengera, tient des propos incohérents et est agitée. Toutefois elle
n'aurait point eu à ce moment d'idées de suicide.
Troisième accès. - Sortie le 9 octobre 1885, elle rentre à la
Salpêtrière quelques jours après et, si l'on en croit la famille,
l'amélioration qui avait autorisé sa sortie n'avait point duré plus
de vingt-quatre heures après; le 20 octobre, jour de sa rentrée,
même aspect, même physionomie, mêmes propos.
A ce moment apparaissent des idées de suicide, qu'elle essaie
de motiver en disant qu'elle est certaine de ne point guérir de sa
maladie et qu'elle est désespérée de ne pouvoir rester chez elle
pour soigner son enfant.
\" mars 1886. B... essaie de se suicider en avalant des
épingles : elle prétend en avoir avalé plus de 100; la malade
devient de plus en plus sombre; elle porte aussi au bras droit une
petite plaie qu'elle s'est faite avec des éclats de verre.
B... prétend qu'elle veut débarrasser son mari et la société d'un
membre inutile, puisqu'elle est assez dénaturée pour ne point
soigner son enfant et abandonner son ménage ; elle annonce
qu'elle s'étranglera. - Pas d'hallucinations.
11.-B... essaie de se suicider en avalant duverre pilé, qu'elle
vomit presque immédiatement. - Pas d'accidents. *»
16. - B... avale dans les cabinets du chlore qui y avait été
déposé quelques instants auparavant. Vomissements. Pas d'au-
tres accidents.
Depuis lors, la malade devient de plus en plus sombre, disant
qu'elle estune coquine, une misérable, que bien des gens qui ont
passé par la guillotine sont moins coupables qu'elle. - Insomnie
constante. '
Mélancolie s'accentuant chaque jour; de temps à autre diverses
petites tentatives de suicide qui toutes avortent successivement.
Pas d'hallucinations. - B... se trouvait le plus souvent dans le
service avec une autre malade, K..., hantée, elle aussi par des
idées de suicide; cette dernière était pour ce fait la plupart du
temps camisolée; leur entretien roulait presque constamment
sur le suicide et les moyens de le mener à bonne fin.
Le jeudi 26 août 1886, à une heure de l'après-midi, K... vient
trouver la surveillante de service, et lui dit que B... est montée
dans le dortoir des filles de service, et que très probablement elle
n'y était que pour se faire du mal; la surveillante se hâte de se
rendre à l'endroit désigné et y tiouve B... pendue à une barre de
fer de la fenêtre. Cotte fenêtre vitrée était ouverte, mais l'ouver-
TENTATIVE DE SUICIDE PAR PENDAISON. 379'
ture était fermée par un grillage qui laisse libre en dedans l'enca-
drementdela fenêtre. B... après avoir attaché la corde au barreau
supérieur du grillage s'était assise sur l'encadrement de la fenêtre,
le dos tourné en dehors, puis s'était laissé glisser. Dans ce glisse-
ment, elle s'etait portée du côté gauche, de sorte que le bras
gauche s'était tourné en arrière et en bas, et était pris entre le
corps et le mur. La tête s'était aussi portée du même côté. Aussi
le sillon que la corde forme sur le cou arrive-t-il en arrière jusqu'à
la ligne médiane à gauche, tandis qu'à droite il s'avance beaucoup
moins loin. La constriction a surtout porté du côté gauche, vers
lequel la tète était fortement fléchie : c'est ce qui peut expliquer
le tiraillement du plexus cervical du côté droit, dont nous retrou-
verons plus loin les conséquences.
La corde immédiatement coupée, B... est étendue par terre et
ne donne plus signe de vie ; on la flagelle avec des li nges trempés
dans du vinaigre; on lui promène de nombreux sinapismes sur
tout le corps et on finit par la ramener à la vie.
La voix est perdue; le cou est extrêmement gonflé et porteune
raie ecchymotique, beaucoup plus marquée à gauche qu'à droite.
A gauche, cette trace de la corde arrivée dans la région de la
nuque, se prolonge jusqu'à la ligne médiane, qu'elle dépasse
même un peu. A droite, la trace est beaucoup moins profonde, ce
qui est expliqué par la position dans laquelle B... a été trouvée.
A l'examen de la gorge, on constate que la luette est gonflée ainsi
que les piliers du voile du palais; deux incisives et une canine infé-
rieures sont très ébranlées. Il est impossible de porter les recherches
plus loin de ce côté à cause de la difficulté considérable de la res-
piration. B... est placée dans un fauteuil; la respiration est sif-
flante, rauque, on entend un bruit de drapeau dans le larynx ; la
suffocation est telle à de certains moments qu'on se tient prêt à
pratiquer la trachéotomie. La malade est absolument inconsciente;
elle ne s'occupe en aucune façon de ce qui se passe autour d'elle,
ne répondant pas aux questions qui lui sont faites; la sensibilité
parait très diminuée, au point que la malade ne retire point le
bras quand on la pince très fortement. .
Vendredi matin, 27 août. - Le cou est toujours gonflé, les
lèvres sont violacées, les yeux saillants; le tirage n'est point dimi-
nué et il y a toujours lieu de craindre la nécessité delà trachéoto-
mie. Injection de morphine.
Vendredi midi. - A la suite des injections de morphine, les
accès de suffocation ont diminué; la voix est légèrement revenue,
mais rauque, très voilée, éraillée et difficilement compréhensible ,
la malade respire toujours avec peine, mais le tirage est moindre.
Vendredi soir. - B... va beaucoup mieux; le cou est dégonflé,
le tirage a presque complètement disparu ; la malade parle, mai..
380 RECUEIL DE FAITS.
la voix est toujours très voilée. Boissous tièdes, ingérées assez
facilement.
Samedi 28. Le gonflement est à peu près complètement dis-
paru ; la respiration est devenue normale, la voix reste toujours
un peu enrouée; la malade toussote de temps à autre. Pas de
crachats.
B... se plaint de douleurs dans l'épaule droite. L'amélioration
que l'on constate au point de vue des accidents qui ont suivi le
suicide n'est point la seule; l'état mental lui-même est amélioré ;
B..., qui, antérieurement, était sombre, anxieuse, a maintenant
une physionomie ouverte; elle s'étonne de se voir camisolée et
dit qu'elle serait bien mieux à aider les filles du service à mettre
en ordre le dortoir. B... n'a repris vraiment conscience d'elle-
même qu'hier soir vendredi, c'est-à-dire trente et une heures après
l'accident; elle se rappelle avoir été oppressée à ce moment, mais
elle a perdu le souvenir de sa tentative de suicide.
Elle explique son enrouement par le froid qu'elle aurait pris la
veille en marchant les pieds nus dans l'eau.
Dimanche 29. L'amélioration continue.
Lundi 30. La malade est interrogée de nouveau, et l'on essaie
de lui faire rappeler son suicide et les circonstances qui l'ont pré-
céde. « Nous sommes montées, nous dit-elle, dans le dortoir, K...
et moi, pour reporter du linge, et là, nous avons fait la remarque
qu'il serait bien aisé de se servir de la barre des fenêtres pour se
pendre et débarrasser ainsi le monde de nous. » Nous poussons un
peu la malade et nous lui demandons si elle n'a pas essayé de
mettre son projet à exécution. Oh ! non, nous répondit-elle,
j'ai bien trop peur de me faire du mal; j'avais bien une corde,
mais je ne m'en suis pas servie. »
Sur de nouvelles instances auprès d'elle, B... se révolte, se plai-
gnant que la fille nous ait fait sur elle de mauvais rapports;
elle s'en prend à la surveillante, et lui reproche de la mal servir
auprès de nous.
A plusieurs reprises, le même sujet est abordé, mais il est im-
possible de la faire se souvenir de son suicide; sa mémoire se
perd au moment où, de concert avec K..., elles examinaient le
moyen de mener à bien leur suicide. Ce qui pourrait prouver la
sincérité de B..., c'est qu'elle a recherché plusieurs fois la corde
dont elle s'est servie, et qui était placée dans un sac à elle appar-
tenant.
Si l'on demande à B... l'explication de la raie noire que l'on
voit sur son cou et qu'on lui montre dans une glace. « Ceci, dit-
elle, c'est la camisole qu'on m'avait mise depuis deux jours, et
qui doit avoir été trop serrée. » L'état mental est changé;
B... suppliait autrefois qu'on ne la renvoyât pas dans sa famille,
TENTATIVE DE SUICIDE PAR PENDAISON. 381
parce qu'elle en était indigne; aujourd'hui, au contraire, elle
demande sa sortie. « J'étais venue ici, nous dit-elle, avec l'idée de
ne plus en sortir et de ne plus rien faire ; j'étais, en faisant cela,
bien criminelle; mais, maintenant, mon mari me pardonne tout,
et j'espère bien que vous allez me signer ma sortie pour me per-
mettre d'aller vivre au milieu des miens et de soigner mon en-
fant. » D'ailleurs, depuis sa tentative de suicide, elle a retrouvé le
sommeil qu'elle avait perdu depuis longtemps.
Samedi 4 septembre. B... se plaint de douleurs assez vives dans
le bras et l'épaule. L'ecchymose provoquée par la corde apresque
entièrement disparu du côté droit, tandis qu'à gauche, et sur un
espace de 7 à 8 centimètres de longueur, la peau du cou est sca-
rifiée ; la largeur de la plaie est de 4 millimètres environ. Cette
suppuration ne s'est point montrée à droite.
Les idées de suicide ont complètement disparu ; la malade n'est
plus tourmentée que par la question de savoir si l'on voudra la
laisser sortir de la Salpêtrière; elle craint de se voir refuser cette
sortie.
Mardi 7. - L'état général n'a pas changé ; seulement les idées
d'indignité semblent revenir, et la malade ne demande plus di-
rectement sa sortie; elle supplie qu'on la force à sortir, craignant
de ne pouvoir le faire elle-même, et ne pouvant se mettre dans
l'idée que ce jour arrivera jamais.
Les douleurs dans l'épaule droite et le bras sont devenues plus
grandes; cette douleur que la malade localisait dans l'articulation
scapulo-humérale, siège ailleurs. Quand on appuie en dehors du
sterno-mastoidien, au niveau des apophyses transverses, on déter-
mine une douleur assez vive, qui du reste se retrouve sur tout le
trajet du plexus brachial, dans le creux sus-claviculaire, dans
l'aisselle et au bras, sur tout le parcours des principaux nerfs :
médian, cubital et radial. On ne trouve pas de douleur à l'avant-
bras et à la main, mais seulement un léger engourdissement.
La même.douleur se trouve à la nuque tout le long des apophyses
épineuses, depuis l'occipital jusqu'à la proéminente.
Un premier vésicatoire est posé dans le creux sus-claviculaire le
mardi 7 septembre.
Un second vésicatoire est posé à la nuque et amène un grand
soulagement; pourtant les mouvements sont encore assez pénibles,
et il est difficile à la malade de porter la main sur la tête.
La légère amélioration que l'on avait constatée au point de vue
mental n'a point persisté, et n'a guère duré que huit jours ; aujour-
d'hui, B... semble être revenue à son ancien délire, et répète les
mêmes propos qu'avant sa tentative; néanmoins, les idées de sui-
cide paraissent disparues.
A partir du 16 septembre, à la suite d'une visite de sa mère,
382 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
qui lui a beaucoup parlé de sortie, B... a perdu de nouveau le
sommeil.
En résumé, cette tentative de suicide a déterminé des effets
locaux assez importants : 1° d'abord des accidents d'oedème de
la glotte, qui ont laissé le pronostic en suspens pendant près
de vingt-quatre heures; 2° une distension des racines cervi-
cales, laissant après elle une névralgie diffuse du plexus cervical
qui n'a pas encore complètement disparu.
Mais les phénomènes les plus intéressants se sont manifestés
du côté des fonctions psychiques :
1° Ce qui frappe tout d'abord, c'est l'absence de souvenir
pendant la période de trente heures environ qui a suivi l'acci-
dent ; mais on reconnaît bientôt que cette amnésie comprenait
le temps où se sont faits les préparatifs du suicide. Il semble
donc que nous retrouvions dans cette circonstance un des
caractères les plus importants des amnésies traumatiques, qui
souvent sont rétroactives, c'est-à-dire comprennent une cer-
taine période antérieure au choc.
2° Enfin un autre fait qui n'est pas moins remarquable, c'est
la modification du délire, qui a été telle pendant quelques
jours, qu'on aurait pu croire à une guérison complète. C'est
en quelque sorte la contre-partie des faits de dépression psy-
chique avec ou sans délire, que l'on observe quelquefois à la
suite de chocs violents.
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE
LI. CHIRURGIE DU cerveau; par Victor HORSLEY, Bs. FR. SI.
A cause du peu de temps accordé à la lecture des communi-
cations, le mémoire suivant n'est nécessairement qu'une simple
description de la méthode que j'ai choisie comme surmontant
avec succès les difficultés et les dangers des opérations sur le
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 383
cerveau. Puisqu'en plusieurs points essentiels ma méthode
diffère de ce qui a été considéré par quelques-uns comme les
règles de la chirurgie, je crois que le sujet sera mieux traité
en décrivant avec détail le traitement d'un cas imaginaire, ac-
compagné des photographies et des spécimens pris sur les
malades que vous voyez devant vous et sur les animaux infé,
rieurs qui ont servi de sujet aux expériences.
Préparation du malade. - La veille de l'opération, la têt,
du malade est rasée et lavée avec du savon et de l'éther ; puis
la place de la lésion est constatée par des mesures et marquée
sur le cuir chevelu. La tète est alors couverte avec de la char-
pie, imbibée d'une solution au 20e d'acide phénique, du mac-
kintosh et de la ouate, et se trouve ainsi phéniquée au moins
douze heures avant l'opération. Enfin, on administre, la veille
au soir le purgatif ordinaire, suivi d'un lavement le matin de
l'opération.
Anesthésie. - La méthode de l'anesthésie est très impor-
tante, elle consiste en l'administration, par injection hypoder-
mique, d'un quart de grain de morphine, après quoi le malade
est chloroformisé. L'administration de la morphine a un double
but. D'abord, comme on le sait, cela permet de faire une lon-
gue opération sans donner une grande quantité de chloroforme.
En effet, j'ai trouvé que la quantité actuellement administrée-
pour une opération de deux heures est très petite. La seconde
raison pour employer la morphine est, peut-être, la plus im-
portante, puisqu'elle est basée sur ce fait, démontré par le
professeur Schafer et par moi, à la suite d'expériences sur des
singes, que la morphine produit une contraction très marquée
des artérioles du système nerveux central, et par suite si le
malade est sous son action, une incision dans le cerveau, ne sera
accompagnée que d'un très petit suintement. Je n'ai pas em-
ployé l'éther dans les opérations sur l'homme, craignant qu'il
ne produise une excitation cérébrale; le chloroforme, au con-
traire, produit une dépression marquée. Dans le cas d'une
complication cardiaque, ces considérations théoriques seraient
abandonnées pour l'emploi d'un anesthésique plus sûr. Dans
le cas de mon second malade, le coeur était déplacé en dehors,
et le lobe inférieur du poumon gauche ne servait que peu à la
respiration par suite de plusieurs attaques de pleurésie; mais
je n'ai pas considéré cet état comme une contre-indication
suffisante de l'emploi du chloroforme. Dans le cas où il y a
384 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
encore lésion cardiaque considérable, on doit faire une pareille
opération sous l'action de la cocaïne. Dans ce cas, on doit faire
attention d'employer une très forte solution lorsque la dure-
mère est exposée, puisque cette membrane est très sensible
(ses nerfs venant de la cinquième branche des nerfs crâniens),
fait qui semble inconnu aux cliniciens, quoi qu'il ait évi-
demment son importance comme cause de la douleur intra-
crânienne.
Quoique les solutions de cocaïne puissent être, dit-on, par-
faitement aseptiques, une plus ample confirmation de cette
assertion doit être faite avant qu'on l'emploie, comme je viens
de l'indiquer, car on saurait trop répéter que l'aseptie est le
point le plus important sur lequel repose la chirurgie du cer-
veau.
Traitement de la plaie. Il est notoire que, pendant ces
trente et quarante dernières années, la trépanation a été re-
gardée comme excessivement mauvaise à cause de la mortalité
élevée qui suivait son application. Cette mortalité tenait évi-
demment à la fréquence de la méningite septique qui suivait
l'ouverture de la dure-mère, le danger de ce procédé fut com-
plètement réalisé par Pott, et son école qui employait le trépan
très volontiers. Par suite, il s'est formé graduellement une
opposition contre l'intervention chirurgicale sur le cerveau.
Sans les précautions antiseptiques, la prudence est louable;
mais, grâce à l'enseignement de sir Joseph Lister, aucun de
ceux qui sont imbus des merveilleux principes de la chirurgie
scientifique découverts par son génie, n'hésitera à suivre les
préceptes de la raison et du sens commun et procédera à l'opé-
ration.
Je n'entrerai pas ici dans l'examen critique des appréciations
vagues que l'on voit dans nos journaux sur le traitement des
plaies; car je ne veux pas perdre le temps de la réunion à dis-
cuter les premiers principes de chirurgie. Je vais maintenant,
donner brièvement les résultats d'une assez grande expérience
de la question, acquise pour avoir pratiqué un assez grand
nombre d'opérations sur les singes, avec un seul insuccès, et
appliqué la même méthode à l'homme, où elle fut toujours
suivie de succès. Comme j'aurai à citer souvent les expériences
faites sur les animaux inférieurs, je désire faire ici une brève
appréciation. De l'opinion de ceux qui croient que le processus
de réparation des tissus chez les animaux inférieurs diffère
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 385
beauconp du même processus chez l'homme, et que, par suite,
une déduction juste ne peut pas être tirée de l'un à l'autre.
Quoiqu'admettant que les tissus des animaux inférieurs ne
sont pas si souvent le siège de la dégénérescence graisseuse et
des autres formes de dégénérescences, c'est la plus grande er-
reur possible de croire que les plaies guérissent par un proces-
sus différent de celui que nous avons vu chez l'homme.
En effet, pour obtenir la réunion par première intention
chez les animaux, le cheval par exemple, il est nécessaire de
prendre les précautions les plus grandes. Les vues stéréotypées
sur ce sujet ont sans doute entravé les progrès de la chirurgie
cérébrale jusqu'à ce que le Dr Ferrier et le professeur Yeo
aient démontré entièrement, au meeting de l'Association à
Cambridge, que les vues populaires sur les opérations sur le
cerveau étaient fausses. L'expérience que j'ai acquise pendant
les deux dernières années, comme Brown, professeur de patho-
logie à l'université de Londres, garantira mon opinion que
l'idée généralement reçue sur ce sujet est sans fondement.
Pour revenir à notre sujet, à cause de ce fait que presque
toutes les méthodes ont des inconvénients qui engagent la res-
ponsabilité du chirurgien, je crois que le mieux est d'employer
la méthode listérienne la plus stricte comprenant la vapeur
phéniquée, les lotions au vingtième, et, pour les premiers
jours, en tous cas, les pansements à la gaze phéniquée. Quoi-
qu'il y ait quelquefois des idiosyncrasies contre l'acide phéni-
que, qui amènent de temps en temps des inconvénients, il est
plus sûr de l'employer, jusqu'à ce qu'on en découvre un meil-
leur, car c'est le plus puissant et le plus sûr des désinfectants.
Je n'ai pas besoin de dire que l'usage de la ouate sublimée, la
peau étant protégée par la gaze phéniquée, peut rendre de
grands services; mais une bonne gaze phéniquée est assez
élastique pour obtenir des meilleurs résultats.
Ligne de l'incision. - On a l'habitude d'enlever les parties
molles du crâne par une incision cruciale. Je ferai remarquer
que pratiquement cette méthode est désavantageuse, car pour
maintenir relevés les quatre lambeaux distincts, il faut quatre
mains qui sont toutes très gênantes. Si, au contraire, on enlève
un lambeau circulaire, on peut simplement le rejeter en ar-
rière sans autre aide. Un ou deux détails ne seront pas dépla-
cés ici : 1° l'incision doit être faite verticalement sur l'os et
toutes les parties superficielles au périoste relevées avec le
lambeau; 2° l'incision doit être peu profonde, pour éviter de
38fi C) REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
couper les vaisseaux collatéraux; 3° elle doit être dessinée de
façon à ne point diviser les gros troncs artériels qui fournissent
le sang à cette portion du cuir chevelu. Ceci peut être facile-
ment fait sans toucher au drainage des vingt-quatre premières
heures, même si le lambeau tombe, puisque, le malade étant
sur le dos, l'écoulement peut se faire librement par le bord
postérieur. Le périoste doit être enlevé par une incision cru-
ciale, dans un espace correspondant à la première couronne de
trépan.
Trépanation de l'os. - Nos moyens actuels d'enlever l'os
sont susceptibles de grands progrès, sans doute, mais le moyen
le plus sûr et le plus rapide est d'appliquer deux couronnes de
trépan aux extrémités opposées de la surface à enlever, et alors
de couper à moitié les côtés d'une telle surface avec une scie
de Hey, et de continuer la division avec une puissante pince.
En supposant que la dure-mère a été séparée, par les ouver-
tures du trépan, aussi loin que possible de la surface inférieure
de l'os à enlever, je ferai remarquer que l'ouverture du cràne,
comme c'est habituellement le cas lorsqu'on fait une explora-
tion, a commencé par l'enlèvement d'un large disque par le
trépan. On trouvera, je pense, qu'un instrument dé cinq cen-
timètres de diamètre est le plus commode dans ce cas. Lors-
qu'on peut conserver la dure-mère intacte, les portions de
l'os enlevé doivent être conservées dans des éponges asepti-
ques chaudes et être replacées à la fin de l'opération entre la
peau et la dure-mère, après avoir été divisée en petits frag-
ments d'après la manière du . D' Macewen.
Traitement de la dure-mère. On doit inciser la dure-mère
sur les 4.5°e de la circonférence de la surface exposée à 3 milli-
mètres de distance du bord de l'os, pour l'empêcher ainsi de se
piquer sur ce bord. La meilleure manière est d'ouvrir la dure-
mère d'abord avec une incision au scalpel et ensuite avec des
ciseaux à pointes mousses, en prenant bien soin de ne point
blesser les méninges au-dessous. On met en sûreté les princi-
pales branches de la méningée moyenne, par une ligature
passée au travers de la dure-mère, juste sur le bord de l'incision
et nouée avant la division du vaisseau.
Traitement du cerveau. - Après la division de la dure-mère,
le premier point pratique est de remarquer si le cerveau fait
saillie ou non par l'ouverture du trépan. Quoique mon expé-
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 387
rience sur ce point ne soit fondée chez les hommes que sur cinq
cas, dont trois étaient des cas de tumeur du cerveau, je suis
porté à croire que le fait de la saillie très proéminente du cer-
veau dans la plaie indique une tension pathologique intra-
crânienne, - pièce d'évidence qui est, si elle est vraie, de la
plus haute importance, puisque, toutes choses égales d'ailleurs,
elle indiquera l'existence d'une tumeur. Je n'ai jamais observé
une telle saillie immédiate sur les animaux sains, et récipro-
quement elle n'a jamais fait défaut sur mes trois cas de tumeur.
(Les deux cas dont je ne tiens pas compte ici, sont : 1° le cas
des D" Bennett et Godle, publié dans les Medico-chi1'w'g¡'cal
Transactions; 2° un cas de tumeur cérébrale que je viens
d'opérer).
Si rien d'anormal ne se présente dans les membraneslesecond
point à voir, dans un examen systématique du cerveau, est sa
couleur. L'expérience seule donnera une familiarité suffisante
de l'aspect du cerveau vivant et, par suite, permettra à tout le
monde d'avoir un opinion certaine sur ce sujet. Comme je ne
suis pas de ceux qui considèrent qu'il est légitime de tenter
une expérience sur l'homme avant de l'avoir trouvée sans
danger sur les animaux inférieurs, je regrette que la législation
actuelle rende presqu'impossible aux chirurgiens d'acquérir
cette expérience fondamentale importante. J'appuie fortement
sur ce point, puisque l'existence d'une légère^teinte jaunâtre,
ou peut-être d'une teinte livide indiquerait, l'existence d'une
tumeur sous l'écorce, dans la couronne rayonnante.
On doit ensuite examiner l'état des vaisseaux et des lym-
phatiques périvasculaires, et surtout faire attention aux taches
blanc-jaunâtres sur leurs parois, qui indiquent une vieille
lésion. Je doit dire ici qu'il est nécessaire d'avoir une exacte
connaissance des artères et des veines du cerveau, parce qu'il
est très utile de voir quelles sont les parties du cerveau
privés de leur sang. On doit ensuite observer les altérations
dans l'épaisseur du cerveau, mais il faut se rappeler que les
tumeurs cérébrales situées sous l'écorce sont à peine visibles
sans l'incision exploratrice.
L'examen du cerveau exposé étant complet, on doit ensuite
considérer le mode d'enlèvement d'une partie du cerveau et
de la tumeur. Peut-être la peur d'opérer sur le cerveau a été
la crainte de l'hémorrhagie, ceci est aussi déraisonnable qu'il
est indispensable de prendre des précautions contre les altéra-
388 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
tions septiques dans la blessure. Cependant cette considération
nous arrêtera un peu, car on a coutume d'éviter ce danger
imposé par l'usage du cautère actuel, méthode barbare qu'ac-
compagnent naturellement des troubles inflammatoires secon-
daires, comme le prouvent les recherches expérimentales.
Un moment de réflexion nous montrera que, dans le cerveau
comme dans les reins, les vaisseaux (et ce sont les artérioles
à qui nous avons le plus affaire) sont dirigés perpendiculaire-
ment à la surface. Celui qui a l'habitude d'opérer sur les reins
sait qu'une libre incision dans cet organe est suivie d'une
hémorrhagie profuse et quelquefois alarmante , qui cesse
d'une façon permanente si la blessure est tamponnée quelques
minutes avec un morceau d'éponge.
Ayant ce fait en vue, il me semble que nous devons traiter
le cerveau exactement de la même manière, et ainsi, en étant
aussi conservateur que possible, on obtiendra en plus une sur-
face d'incision nette, favorable à une rapide réunion. On
notera, qu'en parlant de la chloroformisation du malade, j'ai
montré qu'on pouvait éviter beaucoup de sang par l'emploi
de la morphine. Peut-être qu'en considérant le caractère ter-
minal des artères du cerveau, il est à peine nécessaire de dire
qu'on devra laisser intact lorsque c'est possible, tout gros vais-
seau ; mais on peut me permettre de faire remarquer qu'à
cause de leur trajet dans la pie-mère, on peut les soulever de
la surface du cerveau et surtout de leur sillon, pour permettre
d'enlever la substance cérébrale sous-jacente, pendant que en
même temps la paroi vasculaire est si peu endommagée que
toute thrombose secondaire sera d'une nature provisoire.
De plus, en incisant le cerveau, les incisions dans l'écorce
doivent avoir une direction exactement perpendiculaire à la
surface et être dirigées sur la couronne rayonnante pouréviter
d'endommager ainsi les fibres venant de l'écorce et circonscrire
le siège de l'opération. Ceci se fait naturellement en se rap-
pelant les trajets des fibres de l'écorce à la capsule interne.
Il y a beaucoup d'autres points en rapport avec la physiologie
et la pathologie du cerveau qui régleront l'opération ; ainsi,
par exemple, de laisser, si c'est possible, les parties de chaque
centre de façon que la représentation des mouvements des
articulations ne soit pas entièrement détruite, car la destruc-
tion totale implique naturellement une paralysie permanente
des mouvements du côté opposé.
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 389
Une portion normale ou anormale détachée du cerveau ne
laisse pas, comme on pourrait le supposer, une brèche perma-
nente à parois verticales, car, même dans un temps très court,
le fond de la fosse, c'est-à-dire la couronne radiée, fait saillie
presqu'au niveau de l'écorce environnante. De plus, les bords
de l'incision sont légèrement élevés et si on enlève moins de
cerveau que d'os, ils pénètrent dans l'ouverture du crâne; il y
a normalement une tendance à la hernie du cerveau comme
cela est bien montré sur les photographies du cerveau d'un
singe opéré avec succès dans ces conditions.
Je n'ai pas du tout l'intention de discuter la cause de la
hernie du cerveau, comme on la comprend d'habitude, puisque
cet état n'arrive seulement que lorsque le lambeau ne s'est
pas réuni par première intention, et le facteur nécessaire étant
la décomposition de la plaie et la conservation de cette der-
nière dans une cavité suppurante. L'avantage d'un grand
lambeau que l'on peut ensuite rabaisser comme le couvercle
d'une boite, paraît maintenant évident, puisque d'un seul
morceau, il offre une entière résistance à la pression du cerveau;
ce que ne peut faire la réunion des quatre lambeaux, de l'inci-
sion cruciale, qui favorise au contraire précisément la chose
que l'on veut éviter. Sa principale résistance à la hernie de la
substance cérébrale normale est faite autrement. (Voir Drai-
nage, Pansements, plus bas.)
Fermeture de la plaie. -Après avoir arrêté tout suintement
par des pressions avec des éponges fines, le lambeau doit être
rabattu et attaché au moyen de sutures de soie à la distance
d'un centimètre, et, entre elles, avec des crins de chevaux.
Avec la fermeture de la plaie, nous sommes amenés à
considérer l'importante question du drainage. Je crois que
maintenant je serai accusé de folie si je pose ce principe que,
en général, les cavités formées par l'ablation de portion du
cerveau ne doivent pas être drainées plus de z4 heures ; cepen-
dant j'ai l'intention de faire une telle proposition. Voyons les
conditions du problème. Nous désirons obtenir la réunion par
première intention, c'est-à-dire une réunion solide en 4 ou
5 jours. Nous désirons aussi établir une pression sur le cerveau
qui tend, comme nous l'avons vu, à sortir : et enfin nous dési-
rons arranger les choses de telle façon qu'après la guérison
de la plaie, le morceau de peau puisse être séparé du cerveau
par un coussin de tissu connectif normal doux (c'est-à-dire
390 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
non inflammatoire). Toutes ces conditions sont obtenues en
permettant un certain degré de tension de l'exsudation de la
blessure dans la cavité. Durant les premières 2t heures, il y a
un suintement continuel de sang et de fluide séreux des sur-
faces incisées. Ceci doit être enlevé, et je place un tube à draia
nage au point le plus déclive de l'incision (le malade étant
couché dans son lit). On doit enlever ce tube le jour suivant
et la plaie est pansée avec soin en maintenant une douce et
constante pression au milieu du lambeau. Si l'exsudation qui
se rassemble ensuite dans la cavité s'accumule à un point
appréciable, le troisième jour le malade se plaindra d'un peu
de douleur et de battements, dans la blessure qui mise à décou-
vert, est proéminente dans le centre, la périphérie étant bien
unie. Voici maintenant un point difficile du traitement : c'est
de savoir si on doit laisser la pression continuer ou s'arrêter.
En s'arrêtant à cette dernière mesure, on perdra les avantages
de la pression; aussi ce point réclame une attention spéciale.
Le point pratique sur lequel on s'appuie est très simple : c'est
de voir si la réunion par première intention menace d'être
empêchée par la pression ou non. Dans le premier cas, la
pression peut être facilement diminuée en ouvrant doucement
avec une sonde la trace du tube à drainage et en laissant ainsi
s'écouler un peu de l'exsudation. La valeur de la tension pour
réduire la tendance à la hernie n'est pas douteuse; mais on
désire attirer l'attention sur ce fait que la pression élevée,
jusqu'à l'absorption complète, a deux buts. D'abord, elle force
l'absorption par les lymphatiques des méninges, comme pour
les vaisseaux du péritoine après l'ovariotomie, en permettant
une union rapide de toute la plaie cutanée, et en second lieu,
elle agit comme un échafaudage pour la construction du tissu
connectif normal. Ce dernier point est très net chez les ani-
maux inférieurs, chez lesquels on trouve, en rouvrant la bles-
sure au bout de quelques jours, la cavité toujours remplie d'un
tissu connectif rosé, délicat, spongieux, dont les mailles con-
tiennent l'exsudation mentionnée ci-dessus. C'est le tissu
connectif qui formera une barrière élastique entre la peau et
le cerveau.
Règle générale, il n'est jamais nécessaire de dégager la
tension plus d'une fois. Au bout d'une semaine ou de cinq
jours, la plaie peut être légèrement couverte avec de l'acide
borique finement pulvérisé, de la ouate et du collodion; et
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 391 f
les points de suture peuvent être enlevés à n'importe quel
moment après la première semaine. On trouvera toujours que
le cuir chevelu tend à se déprimer à l'endroit de l'opération;
mais, en suivant les précautions décrites; la dépression sera
légère. On doit considérer comme un point d'une importance
pratique de savoir s'il n'y a aucun inconvénient professionnel
pour le malade d'avoir un trou dans le crâne. L'expérience a
montré que cela avait peu d'importance.
Il ne serait pas inutile d'observer ici que, dans le cas d'une
seconde opération, on trouverait le tissu cicatriciel plus vascu-
laire que les tissus normaux et que la dure-mère est légèrement
adhérente à la surface du cerveau près des bords de l'incision.
Enfin les vieilles cicatrices dans la substance de l'écorce céré-
brale, à l'exception de celles qui ont guéri par suppuration et
qui remplissent les cavités produites par la perte de substance,
déplacent souvent les gros vaisseaux et donnent passage à de
grosses veines. -
La précédente communication ne prétend être qu'une brève
esquisse des points principaux que j'ai trouvé pratique d'obser-
ver dans la chirurgie du cerveau, et je suis heureux d'avoir
l'occasion d'exprimer ma reconnaissance à l'Association, qui,
par ses grandes allocations scientifiques, a rendu possible l'exé-
cution des expériences sur lesquelles est basée cette méthode.
Trois cas servent d'exemple à cette communication. Les
trois cas que j'ai traités, suivant la méthode ci-dessus décrite,
ont un intérêt général et fournissent quelques idées qui ont
leur utilité pour les cas à venir. Peut-être je ferais mieux de
faire les réflexions comme elles se présentent naturellement
dans l'histoire clinique, cependant je récapitulerai à la fin les
points qui méritent une attention spéciale. Je désire cepen-
dant exprimer mes remerciments au Dr Wilson, interne de
l'hôpital national pour les paralysés et les épileptiques, pour
les soins assidus donnés aux cas suivants :
. Cas I. - Jacques B..., âgé de vingt-deux ans, fut admis à
l'hôpital dans le service du Dr H. Jackson et du Dr Ferrier. Anté-
cédents : à dix-sept ans, le malade fut renversé par un fiacre à
Edimbourg. Il fut aussitôt admis à la Royal Infirmary, dans le ser-
vice du professeur Annandale, qui trouvé une fracture en éclats,
avec enfoncement, avec perte de substance cérébrale, à l'endroit
indiqué plus bas. Les fragments osseux furent enlevés, et la
plaie finalement guérit, quoiqu'elle ait librement suppuré et
392 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
malgré la hernie du cerveau. Le malade a été hémiplégique, mais
petit à petit (sept semaines) la paralysie disparut. Vers quinze ans,
le malade a commencé à avoir des attaques, qui étaient très inter-
mittentes. Il fut admis à l'hôpital en 1885, ayant à cette époque
un nombre considérable d'attaques et se trouvant pendant quelques
jours dans le status epilepticus. Après sa sortie de l'hôpital, il
resta sept semaines sans attaque; à la fin de cette période, elle
revinrent, et pendant trois jours avant sa rentrée, il se trouvait de
nouveau dans le status epilepticus.
Etat actuel. - Sur le côté gauche du sommet delà tête (la place
exacte déterminée par mensuration est le centre du tiers supé-
rieur de la frontale ascendante, c'est-à-dire derrière la termi-
naison postérieure du sillon frontal supérieur) se trouvait une
cicatrice carrée, au centre de laquelle on pouvait percevoir l'ab-
sence de l'os, qui formait une ouvertue ovale dans le crâne, dont
le grand diamètre avait à peu près 25 milli.nètres et était paral-
lèle à la suture sagittale. La pression sur la cicatrice était toujours
douloureuse : la douleur augmentait lorsque le malade était dans
le paroxysme de ses attaques. Attaques : ces attaques qui arri-
vaient par séries (à cette époque le malade en avait eu trois mille
dans une quinzaine de jours) avaient toujours le même caractère;
elles commençaient habituellement dans le membre inférieur
droit; d'autres fois dans les deux membres droits simultanément.
Voici un exemple de la première catégorie :
« Le membre inférieur droit était étendu toniquement, et puis
il devenait le siège d'un spasme clonique. Le membre supérieur
droit était alors lentement étendu à angle droit, fixé au corps,
le poignet et les doigts fléchis; les doigts s'étendaient ensuite; et
tout le membre était pris de spasmes cloniques de flexion et d'ex-
tension, le coude se fléchissant graduellement. Un moment, les
spasmes dans le membre inférieur cessaient; mais ceux du
membre supérieur continuaient avec vigueur; le spasme affectait
graduellement l'angle droit de la bouche, s'étendait sur le côté
droit de la face et faisait tourner la tête et les yeux vers la droite. »
En somme, les différentes parties étaient prises dans l'ordre
suivant : le membre inférieur, le membre supérieur, la face et le
cou; le caractère des mouvements était d'abord l'extension, en-
suite une certaine confusion, et enfin la flexion : ce qui montre
clairement que le point de départ était situé vers la terminaison
postérieure du sillon frontal supérieur, point qui coïncide, comme
nous l'avons vu plus haut, avec celui qu'on trouve par mensura-
tion. Avant de décrire le traitement chirurgical, il faut noter que
le malade était nettement hémiplégique, même dix jours après
la dernière attaque, mais il pouvait accomplir tous les mouvements
dans les membres droits, quoiqu'avec moitié moins de force que
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 393
du côté gauche ; il n'y avait aucune altération de la sensibilité
dans le côté droit, et les réflexes superficiels et profonds étaient
exagérés dans les deux membres droits.
Opération (25 mai 1886). - Suivant la méthode décrite plus
haut, l'os autour de l'ancienne ouverture fut librement enlevé;
la dure-mère, l'arachnoïde et la peau formaient une mass homo-
gène de tissu fibreux; la dure-mère fut relevée avec le lambeau.
La cicatrice du cerveau était très vasculaire, de couleur rouge,
d'à peu près 3 centimètres de long et 2 de large. La membrane
qui ouvrait la partie avoisinante du cerveau, était très opaque, et
le cerveau était d'une couleur un peu plus jaunâtre que normale-
ment. La cicatrice à peu près à un demi centimètre de la subs-
tance cérébrale avoisinante, fut excisée sur une profondeur de
deux centimètres. On trouva alors que le tissu cicatriciel pénétrait
plus profondément de quelques millimètres dans les fibres de la
circonvolution marginale dans la couronne rayonnante. Cette
portion fut également enlevée et la plaie fermée. En enlevant
la masse cérébrale on a dû lier trois grosses veines venant du
centre du membre supérieur, parce qu'elles traversaient directe-
ment la cicatrice. La plaie a complètement guéri en une semaine.
La pression du sérum fut deux fois relâchée (une fois probable-
ment sans nécessité). Après l'opération, le malade fut d'abord
complètement paralysé des doigts du membre supérieur droit;
de plus, il y avait une grande flexion du poignet, et l'avant-bras
était en supination. Avec cette paralysie motrice, il y avait une
perte de la sensibilité tactile du dos, de deux phalanges des
doigts. Il ne pouvait localiser le toucher plus bas que le poignet;
enfin il ne pouvait dire la position d'aucune jointure de ses
doigts. Nous avons apparemment ici un exemple net de la perte
de la sensibilité tactile et du sens musculaire, accompagnée de
paralysie motrice, due à une lésion de l'écorce. On ne saurait
trop comprendre que quelques fibres allant du gyrus fornicatus
à la couronne radiée peuvent avoir été atteintes. Cette paralysie
sensitive et motrice avait disparu graduellement à la fin des deux
mois suivants. Jusqu'à présent, le malade n'a pas eu d'attaques.
Cas IL - Thomas W..., vingt-deux ans, fut admis à l'hôpital
National dans le service du Dr Haghlings Jackson. Antécédents
héréditaires; rien d'important à noter, à l'exception d'une tante
paternelle morte phthisique.
Antécédents personnels. Il a eu plusieurs attaques de pleu-
résies après quinze ans.
Etat actuel. - Il commença, en janvier 884, à avoir des
«crampes» dans le pouce et l'index gauche, qui consistaient en
une opposition clonique de ces doigts, et qui se répétaient deux
Archives, t. XII. 26
HJ4 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
fois par jour pendant trois mois. La première attaque grave eut
lieu en mars 1884. Le spasme s'étendait au bras et le malade
tombait. Il eut la seconde attaque en janvier 1885. Après survint
une série de rémissions; en août18S5, une autre grave attaque
commença une nouvelle série d'attaques qui arrivaient une ou
trois fois par semaine jusqu'à son entrée le 4 décembre 1885. La
nature de ces attaques était toujours la même. Elles commen-
çaient par une opposition spasmodique clonique du pouce et de
l'index gauche, ensuite le poignet, le coude et l'épaule se fléchis-
saient cloniquement, alors la face se contractait et le malade
perdait connaissance. La main et les yeux étaient tournés à
gauche et le membre inférieur gauche était élevé. Le membre
inférieur droit était ensuite pris, et enfin le membre supérieur
droit. La paralysie du membre supérieur gauche succédait sou-
vent à l'attaque. A de fréquents intervalles tous les jours, le
pouce du malade commençait à se contracturer, mais l'attaque
pouvait souvent être arrêtée en étendant le pouce ou en appli-
quant une ligature. En février et en mars 1886, les contractures
commençaient souvent par la face, mais en avril le pouce rede-
vint le siège le plus fréquent du commencement de l'attaque.
Etal actuel (très abrégé). - Mouvement. La force de la main
gauche était égale à 45; celle de la main droite à 85. Il pouvait
exécuter tous les mouvements avec.le membre supérieur gauche;
ceux de la main étaient un peu affaiblis. Le pouce gauche était
souvent dans un état de rigidité, alternant avec un spasme clo-
nique (on pouvait amener cet état en manipulant le pouce).
Sensibilité. - Pas d'altérations, excepté la perte du sens mus-
culaire dans le pouce gauche. Les réflexes profonds étaient exa-
gérés dans le membre supérieur gauche. Le malade avait souvent
des maux de tête intenses, commençant à l'occiput et s'étendant
surtout dans la région pariétale droite. Les disques optiques
examinés par M. Marcus Gunn étaient normaux quoique très
roses (hyperémie physiologique).
Diagnostic. Le Dr Beevor et moi nous avons montré que les
mouvements d'opposition du pouce et des doigts peuvent être
produits par une légère excitation des circonvolutions frontale et
pariétale ascendantes à la reunion du tiers inférieur et du tiers
moyen. Le Dr Hughlings Jackson a été témoin d'une de nos
expériences démontrant ce fait et nous a dit qu'il croyait que ce
malade souffrait d'une lésion irritative de nature inconnue, située
dans la région indiquée ci-dessus. Une opération exploratrice fut
décidée.
Opération (22 juin 1886). Le siège de la lésion a été déter-
miné par mensuration, une large couronne de trépan fut appli-
quée, et en enlevant la dure-mère on vit une tumeur. On enleva
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 395
un peu plus d'os en avant et en dessous, pour complètement expo-
ser la masse à laquelle la dure-mère était adhérente. Le bord de
la tumeur s'élevait d'à peu près trois millimètres de la surface
du cerveau, et la tumeur était beaucoup plus dure que la subs-
tance du cerveau. Elle paraissait large seulement de douze milli-
mètres ; mais, comme la substance cérébrale qui l'entourait pa-
raissait sombre et livide sur plus de douze millimètres de largeur,
j'ai enlevé librement tcutesles parties malades. (Comme le montre
la photographie et le spécimen, cette manière de faire était très
justifiée, puisque la tumeur s'étendait largement sous l'écorce).
Avant de fermer la plaie, le centre de la région du pouce fut en-
levé par une libre incision. Le Dr Jackson et moi nous avions
décidé d'exécuter ce détail dans le cas possible où il n'y aurait
pas de grosse altération pathologique évidente, pour empêcher,
autant que possible, le retour de l'épilepsie. De nombreux
vaisseaux furent ligaturés, surtout trois ou quatre sur le bord su-
périeur de la tumeur venant de la région de l'écorce pour les mou-
vements du membre supérieur. La plaie fut refermée comme
ci-dessus. Les 3/6 guérirent parpremière intention en une semaine
quoi qu'il y eût un oedème considérable du cuir chevelu, dû à
l'irritation de la gaze phéniquée (oedème qui disparut rapidement
en employant de la gaz l'eucalyptus). L'autre sixième, à l'extré-
mité inférieure du lambeau, cède et guérit par bourgeonnement,
après la réparation d'un petit morceau de peau sur le bord.
L'état du malade après l'opération était très intéressant et très
important. Le jour suivant, il y a eu une paralysie motrice par-
tiellede la face du côté gauche, une paralysie complète du membre
supérieur gauche depuis et y compris l'épaule. Le 27 juin, on
remarqua une hémianesthésie gauche à un léger toucher (la sen-
sibilité à la douleur était conservée), la localisation de la piqûre
d'épingle était très défectueuse sur tout le côté gauche, intact à
droite, et il y avait une perte complète du sens musculaire dans
le membre supérieur gauche, au-dessous de l'épaule. Le second
jour après l'opération, en faisant un effort pour remuer son
membre supérieur gauche, le malade a mis tout d'un coup sa
main à la blessure et a dit qu'il sentait un « bourdonnement ».
Quand on remuait le membre supérieur gauche, il se plaignait
que la douleur semblait frapper l'os du membre, le côté du cou,
et s'étendre de la main à la blessure. Les réflexes profonds étaient
très exagérés du côté gauche dans les deux membres. Cet état
s'améliora et, à l'époque de la réunion, tout était dans l'ordre,
excepté que l'étreinte de la main était moins forte qu'auparavant
et que les mouvements des doigts étaient un peu gênés. De plus,
les réflexes profonds étaient encore exagérés. De plus, en juillet,
le malade a eu quelques légères contractions dans trois doigts
droits, aucune dans le pouce ni l'index ; aucune attaque depuis
396 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
l'opération. Sa tumeur était composée d'un tissu fibreux dense,
avec deux foyers caséeux, reconnus tuberculeux à l'examen mi-
croscopique.
Cas III. George-W. J..., vingt-quatre ans, fut admis à l'hô-
pital National dans le-service du Dr Buzzard. Antécédents héré-
ditaires : Rien d'important à noter. Antécédents personnels : Au-
cun, excepté une otite moyenne. Histoire de la maladie actuelle.
- A cinq ans, la flèche d'une voiture lui tomba sur la tête, lui
fit une légère blessure et une légère fracture. A treize ans, le
malade reçut un coup de pied de cheval au même endroit. Trois
mois après, les attaques commençaient. Les attaques arrivaient
par séries de trois ou quatre toutes les trois semaines.
Etat actuel. - Le malade est grand, fort ; il porte de nombreu-
ses cicatrices sur la tête, dues à des chutes, etc., quand les attaques
arrivèrent (il avait aussi la plupart de ses dents enlevées par des
coups de pieds de chevaux quand il tombait auprès d'eux, étant gar-
çon d'écurie). Il y avait une cicatrice et la légère dépression d'une
fracture à l'angle supérieur et antérieur du pariétal gauche, près
de la ligne médiane. La cicatrice et le cuir chevelu environnant
étaient très sensibles à la pression. Le malade avait à ce point
souvent de très violents maux de tête, qui augmentaient (et aussi
la sensibilité) à l'approche des attaques. Il y avait aussi une hémi-
anesthésie droite presque complète au toucher et à la piqûre.
Quoique ceci ait son importance, je puis ne pas m'y arrêter en
disant que le Dr Buzzard ordonna l'application d'un fort courant
faradique qui fil complètement disparaitre l'hémianesthésie, mais
laisse intactes les attaques.
Caractères de l'attaque. L'aura était abdominale. Le malade
ressentait le besoin de défécation, accompagné quelquefois d'une
douleur vive dans le côté gauche de l'abdomen. Suivait un resser-
rement de la gorge et quelquefois une toux spasmodique. La tête
et souvent les yeux étaient tournés vers la droite; le bras droit
élait étendu par secousses, et le malade perdait connaissance.
Tous les membres étaient pris dans la flexion généralement; les
membres inférieurs, cependant, sont quelquefois fléchis. Après
l'attaque, le malade disait que son bras droit était faible pour
quelque temps.
Diagnostic. - Dans une communication (Proceedings of the Royal
Society, no 231, 1884), le professeur Schâfer et moi nous avons
montré que le centre des muscles du tronc était situé dans la
circonvolution marginale sur la surface moyenne de l'hémisphère
et que celui des muscles de l'abdomen est juste à l'extrémité pos-
térieure du sillon frontal supérieur. Le professeur Ferrier a mon-
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 397
tré que le centre des mouvements de la tête et du cou est au-
dessous de ce sillon et que celui de l'extension du bras était à peu
près à son extrémité postérieure. Ce dernier point a été confirmé
par le Dr Beevor et moi. Ces considérations amenèrent le Dr Buz-
zard à diagnostiquer une lésion située dans le tiers postérieur de
la circonvolution frontale supérieure, c'est-à-dire juste au-dessous
de la légère dépression du crâne. Faisant le même diagnostic, il
pratiquait l'opération exploratrice suivante :
Opération (13 juillet 1886). Un lambeau est relevé, et l'os est
trépané près de la dépression gauche; on trouve que la table interne
a été brisée en éclats qui forment une couronne dure autour de
l'orifice interne de la fistule du crâne, laquelle fistule était remplie
par du tissu cicatriciel. De plus, la dure-mère avait été déchirée
par la fracture primitive, et un petit morceau d'os avait été pro-
jeté dans une cavité du cerveau. Les fragments osseux furent
enlevés, la dure-mère incisée, on trouva que cette cavité était
cunéiforme et avait de un à cinq centimètres de profondeur, sur
un centimètre de large, et était remplie de tissu connectif lâche.
Elle était exactement située à l'endroit diagnostiqué. La cavité
fut enlevée au moyen d'une incision circulaire faite à la distance
de cinq millimètres.
La plaie fut complètement guérie en trois jours. Une semaine
après l'opération, le malade se plaignait de faiblesse dans tout le
membre inférieur droit. Tous les mouvements étaient atteints,
surtout ceux de la main. Cette parésie est intéressante comme
étant sans aucun doute un exemple de paralysie hystérique chez
un homme, et son rapport avec l'anesthésie fonctionnelle avant
l'opération est évident. L'intervalle de cinq ou six jours, écoulé
avant son apparilion, coïncide avec le temps indiqué récemment
par le professeur Charcot. Cette parésie, à la date de la réunion,
a complètement disparu.
Le manque de temps m'oblige à formuler sans plus amples
détails certaines déductions qui s'écoulent, je pense, des détails
ci-dessus :
1° Chez l'homme, une paralysie temporaire motrice corticale
et peut-être la perte du sens musculaire survient après la liga-
ture des vaisseaux qui fournissent le centre moteur des mou-
vements perdus;
2° Chez l'homme, une paralysie temporaire de la sensibilité
et de la moibilité du type hystérique ou fonctionnel survient
après des opérations pratiquées sur les centres moteurs;
3° L'arrêt des attaques épileptiformes commençantes, par
398 SOCIÉTÉS SAVANTES.
une ligature ou par l'extension de la partie contracturée ou
rigide, fait supposer que probablement le sens musculaire est
représenté dans le centre excito-moteur.
SOCIÉTÉS SAVANTES
SOCIÉTÉ MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE
Séance du 26 juillet 1886. - Présidence de M. SEMELAIGNE.
Des signes physiques, intellectuels et moraux de la folie hérédi-
taire (suite). - 111. rnr.aeT. On ne peut nier que l'hérédité imprime
un cachet spécial à une catégorie très nombreuse d'aliénés, mais
il ne faudrait pas cependant les faire entrer tous dans la famille
des héréditaires, car alors on serait fort embarrassé dans la clas-
sification de la folie. Je bais bien que M. Magnan admet plusieurs
catégories dans son groupe; aussi nos opinions ne diffèrent-elles
que sur la limite extrême à donner à ce groupe et sur le nombre
de ses subdivisions. Je ne place pas la limite aussi loin que lui et
j'augmente les chapitres, ce qui me permet une étude plus facile
des types.
La plupart des aliénés héréditaires n'ont pas d'hallucinations;
ils se font surtout remarquer par des excentricités. La folie des
actes, la périodicité et la remittence des accès leur appartiennent
en propre ; c'est incontestable et je ne crois pas plus que M. Ma-
gnan aux monomanies. Je sais qu'on a fait des distinctions à perte
de vue, basées sur l'objet du délire, mais ce n'est pas une raison
pour ne pas attribuer une place à part à la folie avec conscience,
la folie émotive, la folie du doute, le délire du toucher, etc., tou-
jours si semblables à eux-mêmes. Ces formes ne sauraient se
fusionner avec le groupe des héréditaires sans former une variété.
Qu'on vienne nous dire qu'un malade prend son mouchoir pour
toucher un bouton de porte, cela suffit pour qu'avec cette simple
indication nous connaissions tous les caractères de son état intel-
lectuel. Nous pourrons ajouter qu'il a de la répétition mentale,
qu'il compte à l'infini, et qu'il lui laut un souffre-douleur pour
écouter ses plaintes et ses histoires. N'est-ce pas la preuve qu'il y
SOCIÉTÉS SAVANTES. 399
a là une variété clinique bonne à conserver sans nier qu'elle ait
des caractères communs à toutes les autres formes héréditaires ?
M. Magnan a eu raison de créer une grande famille pour tous
ces malades. C'est un très grand progrès de les avoir groupés, mais
il n'a pas suffisamment distingué d'espèces et de variétés, comme
on le fait en histoire naturelle. Cette méthode appliquée à l'hé-
rédité aurait au moins l'avantage d'en faciliter beaucoup l'étude.
En résumé, il résulte de cette longue discussion que nous sommes
divisés en deux groupes : l'un comprend ceux qui, à l'exemple
d'Esquirol, n'admettent l'hérédité que comme cause déterminante
de la folie; l'autre qui comprend ceux accordant à tous les héré-
ditaires des caractères communs. Je me range à cette dernière
opinion, et j'ajouterai qu'il faut augmenter les divisions.
M. MAGNAN. - Je me suis surtout efforcé de démontrer que
l'hérédité imprimait aux aliénés des caractères généraux toujours
les mêmes, mais je n'ai jamais pensé qu'il fallût négliger l'étude
des variétés et sous-variétés du groupe. Je me suis aussi élevé
contre les tendances d'une certaine école à vouloir faire une entité
morbide d'un simple symptôme épisodique. Lorsque la question
du délire chronique reviendra en discussion, je me réserve de
faire des efforts pour en retirer tout un groupe de dégénérés, celui
des persécutés persécuteurs.
M. FALRET demande que cette discussion soit mise prochaine-
ment à l'ordre du jour. ' MARCEL BRIAND.
CONGRÈS DES NATURALISTES ET MÉDECINS
ALLEMANDS
SESSION DE STRASBOURG 4885 '
Séances des 18-23 septembre.
I. SECTION DE psychiatrie ET neurologie
M. DE GUDDEN (de Munich). Des nerfs optiques, des bandelettes
optiques, des rapports de leurs faisceaux entrecroisés ou non et de
leurs fibres optiques et pupilluires avec les centres de cesorgunes. -
1 Voy. Arch. de Neurologie, t. XI, p. 96.
400 SOCIÉTÉS SAVANTES.
Pour isoler le faisceau non entrecroisé on fait pénétrer à travers
la suture sagittale d'un animal nouveau-né un petit couteau fin et
l'on va sur la base du crâne sectionner le chiasma. Nombreuses
préparations et planches sont présentées au Congrès. La situation
des faisceaux entrecroisés ou non est dans la bandelette optique
la même chez le chat que chez l'homme. (Voy. Arch. f. Ophthal-
molog., XXV, 4) 1. L'entrecroisement s'exécute chez cet animal sur
toute l'épaisseur de la coupe transverse du nerf optique émer-
geant du chiasma, ces faisceaux se séparent peu à peu dans le
trajet du nerf en question pour se rendre à leurs moitiés réti-
niennes respectives. I.e rapport de masse de chacune des deux
espèces de faisceaux est sur une coupe transverse, comme (fais-
ceau non entrecroisé) est à 3 (faisceau entrecroisé). L'oie ne pos-
sède pas de faisceau croisé. A Eisenach 2, de Gudden a prouvé
l'existence dans le nerf optique de deux systèmes de fibre.-) ; l'un
sert à la vision, l'autre commande aux mouvements de la pupille,
par voie réflexe; peut-être y a-t-il un troisième système ayant un
troisième centre. En tout cas, jusqu'ici l'on n'a trouvé que deux
centres, un dans le corps genouillé externe, l'autre dans le tuber-
cule quadrijumeau supérieur. Le nerf optique contient des fibres
de deux calibres différents : le chat se prête surtout à cette dis-
tinction ; l'homme et le lapin s'y prêtent moins bien. Cependant
chez le lapin privé du tubercule quadrijumeau supérieur d'un
côté, et par suite aveuglé du côté opposé (intégrité de la pupille), on
constate, à l'examen microscopique des nerfs convenablement
préparés un nombre prodigieux de fibres épaisses. Chez le chat
les fibres épaisses présentent le même rapport de volume en ce
qui concerne les faisceaux croisés ou non que les fibres minces.
M. GIIASHEY (de Wûrzbourg). De l'importance du liquide cérébro-
spinal pour la circulation du sang dans le crâne. - L'an dernier,
cet auteur montrait que 3 : '
Si l'on fait passer un tuyau élastique dans un tube fermé à parois
rigides et rempli il'eau, tout accroissement de pression imprimé à un
courant de liquide que l'on dirige continuellement dans ce tuyau [image
du sang et de sa pression) entraîne des vibrations toutes particulières du
tissu de ce tuyau élastique, vibrations qui, en se limitant à l'extrémité
périphérique de celui-ci, arrêtent le courant circulatoire. Cet arrêt de la
circulation au moment où l'on élève la pression [sanguine) ne se produit
que lorsque le tube enveloppant extérieur possède des parois rigides
(image de la boite crânienne) et se trouve fermé de toutes parts; si l'on
provoque l'écoulement de l'eau qu'il contient [image du liquide cé,'é61'o-
spinal), la circulation reprend dans le tuyau élastique.
t Voy. Arch. de Neurologie, t. XI, p. 96.
s Id., t. VI. p. '35.
3 Id., t. XI p. 103.
SOCIÉTÉS SAVANTES. 401
Or, on peut également faire naitre les vibrations dans le tuyau
élastique et l'arrêt de la circulation. si le tube extérieur enve-
loppant (boite crânienne) n'est pas fermé de toutes parts, mais
alors la pression atteint dans ce tube [pression intra- crânienne) une
valeur positive, déterminée. Les effets restent les mêmes quelle que
soit la façon dont on s'y prend pour modifier la pression à l'inté-
rieur du tube (intru-c1't ! nienne) que l'on augiiienlela quantitéde li-
quide à l'intérieur du tube (liquide cérébro-spinal) ; qu'on s'oppose
à l'écoulement de ce liquide, qu'on exagère l'effort exercé sur le
tuyau élastique [vaisseau sanguin) qui se dilate [exagération de la
pression vasculaire), on enfin qu'on fasse intervenir les trois fac-
teurs, peu importe. Si l'on adapte an tube extérieur des mano-
mètres très étroits afin d'imiter le mode d'écoulement du liquide
céphalo-rachidien, on voit se produire la pression voulue pour
que l'arrêt de la circulation du tuyau s'effectue, pourvu que la
dimension de celui-ci soit relativement faible. Il peut donc surve-
nir des vibrations vasculaires arrêtant la circulation d'un vaisseau
élastique qui, de même que les vaisseaux sanguins, est entouré
d'un liquide mobile, dont l'écoulement varie sous une pression
positive. Ce liquide cérebio-apinat ? évacue de la cavité crânienne
ou y arrive en quantités différentes selon les individus; que son
évacuation subisse un ralentissement, sous l'iniluence, par exemple
des modifications de la pression du sang ou du diamètre des
vaisseaux exlen-ibles, voilà qu'il se peut produire un arrêt de la
circulation et conséquemment un tiouble de la nutrition. De là
à interpréter les lésions encéphaliques, il n'y a qu'un pas. On
peut se figurer que la prédisposition héréditaire aux psychoses
repose en partie sur l'insuffisance des voies d'écoulement du
liquide cérébro-spinal.
Discussion : MM. KROEPËUN, Mendel, .TOLLY. Ces expériences sont
propres à éclairer la genèse des troubles psychiques consécutifs à
l'extirpation de la glande thyroïde, car cette opération équivaut
à la suppression de canaux de dérivation sanguine et lympha-
tique.
M. BINSWANGEI\ (de Iéna). De l'histologie pathologique de l'écorce
cérébrale dans la démence paralytique. Préparations microsco-
piques de paralytiques généraux morts à la période terminale et
de malades ayant complètement perdu la parole. Chez tous ces
individus, les grandes cellules nerveuses de la troisième couche
de l'écorce, dans les parties comprises entre le rameau ascendant
de la scissure de Sylvius et la glande branche, présentent les
altérations suivantes : à un premier degré, tuméfaction trouble
et boursouflement du noyau, dont le contenu finement granu-
leux disparalt, finalement noyau homogène, brillant, clair, subis-
sant difficilement l'action des substances colorantes, altérations
402 SOCIÉTÉS SAVANTES.
graduelles du nucléole de la même façon, désagrégation de ces
organes; le corps de la cellule est tantôt recoquillé, atrophié et
tous ses prolongements disparaissant, il devient un corps informe
grumeleux, qui se colore fortement au carmin, ou bien se crevasse
en certains points de façon à apparaître comme déchiré, troué,
dissocié. Presque toujours en outre, ces éléments sont exagéré-
ment pigmentés, plus qu'à l'état normal. Le cerveau de'para-
lytiques généraux consécutivement à la syphilis décèle des alté-
ration, des gaines lymphatiques des vaisseaux de l'écorce :
épaississements, duplicalures, dénudations de certains de leurs
segments, prolifération des endothéliums lymphatiques dans les
espaces clos, accumulation de corpuscules lymphoides dans les
mêmes espaces.
M. PFLUEGER (de Berne). Des incitations et coincitations de divers
districts homonymes du champ visuel. - Communication des
recherches de M. Schiele sur le rétrécissement du champ visuel
sous l'influence de la fatigue chez les névropathes. On détermi-
nait la fatigue par des mensurations périmétriques répétées du
champ visuel. La fatigue d'une moitié, d'un quart, d'un secteur,
d'une rétine entraîne concurremment un rétrécissement de forme
analogue du champ visuel de la moitié, du quart, du secteur
homonyme de la rétine du côté opposé, mais jamais elle n'en-
traîne le rétrécissement du champ visuel de la seconde moitié de
l'oeil primitivement fatigué, jamais elle n'empiète sur les parties
limitrophes de la même moitié du champ visuel- Par conséquent,
la provocation ou l'abolition dans l'espèce d'une activité fonc-
tionnelle emprunte l'intermédiaire de la sphère visuelle du lobe
occipital ne s'effectue pas directement et dans la rétine; autre-
ment dit si l'on incite un méridien déterminé de la rétine on
agit sur les organes terminaux de l'écorce correspondants et
cette incitation retentit en même temps sur les organes ter-
minaux de l'écorce qui commandent au méridien homonyme de
l'autre rétine. Cependant il peut arriver que la fatigue des deux
moitiés d'un oeil n'engendre le rétrécissement du champ visuel
que sur la moitié du second oeil. Parfois aussi des examens
périmétriques réitérés amplifient au lieu de rétrécir, totalement
ou dans une moitié, le champ visuel. Le rétrécissement du
champ visuel par examen périmétrique atteint le plus ordinai-
rement 2° à 2°, 5 parfois même 40° et change chez le même patient
parallèlement à l'état de santé subjectif dans lequel il dit se
sentir. Par conséquent, les dimensions du rétrécissement et
leurs modifications permettent de déduire un jugement sur l'état
général actuel de l'écorce; en comparant les résultats de l'exa-
men objectif et les indications données par le patient on peut
obtenir un aperçu sur le mélange de l'état neurasthénique ou
hystérique avec les allégations mensongères (simulation). Le
SOCIÉTÉS SAVANTES. 403
mode d'action des examens périmétriques variera parfois chez le
même malade (rétrécissement partiel ou général, amplification
partielle ou générale, passagers ou permanents, du champ visuel)
cette allure fournira des éléments permettant de conclure à l'in-
citation ou non du reste de l'écorce. D'où la nécessité de com-
battre l'hypothèse de Wernicke etMunk d'après laquelle chaque
lobe occipital se décomposerait en deux territoires séparés, des-
tinés chacun à une moitié homomyne de la rétine. La sphère
visuelle se compose au contraire de tout petits champs fascicu-
lés mélangés entre eux; chaque moitié homonyme des deux
rétines comprend des points identiques communiquant entre eux
dans le cerveau à l'aide de deux organes centraux juxtaposés.
M. Stein (de Francfort). L'emploi de courants galvaniques faibles
en électrothérapie. S'il est important de se servir de galvano-
mètres fidèles et de tenir compte de la densité des effluves élec-
triques dans ses rapports avec leur transmission dans le corps de
l'homme, il est encore bien plus utile de préciser cette densité.
C'est ainsi que dans le Guide d'Eleclrothérapia de Mueller, on trouve
que la valeur de (8 correspond à une surface de rhéophore de
18 centimètres carres, chargées de transmettre une unité électri-
que d'un milliampère. Mais cette fraction estpurement arbitraire.
Il est généralement reconnu qu'on obtient les résultats les plus
favorables avec des courants galvaniques faibles et une densité
peu accentuée. La plus grande somme d'effets thérapeutiques
s'obtient avec un simple courant de 8 milliampères, en graduant
la' densité d'après la sensibilité de l'épiderme. Un faible courant
devra correspondre à une force électrotonique de 4/2 à 2 milliam-
pères ; un courant moyen de 3 à 4 milliampères suffit à la plu-
part des cas. On se servira de surfaces rhéophoriques, mesurées
au moyen du système décimal, ainsi que d'un type de pile ayant
peu d'effet chimique. M. Stein a dans ce but inventé une batterie
dont chaque élément se compose d'un cylindre en bioxyde de
manganèse et d'une barre de zinc; on y verse un mélange à
demi-solide de gélatine, glycérine, acide salicylique et ammo-
niaque. On a de cette façon une pile à faible action chimique,
d'un petit volume, sans acides et constante.
Discussion. M. JOLLY. On ne saurait doser avec cette exacti-
tude un courant continu, car les nerfs sur lesquels il faut agir
sont à des profondeurs très variables selon les individus.
M. Stein (de Francfort). Des )i1'ogrès de la technique à propos de
l'application des bains électriques. Les bains électriques sont prin-
cipalement indiqués quand il y a lieu d'agir sur l'ensemble de
l'économie par un autre moyen qu'en pratiquant l'électrisation
générale. En effet, le bain galvanique, calme, tout en sollicitant
l'organisme entier, car l'individu plongé dans l'eau éprouve des
404 SOCIÉTÉS SAVANTES.
contractions, convulsives à l'ouverture et à la fermeture du cir-
cuit et le galvanomètre marque par ses oscillations de l'aiguille
le lieu hanté par les effluves électriques. On peut se servir de
baignoires en métal bien vernies ou émaillées, pourvu que les
rhéophores soient suffisamment isolés de la paroi. Comme rhéo-
phores dorsaux, on emploiera des lames métalliques, entourées
de tuyau \ de caoutchouc insufflés d'air qui permettent en même
aux malades de s'appuyer confortablement ; pour assurer la dissé-
mination uniforme du courant sur le corps entier, on reliera un
pôle à l'électrode dorsale, un autre aux lames podaliques et IaLé-
rales, ainsi qu'à une plaque située perpendiculairement entre les
pieds, au milieu de la baignoire.
Discussion.- M. JOLLY fait une remarque à laquelle M. STEIN ré-
plique que la dernière plaque n'est employée que pour le bain
faradique.
M. GltasuEY. Les avantages du bain faradique s'étendent-ils chez
les neurasthéniques, aux troubles du sommeil. Réponse. L'a-
mélioration maintes fois observée est tantôt rapide, tantôt gra-
duelle.
M. tBrrwArrcEa. Chez les neurasthéniques apathiques, le bain
faradique sollicite la vitalité. Sous son influence, les malades se
promènent, se sentent meilleur appétit, sont de meilleure humeur,
du moins pendant quelques heures. Chez les mélancoliques hypo-
chondriaques, ne présentant pas d'excitation nerveuse spéciale,
on voit également l'humeur s'amélion r ; les malades prennent
confiance dans la méthode de traitement. Les bains électriques
ne lui ont, pas plus que l'électrothérapie en général, donné de
résultats favorables au point de vue du sommeil.
M. FIIEUSBERG (de Sarreguemines). Des symptômes du côté du
système locomoteur dans les psychoses simples'. Observations de
malades. Dans la folie simple, il peut se produire un stade initial
aigu constitué des accès paroxystiques de rigidité, ou des mouve-
ments convulsiformes qui ne prouvent nullement que la psychose
se complique d'éptiep-ie, d'hystérie, d'alcoolisme. Mais les
formes de transition de ce genre exigent l'exacte connaissance des
tableaux morbides qui constituent des types ; le clinicien qui veut
affirmer son diagnostic et distinguer entre les modalités psycho-
pathiques, doit observer avec la plus grande rigueur s'il veut se
mettre en garde contre l'extension qu'ont prise les troubles psy-
chiques qualifiés d'épileptoïdes.
M. Kuoepelin (de Dresde). Du désordre confus dans les idées.
Les caractères sont principalement : l'incapacité, pour le malade,
de s'orienter dans son milieu, l'incohérence dans l'échappement
Voy. Archives de Neurologie. t. XII, p. 83.
SOCIÉTÉS SAVANTES. 405
des rouages qui président aux conceptions représentative». Mais
ces deux éléments, tout dépendants qu'ils soient l'un de l'autre au
point de vue psychologique, dominent cliniquement l'un ou
l'autre, de sorte que l'on peut distinguer un désordre de l'idéogé-
nèse sensoriel et un désordre intellectuel. Le premier repo-e sur
l'altération du processus de la perception ; il émane directement
d'hallucinations sensorielles ; à cette catégorie appartient une
modalité qui mériterait peut-être bien le nom d'illusionatoire,
car elle a pour particularité l'impossibilité où se trouve le patient
d'obtenir une représentation claire, quelconque, de la situation
présente, quoiqu'il en saisisse exactementles données fondaaten-
tales et qu'il fasse la plus grande attention au monde extérieur ;
on y trouve presque cunstamment des hallucinations de l'ouïe,
plus rarement des hallucinations de la vue, mais sans qu'elles
prédominent. Un désordre dans les idées intermédiaires est cons-
titué par cet état desomniation délirante que l'on remarque pen-
dant l'obnubilation psychique de l'épilepsie grave et des paraly-
tiques généraux, dans le délire fébrile. Le désordre dans les idées
intellectuel a pour symptômes : une succession pressée d'idées
passagères dans laquelle, à la place de l'évolution normale d'une
conception représentative, on remarque une série d'associations,
d'idées enchevêtrées et, partant, confuses; ou bien on assiste à des
combinaisons dues à ce que toute perception éveille irrésistible-
ment les suppositions, et les idées délirantes les plus embrouillées,
les plus fantaisistes, et des répliques contradictoires involontaires
qui suscitent à leur tour réclusion de nouvelles élucubrations,
la découverte de rapports mystiques imprévus, faits pour déso-
rienter au plus haut point le discernement; exemples : maint
cas de folie systématique primitive dans lesquels le système
du délire se développe au beau milieu de manifestations impé-
tueuses. Puis, le fil des conceptions s'use,elles n'évoluent plus avec
leur netteté première, la trame en est modifiée par les sensations
intimes et les émotions; ainsi se produit le désordre émotif dans
les idées, forme bien proche parente du désordre délirant.
Mais, à côté de ces perturbations, de ces syndromes, plutôt épiso-
diques,il existe un désordre dans les idées avec incohérence, tout
secondaire, dans lequel le mécanisme des facultés intellectuelles
ne subit aucun arrêt, ou, si la marche en est pervertie, n'est pas
anéanti. Le genre en est tout différent. On y pourrait encore
distinguer, selon le degré de la déchéance, un désordre « raison-
nant », un désordre généralisé (Griesinger), et finalement un dé-
sordre stéréotypé.
Le désordre dans les idées est, du reste, un trouble de l'intelli-
gence qui se traduit par les actes, les paroles, les écrits. Ces trois
ordres de pièces sont nécessaires pour permettre de juger de
l'existence du symptôme, car il est des fous systématiques qui sont
406 SOCIÉTÉS SAVANTES.
incohérents dans leurs actes, non parce qu'ils ont du désordre
dans les idées, mais parce que la nature de leur délire leur donne
cette apparence. Des individus dont l'intelligence est normale
agissent parfois aussi comme s'ils avaient du désordre dans les
idées, parce que leur volonté ne se transmet plus physiologique-
ment sur les conducteurs moteurs (paraphasie, paragraphie).
Discussion : lli. GRASHEY. Le complexus symptomatique en ques-
tion, qui résulte, en effet, de troubles de la perception (altérations
des impressions et des impressions sensorielles), n'est pas un élé-
ment morbide.
M. KRPEL1N. Evidemment, il résulte d'une somme de troubles
élémentaires.
M. RULPF (de Bonn). Du traitement du tabès dorsal. -L'auteur a
oblenu de très bons résultats du pinceau faradique combiné au
traitement antisyphilitique, dans les cas de tabes où il y avait eu
syphilis antérieure. Sur vingt-quatre malades, quatre guérirent,
tous les autres s'améliorèrent, parfois à un degréconsidérable. Le
pinceau faradique déterminerait les effets suivants :
10 Il apaise les douleurs i Ces deux particularités s'observent chez
2o Il relève la sensibilité ' l'homme normal.
3n Il exerce une action réflexe, en dilatant la pupille, venant à bout
du myosis et de la fixité, de l'immobilité de l'écran pupillaire.
- .\0 11 se pourrait qu'il modifiât la circulation des organes centraux.
qu'il transformât le centre régulateur de la chaleur, car on voit les ex-
trémités, froides avant son emploi, récupérer, sous l'influence du traite-
ment, leur chaleur normale et la conserver.
Discussion : M. JOLLY a vu, à côté des améliorations, se produire
plusieurs insuccès.
M. JEHN. Dans un cas de tabes survenu au cours d'une psychose
simple, le résultat a été excellent, mais on dut appliquer simulta-
nément de faibles courants continus sur la moelle. Quand l'affec-
tion médullaire eut rétrocédé, les accidents psychopathiques qui
avaient momentanément rétrogadé, reparurent.
M. NISSL (de Munich). Des méthodes d'examen de l'écorce du
cerveau'. La dissociation convient- pour la recherche des ano-
malies pigmentaires, dégénérescences graisseuses, etc., mieux
que la méthode des coupes. En revanche, les coupes seules
permettent de découvrir d'autres anomalies, surtout les lésions
fines. Parmi les liquides de durcissement, c'est l'alcool qui
met un évidence les plus beaux aperçus de cellules nerveuses,
mais il détruit les fibres. La solution de bichromate de po-
tasse conserve les fibres, mais détruit plus ou moins les cel-
1 V. Archives île Neurologie, t. X, p. 270.
SOCIÉTÉS SAVANTES. 407
Iules. Pour observer les fibres à myéline, il n'y a rien de mieux
que la coloration à l'hématoxyline de Weigert, d'après son
nouveau procédé. L'examen des cellules nerveuses, des noyaux
du tissu conjonctif, des parois vasculaires exige l'emploi des
couleurs d'aniline; on pratiquera l'autopsie trente heures au
plus et, en été, vingt-quatre heures après la mort; on plongera
le petit morceau d'écorce, dont on déterminera avec soin le lieu
de provenance, dans de l'alcool à 93°, tandis que, pour commencer
le durcissement du cerveau entier, on se servira d'alcool faible. On
pratiquera l'inclusion dans la gomme, et on exécutera les coupes
à l'aide d'une lame imbibée d'alcool. On les jettera successivement
dans l'alcool à 95°, dans l'eau distillée, dans une solution aqueuse
d'aniline que l'on chauffe jusqu'à ce qu'il s'échappe de lé-
gères vapeurs; après avoir procédé à un refroidissement lent,
on aura de nouveau recours à de l'alcool à 95°, on éclaircira à
l'essence de girofle jusqu'à ce qu'on n'obtienne plus de gros
nuages (élimination de l'excès de couleur), enfin on chassera l'es-
sence par la benzine, et l'on montera dans le baume du Canada.
C'est le rouge de Magenta qui donne les meilleurs effets. Quand
il s'agit d'étudier les altérations pathologiques, il faut constam-
ment comparer avec les mêmes régions d'une écorce saine.
M. Exo ( d'Heidelberg ) montre des préparations de muscles
empruntées à un cas de maladie de Thomsen1. On y rencontre
l'hypertrophie des fibres, la multiplication de leurs noyaux. Il en
est de même pour les mêmes organes d'un homme, mort des
suites d'une opération chirurgicale, qui, d'après l'interrogatoire
de sa veuve aurait, certainement eu pendant sa vie une maladie
de Thomsen modérée. Voici maintenant des préparations de trois
muscles d'un garçon ayant été atteint d'une pseudohypertrophie
musculaire infantile (dystrophie musculaire progressive de Erb) ;
on trouve dans le gastrocnémien nombre de fibres hypertrophiées,
atrophie de certaines autres (quelques-unes semblant fendues
dans leur longueur), de l'hypergénèse des noyaux du tissu con-
jonctif, multiplication des noyaux des fibres musculaires; le
sous-épineux présente surtout de l'atrophie des fibres accompa-
gnée d'hypergenèse du tissu conjonctif sans aucune accumulation
de cellules de graise; le grand dorsal ne contient presque plus
de fibres, il comprend des masses de tissu conjonctif et de cel-
lules de graisse ; le processus commence donc non par la prolifé-
ration du tissu graisseux, mais par une hypertrophie musculaire
véritable, accompagnée d'atrophie de nombreuses fibres^et d'hy-
perplasie simultanée du tissu conjonctif.
M. SGHULTZE (d'Heidelberg) apporte des préparations emprun-
' V. Archives de Neurologie. Revues analytiques.
408 SOCIÉTÉS SAVANTES.
tées à un cas d'atrophie musculaire généralisée ; il pense que dans
l'affection désignée sous le nom de pseudohypertrophie on n'a
jusqu'ici pu constater que l'hypertrophie d'une fibre musculaire
en ait toujours précédé l'atrophie. Il montre encore des prépara-
tions dues à Weigert et préparées d'après sa méthode ou d'après
celle d'Adamkiewiez : la théorie des zones chromoleptiques serait
fausse. Enfin il discute un cas de porencéphalie.
Par l'intermédiaire de M. Freusberg, M. HACK TUKE (de Londres)
demande aux neurologistes allemands de lui prêter leur appui
dans son étude sur le somnambulisme provoqué, et de vouloir bien
lui communiquer des cas bien observés. - -
II. SECTION DE physiologie.
M. HERZEN (de Lausanne). De la décomposition du sens de la tem-
pérature en deux éléments différents Un bras profondément
engourdi a perdu non seulement le sens du tact, mais aussi la
faculté de percevoir le froid, tandis qu'il distingue encore nette-
ment la chaleur et les impressions douloureuses. Cette décou-
verte de M. Herzen est complétée par cette autre. La compression
permanente mais modérée d'une jambe, en déterminant dans les
régions innervées par le sciatique de l'anesthésie tactile, enlève
aussi la faculté de percevoir le froid ; ce n'estque bien plus tard,
que la chaleur et la douleur, sont plus senties. Si dans ces condi-
tions on touche une main et un pied soit avec un objet froid (0°),
soit avec un objet modérément chaud (40 à 45°), et si l'on s'étudie
à prendre sur le fait non la sensation occasionnée par le contact,
mais le moment où le sujet réagit à la sensation réelle du chaud
ou du froid, on constate que le temps exigé pour cette réaction
est toujours beaucoup plus long quand il s'agitde la chaleur, que
lorsqu'il s'agit du froid. Une femme qui était affectée d'anesthésie
tactile et d'insensibilité à l'égard du froid, tandis qu'elle sentait
les impressions douloureuses et distinguait parfaitement divers
degrés de chaleur entre 27° et 6u° présentait à l'autopsie une
myélite transverse des cordons postérieurs et de la moitié dorsale
des cordons latéraux surtout des faisceaux latéraux qui se rendent
au cervelet ; les cordons latéraux et la substance grise étaient de-
meurés normaux. L'auteur n'a pas encore eu l'occasion de prati-
quer l'autopsie de malades chez qui il avait constaté la perte de
la sensibilité tactile et des impressions de froid alors que la cha-
leur et la douleur étaient toujours perçues. Chez les chats et les
chiens, les lésions cérébro-spinales unilatérales qui ne nuisent pas
à la sensibilité tactile ne nuisent pas non plus à la sensibilité des
impressions froides; celles qui anéantissent la première troublent
aussi la dernière; telles la sectiou transverse des cordons posté-
SOCIÉTÉS SAVANTES. 409
rieurs et l'extirpation des centres corticaux moteurs. Conclusions
fo La même région de l'écorce cérébrale (gyrus sigmoide) contient le
centre des sensations tactiles et frigorifiques ou des conducteurs qui les
apportent à ce centre; 2° les cordons postérieurs de la moelle trans-
mettent deux espèces de sensations; 3" ces deux espèces de sensations
sont supprimées quand on comprime les troncs nerveux périphériques;
4° la sensibilité à l'égard de la chaleur est chez l'homme transmise par
d'autres nerfs à d'autres tractus et de ceux-ci à d'autres centres céré-
braux que la sensibilité à l'égard du froid ; 5° le sens de la température
se compose donc de deux sens : un sens pour la chaleur, un sens pour
le froid, absolument indépendants l'un de l'autre au double point de vue
anatomique et physiologique.
11 ne faut pas non plus identifier le sens tactile et le sens des
impressions frigorifiques, non plus que le sens de la douleur et ce-
lui de la chaleur. 11 existe, en effet, divers points de l'économie
dont les uns perçoivent uniquement le froid, les autres la cha-
leur, d'autres enfin le contact. Le gland pénien, par exemple,
complètement insensible à l'égard du froid, perçoit les grossiers
contacts. La sensibilité frigorale et tactile s'effectue donc par des
nerfs spéciaux malgré la communauté des trajets et des termi-
naisons centrales des tractus nerveux.
M. GoLTz présente quelques chiens en vie auxquels on a enlevé
tant la sphère du sentiment, que la zone de la vue. En comparant
l'allure des animaux mutilés aux lacunes encéphaliques corres-
pondantes(les animaux sont sacrifiés ultérieurement), on peut voir
que Goltz a raison de combattre le point du vue de Munk 1.
III. SECTION DE médecine INTERNE.
M. Rumpf (de Bonn). Des monoplégies et des hémiplégies syphili,
tiques.- La communication porte sur deux observations de mono-
plégie typique du bras ou de la jambe avec épilepsie corticale.
Dans les deux cas le membre atteint présentait de la tension mus-
culaire et de l'exagération des réflexes tendineux. Intégrité par-
faite dela sensibilité. Dans deux autres cas de monoplégie syphi-
litique, la sensibilité commune était diminuée, ainsi que la
faculté de percevoir la situation et la position des membres affec-
tés ; parfois il se produisait des accès convulsifs dans le membre
atteint sans autres troubles de la motilité, L'auteur porte sur les
deux premiers faits le diagnostic de lésion du centre cortical mo-
teur, sur les deux derniers, celui de lésion corticale de la zone
sensible, conclusion, conforme à celle de Nothnagel *; les endroits
1 Voy. Archives de Neurologie, aliàs passim.
2 Voy. Traduction française, Paris, 1S85. Maladies de l'encéphale et
localisations.
Archives, t. Xll. 27
410 0 SOCIÉTÉS SAVANTES.
de la surface du cerveau qui commandent à la motilité et au sens
musculaire sont chez l'homme, tout près l'un de l'autre, mais non
identiques.
IV. SECTION DE GYNÉCOLOGIE.
M. H.-W. FaEUND (de Strasbourg). Des fines altérations des appa-
reils nerveux qui occupent le parametrium ', dans le cas d'atrophie
simple et p,ii,amét2,itique. - Dans le cas de puerpéralité normale,
l'auteur a trouvé une forte hyperplasie du ganglion cervical de
l'utérus (ganglion de Frankenhoeusu)2 ; dans les stades plus avan-
cés, il existait une métamorphose graisseuse du même organe.
Dans l'atrophie simple du tissu cellulaire du bassin, alliée du reste
à de l'atrophie utérine consécutive à des maladies rapidement
consomptives, à des couches et à des lactations se succédant à des
intervalles trop courts, à des affections puerpérales graves, les
cellules nerveuses ganglionnaires se sont montrées diminuées de
nombre et de volume, en partie atteintes de dégénérescence grais-
seuse ; leur forme, au lieu d'être polygonale, était devenue ar-
rondie, on n'en constatait pas toujours le noyau et le mucléole les
ramuscules nerveux étaient amincis et infiltrés de graisse. Dans
la paramétrite chronique, M. Freund a vu le ganglion qui nous
occupe, comprimé par des tractus de tissu conjonctif cicatriciel ;
les cellules en étaient recoquillées et pigmentées (couleur jaune-
brun), souvent on n'en pouvait reconnaitre le noyau qu'avec peine ;
au degré le plus extrême de la rétraction cicatricielle, à côté des
cellules nerveuses, soumises aux altérations les plus marquées,
on percevait des branches nerveuses clairsemées , amincies,
pauvres en éléments de relais. Importance de ces lésions pour l'in-
terprétation de l'hystérie.
V. SECTION DE pédiatrie
M. RANKE (de Munich). De la paralysie infantile cérébrale.- L'été
dernier, l'auteur a observé neuf cas de paralysie cérébrale corres-
pondant au tableau morbide de la poliencéphalite aiguë de
Struempeil 3. Six cas se rattachent à la forme hémiplégique ; trois
cas concernent la forme monoplégique. Dans la première forme
1 Voy. Manuel de Gynécologie, de Hart et Barbour, traduction fran-
çaise de Crouzat. Paris, 1886, p. 54.
= Voy. Ce même ouvrage, p. 83.
3 goy. Archives de Neurologie, t. XI, p. 112. H s'agit là d'une ma-
ladie qui a été décrite bien des fois Pn France par Bravais, Cotard, Bour-
neville et ses élèves.
BIBLIOGRAPHIE. 411 i
la paralysie était surtout accentuée sur le bras, arrêté dans sou
développement (il en était de même pour un cas de monoplégie
brachiale) ; le trouble de la nutrition portait sur les os et les mus-
cles, et non sur le tissu adipeux sous-cutané. Chez les six hémi-
plégiques, il y avait de l'athétose des doigts qui atteignait en
outre les orteils (trois cas) ; deux d'entre eux présentaient des
troubles intellectuels, un garçon devint, quatre ans après l'inva-
sion de la paralysie, épileptique. Dans tous les cas, la paralysie
n'était pas flasque, comme cela a lieu dans la poliomyélite, mais
elle s'accompagnait d'une légère tension musculaire. Persistance
des réflexes tendineux parfois même exagérés. Jamais d'altéra-
tions fondamentales de la sensibilité, du sens musculaire, de la
réaction électrique. Intégrité du facial. La maladie remontait in-
variablement à la première jeunesse; son stade initial, tantôt in-
diqué, tantôt formellement nié, serait caractérisé par des convul-
sions, de la perte de connaissance, de la fièvre. Chez trois enfants
venus au monde en etat d'asphyxie, l'affection doit remonter à la
naissance.
M. DEmi.E. Contributions à la connaissance des effets nuisibles des
excès alcooliques sur l'organisme de l'e71fttnt.- Sur cinquante-trois
enfants amenés à l'hôpital spécial de Berne, dans le cours des
années 4818-1884, et affectés d'arrêt de développement psychique
total ou partiel, 28, soit 54 p. 100 étaient issus de parents habi-
tuellement adonnés (généralement il s'agissait du père) à l'eau-
de-vie. M. Demme s'élève contre la coutume d'administrer des
boissons alcooliques aux enfants ; il indique deux cas de cirrhose
hépatique, pendant l'enfance et envisage plusieurs observations
relatives à l'épilepsie, à la chorée, aux terreurs nocturnes, comme
suites immédiates d'ingestion prolongée d'alcool. (allg. Zeitschr.
/. Psych., XLIL, 4). P. Kéraval.
BIBLIOGRAPHIE
IX. Traité élémentaire d'anatomie médicale du système nerveux ;
par Ca. Férié. (Au Progrès médical et chez Lecrosnier.)
L'urgence d'un pareil traité se faisait de plus en plus réclamer
en présence des recherches successives, éparses dans différents
recueils depuis dix ans, et ne se retrouvant dans aucun des traités
du système nerveux. Il y avait à tenter ce travail un double
412 BIBLIOGRAPHIE.
écueil, trop dire ou ne pas dire assez, écueil qui ne pouvait être
évité que par la compétence toute spéciale de l'auteur. Ce traité
tout en étant complet repose sur un sage discernement entre les
faits anatomiques courants, partout reproduits et sur lesquels
l'auteur ne fait que passer sans les négliger et entre les faits
récents, si sujets à discussion, difficiles à exposer et qui tous sont
reproduits avec une clarté qui n'existait pas toujours dans les
monographies de leurs auteurs. Le même esprit de méthode se
retrouve dans les questions physiologiques et pathologiques qui
en relèvent l'attrait de l'exposition, sans compter la présence de
nombreuses figures explicatives et schémas inédits ou empruntés
souvent aux meilleures sources. Les premiers chapitres sont con-
sacrés aux méninges et à la configuration extérieure et intérieure
de l'encéphale.
Le chapitre IV (les hémisphères cérébraux) comprend les des-
criptions nouvelles de la scissure de Sylvius, du lobule de l'insula
de la région rétro-insulaire et de ses plis de passage et un exposé
facile à suivre de la corne d'Ammon. Un article spécial sur la
topographie cérébro-crânienne, curieux par les détails crâniolo-
giques et les questions relatives aux applications du trépan, est
suivi d'une revue complète sur les localisations fonctionnelles. La
substance blanche des hémisphères et du centre ovale sont étu-
diées au moyen des coupes de Pitres; les chapitres les plus inté-
ressants sont ceux concernant les noyaux gris centraux et la cap-
sule interne; toute obscurité disparaît devant l'exposé facile et
clair des détails relatifs à l'isthme de l'encéphale et du cervelet;
tout un chapitre est consacré à la circulation cérébrale avec les
nombreuses questions physiologiques et pathologiques qui en
découlent. Le dernier chapitre sur le bulbe rachidien et la moelle
fait apprécier'en songeant aux précédents traités d'anatomie,
combien il était temps qu'une nouvelle revue d'ensemble fût faite
sur cette question.
La seconde partie, réservée au système nerveux périphérique,
relate toutes les recherches récentes relatives aux nerfs crâniens
au point de vue de la physiologie et de la pathologie. Charpentier.
X. Traité clinique du diagnostic des maladies de l'encéphale basé
sur l'étude des localisations; par Hermann NOTHNAGEL, traduit t
par P. Kéraval. - (Paris, 1885. Adrien Delahaye et Emile Le-
crosnier, éditeurs.)
Ce livre est un traité essentiellement clinique s'appuyant sur
les faits que fournit l'observation rapprochée des résultats de
l'autopsie pour faire le diagnostic topographique des lésions en
foyer de l'encéphale. La physiologie est ici reléguée au second
bibliographie. 413 3
plan, l'auteur se réservant de traiter cette question à part, parce
qu'il trouve qu'en définitive les faits cliniques seuls ont une im-
portance prépondérante en matière de pathologie humaine. Ob-
servation rigoureuse du malade avec autopsie complète, analyse
de chaque cas particulier, comparaison de tous les faits entre eux,
telle a été la règle de conduite de M. Nothnagel. Le choix des
observations a eté fait avec le plus grand soin, l'auteur recher-
chant de préférence les hémorrhagies ou ramollissements d'an-
cienne date, et se montrant très circonspect à l'égard des ménin-
gites même circonscrites, des encéphalites aiguës,des tumeurs, etc.
Nous regrettons de ne pouvoir donner ici une analyse com-
plète de ce traité spécial ; nous nous contenterons d'avoir indiqué
l'idée qui y préside. Dans une première partie M. Nothnagel
étudie la symptomatologie spéciale, chaque chapitre comprenant
l'exposé des observations, leur analyse, leur comparaison et les
déductions à en tirer.
Une seconde partie renferme un essai de séméiologie sur l'im-
portance de chacune des manifestations symptomatiques, symp-
tômes de déficit, phénomènes d'arrêt, phénomènes d'excitation
pour le diagnostic local, la localisation des lésions. Nous devons
savoir gré à M. Kéraval d'avoir voulu vulgariser dans notre pays
ce livre indispensable à tout médecin s'occupant de la pathologie
du système nerveux; plus que tout autre, par ses études spéciales
en neurologie et la connaissance approfondie de la langue alle-
mande, il était à même de mener celte lâche abonne fin. Sa tra-
duction tout en restant aussi conforme que possible au texte pri-
mitif, est écrite dans un style simple et facile qui en rend la lec-
ture singulièrement attrayante. - Mais M. Kéraval a fait plus
qu'oeuvre de traducteur ; il a semé au courant du livre de M. Noth-
nagel de nombreuses notes originales et il l'a mis, si l'on peut
dire, au courant de la science par les indications bibliogra-
phiques et le résumé des observations principales parues depuis
sur la matière. Signalons enfin l'excellente idée qu'il a eue de
joindre au texte un atlas d'anatomie normale des centres nerveux,
permettant au lecteur de se retrouver, sans effort d'esprit, dans la
topographie cérébrale et de déterminer rapidement le siège des
lésions en foyer successivement passées en revue dans le cours de
l'ouvrage. J. SI : GLas.
XI. La possession de Jeanne Féry, religieuse professe du couvent
des soew's noires de la ville de Mons (1584). [Bibliothèque Jil,bo-
lique). In-8° 1886. Aux bureaux du Progrès médical et chez Le-
crosnier, éditeur.
L'étude rétrospective de manifestations morbides n'a pas seule-
414 4 bibliographie.
ment un intérêt historique. On peut dire qu'elle apporte un
appui à la clinique, en ce sens qu'elle lui fournit des faits décrits
en toute sincérité par des observateurs non prévenus ; et lorsqu'il
s'agit de l'hystérie ces faits acquièrent une importance de pre-
mier ordre. Il faut donc louer M. Bourneville d'avoir pris l'ini-
tiative des publications relatives à l'histoire si riche de faits des
manifestations névropathiques, etconsidérées autrefois comme de
nature miraculeuse. Le succès des ouvrages précédemment publiés,
le Sabbat des sorciers, la Possession de Françoise Fontaine, l'oeuvre
de Jean Wier, est d'un bon augure pour l'accueil qui sera fait à
l'histoire de la Possession de Jeanne Féry, regardée de son temps
comme une victime du démon, et qui, en réalité, était une hys-
térique des mieux caractérisées, chez laquelle on retrouve les
grandes attaques convulsives, le délire, les hallucinations multi-
ples, l'anesthésie, les extases, les sensations viscérales étranges, etc.
Parmi les manifestations les plus intéressantes observées chez
cette malade, il faut remarquerle dédoublement de la personnalité.
La relation de la possession de Jeanne Féry est enrichie des notes
dans lesquelles M. Bourneville a pris soin de mettre en relief Jes
phénomènes plus intéressants, et de les rapprocher des faits de la
pathologie contemporaine. Co. F.
XII. Klinische Psychiatrie (Specielle Pathologie und Thérapie der
GeisLeskrankheiteil); par H. SCxUELE. (Leipzig, z1886. F.-C.-W,
Vogel, éditeur.)
Ce volume représente la troisième édition- de l'HattdLuch der
Geisteskrankheiten de-la collection Ziemssen (2e édition, 1880). J.
Quand M. Schuele fit paraître cet IIandi)uch, il nous souvient d'avoir
entendu critiquer son style et la nature de ses opinions qu'on
qualifiait de métaphysiques. On lui reprochait notamment d'avoir
conçu plutôt un traité de psychologie pathologique qu'un livre
propre à faciliter l'observation des malades. Sa Klinische Psychia-
trie semble être une réponse à ces critiques. Ce livre n'émane plus,
en effet, du remaniement de l'Handbuch de 1880; il constitue un
travail nouveau, tout entier consacré à la description des types
cliniques, de leurs variétés, des complexus séméiologiques et
épisodiques, de l'évolution de chacun d'eux, et du mélange des
modalités morbides, ainsi que de leurs formes de transition;
le pronostic et le traitement correspondants y trouvent égale-
ment droit de cité.
Aussi M. Schuele, après avoir consacré quelques pages aux
généralités, expose-t-il sans plus tarder sa classification. Nous la
ieproduisons.
BIBLIOGRAPHIE. 41,5
416 6 VARIA.
de ses discussions diagnostiques, ainsi que l'a fait M. de Krafft-
Ebing. P. KERAVAL.
VARIA
A propos DE la mort du ROI DE Bavière; par le Dr 1. V. ! \IUNDEY
(Wiener med. Wochenschr, n° 25, p. 910.)
Eviter de voir dans le petit-fils
. - ' les traits autrefois aimés et éloquents
dans leur silence, du grand-p8e.
Ainsi parlèrent les dieux.
(GOETHE).
Aussi bien dans l'histoire générale que dans les mille chapitres
des histoires spéciales de chaque pays, cet événement tragique se
trouve tout à fait isolé et Shakespeare, le peintre génial de la
folie dans les familles royales,' n'eût pas pu trouver un drame
plus poignant. Depuis le livre célèbre d'Erasme « de moria b, jus-
qu'aux ouvrages modernes de psychiatrie, rien de comparable à
cette catastrophe ! C'est une des causes qui rendent difficile d'étu-
dier cet épisode, même superficiellement.
La cause principale aussi est, qu'il en est, absolument nécessaire
d'avoir ici des documents provenant de témoins oculaires; en
même temps, la catastrophe même s'est passée loin de la présence
de ces témoins. Il est donc fort difficile de donner ici un jugement
valable.
Il faut cependant qu'un journal sérieux donne rapidement son
opinion sur un fait si extraordinaire au point de vue médical et
psychiatrique.
La première question à se poser est : Quand a-t-on pu s'aperce-
voir des premières manifestations de l'allection mentale ? ' ?
Nous en savons assez pour répondre que dès l'enfance, plus
encore dans l'adolescence, et progressivement jusqu'à l'âge mûr
(le malade a dépassé la quarantaine), on a pu observer des symp-
tômes morbides.
Les preuves sont innombrables et on les réunit actuellement.
La seconde question est celle de la prédisposition héréditaire.
Ici encore nous pouvons répondre affirmativement, avec mille
preuves à l'appui.
VARIA. 417 Î
Nous avons ainsi résolu Ips deux points cardinaux d'un examen
légal, s'appuyant sur des bases sûres. On pourrait encore sou-
mettre aux experts la.question de savoir comment il s'est fait que
les exécuteurs testamentaires ont pu permettre, à l'époque de
la mort du père, qu'un jeune homme accablé par la prédisposi-
tion héréditaire et déjà malade arrivât au pouvoir, tandis que
l'autre frère, pour des faits cliniquement peu différents, dut re-
noncer au pouvoir et fut interné ?
Bien que la question soit secondaire au point de vue psychia-
trique, elle était cependant justiciable de la médecine légale, à
cause de la grande responsabilité qui incombe à un souverain.
Pareils faits ont déjà été jugés, car le triste chapitre de l'irrespon-
sabilité chez les princes régnants ou non est même, dans les temps
modernes, important.
Il n'est pas du domaine médical d'élever une critique sur ces
faits dont le résultat a été que l'entourage responsable a pu pen-
dant vingt-cinq ans rester spectateur apathique d'une maladie
qui a consommé la perte du chef suprême de l'Etat.
Dans les dix dernières années, et plus spécialement depuis cinq
ans, la maladie de l'illustre aliéné a pris un caractère manifeste-
ment chronique, surtout à cause du genre de vie du roi qui ne fut
contrôlé par aucun médecin : aussi la volonté et une sûre apprécia-
tion des événements devaient-elles être annihilées par l'influence
prépondérante des passions.
C'était là une sorte de secret de Polichinelle (Offent liches
Gcheimniss), et il faut s'étonner qu'il n'ait été fait auparavant t
aucune tentative pour donner une solution équitable à ces événe-
ments.
Il faut, il est vrai, bien se mettre dans l'esprit qu'on ne peut
agir avec des malades exerçant un pouvoir royal et qui tombent
en démence, comme avec des mortels ordinaires. Le respect
témoigné au plus grand personnage du royaume, et bien des diffi-
cultés sociales et politiques, les croyances et les superstitions
d'un peuple loyal, rendent toute action difficile, poussent à la
temporisation et influencent les décisions.
Mais, dans le cas spécial on a temporisé plus que de raison,
semble-t-il, pour employer un terme peu énergique. Qu'il nous
soit permis d'émettre ici notre opinion sur ce qui aurait dû être
fait par l'entourage.
Il semble évident qu'on aurait dûavanttout avertir les autorités
locales du voisinage de la résidence royale, puis, aussi rapidement
et sans éclat, l'entourage et les domestiques du malade.
Auparavant, il y avait lieu d'appeler à la Capitale un ou plu-
sieurs coryphées de pays étrangers, pour que, en collaboration
1 Massgebande dans le texte. -
418 varia.
avec les collègues du pays, ils reconstruisissent l'histoire et l'état
actuel de la maladie, d'où auraient découlé les mesures à pren-
dre.
Nous trouvons extraordinaire que le savant aliéniste choisi par
les gouvernants, ait pu prendre sur lui une telle responsabilité et
ne l'ait partagée qu'avec quelques collègues du pays.
Nous trouvons aussi étrange qu'on ait cru avoir le droit de
traiter comme affaire domestique, ne regardant que le pays même
un événement d'où dépendait la conservation au pouvoir du roi.
alors que depuisdes années le télégraphe et les journaux portaient
journellement au loin les détails sur les particularités de l'exis-
tence royale.
Mais le gouvernement a aussi le devoir de tout mettre en oeuvre
pour obtenir que la lumière complète soit faite sur la forme, la
marche et le traitement convenable de la maladie.
Si dans ce cas tout a été fait, il n'est pas, nous semble-t-il,
encore temps de faire apparaître l'aliéniste avec ses gardiens,
mais bien le prince ou parent le plus agréable au malade. Lui
seul pourra accomplir le triste devoir d'annoncer au moment
opportun la triste nouvelle d'une déposition nécessaire. Ensuite,
il aura encore à présenter les médecins. Alors seulement, lesimé-
decins réunis font le diagnostic et le pronostic pour décider du trai-
dent en connaissance de cause. C'est ce que fit il y a peu de temps
encore une reine intelligente, lorsqu'il fallut prendre un parti au
sujet d'une belle-soeur impériale : aujourd'hui encore elle veille
pieusement à la santé de la malheureuse.
Un roi comme celui de Bavière avait, croyons-nous, le droit de
ne pas être traité selon les formes. On ne va pas se promener
quelques heures après qu'on a déposé un roi névropathe, avec lui
en calèche découverte, en plein jour, dans ses états, car il est
évident que le malade, bien que dûment aliéné, se rendait bien
compte que ce dernier voyage devait le mener à un château,
prison où il devait rester enfermé jusqu'à son dernier jour.
Bien des aliénés agités n'ont jamais atteint le but final ou ont
su, peu après l'arrivée à l' « asile », se délivrer de l'emprisonne-
ment par la violence, mais aucun d'eux ne J'a fait, cela est indu-
bitable, avec plus de préméditation, que le malade célèbre du
château de Berg.
A peine installé a l'asile-château depuis 48 heures, il a exécuté
son médecin, qui était forcé, par son savoir et son devoir profes-
sionnel à le condamner à la prison perpétuelle.
Puis il se donna lui-même la mort dans les flots où jadis son
clair regard aimait à s'arrêter.
Nous donnons ici le rapport' fait sur le terrible événement du
château de Berg. Rarement un cas n'a présenté plus spécialement
. varia. 419 J
un intérêt médical. Non seulement un médecin très connu a dû
partager la mort de son roi aliéné, mais le'sort du roi lui-même
est fort digne de réflexion. Le byzantinisme de la cour lui a fait
refuser pendant des années ce qu'on accorderait au dernier de
ses sujets, des secours médicaux, des soins appropriés et une sur-
veillance suffisante. On a ignoré ou caché des actes dont la plus
petite fraction eût suffi à exiger que Je roi et l'entourage fus-
sent soustraits aux dangers d'une puissance échappant au con-
trôle de l'intelligence et de la volonté. Pendant des années la
folie inconsciente a respecté les actes non contrôlés du roi, jus-
qu'à ce qu'un sujet d'excitation, les difficultés financières, eût
amené cette crise maniaque formidable. Ayant essayé de s'en-
tendre avec son médecin pour exécuter son plan, suicide ou fuite,
et ayant rencontré un obstacle, le malade royal décida de le sup-
primer.
Ou ne peut s'empêcher de considérer les actes du Dr Von Gud-
den comme imprudents. Croyant avoir une influence considé-
rable sur l'esprit du roi il a été trop loin dans l'oubli des pré-
cautions ; c'est ce qui a causé sa mort. Sa mémoire sera respectée
et son nom, non seulement à titre de savant et de médecin,
mais encore à titre de victime du devoir professionnel, honoré de
tous.
Bernard de Gudden est né le 7 juin 824 (il finissait donc sa
soixante-et-unième année), et fut reçu médecin à Halle en 1848.
Après avoir publié quelques travaux dermatologiques, il s'occupa
de psychiatrie et devint en 1855 directeur de l'asile de Werneck,
puis professeur de psychiatrie à Zurich (1869) : de là il fut appelé
en 18ï2 à Munich, où il dirigea en même temps l'asile départe-
mental d'aliénés. Depuis 1870 il a contribué à la publication des
Archives de psychiatrie. Comme directeur il était très humain et
un des premiers partisans du No restraint. Son regard noble, sa
haute stature ont eu une grande influence sur bien des malades
et ont été sans doule cause de son imprudence, qui lui a fait
accepter le désir du roi, d'être délivré de tout gardien. 11 a été
bien puni de sa trop grande confiance !
L'autopsie du corps du roi a prouvé que non seulement il
existait de graves lésions cérébrales, mais encore que l'état durait
depuis longiemps.
En voici le résultat :
Longueur du corps 191 centimètres, périmètre thoracique 103
centimètres, pannicule graisseux fort : musculature et déve-
loppement corporel très robustes. Le cadavre est un peu gonflé
à la face et au cou, la peau du crâne et des oreilles bleuâtre, à la
partie postérieure des membres et du corps des sugillations cada-
vériques diffuses. Pas de blessures, à l'exception de quelques éra-
420 varia.
tlures du genou. La langue est pincée entre les dents, ces dernières
en mauvais état.
La peau du crâne est très épaisse et gorgée de sang, le crâne
petit par rapport au corps, et un peu asymétrique. Le diamètre
diagonal depuis le front à gauche à la partie postérieure du
crâne est long de n,2 centimètres, le diamètre allant d'en avant
à droite en arrière à gauche est de 17,9 centimètres. Calotte
crânienne très mince, épaisseur maxima 3 millimètres. Les sutures
coronaires et sagittales ossifiées à la face interne. Une série
d'exostoses se trouvent à la partie interne du frontal. Le sinus
longitudinal supérieur s'élargit fortement en arrière, et se rétré-
cit vers l'avant d'une façon remarquable. Beaucoup de granula-
tions de Pacchioni entrant dans la lumière du sinus. La dure-
mère est très épaissie surtout vers le frontal, elle contient beau-
coup de sang et à l'intérieur elle est rude au toucher et villeuse.
Sur la selle turcique une exostose de 2 millimètres de hauteur.
Le rocher gauche présente un promontoire ayant un diamètre
d'un centimètre à la base correspondant à un enfoncement du
lobe temporal du cerveau. La selle turcique est asymétrique,
épaissie, poreuse et cassante; il en est de même du plancher des
fossettes antérieures. Les sinus de la base sont tous pleins d'un
sang noir liquide.
Poids du cerveau sans la dure-mère 4,349 grammes. Arachnoïde
épaissie sur de grands espaces. Sur le lobule paracentral gauche
antérieur et au commencement de la première frontale l'arach-
noïde et la pie-mère sont soudées sur une surface grande comme
une pièce d'un marc, et fortement épaissie. La pression de ce
bourrelet a aminci la voûte crânienne réduite à cet endroit à
l'épaisseur d'une feuille de papier. A la surface du cerveau, régu-
lièrement distribuées de chaque côté, on trouve des portions de
circonvolutions atrophiées, surtout au commencement des trois
frontales à l'extrémité médiane de la frontale antérieure et dans
le voisinage de la partie moyenne du sillon post central ( ? ) La
masse du cerveau gorgée de sang et assez molle.
Autres organes. Pas d'adhérences pleurales; poumons normaux
en dehors des effets provenant de l'aspiration d'eau. Coeur un
peu hypertrophié, mais bien musclé et peu de surcharge grais-
seuse. Catarrhe chronique de l'estomac qui contient encore des
aliments non digérés. Parois abdominales et foie congestionnés,
rate agrandie (en voie de décomposition), reins grands, très cya-
noses mais normaux.
FAITS DIVERS
Concours DÉ l'Internat DE la Maison nationale DE CHAAENTON. -
Un concours pour trois places d'internes à la Maison nationale
de Charenton a été ouvert le '26 juillet au ministère de l'Intérieur.
Le jury était composé de MM. les" Christian, Ritti, du Mesnil,
Ladreit de Lacharrière, Damalix. Sur quatre candidats inscrits,
trois seulement ont pris part aux épreuves, le quatrième n'ayant
pas répondu à l'appel de son nom.
Les épreuves comprenaient : une composition écrite de trois
heures sur un sujet d'anatomie et de physiologie du système ner-
veux ; une épreuve orale d'un quart d'heure sur une question de
pathologie externe et une de pathologie interne.
La question écrite tirée au sort était le nerf facial, anatomie et
physiologie. Les autres questions mises dans l'urne étaient : Nerf
pneumogastrique, anatomie et physiologie. Bulbe rachidien, anatomie
et physiologie.
Les épreuve orales faites le 28 juillet se composent des questions
suivantes : Signes et diagnostic de la fièvre typhoïde. Diagnostie de
la hernie inguinale. Attaque d'épilepsie, fracture de la clavicule.
Symptômes et diagnostic de la pleurésie aiguë. Fractures des côtes.
La question traitée par les candidats était : Signes et diagnostic
de la fièvre typhoïde et diagnostic de la hernie inguinale. A la suite
de ce concours, MM. Champeil, Doucet et Ferrière ont élé nommés
pour trois ans internes de la Maison nationale de Charenton.
Ecole d'infirmières DE l'asile DE Ville-Evrard. M. le Dr Espian
de Lamaeste, médecin-directeur de cet établissement, a organisé'
les cours au commencement du mois d'octobre.
Hospice DE UICTRE : CO4COURS. - Conformément aux votes du
Conseil général de la Seine et du Conseil municipal de Paris, le
service de M. Bourneville à Bicêtre, comprenant les épileptiques
adultes, les enfants idiots, imbéciles, arriérés, épileptiques,
hystériques et pervers, va être dédoublé le 1er janvier prochain.
Il s'ensuit la création d'une nouvelle place de médecin aliéniste
qui sera mise au concours soit à la fin de décembre, soit au com-
mencement de l'année. Avis aux candidats.
422 -) faits DIVERS.
La dormeuse de la SALPÈ'rRIÈRE. - Les journaux politiques ont
beaucoup parlé il y a deux mois, comme d'une nouveauté
d'un cas extraordinaire, d'une malade de la Salpêtrière, nommée
Eudoxie Hé.... Or les cas d'attaques de sommeil sont assez fré-
quents chez les hystériques, ainsi que nous l'avons montré dans
le tome III de l'Iconographie de la Salpêtrière (pages 1 à 145),
volume dans lequel nous avons rapporté tout au long l'histoire de
la dormeuse de la Salpétriére.
Folie RELIGIEUSE. On écrit de Vals-les-Bains : Un étrange
maniaque habitant Vals-les-Bains a été interné aujourd'hui. Un
sieur Jean Arlaud, qui depuis quelques années avait le cerveau
dérangé et était atteint de la folie de la persécution, s'imaginait
conjurer les mauvais esprits en accomplissant un singulier pèle-
rinage chaque année le vendredi saint. Il se rendait à Burzet, et
là, restant vêtu seulement d'une chemise, pieds nus, chargé
d'une croix, il montait au Calvaire.
Et chose à laquelle on ne voudra peut-être pas croire, il y avait
sur le parcours un individu qui l'accompagnait à coups de fouet.
... Et, à chaque coup, Jean Arlaud lui demandait de frapper encore
plus fort.
Quelques personnes ont prévenu la gendarmerie et, cette
année, la population a été privée de cette triste scène. Le malheu-
reux Jean Arlaud était d'ailleurs atteint d'une crise plus violente
que de coutume.Il saccageait toute sa maison, prétendant chasser
le diable. Les gendarmes ont eu beaucoup de peine à s'emparer
de lui. Cette victime de la folie religieuse a été internée à l'asile
de Privas. (Lanterne, mailles faits de ce genre ont un intérêt,
au point de vue de l'influence des idées religieuses, sur la pro-
duction de la folie.
SUR LA. statistique des maladies NERVEUSES ET mentales EN RUSSIE.
- Dans sa communication à la Société des Aliénistes de Saint-
Pétersbourg (séance du 21 décembre 1885), le Dr Hertzenstein a
présenté les résultats de ses recherches sur la statistique des ma-
ladies nerveuses et mentales en Russie. L'absence absolue des
documents immédiats à cet égard l'a fait recourir à une méthode
indirecte, notamment à l'énumération des malades de ce genre
parmi les conscrits. C'est ainsi que se fondant sur les comptes
rendus du Département médical relativement à l'état de santé
psychique des conscrits convoqués pendant quatre ans (48ï9-1882),
il a trouvé que sur 1,617,413 jeunes gens âgés de vingt et un ans,
15,72'i ont été reconnus comme atteints de maladies mentales ou
nerveuses, c'est-à-dire 9,72 p. 100. Prenant ensuite le rapport
pour chaque année séparément, M. Hertzenstein trouve qu'il est,
à peu de chose près, le même; il oscille entre 10,04 p. 100 et
FAITS DIVERS 423
9,58 p. 100. Ces considérations permettent à M. Herizenstein de
conclure que vu la constance (approximative) du rapport indiqué,
le peuple russe est exposé à une série de causes constantes qui
déterminent chez lui un nombre presque invariable des maladies
de dégénérescence ( ? ). (Wrutch, na 5, 1886, Saint-Pétersbourg.)
Ecole d'infirmières pour LES aliénés. - Une école d'infirmières
pour les aliénés a été établie par les directeurs du Iludson River
State hospital. Cette école est fondée puur l'instruction de celles
qui désirent prendre une specialité pour les aliénés soit dans les
maisons privées, soit dans les institutions publiques. Les infir-
mières pourvues du diplôme pour les hôpitaux généraux seront
admises à l'école pour une période d'une année à la fin de
laquelle après avoir passé un examen suffisant, elles recevront un
diplôme portant le cachet de l'hôpital et les signatures du prési-
dent du bureau, du directeur, du personnel médical et du directeur
de l'école. Elles seront payées 100 fr. par mois durant les six
premiers mois, et 125 fr. pendant les six autres mois. Pour celles
qui resteront au service de l'hôpital après ce laps de temps, il y a
des taux de rémunération spéciaux.
Les femmes entre vingt et trente ans qui n'ont pas le diplôme
de l'école pour les hôpitaux généraux, seront admises à l'école, et
recevront une instruction pendant deux ans. Après un examen
suffisant à la fin de cette époque, elles recevront un certificat
portant les mêmes signatures que le diplôme. Elles recevront de
50 à 85 fr. par mois suivant leurs progrès et le temps et la valeur
de leur service. Des appointements spéciaux seront accordés
après l'obtention du certificat pour le service de l'hôpital. En
rapport avec l'hôpital il y a aussi une école pour les hommes de
vingt à trente ans. La durée de l'instruction est de deux ans à la
fin desquelles des certificats sont accordés sur la preuve de leur
capacité. Les hommes sont payés de 80 à 140 fr. par mois sui-
vant les progrès et le temps et la valeur des services. Des arran-
gements sont faits avec ceux qui restent à l'hôpital après l'ob-
tention de leur certificat. Tous les élèves sont nourris, logés,
blanchis et soignés en plus. Les candidats à l'admission à l'école
doivent passer l'examen préliminaire réclamé par la commission
du New-York civil service. Cet examen est passé à l'hôpital par
les chefs de l'établissement qui constituent la commission provi-
soire d'examen. Les candidats doivent être d'une bonne consti-
tution, de moeurs sobres et morales; ils doivent présenter des
lettres certifiant leurs moeurs et leurs qualités de deux sources
honorables ou plus. Les diplômes de l'école d'infirmières sont
reçus à la place des lettres. Pour l'instruction des femmes, les
directeurs se sont assurés les services de Miss S. 1. Hawley, une
gradée de l'école de Bellevue-liospital avec une grande expé-
424 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
rience dans les hôpitaux d'aliénés. En qualité de maîtresse de
l'hôpital et de directrice de l'école, elle donne tous les jours des
leçons au lit du malade et fait des cours. (The med. Record N.-Y.,
25 sept. 1886.)
Hôpital pour les épileptiques. - Un hôpital pour les épilep-
tiques vient d'être créé récemment à Baldwinsville, état de Massa-
chusets, aux Etats-Unis. Les bâtiments qui coûtent environ 5,000
dollars (29,0001 fr.), contiennent quatorze chambres pour les ma-
lades et seront consacrés au traitement des enfants épileptiques.
(The New-York Méd. Journ., 23 oct.).
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE
La Possession de Jeanne Ferez, religieuse professe du couvent des Soeurs
noires de la ville de Mons (1584). Un volume in-8° de 112 pages, papier
vélin, prix : 3 fr. Pour nos abonnés, 2 fr. 50. - Papier parcheminé :
prix : 4 fr. Pour nos abonnés, prix : 3 fr. Papier Japon, prix : 6 fr.
Pour nos abonnés, prix : 5 fr. Ce volume, publié par la librairie du l'ro-
grès Médical, est le quatrième ouvrage de la Bibliothèque diabolique (Col-
tection BournevnIe).Lesouvrages précédents sontparordredepubUoation :
9 Le Sabbat des sorciers; 20 La Possession de Françoise Fontaine;
3° Histoires et disputes des démons et sorciers, par Jean Wier.
FÉRÉ (Ch.). - Traité élémentaire d'anatomie médicale du système ner-
veux. Volume in-8° de496 pages, avec 213 ligures dans le texte. Prix :
10 fr.. Aux bureaux du Progrès Médical, 14, rue des Carmes. Pour nos
abonnés, 7 fr. ,
BURCKHARDT (E.). - Trente-septième rapport sur la Maison de santé de
Préfar,gier (exercice 1885). Brochure in-8° de 26 pages. Neuchâtel,
1886. H. Wolfrath et C'e.
SOCIÉTÉ DE MÉDECINE MENTALE DE BELGIQUE. - Congrès de
phréniatrie et de neuropatologie, tenu à Anvers du 7 au 9 septembre 1885,
sous la présidence de M. le Dr V. DEsGuiN. Statistique internationale
des aliénés, par le professeur LEFEBVIIE. Relations entre la criminalité
et la folie, par le 1) SemaI. - Mémoires divers. Volume in-6a de 38 ?
pages; Gand, 1886. Imprimerie Eug. Vanderhaegnen. ·
VULPIAIQ (A). - Maladies du système nerveux (moelle épinière). Leçons
professées à ls Faculté de Médecine. Tome second. Volume in-8° de
798 pages. Prix : 16 fr. L'ouvrage complet, 2 volumes : 32 fr.
Le rédacteur-gérant, Bourneville.
TABLE DES MATIÈRES
Abstinence, 63.
Activité volontaire (action du
nitrite d'amyle sur l'), par
Tippel, 92.
Alcool comme boisson dans les
asiles, 71.
Alcoolisme chronique (exaltation
dans 1'), par Fox, 69, il I.
Aliénés (temps des processus
psychiques simples chez les),
par de Tschisch, 9 t ; - (trai-
tement de la sit : ophobie chez
les), 92; - (électricité chez
les), 100.
Amnésie rétroactive, 377. 1
Amblyopie hystérique, par Ili-
lier, 1»-)6.
Anatomie médicale du système
nerveux (trai té d'), pdrCh, Fét'é,
413.
Anesthésique (leur influence sur
la nutrition), par Drapier,
1 28.
Aphasie, par Balzer, 58; (et
démence), 79; - (et per-
ception), par Grashey, 88,
'23 ? 234.
Asile (d'Andernach), 64 ; z
(cours pour les infirmiers d'),
18; - (de Cadillac), 191 ; -
(de la Seine), 131 ; - de
Pierrefeu), 132;- (Concours
pour les - de Paris), 132;
(de Charenton), 132; (écoles
d'Infirmières de l' - Sainte-
Anne), 258.
Assistance des aliénés en Espa-
gne, 62.
1 Ataxiespinale (théorie del ? t 1 5.
Atrophie musculaire juvénile,
214.
Atrophie musculaire dans les
paralysies des hystériques, par
Babinski, 1,154.
Autopsie du roi de Bavière,
135.
Boldo-glucine (recherches expé-
rimentales et cliniques sur
l'action somnifère de la ! , par
Juranville, 127.
Borax dans le traitement de
l'épilepsie, 244.
Buveurs (névrite multiloculaire
chez les), 229.
Cachexie p;lChydermiqul1( et idio-
tie), parlJoul'l1evilie et Bricon.
137, °,39; - opératoire, 353.
Cannahinone, 253.
Catatonie, 250.
Cécité et hemichorée, par Hal-
lopeau, 59.
Cérébrales (localisations dans
l'herpétisme), par OEttinger,
60.
Cerveaux de criminels et de
suicidés, par Flescli, 89..
Chaleur (action de la sur les
centres respiratoires et circu-
latoires), 104.
Chirurgie du cerveau, 382.
Chorée (nature et traitement
de la), par Saric, 124; étio-
tosie de la), par Saguet, 126.
Cocaïne dans le sevrage de-
ARCHIVES, t, XII. -"
46 6 TAllLI. DES MATIÈRES.
morphinomanes, par Erleu-
meyer, ! JO,
Commissure postérieure du cer-
veau, 107.
Commotions cérébro-spinales,
237. -
Compression du cerveau, 210.
Congrès des naturalistes et mé-
decins allemands, 401.
Convulsions réflexes statiques,
210.
Corps calleux (fonctions du),
211.
Cràne (fracture du), 65.
Crime et folie, 240.
Criminalité congénitale (identité
de l'épilepsie, de la folie mo-
raleavecla), par Lombroso,90.
Dégénérescence dans la folie,
244.
Délire systématique hallucina-
toire, parMayser, 85.
Démence et aphasie, 79.
Diphthéritiques (paralysies), 223.
Dormeuse de la Salpêtrière, 422.
Dyscrasies, névroses et psycho-
ses, par Mueller, 90.
Egypte (note sur 1'), 86.
Électricité (folie guérie par 1'),
68; -(chez les aliénés), 400.
Électrothérapie (questions de
principe en), par ltiueller, 91,
405.
Encéphale (traité clinique des 1.
maladies de l'), par Noth nagel,
414.
Épilepsie (et arthritisme), 57;
(base anatomique de l'), par
Ilay, 60-, (trépanation dans
1'), par Erlenmeyer, 98;
(symptomatologie de l'
bénigne), 242; (alcoolique),
243; - (congestive), 244;
(traités par le borax), 244.
Épileptique (folie), par Fischer,
61; (automatisme), 241.
Ergotine et paralysie de Landrv,
101.
Érysipèle et psychose, 80.
Ether (paralysie par injection
sous-cutanée d'), 101 .
Évasions des aliénés, 85.
Facial inférieur (origine corti-
cale du), par Raymond, 58.
Faciale (paralysie), compliquée
de zona, 212.
Fibres nerveuses à myéline des
organes centraux (procédé de
coloration des), 105.
Folie (guérie par l'électricité),
par Robertsou, 68; - (circu-
laire), pal' Packer G9; (gé-
mellaire), 73, 78; (avec lié-
michorée posthémiplégique),
73; - (enquête collective sur
les causes de la), par Major,
75; (impulsive), par Green,
79; (transitoire), par Krallt
Ebing, 82; - (troubles de la
motilité volontaire dans la-
simple), par Roller, 83 ;
aiguë mortelle), 84; - (héré-
ditaire), ? 4G, 247, 400; reli-
gieuse), 422. ' ,
Formation réticulaire du bulbe
et de la protubérance, 105.
Gaucher (lésion du lobe tempo-
ral gauche sans aphasie chez
un), 124.
Gémellaire (folie), 73, 78.
Génital (inversion du sens), 83.
Genou (recherches du phéno-
mène du), 128.
Grossesse et psychoses, 8 I .
Guérisons inattendues, par Wil-
lett, 72.
Hallucinations (variabilité des),
parKoch, 84.
Hémianesthésie et hémichorée,
58.
Hémianopsie latérale gauche 234.
Hémichorée, .59 : - Iposlhémi-
plégique et folie), 73.
Hérédité directe des maladies
mentales, par Sioli, 187.
Hémorrhagies-cutanées par auto-
suggestion, par llabille et
Ramadier, 54.
Hypnotisme (de 1'), par Jendras-
sik, 43.
'l'.lltLti LU : MATIÈRES. 427
Hystérie (traitement de l'atta-
que dl par Ruault, 99; -
(dans les troupes russes), par
Oseretkowsky, 265.
Hystériques (paralysies), I, 154;
- (amblyopie), par lIitier,
126; - monoplégie hystéri-
que guérie par suggestion,
par Voisin, 202.
Idiotie avec cachexie pachyder-
tttique, par l3ournevUle et liri-
eoti, 157, 192.
Incohérence, par Konrad, 81.
Inconnu, 256.
Injections sous-cutanées dans
les psychoses, 101 .
Inversion du sens génital, par
Kralft Ebing, 83.
Laryngés (troubles - dans les
atleclions du système nerveux
central), 119.
Lectures (troubles de la chez
les paralytiques généraux), 67.
Liquide céphalo-rachidien, 402.
Localisations méningées et encé-
phaliques des affections catar-
l'hales, par ltaymoud, 59.
Localisations cérébrales (fait t
pour servir à t'histoire des),
par llomen, 204.
Manie aiguë (avec troubles du
langage), par llitchell, G9; -
(chez un garçon de treize ans),
par Strahan, 7U.
Méningite suppurée, 57; - (tu-
berculeuse), 59 ; (cérébro-
spinale chronique), 60.
Mentaux (troubles dans les
affections cérébrales ordinai-
res, par Gasquet,'70.
Morpfnomanes (de la cocaïne
dans le sevrage des), 99.
Motilité volontaire (troubles de
la - dans la folie simple),
par lioller, 83.
Myélite subaigue des cornes an-
térieures, pur Dufourt, 57.
Myélite (chronique), 57; (dif-
fuse), par Raymond, 58.
Nécrologie : Gudden, 133.
Nerf accessoire de Willis (ori-
gine centrale du), 104.
Nerf médian(paralysies du), 226.
Névralgie de la cinquième paire
avec troubles trophiques, -1 14.
Névralgie des plexus lombaire et
sacré, d'origine traumatiqne,
par Tricard, 1 â.
Névrite (optique dans la sclé-
rose multilnculaire), Il` ? , 12 ? ;
(multiloculaire chez un al-
coolique), 416; - (au triju-
meau), I 1S ; muitiloculaire
avec athétose), 13 ; - (réné-
ralisée), 224; - (multiples),
225; - (multiloculaire chez
les buveurs), 229.
Névrose consécutive à un acci-
dent de chemin de fer, 113.
Nitrite d'amyle (influence du
- sur l'activité volontaire),
par Tippel, 92.
Nominations et promotions, 262.
Olives (couche intermédiaire
des), 103.
OphLhalmoplégie (et épicanthus),
222, 223.
Optiques (origine des nerfs), 40 1.
Oxyde de carbone ( troubles
nerveux à la suite de l'em-
poisonuement par 1'), 216.
l'achyméningite et paralysie gé-
nérale, par Savage, 73.
Paralysie (de Landry, guérie par
l'ergoline), 101 ; (par in-
jecliollssous-cutanées d'éther,
101 ; -(bulbaire avec sclérose
latérale), 112 ; - (cas de spi-
nale ascendante aiguë de Lan-
dry), par Soudeykine, 197; -
(diplitliéntrques), 223 - (sa-
turnine), 238; -(syphiliques),
409.
Paralysie générale (troubles de
la faculté de lire dans la), 67 ;
- (et sclérose latérale), 71 ;
- (et pachyméningile), 73;
- (et syphilis), 80, 86 ; - (lé-
sons épendymaires dans la),
. 428 TABLE DES MATIÈRES '
par Friedmanu , 80 ; (ré-
missions dans le cours de la),
par Larroque, 125 : - (histo-
logie pathologique), 403.
Paralysies hystériques, 1, 154.
Pendaison (tentative de suicide
par) ; - (amnésie rétroactive,
modifications du délire), 377.
Pédoncules cérébelleux, 107.
Persécution (idées de), 73.
Pinéale (tumeur de la glande),
228.
Playfair (traitement de), 253.
Poliomyélites, 122.
Porencéphalie et idiotie , par
Otto, 62.
Portes ouvertes (système des),
par Campbell, 72.
Possession de Jeanne Féry, 415.
Protubérance (lésions de la),
227.
Psychiatrie clinique, par Schuele,
414. ,
Psychoses (et érysipèle), 80 ;
(et grossesse), 81 ; (injec-
tions sous-cutanées dans les),
dans les simples), 406.
Pupilles (réaction des), 4 16.
Restiforme (corps), 108.
Rhéostat transportable, 98.
Roi de Bavière (mort du), 416.
Ruban de Reil (anatomie du),
102, 110.
Sclérose (latérale et paralysie
générale), par Savage, 71 ;
(latérale avec paralysie bul-
baire, 112; (systématique
combinée), 209 ; (latérale
amyotrophique), 226 ; - (com-
binée), 233 ; (multdocu-
laire), 236.
Sensibilité (forme nouvelle de
troubles de la dans les lé-
sions unilatérales du cerveau),
230.
Sitiophobes (échanges nutritif
chez les pendant les pério-
I des d'abstinence), par Tuczek,
63.
Société psychiatrique de Ber-
lin, 249.
Société de psychiatrie et de ma-
ladies nerveuses de Berlin, 4 10.
Société médico-psycliologique,
134, 24 ? 400.
Société de tempérance, 135.
Suggestion ( hémorrhagies cu-
tanées, par auto-), 54; - (mo-
noplégie hystérique, guérie
par), par A. Voisiu, 202.
Suicide dans les asiles d'aliénés,
par Hasse, 65 - (surveillance
relative aux tentatives de) ,
78. j
Suicidés (cerveaux des), 89.
Syphilis et paralysie générale,
80, 86.
Système nerveux central (ana-
tomie pathologique du), 217.
Tabes (combiné ataxo-spasmodi-
que ou sclérose postéro-laté-
rale de la moelle), par Gras-
set, 27 ; (anatomie patbo -
logique du - dorsal), ), r15;
(étiologie et symptomato-
logie du), 219 ; -(dorsal illu-
soire), 280. ,
Tétanos céphalique, 111.
Thomsen (anatomie pathologi i
que de la maladie de), 221
222.
Trépanation dans l'épilepsie
98. I
Tubercules quadrijumeaux (au
tomie des), 102. I
Tumeurs (syphilitiques des m'
ninges cérébrales), 231 ; -r.
(sarcome du lobe frontal), : 1.2 1 !
233, 235. I
Typhoïde (épidémie de fièvre -J
à l'asile d'Osiiabruck),. p
Ratai, 66. j
Visuel (des incitations et coinc
talions des divers district
homonymes du champ), 40
TABLE
DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS
Adamkiewicz, 204, 213, ? 19.
AILhaus. 225, 231, 241. y
l3abinshi, 4,154.
Balzer, 58.
Bechterew, 1 Oï, 107, 4 08.
Bernhardt, 112, 2111, 220, 222,
226.
131nswaner, 403.
Bourneville, 137.
Rréda. 37 7.
Bricon, 137.
Briand, 247, 249,401.
Brousse, 59.
C1JllIpbell, 72.
Charpentier, 414.
Christian, 246.
Darkschewitsch, 102, 904-f07.
Delasiauve, 246.
Demme, 411.
Deny, 57, 58, 59, fi0, 244.
Drapier, 128.
Dufour, 24G.
Dufourt, 57.
Dukoii, 40.
1.r1, 209, `> I 5, 224 .
Erlenmeyer, 98, 99, 204.
Erlitzky, 203.
Eulenburg, 212.'
Falk, 257.
Feilchenfeld, 228. z
Féré, 60, 99, 125, 126, 127,128,
z.
Fischer,6t.
Flescli, 89.
Folsam, 244.
Fox, 69.' - '
Freud, 403, : 4f0.
Freusber ? 406.
Friedroann, 80, 105.
Froenk'el, 244.
Gasket, 70.
Goldstein, 86, 104.
Grashey, 88,402, 406.
Grasset, 27.
Greene, 79. ·
Gudden, 401.
Guttstadt, 256.
Haddcn, 60.
lladlicli, 41-I.
Hallopeau, 59.
Ilardiue, 216, 241.
liasse, 63.
Hav, 60.
Ilebold, 64, 232.
Hecker, 98.
lleydeu, 100.
Ilirschber2, 4 12, 222.
llitier, 126.
Homen, 199, 225.
llorsley, 384.
Iraclidy, 98.
Jastrowitz, 257.
Jendrassik, 43, 228.
Juranville, 127.
Kéraval, 62, 63, 64, 65, 66, 67,
68,80, 81, 82, 83, 84, 85, 86,
87, 88, 89, 90, 91, 9°3, 98, 99.
100, 101, 102, 103, 104, 105,
106, -107, IOS, 409, 124, 210,
211, 21>, 213, ,.114,21, 216, ? 1 S, ? I 9, 220. 221,222.223,
224, : 2 5, 226, 227, 228, 229,
230, 232, 233,234, 236, 237. ? 38, 239, 243, 24 ? 257, 49 3, 4-I G.
430 0 TABLE DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS.
Knecht. 250, 253. '
Koch, 84.
Konrad, 81. "
Koschewnikofr, 226. ,...
Kowalew«ky,220, .'
Kraffl-Ebing, 8 ? 83.' '
Iirause, 4 19, 121. · -
Krauss, 215.
Lancereaux, 60.
Landerer, 80.
Larroqne, 1 ? i.
Lévy, 84. .
Lewis (Bevan), 73.
Lilienfeld, 44.6. 1
-Liman, 123. ? ?
J,issauer, 218. '. * - -
l,aehr, 2 : i3. "
f.om broso, 90.
Loewenfeld, ` ? 13, 22L
Mabille, 54.
. Mac Dowall, 73.
Magnan, 247.
Major, 75.
Mayser, 85.
Mendel, 86, 223.
merlin, 243.
111erzejewshy, 227.
nlitchell, 69.
lI1oeli, 11 G, 243.
Monakow, 102, 4,1p.
Mossdorf, 214.
Mueller, 90, 91. -
Musgrave-Clav (de), 68, 09, 'i0,
7f, 'i ? 13,74, 78,79, 80,.
Nasse, 101.
Neumann, 101.
Nickle, 78.
Nolhnagel, 414.
OEttinrer, 60.
Oppenheim, 114,111,119, 122,
.) 23.230, 237.
Oseretkowsky, 26.
Otto, 63.
Pallier, 69.
Pereltif 81.
Pflueger, 404.
Pilliet. 61, 242, 345.
Poehtzoeus, 236.
Ralihas, 67.
Ramadier, 54.
Ranke, 410.
Bannie, 79.
Ryh; 118.
Raymond, 38. .
Remhard; 80, 2,1 J.
Remak, 112. 116, 119, 212,224.
Ribalkitie,"209.
Ritti, 246.
Robertson, 68.
Roller, 83.
RosenLach, 227.
Ruault, 99. ^ ,
Rumpf, 217, 409.
Sa¡ ! l1e t, 4 6.
Saui3èr, 118 ?
Saric, 12 Í.
Savage, 71,73, 78.
Schlager, 85.
Srhmltz, 62.
Schuele, 414.
Schultze, 219. 238.
Schulz, · ! ? 9, 23r.
Sellas, 4,1
Slmlttewortli, 128.
Siemens, 92.
Siemerling, ·I d î, 4 ? 2.
Sioli, 87. Ci1
Skwortzoff ,209, 217.
Sceau. 233. 1
Sorgenfrey, 101.
Suudeylciue, 491.
Stein, 405.
Sttahan, 70.
Teissier, 37. >
Thomsen, 117, 14, 222, .
Tigges, 100. - \,
Tippel, 92. ' ';
Tr'lcard, H5..
Truc. 244. '
Tschisch (de), 51.
Tuczek, 63, - ' .
Tuiez 71.
Uhthoif, 112, 118, 223.
Vel-Ilenil, 59.
Vogelgesang. 233.
Doigt, 219.
Voisin (A.), 196.
Westphal, Il 2, 113, 124, 233.
Willett. 72.
EXPLICATION DES PLANCHES
PLANCHE PREMIÈRE
Fig. 1. - Coupe transversale 'le la moelle. (Intumesc. brachials.)
Fig. 2. Coupe transversale de la moelle (région lombaire).
Fig. 3. - Cellules nerveuses îles cornes antérieures de la substance
grise pu voie de dégénération pynen ! ;rire.
Fig. 4. Les vaisseaux et les cellules nerveuses îles cornes antérieures
de là substance grise.
a, Corne gauche, - b, Corne droite.
432 EXPLICATION DES PLANCHES.
PLANCHE II.
Face interne de. l'hémisphère gauche.
Se. c. ni., Scissure calloso-marginale.
Sc. s.p., Scissure sous-pariétale.
Se. p. i. Scissure perpendiculaire interne.
F. ca., Fissure calcarine.
Se. to.. 1r° scissure temporo-occipitale.
Se. to., 2' Scissure tem poro-occipitale,
F" 1re circonvolution frontale interne.
C. C. C., Circonvolution du corps calleux.
C. Ç., Corps calleux. ? P., Lohule paracentral.
1,. Q., Lobule lluadralalère ou avant-com.
( ? Coin.
'l'o. tr. circonvolution temhoro-occipitale.
Ta" 2' circonvolution temporo-occipitale.
'l ? 3 circonvolution temporale.
p. p. a., Pli pariéto-limhiyue antérieur.
p. P. p., Pli pariéto-lilllbique postérieur.
EXPLICATION DES PLANCHES. 433 3
PLANCHE [[1.
Face externe ou convexe de l'hémisphère gauche
et de l'hémisphère droit.
Se. S., Scissure de Sylvius dont les deux lèvres écartées laissent voir
les circonvolutions de l'insula (,) et les plis temporo-panétanx (¡).
il., Rameau antérieur ascendant de la scissure de Sylvius.
a,, Hameau antérieur ascendant supplémentaire de la mPme scis-
sure.
a,, Rameau antérieur horizontal de cette scissure.
1, Ligne marquant la démarcation entre la 3- frontale et la pariétale
ascendante.
S. lt , Sillon de Rolando.
Sc. p. e., Scissure perpendiculaire externe.
Sc. p. ? Scissure parallèle frontale.
Se ? s., Scissure frontale supérieure.
Se. f. i., Scissure frontale inférieure.
Se. ? Scissure interpariétale.
Se p., Scissure parallèle.
Se. t" 2e scissure temporale.
In. p., Incisure préoccipit,tle,
1). 1)., Pli de passage allant de la 2e .5 la 3e frontale gauche sur lequel
se trouve la petite tumeur t.
L. 0., Lobule orbitaire.
p" l" circonvolution frontale.
F, 2" circonvolution frontale.
F,, 3' circonvolution frontale.
F. A., Circonvolution frontale ascendante. ,
P. A., Circonvolution pariétale ascendante.
P" Pli pariétal supérieur.
'1, Pli pariétal inférieur.
P.3, Pli courbe.
L. oc., Lobe occipital.
7 ? l,e circonvolution temporale.
T,, 2'' circonvolution temporale.
T3, 3e circonvolution temporale.
t3t 4 EXPLICATION DES PLANCHES.
PLANCHE IV.
- Face interne de l'hémisphère droit.
Les lettres ont la même signification que celles de la planche Il, sauf
les suivantes :
e., Incisure ! m'Jovalaire,
d., Sillon parallèle à la scissure perpendiculaire interne allant se jeter
dans la fissure calcarine.
EXPLICATION PES PLANCHES. » - ' 1 MO
1 .. , '
. (' l
PLANCHE V. ' , "
Face externe ou convexe de l'hémisphère droit .
Les lettres ont la même signification que celles de la planche III, il 1'0 : \-
ception de.-) suivantes :
d., Sillon occipital antérieur.
b., Sillon intermédiaire au pli pariétal inférieur et au pli courbe.
c., Sillon divisant le piicombe. -
iUt : : Uf \..1.1. UbuiMiiti, .inp 4186