(1885) Archives de neurologie [Tome 09, n° 25-27] : revue mensuelle des maladies nerveuses et mentales
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(1885) Archives de neurologie [Tome 09, n° 25-27] : revue mensuelle des maladies nerveuses et mentales

ARCHIVES

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NEUROLOGIE

HVREUX, IMPRIMERIE CHAULES

ARCHIVES

DE rut

NEUROLOGIE

REVUE

DES MALADIES NERVEUSES ET MENTALES

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PERIMER, GAUTIE7, GÉ'R]-.NTLZ, GILLES DE 1.\ TOl IiETTI, r : 0311ta1 LT, GRASSET,

li[Cil111), JOFFItOY(%.), K : 111C (T.), Kt : I.LCit, Kl.lt a \' \ r. (P.), ICOJEV \ IKOE,

IANDOl Z1', LEGBA\11 DU SAULLE, M U'.NAN, JI111tET, lfaltaR110\ DE MOXTYEL.

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PIRRIILT, PIGNOL, PITRES, POPOFF, Itl6N.%Itl) il'.). REGNAR1) (A.),

inU ! E))(P.), SLGUS, SfiGUiN (E.-C.), SIK.OIISKY, TALAMON, TAUXOWSKY,

TEINTURIER (1 : .), TIIUL1É (H.), TROISIKII (I ! .), vicotiltolix lit.),

wlstv (J.).

Liétlacleto en chef : D0U11NEVII.I.E

Secrétaire de lu rédaction : Cil. 1 H tt

Bi'M ! '<m;<;Mr.LEmtA.

Tome IX. 1885.

Avec 2 planches cl si ti.1115 li, le\le.

PARIS

B U It 1,'j\ tJ.C DU rnocncs MÉDICAL 1.

I i, rue (les Carme*.

1885

Vol. JX. Janvier 1885. N" 25.

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

PATHOLOGIE NERVEUSE

COMMOTION DE LA MOELLE éPINIèRE

'ETUDE CLINIQUE ET CRITIQUE

Par les Drs L. DTJMÉNIL, professeur de clinique chirurgicate à l'École

de médecine, et PEfEL, chirurgien en chef de l'hospice général de

Rouen.

L'observation des traumatismes de la colonne verté-

brale a révélé depuis longtemps des faits d'interpréta-

tion difficile, faits dans lesquels des troubles fonction-

nels, quelquefois assez graves pour amener une mort

rapide, ne trouvaient pas leur explication dans des

lésions corrélatives, ou dans lesquels des symptômes en

apparence légers étaient suivis, à distance, de pertur-

bations graves.

Ces faits se sont multipliés à notre époque, avec les

causes capables de les produire, surtout avec les acci-

dents de chemins de fer; et l'on a été jusqu'à en

décrire, comme particulière à ces accidents, une

variété sous le nom de Railway spine. Les auteurs qui

ont le plus sérieusement étudié cette question, entre

Archives, t. IX. i

2 ' PATHOLOGIE NERVEUSE.

autres Erichsen, Page, se sont élevés avec raison

contre cette spécialisation, et se sont attachés à démon-

trer que s'il y avait là une cause plus fréquente et

plus puissante de lésions de la moelle épinière, elle

n'avait rien de spécial, et que tous les genres de trau-

~ matisme pouvaient produire les mêmes effets.

C'est cet ordre de faits qui constitue le terrain sur

lequel on a établi la doctrine de la commotion de la

moelle épinière, dont l'étude est encore fort obscure.

Son existence, admise sans contestation par des

hommes d'une autorité considérable à une époque

déjà éloignée de nous : Boyer, Ch. Bell, A. Cooper,

Abercrombie, Olivier (d'Angers), a été de nos jours

mise en doute par des considérations d'ordre anatomo-

physiologique, et surtout par l'insuffisance des moyens

de recherches d'anatomie pathologique dont dispo-

saient les premiers observateurs. Aussi, quoiqu'elle

ait été maintenue dans le cadre pathologique par la

plupart des auteurs modernes, ce n'est le plus souvent

que par tradition et sans l'appui de faits démonstratifs.

« On peut affirmer, dit Shaw ', que ce qui manque

surtout pour l'intelligence des cas ordinairement

rangés sous le titre de commotion de lamoelleépinière,

c'est un nombre suffisant d'autopsies. »

Nous aurons à examiner si nous ne possédons pas

en réalité des faits probants; mais constatons de suite

que l'étude des maladies de la moelle épinière, si

complètement refaite à notre époque, a conduit la

plupart des pathologistes à faire jouer un rôle impor-

tant à la commotion dans leur étiologie, de telle sorte

1 System of surgery, by Holmes, v. II, p. 378.

COMMOTION DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 3

que la question s'est étendue du domaine de la

chirurgie à celui de 'la pathologie médicale. C'est

ainsi que nous pouvons citer les noms de Charcot,

Vulpian, Leyden, Hammond, Jaccoud, W. Gull,

W. Savory, Bergmann, Lockhart Clarke, M. Donnel,

comme rattachant à la commotion des lésions consé-

cutives, telles que : l'ataxie, les amyotrophies.

Cette question a pris une très grande importance, à

notre époque, au point de vue de la médecine légale,

surtout depuis le travail d'Erichsen', dont les opinions

ont été admises par la plupart des pathologistes

anglais : M. Savory 2, Buzzard 3, M. Donnel *. Ce

courant n'a cependant pas été sans contradicteurs et

la doctrine de la commotion a été soumise par Page s

à une critique violente.

Il est certain que les premiers observateurs qui ont

décrit la commotion de la moelle épinière y ont

surtout été conduits par analogie avec la commotion

cérébrale; mais l'étude plus complète de l'anatomie et

de la physiologie des centres nerveux a montré des

différences notables dans les conditions statiques de

l'encéphale et de la moelle. Celle-ci étant entourée par

un espace que remplit le liquide céphalo-rachidien,

fixée au canal osseux par les racines des nerfs et les

ligaments dentelés, maintenue dans l'étui résistant que

lui forme la pie-mère, garantie en outre par les

1 On railway and othe;, injuries of the nervous System, 1866.

2 Effects of injuries of the spinal cord (St. Barlhotomew's Ilospital Rep.,

v. Y, p. 45).

3 On cases of injury from railway accidents (The Lancet, 1867, v. I,

p. 389).

l'lie Lancet 1883, v. II, p. 16.

5 Injuries of the spine and spinal cord, 1883.

le - PATHOLOGIE NERVEUSE.

parties molles extérieures, par les articulations des

vertèbres qui amortissent les chocs, ne paraît pas à

quelques-uns susceptible de ressentir un ébranlement

comme le cerveau. Page attache une grande importance

à ces considérations d'ordre aiiatoriio-I)hysiologique.

Buzzard pense, au contraire, que lorsqu'un choc

arrêtant brusquement le tronc a lieu, la moelle épinière

suit le mouvement acquis dans le canal qu'elle ne

remplit qu'en partie, et peut éprouver par ce fait une

véritable commotion; de sorte que ce qui est pour l'un

un obstacle devient pour l'autre une condition favo-

rable. Les auteurs du Compendium de chirurgie

avaient déjà émis une opinion semblable à celle de

Buzzard; mais au lieu de voir là une véritable commo-

tion, ils n'y trouvaient qu'un tiraillement exercé par

la résistance des racines des nerfs.

Nous n'attachons qu'une importance secondaire à

des considérations de cet ordre, et nous allons chercher,

dans l'examen des faits, des preuves plus convain-

cantes. Mais d'abord nous croyons devoir bien déter-

miner la signification que nous entendons donner à

l'expression de commotion de la moelle épinière. Avec

la plupart des auteurs, nous pensons qu'il n'y a pas

de commotion, en tant que simple ébranlement de

l'organe, sans modification dans sa structure intime,

mais nous ne pouvons admettre la manière de voir de

ceux qui, ainsi que Leyden, rangent sous le nom de

commotion tous les traumatismes dans lesquels le

canal rachidien n'a pas été lésé, quelles que soient les

altérations quesoncontenu a pu subir. Nous yrattachons

les cas seuls où le traumatisme a atteint la moelle,

sans y produire de lésions en foyer, et où les troubles

COMMOTION DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 5

fonctionnels immédiats ne sont pas en rapport avec

des altérations de structure apparentes.

Le point capital que les études modernes ont bien

mis en évidence, est l'influence des traumatismes sur

la production de lésions consécutives dont l'importance

dépasse de beaucoup celle des lésions primitives. Un

fait que j'ai observé et que je vais relater démontrera

cette vérité d'une manière plus frappante encore que

ceux qui ont été publiés jusqu'à ce jour. -

Observation. Marquct (Jean-Baptiste), âgé de soixante

ans, chef d'équipe, est apporté à l'Hôtel-Dieu, le 15 février

1881, au moment de la visite.

Il avait fait, la veille, une chute dans un bassin d'une pro-

fondeur de 1 mètre 50, et il était tombé verticalement la tète

la première. Il perdit complètement connaissance, et resta

environ une heure dans cet état.

A son entrée, nous constatons un peu de renversement de

la tète en arrière, mais sans rigidité ; les mouvements de la

tète s'exécutent assez facilement, mais provoquent de la dou-

leur dans le cou. Les membres supérieurs présentent quelques

mouvements d'ensemble, un peu plus étendus à gauche qu'à

droite. A droite, il peut à peine porter la main au niveau du

menton ; à gauche, il l'élève un peu plus, mais sans pouvoir

cependant atteindre le front. Ces mouvements sont exécutés

uniquement par les muscles des épaules, les avant-bras et les

mains n'y participent nullement.

La respiration est diaphragmatique, le côté gauche du tho-

rax est complètement immobile, la base droite du thorax pré-

sente des mouvements bornés d'expansion. La paralysie du

mouvement est complète aux membres inférieurs.

La sensibilité à l'épingle est conservée aux membres supé-

rieurs et à la partie supérieure du tronc jusqu'au niveau de

l'ombilic, suivant une ligne de niveau; elle est complètement

abolie au-dessous de cette ligne et sur toute l'étendue des

membres inférieurs. L'excitation de la plante des pieds avec

l'épingle provoque dans les deux membres inférieurs des mou-

vements réflexes assez étendus.

La déglutition est normale, la respiration et la circulation

6 PATHOLOGIE NERVEUSE.

sont régulières. Le malade perd ses matières fécales sans en

avoir conscience, et en est complètement souillé à son arrivée.

La vessie est distendue, et le cathétérisme donne environ un

litre d'urine limpide, un peu foncée, fortement acide. La

colonne vertébrale ne présente dans les régions lombaire et

dorsale ni déformation , ni douleur à la pression. On constate

une douleur vive au niveau de la sixième cervicale, mais sans

déformation appréciable. L'exploration parle pharynx ne révèle

rien de particulier.

Le malade est placé dans la position horizontale, la tète

reposant sur un petit coussin. Le cathétérisme est renouvelé

le soir.

2° jour. - Les mouvements des membres supérieurs sont

un peu plus étendus, mais toujours bornés aux muscles des

épaules; la respiration est diaphragmatique ; le membre infé-

rieur gauche présente quelques légers mouvements. La sen-

sibilité cutanée a reparu dans une zone de quatre travers de

doigts au-dessous de l'ombilic. Mouvements réflexes, comme

la veille. Rétention d'urine persistante ; urines claires et

acides ; pas d'évacuations alvines. Intelligence nette.

3° jour. -La sensibilité a reparu sur la verge et la moitié

droite du scrotum, mais non sur la moitié gauche. Il y adel'hy-

peresthésie cutanée sur le côté droit du thorax. Les mouvements

sont un peu plus étendus aux membres supérieurs ; du côté

gauche, il peut, avec difficulté, étendre et fléchir l'avant-bras

sur le bras. Du côté droit, ces mouvements font défaut. Il

commence à fléchir très légèrement les pieds et les orteils.

Les muscles adducteurs des cuisses sont contractés au point do

ne permettre que très difficilement l'écartemcnt des membres.

Le malade a pu uriner un peu dans le bassin, et a eu de l'in-

continence ; on retire cependant encore, avec la sonde, une

certaine quantité d'urine qui est neutre ou légèrement acide.

4e jour. Les mouvements sont les mêmes. Il se produit

de temps en temps dans les membres inférieurs des secousses

qui retentissent vers les lombes, et sont surtout appréciables

pendant le cathétérisme. La contracture des adducteurs

signalée la veille persiste. Les mouvements passifs provoquent

de vives douleurs. L'incontinence d'urine continue; mais il

en reste toujours un peu dans la vessie ; elle est neutre et un

peu louche.

Aux membres supérieurs, douleurs spontanées jusqu'au

COMMOTION DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 7

poignet à droite, jusqu'au métacarpe à gauche. Sur ces

membres, le toucher avec le doigt et la piqûre à l'épingle, le

pincement, éveillent les sensations normales. La pression sur

les masses musculaires provoque de la douleur des deux côtés.

Sur le thorax, sensibilité normale à la partie supérieure,

hyperesthésie à la partie inférieure. A l'abdomen, hyperes-

thésie cutanée jusqu'au pubis. Sensibilité normale aux organes

génitaux.

Sur la face antérieure de la cuisse et de la jambe droite, la

sensation du toucher existe ; mais le pincement de la peau et

la piqûre ne sont pas perçus. La pression des masses mus-

culaires n'est pas douloureuse, sur la face dorsale du pied, la

piqûre donne la sensation du toucher; anesthésie et analgésie

à la face plantaire. Au membre inférieur gauche le pincement

et la piqûre donnent une simple sensation d'attouchement;

cependant la piqûre est perçue à la face antérieure de la cuisse.

L'application d'un corps froid aux membres supérieurs

donne la sensation normale,; sur le thorax et l'abdomen le

froid et la chaleur ne donnent pas la sensation thermique,

mais le malade accuse une piqûre très douloureuse.

Sur la verge, le froid donne une sensation de chaud ; sur la

cuisse gauche une sensation de froid. La perception des tem-

pératures est très obscure aux jambes et nulle aux pieds.

5° jour. - L'hyperesthésie persiste à la moitié inférieure

du thorax ; le froid est perçu à l'abdomen ; sensibilité au tou-

cher obtuse à la plante des pieds ; la pointe de l'épingle y

donne une sensation de chatouillement. Miction et défécation

involontaires.

7° jour. Les irritations douloureuses sont perçues au

côté externe de la jambe gauche et à la face antérieure des

deux cuisses ; le chatouillement est perçu à la plante des pieds.

Les mouvements sont un peu plus étendus au membre supé-

rieur gauche, persistance de la contracture aux adducteurs des

cuisses, une miction volontaire.

Se jour. Les mouvements de flexion des pieds et d'exten-

sion des orteils sont plus accentués. La perception des tempé-

ratures existe aux membres inférieurs, mais un peu obtuse.

Inertie de la vessie. L'urine fraîche est neutre, mais elle prend

vite la réaction alcaline.

9° jour. Sentiment de pesanteur aux mains et aux jambes

quand il essaie de les soulever. Un peu plus de mobilité dans

8 . PATHOLOGIE NERVEUSE.

la jambe gauche que dans la jambe droite ; du côté gauche,

légère flexion du genou. Persistance des douleurs spontanées

qui ont même augmenté dans le bras droit ; persistance de

l'hyperesthésie au thorax et à l'abdomen ; elle s'est étendue à

la face antérieure des cuisses. Mouvements réflexes très accen-

tués.

10° jour. L'hyperesthésie est un peu diminuée au thorax

et à l'abdomen, elle est très prononcée à la face antérieure de

la cuisse droite, moins à la cuisse gauche. Les mouvements

continuent à s'accentuer dans le membre inférieur gauche.

L'urine fraîche est neutre ; un peu de diarrhée. Eau albu-

mineuse, sous-nitrate de bismuth.

1 le jour. Les douleurs sont plus fortes dans le membre

supérieur droit; elles arrachent par moments des gémissements

au malade, et le privent de sommeil. Les cuisses sont devenues

douloureuses comme les bras. Mouvements de flexion et d'ex-

tension de l'index droits, du pouce et de l'index gauches. La

pression sur la masse des triceps cruraux est douloureuse, sur-

tout à gauche. Il éprouve des douleurs vives quand on passe

le bassin sous les cuisses, mais il n'a pas la sensation du

froid. Urine neutre, les dernières portions un peu troubles.

12e jour. La quantité d'urine rendue dans les vingt-quatre

heures est de deux litres et demi.

13e jour. Trois litres d'urine.

1 fi- jour. Les mouvements volontaires s'accentuent

davantage dans les doigts ; extension légère de l'index et de

l'auriculaire droits. A gauche, les mouvements ont gagné en

étendue dans l'index et l'auriculaire, ils commencent à se

montrer dans le médius, l'annulaire et le pouce ; le malade

redresse un peu la main, mais sans pouvoir l'amener complè-

tement dans l'axe de l'avant-bras. Il existe aussi, de ce côté,

quelques légers mouvements de pronatiou et de supination.

L'avant-bras se fléchit et s'étend sur le bras, mais avec beaucoup

de lenteur et saus force. Du côté droit, le redressement de la

main, la pronation, l'extension de l'avant-bras sont nuls, la

flexion de l'avant-bras peut seule s'exécuter faiblement. Les

mouvements des membres inférieurs continuent à augmenter

d'étendue et de force; le redressement des orteils et la flexion

des pieds sont plus énergiques ; le malade arrive, avec beau-

coup d'efforts, à détacher le talon du lit.

La respiration est toujours exclusivement diaphragmatique-

COMMOTION DE LA. MOELLE ÉPINIÈRE. 9

Les douleurs profondes persistent aux membres supérieurs.

L'hyperesthésie a notablement diminué au thorax, la piqûre

n'y provoque que la sensation à peu près normale, mais

l'application d'un corps froid y est encore assez pénible;

l'hyperesthésie existe encore à l'abdomen, la piqûre et l'appli-

cation d'un corps froid y sont très douloureuses ; il en est de

même sur les cuisses. Aux deux jambes, la piqûre est perçue

d'une manière normale.

La vessie contient une petite quantité d'urine très purulente

et neutre.La totalité'des urines rendues dans les vingt-quatre

heures a dépassé trois litres. Ni sucre, ni albumine.

15° jour. - Pas de sensibilité à la pression sur la colonne

vertébrale, si ce n'est un peu au niveau des deux ou trois pre-

mières dorsales, pas de déformation. La contracture des

adducteurs de la cuisse persiste. Le cathétérisme de la veille

au soir n'a donné que quelques gouttes d'urine purulente.

Quantité des vingt-quatre heures, trois litres. Un peu de

diarrhée.

170 jour. - La diarrhée a cessé. Urine des vingt-quatre

heures, trois litres.

18° jour. Un peu d'extension de l'avant-bras sur le bras;

le malade leva très bien la jambe gauche et tend le genou.

La sensibilité des cuisses est redevenue normale. Aux jambes

le toucher est encore perçu un peu faiblemeut. Le froid est

bien perçu à l'abdomen et aux cuisses, la sensation y est

encore un peu douloureuse. Aux jambes, le froid ne donne

que la sensation du toucher.

Secousses dans les membres inférieurs, avec retentissement

dans les bras ; elles s'accompagnent d'une contraction qui a

pour effet de rapprocher les bras du tronc.

19° jour. - IIyperesthésic des muscles des membres infé-

rieurs, surtout à la cuisse droite. 0 gr. 02 d'extrait thébaïque

le soir.

22e jour. - Moins de douleurs depuis l'administration de

l'opium. Les mouvements gagnent sensiblement en étendue :

il peut élever le bras gauche à la hauteur de la tête, et porte la

main de ce côté à la poignée de la corde de son lit; l'extension

des doigts est complète des deux côtés quoique plus faible à

droite et il peut amener la main dans l'axe de l'avant-bras. Il

commence à exécuter quelques mouvements très lents et très

bornés d'extension de l'avant-bras droit.

10 PATHOLOGIE NERVEUSE.

Il soulève à une assez grande hauteur le membre inférieur

gauche, mais il ne peut que détacher avec peine le talon droit

du lit.

Disparition presque complète de l'hyperesthésie cutanée,

Encore quelques troubles dans les sensations thermiques ; un

corps chaud appliqué sur le côté droit du thorax donne une

sensation de froid. Un corps chaud ou froid ne donne, à la

face externe des jambes, qu'une sensation de toucher. Il

perçoit encore confusément la piqûre de l'épingle à la face

externe des jambes. L'urine est purulente et alcaline; la quan-

tité des vingt-quatre heures reste à trois litres.

Il sent le besoin de la défécation et fait des efforts pour le

satisfaire.

Il mange deux portions. Acide benzoïque, injection vésicale

d'acide borique au centième.

26e jour. Les urines des vingt-quatre heures ne repré-

sentent plus que deux litres.

299 jour. - L'urine examinée à la sortie de la sonde est

légèrement acide,

33° jour. La sensibilité tactile est à peu près complète-

ment revenue partout. La sensibilité thermique est encore

obtuse aux membres inférieurs.

39° jour. - Urines beaucoup moins troubles. Exploration

électrique au moyen de l'appareil à induction de Gaiffe, avec

les éponges mouillées; appareil gradué au maximum.

Cuisse droite, région antérieure, le courant est senti ; mais il

ne provoque pas de contractions.

Même résultat à la cuisse gauche.

Jambe droite : il sent faiblement le courant à la région

antérieure, le jambier antérieur se contracte, mais faiblement

et pas assez pour imprimer des mouvements au pied ; l'exten-

seur commun ne se contracte pas; la sensibilité est faible à la

région péronière, la contraction des muscles y est assez forte

pour porter le pied dans l'abduction.

- A la région postérieure la sensibilité est plus développée, les

jumeaux se contractent faiblement. L'électrisation du nerf

musculo-cutané ne produit rien de plus que l'électrisation

directe des muscles.

Jambe gauche : La sensibilité électrique est obtuse comme

à droite; la contractilité est très faible dans le jambier

antérieur, nulle dans l'extenseur commun ; i la région péro-

COMMOTION DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. il i

nière, même résultat que du côté droit. Contractilité plus déve-

loppée dans les jumeaux.

Membre supérieur droit : à la région antérieure de l'avant-

bras les muscles se contractent assez fortement ; absence de

contractions aux régions thénar, hypothénar et interosseuso.Le

long supinateur se contracte bien. Les muscles de la région

postérieure se contractent peu. Contraction énergique dans le

biceps, assez forte dans le triceps.

Membre supérieur gauche : contractions énergiques aux

régions thénar et hypothénar, faibles dans les interosseux.

Les muscles de la région antérieure de l'avant-bras, le long

supinateur se contractent bien.

46° jour.- La faradisation produit du côté droit des contrac-

tions énergiques dans le vaste interne, plus faibles mais bien

appréciables dans le vaste externe et le droit antérieur. Du côté

gauche, contractions énergiques dans le vaste interne; le vaste

externe se contracte plus fortement qu'à droite, il en est de

même du droit antérieur.

Le jambier antérieur et l'extenseur commun se contractent

énergiquement des deux côtés.

Aux membres supérieurs la contractilité est bien développée

aux régions thénar et hypothénar, interosseuses antérieures, et

postérieures des avant-bras, plus cependant à gauche qu'à

droite.

Pris, la veille, d'une douleur vive en cercle autour du bassin

et de la racine des cuisses, en même temps que de raideur

dans les jambes et de quelques frissons. Température à 39°

hier soir.

Ce matin, persistance de la raideur des jambes ; les mouve-

ments des membres inférieurs provoquent des douleurs dans

le bassin et au haut des cuisses, avec une sensation très grande

de pesanteur.

Le talon droit est, par intervalles, le siège de douleurs lanci-

nantes qui déterminent des contractions involontaires. Les

membres supérieurs ne présentent rien de particulier, sauf un

retentissement douloureux dans le bras droit quand il essaie

de soulever la jambe. La sensation de cercle douloureux

existe, aujourd'hui, au milieu de la région épigastrique.

L'application du froid à la cuisse gauche et à l'abdomen pro-

duit une sensation douloureuse; elle n'est pas perçue à la

12 1-) PATHOLOGIE NERVEUSE.

jambe droite, elle l'est à la cuisse droite et légèrement à la

jambe gauche. Température du matin 31 ? du soir, 36.

49° jour. Diminution très sensible des douleurs. Tempé-

rature du soir 37°,6.

50° jour. Disparition complète des douleurs.

52° jour.- Impossibilité de fléchir complètement les doigts;

douleurs très vives dans les articulations phalangiennes, dans

les mouvements passifs, plus à droite qu'à gauche. L'attitude

de la main est la demi-flexion dans les articulations méta-

carpo-phalangionncs avec extension dans les articulations pha-

langiennes.

53° jour. La veille au soir, retour des douleurs autour du

bassin et de la racine des cuisses avec mouvement fébrile

et frissons. Température à 3cJ°,4..

Ce matin, la raideur des membres inférieurs est plus pro-

noncée, les mouvements plus limités. La pression sur la partie

inférieure de la crête épineuse est douloureuse. Le contact d'un

corps froid est douloureux aux cuisses et sur l'abdomen; les

corps chauds ne provoquent pas la même sensation pénible.

Température du matin, 38°; du soir, 38°,7.

56° jour. La raideur des membres a augmenté et les

mouvements sont encore plus limités, lout en restant un peu

plus étendus à gauche. Le malade ne peut plus soulever les

jambes, ni se servir de ses mains ; il se meut tout d'une pièce.

Il accuse des fourmillements dans les mains. llaperdu l'appétit.

Les urines sont acides, fortement colorées.

72° jour. Sensation de chaleur très pénible dans les par-

ties inférieures du corps à partir de l'hypogastre, les draps du

lit paraissent brûlants. Le malade prend depuis cinq à six

jours un gramme d'iodure de potassium et il croit que cette

sensation de chaleur, qui existait du reste déjà auparavant, a

augmenté depuis ce moment. Deux cautérisations ponctuées

ont été pratiquées, la dernière il y a trois jours.

92° jour. - inouvelle apparition de douleurs, avec sentiment

de constriction autour de la racine des membres inférieurs et

'du bassin. Ces accidents ont débuté vers deux heures du matin

et ont eu leur maximum à quatre heures; ils s'accompa-

gnèrent d'un accès d'oppression très intense ; le malade ne

pouvait respirer et croyait, dit-il, qu'il allait mourir. A huit

heures du matin, la température est à 40°,3, le soir à 38°,3.

COMMOTION DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 13

93° jour. Les accidents de la veille ont disparu, le malade

est revenu à son état antérieur ; il y a cependant plus de

raideur dans les membres.

98° jour. Nouvel accès de fièvre avec frissons répétés ; la

sensation de cercle autour du bassin n'existe plus. Tempéra-

ture du matin 39°,1; du soir, 37°,4.

103° jour. Nouvel accès, sans oppression. Le malade ne

peut imprimer le moindre mouvement aux bras ni aux jambes.

Température du soir, 39°,la.

104° jour. - Même état. Dépôt purulent dans l'urine. Ce

liquide, examiné immédiatement à sa sortie de la vessie, est

légèrement alcalin. Température du matin, 390,6; du soir, 40°.

On reprend les injections vésicales de solution borique au

centième.

105° jour. Un corps froid, promené sur la face antérieure

des cuisses, sur l'abdomen et la poitrine détermine de la dou-

leur en même temps que la sensation du froid est perçue.

Température du matin et du soir, 38°, 1.

120° jour. Lé matin, rien de particulier n'avait fixé notre

attention et nous avions pratiqué une série de cautérisations

ponctuées de chaque côté de la crête épineuse. Le soir, dou-

leurs dans toute la région abdominale, les muscles droits sont

fortement contractures et la pression à leur niveau est très

douloureuse. Les bras sont fixés au tronc et le malade pousse

des gémissements lorsqu'on cherche à les porter dans l'abduc-

tion ; il en est de même lorsqu'on cherche à étendre les avant-

bras qui sont dans une demi-flexion. Impossibilité pour le

malade de soulever ses jambes, les mouvements passifs y sont

très douloureux. Sensation de chaleur brûlante à la peau sur

toute la surface du corps. L'injection d'un liquide dans l'esto-

mac détermine une sensation de froid pénible au creux épigas-

trique, et un sentiment de plénitude douloureuse qui persiste

longtemps. Température du soir, 40°,1.

121° jour. Même état, la douleur est très vive au creux

épigastrique. Température, matin, 38°,7; soir, 40',2.

Injection hypodermique do six milligrammes de morphine.

122° jour. Persistance de la contracture ; douleur épigas-

trique moins vive. Température du matin, 40°,IN; du soir, 40°, 1.

Le malade prend, depuis cinq jours,' quatre centigrammes

d'extrait de jusquiame ; la dose est portée à six centi-

grammes.

14 PATHOLOGIE NERVEUSE.

123° jour. Disparition delà contracture dans les muscles

droits de l'abdomen. Même impossibilité d'imprimer des mou-

vements volontaires aux membres inférieurs ; mouvements

très limités aux bras et aux avant-bras, surtout à droite.

L'examen de la contractilité électrique des muscles montre

qu'elle est considérablement diminuée et pour ainsi dire nulle,

excepté à la région postérieure de l'avant-bras où la faradisa-

tion provoque des contractions d'une intensité presque nor-

male. Les douleurs sont moins vives. Température du matin,

38 ? a; du soir, 38°,9.

124° jour. Diminution des douleurs et disparition à peu

près complète de la sensation de chaleur à la peau. Tempéra-

ture du matin, 37°, du soir, 38 ? 1..

125° jour. - Quelques mouvements volontaires dans les

membres supérieurs, surtout à gauche. Température du ma-

tin, 37°,4.; du soir, 370,9.

126° jour. Température du matin, 36°,9 ; du soir, 38°,i.

1271 jour. - Le malade ne souffre plus; mais il conserve

encore un léger sentiment de chaleur dans les viscères abdo-

minaux. Il mangeait trois portions avant ce dernier accès, il

n'en mange pas une actuellement. Température du soir, 37°,3.

128° jour. Température du soir, 2°,8.

129° jour. Frissons à six heures du matin. La sensation

de chaleur vive dans la cavité abdominale a fait place à une

sensation de froid. Température du matin, 40°. Le soir, l'accès

est terminé; température, 37°, 9.

131° jour. Température, soir, 39°,3.

132° jour. Température, soir, 37o,le.

133° jour. - Escharre large comme une pièce de deux

francs sur la crête sacrée.

144° jour. Le malade qui, depuis le dernier accès, n'était

pas revenu à un état aussi calme qu'après les accès précédents,

a été pris, aujourd'hui, à deux heures du soir, d'un nouvel

accès fébrile avec tremblement très accusé des membres supé-

rieurs. Il accuse, à la face postérieure du tronc, une sensation

de froid humide comme s'il était plongé dans de l'eau froide.

A cinq heures et demie, température 38 ? a.

145° jour. - Encore un peu de malaise dans l'après-midi.

Température du soir, 37°,8. 8.

146° jour. -Pris à une heure du soir d'un accès fébrile avec

COMMOTION DE LA. MOELLE ÉPINIÈRE. 15

tremblement violent des membres supérieurs. Douleurs vives

à la face antérieure des bras ; contracture qui maintient les

avant-bras dans la demi-flexion et les applique fortement

contre la base du thorax, sans que le malade puisse les chan-

ger de place. Température, soir, 40°, 1.

147° jour.- Température, soir, 39°.

Les jours suivants, l'escharre s'étend en surface et en pro-

fondeur avec suppuration abondante, il s'en produit une autre

au talon droit et celle-ci gagne le bord externe du pied. On

pratique des lavages phéniqués. Les frissons se renouvellent

plus fréquemment et sont plus forts ; il se manifeste de l'op-

pression.

160° jour. Les points où l'urinoir touche la face inférieure

de la verge et la partie antérieure du scrotum présentent sept

ou huit ulcérations. Escharre en arrière de la tète du péroné

droit. Suppuration très abondante à la région sacrée.

16'a° jour. Les escharres de la région sacrée continuent

leur progrès et on constate la dénudation d'une partie du

sacrum.

165° jour. La voix est complètement éteinte. Le cha-

touillement de la plante des pieds provoque encore des con-

tractions réflexes dans les muscles de la cuisse.

167° jour. - Au moment de la visite, le malade est pris

d'un frisson avec tremblement violent des membres ; il accuse

la sensation d'un froid intense. La température est à 38°,9.

Depuis le 147° jour la température s'était maintenue entre

38°,1 et 39°,8, généralement plus élevée d'un degré environ le

soir.

1680 jour. -Le frisson de la veille, après avoir duré trois

quarts d'heure, cessa pour reparaître à trois reprises. Le

malade est pâle et faible, la voix est complètement éteinte.

Température soir, 36°. Les jours suivants, elle oscille de 36°,9 9

à 38°,3, se tenant généralement à 37° et quelques dixièmes. La

faiblesse augmente et il succombe le 197° jour.

Autopsie le 12 septembre, vingt-quatre heures après la

mort.

L'exploration de la colonne vertébrale par sa partie anté-

rieure, après ouverture des cavités, ne fait reconnaître aucune

anomalie. Les méninges sont saines. La moelle est ferme, un

peu congestionnée à la région cervicale. A la partie supérieure

16 PATHOLOGIE NERVEUSE.

de la région dorsale, la coupe présente une dépression au

niveau de la corne antérieure droite.

Les poumons sont sains ; le coeur petit présente quelques

taches laiteuses ; pas de lésions valvulaires.

Le foie est volumineux, brun clair, d'aspect gras. Les

bronches ne donnent pas la réaction de la matière amyloïde

avec l'iode.

La rate, de volume normal, estdiffluente.

Les reins sont atteints de pyélo-néphrite légère. Les cavités

contiennent plusieurs calculs. La vessie présente les lésions

de la cystite chronique, teinte brune de la muqueuse, colonnes

charnues.

Examen microscopique. Durcissement et préparation de

la moelle. La moelle, coupée par fragments de deux centi-

mètres environ, est mise immédiatement dans l'alcool ordi-

naire. Une partie de la moelle fut laissée dans l'alcool ; une

autre partie, composée de fragments pris dans les différentes

régions, fut, après séjour pendant vingt-quatre heures dans

l'alcool, soumise à l'action de l'acide chromique, suivant le

procédé habituel. Nous eûmes ainsi des portions de moelle

durcie par l'alcool seul les autres par l'alcool et l'acide chro-

mique.

Lps préparations ont été colorées au carmin, éclaircies par

l'essence ds girofle et montées dans le baume de Canada dis-

sous dans le chloroforme.

Outre les lésions que nous décrirons bientôt, et qui existent

aussi bien sur les coupes durcies par l'alcool que sur celles

soumises ensuite à l'action de l'acide chromique, il est un

aspect que nous devons signaler et que nous n'avons constaté

que dans les coupes faites sur la moelle durcie dans l'alcool

exclusivement : nous voulons parler de la présence de nom-

breuses cellules embryonnaires disséminées soit dans la subs-

tance grise soit dans la substance blanche le long des vais-

seaux. Cette légère infiltration embryonnaire fut considérée

tout d'abord comme indiquant un processus inflammatoire; ne

l'ayant pas retrouvée sur les coupes delà même moelle ayant

subi l'action de l'acide chromique, nous nous procurâmes une

moelle saine d'enfant de onze ans et après l'avoir durcie dans

l'alcool exclusivement, nous constatâmes dans cette moelle

ainsi durcie la même infiltration embryonnaire. Cette diffé-

rence d'aspect tient-elle au mode de durcissement ? Cela est

COMMOTION DE LA. MOELLE ÉPINIÈRE. 17

probable; aussi ne faisons-nous que mentionner cette infiltra-

tion embryonnaire sans la considérer dans le cas actuel comme

réellement pathologique.

Lésions constatées. Les lésions suivantes ont été cons-

tatées sur les préparations, quel qu'ait été le mode de durcis-

sement :

1° Région cervicale. -Légère sclérose des cordons latéraux

(faisceau pyramidal croisé). La coupe, examinée par trans-

parence à I'oeil nu, présente en ce point une coloration rosée

plus marquée; avec un faible grossissement (t-0 diamètres),

on reconnaît une vascularisation plus grande de cette région;

quelques vaisseaux, coupés perpendiculairement à leur direc-

tion, permettent de voir leur gaine lymphatique distendue et

contenant quelques leucocytes. Les faisceaux du tissu con-

jonctif y sont plus épais ; ces travées conjonctives présentent

un état grenu particulier qui n'existe pas dans les autres

parties de la substance blanche ; de place en place, au point

d'intersection des faisceaux conjonctifs, existent des cellules

conjonctives de la névroglie (cellules araignées). Les tubes ner-

veux présentent aussi quelques modifications ; plusieurs sont

vides ; sur quelques-uns on constate une tuméfaction du

cylindre-axe.

Les cellules nerveuses de la substance grise sont nombreuses,

présentent pour la plupart leur forme et leurs prolongements

habituels; quelques-unes cependant ne sont qu'incomplète-

ment colorées en rose et présentent une partie jaune, granu-

leuse.

2° Région dorsale. Sclérose du cordon latéral, présentant

les mêmes caractères que dans la région cervicale. Les cellules

nerveuses sont plus altérées; elles sont rares, déformées; plu-

sieurs sont arrondies, granuleuses, sans prolongements, et

complètement jaunes, comme en voie de disparition.

3° Région lombaire. Légère sclérose du cordon latéral ;

les cellules nerveuses grosses, nombreuses, sont saines.

En résumé, les lésions constatées sont les suivantes :

lo Sclérose commençante du faisceau latéral;

2° Dégénération granuleuse des cellules motrices de la subs-

tance grise, surtout dans la région dorsale.

(A suivre.)

Archives, t. )X. 2

is PATHOLOGIE NERVEUSE.

EXPLICATION DE LA PLANCHE I.

FIG. 1. Coupe transversale de la moelle (région dorsale). Schéma

indiquant la région envahie par la sclérose qui occupe le faisceau

pyramidal croisé A des deux côtés.

(Contrairement à l'apparence que donne le dessin dans la région sclé-

rosée les travées conjonctives principales sont plus larges, moins délicates

que dans les autres parties de la substance blanche ; la vascularisation

y est plus grande et se traduit par la présence de nombreux orifices

vasculaires résultant de la section transversale ou oblique des vaisseaux. )

FIG. 2. Un point de la région sclérosée \u avec un grossissement

de 300 diamètres environ (ocul. 2, Nachet. Obj. 3, Verick).

a, a, Tubes nerveux d'inégales grosseurs, dont le cylindre-axe est tantôt

petit, tantôt comme tuméfié.

d, Tubes nerveux vides.

b, Cellule de la névroglie, sans noyau; à prolongements multiples.

c, Substance vaguement fibrillaire et pointillée, interposée entre les

tubes nerveux (sclérose au début) qui se trouvent ainsi plus éloignés les

uns des autres.

FiG. 3. - Cellules de la névroglie dessinées isolément (gross. obj. 7, î,

Verick. Ocul. 2 Nachet).

La plupart de ces cellules sont sans noyau; elles sont nombreuses,

disséminées; situées au point de jonction de deux ou trois faisceaux de tissu

conjonctif, elles présentent des prolongements multiples, déliées leur

présence constitue un des caractères les plus évidents de la lésion du

faisceau pyramidal croisé.

Fi(;. 4.- Celliles nerveuses des cornes antérieures de la substance grise

en voie de dégénération granulo-graisseuse. Le protoplasma de quelques

cellules est jaune, granuleux. Leurs prolongements ont disparu dans

quelques points, il ne reste à la place de la cellule qu'un amas de granu-

lationsjaunâtres.

CLINIQUE NERVEUSE

ÉTUDE SUR UNE AFFECTION NERVEUSE CARACTÉRISÉE PAR

DE L'INCOORDINATION MOTRICE ACCOMPAGNÉE D'ÉCHO-

LALIEI ET DE COPROLALIE2 (Jumping, Lataii, lllrnacax);

Par GILLES DE LA TOURETTE.

Bouteille, qui, à l'âge de quatre-vingts ans, profitant

de l'expérience qu'il avait acquise par de longues années

de pratique, écrivait son Traité de la Chorée , s'écriait

dans son Avant-propos 3 : « Tout est extraordinaire dans

cette maladie : son nom est ridicule, ses symptômes

singuliers, son caractère équivoque, sa cause incon-

nue, son traitement problématique. De graves auteurs

ont douté de son existence, d'autres l'ont crue simulée,

quelques-uns l'ont réputée surnaturelle ». Il est cer-

tain, qu'à l'époque où Bouteille publiait son livre jus-

tement apprécié, les affections nerveuses dans lesquelles

l'incoordination motrice était le symptôme prédominant

se trouvaient fort mal différenciées les unes des autres,

et pour la plupart englobées sous le terme générique de

Chorée danse), qui, à proprement parler, ne pré-

juge guère de la nature de la maladie. Mais, depuis

1 De hU, écho, et \où.û, je parle.

2 De ? o7rooç, ordure, et a),i, je parle. Nous avions choisi, d'abord le

terme de eschrolalie (de xiQ%oô5, indécent, et ),a),w, je parle) ; mais il

nous a semblé préférable d'employer le mot coprolalie, qui, quoique moins

exact, a l'avantage d'être mieux connu.

3 Bouteille. Traité de la chorée, iSI8. Avant-propos.

20 CLINIQUE NERVEUSE.

1818, de grands progrès ont été accomplis et la chorée a

vu tous les jours diminuer son territoire pathologique en

assistant au perfectionnement de la nosographie ner-

veuse. C'est ce que pressentait du reste le vieil auteur

français, lorsqu'il disait' : « Je donne le nom de

pseudo-claorées ou chorées fausses à différentes affections

nerveuses, spasmodiques,convulsives, hystériques, etc.,

qui ne présentent pas les symptômes caractéristiques

de la chorée vraie, et ri ont de ressemblance avec elle

que par des agitations involontaires des différentes par-

ties du corps et par des convulsions grimacières du

visage ». Si, à la suite du travail de Bouteille, on avait

bien voulu tenir compte de la dernière partie de cette

ancienne définition, il est fort probable que l'effon-

drement du groupe des chorées serait encore beau-

coup plus complet qu'il ne l'est aujourd'hui. C'est de

ce complexus que serait sortie la maladie que nous

allons étudier.

Son histoire est brève, si tant est qu'elle existe, car

nousn'en connaissons aucune description au vrai sens

du mot ; elle peut se diviser en deux périodes, toutes

deux de bien minime importance.

En 1825, Itard' publiait une observation qui était

intégralement rapportée par Roth en 1850, et par

Sandras en 1851'. Cette observation que l'on trouvera

1 Bouteille. - Traité de la chorée, 1 SIS, 3e partie, p. 329.

1 Itard. Mémoire sur quelques fonctions involontaires des appareils

de la locomotion, de la préhension et delà voix (Archiv. dézc, dc znéd..18 ? 5,

t. VIII, p. 403.

3 Roth. Histoire de la musculation irrésistible ou de la chorée anor-

male. Paris, 1850.

* Sandras. Traité pratique des maladies nerveuses, t. II, p. 3t.

Paris, 1851.

DE l'incoordination motrice 21

en tète de celles que nous avons recueillies est extrê-

mement concluante et d'autant plus intéressante que

la malade qui en fait l'objet a vécu jusqu'en 1884, et a

été vue par M. le professeur Charcot, qui a contrôlé le

diagnostic rétrospectif. Pas un des trois auteurs pré-

cédents ne songea à la rapprocher de cas similaires, pas

plus qu'à la différencier des autres affections choréi-

formes. Et même, Sandras, le dernier des trois, qui

considère cette observation comme un cas de chorée,

embrouille encore la question en la rapprochant d'un

cas d'aphasie avec hémiplégie droite et hémichorée,

puisqu'il ajoute : « J'en ai observé moi-même un fait

fort remarquable sous plus d'un rapport dont il me

paraît très utile de consigner ici les détails ».

Il faut arriver à Trousseau, pour trouver pour la

première fois une mention, plutôt même qu'une des-

cription très succincte, de l'affection que nous allons

décrire; et encore la place-t-il dans son chapitre inti-

tulé : Des diverses espèces de chorée. Qu'il nous soit per-

mis dès maintenant de citer ce passage de la Clinique

médicale' : « Ces tics sont en quelques cas accompa-

gnés d'un cri, d'un éclat de voix plus ou moins bruyant

très caractéristiques. Et à ce propos, je rappellerai le

fait que j'ai bien des fois raconté d'un de mes anciens

camarades de lycée que j'avais reconnu, à vingt ans

d'intervalle, pendant qu'il marchait derrière moi, à

l'espèce d'aboiement que je lui avais entendu pousser

autrefois alors que nous faisions ensemble nos études.

Ce cri, ce jappement, cet éclat de voix, véritables cho-

rées laryngées ou diaplcrcrmatilzles peuvent constituer

1 Trousseau. Clinique médicale de l'Hilel-Dieil, t. II, Se édit.,

p. 267-268.

22 CLINIQUE NERVEUSE.

tout le tic. Ce sont, non seulementun éclat de voix, un

cri étrange, c'est encore une tendance singulière à ré-

péter toujours le même mot, la même exclamation et

même l'individu profère à haute voix des mots qu'il

voudrait bien retenir. Ces tics sont bien souvent héré-

ditaires ».

Chorées laryngées, chorées diaphragmatiques, l'in-

terprétation fausse touche de trop près une description

qui, nous le verrons, est exacte sur bien des points.

Les observations de Trousseau passèrent inaperçues;

elles furent toutefois reproduites sans commentaires,

en 1879, par Handfield Jones'; mais elles n'inspirèrent

aucunes recherches.

La deuxième période est de date toute récente et

plus féconde que la première, bien que la sanction d'un

travail d'ensemble fasse défaut aux observations éparses

qu'elle comprend. Les auteurs qu'on y rencontre, soit

qu'ils n'aient eu en leur possession que des documents

insuffisants, soit qu'ils n'aient même pas eu qualité-

n'étant pas médecins pour conclure, ont donné des

faits, mais n'ont pas constitué une maladie.

Le premier d'entre eux, Beard (de NewYorlc),pré-

sentait à l'Association neurologique, en 1880, un

mémoire intitulé : ci Les sauteurs du Maine », dans

lequel il rapportait des observations concernant des

individus qui bien évidemment étaient atteints de l'af-

1 H. Jones. -Studies on funrtious of ? tert)0 : M system, 187°.

2 Le mémoire de Beard a été publié dans le x Journal of nervous and

mental diseuses, vol. VII, p. 487 ». Nous en avons donné la traduction

dans le numéro 5 du vol. Il des Archives de Neurologie, 1881, p. 146-150.

Quant à l'assertion de Beard, relativement aux .Malais, et qu'il dit

avoir puisé dans le Gondon médical Record, nous n'avons trouvé dans ce

journal que la mention du premier mémoire de Beard : numéro du

15 août 1878, p. 368.

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 23

fection que nous allons décrire. L'auteur annonçait

en outre, dans sa communication, qu'il existait de

semblables cas parmi les Malais.

C'est ce que nous apprenait en 1883, M. 0. Brien ',

qui, quoique n'étant pas médecin, a bien vu et bien

observé les faits qu'il rapporte dans le Journal de la

Société asiatique.

Enfin, au mois de mars 1884, la Medicina contem-

poranea2, publiait une note de M. Hammond (de New-

York), dans laquelle cet auteur rapportait, d'après le

témoignage d'officiers de la flotte américaine, une

observation concluante quoiqu'incomplète de cette

affection.

Nous avons nous-même, sur les conseils de notre

maître, M. le professeur Charcot, analysé les travaux

des trois précédents auteurs et montré, en juillet 1884',

que le Jumping du Hfaine, le Latah de Malaisie, et le

Myriachit observé par les officiers américains en Sibé-

rie n'étaient qu'une seule et même affection. Nous

donnions en même temps le résumé d'un cas-type que

nous observions alors à la Salpêtrière; à celui-ci nous

en ajouterons aujourd'hui sept autres, qui, joints à ceux

observés par les précédents auteurs, nous fourniront

une base solide pour l'étude d'une maladie dont on a

pu rapporter des observations, mais que l'on n'a pas

encore songé à décrire'.»

1 Journal o/'<AeS/)-a ! 7 ? brandi of the royal Asiatic Society. Singapnre,

juin 1883. Nous devons la communication de ce document à l'obligeance

de M. de Quatrefaôes. 0

2 Hammoiid. - Myriachit. Nuova malattia del systema nervoso. La

llerliciua cou7emporaraen, mars 98;4, p. 126-127.

3 Gilles delà Tourette. Archives de Neurologie, juillet 1884, vol. VIII,

11, 22, p. 68-74. Jumping, Latah, Aly2,iachil.

' Nous ne croons pas qu'il existe d'autres documents importants sur

2t. le CLINIQUE NERVEUSE.

013SLIRVITION' I.

Première partie : Itard : Mémoire sur quelques fonctions involon-

tcziz'es des appareils de lcz locomotiozz, de lu Pz·é7zezzsion et de lcz

voix. (Arch. gén. de médecine 4 S' ? , t. VIII, p. 403.) Deuxième

partie inédite. (Charcol).

111m° de D..., actuellement âgée de vingt-six ans, fut, à l'âge

de sept ans, prise de contractions convulsives dans les muscles

des mains et des bras, qui se manifestaient surtout dans les

moments où cette enfant s'exerçait à écrire, écartaient brus-

quement sa main des caractères qu'elle traçait. Après cet

écart, les mouvements de sa main devenaient de nouveau

réguliers et soumis à la volonté, jusqu'à ce qu'un autre sou-

bresaut interrompit de nouveau le travail de la main. On ne

vit d'abord en cela que de petits tours de vivacité ou d'espiè-

glerie, qui, se repétant de plus en plus, devinrent des sujets

de réprimande et de punition. Mais bientôt, on acquit la certi-

tude que ces mouvements étaient involontaires et convulsifs

et on vit y participer les muscles des épaules, du cou et de la

face. Il en résulta des contorsions et des grimaces extraordi-

naires. La maladie fit encore des progrès, et le spasme s'étant

propagé aux organes de la voix et de la parole, cette jeune

personne fit entendre des cris bizarres et des mots qui n'avaient

aucun sens, mais tout cela sans délire, sans aucun trouble

des facultés mentales. Des mois et des années s'écoulèrent

dans cet état de choses auquel on n'opposa que de faibles

remèdes dans l'espoir des changements favorables que pouvait

apporter la puberté. Cet espoir fut complètement déçu.

MI', de... fut alors envoyée en Suisse auprès d'un médecin qui

s'était spécialement adonné au traitement des maladies ner-

ce sujet. Dans un récent voyage Londres, MM. Broadbent et H. Jachson,

nous ont dit n'avoir jamais observé de semblables cas, ni lu une descrip-

tion de cette maladie. D'autre part, nous a\ons reçu la même réponse de

nombreux médecins de diverses nationalités que nous avons consultés

dans la Section de neurologie du Congrès médical international de Copen-

hague. (Nous ne faisons pas d'exception pour la brochure de M. J. Ar-

mangue yTuset, intitulée Miimasmo o Neto'osio 7n ! t<a ! t<e, qui vient de

paraître à Barcelone, et dans laquelle on ne trouve (sauf quelques

considérations psycho-physioiogiqups) que les documents que nous avions

donnés dans notre lievue Critique des .lrcltoes de Neurologie, juillet 1881).

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 25

veuses qu'il combattait surtout par des bains de petit-lait.

Soit par l'effet de ces bains, soit par l'heureuse influence du

séjour et de la vie des montagnes, la maladie se dissipa presque

complètement; et quand, au bout d'un an, cette demoiselle

quitta la Suisse, elle en revint calme, brillante de fraîcheur,

et sujette seulement à quelques tiraillements visibles, mais

peu fréquents des muscles de la touche et du cou. Elle fut

mariée à cette époque. Mais, le mariage, au lieu de consolider et

d'achever sa guérison comme on l'avait espéré, reproduisit

assez rapidement sa maladie. Il est vrai que Mmo de D...,

n'ayant point eu d'enfant s'est trouvée privée des chances favo-

rables qu'aurait pu lui offrir la révolution physique et morale

ordinairement produite par la maternité. Quoi qu'il en soit,

cette affection convulsive qui, si l'on en excepte dix-huit ou

vingt mois de répit dure depuis dix-huit ans, ne parait pas

devoir s'user par le temps et semble au contraire faire de nou-

veaux progrès. Voici quel est son état actuel : les contractions

spasmodiques sont continuelles, non successives, et séparées

par de courts intervalles de quelques minutes; quelquefois le

repos est plus long, d'autres fois plus court et il en survient

même souvent deux ou trois qui se succèdent sans rémission.

Elles affectent surtout les muscles pronateurs de l'avant-bras,

les extrémités des doigts, les muscles de la face et ceux qui

servent à l'émission et à l'articulation des sons. Parmi les

mouvements continuels et désordonnés qu'amènent ces con-

tractions morbides, ceux imprimés aux organes de la voix et de

la parole sont les seuls dignes de toute notre attention comme

présentant un phénomène des plus rares et constituant une

incommodité des plus désagréables qui prive la personne qui

en est atteinte de toutes les douceurs de la société, car le

trouble qu'elle y porte est en raison du plaisir qu'elle y prend.

Ainsi, au milieu d'une conversation qui l'intéresse le plus

vivement, tout à coup, sans pouvoir s'en empêcher, elle inter-

rompt ce qu'elle dit ou ce qu'elle écoute par des cris bizarres

et par des mots encore plus extraordinaires, et qui fout un con-

traste déplorable avec son aspect et ses manières distingués ; les

mots sont pour la plupart des jurements grossiers, des épi-

thètes obscènes et, ce qui n'est pas moins embarrassant pour

elle et pour les auditeurs, l'expression toute crue d'un jure-

ment ou d'une opinion peu favorable à quelques-unes des

personnes présentes de la société. L'explication qu'elle donne

- 26 CLINIQUE NERVEUSE.

de la préférence que sa langue, dans ses écarts, paraît accorder

à ces expressions inconvenantes est des plus plausibles. C'est

que, plus elles lui paraissent révoltantes par leur grossièreté,

plus elle est tourmentée de la crainte de les proférer et que

cette préoccupation est précisément ce qui les lui met au bout

de la langue quand elle ne peut plus la maîtriser. Du reste,

l'état général de sa santé parait se ressentir fortement de cette

longue affection convulsive, comme le prouvent un amaigrisse-

ment croissant et la pâleur du teint, bien que les fonctions

digestives n'aient pas notablement souffert.

L'influence de la maladie sur l'état du moral est encore plus

sensiblement marquée et l'on observe ici comme dans toutes

les névroses de ce genre excessivement prolongées, une grande

mobilité dans les idées et une légèreté d'esprit et de caractère

qui n'appartiennent qu'à l'extrême jeunesse et qui résistent

aux révolutions de l'âge.

Deuxième partie. M. le professeur Charcot a vu à plu-

sieurs reprises cette malade qui, jusqu'à un âge avancé, avait

conservé son incoordination musculaire et prononçait malgré

elle, même dans les lieux publics, des mots obscènes ainsi que

il. Cliarcot en a été témoin.

En dernière analyse, les journaux politiques ont annoncé

sa mort survenue vers le mois dejuilletouaoùt 1 88 %, et certains

ont offert à leurs lecteurs un régal des mots obscènes qu'elle

prononçait et qui étaient en particulier « merde et foutu

cochon ».

Observation II (Personnelle).

(La première partie a été recueillie par M. Il. chef de

cliniZue de 11. Charcot.)

S. J..., né le lot juillet 1864 au Havre; employé comptable

dans un bureau des ponts et chaussées. Père bien portant ;

la mère a des antécédents tuberculeux. Elle a perdu une fille

de tuberculose pulmonaire ; quatre autres enfants sont morts

jeunes ; trois sont encore bien portants. Il est impossible de

relever d'antécédents nerveux, syphilitiques ou alcooliques

chez les parents qui sont de petits commerçants rangés et

paraissant jouir d'une modeste aisance.

DE 1,'IN COORDINATION MOTRICE. 27

S... n'a jamais été malade pendant son enfance; il élait très

intelligent et remportait tous les prix de sa classe. La dernière

année il a eu le prix d'honneur; à ce moment (juillet 1880)

son professeur remarqua que l'épaule et le bras droits étaient

de temps en temps soulevés par de petits mouvements brusques

et involontaires. Peu de temps après, il entra dans un bureau

et put écrire malgré ces mouvements jusqu'au mois de janvier-

février 1881, époque à laquelle il dut interrompre tout travail.

Les mouvements tendaient à se généraliser; ils avaient envahi

la jambe droite et ce ne fut que vers le mois de juin (1831j

que le côté gauche fut pris à son tour. Vers le mois de janvier

de cette même année était apparu un autre ordre de phéno-

mènes : involontairement et conjointement avec ces mouve-

ment, S... poussait un léger cri d'abord inarticulé, sorte de

he7 ? z ! et de ouah ! émis assez haut pour être parfaitement

entendu par les personnes environnantes.

Il s'en fut consulter M. leDr Gibert (du Havre), qui le soumit

à un régime tonique et à l'hydrothérapie, régime que le

malade suivit très irrégulièrement, de son aveu même, et dont

il ne retira aucune amélioration. Pendant toute la durée

de l'année 1881 et jusqu'en octobre 1882 époque laquelle le

malade entra à l'hospice de la Salpêtrière (salle Bouvier,

service de M. le professeur Charcot), les mouvements ne firent

que s'accroître de môme que des phénomènes phonétiques

particuliers se dessinaient de plus en plus.

A cette époque il présentait l'état suivant : dix-sept ans,

grand, assez maigre, jouissant d'une santé générale excellente,

mangeant bien, dormant bien, ne souffrant pas ; caractère

doux et timide, pouls 82 : léger souffle anémique de base, sans

lésions, le malade n'ayant du reste jamais eu de rhumatismes.

Sans incitation appréciable, S. exécute une série de mouvements

tout particuliers, localisés et généralisés, se produisant tantôt

d'un seul côté du corps, tantôt des deux côtés à la fois. Ces

mouvements sont rapides : à la tête ils occupent les muscles

du front, épicràniens, du pavillon de l'oreille, de la commis-

sure de la bouche qui est rapidement tirée en haut et en de-

hors ; le malade exécute une série de grimaces auxquelles ni

les yeux ni la langue ne prennent aucune part. A ces grimaces

s'associent le plus souvent des mouvements très rapides de

balancement et d'élévation des bras, de même que simultané-

ment les jambes, surtout la droite, se fléchissent et se redres-

28 CLINIQUE NERVEUSE.

sent alternativement, le pied droit venant frapper le sol avec

force. Au moment de l'acmé de cet ensemble de mouvements bi-

zarres S... pousse un crirauque et inarticulé. Ces phénomènes

se reproduisent parfois très fréquemment; une émotion les

ramène : le sommeil, qui est très bon, les fait cesser complète-

ment. Il ne se passe jamais un jour ni même une demi-heure

sans qu'ils ne se montrent : ils ne gênent l'alimenta.tion qu'en

ce que, le verre ou la fourchette, s'ils sont saisis au moment

d'unesecousse, sont quelquefois projetés brusquement en dehors

de leur destination primitive.

Peu de temps après son entrée à l'hôpital et grâce à un exa-

men suivi et plus approfondi, on s'aperçut bientôt d'un phéno-

mène tout à fait caractéristique. Le cri que poussait S... prenait

dans certaines circonstances un caractère tout spécial ; en

effet, bien que le oiiahl ouala ! existât toujours, le malade se

faisait maintenant l'écho fidèle des paroles et même des phrases

brèves qu'il entendait prononcer : « Voilà M. Charcot ».

« Charcot » répétait-il immédiatement, en exagérant ses mou-

vements habituels. Et il ajoutait : a Ah ! voilà M. Charcot,

M. Charcot, M. Charcot »; le tout accompagné de grimaces et

de contorsions. En dehors de ces sortes de suggestions nomi-

nales pour ainsi dire, traduites à haute voix et sans que le

malade pût s'en empêcher, il existait des suggestions idéalises

qu'il traduisait de la même façon. Un jour S .. entendit le di-

recteur de l'hospice dire à une concierge qu'elle ne veillait pas

suffisamment à son service : aussitôt, tout en faisant des contor-

sions, il répéta tout haut : «Ah, la vache, ne fait pas son service,

son service... »

Nous insistons sur cette dénomination ordurière, car chez

S... ce caractère ordurier du mot ou de la phrase qui accom-

pagnent le geste est constant. Lorsque le malade n'a pas été

frappé par un mot, par un fait qu'il peut traduire par le lan-

gage, il accompagne souvent ses contorsions du mot merde; et

cela, devant n'importe quel auditoire. De même il exprime une

idée ordinaire d'une façon ordurière : M. X... rentre dans la

salle : «Ah 1 le voilà ce vieux c... de père X ? ce vieux c... : »-le e

tout prononcérapidement et devant une personne pour laquelle

il doit avoir et il a le plus grand respect. Une dame rentre dans

la salle : « Ah la vache : je la... elle doit avoir, etc. » : deux ou

trois phrases courtes, et on ne peut plus ordurières, dites avec

un accompagnement exagéré de tics et de contorsions, remuant

DE L INCOORDINATION MOTRICE 29

les bras, se relevant et s'abaissant à plusieurs reprises, levant

les épaules, renversant la tête en arrière et de côté. Ces paroles

sont tellement involontaires qu'il lui arrive de les prononcer

devant sa mère qu'il affectionne beaucoup et qu'il fut un jour

de sortie obligé de s'en aller d'un restaurant où il scandalisait

les habitués par ses paroles lubriques prononcées avec force.

Ajoutons que les gestes ne présentaient rien d'ordurier. S...

était encore forcé d'imiter par ses gestes, de même qu'il imitait

en répétant les mots qu'il entendait dire, mais dans des cir-

constances peut-ctreplus limitées. S... était dans la cour de

l'infirmerie delà Salpêtrière : X... venait vers lui : « Ah ! ali !

X ? X... merde, merde », disait S... en levant les bras en

l'air et les abaissant alternativement et levant en même temps

assez haut la jambe droite. Puis les mouvements s'arrêtaient

ou même s'ils ne s'étaient pas montrés, X... et bien d'autres

qui s'en faisaient un j eu répétaient les gestes ordinaires et des

paroles, alors la force d'imitation était telle chez celui-ci qu'en

levant les bras et la jambe droite il trébuchait et tombait par

terre; toutefois sans se faire mal.

Vers le mois de mai-juin, S... fit à l'hospice connaissance d'une

personne avec laquelle il entra en correspondance régulière. A.

partir de ce moment, l'état que nous avons décrit s'aggrava

devant les entraves que l'on mit à cette liaison. Auparavant,

quelquefois il avait assez d'empire sur lui-même pour ne pas

prononcer ses mots orduriers habituels : dès lors, gestes et

mots furent faits et prononcés avec un luxe et une fréquence

inaccoutumés.

Sur ces entrefaites et devant l'inefficacité d'un traitement

très irrégulièrement suivi, le malade fut rendu à sa famille le

1 Il juillet 1883. Il revint au Havre dans cet état, éprouvant un

chagrin tel qu'à plusieurs reprises il songea à quitter la maison

paternelle pour revenir à Paris. Jusqu'à la fin de 1883, aucune

amélioration ne se montra : peu à peu cependant vers le mois

de janvier 1881 survint une certaine sédation; insensiblement,

ces phénomènes portés à leur acmé s'amendèrent et voici l'état

dans lequel nous trouvons S... le 15 juillet 1885., au Havre

dans sa famille, état dont nous complétons l'exposé au moyen

des documents particuliers que son père et sa mère nous four-

nissent en son absence.

S... a insensiblement perdu l'habitude de prononcer des mots

orduriers, mais il est encore écholalique; si on l'appelle dans

30 CLINIQUE NERVEUSE.

la rue, il ne manque que rarement de répéter son propre nom.

Les grands mouvements désordonnés ont également disparu :

il n'existe plus que des mouvements limités du membre supé-

rieur droit dans son ensemble : les orbiculaires des deux yeux

rentrent également en action rapide, enfin, ce qui n'avait pas

été noté pendant son séjour à l'hôpital, la langue est de temps

en temps projetée au dehors et à plusieurs reprises. Toutes les

émotions agissent très vivement sur lui : il saule, dit sa mère,

quand on l'appelle, et, bien que l'amélioration soit considérable

il n'a encore pu reprendre son emploi. L'état général est excel-

lent ; l'intelligence nette et vive : S... a contracté quelques

habitudes de paresse et flâne en attendant sa guérison défini-

tive.

Depuis qu'il est au Havre il n'a fait aucun traitement et

attribue son amélioration au grand chagrin qu'il a éprouvé

pendant plusieurs mois : il ne parle encore de la Salpêtrière

qu'en termes très bons et très affectueux pour les personnes

qui lui ont donné des soins et pour lesquelles, nous dit-il avec

sincérité, il conservera la plus grande reconnaissance. Il

n'existe chez lui aucun trouble de sensibilité : le coeur est sain ;

le champ visuel est normal.

Observation III (Personnelle).

G. D..., quinze ans, se présente en février 188t à la

consultation particulière de M. le prof. Charcot, qui prescrit

un traitement électrothérapique à suivre à l'hospice de la

Salpêtrière, où il nous est donné de l'observer. Il est né au

Havre, où habitent ses parents.

Le père et la mère, que nous voyons à différentes reprises,

sont bien portants : le père n'accuse aucun antécédent parti-

culier ; la mère est une enfant naturelle et n'a pas connu son

père ; elle-même n'était pas encore mariée lorsqu'elle était

enceinte de G...; elle eut, dit-elle, une grossesse ordinaire, mais

qui s'accompagna d'un état mental particulier, causé par le

désir de régulariser une situation, qui devint normale avant la

fin de la grossesse. L'enfant vint à terme, et, dans les années

suivantes, la mère eut deux filles et un garçon, qui sont au-

jourd'hui très bien portants.

G... a toujours été élevé avec tout le confort désirable : son

DE L'INCOORDINATION MOTRICE 31

père est armateur et possède une fortune qui le met à mémo

de faire donner à son enfant tous les soins désirables. Celui-ci

est normalement conformé et n'a pas eu de maladies d'enfance.

A dater de l'âge de huit ans, les parents remarquèrent que son

caractère devenait très impressionnable. Vers l'âge de neuf ans,

G... fut vivement grondé pour s'être oublié en classe dans son

pantalon, ce dont il éprouva une grande peine. Quelque

temps après, il vit un homme s'enfuir par-dessus le mur du

jardin attenant à la maison paternelle, et ressentit une grande

frayeur. A partir de ce moment, la mère remarqua que son

enfant exécutait fréquemment des mouvements inusités et

particuliers, consistant en mouvements rapides de flexion et

d'extension de la tète et du cou. Bientôt après, ces secousses

se généralisèrent : les muscles de la face exécutèrent des gri-

maces variées; il existait des mouvements des bras, d'élévation

alternative des épaules. Subitementl'enfant courait, se mettait

à genoux, se relevait et exécutait des contorsions variées.

Tous ces mouvements disparaissaient pendant le sommeil.

La croissance se faisait régulièrement, bien que l'enfant restât

toujours un peu petit, quoique issu de parents d'assez haute

stature. La santé générale était très bonne.

Vers l'âge de onze ans, G... fut soumis à un régime to-

nique : il prit deux douches par jour, et fit de la gymnas-

tique médicale. Sous l'influence de ce traitement il survint

une grande amélioration : les tics s'affaiblirent, sans toutefois

disparaître complètement. Cette accalmie dura un an , et

les contorsions reparurent de plus belle.

Au commencement de l'année 1883, apparut une série toute

nouvelle de phénomènes. En même temps que survenait une

contorsion, G... se mettait à prononcer le mot : merde, avec

force. Les parents crurent à un symptôme passager, mais ils

furent fort étonnés et très désagréablement surpris lorsque,dans

les périodes les plus accentuées de la maladie, au mot de merde

s'ajouta celui de couillon. Merde, couilton, prononcés sèchement

et vite, accompagnèrent désormais les plus fortes manifestations

de mouvements.

A partir de ce moment, tous les traitements, tous les médi-

caments, sont mis en usage, mais infructueusement. « L'af-

fection écrit le Dr Lafaurie (du Havre) a résisté chez lui à

tous les moyens de traitement, soit médicamenteux, soit hygié-

niques, le séjour à la campagne, où l'enfant a passé huit mois

32 CLINIQUE NERVEUSE.

consécutifs, a paru avoir d'abord un heureux effet, mais ce

moyen, comme l'hydrothérapie , comme la gymnastique,

comme le bromure de potassium et autres sédatifs du système

nerveux... tout a échoué (23 février 1881.).»

C'est à cette dernière époque qu'il vient à la consultation de

M. Charcot avec sa mère. Nous n'insisterons plus sur les con-

torsions que nous avons décrites, sur la bonne santé générale

de l'enfant qui grandit beaucoup en ce moment, et est parfai-

ment conformé : il nous faut appeler l'attention sur un autre

symptôme. Pendant l'examen , le mot de Charcot, vient

frapper son oreille, aussitôt il répète : Charcot en faisant une

contorsion ; celle-ci est quelquefois assez atténuée ; la mère

nous apprend alors que, vers l'époque où l'enfant commença

à prononcer son mot ordurier, il devint également écholalique,

se mettant, sans rime ni raison, à répéter un mot, une fin de

phrase.

Ces mots, G... est incapable de s'empêcher de les prononcer,

ce qui fait que, bien qu'il demeure près de l'hôpital, il ne peut

venir seul prendre le traitement électrothérapique : il s'est

arrêté un jour devant des enfants de son âge qui jouaient aux

billes, et ceux-ci, impatientés par les : merde et couillon

qu'il prononçait, et qu'ils prenaient pour des insultes à eux

adressées, l'eussent corrigé si l'on n'était intervenu. La dame

chez laquelle il est en pension, nous confie qu'elle vient tou-

jours à pied à l'hospice ; car, dans un omnibus, l'enfant a

provoqué une fois un véritable scandale. Il est inutile de dire

que toutes les objurgations ont échoué,

Pendant les mois de mars, avril, G..., qui prend des dou-

ches, vient à l'électrothérapie (électricité statique), suit un

régime tonique, ne présente aucune amélioration. Cependant,

vers le milieu de mai, une sédation semble se produire : les

mouvements sont moins fréquents, moins accentués : le mot

ordurier est moins souvent prononcé. Il devient possible de

faire travailler un peu (3 h. par jour) G..., dont l'instruction

a été fort négligée, par suite de sa maladie, et qui passe son

temps à lire des récits de voyages. L'état général est satisfai-

sant, l'intelligence vive : de temps en temps, surviennent à la

face quelques petites poussées d'eczéma qui disparaissent faci-

lement.

Le 2N juillet,nous revoyons G..., quisuit toujours exactement

son traitement : il se plaint d'être plus énervé depuis quinze

jours. Le mot merde, qu'il ne proiio, venu :

il le dit pendant qu'il lit et sans cause a le, 'il continue

à répéter -symptôme qui n'était jamais dispj"M3a"tm d'une

phrase ou un mot qui l'a frappé. Il s'ennuie beaucoup et voudrait

bien retourner au Havre. L'état général est toujours très satis-

faisant. Ajoutons qu'il n'a jamais existé chez lui aucun trouble

de la sensibilité et que l'examen du fond de l'oeil et du champ

visuel n'a révélé rien de particulier.

26 juillet. G... nous raconte qu'il y a environ trois mois,

il eut une angine qui dura trois ou quatre jours; pendant

cette affection, qui s'accompagna de fièvre, les mouvements

furent beaucoup moins intenses et beaucoup moins fré-

quents. Aujourd'hui, et depuis quinze jours, il est dans une

période d'éuervement : à tous propos, il a des secousses muscu-

laires et répète tout haut tous les mots qui caractérisent l'idée

qui le domine au moment même.

Pendant le mois de septembre 188'N, les parents ramenè-

rent l'enfant au Havre. Celui-ci paraît ne pas s'être mal trouvé

de ce changement d'existence. Lorsque nous le voyons en

octobre, il présente encore des tics fréquents dans la face et

une certaine tendance à l'écholalie; mais il se trouve beaucoup

mieux et nous demande avec insistance quand il pourra

retourner dans sa famille. De temps en temps, il prononce

encore le mot merde. Etat stationnaire, fin novembre 1884.

Observation IV (Personnelle),

Ch..., vingt-quatre ans, natif d'Evreux, ville qu'il a toujours

habitée jusqu'au mois d'août 1883, se présente en mai t8rt'a à

la consultation externe de M. le professeur Charcot, hospice

de la Salpêtrière. '

Son père est mort, dit-il, d'une fièvre typhoïde, sa mère est

bien portante ainsi que ses deux frères. Ch... jouit d'une

bonne santé générale, est de haute taille, intelligent et exer-

çait la profession de clerc d'huissier : il ne présente aucun

trouble de sensibilité, le champ visuel est normal; les or-

ganes génitaux sont bien conformés et fonctionnent normale-

ment. A l'âge de six ans il a eu la rougeole; à treize ans la

fièvre muqueuse.

Dès l'âge de huit à neuf ans, sans cause appréciable, sont

3t CLINIQUE NERVEUSE.

survenus des mouvements involontaires dans les muscles de

la face, du tronc et des membres, mouvements qui n'ont fait

que s'accroître et devenir plus fréquents d'année en année

pour acquérir leur summum en 1880. Vers cette même époque

le malade s'est aperçu qu'en écoutant un discours, une confé-

rence il était poussé par le besoin presque irrésistible de 2épé-

ter un mot, un bout de phrase qui l'avait frappé davantage. Il

lui fallait toute sa contention d'esprit et un vif désir de respec-

ter les convenances pour ne pas répéter ce mot tout haut ; tou-

tefois il s'est aperçu à différentes reprises que plusieurs des per-

sonnes qui l'environnaient avaient parfaitement entendu. Il lui

est arrivé, lorsqu'il lisait, d'être poussé par le besoin irrésistible

de prononcer ce mot, cette phrase qui attirait toute son atten-

tion ; et, comme il était seul, il se laissait aller à satisfaire ce

besoin de répétition. De plus, nous dit-il, toutes les facultés de

l'intelligence étaient pour le moment absorbées chez lui, par

ce mot, cette phrase qui alors s'emparaient de toute sa pensée

à un point tel' qu'ils lui faisaient perdre le fil du discours ou de

la conversation. Le mot entendu ou qui en lisant l'avait frappé

avait de la tendance à revenir sur ses lèvres, à être répété à

intervalles variables, mais toujours au moment juste où à la

fin d'une des contorsions si particulières qui le tourmentaient

et dont nous allons parler.

Ces mouvements involontaires qui chez lui existent depuis

si longtemps, puisque leur début semble remonter à l'âge de

huit à neuf ans, sont irrégulièrement généralisés ou localisés ;

ils surviennent à intervalles très rapprochés, toutes les deux,

trois minutes, et ne cessent que pendant le sommeil qui est

très bon. Ils augmentent d'intensité et de fréquence lorsque le

temps est orageux, lorsque le malade se trouve en compagnie

de certaines personnes qu'il n'a pas l'habitude de voir ; ils di-

minuent au contraire lorsque l'attention est fixée avec beau-

coup de force sur un point particulier, pour revenir toutefois

un instant après avec plus d'intensité et s'accompagner du

mot qui représente l'idée qui a fixé son attention. Lorsque le

malade est debout et marche, ce sont des séries composées de

deux ou trois sauts sur place accompagnés de mouvements

alternatifs d'abaissement et d'élévation des deux épaules. Les

bras remuent, les doigts s'ouvrent et se ferment. Les mouve-

ments qui se passent dans les muscles de la tête et de la face

sont très caractéristiques ; la tête s'incline brusquement vers

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 35

l'une ou l'autre des épaules; en même temps, l'une des com-

missures est tirée en haut et en dehors ; la bouche s'ouvre

toute grande ; lorsquelle se referme, on entend les dents des

deux mâchoires s'entre-choquer violemment. Assez souvent la

langue se trouvant interposée est brusquement saisie et la-

cérée ; elle est du reste toute couturée de cicatrices : une fois

entr'autres un morceau fut nettement sectionné et détaché; il

reste encore à sa face inférieure une plaie de un centimètre de

largeur et assez profonde

Jusqu'en 1880, ces secousses musculaires permirent encore

au malade de copier et de rédiger des actes d'huissier, il pou-

vait écrire et dessiner. Mais durant toute cette année les con-

torsions furent si violentes qu'il dut interrompre son occupa-

tion ordinaire, dans l'impossibilité presqu'absolue où il était

d'écrire. Son maintien particulier ne lui permettait en outre

pas de rester dans une étude où se présentaient beaucoup de

personnes, bien que toutefois ses gestes n'eussent rien d'in-

décent et qu'il ne prononçât jamais de mois orduriers. En 1881, il

put reprendre ses occupations; cependant, depuis deux mois

(mars 1884) il a été obligé de les suspendre à nouveau; il

écrit de travers, fait des pâtés. Il oublie de porter des actes à

domicile par ce fait que lorsque son attention est attirée sur

un point, il est tellement absorbé par cette idée nouvelle

qu'il oublie tout ce qu'il a à faire. Lorsqu'il doit porter un

acte il peut se contenir et ne pas faire de mouvements pen-

dant le temps nécessaire pour remettre le papier dont il est

chargé; mais après qu'il l'a remis les mouvements s'exagèrent,

il répète le mot qu'il a en tète ; il y a là une sorte de détente

exagérée.

Le malade, qui est très intelligent et analyse très bien ses

sensations, n'a pas remarqué qu'un bruit soudain, une surprise

exagérassent momentanément son état; il n'a jamais éprouvé

le besoin irrésistible d'exécuter l'acte qu'il voyait faire à

autrui.

Nous le voyons à différentes reprises, car il vient trois fois

par semaine à la Salpêtrière prendre un bain d'électricité

statique, mais son état ne semble pas s'améliorer, car au 24

juillet, depuis plus de trois semaines, il n'est pas venu à l'hô-

pital.

26 juillet. Ch... revient à l'Electro thérapie. Interrogé sur la

fièvre muqueuse dont il a souffert à l'âge de treize ans et qui

36 CLINIQUE NERVEUSE.

a duré environ quinze jours autant qu'il s'en souvient, il nous

dit ne pas se rappeler si, pendant cette période, les mouvements

qui étaient alors beaucoup moins intenses et beaucoup moins

fréquents qu'aujourd'hui, se sont atténués. 11 a cru remar-

quer cependant, qu'à plusieurs reprises, ayant eu de légères

affections fébriles, ces mouvements se seraient amendés pen-

dant leur durée.

Observation V (Personnelle).

Ch...,quatorze ans, né en août 1870 au Havre qu'il a toujours

habité. Il ne semble pas y avoir d'antécédents héréditaires

dans la lignée du père qui, après avoir tenu une maison d'épi-

cerie, est aujourd'hui rentier. Les grands parents maternels ne

présentaient rien de particulier. La mère, grande, blonde, apa-

thique, perdit en 1868 un enfant d'une affection aiguë qui

dura seulement quatre ou cinq jours. Elle en éprouva un vio-

lent chagrin, et peu à peu devint démente. Pendant près de

deux ans elle eut une folie douce, avait la monomanie des

fleurs, jouait à la petite fille, etc. Elle s'est rétablie peu à peu.

L'enfant qu'elle mit au monde en 1878) quoique assez

chétif pendant les premières années, n'a jamais fait de maladies

sérieuses. De bonne heure on lui fit prendre des leçons de

gymnastique à laquelle il ne tarda 'pas à s'adonner avec

passion.

En 1878 les parents s'aperçurent qu'il faisait des grimaces ;

il avait une série de tics de la face auxquels on ne fit pas at-

tention tout d'abord. Peu à peu, ces mouvements incoordonnés

se généralisèrent, ils envahirent les bras, les jambes des deux

côtés, l'enfant faisait des contorsions bizarres, pliait les ge-

noux, sautait sur place.

Quelquefois il ouvrait et fermait la bouche avec assez de

force et de précipation pour que la lèvre inférieure fut mordue

jusqu'au sang.

Tous les traitements furent essayés et échouèrent; en 1883

les parents vinrent consulter M. Charcot. Nous voyons Ch... au

Havre. le 12 juillet 188t. C'est un enfant assez grand pour son

âge, pâle et anémique, qui reproduit très bien la physionomie

de sa mère. Il est intelligent et répond très nettement à toutes

nos questions. Jamais, parait-il, il n'a poussé de cris, ni dit

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 37

pendant ses contorsions de mots orduriers. Pendant que nous

l'examinons, il cligne des yeux en même temps que le bras

droit se porte à plusieurs reprises rapidement en pronation.

Ces mouvements ont du reste beaucoup diminué, surtout en

intensité.

L'examen du coeur et des autres viscères ne nous révèle

rien de particulier ; la sensibilité générale et spéciale est con-

servée.

Observation VI (Personnelle).

J. L..., onze ans, né en 1873. Grand'mère maternelle migrai-

neuse ; le père, qui est magistrat, est migraineux ; la mère est

un peu nerveuse et très impressionnable, elle a fait une

fausse couche et a un autre garçon et une fille plus jeunes que

nous voyons et qui sont bien portants.

J..., nous dit le père, a toujours été nerveux, c'est un enfant

doux ordinairement, mais très impressionnable et qu'une

impression fâcheuse, une punition par exemple, émeut très

fort. Les parents sont venus habiter le Havre au mois de mai

de 1879, il y a cinq ans. '

Une année ou deux après leur changement de domicile (ils

habitaient alors la Vendée), l'enfant commença à faire quelques

grimaces ; celles-ci ne tardèrent pas à s'exagérer et les se-

cousses envahirent tous les muscles. Il y eut des périodes

d'excitation telles que le sommeil qui, généralement était

bon, en fût troublé et que le malade au milieu de ses mou-

vements incoordonnés poussait des nula ! oula ! ouh ! stridents.

Un de ses mouvements les plus ordinaires consistait à se

relever vivement en criant ozcla ! comme s'il avait eu à ramasser

quelque chose.

A plusieurs reprises l'enfant, chez lequel tous les traitements

avaient échoué, fut envoyé à la campagne et isolé. Une amé-

lioration notable se fit toujours sentir pendant ces séjours.

Dernièrement, il fut, sur les conseils de M. le D Gibert,

envoyé aux environs de Rouen, chez son grand-père, où nous

le voyons le 20 juillet l881.

C'est un enfant bien développé, normalement conformé,

intelligent, chez lequel toutes les fonctions générales s'accom-

plissent parfaitement : il est peu avancé au point de vue des

3S CLINIQUE NERVEUSE.

études que ses nombreux séjours à la campagne l'ont forcé de

négliger.

Pendant que nous lui parlons, la face est animée de petits

tics convulsifs. Les yeux se ferment, les commissures sont

tirées en dehors, la tête s'incline de temps à autre sur l'une

ou l'autre épaule. -

Tous les organes, y compris le coeur, sont sains ; pas de

troubles de sensibilité. Son institutrice nous apprend qu'en

jouant et au milieu d'une contorsion, il répète souvent son

ouh habituel ; mais elle n'a pas remarqué qu'il répétât les

mots qu'il entendait prononcer , ni des mots orduriers.

27 juillet. -L'enfant eut une angine couenneuse pendant

l'automne de 1882, à la suite de laquelle survint une para-

lysie diphtéritique du voile du palais. « La mère, nous écrit-

on, croit se rappeler que, pendant la période aiguë de la

maladie, les mouvements, s'ils n'ont pas cessé, se sont du

moins produits d'une façon moins accentuée, plus rares et

plus faibles. » « Pour moi, dit le père, je me souviens aussi

comme elle, qu'à la fin, les mouvements existaient assez peu

prononcés, et, nous avons même espéré qu'il en serait débar-

rassé à la suite de l'expulsion d'un gros ver rendu dans une

selle à cette époque. Il est vrai que, pendant quelque temps,

nous attribuions à son affection nerveuse le défaut de pronon-

ciation qui ne provenait que de la paralysie du voile du palais ;

mais cette paralysie finit elle-même par produire un tic nou-

veau, qui ne dura pas bien longtemps; il faisait, en commen-

çant certaines phrases, comme une bouillie des mots qu'il

prononçait. Je crois qu'il imitait ce qu'il avait fait par l'effet

de la paralysie. Du reste, le premier tic marqué que nous

ayions observé chez lui il y a bien six ou sept ans, un cli-

gnement d'yeux, il l'avait emprunté à un enfant que nous

voyions souvent en Vendée, et j'entends ici tous les jours dans

la rue les « ou, ou, ou » qu'il faisait il y a trois mois et dont

il n'est pas encore tout à fait débarrassé. »

Au mois d'octobre 1884., le père amène son enfant en consul-

tation chez M. Charcot, qui confirme le diagnostic. Etant

donné l'état relativement favorable du sujet, qui n'a plus que

quelques tics généralisés, M. Charcot conseille le retour à

la ville et la reprise des occupations intellectuelles sans

fatigue.

DE L INCOORDINATION MOTRICE. 39

Observation VII (Personnelle).

M. E..., vingt et un ans, dessinateur mécanicien, né le

13 avril 1863 à Paris. La mère est de Paris, le père de la

Bourgogne. Grands parents paternels : morts jeunes, d'acci-

dents ( ? ). Grands parents maternels : morts dans un âge avancé.

La soeur de la grand'mère maternelle aurait eu la chorée ou

une affection analogue ( ? ). Père tonnelier, non alcoolique,

très impressionnable, très vif de caractère ; mère non ner-

veuse, asthmatique ; une soeur qui, depuis cinq ans, aurait la

même affection que le malade.

Pas de maladies d'enfance : n'aurait eu que tout jeune un

petit abcès derrière l'oreille droite, peut-être d'origine stru-

meuse ( ? ).

Bonne mémoire, intelligent, bien développé ; rien au coeur,

un varicocèle à gauche depuis quatre ou cinq ans ; pas de

syphilis ni d'alcoolisme. N'a rien remarqué au point de vue

nerveux jusqu'en 1870.

Pendant le siège de Paris, une bombe est venue éclater

auprès de lui et a tué un de ses camarades en en blessant un

autre ; il a éprouvé une grande frayeur ; est resté quelques

minutes sans pouvoir parler, les bras agités de tremblement.

Il est resté quelques mois sans faire de grimaces ; puis, vers

1871-72, il a commencé à cligner des yeux. Peu à peu, sont

survenues des contorsions de tout le corps. Il changeait involon-

tairement de pas en marchant, bien que les mouvements

fussent relativement modérés. Ses mouvements étaient variés,

changeaient de forme.

Pendant toute cette période, qui s'étend de 1870 jusqu'au

26 juillet 1889., le malade a eu, tous les trois ou quatre mois,

des migraines avec un point douloureux au niveau du sourcil

droit ou gauche, spécialement ce dernier. Il est resté ainsi

agité jusqu'en novembre 1883, époque à laquelle il com-

mença à être traité à la Salpètrière au moyen de l'électricité

statique.

En mars t 88 , un mieux sensible se montra : les mouve-

ments devinrent moins brusques et moins fréquents ; du

reste, dès 1878, les mouvements des bras et des jambes avaient

déjà disparu : le malade n'avait plus qu'un tic, qui consistait

40 CLINIQUE NERVEUSE.

dans un clignement d'yeux très fréquent, accompagné de con-

torsions des deux sterno-mastoïdiens qui inclinaient la tète

surtout du côté droit. C'est ce tic qui s'est beaucoup amélioré.

Il semble au malade que tous les quarante ou quarante-cinq

ours, il y a des périodes d'aggravation qui durent dix ou

quinze jours. La santé générale est du reste parfaite ; le ma-

lade dort très bien ; il sait cependant dire, le matin en se

réveillant, si la journée sera bonne ou mauvaise. Il sent du

reste très bien lorsqu'un mouvement va venir; il peut le

retarder par un effort de volonté, mais il ne peut l'éviter. Il a

remarqué quelquefois que, dans la journée, il survenait dans

l'un ou l'autre des sterno-mastoïdiens, une contracture passa-

gère, qui néanmoins pouvait durer deux heures, légère, mais

qu'il pouvait apprécier avec les doigts. Le sterno-mastoïdien

du côté gauche se contracte environ trois fois plus souvent

que celui du côté droit, et porte par conséquent la tète à

droite; cependant les contractions des deux côtés sont assez

rapidement alternantes pour que la tête subisse une rotation

double qui la porte alternativement, et d'une façon soudaine,

vers l'une ou l'autre épaule.

A tous ces symptômes, il en joint un de tout spécial et qui

nous a incité à prendre son observation. En entrant dans la

salle d'électrisation, nous passons derrière lui et nous le

frôlons légèrement ; aussitôt il fait sur son tabouret un saut

extraordinaire qui fait rire tous les assistants. Il nous dit, à ce

sujet, qu'il est extrêmement impressionnable et quele moindre

attouchement, lorsqu'il n'est pas prévenu, le fait bondir sur

place.

Le malade n'a pu être suivi depuis, car il est parti soldat :

le grand désir qu'il avait de l'être l'ayant fait user d'un

stratagème pour être pris lors du conseil de révision.

Observation VIII (Inédite).

Communiquée par M. le professeur A. Pitres (de Bordeaux).

1\1"e X..., âgée de quinze ans, a fait à l'établissement hydro-

thérapique de Longchamps, à Bordeaux, un séjour de plusieurs

mois pendant l'hiver de 1883 pour y être traitée d'accidents

choréiformes convulsifs accompagnés de l'émission brusque et

involontaire de mots grossiers ou obscènes.

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 4 t

M"°X... est fort intelligente; elle apprend facilement les

leçons que lui donne son institutrice; elle joue bien du piano.

Elle est grande et forte. Elle n'est pas réglée.

Sa mère n'a jamais eu d'accidents nerveux. Son père a un

tic convulsif non douloureux de la face. Elle a une tante

bizarre, presque aliénée, qui vit isolée et est sujette à des

crises nerveuses, à de la boulimie et quelquefois à des périodes

de tristesse pendant lesquelles elle refuse absolument de

parler.

A l'âge de neuf ans, M"° X... a commencé a avoir dans les

membres et la face des tics choréiformes, des secousses irréâu-

lières et brusques. En même temps il lui arrivait souvent de

proférer vivement quelques paroles banales ou grossières. Après

quelques mois, les accidents disparurent. Mais un an plus tard,

ils se montrèrent de nouveau. Les secousses convulsives repa-

rurent, d'abord dans les épaules, puis dans les bras, puis dans

la figure. A ce moment elles commencèrent à s'accompagner

de bruits gutturaux indistincts. A l'âge de treize ans, ces

bruits devinrent des sons nettement articulés. Le plus souvent,

la malade disait alors : « 17a-t-en, va-1-eie, imbécile ». Un peu

plus tard l'émission des mots devint plus fréquente, plus nette

encore et les mots furent empruntés au vocabulaire le plus

grossier, le plus ordurier. Cet état a persisté à peu près sans

modifications jusqu'à présent.

1'le X... appartient à une famille qui est dans une position

très élevée. Son éducation a été excellente. Elle n'a jamais

quitté sa mère qui l'a entourée de la surveillance la plus

tendre et la plus continue. On se demande où et comment

elle a pu apprendre les mots qu'elleprononce : « nom de Dieu-,

foutre, merde», etc. Jamais, dans les moments de calme, elle n'a

employé une de ces expressions grossières.

Quand Aille X... est en présence d'une personne dont la vue

l'intimide, elle peut, à force de volonté, étouffer les sons et

empêcher, en serrant convulsivement les lèvres, qu'on puisse

comprendre les paroles qu'elle prononce. On n'entend alors

qu'une sorte degrognement indistinct. Il parait qu'aussitôt après

qu'elle se trouve libre elle profère avec une abondance inac-

coutumée les paroles grossières qui font partie de son vocabu-

laire habituel. Jamais les mots ne sont prononcés sans qu'il y

ait en même temps une série de secousses convulsives des

muscles de la face, des épaules et du tronc. Mais assez souvent

42 CLINIQUE NERVEUSE. DE L'INCOORDINATION MOTRICE.

les secousses convulsives ont lieu sans qu'aucune parole soit

articulée et nous avons vu que d'autres fois les mots pouvaient

être étouffés et rendus incompréhensibles par un effort intense

de volonté.

Pendant le sommeil, les mouvements spasmodiques cessent

complètement, et il n'y a jamais de paroles involontairement

proférées.

Pas de troubles appréciables de la sensibilité, pas de parésie

des membres.

M. le professeur Pitres nous écrit, en outre, à la date du

27 octobre : « M"° de M... n'a pas, parait-il, présenté nette-

ment les phénomènes de l'écholalie. Il est vrai qu'on ne l'a

jamais recherchée en prononçant à haute voix devant elle les

mots grossiers qui lui sont familiers. Tout au contraire, la

mère de la malade avait cherché à substituer à ces mots des

expressions indifférentes, des exclamations banales. Pour cela

elle avait ordonné à l'institutrice de s'écrier, plusieurs fois par

jour devant sa fille : «Ah mon Dieu ! » ou « Maman » L'institu-

trice a rempli consciencieusement sa tâche, mais la malade ne

répéta pas les exclamations qu'elle entendait pousser devant

elle.

« Un seul fait observé par l'institutrice parait se rapporter à

l'écholalie. Un soir de l'année 1883, pendant que M"° X... so

déshabillait pour se coucher, un chien vint aboyer sous les

fenêtres de sa chambre. Aussitôt elle commença à imiter invo-

lontairement les aboiements de ce chien, et jusqu'à une heure

du matin elle ne put s'endormir, parce que à chaque, instant

tout son corps était agité de secousses musculaires accompa-

gnées d'aboiements bruyants, tout à fait semblables à ceux

qu'avait poussés le chien. Autre renseignement assez curieux :

M"° X... avait une tendance assez marquée à imiter les gestes

ou à prendre les attitudes bizarres dont la vue l'avait frappée.

Un jour que son institutrice la promenait dans une foire, elle

vit un Gargantua en carton, dont la bouche s'ouvrait et se fer-

mait avec un mouvement régulier, engouffrant tout ce qu'on

lui présentait. L'enfant regarda un moment ce spectacle avec

étonnement, et pendant tout le reste de la promenade elle ne

cessa d'ouvrir et de fermer involontairement la bouche comme

elle l'avait vu faire au Gargantua.» » (A suivre.)

THÉRAPEUTIQUE

DE L'EMPLOI DU CURARE DANS LE TRAITEMENT

DE L'ÉPILEPSIE;

Par BOURNEVILLE et P. BRICON.

Nous n'avons pas à nous occuper ici de l'action physiolo-

gique du curare si bien étudiée par de nombreux auteurs,

surtout par Claude Bernard' d'abord et ensuite par M. Vul-

pian 2 ; ces recherches sont classiques, et, quoiqu'il règne

encore quelque obscurité sur le mécanisme de l'action phy-

siologique du curare, nous ne saurions tirer à cet égard de

nos études personnelles aucune donnée nouvelle.

Il nous semblait, dès l'abord, peu rationnel d'utiliser dans

le traitement de l'épilepsie un médicament qui, physiologi-

quement, sauf une légère excitation initiale, reste sans action

sur les centres nerveux et sur le système nerveux sensitif, et

qui, en abolissant les mouvements volontaires, ne saurait

agir que sur l'effet et non sur la cause de l'épilepsie. Nous

connaissions les observations anciennes et leur lecture ne nous

avait pas inspiré l'idée de traiter nos malades par le curare.

Nous ne nous sommes décidés à l'expérimenter qu'après avoir

lu les nouvelles observations publiées récemment par plu-

sieurs médecins étrangers, qui prétendent avoir obtenu du

curare des résultats satisfaisants et le préconisent dans le

traitement de l'épilepsie.

Nous ne nous dissimulons pas que, pour préciser d'une

manière tout à fait exacte l'action du curare, nous aurions dû

pousser la curarisation jusqu'à l'affaiblissement des mouve-

ments respiratoires, ou tout au moins jusqu'à l'affaiblissement

' Oaude Bernant. .eyon. ! ! <;' /M e d ! <<f : )tCM<o.rtMM e< n;e-

1 Claucie Bei-tiar(l. - Leçons sur les effets des substances toxiques et naé-

dicamenteuses; Paris, IS57, ive-26" leçon (7 mai-13 juin 1856), p. 239-393.

2 Vulpian. - Leçons sur l'action physiologique des stibsta21ces toxiques

et médicamenteuses ; t. ler, 1er fascic., Paris, 1881, 4°-8e leçon, p. 193-423.

4 4 THÉRAPEUTIQUE.

général des autres muscles. Sous ce rapport, nos recherches

ne sont donc pas concluantes, mais de tous les auteurs qui

ont vanté l'action du curare dans le mal comitial, aucun ne

l'a employé, que nous sachions, à la dose limite, et, dans

l'espèce, la crainte d'accidents possibles, pouvant se produire

lors d'un accès éclatant au milieu de la curarisation presque

complète, nous a empêché de dépasser les doses employées

par nos prédécesseurs.

Nous pouvons ajouter que nous comprenions peu comment

ce médicament, dont l'élimination est si rapide quand il est

administré par la voie hypodermique, pût avoir une action

quelque peu prolongée sur les accès d'épilepsie.

Nous n'insisterons pas davantage sur ces considérations

générales qui indiquent suffisamment la confiance relative que

nous avions dans le traitement de l'épilepsie par le curare, et,

après avoir fait l'historique de l'emploi du curare dans l'épi-

lepsie, nous donnerons les résultats que nous avons obtenus

à Bicêtre. ·

I. HISTORIQUE.

Thiercelin ' aurait, le premier, publié deux observations

d'épileptiques traités par le curare {méthode endermique), chez

lesquels le nombre et l'intensité des accès diminuèrent, mais

dont l'amélioration disparut avec la cessation du traitement ;

ces épileptiques avaient été soumis auparavant à diverses

médications sans aucun succès.

Observation 1.- Epilepsie congénitale héréditaire. Jeune homme

de vingt-huit ans, affecté d'une épilepsie congénitale héréditaire,

a passé quatre ans à l'hospice de Charenton. Considéré comme

incurable, il avait cessé de recevoir des soins médicaux depuis

deux ans. Ses accès variaient entre quinze et vingt par mois,

dont une partie n'était que des vertiges, et les autres, en plus

grand nombre de haut mal. -

Observation Il. Epilepsie; début à neuf uns par des vertiges;

accès d'abord nocturnes. Jeune fille de dix-sept ans, épileptique

depuis huit ans. Les crises, à l'état de vertiges pendant un an, ont

ensuite pris le caractère du haut mal, mais seulement nocturnes

i Thiercelin. Académie des sciences et Gazette médicale de Paris,

février 1861.

DU CURARE DANS L'ÉPILEPSIE. t5

pendant deux ans. Depuis cinq ans, ces accès venaient le jour et

la nuit, et étaient caractérisés par des convulsions violentes, des

cris aigus, le râle guttural, l'écume à la bouche, etc. Leur nombre

est de vingt-huit à vingt-neuf par mois depuis un an.

Sous l'influence du curare, administré à doses variant entre

3 à 5 centigrammes par jour, au moyen d'un vésicatoire en

pleine suppuration, M. Thiercelin a vu, dans l'espace de deux

mois (décembre 1859 et janvier 1860), les accès diminuer, de

manière que chez l'un on n'en a compté que cinq au lieu de

quinze ou vingt, et chez l'autre huit au lieu de vingt-huit

ou vingt-neuf dans le dernier mois. La gravité des convul-

sions s'est amendée aussi d'une manière très notable, et l'état

général s'est sensiblement amélioré. Ainsi l'appétit a aug-

menté en ramenant les forces et J'embonpoint. A l'irritabilité

nerveuse, si grande habituellement chez ces malades, ont

succédé un calme intellectuel et une bonne humeur constante

faisant présager un retour prochain à une santé parfaite.

Cette amélioration donnait de grandes espérances, quand,

malheureusement, au bout du deuxième mois, la provision de

curare était épuisée. La contre-épreuve se produisit alors

rapidement chez les deux malades. Les accès revinrent dans

le mois suivant (février) à leur ancienne fréquence ou à peu

près : à savoir, quinze par mois pour l'un, et pour l'autre

vingt-quatre.

Ayant obtenu un nouvel échantillon de I gr. 50 de curare,

M. Thiercelin recommença l'administration chez la jeune fille

seulement, l'exiguïté de la provision ne permettant pas de

mener les deux traitements de front.

Dans l'espace de dix jours, la jeune malade reçut sur un

vésicatoire du bras 50 centigr., soit 5 centigr. par jour en une

seule dose. Pendant ces dix jours, trois crises seulement

revinrent la nuit, et avec peu de convulsions. Amélioration

manifeste.

Le onzième jour, le médicament manque ; il survint trois

accès dans la nuit suivante. Les convulsions ont repris une

certaine intensité. Le douzième jour, M. Thiercelin remet

aux parents 1 gr. du médicament, divisé en quatorze paquets,

et devant être administrés en quatorze jours. Chaque paquet

devait suffire à trois pansements.

Dimanche 1 1 novembre, le deuxième paquet a été employé,

et, pendant ces douze derniers jours, on n'a eu à constater

46 G thérapeutique.

.que deux accès nocturnes, d'une durée au-dessous de la

moyenne et de peu d'intensité.

En résumé, ces deux malades ont été soumis au traitement

par le curare pendant un temps trop court pour pouvoir

affirmer que la diminution de leurs accès fut sous la dépen-

dance de l'administration de ce médicament. Ces observations

sont, du reste, incomplètes, et l'absence de tableaux d'accès

durant la période de traitement ne permet aucune comparai-

son avec les époques correspondantes des années précédentes.

M. Seliivardi rapporte des observations inédites du D Pe-

rini (de Milan) ; celui-ci a aussi employé le curare dans quatre

cas d'épilepsie (un en 1864, deux en 1865, un en 1866). Nous

en donnons le résumé :

Observation 111. - Jeune homme de vingt-cinq ans. Accès

fréquents et violents. Début causé par la vue d'accès épilep-

tiques ; traité sans succès par la valériane et l'atropine. Aura : :

sensation de piqûre dans la région dorsale. Vésicatoire au lieu

de l'aura, saupoudré de un demi centigramme de cérat. Traite-

ment : un peu plus d'un mois. Guérison. Mort l'année sui-

vante de tuberculose pulmonaire. Pas d'autopsie.

Cette observation est incomplète et peu concluante en ce

sens que l'on voit très souvent les accès diminuer, à mesure

que se développe la tuberculose.

Obsi'rvation IV. Femme de trente-sept ans, aurait eu, en

1843, une encéphalite très grave (' ? ). Premier accès en 1865

sans cause connue; traitée sans succès par la valériane, l'atropine,

etc. Aura : Sensation de chatouillement le long de la colonne

vertébrale. Application de vésicatoires au point de départ de

l'aura (dernières vertèbres cervicales), saupoudrés de poudre de

curare. - Durée du traitement. : deux mois. - Amélioration lente

et progressive, puis guérison.

Observation V. Jeune fille de dix-huit ans, accidents convul-

sifs à la suite de chagrins d'amour, puis accès épileptiques. Aura

épigastrique. Même traitement que pour la précédente. Guérison

en deux mois.

Observation VI. Enfant de douze ans. Antécédents épilep-

tiques héréditaires. Paraplégie faciale rhumatismale suivie d'ac-

1 Schivardi. La meclicuzione iporlcrncica, 4° édition. Milan, 1879,p. 199.

DU CURARE DANS L'ÉPILEPSIE. 47

ces épileptiques. Vésicatoire à la nuque saupoudré de curare.

Traitement de quatre mois. Guérison.

Ces trois dernières observations sont encore moins con-

cluantes que la première, et, à notre avis, on ne saurait préco-

niser un traitement sur de tels faits; ce sont des notes à con-

sulter personnellement et non à publier.

Le 26 janvier 18G'a, M. Benedikt communique à la Société

des médecins viennois le résultat de ses recherches sur l'emploi

thérapeutique du curare '. Dès cette époque, il rapportait avoir

traité quinze épileptiques au moyen des injections hypoder-

miques de curare. Voici le résumé des quatre cas que M. Bene-

dikt a relatés avec quelques détails :

Observation VII. Le premier concerne un enfant de douze

ans, atteint depuis quatre a cinq années d'accès momentanés de

perte de connaissance avec roulement desyeux;ii était, depuis

Pâques de l'année 1863, sujet à des accès épileptiques qui reve-

naient au moins une fois chaque semaine, il fut mis en traitement

au commencement d'août et durant les deux mois de traitement

par le curare, les accès ne reparurent plus.

Observation VIII. Dans un autre cas, les accès se répétaient

tous lestrois jours; pendant le traitement, qui dura quatre mois, les

accès ne revinrent que deux fois seulement et furent remplacés,

les jours où auparavant ils avaient l'habitude d'éclater, par des

frissons, de l'abattement, etc.

Observation IX. Dans un troisième cas où les accès venaient

presque tous les deux jours, les accès n'apparurent pendant le

traitement que une à trois fois par mois ; ils étaient plus faibles.

Observation X. Dans un quatrième cas où l'on notait des

vertiges quotidiens et presque chaque jour des accès ordinaires

d'épilepsie, ces derniers devinrent très rares.

Les injections furent faites, dans tous les cas, trois fois par

semaine ; les doses varièrent de l/t5 à 1/10 de grain 2.

En 1866 3, M. Benedikt publiait un second mémoire ; cette

nouvelle série se composait en général d'épileptiques peu favo-

rables, car ils étaient malades depuis un temps déjà assez long.

1 Wiener 7 ? ze(liziiiische Presse. 29 janvier 1865, 110 5, p. 118.

2 Le grain autrichien équivaut à 73 milligrammes.

3 Wiener niediziitische Presse. 12 et t9 août. n"5 33-39, p. 79, 91, 806.

Positive Restiltate zur Curare Thérapie.

1,8 thérapeutique.

OBSERYATfox\).Ftach(lïermann), vingt ans; début probable

en 183'3 à la suite d'un coup sur la tête ; pas d'hérédité, vertiges

fréquents et accès; développement intellectuel peu prononcé; à

l'hôpital, on nota des accès avec perte de connaissance sans

secousses, suivis ordinairement de somnolence persistant parfois

pendant huit heures.

Après un accès à l'hôpital, on observa des troubles intellectuels

et une espèce de perle de connaissance. Comme prodromele ma-

lade accusait une sensation de chaleur qui lui montait à la tête,

parfois précédée d'une forte oppression. En six mois d'observa-

tion il eut environ un accès par mois.

La réaction des nerfs moteurs était normale. Le 3 novembre

1861, on commença le traitement par le curare (injection sous-

cutanée de un huitième de grain, trois fois par semaine). Le ma-

lade eut pendant les quatorze premiers jours deux faibles ver-

tiges et le traitement fut continué jusqu'à la fin de janvier 186-3.

Du 19 novembre 1864, au commcncemenlde l'année 1866, il n'eut

plus d'accès.

« Ce cas, ajoute M. Benedikt, est du plus haut intérêt parce

qu'il nous montre l'influence du curare sur les symptômes

psychiques de l'épilepsie. Je dois ici faire remarquer que dans

beaucoup de cas, au début du traitement, on observe des accès

où les symptômes convulsifs restent les mêmes, mais où les

troubles psychiques l'ont déjà défaut, quoiqu'ils aient été aupa-

ravant des plus prononcés. »

Observation XII. Steinschutz (Johann), douze ans, fils de

paysan. Pas d'antécédents héréditaires ; depuis quatre ans, vertiges

presque momentanés; le malade perd complètement connais-

sance, roule les yeux et reprend la conversation ou son tra-

vail sans avoir conscience de l'intermède pathologique. Ces ver-

tiges se répétaient plusieurs fois le jour. A Pâques de l'année 1863

eut lieu le premier accès d'épilepsie à la suite d'une lecture d'his-

toire de revenants. Il en eut sept jusqu'au 19 août l 863 : alors le

malade fut mis en observation, l'accès durait un quart d'heure,

précédé (un quart d'heure à une demi-heure) d'un accès de petit

mal. Le dernier accès survint quatre jours avant le début du trai-

tement. La réaction du système nerveux moteur par la recherche

galvanique et faradique était très augmentée. Le malade fut pen-

dant huit mois (du 19 août 1863 au 17 mars 1864) traité comme le

précédent etn'eutplus d'accès ni de petit ni de haut mal, et jus-

qu'à présent (commencement de juin 1866) ils ne sont pas revenus.

Après sept semaines de traitement, on trouva du sucre dans

l'urine.

DU CURARE DANS L'ÉPILEPSIE. 49

Observation XIH.Sehro]Ienberger(Joseph), dix-sept ans, hor-

loger, a eu à neuf mois à la suite d'une peur et à six ans après

une chute, un accès d'épilepsie. L'enfant n'a pas d'antécédents

héréditaires; il est intelligent; il y a deux semaines, il eut

de nouveaux accidents convulsifs ; il eut chaque jour, durant six

jours, deux ou trois accès débutant par une sensation de pression

montant de l'abdomen, suivis de l'abolition de la parole, de la

perte de connaissance et de secousses généralisées. Les accès

duraient de trois à cinq minutes et ne laissaient après eux aucun

symptôme. Le traitement, commencé le 29 septembre, fut con-

tinué durant quelques semaines. Les accès cessèrent de suite et ne

reparurent plus'.

Observation XIV. - Altar (Isak), épileptique depuis quatre ans ;

accès nocturnes se répétant dans les derniers temps touslestrente-

deux jours. Quoique le résultat obtenu par le traitement n'ait pas

persisté, M. Benedick dit devoir rapporter ce cas, parce que ce ma-

lade est, jusqu'à présent, celui qui est resté le plus longtemps en

observation ; il fut soumis au traitement du 8 août au 26 décem-

bre 1864. Le malade était sujet dans l'intervalle de ses accès a

des suffocations. L'origine de la maladie est attribuée à des

chagrins, etc. Les accès étaient nocturnes. Des injections de 1/16 à

1/4 de grain lui furent faites quatre fois par semaine. Les accès

perdirent leur type. Dans les deux premiers mois il n'y eut aucun

accès, mais à l'époque où avait coutume de venir l'accès, le ma-

lade ressentait un malaise général et des frissonnements. Dans les

trois mois suivants il y eut un accès, à la suite duquel il resta

pendant un jour assoupi. Plus tard, un autre accès fut suivi de

tremblement de la main droite; dans l'année 1863, il eut cinq

accès au lieu de douze; en 1866, jusqu'en juillet, cinq accès; de

sorte que le malade avait à cette époque à peu près le même

nombre d'accès qu'avant le traitement.

Depuis le premier traitement, il avait été soumis, à deux

reprises différentes à des injections de curare. Les accès de suffo-

cation avaient disparu. Dans ce cas, la présence de sucre dans les

urines fut aussi constatée après plusieurs semaines de traitement.

La contractilité électro-musculaire, normale au début du traite-

ment, diminua passagèrement pendant la durée de celui-ci.

« Ces observations montrent indubitablement, dit M. Bene-

dikt, que le curare possède non seulement une action spécifique

sur la diathèse motrice de l'épilepsie, mais encore sur la dia-

thèse psychique. De nombreux insuccès dans les cas invétérés

' M. Benedickt nous apprend que ce malade a été observé par lui

pendant six années et qu'il n'a pas eu de rechute.

Archives, t. IX. 4

50 thérapeutique.

démontrent qu'il n'est aucun remède sûr pour tous les cas. De

nombreuses expériences me font l'impression, je ne veux pas

dire me démontrent, que ce remède arrête le développement

de la maladie dans les cas récents, idiopathiques, concernant

'des jeunes sujets. »

M. Benedikt faisait des injections trois fois par semaine

durant six à huit semaines ; il suspendait alors le traitement

s'il n'y avait plus d'accès, enfin il le reprenait dès qu'il y avait

rechute. Il se servait du curare du commerce.

Les injections étaient faites au cou, elles restaient doulou-

reuses pendant plusieurs heures chez les personnes sensibles

et donnaient lieu parfois à de petites indurations'.

Enfin, le 3 février 1871 2, M. Benedikt faisait une dernière

communication à la Société médicale de Vienne sur le Traitement

des convulsions par le curare. Il s'agissait d'une malade qui souf-

rait trois mois avant le traitement d'accès decardialgie, auxquels

s'ajoutèrent plus tard des phénomènes congestifs du côté de la

tête et des accès de suffocation. Les narcotiques et les prépara-

tions métalliques restèrent sans effet. On nota encore chez

elle du spasme dans les gros vaisseaux, des pâleurs, des fris-

sons, des fourmillements, des convulsions d'abord localisées

aux orteils et aux doigts de la moitié droite du corps ; celles-ci

se généralisèrent et s'accompagnèrent de délire ; elles de-

vinrent de plus en plus fréquentes malgré l'usage du bromure

de potassium (deux scrupules en deux doses par jour) et dispa-

rurent par l'usage du curare dans l'intervalle de trois jours

(deux injections en tout).

Le curare s'est montré sans action dans certaines formes

d'épilepsie ; l'épilepsie gyratoire, par exemple, et dans un cas

d'épilepsie symptomatique d'une lésion traumatique de la

cuisse.

Mandt 3, en opposition à ces succès partiels, a fait connaître

un cas dans lequel les injections de curare furent employées

pendant quatre mois sans le moindre effet. Il s'agissait d'une

1 Dans une let;re que nous a adressée M. Benedikt, en 1883, celui-ci

fait observer qu'il filtre maintenant chaque fois la solution jusqu'à ce

qu'elle devienne claire et jaune, et que depuis ce temps la réaction

locale est nulle ou au moins très rare.

2 Wiener med. Presse, 19 février 1871, n° 8, p. 196.

à Mandt. Die Wirkung des Curare bei Epilepsie(6Vieaernaed. Pnesse,

ne 17, 1866).

DU CURARE DANS L'ÉPILEPS1E. 51

femme de vingt-deux ans à qui on injecta au bras et à la nuque

dix gouttes d'une solution à 1 : 120 tous les deux jours pen-

dant le premier mois, ensuite tous les jours les autres mois.

Au lieu de la piqûre, il se faisait une petite induration.

MM. A. Voisin et H. Liouville', en 1865, ont fait à Bicétre

des recherches physiologiques et thérapeutiques sur le curare.

Nous laisserons de côté la partie physiologique de leur travail

pour ne nous occuper que du mode d'administration et de

l'action thérapeutique du curare dans l'épilepsie. A tous les

autres modes d'administration ces auteurs préfèrent la méthode

hypodermique. ,

« Le vrai moyen disent-ils, pour avoir des résultats rapides et

presque prévus à courte échéance et la plus utile voie pour pou-

voir parer de suite par la ligature, avec une bande roulée, à un

accident, est l'injection sous-cutanée dans les membres avec les

précautions qu'elle exige.

« Les malades que nous avons traités avec le curare sont tous

des épileptiques placés dans le service de l'un de nous à l'hospice

de Bicétre. Leur affection nous a paru d'autant mieux se prêter à

celte médication qu'elle est, d'une part, regardée comme le plus

souvent incurable, et que, d'autre part, elle est une de ces ma-

ladies que l'on dit avoir été traitée avec succès par le curare dans

les contrées où on le prépare. De plus, cette médication curarique

a déjà fait à Paris et à Vienne, dans les mains de MM. Thiercelin

et Benedikt, l'objet de recherches malheureusement restées in-

complètes par la privation du médicament, et peu certaines, peu

concluantes par le défaut d'une dosologie établie d'une façon plus

fixe. »

Douze malades adultes ou âgés de plus de quinze ans ont

été mis en traitement presque tous au commencement d'août.

Au début, les doses étaient de 2/10 de milligrammes; comme

elles ne produisaient aucun effet appréciable, elles ont été

portées successivement à 60-70 milligr. A partir de là,

MM. Liouville et Voisin ont procédé par augmentation de

5 milligr., puis d'un centigr., et sont arrivés à administrer en

injections sous-cutanées 8 centigr., 38 centigr. par la voie

endermique et 40 centigr. par les voies rectale et buccale.

MM. A. Voisin et Liouville ne semblent pas avoir retiré de

grands avantages de la médication par le curare, ainsi qu'il

résulte du passage suivant de leur brochure :

' A. Voisin et Il. Liouville. Etudes sur le curare. Paris, 1866.

52 THÉRAPEUTIQUE. DU CURARE DANS L'ÉPILEPSIE.

« Pour ce qui touche les résultats défini tifs de l'emploi du curare

contre l'épilepsie, nous ne pouvons pour ce moment rien affirmer

dans aucun sens. Nous n'avons pas vu qu'il fût nuisible, mais

rien ne nous autorise non plus à vanter son efficacité. Pour

asseoir sérieusement un jugement définitif sur ses avantages réels,

il nous semble qu'on est en droit d'exiger des observations de

plus longue durée (deux, trois, quatre ans même) et une statis-

tique avec des points comparatifs antérieurs dans une période à

peu près pareille. »

Beigel ' a injecté dans un cas d'épilepsie jusqu'à 13 milligr.

de curarine sans aucun résultat. ·

Le travail de MM. H. Liouville et A. Voisin clôt, en quelque

sorte, la première période dans laquelle le curare a été em-

ployé contre l'épilepsie. Il nous semble s'être écoulé un

certain nombre d'années avant que le curare fut mis de nou-

veau à contribution : il nous faut arriver, en effet, à l'année

1878, époque où il est reparlé du curare.

« J'ai essayé, dit M. Rosenthal 2, dans un certain nombre de

cas, une solution de 5 centigr. de curare dans 5 gr. d'eau, avec

addition de trois à quatre gouttes d'alcool absolu ; pendant deux

ou trois mois, je faisais tous les deux jours une injection sous-cu-

tanée, en allant progressivement de 4 milligr. à 9 milligr. Chez

sept malades que j'ai soignés ainsi (dont quatre cas sans antécé-

dents héréditaires, et deux d'hystérie épileptiforme), et chez cinq

autres malades traités de la même façon à l'asile des aliénés de

Vienne, le médicament n'a produit aucun effet durable. n

M. le Dr Kunze a recommandé dans ces derniers temps

d'une manière pressante le curare dans l'épilepsie. Il a expé-

rimenté le curare chez 80 malades, et aurait obtenu chez 6

d'entre eux une guérison parfaite. Les faits rapportés en

détail par lui tendraient à prouver que, dans toutes les formes

de l'épilepsie, même dans celles où la maladie, déjà ancienne,

a amené un affaiblissement notable de l'intelligence, le curare

peut, dans certains cas, guérir le mal et même rendre un peu

i Beigel. Versuche mit Curare und CKra ? ? : (Be) ? Klin. Wochens-

chrijt, nos et 9, 9867).

2Rosentlial. - Traité clinique des maladies du système nerveux,

trad. de Lubanski. Paris, 1878, p. 547.

3 Kunze. Jahrbuch du Practischeiz Medicin de P. Borner, année 1879,

p. 25 ?

' DE l'hystérie. 53

de son intégrité à l'esprit. Selon cet auteur, la dose de 1 centigr.

de curare en injections hypodermiques serait sans danger. Les

injections étaient faites pendant trois semaines tous les cinq

jours.

Edlessen', encouragé par ces observations, a essayé le

curare dans un certain nombre de cas d'épilepsie confirmée.

Dans deux cas d'hystéro-épilepsie, le curare a échoué. De

treize épileptiques, six ne tirèrent aucun bénéfice du médica-

ment ou ne furent améliorés que passagèrement, trois virent

leurs accès diminuer d'une façon notable avec cessation même

pendant plusieurs mois, tandis qu'auparavant les accès étaient

quotidiens et très violents ; trois malades enfin auraient été

guéris complètement. Dans presque tous les cas d'autres médi-

caments avaient été auparavant administrés en vain 3.

La solution employée par ces deux auteurs était ainsi com-

posée :

5'il RECUEIL DE FAITS.

mère bien portante aussi, impatiente et irritable. Sa soeur aînée

riait et pleurait en disproportion et parfois en contradiction avec

le motif actuel, disposition amoindrie par son mariage. Frère irri-

table. Grand-père maternel aliéné.

Antécédents pathologiques de la malade. - Parmi les accidents

de la première dentition, elle eut des convulsions longues, coïnci-

dant avec destroubles dyspeptiques notables. A l'âge de cinq ans, la

malade, chez qui la marche se fit tardivement et avec difficultés, fut

apportée à l'hôpital Sainte-Eugénie, où elle demeura un an envi-

ron, à cause d'abcès superficiels collectionnés en diverses parties

de son corps, et dont elle porte encore aujourd'hui des cicatrices

évidentes aux régions sus-claviculaire, mammaire et axillaire

droites. Vers cette époque, la malade présente de plus du gon-

flement aux épiphyses des os longs qui ne se déformèrent pas

beaucoup.

A l'âge de sept ans elle recommença à marcher sans appui, les

troubles disparaissant d'une façon progressive, quoique 'lente et

incomplète.

Réglée à douze ans, elle ne l'a jamais été périodiquement; ses

évacuations sanguines se sont toujours montrées sans régula-

rité. Au moins de janvier 1884, entre 10 et 1 1 heures du matin, la

malade fut prise, au milieu de son travail et sans cause appré-

ciable, d'un accès de toux et d'éternument qui se prolongea pen-

dant trois heures, après lesquelles elle se livra à sa vie habituelle.

Huit jours plus tard, un nouvel accès survient, identique au pre-

mier, mais moins long, et s'accompagnant, comme le premier de

quelques phénomènes convulsifs.

Ces accès conlinuèrent de paraître, séparés par des intervalles

plus ou moins grands jusqu'au 2o juin, époque où elle fut reçue

à l'hôpital des Tournelles, d'où elle sortit au commencement

d'août pour venir à la « Salpêtrière ».

Elle raconte n'avoir perdu connaissance que dans les crises

fortes, ce que nous avons constaté dans la salle Duchenne

où elles se manifestaient d'une manière écourtée et atté-

nuée depuis son entrée, lorsque, le 21 octobre, elles redeviennent

plus intenses, circonstance qui nous met à même de mieux les

observer.

Etat actuel (20 octobre). La malade, ayant un embonpoint

assez notable et de taille un peu au-dessous de la moyenne, a été,

dès son jeune âge, facilement émotive; elle a une certaine timidité

dans ses actions et est, en général, assez gaie. L'exploration de la

sensibilité cutanée donne une hêmi-anesthésie, une hémi-pares-

thésie et une hémi-tlrermo-anesthésie gauches; nous devons dire,

néanmoins, qu'à deux reprises l'algesthésie n'était modifiée

qu'aux poignet et main gauches.

DE l'hystérie. 55

Si, fermant ses yeux, on place les membres gauches de la ma-

lade, étendus ou fléchis, dans l'adduction et qu'on lui demande où

ils se trouvent, on constate qu'elle a perdu la notion de leur posi-

tion ; en outre, en lui disant de toucher un des doigts de la main

droite à l'aide de sa main gauche, on voit qu'elle s'y trompe.

L'examen des membres droits donne des résultats opposés.

Sensibilité spéciale. La malade ne distingue pas le violet et

n'est pas sûre du vert, c'est-à-dire qu'elle a un rétrécissement du

champ visuel à gauche; elle entend moins la montre à gauche;

anosmie à gauche, agueusie.

Réflexes tendineux. Rotuliens un peu exagérés; au poignet

gauche presque nuls et au poignet droit peut-être exaltés. Pres-

sion dynamométrique = 39 pour la main droite, = 16 pour la

gauche.

Le 21, à la visite du matin, on nous avertit que la malade

se reconnaît en imminence d'une de ses crises en disant

« qu'elle sent son ventre tournoyer et qu'on va lui arracher le

gosier », pour citer ses propres mots; on y voit une aura quasi

complète et, dans ces conditions, nous avons l'occasion d'assister

aux phénomènes qui vont se dévoiler. En effet, M"° Greuz... s'é-

carte alors de ses compagnes, suspend son occupation et s'assied

près de son lit. Deux ou trois minutes après, elle est prise d'une

toux involontaire, faisant bientôt place à des éternuments, puis la

toux revient au bout de quatre, six ou huit minutes pour ainsi

alterner jusqu'à la cessation complète de ces accès, durant

un temps quia varié entre dix et soixante minutes et se montrant

dans le jour, d'une manière indéterminable, du moins jusqu'ici.

Presqu'immédiatement après le commencement de ces symp-

tômes, ses extrémités sont le siège de convulsions, surtout les

membres droits et les membres pelviens plus encore que les

membres thoraciques. Ces convulsions sont toniques. Ces der-

nières l'emportent de beaucoup sur les toniques; il n'y a jamais

de relâchement musculaire complet, mais on entend un peu de

stertor à la respiration.

Dans les convulsions cloniques qui se répètent nombre de fois,

on observe soit l'arc de cercle, typiquement réalisé, soit des

grands mouvements désordonnés dans lesquels les membres sont

éloignes de son corps, en jetant au loin les objets qu'ils ren-

contrent dans leur passage ou appliqués sur la bouche et sur le nez,

comme dans l'acte d'une personne qui va éternuer. De temps en

temps les membres thoraciques sont agités de mouvements rapides

et rhytmiques qui ont une courte durée et frappent la poitrine

à coups répétés exigeant l'intervention d'une main étrangère qui

en empêche la continuation. Elle s'arrache le cou et les cheveux,

se heurte indifféremment toutes les parties du corps contre

les barreaux du lit, déchire parfois le col de sa chemise ; en un

56 , RECUEIL DE FAITS.

mot, elle cherche à se débarrasser de toutes les causes possibles

de dyspnée\et d'étouffement.

Dans l'attitude de l'arc de cercle, il arrive qu'en un moment plus

ou moins proche de la fin de cette attitude, la malade a des rires

et des pleurs presque simultanés, convulsifs.

Si on la pince-ou si on lui comprime un des points hysté-

rogènes, principalement l'ovarien gauche ou celui répondant au

côté, externe -du sein droit, elle retire sur-le-champ cette partie du

corps ou exécute un mouvement de défense, cela à un moment

quelconque de l'attaque'pen8antzlaquelle ses paupières, agitées

de vives palpitations, sont closes et ne s'entr'ouvent que quand il

se fait une pause, d'ailleurs passagère, entre la toux et les éternu-

ments. " ? '

En écartant ses paupières, on voit les globes oculaires tournés

en haut et agités, eux aussi, de secousses, les pupilles plutôt dila-

tées que rétrécies, mais sensibles à l'influence de la flamme d'une

bougie. Les bruits cardiaques sont, en général, frappés forts,

éclatants et correspondant à des pulsations radiales (entre 90 et

120 par minute), irrégulières, parfois presque imperceptibles.

La malade ne pousse aucun cri, ni présente aucune autre con-

vulsion partielle. A la fin de tous ces phénomènes-là, la malade

transpire sur le tronc; mais principalement sur le cou et sur le

visage où la sueur ruisselle.

Il est curieux de noter qu'il n'y a pas de crachats et que l'écou-

lement nasal est très réduit, ce qui est en désaccord avec les éter-

numents et la toux, mais n'est pas sans valeur pour leur explication.

La malade déclare, lorsque celles-ci sont finies, ne conserver

aucun souvenir de ce qui s'est passé.

La crise que nous avons décrite plus haut ne débute pas toutes

les fois par la toux; par exception, c'est l'éternument qui ouvre

la scène, et il nous semble avoir remarqué qu'alors la crise sera

peu intense. Effectivement, dans cette éventualité, la malade ne se

couche pas, reste sur une chaise et, après avoir eu une aura très

légère, est atteinte d'accès d'éternuments et de toux de courte

durée et présente très peu de mouvements aux membres; les

attaques de celte catégorie ne dépassent guère dix ou quinze minutes

et ne s'accompagnent pas de perte de connaissance. Ses fonctions

végétatives s'accomplissent bien ; l'appétit est conservé même à

la suite des attaques.

Dans le cas que nous venons de rapporter diverses particu-

larités sont importantes à être relevées, surtout quant à l'aspect

qu'ont revêtu les attaques.

M"e Greuz..., nous l'avons vu, a une tare héréditaire

(grand-père maternel aliéné) ; de plus, jusqu'à l'âge de sept

de l'hystérie. 57

ans, elle a été nettement rachitique et scrofuleuse et ce n'est

qu'alors que son état s'améliore de plus en plus.

Dans la suite, une fois la menstruation établie, nous en

voyons des troubles constants et marqués venir s'ajouter et

rendre plus imminente l'explosion des manifestations hysté-

tériques actuelles, que la chlorose et les émotions morales ont

définitivement déterminées.

Ses attaques n'ont pas ordinairement de phénomènes pré-

monitoires nets ; tout au plus devient-elle plus impatiente,

bàille et, une fois, a montré une envie de mordre une voisine.

Toute impression désagréable produite par un choc, par le

cri d'une voisine épileptique, même par une contrariété, suffit

parfois pour faire paraître l'aura à point de départ ovarien et

à laquelle il n'a manqué jusqu'à présent que les battements

aux tempes pour constituer le type décrit par M. Charcot.

Cette aura est presque aussitôt suivie des accès de toux et

d'éternuments, qui tout d'abord ont constitué les premiers

phénomènes de la maladie et qui aujourd'hui encore marquent

le début des attaques, puisqu'il y a à la suite des convulsions

indubitables.

Quelles relations pouvons-nous établir entre ces phéno-

mènes en apparence sans règle et l'attaque complète décrite

par M. Charcot ?

Nous pensons que les phénomènes précédents peuvent être

compris comme il suit : les convulsions cloniques décrites ne

sont pas suivies de la résolution complète des muscles néces-

saire pour indiquer la venue de la seconde période et, s'il y a

le stertor, il n'est jamais intense et il est entendu presque pen-

dant toute la durée de l'attaque. La malade n'a jamais pro-

noncé de phrases, ni n'a exécuté une mimique quelconque,

dénonçant le tableau de la troisième période avec ses deux

phases gaie et triste. Pour la dernière période, tout en riant et

pleurant elle nous dit qu'elle ne voit ni animaux ni rien d'ef-

frayant.

Donc, le désordre et la confusion dans les attaques de notre

sujet ne sont que superficielles et n'échappent, en réalité, pas

aux descriptions de MM. Charcot, Bourneville, Regnard et

Richer. c

La malade ayant été soumise dans deux de ses attaques aux

inhalations d'éther, dont les effets sont apparus au bout de

quatre, six, huit minutes, fait des allusions à sa profession,

58 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

aux heures de son travail en disant entre autres choses :

« Regardez, 111 ? X... m'a confié cette pièce parce que je suis

habile, je m'y entends plus que vous » ; on voit qu'elle s'adresse

à ses compagnes.

A diverses reprises, nous avons compté les éternuments de

la malade et nous avons eu, pendant le même nombre de

minutes, une quantité d'éternuments variables; ainsi tantôt

nous comptions 32, 37, 40 éternuments dans une minute ;

tantôt 100, 95 dans trois minutes; tantôt 161, 149 dans cinq

minutes.

Dans l'espace de vingt-deux jours (21 octobre au 12 novembre)

la malade a fait 16,195 éternuments qui donnent par jour, en

moyenne, à peu près 163. Nous attirons l'attention sur cette

particularité intéressante d'autant plus que les éternuments de

cette nature ont été rarement mentionnées par les auteurs que

nous avons lus. Nous n'avons rencontré que deux cas dans

lesquels il soit question d'éternuments qui n'étaient pas cepen-

dant aussi nombreux, ni aussi fréquents. Ces deux cas appar-

tiennent à Brodie 1.

En terminant, nous nous demandons s'il n'y aurait pas lieu

de considérer les accès de toux et d'éternuments comme devant

être mis sur le compte de l'atténuation et de l'effacement

même, que nous avons noté pour les périodes et de ne voir là

qu'une sorte de compensation, de substitution dans les symp-

tômes hystériques, vu que les éternuments ne sont autre

chose que le résultat de véritables petites convulsions des

muscles expirateurs ?

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE

I. Sur le phénomène'du genou chez les enfants; par Pelizoeus.

(Arch. f. Psych., XIV, 2.)

De trois écoles populaires dill'érentes de Berlin, l'auteur a exa-

miné 2,403 garçons de six à treize ans. Sur une première série de

1 Progrès médical, le 10 juillet 1880.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 59

778, un seul enfant ne présentait pas le phénomène du genou,

sur une seconde de 787, trois seulement en étaient exempts; enfin

une dernière catégorie de 828 révélait chez deux sujets l'absence

de ce réflexe tendineux. Or, l'un de ces six individus, avait eu, six

semaines auparavant une diphthérie grave, sans paralysie, et le

i éflexe patellaire revenait douze semaines plus tard des deux côtés.

L'examen ultérieur de quatre autres démontrait le retour du même

phénomène. Un seul enfant en était privé d'une façon continue;

il s'agissait d'un sujet anémique, faible, mais bien portant, à

muscles peu développés. De sorte qu'en réalité, sur 2,403 garçons,

le phénomène du genou manqua absolument une seule fois. C'est

tout ce qu'il est prudent d'affirmer. P. K.

II. Contributions A la pathologie de l'encéphale; par

L. VVITEONSIiI. (Arch. f. Psych., XIV, 2.)

1°Sous le titre de Dégénérescence descendante à la suite de po-

rencéphtilie, l'auteur complète l'observation anatomique dont il a

déjà parlé '. Consécutivement à une hémorrhagie probable (pig-

mentation de la cicatrice et du voisinage du processus) la subs-

tance corticale adisparu et lefond de la scissuresylvienne se trouve

transformé en une membrane assez épaisse ; il n'existe plus ni

insula, ni circonvolutions frontale, pariétale, temporale autour de

la région, ni capsule interne, ni capsule externe; les gros ganglions

de la base manquent; il ne resle que quelques vestiges de la couche

optique. Le pédoncule cérébral est libre au milieu de la cicatrice.

L'intégrité des tubercules quadrijumeaux et des nerfs prouve, de

concert avec l'absence d'atrophie générale de l'hémisphère, que la

lésion s'était effectuée après l'époque du développement parfait du

cerveau, c'est-à-dire après la puberté. La dégénérescence porto

sur le faisceau pyramidal, sur les fibres issues du genou de la

capsule etsur lefaisceau plusinterne. Intégrité du segment externe

du pédoncule. Atrophie des cordons antéro-latéraux de la région

cervicale de la moelle, de la substance noire du pédoncule et du

noyau rouge de la calotte (de Stilling) ; atrophie de l'étage supé-

rieur du pédoncule, du ruhan de Reil et de la couche intermédiaire

des olives. Intégrité du faisceau longitudinal postérieur et des

noyaux des nerfs crâniens.

2° Le second chapitre, intitulé : Néoplasie osseuse et calculeuse

dans l'encéphale, renferme effectivement l'histoire d'un ostéome

vrai siégeant dans la substance même de l'hémisphère cérébelleux

gauche; on y trouva tous les éléments du système osseux (périoste,

'Dans son travail sur la Névroglie. (Archives de Neurologie, t. VIII,

p. 75.)

60 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

moelle, os). Il s'agissait d'un vieillard de soixante-dix-neuf ans

n'ayant présenté aucun trouble moteur. M. W. fait remarquer que

les calcifications simples sont constituées par des lamelles dues à

l'agglomération de corpuscules stratifiés. On y rencontre des

grains hyalins qui semblent résulter de la trunformation directe

des corpuscules lymphatiques dans l'espace périvasculaire et de la

-dégénérescence hyaline des parois vasculaires et des tissus envi-

ronnants; on sait du reste, que ces altérations peuvent exister sans

qu'ily ait de dégénération calcaire, mais elles précèdent invaria-

blement cette dernière. Chez un malade, on constatait sur la pie-

mère de la fosse cérébelleuse un néoplasme de ce genre, gros

comme une petite pomme, comprimant le cervelet, dont le lobe

inférieur contenait un second nodus semblable, du volume d'une

cerise ; on avait affaire à des papillomes calcifiés.

3° Un dernier paragraphe porte la dénomination de : Note affé-

rente à la pathologie des cellules nerveuses ; c'est un appendice de

M. W. à ses recherches sur la réaction liislocliimique des cellules

et de leurs noyaux Dia pièces provenant d'encéphales mutilés

(vivisection), de ramollissements cérébraux anciens, de lésions

traumatiques du cerveau chez l'homme, ont été soumis à son exa-

men. Nulle part, il n'a trouvé d'altérations des cellules nerveuses

qui indiquassent un processus inflammatoire actif de ces éléments.

En dehors des foyers, ou rencontre d'abord de nombreuses cellules

en voie de destruction granuleuse, plus loin des cellules privées de

leurs noyaux, plus loin encore, en de» endroits qui paraissent

normaux, des cellules munies de leurs noyaux, mais solubles com-

plètement et facilement dans les acides faibles et le suc gastrique

artificiel. P. K.

III. Contribution A la pathologie et au diagnostic de la formation

DE CAVITÉS DANS LA MOELLE ÉPINIÈRE; par FuERSTNER et ZACIIER.

(Arch. f. Psych., XIV, 2.)

Les auteurs essaient de tracer le tableau clinique de la forme

anatomo-pathologique en question, à la lumière d'une observation

personnelle et des autres cas publiés du même genre (Westphal,

Schuppel, Sclrultze). L'évolution comparée de ces quatre faits leur

permet d'affirmer que la lésion (gliomateuse) débute presque tou-

jours dans la substance grise centrale, et qu'elle prend naissance

à la région cervicale, pour ne s'étendre que tardivement aux cor-

dons blancs. Nulle part la substance grise n'est totalement anéan-

tie, mais elle se trouve au moins comprimée quand les éléments

nerveux demeurent conservas. De cette compression et des alté-

1 Archives de Neurologie, t. V, p. 263.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 61

rations consécutives, notamment des cornes antérieures et posté-

rieures, résultent des symptômes qui affectent une marche des

plus chroniques. Ce sont : l'affaiblissement et l'atrophie lente des

extrémités supérieures, des troubles légers de la sensibilité, l'ab-

sence des réflexes tendineux, rarement la rigidité et la contrac-

ture, les troubles trophiques, l'analgésie, la diminution du sens

thermique et du tact, les symptômes vaso-moteurs. Les troubles

du mouvement sont toujours peu importants. Dans les stades tar-

difs, il se produit des phénomènes bulbaires, des symptômes du

côté du trijumeau, des symptômes cérébraux. Quant à l'atteinte

de la substance blanche, elle est secondaire et le masque clinique

correspondant ne présente pas, après la destruction de la subs-

tance grise centrale, les mêmes allures que lorsqu'il résulte de

lésions uniques. P. K.

IV. De l'hystérie considérée dans ses relations avec quelques

maladies localisées; par D. F. C.1S1'ELLS. (Gcccetu naecliccc CQtn,lcG7aa

1882.)

Après avoir rapporté et analysé une observation personnelle et

quelques autres empruntées à ditlérents auteurs, l'auteur arrive

aux conclusions suivantes : '

Io Les divers états que l'on comprend sous le nom d'hystérie

représentent autant de localisations différentes de diverses mala-

dies que compliquent des actes nerveux réflexes distincts;

2° Pour diagnostiquer et classer ces étals, il faut s'attacher tout

d'abord à la lésion organique et à l'altération fonctionnelle qui

les déterminent et qui correspondent toujours à celles de généra-

tion, de circulation ou de nutrition cellulaires. En aucun cas, on

ne peut faire abstraction des données étiologiques, chronologiques

et mosologiques qui leur correspondent;

3" Dans le traitement de l'hystérie toute espèce d'agents thé-

rapeutiques peut devenir nécessaire; mais il faut les employer

avec la plus grande circonspection et les soins les plus minutieux;

4° Le pronostic varie suivant les localisations ou les généralisa-

tions. P, M.

V. Sur la symptomatologie DE la compression DE la MOELLE, par.

CARIE TUBERCULEUSE DES DERNIÈRES VERTÈBRES CERVICALES; par

0. KAHLER. (Praer medici7a. lYochsch/'L., 1883, nez 47.)

L'auteur insiste sur la paraplégie cervicale et ses caractères et

sur ce fait que la compression de la moelle par carie des dernières

vertèbres cervicales s'accompagne généralement d'atrophie mus-

culaire des membres supérieurs, d'abord des interosseux, puis

62 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

pouvant se propager aux muscles de l'avant-bras, du bras, et

même de l'épaule; c'est une atrophie non paralytique; l'examen

éleclrique donnant les mêmes résultats que pour l'atrophie mus-

culaire progressive, les réflexes tendineux du poignet existaient

alors même que les muscles étaient très diminués de volume, pas

de troubles pupillaires ni cardiaques, dans la forme que Kabler

décrit il y avait toujours pahyméningite externe à la face antérieure

de la moelle, aussi pense-t-il qu'on peut diviser en deux groupes les

cas de carie des vertèbres cervicales suivant qu'ils rentrent ou non

dans cette description et s'accompagnent d'autres symptômes

qu'il indique rapidement. Cinq observations sont jointes à ce tra-

vail. P. M.

VI. Contribution A la symptomatologie du tabès; par Berger

(Verlaanal, der schl. Gesellsch. f. vaterl cuit, in Breslauer Earztl.

Ztschft'- 188t, n" 13.)

Rapporte avoir vu plusieurs cas de tabès s'accompagner au début

presque exclusivement de migraine ou de névralgie occipitale; le

phénomène rotulien faisait défaut, ce qui a permis dès le début

de faire le diagnostic confirmé d'ailleurs par la suite de la

maladie.

Insiste aussi sur les troubles vésicaux qui pendant longtemps

(des années) peuvent constituer le seul signe du tabès, et donner

lieu à des erreurs de diagnostic et à l'emploi d'un traitement spé-

cialement dirigé sur les voies urinaires qui en réalité ne sont nul-

lement malades (tabès dysurica). P. M.

Vil. Note sur les rapports de la trépidation épileptoïde du PIED

avec l'exagération DES réflexes rotuliens ; par M. de FLEURY.

(Revue de médecine, 1881, n° 8.)

La trépidation épileptoïde du pied et l'exagération des réflexes

rotuliens sont tenus pour des phénomènes du même ordre, leur

signification et leur valeur séméiologiques pour identiques. L'au-

teur montre la dissociation fréquente des deux symptômes en des

cas fort variés.

Il a rencontré la trépidation épileptoïde du pied avec des ré-

flexes rotuliens normaux dans diverses affections chirurgicales de

la jambe et du cou-de-pied du côté lésé, dans un cas de rhuma-

tisme chronique; avec affaiblissement ou abolition des mêmes

réflexes dans la fièvre typhoïde et sa convalescence. L'anémie ar-

tificielle des membres inférieurs par la bande d'Esmarck ne sup-

prime avant et avec la contracture que la trépidation épileptoïde

du pied. Elle est sans rapport aussi avec le réflexe achillien.

D. B. '

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 63

VIII. Un cas d'affection du trijumeau. (Contribution à la connais-

sance de l'ophtlialmie neuro-paralytique, du trajet des fibres du

goût issues de la corde du tympan, et des tuméfactions articu-

laires intermittentes); par H. STATOR. (Arch. f. Psych, XIII, 3.)

L'observation concerne un homme de trente-neuf ans ayant

subitement présenté une paralysie de la moitié gauche de la face,

une ophthalmie de l'oeil du même côté, de la congestion cépha-

lique (élourdissements, vertiges, tintouins). Insensibilité complète,

au contact, à la douleur, aux impressions thermiques de la peau

et des muqueuses, nasale, labiale, buccale, gingivale, palatine,

linguale, conjonctivale du côté malade. Intégrité des mouve-

ments, de la mastication, de l'odorat; perte du goût, léger affai-

blissement de l'ouïe, conservation des réflexes des deux yeux.

Conjonctivite, bientôt suivie de kératite, de perforation de la cor-

née, sans pannus : guérison par cicatrice vasculaire. En même

temps tuméfactions bilatérales, mobiles, et peu douloureuses des

grandes articulations inférieures. L'intégrité du sensorium, l'uni-

latéralité des accidents de la face excluent l'idée d'une lésion

protubérantielle ou bulbaire ; l'atteinte exclusive du trijumeau

dans ses trois branches et la kératite indiquent que la cinquième

paire est lésée avant sa division, et que le ganglion de Gasser est

altéré. Malgré l'amélioration obtenue à l'aide des ventouses, des

vésicatoires et de K I., il est impossible de se prononcer sur la

nature de la lésion. L'auteur examine, en terminant, la patho-

génie de la kératite neuro-paralytiqne en général, à la lumière

de l'observation clinique. Or, la clinique montre que la théorie de

sa genèse mécanique, par heurts, sécheresse de la cornée, est

fausse, puisqu'une paralysie unilatérale du nerf en question ne

supprime pas le réflexe palpébral spontané ou provoqué, même

d'origine sensorielle, puisque la conjonctivite qui résulte de la

paralysie des paupières (paralysie du facial périphérique) n'en-

traîne jamais de nécrose de la cornée, puisque enfin il existe des

cas d'affection du trijumeau avec anesthésie de l'oeil sans ulcère

cornéen et qu'inversement l'atteinte du trijumeau peut s'accom-

pagner d'ulcère cornéen sans qu'il y ait anesthésie de l'aeil. Dans

toutes ces conditions, la sécrétion lacrymale persiste; elle est

même augmentée quand la conjonctive est enflammée. La kéra-

tite neuro-paralytique provient, par suite, de l'atteinte des nerfs

trophiques issus des ganglions de Gasser. L'intégrité du facial et

du glosso-pharyngien dans l'observation précédente, rapprochée

de la perte du goût constatée, prouve que les fibres gustatives de

la corde du tympan émanent non du nerf de Wrisberg, non du

nerf tympanique, mais du trijumeau. - Quant aux tuméfactions

articulaires, leur évolution, leur modalité (apyrexie, peu d'inflam-

mation locale) permet d'éliminer leur nature rhumatismale, sans

64 le REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

qu'on s'explique leur relation avec l'affection du trijumeau même

par la théorie des vaso-moteurs. P. K.

IX. SUR LES modifications D%NS LES échanges moléculaires DE la

nutrition SOUS l'influence DE l'hypnotisme ET dans la paralysie

AGIT.1\TE; par G. GUERTLER. (Arclc. f. Psych., XIV, 4.

I. Les proportions d'acte phosphorique excrété selon lespériodes

de la journée ne sont pas modifiées par l'hypnotisme. La quantité

laplus faible appartient Ma matinée; puis la phosphaturie augmente

pour atteindre son maximum dans les heures qui suivent le principal

repas; elle est moindre la nuit quolejour(EtudesdeZùlzer, 1"ii-chow's

Archiv. , t. LXVI). Sur vingt-deux faits, M. Gürtler n'a constaté

que trois exceptions ; il s'agissait alors d'un rapport normal

inverse, l'hypnotisme ayant déterminé une phosphaturie plus

forte la nuit que le jour; mais la quantité d'acide phosphori-

que était alors inférieure à celle de la partie correspondante du

jour précédent. La polyurie a été observée, et, quand elle se pro-

longeait, l'urine renfermait moins de matières constitutives

(urée, phosphates, chlorures). Il. Les trois faits de paralysie agi-

tante examinés par l'auteur n'ont pas révélé de phosphaturie ; un

seul témoignait de la polyurie. P. K.

X. Sur un cas de SYPHILIS CRÉ13RO-SPINkLE ; par J. ALTHAUS.

(Centralblutt fier Nervenkeilkunde, Psychiatrie und QïneHc/te

Psychopathologie, 1883.)

Observation très complète, caractérisée par une paralysie avec

raideur du bras et de lajambeducôté droit et de la jambe gauche.

Sur ces parties on note : intégrité delà sensibilité, exagération des

réflexes tendineux, production de convulsions et même d'épi-

lepsie spinale par les excitations de toutes sortes. Traitement initial :

seigle ergoté etK Br : plus tard, phosphore (huile phosphorée en

capsules) et doses modérées de KI., K Br et sublimé. Amélioration

de presque tous les symptômes. Le malade est encore en traite-

ment. Suit l'appréciation critique. P. K.

XI. Sur la SENSIBILITÉ DE la peau A l'égard DES excitants ÉLEC-

TRIQUES ; par P.-J. 111DIUS. (Centralbl. fùr Nervenheilk., etc.,

1883.)

Après l'exposé critique des recherches de Leyden, et Munk,

Bernhardt, Drosdoff, Watteville et Tschirjew, l'auteur décrit son

mode de contrôle. L'excitation unipolaire (Ka= un pinceau à fils

métalliques, flexibles et secs) d'un courant induit ne lui permet

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 65

point encore de -donner des moyennes. Toutefois, par ce procédé,

ou en intercalant dans le circuit de grandes résistances, et en fai-

sant intervenir les décharges d'ouverture par série de trois (An au

sternum ou dans la main gauche, Kâ sur le lieu d'excitation), il

constate que c'est la peau de la face qui présente la plus grande

sensibilité; les membres inférieurs sont moins sensibles que les

membres supérieurs, et la surface des mains et des pieds (insensi-

bilité de la paume et de la plante) forme un contraste par rap-

port au reste du revêtement tégumentaire. Ces différences tien-

nent surtout, pour M. Moehius, à la variété d'excitabilité des nerfs

de la peau ou des organes centraux; l'exercice plus ou moins sou-

tenu des régions envisagées entraîne une sensibilité plus ou moins

exquise. Il faut encore faire intervenir l'adaptation naturelle de

telles ou telles parties à tel ou tel mode d'excitation ; les unes

sont destinées à la perception de la douleur, les autres point. La

résistance épidermique n'a rien avoir dans l'espèce. Non plus que

leur richesse en filets nerveux, car les plus petites électrodes sont

capables' d'atteindre un nombre suffisant d'appareils terminaux

pour que les centres analysent la sensation et distinguent entre

l'intensité de l'excitation et l'aire de la zone excitée. Il est ab-

solument inutile de s'appliquer déterminer un minimum de dou-

leur et un minimum de sensibilité. Lorsqu'en effet, pour apprécier

une sensation cutanée, on est obligé d'augmenter la force d'un

courant. la fonction des parties profondes entre en jeu. Ainsi,

pour le front et la joue, le minimum de sensibilité tactile relève

d'une force de courant presque identique, tandis que, en ce qui

concerne la sensibilité à la douleur, le front est beaucoup plus vite

impressionné, le périoste sous-jacent se mettant de la partie.

Quant au caractère de la sensation, la piqûre d'aiguille qui ré-

sulte de l'excitation farado-cutanée, est peut-être due à une série

d'excitations rapides et successives sur les organes terminaux,

tandis que les formications de modes variés ayant la même ori-

gine témoignent de l'excitation de petits troncules cutanés.

La sensibilité de la peau vis-à-vis du courant continu (An à la

main,Ka sousforme de pinceau) exige presque partout une forcede

courant identique, si ce n'est à la main ou au pied où le galvano-

mètre dévie de l 50 à 220 sans qu'on ait réussi à produire de brûlure

douloureuse. Telle est lasubstance de ce mémoire dont les par-

ticularités sont relevées, comparativement avec celles des auteurs

précédemment cités, dans un tableau de neuf colonnes. P. K.

XII. Un cas d'atrophie faciale rl ? M1LATÉnALE; par bKRKHAMT.

(Centralb. f. Neruenleeilk., 1883.)

Une jeune dame de dix-neuf ans voit apparaître sur le front et

la joue gauche une tache brune (premier signe d'un trouble de la

Archives, t. IX. S

66 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

nutrition ? ) : elle la frotle avec une pommade irritante de compo-

sition inconnue, et, quelques mois plus tard, alors que les phé-

nomènes intlammatoires sont guéris, se développent, du même

côté, les dépressions caractéristiques de l'atrophie. Intégrité de

coloration de la peau (excepté sur la cicatrice du foyer trauma-

tique) ; intégrité de la langue, des rebords alvéolaires, des dents,

du palais, du nez, de l'oreille, des sens, de la sensibilité, de la

motilité, du sympathique, des masticateurs, de l'excitabilité élec-

trique. La maladie a cessé de progresser dans les derniers mois :

faut-il attribuer cette amélioration au traitement galvanique du

grand sympathique (d'une apophyse mastoïde à la moelle cervi-

cale) et à la faradisation modérée des muscles de la face du côté

gauche ? P. K.

XIII. Sur une fréquence extraordinaire DE la respiration inter-

Piétée COMME UN ÉPISODE D'ÉPILEPSIE SPINALE; par le D..MlLIOTTI.

(Giornale di Neuropatologia. Novembre-décembre 1883.)

L'intéressante observation qui fait l'objet de ce travail concerne

une femme de trente-cinq ans confinée au lit depuis trois ans par

une paraplégie qui, bien qu'incomplète, empêche complètement la

locomotion; il y avait aussi desdouleurs dans le dos, des secousses

dans tout le corps, fourmillements dans les membres, surtout dans

les inférieurs et fréquence de la respiration avec alternatives d'a-

méliorations et d'aggravations; il y aurait eu aussi une douleur en

ceinture avec éruption de zona qui se serait répétée plusieurs fois ;

à différentes reprises grande difficulté pour uriner.

En examinant la colonne vertébrale, on constatait une absence

des apophyses épineuses de la huitième et de la neuvième dorsale,

et lorsqu'on pressait un peu à ce niveau la malade éprouvait une

sensation pénible toute spéciale, il lui semblait qu'elle allait s'é-

vanouir. La malade peut encore fléchir et étendre les jambes

dans son lit quoiqu'assez lentement, elle présente une épilepsie

spinale très prononcée; un peu d'hyperalgésieetaussi d'anesthésie.

Pas d'atrophie musculaire, ni de troubles trophiques. Mais le symp-

tôme qui incommode le plus la malade, c'est une fréquence tout à

fait extraordinaire de la respiration jusqu'à 90 à 100 R. par mi-

nute, pendant que le pouls reste à 80 ou 83, et la température

normale; ces accès de respiration accélérée durent un temps va-

riable de un quart d'heure à cinq heures, et se renouvellent sou-

vent deux fois par jour, soit spontanément, soit provoqués par une

émotion, par une pression brusque et imprévue sur l'épigastre ou

le dos; c'estle premier accès qui chaque jour dure le plus long-

temps.

L'auteur se livre ensuite à une discussion approfondie sur la

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 67

nature de cette dyspnée et de l'affection qui lui a donné naissance.

Maladie du poumon, du coeur, du rein ; altération du sang,

sans oublier les différentes maladies nerveuses qui s'accompagnent

de paraplégie. Peut-être M. Miliotti élimine-t-il cependant un peu

trop facilement l'hystérie, cause si fréquente des manifestations

nerveuses extraordinaires; quoi qu'il en soit, la conclusion à la-

quelle il arrive est qu'il s'agit d'une compression lente de la moelle

épinière, consécutive à la carie de quelques vertèbres dorsales. -

Quant à la fréquence des mouvements respiratoires son méca-

nisme fait aussi l'objet d'une discussion minutieuse après laquelle

l'auteur admet qu'elle est due à la lésion médullaire et n'est autre

chose que l'expression d'une épilepsie spinale des muscles respi-

ratoires. Ce travail se recommande tout particulièrement par l'in-

géniosité des rapprochements entre les données de la physiologie

et les symptômes observés. P. M.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE

1. Sur la pathologie de la manie; par J. `V1GLESNORTH. (Journal

of mental Science, janvier 1884, p. 485.),

Quand on veut étudier fructueusement le fonctionnement nor-

mal ou anormal d'un organe, il ne faut pas se borner à le consi-

dérer à sa période d'entier achèvement, il faut encore suivre atten-

tivement son développement. En appliquant cette méthode au

cerveau, on arrive à cette conclusion importante que, dans le

cerveau humain, les centres les plus élevés sont ceux dont l'évolu-

tion s'est accomplie en dernier lieu, et ceux aussi, par conséquent,

qui sont le plus accessibles à la déchéance. Cette proposition est

une de celles qui jettent le plus de lumière sur la pathologie

mentale.

L'opinion de M. Wiglesworth, déduite de la proposition qui pré-

cède, est que l'ensemble de symptômes cliniquement désigné sous

le nom de manie a pour substratum anatomique une affection,

fonctionnelle ou organique, des plexus coordonnateurs les plus

élevés du cerveau. Cette théorie explique d'une façon satisfai-

sante la succession des phénomènes dans l'accès ordinaire de la

68 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

manie. Voici d'ailleurs l'eX) lication que M. Hughlings Jackson

donne de la manie épileptique : «Lorsque disparait, dit-il, l'in-

fluence de quelques-uns des groupes nerveux les plus élevés, les

groupes nerveux immédiatement inférieurs, désormais privés de

contrôle, entrent brusquement en activité, et c'est à leur activité

.que sont dus les mouvements maniaques. Dans l'ordre physique,

' il y a perte de fonction de quelques-uns des groupes nerveux les

plus élevés, et accroissement d'activité des groupes immédiate-

ment inférieurs; dans l'ordre psychique, il y a perte de conscience

et manie. »

Cette théorie de la manie post-épiloptique par épuisement parait

à l'auteur en tout point applicable à la forme ordinaire de la

la manie. Il est évident que, suivant cette manière de voir les

portions du cerveau dont l'activité produit les manifestations que

nous appelons maniaques, sont en réalité les portions saines, et

qu'elles constituent la majeure partie de l'organe, tandis que la

lésion réelle n'occupe qu'un espace irès limilé. 11 y a hieu à la

vérité dans les parties saines un certain degré d'hyperémie, mais

cette hyperémie est secondaire ; c'est l'hyperémie de tous les or-

ganes en état de suractivité.

En résumé, pour M. Wigtesworth, « la manie est une maladie

primitive des plexus coordonnateurs les plus éle\és de l'écorce

cérébrale; par suite de l'abolition, permanente ou temporaire, des

fonctions de ces centres, les centres inférieurs, qui comprennent

la plus grande partie de l'écorce cérébrale, sont mis en activité ;

la tendance même de ces centres inférieurs à entrer en suractivité,

détermine au moyen d'une excitation réflexe, par la voie du

système vaso-moteur, l'afflux d'une quantité supplémentaire de

sang dans ces pallies, absolument comme s'il s'agissait d'une

glande qui entre en activité; cet afflux sanguin supplémentaire

dure tout autant qu'il est nécessaire de pourvoir à la suractivité

fonctionnelle ».

M. Wiglesworth s'attache ensuite à démontrer que cette théorie

explique d'une manière très satisfaisante les phénomènes observés

dans la manie.

Cherchant ensuite à localiser la maladie, il fait remarquer que

puisque, selon toute probabilité, le cerveau tout entier est re-

présenté dans les lobes frontaux, il est légitime de penser que

c'est dans la région frontale qu'il faut chercher les plexus les plus

tardivement développés, bien qu'à la vérité ils ne soient pas

nécessairement confinés d'une façon exclusse dans cette région.

A ce propos, l'auteur tient à bien établir que les conclusions qu'il il

a établies plus haut relativement à la nature de la manie sont en-

tièrement indépendantes des hypothèses qu'il propose au siège de

la maladie, en sorte que celles-ci peuvent être reconnues erronées,

sans que celles-là soient atteintes.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 69

Enfin 11. \\'iles-orlli s'explique, en terminant, sur un dernier

point; dans sa définition de la manie, il l'a donnée comme une

maladie fonctionnelle ou organique; il existe en effet des manies

qui sont tellement passagères qu'il parait bien difficile de les rat-

tacher à autre chose qu'à un simple trouble fonctionnel; d'autres,

au contraire, sont tellement durables et aboutissent à une ruine in-

tellectuelle si complète qu'on e-t contraint d'admettre une lésion

matérielle des cellules nerveuses, que nous ne connaissons pas

encore, mais sur la nature de laquelle les progrès de la science

jetteront certainement un jour la lumière. R. M. C.

II. De l'éducation spéciale des infirmiers d'asile; par A. CAMPBELL-

CLwE. (Journal of mental Science, janvier, 1884, p. 459.)

L'auteur est convaincu que le meilleur moyen de se procurer et

de retenir de bons infirmiers pour les asiles d'aliénés consiste à

relever leur situation sociale à leurs propres yeux et aux yeux du

public : l'une des façons les plus sûres d'alleindre ce résultat, c'est

de leur donner une éducation professionnelle aussi complète que

possible.

C'est dans la fréquentation même des infirmiers que M. Clark a

puisé ses premières idées sur le sujet qu'il traite actuellement; il a

pu s'assurer que, bien que remplissant leurs fonctions d'une façon

un peu mécanique, ils ne montraient, aux heures de loisir, aucune

répugnance à exercer leur intelligence; souvent même ils faisaient

preuve, en matière de diagnostic, d'une habileté à laquelle il ne

manquait que d'être plus éclairée, et ils témoignaient, à l'égard

descas qu'ils observaient journellement, d'un intérêt qu'il parais-

sait aisé de stimuler dans un but médical. Cette petite étude du

personnel placé sous ses ordres conduitl'auteuràpenser : 1°qu'il

existe une barrière trop grande entre les fonctionnaires de l'asile

et les infirmiers; 2° que les qualités intellectuelles et morales des

infirmiers ne sont pas utilisées au*si largement qu'elles pourraient

l'être; 3, que les infirmiers doivent être étudiés individuellement,

comme les malades eux-mêmes.

Profitant alors d'une circonstance favorable, et mettant à con-

tribution le zèle de la surveillante en chef (celle-ci, instruite dans

les hôpitaux de Londres était une infirmière expérimentée),

M. Clark réussit à faire pénétrer, doucement et tacitement, par

voie de comparaison, dans l'esprit des autres infirmières, le senti-

ment très net de l'insuffisance de leur éducation professionnelle :

ce sentiment se traduisit par une curiosité intelligente et un désir

visible de s'instruire. Sans laisser à ces bonnes dispositions le

temps de s'éteindre, l'auteur organisa rapidement, tant bien que

mal, une série de leçons. Le nombre decesleçons fut de dix-huit ;

70 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

le nombre moyen des auditeurs fut de vingt, sur vingt-six in-

firmiers et infirmières; la présence aux cours n'était pas obliga-

toire. Des examens eurent lieu; leur résultat fut à la fois, pour

l'auteur, une surprise et un désappointement; tous les candidats

répondirent bien ou mal aux questions pratiques : la moitié d'entre

eux seulement répondirent aux questions d'anatomie et de physio-

logie ; les réponses étaient suffisantes. Le nombre des candidats

fut de quinze au premier examen, de dix-sept au second. Le

maximum étant fixé à cent points, il fallait avoir obtenu soixante-

cinq points au moins et avoir assisté à quatorze leçons pour ob-

tenir un certificat de première classe ; trente-cinq points au moins

et la présence à douze leçons étaient nécessaires pour obtenir un

certificat de seconde classe. Les résultats furent les suivants : sept

candidats obtinrent plus de soixante-cinq points; quatre ob-

tinrent moins de soixante-cinq points, mais plus de trente-cinq;

enfin huit n'atteignirent pas trente-cinq points. Les échecs se ren-

contrèrent surtout parmi les hommes; on pouvait les attribuer

surtout au manque d'éducation première, plutôt qu'au manque

d'aptitude, peut-être aussi, dans quelques cas, à l'absence d'ambi-

tion. Il faut ajouter que le personnel masculin avait un service

plus chargé que le personnel féminin. Enfin l'auteur put s'assurer

que plusieurs des leçons avaient été trop élevées pour la moyenne

des élèves.

La seconde série de leçons faite d'une façon plus utilitaire fut

assidûment suivie, et réussit mieux que la première. Des prix

furent donnés aux trois meilleures compositions sur les hallucina-

tions, l'observation de trois malades servant de base à chacune

des compositions; trois hommes et cinq femmes prirent part à ce

petit concours. Le résultat des examens fut très satisfaisant; cinq

femmes et quatre hommes obtinrent un certificat de première

classe; une femme et trois hommes un certificat de seconde

classe.

Un autre résultat favorable fut indirectement atteint : des sortes

de conférences s'établirent entre les élèves ; ils discutèrent et com-

mentèrent les leçons ajoutant ainsi l'enseignement mutuel à l'en-

seignement du maître; enfin les élèves se piquèrent d'émulation ;

cette émulation fut surtout marquée entre les deux sexes, où elle

ne fut pas toujours exempte d'un sentiment moins noble, celui de

lajalousie et du mauvais vouloir : mais ce n'estlà qu'un inconvé-

nientqui a déjà diminué, et que l'avenir ne fera qu'amender en-

core.

L'auteur demande, en terminant, que l'Association médico-

psychologique prête son concours à l'étude de cette question; l'é-

ducation professionnelle des infirmiers d'asile constituera une in-

novation profitable à tout le monde, aux infirmiers eux-mêmesdont

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE 71 1

le niveau social et intellectuel sera élevé, et aux médecins dont la

tâche sera singulièrement facilitée.

Enfin M. Clark soumet à l'Association un projet dont les bases

seraient à peu près les suivantes :

1- Des mesures seraient prises d'une façon simple et à titre

d'essai, sous le patronage de l'Association médico-psychotonique,

pour que les surintendants médicaux d'asiles qui seraient dis-

posés à faire l'essai loyal de ce système entrassent dans une com-

binaison dont la durée minimum serait de deux ans; 2° l'épreuve

à tenter consisterait uniquement à donner un enseignement spé-

cial, non obligatoire, consistant en des leçons pendant l'hiver et

en enseignement au lit du malade, dans la mesure où les exigences

de chaque asile le permettraient; et à délivrer des certificats spé-

ciaux de première, de deuxième et de troisième classe, suivant

l'importance et la durée des services; 3" une liste officielle des in-

firmiers ou infirmières qui auraient obtenu des certificats serait,

au bout de deux ou trois ans, imprimée et distribuée par les soins

et aux frais de l'Association ; 4° les médecins d'asile qui entre-

raient dans cette combinaison, nommeraient une commission

munie des pouvoirs nécessaires pour prendre les dispositions et

établir des règles propres à mener à bien la tentative dont

il s'agit. R. M. C.

III. Contribution A la casuistique DES psychoses consécutives

aux maladies fébriles; par L. Kirn. (Allg. Zeitsch. f. Psych..

XXXIX, 6.)

Sept observations sont consignées. Elles n'apportent aucune

modification aux travaux de Kroepelin '. L'auteur insiste simple-

ment sur l'acuité des symptômes et la rapidité de leur évolution

dans l'espèce, sur l'étal d'affaiblissement psychique possible, sur

les traits si vagues des formes vésaniques. Pour lui, les psychoses

fébriles sont caractérisées par un délire auquel le moi prend peu

de paît, tandis que les psychoses asthéniques se rapprochent des

conceptions formées par le fou proprement dit; les premières

seraient courtes, mais d'un pronostic fâcheux ; les secondes se pro-

longeraient sans danger. Aux lésions somatiques graves corres-

pondraient les psychoses du stade initial de la maladie, aux alté-

rations anatomiques modérées appartiendraient les psychoses des

périodes avancées. La prédisposition jouerait un rôle très impor-

tant ; nervosisme. émotion morale, hérédité psychopathique ou

neuropathique. P. K.

1 Voy. Archives de Neurologie, t. II, p. 263, et t. IV, p. 105.

72 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

IV. SUR LE CARACTÈRE ET LES R\LLUCIVAT10\S DE JE\ ? \E D'AnC; par

William IRELAND. (Journal of mental Science, janvier 4883,

p. 483, et avril 1883, p. 18.)

On est quelque peu déçu lorsque, après avoir lu les deux articles

consacrés au caractère et aux-hallucinations de Jeanne d'Arc, on

s'aperçoit que l'auteur ne conclut pas, ou qu'il conclut à peine, en

des termes dont la réserve confine à la timidité. Toute la première

partie du travail est purement historique, et puisée aux meilleurs

sources; c'est en effet dans les documents relatifs au procès d'abord

et ensuite à la réhabilitation de Jeanne d'Arc que 111. Ireland a

cherché les éléments de ce résumé historique, où les hallucinations

de l'héroïne aussi bien que les principaux traits qui peuvent

éclairer son caractère sont soigneusement notés au passage, mais

sans commentaires. C'est dans les deux dernières pages seulement

que l'auteur laisse entrevoir son opinion; voici les principaux

points de cette dernière et courte partie de son travail : lorsqu'elle

se réclame sans cesse de l'intervention divine, Jeanne d'Arc peut

paraître absolument digne de foi à ceux qui admettent volontiers

le surnaturel dans l'histoire, et son aptitude à jouer le rôle diffi-

. cile qu'elle s'était donné pourrait être considéré comme la preuve

du choix fait par une sagesse supérieure à la sienne propre, plutôt

que comme le résultat des excitations mal réglées d'une affection

nerveuse. D'auho part, il est certain, et l'auteur en cite plu-

sieurs exemples, que ses voix l'ont, à diverses reprises, induite en

erreur.

Elle n'avait que vingt ans lorsqu'elle est morte ; si elle avait

vécu plus longtemps, il est probable que la marche des phéno-

mènes aurait révélé plus clairementle caractère de ses «délusions».

Brierre de Roismont a montré à la vérité que les hallucinations

sont compatibles avec l'état de raison ; mais si quelques personnes

ont pu avoir des hallucinations sans que leur raison fût troublée,

on considère à bon droit que les hallucinés sont des gens dont la

raison est ou atteinte ou bien près de l'être. Il est tel acte de

Jeanne d'Arc à propos duquel on ]t ferait atijoui-d'liiii comparaître,

non devant des docteurs en théologie, mais devant des docteurs en

médecine, et leur décision ne serait pas douteuse. Mais elle vivait

aune époque où on croyait à de fréquentes communications des

hommes avec les esprits : toute la difficulté se réduisait à savoir si

ces esprits étaient bons ou mauvais; faut-il s'étonner que la

paysanne de Domremy ait partagé l'universelle crédulité. La

grande difficulté consiste à donner l'explication des premières

« délusions » de Jeanne , lesquelles paraissent se rattacher à des

hallucinations de l'ouïe et de la vue. L'auteur déclare qu'il n'a,

à cet égard, aucune explication claire à fournir, et qu'il s'est pro-

posé seulement de retracer les principaux événements de la car-

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 73

rière de Jeanne d'Arc de façon à mettre les i)q3-eliologis[es en me-

sure de se faire une opinion. H.M.C.

V. NOTE SUR QUELQUES cas propres a démontrer l'importance qu'il

Y A A RECHERCHER TOUTES LES CIRCONSTANCES ENVIRONNANTES LORS-

QU'IL s'agit d'apprécier l'état mental d'un I\L1D1. ; par SAMUEL

Wilks. (Journal of mental Science, janvier 1883, p. 549.)

Cette note a été inspirée à M. par la lecture d'un article

précédemment publié par le Mental Science et dans lequel l'auteur

insistait sur la nécessité de connaître tous les tenants et aboutis-

sants d'un malade avant de se prononcer sur son état mental. En

effet, « le vrai peut quelquefois n'être pas vraisemblable » et l'on

conçoit qu'il puisse se présenter telle circonstance où une asser-

tion qui, considérée absolument, peut et même doit paraître par-

faitement déraisonnable, se trouve néanmoins entièrement con-

foime à la réalité des faits.

M. Willzs (qui n'e.-t pas aliéniste, mais qui est l'un des médecins

les plus instruits et les plus occupés de Londres) a pu observer un

certain nombre de cas, où des erreurs ont été bien près d'être

commises, soit par lui-même, soit par ses confrères. Le plus ins-

tructif et le plus significatif de ces cas est celui dont voici le ré-

sumé :

Il s'agit d'un homme qui fut examiné par cinq médecins, au

nombre desquels se trouvait M. Wiiks lui-même ; à la vérité aucun

des cinq médecins n'était aliéniste. n'v eut qu'une voix pour dé-

clarer le malade aliéné ; heureusement il n'était point question

d'internement, et il ne fut ni demandé, ni donné de certificat. Le

malade était un homme du monde, que M. Wilks connaissait fort

bien de nom et de vue, qui habitait dans un des faubourgs de

Londres une maison détachée, possédait chevaux, voilures, domes-

tiques, etc.; il menait le train d'un homme riche, et on lui attri-

buait en effet une grande fortune. Un jour, cet homme se met au

lit, refuse de manger, maigrit, souffre d'une insomnie continuelle,

et déclare qu'il ne vivra pas jusqu'à Noël (on était en automne).

Lorsque M. \Villa fut appelé en consultation, les médecins trai-

tants lui apprirent que le malade était plongé dans une grande

mélancolie, qu'il éprouvait des craintes illnsoireslesplusterribles,

qu'il ne cessait de parler de sa propre perversité, de l'avenir ter-

rible qui l'attendait, alors même qu'il échapperait à la justice; il

ne cessait de demander si l'on n'étaitpas venu le chercher pourle

conduire en prison. Il déclara à M. Wilks que toute tentative de

consolation était superflue, qu'il ne vivrait pas longtemps, et que

lorsque le matin survenait il ne savait jamais s'il ne serait pas en

prison le soir. « Il était, dit 11. 1'illcs, lout à fait inutile de cher-

74 4 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

cher à raisonner avec lui. » Deux médecins l'avaient déclaré mé-

lancolique depuis quelque temps ; les deux autres médecins qui le

soignaient actuellement et M. Willis lui-même ne purent que con-

firmer le diagnostic. La femme du malade, interrogée avec le

plus grand soin, ce point est à noter n'avait pu donner au-

cun renseignement sur les causes qui avaient pu réduire son mari

à ce triste état. Quelque temps après, un parent du malade alla

voir M. Wilks et lui apprit que les assertions du pseudo-aliéné

étaient aussi exactes que ses terreurs étaient légitimes : tuteur

d'enfants orphelins, il avait détourné et dissipé la fortune qu'il

avait mission de gérer; au moment où il se mit au lit et témoigna

des craintes qui paraissaient illusoires à son entourage, l'instant

approchait où ses malversations allaient être découvertes, et rien

n'élait plus naturel et plus logique de sa part que de s'attendre a

toute minute à une descente de police.-Lafamilie, très désireuse

d'éviter un scandale judiciaire, fit de grands sacrifices et put dé-

sintéresser à peu près complètement les pupilles frustrés qui ne

déposèrent pas de plainte; à partir du moment où cet arrange-

ment fut conclu, le malade revint à la santé. R. M. C.

VI. Un C\S de perte aiguë de la mémoire; par G. SAVAGE. (Journal

cf mental Science, avril, 1883, p. 85.1

Les cas de perte de la mémoire ne sont pas rares ; mais dans le

cas dont il s'agit, la perte a été beaucoup plus soudaine et plus

complète que d'habitude. M. Savage se déclare fort embarrassé

pour poser un diagnostic; s'il fallait absolument en donner un il

inclinerait à penser que c'est une paralysie générale qui va se

développer. Voici le résumé très succinct de cette longue observa-

tion :

Femme de quarante ans, une tante paternelle aliénée; un en-

faut, âgé de vingt ans; son mari a eu une maladie fort longue,

qui a sensiblement diminué ses ressources : le 8 octobre 1882. elle

a eu une attaque, qui a été considérée, dit-on, par le médecin,

comme simplement hystérique ; c'est à partir de ce moment qu'elle

a perdu la mémoire. Elle dit actuellement qu'elle est mariée depuis

quatre ans, que son enfant en a seize ; elle ne sait ni où elle est, ni

où elle a été; elle répète indéfiniment une même question sans se

souvenir qu'on lui a répondu. Ni agitation, ni exaltation, ni hallu-

cinations, ni illusions, ni mélancolie. Si on lui demande en quelle

année on est, elle donne un jour une date et le lendemain une

autre : elle ne sait pas non plus le jour de la semaine, à moins

qu'un journal ne tombe sous sa main et ne le lui indique. Elle ne

sait ni le nom du médecin, ni le nom de la surveillante, ni si elle

est à Londres ou à la campagne. Elle ne se rappelle ni un tableau,

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 75

ni une odeur, ni un goût. Chaque jour, elle déclare qu'elle est

redevenue elle-même et qu'elle a recouvré la mémoire : vérifica-

tion faite, au bout de deux minutes, les faits et les visages sont de

nouveau effacés de son esprit. Le 2 décembre, à son lever, elle

titube et paraît étourdie; on la recouche, elle a un peu de para-

lysie motrice du bras gauche, avec déviation conjuguée des yeux

à droite ; elle a perdu connaissance ; revenue à elle, elle est apha-

sique, et n'a conservé que quelques mots allemands (elle parle

bien cette langue, ayant habité l'Allemagne pendant plusieurs

années avant son mariage) ; on constate une paralysie motrice

très peu marquée du bras gauche, et existant à peine à la jambe

gauche; elle est dans un état de semi-inconscience et parait avoir

une sorte d'inquiétude dans tout le côté gauche. Au bout de plu-

sieurs heures, elle reprend entièrement connaissance; la faiblesse

à gauche est alors marquée. Depuis cette époque, même état

qu'avant J'attaque peut-être avec une très légère amélioration de

la mémoire.

La portée de l'attaque convulsive est considérable. On est auto-

risé par divers points de l'observation, à dire que s'il y a une alté-

ration cérébrale, elle a son siège dans la moitié droite du cerveau ;

quant à déterminer s'il s'agit d'une lésion corticale, d'un épanche-

ment dans les membranes, ou d'une dégénérescence affectant peut-

être la couche optique droite, c'est-là un problème que M. Savage

ne se trouve pas en mesure de résoudre.

Dans la seconde moitié de janvier,le mari de la malade mourut ;

comme l'avait prévu l'auteur, l'impression de chagrin produite

par celte nouvelle, très marquée sur le moment, fut oubliée en un

instant; on répéta la nouvelle, même émotion vive, même oubli

presque instantané.

Il faut ajouter que la faculté d'associer les idées n'est aucune-

ment troublée, et que la notion d'un grand nombre de faits fon-

damentaux ou acquis par l'éducation subsiste à peu près intégra-

lement ; par exemple elle connaît et emploie aussi bien que jamais

la table de multiplication ; elle peut lire, définir un objet, le nom-

mer quand on le lui présente ; mais elle n'a pas plus la mémoire

des choses lues que des choses entendues. Elle n'a pas plus oublié

la musique que les mots, elle reconnaît les notes 1 l'oreille et à la

vue, et peut jouer du piano de mémoire.

La place d'une telle malade est-elle dans un asile ? En tant que

folle, non sans doute; mais peut-on considérer comme respon-

sable une personne dont les impressions sont aussi fugitives, la

mémoire des choses les plus récentes aussi oblitérée ? Libre, ne

serait-elle pas à la merci du premier venu ? C'est à ce point de

vue que son internement constitue une mesure de sécurité. L'au-

teur la traite comme un cas de démence progressive ; il est pro-

bable en effet qu'elle aura d'autres attaques qui affaibliront encore

76 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

sa mémoire eu même temps qu'elles feront tomber son intelligence.

Quant aux lésions anatomiques, ce seront probablement des lé-

sions se rattachant à la paral3'sie .inérale, ou bien celles qui

caractérisent les modifications post-apoplectiques. R. 1)1. C.

VII. SUR LES maladies mentales consécutives a une élévation DE la

température EXTÉRIEURE; par R. Victor. (Allg. Zeitsch. f. Psych.,

XL, 1 et 2.)

Un premier groupe résulte du coup de chaleur, c'est-à-dire de

l'action générale de la chaleur ambiante sur l'organisme soumis

en entier à celle-ci. L'excès de chaleur atmosphérique engendre

alors des psychoses anisi caractérisées. A la suite de prodromes

constitués par du malaise, de la lassitude, de rafïaibti-sement de

la mémoire, de la céphalalgie, de l'angoisse prrcordiaie. survient

une exagéralion delà sensibilité des organes sensoriels; des hallu-

cinations vives et animées deviennent la cause d'une agitation

maniaque aiuc, ou, plus rarement, d'une profonde mélancolie. On

a vu également, dans les mêmes condition0, des com ulsionc, de la

démence aiguë, des tentatives de suicide, de la stupidité, une

anxiété excessive. La soudaineté des phénomènes, leur acuité,

voilà le cachet de l'évolution des manifestations qui tantôt dis-

paraissent complètement sans laisser de traces, après un sommeil

de vingt-quatre heures, tantôt se transforment en une entité

chronique semblable à la paralysie générale. Ces accidents sé-

vissent surtout sur des troupes on marche, ils affectent de préfé-

rence des soldats déjà malades. La mort en est le résultat dans

40 à 0 p. 100 des cas. Ou peut aussi observer des troubles men-

taux chez les individus qui vivent dans un milieu artificiel sur-

chauffé (ouvriers de fabriques, chauffeurs de machines, boulangers,

chauffeur ? de bateaux, etc.). Il s'agit, dans l'espèce, de lipotliviii,es.

de convulsions «Ioniques avec vomissements, myosis et immobilité

pupillairc, entraînant une mort rapide ou même instantanée.

L'ensemble des faits recueillis par l'auteur dans la bibliographie

(une seule observation lui est personnelle) montre que la satura-

tion de l'air par de la vapeur d'eau, des poussières, des émana-

tions humaines, la surcharge des manoeuvres ou des fantassins

par des fardeaux trop lourds, l'excès de transpiration, l'alcoo-

lisme, les fatigues antérieures, physiques ou morales, constituent

autant du causes prédisposantes. La température du corps des

victimes s'élève souvent jusqu'à -10 et 4a°; par conséquent, la

pathngénie doit être imputée à un arrêt dans l'équilibration phy-

siologique de la chaleur somatique ; le mécanisme des altérations

(hémorrhagies encéphaliques, etc.) doit donc être le même que

dans les cas d'hyperthcrmie fébrile.

Le second groupe des affections mentales de cet ordre relève de

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 77 Î

l'insolation ou coup de soleil. Ici, l'action du calorique, plutôt locale,

porte principalement sur la tête et la nuque; le soleil ou toute

autre source de chaleur artificielle rayonne vivement sur ces ré-

gions. M. Victor en a recueilli quinze observations à l'asile d'E-

berswalde. Tous les sujets étaient des hommes qui avaient été

exposés pendant des années à une chaleur rayonnante intense,

cinq d'entre eux présentaient de l'hérédité... un seul était buveur.

Cinq avaient eu jadis une maladie grave. Absence de syphilis. Une

affection organique du coeur. En général, la psychose avait débuté

graduellement par de l'agitation accompagnée de douleurs cépha-

liquesou par uu stade prodromique de dépression profonde, sinon

de mélancolie vraie, avec tendance au suicide. Puis, ou bien il

s 'était développé le tableau cliniquecomplet delà paralysie générale

(dix cas), ou l'on avait assisté, soit à de la lypémauie (deux cas),

soit à de la folie systématique (trois cas). Neuf morts : altérations

de paralysie générale; quatre sorties dont une guérison (mélan-

colie) ; deux chroniques (fo)ie systématique).Ce sont, tout compte

fait, quinze formes graves, presque incurables dans la genèse des-

quelles les causes prédisposantes ne jouent aucun rôle. P. K.

VIII. Contribution A la connussance des aliénés criminels; par

W. Sommer. (,111,q. Zeitsch. f. Psych., XL, 1 et 2.)

L'auteur a dressé la statistique des malades de ce genre reçus à

l'asile d'Allenberg, de 1832-1882, c'est-à-dire depuis l'ouverture de

l'asile provincial de l'ouest de la Presse ; il indique leurs prove-

nances de diverses maisons de correction, d'arrêt, de détention

définitive ou préventive, des établissements pénitenciers. Le total

s'en élève à 11 1 : 84 h., 27 f. Une longue et savante discussion

complète le tableau. Nous n'y pouvons que cueillir quelques for-

mules intéressantes : c'est ainsi que, dans la région en question, il

y aurait vingt-cinq fois plus de criminels parmi les aliénés; que

les crimiuels femmes sont aussi fréquemment atteints d'aliénation

mentale que les hommes ; que presque toujours les aliénés cri-

miuels ne sont transférés à l'asile qu'incurables; que le mariage

paraît préserver et de la folie et du crime; que, si le criminel doit

être considéré comme un malade à ménager autant que possible,

on doit aussi le considérer comme un homme dangereux, de par

sa propre faute, ou, de par son hérédité morbide, et le séparer de

la société jusqu'au jour où il olfre certaines garantie» d'innocuité.

M. Sommer montre ensuite que l'hérédité du crime n'est pas

très fréquente, que l'hérédité de la folie chez les criminels est

moindre que chez les aliénés ordinaires (il s'en faut de 8 p. 100).

' L'isolement pénal ne serait pas aussi dangereux en tant qu'agent

morigène, mais il accélérerait, chez des prédisposés, l'explosion

d'une psychose. Ce petit nombre d'extraits prouvent que le mé-

78 REVUE de pathologie mentale.

moire traite non seulement des aliénés criminels, mais encore des

criminels aliénés. L'historique des asiles pour ces deux catégories

d'individus est finalement complètement exposé. « Il serait à

souhaiter, termine M. Sommer, que l'on construisit un asile-

hospice pour ceux qui, après avoir accompli le temps de leur peine,

devraient encore être considérés comme dangereux.Maisc'està

peine si, dans toute la monarchie prussienne, il y en aurait à

transférer plus de 100 à 200. » P. K.

IX. Contribution : 1 la question de l'assistance DES épileptiques;

par Wildermuth. (Allg. Zeitsch. f. Psych. XL, 1 et 2.)

D'après l'auteur, qui apporte sur ce sujet une expérience de

seize ans, idiots et épileptiques, jeunes ou adultes, peuvent, sans

inconvénients, pour les uns comme pour les autres, être traités

et instruits dans un seul et même établissement différant d'un

asile d'aliénés. On épargne ainsi le nombre des médecins et des

professeurs. Certes, il incombe à l'Etat de bientôt fonder des

établissements publics destinés aux épileptiques, mais ils pour-

raient aussi recevoir des idiots. Il y a cependant lieu d'affecter

des locaux séparés aux épileptiques psychiquement sains, aux épi-

leptiques dont l'intelligence est affaiblie, aux idiots, aux malades

adultes, aux semi-adultes de quinze à vingt ans. On ne devra pas

négliger les occupations agricoles et industrielles. La direction

médicale et administrative de l'institution appartient au médecin.

Il est non moins utile de créer un service externe pour les épi-

leptiques auxquels la séquestration ne convient pas, de les exa-

miner gratuitement, et de leur délivrer des médicaments à prix

réduit. P. K.

X. Sur les familles nerveuses; par P.-J. Atoalus. (Allg. Zeitsch. f.

Psych. XL, 1 et 2.)

Cinq arbres généalogiques fort bien dressés orment le fond

du travail dont voici les conclusions.

Les affections les plus graves se sont montrées dans les familles

où il y avait, soit transmission multiple (bilatérale), soit mariage

consanguin. La consanguinité est en rapport avec la manie puer-

pérale, l'épilepsie, la folie chronique. On ne constate guère de

caractère pathologique prédominant en relation avec la tare héré-

ditaire ; les formes morbides de pareille origine sont vagues, toute-

fois lachorée, l'hystérie proprement dite, lespropensions au suicide

y manquent absolument, de même que la dipsomanie, l'infection

syphilitique, le tabès, la paralysie générale. La dégénérescence phy-

sique fait défaut, malgré l'existence de la diathèse névropathique :

durée delà vie et fécondité comme dans les familles saines; seules

REVUE DE pathologie mentale. 79

les incurvations de la colonne vertébrale paraissent se développer

trèssouvent, au cours delà vie,sans cause appréciable. Les facultés

intellectuelles sontbonnes, en plusieurs cas même élevées; quoique

l'instabilité du système nerveux et le manque d'énergie entravent

plus ou,moins l'utilisation de l'intelligence, l'assimilation psychique

et les travaux sont en conformité parfaite avec la valeur des fonc-

Lions.Pas de dégénérescence morale. Etcependant, l'imprégnation

héréditaire est plus grande, plus enracinée qu'on ne l'admet géné-

ralement. S'il semble que les maladies graves ne se transmettent

pas aussi communément, en revanche, les hommes en apparence

bien portants ne sont pas normaux; ils portent les stigmates de

l'hérédité. Ceux-ci peuvent simplement se traduire par de l'obnu-

bilation de la connaissance, une sensibilité exagérée à l'égard d'ex-

citations qui échappent à un individu normal, en une émotivitc

excessive, en une adynamie rapide au moindre effort. De tels hérédi-

taires sont pessimistes, mais ils sont capables d'amour et d'amitié.

Conclusion pratique : Toute personne, chez laquelle sont sur-

venues des modalités graves quelconques de dégénérescence ner-

veuse, ne doit pas se marier. Quoique le croisement avec un sang

pur produise d'heureux résultats, le célibat est le seul moyen à

opposer à la propagation. Il est dur de déconseiller le mariage à

des héréditaires jusque-là sains, mais il faut avertir la famille in-

demne des dangers d'une pareille alliance, lorsqu'on est son con-

seil. Le public sera également éclairé sur les conséquences de

l'hérédité par des conférences spéciales. P. K.

XI. Recherches expérimentales ET cliniques sur l'épilepsie; par

Unveriucht. (Arch. f. Psych. XLV, 2.)

En laissant de côté les recherches bibliographiques très com-

plètes de ce mémoire, il nous reste dix-sept expériences per-

sonnelles instituées sur des chiens. Vingt-cinq conclusions en ré-

sument la teneur mieux que n'importe quelle analyse :

1- L'excitation électrique produit des attaques d'épilepsie, non pas seul

lement quand on fait agir le courant sur la région corticale antérieur :

motrice, mais aussi quand on l'applique sur les parties postérieures du

cerveau, qui, d'après d'autres recherches, seraient en relation avec les

fonctions de la vue. La propension aux convulsions est, dans de larges

limites, indépendante de l'apport du sang artériel à l'écorce du cerveau,

de l'excitabilité réflexe et de la chaleur du corps; 20 La durée de l'ac-

tion du courant électrique joue, dans la genèse des convulsions, un plus

grand rôle que la force du courant ? 30 L'évolution des convulsions cor-

respond à la disposition topographique des centres moteurs dans l'é-

corce du cerveau; ainsi n'entrent en convulsions, les uns après les

autres, que les territoires musculaires dont les centres sont situés, dans

l'écorce cérébrale, les uns à côté des autres ; 4" La charpente musculaire

intrinsèque de la langue, ainsi que les muscles rétracteurs de cet organe,

80 REVUE DE pathologie mentale.

reçoivent des libres motrices des deux moitiés de l'écorce ; Sa La même

conclusion s'applique bien probablement aussi aux muscles qui ouvrent

et ferment la mâchoire inférieure; 6" La nuque et le tronc sont, dans

les convulsions hémitatérales, tirées du côté de l'hémisphère excité;

7" Le muscle risurius du chien est simplement innervé par l'hémisphère

homonyme; 8" L'excitation de la région corticale postérieure se tra-

duit par une dilatation de la pupille et de la fente palpébrale, et par un

mou\ émeut de latéral ! té des globes oculaires. Une action prolongée engendre

du nystaginus du côté opposé, auquel s'adjoint une attaque dépitepsie;

- 9 Les convulsions ne se propagent jamais il la seconde moitié du

corps qu'après s'être complètement disséminées sur la première. Parfois

une pause sépare les deux actes; - 10o De l'autre côté, les convulsions

affectent un ordre sériaire invariable; elles commencent, quelqu'ait été

leur point de départ sur le côté primitivement atteint, par l'extrémité

postérieure; Un Quand l'excitabilité de l'écorce s'y prête, on obtient,

par une excitation électrique unique ou répétée, ou même parfois à l'aide

d'influences mécaniques, uu état de mal épileptique qui, tantôt se calme

spontanément, tantôt entraîne la mort de l'animal. Deux formes peuvent

être distinguées. A. Dans la forme oscillante, l'excitation va et vient, à la

manière d'un pendule; après avoir parcouru la seconde moitié du corps,

les convulsions cloniques y reviennent en sens inverse, passent de

l'autre côté, le quittent, se réinstallent sur le second, etc., jusqu'à ce que,

devenues générales, elles occupent le corps entier. B. Dans la forme

récidivante, après uue première attaque convulsive méthodique, normale,

une seconde prend naissance sur le même territoire musculaire; elle est

suivie d'une troisième, puis d'une quatrième, à allures de plus en plus

rapides, jusqu'à ce que, se généralisant, les convulsions s'emparent de

tous les muscles; - 1'-)- Il se peut que certains groupes musculaires par-

ticipent faiblement ou ne participent pas du tout aux convulsions; c'est

qu'alors généralement leurs centres corticaux sont faiblement excitables

ou ne sont pas excitables du tout; 13o Chaque accès isolé coïncide

avec une livpei-ilieriiiie de un à deux dixièmes de degré. C. On aurait, dans

l'état ^le mal, noté 44o l'; le thermomètre monterait encore post ruortem

de trois dixièmes. On a beau abaisser la température somatique jus-

qu'à 34° S', on n'entrave ni l'excitabilité corticale, ni la genèse de l'état

de mal; 14" L'anémie n'a d'influence sédative sur les convulsions que

lorsque, très prononcée, elle met la vie en danger 11 en est de même

pour la suffocation. Dans ce dernier cas, si l'on restitue à temps l'apport

d'oxygène, les convulsions, qui s'étaient déjà éteintes, reprennent.

L'excès d'uxyène dans le sang fait disparaitre les pauses mterconvulsives

de l'état de mal; les pupilles deviennent étroites; 15- La morphine

ne calme les convulsions que lorsqu'on en administre de hautes doses,

et même, la plupart du temps, des doses mortelles. En revanche, l'in-

jection intraveineuse de chloral (dans certains casa la simple dose de 20

centigrammes), ou l'inhalation d'éther calment sur-le-champ les convul-

sions. L'atropine augmente l'excitabilité de l'écorce; elle peut réveiller

une attaque réduite au silence ; 16° L'écorce du cerveau joue un rôle

fondamental dans la production des convulsions musculaires. En extirpant

certains centres moteurs isolément, on élimine du même coup du tableau

cowulslf les territoires musculaires en correspondance avec eux. En cer-

tains cas, les muscles sont le théâtre de mouvements associés produits par

le transport brusque de l'excitation dans les appareils centraux profonds,

revue de pathologie Mentale. 8t

car ces mouvements se manifestent encore après la section transverse

du pédoncule cérébral et de la moelle. Fréquemment ils présentent un

caractère tonique; 17o L'extirpation de la zone corticale motrice dans

l'état domalépileptique réduit au silence les convulsions musculaires ; c'est

tout au plus si l'on voit se produire alors des mouvements associés. Une

ablation bilatérale anéantit également ces derniers ;-i8°Ilest vrai que la

propagation de l'excitation concorde avec la disposition topographique

des centres corticaux, mais elle ne souffre aucune modification dans sa

marche, quand on isole les uns des autres, par de profondes incisures

dans la substance cérébrale, des départements corticaux voisins. En pra-

tiquant autour d'un centre une section complète, on ne trouble pas non

plus la marche normale des convulsions musculaires, par conséquent l'in-

citation semble se transmettre dans les foyers centraux profonds ; -i9°

Cela explique aussi que la section du corps calleux n'empêche pas l'in-

\asion des convulsions sur l'autre moitié du corps; 20° Une hémor-

rhagie ventriculaire apaise les convulsions de la moitié du corps corres-

pondante; 21° L'accès convulsif, provoqué par l'excitation de l'écorce

du cerveau, présente, entre toutes les modalités convulsives d'ordre

expérimental, la plus grande ressemblance avec les attaques de l'épilep-

sie humaine; 22° La nature corticale de ces dernières puise ses argu-

ments dans les diverses formes de l'aura, dans les équivalents psychiques

ainsi que dans les intéressantes relations entre le sommeil et les

psychoses ; 23° Quelques observations nous apprennent que la

destruction de la région motrice empêche également chez l'homme les

convulsions dans les territoires musculaires correspondants; 240

Quant à la marche des convulsions, les acquisitions de la clinique ac-

tuelle s'accordent avec nos expériences; ou ne manque d'indications

exactes que sur la manière dont est frappée la seconde moitié du corps.

Le petit nombre de celles qui existent ne s'accordent pas avec nos obser-

vations, mais peut-être peuvent-elles s'expliquer par la loi des mouve-

ments associés ; 25° Ce fait que, dans les convulsions hémilatérales,

certains districts musculaires sont intéressés sur l'autre moitié du corps,

n'a pas d'analogue en clinique. Ce n'est que pour l'appareil musculaire

de la nuque que quelques remarques isolées des auteurs se plient, à la

rigueur, à une explication comme la nôtre. P. K.

XII. Un lipome du plexus choroïde ; par Il. 013EIISTEINLR.

(Centralbl. 1\cruetaheillc., 1883.)

Ce fait, excessivement rare, ne constitue, en définitive, qu'une

curiosité pathologique, d'autant plus que sur l'individu en question

on ne possédait aucun renseignement. La tumeur occupait le

plexus choroïde gauche; dure, arrondie, d'un diamètre longitu-

dinal d'un centimètre et demi, divisée en son milieu par un

profond étranglement qui la scindait en deux moitiés également

lobulées, elle présentait au microscope l'aspect d'un lipome vrai

parcouru par des tractus conjonctivo-vasculaires, originaires de sa

capsule d'enveloppement. L'auteur rappelle 't ce propos le fait'

présenté par lui à la Société Psychiatrique de Vienne, il y a neuf

ans. P. K.

ARCHIVES, t. IX. 6

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE

I. Une simplification recommandable de la batterie A courants

constants; par Hugo Koebner. (Cenlralbl. ? A'e)'ueH/tet7A., 1883.)

Sous le nom de nouveaux éléments de l'atileut, re-

commande l'appareil suivant. Un cylindre de verre de li centim.

de haut et de 10 centim. de diamètre soutient un anneau en zinc

muni de trois saillies supérieures qui plonge dans le vase. Le fond

du cylindre est occupé par une lame.de cuivre qui porte un fil de

cuivre; ce fil de cuivre est isolé par delà gutta-percha. Un second

fil part d'une des saillies de l'anneau en zinc. On remplit le verre

d'eau additionnée d'un peu de sulfate de zinc ou de magnésie; on

jette au fond quelques morceaux de sulfate de cuivre et l'élément

est prêt àfonctionner. P. K.

Il. Etude sur l'action ne L'ACËtAL ' 1 (diétlillacétal) ; par

Stoltenhotf. (Cenlralbl. f. u'eruelzheilk., 1853.)

Ce corps qui a pour formule C" Il'- 0 ? pour densité 0,87, qui est

soluble dans 18 volumes d'eau, qui distille sans décomposition à

+ )04° 1 ? qui est volatile à la température ordinaire, a été utilisé

par l'auteur sur six aliénés et sur trois individus sains. Il calme

le plus souvent, au moins passagèrement, l'agitation la plus pro-

noncée, mais jamais l'effet n'est durable ; dans les 5, 15, 30 mi-

nutes qui suivent son ingestion buccale, on obtient, à l'aide d'un

minimum de ri grammes, un sommeil de 4 à 10 heures; cette dose

chez les individus sains d'esprit ne détermine que de la somno-

lence fugace, à moins qu'on emploie 7 grammes. Dix grammes

ne présentent aucun inconvénient. Les effets accessoires impor-

tuns se bornent à de la congestion céphalique accompagnée d'irré-

gularités du pouls ; ils ne constituent nullement une contre-indi-

cation à l'administration du médicament. Si l'on en juge d'après

l'odeur exhalée par l'haleine, il est rendu en nalure par la respi-

ration. Il importera du reste dans l'avenir dele chercher dansl'u-

vine par la méthode de Liebon : la lessive de soude, l'iode et

1 Voy. Ai,chives de Neurologie, travail de Langreutur, t. VIH, p. 383.

revue DE thérapeutique. 83

l'acide chlorhydrique, en sa présence, produisent des cristaux mi-

croscopiques d'iodoforme. M. Stolteiilloff a provoqué, chez un

lapin, par la méthode des inhalations, deux à trois heures de

sommeil. P. K.

111. Observation sur une action remarquable de l'électricité

statique; par S.-Th.STEtN.(C<'H<m/6<. ? Ve)'ccH/t6t ? 4883.)

Un homme de vingt-six ans, vigoureux, indemne de toute atteinte

hystérique ou psycuopathique, occupé à des travaux fatigants,

est, depuis plusieurs années, capable de présenter les phénomènes

de catalepsie les plus accusés, tout en demeurant éveillé. Il suffit,

après lui avoir fait étendre le bras volontairement, d'en effleurer

la surface avec la paume de la main, du centre à la périphérie,

pour déterminer la rigidité avec anesthésie locale; une caresse

en sens inverse, c'est-à-dire de la périphérie au centre, rompt le

charme. Toutes les parties du corps sont passibles des mêmes

résultais par les mêmes procédés. Or, en promenant la chaîne

conductrice positive d'une machine statique du centre à la péri-

phérie, on obtient aussi la catalepsie; on lait cesser cette deriiiè ! e

en rayant légèrement les téguments avec la même électrode de la

périphérie au centre. Ce n'est pas le simple contact de la tige qui

agit ainsi, car l'électrode, sans le passage du courant, demeure

inactive. Le pôle négatif catalepsie, s'il est conduit légèrement

de la périphérie au centre ; inversement, il délie la contraction

musculaire, s'il est conduit du centte à la périphérie. L'exemple

de cet individu n'est pas unique; les mêmes faits s'observent

encore chez les sujets hypnotisés. L'électricité galvanique ou

faradique ne produit rien de semblable; elle augmente simple-

ment l'excitabilité des muscles en état de catalepsie expérimentale.

P. K.

IV. Contribution au traitement SYMPTOMADQUE de la paralysie

AGI1'.1\TE; par ? 1LLE\LIETEfi. ((,'Btt>;)'C(i. %. rC)'UG)LLCtih., 1883 -)

11 s'agit d'une malade, dont l'observation est relatée en détail,

qui fut successivement traitée parles moyens suivants : Chloral :

0,30 centigr. par jour additionné de 0,001 milligr. de morphine :

dix-huit mois de traitement; effet purement hypnotique.

K 13r. ; 8 br. par jour dans une tasse de valériane (infusion à

10 p. 100); diminution considérable du tremblement; deux mois

de traitement. Nitrate d'argent; un à dix centigr. par jour

en pilules; deux mois de traitement; effet négatif. Curare;

injections sous-cutanées; Il milligr. à 33 milligr. suspendent

invariablement les accidents de la molililê dès les heures sui-

8ï- le revue de thérapeutique.

vantes, pour deux jours. Courants continus (An. sur le front ;

cathode à la nuque; 8. Eléiii. Siem.); employés pendantdeuxmois

et demi (six séances par semaine de dix minutes), ils font gra-

duellement cesser presque absolument le tremblement. - Celui-ci

diminue aussi très notablement sous l'influence de l'atropine asso-

ciée au seigle ergoté, poussée jusqu'à un début d'intoxication

(neuf pilules contenant chacune 0,3 : ; centigr. d'extrait et 1 milligr.

d'alcaloïde). Disparition complète du tremblement, de par

l'hyoscyamine cristallisée très pure, administrée d'emblée à la

dose de 24 milligr. (intoxication). Quoi qu'il en soit, dans

toutes les expériences, la suspension des médications les plus

actives entraîne la réapparition du tremblement. P. K.

V. Recherches expérimentales sur l'action biologique du BRO-

mure de zinc; par Baldassare Testa. (Il Morgagni, octobre

1883.)

Le bromure de zinc agit suivant l'importance de la dose sur la

sensibilité, puis sur lamotilité; il arrête le coeur des grenouilles

en diastole, mais cette action est très lente en comparaison de

celle du zinc lui-même. L'action'du bromure de zinc doit être

rapprochée plutôt de celle du zinc que celle du bromure de potas-

sium ; c'est probablement à l'influence exercée par le brome que

l'on doit rapporter un certain degré de sommolence produit chez

les animaux par le bromure de zinc, ce qui n'a pas lieu avec le

bromure de potassium. Le bromure de zinc porte son action

d'abord sur les extrémités périphériques des nerfs sensitifs, et en

second lieu sur le centre spinal, sans excepter cependant les troncs

nerveux ; il doit y avoir aussi une action à part sur le centre céré-

bral puisqu'on observe de la somnolence. P. M.

VI. De l'action thérapeutique du bromure de zinc comparée avec

celle du bromure de POf.S3lUJi et de zinc; par Baldassare

Testa. (Il llorwpni, avril 1884.)

L'administration prolongée du bromure de zinc diminue l'exci-

tabilité du cerveau.-lllême si on élève au moyen de la strychnine,

le pouvoir excito-moteur de l'axe 1>ulbo-spiual le bromure de zinc.

et le bromure de potassium diminuent l'excitabilité cérébrale. Le

bromure de zinc doit celte action autant au brome qu'au zinc.

L'action prolongée du bromure de zinc ainsi que celle du bro-

mure de potassium diminuent sans l'abolir l'action épiteptogéne

de la cincltonidiue, mais la diminuent beaucoup plus cependant

que celles de la picrotoxine. Le bromure de potassium, le bro-

mure de zinc et le zinc lui-même sont utiles dans l'épilepsie, en

REVUE DE thérapeutique. 85

diminuant l'activité médullaire, en même temps que l'excitabilité

corticale, le bromure de zinc peut encore agir par son influence

sur les fibres terminales sensitives, il possède d'ailleurs une puis-

sance inférieure à celle du bromure de potassium, mais supérieure

à colle du zinc. Il a aussi une action efficace dans d'autres né-

vropathies convulsives, notamment dans l'hystérie.Le bromure

de zinc doit être en général préféré à celui de potassium, parce

que ce dernier a l'inconvénient de faire tomber facilement l'orga-

nisme dans un état de prostration plus ou moins profonde, ce qui

n'a pas lieu avec le bromure de zinc. P. M.

VII. Trutement des psychoses par l'électricité; par TIGGES.

(Allg. Zeitsch. f. Psych. XXXIX, 6.)

D'après ce travail, les courants continus paraissent agir surlout

sur les symptômes. En employant des courant faibles, on peut

arriver à rendre le sommeil aux psychopathes, à les débarrasser

des sensations pénibles intra ou extra-céphaliques qui ifs tour-

mentent, à faire disparaître les troubles de la sensibilité générale,

les vertiges, et l'engoûrnent intra-crâniens, la congestion de la

face, l'oppression êpigastrique et les illusions de tous les sens, no-

tament du tact, les bourdonnements d'oreilles et les hallucinations

de l'ouïe qui les accompagnent souvent, les symptômes d'exci-

tation d'ordre moteur, y compris la chorée, le ptsyalismc, les ma-

nifestations delasLupeur(muLisme,immobilité,inseusihilité). Voilà

bien des résultats en rapport avec les divers lieux d'application des

électrodes, avec la fixité ou la mobilité, soit de la cathode, soit de

l'anode ; aussi ne s'étonnera-t-on pas qu'ils ne soient que momen-

tanés. P. K.

VIII. Un cas d'élongation des nerfs D\NS le tabès dorsal; par

M. ROSE,ÇSTF,[.i. (Arch. ? Psych., XV 1.)

Chez un tahétique souffrant depuis six ans(observation très com-

plète), on pratique, en une seule séance, l'élongation des deux

sciatiques. Immédiatement après l'opération, on constate que le

patient a reconquis une partie de son sens musculaire et de sa

sensibilité, mais les réflexes patellaires n'ont pas reparu. Le jour

suivant, il se plaint de douleurs térébrantes ou de brûlures des

plus violentes dans les jambes; il lui semble aussi qu'on a rac-

courci ses membres inférieurs. En même temps, la température

s'élève, il se forme au lieu d'opération un phlegmon qui tue l'opéré

en quatre semaines. Autopsie. Dégénérescence grise des cordons

postérieurs, phlegmon fémoral double, thrombose delà veine i'é-

morale droite. Le microscope ne décèle pas d'altération de la

86 SOCIÉTÉS savantes.

moelle, ni du sciatique en rapport direct avec l'élongation. En

somme, celle opération n'a pas de raison d'être. De critiques

en critiques, l'auteur arrive à regarder le tabes comme une affec-

tion systématique, conformément aux indications de Struempell *.

P. K.

IX. Contribution A L'EFFET de la teinture d'aconit; par R. Neuen-

DORFF. (CH<)'0/K. f. Ne ? -ueî2heilk., 1883.)

Un paralytique général présente sur le dos de chaque main un

érythème papulo-vésiculeux symétrique, de concert avec des irré-

gularités de l'activité cardiaque (arhyllimie indescriptible). Consi-

dérant que celles-ci ont déterminé l'éruption, on ordonne de trois

à seize gouttes par jour d'un mélange au cinquième d'extrait

d'aconit ; les fonctions du coeur se régularisent en même temps

que J'affection cutanée disparait. Quelques mois plus lard, le

patient présente des accès d'asthme; action favorable de la même

préparation. L'autopsie ultérieure montre J'existence d'une dila-

tation avec dégénérescence graisseuse du coeur; endaortite chro-

nique déformante, depuis les valvules,jusqu'à l'aorte abdominale.

P. K.

SOCIÉTÉS SAVANTES

SOCIÉTÉ MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE

Séance du 27 octobre Présidence de M. o1'ILL6.

Le président annonce à la Société la mort de MM. Girard de

Cailleux, Sauze et Dumesnil.

M. DALLY fait part de quelques réflexions qui lui sont suggérées

par le programme d'enseignement suivi dans les collèges. Se pla-

çant au point de vue social et pédagogique, il s'attache à démon-

Voy. Archives de Neurologie, t. VII, p. 329.

SOCIETES SAVANTES. 87

trer le peu de valeur des examens du baccalauréat qui ne peu-

vent rien en faveur de l'intelligence des candidats et n'amène-

raient que des déceptions, si l'on s'appuyait trop sur'ces examens

pour préjuger de l'avenir des élèves. La précocité mentale est,en

effet, un signe d'infériorité plutôt que de supériorité de l'intelli-

gence ; il en résulte qu'un critérium basé sur les premiers succès

d'un enfant pour choisir des sujets d'avenir n'aboutirait qu'à des

déceptions. Les prix de collège, ne seraient donc plus une preuve

de l'intelligence des enfants. Les races inférieures présentent

une précocité intellectuelle remarquable : à Sidney, llelhourn,

Victoria, les enfants anglais paraissent au début moins intelligents

que les enfants malaisiens et australiens. La sélection sociale et

intellectuelle fondée sur les examens ne peuvent donner un ré-

sultat réel qu'en élargissant considérablement les limites d'âge.

M. BouitDiN partage celte manière de voir.

M. FALRET demande la nomination d'une commission chargée

de résumer les opinions émises à la Société à propos des divers

projets de révision de la loi du 30 juin 1838.

111. LUNIER. Toutes les questions ayant été débattues ici, il y a

lieu d'adopter la proposition de M. Falret.

M. Bouchereau demande que, pour tenir compte de l'opinion

des minorités dont la manière de voir n'a pas prévalu dans les

discussions qui ont eu lieu, cette commission ne soit composée,

que de membres n'ayant pas jusqu'alors émis leur avis dans la

commission extra-pai-lenieii Lai re qui a déjà étudié le projet de loi.

Séance du 24 novembre. Présidence de M. Foville.

M. Régis présente à la Société un modèle de tableaux pouvant

permettre de représenter graphiquement l'observation des

aliénés atteints de manie, lypétiianie ou folie à double forme. Ces

tracés permettent aussi J'enregistrement du pouls et de la tem-

pérature.

M. Christian fait observer que s'il est intéressant d'établir une

échelle entre la mélancolie avec stupeur et le délire aigu, il est

bien difficile d'en déterminer scientifiquement les degrés : où un

observateur verra de la manie, l'autre ne verra que de l'agita-

tion maniaque, quel sera le critérium ?

M. Régis reconnaît la justesse de cette critique, mais il pense

néanmoins que ces tableaux, qui indiquent à grands traits les

diverses phases de la folie chez un même individu pourront rendre

quelques services au clinicien, surtont en ce qui concerne les

folies intermittentes.

88 SOCIÉTÉS SAVANTES.

M. Foville. Ces tracés m'intéressent d'autant plus qu'autrefois,

j'ai fait des recherches dans ce sens, et que je me suis toujours

heurté à l'objection soulevée par ,11. Christian. Néanmoins il y a

lieu d'encourager les recherches de cette nature; peut-être pouira-

t-on un jour établir pour la folie des graphiques d'une méthode

assez simple pour comparer nutte elles diverses observations.

Elections. Aprèsles élections, la commission, chargée de résu-

mer les opinions de la Société sur les divers projets de révision

de la loi 1838, est composée de : MAI. Christian, Dagonet, de la

Maëstre, Legrand du Saulle, Magnan, Meuriot.

M. Motet. Messieurs, depuis quelque temps, les actes de violence

des aliénés en liberté se sont multipliés dans des proportions in-

quiétantes. Dans une période de moins de quinze jours, j'ai été

commis, pour constater l'état mental de trois aliénés, à la suite

de tentatives d'homicide. Il m'a semblé intéressant de vous sou-

mettre ces trois cas; s'ils appartiennent à la même forme de

trouble mental, ils diffèrent quant à l'évolution du délire, et

chacun d'eux présente des particularités qui méritent d'être

notées.

S... est un homme de trente-deux ans; il nous a été impossible d'éta-

blir ses antécédents. Tout ce que nous'savons de lui c'est que, depuis

plusieurs mois, il était devenu sombre ; il ne faisait pas d'excès alcoo-

liques, manquait d'appétit; et son sommeil était traversé par des rêves

pénibles. Quinze jours avant la tentative de meurtre qu'il a commise,

il avait complètement abandonné son travail et vivait chez lui oisif,

toujours inquiet. Sa femme est blanchisseuse et occupe plusieurs ou-

vrières. Un jour,ses yeux s'arrêtèrent sur l'une d'elles qui repassait une

chemise d'homme, il la voit introduire sa main dans la manchette après

le coup de fer et l'agiter. Immédiatement, il comprend dans ce geste une

allusion blessante pour lui; l'ouvrière a voulu dire : « S... est un em-

manché ,. A partir de ce moment, il croit qu'on le soupçonne d'avoir des

habitudes honteuses ; il n'a plus de repos, il vit aux écoutes et interprète

dans le sens de son délire les faits les plus insignifiants. Voici le fait qui

l'a déterminé à agir : «Il voit l'ouvrière sortir des cabinets d'aisance et,

par un mouvement tout automatique, porter sa main derrière elle et secouer

ses jupes, puis rentrer dans l'atelier sans se douter un instant que

S... est en observation ; mais lui, traduit ce geste ainsi : « Si S .. veut

me posséder, il aura mon derrière x, et exaspéré de cette insulte, dont

son délire a fait tous les frais, il décide qu'à la première provocation il

se vengera. Cette femme, qui ne se doute de rien, est alors l'objet d'un

espionnage incessant. Pendant plusieurs jours, S... attend ayant

enfin vu l'ouvrière sortir des cabinets et ajuster ses jupes, il trouve que

c'en est trop, qu'il faut en finir; il a dans la main son couteau ouvert et

sans dire un mot, il la frappe à la poitrine. Elle pousse un cri, on accourt ;

S... s'enferme dans l'atelier et quand les sergents de ville arrivent, il est

sur la défensive et engage avec eux une lutte des plus énergiques. Conduit

à la préfecture de police, il est dirigé sur l'asile Sainte-Anne. Quand il y

arrive, S... est dans un tel état de dépression qu'on ne peut réveiller

SOCIÉTÉS SAVANTES. 89

ses souvenirs. L'obnnbilation intellectuelle est complète. M. Magnan, qui le

voit alors se demande si cet homme n'est pas un et s'il n'est

pas dans un état de stuleurconsécutice à une crise comitiale. Une observa-

tion prolongée pendant plusieurs jours permet d'écarter cette opinion; S...

sort de cet état, les souvenirs redeviennent nets, précis, et il nous raconte

avec les détails que nous venons de donner la succession des faits. Son

délire nous apparaît systématisé; si l'évolution semble plus rapide

qu'elle ne l'est, d'ordinaire, c'est que nous manquons de renseignements

sur cet homme. Il s'est passé pour lui ce qui se passe trop souvent

même dans un milieu social plus élevé que celui auquel S .. appartient.

On ne prête qu'une attention distraite à des bizarreries, à des excentri-

cités de caractère, dont la nature reste méconnue. Même dans un milieu

social plus élevé se produisent souvent ces cruelles méprises. L'acte de

violence une fois consommé, on se souvient alors d'une foule de petits

faits qu'on avait crus sans importance, et, d'un seul coup, se révèle un

état pathologique, ancien, profond, irrémédiable.

Telle est la condition de S... ; cet homme est un aliéné irres-

ponsable d'un acte tout entier sous la dépendance d'un délire de

persécutions des plus nettement systématisées. Il est interné à

Saint-Anne ; il importe que cette mesure soit maintenue, dans un

intérêt d'ordre public et de sécurité des personnes.

Voici maintenant un second fait non moins intéressant que le

précédent : l'état mental de l'individu dont il s'agit avait passé

inaperçu pendant l'instruction et c'est seulement au moment du

jugement que M. le président de la 10e chambre du tribunal de la

Seine, averti par le défenseur, reconnaît la nécessité d'un examen

médico-légil.

G... est prévenu de coups et blessures; c'est un homme de soixante ans,

bien portant; rien, au premier abord, ne trahit le trouble profond dont

cet homme est atteint; il prétend être un propriétaire malheureux; ses

locataires lui susciteraient mille difficultés. Il se serait pris de querelle

avec un individu auquel il ne voulait pas louer un logement. Dans l'ar-

deur de la discussion il a été menacé , il s'est défendu, il reconnaît qu'il

a eu tord de tirer son couteau. Telle est la version de G.. Elle ne pré-

sente rien d'invraisemblable, et si l'on s'en tenait à ces premières données,

on seiait tout disposé à ne voir en lui qu'un homme poussé à bout, arri-

vant au paroxysme de la colère, pour des motifs fondés en apparence.

Mais, il n'y a rien de vrai dans récit de G... Toutes ses prétendues

infortunes sont imaginaires, et c'est lui qui crée les difficultés dont il se

plaint.

Cet homme, aux allules si calmes dans la prison, au langage si mesuré,

est absolument dangereux. Vis-1-vis de nous, il se tient longtemps sur

la réserve; mais il se laisse à la fin surprendre, et nous déclare qu'il est

convaincu que tout ce qui s'est passé, la querelle, son arrestation, son

séjour à la prison de la santé - c'est un coup monté» ; et la preuve, c'est

que l'individu, cause de cette déplorable aventure, s'appelle Boitelle.

G... a été marchand de vins, et lorsqu'il's'est établi à Paris, son autori-

90 SOCIÉTÉS SAVANTES.

sation d'ouvrir un débit de boissons était signée du préfet de police,

M. Boitelle; il y a certainement pour lui une correspondance entre les

deux noirs, c'est une allusion à ses opinions politiques, il n'est pas

douteux « qu'on lui en veut. » ·

Une fois engagé sur cette piste, G ? se livre tout entier; il raconte ses

infortunes, se plaint de n'avoir plus de repos; ses locataires sont insup-

portables, et sa femme l'engage à ne pas se montrer trop dur pour eux.

Ces confidences, déjà caractéristiques, ne sont rien auprès des détails

que nous donne Illne G... Depuis cinq ans surtout, son mari est d'une

humeur toujours inquiète, se plaint sans cesse, et prend, contre d'ima-

ginaires ennemis, des précautions peu rassurantes pour elle. Tous les

soirs, il met un couteau sous son oreiller. Son sommeil est fréquemment

interrompu et, cherchant une cause il son insomnie, il se lève, vu voir

si dans la cour de sa maison il n'y aurait pas quelque chose d'extraordi-

naire dont l'influence le priverait de sommeil. Il y quelques mois,

pendant une soirée pluvieuse, l'un de ses locataires avait descendu un

rosier en caisse, pour que la pluie l'arrosât; G... ne dormant pas, lit sa

ronde et trouva la plante dans la cour, il la prit, la rentra chez lui et

dit 1 sa femme : a Eh bien, Noil,'i ce qui m'empêchait de dormir ». Tout

lui porte ombrage; nn meuble déplacé, un vêtement suspendu il l'espa-

gnolette de la fenêtre, lui fournissent l'occasion de récriminations sans

fin. A sa femme qui lui fait quelque obserW iuu, il répoml : «'l'aisez-vous,

folle, stupide bête; si je voulais écrire un mot, demain otis seriez moite».

Un jour, s'adressant son chien, il lui fait : « Tu as cinq ans, il y a

cinq ans que je suis malheureux. Si je savais que tu en es la cause, je

te tuerais ». On n'a jamais su pourquoi il a tué une de ses poules qu'il

est allé jeter très loin de chez lui. Sa femme nous a montré des quit-

tances de la compagnie Lesage dont il a coupé tous les en-tétes, parce

(tue, (lit-il, il ne veut has qu'nn 4 Lesage » fasse la vidange des fosses

de sa maison. Il a déchiré et jeté par la fenêtre son acte civil de mariage;

il ne veut pas chez lui de papiers venant de la mairie.

Depuis plusieurs mois, G... est plus troublé encore; son caractère déjà

difficile est devenu agressif, et, en même temps, des conceptions déli-

rantes vaniteuses se sont manifestées : Une nuit, entre autres, il s'est

mis à parler à haute voix, annonçant qu'il était le Christ, qu'il gouver-

nait tout. Sa femme essaya vainement de le calmer, il l'injuria, la

menaça et lui répéta pour la centième fois qu' « il n'avait qu'un mot il

dire et qu'elle mourrait». ,.

G... était, pour tous ceux qui l'approchaient, un sujet d'inquiétudes,

de craintes. On prévoyait à son exaltation croissante qu'il allait devenir

violent. Sa femme s'était depuis longtemps aperçue qu'il s'armait toutes

les nuits; elle tremblait qu'il ne s'en prit à elle. Le commissaire de

police de Courbevoie avait reçu de son côté de nomhteuses plaintes.

Lorsque G... fut arrêté, personne de ceux qui le connaissaient ne fut

surpris d'un acte de violence, que ses menaces, son humeur tracassière

faisaient redouter. Comme il arrive si souvent en pareil cas, l'agression,

qu'on a pu croire subite, répondait à une conception délirante. G...

n'avait pas voulu louer un logement à " un particulier » dont la figure

ne lui revenait pas; il a supposé qu'il lui gardait rancune, qu'il lui en

voulait. La conviction s'est faite dans son esprit, et il a cherché querelle,

il a frappé en aliéné convaincu qu'il avait le droit de se défendre.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 91 i

G... n'est certainement pas responsable de cet acte; mais il

appartient à cette catégorie d'aliénés qui tuent pour un soupçon

et sont un danger permanent pour tout le monde. Dans un intérêt

d'ordre public et la sécurité des personnes, G... dut être séquestré

d'office dans un asile.

Quelque temps après, j'étais commis par le procureur de la

République pour examiner l'état mental d'un nommé ))..., inculpe

de tentative 'de meurtre.

Cet individu est âgé de vingt-huit ans; il vit seul de son métier de

cordonnier dans un cabinet misérable; pendant tout l'été, il a couché

enveloppé d'une couverture sur la sangle d'un lit; il prépare lui-même

ses aliments, ne parle que très peu aux fournisseurs auxquels il s'adiesse,

et ne permet pas qu'on lui parle. Très sobre, il ne boit qu'un demi-

litre de vin par jour. Il ne reçoit personne et la concierge n'a que fort

rarement pu pénétrer chez lui.

D... a de la famille à Paris, mais il vit éloigné d'elle, se souvenant

avec rancune qu'elle est intervenue en 1879 pour le faire placer à l'asile

Sainte-Anne. : 11. llaânttn, qui l'a vu à son entrée, certifie qu'il est atteint

du délire des persécutions : « On le regarde de travers, on a changé son

nom, on lui fait des misères ». Plus tard, il est envoyé à Ville-Evi-ard,

d'où il sort incomplètement guéri, le 1"' février IS83. Le 28 février, son

père demande de nouveau son internement, mais le commissaire de

police refuse d'intervenir, et 1)... reprend sa vie solitaire, sans cesse

persuadé qu'on s'occupe de lui et qu'on veut lui faire du mal; avec de

telles dispositions d'esprit, D... devait fatalement en arriver a la violence,

et le 27 octobre, il tire un coup de revolver sur des voisines qui ne

l'avaient nullement provoqué ; mais il reste convaincu qu'elles avaient

orâanisé tout un sstème cle taquiueries 3 son cudroit : « ,1'ai twé dessus,

dit-il, parce qu'elles me faisaient mal au ventre; je ne les connaissais

pas, mais je savais bien que c'étaient elles qui m'empêchaient de tra-

vailler. Si on avait pu me tordre le cou on l'aurait fait. Elles avaient

toutes les envies, elles voulaient entrer chez moi, je ne le voulais pas.

J'aime mieux être tout seul, ça vaut mieux; qu'elles secouent leurs puces

chez elles ; pourquoi viennent-elles frapper à ma porte ? La concierge en

était; je ne veux pas recevoir d'ordres de la concierge; elle m'a craché

dans le dos; elle s'est appuyée sur mon épaule; je n'ai pas besoin de

tout cela; elle a bien manqué d'y passer la première. Celle qui a étrenné

n'avait qu'a me f... la paix. Elles ont jeté de la « puJfiue » sous ma

fenêtre, tout ça pour m'embêter parce que je ne voulais pas leur parler;

elles m'ont en\o\é du « pis » dans les reins; je trouerai la peau à tous

ceux qui m'ennuieront». mesure que D... parle, devient presque mena-

çant, et nous jugeons inutile de prolonger un examen déjà trop significatif.

Cet homme, qui a passé successivement par les phases classiques

du délire chronique, a été interné de nouveau a Sainte-Anne, d'où

il n'aurait dû jamais sortir. M. LEGRAKD du SAULLE fait observer

que les malades dont M. Motet, vient de raconter les intéres-

santes histoires, sont bien de réels persécutés. Il arrive aussi, bien

souvent, ajoufe-t-il, de voir désigner comme tels de simples

92 SOCIETES SAVANTES.

alcooliques ; il y a lieu de réagir contre cette tendance des médp-

cins ordinaires qui mettent dans leurs certificats « délire des

persécutions», alors qu'il faudrait dire tout simplement « alcoo-

lisme subaigu ». Cette distinction est importante au point de vue

clinique. MAHCEL Briand.

IX- CONGRÈS DES NEUROLOGUES ET ALIÉNISTES

DE L'ALLEMAGNE DU SUD-OUEST'

SESSION DE BADE

Séance du 16 juin 1884 ..

M. le professeur Rns (d'HeideIberg) ouvre la séance, en sa qua-

lité de premier curateur. Sur saproposition, M. le professeur Kuss-

maul est choisi comme président de la première séance; M. le pro-

fesseur Hitzig présidera la seconde. Secrétaires : MM. Laquer et

Edinger.

M. L1CIITItEISt prend la parole sur les différents tableaux sympto-

matiques de l'aphasie. Il construit le schéma suivant :

Voy. Archives de Neurologie, t. VIII, p. 365.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 93

Soit A, Le centre des images acoustiques des mots.

M. Le centre des images motrices des mots.

AM, La voie d'union entre ces deux centres.

Aa, La voie d'entrée centripète des impressions auditives.

llim, La voie de sortie motrice.

L'exercice de la répétition avec intelligence de ce qu'on répète

provoque un influx centripète et la formation d'un magasin d'idées

B, d'où la voie AB, en même temps qu'un influx centrifuge entrai-

nant la parole spontanée (voie BM). Il vient alors la figure sui-

vante.

De la parole on ne saurait séparer la lecture et l'écriture qui

s'apprennent en somme avec elle et émanent de la formation d'un

centre des signes écrits 0. Pour lire, il faut que ce centre soit

joint à A, la lecture à haute voix utilisant le trajet OAM et l'intel-

ligence de l'écriture ne pouvant avoir lieu que par l'intermédiaire

de la voie OAB. La pratique de l'écriture développe le centre E

(centre commémoratif des mouvements de l'écriture), et, par suite,

la voie de communication OE qui sert à copier; on n'écrira spon-

tanément que si B et E sont unis, mais il faut passer par M.

Les déductions pathologiques, les voici :

I. Une lésion du point M provoque l'aphasie du type Broca ca-

ractérisée par une perte de la parole réelle, de la lecture articulée,

de la faculté de répéter, d'écrire spontanément, d'écrire sous la

dictée. Les malades comprennent encore la parole et l'écriture;

ils peuvent encore copier.

4 le SOCIÉTÉS SAVANTES.

11. Une lésion du point détermine 1'(tl)htisie sciiso-iello, tic Vei-

uicke. Les patients ne comprennent plus la parole ni l'écriture;

ils sont incapables de répéter, d'écrire sous la dictée, de lire à

haute voix. Mais ils peuvent encore copier, parler spontanément,

écrire volontairement (ou plutôtiissont simplementparaphasiques

et pajagraphiques).

111. Toute interruption de la voie de communication MA entraîne

l'aphasie de conductibilité de Wernicke. La parole et l'écriture sont

encore comprises; l'acte de copier est possible. Il y a paraphasie

pour la parole spontanée, pour l'écriture volontaire, pour la fa-

culte de répéter, pour la faculté d'écrire sous la dictée, pour la

lecture à haute voix.

IV. L'interruption de la voie de communication MB empêche la

parole volontaire, l'écriture spontanée; mais répéter, écrire sous

la dictée, lire à haute voix, comprendre la parole et l'écriture

copier, constituent autant d'actes exécutables.

V. Une altération portant sur le trajet Mmpngendre'Ia perte de

la parole spontanée, de la faculté de répéter, delà lecture à haute

voix. Ecrire spontanément ou sous la dictée, copier, comprendre la

parole et les signes écrits, sont encore possibles (variété d'aphasie

tic Bl'OC(t).

VI. Une altération interrompant le tractus AB engendre une

variété d'aphasie sensorielle consistant en la perle de l'intelligence,

de la parole et de l'écriture, la paraphasie de la parole spontanée,

la paragraphe de l'écriture volontaire. Mais les individus atteints

répètent, lisent à haute voix, écrivent sous la dictée, sans com-

prendre. L'auteur en cite un exemple personnel.

VII. La suppression du tractus Aa se traduit par la perle de l'in-

telligence du mot, de la faculté de répéter, et d'écrire sous la dic-

tée. La parole spontanée, l'écriture volontaire, l'intelligence des

signes du langage écrit, la faculté délire à haute voix et de copier

persistent intégralement. M. Lichtheim en rapporte un exemple

de son crû.Tandis que dans les deux autres formes d'aphasie

sensorielle, la surdité verbale disparait assez rapidement, elle dure

assez longtemps dans l'espèce.

Terminologie. Les deux grands groupes de troubles aphasiques

méritent les noms d'aphasie motrice et d'aphasie sensorielle. Elles

sont toutes deux complètes. Les autres formes doivent être distin-

guées par la dénomination d'aphasie partielle, centrale et péri-

phérique. La lésion de AM s'appellera aphasie de conductibilité

intermédiaire. En dehors de ces types, on peut imaginer des com-

binaisons multiples, faciles à construire à l'aide du schéma précé-

dent. Quant aux affections difficiles à interpréter, qui paraissent

en contradiction avec la loi, elles résultent de ce que certains élé-

ments composants des tableaux symptomatiques rétrocèdent plus

ou moins vite et plus ou moins complètement.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 95

Localisation. L'aphasie de Broca git dans la circonvolution

frontale attenante à la scissure de Sylvius. L'aphasie sensorielle se

rattache à la circonvolution temporale vis-à-vis. La forme ressor-

tissant à l'interruption de AM dépend de l'insula (observation de

l'auteur). Les voies MB et AB se composant de séries de trousseaux

émanés de sphères sensorielles variées, il en résulte qu'une inter-

ruption complète ne peut avoir lieu qu'au voisinage des centres

et des lieux de convergence; c'est pourquoi l'aphasie partielle mo-

trice réside dans la couche blanche sous-jacente à la zone de Broca,

l'aphasie partielle sensorielle relevant delà couche blanche située

au-dessous de la première temporale. On ne connaît guère ou

bien l'on conteste le trajet des voies Mm Aa; la multiplicité des

fibres de transmission ne fait de doute pour personne; aussi,

pour que les types d'aphasie due à leur interruption soit le moins

frustes possible, est-il nécessaire que les lésions soient très rappro-

chées des points M et A.

VIII. La lésion de la voie OA entraîne la cécité graphique isolée.

Discussion :

M. Kussmaul se réjouit de ce que l'auteur ait observé un cas de

surdité verbale si pure. On arrivera aussi à constater delà para-

phasie isolée. Il est difficile d'en dégager l'autonomie quand elle

accompagne d'autres troubles de la parole, mais parfois elle do-

mine tellement la scène qu'on doit lui accorder une réelle impor-

tance. Est-elle bien uniquement sensorielle ? Il est impossible de

distinguer s'il n'y a pas beaucoup de fibres détruites dans l'écorce,

et l'intrication des tractus corticaux s'oppose à ce qu'on dégage

aucune notion relative soit aux fibres centripètes, soit aux fibres

centrifuges.

M. LICllTIIGI)I. « L'homme observé par moi présentait un trouble

paraphasique avant d'être frappé de l'attaque de surdité verbale.

Quand les symptômes du premier ictus eurent disparu, il resta

uniquement et il est encore sous l'influence de la surdité verbale. »

M. SCIIUI : LG (d'llleuau). Sur un cas de dyspepsie nerveuse (neuras-

thétaie dyspeptique). L'observation concerne une dame de vingt-

huit ans présentant une prédisposition névropathique, mais bien

douée au point de vue psychique, d'une éducation très soignée,

jusqu'alors bien portante, indemne notamment de tout désordre

hystérique. Constitution délicate. Mariée, elle a mené rapidement

à bien deux fois les phénomènes de la puerpéralité ; mais il s'en

est suivi un affaiblissement physique ayant exigé le séjour dans

les montagnes. A la fin de 1881, elle est atteinte de leucorrhée

symptomatique d'un catarrhe utérin. A l'automne de 1883, la

perte d'un enfant (diphthérie) la déprime au point qu'elle ne dort

plus; la leucorrhée augmente, les règles deviennent irrégulières.

On constate alors des troubles digestifs non motivés; tout aliment

96 SOCIÉTÉS SAVANTES.

provoque une sensation de plénitude pénible, ayant son siège à la

région épigastrique, durant plusieurs heures, et s'associant à des

nausées et à des vomi tu ri lions (absence de vomissements). Constipa-

tion opiniâtre; léger enduit saburral sur la langue; pas de lien-

térie. C'est au début de 1883, qu'elle entre à l'asile; anémie, amai-

grissement, lypémanic teintée d'hypochondrie. Sur ces symptômes

se greffe bientôt un épisode" aigu de systématisation hypochon-

driaque : « elle a le cerveau desséché, les organes internes dépla-

cés, le larynx et l'estomac disloqués ; il faut la suspendre par les

pieds pour lui infiltrer de l'eau par le nez dans l'intérieur de la

tête, ou lui séparer la tête du tronc pour lui faire cesser les sensa-

tions pénibles » ; tentative de suicide. Puis l'amélioration se fait

sentir et permet désormais la vie commune.

Mais la malade demeure en proie à uncomplexussymplomalique

consistant en une dyspnée plus ou moins forte, un constant besoin

d'air (le thorax présente en permanence l'état d'inspiration);

cette dyspnée s'exaspère au maximum après l'ingestion alimen-

taire, la malade étouffe pendant une heure et plus. Elle se prête

cependant résolument à l'alimentation qu'on exige d'elle. Son

poids est en ce moment de 94 livres, sa taille z- 1 ? î0. Au mois

d'avril, se manifestent des ulcérations dentaires douloureuses,

coniluontes; on obtient cependant que l'alimentation ne soit pas

suspendue. Selles tous les trois jours à l'aide de lavements ; pas de

lientérie ; le ventre est rétracté en bateau, tandis que la ca-e tlio-

racique est dilatée à son maximum (orthopnée). Intégrité des

organes splanchniques et du sang. Absence de menstruation.

Tous les toniques leeonstituants et digestifs sont en vain passés

en revue, y compris la galvanisation et la faradisation. Malgré la

régularité dans l'alimentation, malgré le repos au litpresque con-

tinu, l'amaigrissement et la pâleur deviennent inquiétants. Au

début de novembre, le poids total est de 02 livres. En même temps,

dépression, découragement, humeur anxieuse. Au milieu de

novembre, accès de dyspnée caractérisés par dilatation et immobi-

lité thoracique, lenteur excessive de la respiration (type abdomi-

nal), petitesse alarmante d'un pouls fréquent, refroidissement des

extrémités, impossibilité absolue de déglutir. La malade désigne

la région supérieure du larynx comme étant le siège d'un obstacle.

Elle ne peut parler. Cet état dure toute la nuit tel quel. On a

recours, non sans une vive appréhension, àla sond; oesophagienne,

car on craint d'augmenter encore la dyspnée; mais, ô surprise ! à

peine la sonde a-t-elle surmoulé un obstacle perceptible à la par-

tie supérieure de 1·u;sopliage, à peine est-elle introduite, que la

respiration reprend son amplitude normale, de sorte que l'instru-

ment permet non seulement l'ingestion alimentaire, mais l'oyxgé-

nation. Celte pratique réussit chaque fois que la malade a un

accès, si bien qu'où effectue l'introduction de la sonde à vide pour

SOCIÉTÉS SAVANTES. 97

chasser les malaises respiratoires quelconques. Sous l'intluence de

cette méthode, tous les accidents disparaissent. On s'occupe ensuite

de déshabituer la patiente de la sonde et, depuis lors, il y a de

cela quelques mois, elle a récupéré la santé en regagnant 20 livres.

L'autour pose, de concert avec une autorité médicale allemande,

le diagnostic de dyspepsie nerveuse résultant de neurasthénie. Il

s'agit, pense-t-il, du degré le plus avancé de la névrose du nerf

vague, mis en lumière par Rosenbach, dans lequel la sonde eut

raison du spasme de la glotte et, par suite, de l'arrêt des réflexes

thoraciques.

Discussion :

M. FUI : 11 ? TNER. Pourlui, il s'agit d'une folie systématique hysté-

rique dans laquelle la sonde agit à merveille. On avait affaire

dans l'espèce, non à de la dyspepsie proprement dite, mais à des

phénomènes psychiques et à des sensations anormales.

M. Sciiuele ne partage pas l'avis de 11. luirstuer, car il n'existait

pas de conceptions délirantes à l'époque des troubles nutritifs,

car, la connaissance restant indemne, il se produisit de véritables

symptômes gastriques, et le refus d'aliments émana, non de la

folie systématique, mais de la dyspnée, car, en dépit du meilleur

régime, la malade ne digéra pas, puisqu'elle diminua de poids.

M. KussMaUL. Quel obscur terrain que celui de la dyspepsie ner-

veuse, des anémies gastro-intestinales, des dyspepsies anémiques.

Pourquoi chez les neurasthéniques dyspeptiques, attribuer une

telle importance au complexus symptomatique qui se passe du

côté de l'estomac. Comment savoir si c'est la neurasthénie qui

cause de tels symptômes ? Est-on toujours sûr qu'une affection

organique de l'estomac ne constitue pas le corps du délit ? (faits

de Hiaschko, Jurgen.) Les deux dernières observations de Sassak

recueillies dans le service de Kussmaul concernent les symptômes

les plus nets de dyspepsie ; le traitement demeura inefficace, le

diagnostic impossible. L'autopsie pratiquée par Recldiii2shauseii

révéla dans la région stomacale et intestinale des altérations

atrophiques des deux plexus.

M. JoLLY (de Strasbourg). Sur la paralysie Ce

nom s'applique à des états dans lesquels les muscles de la parole.

de la déglutition, de la respiration présentent des troubles sem-

blables a ceux de la paralysie bulbaire, en rapport avec des lésions

encéphaliques à tendance centrale. Dans les dernières années, on a

publié une douzaine de cas de ce genre qu'on peut classer en deux

catégories :

1° Le cas à lésion étendue du cerveau, interrompant les tractus

qui se rendent aux noyaux bulbaires. (Voy. le fait de Jolly par sclé-

rose cérébrale, 1872.) Il y faut joindre les cas de démence para-

Archives, t. IX, 7

98 SOCIÉTÉS SAVANTES. *

lytique avec paralysie des muscles de l'articulation, dans lesquels

il n'y a généralement pas d'altérations de la moelle allongée.

2° Les cas à foyer bilatéral ou unilatéral dans les ganglions de

la base. Tableau semblable à celui de la paralysie du bulbe Cas

de Joffroy (1872). 11 faut y ranger la plupart des faits de paralysie

pseudo-bulbaire, y compris les observations toutes récentes de

Bercer. L'auteur vient d'en observer un exemple à sa clinique

(autopsie). On les distingue de la vraie paralysie bulbaire en ce

que, dans la paralysie psendo-bulbaire, il se produit des attaques

apopluaiformea, tandis qu'on ne constate pas d'atrophie ni de

réaction dégénérative de la langue. : 11. Joli%, admet une troisième catégorie. Il s'agit de faits ressem-

blant non plus à la paralysie bulbaire progressive chronique main

à la paralysie bulbaire aiguë. 11 en communique une observation;

la mort eut licueii seize jours, les symptômes furent : un affaiblis-

sement rapide et progressif des jambes et des bras puis des muscles

de la nuque. Dès le début, il existait un), 2 ottl)le pi-oitoiicé de l'ar-

ticulation avec difficulté de mouvoir la langue; difliculté du dé-

glutir, et plus tard aphonie. Mort dans le coma. Pas d'attaques

apoplectiques. Parmi les prodromes, il faut noter des accès du cépha-

iatgie si intenses que la malade essaya, une fois, de se suicider.

Autopsie. Lésion fort étendue siégeant de préférence dans la subs-

tance blanche du cerveau, avec foyer de ramollissement rouge au

milieu du corps calleux. La lésion des hémisphères portait surtout

sur les parties sises entre les circonvolutions ascendantes et la cap-

sule interne. La lésion se continuait en bas, mais en diminuant

d'intensité, jusque dans les pédoncules cérébraux ; elle consistait

en une énorme accumulation de eorpuscutesfymphoides, au voisi-

nage des vaisseaux. On trowa encore un petit foyer près du noyau

du facial. Intégrité complète des noyaux de t'hypogtosse, du nerf

pneuuto-gastriquc,du glosso-pharyngien.

11. Srmea (d'lleidelbcr). Sur lu marche a reculons de la yn -

nouille. Enlevez l'encéphale d'une grenouille, placez-la sur une

planche que \ous abaisserez horizontalement, et \ous verrez l'a-

nimal marcher à reculons.En prenant les précautions nécessaires,

on provoque aussi ce mouvement chez une grenouille indemne ;

par conséquent, il est physiologique. Quel est l'endroit de l'encé-

pbale qui en tout temps détermine lamarclie à reculons. Extrayez

avec un couteau bien affilé l'encéphale de la grenouille jusqu'au

tiers postérieur des lobes optiques desdeux côtés; donnez à l'animal

vingt-quatre heures pour qu'il se rétablisse, et la grenouille marchera

sans exception, toujours, à reculons, notamment quand on lui ex-

citera la patte de derrière. Cet acte n'est pas irrésistible; c'est un

mouvement linéaire, parce qu'il s'installe à ! a suite d'une lésion

symétrique de l'encéphale.

SOCIETES SAVANTES. 99

Discussion :

M. 1W zcc. « Pour moi, les mouvements irrésistibles sont tous,

dès l'origine, des mouvements volontaires qui prennent un carac-

tère irrésistible de par le fonctionnement à taux de diverses parties

de l'organe. C'est ainsi qu'il peut se produira des mouvements en

apparence irrésistibles quandl'individu s'illusionne sur sa situation

dans l'espace. » Les expériences précédentes paraissent, selon lui,

démontrer l'existence d'une simple excitation réflexe par laquelle

certaines parties sont mises en mouvement inégalement.

M. S usiner ne croit pas que ce mouvement soit effectué

contre la volonté. A l'inverse d'autres mouvements irrésistibles,

il a lieu symétriquement des deux côtés. Les mouvements irrésis-

tibles résultent de l'asymétrie de l'innervation.

Pause de dix minutes, à la suite de laquelle M. Kussmaul em-

pêché est remplacé au fauteuil présidentiel par M. Erb.

M. Ilnzic présente à l'assemblée Veticéplutle du chien montré

l'année dernière ', conservé par le procédé de Lavdowsky (glycé-

rine phéniquée e). Depuis cette époque l'organe a été conservé à

sec et il a encore exactement le même aspect que jadis. M. Hitzig

fait en outre circuler deux encéphales durcis par la méthode fran-

çaise à l'acide nitrique.

11. lltizig lit un mémoire sur la température au-dessous de /tt) ! 0 ?

male cliez les paralytiques Ce mémoire sera publié in ex-

M. 1"UEI(ST.NEII (d'lleidPlberl. Sur la yliose de décorée du cerveau.

Plusieurs observateurs ont, en ces dernières années, publié des

cas de sclérose tubéreuse ou granuleuse disséminée de l'écorce.

Voici un cerveau dans lequel les altérations macroscopiques consis-

tent on un état trouble avecépaississemenl delà pie-mère, accom-

pagné d'atrophie considérable des deux insulas, notamment de la

deuxième circonvolution de l'insula du côté gauche. Cette der-

nière présenté en outre, de même que les autres circonvolutions

de l'insula, des granulations et des mamelons tubéreux, de grosseur

etcousistancedmersesreposant,commeautautdeverrues, surla sur-

face. Un autre mamelon tubéreux ayant la forme d'une framboise,

gros comme une noisette, occupe l'épaule gauche. Sa section, de

mémequetasectiondesgranutationsde l'insula du même côté, per-

met de constater des cavités entouréesd'un anneau résistantde tissu

tibreux (analogie absolue avec la publication de M. Bournevillea).

Le microscope décèle un développement remarquablement étendu Li

de la couche externe de névroglie de l'écorce qui ne tranche plus

1 Voy. Archives de Neurologie, t. VIII, p. 372.

2 Id., L. VIII, p. 366.

« Id., t. V, p. 94.

100 SOCIÉTÉS SAVANTES.

nettement sur les autres couches sous-jacontes. En partant de la

première sans quitter le trajet des vaisseaux, on trouve dehauten

bas tout autour d'eux une transformation chimique de la substance

fondamentale névroidique consistant en aspect [brillant, forte co-

loration à la fuchsine, disparition des fibres résistantes, et, en

certains endroits, abondance de corpuscules amylacés dessinant

une mosaïque. Les canaux vasculaires, remarquablement étroits,

sont comme enclavés dans le tissu ; leurs parois sont rigides, mais

nulle part on n'y constatede prolifération cellulaire, ni de dépôts

de pigments, pas plus que dans les organes ambiants. A d'autres pé-

riodes, les corpuscules amyloïdes ont disparu, et la substance fon-

damentale apparaît sous la forme d'un réseau contenant de très

grandes cellules-araignées (corps calleux) et des éléments névro-

gliques très développés de diverses sortes. Ce réseau subit une

double transformation ; c'est, en quelques endroits, un ramolis-

sement muqueux (formation de cavités), en d'autres, l'épaississe-

ment fibroïde (au pourtour et à l'intérieur des cavités, à la surface

du cerveau); on a tout à fait sous les yeux l'image de la syringo-

myélie. En tout cas, ces faits sont à distinguer de la sclérose, car

la sclérose atteint de préférence la substance blanche, porte surla

paroi vasculaire (épaississement et Ilypei-l)lasie cellulaires) et fina-

lement, même dans les stades les plus avancés, elle n'aboutitd'or-

dinairepas au ramollissement. Le terrain du processus est la né-

vroglie; habituellement c'est la couche externe où il commence

pour marcher soit vers l'intérieur de l'écorce, soit seulement vers

l'extérieur (formation.de tubéroaités.) Les régionsde'prédilection pa-

raissent être : l'iusula et la région operculaire. En conséquence,

il y a lieu de distinguer : une sclérose mu) LHocuJaire une sclérose

diffuse (cas de Sànger Strumpel ! ); une gliose diffuse (hyper-

trophie cérébraie deVirchow);unegiioso circonscrite, tantôt

congénitale, tantôt (rarement) acquise. Au point de vue clinique,

d'après les observations connues jusqu'ici, on a presque exclusive-

ment affaire à des idiots dedegrés différents. Un seulcas, celui de

Greitf concernait des accès de petit mal aboutissant à un âge plus

avanc"à à une psychose (gliose circonscrite peu intense). Dans l'obser-

vation dont il vient d'être question, ilyavaitimhécillitéconrénitale;

plus tard, pendant bien des années, on constata de l'aliénation

mentale à symptômes alternes, des lacunes croissantes dans la mé-

moire, de l'aphasie a Laxique très accusée. Les autres phénomènes du-

rent être rattachés à un foyer prolubérantiel (altération unilaté-

rale du noyau de la pyramide ; myélite parenchymateuse de la

pyramide, terminée par ramollissement à l'intérieur des ca-

vités, dégénérescence hyaline des vaisseaux). Une dégénérescence

descendante modérée, unelésion partielle des cordons postérieurs,

une dégénérescence grise des nerf optiques complétaient le tableau

anatomo-pathologique.

SOCIETES SAVANTES. 101

Séance du 1 juin 188t.

M. HITZIG (de Halle) prend la présidence.

M. Tuczek (de i)larboLii--) montre, avec l'autorisation du profes-

seur Weigert(de Leipzig), des préparations originales obtenues à

l'aide d'une méthode toute récente de ce maître, dont les résul-

tats n'ont pas encore été publiés. Ce sont : 1° des coupes à tra-

vers l'écorce du cerveau normal qui décèlent d'une façon très

complète les fibres nerveuses à myéline de toutes les couches

corticales; 2° des coupes à travers l'écorce du cerveau d'un pa-

ralytique général : a dans le lobe occipital (fibres très abondantes

dans toutes les couches), b dans le lobe frontal (absence presque

complète de fibres dans toutes les couches; seule la couche des

grandes cellules présente quelques libres isolées, et encore les

trousseaux d'ensemble sont-ils manifestement réduits de volume.

La méthode à la solution alcoolique de fuchsine acide suivie d'une

immersion dans une solution alcoolique de potasse préconisée

par M. Mendel1 est impuissante à révéler la disparition des fibres

nerveuses à myéline, tandis que les dernières recherches de

Weigert permettent de confirmer pleinement les assertions de

M. Tucxek '.

Discussion :

M. KnOEPELN (de Munich) appuie les allégations de M. Tuczek

d'après ses recherches personnelles.

Bade est de nouveau choisie comme lieu de la prochaine réu-

nion du congrès. Curateurs, 11\f. Sclitilc et Furstner. Le surplus

des cotisations de cette année sera réparti, par fractions égales,

entre la caisse de secours d'Iieppenhein, celle d'lllcuau, et la

fondation Dick du Palatinat.

Sur la proposition du directeur Karrer de Kiing-enmûnster, un

télégramme de souhaits de prospérité est adressé au professeur

Hagen d'1 ? rlannen qui fête en ce moment le soixante-dixième an-

niversaire de sa naissance.

M. (de Des anomalies congénitales de I'fril dans

leur ! '«/)/)0 ! < t;wc les maladies mentales et nerveuses Après une

énumération des anomalies anatomiques mentionnées dans les

écrits psychiatriques, anomalies observées surles yeux d'individus

atteints d'affections mentales et nerveuses et rattachées aux

signes somatiques de la perturbation psychique, M. Manz passe

à quelques formes congénitales trouvées par lui. Telles certaines

1 Voy. Archives de Neurologie, t. VIII, p. 336.

° Id , t. VU), p. 33G.

102 SOCIÉTÉS SAVANTES.

anomalies de coloration de l'iris, de la choroïde, certaines dispo-

sitions morphologiques insolites de la papille du nerf optique,

certaines irrégularités relatives à l'origine, à la division, au trajet

des vaisseaux rétiniens. Citons riiétérochromie delà choroïde et de

la rétine, la pauvreté partielle enpigment du fond de l'ceil, pauvreté

pigmentaire isolée ou associée à l'albinisme. L'albinisme exerce

une influence évidente sur la situation sociale de l'individu qui en

est atteint, il peut même nuire à son éducation psychique; le dé-

faut de pigment est aussi le symptôme d'une infirmité congénitale

(leticopatliie); quoi d'étonnant donc que cesinfirmespréseutent un

développement défectueux de l'encéphale. La constatation des ano-

malies opbthalmoscopiques offre quelque difficulté en ce sens qu'il

est souvent fort difficile de savoir s'il y a un trouble pathologique

réel ou une simple différence physiologique; il faut s'appliquer,

dans l'espèce, à tirer parti de son jugement, et des connaissances

dont l'exercice et une analyse précise sont les facteurs. Le mode de

fonctionnement n'a rien à faire avec les difformités de la papille ou

des vaisseaux rétiniens, car il n'existe pas, dans l'espèce, de trouble

de la vue. Ces anomalies sont le résultat, ou d'une malformation

vraie, de première date embryogénique, ou d'une maladie foetale

(exemples : existence de fibles nerveuses à myélme dans la ré-

tine; formes anormales de l'entrée du nerf optique; trajet

inusité des vaisseaux rétiniens; quelques cololomas). La ma-

ladie foetale atteint un seul oeii(atrop)iie du nerf optique; -

fentesintra-ocu)aires;c.eitainesaiterationsdutrdctusuvéa);

restes de choroldite foetale) ou en même temps d'au très organes, et

alors l'oeit s'en ressent directement ou indirectement (exemple :

configuration pathologique du crâne et de l'orbite : forme du

globe oculaire dans le rachitisme et la syphilis). L'albinisme

n'est peut-être qu'une dyscrasie faetale entraînant une défectuo-

sité généralede l'oeil; la rétinite pigmeiil-tire n'estsouverit qu'une

maladie résultant de diverses localisations d'une affection intra-

utérine à nous inconnue. Quant aux relations que les anomalies

en question affectent avec des maladies psychiques ou des mala-

dies du système nerveux central, les unes sont symptomatiques

d'un trouble mental congénital, d'une lésion des organes nerveux

centraux (exemple : idiotie, épilepsie congéniale, psychose asso-

ciée au crétinisme), les autres dénotent une prédisposition parti-

culière à ces maladies, une imprégnation morbide héréditaire ou

non. Il faut les ranger à côté des malformations auriculaires,

buccales, génitales, souvent observées chez les aliénés, sans ce-

pendant que le médecin leur accorde une valeur séméiologique

quelconque, tandis que maints traités de psychiatrie les consi-

dèrent comme les produits de troubles trophiques. On rencontre

également des anomalies congénitales de l'oeil chez des individus

tout à fait bien portants. La statistique permettrait d'en établir

SOCIÉTÉS SAVANTES. 101

l'importance séitiéioloique. Or Kostt et Nienielscbek ont, sur 140

aliénés, trouvé soixante-quatorze fois un déplacement du nerf

optique dans la papille, deux fois l'existence de fibres myétiniques

dans la rétine, soixante fois une diminution de calibre des ar-

tères, six fois une augmentation de calibre des veines. Klein sur

131 cpiloptiques et maniaques a rencontré vingt-neuf anomalies.

On ne saurait au reste s'appuyer sur la bibliographie, car les au-

teurs se sont attacliés, non point à enregistrer au hasard toutes

Jes anomalies indistinctement, mais simplement les anomalies

devant. suivant eux, être tenues pour signes d'une maladie de l'en-

cépltale.

La pratique personnelle île l'orateur est actuellement constituée

par la collection accidentelle et non systématique de faits qui se

sont présentés, au cours des ans, en ville ou à l'hôpital. Ce qui lui

fait supposer qu'il existe un ce[ tain rapport entre les anomalies

oculaires et les psychoses, ce sont de fréquents examens opthal-

moseopiques pratiqués il y a assez longtemps sur les pensionnaires

de l'hospice de Fribourg qui abrite toute espèce de formes et de

degrés d'idiotie et d'infirmité névropalliidue; plus tard, il réunit

tousles dessins optitttatmoscopiques de la clinique médicale riche

surtout en hystériques. On conçoit celle relation, quand on se

se rappelle les conditions anatomo-pbysiologiques et anatonto-

palliolo;itlues de 1'ail et du cerveau. Ainsi c'est en vain qu'un

aveugle-né essaiera des'éduquer; il n'y arrivera qu'incomplète-

mont au point de vue psychique. Les troubles de la nutrition

générale peuvent, pendant la période embryonnaire, porter sur

les parties constitutives, nerveuses ou non, de l'atl et du cerveau,

d'où : tantôt un pur trouble fonctionnel, tantôt une altération

- inatoiniqtie (leucopatl)ie. svpliilis, i- : ieliitisiiie f'obtl). 1.l disposi-

tion des vaisseaux joue, elle aussi, un rôle évident dans l'accrois-

cement : elle peut, aux divers stades de l'état embryonnaire, pro-

(Iiiii-c en I)ieii de; ot ? anesdes lé;iotiq slé,71ales (aLini)liies, d(,qti,tie-

tions, raréfaction vasculaireprécoce)entrainantde;

lacunes intellectuelles, des convulsions, des anomalies vasculo-ré-

tinienneset ne uro-vascuto-reti nie unes avec ou sans atrophie percep-

tible etc... Quoi qu'il en soit, jusqu'à nouvel ordre, les anomalies

congénitales de )'oeitnosont.paspatt)01 : nomoniques : ct)esno

peuvent servir de symptômes psycltopathiques et tieuropalhiques

que lorsqu'on les rapproelie d'autres anomalies somatiques.

M. RuMpF (de Bonn). Contribution ci la physiologie et ci 1(i p(itho-

logie de lu sensibilité tactile. Les recherches du professeur liumpf

ont été exécutées à l'aide d'un cesthésiomètre construit sur les

indications du professeur llerin,n,, de Prague, instrument qui, sans

être parfait, peut, par le principe même de sa construction,

imprimer un progrès à la connaissance des sensations tactiles.

101 SOCIÉTÉS SAVANTES.

On parvient a : ou uide èl Se l'ellSClânel' sur la faculté lleS OI'an 25

nerveux cutanés, à distinguer ce qui est rugueux de ce qui est lisse.

Il se compose de douze barres d'acier dont le n° 0 est absolu-

lumeut lisse, les nos 1 à 1 sont entourés de fils de ruolz de force

variée du diamètre de 0 milli., 1 un millimètre; chaque barre

présente donc une rugosité qui lui est propre. En conséquence, on

recherchera quelles sont, en chacune des régions de la peau, les

barres qui sont nécessaires pour transmettre à l'individu la sensa-

tion non pas d'un corps lisse, mais d'un corps rugueux. Il faut

naturellement régler aussi uniformément que possible la pression

de la barre sur les téguments, le mouvement de cette barre sur

l'épidémie, la température du métal (elle devra être de 33° C.,

mais on disposera les choses de telle sorte que l'on puisse exclure

toute sensation thermique), la durée de l'expérience. Dans ces

conditions, on trouve, que chez un grand nombre d'hommes, la

sensibilité cutanée de régions identiques est exactement la même

à l'égard des corps rugueux.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 103

l'extrémité en rapport avec la cathode présente une augmenta-

tion nette de la sensibilité. Ces deux modifications apparaissent

quelque temps après qu'a commencé l'action du courant ; elles

persistent quelque temps après l'ouverture du circuit et, parallèle-

ment, sur la partie correspondante de l'autre moitié du corps, le

transfert présente la plus grande netteté.

Le circuit une fois ouvert, dès que le phénomène primitivement

constaté a disparu, la sensibilité tactile décèle une modification

exactement inverse sur les régions qui viennent d'être soumises à

l'anode (la sensibilité, tout à l'heure abaissée, augmente, puis

diminue), ou à la cathode (la sensibilité, tout à l'heure exagérée,

diminue). D'ailleurs, au pourtour des zones soumises au courant,

il existe toujours un district de sensibilité inverse.

Effet des narcotiques. Toutes les préparations de ce genre

diminuent la sensibilité. L'ingestion gastrique de deux centi-

grammes de morphine ou l'injection sous-cutanée de quinze milli-

grammes de cet agent entraîne, par exemple, un abaissement de

la sensibilité de la pointe des doigts qui perçoit non plus la barre

n° 1, mais le n° 1.; la peau de l'avant-bras distingue la rugosité

non plus des n°8 6 ou 4, mais 9 et 6. Même action quoique un peu

moindre de l'hydrate de chloral, de la paraldélyde, du K Br. ;

les doigts ne sentent que le n° 3, l'avant-bras les til, 4 et G.

Pathologie. Dans quelques cas de tabès où les autres méthodes

d'examen avaient à peine fourni de différences considérables

d'avec la normale, la barre la plus rugueuse ne provoqua pas de

sensation de rudesse. Chez d'autres malades ne révélant pas de

diminution objective de la sensibilité, cette méthode trahit des

déviations notables. Elle est par conséquent recommandable.

M. RuMt'r présente des préparations d'encéphale et de moelle

syphilitique dans lesquelles apparaissent les altérations vasculaires

bien connues. (L'observation sera publiée en détail '.)

M. llamos (de Leipzig.) Sur une parulysic yériodique de l'oculo-

moteur commun. On a encore comparativement peu étudié les

paralysies des muscles de 1*(jcjl au point de vue neurologique;

nos connaissances sont bien défectueuses dt l'égard de l'étiolo-

gie et de la localisation de ces accidents. Une forme particu-

lièrement obscure, c'est la paralysie périodique de l'oculo-muteur

commun. Elle est d'ailleurs rare. En voici un cas. 11 s'agit d'une

fillette de sept ans, issue de parents sains, née bien portante. On

notait chez elle, à l'âge de onze mois, une paralysie de l'aU

droit (trois jours de durée); à t'age de trois ans, de violentes

douleurs de 1'(eil du même côté, suivies de strabisme, de dimi-

'Voy. Anilse aux Revues analytiques.

106 SOCIÉTÉS SAVANTES.

nution de volume, de paralysie (durée des douleurs, neuf à dix

jours; durée de la paralysie, huit semaines). Depuis lors, chaque

année, un accès semblable au mois d'août. Cette année, un

accès se montre au mois de mars; début par de violentes dou-

leurs et des vomissements; durée, huit à quatorze jours; la dou-

leur disparut aussitôt que vint la paralysie. Au débul d'avril, il

e iste de la parésie locale de l'oculo-meteur commun du côté droit,

mais rien de plus. Rien n'indique la syphilis congénitale ou

acquise ; la paralysie rétrocède lentement, mais assez uniformé-

ment (c'est la paralysie de l'iris qui cède la première) ; dix semaines

plus tard, on ne trouve plus qu'un vestige de mydriase. Deux

cas analogues ont été publiés par de Haner et Saundby; Moebius

tient pour extrêmement probable qu'il s'agit, dans l'espèce, d'un

processus pathologique à développement progressif, très lent,

agissant par poussées, et siégeant au voisinage du noyau de

l'oculo-moteur commun. 11 semble, dans les trois cas, qu'avec le

temps les accès augmentent de gravité, de sorte qu'il y a lieu de

supposer que finalement s'installera une paralysie permanente.

La périodicité s'explique, dans le cas de de liasner, par la congestion

menstruelle : les autres faits ne se plient à aucune explication.

On a bien affaire à une affection cérébrale, car la paralysie débute

par de la céphalalgie et des vomissements (voisinage de la racine

descendante du trijumeau qui renferme des fibres sensitives de la

tête, de l'oeil ( ? ), de la dure-mère ( ? ).

M. Tuczek (de ilarl)oui ? ). Communication de recherches relatives

aux échanges de la nutrition chez les aliénés pendant l'abstinence.

Les matériaux de celte communication résident en deux obser-

vations de refus de nourriture de longue durée (folie s3stéma-

tique). L'auteur réussit à enregistrer des séries prolongées,

continues,de recherches sur l'assimilation et la désassimilation, et

a les prolonger pendant plusieurs semaines au-delà du temps de

l'abstinence, jusqu'à ce que se fût rétabli l'équilibre normal des

excrétions azotées. Chaque jour, il déterminait la quantité d'urine,

sa densité, sa réaction, l'élimination d'urée, de sulfates, phos-

phates, chlorures, d'albumine, de sucre, d'indican, d'acétone,

contenus dans celte humeur. Dans la première observation, le

malade s'abstint de nourriture pendant vingt-trois jours pleins;

il buvait simplement tous les deux jours un verre d'eau de Ho gr.

Le second cas concerne un jeûne en partie complet, en partie

incomplet de vingt-huit jours. On eut soin chaque fois de déter-

miner les proportions en eau et en albumine de l'alimentation

avant, après ou pendant le temps du jeûne absolu ou relatif. De

là les résultats généraux suivants :

10 Au début du jeûne, la quanlité d'urine diminue, mais sa densité

s'élève, pour décroître ensuite proportionnellement à la diminution des

SOCIÉTÉS SAVANTES. 107 ï

parties constitutives fixes de cotte humeur. Un jeûne absolu, sans inges-

tion d'eau, se traduit par une quantité cl'iiiiiie de cent-cin-

quante à deux-cents grammes (moyenne)

2° Chez les aliénés qui jeûnent en demeurant couchés au lit, la

dernière semaine d'abstinence se traduit par l'élimination d'une quan-

tité journalière d'urée de neiirgrammes (moyenne1, quantité qui correspond

aune perte somatique de 12 : ; grammes de muscle. Dans la ltétiorle

d'ingestion alimentaire copieuse (illi succède a l'abstinence, l'excrétion

d'urée ne monte que très graduellement jusqu'à la normale; le corps

répare sa perte en albumine. L'excrétion d'acide sulf«riyne et d'acide

pliosplioriqnc est, pendant l'abstinence, tout à fait parallèle a l'exciéiion

d'urée, e'est-a-dire à la destruction de l'albumine organique; elle est,

dans la dernière semaine d'abstinence, pour l'acide sulfurique, de

222 mdligr. ; pour l'acide pliosphorique de 7 (lécigr. Dès que le malade

recommence il s'alimenter, la courbe des deux acides suit exactement

elle de l'urée. 1,'exci-étioii de chlore est, pendant le jeûne, à peu près

nulle, elle est on moyenne dans la dernière semaine, de 2 décigr. par

jour. Dès que le malade se remet il manger, la courbe du chlore monte

rapidement et indépendamment (les autres courbes, pour atteindre promp-

temrnt la normale; la plus grande partie du chlore ingéré constitue un

aliment de luxe qui traverse promptement l'organisme.

3° La diminution du poids du corps chez les aliénés sitiolhobes doit-

être bien plus attribuée l,t perte d'eau lit perte d'albumine. En

ingérant une grande quantité d'eau, le malade peut, malgré la perte

d'une notable proportion d'albumine, voir son poids augmenter. Ce poids

peut diminuer quand l'ingestion d'eau est défectueuse malgré l'ingestion

d'un notable appoint d'albumine. -

L'urine des 110 iôtiter-inp ni albumine ni sucre. On

n'y trouve que de dès que l'alimentation introduit de l'albumine,

ni L-C( ! en petites quantités. On y rencontre constamment de l'acétone;

elle y apparaît à peu près dès le cinquième lotir de l'abstinence, et pen-

dant toute z durée; dos les deuxième et troisième jours qui suivent la

terminaison du jeûne, l'urine n'en contient plus. Pour rechercher )'ace-

toile. 1 autour s'est servi des réactifs de Légal (nitro-prussiate de soude)

et de Penzolri (orthonitrobonzoate d'aldéhyde).

Les tableaux et les courbes seront publiés dans les Archiv. f.

Psych. même volume, même cahier '.

Discussion :

MM. Hitzig et FùnsTKHn s'étonnent qu'à l'asile de Marbourp on

laisse "i longtemps les sitiophohes sans manger et qu'on ne les

alimente pas à la sonde. Cette pratique u'entraine-t-elle jamais

de pneumonie ? Pour quels motifs rejette-t-on la sonde ?

M. Tuczek. A l'époque où l'on se servait de la sonde on ne voyait

jamais beaucoup de pneumonie; z il n'en survient que

chez de vieilles femmes; mais on ne saurait, dans l'espèce, les

1 Nous en parlerons plus amplement, s'il y a lieu, aux Revues analy-

tiques.

108 SOCIÉTÉS SAVANTES.

attribuer à la courte sitiophobie. La pneumonie n'a donc rien à

voir avec l'abstinence. On rejette l'alimentation à la sonde pour

plusieurs motifs. D'abord, chez les mélancoliques, il y a lieu de

redouter des lésions causées par l'alimentation forcée. En second

lieu, l'alimentation forcée peut provoquer des idées délirantes.

Enfin que d'aliénés refusent ensuite de manger par d'autres moyens.

'Tel n'est pas l'avis de M. leprofesscur Furstner. En toutcas,ce ne

serait pas une raison pour les laisser s'inanitier. Les dangers de

l'alimentation à la sonde ne sont pas si grands. Une protestation

énergique convient seule à l'adresse de Siemens' qui voue à l'ana-

thème tous les psychiatres coutumiers de l'alimentation à la sonde.

M. llowcst : v (d'Ileidellrer). Recherches expérimentales sur lrs

réflexes tendineux. Ses recherches seraient aptes dès l'abord à

confirmer l'hypothèse de Tschirjew, d'api es lequel réflexes tendineux

et tonicité musculaire constituent deux réflexes musculaires ayant

des voies de transmission identiques, et se manifestant à la suite

d'excitations périphériques qualitativement semblables; la diffé-

rence entre ces deux phénomènes réside en ceci que les condi-

tions génératrices du tonus musculaire sont une excitai ion de

l'appareil centripète intra-musculaire produite par élongation

musculaire à l'aide des points de fixation anatomique, d'où con-

sécutivement une contraction modérée mais continue, tandis

que le réflexe tendineux émane de l'excitation de l'appareil de

terminaison seusilif du muscle produite par un soudain renfor-

cement de l'élongation musculaire (tiraillement du tendon par

un heurt), d'où consécutivementuneconvulsiou musculaire intense

brève. Les expériences de Mommsen montrent que toute circons-

tance qui modifie la force d'un réflexe musculaire, modifie dans

le même sens celle du réflexe tendineux (section du nerf, section

des racines postérieures, section de la moelle, intoxication au

chloroforme, au curare, la strychnine, traction longitudinale).

Quant à la tonicité musculaire, Brondgcest a prouvé qu'il existe

ou peut exister un tonus réflexe des muscles du squelette, mais il

n'existe pas de fait physiologique ou clinique qui laisse le moins

du monde supposer l'existence d'un attire tonus tonique.

En répétant, en modifiant de mille manières l'expérience de

13-oiid,eest, l'auteur est arrivé au résultat qu'il est la plupart du

temps facile de constater chez une grenouille décapitée un tonus

réflexe, et pour les fléchisseurs de la partie postérieure des quatre e

extrémités, etpour les extenseurs des jambes. D'autres expériences

lui ont appris que les appareils centripètes par lesquels s'entre-

tient l'activité du tonus réflexe de Brondgeest occupent le muscle

lui-même; on tout cas, ce n'est pas, comme beaucoup l'ont

Voy. Revues analytique-.

SOCIÉTÉS SAVANTES. t03

jusqu'ici supposé, exclusivement par l'action des nerfs cutanés

sensitifs que cela a lieu. L'excitation des nerfs musculaires cen-

tripètes qui produit le tonus peut n'être qu'un facteur mécanique ;

ce qui plaide en faveur de cette opinion, c'est qu'en renforçant

l'élongation des faisceaux par une charge modérée, on rend le

tonus évident.

Les arguments cliniques invoqués contre l'identité du réflexe

tendineux et du tonus musculaire ne prouvent rien. S'il est exact

qu'avec quelque prudence on arrive à régler nettement et facile-

ment les allures des réflexes tendineux d'un homme, il est, par

contre, toujours difficile, généralement même impossible, de

juger isolément de la force du tonus musculaire d'un individu

vivant. L'unique modification de la tonicité musculaire accessible

à un diagnostic analytique et sûr, c'est son augmentation anor-

male ; cette augmentation existe quand les mouvements imprimés

au membre par le clinicien lui donnent, chez un patient qui a

appris à annihiler son innervation volontaire, la sensation d'une

résistance exagérée, et quand cette résistance exagérée disparait

sous le chloroforme. Si pendant la narcose chloroformique, la

rigidité musculaire demeure partielle, c'est que 1'liypertonub mus-

culaire n'est pas pur, qu'il se complique d'altérations périphériques

des faisceaux résultant d'une exagération de la tonicité datant de

loin (contracture). Aucune des autres modalités de la tonicité

musculaire ne saurait être reconnue sur le vivant; cela n'a rien

d'étonnant lorsqu'on songe que le tonus réflexe des muscles du

squelette d'un homme normal peut se présenter à l'état de contrac-

tion minima, et que c'est à peine s'il existe de différence entre la

sensation de résistance qu'on perçoit chez un individu sain

soumis au chloroforme dont on fait mouvoir les membres (ab-

sence de tonus), et les sensations de résistance qu'on perçoit

chez le même sujet, en dehors du sommeil chtoroformique.

mais s'abandonnant complètement à nos manipulations (tonus

normal). A fortiori, etc. Aussi une foule d'erreurs ont-elles

été proclamées. On a finalement objecté contre la nature

réflexe des réflexes tendineux que cliniquement ils ne mar-

client pas parallèlement aux réflexes cutanés ; cette objec-

tion n'a pas de poids pour qui réfléchit un instant à la

différence physiologique des muscles striés et de la peau : autant

vaudrait s'étonner que les altérations des nerfs centripètes de

l'appareil auditif ne se rencontrent pas dans le tabes alors qu'on y

trouve des lésions du nerf optique.

Discussion :

M. le professeur SCIIULTZE, fait remarquer qu'il y a assez long-

temps, il a sur le lapin fait l'expérience suivante. On introduit

1 Voy. Revues analytiques.

110 SOCIÉTÉS SAVANTES. '

sous le tendon patellaire, uuepetite bûche de bois, pour le tendre

fortement. On a beau dès lors frapper sur lui, il ne se produit pas

de convulsions réflexes du triceps. Donc le simple contact méca-

nique est incapable, à lui seul, de produire le processus réflexe;

il faut encore que le tendon puisse vibrer.

M. le professeur SCHUL1'ZIs. Sur la myélite 'ftuma< ! « ? Les alté-

rations primordiales de la myélite aiguë sont chez l'homme à peine

connues, nos connaissances sur les stades récents de l'intlantuta-

tion traumatique ne reposent que sur des expériences physiolo-

giques. Or, voici l'autopsie d'un homme mort trois jours après

une lésion de la colonne cervicale. Les lésions macroscopiques

consistent en un foyer circonscrit occupant le segment antérieur

des cordons postérieurs, à une distance assez éloignée du lieu de

la lésion ; c'est la même situation, la même disposition qu'en un

cas récemment publié liarNN'estl)lial etlui '. Au microscope on ren-

contre des hématies extravasées, de grandes quantités de cellules

(globules blancs) entre les fibres nerveuses écartées par elles; ces

libres ont plutôt l'air de dégénérer qu'elles ne semblent tuméfiées;

pas de méningite suppurée. A l'oeil nu, on dirait d'un ramollisse-

ment rouge, et l'orateur ne croit pas que les cellules mentionnées

se transforment directement en cellules granuleuses.

M. SCIIULTZE. Présentation d'anomalie de développement toute par-

liettlièrc de la moelle. Un des cas concerne un spina-bifida de

la colonne cervicale associé à une anomalie de structure du qua-

trième ventricule et de la moelle épinière. Dans le renflement

cervical, le canal central est dilaté; cette dilatation, médiane,

rejoint la périphérie postérieure de l'organe; en un point, un

pont de névroglie porteur de fibres nerveuses est jeté sur cette

fente. Autre observation. Celle-ci provient d'un adulte jeune,

bien portant, victime d'un accident de chemin de fer. Ouest frappé

delà proéminence à la surface de l'organe de mille petites excrois-

sances qui constituent autant de gibbosités; elles sont composées

de substance blanche. La substance grise, surtout à la région cer-

vicale, est, dans les cornes antérieures et postérieures, interrompue

dans sa continuité par des tractus de substance blanche, de

quelque façon qu'on pratique des coupes (transverses ou longitu-

diuales); à la partie inférieure de cette région, sur une étendue

en hauteur peu considérable, la substance grise est réduite à des

points. Nous laissons naturellement de côté les phénomènes ressort-

tissant à la contusion récente.

A la suite du congrès, la plupart des assistants visitèrent, sous

la conduite de M. Ileiligeutltal, conseiller aulique, les engins de

gymnastique suédoise exposés à Friedrichsbad par le professeur

Zander de Stockholm. (Archiv. f. Psych. u. 1'cruenhrankic., XV, 3.)

P. Kéraval.

SOCIÉTÉS SAVANTES. Ill 1

SOCIÉTÉ PSYCHIATRIQUE DE BERLIN

Séttiice (lit i i tléceiitbi-e 1883 i.

M. LOEHR, président, déclare la séance ouverte. Il communique à

l'assemblée des lettres de salutations de MM. Hasse, Kroemer, Ideier,

Schmidt.SehroeteretSchoefer.

M. Jasruomrz donne connaissance d'une circulaire de la Société

de médecine interne par laquelle elle convie les psychiatres, et

' notamment, les médecins d'asiles, à prendre part à l'enquête sta-

hstique relative à la tuberculose. '

M. Ordo (de Dalldoi-l) présente un encéphale farci de cysticerques.

Il s'agit d'une journalière de vingt-quatre ans, indemne de toute

hérédité nouropsychopathique. Le 1 avril, elle signale trois

métrorrbagies, suites de couches, après lesquelles la menstruation

ne s'est pas rétablie. En mai, surviennent des céphalalg-iesfréqueli-

te,, surtout occipitales, à la suite desquelles se montrent des

troubles de tasanté généralement du même mois, ces céphalalgies

augmentent et s'accompagnent de lassitude jusqu'au 23; ce jour,

agitation pendant laquelle la malade se frappe'aux murs, gémit,

supplie son mari de la tuer : à cet état succède une période de

sopor. Elle entre à la Charité. Le 2 ! t, à son réveil, la lucidité est

complète ; la patiente ne se souvient pas de ce qui s'est passé ; il

lui reste beaucoup de faiblesse, mais elle s'en remet, et quitte

l'hôpital au début de juillet. Jusqu'au commencement de septembre,

bien-être relatif entrecoupé par de nombreuses céphalalgies, et

d'assez fréquents vertiges accompagnés de lipothymies; périodes

de calme alternant avec des phases de grande agitation et nécessi-

tant tinatemontleretouràl'hopital, le 13 septembre. Le* octobre,

on la transporte à l'asile; son diagnostic d'entrée est ainsi for-

mulé : affaiblissement intellectuel, avec hallucinations et conceptions

délirantes; l'examen révèle, en effet, un épuisement général de

l'économie, de l'angoisse et de l'excitation entées sur un fond

d'anémie prononcé; rabattement est extrême, la tête ballotte de

ci delà; station presque constamment assise au lit : démarche in-

certaine, lourde; absence du signe de Romberg; indifférence à

l'égard des événements extérieurs; il semble qu'il y ait un peu de

parésie faciale gauche, de diminution de la sensibilité générale.

'Voy..<''c/ftt'es<'N<' : <)'o/o)e,t.VH),p.23(;. ,

Pouls petit, facilement dépressible =-'70. Céphalalgie occipitale,

parfois frontale; angoisse, vertiges, lassitude générale. De temps

à autre, agitation avec gémissements, suivie d'hébétude, de troubles

du côté de la mémoire, de desordre dans les idées; pendant les

séries d'accalmie, la conversation est possible et normale, mais

elle détermine un peu de fatigue. A partir du 16 octobre, accès

d'agitation extrême avec hallucinations de l'ouïe et de la vue,

désordre dans les idées, mobilité de l'humeur, actes délirants. Le

10 novembre, sommeil prolongé et profond; la malade ne de-

meure que quelques heures par jour éveillée, elle estalors calme.

Le 19, céphalalgie, angoisse; puis la santé se rétablit complètement.

Du 21 au 26, confusion des couleurs, céphalalgie; la malade reste

absorbée. Le 26, lipothymie suivie d'une telle faiblesse que la

malade, toute étourdie, ne répond que lorsqu'on insiste. Pouls faible

= 70. Elle se lève le 1 décembre, elle se sent bien, et ne présente

qu'un peu de dépression psychique. Le 2 décembre, elle reste au

lit, violente agitation, céphalalgie très intense, vomissements fré-

quents, délire ; il faut l'isoler. Mort soudaine quelques heures

après. La promptitude du décès ne permet pas d'en observer les

phases; ou relève simplement qu'en dernier lieu, le visage et les

lèvres présentaient miecoiorationbtanche.AttoStC.Sanstoenia

(les n'cri signalaient pas non plus la présence), on

est étonné du farcissemeut colossal de l'encéphale, du coeur, de

l'ensemble de l'appareil musculaire par des vésicules de cysli-

cerques. La pie-mère et l'écorce des organes centraux, les parois

des ventricules, surtout à gauche, en sont littéralement bourrées;

il en est de même des muscles. La dure-mère, le diaphragme, la

plèvre, le poumon gauche n'en contiennent que quelques-unes. En

ce qui concerne les détails et l'étude critique, l'auteur établit les

relations de cause à effet entre les phénomènes morbides et l'in-

vasiuu des cysticerques, bien qu'on ne trouve pas de loenia. Il y

a eu pour lui d'un seul trait invasion en masse; l'encéphale a

manifesté sa souffrance par les céphalalgies, l'état maniaque et la

stupeur. Puis, il s'est accoutumé à ces corps étrangers, jusqu'au

jour où leur l'accroissement a de nouveau entraîné des troubles

graves, les uns témoignant de l'augmentation de la pression in-

tracranienne, les autres, de processus actifs (inflammatoires). La

mort soudaine se rattacherait à l'augmentation dans le nombre

des cysticerques du cervelet, de la protubérance, du quatrième ven-

tricule.

Discussion : .'

M. J.ILST110WIT7. Le tableau clinique des cysticerques est encore

assez vague; bien des cas rappellent la paralysie générale. On

trouva, dans une observation, le type de l'hystérie mortelle aiguë

de L. Meyer (absence de troubles moteurs). Ce qui le frappe

SOCIÉTÉS SAVANTES. 118 3

dans le fait de M. Otto, c'est l'absence de convulsions, malgré

l'infiltration des centres moeurs. Il rappelle que le diagnostic est

parfois possible, quand on sent des cysticerques sous la peau et

dans les muscles. Un de ses malades atteint de cysticerques mu-

sculairesn'avail présenté aucun phénomène encéphalique.

M. REUM conteste l'utilité de l'oplitlialmoscope comme instru-

ment de diagnostic, dans l'espèce.

M. LAXGREUTEK. Des cysticerques peuvent occuper l'encéphale

sans engendrer de phénomènes cliniques caractéristiques.

MM. Loeiir et Zinn remettent en mémoire le cas semblable

d'ULLmoi (1 le séance de la Société Allg. Zeitscle. f. Psych., 4 871),

dans lequel on put établir le diagnostic pendant la vie.

M. F. Falk. Sur quelques accusations pour crimes contre la morale

(attentais). L'auteur rapporte quatre cas d'attentats : actes

luxurieux commis sur des fillettes de moins de quatorze ans. Le

premier de ces faits avait, iiiêmeà des profanes, suscité le soupçon

qu'il s'agissait d'un aliéné, mais l'expertise ne décela, chez l'ac-

cusé, âé de vingt-cinq ans, rien de pathologique ; condamnation

à deux ans de détention. Le second concernait un jeune homme

de vingt-trois ans, faible d'esprit, jusque-là intègre, qui auparavant

avait été interdit. Les troisième et quatrième cas avaient trait à

des hommes de quarante ans qui, à plusieurs reprises, pendant

des accès d'épilepsie transformés (troubles psychiques) avaient

devant des enfants découvert leurs parties génitales; l'instruction

fut suspendue pour le dernier; le premier fut acquitté deux fois;

sa conduite, dans ces cinq dernières années, n'a pas laissé à

désirer. Mais, dans ces quatre cas, ce n'est qu'après des condam-

nations répétées que l'on flaira un trouble mental. L'examen

médico-légal, en annulant la pénalité, permit de faire intervenir

le tribunal civil et d'obtenir une interdiction.

Discussion :

M. Zinn fait remarquer les difficultés que l'on recontre, en ce

qui concerne les jeunes criminels de cette catégorie, à obtenir

l'élargissement d'individus dont la force de résistance a diminué.

La paralysie générale et la démence sénile se prêtent mieux à

un rapport médico-légal. Il mentionne deux cas dans lesquels il

ne trouva, chez l'accusé, qu'un sommaire souvenir de l'acte, sou-

venir relativement tardif. Dans les deux cas, il s'agissait d'épilep-

tiques. Les spécialistes entendus avant lui avaient conclu à la

responsabilité. M. Zinn aborde ensuite l'histoire médico-légale

d'un fait de ce genre. Voici l'entrée en matière : « En septembre

1806 passait à travers un village, dans une province voisine, un

homme convenablement vêtu ; à l'entrée de ce village, il trouve

trois enfants qui jouent dont une fillette. Il marche à cette der-

ARCHIVES, t. la. 8

11 se SOCIÉTÉS SAVANTES.

nière, la renverse, la prend sur ses genoux, lui enfonce un doigt

dans les parties génitales tandis que les autres enfants s'enfuient,

repose à terre la fillette qui se met à crier, lui donne un silber-

groschen et s'en va.» On l'arrête le soir dans un hôtel d'une ville

située à un heure de là et l'on apprend que c'est le chef d'une

maison de commerce autorisée des provinces de l'Ouest. Ses

allures frappent le directeur de la prison. Ici commence la série

des rapports médico-légaux contradictoires, longue épopée qu'il

faut lire par le menu pour en apprécier les détails. Elle se résume

en une multitude de comparutions de divers médecins, en une

nouvelle instruction relative à l'attitude du patient après l'acte et

pendant sa détention, en la demande d'explications toujours con-

tradictoires à la barre du tribunal, les uns attestant la simulation

tandis que M. Zinn affirme l'état de maladie : de là désordre

dans l'esprit des juges et des jurés. L'irresponsabilité finit par

être déclarée. L'avenir prouva la réalité des assertions de l'ora-

teur et confirma son diagnostic : épilepsie. Le malade guérit au

bout de six mois : depuis lors, pas plus qu'avant le crime, il n'a

eu d'accès d'épilepsie.

M. Iliascu fait remarquer combien les rapports défectueux sont

fréquents. Il communique une observation de son crû.

M. Loehr rappelle, par rapport aux jeunes criminels pour atten-

tats, les cas soumis au congrès du Hambourg : soins à donner aux

idiots. (Voy. compte rendu.)

M. Edel mentionne la fréquence de ces crimes chez les profes-

seurs.

MM. FALK et Iluata confirment cette fréquence, à la lumière des

documents les plus modernes : intégrité psychique habituelle de

ces délinquants.

M. LOEHR présente à l'Assemblée le mémoire suivant emprunté

à l'héritage littéraire de M. de GELLfIUIt`7. Quelques résultats tirés

de l'emploi de l'hydrothérapie à l'asile d'aliénés d'Iicclccrmiwle.

Ce mémoire était destine à la société. Pour agir comme dérivatif

à l'égard de la circulation crânienne, et produire le sommeil,

l'auteur a employé les compresses aux mollets. Un morceau de

toile long de deux mètres et demi, de la largeur d'un drap, est

roulé et plongé, d'un tiers de sa longueur, dans de l'eau froide;

on l'exprime en le tordant, et l'un entoure la jambe de telle sorte

que les tours secs recouvrent partout de plusieurs couches les

tours humides; on peut encore lier par dessus un morceau de

laine ou un bas. On place ce bandage le soir au lit, pour l'enlever

le lendemain matin. En dilatant les vaisseaux, il produit une

réplétion exagérée du système vasculaire des membres inférieurs,

il dégage la tête; d'où la diminution des congestions céphaliques.

SOCIETES SAVANTES, 115

L'auteur l'a toujours employé utilement, notamment contre l'in-

somnie. Le lendemain, le calme diurne dépasse celui que pour-

rait produire n'importe quel médicament. Au besoin on changera

les compresses toutes les trois à quatre heures, dès que les couches

internes seront sèches. Les résultats favorables ont été obtenus

dans les manies récentes et périodiques, dans les formes d'agi-

tation chronique. (.lllg. Zeetsclar. f. Psyelt., IL[, 1.) P. Kéraval.

Séczn·e du I znurs I 531.

M. le président LOEiirt transmet les salutations de \11. lnwsr.,

)L4.SSl;,IImSCH,K.UtCZEWSEI.

Le secrétaire de la Société, M. Bernhard, ayant transporté ses

pénates à Gaerlitz, sa succession est, d'après le voeu du président,

donnée à 11. Gock.

M. 0. Mùller. Les lieux de station d 'hiver pour les maladies zzer-

veuses ci la Itiuièru. L'ouverture de la voie du Saint-Gothard

permet chaque année, à des milliers d'Allemands souffrants de

gagner l'Italie l'hiver, sans presque aucune fatigue. Or, la Rivièra

constitue un étroit pays riverain qui s'étend, à partir de Gênes au

sud. sur la côte orientale (Rivièra di Levante) jusqu Clliavari,

sur la côte ouest jusqud.Niz/a et Cannes (ttivièra di Pouente).

De hautes montagnes, dont les bords escarpés taillés à pic

surplombent la Méditerranée, forment un écran contre les vents

du Noi-d; de la, des conditions climatériques spéciales. Cette

bande de territoire atteint bien rarement quelques kilomètres de

large. Toutes les stations sont contiguës à la mer, au moins par

les habitations intérieurement situées; en tout cas, leurs régions

supérieures s'élèvent rarement de quelques cents pieds au-dessus

du niveau marin. Aussi trouve-t-on là une végétation australe de

palmiers, cactus, orangers, citroniers. oliviers dont on fait la

récolte en décembre etc., tandis que les sommets des montaenes

sont couverts de neige et de glace; le seul inconvénient, c'est

qu'à raison de l'escarpement on rencontre souvent des contrastes

brutaux entre le soleil et l'ombre, entre la température de midi,

du matin, du soir. Sur la côte orientale de la Rivièra, il n'y a

qu'un lieu qui ait attiré nos compatriotes, parce qu'il présente un

caractère riant et champêtre, c'est Nervi. Presque aux portes de

Gènes ( ! 'kilomètres), Nervi a, dans ces dix dernières années, con-

quis droit de cité thérapeutique; cette sale vil le italienne est devenue

un lieu agréable. L'affluence allemande est prouvée parla présence

actuelle de trois médecins de cette nationalité. Très préservée au

nord et à l'est par les montagnes abruptes qui dominent la ville,

elle est haiguée d'uu airextraordiuaireureut duw, rafraiclii malin

116 (i SOCIÉTÉS SAVANTES.

et soir par les brises qui s'élèvent de la mer. Le caractère italien

est toujours le même; une vieille rue la coupe qui se dirige au sud,

le long des côtes en venant de Gênes. Quantité de jardins et de

parcs magnifiques plantés de palmiers et d'arbres descendent de

la ville aux bords de la mer. Quelques desiderata doivent mal-

heureusement être également enregistrés relativement au confort

et à l'agrément il n'existe pas non plus encore d'établissements

de bains bien installés. Le 1), SelieLolig y possède une maison de

santé parfaite. La Rivièra di Ponente offre bien plus d'attrait.

La perle des stations d'hiver, grâce à sa situation, à l'air qu'on y

respire, au' : promenades, au confortable, aux soins dont on est

entouré, à la propreté, c'est Saii Rem). Simple petite ville calme

il y a quelques dix années, elle compte aujourd'hui 18,000 habi-

tants, trente grands hôtels et pensions. L'année dernière

2,003 Allemands sont venus s'y mettre en traitement. Six médecins

allemands y sont maintenant suffisamment occupés. Très propre,

elle possède nombre de très belles promenades qui gagnent les

monts ambiants. Le lieu de réunion des étrangers est le Corso,

sis au-dessus de la gare et du jardin de l'Impératrice; ses belles

plantations (palmiers, etc.) et les séances de concerts répétées

plusieurs fois par semaine contribuent à en faire un endroit de

rendez-vous. Température moyenne d'après Koerner '; annuelles

- 16,63; hivernale = + '10,5 : c'est-à-dire qu'elle tient le milieu

entre Naples et Palerme. -A une heure de chemin, par une voie

riveraine de la plage, on atteint Ospedoletli station ouverte,

l'hiver dernier, à grands frais par le crédit foncier de Lyon. « A

mon arrivée, le 10 décembre de l'année précédente, je trouvai

presque vides les magnifiques locaux de l'hôtel de la Reine qui

comprend deux cents chambres; l'élégant salon de conversation

était aux mains des divers corps d'état du bâtiment, le professeur

Muguenin de Zurich était attendu avec impatience. » En somme,

grand calme, douce retraite, facilité de respirer, sur des pro-

menades agréables et pleines de goût, un air pour ainsi dire

tamisé; telles sont les particularités qui certainement attireront,

dans l'avenir de nombreux clients, à la condition que les prix de

pensions, la nourriture, et la modicité relative des dépenses pour

un assez long séjour se mettent de la partie. Les chambres, les

salles, les cabinets de bains sont confortables et hygiéniques.

Descendons vers le sud; après une maiche d'une heure, nous

abordons une petite ville gracieusement entourée d'une forêt de

palmiers voisine. Nous sommes à 13ord10het·ce : 2,300 habitants. Très

fréquentée pendant ces dernières années, elle jouit du calme de

la campagne. C'est le lieu le plus préservé de la Rivièra. Prix

1 San liemo. Eine Deitische Winlercolonie, Leipzig, 1883, Otto Wie-

gaud.édt.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 117

modérés, culture de palmiers de toutes grosseurs et de diverses

variétés. Vue magnifique sur la mer du café Cadana.aJe passe

les stations de la Rivièra française, dont les Allemands ne sesou-

cientguère aujourd'hui.» »

Les formes morbides pour lesquelles un séjour d'hiver et la Ri-

viera est indiqué sont avant tout les affections pulmonaires. Parmi

les maladies du système nerveux, les médecins de la résion citent

les perturbations asthéniques, et celles qui résultent d'un épuise-

ment somatique. M. 0. Millier ajoute les états de dépression psy-

chique au début (mélancolie ethypochondrie légères), tandis qu'il

ne saurait y avoir qu'aggravation pour les états d'excitation ac-

compagnés de manifestattons irrésistibles, d'angoisse, d'halluci-

nations, ainsi que pour les états en rapport avec des pertes de

substance (paralysie générale au début). Il importe cependant de

choisir le lieu qui convient à chaque malade, et surtout de le con-

fier à un spécialiste avant qu'il n'entreprenne le voyage et pen-

dant sou traitement là-bas.

M. ICNt : ctlr. Longue durée insolite d'un état d'o6tattLilution psy-

chique de nature épileptiquc. L'observation porte sur un homme

de trente-six ans libre de toute tare héréditaire ou autre. Il ra-

conte qu'il a été atteint d'épilepsie à la suite d'un traumatisme

(fracture des osdunex, commotion cérébrale) l'âge de vingt-

neuf ans, en 18î6. La moyenne de ses attaques fut pendant cinq

ans de deux par semaine. Puis une lacune considérable existe

dans ses souvenirs. « Vers l'époque où le feuillage commence à

jaunir, dit-il (vers la fin de septembre 1881) » il auiait été frappé

d'hémiplégie gauche, et aurait séjourné à l'hôpital de Hautzen

(il était en tournée de voyage); en même temps, il aurait présenté

un trouble de la parole. En reconstituant son histoire à l'aide de

lambeaux de renseignements, on trouve qu'avant cette attaque

apoplectique, il était pendant sa tournée entré à l'hôpital de Lo-

bau (Saxe) pour une bronchite; à ce moment, les médecins ne se

sont aperçus d'aucune perturbation nerveuse ou mentale. Il quitte

guéri l'hôpital le 20 août, et, après son départ, on remarque qu'il a

barbouillé les murs de sa chambre et les livres qu'il lisait d'ins-

criptions dépourvues de sens. Dans la nuit du 20 au --Il août, on le

trouve à 21 Iiilotii. de iiautzen privé de connaissance et par

des convulsions. Porté à l'hôpital, il est déclaré hémiplégique

gauche ('paralysie de la parole). ll n'a sur lui ni argent, ni pièces

d'identité si ce n'est un certificat de sortie de l'hôpital de Lobau.

Peu de jours après son admission, il écrit (car il ne peut parler)

tous les renseignements demandés par un fonctionnaire muni-

cipal sur sa personnalité et mentionne son séjour antécédent à

l'hôpital. Malgré cela, a son entrée à l'asile, autant d'ailleurs

qu'aujourd'hui.sa mémoire est iiieip,ti)[e de 1(ii fournir ttieuii 1-ell-

118 SOCIÉTÉS SAVANTES.

seignement sur cet épisode; nous ne pouvons même savoir de lui

quand celte amnésie est apparue pour la première fois. Ce que

l'on peut affirmer, c'est que, depuis l'ictus apoplectique, les accès

d'épilepsie ont gagné en fréquence et en violence; ils sont rede-

venus journaliers comme au début et sont suivis d'une excitation

de plusieurs heures (injures, menaces, idées d'empoisonnement,

destruction, tendances aggressives, un accès de manie furieuse de

quatre semaines). Inutilité de K I. K 13r. oxyde de zinc. Néanmoins

au bout de quelques semaines, la parole est revenue, le bras

gauche a récupéré ses fonctions après plusieurs mois. Translation

du malade à l'asile de Colditz le 2 janvier 1883. De l'hémiplégie

gauche, il ne reste qu'un téter strabisme interne gauche, de la

faiblesse de la branche buccale du facial du même côté, de l'm-

puisance de la jambe à porter le corps (les mouvements en sont

possibles, mais ils sont limités comme étendue et comme force).

Pas d'autre anomalie somatique à part les vestiges de la fracture

des os du nez. Rien du côté des facultés psychiques. Les accès

d'épilepsie se montrent pendant deux jours consécutifs; le troi-

sième jour est un jour de répit. Chaque accès commence par

une immobilité grâce a laquelle le malade semble figé dans la

stupidité; on a le temps de le placer sur son lit. Il ne se produit

pas de ci Les convulsions durent dix minutes; la jambe gauche

y participe; deux heures de sommeil terminent l'attaque. Jamais

d'agitation. A partirdu 2 février, doses quotidiennes de 10 gr. de

KBr. en deux fois. Jusqu'au tO, on ne constate aucune modifica-

tion ; puis les accès deviennent plus rares. Du 14 février au 28

mars, quatre accès. Puis disparition des attaques malgré la dimi-

nution graduelle de KBr et sa réduction à 2 gr. par jour. Pen-

dant ce laps de temps, la jambe gauche a recouvré sa force; le

malade se promène sans boiter, librement.

L'orateur insiste sur la durée de l'obnubitation psychique dont

le minimun a dû être de trois semaines, sur l'absence d'hébétude

objective pendant ce laps de temps. Le malade pu voyager, s'oc-

cuper, séjourner à l'hôpital sans qu'on remarquât d'anomalies; il

a pu, même sous l'influence de phénomènes graves (troubles de la

parole), renseigner convenablement un fonctionnaire. Un ensei-

gnement se dégage de ce fait, c'est que le médecin légiste doit se

montrer très réservé. Il faut encore noter les effets bienfaisants

et rapides du 1113r; d'autant plus que, depuis un an, on n'a ou à

enregistrer aucun symptôme d'épilepsie, alors que la maladie da-

tait de sept ans, et que les six derniers mois avaient été marqués

par une aggravation considérable compliquée bientôt d'hémiplé-

gie avec troubles de la parole.

Discussion :

M. Zixx contraint l'auteur à ajouter que l'ivrognerie doit être

écartée dans l'espèce.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 119 9

M. Mueller. A la suite de fièvres typhoïdes graves, maints ma-

lades présentent d'assez longues disparitions de la connaissance.

M. Loehr rappelle la perte de connaissance qui succède à la

manie; dans un cas dû aKrafft-Ehing la perte de conscience

dura du 23 mai au 30 juin.

M. 71-Ns. Sur l'extension projetée de l'assistance médicale des

malheureux de la province de Brandebourg ' . Berlin n'est pas comprise

dans la province. - Avant la mise en vigueur de l'ordonnance ré-

glant le régime et l'organisation de l'assistance des pauvres et des

aliénés, la province, à ce point de vue, se décomposait en trois ré-

seaux auxquels incombaient pour chaque district le soin et l'en-

tretien des pauvres et des aliénés, (1876). Or le réseau des pauvres

du pays de Kurmarkii'a pourvu lu'à 7rtiid'peiiie à l'assistance de

ses aliénés, au moyen de l'asile d'aliénés départemental (Landirre-

nanstalt) d'l : berwvalde et de l'établissement d'aliénés et d'infirmes

(Iii,etipile.ae und Siechenanstalt) de Le réseau des

pauvres du pays de la Basse-Lusace n'a pas non plus suffi aux be-

soins à l'aide de l'asile départemental d'aliénés de Sorau. Enfin

le réseau du pays de Neumark ne possède pas d'asiles d'aliénés.

Donc, le régime d'assistance de la province de brandebourg, tout en

ayant étendu ses anciennes constructions, tout en eu avant exécuté

de nouvelles autant que possible, n'a pu satisfaire aux exigences de

la nécessité. Voici quelques points du programme et des plans pré-

parés par l'orateur en sa qualité de rapporteur médical (Landes

médicinal Réfèrent) pour la province de Brandebourg : on sait que

cette fonction comporte la haute surveillance des asiles d'aliénés

provinciaux, ainsi que l'inspection médicale et hygiénique des

établissements de bienfaisance, de correction, d'éducation pénale,

de sourds-muets de la région.

La population de la province comporte 2,260,000 âmes dont

S,68;; aliénés, soit I aliéné pour 398 habitants. De 1871 à 1880, la

population s'est accrue dans la proportion de 11 1 p. 100; les alié-

nés ont augmenté de 39 p. 100. A présent la province hospitalise

dans ses trois asiles 9,440 aliénés se répartissant en 800 pour

Eherswalde, 400 pour Sorau, 240 pour Wittstock. Il y a encom-

brement, et, de plus, les bâtiments ne correspondent plus au

genre de malades a héberger, surtout lorsqu'on considère l'excès

disproportionné des malades incurables et dangereux, de ceux qui

causent du désordre, dont l'aspect extérieur suscite le dégoût.

M. Zinn est parti d'un point de vue, confirmé par l'expérience gé-

nérale. d'après lequel on n'arrive à parer aux indications de l'assis-

tance publique des aliénés qu'en donnant aux asiles un périmètre

1 A rapprocher du mémoire sur la basse Franconie de M. Rieer, Ar-

chives de Neurologie, t. VIII., p. 92.

120 SOCIÉTÉS SAVANTES.

permettant l'admission d'un malade pour 1,000 habitants; par

conséquent il faut que la province construise encore des asiles

pour z0 malades. Elle manque aussi d'asiles pour les aliénés

congénitaux (idiots) perfectibles ou non, d'établissements pour

hospitaliser et traiter méthodiquement par les ressources théra-

peutiques les épilepliqucs non aliénés, d'institutions adaptées à

l'éducation pédagogique des enfants épileptiques. Mais, comme la

province ne peut mener de front l'exécution de toutes ces obliga-

tions, comme on a provisoirement la latitude de caser les idiots,

soit dans les asiles privés, soit dans les asiles publics situés en de-

hors de la province, comme les soins préventifs pour les épilep-

tiques non aliénés n'ont pas une urgence immédiate, M. Zinn

propose :

1° D'abord, de créer un asile d'aliénés pour 600 malades, asile

de traitement et d'hospitalisation destiné de préférence à des ma-

lades incurables, dangereux, créant le désordre. A cet asile on

annexera une exploitation agricole étendue qui, sise à une dis-

tance mesurée de l'établissement, occupera le voisinage d'une

grande ville placée sur une voie ferrée. Ce nouvel établissement

ne recevra pas de pensionnaires, cat-EI)ei-swald(, et Sorau suffisent

à ces besoins-là. Chacun des trois établissements pour aigus et

chroniques (Eberswalde, Sorau et le nouvel asile) desservira la

partie de la province immédiatement adjacente. Eberswalde pro-

filera à un rayon de 1,200,000 habitants, Sorau à une zone de

700,000, le nouvel asile servira à 400,000 âmes;

2" Provisoirement, on peut écarter les projets de construction

d'un autre asile d'aliénés de 300 lits environ, d'un asile d'idiots,

d'un asile d'épileptiques non aliénés.

La besogne n'est jamais complète pour le médecin, tant qu'il

ne s'est pas inquiété du programme même de l'édification d'un

asile; il doit non seulement se familiariser avec les besoins de l'é-

tablissement dans leurs petits détails fondamentaux, mais encore

reproduire par le dessin, de façon à les rendre plus intelligibles

pour tous, les exigences à satisfaire. L'architecte, en supposant

qu'il agrée le programme proposé, a pour mission de compléter

les ébauches, et de perfectionner le plan proprement dit pour l'exé-

cuter. L'exécution même sera surveillée par l'aliéniste en per-

sonne. L'entente la plus précise régnera avant et pendant l'exé-

cution entre l'aliéniste et l'architecte ; celui-ci apprendra de celui-là,

les indications à remplir et leurs particularités les plus menues, il

s'en pénétrera, car la fusion intime des deux ordres de connais-

sances (architecturales et médicales) peut seule porter des fruits

mûrs. Architecle etmédeciu prendront part aux consultations des

autorités compétentes; ils manifesteront leurs opinions dans les

conseils, y rectifieront les manières de voies erronées, jetteront

la lumière sur les points mal compris et feront régner l'unité.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 121

L'auteur soumet donc et explique à la société ses plans fondamen-

taux (5 ébauches et un plan de situation); il a eu pour souci d'é-

viter rigoureusement tout ce qui ne se rattache pas directement à

l'adaptation, au but fixe de l'asile, son objectif a été de faire le

nécessaire solidement et conformément à la ditection poursuivie.

Il a adopté le système des pavillons séparés en se proposant

d'éliminer impitoyablement les espaces morts : tels les angles et

les endroits privés de lumière directe. Le placement de chaque

sexe comportera quatre bâtiments.

122 SOCIÉTÉS SAVANTES.

voyage, afin de visiter les nouveaux établissements d'aliénés et

hôpitaux de l'Allemagne et de l'étranger, avec mention d'avoir à

commencer ce voyage, dont il rendra compte plus tard à la so-

ciété, aux environs de la Pentecôte.

Discussion à laquelle prennent part Loehr, Schroeter, Zenker,

Edel : elle met en lumière la satisfaction relative au résultat ob-

tenu. La société exprime ses félicitations à l'auteur du projet, en

même temps qu'elle adresse aux autorités provinciales, toute sa

gratitude pour les services rendus par leur rapide décision.

M. l ? 1'SF : LFIn. De l'ozone et de son action sur les maladies nerveuses

chroniques. Ce ne sont encore que des recherches préalables

auxquelles l'auteur a été poussé par les résultats que Binz (de

Bonn) a obtenu, à l'aide de l'ozone comme narcotique. Il importe

peu, pour lui, que l'on désigne sous le nom d'ozone ce qui dans

l'air fournit la réaction connue sur le papier amidonné impré-

gné d'iodure de potassium, ou tout autre chose, tant il lui

parai certain que l'atmosphère contient un gaz spécifique quant

à son action sur les organismes malades. Sous ce rapport, l'air a

été à peine examiné. Depuis le mois de décembre 188 ? il pra-

tique' chaque jour trois examens sans négliger les conditions ther-

miques, météorologiques, barométriques, hygrométriques, ané-

mométriques etc., du milieu ambiant. Or, il a, jusqu'à présent,

été assez heureux pour constater qu'une très forte proportion

d'air ozonisé exerce une action spécifique sur les maladies ner-

veuses des catégories les plus variées, de même, qu'un air peu

chargé ou tout à fait privé d'ozone. Il a, pour les malades de

son établissement, tracé des courbes du sommeil accompagnées

des inscriptionsconsignantles réponses des maladesàdesqueslious

adressées et contrôlées- par lui. Le temps avancé s'oppose à ce

que l'auteur termine sa communication. Plus tard, lorsque la

série de recherches se sera grossie des bénéfices d'une observation

régulière ultérieure, il fera connaître les résultats obtenus.

La séance est close à cinq heures. (Allg. Zeilscha. f. Psyrli.

XLI, 1.) P. KÉRAYAL.

XVIIe CONGRÈS DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ DES ALIËMSTES

DE LA BASSE-SAXE ET DE 1VESTPH ? LIE'

SESSION DE HANOVRE

Séance du 101 mai 1883.

M. Snell est appelé à la présidence; secrétaire : M. Tannen.

1 Voy. Archives de Neurologie, t. V, p. 265. -

SOCIÉTÉS SAVANTES. 123

M. Snh : LL prend la parole sur les sensations pathologiques en tant

que symptômes de perturbations mentales. Les sensations patho-

logiques, jadis peu remarquée;, ont été, de la part des psychiatres

contemporains, plus étudiées; elles ont attiré une attention en

rapport avec leur importance. C'est ainsi que Seliuelu (Dysphrénie

névralgique), après avoir observé, en clinique, les sensations

pathologiques, arrive à ce résultat que le groupe des perturba-

tions mentales, dans lesquelles les sensations pathologiques

constituent une partie fondamentale, comprend toutes les psy-

choses dont la genèse ne dérive pas d'une lésion encéphalique

directe. Les sensations pathologiques relèvent du vaste domaine

des hallucinations, mais elles jouent un rôle tout particulier, et

s'observent assez souvent sans hallucinations proprement dites.

Elles ne manquent presque jamais dans la mélancolie et dans les

formes de délire systématisé, sont plus rares et moins importantes

dans la manie, et s'observent fréquemment dans les diverses mo-

dalités de la démence, y compris la paralysie générale. Elles

peuvent atteindre n'importe quelle partie du corps, s'y localiser

ou s'étendre de façon à occuper au besoin tout l'organisme, de-

meurer sous la même forme pendant des années, ou varier et

même survenir périodiquement, constituer le pivot de la maladie

ou n'être qu'accessoire, enfin, ce qui les distingue des hallucina-

tions, rétrocéder. L'orateur lit à ce propos l'histoire d'une femme

de trente ans, actuellement en traitement à l'asile d'Ilildeslieim,

sous le coup d'une hérédité psychopathique indirecte, qui brus-

quement sentit que sa lèvre supérieure devenait trop épaisse et

trop longue. La malade, attribuant cette sensation à ce qu'elle a

trop mangé s'abstient dès lors le plus possible d'aliments; la sen-

sation anormale croit néanmoins de telle sorte qu'elle accfuiert ! u

conviction que la mort seule peut la débarrasser de ce malheur.

De là une mélancolie anxieuse accompagnée de sitiopliobie et

tentatives de suicide. Inutile de dire que la lèvre supérieure ne

présente aucune anomalie. Une surveillance attentive et des soins

assidus aboutissent au relèvement de l'état général; avec lui se

montre une période d'accalmie pendant laquelle disparait la sen-

sation, la malade reconnaissant son erreur. Malheureusement une

rechute ne tarde pas à se produire. En d'autres circonstances, les

dents deviennent gênantes, bien qu'elles soient saines; on les

arrache sans résultats. Mais les sensations pathologiques les plus

fréquentes sont celles qui se localisent au cou, à la poitrine, au

ventre. Il y a sur ce point quelques réserves à faire. C'est ainsi

que l'anxiété dite précordiale ne se limite pas le moins du monde

a la région en question, qu'elle peut porter sur n'importe quelle

place du thorax et de l'abdomen, varier d'étendue et paraître

émaner des organes splanchniques (idées délirantes correspon-

dantes). Les aliénés spécifient souvent que la cause de leurs sensa-

121 SOCIÉTÉS SAVANTES.

tiens pathologiques réside en des corps étrangers vivants ou ina-

nimés (lame d'acier, serpents, grenouilles, démonomanie intra-

somatique). Sensations pathologiques des organes sexuels, plus

fréquentes chez la femme : aliénées se croyant enceintes pendant

vingt ans. La colonne vertébrale est bien moins fréquemment

hantée par les sensations pathologiques; elles n'y sont pas non

plus aussi polymorphes qu'ailleurs, mais revêtent le caractère de

toitures (douleurs, machines). A la tête, on accuse des sensations

de tension, pression, plénitude, vide, constriction douloureuse au

niveau du bregma, des arcades surcilières, d'un côté ou des deux

côtés; assez fréquemment, les yeux semblent secs, raides, immobiles

brûlants, exagérément mobiles, détachés de la cavité orbitaire,

branlants (mélancolie), la langue paraît sèche. Le corps est brisé

écartelé, toi-Luié, immergé dans l'eau chaude ou dans l'eau froide

inondé de vermine. Périodicité des sensations pathologiques et

quant à leur force (exaspération) et quant à leur apparition (pé-

riodes d'intégrité), notamment dans la manie périodique ou dans

la folie circulaire; elles disparaissent au stade de parfait dévelop-

pement, d'état, pour revenir au stade de repos ou de dépression

(deux cas); souvent, dans ces entités morbides, une sensation de

douleur et de pesanteur dans les membres empêche les patients

de marcher. Elles sont parfois l'origine réelle d'un délire systé-

matique (observation à l'appui). En agissant vivement sur le mo-

ral des sujets (changement de résidence, événements imprévus),

on arrive quelquefois à modifier les sensations pathologiques,

voire à les supprimer pour un temps (un exemple de persécuté en

1818). Chez maints mélancoliques, les sensations pathologiques

disparaissent le soir, l'humeur devient gaie.

AI. SNELL termine en faisant remarquer que la communication

précédente n'a d autre prétention que d'appeler nouteaut'at-

tention sur cette partie intéiessante de la séméiotique des mala-

dies mentales.

Discussion :

M. Hasse. Tous les persécutés éprouvent des sensations patholo-

giques. Elles sont fréquentes chez les paralytiques généraux ainsi

que dans le stade dépressif de la folie circulaire.

M. IlESSE, raconte l'histoire d'un aliéné qui se plaignait inces-

samment de douleurs dentaires immotivées. Déjà on lui avait en-

levé huit dents lorsqu'on l'amena à l'établissement d'ilteti. L'abla-

tion d'une dent chassait la douleur dans une autre, qu'elle fût ou

non demeurée, un certain temps après l'extraction, dans l'al-

véole.

M. ENGELKEN connaît depuis douze ans un chiffonnier qui

éprouve des sensations pathologiques abdominales. Des magiciens

lui soufflent la nuit du froid dans le corps. Il se place sur le

SOCIÉTÉS SAVANTES. 125

ventre pour échapper à ces sensations désagréables, et aussitôt les

magiciens se faufilent à travers l'anus dans l'intérieur de son

organisme, pour lui faire endurer mille tortures. Souvent il se

dispute avec dos hommes qu'il prend pour des enchanteurs.

M. SNELL appelle l'attention sur la maladie toute spéciale récem-

ment décrite (Virchow's Archiv, mars 1883) sous le nom d'atrémie

par B.-W. Neftel de Kew-York. Elle atteindrait, en Amérique, les

dames de la plus haute classe. Tout effort somatique ou psychique

engendre les sensations pathologiques les plus violentes dans la

tête, le dos, l'épigastre; en même temps tendance à la lipothy-

mie, dyspnée, troubles digestifs. Eu conséquence, les malades

sont contraintes à garder un repos au lit absolu, afin d'éviter ces

tortures.

Aucun des assistants n'a observé de pareils états pathologiques.

Bien des fois ils ont vu des mélancoliques et des hystériques ne

pouvoir marcher. Et, à cet égard, M. Engetken mentionne un cas

dans lequel l'emploi de l'eau froide (en allusions) amena une

prompte guérison. Burghard en a cité de semblables. Mais nul

n'a constaté l'atrémie proprement dite de Neftel.

la famille et considérations sur l'opium. Après avoir gémi sur

les vices d'éducation psychiatrique des médecins praticiens' qui

ne reconnaissent pas assez vite l'aliénation mentale et ne savent

pas la traiter méthodiquement assez tôt, M. Engeiken explique

que, dans la région qu'il habite, il n'a pas à regretter ces mau-

vaises conditions. Depuis de longues années (1767), sa famille a

fondé un asile que les fils aînés se transmettent, de sorte que la

notoriété a vaincu les préventions populaires; des régions voi-

sines du Hanovre et de une bonne partie des cas

psychopathiques parviennent à sa connaissance et sont visités par

lui. On a pu suivre ainsi l'hérédité à travers quatre générations

et diagnostiquer le début des affections mentales. Aussi, pendant

quatorze ans de pratique, l'orateur a-t-il pu voir un grand nombre

de faits récents et les traiter. C'est la teneur d'une riche expé-

rience, d'une ample moisson de diagnostics et de méthodes thé-

rapeutiques qu'il consigne.

Les cas de psychoses récentes ou commençantes qui permettent

un traitement au logis, sont des états de dépression simples se

traduisant par une maussaderie légère ou plus profonde, accom-

pagnée ou non de conceptions délirantes, à la condition que les

familles surveillent leurs malades, qu'on n'ait à redouter de leur

part aucun dommage direct, aucune explosion dangereuse, aucune

tendance au suicide. Maints de ces aliénés ont conscience de leur

maladie et se soumettent volontiers aux objurgations; d'autres

ne se plient qu'à une ferme autorité. Tels sont les cas qui sans

t26 SOCIÉTÉS SAVANTES.

exception s'offrent au médecin de la maison; celui-ci les traite et

n'appelle des spécialistes en consultation, que lorsqu'un complet

insuccès lui en démontre la nécessité. Quoi qu'il en soit des tem-

porisations et des explications banales du médecin traitant (neu-

rasthénie ! anémie ! ), quand finalement on appelle le psychiatre,

il se trouve en présence, dans l'immense majorité des cas, de dys-

thymie et de mélancolie simples, voire même de mélancolie vio-

lente avec forte angoisse précordiale, insomnie complète et con-

ceptions délirantes. On constate, en outre, presque toujours des

accèsnévraigiformes plus ou moins continus présentant des phases

d'exacerbation temporaires, des phénomènes congestifs, des bat-

tements de coeur, de l'hyperesthésie psychique, de la céphalalgie,

des alourdissements, des tintouins, des battements dans les tempes,

de l'inappétence, des rêvasseries, quelquefois un réel embarras

gastrique, de l'apathie, delà lenteur au travail mécanique aller-

nant avec des fougues laborieuses presque impulsives et disconti-

nues, des troubles du sommeil, de la constipation, de la lenteur,

et de la faiblesse du pouls, excepté quand le malade s'agite (pouls

tendu, fréquent), ou lorsqu'il est atteint d'anxiété précordiale

(pouls accéléré, dur, tendu, dicrote). Le regard reflète ces divers

états. La parole paresseuse, traînante, peut être également claire,

accélérée : gémissements, cris stéréotypés, monosyllabiques.

Beaucoup recherchent l'isolement, d'autres sont incapables de

rester un instant seuls; d'autres encore, après avoir présenté des

allures de la motilité normales, suivent subitement leurs impul-

sions instinctives, et se livrent à des actes, à des migrations dan-

gereuses. L'évolution de la mélancolie simple est presque cons-

tamment lente, graduelle; les prodromes, peu marqués, passent

inaperçus de l'entourage, mais leur progression est ininterrompue;

le malade lui-même convient de malaises anciens qui, en somme,

ont été les premiers signes originels de l'affection. Presque toujours,

il y a eu des causes psychiques occasionnelles (émotions); du reste

il faut faire la part de la force des incitations et de la résistance des

individus, au point de vue physique et psychique. La teneur des

conceptions délirantes dépend et du caractère de l'émotion occa-

sionnelle, et de l'individualité du malade, et du genre d'éduca-

tion, des croyances de ce dernier. Il n'est guère d'aliénés de ce

genre qui ne soient aptes à faire une tentative de suicide soudaine

inattendue, à essayer de fuir pendant une crise d'angoisse vio-

lente. Cependant, au début, tous offrent encore des intervalles

lucides plus ou moins longs avec conscience de leur état. L'héré-

dité occupe dans l'espèce une large place non seulement de par

la nature du germe, mais aussi de par le milieu et l'espèce de

l'éducation ou de l'instruction; l'ensemble de ces éléments produit

le terrain originel. Les conditions politiques et sociales, la puberté,

la menstruation, la grossesse, iapuorpérahté, iajactation, la méno-

SOCIÉTÉS SAVANTES.. , 17

pause, 1,Lftibl esse plivsi(Itte,l es dystroplii es chroniques, l'épuisement

consécutif auv. maladies fébriles, les excès doivent aussi être pris

en considération. Le traitement se propose un double but : 1 - s'op-

poser à la cause delà maladie : les prescriptions hygiéniques et

morales de tous ordres s'imposent à cet effet. On suivra les indi-

cations tirées de l'analyse complète du malade sous toutes ses faces;

2- formuler une médication qui n'a de chances d'aboutir que si

les conditions les plus favorables ont été assurées par le traitement

moral et hygiénique. Dans tous les cas de psychoses récentes sim-

ples, il faut prescrire des médicaments. Outre que cette manière

de faire exerce un effet psychique favorable,elle est inévitable dès

qu il y a douleur, angoisse, conceptions délirantes, hallucinations,

et doit être imposée lorsque le malade n'a plus conscience de son

état de maladie. Les narcotiques doivent, avant tout, entrer en

ligne, car seuls ils agissent directement sur la douleur. Un seul

mérite d'être usité, c'est l'opium. Mais il faut savoir l'employer;

il donne des résultats brillants, à la seule condition qu'il soit bien

manié, dans les cas légers, au début. Il est bien plus actif que la

morphine; il agit favorablement sur la nutrition des centres ner-

veux par neutralisation des agents d'excitation des cellules de per-

ception, par arrêt des impressions reçues. Tantôt l'effet est rapide

(dès la première dose ou en peu de jours) tantôt il est lent (quelques

jours à une ou deux semaines). M. Engetken ne connaît pas

d'exemple ou l'effet n'ait été bienfaisant. La dose doit produire

une légère action narcotique ; un vomissement peu après l'inges-

tion indique la nécessité de la baisser; mais un vomissement du

début, c'est-à-dire une heure ou un peu plus tard après l'adminis-

tration, constitue une indication d'avoir à persister à la même

dose, car alors le vomissement disparait au bout de quelques

jours. Chez des adultes faibles, délicats, on fera prendre, pour

commencer, au moins 5 centigr., matin et soir; dès le deuxième

jour, chaque dose sera de 10 centigr. ; de fortes constitutions

exigent au moins par doses 7o milfigr. et, dès le second jour, 13

ceutigr.; généralement ces doses doublées produisent un résultat

curatif considérable; on les continue une semaine ou davantage,

et, dès qu'on constate que le mieux-être s'arrête, on monte de

10 ceiitigt,. Si l'action d'une dose ne dépasse pas en durée six,

huit, dix heures, c'est qu'il faut augmenter la quotité, sinon on

s'en tient à la quantité prescrite jusqu'à ce qu'il n'en soit plus de

même. Souvent il suffit d'augmenter de 5 à 6 centigr. pour

imprimer une nouvelle impulsion aux progrès du l'amélioration;

en un mot, l'action graduelle est indispensable tant que l'estomac

ne fournit pas de contre-indication. Dans la pluralité des cas de

névrose encéphalique simple, on n'a besoin que de 20 à 30 cen-

tigr. deux fois par jour; rarement on doit monter à 40 ceutigr.;

il est extrêmement rare (grandes résistances individuelles) qu'il il

US SOCIÉTÉS SAVANTES.

faille atteindre 30 à 60 centigr. par doses. C'est on prolongeant

l'action des doses exigées qu'on doit s'attendre à une complète

disparition de l'ensemble du tableau morbide. Mais, ce résultat

obtenu, ne supprimer le traitement qu'avec la plus grande pru-

dence. On commence par diminuer la dose d'un quart ou d'un

tiers pendant huit jours, s'il, ne vient pas de recrudescence; on

diminue de moitié, pendant une autre semaine; s'il se montre

des indices de rechute, on ajoute une fraction pour huit à flua-

torcejours, sinon on risquerait d'être obligé de recommencer tout

le traitement, et alors il faudrait reprendre sur de nouveaux frais,

graduellement, sous peine de collapsus avec diarritéeprofuse,

douleurs vagues, empirement de l'état psychique.

L'opium agit au début sur l'appareil digestif en suscitant des

nausées, de l'inappétence, delà constipation. Les nausées dispa-

raissent dès les deuxième et troisième jours qui suivent; l'appétit

revient, du moins lorsqu'on fait ingérer de petites doses de 10 à

d : i centigr. ; la constipation cède dès les quelques semaines con-

sécutives, sinon les laxatifs en font justice, soit qu'on les admi-

nistre concurremment avec l'opium, soit qu'on suspende l'opium

pendant que le malade est sous l'influence du laxatif. Parfois on

observe, dans le cours du traitement, delà diarrhée; dans ce cas, ré-

duire les doses, pendaut uu jour ou deux, de moitié; il n'estd'ailleurs

pas nécessaire que la diarrhée disparaisse totalement. Pour faire

agir l'opium surdes individus robustes, réfractaires, même à3U et

40 centigr., il faut administrer un émétique puissant pendant un

jour ou deux successivement ; puis on fait prendre d'emblée au

minimum 13 centigr.

En somme, l'opium n'agit qu'indirectement. Comme hypnotique,

en dilninuantl'exci talion cérébrale; celle-ci diminuée, le sommeil

survient spontanément. Pour obtenir ceteffel, il faut donner chaque

jour deux doses de force suffisante; la première (dose matutinale) sera

administrée une heure après le premier repas (huit iL neuf heures

du matin); la seconde (dose vespérale) une heure avant le repas

du soir (sept heures du soir). Par ce procédé, aucun inconvénient

n'est à redouter. L'opium fortifie le système nerveux en tonifiant

les vaisseaux ; de là suppression des congestions fluxionnaires, des

influences naralysatrices, de la douleur psychique, des ratiocina-

lions et préoccupations délirantes, des idées fixes. La lassitude,

le besoin de sommeil, la lourdeur des membres, qui parfois se

montrent au début, résultent de la sédation de l'excitation. Durée

du traitement : des jours, des semaines, plusieurs mois, quelque-

fois très longtemps. Jamais ou n'obtient le thériacisme. En des

cas, tout à fait isolés, de mélancolie chronique entée sur une

prédisposition héréditaire ou acquise, on a dû traiter pendant des

années, et, si l'on n'a pas guéri, on a supprimé des idées de sui-

cide. Ce serait donc une arme puissante entre les mains du mé-

BIBLIOGRAPHIE. 129

decin. L'expérience de M. Engeiken lui permet de recommander

l'opium ainsi administré, dans la dysthymie et la mélancolie ré-

cente simple, surtout quand prédomine de l'angoisse précordiale,

dans la mélancolie active. Il peut agir comme prophylactique

dans la mélancolie puerpérale ; on éviterait] a récidive en en admi-

nistrant 10 centigr. deux fois par jour avant ou après la délivrance,

pendant quelque temps. Le résultat est brillant dans les psychoses

basées sur l'anémie, chez la femme, et lorsqu'il existe un subs-

tratum alcoolique. Ce sont les propriétés principales du médica-

ment qu'il importe d'utiliser. Il agit comme anesthésique, contre

l'hyperesthésie psychique, t'hyperesthésie nerveuse, l'excitation

nerveuse ; comme tonique et stimulant à l'égard du système ner-

veux vaso-moteur ; d'où son action trophique sur l'encéphale et

son action stimulante sur les organes chylopoïétiques. Sans l'o-

pium, termine M. Engeiken, je répudierais mon titre de médecin

aliéniste. A l'appui, quatorze observations tirées de son ba-

gage : 1874, 1875, 4876. malades suivis jusque pendant l'an-

née 1881.

Discussion :

Elle révèle une contradiction presque unanime de la part de

tous les membres présents. L'opium est loin de fournir des résul-

tats même à peu près aussi éclatants. Et cependant la plupart des

médecins ont expérimenté très largement l'activité du médica-

ment en question.

M. 11-sse présente à la Société les plans de construction relatifs

à l'agrandissement de l'asile de Konigslutter. On élèvera quatre

nouveaux bâtiments isolés qui déjà sont en voie d'exécution. Ces

bâtiments recevront quatre-vingts malades.

La séance est close à sept heures du soir. La prochaine réunion

aura lieu àhaiiovre,le lormai 1SS a. (tlll. Ze.itsclel·. f. Psch.. XLL 4 .)

P. KËRAVAL.

BIBLIOGRAPHIE

I. Contributions ci l'élude de l'hystérie. (Cas pratique. Hystérie à

forme convulsive. Guérison ); par le Dr Eustasio Sena GimENo.

Après avoir rappelé sommairement les diverses théories de

l'hystérie l'auteur, dit qu'il se range à celle de son maître, le

Archives, t. IX. 9

130 BIBLIOGRAPHIE.

D Campa, professeur d'obstétrique et de pathologie spéciale de la

femme et des enfants à l'Ecole de médine de Valence. » Pour le

D'Campa, le siège anatomique de celle maladie ou, pour mieux

dire, sa lésion anatomique réside dans l'appareil de la génération,

et comme ce professeur n'est pas de ceux qui croient que l'hystérie

est l'apanage exclusif de la femme, il la localise pour la femme,

dans les ganglions ovariques, d'où part une excitation qui retentit

sur la moelle, en raison de la relation intime qui existe entre

l'ovaire et les centres nerveux; et pour l'homme, il assigne comme

siège nosofogiquo à l'affection les ganglions spermatiques, dont

l'état de souffrance agit de la même manière que celui des gan-

,lions ovariques. Cette théorie est analogue à celle de Négrier et

de Schulzenberger.

« Celte nouvelle théorie se trouve la mieux en harmonie avec

les désordres menstruels, qui ouvrent si fréquemment une porte

d'entrée à l'hystérie, puisque, comme le dit très bien le D Campa,

sur cent cas d'hystérie, il y en a quatre-vingt-dix dont on trouve la

cause dans une altération de la fonction menstruelle, altération

ayant ordinairement son point de départ dans l'ovaire ».

A l'appui de cette manière de voir, l'auteur donne ensuite la

relation d'un cas, qu'il a eu l'occasion d'observer, et qui montre

« l'importance du traitement basé sur l'étiologie, auquel on devra

recourir tout d'abord toutes les fois que cela sera possible ».

Voici cette observation, en partie traduite littéralement, en partie

résumée.

« 11 s'agissait d'une dame de vingt-huit ans, mariée, de tempé-

rament hmphatico-nerveux, d'une constitution appauvrie, adon-

née aux travaux domestiques. Ni les antécédents pathologiques de

la famille de la malade, ni les siens propres n'ont aucune relation

avec la maladie actuelle, car jusqu'à sa dernière couche, qui eut

lieu l'an dernier au mois de février, elle ne s'écarta en rien des

lois physiologiques qui régissent les fonctions de reproduction.

« La santé de cette dame n'avait subi aucune altération notable

pendant quelques années; mais, au mois de juin de cette année,

elle se vit subitement atteinte d'une maladie convulsive caracté-

risée par des accès intermittents précédés de bâillements et de

pandiculations; pendant l'accès, qui ne s'accompagnait jamais de

perte de connaissance, elle éprouvait dans la poitrine une forte

sensation d'oppression qui l'étouffait et qu'elle traduisait en disant

que la matrice lui remontait dans la poitrine.'L'attaque finie, la

malade se sentait bien, tout comme s'il ne lui fût survenu rien

d'anormal, jusqu'au retour d'une nouvelle attaque, qui avait lieu

au bout de quinze jours. Ces accès se succédèrent de quinze en

quinze jours, quoique la malade eût pris tout ce qui lui avait été

conseillé, soit par des médecins, soit par des empiriques...

« Cet état de choses dura jusqu'au mois de mai dernier, époque

BIBLIOGRAPHIE. 131

à laquelle on me demanda mes soins. Alors un interrogatoire

attentif m'apprit que la malade n'avait pas eu ses règles dans les

trois derniers mois qui avaient précédé son mariage, que la

menstruation avait néanmoins reparu après celui-ci, mais que

souvent, depuis qu'elle était mariée, comme avant, elle avait res-

senti l'orgasme nerveux précurseur du flux menstruel, mais sans

que l'écoulement sanguin se montrât jamais.

0 Bien que n'ayant pas vu apparaître la menstruation pendant

douze ans, cette dame a eu trois grossesses heureuses, terminées

par de bonnes couches... »

« En face de ces renseignements, et en l'absence d'autres anté-

cédents qui puissent être en relation avec la maladie, nous atten-

dîmes le moment, de l'attaque pour être à même de mieux

asseoir notre diagnostic. Effectivement, trois jours plus tard nous

fûmes appelé pour assister à un accès. A notre arrivée dans la

chambre de la malade, nous la trouvâmes couchée, dans le dé-

cubitus dorsal et maintenue par deux de ses proches, précaution

nécessitée par les fortes convulsions générales dont elle était

agitée. Les facultés expressives et sensitives étaient abolies, mais

l'ouïe et la connaissance étaient conservées, d'après ce que nous a

dit la patiente elle-même après l'attaque. »

« Celle-ci terminée, la malade se montra gaie, riant pour le

motif le plus insignifiant... »

L'analyse de l'urme, en montrant qu'il n'existait pas d'albumine

dans ce liquide, éloignait l'idée d'éclampsie; les antécédents

fournis par la malade et les phénomènes observés, conduisaient

au diagnostic d'hystérie à forme convulsive.

« Opposé à la polypharmacie, et par conséquent soucieux de

chercher la médication la plus simple, en rapport toujours avec

la cause du mal, ne trouvant d'autre part, comme influence sus-

ceptible de donner naissance aux accidents observés, que le défaut

de relation entre l'ovulation et la menstruation, nous pensâmes

tout d'abord à provoquer l'hémorrhagie et, en vérité, nous n'a-

vons actuellement aucune raison de nous en repentir, car il suffit

de quelques grammes de fer réduit par l'hydrogène, alternant

avec le tartrate ferrico-potassique, et de bains de siège chauds,

pour que la menstruation reparût après avoir fait défaut pendant

douze années consécutives. L'hémorrhagie menstruelle se fit et les

attaques d'hystérie disparurent. Un mois se passe; le flux cata-

ménial se suspend de nouveau, et alors les attaques reviennent.

Dans ces conditions, nous prescrivons de nouveau les bains

chauds, et, comme la première fois, les règles reparaissent et les

attaques d'hystérie cessent. Il n'en est plus survenu d'autres; aussi,

considérons-nous cette dame comme guérie de sa maladie ». (La

Cronica Medica, de Valence, août 1881, p. 673.) Cu. H. P.

132 BIBLIOGRAPHIE.

II. Das Centralorgan des Nei-veia2)pa ? ,Éits ; par 0. Kahler.

(In Lelarbuclz dei- Gewebelelare, von C. ToLDT, 2° édit., 1884.)

Cette section de l'histologie récente de Toldt, écrite par M. le

professeur Kahler, présente les particularités suivantes : au lieu

de se borner, comme cela a lieu dans la plupart des traités d'his-

tologie, à passer en revue les éléments divers du système nerveux,

M. Kahler a pensé qu'il serait plus utile, sans négliger l'anatomie

et l'histologie générales, de mettre sous les yeux des étudiants

l'état actuel de nos connaissances relatives à la disposition, au

trajet, aux connexions des fibres et des cellules, dans l'ensemble

des centres nerveux. Ce n'est plus, si l'on veut, de l'histologie fine,

mais c'est une histologie plus en rapport avec les besoins mo-

dernes, car elle permet d'étudier, sous le microscope, la méthode

anatomo-clinique de notre savant maître, AI. Charcot.

Avant d'entrer en matière, M. Kahler prend soin d'exposer la

technique et les procédés de recherche neurologiques. Ce résumé

sert d'introduction, par exemple, à la description du trajet des

fibres dans la moelle. On se préoccupe ainsi successivement : 4° de

la méthode de découpe; 2° de la méthode embryogénique ; 3" de

la recherche des dégénérescences secondaires; 4° des examens

d'anatom : e comparée. Les procédés de préparation, durcissement,

conservation, avec les formules les plus recommandables et les

plus récentes, les points de repère destinés à s'orienter, l'anatomie

pathologique pure et expérimentale, sont l'objet d'indications très

claires et très judicieuses. « C'est en coordonnant, dit l'auteur, les

résultats obtenus à l'aide de toutes les mélhodes sus-mentionnées,

que l'on est arrivé, au moins partiellement, à dissiper sur plu-

sieurs points l'obscurité dont était, il y a peu de temps encore,

enveloppée la texture intime, l'architecture des organes centraux.

Nous n'enregistrerons dans le cadre des descriptions suivantes que

des notions indubitablement établies. »

Et M. Kahler décrit en détail les segments de la moelle, en

allant du général au particulier, et en morcelant ses examens de

telle sorte qu'on suive pas à pas chaque système, à chaque région,

à chaque étage, de bas en haut. Il gagne ainsi la moelle allongée.

Il la passe en revue sous deux chefs : partie fermée - partie ou-

verte. 11 s'occupe, dans la partie fermée : i° des coupes transverses

à la hauteur de l'entrecroisement des pyramides; 2° des coupes

transverses à l'endroit où le canal central se dispose à s'ouvrir, et

termine par un aperçu résumant le trajet des fibres de cette par-

tie. La partie ouverte comporte : 1° les coupes transverses à la

hauteur dû tiers inférieur des olives ; 2° les coupes transverses à

la hauteur du tiers moyen des olives; 3° les coupes transverses à

BIBLIOGRAPHIE. 133

la hauteur du tiers supérieur des olives; un résumé synoptique

de ces trois segments complète l'analyse.

Passons à la protubérance. Division en coupes transverses : 1° à

la hauteur de son tiers inférieur ; 2° à la hauteur de son tiers

moyen. Puis, nouveau résumé final donnant du corps à la dissec-

tion histologique. Ajoutons que, pour la protubérance comme

pour le bulbe, des paragraphes spéciaux intercalés dans le texte

mettent, grâce au type italique adopté, eu évidence les origines

des paires nerveuses qui correspondent aux diverses coupes

étudiées.

Le cervelet, ses relations, sa texture et sa structure participent

delà même netteté, du même soin; ici aussi un sommaire termi-

nal fixe les idées sur le trajet et les rapports des fibres cérébelleuses.

Plans identiques en ce qui concerne le cerveau majeur. Les tuber-

cules quadrijumeaux sont abordés par deux séries de coupes; les

unes à la hauteur du tube quadrijumeau supérieur, les autres au

niveau du tubequadrijumeau inférieur; comme ailleurs, on trouve

un résumé du trajet des fibres du cerveau moyen ; comme ailleurs,

également les origines des nerfs ressortent en italique.

Le chapitre qui traite du cerveau se scinde en A, le tronc avec

les ganglions de la base; B, le manteau (substance blanche et

écorce des circonvolutions). Nous appellerons l'attention sur la

structure histologique des masses grises du tronc. On y rencontre

d'abord une série de coupes tranverses et verticales à la région

du pulvinar et des corps genouillés ; l'origine du nerf optique et

du chiasma suscite la consignation de toutes les notions capables

d'éclairer la question, à quelque ordre de connaissance qu'elles

soient empruntées. Une autre série de coupes pratiquées dans le

même sens porte sur la région intermédiaire, c'est-à-dire sur le

pédoncule, dans la capsule interne, sur le lieu de transformation

de la calotte du cerveau moyen en région substhalmique et la

zone de transition de cette région en d'autres portions du tronc

du cerveau. La région optcco-nucléo-lenticulaire et celle des

noyaux lenticulaires et caudés sont elles-mêmes sectionnées de la

même façon. Enfin, en guise de synthèse, l'auteur examine le

tronc cérébral à l'aide de coupes horizontales, et résume les sys-

tèmes de fibres qui composent le pédoncule et la capsule interne.

Nous ne nous arrêterons pas à la glande pineale. Quant aux cir-

convolutions, AL Kahler commence par leur consacrer, ainsi que

dans la moelle, quelques lignes esquissant les grands traits de

l'anatomie générale, pour envisager ensuite spécialement la cir-

convolution de l'hippocampe et de la corne d'Ammon, le lobe

olfactif et l'origine des nerfs olfactifs.

De nombreuses ligures permettent de suivre pas à pas les ana-

lyses micrographiques dans les divers endroits du système nerveux

central, et aux divers étages de ces endroits, de même qu'elles

1 34 BIBLIOGRAPHIE.

éclairent la synthèse anatomique des organes. Notre opinion est

que le travail dont nous venons de rendre compte est clair, bien

divisé, méthodiquement ordonné. P. KÉRAVAL.

III. Recherches stéréognostiques; par Hermann Hoffmann.

(Thèse de Strasbourg, 1883.)

Ces recherches sont destinées à la détermination des modalités

du toucher qui permettent de reconnaître les qualités des corps

dans l'espace (yrçïoerx&i, je connais; le corps); elles ont

été inspirées par le professeur Kussmaul. Travail rempli déchiffres

et de mensurations dont il est impossible de donner un aperçu

dans une analyse. Exposé et historique détaillés de nos connais-

sances sur le sens du toucher; quant aux recherches spéciales de

l'auteur, elles se trouvent relatées avec soin pour chaque malade

ainsi que la technique qui a été employée ; elles ont porté sur les

conditions dans lesquelles étaient faits les examens stéréognos-

tiques : 1" influence de l'état de mouvement des corps sur la fa-

cilité à les reconnaître ; 2° influence des différentes modalités du

sens du toucher (sens de la température, impression douloureuse,

sensation de contact, sens de la place, sens de la pesanteur, sens

de l'espace, sens de pression, sens du mouvement des jointures,

sens d'orientation); 3° influence de l'état de l'intelligence (jeunes

enfants, maladies du cerveau). -D'après les résultats qu'il a ob-

tenus, l'auteur pense qu'il y a lieu d'établir une distinction for-

melle entre la sensation de frôlement et celle de pression et

aussi entre le sens de la place (ortssinnl et lésons de l'espace (raum-

sinn), ainsi qu'entre les notions de pesanteur fournies d'une part

par pression du corps sur la peau, d'autre part par l'action mus-

culaire ; la délicatesse des sensations de frôlement et de piqûre

peut se montrer différente suivant les individus. P. M.

IV. De la prostitution dans ses rapports avec l'alcoolisme, le crime

et la folie (Conférence faite à Lyon), par le D' P. Lvdvme.

Tout le monde sait qu'en France la prostitution est soumise à

des règlements spéciaux, dont la police des moeurs est chargée

d'assurer l'exécution et qui ont pour but de préserver la popula-

tion des maladies vénériennes. Contrairement aune opinion en-

core très répandue dans le corps médical, l'auteur prétexte que

cette réglementation a beaucoup plus d'inconvénients que d'avan-

tages. Après avoir rappelé quelques-uns des faits scandaleux aux-

quels ont donné lieu, dans ces dernières années, les erreurs com-

mises par la police des moeurs, le Dr Ladame proteste contre l'in-

fluence néfaste exercée, selon lui, par les maisons de tolérance

BIBLIOGRAPHIE. 135

sur la santé et la moralité publiques; loin de restreindre la pros-

titution en la localisant elles contribuent à la développer dans de

larges proportions. De plus, ces maisons étant regardées comme

un exutoire qu'il faut avoir soin d'entretenir, on ne néglige rien

pour les rendre aussi attrayantes que possible; on y autorise la

vente et le débit de boissons alcooliques, aussi, suivant les expres-

sions de l'auteur, l'ivrognerie s'y présente avec toutes ses com-

plications les plus dangereuses, ses conséquenses les plus com-

munes et les plus funestes, le suicide, le crime et la folie.

Si l'ivrognerie et la prostitution sont des vices inséparables, les

rapports de la prostitution avec la criminalité sont aussi intimes,

et l'auteur, s'appuyant sur différents travaux statistiques, fait res-

sortir la corrélation qui existe entre le développement de la pros-

titution et le nombre des criminels dans les diverses régions de la

France. Ce n'est pas tout. Les maisons de tolérance sont de véri-

tables écoles de débauche, dans lesquelles les jeunes gens vont

faire l'apprentissage des aberrations qui ne les conduiront que

trop souvent à la folie, c ir bien que l'on n'ait pas encore déterminé

scientifiquement par des statistiques exactesà quel degré les excès

vénériens interviennent dans l'étiologie de la paralysie générale,

le D, Ladame admet que les excès jouent un grand rôle dans sa

production et il en déduit que la tolérance de la prostitution favo-

rise sans s'en douter le développement de la folie.

Malheureusement, comme conclusion de sa thèse, le Dr Ladanie

n'indique pas les remèdes qu'il jugerait nécessaire pour combattre

sinon pour faire disparaître la prostitution, puisqu'il considère le

régime de la réglementation comme allant absolument contre le

but qu'elle poursuit. G.1UTIEZ.

V. Manuel des maladies des nerfs périphériques et du sympathique ;

par A. SEELIGMULLER (Rrunswick, 1882).

Ce manuel fait partie de la collection des «courts manuels n

de Wreden, c'est dire qu'il ne faut lui demander ni bibliographie

méthodique ni discussions étendues, mais on y trouve un exposé

complet et clair des faits qui semblent définitivement acquis et un

aperçu suffisant des différentes théories qui ont eu cours sur tel

ou tel point de la pathologie nerveuse. ,

Après quelques notions préliminaires sur la physiologie nor-

male et pathologique du système nerveux périphérique ainsi que

sur l'étiologie générale et la pathogénie des maladies nerveuses

vient un exposé général de la thérapeutique dans ce genre d'affec-

tions, ce qui d'ailleurs n'empêche pas l'auteur de faire, lorsqu'il

en est besoin, un chapitre spécial de traitement pour telle ou telle

maladie en particulier.

136 BIBLIOGRAPHIE.

Puis l'étude des différentes affections des nerfs périphériques,

sections nerveuses, névralgies, paralysies, en y comprenant même

les paralysies toxiques et consécutives aux maladies graves ainsi

que les paralysies par inauguration (auto-suggestion inconsciente).

Les diverses crampes professionnelles font l'objet d'un chapitre

particulier, ainsi que les tics et les contractures siégeant dans le

domaine des différents nerfs.

Enfin viennent les maladies du grand sympathique soit cervical (mi-

graine, céphalée, maladie de Hasedow, ftémiatrophie faciafe progres-

sive, angine de poitrine, palpitations), soit abdominal (névralgies

viscérales, colique de plomb) et d'autres affections des nerfs tro-

phiques, vaso-moteurset sécrétoires (paralysie diffuse des vaso-mo-

teurs,sclérodermie, asphyxie symétrique des extrémités, affections

articulaires d'uriginevaso-motcice,liy pérbydrose,éplidruse,zona).

Un certain nombre de figures, notamment de la distribution

des nerfs et des points moteurs, ajoutent encore à l'utilité pratique

de ce livre. P.M.

VI. Contribution ophthalmologique au diagnostic des maladies du

cerveau; par Hermann Wilbrand (Wiesbaden, 1884).

Ce travail n'est pas seulement une étude clinique, comme son

titre semble l'indiquer; il est même plus spécialement consacré

àl'eaposition d'une théorie de la vision à l'aide de laquelle ou peut

expliquer les particularités nombreuses que présentent les faits

pathologiques.

M. Wilbrand admet dans les couches corticales du cerveau, trois

centres distincts pour le sens de la lumière, celui des couleurs et

celui de l'espace (acuité visuelle). Il croit que ces centres sont su-

perposés et non juxtaposés, attachant t cette disposition une

grande importance. L'impression traverse le centre de la lumière

avant d'arriver à celui des couleurs, celui de la lumière et des

couleurs, avant d'aï river au centre de l'espace. 11 est partisan de

lasemi-décussation dans lo chiasma en vertu de laquelle les deux

moitiés homonymes de chaque rétine sont en rapport avec l'ité-

misphère opposé. D'excellents schémas ajoutent à la clarté de cette

exposition.

Après avoir fait connaître la manière dont il envisage le méca-

nisme cérébral de la vision, l'auteur passe en revue les faits cli-

niques relatifs aux modifications de la sensibilité et aux différentes

formes d'liémople; il les trouve conformes à sa théorie. Les ob-

servations sont nombreuses et attestent une connaissance par-

faite de la littérature oplitbalmologidue; malheureusement elles

sont souvent très incomplètes, et, il faut le dire, c'est cause de

cela qu'elles concordent avec l'exposé théolique. Si les iiiodifica-

BIBLIOGRAPHIE. 137

tions pathologiques de la sensibilité visuelle avaient été étudiées

plus rigoureusement, l'auteur aurait sans doute reconnu l'insuffi-

sance de son hypothèse, comme de bien d'autres qui veulent ren-

fermer dans une formule simple une fonction fort complexe. Ces

réserves faites, nous nous hâtons d'ajouter que la théorie de

M. Witbrand constitue une synthèse assez exacte des gros faits

cliniques et qu'elle introduit un certain ordre dans des connais-

sances encore bien confuses. La méthode d'ailleurs est excellente,

car il n'est pas douteux que la clinique doive servir très efficace-

ment la physiologie dans l'étude de la vision.

Les nombreuses observations que renferme ce travail n'en cons-

tituent pas le moindre intérêt; nulle part les différentes formes

d'hemiopie n'ont été étudiées d'une manière plus complète.

Dans un dernier chapitre, l'auteur examine les faits et fait va-

loir les raisons contraires à l'existence de centres juxtaposés pour

les trois modes de sensibilité. Il combat les idées de Schneller.

Une observation d'hémiopie latérale droite, avec , trouble de la

sensibilité, termine cet important mémoire. Parinaud.

VIL L'influence du travail neruo-musculeclre et de la fatigue sur les

réflexes tendineux et sur l'excitabilité électrique des muscles et

des nerfs chez l'homme; parle Dr J. 0[tscH.sKY.(Cttarkoii', 1884.)

L'auteur nous fait ressortir que l'état de la fatigue des muscles

et des nerfs soumis à une irritation électrique (comme on le fait

dans la physiologie expérimentale) ne peut pas être considéré

comme tel. L'état produit par cette irritation ne serait donc pas

assimilable à« l'état de ta fatigue » produit par une « innervation»

des mouvements volontaires. Cette dernière doit être beaucoup

plus compliquée qu'on ne la considère.

En ce qui concerne les explorations dynamométriques des

muscles « fatigués », elles ne nous montrent pas l'état propre aux

muscles isolés, puisque le système nerveux entier prendrait part

(volonté, effort), ce procès, donc l'exploration électrique des

muscles et nerfs en question pourrait seulement nous renseigner

sur l'état delà fatigue. Prenant comme point de départ de ses

expériences ce dernier principe, l'auteur, qui expérimentait sur

des sujets jeunes et vigoureux (il faisait soulever tantôt avec les

mains, tantôt avec les pieds, en position de maximum d'efforts,

un poids dooà to livres durant t a 30 minutes), elierellaità biense

rendre compte sur le changement à la réaction galvanique et fara-

dique produit dans les muscles avant, pendant et après la fatigue

normale.

Les résultats obtenus sont les suivants : 10 la contractilité

galvanique et t'aradique augmente au commencement du travail;

138 BIBLIOGRAPHIE.

ensuite, au sur et à mesure que les muscles se fatiguent davan-

tage, la contractilité galvanique et faradique diminue. Les diffé-

rentes phases ne sont pas toujours bien prononcées; , dans ses

expériences, l'auteur observait souvent la réaction de dégéné-

rescence, affaiblissement notable de contractilité faradique avec

conservation normale de la contractilité galvanique; 3° les con-

tractions musculaires deviennent de plus en plus lentes; 41 tous

les phénomènes s'observent sur des muscles qui ont subi des con-

tractions, soit cloniques, soit toniques; 5° sur les nerfs fatigués,

on observe ces mêmes réactions, mais le Lr ti-ait doit être beaucoup

plus prolonge, c'est-à-dire qu'ils se fatiguent plus tard que les

muscles; 6" le rétablissement de l'excitabilité des muscles se fait

plus vite que celle des nerfs : pour l'accélérer, il faut faire passer

un courant constant à travers les muscles et nerfs « fatigués »;

7° au commencement du travail (fatigue), les réflexes tendineux

sont exagérés; ils diminuent proportionnellement à la progres-

sion de la fatigue et peuvent atteindre une disparition complète.

D'autre part, ces réflexes se rétablirent plus vite que l'excitabilité

musculaire. Faisant ensuite allusion à différentes théories qui

existent sur la question du phénomène patellaire), l'auteur trouve

que les résultats obtenus par ses expériences le font considérer

comme propre à un état des muscles mais pas comme réflexe

nerveux. ' F. Kaun.

VIII. De l'ataxie paralytique du coeu)' d'origine Mettre; par Semmola.

(tapies, 1881).

Sous le nom d'ataxie paralytique du coeur d'origine bulbaire,

le Dr Semmola (de Naples) signale un nouveau type clinique de

maladie du coeur dont il fait la description en quelques apho-

rismes. (Extrait des transaction of the inteinationnal médical Con-

gress, sevenlh session London, august. 4881 .) '

Les émotions violentes répétées, les excès vénériens et, en géné-

ral, toutes les causes épuisantes du système nerveux sont, pour

le Dl Semmola, le pomt de départ de l'ataxie paralytique du

coeur qui survient surtout entre quarante-cinq et soixante ans.

Les premiers symptômes sont : une oppression passagère, des

palpitations, et presque toujours des troubles dyspeptiques. A

cette période, la maladie convenablement traitée peut rétrocéder

et guérir; mais, le plus souvent, elle s'aggrave jusqu'à la mort

en passant par toutes les phases des affections organiques du coeur,

et cependant il n'existerait au moins primitivement aucune alté-

ration soit du myocarde, soit de l'endocarde.

Ce qui caractérise cette ataxie paralytique du coeur d'origine

bulbaire, dit le L)' Seitimoli, c'est l'apparition de taches marbrées,

BIBLIOGRAPHIE. 139

violacées sur les mains, et au niveau des articulations, et une con-

gestion pulmonaire passive, phénomènes dont la nature névro-

paralytique ne peut être mise en doute puisqu'ils surviennent à

une époque où il n'existe encore aucme stase veineuse due à une

insuffisance valvulaire non compensée.

Dans les cas dont on a pu faire l'autopsie, la lésion anatomique

rencontrée a été la dégénérescence graisseuse des ganglions car-

diaques et l'atrophie avec dégénérescence pigmentairedes noyaux

bulbaires du vague et des noyaux vaso-moteurs.

Dans le traitement, l'auteur recommande les sels de quinine et

la digitaline qui sont d'une efficacité surprenante, au début de la

maladie du moins, car dès l'apparition des symptômes névro-

paralytiques, toute médication devient inutile.

L'entité morbide que veut créer le Dr Semmola est d'une sim-

plicité qui contraste avec la complexité que l'on est habitué à

rencontrer dans la pathologie du pneumo-gastrique; aussi est-il

permis de se demander si les conclusions de l'auteur ne sont pas

un peu prématurées. Gautiez.

1 ? L'hystérie viscérale'; par A. Fabre. (Paris, 1883, A. Delaliaye

et Lecrosnier.)

C'est la dernière oeuvre du regrettable professeur, originale, cons-

ciencieuse et pleine d'érudition autant que celles qui l'ont précédée.

A. Fabre voit avant tout dans l'hystérie une maladie du système

nerveux de la vie végétative. Sur le tube digestif, l'hystérie ne

provoque pas seulementdes troubles fonctionnels; mais aussi des

lésions anatomiques véritables par action trophique.

A défaut d'examen direct, ces lésions seraient révélées par les

états variables de la langue, par la présence dans les selles de

débris d'entérite pseudo-membraneuse. Une analyse très minu-

tieuse des diverses conditions des vomissements hystériques,

« malgré son respect pour le maître », conduit A. Fahreaestimer

exceptionnel le rôle de l'urémie dans leur production. D'une part,

en effet, il a trouvé l'urée aussi abondante dans des matières

vomies au cours de toute autre affection que l'hystérie et l'urémie

et l'abondance des liquides expulsés par la voie supérieure suffit

à expliquer l'anurie, d'autre part; l'absence de toute autre symp-

tôme urémique, en ces cas, lui paraissent peu en rapport avec

l'idéedeM.Cliarcot.

Il insiste, en outre, sur une cause non encore signalée de vomis-

sement, l'hystérie suspensive ou inhibitoire. La vie végétative est

' M. Comby a analysé, dans le Progrès médical de L8S3,p, 57, li seconde

partie (le ces nouveaux fragments de clinique médicale. Elle traite des

t7ao7MCfyy ? 0 ?

HO INDEX BIBLIOGRAPHIQUE.

suspendue dans l'organisme, l'estomac, privé de sécrétions, rejette

les aliments inutiles que sa cavité peut recevoir. En ces cas,

A. Fabre n'a pas seulement recherche la preuve de cet arrêt de

la nutrition dans la diminution des déchets organiques dans

l'urine, comme MM. Charcot et Bouchard, mais encore dans le

retard apporté à l'élimination de certains médicaments par la

même voie.

A. Fabre établit la réalité de la fièvre hystérique et lui recon-

naît cinq formes, éphémère, chronique, intermittente, typhoïde.

Celle-ci est la plus insidieuse. La cinquième forme, dite feGricnle

hystérique, consiste en des élévations passagères de température

observées au cours de l'hystérie inliilntoire et tranchant sur l'a-

baissement ordinaire thermique qui la caractérise. Son alternance

avec d'autres manifestations névropalhiques, son origine émotive,

son évolution désordonnée caractérisent la fièvre hystérique.

La fausse phthisie des hystériques, l'hystérie simulant les affec-

tions utéro-ovariennes, non seulement par le périloiiisine et les

métrorrhagies, mais encore par une leucorrhée, comparable par

son mode de sécrétion et ses qualités à l'urine, aux larmes, à la

salive anormalement sécrétées dans cette affection. Les arthro-

pathies hystériques avec les altérations organiques souvent irré-

médiables qui les peuvent accompagner, les phénomènes cutanés

sont les derniers points traités dans ces leçons. A. Fabre considère

l'opium à haute dose comme le médicament le plus utile dans

l'hystérie, dans ses manifestations cardiaques notamment.

D. Bernvrd.

INDEX BIBLIOGRAPHIQUE

Illustrations of the anoinalozis course of posterior spinal sclerosis;

par G.-C. SEGUIN. (A7ch. of illecd. Neur., 7, 1884.)

De la surdité dans le tcibes syphilitique; par P. 111-RMET.

Alimicismo o neurosis imitante ; par Armangué Y TusET. (Barce-

lone, 1884).

Recherches dynamomélriques sur l'état des forces chez les hémiplé-

giques ; par Drcaar, 1881k.

Etude critique sur le traitement du tétanos par l'hydrate de chlo-

ral ; par L1ESTIiATI. (Thèse de Paris, 1884.)

De l'amaurose saturnine ; par Weber. (Thèse de Paris, 1884.)

Contribution à l'étude de la migraine ; migraine et arthrilisme ;

par G. SOUL.4. (Thèse de Paris, 1881.)

De l'aliénation mentale comme complication immédiate ou tardive

de la fièvre typhoïde ; par Pituvosr. (Thèse de Paris, 188t.)

Du traitement de la 4'ct(t<t<yt;ep(f)' les pulvérisations de chlorure de

méthyle; par Santelli. (Thèse de Paris, 1884.)

FAITS DIVERS

Asile d'aliénés de la Srme. - Le ministre de l'intérieur vient

de faire les nominations suivantes dans le personnel du service

des aliénés du département de la Seine :

M. le De Taule, inspecteur du service des Enfants-Assistés de la

Seine, est nommé directeur de l'asile Sainte-Anne.

M. le D Gilson, chef de la clinique de pathologie mentale,

médecin-adjoint à l'asile Sainte-Anne, est appelé à remplir, dans

la section clinique dudit asile, toutes les obligations imposées aux

médecins en chef des asiles publics.

M. le De Abel Barroux est nommé directeur de l'asile-hospice

d'aliénés de Villejuif.

M. le Dr Brivnd, médecin-adjoint à l'asile Sainte-Anne, est

nommé médecin en chef de l'asile-hospice d'aliénés de Villejuif.

M. le Dr Dubuisson est nommé médecin-adjoint à l'asile Sainte-

Anne.

Le concours pour la nomination de cinq places d'internes en

médecine dans les asiles publics d'aliénés et l'infirmerie spéciale

près le dépôt de la préfecture de police, s'est terminé par la nomi-

nation de MM. Vrain, Loisel, llalfilâtre, Grenier et Biaise, internes

titulaires, et MM. Hevertegat, Houeix de La Brousse, Fournier,

Bartbomeuf et Garnier, internes provisoires.

La composition écrite du concours de la médaille d'or de

l'internat des asiles (bourse de voyage) a eu lieu le 3 novembre à

l'asile clinique Sainte-Anne. Le sujet tiré était : Estomac (anatomie

et physiologie) ; Délire dans les maladies aiguës. Les deux questions

restées dans l'urne étaient : -1° Nerf facial (anatomie et physio-

logie); paralysie faciale; 2° Corps opto-strié (anatomie et physio-

logie); de l'hémiplégie. L'épreuve clinique a eu lieu le mercredi

suivant. -nI. Victor Vétault, interne du service du Dr Bouche-

reau à l'asile Sainte-Anne, a obtenu la médaille d'or.

Nominations et PROMOTIONS.A ? ')'<e du 27 octobre 4884. -

M. Llanta, directeur de l'asile Sainte-Anne, a été nommé directeur

de l'asile de Mont de Vergues (Vaucluse), en remplacement de

M. Cottard admis à faire valoir ses droits à la retraite, et M. Llanta

a été promu à la Ire classe de son grade.

1 il FAITS DIVERS.

llo,i,icp, de la SvLi'ÈraifeuE. Cours de clinique des maladies du ! ! )/s<entC) ! erue ! <j ? AL le professeur Cuvrcot a commencé les

cours de clinique des maladies du système nerveux, le vendredi

14 novembre, à neuf heures et demie du matin.

Ordre des cours : les lundis, leçon au fit de : malades; les mardis,

examen des malades de la consultation externe; les vendredis,

leçon à l'amphithéâtre.

Asile SA'TE-A\'\E. Clinique des maladies mentales. M. le

professeur BALL a commencé le cours de clinique des maladies

mentales, le dimanche 9 novembre à dix heures du matin et le

continue tous les jeudis et dimanches, à la même heure.

M. 11\ca.w, mPdecin du bureau d'admission, a égalementrepris

à l'asile Sainte-Anne, le dimanche 16 novembre, ses leçons cli-

niques sur les maladies mentales et nerveuses, et les continue

tous les dimanches et mercredis, à neuf heures et demie.

Les leçons porteront plus particulièrement, cette année, sur

les rapports entre la folie des héréditaires, les folies intermittentes

et le délire chronique.

Société d'anthropologie. -Le bureau pour l'année 1883 se com-

pose de MM. Bureau, président ; Letourneau et itlvcrror, vice-

présidents.

Prix BROCA. La Société d'anthropologie a décerné le prix

l3roca à M. le Dr Léo TESTUT, professeur à la Faculté de médecine

de Lilie pour son livre intitulé : Anomalies musculaires chez l'homme

expliquées par l'anatomie comparée ; leur importance en urntllro-

pologie.

L1L1DIES DU SYSTÈME NERVEUX DANS l' ARMÉE PRUSSIENNE EN 1880-

1882. -4,3î9 cas : 3,9 p. 100 de l'effectif; dans les deux années

précédentes on avait observé 3,8 p. 100 de l'effectif de l'année.

A. Maladies mentales. 120 cas : 0,31 p. 100 de l'effectif. Avec

ceux qui étaient au commencement de l'année dans les hôpitaux,

on a traité, en somme, 133 malades, dont un décès, 16 furent

guéris, 53 furent envoyés dans les hôpitaux d'aliénés des com-

munes, et 52 retournèrent dans leurs familles, etc., etc.

Depuis l'année 1873-1874, où le chiffre des maladies mentales

s'élevait à 0,39 p. 100 de l'effectif, le chiffre de cette année est le

plus élevé.

B. Épilepsie. 267 cas : 0, 15 p. 100 de l'effectif. Au commen-

cement de l'année, il y eu avait eucore 2n dans les hôpitaux. On a

donc traité 302 cas, dont 52 furent guéris; 228 de ces malades ont

été réformés.

C. Tétanos. 8 cas, dont I décès, 1 réformé, 6 guéris.

FAITS DIVERS. 143

D. Névralgies. 4JC cas.

E. Maladies des méninges cl du cerveau. 272 cas : 0 ? 6 li. 100

de l'effectif. On a traité (c'est-à-dire-)- 31 cas restés de l'an passé)

303 de ces cas, dont 64 ont eu une issue funeste.

F. Atrophie progressive des muscles, 13 cas. Dans l'un de ces cas,

on vit l'atrophie envahir d'abord les muscles interosseux de la

main droite; l'atrophie passa ensuite aux muscles du bras entier

et de l'omoplate. En examinant l'urine, on n'observa pas de pré-

cipitation calcaire comme Fi iedreicli l'a dit, mais une diminution

de la créatinine, que Rosenthal a constatée de son côté.

G. Maladies de la moelle épinière. 83 malades traités pondant

l'année : 4 morts, 45 réformés, 17 guéris. (La Semaine médicale

du 30 octobre 1884.)

Société rR\-.\CISE de tevipérvnce. La Société française de tem-

pérance, réunie en assemblée générale, le 23 décembre )884, a

formé son bureau comme il suit pour l'année l8Sa : Président,

M. le professeur Duverger; vice-présidents, 11\I. Boucliardat,

Théophile Roussel, Claude (des Vosges) et Levassent'; secrétaire

général, Dr L. Lunier, secrétaires généraux adjoints, les

Drs Decaisne et Vidal; secrétaires des séances, MM. Gurenard et

le D, Audigé; bibliothécaire-archiviste, Dr A. Motet; trésorier,

M. Jules Robynes.

Société contre l'abus du T.l3C. La Société contre l'abus du

tabac vient d'élire membres de son bureau pour 188 : i : Président,

M. Decroia; vice-présidents, MM. le Dr Bourdin, de Gasté, le

le Dr Hache, Petibon; secrétaire général, M. Rasel; secrétaires des

séances, MM. Brosselard, Calderon, Colleux, de la Vallette; secré-

taire pour l'étranger, M. Desincne ; trésorier, M. Sér.eyx ; archi-

viste, M. E. Potin.

Nécrologie. Le Dr CouTY est mort à l'âge de trente-quatre ans,

àRio-de-Janeiro,le 22 novembre, à la suite d'une maladie de coeur.

En 1878, il avait été appelé par le gouvernement brésilien à la

chaire de biologie industrielle à l'école polytechnique de Rio. En

1879, il avait installé, avec le concours de M. Lacerda, un labora-

toire de physiologie expérimentale. Avant son départ de France,

notre compatriote avait publié, sous la direction de 11. Vulpiati,

dans les Archives de physiologie, les mémoires originaux qui

suivent : 1876. Etude relative ci, l'influence de l'encéphale sur les

instincts de la vie organique et spécialement sur les organes cérébro-

vaseulaires. 2° série, t. 111. 1876. Recherches expérimentales sur

les gaz iiiti,(t-ai@té-iels. 2° série, t. IV. 1877. Recherches sur les

effets curdio-vasculaircs des excitations des sens. 2° série, t. IV.

Depuis son séjour au Brésil, il a publié différents mémoires :

)t4 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

en 1879 ; six expériences d'excitation de l'écorce grise du cerveau du

singe. (Arclc. de phys., 2° série, t. VI.) 4880. Recherches sur la

température périphérique et quelques conditions de ses variations.

(Ai-cit. de phys., 2° série, t.VU ) Sur les lésions corticales du

cerveau. (Arclv. de plzys., 2e série, t. VIII.) 1883-1884. Le cerveau

moteur. (Arch. de phys., 3e série, t. Il et III.) Il a adressé de plus

quelques notes à l'Académie des sciences, au sujet de l'action

physiologique du café, études faites, elles aussi, au laboratoire du

Musée.

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE

HEttMET (P.) De la surdité dans le tabès syphilitique . Brochure in-8^

de 7 pages. Paris, 1884. Imprimerie Alcaii-Lévy.

CLEVFXGER (S.-V.) Comparative physiology anrl p.srlchologg. Volume

in-8" de 2fui0 pages, cartonné à l'anglaisé. Prix' : 10 fr. 50'. Chicago, 1885.

Jansen Nl- Clurc, andCompany.

SFPPILLI (P.) et BIAncm (L.). Atli del quarto congresso delta Societa

freniatria et aliana. Tenuto m Voghera da) 16 al. 22 settembre 1883.-

Volume in-8- de 501 pages, avec 3 planches. lllilano, 1884. Tipografia

Fratelli Bachiedei.

Prêter (W.). Eléments de physiologie générale. Traduit de l'alle-

mand par J Souny. In-8" de 3t4 pages. Prix : 5 fr. Pans, 1884.

Librairie Alcan.

BEBGESIO (B ) La eolida nei calarri i ? itestit2a ! i cronici degli alienati.

Brochure in-8° de 10 pages. Milan, 188U. Tipografia dei Recliindci.

Benmno (B.) et Mosso (G.). Contributions allô studio délia circola-

zione cérébrale. Broc))ure i))-8'' de 30 pages, avec 14 figures dans le texte.

Torino, 1884. Tipografia Celanga e coinp.

111usso (G.). Le variazioni del diametro pKp ! 7/a)'e negli epillettici.

Brochure in-8^ de 2s pages. Reggio Emilia, 1884. Tipografia A. Caldcrini

e Figlio.

Sulle irregolarita dell' oi-ifizio pupillare negli aliénait. Brochure

in-8° en 8 pages. Torino, 1882. Lo Spenmentale.

Le rédacteur-gérant, Bourneville.

9"eux. Ch. Biaissur, imp. - 185.

Vol. IX. ' Mars 1885 ? N" 26'

ARCHIVES DE NEUROLOGIE -

PATHOLOGIE NERVEUSE ? «-COMMOTION DE L1 IIOh : LLL.ÉPINIÈftI ? I -- .

lsTllDE CLI\IQI : I : FI' CIiITI(ll : ^

Parles D L.DUIÉ\IL, professeur de clinique cllirurgicale à l'École

de médecine, et PETEL, chirurgien en chef de l'hospice général de

Rouen. ' . , .

Si nous passous eu revue l'ensemble des faits sur

lesquels on peut baser l'étude de la commotion de la'

moelle épiuière, nous pouvons les ranger en quatre

catégories : ' . , . r r

1° Ceux dans lesquels l'exa ni en.anatd'm'iqùe' fait

peu de temps après l'accident, n'a révélé aucune lésion

appréciable de l'organe; 2° ceux dans 'lesquels"' on

rencontre des lésions circonscrites qui n'expliquent

pas la nature ni la gravité des symptômes ; 3° ceux

dans lesquels l'examen fait tardivement n'a" fait voir"

que des lésions consécutives; 4° ceux dans lesquels

il n'y a pas eu de recherches anatomiques, "iîiai'o*ü

1 Voir Archives de Neurologie, 1. IX, p. l.

Archives, t. IX. 10 0

t 16 6 pathologie nerveuse.

l'observation clinique établit l'analogie avec les faits

de la catégorie précédente.

I. Nous ne ferons que rappeler ici les faits signalés

par Boyer et par P. Franck, où l'examen de la co-

lonne vertébrale et de la moelle a été complètement

négatif. On objecte à ces faits qu'ils remontent à

une époque où les procédés d'examen ne permet-

taient de constater que des lésions grossières. Cette

objection leur ôte-t-elle toute valeur ? Sans doute la

physiologie pathologique ne reçoit aucune lumière de

ces recherches, le rapport entre des désordres ana-

tomiques et les troubles fonctionnels n'est nullement

éclairé ; mais croit-on que lorsque le microscope eût

démontré quelques ruptures vasculaires, la présence

de quelques globules de sang dans la gaîne des petits

vaisseaux, le mécanisme de la mort en eût été mieux

connu ? L'autorité des hommes sous le nom desquels

ces faits ont été produits nous garantit que l'examen

à l'oeil nu a été fait dans des conditions suffisantes

de rigueur scientifique. Il n'y a pas plus de motifs pour

rejeter de pareilles observations que les faits sem-

blables de commotion cérébrale. Ces faits me paraissent

trouver confirmation dans l'observation que je viens

de rapporter, ou l'examen histologique pratiqué après

un temps relativement peu considérable n'a pasrévélé

de traces de lésions primitives. Voici, d'ailleurs, un

cas analogue à ceux que je viens de signaler, appar-

tenant à notre époque et dont la valeur est par consé-

quent moins contestable; il est rapporté par Buzzard' :

1 Loc. rit.

commotion DE la. moelle épinière. H7 7

Un commerçant, âgé de quarante ans, bien portant,

étaitdans un train qui éprouva une violente collision; il

reçut un choc sur la colonne vertébrale et fut lancé en

avant et en arrière dans le wagon. Pendant le délai

qu'occasionna l'accident, il resta sur le talus de la voie.

11 ressentit, à la suite, de la douleur dans le dos et

éprouva les symptômes du choc du système nerveux.

Pendant les six premières semaines, il ne put prendre

d'aliments solides et fut incapable de marcher pen-

dant dix semaines. Les douleurs de dos persistèrent

pendant toute cette période, et il s'y joignit également

des douleurs dans la tête et dans les membres. Il y

eut une insomnie presque complète, du refroidisse-

ment et de l'engourdissement des jambes et, par mo-

ments, de la faiblesse de la vue. Un peu d'améliora-

tion eut lieu; les forces augmentèrent, et il put mar-

cher sans aide. Mais la douleur du dos augmenta,

l'amélioration générale s'arrêta, et il mourut quatre

mois après l'accident. L'autopsie révéla une hépati-

sation des deux poumons. On ne trouva aucune lé-

sion du côté de la colonne vertébrale.

Ce fait, ajoute Buzzard, paraît être un exemple de

commotion de la moelle ayant occasionné une pneu-

monie.

II. S'il est rare de constater l'absence totale de lé-

sions apparentes lorsqu'un traumatisme grave a amené

la mort dans la période primitive, il l'est moins de

trouver des lésions dont l'étendue et le siège ne ren-

dent pas compte de la gravité immédiate des acci-

dents.

H8 pathologie nerveuse.

« Nous sommes peut-être, dit W. Savory', trop en-

clins à attribuer les symptômes produits par une vio-

lence extérieure aux effets visibles. Dans quelques cas

de paraplégie avec hémorrhagiespinale, nous devrions

plutôt voir dans l'extravasation du sang un effet su-

perflu de la commotion, qui, même sans sa présence^

n'en aurait pas moins produit les mêmes consé-

quences. Il cite à l'appui le fait suivant :

Chute sur la tête, étourdissement pendant quelques'

minutes, retour de la connaissance avant l'arrivée à

l'hôpital. Pas d'autres traces de traumatisme que'

quelques légères contusions de la tête et un léger"

saignement de nez; mais perte complète de mouve-

ment et de sensibilité' aux extrémités supérieures et

inférieures, ainsi qu'au troncjusqu'au niveau des cla-

vicules. Respiration diaphragmatique; abolition du

pouvoir réflexe. ' Mort le lendemain de l'accident.

Ni fracture ni déplacement au crâne et à la colonne

vertébrale, pas d'hémorrhagie ni de congestion à la

surface du cerveau et de la moelle épinière. L'examen

minutieux du cerveau n'y fit découvrir aucune lésion;

mais'une section longitudinale de la moelle montra,

au niveau de la quatrième vertèbre cervicale, un cail-

lot d'environ un demi-pouce extravasé dans sa 'subs-

tance. 11 était nettement limité, et on ne put découvrir

aucune autre lésion dans les portious adjacentes ou

autres de la moelle.

Ici, ajoute Savory, s'il est possible de rattacher la

perte de fonctions conductrices du mouvement et de

1 Loc. czi., p. b4.

commotion DE la moelle épinière. 119

la sensibilité à la lésion visible, le caillot sanguin, il

n'en est pas de même du pouvoir réflexe. La sup-

pression de la fonction delà moelle considérée comme

centre est due à la commotion, qui cependant n'a

pas produit d'altération de structure visible après la

mort.

C'est la même opinion que Savory exprime ail-

leurs ', à propos des fractures de la colonne verté-

brale.

Il en est de même dans des traumatismes de la

tête où j'ai vu la mort survenir presque immédiate-

.ment sans autres lésions appréciables qu'un foyer de

-contusion très superficiel à la face inférieure d'un

des hémisphères du cerveau. Dans des cas de cette

nature, les lésions visibles sont plutôtdes témoins de

l'intensité de la violence extérieure que la cause di-

recte de la mort.

III. Le premier fait de cette catégorie, rapporté par le

docteur Ma ty en 1766, est celui du comte de Lordat qui,

six mois après une chute de voiture, commença à

"éprouver de la difficulté à parler et de la faiblesse dans

le bras gauche. Ces symptômes augmentèrent gra-

duellement; trois ans et demi après l'accident, il y

avait une émaciation considérable, il marchait avec

une canne et avec beaucoup ,de difficulté; le bras et

la main gauche étaient atrophiés et paralysés. Le mem-

bre supérieur droit était engourdi etL... pouvait à

peine lever la tête. La salive s'écoulait et il'ne pouvait

The 7n< ? vol. If, 1882, p. 883.

.. - il .1 1 1 ..11

150 pathologie NERVEUSE.

prononcer que quelques syllabes qui sortaient, avec

beaucoup d'efforts, par une forte expiration, avec un

faible bruit et à peine articulées. Les sens et l'ititelli-

gence étaient intacts. Il mourut près de quatre ans

après l'accident.

Ce cas, dit Erichsen, présente les traits ordinaires

de la commotion de la moelle d'une manières ! évidente

qu'il peut presque eu être considéré comme type. On

constata à l'autopsie une injection de la pie-mère

cérébrale qui était en même temps infiltrée de lymphe,

quelques traces de suppuration vers la faulx, un

épaississement de la moelle allongée augmentée d'un

tiers en largeur, un épaississement marqué des mem-

branes de la moelle et une induration de la portion

cervicale qui résistait à la pression.

Ce cas est, pour nous, un exemple frappant d'atro-

phie musculaire progressive avec paralysie labio-glosso-

laryngée. Le point de départ des lésions parait avoir

été dans les méninges du bulbe et de la moelle, et sans

êtreaussi anirmatifque l'est Erichsen en le présentant

comme un type de commotion, nous pensons que le

traumatisme a joué un rôle essentiel en agissant sur

les membranes par un mécanisme analogue à celui de

l'entorse.

Lockhart Clarke ' a rapporté un fait important qui

lui avait été communiqué par Gore.

Un hommede quarante-huit ans, actif, intelligent, à la

tête d'affaires importantes, reçut dans une collision de

' 7')'aM. Pcth. Soc., vol. XVII, p. 20.

commotion de la moelle épinière. 151

chemin de fer un choc sans plaies ni contusions et ne

se plaignit immédiatement que de douleurs dans le

dos. Il fit tous ses efforts pour continuer ses occupations

et y parvint pendant un temps court, mais avec beau-

coup de peine. Il éprouva graduellement de l'engour-

dissement et de la faiblesse dans les membres inférieurs.

Les troubles de l'ataxie se caractérisèrent et il succomba

trois ans et demi après l'accident. Lockhart Clarke cons-

tata une sclérose limitée aux cordons postérieurs et

un épaississement des membranes sur quelques points.

Thudicum et Lockhart Clarke ' ont publié un autre cas

qui a les plus grandes analogies avec celui-ci : un

homme de cinquante-quatre ans, en sautant à travers

un parterre de fleurs, tomba lourdement sur les talons

et ensuite en arrière sur la tête. Il fut étourdi quelque

temps, mais se remit graduellement et après quelques

jours de repos au lit parut complètement rétabli. On

remarqua cependant de grands changements dans ses

habitudes. Après avoir été passionné pour tous les

exercices corporels il cessa d'y prendre part. Cinq ans

après l'accident, pendant la chasse au coq de bruyères,

dont il avait conservé l'habitude, il remarqua que sa

jambe gauche avait perdu de sa force. A partir de ce

moment une atrophie progressive s'empara de ses

muscles et il finit par succomber par le défaut d'ac-

tion des muscles respiratoires. L'autopsie révéla

une dégénérescence très étendue de la moelle épi-

nière.

Dans une observation de Bastian2, une chute d'une

L lieale's Arch. of iiiedic., 1863.

2 ])-ans. of the roy. mccl. anil Chir. Soc., vol. 1, p. 39, 1868.

.11

152 pathologie nerveuse.

..i : 1l ? u f-

meule de foin avait amené une paraplégie immédiate

suivie ? au"bbut de' huit jours, de douleurs fulgurantes

et dé contractures. Pendant les six mois que le malade

vécut il se produisit une émaciation considérable. A

l'examen ,^011 rencontra une dégénérescence de la moelle

et, à la' fin de' la région cervicale, des lésions anciennes

indiquant évidemment l'existence d'une hématomyélie

primitive.

Nous devons noter .dans cette observation l'existence

précoce de larges escharres de décubitus qui se ratta-

chaient à la lésion primitive de la moelle. D'après ces

considérations nous sommes portés à l'éliminer descelle

étude. lLk

- C'est évidemment à cette catégorie de faits qu'appar-

tient l'observation que nous-avons rapportée.

Nous ne'citerbns que pour mémoire plusieurs obser-

vations empruntées par Olivier (d'Angers) ' à Wolf et

Abércromblé où l'on voit se développer, à la suite de

traumatismes, des dégénérescences encéphaioïdes ou

fongueuses vraisemblablement aux dépens des enve-

loppes delà moelle; la nature de ces lésions autorise

à croire que la violence antérieure n'a joué qu'un rôle

n11 ti. - ? ?

accessoire.

c,. ,~i .. -. - n " .Il z

IV.'Les faits de la quatrième catégorie ont la même e

importance que ceux'de la précédente, maintenant que

les lésiônsmédullitirës de l'atrophie musculaire et de

l'ataxie locomotrice sont bien déterminées; la sympto-

inatotogie entraine la`notion--de'l'anâtomié'path'olo-

1 : i4° ohcrvation.. ? ? v, 1 . , .....1

commotion DE la moelle épinière. 153

..... ..i.rJll allt 1

gique. Ces observations sont aujourd'hui assez nom-

breuses; je ne citerai que celles dans lesquelles l'étio-

logie ressort le plus clairement.

Un homme, observé par Bergmann ', de bonne

santé, sans aucune prédisposition héréditaire, tombe

de cheval sur le dos; reste sans connaissance et souffre

à la suite de douleurs et de raideur dans les mouve-

ments de la tête. Plus tard et lentement se développe

de la faiblesse dans les épaules/ sans troubles de l'in-

telligence ni de la sensibilité -générale ou spéciale.

L'atrophie musculaire envahit- les ` membres ? supé-

rieurs. ' ' '" " - < ' ?

W. Roberts relate le fait suivant : Un jeune homme,

soigné à l'infirmerie de Manchester, avait reçu sur la

nuque une.balle.de tissu de coton; cet accident fut

suivi immédiatement de légère raideur. du- cou et de

douleurs passagères dans ,lesbras.` Six mois. après,

des , phénomènes d'atrophie se manifestèrent, .dans

l'éminence thénar droite et Le malade succomba finale-

ment à l'envahissement des muscles, de, la respiration.

Valentiner, ajoute^Roberts, rapporte un cas dans lequel

les premiers troubles de santé, suivirent une chute sur

le dos.d'une hauteur de 8 ou 10 pieds; l'atrophie mus-

culaire se déclara six ans plus tard.... ,

C'est encore à notre sujet que.se rattache un fait

publié par M. Gull 3 sous le titre : Atrophie progressive

des muscles du tronc et des extrémités supérieures à

1 Saint Petersburyer 7ur.d. Zeitschr.; 1864.- " -" c"i" ^ """ .7

2 Reyîold's Syst. of med ? art. 117asti21q palsy.

3 Gur ? c hoshit. Rep., t8ô8. , , , . : 7

154 pathologie nerveuse.

la suite d'un coup de poing sur la nuque. Un

garçon âgé de quinze ans reçoit entre les deux épaules

un coup de poing d'un de ses camarades de jeu. Une

semaine après, le faciès prend un aspect languissant

et graduellement, à partir de ce moment, les muscles

des membres supérieurs s'atrophient, les bras perdent

leur force et demeurent incapables de tout effort. La

respiration devient purement diaphragmatique, l'atro-

phie s'étend aux deux tiers inférieurs des trapèzes et

aux muscles qui soustendent la colonne vertébrale.

La tête se fléchit en avant et ne peut être rejetée en

arrière que par les oscillations du tronc. La marche

était vacillante plutôt à cause de la faiblesse des mus-

cles qui soutiennent le tronc que par la faiblesse des

jambes. Le malade ne pouvait rester assis sans avoir

le dos soutenu. Les sphincters conservaient leur action.

La contractilité électrique des muscles était en rapport

avec leur volume ; les muscles des bras, qui étaient les

moins atrophiés, se contractaient bien, ceux des avant-

bras et des mains, qui avaient perdu davantage, se con-

tractaient moins, mais cependant les contractions y

étaient encore manifestes. L'évolution de la maladie se

lit sans douleurs, la sensibilité des muscles atrophiés

n'était pas exagérée; il n'y avait pas de contractions

librillaires.

B. M. Donnel ' communiqua à l'Académie de

médecine d'Irlande des notes sur trois cas de trauma-

tisme de la colonne vertébrale suivis d'atrophie mus-

culaire. Dans les trois cas, la sensibilité était peu

' 1·hr l.iyrel, vol. Il, 1881', p. JG.

commotion DE la moelle épinière. 155

altérée, si même elle l'était. Le dépérissement des

muscles fut rapide et eut lieu peu de temps après

l'accident. La marche et le caractère de l'atrophie

prouvaient qu'elle était sous la dépendance de la

myélite affectant les cellules motrices des cornes anté-

rieures.

Tous ces cas appartiennent à l'atrophie musculaire.

L'ataxie a aussi sa part dans les effets du traumatisme.

Nous en avons déjà cité des exemples dans la troisième

catégorie de faits ; nous en retrouvons ici un certain

nombre qui, pour n'avoir pas élé suivis d'autopsie,

n'en ont pas moins une valeur incontestable. H.-J.

Petit 1, dans un mémoire intitulé : De l'ataxie loco-

motrice dans ses rapports avec le traumatisme, cite

l'opinion de Horn et Steinthal ', qui admettent une

espèce traumatique de tabes dorsalis ; il rappelle les

observations X et XI de l'ouvrage d'Erichsen où la

commotion de la moelle amena des troubles attribuables

à la myélite chronique, parmi lesquels on trouve des

phénomènes ataxiques, deux cas empruntés à l'ouvrage

de Topinard, un fait deCharcot, dans lequel on voit un

officier de vingt-huit ans atteint d'ataxie quelques

mois après une chute de cheval sur le dos, enfin une

observation de Lockhart Clarke, relative à un homme

de quarante-deux ans qui après une violente contusion

sur les reins, eut une perte de connaissance pendant

quelques minutes et dut rester aulit pendant uumois.

Au bout dece temps, les accidents d'ataxie se dévelop-

pèrent.

1 Revue mensuelle de médecine et de chirurgie, 1879, p 200.

2 Journal der praklischen lleilkuntfe, IS44.

156 pathologie nerveuse.

Charcot admet les amyotrophies d'origine trauma-

tique et, ainsi que Vulpian, les ataxies de même source.

Hammond', tout en reconnaissant que les causes de la

sclérose spinale multiple ne sont pas très connues,

pense que des coups directs, portés sur l'épine dor-

sale, des contusions violentes, comme celles qui se

produisent dans les accidents de chemins de fer, doi-

vent figurer dans l'étiologie de cette maladie.

Leudet' a réuni sous le titre de congestion de la

moelle, à la suite de chutes ou d'efforts, un certain

nombre de faits où l'on voit survenir, plusieurs heures

après une chute sur le dos, le siège ou les pieds, une

paraplégie plus ou moins complète, temporaire,

guérissant dans un temps qui varie de trois à soixante-

dix jours. Ces faits ressemblent beaucoup à un cer-

tain nombre de ceux qu'Erichsen a rapportés après

lui. Leudet refuse de les rattacher à la commotion, à

cause de l'intervalle qui sépare l'accident de l'appari-

tion des symptômes; il attribue ceux-ci à la conges-

tion. . , z..

Nous ferons observer que -la congestion n'est elle-

même que secondaire, que le traumatisme n'a pas

agi directementsur les vaisseaux de la moelle, car, en

admettant la possibilité de cette action directe, ses

effets eussent été immédiats. Il y a eu un intermé-

diaire qui n'a pu être que la moelle même modifiée

dans quelques-uns de ses éléments, par l'ébranlement

qu'elle a-subi. Je sais,bieii- qu'en rangeant ces faits

1 Maladies du syst. nerv., p. 689, 725, 928.

2 Arch. grnér. de méd., 1863, vol. I, p. 257.

COMMOTION DE LA MOELLE I'1n1li1tL. 157

dans la commotion, on rompt avec la tradition qui

met au premier rang du tableau syinptomatologique

l'instantanéité des troubles fonctionnels; mais les des-

criptions pathologiques ne sont pas fatalement vouées

à l'immobilité, les progiès de l'observation peuvent

les modifier. N'est-il pas possible que, dans les trau-

matismes que nous étudions, l'influence de l'ébranle-

ment se fasse sentir différemment sur les divers

éléments de la moelle et que dans certains cas, les

éléments vaso-moteurs souffrent à l'exclusion de cer-

tains autres, ce qui expliquerait les congestions se-

condaires qu'a signalées Leudet ?

L'ensemble des faits que nous venons de passer en

revue présente une valeur incontestable par leur im-

portance intrinsèque, par leur nombre et par l'auto-

rité des hommes qui les ont observés.

CLINIQUE NERVEUSE

ÉTUDE SUR UNE AFFECTION NERVEUSE CARACTÉRISÉE PAR

DE L'INCOORDINATION MOTRICE ACCOMPAGNÉE D'ÉCHO-

1. : lLIls` ET DE COPROLAL1E (Jumping, L\T.%11, llSmn.cHir)';

Par GILLES DE LA 'l'OURI's1"l'E.

Observation IX (Inédite) 2.

CommuniIuée yar 11. le D1 Foré, médecin-adjoint

à la salpêtrière.

Desc..., vingt-trois ans, est né au Havre de parents d'origine

normande.

Son père est mort à soixante-sept ans d'une anévrysme ( ? ),

il n'était pas nerveux, c'était un buveur accidentel. De deux

oncles paternels, l'un serait mort aussi d'un anévrysme ( ? ) ;

l'autre accidentellement.

Sa mère est morte à soixante-deux ans hydropique ( ? ), elle

n'était pas nerveuse. Elle était de deux ans plus jeune que son

mari. Ni frère, ni soeur.

De ce mariage sont nés sept enfants : 1° une fille morte à

trente-deux ans, poitrinaire, non nerveuse; 2° une fille qui se

porte bien, nerveuse, mais sans attaques; 3" un fils marin,

V. le 25, janvier 1885.

2 Cette observation ne se trouve pas indiquée dans la première partie

de ce mémoire publiée en janvier 988s, époque à laquelle nous ne la

possédions pas. Nous serions très reconnaissant aux confrères qui pos-

sèdent des observations analogues de les publier ou de. nous les faire

parvenir pour les publier en leur nom.

DE L'INCOOItDI\.1T10\ .MOTRICE. 159

mort en mer; 4° un fils, qui s'est noyé dans le port du Havre;

5° un fils, mort à deux ans( ? ) ; 6° notre malade ; 7° une fille,

mort-née.

D... a été élevé en nourrice, où il fut, paraît-il, mal soigné.

Il n'a pas eu de convulsions à aucune époque de son enfance;

il a marché à dix mois et a aussi parlé de bonne heure ; il a

été propre de bonne heure et n'a jamais eu depuis d'inconti-

nence d'urine, jamais de chorée. Etait sujet à des colères très

violentes. Il a perdu ses parents dans le bas âge et a été

élevé à Paimpol où il aurait encore beaucoup souffert au point

de vue de l'alimentation et des soins. Néanmoins jusqu'à qua-

torze ans il n'avait jamais présenté d'autre trouble morbide

caractérisé que des terreurs nocturnes auxquelles il est encore

sujet maintenant; mais il était resté faible et malingre, si bien

que lorsque l'âge vint d'être appelé au service militaire, il fut

réformé comme faible de constitution. 11 est de taille moyenne

assez bien proportionné, si l'on ne considère que le squelette;

mais il a les chairs ' flasques et les muscles peu développés;

en outre son systèmepileux est,peu développé, il n'a que quel-

ques poils follets sur la lèvre supérieure, et ce n'est que depuis

six mois, c'est-à-dire à plus de vingt-deux ans qu'il a vu appa-

raître les premiers poils sur le pubis. Ses testicules sont

extrêmement petits, pas plus sensibles l'un que l'autre; du

reste il n'existe aucun trouble de la sensibilité générale ou

spéciale. On ne constate aucune autre malformation caracté-

risée, ni du crâne, ni do la face, ni des dents. En somme, on

peut dire que ce qui domine dans son état général, ce sont les

caractères à' infantilisme que révèle la dégénérescence dont

nous ne trouvons point la cause dans l'hérédité directe du

sujet.

La maladie dont il souffre actuellement a débuté à l'âge de

quatorze ans sans cause appréciable, sans qu'il puisse rendre

compte d'aucune sensation prémonitoire qui puisse ressembler

à une aura; il était pris de mouvements tantôt dans unejambe,

tantôt dans les deux jambes, tantôt dans un bras, tantôt dans

un bras et une jambe, tantôt dans les quatres membres. Ces

mouvements rhythmés se manifestaient toujours sous forme

de crises. Aujourd'hui encore quand ils sont très intenses et

envahissent les quatres membres, le malade tourne sur lui-

même et tombe; mais il ne perd jamais connaissance, n'urine

160 CLINIQUE NERVEUSE.

jamais ; màisinui arrive ilê'se'mcirdré lü.lâriûe, ce qui tient à

ce que les mouvements rhythmés se' propagent alors à la'

mâchoire et à la langue qui peut se trouver prise accidentelle-

ment-. - ? ..» ? ' · °

Toutes les crises de convulsions rhythmées se ressemblent,

elles sont les mêmes depuis le début de l'affection. Au com-

mencement il a eu pendant dix mois une crise ou deux par'

jour; puis pendant quelques mois, il en a eu sept ou huit par

jour; puis il s'est fait une nouvelle accalmie de quelques années ;

certains mois s'écoulaient sans qu'il eût plus de deux ou trois

accès par mois. Depuis deux ans, il s'est fait une nouvelle

recrudescence ; et au moment où il s'est présenté à nous, il en

avait à peu près une par jour durant dix minutes. Le jour

même de notre consultation sous l'influence de l'émotion, il a

eu une série d'accès. Ainsi la seule variation que l'on puisse

apprécier dans ses crises convulsives est dans l'étendue des

mouvements qui peuvent être limités à un membre, ou se

montrer sous la forme hémiplégique, ou sous la forme croisée,

ou encore généralisée.

Mais il y a quatre ans, aux phénomènes convulsifs s'est

ajouté un autre symptôme. De temps en temps, soit pendant

la crise de mouvements rhythmés. soit en dehors de ces crises,

il éprouvait le besoin irrésistible de répéter ses propres paroles

ou encore de répéter quatre ou cinq fois la même syllabe d'un

même mot. Jamais il n'a répété les mots prononcés devant lui

par une autre personne. Il n'y a que deux ans que, dans la

plupart de ses crises, il prononce une ou deux fois, trois fois

au plus des mots qu'il ne voudrait pas dire, en particulier zul

ou mercie; le plus souvent il dit sèchement un de ces mots une

seule fois. Toujours les crises sont diurnes, et en général elles

surviennent quand il est fatigué ou qu'il vient d'être excité par

une émotion plus ou moins vive.

L'attaque qu'il a eue devant nous s'est passée de la manière

suivante : la tête s'est tournée à gauche, la langue est sortie

brusquement, est rentrée de nouveau et la mâchoire s'est fer-

mée bruyamment et brusquement aussi. - En même temps le

bras gauche est agité par des mouvemements de moulin, fait

ainsi sept ou huit tours, puis la main se secoue vivement sept

ou huit fois. Les mêmes mouvements se répètent dans le bras,

droit. Le malade secoue deux ou trois fois sa jambe droite,

DE L INCOORDINATION MOTRICE. 161

tire la langue encore une fois, dit « zut » et tout est fini. En

dehors de cela il a de temps en temps un mouvement choréique

isolé d'un bras ou d'une jambe, de sorte que les accès convul-

sifs sont beaucoup moins isolés qu'on ne pourrait le croire

d'après son récit.

Depuis qu'il est soumis à l'hydrothérapie et à un régime

tonique les accès ont considérablement diminué de fréquence

et d'intensité; il n'a plus eu du cinq décembre au premier jan-

vier que quatre crises un peu importantes et encore il n'y a

pas eu d'agitation des membres inférieurs, ni de paroles invo-

lontaires ; tout s'est borné à quelques mouvements choréi-

formes du bras. Il semble en outre que les mouvements isolés

aient presque disparu, il peut aider sa tante qui est concierge

dans une maison très importante; il est mieux nourri, son état

général est meilleur.

Les circonstances ont montré du reste la valeur de l'état

général, du repos et de la bonne alimentation. Depuis le pre-

mier janvier qu'il a dû travailler beaucoup plus, faire des

courses, manger irrégulièrement, se lever fréquemment la

nuit, les crises sont devenues plus fréquentes, et les jambes

sont prises de nouveau, mais au lieu d'être comme autrefois le

siège de mouvements tout à fait incoordonnés susceptibles

d'amener la chute, il ne s'agit que de quelques mouvements

cadencés qui se répètent sept ou huit fois et cessent; il ne

prononce plus involontairement de mots grossiers, et ne

répète plus les mots ou les syllabes.

Archives, t. IX. 1 1

RÉSUMÉ ANALYTIQUE DE NEUF

164 CLINIQUE NERVEUSE.

I.

Les cas que nous avons observés seraient, croyons-

nous, suffisants pour mériter à eux seuls une descrip-

tion synthétique '. Toutefois, afin d'éviter des redites

fastidieuses, nous y joindrons les faits publiés par les

trois auteurs étrangers, nous promettant plus tard d'éta-

blir des comparaisons. Aussi, désireux de ne rien préju-

ger sur la nature de ces observations, ne leur emprunt-

terons-nous que les symptômes analogues à ceux que

nous avons nous-mêmes relevés, nous réservant de

compléter cet exposé au moment où nous comparerons

entre elles toutes ces observations.

L'affection que nous allons décrire débute généra-

lement à un âge peu avancé. Dans nos neuf observa-

tions elle a commencé :

1 fois à 6 ans : Obs. VI;

2 fois à Pans : Obs. I, VII;

3 fois à 8 ans : Obs. III, IV, V;

1 fois à 9 ans : Obs. VIII;

1 fois à 14 ans : Obs. IX.

1 fois à 16 ans : Obs. II.

Beard nous dit avoir vu des enfants de quatre à

sept ans qui étaient atteints du Jumping. Elle dé-

1 L'observation VIII appattient à M. le professeur Pitres (de Bordeaux),

qui nous l'a communiquée gracieusement. M. le D Gibert(du Havre), a

bien voulu nous donner tous les renseignements désirables sur plusieurs

des malades dont nous rapportons l'histoire et qui avaient été confiés à

ses soins. - M. le Dr Laurent (de Sanvic), nous a envoyé l'obsemation

succincte d'un lieutenant de vaisseau affecté de tics convulsifs, pendant

lesquels il prononçait avec force le mot merde à plusieurs reprises.

M. le Dr Fére nous a communiqué l'observation IX. Nous tenons a

leur témoigner ici même toute notre gratitude.

DE l'incoordination motrice. 165

bute donc dans l'enfance et au plus tard dans l'ado-

lescence; elle semble de plus affecter particulièrement

le sexe masculin, bien que nous possédions l'observa-

tion de deux femmes, et qu'O'Briennous apprenne que

la maladie sévit aussi sur les Malaises. Néanmoins, les

hommes fournissent et de beaucoup, à ce qu'il semble,

le plus fort contingent. Parmi les causes occasionnelles

le plus souvent invoquées, se trouvent les émotions

morales vives, la peur en particulier : mais la cause

véritable, déterminante, là, comme dans toutes les

maladies nerveuses ', n'est autre que l'hérédité.

« Ces tics sont bien souvent héréditaires, » a dit

Trousseau. « Cette affection, écrit Beard, est aussi héré-

ditaire que la folie ou l'épilepsie... Dans la famille

sur laquelle j'expérimentais il y ayahçuatre sauteurs : le

père, le fils et deux petits-fils âgés de quatre à sept

ans. Dans une autre, trois frères étaient atteints. »

Les malades qui font le sujet de nos neuf observa-

tions possédaient les antécédents nerveux suivants :

Obs. I. N'ont pu être obtenus.

Obs. II. Néant.

Obs. III. Etat mental tout particulier de la

mère pendant sa grossesse.

Obs. IV. Néant.

Obs. V. Mère aliénée.

Obs. VI. Grands-parents migraineux, mère

très nerveuse.

Obs. VII. Chorée des grands-parents, père très

nerveux, une .soeur atteinte de la même affec-

tion.

1 V. Ch. Féré. La Famille néuropatlcique. (Archives de Neurologie,

1884, janvier et mars.)

166 CLINIQUE NERVEUSE.

Obs. VIII. Le père a un tic non douloureux de

la face; tante aliénée.

Obs. IX. Néant ( ? )-

Nous voyons donc que, dans cinq observations, cette

hérédité nerveuse est des plus manifeste.

Nous n'avons rien dit de la profession de nos ma-

lades dont l'influence, vu l'age du début, nous pa-

raît ici de bien minime importance : toutes les classes

de la société paraissent d'ailleurs payer tribut à cette

affection.

Quant à l'influence du climat et de la situation géo-

graphique, nous croyons, vu la diversité des pays où

cette maladie a été observée, qu'elle se rencontre sous

toutes les latitudes.

Le mode de début, tout au moins dans les cas que

nous avons observés et qui sont les seuls sur lesquels

nous ayions des renseignements complets, est généra-

lement toujours, ou à peu près, identique. C'est Vin-

coordination motrice qui ouvre la scène morbide : in-

coordination qui présente ceci de particulier qu'elle

s'établit lentement, sourdement, sans paraître influencer

la santé générale du sujet. Ces mouvements incoordon-

nés ou plutôt ces secousses musculaires débutent le

plus souvent par la face ou par les membres supérieurs;

généralement l'un de ces derniers est envahi à l'excep-

tion de celui du côté opposé qui néanmoins ne tarde

pas à être pris à son tour.

C'est à l'école, c'est dans la famille, que le profes-

seur ou les parents s'aperçoivent qu'un des bras est

agité de mouvements convulsifs : les doigts s'allongent

et se fléchissent alternativement, les épaules se sou-

lèvent ; le travail devient difficile. Presque en même

DE l'incoordination motrice. 167

temps- les intervalles varient suivant les sujets-ap-

paraissent, s'ils n'ont pas été les premiers en date, des

mouvements incoordonnés des muscles de la face. Ce

sont, le plus souvent et dès le début, des clignements

d'yeux incessants; l'une ou l'autre des commissures buc-

cale est violemment attirée en haut et en dehors; les

masséters, en se contractant, produisent le grincement

de dents, la langue est projetée en dehors et même

déchirée lorsque la contraction des masséters est trop

brusque (Obs. IV). Les muscles du cou entrant en ac-

tion, la tête est portée alternativement dans la flexion

et dans l'extension : les sterno-mastoïdiens l'inclinent

de côté et d'autre.

Les membres inférieurs ne tardent pas à être enva-

his à leur tour, et l'incoordination y revêt un mode

particulier : ce ne sont plus des mouvements limités

comme précédemment à des groupes musculaires iso-

lés ; les contractions portent le plus souvent sur l'en-

semble des muscles de l'un ou de l'autre membre, sou-

vent des deux à la fois. Le malade frappe du pied, se

baisse, se relève; mais, le mouvement qu'il accomplit

le plus souvent est le saut qui peut s'exécuter sur place

ou avec progression.

Nous insistons sur ce caractère du saut : nous l'avons

expressément noté plusieurs fois. Beard a appelé ses

malades des sauteurs (jumpers) et Trousseau nous dit

sans se douter de l'importance de son témoignage :

« Sous l'influence de je ne sais quel trouble de l'inner-

vation, cet enfant était pris de mouvements bizarres,

de contractions musculaires involontaires qui le jetaient

en avant comme s'il eût été lancé par un ressort, le

faisaient sauter à sept ou huit pieds de la place qu'il

168 CLINIQUE nerveuse.

occupait lorsqu'il était debout, ou le faisaient se lever

brusquement, mécaniquemeut, si je puis ainsi dire, du

siège où il était assis, mais ne l'en précipitaient pas » »

N'oublions pas encore que, dans un grand nombre de

cas, tous ces mouvements se combinent entre eux, ou,

mieux encore, s'exécutent simultanément, s'adjoignent

les uns aux autres, se réunissent pour former un com-

plexus assez spécial quoique assez varié, la prédo-

minance des contractions dans un groupe musculaire

donnant à la physionomie de chaque malade un carac-

tère objectif tout particulier.

Si ces mouvements peuvent varier dans leur forme

d'un individu à l'autre, ils présentent cependant des

caractères généraux qui sont les mêmes chez tous les

sujets. Un de ces caractères résidedans la soudaineté avec

laquelle ils apparaissent et la rapidité avec laquelle ils

s'effectuent. Tout à coup, alors que rien dans )'habitus

général du malade ne faisait soupçonner quelque chose

de particulier, une grimace, une contorsion se produi-

sent, une fois, deux fois, à plusieurs reprises, puis tout

rentre dans l'ordre. Mais, bientôt après, car générale-

ment les intervalles sont très rapprochés les uns des

autres, surviennent de nouvelles secousses. Il faut dire

que ce sont surtout les contractions musculaires limi-

tées, soit à la face, soit à un membre,- soit l'associa-

tion particulière de celles-ci, qui se montrent avec le

plus de fréquence et le plus d'intensité. Lorsqu'il s'a-

git de grands mouvements, de sauts par exemple, leur

i Trousseau. Loc. cit., t. 1(, p. 264. Nous ajouterons que cet auteur

dit en parlant de l'état physique et des faits et gestes de t'enta).t,« «toutes

choses que ne peuvent faire les individus atteints de la danse de Saint-

Guy ». .

.DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 169

retour est moins précipité. Alors que, généralement, il

se passe à peine quelques minutes sans qu'une secousse

musculaire limitée ne se produise, les grands mouve-

ments n'existent parfois que tous les quarts d'heure,

par séries, toutes les heures ou même moins, suivant

les cas; il est vrai aussi que, dans leur intervalle, les

secousses limitées n'en existent pas moins.

Ces diverses modalités de l'incoordination motrice

sont influencées par diverses causes. On peut dire que

toutes les émotions morales ou physiques que le sujet

puise chez lui-même ou qui lui viennent de l'extérieur

les aggravent singulièrement et en fréquence et en in-

tensité. Ces malades sont particulièrement sensibles à

toutes les actions, à tous les bruits venus du dehors :

la moindre surprise détermine une accentuation des

secousses qui sont de même exagérées par une émo-

tion morale vive. De plus, il est des jours, c'est d'eux

que nous le tenons (Obs. III, IV, VII), où eux-mêmes

peuvent dès le matin, au réveil, prédire que la journée

sera plus mauvaise qu'à l'ordinaire : ils se sentent

dans un état tout spécial, ils éprouvent, disent-ils, un

énervement particulier qui leur fait prévoir pour la

journée une accentuation de leur incoordination mo-

trice. D'autre part, ces secousses peuvent être non seu-

lement diminuées, mais encore totalement supprimées

par différents facteurs; parmi ceux-ci, il n'en est pas

de plus puissant que le sommeil. Non seulement elles

cessent complètement pendant qu'il a lieu, nous en

avons pour témoins les parents qui ont scrupuleuse-

ment observé leurs enfants, mais encore, tous nos ma-

lades nous ont dit, que pendant la nuit, ils dormaient

d'un sommeil de plomb dont il était très difficile de les

170 CLINIQUE NERVEUSE.

tirer. Il est fort probable que l'énorme dépense de

mouvements qu'ils ont faite pendant la journée ne con-

tribue pas peu à ce résultat. Une seule fois (Obs. VI),

l'incoordination paraît avoir, à diverses, reprises per-

sisté pendant le sommeil; mais il y avait là un élément

morbide surajouté.

Ces secousses sont également modifiées d'une autre

façon : febris solvit spaszzzos, dit le vieil adage, nous en

avons ici une nouvelle confirmation. Parmi les sujets

qui ont été soumis à notre observation, il en est trois

qui, à partir du début de leur affection, eurent à sup-

porter des affections aiguës (Obs. III, angine simple;

Obs. IV, fièvre muqueuse ( ? ) ; Obs. VI, angine couen-

neuse). Pendant leur durée, il est incontestable que les

secousses musculaires diminuèrent debeaucoup de fré-

quence et d'intensité sans toutefois disparaître complè-

tement, et qu'elles ne reparurent avec leur violence

ordinaire qu'après la disparition de l'état fébrile.

Indépendamment de ces étals fébriles, les malades

peuvent traverser des périodes de rémission, de

même qu'il existe des périodes d'exacerbation peu-

dant lesquelles l'incoordination motrice se montre

assez peu, bien qu'elle ne disparaisse jamais com-

plètement, pour que les individus se considèrent

comme presque entièrement guéris : nous en reparle-

rons en traitant de la marche de la maladie. Toutefois,

empiétant sur ce chapitre de notre description, et

avant de passer à l'étude des autres symptômes, nous

devons dire que, dans certains cas peut-être, la maladie

peut rester bornée à cette incoordination, que toujours

celle-ci est la première en date et que souvent elle peut,

pendant de longues années, constituer à elle seule toute

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 171 I

V affection. (Dans les observations I, IX, les symptômes

autres que ceux fournis par les secousses musculaires,

ne se montrèrent approximativement que quatre ou cinq

ans après le début de l'affection; dans l'observation II,

cinq mois après; dans l'observation III, six ans; dans

l'observation IV, seize ans; l'observation VI n'est pas

très concluante à ce sujet; l'observation VIII semble se

rapprocher de l'observation II; enfin ils n'étaient pas

encore apparus après six et quatorze ans dans les ob-

servations V et VU). Donc, pendant toute une période

qui peut comprendre jusqu'à seize années (Obs. IV),

les symptômes peuvent rester complètement bornés à

ceux que nous avons déjà décrits. C'est un point sur

lequel il est du plus haut intérêt d'insister, au point de

vue du diagnostic différentiel, qui sera surtout difficile

pendant toute cette première période.

Il nous faut encore, avant de passer outre, insister

sur l'état physique et moral du sujet, état qui ne variera

pas du reste dans les périodes ultérieures. Disons-le

de suite, pendant toute cette première étape, l'état phy-

sique du sujet est aussi satisfaisant que possible. Il est

évident cependant qu'une incoordination motrice aussi

accentuée que celle qui existe parfois n'est pas tou-

jours sans inconvénients pour la santé de celui qui en

est la proie, mais ces inconvénients sont pour ainsi

dire sans importance. Les fonctions de nutrition ne

s'en exécutent pas moins bien, un sommeil réparateur

venant, avons-nous dit, suppléer pendant la nuit à la

dépense musculaire exagérée qui s'est faite pendant le

jour. Si cette incoordination survenait brusquement

avec toute son intensité, nul doute que les fonctions

générales ne pussent être altérées, mais comme elle

172 -) CLINIQUE NERVEUSE.

s'établit peu à peu, progressivement, il s'établit une

sorte de tolérance, une habitude particulière qui fait

que les malades vivent pour ainsi dire en bonne intel-

.'igence avec leur maladie. N'oublions pas toutefois

qu'il existe des contractions dans certains groupes

musculaires qui peuvent être fort préjudiciables.

Chez le malade de l'observation IV, la langue était vi-

vement projetée au dehors, et, parfois, en même temps

que cette projection, il survenait des contractions telle-

ment brusques des masséters, qu'à plusieurs reprises

l'organe de la parole fut très cruellement mordu : ce

sont là des faits rares, mais dont il ne faut pas man-

quer de tenir compte. Toutefois, à l'inverse de ce qui

se passe chez les choréiques, l'incoordination motrice,

qui, nous le savons, se présente ici sous forme de se-

cousses extrêmement brusques, n'est jamais assez sou-

tenue pour empêcher l'alimentation, lorsqu'elle siège

dans les membres supérieurs, par exemple, ou la

marche lorsqu'elle siège dans les membres inférieurs.

Quant à l'état mental, il est parfaitement régulier et

normal : les sujets raisonnent très bien ; en aucune

façon leurs actes ne rappellent ceux des aliénés ; ils

ont parfaitement conscience de leur état ; la plupart

sont fort intelligents. Quant à l'état moral, il est va-

riable suivant l'âge de l'individu. L'affection débutant

presque toujours entre sept et dix ans, il est évident

que les enfants de cet âge ne peuvent, à l'instar de

personnes plus âgées, s'affliger outre mesure de leur

état : ils prennent des habitudes de paresse si chères

à cette époque de l'existence. Mais, lorsque les années

s'accumulent et avec elles les soucis, les sujets songent

à réagir. Les efforts qu'ils font alors pour atténuer ou

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 173

faire disparaître la violence de leurs mouvements sont

parfois mais temporairement couronnés de succès. L'un

de nos malades (Obs. IV), était clerc d'huissier, et al-

lait porter du papier timbré à domicile. Pendant l'en-

trevue avec son client, si celle-ci était très brève, il

pouvait mettre un frein à tous ses mouvements inso-

lites et les arrêter complètement. Mais, aussitôt après

cette cessation qui ne s'obtenait qu'au prix de la plus

violente contention d'esprit, les mouvements revenaient

avec une violence inaccoutumée; il gesticulait, tirait la

langue, sautait sur place, devant la porte de celui qu'il

venait de quitter. Il fut obligé d'abandonner son mé-

tier. Le malade qui fait le sujet de l'observation VII,

passa récemment le conseil de révision : il avait un

désir extrême d'être soldat. Il fit en sorte de passer

le dernier, et se déclara lui-même bon pour le service.

Rentré dans la salle commune, il eut pendant quelques

instants à subir une exagération inusitée de son in-

coordination motrice qui chez lui portait spécialement

sur les deux sterno-mastoïdiens.

Signalons encore d'autres signes, qui, bien que

négatifs, n'en ont pas moins une très grande impor-

tance. Chez tous nos malades, la sensibilité générale

était tout à fait normale : les sens spéciaux ne présen-

taient rien de particulier; chez plusieurs, l'examen

campimétrique de l'oeil n'a fourni aucune anomalie :

aucun d'eux non plus n'avait jamais présenté d'acci-

dents nerveux convulsifs. Nous verrons que les obser-

vations rapportées par les auteurs étrangers sont éga-

lement muettes sur l'existence de ces variétés de

troubles. On conçoit déjà combien le diagnostic diffé-

rentiel s'en trouvera éclairé.

174 CLINIQUE NERVEUSE.

§ IL

I. Les symptômes que nous avons décrits dans le

précédent paragraphe peuvent à eux seuls constituer

toute la maladie, mais, dans la grande majorité des

cas, ils ne la constituent que temporairement et l'on

voit bientôt apparaître de nouveaux phénomènes de

beaucoup encore plus caractéristiques que les précé-

dents. Ils sont de divers genres : nous allons les décrire

d'après leur ordre habituel d'apparition.

Nous n'insisterons pas sur la date de cette apparition,

car, nous avons déjà dit que, pendant une période com-

prise dans nos observations entre quelques mois et

seize années, l'incoordination motrice pouvait exister

seule : ou plutôt, nous parlerons de cette date pour

dire qu'elle est fort variable. Le mode de début paraît

au contraire assez régulier : il y a là une gradation

constante et toute spéciale de ces phénomènes nou-

veaux, les choses se passant de la façon suivante.

La plupart du temps, pendant une de ces périodes

d'excitation que nous avons signalées, subitement, à

l'occasion d'un mouvement désordonné, et au moment

où l'incoordination est à son summun, à l'acmé de

la convulsion, le malade pousse avec force un cri inar-

ticulé (Obs. I, II, 111, IV, VI, VIII, IX), qu'il est souvent

fort difficile de traduire : c'est un heni, ozih, ouala, ah,

qui, toujours en rapport avec l'incoordination peut être

poussé plusieurs fois de suite et à intervalles variables

dans le courant de la journée. Ce cri inarticulé, lors-

qu'il existe, doit faire soupçonner l'apparition probable

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 175

d'un autre signe, qui n'est en somme que la transfor-

mation du précédent avec une caractéristique toute

particulière en plus. L'émission du son reste toujours

brusque, instantanée, en coïncidence parfaite avec le

summum de la convulsion, mais le cri devient articulé

et le mot que le malade va prononcer, mot variable,

prendra dans certains cas les caractères de l'écho : le

sujet deviendra écholalique. et écholalique complet,

comme nous allons le montrer (Obs. II, III, IV, IX, ma-

lades de Beard, O'Brien et Ilammond). Cette écholalie

est parfois assez manifeste pour n'avoir pas besoin

d'être cherchée : chez certains sujets cependant, elle

revêt une modalité telle (Obs. IV), qu'il est nécessaire

d'un examen approfondi pour la constater. Son mode

le plus simple de production est le suivant : le malade

s'entend appeler à haute voix; aussitôt il répète avec

force et rapidité son propre nom en accompagnant

l'émission du mot d'une de ses convulsions ordinaires.

Il n'est toutefois pas nécessaire qu'on s'adresse direc-

tement à lui pour que le phénomène se produise. Le

malade entend parler une des personnes qui l'entou-

rent ; aussitôt il répète, avec une secousse, le ou les

derniers mots de la phrase qu'il vient d'entendre. Il

est parfaitement conscient, tout à fait décidé même,

lorsqu'on l'en prie surtout, à se soustraire à ce nouveau

désagrément : il ne peut y parvenir. Le malade qui fait

le sujet de l'observation IV, garçon fort intelligent et

âgé de vingt-quatre ans à l'époque où nous l'observions,

s'était à ce sujet, et pendant longtemps, fort bien ob-

servé lui-même. « En écoutant un discours, une con-

férence, nous disait-il, j'étais poussé par le besoin

presque irrésistible de répéter un mot, un bout de

176 CLINIQUE NERVEUSE.

phrase qui venaient de me frapper davantage. Il me

fallait toute ma contention d'esprit et un vif désir de

respecter les convenances pour ne pas répéter ce mot

tout haut; toutefois, comme je ne pouvais me soustraire

qu'incomplètement à cette obligation, je m'aperçus, à

différentes reprises, que plusieurs des personnes qui

m'entouraient avaient parfaitement entendu. » Il lui

arriva, lorsqu'il lisait, d'être poussé par le besoin irré-

sistible de prononcer à haute voix ce mot, cette phrase

qui attiraient toute son attention : comme il était seul,

il se laissait aller à satisfaire ce besoin de répétition.

« De plus, nous apprend-il, toutes les facultés de l'in-

telligence étaient pour le moment absorbées chez lui,

par ce mot, cette phrase qui s'emparaient alors de toute

sa pensée à un point tel qu'ils lui faisaient perdre le

fil du discours ou le sens de sa lecture. Le mot entendu

ou qui, en lisant, l'avait frappé, avait de la tendance à

revenir sur ses lèvres, à être répété à intervalles va-

riables, mais toujours au moment même ou à la fin

des secousses musculaires si particulières qui le tour-

mentaient. »

Ce récit d'un malade intelligent en dit plus que

bien des descriptions. Chez deux autres sujets (Obs.

II, III), nous avons pu en vérifier l'exactitude. Il n'est

donc pas nécessaire, pour que l'écholalie se produise,

qu'un son venu du dehors vienne frapper l'oreille du

malade, la vue seule du mot qu'il lit peut la déterminer :

la seule pensée même du mot ou mieux de la chose

qu'il représente peut produire sa répétition. Il est vrai

qu'une certaine catégorie très nombreuse, d'individus,

les auditifs, impressionnent mentalement, lorsqu'ils

songent à quelque chose, leur oreille par les mois

DE L INCOORDINATION MOTRICE. 177

dont ils revêtent l'idée qui les haute en ce moment; il

en est presque toujours ainsi dans la lecture mentale,

sans articulation des mots.

Nos malades sont donc des écho laliques, et ils le sont

au premier chef : c'est là un des symptômes les plus

constants de leur affection, un de ceux qui, en parti-

culier, ont le plus frappé les auteurs étrangers. Il est

un des premiers à apparaître après l'incoordination

motrice, il semble être un des derniers à persister

pendant les périodes d'accalmie, nous ne disons

pas de guérison qui peuvent survenir. Il faut qu'il

se manifeste : le malade répétera parfaitement des

mots prononcés dans une langue qui lui est tout à fait

inconnue : il sifflera, lui Malais (O'Brien), un air

européen qu'il entendra au même moment pour la pre-

mière fois : tellement il semble se développer chez

ces sujets une aptitude spéciale et toute nouvelle.

L'écholalie, n'est en somme, ou plutôt, prise dans

son sens le plus restreint et le plus habituel, n'est que

l'imitation par la voix de sons articulés ou non qui

viennent frapper notre oreille; l'imitation d'un geste,

d'un acte, bien qu'étant plus complexe, est évidemment

un phénomène du même ordre. Cette faculté d'imitation,

cette écholalie du geste ou de l'acte, les malades, dans

certains cas, la possèdent à un degré extrême. Tous

ces phénomènes paraissent si bizarres, que nous ne

voudrions pas invoquer à ce sujet l'autorité des auteurs

étrangers, si nous n'avions pas été nous-même témoin

du fait suivant (Obs 11) : « S... est dans la cour de la

Salpêtrière, en proie à son état habituel ; il est agité

par ses contorsions variées, pendant lesquelles il pousse

son oziah, ozcah ordinaire; un malade s'approche delui,

L. L. 1\.. - 1"2

178 CLINIQUE NERVEUSE.

et essaye d'imiter une de ses contorsions les plus ordi-

naires, qui consiste à lever le bras et la jambe droite

en frappant la terre du pied gauche, position, comme

on le voit, peu favorable à l'équilibre; il imite en même

temps par la voix son onomatopée. Aussitôt, S..., qui

peut en ce moment même être tranquille, imite les cris

et gestes de son camarade d'hôpital, et il y met une

telle conviction qu'il ne tarde pas à tomber à terre,

sans toutefois se faire mal. On est obligé d'intervenir

pour faire cesser ce jeu qui pourrait devenir dangereux,

et qui a pris naissance et s'est perpétué depuis que

les autres malades ont remarqué la faculté d'imitation

irrésistible de S... » Ce symptôme, nous le retrouvons

porté à son summun dans les observations des auteurs

étrangers. Un des malades de Beard, était assis sur

une chaise et coupait son tabac : « Je m'approchai de

lui, dit cet observateur', et le frappant subitement sur

l'épaule, je lui dis : Jette-le. Aussitôt il lança son cou-

teau qui alla se planter dans une porte vis-à-vis, et en

même temps répéta mon ordre : Jette-le, avec une ex-

pression particulière de terreur et d'alarme ».

« On me présenta, dit 0'Brien ? une femme malaise

âgée et très respectable. Je causai environ dix minutes

avec elle sans rien soupçonner d'anormal. Tout à coup,

celui qui me l'avait amenée enleva son habit; aussitôt

elle commença à se déshabiller, et elle se fût mise

complètement à nu si je ne m'étais interposé ».

Dans l'observation recueillie par les officiers améri-

cains, et rapportée par Hammond 3, il est dit en par-

1 Archives de Neurologie, juillet 1881, p. Il6.

2 Ibid., juillet 1884, p. 71.

/&td.,juiUetl88<,p ? 3.

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 179

lant du matelot qui en fait le sujet : « Si le capitaine

donnait brusquement en sa présence un coup sur son

côté, le pilote répétait ce coup de la même manière et

sur le même côté ; si un bruit se produisait inopiné-

ment ou avec intention, le pilote semblait forcé contre

sa volonté de l'imiter à l'instant avec une grande exac-

titude. Les passagers, par malice, se mirent à imiter le

grognement du porc ou d'autres cris bizarres ; d'autres

battaient des mains, sautaient, jetaient leurs chapeaux

sur le pont, et le pauvre pilote imitait tous ces gestes

avec précision, autant de fois qu'on les répétait».

Cette faculté d'imitation, cette écholalie du geste ou

de l'acte est donc, dans certains cas, très complète chez

ces malades; elle peut l'être au point de leur faire com-

mettre des actes qui ne sont pas, à proprement parler,

irraisonnables, mais qui peuvent avoir pour eux ou

pour les personnes de leur entourage, les inconvé-

nients les plus fâcheux. Notre malade (Obs. Il), pouvait

tomber d'une façon malencontreuse et se blesser; c'est

ce que nous voyons également dans les observations de

Beard, d'O'Brien et de Hammond.

« Un jeune garçon de seize ans, dit le premier, jouait

avec un de ses camarades et l'avait renversé sur le

gazon. Quelqu'un s'approcha et lui dit : Frappe-le. Il le

frappa à poings fermés. Il était à une fenêtre peu

élevée ; on lui cria : Saute, et il sauta en répétant

l'ordre donné ».

« Je citerai, dit O'Brien, un cas qui eut une issue fa-

tale : le cook d'un steamer était un latah des plus corsés.

Il berçait un jour, sur le pont du navire, son enfant dans

ses bras, lorsque survint un matelot qui se mit, à l'ins-

tar du cook, à bercer dans ses bras un billot de bois.

180 CLINIQUE NERVEUSE.

Puis ce matelot jeta son billot sur un tendelet et s'a-

musa à le faire rouler sur la toile, ce que fit immédia-

tement le cook avec son enfant. Le matelot, lâchant

alors la toile, laissa retomber son billot sur le pont ; le

cook en fit de même pour son petit garçon qui se tua

sur le coup. »

n Le capitaine du bateau, nous apprend Ham-

mond, tout en battant des mains butta accidentelle-

ment et tomba pesamment sur le pont. Le pilote, sans

avoir été touché par le capitaine, se mit à battre des

mains, et voulant l'imiter jusqu'au bout,-tomba préci-

sément delà même manière et dans la même position. »

Ces exemples sont extrêmement démonstratifs, et leur

existence dans toutes les descriptions est la meilleure

preuve de leur constance.

II. La troisième catégorie de symptômes est encore,

s'il est possible, beaucoup plus caractéristique. Les

phénomènes qu'elle renferme sont en effet si fréquents,

on les observe avec une persistance telle, ils ont des

caractères si spéciaux que même, si jamais ils exis-

taient seuls, on pourrait immédiatement porter un

diagnostic : car ils sont paihognomoniques, jamais ils ne

s'observent, dans les conditions que nous allons indi-

quer, dans aucune autre affection. Itard s'exprimait

ainsi en 1825 (Obs. 1) : « Au milieu d'une conversa-

tion, dit-il en parlant de la marquise de D..., qui

l'intéresse le plus vivement, tout à coup, sans pou-

voir s'en empêcher, elle interrompt ce qu'elle dit ou

ce qu'elle écoute par des cris bizarres et par des mots

encore plus extraordinaires, et qui font un contraste

déplorable avec son esprit et ses manières distinguées.

Ces mots sont pour la plupart foutu cochon, des jure-

de l'incoordination motrice. 181

ments grossiers, des épithètes obscènes, et, ce qui n'est

pas moins embarrassant pour elle et pour les audi-

teurs, l'expression toute crue d'un jugement ou d'une

opinion peu favorable à quelques-unes des personnes

présentes de la société ». Et Trousseau nous dit en-

core : « L'individu profère à haute voix des mots qu'il

voudrait bien retenir »; ce que nous reprendrons en

disant : très souvent, outre les cris inarticulés que

poussent les malades, outre l'écholalie à laquelle ils

sont sujets, peut survenir l'émission à haute voix d'un

mot, d'une expression obscène, toujours à l'occasion

d'une convulsion et chez des personnes que leur édu-

cation et leur état mental sembleraient devoir mettre

à l'abri de pareilles inconvenances. Ces phénomènes,

nous les avons observés à satiété chez deux malades

(Obs. II, III) ; ils sont expressément notés comme

nous l'avons vu dans l'observation d'Itard, complétée

par M. Charcot, et Pitres et Féré, nous ont

communiqué deux cas des plus concluants à leur

égard (Obs. VIII, X) '. Non seulement les malades pro-

noncent des mots obscènes, mais encore il semble

qu'il puisse exister chez eux une combinaison de l'é-

cholalie dont ils sont souvent tributaires, et de la

coprolalie qui peut exister conjointement avec elle.

Citons encore un exemple : « Un jour, S... (Obs. II)

entendit le directeur de l'hospice de la Salpêtrière,

dire à une concierge qu'elle ne veillait pas suffisamment

Nous avons dit que M. le D1' G. Laurent (de Sawic), nous avait com-

muniqué l'observation, malheureusement trop incomplète pour être pu-

bliée, d'un lieutenant de vaisseau avec lequel il avait navigué, qui était

animé de mouvements couvnisifs. à l'occasion desquels il prononçait à

haute voix et plusieurs reprises le mot merde. Dans deux autres ob-

servations que nous publierons ultérieurement, cette coprolalie est éga-

lement des plus manifestes.

183 CLINIQUE nerveuse.

à son service ; aussitôt, tout en faisant des contorsions,

S... se mit à crier : «Ah la vache, ne fait pas son service,

son service, son service » ; le tout d'une façon très brève.

S... ne se contente pas .d'être écholalique : lorsqu'il n'a

pas été frappé par un mot, par une idée qu'il peut

traduire par le langage articulé, il accompagne souvent

ses contorsions du mot 221eî,de, et cela devant n'importe

quel auditeur. Vient-il -CI être frappé par une idée, par

la vue d'une personne, aussitôt il revêt cette idée, il

parle de cette personne d'une façon ordurière ; M.X...

rentre dans la salle : « Ah le voilà ce vieux c.. de père

X..., ce vieux c.. ! » - le tout prononcé rapidement et

devant une personne pour laquelle il doit avoir, et il a

le plus grand respect. Une dame entre dans la salle :

«Ah ! la vache je la... elle doit avoir, etc. »,deux ou

trois phrases courtes et on ne peut plus ordurières,

dites avec un accompagnement de secousses muscu-

laires désordonnées, remuant les bras, se baissant et

se relevant à plusieurs reprises, levant les épaules,

renversant la tête en arrière et de côté. Ces paroles

sont émises si involontairement, qu'il lui arrive de les

prononcer devant sa mère qu'il affectionne beaucoup,

et qu'il fut obligé un jour de quitter un restaurant où

il scandalisait les habitués, par ses paroles lubriques.

Ce qui montre combien celles-ci sont involontaires,

c'est que jamais elles ne sont accompagnées de gestes

en rapport avec leur signification». Rappelons-nous

que Mme de D... émettait « ce qui n'est pas moins

embarrassant pour elle et pour les auditeurs, l'expres-

sion toute crue d'un jugement ou d'une opinion peu

favorable à quelques-unes des personnes présentes de

la société ». Quant aux auteurs étrangers, O'Brien

DE l'incoordination motrice. 183

nous dit expressément : « Le latah pousse une excla-

mation involontaire qui est toujours obscène; ce dernier

phénomène se produisant dans l'un et l'autre sexe ».

Véritablement ce caractère d'obscénité estpatlioqiion2o-

nique Outre le fait lui-même, il y a là en effet quelque

chose de tout à fait particulier. On comprend à la ri-

gueur, étant donné ce besoin extrême qui fait que, chez

tous ces malades, l'idée présente s'empare de tout

l'être, et se traduit à haute voix, on comprend, disons-

nous, qu'un garçon de dix-neuf ans (Obs. II), puisse

avoir des idées lubriques ou obscènes, et les traduire

par des paroles. Mais que, hors de tout propos, des

femmes, des jeunes filles, de jeunes garçons d'excel-

lente famille, parfaitement élevés, remplacent un cri

inarticulé par une expression obscène, il y a là quelque

chose de tout à fait spécial, et disons-le, d'entièrement

inexplicable. Et rien ne peut changer la caractéristique

de ce vocabulaire, ni les objurgations, ni les divers

stratagèmes de substitution (Obs. VIII); tout au plus, la

volonté du malade lui-même est-elle quelquefois assez

puissante pour lui faire retenir un instant les mots qui

vont échapper; et encore cette contention est-elle le

plus souvent suivie d'une explosion exagérée de mots

grossiers.

Cette coprolalie n'existe pas chez tous les sujets

de même que chez tous, l'écholalie n'existe pas ou

tout au moins n'existait pas chez tous nos malades au

moment de l'observation. Sur les neuf, dont nous pos-

sédons l'histoire, à différentes époques du développe-

ment de l'affection, ce symptôme existait cinq fois

(Obs. I, II, III, VIII, IX); (nous pourrions également

compter le lieutenant de vaisseau, cité par M. Laurent,

184 clinique nerveuse.

et deux autres observations, ce qui nous donnerait une

proportion de 8 p. 12.) Nous savons que cette copro-

lalie avait vivement frappé Trousseau; nous avons

dit qu'elle existait chez tous les malades d'O'Brien.

Aussi, bien que Beard et llammond, - ce dernier

dans son unique et très incomplète observation,

ne la mentionnent pas, serions-nous tentés de dire que

dans la grande majorité des cas, et à une époque va-

riable de la maladie, elle fera presque certainement

son apparition. La date exacte de celle-ci est assez

difficile à préciser; c'est certainement le symptôme

qui vient le dernier dans la série, et comme il s'entre-

mêle à ceux qui préexistent, il est quelquefois assez

difficile aux malades de préciser exactement la date de

son début. S'il nous était permis de nous servir des

cinq observations dans lesquelles la coprolalie exis-

tait, nous dirions que dans l'observation I, elleapparut

plusieurs armées après le commencement de la maladie;

dans l'observation II, trois ans après; dans les obser-

vations III et IX, cinq ans après; l'observation VIII

n'est pas assez précise à ce sujet. L'époque de début

de ce symptôme ne paraît donc pas être très rappro-

chée de l'époque du début de l'affection; c'est, du

reste, nous l'avons dit, le dernier en date. Insistons

encore sur ce point qui lui est commun avec l'écholalie

ou la production d'un cri inarticulé, c'est que le mot

ordurier ou obscène est toujours émis au moment de

l'acmé d'une secousse musculaire et que jamais le

geste ne souligne la signification du mot. Nous savons

encore que la pensée du malade peut prendre, tout au

moins quant aux mots qui la traduisent, une tournure

obscène tout à fait spéciale (Obs. II).

. DE L INCOORDINATION MOTRICE. 185

Quant à l'état physique, moral et mental des malades,

lorsque la maladie est complètement constituée, nous

ne saurions mieux faire que répéter ce que nousavons

dit en traitant de la première période, il est excellent

sous tous les rapports, sauf bien entendu à tenir compte

des inconvénients que peut créer un état aussi anormal.

§111.

La marche de cette affection, ainsi qu'on a pu en

juger en suivant la description que nous avons don-

née, est tout à fait lente et insidieuse. Son début est

obscur; peu à peu les symptômes se déroulent à diverses

dates d'apparition, le tout, suivant une marche assez

régulière. Cependant, en faisant l'histoire particulière

de chaque symptôme , nous avons dit qu'il existait

pour chacun d'eux des moments d'exacerbation, va-

riables en durée et en intensité; nous aurions dû ajouter

que, tous les trois, secousses musculaires, écholalie,

coprolalie, lorsqu'ils coexistaient, s'exagéraient si-

multanément. En regard de ces exacerbations, pla-

cons les périodes de rémission ou d'accalmie. Sous

des influences mal connues et qui, tout au moins,

sont, autant que nous avons pu en juger, très varia-

bles suivant les sujets, les secousses musculaires de-

viennent moins fréquentes et moins fortes, les mots

orduriers ne sont plus prononcés qu'à de rares inter-

valles, l'écholalie peut ne plus se montrer. Mais, dans

ces intervalles, jamais la guérison n'est tout à fait

complète, radicale : la maladie sommeille, elle n'est

186 CLINIQUE NERVEUSE.

pas disparue. Toujours il reste des secousses mus-

culaires, atténuées il est vrai, mais qui sont aussi

toujours faciles à apprécier : c'est un bras qui en est

le siège; elles se localisent assez souvent dans les

muscles de la face (Obs. I, II, III, V, VII). Ces périodes

de calme peuvent du reste être assez longues (Obs. I,

un an; Obs. II, cinq mois; Obs. III, trois mois, etc.);

mais, à un moment donné, reparaît tout le cortège des

symptômes aussi accentués qu'auparavant, jusqu'au

jour où une autre période rémissionnelle vient rétablir

le calme. Est-ce donc à dire que la maladie ne peut

s'éteindre graduellement à la suite de plusieurs de ces

accalmies ? Nous ne saurions donner ici une affirma-

tion, mais s'il nous était permis de conclure d'après

nos observations, nous dirions que, pour notre part,

nous ne l'avons jamais vue complètement disparaître;

elle s'atténue, elle ne guérit pas, et encore son atté-

nuation peut bien n'être que le prélude d'une nouvelle

exacerbation. Dans l'Observation I, nous voyons

qu'elle a duré soixante-dix-huit ans et persisté jusqu'à

la mort de la malade; dans les autres cas, en cours

d'observation, elle dure depuis quatre ans, Obs. II;

Obs. III, V, VI, VIII, six ans; Obs. VII, quatorze ans;

Obs. IV, seize ans; Obs. IX, neuf ans.

Quant aux auteurs étrangers, bien que la nature et

l'étendue de leurs travaux ne soient pas telles qu'elles

nous permettent de conclure expressément dans le sens

de l'incurabilité, nous dirons néanmoins que la des-

cription qu'ils donnent de l'affection chez les gens

âgés, alors qu'ils nous disent qu'elle peut débuter chez

les jeunes enfants, nous engage à conclure dans le sens

même qui se dégage de nos propres observations.

DE l'incoordination MOTRICE. 187

Beard cependant est assez affirmatif au sujet de la

chronicité indéterminée, car il nous dit : « La possibilité

de l'excitation est permanente et persistante : une fois

que l'habitude du «jumping » est acquise, le sujet dont

la susceptibilité varie suivant le moment est toujours

capable de produire ces mêmes phénomènes avec une

intensité plus ou moins grande : une fois sauteur, on

est toujours sauteur, dit le pronostic. » Nous n'excep-

terions peut-être de cet ostracisme que les sujets chez

lesquels la maladie est encore bornée aux simples

tics de la face ou à des incoordinations, à des secousses

musculaires partielles, si tant est qu'on puisse considé-

rer l'affection comme constituée à cette période; mais,

lorsqu'à l'incoordination se sont jointes l'écholalie et

la coprolalie, nous croyons être dans le vrai en con-

cluant à l'incurabilité.

§ IV.

Nous croyons qu'il est maintenant nécessaire, avant

d'établir le diagnostic, le pronostic et le traitement de

l'affection que nous venons de décrire, de comparer

ses symptômes, tous puisés dans nos propres observa-

tions, avec ceux que les auteurs étrangers ont attribué

à diverses maladies connues dans divers pays sous les

noms bizarres de junzpimg; latah ; myriachit '. On se

rappelle qu'au début de cette étude nous avons supposé

que les observations dont nous allons désormais parler

1 V. Archives de Neurologie, juillet 1881, p. 68-75.

188 CLINIQUE NERVEUSE.

avaient trait à l'affection que nous décrivions : il nous

faut maintenant donner la preuve de ce que nous avons

avancé. Rappelons d'abord quelques-uns de ses symp-

tômes fondamentaux : 10- cette affection est héréditaire;

elle se caractérise par une incoordination motrice sous

forme de secousses musculaires brusques, affectant

divers muscles, produisant des mouvements variés et

assez souvent ceux qui produisent le saut; 2° cette

incoordination peut s'accompagner de l'émission de

sons inarticulés ou articulés : dans ce dernier cas, ceux-

ci sont représentés par des mots qui ne sont fréquem-

ment que la répétition de mots semblables prononcés

auprès du malade. Cette imitation vocale (écholalie)

peut avoir pour corollaire une imitation physique de

l'acte ou du geste que le sujet voit accomplir devant

lui ; 3° parmi les expressions que le malade peut répé-

ter au moment d'une convulsion, il en est qui revêtent

un caractère tout spécial , celui de ! 'oee/7e (col)ï,o-

lalie); 4° l'état physique et mental des sujets est en

pleine intégrité; la maladie semble incurable, elle

débute chez les sujets jeunes et les accompagne pen-

dant toute leur existence.

Nous passons sous silence les observations de Trous-

seau, qui ne constituent pas un ensemble suffisant pour

mériter l'analyse et nous arrivons au travail de Beard',

qui porte un titre caractéristique : « Les Sauteurs du

Maine ». Il est facile de retrouver, dans cette notice im-

portante, quoiqu'incomplète (l'auteur n'ayant pu obser-

ver les malades que pendant quelques jours, à l'occa-

sion d'un voyage) des caractères se rapprochant assez

1 Archives le Neurologie, loc. cil., 1889, p. 146-151 .

DE L INCOORDINATION MOTRICE. 189

particulièrement de ceux que nous avons énoncés pour

ne pas laisser de doutes sur l'identitédes deux affections.

1° « Cette affection est aussi héréditaire que la folie

ou l'épilepsie, nous dit l'auteur américain : dans la

famille où j'expérimentais, il y avait quatre sauteurs

(lunzhers) : le père, le fils et deux petits-fils âgés de

quatre et sept ans. Dans une autre, trois frères étaient

atteints. Chez tous, l'incoordination motrice était des

plus évidente et affectait spécialement la forme du

saut. » 2° L'écholalie et l'imitation du geste ou de

l'acte n'étaient pas moins appréciables : « Peu importait

la langue employée dit-il : le sauteur, répétait aussi bien

du grec que du latin, pourvu que l'ordre fût donné

bref et sec et en quelques mots. » 3° La coprolalie

n'esl pas meutionnée-4° « Psychiquement ces sauteurs

sont modestes, tranquilles et soucieux de leur dignité :

ils sont intelligents. » Leur état physique est satisfai-

sant : l'affection semble incurable et débuter de bonne

heure.

Tous les caractères fondamentaux sont là au grand

complet, sauf toutefois la coprolalie, qui peut-être n'exis-

tait pas chez les malades examinés par Beard, bien que

cet auteur dise en avoir observé plus de cinquante.

Beard en outre, nenous parle pas des femmes qui, nous

le savons, peuvent, comme les hommes, être affectées.

Malgré cela, nous croyons que nous devons et de suite

conclure à l'identité des deux affections. Signalons,

pour y insister, le fait que les sauteurs exécutaient

avec rapidité l'ordre qu'on leur donnait-celui-ci leur

fût-il préjudiciable en le répétant à haute voix.

La seconde notice, dans laquelle nous voyons rap-

portés des symptômes très analogues à ceux que nous

190 CLINIQUE NERVEUSE.

avons décrits est due à M. O'Brien, un bon observateur,

mais qui n'est pas médecin. Le jumping américain est

devenu le la/ah de la Malaisie; c'est dans ce pays que

l'auteur a expérimenté'. Disons que toutes ses observa-

tions peuvent ne pas être concluantes, car M. O'Brien

nous avertit lui-même que l'acception malaise du mot

latali est très large : « elle englobe toutes les personnes

d'une organisation nerveuse particulière, depuis ceux

qui, par leur constitution mentale, paraissent absolument

subordonnés à la volonté d'autrui jusqu'aux personnes

qui sont d'une nature plus on moins excitable. » Don-

nons un résumé de ce mémoire où la méthode médi-

cale n'a pas présidé à la classification des faits. Classe A :

« Le Icitah est sous le coup d'une impulsion irrésistible

qui le porte à s'élancer de suite sur l'objet le plus proche

animé ou inanimé; puis, à ce moment, il pousse une

exclamation involontaire, qui est toujours obscène; ce

dernier phénomène se produisant toujours dans l'un et

l'autre sexes. »

« Classe C : « Cette classe comprend les individus

qui, sans y être sollicités, imitent les mots, sons ou gestes

de ceux qui les entourent, tout en paraissant jouir d'un

état mental parfaitement régulier dans l'intervalle de

ces accès. Cette propension à l'imitation est souvent

combinée avec les autres phénomènes caractéristiques

du latah, mais, dans beaucoup de cas, elle existe

seule. »

Il est inutile d'insister plus longtemps : l'analogie

nous paraît ici également évidente; elle ressort encore

1 V. Archives de Neurologie, loc. cit., juillet 1884. Jumping, Latah, My-

riacliit, p. 68-75.

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 191 I

mieux de la lecture du mémoire de M. O'Brien, dont

nous ne pouvons donner que des extraits.

Enfin, en troisième lieu, nous citerons l'observation

que M. Hammond ' (de New-York) a récemment pu-

bliée, d'après le récit que lui en avaient fait des olli-

ciers de la flotte américaine, récit que cet auteur fait

suivre de quelques réflexions. Nous l'aurions classée

immédiatement dans le même groupe que les observa-

tions de Beard et de O'Brien, si M. Hammoud lui-même

n'avait eu soin d'intituler son travail : « Nouvelle ma-

ladie du système nerveux ».

Bien que cette observation soit très incomplète et

qu'elle ait été recueillie par des personnes étrangères à la

médecine nous pouvons dire cependant en toute sécu-

rité qu'il s'agit là d'un cas tout à fait analogue à ceux

des précédents auteurs et aux nôtres. « Le malade (un

pilote) y est-il dit, semblait affecté d'une maladie men-

tale ou nerveuse qui l'obligeait à imiter tous les gestes

qui venaient frapper ses sens. Si le capitaine donnait

brusquement en sa présence un coup sur son côté, le

pilote répétait ce coup de la même manière et sur le

même côté : si un bruit se produisait inopinément ou

avec intention, le pilote semblait forcé, contre sa vo-

lonté, de l'imiter avec une grande exactitude. Les pas-

sagers, par malice, se mirent à imiter le grognement

du porc ou d'autres cris bizarres; d'autres battaient des

mains, sautaient, jetaient leurs chapeaux sur le pont,

et le pauvre pilotte imitait tous ces gestes avec précision

' NI. Hammond a publié sa note dans la illediciiia contemporanea (de

Naples', mars 1884, p. 126-130. Cette note a été suivie d'une analyse do

M. Vizzioli, dans le Giornale (li Neuropalologia (Naples, anno 2,fasc. 1,

p. 42-54), dans laquelle celui-ci a soutenu l'identité avec le jumping de

Beard.

192 CLINIQUE NERVEUSE.

autant de fois qu'on les répétait... 'C'était un homme

de moyenne taille, de bonne mine, plutôt intelligent,

si on jugeait par l'expression de son visage. Comme

nous quittions la rive pour nous embarquer sur le ba-

teau à vapeur, un de nos hommes poussa un cri et jeta

son béret à terre. Observant le pilote, nous le vîmes

également jeter son béret avec force sur une barrique

qui servait au ravitaillement de l'équipage.

« Nous fûmes témoins plus tard d'un incident qui nous

prouva jusqu'où s'étendait son irresponsabilité. Le capi-

taine du bateau tout en battant des mains buta acciden-

tellement et tomba pesamment sur le pont. Le pilote,

sans avoir été touché par le capitaine, se mit à battre

des mains et, voulant l'imiter jusqu'au bout, tomba

précisément delà même manière et de la même façon. »

En lisant celte observation sans idée préconçue, il

est évident qu'elle répond tout à fait aux cas de Beard;

qu'elle reproduit presqu'exactement un cas d'O'Brien

(Classe C) dans laquelle il s'agit également d'un matelot

et, par conséquent, que le jumping, le Lata7a et le

mgriaclail sont analogues à l'affection que nous avons

observée et décrite. Nous concluerons donc que cette

affection existe dans beaucoup de pays et que, n'ayant

pas encore été l'objet d'un travail d'ensemble, les cas

qui s'y rapportent, ainsi qu'il arrive toujours apparaî-

tront désormais plus nombreux à mesure qu'on aura

mieux appris à les connaître.

Non seulement elle existe dans l'Etal du Maine où

observait Beard, mais encore dans le nord du AIichiSan.

Ace propos, cet observateur nous dit qu'elle sévit dans

ces pays particulièrement sur les individus d'origine

française vivant ensemble dans les bois, où ils exercent

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. - 193

la profession de bûcheron. N'y aurait-il pas là un de

ces exemples d'hérédité nerveuse analogue, par suite

des mariages consanguins, à celui qui nous est offert

par la race juive ? M. O'Brien a observé en Malaisie,

mais cet état, fréquent chez les Malais, l'est éga-

lement chez les habitants des détroits; cependant il

n'est pas spécial à ces peuplades car l'auteur a pu en

observer plusieurs cas chez les Tamils( ? ), les Bengalais,

les Sikhs et chez un Nubien de pure race. Quant au

myriachit, cette maladie est commune en Sibérie, et,

« le capitaine d'état-major affirma qu'il avait vu beau-

coup de cas semblables du côté de Yaliutsk, durant les

hivers extrêmement froids qu'on y observe ». Nous

même, nous avons recueilli les observations de malades

habitant en France à de grandes distances les uns des

autres. Il est évident que cette affection doit exister

dans toute l'Europe, de même qu'elle existe en Asie,

*en Afrique et en Amérique. Nous pourrions presque

l'affirmer en disant avec Beard : « J'espère que l'on dai-

gnera m'accorder quelque croyance lorsqu'on saura

que j'ai fait toucher du doigt tous ces phénomènes à

des propriétaires du Maine, à des médecins de l'en-

droit qui, après avoir convenu de la réalité, m'assurè-

rent qu'ils n'avaient jamais soupçonné que si près d'eux

se passaient des faits aussi étonnants et auxquels ils n'a-

vaient jamais prêté la moindre attention ».

§ V.

Nous serons bref sur le pronostic ; il ressort de

l'exposé que nous avons fait de la maladie. L'individu : xcmvta, t. 1\. 13

191 CLINIQUE NERVEUSE.

qu'elle atteint n'est pas menacé dans son existence; il

mourra dans un âge avancé s'il ne contracte pas d'autres

affections; mais en revanche il a bien des chances pour

conserver celle-ci toute sa vie. Et il est incontestable

que c'est là un déplorable compagnon; lorsqu'elle sur-

vient chez des enfants, elle leur donne des habitudes

de paresse, et empêche leur développement intellectuel

en supprimant le travail ou en y apportant de graves

empêchements. Il est facile, en outre, de comprendre

qu'à mesure que les malades avancent en âge, leur

situation devient de plus en plus désagréable. Mais il y

a encore ici des questions de degré ; celui qui n'a que

des secousses musculaires limitées, qui répète un mot

sans y ajouter de consonnances ordurières, n'est plus

dans les mêmes conditions physiques et morales que

celui qui est en proie à la série des symptômes au grand

complet et qui, son esprit restant toujours sain, se

rend parfaitement compte de sa pénible situation. Il

est vrai qu'il faut aussi compter les accalmies qui

peuvent être assez fréquentes. Il s'établit une sorte de

statu quo, le malade vit avec sou affection, tout en

s'en trouvant incommodé, et son entourage veut bien

ne tenir aucun compte des grossièretés qu'il peut dire,

à l'instar de ce lieutenant de vaisseau qui faisait son

service tout en proférant des mots obscènes.

Quant au diagnostic, il y a lieu d'établir ici quelques

divisions d'après les diverses périodes par lesquelles

passe l'affection :

1" cas. L'individu n'est affecté que d'incoordination

motrice, de secousses musculaires ; la maladie se consti-

tuera probablement dans un laps de temps plus ou

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 195

moins long, mais en ce moment elle ne se traduit que

par ce seul symptôme. Avec quelle autre affection

pourrait-on la confondre ?

Il en est une qui s'impose de suite, et dont la diffé-

renciation présente parfois des difficultés assez consi-

dérables; nous voulons parler de la chorée, surtout

lorsque notre affection a débuté, ce qui est le cas le

plus fréquent chez un enfant. Cependant, un observa-

teur attentif ne s'y trompera pas longtemps; l'incoor-

dination motrice de la chorée ne ressemble pas aux

secousses musculaires qui agitent nos malades. Alors

que le choréique a des mouvements assez lents, que

les doigts se tordent, que la bouche se dévie, le tout

successivement, lentement et pendant une période assez

longue, nos malades ont des secousses brusques, des

décharges musculaires. Beard l'avait bien dit : « Ces

manifestations ont un caractère instantané. De plus,

après avoir sauté, crié, ou s'être livré à d'autres actes

de même nature, le sauteur revient aussitôt à l'état

normal. Son explosion, comme celle du revolver, pour

ainsi dire, est soudaine, et comme un revolver aussi,

le sauteur est tout prêt pour une nouvelle explosion

sous l'influence d'une excitation appropriée. Si nous

examinons un sauteur, cinq secondes après le jumping,

nous ne trouvons chez lui aucun signe, aucune indi-

cation de ce qu'il vient défaire, et rien ne nous annonce

ce qu'il est à même d'exécuter ». Ce ne sont certaine-

ment pas là les caractères de la chorée vraie, de la

chorée de SJden7aanz. De plus, si l'on dit à un choréi-

que de porter un verre à sa bouche, il ne le pourra

faire sans répandre le liquide par terre ; si par hasard

notre malade a une secousse, il jettera son verre au

196 CLINIQUE NERVEUSE.

loin, mais il faut que cette secousse apparaisse à ce

moment précis, et nous avons vu dans nos observa-

tions qu'une grande contention d'esprit ce qui est

le contraire pour le choréique, pouvait momenta-

nément suspendre ses convulsions. Et encore, ne

pourrait-on guère confondre les deux affections que

lorsque la chorée passe à l'état chronique, puisque

celle que nous avons décrite est chronique d'em-

blée. Jamais, en outre, elle ne présente ces-épiplié-

nomènes aigus . que l'on observe dans la chorée;

jamais les malades ne sont confinés au lit par la vio-

lence des mouvements. Enfin, jamais on ne voit appa-

raître ces paralysies qui surviennent assez souvent dans

la chorée \

Avant d'aller plus loin, nous voulons dire un mot

d'une variété d'incoordination limitée aux muscles de

la face, à marche chronique et qui, par opposition à la

névralgie de la cinquième paire, a reçu lenom de linon

douloureux de la face. Etant donné que, de même que

chez nos malades, pendant les périodes de début ou

d'accalmie, l'incoordination semble parfois assez bien

se limiter aux muscles de cette région, il nous semble

utile de chercher préciser les différences. Il est incon-

testable qu'il existe des convulsions limitées aux muscles

innervés par le facial, soit partielles, soit généralisées %

qu'on peut dans beaucoup de cas rattacher à leur vé-

ritable cause : névralgie faciale antérieure, trauma-

tisme, voire même hystérie; de celles-ci, nous ne dirons

rien. Mais il en est d'autres qui peuvent exister iudé-

1 V. Ollive. Des paralysies chez les choréiques. Thèse, Paris, 1884, p. 37.

2 Consulter le mémoire de François. Essai sur les convulsions idiopa-

tiques de la face. Bruxelles, 180.

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 197 Ï

pendamment d'une cause connue, et même coexister

chez différents membres d'une même famille; c'est

alors que les difficultés peuvent devenir considérables.

Toutefois, si l'on veut admettre le tic non douloureux

de la face, comme une entité morbide définie, il n'est

pas moins vrai que sa limitation exacte aux muscles

innervés par le facial et sa localisation constante per-

mettront d'éviter l'erreur, car, dans l'affection que

nous avons décrite, les secousses musculaires, si elles

se cantonnent parfois dans le domaine de ce nerf, ne

tardent pas, tout au moins pour un certain temps, à

se généraliser. Enfin, il ne nous répugnerait pas d'ad-

mettre que, dans certains cas, ces tics non douloureux

de la face constituent peut-être une première étape

dans l'évolution de notre maladie, et que cette étape

peut ne pas être franchie, ainsi que nous le voyons

dans l'observation VIII, qui a trait à une jeune fille

dont le père avait un tic non douloureux de la face, et

qui elle-même présentait les symptômes de notre affec-

tion au grand complet.

2e cas. A l'incoordination motrice viennent se joindre

des cris inarticulés .

A cette seconde période, le diagnostic devient déjà

sensiblement plus facile, quoique nous ne possédions

pas encore de véritable symptôme pathognomonique.

A l'occasion d'une secousse musculaire, au moment de

l'acmé d'une convulsion, le malade pousse un cri inar-

ticulé ; le diagnostic, dans ce cas, est-il éclairé par ce

nouveau symptôme ?

Nous nous retrouvons ici en présence de la chorée ;

dans celle-ci, les divers muscles phonateurs ou res-

198 CLINIQUE NERVEUSE.

pirateurs peuvent être affectés , et produire un son

glottique particulier. Mais, de même qu'il peut exister,

dans la chorée de Sydenham, des contractions des

muscles de la face ou des membres, indépendantes

les unes des autres, de même ces convulsions de la

chorée dite diaphragmatique , peuvent exister seules.

Dans notre affection, il ne faut pas perdre cela de vue

que, chaque fois que l'émission d'un son se produit,

celle-ci coïncide toujours avec une convulsion muscu-

laire. Le malade saute, il pousse un cri; tout rentre

dans l'ordre. Il n'en est pas de même dans la chorée,

et ne tenons-nous encore pas ici compte d'une foule

de conditions contingentes qui ne permettront jamais

au diagnostic de s'égarer, s'il était possible qu'il s'é-

garât.

Nous ne dirons rien du cri initial de l'attaque

d'épilepsie ou d'hystérie; il y a là un tableau consécu-

tif si frappant, qu'y penser c'est le différencier. Il n'en

est toutefois pas de même de certains cris, de ces aboie-

ments qui surviennent en dehors des attaques chez les

hystériques, en s'accompagnant même d'incoordination

motrice. Mais, chez ces malades, il existe toujours, ou

des crises convulsives antérieures, ou des troubles de

la sensibilité, ou un rétrécissement du champ visuel,

tous phénomènes que nous n'avons jamais notés chez

nos malades. Quant aux épidémies d'aboyeurs qui ont

surtout régné au Moyen Age, outre qu'il est bien rare-

ment donné maintenant d'en constater des exemples,

même isolés, elles se caractérisaient suffisamment par

des troubles mentaux, et des actes insolites, des accès

convulsifs qui primaient de beaucoup les phénomènes

ayant trait avec la phonation.

DE L'INCOORDINATION MOTRICE. 199

3« cas. A l'incoordination motrice, aux cris inarticulés,

se joint l'émission de mots articulés avec écholalie et

coprolalie.

A partir de cette période, le diagnostic s'établit pour

ainsi dire de lui-même. A l'occasion d'une secousse, le

malade prononce un mot; celui-ci peut n'être que la

répétition d'un mot qu'il vient d'entendre; autrement,

il a un caractère obscène. Il n'existe pas, croyons-nous,

d'affection présentant cet ensemble symptornatique si

spécial. Nous savons bien que, pendant la phase som-

nambulique de l'hypnotisme, le sujet peut être échola-

lique, mais quelle différence d'état ! et même, si cette

écholalie persiste par suggestion après le réveil ouest

l'incoordination motrice ?

Certains aphasiques peuvent prononcer et à satiété

des mots grossiers et toujours les mêmes. Trousseau

cite le cas d'une dame qui offrait un fauteuil à ses

invités en leur disant : « Cochon, animal, fichue

bête ». Mais, ajoute-t-il, bien que les actes de cette

dame parussent d'ailleurs fort sensés, elle ne sem-

blait pas s'impatienter ni comprendre le sens des

injures qu'elle proférait ». Enfin, ces mots formaient

tout son vocabulaire. Il n'est pas besoin, croyons-

nous, d'insister davantage : les aphasiques eussent-ils

même de l'hémichorée ou de l'athétose ?

Le traitement de cette singulière affection, ou tout

au moins son traitement radical est encore à instituer.

On peut, en effet, en lisantnos observations, remarquer

combien de procédés curatifs ont été infructueusement

tentés; tous les sédatifs du système nerveux ont échoué.

Une seule méthode a paru amender les symptômes et

200 CLINIQUE NERVEUSE.

amener ces périodes de rémission si favorables : l'isole-

ment, combiné avec les reconstituants de toutes

sortes, préparations de fer, hydrothérapie . Les malades

ont également paru se trouver bien de l'emploi pro-

longé de l'électricité statique combinée avec l'hydrothé-

rapie et l'isolement, mais ce ne sont là que des adju-

vants ; peut-être peuvent-ils retarder l'évolution de

la maladie, surtout lorsque les malades sont traités de

bonne heure. Toutefois, nous ne saurions conclure à

ce sujet ; et nous craignons bien que la prédiction de

Beard : « Une fois sauteur, toujours sauteur », ne

reçoive ultérieurement de nouvelles confirmations.

Quant à la nature intime de l'affection, que dire en

l'absence de toute donnée anatomo-palhologique ? On

pourrait, en s'aidant des ressources delà psychologie,

essayer d'interpréter quelques symptômes, nous préfé-

rons, pour notre part, renvoyer ceux qui voudraient

tenter cette interprétation au livre si intéressant de

M. Ribot, sur les maladies de la voloiité

1 Th. Ribot. Les maladies de la volonté. Paris, 1883. Voir plus par-

ticulièrement l'Introduction et le chapitre Il.

TI ;1.<1P1'UTIQUE

DE L'EMPLOI DU CURARE DANS LE TRAITEMENT

DE L'ÉPILEPSIE1;

Par BOURNEVILLE et P. BRICON.

II. ADMINISTRATION ET DOSES.

La plus grande incertitude régnant sur la nature et la pro-

venance du curare, il est de toute nécessité d'essayer celui que

l'on se propose d'administrer. Il y a donc à rechercher : 1° si la

substance est réellement du curare; 2° quelle est l'activité de

ce curare '. Les échantillons de curare ne sont jamais parfai-

tement semblables ; les plus actifs ne donnent la mort à un

lapin ordinaire (de 4 à 5 livres) qu'à la dose de 4 milligr. ;

chez quelques-uns il faudrait donner 2, 3 et même centigr.

pour arriver au même résultat. 5 milligr. d'un curare

donné étant la dose limite pour un lapin de 2 kilogr. 500, un

individu de 50 livres aurait pour dose limiteenviron 5 centigr.,

un de 50 kilogr. le double et de 75 kilogr., 15 centigr ? On

obtient expérimentalement la dose limite en injectant sur un

lapin des doses progressives de curare, jusqu'à ce qu'il meure;

l'avant-dernière dose injectée sera la dose limite.

Le curare que nous avons employé pour notre solution de

8 p. 100 ayant amené la mort d'un lapin de 3 kilogr. à la

dose de 4 milligr., la dose limite était donc pour cet

animal de 23 milligr., soit de 36 centigr. pour un adulte

de 60 kilogr.

1 Voir page 43.

2 Voir A ce sujet l'excellente thèse de M. Jousset de Bellesme : De la

méthode hypodermique ; de la pratique des injections sous-cutanées .

Pans, 1865.

3 Jousset de Bellcsme, loc. cil., p. 72.

202 THÉRAPEUTIQUE.

La solution injectée par nous à Bicètre était ainsi for-

mulée :

DU CURARE DANS L'HPILEPSIE. 203

dose limite fournie par l'expérimentation. Sur ce point, nous

n'avons pas d'autre renseignement que celui qui nous est

fourni par M. Rosenthal. « Dans une de mes observations',

dit-il, après une injection de 0.01, il y eut des symptômes

d'intoxication consistant en nausées, vertiges, rougeur de la

face, battements doulouroux des tempes, abattement général,

accélération du pouls et soif vive ; par l'analyse chimique des

urines, on y trouva du sucre. Ces accidents disparurent par

le repos et un traitement simple. »

IV. EXPOSE DES FAITS.

Nous présenterons d'abord trois observations qui nous ont

paru intéressantes au divers titres, puis nous donnerons un ré-

sumé des observations des dix-huit autres malades soumis au

traitement par les injections hypodermiques de curare.

Observation XV. Grand'père paternel alcoolique et cancéreux.

G)'<M ! d'pc)'6 maternel alcoolique. Mère migraineuse. Deux

soeurs mortes de méningite.

Vertiges ci six ans. Accès deux mois plus tard. Retard de

la parole, de la marche, de la propreté. Teigne. Chute du

rectum. Traitement par le bromure de potassium (insuccès),

puis par l'hydrothérapie (insuccès); retour partiel de l'intelligence.

Chute, plaie frontale. Augmentation des accès. Description

d'unaccès. Déchéance intellectuelle (méningo-cncéphalite). Trai-

tement par les injections hypodermiques de curare. Insuccès.

Mul... (AlberL), né le f ? avril 1873, est entré à Bic3trc le 19 avril

1sus(1 (service de At. BouwrwLLH.).

Renseignements fournis par sa mère (28 avril 1881). P'c, qua-

rante-deux ans, bien portant, élteronnier-sellier, brun, assez in-

tetnpent, ne fait pas d'excès de boisson habituels; n'a jamais eu

de migraines, ni d'affections de la peau, etc.; marié depuis qua-

torze ans, « c'est un bon mari ». [Père, éperonnier, mort en )8' ! 2,

à t'age de soixante-deux ans. d'un cancer du pylore, faisaitquelque

excès de boisson. Mûre, morte en 1Spl, écrasée par une voiture;

n'a jamais eu d'attaques de nerfs. Pas d'aliénés, ni de paralytiques,

ni d'apoplectiques, m d'épileptiques; pas de difformes, ni de sui-

cides ou de criminels dans la famille.]

Mère, trente-cinq ans, journalière, femme de ménage, après

' Rosehtltal. - Loc. cit. (11'ieran. nzed, Presse, n" 6, 1867.)

304 THÉRAPEUTIQUE.

avoir été marchande des quatre saisons à Montargis; bien por-

tante, assez intelligente; est sujette à des migraines une fois ou

deux par mois, sans coïncidence avec les règles (céphalalgie fron-

tale, vomissements, etc.); elle n'a jamais eu de maladies de peau

ni fait de maladies graves. [Père, jardinier, faisait quelques excès

de boisson, n'a eu ni migraines, ni maladies nerveuses ; mort à la

suite d'un coup de pied dans le ventre; il avait été opéré quelques

années auparavant d'une hernie étranglée. Mère, bien portante

sobre, ni migraineuse, ni nerveuse. Deux frères, l'un mort

jeune, on ne sait de quoi ; l'autre, en bonne santé, a deux enfants

ceux-ci, n'ont jamais eu de convulsions. Cinq scetzns, dont

deux mortes jeunes de cause inconnue; les autres sont bien por-

tantes ; une a eu un enfant qui n'a pas eu de convulsions. Pas

d'aliénés, etc.] Pas de consanguinité.

Huit enfants : 1° garçon, quinze ans, bien portant, intelligent,

2° garçon, mort à dix-sept mois d'une méningite; 31 garçon, onze

ans, intelligent, bien portant : 4° fille, dix ans, intelligente, bien

portante; H" notre malade; 6° fille, six ans et demi, bien portante,

va à l'école; 7° fille, morte à dix-huit mois d'une méningite après

trois mois de maladie; 8° garçon, vingt-trois mois, santé excel-

lente. Ils ont tous été élevés au sein par leur mère; aucun n'a eu

de convulsions.

Notre malade. Grossesse moins bonne que les autres. La

mère venait à peine de sevrer quand elle est devenue enceinte; au

troisième ou quatrième mois, alors qu'elle doutait encore de sa

grossesse, elle a eu une grande peur occasionnée par un vent vio-

lent qui a failli l'enlever. Sous le coup de cette peur, elle sentit

remuer l'enfant pour la première fois; à partir de ce moment,

durant toute la grossesse, elle fut très impressionnable : si l'on

frappait à sa porte, « elle deveiiaitverte », etse cachait. En dehors

de cette impressionnabilité contrelaquelle elle luttait, la grossesse

fut bonne. Accouchement, à terme, naturel. 1.'etifiint, élevé au

sein par qa mère jusqu'à un an (pas de convulsions), a marché

à vingt mois (les autres enfants ont marché au plus tard à qua-

torze ou quinze mois); il a parlé à quatre ans mais mal (les autres

enfants ont parlé vers dix-huit mois, et à deux ans, ils parlaient

bien). Il ne fut propre qu'à trois ans (ses frères el soeurs ont été

propres de bonne heure). Jusqu'à l'âge de quatre ans, il eut en

dehors des besoins de défécation, une chute du rectum qu'on lui

rentrait faci'ement. Dès qu'il est devenu propre et sut tout dès

qu'il a marché, la chute du rectum a diminué.

lllul... a été difficile à élever; pendant longtemps, il n'aimait

que le pain, les liaricots, les pommes de terre et le laitage sucré.

11 paraissait néanmoins intelligent, comprenait ce qu'on lui disait,

essayait de se rendre utile. Il est allé à l'école où il apprenait bien.

DU CURARE DANS LEI'ILEL'SIE. 205

Avantde s'endormir il s'amusait à lire, à compter, puis « il balan-

etzil sa tète en la roulant sur l'oreiller, il aurait toujours eu cette ha-

bitude, il ne s'endormait pas sans se bercer ». Pas d'autres tics,

pas d'habitudes de succion ; il mangeait et s'habillait seul, cirait

ses souliers, faisait les commissions, etc. Pendant un an, vers trois

ans, croûtes persistantes du cuir chevelu; en 1880, glandes cervi-

cales non abcédées, conjonctivite légère, pas d'otite, etc., pas de

fièvres éruptives. '

Jusqu'en décembre 4S9, llul... ne présenta aucune affection

nerveuse. A cette époque, on constata les accidents suivants : Il

avait une convulsion de la face, on croyait « qu'il riait sans

bruit », en trois ou quatre secondesc'étaitlini. (Vertiges). Unjour

en marchant tenu à la main par son père, celui-ci sentit que

l'enfant serrait plus fortement, et s'arrêtait; il vit sa face convul-

sée ; durée : deux à trois secondes. Vers la fin de janvier 1880,

Mut... eut des accès, d'abord assez légers et assez éloignés, il est

resté trois semaines sans en avoir; les vertiges persistaient et ve-

naient environ tous les deux jours par série de trois ou quatre;

on lui donna du bromure de potassium; à partir du 12 avril, les

accès se montrèrent tous les jours, leur maximum a été de sept

en vingt-quatre heures; ses parents se sont alors décidés à le pla-

cer. Mené à la préfecture, l'enfant a beaucoup pleuré; il a même

sangloté quand il s'est vu à l'infirmerie du dépôt, où il n'est

d'ailleurs resté que quelques heures.

Accès. Aura; à l'origine, il disait : « Voilà que cela me prend, »

il accusait une douleur dans le ventre et à la tête dont il ne s'é-

tait jamais plaint auparavant. Il criait en tombant et ne se bles-

sait jamais, il n'urinait pas sous lui et il n'écumait pas. On ne sait

s'il se mordait, mais un assure qu'il n'avait pas à la maison la lèvre

supérieure aussi grosse, elle était régulière, ce n'est que depuis les

accès qu'elle a grossi. Les convulsions prédomineraient à droite;

après les crises, on a remarqué qu'il se tenait moins bien sur la

jambe droite et qu'il se servait moins bien du bras droit. Depuis

le début des accès, il mange moins; l'an dernier, il était presque

vorace. On ne sait à quoi attribuer sa maladie; pas de chutes;

pas de vers, pas d'onanisme, pas de vision colorée; on ignore s'il

a eu peur. Il n'aurait plus de vertiges. Les accès sont diurnes et

nocturnes.

L'enfant est très caressant, très affectueux pour ses parents, ses

frères et ses soeurs dont il n'était pas jaloux. 1,'iii tell igeilec a

beaucoup diminué depuis quatre mois et même depuis une

quinzaine de jours; il a reconnu ses père et mère, mais ne leur

a pas parlé (avi il 1881).

Etal actuel (21 avril 1880). Tète : crâne petit, régulier, la partie

postérieure est notablement plus développée; méplat à la partie

206 THÉRAPEUTIQUE.

supérieure de l'occipital; sillon transversal au niveau de la fon-

tanelle antérieure.

DU CURARE DANS LÉI'1LHPS1G. 207

La)'Mp ! M<<o) ! ,lac< ? 'ctf(to ? latct0riCprésententaucune

anomalie.

Sensibilité générale et spéciale, normale. - Le phénomène du

tendon est assez marqué des deux côtés, mais plus à gauche.

L'intelligence est en partie conservée ; l'enfant connaît la date

du jour, le nom du mois, son â;ze, etc., il ne se rappelle pas la

date de son entrée '. Le sommeil est lion. Le dynamomètre donne

à gauche 38, à droite, 40.

Description d'un accès. Pas d'aura. Petits cris initiaux. lié-

riode ionique : face à droite, yeux tournés en haut et à droite; pau-

pières ouvertes ou demi-closes, pupilles très dilatées, cou rigide

dans l'extension, bras droit dans l'extension, main fermée pouce

en dedans, bras gauche en denii-ilexion, doigts écartés, le pouce

tantôt dans l'extension, tantôttléchi dans la paume de la main,

les autres doigts fléchis. Membres inférieurs dans l'extension in-

complète ; pied gauche en 2urets équin, plus accusé qu'à droite,

bien que ce soit à droite que la rigidité prédomine. Période téta-

niforme : la face devient de plus en plus rouge; convulsions téta-

nitbrmes de la face à droite, puis dans les quatre membres, avec

légère prédominance adroite. Période clonique : peu accentuée;

quelques secousses dans les membres surtoutdans la jambe droite;

pâleurde la face très prononcée. Pasde stertor, pasd'écume (ou

parfois légère écume). L'enfant revient de suite à lui, sourit; mic-

tion involontaire inconstante. Durée totale : une minute.

Dans d'autres accès; pas de cri ou d'autres fois cri, un peu sourd

et prolongé, chute en arrière. Quelquefois en revenant à lui, il

se frotte la figure de la main gauche et se réveille peu à peu

(Xà6 6 minutes). Parfois, il pleure après ses accès.

4880. 2G avril. L'enfant a eu dans la nuit du 24 au 25, 13 accès;

dans la journée d'hier 10 accès; dans la nuit 19 accès et 11 accès

ce matin jusqu'à 10 heures et demie. - Soir : T. B. (-25 avril)

3U°. -G avril, matin : 39°,4.- Soir : T. 37',8; P. 124; R. 36.

Pommettes colorées, assoupissement ; pupilles normales.

15 grammes d'huile de ricin avec 1 goutte d'huile de croton.

Lavement, sulfate de quinine, 50 centigr. Pas d'accès de midi

à 8 heures du soir.

27 avril. 26 accès dans la nuit ; ce matin de 7 à 8 heures 10

de 8 heures à 10 heures et demie, pas d'accès. T. R. matin, 39°.

L'enfant est éveillé, P. 96. Pas de vomissements, langue humide,

selles abondantes; il a gâté.

30 avril. Pas d'accès depuis le 25. Julep avec 2 grammes de

bromure de )ot(fM'tMM. 5 mai : 3 grammes. 10 mai : 4 grammes.

1 Depuis cette époque l'intelligence a considérablement diminué (Voir

jauger 185).

208 THÉRAPEUTIQUE.

15 mai b grammes. 20 mai, 6 grammes.- 1 Il mai : Chute

du rectum facilement réductible.

6 mtti. - f.ecture : sait ses lettres; écriture : fait des bâtons;

calcul : connaît les chiffres. - Parait avoir peu de mémoire ;

parle difficilement. Gymnastique : ne fait que les mouvements.

Traitement : Bromure de potassium avec sirop de diacode.

24 juin. Travaille très peu; accès fréquents; somnolence; de

moins en moins intelligent. Purgatif; suspension du bromure de

potassium les 26 et 27. A partir du 28 juin, % grammes de bro-

mure de potassium; du 1er au 5 juillet, 3 grammes avec augmen-

tation progressive tous les 5 jours d'un gramme jusqu'à 7 grammes.

3 septembre. Revacciné sans résultat le 26 août. '

4 septembre. Suspension du bromure de potassium les 5 et fi;

le 5 septembre : purgatif; le 7, bromure de potassium, 2 grammes ;

le 10, 3 grammes; augmentation progressive d'un gramme tous

les cinq jours, 2 bains salés par semaine.

25 septembre. - Progrès très sérieux en lecture seulement.

27 octobre. Emmené par sa mère en congé.

i iiovei2b ? -e. Ramené par sa mère, il a eu plusieurs accès chez

lui (2 le j,r, 5 le 2, 4 le 3, 4 le 4) ; sa mère prétend « que, quand

la lèvre supérieure devient grosse, cela indique l'approche d'un

accès ».

5 novcmLre. - Purgatif; 2 bains salés par semaine.

6 novembre. Bromure de potassium : 3 grammes le 16

novembre : 3 grammes; le 26 novembre, 4 grammes.

18 décembre. Purgatif; suspension du bromure de potassium,

le 19 et le 20.

2) décembre. Bromure de potassium : 2 grammes, etc.

1881. Il 1 juin. - 1'raitement par l'7tytlrotltérapie et le bromure

de potassium (4 grammes), jusqu'au 30 juin. Suspendre pendant

8 jours -et recommencer par deux grammes en augmentant d'un

gramme tous les )0 jours jusqu'à 10 grammes.

4 juillet. A fait assez de progrès à l'école; lit demi-couram-

ment ; est plus intelligent. Gymnastique : peu de progrès.

2 décembre. Quelques petites adénites cervicales.

't3 décembre. L'enfant est obéissant, très joueur; n'est pas

méchant; fait quelques progrès à l'école et à la gymnastique.

Suppression des douches; il prend toujours du bromure de potas-

sium ; aller jusqu'à 6 grammes.

1882. 13 janvier. Le bromure de potassium a été suspendu

le 2 janvier ; du 14 au 21 janvier : 2 grammes; augmenter d'un

gramme toutes les semaines, jusqu'à 6 grammes.

17 janvier. 15 accès de jour ; 23 de nuit. T. R. soir : 39 ?

18 janvier. T. R. matin : 39°,6.

DU CURARE DANS L ÉPILEPSIE. 200

25 féurier. - Revacciné sans succès.

1 mai. Suppression du bromure de potassium.

16 mai. Hydrothérapie.

26 octobre. L'enfant a, depuis le commencement du mois

d'août, une plaque de teigne sur la région pariétale gauche; épila-

tion. lotion de sublimé.

3 décembre. Suppression de l'hydrothérapie. Progrès peu

sensibles à l'école, etc.; mémoire faible. Malgré les douches, les

accès ont augmenté ; la nutrition s'est bien maintenue; il parait

avoir profité physiquement, les joues sont pleines et fraîches.

1883. 30 mars. Traitement par les injections hypodermiques de

curare.

12 mai. Depuis la veille au matin, 9 accès, dont deux pen-

dant la visite. Il pleure abondamment quand on le voit.

i"j'UH ? Quelques progrès à l'école; il serait taquin envers ses

camarades.

8 juin. Suppression du traitement par les injections lvypoder-

miques de curare. Hydrothérapie.

3 septembre. - Il y a siz ,jours, llful ? s'est fait en tombant au-

dessus de la queue du sourcil droit une plaie linéaire de i centim.

et demi. Depuis cette chute, accès nombreux tous les jours.

t ? octo6re ? Depuis une douzaine de jours, accès répétés (3 à 4 par

jour); le 6 octobre, des sangsues posées derrière chaque oreille

ont produit la suspension des accès pendant deux jours. Bromure

de potassium 3 grammes. Voici quelques températures durant cette

période : le 3 octobre au soir, T. li. 38-,6; le 6, T. Il. 33°.

Soir : 38°,9; -le 7, T. ){. 37°,9.-Soir : 38°,3;-le S,T. R. 3-io,6.

22 octobre. Les accès sont beaucoup moins fréquents et ne

sont plus quotidiens. Suppression du bromure de potassium.

30 novembre. S ! tppt'css ! 'OH du traitement hydrothérapique.

13 décembre. L'enfant ne fait plus de progrès à l'école; il est

devenu paresseux, taquin, malpropre.

4884. 1° ccvril r)'c[<'(t'nM) : t/t ! /f'o</t'(tptue.

12 juin. Les notes de l'école constatent que .Mul.... décline

chaque jour. Il a des accès fréquents (en mars, 197).

14 juitz. - ll entre à l'infirmerie; il fléchit sur les jambes, a

6 accès par jour et autant la nuit.

19 juin. Deux verres d'eau deSedlitz.

28 juin. -Amélioration notable; il n'y a plus que 2 accès dans

les 24 heures. Accès du mois : 222.

in juillet. Aggravation nouvelle; accès très répétés, pas d'ex-

citation maniaque, hébétude, irascibilité, affaiblissemeritphysique.

M... a de la peine a marcher à la promenade, depuis trois mois

surtout; pupilles égales, un peu dilatées. Léger frémissement de la

pointe de la langue. 11 bave beaucoup; autrefois il ne bavait que

Archives, t. IX. 14

1210 THÉRAPEUTIQUE.

dans ses accès. La parole jadis libre est traînante, pénible. Il sait

encore son âge et la date. Conjonctivite palpébrale double.

12 décembre. A la suite d'accès nombreux, l'enfant présente

une hémiplégie droite incomplète; l'épaule est tombante, il boîte;

il peut toutefois mettre le bras sur la tête. Le bassin est projeté

en arrière; il fauche de la jambe droite; cependant il peut avec

effort soulever le pied; mais, en l'absence d'effort, la pointe du

pied traîne, et c'est sur elle surtout qu'il appuie. Le rachis présente

à la région dorsale une grande concavité droite. La sensibilité

est conservée. Le malade est hébété, répond très peu et d'une

façon contradictoire. Il fait automatiquement tout ce qui lui est

commandé. Pas de céphalalgie. Le dynamomètre donne à droite :

5 et à gauche 12 et demi. T)'<M'<<'me) ! < : bromure de potassium.

988a. 1 4 janvier. Mu)... n'a pas eu d'accès depuis huit jours.

La motricité est revenue dans le côté droit. La jambe seule reste

traînante dans la marche.

17 janvier. Nouvelle aggravation. Les forces physiques dé-

croissent, M... a de la peine à tenir sa plume, à marcher lors des

promenades. La déchéance intellectuelle s'accentue, il ne peut

plus apprendre de fables comme autrefois, il sait toutefois les dé-

tails de la date; il rit sans motif. Dynamomètre à droite : 25;

à gauche : 22. Traitement : 7 grammes de bromure de potas-

sium jusqu'à la fin du mois.

DU CURARE DANS épilepsie. 211

gt3 THÉRAPEUTIQUE.

prédominent sur l'hémisphère gauche du cerveau, nous fon-

dant suri' 'hémiplégie droite transitoire notée à la fin de l'année

188'N.

Observation XVI. Père alcoolique mort de paralysie générale.

Grand*père paternel mystique, violent. Grand-oncle paternel

suicidé (délire de persécution) ; une flle de ce dernier hystérique.

Autre grand-oncle mort aliéné. Cousins aliénés.

Hpilepsie idiopathique. Accès de colère de la première en-

fance ci 1881. - Fièvre cérébrale et convulsions ci 7 ans (1876).

Premier accès en août 1881. Description (les accès. -llctllucitzn-

tions et accès de manie avant et après les accès. Séries; états

de mal. - Affaiblissement intellectuel. Pliimosis. Onanisme;

rapports sexuels. Puberté.

Crest... (Adrien), né le 15 mai 1869, est entré à Bicêtre le

20 mars 1882 (service de M. Bonncmtr.E).

Re) ! i ! C)CHC)) : e) ! <s/'OM)' ? ? spa ? 'SftMM'e()3 3 avril 1882). Pe>e,mort en

1512, à l'âge de trente-deux ans, à l'asile de Montdevergues, où il

est resté quinze mois : il disaitavoir.des millions, de grandes quan-

tités de marchandises et avoir trouvé le secret de ne pas mourait.

Il était fabricant de toiles dans le département de Vaucluse et

sous l'influence de sa maladie il s'est livré à des spéculations

malheureuses.- Marié à vingt-huit ans, déjà et depuis longtemps

il avait l'habitude de boire; parfois il buvait jusqu'à un litre d'ab-

sinthe ; avec un de ses amis il pariait à qui en boirait le plus. Il

buvait encore du Champagne et de l'eau-de-vie; enfin il fumait

beaucoup. Il était cholérique et sujet des migraines (vomissements

et saignements de nez) ; il avait « comme une espèce de dartre fa-

rineuseo erratique. Aussitôt après le mariage sa femme s'aperçut

qu'il n'était pas comme tout le monde, qu'il avait des idées ex-

traordinaires ; quatre à cinq jours plus tard, on est venu faire

une saisie, il ne s'en doutait pas : son intelligence, qui avait été

assez développée, était donc déjà atteinte. [Père, mort à soixante-

dix-huit ails ; il était « halluciné, mystique », très violent; il bat-

tait sa femme et ses filles. » Un de ses frères (grand-oncle du

malade) s'est suicidé en se jetant dans un puits; il était atteint du

délire de la persécution (ses enfants sont morts les uns de la poi-

trine, une avait des attaques de nerfs, un autre, qu'on appelait le

lutteur, ou le Taureau de Provence, à cause de sa force, a été

condamné pour vol et tentative d'incendie; reconnu aliéné, il a

été séquestré dans l'asile de Cadiilac, puis transféré à l'asile de

Mondevergnes); un autre frère, l'abbé Gabriel Cr..., est devenu

fou, a été destitué et enfermé dans un asile. Le 0'' Campagne

aurait dit à la mère du malade que, sur les livres de l'asile, il y

avait beaucoup de Cr... 7e)'c, morte toute jeune des suites de

DU CURARE DANS L'&PILEPSII ? 2)3

mauvais traitements, on ne croit pas qu'elle fut nerveuse, elle

était douce, « c'était une excellente créature ». Un oncle paternel

de notre malade, François Cres ? est mort aliéné à Montdevergnes

(il a deux fils chétifs, et une fille qui n'auraient pas d'affections

nerveuses); deux tantes maternelles s'adonnent à des pratiques

religieuses exagérées; elles n'ont pas d'enfants, on ne peut donner

d'autres détails sur elles. Il y aurait eu plusieurs paralytiques dans

la famille. Pas d'autres suicides. Une Cr..., à un degré de parenté

que l'on ne peut préciser, « avait la figure tournée de coté»; le

père de celle-ci s'était remarié à soixante ans « avec sa servante

qui faisait la noce » ; les deux fils de ce même Cres.. ont été

arrêtés comme incendiaires et enfermés plusieurs fois dans des

asiles 1.]

Mère, trente ans, châtaine, de physionomie agréable, modiste

chez elle, « parce que mon mari m'a laissé dans la peine »; elle

est bien portante, n'est sujette ni aux migraines ni aux attaques

nerveuses, elle est peu impressionnable, a eu beaucoup d'ennuis

avec son mari. Jamais de maladie de peau.[Pe;'e, mort de

vieillesse, à soixante-dix-huit ans, « s'était remarié et ne s'est

jamais occupé de moi; il m'avait placée au couvent où mon mari

m'a prise parce que j'étais orpheline ». Mère, morte en cou-

ches « quand je suis venue au monde, dit-on ». Ni frère, ni soeur.

mon père était Suisse, ma mère Espagnole et je ne puis pas

donner d'autres renseignements sur ma famille.] - Pas de con-

sanguinité.

Six enfants dont quatre du père du malade : 10 notre malade ;

2° garçon, douze ans, né dix mois après le premier, est délicat,

a eu des bronchites; deux fois on l'a renvoyé de pension parce

qu'il avait des convulsions, il est moins intelligent que notre ma-

lade ; 3° garçon, mort d'une fièvre cérébrale avec convulsions con-

sécutives à une chute ; - il avait une taie ( ? ) sur l'oeil à la nais-

sauce, de même que l'enfant précédent; après la naissance de

ce troisième enfant, le père ayant déjà été enfermé à l'asile de

Montdevergnes, on avait essayé de faire vivre la mère du ma-

lade en dehors de son mari ; mais un jour, il est parvenu à avoir

de nouveaux rapports dans lesquels a été procréée : 4° une fille,

âgée de 9 ans; elle est intelligente, gentille, très nerveuse; a eu

des convulsions dans le cours d'une fièvre typhoïde à sept ans.

D'un amant, deux enfants : 5" garçon, sept ans, bien portant,

pas de convulsions; 6° fille, six mois, est bien venante, pas de

convulsions.

'Afin de vérifier l'exactitude de tous ces renseignements, nous avons

écrit à M. le Dr Campagne, médecin en chef de l'asile de Montdevergnes,

qui a eu l'obligeance de faire des recherches minutieuses sur les registres

de son asile; elles confirment, en somme, ce que nous a\ons rappoité.

214 f1. THÉRAPEUTIQUE.

Notre malade. - A la conception, le père de l'enfant était déjà

malade, et buvait beaucoup; c'est étant ivre que tous les enfants

ont été conçus ; c'est surtout dans cet état qu'il avait des rapports

sexuels. Grossesse accidentée par des chagrins, des ennuis de

toute sorte, occasionnés par son mari qui la battait souvent, lui

enfonçait les ongles dans la peau durant ses moments de rage.

Elle resta alitée pendant huit jours à la suite d'un traumatisme;

son mari la serra dans une porte; pas d'alcoolisme. -Accouche-

ment à terme, naturel, sans chloroforme ; la tête est lestée assez

longtemps au passage. A la naissance, l'enfant était cyanose;

on l'a frictionné et ce neserait qu'avec peine qu'on aurait réussi à

le faire revenir. - Elevé au sein par une nourrice, il ne dormait

pas, avait des accès' de cris, était très méchant. Attribuant ces

accidents au lait de la nourrice, on la remplaça par une autre,

mais la situation resta la même. Cr .. a marché à deux ans; les

accès de cris s'étaient transformés en ucccs de colère dans lesquels

il devenait tout bleu se roulait à terre, injuriait sa mère, la bat-

tait, ces crises duraient une heure au plus. Il a parlé vers quinze

mois ; - presque toujours uriné au lit jusqu'à onze ans;it

allait à l'école du pays où il apprenait bien. Les accès de colère ont

continué jusqu'au mois d'août 1881. Il était alors placé à l'ouplie-

linat Saint- Vincent-de-Paul, où on payait pour lui 3.i fr. par

mois, il y eut plusieurs accès de colère. C'est là qu'il aurait eu

ses premiers accès; il en a eu chaque matin pendant trois jours

consécutifs; on l'a fait examiner à l'asile Saint-Jean-de-Dieu

(août 1881) et peu après on l'a rendu à sa mère (novembre 1881),

qui l'a gardé jusqu'à son placement à Bicêtre. Elle assure que de-

puis le début de ses accès, Cr... est devenu très peureux, taudis

qu'il ne l'était pas auparavant. Il dit sans cesse qu'il a peur d'une

grosse araignée toujours placée devant ses yeux.

Sa mère décrit ainsi les accès : Pas d'uuru, cris, hurlements, ri-

gidité du corps, constriction des mâchoires; agitation consécu-

tive ; ronflement, miction, écume, pas de défécation. Avant les

accès, tristesse, idées de suicide (il a essayé de se donner un coup

de couteau et la tempe gauche).-Après les accès, il a eu plusieurs

fois des troubles intellectuels; ainsi, un jour, il est allé ouvrir une

porte, a regardé, est revenu et a dit : « Ils se sont tous évadés».

Un autre jour, il est allé pieds nus chercher un pain de quatre

livres, sans qu'on le lui eut commandé; d'autres fois, il a commis

des actes de violence, il a battu sa mère, sa soeur; une fois il a

essayé de donner à celle-ci des coups avec une pincette rougie au

feu sur le reproche qu'on lui faisait : « On vient de me le dire là »

en montrant l'oreille. Après les crises, on note encore quelques

divagations, des pai oies incohérentes.

En dehors des accès décolère et d'épilepsie,Cres... est très doux

et tiès bon. {'intelligence a diminué depuis le mois d'août, et de

DU CURARE DANS L'ÉPILEPSIE. 215

plus le sommeil est agité par des cauchemars, des peurs et cela

surtout avant les accès. On croit qu'il se livre à l'onanisme.

Rougeole à 3 ans, fièvre cérébrale à 7 ans, attribuée à un coup

de soleil et durant laquelle il aurait eu des convulsions pendant

9 jours avec des intervalles; elles étaient générales, ne prédomi-

naient pas d'un côté du corps, et ne furent pas suivies de paralysie;

la maladie dura un mois ; elle eut pour conséquence de rendre

les accès de colère plus violents sans modifier leur fréquence. Cres...

se serait mis alors à travailler beaucoup, mais cette ardeur n'a

été que momentanée. Il est très vorace; parait haineux. Il avait

pris en grippe une femme de ménage de sa mère, la battait, disait

que, s'il avait vingt ans, il lui ferait tomber la tête. Pas d'autres

maladies que celles qui ont été notées.

État actuel (2 mai 1882). - Tête : crâne petit, ne paraissant pas

asymétrique ; pas de méplat à la partie supérieure de l'occipital,

bosses pariétales peu prononcées, ainsi que les apophyses mas-

toïdes ; rainure transversale au niveau de la fontanelle antérieure.

Cicatrice oblique sur le pariétal droit vers la partie médiane,

résultant, selon le malade, d'une chute pendant sa première en-

fance.

216 (; THÉRAPEUTIQUE.

mâchoire inférieure. 14 dents permanentes, bien rangées et non

cariées; mâchoire supérieure, 12 dents; la deuxième grosse mo-

laire n'est pas encore sortie, restontles deuxièmes molairesdelait

très ébranlées; articulation normale, forme des mâchoires nor-

male ; voûte palatine peu profonde, parait légèrement inégale,

..et semble plus élevée à droite qu'à gauche; voile du palais symé-

trique ; luette très longue, frôlant presque la partie postérieure

de la langue; piliers normaux; amygdales très volumineuses, sur-

tout la droite; muqueuse du pharynx assez rouge; langue large.

Gencives en bon état.

Organes génitaux : la verge est relativement longue; phimosis

congénital assez prononcé; aussi le gland se découvre-t-il avec

difficulté; adhérences préputiales; gland assez développé. Testi-

cules descendus, peu volumineux, le gauche surtout parait comme

atrophié '.

Peau et système piteux. La face est assez colorée, le reste du

corps est légèrement pigmenté. Deux petites cicatrices venant de

blessures faites en jouant sur la face dorsale de la main droite.

Au niveau du pli du coude, des deux côtés, deux petites plaques

rouges peu colorées, mais suintantes, donnant lieu à de la desqua-

mation, et étant le siège de démangeaisons assez vives; l'enfant

ne peut préciser la date de leur apparition. Les cheveux sont

blonds, assez abondants, les sourcils bruns assez fournis; les cils

bruns très longs. Cres... est imberbe ; aisselles, pénil et le reste de

la surface du corps glabres.. Il avoue se masturber : -« C'est mon

cousin, dans la ville où je suis né, qui m'a appris cela ». Son cou-

sin avait dix-huit ans.

Sensibilité générale et spéciale normale; pas d'exagération des

réflexes. Marche régulière, normale. Le dynamomètre donne, à

droite 42, à gauche 32; en janvier 1885, 79 à droite, 68 à gauche.

Le malade parait intelligent; il répond avec beaucoup de pré-

cisiou et de netteté à toutes les questions qui lui sont adressées.

Le caractère est doux et tranquille. C... ne se dispute jamais : se

lient bien à table. Le sommeil est généralement bon, mais il lui

arrive assez souvent d'avoir des heures entières d'insomnie dont il

ignore la cause; il rêve assez fréquemment sans avoir de cauche-

mars.

Description d'un accès. Pas d'aura. Sans cri ou à la suite

d'un petit gémissement, l'enfant se renverse lentement dans son

1 Examen des organes génitaux en juillet 1884 : poils peu abondants au

pénil; bourses pendantes; testicules normaux, gros; verge longue et

grosse; gland découvrable ; méat relativement peu large. - En jan-

vier 1885 : poils châtains assez abondants et assez longs au pénil ; \erge

longue et volumineuse; bourses pendantes; testicules de la grosseur

d'une noix. Masturbation moins fréquente.

DU CURARE DANS 1,'ÉPILEFSIK. 217 Î

lit; la face pâlit très peu, la tête s'incline à gauche, les yeux regar-

dent en haut et à fauche, les paupières sont ouvertes, le corps est

rigide. Au bout de quelques secondes, les pupilles se dilatent

et les globes des yeux commencent à rouler, les paupières restant

toujours ouvertes. Alors, secousses cloniques aussi prononcées

à droite qu'à gauche. Parfois, la période clonique manque. Au

bout d'une minute environ, la tête revient de gauche à droite,

l'enfant regarde avec étonnement autour de lui. On croit tout

terminé, mais bientôt il ferme les yeux, la respiration devient

stertoreuse. A ce moment, les pupilles sont extrêmement dilatées,

la langue est entre les dents, il y a de l'écume. Cet état dure en-

viron 4 minutes, puis le ttcrlor cesse. Pendant la dernière période

de l'accès, l'enfant est très congestionné et sue abondamment.

Hébétude consécutive.

1882. 5 i ? 2ai. - Légère amygdalite pultacée à droite.

Il ii2ai. L'enfant est à l'infirmerie depuis deux jouis en série

d'accès ; le 9 mai, il a eu un accès; dans la nuit du 9 au 10,

4 accès; le 10, 3 accès; dans la nuit du 10 au I 1, 28 accès; ce

matin, avant la tisite, il a ou 4 accès. La face est très rouge, les

conjonctives injectées, les pupilles modérément et également

dilatées ; mutisme absolu. L'enfant qui ordinairement parle et

comprend très bien, se met à rire à chaque question qu'on lui

pose, sans faire aucune réponse. T. It. 38°, 4. Soir : T. H. 38°, 6.

Hier 10 mai, il a été impossible de prendre la température à

cause de l'agitation de l'enfant : il a mordu et cherché à frapper

les personnes qui l'entouraient. Appétit à peu près nul depuis le

début de la série.

12 - T. R.3S ? Soir : 'f.1 ? 35 ? r.

13 mot. T. R. 381. - Soir : T. H. 38°.

I 4 znui. T. R. 380. Soir : T. Il. 38°.

15 mai. T. R. 31°, G.-Ilier l'enfant était agité, proférait des

menaces, injuriait, disait qu'on voulait le voler, cherchait à frap-

per les autres enfanta; la nuit a été calme. Ce matin, il prétend

voir des choses bizarres : un diable avec des ailes, des cornes, une

fourche, tel qu'on le voit sur les images, et aussi une araignée

énorme ; il a en outre une sensation de chute dans un précipice.

Pas d'hallucinations de l'ouïe; appétit bon.

U mai. - Les notes de l'école, de la. gymnastique, etc., cons-

tatent qu'il est intelligent, travailleur et progresse.

I" juin. Hier, à trois heures de l'après-midi, Cr... a été pris

d'un état de mal; à 8 heures, il avait eu 20 accès et 10 vertiges. A

8 heures du soir, il était dans un état comateux. T. A. 39°, 8. Ce

matin , il est- assez éveillé depuis quelques instants; mais à

5 heures, il était agité et avait le visage très rouge ; à 7 heures il

s'est mis à pleurer, puis s'est levé du lit, se figurant qu'on lui di-

218 THÉRAPEUTIQUE.

sait des sottises et a voulu frapper un de ses camarades. T. A. 38°

Les accidents se sont peu à peu dissipés.

8 juin. Brûlures légères qu'il s'est faites en renversants»

soupe sur sa poitrine. ? 0 juitz.-C... a eu 7 accès ce matin; hébétude; nouvel accès à

la suite. -

21 juin. --Deux autres accès hier; ce matin encore, les yeux

sont hagards; on a dû, faute de cellule, lui mettre la camisole à

cause de son agitation '. A la suite, il est calme et a replis sa

connaissance.

I I oclobre.- Cr... a eu 9 accès cette nuit; ce matin il estcou-

ché, regarde d'un air effaré, ne semble reconnaître personne, pas

même sa mère ; à toute question il répond : tné, 771d. Par mo-

ments il pleure sans motifs. T. Il. 401,2. - Soir : T. Il. 40°.

12 octobre. T. R. 38-,2. Soir : T. R. 38°.

13 octobre. T. R. 3-il,6. Soir : T. R. 3î,,6.

26 octobre. Revacciné sans résultat.

30 décembre . Progrès t l'école. Période d'agitation ma-

niaque à la suite d'accès.

1883. S janvier. Cr... est complètement remis de ses derniers

accidents.

9 février. Dans la nuit du 6 au 7, 17 accès. T. R. 38°,7.

Soir : T. R. 38°,4.

7 février. T. R. 38 ? >. Soir : T. R. 38o,2.

8 février. - T. R. 38°,4. Soir : T. R. 38°,2.

G février. T. R. 37°,8. Soir : T. R. 37° ,2.

10 féurrer. T. R. 38°. Soir : 3 ? ? , Dans un accès, C...

s'est mordu assez profondément le bord gauche de la langue; il

a été très agité.

,1'2 févriei,. - Amélioration, quoiqu'ayant encore conservé un

certain degré d'irritation. Purgatif, bain, sirop d'iodure de

fer.

3 mars. Début du traitement par les injections hypodermiques

de curare.

8 murs. - L'enfant déclare spontanément qu'il a maintenant

plus de peine à apprendre ses leçons qu'autrefois. Le regard n'est

pas encore dur, la physionomie est éveillée, la figure rose. - Cu-

rare et sirop d'iodure de fer.

20 murs. Série d'accès (20) T. R. 39°,2. Soir : T. R. 38°,S.

I 3 wril. - Début d'une série d'accès cette nuit (12 accès) ; ce

matin à la fin d'un accès la période de slertor étant passée, on le

trouve la face d'un rouge vermillon intense, couverte de sueur,

brûlante; il urine involontairement et abondamment sous lui;

' Les enfants agités sont laissés confondus dans un dortoir de 50 lits

servant d iulimerre, de réfectoire, du salle de réunion aux gâteux, etc.

DU CURARE DANS L'ÉPILEPSIE. 219

l'enfant n'est pas encore revenu à lui. Excitation maniaque consé-

cutive assez prononcée.

14 avril. - T.'enfant est plus calme. - 46 avril. Il est revenu

aujourd'hui complètement à son état normal. : .t9 tnui. - Daus la uuit, I accès; T. 13. 39 ? ? . - Soir : T.R.

301,4. Physionomie égarée : joues rouges ; pupilles dilatées, égale-

ment; excitation au moindre attouchement. Mutisme. Bain d'une

heure; sinapismes ; lotions vinaigrées; 2 lavements avec 50

de sulfate de quinine. juitz. Amélioration.

20 juin. Hydrothérapie. ? 8 jatitz. - Vouc eile série d'accès (14 dans la nuit, 2 avant la vi-

site); il ne répond d aucune question, se met à pleurer; usage

rouge, couvert de sueur.

26 iiiillet. Série d'accès (12, nuit du ? : i-` ? 6); 4 accès le 26.

T. R. 38°, n. Soir : T. R. 38°, S.

30 juillet. - Excitation maniaque. Bain d'une heure. : 31 ,luillet. - C... raconte qu'il a eu très peur cette nuit, ayant

vu assis sur une table une foule de petits bonshommes de 2.'i cen-

timètres qui lui faisaient des grimaces (hallucinations). Encore

un peu d'incohérence ce matin. Bain de trois quarts d heure.

Octobre. L'enfant est mis en apprentissage à l'atelier du tailleur.

19 tzouc7nLrc. - Dans la nuiL du 17 au 18, 17 accès; dans la

journée, 2 accès. Il s'est levé plusieurs fois inconsciemment, avait

les yeux hagards, ne savait ce qu'il faisait, ne parlait et ne répon-

dait pas. - Soir : T. It. 3S)°.

l9 nouetnbz·c. -C... est complètement revenu à lui et a repris

son état normal.'l'. li. 38°, ? . - Soir : 1'. 11. 3S°.

2·3 novembre. C... est un peu agité depuis hier; dit des bê-

tises, se sert de termes grossiers et orduriers, etc.; pas d'accès.

30 novembre. Cessation du traitement hydrothérapique.

4 décc2nbre.-Les notes de l'école sontassez bonnes, toutefois l'on

constate une diminution de la mémoire, et « depuis six mois, Cr...

est devenu acariâtre de doux qu'il était et emploie souvent des ex-

pressions ordurières qu'il n'auraitjamais prononcées auparavant.»

24 décembre. Les périodes d'excitation maniaque et les accès

de violence deviennent plus fréquents. La mémoire diminue. Il

apprend moins bien qu'autrefois (fables, calcul), il sait les détails

de la date du jour, de son entrée et de sa naissance. - Il raconte

qu'un de ses cousins plus âgé lui apprenait les jours de sortie de

hcée à se masturber; ils se masturbaient mutuellement; il avait

alors 9 ans. Il a continué depuis à se masturber ; il prétend ne

pouvoir se retenir. L'enfant raconte encore qu'il embrassait les

organes génitaux d'une petite fille de son âge (la fille d'un ma-

réchal ferrant); ceci lui serait armé une quarantaine de fois. Il

dit enfin qu'étant chez sa mère il aurait eu, pendant trois mois,

des rapports sexuels assez fréquents avec une domestique âgée

220 THÉRAPEUTIQUE.

de 50 ans ( ? ) qui couchait dans sa chambre; les accès ne seraient

survenus que 7 mois après la cessation des rapports. Pendant

plusieurs mois, le souvenir de cette domestique lui revenait, et il

ne pouvait alors s'empêcher de se masturber. Actuellement ces

souvenirs auraient disparu. A l'infirmerie, il aime à se rapprocher

des infirmières.

f88t. 8 janvier. Nouvelle série d'accès avec excitation ma-

niaque. Légère morsure de la langue. T. R. 39 ? Soir : 1'. R. 39°, 2.

9 janvier. T. R. 38o, 8. Soir : T. R. 38°, 8.

t0 jtt»viet ? T. R. 38°, 6.-Soir : T. R. 38°. L'enfant va mieux,

bien qu'il soit un peu agité.

21 février. Nouvelle série d'accès. T. R. 40 ? Soir : T. R.

391. - 22 février. T. R. 38", 5. -Soir- : T. R. 38°, 7. - 23 féorier.

- T. R. 38 ? Soir : T. R. 38°.

le, ttf)'</. Traitement par l'hydrothérapie.

Juin. Les notes de l'école, du tailleur, etc., sont assez bonnes.

Cres... fait quelques progrès; il est sensible aux réprimandes. Les

accès de colère persistent.

8 juillet. Les périodes d'excitation maniaque sont plus rares.

Traitement : Outre les douches, bromure de potassium.

Décembre. Les notes du tailleur et de l'école sont bonnes;

l'enfant fait des progrès; la mémoire serait redevenue bonne,

mais C... est insubordonné et très violent.

DU CURARE DANS L'ÉPILEPSIE. 221

222 'recueil de faits.

alcoolique; sa mère, pendant la grossesse, a éprouvé de nom-

breuses émotions, a subi des traumatismes ; ci la naissance, il

était asphyxié.

Les premiers accidents ont consisté en accès de cris (in-

làice), remplacés plus tard par des accès de colère (enfance),

A ceux-ci, vers 12 ans, se sont ajoutés des accès d'épilepsie

compliquée de délire (hallucinations, excitation maniaque, etc.).

Les accès se montrent par séries. Nous avons même noté

un véritable état de mal. Ils ont été plus nombreux en 1883,

et les facultés intellectuelles ont baissé durant cette année,

surtout la mémoire. Les accès s'étant un peu éloignés en 188,1,

on a remarqué que l'enfant paraissait recouvrer ce qu'il avait

perdu au point de vue de l'intelligence.

Bien d'autres particularités cliniques très intéressantes

pourraient encore être relevées dans ce cas. Nous nous bor-

nons à celles qui précèdent et nous reprenons l'exposé de nos

observations. (A suivre.)

RECUEIL DE FAITS

TROIS AUTOPSIES POUR SERVIR A LA LOCALISATION

CL : ltL.13R1LL : DES TROUBLES DE LA VISION;

Par Cii. FÉRÉ.

Bien que les recherches relatives aux troubles de la vision

d'origine cérébrale se soient multipliées dans ces dernières

années, la question n'est pas définitivement résolue.

On discute encore les caractères symptomatiques de ces

troubles, sur lesquels la physiologie expérimentale et la cli-

nique ne sont pas d'accord. L'expérimentation sur les animaux

tend à établir que les lésions du cerveau ne peuvent déter-

miner qu'un seul trouble fonctionnel de la vision, l'hémianop-

des troubles DE la vision. 223

sie. La clinique humaine au contraire, nous démontre que si

on peut observer l'hémianopsie en conséquence d'une lésion

cérébrale, on rencontre au moins aussi souvent une amblyopie

croisée spéciale, caractérisée par un rétrécissement concen-

trique du champ visuel, avec diminution de l'acuité visuelle,

et quelquefois disparition de la vision d'un certain nombre de

couleurs, dont la perception disparait dans un ordre déter-

miné et en rapport avec le degré du rétrécissement. Dans un

certain nombre de cas, l'amblyopie croisée et l'hémianopsie

se combinent '.

L'absence d'examen campimétrique chez les animaux nous

permet de rester dans le doute en ce qui les concerne ; et d'ail-

leurs ce sont les troubles observés chez l'homme qui nous

intéressent exclusivement.

Au point de vue anatomique, lus faits se présentent encore

avec des variétés plus nombreuses, aussi, avons-nous cru in-

téressant de rapporter quelques nouvelles observations avec

autopsie. La partie clinique de la première figure déjà dans

notre précédent travail 2.

013SI,RN'ATIO ? 1. - Hémiplégie, hémianesthésie, rétrécissement voit-

centrique du champ visuel.- Autopsie.

La nommée Lét..., soi.\ante-et-un ans, est entrée il y a six ans

à la Salpêtrière, salle Sainle-Amélie, n° 9 service de M. Chakcot.

C'est en )873 qu'elle tomba malade. Après avoir eu pendant

quelque temps un sentiment de faiblesse dans son côté droit qui

aurait été très douloureux-, elle eut. une attaque avec perte de

connaissance. Eile est entrée à la Charité dans le service de

M. l3ourdon. Quand elle est revenue à elle, elle avait une hémi-

plégie droite et était aphasique. Son aphasie a persisté environ

trois semaines, puis elle a recouvré peu à peu la parole.

Etat actuel (décembre 1881 Fttce : la commissure droite est

un peu attirée en bas. La pointe de la langue est un peu déviée

à droite. Pas de contracture ; la face parait flasque dans tous les

iiiotivements. - Pat-al3,sie complète du membre supérieur droit,

avec raideur de toutes les articulations. Contracture très pro-

noncée de tous les muscles fléchisseurs du bras, de l'avant-

bras et de la main. L'avant-bras est en demi-ilexion sur le bras,

1 Cil. Foré. Contribution à l'étude des troubles fonctionnels de la

vision par lésioiis cérébrales, t883.

- ' Lec. cit., p. 137.

22 le RECUEIL de faits.

les doigts sont fortement Ilécliis, le pouce eu dessus. Para

lysie moins marquée du membre inférieur, qui est en demi

flexion, raideur articulaire. Les réflexes tendineux sont

exagérés à droite, et il existe une trépidation du pied très mar-

quee.

Sensibilité : La sensibilité, au contact, à la douleur, à la tempe-

DES TItUUI : LIsS 1)L LA VISION. 225

v

rature, est complètement abolie sur toute la moitié droite du

corps, y compris la face. Le meinbie inférieur droit lui parait

plus froid que le gauche. L'insensibilité tactile existe égale-

ment au conduit auditif externe, à la narine du côté droit. Il en

est de même à la conjonctive, mais la cornée est sensible : le

résultat est moins net pour la langue. L'ouïe, l'odorat, le goût

sont sensiblement obnubilés droite. - L'acuité visuelle est la

même pour les deux yeux, 0,6 ; pas d'achromafopsie, mais rétré-

cassement du champ visuel, surtout marqué droite (fig. 1); pas

de lésions du fond de I*o-il.

le Ier avril 1884. - Le pédoncule cérébral gauche est

aplati, beaucoup plus petit que le droit, son t'aisceau moven est

gris, séparé du bord externe par une bandelette blanche de

2 millimètres de largeur (fig. 2). La pyramide gauche tout à fait

jaune ne mesure trilis0('St ! cineliL que 2 millimètres et demi.

Affaissement de la moitié gauche de la protubérance.

Un foyer ancien d'itemorrhanie situé en dehors du noyau lenti-

culaire, coupe le carrefour sensitif en arrière, et arrive jusque

sous la troisième cireomolution frontale, ce qui explique l'aphasie

transitoire du début.

Ancamrs, z 1 'i

Fiy. ` ? . ? 1, hrloncule cérnhral n,tucle rlunnr dans ses trois quarts

internes (D); 3, protuh(rmcu;-3, pjramide gauche dégénérée;

4, olive; 3, faisceau latéral.

25 ! 6 ' RECUEIL DE FAITS,

Les deux fiers postérieurs de la capsule interne et la portion

attenante du noyau lenticulaire ont une teinte jaune brun(F ? 3).

Pneumonie au deuxième degré à

droite au centre du lobe moyen; 1

congestion des lobes inférieurs des

deux poumons.

Cette autopsie nous montre une

lésion du carrefour sensitif ana-

logue à celles que nous avons

rapportées précédemment, et qui

semble constituer la localisation

certaine de l'amblyopie croisée.

Cette amblyopie offre un intérêt

d'autant plus grand qu'elle res-

semble en tous points à l'am-

blyopie des hystériques, qui peut

se trouver imitée dans certaines

autres conditions pathologiques'

comme dans l'épilepsie, dans l'al-

coolisme, dans le saturnisme, etc.,

mais qui n'en constitue pas moins

un symptôme important et carac-

téristique de l'hystérie comme l'a

établi M. Charcot.

Cette analogie symptomatique

de l'hémianesthésie sensitivo-sen-

sorielle d'origine cérébrale, et à

l'hémianesthésie des hystériques

permettra peut-être de déterminer

la lésion dynamique à laquelle il

faudra faire remonter la cause de

la grande névrose.

Observation Il. -- Cécité verbale incomplète, cécité musicale conz-

plète. Aphasie partielle. Hémiplégie droite avec contracture.

Rétrécissement segmentairc du champ visuel. Autopsie 2.

lIm° IL ? quarante-cinq ans, ancien professeur de piano. - Hé-

1 lî. Tliomsen et H. Oppenheim. - Ueber clas Vorkhommen und die

Bedettlung der sensorischeu azaQsllzesie bec Ct7a)iA't< ? f'M der cerzlraleaz

nerven systeii. (drch. f. ps;/cA., Bd. XV, H. 2.

2 La partie clinique est résumée d'après l'observation de AI. Bernard

(De l'aphasie, thèse 1885, p. 119).

tig. 3. - Coupe Horizontale

de l'hémisphère gauche avec

un ancien foyer h6mnrrha-

gique coupant la partie pos-

térieure de la capsule in-

terne.

DES TROUBLES DE LA VISION..227

illiplégie droite datant de 1878 : aphasie transitoire ; contracture

du côté hémiplégique, le membre supérieur dans la flexion, le

membre inférieur dans l'extension avec pied équin varus. Contrac-

ture du côté droit de la face, sans déviation ni asymétrie de la

langue qui se meut aisément en tous sens. Sensibilité géné-

rale intacte, il en est de même de la sensibilité spéciale, sauf pour

la vision. Il existe en effet, un rétrécissement hémianopsique du

champ visuel portantsurlamoitiésupérieure droite, sans atteindre

à beaucoup près le point de fixation. (Voir la figure de M. Ber-

nard.) Elle s'exprime avec difficulté et présente des troubles de

perception des signes écrits (cécité verbale incomplète, cécité

musicale complète) sur lesquels nous n'avons pas à revenir ici.

Elle succomba le 4 1 mai 1884 à une pneumonie.

AuTOi'siK.La face inférieure du pédoncule cérébral gauche

présente un aplatissement notable. Toute cette face, depuis le

bord interne jusqu'à l'union du quart externe avec le troisième

quart offre une teinte gris jaunâtre. Seul le quart externe offre

une teinte blanche naturelle. Sur le bord interne, on ne voit au-

cune fibre Manche : tout est uniformément gris.

La moitié gauche de la protubérance annulaire est notablement

affaissée, beaucoup moins convexe que la moitié droite. La pyra-

mide antérieure gauche, de moitié moins volumineuse que la

Fig. 4. Face externe de l'hémisphère gauche. Fi, Pg, F3, les trois

circonvolutions frontales F A , circonvolution frontale ascendante;

l' A, circonvolution pariétale ascendante; Pi, lobule pariétal supérieur;

P2, lobule du pli courbe ; Pa, pli courbe. Le ramollissement est

représenté par les parties courbes où se rendent des artères exsangues.

228 RECUEIL DE FAITS.

droite, offre la teinte jaune caractéristique de la dégénération

descendante.

Sur une section transversale pratiquée au niveau de l'insertion

prolubérantiel des pédoncules, on voit que le pédoncule gauche

est beaucoup plus mince. que le droit. A ce niveau existent trois

petites lacunes à raudes eclions trausveralcs, dont les parois

sont jaunes et dont le contenu rappelle celui des lacunes que l'on

voit si souvent dans le corps strié. ,

- Surlafaceexternedel'IrémisplrèreaucUe(Tr ? r).unelarjepladue

jaune englobe toute la moitié supérieure de l'iiisula, la pal-tie

moyenne et postérieure de la troisième frontale et le quart infé-

rieur de la frontale ascendante. Cette plaque se prolonge en une

bande mince sous l'opercule et arrjve jusdu'ù l'extrémité poslé-

rieure de la scissure de Sylvius, où la bande s'élargit et s'étale

sur ses deux bords. Ce prolongement passerait complètement

inaperçu si l'on ne soulevait pas l'opercule.

Il existe dans le lobuicpariétat inférieur, à l'angle inférieur,

une autre plaque jaune mesurant l'étendue de la pulpe du pouce.

Elle comprend le fond de ia scissure inter-pariôtale, mais n'at-

teint pas le lobule pariétal inférieur, ni la pariétale ascendante.

Les artérioles qui se rendent à la région nécrobioséc sont

exsangues, la branche qui leur donne naissance est oblitérée à son

origine à la sylvienne par une masse jaunâtre au centre, déco-

lorée et fibroide à la périphérie.

DES Troubles DE LA VISION. 229

Observation II1. Hémiplégie droite transitoire ; hémianopsie pcr-

munente '. Autopsie.

La nommée Carpenlier cinquante-deux ans, admise salle Du-

1 La partie clinique de cette observation est résumée d'après îles noies

communiquées par 11. Souza Leite, externe du service.

230 RECUEIL DE FAITS.

chenne de Boulogne (service de M. Charcot), a présenté dans sa

jeunesse un certain nombre de troubles hystériformes.

En novembre 1883, elle éprouva une attaque apoplectiforme à

la suite de laquelle elle eut une hémiplégie droite tout à fait pas-

sagère.- A son entrée dans le service il n'existe plus de troubles

moteurs, mais la sensibilité au froid et à la douleur était un peu

diminuée du côté droit : l'odorat, le goût et l'ouie étaient intacts ;

maisM Parinaud a constaté une hémianopsie droite des plus nettes

sans lésions du fond de l'oeil (fig. 5). Mort le 24 décembre 1881.

Autopsie. Les pédoncules cérébraux sont systématiques et

d'aspect normal, il en est de même de la protubérance, du bulbe

et du cervelet. Les bandelettes optiques, le chiasma, les nerfs

optiques n'offrent aucune altération appréciable ; il en est de

même des corps genouillés et des tubercules quadrijumeaux.

L'ouverture du troisième ventricule faite par la partie inférieure

nous montre l'absence de commissure grise.

L'hémisphère droit est sain autant à sa surface que sur les

coupes. L'hémisphère gauche ne présente d'autre altération à sa

surface qu'une plaque jaune (fig. 6) superficielle comprenant la

plus grande partie du coin et une petite étendue de la deuxième

circonvolution temporo-occipitale adjacente. Il n'existe aucune

autre lésion dans la profondeur.

Insuffisance aortique ; pneumonie du lobe inférieur gauche.

Fig. 6. Face interne de l'hémisphère gauche, li, ramollissement

^superficiel portant sur le coin et la partie postérieure de la deuxième e

circonvolution temporo-occipitale.

DES TROUBLES DE LA VISION. 231

Cette observation nous offre à relever deux points intéres-

sants :

Au point de vue clinique, elle présente une particularité

importante qui consiste en ce qu'il s'agit d'une hémianopsie

régulière, la ligne de démarcation passant par le point de

fixation. Or, en général, les cas d'hémianopsie d'origine céré-

brale ont pour caractère spécial de montrer une région fonc-

tionnellement intacte autour du point de fixation, c'est-à-dire

que la vision centrale est conservée.

Au point de vue anatomique : elle nous offre encore une

exception, nous voyons en effet une lésion de la face interne

du lobe occipital, au lieu d'une lésion du lobule pariétal infé-

rieur ou de son voisinage. Ce nouveau fait nous autorise donc

encore à dire, que la localisation de l'hémianopsie d'origine

cérébrale est encore insuffisamment établie ; et nous sommes

amené à confirmer à cet égard les conclusions que nous

avions déjà formulées.

« Il existe quelques faits anatomiques qui, joints aux faits

expérimentaux permettent d'affirmer l'existence d'une liémia-

nopsie d'origine hémisphérique, dont la localisation n'est

point nettement établie.

« L'existence de l'amblyopie d'origine cérébrale est nette-

ment établie par des faits cliniques et anatumo-pathologiques.

Elle reconnaît ordinairement pour cause une lésion de la ré-

gion du carrefour sensitif. »

On remarquera qu'en somme toutes les lésions qui déter-

minent des troubles delà vision, siègent dans la partie posté-

rieure de l'hémisphère, et qu'en examinant de près les résul-

tats des autopsies on peut voir des lésions assez rapprochées

déterminer des troubles différents. Il est donc permis de se

demander si tous les sujets sont aptes à éprouver des troubles

identiques en conséquence d'une lésion destructive de même

siège, ou en d'autres ternies s'il n'existe pas des variétés dans

l'entrecroisement des fibres provenant des régions de l'écorce

qui président à la fonction visuelle. Certaines variétés anato-

miques légitiment cette hypothèse; ne veyons-nous pas, par

exemple, que dans notre dernière autopsie la commissure grise

était absente : ce n'est pas là une anomalie rare ' ; et il existe

1 Sur deux séries de "vingt sujets examinés à ce point de vue, nous

avons vu la commissure grise manquer quatre l'ois dans la première, et

liuq fois dans la seconde.

232 REVUE CRITIQUE.

encore de grandes variétés dans l'importance de cette lame de

substance grise qui est désignée sous le nom de racine grise

des nerfs optiques à laquelle nous avions l'ait dans notre

schéma, jouer le rôle d'une commissure douée d'une sorte de

conductibilité indifférente susceptible d'expliquer la persis-

tance de la vision centrale dans l'hémianopsie d'origine céré-

brale. Des variétés de commissures et des entrecroisements

pourraient faire comprendre comment certains sujets ne peu-

vent être qu'amblyopiques, tandis que d'autres ne peuvent

être qu'hémianopsiques et que d'autres encore ne peuvent

avec une lésion identique ne présenter que des troubles com-

binés. L'existence bien établie des variétés dans l'entre-

croisement des pyramides peut venir à l'appui de cette hypo-

thèse.

REVUE CRITIQUE

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX

.1 L'ÉTAT PHYSIOLOGIQUE El" l'ATIOLOGIQUI : .

Parle D 1. MAIKET, agrégé ]illetilté ile médecine de Montpellier.

Si, dans ces dernières années, des recherches anatomo-

pathologiques plus précises ont permis de distraire du groupe

des névroses, c'est-à-dire du groupe des maladies nerveuses

sine un assez grand nombre de maladies, ces recherches

sont restées lettre morte dans beaucoup de cas. L'hystérie,

l'épilepsie, l'aliénation mentale, etc., échappent au contrôle

anatomo-pathotogique. On comprend combien la physiologie

pathologique et le traitement de ces maladies doivent se

ressentir de cet état de choses, et l'idée de rechercher leur

modus faciencla dans l'étude de la nutrition du système ner-

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 233

veux devait s'imposer. Hais pour pouvoir tirer des conclusions

de recherches faites dans cette direction chez l'homme ma-

lade, il faut connaître la nutrition du système nerveux à l'état

physiologique. Ce n'est qu'en comparant l'état de maladie

à l'état dû santé qu'on peut dire que dans tel cas il y a ou il

n'y a pas de modifications dans l'élimination de l'acide

phospborique, et qu'on peut expliquer ces modifications.

Or, nos connaissances relatives à la nutrition du tissu

nerveux chez l'homme sain ne sont pas plus avancées que

celles relatives à la nutrition de ce môme tissu chez l'homme

malade. Par suite tout travail ayant pour but de rechercher

si les maladies nerveuses modifient les échanges qui se passent

au sein du système nerveux doit être précédé d'un travail ayant

pour but d'étudier la nutrition de ce système -il l'état physiolo-

gique.

Dans l'état actuel de la science, l'étude de la nutrition du

système nerveux ne peut porter que sur certains points de

cette nutrition. Celte étude no peut, en effet, avoir pour base

que lacon naissance des éléments qui entrent dans la constitution

de ce système, éléments qui seuls peuvent fournir aux échanges

nutritifs qui ont lieu dans celui-ci. Malheureusement nous

sommes loin encore do connaître la constitution chimique du

système nerveux.

« Quoique le cerveau, dit Gorup ]3esziiiez 1, dans son remar-

quable Traité de chimie physiologique, ait été l'objet d'études

chimiques très sérieuses, nous n'hésitons pas à dire que cet

organe est plus imparfaitement connu que tous les autres de

l'économie. » Cependant, si la constitution chimique du sys-

tème nerveux nous échappe encore à beaucoup d'égards, il est

quelques substances que nous savons y jouer un grand rôle, et

parmi elles, la plus importante est l'acide phosphorique : le

tissu nerveux est, en effet, de tous les tissus mous de l'éco-

nomie le plus riche eu cet acide, c est même le seul où l'on

rencontre ce dernier à l'état libre. Si donc, faute de données

chimiques suffisantes, des recherches sur la nutrition du sys-

tème nerveux ne peuvent porter actuellement sur l'ensemble

de cette nutrition, ces recherches peuvent avoir comme

objectif quelques-uns des éléments constitutifs de ce système

et plus particulièrement l'acide phosphoriquo.

(oi-ili)-B 0 si Il ez. Traité rlr cleimir i,lrr/eioloyirttr, t. t . 11, p. )S ?

13 4 REVUE CRITIQUE.

Mais comment, étant données nos connaissances sur le rôle

de l'acide phosphorique comme élément constitutif du tissu

nerveux, arriver à savoir si cet acide est lié à la nutrition

de ce tissu ? Par l'examen des urines.

. L'homme rend chaque jour par les urines une certaine

quantité d'acide phosphorique. Une des principales sources de

cet acide éliminé est l'alimentation; toutefois, ce n'est pas la

seule, l'étude de l'inanition le prouve. Les recherches de

l31dder et Scllmidt', de Storch2, de Bisclloff , de Zuelzer 6,

celles que j'ai faites moi-même, etc., démontrent que, soit

chez les animaux, soit chez l'homme, la suppression de l'ali-

mentation diminue, mais ne fait pas disparaître l'acide phos-

phorique contenu dans les urines et portent ainsi à penser

qu'une certaine quantité de cet acide provient des échanges

qui se passent au sein de nos tissus. Il est donc possible qu'en

étudiant l'élimination de l'acide phosphoripue par les urines

on puisse arriver à savoir si cette substance joue un rôle dans

la nutrition du système nerveux, et si les maladies de ce sys-

tème modifient cette nutrition. S'il en est ainsi, en effet, la

mise en activité physiologique ou pathologique du tissu ner-

veux pourra modifier l'élimination quotidienne des phosphates n

a) Le rein n'est pas la seule voie d'élimination de l'acide pliosphorique,

on retrouve cet acide dans d'autres excrétions, dans les lèces, par exemple;

mais ce sont surtout les urines qui renferment cette substance. Les

recherches auxquelles nous nous sommes livré cet égard nous ont

montré que les leces ne renferment que la septième ou la huitième partie

de l'acide z éliminé. C'est à cette proportion qu'arrive aussi

fnâe111181111 (Anc'lr. fui- Anal, yleystol., etc., 1). 2a), tandis que llaxtltausen

(m iNutib,-ILiei- et Vogel, p. 40) pense que l'acide P110,I)II(JrILI(ie tics exci-é-

ments représente z ou la cinquième parue de l'aculu pltos-

hltorulue total, et Goi-til)-Bebtiie/, (loco citalo, t. 1, p. 114), la treizième

partie .seulement.

1W Iclt·r et Seliiiiidt. Die t'ei'tuM ! ty'«f/'<e und der S<o ? tt)tc7;M<, 1852.

2 Storch. De l'empoisonnement aigu par le phosphore. Copenhague,

1865. Cité par Zuelzer.

1 Iiisclioli. Ueber die Ausscheulung der l'ho.pleorsaitre dttrcla clert

Tluerh.rycr. (Zeitschr. Biologie, 1SBB.)

* Zuelzer. Ueber dus Yerlulltniss (Ici- Phospliorsaitre sunt Sticksioll

in Urta. (drclt. lui- pathologische Anatomie und Physiologie, etc.,

t. 1.1V1, 187b, 1. -1-1$et sp.)

b) L'acide pliosphorique qu'on retrouve dans les urines y existe soit

sous tormedeseis.'soitHntt tiès laible quantité à l'état Lbte. Longtemps

la présence dans les urines de l'acide pliosphorique non 0-,)(lé a pu èlre

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 2 : ! 5

relativement à l'état de repos ou à l'état de santé ; et, on le

sait, la chimie nous fournit des réactifs permettant de doser

la quantité de cet acide contenu dans les urines. Parmi ces

réactifs, le plus employé, on pourrait même dire le seul

actuellement employé est la liqueur d'acétate d'urane qui,

convenablement préparée et titrée, permet un dosage très

exact.

Partant donc de cette idée qu'on peut, par l'examen des

urines, arriver à savoir si l'acide phosphorique se lie à la

nutrition du système nerveux et si la maladie modifie cette nu-

trition, nous avons entrepris des expériences à ce sujet, expé-

riences que nous avons consignées dans notre travail intitulé :

Recherches sur l'élimination de l'acide pliosphoi-lqite chez

l'homme sain, l'aliéné, l'épileptiqcce et l'hystérique (G. Masson,

éditeur, 188't). Dans ce travail nous avons dû, pour arriver à

une solution complète de la question que nous nous étions

posée, étendre nos recherches à d'autres systèmes que le sys-

tème nerveux : au système musculaire et à la nutrition géné-

rale. Dans la présente revue nous voudrions, ne nous occupant

que du système nerveux mettre en relief les résultats auxquels

nous sommes arrivé relativement à la nutrition de ce système

à l'état physiologique et pathologique. Pour cela nous invoe

mise en doute, elle ne peut plus l'être depuis les recherches de Sot-

z (Zeitsclirift frinpltys, chimie, t. IV, p. 21 1SS0), de Zuelzer

(Untersuche liber die Semciologie des llurns, p. 1S. et de Lepine,

Ëymonnet et Haubert {Comptes rendus de la Société de biologie, p. Bti-1,

18S ! , et Comptes rendus de l'Académie des sciences, 28 janvier 18S4).

.Mais l'étude de l'acide 1)tuspltoticlue non oxldù dans ses rapports avec

la nutrition du système nerveux n'a pas encore été laite. Dans certains

états nerveux ou à la suite de l'administration de médicaments faisant

sentir plus particulièrement leur action sur le système nerveux, Zuelzer

et Lépine ont bien vu augmenter le chillre de cet acide proportionnelle-

ment au chiffre de l'azote; mais celte augmentation provient-elle dans

ces cas du système nerveux, c'est ce qu'il est encore impossible de dire,

ainsi que le fait remarquer Lépinu dans une communication à la Société

de Biologie (juillet 18Si) : « L'augmentation de l'excrétion du phosphore

incomplètement oxydé dans certains états nerveux ne. suppose pas néces-

sairement un grand accroissement de la de la substance

nerveuse; il se peut que la désassimilation des substances pliosphorées

disséminées dans divers tissus de l'organisme soit accrue par une action

nerveuse, comme l'est celle de la matière glncoèiie, consécutivement il

la piqûre du plancher du quatrième ventricule. » Laissant de côté 1 acide

phosphorique non oxydé, nous étudierons seulement l'acide pliosphorique

uvvdl.

236 REVUE CRITIQUE.

querons quelques-uns des faits que nous avons réunis dans le

travail que nous venons de citer, travail auquel le lecteur

devra se reporter pour de plus amples détails sur toutes les

questions que nous traiterons. Nous indiquerons en outre les

recherches qui ont été faites avant les nôtres sur le même

sujet.

Nous diviserons ce qui suit on deux parties consacrées, l'une

à la nutrition du système nerveux à l'état physiologique;

l'autre à la nutrition de ce système à l'état pathologique, dans

l'aliénation mentale, l'épilepsie et l'hystérie.

1. DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX A L'ÉTAT

PHYSIOLOGIQUE.

Historique.

Les recherches relatives à la nutrition du système nerveux

par l'étude de i'élimination de l'acide phosphorique par les

urines sont encore peu nombreuses. Elles se résument à notre

connaissance en celles de Mosler', Wood2, Hammond3 et

Byasson 1. Ces auteurs étudient comparativement l'élimination

de l'acide phosphorique chez un individu sain à l'état de repos

et chez ce même individu soumis à un travail intellectuel.

Suivant qu'ils trouvent ou non, sous l'influence de l'activité

cérébrale, une augmentation dans le chiffre d'acide pliospho-

rique rendu par les urines, ils en concluent que le système

nerveux emploie ou non de l'acide phosphorique pour pro-

duire du travail. L'acide phosphorique qu'ils trouvent en plus

dans les urines est regardé par eux comme de l'acide phospho-

rique de déchet, comme le résultat de la désassimilation de la

substance nerveuse.

1 Mosler. l3eilrtie zur lCezzzzln7s.s Urinabinideranij bel Grsumlen;

,1t(ilys iii Caitst(iti's (ihi-esbel-ichl, 1833.

2 Wood. Recherches sur l'influence de l'acliu'té cérébrale sur l'exeré-

tioit de 1'(icide I)hospho)-i(lite licti- li rein. (2 ? oeeedff ? of the Contrecticut

médical Society, 1869, aualjsé in 13tll, de la Soc. ntetl. de l'arzs, t. Xi,

1870, p. 88.

" Ilammuml. - l'lJ/,iolor/ical lleueoires. l'Irilatlelplne, 1SG3. CU h;rr

divers.

4 13yassun.-Lsscti sur la relation qui existe il l'état physiologique entre

l'activité cérébrale et la composition des- urwrec. Ttr. de Paris, 18H ?

DE LA NUTRITION DU SYSTEME NERVEUX. 23T

Les résultats auxquels sont arrivés les auteurs qui précédent

sont différents. Mosler, IIammond, Byasson veulent que le

travail intellectuel augmente le rendement de l'acide plios-

phorique. Ainsi, tandis qu'àl'état de repos, Byasson, qui expéri-

mentait sur lui-même, rendait par vingt-quatre heures 1 gr. 50 ! s

d'acide phosphorique, en rendait i gr. 977G dans le même laps

de temps sous l'influence du travail intellectuel. Wood,

au contraire, pense que la mise en activité du système ner-

veux diminue le chiffre de l'acide phosphorique rendu par les

urines. '

Sans insister sur le désaccord qui existe entre les résultats

obtenus par Wood et ceux obtenus par les autres auteurs dont

nous avons rappelé les travaux, on voit, lorsqu'on étudie de

près ceux-ci, qu'ils sont susceptibles d'objections diverses et

telles qu'on peut se demander si c'est bien au travail intellec-

tuel que reviennent les modifications que ces auteurs ont

constatées sous l'inlluence de ce travail. Parmi ces objections,

nous n'en retiendrons qu'une, celle qui a trait à l'alimenta-

tion.

L'influence qu'exerce l'alimentation sur l'élimination de

l'acide phosphorique est considérable. C'est par grammes

que peuvent se chiffrer, chez un même individu, les variations

quotidiennes dans l'élimination de cet acide suivant la nature

de l'alimentation; tandis que c'est par centigrammes que se

marquent, ainsi que nous le verrons, l'influence du travail in-

tellectuel sur l'élimination des phosphates. Il faut donc, dans

des expériences biologiques semblables à celles que nous

venons d'indiquer, annuler absolument l'influence de l'alimen-

tation, si on ne veut pas s'exposer à attribuer au travail intellec-

tuel ce qui est dû simplement à cette dernière. C'est là un

fait dont on n'a pas suffisamment tenu compte jusqu'à pré-

sent, à l'exception toutefois de Byasson.

Ce savant a cherché à annuler l'influence de l'alimentation

en se soumettant, pendant toute la durée de l'expérimenta-

tion, à un régime toujours le même par sa qualité et sa

quantité. Malheureusement ce régime, qui se composait de

pain et d'eau, était défectueux, et cela non seulement parce

qu'il produisait un état de répugnance tel que Byasson, ainsi

qu'il le dit lui-même, était obligé de se forcer pour le manger,

mais parce qu'il s'éloigne trop de la normale. La nécessité

23S REVUE CRITIQUE.

d'employer dans ces cas une alimentation aussi normale que

possible est prouvée par les recherches de Bischoff', Zuelzer "

et Sievert 3 sur les animaux et sur l'homme. Plus l'alimen-

tation se rapproche par sa nature de l'alimentation ordi-

naire de l'animal en expérience ou de l'homme, plus se ré-

gularise l'élimination de l'acide phosphorique. Ainsi à la

suite d'un régimecomposé exclusivement de pommes de terre, la

quantité d'acide phosphorique rendu pendant chaque période

de 21 heures est très variable, tandis que cette élimination

se régularise lorsque l'alimentation devient mixte ou animale.

On peut donc se demander si ce n'est pas simplement au

régime et non au travail intellectuel qu'il faut attribuer les

modifications que Byasson a constatées dans l'élimination de

l'acide phosphorique.

Les conditions d'expérimentation dans lesquelles se sont

placés les auteurs qui ont recherché l'influence qu'exerce le tra-

vail intellectuel sur l'élimination de l'acide phosphorique per-

mettent donc des doutes sur la valeur des résultats qu'ils

ont obtenus. Ce n'est pas tout : nous ne pouvons accepter

sans discussion les conclusions que ces auteurs veulent tirer

de leurs recherches. Nous ne pensons pas, qu'il suffise de

constater, sous l'influence du travail intellectuel, une aug-

mentation dans le chiffre de l'acide phosphorique rendu par les

urines pour être en droit de conclure que cet acide en excès

provient de la désassimilation de la substance nerveuse. L'a-

cide phosphorique, en effet, n'est pas propre au seul système

nerveux ; il entre dans la constitution de tous nos tissus, et

comme le cerveau en fonctionnant peut retentir sur d'autres

organes, sur d'autres fonctions, il peut se faire que ce soit à

ce retentissement qu'il faille attribuer tout ou partie des modi-

fications survenues sous l'influence du travail intellectuel dans

l'élimination des phosphates. En tout cas, c'est la un point

qu'il faut élucider avant de tirer aucune conclusion.

Ainsi, non seulement les résultats obtenus par Wood con-

tredisent ceux obtenus par Mosler, Hammond et Byasson,

mais lorsqu'on étudie de près les travaux de ces auteurs, on

1 Bischoff. Loco citalo.

2 Zuelzer. Loco citato.

3 Sievert. Zet<xc/t ? ? 7 sur die '/e.<Hntne7 : Natnrwissench. 1868,

B(l. XXXI, p. 458. ,

DE LA NUTRITION DU SYS'tÈMË NERVEUX. 'l 3 9

trouve à ces travaux des côtés défectueux qui portent à se de-

mander si c'est bien à l'actvité intellectuelle que doivent être

attribuées les modifications qu'ils ont constatées sous l'influence

de cette activité. De plus, on ne peut sans autres preuves,

attribuer ces modifications à des échanges qui se passeraient

dans le cerveau. Les recherches relatives aux rapports qui

peuvent exister entre la nutrition du cerveau et l'acide plios-

phorique devaient donc être reprises à un double point de vue ;

le problème que soulève l'étude de ces rapports se compose de

deux parties : 1° Constatation des modifications qui surviennent

sous l'influence du travail intellectuel dans l'élimination de

l'acide phosphorique.

2" Interprétation de ces modifications.

C'est ainsi que nous avons compris ce problème. Mais avant

d'indiquer les résultats que nous avons obtenus, il est néces-

saire d'exposer quelques considérations générales qui servent

de base à nos recherches.

Considérations générales.

Pour savoir si l'activité cérébrale modifie l'élimination de

l'acide phosphorique, nous avons étudié comparativement cette

élimination chez un même individu à l'état de repos et à l'état

de travail intellectuel. Pendant un certain nombre de jours nous

étudions l'élimination quotidienne de l'acide phosplioriquc

chez cet individu au repos ; puis, pendant un certain nombre

d'autres, nous étudions cette élimination chez ce même indi-

vidu soumis à un travail intellectuel. Mais pour pouvoir, si

des modifications se produisent dans l'élimination de l'acide

phosphorique, pendant l'état d'activité cérébrale, attribuer ces

modifications à cette seule activité, il est des précautions à

prendre. Ces précautions sont de deux ordres : d'ordre biolo-

gique et d'ordre alimentaire.

L'acide phosphorique, nous l'avons déjà dit, n'entre pas seu-

lement dans la constitution du système nerveux, il fait

partie intégrante de tous les tissus de l'économie '. Il est pos-

sible qu'il se lie à la nutrition de ces tissus, et que son éli-

1 Voir, à cet égard : Mairet, loco citalo, p. 13 et sq.

2'l0 REVUE CRITIQUE.

initiation soit influencée par elle ; par suite, il faut qu'à part

le travail intellectuel, l'individu en expérience soit, pendant

l'état de repos et pendant l'état de travail, dans des conditions

biologiques absolument semblables; il faut que les conditions

d'activité musculaire, de sommeil, de milieu, etc., soient les

mêmes dans les deux cas. Ces conditions sont faciles à réaliser

chez l'homme sain et elles l'ont toujours été dans nos expé-

riences.

Quant à l'alimentation, nous avons suffisamment insisté

dans le paragraphe précédent sur la nécessité d'annuler son

influence, pour n'avoir qu'à indiquer ici comment nous sommes

arrivé à ce but.

Engelmann ', dans des recherches fort bien faites sur l'in-

lluence qu'exerce le travail musculaire sur l'élimination de l'a-

cide phosphorique a déjà montré qu'en soumettant un individu

à un régime mixte revenant toujours le même par sa qualité

et sa quantité, on arrive, toutes les autres conditions restant

les mêmes, à régulariser suffisamment l'élimination quoti-

dienne de l'acide phosphorique, pour que, si ou fait intervenir

un travail musculaire et si des modifications se produisent

dans cette élimination, ces modifications puissent être attri-

buées à l'intervention de ce travail. Nous avons repris ces re-

cherches d'Ëngelmann et les résultats que nous avons obtenus

sont venus confirmer ceux obtenus par ce savant. Mais nos

recherches nous ont montré en outre que cette régularisa-

tion dans l'élimination de l'acide phosphorique est obtenue

non seulement avec un régime mixte, mais encore avec un ré-

gime animal ou végétal convenablement préparé, à une con-

dition, c'est qu'on laisse les individus en expérience manger

une certaine quantité de pain. Pour fixer les idées sur les faits

que je vicnsd'indiquer.je prendrai, parmi les observations que

j'ai rapportées à ce sujet (loc. ca't., p. 100), l'exemple suivant :

Un individu à l'état de repos, soumis à un régime mixte tou-

jours le même par sa quantité etsa qualité rend par 21 heures,

pendant quatre jours consécutifs, les chiffres suivants d'acide

phosphorique : 2 gr. OR, 2 gr. 15, 2 gr. 2'i, 2 gr. 15. Ce même

individu, soumis pendant trois jours consécutifs à un régime

exclusivement animal, rend par 2t heures les chiffres sui-

r I : yefmamn. -.Inclr. l'or Anttl. lrl ? iul., clc., 1571, tr. 7.

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 2H

vants d'acide phosphorique : 2 gr. 34, 2 gr. 63, 2 gr. 38. Ce

même individu enfin, soumis à un régime végétal élimine par

24 heures : 1 gr. 54, 1 gr. 62, 1 gr. 60 d'acide phosphorique.

Peut-on, je le demande, espérer une régularisation plus grande

dans l'élimination quotidienne de l'acide phosphorique que

celle que nous avons obtenue ? Et si, soumettant l'individu qui

précède à un travail intellectuel, des modifications se pro-

duisent dans l'élimination de l'acide phosphorique, hésitera-

t-on à attribuer ces modifications à ce travail ? Nous ne le

pensons pas.

, Ainsi, si chez un individu placé dans les conditions de vie et

d'alimentation que nous venons d'indiquer, on met enjeu l'ac-

tivité cérébrale et si des modifications se produisent dans l'éli-

mination de l'acide phosphorique, ces modifications peuvent

être attribuées à jette activité.

Mais, on s'en souvient, le but que nous poursuivons par

l'étude de l'élimination de l'acide phosphorique est celui de

savoir si cet acide est lié à la nutrition du cerveau. Or, pour

arriver à ce but, la seule étude de l'élimination de l'acide

phosphorique totale est insuffisante ; elle nous conduirait même

à des interprétations erronées. Il est nécessaire que nous

étudiions en même temps l'élimination de l'azote et que nous

ne considérions plus seulement l'acide phosphorique total,

mais cet acide suivant qu'il se trouve dans les urines sous la

forme de phosphates solubles ou insolubles.

L'acide phosphorique oxyde' qu'on retrouve dans les urines

y existe en effet sous deux formes : sous la forme de phosphates

solubles, phosphates de soude et de potasse, ce sont les phos-

phates alcalins, et sous la forme de phosphates insolubles, de

phosphates terreux, phosphates de chaux, de magnésie et de fer.

Ces deux espèces de sels peuvent facilement être étudiées sépa-

rément. C'est dans l'étude comparative de ces sels et dans les

rapports qui existent entre eux et l'azote, que nous trouverons le

moyen de savoir si l'acide phosphorique joue réellement un rôle

dans la nutrition du système nerveux.

Nous ne nous étendrons pas davantage sur ces deux ordres

de faits' ; disons seulement que les considérations que nous

avons fait valoir précédemment à propos de l'acide phos-

1 Voir, pour plus de détails : ilairet, loco cilalo, p. 31 et seq.

Archives, t. IX. 16

242 REVUE CRITIQUE.

phorique total et de la possibilité de régulariser son élimina-

tion s'appliquent aussi à l'acide phosphorique uni aux terres,

à l'acide phosphorique uni aux alcalis et à l'azote.

Ces préliminaires indispensables pour donner à nos recher-

ches toute l'autorité nécessaire étant établis, nous pouvons

maintenant aborder ces recherches et indiquer les résultats que

nous avons obtenus.

Le travail intellectuel dans ses rapports avec l'élimination de

l'acide phosphorique et de l'azote.

Pour savoir si le travail intellectuel modifie l'élimination de

l'acide phosphorique et de l'azote, et pour nous rendre compte

des modifications produites, nous nous contenterons de rappeler

l'expérience suivante qui résume tout ce qui a trait à cette

question. *

Dans cette expérience, dont nous sommes le sujet, nous

nous sommes soumis à un régime de nature variable et à

un travail intellectuel de même nature mais d'intensité diffé-

rente.

Dans une première expérience, nous mangions un régime

mixte revenant chaque jour le même en quantité et en qua-

lité ', et après avoir, pendant quatre jours consécutifs, étudié

l'élimination de l'acide phosphorique et de l'azote, alors que

nous étions à l'état de repos, nous nous sommes ensuite

soumis pendant quatre autres jours à un travail intellectuel

d'une durée de sept heures ; puis, pendant deux autres

jours à un travail intellectuel de même nature et d'une durée

de dix heures. Le tableau suivant indique les résultats obte-

nus : *

1 Voir. pour la qualité et la quantité de ce régime : Alairet, loco citntu,

p. 60.

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 243

Tableau I. Influence du travail intellectuel sur l'élimination

de l'acide phosphorique et de l'azote.

244 REVUE CRITIQUE.

Ces premières données acquises, nous nous soumîmes à un

régime végétal toujours le même par sa qualité et sa quan-

tité et après avoir étudié pendant trois jours consécutifs l'éli-

mination de l'acide phosphorique et de l'azote à l'état de repos,

nous avons étudié pendant trois autres jours ce que devient

cette élimination à la suite d'un travail intellectuel d'une

durée de sept heures et de même nature que celui des expé-

riences précédentes.

Tableau II. Influence du travail intellectuel sur l'élimination

de l'acide phosphorique et de l'azote.

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 245

Poussant enfin nos recherches plus loin nous nous soumîmes

à la diète et nous étudiâmes encore comparativement l'élimi-

nation de l'acide phosphorique à l'état de repos et à l'état de

travail intellectuel.

1'uL ? u III. Influence du travail intellectuel sur l'élimination

de l'acide phosphorique et de l'azote.

246 REVUE CRITIQUE.

1° S'exagérer la diminution de l'azote, de l'acide phospho-

rique total et de l'acide phosphorique uni aux alcalis. Le

chiffre moyen d'élimination de l'azote par vingt-quatre heures

tombe de 2'e gr. 5t à 21 gr. 08, c'est-à-dire qu'il diminue de

3 gr. 46, alors que la diminution n'avait été dans l'expérience

- 2, que de 2 gr. 5 t. Le chiffre moyen de l'acide phosphorique

uni aux alcalis tombe de 1 gr. 65 à 1 gr. 27 c'est-à-dire di-

mi ue de 0 gr. 38, tandis que dans l'expérience 2, il n'avait

diminué que de 0 gr. 12.

2° Se préciser une modification à peine sensible dans l'ex-

périence 2, l'augmentation de l'acide phosphorique uni aux

terres; le chiffre de cet acide est porté de 0 gr. 50 àOgr. 58.

Dans les expériences des tableaux II et III, nous retrouvons,

sous l'influence du travail intellectuel des modifications dans

l'élimination de l'acide phosphorique et de l'azote semblables

à celles que nous ont fourni les expériences 2 et 3 du tableau I

avec cette différence que, tandis que dans l'expérience 2 du

tableau I, un travail de sept heures n'augmente pas le chiffre

d'élimination de l'acide phosphorique uni aux terres, ce même

travail augmente ce chiffre dans les expériences des tableaux

II et III; il l'augmente de 8 centigr. dans le tableau II et de

9 centigr. dans le tableau III.

D'où vient cette différence d'action pour un même travail ?

Les expériences consignées dans les tableaux II et III contrin-

diquent-elles celles consignées dans le tableau I ?

Cette différence d'action s'explique parfaitement ; elle tient

simplement à la différence de régime. Dans le tableau I, en

effet, l'individu soumis à un travail intellectuel, mangeait un

régime mixte, riche en phosphates : dans l'expérience du ta-

bleau II, le régime qui est végétal est moins riche en acide

phosphorique ; et dans le tableau III, l'individu en expérience

est à la diète. En d'autres termes, c'est dans le rapport entre

le travail et la richesse de l'alimentation en acide phospho-

rique qu'il faut chercher le pourquoi de l'augmentation ou de

la non augmentation des phosphates terreux sous l'influence

de l'activité cérébrale. Un même travail augmentera d'autant

plus le chiffre de l'acide phosphorique uni aux terres, que l'ali-

mentation sera moins riche en phosphates ; ce qui revient à

dire que, pour un même travail, si l'alimentation est suffisam-

ment riche en ces sels pour réparer les pertes faites par ce

travail, l'acide phosphorique uni aux terres éliminé par les

DE I.A NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 2 le7

urines n'est pas augmenté'. Par conséquent, pour avoir une

idée complète de l'influence qu'exerce le travail intellectuel

sur l'élimination de l'acide phosphorique, il faut absolument

tenir compte des rapports qui existent entre l'intensité du

travail et la richesse de l'alimentation en phosphates.

Mais, fait important à noter, tandis que les modifications

dans l'élimination de l'acide phosphorique uni aux terres sont

dans un rapport étroit avec l'intensité du travail et la richesse

de l'alimentation en acide phosphorique, il n'en est plus de

même de la diminution de l'azote et de l'acide phosphorique

uni aux alcalis. Cette diminution reste, en effet, à peu près la

même pour un même travail, peu importe la nature de l'ali-

mentation. C'est ce qui ressort de la comparaison des résul-

tats consignés dans le tableau I (expérience 2) et dans les

tableaux II et III. Dans le tableau I (régime mixte), la diminu-

tion de l'azote est de 2 gr. 54 et celle de l'acide phosphorique

uni aux alcalis de 12 centigr. ; dans le tableau II (régime

végétal), cette diminution est pour l'azote de 2 gr. 37 et pour

l'acide phosphorique uni aux alcalis de 9 centigr. ; et dans le

tableau Ill(diète), le chiffre de l'azote diminue, sous l'influence

du travail intellectuel, de 1 gr. 42 et celui de l'acide phospho-

rique uni aux alcalis de 14 centigr. La nature de l'alimen-

tation n'influe donc pas sur l'élimination de l'azote et de

l'acide phosphorique uni aux alcalis. Cette élimination est

seulement en rapport avec l'intensité du travail ; elle est d'au-

tantplus diminuée que cette intensité est plus grande, ainsi que

le prouve la comparaison entre l'expérience 3 du tableau I, et

l'expérience 2 du même tableau. Ici donc, comme pour l'acide

phosphorique uni aux terres, pour avoir une notion complète

de l'influence qu'exerce le travail intellectuel sur l'élimination

de l'azote et de l'acide phosphorique, il faut tenir compte des

rapports qui existent entre l'intensité du travail et l'alimen-

tation, et dans ces cas, les seuls qui puissent servir à étudier

les rapports biologiques qui existent entre l'acide phospho-

rique et le fonctionnement du système nerveux, on arrive aux

résultats suivants :

1° Le travail intellectuel diminue le chiffre de l'azote éliminé

par les urines;

1 Voir pour les rapports qui existent, relativement à l'élimination de

l'acide phosphorique, entre la richesse de l'alimentation et le travail,

nos recherches, p. 99, et plus particulièrement, p. 76 et 80.

248 REVUE CRITIQUE.

2° Le travail intellectuel augmente l'élimination de l'acide

phosphorique uni aux terres;

3° Le travail intellectuel diminue l'élimination de l'acide

phosphorique uni aux alcalis ;

4.° Le travail intellectuel diminue le plus généralement le

'c ? eefe l' acide phosphorique total. Nous disons que le tra-

vail intellectuel diminue le plus généralement l'acide phos-

phorique total ; et en effet, sidans le plus grand nombre de cas

nous avons constaté la diminution de cet acide, nous ne devons

cependant pas oublier que lorsque nous nous soumettions à

un régime végétal (tableau II), le chiffre de l'acide phospho-

rique total est resté le même sous l'influence de l'activité céré-

brale qu'à l'état de repos.

Consécutivement aux modifications produites dans l'élimi-

nation de l'acide phosphorique par le travail intellectuel se

produisent des modifications dans les rapports qui existent

entre l'acide phosphorique et l'azote et entre l'acide phospho-

rique uni aux terres et l'acide phosphorique uni aux alcalis.

Ces modifications nous ne ferons que les indiquer dans le ta-

bleau suivant, tableau qui résume aussi ce que nous avons dit

précédemment.

Tableau fiv. Influence du travail intellectuel sur l'élimination

de l'acide phosphorique et de l'uzole.

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 249

Interprétation des modifications produites par le travail intel-

lectuel sur l'élimination de l'acide phosphorique.

Le travail intellectuel diminue le chiffre de l'azote et de

l'acide phosphorique uni aux alcalis rendu par vingt-quatre

heures; il augmente le chiffre de l'acide phosphorique uni aux

terres éliminé dans le même laps de temps. Quant au chiffre

total d'acide phosphorique il est variable, tantôt il est dimi-

nué, tantôt il n'est pas modifié et on comprend même qu'il

puisse parfois être augmenté. Telles sont les modifications

que produit l'activité cérébrale sur l'élimination de l'acide

phosphorique et de l'azote. Ces modifications nous avons à les

interpréter et à rechercher quel rôle le système nerveux joue

dans leur production.

Il est une théorie d'après laquelle cette question serait facile

à résoudre. Cette théorie est due à Zuelzer. Ce médecin a pu-

blié en 18761 un travail dans lequel il cherche à montrer que

dans les conditions ordinaires de la vie, HO ? ')Ho/eH lfinsieinden,

il existe un rapport constant entre l'acide phosphorique et

l'azote éliminé par les urines. Ce rapport qui serait d'après

lui : : 17 : 100 resterait constant, peu importe les causes biolo-

giques qui peuvent modifier l'élimination des phosphates ; ces

sels varieraient dans les mêmes proportions que l'azote. Seule

l'intervention du système nerveux modifierait ce rapport; la

mise en activité de ce système augmenterait l'élimination de

l'acide phosphorique sans augmenter celle de l'azote. On voit

si la théorie de Zuelzer est vraie, combien il est facile de sa-

voir si, dans un cas donné, le système nerveux intervient ou

non. On n'a qu'à étudier comparativement l'élimination de

l'acide phosphorique et celle de l'azote ; si le rapport entre ces

Jeux substances dépasse 17 p. 100, c'est une preuve de l'inter-

vention de ce système; dans le cas contraire, c'est une preuve

de sa non intervention.

Malheureusement, si, comme la plupart des théories, celle de

Zuelzer a quelque chose de vrai, elle est fausse dans sa partie

essentielle, celle qui a trait à la possibilité de savoir, par l'é-

tude comparative de l'élimination de l'acide phosphorique et

de l'azote, si le système nerveux intervient dans la production

de tel ou tel phénomène biologique.

1 Zuelzer. Archives de Virchow. 1876, p. 66.

350 REVUE CRI 1"IQUK. NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX.

D'abord, quand on étudie de près le travail de Zuelzer, on

peut difficilement attribuer quelque importance à ce rapport

de 17 p. 100 que donne cet auteur comme exprimant les rela-

tions qui, dans les conditions ordinaires de la vie, existent entre

l'acide phosphorique et l'azote. Cette moyenne, est, en effet.

obtenue avec des chiffres qui varient dans des proportions

beaucoup trop considérables pour qu'elle puisse avoir quelque

valeur et si le lecteur veut bien se reporter à nos recherches ' 1

sur l'homme sain placé dans les conditions ordinaires de la

vie, il verra que jamais nous n'avons obtenu une proportion

aussi élevée.

En second lieu, lamise en activité du système nerveux n'est

pas le seul élément qui puisse faire varier le rapport entre l'a-

cide phosphorique et l'azote. Nos recherches2 sur le travail

musculaire dans ses rapports avec l'élimination de l'acide

phosphorique le prouvent. Dans ces recherches nous voyons,

en effet, sous l'influence de la mise en activité du muscle aug-

menter la proportion qui existe entre le chiffre des phosphates

et celui de l'azote éliminés. Or cette augmentation ne peut

pas être attribuée à l'intervention du système nerveux. Le

muscle et le nerf traduisent leur action sur l'élimination de

l'acide phosphorique d'une manière toute différente. Tandis

que le muscle en travaillant augmente les phosphates alca-

lins et ne modifie pas ou tend à diminuer les phosphates ter-

reux, le système nerveux, au contraire, diminue l'élimination

des phosphates alcalins et augmente celle des phosphates ter-

reux.

En troisième lieu enfin, si on se reporte aux recherches con-

signées dans les tableaux qui précèdent, on voit que si, sous

l'influence du travail intellectuel, le rapport entre l'acide

phosphorique et l'azote est augmenté : 10 Cette augmentation

n'est pas en rapport, ce qui devrait être si la théorie de Zuelzer

était vraie, avec l'intensité du travail. Elle est plus grande avec

un travail de sept heures qu'avec un travail de dix heures (ex-

périence 1 et 2. Tableau I).

2° Cette augmentation n'a pas lieu parce que l'acide phos-

phorique est plus augmenté que l'azote, mais parce que cette

dernière substance est plus diminuée que la première, fait

que ne prévoyait pas Zuelzer dans sa théorie.

1 J1airPl.-I,o.ocilnto, passim.

2 lrl.. p. 67 et seq.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 351

La théorie de Zuelzer ne peut donc nous donner- la solu-

tion du problème que nous étudions actuellement. Pour arri-

ver à celle-ci, il nous faut revenir quelques instants sur nos

recherches.

Les individus sur lesquels nous avons expérimenté étaient

placés, nous l'avons dit, pendant les états de repos et de tra-

vail intellectuels dans des conditions biologiques et alimen-

taires absolument semblables. Par conséquent, si les modifica-

tions dans l'émination de l'acide phosphorique que nous avons

trouvées sous l'influence du travail, tiennent à une autre cause

qu'au système nerveux, on ne peut les rattacher qu'au reten-

tissement du cerveau sur la nutrition générale. Il s'agit donc

de savoir si la nutrition générale a une influence sur cette éli-

mination, et dans le cas de l'affirmative, nous devrons chercher

à distinguer cette influence de celle du système nerveux. Avant

toutes recherches ayant pour but de déterminer s'il existe

quelques rapports entre la nutrition du système nerveux et les

modifications que nous avons constatées dans l'élimination de

l'acide phosphorique sous l'influence du travail intellectuel,

nous devons donc nous demander quels sont les rapports qui

existent entre cette élimination et la nutrition générale.

Nous avons institué à ce sujet une série de recherches que

nous ne pouvons songer à rapporter ici; nous nous bornerons

seulement à indiquer les résultats que nous avons obtenus,

renvoyant pour plus de détails à notre travail déjà cité

(page lt3 à 127). (A suivre.)

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE

XIV. Note sur la DISPaRITI0 : 1 du phénomène du genou chez les

vieilles gens; par P.-J. Moebius. (Centralbl. f. Nervenheilk. ,

1863.)

L'examen de cinquante-six individus ayant dépassé quatre-

vingts ans aboutit au dénombrement que voici :

252 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 253

En faisant la part de l'état de l'appareil oculaire et de ses

milieux, l'auteur conclut que le myosis est le lot du vieillard, sans

qu'on soit en mesure de préciser un âge exact, mais que toute

dilatation pupillaire qui se montre au-delà de cinquante ans

indique toujours, abstraction faite des circonstances d'ordre

ophthalmologique, une maladie de l'encéphale. Le myosis ne

s'accompagnant pas dans l'espèce de rétrécissement de la fente

palpébrale et d'enfoncement du globe oculaire, on pourrait le

rattacher à un défaut d'innervation du grand sympathique cervi-

cal ; les myosis extrêmes résulteraient encore de la contracture du

sphincter pupillaire, de par l'altération des fibres dilatatrices.

Mobilité de la pupille. - Le myosis et 1 inertie pupillaire ne sont

pas fatalement liés l'une à l'autre, mais l'inertie de l'écran irien

est considérablement plus fréquente quand il y a myosis que

lorsque les pupilles présentent une largeur moyenne. En général,

cette inertie se manifeste assez indistinctement pour les divers

excitants. Elle peut être absolue. Il n'existe aucun rapport entre

elle et la présence ou l'absence du phénomène du genou. La dila-

tation pupillaire qui succède aux excitations de la sensibilité

générale, des organes des sens, de l'activité psychique est moins

nette chez le vieillard, quand la mobilité pupillaire est amoindrie ;

elle demande chez lui de bien plus fortes impressions que chez

les adultes. L'ensemble de ces allures s'explique par un trouble de

l'innervation du grand sympathique cervical et du système ner-

veux en général, par des modifications histologiques de l'iris et des

vaisseaux irions. P. K.

XVII. Nouveaux cas de tabès chez L FEMME; par P.-J. 1BIUS.

(Cbl. f. Ncrucrtlccilh., 188, n" 20.)

L'auteur avait déjà dans les noa 9 et 12 du même journal, rap-

porté descas de tabès chez la femme; dans le présent travail qui

contient treize nouvelles observations, il arrive aux conclusions

suivantes :

1) Dans la majorité des cas de tabes chez la femme on a pu

retrouver la syphilis dans les antécédents, et, dans presque tous, se

trouvaient des circonstances qui rendaient très probable l'exis-

tence d'une infection antérieure.

2) Chez les vierges on n'a pas observé le tabes.

3) Au moment du début du tabès les malades étaient en moyenne

âgées de trente-deux ans; l'intervalle entre le moment de l'infec-

tion et le début du tabès était en moyenne de sept ans.

4) La syphilis avait toujours été d'une forme légère. On ne trou-

vait plus de signes nets de syphilis, ni sur les malades chez lesquelles

l'infection était notoire, ni sur celles chez lesquelles elle était seule.

ment probable.

234 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

S) Les causes occasionnelles de tabes manquaient absolument

dans la plupart des cas; celles que l'on trouvait consistaient en

accidents puerpéraux, '.surtout en hémorrha-ies, en des cas

isolés, refroidissement, émotions morales, prédisposition neuropa-

thique. - C. Marie.

XVIU. Contribution A la question DE l'étiologie DU tabès dorsal;

par M. BERNIIARDT. (Centralbl. /. Nervenleeilk., 1883 r.)

Examen de vingt-six cas de tabes portant sur vingt-trois hommes

et trois femmes. Dans ce nombre dix avaient certainement eu la

syphilis dont trois femmes, cinq l'avaient peut-être eue (accidents

secondaires douteux). Des onze qui restent, sept avaient été

exposés soit à l'humidité, soit à un travail exagéré dans de mau-

vaises conditions d'hygiène et d'alimentation (humidité, indigence

etc.); les quatre autres appartenaient à une classe sociale aisée

et ne présentaient aucun élément étiologique en rapport avec le

tabès. Sur les quinze individus atteints de syphilis, vraie ou dou-

teuse, huit accusaient en même temps les causes pathogénétiques

de l'ataxie locomotrice (excès, fatigues, froid humide, misère), de

sorte qu'en réalité sept tabétiques seuls relevaient de l'infection

syphilitique sûre ou probable. Sur ces vingt-six tabétiques, quinze

appartiennent à une sphère sociale peu relevée ou à la classe

pauvre; on y compte neuf syphilitiques et six individus indemnes

de syphilis : onze ressortissent à la clientèle privée, et se dédou-

blent en six infectés et cinq sujets sains. P. K.

XIX. Contribution A L'ÉTUDE DES troubles DE coordination dans L'EN-

FANCE; par A. Erlenmeyer. (Centrulbl. f. Nervenheilk., 4883.)

Etude symptomatique d'un fait très intéressant, caractérisé,

chez un enfant de huit ans, par du strabisme interne de toit

droit, des mouvements incessants dans la langue, de temps à

autre des convulsions dans lesmuscles de la face, surtout à droite,

une sorte d'aphasie alaxique mécanique (anarthrie), enfin de

l'ataxie dans les deux jambes. Les deux extrémités supérieures

sont constamment en mouvement; intégrité de la sensibilité;

signe de Romberg. Diagnostic de Friedreich : affection médul-

laire ; deErb : chorée minor. Après discussion, Erlenmeyerconclut

à l'ataxie héréditaire2, à raison de l'âge auquel l'enfant a été atteint

(cinq ans), à raison de la consanguinité de ses générateurs, à

raison de l'ataxie locomotrice et statique, à raison de la consta-

tation passagère d'un nystagmus ataxique, de l'absence des

1 Voy. Archives de Neurologie.

2 Idem.

HEbUE DE l'A'l'HUI.UUIE \EIiVEUE. 255

réflexes tendineux patellaires, de l'intégrité de la sensibilité. Sous

l'influence d'injections sous-cutanées de curare, de l'hydrothérapie,

et des courants continus (colonne vertébrale et grand sympathique)

le slrabisne disparait; une saison à Wildbad améliore les troubles

de la parole. Les autres symptômes persistent. P. K.

XX. Sur UNE PSEUDU-HYPEI2TR01'lllE des muscles; par 0. Berger

(Arch. f. Psych., XIV, 3.)

Rédaction de l'histoire de deux faits. Un seul est accompagné

d'autopsie. En voici la teneur (Obs. 1). Dès les premières années

de la vie, le système musculaire devient malade; la maladie

s'aggrave et progresse à la suite d'une rougeole; des accès d'épi-

lepsie se montrent à l'âge de six à huit ans; le patient meurt à

seize ans de tuberculose; il y avait, dans l'espèce hérédité, névro-

pathique. On trouve presque tous les muscles surchargés de graisse :

les cloisons ont aussi subi, après l'hyperplasie conjonctive, l'en-

vahissement graisseux; la plupart des fibres striées ont simplement

diminué de volume; peu d'entre elles sont en état de dégénéres-

cence parenchymateuse. Comme, cinq ans avant la mort, une

bribe des gastrocnémiena présentait une prolifération interstitielle

bien plus accusée, l'auteur pense qu'il y a eu d'abord myopathie

interstitielle, les travées de nouvelle formation ayant graduelle-

ment atrophié les faisceaux contractiles; la substitution de la

graisse se serait effectuée eu dernier lieu. P. K.

XXI. Un cas DE névrite multiple; parF.-C MUELLER. (ri7'Ct.

f. Psycit., XIV, 3.)

Une alcoolique de soixante ans est atteinte d'un rhumatisme

articulaire subaigu accompagné de délire qui se term'ne par de

la mélancolie agitée avec désordre dans les idées. En même temps

on constate de la paralysie ou de la parésie étendue de plusieurs

muscles : extenseurs de la main; extenseurs et fléchisseurs des

doigts; extenseurs et fléchisseurs de la jambe, etc.. (flaccidité et

atrophie); les mouvements d'ensemble sont encore possibles, mais

ils sont faibles et incertains. Intégrité de la sensibibité. Réaction

dégénérative, mort subite; l'autopsie révèle une tuberculose pul-

monaire. On trouve au microscope une dégénérescence atro-

phique, ou une tuméfaction vitreuse des fibres musculaires, une

dégénérescence granulo-graisseuse des branches nerveuses intra-

musculaires, dégénérescence qui occupe également les troncs,

mais y est moins accusée; intégrité des vaisseaux. On n'a pas

songé à suivre les nerfs jusqu'au centre, mais on a examiné la

moelle et le bulbe qui sont intacts. Le rôle du rhumatisme est

256 REVUE DE PATHOLOGIE NElt'LUbE.

patent. L'alcoolisme, l'âge avancé entrent également eu ligne de

compte dans la genèse de l'ensemble des accidents enregistrés.

P. K.

XXII. Contribution A l'étude DE la névrite DÉGÉNÉRATIVE multiple;

par 0. Vierordt. (Arch. f. Psych., XIV, 3.)

L'observation principale de ce mémoire concerne une jeune

fille de vingt-trois ans, syphilitique, atteinte de phthisie au début.

A la suite d'un refroidissement, elle présente de l'affaiblissement

avec engourdissement des extrémités inférieures et des douleurs

articulaiies. Puis les extrémités supérieures s'atrophient rapide-

ment. Quatre semaines après le début des accidents, réaction

dégénérative complète ou partielle, suivant leb régions explorées.

Finalement, paralysie totale des jambes, presqu'absolue des bras.

Dans le cours de l'affection, on a noté des douleurs spontanées

très faibles, des zones d'hyperesthésie extrêmes sur la peau et

dans les muscles, une diminution évidente de la sensibilité tac-

tile. La paralysie gagne le tronc et le diaphragme (fréquence

très grande du pouls); graduellement, la prostration devient ex-

cessive ; délire; incontinence de l'urine et des matières; accidents

du décubitus ; oedème des extrémités; un peu de fièvre. Mort cinq

mois après les premiers phénomènes. Ou trouve une dégénéres-

cence très accusée des nerfs périphériques, du nerf phrénique et du

nerf vague; le microscope révèle qu'il s'agit d'une dégénérescence

semblable à la dégenération secondaire consécutive à la section

et à l'écrasement d'un nerf; atrophie graisseuse et même cireuse

du tissu musculaire correspondant. P. K,

XXII RECHERCHES expérimentales ET ANATOMO-PATHOLOGIQUES sur

les rapports qui rattachent la sphère visuelle (de Muiik i) Aux

centres optiques infra-corticaux et au nerf optique; par MONA-

r,ow. (Arclc. f. Psych., XIV, 3.)

1. D'abord deux séries d'expériences chez les lapins et les chats

nouveau-nés. Aux uns on enlève des zones circonscrites du dé-

partement occipital. Aux autres on énuclée le globe de l'oeil. Chez

quelques lapins, on pratique la destruction des fibres de la

capsule interne et de la couronne rayonnante dont l'expérience

démontre la dégénérescence à la suite des résections de la zone A.

Au bout de quelques mois, on tue les animaux, et l'on procède à

un examen histologique attentif, après macération dans le bi-

chromate de potasse et d'ammoniaque. M. Monakow a de cette

0

i V. Archives de Neurologie, 6. VI, p. 403, et Progrès médical, 1879,

no 10.

REVUE LE PATHOLOGIE NERVEUSE. 257

façon trouvé ce qui suit : Chez le lapin les cellules du corps ge-

nouillé externe et du pulvinar, la substance blanche moyenne du

tubercule quadrijumeau antérieur, sont en grande partie di-

rectement unies à la sphère visuelle (zone A). Le nerf optique de

cet animal est, par l'intermédiaire des centres infra-corticaux,

en rapport étroit avec les troisième et cinquième couches de l'é-

corce occipitale. Il en est de même chez le chat. La résection

de régions circonscrites de la sphère visuelle entraîne (six à huit

semaines après l'opération), des arrêts de développement qui

portent sur les centres visuels infra-corticaux et se propagent

sans interruption aux deux nerfs optiques. Les zones AI A2 A3 ',

sont particulièrement en rapport avec le corps gemouillé externe

et le pulvinar; les zones AI et A2 sont aussi eu rapport avec le tu-

bercule bi-jumeau antérieur. Les éléments corticaux en question

sont directement rattachés aux cellules ganglionnaires du corps

genouillé externe et du pulvinar; leur mode d'union avec le tu-

bercule bi-jumeau antérieur est encore obscur. La disparition des

cellules nerveuses de ces régions infra-corticales entraîne un

anéantissement partiel de leur réseau gris; mais l'inverse n'est

pas vrai. Les racines du nerf optique prennent naissance dans le

réseau gris du corps genouillé externe et du pulvinar. L'atrophie

des nerfs optiques qui succède à l'extirpation de la sphère visuelle

a lieu par l'intermédiaire de la nécrose des cellules ganglion-

naires du pulvinar et du corps genouillé externe, et directement,

par la disparition du réseau gris de ces organes. Quant à l'atro-

phie de la racine du nerf originaire de la substance blanche

superficielle du tubercule bi-jumeau antérieur, on n'en saurait

préciser le mécanisme. - Confirmation des opinions de Gudden

et Nicali sur l'entrecroisement du nerf optique ; confirmation des

assertions de Ganser , sur le trajet des fibres du nerf optique dans

le chiasma. De plus, le faisceau entrecroisé parait presque exclu-

sivement uni à la moitié médiane de la sphère visuelle, le

faisceau non entrecroisé se rendant à la moitié latérale de la

même région. La zone corticale dont l'atrophie provoque la

dégénérescence du système des fibres optiques correspond assez

sensiblement, comme étendue, à la sphère visuelle du chien, de

Munk; mais chaque district de l'écorce empiète l'un sur l'autre,

de sorte qu'il existe un champ de passage qui n'est pas à né-

gliger.

II. La seconde partie de ce travail a trait à des observations

anatomo-pathologiques et cliniques, pris chez l'homme. Elle n'est

pas encore entièrement publiée. P. K.

i Voiries figures du Progrès Médical de 1879, ne 10.

2 Voir les Archives de Neurologie.

Archives, t. IX. 17 î

258 REVUE LE PATHOLOGIE NERVEUSE.

XXIV. Un cas d'arrêt de développement dans la SPHERE motrice du

cerveau; parJ. Gensen. (Arch. f. Psych., XIV, 3.)

Il s'agit d'une idiote épileptique, morte à l'âge de trente ans,

dont le développement somatique fut tardif; elle avait appris à

marcher à rage de six ans; l'épilepsie datait de la puberté.

L'éducation en fut encore possible; elle parlait imparfaitement.

mais elle correspondait suffisamment avec le monde extérieur, et

possédait un certain degré de discernement et de spontanéité.

Analgésie. L'étude nécroscopique démontre qu'il s'agit d'une ré-

duction delà substance nerveuse cérébrale, surtout au niveau de

la troisième frontale, de l'opercule et de l'insula sous-jacent des

deux côtés, mais non de microcéphalie. L'écorce parait même un

peu plus épaisse que normalement. Il y avait en un mot assez de

tissu pour que la vie psychique motrice et sensorielle persistât :

mais les facultés et les fonctions étaient en rapport avec l'état ru-

dimentaire du développement histologique. L'épilepsie n'était que

l'expression d'une excitabilité réflexe témoignant de l'insuffi-

sance des centres d'arrêt corticaux. La mort résultait d'une

hémorrhagie sous-arachnoïdienne. Une planche accompagne ce

travail. P. K.

XXV. Appendice au mémoire intitulé : Sur une affection semblable

au tableau SYIYTOll9TIQU de la DÉGÉNÉRESCENCE GRISE CLItÉISItO-

spinale ; par C. WESTPH9L. (A9'CIL. f. Psych., XIV, 3.)

Aux cas déjà signalés ' témoignant du tableau clinique de la

dégénérescence grise cérébro-spinale multiloculaire sans altéra-

lion anatomique correspondante, il convient d'ajouter ceux de

Killian (thèse de Strasbourg 1876) et Leyden (communication

privée). Par conséquent, quelle que soit l'analogie, la perfection,

la netteté de l'ensemble symptomatique, on doit user de la plus

grande réserve dans le diagnostic. Un signe différentiel certain

entre la dégénérescence réelle et les pseudo-dégénérescences

(névroses), c'est l'atrophie du nerf optique; l'existence de cette

dernière prouve qu'il y a dégénérescence, mais son absence

ne prouve rien. Quant à la contraction paradoxale, il serait pré-

maturé de vouloir lui attribuer de la valeur diagnostique. P. K.

XXVI. RECHERCHE expérimentale des manifestations connues sous

le NOM DE « phénomènes tendineux », en tenant le plus de compte

possible DES essais entrepris chez l'homme ET DES observations

pathologiques ; par Ch. Rosenheim. (Arch. f. Psych., XV, 1.)

Ce travail nous rappelle celui de Brissaud. (Thèse de Paris, 1880,

i Voy. Ai-chives f" A'euro'ogie.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 259

ch. VI, p. 83 1.) L'auteur a aussi inventé un appareil de recherches

qui pei niil d'enregistrer mécaniquement les résultats et les allures

physiologiques de l'excitation des tendons et de ses modifications

pathologiques. L'analyse ne saurait suppléer à la lecture du

mémoire, à l'étude des figures et des tracés, à l'appréciation

personnelle des diverses circonstances dans lesquelles M. |Rosen-

heim opérait. 11 pose les conclusions suivantes : 10 le phénomène

du genou (réflexe tendineux patellaire) peut être produit par cers

taines excitations électriques du tendon, abstraction faite de la

traînée du courant; 2° les excitations, déchaînées par chaque

décharge de l'appareil magnéto-électrique à rotation, s'addi-

tionnent et placent les organes nerveux centraux dans un état

d'irritation croissante. Une longue action de ce genre se réfléchit

sous la forme de contraction du triceps fémoral ; - 3° comme

maintenant, d'après Kronecker et Stiplin- « les réflexes ne sont

dégagés que par des heurts répétés sur les cedtres nerveux» rien

ne s'oppose à ce qu'on interprète le phénomène du genou comme

un réflexe. P. K.

XXVII. Sur un cas de paralysie spinale spasmodique (terme consa-

cré) avec nécropsie ; observation suivie de quelques remarques

relatives à la lésion primitive du cordon latéral des pyramides;

par C. WESTPHAL. (Arch. f. Psych., XV, 1 1.)

L'observation, très complète, se résume parfaitement dans

l'énoncé textuel de la suscription : Aucune prédisposition héré-

ditaire. En 1873, ulcère syphilitique (cicatrice préputiale). En 1876,

phénomènes spasmodiques occupant les extrémités inférieures

qui se montrent d'abord au moment de la miction. Parésie spas-

modique croissante ; convulsions spontanées; exagérations des ré-

flexes tendineux ; diminution du sens de la température dans les

membres inférieurs, avec un peu d'exagération de la sensibilité

à la douleur dans les mêmes régions. Longtemps cet état persiste

à peu près tel quel. En juillet 1880 survient une paralysie rapide

du bras droit; en même temps apparaissent des phénomènes

cérébraux. Mort dans le coma. Diagnostic. D'abord, dégénéres-

cence multiloculaire de la moelle en lésion associée de certains

cordons, en réservant la possibilité d'une dégénérescence isolée

des cordons latéraux ou des faisceaux pyramidaux ; plus tard :

passage de la dégénérescence multiloculaire à l'encéphale.

Autopsie. Exostose du pariétal droit. Ramollissement de la subs-

1 Thèse de Brissaud, 1880, eh. VI, p. 83.

3 Voy. Archives de Neurologie (Société de psychiatrie et maladies ner-

veuses, de Berlin), t. IV, p. 247.

260 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

tance blanche, surtout dans l'hémisphère cérébral gauche. Au

microscope, la moelle présente une dégénérescence des cordons

latéraux pyramidaux et cérébelleux; affection commençante des

cordons postérieurs; pyélonéphrite; hypertrophie et dilatation de

la vessie ; oedème et hypostase des poumons ; bronchite catarrhale.

C'est donc bien, termine M. Westphal, une paralysie spinale

spasmodique, en rapport avec la lésion des cordons latéraux;

t'atteinte concomitante des cordons postérieurs ne descend

jamais, dans les cas de ce genre, jusqu'à la moelle lombaire

Il n'existe pas, d'ailleurs, dans la science, de fait relatif à une

dégénérescence isolée primitive des cordons latéraux; pareille

altération est, d'ordinaire, le prélude d'une amyotrophie. On

trouve cependant une localisation latérale primitive dans la para-

lysie générale des aliénés, localisation n'ayant rien à voir avec

la dégénérescence secondaire descendante. Cette lésion, de même

que les formes associées de destruction des cordons qu'on observe

chez les aliénés paralytiques, procède alors d'un processus d't'KMO-

lution en vertu duquel les systèmes histologiques qui, dans le déve-

loppement de la moelle, ferment la marche, c'est-à-dire les sys-

tèmes où se forment le plus tardivement les manchons de myéline

(faisceaux pyramidaux, puis cordons postérieurs et faisceaux laté-

raux cérébelleux) sont ceux qui rétrocèdent les premiers, ceux

dans lesquels les manchons myéliniques dégénèrent et dispa-

raissent ; en effet, de même que les cellules granuio-graisseuses

précèdent l'organisation des cordons de substance blanche ou de

leur myéline, de même la mort de ces tractus a lieu par le

retour aux mêmes éléments. Le mécanisme du processus nous

échappe, mais sa fin marche de pair avec 1'liyper-ènèse du tissu

conjonctif fibrillaire. Les manifestations cliniques qui émanent

de la lésion combinée des cordons postérieurs et latéraux diffèrent

chez le paralytique général et chez l'individu psychiquementsain,

en ce que, dans le dernier cas, la condition anatomique de la

genèse du complexus symptomatique repose d'une part sur l'at-

teinte continue des cordons latéraux de haut en bas et en même

temps sur l'intégrité des cordons postérieurs, à partir de la

portion inférieure de la moelle dorsale et dans toute la moelle

lombaire; les cordons postérieurs sont-ils lésés plus bas ou dans

leur segment externe, les phénomènes spasmodiques font défaut.

Chez le paralytique général, au contraire, la topographie des

lésions énoncées correspond simplement à de la faiblesse paraly-

tique, associée à du tremblement et à une exagération des phéno-

mènes du genou, parce que, jamais, dans l'espèce, la lésion des

cordons latéraux n'atteint le même degré que chez les sujets dont

l'intelligence est intacte, son existence étant abrégée par maintes

1 Voy. Archives de Neurologie.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 261

complications 1. - A ce propos, le ramollissement cérébral

observé ici comme accident ultime constitue une particularité

remarquable ; malheureusement on a négligé la recherche anato-

mique approfondie de la région. P. K.

XXV111. Contribution LA casuistique DE la sclérose cérébelleuse;

par W. Sommer. (Arch. f. Psych., XV, 1.)

Observation très incomplète concernant un idiot de trente ans*

l'idiotie fut consécutive à une encéphalite à l'âge de trois ans. Ce

malade s'agite tout à coup pendant sept semaines et meurt subi-

tement. On trouve à l'autopsie une pachyméningite externe, une

leptoméningite chronique, une poussée d'hyperémie méningée,

une hydrocéphalie chronique externe et interne, de )'oedème

cérébral, de la sclérose avec atrophie de tout le cervelet, moins

le vermis et les parties qui relient cet organe au reste de l'encé-

phale. Toutes ces altérations sont anciennes ; leur progression

croissante a évidemment tué le patient. Peut-être le bulbe s'est-il

mis de la partie; cet organe n'a pas été examiné. P. K.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE

XIII. De la conscience dans LES états connus sous LE nom d'états

d'inconscience; par A. PicK (Arc7a. f. Psych., XV 1).

L'auteur a examiné, à la lumière d'une observation de folie

épileptique, très minutieusement prise, les assertions de Gnauck,

d'après lesquelles il y a, dans l'espèce, un état anormal de la

conscience analogue à celui du rêve, et non une perte de con-

naissance totale; aussi le souvenir de ce qui s'est passé pen-

dant l'accès n'est-il pas toujours éteint, et présente-t-il des

formes variées; tantôt (pendant l'attaque) l'individu perd la notion

du monde extérieur, tantôt il n'y a qu'obnubilation psychique

(psychose épileptique 2). M. Pick confirme ces opinions et essaie

l'explication d'une pathogénie somatique. Ainsi, il est des états

1 Voy. Archives de Neurologie. Revues analytiques.

2 W t. V, p. 372.

262 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

d'inconscience avec alexie, avec agraphie, qui, tout en traduisant

des modifications entre les rapports de la teneur de la connais-

sance et le monde extérieur, se limitent surtout aux impressions

sensorielles et notamment à celles d'ordre optique. Sans parler

des hallucinations et des illusions qui peuvent exister en même

temps, on voit le malade méconnaître son entourage, son écriture,

et ne pouvoir écrire lisiblement. C'est là de la perte de la vision

mentale des objets et des signes ' ; la perte passagère des images

corn iiiénioralives des impressions visuelles, résulte de troubles

moléculaires et circulatoires dans les postes terminaux où se

peignent ces images. Ce sont les degrés divers de ces mo-

difications locales qui font que, pour une même phase, les

impressions sensorielles récemment emmagasinées demeurent

indemnes, tandis que les images commémoratives d'origine

ancienne sont altérées. C'est pourquoi il existe une conscience

avec amnésie, une conscience sans amnésie, et des états intermé-

diaires de la connaissance. Ces particularités se rencontrent encore

dans les maladies nerveuses et cérébrales d'un autre ordre, voire

dans le délire de la fièvre traumatique (une observation à l'appui). 'i.

P. K.

XIV. LA RESPONSABILITÉ LÉGALE PEUT-ELLE ÊTRE ACQUISE PAR LES imi3e-

CILUS pourvus d'éducation ? par G.-E. SHUTTLKWORTH. (Journal Of

mental Science, janvier 1884, p. 467.)

L'auteur s'explique tout d'abord sur ce qu'il entend désigner par

le mot imbécile; il considère comme imbécile toute personne qui

présente une insuffisance intellectuelle soit congénitale, soit sur-

venue dans la première enfance, pourvu que le degré de cette

insuffisance soit moindre que dans l'idiotie.

Il étudie ensuite l'état mental des imbéciles au point de vue de

leur capacité à déposer en justice, mais surtout au point de vue de

leur responsabilité légale en matière criminelle. <

Pour manquer de cette précision absolue qui, seule, en rendrait

l'application facile, les conclusions de 111. Shuttleworth n'en sont

pas moins fortjudicieuses. 11 pense avec raison que la responsabi-

lité d'un imbécile est variable suivant sa capacité mentale primi-

tive et aussi suivant le degré de développement intellectuel qu'aura

produit chez lui l'éducation. Tel imbécile par exemple, peut, en

commettant un acte, savoir que cet acte est blâmable, sans se

douter le moins du monde qu'il est criminel ; la notion usuelle

du blâmable aura pénétré dans son cerveau par l'éducation; la

notion plus élevée et moins fréquemment usitée du crime ne lui

est pas familière ; il peut ne pas la posséder : comme exemple

1 Voy. Archives de Neurologie, t. VI, p. 403, et Crouigneau, Paris, 1884.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 263

extrême, l'auteur cite le cas d'un imbécile qui, trouvant un

homme endormi, lui coupa la tête, pcpsant qu'il serait fort plat-

sant devoir le dormeur chercher sa tête à son réveil ; cet imbécile

croyait avoir fait une mauvaise plaisanterie, très propre à lui

attirer quelque correction; il ne savait ni ne comprenait qu'il

avait commis un crime. En somme, la responsabilité des imbéciles

pourvus d'éducation, trop négligée en médecine légale, est va-

riante suivant les cas et ne peut être équitablement mesurée

qu'après une étude attentive de chaque cas en particulier.

R. 1)1. C.

\V. UN CAS DE TABES HORS\L AVEC TROUBLE MENTAL; par L. GOLDSTEIN.

(Central6l. f. Ne·verrlteilk., 1883.)

Observation d'ataxie suivie de lypémanie anxieuse avec idées

d'empoisonnement; on veut « le tuer, le voler »; on agit sur lui

à l'aide d'une machine infernale; pas d'autopsie. M. Goldstein

insiste sur l'intégrité, dans l'espèce, de la vue et des nerfs crâniens,

sur les douleurs excentriques eu rapport avec les conceptions déli-

rantes. 11 tendrait cependant à se rattacher à l'idée que la psychose

et les tabès étaient indépendants. P. K.

XVI. Psychose ET carcinome; par R. Neuendorff. (Centrnl6l. f. Ner-

venlceillc., 1883.)

L'observation dont il s'agit met en relief des idées fixes d'em-

poisonnement, des hallucinations de la vue et de l'ouïe (le malade

voit martyriser des animaux et les entend crier), un état de dépres-

sion profonde accompagné de désordre, de mobilité, de contra-

diction, dans les idées (lamentations) et les actes. Le patient

émacié, cachectique, ne présente aucun des signes du cancer; on

attribue, par conséquent, sa déchéance somalique à son défaut

d'alimentation. T. terminale, le jour de la moit, 3 ? 1.- Toute la

petite courbure, du cardia au pylore, est envahie, presque dans la

moitié de la paroi, par un carcinome médullaire. P. K.

XVII. CoaTmsBrnoN LA catatonie; parR. NEUENDORFF. (Centralbl.

J'.Ncrvcnlteilk., 1883').

A la suite de l'exposé détaillé de deux observations d'aliénation

mentale, l'auteur passe à la discussion symptomatique. Les symp-

tômes relevés seraient caractéristiques de la lobe systématique et

de la mélancolie stupide, s'il ne s y était joint des phénomènes

tétaiioides et cataleptoïdes qui leur impriment un cachet spécial,

et les rangent dans la classe de la catatome de Kahlbanm. P. K.

1 Voy. les Archives de Neurologie.

264 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

XVIII. CONTRIBUTION A la pathologie ET A l'anatomie PATHOLO-

GIQUE DE la paralysie progressive; par ZACHER. (Arch. f. Psych.,

XIV, 3'.)

M. Zacher s'occupe ici de certains symptômes ou groupes symp-

tomatiquesquiserattachent aMa : aM<t ? M coHM<Mes.I. En premier

lieu, l'allure des réflexes tendineux et cutanés, au moment ou à la

suite des attaques, est étudiée à l'aide de quatre groupes d'obser-

vations. Ce sont : 4° des paralysies générales à moelle indemne

(nécropsies); 2° des paralysies générales avec sclérose funiforme

des deux cordons latéraux (nécropsies); 3° des paralysies générales

avec sclérose également systématique des cordons latéraux et des

cordons postérieurs (nécropsies) ; 4" des paralysies générales ne

pouvant être classées dans les catégories précédentes, ou pouvant

y être classées, mais sans autopsie. Une analyse minutieuse el

judicieuse aboutit aux conclusions suivantes.

Les réflexes tendineux paraissent toujours exagérés sur la moitié du

corps en proie aux phénomènes d'excitation moteurs, même quand ces

phénomènes d'excitation se compliquent de phénomènes paralytiques,

inversement, les réflexes tendineux sont plus faibles ou disparaissent

complètement dans la moitié du corps où l'on ne constate que de la

paralysie de la motilité. Relations homologues entre les réflexes cutanés

et l'état de la sensibilité, c'est-à-dire que le réflexe cutané, et en parti-

culier le réflexe crémastérien est affaibli ou nul dans la région où les

sensations sont émoussées ou abolies. Presque toujours, quand la sensi-

bilité à la douleur est obtuse, on constate simultanément de la parésie

motrice du même côté, de sorte que l'abolition des réflexes cutanés

devient un signe de parésie. La genèse de ces manifestations par excès

ou par défaut réside dans l'atteinte directe ou à distance des centres

corticaux en connexion avec les centres réflexes de la moelle; elle n'im-

plique aucunement l'idée de la destruction immédiate ou consécutive des

éléments anatomiques.

Pour M. Zacher, les phénomènes tendineux sont de vrais réflexes2,

car le heurt d'un tendon provoque souvent avec la contraction du

muscle correspondant des convulsions légères dans le muscle

voisin, ce qui n'a pas lieu quand on frappe sur l'os; car, en outre,

le choc du ventre musculaire même ne produit jamais, quel que

soit l'état d'hyperexcitabilité mécanique de ce dernier, des con-

tractions aussi fortes ni des convulsions successives. De plus, il n'y

a pas de rapport de cause à effet entre les tensions et les raideurs

musculaires qui très fréquemment accompagnent l'hyperexcita-

bilité réflexe et celle-ci; les faits démontrent que ce sont de

1 Voy. les Archives de Neurologie.

2 Idem.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 265

simples concomitances accidentelles. Il. L'auteur passe à

l'examen de quelques troubles de la motilité qui se rattachent aux

attaques congestives. 10 Les mouvements automatiques coordonnés,

adaptés, conformes au but proposé, qui présentent en somme le

caractère de mouvements voulus, intentionnels, et se rattachent

d'ordinaire aux attaques accompagnées de phénomènes d'excita-

tion moteurs, s'observent généralement au bras, rarement à la

jambe ou à la tête. Les uns émanent probablement de pares-

thésies, d'obnubilation des perceptions sensorielles, d'hallucina-

tions; les autres, vraiment automatiques, dérivent d'excitations

centrales; 20 la déviation conjuguée de la tète et des yeux qui suit

l'attaque est un phénomène d'excitation moteur. Après critique

et réflexion approfondie sur les cas conformes et non conformes

aux allégations de Prévost et Landouzy, M. Zacher admet que,

dans les attaques congestives où l'on constate des phénomènes

d'excitation unilatéraux purs, la tête et les yeux regardent le côté

lésé; dans celles qui se traduisent par des paralysies simples

également unilatérales, la tête et les yeux regardent le côté

opposé à la lésion; 3° les troubles du sens musculaire, assez fré-

quents, mais difficiles à constater, consistent ici dans la perte de

notion de situation des membres et dans l'impossibilité de tirer la

langue, bien que ces organes ne soient pas paralysés. Nec plura.

111. Ce dernier paragraphe est consacré aux troubles de la vue ',

qui accompagnent et suivent les attaques congestives. Les docu-

ments que nous possédions jusqu'ici se trouvent complétés par

huit nouvelles observations. De ce matériel il conviendrait de

déduire que les attaques congestives se traduisent certainement

par deux genres de troubles visuels : 1 par de la cécité psychique

pure, sans qu'on soit, jubqu'à nouvel ordre en mesure de décider

si elle est constamment bilatérale, si elle s'accompagne de troubles

de la motilité du côté droit, de dysphasie etc. ; 2° par de l'héinia-

nopsie vraie, ou du moins par un symptôme semblable; ces deux

forment s'associent probablement bien des fois (trouble visuel

combiné). L'existence d'une amaurose exclusivement unilatérale

est aujourd'hui des plus douteuses. La localisation anatomique

de l'hémianopsie porte évidemment sur le cerveau postérieur; on

ne peut préciser la nature du processus, mais le trouble étant

transitoire, on peut affirmer que la lésion n'est pas grossière.

IV. M. Zacher a observé chez deux malades, pendant l'évolution

de leurs attaques, un singulier trouble vasomoteur ; en effleurant

la peau à l'aide d'un objet mousse, on déterminait une raie,

d'abord blanche, puis d'un rouge intense, sur laquelle poussaient

de petites élevures analogues à celles de l'urticaire (transsudation

1 Voy. Archives de Neurologie, t. VI, p. 403 (travail d'Hirschberg) ; voy.

la thèse (le Croitigneaii stir la Ilision nientale. Paris, 1994. :

266 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

constatée de sérosité). Ces deux paralytiques généraux, qui pré-

sentaient une s mptomalolo;ie différente, avaient tous deux delà

sclérose des cordons latéraux. V. Dans la revue d'ensemble

terminale, nous devons noter que l'auteur a toujours invariable-

ment observé 1'unilaLéralité des phénomènes parétiques ou con-

vulsifs, qu'il considère certains types d'attaques congestives comme

de vrais complexus morbides en rapport avec des sphères corti-

cales qu'il importera d'étudier et de préciser plus tard, qu'enfin

l'attaque n'émanerait pas, d'après lui, d'une exacerbation de

l'inflammation chronique puisque, même quand l'étal est grave, la

température ne s'élève pas, tandis qu'elle monte à propos d'at-

taques légères, et que cette allure de la température doit faire

songer suivant le cas, à l'atteinte des centres thermiques ou à leur

intégrité; il y a là matière à un travail spécial. P. K.

XIX. DE l'influence DE l'ivrognerie sur la genèse DE l'idiotie;

par Kind. (Alla. Zeitschr. f. Psyle., XL, 4.) .

Long travail de statistique qui se résume de la façon suivante :

Au premier abord, on trouve que sur 538 idiots du sexe masculin,

dans 56 cas, leurs aïeux buvaient; sur 385 idiotes, dans 49 cas,

leurs aïeux faisaient des excès de boisson. Cette ivrognerie ata-

vique, dont la proportion apparente est de 105 : 923 se décom-

pose en : ivrognerie à la fois paternelle et maternelle, ivrognerie

paternelle, ivrognerie paternelle et graud'paterneile d'un côté,

etc.. Mais est-elle bien réellement la cause de l'idiotie. Après

avoir fait le décompte, dans l'espèce, du genre de spiritueux, des

accidents auxquels ils ont donné naissance chez les ascendants,

de la profession du père, de l'âge des parents au moment où l'enfant

est venu au monde, de la consanguinité, des tares héréditaires

de tous ordres, de la puissance génératrice et des conditions hy-

giéniques des familles, du caractère de la grossesse envisagée en

soi ou par rapport aux autres accouchements, du mode d'évolu-

tion de l'idiotie dans les familles d'ivrogues et de son degré, du

genre de mort de ces idiots-là et du poids de leurs cerveaux, selon

l'âge ou le sexe, etc., etc. M. Kind prouve que, sur ses 923 idiots,

il n'y avait en somme que 31. cas (au lieu de 105) atlribuables à

l'ivrognerie chez les ascendants; la proportion pour cent, qui

semblait être de f t : 18 devient en réalité 3 : 68. Et encore est-on

incapable de préciser l'enchaînement de diverses circonstances

intervenant ici, les rapports pathogénétiques exacts entre les

différents éléments étiologiques. Ainsi, il est bien souvent impos-

sible de déterminer si l'ivrognerie n'était pas elle-même le symp-

tùme d'une psyclrose. P. K.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE 267

XX. Sur l'extension de la dégénérescence physique chez les CRI-

11 : VELS ET LES «APPORTS QUI EXISTENT ENTRE LES SIGNES DE DEGENE-

RESCENCE ET les névropathies ;- par Kneciit (Allq. Zeitschr. /.

Psych., XL, 4').

1. Sur 1, ? lé individus mâles internés au pénitentier de Wal-

dheim en 1870 et 1877, 379 présentaient des malformations exté-

rieures (taille), appareil dentaire, colonne vertébrale, crâne, face,

etc.); soit 47,7 p. 100, et, dans ce nombre, il n'y en avait que 130

qui ne portassent qu'un seul signe de déchéance somatique. Quant

aux malformations internes, la ressemblance de l'encéphale de ces

sujets avec celui des animaux a été exagérée, mais on rencontre

fréquemment une disposition anormale des circonvolutions, de con-

cert avec les autres signes de dégénérescence extérieurs. Les autres

anomaliesinternes ne sauraient encore être chiffrées, à raison du

trop petit nombre d'autopsies existant. En ce qui concerne les

troubles psychiques, on rencontra soixante fois l'affaiblissement

intellectuel congénital ou acquis au moment de l'incarcération;

23 tombèrent malades au cours de leur peine, à raison d'une pré-

disposition ou d'une affection antérieure. L'épilepsie, le tic con-

vulsif de la face, l'irritabilité du système vasculaire (pouls de vieil-

lard précoce) constituaient autant de tares héréditaires : 72 of-

fraient des cicatrices céphaliques, et, parmi eux, plusieurs étaient

en proie jà des vertiges ou à des convulsions épileptiques; 212,

soit 17,5 p. 100 faisaient des excès alcooliques habituels.

Il. Les signes de dégénérérescencesont-iis plus fréquents chez les

névropathes et les psychopathes que dans l'ensemble de la po-

pulation, et que chez l'homme sain. Sur 75 femmes révélant

des signes de dégénérescence, 59 souffraient de troubles dans

le domaine du système nerveux, psychoses ou autres accidents,

dont M. Knecht enregistre l'énumération eliifftée; 29 d'entre

elles étaient en même temps des héréditaires. Après avoir

minutieusement agité cette question statistique sous des for-

mes différentes, l'auteur pose les conclusions que voici.

1° Ce qu'on désigne sous le nom de signes de dégénérescence

constitue l'expression la plus fréquente de la prédisposition

névropathique ; 2° Les porteurs de ces dégénérescences

possèdent une tendance trois à quatre fois plus grande à contrac-

ter des psychoses et des névroses que les individus normalement

conformés; 3° L'immunité relative aux anomalies de formation

ne constitue nullement, pour les individus touchés par la tare

héréditaire, une garantie qu'ils ne seront pas affectés un jour de

psychoses ou de névroses ; - 4° Quanta la gravité de l'inlpré-

1 Voy. Archives de Neurologie, Sociétés.

268 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

gnation morbide , ce sont les descendants d'épileptiques et de

buveurs qui sont le plus en danger.

Quel rapport existe-t-il entre la fréquence de l'imprégnation

névropathique chez les criminels et son extension dans la popu-

lation non criminelle ? En Allemagne, la prédisposition névro-

pathique est essentiellement plus étendue chez les criminels. Il

est d'ailleurs impossible de décider s'il existe une relation étroite

entre le crâne et la tare névropathique. Mais il est certain que la

fréquence du crime est influencée par les causes sociales, et il

n'est pas douteux que le combat pour la vie ne place les névro-

pathes dans des conditions plus défavorables que tout autre

individu. P. K.

XXI. Contribution au traitement DU refus d'aliments CHEZ les

aliénés; par F. Siemens. (-41,ch. f. Psych., XIV, 3 : XV, 1.)

Long mémoire compact, riche en indications bibliographiques

de tous ordres relatives à cette question (parties I, II, III, IV ').

L'auteur veut prouver que les moyens de contrainte doivent être

remplacés par des procédés naturels, mais adaptés au but à

atteindre. Dans bien des cas, le jeûne des aliénés n'est pas dan-

gereux, pour peu qu'on le surveille, et le malade le rompt spon-

tanément (Obs. I et IV) : en tous cas, ce jeûne est très souvent le

symptôme d'un trouble somatique réel contre lequel la sonde

oesophagienne ne peut rien (Obs, II, III. IV), les oscillations pon-

dérales étant en somme faibles, si l'on réussit à faire prendre à

l'aliéné une petite quantité d'aliments (Obs. X V). Passons du

reste aux conclusions qui se dégagent des quinze faits personnels

1111. Siemens.

1" Le refus volontaire d'aliments chez les aliénés ne met pas les malades

en aussi grand dangerqu'ona a voulu le dire; il suffit, pour s'en convaincre,

de contrôler les allures de l'état somatique et de l'état psychique.

9'' Ce refus résulte, dans la plupart des cas, d'altérations dans l'inner-

vation et les échanges stcechiologiques de ces patients. Il n'est donc

qu'un symptôme d'états morbides de l'économie.

30 Aussi l'organisme devient-il capable de résister pendant un temps

assez long, tout en ne prenant qu'une petite quantité de nourriture,

à la condition qu'on lui évite d'autres dommages et qu'on l'empêche de

perdre ses forces.

4° L'inanition spontanée pour des raisons purement psychiques

n'entraîne par elle-même aucun symptôme inquiétant ni dans le domaine

somatique, ni dans le domaine psychique, tant que le jeûne ne dépasse

pas quatorze jours sans ingestion d'eau, ou cinquante jours avec inges-

1 Nous regrettons cependant d'y voir considérer le jeûne du Dr Tanner

comme démontré.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. ll69

tion d'eau, et tant qu'on ne constate pas la disparition de to p. ioo

du poids du corps.

50 L'alimentation artificielle contre la volonté des malades devient, si

ceux-ci résistent, dangereuse mécaniquement (traumatisme gastro-oeso-

phagien, introduction d'aliments dans les bronches, etc.) et physiologi-

quement, car on ne tient pas compte de la puissance digestive et assimi-

latrice de l'économie.

6° Les dangers qui résultent pour le corps de l'alimentation forcée,

par violence, dépassent encore ceux qui émanent de l'abstinence passa-

gère ou même prolongée.

7" Le meilleur traitement de la sttiophobie, le voici : Solliciter sans

relâche les malades à accepter volontairement des aliments; dans ce but,

leur présenter les aliments, les mets, qu'ils désirent et qui sont faciles

a ingérer. Quand la résistance n'est pas trop grande, la simple alimen-

tation à la cuiller est praticable. Dans les autres cas, on arrive, par les

efforts patients des* médecins et des gardiens, à faire prendre aux mala-

des autant d'aliments qu'il en est nécessaire pour conserver la vie. Si

alors, sur ces entrefaites, la cause patbogénétique s'atténue, si la lésion

physiologique s'améliore, on voit la sitiophobie cesser.

8" Il n'en est pas moins vrai qu'il y a des cas dans lesquels une abs-

tinence prolongée, quoique non absolue, fait dépérir, puis mourir, les

aliénés. Ce sont, la plupart du temps, de vieux lypémano-hypochondriaques

qui, par suite d'une longue période morbide préalable, ont graduellement

perdu leur capacité de résistance et du régénération. On ne saurait les

sauver.même par l'alimentation à la sonde.

9° L'abstinence absolue, pratiquée par des malades vigoureux, pour

des motifs psychiques, n'a pas coutume de durer si longtemps que la

vie s'en trouve menacée.

10' On agira très sagement en ne s'occupant pas d'alimenter pendant

leur accès d'obnubilation de la connaissance les paralytiques généraux,

les épileptiques et autres malades quipeideut pendant ces épisodes pério-

diques, la notion exacte de leurs rapports avec le monde extérieur, car

ces accès se maintiennent rarement longtemps, et par conséquent, la pri-

vation de nourriture ne détermine aucun Danger.

110 L'alimentation à la sonde doit être bornée aux pertes de connais-

sance de longue durée et aux cas de paralysie des voies gastro-oesopha-

giennes supérieures.

12o Les moyens qui viennent d'être consignés nous ont jusqu'à présent

suffi dans tous les cas, et nous espérons nous tirer d'affaire avec eux

dans l'avenir. Si cette manière d'agir devait jamais se trouver en défaut,

nous ne nous découragerions pas, mais nous persisterions à diriger

tous nos efforts sur la découverte d'autres moyens dépourvus de danger

pour le malade. P. K.

XXII. Histoire d'une somnambule EXTRA-LUCIDE, EN tant QUE CONTINT-

BUTIO-4 A l'étude de la porencéphalie (avec trois de5S1l1S$la

plume); par D. L.11DL. (Arch. f. Psych., XV, 1.)

L'observation concerne une fillette de douze ans dressée par sa

mère et deux cabaretiers au rôle de somnambule, sorcière, nécro-

270 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

maucienue, devineresse, médecin. Peu à peu ils lui inspirèrent

une grande confiance en son talent personnel. L'histoire montre

que l'enfant sut développer, dans l'espèce, beaucoup d'intelli-

gence, de tact, de savoir-faire. Cependant elle était infirme; elle

présentait une hémiplégie flasque du bras droit, une hémipa-

rébie très accusée de la- jambe du même côté (atrophie de ces

membres), un nystagnius horizontal des deux yeux avec strabisme

divergent. Mort deux ans plus tard. L'autopsie décèle l'existence

d'une communication infundibuliforme entre l'espace sous-arach-

nddien et le. ventricule latéral gauche. Ce trou porte sur la

partie moyenne des deux circonvolutions ascendantes ; il touche

un peu aux bords limitrophes des lobes frontaux, pariétaux,

temporaux : disposition radiaire des circonvolutions à l'intérieur

de la cavité. En un mot, le segment supérieur de la dépression

comprend la partie inférieure de la frontale ascendante et un

morceau de la première frontale; son segment antérieur occupe

la partie inférieure de la première frontale et la partie posté-

rieure de la deuxième frontale; son segment inférieur se compose

de la partie postérieure de la troisième frontale et des circonvo-

lutions de l'iusulu ; son segment postérieur embrasse la partie

antérieure de la première temporale et la partie inférieure de la

pariétale ascendante avec l'opercule. On peut suivre dans le trou

trois branches vasculaires principales de la sylvienne : 1° l'artère

de la deuxième frontale (front, externe et inférieure); 2° l'artère

de la froii taie ascendante (ceutraleaulérierel; 3° l'artère delà parié-

tale ascendante (centrale postérieure). L'ensemble de l'encéphale

pèse 846 gr. 76. Différence entre l'hémisphère cérébral gauche

et l'hémisphère droit, 33 gr. 34. Dans une analyse critique très

attentive, l'auteur fait ressortir les troubles de la motilité en

rapport avec l'atteinte des circonvolutions motrices, l'absence

d'aphasie par suite du simple déplacement avec intégrité des

éléments anatomiques du centre en quesiion, la conservation des

facultés intellectuelles, la substance corticale n'ayant pas subi de

dommage. Le travail se termine par des remarques sur la genèse

et l'étiologie de la poreucéplialie en général, à la lumière de

toutes les observations connues actuellement 1. P. K.

XXI11. Sur les troubles psychiques consécutifs aux blessures

c'éphaliques ; par IIAKTUANN. (Ai-eh. f. Psych., XV, 4). ? At2 T.

Travail d'ensemble fondé sur des recherches bibliographiques :

observations empruntées les unes aux sources littéraires citées, les

autres au directeur Poetz. Un tableau réunit vingt-huit cas accom-

' Voy, Archives de Neurologie, travail de Kundrat, t. VI, p. 156.

ItVU : : U Y.11'HUt.o( : IL \1N1 ? L. 271

pa"'u(j5 d'autopsies et met en relief les noms d'auteurh, le genre

du traumatisme, les suites immédiates de ce dernier, la forme de

la psychose. De cette élude, M. llartmaun tire que :

1" La folie traumatique n'est pas une formenosologique hpécihquc.

2o Cependant elle possède certaines particularités dans sa marche et sa

terminaison. Les entités les plus fréquentes sont les étals d'exaltation et

la démence à des degrés divers; ces modalités se piésentent pures ou

associées. 30 Les psychoses traumatiques primitives se rattachent

immédiatement aux phénomènes de commotion produits par l'accident,

biles représentent, soit la prolongation affaiblie, le (lot mourant dos

troubles fonctionnels du cerveau, surtout de la sphère intellectuelle

(démence primaire), soit la réaction de l'organe central contre l'ictus

trauiuatique (manie furieuse ou manie primitive, périodique ou continue

souvent accompagnée de convulsions). C'est à des lésions traumatiques

qu'il faut rapporter les tmublus moteurs ou seiisitils qui se manifestent

aimultai,cmuut. - 4 Les psychoses traumatiques secondaires se ratta-

chent au traumatisme; après un stade protiromiyue plus ou moins long,

ce sont des anomalies psycho-cérébrales (excitabilité, obtusion psychique

et morale) qui établissent la continuité dans le temps et la pathogénie

étiologique; on constate aussi, à cette période, des troubles sensoriels,

sensibles et moteurs. La vésanie proprement dite est de prime abord

marquée au sceau de l'affaiblissement psychique ou bien, à la suite d'un

stade préalable de mélancolie ou de m.me, elle se transforme rapide-

ment en démence qui revêt la plupart du temps le caractère de celle de

la paralysie Parmi les psychoses secondaires, il faut ranger

les transformations psychiques d'une épilepsie consécutive aux blessures

cepttatiques, ainsi que les pshoses réflexes prenant leur point de dépatt L

dans les cicatrices, et les autres modes d'irritation du système nerveux

pétipltériquu après lésion cephatique. Les premières sont de préférence

des états d'exaltation ; les secondes se traduisent presque aussi souvent

par des états de dépression. 6o Le pronostic est dans les psychoses

traumatiques primitives, de même que dans les psvehoses réflexes, pro-

portiunuellement favorable. Quinze cas de psychose primitive de cette

espèce se liquident par six guérisons, cinq améliorations, deux morts ;

qmnzeobservationsdepsycttosetettfxe comprennent huit guérisons,

trois améliorations, une mort. - 7" Le genre et le lieu du traumatisme

n'exercent aucune iuttueuce sur la psychose ultérieure, ce qui s'explique

d'autant mieux que la lésion cérébrale ne correspond pas toujours à

l'endroit où agit l'agent traumatiques 8" L'existence de phénomènes

de commotion n'est pas la condition préliminaire indispensable pour la

production d'une psychose ultérieure. Cependant de graves manifesta-

tions de commotion impliquent l'idée que l'affection psychique sera plus

dangereuse. 9o La blessure céphalfque, avec ou sans tesiongrossieie,

laisse encore après elle pendant de nombreuses années, une infirmité

encéphalique qui peut atteindre au degré de la vésanie grâce au concours

d'autres éléments étiologiques (surtout prédispositions héréditaires, tare

individuelle, dommages alcooliques et psychiques). Le danger s'accroît

encore quand le traumatisme a laissé après lui des résidus locaux (lésion

en foyer, cicatrice calleuse). 11 faut attribuer, pour l'appréciation pronos-

tique relative à une psychose ultérieure, une certaine importance aux

27 : 2 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

accidents suivants qui permettent de conclure que le traumatisme a

laissé quelque infirmité cérébrale. Ces accidents sont : la propension à

des congestions encéphaliques à répétition ; la diminution de la tolé-

rance à l'égard des spiritueux ; les céphalalgies à retours périodiques,

ou localisées a un endroit déterminé ; les accès de vertige ; une excita.

bilité morale anormale à l'égard d'impressions auparavant innocentes ;

la diminution de la capacité de travail intellectuel ; la persistance de

paralysies ou d'autres perturbations sur les organes des sens. --d0°

L'épilepsie consécutive du des lésions céphaliques obscurcit considérable-

ment le pronostic par suite de la possibilité des transformations psy-

chiques de la névrose. 110 Le sexe masculin est de beaucoup plus

exposé que le sexe féminin a la vésanie traumatique, de même, en gé-

néral qu'aux blessures. C'est l'âge moyen de la vie qui prédomine, pour

la même raison. 12° Il a pu s'écouler jusqu'à vingt-trois ans entre

l'ictus traumatique et l'apparition de la vésanie (Kratf ? bina).- 43 Le

rapport etiologique entre une vésanie et une blessure céphalique ne

saurait être allégué que dans les psychoses primitives et dans les psy-

choses réllexes, ainsi que dans les cas où l'autopsie confirmait la lésion

traumatique. D'ailleurs, il faut exiger la constatation du rapport de con-

tinuité temporelle et intime entre la psychose et les altérations nerveuses

et psycho-cérébrales survenues depuis le traumatisme. Les syndromes

précurseurs auxquels on doive principalement faire attention sont : de

légers degrés d'imbécillité revêtant parfois la forme de la moral insanity

et la réaction anormale des individus quant aux alcools et aux impres-

sions psychiques. Dans certains cas, on a des raisons de croire que la

blessure céphalique incriminée était simplement le tésultat d'une psy-

chose déjà existante ; c'est ainsi que la chute pendant une attaque con-

gestive, ou un vertige épileptique, avait pu déterminer le traumatisme à

la suite duquel les manifestations morbides préexistantes étaient deve-

nues plus évidentes. 140 La vésanie traumatique n'a pas de signes

anatomopatliologi(lu*. 11 est rare que l'on trouve à l'autopsie des

lésions traumatiques (fractures crâniennes, etc.) et leurs conséquences

(processus méningitiques et encéphalitiques, etc.). Mais l'absence de

désordres anatomiques traumatiques ne justifie pas, à elle seule, l'ex-

clusion de la genèse traumatique d'une psychose, car celle-ci peut, de

même que lesautres modalités psychopathiques, avoir, pour substratum

patuogénétique, des altérations moléculaires, des anomalies dans la

fonction de conductibilité des éléments de l'encéphale et dans la répar-

tition du sang au sein de ce centre nerveux. P. K.

XXIV. Inversion du sens génital; par Tarnowsky. (Messager de psy-

chidtrie clinique et légale et de Neuropathologie, par Mierze-

jewsky de Saint-Pétersbourg. Wiestnir ILlitzitchesicoy isoudebnoy

psychiatrie i Névi,oputologii). An 11, fascicule 2 (décembre 1884).

L'auteur, professeur de syphiligraphie à Saint-Pétersbourg, a

recueilli dans le cours d'une pratique de vingt cinq ans un nombre

considérable de cas d'inversion du sens génital observés ni sur le

banc des criminels, ni dans une asile d'aliénés, mais parmi les

gens de la société non considérés comme malades. L'auteur s'oc-

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 273

cape plus particulièrement de la pédérastie qui, comme il l'observe

très justement, n'est qu'une variété des inversions du sens génital

et doit être étudiée dans ses rapports avec les autres formes de

l'aberration génésique. Le travail du professeur Tarnowsky est très

1 elle en observations cliniques, les unes personnelles d'autres em-

pruntées à divers auteurs; il offre sous ce rapport un intérêt très

grand. Il est précédé d'une classification et de considérations gé-

nérales sur la question. Si cette partie du travail offre certains

points discutables, le lecteur trouvera dans le même numéro du

Messager un article de Magnan s'occupant du même sujet et grou-

pant, dans un cadre très vaste toutes les anomalies, les aberrations

et les perversions sexuelles. Voici la classilication de Tarnowsky :

1 Anomalies du sens génital chez les dégénérés : ce. Inversions con-

génitales du sens génital; 6. Inversions périodiques du sens génital;

e. Inversions épileptiques du sens gé ? 21ttil (I;étléi-tistie épileptique).

2° Inversions acquises du sens génital ; ct. Inversion se développant

chez des sujets sains ci cerveau normal et bien conformé (chez les non

dégénérés) ; Inversions du sens génital dans le courant de la dé-

iiieîzce sénile (pédérastie des vicllurds); c. Inversions du sens géni-

tal au début de la paralysie générale (pédérastie paralytique).

Comme étiologie de ce second groupe, l'auteur invoque les

exemples funestes des institutions fermées, les pratiques, que se

permettent les aînés sur leurs cadets dans les collèges où ils sont

internes; les habitudes de pédérastie sur les vaisseaux, dans les

prisons, les casernes, etc. D'après les travaux récents il est permis

de douter de l'existence de ce groupe et des observations minu-

tieuses prouveraient sans doute à l'auteur que même dans les cou-

ditions qu'il indique, il n'y a qu'un groupe de gens susceptibles

de contracter des habitudes de pédérastie invétérées : ce sont les

dégénérés.

Les observations que Tarnowsky donne à l'appui de ses subdi-

visions du premier groupe offrent un intérêt clinique tout parti-

culier. Tel est, par exemple le malade qui donne à une fille pu-

blique des indications sur la manière de le flageller en la prévenant

que lorsqu'il viendra le soir il ne lui adressera pas la parole, se

couchera sans mot dire, et subira la flagellation indiquée. En effet

quelques mois plus tard il arrive morose et taciturne, se désha-

bille, se couche, subit la flagellation, s'excite, prononce des pa-

roles bizarres, éjacule s'endort et s'en va après quelques heures de

sommeil sans mot dire. Ces visites se répètent tous les deux ou

trois mois. Dans les intervalles, il vient payer et donner à cette

femme quelques indications complémentaires. Cela dura plusieurs

années, et il n'a jamais eu avec elle de coït normal. Tel autre

homme très bien, très rangé, père de famille, etc., a des accès

autrement curieux : on lui prépare un logement spécial occupé

par trois prostituées jouant, l'une le rôle de maîtresse de la mai-

AncaivKs, t. ! \. 18

274 REVUE DE PATHOLOGË MENTALE.

son, l'autre de camériste, et la troisième de cuisinière. Elles

étaient prévenues de ce qu'elles avaient à faire. Le malade art-

vait sans avoir jamais vu préalablement le personnel de la mai-

son. On le déshabillait, le couchait, lui faisait subir l'onanisme,

la flagellation et toutes espèces de violences sexuelles, tout cela

selon un programme arrêté par une tierce personne qui arran-

geait l'affaire. Le malade feignait de .·.edéfendre,se débattait, de-

mandait grâce, enfin on lui donnait manger, on le laissait dor-

mir quelque temps; mais on ne le laissait pas sortir malgré se=

demandes. Cela durait quelques jours. Le confident du malade

qui observait de loin toutcequise passait, reconnaissait à certains

signes qu'il était temps d'en finir et on lâchait le malade qui ren-

trait dans sa famille. Ces attaques se répétaient deux fois par an.

M. Tarnowsky range ces deux observations dans la subdivision

de « l'aberration génitale périodique » qu'il trouve analogue à la

manie périodique. Il est difficile d'accepter cette manière de voir et

il est très probable qu'il ne s'agit ni d'impulsious ni d'obsessions.

Malheureusement, ces observations sont incomplètes et il est très

vraisemblable que les deux malades ont présenté d'autres syn-

dromes épisodiques propres aux dégénérés. Dans le même groupe

de « périodiques » sont rangés par il. Tarnowsky les « exhibition-

nistes » de Lasègue et les nécrophiles de Brière de Boismont

(Gazette médicale, juillet 1845). Pour sa troisième subdivision,

M. Tarnowsky admet qu'un acte de violence sexuelle impulsif peut

être observé comme équivalent psychique d'un accès épileptique.

Il cite à l'appui les faits cliniques suivants :

Le premier(observation de Tarnowsky) jeune homme de vingt-

six ans, avait eu quelques accès épileptiques. Il arriva un jour

chez sa maîtresse (après un dîner copieux avec excès de boissons),

ne la trouva pas chez elle, se jette sur un garçon de dix-sept ans

qui couchait dans le logement et essaye de le violer. La femme

de chambre entend les cris, arrive au secours, il se jette sur elle

et se livre au coït. Il se couche après ne se réveille qu'au bout de

douze heures de sommeil, et ne se souvient plus de ce qui s'est

passé avec le garçon, se souvient toutefois qu'il a été ivre la veille

et croit avoir eu un coït.

Dans un second cas (observation d'Erlitzlcy), il s'agit d'un

jeune homme qui, après avoir brillamment terminé ses études,

mène, pendant deux ans, une vie dissipée. 11 a quelques accès d'é-

pilepsie. Fiancé à une demoiselle de bonne famille, il arrive le

jour de la noce, accompagné de son frère qui est médecin, il

entre dans le salon où tous les invités sont réunis, s'approche de

sa fiancée, se déboutonne le pantalon et commence à se mastur-

ber devant tout le monde. On l'emmène immédiatement à la cli-

nique psychiatrique. En route, il continue à se masturber; la même

excitation génésique persiste pendant les premiers jours de sou

SOCIÉTÉS SAVANTES. 275

séjour. L'accès passe et le malade ne garde qu'un souvenir vague

de ce qui s'est passé.

Une troisième (observation de Kowalewsky) concerne un homme

de quarante ans, toujours bien portant, qui après une courte pé-

riode dépressive d'uue journée demande à une amie de sa femme

en présence de celle-ci de vouloir bien se livrer à lui. Sur le re-

fus de la dame il s'adresse immédiatement à sa femme qui refuse

à son tour; il tombe alors à terre, il gémit, puis il devient furieux

et met en fuite sa femme et son amie. Le malade brise les car-

reaux, déchire ses vêtements, menace de jeter de l'eau bouillante

à la tête du premier qui entrera et finit par mettre dans le poêle

son enfant âgé de trois ans. Le jury rendit une ordonnance de non-

lieu, quelque temps après il entra dans le service de M. Kowa-

lewsky avec tous les symptômes du haut mal. M. Tarnowsky finit

son article par une étude critique des symptômes somatiques de

la pédérastie active et passive. Cette partie de son travail ne pré-

sente qu'un intérêt médico-légal tout à fait spécial. BAJENOFF.

SOCIÉTÉS SAVANTES

SOCIÉTÉ MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE

Séance du 20 janvier.

Des troubles mentaux dans la sénilité précoce et rapide; par

M. Charpentier. Quoique signalée incidemment par les méde-

cins aliénistes dans nombre de leurs observations, la sénilité pré-

coce ne nous semble pas avoir fixé suffisamment l'attention au

point de vue des troubles mentaux qui l'accompagnent, surtout

s'il ne s'y joint aucune lésion des tissus ou des liquides autre que

celles qui caractérisent la vieillesse.

Sous le nom de vieillesse ou de sénilité ordinaire, nous enten-

dons le complexus de destruction ou, pour employer le langage

des évolutionnistes, le processus de dissolution qui, commençant

ordinairement vers soixante ans, se continue jusqu'à la termi-

naison de l'existence. La vieillesse type, la vieillesse idéale, celle

que peuvent souhaiter ceux qui désirent vivre longtemps vieu x

276 SOCIETES SAVANTES.

permet à l'être humain de jouir de toutes ses fonctions de nutri-

tion, et de relation, en tant qu'il en fasse un usage modéré. A côté

de ce type, rare il est vrai, et dont la caractéristique est l'extrême

lenteur du processus de destruction, viennent se ranger les formes

rapides de la sénilité, formes rapides parce que des périodes d'ac-

célération viennent varier la lenteur uniforme du processus ou

parce que cette même accélération s'établissant pendant le cours

ou même pendant le début ne s'arrête pas, en active le dévelop-

pement et en détermine en peu de temps la terminaison fatale.

Sous le nom de sénilité précoce, nous entendons celle qui sur-

vient avant l'âge de la vieillesse ordinaire et, comme chez les indi-

vidus qui en sont frappés, la marche est rapide quand il s'y joint

des troubles mentaux; ainsi se trouve justifiée l'expression de sé-

nilité précoce et rapide qui fait l'objet de notre communication.

Les aliénistes ont peu traité ce sujet, et les auteurs qui ont

écrit sur la vieillesse parlent en termes vagues d'une vieillesse qui

viendrait de bonne heure par suite de misère organique, physiolo-

gique ou hygiénique. L'expression est d'ailleurs d'origine récente.

C'est en février 1871, dans les séances de l'Académie de médecine,

alors que l'alcoolisme et toutes les autres misères sévissaient sur

la population de Paris, que les expressions de sénilité prématurée

et surtout de sénilité précoce furent heureusement employées par

MM. les professeurs Richet et Verneuil pour expliquer la gravité

des traumatismes chez les blessés; nous pensions, à la lecture des

comptes-rendus, voir surgir alors la sénilité précoce simple, déga-

gée des lésions aulres que celles de la vieillesse; mais, nous le

répétons, l'alcoolisme dominait en maître sur le terrain clinique;

il servit à expliquer la sénilité prématurée. Plus tard, M. Verneuil

expliqua, comme vous le savez, cette gravité du traumatisme en

faisant intervenir à l'aide d'observations fondées et incontestables

d'autres éléments étiologiques morbides, lésions du foie, diabète,

impaludisme, etc. De la sénilité précoce simple sans autres lésions

que celles de la vieillesse il ne fut pas question. Et cependant celte

sénilité précoce simple existe; elle frappe à cinquante-cinq ou

à cinquante ans et même plus tOt. Les individus frappés par cette

sénilité le sont non seulement dans leur système cutané, séche-

resse et teinte terreuse de la peau, rides du visage et de la face

dorsale des mains, cheveux blanchis ou tombés, dents cassées

ou disparues, mais ils le sont dans leurs fonctions digestives ralen-

ties, dans leurs fonctions respiratoires diminuées, dans leur

système musculaire affaibli; et ils vivent, et ils continuent à vivre,

et ils ne sont pas malades, et ils n'ont pas de troubles intellec-

tuels ; ils vivent au même titre que, dans la vieillesse typique, le

vieillard qui conserve ses fonctions, mais diminuées et nécessitant

un usage modéré; il est de ces séniles précoces, ce sont les privi-

légiés, qui n'ont même pas de manifestation athéromateuse; le

SOCIÉTÉS savantes. 277

pouls est plus faible, et c'est tout. « On a l'âge de ses vaisseaux »,

a dit le professeur Peler; c'est vrai, mais quelque respect que nous

ayions pour la profondeur de cette pensée, nous ne pouvons nous

empêcher de dire qu'elle n'est pas absolument exacte; elle est vraie

pour les sujets dont les vaisseaux sont altérés, elle cesse de l'être

pour ceux' qui restent étrangers à ces lésions tout en se laissant

envahir par le complexus simple de la sénilité. 1

Mais ce groupe de séniles précoces est étranger à notre sujet,

puisqu'il ne présente pas de troubles mentaux. Nous n'y insistons

pas davantage.

Nous ne nous arrêterons pas longtemps non plus sur les sujets

atteints de sénilité précoce et de troubles mentaux chez lesquels

l'étioiogie est déterminée par des maladies aigués ou chroniques

qui en ont été les causes occasionnelles. Nous faisons allusion aux

sénilités précoces et rapides des tuberculeux, des cancéreux, des

brightiques, de certains cardiaques, de beaucoup d'atliéromateux,

des scrofuleux souffrant depuis longtemps d'affections osseuses

ou articulaires prolongées, de tous ces malheureux atteints de la

misère organique ou physiologique de Bouchardat, sans compter

les intoxiqués par poisons lents, alcool, plomb, tabac, opium,

morphine, par la syphilis, par la glycémie, ou par la rétention

de produits destinés à être éliminés. Dans tous ces états, la séni-

lité précoce est fréquente et les troubles mentaux ont été souvent

signalés. Le délire mélancolique, la folie soupçonneuse des phti-

siques, la démence par athéromasie cérébrale, la folie diabétique

et goutteuse, les folies diathésiques, l'encéphalopathie saturnine

et syphilitique, la morphiomauie, et surtout l'immense groupe

des troubles cérébraux alcooliques ont été successivement étudiés.

Nous n'avons rien à dire de nouveau, sinon d'insister sur la fré-

quence assez grande de la sénilité précoce dans ces conditions,

à la fin, pendant le cours, et parfois au début de la scène patho-

logique. Cette apparition au début est assez importante pour qu'à

propos de sénilité précoce l'attention soit toujours éveillée sur

la possibilité du développement de quelques-unes de ces graves

maladies.

Nous ne ferons au-si que passer légèrement sur d'autres

troubles mentaux qui existent à l'âge mûr en même temps que

la sénilité précoce, mais qui ne relèvent pas de cette sénilité.

Ainsi un épileptique a des conceptions délirantes à vingt-cinq ans,

il en a d'autres à quarante-cinq et la sénilité précoce apparaît ou

bien celle-ci succède, accompagnée de troubles intellectuels, aux

suites d'une fièvre typhoïde, d'un traumatisme crânien ou d'une

dernière couche chez des sujets de cet âge; dans tous ces cas,

sénilité précoce et perturbation cérébrale sont liées à un autre

élément étiologique : épilepsie, accouchement, maladie grave,

traumatisme, ou encore à une tare héréditaire, car, si nous ne

278 sociétés savantes.

nous trompons pas, les héréditaires d'ordre cérébral ou névro-

sique souvent vieillissent de bonne heure et vieillissent vite.

De même, nous ne faisons que signaler, pour les éliminer des

sénilités précoces, les pseudo-sénilités. Il est des jeunes gens qui

sont gris ou chauves- à vingt-cinq ans. des femmes de cet âge

dont le système dentaire est complètement carié; des garçons de

dix-huit ans qui, par l'attitude du cou, de la tête, des épaules et

des bras, ont l'air de vieillards; mais ce ne sont là que des appa-

rences ; et, si. à un certain âge delà vie, un seul caractère comme

la chute des dents de lait suffit pour indiquer le passage de la

première à la deuxième enfance, il n'en est pas de même de la

vieillesse qui est un résultat d'ensemble, lequel se retrouve dans

chaque détail de l'économie, mais ne se caractérise isolément

dans aucune de ses parties; nous éliminerons aussi de la sénilité

précoce la sénilité des idiots et des crétins, car on peut dire de

leur âge viril ce qu'on a dit de leur intelligence, ils ne peuvent

avoir perdu ce qu'ils n'ont pas possédé. Nous faisons exception

pour quelques rares d'entre eux qui, par une éducation, ont pu

s'élever au rang d'imbéciles, présenter quelques traits de l'âge

mûr et, par le privilège du temps, se glisser en y étant confon-

dus parmi les déments sénilisés.

Les troubles mentaux que nous avons à décrire et que nous dé-

signons sous le nom de troubles mentaux de la sénilité précoce

simple, pour les bien distinguer de ceux dus à des antécédents pa-

thologiques, présentent certains caractères généraux. Ils survien-

nent presque toujours dans les mêmes conditions. Souvent il y a

eu antérieurement un changement assez brusque dans les habi-

tudes, changement voulu par les sujets ou imposé par des néces-

sités sociales; de plus il y a impossibilitéde leur part à contracter

de nouvelles habitudes à moins que ce ne soient des habitudes

vicieuses, celle-là venant apporter alors leurs modifications patho-

logiques, mais sans s'opposer, tant s'en faut, à l'apparition de la

sénilité précoce et du trouble mental. La véritable caractéristique

de la condition qui préside au développement de celte sénilité et

de ces troubles mentaux, c'est l'incapacité d'adaptation de l'indi-

vidu à son nouveau genre de vie. Nous n'expliquerons pas ce

défaut d'adaptation ; nous ne ferons que le constater, il existe

aussi chez le vieillard, mais ! moins marqué; chez celui-ci, les

idées sont comme ses pas; elles ne dévient pas, elles ne vont

pas à reculons, mais elles ne peuvent pas suivre; chez nos sujets.

non seulement les idées ne peuvent pas suivre, mais elles se trou-

blent. Au reste, une observation résumée montre mieux ce dont

il s'agit :

M""= X ? quarante-huit ans, sans antécédents pathologiques

individuels ni héréditaires habite Paris; femme d'intérieur, elle a

toujours vécu avec sa fille qu'elle maria convenablement en pro-

sociétés savantes. 2"9

vince. Retenue à Paris par des questions d'intérêt, elle est obligée

de vivre seule séparée de ses enfants. Deux mois après, elle est

méconnaissable, tant ses traits altérés portent l'empreinte de la

vieillesse : tous les voisins en sont frappés; elle ne peut leur

fournir aucune explication; elle n'a aucun chagrin d'être séparée

de sa fille, aucun des suites du mariage, mais elle a conscience

du changement qui s'est opéré en elle, elle avoue qu'elle a un

ennui vague. Elle n'entretient plus sa maison, elle se passerait de

dîner, tant cela l'ennuie de préparer ses repas ; elle n'aime plus les

travaux de couture, d'ailleurs sa vue baisse; elle se lève plus tard,

dort mal. La nuit elle a des peurs vagues, non motivées, elle ne

sait pas de quoi elle a peur : elle passe ses journées assises, quit-

tant avec peine son fauteuil, remettant de jour en jour des sor-

ties nécessaires; les fonctions digestives sont ralenties, la nuit il

v a quelque oppression; l'amaigrissement est notable, ainsi que

la diminution des forces; l'examen le plus minutieux, répété

plusieurs jours de suite, ne nous fait rien découvrir. M-11 X ? sur

notre conseil, passe deux mois auprès de ses enfants; aucune

amélioration. A son retour, les traits de la sénilité sont; encore

plus accentués; on la soutient pour l'accompagner tantses forces

la trahissent. A part un peu d'emphysème pulmonaire, nous ne

trouvons rien; rien dans les urines, il n'y a pas à penser non plus

à de l'alcoolisme dissimulé, menstruation normale. Au point de

vue intellectuel, le même ennui de tout; quelques peurs non mo-

tivées, les peurs sont plus prononcées ainsi que les insomnies,

elle désire quelqu'un près d'elle la nuit; elle a peur de manger

parce qu'elle a peur de mal digérer, elle apeur de mourir; elle a

peur du bruit de la sonnerie de la pendule; elle a peur de passer

d'une pièce dans une autre; elle demande qu'on ne marche pas

légèrement près d'elle, les surprises l'effrayent, la mémoire a di-

minué; mais ce qui est surtout notable c'est l'indifférence de la

malade pour les questions d'intérêt qui ne sollicitent plus son at-

tention. Trois semaines plus tard, au retour d'une courte prome-

nade, elle fut prise d'un peu de frissons, d'oppression, d'une

pointe de côté; nous constatons une pneumonie du côté droit,

quelques jours après le gauche fut pris également et la malade

succomba avec un délire fébrile le douzième jour.

En résumé, absence d'antécédents pathologiques, absence de

causes hygiéniques mauvaises, une séparation volontairement

consentie et non attristante, puis un ennui vague, une paresse

générale, une négligence des actes habituels, des insomnies, en-

suite des frayeurs, les traits de la sénilité marchant de pair avec

les troubles intellectuels et enfin apparition d'une pneumonie

terminale, voilà le tableau symptomatique de ce qui s'est passé

en cinq mois. Cette femme vivait pour sa fille et par sa lille; c'é-

lait sa tille qui élait le 1110utile de ses actes quotidiens, de ses ha-

280 SOCIÉTÉS savantes.

bitudes; la fille disparue, tout change et la mère est incapable

d'accomplir les mêmes actes pour elle-même; l'adaptation ne se

fait pas, ce ne sont même pas de nouvelles habitudes qu'elle n'a

pu contracter ce sont les mêmes qu'elle n'a pu continuer parce

que le motif, le mobile en' était changé. Nous aurions pu citer

des faits analogues concernant un commerçant retiré des affaires,

un employé ayant obtenu sa retraite; le changement d'habitude

était plus manifeste, et les mêmes phénomènes se sont produits;

nous nales avons pas vu rester à l'élat stationnaire, ni disparaître

et toujours nous avions eu une maladie terminale qui s'expliquait

par l'altération grave portée à la nutrition, et alors que nos in-

vestigationspréeédentes avaient été infructueuses dans la 1-eche relie

d'un élément morbide étiologique.

Ainsi tous nos malades ont présenté les caractères communs

suivants : apparition précoce et développement rapide des carac-

tères de la ,vieillesse et apparition des troubles mentaux qui an-

térieurement n'existaient pas; caractère dépressif des manifesta-

lions mentales; formes mélancoliques, hypocondriaques, anxieuses

ou panophobiques; état conscient des malades, sauf dans certains

cas d'affaiblissement intellectuel; marche rapide san< améliora-

tion notable; terminaison fatale par une maladie ultime qui ne

s'est révélée que dans les derniers temps de l'existence ; comme

cause conditionnelle : changement brusque d'habitude; comme

caractère négatif, absence d'hallucinations.

D'autres sujets présentent aussi des troubles mentaux associés

à la sénililité prématurée; mais nos observations sont incom-

plètes à cet égard; nous n'avons fait que les observer passagère-

ment. Ces sujets appartiennent aux deux sexes, mais surtout ou

sexe féminin, nous pensons que parmi eux doivent se trouver des

héréditaires. Ces sujets ont une caractéristique, ils ne veulent

pas vieillir et ils ne savent pas vieillir, le moindre pli du visage, la

moindre décoloration du système pileux, la moindre altération

des formes les émeut et les plonge rapidement dans l'inquiétude

et l'hypochondrie ; il est vrai de dire que leurs frayeurs ne sont

que trop justifiées, et que souvent chez eux les progrès de la séni-

lité luttent avec trop de succès contre les procédés locaux ou gé-

néraux qu'ils emploient pour enrayer le début de la dissolution.

Malgré nos efforts, aucun d'eux ne voulait admettre une sénilité

précoce à laquelle ils ne pouvaient se résigner et tous eussent

préféré une maladie comme explication de leur état. Ces sujets

nous ont paru se rattacher aux formes dégénérées, héréditaires,

raisonnantes, morales, lucides de la folie; en tous cas, ils obsèdent

le médecin par leurs craintes multiples, mobiles et variées et par

leurs supplications importunes pour faire disparaître les effets

prématurés du temps. Nous ne serions pas étonnés si parfois des

terminaisons graves de cette forme venaient à se produire.

sociétés savantes. 281

Enfin, il est un troisième groupe de sujets présentant aussil'as-

sociation des troubles mentaux et de la sénililité prématurée.

Nous en possédons par devers nous deux cas où l'éclosion des

symptômes mentaux fut pour nous une surprise, tant nous y

étions peu préparés. Il s'agit en général d'individus des deux

sexes ayant parcouru leur carrière jusqu'à quarante-cinq, cin-

quante-cinq ans et s'étant souvent fait remarquer parleur activité,

leur persévérance opiniâtre etun déploiement parfois considérable

d'intelligence. Des revers plus ou moins nombreux qu'ils ont ren-

contrés ne les ont pas ébranlés, tandis qu'arrivés à cette pé-

riode, subitement on les voit .blanchir ou grisonner en peu de

temps; les traits du visage s'empâtent ou au contraire s'altèrent

par émaciation ; l'éclat du regard se ternit, la voix se casse ou

devient dolente; on sent chez eux la fatigue toujours imminente

quelques efforts qu'ils fassent pour la dissimuler, le repos qui leur

est conseillé et qu'ils prennent ne les améliorant pas, ils reparais-

sent plus vieillis, plus fatigués que jamais, : jusqu' : 1 ce que cédant

aux progrès de cette sénilité, à l'influence de la décadence intel-

lectuelle dont ils ont souvent conscience et aux conseils d'amis,

ils se décident à prendre un repos définitif, faisant en cela acte

de prudence.

Si nos observations ne nous trompent pas, tous ces sujets ont

porté pendant des années une empreinte qu'ils ont entièrement

dissimulée; ils ont été dominés et dirigés par une idée fixe, soit de

faire fortune, soit de conquérir des lionneurs, soit de réformer

l'état politique, social et moral de leur époque ou de leur

milieu. Nous devons à cet égard être très mesuré dans nos appré-

ciations, car l'idée qui les soutient, implantée profondément, est

souvent une idée noble, élevée et ne méritant que des éloges ;

mais il n'en est pas moins vrai que ce;soit une idée fixe et que,

sous ce rapport, elle présente une certaine communauté avec les

autres idées fixes plus vulgaires et surtout plus dangereuses par

les excès auxquels elles conduisent les malheureux qui çn sont

affligés. Généralement ce ne sont pas les déceptions, ni les peines

morales qui font éclore le mal, mais il semble que cette idée qui

s'est imposée perd subitement ses racines et, tout à coup ébranlée,

disparaît rapidement, souvent même avant que le but proposé ne

soit atteint. En tous cas, ces sujets reconnaissent eux-mêmes

l'éclosion du mal, ils le pressentent et, dans leur entourage, ils

font comprendre qu'ils se sentent devenir vieux, fatigués, pa-

resseux et qu'ils doivent se reposer. Heureux sont-ils, s'il en est

temps encore, sinon par leur survie à activité stérile, ils vontfairo

regretter une réputation qu'ils avaient justement méritée.

Ces cas se rencontrent chez des hommes de science, des litté-

rateurs et des hommes politiques. Dans la classe des commerçants

qui ont prospéré, ce n'est pas un fait rare. Nous avons observé

282 sociétés savantes.

également ces phénomènes chez deux dames de moeurs exemplaires

et d'une observance rigoureuse dans l'accomplissement de leurs

devoirs religieux. Dans tous ces cas, les phénomènes d'anxiété

sont plus rares ou moins intenses; ici c'est l'affaiblissement gra-

duel, insensible de l'intelligence qui domine ; la mémoire

s'affaisse pour les faits-récents comme chez les vrais vieillards.

mais le souvenir do leurs travaux accomplis et de leurs services

rendus persiste chez eux même, plus vifs, et souvent porte ces

malades à en faire la glorification dans des termes tels que ceux

qui les entourent ne tardent pas à soupçonner l'invasion du mal.

Quant à eux, ils persistent dans leurs opinions, leurs idées, leur

genre de vie, sans les adapter au siècle qui marche et auquel ils

deviennentpromptementétrangers. Leur susceptibititéaugmente ;

ils deviennent irascibles; surgissent alors des idées de misanthro-

pie, de mépris pour la société dont ils ne voyent que les défauts,

quelques vagues idées de persécution se dessinent et le discer-

nement des notions de justice subit, comme la mémoire, une

évolution inverse du mode, suivant lequel elles ont été acquises.

lis en arrivent à méconnaître les injustices qu'ils commettent

envers les autres, tout en ressentant vivement l'impression des

torts que l'on a envers eux. Ils sont, sous ce rapport, semblables

aux enfants qui déjà distinguent et apprécient le mal qu'on leur

fait, avant de discerner le mal qu'ils font aux autres ; toujours défen-

seurs tenaces de leurs droits, ces affaiblis précoces méconnaissent

les droits d'autrui et parfois en arrivent à des menaces et voies de

fait qu'ils croient légitimes et fondés sur des notions de justice.

Parfois, ne remplissant pas leurs engagements parce qu'ils en ont

oublié la valeur morale, ils s'étonnent des rigueurs de ceux qu'ils

ont lésées, rigueurs qu'ils trouvent injustes, et ils en arrivent à

vouloir les réprimer au nom d'une justice dont ils n'ont plus

qu'une notion enfantine. Cet affaiblissement intellectuel précoce

avec marche rétroga.de du discernement vers l'enfance nous

parait mériter considération au point de vue médico-iégat,

pour atténuer la responsabilité des délits auxquels ces séniles

peuvent être entraînés dans de telles conditions. Parfois même,

si les autres traits de l'affaiblissement intellectuel son t peu saillants.

y aurait-il lieu dans ces cas, de tenir un compte rigoureux des

traits physiques de la sénilité précoce, pour atténuer la responsa-

bilité dans les cas d'airail)lisenieiit intellectuel ; parfois la marche

est moins rapide que dans les autres formes de sénilité précoce.

Messieurs, pour terminer, nous vous demandons la permission

de résumer cet exposé dans les propositions suivantes :

10 A côté de la vieillesse ordinaire uniformément lente et de

ses variétés de formes rapides par périodes d'accélération transi-

toires ou rapides d'emblée, il a tien d'admettre l'existence d'un

SOCIETES SAVANTES. 283

groupe de sénilités survenues avant l'âge. Ce sont les sénilités

précoces ;

2° Ces sénilités précoces ne sont souvent que l'expression de

l'atteinte grave portée à la nutrition par ces maladies générales

ou locales, engendrées ou non par des écarts hygiéniques. Sou-

vent ces maladies se masquent derrière la sénilité précoce et

exigent des investigations minutieuses pour être constatées. Elles

peuvent être ou non accompagnées de troubles mentaux que les

auteurs ont décrit, mais sans mettre assez en relief la précocité de

la sénilité concomitante ;

3° Les troubles, mentaux de la sénilité précoce peuvent exister sans

maladies, et, dans ces cas, si une maladie apparaît, ce n'est que

comme épisode terminal incapable d'expliquer ni les troubles

mentaux, ni la précocité de la sénilité.

Ces troubles mentaux sont à forme dépressive avec certaine

conscience du sujet; ils ont le caractère des formes mélancoliques,

hypocondriaques, anxieuses, ou panophohiqnes de la folie; il =

peuvent consister dans l'état d'affaiblissement intellectuel ;

4° Ces troubles mentaux, qu'ils reconnaissent pour cause le

changement brusque d'habitude, ou les atteintes mûmes de la

vieillesse et l'inquiétude qui en est la conséquence, ou bien encore

la cessation brusque de l'énergie entretenue jusqu'alors par une

idée intensive déterminante, des troubles mentaux ont toujours

pour condition causale commune, l'incapacité de l'individu de

s'adapter aux circonstances nouvellesqui l'entourent. L'adaptation

qui est un facteur principal dans les évolutions des êtres et des

espèces, est aussi une cause de cette destruction, quand elle vient

à disparaître de ces mêmes états et espèces; cette incapacité

d'adaptation apparaît très marquée dans les troubles mentaux de

la sénilité précoce ;

Il y a lieu, au point de vue médico-légal de tenir compte de

l'existence de cette sénilité précoce dans l'appréciation des délits

contre les personnes commis par les sujets qui en sont frappés,

et de rechercher minutieusement dans ces cas les traces de

l'affaiblissement intellectuel et, en particulier, de l'affaiblissement

du discernement des notions de justice.

6° Enfin il existe une sénilité précoce sans maladies, sans

troubles mentaux. Les hommes qui en sont frappés savent vieillir,

comprendre les avertissements du temps, et adapter leur genre

de vie aux modifications survenues dans leurs fonction*. En cela

faisant, ils peuvent longtemps se prolonger et jouir de la vie et

des fonctions qui y président à la condition d'un usage modéré.

Ceux-là enseignent par leur conduite les prescriptions hygiéniques

que réclame la précocité de la sénilité. (A suivre.)

VARIA

DISCOURS prononcé par M. LE Dr Dagonet LA distribution des PRIX

DE l'école d'infirmières laïques de l'asile Sainte-Anne.

Mesdames, Messieurs, l'année précédente nous avons dû vous

exprimer un regret, celui de ne pas voir nos cours professionnels

suivis avec toute l'assiduité désirable. Cette année, nous sommes

obligés de constater le même manque d'assiduité.

Ces conférences que nous prenons la peine de vous faire, se

rattachent directement à vos devoirs professionnels, elles auront

même pour vous, comme je vous l'expliquerai tout à l'heure, un

véritable intérêt personnel; nous vous engageons donc à mettre

de ce côté le plus grand empressement. Nous ferons du reste en

sorte, l'année prochaine, de faire ces cours à une heure plus

favorable, ils deviendront de cette manière une partie des devoirs

qui vous sont imposés dans cet asile.

Nous tenons d'autant plus à cette assuidité qu'un changement

important s'est produit cette année dans notre établissement, sur-

tout du côté des femmes

La communauté religieuse qui, depuis la fondation de cetasile,

régnait despotiquement ici a fait place à un service laïque.

C'est là une très grosse affaire et pour la mener à bonne fin, il

n'a pas moins fallu que des efforts énergiques et persévérants

d'hommes absolument convaincus, en tête desquels nous devons

placer M. le Dr Bourneville, député de la Seine, qui veut bien ve-

nir présider cette réunion.

Bien des objections ont été faites pour l'adoption d'une sem-

blable mesure, bien des erreurs, bien des préjugés ont été mis

en avant. Vous les connaissez tous.

Le personnel laïque serait-il dévoué, plein d'égards pour les

malades, et honnête à tous les points de vue, n'aurait-on pas à

faire, sous ce rapport, une comparaison fâcheuse avec la commu-

nauté religieuse qui allait nous quitter ?

Je ne veux pas ici entamer de discussion à ce sujet; pour ce qui

concerne l'asile Sainte-Anne, ce qu'il nous importait de savoir,

c'était si le service laïque fortifierait nos espérances ou s'il donne-

rait raison aux préoccupations de quelques esprits pessimistes et

peu expérimentés. Nous sommes heureux de le constater, aujour-

d'hui que l'expérience est faite, cette transformation ne nous a

donné que des résultats avantageux.

VARIA. 285

Le service des hommes n'élait pas directement intéressé dans la

question, il a continué à se faire, grâce au zèle des surveillants eu

chef des différentes divisions, de la manière la plus satisfaisante.

Chez les femmes, les médecins en chef se sont, en général, féli-

cités de la bonne tenue de leurs gardiennes, de l'exactitude et du

zèle qu'elles ont apportés à l'exécution des prescriptions dont

elles étaient chargées. Dans une maison comme celle-ci, cet em-

pressement à soigner les malades et à exécuter les prescriptions

médicales est la première règle à observer. La maison est faite

pour les malades et non pour le plus grand bien-être de tel ou tel

employé. L'assuidité à ces cours est aussi l'une des conditions qui

nous paraissent nécessaires à remplir pour obtenir de nos em-

ployés les qualités qui seules peuvent leur permettre de faire un

bon service.

Personne, en effet, n'ignore que la communauté religieuse, sous

la direction de laquelle se trouvaient les gardiennes, cherchait le

plus possible à les détourner d'assister à cc, conférences.

L'instruction est certainement la chose qui plait le moins aux

communautés; en développant l'intelligence, en élargissant en

quelque sorte l'horizon de nos connaissances, elle a pour résultat

de rectifier une foule d'erreurs et d'idées fausses que, le plus sou-

vent, l'on a soin d'entretenir dans un intérêt particulier.

Le conseil municipal, en fondant les cours professionnels à

Sainte-Anne et dans quelques autres établissements hospitaliers, a

eu un double but en vue, celui d'abord d'avoir un personnel plus

intelligent, plus soumis aux médecins et, par conséquent, plus ca-

pable de donner des soins aux malades, et, d'autre part, celui de

faciliter la laïcisation des services hospitaliers.

C'est pour cette raison que les médecins de cet asile tiennent

essentiellement à ce que ces cours se fassent régulièrement et

soient suivis exactement.

Je vous l'ai dit l'année précédente, quelques-unes des parties

qui vous sont enseignées peuvent vous paraître abstraites, mais

elles provoquent l'attention, la réflexion, de votre part, et elles se

rattachent à l'ensemble même des notions élémentaires dont vous

comprenez seulement l'utilité après qu'elles vous ont été toutes

exposées. Elles sont le principe, la base de l'instruction qui \ous

est nécessaire.

Il faut que vous sachiez appliquer des bandages, mettre des

ventouses, des appareils, faire toutes sortes d'injections, etc., et

pour le faire avec intelligence, il vous faut posséder certaines con-

naissances anatomiques et physiologiques.

La physiologie, par exemple, vous apprend que l'homme ne peut

pas vivre sans respirer, que la respiration se fait au moyen d'or-

ganes qu'on a désignés sous le nom de poumons; que l'homme a

besoin pour respirer de dix mètres cubes d'air par heure et que,

286 VARIA.

pour se maintenir dans des conditions de santé convenables, il

doit habiter une chambre suffisamment ventilée et ayant au moins

trois mètres en tous sens. C'est pour cette raison qu'il y a de

graves inconvénients à accumuler dans les dortoirs, dans les

salles de réunion un nombre de malades trop considérable pour

le volume d'air que l'espace peut contenir. Le besoin respiratoire

n'est plus satisfait et en dehors des maladies infectieuses et de

l'apauvrissement du sang qui peuvent en résulter, la phthisie pul-

monaire qui comprend, à Paris, le chiffre le plus considérable de

la mortalité en est une conséquence fâcheuse.

Si la respiration doit être attentivement surveillée, il en est de

même de l'alimentation.

L'homme perd au repos pour l'entretien de sa vie une certaine

quantité de force et de matière qu'il lui faut réparer; on a cal-

culé que, pour les recouvrer, il lui fallait absorber I kilogr. de'pain

et 300 gr. de viande. Voilà la ration de l'homme au repos.

Mais s'il travaille, les mêmes calculs ont établi qu'il lui fallait

absorber, sous forme d'aliments, cinq fois la quantité de force qu'il

a perdue en travaillaut,soil environ 2 kitog. de pain et 500 gr.de

viande, ou d'auties aliments fournissant la même quantité de force.

Ce qui existe pour le travail matériel existe aussi pour le travail

moral et intellectuel. Toutes ces notions sont rigoureusement dé-

duites. L'alimentation assure l'entretien de l'individu et le main-

tien de sa température.

11 faut donc surveiller l'air que nous respirons, l'eau que nous

buvons, les aliments que nous absorbons, tout doit être scrupu-

leusement vérifié, qualité et quantité, si l'on veut prévenir des

causes nombreuses d'insalubrité; c'est là, il est vrai, un soin qui

incombe à l'administration; mais notre devoir est d'empêcher

qu'aucune négligence coupable ne soit apportée de ce côté.

L'on a dit avec raison que les hôpitaux mal tenus, mal surveil-

lés étaient la pire des choses, les individus qui y entrent avec un

simple rhume peuvent mourir d'une maladie contractée à l'hôpi-

tal lui-même.

C'est pourquoi nous voulons, nous médecins, que nos services

soient tenus convenablement; c'est un devoir de conscience pour

nous, nous voulons que tout se passe honnêtement, loyalement,

que la surveillance s'y fasse d'une manière effective et non fictive

que nos employés remplissent leurs fonction» avec intelligence,

car nous sommes convaincus qu'il n'y a pas d'autre moyen d'as-

surer à nos malades tout le bien être que nous cherchons à leur

procurer.

Je ne m'étendrai pas davan tage, mesdames et messieurs, sur ce su-

jet, je me borne à vous engager, dans votre propre intérêt, à suivre

exactement ces cours, car nous avons la ferme intention, au sur

à mesure des progrès de la laïcisation, de réserver nos meilleures

VARIA. 287

places à Ville-Juif, à Ville-Evrard etailleurs àceux d'entre vous qui

auront fait leurs preuves de bonne conduite et qui auront obtenu

les récompenses qui, chaque année, seront accordées à la suite de

ces conférences. Il nous reste, eu terminant, à remercier nos dé-

voués collaborateurs, les internes de nos services du zèle et du dé-

vouement qu'ils ont apportés à faire ces cours.

AI. le Dr Respaut a fait le cours d'anatomie et il a insisté parti-

culièrement sur l'étude des os et des articulations. Son cours a été

suivi avec assiduité et profit.

Le cours de pansements et de petite chirurgie, fait avec la plus

grande clarté par M. Dericq, interne en médecine du service de

l'admission, a été généralement suivi avec beaucoup plus d'assi-

duité par les gardiens que par les gardiennes. Tous, du reste, se

sont appliqués à l'exercice pratique de l'application des bandages

et pansements.

M. le Dr Vetault a fait le cours de physiologie avec beaucoup de

zèle; les femmes ont montré, en particulier, qu'elles savaient en

tirer des conclusions pratiques.

il. Duhamel, interne eu médecine du service des hommes de

l'asile Saint-Anne, a fait avec le plus grand soin le cours d'hygiène;

il a exposé dans différentes leçons les notions les plus importantes;

et les plus pratiques, de cette partie de la science, il a eu enfin la

bonne idée de faire autographier le résumé de chacune de ses

leçons de manière à permettre aux élèves de fixer facilement dans

leur mémoire l'enseignement qui leur était donné. C'est une heu-

reuse innovation qu'il serait utile d'imiter.

MM. Delage et Bouffé, internes en pharmacie, se sont chargés de

faire le cours de pharmacie, ils l'ont fait de la manière la plus

satisfaisante. Ce cours, commencé au mois de mai, a été fait en

quatorze séances. Les hommes ont été les moins nombreux; mais,

en'revanche, pour la plupart, ils ont su profiter de l'enseignement

qui leur était donné, ainsi que l'attestent leurs compositions.

Il y lieu aussi de remarquer que les élèves des années précé-

dentes montraient plus de zèle et d'assiduité que les nouveaux

venus. Les femmes se sont toujours rendues au cours en plus

grand nombre ; mais, à l'inverse de ce qui se passait chez les

hommes, on remarquait l'absence des anciennes élèves. Il faut

dire cependant à leur louange que certaines d'entre elles ont par-

faitement conservé les notions qui leur avaient été données l'année

précédente. En effet, leurs reconnaissancesontété très brillantes;

l'une a eu le maximun et six ou sept ont nommé les trois quarts

des produits. Comme il était facile de le prévoir, leurs composi-

tions écrites se sont un peu ressenties de leur négligence à venir

au cours, aussi, pour cette partie de renseignement, étaient-elles

inférieures aux hommes, tandis qu'elles étaient de même force

pour les reconnaissances.

288 FAITS DIVERS. py

Je ne veux pas, mesdames et messieurs, vous faire attendre plus

longtemps la distribution des récompenses qui vont vous être dé-

cernées : je termine en exprimant l'espoir de n'avoir l'année pro-

chaine que des éloges à vous faire, sous tous les rapports.

FAITS DIVERS

Institution nationale DHS SOURDS-MUETS. AI. JAVAL, inspecteur

général des services administratifs, a été nommé directeur de cette

institution.

Institut royal des sciences de 1,01113AIIDIE. Le prix Fossiati vient

d'être décerné à M. Luigi Lucioni, professeur à l'université de

Florence, pour son mémoire sur les localisations sensorielles dans

l'écorce cérébrale.

Enfants, idiots. Des développements apportés durant les

dernières années dans le département de « Public Charities and

Correction » ont soulevé une question de quelque intérêt. Uue fille

idiote d'une des institutions de Bandall's Island fut rendue grosse

par un idiot. Ce cas soulevait la question suivante : Les idiots

microcéphales sont-ils capables de se perpétuer PBerkham rapporte

qu'un imbécile, marié depuis quelques années à une femme bien

portante, n'eut pas d'enfants. Au contraire, un homme sain, marié

à une femme idiote, eut trois enfants, dont deux furentidiots. Ces

cas confirment le dire de Vogt, que les idiotes peuvent concevoir

et que la plupart du temps les idiots sont incapables de faire des

enfants. Dans les cas de conception, lorsque la femme est seule

demi-crétine, Berlillain n'a jamais vu leur progéniture arriver à

l'à,e, mûr; si ce n'est pas un mort-né, le produit meurt ordinaire-

ment pendant l'enfance. L'idiot microcéphale deRandati's Island

a les organes génitaux bien développés, et, sans aucun doute, il

est capable de procréer. Les résultats de Berkham sont confirmés

par les travaux de Monteyell sur l'hérédité dans les familles dégé-

nérées psychiquement. (Joumt. of tteruous and mental diseuses.

1881, l. 103.)

Le rédacteur-gérant, Bouhneville.

trrcA (.h lj £ hlâbâi ion/ Jb ?

Vol. lx. Mai 1885. N" 27.

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE

ALTÉRATIONS DE LA MOELLE ÉPINIÈRE CAUSÉES PAR

L'ÉLONGATION DU NERF SCIATIQUE

Etude expérimentale faite dans le laboratoire de M. le professeur

Jean 1111ERZEJEVt'SKI (de Pétersbourg).

Par Pauline TARNOWSKI.

Pendant ces douze dernières années, l'élongation

des nerfs a joui d'une grande vogue dans la thérapeu-

tique des maladies nerveuses. Il faut reconnaître

qu'elle n'a pas produit les guérisons qu'on en atten-

dait ; néanmoins, bon nombre de praticiens de tous

les pays y ont eu recours à titre d'essai empirique tou-

tes les fois que les moyens habituellement employés

restaient inefficaces. Peut-être trouvera-t-on trop hardi

de traiter de méthode empirique ce nouveau mode

de traitement ? Mais la littérature volumineuse, dont

elle a été l'occasion, n'est-elle pas là pour montrer,

que, parmi le nombre considérable d'observations cli-

niques qu'on compte par centaines, on en trouve à

peine une dizaine qui traitent la question au point de

Archives, t. IX. z19

290 pathologie expérimentale.

vue expérimental. Avant d'exposer nos expériences

personnelles, faites sur des lapins, nous croyons utile

de tracer un court exposé de tous les travaux concer-

nant l'élongation des nerfs depuis le jour où le profes-

seur Biliroth en 1869 entama le premier cette question,

qui ne reçut droit de cité qu'en 1872, à la suite d'une

opération du professeur Nussbaum, suivie d'un succès

éclatant. Nous nous permettons cette investigation

dans l'histoire de l'élongation des nerfs, dans le but

d'appuyer de toutes les données connues les quelques

conclusions pratiques que nous avons à tirer de notre

étude expérimentale.

Pour faciliter l'aperçu des observations antérieures,

nous les divisons en quatre groupes : Groupe le', con-

tenant les élongations des nerfs pratiquées dans un

but thérapeutique. Groupe II : Elongations de

nerfs suivies de mort. Observations avec autopsie.

Groupe III : Recherches purement expérimentales sur

les élongations des nerfs entreprises sur des animaux,

sans examen de la moelle épinière. - Groupe IV : Les

mêmes, avec examen histologique de la moelle. C'est

à ce dernier groupe que se rapporte notre travail.

Groupe Ie'. Elongations de nerfs pratiquées dans

un but thérapeutique.

En 1860 61, le professeur Nussbaum ' faisait une

résection de l'articulation du coude; occasionnellement

il étira avec force le nerf ulnaire qui était adhérent

1 Nussbaum. Deutsche Zeitschr. fiii, Chirurgie, 1872, p. 450.

altérations de la moelle épinière. 291

aux tissus voisins. Au lieu des complications qu'ap-

préhendait l'opérateur, il vit disparaître la contrac-

ture du quatrième et du cinquième doigt qui persistait

malgré tous les remèdes.

M. Billroth 1, en 1869, voulut s'assurer des causes

qui faisaient persister les douleurs atroces et les con-

tractures dans la région fessière chez un malade, en

dépit de tous les modes de traitement. Il découvrit à

cet effet le nerf sciatique qu'il explora jusqu'à son

émergence et amena, à sa grande surprise, un enraie-

ment des contractures ainsi que des douleurs. Ces

deux incidents servirent de préface à une longue suite

d'opérations sur les nerfs dans le but de les guérir en

les étirant.

Ce fut M. Nussbaum, 2 qui le premier, en 1872,

élongea les nerfs dans un but thérapeutique. Voici en

deux mots l'exposé de son observation : Un soldat,

âgé de vingt-trois ans, reçut un coup de crosse sur la

nuque et le coude gauche. Il souffrait de crampes très

douloureuses et de contractures des muscles pectoraux

ainsi que des muscles du bras gauche, qui cessèrent

après l'élongation du nerf ulnaire, du plexus axillaire

et des nerfs corticaux dans la région claviculaire. Ce

résultat brillant mit à la mode la nouvelle opération,

et, depuis, l'élongation des nerfs fut pratiquée dans

tous les pays, avec plus ou moins de succès. La même

année, M. Gartner3, à Stuttgardt, étira le plexus bra-

1 Vogt. -Die Nervendelinung als Opération in der Cliirurg. Praws,

Leipzig, 1877.

2 Nussbaum. - Blosselegung und Dehizzvig der IRïcketntnrksneruen.

Deutsche 7eitsch·ift sur Chirurgie, Bd. I, K. V, p. 450.

3 G;irtner. Ibid., p. 102.

292 PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE.

chial chez une demoiselle de trente-huit ans, qui accu-

sait de la paralysie et des douleurs dans une des

extrémités supérieures. Enraiement des douleurs.

Mort au bout de quinze jours à la suite d'une lésion

dans la veine jugulaire, indépendante de cette opé-

ration. Vojt l (1876) étira avec succès le plexus

brachial chez un maçon de soixante-trois ans pris de

tétanos après s'être blessé à la main. M. Verneuil'

(1876) élongea, en le broyant, le plexus brachial à une

femme de soixante ans qui accusait des contractures

douloureuses dans l'extrémité supérieure et une réci-

dive de cancer. La malade mourut à la suite d'un éry-

sipèle survenu pendant le traitement. Watson Eben',

en 1878, fait part de deux cas d'élongation du plexus

brachial chez un garçon de seize ans et un homme de

trente-cinq ans, qui tous deux avaient été pris de téta-

nos à la suite d'une blessure l'un au doigt, l'autre à

la main. Les deux malades moururent.

Czerny4 (1879) fit subir plusieurs fois l'élongation

du plexus brachial à un jeune homme atteint d'hémi-

plégie et de crampes très douloureuses, mais sans

succès. Clin', homme de trente-huit ans, luxation

compliquée de la phalangette du pouce, résection de

la phalangette, tétanos, traction du plexus brachial,

mort le cinquième jour. Esmarch (1880) obtint un

beau résultat après une élongation du plexus brachial.

1 Vogt. Centralb. sur Chirurgie, 1876, no 40.

2 Verneuil. La thèse de Duvaull sur la distension des nerfs, etc.,

1876, thèse de Paris.

1 Watson Ehen. - The Lancer 1878, I, p. 229.

4 Czerny. Arch. sur Psychiat., etc., 1879, X, p. 284.

' Clin und Knie.S<-Pe<e)'M)'yn : ed. 117och., 1879, no 33.

'' Esindi'ch. Deulsche metl. 117ocheiische,ilt, 1880, n" 19.

ALTÉRATIONS DE LA MOELLE ÉPINIÉRE. 293

Enraiement des douleurs et retour de la motilité.

Gillette et Debove `, depuis 1881, ont pratiqué avec suc-

cès l'élongation du plexus brachial et d'autres nerfs.

Leurs travaux, du reste, sont trop connus en France

pour que j'aie à les exposer ici. Ranke (1882) commu-

nique une observation sur une contracture congéni-

tale qu'il entreprit de combattre en élongeant le

plexus brachial; il n'obtint aucun résultat satisfaisant.

Stintzing3 (1883) élongea le plexus brachial à un

vieillard de soixante-sept ans atteint de paralysie agi-

tante, aucune amélioration ne s'ensuivit.

Des élongations du nerf cubital furent pratiquées

par les observateurs suivants : Vogt4 (1873) l'entreprit

chez une malade qui s'était violemment blessée au

poignet : cessation des douleurs, guérison. Alorton'

(1877) : Blessure faite au poignet avec des ciseaux,

douleurs envahissant toute l'extrémité supérieure :

l'élongation du nerf cubital amena une guérison.

Czerny6, en 1878, traitapar l'élongation du nerf cubital

une névralgie de l'extrémité supérieure occasionnée

par un violent traumatisme du coude, chez un homme

de vingt-quatre ans; amélioration. Duplay' (1878) :

Névralgie du nerf cubital par compression d'un fibrome

chez un homme de vingt-six ans, l'élongation du nerf

1 Gillette et Debove. - Union méd., 1881, p. 116. ,

1 rangez Arch. sur klinische Chirurgie, 1882, 48, p. 537.

' Stintzing. Ueber Nervendehnteng, Leipzig, 1883, p. 165.

1 Vogt. Deittschc Zeitschr. sur Chirurgie, 1876, VII, p. 155.

5 Morton T)Mmas. 7'wo cases of izervestretching. (Thednzr.ric.Jouru.

of lhe Med. Sciences, 1878, Jan.)

6 Czerny. Loc. cit.

7 Dup)ay. Bulletins et mémoires de la Société de Chirurgie, 1878, IV,

p. 773- - ...

294 PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE.

amena une guérison de la névralgie. Mac-Leod'

(1879) : Parésie et atrophie de l'avant-bras et de la

main chez un homme de vingt-six ans; élongation du

nerf ulnaire; l'atrophie ne diminue pas. Gerald Bom-

ferd (1880) : Atrophie musculaire de l'extrémité

supérieure; élongation des deux nerfs ulnaires; atro-

phie notablement diminuée. Leisrink3 (1882) pratiqua

une traction du nerf ulnaire pour remédier à une

altération motrice et un trouble de la sensibilité obser-

vés dans l'extrémité supérieure; les symptômes empi-

rèrent. Banne z) : Névralgie dans la région par-

courue par le nerf ulnaire; amélioration après la

traction du nerf correspondant. Nicoladokib (1882)

cite un cas d'amélioration durable à la suite de l'élon-

gation du nerf cubital. Certains auteurs combattirent

la lèpre anesthétique en pratiquant l'élongation des

nerfs. Tels furent : Lawrie en 1878 et Gerald Bomferd'

à Calcutta, Lacorie' en 1880 à Lahore, qui, selon leurs

témoignages élongèrent, le nerf ulnaire avec succès.

D'autres auteurs élongèrent le nerf cubital en même

temps que le nerf médian. Le professeur Verneuil', qui

modifia la méthode de l'élongation des nerfs pratiquée

t llac-Leod. - Brain, 188o, II, p. 147.

2 Gerald Bomferd. The Lancet, 188t, I, p. 329.

3 Leisrink. Beiti,age zur Casuistik der Nervenchirurgie speciall der

Ne2-veiidehnung. (Arch. f. Chirurgie, 1882, p. 48, K. 2.)

* Ranke. Arch. für chirurgie, 1882, p. 537.

5 Nicoladoki. Beilrdge zur Nervenchirurgie réf. dans la Centrait, f.

Nervenheillcunde, 1882, p. 231.

6 Gerald Bomferd. Nerve sti,etèhing in azzaesthetie leprosy. (TheLancel,

1881, 26of february.)

7 Lacorie (Lahore). Case of anaesthetie leprosy treated by stretching

of both ulnrer and sciatic 7 : o'ue. (The Lancet, 1881, Mardi.)

8 Veriieuil. - V. Duvatilt, loc. cit.

ALTÉRATIONS DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 295

en Allemagne, en introduisant la sonde cannelée, sur

laquelle il broyé le nerf, entreprit une double élon-

gation en étirant le nerf médian et ensuite le cubital à

un homme de trente-neuf ans, qui accusait des crampes

douloureuses dans les muscles de la main à la suite

de l'amputation de l'annulaire : guérison complète.

Auerbach' entreprit en 1882 l'élongation des nerfs

médian et cubital dans un cas de paralysie agitante,

occasionnée par une vive frayeur; une amélioration

s'en suivit. Gillette (1881) étira avec une force de

quinze kilos les nerfs médian et cubital à une femme

qui accusait de l'ataxie depuis cinq ans. Les douleurs

de l'extrémité supérieure cessèrent, mais celles des

extrémités inférieures augmentèrent.

Elongation du nerf médian. Callender3 (1874) :

Un homme de quarante-cinq ans endurait de violentes

douleurs dans le moignon après une amputation de

l'avant-bras. L'élongation du nerf médian amena un

amendement des douleurs. M. Callenderl pratiqua la

même opération sur un jeune homme de vingt ans, qui

accusait également de vives douleurs dans le moignon;

Enraiement des douleurs. NankiveIP fut moins heu-

reux. Il communique deux cas de mort à la suite de

l'élongation du nerf médian. Sa première observation se

rapporte à un jeune homme de vingt-trois ans, blessé

1 Auerbach B. Zur casuistik der Nervendehnung. (Deutsch. nied.

11'ockensch., 1882, no 3, p. 37.)

2 Gillette. Loc. cit.

3 Callender. T2,aits. of the cH ? H'caSoc. of London, 1574, VII, p. 100.

Callender. - Lancet, 1875, 1, p. 883.

1 i%'iiiliivell. - Lancet, 1878, 1, p. 311.

296 PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE.

au médius et pris de tétanos. Quarante-huit heures

après l'élongation du nerf médian, le malade mourut,

La deuxième observation concerne un homme de qua-

rante-huit ans auquel on amputa le pouce, ce qui

amena du tétanos, élongation du nerf médian, mort

le lendemain. Struckmann' Maag : Une femme de

trente-sept ans accusait de la névralgie de l'avant-bras;

L'élongation du nerf médian amena du soulagement.

Estiander' : Un homme de vingt-sept ans souffrait à

l'extrémité supérieure d'une névralgie d'origine trauma-

matique. Elongation du nerf médian; amélioration.

Thomas' (1879) : Tétanos d'origine traumatique chez

un jeune homme de vingt-trois ans qui se blessa à la

main; le nerf médian fut élongé et broyé sur une

sonde cannelée; convulsions, mort. Smith (1880) :

Homme de cinquante-quatre ans, auquel on ouvrit un

abcès phlegmoneux à l'avant-bras; il s'en suivit du

tétanos; l'élongation du nerf médian amena la guéri-

son. Le' Fort (1882) : Névralgie et paralysie à la suite

d'un accident de chasse; guérison complète après

l'élongation du nerf médian. Pour en finir avec le

membre supérieur citons encore quelques observations

sur l'élongation du nerf radial. Paget6, en 1876, étira

avec succès le nerf radial dans une contracture doulou-

reuse. Blum' : Anesthésie et altération motrice dans

' Struckmann-Maag. Etc.

2 Estlander. V. l'article de M. Chauvel sur l'élongation des nerfs.

Archives de médecine, 1881, vol. I, p. 707.

3 Thomas. Bulletins et mémoires delà Société de Chirurgie, 1879.

V. p. 173.

4 Smith. -Med. Times and Gaz., 1880,11, p. 216.

11 Le Fort. Gazette médicale de Paris, 1882, p. 387.

' Paget Voir le travail de M. Chauvel, loc. cit.

7 Blum. - De l'élongation des nerfs. (Arclz. de médecine. 1878.)

ALTÉRATIONS DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 297

l'extrémité supérieure chez un homme de vingt-neuf

ans, qui avait été blessé; élongation du nerf médian,

retour de la sensibilité, mais pas d'amélioration de la

motilité du bras.

Elongations des nerfs intercostaux. En 1878,

M. Nussbaum ' annonça la guérison remarquable d'un

malade affecté depuis vingt ans d'une névralgie inter-

costale. Au mois de novembre 1878, M. Nussbaum lui

étira les 8°, 9° et 10' nerfs intercostaux. Disparition

des douleurs. Malheureusement la guérison ne fut

guère stable, les douleurs se renouvelèrent, comme le

constata M. Langenbuch en 1880. Kleef (1880). Une

femme de trente-cinq ans, névrite ascendante chro-

nique. Elongation des 4\ 5', 6° nerfs intercostaux.

Guérison. Bzehazek3(1881) pratiqua également l'élon-

gation des nerfs intercostaux dans un cas de névralgie,

mais sans amélioration durable. Nicoladoki (1882) :

Elongation des nerfs intercostaux suivie de mort. (Voy.

au groupe second l'autopsie du malade de Nicoladoln).

L'élongation des nerfs ne se bornant pas aux extrémi- 1-

tés fut pratiquée également sur la face, ainsi l'élonga-

lion du nerf facial fut faite par M. Baum en 1878 à

une femme de trente-cinq ans qui souffrait de contrac-

tions convulsives des muscles de la face. Guérison.

1 Nussbaum. Die- Opération einer intercostal Neuralgie. Munchen,

t8,9.

2 Kleef. - Ei ? t Fall von Dehnung der intercostal Nerven. ()F7eKern ! e<<.

fYoch., 1880, n° 40.)

3 Bzehazek. R. V. Beitrnge zur operatiuen Beha ? idlung der intercos-

tal Neuralgien (Allgem. 11'iencr med. Zeilschr., 1881, n°s 43-i4.)

* Nicotadoki. Beitctrge zur Nerven-Chirurgie. (vienez med. Presse

1889, n°° 27 et suivants.)

1 Baum. Berliuer Klinisch. Wochenschrifl, 1878, p. 595.

298 PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE.

Schùssller1 (1879, à Brème) : Une femme accusait des

convulsions des mucles de la face depuis huit ans;

élongation du nerf facial; guérison complète. Putnam 2

(1880, à Boston) : Spasmes cloniques de la face chez

un homme de vingt-cinq ans, élongation dunerf facial.

Insuccès. Allen Sturge et Gadlec' (1880) guérirent une

vieille femme de soixante-douze ans, qui, depuis six

ans, accusait des contractures spasmodiques de la face,

en lui étirant le nerf facial. Eulenburg4 amena une

guérison dans un cas analogue, en pratiquant l'élon-

gation du nerf facial pour des contractions delà face.

Bernhardt3 (1882, à Berlin) fait part dans son article

de dix observations sur l'élongation du nerf facial et

en tire une conclusion favorable à cette opération.

Carter Grayl communique deux observations person-

nelles sur l'élongation du nerf facial. Dans la première,

il constate un soulagement de courte durée, dans la

seconde l'état du malade empire.

Elongations du nerf Trijumeau. Higgens7 (1875)

étira les nerfs sus et sous-orbitaires, chez un homme

de soixante-deux ans, qui souffrait de violentes dou-

leurs après l'énucléation du bulbe oculaire. Les dou-

1 Seliùssler (H.). Mimischer Gesichisk ? ,(i ? izpf. Dehnung des faciales

(Berl. Klin. 117ochenschî ? 1879, n- 46, p. G84.)

2 Putnam. Arch. of nzed. New-Yoi,k, 1880, I.

» Allen, Sturge et Gadlee. - The Brit. nied. Jouria., 1880, II, p. 810.

Eulenburg. Archives générales de médecine, 1881, I, p 107.

' Be'-nhat'dt Weiterer Beilrag. zur Frage von den Erfolgen der

Dehnung des N. facialis bei tic convulsif. (Deutsch. nzed. TVochenschr..

1882, n- 9.)

Carter Gray (L ). tao cases z of /ac'al nerven the Amer.

Journ. of Neurol. und Psych., I, p. 51r,.

fliggeiis. - The Brit. med. Journ. 1879, 1, p. 89 ?

ALTÉRATIONS DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 299

leurs cessèrent. En 1878, l'auteur pratiqua l'élonga-

tion du sus-orbitaire dans un cas analogue, avec le

même succès. Vogt1 (1876 et 1877) étira le nerf alvéo-

laire supérieur pour des névralgies et obtint la gué-

rison. Spence (1817) obtint également une guérison

en élongeant le nerf sous-orbitaire dans un cas de

névralgie accompagnée d'accès épileptoïdes. Czerny 3

(1878) communique deux observations sur l'élongation

du nerf sus-orbitaire; la première concerne un homme

de soixante-trois ans, guériosn. Dans la seconde, la

névralgie ne céda qu'après une résection du nerf. Grain-

ger-Stewart4, en 1878, opéra un vieillard de soixante-

dix ans atteint de névralgie et de contractions

de la face; le nerf sous-orbitaire fut étiré à deux

reprises, ensuite ce fut le tour du nerf mentonnier.

Guérison. Rocher' guérit en 1879 un homme de

trente-deux ans qui souffrait depuis quatorze années

d'une névralgie opiniâtre, en lui étirant le nerf sus-

orbitaire. Masing" (1879) : Elongation du nerf sus-

orbitaire dans un cas de névralgie; guérison. Crédé'

(1880) guérit une névralgie de la face chez une

femme en lui élongeant le nerf sous-orbitaire. Purdie'

(1880) atteint le même résultat dans un cas analogue.

Hahu9 (1880) et Langenbuch, dans la même année,

1 Vogt. Loc. cit.

2 Spence. The Lancet, 1880, p. 249.

3 Czerny. Loc. cit.

grainier Stewart. The Brit. med. Journ., 1879, p. 803.

3 Kocher. Co2-iespondeîtzblatt sur Schweigei, Aerzte, 1879, n° 14.

" 111asing. St-Pelersb. 711ed. 117och., 1879, n" 49.

Credé. -- Berl. klin. iYoc/z., 1880, p. 235.

8 Purdie. Stretching of sciatic and infraorbit nerves. (7'/ie.ance<,

1880, II, 14.)

1 Hahu. - Berlin klin. lvoch., 1880, p. a3o. Lat)genbuch./61d., p. 235.

300 PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE.

étirèrent le nerf sous-orbitaire dans des névralgies,

mais ne parvinrent qu'à enrayer momentanément les

douleurs. Walsham ' (1880) pratiqua l'élongation du

sous-orbitaire chez une femme atteinte de névralgie

et contractions convulsives de la face; guérison.

Quinquaud (1880-1881) pratiqua la même opération

dans des cas analogues et obtint également des résul-

tats satisfaisants. Bada) (Bordeaux) entreprit, selon le

rapport de M. Trélat, trois fois l'élongation du nerf

nasal externe pour des névralgies dans la région orbi-

taire, et constata toutes les fois l'arrêt des douleurs.

Sée5 (9 88), Po)ai] ! on' et Alouchet6 étirèrent le nerf

dentaire inférieur, dans trois cas de névralgie; amé-

lioration dans la première obser.vation et guérison

complète dans la dernière. Leisrink (H.)'communique,

en 1882, trois cas d'élongation des trois branches du

trijumeau pour des névralgies et obtint toutes les fois

la guérison. Ranlcee (1882) fait part de sept observa-

tions sur l'élongation des trois branches du trijumeau.

Il note. bien quelques guérisons, mais toujours à la

suite de la résection des branches du nerf.

Elongations du nerf optique. Kümmell Hermann9

1 Walsham. The Brit. med. Journ., 1880, Il.

2Quinquand. - Société de Biologie, 12 mars 1881.

3 Badal. - Gazette médicale de Paris, 1882, p. 848.

1 Sée. Gazette médicale de Paris, 1882, p. 293.

5 Palaillon. Ibid.

' Mouchet. Ibid., p. 351.

' Leisrink. Beifrctgezur Ne)-venchii-uigie, etc ? 4rch. f. Chirurg., 1882,

48, 4, 3.

8Ranke. - Compte-rendu des opérations pratiquées à la clinique chi-

)-Mt-.9 : ca<e(<e Groningen. (Arch. f. Klin. chirurgie, 1882, p. 537.)

0 Kummell Hermanu. - {/e&erDe/mM7tf/en. oplicus (Deutsch med.

lVoch., 9882, 11- 1.)

ALTÉRATIONS DE LA MOELLE ÉPINIÉRE. 301 i

(1882) pratiqua cinq fois l'élongation du nerf optique,

sans atteindre de résultats satisfaisants. Pamard' (1882,

à Avignon) entreprit une élongation bilatérale des

nerfs optiques dans un cas d'atrophie de ce nerf, d'o-

rigine syphilitique; amendement des douleurs, mort

accidentelle du malade, pas d'autopsie. Hatzaourow2

communique trois cas d'élongation du nerf tra-

chléaire dans des cas d'iridocyclite de staphylome de

la cornée, et d'intenses douleurs subséquentes à l'énu-

cléation. Toutes les trois fois, les douleurs cessèrent.

Élongation du nerf sciatique. De tous les nerfs,

c'est, sans contredit, le sciatique qui fut étiré le plus

souvent. Aucommencement, ce fut pour des névralgies,

des traumatismes et, depuis 1879, ce nouveau mode de

traitement fut appliqué en Allemagne (Langenbuch) au

traitement de l'ataxie locomotrice. Procédant par

ordre chronologique, nous présenterons d'abord un

aperçu, aussi bref que possible, des observations sur

la névralgie traitée par les tractions nerveuses, et nous

le terminerons par un exposé de celles qui concernent

l'ataxie. Patruban' (1873) étira le nerf sciatique à un

homme souffrant d'une sciatique rebelle; améliora-

tion. Nussbaum' (1876) pratiqua l'élongation des deux

nerfs sciatiques et du crural à un homme de trente-

cinq ans, atteint de paralysie et de spasmes cloniques

des extrémités inférieures ; amélioration. Drayez

1 Pamard. Gazette médicale de Paris, 1832, p. 206.

2 KatMourow. Wratch. Gaz. nzed. hebdom. St-Petersb., 1883, nos 44

et 45.

Patruban. Ce ? t<)'u/< ! « /Mr Mect. MM/MC/t<., 1873, p. 2X4.

Patrubaii. - Centralblatt sur med. ll'issensclzt., 1873, p. 254. 1876.

Nussbiiiin. Nervendehnung bei centralen Leiden ; Munchen, 1876.

5 Drake. Canada nzed. aîtd sury. Journ., 1876, november.

302 PATHOLOGIE EXPERIMENTALE.

(1876) : Un homme de vingt-six ans est pris de

tétanos après une insignifiante blessure au pied ; l'é-

longation du nerf sciatique amène un soulagement

momentané; les convulsions revinrent et le malade

mourut quinze jours après l'opération. Bird' (1877)

amena une guérison en étirant le nerf sciatique pour

une sciatique qui avait persisté durant six mois.

Chiene' (1877-1878) pratiqua cinq fois cette opération

pour des sciatiques et obtint deux guérisons. Sklifas-

sowski' (1878, Saint-Pétersbourg) étira le nerf scia-

tique dans le but d'amender de vives douleurs occa-

sionnées par une plaie; ce n'est que la résection du

nerf qui amena la guérison. Macfarlane` (9 878) guérit

une sciatique contractée à la suite d'un refroidisse-

ment, en opérant une traction du nerf sciatique.

lliasin5 fit une traction bilatérale du nerf sciatique à

un homme de trente-sept ans, qui accusait, depuis

sept ans, une névralgie accompagnée de troubles de la

motilité et de la sensibilité. Une seconde observation

du même auteur se rapporte à un garçon de douze

ans blessé à la région sacrée, et accusant une disten-

sion du pied, un pied varus équin et des contractures

convulsives. L'élongation du^nerf sciatique amena une

amélioration. Morton0 pratiqua une traction du nerf

sciatique à un homme de cinquante-deux ans, souffrant

depuis onze ans d'une névralgie d'origine traumatique.

1 Bird. Tlie iVew-1-oi-li med. Record., XIV, 1877, 13 septembre.

2 Cliiene. - Tlze Practitiozzen, 1877, p. 417. The Lancet, 1878, 1, p. 905.

Sklifass.owski. Sl-Petersb. nied. kvoch., 1878, n" as, p. 213.

1 Macfarlane. Tlie La ? zcet, 1878, 11, u" 6.

8 Masing. S<-Pe<o&. med. iYock., 1878, iio 3'i, p. 281. Voy. le

même recueil.

é Morton. Thomas, loc. cit.

ALTÉRATIONS DE LA MOELLE FP1NI,RE. 303

Soulagement de courte durée. Struchemann Maag'

(1878) fait part de deux observations concernant deux

jeunes femmes atteintes de névralgies de l'extrémité

inférieure; les tractions nerveuses amenèrent un

amendement. Andrews et Farrer' (Chicago) : Ilaraplé-

gie et contracture des muscles de l'extrémité infé-

rieure, d'origine traumatique; traction du nerf sciatique

et crural, guérison. Crabbel g : Tétanos à la suite d'un

traumatisme chez un homme de quarante-deux ans;

traction du nerf sciatique et du crural; mort le même

jour. Clarke' (1878) : Une femme de vingt-quatre ans

fut prise de tétanos après l'amputation du gros orteil;

l'élongation du nerf sciatique amena la guérison.

Czerny' (1879) pratiqua une traction bilatérale des

nerfs sciatiques pour une myélite par compression et

une paralysie des extrémités inférieures; progrès

rapide delà myélite. llorris (1879) : Traction du nerf

sciatique à l'émergence du tronc chez un enfant de

sept ans ( ! ) pris de tétanos après s'être blessé au pied ;

mort le même jour. Grainer-Stewart' (1879) : Contrac-

tions douloureuses des muscles de l'extrémité infé-

rieure ; traction du nerf sciatique, amélioration.

Blum' : Névralgie et atrophie musculaire dans la région

sciatique, chez un homme de trente-neuf ans ; traction

du nerf correspondant, guérison. Dans une seconde

1 Struchemann Maag. IIosp. Fidende, 1878, 2, B. V., 44.

2 Andrews and Farrer. Chicago 2 ? zed. Joie7-n., 1878, p. 230.

3 Crabbel. - Arch. sur chirurgie, XXIII, p. 817.

4 Clarlie. -Glascow med. Journ., 1879, Suly.

3 Czerny. Arch. sur Psych., 1879, p. 284.

1 Morris. The Brit. nied. 1879, I, p. 933.

' Grainger Stewart. Ibid., p. 803.

9 Blum. - Bulletin et mémoire de la Société de chirurgie, isso.

304 . PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE.

observation, M. Blum constata un amendement. Hut-

chinson' (1880) : Un jeune homme de vingt-deux ans

reçut une décharge de plomb dans l'extrémité infé-

rieure ; il s'en suivit un tétanos; élongation du nerf

sciatique; mort vingt heures après. Omboni2 : Un

enfant de sept ans se blesse vivement au pied. Téta-

nos ; la traction du nerf sciatique amena un soulage-

ment de courte durée; mort. Golding-Bird3 : Névralgie

violente consécutive à l'amputation de l'extrémité

inférieure; traction du nerf sciatique restée sans suc-

cès, la résection du nerf amena la guérison. Spence'

(1880) : Commencement d'atrophie musculaire; amen-

dement après l'élongation du nerf sciatique. Robertson'

(1880) : Un homme de quarante-cinq ans souffrait

depuis huit années d'une névralgie dans la région du

nerf sciatique; une traction de ce dernier amena un

soulagement. Patow Bramwell ° (1880) : Sur cinq

malades auxquels il pratiqua la traction du nerf scia-

tique pour des névralgies, constata trois guérisons,un

amendement et un insuccès. Purdie' (1880) constata

la guérison d'une névralgie après l'élongation du nerf

sciatique. Pooleye (1880) rapporte quarante quatre

observations de tractions nerveuses pratiquées dans

diverses névralgies, principalement dans la sciatique.

L'auteur, un grand partisan de ce nouveau mode de

1 Hutchinson. dlecl. Tinzes and Gaz., 1880, II, p. 216.

2 Omboni. - ln Fi-onibetta Sullo sti2,artiento deinerve, 1880.

3 Golding-Bird. The Brit. med. Journ., 1880, I, p. 969.

4Spence. - The Lancet, 1880, I, p. 249.

3 Robertson. - The Lancet, 1880, p. 587.

Patow BromweU. The Bi,it. med. Journ.. 1880, I, p. 94 t.

7Purdie. - Stretchirzg of scialic, etc. (The Lances, 1880, II, 14.)

4Pooley. - The New-Yorlc 7zc £ Record., 1880, p. 173.

ALTÉRATIONS DE La MOELLE ÉPINIÈRE. 305

traitement, prétend que la traction enraie chaque fois

les douleurs et exerce une action favorable sur les

altérations trophiques. Pour ce qui est du tétanos d'o-

rigine traumatique, l'auteur considère la traction des

nerfs comme inutile. Berridge1 (1881) : Contractions

douloureuses des muscles de l'extrémité inférieure ;

l'élongation du nerf sciatique produisit du soulage-

ment. Gillette' (1881) constata également'de l'amélio-

ration, après la traction du nerf sciatique, chez deux

femmes atteintes de névralgies. Norman Mackintosh3

(1881) : Traction du nerf sciatique chez un homme de

quarante et un ans souffrant d'une névralgie depuis

quatorze ans; amélioration. latrie ( (1881) fait part

de résultats favorables atteints par la traction du nerf

sciatique dans la lèpre anesthésique. Lamarre )C.5

(1881) : Traction répétée du nerf sciatique chez une

femme de soixante-dix ans sans obtenir de résultat

favorable; mort accidentelle de la malade, l'ouver-

ture du cadavre ne put être faite. Morton Williams

(1882) fait part de deux observations sur l'élongation

du sciatique pour une paralysie agitante; pour une

sciatique ; amélioration chaque fois. L'auteur se pro-

nonce en faveur de cette opération. Simon R. M. 7

(1882) : Paralysie infantile chez un enfant de cinq

i Berridge. The 13z·it. zned. Journ. 1SS), april.

2 Gillette. Loc. cit.

3 Norman Mackintosh. lite Brit. ned. Jourre., issi, I.

4 Lawrie. -lhecase anaeslhetie fehrosry, etc. (The Lancet, ISSI.)

1 Lamarre (E.). Contribution à l'étude de l'action de l'élongation des

nerfs dans les affections médullaires, (I ? evite (le chirurgie, ISSI.)

a Moi ton William. A contribution to the szibject of ? zei-ve slrelching.

(Joura. ofnerv. and ment, clisease, 1882, p. 133.)

1 Simon lt. AI. Nerve strelching iii infantile paralysis (the B;'t/. nzecl.

Journ., 188 ? , II).

Archives, t. IX. 20

306 PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE.

ans. La traction du nerf sciatique améliora la dé-

marche. Weltrubsky1 (1882) entreprit, dans la clinique

du professeur Lussenbauer, toute une série de tractions

nerveuses, dont trois du sciatique, pour une névrite

ascendante. Résultat excellent mais non stable, pour

des douleurs violentes dans l'articulation du fémur.

Amélioration de courte durée pour une épilepsie

débutant par des crampes dans le membre inférieur.

Après la traction, les intervalles après les accès

gagnèrent en durée. Leisrink2, dans le nombre de ses

observations sur l'élongation des nerfs, fait part de

trois cas d'élongation du nerf sciatique; pour une

névralgie, une sclérose et une myélite. Résultats néga-

tifs. Itauke3 fit deux fois la traction du nerf sciatique,

dont une amélioration. Wieth John A.4 pratiqua pour

une sciatique la traction du nerf intéressé et obtint un

soulagement de courte durée. Riedel5 (Aix-la-Chapelle,

1882) communique deux cas de lésions de l'épine dor-

sale d'origine traumatique, qui guérirent à la suite de

traction du nerf sciatique et du crural. Leyden E.' s

(1882) essaya à trois reprises de ce nouveau mode de

traitement, mais sans en obtenir de résultats satisfai-

sants. L'effet de la traction des nerfs fut absolument

1 Weltrubsky. Erfalirungen liber Nervendehnung Casuistische Mitlhei-

lungen ans der chirur. Klinic gussenbauer. (Prctg, med. Woch., 1882,

nos 14 et suivants.)

2 Leisrink. Beili-cege zur casuistik des Neruencleirttrgie, etc., loc. cil.

rancie. Loc. cit.

i Wieth John A. Titrée cases of strelching for the relief of persistais

fulguraling pains, etc. (Amer. Jours. of Nettrol. and Psllch., I, p. 465.)

6 Riedel. Ve)'ueeA ! <7 ! y ac/t. ! Ve)'e//M ! on. (Deutsch. med. llo-

chenschr., 1882, no 1.)

Leyden E. UeLer Nenaendehnung, etc. (Charité Annalen, 188-9,

p. 267.)

COMMOTION DE LA MOELLE EPINIERE. 307

nul. Blum' (t882) : Deux cas de sciatique. L'une gué-

rie, l'autre soulagée pur l'élongation du nerf intéressé.

Westphal2(1882/j : Un ouvrier de quarante-quatre ans

fut opéré dans la même séance, au nerf sciatique et

au crural pour une paralysie spasmodique. Soulage-

ment momentané. En somme, résultat nul.

(A suivre.)

PATHOLOGIE NERVEUSE

COMMOTION DE LA MOELLE ÉPliNIÈRE3

ETUDE CLINIQUE ET CRITIQUE

Par les D" L. DUMÉNIL, professeur de clinique clirurgicale a l'École

de médecine, et PETEL, chirurgien en chef de l'hospice général de

Rouen.

L'hémorrhagie intra-arachnoïdienne d'origine rachi-

dienne ne se comprend qu'avec déchirure de la dure-

mère, comme complication d'hématorrachis, ou déchi-

rure du feuillet viscéral de l'arachnoïde dans le cas

de lésions des vaisseaux sous-arachnoïdiens; c'est assez

dire qu'elle s'accompagne de troubles graves persis-

tants, et les quelques faits rares qu'on a observés mon-

1 Blum. - Gazette médicale de Paris, 1882, p. 145.

2 Westphal. - Ueber einen Fall von ! grosser Degeneralion des central ? ! e)'ueM ? 4'<eH : ï, etc. C/ta)' : Yc) ! ! tcM, 18S3, p. 390 et suivantes.

3 Archives de Neurologie, t. IX, p. 1 et 145.

308 PATHOLOGIE NERVEUSE.

trent qu'elle provoque surtout des phénomènes d'exci-

tation, des convulsions et des contractures '.

Il est douteux que 1'liémorrha-ie sous-arachtioïdieniie

puisse être produite par un traumatisme de la colonne

vertébrale, et il est impossible, en l'absence de faits

probants, d'être fixé sur les symptômes qu'elle pour-

rait occasionner. Tout porte à croire qu'ici encore,

les phénomènes d'excitation, raideur de la nuque,

contracture, convulsions cloniques et toniques, doivent

prédominer.

L'hématomyélie d'origine traumatique, sans lésions

de la colonne vertébrale est rare, mais il en existe des

exemples incontestables. L'observation quatre du mé-

moire de Savory que nous avons citée, en est une. Il

en est de même d'un fait rapporté par Bennett 2.

Un individu, se disputant avec sa femme, lui assène

un coup violent sur la nuque, une paraplégie subite

se déclare dans les quatre membres, sans que les par-

ties molles paraissent aucunement intéressées. Quatre

jours après ,la femme meurt, et, à l'autopsie, on trouve

au centre de l'axe gris, vers la quatrième cervicale,

un foyer hémorrhagique.

Peut-on distinguer la simple commotion de ces

épanchements ? Telle est la question la plus difficile à

résoudre dans le diagnostic des traumatismes de la

moelle épinière. L'hématorrhachis peut rendre l'erreur

possible, mais nous avons vu combien il est rare, isolé

des lésions de la colonne vertébrale. Dans ces cas,

comme l'apparition des phénomènes de compression

1 Bouchard. Lor. cil.

' Clinical lectures on the principles (iiiii pracliseof medicine, t859.

COMMOTION DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 309

exigerait l'accumulation d'une quantité de sang con-

sidérable, on peut penser que la distinction de J.-L.

Petit en phénomènes primitifs et consécutifs pourrait

servir au diagnostic.

Une question importante à étudier ici, est de savoir

si un hématorrachis peut disparaître assez rapidement

pour qu'on puisse expliquer par la résorption du sang,

la disparition quelquefois très rapide des accidents.

Nous manquons de données précises à cet égard; no-

tons cependant que, dans un cas emprunté par Eri-

chsen' à A. Cooper, un an après l'accident (torsion

de la colonne vertébrale), on trouva encore un épan-

chement de sang abondant entre la dure-mère et le

canal osseux, étendu de la première vertèbre cervi-

cale à la deuxième dorsale. Notons, en outre, qu'il n'y

eut aucun accident primitif, que les troubles consécu-

tifs, ne se montrèrent que plusieurs mois plus tard,

qu'ils prirent le caractère de symptômes inflammatoires

et que la paralysie des membres ne vint que peu à peu

dans les derniers temps de la vie.

Il nous paraît très vraisemblable, que la paralysie

qui peut accompagner un épanchement sanguin et

qu'on voit disparaître plus ou moins rapidement tient

plus à la commotion qu'à l'épanchement même.

L'hématomyélie provoque une myélite centrale, et

à ce titre est suivie à courte échéance d'altération am-

moniacale des urines et d'escarres graves de décubi-

tus. Ajoutons que les mouvements réflexes disparais-

sent rapidement et que l'excitabilité électrique est

abolie.

i Loc. cit., p. 90.

310 PATHOLOGIE NERVEUSE.

D'après ce que nous avons dit sur les phénomènes

d'excitation, observés dans les hémorrhagies ménin-

gées, on pourrait penser qu'il y a là un élément propre

à les faire distinguer de la commotion simple. Notre

observation, en montrant, dès le troisième jour, une

sécrétion urinaire, cette lacune ôte à la polyurie un

caractère de certitude complète. Le pouvoir réflexe du

centre spinal paraît résister davantage, car nous cons-

tatons son existence chez notre malade, au moins pour

le réflexe plantaire. Les deux moitiés de la moelle ne

sont pas toujours également influencées; nous voyons

dans notre cas, le côté droit plus profondément frappé

que le côté gauche, et cette différence se maintient

pendant toute la période de rétablissement des fonctions.

Nous retrouvons d'ailleurs cette particularité dans un

certain nombre d'observations. La distribution des

troubles sensitifs ne répond pas exactement à celle

des troubles moteurs, nous voyons l'anesthésie épargner

la partie supérieure du tronc et les membres supérieurs,

lorsque la paralysie motrice y est très accusée.

Erichsen, après avoir avancé d'abord que la com-

motion de la moelle ne s'accompagne pas de paralysie

des sphincters, ajoute à la page suivante que les trou-

bles de ce côté se produisent rarement de bonne heure,

qu'on ne les observe que dans les périodes avancées

de la maladie, lorsque le ramollissement de la moelle

est complet. Notre observation est en contradiction

avec cette manière de voir. Un symptôme auquel nous

attachons une grande importance est la persistance de

l'acidité de l'urine, jusqu'au trente-deuxième jour. La

contractilité électro-musculaire n'a été explorée chez

notre malade que le trente-huitième jour ; nous la

COMMOTION DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 311 I

trouvons d'abord affaiblie et même abolie dans un

certain nombre de muscles paralysés, mais d'une

manière très inégale, généralement plus à droite, où

la paralysie a été plus complète. Dans l'espace très

court de six jours elle reparaît jusqu'à atteindre presque

les limites normales, en restant toutefois un peu moins

développée du côté droit. Il semble qu'il y ait eu plutôt

une sorte d'engourdissement que perte réelle de la con-

tractilité électrique, car dans ce dernier cas, elle ne se

serait pas réveillée spontanément dans un délai si court.

. La marche des troubles fonctionnels est graduelle-

ment décroissante. Nous voyons le rétablissement des

mouvements commencer dès le deuxième jour, et

s'accentuer progressivement, quoique lentement. Le

retour de la sensibilité s'opère aussi très vite au tronc,

et finit par gagner, mais beaucoup plus lentement les

extrémités inférieures. Ce retour de la sensibilité s'ac-

compagne d'hyperesthésie très accusée, qui semble

indiquer un certain degré d'excitabilité des éléments

de la moelle. Nous devons aussi noter dans cette pé-

riode quelques contractures dans les muscles des

cuisses, traduisant déjà, sinon une inflammation réelle,

au moins une certaine irritation propre à faire craindre

pour plus tard des lésions plus profondes. Ces premiers

troubles n'ont pas empêché la guérison de s'accentuer,

mais peut-être l'ont-elles ralentie, car, au quarante-

sixième jour, malgré l'amélioration progressive, les

fonctions étaient loin d'être rétablies dans leur inté-

grité. Là s'arrête la période que nous pouvons appeler de

commotion. A partir de ce jour, c'est la myélite qui

évolue, et le tableau symptomatique se modifie com-

plètement.

312 PATHOLOGIE NERVEUSE.

Diagnostic. Le diagnostic est-il toujours possible,

et avec quels éléments peut-on l'établir ? La soudaineté

des accidents n'est pas spéciale à la commotion; une

fracture, une luxation des vertèbres, une hémalorra-

chis, une hématomyélie traumatiques peuvent occa-

sionner une paraplégie aussi brutale. L'absence de

déformation n'a pas une valeur absolue, un déplace-

ment produit par une fracture peut exister un moment,

puis disparaître. La sensibilité sur un point peut exis-

ter dans la commotion, et être due à un simple tiraille-

ment, une sorte d'entorse. Si, en outre, nous rattachons

à la commotion les cas où les troubles du premier

moment manquent complètement ou sont si légers

que le malade n'y apporte aucune attention, nous

devons avouer que le diagnostic immédiat est impos-

sible, et si le malade succombe rapidement, l'autopsie

seule peut résoudre le problème.

Mais si la vie se prolonge un certain temps, n'y

a-t-il pas dans la nature et la marche des symptômes

des caractères capables de faire distinguer la simple

commotion de la contusion de la moelle et de la com-

pression produite par un épanchement sanguin ? Les

troubles fonctionnels de la contusion ont un degré de

permanence que nous n'avons que trop souvent l'oc-

casion de constater dans les fractures et les luxations

de la colonne vertébrale. De plus, la contusion de la

moelle amène rapidement la décomposition ammonia-

cale des urines, et la formation d'escarres. Nous

devons nous arrêter plus particulièrement à l'étude des

épanchements sanguins, puisque c'est surtout sur leur

existence qu'on a basé la critique de la doctrine de la

commotion.

COMMOTION DE LA MOELLE ÉP1NIÈRE. 313

On peut les trouver sous la dure-mère (hématora-

chis), dans la cavité arachnoïdienne ou dans les mailles

de la pie-mère (hémorrhagies méningées), dans le tissu

de la moelle (hématomyélie). L'hématorachis trauma-

tique, fréquent comme complication des fractures et

des luxations, peut-il être le résultat d'un simple ébran-

lement de la colonne vertébrale, dans l'état d'intégrité

parfaite des os et de la dure-mère ? Une observation

de Chalvet', et la cinquante-sixième observation d'Oli-

vier d'Angers, mettent la chose hors de doute. Le plus

souvent, le sang s'épanche en nappe mince plus ou

moins étendue, dans les mailles du tissu cellulaire

lâche qui unit la dure-mère au canal osseux, mais il

peut incontestablement former un foyer assez consi-

dérable pour comprimer la moelle 2.

Un fait que nous avons observé depuis la rédaction

de ce travail, et qui rentre dans'la catégorie de ceux de

Bergmann, W. Roberts, Valentiuer, W. Gull,111. Idonnel,

mérite d'être mentionné avant d'aller plus loin.

Observation. X..., âgé de dix-neuf ans, employé de

commerce, d'une taille élancée, est atteint depuis son enfance

d'une incontinence d'urines nocturne intermittente.Il n'existe

dans sa famille aucune maladie du système nerveux. 11 présente

les attributs du lymphatisme.

A l'âge de quatorze ans et demi, il fit une chute sur le dos,

d'upe hauteur de trois mètres environ, et tomba sur un tas de

charbon. Il y eut perte complète de consciencependantun temps

court. Revenu à.lui, rien de particulier ne frappa son attention

ni celle des parents. Il fut placé plus tard dans une maison de

commerce, où il était occupé à un travail de bureau. A l'âge

1 Société anatomique, 1879.

2 Compenad. de c/i'Kt'e. Bouchard, Dictionnaire. encyclopédique des

sciences nzéd., t. Viii, lie partie. -Lidel. American Journal of the me-

diculsciences, octobre 1864.

314' pathologie nerveuse.

de dix-sept ans et demi, il accusa des douleurs de reins et com-

mença à éprouver de la difficulté à porter le bras droit derrière

le dos. Il changea de place au mois de novembre 1883, et entra

chez un commissionnaire en rouenneries. Là, son travail con-

sistait à traîner une petite voiture chargée; il le continua jus-

. qu'en 1884. Il me consulta à cette époque, et je constatai un

amaigrissement considérable de l'épaule droite. Je conseillai

l'électrisation, qui fut pratiquée régulièrement de deux en deux

jours.

Je revis le malade le 2 décembre 1884, et je trouvai tout le

membre supérieur droit notablement amaigri. Le relief del-

toïdien n'existait plus ; la fosse sous-épineuse était excavée, le

grand pectoral très aminci. Les muscles du bras et de l'avant-

bras avaient perdu au moins le quart de leur volume; le

déchet était le même aux éminences de la main. Le bras était

collé au tronc, et le malade ne pouvait l'en détacher. La flexion

et l'extension de l'avant-bras s'exécutaient assez bien, mais on

surmontait aisément la résistance des muscles. Le malade ne

serrait que faiblement de la main droite; la main tremblait en

écrivant. La sensibilité était intacte.

Le membre inférieur correspondant ne présentait aucune

apparence anormale; les saillies musculaires y avaient leur

développement ordinaire, le malade se tenait également bien

sur les deux jambes et pouvait aisément faire une course assez

longue; cependant, quand il avait marché quelque temps, il

ressentait de l'engourdissement et des douleurs dans le membre

inférieur droit.

Il lui semblait aussi sentir quelque chose d'anormal dans la

langue quand il faisait quelque effort. La parole était nette, la

langue était tirée droite et ne présentait aucune anomalie.

Un des grands avantages du fait que nous avons

rapporté, est d'établir nettement dans la marche cli-

nique deux périodes, celle des phénomènes primitifs

et celle des troubles tardifs, les premiers appartenant

à la commotion, les seconds à l'inflammation. La pre-

mière période comporte une durée de quarante-sept

jours; elle est apyrétique et présente un retour gra-

duel des fonctions. S'il y a eu quelques phénomènes

COMMOTION DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 315

d'excitation, ils n'ont pas empêché la marche vers la

guérison de s'accentuer. La seconde période est de

cinq mois et se termine par la mort. Elle éclate brus-

quement avec violence, un état fébrile des plus accen-

tués et amène tous les troubles de la motilité, de la

sensibilité et de la nutrition qui caractérisent la myélite.

Les lésions de la deuxième période sont ici bien po-

sitives, ce sont celles de la sclérose des cordons laté-

raux et la dégenération des cellules nerveuses. Celles

qu'on pourrait rattacher à la première période, font

complètement défaut, car nous ne pouvons attacher

d'importance à une dépression signalée sur une coupe

de la corne antérieure droite. Comme aucune lésion

particulière n'a été révélée en ce point par le micros-

cope, nous avons tout lieu de croire à un simple acci-

dent de préparation. S'il y avait eu des altérations

primitives en foyer, on les aurait certainement retrou-

vées, car la durée de la maladie nous paraît relative-

ment bien courte pour en avoir effacé toute trace;

j'ajouterai même que le travail inflammatoire de la

seconde période, aurait dû les accuser davantage. Rap-

pelons que, dans le fait de Bastian, on retrouvait

des traces d'hémato-myélie près de. six mois après

l'accident.

La critique qui s'est attachée à contester la significa-

tion des observations ne repose que sur quelques objec-

tions facile à réfuter. Nous l'avons dit, c'est Page surtout

qui a cherché à ruiner la doctrine de la commotion-

de la moelle. Ne pouvant nier les faits, il en a cherché

l'explication dans des lésions qu'on rencontre réelle-

ment quelquefois, mais dont il a augmenté systémati-

quement la fréquence. Il croit, dans des cas de cette

316 PATHOLOGIE NERVEUSE.

nature, à l'existence d'épanchements sanguins dont

la résorption expliquerait la guérison; les phénomènes

qu'on rapporte à la commotion ne seraient que des

phénomènes décompression. Mais ce n'est qu'une hypo-

thèse, et il ne cite qu'un cas emprunté à Mayo, où, à la

suite d'un coup violentsur les trois vertèbres inférieures

le blessé mourut en quatre heures. On trouva du sang

extravasé dans le canal rachidien, avec intégrité des

vertèbres et de la moelle. Evidemment ce n'est pas

l'épanchement sanguin qui a tué le malade en quatre

heures par compression.

Nous étudierons plus loin avec les données actuelles

de la science, le rôle qu'on est autorisé à attribuer

aux épanchements sanguins.

Page critique l'observation d'ataxie locomotrice d'o-

rigine traumatique rapportée par Lockhart Clarke, par

la raison qu'il est impossible d'expliquer des lésions

systématiques provenant d'une violence extérieure.

L'observation que j'ai rapportée réfute péremptoire-

ment cette critique.

La pathogénie des lésions consécutives, me paraît

complètement démontrée par les recherches anato-

miques. Ce sont évidemment des lésions inflamma-

toires aboutissant à la sclérose. Dans notre observa-

tion, l'évolution des accidents, aussi bien que les

lésions, trahissent l'existence d'une myélite franche.

Telle est aussi l'opinion de Charcot sur l'origine des

amyotrophies qui surviennent en conséquence d'une

cause traumatique. Telle est aussi celle d'Erichsen sur

la nature des lésions tardives de la commotion.

Symptomatologie. Nous n'avons pas l'intention

de faire une étude complète des symptômes de la com-

COMMOTION DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 317

motion à tous ses degrés depuis les cas les plus légers

qui ne se traduisent que par un léger engourdisse-

ment, une douleur obtuse qui disparaissent assez rapi-

dement, jusqu'aux formes où la mort survient en quel-

ques heures. Nous ne nous arrêterons qu'aux phéno-

mènes qui se sont montrés dans l'observation qui nous

appartient. Nous chercherons ensuite, par l'examen des

faits épars dans la littérature médicale, sur quelles bases

on peut établir le diagnostic. La symptomatologie est

très difficile à établir, parce qu'il y a peu d'obser-

vations complètes et parce que les symptômes propres

à la commotion, se trouvent mélangés à d'autres dont

la distinction n'est pas toujours facile. Nous devons

d'abord signaler, dans un grand nombre de cas, des

troubles cérébraux de début, tenant à la commotion

du cerveau qui coexiste souvent, de sorte que le terme

commotion cérébro-spinale conviendrait mieux à ces

cas que celui de commotion de la moelle épinière.

Mais, après une perte de connaissance plus ou moins

complète et plus ou moins longue, le malade revient

à lui, les troubles de sensibilité spéciale disparaissent

et la sphère pathologique se circonscrit de plus en

plus aux troubles fonctionnels du centre médullaire.

Une remarque qu'il n'est pas inutile de faire d'a-

bord, c'est que les troubles moteurs et sensitifs sont

beaucoup plus persistants dans la commotion spinale

que dans la commotion cérébrale, probablement parce

que les éléments anatomiques condensés dans un fais-

ceau étroit et serré, ressentent plus profondément les

effets du traumatisme. Tous les éléments de la moelle

peuvent être influencés dans les fortes commotions,

aussi bien les éléments moteurs que les sensitifs, et,

318 PATHOLOGIE NERVEUSE. DE LA MOELLE ÉPINIÈRE.

parmi ceux-ci également ceux qui président aux* diffé-

rentes variétés de sensibilité.

Le rôle que la moelle remplit dans certaines fonctions

organiques, peut aussi être modifié, ainsi que nous le

voyons chez notre malade atteint de polyurie notable

et persistante. Nous devons dire cependant ici, que

l'observation ne mentionnant pas l'état antérieur de la

contracture très prononcée des adducteurs des cuisses,

contredit cette manière de voir, et il nous est impos-

sible de trouver ailleurs que dans l'étude attentive de

l'évolution des symptômes, le moyen d'établir le dia-

gnostic sur des bases rationnelles. La persistance de

l'acidité des urines jusqu'au cinquante-sixième jour,

chez notre malade, l'absence des escarres avant l'ap-

parition de la myélite nous semblent avoir une très

grande importance.

Nous avons surtout insisté dans cette étude, sur les

faits où il y avait eu des phénomènes primitifs incon-

testables, mais nous avons souvent mentionné aussi les

cas de Leudet et d'Erichsen, où ces phénomènes ont

été très légers ou nuls. Si, comme dans les cas de Leu-

det, on peut voir les troubles consécutifs disparaître

plus ou moins rapidement, ce qui indique que l'inté-

grité de la moelle a été peu compromise, il n'en est

pas toujours de même, ainsi que le prouvent les obser-

vations d'Erichsen, de sorte que les désordres secon-

daires ne paraissent pas complètement subordonnés

à l'ébranlement primitif, et l'on est autorisé à penser

que la structure de la moelle lui donne une suscepti-

bilité extrême à ressentir le contre-coup de violences

extérieures dont la gravité ne se révèle que tardive-

ment. Ce mode d'influence des traumatismes n'est pas

DU CURARE DANS L'ÉPILEPSIE. 319

du reste, spécial à la moelle. On le retrouve dans la

pathologie du cerveau, dans ces troubles que Lasègue l

a décritscomme manifestation tardive des traumatismes

de la tête, ainsi que dans l'étiologie de la paralysie

générale'.

Nous tirerons de cet exposé les conclusions suivantes :

1° La commotion de la moelle épinière doit être

maintenue dans l'état actuel de la science ;

2° Elle peut être l'origine de lésions inflammatoires

consécutives;

3° Ces lésions inflammatoires peuvent présenter la

forme de myélites systématiques;

4° La commotion peut exister à l'état latent et ne

se révéler que par des troubles secondaires, variant

depuis la simple congestion passagère, jusqu'aux sclé-

roses incurables.

THÉRAPEUTIQUE

1)l : L'EMPLOI DU CURARE DANS LE TRAITEMENT

DE L'ÉPILEPSIE 3;

Par BOURNEVILLE et P. BRICON.

IV. EXPOSÉ DES FAITS Stl2le.

Nous allons terminer aujourd'hui l'exposé des observations

de nos malades épileptiques traités par le curare. Chemin fai-

1 Les cérébraux (Etude de pathologie mentale), (Arch. de méd., 1880,

vol. I, p. 385.)

2 Thèse de Paris, 1882.

3 Voir t. IX, p. 43 et 201.

320 THÉRAPEUTIQUE.

sant, nous relèverons brièvement les particularités cliniques

les plus intéressantes.

Observation XVIL Epilepsie s ? /mptot ? M< ! <jfMe.Père et grands-pères

paternel et maternel alcooliques. Soeur morte de méningite.

Cousine germaine : convulsions. Premières convulsions à trois ans

et demi; deuxièmes convulsions A quatre ans et demi, prédominant

à gauche. De quatre ans et demi ci sept ans, dix ci douze états

de mal convulsifs. A sept ans, nouvelles convulsions presque

exclusivement limitées ci gauche, suivies d' hémiplégie du côté cor-

respondant. Alliétose. Modifications de l'intelligence.

A dix ans, nouvel état de mal : nouvelle din21 ? zutio ? z de l'intelli-

S'enre. Début de l'épilepsie vers 1870. Suspension des accès.

Pleurésie sèche (1880). Traitement par les injections de

curare : accidents locaux du côté paralysé; insuccès. Mort

dans un accès (1883).

Autopsie : asymétrie du crâne. - Atrophie de l'hémisphère droit

( ? : i0 gr. de moins que le gauche). Pseudo-kyste répondant (k

un foyer ancien d'encéphalite très étendu, ayant presque entière-

ment séparé l'hémisphère en deux portions.

Lef... (Gustave), né le 22 septembre est entré à Hicetre une

première fois le 2S mai 1868, une seconde fois le 29 décembre 1871

(service de M. BoowEVIr.LC : ); il est décédé le 40 novembre 1883, à

quatre heures du soir.

Renseignements fournis par sa mère (28 août 1882). Père, cin-

quante-deux ans, menuisier, taille moyenne, bien portant, n'est

sujet ni aux migraines, ni aux névralgies, ni aux maladies de peau.

Il ne fume pas, mais il fait des excès de boisson une fois par mois

(vin) : « un demi-setier de vin de plus qu'à l'ordinaire et il est

pris ». Ses camarades le plaisantent : « Toi, Lef..., passant par

les vignes, tu es gris » ; il n'a pas le vin mauvais; il est un peu

cholérique, bon ouvrier; marié à vingt et un ans. [Père, mort à

quatre-vingts ans; on l'a noyé, pense-t-on, ou il est tombé par

accident dans le canal du Loiret; menuisier, il faisait des excès de

boisson. Afët'e, morte vers vingt-huit ans, on ne sait de quoi;

laissant cinq enfants. Grand-père paternel, mort à quatre-vingts

ans. Pas d'autres renseignements. Quatre frères et une SOEM ! ' : un

frère est mort à quarante-huit ans, de la poitrine et de chagrin,

dit-on, parce que son fils a «mal tourné» : il buvait, courait les filles,

ne travaillait point (pas de condamnations); il s'est cassé la jambe

et est resté trois mois à Lariboisière, et, un an après l'accident, il

est mort de la poitrine, il n'avait pas d'enfants. La soeur est morte

du choléra en 1819, laissant un fils qui est mort de la poitrine.

Pas d'autres détails. Pas d'aliénés, d'épileptiques, de paralytiques,

de difformes, de suicides, de criminels dans la famille. 1

DU CURARE DANS L ÉPILEPSIE. 321

Mère, quarante-sept ans, intelligente, teinturière, repasseuse

elle fait les apprêts. Mariée à dix-sept ans, elle est bien portante,

sobre, a une physionomie régulière, agréable, n'a jamais eu

aucun accident nerveux; elle n'a jamais eu de convulsions dans

l'enfance, ni de maladies de peau. [Père, soixante et onze ans,

maçon, bien portant, travaille encore; faisait autrefois de nom-

breux excès de boisson. Grand-père paternel, mort à soixante-

douze ans des suites d'une chute du haut d'une échelle. Aupa-

ravant, il était bien portant ; il buvait un peu. - Grand' mère

maternelle, morte vers soixante ans, on ne sait de quoi. -Grand-

père paternel, mort du choléra en 1832. - Grand'mère maternelle,

morte d'une fluxion de poitrine. Un frère est mort du choléra

en 1865, ainsi que sa femme et son enfant. Une soetii- est sujette

à des douleurs d'estomac sans accidents nerveux. Elle a deux

filles : l'une d'elles a eu des convulsions, mais elle est intelligente,

l'autre est bien portante. Pas d'aliénés, etc. Pas de consan-

guinité.

Trois enfants : 4° notre malade; 2o fille morte à sept ans d'une

méningite; elle était très intelligente ; 3° fille, quinze ans, bien

portante, intelligente; pas de convulsions, assez nerveuse.

Notre malade. A la conception, rien de particulier; elle a eu lieu

trois mois après le mariage; pas de rapports dans les excès alcoo-

liques : « s'il a bu, dès qu'il a la tête sur l'oreiller, il dort ».

Grossesse bonne, pas de traumatisme, ni de constriction, etc.

Accouchement à terme, naturel, sans chloroforme. A la naissance,

L... était petit, n'était pas asphyxié; il était «très gentil». Elevé au

sein en nourrice, repris à quatorze mois, il ne se tenait pas sur

les jambes; il était en mauvais état; la nourrice était devenue

enceinte; il fut alors placé chez sa grand'mère maternelle jusqu'à

l'âge de vingt-deux mois. Il a marché à dix-huit mois et parlé à

quinze-seize mois; il était assez précoce, et quand il est revenu de

chez sa grand'mère, il était très gentil, « courait comme un lapin,

était diable, intelligent ». Il a eu la rougeole à quinze mois, mais

n'a eu aucune autre fièvre éruptive, ni diphtérie, etc. A trois ans

et demi ou quatre ans, étant confié à la garde d'une personne

étrangère, il est tombé sur un décrottoir et s'est fait une coupure

au front, dont la cicatrice existe encore. Trois semaines après, il

eut une diarrhée, au cours de laquelle survinrent des convul-

siolzs très fortes qui ont duré trois heures et « ont porté

sur les deux côtés, mais elles étaient plus fortes à gauche ».

Les convulsions avaient débuté à quatre heures du matin ; la diar-

rhée existait sans autres symptômes depuis deux à trois jours. Un

médecin lui fit appliquer des sangsues, mettre de la glace; le len-

demain, il était calme, n'était pas paralysé; il fut complètement

guéri au bout de quatre à cinq jours; il a alors marché et s'est

Archives, t. IX. 21

322 THÉRAPEUTIQUE.

servi de son bras « comme s'il n'avait rien eu ». A quatre ans

et demi, il eut de nouveau des convulsions qui durèrent environ

cinq heures, portèrent sur les deux côtés ; mais principalement

sur le côté gauche. De quatre ans et demi à sept ans, les convul-

Stons ont reparu dix ou douze fois, ayant toujours les mêmes

caractères, c'est-à-dire avec prédominance à gauche sans para-

lysie. -

A sept ans, sans prodromes, vers quatre heures du matin, comme

presque toutes les autres fois, Lef... eut de nouvelles convulsions,

qui cette fois ont été presque exclusivement limitées ci gauche, elles

ont duré six heures, et ont été suivies de « cris effrayants qui

n'étaient pas humains ». Le malade serrait très fortement les

dents; ces cris ont persisté presque toute la journée; la nuit fut

assez calme et le lendemain matin un médecin constata la para-

lysie dit côté gauche. Il ne reprit connaissance qu'au bout de vingt-

quatre heures; il aurait eu de la fièvre (glace, éther, sinapismes);

il ne se leva que vers le huitième jour, et il était incapable de se

tenir sur la jambe gauche et de se servir du bras gauche «qui

était tombant ». Il a recommencé à marcher quatre semaines

après les convulsions (on lui avait fait prendre quatre bains

électriques), mais il a toujours traîné la jambe et il la traîne

autant aujourd'hui qu'à son entrée. Le bras u'arécupéré quelques

mouvements qu'au bout de deux à trois mois. Depuis qu'il est à

Bicêtre, la main a repris de la force. Le bras a été électrisé pen-

dant un an, mais cela « n'a pas faitgrand'chose ». Les mouvements

cl'athétose se seraient montrées vers le deuxième mois après les

convulsions. On n'a pas remarqué le début précis de la contrcic-

ture.

Jusqu'à sept ans les convulsions ne paraissaient pas avoir touché

l'intelligence, mais après les convulsions dont il vient d'être parlé

celle-ci était très affaiblie. La parole, qui était très développée,

libre, sans bégaiement, est devenue très embarrassée; Lef... restait

quelquefois longtemps sans dire un mot; la parole est redevenue,

plus libre vers huit ans.

De huit à dix ans, Lef... a habité Montereau, où il aurait eu

encore une fois des convulsions, attribuées par le médecin à une

congestion cérébrale. On ne sait combien de temps elles ont duré,

ni quels étaient leurs caractères ; il fut pendant neuf jours très

malade. Après ces convulsions, l'intelligence aurait encore baissé.

Lef... n'eut plus, à dater de cette époque, de nouvelles convul-

sions.

De dix à seize ans, on a essayé de le mettre à l'école, mais il

n'apprenait rien; il se mettait eu colère, se battait avec les autres

enfants, et les dérangeait. Ses maîtres ont déclaré qu'ils ne pou-

vaient rien en faire. On a essayé de le mettre estampeur; il a

fallu y renoncer, parce qu'il «n'y était pas»; du reste, il ne pouvait

DU CURARE DANS L 1']Lrpq JE. 323

qu'à peine se servir de la main gauche, avec laquelle il ne pouvait

qu'avec difficulté tenir son pain. On se décida à le placer à l31cétre

(.seize ans), parce qu'il se laissait entraîner par des vauriens, avec

lesquels, un jour, il avait volé des pruneaux chez un épicier; il

avait pris la clef du logement et l'avait jetée à l'égoût; une autre

fois ayant volé des allumettes il les avait fait flamber, etc. Ses

camarades l'avaient emmené un jour vagabonder à Saint-Ouen,

un autre jour aux Champs-Elysées, d'où il avait été ramené à dix

heures du soir, par une dame à qui il avait pu dire son adresse.

Il causait à ses parents des inquiétudes continuelles. Dès son en-

trée, le 28 mai 1868, il a fréquenté l'école de Bicêtre, où il n'a rien

appris; il n'a pas eu d'accès durant ce premier séjour. Transféré à

Saint-Lizier, quelques jours avant l'investissement de Paris

(fin août), il y est resté jusqu'au 29 décembre 18î 1, époque où il

est rentré à Bicêtre : « 11 était bien le même ».

Les accès auraient débuté à Bicêtre, on ne sait à quoi les attri-

buer ; on n'avait rien observé dans les sorties, sauf une violente

colère en avril 1 882, sous un prétexte futile, et il y a trois semaines

deux étourdissements dans lesquels il ne serait pas tombé et n'au-

rait pas perdu connaissance.

Son caractère a toujours été emporté avant les convulsions

même étant tout jeune, il se mettait en colère contre ses jouets*

Depuis deux ans, on le trouve quelquefois un peu sombre. La

mémoire est la même; elle n'a subi aucun changement depuis son

retour de Saint-Lizier. Pas d'onanisme jusqu'à vingt-six ans.

Pas de vers, pas de dartres, pas d'engelures, pas de croûtes dans

les cheveux ; pas d'ophthalmie. Il aurait eu une otite à droite ( ? )

qui aurait duré un an.

Etat actuel. La main gauche est notablement plus petite que

la droite ainsi que l'avant-bras correspondant; elle présente un

état qui se rapproche de l'alhélose; lorsqu'elle est abandonnée à

elle-même, les doigts se mettent dans l'extension forcée; il y a

même une subluxation de la phalangine sur la phalange et ce

phénomène est surtout marqué à l'index. Les deux dernières

phalanges restent dans une flexion modérée. Le pouce présente

une subluxation en arrière de la première phalange; si on vient

alors à placer les doigts dans la demi-flexion, ils reviennent d'eux-

mêmes à l'état précédent; mais si on les place dans la flexion

complète, ils y sont facilement maintenus. La force de la main est

notablement diminuée. La main étant dans l'extension, si on

demande au malade de la fermer, il arrive avec effort à fléchir les

trois derniers doigts et le pouce; mais l'index, en raison de sa sub-

luxation phalango-phalanginienne en arrière, ne peut être fléchi

et reste étendu. Tous ces mouvements peuvent être exécutés

volontairement, et il n'existe en somme aucun mouvement invo-

324 THÉRAPEUTIQUE.

lontairo dans la main non plus que dans le pied. En un mot, il

ne semble pas du tout que ce malade ait eu de l'hémichorée.

La sensibilité de tout le côté gauche paraît normale au toucher

et à la pression; mais la sensibilité au chatouillement et au froid

est presque entièrement abolie.

Il existe une atrophie de la moitié gauche de la face; l'ouverture

palpébrale est moins grande qu'à droite ; la région malaire est

moins développée; chute du sillon naso-labial gauche.

4880. Janvier. Pleurésie sèche à gauche.

1882. 21 octobre. Le malade est sujet à des accès de colère

dans lesquels il déchire ses habits.

10 novembre. - Traitement par les injections hypodermiques de

curare, 4 gouttes (2 milligr.). Les doses ont été élevées aux

mêmes dates et suivant la même progression que chez le malade

de rOBSEUVATION XVIII.

4 6 novembre. 8 gouttes (4 milligr.). La douleur est presque

nulle au moment de l'injection; pas d'accidents locaux, sauf par-

fois une légère ecchymose, pas de troubles généraux ; - hier le

malade s'est plaint de céphalalgie.

. 23 novembre. Au bras gauche (côté paralysé), Lef... présente

des indurations au niveau du deltoïde avec douleur et rougeur de

la peau. On fera dorénavant à gauche l'injection à la région dor-

sale.

48 décembre. Le malade présente des indurations multiples,

à la suite des injections hypodermiques, mais toujours au bras

paralysé (côté gauche). Il n'accuse aucun phénomène général,

l'appétit est excellent. Les injections sur le côté paralysé sont

supprimées. - 10 gouttes de la solution 2 p. 100. - 31 décembre.

Les indurations ont diminué.

4883. 8 janvier. Les indurationscontinuent à diminuer. Rien

autre de particulier.

16 janvier. Eruption papuleuse très discrète sur la face et la

partie antérieure du thorax.

9 février. Lef... est sorti en congé depuis le 4 février; il est

rentré hier; il a eu trois accès chez ses parents, avec lesquels il

se serait querellé. Le père s'enivrerait avec de l'absinthe. Le bro-

mure de potassiuin (8 gr.), qui avait été continué par erreur, est

supprimé.

8 juin. Suppression du traitement par les injections hypoder-

miques de curare. - Hydrothérapie.

DU CURARE DANS L'ÉPILEPSIE. 325

Traitement du 10 0 novembre i 889 au 8 juin 1883

(7 mai. 1 jours).

326 THÉRAPEUTIQUE.

de liquide anormal. - A l'ouverture du thorax, on constate une

adhérence presque totale entre les deux feuillets de la plèvre a

gauche; du côté droit, il existe quelques adhérences à labase.

Péricarde et cavité péricardique, rien de particulier.- Le ccezer

(180 gr.) est surchargé dégraisse, légèrement hypertrophié, en

systole, fortement contracté. Les valvules, le myocarde, l'endocarde

sont normaux. Les cavités contiennent un peu de sang liquide

sans caillots. On trouve quelques plaques laiteuses sur la crosse

de l'aoi te et à la base de la vulve antérieure de la mitrale. Les

adhérences du poumon gauche se laissent facilement détacher.

Les poumons ne présentent rien de particulier, sauf de l'oedèmo

et de la congestion surtout prononcés aux bases. Poumon gauche,

500 gr. Poumon droit, 550 gr. Unie (li;Ubr.). Ileizgauele (120 gr.);

rein droit (150 gr.). Les capsules surrénales, le foie ( ! ,250 gr.), ne

présentent que delà congestion; l'estomac, l'oesophage, le larynx

et tous les autres organes sont sains.

Le nerf médian paraît plus gris et plus petit à gauche qu'adroite.

Les artères fémorales ne présentent pas de ditlérence de volume

appréciable.

Crâne dur, épais, notablementplus à droite qu'à gauche, et cela

dans toute son étendue; la moitié droite du crâne a à peu près la

même épaisseur partout, tandis que, du côté gauche, il existe des

parties plus pu moins épaisses les unes que les autres. La base du

crâne est moins développée ti droile (côté de la lésion) qu'à gauche

(côté paralysé) ; les fosses y sont moins profondes et le frontal est

plus oblique de ce côté que de l'autre. Le liquide céph(tlo-7achi-

dien est en. quantité normale.

L'encéphale pèse 4,070 gr. Les artères de la base paraissent

égales. Le tubercule mamillairc droit est très atrophié, il est grisâtre

et représente à peine le quart du volume de celui de gauche. La

moitié droite de l'espace perforé est aussi moins grande. Le

pédoncule cérébral droit est moins large, moins épais que le gauche.

La moitié droite de la protubérance est moins bombée que la

gauche; la pyramide antérieure droite est un peu moins large que

la gauche; l'olive clroile est plus apparente; en un mot, la moitié

droite du bulbe paraît moins développée et moins bombée que la

gauche. Au-dessous des olives, l'atrophie porte au contraire sur

le côté gauche de la moelle. L'hémisphère cérébelleux droit

pèse 5 gr. de plus que le gauche. Cervelet et isthme : 170 gr.

L'hémisphère cérébral droit est en retrait de 2 centimètres en

avant sur le gauche; en arrière, ce retrait n'est que d'un demi à

un centimètre au plus; en largeur, l'hémisphère droit a plus

d'un centimètre de moins que le gauche, au niveau du chiasma;

en arrière, on trouve 5 centim. et demi à droite, et 8 centim. et

demi à gauche : sur les deux hémisphères, la décortication se fait

DU CURARE DANS L'ÉPILEPSIE. 327

très bien; l'hémisphère gauche paraît sain. L'hémisphère droit

pèse 230 gr. de moins que le gauche.

Ce qui frappe de suite, c'est l'existence, sur l'hémisphère droit,

d'un pseudo-kyste très volumineux, partant de la circonvolution

olfactive, répondant à la portion bulbaire du nerf olfactif et s'éten-

dant jusqu'à 2 centim. et demi de l'extrémité occipitale de l'hémis-

phère. En dedans, le pseudo-kyste longe la bandelette optique

droite, le pédoncule cérébral qu'il contourne, et la corne tempo-

rale du ventricule latéral. En arrière du pédoncule, le pseudo-kyste

remonte sur la face interne et sur la face convexe et semble avoir

séparé complètement le lobe occipital du reste de l'hémisphère.

Le kyste distendu a un aspect gélatiniforme et bosselé. La paroi

du kyste (celui-ci vidé) donne une sensation pseudo-cartilagineuse.

Les bosselures rappellent vaguement les circonvolutions.

Hémisphère gauche. Face convexe. Cet hémisphère n'a été exa-

miné qu'après un séjour de quelque temps dans l'alcool. La pre-

mière circonvolution frontale envoie dès son origine un pli long,

sinueux, mais unique à la deuxième frontale. Dans une partie de

sa longueur, ce pli double la circonvolution, puis elle se compose

de deux petits plis transversaux dontle postérieur donne naissance

à deux plis antéro-postérieurs qui viennent en forme de crochet

s'insérer sur un pli antéro-postérieur de la deuxième qui naît de

la frontale ascendante. L'insertion inférieure envoie un petit pro-

lonfement à la deuxième circonvolution frontale. La deuxième

circonvolution frontale comprend à l'origine un pli transversal assez

volumineux qui, en bas, s'abouche avec la troisième circonvolution

frontale. Delà partie moyenne de ce pli part la deuxièmecircomo-

lution frontale qui va directement en arrière, reçoit le pli de pas-

sage de la première circonvolution frontale, décrit une première

sinuosité, puis une seconde, dont le sommet reçoit le second pli

de la première frontale, puis vient s'insérer sur la circonvolution

frontale ascendante. La troisième circonvolution frontale est

sinueuse et assez courte La circonvolution frontale ascendante

est grosse, sinueuse, va presque verticalement en haut. Le

sillon de Rolando est profond. - La circonvolution pariétale ascen-

dante est grosse, mais moins que la frontale ascendante. A un

centimètre de sa partie inférieure part un gros pli de passage

qui l'unit au pli pariétal inférieur.

Ce pli interrompt la scissure interpariétale qui se trouve ainsi

transformée en deux scissures distinctes, l'une parallèle au sillon

de Rolaudo et se prolongeant avec la branche transversale du

sillon médian du pli pariétal supérieur; cette partie delà scissure

interpariétale forme ainsi avec ce sillon une scissure isolée, pro-

fonde, bifurquée en haut et atteignant presque, par sa branche

bifurquée postérieure, le bord supérieur; l'autre partie de la scis-

sure interpariétale est sinueuse, profonde, normale..

O

328 THÉRAPEUTIQUE.

Le lobule pariétal inférieur est sinueux, bien développé, il pré-

sente un sillon profond qui le divise presque entièrement en deux

parties; il envoie un pli de passage au pli courbe et en reçoit un

du pli pariétal supérieur; celui-ci est sinueux, mais moins volumi-

neux que l'inférieur. Le pli courbe est plissé, et n'offre rien de

particulier. Les scissures parallèle et pariéto-occipitale externe

sont profondes. Les circonvolutions temporales sont normales,

bien développées. -Le lobe occipital est normal. Le lobule de

l'insula est bien développé; il reçoit de la première temporale un

pli de passage volumineux, bifurqué à sa base.

Face interne. La première circonvolution frontale est épaisse,

plissée. Le lobe paracentral est épais, long, bien développé; au

'lieu du pli longitudinal qu'il présente ordinairement, on observe

deux plis transversaux dans l'axe postérieur assez profond le pre-

nant sur toute sa hauteur; l'antérieur est moins marqué. Le sillon

qui le sépare en avant de la première frontale n'atteint pas tout

à faille bord supérieur, il est sinueux. La scissure calloso-mar-

ginale est sinueuse, peu profonde. - La circonvolution du corps

calleux est épaisse bien développée, légèrement bifurquée en avant

au niveau du bourrelet du corps calleux. Le lobe quadrilatère

est bien développé, très sinueux; il est séparé du coin par lascis-

sure pariéto-occipitale très profonde. Le coin et la scissure cal-

carine sont normaux. - Le lobule fusiforme envoie en haut un pli

de passage à la circonvolution de l'hippocampe. Lobule lizzgunl, lo-

bule de l'hippocampe et corne d'Ammon normaux. Corps calleux,

pédoncule cérébral, couche optique, corps strié, bien développés,

normaux.

Les circonvolutions et les scissures du lobe orbitaire ne présen-

tent rien de particulier.

Hémisphère droit. Face convexe. La première circonvolution

frontale est bien développée, dédoublée dans ses deux tiers posté-

rieurs ; elle s'insère par sa partie supérieure au niveau du bord

interne sur la frontale ascendante. On observe en avant de la

frontale ascendante une scissure parallèle presque complète, inter-

rompue seulement par une insertion de la deuxième frontale

sur la frontale ascendante. (Scissure parallèle frontale (sulcus

proecentralis superior). La deuxième frontale est très dévelop-

pée, très sinueuse, surtout en avant; elle envoie un pli de passage

en haut et vers le tiers antérieur à la première frontale.- La troi-

sième frontale est bien développée, sinueuse. Le rameau anté-

rieur ascendant de la scissure de Sylvius est très prononcé, très

profond et n'est séparé que d'un demi-centimètre de la scissure

frontale inférieure.

. La frontale ascendante est plissée, assez grêle surtout dans son

cinquième supérieur qui est en retrait par rapport à la surface

DU CURARE DANS L'I : PILEPSII·;. 329

de 4 millimètres environ; elle est beaucoup moins développée que

la gauche. Le sillon de Rolanclo est profond, sinueux. La pa-

riétnle ascendante est sinueuse, plus développée que la frontale

ascendante, surtout dans son tiers inférieur qui parait normal.

En arrière de la frontale ascendante et au-dessous déjà lèvre

supérieure de la scissure de Sylvius, on trouve le pseudo-kyste qui

occupe : s) sur la face externe, la place du lobe temporal dont les

circonvolutions sont complètement détruites; la partie postérieure

du lobe pariétal inférieur, la partie la plus antérieure du lobe

occipital, le pli courbe, la partie postérieure du lobule pariétal supé-

rieur; 6) sur la face interne : la moitié postérieure du lobe

quadrilatère, tout le coin, le lobule lingual et toute la circonvolu-

tion de l'hippocampe, y compris la corne d'Aiimoiz. Comme on le

voit, la lésion forme une sorte de cercle oblique d'avant en

arrière et de bas en haut, et qui coupe en quelque sorte l'hémis-

phère cérébral en deux parties, l'une antérieure (lobe frontal et

région pariétale), l'autre postérieure répondant au lobe occipital.

La partie antérieure du lobe pariétal est atrophiée, mais a con-

servé son aspect normal, l'autre est très atrophiée, réduite à l'état

membraneux. Tout le pli courbe est très atrophié et réduit à l'état

membraneux, ainsi que la partie postérieure du lobule pariétal

supérieur. La partie antérieure dece dernier lobule est atrophiée,

mais a conservé son aspect habituel. Les circonvolutions occipi-

tales paraissent normales.

Le lobe de iinsula est très atrophié.

Face interne. La première circonvolution frontale et le lobe

paiace71t7,al sont plissés, bien développés.-La scissure calloso-mar-

ginate est sinueuse, profonde; elle est interrompue vers son tiers

antérieur par un pli de passage allant de la première frontale à

la circonvolution du corps calleux. La circonvolution du corps

calleux est atrophiée dans toute son étendue, mais l'atrophie

atteint son maximum sur la moitié antérieure; en ce point, la

circonvolution est réduite à une sorte de mince membrane.

La partie antérieure du lobe quadrilatère est très atrophiée, plis-

sée et en retrait de plusieurs millimètres par rapport au lobe

paraccntral; sa partie postérieure, comme nous l'avons dit, étant

plus atrophiée encore, se trouve beaucoup plus en retrait par

rapport au lobe occipital.' Le corn se trouve perdu dans le foyer.

- Le lobe occipital est bien développé, sauf dans une petite por-

tion de sa partie antéro-inférieure, qui est intéressée dans le foyer.

Le lobe orbitaire, dans son ensemble, est très atrophié; les pre-

mière et deuxième circonvolutions olfactives sont réduites à une

sorte de membrane; le foyer qui les intéresse se confond avec la

lésion qui a détruit la partie antérieure du corps calleux. Le lobe

orhitaire mesure à droite : longueur, 3 centim., 8 dixièmes;

330 THÉRAPEUTIQUE.

largeur, 5 centim.; à gauche : longueur, 3 centim. 8 dixièmes;

largeur, 5 centim.

Examen du foyer. L'hémisphère cérébral droit, après être

resté plusieurs mois dans l'alcool, mesure en longueur 1 ! centim. 2.

On pratique trois coupes perpendiculaires à '72,') 04 et 12o milli-

mètres de l'extrémité antérieure de l'hémisphère. (PL. II.)

Première coupe. Passant par l'extrémité inférieure de la parié-

tale ascendante, le tiers inférieur du sillon de Rolando, la fron-

tale ascendante et se terminant au niveau de l'insertion de la

première frontale, elle sectionne le pseudo-kyste à 4 centimètres

en arrière de son extrémité antérieure. Cette coupe montre que

le pseudo-kyste a une paroi mince transparente, vasculaire;

entre les parois, on remarque, intérieurement, quelques fins

tractus. Au niveau de la coupe, le kyste mesure 4 centimètres

environ de largeur. Les circonvolutions temporales, la circonvo-

lution de l'hippocampe, la corne d'Ammon, etc., ont tout à fait

disparu. La pie-mère épaissie forme en avant une poche arrondie

répondant à l'extrémité antérieure du lobe sphénoidal. La subs-

tance grise des circonvolutions de l'insula est complètement

détruite; ces circonvolutions sont remplacées par une sorte de

membrane plissée, au-dessous de laquelle se remarque quelques

petites cloisons la reliant au noyau extra-ventriculaire (la capsule

externe et l'avant-mur ayant disparu), qui, par sa face infé-

rieure, est en contact direct avec la paroi kystique supérieure.

Deuxième coupe. Elle est faite à 32 millimètres de la première,

et porte sur le lobule quadrilatère, les lobules pariétal supé-

rieur et inférieur et le kyste à l'endroit où celui-ci paraissait

occuper presque toute la hauteur du cerveau. Sur cette coupe

on note que, sauf une petite partie du lobule pariétal supérieur,

du reste atrophiée elle-même, toutes les autres parties des circon-

volutions sont détruites, et qu'à leur place, sur la face convexe

seulement, on trouve un tissu aréolaire grisâtre par endroits

circonscrivant des cavités déformes et de dimensions diverses. On

peut donc distinguer à ce niveau une paroi kystique interne et

une externe, dont l'intervalle (un centimètre environ) est comblé

parce tissu. Les faces inférieure et inféro-interne du kyste sont

représentées par une simple membrane, lapie-mère, non doublée

par le tissu aréolaire, dernières traces des circonvolutions. On

voit encore que le ventricule latéral communique largement avec

la poche kystique (la corne sphénoidale se confondant ici avec

le kyste).

Troisième coupe. Elle est pratiquée sur le lobe occipital et vers

l'extrémité du kyste et montre encore une partie des circonvolu-

tions remplacées par le tissu aréolaire ; d'autres sont atrophiées,

DU CURARE DANS L'ÉPILEPSIE. 331

quelques-unes presque normales. (PL. II, fig. 4, 2, 3. Les rtg. 4,

5 et 6 représentent des coupes symétriques pratiquées sur l'hé-

misphère sain.)

Réflexions. Le malade n'a eu que six accès pendant la

durée du traitement, chiffre correspondant à celui des mêmes

mois de l'année précédente ; mais l'on remarquera que le

nombre des vertiges a considérablement augmenté pendant la

même période ; que, de plus, Lef... était sujet à des rémissions

irrégulières, ayant même atteint parfois l'espace de près de

sept ans. Le curare a donc été inefficace, les vertiges ont même

été plus nombreux qu'avant et après la médication.

Ceci dit relativement aux effets du curare, nous devons

relever les particularités principales de cette observation très

curieuse au point de vue clinique et au point de vue anatomo-

pathologique.

0 a) Si, dans les antécédents héréditaires, nous n'avons à citer

que les excès alcooliques du père et des aïeuls et des convulsions

chez une cousine, dans les antécédents 'personnels du malade

nous avons à signaler des accidents nombreux.

b) De quatre à douze ans, Lef... a eu une douzaine d'états

de mal convulsif, débutant le matin vers quatre heures, durant

quatre à cinq heures et dans lesquels les convulsions étaient

généralisées, mais plus fortes à gauche. Quelques jours après,

il était rétabli sans trace de paralysie.

c) A sept ans, sans prodromes, ainsi que c'est à peu près la

règle, nouvel état de mal plus long que les précédents, dans

lequel les convulsions oizi été presque exclusivement limitées à

gauche, suivies de cris et de grincements de dents durant plu-

sieurs heures, et laissant après elles une hémiplégie du côté

gauche. La paralysie s'est compliquée d'athétnse au bout de

deux mois et de contracture. "L'intelligence, qui avait été

jusqu'alors respectée, fut notablement affaiblie par ces convul-

sions. Elle diminua encore après un dernier état de mal sur-

venu à dix ans. La situation intellectuelle et morale peut se

résumer ainsi : imbécillité avec perversion des instincts.

d) C'est en 1871, quand Lef... avait 19 ans, que s'est mon-

trée l'< ? 7e4'<e. Les accès, sur lesquels, malheureusement,

nous n'avons pu recueillir de détails précis, ont toujours été

assez rares, excepté en 1879 où l'on en a compté dix-sept. Il y

a même eu une rémission complète pendant six années.

332 THÉRAPEUTIQUE.

e) Nous devons dire encore : 1° que, outre la contracture et

un certain degré d'alhétose, les membres du côté paralysé,

ainsi que la moitié correspondante de la face étaient moins

développés que les parties similaires du côté sain ; 2° que

les injections de curare ont déterminé dans le côté paralysé

(gauche) des indurations qui n'ont pas été observées à droite

(troubles trophiques) ; 3° enfin que, si la sensibilité au tou-

cher et à la pression était conservée, la sensibilité au chatouil-

lement el au froid était abolie sur toute la moitié gauche du

corps, répondant à l'hémiplégie.

f) Nous ne nous appesantirons pas sur les lésions trouvées à

l'autopsie. Nous en avons donné une description suffisamment

détaillée. Ce que nous devons rapppeler, c'est l'étendue consi-

dérable du foyer, la destruction totale du lobe temporal, la

séparation presque complète de l'hémisphère cérébral droit en

deux tronçons ne communiquant que par un pont étroit de

substance nerveuse ; l'atrophie de la capsule interne, de l'avant-

mur, etc., ce qui explique en partie les troubles de la sen-

sibilité.

Ce résumé justifiera certes, aux yeux de nos lecteurs, les

détails dans lesquels nous sommes entrés, car ils verront là

un exemple d'accidents très communs chez les enfants, encore

trop peu connus, et dont l'intérêt pratique est incontestable.

Nous n'insistons pas davantage et nous reprenons l'exposé

succinct des autres cas d'épilepsie traités par le curare.

Observation XVIII. Epilepsie symptomatique. Deux soeiii-s et

deux frères. Convulsions dans l'enfance. Mère absinthique

pendant la grossesse.

Premières convulsions ci trois mois, revenues plusieurs fois

jusqu'A deux ans. Maux de tête cinq ci six fois par an

de huit ci douze ans. Vertiges ci douze ans. Accès vers

douze ans et demi. Affaiblissement intellectuel. Change-

ment de caractère. Traitements divers; insuccès. - Agitation

maniaque parfois après les accès; Hallucinations de l'ouïe.

Onanisme. Curare; insuccès. Hydrothérapie (du 8 juin au

30 novembre 1883 et du 1" avril au 31 octobre 1884); in-

succès.

Derou... (Ernest), né le 27 avril 1867, est entré à Bicêtre le 14

août 1882 (service de M. BOURNEVILLE).

DU CURARE DANS l'ÉPILEPSIE. 333

Traitement du 6 novembre 1882 au 8 juin 1883 (7 mois = 199 jours).

TOTAUX

33 1· THÉRAPEUTIQUE.

mai-décembre 1881 ; 1882, 1883, 1884.) Bromure de sodium

( 1 1 novembre 1880); Chlorhydrate de pilocarpinc (du 4 mars

au 3 août 1882). Curare; insuccès.

Harp... (Georges), né le 2 décembre 4 864, est entré à Bicêtre le

2 juillet 4 872 (service de M. Bourneville).

Traitement du 6 novembre 1882cn( 8 juin 1883 (7 mois = 21 jours).

TOI AUX - '

DU CURARE DANS L'EPILEPSIE. 335

curare a donc été complètement nulle. Nous avons noté en

J884 une diminution des accès et une augmentation notable

des vertiges. On remarquera que, chez cet enfant, tous les

nombreux traitements mis en usage ont échoué.

Observation XX. Epilepsie idiopathique. Idiotie. Gâtisme.

Mlraie de pilocarpine (188â).- Amélioration. Curare (f383);

insuccès.

Duché... (Pierre), vingt-trois ans, entré àBicêtre le 18 décembre

1876 (service de Bourneville).

Traitement du 6 novembre au S mai 1883 (6 mois - )76 jours).

TOTAUX

336 THÉRAPEUTIQUE.

Réflexions. Le nombre des accès qui semblaient

diminuer progressivement depuis 1879, qui en 1882 était tombé

à 164 (de 226 en 1881), sous l'influence probable du traitement

par les injections hypodermiques de nitrate de pilocarpine,

s'est élevé de nouveau durant le traitement par le curare. Il est

toutefois à noter que depuis que Duché... n'est plus soumis à

aucun traitement, les accès d'abord, puis les accès et les ver-

tiges ont considérablement augmenté, sans cependant avoir

encore atteint le chiffre enregistré en 1878 (458), ni même

celui de 1879 (317) première année de la période décroissante

signalée plus haut.

Observation XXI. Epilepsieidiopathique. Phimosis. - Bromure

de potassium de ')871 à 1880. Hydrothérapie (16 avril au 4 er

novembre 1882 et du 4°r avril au 15 octobre488r).-Af'viblisse-

ment des facultés intellectuelles. Injections hypodermiques de

curare; insuccès.

Tribou... (Edouard), trente-trois ans, est entré à Bicêtre le 31

mars 4 874 (service de M. BOURNEVILLE).

Traitement du (^novembre 1882 au 5 mai 4883 (6 mois= 165 jours).

TOTAUX

DU CURARE DANS l'ÉPILEPSIE. 337

Traitement. Pour ce malade les doses sont les mêmes que

pour Duch... jusqu'à la date du 2 avril 1883; le 4 avril il est mis

à 17 gouttes de la solution à 4 p. 100, puis les 8, 13, 18, 23, 28

avril, à 20, 22, 2î, 26 et 28 gouttes de la même solution.

Réflexions. Depuis l'entrée du malade à Bicêtre

jusqu'en 1877, les accès ont eu la marche progressive trop

souvent habituelle ; decette époque à 1881., le nombre des accès

a tantôt diminué, tantôt augmenté sans toutefois atteindre le

chiffre de 1877. Cet arrêt de la maladie est plutôt fictif que

réel, car il est à noter qu'en mars 1877 et 1878 l'on a enregis-

tré par exception 39 et 19 accès, L'ensemble des dix années

présente donc, si l'on tient compte de cette élévation momen-

tanée et tout accidentelle une marche progressive évidente.

Le résultat des différents traitements [bromure de potassium,

8 gr. jusqu'au 18 novembre 1880 ; hydrothérapie etc.) est abso-

lument nul.

Observation XX. Epilepsie. Soeur épileptique. Premières

convulsions à dix-sept mois. - Vertiges A trois ans et demi. -

Accès a neuf ans. - Déchéance intellectuelle. Picrotoxine (de

juin 4 881 à juin 1882) - insuccès. Hydrothérapie (juillet à

décembre 1880, et de juillet à décembre 1882); insuccès. In-

jections hypodermiques de curare; insuccès.

Lamb... (François), né le 16 avril 1866, est entré à Bicêtre le 13

juillet 1875 (service de M. Bourneville).

Traitement du 30 mars au 15 septembre 1883

(5 mois et demi = 170 jours).

TOTAUX a .

338 THÉRAPEUTIQUE.

DU CURARE DANS l'ÉPILEPSIE. 339

TOTAUX

340 THÉRAPEUTIQUE

le' avril au 13 octobre). On note donc outre l'augmentation du

nombre des accès, l'apparition, puis l'augmentation des ver-

tiges, et parallèlement des accès d'excitation maniaque et une

déchéance intellectuelle de plus en plus accusée.

Observation XXII. Atrophie cérébrale. Epilepsie symptoma-

tique et imbécillité. Hypospadias. - Père alcoolique. Mère

hystérique. Tante et oncle maternels, cancéreux. Naissance

avant terme (version). Premières convulsions ci quatre ans.

Hémiplégie gauche consécutive ; diminution de la paralysie, accès

d'épilepsie ci quinze ans. Aura indéterminée. Déchéance in-

tellectuelle. Traitement par les injections hypodermiques de

curare; insuccès. Bromure de nickel (1er septembre 1884).

AuLerl;... (Pierre), né le 4 juillet 1866, entré le 9 septembre 4882

à Bicêtre (service de M. Bourneville).

Traitement du 1 1 janvier au 8 juin 1883 (5 mois = 144 jours).

TOTAUX

DU CURARE DANS l'ÉPILEPSIE. 3H

Observation X1111. Instabilité mentale ; épilcpsic idiopathiquè.

Père alcoolique. Mère : crises nerveuses en 4883. - Grand-père

maternel alcoolique, mort aliéné. Premières convulsions cc trois

ans. - Maux de tête fréquents. Absences depuis janvier 1882.

Benar... (Eugène), né le 7 juin 1872, est entré à Bicêtre le 9

septembre 1882 (service delf. BOUIiIE'ILLH.).

Traitement par les injections hypodermiques dccurare

(Du 30 mars au 1 cl septembre 1883=5 5 mois).

342 THÉRAPEUTIQUE.

puis Il à partir du 5 mai et 12 à dater du 10 mai. Il est remis à

8 gouttes le 16 mai, à 9 le 17 mai et enfin à 7 gouttes du 24 mai

au 4 juillet. Tout le reste du mois de juillet il est à 8 gouttes ; il

n'est mis à 9 gouttes que le 8 août et à 10 gouttes le 15 août.

Réflexions. Si nous comparons les accès de la même

période de 1883 et de 1884, nous trouvons une notable amé-

lioration, mais il est juste de dire que cette amélioration se

dessinait déjà avant sa mise en traitement, car de 105 accès

(mois de son entrée), ce malade était tombé à 6 accès (mois de

mars) dans le mois précédant la cure par le curare. Pendant

neuf mois consécutifs, il n'a pas eu d'accès (de mai 1883 à

février 1884); 13 accès en janvier 1885.

Observation XXIV. Epilepsie symptomatique. - Père mort hletlei-

sique. Mère migraineuse et colérique. Premières convulsions

à deux ans prédominant ci gauche. Onanisme. Vertiges et

accès ci treize ans et demi. -Période d'excitation maniaque. -

Affaiblissement des facultés intellectuelles. Traitements par

le bromure de potassium et l'hydrothérapie. - Injections hypoder-

miques de curare. Bromure de nickel (11 juillet 1884).

Laur... (Emile), âgé de seize ans et demi, entré le 9 septembre

1882 à Bicêtre (service de M. Bourneville).

Traitement du 42 janvier au le* septembre 1883 (3 mois = 223 jours).

totaux

DU CURARE DANS L'ÉPILEPSIE. 343

de comparaison avec les mois correspondants de l'année pré-

cédente, mais si nous comparons les mois de traitement avec

les mois précédents, nous trouvons une diminution des accès :

185 au lieu de 226 ; les accès des cinq mois suivants sont aussi

plus élevés (204), mais il y a lieu de tenir compte du peu de temps

pendant lequel le malade a été observé, de la déchéance intel-

lectuelle qui n'a pas été entravée par le traitement : en résumé

le résultat est peu concluant.

Observation XXV. Epilepsie idiopathique. Coqueluche.

Convulsions prédominant droite (à six ans et demi), suivies d'évu-

zzouissements, puis d'étourdissements (à sept ans et demi).- Accès

à 10 ans. - Tourneur. Onanisme. Affaiblissement intellec-

tuel.- Injections hypodermiques de curare (4883); insuccès. -

Kleptomanie. Gâtisme. Plus d'onanisme en 48884; hydrothé-

rapie (1er avril au 15 octobre).AmtûrattOKh'es notable. -

Redevenu propre.

Parad... (Léon), né le 10 février 4 870, entré à Bicêtre le 42 juil-

let 1883 (service de M. BOURNEVILLE).

Traitement du 9 février au 8 juin 1883 (4 mois = 110 jours).

344 THÉRAPEUTIQUE.

DU CURARE DANS l'ÉPILEPSIE. 34.5

Traitement du 9 février au 45 juin 1883 (4 mois - 117 jours).

36 THÉRAPEUTIQUE.

Traitement du 30 mars au 30 juin 4883 (3 mois = 93 jours).

TOTAUX

DU CURARE DANS l'ÉPILEPSIE. 3 1-7

0 13 S E R V. TI 0l 11. - Epilepsie idiopathique. Père alcoolique

Convulsions ci sept ou huit mois. Vertiges ét treize ans. Alcoo-

lisme de vingt-quatre ci vingt-cinq ans. Premier accès ci vingt-

cinq ans. Bromure d'or en 1882 ; insuccès. -Injections ieypodez-

miqzces de curare; insuccès. Affaiblissement des facultés in-

tellectuelles.

Lid... (Joseph), quarante-cinq ans, est entré le 10 mai 1880 à

Bicêtre (service de M. Bourneville).

Traitement du 30 mars au 30 juin 1883 (3 mois = 93 jours).

totaux

318 THÉRAPEUTIQUE.

OusEw-a'rcov \111. -Epilepsic idiopathique. - Père alcoolique ( ? ).

Fièvre intermittente (trois ans.) - Premier accès à sept ans.

Accès d'abord incomplets. - Accès de manie.- Déchéance intellec-

tuelle complète. Traitements divers (bromure de potassium, serin

des marais, etc.) Hydrothérapie (avril à décembre 1882, et

d'avril à octobre 4884). Traitement par les injections hypoder-

` ? niques de curare; insuccès. Gâtisme.

Perch... (Gilbert), né le 24 septembre 1868, est entré à Bicêtre

le 28 janvier 1882 (service de M. BouRNEviLLE).

Traitement du 11 janvier au 13 février 1883 ( mois= 33 jours).

TOTAUX

DU CURARE DANS 1,'ÉPILEPSIE. le 9

germain maternel mort du mal de Pott. Onanisme. Début ff

trois uns.- Débilité mentale consécutive. Rougeole. Erysipèle

(mai 4881). Congestion méningitique. Hydrothérapie (juillet

1881 et d'avril à novembre 1882). Amélioration. Abcès du

cuir chevelu (1882). Curare; insuccès. Hydrothérapie (juin à

octobre 1883). Mal de Pott. Abcès par congestion. - Fistule

ingzzizzo-abdomizzale gauche. Autopsie : tuberculose pulmonaire ;

méningite purulente (moelle et cerveau).

Charm... (Emile), dix ans, entré à Bicêtre le 16 novembre 1880

(service de M. BOURNI3V1LLE), mort le 31 juillet 4884.

Traitement du 6 novembre 1882 un 8 juin 1883 (7 mois--201 jours).

TOTAUX

350 THÉRAPEUTIQUE.

diminuent fréquemment les accès, sans que toutefois on puisse

déterminer exactement leur rôle et le mécanisme et la durée

de leur action. Nous noterons aussi que l'enfant soumis aux

douches après la suppression du traitement par le curare n'a

plus retiré de l'hydrothérapie le bénéfice des années

précédentes. La marche des accès est du reste, depuis

-novembre 1882 au 31 juillet 1884, très irrégulière; le nombre

en est tantôt élevé, tantôt diminué d'un mois à l'autre sans

qu'il soit possible de se rendre compte de ces irrégularités.

Observation XXXI. E4pilepsie idiopathique. Cousine germaine

(du père) épileptique. Convulsions à dix-huit mois. Parésie

gauche. Secousses de la main gauche. Premier accès en mai

1880. Vertiges. Aura et affaiblissement des facultés intellec-

tuelles. Accès surtout nocturnes. Hydrothérapie (1884-4882).

Amélioration. Curare; insuccès. Tuberculose. Mort.

Délai... (Edouard), dix huit ans, est entré à Bicêtre le 7 dé-

cembre 1880 (service de 11. BounnEwLr.L), décédé le 25 octobre 1883.

Traitement du 6 novembre l 882 au 30 juin 1 883 (8 mois=233 jours).

TOTAUX

DU CURARE DANS 1, PILEPSIE. 351

ment nulle, car déjà, depuis quelques mois, les accès allaient

en diminuant progressivement, les vertiges avaient complète-

ment disparu ; pendant le traitement par le curare, les accès

se maintiennent à peu près au même chiffre que dans les mois

précédents, ils s'élèvent toutefois à 18 et 19 dans les mois de

mai et juin 1883, puis tombent à 8, 2, 2 et 1 pour les quatre

mois suivants; le traitement avait été supprimé le 30 juin, la

mort eut lieu le 25 octobre.

On : r.nwrov R111. Idiotie ; épilepsie. Mère : idées de suicide

pendant deux mois. Grand-père maternel mort de phthisie.

Grand'mère maternelle morte de cancer utérin. Frère jumeau

mort « trois jours (convulsions). Grossesse : chute à cinq mois,

peur à sept mois et demi. Premières convulsions à deux mois,

suivies d'une paralysie gauche. - Depuis, nombreux accès.

Gâtisme. Tics, tournoiement, mérycisme partiel (liquides).

Secousses ; traitement par le curare, insuccès. Obstruction du

larynx par un morceau de viande; mort.- Autopsie : sur l'hémis-

phère cérébral droit (face convexe) : atrophie de la plupart des

circonvolutions situées en arrière du sillon de Rol(indo, et des

circonvolutions de la face interne.

Vautr... ();rnest)1, né le Il février 1872, entré le 25 mai 1878, à

Bicêtre (service de M. Bourneville). Mort le 22 mai 1883.

Traitement du 23 novembre J 882 au 22 mai 1883

(5 mois = 146 jours).

TOTAUX

352 THÉRAPEUTIQUE.

DU CURARE DANS l'ÉPILEPSIE. 353

Traitement du 47 février au 31 août 1883 (6 mois

et demi = 192 jours).

.TOTAUX

RECUEIL DE FAITS

DU DEGRÉ D'IMPORTANCE AU POINT DE VUE DU PRONOSTIC

D'UN ABAISSEMENT EXTRÊME DE LA TEMPÉRATURE DANS

LE COURS DES MALADIES MENTALES ;

Par N. POPOFF, médecin de l'asile Saint-Nicolas, a Saint-Pétersbourg.

Depuis que z a attiré l'attention sur les varia-

tions de la température du corps durant diverses formes

d'affections mentales, beaucoup d'autres auteurs ont étudié

cette question et ont été presque unanimement amenés à

conclure qu'une psychose par elle-même, sans complication

d'une affection organique, peut modifier la courbe normale de

la température.

Sans m'arrêter sur toutes les particularités que peuvent

présenter sous ce rapport les maladies mentales, je m'en

tiendrai à l'abaissement brusque de la température dans

quelques cas particuliers. Des faits de ce genre sont décrits par

Lowenliardt 2, Ulrich Filin ? Jenler 1, Scliülc 6, Kroemer7,

' WnksmouH). Tempcraturbeobachtungen bei geisleskranken. ( 111.

zeitschri/f sur psychiatrie, 1857.)

2 Lowenhardt. Uelie), eine Fonnz von Manie mil hefer zenzfrera-

tursenkung . (AU. zeilschr. y. psych., 1868.)

3 Ulrich. Ueber satbnornaale 11(j-pei@wiiî, ? ie 7;ait zugrundelegung ziveie,

Falle. (AU. zeitschr. f. psych., 1869.)

* Filins. Ueber das vorhommen niedriger korfe.rten7peratur bei geis-

tesltranken (St-Pelersbourg nzed. Wochenschrift, 1876.)

s Zenker. ! 7e&e'' die tiefe z rend 112(ii,meschiitz bei geisles-

ki,anke7t. (Allg. zeitschrift f. psych., 1877.)

6 Sohüle. Zeitschrift zûr p/e/t., 1878.

' Kraemer. Temperaturbeobachtungen bei paralylischen geisleskran-

ken. (Allg. zeitschrift f. psychiatrie, 1880.)

DE LA TEMPÉRATURE DANS LES MALADIES MENTALES. 355

et dernièrement par Beeliterew et Otto Hebold ". Un sem-

blable phénomène ne pouvant être expliqué ni par des condi-

tions extérieures défavorables, ni par l'état physique des

malades, la plupart des auteurs ont cru devoir le rapporter aux

changements qui surviennent dans le système nerveux central.

Effectivement, des recherches expérimentales et des données

d'anatomie pathologique ne tardèrent pas à confirmer une telle

supposition. Landois et Eulenbourg, pratiquant des expériences

sur des chiens et des lapins, ont démontré que les changements

qui s'opèrent dans la température du corps, dépendent de l'in-

iluence exercée sur elle parles régions du cerveau correspondant

aux circonvolutions centrales des animaux supérieurs. Plus tard,

Hitzig étudiant l'influence thermique de l'écorce du cerveau

lui attribua la même localisation qu'aux fonctions motrices.

Il est vrai que Vulpian et Kûssner, s'appuyaut sur leurs expé-

riences, n'arrivèrent point aux mêmes résultats, mais Bech-

terew donna dernièrement la raison de cette contradiction ;

il fit des recherches très minutieuses et trouva que la région

thermique de l'écorce du cerveau chez les chiens offre les

mêmes limites que les centres moteurs de Hitzig. Le même

auteur a a publié plusieurs cas de lésion de la région motrice

de l'écorce du cerveau, dans lesquels s'observaient des chan-

gements de la température interne du corps; il admet, par

suite, que les centres thermiques du cerveau de l'homme se

trouvent à proximité des centres psycho-moteurs. Ainsi les

investigations et les recherches sus-mentionnées prouvent que

le système nerveux central peut exercer une influence notable

sur la température du corps, et que parmi les fonctions lésées

dans les affections psychiques doivent figurer celles des centres

thermiques. Les troubles de la calorification, dès qu'ils atteignent

une certaine intensité, sont considérés par beaucoup d'auteurs

comme provenant de modifications profondes aboutissant à la

mort (Otto Ileboldt, Lowenhart et d'autres).

Un fait, que j'ai eu l'occasion d'observer cette année, est en

1 f3ecVterew. Essai clinique sur la température dans quelques formes

de maladies mentales. Thèse 1881, en russe.

2 Otto Hebold. Subnormale temperaluren bei geisteskranlcezz. (drc/t.

f. psychiatrie, 1882.)

3 Bechterew. Ueber die lésion der mo<0)'t ! c/te't zone des growkizns

(St-I'clesburger med. lVoc/iezzsc)zrift,187c3.)

356 RECUEIL DE FAITS.

contradiction, sous certains rapports, avec cette dernière

opinion.

Antoinette W..., femme d'un médecin, âgée de quarante-neuf

ans, entra à l'hôpital de Saint-Nicolas, le 12 mars 4 884. La malade

appartient à une famille de psychopathes. Son aieul (maternel)

se distinguait par un caractère violent, capable à la moindre

occasion de s'emporter jusqu'à perdre tout empire sur lui-même;

la mère de la malade était très irritable, distraite, fantasque. La

soeur de sa mère, devenue aliénée, est morte dans un asile de

Varsovie, et une autre tante maternelle est devenue maniaque

après ses couches. Un oncle maternel a été atteint de manie, et le

frère de la malade a été atteint de délire alcoolique. Mme W...,

dès sa plus tendre enfance, manifesle une grande irritabilité, un

caractère obstiné et une intelligence assez bornée. A l'âge de

cinq ans, à la mort de son frère, elle eut une crise convulsive

avec perte de connaissance. Plus tard, lllme W... éprouva des

maux de tête qui, devenus peu à peu plus violents, augmentaient

à la suite d'une émotion ou d'une fatigue de l'esprit. La mens-

truation, dont le début remonte à l'âge de quatorze ans, a tou-

jours été régulière.

A vingt et un ans, elle eut des accidents cérébraux mal déter-

minés, qui furent suivis d'une convalescence très lente. Elle se

maria à vingt-cinq ans, et eut quatre enfants. Les grossesses et

les couches furent normales et sans influence sur l'état mental

de la malade. - Mais elle ne fut pas heureuse en ménage : son

mari, irascible et hypochondriaque, souleva des querelles et des

scènes qui provoquaient chez la malade une grande irritation

accompagnée de douleurs au coeur et de névralgie intercostale.

En 1877, à la suite de pertes pécuniaires, d'une maladie de

son frère et d'une grande frayeur causée par un incendie dans le

voisinage de sa maison. lllm W... éprouva un accès de manie qui

se prolongea jusqu'en mars 4878. Au mois de novembre 1879, un

nouvel accès de même nature se déclara sans raison apparente et

dura jusqu'en mars 1880. Depuis lors, jusqu'en 1884, la malade

eut encore deux accès. La maladie se développait chaque jour

assez lentement et s'annonçait au commencement par une légère

excitation, une perte d'appétit et de sommeil, un besoin de loco-

motion et un grand désir de voyager. Elle se mettait, en outre, à

boire d'abord de la bière et du vin, et plus tard de l'eau-de-vie et

de l'esprit de vin; ces abus se répétèrent surtout dans son dernier

accès qui commença en janvier 4884, et qui devint si violent, que

ses parents furent contraints de la placer à l'asile.

Elle fut conduite delà gare à l'établissement, camisolée, dans

un état d'exaltation extrême.

DE L1 TEMPÉRATURE D\NS LES MALADIES MENTALES. 357

La camisole de force fut immédiatement retirée', et l'examen

montra ce qui suit :

La malade a beaucoup d'embonpoint, elle est grande et d'une

forte constitution. Ses bras portent des plaies et des ecchymoses,

produites par la constriction des liens. Son crâne est régulier, la

face est injectée, les artères carotides et temporales sont gonflées'

les pupilles rétrécies, la langue est chargée, le pouls accéléré et

assez plein. Les bruits du coeur sont distincts ; la respiration est.

normale; le ventre est ballonné. L'expression du visage est ani-

mée et très mobile; tous les mouvements sont extrêmement

énergiques, variés, saccadés; la malade ne reste pas un moment

tranquille, quitte sa place continuellement, se rassied, court, tend

à s'enfuir et ne cesse de prononcer des mots sans suite, mêlant le

russe, le français et le polonais, ce qui tend son langage encore

moins compréhensible.

Il est assez difficile de fixer son attention, de sorte que ce n'est

qu'en lui posant des questions réitérées qu'on parvient à obtenir

des réponses brèves sur sa famille, son mari, son âge, etc... Elle

est ordinairement gaie, contente d'elle-même et bien disposée,

mais son humeur peut changer soudainement et il suffit du plus

léger prétexte pour provoquer un violent accès de colère. Tel

était l'état de la malade à son arrivée à l'asile. Elle mangeait

difficilement, dormait mal, retirait et déchirait ses vêtements. Le

22 mars, elle commença à prendre un peu plus d'aliments, mais

elle dormait peu, paraissait fatiguée, restait le plus souvent cou-

chée, mais sans cesser néanmoins d'être excitée, de parler et de

gesticuler.

23 mars. Elle est plus calme, mais sa faiblesse physique aug-

mente ; elle passe presque toute la journée aulit, parle peu, mais

avec la même volubilité. Elle se sent bien. La peau est

froide et marbrée de taches rouges aux extrémités. Le pouls est

lent, faible, 40 par minute. A sept heures du soir, la température

rectale donne 34°, 350. On prescrit du lait coupé de cognac, du

vin; on réchauffe les extrémités et on fait sur tout le corps des

frictions continues avec de l'esprit de vin aromatique.

' Grâce aux conseils du Dr Tschetschott, médecin en chef de l'asile,

ainsi qu'à la collaboration énergique de 1111te Sliwortzoff, docteur en mé-

decine ile lafaciilté de Paris, je suis parvenu à introduire dès le commet

cernent de l'année courante dans la division des femmes de l'asile Saint-

Nicolas le no-restraint le plus absolu. Cette méthode, dès son application,

n'a pas manqué d'exercer une salutaire influence sur le cours des diverses

formes mentales, et plus particulièrement dans les cas de violentes agi-

tations qui, d'une manière très notable, s'amendent plus rapidement que e

par le passé, où la camisole de force et les autres moyeus de contention

étaient employés.

358 RECUEIL DE FAITS. '

34 mars. Assez faible physiquement : état d'excitation comme

la veille. Bon sommeil. La température rectale à dix heures du

matin 34°, 8 C.; à deux heures de l'après midi 3,il, 7 C.; à sept t

heures du soir, 34°, 3 c. On suit le même traitement en y ajoutant

des sinapismes.

25 mars. T. à dix heures du matin, 35°, 9 ; à deux heures de

l'après-midi, 36°, 4 C.; à sept heures du soir, 36°, o C.

26. T. à dix heures du matin, 36", 4 c. ; à deux heures de

l'après-midi, 36° 8 c. ; à sept heures du soir, 37°, 2 c.

27 mars. T. à dix heures du matin, 3(i°, 8 C. ; à sept heures

du soir, 36°, 8 C.

28 mars. A dix heures du matin, 37°, C. ; à sept heures du

soir, 36°, 9 C.

29 mars. A dix heures du matin 37°, c.; à sept heures du

soir, 36°, 2.

30 mars. A dix heures du matin, 37°, G C. ; à sept heures du

soir, 37°, C.

31 mars. - A dix heures du matin, 37°; à sept heures du soir,

37°, 1.

Du 25 au 28 mars, la malade dormit peu et d'un sommeil agité

elle mangea mal, ne prit que du lait et du bouillon. Sa surexci-

tation est moindre, les forces sont épuisées.

Depuis le 28 mars, l'appétit et le sommeil sont meilleurs; une

amélioration sensible se produit dans son état physique et psy-

chique.

Avril. 1-3. L'appétit et le sommeil sont bons; la malade com-

mence à quitter le lit et passe des journées entières dans un fau-

teuil, mais elle marche encore avec difficulté. On observe aussi

une légère excitation qui s'exprime par une gaîté bruyante,

beaucoup de loquacité et une exubérance des gestes. Elle parle

déjà logiquement et fait des réflexions judicieuses sur tout ce qui

l'entoure.

Le 4 avril, Mme W... fut transférée dans la section des malades

tranquilles, et le 5 mai, elle quitte l'hôpital comme convalescente.

Nous voyons dans cette observation, un abaissement no-

table de la température centrale; elle n'atteignait, en effet,

au rectum que 34°, 3 C. se trouvait ainsi de 30) 3 C. à 3°, 7 C.

au dessous de la normale, celle-ci atteignant au rectum de

37°,6 C. à 38° C'. Cet abaissement thermique est d'autant plus

notable que l'état général de Mmo W... ne ressemblait guère à

1 Jiirgensen. Zur Gehre von <<e)' Bckacadlttng fieberhafler kracalcheilcu

mikels des halten wassers. (Arch. /u)'M)tMC/ie« ! eeetM, 1867-68.)

DE LA TEMPÉRATURE DANS LES MALADIES MENTALES. 359

celui que l'on constate dans la stupeur. Bien qu'elle fût très

affaiblie, elle était cependant encore excitée, pouvait quitter

le lit, parlait sans discontinuer et avec de nombreuses gesticu-

lations. Il faut aussi ajouter que l'épuisement des forces phy-

siques atteignit son plus haut degré seulement quand la tem-

pérature commença déjà à s'élever et à monter à 36° C.

Pourtant, un tel abaissement ne peut être expliqué par une

influence extérieure ; il est vrai que la malade avait d'abord

essayé de défaire ses vêtements et de se découvrir, mais sa

chambre était suffisamment chauffée, le thermomètre s'élevait

à 16° R.; d'ailleurs on a démontré que la chaleur du corps

peut ne pas varier, malgré les oscillations de la température

ambiante, si celles-ci ne dépassent pas les limites entre 110 et

32° R. (Rosenthal).

Ce phénomène ne peut non plus être expliqué par le refus

d'aliments; ce dernier étant de trop courte durée pour altérer

la nutrition de la malade qui avait à peine maigri. On no peut

donc supposer ici qu'un trouble des centres thermiques du

cerveau promptement enrayé par le traitement actif qui a été

mis en usage.

Différents auteurs ont rapporté des observations analogues

dans lesquelles un abaissement considérable et longtemps pro-

longé de la température n'a pas entraîné la mort.

Burckhardt1 décrit un cas de mélancolie chez une femme,

dans lequel la température au début s'était abaissée à 34°, 8 C.

(1110 observation); chez une autre malade également mélan-

colique, il avait encore constaté un abaissement de tempéra-

ture arrivant à 34°, 6 c. ; dans les deux cas, la terminaison a

été favorable. Dans l'observation XXI, il s'agit encore d'un

mélancolique dont la température est descendue à 3t°, 8 G.

L'année dernière, Ilaasse publia ses recherches sur les

variations de la température durant des psychoses périodiques.

Dans ce mémoire, qui ne renferme rien de nouveau, il n'y a que

la Xillle observation qui présente quelque intérêt. En effet,

après un accès d'exaltation maniaque, la température est

tombée plusieurs fois à 34°, 4 C., sans que l'état général du

malade ait été sensiblement modifié. Du reste, dans d.'autres

1 Burckhardt. l3eoLachttczyezz ueber die temperalur geisleskranken.

(Arch. f. sch., 1S7S.)

2 Hausse. Einige l3coGachluzacn zceber die temperalur bei perio-

dti ? ,heit geistcskranken. (Allg. zeilschi,ifi f. psychiatrie; 1883.) *

360 REVUE CRITIQUE.

cas, dans l'alcoolisme par exemple, la température peut baisser

dell°C., sans entraîner la mort, comme le prouve l'observation

rapportée par Magnan.Il s'agissait d'une femme âgée de trente-

huit ans, chez laquelle les températures vaginale et axillaire

s'étaient abaissées jusqu'à 260 C. La malade avait fait des excès

alcooliques et était restée longtemps exposée au froid. Elle se

rétablit'promptement'. Il est regrettable que les observations

de ce genre ne soient pas plus nombreuses 2 pour pouvoir en

tirer des déductions générales; mais néanmoins, des cas déjà

publiés il ressort ce fait qu'un abaissement même considérable

de la température peut se produire dans le cours des maladies

mentales sans entraîner nécessairement un pronostic fatal.

Aussi, ne doit-on pas admettre avec certains auteurs, qu'un

trouble thermique de cette nature dépend de modifications des

centres nerveux tellement graves qu'elles sont incompatibles

avec lavie; plusieurs faits, nous l'avons vu, protesteraient

contre cette dernière assertion.

REVUE CRITIQUE

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX

A l'état physiologique LT pathologique3.

Par le D' A. MAIRET, agrégé à la Falculté de médecine de Montpellier

II. DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX

A L'ETAT PATHOLOGIQUE

Nos recherches sur la nutrition du système nerveux à l'état

pathologique ont porté sur trois groupes de maladies fonc-

' ' Magnan. Leçons cliniques sur l'alcoolisme. (Gazette des hôpitaux,

10, 17 et 24 juillet 1869.)

2 Voir une observation de M. Bourneville. (Société de biologie,

1871, p. 1.)

3 Voy. t. IX, p. 232.

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 361

tionnelles de ce système : aliénation mentale, épilepsie, hys-

térie. Nous étudierons successivement chacune de ces maladies.

ALIENATION MENTALE.

Historique. ' -

Les recherches relatives aux modifications que peut produire

l'aliénation mentale sur la nutrition du système nerveux par

l'étude de l'élimination de l'acide phosphorique sont moins

nombreuses que pourrait le faire supposer la connaissance du

rôle que joue cette substance dans la constitution du système

nerveux. Elles se résument, à notre connaissance du moins,

en celles de Bence Joncs', de Sutherland 2, de Beale 1, de

Lombroso 1, de Mendel6 etdeWood. Ces auteurs arrivent à

des conclusions variables. Les uns pensent que dans lesinflam-

matious aiguës du cerveau les phosphates sont augmentés,

parfois en quantité excessive (Bence Jones, Beale); que dans la

manie ces sels sont augmentés pendant les périodes de paroxysme

et diminués pendant les périodes de dépression (Sutherland,

Beale, Lombroso), que chez les idiots et les déments, le chiffre

de l'acide phosphorique oscillerait autour de la normale (Lom-

broso, Mendel).

D'autres, au contraire, pensent que, sous l'influence de l'alié-

nation mentale, la quantité de phosphates rendus par les urines

est diminuée; Mendel résume, en effet, de la manière suivante

les recherches qu'il a faites :

« En général, dans les affections cérébrales chroniques, la

quantité d'acide phosphorique éliminé par vingt-quatre.heures

est inférieure, pour un même régime, à la quantité d'acide phos-

phorique éliminé pendant un même laps de temps, par un in-

dividu sain, et cela, soit d'une manière absolue, soit d'une

manière relative à la somme des matières solides éliminées.

Bence Jones. Philosophical constatationes, 1850, p. 66, cité par

Beale.

2 Sutherland, cité par Beale.

3 Beale. De l'Urine, etc., trad. de l'anglais par Olivier et Bergeron,

1865, p. 217.

1 Lombroso. In Mendel.

' Monde). Arch. f. Psych. und n-erwetl : , 1872, 111. Band, p. 636.

362 REVUE CRITIQUE.

« Chez le maniaque et chez le fou furieux, la quantité d'acide

phosphorique éliminé est diminuée, soit d'une manière abso-

lue, soit d'une manière relative à la somme des matières so-

lides. »

- - D'autres enfin pensent- que l'aliénation mentale augmente

seulement la quantité d'acide phosphorique uni aux alcalis, le

chiffre de l'acide phosphorique uni aux terres diminuant au

contraire (Wood).

Pour être peu nombreuses, les recherches sur l'élimination

de l'acide phosphorique n'en conduisent pas moins les auteurs

à des résultats aussi divergents que ceux que nous avons ren-

contrés à propos du travail intellectuel. Et naturellement les

opinions de ces auteurs sur la valeur qu'on [peut attribuer à

l'étude de l'élimination de l'acide phosphorique par les urines

pour savoir si l'aliénation mentale modifie ou non la nutrition

du cerveau sont en rapport avec les résultats qu'ils ont obte-

nus. Ceux qui trouvent dans les urines une augmentation de

l'acide phosphorique pensent que cette augmentation est un

indice de la dépense d'influx nerveux ; ceux qui ne constatent

pas cette augmentation pensent que l'étude de l'élimination

de l'acide phosphorique ne peut nous éclairer sur les troubles

que l'aliénation mentale est susceptible de faire subir à la nu-

trition du système nerveux.

Nous n'entrerons pas ici dans la critique des expériences qui

précèdent; nous l'avons fait ailleurs. Nous ferons ressortir

seulement les divergences qu'ont obtenues ces auteurs dans

leurs recherches. La nécessité d'instituer de nouvelles expé-

riences pour savoir, par l'étude de l'élimination de l'acide

phosphorique, si l'aliénation mentale modifie la nutrition du

système nerveux, s'impose par la divergence des résultats

qu'ont obtenus les auteurs et par l'erreur dans laquelle ils sont

lorsqu'ils veulent, se basant sur les modifications en plus ou en

moins dans l'élimination de l'acide phosphorique total, conclure

que cet acide se lie ou non à la nutrition du système nerveux

et que telle ou telle maladie modifie ou no modifie pas. cette

nutrition. Nous avons insisté sur cette erreur dans la première

partie de ce travail,, et si nous la rappelons ici, c'est pour indi-

quer que, comme pour le travail intellectuel, nous avons dû,

pour l'aliénation mentale étudier l'élimination do l'acide phos-

phorique à un double point de vue : 10 constatation des mo-

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 363

difications que la folie imprime à l'élimination de l'acide phos-

phorique ; 20 interprétation de ces modifications.

Ces deux parties du problème nécessitent quelques considé-

rations générales, sur lesquelles nous devons nous arrêter avant

d'exposer le résultat de nos recherches.

Constatation des modifications qu'imprime [la folie

dans l'élimination de l'acide phosphorique.

Pour pouvoir dire que, dans un cas donné d'aliénation men-

tale, il y a modification dans l'élimination de l'acide phospho-

rique, il 'faut avoir un terme de comparaison, et ce terme,

l'étude de l'élimination de l'acide phosphorique chez l'homme

sain peut seule nous le donner. Et comme beaucoup des cas

d'aliénation mentale que nous étudierons sont incurables, c'est

avec l'élimination de l'acide phosphorique chez l'homme sain

en général que nous devrons comparer l'élimination des phos-

phates. Cette élimination est-elle, chez ce dernier, suffi-

samment régulière pour nous permettre d'établir une moyenne

d'élimination par vingt-quatre heures ? Telle est la question

qui se pose actuellement à nous.

Si nous interrogeons à ce sujet les auteurs (Breed, Winter,

Riessel, Wood, Mendel, Yvon, Hardy, Tessier, etc.), nous

voyons que le chiffre d'élimination de l'acide phosphorique

par vingt-quatre heures est très variable suivant les individus

examinés. C'est par grammes que peuvent se chiffrer les écarts

quotidiens dans cette élimination. Par suite, il est impossible

d'établir une moyenne d'élimination qui permette de savoir

si la folie modifie ou non le rendement de cette substance.

Nous verrons en effet que si cette maladie modifie ce rende-

ment, elle ne le modifie pas dans des proportions telles que

les chiffres obtenus ne puissent être compris dans les oscilla-

tions quotidiennes que les auteurs ont constatées chez l'homme

sain, envisagé d'une manière générale.

Il est vrai que les écarts qu'ont obtenus les auteurs (Mosler,

Haxthausen, l'arhes, Mendel, Beaunis, etc.) n'étaient pas

moins grands lorsqu'ils étudiaient non plus l'élimination de

l'acide phosphorique chez différents individus, mais cette éli-

mination chez un même individu placé dans les conditions

ordinaires de la vie. Et cependant nous avons vu, dans la pre-

mière partie de ce travail, qu'en se plaçant dans certaines con-

364 REVUE CRITIQUE.

ditions déterminées, en soumettant un individu à l'état de

repos, à une alimentation toujours la même en qualité et en

quantité, on régularise chez cet individu le rendement de l'acide

phosphorique dans des proportions telles que l'intervention

d'un travail se marque facilement. Par conséquent, ce que

nous avons fait pour un seul individu, nous pouvons l'étendre

à plusieurs, et voir si les écarts quotidiens que nous obtien-

drons pour chacun d'eux, ne sont pas assez faibles pour nous

permettre d'établir sinon un chiffre moyen d'élimination des

phosphates par vingt-quatre heures, du moins des chiffres mi-

nima et maxima assez rapprochés l'un de l'autre pour que l'in-

fluence de la maladie se marque aisément. Mais cette manière

de faire n'est pas pratiquée, et cela pour nombre de raisons

qu'il est inutile d'indiquer ici. Elle ne peut être de mise que

lorsqu'on veut juger, non plus que l'élimination de l'acide

phosphorique chez l'aliéné, relativement à l'état sain, mais de

cette élimination dans deux périodes consécutives et de courte

durée d'une même maladie.

Heureusement, on peut arriver à la solution de ce problème

d'une autre manière.

Supposons un individu en état de santé vivant constamment

dans le même milieu, dans les mêmes conditions biologiques

et soumis à une alimentation revenant toujours la même dans

un laps de temps restreint. Ne peut-on pas penser que, dans

ces conditions l'économie de cet individu s'adaptera à ce milieu,

qu'il s'établira entre les ingesta et les excréta un rapport qui

pourra varier d'un jour à l'autre, mais qui tendra à devenir

constant lorsqu'on comparera entre eux, non plus deux ou

plusieurs jours consécutifs, mais deux ou plusieurs cycles de

nourritures consécutifs. C'est là une question que je me suis

posée et je trouvais justement dans le milieu où j'observais mes

malades, c'est-à-dire à l'asile des aliénés, un milieu favorable

pour la résoudre.

Le régime alimentaire de notre asile varie dans de faibles

limites, surtout pour une même époque de l'année. En étudiant

les variations qu'il subit, je vis sauf quelques légères différences

qui se fondent si on porte l'examen sur une période de huit

jours, que le cycle des mêmes aliments revient chaque quatre

jours. Nous désignerons ce cycle sous le nom de période ali-

menlaire.

Ces conditions étant remplies, voyons ce qu'est chez un in-

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 365

dividu sain l'élimination de l'acide phosphorique par jour et ce

'qu'elle devient par période de quatre et de huit jours. Pour

cela, prenons un exemple parmi plusieurs autres.

TABLEAU V. Homme bien portant (22 ans) soumis aux conditions

ordinaires de milieu et d'alimentation de l'asile.

366 REVUE CRITIQUE.

le faire pour plusieurs. Pour cela, nous avons examiné pen-

dant un eou plusieurs périodes alimentaires dix individus sains,

vivant à l'asile à l'état de repos et mangeant le régime ordi-

naire de l'établissement, puis nous avons pris pour chacun de

ces individus le chiffre moyen d'élimination d'acide phospho-

rique par vingt-quatre heures. Nous consignons dans le tableau

suivant les résultats que nous avons obtenus.

Tableau. VI. Elimination moyenne de l'acide phosphorique

par 94 heures pendant la durée d'une période alimentaire chez dix

individus sains, vivant ci l'asile et à l'état de repos 1.

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 367

phosphorique par vingt-quatre heures peut, si l'on tient compte

de la période alimentaire, varier, suivant les individus, entre

1 gr. 55 et 2 gr. 11.

Les différences que nous avons ainsi obtenues dans le ren-

dement journalier de l'acide phosphorique sont encore trop

considérables pour nous permettre d'établir un chiffre moyen

d'élimination de cet acide par vingt-quatre heures. Toutefois,

elles ne sont pas telles qu'elles rendent factice la détermina-

tion de chiffres maxima et minima au-dessus et au-dessous des-

quels on puisse dire qu'à l'état pathologique, lorsque le malade

observé est placé dans des conditions de milieu et d'alimenta-

tion semblables à celles dans lesquelles étaient placés les in-

dividus sains qui font le sujet du tableau qui précède, le rende-

ment de l'acide phosphorique est augmenté ou diminué. Ces

conditions sont faciles à réaliser. La première l'est tout natu-

rellement puisque c'est pour des hommes sains vivant comme

nos malades à l'asile que nous avons étudié l'élimination de

l'acide phosphorique. La seconde ne l'est pas moins, l'aliéna-

tion mentale, maladie essentiellement chronique, permet assez

souvent une alimentation régulière. Par conséquent, pour

pouvoir comparer l'état pathologique à l'état physiologique au

point de vue de l'élimination de l'acide phosphorique, nous

n'avons qu'à laisser les malades suivre le régime ordinaire de

l'asile, à tenir compte de la période alimentaire et à surveiller

qu'ils mangent la portion ordinaire de l'établissement. Ce que

nous venons de dire pour l'acide phosphorique total s'applique

aussi à l'acide phosphorique uni aux terres et à l'acide phos-

phorique uni aux alcalis.

Ainsi se trouve résolu le problème dont nous poursuivons la

solution. Toutefois, pour qu'on ne puisse attribuer qu'à l'élé-

ment maladie les modifications dans l'élimination des phos-

phates qu'on constate sous l'influence de l'aliénation mentale,

il est encore quelques précautions à prendre. Ainsi ilestindis-

pensable de recueillir toute l'urine rendue en vingt-quatre

heures par les malades observés, de tenir compte de l'âge de

ceux-ci, de supprimer tout traitement pendant la durée des re-

cherches, etc., etc.1. Ces précautions nous ne ferons que les in-

diquer ici, et dire que nous en avons tenu compte.

Ajoutons encore que lorsqu'on peut observer l'aliéné jusqu'à

i Mairet. Loco citalo, passim.

368 REVUE CRITIQUE.

son entière guérison, le problème qui précède devient encore

plus simple; on n'a, en tenant compte toujours de la période

alimentaire, qu'à comparer chez lui l'élimination de l'acide

phosphorique à l'état de santé et à l'état de maladie.

. Interprétation des modifications produites par l'aliénation

mentale sur l'élimination de l'acide phosphorique.

Supposons que l'aliénation mentale produit des modifications

dans le rendement de l'acide phosphorique ; pouvons-nous en

conclure que ces modifications proviennent des échanges qui

se passent au sein du système nerveux ? Nous avons déjà vu,

en effet, à propos du travail intellectuel, que les modifications

qu'on constate sous son influence reconnaissent deux origines,

le cerveau et la nutrition générale. N'est-il pas possible que

l'aliénation mentale retentisse, elle aussi, sur cette dernière ?

C'est tout au moins un fait à rechercher, et pour cela nous sa-

vons qu'il nous faut étudier comparativement l'élimination de

l'azote, de l'acide phosphorique uni aux alcalis et de l'acide

phosphorique uni aux terres.

Ce n'est pas tout. Lorsque nous avons étudié l'influence

qu'exerce le travail intellectuel sur l'élimination de l'acide

phosphorique, nous avons pu supprimer toutes les causes bio-

logiques qui sont peut-être susceptibles de produire elles aussi

des modifications dans le rendement de l'acide phosphorique.

Chez l'aliéné, cela ne nous est pas possible; il est une de ces

causes que nous ne pouvons pas supprimer, c'est l'activité mus-

culaire, qui, dans certaines formes d'aliénation mentale, la ma-

nie avec agitation, par exemple, peut être porté très loin. Or,

lorsqu'on étudie la composition du tissu musculaire, on voit

que de tous les tissus mous de l'économie, ce tissu est, après le

tissu nerveux, le plus riche en acide phosphorique. Par suite,

'nous devons nous demander si l'activité musculaire se modifie

par l'élimination des phosphates, et dans le cas de l'affirmative

rechercher de quelle manière a lieu cette modification et sa-

voir si, quand le système musculaire et le système nerveux

agissent simultanément, on ne peut pas faire la part de ce qui

revient à chacun d'eux dans les modifications qu'on cons-

tate.

DE LA. NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 369

, Travail musculaire et acide phosphorique.

Nous serons bref sur ce qui a trait au travail musculaire

dans ses rapports avec l'acide phosphorique. Nous indiquerons

seulement les résultats que nous ont fournis nos recherches,

recherches qui constituent tout un chapitre de notre ouvrage

déjà cité (chap. in, p. 67 à 91) :

1 ° Le travail musculaire augmente la quantité d'azote éliminé

par vingt-quatre heures ;

2° Le travail musculaire augmente la quantité d'acide phos-

phorique éliminé par vingt-quatre heures ;

3° L'augmentation de l'acide phosphorique porte exclusivement

sur l'acide phosphorique uni aux alcalis ; dans la majorité des

cas, le chiffre de l'acide phosphorique uni aux terres reste fixe,

parfois il est légèrement diminué.

Augmentation de l'acide phosphorique uni aux alcalis et de

l'azote, tel est donc le fait capital de l'action du travail mus-

culaire sur l'élimination de ces substances. Cette action est

donc inverse de celle du travail intellectuel; celui-ci, en effet,

diminue l'élimination de ces deux substances et augmente seu-

lement le chiffre des phosphates terreux, phosphates que le

travail musculaire laisse intacts ou diminue même. Le tableau

suivant indique, on ne peut mieux, l'influence qu'exercent ces

deux travaux sur l'élimination des phostates et de l'azote.

On le voit donc si le travail musculaire agit, l'élimination de

l'acide phosphorique, l'étude comparative de l'élimination de

l'azote, de l'acide'phosphorique uni aux alcalis et de l'acide

phosphorique uni aux terres permet de faire la part de ce qui,

dans un cas donné, revient aux muscles et au système ner-

veux dans les modifications produites.

Connaissant l'influence qu'excercent le travail intellectuel,

le travail musculaire et la nutrition générale sur l'élimination

de l'acide phosphorique, et la manière de distinguer l'action

de chacun de ces facteurs, nous possédons tous les éléments

nécessaires pour nous permettre d'interpréter les modifications

que l'aliénation mentale peut produire dans l'élimination des

phosphates, et nous pouvons aborder nos recherches. Celles-ci

ont porté sur les deux formes principales de folie, la manie et

la lypémanie. Nous avons étudié, en outre, l'idiotie et la dé-

mence simple.

Archives, t. IX. 21

370 REVUE CRITIQUE.

Manie et acide phosphorique.

Nos recherches relatives à la manie se rapportent à des malades

chez lesquels l'agitation. n'atteignait pas un degré trop consi-

dérable. Et cela parce que, dans les cas où l'agitation était

trop intense, il nous a été impossible de recueillir toute l'urine

rendue dans les vingt-quatre heures, et que l'état des malades

réclame une alimentation et un traitement particuliers. En

outre, notre attention s'est plus particulièrement portée sur des

maniaques chez lesquels l'agitation revenait par accès séparés

par des intervalles de calme relatif ou complet. Parmi ces ma-

lades, il en est que nous avons pu suivre pendant les diffé-

rentes phases de leur maladie jusqu'à leur guérison complète.

Nous avons consigné dans un autre travail les résultats que

nous a donnés jour par jour l'examen des urines. Nous nous

contenterons ici d'indiquer les résultats généraux que nous

ont fournis nos différentes observations.

V. J... est un malade entré déjà plusieurs fois à l'asile et

que nous avons pu suivre à des intervalles plus ou moins éloi-

gnés, du mois d'octobre 1879 au mois de janvier 1881. Cet

homme, qui est resté placé pendant toute la durée de nos

recherches dans les mêmes conditions de milieu et d'alimen-

tation (nous avons tenu compte de la période alimentaire) ren-

dait en moyenne par vingt-quatre heures :

1» A l'état de guérison : '

Azote, 22,58 ; acide phosphorique total, 1,85; acide phosphorique

uni aux terres, 0,48; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,37.

2° Du 7 octobre 4 870 au 17 du môme mois, pendant un accès

d'agitation, alors que la maladie était à sa période d'état

et l'intelligence du malade très embrouillée :

Azote, 34,39 ; acide phosphorique total, 2,38 ; acide phosphorique

uni aux terres, 0,99, acide phosphorique uni aux alcalis, 1,42.

3° Pendant une période de dépression, du 23 au 26 octobre :

Azote, 22,34 ; acide phosphorique total, 1,49 ; acide phosphorique

uni aux terres, 0,C)6; acide phosphorique uni aux alcalis, 0,83.

4° Pendant une période de rémission, du 28 octobre au no-

vembre :

Azote, 22,08 ; acide phosphorique total, 1,66 ; acide phosphorique

uni aux terres, 0,37 ; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,29.

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 371

5o Pendant une seconde période d'agitation (novembre 1879),

alors que les troubles somatiques étaient aussi marqués

et les troubles intellectuels un peu moins accentués que

précédemment :

Azote, 34,55; acide phosphorique total, 2,04 ; acide phosphorique

uni aux terres, 0,50; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,43.

6° Pendant une troisième période d'agitation (mai 1880), l'agi-

tation étant plus superficielle que précédemment :

Azote, 22,t,S; acide phosphorite total, 2,53; acide phosphorique

uni aux terres. 0,52; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,74.

7° Pendant une période de rémission (juin 4880) :

Azote, 19,S5; acide phosphorique total, 1,82; acide phosphorique

um aux terres, 0,40; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,42.

8° Pendant une période de dépression (juin 1880) :

Azote, 20,75; acide phosphorique total, 1,82; acide phosphorique

uni aux terres, 0,88; acide phosphorique uni aux alcalis, 0,94.

9° Pendant une période d'agitation, à l'époque du déclin de la

maladie (juin d880) :

Azote, 21,88; acide phosphorique total, 2,33; acide phosphorique

uni aux terres, 0,53 ; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,80.

10° Pendant la convalescence (juillet et août 1880) :

Azote, 16,69 ; acide phosphorique total, 1,69; acide phosphorique

uni aux terres, 0,46; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,23.

L'observation de V. J... nous montre que la manie exerce

une influence sur l'élimination de l'acide phosphorique et que

cette influence est variable suivant les périodes. A ce dernier

point de vue, cette maladie peut être divisée en quatre périodes :

agitation, dépression, rémission, convalescence.

Pendant l'agitation, le chiffre de l'acide phosphorique rendu

par vingt-quatre heures est augmenté. Tandis qu'à l'état sain, ce

chiffre est de 1 gr. 85, il atteint alors 2 gr. O ! e, 2 gr. 23, 2 gr. 33.

Toutefois pour que ces modifications se produisent sous l'in-

fluence de l'agitation, il faut que celle-ci ait une certaine inten-

sité, sinon le chiffre del'acide phosphorique reste normal; il nous

aparu inutile d'indiquer les résultats auxquels nous ont conduit

nos recherches à ce dernier point de vue ; les signaler suffit.

L'augmentation de l'acide phosphorique qu'on constate sous

l'influence de l'agitation porte sur les deux espèces de phos-

phates, mais avec une intensité différente sur chacun d'eux

suivant les cas. Pendant la période d'état de la maladie, alors

que les troubles cérébraux sont intenses, que les idées sont très

embrouillées, que l'entraînement intellectuel ne peut être ré-

372 REVUE CRITIQUE.

primé, l'acide phosphorique uni aux terres est augmenté dans

des proportions beaucoup plus considérables que l'acide phos-

phorique uni aux alcalis. C'est ce qui ressort des résultats que

nous avons obtenus dans les deux premières périodes d'agita-

tion que nous avons indiquées. Dans ce cas, le rapport entre

l'acide phosphorique et l'azote atteint, chez V. J..., 42 p. 100

et 69 p. 100 au lieu de 35 p. 100 qu'il est à l'état normal.

Pendant les périodes de déclin de la maladie, alors que les

troubles cérébraux sont peu intenses, l'acide phosphorique uni

aux terres est au contraire proportionnellement moins augmenté

que l'acide phosphorique uni aux alcalis, si bien que, dans les

deux dernièrespériodes d'agitation que nous étudions, le rap-

port entre les phosphates terreux et les phosphates alcalins

tombe à 30 p. 100 au lieu de 35 p. 100.

Pendant l'état de dépression, alors que, à part l'agitation,

les troubles cérébraux persistent et s'accusent par de l'apathie,

un vague sentiment de tristesse, de la pesanteur de tête, etc.,

l'élimination de l'azote et de l'acide phosphorique est modifié

de la manière suivante. La quantité d'azote est diminuée :

22 gr, 34 et 20 gr. 75 au lieu de 22 gr. 58. L'acide phospho-

rique est diminué, le chiffre de cette substance peut descendre

de 1 gr. 85 à 1 gr. 49. La diminution de l'acide phosphorique

porte exclusivement sur l'acide uni aux alcalis : 0 gr. 94 et

0 gr. 83 au lieu de 1 gr. 37, chiffre normal; l'acide phospho-

rique uni aux terres est, au contraire, augmenté etmèmedans

d'assez grandes proportions : 0 gr. 66 et 0 gr. 88 au lieu de

0 gr. 48.

Pendant la période de rémission, la quantité d'azote éliminé

parvingt-quatreheuresestplus oumoius diminuée relativement

à la normale : 22 gr. 04 et 19 gr. 83 au lieu de 22 gr. 58. Il

en est de même de l'acide phosphorique : 1 gr. 82 et 1 gr. 66

au lieu de 1 gr. 85. La diminution de l'acide phosphorique

peut porter sur les deux espèces de phosphates, mais elle

atteint surtout, et même dans un cas exclusivement, les phos-

phates terreux, dont le chiffre s'abaisse de 0 gr. 48, chiffre phy-

siologique, à 0 gr. 40 et 0 gr. 37.

Pendant la convalescence, la quantité d'azote éliminé est

diminuée : 16 gr. 69 au lieu de 22 gr. 58 ; il en est de même

de l'acide phosphorique : 1 gr. 69 au lieu de 1 gr. 85, et dans

ce dernier cas, la diminution porte également sur les phosphates

neutres et alcalins.

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 373

Telles sont les données qui se dégagent de l'observation de

V. J... Ces données, nous les retrouvons les mêmes dans tous

les cas de manie que nous avons examinés.

G.g... est un maniaque qui, à une période de convalescence

très avancée, rend par vingt-quatre heures :

Azote. 20,71; acide phosphorique total, 1,30; acide phosphorique

uni aux terres, 0,36; acide phosphorique uni aux alcalis, 0,94.

Ce malade rend, 4° sous l'influence d'un accès d'agitation

à la période dite de la maladie :

Azote, 25,12; acide phosphorique total, 2,27; acide phosphorique

um aux terres, 0,99 ; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,23.

2° Sous l'influence d'un accès d'agitation diminuant d'une

manière progressive :

Azote, 25,84; acide phosphorique total, 2,00; acide phosphorique

uni aux terres, 0,64; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,38.

Car..., à l'état de calme, rend par vingt-quatre heures :

Azote, 19,00; acide phosphorique total, 1,36; acide phosphorique

uni aux terres, 0,45; acide phosphorique uni aux alcalis, 0,91. 1.

Sous l'influence d'un état d'agitation, il rend :

Azote, ? 41; acide phosphorique total, 2,26; acide phosphorique

uni aux terres, 0,66 ; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,60.

Sous l'influence d'un état de dépression, ce même malade

rend :

Azote, 19,91 ; acide phosphorique total, 1,53; acide phosphorique

uni aux teires, 0,68; acide phosphorique uni aux alcalis, 0,85.

Les exemples qui précèdent et dont on trouvera les détails

dans notre travail', ainsi que ceux relatifs à deux autres cas de

manie que nous croyons inutile de rappeler ici, confirment

absolument les résultats que nous avons obtenus chez V. J...

Aussi, généralisant les conclusions auxquelles nous a conduit

l'observation de ce malade, dirons-nous :

La manie influence l'élimination de l'acide phosphorique et

de l'azote. A ce point de vue, l'état maniaque peut être divisé

en quatre périodes : agitation, dépression, rémission, conva-

lescence.

L'agitation, lorsqu'elle est peu intense, ne modifie pas l'élimi-

nation de l'acide phosphorique ; dans le cas contraire, elle

1 Maire). Loco citato, p. 15S- ! 6S.

374 REVUE CRITIQUE.

augmente très nettement le rendement des phosphates, phos-

phates terreux et phosphates alcalins ; mais encore ici faut-il

distinguer les cas dans lesquels les troubles cérébraux sont très

marqués de ceux dans lesquels ces troubles sont superficiels.

Dans le premier cas, qui correspond à la période d'état de la

maladie, l'agitation produit les modifications suivantes :

L'azote est augmenté, et cela dans des proportions assez consi-

dérables ;

L'acide phosphorique est augmenté. L'augmentation de cet

acide porte sur l'acide phosphorique uni aux terres et sur l'acide

phosphorique uni aux alcalis, mais proportionnellement davan-

tage sur le premier de ces acides que sur le second; de sorte que

les rapports qui existent à l'état physiologique entre les phos-

phates neutres et les phosphates alcalins sont considérablement t

augmentés.

Dans le second cas, qui correspond à'ia période de déclin de

la maladie, l'agitation modifie de la façon suivante l'élimina-

tion de l'acide phosphorique et de l'azote :

L'azote n'est pas augmenté, ou, quand il l'est, c'est dans des

proportions beaucoup moins considérables que dans la période

précédente;

L'acide phosphorique est augmenté. L'augmentation de cet

acide porte sur les deux espèces de phosphates, mais à l'inverse

de ce qui se passe dans la période précédente, davantage sur

l'acide phosphorique uni aux alcalis que sur l'acide phospho-

riqueuni aux terres, de sorte que les rapports qui existent entre

ces deux acides sont diminués.

Pendant l'état de dépression, état généralement passager,

prélude d'un nouvel accès d'agitation ou transition entre deux

accès, et dans lequel toute trace d'agitation a disparu, mais où

l'individu reste affaissé, se plaint de pesanteur, et de douleur

de tête, où parfois on a beaucoup de peine à lui arracher une

parole, etc., le rendement de l'acide phosphorique et de l'azote

est modifié de la manière suivante :

1° La quantité d'azote éliminé est inférieure à la normale dans

des pz oportions variables, parfois très faibles, d'autres fois, au

contraire, assez marquées ; /

2° La quantité d'acide phosphorique est diminuée. La diminue-

tion de cet acide porte exclusivement sur l'acide phosphorique

uni aux alcalis; l'acide phosphorique uni aux terres est au

contraire augmenté.

DE LA NUTRITION DU SYSTEME NERVEUX. 375 i

Pendant les périodes de rémission :

1° La quantité d'azote éliminé est diminuée;

2° La quantité d'acide phosphorique est diminuée. La diminue-

tion de cet acide porte sur les deux espèces de phosphates , mais

plus souvent davantage sur les phosphates alcalins que sur les

phosphates neutres.

Pendant la convalescence : .'

1° La quantité d'azote éliminé est diminuée;

2° La quantité d'acide phosphorique est diminuée. La diminue-

tion de cet acide porte et peu près également sur l'acide phospho-

rique uni auc terres et sur l'acide phosphorique uni aux alcalis.

Pour rendre plus saillantes les modifications que l'état ma-

niaque imprime à l'élimination de l'azote et de l'acide phospho-

rique, nous les synthétiserons dans le tableau suivant :

Tableau VIII. Influence exercée par l'état maniaque sur l'élimi-

nation de l'azote et de l'acide phosphorique

376 REVUE CRITIQUE.

de l'azote et de l'acide phosphorique uni aux alcalis est inti- ? Ke ? Me ? t<'eaMc ? ) : e ! a6tOK. Et encore faut-il, pour que

dans ce cas l'augmentation se produise, que l'agitation ait une

certaine intensité ; différemment, nous l'avons dit, le rende-

ment de l'azote et de l'acide phosphorique n'est pas modifié.

` Pendant la période d'agitation, l'acide phosphorique uni aux

terres est augmenté; il en est de même pendant les périodes

de dépression, tandis que cet acide est diminué pendant les

états de rémission et de convalescence. Le fait de l'augmenta-

tion de l'acide phosphorique uni aux terres, dans deux périodes

aussi dissemblables symptomatologiquement que les périodes de

dépression et d'agitation, prouve d'une manière on ne peut plus

manifeste que, dans la manie, l'augmentation de l'acide phos-

phorique uni aux terres ne se lie pas exclusivement il l'agita-

tion.

Et si on remarque, d'une part, que c'est dans la période

d'état, alors que les troubles cérébraux sont le plus intenses,

que le chiffre de l'acide phosphorique uni aux terres est le plus

élevé; d'autre part, que l'augmentation de cet acide est plus

considérable pendant les périodes de dépression que pendant

les périodes d'agitation du déclin de la maladie, alors que les

troubles cérébraux sont moins marqués que pendant l'état de

dépression, on est obligé de rattacher à ces troubles l'augmen-

tation des phosphates terreux. Et si on rapproche ces faits des

résultats que nous a fournis l'étude de l'influence exercée par

le travail intellectuel sur l'élimination de l'acide phosphorique

uni aux terres, on est obligé d'admettre que la manie, dans

les périodes d'agitation et de dépression, augmente les échanges

nutritifs qui se passent au sein de la substance nerveuse.

D'où vient maintenant cette augmentation de l'azote et de

l'acide phosphorique uni aux alcalis qu'on constate pendant

les périodes d'agitation de la manie ? Cette augmentation, liée,

nous l'avons vu, à l'agitation, ne se rattache pas aux échanges

nutritifs qui se passent au sein de la substance nerveuse. En

effet, elle n'existe plus dans l'état de dépression, alors que ces

échanges sont cependant suractivés, comme le prouve l'aug-

mentation des phosphates terreux. C'est donc en dehors du

système nerveux qu'il faut chercher son explication. Or, l'agi-

tation met en activité, et parfois d'une manière considérable,

le système musculaire ; et comme nous savons que les muscles,

en travaillant, augmentent l'élimination de l'azote et de l'acide

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 37"

phosphorique uni aux alcalis, il est naturel d'attribuer à la su-

ractivité du système musculaire une part dans l'augmentation

de l'azote et des phosphates alcalins qu'on constate sous l'influence

de l'agitation maniaque.

Est-ce là la seule origine de cette augmentation ? Si l'on

compare l'élimination de l'azote et de l'acide phospho-

rique pendant l'agitation des périodes d'état et des périodes

de déclin de la manie, on retrouve dans les périodes de

déclin proportionnellement plus d'acide phosphorique éli-

miné que d'azote, ainsi qu'il arrive sous l'influence du travail

musculaire; dans les périodes d'état, au contraire, alors cepen-

dant que le système musculaire est mis en activité d'une ma-

nière aussi intense qu'aux périodes de déclin, l'acide phospho-

rique uni aux alcalis est proportionnellement moins augmenté

que l'azote, et cette diminution dans les rapports entre l'acide

phosphorique uni aux alcalis et l'azote ne tient pas à ce que cet

acide est éliminé en moindre quantité qu'aux périodes de déclin,

c'est l'inverse qui existe ; elle tient à ce que l'azote est plus aug-

menté proportionnellement que les phosphates alcalins. Cette

plus grande augmentation de l'azote ne peut être évidemment

rattachée au système musculaire; son origine ne peut être

recherchée que dans une décomposition plus active des ma-

tières albuminoïdes en général, c'est-à-dire dans une suracti-

vité de la nutrition générale. .

D'où cette conclusion : l'agitation maniaque suractive la

nutrition générale.

C'est l'inverse qui se produit dans les périodes* de dépres-

sion. Ici en effet, nous retrouvons en môme temps qu'une aug-

mentation des phosphates terreux, une diminution de l'azote

et des phosphates alcalins, c'est-à-dire des modifications abso-

lument semblables à celles constatées à la suite du travail in-

tellectuel, et qui reconnaissent évidemment la môme origine

que ces dernières, c'est-à-dire un ralentissement de la nutri-

tion générale. Par suite, nous pouvons dire : l'état de délmes-

sion maniaque retentit sur la nutrition générale, qu'il ralentit.

La manie a donc une réelle influence sur les échanges qui

se passent au sein du système nerveux, influence qui semble

se poursuivre encore pendant les périodes de rémission et de

convalescence; mais nous n'insisterons pas davantage sur ce

point. Nous ferons seulement remarquer que, dans la manie,

les périodes de dépression étant de très courte durée d'une

378 REVUE CRITIQUE.

manière absolue et relativement aux périodes d'agitation, c'est

la suractivité de la nutrition générale qui domine, et de beau-

coup, dans cette forme d'aliénation mentale.

Nous pouvons, considérant seulement les états d'agitation

et de dépression, résumer comme suit les conclusions qui se

dégagent de l'étude de l'élimination de l'acide phosphorique,

et de l'azote dans la manie :

1° la manie modifie diversement, suivant LES PÉRIODES,

l'élimination par LES urines DE l'acide PHOSPHORIQUE ET DE

l'azote ;

2° La manie modifie LES échanges NUTRITIFS QUI SE passent

au SEIN DE la substance nerveuse ; ELLE LES augmente ;

3° la manie retentit SUR la NUTRITION générale, qu'elle

SURACTIVE dans LES PÉRIODES d'agitation ET QU'ELLE ralentit

dans LES PÉRIODES DE DÉPRESSION.

Lypémanie et acide phosphorique.

De même que nous avons dû laisser de côté à propos de la

manie, les cas dans lesquels l'agitation était trop intense, de

même aussi pour la lypémanie et cela pour les mêmes rai-

sons.

Nous n'avons pu suivre les lypémaniaques que nous avons

examinés jusqu'à leur entière guérison, comme il nous a été

donné de le .faire pour quelques maniaques; par suite, pour

juger chez eux des modifications qu'imprime la lypémanie à

l'élimination de l'acide phosphorique, nous devons prendre

comme terme de comparaison l'élimination de cet acide chez

l'homme sain en général. (Voir les recherches consignées

page 366, tableau VI.)

Cela dit, voyons si cette forme d'aliénation modifie l'élimina-

tion de l'acide phosphorique.

Gib... est un lypémaniaque qui s'imagine qu'on va le tuer :

chez cet homme, l'aliénation mentale est restée très longtemps

stationnaire, et nous l'avons observé pendant un long laps de

temps à des intervalles plus ou moins éloignés. Nous consignons

dans le tableau qui suit les résultats que nous a fournis l'exa-

men de ses urines au mois de mai 1880 et aux mois de mars et

avril 1881.

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 379

Tableau IX.

380 REVUE CRITIQUE.

avec ce qui existe chez l'homme sain en général, nous voyons

que :

l°La quantité d'azote est diminuée;

2° La quantité d'acide phosphorique total est normale ;

3° La quantité d'acide phosphorique uni aux terres est aug-

mentée ;

4° La quantité d'acide phosphorique uni aux alcalis est di-

minuée.

Par conséquent, chez Gib..., l'élimination de l'azote et de

l'acide phosphorique diffère de l'état normal par les trois points

suivants :

a) Diminution de l'azote ;

b) Augmentation de l'acide phosphorique uni aux terres ;

c) Diminution de l'acide phosphorique uni aux alcalis.

Ajoutons encore, pour rendre plus précis les résultats qui

précèdent, que l'état mental de Gib... restant le même, nous

avons examiné à plusieurs reprises les urines de ce malade :

au mois de septembre 1880, pendant unepériode de huit jours ;

au mois d'octobre 1881, pendant une période de quatre jours;

au mois de mars 1883, pendant une période de quatre jours;

et que, dans tous ces cas, nous avons toujours trouvé des

modifications semblables à celles de mai 1880, mars et avril

1881.

Cette influence de la lypémanie sur l'élimination de l'acide

phosphorique, nous la retrouvons la même que chez Gib...,

chez les autres lypémaniaques que nous avons observés; ainsi

dans les trois cas suivants, dont nous ne ferons qu'indiquer

les résultats généraux

Bis... atteint de lypémanie avec tendance au suicide, rend

en moyenne par vingt-quatre heures pendant la période station-

naire de la maladie :

Azote, t î,32 ; acide phosphorique total, 1,74 ; acide phosphorique uni

aux terres, 0,89; acide phosphorique uni aux alcalis, 0,S5.

Bar..., âgé de vingt-neuf ans, présentant les signes de lypé-

manie s'accompagnant à certains moments de stupeur, rend en

moyenne par vingt-quatre heures :

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 381

Azote, 19,33 ; acide phosphorique total, 1,83; acide phosphorique uni

aux terres, 1,71; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,12.

V..., trente-six ans, présente les signes delà lypémanie

rend en moyenne par vingt-quatre heures : .

Azote, 14,92; acide phosphorique total, 1.48; acide phosphorique uni

aux terres, 0,75 ; acide phosphorique uni aux alcalis, 0,73.

Les observations qui précèdent nous ayant donné des résul-

tats concordants, nous pouvons ce nous semble généraliser ces

résultats et dire que, dans la lypémanie :

1° Le chiffre de l'azote rendu par vingt-quatre heures est di-

7 ? lilzué;

2° Le chiffre de l'acide phosphorique uni aux terres est aug-

menté ;

3° Le chiffre de l'acide phosphorique uni aux alcalis est dinzi-

nué ;

4° Le chiffre de l'acide phosphorique total se maintient dans

les limites inférieures de la normale ou bien est faiblement di-

minué. -

Toutefois, pour que, dans la lypémanie, toutes les modifica-

tions qui précèdent se produisent, il faut que la maladie ait

une certaine intensité, sinon l'acide phosphorique uni aux

terres n'est pas augmenté; on ne constate que la diminution

de l'acide phosphorique uni aux alcalis et de l'azote '.

Interprétation des modifications produites par la lypémanie dans

l'élimination de l'acide phosphorique.

Les modifications que produit la lypémanie sur l'élimination

de l'azote et de l'acide phosphorique nous étant connues, nous

devons chercher à nous en rendre compte. Pour cela, rappro-

chons-les de celles que produit le travail intellectuel chez

l'homme sain. Nous synthétisons dans le tableau suivant ce

qui a trait à ce travail et à la lypémanie.

hiairet. - Goco cilalo, p. 184-iBG.

382 REVUE CRITIQUE.

Tableau X. -Comparaison entre l'influence qu'exercent le travail

intellectuel et la lypémanie sur l'élimination de l'acide phospho-

rique et de l'azote et sur les rapports qui existent entre ces su6s-

tances. ·

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 383

Idiotie et démence.

Nous serons bref sur l'influence qu'exercent l'idiotie et la

démence sur l'élimination de l'acide phosphorique. Nous indi-

querons seulement les conclusions qui se dégagent de nos re-

cherches.

1° Idiotie :

a) Lorsque l'idiotie est considérable, on constate une diini-

nution de l'azote, de l'acide phosphorique uni aux terres et de

l'acide phosphorique uni aux alcalis.

b) Lorsque l'idiotie est moins complète, le chiffre de l'acide

phosphorique et de l'azote est compris dans les limites infé-

rteures de la normale.

2° Démence :

La démence diminue l'élimination de l'azote, de l'acide phos-

phoriqueuni auxterres et del'acide phosphorique uni aux alcalis.

Si nous nous contentons de rappeler ainsi les conclusions

qui précèdent relativement à l'idiotie et à la démence, c'est que

les résultats que nous avons obtenus dans ces cas nous

donnent des résultats trop peu précis pour nouspermettre, en

nous basant sur ces états morbides, de nous rendre compte des

rapports qui existent entre l'acide phosphorique etles troubles

cérébraux. En effet, si ces résultats nous portent à penser que,

dans ces maladies, les échanges qui se passent au sein du système

nerveux sont ralentis, nous ne pouvons cependant établir ce

fait sur des bases scientifiques indiscutables. Mais il n'en est

pas de même en ce qui concerne la manie et la lypémanie.

Nous avons vu ces deux formes d'élimination modifier très

nettement ceséchanges et, par suite, nous pouvons dire comme

conclusion générale :

L'aliénation mentale modifie les échanges nutritifs qui se

passent au sein du système nerveux.

EPILEPSIE

Historique.

Les recherches relatives aux rapports qui existent entre

l'épilepsie et l'élimination de l'acide phosphorique sont peu

nombreuses. Nous nous contenterons de rappeler que Beale 1

1 Beale. Loco. citato, p. 220.

384 REVUE CRITIQUE.

et Mendel' ont trouvé, sous l'influence d'attaques épileptiques,

épileptiformes et apoplectiques, une augmentation de l'acide

phosphorique éliminé par les urines et que Külin 1, au contraire,

n'aurait pas constaté cette augmentation. Nous insisterons

toutefois davantage sur les recherches de Lépine et Jacquin 3.

Dans un travail intitulé : Excrétion de l'acide phosphorique

pai, 1'î(i,iîze dans ses rapports avec celle de l'azote, .travail con-

sacré à des recherches sur les maladies du système nerveux,

Lépine et Jacquin étudient non seulement l'élimination de

l'acide phosphorique total, mais encore l'élimination de

l'acide phosphorique uni aux terres et de l'acide phosphorique

uni aux alcalis; et, à ce pointde vue, ils arriventà des résultats

qui, sous beaucoup de rapports, sontconfirmatifs de ceux que

nous avons obtenus. Certaines des observations rapportées par

ces auteurs complètent même celles que nous avons recueillies

nous-même. Le fait principal qui se dégage de ces observa-

tions, c'est que les attaques d'épilepsie, les vertiges et même

les seules menaces d'attaques augmentent le chiffre de l'acide

phosphorique uni aux terres, tandis que dans ces cas lesphos-

phates alcalins sont peu influencés et peuvent même être di-

minués relativement à l'état ordinaire. Notons encore que

Lépine et Jacquin sont amenés à conclure que, sans l'influence

d'attaques d'épilepsie, le rapport entre l'acide phosphorique

et l'azote serait augmenté, tandis que dans l'intervalle des

attaques, ce rapport serait diminué.

Recherches personnelles.

Nos recherches sur l'élimination de l'acide phosphorique dans

l'épilepsie a porté sur des malades à l'état de repos, vivant

à l'asile, soumis au régime ordinaire de l'établissement etpré-

sentantun certain degré d'affaiblissement intellectuel.

Nous avons étudié, chez ces hommes, l'élimination de l'a-

cide phosphorique en dehors des attaques, l'influence des

attaques, et enfin pendant l'état de mal épileptique. Dans ces

divers cas, nos recherches ont porté sur un nombre de jours

assez considérable pour que nous puissions établir pour chaque

individu une moyenne d'élimination de l'acide phosphorique par

' Mendel. loco. citato, p. 660.

2 Ruhn. - Deutsch. Arch, für Klin., 1878, cite par Lépine et Jacquin.

3 Lépine et Jacquin. Sur l'excrétion de l'acide phosphorique etc. (Rev.

mens, de méd. et de chir., juin, septembre et décembre 1879.)

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 385

vingt-quatre heures nous permettant une étude comparative

facile. Nous avons observé ainsi sept épileptiques. Nous nous

contenterons de rappeler ici en détail l'expérience qui suit :

Tableau XI. Es..., 30 ans; épileptique, entré à l'asile le

il septembre 4880.

386 REVUE CRITIQUE.

Si nous établissons chez Es... le chiffre moyen d'élimina-

tion de l'acide phosphorique par vingt-quatre heures pendant

les jours où cet individu est à son état ordinaire, ades attaques,

ou bien est dans sa période épileptique, nous obtenons les ré-

sultats consignés dans le tableau ci-dessous :

T.V11LEAU XII

DE LA NUTRITION DU SYSTEME NERVEUX. 387

2° L'acide phosphorique uni aux terres est proportionnellement plus

augmenté que l'acide phosphorique uni aux alcalis, ainsi que

le 1 prouve l'augmentation du rappoit entre [ces deux acides :

48 p. 100 au lieu de 39 p. 100.

Les résultats qui précèdent, nous les avons obtenus sem-

blables dans tous les cas d'épilepsie que nous avons observés,

sauf la]diminution de l'acide phosphorique uni aux alcalis sous

l'influence des attaques. L'observation de Es... est la seule dans

laquelle nous ayons constaté cette diminution, dans tous les

autres cas, les phosphates alcalins étaient augmentés.

M..., vingt et un ans, épileptique, rend en moyenne par

vingt-quatre heures.

A l'état ordinaire :

Azote, 16,54 ; acide phosphorique total, 1,60; acide phosphorique uni

aux terres, 0,53; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,07.

Sous l'influence d'attaques : '

Azote, 19,77; acide phosphorique total, 1,96; acide phosphorique uni

aux terres, 0,70; acide, phosphorique uni aux alcalis, 1,26.

A..., trente ans, épileptique, rend en moyenne par vingt-

quatre heures :

A l'état ordinaire :

Azote, 17,47; acide phosphorique total, 1,96; acide phosphorique uni

aux terres, 0,47; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,49.

Sous l'influence d'attaques :

Azote, 22,26; acide phosphorique total, 1,29; acide phosphorique uni

aux terres, 0,73; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,56.

Pendant la période épileptique :

Azote, 20,34 ; acide phosphorique total, 2,20 ; acide phosphorique uni

aux terres, 0,53; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,67.

R..., cinquante ans, dément épileptique, rend en moyenne

par vingt-quatre heures :

A l'état ordinaire :

Azote, 15,33; acide phosphorique total, 1.32; acide phosphorique uni

aux terres, 0,42; acide phosphorique uni aux alcalis, 0,90.

Sous l'influence d'attaques :

Azote, 16,89; acide phosphorique total, 1,69; acide phosphorique uni

aux terres, 0,56; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,13.

Pendant la période épileptique :

Azote, 20,32; acide phosphorique total, 1,73; acide phosphorique uni

aux terres, 0,55; acide phosphorique uni aux alcalis, 1,18.

388 REVUE CRITIQUE.

Si on compare les résultats qui précèdent avec ceux que

nous avons obtenus chez Es..., nous voyons qu'il n'existe entre

eux qu'une seule différence portant, ainsi que nous le di-

sionsplushaut, sur l'acide phosphorique uniaux alcalis. Tandis

que chez ce dernier malade cet acide était diminué sous l'in-

fluence des attaques, il est augmenté dans les trois cas que nous

venons de rappeler.

Par conséquent, nous pouvons dire :

A. Sous l'influence des attaques et comparativement à l'état

ordinaire :

1° L'azote rendupar vingt-quatre heures est augmenté.

2° L'acide phosphorique uni aux terres est augmenté ; /

et cela proportionnellement plus que l'azote;

3° L'acide phosphorique uni aux alcalis est augmenté.

Une seule fois sur sept, nous n'avons pas vu se pro-

duire cette augmentation; ;

4° L'acide phosphorique total est augmenté.

B. Sous l'influence de l'état de mal épileptique :

10 L'azote rendu par vingt-quatre heures est augmenté;

2° L'acide phosphorique uni aux terres est augmenté;

3° L'acide phosphorique uni aux alcalis'est augmenté ;

- 4° L'acide phosphorique totales ! augmenté.

Si, d'un autre côté, on compare les résultats que nous avons

obtenus chez les épileptiques qui précèdent pendant l'état or-

dinaire, c'est-à-dire en dehors des attaques et de l'état de mal

épileptique, avec les résultats que nous afournisThomme sain

en général, on voit que pendant l'état ordinaire, l'élimination

de l'azote et de l'acide phosphorique n'est pas modifiée.

Interprétation des modifications produites par les attaques d'é-

Epilepsie et par l'état de mal épileptique sur l'élimination de

l'acide phosphorique par les urines.

A. Attaques d'épilepsie. Sous l'influence des attaques, l'a-

zote, l'acide phosphorique uni aux terres et l'acide phospho-

rique uni aux alcalis sont augmentés. Or, comme nous savons

que la nutrition générale influence dans le même sens ces diffé-

rentes substances, on serait tenté de rattacher leur augmenta-

tion à une suractivité de cette nutrition; mais, lorsqu'on

étudie les faits de plus près, on voit qu'il ne peut en être ainsi.

DE LA NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX. 389

D'abord l'acide phosphorique uni aux terres est proportion-

nellement beaucoup plus augmenté que l'acide phosphorique

uni aux alcalis et que l'azote, ce qui porte déjà à admettre que

l'augmentation des phosphates terreux a une autre origine que

la nutrition générale. En second lieu, les recherches de Lépine

et Jacquin nous ont montré l'acide phosphoriqueuni aux terres,

augmenté sous l'influence des vertiges, ou même simplement

sous l'influence de l'imminence des attaques, alors que les

phosphates alcalins et l'azote ne sont nullement augmentés.

Evidemment, l'augmentation de l'acide phosphorique uni aux

terres reconnaît une autre cause que la nutrition générale. Et

comme, d'une part, l'intervention du système nerveux ne peut

être mise en doute dans les attaques d'épilepsie, et que, d'autre

part, nos recherches nous ont montré que l'intervention de ce

système suractivé dans sa nutrition se traduit par une éléva-

tion dans le chiffre de l'acide phosphorique uni aux terres éli-

miné par les urines, nous sommes, par la force des choses,

amené à attribuer, en partie tout au moins, à une suractivité

de la nutrition du système nerveux les phosphates terreux éli-

minés en plus qu'à l'état ordinaire sous l'influence des attaques

d'épilepsie.

Inversement, l'augmentation de l'acide phosphorique uni

aux alcalis et de l'azote n'existant pas en dehors des attaques,

sous l'influence des vertiges et de l'état de mal épileptique,

c'est ailleurs que dans le système nerveux qu'il faut rechercher

son explication.

Or, les attaques d'épilepsie mettent en jeu l'activité du

système musculaire dans des proportions considérables, et

comme la mise en activité de ce système augmente l'azote et

l'acide phosphorique uni aux alcalis, nous sommes naturelle-

ment amené à rattacher au système musculaire l'augmentation

de l'azote et des phosphates alcalins, qu'on retrouve sous l'in-

fluence des attaques d'épilepsie.

Est-ce là la seule origine de cette augmentation ? Ne faut-il il

pas incriminer la nutrition générale ? C'est possible, mais nos

recherches ne nous permettent pas une démonstration rigou-

reuse de ce fait.

En résumé : 1° Les attaques 'd'épilepsie modifient l'élimina-

tioîz, par les urines, de l'azote et de l'acide phosphorique ; elles

augmentent celle élimination;

390 REVUE CRITIQUE. NUTRITION DU SYSTÈME NERVEUX.

2° Les attaques d'épilepsie suractivent les échanges en acide

phosphorique qui se passaient au sein de la substance ner-

veuse.

B. Etal de mal épileptique. Sous l'influence de l'état de

mal épileptique, l'azote, l'acide phosphorique uni aux terres et

l'acide phosphorique uni aux alcalis, sont augmentés, et cela

dans des proportions à peu près semblables, de sorte que les

rapports qui existent entre ces substances et l'état ordinaire ne

sont pas ou très peu modifiés. Par suite, nous devons nous

demander si la nutrition générale no doit pas être incriminée ;

mais lorsqu'on étudie comparativement ces modifications avec

celles que produisent les attaques d'épilepsie et l'agitation ma-

niaque, on arrive à faire jouer un rôle important au système

nerveux et au système musculaire dans leur production.

Ces différents faits établis, nous pouvons résumer comme

suit les rapports qui existent entre l'épilepsie et l'acide phos-

phorique :

1° Dans l'épilepsie, en dehors des attaques et de l'état de mal

épileptique, l'élimination de l'azote et de l'acide phosphorique

par les urines n'est pas modifiée;

2° Les attaques et l'état de mal épileptique augmentent l'éli-

mination de l'azote et de l'acide phosphorique; ils suractivent les

échanges qui se passent au sein du système nerveux.

Quant à l'hystérie, nous rappellerons seulement que nous

avons institué, comme pour l'aliénation mentale et l'épilepsie,

des expériences à l'effet de savoir si cette maladie modifie la

nutrition du système nerveux. Ces expériences encore trop

peu nombreuses et incomplètes ne nous permettent de for-

muler aucune conclusion.

Dans cette revue consacrée à l'étude de la nutrition du

système nerveux à l'état physiologique et pathologique, nous

avons dû, pour nous rendre compte de cette nutrition, faire

plus particulièrement appel à nos recherches personnelles. Il

nous parait inutile de reprendre les différentes conclusions

qui se dégagent de ses recherches ; nous avons eu soin, chemin

faisant, de les mettre suffisamment en relief. Nous rappellerons

seulement les points suivants :

1° Il est possible de pénétrer la nutrition du système nerveux

par l'étude de l'élimination de l'acide phosphorique ;

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 391

2° Si l'acide phosphorique se lie à lanutrition d'autrestissus

que le tissu nerveux, il se lie intimement à la nutrition de ce

dernier;

3° L'activité cérébrale et les maladies fonctionnelles du

système nerveux modifient la nutrition de ce système ;

4° L'activité cérébrale physiologique et pathologique retentit

sur la nutrition générale qu'elle ralentit.

Ces derniers points, modifications dans les échanges nu-

tritifs qui se passent au sein du système nerveux sous l'in-

fluence des maladies fonctionnelles de ce système, retentisse-

ment de l'activité cérébrale sur la nutrition générale, mérite-

raient de nous arrêter davantage au double point de vue

scientifique et pratique. Nous y reviendrons plus tard; nous

n'avons voulu pour le moment que les dégager de nos re-

cherches et les mettre en relief. (A suivre.)

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE

XXV. DU MÉCANISME PSYCHIQUE DU DELIRE DANS LA VÉSANIE PRIMAIRE

(paranoïa, primcire Verrucktheit, des auteurs allemands); par

Rosenbach. (Messager russe, 1884.)

On sait que la psychiatrie allemande professait, jusque vers 1860,

que toutes les formes des maladies mentales ne sont que des pé-

riodes différentes d'un seul et même processus morbide commen-

çant toujours par une modification de la sphère affective

(mélancolie, manie), continuant à moins de guérison sous une

forme déterminée de délire pour finir par la démence. Telles

étaient, par exemple, les idées de Griesinger, qui les a développées

dans son livre classique. En 1863, Swell émit l'opinion que le

délire systématisé de persécution et de grandeur (délire chronique

de Magnan) peut se développer sans être précédé de période mé-

lancolique ou maniaque; Griesinger se rallia à cette manière de

voir et professa à la charité de Berlin que ces états morbides pou-

vaient surgir d'emblée (de là le nom de vésaiiiepi-in2ai7-c). A l'heure

qu'il est, certains auteurs, Westphal en particulier, n'admettent pas

du tout qu'un délire systématisé puisse être un état secondaire.

392 .REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. ,

On admet généralement que le délire chronique 1, laisse intac

l'appareil logique des malades. M. Rosenbach croit que c'est une

erreur; il est même d'avis que le délire chronique ne peut évoluer

que sur un fond de débilité mentale. Ce ne sont pas les halluci-

tions qui fournissent les éléments du délire, les idées délirantes

les plus bizarres surgissent spontanément et le fait même que

des illusions et hallucinations peuvent être interprétées par le

malade dans le sens de son délire prouve qu'il existe déjà une

certaine débilité mentale. Il est vrai qu'on voit souvent des gens

d'une instruction spéciale brillante devenir délirants chroniques;

cela ne prouve rien, à notre avis, puisque des gens occupant des

postes élevés et ayant reçu une belle instruction peuvent très bien

être des débiles. M. Rosenbach s'élève de même contre l'opinion

généralement répandue que, dans le cours d'un délire chronique,

les idées ambitieuses surgissent comme une conséquence logique

des idées de persécution. Cette manière de voir n'est pas, selon

M. Rosenbach, conforme aux faits cliniques. Il avance qu'une

analyse attentive des idées délirantes, des illusions et des hallu-

cinations dans le délire chronique prouvent le contraire, Qu'on

peut encore, au début de la maladie, retrouver les éléments des

deux espèces d'idées délirantes (persécution et ambition); le fait

même que le malade rapporte tout ce qui se passe autour de lui

à sa personnalité est déjà une idée de grandeur, quand même le

malade lui-même ne la considérerait pas comme telle. En général,

les idées de persécution ne sont pas nettement séparées des idées

ambitieuses qui viennent après, comme on le croit ordinairement,

et les deux espèces d'idées délirantes forment souvent un tissu

inextricable. BAJENOFF.

XXVI. Théorie physiologique DE l'hallucination; par A. BINET

et Ch. Récrié. (Revue scientifique, janvier z.)

Il existe un certain nombre de faits qui paraissent démontrer

que l'hallucination est produite par une excitation des centres senso-

riels. Parmi ces faits, on peut citer les suivants :

1° L'achromatopsie. M. Paul Richer a montréque. chez la plupart

des hystériques hypnotisées, il est impossible de suggérer

des hallucinations colorées par l'oeil achromatopsique; M. Binet a

pu vérifier que la même règle s'étendait à une hallucination

spontanée, chez une hystérique aliénée. Si l'achromatopsie, qui

est très probablement un trouble fonctionnel de l'écorce cérébrale,

met le même obstacle à l'hallucination qu'à la perception d'une

' C'est le terme propre de la terminologie française qui correspond à

la primare verrucktleeit ou paranoïa des Allemands. tN.-B. ) '

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 393

couleur donnée, cela tient vraisemblablement à ce que les deux

phénomènes, perception et hallucination, emploient le même

ordre d'éléments nerveux. En d'autres termes, l'hallucination se

passerait dans les centres où sont reçues les impressions des sens ;

elle résulterait d'une excitation des centres sensoriels.

20 Les phénomènes de contraste. M. Parinaud a observé que

l'hallucination d'une couleur peut développer des phénomènes de

contraste chromatique aussi bien, et même d'une manière plus

intense que la sensation réelle de la couleur. Si, par exemple, on

présente à une malade en état de suggestion une feuille de papier

divisée en deux parties par une ligne, et qu'on lui donne sur une

des moitiés l'hallucination du rouge, elle accuse sur l'autre

moitié la sensation du vert complémentaire. Or c'est précisément

ce qui se passe lorsqu'on regarde fixement un carton moitié blanc

et moitié rouge.

3, Les sensations subjectives. Toute hallucination d'une couleur

qui dure un certain temps laisse après elle, comme le fait une

sensation de la même couleur, une sensation consécutive de

couleur complémentaire. Ce phénomène, observé pour la première

fois par Gruithuisen, dans les images de ses rêves, peut être répété

facilement sur des hystériques hypnotisées. On montre à la malade

un carré blanc en lui suggérant qu'il est coloré en rouge, ou en

vert, etc. Puis on lui fait reporter les yeux sur un autre carré, au

centre duquel on a marqué un point pour immobiliser le regard ;

il suffit d'attirer l'attention de la malade sur le point noir pour

que spontanément elle s'écrie que le point est entouré d'un carré

coloré; et la couleur qu'elle indique est la complémentaire de

celle qu'on lui a fait apparaître par suggestion. Cette couleur

complémentaire est l'image négative laissée par l'hallucination

colorée; elle dure peu de temps, s'efface, seperd, meurt, comme

disent les malades ; elle a bien les allures d'une image négative

ordinaire.

Pour agir à coup sûr, il faut préciser par une comparaison la

couleur qu'on suggère; sans cette précaution, on obtient sou-

vent des résultats contradictoires. Si, par exemple, on se con-

tente de suggérer du « rouge », la malade peut se représenter

soit le rouge qui a pour complémentaire le vert, soit un rouge

orangé dont le complémentaire est le bleu. La réponse peut

donc varier suivant les cas, sans que la malade cesse d'être sin-

cère. Mais on arrive facilement à éviter ces variations en appor-

tant de la précision dans la suggestion de la couleur.

Il est à propos de rappeler à ce sujet qu'on retrouve des phéno-

mènes analogues dans la vision mentale des individus normaux.

L'idée persistante d'une couleur complémentaire, comme si c'était

une sensation réelle (Wundt) brillante, développe une image con-

394 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

séculive de couleur. Ces faits nous montrent le rapport étroit de

parenté qui unit la sensation, l'hallucination et le souvenir.

4° Mélange des couleurs imaginaires. Ce mélange donne des cou-

leurs résultantes qui sont conformes aux lois de l'optique. Que

par suggestion on colore une série de cartons blancs, et qu'on

apprenne à l'hypnotique à se servir d'une plaque de verre pour

porter l'image réfléchie d'un des cartons sur un autre, on verra

que la fusion des deux couleurs imaginaires produira la même

résultante que s'il s'agissait de couleurs réelles.

50 Phénomènes observés du côté de l'oeil. M. Féré a observé que,

dans le cas des lésions cérébrales et dans l'hystérie, il existe un

rapport constant entre la sensibilité spéciale de l'oeil et la sensi-

bilité de ses enveloppes. Ce rapport, prouvé par un grand nombre

de faits, paraît indiquer qu'il existe, dans des régions indéter-

minées de l'encéphale, des centres sensitifs communs aux organes

des sens et aux téguments qui les recouvrent. Or, les auteurs ont

constaté que, dans différentes circonstances, l'hallucination visuelle

produit une modification dans la sensibilité des téguments, ce qui

nous paraît rendre probable que l'hallucination visuelle intéresse

le centre de la vision. Ainsi, chez un sujet dont la cornée et la

conjonctive sont insensibles pendant la catalepsie, il suffit de pro-

voquer une vision imaginaire pour ramener la sensibilité des

membranes externes de I'oeil. Chez un autre sujet, l'hallucination,

en se prolongeant après le réveil, provoque une dysesthésie des

téguments de l'oeil qui dure exactement autant de temps que

l'hallucination. Enfin, chez une hypnotique, l'hallucination visuelle

unilatérale produit une dysesthésie localisée exclusivement dans

l'oeil halluciné.' H. G.

SOCIETES SAVANTES

SOCIÉTÉ MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE

Séance du 29 décembre 1884. Présidence de M. FOVILLE.

M. le Président annonce à la Société qu'un de ses membres,

M. G. Ballet, vient d'être nommé médecin du bureau central.

Elections. Après élections, le bureau est ainsi composé pour

l'année 488. Présidezt : M. DAGONGT; vice-président, M. Mesnet;

secrétaire général : M. RITTI ; secrétaires annuels : MM. Charpentier

et Garnier.

Des troubles mentaux dans la sénilité précoce; par M. CHARPEN-

tier (V. p. 275).

M. Longer. L'une des causes de la sénilité, d'après M. Char-

pentier, est l'idée fixe ; cela ne me semble pas très rationnel, car

j'ai souvent remarqué, au contraire, que les gens à idée fixe tom-

baient moins facilement dans la démence que les autres. Dans

certaines professions, il y a une cause de sénilité précoce bien

connue ; c'est le changement brusque d'occupations. Un commer-

çant actif cesse-t-il tout à coup de s'occuper d'affaires qu'il n'est

pas rare de le voir tomber bientôt dans la décrépitude. Ces faits

ont une grande importance en médecine légale ; les hémiplégiques

devraient, à mon sens, entrer dans le cadre des séniles précoces.

M. LEGRAND nu SAULLE. Le directeur de la Dette inscrite me disait

un jour que la mortalité chez les officiers en retraite était de

22 p. 100 dans la première année. Je ne sais trop si je dois attri-

buer cette mortalité à une sénilité précoce ; ne reconnaîtrait-elle

pas plutôt la nostalgie pour cause ?

M. Foville demande si dans ce chiffre de 22 p. 400soutcomprisles

officiers atteints par la limite d'âge et ceux retraités pour infirmités,

ou bien s'il s'agit seulement des premiers ; dans la première hypo-

thèse, il n'y aurait rien d'étonnant à ce que la mortalité soit si

élevée, puisqu'elle frapperait une catégorie d'individus dont plu-

sieurs ont été mis à la retraite pour incapacité maladive.

396 SOCIÉTÉS SAVANTES.

M. LEGRAND du SAULLE. La statistique du ministère des finances

ne fait pas cette distinction.

M. Motet. Je suis très frappé de l'interprétation de M. Char-

pentier. On est ou on n'est pas un vieillard; si les malades qu'il a

observés sont jeunes, l'affaiblissement intellectuel prématuré est

la conséquence d'un état pathologique déterminé et non de la

sénilité. Il serait plus exact, en ce cas, de dire ce que sont des

individus chez lesquels l'aspect extérieur rappelle celui des

vieillards, mais ce ne sont pas des séniles précoces. Le plus souvent

cette catégorie de malades à laquelle a fait allusion M. Char-

pentier, est composée d'individus obtus par suite de poussées con-

gestives et particulièrement de vieux buveurs, dont la circulation

cérébrale est ralentie, et l'activité individuelle diminuée; cène

sont pas encore des déments, ce sont des lents. Quand ils

deviennent actifs, c'est qu'un trouble cérébral nouveau s'est pro-

duit. II n'y a donc pas matière à créer un groupe nouveau avec

les séniles précoces.

M. Charpentier. J'ai voulu surtout décrire ces gens qui, sans

troubles organiques apparents, autres que de la faiblesse muscu-

laire, présentent un affaiblissement intellectuel et ne sont cepen-

dant pas des vieillards. N'est-il pas légitime de les appeler des

séniles précoces puisqu'ils sont jeunes encore, et que cependant ils

ressemblent à des vieillards ?

M. Motet. Lasègue rapporte l'histoire d'un marchand de

vins qui, innocent d'un crime qu'on l'accusait d'avoir commis,

et emprisonné pour ce motif deux fois de suite, fut très indifférent

à sa seconde incarcération, alors qu'au contraire, la première

l'avait beaucoup frappé. C'est qu'il était sous le coup d'une

violente commotion morale qui avait déterminé une démence

rapide, comparable à celle dont nous parle M. Charpentier ; mais

là encore, il s'agissait de troubles cérébraux se traduisant par des

paralysies.

M. Charpentier. M. Lunier m'objecte que l'homme à idée fixe,

tombe rarement en démence, cette objection n'en est pas une

pour moi, car la démence ne se rencontre pas toujours chez des

séniles précoces.

M. LEGItAND du SAULLE. Un éminent magistrat de Paris me fit,

un jour, part des scrupules qu'il avait à condamner certains per-

sonnages ayant occupé autrefois les plus hautes fonctions, et

dont l'existence était des plus honorables avant la catastrophe les

amenant devant lui; il s'agissait, dans son esprit, de ces hommes

qui, arrivés à un âge avancé, compromettent leur crédit et leur

honneur, en prêtant leur nom à des sociétés financières véreuses.

Comme j'avais assisté à beaucoup d'interrogatoires de ces indi-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 397

vidus, je répondis au magistrat qu'il avait raison de les con-

damner. On ne doit pas voir en eux des séniles, mais des hommes

tombés, parce que n'ayant pas une fortune suffisante pour le rang

désiré, ils acceptent des fonctions très rétribuées en feignant de

les croire honnêtes.

M. Boucueiieau. La mortalité des retraités si élevée dans la

première année, n'a rien qui me surprenne, surtout chez les

officiers qui souvent ne cessent leurs services que pour cause

d'infirmités et même de maladies graves.

M. Magnan, sur l'invitation de M. Falret, donne communication

du mémoire qu'il a lu à l'Académie de médecine sur les ano-

malies, les aberrations et les perversions sexuelles chez les dégé-

nérés. Ces anomalies sexuelles sont si nombreuses, si variées,

qu'elles prêteraient à la confusion, si l'on ne faisait ressortir

leurs liens réciproques par une classification basés sur l'anatomie

et la physiologie. Les spinaux, qui forment le premier groupe,

sont réduits au réflexe simple; leur domaine se trouve limité à la

moelle, au centre génito-spinal de Büdge. C'est l'onanisme chez

l'idiot complet. Pour les seconds, les spinaux cérébraux postérieurs,

le réflexe part de l'écorce cérébrale postérieure et aboutit à la

moelle. La vue seule, l'image d'un sexe différent, quelles que

soient ses qualités, provoque l'organe vénérien. C'est l'acte

instinctif purement brutal. Un troisième groupe comprend les

spinaux cérébraux antérieurs. Le point de départ du rétlexe est

dans l'écorce cérébrale antérieure; c'est une influence psychique,

comme dans l'état normal, qui agit sur le centre génito-spinal ;

mais l'idée, le sentiment ou le penchant sont ici pervertis. Enfin

les cérébraux antérieurs ou psychiques, ce sont les extatiques, des

érotomanes.

La plupart des sujets présentant ces anomalies sexuelles offrent

d'autres syndromes épisodiques dans le cours de leurs observa-

tions ; ils ont des obsessions, des impulsions et des délires variés

à début rapide et à évolutions irrégulières. Les troubles intel-

lectuels de ces dégénérés, exercent une action tellement obsé-

dante, qu'ils annihilent la volonté et déterminent des actes que

celle-ci est impuissante à réprimer. C'est là, au point de vue

médico-légal une des conditions les plus importantes à relever.

C'est d'autant plus nécessaire que, malgré leurs apparences rai-

sonnables, ces malades, à la merci de leurs élans impulsifs, ne

sauraient être considérés comme responsables. Ce ne sont donc

pas de simples originaux, mais bien des psychopathes, de vrais

aliénés qui, sous tous les rapports, réclament l'assistance et l'at-

tention du médecin. M. B.

398 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Séance du 26 janvier 1883. Présidence de M. DACONET.

AI. Foville, en quittant le fauteuil de la présidence donne lec-

ture d'un discours où il passe en revue les différents travaux de

- la Société pendant le courant de l'année 1884.

M. DAGONIdT, qui remplace M. Foville, annonce queM. le Dr Gou-

jon vient d'être élu sénateur et que M. Briand a été récem-

ment nommé médecin en chef à l'asile de Villejuif. Il remercie

aussi en termes élevés la Société qui l'a choisi pour succéder à

M. Foville, et lève ensuite la séance.

Elections. M. le président donne lecture d'une lettre de M. Mesnet

qui s'excuse de ne pouvoir accepter les fonctions de vice-président.

Il est aussitôt procédé à un nouveau scrutin et le nom qui sort de

l'urne est celui de M. Semelaigne, qui est nommé vice-président

pour l'année 1885. M. B.

Séance du 23 février 1883. Présidence DE M. DAGONET.

M. LEGRAND du SAULLE donne lecture du rapport de la commis-

sion des finances.

Prix Ilel7aomne. Après discussion, il est décidé que, pour l'an-

née 1883, ce prix, d'une valeur de 1,200 francs, sera accordé au

meilleur travail relatif à l'idiotie, et de préférence aux lésions

anatomiques des centres nerveux dans l'idiotie.

Pria; Moreau de Tours. Ce prix, d'une valeur de 200 francs, sera

décerné au mémoire le plus méritant sur n'importe quel sujet de

pathologie mentale.

A la suite des rapports de MM. Christian et Garnier, MM. Camu-

set et Mairet sont nommé membres correspondants.

M. Motet, qui, dans la précédente séance, a fait hommage au

nom de M.Miraglia, de Naples, d'une intéressante étude médico-

légale sur un drame dont l'épilogue s'est terminé devant un

conseil de guerre, donne en ces termes, l'analyse du mémoire de

M. Miraglia : « Le 13 avril 1884, dans la soirée, à la caserne de la

Pizzofatcon, habitée par le 19° régiment d'infanterie, quelques

soldats se disputaient. Le caporal Romoroni, craignant qu'ils n'en

vinssent aux mains, donna l'ordre de se taire au soldat Zanolletti,

et engagea le caporal Trovato à se retirer dans sa chambre. A ce

moment, entrait le soldat Inisdea qui, se tournant vers le caporal

Romoroni lui dit : « Qu'est-ce que cela veut dire, aller dans la

SOCIÉTÉS SAVANTES. 399

chambrée ? Peut-être parce qu'il est Calabrais ? .) et, il le prit

par sa tunique tandis que l'autre cherchait à le calmer. Le soldat

Pietra Codara voulut s'interposer, il fut repoussé par Inisdea qui

lui dit : « Ne m'ennuie pas, parce que ce soir il me passe des

frissons par la tête, et je suis bon pour répondre à qui voudra se

mesurer avec moi, l'un après l'autre. » Alors Codara lui'donna un

soufflet, Inisdea chercha à s'armer de son sabre-baïonnette, mais

il fut retenu par le soldat Vincenzi qui lui prit les deux bras.

Inisdea prononça alors ces paroles « cadra, cette nuit je te

couperai la tête ».

Le soldat Codara informa de cette menace le sergent Cane,

déclarant que cette nuit-là, il ne coucherait pas dans iachambrée,

croyant Inisdea capable de faire ce qu'il avait dit. Le caporal

punit celui-ci de la prison. Inisdea, de plus en plus irrité,'s'écria :

« A moi qui ai été souffleté, la prison ? » Le calme s'étant rétabli,

Codara va s'asseoir sur le lit d'un de ses camarades, et se met à

parler avec d'autres soldats qui se' trouvaient là. Personne ne

s'aperçoit que Inisdea a traversé la chambrée, qu'il a pris son

fusil, qu'il s'est rendu à son lit, a tiré des cartouches de sa

giberne et qu'il a chargé son arme.

Quelques minules se passent, et l'on entend un coup de fusil

dont le projectile atteint le soldat Zanoletti, qui tombe à terre en

gémissant; un second coup atteint à la joue gauche le caporal

Pistone, qui, à ce moment, entrait dans la chambrée, et qui vit

Inisdea, le fusil abaissé; il faisait sombre, la seconde lampe s'élait

éteinte à la première explosion, les vitres étaient tombées en

éclals. Un troisième coup siffla derrière le soldat Vincenzi, qui

fuyait : Inisdea tira encore trois autres coups.

Le caporal Bona, le soldat Storti, et le soldat blessé Zanoletti,

marchant à quatre pattes sous les lits, cherchaient à atteindre le

fond de la chambrée; ils étaient à chaque instant arrêtés par les

coups de fusil qui se succédaient dans cette direction. Ils purent

cependant franL'hir le mur qui sépare la cinquième de la septième

chambrée. Dans le dortoir des sous-officiers ou logement, les

sergents Cane et Ra--iii de la cinquième compagnie (cachés ailleurs

pour le moment), le sergent Danesi de la sixième, le sergent Lani

de la septième, s'étaient réfugiés, le caporal Romorani, le caporal-

major Inorgilla et le soldat Inellara. Pendant que ces derniers

étayaient la porte sans serrure avec deux fusils et un manche à

balai, Inisdea criant cherchait a l'enfoncer; n'y pouvant parvenir,

il tire un coup de fusil dont le projectile traverse la porte, et fait

dans l'aine une blessure mortelle à Romorani, qui tombe à terre.

Danesi et Mozilla se cachent dans un coin après avoir éteint la

lumière; lllellara épouvanté gagne la fenêtre, et, après un instant

d'hésitation saute dans la cour. Inisdea pénètre dans la chambre,

400 SOCIÉTÉS SAVANTES.

demande au blessé Romorani où sont les sergents Cane et Ragni ;

et tire encore plusieurs coups dans la direction de leurs lits et

sort.

Courant à la recherche des sergents Cane et Danesi, et du soldat

Cadora, Inisdea tira encore plusieurs coups de fusil dans la direc-

tion des latrines et se dirigea vers une porte qu'il enfonça à coups

de crosse, puis il revint vers les latrines, où plusieurs soldats s'é-

taient réfugiés. Il donna l'ordre aux soldats siciliens et calabrais

de sortir un à,nu. A nette injonction, un soldat se jette dans la

fosse, suivi de deux autres. Inisdea décharge son arme, tue

Cari, un Sicilien et Ferrato, de Forli, qu'il avait promis d'épargner

parce que c'était un conscrit; malgré cette promesse, il fait un pas

en arrière, lui tire à bout portant un coup dont la balle traverse la

poitrine de Cari et va atteindre encore le soldat Cicarelli, qui tombe

mort. Les soldats Capello, atteint à la face, et Gay, grimpent à

une fenêtre, se tiennent un moment suspendus en dehors, leurs

forces les trahissent, ils tombent dans la cour; le premier se tue,

le second se blesse grièvement.

Inisdea tire encore dans toutes les directions en criant : « Sergent

Cane, Danesi, Gay et Condardi (qu'il savait absents du quartier),

sortez donc, je veux vous écharper », et il décharge d'autres coups

de fusil dans la direction de la chambre des sous-officiers et le

long du passage de la chambrée. 11 s'approcha du lit du caporal-

major Condari, qui n'était pas encore blessé et le suppliait de ne

pas le tuer; il lui ordonne de ne pas bouger, qu'il ne le tuerait

pas, parce qu'avec les autres il s'était délivré de ses frissons, qu'il

y en avait assez pour mettre dans les journaux.

Sur ces entrefaites, le sergent Sabry du sixième ; Berraghin et

le trompette Ciccarelli escaladant un petit mur, qui de laseptième

chambrée conduit près delà chambre où était Inisdea, l'aperçurent

et leur cria : « Qui va là ! 1 », et en même temps il tira dans leur di-

rection un coup de fusil qui atteignit Sabry au genou. Ciccarelli se

jeta à terre et, sans être vu, il passa sous un lit, et en rampant, il

arriva auprès de Inisdea et de Condari qui le suppliait; alors, sor-

tant de sous le lit, il se précipita sur le forcené qui tira encore un

coup de son arme, sans atteindre personne, etle frappa à la tempe

avec le canon. Alors à la lutte qui s'engagea entre eux trois, accou-

rurent des soldats, qui, à grand'peine, purent lier ce furieux qui

menaçait encore.

Il fut transporté au château de l'OEuf, et on le laissa garrotté

dans une cellule jusqu'au matin. Dans une demi-heure, il avait

tiré-cinquante-deux coups de fusil, il restait dans sa giberne une

cartouche qu'il avait dit à Condari avoir gardée pour lui-même.

Dans ce carnage, il y avait eu trois blessés, le caporal Romorani ;

les soldats Capella, Cari, Ciccarelli, Rollenyo, le Runi et Zinoletti

étaient morts.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 401 <

Transporté dans un cachot, Inisdea fut soumis le 22 mai à un

examen prolongé de la part des experts. L'accusation et la défense

avaient chacun les leurs. M. Miraglia nous montre Inisdea absolu-

ment indifférent à toutes les recherches faites sur lui avec le secours

des machines, des instruments en honneur dans l'école moderne.

La débilité mentale de l'accusé n'exclut pas l'astuce chez lui; il est

soupçonneux-, il a la vanité du mal. C'est un grand enfant, avec le

front bas, mal conformé, étroit au plus haut degré avec la région

temporale très large au-dessus, et derrière les oreilles, un léger

strabisme existe. Aux paroles qui pouvaient exciter ses appétits

sanguinaires, on le voyait rougir et s'agiter. Cependant, à un

moment, il pleure en disant que, se souvenant d'avoir été, il y a

quelques années frappé par son frère Miche), il l'aurait tué aussitôt

son retour à Girifalco. Lorsqu'on vint faire son portrait, il se

montre très joyeux, très vain d'avoir son image; il s'asseyaittran-

quillement; mais de temps en temps il s'agitait, il demandait àse

reposer. Puis, à peine quelques instants furent-ils passés, qu'il ac-

corda cinq minutes pour terminer son portrait, et ne consentit à

poser que si M. Miraglia se mettait devant lui la montre à la main.

Quand l'aiguille marqua la dernière des cinq minutes, il seleva

tout à coup en disant : « C'est fini, le portrait est terminé ». On

ne put le prendre que de profil, il ne voulait pas poser de face;

cela fut d'autant plus regrettable qu'on eût pu voir la malforma-

tion de la tête, dont la moitié droite était plus développée que la

moitié gauche ; l'asymétrie était évidente ; le diamètre horizontal

passant d'un conduit auditif à l'autre avait 'son extrémité droite

plus élevée que l'extrémité gauche. L'irrégularité des hémis-

phères cérébraux était révélée par un développement plus mar-

qué en sens contraire de la face dans la région crânienne posté-

rieure.

Au cours de l'instruction pendant les débats, il fut démontré,

comme l'avaient d'ailleurs établi les experts de la défense, que

Inisdea, depuis son enfance avait toujours eu un caractère desplus

difficiles; il était irritable, fantasque, naturellement sauvage et

cruel, il avait résisté à tout système d'éducation; grossier, incorri-

gible, il était de plus épileptique; la difformité et l'asymétrie delà

tête a toujours existé. Il appartient à une famille d'aliénés et d'é-

pileptiques. Quand on apprit dans son pays la nouvelle du meurtre

du 13 avril, on dit que c'était là un effet de son terrible caractère,

on eût pu ajouter aussi, et de ses prédispositions héréditaires.

M. Miraglia nous donne dans un tableau trop significatif, la géiiéa-

logie d'Inisdea. Sa famille, véritable type d'hérédité morbide,

compte treize membres, dont deux générations; presque tous

sont fous; la troisième génération commence par un individu obs-

cène.

* Archives, t. lU. 26

SOCIÉTÉS SAVANTES. IO3

L'accusation fut impitoyable : elle prit l'affaire par,son côté dra-

matique, elle fit appel à la sévérité de la cour au nom de la disci-

pline, au nom de l'exemple, et, rejetant dédaigneusementtous les

arguments des médecins experts, elle fit comprendre que l'accusé,

quelles que fussent les défectuosités de son intelligence, devait

expier un crime épouvantable. M. Miraglia, pour lequel l'énormité

du crime ne pouvait être un argument ni pour ni contre l'accusé,

cherchait ailleurs les éléments d'une appréciation scientifique. Il

montrait Inisdea épileptique sous la forme vertigineuse, ayant toute

sa vie présenté les troubles du caractère des épileptiques ; il in-

sistait sur les antécédents héréditaires établis de la manière la

plus précise, il faisait valoir l'importance de la malformation crâ-

nienne et cérébrale de cet homme, et protestait hautement contre

la prétention singulière de l'accusation de refuser d'admettre qu'on

puisse être un aliéné et s'exprimer d'une façon correcte, qu'on

puisse être un aliéné et faire preuve d'une préméditation et d'un

cynisme révoltant. Et, reprenant alors toute la vie d'Inisdea en

faisant ressortir toutes les excentricités, tousles actes de violence;

s'appuyant sur la déposition même des témoins dont la plupart,

qu'ils fussent à charge ou à décharge, reconnaissaient que Inisdea

était plus qu'une intelligence irrégulière, un impulsif dangereux,

il déclarait aliéné irresponsable l'homme qui avait tué dans un

accès de fureur pathologique.

Un seul point de l'argumentation de M. Miraglia, nous a paru

un peu trop laissé dans l'ombre. Qu'on ne prenne pas l'expression

de ce desideratum pour une critique : nous ne savons pas tout ce

qui s'est passé devant la cour, et peut-être a-t-il été fait nue allu-

sion plus accentuée, que nous ne l'avons trouvée dans la brochure,

à l'état d'Inisdea dans la journée du 13 avril.

11 est certain que cet homme avait bu du vin, du rhum à plusieurs

reprises dans la journée; qu'il était excité déjà quand il eut une

discussion avec un cocher, contre lequel il dégaina dans la rue;

qu'à son retour à la caserne, l'excitation alcoolique persistait, et

que l'altercation qu'il eut avec d'autres soldats, le soufflet qu'il

reçut, la punition qui lui fut infligée, exaltèrent encore des dispo-

sitions naturelles à la violence. Certes, s'il ne se fût agi que d'un

ivrogne vulgaire, arrivant au paroxysme de la colère, en vertu

seulement de l'excitation alcoolique amenée par les excès mani-

festement volontaires de la journée, nous nous sentirions peu

disposés à l'indulgence ; mais qui ne voit que l'alcool n'a fait

dans cette douloureuse aventure qu'apporter I*appareild'excitiLion

qui manquait pour faire d'Inisdea toujours violent, toujours

menaçant, toujours prêt à l'attaque, un impulsif incapable de se

maîtriser, obéissant sans résistance possible aux pires entraîne-

ments. L'accusation trouvait des arguments dans la longue durée

de la scène de carnage, même dans les propos de l'accusé ;

40 le SOCIÉTÉS SAVANTES.

M. Miraglia répondait que l'épileptique peut se comporter ainsi,

et il en donnait des exemples; au courant de notre littérature

médicale, c'est à nous qu'il demandait des preuves et il en trouvait

dans le cas de Miche), qui, en moins de vingt minutes, tuait six

personnes à coups de croissant à élaguer les arbres, et au nom de

la science, fort de l'appui que lui apportât M. MervHIe, avocat

général à la cour de Lyon, disait : « C'est plus encore par leurs

antécédents que par leurs discours que se révèlent certains aliénés.

Ce serait faire preuve d'une étrange fatuité, que de vouloir subs-

tituer sa propre appréciation aux témoignages des hommes qui

ont fait de l'étude de la folie l'objet des travaux de toute leur vie. »

Inisdea, malgré de courageux efforts, fut condamné et fusillé.

La discipline militaire y aura-t-elle gagné beaucoup, et la mort

d'un malheureux aliéné aura-t-elle servi à réprimer les rebelles à

la discipline, ouïes aliénés comme lui ? Il est permis d'en douter...

Il y a quelques jours à peine, dans des conditions qui paraissent à

peu près analogues, un soldat italien a tué quatre de ses cama-

rades. Aussi partageons-nous les sentiments de tristesse que la

mort d'Inisdea inspire au médecin qui a vécu de si longues

années au milieu des aliénés, qui les connaît si bien, et qui n'a pu

réussir à arracher au piquet d'exécution un malheureux fou qu'il

considérait comme irresponsable.

Nous savons bien, messieurs, que lorsqu'il s'agit de juger à dis-

tance, il faut se garder de se laisser prendre par des sentiments

de compassion qui parfois peuvent égarer; mais, dans l'espèce,

nous avons devant nous un de nos collègues dontnous connaissons

la vie laborieuse; il est venu spontanément soumettre à nos ap-

préciations la conduite qu'il avait cru devoir tenir ; il semblaitnous

dire : Voilà ce que j'ai fait, voilà les données scientifiques sur les-

quelles j'ai essayé d'arracher à la mort un homme que je croyais

irresponsable. Jugez-moi à votre tour.

J'ai pensé, messieurs, que votre jugement adoucirait pour

M. Miraglia l'amertume d'une défaite après un combat généreux,

et je vous remercie en son nom, de m'avoir permis de mettre sous

vos yeux son intéressant travail.

M. DAGONET. M. Miraglia a eu raison de conclure à l'irresponsa-

bilité; j'ai eu moi-même dans mon service un aliéné du nom de

Bosquet, qui tua son capitaine dans des conditions à peu près

identiques; il passa en conseil de guerre, et Sédillot établit l'irres-

ponsabilité pour cause de folie. Malgré cela et pour l'exemple,

Bosquet fut condamné à mort; puis, en attendant le résultat d'un

recours en grâce, il fut interné à l'asile de Stephansfeld, où il

mourut bientôt de pneumonie caséeuse. De semblables rigueurs

n'empêcheront point les aliénés de devenir meurtriers.

M. MoREAU (de Tours) donne lecture de l'analyse d'un travail du

SOCIÉTÉS SAVANTES. 405

docteur Solivetti, sur un nouveau traitement des convulsions

hystériques.

M. Legrand du SAULLE communique huit observations d'enfants

devenus épileptiques après avoir vu le cadavre d'un de leurs pa-

rents. Il rappelle aussi l'histoire d'une malade de la Salpêtrière,

quia eu déjà plusieurs milliers d'attaques consécutives. Cette femme,

dont l'hystérie n'est aujourd'hui douteuse pour personne, vient

d'avoir en quelques semaines plus de dix mille attaques.

M. FALHET demande qu'on mette à l'ordre du jour la discussion

sur les signes physiques intellectuels et moraux des folies hérédi-

taires, cette question générale découle tout naturellement de la

dernière communication de M. Magnan. '

SI. Magnan. Je crois aussi qu'il faut étendre la discussion à tous

les signes de dégénérescences héréditaires, car les aberrations

sexuelles dont je vous ai donné des exemples n'embrassent qu'un

des côtés d'une grande question. Dans une discussion générale à

laquelle nous consacrerions plusieurs séances, chacun de nous

pourrait indiquer des faits et peut-être des signes nouveaux de

folie héréditaire.

En procédant ainsi par l'analyse, on pourrait plus tard synthé-

tiser la question et lui donner toute l'ampleur qu'elle comporte.

Marcel Bmartn.

XVIII- CONGRÈS DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ DES ALIÉ-

NISTES DE LA BASSE-SAXE ET DE WESTPHALOE 1

SESSION DE HANOVRE

Séance du 1 er mai 188 1.

M. Snell est élu président. Secrétaire : M. TANNEN.

Communication de M. SNELL senior : Démence paralytique co) ! -

S(;c ! << ? M('t<' ! H<OOEtC([<tonM< ! it'n ! Mf. Si l'on a signalé fréquemment

des phénomènes paralytiques d'origine saturnine, il est rare qu'on

ait publié des observations dans lesquelles la démence paraly-

tique de pareille cause ait eu sa sanction anatomo-pathologique

Voir Archives de Neurologie, t. IX, p. 122.

.06 SOCIÉTÉS SAVANTES.

caractéristique. Signalons toutefois les cas de Jules Falret.

(Recherches sur la folie paralytique et les diverses paralysies géné-

)'(t<c4'. Paris, 1853); Devouges (Ue la paralysie générale d'origine

saturnine. Annales médico-psychologiques. Série 111, t. III, p. 54);

Boettger et de Gellliorn(Allg. Zeitscler. f. Psych. t. XXVI, p. 224);

deMonakow (Ai-eh. f. Psych. und Nervcnkkhln, t. X, cah.2) ; Bar-

tens (Geisteskzvozhheit nach Bleiver31fluzzg. Allg. Zeitsch. f. Psych.

T. XXXVII); Ullrich (Allg. Zeilsch. f. Psych. T. XXXIX)1. Mais, en

somme, il existe jusqu'à ce jour peu de faits indubitables de

paralysie générale à la suite de l'intoxication saturnine=. En voici

un, observé l'an dernier à l'asile de llildesheim. Il s'agit d'un

homme de trenle-cinq ans, indemne de prédisposition psychopa-

thique héréditaire, laborieux, marié depuis six ans, ayant trois

enfants sains et vivant dans des conditions sociales assez heu-

reuses. Appartenant depuis quatre ans et demi à une fabrique de

produits chimiques, il était, dans ces trois dernières années,

chargé des diverses préparations de plomb; il y a dix-huit mois

qu'il s'occupe du four à plomb et de dessécher la litharge. A la

suite de différents accidents saturnins, il prit quelques précautions

consistant notamment à porter de la ouate devant les olifices

buccal et nasal. Il était, depuis un an, en proie à des troubles

digestifs (plusieurs selles la nuit) ; incertitude de l'écriture devenue

illisible; parole hésitante avec achopement syllabique; disparition

complète des fonctions sexuelles ; tremblement des mains (im-

possibilité de tenir sa fourchette); démarche mal assurée, faible

réaction et fréquemment inégalité des pupilles; émoussement

très accusé de la sensibilité cutanée; vertiges fréquents; convul-

sions des muscles des bras etdesjambes survenant par accès diurnes

(2 heures au maximum) ou nocturnes (novembre); malaise très

prononcé ; sensation de piqûres dans le côté gauche et vomisse-

ment d'un sang épais foncé; rien dans la poitrine ni dans les

organes de l'abdomen ; liseré bleu-noir du bord gingival ; les

facultés mentales baissent de plus en plus ; la mémoire est telle-

ment obtuse qu'il ne se rappelle plus les noms de ses voisins, qu'il

est incapable de comprendre les rapports les plus simples et qu'à

la plupart des questions il répond par un sourire d'idiot (démence

progressive sans délire ni agitation). L'examen révèle de l'méga-

lité pupillaire (la pupille de gauche est la plus large), de l'absence

de réaction de l'iris à la lumière, un liseré gingival bleu-gris, du

tremblement de la langue, une grande incertitude dans les mou-

vements des mains et des pieds (projectionsbrusques à la manière

d'une fronde) ; une démence extrême (le malade est incapable

de dire d'où il vient, où il se trouve, etc.); une extinction presque

' Voir Archive;, de Neurologie, t. VI, p. H7.

Id., t. 111, p. 247, ' .

SOCIÉTÉS SAVANTES. 407

complète de la mémoire ; un certain degré d'agitation la nuit,

qui le pousse quelquefois à abandonner son lit et t se promener

en rond, sans idées délirantes ni hallucinations. Au milieu de

février, survient un accès vertigineux à la suite duquel, pendant

quelque temps le corps penche à droite ; grincements de dents,

accroissement progressif des phénomènes paralytiques (impossi-

bilité de se tenir debout, d'aller et venir, chutes). Un traumatisme

facial consécutif à une chute provoque un double érisypèle qui,

de concert avec une bronchite catarrhale, accélère la mort le

18 mai, après trois mois et demi de séjour à l'établissement.

Nécropsie. Pas d'altérations de la nutrition, à part quelques acci-

dents du décubitus; une cuillerée à soupe d'un liquide clair dans

le péricarde; myocarde brun-jaune, de consistance flasque et

molle ; un peu d'épaississement sur les bords de la mitrale;

sécrétion muco-purulente des bronches; 1>ronchio-pneumonie du

lobe inférieur droit; nombreuses ecchymoses pleurales (plèvre

viscérale); athéromasie modérée de l'aorte thoracique; surcharge

graisseuse du foie; légère dégénérescence graisseuse des reins;

épaississement et congestion des parois du crâne. L'encéphale

pèse 1,400 grammes. Epaississement des méninges molles qui

partout adhèrent à l'écorce de circonvolutions étroites; substance

grise pâle ; anémie de tout l'encéphale; forte dilatation des ven-

tricules latéraux dont l'épendyme estépaissi et granuleux, surtout

danslequatrième ventricule. En somme, altérations que l'on trouve

presque continuellement dans la démence paralytique à son état

de parfait développement et, cliniquement, paralysie générale,

sans mégalomanie, sans euphorie, sans présomption, caractérisée

par une graduelle démence.

hiscussion :

M. Ditthab. Dans les cas de ce genre, on devrait pratiquer

l'examen électro-diagnostique du malade. On trouverait les mo-

difications relevant de l'intoxication saturnine.

M. HESSE. Gheel et sa colonie d'aliénés. Gheel est constituée par

une petite ville située dans la province d'Anvers, entourée d'un

certain nombre de villages d'importance variable, dont l'en-

semble est connu sous le nom de la Campine. Elle occupe la partie

nord-est de la province en question et la partie nord-ouest de

celle de Limbourg. C'est un terrain stérile, sablonneux, alternant

de temps à autre avec des bois de sapins qui forment la ligne de

partage des eaux entre la Meuse et l'Escaut. A une heure au nord

de Gheel, on rencontre un canal qui unit la Meuse à l'Escaut; au

sud, coule la grande Nèthe qui, avec la petite Nèthe, appartient

au système fluvial de l'Escaut. La population de Gheel est, comme

celle du nord de la Belgique, d'origine flamande ; c'est le flamand

qu'elle parle, le français n'étant presque pas compris des classes

M8 SOCIÉTÉS SAVANTES.

inférieures. Gheel même compte 3,052 habitants; ses rues, larges

et belles, se composent de grandes maisons construites avec un

certain luxe et respirant le bien-être, la propreté, le confort.

Depuis deux ans, le chemin de fer y conduit : c'est celui qui, après

avoir passé à Aachen, Reydt, Voldrop, Heerenthals, se rend à

Anvers.

La zone entière dont Gheel est le pivot, le noyau, comprend

z10,000 habitants catholiques, trouvant dans l'agriculture des res-

sources peu lucratives. Aussi est-ce de tradition que l'on soigne

des aliénés dans les familles, ces soins formant en somme la res-

source du pays. Quant à remonter à l'origine réelle de la colonie,

cette tâche n'est guère possible. On se heurte d'emblée à une

fable légendaire, celle de la fille d'un roi d'triande qui, vers

l'an 600, y vint avec son bien-aimé pour fuir les persécutions

paternelles, y fut découverte et tuée avec ce dernier par son propre

père. Ce martyrologe lui valut la réputation de sainte ; on cons-

truisit en son honneur, au xiii, siècle, une église existant encore

aujourd'hui, où elle est honorée et priée; le peuple lui attribue

le pouvoir de guérir les aliénés ou, si l'on préfère, les possédés.

L'opinion vulgaire est encore que l'homicide ne fut commis par le

père que dans un accès de délire. Toujours est-il que depuis cette

époque des légions de malades ont été amenées en cette région

de tous les pays. Or, comme l'exorcisme exigeait souvent un

long temps, il fallait séjourner et se faire héberger par les habi-

tants. C'est ainsi que peu à peu se forma la colonie de Gheel.

Voilà pourquoi aussi, à l'origine, des prêtres seuls s'occupaient des

aliénés. Peu à peu, mais lentement, ce soin passa à l'Etat.

En 1850, fut promulguée la loi belge sur les aliénés; la colonie

bénéficia des dispositions d'ordre, d'observation scientifique,

d'examen médical, de traitement systématique, de réglemen-

tation, de répartition hygiénique contenues dans le texte en

question.

Au début du siècle, il y avait, à Gheel, 400 malades, actuelle-

ment il en existe 1,600. Au 4 el septembre 1882, le recensement

pour les malades atteignait au chiffre de 1,642 aliénés dans le

domaine entier, dont 806 hommes et 836 femmes. Le chef-lieu

seul, la ville de Gheel, hébergeait 800 malades, soit un malade par

quatre habitants. Depuis 1802, il existe une infirmerie de cons-

truction récente, élevée a la dignité d'asile central fermé, devant

recevoir au maximum 80 malades; le jour de la visite deM. liesse,

il y avait là 31 hommes et 24 femmes sous la surveillance de cinq

gardiennes (soeurs catholiques). C'est là qu'habitent le médecin en

chef de tout le domaine, ainsi qu'un secrétaire, placé sous les

ordres de celui-ci, et chargé de l'économie de l'établissement.

Cette infirmerie, un peu petite, mais ne laissant rien à désirer

(éclairage, aérage, dortoirs, jardins, sections destinées aux gâteux)

SOCIÉTÉS SAVANTES. 409

comme soins médicaux et hygiéniques, est réservée au seul mé-

decin en chef.

La colonie tout entière, y compris l'établissement central, est

placée sous l'autorité du ministre delà justice, ministre qui a éga-

lement sous ses ordres l'inspecteur général (administrateur et non

médecin) de tous les établissements belges. Cet inspecteur général

est le chef direct du médecin en chef. Il existe aussi une commis-

sion de surveillance composée du gouverneur de la province

d'Anvers, du procureur pies le tribunal de Turnlioul, du commis-

saire de l'arrondissement de Turnhout, d'un médecin nommé par

le gouvernement, du bourgmestre, du pasteur et d'un ou de deux

membres de la commune de Gheel. Cette commission nomme un

comité permanent de cinq membres qui, sous la présidence du

bourgmestre, choisit les nourriciers, surveille le paiement des pen-

sions et tous les comptes, préside à l'encaissement et au rembour-

sement des pensions; c'est à ce comité que le médecin en chef

propose les meilleurs nourriciers, mais le médecin en chef seul

choisit les malades à confier aux gens choisis par le comité. Jus-

qu'alors le maximum des nourriciers dans le domaine de Gheel a

été de 1,000 (désignés ou approuvés), chacun ne doit avoir que

deux malades, la colonie entière ne dépassant pas jusqu'ici

2,000 aliénés; chaque maison ne doit héberger que des aliénés

du même sexe.

La commune totale de Gheel est divisée en trois sections dont

le noyau est Gheel. Deux sections au nord sont séparées l'une de

l'autre par la roule départementale de Gheel à Turnhout. Une

section au sud enferme Winkeloomsheide; ce lieu est depuis

trente ans seulement affecté aux aliénés, tandis que l'endroit

voisin, Sleeleu, sert depuis six siècles au même but.

Superficie totale de toute la colonie = 10,S;i3 beclares; la plus

grande longueur, du nord au sud = 18,120 mètres; la plus

grande largeur, de l'est à l'ouest = l 3,612 mètres; la circonfé-

rence est de 6,300 mètres.

Quatre médecins, y compris le médecin chef, visitent et traitent

les patients; il existe quatre gardiens de sections ayant pour mis-

sion de parcourir leur section chaque jour et d'y veiller à l'obser-

vation, à l'exécution des ordonnances et prescriptions médicales,

de signaler au médecin en chef toute irrégularité parvenue à leur

connaissance, d'amener aux nounicieis les malades qu'on leur

destine, de collaborer à la réintégration des evadé. Tout le per-

sonne), médecins ou surveillants, habile a Gheel même. Le mé-

decin en chef est logé à l'infirmerie; il a un traitement de 4,500

francs et doit visiter deux fois par au tous les malades. Les médecins

de sections, subordonnés au médecin en chef, doivent visiter une

fois par mois au moins les malades de leur section; traitement :

410 SOCIÉTÉS SAVANTES.

2, .100 francs. Les nourriciers sont divisés en nourriciers proprement

dits (liostgevers) et hôtes (veerden) ; aux premiers incombent les

malades des classes sociales inférieures, aux derniers les malades

des classes sociales élevées (pensionnaires). L'Etat a les malheu-

reux à sa charge; sur les prix de pension des autres, il faut que

les hôtes versent à l'Etat Il p. 100 dont 10 p. 100 pour le traite-

ment médical, 1 p. 100 pour l'administration. Le taux du prix

de pension est abandonné à la conciliation des parties intéressées

(parents et hôtes). Les malades, ceux qui sont confiés à des nour-

riciers comme ceux qui sont traités à l'infirmerie, se décomposent

en trois divisions ou classes : aliénés propres, demi-gâteux,

gâteux. La première catégorie paie à l'Etat 82 centimes par

jour; la seconde, 92 centimes; la dernière, 4 fr. 10. Les nour-

riciers reçoivent, pour un malade propre, 220 francs par an;

pour un demi-gâteux, 270 francs; pour un gâteux complet,

315 francs.

Les malades à envoyer à la colonie sont choisis par les direc-

teurs des autres établissements fermés d'aliénés belges qui les

signalent et les adressent au médecin en chef. Cette colonie n'est

faite que pour des chroniques, à l'exception des maniaques et des

aliénés ayant de la tendance au suicide. Après examen et quand

il y a lieu, le médecin en chef exclut de la colonie ceux qui cons-

tituent une gêne, mais il leur faut pour cela entrer en relations

avec les directeurs des établissements fermés, jusqu'à ce que l'un

d'eux se déclare prêt à reprendre les malades en question. Tout

arrivant est reçu à l'infirmerie; il y est observé pendant cinq jours,

puis, il est, d'ordinaire le jeudi, adressé au nourricier choisi pour

lui. L'infirmerie garde encore ceux que l'on ne destine pas aux

soins domestiques et les malades atteints d'affections somatiques.

Le directeur peut aussi procéder à des admissions directes, et

même faire mettre en traitement dans les familles des cas aigus,

à son gré. On ne s'inquiète pas, pour l'évacuation dans les familles,

du lieu de séjour, on examine simplement le nourricier à qui on

confie l'aliéné; une exception cependant à l'égard du village

d'Elsum, situé à l'ouest de Gheel, où l'on envoie exclusivement

des idiots. Chaque nourricier possède un petit livre sur lequel

sont exactement consignés les prescriptions, le nom du médecin

visiteur, le jour et la date de sa visite ; on y ajoute un inven-

taire.

Répartition locale. Gheel même abrite 800 aliénés, soit 50

p. 100, dont 150 pensionnaires. L'église consacrée à la sainte est

flanquée d'un petit édifice renfermant trois ou quatre chambrettes

étroites, parcimonieusement éclairées, dans lesquelles étaient

enfermés les malades soumis à l'action de la sainte pendant neuf

ours; on ne leur ménageait pas les appareils de coercition. Ce

SOCIÉTÉS SAVANTES. 411 I

culte, ou plutôt la croyance populaire s'est perpétuée jusqu'à

nous. Confortable suffisant des habitations des nourriciers,

excepté pour les malades dont les prix sont peu élevés; il faut, il

est vrai, faire la part de la forme de la maladie (aliénés destruc-

teurs, par exemple), mais il n'y a pas d'excès de bien-être. Peu de

restraint. Entretien suffisant et en particulier alimentation conve-

nable. Occupation des aliénés, quand cela se peut (fuseau, tricot,

dentelle). Chambres à coucher peu parfaites, mais remplissant le

gros des exigences. Bon aspect des nourriciers; ils paraissent

intelligents; les femmes sont particulièrement actives; il semble

que ces gens soient nés gardiens etinfhmiers d'aliénés. Somme

toute, bonne impression.

. Quant à cette partie de la colonie qui n'a que trente ans d'exis-

tence, quant à Winlzeloomslieide, l'observateur en emporte une

impression pénible, fâcheuse. Les routes insuffisantes, à peine

frayées, mal entretenues, difficilement accessibles, même en

été, conduisent à des habitations disséminées, basses, à rez-

de-chaussée, couvertes de chaume; au centre brûle a feu ouvert uu

foyer empestant le logis. Les malades sont confinées dans des

chambres éclairées par une petite fenêtre grillée, dont le sol,

tout en briques, présente, sur un des côtés, une déclivité de pavés

où arrive l'eau destinée à laver parterre. Les lits sont des plus pri-

mitifs ; ce sont des caisses en bois ordinaire contenant une pail-

lasse, un drap, un oreiller en paille, deux couvertures de laine.

Les malades, pendant le jour, se tiennent auprès des nourriciers,

travaillent avec eux, ou s'assoient en commun dans les salles de

jour infestées; absence d'ordre, de propreté, de terrain de cul-

ture suffisant; nourriture trop peu abondante, consistant par

exemple en un pain de seigle et de son grossier. Deux maisons à

peine font exception à la règle.

Les autres régions situées plus à l'ouest, où l'on soigne des alié-

nés depuis des siècles, offrent des conditions beaucoup plus favo-

rables, quoique la disposition des habitations laisse encore bien à

désirer. La plus voisine de Winkeloomsheide, c'est le village de

Steelen. On y traite des malades depuis 600 ans. C'est la que les

soins dans les familles ont acquis le degré de développement et

d'organisation le plus favorable, c'est là que, comme à Gheel

même, les nourriciers paraissent avoir l'intuition innée de leurs

fonctions. Le malade fait corps avec son gardien ou inversement

d'où un traitement domestique parfaitement ordonné et des avan-

tagescotisidérables pour les aliénés, du moins pourles chroniques.

De conceit avec Gheel, cette station forme un grand asile-hos-

pice.

1 SOCIÉTÉS SAVANTES.

CHIFFRES EMPRUNTÉS AU RAPPORT DU MÉDECIN EN CHEF, LE D'' PEËTEKS.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 413

tiori en est-il ainsi dans les locaux défectueux de Gheel. Seul

l'établissement fermé permet de tenir la main à toutes les condi-

tions indispensables pour le traitement de semblables malades. 11

n'est pas de médecin qui n'ait vu des malades apportés du sein

des familles complètement gâteux, devenir complètement propres

par un traitement convenable, incessamment surveillé dans un

asile clos;

6° Choisir avec rigueur les malades à introduire dans les

familles; en exclure systématiquement les manies chroniques,

les sexuels, les aliéné ? dangereux pour la sécurité publique, les

paralysés généraux, les galeux;

7" Choisir mieux les nourriciers. Il faudrait qu'ils jouissent d'un

certain bien-être, d'une existence bien ordonnée, qu'ils n'atten-

dissent pas le paiement de la pension de leurs malades pour vivre.

A Gheel, malgré les règlements formels, on a confié des aliénés

à des familles trop besogneuses. Voyez plutôt Winkeloomsheide.

Delà le désordre, la saleté, le défaut d'attention. A midi, par

exemple, on trouvait encore des malades aulit; peu de lits étaient

faits, le ménage n'était pas soigné ;

8° Un nombre infiniment petit de lits remplissent les indica-

tions réglementaires;

9° Les règlements attribuent à la participation de l'aliéné aux

repas des nourriciers un minimum hebdomadaire de 3 kilog. 500

de pain de froment ou de grains mélangés, de 1 kilog. de viande.

La commission laisse aux nourriciers la fixation du minimum de

beurre et de légumes, se réservant une détermination spéciale

en certains cas. Malheureusement, généralement la mise en vigueur

de ce règlement est absolument insuffisante ; du reste, avec la

meilleure volonté du monde, les familles pauvres ne sauraient le

remplir complètement (voy. Winkeloomsheide) ;

Winkeloomsheide, Gheel notamment, comporte une opinion favo-

rable. De cette diversité provient la diversité dans les apprécia-

tions des visiteurs qui n'ont pas visité le territoire entier de la

colonie. Celui qui a tout vu sans parti pris pense que le soin des

aliénés dans les familles, tel qu'on le pratique à Gheel, a une

réelle importance, un grand avenir, à la condition expresse qu'on

exécute les réformes que nécessitent les temps modernes. Est-ce

à dire qu'il représente un mode de traitement partout justifié,

partout parfait, qu'il faille annexer à tous les établissements

d'Etat, qu'il soit appelé à remplacer les asiles ? Nullement. Il faut

le limiter à des cas particuliers bien déterminés et le pratiquer

lorsquelesconditionssontfavorables. Le choix desmalades et celui

des gardiens, priment toute considération. Comparé aux anciens

traitements des aliénés usités à l'époque où Gheel fonctionnait, ce

41 si SOCIÉTÉS SAVANTES.

genre d'assistance était merveilleux ; la Gheel d'aujourd'hui est

insuffisante : améliorez-la.

Rappelons parallèlement comment, depuis 1878, on a à Ilten

organisé à petites doses le traitement des aliénés dans les familles '.

Institué par Waiirendorff avec l'autorisation du suprême landes-

directorium2, il est tiii)exé à l'asile fermé à titre d'essai, pour les

hommes des classes sociales inférieures auxquelspareil traitement

convient (choix prudent et judicieux du médecin). Ilten, avec les

villages qui l'entourent, est tout indiquée pour cotte expérience.

Le caractère de la population est doux. l'espiif en est assezcultivé

(voisinage de la ville de Hanovre). plus cultivé que chez les agri-

culteurs ordinaires. l'Ille jouit en outre d'un certain bien-être; il

y existe à peine de pauvres. Provisoirement, on ne s'adresse qu'à

Ilten même ou aux illa;es du même arrondissement, tels que

Alilten, llaever, l31lm. en déployant toute la circonspection dési-

rable dans le choix des nourriciers et des malades. La progression

a été graduelle. Aujourd'hui, à llten, il va 22 malades; à Bilm, 16

àAhlleu, 8; à liavei-, 4 malades en traitement. On exige desnour-

liciers une bonne réputation de moralité, d'intelligence, des qua-

lités d'ordre et de propreté, ainsi que les preuves de ressources

suffisantes pour assurer au malade une nourriture bonne et copieuse.

On admet exclusivement ceux qui offrent toutes ces conditions

réunies : on s'assure également qu'ils prennent plaisir à soigner

les malades. On leur impose d'associer les malades à leur repas

commun, de les garder durant tout 'le jour dans leurs locaux

d'habitation, de les stimuler au travail sans coercition ni menace,

de leur donner une chambre spéciale hygiéniquement installée

pour la nuit, de veiller à la propreté, à J'entretien du vêtement,

etc... L'établissement fournit un lit pour chaque malade dans un

but d'uniformité; en échange, le nourricier verse annuellement

une certaine somme, somme distraite du prix de pension; trois

ans plus tard le lit lui appartient. Obligation par lui de signaler

au gardien en chef les modifications somatiques ou psychiques

de son pensionnaire. A l'entrée de celui-ci, le nourricier est mi

en possession d'un livre sur lequel sont inscrits les conditions sous

lesquelleslepensionnaire luiestcoutié et l'inventaire des objets du

malade ; des feuillets blancs sont destinés à la visite quotidienne

du médecin; des tableaux tout tracés attendent l'inscription du

poids du corps examiné tous les mois à l'asile même, à la suite

d'un grand bain.

Le choix du malade à installer dans la famille n'a lieu qu'après

une longue observation préalable permettant d'affirmer l'état

1 Voy. Archives de Neurologie, t. V, p. 125 et 266.

2 Nous appelons l'attention de l'administration française sur les idées

de progrès de l'adnziuistratiozz allemande (P. K.).

SOCIÉTÉS SAVANTES. 415

chronique (démence pure ou folie systématique). Les déments, on

n'hésite pas à les transférer dans les familles; quant aux fous

systématiques, on en étudie les idées délirantes, les hallucinations

sensorielles. Les paralytiques généraux sont également confiés aux

familles quand, appartenant à la forme démente, ils ne sont pas

encore en pleine paralysie. Exclusion absolue de tous les troubles

psychiques aigus, des psychopathies chroniques avec agitation ou

tendance au suicide, des fous systématiques à idées délirantes ou

hallucinations dangereuses pour la sécurité publique, de la folie

morale, des épileptiques quelconques, du moins temporairement,

c'est-à-dire tant que l'éducation des nourriciers ne sera pas par-

faite, de tous les gâteux, pour les mêmes motifs.

Jamais on ne laisse se relâcher le fil qui unit le malade à l'éta-

blissement. On s'inquiète notamment de l'état sanitaire de la

maison du nourricier; une seule affection s'y déclare-t-elle, on

réintègre le malade à l'asile momentanément.

Malgré le peu de temps consacré à ce système, malgré le petit

nombre de malades traités, on peut dire actuellement avec certi-

tude qu'aucun inconvénient sérieux ne contre-indique la méthode.

On a même déjà pu enregistrer des résultats qui, étant donné la

'forme et le degré de la- psychose des patients, sont surprenants.

Tel ce malade, qui, paraissant totalement dément, absolument

incapable de tout travail physique, ne manifestant aucune réaction

à l'égard du monde extérieur, s'améliora si bien dans la famille,

. qu'au bout de dix mois, non seulement son habitus extérieur était

complètement modifié, mais on constatait un réveil psychique se

traduisant par la participation intime et intéressée à tous les tra-

vaux du nourricier. D'autres effets moins éclatants permettent

d'affirmer que le traitement dans la famille exécuté avec circons-

pection à Ilteu et dans les environs, peut produire une action

bienfaisante certaine. Presque tous les malades, quand on les

interroge, disent qu'ils s'y sentent mieux et plus à l'aise qu'à

l'asile, très peu demandent leur réintégration à l'établissement.

Le premier effet du traitement est la reprise du travail, qui apporte

une déviation aux idées délirantes, et rappelle les conceptions

normales saines; tandis qu'à l'asile, les malades refusent toute es-

pèce d'occupation, ils se mettent graduellement à travailler dans

la famille, ils s'associent, s'amalgament avec le milieu d'activité,

de devoirs, debonne harmonie où ils sont plongés. Il n'est pas un

seul aliéné qui ait refusé de faire sa partie dans ce concert, quand ce

ne serait que de soigner et de garder les enfants de la maison ;

beaucoup s'identifient avec ces petits êtres, et s'y attachent au point

de pleurer et de rire avec eux; un malade, par exemple, refusa

de manger tant que l'enfant pour lequel il avait conçu une vive

affection demeura souffrant.

Tout cela signifie-t-il que, malgré la plus grande prudence, on

416 SOCIÉTÉS SAVANTES.

n'ait pas fait d'écoles ? Evidemment on a eu des mécomptes, des

difficultés, en ce qui concerne notamment la surveillance des pen-

sionnaires et leurs affections intercurrentes ou leurs modifications

psychiques. Mais semblables faits ne se produisent-ils pas dans les

asiles fermés ? On peut parer.

Conclusion. Le traitement dans les familles constitue un moyen

capable de retarder la déchéance psychique inévitablement prévue

et de faire rentrer ces malheureux parmi les membres actifs de la

société humaine.

Discussion :

M. ËNGELKEN ajoute à la communication précédente, quelques

mots sur VEtat actuel de la colonie d'aliénés de ville de Brème, au

village d'Elle77. Dans ce village, sont aujourd'hui en traitement,

dans les familles, 40G malades, dont 20 ne sont pas aliénés. Avant

d'y transférer les aliénés, on les.observe au moins pendant qua-

torze jours à l'asile de Brème. S'il est démontré que le traitement

domestique ne leur convient pas, on peut toujours, en tout temps,

les réintégrer à l'asile fermé. Sur ceux qui vivent dans les familles,

il y a deux tiers d'hommes, un tiers de femmes. Selon l'occupation

et l'aptitude au travail des malades, on paye, pour leur entretien

8 à 30 marks (10 à 37 fr. 50 c.) par mois.

Séance close à 7 heures. Prochaine réunion le 1"' mai 1885,

à Hanovre, dans le Kasten's Hôtel, à 4 heures. (Allg. Zeitsch. f.

Psych., t. XLI, 3.) P. KËRAVAL.

SOCIÉTÉ PSYCHIATRIQUE DE BERLIN

· Séance dzc ir juiz lS8r'

En ouvrant cette cinquantième séance, le présidcntLOEim consacre

quelques paroles à l'origine et au développement de la Société.

C'est en 1860 que la Société des aliénistes allemands tenait sa

première séance à Eisenach. Bientôt se faisait sentir le besoin de

former des sociétés psychiatriques locales qui, en groupant les

aliénistes des asiles voisins, ainsi que les amis de la médecine

mentale, préparassent des matériaux à la société principale et

construisissent les assises de la science, ainsi que le fonds de l'All-

gemelize Zeitschrlft Sfùr Psych. La société psychiatrique de Berlin

4 Voy. Archives de Neurologie, t. IX, p. iil.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 417

fut la première des sociétés locales de l'Allemagne. Elle fut

fondée à la suite de la réunion de la Société des aliénistes alle-

mands à Berlin en 1866; c'est sur la demande de plusieurs

membres de cette dernière, qu'elle fut constituée en tant que ra-

meau de l'arbre. Du premier coup, elle se composa des médecins

des asiles d'aliénés de Berlin (Blankenburg, Bonn,Bunziau,Carls-

feld,Goerlitz, Halle, Koenigslutler, Kowanowko,Eberswalde,Owinsk.

Poepelwitz, Rùgenwalde, Schweizerhof, Schwerin, Schwitz, Sorau).

On remarquait : à la première séance, MM. Arndt, Hauptmann,

ldeler, Kahbaum, Loelir, 0. Muller, Sponholz ainé, Ullrich,Wendt,

et, parmi les confrères défunts, Boettger, Kceppe, Weyert. Elle a

compté dans son sein 105 membres, dont 4 sont sorlis et 15 sont

morts. Toutes les séances ont été présidées, au moyen de réélec-

tions annuelles, par Loehr ; elles ont eu pour secrétaires successifs :

Ideler, Seliroeter, Noetel, Scliaefer, Doerrenberg, Bernhard, Gock.

Révision des statuts qui incombe, comme l'on sait, à la première

séance de l'année. Le président propose de modifier le paragraphe 3

ainsi qu'il suit : « On renouvellera désormais le bureau chaque

année, en le composant de trois membres chargés de conduire

alternativement chacune des trois séances annuelles, » de sup-

primer le paragraphe 5, relatif à la fixation des travaux de chaque

séance, qui n'est pas praticable. D'après les observations de

lllll. Jastrowitz et Ullrich, vu l'activité pendant cinquante ans d'un

même président, l'assemblée adopte que M. Loehr doit conserver

la conduite de la société. Elle supprime le paragraphes. Par con-

séquent, voici ce que deviennent les statuts :

1" But. Imprimer à la psychiatrie et aux sciences adjuvantes un mou-

vement de progrès. 2" Les membres seront des médecins, ils se

conformeront aux statuts, seront élus par les membres delà société;

on pourra également, dans les mêmes conditions, admettre des

membres non médecins. 3° Organisation. Le bureau se composera

d'un président et d'un secrétaire. Il préparera l'ordre du jour de la

séance, convoquera les membres quatorze jours avant sa tenue, rédi-

gera le procès- verbal, établira la liste des membres et provoquera les

éléments de travail. On admettra des étrangers. 4° Lieu et époque

des réunions. On les prévoiera pour chaque année. Elles auront lieu

trois fois par au, en mars, juin, décembre. Dans la séance de juin,

qui se tiendra toujours li Berlin, on dressera le bilan des travaux de

l'année écoulée, et l'on procédera à la nomination du bureau. Les

autres séances pourront, après décision spéciale, avoir lieu à un

autre endroit. 5° Organe de la société : VAllgemeine Zeitschrift sur

Psychiatrie. 6- Modifications aux statuts. Elles ne peuvent avoir

lieu que par l'assemblée générale, à la majorité des deux tiers des

membres présents. 7o Addition du 15 juin 1883. Le temps d'une

communication ne dépassera pas vingt minutes, ou, avec la permis-

sion du président, trente minutes. L'argumentation de chaque orateur

sera au plus de dix minutes.

Archives, t. IX. 27

418 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Renouvellement du bureau par acclamation. Président, M. Loehr;

secrétaire, M. Guttstadt. Adoption de la proposition de 111. Falli,

que désormais le bureau fixe le chiffre de la contribution person-

nelle et veille aux rentrées.

Adresse par télégramme à M. Hagen (d'Erlangen), qui fête le

16 juin son 70, anniversaire.

Manifestation en l'honneur de M. Meyer, medicmalratli et direc-

teur de l'asile de Brake (Lippe-Detmold).

M. Hirsch est chargé de représenter la société au congrès des

naturalistes de cette année, à Magdehourg (dans la section de

psychiatrie).

M. GUTTSD : 1T. Cornmztnicat*on sur l'assistance des idiots. Elle est

tirée d'un gros travail qui va bientôt paraitre sur les idiots et les éta-

blissements qui leur sont consacrés en Prusse. Historique : En 1840,

la Société des naturalistes suisses, réunie à Fribourg, invitait à la

construction d'asiles de ce genre. Travaux de Guggenbulil et Gor-

don (critiques); statistiques de Guggenbuhl et Erlenmeyer; seul

Gresinger est arrivé, comme président de la Société médico-psy-

chologique de Berlin, à établir le nombre des psychopathes du pays

tout entier, à l'occasion du recensement de la population. On a

vu par lui que :

SOCIÉTÉS SAVANTES. 419

60 p. 100 d'entre eux, âgés de moins ou de plus de vingt ans, sont idiots

de naissance.

37 p. 100 des imbéciles, âgés de moins de vingt ans, sont imbéciles de

naissance.

11 p. 100 des imbéciles, âgés de plus de vingt ans, sont imbéciles de

naissance.

Hérédité et prédisposition de famille. Elle existait :

420 SOCIÉTÉS SAVANTES.

ouvert un dans cette ville, d 10, Brunuenstrasse. 11 n'y a pas de

surmenage.

M. Loehr cile, à ce propos, l'établissement de Chroeter (de

Dresde), qui a prodigué l'enseignement aux arriérés avec succès.

M. Solger. Les arriérés incombant à la ville ont à leur dispo-

sition un professeur supplémentaire. Cette prévision existe pour

les enfants épileptiques.

Le temps est trop avancé pour qu'on continue la discussion sur

ce sujet.

M. LOEHn. De l'interdiction dans les intervalles lucides. La

notion d'intervalle lucide est loin d'être claire. La pratique des

médecins et même des aliénistes est, en ce qui concerne l'inter-

diction, très différente. Telles sont les raisons pour lesquelles il

convient de traiter une question sur laquelle ont jeté un certain

jour les travaux publiés dans ces dernières années sur la folie cir-

culaire, la manie périodique, la folie morale cyclique, le cyclo-

thyma. On sait actuellement que ces noms désignent une forme

morbide qui, au point de vue clinique, constitue un groupe limité

parmi les psychoses, au même titre que la démence paralytique.

De Gellliorn, dont il a été parlé dans la séance précédente', a

laissé des mémoires posthumes, l'un sur l'hydrothérapie, commu-

niqué la fois dernière ; l'autre relatif à un cas dans lequel beau-

coup de médecins avaient, devant la justice, émis un avis diamé-

tralement opposé. J'y ajouterai deux cas de ma propre pratique :

dans le premier, l'intervalle lucide n'était qu'une large rémission,

aussi un spécialiste distingué hésita-t-il, au préjudice de la ma-

lade, à accorder l'interdiction; dans l'autre, on avait affaire à une

aliénée dont l'interdiction eut lieu pour folie circulaire en des

circonstances qui ne se répéteront pas souvent.

Premier cas. Celte observation, dans laquelle sont consignés des

rapports multiples, est caractérisée par ce fait que, depuis treize

ans, se produisent annuellement un ou deux accès d'agitation

présentant tous les éléments de la manie avec désordre extrême

dans les idées, obnubilation de la connaissance, actes impulsifs

(kleptomanie, destruction, agression). Entre les accès, dont le

déclin graduel se traduit par toutes sortes de conceptions baroques

et d'actes pervers, il existe des périodes de santé relative, des

mois durant, pendant lesquelles se montrent delà fatigue, de l'af-

faissement, de l'indifférence psychique, de l'émoussement de

l'intelligence, du sens moral, de l'affectivité. En un mot, manie

périodique. Par conséquent, le malade est une partie de l'année

absolument irresponsable de ses actes, et, le reste du temps,

1 Voy. Archives de Neurologie, t. IX, p. 114.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 421

rebelle à toute activité mentale ; en pareille occurrence, mieux vaut

décréter l'irresponsabilité.

Deuxième cas. Comtesse de B..., quarante-huit ans, hérédité psy-

cbo-pathique, bizarrerie pendant l'enfance, ménage malheureux,

a eu trois enfants. En 1868, séjour de quatre mois à la maison de

santé de Schoeneberg (certificat de Griesinger,- tentative de sui-

cide) ; son mari la retire surses instances. Levinsteinla déclare incu-

rable. Elle prétend que l'empereur d'Autriche et tous ses officiers

ont brigué ses faveurs. Mort de son mari en 4872. Elle se dit

grosse du roi de Bavière. Une enquête démontre que le conseiller

juridique Fischer, de Breslau, la considère comme capable de

peser les conséquences de ses actes; un spécialiste distingué

déclare qu'elle est sur les confins de la folie, mais qu'il n'y a pas

lieu de la priver de sa liberté d'action (mai 1873). Elle s'en va

habiter Dresde. Là, nouvelles conceptions délirantes avec halluci-

nations sensorielles. Elle se plaint à la police que le propriétaire

d'une villasituée en face d'elle, pend, étrangle, guillotine, égorge,

fusille toutes les nuits un grand nombre d'hommes et que les

cadavres sont enlevés soit avec des remorqueurs à vapeur, soit à

l'aide de voitures; elle a compté jusqu'à six voitures pleines... etc.

Toutes ces menées aboutissent à un rapport médico-légal formu-

lant la perte complète delà raison. Même répétition avec quelques

variantes à Breslau; on la conduit à Schwreizerhof à la fin

de 1 874. Et cependant ses visiteurs, ses parents la tiennent, les

uns pour aliénée, les autres pour saine. Nécessité, dans un but de

protection civile, d'un examen médico-légal. Malgré la circons-

pection delà malade à l'égard de ses conceptions délirantes, elle

fut déclarée démente dans le sens de la loi.

Troisième cas. Baronne de A...,quarante-trois ans; tare hérédi-

taire ; mariée en 4860, met au monde trois enfants; perd,

en 1868, son mari beaucoup plus âgé qu'elle sans testament.

Dès 1868, idées mélancoliques. En 4869, elle se brûle dangereu-

sement. En 1870, affection utérine. En 1871, agitation maniaque,

puis union scandaleuse avec le précepteur de ses enfants, fuite

avec lui. On l'amène à Goerlitz en 1872, où elle séjourne jus-

qu'en 1878; périodes d'agitationduranttroisàquatremois, suivies

de phases de dépression de six à huit mois; transitionsd'intégrité

psychique relative. Extrêmement dangereuse pour les gardiennes

pendant le temps d'agitation, elle tombe dans la stupeur pendant

le temps de dépression, et, pendant la phase intermédiaire, elle

devient extraordiuairement aimable et perspicace. On la retrouve

à Dresde en 1878 ; à Noël, il faut la conduire à Endenicli. Enfin,

en 1880, elle demeure quatre mois à Pirna. En 1881, période

d'agitation à Vienne; relations avec des artistes qui l'exploitent.

En juin 1882, elle arrive à Blankenburg où elle se rend insuppor-

422 SOCIÉTÉS SAVANTES.

table; on la transporte en août à Schweizerliof, l'établissement

de Goerlitz l'ayant refusée. A ce moment, accès d'agitation de

quelques mois, suivi d'une période d'amabilité et de suractivité

intellectuelle doublée d'une grande force de caractère lui per-

mettant de réprimer les écarts de son affectivité. C'est pendant

cette période qu'a lieu l'instruction. M. Loehr, tout en exposant

magistralement le trouble mental de la baronne, lui conseille

dans son intérêt de demander elle-même l'interdiction. Mais

voilà que le président du tribunal fait ressortir à cette dame les

inconvénients légaux de cette mesure : impossibilité de disposer

de ses biens, impossibilité même de décider de son changement

de résidence actuel. Malgré cela, elle persiste. On la lui accorde.

La baronne de A..., malgré ses très nombreux accès, avait conservé,

par conséquent, le plein discernement de sa propre maladie ainsi

qu'une force de volonté assez grande pour se préserver des tristes

conséquences de sa psychose.

Ces trois faits montrent les grands dangers auxquels sont

exposés les malades dans les intervalles lucides, de par les

médecins eux-mêmes qui leur refusent les bénéfices de la protec-

tion légale.

Le temps est trop avancé pour qu'on puisse passer à la dis-

cussion.

Banquet. La prochaine séance aura lieu le 15 décembre 1884.

(Allg. Zeitsch. f. Psych., XLI, 3.) P. Kéraval.

SOCIÉTÉ DE PSYCHIATRIE ET MALADIES NERVEUSES

DE BERLIN

Séance du 10 décembre t883 '. Présidence de M. Westphal.

Communication annoncée de M. Westphal sur un cas de tumeur

du lobe temporal gauche avec pièce à l'appui. Elle sera publiée dans

la Bei-line7- klinische Wochenschri ft.

Discussion : .'

M. MENDEL. Le cas de Schoefer invoqué par M. Westphal lui rap-

pelle qu'il a pendant la vie du malade formulé le diagnostic d'un

1 Voy. Archives de Neurologie, t. VIII, p. 382.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 423

foyer à la pointe du lobe temporal droit. Tout petit qu'il fût, ce

foyer expliquait le symptôme; car, il faut tenir compte également

des troubles du pourtour du foyer qui rétrocédèrent; en ce qui

concerne le lobe temporal opposé, toute la pointe était dans un

état d'hypérémie extrême. Confirmation orale de M. ScBOEFER;

son malade n'était pas en proie à une démence avancée. Les troubles

moteurs rapportés disparurent dans le cours de la maladie.

Chez une démente épileptique, qui n'était pas atteinte de surdité

verbale, Mendel a rencontré une atrophie très accusée du lobe

temporal droit.

M. R ! CHTER'(de Dalldorf) a observé de la surdité verbale chez un

homme dont, à l'autopsie, lapremière temporale gauche se trouva

détruite. Opinion à l'appui de Langreuter.

M. HADDCB mentionne deux cas communiqués par Claus chez

des déments avancés. Dans le premier cas, il se produisit l'aphasie

sensorielle en question : destruction des première et deuxième

temporales gauches. Dans le second cas, il s'agissait d'un paraly-

tique général ; le lobe temporal gauche était atrophié.

M. WESTPHAL prétend que, dans le cas de Schoefer, le foyer, qui

n'avait que le volume d'une lentille, était distant de la pointe du

lobe temporal d'environ 5 centimètres ; ce petit foyer n'occupait

que les fibres conductrices et, d'après lui, s'était développé avant

et non pendant le temps de l'observation.

Présentation de malade par M. REMAK. Myoclonus multiple.

C'est un garçon de onze ans ayant eu la diphthérie neuf semaines

avant son admission (6 août) ; évolution de la maladie en qua-

torze jours ; puis, parole nasonnée, régurgitation des liquides

par le nez. Depuis trois semaines, incertitude des jambes, diplo-

pie, impossibilité de lever le bras droit, faiblesse de la main

droite. L'examen décèle une parésie bilatérale de l'oculo-moteur

externe, de la paralysie du voile du palais, de la parésie des nerfs

axillaire et cubital droits (conservation de l'excitabilité électrique),

de l'ataxie des extrémités inférieures avec légers troubles de la

sensibilité et absence du phénomène du genou. Tous ces accidents

s'améliorent par le traitement galvanique. Un plongeon inattendu

dans l'eau froide cause à l'enfant à ce moment une si violente

terreur qu'il faut le rapporter chez lui; la difficulté de la marche

augmente. Le 7 septembre, on constate de l'incertitude de la dé-

marche, surtout pour monter les escaliers; le phénomène du ge-

nou n'existe plus. Le 20 septembre, convulsions fibrillaires des

jambes augmentant à mesure que la démarche s'améliore. Le

5 octobre, légère diminution de l'excitabilité des nerfs péroniers

aux deux sortes de courants. Le 26 octobre, convulsions dans les

bras; des deux côtés, vestiges du phénomène du genou. Le 6 no-

vembre, voici ce que l'on constate :

424 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Dans le décubitus dorsal, divers muscles sont visités par des

convulsions cloniques, qui, sans se suivre d'une façon tout à fait

rhythmique, sont symétriques, mais non synchrones, des deux

côtés, varient d'intensité et de fréquence (on en compte jusqu'à

60 àla minute) et paraissent indépendantes de la respiration in-

demne. Elles occupent, dans les extrémités inférieures, principa-

lement les muscles de la cuisse (triceps et son muscle droit), sont

peu ou point accusées dans les muscles de la jambe; contractions

irrégulières du droit de l'abdomen. Dans le décubitus abdominal,

atteinte des fléchisseurs des cuisses, des fessiers, des carrés des

lombes ; intégrité des mollets. Pendant la station debout, les con-

vulsions des extrémités inférieures diminuent, mais on en cons-

tate dans l'épaule et le bras (sterno-cléido-mastoidien, trapèze,

pectoral, deltoïde, biceps, triceps) ainsi que dans le long supina-

teur de l'avant-bras. Il se produit parfois des contractions du

grand dentelé. Intégrité complète des muscles de la tête et de la

face. Disparition des convulsions pendant les mouvements inten-

tionnels ; le malade peut donc courir vite, sauter, écrire. Toute

émotion, toute excitation augmente les convulsions ; elles ne

cessent cependant pas absolument pendant le sommeil. Aucune

anomalie de la sensibilité, pas d'anomalie de l'excitabilité méca-

nique, exagération très nette de l'excitabilité réflexe de la peau

qui entraîne la réaction des muscles sous-jacents. On a beau

néanmoins presser sur le carré des lombes et le grand fessier, on

ne provoque pas de contraction répétée, le phénomène de la

hanche ne se produit pas. Exagération bilatérale du phénomène

du genou. Examen électrique : diminution faible de l'excitabilité

des nerfs péroniers des deux côtés, pas d'hyperexcitabilité ner-

veuse ou musculaire en général, ni dans les sphères affectées ; les

convulsions à l'ouverture de l'anode paraissent relativement pré-

coces, surtout sur le trajet des nerfs cruraux. Le retour de lamo-

tilité à la normale, l'absence de troubles de la sensibilité, l'ab-

sence de tremblement, permettent d'exclure l'idée d'une lésion

organique du système nerveux et de se rallier à l'opinion d'une

névrose en rapport avec la terreur éprouvée après la disparition

des accidents qui, eux, auraient pu être rattachés à la diphthérie

et à une affection centrale. L'auteur élimine l'idée de la chorée

électrique, parce que, dans cette maladie, les contractions ont la

spontanéité de l'éclair, les muscles de la face participent aux phé-

nomènes, et il n'existe pas d'hyperexcitabilité réflexe du côté de

la peau. Cette observation rentrerait, au contraire, parfaitement

dans les faits de paramyoclonus de Friedreich dont l'observation

concernait un homme de cinquante ans ayant été, à la suite de

frayeur, atteint de convulsions qui rétrocédèrent sous l'influence

1 Voy. Archives de Neurologie, t. III, p. 235.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 425

de l'électricité. Dans le cas de Loewenfeld intitulé : « Myoclonus

multiple », il s'agissait d'un 'garçon de dix ans chez lequel les

mêmes muscles étaient pris; il existait aussidel'hyperexcitabilité

cutanée, de la diminution des réflexes tendineux; la guérison eut

lieu par galvanisation de la colonne vertébrale du grand sympa-

thique. D'après Loewcnfeld, il convient d'en attribuer la pathogénie

à l'excitation des territoires spinaux moteurs qui commandent à un

ensemble fonctionnel démuselés. M. Remak ne serait pas éloigné

d'adopter cette genèse par la moelle, et de songer à l'existence,

dans l'espèce, d'un état d'excitation chronique des noyaux moteurs

des cornes antérieures grises.

Présentation de malade par M. BERNHARDT. Elle a traita un

homme en proie à une paralysie partielle de Irt sensibilité sur

l'extrémité supérieure droite, la moitié droite de la face, du cou,

de la nuque, du dos, du thorax. (Voy. in extenso dans Berliner

klin. Wochenschi-ift.)

Discussion :

M. SCEUETZ. A-t-on examiné le champ visuel et l'acuité auditive

de l'oreille droite ?

M. Bernhardt. Je n'ai rien trouvé.

MM. MENDEL et REMAK. lise pourrait qu'on ait affaire à un hys-

térique. L'absence de troubles moteurs et d'atrophie plaide contre

l'existence de lésions syringomyéliques.

M. Mendel. Comment expliquer la participation de la moitié

droite de la face au trouble de la sensibilité ?

M. BERNHARDT. 11 y a un an et demi que je connais le malade.

Toute idée d'hystérie doit être écartée. Du reste, on ne trouve

rien dans les organes sensoriels droits. Intégrité de la plus grande

partie du tronc et de toute l'extrémité inférieure droite quanta la

sensibilité. L'absence de troubles de la motilité et d'atrophie s'ex-

pliquerait de la façon suivante : des altérations capables, à l'oc-

casion, d'aboutir à la syringomyelie se développent, comme on

sait, d'abord dans les segments les plus postérieurs de la moelle ;

rien ne dit que, plus tard, il ne se produira pas de phénomènes de

cet ordre. Les manifestations sensitives de la moitié droite delà

face s'expliquent par une lésion de la racine ascendante droite du

trijumeau dans le segment le plus supérieur de la moelle cervicale

de ce côté (cas de Schultze, Fuerstner, Zacher ').

Séance du 14 janvier 1884. Présidence DE li. WESTPHAL.

Présentation, par M. Remak, du galvanomètre vertical absolu

de Hirschmann, à sensibilité graduable. Un couple aslatique d'ai-

Voy. Revues analytiques in Archives de Neurologie.

426 SOCIÉTÉS SAVANTES.

guilles magnétiques oscille autour d'un axe horizontal; supprime-

t-on l'influence du magnétisme terrestre, on obtient une égale

déviation dans les deux sens; interrompt-on le courant, la saine

équilibration des bras de levier détermine toujours un retour

exact à la situation verticale. Le coffre du galvanomètre qui con-

tient la masse de cuivre amortissante peut tourner avec l'échelle

et prendre toutes les positions intermédiaires à la verticale et à

l'horizontale; comme une vis permet de l'y fixer ad libitum, il est

aisé d'obtenir le point nul de l'échelle. A son maximum de sensi-

bilité, le galvanomètre donne pour chaque raie partielle des dix

fractions très larges un demi-milliampère. Une série de tampons

installés sur la plate-forme du bas permettent, en faisant jouer des

appareils de fermeture accessoires, de réduire vis-à-vis du courant

les oscillations galvanométriques et, par conséquent, la sensibilité

de moitié ou du quart. Il en résulte que chaque raie partielle de-

vient à volonté un demi, un, deux milliampères, ce qui fournit des

mensurations exactes de 0,5 de milliampères à 20 milliampères.

En intercalant dans la voie de conductibilité principale des résis-

tances convenables destinées à diminuer la sensibilité, on ne

change en rien la résistance totale du galvanomètre à l'égard de

toute sensibilité ; elle équivant à 500 unités Siemens.

Discussion :

M. BERNHARDT s'est convaincu également de l'excellence de cet

instrument. Il a cependant un inconvénient : c'est que l'amortisse-

ment des oscillations de l'aiguille magnétique n'est pas tout à fait

suffisant ; l'équilibre n'est donc obtenu qu'après un laps de temps

trop long. Il désire aussi qu'on explique mieux la valeur des raies

partielles de l'échelle. La légende de M. Hirschmann dit qu'au jeu

des tampons 1.1 chaque raie partielle, celle même qui n'est pas

directement désignée par un nombre vaut un demi-milliampère,

au jeu des tampons 2.2 , elle équivant à un milliampère et à deux

milliampères quand on s'adresse aux tampons 4.

M. EULENBURG est d'accord avec M. Bernhardt en ce qui concerne

les oscillations del'aiguille, mais il demande à conserver la division

de l'échelle.

Avant la présentation des pièces de M. SAKAKY, pièces relatives à

des préparations microscopiques de lésions des nerfs périphériques ' ,

M. WesTPHAL fait remarquer que, dès 1878,' il a cherché et trouvé

des altérations périphériques des nerfs sensitifs dans un cas de

tabès avec lésion centrale (atrophie dégénérative du nerf fémoro-

cutané postérieur. (Arch. f. Psychiât., t. VIII). Tout récemment,

Déjerine a, de concert avec les altérations centrales du tabes,

rencontré delà dégénéresence des nerfs sensibles périphériques;

' Voy. Revues analytiques.

sociétés savantes. 427

en même temps qu'il a révélé que les nerfs périphériques peuvent

être seuls lésés sans qu'il y ait de lésion tabétique centrale

(neuro-tabes périphérique). Avant Déjerine, Westphal avait examiné

au microscope les nerfs saphène et fémoro-cutané interne dans un

cas de tabes, il les avait trouvés atteints d'atrophie grise, surtout à

la périphérie.

M. Uhthoff. De l'atrophie des nerfs optiques. Le matériel d'observa-

tion a été puisé à la clinique de Schoeler; il se chiffre par 154 cas. Il

est proportionnellement rare qu'on puisse noter des facteurs étio-

logiques. Dans l'espèce, on en a enregistré en douze cas seulement.

Il faut aussi se montrer très prudent quant à l'appréciation des

causes. Les auteurs, tels que Galezowsky, vont trop loin quand ils

fout dépendre l'atrophie des nerfs optiques d'une bien plus grande

catégorie d'agents pathogénétiques. C'est l'atrophie d'origine

spinale qui est la plus fréquente de beaucoup. On doit de plus en

plus rayer de son agenda diagnostique l'atrophie simple, progres-

sive, non compliquée. Les allures du phénomène du genou et

de la réaction pupillaire dans l'atrophie spinale ont été soigneuse-

ment étudiées ; l'orateur en présente divers tracés. Les paralysies

des muscles de l'oeil sont proportionnellement rares dans l'espèce.

Après l'atrophie spinale, on fera venir, au point de vue statistique,

l'atrophie cérébrale. Un assez vif intérêt s'attache à l'atrophie des

nerfs optiques consécutive à une névrite primitive non compliquée,

en ce qui concerne l'étiologie, les troubles de la vue, les champs

visuels, etc. La démence paralytique est une cause d'atrophiepro-

portionnellement rare, cependant il importe de tenir compte des

cas qui se présentaient à l'observation; à cet égard, M. Uhthoff

pense que, parmi les malades atteints d'atrophie spinale, quelques-

unspourraientbien se transformer plus tard en paralytiques géné-

raux. Les excès d'alcool et de tabac entraînent quelquefois une

amblyopie très prononcée, et une décoloration atrophique totale

des papilles; mais jamais on n'observe de complète cécité. Lesautres

éléments pathogénétiques à signaler sont : les maladies de l'orbite,

l'embolie de l'artère centrale, l'intoxication saturnine, les hémor-

rhagies, les traumatismes, l'albuminurie, les déformations crâ-

niennes avec amaurose congénitale. La communication de

M. Uhthoff se termine par la présentation de préparations micros-

copiques d'atrophie du nerf optique dans la paralysie générale. Il

montre également un malade affecté d'hémianopsie temporale à

la suite d'une fracture traumatique de la base du crâne (lésion du

chiasma).

Séance du 10 mars 1884. Présidence de .11. Westphal.

Renouvellement dubureau pour l'année 1884 : président,M. West-

phal ; vice-président, M. Sander ; secrétaire, M. Bernhardt. Com-

428 SOCIETES SAVANTES.

mission de réception : MM. Liman, M. Monde), Meyer, Senator,

Westphal.

Présentation, par M. OPPENIIEIM, d'un malade éprouvant des

symptômes qui font supposer de la syringomyélie. L'homme dont

il s'agit, âgé de trentre-deux ans, n'est sous le coup d'aucune tare

hériditaire; il a joui d'une bonne santé jusqu'à il y a deux ans et

demi. Pas de syphilis; pas d'alcoolisme. En octobre 1881, il res-

sent soudain, en procédant à ses semailles, une sensation d'en-

gourdissement avec formications.sur toute la moitié droite du

corps; plus tard, elle se limite principalement au bras droit et à

la moitié droite du tronc. Graduellement se développe de l'insen-

sibilité à la douleur dans les deux extrémités supérieures. Même

phénomène sur la partie inférieure de la face à droite ; perte du sens

de la température. Six mois après le début des accidents, les petits

muscles de la main gauche s'atrophient; l'atrophie augmente

graduellement, si bien que la force de cette extrémité diminue.

De temps à autre, les deux phalanges terminales des deuxième et

troisième doigts du côté droit sont le siège de vésicules grosses

comme des noyaux de cerise, qui crèvent et laissent derrière elles

des ulcérations difficiles à guérir. Actuellement sensation de

«brûlure froide dans les deux extrémités supérieures, surtout dans

celle de droite; faiblesse dans la main gauche. La marche n'est

pas particulièrement pénible. La vessie fonctionne bien; constipa-

tion ; appétit exagéré. On trouve, à l'examen, de l'émoussemeiit de

la sensibilité dans tous ses modes sur les deux extrémités su-

périeures, le tronc, le cou, la région du maxillaire inférieur, les

oreilles, l'occiput, la région pariétale (trouble plus intense à

droite); une diminution prononcée des sens du tact, delà pression,

de la vigueur, du lieu; mais c'est la sensibilité douloureuse et le

sens de la température qui ont le plus souffert, car on peut tra-

verser la peau par une aiguille, la soumettre indéfiniment au circuit

électrique fermé àl'aidedu pinceau, sans produire aucuneréaction.

Intégrité du sens musculaire. Pas d'ataxie. Refroidissement et

décoloration rouge bleuâtre des deux mains, ainsi que de la por-

tion inférieure des avant-bras. Aplatissement accentué du premier

espace interosseux, moins prononcé des autres espaces ainsi que des

éminences thénar et hypothénar. Réaction dégénérative des muscles

atrophiés. La situation des doigts est en rapport avec la paralysie

atrophique des interosseux. Les phalanges des deuxième et troi-

sième doigts de la main droite présentent des cicatrices arrondies

(ulcérations guéries) : vue, goût, odorat, ouie normaux. Intégrité

psychique, à part un certain degré d'euphorie. Bon état général.

Absence de phénomènes paralytiques, si ce n'est ceux qui relèvent

des interosseux de la main gauche. Rien du côté de la motilité

ni de la sensibilité des extrémités inférieures. Exagération des ré-

flexes tendineux ; constipation. Rien à la vessie.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 429

Conclusion : Il s'agit d'une lésion à évolution chronique oc-

cupant la moelle cervicale et la moelle dorsale dont elle intéresse

lestractus sensitifs, trophiques, vaso-moteurs; il est probable que

la substance grise et, en particulier, ses segments postérieurs

sont atteints; à gauche, l'altération a dû empiéter sur les cornes

antérieures. Rien aux cordons antéro-latéraux. Le complexus

clinique rappelle les faits de syringomyélie.

Présentation, par M. RicHTER (de Dalldorf), de quelques hémis-

phères cérébraux représentant des types anormaux de circonvolu-

tions, sous la forme de plis de passage insolites. Tel cet hémisphère

gauche d'un paralytique général sur lequel on trouvait des ponts de

communication profonds à la partie inférieure, tel le même

organe d'un individu sain d'esprit chez lequel la même anomalie

se remarquait en haut à la partie supérieure. Sur l'hémisphère

droit d'un paralytique général, la portion inférieure du sillon de

Rolando communiquait avec le sillon frontal supérieur; sur

l'hémisphère droit d'une idiote, c'étaitla partie supérieure du sillon

de Rolando qui s'ouvrait dans le sillon frontal supérieur. Le cer-

veau d'un criminel offrait des deux côtés une bifurcation avec

prolongements anormaux en avant du sillon de Rolando. L'hé-

misphère gauche d'un homme affecté de démence sénile, était

doté de trois circonvolutions ascendantes séparées par deux

sillons de Rolando. L'orateur n'a jamais vu de communication

réelle entre le sillon de Rolando et la scissure de Sylvius.

M. OPPENHEJM. Communication annoncée sur l'étiologie du tabes.

Quatre-vingt-six cas ont élé rassemblés par lui à la clinique des

maladies nerveuses de la Charité de Berlin (56 h., 30 f.). Dans

51 cas la syphilis est niée; aucun signe, aucun commémoratif en

permettent d'en établir le diagnostic rétrospectif. Chez 9 indi-

vidus, un chancre mou avait existé plus ou moins longtemps

avant le tabès. Chez 6 patients l'infection syphilitique était niée,

mais on notait l'existence d'avortements, de fausses couches,' et

la mort précoce d'enfants. Dans neuf observations, l'infection

primitive se traduisit par des accidents secondaires presque

toujours très légers; une de ces syphilitiques souffrait de dou-

leurs lancinantes, dans les extrémités inférieures, deux ans avant

que l'infection eût parcouru son cycle. Chez un seul malade, on

constate encore actuellement des signes de syphilis constitution-

nelle (plaques muqueuses buccales). Cette statistique n'est pas

en faveur des excès sexuels comme agents pathogénétiques.

Dans 50 cas, on put avoir des renseignements généalogiques;

cinq fois seulement on trouve de l'hérédité dans le sens le plus

large du mot. Rôle important des refroidissements et surtout de

l'action prolongée du froid, de l'humidité, des intempéries de

l'hiver. Très souvent il ya enmêmetemps des fatigues corporelles

4.M SOCIÉTÉS SAVANTES.

excessives, de sorte que bien des fois ce sont elles que l'on accuse

seules comme causes. Dans un exemple de traumatisme pathogé-

nétique, la lésion du système nerveux se manifesta essentielle-

ment sous la forme de tabes dorsal, mais l'autopsie révéla qu'il ne

s'agissait nullement d'une dégénérescence grise pure des cordons

postérieurs. Un exemple d'affection tabétique semblant consécu-

tive à un empoisonnement par le gaz d'éclairage ; des crises gas-

triques avaient immédiatement succédé à l'accident et plus tard

on nota le complet tableau du tabes. Ou observe aussi fréquem-

ment chez les tabétiques non syphilitiques que chez les tabétiques

syphilitiques des affections des nerfs de l'oeil (surtout des nerfs

qui commandent aux muscles), des vertiges, des lipothymies,

des attaques apoplectiformes, etc... Dans les deux groupes, ces

manifestations peuvent exister ou manquer, n'être qu'indiquées

ou être très prononcées. En rapprochant ces résultats des statis-

tiques de divers auteurs, on arrive à conclure que le tabes dorsal

résulte d'une série des causes différentes (refroidissement, fatigues

physiques exagérées, syphilis) sans compter d'autres facteurs

inconnus, et que le complexus clinique est incapable de nous

indiquer quelle est la lacune qui a provoqué le tabes observé.

Discussion :

M. Bernhardt. Depuis sa dernière publication (fin septem-

bre, 1883), il a observé 12 nouveaux cas de tabes, î dans sa clien-

tèle, 5 à la policlinique. Les premiers malades avaient eu la

syphilis. Parmi les ! i autres, 3 en accusaient l'existence. Sa convic-

tion demeure la même; un très grand nombre de tabétiques ont

eu la syphilis un peu avant. (Voy. Cetatral6latt. sur Nervenheil-

kunde, 1883'.)

M. LEWIN souscrit à l'opinion de la simultanéité chez les ma-

lades d'accidents syphilitiques et de refroidissements. Le traite-

ment antisyphilitique ne lui a jamais donné de résultats. Dans un

cas, il y aurait eu en même temps intoxication arsenicale (par

une tapisserie); on éloigna l'agent toxique et les symptômes tabé-

tiques rétrocédèrent.

M. Westphal. De tous les documents actuels, faut déduire

qu'aucun des éléments nocifs indiqués n'est la cause des tabes. Il

est probable que généralement les paralysies des muscles de

l'oeil d'ordre syphilitique proviennent de gommes occupant les

nerfs correspondants; au regard du grand nombre des autopsies

tabétiques, on ne trouve qu'une proportion infiniment faible de

lésions syphilitiques du foie, des reins, du cerveau. Le traitement

antisyphilitique réussit très peu dans le tabes. Il n'est pas admis-

sible que les avortements de femmes prouvent, sans plus ample

1 Voy. Archives de Neurologie. Revues analytiques.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 431

informé, l'existence d'une infection syphilitique de la personne

ou du conjoint.

M. Remak. Erb a communiqué à Londres que sur 8 autopsies de

tabétiques, il a constaté trois fois la syphilis. Il partage la ma-

nière de voir de Westphal au sujet des femmes et de leurs avorte-

ments. D'après l'orateur, sur 3,400 cas de syphilis on trouverait

290 névropathes dont 40 tabétiques, soit 14, 4 p. 100. Il insistera

dans la prochaine séance sur sa statistique personnelle.

M. LEWI,4. Sur 800 femmes syphilitiques observées par lui,

5 allèrent plus tard se faire traiter dans le service des maladies

nerveuses de la Charité des Berlin, mais aucune n'avait de tabes.

L'heure avancée nécessite l'ajournement de la discussion.

Séance du 12 mai 1884. -- Présidence de M. Westphal.

Continuation de la discussion sui- l'étiologie du tabes.

M. Oppenheim. Sur 100 tabétiques, il avaient eu un chancre

mou; 43, un chancre induré (soi-disant sans conséquences

ultérieures); Il étaient franchement syphilitiques; 6 étaient

probablement infectés. Total : 17 syphilitiques. Parmi les malades

actuellement présents dans le service des syphilitiques, un seul

est tabétique.

M. REMAK. Le 21 janvier 1880, à la séance de la Société de mé-

decine de Berlin, l'orateur présentait une statistique portant sur

52 tabétiques; par une élimination raisonnée, il arrivait à la pro-

portion de 25 p. 100 de syphilitiques. Depuis cette époque, il a

rassemblé 64 cas de tabes (15 f., 49 h.). Laissons, pour les motifs

sus indiqués, les femmes de côté; d'ailleurs aucune d'elles n'était

syphilitique, partout il s'agissait d'individus (hommes ou femmes)

mariés, 4 femmes avaient eu des enfants sains, 4 n'en avaient

pas, 3 avaient avorté; en revanche, 5 femmes avaient été sou-

mises à des refroidissements, 1 avait été atteinte de tabes après

traumatisme (fracture de cuisse), 2 à la suite d'une terreur

(saisie- gagerie, perte de fortune, vol). Sur ces 15 femmes, 7 avaient

éprouvé des symptômes de paralysie des muscles de l'oeil (l'auteur

n'a pas tenu compte de l'immobilité rigide de la pupille), 2

présentaient de l'atrophie du nerf optique. Les hommes tabé-

tiques se répartiraient en trois tableaux. Dans la première série,

à antécédents syphilitiques certains (14 cas), caractérisés par un

chancre induré, des accidents secondaires, des avortements mul-

tiples s'effectuant souvent presque immédiatement après l'infec-

tion ; il faut noter que le temps écoulé entre l'accident primitif

et les premiers phénomènes tabétiques, fut d'un an à 23 ans

(moyenne =8 8 ans); en outre, 6 individus accusaient en même

432 SOCIÉTÉS SAVANTES.

temps un refroidissement probable; 4 avaient eu des symp-

tômes de paralysie des muscles de l'oeil, 3 présentaient de l'atro-

phie du nerf optique; de sorte qu'en somme, la proportion serait

de 43 p. 100 de refroidissements concurrents, de 28 p. 100 d'af-

fection des muscles oculaires, de 22 p. 100 d'atrophie du nerf

optique. La seconde catégorie est celle des malades ayant eu une

ulcération quelque part, mais sans accident secondaire (14 cas);

6 d'entre eux avaient, peu de temps après l'infection, procréé

des enfants sains; un était probablement syphilitique, car des

frictions à l'onguent napolitain avaient eu raison d'un mal per-

forant; le temps écoulé entre l'ulcération et les premiers symp-

tômes tabétiques, fut de 4 à 30 ans et demi (moyenne : = 4 2 ans);

sept avaient été exposés à un refroidissement généralement pro-

fessionnel; un avait subi un traumatisme (fracture de l'iléon) :

tous avaient présenté de la paralysie des muscles de l'oeil; aucun

n'était atteint d'atrophie du nerf optique, de sorte qu'en réalité

ce groupe se décompose en 50 p. 100 de refroidissements, 7 p. 100

de traumatismes, 21 p. 100 de paralysie des muscles de l'aeil. Le

troisième cadre embrasse les exemples dans lesquels il n'existe

aucun soupçon d'infection syphilitique (21 faits); parmi eux 7

malades, appartenant à la clientèle privée, fournissaient des

anamnestiques certains, 10 avaient eu plusieurs enfants sains,

sans aucun avortement, 3 pouvaient être soupçonnés de syphilis

(avortements répétés, exostose du tibia chez un cocher, surdité

nerveuse subite chez une soeur de neuf ans), 9 avaient probable-

ment subi un refroidissement, 8 avaient été affectés de para-

lysie des muscles de l'eeil, 1 était atteint d'atrophie du nerf

optique; soit, au total, 44 p. 100 de refroidissements, 35 p. 100 de

symptômes en rapport avec les muscles de l'oeil, 5 p. 100 d'atrophie

du nerf optique. Si maintenant on adopte la théorie unitaire de

la syphilis, on doit calculer que, sur les 49 cas précédents, 31,

c'est-à-dire 63,5 p. 100 étaient syphilitiques; si l'on est partisan

de la théorie dualistique, on relève la proportion de 28,5 et tout

au plus 36,7 p. 100 de syphilis, c'est-à-dire une;proportion moyenne

de 33 p. 100.

AI. Bernhardt. Jusqu'au 21 janvier 1880, l'orateur a fait le réco-

lement de 125 cas de tabes soigneusement observés quant aux

facteurs étiologiques. Le 21 janvier 1880, il donnait des dé-

tails de même ordre sur 67 tabétiques (58 h., 9 f.) et formulait

la proportion de 40 p. 100 ayant eu la syphilis auparavant; en

en défalquant les chancres mous, il restait encore 21 p. 400. Le

8 novembre 1881, il publia une analyse pathogénétique de 20 ta-

bétiques examinés d'après le même plan; 60 p. 100 d'entre eux

avaient été jadis infectés : la défalcation des chancres mous laisse

une moyenne de 45 p. 100. 26 cas sont étudiés à ce point de vue,

en septembre 1883, il arrive à la proportion de 57,6 syphilitiques

SOCIÉTÉS SAVANTES. 433

théorie unitaire) et de 38,4 (théorie dualistique). Les 12 derniers

cas envisagés par lui dans la dernière séance se résument en

83 p. 100 de syphilitiques. Si l'on comprend dans la statistique

les chancres roous,ilfautformuler le chiffre de 60 p. 100 tabétiques

syphilitiques; si on élimine leschancres mous, on arrive simplement

à 48 p. 100. L'inspection comparative de 100 hommes affectés de

tuberculose pulmonaire et certainement indemnes de tabes se

traduit par 62 p. 100 n'ayant assurément pas eu la syphilis; 26

p. 100, ou, si l'on exclut le chancre mou, 8 p. 100 avaient été in-

fectés. 5 : 5 autres tout récemment examinés se répartiraient en :

61,8 p. 100 non tabétiques, dont un indubitablement indemne de

syphilis et 23,6 p. 100, ou, si l'on ajoute les chancres mous, 38

p. 100 syphilitiques. D'où le résultat total que voici : sur 125 ta-

bétiques, 46,8 p. 100 avaient sûrement eu la syphilis ; sur 155 non

tabétiques, 15,8 p. 100 avaient à coup sûr eu la syphilis ; com-

prend-on dans la répartition les chancres mous, on obtient pour

la première classe, 60 p. 100 syphilitiques, pour la seconde 32 p. 100

syphilitiques.

M. REMAK. En aucun cas de tabes il n'a vu de phénomènes érup-

tifs (syphilis cutanée, etc.), tandis que chez les hémiplégiques ou

observe souvent ces accidents. Il n'a pas parlé à dessein de ses

faits anciens, car ils n'ont pas été recueillis dans le but qui nous

occupe.

M. Lswrssxr. Quel était l'âge des tuberculeux ?

M. Bernhardt. De vingt à quarante ans. Chez une femme tabétique

n'étant, en dehors de l'infection syphilitique, sous le coup d'aucun

autre agent pathogénétique, il a observé une périostite bilatérale

très douloureuse des tibias, qui disparut promptement après l'ad-

ministration de K. I.

M. Westphal combat les assertions de Moebius relatives au

tabes chez la femme (Centralllatt f. Neruenheilh. du 1"mars 81';

aux cas positifs de cet auteur, il peut opposer un bien plus grand

nombre de faits négatifs, c'est-à-dire de femmes tabétiques non

syphilitiques. Il serait intéressant de poursuivre l'étude de l'étio-

logie de la sclérose multiloculaire, car ses observations lui ont

laissé l'impression, que, dans cette maladie, la syphilis joue peut-

être un rôle.

M. MENDEL. Communication annoncée sur la démence paralytique

chez les chiens. On saitque, lorsqu'on examine les cerveaux de para-

lytiques généraux morts aux divers stades de cette affection, on cons-

tate trois espèces d'étalsanatomo-patliologiques. Dans les cas où la

maladie a suivi une évolution aiguë, c'est une hyperémie corticale

très prononcée; le tissu interstitiel est rempli de noyaux qui, pour

1 Voy. Archives de Neurologie Revues analytiques.

Archives, t. IX. 28

434 SOCIÉTÉS SAVANTES.

la plus grande part, émanent d'hématies extravasées, et les espaces

adventices sont bourrés de leucocytes. La grande majorité des

faits concernent une marche d'ordinaire lente, les malades sont

tués en trois ou quatre ans; les altérations principales résident

dans le tissu interstitiel (prolifération de cellules-araignées, dont les

prolongements multipliés, sont en relation avec les vaisseaux

néoplasie vasculaire hypergenèse de noyaux). Une troisième

série comprend les cas rares à marche traînante : ici il y a sclé-

rose étendue de l'écorce grise, étiolement, atrophie des cellules

nerveuses ganglionnaires. Cette étude anatomo-pathologique fait

entrevoir que le point de départ de la paralysie générale réside

dans l'hyperémie organique de l'écorce. Mais il n'y a que très peu

de gens, parmi les individus exposés à de fréquentes hyperémies

corticales, qui deviennent paralytiques généraux. Aussi doit-on

admettre qu'il existe une prédisposition préparatoire, soit, par

exemple, une lésion des parois vasculaires, permettant le passage

à travers elles des parties constitutives du sang. Delà l'idée d'ins-

tituer des expériences capables de produire une hyperémie assez

puissante pour que le sang surmonte la résistance des parois vas-

culaires normales. Or, Salathé a déjà montré que si l'on fixe un

animal sur une table, en lui assujettissant la tête sur le bord de

cette table et que si l'on fait tourner le tout, au bout d'un certain

temps, l'animal meurt. La force centrifuge a provoqué de l'liype-

rémie cérébrale. Inversement, si l'on place la tête au milieu de la

table, la rotation détermine de l'anémie encéphalique. M. Mendel

a répété ces expériences dans le laboratoire de Munk; il a obtenu

les mêmes résultats. L'un des chiens dont les organos sont mis

sous les yeux de la société a été traité par la force centrifuge ; il

est mort au bout de 17 minutes; on constate sur le crâne, les

méninges, le cerveau, les muscles de la tête et du cou, un état

d'hyperémie très prononcé, avec hémorrhagies capillaires ; les

organes occupant le centre de la table sont anémiés. Un second

chien soumis le même jour à la force centripète mourait en 3 mi-

nutes ; les centres encéphaliques sont anémiés, tandis que les

organes situés au bord de la table sont hyperémies. M. Mendel a

été plus loin. 11 a provoqué une hyperémie centrifuge modérée,

à petites doses non mortelles, quelques minutes chaque jour, en

plusieurs séances successives. Immédiatement après la rotation, on

observe du nystagmus, de légers tiraillements dans le domaine du

facial supérieur, de l'hébétude, de l'oscillation avec titubation du

côté vers lequel a eu lieu la rotation. Au bout de deux semaines

de ce traitement, voici les symptômes permanents que l'on note :

Indifférence de l'animal qui demeure au repos dans sa niche,

troubles de la motilité des membres postérieurs, perte de la no-

tion de position de ces extrémités, puis phénomènes identiques

du côté des extrémités antérieures, parésies sur les groupes mus-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 435

culaires du tronc et du facial, modifications dans l'aboiement,

troubles de la sécrétion urinaire. Rien du côté de l'appareil digestif

jusqu'à la mort, mais difficultés de la déglutition dans les derniers

temps. La mort a lieu au milieu d'un complexus symptoma-

tique constitué par un amaigrissement très prononcé, des acci-

dents du décubitus, des phénomènes de paralysie généralisée.

On cesse d'exécuter les séances de rotation dès que ces phénomè-

nes ont commencé leur apparition. Deux chiens sont soumis à

l'examen des membres de la Société. L'un d'eux est arrivé à un

degré modéré de démence (affaiblissement intellectuel), accom-

pagné de parésie des extrémités postérieures et perte du sens de

position. L'autre, qui, depuis trois mois, n'a pas subi de rotation,

présente un état prononcé de démence, avec parésie des quatre

extrémités, du tronc, des muscles innervés par le facial. Le pre-

mier était jadis un animal très éveillé, fringant, d'un tempéra-

ment sanguin, l'autre était extrêmement méchant; tel est leur

atfaiblissementpsychique que, depuis une heure, ils attendent dans

une antichambre sans s'inquiéter des gens qui entrent. Dans

toutes les autopsies de ces animaux, le tableau anatomo-pathologi-

ques est uniforme, c'est-à-dire que, macroscopiquement, il s'agit

d'adhérences parfaites delà dure-mère à la pie-mère et à l'écorce.

En voici une préparation. Les adhérences sont des plus nettes au

pourtour du sillon cruciforme; on voit, en outre, une araclinite dif-

fuse, d'une intensité modérée, avec plaques laiteuses le long des

vaisseaux. Au microscope, on relève tous les signes d'une encépha-

lite corticale interstitielle; (cellules araignées nombreuses et

très développées, prolifération des noyaux, hyperplasie vascu-

laire) ; en un mot, il y a concordance complète avec l'état habituel

de l'écorce des aliénés paralytiques généraux.

Pourquoi maintenant l'écorce est elle seule ? lésée Pourquoi la

substance blanche demeure-t-elle indemne dans tous les stades

qui ne constituent pas les phases ultimes, ainsi que cela a lieu

chez l'homme ? Ceci résulte de la différence de distribution des

vaisseaux dans les deux substances. La substance grise renferme

un système de canaux multiples très ramifiés, pourvus d'anas-

tomoses transverses nombreuses, qui, cela se conçoit de reste,

opposent de plus grands obstacles à la circulation du sang que

le réseau vasculaire parcimonieux fourni par les extrémités

artérielles de la substance blanche.

Pourquoi, dans la pluralité des cas, les premières perturbations

affectent-elles les extrémités postérieures ? Pourquoi est-ce le pour-

tour du sillon cruciforme et de la scissure de Sylvius qui est de

préférence exposé à la lésion ? Il s'agit ici de rapports topographi-

quesdes vaisseaux. M.Mendel y reviendra probablement plus tard.

436 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Séance du 9 juin 1884. Présidence DE M. Westphal.

M. JASTROWITZ. Communication annoncée sur un cas de conceptions

io7·ésistibles en nzédecine léyale, auec quelques re7na7·yues relatives

aux conceptions irrésistibles. L'observation est destinée à la Deuts-

che medicinische Woche7zsclarift. Un homme de trente-un ans était

hanté par l'obsession qu'il lui fallait s'approprier des objets de

femme. Aussi dans un tramway extrayait-il de la poche d'une dame

sonporte-monnaie.Le diagnosticétait très difficile parce qu'il sem-

blait qu'il y eût simulation. Les débats seuls et les faits ultérieurs

mirent en lumière l'explication des symptômes les plus remarqua-

bles de l'inculpé. Il s'agissait d'un accordeur de pianos ayant sur-

mené son nerracouslique par desaccordscontinus,d'oùimpression-

nabilité extrême du cerveau. Ajoutez à cela des excitations laten-

tes du système génital (rêves, pollutions), ayant dirigé les pensées

pathologiques du patient sur un autre sexe. L'orateur détaille

les conditions nécessaires à la genèse des conceptions irrésisti-

bles. Il rappelle la discussion ayant eu lieu sur ce sujet dans le

sein de la Société en 1877. D'après son expérience, c'est toujours

une sorte d'asthénie cérébrale, quelles qu'en soient les causes les

plus multiples, qui préside forcément à la t'enèse de cette affection.

Jamais elle n'apparaît sur un terrain indemne d'hérédité, psychi-

quement normal, non surmené, c'est-à-dire en pleine santé men-

tale. Cas de Passow, Zippe, Charcot et Magnan. Ce n'est cependant

ni une psychose dégénérative, comme le veut de Kralft-Ebing, ni

une forme de folie systématique, comme le pense Schuele.

Discussion : .'

M. Westphal. Il a en son temps édifié la notion de conception

irrésistible, comme indépendante de tout autre trouble psychique ;

elle se produit isolément chez un individu autrement bien por-

tant. L'impressionnabilité cérébrale constitue un élément vague.

Il est certain que les conceptions irrésistibles apparaissent sans

affaiblissement préalable; en bien des cas, une émotion de l'âme

les a précédées, mais souvent ces états sont consécutifs. Les expres-

sions d'imprégnation, de tare héréditaire, sont incertaines, dé-

pourvues de clarté. Il n'est pas non plus constant qu'il n'y ait

qu'un côté de l'activité psychique d'atteint; c'est tout au plus si

l'on serait en droit de parler de prédominance temporaiie. Il

faudrait traiter des conceptions irrésistibles pures (théoriques),

à côté de celles où l'impulsion correspond à des conceptions.

Comment se fait-il que, dans certains cas, aux conceptions irrésis-

tibles s'associent des excitations sexuelles ? On ne sait. Ainsi l'ora-

teur connaît un jeune homme qui a des pollutions au moment où

se produit la conception irrésistible, l'obsession qu'il est enchaîné

SOCIÉTÉS SAVANTES. 437

ou qu'il lui faut se lier les mains. Un autre éprouve des excitations

sexuelles alors qu'il retrousse les manches de sa chemise.

M. JASTRONITZ. D'après ses observations, il y aurait lieu d'établir

que, chez un homme complètement sain, pur de toute tare

héréditaire, de toute prédisposition, les conceptions irrésistibles

n'apparaissent pas comme au milieu d'un ciel serein. Il serait à

souhaiter que des exemples de ce genre fissent l'objet de com-

munications détaillées. Le surmenage psychique et la dégénéres-

cence mentale jouent un rôle, mais il est difficile de tracer les

limites de ce que traduit le mot de dégénérescence; les psychoses

dégénératives ne peuvent avoir de bornes tracées qu'en des cas

concrets déterminés, et non en général.

M. OTTO. Communication avec pièces à l'appui sur un cas de

porencéphalie. Un jeune garçon de quatre ans présente un faible

développement physique (petit crâne de 41 centimètres de circon-

férence) ; c'est un idiot dans toute la force du terme. Depuis la

naissance, il existe de la rigidité de presque tous les muscles. La

raideur accompagne tous les mouvements actifs ou passifs, tous

les changements de position; dès qu'il s'agit de se remuer, les

muscles forment des bourrelets saillants très nets, si bien que

souvent l'enfant présente la rigidité d'un bâton. Cette raideur

disparaît pendant le sommeil et au repos. Sensibilité tout à fait

normale; il en est de même des réflexes, des organes des sens,

de la réaction électrique. Autopsie. Poids de l'encéphale, 470

grammes; hémisphère droit, 130; hémisphère gauche, 180. Deux

grandes lacunes porencéphaliques communiquent avec les ven-

tricules ; elles sont symétriquement placées dans le territoire de

l'artère cérébrale postérieure, à peu près à la limite qui sépare le

lobe temporal du lobe pariétal, et celui-ci du lobe occipital. Une

troisième perte de substance cicatricielle constitue une fente

petite mais profonde à la convexité du côté gauche, au point où

s'abordent la troisième frontale et la frontale ascendante; dispo-

sition radiaire des circonvolutions ambiantes. Intégrité des insu-

las ; absence bilatérale de l'opercule; brièveté des sillons de

Rolando. Aucune anomalie microscopique des nerfs, de la moelle

épinière, des muscles. Il s'agit, dans l'espèce, d'un processus de

destruction foetal par nécrose anémique du manteau; d'où les

trous et l'étiolement général de l'encéphale. Peut-être faut-il

accuser l'anémie maternelle pendant la grossesse. Pour expliquer

les phénomènes moteurs, il faut avoir recours à l'entrave apportée

au fonctionnement des circonvolutions ascendantes et de la région

pariétale. Ressemblance des troubles de la motilité avec la mala-

die de Thomsen (rigidité, saillie des bourrelets musculaires). Ce

cas sera publié en détail '.

1 Nous l'analyserons alors plus amplement, s'il y a lieu.

438 BIBLIOGRAPHIE.

Discussion :

M. VESTPHAL. Il n'y a pas de raison d'établir une comparaison

avec la maladie de Thomsen 1.

M. REMA&. La raideur congénitale spasmodique des membres

décrite par Rupprecht chez les enfants idiots dont l'encéphale

est lésé devrait être rapprochée de ce fait. Un malade autopsié

par Ross présentait précisément de la porencéphalie.

M. Bernhardt. Il y a plusieurs années, Scliultze a insisté sur la

grande analogie qu'il y a entre les phénomènes spasmodiques

des hydrocéphales et la paralysie spinale spasmodique des en-

fants. Rappelons aussi les travaux de Ross sur l'hémiplégie et la

paraplégie spasmodique, des enfants qui sont atteints d'une

lésion pathologique du cerveau, ainsi que les expériences toutes

récentes d'Adamkiewicz, sur la production de spasmes passagers

chez des lapins dont on excite momentanément par compression

la surface du cerveau. (Arch. f. Psych. u. No,venk ? XV, 3.)

P. KÉRAVAL.

BIBLIOGRAPHIE

X. La Gymnastique (notions physiologiques et pédagogiques,

application hygiéniques et médicales); par A. Collineau.

Cet important ouvrage est divisé en cinq parties : la première

est consacrée à l'Histoire de la gymnastique depuis les temps les

plus reculés jusqu'à nos jours. La deuxième est un exposé judi-

cieux des notions d'anatomie et de physiologie qu'il est indispen-

sable de connaître pour se rendre compte du mode d'action des

différentes pratiques gymnastiques. La troisième contient une

étude analytique.et critique de presque tous les exercices^corporels

et en particulier de la marche, de la course, du saut, de la danse,

de l'équitation, de la natation, etc. La quatrième est réservée à

l'étude des exercices qui s'exécutent à l'aide d'engins appropriés

au développement d'une région, d'une fonction ou d'un système

organique; c'est en un mot l'étude de la gymnastique dite avec

appareils.

1 Voir les Archives de Neurologie, t. VIII, p. 273; IV, Y46.

BIBLIOGRAPHIE. 439

Cette partie, une des plus importantes de l'ouvrage, est divisée

en plusieurs chapitres relatifs à la construction et à l'aménagement

des gymnases, à l'installation hydrothérapique qui en est le com-

plément nécessaire, etc... ; on y trouve, en outre, une description

méthodique des différents exercices gymnastiques et de tous les

engins et appareils avec lesquels ils s'exécutent : de nombreuses

figures aident à la clarté de cette description. Cette quatrième

partie se termine par un exposé critique de trois grandes;méthodes

modernes de gymnastique : 4 la Gymnastique suédoise fondée par

Hing; 2° la Gymnastique de chambre ou de l'opposant, préconisée

par Sclireiber en Allemagne et Pichery en France; 3° la Gymzzas-

tique militaire ou de l'Entrainement qui a reçu son plus grand dé-

veloppement en Angleterre. Les médications thérapeutiques de

la gymnastique forment l'objet de la cinquième partie.

En raison de la nature de ce recueil, nous nous bornerons à ré-

sumer ici les procédés gymnastiques applicables au traitement

des maladies nerveuses telles que l'idiotie et l'imbécillité, la chorée,

l'hystérie, l'épilepsie, l'hypocondrie et enfin un certain nombre

d'atrophies et de paralysies fonctionnelles.

L'utilité des exercices gymnastiques chez les idiots a été dé-

montrée depuis longtemps, les résultats qui ont été, obtenus à

Bicêtre et à la Salpêtrière, surtout depuis l'adoption par M. le

Dr Bourneville de la gymnastique Pichery, sont' à cet égard des

plus instructifs. Aussi croyons-nous devoir indiquer en quelques

mots le principe de cette méthode. M. Pichery a remplacé l'anta-

goniste que nécessite la gymnastique suédoise par un système

d'engins qu'il désigne simplement sous le nom d'opposant : ces

engins consistent en échelles de cordes jumelles et en [chaînes

élastiques constituées par des ressorts à boudin qui permettent

de mettre enjeu successivement et sans danger tous les muscles

du corps des enfants idiots, gâteux et semi-paralytiques.

On sait combien il est difficile de fixer l'attention delà plupart

de ces enfants, et combien ils sont inhabiles à se servir de leurs

mains; grâce à ces engins, on parvient assez aisément à dévelop-

per et à perfectionner la faculté de préhension et on habitue peu

à peu leur corps se prêter aux diverses attitudes de la station,

de la marche, du saut, etc. Une fois ces premier-, résultats acquis

ces enfants passent au grand gymnase, où on complète l'assou-

plissement de leurs membres par des mouvements d'ensemble

cadencés et rhythmés jusqu'à ce qu'ils soient en mesure de se

livrer aux différents exercices de la gymnastique proprement dite

ou d'application avec les instruments (haltères, barres à sphères,

niels, etc.), les agrès (échelles, cordes à noeuds, perche fixe ou

mobile) et les appareils (barres parallèles, trapèze, etc.)

Dans la chorée, cette folie musculaire, le choix des procédés

gymnastiques n'est pas moins important. On peut diviser à ce

440 BIBLIOGRAPHIE.

point de vue les choréiques en deux catégories : dans la période où

la volonté n'a aucune prise sur les puissances musculaires, la

gymnastique doit être passive et consister en massages à pleines

mains sur toute la surface du corps et en frictions continuées

pendant une heure. Dès qu'il se produit un amendement on passe

sans abandonner le massage aux mouvements de flexion et d'ex-

tension, successifs, lents, très réguliers et rhythmés. Enfin quand

la volonté commence à reprendre son empire, la gymnastique de-

vient active : aux marches, aux mouvements d'assouplissement

succèdent le maniement des haltères, des barres à sphères, puis

les manoeuvres aux agrès, etc.

Dans l'hystérie, les exercices qui se pratiquent au gymnase cou-

viendrontdans la majorité des cas en tenant compte, bien entendu,

de l'âge, du sexe, des aptitudes physiques et intellectuelles, etc.,

des sujets. L'hydrothérapie doit être le complément obligé de la

gymnastique.

Dans I'/M/sMro-p6pSt'e et l'épilepsie, les accès, sans contre-indi-

quer positivement la gymnastique, exigent cependant qu'elle ne

soit pratiquée qu'avec certaines réserves : M. Delasiauve a formulé

cet égard des préceptes qui peuvent encore aujourd'hui servir

de règle de conduite et l'expérience de tous les jours, démontré

que, sous l'influence des jeux et de la gymnastique, les accès

diminuent de fréquence.

Lorsqu'il s'agit d'un état habituel 3')aypocoztdrie, il faut suivre

le goût du malade et lui faire faire sans rigorisme de méthode

ses exercices de prédilection : le tout est de l'amener à déployer

chaque jour une certaine activité musculaire.

Les paralysies qui ne sont pas symptomatiques d'une lésion or-

ganique sont également justiciables de la gymnastique : M. Heiser

en a décrit les règles principales et a fait construire un appareil

spécial destiné aux hémiplégiques.

Enfin dans l'atrophie musculaire progressive, tant que la con-

tractilité musculaire subsiste, il est indiqué de la solliciter de

toutes les manières : la gymnastique pourra donc rendre encore

ici quelques services; malheureusement on sait combien est

sombre le pronostic de cette affection.

Il existe encore un grand nombre de maladies, pour la plupart

rebelles au traitement médical proprement dit, dans la thérapeu-

tique rationelle desquelles la gymnastique mérite de prendre place

au premier rang. D'un autre côté, on ne saurait nier la salutaire

influence des exercices gymnastiques pour le développement des

facultés physiques et intellectuelles. La place de jour en jour plus

grande qu'on leur accorde dans les nouveaux systèmes d'éducation

le prouve suffisamment. A ce double titre, le livre du Dr Collineau

nous parait appelé à un légitime succès. DENY.

BIBLIOGRAPHIE. 441

XI. Contribution à L'étude des troubles trophiques dans la paralysie

générale; par J. RAMADtER (Thèse 1884).

Les paralytiques généraux, offrent souvent des troubles de la

nutrition générale, amaigrissement ou engraissement qu'il n'est

pas toujours facile de mettre en rapport avec les autres troubles

psychiques ou somatiques. Certains appareils et certains tis-

sus paraissent pouvoir être atteints de préférence : on a signalé

des éruptions cutanées peniphigoïdes, maculeuses, anthracoïdes,

etc., le zona; mais l'étude de ces manifestations n'est pas encore

assez complète pour permettre d'établir définitivement leurs rap-

ports avec la maladie de Bayle. La paralysie générale offre avec

l'ataxie locomotrice des rapports étroits par l'étiologie l'évolution

symptomatique, l'anatomie pathologique; aussi n'est-il pas sur-

prenant de voir signalés dans le cours de la première maladie

des troubles qui ont été observés dans la seconde, nous voulons

parler du mal perforant plantaire (Christian), de l'atrophie mus-

culaire (Voisin et Hanot), d'une altération atrophique des os qui

favorise les fractures. -Parmi les troubles de nutrition, il faut

citer encore les escarres qui se produisent fréquemment sousl'in-

fluence des pressions prolongées, et en particulier les escarres

au sacrum, sur lesquels M. l3alllarer a particulièrement insisté.

Ces escarres sacrées, qui se rencontrent dans un grand nombre

d'affections nécessitant un décubitus prolongé, déterminent sou-

vent, lorsque le canal rachidien a été ouvert, la production d'une

méningite ascendante remontant jusqu'à la base du cerveau,

qui prend dans cette région une coloration ardoisée spéciale.

Cette coloration ne se rencontre, comme l'a montré M. Baillarger,

qu'en conséquence de l'escarre sacrée, et de la méningite consé-

cutive ; ce qui le prouve c'est que cette coloration se retrouve dans

certains cas d'otite interne ou de cancer de l'oeil ayant déterminé

la destruction de l'orbite; elle occupe alors des régions corres-

pondantes à la destruction osseuse et à la lésion inflamma-

toire. Ces escarres sacrées déterminent encore une autre compli-

cation non signalée par M. Ramadier, c'est l'infection purulente,

avec abcès de la rate, etc. Cn. F.

XII. Raison et Folie; par Auguste Tebaldi, professeur de psychiatrie

à l'université de Padoue. In-42 de 220 pages, Ulrico Hoepli,

éditeur. Milan 1884.

Ce livre, dit l'auteur dans sa préface, s'est trouvé écrit presque

sans y penser, au jour le jour, au hasard de l'inspiration et des

impressions quotidiennes, dans un langage dépourvu de cette ter-

minologie technique, de cet appareil doctrinal, de ce luxe de

4t2 BIBLIOGRAPHIE.

chiffres, qui rendent souvent si difficile et si pénible la lecture

des ouvrages de psychiatrie. Et de fait, rien n'y sent l'effort ; ce

n'est pas un traité solennel, mais une suite de conférences sans

prétention, une causerie pleine d'intérêt et de charme.

Les livres de ce genre s'accommodent mal d'une analyse métho-

dique, toujours en désaccord avec leurs allures primesaulières.

Nousciterons rapidement quelques-uns des principaux chapitres.

Tout d'abord, l'auteur rappelle quelles ont été les vicissitudes de

l'assistance publique des aliénés, et donne une description de

quelques asiles en France (Salpêtrière), en Angleterre, en Belgique

(Gheel), en Allemagne, en Italie.

Puis, entrant dans le coeur de son sujet (Raison et Folie), il se

livre à d'ingénieux aperçus sur l'idéation chez les fous, sur les

manifestations artistiques et poétiques, imaginatives et affectives

sans la folie.

Signalons aussi les pages consacrées au délire politique et au

délire religieux où l'on trouve d'intéressants exemples de ces

divers délires.

Sortant alors de l'asile, l'auteur nous fait faire une excursion

dans la vie ordinaire en nous présentant tous les demi-fous, tous

les cérébraux, tous les bizarres, tous les excentriques, qui pullulent

autour de nous et parmi nous, et nous indique en même temps

quelques-uns des desiderata de la médecine légale.

Suit une étude très fine sur les fous dans la littérature : Roland

furieux, Don Quichotte, le Fou de Parachos, Macbeth, le Roi Lear,

Iiainlet.

Et pour finir, quelques conseils sur l'hygiène de l'intelligence.

Un index bibliographique assez étendu termine ce volume.

P. Marie.

XIII. Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie

et l'idiotie; par BOURnC'1LLE, ]3oUTIEIt, ]3oN-i ? inr, S1GL.1S. Compte

rendu du service de Bicêtre pour l'année 1883. Paris, bureaux

du Progrès médical.

Ce volume est le quatrième de la série et comme les précédents

est divisé en deux parties. La première est consacrée à l'histoire

du service pendant l'année 1883 au point de vue de l'administra-

tion, de la statistique médicale, etc.; la seconde est exclusivement

constituée par des documents cliniques.

Dans la première partie, M. Bourneville et ses collaborateurs

donnent un compte rendu minutieux du fonctionnement du ser-

vice au point de vue des écoles et des occupations diverses pro-

curées aux petits malades, en insistant spécialement sur l'ensei-

gnement professionnel qui, grâce à une persévérance digne

d'éloges, a pu enfin être constitué et semble donner déjà d'excel-

INDEX bibliographique. 443

lents résultats. Nous n'avons pas à insister ici sur l'importance d'un

pareil progrès; mais nous devons constater qu'elle est considé-

rable et que c'est le point de départ d'une modification complète

dans le système d'assistance appliqué aux idiots et aux aliénés.

La deuxième partie comprend d'abord une étude très complète

du mérycisme par MM. Bourneville et Séglas; cette étude ayant

déjà paru dans les Archives de Neurologie, nous nous bornons à la

signaler. Vient ensuite une observation d'h3,stéro-épilepsie, chez

un jeune garçon de treize ans. Puis trois observations d'idiotie,

l'une avec méningo-encéphalite chronique, l'autre avec hydrocé-

phalie, la troisième avec atrophie simple des circonvolutions cé-

rébrales. Dès maintenant les quatre Comptes rendus du service

de Bicêtre renferment des documents intéressants et dignes d'être

consultés sur l'épilepsie, l'hystérie chez l'homme et l'idiotie. P. M.

INDEX bibliographique

Contribution à l'étude des névralgies du membre supérieur; par

TURBERT. (Thèse de Paris, 1884.)

Notes sur la rage, et particulièrement sur l'incubation, sur les

formes larvées et le pronostic; par WALLET. (Thèse de Paris, 1884.)

Etude sur quelques cas d'atrophie musculaire généralisée, consécu-

Mue à des tumeurs malignes de la colonne vertébrale; par Séné.

(Thèse de Paris, 1884.)

De la lypémani ? etplus particulièrement de la lypémanie anxieuse;

par METZGER. (Thèse de Paris, 1884.)

L'hystérie chez les jeunes garçons; par de CASAUBON. (Thèse de

Paris, 1884.)

De l'aliénation mentale chez les vieillards ; par 601DAL. (Thèse de

Paris, 1884.)

Contribution à l'étude de l'atrophie musculaire survenant dans le

cours de la sclérose en plaques disséminées ; par Daima. (Thèse de

Paris, 1884.)

D'une forme de névralgie maxillaire (névralgie des eftenMs) consi-

dérée surtout au point de vue de la pathogénie et du traitement; par

M. HELIE. (Thèse de Paris, t884.)

Essai sur la modification ci apporter ci la loi de 1838 à l'égard des

aliénés criminels; par Lemonnier. (Thèse de Paris, 1884.)

Contribution ci l'élude du non-restraint; par TAGLE Y ALFONSO.

(Thèse de Paris, 1884.)

Du traitement méthodique du tétanos par la fève deCalabar et son-

principe actif l'ésérine; par PISSOT. (Thèse de Paris, 1885.)

De l'aphasie au début de la paralysie générale; par Duhamel.

(Thèse de Paris, 1885.)

1,41 4 FAITS DIVERS.

Crises viscérales de l'ataxie locomotrice progressive ; par VEIL-

LEAU. (Thèse de Paris, 4885.)

De l'épilepsie syphilitique et de son diagnostic différentiel avec

l'épilepsie vulgaire ; par J. Barbier. (Thèse de Paris, 1885.)

FAITS DIVERS

Société française de TEllPliR9NCE.- Cette Société a tenu sa séance

solennelle le 29 mars, sous la présidence de M. A. DUVE11GEII, pro-

fesseur à l'Ecole de Droit. Après avoir entendu une allocution

chaleureuse de M. le professeur A. Duverger, le rapport sur la si-

tuation morale et financière de l'oeuvre par M. le DT Limier, se-

crétaire général, les rapports de MAI. Decaisne. Froc et Ch.Tierry-

Mieg et celui de M. Guignard sur les récompenses, la Société

a décerné une médaille de vermeil à M. le Dr Kümmer et au pas-

teur A1.-L.-L. Rochat, des médailles d'argent à MM. les Ds 1 . Jac-

quemart et A.-J. Devoisins, des médailles de bronze à M110 Conte

et M. Marambat; 750 fr. répartis entre MM. les D's Devoisins, Jac-

quemart, Legendre et John Lemoine, 244 diplômes de membre

associé honoraire, 29 médailles d'argent, 265 médailles de bronze,

14 diplômes de membre titulaire et 421 diplômes de témoignage

de satisfaction, 49 livrets de caisse d'épar2ne postale (550 fr.),

12 comptes rendus du congrès international de 4878, 420 manuels

Pécard, 12 manuels populaires du Dr Auguste Sanden, 89 exem-

plaires de la conférence Homais, 484 volumes de ses bulletins et

1,148 exemplaires des années 1880 à 1884 du Bon Conseiller, publié

sous son patronage.

Société médico-psychologique. (Prix à décerner en 1886). - Prix

Aubanel. Question proposée : « De la coexistence, chez un

même malade, de délires d'origine différente (alcoolique, épilep-

tique, paralytique, vésanique, etc.), au point de vue du diagnostic,

du pronostic, du traitement et de la médecine légale. » Ce prix

est de la valeur de 2,400 fr. -Prix Belhomme. Ce prix, de la

valeur de 1,300 fr., sera décerné au meilleur travail manuscrit

relatif à l'idiotie et de préférence aux lésions anatomiques des

centres nerveux dans l'idiotie. Prix Esquirol. Ce prix de la

valeur de 200 fr., les oeuvres d'Esquirol, sera décerné au meilleur

mémoire manuscrit sur un point de pathologie mentale.-Prix

Moreau (de Tours).-Ce prix, de la valeur de 200 fr., sera décerné

au meilleur mémoire manuscrit ou imprimé, ou bien à la meil-

FAITS DIVERS. 445

leure des dissertations inaugurales soutenues dans les facultés de

médecine de France, sur une question de pathologie mentale et

nerveuse. Les mémoires imprimés et les thèses devront avoir été

publiés en 1885. Nota. Les mémoires manuscrits ou impri-

més, ainsi que les thèses, devront être déposés, le 31 décembre

1885, chez M. le Dr Ant. Ritti, médecin de la Maison nationale de

Charenton, secrétaire général de la Société. Les mémoires manus-

crits seront accompagnés d'un pli cacheté avec devise, indiquant

les noms et adresse des auteurs.

' Société de psychologie physiologique de PARIS. - Nous signa-

lons à nos lecteurs la fondation toute récente d'une Société de

psychologie physiologique, dont les statuts, qui ne peuvent être

reproduits ici, sont en grande partie modelés sur ceux de la So-

ciété de biologie. La nouvelle Société a pour but l'élude des phé-

nomènes psychiques, à l'état normal et à l'état pathologique,

d'après la méthode d'observation et d'expérimentation. Elle se

compose : 1° de 30 membres titulaires résidants à Paris; 2° de

membres correspondants dans les départements.

Le bureau sera ainsi composé : : Président, M. Charcot ; vice-

présidents, MM. P. JAYET et Th. RIBOT; secrétaire général,

AI. Ch. RICUEr; secrétaires, MM. Ch. Féré et E. GLEY ; trésorier,

M. FERRARI. Pour les membres correspondants, la cotisation

annuelle est fixée provisoirement à 12 fr. par an. Les personnes

qui désirent s'associer devront s'adresser à M. Ch. Richet, bureau

de la Revue scientifique, ou au bureau de la Revue philosophique.

- Dans l'un de nos prochains numéros, nous publierons les pre-

mières communications faites à la Société. (Revue philosophique.)

Nominations ET promotions. M. le Dr DuBuissoN est nommé

médecin adjoint de l'asile Sainte-Anne, en remplacement de

M. le Dr BRIGAND (2e classe, 2,500 fr.). M. le Dr Brusque est nommé

médecin adjoint de l'asile de Vaucluse (Seine), en remplacement

de M. le Dr BOUDRIE (Ire classe, 3,000 fr.).

Ont été nommés chevaliers de la Légion d'honneur, pour

services exceptionnels rendus pendant la dernière épidémie cho-

lérique : M. le Dr BENOIT, médecin de l'asile d'aliénés de Privas

(Ardèche) ; M. le Dr Campagne, médecin en chef de l'asile d'alié-

nés de Montdevergues (Vaucluse).

Les récompenses suivantes ont été en outre accordées par

décret en date du 30 mars, sur la proposition des ministres de

l'intérieur et du commerce :

Méd(tilles d'o ? ,de 1 le classe : ,AI. CARTOUX, directeur de l'asile Saint-

Pierre à Aiarseille; le Dr D ? ui3y, directeur-médecin de l'asile d'Aix;

le Dr Bouteille, directeur-médecin de l'asile de Toulouse; le

Df Goujon, sénateur, maire du 12° arrondissement de Paris.

446 FAITS DIVERS.

Médailles d'or de 2° classe : M. le D Rouc, médecin de l'asile

d'aliénés de Limoux; le Dl ABRAM, médecin adjoint à l'asile d'a-

liénés de Marseille; le Dr médecin adjoint à l'asile d'a-

liénés d'Aix; le Dr Motet, vice-président de la commission d'hy-

giène du 11, arrondissement de Paris.

Médailles d'or : M. le Dr FEi3vR, médecin adjoint de l'asile de

Montdevergues (Vaucluse); Alm°R.1YNAUD (en religion soeur Sainte-

Opportune), supérieure des soeurs de l'asile de Montdevergues.

Médailles d'argent de Ire classe : AI. le Dr CAILLAU, médecin

adjoint de l'asile de Toulouse ; M-11 Salé (en religion soeur Marie-

Rédemption), attachée à l'asile de Toulouse, et Cassenas (en reli-

gion soeur Irenée), attachée à l'asile d'aliénés de Limoux.

Médailles d'argent de 2e classe : M. Bonnet (Marius), infirmier à

l'asile de Marseille ; Meiluan et 111.1NON, internes à l'asile de Tou-

louse ; SOULA (Raymond), surveillant en chef à l'asile de Toulouse;

MUe Rouan (Marie), infirmière à l'asile de Toulouse.

Médailles d'argent : M11. Autan et FOURIEL, internes à l'asile de

Montdevergues (Vaucluse).

Médailles de bronze : MM. Cr.ucmcn (André), G.annlcor'a (François) :

Germain (Philippe), surveillants et VOLLF (Antoine), conducteur

des travaux à l'asile deMontdevergues (Vaucluse).

Lettres de félicitations : MM. BKLTRUDE, interne à l'asile de Mar-

seille ; Jean (Adrien), JEAUNEAU (Auguste) et Barger (Antoine),

infirmiers; 11L ? sAuLnEnT (en religion soeur Saint-Vincent), FAu-

CONIT (élicie), Girault (Eugénie) et Bladon (Marie), infirmières

au même établissement.

Mentions honorables : GRATADOUR et Roques, internes suppléants

à l'asile de Toulouse.

Nécrologie. Le D''Prosper Lucas, vient de mourir à J'âge de

soixante-dix-sept ans, Aleunecy (Seine-et-Oise), où il s'était retiré

depuis sa mise à la retraite. Plusieurs journaux, parmi lesquels le

Temps, la Justice, publient sur notre regretté collègue la note

suivante :

« Successivement médecin des aliénés de Bicêtre et de l'asile

Sainte-Anne, le DT Prosper Lucas est surtout connu par son

Traité philosophique et physiologique de l'hérédité naturelle dans

les états de santé et de maladie du système nerveux (2 vol. in-8°,

Paris, 1847-1850). Cet ouvrage, qui dénote une érudition et des

connaissances scientifiques peu communes, est la marque d'un

esprit profond et original ; il a été, on peut le dire, l'inspirateur

de tous les travaux qui ont été publiés depuis sur l'importante

question de l'hérédité physiologique ou morbide, tels que ceux

de Moreau (de Tours), de Morel, de M. Th. Ribot, etc., pour ne

citer que des écrivains français. Darwin a beaucoup contribué à

faire connaître à l'étranger le livre de notre savant compatriote.

FAITS DIVERS. 447

Le Dr Lucas avait recueilli dans ses services d'aliénés, de nombreux

documents qu'il se proposait d'utiliser pour un volume complé-

mentaire à son grand traité, et dans lequel il devait étudier les lois

qui président à l'hérédité des maladies mentales.

« Le Dr Prosper Lucas était le frère de M. Charles Lucas, membre

de l'Académie des sciences morales et politiques, bien connu par

ses travaux sur les questions pénitentiaires et l'abolition de la

peine de mort. »

Né en 1808 à Saint-Brieuc (Côtes-du-Nord), le Dr Prosper Lucas

avait pris une part active aux événements de 1848, et s'était pré-

senté à deux reprises aux élections. Dans sa profession de foi

républicaine du 19 avril 1849, nous citerons les passages sui-

vants :

« Deux partis du passé, dans leur aveugle et brutal égoïsme, n'ou-

blient que la patrie, la patrie épuisée de tant de convulsions qui

demande à ses enfants de la stabilité, de l'ordre et du repos ! 1

Tous deux sourds à sa voix, ou prenant celle du fanatisme et de

la passion pour elle, sans mémoire du passé, sans conscience du

présent, sans pressentiment d'un avenir qui nous touche, tendent t

avec une pensée différente, par des voies opposées, à un seul et

même dénouement, à une série sans fin de nouvelles catastrophes,

dût leur triomphe s'acheter de toute la fortune et de tout le sang

de la France; dussent-ils se disputer et s'arracher ensuite, sur

les ruines du pays, un règne sans lendemain.

« Contre les maux dont ces deux partis menacent la France, dans

notre foi profonde, il n'y a qu'un refuge : il est dans ce qu'ils at-

taquent ; il est dans le maintien et l'organisation paisible et

régulière de la République, etc.; toute révolution nouvelle,

qu'elle soit amenée par une insurrection ou par un coup d'Etat,

c'est le triple fléau, cette fois inévitable, de la banqueroute, de la

misère publique et d'un malheur cent fois pire que la guerre

civile, d'une jacquerie sociale qui suivra la misère. »

Outre son important Traité sur l'hérédité, qui obtint de l'Ins-

titut (Académie des sciences) un prix de 2,000 fr., M. le D Prosper

Lucas a publié avant son doctorat, 1831, 1 vol. in-8", couronné

par les sociétés des méthodes de l'enseignement élémentaire, sur

la liberté d'enseignement, une dissertation in-4°, intitulée : De l'inti-

tatioiz contagieuse, ou de la propagation sympathique des névroses

et des monomanies, et plusieurs mémoires scientifiques. La médecine

aliéniste perd en M. le Dr Prosper Lucas, un de ses membres les

plus éminents, un esprit distingué et érudit. (Ann. méd. psych.)

Le 3 mars dernier, est décédé le Dr Hurel (Pierre-Alexandre),

médecin à Gaillon et de la maison centrale de cette ville. Ce con-

frère distingué n'avait pas quarante-quatre ans. Depuis quinze ans

qu'il habitait Gaillon, il avait su s'attirer les sympathies générales

par son dévouement et sa charité.

448 FAITS DIVERS.

LeD'Hurel était officier d'académie, membre correspondant

de la Société de médecine légale de France et de la Société mé-

dico-psychologique de Paris. Nommé en 1869, médecin de la

maison centrale de Gaillon, et frappé du nombre de criminels

devenant aliénés, il n'eut pas de cesse qu'il n'obtînt de l'adminis-

tration l'annexion à la prison d'un quartier pour ces malades. Il

fut assez heureux, aidé en cela par les inspecteurs généraux,

de voir ses voeux réalisés en 1876.

Parmi les travaux publiés par notre regretté confrère, nous

citerons spécialement les suivants : Quelques observations pour servir

ci l'histoire de la folie pénitentiaire, in Ann. inéd.-I)sych. ne' de

mars et de mai 1875. Le quartier des condamnés aliénés annexé à

la maison centrale de Cation, in Azzn. méd.-psych., n° de mars-1877.

Etude statistique du quartier des condamnés aliénés annexé à la

maison centrale de Gaillon; in Compte rendu du Congrès interna-

tional de médecine mentale. Paris 1880. tÀ2111. t nzéd.-psych.)

Inauguration DE la statue de PINEL. La Société médico-psycho-

logique inaugurera le 13 juillet prochain la statue de Pinel, érigée

place de la Salpêtrière et olferte, comme l'on sait, à la ville de

Paris par la Société.

L'ordre du jour de la séance d'inauguration vient d'être ainsi

fixé : NI. Dagonet, président, ouvrira la séance par une allocution.

M. Legrand du Saulle, secrétaire du comité d'érection, fera remise

de la statue à la ville de Paris, représentée par 111. le Préfet de la

Seine. NI. Ritti, secrétaire général, lira un éloge de Pinel.

Nous croyons savoir également que plusieurs autres discours

seront encore prononcés par les représentants officiels de l'Aca-

démie de Médecine, de l'Académie des Sciences, de la Faculté de

Médecine et autres compagnies dont l'illustre Pinel était membre.

La fête se terminera par un banquet offert par la Société

médico-psychologique.

VIVISECTION. - Le ministre des cultes de Prusse, NI. de Gossler,

a toujours reconnu que la vivisection était nécessaire à l'avance-

ment de la science médicale, il a toujours résisté aux protesta-

tions et pétitions des anti-vivisectionnistes. 11 a cependant fait

faire une enquête sur l'extension des pratiques vivisectives dans

les Universités, ce qui lui a permis de constater que partout des

principes humains et recommandables présidaient aux expériences

sur des animaux. Pour obvier à des abus possibles, le ministre a

jugé utile d'assurer une consécration aux règles en usage jusqu'à

ce jour. Voici l'ordonnance :

1° Des expériences sur des animaux vivants ne doivent être

faites que dans le but de recherches sérieuses ou dans un but

d'enseignement sérieux. 20 Dans les cours, on ne fera de vivisec-

tions qu'au cas où elles sont nécessaires pour faire comprendre

FAITS DIVERS 449

clairement la pensée du professeur. 3° Les préparatifs de l'opéra-

tion seront dans la règle faits avant le commencement de la dé-

monstration elle-même et en l'absence des auditeurs. 4° Les vivi-

sections ne seront faites que parles professeurs ou Privât docents

ou sous leur responsabilité. 6° Dans tous les cas où l'anesthésie

n'est pas incompatible avec le but à atteindre par la vivisection,

les animaux serontendormis complètement et pendant un certain

laps de temps. '

Congrès psychiatrique d'Anvers. Le secrétaire de la Société

de médecine mentale de Belgique, notre distingué confrère le

Dr Ingels, vient d'adresser aux médecins aliénistes une lettre dont

nous extrayons les principaux passages :

« Dans sa dernière réunion (31 janvier 1885), la Société de mé-

decine mentale a décidé, conformément aux usages anciens, de

tenir une séance au lieu de domicile de son Président, c'est-à-

dire à Anvers, pendant l'année 1885.

« Cette séance aura lieu dans le courant de l'été à une époque

qui sera déterminée d'une manière plus précise ultérieurement;

elle coïncidera avec l'Exposition universelle qui s'ouvrira dans la

même ville au mois de mai prochain. La Société, désirant rendre

cette réunion plus solennelle, a résolu d'y convier nos confrères

de l'étranger. Ellia manifesté la volonté d'organiser à cette occa-

sion une sorte de Congrès psychiatrique, qui durera de deux à

quatre jours. Elle a désigné dans son sein une commission char-

gée de régler toutes les particularités de cette réunion scienti-

fique et confraternelle. La commission se compose du bureau de

la Société, MM. Desguin, Lentz et Ingels, auxquels on a adjoint

11111. Oudart, inspecteur général des établissements d'aliénés;

Lefebvre, professeur à l'Université de Louvain; Heger, professeur

à l'Université de Bruxelles; R. Boddaert, professeur à l'Université

de Gand; Semai, médecin-directeur de l'asile de Alons. Elle se

réunira une première fois le samedi 14 février 1885.

« Je viens vous prier, monsieur et honoré confrère, de bien vou-

loir nous adresser votre avis sur la marche à suivre dans l'organi-

sation du Congrès et nous indiquer les questions d'ordre scienti-

fique ou administratif que vous désireriez entendre discuter à

cette occasion. Vous voudrez bien aussi nous informer si vous

vous proposez de faire une communication orale ou écrite lors de

la réunion du Congrès. Vous rendriez la besogne de la commis-

sion plus facile en nous honorant à ce sujet d'un mot de réponse

dans le plus bref délai, avant la fin de la semaine prochaine si

c'est possible. Vous nous obligerez en adressant toutes vos com-

munications au secrétaire, le Dr B.-C. Ingels, médecin de l'hos-

pice Guislain, à Gand. »

Archives, t. IX. 29

450 FAITS DIVERS.

Nécrologie. Le Dr Daniel Noble est mort à Manchester le

12 janvier dernier, à l'âge de soixante-quinze ans. On lui doit,

d'après The Journal of mental science, les travaux suivants : Ele-

znents of rsychological Medicine; The Braizz and its Physiology ;

Mesmerism Truc and Mesmerism False; The Humazz 31111d in its Rela-

tions ivith the Brain aizd Nervous System; Influence of Manufacture

upon Healh tiiid Life.

Le même journal nous annonce la mort du D' W.-A.-F.

BMWNE (de Dumfries). Il était âgé de quatre-vingts ans. On lui

doit, entre autres travaux : What Asyluan werc, arc. alzrl oziglb to

be; On Gztiteau; illad Pocts, etc. Il a été superintendant de Mon-

trose Asylum, de Dumfries Royal Institution; commissaire pour

l'aliénation en Ecosse, etc.

- Nous avons le regret d'annoncer la mort de 11m° Emilie Bovell-

STURGE, docteur en médecine de la Faculté de Paris, décédée à

Nice, le 2 avril 1885. Emilie Bovell avait fait sa thèse à la Salpê-

trière : De quelques accidents de l'épilepsie et de <*/tte)'o-ëp ! 76ps : c

(Paris, 1877). Elle prenait une part active aux Congrès d'hygiène,

et s'intéressait à toutes les questions médico-sociales. Elle avait

épousé le Dr Allen Sturge, connu par ses intéressants travaux sur

les maladies nerveuses. L'an dernier, elle a publié un opuscule

sur l'Education des enfants abandonnés en Angleterre.

Tentative d'assassinat D'UN aliéné sur UN médecin. Le 23 no-

vembre dernier, le Dr Altirray Lindsay, médecin en chef de l'asile

d'aliénés du comté de Derbyshire à Mickleover, a été grièvement

blessé par un aliéné, avec un ciseau. L'accident eutlieu dansl'ate-

lier des charpentiers. AI. Alurray Lindsay fut blessé au nez, à l'ab-

domen, à la poitrine au voisinage du coeur. L'aliéné exprima le

regret que sa tentative n'eût pas réussi. Il était employé depuis

plusieurs années aux ateliers, et considéré comme un homme

inoffensif. Nous sommes heureux d'apprendre du Americtzn Journal

of Insunity, et nous nous associons de tout coeur à notre con-

frère - que les blessures du Dr Lindsay sont en bonne voie de

guérison, et que sa convalescence suit une marche favorable.

Asiles d'aliénés DE la Seine. Ai. le Préfet de la Seine a invité

la commission de surveillance des asiles à rechercher une localité

convenable pour la construction d'un nouvel asile d'aliénés. Le

7 juin dernier, la commission a visité le vaste domaine qui entoure

l'asile de Ville-Evrard, et a choisi sur ce domaine J'emplacement

du futur.

Incendie A l'asile d'aliénés de VILLEJuir. Lundi 10 février, à

8 heures et demie, un incendie a éclaté sans cause connue à l'asile

d'aliénés de Villejuif dans un baraquement en planches servant de

bulletin bibliographique. 451 t

cuisine, de buanderie, de lingerie, de bains pour des gens de ser-

vice. Ce baraquement est situé à dix mètres du bâtiment du 1 Il et

2e quartier, occupés par quatre-vingts aliénées. Les secours ont été

organisés avec le plus grand zèle. Les malades ont été évacuées sur

les autres quartiers sous la direction de M. Barroux, directeur, de

11. le Dr Briand, médecin en chef et des internes. Les surveillants

et les infirmières laïques ont opéré le transport des malades avec

un sang-froid et un dévouement dignes des plus grands éloges.

Les pompiers sont accourus de toutes les communes environnantes.

illalbeureusement, l'eau manquait complètement à l'asile; on n'a pu

en trouver, après beaucoup de difficultés, qu'à 800 mètres de

l'asile. Deux sous-employés, le cuisinier et le garde-magasin en

voulant sauver du linge se sont laissés prendre par les flammes,

et, en saillant du 1" étage, se sont fait des contusions, légères

heureusement. Les dégâts sont évalués à 125,000 francs environ.

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE

BOTTE% (F.). Le Magnétisme animal, étude critique et expérimentale

sur l'hypnotisme ou sommeil nerveux, provoqué chez les sujets sains

, léthargie, catalepsie, somnambulisme, suggestions, etc.). Volume m-18

de 982 pages, avec 3 planches. Prix : 3 fr. b0. - Paris, 1884. Librairie

Pion et C'e.

DuvAL(E.) Des avantages de l'hydrothérapie hivernale. Brochure

n-S" de 30 pages. Paris, 1885. Chez l'auteur, 3, rue du Dôme.

MAUDSf.EY (H.). Le crime et la folie. (Bibliothèque scientifique infer-

nationale.) Un volume in-8" cartonné, de 297 pages. Prix : 6 fr. - Paris,

1876. Librairie Alcan.

MAKTEGAZZA (P.). La physionomie et les sentiments. (Bibliothèque

scientifique internationale). Un volume in 8- cartonné, de 261# pages, avec

8 planches et 7 figures. Prix : 6 fr. Paris, 1855. Librairie Alcan.

Obersteiner (H.) The cérébral blood-vessels in lteallh and disease.

Extrait du tome VU du Brain. Brochure in-S" de 21 pages. London, 1S8 ? 1.

z and C°.

Ueber Pruritus )tiemalis. Z aus Dr tt')«<'A6/e) ?

" ? jVcd. Wochenschrift ? Wien, 188').

Der feinere Bail der Kleinhimzinde bei Mcnschen untl Thicren.

Separatabdruck aus dun « Iliologischen Ccntralblatt o. Ërtaugen, 1880

Die Beziehztîigeib der syphilis zur Dcmentia paralytica. Separatab-

druck ans Di,. lvzitelshôfers. Brochure 111-8- de 10 pages.

Régis (E.). Manuel pratique de Médecine mentale. Un volume in-ts,

cattonné, de 610 + xxiv pages. Prix : 7 Ir. 50. - Paris, 1884. Librairie

A.can.

452 bulletin bibliographique.

Secum z Illustrations of the ano21alozis course of posterior

spinal sclerosis. Brochure iii-8- de 11 pages. New-York, 1884.

Archives of nzedicine.

anzerican nielliod of giviug potassium iodide in very large doses

for the la ter lésions of syphilis; more especiali'ty syphilis of the nervous

System. Brochure iii-8o de 18 pages. New-York, 1884. Archives of

medicine.

Westnial. Ueber einen Fall von Zerstdrung des lz'7tlcen Schlàfelappens

durch Geschwulstbildarzg oline aphasische Sûtrungen. Lirzhshcirzdigkeit

Brochure in-8" de 12 pages. Extrait du Be)'H7tO' /t7tMC/te Wochenschrift.

1884.

Ueber einen Fall vott spinale)' Ekrankung mit 7 ? ;'& ? M' : ? ung

allgmeiner Paralyse. F7,zilizeitiqe Diagnose durch Nachweis der Frhlens des

hniephtEuomena. Brochure in-80 de 18 pages et une planche. Extrait des

Archva für Psychiatrie, 1884, t. XV, cahier 3.

Le redacleur-gcranl, Bourmsville.

TABLE DES MATIÈRES

Acétal (action de 1'), par Stoltenholï,

82.

Aconit (effet de la teinture d'), par

Neuendorif, 86.

Affaire Isnidea, 398.

Aliénés (refus d'aliments chez les),

par Siemens,208.

Aliénés criminels, par Sommer, 77 ;

- par lallc, 113.

Aliénés en tibettc (actes criminels

commis par les). par Motet, 88.

Aphasie, par Lichtheim, 92.

Assistance des aliénés dans la pro-

vince de Brandebourg, 119.

Ataxie dans l'enfance, par Schultz,

252.

Athétose, 323, 33,-).

Batterie à courants constants (sim-

plificatiou de la), par Keebner, 82.

Bromure de zinc et bromure de po-

tassium, par Testa, 84.

Catotonie, par Neuendorff, 265.

Circonvolutions (anomalies), 429.

Conceptions irrésistibles en méde-

cine légale, 436.

Coeur(ataxie paralytique du d'ori-

gine bulbaire), par Semmola, 433.

Conscience (de la dans les états

connus sous le nom d'état d'in-

conscience), par Pick, 261.

Congrès des membres de la Société

des aliénistes de basse Saxe et

de Wesphalie, 122.

Congrès des neurologues et alié-

nistes de l'Allemagne du sud-

ouest, 92.

Coprolalie, 19,158.

Curare (du dans le traitement

de l'épilepsie), par Bourneville

et Bricon, 43, 201, 319

Cysticerques de l'encéphale, 111.

(Un cas de ce genre a été omis

dans la table du t. VII, 1). 218.)

Dégénérescence, crime et névropa-

thie, par Knecht, 267.

Dégénérescence grise cérébro-spi-

nale (affection analogue à la),

par Westphal, 258.

Démence paralytique (saturine), 405;

(chez les chiens), 433.

EctolaUc, 49, 15S.

Electricité statique (sur une action

remarquable de l'), par Stein, 83.

Electricité (traitement des psycho-

ses par 1'), par Tigges, 85.

Ellen (colonie), 416.

Elongation des nerfs dans le tabès

dorsal, par Rosenstein, 85;

(élongation du nerf sciatique et

altération de la moelle consécu-

tivesl, par Tarnowsky, 289.

Encéphale (contribution à la patho-

logie de l'), par lVitl : owsl : y, 59.

Enfants (ataxie chez les), 252;

(troubles de coordination chez

les), 254.

Epilepsie spinale et fréquence de

la respiration, 66.

Epileptiques (assistance des), par

\'ildertntttU, 78;- (Obnubilation

psychique durable chez les), 117.

Epilepsie (traitement par le curare,

43, 201, 319; -(Recherches expé-

rimentales et chimiques sur 1'),

par Unverricht ? 9 ? (causée

par peur de cadavres), 405 ; -

(rémissions dans l'), 3 ? 5, 334;

symptomatique , pseudo-kyste,

par Bourneville et Bricon, 320.

Epilepsie, hystérie et idiotie (re-

cherches cliniques et thérapeu-

tiques sur), par Bourneville,

Boutier, Bonnaire et Séglas; 442.

Eteruuments hystériques, 53.

Excitabilité électrique des muscles

et des nerfs chez l'homme (iu-

454 1 TABLE DES MATIÈRES.

fluence du travail nervo-muscu-

laire et de la pratique sur 1'), par

Orchansky, 137.

Faciale (un cas d'atrophie uni-

latérale), par Bernhardt, 65.

Familles nerveuses, par Moebius

78.

Galvanomètre vertical absolu, 425-

Gliose de l'écorce du cerveau, 99-

Génital (inversion du sens), par

Tarnowsky, 272.

Genou (phénomène dit - chez les

enfants), par Pehtzoeus, 58; -

(disparition du phénomène du

chez les vieinards),parA10Bbius,

251.

Gheel (sa colonie), 407.

Graphique (représentation - de la

marche des maladies mentales),

par ltégis, 87.

Gymnastique(la), IrarColhneau,4 : i8.

Hallucinations de Jeanne d'Arc,

par Ireland, 72.

Hiver (stations d'), pour les ma-

ladies nerveuses), 115.

Hydrothérapie chez les aliénés,

114.

Hypnotisme (nutrition sous l'in-

fluence cle l'), par Guertler, G4.

Hystérie (éternuments dans 1'), par

SOU2a-Leite, 53 ; - (dans sesre-

lations avec quelques maladies

localisées), par Castels, 61 ;

Hystérie convulsive, pat, Gitrieiio,

129 ; - (viscérale), par F abre,

139.

diots (assistance des), 418,

nurmierestuiquesdeSamt-Anne

- (discours de AI. Daonet 1 la

distribution des prix de l'école

des), 284.

Infirmiers (éducation spéciale des

d'asile), par Clarh, 69.

Jntervaiieshjcides (interdiction dans

les), 418, 420.

Istiidea (allaii,c) (V. lisdea).

Ivrognerie et idiotie, par Kind,

266.

Lipome du plexus choroïde, par

Obersteiner, 81.

.'obe temporal (destruction com-

lrlète du), 327, 33 ? .

Maladies mentales ( difficulté de

diagnostic), 73; consécutives

à une élévation de température

extérieure), par Victor, 76.

Manie (pathologie de la), par Wi-

glesworth, 67.

Marche a reculons delà grenouille,

98.

Mémoire (perte aigué de la), par

Sa, f7

mis(l (affaire), 398.

.Moelle épinière (commotion de la),

par Diiméiiil et Ptel, 1, 145, 289,

307 ; (altérations delàcausées

par l'élongation du nerf sciatique) ,

par Tarnowsky. 289.

Moelle épinière (formation de ca-

cités dans la), 60; (compres-

sion de la par carie ; des ver-

tèbres), par Rallier, 61) - -tiio-

malie du développement, 110.

Motrice (incoordination avec

écholalie et coprolalie), par Gilles

de la Tourette, 19. 158.

Motrice (arrêt de développement

dans la spUî·w - du cerveau),

par Gensen, 258.

Muscles (pseudo-hypertrophie des),

par Berger, 255.

Myélite traumatique, par Sclultze,

110.

Myoelonns multiple, 423.

Nerfs périphériques (maladies des

et du sympathique), par

Seelimnller,135;-(lésions des\

1126.

Neurasthénie dyspeptique , par

Scltuele, 95.

Névrite multiple, par 111uller, 255 ;

par Vierorcit, 236.

Nutrition (dans l'hypnotisme et la

paralysie agitantel, G4 ; - choz

les aliénés pendant l'abstinence),

106.

Nutrition du système nerveux à

l'état normal et n l'état pathologi-

que, par llairet, 231, 360.

Z commun (paralysie

périodique de z yar laebius,105.

(anomalies ciel ),dans les mala-

dies nerveuses et mentales.

Ophthalmologique (contribution au

diagnostic des maladies du cer-

' veau), par 1'illraml, 136.

Optiques (atrophie des nerfs), par

Ulittioti, 427.

Paralysie agitante (nutrition dans

la), 64; traitement symptoma-

tique de la), par Erlenmeyer, 83.

TABLE DES MATIERES. 455

Paralysie générale (pathologie et

anatomie pathologique), par Za-

cher, 20; ; - (Lroubles tropliilues

dans la), par Ramadier, 441.

Paralysie partielle de la sensibi-

lité, 425.

Paralysie spinale spasmodique avec

autopsie, par Westphal, 259.

Peau (sur la seiisibilitétle la - à

l'égard des excitants électriques),

par llrbius, G4.

Porencéphalie, 437.

Prix Belhomme, 39S ;-Prix lioreau

de Tours, 398.

Programme d'enseignement dans

les collèges, 86.

Prostitution (dans ses rapports avec

l'alcolisme, le crime et la folie),

par La(lanie, 134.

Psychoses (consécutives aux mala-

dies fébriles), par Kirn, 71; -

(traitement dans la famille et par

l'opium, 125.

Psyctioses(etcarcitioiiie),pat,Netiei)-

dorlf, 2fi3; - (et traumatismes

cralniens), par Hartmann, 70.

Pupille chez les vieillards, par lllm-

bius, 252.

liaison et folie. par Tebaldi, 441.

Réflexes rotuliens et trépidation

épileptoide, par de Fleury, 62.

Réflexes tendineux (recherches ex-

périmentales sur les), par Monnn-

seii, 108.

Respiration (fréquence de la - et et

épilepsie spinale), par illiliotti,

66.

Responsabilité des imbéciles pour-

vus d'éducation, par Slmttle-

wortli, 90 ? .

Sclérose cérébelleuse, par Sommer

261. l .

Sénilité précoce et rapide (des

troubles mentaux dans la), par

Charpentier. 275, 395.

Sensations pathologiques dans les

psychoses, 123.

Sensibilité tactile (physiologique et

pathologique), 103.

Société médico-psychologique, 86,

275.

Société psychiatrique de Berlin, 1 11 1 .

Somnambule extra-lucide, par

Lambl, 269.

Stéréognostiques (recherches), par

Hoffmann, 134.

Syphilis cérébro-spinale, par AI-

tbaus, G4. 64.

Syriti,oiilyélie, 428.

Système nerveux central, par Kah-

ler (An. Kéruval), 13.

Tabes (coutiibutiou à la sympto-

mutOloyO du), pai' l3erger, G2 ; 1*

(c)ei ! lesfemmes),pnr.Moebius,

253 avec trouble mental, 263;

du), 429.

Température (importance au point

de vue du pronostic d'un abais-

sement extrême de la tempéra-

ture dans le cours des maladies

mentales), par Popoft, 355.

Tendineux (phénomènes), par Ro-

senheim, 258.

Trijumeau (anection du), par Sena-

tor, 63.

Troubles trophiques, 332.

Vision (trois autopsies pour servir

à la localisation .cérébrale des

troubles de la), par Ch. Féré, 22.

Visuelle (sphère), par Moiiakow,

256.

TABLE

DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS

Althatis, 64.

Bajenoff, 275, 392.

Berger, 62, 255.

Bernard, G2, 440.

Beriihai,dt, 65, 425.

Binet, 392.

Bonnaire, 442.

Bouchereau, 87, 397.

Bourdin, 87.

Bourneville, 43, 20t, 319, 442.

Boutier, 442.

Briand, 92, 397, 405.

Bricon, 43, 201, 1t9.

Castels, 61.

Charpentier, 275, 396.

Christian, 87. /

Clark (Cainpl)ell), 69.

Collineau, 448.

Da'onet, 284, 404.

Daily, 86.

Deny, 440.

Duménil, 1, 145, 307.

Erb, 92.

Engelken, 124, 416.

Erlenmcyer, 83, 253.

Eyselein, 122.

Fabre, t39.

Falk, 113.

Falret, 87.

Féré, 222, 392, 441. L.

Fleury (de), 62.

Foville, 88, 395.

ruei : çtner, G0, 97, 99, 107.

Gautiez, 135, 139.

Gensen, 258,

Gilles île la Tourette, 19, 158.

Gimeno, 129

Goldstein, 263.

Guertler, 64.

Guttstat, 418.

Hartmann, 270.

Hasse, 124, 129.

Hesse, 124, 407.

Hirsch, 114.

Hitzig, 99, 101, 107.

Hoffmann, 134.

lreland, 72.

Jastrowitz, 111, 112, 419, 436, 437.

Jolly, 97.

Kahler, 61, 132.

Kahn, 138. -

Kéraval, 59, 60, 61, 64, 65, 66, 71,

77, 78, 79, 81, 82, 83, 84, 85, 86,

110, 115, 122, 129, 134, 252, 253,

254,255,956,257,238,259,361

262, 263, 266, 268, 269, 270, 272,

416, 422, 438.

Kind, 266.

Kirn,7t.

Kiieclit, 117, 267.

Koebner, 82.

Kroepelin, 101. 1.

Kussmaul, 95, 97.

Ladame, 134.

Lambl, 269.

Langreutur, 113.

Lerand du Saulle, 395, : ;9G, 405.

Leite (Souza), 53.

Lichtheim, 92, 95.

Lahr, t11, 113, 114, 420.

Limier, 87, 395.

TABLE DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS. 57

Magnan. 397.

111airet, 231, 3G0.

Manz, 101.

Marie, 61, 62, 67, 84, 85, 134, 136,

254, 442, 443.

Mendel, 433.

Nliliotti, 66.

loinmseii, 108.

Monakow, 256.

Motet, 88, 396, 398

]Moebius,6t,78,i05,23t,2o2,2 : )3.

llluller (0.), 115.

Millier, 255.

Musgrave-Clay (de) 69, 71, 73, 7S,

î 6, 263.

Meuendorff, 8G, 263.

Obersteiner, 81.

Oppenheim, 4 ? 8, 4 ? 9.

Oischanskv, 137.

Otto, 111, 437.

Parinaud, 137.

Pétel, 1, 145, 307,

Pelitzceus, 58.

Petit-Vanilol, 131.

Pick. 261.

Popoff, 365.

Ramadier, 441.

Régis, 87.

Rehin, 113.

Ilemak, 423, 425.

Richtur(de))aUdorf),429.

Rosenbach, 391.

Rosenheim, 258.

Rosenstein, 85.

Ruinpf, 103, 105.

Sakaky,426.

Savane, 74.

ScIW Ic, 95, 97.

Scbultze, 109, 110.

Sclmlz, 252.

Seeliâmuller, 135.

Ségalas, 442.

Semmola, 138.

Senator, 63.

Suell, 123, 124, 125, 405.

Shuttlevvorth, 262.

Siemens, 268.

Sommer, 77, 261.

Stein, 83.

Steiner, 98, 99.

Stoltenholf, 82.

Tarnowsky, 272, 289.

Tebakli, 441. '

Testa, 84.

TigôeS, 85.

Ttiezeli, loi, 107.

Ubthotf, 497.

Unverricbt, 79,

Victor, 72.

Vierordt, 256.

Westphal, 258, 259, 434, 43G.

Wigleswoith, 67.

Wilks, 73.

Wililermuth, 78.

Wilbrand, 136.

Witkowski, 59.

Zaclier, 60, 264.

Ziiin, 113, 119.

EXPLICATION DES PLANCHES

PLANCHE PREMIÈRE

FiG. 1. Coupe transversale de la moelle (région dorsale). Schéma

indiquant la région envahie par la sclérose qui occupe le faisceau

pyramidal croisé, A, des deux côtés.

(Contrairement a l'apparence que donne le dessin dans la région sclé-

rosée les travées conjonctives principales sont plus larges, moins délicates

que dans les autres parties de la substance blanche ; la vascularisation

y est plus grande et se traduit par la présence de nombreux orifices

vasculaires résultant de la section transversale ou oblique des vaisseaux.)

FiG. 2. - Un point de la région sclérosée vu avec un grossissement

de 300 diamètres environ (ocul. 2, Nacliet. Obj. 3, Verick).

a, a, Tubes nerveux d'inégales grosseurs, dont le cylindre-axe est tantôt

petit, tantôt comme tuméfié. ,

d, Tubes nerveux vides.

b, Cellule de la névroglie, sans noyau, à prolongements multiples.

c, Substance vaguement fibrillaire et pointillés, interposée entre les

tubes nerveux (sclérose au début) qui se trouvent ainsi plus éloignés les

uns des autres.

FiG. 3. - Cellules de la névroglie dessinées isolément (gross. obj. 7,

Verick. Ocul. 2 Nachet).

La plupart de ces cellules sont sans noyau; elles sont nombreuses,

disséminées; situées au point de jonction de deux ou trois faisceaux de tissu

conjonctif, elles présentent des prolongements multiples, déliées leur

présence constitue un des caractères les plus évidents de la lésion du

faisceau pyramidal croisé.

FtG. 4.- Cellules nerveuses des cornes antérieures de la substance grise

en voie de dégénération granulo-graisseuse. Le protoplasma de quelques

cellules est jaune, granuleux. Leurs prolongements ont disparu dans

quelques points, il ne reste à la place de la cellule qu'un amas de granu-

lations jaunâtres. -

EXPLICATION DES PLANCHES.

PLANCHE II

ancien FOYER (pseudo-layste) ayant BhTHUtT TOUT LE lobe Tli11P011AL, etc.

Hémisphère droit. (Fig. 1,2, 3); dessins demi-schématiques, grandeur

naturelle après macération dans l'alcool.

FIG. 4. - Coupe pi-aliqitée siii, l'exi ? ,éiïiiié i ? féî,ieiti,e de la pciî,iétale

ascendante, le tiers inférieur du sillon de Rolando, etc.

F,, première circonvolution frontale. F A, frontale ascendante.

PA, pariétale ascendante. C C, cops calleux. V,vrntricu)elaté-

ral. C 0, couche optique. N l', noyau intra-ventriculaire du corps

strié. CI, capsule interne. NE, noyau extra-ventriculaire du corps

strié. L7, lobule de l'insula. T A, TA, tissu aréolaire. - P Al, pie-

mère épaissie, limitant le pseudo-kyste, PK.

2. - Coupe pratiquée sur le lobe quadrilatère, les lobules parié-

taux supérieur et inférieur.

P,, coupe du lobule pariétal supérieur. P,, lobule pariétal inférieur.

- L Q, coupe du lube carré. 17L, ventricule latéral. C S, corne

sphénoïdale. TA, TA, tissu aréolaire. PM, coupe de la pie-mère

épaissie.

FiG. 3. Coupe pratiquée sur le lobe occipital et vers l'extrémité du

pseudo-kllsle.

L 0, lobe occipital. - L C, coin. Ç 0, corne occipitale. TA, TA,

tissu aréolaire.

Hémisphère gauche. (Fig. 4, 5 et 6; dessins demi-schématiques, gran-

deur naturelle.) Les coupes ont été pratiquées aussi symétriquement

que possible celles de l'hémisphère malade. - La face convexe (le l'hé-

misphère a été aplatie par un défaut de conservation.

FIG. 4. C C C, circonvolution du corps calleux. - C C, corps calleux.

V L, ventricule latéral. -N V, noyau intra-ventriculaire du corps strié.

- C 0, couche optique. NE, noyau extra ventriculaire du corps strié.

CI, capsule interne. I, coupe du lobule de l'insula. CS, coupe

delà corne sphénoïdale du ventricule latéral. F, , première circonvo-

lution frontale. FA, frontale ascendante. CE, capsule externe (le

trait s'arrête un peu trop en avant). P A, pariétale ascendante. - T,

première circonvolution temporale.

FiG. 5. L Q, lobe quadrilatère. F L, ventricule latéral. C S,

corps strié. P,, lobule pariétal supérieur. . l'" lobule pariétal in-

férieur. T l', circonvolutions temporales.

Fie. 6. 0, lobe occipital. C 0, corne occipitale.

F.rrm. ( : h. imp. - 585.