(1882) Archives de neurologie [Tome 03, n° 07-09] : revue mensuelle des maladies nerveuses et mentales
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(1882) Archives de neurologie [Tome 03, n° 07-09] : revue mensuelle des maladies nerveuses et mentales

ARCHIVES

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NEUROLOGIE

ÉVREUX, IMPRIMERIE DE CH TRLES HÉRISSE).

ARCHIVES

DE

NEUROLOGIE

REVUE

DES MALADIES NERVEUSES ET MENTALES

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AMT LI 101 L TBOR TTION DU

JIM. AMIDON, BUI.ET, BUSARD, B1TOT (r.-a.), r7LlE,

bo.waiiie 13ouctiritEiu, briand (u.), Biussun 1) (1,.), broiardel (P.).

ciurpentier, COT.111D, ULBOIE (1L), DEL : 1SI1LYE, U17E11'Ol ? 1)IIET,

DUVAL (llwnAS), fIiLIT%h1, reliriez, GILBERT, CO)IB.11 LT,CR-qSET

Illn1'li (G.), m ru Min, .IOI'('il(Il (1.), ICl.n1\'Ih (P.), L1\17171%1', MAGNAN,

M Ulii : , 3UYGR1ER. 4111 Il%l'.I1.\\Shl, \Il SGR N'EIMANN, PIER11ET

P1GN0L, PITRES, Il Itl : f\AItl7 P.). Il ICI[Ell (l'), SI ? Gllrv (E.-C.),

STfr.tUS (r,.), T1L.1\10Y, TGI\1'I Itll : lt (C.) TfIC'LII; (11.), TIt01SIEII (R.),

\lGOlli0ll lit ? \01S1N" (J.)

Rédacteur ni c%r ? BllUltI : rII,LI :

Secrétaire de la rédaction : UÉItl'

nrssitateor : LEU11.1.

Tome III. - 1882

Avec 7 planches noires on en couleur eL M ligures dans In texte

PARIS

BUREAUX DU l'ItOGli1·.'S MÉDICAL

ri, rue des Ecoles.

IS82

f Vol. III Janvier 1882. ? 7

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

ANATOMIE

LA CORNE D'AMMON (Morphologie ET Eàll3RY,)LOGIL) (Suite);

Par Mvtiiias DUVAL'. 1.

Il. Corne d'Ammon chez l'homme et chez quelques

singes (fig. 1 et 2 de la Planche 1, fiq. 3 3 et 4 de la

Planche riz.

La figure 1, représentant une coupe du cerveau humain

au niveau de l'extrémité toute postérieure des pédon-

cules cérébraux, est destinée à montrer les rapports de

la formation ammonique avec les parties voisines. Immé-

diatement en dehors du plan médian axial de l'encé-

phale, on voit en bas le pédoncule (P) et en haut l'ex-

trémité postérieure de la 'couche optique correspon-

dante (C 0); si la coupe avait porté sur une région un

peu plus antérieure, on verrait, en dehors du pédon-

cule, la section de la bandelette optique ; ici, vu le

niveau susindiqué, à la place de cette bandelette, on

1 Voir le n" 6, 1). 161.

I

2 ANATOMIE.

trouve (en C G) la coupe de l'extrémité antérieure du

corps genouillé en dehors de laquelle est la masse

centrale de l'hémisphère. Ces parties étant reconnues;

nous pouvons porter notre attention : 1° soit vers la

cavité, (V) du diverticule sphénoïdal du ventricule

latéral, et nous reconnaissons, dans cette cavité,

comme en formant la paroi interne (par rapport au

plan médian), la saillie blanche de la corne d'Ammon

(en H) ; pour plus de clarté, et afin de ne pas affecter

le nom de corne d'Ammon à cette saillie qui, en

somme est ce qu'il y a de plus insignifiant dans l'en-

semble de la formation ammonique, nous adopte-

rons ici la nomenclature des auteurs allemands et dé-

signerons cette saillie sous le nom d'alveus ; 2° nous

pouvons d'autre part porter notre attention sur la

substance corticale, c'est-à-dire sur la circonvo-

lution de l'hippocampe (en G H, seconde cir-

convolution temporo-occipitale) et suivre cette subs-

tance grise corticale, avec la couche blanche sous-ja-

cente, vers la formation ammonique, c'est-à-dire en

haut et en dehors.

C'est ce dernier ordre d'étude qui sera le plus pro-

fitable, en le faisant sur la fig. 2, laquelle représente

seulement la formation ammonique telle qu'elle est

déjà donnée dans la fig. 1, mais à un grossissement

plus considérable (10 à 12 fois au lieu de 3 fois). -Si

donc nous partons de la moitié supérieure de la con-

vexité de la circonvolution de l'hippocampe (extrémité

gauche de la fig. 2), nous voyons qu'à cette convexité

(0) fait suite un profond sillon (e) dans lequel pénètrent

de nombreux vaisseaux; au-dessus de ce sillon est une

circonvolution, très nette (a, b, c, cl, fig. S) et non une

LA CORNE D'AMMON. 3

demi-circonvolution comme on l'a dit souvent; c'est la

circonvolution godronnée, qui présente des dimensions

relativement réduites, de sorte que de sa surface une

faible partie seulement est tout à fait libre (en a), le

reste correspondant au sillon qui la sépare de la cir-

convolution précédente, et étant plus ou moins soudé

à celle-ci par les vaisseaux et la pie-mère qui remplis-

sent cet étroit sillon. Au-dessus de la circonvolution

godronnée, le manteau de l'hémisphère est réduit à sa

couche de substance blanche, formant ici un gros cor-

don dont la coupe est en forme de coeur de carte à

jouer; ce cordon (C B) est le corps bordant; son angle

supérieur (du côté X) s'amincit graduellement, mais

ne présente pas un bord libre ; il se continue en effet

en une mince lamelle de substance nerveuse qui s'in-

curve en dehors, forme la paroi interne du ventricule,

et, se réduisant enfin à la membrane épendymaire, revêt

l'espèce de panache que forment les vaisseaux san-

guins du côté de la cavité ventriculaire : l'ensemble

de ces vaisseaux (plexus choroïde) est ainsi compris

entre deux lamelles, qui se continuent l'une avec l'au-

tre au niveau du bord libre du plexus (en P C) et dont

l'inférieure, comme nous venons de le dire, se rattache

au corps bordant, tandis que la supérieure va se ratta-

cher (au dessus de X, fiq. 2) à la base de l'hémisphère

en dehors de la surface des corps genouillés. Les plexus

choroïdes n'interrompent donc pas la continuité de

la paroi de la cavité ventriculaire, mais répondent

seulement à une région où cette paroi est amincie,

distendue et refoulée par eux vers la cavité ; par suite

le corps godronné est en dehors du ventricule ; c'est

une partie corticale, une vraie circonvolution :

4 ANATOMIE.

Si nous examinons la disposition des couches que

forment ces parties, c'est-à-dire la structure de la cir-

convolution de l'hippocampe et de la circonvolution

godronnée, nous constatons les dispositions sui-

vantes :

A. Au niveau de sa convexité (extrémité gauche

de la figure 2), la circonvolution de l'hippocampe pré-

sente, en allant de la superficie à la profondeur :

1° D'abord une couche de substance blanche (0, /%'. ,8,)

formée de fines fibres nerveuses : ce revêtement blanc,

auquel les anatomistes allemands ont donné le nom

de subiculum, est ce que présente de plus particulier cette

circonvolution ; il est d'autant plus prononcé qu'on

examine descoupes plus antérieures; mais jamais nous

ne l'avons vu présenter une largeur aussi considérable

que celle que lui attribuent divers auteurs (voyez les

figures de Meynert), c'est-à-dire qu'il va en s'amincis-

sant vers le sillon qui sépare la circonvolution de l'hip-

pocampe d'avec la circonvolution godronnée et dispa-

rait dans la profondeur de ce sillon. 2° Au-dessous

du subiculum est une couche formée de substance d'ap-

parence amorphe, parsemée de petites cellules irrégu-

lièrement disposées, ayant le plus souvent leur grand

axe transversalement dirigé, c'est-à-dire parallèlement

à la surface. 3° Au-dessous est une épaisse couche de

cellules pyramidales, qu'on ne voit pas distinctement

séparée, comme dans la plupart des autres régions de

l'écorce, en un stratum superficiel de petites pyramides

et un stratum profond de grandes pyramides, quoique

ces cellules soient du reste d'autant plus volumineuses et

surtoutd'autant plus allongées qu'elles sont plus profon-

des. 4° Aux cellules pyramidales les plus profondes

LA CORNE D'AMMON. 5

succède une couche de cellules nerveuses étoilées ou

fusiformes. 5° Enfin vient la couche médullaire de

substance blanche.

B. -Au niveau du sillon qui sépare la circonvolution

godronnée de la circonvolution del'hippocampe,la com-

position de cette dernière est modifiée de la manière

suivante : 1 Le subiculum ou revêtement blanc super-

ficiel disparaît (a, lîq. 2). 2° La couche sous-jacente

(substance amorphe avec cellules irrégulièrement dis-

posées) est pénétrée par un grand nombre de vaisseaux,

qui, se disposant par nappes plus ou moins continues

dans son épaisseur, lui donnent un aspect irrégulier,

avec stratifications vaiiables (aspect caverneux). Dans

la profondeur, cette disposition est assez prononcée

pour faire croire à la présence d'une nouvelle couche

(fzg. 2 entre cet a) ; c'est ce que Meynert a appelé le

stratum lacîinoszi221, « qui est composé par un épais ré-

seau d'espaces lymphatiques périvasculaires, disposés

autour d'un lacis de capillaires qui pénètrent par en

bas dans la corne inférieure du ventricule latéral ». (Hu-

guenin, op. citât., p. 296). On voit donc que ce stratum

laczinosuî21, quelque nettes que puissent être ses dis-

positions, ne représente rien d'essentiel au point de

vue de la structure de l'écorce, c'est-à-dire de la distri-

bution des éléments nerveux. 3" La couche des

cellules pyramidales est formée d'éléments tous de

plus en plus volumineux, c'est-à-dire que les petites

cellules pyramidales disparaissent presque complète-

ment (c. feg. 2). 4° Rien de particulier pour la couche

de cellules nerveuses étoilées (d, fig. 2), non plus que

pour la couche de substance médullaire blanche

(f, fig. 2) qui forme ici l'alvezcs (voy. ci-dessus page 2),

6 ANATOMIE.

et qui est revêtue à sa surface intérieure par l'épithé-

lium épendymaire.

C. Si nous suivons également de la superficie à

la profondeur (de gauche à droite ou de bas en haut,

dans la fig. 2) les couches qui composent la circonvo-

lution godronnée , nous allons trouver les mêmes

stratifications que nous venons de décrire, mais avec

interposition d'une nouvelle couche au-dessous de la

première. En effet : 1° La première couche (substance

amorphe avec cellules irrégulièrement disposées), ne

présente ici de particulier que son épaisseur et son

uniformité (a, fig. 2). Nous verrons plus loin que, chez

divers mammifères, cette couche amorphe devient de

plus en plus caractéristique de la circonvolution go-

dronnée. 2° Au-dessous apparaît, comme nouvelle

couche, une mince nappe contournée (b, fig. 2), d'un

aspect tout particulier : elle est formée d'éléments ana-

tomiques arrondis, qu'on prendrait au premier abord

pour des noyaux libres, mais qui sont en réalité de

petites cellules à corps protoplasmatique rudimentaire.

Ces éléments sont étroitement serrés les uns contre les

autres ; ils prennent très énergiquement le carmin, de

sorte que, sur les coupes ainsi colorées, cette couche

se distingue, même à l'eeil nu, comme un ruban foncé

décrivant des ondulations plus ou moins nombreuses.

(Voy. les figures des PL. II et III.) Cette couche est

caractéristique de la circonvolution godronnée chez

tous les animaux dont nous avons étudié l'encéphale :

on ne trouve rien qui lui ressemble dans une autre

région corticale. Kupffer lui avait donné le nom de

stratum granulosum; Arndt et Meynert ayant reconnu

la nature nerveuse (cellules) de ses éléments, Meynert

LA CORNE D'AMMON. 7

lui a donné le nom de stratum corporum nervorum

a2,clorzinî. (Voy. Huguenin, page 297.) 3° Vient

ensuite (c, fig. 2) la couche des grandes pyramides,

qui, vu la dimension réduite de la circonvolution

godronnée, sont ici disposées en rayonnant de la partie

profonde vers la partie superficielle ; aussi cette

couche mérite-t-elle plus spécialement ici le nom de

stratum radiatum que lui a donné Meynert dans

l'ensemble de la formation ammonique. 4° Au-

dessous est la couche de cellules nerveuses étoilées,

et enfin, 5° la couche médullaire de substance blanche,

laquelle se continue avec le corps bordant, puisque ce

corps bordant représente une région où le manteau de

l'hémisphère est réduit à sa partie blanche médullaire

sans revêtement de substance grise corticale.

D. Enfin le sillon qui sépare la circonvolution

godronnée de celle de l'hippocampe, d'abord assez

large dans sa partie superficielle (en e, fig. 2), devient

de plus en plus étroit à mesure qu'il s'enfonce entre

les deux circonvolutions. En même temps, comme ses

vaisseaux pénètrent dans les couches superficielles de

la circonvolution de l'hippocampe et y dessinent, par

leur présence, des lacunes en forme de nappes (sera-

tum lacunosunz), et comme, à mesure qu'il se rétrécit

les couches superficielles des deux circonvolutions

arrivent au contact l'une de l'autre et se soudent par

places, il en résulte que parfois il est difficile, même

avec un fort grossissement, de suivre ce sillon d'une

manière continue, sans le confondre avec les diverses

formations qui méritent le nom de stratum lacuitosum.

C'est ce qui explique qu'on ait pu voir dans la forma-

tion ammonique une masse unique dans laquelle la

8 ANATOMIE.

substance corticale pénètre en s'enroulant et non

deux circonvolutions parfaitement distinctes.

En résumé, faisant abstraction du subiculum qui

n'existe pas sur toute la circonvolution de l'hippo-

campe, et du stratum lacunoszcm, qui n'est pour ainsi

dire qu'un accident, résultant de ce que les vaisseaux,

ne trouvant pas assez de place dans l'étroit sillon qui

sépare les deux circonvolutions, viennent se loger

dans la substance superficielle de l'une d'elles, en

résumé nous voyons que, dans toute la formation am-

monique, on trouve en allant de la superficie à la pro-

fondeur : une couche de substance amorphe, une

couche de cellules pyramidales (stratum racliaitim), une

couche de cellules nerveuses étoilées, et enfin la subs-

tance blanche; seulement dans la circonvolution

godronnée une nouvelle couche vient s'interposer

entre la première et la seconde, c'est le siraliimqi,aîîzi-

losum, entre la couche amorphe et le stratum radiatum.

Mais cette adjonction de nouveaux éléments ne fait pas

que le corps godronné, considéré dans son entier,

représente une nouvelle formation, surajoutée à la

substance corticale; il n'est qu'une circonvolution

ordinaire, une saillie de cette substance corticale.

Il ne sera pas sans intérêt de rapprocher immédia-

tement ces résultats des formules souvent énigmatiques

par lesquelles les auteurs ont cherché à résumer leur

manière de comprendre la formation ammonique.

« La corne d'Ammon, ainsi que l'ont démontré

les frères Wenzel, dit Sappey (t. III, 1877, p. 106),

n'est qu'une circonvolution retournée, de telle sorte

que sa partie médullaire, d'enveloppée qu'elle était,

est devenue enveloppante. La bandelette de l'hippo-

LA CORNE D'AMMON. 9

campe est attachée par son bord adhérent au bord

libre et incliné en dedans de cette circonvolution. Le

corps godronné se trouve logé dans la concavité de sa

face interne. » Dans cet énoncé, faisons remarquer

d'une part que l'expression de circonvolution retournée

(partie médullaire enveloppée devenue enveloppante)

a sans doute pour origine, soit l'idée que cette circonvo-

lution, détachée de la surface, est placée dans la

cavité ventriculaire, soit une trop grande importance

attachée à la couche blanche superficielle dite szcbiczc-

lîim, et d'autre part que le corps godronné n'est pas

une chose à part logée dans la concavité de la forma-

tion ammonique, mais bien la moitié supérieure de

cette formation, c'est-à-dire la circonvolution supé-

rieure d'un ensemble constitué par deux circonvolu-

tions.

Les mêmes remarques s'appliquent au passage sui-

vant, extrait de Ch. Richet (Structure des circonvolutions

cérébrales. Thèse de concours, Paris, 1878J. « Cette

lame grise, entourée par l'alveus du côté interne ou

ventriculaire, par le subiculum du côté interne ou

périphérique, se reploie sur elle-même en formant un

crochet recourbé en forme de crosse d'évêque, qui

fait quelquefois un tour complet à la manière de l'hé-

lice d'un limaçon... Cette lame grise amincie semble

à son extrémité se continuer directement avec cette

bandelette rougeâtre, hérissée de petites saillies, qu'on

a désignées sous le nom de corps godronné, et qui fait,

avec la corne d'Ammon et le corps bordant, saillie

dans la cavité latérale du ventricule. » Cette descrip-

tion est accompagnée de figures que nous avions vai-

nement cherché à comprendre, lorsque nous avons

10 ANATOMIE.

enfin aperçu, à l'explication des planches, cette

remarque suffisamment explicative : « Pour rendre

les figures plus claires, on a supprimé le corps bor-

dant et le corps godronné. » Que le lecteur veuille bien,

par la pensée, supprimer des figures de nos PL. I, Il

et III, le corps godronné, et il verra ce qui peut rester

alors de la corne d'Ammon.

Plus heureuses sont les descriptions dans lesquelles

P. Berger résume les travaux allemands (art. Cerveau

du Dictionnaire encyclopédique) . Dans les passages que

nous allons citer, il suffira presque de mettre en ita-

liques certains détails, pour montrer combien ils se

ressentent encore des conceptions classiques - (p. 194

de l'article cité) : « La corne d'Ammon dans son entier

représente non point une circonvolution retournée,

mais une demi-circonvolution dont tous les éléments

ont été profondément modifiés... Partant de- la face

interne de l'hémisphère, on trouve d'abord un profond

sillon séparant deux saillies : en bas c'est la circonvolu-

tion de l'hippocampe, en haut la corne d'Ammon, ou, si

on le préfère, la demi-circonvolution supérieure de l'hip-

pocampe. Ce sillon, c'est l'anfractuosité qui les sépare

et que comble en partie le corps godronné dont il faut

faire abstraction dans cette étude. » De même

lorsque l'auteur décrit la manière dont se comporte

la substance grise. « Au niveau de la circonvolution

de la corne d'Ammon, dit-il, la substance grise corti-

cale paraît quitter la surface de l'hémisphère pour

devenir profonde... elle se recouvre d'une mince

couche de substance blanche à laquelle est due la cou-

leur particulière de ce repli..., puis elle vient mourir.

dans la corne d'Ammon. » «... Mais avant de dis-

LA CORNE D'AMMON. 11

paraître elle se met en rapport avec une traînée de

substance grise qui en est une véritable dépendance ;

cette lame, située entre le bord supérieur de la corne

d'Ammon et le subiculum, par conséquent dans le

sillon de séparation des deux branches du crochet,

doit à sa couleur et à son aspect dentelé le nom de

corps godronné ou Fascia clentata. Aussi l'écorce, super-

ficielle d'abord dans la circonvolution de l'hippocampe,

devient profonde dans la corne d'Ammon où se trouve

son véritable bord libre; mais ce dernier, grâce aux

relations qui l'unissent au corps godronné, redevient

superficiel quoique 12îlraveî2tîieutaii,e ( ! ). » (Op. citât.,

p. 160). Il va sans dire que par suite, il n'est fait

aucune mention de la continuité de l'une des lèvres

du corps bordant avec la lamelle épendymaire qui

revêt les plexus choroïdes, témoin la description sui-

vante empruntée à Berger, et dans laquelle, pour la

dénomination de certaines parties, il faut avoir égard

à ce que l'auteur considère la région postérieure de la

formation ammonique : « Le corps frangé ou bordé

(toenia; corpus fii2îb21aitinz ; fimbria) est une bandelette

très blanche... La face supérieure ou ventriculaire est

libre; sa face inférieure adhère intimement à l'hippo-

campe : son bord antérieur recouvre la partie posté-

rieure du corps godronné et répond très médiatement

à la couche optique, son bord postérieur très mince

se continue avec la convexité de la corne d'Ammon. »

(Art. Cerveau, p. 169.)

Quant à l'étude de la structure, c'est-à-dire de la

disposition des couches dans la circonvolution de l'hip-

pocampe, elle est faite par Berger d'une manière très

exacte ; seulement, d'après les travaux allemands que

12 ANATOMIE.

l'auteur résume, il nie la présence d'une couche de

cellules étoilées entre la couche des grandes pyra-

mides et la substance médullaire blanche. Cette réserve

faite, nous devons, pour compléter notre propre des-

cription, reproduire textuellement celle de P. Berger.

(Op. citat., p. 159 et 181.) « Si l'on examine la circon-

volution de l'hippocampe, on est frappé de la couleur

blanche qu'elle revêt et qui se prononce d'arrière en

avant, en lui donnant, au niveau de la face inférieure

du crochet, un aspect tout particulier. Ici, en effet,

des îlots de substance blanche sont entourés de subs-

tance grise, d'où le nom de substance réticulée blanche

que lui a donné Arnold (substantiel reticularis alba).

« Une substance réticulaire très développée recouvre

toute la face externe de l'écorce dans ces deux parties,

mais surtout dans la circonvolution de l'hippocampe;

c'est à elle qu'est due la couleur blanche de cette der-

nière. La prenzière couche, appartenant en propre à

l'écorce, la couche externe, est formée de petites cel-

lules transversales et par conséquent parallèles à

l'écorce : elles sont difficiles à reconnaître et appar-

tiennent au tissu interstitiel. La deuxième couche est

caractérisée par l'absence des petites pyramides que l'on

trouve dans les autres régions de l'écorce. Elles sont

remplacées par des lacunes périvasculaires limitées par

les prolongements terminaux des pyramides plus pro-

fondes ; ceux-ci forment une sorte de réseau autour

des anastomoses par lesquelles les capillaires de l'épen-

dyme s'unissent aux capillaires venant de la surface

du cerveau ; c'est le stratum lacunosum de Meynert

(stratum reticulare de Kuppfer). La troisième couche

(stratum radiatum) est composée en dehors par les pro-

LA CORNE D'AMMON. 13

longements périphériques des pyramides qui en forment

la couche la plus profonde... Les dimensions de ces

pyramides sont considérables et l'épaisseur de la

couche qu'elles forment a déterminé Meynert à donner,

dans toutes les autres régions de l'écorce, le nom d'am-

nzons formation à la couche plus particulièrement com-

posée de ces éléments. Plus profondément on ne

trouve ni cellules irrégulières, ni cellules fusiformes. Il

n'y a même pas de substance conjonctive ou de matière

unissante interposée entre la couche nerveuse profonde

et ce qui représente dans la corne d'Ammon la subs-

tance médullaire. »

Nous avons étudié la formation ammonique chez

deux espèces de singes : sur un cynocéphale et sur

un cébien.

Chez le cynocéphale (PL. II, fig. 3), les parties sont

disposées exactement comme chez l'homme : l'en-

semble de la corne d'Ammon est seulement un peu

aplati de haut en bas, de sorte que la circonvolution

godronnée est plus large et moins haute; aussi sa sur-

face est-elle de plus en plus cachée dans le sillon qui

la sépare de la circonvolution de l'hippocampe ; mais

en même temps la continuité de la couche des grandes

pyramides d'une circonvolution dans l'autre est ici

encore plus évidente (c, c). Les formations vasculaires

caverneuses dites stratum lacuiiosuîn sont moins pro-

noncées, et nous allons du reste les voir disparaître à

peu près complètement chez les autres mammifères,

nouvelle preuve de leur peu de signification ; il n'y a

donc pas lieu, ainsi que nous l'avons dit, de les com-

prendre dans la nomenclature des couches de cette

il k ANATOMIE.

région corticale. Enfin, on voit ici (fig 3, en X), aussi

nettement que chez l'homme, la manière dont se com-

portent les plexus choroïdes relativement au ventri-

cule (V et PC) et au corps bordant.

Chez le singe cébien (fig. 4) les dimensions réduites

de l'encéphale nous ont permis de donner une figure

qui s'étend en haut jusqu'au corps calleux (C p) avec

la bandelette du trigone (Ia). Cette bandelette est, avec

la face supérieure de la couche optique et avec les

plexus choroïdes, dans les mêmes rapports que le

corps bordant est avec la face inférieure de ces mêmes

couches et de ces mêmes plexus. On voit que sous le

corps calleux la bandelette du trigone représente la

formation ammonique réduite à son corps bordant, et

ce fait, que nous indiquons ici en passant, va devenir

évident chez les autres mammifères. Quant à l'ensemble

de la corne d'Ammon (partie inférieure de la fig. 4)

chez le singe cébien, il reproduit très exactement les

dispositions précédemment décrites, et ne présente de

remarquable que le grand développement dans tous

les sens de la circonvolution godronnée.

III. Corne d'Ammon chez divers mammifères.

1° Mouton. Les figures 5 et 6 représentent une

corne d'Ammon chez le mouton.- Pour ce qui est de

la figure 5, il est inutile d'en donner ici une descrip-

tion, qui ne serait que la répétition de celles que

nous avons données pour l'homme et les singes : l'ins-

pection seule de la figure, pour les détails de laquelle

ont été employées les mêmes lettres de renvoi, suffira

LA CORNE D'AMMON. - 15

à la démonstration des deux circonvolutions et du

sillon qui les sépare. Quant à la figure 6, pour la

rendre intelligible et en faire comprendre toute l'im-

portance, il nous faut rappeler que, chez tous les ani-

maux autres- que l'homme et les singes, la formation

ammonique, au lieu d'occuper seulement le diverti-

culum sphénoïdal du ventricule latéral, se prolonge

en haut dans ce ventricule lui-même, c'est-à-dire que

lorsqu'on dissèque le cerveau de haut enbas, on trouve,

en arrivant au-dessous du corps calleux, non pas, comme

chez l'homme et les singes (fiq 4, li), une simple ban-

delette blanche faisant suite au corps bordant, mais

bien une bandelette blanche accompagnée de subs-

tance grise et on reconnaît dans cette substance grise

les diverses parties de la formation ammonique. Cette

formation décrit donc un fer à cheval complet à conca-

vité antérieure, présentant une branche supérieure et

une branche inférieure (chez l'homme il n'y a que la

branche inférieure). Sur une coupe verticale compre-

nant chacune de ces branches, les parties de la branche

supérieure seront donc symétriquement disposés par

rapport à celle de l'inférieure, c'est-à-dire qu'elles se

regarderont réciproquement : c'est ce que montre la

comparaison des figures 5 et 6, puisque la figure 6

semble n'être autre chose que la figure 5 renversée;

nous reconnaissons donc en C B (1îq. G) le corps bor-

dant, qui, si la coupe était faite sur un cerveau

d'homme ou de singe, représenterait le trigone, et en

effet tous les anatomistes décrivent la bandelette du

trigone comme faisant suite au corps bordant ; en P C

(ft,q. 6) sont les- plexus choroïdes et l'on voit qu'ici

aussi ils sont renfermés dans une mince lamelle for-

16 G ANATOMIE.

mant paroi ventriculaire et se rattachant d'une part au

bord du corps bordant (ou bandelette du trigone) et

d'autre part à la limite externe de la couche optique

(contre le noyau caudé du corps strié) ; en c est la

circonvolution godronnée, remarquable et reconnais-

sable par son stratum granulosum ; cette circonvolution

godronnée est ici, comme dans la moitié inférieure de

la formation ammonique, séparée, par un sillon pro-

fond, étroit, contourné, plein de vaisseaux, d'une belle

circonvolution (CH, fig. 6) dans laquelle il est facile de

reconnaître la suite de la circonvolution de l'hippo-

campe.

Or, et c'est là un fait essentiel non seulement pour

l'étude présente mais encore pour un grand nombre de

questions relatives à la morphologie comparée des

hémisphères, cette circonvolution de l'hippocampe est

ici située au-dessous du corps calleux. D'autre part, on

aperçoit dans la partie supérieure de la figure 6, au-

dessus du corps calleux, une circonvolution qui cor-

respond à ce que, pour le cerveau humain, tous les

auteurs désignent sous le nom de circonvolution du

corps calleux (gyrus fornica tus). Si chez l'homme la for-

mation ammonique, au lieu de se réduire en haut au

corps bordant (bandel. du trigone), se continuait avec

toutes ses parties constituantes , celles-ci formeraient

sous le corps calleux une circonvolution godronnée

et une circonvolution de l'hippocampe, absolument

indépendante de la circonvolution du corps calleux,

située au-dessus de la grande commissure interhémis-

phérique. Que penser donc de l'indication donnée par

tous les auteurs, à savoir que la circonvolution de l'hip-

pocampe (région temporo-occipitale) se continue en

r" cottw n'anmov. 17

haut (face interne de l'hémisphère) avec la circonvolu-

tion du corps calleux ? Deux solutions sont seules pos-

sibles pour trancher cette contradiction : ou bien la

situation du corps calleux est différente chez l'homme

et les singes d'une part, chez les autres mammifères

d'autre part; ou bien l'opinion classique est une erreur.

C'est à cette dernière interprétation qu'il faut se ratta-

cher. En effet, eu examinant les parties corticales

situées en arrière et au-dessous du bourrelet du corps

calleux sur des hémisphères humains, on constate que

la circonvolution du corps calleux est interrompue

brusquement, au niveau de sa prétendue continuité

avec celle de l'hippocampe, par un sillon oblique, de

telle sorte que la circonvolution de l'hippocampe vient

ici mourir par une extrémité taillée en pointe et qui se

perd sous le bourrelet du corps calleux. Que cette

pointe soit supposée s'élargir eu se prolongeant sous

le corps calleux et nous aurions chez l'homme, comme

chez le mouton, la circonvolution de l'hippocampe

développée jusque sous la face inférieure du corps

calleux.

S'il en est ainsi de la circonvolution de l'hippocampe,

à plus forte raison en est-il de même de la circon-

volution godronnée. pour laquelle il ne faut pas songer

à chercher aucune espèce de continuité avec les par-

ties de l'écorce situées au-dessus du corps calleux, sur

la face interne de l'hémisphère. Dans les descriptions

classiques des circonvolutions, il n'est du reste guère fait

allusion à une continuité de ce genre, puisque les au-

teurs ne comprennent pas le corps godronné parmi les

formations corticales. Mais Berger, dans l'article souvent

cité, s'inquiétant des connexions des diverses parties

2

18 ANAT0M1E.

de la corne d'Ammon, exprime d'une façon on ne peut

plus nette l'opinion que nous venons de réfuter. « En

haut, dit-il, le corps godronné se continue avec l'écorce

de la circonvolution du corps calleux. » (Oh. citât.,

p. 169.)

Il y a déjà quelques années, que, étudiant dans un

autre but des coupes d'hémisphères de chien et de chat

(les choses sont disposées comme chez le mouton), nous

avions été frappé de la présence de véritables circon-

volutions au-dessous du corps calleux, à la place

occupée par le trigone chez l'homme. Comme nous

suivions à cette époque les leçons où Broca exposait ses

idées sur le lobe limbique (publiées depuis dans le Revue

d'anthropologie), nous lui fîmes remarquer, pièces en

mains, à la suite d'une de ses leçons, que chez les ani-

maux, on trouvait sous le corps calleux des replis de

substance grise corticale qui pouvaient être consi-

dérés comme formant le véritable limbe du manteau

de l'hémisphère, et nous n'oublierons jamais avec

quelle bienveillance ce maître éminent, au début de

la leçon suivante, indiqua que certainement, d'après

les pièces qu'il avait reçues de nous, sa conception du

lobe limbique devait être modifiée chez les animaux.

Il se proposait de reprendre cette étude au point de vue

de ces circonvolutions que nous appelions provisoi-

rement sous-calleuses. Par ce qui précède, nous voyons

que ces circonvolutions sous-calleuses ne sont autre

chose que l'ensemble de la corne d'Ammon, c'est-à-dire

la circonvolution godronnée et la circonvolution de

l'hippocampe ; nous voyons de plus que chez l'homme

même le limbe de l'hémisphère ne saurait être repré-

senté par le gyrus fornicatus (circonvolution du corps

LA CORNE D'AMMON. 19

calleux), mais bien par ce qui reste des circonvolutions

sous-calleuses (partie supérieure de l'hippocampe) atro-

phiées et que, par suite l'étude, du lobe limbique est

entièrement à refaire d'après des vues suffisamment

indiquées par tout ce qui précède. C'est un travail que

nous avons entrepris et qui sera prochainement publié.

Pour le moment, laissant de côté ces considérations

de morphologie générale, il nous suffira d'avoir reconnu

la formation ammonique dans l'ensemble des parties

grises et blanches situées au-dessous du corps calleux

du mouton. Or, chez lesautres animaux que nous allons

étudier, on voit la formation ammonique seretirer, pour

ainsi dire, de plus en plus de la face inférieure des

hémisphères pour se concentrer sur le corps calleux

où elle prend un énorme développement, la formation

ammonique droite et la gauche arrivant à se toucher

sous la région médiane du corps calleux et à se souder

dans cette partie.

2° Rongeurs. Chez le rat et le lapin, on peut étu-

dier avec avantage la formation ammonique à l'aide

de coupes horizontales, c'est-à-dire qui portent sur la

partie moyenne du fer à cheval décrit par la corne

d'Ammon ; quant aux coupes verticales, elles sont sur-

tout intéressantes dans leur partie supérieure, intéres-

sant la branche supérieure du fer à cheval en question,

car sa branche inférieure est très réduite, à l'inverse

de ce qui existe chez l'homme, et ne présente rien de

particulier.

La figure 7 (PL. III) représente une coupe horizon-

tale du cerveau du rat; coupe passant par les tuber-

cules quadrijumeaux (TQ) et les couches optiques : en

arrière de la couronne rayonnante, on trouve les diverses

20 ANATOMIE.

parties de la corne d'Ammon, se présentant , d'avant

en arrière, dans l'ordre suivant : d'abord le corps bor-

dant (CB), puis la circonvolution godronnée (C), recon-

naissable à son stratum granulosum (b) ; vient ensuite

(en e) le sillon qui sépare cette circonvolution du reste

de la substance corticale, c'est-à-dire de la circonvo-

lution de l'hippocampe (CH) ; mais ici cette dernière

expression n'est qu'imparfaitement justifiée, car si la

région corticale C H est limitée en dedans par un sillon

(e), elle n'est séparée en dehors par aucune limite du

reste de la substance corticale de l'hémisphère. Nous

voyons donc déjà ici un exemple du fait déjà annoncé

(page 18) et auquel les études suivantes donneront

presque la valeur d'une loi générale, à savoir que sur

ce cerveau lisse, c'est-à-dire qui paraît sans circonvo-

lution quand on n'examine que ses faces extérieures, il

existe cependant un sillon et une circonvolution vers

la face interne, la circonvolution godronnée et le sillon

qui la sépare du reste de l'écorce. Sur cette figure 7,

vu l'étroitesse de la cavité ventriculaire, on a, pour

plus de clarté, négligé de représenter les plexus cho-

roïdes et indiqué seulement la limite du ventricule du

côté du corps bordant; mais il est facile, en comparant

par exemple avec la figure 11, de comprendre qu'une

mince lamelle, partie du bord antérieur du corps bor-

dant (CB) doit envelopper les plexus choroïdes et venir

se rattacher à la limite externe de la couche optique,

contre le noyau caudé du corps strié (figuré comme

une coupe triangulaire à la partie postérieure de la

couronne rayonnante).

Si dans' une coupe horizontale (fig. 7) la corne

d'Ammon d'un côté est séparée de celle du côté opposé

LA CORNE D'AMMON. 21

par toute l'épaisseur des couches optiques (ou pour

mieux dire des tubercules quadrijumeaux), il n'en est

plus de même, sur une coupe verticale, pour les

parties supérieures ou sous-calleuses des deux cornes

d'Ammon (fig. 8). Ici les deux formations ammo-

niques se rapprochent de le ligne médiane, et une

de leurs parties arrive presque au contact d'un côté à

l'autre. Cette partie (C H, fig. 8), c'est une région de

l'écorce qui, par sa saillie nettement délimitée, mérite

bien ici le nom de circonvolution de l'hippocampe

(comparez avec la figure de la PL. Il). De sorte que

ce cerveau du rat, parfaitement lisse à sa surface exté-

rieure, se trouve cependant posséder, dans la partie

sous-calleuse de sa face interne, deux circonvolutions

bien définies, la circonvolution de l'hippocampe (CH)

et la circonvolution godronnée (a, b, c, fiq. 8).

Cette étude du cerveau du rat va permettre de com-

prendre dès la première inspection les dispositions en

apparence énigmatiques des deux formations ammo-

niqueschez le lapin, au-dessous du corps calleux, telles

qu'elles sont représentées dans la figure 9. Ici le corps

calleux est occupé sur toute sa face inférieure par

deux épaisses couches grises qui sont pour le moins

aussi volumineuses que les masses corticales dévelop-

pées au-dessus de lui. De ces couches, l'une est supérieure

(C H) et continue d'un côté à l'autre ; on reconnaît en

elle les deux circonvolutions de l'hippocampe (celle de

droite et celle de gauche), qui se sont soudées sur la

ligne médiane, et, en passant en revue, des séries de

coupes échelonnées d'avant en arrière, on saisit toutes

les phases de cette soudure; l'autre est inférieure et

ne forme pas une couche continue, quoique ses moi-

22 ANATOMIE.

tiés droite et gauche arrivent en contact; on reconnaît

en elle la circonvolution godronnée, dans laquelle on

retrouve le stratum granulosum (b, b) caractéristique,

et c'est précisément parce que le stratum de droite et

celui de gauche ne se continuent pas l'un avec l'autre,

mais se regardent par leur bord interne convexe, que,

quel que soit le contact intime des deux circonvo-

lutions godronnées , nous pouvons les considérer

comme non soudées ensemble, à l'inverse de ce qui

arrive pour les circonvolutions de l'hippocampe dont

les stratum radiatum se continuent de l'un à l'autre.

Ces deux circonvolutions (la godronnée et celle de

l'hippocampe) sont séparées par une mince zone (e),

dans laquelle on trouve de nombreux vaisseaux, et

qu'on reconnaît facilement, malgré son étroitesse,

comme représentant le sillon qui sépare (fig. 7 et 8, e)

la circonvolution de l'hippocampe de la circonvolu-

tion godronnée. Pour compléter cette description

des hippocampes chez le lapin, il est à peine besoin

de désigner, sur la figure 9, le corps bordant en CB et

la cavité du ventricule en V.

C'est sur la corne d'Ammon du lapin qu'a été publiée

la première et la seule monographie consacrée à la

formation ammonique : nous voulons parler de la

thèse de G. Kupffer 1. Cet auteur étudie d'abord le dé-

veloppement de la formation ammonique, et émet à

. Gust. Kupffer. De Cornus Anznzottis e;c'6[ desquisitiones prmcipmce

in cuniculis institut ? Dorpati, 1859. Pour ce qui est des auteurs anté-

rieurs et des passages dans lesquels ils ont fait allusion d'une manière

plus ou moins ('tendue il la formation ammonique, voyez : Vicq d'Azyr,

Mémoires de l'Académie des sciences, 1844, p. 312. Wenzel : De

penitiori cerebri structura. Tubinaen, 1812, -p. 134. - 1'reviranus,

Untersuchungen ùb. BaH des Gehirns, Bremen, 1820, p. 130. - Wolk-

mann, Aztalonzia anizuali2cm. Leipzig, 1831, p. 53.

LA CORNE D'AMMON. 23

ce sujet des vues fort justes, sur lesquelles nous

aurons à revenir. Quant à la disposition des parties

chez l'animal adulte, Kupffer les décrit d'une manière

singulièrement compliquée; car, sans tenir compte

de ce que l'embryologie lui a montré dans cette for-

mation deux lamelles distinctes (nos deux circon-

volutions, l'une de l'hippocampe, l'autre godron-

née), il énumère de haut en bas les différentes couches;

il en compte sept qu'il décrit laborieusement, sans

même tenir bien compte de ce qu'une même couche,

par le fait de la courbe qu'elle décrit ( par exemple,

le stratum granulosum) se présente deux fois. Cepen-

dant son étude est très complète, surtout lorsqu'il s'at-

tache à la couche qu'il nomme stratum granulosum et

qui depuis a conservé ce nom. Kôlliker avait déjà

signalé cette couche : « La corne d'Ammon et l'ergot

de Morand, disait-il dès 1350 `, reproduisent le type

des autres circonvolutions, si ce n'est que dans la

substance grise de la corne d'Ammon on trouve une

couche particulière de cellules rondes, dépourvues de

prolongements et étroitement pressées les unes contre

les autres. » Kupffer indique combien cette couche se

teint énergiquement par le carminé et il décrit com-

ment elle coiffe, sur une coupe, le stratum cellulosum

(le stratum radiatum des grandes pyramides) qui vient

se terminer dans ce qu'il appelle le folizim infei,ius

cornus ammonis (circonvolution godronnée). Aussi ses

dessins, tout en reprodusiant l'apparence d'enroule-

1 Kolliker, JIiki,oscop. Anatomie, Leipzig, 1850, t. II, p. 471.

- « lioc stratuin, si segmeiittim, ailtiquam mieroscopio stibmittas,

Ammonio coccico tractaveris, colore intense rubro imbutum plane a reli-

qiiis (listiligutur. » (Op. citat., p. 22.)

21 ANATOMIE.

ment de l'écorce, à peu près comme tous les auteurs

classiques se sont plu à le figurer, sont accompagnés

d'explications qui en donnent l'interprétation exacte,

à peu près telle que nous l'avons donnée précédemment.

(Au lieu de parler de deux circonvolutions Kupffer

parle de deux feuillets.) .

Arndt ne fait guère que reproduire la description

de Kupffer en la simplifiant, et en insistant sur les rap-

prochements à faire entre la formation ammonique et

le reste de l'écorce grise'. Ainsi que Kôlliker2 il consi-

dère les éléments du stratum granulosum comme des

cellules nerveuses. Depuis cette époque, la formation

ammonique a été^étudiée chez les rongeurs par Stieda,

qui a très nettement interprété les dispositions que

présentent les parties sous-calleuses chez le lapin;

pour désigner les deux circonvolutions que nous avons

décrites, il emploie les expressions de lamina superior

(circonvolution de l'hippocampe) et de lamina inferior

(circonvolution godronnée).

3° Taupe et chauve-souris. Nous avons donné

(PL. III, fiaures 10 et 99)e dessin de la formation

ammonique chez deux autres petits mammifères, pour

montrer combien cette formation est relativement

volumineuse sur les encéphales de très petites dimen-

sions.

Le cerveau de la taupe est représenté dans la fig. 10

d'après une coupe horizontale (qui comprend en avant

1 Arndt. - Stildien iiber die Archilecktonik der Gehirnrinde. (Arch. f.

Jlikr. Anat., Bd III, p. 441, Bd IV, p. 407, et Bd. V, p. 317.)

' Kôlliker. Gewebelehre, 18G7, page 306.

1 L. Stieda.- Stii(lien iiber das centrale Neî,veiilstea der Wirbelthiere.

Leipzig, 1870.

LA CORNE D'AMMON. 25 15

jusqu'au lobe olfactif, 01. On trouve, en V, la cavité

des ventricules, et en a, b, cla circonvolution godron-

née, toujours bien caractérisée par son stratum grand-

loszinz (en b) : le profond sillon e la sépare du reste de

l'écorce, dont la partie la plus voisine (CH) est évi-

demment l'homologue de la circonvolution de l'hippo-

campe des animaux à circonvolutions externes.

Enfin l'encéphale de la chauve-souris (fig 11) remar-

quable par ses dimensions exiguës (remarquer que la

figure Il est faite à un grossissement de 16 fois, et la

figure 10 à un grossissement de 7 fois seulement) et à

peu près complètement lisse, nous donne la démons-

tration la plus évidente de cette loi précédemment

indiquée, à savoir que les hémisphères, en apparence

les plus lisses, sont cependant pourvues, à leur face

interne, d'une belle circonvolution séparée du reste de

l'écorce par un profond sillon. On voit sur \a figure 10

que l'aire de la formation ammonique est, sur une

coupe horizontale, presque égale à l'aire de tout le

reste de l'écorce.

Si donc cette région de l'écorce conserve chez tous

les mammifères une délimitation si exacte, avec une

particularité de structure si caractéristique, elle mérite

plus que toute autre, au point de vue anatomique, le

nom d'ozgane cortical, et il n'est guère possible de

douter qu'une fonction soit localisée dans cet organe.

Reste donc à chercher sa signification physiologique.

C'est une question que nous n'aborderons pas ici, et

qui doit être résolue par l'anatomie comparée et par

l'expérimentation. Nous ferons seulement remarquer

que l'anatomie a déjà désigné cette partie comme cor-

respondant très probablement aux fonctions olfactives,

26 ANATOMIE.

et, en effet, tous les auteurs admettent qu'une des raci-

nes blanches du bulbe olfactif vient se terminer dans la

circonvolution de l'hippocampe en formant la couche

blanche superficielle de cette circonvolution, le subi-

cïiluî2î (voy. entre autres Huguenin, Op. cit., page 132).

Or, si la formation ammonique est en rapport avec

l'olfaction, comme les vertébrés autres que les mam-

mifères sont doués de l'olfaction, le but principal que

nous devrons nous assigner dans les recherches à ce

sujet, sera de trouver chez les oiseaux, les reptiles, les

poissons, etc. , une partie cérébrale qui rappelle par

sa forme ou au moins par ses dispositions l'hippocampe

des mammifères. Il n'y a guère à espérer de trouver

chez les vertébrés autres que les mammifères une par-

tie cérébrale qui reproduise la forme de la corne

d'Ammon, car l'anatomie descriptive comparée de

l'encéphale est faite depuis longtemps d'une manière

assez complète, et rien de ce genre n'a été signalé. Mais

l'anatomie microscopique comparée est encore en

grande partie à faire, et il sera possible que, sur une

écorce cérébrale uniforme en surface, on trouve, en

une région, une couche interposée, reproduisant la dis-

position du stratum granulosum : cette région pourra

être alors considérée comme l'analogue de la circon-

volution godronnée et par suite nous indiquera la

partie qui représente un hippocampe. Si, en effet, par

exemple dans la figure 10, nous supposons effacé le

sillon qui sépare la partie CH des parties a, b, c, il

n'y aura plus alors, au point de vue de la forme de

l'écorce, une véritable circonvolution godronnée; et

cependant, par le fait de la présence de la couche b,

il serait impossible de ne pas reconnaître l'existence

LA CORNE D'AMMON. 27

de l'organe cortical correspondant là cette circonvolu-

tion.

Nous arrivons donc à cette conclusion, à ajouter

à celles formulées par anticipation (voir ci-dessus)

à savoir que le stratum granulosum est la partie la plus

essentielle, caractéristique de la formation ammonique,

partie qui permettra de reconnaître, dans les hémis-

phères les plus simples, les régions homologues de la

formation ammonique alors même que celle-ci ne pré-

sentera ni circonvolution de l'hippocampe, ni même

de circonvolution godronnée extérieurement dessinée.

Comme on le voit, la présente étude demande à être

continuée par un vaste complément d'anatomie com-

parée ; mais même pour ce qui est de l'encéphale de

l'homme et des mammifères, il est plusieurs questions

auxquelles nous avons fait à peine allusion ou qui

restent encore à aborder : nous proposant d'en faire

l'objet de prochaines études, nous devons seulement

les signaler ici, car, par leur énoncé même, elles doi-

vent être rapprochées des questions sur lesquelles nous

sommes arrivés à conclure. Comment se comporte

la formation ammonique à son extrémité toute anté-

rieure, c'est-à-dire au niveau de ce qu'on appelle le

crochet de la circonvolution de l'hippocampe ? Avec

quoi se continue la branche interne de ce crochet ?

Avec le corps bordant, ou avec le corps godronné ?

Quelles sont, dans leurs détails, les connexions

exactes des tractus olfactifs avec la formation ammo-

nique ? A quelles formations faut-il donner le nom

de circonvolution limbique ?

28 ANATOMIE.

IV. Développement de la corne d'Ammon.

Le développement de la corne d'Ammon a été, dans

ses principaux détails, très nettement suivi par

Kupffer; nous analyserons plus loin le court passage

où cet auteur formule ses observations. Mais Kupffer

avoue n'avoir pu saisir le mode de développement des

plexus choroïdes', et nous avons vu que la disposition

de ces plexus est une question intimement liée à l'étude

du corps bordant. Dans les divers ouvrages où l'évo-

lution des vésicules cérébrales est aujourd'hui traitée

d'une manière si complète (voy. plus particulièrement

Mihaikowitz et Kôlliker), les détails relatifs à la for-

mation ammonique et aux plexus sont épars, donnés

souvent d'une manière accessoire et avec diverses

lacunes, de sorte qu'il nous a paru nécessaire de

reprendre cette étude à notre point de vue spécial;

nous trouverons ainsi la confirmation la plus com-

plète des conclusions auxquelles nous sommes précé-

demment arrivés.

Cette étude se bornera à une explication raisonnée

des six figures de la PL. IV, représentant toutes des

coupes horizontales antéro-postérieures d'encéphales

d'embryon; nous n'avons pu disposer d'embryons de

lapins pris à toutes les périodes du développement,

' Kupffer. Op. cit., page 9 : « Proxime ante plicam, cornu Ammoms for-

mantem, apud embrya varias oetalis fissuram in hémisplicrii pariete inve-

nimus per quam pia mater et vasa sanguîfera ventriculi lateralis cavum

adhuc amplum intrant. Quce fissura, utrum inde a primo évolutions

initioin cesicnlre cerebri pariete exstet, an nonnisi plica formata oriatur,

constituere non possum, quia embrya c primis evolutionis périodis in

promptu non habni. »

LA CORNE D'AMMON. 9

c'est pourquoi les premiers stades sont figurés d'après

des encéphales de mouton, et les suivants d'après des

encéphales de rongeurs; mais la série nous paraît

avoir été, dans ces conditions, suffisamment démons-

trative.

La figure 12 représente la coupe d'un encéphale de

mouton qui mesurait 16 millimètres de la tête à l'ori-

gine de la queue : les vésicules des hémisphères sont

déjà bien formées, en avant et sur les côtés de la vési-

cule cérébrale moyenne, de sorte que la cavité des

ventricules latéraux (I, 1,) communique avec la cavité

du futur troisième ventricule (2) par une large fente,

la fente de Monro (qui se réduira plus tard à son extré-

mité toute antérieure, sous le nom de trou de Monro,

si toutefois il reste encore chez l'adulte une partie

perméable de cette fente)'. Tandis que la paroi antéro-

latérale du ventricule latéral (ou ventricule des hémis-

phères) est déjà épaisse, ce qui correspond au dévelop-

pement du corps strié, ainsi que nous l'avons indiqué

ailleurs2, leur paroi postérieure est mince, fragile et

présente des plis plus ou moins réguliers, destinés à

disparaître par les progrès du développement, c'est-à-

dire à mesure que croît l'épaisseur et la consistance de

cette paroi. Cependant, de ces replis, que Kôllilier

appelle primitifs ou transitoires, l'un est destiné à per-

sister en s'exagérant : c'est celui qui, sur la paroi interne

de l'hémisphère (Iîg. 12, P), est situé immédiatement

en arrière de la fente de Monro : déjà, à cette époque,

1 Voez à ce sujet notre communication à la Société de biologie, 14

juin 1879. (Des plexus choroïdes et des trous de Monta.)

* Voyez Société de biologie, 21 juin 1S79 : Le développement de la région

knliculo-opliquc dans le cerveau humain.

30 ANATOMIE.

les vaisseaux, développés dans le feuillet moyen, se

sont accumulés en abondance dans ce pli, et refoulent

de plus en plus la mince paroi cérébrale vers la cavité

du ventricule. Ainsi vont se former les plexus cho-

roïdes. C'est ce qu'on voit dans la figure 13 (mouton,

long. 21 millimètres) : ici la paroi cérébrale a gagné en

épaisseur; ses sillons transitoires ont presque disparu,

excepté celui qui était immédiatement en arrière de la

fente de Monro (F), lequel s'est développé au point de

représenter une véritable invagination de la paroi céré-

brale en elle-même, c'est-à-dire de former une sorte

de bourse renfermant les plexus choroïdes et dont

l'ouverture dirigée en dedans et en avant est limitée

par deux lèvres, l'une antérieure qui forme la limite

postérieure de la fente de Monro, l'autre postérieure

qui se continue avec la paroi interne et postérieure de

l'hémisphère.

C'est sur cette dernière portion de la paroi cérébrale,

c'est-à-dire contre la lèvre postérieure de l'orifice don-

nant accès dans la bourse qui renferme le plexus cho-

roïde, que nous allons voir se former la corne d'Am-

mon, par un procédé très simple, par l'apparition

d'un sillon séparant deux parties saillantes, deux cir-

convolutions. En effet, déjà dans la figure 14 (embryon

de lapin long de 17 millimètres), on voit en ce point

(enX) la paroi cérébrale, demeurée relativement mince,

présenter un plissement qui prélude pour ainsi dire à

cette formation. (Le reste de cette figure reproduit à

peu près les détails de la figure 13, et montre que

nous pouvons emprunter les éléments de cette étude

successivement aux embryons de mouton et aux em-

bryons de lapins). Mais dans la figure 15 le sillon en

LA CORNE D'AMMON. 31

question est très nettement indiqué (en Y) ; il contient

de nombreux vaisseaux, ou, pour mieux dire un pro-

longement de la pie-mère, car dans les éléments du

feuillet moyen se sont produites les différenciations et

stratifications qui conduisent à la formation des enve-

loppes cérébrales. En avant de ce sillon est une véri-

table circonvolution, qui sera la circonvolution go-

dronnée (le corps godronné avec le corps bordant).

En arrière est une partie de la paroi cérébrale qui

formera ce qui, chez les rongeurs, est l'homologue de

la circonvolution de l'hippocampe. Que le sillon en

question se rétrécisse par accroissement en volume de

la circonvolution godronnée, que dans celle-ci la dif-

férenciation des éléments anatomiques amène la pro-

duction d'un stratum granulosum, et qu'en même

temps sa partie la plus voisine de la fente de Monro

ne donne lieu qu'à de la substance blanche, et nous

aurons dès lors la formation ammonique telle qu'on la

trouve chez les rongeurs à l'état adulte.

C'est ce que montre les figures 16 et 17. Sur la

figure 16 (lapin presque à terme) la circonvolution

godronnée s'est épaissie en même temps que sa partie

toute antérieure, se transformant uniquement en subs-

tance.blanche, a donné naissance au corps bordant.

On voit de plus que l'épaississement de cette circon-

volution godronnée est due surtout à l'augmentation

de sa couche superficielle (a) dans laquelle va appa-

raître le stratum granulosum. Sur la figure 17 (lapin

à terme) ce stratum est apparu (en b), et il nous paraît

inutile de donner de cette figure toute autre descrip-

tion et explication, mais simplement de prier le lec-

teur de la comparer avec la figure 8 de la PL. III.

32 ANATOMIE.

L'embryologie vient donc absolument à l'encoutre

de l'opinion que nous avons précédemment combattue,

à savoir que le corps godronné serait une chose à part,

logée dans la concavité de la formation ammonique

(voy. les citations d'auteurs ci-dessus page 9); elle

montre que le corps godronné n'est que la circonvo-

lution antérieure (ou supérieure, ou inférieure, selon

qu'on considère l'une des branches ou la partie

moyenne du fer à cheval) d'un ensemble constitué par

deux circonvolutions que sépare un sillon. Cette dé-

monstration, empruntée à l'embryologie, n'était pas

inutile, car les auteurs antérieurs à Kupffer avaient

précisément cherché à confirmer la conception clas-

sique par l'élude du développement (Arnold)'. Kupffer,

au contraire, a constaté que le rétrécissement du sillon

est dû simplement à l'accroissement en épaisseur de

l'un des plis qui le limite et, quoiqu'il n'ait peut-être

pas tenu assez compte de ce fait lorsqu'il a classé les

couches qu'on trouve dans la formation ammonique

(voy. ci-dessus page 23), il l'a, au point de vue pure-

ment embryologique, exprimé avec une telle clarté

que nous devons reproduire ici ce court passage de sa

monographie : « Preeparatis certior factus sum, dit-il

(page 9), plicam, antea apertam, eo impleri quod ambo

folia crassiora fiunt. Qui processus cum evolutione pro-

grediente parietis ventriculi lateralis omnium congruit,

neque, ut Arnoldus censere videtur eo perficitur, quod

novoeformationesextrinsecusinsulcumseseimmittant.') z

1 Arnold (tlandbuch der Anatomie des Menschen, t. II, p. 769) dit :

Das Ammonshorn bat beim Foetus in 1, Monat dieselbe Bildung wie dise

Vogelklaue, d. Il. es ist einc blosse Einbiegung eines Gyrus in das weite

Utiterliorii welclie durchd'n zwciteMarkschicntnund

rlie CZ,LI111BILC Binde gcbildet wirtl, kommt ers spâter ziim Vorsclcm. »

LA CORNE D AMMON. " 33

Nous terminerons en faisant remarquer combien

l'embryologie confirme ce que nous'avons dit des rap-

ports des plexus choroïdes avecjjla cavité des ventri-

cules : de par leur mode déformation, ces plexus sont

toujours en dehors des cavités cérébrales, c'est-à-dire

qu'ils ne viennent se loger dans les ventricules qu'en

repoussant devant eux la paroi cérébrale et non en la

perforant; et cela est ainsi non seulement pour les

ventricules latéraux, mais encore pour la toile choroï-

dienne et le troisième ventricule, pour les plexus chou

roïdes inférieurs et le troisième ventricule. Au niveau

de ce dernier, la paroi amincie, qui passe comme un

'voile au-dessus de la fosse rhomboïdale, peut se perforer

d'une manière plus ou moins normale et telle est l'ori-

gine du trou de Magendie, sur l'existence duquel ont

eu lieu dans ces derniers temps de nombreuses dis-

eussions' : ce trou est toujours accidentel ; nous ne

voulons pas dire par là qu'il soit toujours produit par

violente déchirure au moment où est extrait l'encé-

phale, mais seulement qu'il n'existe pas primitivement,

qu'il se forme par amincissement extrême de la men-

brane, et qu'il n'a dans son existence et sa disposition

rien de plus constant que par exemple les ouvertures

fenêtrées qui, d'une manière irrégulière, peuvent se

présenter sur l'épiploon ou les» lames mésentériques

de certains animaux.

Pour ce qui est en particulier des plexus choroïdes

et des ventricules latéraux, nous ne pensons pas que

1 Voyez Mare Sée. z la communication des cavités ventricvlaircs

de l'encéphale avec les espaces soits-a2,achîzotdiciis. (Revue mensuelle, 1878,

page 424, et 1879, page 295). Voyez aussi les communications de

M. iiochefoutame d la Société de biologie, avril 1879.

34 ANATOMIE.

jamais une perforation de ce genre se produise ; les ven-

tricules des hémisphères resteraient donc toujours

complètement clos. Aussi, quand on injecte les espaces

sous-arachnoïdiens, ne voit-on pas réellement le liquide,

à moins de ruptures violentes, pénétrer dans la cavité

ventriculaire. Les résultats obtenus par H. Quincke

sont démonstratifs à ce sujet : sur des animaux vivants,

cet expérimentateur injectait du vermillon émulsionné

. (vermillon très fin, broyé avec une solution de sucre)

dans l'espace sous-arachnoïdien, au moyen d'une

canule pointue. Quatre fois la matière colorante fut

trouvée dans les plexus choroïdes ; jamais elle ne fut

rencontrée à l'état de liberté dans les ventricules. (Voy.

M. Sée, Op. cit., page 300.)

EXPLICATION DES PLANCHES

PLANCHE I.

Fig. 1. -Coupe transversale de l'encéphale de l'homme au niveau des

corps genouillés; - CO, couche optique; CC, corps genouillés ; V, ca-

vité du diverticule spliénoidal du ventricule latéral; H, saillie blanche

intra-ventriculaire de la corne d'Ammon; CH, circonvolution de l'hip-

pocampe (2e circonvolution temporo-occipitale). Grossis. 3 fois.

Fig. 2. La corne d'Ammon de la figure précédente grossie 10 fois.

II, saillie intra-ventriculaire de la corne; CB, corps bordant; PC,

plexus choroïdes ; X, entrée de la pie-mère dans le repli mésentéri-

forme; 0, subiculum; e, entrée du sillon qui sépare la circonvolu-

tion de l'hippocampe de la circonvolution godronnée ; a, couche de subs-

tance amorphe; A, stratum granulosum ; c, stratum tadiatum;

d, couches des cellules nerveuses étoilées ; couette de substance

blanche médullaire.

PLANCHE Il.

l'ig. 3. Coupe transversale de la corne d'Ammon d'un singe cynocé-

phale (Grossiss. 12 fois). Lettres comme pour la figure 2.

Fig. 4. Idem chez un singe cébien (Grossiss. 6 fois). Lettres

LA CORNE D'AMMON. 35

comme précédemment; de plus : Cp, corps calleux; CC, circonvo-

lution du corps calleux ou ggrus j'orzicalus; - h, bandelette du trigone.

Fig. 5. Coupe de la moitié inférieure, et figure 6 coupe de la moi-

tié supérieure (sous-calleuse) de la corne d'Ammon du mouton. - Let-

tres comme ci-dessus.

planche fll,

Fig.7. - Rat; coupe horizontale; grossiss. 8 fois; lettres comme ci-

dessus.

Fig. 8. Rat; coupe verticale; idem.

Fig. 9. Lapin; coupe transversale. Grossiss. 5 fois et demi. Les por-

tions sous-calleuses des deux cornes d'Ammon sont soudées sur la ligne

médiane; V, cavité de l'hémisphère ; CC, partie corticale homologue

du gyrus fornicatus; Cp, corps calleux; -CH, circonvolution de l'hip-

pocampe ; b, b, stratum granulosum de la circonvolution godronnée;

e, sillon qui sépare la circonvolution godronnée d'avec la circonvolution

de l'hippocampe; CB, corps bordant.

Fig. 10. Taupe; coupe horizontale, grossiss. 7 fois. Lettres comme

ci-dessus.

Fig. 1t.-Chauve-souris; coupe horizontale. Grossiss., 16 fois. Lettres

comme ci-dessus.

planche ZV.

Développement de la corne d'Ammon et des plexus choroïdes.

Fig. 12. Coupe horizontale de l'encéphale d'un embryon de mouton

long de 16 millimètres. 1, cavité des hémisphères (ventricules laté-

téraux) ; 2, cavité de la couche optique (3- ventricule); 3, cavité des

tubercules quadrijumeaux; CS, corps strié; pm, pie-mère en voie

de foirnation; P, plexus choroïdes.

Fig. 13. Même coupe, mouton long de 21 millimètres. Lettres comme

ci-dessus, de plus F, fente de Monro.

1;'ig. il. Coupe horizontale de l'encéphale d'un embryon de lapin,

long de 17 millimètres ; lettres comme ci-dessus; A", lieu de la forma-

tion de la corne d'Ammon.

Fig. 13. Embryon de lapin, long de 36 millimètres; y, vaisseaux

placés dans le sillon qui sépare deux plis, lesquels vont former les deux

circonvolutions de la corne d'Ammon.

Fig. 16. Lapin presque à terme, et Figure 17, lapin à terme. Lettres

comme dans les figures de la Planche 111. (Comparez notamment avec la

Figure 8;.

DE LA STRUCTURE DU NERF AUDITIF;

Par le D' ALP. EKLITKY (de Saint-P3tersbottrg).

Le nerf auditif, l'un des plus courts des nerfs crâ-

niens, prend naissance, comme on le sait, dans le bulbe

rachidien au moyen de plusieurs racines, et de plu-

sieurs noyaux d'origine. Pour ce qui est de ces derniers,

quoique presque tous les auteurs s'accordent à leur

reconnaître la même origine, quelques-uns cependant

les désignent par différentes dénominations, circons-

tance qui ne contribue guère à éclaircir une question

assez compliquée par elle-même. Voyons un peu les

aperçus des auteurs à ce sujet.

Huguenm ' reconnaît au nerf auditif trois noyaux

d'origine : un antérieur, un interne et un externe. Le

noyau antérieur siège dans les couches superfi-

cielles de la protubérance et du corps restiforme,

immédiatement à l'entrée du nerf auditif dans ces par-

ties. D'après Huguenin, c'est la région supérieure de ce

ganglion , précisément dans celle qui se localise dans

la protubérance, que prend naissance le nerf intermé-

diaire de Wrisberg. Le noyau interne occupe toute la

largeur du plancher du quatrième ventricule, au niveau

des stries acoustiques. Le noyau externe se place en

1 G. Huguenin. /iHyet)tCt')te/'a</t0oy)e(<e<' /Wa;t4te ! <<Mt<M Neroen

Systems. Zurich, 1873.

DE LA STRUCTURE DU TRONC DU NERF AUDITIF. 37

dehors du précédent, dans le segment interne des

pédoncules cérébelleux.

Krause * reconnaît au nerf auditif quatre racines,

et pour chacune d'elles, un noyau d'origine.

Le noyau latéral des racines postérieures se trouve,

d'après cet observateur, entre la partie supérieure et

l'inférieure de ces racines, immédiatement à leur issue

du corps resti forme. Le noyau médian des racines

postérieures occupe le plancher du quatrième ventri- ,

cule, au niveau des stries médullaires. Le noyau nzé-

diandesracines antérieures se place dans la partie interne

du corps restiforme, et finalement, le noyau latéral des

racines antérieures se localise dans la protubérance, à

l'endroit où en émergent les racines nerveuses.

C'est précisément de ce noyau que tire son origine,

d'après Krause, la portion intermédiaire de Wrisberg.

C'est ainsi que le noyau latéral des racines postérieures,

et le noyau latéral des racines antérieures de Krause,

correspondent au noyau antérieur de Huguenin. Le

noyau médian des racines postérieures correspond au

noyau interne de Huguenin, et le noyau médian des

racines antérieures au noyau externe de Huguenin.

Henle 2 désigne sous le nom de noyau supérieur du

nerf auditif, celui que Krause appelle noyau médian

des racines postérieures noyau interne de Huguenin.

Le noyau inférieur de Henle correspond à ce que

Krause désigne sous le nom de noyaux latéraux des

1 '\NI. Krause. Allgemeine und nzicnoscopische fuatonzie. Ilannover,

1875.

' J. HcH)c. Iliiidbitch der des /c ? i ! C/ ! 0 ! . Braunsch-

1879.

38 ANATOMIE.

racines postérieures et antérieures le noyau anté-

rieur de Huguenin. Le noyau latéral de Henle équivaut,

en partie, au noyau médian des racines antérieures de

Krause, et au noyau externe de Huguenin.

Schwalbe ' de son côté distingue trois noyaux d'ori-

gine au nerf auditif : son noyau central correspond au

noyau médian des racines postérieures de Krause; son

noyau latéral au noyau médian des racines anté-

rieures de Krause; son noyau accessoire au noyau

latéral des racines antérieures de Krause. Schwalbe

affirme en plus, que des cellules ganglionnaires sont

contenues dans le segment extérieur des racines posté-

rieures. Quant aux relations intra-cérébrales du nerf

auditif, on doit convenir qu'elles ne sont pas tout à

fait éclaircies. Parmi les auteurs modernes, llleubel 2

fait ressortir, par exemple, la part éminente qu'un

des fascicules du nerf auditif prend dans la formation

des pédoncules cérébelleux supérieurs (Bindearm),

tandis que Mathias Duval3 insinue que quelques fibres

des racines antérieures du nerf auditif se rendent dans

le cervelet.

Le tronc du nerf auditif ainsi composé, donne nais-

sance dans son parcours, entre le corps restiforme et

le méat auditif interne, à un certain nombre de tubes

nerveux très déliés, qui contribuent à la formation du

nerf intermédiaire de Wrisberg. On observe quelque-

fois que le nerf en question est entièrement constitué

G. Seliwalbe. - Lehrbtcch der Neurologie; Erlangen, 1880.

s Beli71eîmeclicirtische-psychologische Gesetlschaft. Sitzung vom7 januar

1878. Arch. sur Psgch. 13-D : X. Heft : . 1880, s. 51, 0.

3 Mathias Duval. - Sens de l'espace (Société de biologie. Séance du

21 février 1880. Progrès médical, nez 9, 1880, p. 170.)

DE LA STRUCTURE DU TRONC DU NERF AUDITIF. 39

de filaments nerveux, émergeant en totalité du tronc

du nerf auditif.

Les recherches microscopiques sur ce tronc chez

l'homme m'ont amené à constater les deux circons-

tances suivantes : 1° le tronc du nerf auditif se compose

de deux parties distinctes : une antérieure et inférieure;

l'autre postérieure et supérieure. Ces deux faisceaux se.

distinguent par le caractère de leurs tubes nerveux.

2° Dans le tronc du nerf auditif, principalement

dans la partie qui touche au corps restiforme, et plus

rarement dans tout son parcours, jusqu'au méat audi-

tif interne, se trouvent des îlots de substance grise,

contenant des cellules nerveuses.

Pour le tissu réticulaire, aussi bien que pour les cel-

lules nerveuses revêtues de membranes, ces îlots sont

identiques à la substance grise de la moelle épinière,

ainsi qu'aux ganglions cérébro-spinaux.

Horbaczewski ` (v. Rente, loc. cit., p. 461) distingue

deux espèces de fibres nerveuses, dans le nerf auditif

de la brebis et du cheval, notamment : les fibres du nerf

cochléaire plus grêles , et les fibres du nerf vestibulaire

plus volumineuses.

Axel Key et Gustave Retzius ont obtenu deux espè-

ces de fibres nerveuses, par voie de dissociation du

nerf auditif, ce dont ils publient un dessin (PL. I, fig.

23-24 de leur travail.) Ils ne disent pas cependant, si

ces deux espèces de fibres furent prises au même en-

droit du nerf auditif, ou bien à des niveaux divers de

son parcours.

1 Wiener Sitzungsberichte. 1875, april.

' Axel Key und Gustav Retzius. - Studien in der anatomie desNcruen-

sdstems und des 131ndeewelbees; Zweite Ilalfle S. g. Slocholm, 1S76.

40 ANATOMIE.

De notre côté, voici ce que nous avons pu constater :

les couches transversales du nerf auditif, préalable-

ment durci dans du bichromate de potasse, avec addi-

tion de sulfate de cuivre ', furent d'abord pratiquées à

l'endroit de son issue du corps restiforme, et traitées

par le carmin. Examinées au microscope, ces coupes

présentèrent le tableausuivant :

La portion moindre de la coupe, correspondant au

faisceau du nerf localisé à la région supérieure et pos-

térieure présentait de gros tubes médullaires avec de

larges cylindres d'axe bien distincts. Ces tubes nerveux,

d'égale dimension, alignés l'un près de l'autre,

atteignaient à peu près la grosseur des nerfs moteurs

crâniens, nerfs pathétique et moteur de l'aeil, ou bien

encore le volume des racines antérieures des nerfs

spinaux. Le tissu conjonctif, formant le périnèvre,

et l'endonèvre, se présentait en forme de trabécules

et de faisceaux parcourant par endroits la coupe

transversale du nerf et contenant des fibres nerveuses

transverses, ainsi que des vaisseaux sanguins. Le tissu

conjonctif contenait également un petitnombre de cel-

lules étoilées et de noyaux.

Des fibres nerveuses fraîches, prises en cet endroit,

furent soumises à l'action de l'acide osmique et du pi-

crocarminate, et dissociées ensuite. Elles ne présen-

tèrent cependant rien de caractéristique, si ce n'est une

fragilité excessive. Leur grosseur est inférieure, à très peu

de chose près,à celle des fibres des racines antérieures de

la moelle épinière. Ces tubes nerveux sont assez unifor-

mes (PL. V, fig. 2), possèdent des noyaux granuleux

1 A. Eitzky. Progrès médical, nez 39, 1877.

DE LA STRUCTURE DU TRONC DU NERF AUDITIF. 41

dans la gaine de Schwann, disposésau centre de segments

de longueur moyenne, entre deux étranglements. Les

segments cylindro-coniques occupent leur place habi-

tuelle. A de rares intervalles, on rencontre, parmi ces

tubes médullaires, des tubes de myéline excessivement

déliés et des fibres de Remak.

La seconde portion occupe une plus grande étendue

de la coupe transversale du tronc nerveux pratiquée à

son émergence du corps restiforme, et correspond

à la partie inférieure et antérieure du nerf. Elle se

compose de fibres nerveuses plus grêles et plus fines,

et en contient même d'excessivement déliées. Dans bon

nombre de ces fibres, les cylindres d'axe ne se colorent

pas par le carmin (PL. V, fig. 3) et ne se reconnaissent

guère que sous l'aspect de points noirs, au centre de

la couche jaunâtre et mince de myéline qui les en-

toure.

L'aspect général de la coupe transversale du nerf

auditif, dans cet endroit, offre une certaine ressem-

blance avec les coupes analogues du trijumeau et du

pneumogastrique. A cette portion de la coupe, le tissu

conjonctif diffère tant soit peu d'avec la précédente.

Les cloisons et les faisceaux en sont plus courts et ne

contiennenent guère de fibres transversales. Ces trabé-

cules du tissu conjonctif, tout en étant plus courtes,

n'en sont pas moins épaisses, et par endroits con-

tiennent des vaisseaux de calibre assez fort. Les cel-

lules étoilées s'y rencontrent en grande quantité; elles

se présentent éparses aussi bien que sous forme d'amas.

Les noyaux du tissu conjonctif abondent également.

Pour ce qui est des fibres nerveuses de cette portion

du nerf, à l'état dissocié et traitées par l'acide osmique

42 ) ANATOMIE.

et le picrocarminate, elles présentent un aspect très

différent des tubes médullaires de la portion précé-

dente. Ce sont des (ils assez déliés et fins, revêtus d'une

couche circulaire de myéline très mince, qui ne pré-

sentent qu'à de rares intervalles des traces d'incisures

dans les segments cylindro-coniques.

On ne saurait découvrir sur le parcours de ces fibres,

ni des noyaux de la gaine deSchwann,ni des étrangle-

ments, même lorsque l'on réussit à dissocier ces fibres

sur une étendue assez considérable. En échange, ces

fibres présentent le long de tout leur parcours de fré-

queiits reiiflemejitS(PL. V,fiq. 4) dus probablement aux

cylindres d'axe ainsi qu'à leurs gaines. La couche cir-

culaire de myéline conserve la même épaisseur dans

les renflements que dans les parties intermédiaires.

Ces renflements affectent différentes formes et différents

volumes. Cependant, la forme globulaire ou bien l'ova-

faire sont celles qui prévalent.

Cette particularité des fibres que nous venons de

mentionner, ainsi que leur tendance à former des

enchevêtrements inextricables, rend leur dissociation

extrêmement difficile. Parmi ces fibres nerveuses, ce

n'est qu'exceptionnellement que je trouvai des tubes

uniformes, à couche circulaire de myéline. Mais je

n'eus jamais l'occasion d'y discerner des fibres de Re-

mak.

Ces deux parties bien distinctes, trouvées dans le

tronc du nerf auditif, correspondent, la première au

faisceau du nerf vestibulaire, la seconde au faisceau du

nerf cochléaire. Sur les coupes du tronc, pratiquées à

son origine microscopique, ces deux parties ne diffè-

rent entre elles que par la nature de leurs fibres, et

DE LA STRUCTURE DU TRONC DU NERF AUDITIF. 43

par l'étendue qu'elles occupent; elles ne présentent

aucune limitebien accusée. Mais, à mesure qu'on avance

vers le méat auditif interne, en procédant successive-

ment aux coupes du tronc nerveux, on trouve une

cloison de tissu cunjonctif de plus en plus accentuée,

qui sépare les deux faisceaux de fibres nerveuses.

Immédiatement avant l'entrée du nerf dans le méat

auditif interne, cette cloison se renforce encore davan-

tage, et sépare entièrement les deux faisceaux en deux

nerfs bien distincts (PL. V, g. 5), d'un volume presque,

égal. Le faisceau supéro-postérieur se compose de

tubes nerveux assez forts, quoiqu'un peu moins gros

qu'à l'origine du tronc nerveux. Ces tubes médullaires

ont un cylindre-axe nettement accusé par le carmin

(Pl. V, fig. 5, A) ; à cet endroit, il n'y a plus de fibres

nerveuses transversales. 9-

Pour ce qui est du faisceau antérieur et inférieur,'

il se compose exactement, comme à son émergence du

corps restiforme, de fibres nerveuses plus ou moins

grêles, dont les cylindres d'axe ne se colorent pas au

carmin. (Pi,. V, fig. 5, B), et ne se distinguent que sous

la forme de points foncés ; souvent même, ils se déro-

bent à Foel) de l'observateur.

Ou doit mentionner ici que plusieurs physiologistes

reconnaissent les doubles fonctions du nerf auditif.

Ainsi, par exemple, Cyon' est de l'opinion que le

« nervus cochleae » est le seul nerf auditif et que le

« ramus vestibularis » transmet les impressions de

l'espace. Cyon fait ressortir encore que ces résultats

' Ettc Cyon ccAc'c/tM ce ? e/aM f /bKC'o ? M M ctOEMj;

1 Elle Cyon Recherches expérimentales sur les fonctions des canaux

semi-circulaires, etc. Thèse pour le doctorat en médecine Paris, 1878,

p. 97-98.

41 . ANATOMIE.

des observations physiologiques sont parfaitement d'ac-

cord avec les données anatomiques, d'après lesquelles

les fibres du nerf auditif ont deux différents aspects et

deux différentes origines, ce qui a été constaté par le

professeur Stieda (de Dorpat).

Dans les derniers temps, Mathias Duval' vient de

confirmer aussi qu'il existe deux racines du nerf au-

ditif bien distinctes et dont l'antérieure est, selon lui,

la racine motrice et joue le rôle du nerf de l'espace,

pour lequel les canaux demi-circulaires servent d'ap-

pareil périphérique.

Les coupes nombreuses du tronc du nerf auditif que

nous pratiquâmes sur bon nombre de cadavres, nous

présentèrent pour la plupart, à l'examen microsco-

pique, des îlots de substance grise, avec des cellules

ganglionnaires. Ce fait s'observe principalement,

comme je l'ai dit déjà, dans la partie interne du nerf

qui longe le corps restiforme. Néanmoins, il n'est pas

rare de rencontrer de ces îlots sur des coupes, faites

au niveau même de l'entrée du nerf dans le méat au-

ditif interne. Dans la partie du tronc nerveux qui

avoisine le corps restiforme, ces îlots occupent un

espace plus vaste. Leur étendue diminue, à mesure

qu'on approche du méat auditif interne.

Cependant on constate parfois une exception à cette

règle, car il arrive de rencontrer, rarement il est vrai,

des îlots plus vastes dans les parages du méat audi-

tif interne, que dans ceux qui touchent au corps res-

tiforme. Dans la grande majorité des coupes, on ne

1 Loco crtalo.

DE LA STRUCTURE DU TRONC DU NERF AUDITIF. 45

rencontre dans chacune d'elles, qu'un seul îlot de

substance grise (PL. V, fiq. 6). Mais il arrive quelque-

fois d'en trouver par deux, dans une même coupe

(PL. V, fiq. 7). Dans ce cas, les îlots sont généralement

plus petits. Il ne m'est jamais arrivé de voir plus

de deux îlots dans une même préparation microsco-

pique.

Ces îlots de substance grise se perçoivent facile-

ment, même à l'aide d'un petit grossissement. Avec le

système 4 de Hartnack, oculaire 3, ou s'en rend par-

faitement compte, surtout lorsqu'ils sont colorés au car-

min. Leur vive coloration, et surtout celle des cellules

ganglionnaires qui s'accentuent encore davantage, fait

que les îlots se distinguent notoirement des tubes ner-

veux qui les entourent.

Au nombre d'un seul ou de deux, les îlots avoisinent

toujours les tubes nerveux de plus fortes dimensions

(PL. V, f. 6 et 7), autrement dit, se trouvent toujours

dans le faisceau du nerf vestibulaire. Il arrive cepen-

dant que l'îlot s'approche plus ou moins du faisceau à

fibres grêles (le nerf cochléaire); mais dans ce cas

également, l'îlot se trouve entouré de fibres nerveuses

plus grosses. ,

En observant de plus près la structure même de

l'îlot, on s'assure qu'elle se compose d'un double ré-

seau, à l'instar de la substance grise de la moelle épi-

nière. L'un de ces réseaux est formé par le tissu con-

jonctif, fibrilles et tissu, finement grenu de Gerlach. Dans

les cloisons conjonctives de ce réseau, on distingue des

éléments cellulaires et des vaisseaux capillaires. Les

interstices de ce réseau sont traversés par des fibres

46 ANATOMIE.

nerveuses longitudinales éparses, en formant de minces

faisceaux.

Le second réseau, dit nerveux, est constitué par des

fibres nerveuses très grêles. Toute l'étendue du tissu

est couverte de cellules ganglionnaires et de nombreux

noyaux. Les cellules ganglionnaires, à protoplasma gra-

nuleux, contiennent de gros noyaux de forme globu-

laire ou ovalaire, renfermant des nucléoles (PL. V,lîq. 8).

Les cellules ont pour la plupart deux prolongements

et sont revêtues d'une membrane. II est à remarquer

que les cellules ganglionnaires sont plus petites, toutes

les fois qu'on observe deux îlots dans la même coupe,

au lieu d'un seul, comme d'habitude.

En analysant de plus près la relation qui existe

entre ces cellules ganglionnaires et les îlots eux-mêmes,

il est facile de s'assurer que ces cellules servent de

ganglions ou noyaux, à des branches nerveuses très

fines, qui se détachent du nerf auditif pour se relier

ensuite aux tubes nerveux plus gros (au nombre d'un

ou de deux), qui forment le nerf intermédiaire de

Wrisberg. Bien que les fibres de ce dernier prennent

habituellement naissance dans le corps restiforme

même, il arrive cependant que ces fibres émergent de

la partie postérieure supérieure du tronc du nerf au-

ditif, à l'égal des branches nerveuses très déliées que

nous venons de mentionner.

Chaque îlot de substance grise laisse échapper de

longues traînées de tissu conjonctif, plus ou moins

nombreuses, constituant des espèces de cloisons ou de

trabécules, déjà notés (PL. V, fiq. 6 et 7). Ces derniers

contiennent des fibres nerveuses transversales excessi-

vement déliées, qui atteignent jusqu'au bord de la sur-

DE LA STRUCTURE DU TRONC DU NERF AUDITIF. 47

face antérieure du nerf et servent d'origine aux bran-

ches nerveuses dont nous avons parlé.

Le nombre des branches nerveuses issues du nerf

auditif, et concourant à la formation du nerf intermé-

diaire de Wrisberg est très variable, selon les indi-

vidus. Leur nombre en est parfois très restreint. Il

arrive de constater, que sur tout le parcours du tronc

du nerf auditif, on ne voit pas s'en détacher une seule

fibre nerveuse; dans ces cas-là, les coupes transver-

sales, examinées au microscope, ne présentent pas la

moindre trace d'un îlot de substance grise, ni de

cellules ganglionnaires. Chez d'autres individus au

contraire, on observe une grande quantité de fibres

nerveuses très fines, se détachant du nerf auditif, tout

le long de son trajet, depuis le corps restiforme jus-

qu'au méat auditif interne. Chaque coupe microsco-

pique du nerf ne manque pas de contenir un îlot plus

ou moins grand, voire même deux îlots, garnis de

cellules ganglionnaires.

On en arrive ainsi à la conclusion, que la quantité

et l'étendue des îlots de substance grise, avec leurs

cellules ganglionnaires, contenus dans le tronc du nerf

auditif (dans le faisceau vestibulaire), se trouve en re-

lation directe avec le nombre et la capacité de fibres

nerveuses qui se détachent de ce nerf, pour se con-

fondre avec le nerf intermédiaire de Wrisberg.

Toutes les fois que la branche nerveuse la plus forte

du nerf de Wrisberg provenait du tronc du nerf au-

ditif, au lieu d'émerger du corps restiforme, l'îlot de

subtance grise qui servait de ganglion à cette branche,

occupait une assez vaste étendue ; sur la coupe trans-

versale du nerf auditif, on voyait l'îlot occuper presque

48 ANATOMIE.

tout l'espace de la partie supérieure et postérieure du

nerf, ne laissant tout autour que très peu de place,

pour le passage des fibres nerveuses.

J'ai déjà fait observer que les grosses fibres ner-

veuses du faisceau postérieur et supérieur du nerf au-

ditif, s'amincissaient légèrement en approchant du

méat auditif interne, tout en conservant une diffé-

rence marquée d'avec les fibres grêles du faisceau an-

térieur et inférieur. Notons que l'amincissement des

fibres nerveuses en question commence exactement à

partir de l'endroit où cesse l'émergence des fils ner-

veux qui se détachent du nerf auditif pour se con-

fondre avec le nerf de Wrisberg. C'est aussi l'endroit

où le nerf auditif cesse de présenter des îlots de subs-

tance grise, servant de ganglions aux fils nerveux.

Comme' je J'ai dit ailleurs; cette 'particularité s'ob-

serve à différents niveaux du parcours du nerf auditif

entre le corps restiforme et le méat auditif interne.

, , -i < i i' ' ''

En se basant sur ces faits, il nous semble qu'aux

noyaux connus du nerf intermédiaire de Wrisberg, le

noyau latéral des'racines antérieures du nerf auditif

(Braule), le noyau antérieur de Huguenin, et le noyau

accessoire de Schwalbe, on pourrait encore ajouter les

ganglions, microscopiques localisés dans le tronc du

nerf auditif que nous venons de décrire.. ,

Rien de nouveau, que les cellules ganglionnaires,

c'est-à-dire les ganglions ou noyaux respectifs qu'on

trouve sur le parcours des fils nerveux. Sans nous

arrêter aux ganglions microscopiques nombreux, tels

que le ganglion de Casser, les ganglions géniculés, le

DE LA STRUCTURE DU TRONC DU NERF AUDITIF. 49

ganglion jugulaire, le ganglion pétreux, les ganglions

des nerfs sympathiques, rappelons-nous que Pouchet

et Tourneux ' citent des ganglions sur le trajet du nerf

lingual, et sur les fibres grises du grand sympathique.

Henle2 affirme qu'on trouve un certain nombre de

cellules nerveuses disséminées entre les fibres du nerf

oculo-moteur. Hyrtl 3 prétend que « dans le méat audi-

tif interne, le nerf auditif contient des cellules gan-

glionnaires, très faciles à découvrir chez le cheval et

le veau, mais qu'on ne trouve qu'avec peine chez

l'homme. » Stannius'a vu de nombreuses cellules ner-

veuses dans les branches du nerf auditif. Koelliker "

affirme avoir trouvé également parmi les fibres du nerf

cochléaire et du vestibulaire, ainsi que dans le tronc

du nerf auditif de l'homme et des mammifères, un

grand nombre de cellules nerveuses bipolaires. Pierret'

signale des amas de cellules ganglionnaires enclavées

entre les tubes médullaires du nerf auditif. Cependant,

aucun de ces observateurs ne donne d'explication, ni

de plus amples détails anatomiques sur les éléments

ganglionnaires.

Nous nous permettons de rappeler, comme nous

l'avons déjà noté, que les auteurs s'accordent unani-

1 Pouchet et F. Tourneux.-Précis d'histologie humaine et d'hislogénie.

Paris, 1878, p. 369.

Iienle, loc. cit., p. 394.

3 Joseph Ilyrtl, Lehrbuch der Anatomie des Heuscheu de Wien 1851,

s. 620.

1 Stannius. - Gott. Nachr., 1851, p. 62.

5 A Koethker. Handboch der Gewebelehre des Menschen. Leipzig,

1867, s. 730.

- A. Pierret. Contribution à l'étude des phénomènes céphaliques du

tabes dorsalis; symptômes sous la dépendance du' nerf auditif. (Revue

nensuelle, n Q, 177, p. 103.)

4 .

50 ANATOMIE.

ment en reconnaissant pour noyau du nerf intermé-

diaire de Wrisberg (nerf qui sert de connexion entre

l'auditif et le facial), un des noyaux localisés dans le

bulbe, rachidien et appartenant au nerf auditif (Hu-

guenin)'; d'autres'prétendirent qu'il ne faisait partie du

nerf auditif qu'à son origine, et que dans son trajet

ultérieur il appartenait au facial. (Krause 2 et Schwalbe s) .

Certains auteurs même révoquèrent en doute la réalité

d'une connexion du nerf auditif avec le nerf facial

par l'entremise du nerf intermédiaire de Wrisberg et

l'envisagèrent comme illusoire. C'est ainsi que Rauberb,

et d'autres observateurs prétendent que les fibres ner-

veuses qui se détachent du nerf auditif et s'acheminent

vers le nerf facial, et vice versa, n'atteignent pas jus-

qu'à la périphérie de ces nerfs, mais se perdent, après

avoir parcouru une courte distance. Krause5, de

son côté, range le nerf intermédiaire de Wrisberg au

nombre des nerfs de communication bien développés.

Ce fut Arnold 6 le premier qui insista sur une rela-

tion autrement réelle, existant entre le nerf auditif et

le facial, dans le méat auditif interne. Cet auteur

distingue une double relation entre ces nerfs. La pre-

mière a lieu à la partie supérieure et interne, et se

compose de quelques filaments grêles, se dirigeant du

nerf facial au nerf vestibulaire. Cette communication

a généralement lieu après l'entrée du nerf auditif dans

1 Huguenin, loc cit., p. 177.

W. Krause. Handbuch der Anatomie, von Cari. Fi,iedr. Theod.

Krause B. IL Hannover, 1879, s. 737.

3 Loc. cit. s. 852.

4 Ueber d. sympatla. GfeH.M'aHy des Yagus, s. 19.

Lac. cit. Hannover. 1879, s. 738.

Dépare cephalica synzpathici. Heidelberg, 1823, s. 3

DE LA STRUCTURE DU TRONC DU NERF AUDITIF. 51

le méat auditif interne ; elle ne s'observe avant

l'entrée que par voie d'exception. La seconde commu-

nication externe et inférieure se compose d'un ou de

deux filaments excessivement déliés, reliant le gan-

glion géniculé, au renflement ganglionnaire, situé sur

le nerf vestibulaire, et connu sous le nom d'intumes-

cence ganglioforme deScarpa. Plusieurs auteurs,

au nombre desquels nous citerons Krause', partagent

cette manière de voir d'Arnold.

Tout en observant : 1° que beaucoup de branches

nerveuses, concourant à la formation du nerf inter-

médiaire de Wrisberg, prennent naissance dans les

ganglions microscopiques enclavés dans le nerf au-

ditif (faisceau vestibulaire); 2° que d'après Schwalbe'

et plusieurs autres auteurs, le nerf intermédiaire de

Wrisberg se relie définitivement au ganglion géniculé

du nerf facial il en ressortirait, comme nous nous

permettrions de le supposer, que la relation entre

le nerf auditif et le nerf facial est beaucoup plus in-

time, qu'on ne l'avait supposé jusqu'à présent.

L'importance que peut avoir cette relation au point

de vue physiologique en général, et particulièrement

au point de vue du rôle que joue le nerf intermédiaire

de Wrisberg, jusqu'à présent si négligé ceci est une

question d'avenir, que nous ne saurions décider actuel-

lement. D'autant plus que les auteurs diffèrent singu-

lièrement quant au rôle du nerf intermédiaire de

Wrisberg. C'est ainsi que Claude Bernard" le classe au

1 Loc. cit. Hannover. 1879, s. 856.

1 Loc. cit. s. 853. ,

Huguenin, loc. cit. s. 177.

52 ANATOMIE.

nombre des nerfs vasomoteurs ; Lussana lui attribue

des rameaux gustatoires se rendant dans la corde du

tympan; Krause' le considère au point de vue de

branche de communication avec le ganglion genouillé;

Schwalbe', Arnold et Bischoff s'accordent à lui recon-

naître le rôle de filet d'origine du ganglion genouillé,

quoiqu'ils ne se décident pas à le classer au nombre

des nerfs sensibles, en s'étayant du fait, que la phy-

siologie du nerf intermédiaire de Wrisberg n'est rien

moins qu'établie définitivement, au point de vue de la

science.

EXPLICATION DE LA PLANCHE V

Fig. 1. 3/7 Hart. : Coupe transversale du tronc du nerf auditif

traitée par le picro-carminate. Faisceau postérieur supérieur montrantdes

tubes nerveux à myéline volumineuse et presque égale avec des cylindres

d'axes larges et colorés vivement.

Fig. 2.-3/7 Hart. : Trois tubes nerveux à myéline du faisceau postérieur

supérieur du nerf auditif soumis à l'action de l'acide osmipue à 1/2 pour

100.

Fig. 3. 3/7 Hart. : Coupe transversale du tronc du nerf auditif trai-

tée par le picro-carminate. Faisceau antéro-inférieur montrant des tubes

nerveux de diverse dimension avec des cylindres d'axes sous l'aspect de

petits points qui ne se colorent pas par le picro-carmin.

Fig. 4. 317 Hart. : Deux tubes nerveux à myéline dufaisceau antéro-

inférieur du nerf acoustique soumis à l'action de l'acide osmique. Sur

toute la longueur de ces fibres se présentent beaucoup de renflements de

diverse forme. On ne reconnaît pas les noyaux de la gaine de Schwann

et des étranglements.

Fig. 5. 3/4 Hart. : Coupe transversale du tronc du nerf anditif trai-

tée par le picro-carmin montrant au milieu une large cloison conjonctive.

A, Tubes nerveux avec des cylindres d'axes larges et colorés. B, Tubes

nerveux avec des cylindres d'axes fins qui ne se colorent pas.

Fig. 6. 3/4 Hart. : Coupe transversale du tronc du nerf auditif trai-

tée par le picro-carminate. Faisceau postéro-supérieur montrant parmi

Archives de physiologie, etc. 1869.

' toc cit. Hannover, 1879, s. 738.

' Loc cit. s. 853,

PATHOLOGIE MENTALE. 53

des tubes nerveux volumineux un îlot de la substance grise avec beau-

coup de cellules ganglionnaires vivement colorées. Il s'échappe de la

substance grise des tabécules conjonctifs jusqu'au bord du nerf.

- Fig. 7. 3/4 Hart. : Coupe transversale semblable de l'autre individu

montrant deux ilôts de la substance grise avec des cellules ganglion-

naires.

Fig. 8. 3/9 Hart ? Trois cellules ganglionnaires de la substance grise

des ilôts mentionnés. On voit la membrane propre autour des cellules,

protoplasma finement grenu, un grand noyau ovale avec un nucléole

et des prolongements protoplasmatiques. "' ' , ' k

PATHOLOGIE MENTALE

INVERSION DU , SENS "GÉNITAL" (Contràre seaûalémpfindung.

Wcslphal. Pervcrted sexuel Instincts. Julius Krueg, fHM ! 'M'ot ! 6

dcll'istinto sessuale. Tomassia Ariggio.) "' ? ° r7 y ? ' ParMM.CHARCOTetMAGNAN. mr un - .

^

" r ,r" i, . -ni .yt;1 '"sH ', -

La perversion du sens génital s'associe à1 de nom-

breuses formes mentales, et depuis les naïves obscé-

nités du vieillard en démence jusqu'aux hideuses pro-

fanations de cadavres de certains vésaniques impulsifs,

il existe une longue sérié de faits qui1, loin'de'consti-

tuer une forme mentale définie, ne sont que des symp-

tômes de diverses maladies, dénptanfchez l'individu

l'affaiblissement ou la perversion des. facultés morales

ou affectives. ' - ? " ? > ? -\e - '. z ? i' < . » « i i, « .

Mais ne s'agit pas ici de ces perversions du sens

génital qui souvent prennent leur source -dans des

troubles de la sensibilité générale,^ mais * bien d'un

ordre d'idées déterminé, dans lequel leT fait 'étrange

51,. PATHOLOGIE MENTALE.

dans notre civilisation est l'appétit génital pour le

même sexe à l'exclusion de l'autre.

Sans doute, dans l'antiquité, nous trouvons les traces

de ces amours contre nature, et bien des exemples

d'amitié légués par le paganisme, ont pour fondement

de honteuses promiscuités. Mais ce ne sont là, sans

doute, que les dégradantes conséquences du relâche-

ment des moeurs dans une société profondément viciée.

Des faits de ce genre à caractères absolument mala-

difs ont été rapportés par différents auteurs; toutefois,

avant d'entrer dans le vif de la discussion, nous tenons

à rapporter un exemple qui par sa simplicité, par la

lucidité et le degré élevé de l'intelligence du sujet, met

en relief, en accentuant fortement les ombres, les carac-

tères principaux de cette singulière disposition morbide.

OBSERVATION ! . Tendance nêvropathique des ascendants ; dis-

proportion entre l'âge du père et de la mère. Inversion du sens

génital : dès l'enfance, sensations voluptueuses, et depuis la

puberté parfois éjaculation ci la vue d'un homme nu, d'une

statue d'homme nu ou du souvenir obsédant de ces images;

la femme nue laisse indifférent. De 5 à 8 ans, propension au

vol. Habitudes d'onanisme jusqu'à 22 ans. 4 ttaques

hyslériformes à partir de 15 ans.

Voici tout d'abord le récit fait par le malade lui-même des

phénomènes bizarres qu'il éprouve et qu'il rapporte à ce qu'il

appelle sa sensualité :

« Ma sensualité, dit-il, s'est manifestée dès l'âge de six ans

par un violent désir de voir des garçons de mon âge ou des

hommes nus. Ce désir n'avait pas grand'peine à se satisfaire,

car mes parents demeuraient près d'une caserne et les soldats

ne se gênaient pas pour laisser voir leurs parties viriles. Un

jour, j'aperçus (j'avais peut-être huit ans) un soldat qui se

masturbait; je l'imitai et j'éprouvai, à côté du plaisir de

l'imagination qui s'arrêtait sur ce soldat, le plaisir physique

d'un chatouillement très fort. Je continuai à me donner ce

INVERSION DU SENS GENITAL. 55

plaisir, toujours en excitant mon imagination par le souvenir

d'hommes nus. Mes parents quittèrent N... pour s'établira à

B...; là, je vis que des soldats allaient se baigner dans une

petite rivière très pittoresque ; ils se baignaient complètement

nus ; j'imaginai pour pouvoir me satisfaire, d'aller m'asseoir

au bord de la rivière et de dessiner le paysage ; de cette ma-

nière, je voyais les soldats, sans avoir l'air de les regarder.

Vers l'âge de quinze ans, la puberté arriva ; ma masturbation

me donna d'autant plus de satisfaction ; d'ailleurs, je pro-

voquais l'érection et ses suites autant par l'imagination

que par le mouvement ; il m'est arrivé plus d'une fois

d'avoir l'érection, la convulsion amoureuse et la perte de

sperme à la seule vue du membre viril d'un homme. La

nuit, mon imagination travaillait et amenait les mêmes

résultats. Je cessai absolument la masturbation à l'âge de

vingt ans ; mais je ne suis jamais parvenu, malgré tous

mes efforts, à arrêter les excitations de mon imagination ;

les hommes jeunes, beaux et forts provoquent toujours chez

moi une \ive émotion ; une belle statue d'homme nu produit

le même effet ; l'Apollon du Belvédère me fait beaucoup d'im-

pression. Quand je rencontre un homme dont la jeunesse et

la beauté provoquent ma passion, je suis tenté de lui plaire ;

si je donnais libre carrière à mes sentiments, je lui ferais toutes

les amabilités possibles, je l'inviterais chez moi, je lui écrirais

sur du papier parfumé, je lui porterais des.fleurs, je lui ferais

des cadeaux, je me priverais de bien des choses pour lui être

agréable. Jamais, je ne me laisse aller à tout cela, mais je sens

très bien que je serais capable de le faire ; je dois vaincre le

désir que j'éprouve d'agir ainsi. Je sais dominer les envies dont

je viens de parler, mais je ne parviens pas à dominer l'amour

lui-même ; cet amour heureusement ne me possède pas d'une

manière continue ; je travaille et mes études me sont d'un

grand secours contre les pensées sensuelles, mais souvent la

sensualité l'emporte sur le travail et je suis arrêté au milieu de

l'examen très approfondi d'une question, par la représentation

soudaine d'un homme nu dans mon imagination. J'ai toujours

lutté tant que j'ai pu contre cette sensualité ; je suis parvenu

à empêcher beaucoup d'actes auxquels je me sentais poussé ,

mais je n'ai jamais pu éteindre la sensualité même. La suprême

satisfaction de cette sensualité n'a jamais été que la vue de

l'homme nu, surtout de la verge de l'homme ; je n'ai jamais

ressenti le désir de pénétrer dans l'homme ou d'être l'objet

56 - PATHOLOGIE MENTALE.

d'un'homme. Regarder les parties génitales d'un homme beau

et fort, tel a toujours été la volupté la plus grande pour moi.

Quant aux femmes, si belles qu'elles soient, elles n'ont

jamais fait naître en moi le moindre désir. J'ai essayé d'en

aimer une, espérant ainsi revenir à des idées naturelles ; mal-

gré sa beauté, ses efforts, etc., je suis resté complètement froid

et l'érection, si facile chez moi à la vue de l'homme, n'a pas

même commencé. Jamais une femme n'a provoqué en moi la

plus petite sensualité.

J'adore la toilette féminine ; j'aime à voir une femme bien

habillée, parce que je me dis que je voudrais être femme pour

m'habiller ainsi. A l'âge de dix-sept ans, je m'habillais en

femme au carnaval et j'avais un plaisir incroyable à traîner

mes jupes dans les chambres, à mettre de faux cheveux et à

me décolleter. Jusqu'à l'âge de vingt-deux ans, j'ai eu le plus

grand plaisir à habiller une poupée ; j'y trouverais encore du

plaisir aujourd'hui.

Les dames s'étonnent de me voir si bien juger du plus ou

moins de bon goût de leurs toilettes et de m'entendre parler

de ces choses, comme si j'étais femme moi-même.

L'amour que j e ressens pour un homme passe vite ; dès qu'un

autre homme, plus joli à mes yeux, se présente, la pensée du

premier disparaît.

Les pertes nocturnes semblent ne plus être aussi fréquentes

qu'il y a quelques mois : actuellement, il y a bien trois semaines

que je n'en aipas eu ; mais, je continue à avoir mes rêves ordi-

naires et à désirer toujours voir (rien de plus) des hommes nus.»

Tels sont décrits par le patient qui en a pleine conscience

les caractères de l'obsession dont il ne peut s'affranchir.

Ce malade quel est-il ?

Au point de vue physique, cet homme, âgé de trente etun ans,

est brun, grand, bien charpenté, il a le crâne régulièrement

conformé, l'oeil vif, le visage énergique et intelligent, malgré

un léger prognathisme de la mâchoire inférieure et un déve-

loppement assez considérable des oreilles. Il porte une mous-

tache épaisse,bien plantée qui ne manque pas de lui donner une

certaine allure martiale. Il se tient droit, la marche est ferme,

même un peu raide et n'a rien de l'allure féminine ; il est d'ail-

leurs sexuellement très bien conformé ; le pubis est fourni de

poils,les testicules et la verge offrent uneconformationrégulièro,

sans la moindre anomalie, il n'y a pas trace d'hypospadias.

INVERSION DU SENS GENITAL. 57

Sous le rapport de l'intelligence, c'est un esprit cultivé,

instruit, très éruditjuil a toujours travaillé, 'S'est tenu cons-

tamment au premier rang, et après de fortes études classiques

a conquis rapidement les grades universitaires qui l'ontconduit

à trente ans au professorat dans une faculté, i Admirateur des

oeuvres d'art, adonné à la musique, il préfère particulièrement,

Chopin, Gounod, Delibes, Massenet, trouvant chez ces auteurs

la note sentimentale qui lui convient ? ci 1 'Il Il (101- na z

La poésie de Victor Hugo, les descriptions de la nature de

George Sand, ont pour lui les plus grands charmes, j - f '

Il est bienveillant, un peu complimenteur, d'un commerce

facile et s'estime heureux quand il ! peut rendre service à'-ses

amis ou faire du bien aux déshérités de la fortune. t,

Si nous reprenons l'histoire pathologique nous verrons bien

des ombres sur ce fond en apparence si parfaitement uni. Tout

d'abord, les antécédents héréditaires montrent une'' grande

disproportion entre l'âge du père marié à quarante-neuf ans et

de la mère qui n'avait que dix-huit ans. Il est vrai que du côté

paternel les oncles et les tantes et le père lui-même atteignent

un âge avancé, sans qu'aucun accident nerveux ait attiré l'at-

tention ; quant aux ascendants maternels, on' trouve chez le

grand-père un défaut d'équilibre dans la conduite dans le genre

de vie, qui sans constituer la folie proprement dite, dénote

les dispositions maladives que l'on trouve chez les individus

prédisposés aux affections mentales. Quoique notaire dans

une petite ville; il menait une vie un peu' agitée, il était en

relation avec les célébrités artistiques de son temps, les rece-

vait chez lui, entre autres la Malibran, dont il était l'ami ; il

négligeait sa charge et finalement il avait été obligé de l'aban-

donner. La mère du grand-père s'était fait remarquer par son

excentricité : très aimable pour les étrangers, elle était dans

son intérieur méchante et acariâtre. La mère, de moeurs pures

associant à une religiosité exagérée un goût prononcé pour la

toilette, recherchait les choses voyantes, les grandes dé-

monstrations et particulièrement les cérémonies à grand

fracas. -

Dans son enfance, il a eu la scarlatine, la coqueluche qui

ont guéri sans complication. De cinq à huit ans, le malade a

présenté une propension au vol des mieux accusée ; il prenait,

sans aucun remords, à ses camarades,à ses maîtres, des plumes,

des crayons, différents objets, qu'il emportait chez lui, mais

58 PATHOLOGIE MENTALE.

sans les collectionner ; un jour, il dérobe dans le bureau de son

maître d'étude, un encrier contenant de l'encre rouge, et au

moment où il franchissait le seuil de la salle de travail, l'en-

crier tombe de la poche, se brise, répandant le liquide révéla-

teur de son iarcin ; vivement ému de la mésaventure, à partir

de ce moment il a cessé de voler.

Les dispositions nerveuses de notre malade ne se sont pas

seulement traduites par des troubles psychiques, des aberra-

tions morales, il a offert aussi, de très bonne heure, des acci-

dents convulsifs qui, par leurs prodromes, par leur marche et

aussi la bénignité des phénomènes consécutifs ne s'opposant

pas à la reprise immédiate du travail, se rattachent à l'hystérie

plutôt qu'à l'épilepsie.

Les crises remontent à l'âge de quinze ans ; d'abord très

rares, elles sont devenues plus fréquentes en 18G9 et 1870.

Elles sont précédées par une excitation cérébrale qui empê-

chant le malade de fixer une idée et de s'y arrêter, lui fait dire

autre chose que ce qu'il voulait dire. Il lui semble que la

pensée qu'il veut émettre est déjà remplacée par une autre

avant qu'il ait eu le temps de l'exprimer ; en d'autres termes,

les idées se précipitent avec une telle rapidité qu'il lui est im-

possible de s'y arrêter. Il a, du reste, conscience de cet état.

Les phénomènes intellectuels sont accompagnés d'un batte-

ment continu des paupières. Ces troubles se montrent dès le

réveil soit pendant la nuit, soit dès le matin, entre sept et huit

heures. Prévenu par ces prodromes, le malade reste au lit, ou

bien s'il s'était levé, s'empresse de se recoucher pour éviter

d'être surpris par l'attaque hors de chez lui.

Ces phénomènes précurseurs durent plus ou moins long-

temps ; exceptionnellement même, tout s'arrête là et un som-

meil profond vient enrayer l'accès. Quand l'attaque arrive,

c'est le fait le plus habituel, elle se produit toujours dans la

matinée, mais à des heures différentes. Un jour par exception

la crise eut lieu l'après-midi à la suite d'une émotion.

D'après le dire d'une parente qui demeure auprès du malade,

au moment de l'attaque, celui-ci pousse un cri, perd connais-

sance, se raidit; présente ensuite des secousses dans les

membres, les yeux se convulsent, les mâchoires s'entre-

choquent et si l'on ne mettait un linge mouillé entre les

dents, les lèvres et la langue seraient mordues presque chaque

fois, ce qui arrive, du reste, malgré les précautions prises ;

INVERSION DU SENS GÉNITAL. 59

de l'écume se montre aux lèvres et la face s'inonde de sueurs.

'Après l'attaque survient un sommeil profond. Une seconde

attaque se produit trois heures environ après la première, puis

une troisième trois heures environ après la seconde, quelque

fois enfin une quatrième. Ces quatre attaques se répartissent

sur un jour et demi ; le lendemain du jour où le mal a com-

mencé vers midi, le trouble de l'intelligence et le battement

des paupières cessent. Une grande fatigue suit la crise, l'appé-

tit reste bon, il y a même une sensation de faim. Pendant

deux ou trois jours les urines sont rougeâtres et épaisses. Il

reste un peu de tristesse motivée surtout par le chagrin que

parait chaque fois témoigner l'entourage, du retour de ces

accidents; d'ailleurs l'intelligence est libre et peut être appli-

quée tout aussitôt à une occupation sérieuse comme si rien

n'était advenu. Le début de ces accidents remonte à 1865;

jamais avant cette époque, on n'avait remarqué de phéno-

mènes convulsifs. Dans les premières années, les intervalles

furent fort longs, ils étaient de plus d'une année ; en 1869 et

1870, les accès devinrent plus fréquents. Depuis 1870, les

crises sont espacées de trois mois, de deux mois et, par excep-

tion, de trois semaines seulement.

Une disposition d'esprit qui s'exagère parfois après les

attaques, c'est le désir de compter et de recompter plusieurs

fois de suite les fleurs, les lignes, les clous, les carrés, les petits

détails en un mot, d'une tapisserie, d'un écran, d'un plafond,

d'une décoration quelconque.

Les convulsions ne semblent pas exercer d'influence sur les

troubles intellectuels, après lesquels d'ailleurs, 'elles se sont dé-

veloppées et qu'elles n'ont pas modifiés, malgré leur fréquence

plus grande depuis quelques années.

D'après la note précédemment citée, rédigée en juin der-

nier par le malade, celui-ci paraissait absolument esclave de

ses appétits anormaux ; cette disposition morale s'est sensi-

blement modifiée depuis cette époque. Déjà au mois d'août, il

racontaitqu'ils'étaitaperçuque la vue d'une femme ne le laissait

pas indifférent ; en septembre sur nos conseils il s'était efforcé

de substituer, dans ses souvenirs, la femme à l'image obsédante

del'hommenu. Il l'avait tenté àplusieurs reprises, mais il était

tenu à de grands efforts de volonté pour que son imagination

ne le portât pas vers son objet de prédilection. Enfin, au

commencement de septembre, ayant remarqué moins de résis-

60 PATHOLOGIE NERVEUSE.

tance de son esprit, à s'arrêter à l'idée de la femme et ayant

même éprouvé une certaine satisfaction à la regarder, il a fait

une tentative dont il est sorti victorieux. C'est sans effort qu'il

a pu avoir, à plusieurs reprises, des relations avec une femme,

éprouvant d'ailleurs les sensations voluptueuses habituelles.

L'effet moral a été excellent ; il a eu du repos quelques jours,

mais obligé de quitter Paris et réduit à lutter par la raison

seule contre ses obsessions il sent, dit-il, parfois ses idées

devenir anti-naturelles.

En dehors de l'hygiène physique et morale à laquelle le

malade a été soumis, nous avons eu recours aux pratiques

hydrothérapiques, affusions froides et douches, et au bromure

de potassium qui a diminué l'intensité et la durée des crises,

mais non la fréquence. (A suivre.)

i 9· t

PATHOLOGIE NERVEUSE

DE LA CACHEXIE PACHYDER)IIQUE. (11j·xmdbme des auteurs

anglais). OBSERVATION NOUVELLE AVEC ALIÉNATION

MENTALE TRANSITOIRE ; par le I)rll. BLAISE, chef de clinique

a la Faculté de médecine de Montpellier.

'Y') » ' ) i ' '

La cachexie pachydermique n'est pas en réalité une

maladie nouvelle. Confondue pendant longtemps avec

d'autres états morbides, particulièrement avec la poly-

sarcie adipeuse', elle en est séparée pour la première

fois par sir William Gull '. Le mémoire de Gull lu, le

1 Sir W. Gull. On tz cretinoid state stcperuening in ndttlt Life in

tramât. (Trans. of the clin. Soc. of London, vol. YI1, p. 180.

DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 61

24 octobre 1873, à la société clinique de Londres, est

basé sur cinq cas observés par l'auteur anglais lui-

même. Il donne des malades un tableau fidèle et sai-

sissant, où l'on trouve décrit dans toute sa netteté cet

oedème spécial, solide, qui déforme tout le corps,

particulièrement la face et les extrémités des membres,

et qui constitue l'un des traits les plus caractéristiques

du nouvel état morbide. C'est ainsi qu'il compare la

forme des mains à celle d'une bêche (spade-like).

Mais ce qui frappe le plus W. Gull, ce n'est pas cet

oedème spécial, c'est ce double fait que toutes ses

observations se rapportent à des femmes et que ces

dernières présentent un état intellectuel voisin du cré-

tinisme. Aussi 'propose-t-il d'appeler l'affection nou-

velle : état crétinoïde pouvant subvenir chez les femmes

à l'état adulte. L'auteur se borne à décrire très nette-

ment ce qu'il a observé, laissant à d'autres le soin de

déterminer la nature et les lésions anatomiques de ce

syndrome clinique. Les malades de Gull ne présentaient

d'ailleurs aucune complication viscérale.

En 1877, le D' Ord', de Saint-Thomas Hospital,

présente, à la même société, deux nouveaux cas, se

rapportant encore à des femmes, dont l'un, suivi d'au-

topsie, avait permis d'étudier les lésions anatomiques.

C'est toujours le même tableau clinique. Mais il ressort

de l'examen nécroscopique que l'infiltration générale

cutanée et sous-cutanée, qui déforme d'une façon si

caractéristique les différentes parties du corps, n'est

due, ni à la graisse, ni à un liquide oedémateux

= W.-nI. Ord. On 3lyxoedei ? za (Med. chir. Ti,a71sact., vol. LXI, p. 57.

Le même. - Clinical lecture on myxoedema. (Brit. nied. Jour., may

1878.)

62 PATHOLOGIE NERVEUSE.

s'écoulant après la section, mais à une matière spé-

ciale, d'apparence gélatineuse, qui présente tous les

caractères chimiques et histologiques du tissu muqueux.

Cette matière spéciale serait constituée par le dévelop-

pement exagéré du ciment intercellulaire qui contient

de la mucine.

Cette infiltration de la peau entraîne l'atrophie des

bulbes pileux, des glandes sébacées et sudoripares,

étreint les réseaux vasculaires et les extrémités ner-

veuses ; d'où l'altération, la chute des cheveux et des

poils, la diminution des sécrétions sébacées et sudori-

pares, l'abaissement de la température périphérique et

les troubles de la sensibilité observés pendant la vie.

La paresse cérébrale si remarquable des malades, leur

lenteur dans tous les actes qu'ils accomplissent

tiennent à ce que les terminaisons nerveuses périphé-

riques, englobées et comprimées par le tissu muqueux

ne perçoivent que des sensations affaiblies, incapables

de stimuler d'une façon suffisante les fonctions des

centres nerveux.

L'infiltration porte d'ailleurs sur le tégument interne,

comme sur l'externe ; par suite, on peut lui attribuer

les troubles de la digestion et de la nutrition et la

cachexie consécutive.

En résumé, Ord rattache tous les phénomènes obser-

vés à l'existence de ce tissu muqueux et propose, en

conséquence, de désigner la maladie sous la nom de

myxoedème.

En juin 1879, Olive' publie, dans les Archives de

médecine, un résumé de faits observés par Gull et

'Olive. Sur le Myxoedème. (drch. gén. de .met., 1879, t. I, p. 677.)

DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 63

Ord. Il insiste sur ce fait qu'il ne s'agit pas d'une

espèce morbide nouvelle. Il rapporte que son maître,

M. le professeur Lasègue, « rappelait à ce sujet l'obser-

vation d'une pensionnaire de l'Hospice de la Vieillesse

(femmes), nommée Madeleine et qui était devenue

légendaire à force d'être montrée comme un échan-

tillon-type de la maladie. Cette femme avait été prise

graduellement d'une bouffissure solide qui s'était éten-

due de la face à tout le corps et qui avait débuté vers

l'âge de quarante ans... La description répond exacte-

ment à celle que donne sir W. Gull. Les faits iden-

tiques, ajoute Olive, peu nombreux, ont été rapportés

en France sous le nom générique et vague de poly-

sarcie adipeuse. »

Savage ' publie le premier cas observé chez l'homme.

Hammond émet, il est vrai, quelques doutes sur la

question de savoir s'il s'agit bien là d'un véritable cas

de myxoedème. Quoiqu'il en soit, à côté des symp-

tômes déjà décrits, tels que la sécheresse et la rudesse

particulières du tégument externe, et l'abaissement de

la température au-dessous de la normale, l'auteur

signale des troubles très variés du système nerveux :

caractère triste et sombre; intelligence notablement

affaiblie; réponses lentes et inexactes; mémoire impar-

faite ; sens spéciaux atteints avec illusions et halluci-

nations fréquentes; démarche vacillante sans paralysie

des membres ; perversions du goût et de l'odorat pou-

vant aller jusqu'aux hallucinations proprement dites.

Dans un cas cité par Savage, les troubles psychiques

ont abouti à une véritable manie, avec insomnie,

1 Savage. Myxoedema and its zzerccus symptoms. (Journal of mental

science. Jan. 1880, p. 417.)

6t PATHOLOGIE NERVEUSE.

incohérence et violence du langage pendant la nuit.

Pour Savage , c'est l'encéphale qui est le point de

départ de tous ces accidents nerveux.

Le 1e mai 1880, Goodhart' publie un cas de myxoe-

dème observé chez l'enfant. Nous devons déclarer que

la lecture de cette observation ne nous a pas entière-

ment convaincu en ce qui concerne l'existence du

myxoedème. Quoiqu'il en soit, il s'agit d'une petite

fille de quatre ans, présentant un état de crétinisme

très accusé, avec embonpoint considérable, visage

rond et sans expression, mains déformées, particuliè-

ment au niveau des éminences thénar et hypothénar ;

l'existence du corps thyroïde était douteuse. L'excès

de graisse sur tout le corps, la pâleur jaunâtre des

téguments, rare chez l'enfant, font penser à l'auteur

qu'il s'agit de quelque chose de semblable au myxoe-

dème des adultes.

Goodhart-s'étend longuement sur le crétinisme spo-

radique ; puis il établit un parallèle avec le myxoedème

et trouve entre ces deux affections des relations évi-

dentes. Il rejette absolument l'interprétation de Ord et

ne pense pas que des lésions cutanées telles que celles

du myxoedème, puissent entraîner des troubles des

facultés psychiques. A la rigueur, et bien qu'il ne

connaisse rien de semblable , il admettrait cette

influence chez un enfant, dont le cerveau est incom-

plètement développé et qui présenterait une anesthésie

complète, conséquence d'une ichthyose ou d'une sclé-

rodermie congénitale. Mais, chez un adulte, alors que

le cerveau est arrivé à son complet développement,

' Goodhart. cietiizi6m sporadic and 31yxoederna. (Jled. Times and

Gaz., 1 may 1880.)

DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 65

pareille chose lui semble impossible et de fait, on ne

voit pas, dit-il, les anesthésies ou la perte d'un sens

spécial entraîner des troubles intellectuels ; le contraire

se produirait plutôt. En résumé, il attribue les symp-

tômes cérébraux à une lésion cérébrale de même

nature que celle qui porte sur les téguments. Mais on

peut objecter à l'auteur anglais que Ord n'a pas pu

découvrir cette lésion cérébrale et qu'il a observé dans

un cas de sclérodermie très prononcé des symptômes

analogues à ceux du myxoedème. ,

En juillet 1880, M. Hadden', qui avait eu l'occa-

sion d'observer successivement les malades de Ord et

de M. Charcot, publie dans le Progrès médicalune inté-

ressante revue sur le myxoedème. Il nous apprend que

111. Charcot « avait découvert de son côté le myxoedème

et allait publier un travail à ce sujet, sous le. nom de

Caclaexieac7aydez°nziqzie, lorsqu'il prit connaissance des

recherches de Ord. » Le savant professeur de Paris

avait, en effet, observé plusieurs cas de myxoedème soit

en France, soit à l'étranger, où il avait rencontré deux

malades : l'un àMurano, près Venise, l'autre à Murvie-

dro, l'ancienne Sagonte, en Espagne. A .l'égard des

symptômes cérébraux, M. Hadden propose l'interpré-

tation suivante : « La diminution remarquable de la

chaleur'du corps peut être un symptôme, précoce, dû

sans doute à une affection du système .vaso-moteur.

Sachant, comme nous l'enseigne la physiologie, que les

pensées et les actions sont toujours accompagnées par

une chaleur et par l'usure des tissus, il est raisonnable

de supposer que la torpeur intellectuelle et l'affaiblis- ? .

1 Hadden. - Du Myxoedème. (Progrès Médical, nos 30.et 31,18SO.)

5

66 PATHOLOGIE NERVEUSE.

sèment physique sont dûs aux conditions circulatoires

de ces malades, que l'on peut comparer à des animaux

à sang-froid. Une lésion du grand sympathique expli-

querait ces symptômes et retarderait le mouvement

nutritif si important dans les fonctions de la vie.

L'hypothèse de M. Hadden est loin d'être à l'abri de

tout reproche et ne nous satisfait que médiocrement.

En même temps et dans le même journal, M. Ballet'

publie, sous le titre de Cachexie pachdernai jue,

l'observation d'un malade de M. Charcot. Il s'agit d'un

homme de cinquante-sept ans, qui présente le tableau

symptomatique complet du myxoedème.

De son côté, Thaon fait paraître dans la Revue

mensuelle un travail d'ensemble intéressant. On y trouve

une observation nouvelle, concernant une dame, qui

lui avait étéadresséeparM.Charcotet qu'il avait soignée*

pendant deux hivers consécutifs à Nice. L'auteur se

livre à une revue critique des travaux de Gull et de

Ord. Il repousse la dénomination de myxoedème.

« En l'acceptant, on semblerait, dit-il, adopter la

théorie entière du D' Ord et admettre la subordination

de tous les symptômes à l'existence de ce tissu

muqueux à la périphérie du corps. » Cette subordina-

tion ne peut se démontrer. Il faudrait, en effet, dans

l'espèce, que la peau et le tisssu cellulaire fussent

infiltrés longtemps avant l'apparition des phénomènes

cérébraux. Or, aucune des observations publiées par

Ord et Gull ne présente cette subordination chronolo-

1 Ballet. Cachexie pachydermique (Afy.roeHte des auteurs anglais),

in Progrès Médical, 24 juillet 1880.

'Thaon. Cachexie pachydermique (oedème crétinoide, myxoedème),

in Revue mens, de Dlérl. et de Chir., août 1880.)

DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 67

gique des symptômes ; le contraire existe même pour

deux d'entre elles. L'auteur ajoute que, dans l'hypo-

thèse de Ord, les désordres de l'activité cérébrale

seraient de règle dans les cas où « les impressions

périphériques sont singulièrement plus émoussées, »

telles que l'anesthésie généralisée des hystériques ou des

lépreux. Et cependant rien de semblable ne s'observe

en clinique. Il y a mieux, les malades atteints de

myxoedème ne présentent même pas d'anesthésie. En

conséquence « l'hypothèse de Ord est insoutenable. »

Loin d'en faire un symptôme secondaire, Thaon est

« presque tenté de mettre au premier rang cette pa-

resse cérébrale et de faire dépendre d'elle la plupart

des autres symptômes». A l'appui de sa thèse, il cite le

cas suivant qu'il emprunte à sa clientèle privée et qui

montre « la facilité avec laquelle les impressions

morales pénibles peuvent amener chez les femmes des

modifications dans le système cutané général ». Une

dame de quarante-deux ans, d'une bonne constitution,

a ressenti depuis sept ans des chagrins violents et

« chaque fois elle a éprouvé les symptômes suivants :

tristesse très grande, chloro-anémie, paresse intellec-

tuelle, engraissement considérable, sécheresse de la

peau, état pachydermique de la paume des mains et

de la plante des pieds. Chaque phase morbide durait

trois mois à un an; puis la gaieté revenait, ainsi que

l'activité cérébrale, et, chose remarquable, les lésions

périphériques disparaissaient en même temps ». En

résumé, l'auteur voit dans le myxoedème un état mor-

bide affectant l'ensemble de l'organisme. « La maladie

est partout, la déchéance est générale , le sang est

appauvri, toutes les fonctions sont languissantes; c'est

68 PATHOLOGIE NERVEUSE.

une véritable cachexie. » La cachexie pachydermique

se révèle par la triade symptomatique suivante : ané-

mie profonde, altérations remarquables de la- peau et

du tissu cellulaire, état cérébral particulier.

La fin de ce travail comprend la reproduction de

trois observations : une première de Gull ; une deuxième

(avec autopsie) de Ord; la troisième est l'observation

de M. Charcot, publiée par M. Ballet.

Quelques jours après la revue de Thaon, Bourne-

ville et d'Olier' publiaient un nouveau cas de myxoe-

dème avec crétinisme et idiotie. Il s'agit d'un enfant

de 19 ans, difforme et présentant l'aspect d'un enfant

de deux ans. Il n'existe ni antécédent névropathique, ni

consanguinité. Né à terme, il reste en nourrice jusqu'à

un an, dans des conditions hygiéniques déplorables. A

cette époque, on note quelques convulsions. A 15 mois,

l'enfant commence à marcher et ne diffère sous aucun

rapport des enfants de son âge. Depuis, sans nouvelle

attaque de convulsions, il se produit un arrêt de déve-

loppement, l'enfant devient gâteux. La dentition s'opère

lentement et n'est pas complète à 7 ans. Actuellement

on observe : état d'inertie avec obtusion intellectuelle

et apathie. complètes; tête volumineuse dont la forme

se rapproche de celle d'un pain de sucre; calvitie

presque complète avec cheveux courts, secs, presque

noirs; visage hideux; front et racine du nez couverts

de rides; nez camard; peau de la face mate, d'un

blanc jaunâtre, bouffie et absolument glabre ; la bouf-

fissure est surtout marquée au niveau des joues, des

lèvres et des paupières. La lèvre inférieure est forte-

' Bournevillp et d'Olier. -Alole siti, 1121 cces de crélinisn7e uoec nzrlrndénze

cachexie pachydermique). (Proqrès Médical, 20 août 1880, n° 35.)

DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 69

ment renversée (état dû en partie à une rétraction

cicatricielle de la peau du menton) et laisse échapper

presque continuellement la salive. Les dents sont pour

la plupart cariées et usées; il n'existe pas de malfor-

mation du voile du palais. La bouffissure de la face n'a

pas toujours existé au même degré; actuellement physio-

nomie sans expression; la joie s'exprime par un sou-

rire grossier et disgracieux. La parole est réduite à

quelques monosyllabes, la voix enrouée, nasillarde; les

réponses sont lentes à venir et comme traînées. La

peau du cou est notablement épaissie et le corps thy-

roïde à peine marqué. La peau du tronc paraît fine,

d'un blanc mat, résistante sous le doigt, comme infil-

trée ; il semble qu'elle recouvre une épaisse couche de

tissu cellulaire lâche. En divers points du thorax, elle

est soulevée par des tumeurs molles, tremblottantes,

d'apparence myxoedémateuse.

La température, recueillie sur le devant de la poi-

trine et sur des tumeurs cervicales, a été de 35 ? et

36°,2, la température extérieure étant de 25", 1 .Au rec-

tum, elle est restée invariablement pendant huit jours

à 370,2 2 le soir. Sur la face externe du bras le ther-

momètre a donné 33°, 8 à droite, 34°, à à gauche; à la

main, on y note d'ailleurs un abaissement de tempé-

rature.

L'urine examinée à plusieurs reprises, n'a présenté

ni glycose, ni albumine. Partout la peau est absolu-

ment glabre; la sensibilité générale paraît émoussée;

le ^chatouillement n'est pas ordinairement perçu. Le

malade présente au froid une sensibilité exagérée. Les

sens spéciaux : vue, ouïe, goût ne semblent pas atteints.

Enfin, il n'existe pas de troubles digestifs et le sommeil

70 PATHOLOGIE NERVEUSE. '

est tranquille. Un fait remarquable est l'amélioration

sensible survenue après l'administration de bains, de

préparations toniques et ferrugineuses.

L'attention est attiréesur le myxoedème, de nouvelles

observations ne tardent pas à paraître. Le z5 septem-

bre 1880, Thomas Inglis1 publie deux nouvelles obser-

vations.

La première se rapporte à un homme, jouissant d'une

bonne santé habituelle, [qui, péniblement affecté des

désordres de sa femme, tombe dans la mélancolie et

entre à l'asile après avoir tenté de se suicider en pre-

nant une grande quantité d'opium. A cet état de mé-

lancolie, qui cesse au bout de trois mois, succède un

oedème qui envahit insensiblement et progressivement

les paupières, les mains, les membres et le tronc. Les

paupières sont gonflées, ridées, couleur de cire ; le

nez est épaté, les lèvres épaisses, la lèvre inférieure

proéminente. La physionomie prend une expression

d'hébétude et perd même toute expression. La laugne

paraît trop grande pour la bouche, sans cependant

qu'il y ait un oedème marqué. Le langage du malade

est lent; sa façon de parler rappelle, particulièrement

le matin, le débit d'un hémiplégique, et aussi l'articu-

lation embarrassée de l'épileptique. Les mains pren-

nent bientôt la forme de bêche ; le malade y éprouve

des sensations de raideur, de froid, d'engourdissement.

Mais nulle part la pression du doigt ne détermine de

godet, et l'urine ne renferme pas d'albumine (d=10 t 5).

Le coeur bat lentement, mais paraît sain. La surface

du corps est toujours froide au toucher et le malade

1 Thomas Inglis. Two cases of Myxoedema (7'Ae 7.<Me<'<, p. 496, vol. 11,

4880.)

DE LA CACHEXIE PACHIDERn21QUE. 71

n'a jamais chaud, même dans les grandes chaleurs.

La température axillaire est de 95° Fahr. La peau

est sèche, dure et sa sensibilité est émoussée comme

dans la sclérodermie : le chatouillement de la plante

des pieds ne détermine pas de réflexe. On observe

quelquefois de courtes transpirations. La préhension

est faible; l'excitabilité faradique des muscles des

membres et du visage diminuée, ce qui n'existe pas

sur la calotte crânienne où l'oedème est peu marqué.

D'ailleurs il n'existe pas d'atrophie musculaire.

Ce fait de la diminution de la contractilité faradique

des muscles aux endroits où l'oedème est marqué, ne

tient pas, dit l'auteur, à une dégénérescence des élé-

ments nerveux périphériques, mais résulte de l'obs-

tacle mécanique à l'excitation des terminaisons ner-

veuses, crées par l'infiltration mucoïde.

Ingliscompareladémarche de son malade à celled'un

canard. Du côté des sens spéciaux, il note de la surdité

coïncidant avec une intégrité de la vue et de l'odorat.

L'appétit est d'habitude assez mauvais; le malade pour-

rait rester sans inconvénient plusieurs jours sans man-

ger ; il trouve d'ailleurs mauvais goût aux aliments.

Enfin , le patient tombe dans un état de léthargie très

prononcé et on note à côté d'une constipation habi-

tuelle, les troubles psychiques suivants : affaiblissement

de la mémoire, particulièrement en ce qui concerne les

faits récents, et dégradation des facultés intellectuelles.

La seconde observation de Ch. Inglis se rapporte à

une femme de 39 ans, mère de huit enfants bien por-

tants. La soeur de cette malade avait été atteinte de

manie puerpérale et la mère était morte d'une attaque

d'apoplexie. Le début de la maladie s'est fait il y a

72 PATHOLOGIE NERVEUSE.

cinq ans par une attaque de mélancolie avec perver-

sion des divers sens spéciaux. Ainsi cette femme trouve

à tout une odeur de poudre. Elle présente les mêmes

phénomènes morbides que le malade précédent, mais

moins prononcés. Les facultés intellectuelles sont affai-

blies. Au bout de deux ans, il survient un véritable état

de manie qui nécessite l'entrée dans un asile. A ce

moment, elle est reine, possède des châteaux, etc. La vue

est bonne, mais le goût et l'odorat sont pervertis. Ses

aliments contiennent du tabac à priser, sentent le poi-

son. De nombreuses verrues apparaissent sur les bras.

Comme chez le malade précédent, les perversions sen-

sorielles sont plus accusées le matin; à ce moment, elle

peut à peine voir. Du côté du coeur, rien de particulier,

à part un claquement énergique du second bruit.

L'urine est normale (d 10 10). La malade qui possédait

autrefois un caractère assez doux, est actuellement

irritable, passionnée, s'irrite sans motif. La conversa-

tion est naïve et enfantine; elle se tient souvent à elle-

même un langage incohérent. L'attention est affaiblie,

le jugement faux, la mémoire en assez bon état. Elle

est affectueuse à l'égard de ses enfants.

Il semble incontestable, d'après Inglis, que dans le

myxoedème, il existe une altération du système nerveux

central. En effet, dit-il, dans tous les cas on a observé

des troubles intellectuels variables, du reste, depuis

.l'irritabilité du caractère, la tristesse, jusqu'à la manie

agressive et au délire des grandeurs. Bien que ces

troubles intellectuels surviennent toujours à quelque

phase de la maladie, Inglis ne pense pas qu'il y ait

un rapport nécessaire entre le myxoedème et l'aliéna-

tion mentale. Cette dernière relève plutôt de la cons-

DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 73

titution du malade, de son tempérament, que de la

lésion de l'encéphale. Il existe alors quelque chose

d'analogue à ce qui se passe dans certaines lésions du

cerveau qui entraînent souvent, mais non nécessaire-

ment, des troubles intellectuels. Inglis considère le

myxoedème comme une maladie nerveuse, les modifi-

cations profondes du système cutané n'étant que secon-

daires. Le traitement ne lui a pas donné de résultat

satisfaisant. Les toniques nerveux, l'électricité galva-

nique, les bains ont produit tout au plus un palliatif.

Le 12 novembre 1880, Dyce Duckworth présente à

la Société clinique de Londres, une note sur deux nou-

veaux cas de myxoedème.

Le premier se rapporte à une femme de 47 ans,

bien constituée, admise au mois d'août 1879, à Saint-

Bartholomew's Ilospital. Elle a eu neuf enfants et plu-

sieurs fausses couches et ne présente aucun antécédent

syphilitique. Au premier abord, on croirait avoir affaire

à un cas de maladie de Bright. La peau de la face est

bouffie, particulièrement au niveau des paupières et

des lèvres, présente une coloration cireuse, à l'excep-

tion des pommettes qui sont rouges. La face, la peau

du crâne et l'épaule gauche présentent quelques tumeurs

acquises et non congénitales, sur lesquelles Duckworth

attire l'attention, parce qu'elles se trouvent signalées

dans d'autres cas. Le corps thyroïde est petit; les tégu-

ments du tronc et des membres sont enflés et bouffis,

les mains larges et grossières. Le sang présente une

teinte pâle ; les muqueuses sont anémiées. La contrac-

tion cardiaque est faible, le pouls 'généralement au-

' Dyce Duckworth. Two cases of myxoedema. (Lc ! nce<, t. II, p. 813

S80.)

74 PATHOLOGIE NERVEUSE.

dessous de 60. Mais tous les organes internes paraissent

sains. La malade a un appétit capricieux, des nausées

et des vomissements fréquents et de la constipation;

ses règles ont été supprimées pendant six mois. L'urine

(d- 1015 à 1022) ne présente ni albumine, ni glu-

cose. De plus on observe de la lenteur dans la parole

et les idées. La voix est nasillarde. La malade marche

en se dandinant, avec hésitation, se gardant bien de

traverser une rue. Elle est toujours triste; les stimu-

lants l'engourdissent. La force musculaire se montre

plus considérable en été; enfin il existe une sensibilité

exagérée au froid. La température prise pendant dix-

huit jours consécutifs, 4 ou 5 jours après le début de

la bouffissure, montre une élévation en faveur du côté

gauche (93°,4 - 970,8 F. = 34°,1 adroite; 95 ? -

99 ? F. = 35',2 à 37°,4 à gauche). Sans cesse exposée

aux mauvais traitements d'un mari brutal, la malade

avait mené une existence malheureuse. L'administra-

tion de toniques divers, de préparations arsenicales,

associée à une alimentation choisie, ne donne aucun

résultat. Sept ans auparavant, elle avait été soignée à

Guy's Hospital pour une parésie de la jambe droite

avec anesthésie autour de la cheville qui avait disparu

sous l'influence de l'électricité et des toniques.

Le deuxième cas se rapporte encore à une femme,

âgée de 46 ans, d'une forte constitution. Bien portante

jusqu'à l'âge de 42 ans, la maladie avait évolué lente-

ment. Il n'existait aucune prédisposition héréditaire.

Les téguments, à l'exception des pommettes, présentent

une teinte pâle. La bouffissure des paupières, l'aspect

général du visage rappellent la néphrite chronique.

La malade est triste, languissante. Le corps thyroïde

DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 75

présente un volume normal. Les mains sont en forme

de bêche; les jambes sont oedématiées, la droite beau-

coup plus que la gauche. Il existe un catarrhe chro-

nique des bronches et une constipation habituelle.

Le pouls est à 80. L'urine ne renferme pas d'albu-

mine (d = 1005). Réglée irrégulièrement cette an-

née, la malade a remarqué que depuis huit ans ses

règles étaient plus abondantes. Ilya deux ans, elle s'est

aperçue que le travail à l'aiguille devenait difficile.

En même temps les mouvements s'opéraient avec plus

de lenteur. Sans présenter une hésitation proprement

dite dans la marche, la malade n'osait plus trop s'aven-

turer dans les rues. Parfois elle avait de la peine à

garder l'équilibre, se laissait tomber et mettait long-

temps à se relever. Elle était aussi particulièrement

sensible au froid et aux changements de température.

Enfin, elle trouve mauvais goût aux aliments et prétend

que ces derniers sont mal préparés. Le thermomètre

donne, dans l'aisselle droite, 990,4 F. (370,4 C), dans la

gauche, 97 ? F. (3G ? C). Le traitement n'a pas modifié

l'état cachectique de la malade.

Dans la même séance de la Société clinique de Lon-

dres, M. Maddon parle d'un cas qu'il a observé et qui

présentait, entre autres particularités remarquables,

des ongles cassants et une diminution de l'excrétion

de l'urée. Il rappelle que, pour lui, la maladie tient à

un trouble profond du grand sympathique. Dyce Duck-

worth pense, de son côté, que le myxoedème est une

maladie d'origine centrale , sous la dépendance de

troubles de la nutrition.

Enfin Hammond vient de publier un article impor-

tant sur le myxoedème, qu'il envisage particulièrement

76 PATHOLOGIE NERVEUSE.

au point de vue des troubles nerveux et cérébraux'.

Les phénomènes de cet ordre, notés parses devanciers

sont : un affaiblissement notable de l'intelligence, des

réponses lentes et inexactes, une mémoire imparfaite,

des illusions et des hallucinations fréquentes des sens

spéciaux, pouvant entraîner un véritable état de manie

(Savage). Cependant, l'état habituel est plutôt un état

de lassitude, de stupidité qui rappelle assez bien ce

que l'on désigne sous le nom de démence aiguë.

IIammond note, en passant, la ressemblance qui

existe entre les malades atteints de myxoedème et ceux

qui sont intoxiqués par l'arsenic. Puis il cite une obser-

vation personnelle tout particulièrement intéressante

au point de vue des troubles nerveux.

Il s'agit d'une femme de 41 ans. Au premier abord,

il semble qu'on a affaire à un oedème généralisé, con-

séquence d'une affection cardiaque et rénale. Le visage

et particulièrement les paupières sont tuméfiées, la

peau du front, rude, est enflée par places, le nez est

épaté; les lèvres, surtout la lèvre iliférieure, sont proé-

minentes : on dirait que la malade a reçu un grand coup

de poing sur la bouche. Au niveau des pommettes, la

peau est épaissie et colorée en rouge de chaque côté,

sur un espace d'un dollar. Le cou et les mains sont

fortement oedèmatiés , les doigts élargis en forme de

massue, sans incurvation des ongles. Cet oedème se

retrouve sur toute la surface du corps, mais nulle

part, la pression ne détermine de cupule. La sensibilité

générale de la peau est notablement diminuée; ainsi sur

les joues, la malade distingue difficilement les deux

1 Hammond. On mi/.xoedema . wilh spécial référence lo its cérébral

and nervous symptoms. ([nA'eM;'o<oytC6 ! < Contributions, vol. 1, n"3,18S).)

DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 77

pointes de l'esthésiomètre avec un écartement d'un

pouce et demi (ce qui équivaut à trois fois la distance

normale). A l'extrémité des doigts, il faut un écart de

cinq douzièmes de pouce pour obtenir deux sensations.

La malade a ressenti au début des douleurs unique-

ment localisées à divers points de la tête. Il lui semblait

marcher sur un coussin, et l'extrémité des doigts

paraissait serrée comme par un dé à coudre. Elle

éprouvait aussi comme une sensation d'engourdissement

à la face, à l'extrémité de la langue, aux bras et aux

jambes. La force musculaire était affaiblie, la marche

chancelante, la préhension peu énergique. Il existait

de l'incoordination dans les mouvements des membres

supérieurs et inférieurs. La marche, les yeux fermés,

était incertaine, et dans la marche ordinaire, la malade

fixait constamment le sol, comme dans l'ataxie. Le sens

du tact se trouvait notablement affaibli. L'examen

opthalmoscopique démontrait l'existence d'une neuro-

rétinite bilatérale. Les objets paraissaient tachés et en-

tourés d'une ombre. Les pupilles étaient égales, pares-

seuses ; enfin, il y avait de temps en temps de la di-

plopie. L'acuité auditive était notablement émoussée :

le tic-tac d'une montre était perçu à'20 pouces de

l'oreille à gauche, à 26 à droite. A une certaine épo-

que, il y avait eu des tintements d'oreille. Les autres

sens spéciaux, le goût et l'odorat présentaient, eux

aussi, un affaiblissement très marqué : il était impos-

sible pour la malade de distinguer par la saveur ou

l'odeur un poisson d'un « roast beef ».

Il existait de fréquentes hallucinations de la vue et

de l'ouïe : la malade parlait de certains Français qui

s'efforçaient de la faire souffrir en mettant du vitriol

78 PATHOLOGIE NERVEUSE.

dans son fit et dans ses aliments; d'autres fois elle en-

tendait des voix qui lui faisaient le récit des tortures

qu'elle devait subir.

Quant aux troubles psychiques, les voici tels qu'ils

ront rapportés par Hammond : « Il s'était produit un

affaissement manifeste de l'intelligence; s'agissait-il de

répondre aux questions les plus simples, la malade

regardait fixement, une minute entière, celui qui l'in-

terrogeait, ne paraissait pas comprendre la question

ou du moins ne sachant pas quelle réponse faire. Il

était des choses tout à fait élémentaires qu'elle ne com-

prenait pas le moins du monde : ainsi elle fut incapable

de me dire combien faisaient 60 et 25; elle fixa les

yeux sur moi quelque temps et dit enfin : Oh ! toutes

ces choses là. Il me fut impossible de tirer d'elle aucune

réponse.

« La mémoire était également atteinte. On fut obligé de lui

souffler avant qu'elle pût dire où elle habitait; en donnant le

nom de ses enfants, elle commit plusieurs erreurs, qu'elle finit

par corriger pourtant elle-même. La mémoire des mots était

peut-être plus atteinte, mais sans qu'il y eut une véritable

aphasie. La malade arrivait, sans trop de difficulté, à donner

le nom des objets qu'on lui désignait, mais sa prononciation

semblait déceler une parésie de la langue. Elle dormait peu, se

réveillait souvent en sursaut, effrayée, et on n'arrivait qu'avec

peine à la rassurer. »

Pour terminer cette observation intéressante d'Ham-

mond, dont nous avons tenu à donner une idée com-

plète, nous noterons encore une constipation habituelle,

un excès d'urates dans les urines, un pouls lent et

faible, enfin l'abaissement de la température prise soit

dans l'aisselle, soit sous la langue et qui ne fut jamais

DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE. -19

trouvée supérieure à 96° Fahr. (35°,5 c.) En ce qui

concerne l'interprétation des troubles nerveux, Ham-

mond rejette l'hypothèse de Ord. « Rien n'y justifie la

présence des illusions et des hallucinations, ni les

périodes d'excitation maniaque observées dans certains

cas. » Il rattache les troubles cérébraux à une lésion

de l'encéphale, caractérisée par le dépôt de tissu

muqueux autour des cellules nerveuses. Dans le cas

qu'il publie, les troubles psychiques avaient précédé

l'apparition de l'oedème spécial. En résumé, les troubles

nerveux résulteraient de deux ordres de lésions :

lésions périphériques et lésions centrales.

Pour compléter la bibliographie du myxoedème,

nous devons aussi mentionner la savante leçon cli-

nique de M. le professeur Charcot que M. de Ranse a

fait paraître dans la Gazette médicale, de Paris (n° 51,

1880). On y trouve quelques considérations nouvelles

sur la thérapeutique de la maladie. La diète lactée, les

bains sulfureux, le massage, le séjour dans un climat

sec ont procuré aux malades de M. Charcot une amé-

lioration notable. « Il semble, d'une manière générale,

qu'on doive plus compter sur les moyens hygiéniques

que sur l'action des médicaments ; ceux-ci sont fré-

quemment mal tolérés, par suite peut-être de l'entrave

que l'infiltration de la peau et des muqueuses apporte

aux fonctions d'excrétion. »

(A suivre.)

RECUEIL DE FAITS

Contribution A l'étude DE l'aphasie ; par les Drs RAYIaOND

et F. DREYFOUS.

S'il est, dans l'histoire des localisations cérébrales, un fait

indiscutable, c'est bien celui relatif à la localisation du centre

du langage au niveau de la circonvolution de Broca. L'ana-

tomie pathologique, aidée et guidée par la clinique, l'a établi ;

et, récemment, l'étude du somnambulisme, chez les hystéri-

ques, a fourni un appui inattendu à la démonstration de

l'existence de ce centre.

Cependant, on trouve encore cà et là, éparses dans les recueils

de médecine, des observations contradictoires dont on pourrait

s'autoriser contre la théorie généralement adoptée aujourd'hui.

C'est sur ces cas exceptionnels qu'on se base pour affirmer que

« une lésion limitée à une moitié du cerveau peut produire des

symptômes de l'un ou de l'autre côté. » En y regardant de

près, on prouverait que la plupart de ces exemples peuvent

être récusés, parce qu'ils sont incomplets au point de vue des

détails de l'autopsie.

En voici un exemple. Un malade aphasique est en même

temps hémiplégique du côté gauche. Voilà une coïncidence

tout à fait anormale. Faut-il s'emparer de ce fait et conclure

qu'une lésion de l'hémisphère droit pourrait produire l'apha-

sie ? On serait d'autant plus tenté de le faire que, à l'autopsie,

on trouve un foyer de ramollissement cérébral à droite. Et si

les investigations s'arrêtent là, on n'hésite pas à contester la

règle établie par Dax, Bouillaud, Broca. C'est ce qui aurait pu

se produire dans un cas observé par M. Peter, et dans le cas

que nous publions ici. Or, chez ces malades, atteints d'aphasie

avec hémiplégie gauche, le ramollissement du côté droit exis-

tait ; mais, en même temps, il s'en trouvait un autre à gauche,

et leur histoire, loin d'infirmer la loi universellement admise,

ne fait que la confirmer.

ÉTUDE DE L'APHASIE. ' 1

Observation' I. Cirrhose atrophique du foie chez un alcoolique.

Apoplexie cérébrale. Hémiplégie et /tt ? tK;) : c</te4;(; gauches, avec

aphasie. Foyers multiples de ramollissement cérébral.

J... (Antoine), soixante-cinq ans, employé d'octroi, entre à l'Hôtel-

Dieu le zig juillet 1880, salle Saint-Christophe, no 23.

J... n'a jamais eu de maladie sérieuse. Pendant plusieurs années,

il a tenu un comptoir de marchand de vins et s'est livré aux excès

de boisson nécessités) ? ) par sa profession. Une tarda pas a présenter

les troubles digestifs et cérébraux habituels aux alcooliques : pituite

tous les matins; insomnie et cauchemars la nuit; rêves d'ani-

maux, etc.

Il est difficile de préciser la date du début des accidents actuels.

Tout ce que le malade peut dire, c'est que, depuis quelque temps,

un mois peut-être, il ressentait une pesanteur à l'hypogastre, et

après chaque repas sa respiration était gênée. Ces phénomènes

s'accentuèrent progressivement, et, en même temps il s'aperçut que

sou ventre augmentait de volume : ses habits étaient trop étroits.

Tout d'abord c'est à peine si le malade se préoccupa de ces symp-

tômes : il continua à travailler. Mais, tout d'un coup, ses jambes

enllèrent, et, comme les forces diminuaient, il dut se résigner à

entrer à l'hôpital.

A cette époque, 2G juillet, voici son état : L'amaigrissement est

considérable et porte notamment sur les membres et le thorax, qui

fait un contraste frappant avec l'abdomen. Le ventre est augmenté

de volume; les veines de la paroi sont visibles, mais non disten-

duos; par le palper on constate nettement la fluctuation, et par la

percussion, la maillé aux parties déclive ? celle-ci changeant de

siège quand le malade change de position. Il est impossible d'ap-

précier le volume exact, ni du foie, ni de la rate. Rien au coeur.

La dyspnée est telle que la ponction est pratiquée d'urgence. On

retire environ cinq litres d'un liquide citrin. On peut alors recon-

naître que le foie est diminué de volume.

Les jours suivants, même état, le liquide de l'ascite se reproduit

rapidement, et on est forcé, quinze jours après la première ponc-

tion, d'en faire une seconde. Depuis ce moment, l'ascite ne se déve-

loppe que lentement; le malade s'alimente un peu; mais ses forces

baissent progressivement.

2o août. Le malade vient d'être frappé d'apoplexie : coma,

avec perte subite de connaissance ; résolution des quatre membres.

A la visite du matin, on le trouve encore presque sans connaissance,

dans le décubitus dorsal, avec rotation de la tête à droite. En exa-

minant la face, on est frappé de la déviation de la commissure

labiale droite; toute la face est tiraillée de gauche à droite, et la

moitié gauche du visage est flasque et mobile. En pinçant le ma-

82 RECUEIL DE FAITS.

lade, on voit que les muscles de la face se contractent seulement à

droite; les paupières se ferment également des deux côtés. Les

membres gauches, bras et jambe, sont aussi paralysés; quand on

soulève le bras ou la jambe droites, ils ne retombent sur le lit que

lentement; au contraire, le bras et la jambe gauclies, quand on les

élève en l'air, retombent lourdement comme des masses inertes.

Malgré l'état de stupeur du malade, on peut apprécier la sensi-

bilité cutanée. En pinçant fortement la peau du membre supérieur

ou inférieur droit, on voit la face grimacer; le malade paraît donc

sentir la douleur à droite; la même expérience répétée plusieurs

fois, donne, chaque fois, le même résultat. En pinçant la peau de

la même façon à gauche, on ne voit se produire à la face aucun

mouvement qui exprime la solilrratice. Il existe donc de l'hémianes-

Lliésie gaucho avec hémiplégie Masque du même côté.

26 ffOMt. Le malade est sorti do sastupeur ; il comprend ce qu'on

lui dit, cherche a répondre, mais ne peut pas le faire ; il commence

à émettre quelques sons, quoiqu'il ne prononce pas un mot intelli-

gible. D'ailleurs il ne peut remuer la langue : celle-ci reste appliquée

contre le plancher de la bouche et il est impossible au malade de

la projeter au dehors.

On se rend facilement compte aujourd'hui de l'état de la sensi-

bilité ; l'hémianesthésie persiste ; la piqûre de la peau n'est pas

sentie à gauche, pas plus que le pincement Mais il n'y a pas de

troubles sensoriels; la vue, le goût, l'odorat (chloroforme, éllici)

sont conservés intacts.

1 er septembre. Ce matin, pour la première fois, le malade pro-

nonce clairement quelques mots ; après quelques efforts, il sort la

langue hors de la bouche.

7 sept. Les forces diminuent; l'appétit est nul ; l'état général

s'aggrave.

12 sept.L'hémiplégie, avec anesthésie, persiste; mais le malade

parle mieux; il a quelques mots à sa disposition; il remue la

langue en tous sens. Cet état reste le même jusqu'à la mort qui

arrive sous l'influence des progrès de la cachexie.

Autopsie faite vingt-quatre heures après la mort. - Cerveau.

Pas d'athérome des artères de la base.

Hémisphère droit : 1 Foyer de ramollissement, qu'on aperçoit très

bien avant d'enlever les méninges, et qui occupe la partie supérieure

de la circonvolution pariétale ascendante et la pariétale supérieure.

2° Quand, après avoir incisé les méninges, on écarte la scissure de

Sylvius, on voit que les circonvolutions de l'insula sont le siège d'un

ramollissement très étendu qui gagne le lobe occipital en arrière.

Sur la première coupe transversale, comprenant une partie de la

capsule interne (partie antérieure), rien. - Sur tadouxième coupe

(lassant par le milieu del'insula, rien. Surunccoupe, faite à deux

ÉTUDE DE L'APHASIE. 83

centimètres en arrière de la deuxième, on voit seulement les cir-

convolutions de l'insula ramollies. - Sur une dernière coupe, a

trois centimètres en arrière, on note le même ramollissement

superficiel, mais ne pénétrant pas profondément.

Hémisphère gauche : Au niveau du pied de la troisième circonvo-

lution frontale, une plaque jaune formant un foyer de ramollisse-

ment superficiel, bien circonscrit, en voie de cicatrisation.

Rien à la protubérance, ni aux pédoncules, ni au bulbe. L'artère

sylvienne gauche, non athéromateuse, renferme un caillot an-

cien qui parait s'être formé par thrombose. Ce caillot siège au point

de division des artères pariétales.

Cavité abdominale (résumé) : Ascite; péritonite chronique géné-

ralisée.

Foie : De volume presque normal, un peu diminué cependant,

Capsule épaissie. A la coupe, aspect typique de la cirrhose de

Lacnnec. A l'examen microscopique, après durcissement avec un

faible grossissement, on constate les caractères bien connus de la

cirrhose annulaire périlobulaire.

Rate : scléreuse. Les autres viscères, coeur, reins, poumons,

n'offraient aucune altération importante à signaler.

En comparant les cas publiés sous ce titre : Aphasie , Iténti-

plégie gauche, on trouve deux séries de faits :

1° Ceux où des lésions multiples expliquent l'aphasie d'une

part, l'hémiplégie de l'autre;

2° Ceux pour lesquels on a admis la « gaucherie cérébrale ».

Notre cas appartient à la première catégorie; on peut en

rapprocher une observation de M. Peter, où les lésions corres-

pondent exactement aux phénomènes cliniques observés pen-

dautla vie : l'anomalie n'était qu'apparente; à des symptômes

multiples correspondaient également des lésions multiples.

Observation II (résumée). - (Gazette des Hôpitaux, 1879.)

13... (Ismaél), cinquante-huit ans. Hémiplégie gauche complète

avec aphasie. Début subit, par hémiplégie, sans perte de connais-

sance, il y a uu mois.

Etal actuel. Décubitus latéral gauche, rotation de la tête à

gauche, avec déviation conjuguée des yeux.

La sensibilité parait intacte.

Pas d'hémiplégie faciale.

Hhchare sacro-fessière gauche ; ni incontinence d'urine, ni illeoil-

tiucnce des matières fécales.

84 RECUEIL DE FAITS.

Il ne peut prononcer un mot.

Fièvre violente ; l'eschare s'étend. Mort. '

A l'autopsie : ramollissement du pied de la 3° frontale gauche,

ramollissement à la partie moyenne des circonvolutions frontale et

pariétale ascendante droites. '

.. ' J à

M. H. de Boyer, dans son remarquable travail sur les locali-

sations cérébrales, donne un cas personnel, analogue aux deux

précédemment cités. Mais il ne nous fournit sur ce fait aucun

détail.

A côté de ces faits, il en existe d'autres, où l'hémisphère cé-

rébral gauche ne présentait aucune lésion appréciable. Pour

nous, les cas de ce genre doivent être révisés avec soin : on

peut se demander s'il n'y a pas eu quelques erreurs, quelques

examens incomplets. Dans ces derniers temps, on a bien mon-

tré que l'aphasie pouvait être dueàuno lésion ducentre ovale, si

eelle-ci correspond au faisceau pédiculo-frontal inférieur.

N'a-t-on pas quelquefois négligé une lésion très peu étendue

et située dans la profondeur, et non à la surface du cerveau ?

Ne trouvant pas de lésion importante, et superficielle, on a

inscrit le fait comme contradictoire avec la doctrine de la lo-

calisation de Broca.

Nous insistons sur ces prémisses, parce qu'on a édifié, avec des

cas exceptionnels, une théorie acceptable tout au plus pour un

petit nombre d'entre eux : celle de la « gaucherie cérébrale ».

Avant de la discuter, il faut bien savoir combien rare serait

cette^anomalie fonctionnelle du cerveau : Séguin, sur 266 cas

d'aphasie, en a trouvé 213 avec hémiplégie droite, 17 avec

hémiplégie gauche; Voisin, 1 fiO, avec hémiplégie droite, 6 avec

hémiplégie gauche ; Broca, il-) ou 13 avec hémiplégie droite

pour un avec hémiplégie gauche.

Ces considérations permettent, nous le pensons, de négliger

les cas oùles auteurs, comme M. Farte, s'appuient sur des faits

cliniques seulement, sans avoir les pièces anatomiques en

main. Ainsi on aurait pu regarder aussi notre malade comme

étant gaucher du cerveau, qu'on nous passe cette expression,

et droitier de la main. Le cas de M. Farge est tout à fait ana-

logue; peut-être est-il susceptible de la même interprétation.

Les auteurs, qui ont maintenu cette opinion, sont surtout

MM. Mesnet, Billod, Schruber, etc. Voici leur théorie : la plu-

part des hommes se servent du membre supérieur droit pour

faire es gestes, pour les travaux délicats ; ils sont donc droi-

ÉTUDE DE L'APHASIE. 85

tiers. Or, chez eux, la faculté du langage siège dans l'hémisphère

gauche ; il y a un lien entre le rôle de l'hémisphère comme

centre du langage, et son rôle comme centre des mouvements

les plus délicats du membre supérieur.Si, au contraire, l'homme

se sert surtout de sa main gauche, s'il est gaucher, c'est l'hé-

misphère droit qui présidera, et aux gestes habituels, et aussi

à la faculté du langage ; chez lui il y aura de « la gaucherie

cérébrale ». A l'appui de cette,;hypothèse, on peut fournir les

deux observations suivantes : H,y ., ,

Observation III (résumée). Wodhmn (Saint-George' Hospital

' ? Reports, 1869).-

' ' ' ' r ; r .. .

Hémiplégie du côté gauche chez un garçon de dix-huit ans, ambi-

dextre. '' .. 1 ,

Aphasie consécutive, absolue pendant trois mois. Retour graduel,

mais incomplet de la parole. Nécrose du maxillaire.

Mort par épuisement, douze mois après l'attaque primitive.

Destruction presque totale de l'insula de Reil du côté droit.

Observation IV. Aphasie avec hémiplégie gauche. Embolie de

l'artère sylvienne droite, avec ramollissement de la 3° frontale, du £

lobule de l'insula et de la corne sphénoîdak. (Observation de Le-

double et Viollet. (Tribune médicale, mars 1879.) ?

Ch..., trente-cinq ans, blanchisseuse, est atteinte depuis huit

mois d'épithélioma ulcéreux du col de l'utérus. Celte affection a

sa marche ordinau·e. ? , 1 t ,

Le 11 septembre 1878, cette malade fut brusquement frappée

d'hémiplégie gauche et d'aphasie, sans avoir perdu connaissance

plus d'un quart d'heure. La sensibilité resta intacte du côté para-

lysé, mais l'aphasie fut absolue. Dans lesi premiers jours, il fut

facile de constater le phénomène de l'hémiplégie variable qui,

d'après 111\I. Cliarcot etVulpian, appartient exclusivement au ramol-

plissement.' ' - .

Entrée le 29 septembre à l'hôpital, la malade y succomba le

29 octobre, sans a\oir présenté aucun signe nouveau.

Autopsie (résumée). Hémisphère cérébral droit. La pie-mère

et l'arachnoïde, qui recouvrent le cerveau depuis la partie antérieure

des circonvolutions frontales jusqu'en arrière de la circonvolution

pariétale, ascendante, c'est-à-dire tous les points que l'on donne

comme les centres moteurs du cerveau, sont injectées et adhérentes

l'une à l'autre. L'arachnoïde est couverte d'un dépôt croupal ou

86 RECUEIL DE FAITS.

purulent, au niveau du pli de passage de la 2e circonvolution fron-

tale à la marginale antérieure, et aussi au niveau du pli de passage

de la 3° circonvolution- frontale avec la pariétale ascendante.

Circonvolution frontale ascendante ramollie.

La 3° circonvolution frontale horizontale ou circonvolution de

Broca est affaissée, friable dans toute sa longueur; elle est presque

réduite en putrilage, vers le pli sourcilier.

Lobe pariétal : ramollissement de la pariétale ascendante à son

origine, et de la pariétale inférieure.

Lobe sphénoïdal : ramollissement du sommet de la corne du lobe

sphénoidal : 1 ro, 2° et 3° temporales presque détruites.

Lobule de l'insula, capsule externe et avant-mur creusés d'une

cavité remplie de liquide jaunâtre. Partie antérieure de la cap-

sule interne, jaunâtre.

Artère sylvienne oblitérée par un caillot. Pas d'athérome

aortique.

Abdomen. Col de l'utérus : épithélioma pavimenteux tubulé.

Coagulations fibrineuses dans les deux veines utéro-ovariennes.

A gauche, veine rénale et veines lombaires obstruées.

Nous répétons, après avoir rapporté ces deux observations,

ce que nous avons déjà dit en commençant cet article : il est

nécessaire, à propos de ces faits, comme à propos de cas sem-

blables, déjà publiés, de faire des réserves ; peut-être chez ces

malades, existait-il une lésion de l'hémisphère droit, en même

temps que l'on rencontrait la lésion de l'hémisphère gauche,

lésion qui, à l'autopsie, surtout si l'on n'est pas prévenu de la

possibilité de la coïncidence, peut parfaitement passer inaper-

çue, d'autant plus^que, quelquefois, elle est minime et placée

profondément.

Une doctrine, comme celle des localisations cérébrales, dont

la démonstration détruit, defond en comble, le dogme de l'unité

fonctionnelle du cerveau, devait, forcément, donner toujours

lieu à des débats contradictoires ; encore est-il nécessaire d'é-

tudier minutieusement les faits isolés qui semblent détruire un

point bien acquis à la science.

REVUE CRITIQUE

111 : 'l'ALf.OSCOPIE, 1111 : 'l'A1.LOTHi : R.IPIE, tI : STH1 : SIOGÈ\ES

(Addition) ;

Par le D' Romain VIGOUROÏÏX '.

Nous avons parlé avec quelque étendue du scepticisme, qui

en Angleterre avait accueilli les premiers,faits relatifs aux

aesthésiogènes. Nous ne voudrions pas cependant avoir laissé

dans l'esprit du lecteur l'impression que ce scepticisme ait été

partagé par tous les médecins anglais. En regard des négations

à priori de quelques-uns, nous aurions dû placer la réserve

vraiment scientifique ou les observations confirmatives des

autres. Réparons brièvement cette omission.

Plusieurs savants anglais ont, dès l'origine de la question,

cru devoir se rendre compte de visu des expériences de la Sal-

pétrière. Le docteur Hack Tuke a donné dans le Journal of

mental science (janvier 1879) la relation des faits dont il a été

témoin. Il a pris soin de faire lui-même, sur les malades du

service de M. Charcot, des expériences de contrôle, en vue de

l'objection fondamentale, de l'influence de l'imagination. Il ne

cherche pas à expliquer les phénomènes dont il a pu constater

la réalité ; mais il montre d'une façon particulièrement saisi-

sante combien il est peu logique d'attribuer à l'imagination

tous les effets des restbésiogènes, sous le prétexte qu'on a prouvé

l'influence de l'imagination sur certains actes de l'organisme.

Vers la même époque (le milieu de 1878), le Dl Sigerson

faisait à la Salpêtrière une série do visites dont il a rendu

compte dans le Brit. 2 ? zed. Jouî,i., février 1879. 11 n'éleva

aucun doute sur la rigoureuse exactitude des expériences de

métalloscopie et autres dont il a été témoin.

'Voir t. I, p. 27, 413 3 et : j6t.

88 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

Le professeur Gamgeo (de Manchester) assista aussi aux di-

verses expériences sur les aimants et électro-aimants dont on

s'occupait alors plus spécialement. Il en a donné dans le 7M ? A

9)tedical Joit ? ial, de janvier 1878, une relation étendue et abso-

lument confirmative ; il y discute amplement la question de

méthode.

Il y aurait encore à citer les nombreux médecins anglais qui

ont eu l'occasion de répéter ou de varier les expériences de la

Salpêtrière sur des malades.de leur pays, non suspectes par

conséquent d'imitation inconsciente ou autre. Ainsi le Dl Mac

Call Anderson a communiqué à la Société médico-chirurgicale

de Glascow l'observation d'une malade hystéro-épileptique

traitée par les métaux, et le D' Mac Kendrick a fait sur cette

malade les expériences de contrôle les plus rigoureux (Glascow

2 ? ? ed. Joit)-ii., 1879). D'autres faits ont été rapportés par Stone,

ltilyrose-Atltins, etc. On trouvera d'ailleurs dans le Progrès

médical le résumé de ces observations et de quelques autres.

il. V.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE

I. Contribution A l'étude DE la sclérose centrale (SCLÉ-

rose PLRII ! PENDYJI11RE); parAug. Eickholt. A9'CIt. f. Psych.

il. 1\'e·uenla., 1880.)

L'observation longuement rapportée qui forme la base de

cette note concerne une femme de li2 ans ne présentant rien

.d'anormal parmi ses anamnestiques, ni dans le domaine de

l'hérédité, ni dans son histoire nosographique, ni dans son

existence génitale. La maladie en question débute par des

vertiges et des 12,ozibles psychiqztes qui, d'abord constitués par de

simples absences, des distractions, se transforment soudain en

une agitation au fond de laquelle on perçoit le délire des per-

sécutions ; en même temps la démarche est vacillante. Pendant

les quatre mois que dure cotte phase, on constate : une série

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 89

d'accès d'agitation à forme impulsive, de l'incoordination mo-

trice généralisée, des tremblements fibrillaires des lèvres, une

parole trémulante, traînée, scandée, des oscillations dans les

extrémités supérieures au repos, de la titubation pendant la

marche et à la fois l'attitude de la femme grosse (rejet du

centre gravité en arrière), le signe de Romberg, de l'inégalité

et de l'inertie pupillaires (dilatation plus prononcée à gauche),

de l'affaissement des traits du visage, de l'augmentation dans

la pression intra-oculaire ; l'amaurose que l'on signale sur l'oeil

gauche correspond à l'apparence confuse de la papille dont on

ne peut distinguer les vaisseaux, tandis que les examens ophthal-

moscopiques du côté droit décèlent un dessin imparfait sans

netteté, une coloration rouge livide, une légère dilatation de

l'artère centrale avant sa division en des ramifications exiguës,

de la réplétion des veines. Enfin une démence complète profonde

termine cette période par un calme absolu. Bientôt après c'est

à une série de crises convulsives généralisées alternant avec des

instants d'agitation que l'on assiste. Les premiers, caractérisés

par tous les phénomènes de l'épilepsie grave, y compris les

contractions du diaphragme, les vomissements, la dyspnée

intense, précèdent, puis accompagnent la marche graduelle-

ment croissante des troubles moteurs; dans leur intervalle on

note un tremblement violent des extrémités supérieures avec

inclinaison très prononcée du corps à droite, la diminution

excessive de la sensibilité, des hémiparésies passagères, de

l'atrophie progressive de l'ensemble du système musculaire

débutant par les membres supérieurs et ne sautant pas de tel

groupe à tel autre. On voit aussi par moments des convul-

sions localisées sur un côté du corps, sur les muscles du cou à

l'occasion de quelques mouvements (décubitus dorsal, flexion

du tronc); même remarque au sujet de la rigidité de la char-

pente musculaire qui passe à l'état de permanence durant le

dernier mois en même temps que l'ensemble des extrémités

sont presque perpétuellement animées de secousses cloniques.

Mentionnons aussi des cris 7addocép7aalcqzces, et une ins21ffi-

sance mitrale des plus évidentes. La mort, résultat de la

déchéance organique, des accidents gangreneux du décubi-

tus, et d'une pneumonie du lobe inférieur droit, met un terme

à l'affection après vingt mois de durée.

L'autopsie révèle : uno atrophie de la région thoracique et

lombaire de la moelle en partie ramollie, une coloration gri-

90 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

sàtre des cordons postérieurs dans la région cervicale, une

dilatation brusque du canal central à partir du segment dorsal

supérieur de l'organe jusque dans la portion lombaire qui

mesure 1 à 2 millimètres de diamètre au début du renflement

lombaire. Le cerveau est également volumineux par l'expan-

sion maxima des ventricules latéraux d'où sourd un liquide

clair; l'atrophie des ganglions de la base, des tubercules qua-

drijumeaux, l'aplatissement des bandelettes optiques, l'amin-

cissement des nerfs optiques témoignent de la compression.

Epaississement de l'épendyme. Nombreuses granulations sur

le plancher ventriculaire. Atrophie de la substance grise oedé-

matiée, brunâtre; congestion de la substance blanche ferme et

dure; réduction de la couronne rayonnante. Lésions mitrales.

L'analyse hislologique démontre : une prolifération de la

névralgie cérébrale : réplétion énorme des vaisseaux, exsuda-

tion d'un grand nombre d'hématies, hyperplasie nucléaire des

parois vasculaires, feutrage épais de fines fibrilles conjonctives,

atrophie des cellules nerveuses un travail identique dans la

couche sous-épithéliale de l'épendyme, dans la pie-mère médul-

laire et le long des racines antérieures et postérieures. Ces

lésions qui rétrocèdent dans les régions où la dilatation du

canal est moindre (lie ventricule) reparaissent à mesure que,

dans la moelle, le diamètre de ce dernier augmente et s'accom-

pagnent alors de la prolifération de la substance gélatineuse

centrale. Les cordons sont peu atteints, mais les cornes devien-

nent le siège des modifications vasculaires indiquées et de la

dégénérescence inflammatoire des éléments nerveux à des

stades divers qui suivent, elles aussi, la marche de l'agrandis-

sement de l'octasie centrale.

En somme, tout portant à conclure à la dilatation de cavités

naturelles sous l'influence d'un processus cérébro-spinal de

nature scléreuse partout identique, ainsi que parait l'indiquer

l'exagération des lésions le long de l'axe nerveux dans les

régions où l'ectasie est la plus prononcée et inversement, voici

comment le DT Eickholt relie les lésions épendymaires à l'hy-

drocéphalie et àl'hydromyélie. Chez une cardiaque (lésions des

orifices non compensées) se produit une sclérose diffuse du

cerveau (symptômes psychiques); à raison des stases vascu-

laires d'origine cardiopathique, celle-ci ne tarde pas à se com-

pliquer d'hydropisie ventriculaire dont la résorption se trouve

empêchée par l'inflammation toujours progressante de l'épcn-

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 91

dyme. Môme mécanisme pour la moelle ; de sorte qu'à l'hydro-

céphalie se joint l'hydro ou syringomyélie ; en outre ici l'in-

flammation des cornes antérieures, préparée par la sclérose

périépendymaire, apporte son concours à l'ectasie en ce sens

que leur terrain favorable au ramollissement et à la fluidifi-

cation bien plus qu'à la sclérose, laisse un champ beaucoup

plus libre à la dilatation centrifuge du canal, (Voy. sur ce

sujet : Hallopeau. A2,chz'ves gé21é2-. demédecine, 1871-73.) P. K.

IL Sur les nouvelles expériences relatives au magnétisme animal ;

par le De P. Grutzner (de Breslau). (Ccntralblatt ? <)'A''c)'t)C ? tC ! 7-

hunde, etc., n° 10, 1 ornai 1880.)

C'est une revue critique, sans faits nouveaux, des recherches ré-

contes de Ch, Richet, Heidenheim, 0. Berger, et autres.

III. Névralgie NASO-GRL'ITAIRE intermittente; par le D' A.

SEELiGwuLLER (de Halle). (Ceiit-alb. f. aerv., n° 1, Il' juin

1880).

L'auteur a observé une douzaine de cas dans lesquels, en

l'absence ( sauf dans un ) de toute influence paludéenne, les

accès revenaient à heure fixe avec une précision surprenante.

La durée de l'accès était en moyenne de 2 ou 3 heures, la dou-

leur, spontanée ou à la pression, extrêmement intense. La plu-

part des malades étaient des hommes; leur âge compris entre

vingt et quarante ans.

Le sulfate de quinine et tous les autres moyens n'avaient

donné aucun résultat. Seule la douche nasale, réitérée plusieurs

fois par jour, avait eu rapidement raison de l'affection. On la

faisait d'abord avec du lait tiède, plus tard avec de l'eau faible-

ment salée. L'auteur suggère, pour les cas qui pourraient ré-

sister à ce moyen, l'emploi d'une solution de salicylate de

soude.

M. Seeligmùller pense avec Horner qu'il s'agit là d'un

. catarrhe des sinus frontaux et il attribue les douleurs à une

rétention dans ces cavité des produits sécrétés. Ceux-ci agiraient

à la fois chimiquement et surtout mécaniquement. Lamuqueuse

des sinus est très riche en nerfs ; elle reçoit des filets do pres-

que toutes les divisions de la branche ophthalmique de la

5° paire. R. V.

92 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

IV. La question du galvanomètre; hal 1C D Er11C5L liE\fAü

(Berlin). (Centrale, f. Ne·vet7reaZ7unde, n° 12 du 15 juin

1880.)

L'auteur présente quelques observations relatives à la .pro-

position de deWatteville et de Hesse, reproduites parBernhardt

dans le n° 9 du Centralblalt, de graduer en milliwebers les

galvanomètres des appareils médicaux. '

Il avait, avant de Watteville, montré que l'on peut évaluer

la force absolue de courant correspondant à la déviation d'un

galvanomètre vertical. par l'insertion d'unerésistance convenable

dans le circuit ; seulement, la force absolue de courant qu'il

obtient, d'après les principes de la physique allemande est tou-

jours représentée par une fraction décimale, à savoir, le quotient

de la force électro-motrice des éléments (exprimée en unités

de force électro-motrice, l'unité étant la quantité d'électricité

qui, à travers l'unité de résistance, décompose en une minute

un centimètre cube d'eau ) par la résistance totale exprimée

en unités de Siemens. Abstraction faite de la bizarrerie du mot

milliweber, il ne voit pas pourquoi de liesse et Bernhardt, sans

doute séduits par son origine étrangère veulent introduire un

système basé sur des unités étrangères de force électro-motrice

et de résistance ( Volt et Ohm), renonçant ainsi aux résultats,

à peine conquis, de la physique de leur pays et embarrassant la

médecine de conceptions difficiles à saisir sans le secours des ma-

thématiques. Du reste, d'après la correction admise par Ber-

nhard, un milliweber s'exprime en force absolue par '12 ? de

sorte que pour tous les cas, on peut facilement par division par

ce nombre, ou par multiplication par la réciproque ? = 83,3

évaluer en milliwebers la force absolue de courant.

M. Remak fait ensuite remarquer que l'adoption du système

absolu avec galvanomètres verticaux, presque exclusivement

employés en Allemagne, ne peut être exact que pour les pre-

mières divisions du cadran. Il préfère renoncer dans la pra-

tique, aux mesures absolues et recommande, le galvanomètre

d'Erb. C'est un instrument qui, par l'adjonction facultative de

différentes longueurs de fil, peut acquérir différents degrés de

sensibilité. , R. V.

REVUE DE pathologie NERVEUSE. 93

V. Remarques sur l'article précédent ; par le Dr Berniiardt (de Berlin).

(Cènlralb, no 4 , 4 880,)

%Il,,

B., montre, en citant des précédents, que l'origine étrangère d'une

innovation scientifique n'a jamais été un obstacle à son adoption

en AJiemagne ? 11 fait ressortir la simplicité de l'évaluation en

milliweber, et insiste sur l'utilité qu'il y aurait à avoir en électro-

thérapie des données uniformes, indépendantes de la construction

particulière des appareils des différents observateurs.

nez m a Il .

VI. Ve Réunion des neurologues et aliénistes du SUD-OUEST DE L'AL-

LEMAGNE, A Baden-Baden, les et 6 juin 1880, (Compte rendu

du Dl Moriz Mayer.)

VII. GuÉRISON'D'UN ECZÉMA CHRONIQUE PARTIEL PAR LES COU-

RANTS galvaniques ; par HAMMON. (Neurological Contri-

LLCIab)zs, 1819, n 1, p. 83.)

Le malade, àgéde soixante-dix ans, souffrait depuis huit mois

d'un eczéma chronique occupant la face palmaire et dorsale de

la dernière phalange du pouce. Le bout du doigt était rouge , à

vif, creusé de fissures douloureuses et très sensibles au toucher.

Après cinq mois de traitements infructueux, le Dr Morton

vit le malade et essaya à son tour, pendant deux mois, divers

traitements internes et externes, sans plus de succès. Ileutenfin

recours au moyen suivant : un gros dé à coudre en argent fut

attaché par un fil à une plaque de zinc. Le dé fut mis au pouce,

et la plaque de zinc appliquée sur le bras ; on plaça un peu de

charpie sous la plaque de zinc, et cette charpie fut mainte-

nue imbibée d'un mélange d'eau et de vinaigre. Au bout de

quelques jours la sécrétion purulente se tarit; les fissures se

cicatrisèrent, la peau devint blanche et ferme ; au bout de qua-

tre mois l'affection ne s'était pas reproduite. C. T.

VIII. NÉVRALGIE SCIATIQUE' GUÉRIE PAR l'ÉLONGATION DU NERF ;

par Norman Mackintosii (A'97Ze7'LCaIZULZ)'7t. of. 9)Zed. se., avril

1881, ns 17. a5C.) .- , )11 '' i ' ' ' >r™" ,1~ ·7 ,· au

Le malade, âgé de quarante et un ans n'avait jamais eu la

syphilis. 11 souffrait depuis seize ans d'une névralgie sciatique

9t REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

occupant la cuisse, le genou et le pied ; la névralgie avait ré-

sisté à tous les moyens ordinaires. Les attaques d'abord rares,

avaient peu à peu augmenté de fréquence et d'intensité. A la

fin, la douleur était presque continue, durant cinq à six semai-

nes sans relâche ; durant ce paroxysme, le malade mangeait à

peine et ne dormait plus ; les injections do morphine ne pro-

duisaient plus ni amendement, ni sommeil. Le,docteur \Iacliin-

tosh se décida à faire l'élongation. Après anesthésie par l'éther

et avec les précautions antiseptiques, il fit une incision longitu-

dinale de cinq pouces et demi sur le trajet du nerf, commen-

çant au niveau du bord inférieur du grand fessier ; séparant

les muscles et disséquant avec soin, il mit le sciatique à dé-

couvert et l'étira fortement. La plaie se cicatrisa par première

intention. Les douleurs disparurent complètement après l'opé-

ration, et quatre mois après il n'y avait eu aucune crise nou-

velle. C. T.

IX. Piscidia ERYTxRINa; par Isaac OTT. (The 13·aziz, III,

p. .Ss-456, 1880.)

Aux médicaments antinévralgiques, aux narcotiques, aux

calmants déjà si nombreux, M. Ott vient proposer d'ajouter

une nouvelle substance, l'extrait de piscidia qui

aurait sur l'opium l'avantage de ne pas constiper et de ne pas

troubler l'appétit. Ce produit est fourni par un arbre de la

Jamaïque, que son écorce rouge a fait surnommer l'arbre co-

rail.

Ses propriétés stupéfiantes sont bien connues des naturels

qui les utilisent pour la pêche des petits poissons, sans le

moindre inconvénient pour le consommateur. Presque toutes

les parties de la plante jouissent de la même propriété; mais

pour préparer l'extrait employé en médecine, on se contente

de traiter par l'alcool l'écorce des racines. On obtient ainsi un

liquide rougeâtre, à saveur acre, ressemblant au laudanum

dontilal'odeur.LesoxpériencesdeM. Ott, faites surdeslapins et

des grenouilles, permettent de rapprocher l'extrait de piscidia

erythrina de la morphine et du chloral. C'est un narcotique,

sans action sur les nerfs, moteurs ou sensitifs. Il diminue le

pouvoir réflexe des centres nerveux, ralentit le pouls, et

augmente la tension artérielle au début, pour l'abaisser

ensuite ; enfin il produit le tétanos, dilate la pupille, et excite

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 95

les sécrétions de la salive et de la sueur. Son action sur le rein

n'est pas notée. Il no semble pas que l'extrait étudié par M. Ott

soit doué de propriétés bien énergiques, puisque pour tuer des

lapins, il a dû leur en injecter quarante-huit gouttes par la

voie sous-cutanée. R. BLANCHARD et J. PIGNOL.

X. Paralysie AGITANT guérie par la galvanisation CEN-

TRALE, LE bromure DE sodium ET L HTOSCY.1NIUDI; par Ed.-C.

MACNA. (Journ. ef mental HHM' : )0 ! M cesses, janv. 1881,

p. 1 i) fi.)

Mm0 E..., âgée de cinquante ans, était atteinte d'un trem-

blement généralisé et continuel compliqué de troubles céré-

braux graves, avec délire de persécutions, hallucinations de

la vue et de l'ouïe. Il y avait rigidité musculaire et contracture

marquée, la tète était inclinée en avant et fixe , le tronc était

aussi penché en avant; la marche était difficile. La force mus-

culaire et la sensibilité étaient intactes. La langue était agitée

d'une trémulation notable. Le tremblement avait débuté par

une main et le bras et avait peu à peu gagné tout le corps. L'affec-

tion s'était développée graduellement sous l'influence de cha-

grins domestiques.

Le docteur Mann soumit la malade au bromure de potas-

sium et de teinture d'hyocyanium. Il applique l'électricité sous

forme de galvanisation centrale et de courant bi-temporal. L'ex-

citation mentale se calma rapidement. A la fin du second mois

tout trouble cérébral avait cessé ; en même temps la rigidité

et le tremblement disparaissaient ; la marche devenait plus

animée; la tète et le tronc se redressaient Au bout de trois

mois, la malade était complètement guérie. C. T.

XI. Quelques POINTS DE LA pathologie DES lésions oculaires

DE LA SYPHILIS CÉRÉBRALE ET SPINALE ; par STE111AN BULL.

(American journ. o/' ? He. se, avril 1881 , p. 382.)

La fréquence des troubles oculaires de la syphilis cérébro-

spinale a été mise en relief par les écrits de Hugh. Jackson

et de Fournier. Les paralysies des muscles de l'oeil aussi

bien que les troubles visuels, amblyopies, amauroses, sont

des faits bien conuus aujourd'hui; l'auteur résume les prin-

- 96 .REVUE DE PATHOLOGIE, NERVEUSE.

cipaux caractères^ de" ces" diverses manifestations syphiliti-

'ques ; Fil signale leur i Valeur0 pronostique "ef" diagnostique.

,cAvec''Hughling Jackson,- il ? insiste sur' la nécessité de pra-

- tiquert l'examen ophthalmoscopique chez 'tout' individu 'qui

présente quelques'symptômes attribuables'à'la syphilis céré-

t brale. Si étrange que paraisse le fait; en effet, diverses observa-

'tions ont montré que les signes physiques de la' névrite optique

et de'la neuro-rétinite peuvent exister sans qàe,lé malade ac-

cuse aucun- trouble de la vue : Cette névrite optique peut s'ac-

compagner de la paralysie d'uni ou de, plusieurs des 'iuàseles

moteurs de globe oculaire. Elle coexiste fréquemment comme l'a

indiqué'Jaehson;ca\·ec'des attaques''d'épilepsie" unilatérale.

L'association de' ces deux ordres de phénomènes est en rapport

le plus souvent avec une lésion syphilitique des circonvolutions.

Bull rapporte cinq 'observations1 dont nous nous'contenterons

de donner le sommaire.- ' '. ei4-ra`r·STn'v· sb nidèb nst i 1 ·F 1

, - ;t.f)f ? <..J'" ° 1 ' T nJ 4' t92nB t3t, 'I,llffTt Mi'-^ll'

' 013SERV,TIO,41.' I. -Parésie du droit supérieur gauche ; Posis tran-

t Observation I. JParésie du droit supérieur gauche,; pLosis ran-

,sitôiré'àJplusieürs''r'éprisës ? paraplébie; atrophie des nerfs opti-

' crues consécutive' à' la' névrite"1'1'1 "* f ? ? "

°nnt.y tttTRT 17Li 7· .t' ·^-to lt 'tl ? 9'7 ? 1 ? îti' '

Observation IL .Parasie de la troisième paire"droite et du

droit supérieur ' droit ;. 'atrophié blanche simple, des rnerfs opti-

ïlues, 't' . .l`tud 1 ·u"f «bfiiiU'>ii,i< m »i.b h luiano .r

L . ,'ri , rti - V't-i-,1 «» ? t ? . tfl i-' t t 'i' < FQii ? ).

OBSEIIVATION. 111 ? ( Névrite optique terminée par l'atrophie du

nerf, optique droit ? sans autre phénomène* "cérébral, que do la cé-

phalée ''' ? '' 'I ,J ? ? " JUJ"IÙ '1"'1"° . t.,lr ·...;1- , ,

;t ;^ r I , ? t2 c . t' ? fr;= c;71 21T.1, r y,btlT9f17 m '4t·

Observation IV. -Ptosis du cû6 gauche,, névrite optique double. ? tjLtJ ? unu3-'jH.i'c.*j) ? t' ? -i ? t ?

()BSERVATJON,,V., ^Paralysiejj du. droit inférieur droit;.ptosis à

droite;, atrophie, dunerf,oplicfue,drolt' surdité, complète d'un côté,

partielle de l'autre. Dans.ce cas ? les, phénomènes auditifs s'accom-

pagnèrent de tous, les symptômes do la maladie deliénit`,re,IVer-

tiges avec perle de l'équilibre et bourdonnements d'oreilles. Ces

' symptômes cédèrent au traitenïetil aiitisÿpliilitiqüé, 'mais le malade

'garda une" surdité coinplétë de l'oreille" gauche. ? "sJ1 ? C ? [}

fP'f"sl.ïi.jIlfy itUtir IPO9 .y 79(J>Z 'lr prtUiyU ) nlUtlJ>'1J 1`J '' >'

1 . lt,l f111,11 pil Ifft ,Itt'1919'li .H;)tU ? ·v1 ; f` `1Wv "

>' XII : De'l'élongatiôn' DES''NERFS;'par L ? WlTKOAVSKI,'

de Strasbourg. (Arch. f. Psycli. 21. lle2veizk.'l' t.'XI.)'"1

1 . V> 'r 9nLsptal t^·tt' 2fIf1'' ' = (7l.Ljt .'Imtlt 91lUa

1· ILes recherches 1 liistologiques et les expériences entreprises

à cet sujet se rapportent à trois sortes d'individualités/qui sont :

t° le cadavre humain;; l'homme; 3° les animaux : z

REVUE DE pathologie NERVEUSE. 97

L'allongement brusque et vigoureux de tout un membre

raidi et contracture par la mort produit, de même que l'élonga-

tion directe de son nerf, une rupture de la myéline, par places,

tout le long du nerf; on la trouve refoulée de part et d'autre

des endroits tiraillés. Intégrité des gaines et des cylindres-axes.

- Un examen pratiqué peu de temps après l'opération de l'élon-

gation chez l'animal (lapin, cobaye) décèle les mêmes lésions

et quelquefois la déchirure du cylindre-axe. Mêmes observations

surle sciatique d'un homme élongé un jour avant sa mort, pour

un tétanos traumatique. (Pertik deBudapesth et Witk.) L'au-

teur a grand soin de faire ressortir en même temps qu'il a

constamment pris soin dans ses expériences de graduer la force

de traction, par comparaison de l'animal à l'homme, et con-

formément aux recommandations de Nùssbaum. Tout nerf

qui a subi ce traitement, présente au delà du troisième jour

( lapin ) un début de dégénérescence ( segmentation myélinique,

discontinuité ou absence complète du cylindre-axe; gaines vides

ou remplies d'une matière grenue (multiplication des noyaux);

le processus était complet sur une fibre de chien au neuvième

jour; au quatorzième, un lapin présentait un grand nombre de

fibres dégénérées sur la périphérie du nerf. En aucun cas,W...

ne constata d'altération anatomique dans le bout central par

rapport au lieu de préhension. Pas de troubles trophiques,

même aux muscles ; troubles de la locomotion variables et

passagers. Macroscopiquement l'opération peut donner lieu à

des hémorrhagies dans les gaines et assez souvent à la rayure

de Fontana (tassement des fibres les unes contre les autres).

En somme l'élongation, en supprimant la conductibilité d'un

certain nombre de fibres, détermine rapidement une dégénéra-

tion qui s'étend dans le bout périphérique. C'est bien une sec-

tion partielle ( Verneuil Si comme tend à le croire l'auteur, il

est vrai qu'à l'état normal on peut constater sur les nerfs

périphériques des vestiges de processus, de dégénérescence et

de régénération ( opinion dc lllayer l'élongation constituerait

un coup de fouet ranimant, accélérant, multipliant dans le

système nerveux les processus de déchéance et de néoplasie

physiologiques.

Pour finir, quelques conclusions histologiques. M. W... fait

ressortir que bien que le nerf n'ait pas participé au traumatisme

de la plaie d'ailleurs toujours très modéré, bien qu'il n'ait pré-

senté, caché dans la profondeur, dans sa gaine intacte, aucun

98 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

phénomène inflammatoire, la réparation du tissu nerveux n'a

jamaiseulieu par première intention : elle a toujours été précé-

dée par de la dégénérescence, que la plaie guérit ou non par

première intention (mêmes altérations nerveuses dans les deux

cas). D'autre part, pour que la dégénérescence soit complète,

il faut que le cylindre-axe soit rompu. La rupture des cylin-

dres-axes brisés par l'élongation a lieu, presque sans exception,

entre deux étranglements annulaires, ce qui prouve la faus-

seté de l'opinion 'jE'Hy6/; ? ! <MH ! aux termes de laquelle' un nerf

serait composé d'autant de segments de cylindre-axe qu'il y a

d'étranglements, segments reliés entre eux par uu ciment

organique interposé en ces points. D'ailleurs les altérations

traumatiques sont loin de se limiter ré-ulièrement àl'étran-le-

ment le plus voisin. P. K.

XIII. DE l'amaurose consécutive aux lésions du sourcil ou

DE la région orbitaire; par J. SANTOS FERNANDEZ (de la Ha-

vane) ; traduction anglaise par A.-B. DE LuNA. (77;e Aine-

z·ican jouzozalof LhelTedz'cal Sciences, n° de janvier 1881.) /

Cette étude historique, clinique et expérimentale se termine

par les conclusions suivantes :

1° L'amaurose consécutive aux lésions du sourcil est généra-

lement causée par des lésions cérébrales ; la preuve, c'est que

dans le plus grand nombre des cas, le malado perd connais-

sance ou meurt peu de temps après l'accident;

2° Bien que la littérature ophthalmologiquc moderne ne con-

tienne pas un seul cas dans lequel l'examen ophthalmosco-

pique ait été régulièrement pratiqué pendant toute la durée de

la maladie, deux de mes cas, ainsi que les observations de

Galezowski, tendent à prouver que l'amaurose est due soit à une

atrophie de la papille, relovant elle-même d'une lésion plus

ou moins grave ; soit à une lésion du nerf optique à son pas-

sage dans le trou optique; ,

3° Les cas dans lesquels l'amaurose a été attribuée à une

action sympathique ou à l'excitabilité de la cinquième paire

appartiennent à une époque où l'oplithalmoscope n'était pas

encore en usage, et ont par conséquent pu donner lieu à des

interprétations erronées;

4° L'amaurose occasionnée par une simplo irritation du nerf

sus-orbitaire résultant de piqûres, de distension cicatricielle ou

REVUE ! DE PATHOLOGIE NERVEUSE. '99

de toute autre cause, pourrait à l'heure actuellc,.étrp mise, en

doute; car on ne trouve pas, à l'appui de son, existence, une

seule observation clinique complète; mais comme on a observé

l'amaurose sympathiques par excitabilité .de, là branche maxil-

laire de la cinquième paire'il ne saurait être permis, en bonne

logique,, de nier, la possibilité d'un résultat semblable, pour ce

qui concerne le nerf sus-orbitaire,,l'une des .trois 'principales

branches du trijumeau ; ga-uBinni n , S,AU117911W oJ;J <nj >

1.5° L'identité complète-une fois admise entre l'amaurose qui

résulte d'une irritation du nerf maxillaire, supérieur et, celle

qui résulte d'une irritation du nerf sus-orbitniro,r;le pronostic

doit être considéré commo également favorable dans, les, deux

cas : quant ài,l'amaurose consécutive aux lésions du sourcil et

aboutissant à l'atrophie do la papille, elle est incurable ; tf ,

6° Dans les expériences instituées sur les cliiens, les divers

traumatismes provoqués de la région sus-orbitaire n'ont pas

été siiivii'd ? auio-se. Y ? ? m" ? "° R.'DE'M.C ? ' ''

' r r;l il ' si"" tW i '' " < ' 1. 1f,1 am -1 ;) sn 'T3, ', >\

t >>V\ * / tJ c n i mi .' je Imi)"flW 9f

XIV : SUR les* fractures NON mortelles DE la base DU crâne,

avec cent trente-cinq olservations;parJolin-A. LiDELL.(7V(e

if A27ze2,icaîz-joîtî,nal of,tlie IlIedical Scz*eiicesl n, d'avril 1881.) ? > if ffl f ·rn'

On a déjà rendu, et;il faut rendre'encore aux; chirurgiens

américains cette justice, qu'ils ont merveilleusement,tiré parti

du champ d'observation quedeur a fourni la guerre de la Séces-

sion. C'est à la source >; intarissable ! de documents recueillis a

cette époque que 112 : Lidell a puisé les matériaux de son impor-

tant travail,' dont nous reproduisons ici les conclusions : .un 1

t 1 Les, fractures qui intéressent la base du'crâne ne sont pas

nécessairement, mortelle; i au contraire,, 'la- proportion des

guérisons est considérable ;' 'ICrjWf'W I n7n i, I(1 ! lirll J-v. ' ,

1 2° Les malades qui guérissent le mieux ,senti ceux que '[l'on

tient au repos, que l'on traite par la méthode antiphlogistique,

c'est-à-dire par l'alimentation restreinte, îles applications froi-

des sur la; tête,) les purgatifs ? les mercuriaux,,les vésicatoires,

suivantilo cas, pendant la durée de la .période [d'inflammation

et do suppuration qui succède à la; lésion.'Plusieurs malades,

dont,,l'état paraissait 1 désespéré, Ont été sauvés par ce traite-

ment ; faute d'y avoir recours au contraire, beaucoup de bles-

sés n'ont guéri, qu'imparfaitement,, et quelquefois,le résultat a

été plus fâcheux, encore ;, ? .0Jt,ipiu jb JIrb.IIIJc Il owHiio-bu*

100 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

3° La ligature de la carotide primitive peut être, pratiquée

avec succès pour arrêter l'hémorrhagie de l'artère méningée

moyenne. Ce traitement a réussi dans deux cas ; i -,

4° Chez beaucoup de blessés atteints de fracturejpar coup de

feu de la base du crâne, et surtout chez ceux qui ont été impar-

faitement, incomplètement ou négligemment traités, on voit,

après une^amélioration apparente plus.'ou moins''prolongée,

la santé générale se détériorer," l'atrophie et les contractures

tendineuses survenir dans les membres pâralpsés, la ? éépl>;a-

lalgie et les vertiges persister, la cécité et la surdité augmenter ;

enfin on .voit apparaître l'épilepsie .traumatique, l'altération

dos facultés mentales,, etc. 1 eaucou 1 , -J. p d s ce, e s,, ), r app ortés.vie -

nent malheureusement à l'appui de cette assertion ! Aussi, le

grand ensei-ner ? t,'p"ratique,, qu'il convient de tirer de ces

faits, c'est que toutes les fois qu'on se trouve en présence' d'un

de ces traumatismes, il faut demeurer convaincu des fâcheux

résultats que peut avoir un (traitement, insuffisant, et .pour-

suivre avec pers6vérance,,T)dat tout le . temps^ nécessaire un

traitement approprié. ! Par dessus tout,, ^l faut assurer ;|au" ma-

lade les bénéfices d'un milieu parfaitement calme,'d'un'repos

physique et moral,absolu,let d ûnLSevèrë régime antiphlogis-

tique. ? ? ... ? , ? q i' 1 ' lt*'Dr l@(C ,

tique. ,nu f)T,ir[,n tlr 3n r,lilfJ m,.J; y0 r s»\

- ",r ' '->< ' » 11» Tl| ! - -ttffut -)J. »'(0,l et fi, k,,1[, gui

XV. ETUDE SUR LES'IIrRIORRIIAGIE5 primitives; immédiates ou

DIRECTES des ventricules1' cérébraux ; par Edward SAN-

ders. (771eAM ! M' : eaH Journal of the Médical Sr.iefzces, n° de

ju111et1881.) '`n, m ? I" " "-«'fi'' »' (,. if'i'f >

11 - ' ? ! h .-il I o" i f ii, ? t. 1" ,.

L'auteur n'entend parler dans ce' travail'que'des'hémorrha-

gies qui ont leur' origine soit' dans le ventricule lui-même, soit

en un point de ses parois, indépendamment de toute lacération

du tissu'cérébral, de toute effraction de sang''venu d'ailleurs.

Tous les auteurs s'accordent à considérer' cette' lésion comme

extrêmement rare; mais M. Sanders pense' que souvent elle a

passé inaperçue'ou bien a'été méconnue; ses recherches biblio-

graphiques lui ont permis d'en rassembler quatre-vingt-qua-

torze cas. Les causes de l'hémorrhagie intra-ventriculaire pri-

mitive'ne'diffèrent pas essentiellement de celles deslextrava-

sations sanguines ordinaires." Au point de vue de l'âge, il est à

remarquer'(si toutefois il'est permis de (conclure^ d'après un

nombre de cas aussi restreint) que l'hémorrhagie intra-ventri-

REVUE DE pathologie NERVEUSE. 101

culaire primitive serait sensiblement plus fréquente aux deux

extrêmes de la vie : elle est d'ailleurs plus uniformément ré-

partie entre les divers âges que l'hémorrhagie cérébrale pro-

prement dite. Elle paraît avoir été observée plus souvent chez

les hommes que chez les femmes. - . - "

Si l'on recherche' quelles sont les maladies ou les états anor-

maux qui existaient chez les' sujets que l'hémorrhagie intra-

ventriculaire frappés, on trouve trois fois la grossesse, deux

fois la délivrance récente, treize fois l'augmentation de volume

du coeur ' (avec hypertrophie gauche 'très^accusée dans cinq

cas) , dix fois une hémorrhagie ou une hémiplégie antérieure,

une fois la leucocythémie,' une fois le scorbut; une fois lé pur-

pura, une fois la cachexie palustre, deux fois l'effort 'brusque

ou prolongé, trois fois'des sensations émotives violentes, une

fois l'inflammation du ventricule lui-même. D'autre part, toutes

les côiiditiôris`(gôiitté, alcoolisme, syphilis, etc.) qui, en provo-

quant l'altération des paroisvasculaires cérébrales, prédisposent

à l'hémorrhagie cérébrale ordinaire^ paraissent devoir prédispo-

ser également'à l'hémorrhagie intra-ventriculaire primitive.

Au point de vue du mécanisme; l'auteur ne se refuse pas à

admettre, bien qu'à. cet égard il conserve quelques doutes, que

des hémorrhagies de ce genre puissent se produire par simple

exhalation, en dehors de toute rupture vasculaire; mais cette

explication ne serait en tout, cas^applicable,, qu'aux, hémorrha-

gies très minimes. Le plus, souvent, c'est à la rupture, d'un

vaisseau situé sur la paroi vasculaire ou dans son voisinage

immédiat qu'il faut attribuer les phénomènes observés. Il con-

vient aussi de tenir compte, au point de vue étiologique, des

anévrysmes,, des tumeurs intra-cràniennes, de l'inflammation

du ventricule lui-même, de l'atrophie et'du ramollissement du

cerveau, (ainsi;que des .diverses..modifications subies par les

vaisseaux du cerveau en général, ou par les vaisseaux directe-

ment intéressés ! dans l'hémorrhagie. Quant aux anévrysmes

miliaires, il^est, permis,, de, supposer, et,.4uelques faits vien-

nent à l'appui de cette manière, de voir, que les vaisseaux

ventriculaires ne se comportent pas autrement à l'égard de

cette lésion que les autres.vaisseaux cérébraux.

En dehors des conditions particulières qui résultent du siège

mêmedel'hémorrhagie, lesphénornènes anatomo-pathologiques

ne paraissent présenter aucun caractère, qui leur soit exclusif.

Au point de vue du diagnostic, il est surtout important de

102 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.'

distinguer l'hémorrhagio'intra-vcntriculaire primitive do l'hé-

morrhagie cérébrale ordinaire et (le"

L'auteur à' résumé dans déûtâbloâuX ? èye nous reproduisons,

les éléments de ce double diagnostic différentiel : ' '' ' ' '

1^;m : ronttu.c,cy-at;Tmcuamr ? ·, '

Fréquente chez leslsujets' jeunes M'

ou âgés.

Débuttrèsirapileetviolent.zW l2t

Coma ordinairement très profond j

datant tout a ,,

'la maladie.1'^' ! "M^ Jii-ith

Convulsions fréquentes. '<H f1u''ir

Contracture fréquente', il iitp

La,paratysiemanque.on\ent;g

quelquefois elle est 'généralisée.

I r .. , .... 1 , ? . · ,

Une amélioration ou' une remis ? 1

sien passagères des symptômes il)

. , ne sont pas rares. ,1^ |/ ,jj

La lie -ué sont * 'on est une Il )ibbi

La guérison est, une terminaison,

rale. mJ<. w.l , Im4n W ! 1m 1J

La mort ést'rapide;elle survient ?

9 soin eut en quelques heures, Un

, 91> Wttll'tti ? yln, ·l'9WOL fi'

rr ? .nl a,s W IW, `l'·l7ff II mr

2^ IIC1f01tltndGll : VENTRICULAIRE.

'Il (C 11 . -*

Pas d'antécédents pour, expliquerai,

la lésion.

Les symptômes prémonitoires ne

sont pas rares. ' , ? pN

Céphalalgie 'rare ? t il'm

Si la paralysie existe, règle géné-

rale elle n'est pas généralisée ;

c'est une hémiplégie, g ;1 , ,

La déviation.de la bouche et , de,

là langue sont plus communes.

La contracture est très commune ? t

>" ? - -> . '. </9,

Les convulsions existent souvent,

mais elles sont moins communes.

Vomissements moins fréquents.

Pas de symptômes de 'méningite '

secondaire avec fièvre ? "l'imii1

I,r,

Mort rapide., ? ", ?

M gJijJlbMOnRIIAGIC^CERÙBnAI-E. , / ·

Frequentc'surtontf'vers le milieu

de la vie.

.t Début plus lentlet moins violent.

t9Cpmar| généralement moins ptp-

fond. ? '"I"' "" - '

uip a^u ? ^ob smI ) 'lOtspriMi

-jb^Cohvulsions rares ? z 9`t;u ut'

t,ç9a)tracture, rare., t Ili r;y r·t ! 1 J·v,, , ^

1, La paralysie est, la règle; elle rc-

vêt "généralement la' forme i hé-

't' 3 miplégïque'I yTrr '" ''M ?

L'amélioration passagère estbeau-

Imn coup moms^fréquente.jp ,y.,tt

La Lagnelison est fréquente."

'ai > ouo 'iiipra nqirut)' un t. t

s .Même en cas'de terminaison . .1·u-

. "neste,lavieseprolon;eordmat-

, rement pendant plusieurs jours.

tll..· i.,i,y,.u l·r ·1",vt· n·,ur .'

lùixniy- " tff-t'' i , « , . <

HEMOURHAG1E MEGEE.

tlIYJ3J13'vl ;r119u1`Wr ! 2`uO·r.r

,l0u,trouve dans les,, antécédents :

pour te nouveau-né, un accou-

chem'eritu laborieux ; pô'ur'Tà-

dulte un traumatisme.

Ces. symptômes manquent ordi-

nairement ? ir *' '

"r'> Céphalalgie fréquente (Ramskill).

La (paralysie A est ordinairement

généralisée; l'hémiplégie est

exceptionnelle (Nothnagel).

Ces délations sont rares (Rams-

' .'kill).' "' ?

Lacontracture, quoiquefrequentc,

'nestmoinscommune.(i, . 1 '

jj Les coinulsions sontja régie.

Vomissements très fréquents. '

Il Symptômes de méningite secon-

l'i'daire avec'forte fièvre,,vers le

troisième ou lé quatrième jour.

liègle générale, la', vie' se prolonge

pendant plusieurs jours."5 ? ' r

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 103

Le pronostic est presque toujours fatal : sur les quatre-vingt-

quatorze cas rassemblés par l'auteur, on ne compte que trois

guérisons; dans ces trois cas, l'hémorrhagie n'avait envahi

qu'un seul ventricule. 13. DE M. C.

XVI. SUR' CERTAINES PHASES PEU CONNUES"DU TABES ' DORSAL ;

par Th. BUZZARD. (The Lancet, septembre 1881.)

L'auteur pense que quelquefois l'absence du réflexe patellaire

est le seul symptôme du tabes. L'ataxie des mouvements peut

manquer chez des sujets qui offrent déjà les symptômes les

plus graves du tabès; il cite plusieurs faits de crises gastriques,

d'arthropathies,chez des sujets qui n'avaient pas d'incoordina-

.tion. Il appelle également l'attention sur la prééminence que

peuvent encore prendre quelques autres symptômes qui sont

relégués au second plan : les troubles vésicaux du tabes pren-

nent quelquefois une telle importance qu'ils sont considérés

comme constituant toute la maladie. M. Buzzard rapporte' le-

fait d'un hémiplégique chez lequel on ne trouva non seulement

pas l'exagération des réflexes du côté paralysé, mais même

, aucune réaction au choc du tendon patellaire; on apprit que

ce sujet avait eu' auparavant des douleurs fulgurantes, de la

diplopie, etc., c'était un ataxique. Il insiste aussi sur les chutes

brusques auxquelles les ataxiques peuvent être sujets, par suite

d'une paraplégie subite, quelquefois assez marquée pour

obscurcir le diagnostic. Cu. F.

XVII. SUR UNE lésion DE l'axe GRIS DE la moelle épinière

dans un cas DE SYPHILIS RÉCENTE ; par A. JARISCH. (IViene2-

Medizin. l3latle·, 1881.)

L'auteur ayant observé plusieurs fois au début de la syphi-

lis une exagération des réflexes cutanés et tendineux qui avait

disparu sous l'influence d'un traitement antisyphilitique s'é-

tait demandé si ces phénomènes ne devaient pas être mis en

rapport avec des lésions médullaires analogues à celles qu'il

avait,déjà décrites dans certaines affections cutanées. Il a eu

l'occasion d'examiner la moelle d'un individu atteint de syphi-

lide papulo-squammeuse. Sur certaines coupes de la partie in-

férieure'de la moelle dorsale, on constatait que les cornes an-

térieures étaient gonflées et élargies, surtout dans leurs parties

104 REVUE DE pathologie NERVEUSE.

latérales. Les altérations microscopiques les plus intenses sié-

geaient depuis les racines de la dixième paire dorsale jusqu'au

renflement lombaire ; elles n'étaient pas continues, mais se

présentaient plutôt sous forme de nodules.' On constatait prin-

cipalement une vascularisation énorme de la substance grise,

surtout dans les parties centrales^et. latérales, et notamment,

dans le processus réticulaire. Dans plusieurs endroits, cet état

avait amené de petites hémorrhagies. Les vaisseaux de la

commissure surtout' 'étaient 'élài-is 1 -et'"g'o'r-'és-'deq s(la'ng, leur

adventice épaissie. La substance grise présentait des alté-

rations qui étaient en rapport intime avec cette hypéré-

mie et ces proliférations vasculaires. Là où le processus était

le plus intense,1 la structure propre àlasübstancé'gri'se âvait

complètement disparu ; le réseau conjonctif' était très épaissi,

t1 ? );< ia n IY 1W .' ? t., t Jutt < Uy

et dans cette masse plus ou moins homogène, les cellules gan-

glionnaires paraissaient gonflées et,comme i;énipliés déliquide : ,r,

dans,quelques-uns le noyau [était peu distinct. D'autres fois le-

noyau, était tout à fait libre;ou', à peine entouré des restés du» 11

protoplasma.'Les altérations étaient surtout marquées dans les''

cellules ganglionnaires des colonnes de* Clarke, ' du groupe la-

téral et des p'artie's,céntrales,' tandis que les' cellules' m'ultipo ?

laires antérieures participaient à un degré bien' moindre,' mais

manifeste^ au processus' pathologique. Dans" l'a"'méme,réal9'n'; la

substance blanche .de^la moelle était vascularisée, son tissu

conjonctif était gonflé, sans, altération des tubes nerveux. Ces

lésions étaient beaucoup moins marquées. CH. FÉRÉ etRiCHARD.

· f f vu 9'. ., f.«t ' .

XVIIL1 DLUlII : IE contribution L'ÉTUDE des localisations ,

cérébrales; par E.-C. SEGUIN., (.021T2t. 0/. nervous a2ad ? 72en-

tal, disecisës; juillet 1881.)" , , < ? r)..tnn . J

.9% i·p 1 ? u4 .nl 1 I -ii'i;ji, 11 1 . U't'.t.tû 'ii

Cinq nouveaux faits portent à neuf le nombre des observations

personnelles de M.' 1 Séguin;irelatives aux localisations corticales

du cerveau ;,il'en'tire les conclusions suivantes ? la partie in-

férieure de la troisième frontale est en rapport avec les'orgahes

et lafonction dulaugage;°la'partie moyenne'Mes'frontale et

pariétale ascendantes," avec les, mouvements 'du 'bras ' du côté

opposé ; ' la partie supérieure des deux'méines circonvolutioris

avec le lobule paracentral (et aussi le lobule pariétal supérieur ? ) ,,

avec ceux des deux membres du côté opposé et peut-être plus

particulièrement avec ceux de la jambe ? CH. 1. , hit, i,

SOCIÉTÉS1 SAVANTES; ? PCIÉ'rÉ.,àfÉ, DIC07pYCIIOI,OGiQUF,

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopte. , , ,

ni. c Ris , 1 , cominu'mduë , lâ sôciété l'obsérvation` 1 ' t')') - - 1

M. 'II TIAN communique à la société l'observation un déli-

rant chronique présentant des idéës' depersécutioi ? âssociées à''dés ' i

idées' de grandeurs ! 'chez lequel le moindre malaise se traduisait par'-1' '

une exaspération du délire. Ce malade'était en' outre cryptorchide;' *

et M. Christiandemander·siZCe vicecdetconformationn'était.pas

pour quelque chose dans la production ! du délire. Dans leicourside '.

quelques affections, inflammatoires dont cet individu fut;, atteint, il .1.

présenta du, délire fébrile se substituant au,délire d'absence., Tout,

du reste, devenait, pour .lui/ lé prétexte d'une, idée, délirante, , A, la

suite d'une administration de tartre stibié,' il empoisonné,

et a conservé ensuite'cette idée 'pendant lo'nL'temps ? ll : n"i''1 S Y.llïLl.

M. Voisin estime, dans ce cas, que le délire fébrile pouvait tenir a

un état congestif des'centres- nerveux, 'comme r'b'iit'eà'lobse'rvè 'dés`'

exemples dans les cours de certaines affections; le délire vésanique

habituel reparaissant aussitôt après la guérison de la maladie,

intercurrente. '> ? T sf ? 7"'JT"' ' ' * ? û1™ ? nit -i z jag i

M. Luys croit que, souvent) on peut expliquer la formation du dé-

lire par un vice de conformation des orc,ane's' génita 1 ux.'ll'b"r'ap

pelle un individu atteint d'hydrocèle enkysté, qui;s'est cru persé-

cuté, et pensait' qu'on l'avait changé de sexe'en lui mettant dans le'

scrotum un oeuf, qui aurait faitdeflui,unenfemelle : M. r Luys, de- ut,

mande ensuite à la Société ce quelle pense., déscrises{ qui .jugent jb

un délire, par, une, affection jiiguë.j3 ^icja01r arn '.i ? w«< '.L ^W 3lza

M. Christian atremarqué que dans la paralysie générale former 4

maniaque', une,, maladie ( intercurrente pouvait., avoir^un^ heureux r

résultat sur l'affection mentale ? tandis qu'au contraire, la . termi-

naison était presque fatale' quand elle'survenait'dans les* formes

dépressives.") ? 'it ? ' )'t.f)t ? )t ? ti'9 ? bqt') ? ' .'

l Luys craint qu'il n'y ait' siinpie coiiieideiice rlle et lion . z

une relation de cause à effet. ' ' ,lh' ' Il <"' ' 1"1, 1 ? '" "

106 SOCIÉTÉS SAVANTES.-

, M.1 Voisin a vu des épiloptiques dont les attaques étaient suspen-

dues pendant la durée. d'une affection inflammatoire. i. ? 1. ,,

M. Delasiauve insiste sur la distinction à établir entre le délire

fébrile et le délire vésanique, et pense qu'une maladie peut, dans

certains cas, se substituer à une autre. Pendant i une épidémie de

variole qui sévissait dans son service, il a observé une petite fille

épileptique, dont les attaques étaient, ordinairement quotidiennes

et qui n'a pas eu une seule , manifestation , du mal comitial,dans

tout le cours de sa variole.

M. LEGRAND du, SnoLr.n, revenant sur l'observation rapportée par

M. Christian, repousse l'administration du tartre stibié chez les

persécutés; parce que les troubles gastro-intestinaux qu'il déter-

mine "peuvent" être pour le sujet le point de départ d'idées d'em-

poisonnement dont il se débarrasse ensuite difficilement. '

M. Magnan lit un rapport sur trois candidats qui demandent à

faire partie de la Société. A l'unanimité, ''M110 qlit02-t--off docteur

en médecine, le'D i)laral' Brinnd et'le De sont nommés,

les^deux premiers membres correspondants,' et le troisième membre

titulaire delà Société iiiédico-Sy11010,-i(ILIC. '` 111ncer. Briand.

Séti)zce du ·30 octobre 88 ? Présidence de M. Delasiauve.

M. Bouedin présente à la Société un' mémoire sur l'aaztoztomnsie.

On désigne,' dit-il, sous le nom d'aphasiques une catégorie d'in-

vidus dont le langage' ne répond pas à la pensée. Ils disent, par

exemple : allumer ma pantoufle;' au lieu de : allumer ma lampe,

allumer mabougie, et, ne s'apercevant pas de l'erreur qu'ils viennent

de commettre, ils tiennent ainsi dés discours incompréhensibles.

Ap7tctsirtte, étymologiquement, veut dire : qui ne parle pas; on leur

applique donc'un qualificatif impropre, qu'il serait peut-être bonde

modifier. L'antonomase est une figure de rhétorique qui consiste à

ne pas appliquer à un objet son mot propre et à le remplacer par

un équivalent. Je crois donc qu'il serait préférable d'appeler attto-

nomasie la forme d'aphasie à laquelle je viens de faire allusion.

M. FALRET. Dans l'antonomase, on emploie un équivalent et l'on

dit par exemple : la maison de Molière pour désigner la Comédie-

Française, tandis que les aphasiques emploient, quand l'expression

propre leur manque, un terme qui souvent ne signifie rien du tout.

" AI : Lois.`Je'crois - qu'il faudrait réserver l'antonomasie pour dé-

terminer l'état d'un malade qui, sans employer un terme impropre,

se servirait de circonlocutions.

1 Mlle Slwortzoff est la première femme qui ait été admise 1 la Société

12zédico-psilchologiqzie. Ce fait vaut qu'on le signale.

SOCIÉTÉS SAVANTES ? 107

M. Charpentier.' Je me représente assez volontiers l'antonomasie,

comme la tendance de ces personnes qui abusent sans cesse de la

périphrase.n' ? (.u..j. r ..oiluniiit"" i,1 ? Jei=n -itvt n> 1

M. Foville demande si les individus dont il est question mani-

festent leur état dansée langage écrit comme .ils le manifestent

dans le langage parlé'.c < ' ? )r ? ? dJri t ,trs2z «= .-j ?

" M. Boonnm. Le mol antonomase, que je vous proposais d'accepter,

s'appliquerait1 aussi bien aux yrccp7aiques qu'aux aphasiques.

. ' l ? t - Wo" l.'r

Discussion sur la création d'un asile pour les aliénés criminels ? ? .il" id ? ·r ! )'n : ,f W , nnhF'I,iait3 ? pr f -> ? »in" nli1'ri't . If

M. Motet, rendant.comple à lai Société, des^travaux, du Congrès

médical,de Londres, s'étend longuement, avec son talent ordinaire,

sur la question des aliénés^ criminels. Les Anglais, t dit-il, ont fait

sur ce sujet un grand nombre d'expériences qu'il suffit de connaître

pour en profiter] L'histoirejies, aliénés criminels se divise, chez nos

voisins, d'outre-Manclie, eu quatre, grandes périodes. ^Durant la

première"ils étaient confondus, dans les maisons, de détention avec,

les prisonniers ordinaires ;,mas ils étaient pour ces derniers tantôt

un sujet d'effroi, tantôt^un objet do risée j'ajôulez que d'autres

aliénés criminels, acquittés comme irresponsables, restaient en li-

berté et commettaient de nouveaux crimes. Plus tard, ceux d'entre

ces malheureux qui pouvaient payer leur pension furent séparés des

prisonniers et placés dans des asiles avec les aliénés ordinaires;

c'est ce qui «marque la seconde période. Peu après, on entra dans

la période dite de réaction ? ce n'était pas assez d'avoir séparé les

aliénés 'Criminels des .malfaiteurs sensés et responsables.de leurs

actes; il ne fallait pas les confondre avec les autres aliénés, caries

familles de ces derniers réclamaient contre cette promiscuité. L'on

en arriva peu à peu a la période de centralisation;, en fondant un

asile central pour les aliénés criminels. Dans cet. asile, que j'ai vi-

sité, j'ai'vu des .malades que .j'aurais pris, absolument, pour,, ,des,

aliénés ordinaires, n'eût été le lieu où ils se trouvaient ? J^^,,

M. llt cwN : Dans la très intéressante communication de M. Motel,

il me semble trouver, la condamnation même du projet qu'il, vou-

drait voir accepter en-France. Comment, en effet, admettre que des

malades, qui; suivant §on expression, ressemblent tant auxaliénés

ordinaires,. soient soignés ailleursjque dans, un asile ordinaire ? Et,

pour ma part, t je| me,résoudraise,diffiqilement .à-admettre qu'on

doive traiter en criminels un paralytique général par exemple ou

un dément parce qu'ils auront dérobé quelque objet ou exhibé en

public, leurs organes génitaux. £ ,cE, 3DUlasctt rrlncrLll3w.wu.car

. - HCt)9t<i ? yi' r..iti'; W{ ? '

,tl* 1, 1, .1 ? .Ilül.l, x. *, (` v . 111 1, il il, 1- tr

l'il, i .li il 1`fiv '.r;) i^ jj^.\syWi\jyivi'-n i^i,

108 sociétés 'savantes.

SOCIÉTÉ PSYCHIATRIQUE DE LA PROVINCE DU RHIN

' ' Séance du\ % juin 1880. n ' ""

Le Dr Schuchardt, d'Andernach; est nommé membre titulaire.

Le De Hertz 'met sous lès' yeux de la Société le plan du nouvel

asile construit 'à Sarreguemines'1 Owy remarque un lazaret spécial

réservé aux maladies fébriles pour chaque sexe; de chaque côté un

grand bâtiment indépendant, mi-partie pour les épileptiques, mi-

partie pour les gâteux ; des constructions affectées aux pension-

naires, aux malades calme ? , aux aliénés demi-agités, aux agités;

en tout, six corps de bâtiment. L'installation la plus originale,

est celle des locaux 'destinés à1 l'isolement,1 que l'on voit émerger,

comme les bourgeons des rameaux, du corps de logis, des dis-

tances régulières. lien existe'dans les sections des aliénés calmes,

des' agités, "des" demi-agités ? des 'entrants;11 Chacun 'des locaux

cellulaires est séparé du ' corps de logis respectif non ' seulement par

des portes, mais' encore par des antichambres murées ; l'isolement

est donc aussi complet que possible.' On a évité de les'grouper dans

le même but ;l quand une même construction en' possède plusieurs,

ils sont'disposés en dehors les uns desautres. Chaque compartiment

cellulaire comprend un lieu d'habitation,' un corridor, un cabinet

d'aisances et une issue spéciale dans une cour à part. Un parquet de

chêne inséré dans l'aspbalte,n'de grandes i fenêtres, surmontées

d'impostes valvulaires destinées à l'aération, l'éclairage au gaz en

rapport avec v l'appareil de ventilation/, le chauffage'à à l'aide de

poêles abrités par un manteau de'maçonnerie, que l'on alimente

dans les corridors;' la' solidité des murailles préservant également

du froid et de la chaleur, tels sont les principaux avantages de

l'aménagement. vjluztim » n ,i, , , , . -

' M : Ripping communique un fait concernant un garçon de quatorze

ans qui se prétendait' en communication avec la sainteVierge.Trans-

porté au Siegburg pour être observé, il fut non reconnu comme

aliéné; 1 mais convaincu d'imposture. (Voyez i Vierteljahrcssch f.

gesichtl.'médic. N. F. XXXIV, 4, p. 47979.) 1 1

18 M.' Nasse présente' les conclusions suivantes à l'égard de-l'emploi

del'ltyoscyamizze dans' les psychoses. Après avoir résumé les travaux

de Lawson, Mendel, Savage, Prideaux, Gray sur ce sujet, M. Nasse

passe' ses propres essais.' Se. conformant aux''indications de

Lawson, il employait l'hyoscyamine amorphe de Mark à l'intérieur

à la dose de 0,003 à 0,0'JG par jour ? Sur quatre cas de manie chro-

SOCIETES SAVANTES. 109

nique avec propension marquée à déchirer et à salir, il n'obtint

qu'un succès passager malgré l'administration du médicament pen-

dant sept à onze jours consécutifs. Aucun repos, nulle action sur

l'appétit ou sur' la gorge, doute à1' l'égard 'de da régularité de la

mydriase et de l'accélération du pouls. Mêmes résultats négatifs à

propos d'un paralytique agité ? Ces'observations engagèrent d'au-

tant mieux M. Nasse à prolonger ses essais, que Savage et Gay

mettent en garde contre, le collapsus qui se montre par la prolon-

gation de l'usage et qu'il a lui-même enregistré dans le cas

heureux en question, de,l'abattement général et .de la, diarrhée.

D'ailleurs, diversité, des opinions sur, la, valeur, des diverses 113 oscya-

mines (amorphe ou cristallisée), ainsi que sur, celle de, mode d'em-

ploi (interne ou en injections hypodermiques) ? t Xl · -

V -i' ' £ -I t.Mv p .1 c.. p .ln.h' ! rv n.

, )7 ri. Séance { dut 6, novembre ,1880..., ", ,

V'Jfi ! 'ih ? )'10' nh 'ni ? l . ' s.'O , t -,

Après la réception comme-, membres titulaires des D™ Huberty,

de Dùren, et Von Eancvwnr.n,, de Alirweiler, le président commu-

nique, à la Société l'invitation qu'il, a. reçue d'assister au Congrès

international de , médecine. 1 11 souhaite,, que quelques-uns de ses

membres puissent agréer à cette invitation. V. - 11,

Le Dr LÉo lit deux rapports médico-légaux concernant l'état mental

d'unjournaherde trente-deux anset d'un mendiant de quarante ans,

accusés d'attentats à la pudeur sur des enfants, et tous deux à peu

près aussi mal partagés psychiquement. Le premier devait être

considéré comme à la limite de la santé mentale, tandis que le

second avait manifestement franchi les bornes de la normale, et

paraissait atteint de faiblesse mentale. Le tribunal ayant demandé

un supplément d'expertise psychologique, J'aliéniste commis à cet

effet'confirma le rapport. Condamnation du premier inculpé, le

second étant dirigé sur un asile.

Le Dl Bisser se rallie à la parole d'Helmholtz : « Les idées sont

les résultantes de l'effet produit sur notre connaissance; par les

objets représentatifs. La conception dépend donc et de la nature

de l'objet qui fait image et de celle du terrain impressionné. Or, une

conception ne peut être absolument vraie, car elle ne peut sans

l'altérer reproduire la nature de l'objet réfléchi, représenté. Aussi

nos conceptions ne sont-elles que des signes, des symboles. Aussi

n'y a-t-il pas .de vérité absolue, l'être qui conçoit et l'objet conçu

appartenant ,à deux mondes tout à fait différents. » L'auteur

accentue la stérilité de la psychologie ; et malgré tout, les questions

delà réalité de l'objet,,au point de vue du sujet s'imposent à

'esprit. Il prophétise que des processus psycho-sensoriels que nous

1 I O BIBLIOGRAPHIE.

ne voyons évoluer que par parties, nous arriverons à saisir une

quantité psychique représentant ce que nous désignons aujourd'hui

sous le nom de la .connaissance. A ce propos, il, recommande la

méthode génétique qui consiste à étudier le mode , de production des

phénomènes ; le connaître, c'est déjà donner au savoir humain une

conclusion,' tandis que l'essence delà causalité échappeet échappera

probablement toujours à l'intelligence.' montre 1 qu'en' envi-

sageant les causes, nous parlons des 'propriétés des; choses ' et. dési-

gnons celles que nous avons-apprisnà connaître par- leurs mani-

festations. Ces propriétés, toujours considérées dans la méthode

d'étude, physico-naturelle dans , leurs rapports écologiques,, con-

cernent i simplement la désignation' du,7) : ode d'action de la chose

sur nous. Tout'pivote autour de l'action de l'incitation/ ce n'est

plus la'causalité qui est en jeu, Iüais''l'eüèleccirzemenG successif des

phénomènes. Malheureusement,' en rassemblant" l'ensemble dos

manifestations ' ordonnées par étapes 'temporelles, l'homme a

appliqué à la notion des successions de temps,' l'idée de cause, et

comblé par des conceptions, les lacunes que laisse, dans son esprit

'l'obscurité de la nature.de la cause dernière, du mode3 de mou-

vementr des particules infinitésimales. Celte, abstraction de la

causalité est l'obstacle au progrès comme tant d'autres. L'auteur

termine par l'analyse d'une sensation chez le nouveau-né, qui est la

répétition du discours prononcé par lui à l'occasion du congrès de

Naturalistes de 111unich. ? t' ' ' · 1 a" ' ? 1' i.l,

'L'époque de la prochaine 'réunion' est fixée au 18 juin 1881T

(,Illg : Zeitsch ? -;lf.'Psych. ae. psych-g'esielttl tilledici2z;"Ixxxvlll, 1,

1881.) 'ic^Jatl -rl ' ^P. I.

· .«. I t1 i .. ' , , 1 r . · oj'1 , . SI

1 BIBLIOGPAJPIIIIJ 1 f I m , i, m

i 4ï 3'')' m- 14tml f1 al LV1 tk;u5t'i»n'l

. 'i uifiii , irt ,u({,i>iTiT» 9li ,

j..JO, 01' 11, n fI1 111,9. 'Il

I. Leçons orales sur les phrénopalhics ou traité théorique elprali-

'< que des maladies mentales'; cours "donné à la, clinique des

établissements d'aliénés' à Gand, t par z % GUISL,1,N.-e Avec

' 54 figures intercalées dans le texte, un plan général et le plan

de l'hospice Guislain actuel. 2° édition publiée par. les soins

duDr 0. Ingeli, médecin en chef de l'hospice Guislain à Gand.

'" ' i l L " 4, ii i , Il 1 n oq lulll." ( ...jij., tl,

' Lorsque la première édition, des "Leçons sur- les^ phrénopa-

thies parut en 1852, l'accueil qui lui fut fait, montra en quelle

BIBLIOGRAPHIE. lit i

estime était tenu le savant aliéniste belge. Morel, tout particu-

lièrement, en salua l'apparition en termes sincèrement admi-

ratifs d'où n'était pas exclue, du reste, une critique courtoise.

Assurément, l'homme qui avait fait de l'étude de l'aliénation

mentale un véritable sacerdoce^ l'observateur profond et sagace

doublé d'une âme ardente et généreuse, ne méritait pas moins.

Comme nous le montrent les paroles éloquentes qui servent,

pour ainsi dire, d'introduction àson cours, Guislain ne se

contenta pas d'être un savant préoccupé uniquement des pro-

blèmes ardus de la psychologie morbide, il' fut encore et' sur-

tout un grand esprit ouvert aux aspirations les plus nobles.

Navré de l'état de délaissement où se trouvaient, dans son

pays, les malheureux aliénés, il flétrit, , en , termes indignés

l'indifférence des pouvoirs .publics. « On ne s'occupe de ces

deshérités de l'intelligence, s'écrie Guislain, que, dans un but

financier; ils ' sont l'objet d'uni trafic infâme et considérés

comme des animaux de basse-cour ; on négocie leur placement

comme s'il s'agissait de porcs ou de chevaux. » Longtemps en-

core cependant les autorités furent sourdes à ces réclamations

courageuses. ? " z " " ` ' `

Si le célèbre médecin do Gand n'obtint pas un régime d'hos-

pitalisation des aliénés tel qu'il eût pu le souhaiter, il n'en est

pas moins vrai qu'il fut l'initiateur des réformes qui se, sont

accomplies depuis en Belgique. r,;

Dans les dernières années de sa vie, Guislain rassemblait

des notes destinées à une seconde -édition des Leçons sur les

phrénopalhies, dont les exemples commençaient, du reste, à se

faire rares. La mort vint avant qu'il eût pu accomplir la tâche

qu'il s'était tracée, '-t ? ' r tr · · >>VV

Il appartenait à M. le Dl C. Ingeli, son successeur à l'hospice

auquel la ville de Gand, par reconnaissance, a donné le nom du

grand aliéniste, de se faire l'exécuteur d'un tel projet. Posses-

seur des notes préparées par Guislain en vue de l'édition nou-

velle, il les a intercalées dans le texte, en conservant auxLeoas

sur les plt2,é)iol)alhies, leur physionomie .propre, se contentant

d'indiquer les principales conquêtes de la science depuis, la

mort de l'auteur ? . , "' , t ; à l

Pour ceux qui ne se rendraient' qu'imparfaitement compte

des difficultés à vaincre pour se diriger un peu sûrement dans

ces graves questions des troubles psychiques, il y a lieu de

méditer ces quelques lignes placées au seuil des Leçons sur les

112 BIBLIOGRAPHIE. ? 6MOp< : </Me4' : « J'étais seul, sans maître, les difficultés sur-

gissaient de tous côtés, je ne comprenais rien à ce que je voyais,

et les mécomptes furent d'abord mes guides de tous les jours.

De toutes les préoccupations scientifiques auxquelles je m'étais

livré jusqu'alors, l'étude des maladies mentales m'apparut

comme la plus ardue. Au moment où je vous parle, je partage

encore cette opinion. En effet, dix années de ma vie ont été

employées à interroger l'homme vivant et le cadavre ; dix autres

ont servi à méditer sur ce que je voyais ; pendant les dernières

années seulement j'ai appris à guérir les aliénés. »

Des aperçus généraux sur l'habitus extérieur de l'aliéné, sur

la façon dont il se révèle à l'oeil exercé du praticien, les diffi-

cultés d'une démarcation possible entre le domaine de la

raison et de la folie, forment la substance des premières leçons.

L'aliénation mentale est définie par Guislain : un dérangement

des facultés mentales, morbide, apyrétique, chronique, qui ôte

à l'homme le pouvoir de penser et d'agir librement, dans le

sens de son bonheur, de sa conservation et de sa responsabi-

lité. Passant ensuite en revue les différents mots usités pour

caractériser les nombreux états d'aliénation, il n'a pas de peine

à montrer leur imperfection. Dans cet ordre d'idées, il propose

une nouvelle terminologie qui puiserait sa précision dans un

radical étymologique toujours le même. Celui qu'il trouve

bien préférable à [ôy}\ est yp7)v, qui a l'avantage de se prêter

admirablement à la formation d'innombrables dérivés tels que :

phrénie, phrénologie, phrénopathie,phrénothérapie,phrénalgie,

hyperphrésie, phrénoplexie, aphrénie, idéophrénie, paraphré-

nie, phrénésie, pour ne citer que les principaux. Toutefois,

l'auteur n'exclut pas les anciennes dénominations. L'usage, à

peine est-il besoin de le faire remarquer, n'a pas consacré le

vocabulaire choisi par le savant aliéniste belge.

L'essai d'une classification des maladies mentales devait

tenter Guislain, puisqu'il est avéré que tout traité de psychia-

trie doit en contenir une. Il reconnaît six types élémentaires,

répondant aux caractères fondamentaux et naturels de l'expres-

sion morbide.

1° Mélancolie. Phrénalgie, exaltation des sentiments avec

tristesse ;

9° Extase. Phrénoplexie, suppression des actes intellec-

tuels avec raideur généralisée ;

3° Manie. Hyperphrénie, exaltation passagère du moral;

BIBLIOGRAPHIE. 113 3

V Folie. Paraphrénie, anomalies de la volonté impulsive;

5° Délire. Idéophrénie, anomalies dans les idées ;

6° Dénence- Aplirénie, déchéance, oblitération des actes

moraux et intellectuels.

Quelque admirateur que l'on soit du talent de Guislain, il

est difficile de prétendre que cette tentative de classification

fût heureuse. L'auteur constate du reste que le plus souvent

l'aliénation mentale est un état composé de différentes formes

élémentaires plus ou moins régulièrement combinées entre

elles; ce sont les morbi mentis ? nixti de Heinroth.

Il n'existe pas de monomanies dans le sens rigoureux du mot. z

A côté de l'altération partielle saillante, on rencontre d'autres

phénomènes annonçant un trouble intellectuel plus général.

Mais en pratique, dit Guislain, la maladie se renfermant dans

un cercle d'idées restreint, une catégorie de sentiments, cons-

tituera une monomanie ou une monophrénie.

Replacé sur le terrain de la clinique, il se montre, comme

toujours, observateur plein de finesse et de tact. Ses descrip-

tions sont vivantes, originales, ses présentations de malades

on ne peut plus heureuses.

Au nombre des tableaux cliniques les plus réussis et les plus

vrais, il faut citer celui du mélancolique à la première période.

« Dans le plus grand nombre des cas, l'état mélancolique

s'annonce par des phénomènes précurseurs et incubateurs qui

se développent lentement. C'est à peine si l'on s'aperçoit de

l'invasion de la maladie. Elle n'offre d'abord rien de spécial ;

c'est le simple malaise qu'on constate souvent au début d'autres

maladies. C'est par une inaptitude, par une répugnance pour

tout travail, par une paresse de l'esprit, qu'elle se manifeste.

Le courage abandonne le malade, les impressions le fatiguent,

tout lui devient une charge. »

C'est cet état de souffrance qui marquerait, du reste, pour

Guislain, le début de la plupart des cas de folie. Une impres-

sion douloureuse retentissant sur le moral devient pour lui,

l'élément fondamental pathogénique des troubles psychiques.

On entre dans la folie bien plutôt par une lésion du sentiment,

de la sensibilité' morale, du sens émotif, que par un trouble de

l'esprit. Cette manière d'interpréter les faits atrouvé et devait

trouver de nombreux adhérents. On a généralement reconnu

la justesse d'appréciation de l'aliéniste belge, et tout au plus

a-t-on pu dire qu'il avait un peu forcé la note.

lit i BIBLIOGRAPHIE.

Si l'on se reporte à l'époque où écrivait Guislain, on ne sera

pas surpris des erreurs et des lacunes nombreuses constatées

au chapitre de l'anatomie pathologique. Par exemple, dans

son étude du ramollissement cérébral, il confond les lésions

propres à la paralysie générale avec celles d'autres affections

cérébrales.

Il avoue du reste, qu'il est loin, malgré de nombreuses et

patientes recherches sur le cadavre, d'avoir pu élucider les

difficiles questions qui se rattachent à la connaissance de la

nature et du siège des maladies mentales.

Dans les leçons consacrées au traitement, sans se déclarer

l'adversaire résolu du no-restraint, et rendant toute justice

aux efforts de Conolly, Guislain conseille l'emploi intelligent

des moyens de coercition, dans certains cas exceptionnels.

En résume, le public médical ne saurait être trop reconnais-

sant au D Ingeli d'avoir fait revivre l'eeuvrc du savant, de

l'observateur pénétrant et de l'homme de ccenr qu'on a pu

appeler loPinel de la Belgique. Dr 1>.iur, Garnier.

INDEX BIBLIOGRAPHIQUE

Du traitement de la névralgie sciatique par l'élongation du nerf ; par

J. NICOL.%S (thèse de Paris, 1881).

De l'élongalion des nerfs ; par FI. Sciicvixg (thèse de Paris, 1881).

Essai sur l'étiologie et la pathogénie de l'élél)hai2liasis des Arabes ; pli

A. CLARAC (thèse de Paris, 1881).

Contribution à l'étude des modifications de la sensibilité du membre

supérieur consécutives aux lésions nerveuses; par G. Mialabct (thèse de

Paris, 1881).

Contribution l'étude de la méningo-encéphalite traumalique ; par E.

IInoUILLCT (thèse de Paris, 1881).

De la curabihté relative de l'épilepsie à la Salpcflriére; par G. l''t : ttn 'KD

(thèse de Paris, 1881).

Etude sur le tabès dorsal spasmodique ; par G. Pcnna : n (thèse de

Paris, 1881). ).

Essai sur les localisations spinales du rhumatisme ; par B. Mettas

(thèse de Paris, 1881).

De la contraction idio-nztscul(ii),e en clinique ; par D. L B13É, (thèse de

Paris, 1881).

Recherches sur les terminaisons nerveuses motrices dans les muscles

striés des insectes ; par H. Vullakes (thèse de Paris, 1881).

Considérations sur les fractures spontanées dans l'alaxie locomotrice ;

par A. Ascecrr (thèse de Paris, 1881).

Du pied-bot consécutif à la paralysie infantile et de son traitement ;

par W. ULCOQ (thèse de Paris, 18S1).

VARIA

LE SABBAT

Du transport des Sorciers au Sabbat.

Les Sorcières se rendent au Sabbat de différentes manières.

Les vnes se mettent vn baston blanc entre les iambes, & puis

piononcent certains mots, & de(lors sont portées par l'air

iufques en l'affemblee des Sorciers. Ou bien elles y vont sur

vn gros mouton noir qui les porte si ville en l'air qu'elles

ne se peuuent recognoiftre. Thieunne Paget r'apportoit que le

Diable s'apparut à elle la première fois en plein mydi en

forme d'vn grand home noir, & que comme elle se fut baillée

à luy, il l'embraua & l'efleua en l'air, & la transporta en la

maifon du pré de Longchamois, où il la conneut charnelle-

ment, & puis la r'apporta au lieu mefme où il l'auoit prife.

Antide Colas difait que le foir que Satan s'apparut à elle en

forme d'vn homme de grande Mâture, ayant sa barbe & ses

habillemens noirs, il la transporta au Sabbat, &qu'aux autres

fois il la venoit prendre sur son lift, & l'emportoit comme vn

vent froid, l'empoignant par la tefte.

Les autres y vont, tantoft sur vn bouc, un taureau ou un

chien, tantoft sur vn cheual volant (Fig. i), & tantoft sur

vn ballet, & fortent le plus fouuent par la cheminée, aucuns

chevauchent un rofeau, une fourche, une quenouille : les

vns se frottent auparavant de certaine greffe compofée de

choufes très abhorentes & dégouttantes, defquelles la plus

ordinaire est greffe d'enfants félonement meurtris; les autres

ne se frottent rien. Les vns y vont nuds comme font la plus

part pour se graiffer, les autres venus; les vns la nuict, les

autres le iour, mais ordinairement la nui3 : .

Il s'en trouve encore qui vont au Sabbat sans bette, n'y

116 VARIA.

ballon. Mais il faut croire aufri que le bafton, ni la befte ne

profite non plus aux Sorciers que la greffe, ains que c'eft le

Démon qui est comme vn vent lequel les porte, n'y plus n'y

moins que l'on voit un tourbillon defraciner les arbres les

plus hauts, et les transporter deux et trois lieues loing de leur

place.

Les Sorciers neantmoins vont quelques fois de pied au

Sabbat, ce qui leur aduient principalement lors que le lieu,

où ils font leur allemblée, n'eft pas gueres esloigné de leur

habitation. « Il y en a qui portent quelque poille, ou autre

vaiueau de cuyure, ou d'argent pour mieux solenniser la

fefte '. »

Le Sabbat se tient ordinairement de iiiiiél.

Satan conuoque les Sorciers de nui6t, à fin qu'ils ne foyent

descouuerts, car pour mefme raifon ils danfent en leurs affem-

blees doz contre doz, & voire qu'ils se mafquent maintenant

pour la pluspart. Toutesfois ces affemblees Diaboliques se font

' Bodin. De la Démonomanie des Sorciers, &c., p. Sa.

Pigez

VARIA. 117

tellement de nuiét, que lors que le coq a chanté, tout vient

à disparoir.

Remigius afferme, au dire de Sorcières iudiciairement con-

uaincües, le temps le plus ydoine & le plus opportun, non

seulement à leurs affemblées nocturnes, ains à tels autres ieux

du Diable, comme phantofmes, apparitions, spectres &bruits

horrifiques, être durant l'heure précédant la my nuict. L'heure

suyvante n'eft autant fauorable ; mais les Sorcières n'ont did

pour quoy. J'adjquterai qu'il n'eft point en la nuill autre

heure en laquelle s'apparoiffent les ombres & reuenants plus

soutient à ceux qui les redoubtent & en ont paour.

Et pour ce qui est du chant du coq, une Sorcière nommée

Latoma, a reuelé que rien ne pouuoitleur être plus fafcheux,

voyre funefte que de ouyr le coq chanter ce pendant qu'elles

se appreflent. Jehan Poumet & sa femme Désirée, tous deux

sorciers, ont diit par deuant le Tribunal que souventes

fois les Diables, approchant l'heure de soy retirer du Sabbat,

crioient : Hôla, defcampez uitement vous aultres ; jà com-

mencent les coqs à chanter. Par quoy se doibt sans doubte

entendre qu'il ne leur est licite continuer leurs ceuures paffé

ce moment. Mais on ne' sçait pour quoy ils abhorent tant la

voix du coq.

Du iour du Sabbat.

« I'ay eftimé autrefois, dit Boguet que le Sabbat se tenoit

seulement la nid du Ieudy : mais depuis que i'ay leu que

quelques vns de la mefme fede ont confeffé, qu'ils s'affem-

bloyent, les vns la nuift d'entre le Lundy & le Mardy, les

autres la nuict d'entre le Vendredy & le Samedy, les autres

la nuict qui precedoit le Ieudy, ou le Dimanche, de là i'ay

conclu qu'il n'y auoit point de iour prefix pour le Sabbat, &

que les Sorciers y vont lors qu'ils y sont mâdez par Satan. »

A ces ailemblées, dit Guaccius2 ont couitume d'aller les

Sorciers dans le silence de la nid, quand règnent les puif-

fances des ténèbres; quelques fois pourtant ils se réunissent à

mydy, à quoy se rapporte l'efcriture : à Dasmon meridiano.

En oultre, ils ont d'habitude des jours préfix, divers suivant

' Boguet, loc. cit., p. ioo.

Loc. cit., p. 81. 1.

118 VARIA.

les divers pays. En Italie ils ont efleu la nuict du Ieudy,

vers le milieu, selon Sébastien Michel. En Lorraine les Sor-

cières s'aflemblent en la nuict du Mercredi & en celle du

Samedi au Dimanche, selon Remigius. D'autres difent que

c'eft la nuit du Mardy.

Du lieu du Sabbat.

Les vns ont remarqué que le lieu du Sabbat est toufiours

notable, & signalé par le moyen de quelques arbres (auffi

soubs un grand noyer), ou croix; mais le lieu des affemblées

varie. Icy, les Sorcières se réuniffent en vn pré qui est sur vn

grand chemin; là, proche de l'eau, en vn lieu qui est du tout

sans chemin. Ailleurs, les Sorciers s'affembloyent soubs un

village, qui est vn lieu affez descouuert, &c., d'où il se void

qu'il ne se faut pas beaucoup arrefter au lieu des Sabbats &

afl'emblées des Sorciers, lesquels aussi n'ont pas beaucoup de

peines de s'y retrouuer, veu que Satan les y conduit & porte.

L'eau est requife au Sabbat, d'autant que pour faire la

grefle, les Sorciers battent ordinairement l'eau auec vne

baguette, mefmement qu'à faute d'eau, ils vrinent dans vn

trou qu'ils font en terre, & puis battent leur vrine.

Du Pacl exprés ou tacite que les Sorciers ont accoui7lillié

de faire avec le Diable.

Les Démons ne font aucune forte de plaifir aux Sorciers

& Magiciens, que ce ne foit en vertu du pait, ou conuentiô

qu'ils ont faiét auec eux. Ceffuy paet se faict en deux façons,

à sçavoir expreffe ou tacite. Le paft est dit tacite, selon

Giillandus, non obftant profeffion expreffe du nouice, quand

iceluy, par crainte de veoir le Diable & de parler à luy, est

repçu en la confrairieparun Sorcier profès, vicaire du Daernon.

Le pact exprès est quand le Diable apparoift en forme cor-

porelle par devant tefmoins & repçoit hommage & fidélité.

Lors n'eft toufjours le Diable veû, mais il est ouï parlant &

promettant honneurs & richeffes au nouice. Cefluy renonce

son Créateur de uive voix ou remet une schédule es mains du

Diable. A tous les I)aas faicts avec le Da=mon sont onze

poiiids communs, comme suit :

VARIA. 1 1 9

Premièrement les Sorciers abjurent le baptefme & leurfoy

chreftienne & se retirent de l'obéitrauce de Dieu, répudient

le patronage de la bien heureuse Vierge Marie que par déri-

fion impie ils appellent la rouffe. Enfuite renient tous les

Sacrements de l'Ecclise & foulent aux pieds la Croix (Fig. 2)

& les ymaiges de la bien heureuse Vierge Marie & d'aultres

saints. lcelles toutes fois ne conculquent en la présence du

Diable, ains en aultre lieu, promettant seulement de le faire

dès que le pourront. Enfuite s'obligent par serment solennel

es main du Prince à luy être perpétuellement ridelles &

soubmis, obéissant à tous ses mandemens. Ensuite, touchant

lesEfcriptures, à sçavoir un grand livre ayant pages noires&

obfcures, preftent serment de valielaige éternel. Jurent en

oultre qu'ils ne retourneront jamais en la foy du Chrift ny

ne garderont les divins commandemens, ains ceux qu'il

plaira au Prince leur décréter; que toufjours viendront sans

retard aux jeux des affemblées nocturnes quand seront de ce

requis, y feront ce que feront les aultres sorciers & sorcières,

affiliant à. leurs sacrifices & communiant à leurs prières &

adorations; qu'ils obferveront leurs voeux au mieulx qu'ils

pourront & s'efforceront d'amener aultrui en la même créance.

En efchange promet le Prince des Doemons, au nouice sorcier,

Fig. 2.

120 VARIA.

d'un visaige soubriant, une perpétuelle félicité & des joies

immenses, toutes les voluptés qu'il désirera en ce monde &

en l'autre des jouissances plus grandes que ymaginer ne se

peut.

Deuxièmement Satan contraint le Sorcier de se rebaptifer

au nom du Diable (Fig. 3) & de prendre un autre nom,

-renonçant le oremier : ainsi feut Cuno de Roure rebadtisé

Barbe de chèvre. Ce qu'il fait comme est vraysemblable, àfin

que le Sorcier de là prenne opinion que son premier Bap-

tefme est du tout effacé & ne lui peut plus servir en rien.

Tiercement le confirme en cette opinion luy gravant de

ses ongles le front pour d'illec tollir le Chrefme & signe

baptifmal (Fig. 4).

Quartement luy faiet renoncer ses parrains & marraines

tant du Baptême que de la Confirmation, luy en affignant de

nouveaux.

Quintement donnent au Diable quelque part & morcel de

leurs veftemens, pour ce que le Diable s'eftudie à s'emparer

d'une part de toutes chofes; des biens spirituels, la foi & le

Baptefme; des corporels, le sang; des naturels, les enfants,

& des terreftres, les veftemens (Fig. 5).

Sixièmement, ils preflent serment au Da ? mon en un cercle

Fig. 3.

VARIA. 121

gravé en terre; peut eftre bien par ce que il veut leur faire

accroire qu'il est le seigneur du Ciel et &de la Teire, veu

que le cercle est le symbole de la Divinité & la Terre

l'Scabeau de Dieu (Fig. 6).

Fig. 4.

Ffg. 5.

122 VARIA.

Septièmement, demandent au Doemoli eftre rayés du livre

de vie & inicripts au livre de mort (Fig. 7). Ainfi eftoient

les noms des Sorciers d'Avignon infcripts en unlivre très noir.

Fig. 6.

Fig. 7.

VARIA. 123

Huitièmement promettent des sacrifices, aucuns jurant

d'occir magiquement par chacun mois, voyre par chaque

quinzaine un petit enfant en luy sugcant le sang (Fig. ,8).

Neufuiemement se rendent tributaires à leur Doemons

patrons de quelque impoft une fois l'an, en rachapt des mo-

leftations dont sont grevés par le dict paet, & n'eft le tribut

valable s'il n'eft de couleur noire.

Dixiemement sont en variable partie du corps, es épaules

soubs les paupières, soubs les leures, soubs les aiffelles, au

fondement pour les hommes, es mamelles ou es parties hon-

teufes pour les femmes, marqués d'un signe auqueldevient la

peau infensible. La forme de ce signe n'eft toujours la

même; tantoft c'eft patte de lieuvre, tantoft de crapaux, ou

d'aragne, de chaton ou de lire. Et ne sont tous ainfi mar-

qués, ains seulement ceulx que le Diable croit inconftants.

Onzièmement promettent ne jamais adorer l'Euchariflie,

injurier la Vierge & les Sainds, brifer & conspuer les sainctes

reliques tant que pourront, ne se servir d'eau benoîte ny de

cierges confacrés, ne jamais faire coilfeffion entière de tous

leurs péchés; en fin garder silence sempiternel sur leur

commerce avec le Diable. (.1 suivre.)

Fià,. 8.

124 VARIA.

ASILES D'ALIÉNÉS DE LA SEINE

En raison de l'importance de l'Assistance publique à Paris, de

la distribution de secours de toute nature, du nombre des établisse-

ments hospitaliers (hospices, hôpitaux, asiles, etc.), il a été néces-

saire de créer une Administration spéciale. En 1849, une loi a

confié i celte administration le service des enfants assistés et des

aliénés. Après la guerre 4870-1871, l'Administration de l'Assistance

publique, qui était très impopulaire, s'est vu enlever le service des

aliénés. Il s'en suit que, aujourd'hui, il existe à Paris deux Admi-

nistrations de l'Assistance publique, l'une siégeant avenue Victoria,

et une autre, limitée au service des aliénés, siégeant aux Tuileries.

Il en résulte, à tous les égards, de nombreux inconvénients. Les

dépenses sont plus considérables et tendent à s'accroître chaque

année; on a créé un nouveau Corps médical, un autre groupe

d'internes, etc. De là, des tiraillements de toute sorte, des fausses

manoeuvres, des pertes de temps. Il serait vivement à désirer que

tous les services relatifs à l'Assistance publique fussent réunis en

un seul groupe. En attendant la réalisation de cette réforme si

désirable, nous croyons utile de donner les conditions relatives à

l'internat des asiles. Depuis 1879, les places d'internes en médecine

des asiles d'aliénés de la Seine sont données au concours. Voici les

extraits des règlements administratifs qui concernent ce concours :

Conditions du concours. Peuvent prendre part au concours

tous les étudiants en médecine âgés de moins de trente ans et

pourvus de douze inscriptions. Les candidats devront se faire ins-

crire à Paris, au siège général de la Préfecture de la Seine

(Bureau du personnel). Chaque candidat devra produire les pièces

ci-après : 1° un acte de naissance; 2° un extrait du casier judi-

ciaire ; 3° un certificat de vaccine; 4° un certificat de bonne vie et

moeurs; 5° un certificat constatant qu'il est pourvu de douze ins-

criptions de médecine.

Epreuves. Les épreuves sont réglées ainsi qu'il suit : Epreuve

d'admissibilité : 1 une épreuve écrite de trois heures sur un sujet

d'anatomie et de physiologie du système nerveux. Cette épreuve

pourra être éliminatoire si le nombre des concurrents dépasse le

triple des places vacantes.

Epreuve définitive : 2° une épreuve orale de quinze minutes sur

un sujet de pathologie interne et de pathologie externe, après un

quart d'heure do préparation. Le maximum des points à

accorder pour chacune de ces épreuves est fixé ainsi qu'il suit :

pour l'épreuve écrite, trente points ; pour l'épreuve orale, vingt

points. Le sujet de l'épreuve écrite est le même pour tous les can-

VARIA. 125

didats. Il est tiré au sort entre trois questions qui sont rédigées et

arrêtées avant l'ouverture delà séance par le jury.

Pour les épreuves orales, la question sortie est la même pour

ceux des candidats qui sont appelés dans la même séance. Elle est

tirée au sort entre trois questions qui sont rédigées et arrêtées par

le jury avant l'ouverture de chaque séance. L'épreuve orale peut

être faite en plusieurs jours, si le nombre des canditats ne permet

pas de la faire subir à tous dans la même séance. Les noms des

candidats qui doivent subir l'épreuve orale sont tirés au sort à

l'ouverture de chaque séance. Le jugement définitif porte sur l'en-

semble des deux épreuves (écrite et orale). Les premiers reçus au

concours sont nommés internes titulaires.

La durée des fonctions des internes titulaires est de trois ans.

La répartition des internes dans les divers services d'aliénés se fait

dans l'ordre de classement établi par le jury d'examen. Ce mode

de répartition assure à presque tous les internes un séjour d'au

moins une année sur trois dans un des services de l'asile Sainte-

Anne, situé dans l'enceinte de Paris. Un interne ne pourra rester

plus de deux ans dans le même service. Tout interne titulaire est

autorisé à passer sa thèse de doctorat aussitôt après sa nomination.

Internes provisoires . 11 est nommé, à la suite du concours et

dans l'ordre de mérite, des internes provisoires chargés de remplacer

les internes titulaires en cas d'absence ou d'empêchement. La durée

des fonctions d'interne provisoire est limitée à une année, à partir

du le, janvier 1882. Les internes provisoires pourront se repré-

senter au concours pour les places d'interne titulaire. L'interne

provisoire qui passe sa thèse renonce implicitement à se repré-

senter, mais il peut rester en fonctions jusqu'à l'expiration de

l'année commencée. L'interne provisoire reçoit le traitement et

les avantages en nature de l'interne titulaire , chaque fois qu'il est

appelé à le remplacer. ·

Dans le courant de l'année 4880, deux concours ont eu lieu pour

des places d'internes dans les asiles d'aliénés de la Seine. Nous re-

produisons les questions écrites et orales données à ce concours,

afin de donner aux futurs concurrents une idée de la nature des

épreuves.

Questions écrites. 10t concours (1880) : Méninges; 20 concours

(1880) : Nerf de la 5° paire (anatomie et physiologie). Les ques-

tions restées dans l'urne étaient : 4 Il concours : Nerf pneumogas-

trique ; Moelle épinière ; 2° concours : Moelle épinière (anato-

mie et physiologie); Artères du cerveau. Circulation cérébrale.

Questions orales. 1er concours (1880) : De l'épilepsie. Plaies des

artères; 2° concours (1880) : Signes et diagnostic de la fièvre ty-

pAotde. Signes et diagnostic de la fracture du col du fémur. Les ques-

tions restées dans l'urne étaient : ll concours : De l'insuffisance

aortique. Diagnostic de la hernie étranglée. Signes et diagnostic

126 VARIA.

de la pneumonie. Corps étrangers de l'oesophage. 21 concours :

Variole. Signes et diagnostic de la fracture de côtes. Pneumonie

franche. Fracture du radius.

Le 3c concours s'est ouvert le 3 décembre 1881.

Le jury du concours était constitué par MM. Bigot, Bourneville,

Dagonet, Danlos, de Lamaestro, Polaillon, A. Voisin. Il vient de se

terminer par la nomination de 111\I. IIeulz, Vétauld, Béraud et

Bouclier, internes titulaires. MM. Gaudry, Poumeau, Manière,

internes provisoires. Les épreuves orales ont pris deux séances ;

les candidats ont eu à traiter les questions suivantes : 1° Signes et

diagnostic de la pleurésie ; signes et diagnostic des fractures de l'ex-

trémité inférieure du radius; 3° Rougeole; Fractures de la rotule.

Les autres questions déposées dans l'urne étaient : 1° Erysipèle

de la face; fracture de la clavicule; - 2° Insuffisance aortique ;

plaies pénétrantes de la poitrine; - 3° Signes et diagnostic delà

péritonite aiguë ; anthrax; 4° névralgie faciale; signes et dia-

gnostic des fractures du rocher. 11 y avait quatre places vacantes ;

vingt et un candidats s'étaient fait inscrire, dix-sept ont répondu à

l'appel, lors de la composition écrite; dix seulement ont lu leur

composition. Si l'on compare les résultats de cette année avec ceux

de l'année dernière, on trouve que les résultats sont notablement

meilleurs. Les épreuves ont été généralement bonnes. Il est donc

probable que, contrairement aux prévisions de la Gazette hebdo-

madaire, ce concours, bien que spécialisé contre notre avis, attirera

proportionnellement autant de candidats que le concours de l'in-

ternat des hôpitaux. Les avantages sont d'ailleurs plus considérables

(800 fr. d'indemnité, le logement, le chauffage, la nourriture) que

ceux qui sont offerts aux internes des hôpitaux.

Les avantages matériels attachés à la situation d'internes dans

les asiles publics d'aliénés de la Seine comportent le logement, le

chauffage, l'éclairage, la nourriture, et un traitement fixe et annuel

de 800 francs.

Médaille d'or de l'internat des asiles. Le rédacteur en chef de

ce journal, qui a demandé en vain que les internes;des asiles fussent

fournis par l'Assistance publique et appartinssent au Corps de l'in-

ternat des hôpitaux, a insisté pour que le concours, dit de la mé-

daille d'or, eût des avantages plus enharmonie avec les besoins

scientifiques de notre époque, et que la médaille d'or et les avan-

tages inhérents, c'est-à-dire une prolongation de service, fussent

remplacés par une bourse de voyage. M. Ilerold, préfet delà Seine,

a fait examiner celte proposition par une Commission spéciale qui

a émis un avis favorable.

FAITS DIVERS

NoMiNvnoNs. M. le Dr Laborde, médecin inspecteur des asiles

publics de la Seine, est nommé inspecteur des maisons de santé, en

remplacement de M. Georges Benccnox, démissionnaire. M. le

Dl RITTI, médecin.inspecteur-adjoint, est nommé inspecteur titulaire.

M. le Dl Gérard Marchant est nommé médecin inspecteur-adjoint.

- 111. le Dr Legras, inspecteur-adjoint, est nommé inspecteur titu-

laire en remplacement de M. le Dr FaUnE, décédé. M. le D P.

Gennmnest nommémédecin inspecteur-adjoint.M. le DT Berthe-

lot a été autorisé à passer dans le service des enfants-assistés en bas

ye.-111. le Dr Marcel BRIAND est nommé médecin inspecteur-adjoint.

Nécrologie. M. le Dr Briquet, membre de l'Académie de mé-

decine, professeur agrégé de la Faculté, médecin honoraire des

hôpitaux, est décédé le vendredi 2o novembre à l'age de 80 ans.

On lui doit un grand nombre de travaux scientifiques parmi lesquels

nous citerons son Traité clinique et thérapeutique de l'hystérie, 48,ï0.

M. le Dr LiNAS et M. le Dl BRIERRE de Boisuont sont morts, le

premier en , le second à la fin de décembre. Nous leur

consacrerons un article nécrologique dans le prochain numéro.

Asiles DE n Seine. Asile, de Vaueluse. M. le Dr Boudrie, méde-

cin adjoint de l'asile devaucluse, a été promu à la deuxième classe

de son grade. Il a été créé à l'asile de Vaucluise une place de

médecin adjoint ; M. le Dr C\MUSET est nommé à ce poste.

Par arrêté du ministre de l'instruction publique,M. 10*1)r BILLOD,

directeur médecin en chef honoraire des asiles d'aliénés de la Seine,

a été chargé d'une mission en Italie, pour y étudier l'organisation

de l'enseignement des maladies nerveuses et mentales. M. le ministre

ne pouvait faire choix d'un homme plus compétent.

Asile de TOULOUSE. M. le Dl Bouteille, médecin en chef à

l'asile de nlarseille, est nommé directeur de l'asile de Toulouse, en

remplacement de M. Marchant, décédé.

Asile DE MARSEILLE. M. Pons, médecin en chef de l'asile de

Bailleul, est nommé médecin en chef à l'asile de Marseille.

Asile de Bailleul. M. B»LC, médecin en chef de l'asile de la

Cellette, est nommé médecin en chef de l'asile do Bailleul, en rem-

placement de M. Ponts.

Prix. P. Bernard de Civrieux, 2,000 fr.- L'Académie de médecine

a proposé pour sujet de ce prix : Recherches sur les causes de l'ataxic

locomotrice. PrixFalret, I,;i00 fr. Question -.Dcsvertiges avec délire.

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE

Apolinvrio Y Macus. Lèpre, sclérodermie et asplcyxie locale des

extrémités, broch. in-8" de 60 pages, 1881, Montpettier, Boehm et fils.

SERCI. Teoi-iafisioloqzctt delta l'ercezione, L vol. in-S" de 330 pages,

1881, il Milan, Dumolard.

Brousse (A.). Réflexions sur un cas de syphilis cérébrale (Hémiplégie

gauche, à forme intermittente). Broch. in-8^ de 21 pages, 1881. Mont-

pellier, Boehm et fils.

PnEvosT (J.-L ). Contribution à l'étude des phénomènes nommés réflexes

tendineux. Broch. iu-S^ de 42 pages, avec une pl., 1881, Genève, II. Georg.

Prévost (J. L.) et Taller (A.). Nouvelles expériences sur les phé-

nonzèzzes nommes réflexes tendineux. Brochure in-8- de 6 pages, 1881,

Genève, II. Georg.

Riva (L.). La température nella paralisi général clegli aliezzati.

Broch. 111-8- de 8 pages, Milan.

COUL61ULT (L.). Des lésions de la corne d'Ammon dans l'epmlepsie.

Une broch. in-8" de 70 pages. Prix : 2 fr. Paris, 1881, au bureau des

Archives de Neurologie.

R[DEL-SAiLHRD (G.). DeeacAextepa ? t.t/dem ! tMe(myxoedemedes

autem anglais). Broch. in-8° de 80 pages, avec clew planches phot. Prix :

2 fr. 50, Paris, 1881, au bureau des Archives de Neurologie.

Gowens (W. R.). Du diagnostic des maladies de la moelle épinière,

traduit de l'anglais par 0. Jexwxcs. Broch. in-S" de 108 pages, avec

14 pl. dans le texte et une en chromo-lithographie. lliix' : 3 fr. Paris, 1881,

Bertttier.

Cmncor (J.-M.). Ueber die <ocaHM<MHde)'Se/t ! )'K)id7 ! M<;/tettN : a)7M-

Krankheiten. Deuxième fascicule des Leçons professées il la Faculté du

médecine de Paris, recueillies par Bournevillg et Bmssauo, traduction

allemande de Bertiiold Fetzer, ornée de 39 ng. 1881, verla von Adolf

Bonz et C-, Stuttgardt.

GOWERS (W.-U) Epilepsy and otlaer chronic convulsives cliseases, theie-

causes, symptoms et treatment. Un vol. in 8° de 309 pages, cartonné, 1881,

J. A. Churchill, New-Burtington street, London.

SEGUIN (E.-C.) A second contribution to llee sii4cly of localised cérébral

lésions. Broch. in-8" de 43 pages, avec il figures dans le texte, juillet

1881. 182, ritlli avenue a New-lotlc, PLitiiain's.

SEGLI-I (E.-C.). Importance of the Ear/ récognition ouf npilepsy. Broch.

de 26 pages. Printmg and loolibindute C-, 201-213, rabl tweillli street,

New-York.

Le rédacteur-gérant, Ijoubm : vii.i.e.

Lmeui, Ui. ltnma, mp. -162.

Vol. III. Mars 1882. Ne 8

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE

CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE L'HYPNOTISME CHEZ LES

HYSTÉRIQUES; DU PHÉNOMÈNE DE L'HYPEREXCITABILITÉ

NEURO-MUSCULAIRE (Suite) ' ;

Par MM. CHARCOT et PeuL RICIIER.

III. DES DIFFÉRENTS DEGRÉS DE L'lIIPEHE\CITAI31L1T1;

KEURO-MUSCULAIRE. VARIATIONS DU PHÉNOMÈNE.

Il ne faudrait pas croire que toutes les hystériques

hypnotisées soient susceptibles de présenter à un égal

degré de développement tous les phénomènes que

nous venons de décrire comme se rattachant à cet état

nerveux spécial désigné sous le nom d'hyperexcita-

bilité neuro-musculaire.

Il faut s'attendre ici à de nombreuses variations in-

dividuelles que pour la plupart il est possible de

rattacher au type décrit dont elles ne sont que des

atténuations plus ou moins accusées. Cependant on se

' Voir le il" 5, p. 32, 11- 6, 1). 173.

9

130 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

tromperait également si l'on s'imaginait que les

sujets sont rares, sur lesquels est possible de répéter

toutes les expériences rapportées plus haut. Il ne

s'agit pas là de faits exceptionnels. Si nous en croyons

notre expérience personnelle, la proportion serait de

1 sur 4 ou 5 au plus. Il est vrai que les malades

soumises à notre observation à la Salpêtrière, sont

toutes des sujets atteints de la névrose hystérique

dans sa forme la plus accentuée, Xhysteria major.

Après avoir montré les principaux caractères du

phénomène dans son plus haut degré de développe-

ment, il nous paraît utile d'insister un peu sur les

variations qu'il peut subir soit d'une malade à l'autre,

soit chez une même malade, et d'en fournir quelques

exemples.

A. Des différents degrés de l'lzJperexcitabilité 2zaîii-o-

musculaire chez une même malade. Influence de

la répétition des expériences sur son développement.

Chez une même malade, le degré d'hyperexcitabilité

neuro-musculaire, pendant la léthargie hypnotique,

peut varier dans des circonstances diverses,

a) Il varie suivant les régions du corps. Dans

les cas réguliers, ceux qu'on peut appeler les

cas types, le phénomène existe à un égal degré sur

tous les muscles, aussi bien aux membres qu'à la face

(il n'est pas question ici de la différence du résultat

obtenu : contracture aux membres, contraction à la

face). Mais il arrive fréquemment qu'n ce point de vue

il existe des différences entre les deux côtés du corps,

étude DE L·H1P\O'l'IS\IE CIIEZ les hystériques. 131

entre les membres inférieurs, les membres supérieurs

et la face, l'hyperexcitabilité pouvant se montrer en

un point et faire défaut en un autre, ou bien exister

ici et la, mais à un degré différent.

b) L'hyperexcitabilité varie également chez une

même malade d'un moment à l'autre. Il est des jours

où, sous l'influencedecausesdiflicilementappréciables,

mais dans lesquelles on peut faire entrer les émotions

vives, la fatigue physique, l'imminence des attaques,

etc., telle malade présente une exaltation ou une atté-

nuation du phénomène.

c) Enfin par la répétition des expériences, ce phé-

nomène est susceptible d'acquérir un plus haut degré

de précision et d'intensité. Il s'agit là, ainsi que nous

le verrons plus loin, de phénomènes d'ordre réflexe

dont l'habitude facilite le développement et qu'elle

perfectionne. Nous avons pu constater le fait bien des

fois. Il est des sujets qui présentent presque d'emblée,

dès les premières séances d'hypnotisme, le phénomène

de l'hyperexcitabilité neuro-musculaire complètement

développé. D'autres, et c'est le plus grand nombre,

mettent un temps plus ou moins long à l'acquérir. A

un premier degré, il consiste en une tendance des

réflexes tendineux à provoquer une contracture plus

ou moins généralisée. Puis la localisation de la con-

tracture s'établit; il est possible d'obtenir la contrac-

ture partielle des différents muscles des membres, et

les différents procédés à l'aide desquels on la produit

peuvent être classés ainsi qu'il suit, d'après le mode

d'apparition de leur eflicacité : c'est l'excitation des

tendons qui réussit d'abord, puis l'excitation des

masses musculaires, en dernier lieu l'excitation des

132 ^ PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

troncs nerveux. Enfin ce n'est que dans les cas les

plus développés que l'hyperexcitabilité neuro-muscu-

laire se montre à la face. Nous nous contenterons de

rapporter les deux observations suivantes :

Dans les récentes expériences que nous avons faites à ce

sujet, il nous a été donné do saisir en quelque sorte le mode de

développement de l'hyperexcitabilité neuro-musculaire chez

une de nos malades que nous soumettions pour la première

fois aux pratiques do l'hypnotisme.

Janvier 1881. -Caill..., 20 ans, hystéro-épileptique. hémi-

anesthésique à gauche et acliromatopsique du même côté, n'a

pas encore été endormie par nous ; elle l'aurait été par d'autres,

mais peu souvent, et, dans tous les cas, les expériences

d'hyperexcitabilité neuro-musculaire n'ont jamais été tentées

sur elle.

Pendant la veille, les réflexes tendineux sont exagérés aux

genoux, mais sans irradiation aux membres supérieurs, ils exis-

tent aux coudes ; aux poignets ils se montrent à peine.

Par la fixité du regard, la malade se trouve promptement

endormie. Aussitôt nous constatons que les réflexes tendineux du

poignet qui, tout à l'heure, existaient à peine, sont maintenant

manifestement exagérés. Nous recherchons alors si la malaxation

des masses musculaires de l'avant-bras peut être suivie de

contracture, mais le résultat est complètement négatif. Nous

revenons alors à l'excitation des tendons par percussion. Nous

constatons de nouveau que les réflexes tendineux sont exagérés ;

le mouvement qui suit le choc est très étendu, il est brusque

et rapide, il n'y a aucune tendance à la contracture. Mais

bientôt, en répétant les chocs sur le tendon, nous voyons la

contracture se développer ; il suffit d'une dizaine de coups portés

successivement sur le tendon pour immobiliser le membre

dans une attitude forcée de contracture permanente. Cette

contracture se détruit facilement par la friction des muscles

antagonistes.

Nous tentons alors de nouveau de produire la contracture

par la malaxation des muscles, et cette fois, non sans quelque

surprise, nous réussissons pleinement. Une fois réveillée par le

procédé habituel (souille sur le visage), Caill.... conserve les ré-

llexes tendineux du poignet plus accusés qu'avant les expériences.

ÉTUDE DE L'HYPNOTISME CHEZ LES HYSTÉRIQUES. 133

Ne semble-t-il pas que d'après ce que nous venons de rap-

porter, l'on puisse admettre dans l'hyperexcitabilité musculaire,

les trois degrés suivants :

1er degré : simple exaltation des réflexes tendineux; 3'

degré : le réflexe tendineux donne lieu à la contracture

contracture réflexe par excitation tendineuse; 3° degré :

contracture réflexe par excitation directe des masses mus-

culaires.

Dans une seconde expérience faite le lendemain, nous cons-

tatons une aptitude plus grande des muscles à la contracture,

se traduisant même pendant la veille. Pendant l'hypnotisme

l'byperexcitabilité, bien que plus développée, présente quelques

irrégularités.

Caill... a conservé les réflexes tendineux du poignet assez

exaltés surtout du côté gauche. Le réflexe patellaire est tou-

jours très exagéré. '

Le choc répété sur les tendons de la face antérieure du poi-

gnet gauche amène bientôt la contrature, ce qui n'a pas lieu

pour le côté droit. La malade est toujours en état de veille et

cette expérience est faite presqu'à son insu, pendant que son

attention est attirée ailleurs. Cette contracture disparait comme

celle du sommeil par la friction des antagonistes.

Caill.... est endormie rapidement par la fixité du regard.

Sur le bras gauche, contracture facile par l'excitation des tendons,

par la malaxation musculaire et par l'excitation des nerfs. La

pression du nerf cubital en arrière de l'épitroclilée contracture

la main dans l'attitude régulière de la griffe cubitale. C'est la

première fois que cette expérience est tentée chez cette malade.

Sur le bras droit, l'excitation des tendons et des masses

musculaires nous donne des résultats semblables, mais nous

constatons que l'excitation du nerf cubital au lieu d'élection

n'est point suivie de la contracture habituelle. A chaque frois-

sement du nerf cubital répond un léger mouvement dans les

doigts, mais aucune contraction nettement localisée, aucune

ébauche de contracture.

Sur le bras gauche au contraire la griffe cubitale s'obtient

très facilement. ainsi que nous l'avons déjà dit.

Le griffe cubita'e étant produite à gauche, nous plaçons un

aimant près de l'avant-bras droit, dans le but de transférer la

griffe de ce côté. Dix minutes et plus s.e passent sans qu'aucun

transfert ait lieu. Le bras droit garde sa flaccidité, et l'on note,

13 'e PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

par contre, que la contracture de gauche, au lieu de se détendre

s'est accusée davantage. La griffe cubitale qui existait déjà

s'est exagérée.

Dans ce cas, il faut admettre que le nerf cubital droit était

inexcitable du moins par les procédés habituels. L'hyperexci-

tabilité neuro-musculaire ne s'est développée à la face, chez

cette malade que plusieurs mois après les premières expériences

que nous venons de rapporter. Les deux figures 3 et le de la

Planche XII (t. II) ont été prises d'après elle.

Entre autres détails intéressants, l'observation

suivante nous montre également une différence entre

les deux côtés du corps au point de vue de l'hyperex-

citabilité :

E. P..., livstéro-épiloptiqtip, anesthésique totale, ovarienne,

etc., présente cette particularité dans le mode de production

du sommeil hypnotique, que la simple fixité du regard pro-

duit chez elle ce que l'on obtient plus fréquemment par

l'action d'une lumière très intense. Elle entre d'abord dans

l'état cataleptique qui persiste indéfiniment, et alors le

sommeil ne peut être obtenu qu'à la condition do lui former

les yeux. La catalepsie cesse aussitôt et la malade devient

léthargique.

L'hyperexcitabilité neuro-musculaire caractéristique de la

léthargie présentait, le 20 janvier 1881, les particularités sui-

vantes :

1° La contracture demande pour se produire une malaxation

assez énergique des masses musculaires.

2° Elle se montre avec plus do facilité à la suite de l'excita-

tion tendineuse. Mais il faut alors répéter les chocs, et l'on voit

la contracture s'accentuer graduellement. La simple pression

sur le tendon est impuissante.

3° L'hyperexcitabilité est plus développée sur le bras gauche

que sur le bras droit. La différence entre les deux côtés est assez

notable. Il faut insister beaucoup plus pour obtenir a droite

les mêmes résultats qu'à gauche. On y arrive cependant.

4° Lorsque l'excitation est insuffisante, on n'obtient qu'une

contraction plus ou moins prolongée ou bien une contracture

qui se résout d'elle-même bientôt.

5° La contracture une fois bien établie persiste après le réveil.

ÉTUDE DE L'HYPNOTISME CHEZ LES HYSTÉRIQUES. 135

B. L'hyperexcitabilité neuro-musculaire peut cesser

partiellement dans une partie du corps, ou inversement

peut y être provoquée.

Chez une de nos malades qui présente à un haut

degré l'hyperexcitabilité neuro-inuscula ire, nous avons

vu plusieurs fois dans le cours de nos expériences, cet

état musculaire spécial disparaître tout d'un coup pour

faire place à un état paralytique localisé à un seul

côté du corps et qui persistait au réveil. D'ailleurs nous

avons toujours pu, à la suite de quelques manoeuvres,

ramener la motilité, et, au bout de quelques instants,

rendre à la malade toute la liberté de ses mouvements.

Voici le récit d'un de ces accidents : .

23 clécemhre 1880. - Pendant le cours d'expériences assez

prolongées sur 1'liyperexcitabilité des muscles et des nerfs du

bras droit, tout d'un coup, sans cause apparente, toute trace

d'hvperexcitabilité disparait dans ce membre et à la fois dans

tout le côté droit du corps aussi bien à la face qu'aux membres.

Le bras droit retombe inerte le long du corps, Witt ? qui est

assise s'affaisse de ce côté, les réflexes tendineux existent néan-

moins. Tout le côté gauche a conservé l'hyperexcitabilité neuro-

musculaire comme auparavant. Si l'on soulève les paupières,

la catalepsie est facile à gauche, mais à droite elle n'a plus lieu.

On réveille la malade par les procédés ordinaires, l'hémi-

plégie persiste ; son bras droit est inerte; elle peut à peine se

tenir debout, elle est incapable de marcher, sa jambe droite lui

refuse tout service.

De plus Witt... est aphasique. Elle est comme hébétée, elle

regarde son bras paralysé qu'elle cherche à soulever avec l'au-

tre main, mais sans manifester le mécontentement qu'un réveil

dans un semblable état semblerait devoir lui causer.

Elle fait quelques résistances lorsque nous cherchons à l'en-

dormir de nouveau. On y parvient cependant sans dilficulté

par la pression des globes oculaires. Le même état hémi-

paralytique persiste. Au bout de quelques instants, il se pro-

136 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

duit spontanément un tremblement léger dans la mâchoire in-

férieure.

Ce tremblement augmente peu à peu, puis gagne le bras

droit, puis la jambe droite. Les membres du côté gauche con-

servent leur immobilité, jusqu'au moment où, gagnant en

amplitude, les oscillations du tremblement se transforment en

violentes secousses qui soulèvent tout le corps.

Ces secousses sont bientôt suivies d'une sorte de stertor qui

dure qnelques minutes. La paralysie du côté droit n'a pas dis-

paru. Le sommeil persiste avec les mêmes caractères qu'avant

cette petite crise.

Croyant voir une indication dans ce qui venait de se passer,

nous essayons de provoquer une attaque. Une excitation vive

portée sur les zones hystérogènes de l'aisselle n'amène qu'une

violente secousse généralisée. Cette manoeuvre, répétée plu-

sieurs fois, est bientôt suivie du réveil. Et cette fois Witt...

a recouvré en même temps que la connaissance le mouvement

et la parole. Elle n'a qu'un souvenir confus de ce qui s'estpassé,

et s'étonne d'une sensation de fatigue qu'elle éprouve dans tout

le côté droit.

Nous rapprocherons du fait qui précède, l'expé-

rience suivante dans laquelle, pendant l'état somnam-

bulique, alors que, suivant la règle, l'hyperexcitabilité

neuro-musculaire avait entièrement disparu, cette

disposition musculaire spéciale a pu être rappelée dans

un seul membre :

26 janvier 1880. B... est plongée par la friction sur le sommet

de la tête dans le sommeil sans hyperexcitabilité neuro-mus-

culaire ou état somnambulique. L'excitation mécanique directe

ou indirecte des muscles n'amène plus leur contracture. Les

réflexes tendineux n'en sont pas moins conservés. La résolution

musculaire est parfaite. La catalepsie n'est plus possible par

l'ouverture des yeux. L'état de la motilité est le même par tout

le corps.

Nous recherchons l'état de la contractilité électrique que nous

trouvons normale. Mais au bout de quelques instants de faradi-

sation, nous nous apercevons qae le membre sur lequel nous

opérons est redevenu hyperexcitable. En effet, l'excitation

ÉTUDE DE L HYPNOTISME CHEZ LES HYSTERIQUES. 137

mécanique des nerfs et des muscles amène la contracture de la

façon que l'on sait, mais cela au bras gauche seulement. Tout

le reste du corps n'offre pas trace d'hyper excitabilité.

Lorsque les paupières sont ouvertes, le bras gauche devient

cataleptique, ce qui n'a lieu en aucune façon pour le bras droit.

C. Variations individuelles de l'hyperexcitabilité

neuro-musculaire.

D'une malade à l'autre, l'hyperexcitabilité neuro-

musculaire peut présenter de grandes différences au

double point de vue de la précision et du degré de

développement de ses caractères. Les différents degrés

que l'on observe successivement chez une même

malade, lorsque le phénomène est en voie de déve-

loppement, peuvent se montrer isolément chez des

malades différentes, et l'on conçoit fort bien que,

suivant les dispositions spéciales du sujet, le phéno-

mène de l'hyperexcitabilité neuro-musculaire puisse

s'arrêter aux diverses phases de son évolution. Nous

rapporterons ici deux observations dans lesquelles les

caractères du sommeil hypnotique se sont montrés peu

développés :

L. D ? seize ans, hystéro-épileptique, a de grandes attaques

convulsives avec arc de cercle et attitudes passionnelles, a en

outre des accès de somnambulismenaturel. Ovarienne à gaucho

principalement.

Entrée le 6 février 1881, à l'hospice où elle n'a fait qu'un

très court séjour.

9 février 1881. L'anesthésic se trouve réduite à une plaque

de la largeur des deux mains environ et qui occupe le sommet

de la tête, plus étendue à gauche qu'a droite; en avant elle

coupe le front obliquement, descendant jusqu'au niveau du

sourcil gauche. Il n'y a pas d'achromatopsie. Les réflexes ten-

138 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

dineux sont exagérés aux genoux; ils sont fort peu accusés

aux poignets et aux coudes, un peu plus cependant aux membres

du côté gauche.

La malade est assise sur une chaise et on la prie de fixer

avec persistance la tète brillante d'une grosse épingle que l'on

maintient à peu de distance de ses yeux et un peu en haut.

Au bout de cinq minutes environ, on remarque quelques

mouvements cloniques dans les muscles de la face, surtout du

côté gauche , les conjonctives sont rouges, les sourcils se con-

tractent. La fixité du regard augmente, le clignotement dis-

parait. A ce moment les membres sont insensibles à la piqûre;

lorsqu'on les soulève, ils retombent inertes ; il n'y a pas de

catalepsie. Les réflexes tendineux aux deux bras sont manifeste-

ment exagérés. Le même état persiste un quart d'heure environ

avec quelques frémissements de tout le corps et des muscles de

la face de temps en temps; l'objet brillant est toujours main-

tenu devant les regards de la malade.

Puis tout d'un coup, pendant que l'on continue à piquer

les membres du sujet, on s'aperçoit que la sensibilité a reparu

partout; chaque piqûre donne lieu à un mouvement réflexe,

indice que l'impression est perçue par le centre nerveux. Alors

on retire l'objet qui sert à maintenir la fixité du regard, pensant

que l'expérience était terminée. Mais aussitôt les yeux se

ferment et la malade tombe dans un état de résolution tel que

nous n'en avons jamais observé de semblable. La malade est

endormie. Tout son corps s'affaisse sur lui-même au point

qu'elle glisse sur sa chaise, et qu'on a peine à l'y maintenir

assise. La tête retombe lourdement sur la poitrine, oscillant

d'un côté sur l'autre suivant qu'on cherche à la redresser.

Dans cet état les réflexes tendineux sont fort exagérés. Le

choc sur le tendon rotulien donne lieu à un soubresaut de tout

le corps ; aux coudes et aux poignets le choc tendineux est

suivi d'un mouvement bien plus étendu que pendant la veille.

En somme, nous trouvons ici exagération et généralisation des

réflexes tendineux, mais nulle tendance à la contracture. La

contracture n'est produite ni par la percussion répétée des

tendons, ni parla malaxation des masses musculaires.

La sensibilité persiste, et le pincement ainsi qui la piqûre

donnent naissance à des mouvements réflexes ; la malade retire

son membre, et la douleur se peint sur sa physionomie, qui

autrement est impassible et sans expression.

ÉTUDE DE L'HYPNOTISME CHEZ LES HYSTÉRIQUES. 139

L'ouverture des yeux n'a pas lieu sans quelque difficulté, à

cause du spasme des paupières et de la convulsion des globes

oculaires. On y arrive cependant, mais le regard ne parait pas

bien fixe et au bout de pou d'instants les paupières se ferment

d'elles-mêmes. Pendant que les yeux sont ouverts, l'état mus-

' culaire ne change pas, pas de catalepsie possible, même

état des réflexes, même résolution,

Bientôt la malade est prise de secousses des bras, analogues

à celles du début de son attaque. La crise parait imminente.

Nous nous empressons alors de la réveiller par le souffle sur

le visage et sur les yeux. Il faut insister un peu pour y par-

venir.

La malade se dit très fatiguée; elle ne peut se tenir debout,

ses jambes refusent de la porter. Elle a une tendance invincible

au sommeil et se rendort d'elle-même. On la fait alors porter

à son lit où elle no tarde pas à s'éveiller spontanément.

Nous la revoyons environ une demi-heure après. Elle est

parfaitement réveillée, et ne ressent d'autre malaise qu'une

grande fatigue. Nous constatons que les réflexes tendineux sont

bien plus exagérés qu'avant l'expérience, tout en l'étant à un

degré moindre que pendant le sommeil.

Cette expérience d'hypnotisme est la seule qui ait

été été faite sur cette malade. C'était la première fois

qu'elle y était soumise, et nous ne pûmes la répéter,

car elle sortit de l'hospice le lendemain même.

Ici, des phénomènes musculaires qui servent à ca-

ractériser l'hypnotisme, un seul persiste, c'est i'e-xa-

gération des réflexes tendineux qui se montre d'une

façon très manifeste. Il n'y a aucune aptitude des

muscles à la contracture quand les yeux sont fermés,

et lorsqu'ils sont ouverts, aucune tendance à l'état ca-

taleptique. Enfin la résolution musculaire s'est mon-

trée là à un degré peu ordinaire, et la fatigue qui a

suivi l'expérience est un fait tout à fait exceptionnel.

Dans l'observation suivante à l'exagération des ré-

flexes tendineux s'ajoute une certaine tendance à la

140 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

contracture, bien qu'aucune localisation précise soit

possible. Ce n'est en somme qu'une sorte d'état rudi-

mentaire de l'hyperexcitabilité neuro-musculaire, et

l'état cataleptique qui suit l'ouverture des yeux ne

peut être provoqué.

18 février 181.-V...,Iystéro-épileptiquebémianestUésique

à gauche, analgésique du côté droit. Pas d'achromatopsie.

Exagération des réflexes tendineux aux membres supérieurs

comme aux membres inférieurs, plus accusés à gauche qu'à

droite. A la jambe gauche la trépidation épileptoide peut être

provoquée par le procédé ordinaire ( soulèvement de la pointe

du pied). ).

Cette malade n'a jamais été endormie. Nous la prions de

fixer du regard un objet brillant et rapproché. Au bout de peu

d'instants elle pousse quelques soupirs, puis bientôt les yeux

se ferment, la tête se renverse, elle est endormie.

La résolution musculaire est complète. Les réflexes tendineux

ont subi une exaltation notable. Le mouvement réflexe est plus

étendu.

La malaxation des masses musculaires ne détermine aucune

contracture. Il en est de même aux poignets pour l'excitation

mécanique portée sur les tendons, percussion, friction ou

malaxation. Mais le choc rotulien donne un résultat différent.

A la suite de plusieurs coups portés successivement la jambe

se roidit dans l'extension et la contracture envahit en même

temps les quatre membres. Cette contracture cède facilement

par la friction.

Le spasme des paupières empêche l'ouverture des yeux, les

pupilles se cachent convulsivement sous la paupière supérieure

et ne se laissent pas découvrir. La catalepsie n'est pas possible.

- Le réveil est facilement obtenupar le souffle sur le visage.

Les deux exemples qui précèdent nous montrent le

sommeil hypnotique à un degré fort incomplet, sorte

d'état rudimentaire. Les phénomènes psychiques sont

nuls, l'état cataleptique n'existe pas, pas plus que

l'aptitude des muscles à la contracture localisée. En

DE LA CACHEXIE P.1CIITDEI2\IIqi;R. 1 li (

outre de la somniatiou et de la perte de connaissance,

l'exaltation des réflexes tendineux, simple ou accom-

pagnée de tendance à la contracture, est le lien qui

rattache ces faits incomplets à l'état de léthargie hyp-

notique entièrement développé dont nous avons donné

la description. Mais, entre ces deux extrêmes, l'on

conçoit qu'il existe de nombreux degrés intermédiaires

qui constituent comme autant de variétés. (A suivre.)

PATHOLOGIE NERVEUSE

DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE. (Mvxoedème des auteurs

anglais). OBSERVATION NOUVELLE AVEC ALIÉNATION

MENTALE TRANSITOIRE ' ; 1;

Par la D H. BIAISE, chef de clinique u la Faculté de médecine

de Montpellier.

Nous avons pensé qu'il était utile de donner un

compte rendu complet des dernières observations

publiées par les auteurs anglais et américains, ces

observations n'étant pas relatées dans les recueils

français. Comme on le voit, le nombre des cas de

myxoedème dont la description a été faite est encore

assez restreint. Bien que l'on puisse citer déjà une

vingtaine d'observations, les documents sont encore

z Voir le n 7, p. 60.

\'l-2 PATHOLOGIE NERVEUSE.

insufnsants et ne permettent pas de donner une des-

cription complète de la maladie. Aussi avons-nous

pensé qu'il ne serait pas sans intérêt de publier le cas

suivant qu'il nous est donné d'observer dans le service

de notre excellent maître, M. le professeur Grasset.

Observation (personnelle).

Honorine A..., lingère, âgée de trente-quatre ans et née à

Montpellier, entre à la clinique des vieillards (service de

M. Grasset), au mois de novembre 1880.

Son père a joui d'une bonne santé habituelle ; sur ses vieux

jours, il est devenu asthmatique (catarrhe chronique et emphy-

sème) et a succombé à l'âge de soixante-cinq ans. Sa mère est

morte à soixante-sept ans des suites d'une attaque. Elle n'a

qu'un frère, âge de quarante-quatre ans, qui s'est toujours bien

porté.

A..., d'un tempérament lymphatique, a présenté dans sou

enfance des engorgements ganglionnaires au cou et des croûtes

dans les cheveux. Réglée à onze ans, sa menstruation était ré-

gulière, mais abondante. Elle perdait d'habitude pendant cinq

à six jours; souvent même, la période menstruelle durait

jusqu'à huit jours. Ses règles ne s'accompagnaient pas de trou-

bles nerveux, et, pendant leur évolution, elle se livrait sans

inconvénient à ses occupations journalières. Elle n'a jamais eu

d'enfant.

Elle prétend n'avoir commis aucun excès; cependant, elle

passait, dans son quartier, pour une fille déréglée et commet-

tant de fréquents excès vénériens. Elle ne présente d'ailleurs

aucune trace de syphilis. Son caractère, très turbulent jusque

vers l'âge de douze ans, est devenu doux et facile à partir de

cette époque. D'autre part, elle a mené jusqu'à l'âge adulte une

vie très active. Son intelligence paraissait vive et sa parole était

rapide, à tel point que souvent on ne saisissait pas ce qu'elle

disait.

Notre malade, qui n'a jamais quitté Montpellier, a toujours

eu un embompoint extraordinaire depuis l'établissement de ses

menstrues. A l'âge de treize ans, on lui en donnait dix-huit.

Mais ce n'est guère que vers l'âge do vingt-sept à vingt-huit

DE LA CACHEXIE l' 1CH11)Lk\ll, ! lili, 1 W

ans qu'elle a commencé à prendre les proportions démesurées

que nous lui voyons aujourd'hui. Cependant, son affection

parait avoir débuté vers l'âge de vingt et un ans. A cette

époque, elle a eu une éruption de petits boutons, gros comme

une tête d'épingle, limitée aux membres supérieurs, et qui dura

environ cinq à six jours. Deux ou trois mois après cette érup-

tion, ses cheveux commencèrent à tomber : tous les matins, le

peigne en enlevait des quantités très notables. Cette chute se

prolongea pendant neuf mois environ, s'accompagnant de celle

des cils et des poils dans toutes les régions qui en sont pour-

vues. En même temps, elle souffrait de fortes douleurs au

niveau des pommettes et de gastralgie avec vomissements fré-

quents de matières alimentaires survenant assez loin des repas.

A partir de ce moment, elle eut de la dysménorrhée et resta

quatre mois sans être réglée. Mais bientôt, sous l'influence d'un

traitement tonique et ferrugineux (vin de quinquina' pilules

de Blaud, bains ferrugineux, nourriture substantielle, lait

d'ànesse pendantun mois), l'état général ne tarda pas à s'amen-

der. Le teint redevint frais, coloré, et, malgré quelques dou-

leurs gastralgiques, Honorine se trouvait dans un état de santé

relativement bon, se livrant sans difficulté à ses occupations

journalières. Elle garda sensiblement les mêmes dimensions et

n'éprouva rien de bien particulier jusque vers l'âge de vingt-

sept ans. Mais alors les différentes parties de son corps, ou

plutôt de ses téguments, se mirent à grossir progressivement,

en même temps qu'elle éprouvait des sensations bizarres, du

côté de la peau, sensations douloureuses, de brûlure, de piqûres

d'épingle, de froid, d'eau qui lui courait dans les jambes, de

torsion et de pression des chairs. En même temps aussi, elle

avait des maux de tête fréquents avec douleurs siégeant parti-

culièrement au niveau des os malaires. Son caractère se modi-

lia, devint inquiet. La parole devint lente, grasse, et revêtit

bientôt un timbre spécial. Cette modification dans la parole

s'accompagnait d'une certaine lenteur dans les idées, de fatigue

intellectuelle rapide.

Les sens spéciaux eux-mêmes étaient compris dans ce tableau

morbide. Le goût d'aboid, et presque aussitôt l'odorat et l'ouïe,

présentèrent des altérations fonctionnelles. Ces perversions

sensorielles, d'abord peu accentuées, arrivèrent à leur maxi-

mum trois mois environ avant son entrée à l'asile, qui eutlieu

fin jan\ier 1878. Elle trouvait mauvais goût et mauvaise odeur

1 I 1 PATHOLOGIE NERVEUSE.

aux aliments les mieux préparés. Elle entendait des propos

injurieux, des propos obscènes qui s'adressaient à elle et que

prononçaient les personnes qui l'entouraient. Dans les pre-

miers temps, son jugement suffisait à rectifier l'erreur de ses

sens ; elle comprenait que ces personnes étaient incapables

de proférer sur son compte de pareils propos, et elle arrivait,

mais non sans peine, à se persuader qu'elle était le jouet d'il-

lusions. Mais peu à peu sa volonté prit le dessous et elle ne

tarda pas à accorder une croyance entière aux indications erro-

nées de ses sens. C'est alors qu'elle interpellait vivement dans

la rue des personnes qu'elle accusait de mal parler d'elle et de

l'insulter, tandis que la conversation de ces personnes avait

roulé sur un sujet qui lui était complètement étranger. Il lui

semblait que son corps exhalait une odeur repoussante. Cer-

taines personnes lui apparaissaient menaçantes en même

temps qu'elles lui reprochaient d'avoir tué l'enfant d'une de

ses voisines. De nouvelles sensations bizarres se déclaraient du

côté des téguments, trouvant dans une certaine mesure leur

raison d'être dans les modifications que subissaient ces der-

niers. C'est ainsi qu'Honorine prétendait avoir un masque sur

la figure, ou bien sa tête s'était transformée en une tête de

chien. Quelque temps auparavant, elle avait constaté que la

chaleur du soleil et le froid vif l'impressionnaient plus lente-

ment que par le passé. Elle avait aussi constaté que l'épaissis-

sement progressif des téguments des mains avait diminué la

délicatesse du toucher. Le sommeil était troublé par des rêves

pénibles, par des apparitions terrifiantes. Les cheveux se remi-

rent à tomber. En même temps, la malade éprouvait des trou-

bles digestifs avec douleurs gastralgiques après le repas, suivies

de vomissements fréquents. La constipation était habituelle.

Les perversions sensorielles devinrent bientôt l'origine d'un

délire continu avec prédominance des idées de persécution. In-

ternée à l'asile sur ces entrefaites, elle resta quelque temps

dans le même état psychique, prenant les gardiennes pour des

hommes déguisés on femmes qui voulaient l'assassiner, pous-

sant fréquemment des cris dans sa terreur, considérant le per-

sonnel médical comme des juges qui l'avaient condamnée. Elle

ne se rendait d'abord aucun compte du lieu où elle se trouvait.

Ce n'est qu'au bout de quelques mois qu'elle parvint à se recon-

naître et à distinguer qu'elle avait affaire à des médecins et à

des infirmières. Le gonflement des téguments aurait progressé

DE t.1 C : 1( : H1 : 11E 1WCHYDEItJIiQI.E. H5

à l'asile jusque vers la fin de l'année 1878. Particulièrement

marqué à la face, surtout au côté droit, il devint tel, dit la ma-

lade, qu'on voyait l'eau à travers ses paupières, tant elles

étaient transparentes. L'infiltration, par sa propagation aux

muqueuses et particulièrement à la muqueuse buccale, finit

par rendre douloureux l'acte de serrer les mâchoires. La parole

devint plus grasse, comme empâtée, fortement nasillarde. Les

lèvres épaisses, fortement renversées en dehors, laissaient la

salive s'échapper avec facilité de la bouche. Mais bientôt ce

gonflement se mit à rétrocéder, particulièrement à la paume

des mains et à la plante des pieds, en même temps que s'amen-

dait l'état psychique et que disparaissaient progressivement les

perversions sensorielles et les idées délirantes. Pendant tout

ce temps, Honorine avait une constipation opiniâtre, troublée

de distance en distance par de véritables débâcles : cinq à huit

selles dans la même journée; on aurait dit une véritable action

purgative. Enfin, l'état psychique finit par s'améliorer à un

point tel que la guérison fut complète, et que notre malade

obtint sa sortie de l'asile en octobre 1880. Le traitement avait

consisté dans l'administration de préparations toniques et fer-

rugineuses : lait de quina, sirop de raifort ioduré, fer sous

diverses formes, bains sulfureux.

Etat actuel. Du côté des sens spéciaux, il n'existe plus

aucune perversion sensorielle. On constate simplement un peu

de diminution de l'acuité visuelle. L'état mental est excellent :

la malade est raisonnable. Pour tout ce qui est en dehors de

l'état psychique ou sensoriel, il existe, d'après notre malade,

une amélioration très notable. La parole est beaucoup moins

lente, mais elle conserve le caractère empâté, rauque et nasil-

lard. Honorine n'est pas fatiguée par l'exercice intellectuel et

entretient sans difficulté une conversation suivie. Il reste cepen-

dant un peu de lenteur dans les mouvements et les idées, peu

marquée d'ailleurs.

Du côté des téguments, il existe une amélioration très notable,

particulièrement au niveau des pieds. Ces derniers ne diffèrent

pas sensiblement de ceux d'une personne ordinaire, si l'on né-

glige un état de sécheresse particulier de la peau. L'améliora-

tion Bégaiement porté sur la paume des mains, dont la peau est

devenue moins épaisse et plus souple. L'oedème de la face aurait

également diminué, particulièrement au niveau des paupières.

Si l'on compare la physionomie générale de notre malade à

10

116 PATHOLOGIE NERVEUSE.

celle qu'elle a présentée avant le début de la maladie et dont

ou peut juger d'après une photographie faite entre vingt et

Mngt et un ans, on constate un changement considérable, très

marqué, surtout en ce qui concerne la face. Ainsi, bien qu'Ho-

norine présentât, dès l'âge de vingt et un ans, une face très

développée, comme tout le reste du corps d'ailleurs, il existe

un rapport normal entre le développement de toutes les par-

ties. De plus, on ne retrouve nullement cette apparence

d'oedème, si nette actuellement au niveau des paupières, à tel

point que ces dernières présentent une semi-transparence, un

peu variable, du reste, suivant les jours. Au premier abord,

l'aspect de la face fait croire à un oedème brightique. Mais le

doigt ne détermine pas de cupule à la pression ; le gonflement

est surtout marqué au niveau de labranchomontantedu maxil-

laire inférieur et de la parotide, avec prédominance à droite.

Le front présente des rides profondes. Les lèvres sont encore

fortement épaissies, renversées en dehors ; la muqueuse en est

luisante, mais pâle et anémiée. Les cils ne sont revenus qu'in-

complètement et le bord libre des paupières est rouge. Les

sourcils sont assez fournis; il existe môme un peu de barbe

naissante sur les joues de chaque côté et sur la lèvre supé-

rieure. Enfin, la face a peu d'expression : on dirait un masque.

Le rire ne détermine qu'une forte grimace, qui donne une phy-

sionomie étrange à la malade. Depuis quatre à cinq ans, les

cheveux ont recommencé à tomber, mais peu abondamment.

A la partie médiane et antérieure de la tète, il existe une cal-

vitie presque absolue. D'autre part, la malade a remarqué que,

dans ces dernières années, les cheveux avaient changé d'aspect

et de consistance : ils seraient devenus plus laineux, moins

fermes et plus ternes. La muqueuse de la bouche est épaissie,

comme boursouffléo. Les dents ont toujours été et sont encore

en assez bon état (il ne manque qu'une incisive); elles déter-

minent sur la face interne des joues une empreinte permanente

très marquée. La luette est grosse, comme oedématiée et pend

sur la base de la langue.

La peau et le tissu cellulaire du cou sont aussi fortement

épaissis; l'extension de la tête détermine à la nuque des plis

très profonds. Sur le tronc, le système pileux est assez déve-

loppé et la peau présente le même aspect général que sur le

reste du corps. Les mamelles sont pendantes, lourdes, volumi-

neuses, nullement fermes au toucher.

DE LA CACHEXIE l'1CIIYLliHIInUli. 147

L'adème spécial est encore assez net sur les bras et les avant-

bras, mais il a presque totalement disparu sur les mains. Au

niveau de ces dernières, la peau est particulièrement sèche et

rugueuse, gercée, presque écailleuse, surtout autour des arti-

culations métacarpo-phalangienncs et dans les parties sus-

jacentes. Aux membres inférieurs, le gonflement est plus

marqué, à l'exception des pieds. On n'y voit aucune trace d'in-

sertion musculaire et il existe un défaut de proportion très

manifeste entre le volume des membres aux différentes hau-

teurs. Ainsi, à partir de la saillie du mollet, la jambe va

s'amincissant beaucoup moins qu'à l'état normal.

D'ailleurs, dans quelque partie du corps que l'on envisage le

tégument, ce dernier présente une fausse apparence d'oedème

sans cupule à la pression du doigt, nulle part mieux marquée

qu'à la face; une coloration blanchâtre, un peu cireuse dans

certaines régions ; un état de sécheresse et de rudesse très

marqué. La sécrétion sudorale est fortement diminuée : la

malade ne sue, d'une façon un peu notable, que sous les ais-

selles. La sensibilité cutanée ne parait pas actuellement

émoussée, au moins d'une façon appréciable. Les organes

internes paraissent sains. A l'auscultation du coeur, on trouve

un bruit de souffle anémique à la base, qui se propage dans les

vaisseaux du cou. La quantité d'urine rendue dans les vingt-

quatre heures est normale. Cette urine (d= 1013- 1030), même

fraîche, présente une légère réaction alcaline et laisse déposer,

au bout d'un certain temps, un précipité muqueux assez abon-

dant, qui ne présente au microscope aucun caractère bien par-

ticulier. Cet état de l'urine est dû probablement à un peu de

catarrhe vésical. La quantité d'urée excrétée dans les vingt-

quatre heures parait diminuée. L'analyse n'a mêlé que

1 \ grammes dans les urines rendues du 25 au 26 février. Il

n'existe d'ailleurs aucune trace d'albumine. Le thermomètre

a donné les résultats suivants :

22 février (3 h., soir), la température ambiante étant 19° c.

If4S PATHOLOGIE NERVEUSE.

J tCUf'Le)' ( 11 : SOlI'), Z. AX. l11 ? ?

ts féanLèr (10 li, matin), '1. : lx., 36 ?

27 février (matin), T. Ax., 36°,8. ? S fëcrLèr (3 h. soir), 'l'. Aa., 37°,2.

En présence de ces chiffres, il serait difficile de conclure à

un véritable abaissement de la température périphérique.

En prévision d'antécédents syphilitiques, on avait institué,

quelque temps après son entrée à la clinique, un traitement

spécifique. Pendant environ trois semaines, Honorine prit de

la liqueur de Yan Svvieten et de l'iodure de potassium. Mais ce

traitement, loin d'amener une amélioration, paraissait augmen-

ter la faiblesse générale. Aussi, et comme d'autre part il n'exis-

tait pas de raison bien probante pour l'existence d'une syphilis

antérieure, ce traitement fut remplacé par des préparations

toniques et ferrugineuses (vin do quinquina, peroxychlorure de

fer, etc.). Il en résulta promptement une amélioration réelle

dans l'état général de la malade.

Cette observation présente plusieurs particularités

remarquables : l'intensité des phénomènes nerveux ;

la marche de l'affection, procédant, pour ainsi dire,

par deux poussées successives que sépare un inter-

valle de temps assez notable, sont des faits qui nous

paraissent mériter une attention spéciale. D'autre part

l'histoire de notre malade parait justifier complètement

la théorie de Ord. Elle indique en effet une subordi-

nation complète des troubles nerveux aux lésions cuta-

nées. Les troubles nerveux vont croissant à mesure

que se développent les lésions cutanées, a tel point

qu'il survient une véritable aliénation mentale avec

délire des persécutions. Puis, on voit ces troubles

psychiques et nerveux s'amender progressivement et

arriver à une guérison complète, à mesure que s'amé-

liore l'état des téguments. Une particularité non moins

intéressante est l'efficacité de la médication tonique et

ferrugineuse qui, toutes les fois qu'elle a été mise en

DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 1 19

usage, a donné d'excellents résultats. Il existe évidem-

ment ici plus qu'une simple coïncidence. Des effets

analogues ont été obtenus d'ailleurs dans d'autres cas,

en particulier par Botirneville et d'Olier sur leur

malade. Enfin l'amélioration qui se trouve notée dans

plusieurs observations ne paraît nulle part aussi mar-

quée que chez notre malade.

Nous avons adopté la dénomination de « cachexie

pac7aderrzz jue » , créée par 31. Charcot, parce qu'elle nous

paraît de beaucoup la meilleure. L'état de cachexie

que présentent tous les malades, est un élément tout

aussi important, tout aussi caractéristique que l'altéra-

lion tégumentaire. Comme dans toutes les cachexies,

l'affection porte non seulement sur un système, mais

sur l'ensemble de l'économie et les médications actives

sont celles qui modifient avantageusement l'ensemble

de l'organisme. Enfin, comme on l'a déjà fait remar-

quer, l'expression cachexie pachydermique ne préjuge

rien sur la nature de l'affection et a l'avantage de rap-

peler la forme particulière des extrémités des membres.

Les observations de cachexie pach) dermique publiées

jusqu'à .ce jour permettent de connaître la maladie

dans ses traits principaux, niais les documents sont

encore insuffisants pour édifier une histoire clinique

complète. Cependant, les observations nouvelles ont

considérablement élargi le cadre primitif de la ma-

ladie.

W. Gull pensait que l'affection était propre à l'âge

adulte et à la femme. Mais les observations publiées

successivement par Savage, Charcot, Bourneville, et

d'Olier, Th. Inglis, montrèrent que les hommes pou-

vaient eux aussi être atteints. D'autres faits ont établi

150 PATHOLOGIE NERVEUSE.

que l'affection pouvait débuter chez l'enfant. Enfin, si

la cachexie pachydermique est beaucoup plus com-

mune chez la femme et présente son maximum de fré-

quence après trente ans, il n'existe aucun cas ayant

débuté chez le vieillard.

L'étiologie est encore très obscure. Dans aucun cas,

l'affection n'était héréditaire. Du côté de l'hérédité,

certaines observations parlent d'antécédents nerveux,

tels qu'apoplexie ou folie. Comme antécédents person-

nels, on ne peut guère signaler que des causes banales :

chagrins domestiques, émotions, fatigues excessives.

Chez plusieurs femmes, il y avait eu un nombre consi-

dérable de grossesses ou de fausses couches. La mala-

die peut survenir chez des personnes ayant toujours

joui d'une bonne santé. Enfin on ne connaît absolu-

ment rien de l'influence des diathcses, des climats et

des saisons.

Quand la maladie est confirmée, ce qui frappe t

première vue, c'est l'aspect oedémateux de la face, qui

suscite immédiatement l'idée d'une néphrite chro-

nique. Cet oedème est particulièrement marqué au

niveau des paupières, des lèvres et des joues. Les pau-

pières sont gonflées, ridées, souvent comme transpa-

rentes. Les lèvres sont épaissies, renversées en dehors,

particulièrement la lèvre inférieure. Le nez est charnu,

épaté, avec narines largement dilatées. Sur le reste de

la face, l'oedème est plus ou moins marqué; au niveau

du front, on l'a vu n'exister que par plaques. Il peut

aussi être plus accentué d'un côté que de l'autre, ce

qui entraîne une asymétrie faciale plus ou moins

notable. Loin de prédominer aux parties déclives, il

est ordinairement plus net sur les côtés. Nulle part la

DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 151

peau ne conserve l'empreinte du doigt. Les rides sont

très accusées, particulièrement au niveau du front. La

peau de la face présente une teinte cireuse, sur laquelle

tranche habituellement une vive coloration des pom-

mettes. Enfin la physionomie est sans expression, ou

présente une expression particulière : elle dénote alors

la tranquillité, la tristesse ou l'hébétude. Dans certains

cas, on pourrait croire que la figure du malade est

recouverte d'un masque.

Dans plusieurs observations on a signalé la chute

des cheveux et des poils au début de la maladie. On

a même constaté de véritables troubles trophiques du

système pileux. Les cheveux et les poils perdent leur

éclat, deviennent laineux, plus fragiles. Des troubles

trophiques analogues ont même été constatés du côté

des ongles, qui deviennent cassants, rabougris et

peuvent se détacher.

La langue est habituellement large, épaisse et peut

môme paraître trop grande pour la bouche. La mu-

queuse buccale et pharyngienne est d'ailleurs gonflée,

mais non congestionnée, par suite de son infiltration

par l'exsudat muqueux. Dans quelques cas, les dents

se trouvaient en mauvais état, étaient fragiles, cariées,

tombaient.

Au cou, l'infiltration mucoïde'détermine des rides

profondes sur la nuque. En avant, l'état du corps thy-

roïde est très intéressant. Presque constamment dimi-

nué de volume, quelquefois il n'atteint pas le quart de

ses dimensions ordinaires et, dans certains cas, il a été

impossible d'en trouver trace a la palpation. D'ailleurs

la recherche du corps thyroïde est rendue difficile par

le gonflement des téguments. Du côté des membres,

152 PATHOLOGIE NERVEUSE.

l'infiltration cutanée et sous-cutanée détermine la plu-

part du temps des déformations caractéristiques. Les

membres sont tranformés « en véritables colonnes

pesantes, arrondies, sans grâce ». Les mains sont

larges, grossières, les doigts élargis en forme de

massue ; le tout rappelle plus ou moins la forme d'une

bêche ou l'extrémité d'un pachyderme. Les pieds pré-

sentent une déformation analogue et une apparence

oedémateuse. Biais, ici comme partout ailleurs, il ne

s'agit pas d'un oedème ordinaire, mais de cet oedème

spécial, solide, dont nous avons déjà décrit les carac-

tères. Cet oedème peut être d'ailleurs plus marqué d'un

côté que de l'autre au niveau des membres.

Sur le tronc, on observe toujours ce même gonfle-

ment, plus ou moins marqué. Les téguments sont ten-

dus, font corps avec les parties profondes, et il est très

difficile d'y faire un pli. Les mamelles sont dures,

gonflées. Dans plusieurs observations, on a signalé

la présence de tumeurs molles, quelquefois même

tremblottantes, qui s'étaient développées dans la peau

de la face, du crâne et du tronc. Du côté des organes

génitaux, on a noté un gonflement de la vulve et du

museau de tanche; mais ce fait doit être rare. La

muqueuse inférieure du rectum peut être gonflée au

point de gêner la défécation (D' Ord, Bourneviue).

Sur toute l'étendue du corps, la peau est sèche,

rugueuse, écailleuse même sur certaines parties, parti-

culièrement au niveau des mains et des pieds. Les

malades suent peu ou même pas du tout; la sécrétion

sébacée est tarie. Il existe des sensations anormales du

côté des téguments : fourmillements, picotements,

sensation de froid, de brûlure, de torsion des chairs.

- DE H CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 153

La sensibilité cutanée est très souvent émoussée. Les

malades sont en général très frileux. La température

des téguments et de l'aisselle est habituellement au-

dessous de la normale. Cette diminution de la tempé-

rature parait coïncider avec une diminution dans les

échanges organiques : toutes les fois qu'on a procédé

à l'analyse des urines, on a trouvé une diminution

dans la quantité d'urée excrétée dans les 24 heures.

Les organes internes restent d'ailleurs parfaitement

sains et les urines ne contiennent pas d'albumine.

Quant aux troubles digestifs signalés dans plusieurs

observations, ils ne relèvent pas forcément de l'infil-

tration iiiucoïde de la muqueuse gastro-intestinale; on

pourrait très bien les rattacher, dans la plupart des cas,

à l'anémie profonde, à la cachexie concomitante. La

constipation est habituelle, entretenue peut-être par la

diminution des sécrétions intestinales. La menstruation

est difficile et irrégulière ; on signale ordinairement

de l'aménorrhée. Signalons aussi une certaine gêne de

la respiration pouvant aller jusqu'à une sensation de

dyspnée véritable.

La voix a un timbre spécial ; elle est comme en-

rouée, nasillarde, 31. Ord l'a comparée à la voix pha-

ryngée du début de l'amygdalite. Les réponses sont

tentes, monotones, comme traînées. Particulièrement

gêné le matin (Th. Ingtis), le langage rappelle quel-

quefois le débit d'un hémiplégique ou l'articulation

embarrassée de l'épileptique. Cet état du langage

s'accompagne de lenteur corporelle et de torpeur

intellectuelle. Les actes les plus simples sont exécutés

avec lenteur, on dirait même souvent avec effort. La

préhension peut être faible, difficile; les mains sont

1 ') 19. PATHOLOGIE NERVEUSE.

inhabiles, particulièrement pour ce qui concerne les

travaux, délicats, tels que le travail à l'aiguille. La

démarche est quelquefois décidée, précipitée même et

ne présente alors rien de bien particulier; mais sou-

vent' aussi elle est lente, hésitante, vacillante; sans

qu'il y ait hésitation proprement dite, le malade n'ose

pas s'aventurer à traverser une rue : il y a ta quelque

chose qui rappelle l'agoraphobie. Ingiis compare la

démarche d'un de ses malades à celle d'un canard. On

peut observer aussi une certaine difficulté i garder

l'équilibre, ou à se relever après une chute. Ces phé-

nomènes peuvent coexister d'ailleurs avec une diminu-

tion de la force musculaire et de l'excitabilité galva-

nique des muscles. Dans le cas cité par IIammond, il

y avait des symptômes d'ataxie locomotrice avec anes-

thésie plantaire, ce qui rendait la marche très difficile,

particulièrement avec les yeux fermés.

Les facultés psychiques peuvent être intactes; mais,

même dans ce cas, on observe habituellement une tor-

peur intellectuelle plus ou moins marquée. Cette len-

teur dans les actes et les réponses, sur laquelle nous

venons d'insister, n'est elle-même que le résultat de la

lenteur avec laquelle s'accomplissent toutes les fiteuliés

intellectuelles. Les malades paraissent indifférents à ce

qui se passe autour d'eux. Peu soucieux d'exercer leur

esprit ou leur corps, ils restent plongés dans un état

de somnolence presque continuel. Le moindre effort

intellectuel semble être une source de fatigue. Cepen-

dant, lorsqu'on les met en colère, ils sortent de cet

état d'inertie : la parole et les actes prennent une

vivacité inaccoutumée. Ils deviennent capable ? d'efforts

extraordinaires, fémoince malade de 31. Charcot qui sou-

DE LA CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 155

levait sept boisseaux de pommes de terre de chaque

main. Quelquefois les facultés psychiques sont sérieu-

sement atteintes. La mémoire est imparfaite, particu-

lièrement en ce qui concerne les faits récents, ou même

toutes les facultés intellectuelles sont affaiblies, ob-

tuses, dégradées : le malade répond difficilement aux

questions les plus simples, il échoue devant l'opéra-

tion la plus simple de l'arithmétique (Hammond).

Enfin on peut voir survenir un véritable état d'aliéna-

tion mentale avec ou sans illusions et hallucinations

des sens spéciaux, ('/est ainsi qu'on a observé de la

mélancolie, un état de manie avec violence et inco-

hérence du langage pendant la nuit, et même un

véritable délire des persécutions.

Tous les malades sont pâles, languissants. Les trou-

bles variés des téguments et du système nerveux s'ac-

compagnent d'une anémie profonde, d'une cachexie

véritable. Aussi serait-il fort intéressant de faire des

analyses du sang et de compter les globules. C'est une

lacune à combler, ainsi que l'a fait remarquer Thaon.

Si, dans tous les cas de cachexie pachydermique, on

observe une triade symptomatique constante : anémie

profonde, lésions tégumentaires et troubles nerveux,

on peut dire aussi que, sur ce fond morbide commun,

on peut rencontrer des formes très variées. Ceci s'ap-

plique tout particulièrement aux troubles du système

nerveux. Véritable prothée, la maladie peut réaliser la

symptomatologie du système nerveux tout entier. Trou-

bles de la motilité, troubles de la sensibilité générale et

spéciale, symptômes do l'ataxie locomotrice, troubles

psychiques depuis les plus légers jusqu'aux plus graves,

tout a été observé. Le système nerveux tout entier peut

156 PATHOLOGIE NERVEUSE.

donc être en cause dans la cachexie pachydermique.

Doit-onenconclure, comme l'ont fait quelques auteurs,

à l'existence de lésions portant sur ce système ? L'exis-

tence de ces lésions peut paraître très vraisemblable,

mais il ne faut pas oublier qu'elles n'ont encore été

constatées par personne. Il faut attendre à cet égard

le résultat de nouvelles autopsies. En tout cas, ces

lésions ne sont pas indispensables pour expliquer la

majeure partie des troubles nerveux et particulière-

ment les troubles psychiques. les immenses

progrès réalisés par le microscope, n'est-on pas obligé,

en clinique mentale, d'invoquer à chaque pas l'alté-

ration fonctionnelle ? D'autre part, doit-on, avec Ord,

subordonner absolument tous les troubles psychiques

aux lésions cutanées ? Accepté dans toute sa rigueur,

ce principe serait faux. Il est incontestable que les trou-

bles psychiques observés peuvent être indépendants

des lésions tégumentaires, puisqu'on les a vus consti-

tuer les premiers symptômes de la maladie. Biais il

nous semble non moins raisonnable d'admettre que,

dans certains cas, les altérations tégumentaires puis-

sent devenir l'origine d'idées délirantes. Ne voit-on

pas souvent des aliénés en pleine période de calme,

être pris tout à coup d'idées délirantes, particulière-

ment d'idées de persécution, à l'occasion d'un embar-

ras gastrique, par exemple. Ils trouvent à toutes les

substances ingérées un goût mauvais, atroce, et s'ima-

ginent par suite que ces aliments sont falsifiés ou

qu'une main criminelle a dû y répandre du poison. Il

en résulte des idées nouvelles d'empoisonnement, de

persécution, qui disparaissent lorsque la muqueuse

digestive revient à l'état normal. Des faits identiques

Ll : L.1 C.ICHls1111 l'1CHI1)l : Lt\Ilt,Ul : . 157

se passent dans la cachexie pachydermique. L'infiltra-

tion des téguments externes ou internes entraîne des

troubles fonctionnels analogues, suivis des mêmes trou-

bles psychiques. Sans doute, il faut un élément de plus

pour que la lésion périphérique provoque une idée déli-

rante. Il faut que l'impression périphérique mauvaise

aboutisse à un cerveau disposé à la recevoir et à la

transformer d'une manière spéciale, incorrecte. Mais,

il n'eu est pas moins vrai que c'est à l'occasion de

cette impression périphérique que se manifestera l'idée

délirante. Des faits de ce genre ont d'ailleurs été notés,

non seulement dans la cachexie pachydermique, mais

encore dans des maladies telles que la sclérodermie,

qui entraînent une altération profonde des téguments.

Ne trouve-t-on pas ici l'exemple de cette influence ré-

ciproque et intime qu'exercent l'un sur l'autre le tégu-

ment et les centres nerveux, et qui reste comme le

souvenir de leur communauté d'origine ?

La cachexie pachydermique est une espèce nosolo-

gique nettement définie et que l'on distingue facile-

ment des états morbides tels que les affections car-

diaques ou rénales, la polysarcie, la sclérodermie, etc.

31. Charcot affirme mèmeLLque la physionomie des ma-

lades est si caractéristique qu'une fois qu'on la connaît,

on la saisit, pour ainsi dire, au vol et l'on n'hésite pas à

porter le diagnostic ».

Quelle place doit occuper le nouvel état morbide

dans le cadre nosologique ? Ici nous reproduirons entiè-

rement les idées émises par notre savant maître dans

une leçon clinique faite à l'occasion de notre malade.

31. le professeur Grasset pense que la cachexie pachy-

dermique trouve sa place naturelle à côté du groupe

158 r ? rnoLOVtL navLOaL.

des sclérodermies, ou mieux, à côté de la sclérodermie

oedémateuse. En effet, si la cachexie pachydermique

s'éfoigneassezdeiascférodactyfieetdefascféroder-

mie ordinaire, il n'en est plus de même pour ce qui

concerne la sclérodermie oedémateuse. Dans la scléro-

dermie oedonateuse, comme dans la cachexie pachy-

dermique, la lésion prédomine dans le tissu conjonctif

sous-cutané; elle ne diffère que par la nature de l'ee-

dème. Dans les deux cas la peau présente des altéra-

tions. dureté, desquamation en divers points, colo-

ration spéciale, troubles anesthésiques, abaissement

de la température, diminution des sécrétions sébacées

et sudoripares. Enfin, dans la sclérodermie, on a pu

observer comme dans la cachexie pachydermique des

hallucinations et des troubles psychiques allaiitjusqu'à

un véritable délire systématisé. La sclérodermie oedé-

mateuse serait pour Ïl. Grasset comme le trait d'union

entre la sclérodermie ordinaire et la cachexie pachy-

dermique. Dans l'étal actuel de la science, cette opi-

nion nous paraît la plus vraisemblable.

La marche de l'affection est ordinairement lente; il

est souvent difficile de préciser le début. Dans quel-

ques cas rares, le début a été brusque : la maladie s'est

annoncée par des frissons violents (cas de M. Charcot)

ou par une hématurie (cas de Ord). Presque tou-

jours l'évolution est progressive. On a pu cependant

observer de l'amélioration et même une amélioration

très notable. La malade peut succomber aux progrès

de la cachexie ou à une maladie intercurrente. L'affec-

tion n'est peut-être pas incompatible avec une longue

existence. En tout cas, les données manquent : jusqu'ici

on n'a encore suivi que deux malades jusqu'à la mort.

DE LA CACHEXIE P U ll\ DERM1QUL. 159 i)

Nous voici arrivés au traitement : « Il est remarqua-

ble, dit Thaon, que toutes les médications internes

échouent ou soient mal tolérées; est-ce dû à l'accumu-

lation des médicaments, qui est bien vite atteinte, par

suite de l'imperméabilité de la peau fermée à toute

excrétion ? ou bien est-ce dû à l'état de dyspepsie, si

fréquent chez ces malades ? Il n'en est heureusement

pas toujours ainsi. Dans quelques cas les préparations

toniques et ferrugineuses ont donné des résultats très

satisfaisants. » Notre observation semble particulière-

ment remarquable sous ce rapport. En dehors du fer,

du quinquina, les bains d'air chaud, les frictions, les

massages, les bains sulfureux pris à domicile ou mieux

dans une station thermale, comme Aix en Savoie, sont

parfaitement indiqués. Thaon insiste « sur les avan-

tages du séjour dans un climat sec, tempéré, tonique

et bien ensoleillé, tel que celui de Nice. Dans ces con-

ditions les malades peuvent sortir tous les jours; ils

peuvent rester exposés à l'air le plus longtemps pos-

sible ; ils peuvent prendre de'véritables bains de soleil

qui agissent sur l'hémoglobine du sang et sur les nerfs,

autant par les rayons caloriques que par les rayons

chimiques'. »

'Depuis que co tuuail nous a été adressé, (10 ]IL) 11\ et LI.\ l,tllb ont été

lulili6; i\I. l)lame uu .v f,t`t lc résumt;, quu t`uua pulUieruua p`uclt,`tnu-

`uenl. (1'ote cle la eclactaou.)

CLINIQUE NERVEUSE

\Ol'RS I'O(;lt aCR\'Ili .1 L'lll : i'l'olNl; DG I, Hl-STI : Fto-CP1LI,L'SIE ! 'd)( ? b'm<E.

Dans cette courte étude, nous avons seulement

voulu appeler l'attention sur quelques particularités

peu connues ou rares de la grande hystérie. Nous

n'avons en vue qu'une description épisodique, et

nous nous renfermerons dans l'exposition de quelques

faits que nous avons eus sous les yeux dans le service

de M. Charcot, à la Salpêtrière.

1. - tulioL ii,\ue n ) ? T'r ? u

Nous ne reviendrons pas sur la description classique

désormais, donnée par M. Charcot, de l'attaque d'hys-

téro-épilepsie avec ses trois phases épileptoïde, des

contorsions et des attitudes passionnelles ou de délire;

nous rappellerons seulement que la deuxième période

est ordinairement caractérisée par des contorsions

plus ou moins variables, par de grands mouvements

constitués par des alternatives de flexion et d'ex-

tension du tronc suivant l'axe longitudinal du

corps; l'arc de cercle à convexité ventrale est

un épisode des plus communs de cette période. La

de L'HYS'l'BItO-1'ILEPSIi : . Kil I

malade qui fait le sujet de l'observation qu'on va lire

nous montre une période de grands mouvements qui i

diffère sensiblement du type ordinaire.

V... (Caroline), âgée de vingt-quatre ans, est entrée le

5 décembre 1880 à la Salpêtrière, salle Sainte-Laure, n° G

(service de M. Charcot).

Antécédents héréditaires . V... est issue d'une union illé-

gitime. Sa mère n'avait que quinze ans quand elle devint

enceinte, et aurait eu une fièvre cérébrale ( ? ) pendant sa

grossesse ; elle était rhumatisante et sujette à des attaques coii-

vulsives et à des elourdissemenls ; elle est tombée dans le feu

et porte à la face et sur le corps des traces de brûlures ; elle se

mord la langue dans ses accès qui se sont répétés à peu près

tous les jours, au moins pendant une certaine période. Le

père, qui a disparu depuis plusieurs années, n'aurait jamais eu

d'accidents nerveux. Il en serait de même des trois frères qui

sont connus de la malade. Une tante maternelle se porte

bien et n'a pas d'attaques.

Antécédents personnels. - Dès les premiers jours qui ont

suivi sa naissance, V... aurait eu des convulsions (pas de

sillons dentaires). Elle aurait eu, toute jeune encore, une an-

gine couenneuse suivie de rougeole, et vers sept ou huit ans

une scarlatine.

A l'âge de neuf ans, un jour que son père battait sa mère,

elle eut une grande peur et c'est alors qu'elle commença à

avoir des crises nerveuses. Pendant quatre ans, elle eut tous

les jours dos attaques nerveuses qui ne se produisaient pas à

des heures fixes , mais en toute circonstance nuit et jour. Ces

attaques, avec porto de connaissance dès le début, commen-

çaient par le bras gauche qui, allongé le long du corps et la

main fermée et fléchie, se tordait en arrière et en dehors. Il

n'est pas établi que pendant ces accès elle se fut mordu la

langue, mais elle pissait au lit à toutes les fois.

Vers dix ans, un an après les premières attaques, elle aurait

eu une fièvre cérébrale. Elle a été réglée à treize ans. A partir

de ce moment, elle cessa d'avoir des attaques tous les jours ;

ses crises changèrent de caractère et devinrent semblables

à celles qu'elle a aujourd'hui. Elle est prévenue qu'elle va être

prise. Si, dans la rue, elle se sent malade, elle a le temps de se

162 CL1N1QLE KERMiUSK.

réfugier quelque part, 'de dégrafer ses \ éléments, de choisir sa

place pour tomber. Ses attaques, d'abord rares, devinrentbieutôt

extrêmement fréquentes et se répétèrent vingt à vingt-cinq fois

par jour depuis l'âge de treize ans jusqu'à vingt- trois.

Depuis que cette nouvelle espèce d'attaques se produit, elle

éprouve une douleur continue dans le bas-ventre des deux

côtés; mais quand l'attaque va venir, la douleur augmente,

principalement du côté gauche, et en même temps, elle a une

sensation déboule qui remonte de l'épigastre vers lagorge. En

tout temps elle a des battements, quelque chose qui cogne,

dans les deux tempes, sans recrudescences au moment des at-

taques. Elle était toujours bien plus souffrante au moment de

ses règles.

Elle vint à Paris, il y a deux ans, entra à l'Hôtel-Dieu où

elle resta un mois ou deux. Sous l'influence de l'éther, de la

morphine, du bromure de potassium, ses attaques ont

diminué considérablement de fréquence depuis cette époque.

Elle fut envoyée à la Salpètrière, où elle ne resta que quelques

mois dans un service d'aliénées, bien qu'elle n'eût jamais eu

qu'un délire inoffensif à la suite de ses attaques. Au bout de

cinq ou six mois, elle quitta l'hospice. Elle vécut pendant neuf

mois avec un jeune homme qu'elle finit par quitter cause de

ses accès, elle rentra chez sa mère ; mais au bout de quelque

temps (décembre 1880), elle tomba sur la voie publique, fut

portée à l'Hôtel-Dieu et c'est de là qu'elle est revenue à la Sal-

pètrière où elle est entrée le cinq décembre 1880.

Étal actuel. Elle est d'une intelligence très médiocre, a

peu de mémoire, mais elle est laborieuse, aide aux travaux du

ménage; et parait sincère. Elle est très irritable, sujette à

des accès de colère, ou boude facilement. Elle mange très peu

et offre quelque dépravation du goût. Elle recherche les mets

vinaigrés ; elle aurait bu un jour un litre de vinaigre. Elle est

du reste assez bien constituée et ne présente aucun vice de

conformation ; elle est d'une bonne santé habituelle.

Elle est toujours réglée très abondamment; quelquefois elle

perd pendant quinze jours. De temps en temps, elle a des

métrorrhagies intercalaires.

Depuis que ses attaques sont moins fréquentes, elle souffre

davantage dans le ventre.

Quatre ou cinq jours avant d'être prise, elle se sent mal à

son aise et, vers le soir surtout, elle est agitée, elle dort mal et

17E L'HYS'fERO-EI'ILLL'SIE. 163

son sommeil est troublé par des rêves. Il nous est arrivé un joui',

pendant qu'elle était dans cet état, de provoquer un accès par

pression sur un de ses points hystérogénes, elle s'est trouvée

déchargée du coup, s'est trouvée mieux ensuite et n'a pas eu

d'attaque spontanée : le 8 mars, à la fin de ses règles, elle était

agitée ; j'ai provoqué une série d'attaques par la pression

sur son point vertébral, elle n'a pas eu de nouvelle série jus-

qu'au 5 avril.

Toutes les nuits, elle rêve ; mais les rêves n'ont aucun carac-

tère effrayant et ne sont pas uniformes ; le plus généralement,

il s'agit de sa famille.

Depuis un au environ, ses attaques ne se produisent que

presque toutes les trois semaines ou un mois, le plus souvent

avant ou pendant ou après ses règles ou sesmétrorrhagies ; ainsi

elle a une série de cinq attaques le 3 janvier, ses règles viennent

le 3 et ce jour là encore elle a quatre attaques ; elle a une

métrorrhagie le 30 du même mois, elle avait eu quatorze

attaques la veille et quatre ce jour là, mais elle avait eu d'au-

tres séries le 6 et le 8; au mois de février, elle a ses règles

le 3, et elle a une série le 6 et le 7, et est tranquille tout

le reste du mois ; au mois d'avril, elle a une série le jour des

règles.

Elle a commencé à avoir des rapports sexuels vers dix-

huit ans, et IL'a jamais remarqué qu'ils eussent aucune in-

Iluence sur ses convulsions ; pendant sa dernière aventure, les

attaques n'étaient pas plus fréquentes que maintenant; les

attaques se produisent toujours le jour, elle n'en a jamais eu

la nuit.

Sensibilité générale. Dans l'intervalle des attaques, elle

est hémi-anesthésique gauche, elle ne sent ni le contact,

ni la piqûre, ni le froid, mais elle sent la pression sur les parties

profondes, et le sens musculaire est conservé. L'anesthésie

cutanée n'est d'ailleurs pas limitée exactement à la ligne

médiane : il existe une plaque sensible de la largeur de la main

à la limite des régions dorsale et lombaire, s'étendant latérale-

ment le long des dernières côtes pour aller se confondre avec

une autre plaque un peu moins étendue située en dehors et au-

dessous du sein gauche ; autour du nombril, il existe encore

une plaque semblable de la largeur de la paume de la main.

Vision. En raison du peu d'intelligence de la malade, qui

ne sait pas reconnaître même les lettres, il est difficile d'ap-

164 CLINIQUE NERVEUSE.

précier au juste son acuité visuelle et l'étendue de son champ

visuel qui parait toutefois rétréci surtout du côté gauche. Elle

voit toutes les couleurs des deux yeux, mais elle est incapable de

différencier les nuances d'une même couleur '.

Les deux conjonctives sont insensibles, les cornées ont

conservé leur sensibilité.

Ouïe. Elle entend moins bien la montre du côté gauche.

Odorat. Conservé des deux côtés ; sensibilité tactile con-

servée dans les deux narines. (Examen avec l'éthcr.)

Goût. Égal des deux côtés ; insensibilité du voile du palais.

(Examen avec.la coloquinte.)

Pendant les attaques l'insensibilité, est totale et complète.

A toutes les périodes, on peut mettre le doigt au contact de

la cornée, sans que la pupille change de direction, ce dont on se

rend très bien compte en tenant l'autre- oeil ouvert. Cette

insensibilité parait même quelquefois persister au moment où

la malade a déjà repris connaissance, quand elle s'asseoit et

demande à boire ; un jour, au moment où elle saisissait le verre,

j'ai pu lui mettrele doigt sur la cornée sans que l'oeil se ferme

et sans que le regard change de direction.

Points hystéîogèiîes 1° sur la 6° côte gauche vers le bord

externe du thorax ; 2° sur les apophyses épineuses de la

12, dorsale et de la 1° lombaire.

La pression sur la région ovarienne gauche arrête les attaques

qui sont prévenues par la pression du bandage à ressort.

V... tombe en catalepsie au bruit du gong. Elle s'endort assez

difficilement par la fixité du regard ; du reste dans l'hypnotisme,

elle n'offre pas d'hyperexcitabilité réflexe notable; mais les

réflexes tendineux sont exagérés ; pas de somnambulisme pro-

voqué. Elle s'endort les yeux convulsés en haut; on nepeutpas

découvrir la pupille, et par conséquent provoquer de catalepsie

dans cet état.

Description de l'attaque. Que l'attaque soit spontanée ou

provoquée, elle se présente toujours avec le même caractère. Si

elle est debout au moment où elle est prise, elle s'affaisse, puis

s'étend de tout son long. Si elle est couchée, les paupières

se mettent à battre très rapidement; le tronc et la tète se

1 Nous ferons remarquer à ce propos que certaines hystériques qui

semblent avoir perdu la vision d'une couleur, peuvent cependant voir

certaines nuances de cette couleur; ce sont tantôt les nuances claires,

tantôt les nuances sombres dont la vision aurait persisté.

DE 1,'HYSTRO-ÙPI lE PSI E. 165

tournent le plus souvent vers la droite, quelquefois vers la

gauche. Le bras droit est dans la flexion, le gauche dans

l'extension est animé d'un petit mouvement de trépidation;

puis la partie inférieure du corps se tourne du même côté.

Elle enfonce le nez dans l'oreiller, s'arrête un instant, puis le

corps tout d'une pièce se porte brusquement du côté opposé

en tournant autour de son axe longitudinal, puis reprend avec

la même brusquerie sa position primitive, et ainsi de suite.

Elle fait ainsi une douzaine de demi-rotations avec une grande

rapidité et une grande violence ; quelquefois elle se heurte le

visage avec une telle force sur son oreiller qu'elle a des

épistaxis. Quand ce mouvement de roulis s'arrête, elle reste

un instant d'aplomb sur le dos, puis le tronc se lève assez

posément, se fléchit sur le bassin pour faire avec les membres

supérieurs étendus un angle de 45° environ ; elle se rejette brus-

quement en arrière, la tête sur l'oreiller ; elle recommence cette

espèce de mouvement de tangage deux ou trois fois. Revenue

dans la poistion horizontale, elle se frappe trois ou quatre fois

la poitrine avec ses deux poings, ensuite elle allonge les deux

bras sur les côtés du corps et frappe sur le matelas aussi trois

ou quatre coups.

Quelquefois le bras droit reste immobile dans la demi-flexion

et le bras gauche bat seul le matelas.

Cette série de mouvements terminée, elle pousse quelques

cris, fait entendre une sorte d'aboiement, et fait quelques

fortes inspirations.

Le plus souvent elle recommence immédiatement son mouve-

ment de roulis sans passer parla phase épileptoïde du début,

et fait aussi des séries de mouvements analogues à ceux que

nous venons de décrire et se succédant avec une régularité d'au-

tomate. Enfin les grands mouvements cessent, elle se met à se

gratter violemment la tête avec ses deux mains, s'ébouriffe, se

tourne de côté et d'autre, crie : «Ah ! ah ! ah ! », regarde autour

d'elle sans voir ce qui se passe et sans avoir recouvré ses sens;

on peut quelquefois lui porter le doigt sur la cornée sans que son

oeil se dévie; puis, couchée sur le côté, en chien de fusil, elle

appelle : « Maman ! Léon ! Léon ! (son amant)... mon Dieu...

Eh ! Odile (sa soeur), Odile, Odile. Oh ! Maman. Cochons de

Prussiens, saleté... », fait des gestes de répugnance et d'hor-

reur. Tout d'un coup, elle s'asseoit, se gratte la tête à deux

mains, regarde fixement, demande « à boire, à boire », tou-

166 CLINIQUE NERVEUSE.

jours sans avoir repris ses sens, comme le montre l'insensibi-

lité de la cornée.

On lui présente un verre d'eau qu'elle boit avidement. Elle

se met à genoux sur son lit, arrange ses oreillers, se couche sur

le côté droit et s'endort bientôt.

Les attaques se sont présentées par séries de le à 1 depuis

qu'elle est soumise à notre observation et toutes se ressemblent.

Dans les séries d'attaques, c'est-à-dire lorsqu'on est prévenu

qu'uneautre attaqueva seproduire, onpeutconstater qu'a l'ins-

tant qui précède le premier battement des paupières, la pupille

est étroite, elle se dilate dès que les mouvements commencent

et la dilatation reste à son maximum jusqu'à la fin do l'at-

taque ; elle revient ensuite lentement à l'état normal.

Cette observation présente plusieurs faits intéressants

à noter. Les attaques dontV... a été atteinte de neuf à

treize ans semblent bien avoir été des attaques d'épilepsie

auxquelles la malade était d'ailleurs prédisposée par

l'hérédité; au moment de l'établissement de la mens-

truation, ces attaques se sont transformées et ont pris

les caractères des attaques d'hystéro-épilepsie. Jamais,

depuis qu'elle est réglée, elle n'a eu d'attaque ressem-

blant à celles qu'elle avait étant enfant. Cette substi-

tution est bien propre à montrer le rôle de l'évolution

des organes génitaux dans le développement de la

névrose qui nous occupe.

Nous ne ferons quesigna)er)'irréguiari<éde)'hémia-

nesthésie, qui est interrompue par des plaques sen-

sibles, dont deux s'étendent autour de points hysté-

rogènes, et la troisième indépendante.

Mais nous appellerons plus particulièrement l'atten-

tion sur les caractères spéciaux de la deuxième phase

de l'attaque, de la phase des grands mouvements. On

remarque en effet que ces mouvements, au lieu de se

faire comme d'ordinaire, dans le sens de l'axe

or r.'rr5-swao-rrtr.r·.rrr. 167

longitudinal du corps qui semble se mouvoir soit eu

avant soit en arrière autour d'un axe transversal

passant par le milieu du bassin, se font principalement

en sens inverse, c'est-à-dire que la malade roule

autour de son axe longitudinal. Ces variétés de

l'attaque sont intéressantes à noter, parce qu'elles

peuvent donner l'explication de certaines épidémies de

convulsions en apparence bizarres que l'on ne peut

rattacher à leur véritable cause, si on n'admet qu'un type

unique et immuable.

Il. zona HYSTËRIQUH.

On a cru pouvoir rattacher à l'hystérie certaines

éruptions vésiculaires mal limitées de la peau', qu'on

pourrait, si cette relation était bien démontrée, rappro-

cher des troubles vaso-moteurs, des rougeurs qui

constituent quelquefois de véritables prodromes

de l'attaque '. Mais nous voulons seulement appeler

l'attention sur une manifestation cutanée qui ne nous

paraît pas avoir été encore signalée, nous voulons

parler du zona hystérique. C'est la malade qui fait le

sujet de l'observation précédente qui en a été atteinte.

Le 3( ! février 1881, V... se plaint d'une douleur dans le côté

gauche de la poitrine, sans toux, sans fièvre, sans fréquence

du pouls. L'auscultation ne révèle aucun bruit morbide, la

percussion donne un son normal au niveau de la région

douloureuse. 11 semble qu'il s'agisse d'une pleurodynie, on

1 Castes. France médicale, 1877.

' Richer. - Études clenigtees sur l'hslBro-Apâlep.cie, 1881, p. 19. -

Ttmrnrwlle t Rrnarrl : 1·onnrTrapirr 1>hnlogrnhkique, t, t, 187f,, p G.

11f1. I I ; I. lll. ISn, p. l'.i.

168 CLINIQUE NERVEUSE.

applique un vésicatoire volant large comme la paume de la

main.

Le 27 la pleurodynie a disparu, et on voit se développer une

zone de sensibilité de 2 centimètres de largeur environ autour

du soulèvement épidermique. Cette zone se confond en bas

avec la zone ordinairement sensible.

Le 1 mars la sensibilité persiste encore sur la surface du vési-

catoire et dans la zone périphérique, mais la malade se plaint

de douleurs brûlantes tellement vives qu'elles lui arrachent des

larmes et siégeant dans la région lombo-abdominale droite par-

tant de la zone hystérogène dorso-lombaire et s'étendant

obliquement suivant la direction des nerfs intercostaux vers la

paroi abdominale antérieure. On n'y voit aucune rougeur,

mais la moindre pression, le contact de la chemise exaspère

les douleurs. , '

Le 2, mêmes douleurs qui empêchent tout sommeil. La

région douloureuse présenté deux plaques rouges, l'une allongée

de douze centimètres environ de longueur sur trois de large, située

au dessus de la crête iliaque et se dirigeant obliquement vers

l'apophyse épineuse de la troisième lombaire; l'autre, moins

longue, située au dessous de la dernière fausse côte etprésentant

la même direction. Cette plaque offre sur certains points une

surface irrégulière comme chagrinée, mais il n'y a nulle part

de vésicules.

Le 3, on voit se développer au centre des plaques rouges,

sous forme de traînées longitudinales, des groupes de vésicules

transparentes. L'éruption est devenue conlluente les jours

suivants et a suivi l'évolution ordinaire du zona; les vésicules

se sont réunies par groupes pour former de petites bulles

irrégulières qui ont laissé des ulcérations superficielles qui se

sont cicatrisées dans l'espace de trois semaines environ

Il reste des cicatrices blanchâtres, et aujourd'hui encore (25

juin) la douleur persiste dans la région occupée par l'éruption.

Il s'agit donc ici d'un zona développé sur le trajet

des nerfs qui ont leur origine au niveau de la zone

hystérogène dorso-lombaire. Il est en outre à re-

marquer que pendant le mois où le zona s'est dé-

veloppé, la malade n'a pas eu d'attaque. La zone hys-

térogène semble avoir déterminé la localisation du

DF 1,'HYSTRO -ÉPI 1,EPSIF. 169

zona, et ce dernier paraît avoir eu une action suspen-

sive sur les manifestations convulsives de l'hystérie.

On pourrait peut-être se rendre compte de la pro-

duction de la névralgie et du zona au niveau d'une

région habituellement sensible ou douloureuse par une

congestion rachidienne localisée (ubi dolor, ibi fluxus)

qui amènerait par la distension des veines une com-

pression des nerfs au niveau de leur sortie du canal

vertébral. D'ailleurs on peut voir le zona se développer

dans d'autres circonstances où, la congestion spinale

peut être incriminée à bon droit; après avoir passé

une après-midi entière à visiter un musée de peinture

toujours debout et dans une position particulièrement t

fatigante un malade, qu'il nous a été donné d'observer

de près, fut pris d'une douleur vive au niveau des

apophyses épineuses des première et seconde vertèbres

lombaires : dans la nuit suivante le développement des

douleurs intenses avec sensation de cuisson sur divers

points du trajet de la branche ilioscrotale gauche, et le

surlendemain ces points douloureux étaient le siège de

groupes [de vésicules d'herpès; le tout a évolué comme

un zona des mieux caractérisés et les douleurs persis-

tent encore au bout de deux ans sur le trajet des nerfs.

III. ANESTUIiSIli ET RHUMATISME AItTICUI.AIRli AIGU.

Les auteurs de {'Iconographie photographique de la

Salpètrière rapportent deux observations danslesquelles

ils ont vu l'anesthésie et les attaques disparaitre à la

dernière période de la phthisie pulmonaire ' ; mais,

1 Rourncullo et Regnnrd. /co7 ! t ? fpo ? N'yMec ? N/-

f/)' ! <'rf,lS7C-)8 ! iO,t.),Uet)n.

170 CLINIQUE NERVEUSE.

il est impossible d'après ces deux faits de décider si

c'est l'épuisement général du sujet qui amène la dis-

parition des troubles nerveux, si la fièvre suffit pour

amener ce résultat, ou si l'amendement des symptômes

propres à l'hystérie est sous l'influence de toute autre

cause. Une hystérique anesthésique a eu l'année

dernière une pleurésie qui a duré cinq semaines, et

pendant laquelle elle est restée sensible depuis les

premiers jours jusqu'à la fin ; ce fait semble indiquer

qu'un épuisement considérable n'est pas nécessaire

pour produire une sédation des troubles hystériques.

La coïncidence de l'hystérie et du rhumatisme

articulaire aigu n'est point rare ; Briquet l'avait déjà

notée et il pensait que le rhumatisme agissait comme

cause prédisposante à cause du traitement antiphlo-

gistique qu'il nécessitait '. Nous avons observé une

attaque de rhumatisme articulaire aigu qui nous

paraît intéressante au point de vue de l'étude de

l'influence de la fièvre sur l'itiestliésie hystérique.

C... (Virginie), dix-huit ans, est entrée à la Salpètrière (ser-

vice de M. Charcot) le 27 novembre 1880.

Antécédents héréditaires. Son père est devenu épileptique

pendant qu'il était au service militaire, il a des grandes et

fréquentes attaques. La mère, morte poitrinaire à vingt-neuf

ans, ne parait pas avoir été nerveuse, mais elle semble avoir

eu plusieurs attaques de rhumatisme. Il est né onze enfants

de ce mariage, six sont morts; il reste cinq filles, notre malade

est la seconde; pas de renseignements sur les autres, sauf sur

l'aînée qui se porte bien. Oncle maternel rhumatisant.

Antécédents personnels. A trois ans, elle aurait eu des

convulsions. Etant enfant, elle a eu des douleurs de croissance.

1 Briquet. Traité clinique rt thérapeutique de <'Av ! /f')';f, )Mf.,

DE 171

Réglée à onze ans. A douze ans, elle a eu une première attaque

de rhumatisme généralisé qui l'a tenue deux mois au lit.

Presque immédiatement après ses premières règles, à onze

ans, elle a eu une première attaque qu'elle ne peut pas bien

définir : elle aurait eu une perte de connaissance qui aurait

duré une demi-heure, elle ne sait pas si elle a eu des convulsions,

elle ne parait pas s'être mordu la langue, ni avoir uriné dans ses

vêtements. A partir de ce moment, elle a eu des attaques

analogues tous les quinze jours ou tous les huit jours.

C'est seulement à partir de quatorze ans qu'elle se souvient

d'attaques analogues à celle qu'elle a aujourd'hui, précédées

de sensation de boule qui remonte du ventre au cou, batte-

ments dans la tempe gauche, chute, convulsions, etc. ; et dès

cette époque on aurait constaté l'anesthésie.

Il y a un an,, elle fut contrariée à propos d'un mariage

qu'elle voulait faire et auquel son père s'est opposé. Elle quitta

la maison et vint à Paris où elle vécut avec son amant. Quelques

jours après son arrivée, elle fut prise des grandes attaques dont

nous sommes témoins depuis son entrée à la Salpètrière.

Étal actuel ( 15 janvier 1881). C... est une blonde assez bien

constituée, elle est maigre et un peu pâle. EUeest sujette à des

battements de coeur et on constate un souflle doux à la pointe

et au premier bruit.

C... est anesthésique totale, elle ne sent ni le contact, ni la

piqûre, ni le froid, ni le chaud, mais elle a conservé le sens

musculaire, elle se tient très bien debout les yeux fermés. Elle

entend un peu moins bien la montre du côté gauche.

Vue. -L'acuité visuel le = 0 gauche, elle est de sept dixièmes

delà normale adroite. Le champ visuel est très rétréci des

deux côtés, mais surtout à gauche où il n'a guère que dix degrés

en moyenne (périmètre de Landolt), tandis qu'à droite il a à

peu près trente degrés sur toute la en conférence; il s'agit d'un

rétrécissement à peu près régulièrement concentrique, un

peu plus prononcé du côté nasal. La vision des couleurs est

complètement abolie à gauche, (,il C... ne voit que gris et blanc

sale. A droite, elle voit toutes les couleurs et toutes les nuances,

sauf le violet qui est w grs et le jaune clair qui est vu blanc

sale.

L'état de la sensibilité oculaire est en rapport avec celui do

la vision. A gauche comme à droite on peut toucher la con-

jonctive sans provoquer aucun réflexe, ni mouvement des pau-

172 CLINIQUE NERVEUSE.

pières ou de l'oeil, ni sécrétion de larmes; mais tandis qu'à

droite, il est impossible de toucher la cornée, sans que l'oeil se

retire immédiatement et sans que les paupières se ferment, à

gauche, on peut conduire au contact de la conjonctive, puis

de la cornée, une bande de papier qui ne produit de réflexe, et

ne détermine l'occlusion des paupières et la rétraction de

l'oeil que lorsqu'elle arrive dans le champ pupillaire. Si, au lieu

de se servir d'un objet mince, on prend pour cette exploration

un objet d'une certaine épaisseur, on peut ne pas obtenir le

même résultat à cause de l'ombre portée, c'est la rétine qui

sent et non la cornée.

Lorsqu'on provoque le transfert soit par l'aimant, soit par

une pile sèche, la cécité des couleurs passe à droite avec l'in-

sensibilité cornéenne.

La région ovarienne gauche est spontanément douloureuse

et sensible à la pression.

Points hyslérogènes. il sur la 12° côte gauche, sur la

partie latérale du tronc ; 2° sur la 7" gauche sous le sein ;

3° au-dessus du sein droit sur la il côte; le, sur les apophyses

épineuses des 6° et 7° vertèbres dorsales.

C..., assez peu intelligente, a le caractère difficile; elle ne s'en-

tend avec aucune de ses camarades, ou si cela lui arrive quel-

quefois c'est pour tramer quelque complot dont elle se tire à

temps pour n'être pas trop compromise. Elle est très difficile à

mener et cherche continuellement à tromper.

Ses attaques ont toujours lieu pendant le jour, elles varient

considérablement de fréquence suivant les mois. Elle en a eu

16 pendant le mois de novembre, 79 pendant le mois de

décembre, 17 pendant le mois de janvier.

Attaques. L'attaque est annoncée par une recrudescence

de la douleur ovarienne, par une sensation de boule qui part de

l'épigastre vers la gorge et redescend une ou deux fois; avec

battements dans les tempes principalement à gauche, et siffle-

ments prédominant aussi dans l'oreille gauche.

Elle tourne la tête à gauche en raidissant le cou qui se

gonfle. A ce moment, on voit que la pupille s'est rétrécie. Les

paupières se mettent à battre sans arrivera l'occlus) on complète.

Les pupilles se dilatent largement, les deux bras le

long du corps et se raidissent, les poings sont fermés les pouces

en dehors, la main légèrement fléchie et dans la rotation en

dedans. Les deux bras battent le matelas, la tète revient dans

DE 173

la rectitude et la malade fait entendre des cris saccadés. Le

bassin fait quelques mouvements rhythmiques de propulsion

pendant que la paroi abdominale est projetée par secousses;

puis le bassin se soulève, la tète se renverse fortement en

arrière, et la malade ne porte plus sur son lit que par levertex

et les talons, le corps forme un axe à convexité ventrale dont

la flèche a 30 ou 0 centimètres. Elle reste ainsi quelques

secondes, puis retombe à plat sur le dos. Elle s'asseoit, regarde

fixement pendant quelques minutes, puis tout rentre dans

l'ordre,ou l'attaque recommence pour former une série plus ou

moins longue. Pondant cette phase de regard fixe, qui constitue

chez C... la phase du délire ou des attitudes passionnelles, on

remarque que la pupille, sous la même lumière, se rétrécit et se

dilate alternativement à des degrés variables et pour un temps

plus ou moins long, comme si elle se contractait pour s'accom-

moder pour la vision d'objets situés à des distances variables

daus une hallucination. Quand le regard est absolument fixe,

on peut appuyer le doigt sur la pupille sans qu'elle se dévie

d'un côté ou de l'autre, comme du reste pendant toute la durée

de l'attaque.

Les attaques ne sont jamais isolées, elles se reproduisent tou-

jours parsériesde nombre variable; mais les attaques qui les

constituent sont toujours identiques. Les séries ne laissent

après elles aucune hébétude, la malade peut reprendre ses

occupations, elle est seulement courbaturée.

Le 2 jamicr, C... se plaint de douleurs dans le côté gauche

de la poitrine, elle ne tousse pas et on n'entend aucun bruit

morbide dans tout le côté, cependant elle est oppressée.

25. Même état. Trente ventouses sèches.

26. Douleurs dans l'épaule gauche, dont les mouvements

sont devenus douloureux sans que l'insensibilité de la peau ait

disparu.

- 27. Les douleurs s'étendent au coude gauche et à l'épaule

droite sans gonflement. La langue est sale, l'appétit nul, mais

pas d'élévation de température. Purgatif.

30. Les douleurs sont restées à peu près stationnaires, peu in-

tenses, toujours sans gonflement ni rougeur ; dyspnée, bruits

du coeur tumultueux; le souffle de la pointe parait avoir aug-

menté. Ventouses sèches.

31. C... a été soumise la veille à l'élcctrisation statique qui a

cessé à deux heures et demie, elle avait recouvré sa sensibilité

171 i i UNIQUE MORVEUSE.

totale. - Ce matin elle est encore sensible sur la moitié droite

du corps. Les douleurs ont un peu diminué; C... se lève.

12 lëvi-iej,. Les douleurs se sont considérablement accrues et

généralisées à toutes les articulations des membres. Autour des

cous-de-pied il existe un gonflement oedémateux très manifeste;

Les genoux sont aussi gonflés et en est de même des poignets

et des coudes. Aux poignets et aux articulations de la main et

des doigts, il existe non seulement du gonflement, mais de la

rougeur. Le moindre mouvement exaspère les douleurs, mais

la peau est restée insensible, on peut la transpercer complète-

ment au niveau des articulations les plus atteintes sans pro-

voquer la moindre douleur. C... peut être hypnotisée et cata-

leptisée comme d'ordinaire.

Les battements du coeur sont très tumultueux et irréguliers.

T. rectale 39', 9 le malin, 40", t le soir.-Salicylate de soude,

6 grammes.

3. Même intensité des douleurs articulaires, même insensibilité

cutanée. Oppression trèsintense, irrégularité des bruitsducoeur.

T. 40° le matin, 40", j 5 le soir. - Vesicatoire sur la région pré-

cardiale. Salicylate de soude, 6 grammes. Lait.

4. Même état. T. 10°, 1 le matin, 40°, 4 le soir. Même trai-

tement,purgatif.

5. T. t0° le matin, 40°, 3 le soir. Par l'application de

l'aimant, on a obtenu le transfert des troubles visuels.

6. T. 40°, 1 le matin, 39°, 8 le soir.

7. T. 39°, 3 le matin, 39°, 2 le soir.

8. T. 39°, 2 le matin, 39», 3 le soir.

9. T. 39°, le matin, 39°, 2 le soir. Epistaxis, douleur ova-

rienne gauche, menace d'attaque, application de la ceinture ;

les douleurs sont un peu moins vives.

10. La malade sent que l'attaquc est imminente(bonle, bour-

donnements d'oreilles, battements dans les tempes) malgré

l'état du coeur, on administre de l'éther avec précaution jus-

qu'à résolution complète pour éviter les attaques; la malade

revient bien sans accident. Les douleurs ont notablement

diminué, les pieds et les genoux sont même presque libres;

mais la rougeur et le gonflement persistent encore aux arti-

culations des doigts. L'insensibilité de la peau est toujours la

même. La malade, quoique très affaiblie, a un peu d'appétit.

T. 38°, 4 le matin, 39° le soir.

Lt; i,msniato-i : mn.t : rair. 175

11. Le mieux persiste ; les douleurs se sont encore atténuées,

la rougeur a à pou près complètement disparu aux mains où il

existe encore du gonflement. On peut s'assurer que non seule-

ment la sensibilité de la peau, mais encore la sensibilité spé-

ciale n'ont pas été modifiées par le rhumatisme articulaire

aigu; la vue, l'ouïe et l'odorat n'ont subi aucune modifica-

tion. T. 38° le matin, 38°, 2 le soir.

A partir de ce moment la température ne monta plus au

dessus de 38°, et la période aiguë de l'attaque de rhumatisme

put être considérée comme terminée; mais il resta des dou-

leurs subaiguës qui persistèrent pendant tout le mois de mars,

alternativement dans toutes les articulations, et le 8 avril, les

épaules étaient encore un peu sensibles dans les mouvements.

Nous n'avons pas insisté sur tous les détails de cette

attaque de rhumatisme articulaire qui n'a rien pré-

senté de particulier dans sa mai elle, nous avons voulu

surtout montrer qu'il s'agissait bien d'un cas aigu

avec douleurs vives, et une élévation considérable de

la température ; les douleurs articulaires ont persisté

pendant plusieurs semaines sans modifier l'anesthésie

générale et spéciale ; nous verrons plus tard que les

douleurs de l'accouchement ne la tnodifienthas davan-

tage. D'autre part, nous voyons pendant la période

fébrile des menaces d'attaque, qui ont eu un commen-

cement d'exécution, et lorsque les douleurs per-

sistaient encore, le 24. mars, C... a eu trois attaques.

L'élément spasmodique n'est donc pas non plus

modifié sensiblement par la fièvre. Ce fait semble-

rait donc indiquer que si la marche de l'hystéro-

épilepsie est modifiée par certaines affections fébriles

intercurrentes, ce n'est pas l'élément fébrile qui est la

cause de cette modification; ce n'est pas non plus l'élé-

ment douleur, cette cause reste à cherclier. (A suivre.)

RECUEIL DE FAITS

LÉSION A\(;II : \\1 : UU 1,01,UI,E DL L'INSULA;

a

Par t30Ut111s·fLl,l : et 1W\NAIRI : .

Les lésions limitées exclusivement au lobule de l'insula sont

très rares ; le plus souvent la lésion intéresse, à des degrés

divers, les circonvolutions voisines. Aussi ne connait-on pas

encore les symptômes cliniques qui répondent aux lésions du

lobule de l'insula. Dans le cas qu'on va lire et que nous

publions à titre de document la lésion avait détruit entière-

ment toutes les digitations du lobule de l'insula.

OBSERVATION. Attaque apoplectique. - Hémiplégie gauche;

Contracture ; Phénomènes réflexes. Alcoolisme.

EJt'lepste; - Marche des accès; - Démence; - Mal penfo-

rcttzt ; - Mort.

Autopsie : Destruction du lobule de l'insula du colé droit;

Atrophie de la couche optique et du corps strié correspondants;

Dégénération secondaire; Lésions tuberculeuses des

poumons.

Carr... (François), âgé de cinquante-quatre ans, charpentier,

est entré le 4 juin 1868, à Bicêtre (service de M. l3ouawvu,x,L).

Retzseignemet7ts fournis par sa &e6-sa'« ? ' '. M, cultivateur,

mort on ne sait de quoi. Mère, morte quand notre malade

était en bas âge. Deux scetws en bonne santé, mariées, sans

enfants. Pas d'épileptiqucs, pas d'aliénés, etc., dans la famille.

Notre malade s'est marié à 34 ans; il ne faisait pas d'excès

de boisson, mais fumait beaucoup. Dix-huit mois après son

mariage, il a été brusquement frappé d'hémiplégie gauche : étant

1 C'est ce qui l'insuffisance (les 1 eiisei-il t'Ili ciiis qu'on va lire.

recueil DE faits. 177

à la garde-robe, il est tombé sur le sol et est resté dans cet

état, ayant gardé, dit-on, toute sa connaissance ( ? ), jusqu'à ce

que sa femme, étonnée de son absence, vint à son aide. Il

serait resté quinze jours au repos forcé, après quoi, il recom-

mença à marcher en tramant la jambe et en se soutenant

sur une canne.

Les accès d'épilepsie se sont déclarés environ six ans après

l'attaque paralytique. Durant cet intervalle, notre malade

gagnait sa vie à ouvrir les portières des voitures sur la voie

publique, et s'adonnait en même temps à la boisson. Par suite

de la multiplicité des accès, il dut renoncer à son travail et en-

trer à Bicètre. A l'hospice, il persévéra dans ses habitudes

d'alcoolisme, et l'on dut le faire passer de l'hospice des vieillards,

dans la section des épileptiques.

11 y a quatre ans, il avait encore de la mémoire, reconnais-

sait tout son monde, avait une conversation suivie. Aujour-

d'hui, sa mémoire a totalement disparu, et il reste indifférent

aux choses du dehors. En même temps que les facultés

mentales, le physique s'est notablement affaissé depuiscette

même époque, et il s'est produit, parait-il, un amaigrissement

considérable. A part l'état parétique dépendant de l'ictus

primitif, le malade n'a présenté d'autres symptômes de lésion

encéphalique durant ce laps de temps, que des atteintes in-

termittentes de céphalalgie. On ne trouve d'ailleurs aucun

antécédent morbide chez lui. Il a deux filles de son mariage,

âgées l'une de 22 ans et l'autre de 17, toutes deux de bonne

santé.

1880. Septembre. ? yse/e phlegmoneuxde laparoi thora-

cique, consécutif à un anthrax. Incision et pansement de Lister.

1881. 10 juin. - Le malade présente un état d'agitation

considérable, cherche à sortir du lit, prononce des paroles in-

cohérentes. Il a eu deux accès hier (chloral, 4 gr.).

11 juin. Un accès hier. Ce matin l'excitation maniaque est

remplacée par un état de torpeur très prononcé ; la respiration

est rapide et embarrassée, avec un léger degré de stertor. On

ne trouve de symptômes localisés ni dans la poitrine, ni dans

l'abdomen. Pas de troubles de la sensibilité (ventouses sèches

sur le thorax ; ventouses scarifiéesà la nuque ; lotions vinaigrées ;

sinapismes aux membres inférieurs ; potion cordiale). T. R.

381,4. - Soz'î -. T. R. 380,4.

178 RECUEIL DE FAITS.

12 juin. La stupeur a diminué. Lorsque l'on explore,

par la piqûre, la sensibilité d'un des membres paralysés, on

voit le membre correspondant du côté sain s'agiter de violents

mouvements réflexes. T. R. 38°,6. Lavement purgatif; potion

deTodd; café).

21 juin. Un accès ; Car... n'en avait pas eu depuis le 10 ;

amélioration.

Examen physique (22 juillet). Tète /crâne symétrique ; cal-

vitie complète ; la suture sagittale se dessine sous la peau, en

forme de crête. L'occipital est déprimé au niveau de son articu-

lation avec les pariétaux, le cuir chevelu présente une cicatrice

en Y répondant exactement aux traits de suture. Le visage est

asymétrique par suite de la paralysie faciale qui occupe le côté

gauche. On note l'effacement du sillon naso-jugal, la déviation

du nez, l'abaissement de la commissure buccale, en même

temps que l'affaissement delà joue et du menton. La langue se

dévie du côté paralysé.

Thorax et abdomen normalement conformés.

Membres supérieurs. Le bras gauche est raide avec contrac-

ture ; l'avant-bras et le poignet sont en pronation forcée avec

demi-flexion : les doigts sont repliés sans raideur dans le creux

de la main, tandis que le pouce se trouve en légère adduction.

Du côté droit, l'attitude est normale.

La mensuration comparative des deux membres donne les

résultats suivants :

RECUEIL DE FAITS. 179

fecte les dimensions d'une pièce de 1 franc ; le stylet s'y enfonce

à une profondeur de 6 millimètres sans déterminer de dou-

leur ; tout autour existe la couche de squames épidermiques

habituelle, au-dessus de laquelle la sensibilité reste normale.

Voici les mensurations comparatives des deux membres :

180 RECUEIL DE FAITS.

souvent qu'il a été occupé chez le général Morin, où il astiquait

les harnais, et demande sans cesse la même occupation ici. A

une époque de son séjour, il s'était ingénié à boire son urine

pour guérir ses accès d'épilepsie et à se faire tirer violemment

le bras paralysé par d'autres malades, afin de guérir sa para-

lysie.

23 juillet. Le malade, qui depuis quelque temps était

revenu à son état normal, retombe aujourd'hui dans la stupeur

et l'adynamie; l'oppression est intense (50 respirations par

minute). Les pommettes sont rouges. Le pouls est petit, rapide,

assez régulier, à 130.

A l'auscultation, on perçoit des râles sibilants et ronflants

des deux côtés de la poitrine ; le murmure vésiculaire s'entend

difficilement. Il existe de la matité dans toute l'étendue du

thorax. Les vibrations vocales sont exagérées.

La sensibilité est normale des deux côtés ; les réflexes sont

plus prononcés du côté gauche. (Vomitif; vésicatoire; potion

avec rhum et extrait de quinquina.) Soir : T. R. 39°,2.

24 juillet. L'état adynamique s'accentue. Les lèvres et la

langue se recouvrent de fuliginosités; la dyspnée augmente.

On entend dans le poumon gauche à la partie supérieure un

souffle bronchique profond, masqué en partie par de nombreux

râles sous-répitants. A droite, mêmes râles. Le malade com-

prend les questions qu'on lui adresse et y répond à peu près

exactement. T. R. 39°,2.

25 juillet. Mort à trois heures de l'après-midi.

Autopsie vingt-quatre heures après la mort. Absence de

rigidité cadavérique.

Thorax. Il existe quelques adhérences pleurales récentes

en arrière et à gauche. Tout le poumon droit est friable, dense,

crépite légèrement et surnage. A la coupe, il s'écoule une

sérosité abondante et non purulente. Le parenchyme est farci

d'une multitude de noyaux caséeux dont le volume varie de

celui d'un mil à celui d'une lentille. Le poumon gauche pré-

sente dans son lobe inférieur, au niveau de la gouttière costo-

vertébrale, un foyer de la largeur de la main ; le parenchyme

est déprimé, d'une teinte feuille-morte à la surface ; il existe en

outre trois ouvertures vraisemblablement artificielles et pro-

duites par la pression du doigt qui a dû rompre les adhérences

pleurales. Elles donnent accès dans une vaste caverne à parois

déchiquetées. Le reste du lobe est induré; son tissu est comme

RECUEIL DE FAITS. )8t

carnirié, ne crépite pas, et plonge quand on le jette dans l'eau.

Les vaisseaux sanguins, voisins de la caverne, sont obstrués

par des caillots récents. Le contenu du foyer est constitué par

un putrilage gris ardoisé, avec un liquide sanieux, noirâtre et

fétide qui s'écoule par les bronches. Le lobe inférieur renferme

de plus, en outre de quelques noyaux de gangrène analogues

au précédent, mais plus petits, un semis de nodules de broncho-

pneumonie caséeuse, identiques à ceux du poumon droit. Le

lobe supérieur est intact. Les ganglions péribronchiques sont

volumineux, indurés et anlhracosés. Coettî, : 130 gr. Sur-

charge graisseuse, principalement sur la face antérieure. Pas

de lésions valvulaires. Le ventricule gauche renferme un

caillot fibrineux avec des traces de stratification. L'oreillette

contient un caillot noir, volumineux et récent.

Abdomen. Foie, 300 gr. normal. Rate, 130 gr., diffluente.

7eMs 550 gr. chacun; l'altération sénilo est très marquée,

surface granuleuse ; cicatrices rayonnées dues à d'anciens

kystes superficiels; surcharge graisseuse des calices et bas-

sinets. Estomac .'la muqueuse est saine. L'organe renferme

des produits noirâtres, semblables au putrilage pulmonaire.

et la vessie sont intacts.

Tète. Le cuir chevelu est très épais et très adhérent ; la calotte

crânienne est dure et épaisse ; la dure-mère est fortement fixée

aux sutures de la voûte d'une part, et à la pie-mère de l'autre.

Le liquide céplaalo-racleailaen est assez abondant.

Encéphale, 1,1 GO gr. La surface est un peu lavée; les artères,

les nerfs de la base sont sains. Le tubercule mamtV/a/re droit est

d'un tiers plus petit que le gauche, et de coloration normale.

Le pédoncule cérébral droit est notablement atrophié, aplati et

moins large que le gauche ; il en est de même de la moitié

droite de la protubérance. La pyramide antérieure droite est

représentée par un cordon aplati de teinte grisâtre et sur le

même niveau que l'olive correspondante. En somme, la moitié

droite de l'isthme de l'encéphale est moitié moins volumineuse que

celle du côté opposé. Sur une coupe, la surface de section du

pédoncule cérébral droit est de deux tiers moindre à droite

qu'à gauche. Les tubercules quadrijumeaux sont normaux.

L'hémisphère cérébral droit pèse 1 li grammes de moins que le

gauche, et sa longueur est moindre d'un centimètre. Le cerveau

pèse 970 grammes. Le cervelet est sain ; ses deux hémis-

phères sont égaux.

182 RECUEIL DE FAITS.

Hémisphère cérébral gauche. La décortication est facile;

les circonvolutions se dessinent nettement ; il n'y a rien d'anor-

mal, tant à la surface que dansles noyaux gris centraux (Fig 9).

Hémisphère droit. A travers les méninges on aperçoit une

dépression considérable au niveau du lobule de l'insula et du

lobe sphénoïdal. Partout la pie-mère se détache aisément, sauf r

sur les points dont nous venons de parler, où elle est épaissie

et d'une couleur brune, rougeâtre, un peu ochreuse. La dé-

pression superficielle est comblée par un réservoir du liquide

céphalo-rachidien. La pie-mère enlevée , l'hémisphère se

montre aplati. On trouve un foyer atrophique qui a détruit :

1° toute la partie postérieure de la troisième circonvolution

frontale (le reste de cette circonvolution n'est qu'amaigri) :

2° la partie inférieure de la frontale et de la pariétale ascen-

dantes, le pli qui unit l'extrémité inférieure do ces deux cir-

convolutions ; 3° la plus grande partie du lobule du pli courbe

(PL. VI, P 2). Le lobule de l'insula. dans sa totalité, est dé-

truit, il ne reste plus aucune trace des digitations; la première

temporo-sphéno'idale et la partie postérieure de la seconde cir-

convolution offrent la même altération.

Le parenchyme est remplacé par une sorte de membrane

d'aspect gélatineux, de consistance mollasse et de coloration

rougeâtre, sur le lobule de l'insula, de telle sorte que, entre

Fig, 9. C , corps calleux. C. S., corps strié.

0., couche optique.

RECUEIL DE FAITS. 183

l'extérieur et la paroi ventriculaire, il n'existe plus qu'une mince

couche de substance blanche. Les circonvolutions du voisi-

nage sont atrophiées, sans changement de couleur. (PL. VI.)

Le corps strié, considérablement réduit dans son volume,

n'existe plus que sous forme de deux petits noyaux du volume

d'un gros haricot. La couche optique est diminuée d'au moins

les deux tiers de son volume et déformée. La paroi du ventri-

cule latéral est amincie ; et sur le plancher de cette cavité, on

voit se lever un faisceau de vaisseaux sanguins. (Fig. 10). Sur

la coupe des masses centrales grises, on ne découvre pas de

foyer. La capacité du ventricule est sensiblement accrue.

Considéré dans son ensemble, l'hémisphère cérébral droit

est moins long, moins épais et moins haut que l'hémisphère

gauche. Déjà la différence de poids (t t0 gr.) que nous avons

indiquée le faisait pressentir, mais les chiffres suivants en don-

nent une idée exacte :

181 î- RECUEIL DE FAITS.

Réflexions. Cette observation nous offre un exemple

remarquable de l'enchaînement régulier des altérations qui se

développent dans l'axe cérébro-spinal consécutivement à une

lésion cérébrale en foyer, ayant causé une hémiplégie et secon-

dairement une sclérose fasciculée descendante de la moelle.

I. Il est probable, dans notre cas, que c'est sous l'influence

des efforts de défécation du malade qu'un caillot est venu pro-

duire l'obstruction vasculaire près de l'origine de l'artère

sylvienne. Cette localisation est rendue manifeste par ce fait

que le territoire de l'artère de la troisième circonvolution fron-

tale, laquelle, comme on sait, se détache prématurément du

tronc de la cérébrale moyenne, se trouve englobé dans la zone

ischémiée.

II. Nous n'avons que peu de détails sur les accès d'épilepsie :

on les disait très violents. Ils s'annonçaient généralement par

une période d'excitation, accompagnée d'une céphalalgie in-

tense et survenaient principalement pendant le jour. A la fin

de la crise, il n'y avait ni écume buccale, ni évacuations in-

volontaires ; maintes fois ils ont été compliqués d'excitation

maniaque, en général passagère, et à laquelle succédait parfois,

ainsi que nous l'avons observé nous-mêmes on juin dernier,

un état de torpeur qui persistait deux ou trois jours. Il serait

difficile, en présence de cette pénurie de données cliniques,

d'affirmer s'il s'agit dans ce cas d'épilepsie vulgaire ou d'épilep-

siejacksonienne. En faveur de cette dernière hypothèse, on

pourrait invoquer l'intensité des phénomènes cephaliques, qui

précédaient et suivaient la crise. Mais, d'autre part, les accès

survenus six ans après l'apoplexie sont allés sans cesse en

augmentant, ainsi que cela a lieu le plus souvent dans l'épi-

lepsie vulgaire. Voici d'ailleurs, leur marche de 1871 à 1881 :

RECUEIL DE FAITS. 185

III. L'intelligence diminuait en même temps que les senti-

ments affectifs; sa femme était morte et, néanmoins, il la

réclamait non pas par affection, mais pour avoir quelques dou-

ceurs. Cette déchéance intellectuelle vient appuyer l'idée d'une

épilepsie vulgaire, car, dans l'épilepsie hémiplégique, l'intel-

ligence, en général, ne subit pas d'atteinte ; elle reste la même.

La santé physique se maintenait en apparence : le malade allait

et venait, ne toussait pas et ne paraissait pas avoir d'oppres-

sion ; sa voix restait forte ; rien en un mot ne faisait pres-

sentir l'existence des lésions pulmonaires, à marche chronique,

que nous avons rencontrées à l'autopsie. Le développement

de lésions organiques graves, sans réaction appréciable, n'est

pas chose rare chez les malades, comme le nôtre, atteints de

démence ou de débilité mentale.

IV. Nous croyons inutile de revenir sur les caractères et le

siège de la lésion. Toutefois, nous devons signaler l'absence

d'aphasie, avec une lésion de la partie postérieure de la troi-

sièine circonvolution frontale DROITE, ce qui vient à l'appui de

la théorie qui localise la faculté du langage dans la région cor-

respondante de l'hémisphère gauche. Nous devons signaler

aussi cette atrophie, ou si l'on préfère,- cet amaigrissement gé-

néral des circonvolutions de toute la face convexe de l'hémis-

phère droit, conséquence d'une lésion survenue à trente-six

ans. Quel est le rôle de la lésion du lobule de l'insula dans

cette atrophie ? 2 .

V. La dégénération secondaire partie du foyer périphérique,

qui avait détruit le lobule de l'insula, les parties avoisinantes

des circonvolutions (et on particulier de la frontale et de la

pariétale ascendantes), et produit une atrophie considérable

de la couche optique et du corps strié (Faj. 9 et 10), s'est

propagée à la moelle en atrophiant sur son passage une partie

de la couronne rayonnante de Reil et des noyaux gris cen-

traux. D'autre part, il est facile de suivre à I'oeil nu les traces

de la sclérose descendante à travers l'étage inférieur de la pro-

lzzbérazzce, du pédoncule cérébral et la pyramide antérieure du

bulbe, etc. Pour ce qui est de l'existence de la sclérose fasci-

186 RECUEIL DE faits.

culée dans les cordons latéraux, elle était rendue évidente, pen-

dant la vie, par les phénomènes d'épilepsie spinale, l'exagéra-

tion àesréflexes tendineux et la contracture.

VI. Nous signalerons enfin, comme dernière particularité,

la coïncidence du mal perforant plantaire avec l'hémiplégie

sur le côté gauche. L'apparition de cette ulcération sur un

membre condamné à une inaction fonctionnelle relative, et

par conséquent en dehors des causes externes généralement

considérées comme déterminantes du mal perforant, nous per-

met de ne considérer cette lésion, dans le cas actuel, que comme

un simple trouble trophique d'origine centrale. On pourrait

donc invoquer ce fait comme preuve à l'appui de la théorie

qui considère le mal perforant comme une affection de nature

essentiellement nerveuse'.

explication DE la planche VI

L, 1, foyer ancien ayant détruit le lobule de l'insula.

7 ? partie atrophiée delà troisième circonvolution frontale.

F a, circonvolution frontale ascendante dont la partie inférieure est

atrophiée.

P a, circonvolution pariétale ascendante dont l'extrémité inférieure est

atrophiée.

7 ? lésion de la première circonvolution tempoto-sptiénoiddte.

Te, deuxième circowolution temporale dont l'extrémité posténeuie est

lésée.

P 2, lobule du pli courbe.

L. 0, lobe oibilaire (face intérieure du lobe Iroutal).

,11, membrane résultant : 1° des ieplis de la pie-mère qui enveloppaient

entre autres la première circonvolution temporale et le lobule pariétal

inférieur; 2" des débris de ces mêmes circonvolutions.

Voir sur ce sujet : Duret, Archives de Physiologie, 1874 ; Charcot

et Pitres, Revue mensuelle de médecine et de chirurgie, 1877; Grasset,

Des localisations dans les maladies cérébrales; H. de Bojer, Études

topographiques sur les lésions corticales des hémisphères cérébraux;

Ferrier, De la localisation dans les maladies du cerveau , travaux où sont

consignées la plupart des observations connues ielatives aux lésions du

lobule de l'insula.

REVUE CRITIQUE

CARACTÈRE, MOEURS, ÉTAT MENTAL DES HYSTÉRIQUES'

Par le Dr Henri HUCHARD, médecin de l'hôpital Tenon.

Tous les auteurs qui ont décrit l'hystérie, s'étendent avec

un soin jaloux sur la description complète des accidents con-

vulsifs, des troubles sensitifs et moteurs, des phénomènes

viscéraux, que la grande névrose peut produire ; mais

aucun d'eux n'insiste d'une façon particulière sur l'état des

facultés mentales ou affectives ; aucun d'eux ne nous montre

l'hystérique au point de vue moral et intellectuel avec les

tendances et les traits si saillants de son caractère. Et cepen-

dant, il n'y a pas de question qui puisse davantage intéresser

le clinicien et le médecin légiste, il n'y en a pas qui puisse

également devenir un sujet d'étude plus important pour le

psychologue et le moraliste, enraison du rôle que les hystériques

peuvent jouer dans les sphères petites ou grandes de la so-

ciété où elles sont trop souvent méconnues. On a donc eu

absolument tort de laisser dans l'ombre cette étude si inté-

ressante ; et c'est pour comblercettelacune, qu'ilnous a semblé

utile de réunir dans une vue d'ensemble tout ce que l'on

sait sur ce sujet, en nous inspirant non seulement de nos

recherches personnelles, mais aussi des observations rapportées

par nos devanciers, Tardieu, Moreau (de Tours), Lasègue,

Legrand du Saulle, Charcot, Bourneville, etc.

Les hystériques peuvent présenter pendant leur existence

des troubles intellectuels ou de simples aberrations de carac-

tère sans avoir ni attaques, ni autres manifestations de la

névrose ; d'autres fois aussi, les perversions intellectuelles ou

mentales peuvent précéder pendant un temps plus ou moins

1 Extrait d'un ouvrage sur les 1\cvnosLS, qui doit incessamment

paraître.

f88 revue critique. ? r

long les manifestations somatiques ; plus souvent elles leur

succèdent, soit immédiatement, soit longtemps après.

I. Un premier trait de leur caractère est la mobilité. Elles

passent d'un jour à l'autre, d'une heure ou d'une minute à une

autre, avec une incroyable rapidité, de la joie à la tristesse, du

rire aux pleurs ; versatiles, fantasques ou capricieuses, elles

parlent dans certains moments avec une loquacité et une

animation étonnantes, tandis que dans d'autres elles de-

viennent sombres et taciturnes, gardent un mutisme complet,

restent plongées dans un état de rêverie, de dépression mentale

dont on peut difficilement les faire sortir ; elles sont alors

prises d'un sentiment vague et indéfinissable de tristesse

avec sensation de serrement à la gorge, de boule ascendante,

d'oppression épigastrique, et éclatent en sanglots, ou elles

vont cacher leurs larmes dans la solitude qu'elles réclament

et qu'elles recherchent; d'autres fois, au contraire, elles se

mettent à rire d'une façon immodérée, sans motif sérieux.

Elles se comportent en un mot, dit M. Ch. Richet, « comme les

enfants que l'on fait rire aux éclats alors qu'ils ont encore sur

la joue les larmes qu'ils viennent de répandre ».

Leur caractère change comme les vues d'un kaléidoscope, ce

qui a pu faire dire avec raison par Sydenham, que ce qu'il y a

de plus constant chez elles c'est leur inconstance. Hier elles

étaient enjouées, aimables et gracieuses, aujourd'hui elles sont

de mauvaise humeur, irascibles et susceptibles, se fâchant de

tout et de rien, indociles par système, taquines par parti pris,

maussades par caprice, mécontentes de leur sort ; rien ne les

intéresse, elles s'ennuient de tout. Elles éprouvent une antipa-

thie très grande contre une personne qu'hier elles aimaient et

estimaient, ou au contraire d'une sympathie incompréhensible

pour telle autre; aussi poursuivent-elles de leur haine certaines

personnes avec autant d'acharnement qu'elles avaient autrefois

mis de persistance à les entourer d'affection. Bergeret d'Ar-

boisnous montre une hystérique qui fait condamner à plusieurs

mois d'emprisonnement, et même à cinq ans de réclusion, des

innocents pour lesquels elle avait conçu un violent sentiment

de haine 1. C'est encore là l'histoire si souvent renouvelée du

malheureux mari qu'hier elles aimaient tendrement, et qu'au-

i Annales d'hygiène publique et de médecine légale, 1863.

ÉTAT MENTAL DES HYSTERIQUES. 189

jourd'hui elles ne peuvent plus voir; elles se plaignent alors de

ne plus recevoir les preuves d'une affection qu'elles repoussent,

portent contre leur mari des accusations sans nombre et sans

nom; delà, dans le foyer domestique, des troubles et des

discussions sans cesse alimentées par leur esprit d'agression,

par leur imagination féconde et désordonnée, de là aussi ces

demandes, ces procès en séparation de corps, où les hysté-

riques accusent, se défendent pendant des heures avec une

lucidité parfaite, avec un accent de conviction et de sincérité

bien propre à émouvoir les juges en leur faveur.

Parfois, leur sensibilité est exaltée au plus haut point pour

les motifs les plus futiles, alors qu'elle est à peine touchée

par les plus grandes émotions : elles restent presque indiffé-

rentes, impassibles même à l'annonce d'un vrai malheur, elles

deviennent tout à coup d'une extrême susceptibilité, versent d'a-

bondantes larmes, s'abandonnent au désespoir le plus profond

pour une simple parole mal interprétée, et transforment en

offense la plus légère plaisanterie. Cette sorte d'ataxie morale

s'observe encore pour leurs intérêts les plus chers : celle-ci

assiste avec l'indifférence la plus complète à l'inconduite de

son mari, celle-là reste froide devant le danger qui menace sa.

fortune. « Tour à tour douces et emportées, dit Moreau (de

Tours), bienfaisantes et cruelles, impressionnables à l'excès,

rarement maîtresses de leur premier mouvement, incapables

de résister à des impulsions de la nature la plus opposée...,

présentant un défaut d'équilibre entre les facultés morales

supérieures, la volonté, la conscience, et les facultés infé-

rieures, instincts, passions, désirs. »

Cette extrême mobilité dans leur état d'esprit et dans leurs

dispositions affectives, cette instabilité de leur caractère, ce

défaut de fixité, cette absence de stabilité dans leurs idées

et leurs volitions , rendent compte aussi de l'impossibilité

où elles se trouvent, de porter longtemps leur attention sur

une lecture, sur une élude, sur un travail quelconque.

Tous ces changements se produisent avec la plus grande

rapidité ; chez elles, les impulsions ne sont pas, comme chez

les épileptiques, privées absolument du contrôle de l'intelli-

gence, mais elles sont vivement suivies de l'acte. C'est ce qui

explique ces mouvements subits de colère et d'indignation,

ces enthousiasmes irréfléchis, ces affolements de désespoir,

ces explosions de gaieté folle, ces grands élans d'affection, ces

190 REVUE CRITIQUE.

attendrissements rapides ou ces brusques emportements pen-

dant lesquels, agissant commedes enfants gâtés, elles trépignent

du pied, brisent les meubles et éprouvent le besoin irrésistible

de frapper.

Lorsque les hystériques sont réunies, comme dans un ser-

vice d'hôpital par exemple , leurs moeurs présentent des

caractères importants à étudier : elles se recherchent volon-

tiers, forment des groupes isolés , fuyant avec un certain

orgueil la société des épileptiques pour lesquelles elles n'ont

pas assez de mépris ; mais elles deviennent vite jalouses entre

elles, ourdissent de petits complots les unes contre les autres,

portent l'esprit de dénonciation jusqu'à s'accuser des moindres

faits, puis, leurs amitiés éphémères sitôt mortes que nées, elles

se séparent bien vite et se querellent ou se disputent pour les

motifs les moins sérieux. Comme elles ont aussi le caractère en-

fantiz et qu'elles sont exposées entre elles à une sorte de

contagion ou d'imitation nerveuse, on les voit organisant de

mesquines conspirations d'indiscipline ou de rébellion ; on les

voit encore toutes prises d'un fou rire à propos de rien, d'un

homme qui passe, delà pluie qui tombe, d'une mouche qui vole ;

puis ce sont des récriminations, des reproches, des lamenta-

tions, des larmes sons fin. Dans un service renfermant des

épileptiques et des hystériques, on reconnaît souvent celles-ci

par l'habitude qu'elles ont de mettre des fleurs au chevet de

leur lit, de s'orner la tête de rubans (ordinairement rouges

ou bleus), de porter une cravate aux couleurs éclatantes; et,

comme il est dit que tout est contraste dans leur caractère

ou leurs manières d'être, il est intéressant de les voir avec ces

parures et ces fleurs sur la tête, marcher par une pluie bat-

tante à l'approche de leur délire ou do leurs accès convulsifs,

pieds nus, les vêtements en désordre et les cheveux au vent 1.

II. Un second trait de leur caractère est un esprit d'opposition,

de contradiction, de controverse. Elles mettent autant d'insis-

tance à nier qu'à affirmer, à refuser aujourd'hui ce qu'elles

ont demandé, réclamé, exigé hier ; elles éprouvent un secret

plaisir à combattre avec une assurance qui n'a d'égale que

1 M. Bourneville a judicieusement insisté sur ces derniers détails dans

l'Iconographie photographique de la Salpdt;,iè,e (1876-1880).

ÉTAT MENTAL DES HYSTÉRIQUES. 191

leur absence de conviction, l'opinion contre laquelle elles se

seraient révoltées autrefois, ou encore à provoquer autour

d'elles l'étonnement et la stupéfaction par des thèses plus ou

moins extraordinaires et paradoxales qu'elles soutiennent.

Elles sont surtout affectées de ce subdélire ou de cet état

malicieux (ainsi désigné par M. Daily) qui les porte à orga-

niser des intrigues, des querelles, des brouilles, à créer des

embarras, à écrire des lettres anonymes pour semer la dis-

corde, à simuler des maladies pour le singulier plaisir de faire

naître dans leur entourage de grandes inquiétudes.Unejeune

fille ne veut pas absolument manger ; sa famille éplorée joint

les supplications aux prières, qnand on s'aperçoit qu'un jour elle

prend des aliments en cachette. Une autre annonce qu'elle

a résolu de mourir tel jour à telle heure ; comme on a l'air

de ne pas croire à sa parole, elle s'irrite et reste pendant trois

jours consécutifs faisant la morte, avec une force de volonté

telle qu'elle résiste aux excitations les plus vives employées

pour la tirer de cette espèce de coma. Bientôt elle se lève

enchantée, fière et radieuse du tour qu'elle a joué et de l'éton-

nement qu'elle a dû produire ; elle avoue plus tard qu'elle a

simplement joué la comédie.

C'est qu'elles aiment porter tout à l'extrême, ne sachant

pas vivre avec simplicité; c'est qu'elles exagèrent tous leurs

sentiments, l'indifférence comme l'enthousiasme, l'affection

comme l'antipathie , la tendresse comme la haine, la joie

comme le désespoir, et qu'elles dramatisent tout sur la grande

scène du monde où elles sont et restent toujours de vraies

comédiennes. Elles veulent qu'on s'occupe d'elles, qu'on les

plaigne, qu'on s'intéresse à leurs petites comme à leurs

grandes misères. Aussi n'épargnent-elles aucune ruse, aucune

invention pour arriver à ce résultat.

Ce besoin de simuler, d'attirer l'attention sur leurs actes,

d'étaler une certaine mise en scène, ce désir de faire parler

d'elles, d'affecter des poses théâtrales, sont tellement irrésis-

tibles qu'ils les poussent souvent à se déchirer, à se mutiler et

même à jouer la comédie du suicide. Le malheureux atteint

de spleen ou de désespoir, qui veut attenter sérieusement à ses

jours, fait ses préparatifs en silence, loin de tout regard indis-

1 Dally. De l'état et du délire malicieux (Ann. med. psych. 1877,

p. 356.

192 a ' z REVUE . CRITIQUE.' «. t

cret; l'aliéné frappé de manie aiguë se donne la mort avec une

sorte d'instantanéité irréfléchie ; c'est pour fuir souvent des

ennemis et un danger imaginaires, que l'alcoolique se précipite

par une fenêtre ou se-jette à -l'eau; et le lypémaniaque pour-

suivi et -harcelé- sans cesse par 'ses idées de suicide, reste

longtemps, sans en rien dire à personne, hésitant et troublé

encore idans l'accomplissement de l'acte qui doit mettre

fin à son existence... L'hystérique agit autrement; elle

déclare souvent bien des jours et des mois à l'avance qu'elle

est lasse de la vie, elle annonce urbi et orbi qu'elle, veut=se

tuer, et tout en cherchant avec un certain art à déjouer la

surveillance de son entourage, elle ne manquera pas de laisser

percer son dessein -par certaines paroles ou certains sous-

entendus assez adroitement imaginés, elle aura bien- soin

d'être vue au milieu de ses préparatifs, ou s'arrangera tou-

jours de manière à recevoir un prompt secours au moment

opportun. Une des malades de la Salpêtrière a l'idée'

sans trop savoir pourquoi, de se précipiter du haut du

puits de Grenelle : et l'on arrive naturellement à temps pour

' la'retenir ; un autre jour elle prend un flacon de chloroforme

et s'enferme dans les lieux d'aisances pour s'empoisonner, dit-

elle ; puis' elle se pratique une saignée avec des ciseaux ;'

enfin uÎe'Jautre fois elle prend sans cause vingt pilules de

belladone et annonce avec une satisfaction mal feinte ou mal

contenue qu'elle a voulu attenter à ses jours. C'est bien la

même malade qui dans sa jeunesse s'est opéré la section

du-mamelon. Une autre hystérique effrayait tous les soirs

son entourage par ses menaces répétées de se jeter par la fenêtre.

Sa'famillë affolée, qui avait tort de la prendre au sérieux,

l'attache afin de la mettre dans l'impossibilité d'exécuter son

projet*. Sur ces entrefaites, leD'Hammond arrive, la délivre

denses liens et de ses entraves, puis il lui déclare qu'elle est

libre ;;elle court à la fenêtre, regarde un instant, et revient à

son lit en adressant au médecin quelques épluthotes malson-

nantës. Elle n'a jamais recommencé '. : Le rôle du médecin est donc de ne pas trop ajouter foi à ces

menaces.; mais il ne faut pas non plus qu'il mette la corné-*

dienne trop ouvertement et en face du monde au défi d'accomplir

un acte longtemps annoncé d'avance, car l'hystérique est sou-

Mlaminond. Maladies du système nerveux. Trad. française, 1879.

ÉTAT MENTAL DES HYSTÉRIQUES. 193

vent vaniteuse et orgueilleuse ; elle est essentiellement lafemme

prompte aux coups Je tête, sujette à tout faire « par toquade »,

et poussée par cet orgueil incompréhensible ou par un faux

amour-propre, elle voudra mettre sérieusement à exécution le

projet qu'on a traité trop légèrement. La marquise de Prie,

la trop célèbre maîtresse du duc de Bourbon, après avoir été

exilée de la cour et dépitée de son abandon, annonce qu'elle va

se donner la mort, tel mois, tel jour, telle heure ; elle convie ses

amies à des danses, donne des fêtes, paraît gaie, animée, pleine'

d'entrain ; le soir elle parle encore en présence de son nouvel

amant de sa détermination formelle, qui est accueillie par des

sourires d'incrédulité. Celui-ci, croyant à une mystification, lui

donne le poison de sa propre main, et il ne se rend à l'évidence

que lorsqu'il est devenu impossible de lui porter secours (Taguet).

Quel est le plus souvent le but de ces tentatives de suicide ?

Une malade observée par M. Taguet' va nous l'apprendre :

Cette jeune femme était unie à un mari pour lequel elle res-

sentit d'abord une réelle affection. Au bout d'un certain temps,

elle prend un malin plaisir à lui faire de la peine et toutes

ses actions concourent vers ce but singulier : elle lui déclare

qu'elle est lasse de son amour, et pour aiguillonner sa jalousie,

lui annonce qu'elle va courir les aventures galantes ; elle

n'en fait rien et reste vertueuse. C'est alors qu'elle imagine

la simulation du suicide : on laisse à sa disposition quatre

pilules purgatives qu'on lui dit renfermer de fortes doses

d'opium, les pilules disparaissent, il n'y eut pas naturellement

d'effet purgatif puisqu'elles n'avaient pas été ingérées, et la

malade simule assez grossièrement une intoxication par

l'opium ; un jour elle force la serrure d'un placard, fait dis-

paraître un flacon renfermant deux grammes de morphine

pour injections sous-cutanées et vient annoncer avec une

certaine fierté et une certaine ostentation qu'elle a absorbé tout

le flacon, ce qui était faux; elle essaie enfin de se pendre aux

rideaux de son lit, après avoir pris la précaution d'ouvrir la

porte de sa chambre, afin qu'on pût la voir et la secourir.

Or, fait important à constater, cette malade renouvelait ses

menaces et ses tentatives chaque fois que son mari venait

la visiter, et qu'elle se voyait observée par les médecins.

Quelle est la conclusion à tirer de ces faits ? C'est que,

daguet. Annales med. psych., 1877.

13

194, REVUE CRITIQUE.

comme pour l'anorexie hystérique, qui est plutôt le résultat

d'un état mental que d'un état gastrique, l'entourage est

l'obstacle à la guérison, c'est que l'isolement de la malade et

le changement de milieu doivent être impérieusement, formel-

lement réclamés, parce qu'ils sont les seuls moyens curatifs

dont nous disposions en pareille circonstance.

III. Les hystériques sont donc remarquables par leur esprit

de duplicité, de mensonge, de simulation. « Un trait commun

les caractérise, dit Tardieu, c'est la simulation instinctive,

le besoin invétéré et incessant de mentir sans cesse, sans objet,

uniquement pour mentir, cela non seulement en paroles,

mais encore en actions, par une sorte de mise en scène, où

l'imagination joue le principal rôle, enfante les péripéties les,

plus inconcevables et se porte quelquefois aux extrémités les

plus funestes ' ». « Elles portent encore, dit Morel, la manie

analytique du soupçon jusque dans ses dernières limites.

Elles se noient dans les suppositions les plus bizarres, les

plus fausses, les plus ridicules et les plus injustes. L'amour

de la vérité n'étant pas, d'un autre côté, la vertu dominante

de leur caractère, elles n'exposent jamais les faits dans leur

réalité, et trompent aussi bien leurs maris, leurs paients que

leurs confesseurs et leurs médecins'. »

Exagérant leur mal, inventant même des maladies dont

elles ne sont pas atteintes, elles éprouvent une satisfaction

secrète à tromper les personnes qui les entourent, et surtout

les médecins, lorsque ceux-ci paraissent s'occuper d'elles et

s'intéresser scientifiquement à leur affection. Cliomel, qui

ne voulait plus s'occuper des hystériques parce qu'il avait été

souvent trompé par elles, aimait à raconter l'histoire sui-

vante : Une malade entre dans son service, présentant des

phénomènes nerveux dont la bizarrerie et l'étrangeté l'inté-

ressent vivement ; il rédige soigneusement son observation,

prend des notes, reste près d'elle pendant plus d'une heure,

puis quand l'interrogatoire lui semble épuisé, il lui demande

si elle n'a plus rien à dire : « Oui, monsieur, répond-elle, c'est

que de tout ce que je vous ai dit, il n'y a pas un mot de vrai. »

Cette boutade, hâtons-nous de le dire, nous étonne de la part

1 Tardieu. Étude médico-légale sur la folie, Paris, 1880.

Morel. Éludes cliniques.-

ÉTAT MENTAL DES HYSTÉRIQUES. 195

d'une hystérique, qui ne convient pas volontiers de ses/ ·

mensonges, qui a l'esprit de ruse et de dissimulation porté

parfois jusqu'à ses dernières limites, et qui montre toujours

une certaine ténacité et une persévérance extraordinaire dans

la narration des faits qu'elle invente.

Il n'est pas de supercherie qu'elles n'imaginent pour satis-'

faire leur besoin souvent irrésistible de se rendre intéressantes,

de faire parler d'elles et de se poser sur une sorte de piédestal.

C'est ainsi qu'elles exagèrent leurs mouvements convulsifs,

qu'elles se plaignent de maux incroyables et qu'elles peuvent

s'astreindre, par une persistance qui constraste singulièrement

avec la mobilité et l'inconstance de leur caractère, à des actes

souvent monstrueux, ou à des pratiques repoussantes : Une

jeune fille hystérique est prise de vomissements dont l'aspect

rappelle absolument celui de l'urine ; tous les matins on la sonde

et dans la journée les vomissements ne reparaissent plus, puis

comme on pense à la possibilité d'une supercherie, on fait sur-

veiller la jeune malade, et on ne tarde pas à la surprendre

buvant ses urines en cachette tous les matins '.

Ces faits de simulation ne sont pas rares : « On les

rencontre à chaque pas dans l'histoire de l'hystérie --dit

M. Charcot et l'on se surprend quelquefois à admirer la

sagacité ou la ténacité inouïe que les femmes, qui sont sous

le coup de la grande névrose mettent en oeuvre pour tromper,

... surtout lorsque la victime de l'imposture doit être un mé-

decin. Dans l'espèce, il ne parait pas démontré que la

parurie erratique des hystériques ait été jamais simulée de

toutes pièces et pour ainsi dire créée par les malades.

En revanche, il est incontestable que, dans une foule de cas,

elles se sont plu à dénaturer, en les exagérant, les princi-

pales circonstances du cas, et à lui imprimer le cachet de

l'extraordinaire, du merveilleux. Voici, en général, comment

les choses se passent : l'anurie ou l'ischurie avec les vomis-

sements existent seuls pendant un certain temps, et le phéno-

mène est réduit par conséquent à sa plus grande simplicité.

Mais bientôt, principalement si les accidents semblent exciter

l'intérêt et la curiosité des médecins, de l'urine pure sera

expulsée par les vomissements, en quantité considérable ; il

1 Duponchel. De la folie hystérique. Thèse de Paris, 1874.

« Leçons sur les maladies du système nerveux. T. 1, p. 128.

196 REVUE CRITIQUE. r

en sortira par les oreilles, par le nombril, par les yeux et

même par le nez, ainsi que cela eut encore lieu dans un fait

récent. Enfin, si l'admiration est poussée à son comble , il s'y

joindra peut-être des vomissements de matières fécales. »

Les médecins ne sont pas les seuls trompés par ces super-

cheries. Que de fois aussi les hystériques se sont-ellesjouées delà

crédulité publique en annonçant à des populations ignorantes,

superstitieuses et trop souvent avides du surnaturel, des appari-

tions miraculeuses, ou des faits extraordinaires qui avaient le tort

den'exister que dans leur imagination et dans leur esprit inépui-

sable d'invention et de mensonge Et pour citer un exemple

des plus récents, n'a-t-on pas vu dernièrement une hystérique

simuler les plaies et les blessures des véritables stigmatisées' !

C'est ainsi que se posant en victimes ou en héroïnes, elles

inventent mille histoires mensongères où le vrai et le faux est

mêlé avec un art si parfait que la justice peut être facilement

déroutée : : -En 1873, Mi', de M....âgée de dix-huit ans, accuse

le vicaire de la paroisse de l'avoir violée; elle raconte que tel

jour, telle heure, alors qu'elle se trouvait en prière à l'église,

le vicaire s'approcha d'elle après .avoir fermé toutes les portes

et la pria de l'accompagner dans la sacristie; là le vicaire lui

fait une déclaration brûlante et comme elle résiste, il fait mine

de se porter un poignard au coeur ; elle s'évanouit, dit-elle, et

lorsqu'elle a repris ses sens, elle était violée. A la cour d'assises,

les médecins légistes l'interrogent sur le modits faciendi, et

comme elle répond par des détails enfantins, on l'examine et

on la trouve absolument vierge, sans trace de violence exté-

rieure. Une jeune fille très pieuse se fait un jour avec une

paire de ciseaux plus de six cents incisions sur tout le corps,

puis elle prétend que ces blessures sont l'oeuvre d'umindividu

qui a voulu lui infliger le dernier outrage. Pressée de questions

par M. Toulmouche (de Rennes), elle finit par avouer qu'elle

s'est volontairement pratiqué ces nombreuses blessures , et

cette singulière comédie a précédéde peu une attaque d'hystérie

des mieux caractérisées .

'Bail. La stigmatisée de S... (L'Encéphale, 1881.)

- Toulmouche. Consultations médico-légales sur deux cas assez rares

d'aberration mentale. (Acan. (I'hyq. publ. et de med. légale. Paris, 1853).

- Voyez aussi Legrand du Saulle : Etude rnédico-légale sur l'hystérie' et

sur le degré de responsabilité des hystériques, etc. (Gaz. des h6p., 1859,

p. 145.) Bulard, thèse de Montpellier, 1858. Duponchel et Chabrun,

thèses de Paris, 1874 et 1878; etc.

ÉTAT MENTAL DES HYSTÉRIQUES. t97 Î

Quelquefois elles s'accusent elles-mêmes, ce qui détourne

davantage les soupçons, elles imaginent de toutes pièces un

crime dans un but qu'on ne peut concevoir ni définir , elles

en indiquent les circonstances et les péripéties avec un luxe et

une précision de détails qui ne peuvent laisser aucun doute

dans l'esprit du magistrat, et cependant tout le récit est faux

d'un bout à l'autre. Telle, il y.a peu de temps, cette jeune

fille qui se dénonce et s'accuse d'avoir tué un jeune homme sur

le bord d'une pièce d'eau où il était ensuite tombé. On ne re-

trouve pas le cadavre et l'on acquiert bientôt la certitude qu'il

s'agissait d'une hystérique et d'une histoire inventée par elle.

D'autres fois encore elles se plaisent à mystifier toute une

population : Tout à coup, dit M. Legrand du Saulle, il survient

dans un pays de grandes divisions entre diverses familles qui

cessent de se fréquenter parce qu'elles ont reçu des lettres

anonymes. C'est que dans ce pays, il y a souvent une femme

hystérique au courant des histoires de tout le monde et qui est

entrée dans la voie des lettres anonymes, éprouvant un certain

plaisiràsemer partout la discorde. M.Lasègueracontel'his-

toire suivante qui, pendant quelques années, a ému plusieurs

tètes couronnées : Une femme écrit au roi Victor-Emmanuel

pour lui dire qu'elle est fille naturelle de sa soeur la princesse

de Carignan; comme preuve, elle parle d'une cassette cachée

sous le lit de la femme qui lui servait de mère, un jésuite

venait voir cette femme, et un jour cassette et jésuite dispa-

raissent. Ne recevant pas de réponse, elle écrit lettres sur

lettres, donne son adresse, on fait des recherches en France.

on ne découvre rien; mais un envoyé du roi, convaincu de la

véracité du récit, l'emmène à la cour d'Italie. Elle revient en

France où l'on finit par savoir qu'elle est femme d'un coiffeur, et

unjourM. Lasègue la voit en proie à une attaque d'hysléro-épi-

lepsie suivie d'aphasie '.

Lorsque les hystériques sont entrées dans cette voie périlleuse

elles ont déjà un pied dans l'aliénation mentale, et au point de

vue médico-légal, elles n'ont déjà plus l'entière responsabilité

de leurs actes.

IV. Si leurs impressions, disons-nous, sont mobiles, fugaces et

changeantes, on peut voir aussi, par une singulière contradic-

1 Lasègue. Les hystériques, leu7, pee-ve,sité, leui,s mensoiges. (Ann.

tnedico-psych. t. VI, 1881.)

198 - REVUE CRITIQUE.

' tion qui n'est pas rare dans l'histoire de l'hystérie, avec quelle

constante persévérance, avec quelle fixité elles reviennent

toujours à une même idée qu'elles ont imaginée tout d'abord

et à laquelle elles s'attachent comme à une chose réelle : -té-

moin cette histoire d'amours toujours la même et toujours

répétée de la même façon par la fameuse hystérique Gen...

observée à la Salpêtrière ; témoin encore, pour ne citer que

celui-là, le cas du malheureux Urbain Grandier qui,, accusé

par les religieuses Ursulines deLoudun de venir les visiter pen-

. dant la nuit, expia sur le bûcher des crimes imaginaires.

C'est que les hallucinations laissent parfois une impression

profonde et durable dans leur esprit, puisque les hystériques

' croient à la réalité de leurs rêves pendant un temps assez long.

- 'Le fantôme mal dessiné d'abord de ces hallucinations prend une

* forme et bientôt un nom : dans le procès célèbre qui a agité

« l'opinion publique en 1835, Marie de M... a persisté avec une

^ énergie rare dans ses accusations de viol portées contre M. La

R...'. '. Elle décrit avec les moindres détails les sensations, tac-

tiles, les attouchements dont elle a été victime dans son rêve,

' et les termes dont elle se sert, contrastent souvent avec la pu-

reté de sa vie et la chasteté de son coeur : tant il est vrai que

f l'hallucination et l'excitation qui l'accompagne suggèrent chez

'-les malades, au dire de Brierre de Boismont « des expressions

** qui ne leur sont pas familières ». ·

Ces idées fixes qui constituent, suivant l'expression si ingé-

nieuse d'Esquirol, une sorte de catalepsie de l'intelligence,

l peuvent donner lieu à différents accidents chez les hystériques :

ainsi nous avons vu que certaines malades refusent toute ali-

mentation, non pas seulement parce qu'elles ontperdulaseilsa-

tion de la faim, mais aussi parce qu'elles s'imaginent que le

travail digestif détermine des douleurs trop vives ; une autre

'se condamne à un mutisme absolu parce que l'exercice de la

voix détermine, dit-elle, un peu de douleur, et elle reste ainsi

muette pendant des mois ; une troisième croit remarquer que la

marche et la station provoquent des sensations douloureuses,

et' alors pour les éviter, elle a résolu de ne plus marcher pen-

dant de longs mois ; une hystérique tient les yeux fermés pen-

dant des journées entières, laissant tomber ou contractant

' ' Lire la relation extrêmement intéressante de ce procès dans le cahier

XLVI des Causes célèbres de tous les peuples, par Fouqumr.

ÉTAT MENTAL DES HYSTÉRIQUES. M 99

convulsivement ses voiles palpébraux, et se refusant absolu-

ment à les ouvrir. On pourrait citer un grand nombrecde

faits semblables où les hystériques se condamnent par'parti

pris, par obstination, par une sorte d'opiniâtreté maladive, à

ne plus manger, à ne plus marcher, à ne plus voir. Elles ont

décidé ainsi, pendant des mois et même des années, de ne'plus

vivre de la'vie commune , presque calmes et indifférentes^ au

milieu des émotions ou des tristesses de leur entourage ; celui-

ci a beau prier, supplier, insister, « l'excès d'insistance appelle

l'excès de résistance ». (Lasègue.) < .

C'est là une preuve d'une grande force de volonté, dira-t-on..

Non, c'est de la force d'inertie, c'est plutôtune aberration ou une

perversion de la volonté. Les hystériques ne veulent pas aujour-

. d'hui ce qu'elles voulaient hier, elles veulent ce qu'elles ne de-

vraient pas vouloir, et si elles sont parfois capables^de grandes

énergies, elles ne savent pas montrer de suite dans leurs

volitions pas plus que dans leurs sentiments. Vous les voyez

concevoir de grands projets, prendre debellesrésolutions : elles

vont travailler, elles travaillent déjà avec ardeur ; sur votre

conseil, elles abandonnent la lecture des romans qui les absorbait

encore tout à l'heure, elles renoncent à leur vie contemplative,

à leur manie si fréquente d'écrire et de composer,des vers,

elles se livrent à des travaux manuels, elles., s'occupent

de leur maison et reprennent au foyer domestique la place

qu'elles avaient presque abandonnée ; en un mot tout marche

à souhait pendant plusieurs jours..., quand aussitôt s'éteint

misérablement ce trop beau feu de paille, quand tout à coup

s'écroule cet échafaudage trop fragile de grandes promesses. Le

travail suppose un effort -persévérant de la volonté; elles, sont

pour un jour bien capables de cet effort, mais elles ne peuvent

y persévérer ; aussi ne sont-elles pas travailleuses et se plaisent-

elles à vivre le plus communément dans une insouciante oisi-

veté. Elles reviennent bien vite à leurs anciennes habitudes,

déclarant qu'elles ne peuvent vivre ainsi, se disant bien mal-

heureuses, et tout est et sera toujours à recommencer, parce que

leur défaillante volonté fléchit sans cesse sous le joug toujours

plus puissant de leurs petites comme de leurs grandes passions.

V. Les hystériques présentent-elles cette tendance aux plai-

sirs sexuels, cette imagination lascive ou cet excès de sensualité

qu'on s'est plu de tout temps à leur attribuer Le fait existe,

200 REVUE CRITIQUE.

mais il est plus rare qu'on le pense, et l'on cite bon nombre de

ces femmes chez lesquelles la sensibilité génésique est même

tellement émoussée qu'elle parait presque absente. Les désirs

oulappétits vénériens sont nuls, et l'acte génital peut étre'ac-

compli par elles avec une réelle indifférence, et même avec une

certaine répugnance ! ' Ce qui a pu faire dire le contraire, c'est

qu'elles sont souvent romanesques, aimant les aventures ga-

lantes qu'elles savent souvent arrêter au moment opportun.

Quelques-unes cependant, sans jamais présenter ces phéno-

mènes d'érotisme ou de nymphomanie qui peuvent compliquer

la névrose', mais qu'il ne faut jamais confondre avec elle, ont

une certaine excitabilité génésique ; elles sont ordinairement

libres dans leur langage, employant des mots expressifs pour

peindre leurs sensations, et l'on voit souvent dans les hôpitaux

éomme dans la clientèle, des femmes qui éprouvent un singu-

lier plaisir à se faire sonder tous les jours pendant des se-

maines entières, ou encore d'autres malades qui simulent une

affection de' matrice et qui reviennent sans cesse consulter

le médecin'pour réclamer des examens au spéculum.

* On en rencontre enfin qui ont ce qu'on peut appeler le tem-

pérament génital, caractérisé par une certaine ampleur des

masses charnues et l'abondance du système pileux, par l'ex-

pression mobile de la physionomie, l'animation facile des traits,

l'éclat brillant des yeux, l'épaisseur et la coloration des lèvres

qui sont d'un rose vif tranchant avec la blancheur des dents,

enfin par le développement des seins et des organes sexuels ;

elles'peuvent parfois résister pendant un temps plus ou moins

long aux pensées qui les obsèdent, mais bientôt, vaincues dans

la lutte inégale du devoir et de la raison contre le désordre et

le dérèglement des sens, elles peuvent chercher, elles cher-

chent souvent dans les attouchements solitaires une diversion

passagère a l'ardeur qui les tourmente... Puis ces attouchements

se répètent et conduisent à l'érotisme, à la nymphomanie,

accidents qui peuvent, nous le répétons, compliquer l'hysté-

rie, mais qui sont.absolument distincts de cette névrose. On

les voit alors, dit Tardieu, abandonner parents, amis, enfants,

et aller chercher dans la prostitution un remède encore impuis-

sant à la triste fureur qui domine leur raison et leurs sens.

VI. Ce qui les distingue encore, c'est une sorte de quiétude

dans laquelle les laissent toutes les affections d'une durée plus ou

ÉTAT MENTAL DES HYSTÉRIQUES. 201

moins longue dont elles sont atteintes. Que l'on mette en re-

gard deux malades, l'une avec une hémiplégie permanente

compliquée de contracture due à une lésion, quelconque, des

centres nerveux, l'autre avec une contracture hémiplégique

de nature hystérique, et l'on comprendra quelles différences

les séparent au point de vue mental : la, première ne verra pas

sans une inquiétude toujours croissante la rigidité musculaire

envahir de jour en jour davantage ses membres immobilisés déjà

par un long repos ; la seconde, c'est-à-dire l'hystérique, subit cette

immobilisation prolongée avec une, insouciance étrange,, avec

une patience singulière qu'il ne faut pas prendre pour de la rési-

gnation, et l'on sent que ses plaintes, ses récriminations et ses

doléances d'une heure ne sont pas sérieuses, comme si elle sa-

vait par avance qu'il ne s'agit pas d'une affection irrémédiable.

, Mais cette quiétude ne provient pas toujours d'un (raisonne-

ment plus ou moins inconscient que les hystériques peuvent

faire sur la gravité ou la bénignité de, leurs accidents morbides ;

elle est due aussi et surtout à un état .-cérébral singulier qui

mérite de nous arrêter un instant : ces malades peuvent être

atteintes d'une perte absolue et générale de toutes les diverses

sensibilités, et cependant elles ont si peu conscience,de, ce

trouble profond qu'elles n'en parlent jamais, qu'elles peuvent

marcher, se livrer à toutes sortes d'occupations sans en ,être le

moins du monde incommodées, au point même qu'elles mani-

festent le plus souvent un grand étonnement quand le médecin

attire pour la première fois leur attention sur ce point. Quelle

différence avec l'anesthésique par lésion encéphalique ou mé-

dullaire, qui s'aperçoit, qui se préoccupe de la, plus ( légère

diminution de la sensibilité, de la difficulté consécutive, de la

marche, de la sensation de « corps élastique » qu'il éprouve

sous ses pas et qu'il sait si exactement analyser ! Tous, deux

sont anesthésiques, pourquoi donc l'hystérique qui l'est davan-

tage le ressent-elle moins ? C'est parce que cette dernière se

trouve' dans une situation d'esprit comparable à celle des indi-

vidus qui, distraits par une forte préoccupation deviennent dès

lors incapables de sentir les impressions fies plus violentes,

c'est parce qu'elle a dû acquérir par le fait même de sa maladie

une sorte de paresse cérébrale qui, « la rend moins apte à

percevoir certaines modalités sensitives, ».

1 Lasègue. De l'anesthésie et de l'ataxie hystériques. (Arch. de zéd.,

1864, p. 391.) ' ' -' . pi

H02 REVUE CRITIQUE, i

Dans certains cas cependant, le cerveau des hystériques est

hanté par des idées hypocondriaques. Mais on s'aperçoit bien vite

que cette hypocondrie n'est pas vraie, et qu'elle a souvent

pour but d'inspirer un certain intérêt ou même de faire naître

dans leur entourage des inquiétudes pour leurs maux réels ou

imaginaires. Elles parlent d'elles à toutpropos, deleur vie man-

quée, de leurs affections perdues, ou de leurs illusions évanouies,

de leurs souffrances continuelles ou de leurs douleurs incom-

prises ; et dans toutes leurs paroles ou leurs actions, on re-

marque que c'est toujours leur personnalité qui domine, ou le

moi qui est en jeu. C'est qu'elles sont souvent égoïstes, ne

pensant qu'à elles, à leurs petites comme à leurs grandes

misères, presque heureuses de tenir leurs parents et leurs

amis en haleine d'inquiétude et de tristesse jusqu'au jour où

un être aimé, un enfant qu'elles avaient semblé voir avec une

certaine indifférence, tombe sérieusement malade; alors, elles

exagèrent tout, le danger comme le dévouement, oublient pour

un temps les préoccupations de leur santé, passent des nuits

entières au chevet d'un lit, s'épuisant souvent en privations

inutiles, ou en agitations stériles.

Certaines femmes hystériques ont souvent la manie de de-

mander des conseils à tous les médecins qu'elles rencontrent

ou qu'elles vont trouver; ce qui étonne même de la part d'hys-

tériques intelligentes, c'est leur crédulité facile dans l'effica-

cité des moyens les plus bizarres,ou dans la parole de vulgaires

charlatans et de somnambules. Enfin, elles ont souvent la ma-

nie des médicaments, cessant l'un pour en reprendre un autre,

et s'attachant quelquefois à l'un d'eux avec une persistance

telle qu'on est souvent obligé de les tromper pour éviter la

production d'accidents toxiques. C'est ainsi qu'elles abusent de

la morphine, et la morphiomanie des hystériques qu'on observe

si fréquemment est d'autant plus difficile à guérir qu'on ne

peut faire appel à leur volonté pour en réprimer l'habitude et

les abus.

VII. Si les facultés affectives sont atteintes, les facultés intellec-

tuelles ont conservé parfois, ont acquis même un certain degré é

d'excitation ; quelques-unes de ces malades sont brillantes,

enjouées, aimables dans le monde quand elles le veulent,

elles ont de l'esprit, la mémoire sûre, une imagination vive, une

conversation animée, ce qui a pu faire dire avec raison que même

ÉTAT MENTAL DES HYSTÉRIQUES. 203

avec ces profondes aberrations du sens moral, cet état diffère

de lafolie réelle, et qu'il constitue plutôt une forme de caractère

qu'une maladie de l'intelligence, qu'il n'y a qu'un seul côté

défectueux dans leur esprit, c'est « l'impuissance de la volonté à

refréner les passions ' a. (Ch. Richet.)

Les hystériques s'agitent, et les passions les mènent, pour-

rait-on dire encore. Toutes les diverses modalités de leur état

mental que nous avons cherché à étudier, peuvent presque-se

résumer dans ces mots : ELLES NE SAUVENT pas, ELLES NE peuvent

pas, elles NE veulent pas vouloir. C'est bien en effet parce

que leur volonté est toujours chancelante ou défaillante,

c'est parce qu'elle est sans cesse dans un état d'équilibre

instable, c'est parce qu'elle tourne au moindre vent comme

la girouette sur nos toits, c'est) pour ces raisons que ces

malades ont cette mobilité, cette inconstance et cette mutabi

lité dans leurs désirs, dans leurs idées ou leurs affections.

C'est encore pour la même raison qu'elles manquent de fran-

chise et qu'elles commettent si souvent des mensonges : car

elles laissent leurs pensées errer au gré de leur imagination

vagabonde ou déréglée qu'elles sont impuissantes à diriger,

comme si elles étaient sans cesse sous l'influence d'un empoi-

sonnement par le haschich. Si elles obéissent presque tou-

jours à leur premier mouvement et à l'exaltation de leurs

sentiments, si d'autres fois elles expriment des idées singu-

lières et baroques, disant tout ce qui leur passe par la

tête, si elles commettent encore des extravagances, se faisant

remarquer par une certaine liberté d'allures et de conversa-

tion, si jamais calmes et pondérées elles sont toujours pas-

sionnées et ardentes pour le bien comme pour le mal, ce n'est

pas seulement parce que la raison n'intervient point' pour

redresser toutes ces irrégularités de conduite ou de paroles,

mais c'est surtout parce que le frein de la volonté est pour

ainsi dire faussé au point de ne pouvoir plus ni les arrêter ni

les retenir. Pour une raison ou une autre, cette volonté renaît-

elle dans leur esprit, et des guérisons dites « miraculeuses »

peuvent survenir : une hystérique atteinte d'anorexie, ne

veut pas manger jusqu'au jour où un médecin impose son

autorité, et lui démontre que son affection va devenir très

' Ch. Richet. -Les démoniaques d'aujourd'hui, etc. (Revue des Deur-

Mondes, 15 janvier 18b0.)

2Oa - , REVUE CRITIQUE.

grave ; une autre, complètement immobilisée par la con-

tracture depuis plusieurs années, se met marcher tout à coup à

l'annonce d'un incendie; une autre, atteinte de paraplégie, se

lève et marche à la rencontre d'un frère qu'elle n'avait pas vu

depuis plusieurs années, etc. N'ont-elles pas aussi entendu van-

ter les cures miraculeuses produites par certaine eau douée'de

propriétées surnaturelles ? Elles entreprennentle grand voyage

depuis longtemps prémédité et préparé par la lecture ou le

récit d'histoires extraordinaires, elles emportent avec elles la

conviction et la volonté de guérir, elles n'ont pas encore

franchi le seuil de la grotte mystérieuse que subitement les

guérisons surviennent : les paralytiques marchent, les aveugles

voient et la parole est rendue à celles qui ne parlaient pi us ! C'est

que l'hystérie, est un terrain fertile en miracles thérapeutiques

qui s'opèrent par la vertu d'une imagination puissamment

surexcitée ou par le réveil subit et inattendu d'une volonté

depuis longtemps endormie. C'est ainsi que les pilules de mie

de pain, décorées sous le nom de pilules de fulminate de la-

raxacum , ont souvent opéré des miracles qui disputent la

palme à l'ingestion d'une eau claire'. Tous ces faits n'en sont

pas moins intéressants, parce qu'ils démontrent l'influence salu-

taire de la volonté sur la disparition d'un grand nombre d'ac-

cidents hystériques, et l'importance qu'on doit lui attacher au

point de vue de la conduite thérapeutique à tenir. `

UA maladie psychique, en effet, on doit opposer un traitement

psychique : il faut inspirer confiance aux malades, leur parler

quelquefois avec une certaine autorité, il faut encore savoirleur

exposer le danger de leur situation avec une voix assurée et

presque impérieuse qui ne souffre pas de réplique. Voici, entre

mille, un exemple qui démontre l'heureuse influence produite

par la volonté du médecin sur celle du malade : M. Charcot,

qui a eu l'obligeance de me raconter ce fait, est appelé un jour

en toute hâte par le médecin ordinaire d'une hystérique en

danger de mourir d'inanition. Cette malade était en effet

atteinte d'une anorexie invincible, elle se refusait à manger

depuis des mois, et l'état était devenu très grave, voisin de la

cachexie : corps extrêmement amaigri avec les chairs flasques

et le ventre creusé en bateau, face pâle et blême, yeux excavés,

' On sait qu'autrefois Cruveilhier parvenait a faire avorter une attaque

convulsive en faisant boire à la malade, de gré ou de force, plusieurs verres

d'eau froide coup sur coup.

état mental DES HYSTÉRIQUES. 205

pouls petit' et misérable, jambes légèrement infiltrées ? En

présence d'un état si menaçant, M. Charcot prend' une' grave

détermination : il éloigne les parents de la malade et lui coma

mande impérieusement de manger, car si elle' né le fait pas,

elle est vouée à une mort certaine avec' des souffrances horri-

bles. Ces paroles, ces mesures sévères produisirent un grand

effet. Le premier jour, elle voulut bien toucher à un peu de

nourriture, le second jour elle mangea, les jours suivants

davantage encore, et après une semaine elle mangeait comme

tout le monde, puis, après deux mois de ce régime, elle s'était

transformée, avait repris son embonpoint et sa santé d'autre-

fois. Interrogée par le médecin consultant, sur le motif, sur' le

but de son abstinence volontaire, elle répondit z : « D'abord

je n'avais pas faim, puis tant que mes parents furent là', je ne

crus pas au danger parce que je voyais dans leursremontrances

de tous les jours un excès dé leur affection ; mais vous êtes

venu, vous avez éloigné mes parents, vous m'avez parlé d'une

grosse voix ; j'ai senti alors que mon état était réellement

grave, j'ai voulu manger, et j'ai mangé. » ` ' ' °

Une autre hystérique était atteinte d'une paraplégie com-

plète depuis plusieurs mois ; M. Charcot lui avait annoncé

qu'il serait obligé pour la traiter avec succès', de l'envoyer

seule dans un établissement hydrothérapique et de la séparer

ainsi de ses parents. Quelques semaines se passent sans' aucune

amélioration, quand une nuit elle voit,' elle entend dansrun

rêve le médecin consultant qui lui apparaît et lui renouvelle sa

prescription de la façon la plus formelle. Les hystériques.'on

le sait, croient longtemps à la réalité des rêves ou' des capuche-

mars qui troublent si souvent leur sommeil agité ? Celle-ci à

son réveil pendpour, elle'adéjàrésolu de marcher, et ce queles

médications les plus diverses n'avaient pas fait, la volonté seule^

qui est un galvanisme, a pu l'accomplir ; elle a pour ainsi dire

électrisé les membres de la paralytique et leur a rendu'rapi-'

dément la faculté locomotrice !

a

' VIII. En terminant ces considérations sur le caractère, les

moeurs et l'état mental des hystériques, il est nécessaire de dé-

clarer que toutes les malades sont bien loin déposséder surtout

à ce point ces dispositions de l'esprit que nous avons cherché à

étudier ; quelques-unes se contentent d'être fantasques, capri-

cieuses et inconstantes, ne présentant toujours qu'une certaine

206 REVUE CRITIQUE.

faiblesse ou instabilité de la volonté ; d'autres sont inquiètes,

émotives à l'excès, véritables sensitives qui tressaillent ou

s'agitent au moindre souffle des plus petites passions. A ce

degré même, l'hystérie légère n'est pas, comme le dit si bien

M. Richet, une véritable maladie, c'est plutôt une des expres-

sions, une des modalités du caractère féminin. On peut même

ajouter aveclui que les femmes à vapeurs, sujettes à « avoirleurs

nerfs », comme on dit dans le monde, sont plus femmes que les

autres femmes.

D'autres, au contraire, n'ont en aucunefaçon et àaucun degré

le caractère hystérique ; on voit même parfois de ces malades qui

sont atteintes des accidents convulsifs les plus accusés ou encore

des phénomènes permanents de la névrose, tels que les cou-,

tràctures, les paralysies, les troubles de la sensibilité, et qui pré-,

sentent une pondération remarquable dans leurs idées ou leurs

sentiments; elles sont calmes,, confiantes, dociles et sérieuses;,

elles n'entras enfin cotte mobilité de caractère qui est l'un des^

traits principaux de l'état mental des hystériques.

IX. Cette étude présente doncun grand intérêt à l'âge adulte;

mais, dès le jeune âge, on peut déjà surprendre certaines disl

positions du caractère qui permettent de reconnaître une cer-'

taine tendance à l'affection nerveuse. 1 9

« Ce sont ordinairement des fillettes de huit à douze ans,

quelquefois plus jeunes encore, à physionomie éveillée. Elles

sont facilement impressionnables, sujettes à pleurer ou à rire

sous les prétextes les plus futiles, et douées d'une vive imagi-

nation et d'une intelligence remarquable. Elles se distinguent

dans toutes les études, surtout sur la musique, le dessin et pos-

sèdent un talent naturel d'imitation. Elles pratiquent volon-

tiers le mensonge et jouent d'instinct la comédie. «(Jules Simon.)

On voit ces enfants concevoir sur leur santé des préoccupations

qui ne sont pas communes à leur âge, elles ont une tendance

aux idées hypocondriaques, se plaignant tour à tour de gas-

tralgie, de douleurs entéralgiques, de céphalalgie, de névralgies

diverses. Les auteurs anciens ont souvent assimilé à tort

l'hypocondrie à l'hystérie ; nous ne confondons pas ces deux

états morbides si différents, mais nos observations nous auto-

risent à penser que le plus souvent l'hypocondrie dans le jeune

âge est le symptôme précurseur de l'hystérie qui va naître à

un âge plus avancé.

ÉTAT MENTAL DES HYSTÉRIQUES. 207

D'autres fois, on remarque que, dans leur enfance, elles

sont turbulentes, indisciplinables au point qu'elles sont obligées

de quitter leurs classes et qu'elles n'ont pas reçu l'instruction la-

plus élémentaire; elles sont querelleuses, susceptibles, se fâchant

avec leurs petites compagnes, sujettes à de violentes colères. La

fameuse hystérique Gen... était follette, difficile à tenir, elle

courait partout, s'échappait de l'école, avait déjà la manie de

sauter par dessus les murs et de se cacher au point qu'on était

parfois obligé de l'attacher; enfin, vers l'âge de quinze ans,

elle était souvent prise sans cause d'une profonde tristesse,

refusant de parler pendant des journées entières.

En résumé, ces petites filles présentent de bonne heure des

habitudes, des manières et des allures qui portent déjà le cachet

de la névrose dont elles seront plus tard atteintes : elles sont

impressionnables à l'excès, la plus petite contrariété, les moin-

dres reproches et réprimandes sont reçus avec des sanglots^et

d'abondantes larmes et produisent un sentiment d'oppression à

l'épigastre, de strangulation à la gorge, etc. Vives et irritables,

elles ont souvent de petites colères et des accès de jalousie ; elles

ont aussi une grande mobilité d'humeur et des bizarreries de

caractère qui paraissent étranges; coquettes et maniérées, elles

éprouvent déjà le désir d'appeler sur elles l'attention ou d'ins-

pirer de l'intérêt, et savent déjà pratiquer le mensonge ou jouer

la comédie ; la physionomie est ordinairement intelligente,

expressive, la mémoire est fidèle, l'imagination a de la vivacité;

elles ont des insomnies et des cauchemars, de véritables hallu-

cinations et des terreurs nocturnes ; elles se plaignent souvent

de migraine ou de céphalalgie, d'hyperesthésie et de sensibilité

à la lumière, de gastralgie avec vomissements tenaces, de névral-

gie intercostale etd'hyperesthésie ovarienne qui commence à se

montrer au moment de la puberté ; enfin elles ont à propos de

la plus légère bronchite, d'une simple angine, des toux paroxys- *

tiques et persistantes présentant souvent un timbre particulier,

des spasmes passagers et divers du côté de l'oesophage, du pha-

rynx, du larynx et des viscères abdominaux, spasmes qu'elles

expriment par la sensation de corps étranger à la gorge, de

bêtes qu'elles ont dans le ventre, de vers qui montent ou qui

descendent, ou de poids qui les oppriment.. Dans certains

cas encore, on observe des palpitations, des tendances aux

lipothymies et aux syncopes, des pertes de connaissance incom-

plètes que l'on confond trop souvent avec des accidents épilep-

208 REVUE CRITIQUE.

tiques, surtout s'il s'y ajoute, comme il arrive parfois, de véri-

tables attaques convulsives.

Il faut insister sur les dispositions du caractère, sur les troubles

divers du système nerveux, qui permettent dès l'enfance de re-

connaître, de dépister et de combattre la disposition à l'hystérie.

Voici encore d'autres exemples qui, en relatant divers accidents

nerveux du jeune âge, dévoilent bien le caractère hystérique

dès cette période de l'existence : une petite fille de dix ans est

atteinte d'une céphalalgie frontale atroce qui dure plusieurs

mois, qui résiste à tous les calmants, à l'hydrothérapie même,

et qui cède un beau jour brusquement, au moment d'une atta-

que de spasme pharyngé-laryngé avec toux rauque et une sorte

d'aboiement. Or, dans ce cas, plusieurs médecins consultés

n'avaient pas hésité à porter un pronostic très grave, puisqu'ils

admettaient une affection des centres nerveux. Une autre

petite fille de six ans, jalouse de son petit frère, se dit atteinte

de douleur de tête, elle accuse du vertige, des douleurs névral-

giques vagues, de la photophobie, elle refuse tout aliment, craint

le moindre bruit, redoute l'impression de la lumière ; le pouls

est accéléré au moment des visites...; au 4e jour, on s'aperçoit

de la supercherie, on contraint la petite comédienne de se

lever, de marcher et démanger, et tous ces symptômes, qui

avaient à un moment éveillé quelques inquiétudes, disparais-

sent comme par enchantement; or, cette enfant est devenue

jeune fille, elle a maintenant seize ans, et elle est assez souvent

atteinte de spasmes, de mouvements convulsifs sur la nature

hystérique desquels il n'est même pas permis d'hésiter '.

West a observé deux cas de simulation à peu près sembla-

bles : un enfant de treize ans se plaint pendant neuf mois de

céphalalgie avec photophobie, il a une hyperesthésie du cuir

chevelu, de l'inappétence, de la constipation, il accuse une

certaine difficulté dans la marche, etc., et cependant on décou-

vre que l'enfant exagère tous ses symptômes douloureux lors-

qu'on l'observe, et après un traitement moral pendant lequel

l'indifférence des parents et du médecin joue le principal rôle,

le petit malade guérit complètement ; - une petite fille, qui

avait eu à dix-huit mois des convulsions, à six ans une toux

spasmodique avec sensibilité considérable de l'épiglotte, accuse

depuis huit ans et demi jusqu'à dix ans et demi une cépha-

Jules Simon. Conférences cliniques et thérapeutiques sur les mala-

dies des enfants, 1880, p. 135.

ÉTAT MENTAL DES HYSTÉRIQUES. ' 209

lalgie très intense, elle s'en plaint surtout lorsqu'elle est l'objet

de l'attention de sa mère et du médecin; elle présente des

bizarreries et une irritabilité de caractère insolites pour son

âge, refuse parfois de manger et bientôt éprouve nettement la

sensation de la boulé hystérique, puis elle est prise de dyspha-

gie avec symptômes d'hydrophobie nerveuse et de convulsions

générales, accidents dont un traitement moral eut seul rai-

son '. Dans ces cas, ajoute si judicieusement M. West, c'est

moins l'état du corps que celui de l'esprit qui doit éveiller les

craintes du médecin. Car, l'attention constante donnée aux

moindres sensations du malade, « l'habitude .de satisfaire,

tous ses désirs et fantaisies, sous prétexte de maladie, et l'indul-

gence que l'enfant trouve toujours en ce cas dans un amour,

maternel exagéré, exercent une très funeste influence'sur leur

caractère et en font de jeunes hypocondriaques ». , ,,

Ht

X. Nous avons étudié les dispositions intellectuelles et men-'

tales de l'hystérique à l'âge adulte, nous avons vu ses tendances

névrosiques dès le jeune âge; il serait intéressant de savoir ce'

qu'elle devient à ce point de vue à un âge plus avancé, à l'é-

poque de la ménopause par exemple. Or, à ce sujet, il n'existe

absolument rien de précis : sans doute, le caractère devient'-

plus calme et les sentiments plus fixes, les idées 'sont' moins'

fluctuantes et les volitions moins mobiles ; mais d'autres fois t

aussi on peut voir éclater des accidents nerveux connus sous'

le nom d'hystérie de retour on de la ménopause, et souvent

accompagnés de tendances érotiques si bien décrites ' par

M. Noël Guesneau de Mussy .

Enfin, nous avons vu que, dès l'enfance, les traits se présen-

tent sous l'aspect d'une physionomie éveillée, mobile, expres-

sive, qui contraste singulièrement avec la figure' indifférente,

inerte et sans expression des jeunes épileptiques. En est-il de

même chez les adultes, et leur état mental a-t-il son reflet sur

leur physionomie; en un mot existe-t-il une constitution, un

faciès hystérique' ! -,

Sous le rapport de la constitution, les avis ont toujours été

1 West. = Leçons sur les maladies des enfants. Trad. par Archambault,

ire édition, 1875, p. 13.

Gueneau de Mussy. Erotisme de la ménopause. (Gaz. hebd,, 1870,

et Clinique médicale, t. 11, 343; Paris, 1875.

14

210 REVUE CRITIQUE.

partagés depuis longtemps, comme le prouvent les citations sui-

vantes que l'on pourrait aisément multiplier : Arétée croyait

ainsi dépeindre les hystériques : n Juvenes rnulierculae quae sunt

sensibilioris gpneris nervosi,ettexturae tenuioris. » Forestus, au

contraire, disait : xMulieresvirosa; corpulentes etmulto sanguini

prseditse. » C'est bien la même opinion exprimée par Louyer-

Villermay, qui prétendait que toute femme hystérique est forte,

brune, pléthorique, pleine de vie et de santé, ce qui est une

grande exagération et une erreur manifeste. Car « il n'existe pas,

dit Briquet, de constitution hystérique appréciable par les appa-

rences extérieures ; cette maladie prend les femmes comme elle

les trouve, blondes, brunes, grasses, maigres, fortes, faibles,

colorées ou pâles ; il n'y a pas de choix. Quelques hystériques,

à la vérité, ont la ligure délicate, intelligente; mais il en est

tant dont la face béotienne, apathique et dure, trahit lastupidité,

ou dont les traits amaigris, décharnés et le teint hâve, consta-

tent la dégradation, qu'il faut renoncer au beau type grec

comme spécimen de la prédisposition à l'hystérie Il y a d'ail-

leurs de par le monde trop de femmes hystériques pour que

cette maladie n'atteigne que des belles. Dubois (d'Amiens) avait

deviné tout cela ; car, au milieu du fatras d'écritures sur cette

matière qu'il avait été forcé de compulser, il finit par dire :

« Je soupçonne fort qu'il n'existe pas de constitution hysté-

rique comme l'entendent les auteurs ' ». -

Malgré cette assertion un peu exclusive de Briquet, il n'en

est pas moins vrai que quelques hystériques présentent parfois,

sinon une constitution prédisposante, au moins un faciès par-

ticulier qui nous a permis dans certains cas, à leur simple aspect,

de reconnaître des hystériques. Nous avons suffisamment dé-

montré que leur état mental est surtout formé de contrastes,

qu'une volonté sans force est ordinairement unie à une activité

désordonnée de l'imagination, et qu'à une vive exaltation delà

sensibilité morale correspond souvent un défautde réaction aux

impressions si diverses qui les frappent, etc. (Axenfeld.) Aussi

ces contrastes se trahissent-ils parfois sur leur physionomie

par une expression habituelle de langueur et d'abattement,

accompagnant une certaine mobilité des traits. Pour Todd,

l'éclat de l'oeil et un léger abaissement de la paupière supé-

rieure cachant en partie le limbe de la cornée ont été indiqués

comme caractérisant habituellement le faciès hysttrica.

Briquet. Traité de l'hyslene, p. 02-93.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 21 1

Si ce travail que nous arrêtons ici reste encore incomplet, il

n'aura pas été sans utilité : en montrant au clinicien et au

thérapeute que l'hystérie atteint plus ou moins profondément

la volonté, il leur indique la voie à suivre et les moyens à

mettre en oeuvre pour combattre utilement certains accidents

rebelles, il leur apprend aussi le secret de ces guérisons singu-

lières souvent inespérées et toujours inattendues ; en dévoilant

les modalités prépondérantes du caractère des hystériques, il

intéresse le magistrat comme le médecin légiste au point de

vue de la créance que l'on peut prêter à leurs paroles et à leurs

déclarations, et aussi du degré de responsabilité que l'on doit

attribuer à leurs actes ; le psychologue et le moraliste trouveront

également un sujet fécond d'études dans cette agitation tumul-

tueuse d'impressions et de sentiments divers dont l'esprit des

hystériques est sans cesse troublé. Nous savons maintenant ce

que produit l'exaltation de l'imagination unie à l'impuissance

de la volonté, c'est-à-dire l'intelligence sans le contrôle de la

réflexion qui éclaire la folle du logis, sans un frein qui modère

l'activité désordonnée et stérile des volitions.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE

I. LE CRANE ET LE CERVEAU D'UNE MICROCÉPHALE; par J. JENSEN.

(Archiv. f. Psych. u. Nervenh., 1880.)

Faut-il ne considérer comme microcéphales, c'est-à-dire

comme idiots au point de vue clinique, que les individus pré-

sentant une atrésie prononcée des centres encéphaliques

et notamment du cerveau, de grossiers arrêts de développement

du système nerveux en corrélation avec une minutie extrême

du squelette crânien ? L'observation décrite en détail par le

Dr Jensen démontre qu'il exisleune classe d'idiots dont la lésion

anatomique est représentée simplement par un défaut relatif de

212 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

substance corticale, tant pour l'ensemble des hémisphères qu'à

l'égard des masses ganglionnaires de la base. Il semble, comme

le fait ressortir l'auteur de ce mémoire, que les cerveaux des

microcéphales aient eu à leur disposition trop peu de matière

nerveuse pour pouvoir, au moment de l'évolution formatrice,

dispenser la quantité qu'exigent les organes supérieurs qui pré-

sident à la vie psychique; les couches grises ont été sacrifiées

à l'élément blanc, la vie psychique à la vie végétative. Et

notons qu'il s'agit ici d'un idiot non microcéphale, dont il a

fallu chercher avec soin les altérations pour les voir, ce qui

imprime, dans l'espèce, une surprenante allure de vérité à la

théorie.

L'histoire de la jeune idiote en question, morte à seize ans

et demi d'une entérite hémorrhagique inexpliquée, présente

parmi les commémoratifs de la première et de la seconde en-

fance les particularités suivantes : faiblesse physique, agitation,

insomnie, absence de sensibilité à la douleur. L'enfant n'en-

tendait guère que les battements do mains, et n'apprit à mar-

cher que tard. Parvenue à sa quatorzième année, elle offre le

faciès de l'oiseau (projection en avant du nez et des incisives

du maxillaire supérieur); pour toute parole, elle fait entendre

un ronflement analogue au ronron des chats, qui de loin en

loin revêt un timbre métallique, et des geignements inarticulés

quand il s'agit de répondre à des excitations désagréables, mais

elle ne possède aucune manifestation expressive capable de

traduire un certain bien-être. Malpropreté absolue; démarche

légèrement titubante ne l'empêchant point de trotter en chan-

celant partout avec agitation. Ni ouïe, ni goût : l'ingestion des

aliments bouillants quels qu'ils soient, sans préférence, les

saupoudrât-on de sulfate de quinine, ne lui procure aucune

sensation, aucun malaise, aucun réflexe. Le seul signe d'in-

telligence qu'on signale est qu'elle connaissait sa place à table,

s'y rendant spontanément. Taille 1 ? ? ï. Poids 21 kilog. 07.

Arrêt de développement de l'appareil génital. La description

du squelette céphalique permet de relever l'écartement de la

suture frontale, l'existence d'un grand nombre d'os interca-

laires dans la suture lambdoïde, l'obliquité antérieure des

dents incisives du maxillaire supérieur tandis que la mâchoire

inférieure est fortement rejetée en arrière, l'étroitesse des

canaux carotidiens, la forme presque losangique du trou occi-

pital, la situation horizontale des voûtes orbitaires. Les dimen-

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 213

sions du crâne dans leur ensemble sont d'au moins 8 à 10 p. 100

plus faibles que celles des femmes allemandes en moyenne.

Ne pouvant copier les détails des mensurations d'ordre anthro-

pologique, nous nous bornerons à mentionner que le trou occi-

pital a subi, toutes choses égales d'ailleurs, une réduction de

4 p. 100 dans son plus petit axe, de 6 p. 100 dans son sens le

plus étendu; la ligne basale de Welker est de 4,3 p. 100 au-

dessous de la moyenne. Il est remarquable que l'aîi-èl de déve-

ln2penzezzt porte au même titre, au même degré sur les os de la

face; sa masse est de 10 p. 100 inférieure aux mesures

moyennes, et cet abaissement mensural atteint, même pour les

dimensions des orbites, 16 p. 100, tandis que l'angle facial de

Welker est encore de 78.

Le cerveau, qui pèse 954 grammes avec les méninges molles,

contredit au diagnostic de microcéphalie, d'autant queles hémis-

phères y sont représentés pour 805 grammes. L'examen super-

ficiel des circonvolutions et des sillons confirme plus parfaite-

ment la remarque que c'est là un volumineux cerveau d'idiot;

il met en relief le caractère humain de l'individu en ce sens

qu'on observe, par exemple, sur la frontale ascendante, des

deux côtés, une scissure profonde (rareté chez l'homme, incon-

nue chez le singe); la division du sillon interpariétal en plu-

sieurs segments, au point de former à gauche un sillon parallèle

au sillon de Rolando, doit être aussi rangée parmi les phéno-

mènes propres à la race humaine. Ajoutons enfin que l'insula

est complètement recouverte, et nous aurons bien des arguments

en faveur de la conclusion que le système des replis cérébraux

paraît témoigner bien plus d'un excès que d'un défaut d'évolit-

tion. Mais une étude approfondie décèle : .

1° ° L'aplatz'sseme7t général des circonvolutions qui, au lieu

d'offrir une profondeur de 9 millimètres, ne mesurent que

7 millimètres : or, trois cerveaux d'idiots examinés comparati-

vement présentaient une hauteur de 9 millimètres. L'auteur a

calculé que la diminution se manifeste principalement sur les

lobes frontaux et occipitaux, assertion qui ruinerait la théorie

simienne de Vogt (son parallèle entre la masse des régions occi-

pitales du singe et des microcéphales).

2° La pauvreté de la zone corticale. Tandis que dans trois cer-

veaux quelconques, la couche corticale est de 2,57 millim., que

sur trois idiots pris au hasard elle ne s'abaisse qu'à ? ,3'a millim.,

elle n'a que 2,17 millim. d'épaisseur dans le cas présent.

21 t REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

Le fait constaté, trouvons-en la pathogénie ? Comment peut se

produire une pareille localisation anatomo-pathologique ? Le

Dl J. se rallie à l'opinion de Gustav Josef pour qui le rétrécis-

sement du canal carotidien détermine une diminution de cali-

bre des artères contenues et entraîne une insuffisance de circu-

lation collatérale qui vient alors entraver le développement

cérébral. L'ischémie carotidienne est démontrée par les injec-

tions de Rohon (Arbeit. des zoolog. 7)M< ! '<. zu Wîeiz., t. 11);

des mensurations comparatives établissent l'exiguité des trajets

osseux de la microcéphafie qui nous occupe; serait-il rationnel,

alors que le crâne et le cerveau envisagés sont loin du retour

à l'atavisme (théorie de Vogt), quand on ne constate ni sou-

dure prématurée des sutures (théorie de Virchow), ni aucune

trace de lésions encéphaliques récentes ou anciennes (Stark),

ni les conditions de la pression intra-utérine anormale (Klebs),

de ne pas établir un rapport de cause à effet entre la inalfoî,2)za-

tion vasculaire et l'hypotrophie cellulaire du cerveau ? Quant à

l'origine de la malformation vasculaire, M. J. la relègue parmi

les genèses inconnues des anomalies vasculaires. P. K.

II. SUR LE nouveau MODE d'interdiction DES aliénés EN ALLE-

magne; par SPINOLA. (Arch. f. Psych. u. n'evelalc., 1880.)

Au premier octobre de l'année 1880 entrait en vigueur dans

les Etats allemands un nouveau procédé juridique à suivre pour

déclarer en état d'aliénation (démencedu Code français) et frap-

per d'interdiction légale les aliénés. Il s'agit en réalité simple-

ment de la substitution d'un mécanisme à un autre, et à cet

égard, nous le recommanderons à ceux qui seraient en quête

de réformes quant à la législation des aliénés. Comme sa des-

cription suppose l'exposé préalable du fonctionnement adopté

jusque-là et la connaissance exacte des diverses juridictions

administratives ou autres d'outre-Rhin dans leurs délimitations

respectives, nous nous bornerons à le mentionner ici à titre de

document, nous réservant d'y revenir plus tard au sujet de toute

question de droit qui en nécessiterait l'exposé détaillé. P. K.

III. Cas DE malformation cérébrale ; par le Dr L. WILLE.

(Arch. f. Psych. u. Nex·venlc., 1880.)

L'enfant dont il s'agit, venu au* monde en état de microcé-

phalie, ainsi qu'on peut s'en convaincre par le détail des men-

revue DE pathologie mentale. 215

surations crànio-faciales relatées au cours de l'observation,

présentait aussi un bec-de-lièvre supérieur médian compliqué

de gueule-de-loup. Les difficultés qu'offrait de ce fait sa

nutrition, la perte croissante de l'appétit qu'il manifesta et

bientôt de violentes convulsions suivies d'agitation, de dyspnée,

d'oedème entraînèrent sa mort à l'âge de vingt-deux jours, au

milieu d'une émaciation et d'une déchéance pondérale pro-

gressives, la température s'abaissant entre 32° et 30 ? 5 c. La

grossesse, sauf une frayeur violente dès le début, aurait affecté

une marche normale.

La nécropsie démontre : de l'anémie de tous les organes, de

l'oedème pulmonaire, de petits foyers de pneumonie dans les

deux poumons, une absence totale de fontanelles (bords osseux

au contact à leur niveau), des adhérences solides et même

ossifiées entre les sutures, un défaut complet de prolonge-

ments durc-mériens dans la masse nerveuse (ni faux cérébrale,

ni tente du cervelet). Dépourvue de lame criblée, d'apophyse

crista-galli, de crête frontale, la cavité crânienne, dont la crête

occipitale interne n'existe pour ainsi dire pas, et qui manque

de protubérance occipitale autant que des crêtes qui y abou-

tissent, se décompose, à proprement parler, en deux fosses infé-

rieures presque d'égal diamètre, situées l'une en avant, l'autre

en arrière. La selle turcique qui les sépare, très peu profonde,

est quasi plate à raison de l'imperfection des apophyses cli-

noïdes antérieures et postérieures. '

Les grosses malformations cérébrales qui correspondent aux

anomalies osseuses précédentes portent sur les hémisphères,

dont l'ensemble amoindri, arrêté dans son évolution, n'est le

siège d'aucune division longitudinale ou transverse. La con-

vexité n'est point séparée en lobes. La base seule décèle un

lobe postérieur et un lobe antérieur. Les caractères frappants

de la circonvolution d'hippocampe et de la circonvolution en

crochet indiquent l'individualité du lobe postérieur ; c'est le

lobe temporal, et, par conséquent, le sillon qui le limite en

avant représente la scissure de Sylvius, la substance nerveuse

en deçà ou au delà de celle-ci devant être considérée comme

l'embryon des circonvolutions frontale et pariétale. L'absence

de sillon de Rolando ne permet pas au surplus de se rendre

compte du degré d'atrésie des deux régions. Le lobe olfactif

manque totalement ; il est remplacé par une profonde dépres-

sion en avant du chiasma; même enfoncement au niveau d'un

216 REVUE DR P1TH()IO.IIs MENTALE.

ruban de substance blanche qui précède la couche optique surle

plancher ventriculaire. Nulle trace de lobe occipital. Il n'existe

ni corps calleux, ni commissure antérieure, ni cloison transpa-

rente, un seul ventricule. Laplaceduventriculemoyenestmar-

quéepar une fente médiane dont losbordssont immédiatement

adjacents. Un bourrelet caudiforme, paraissant bien distinctde

la couche optique soudée inférieurement, tient lieu de corps

strié; en arrière un autre renflement arrondi décrit une courbe

inféro-antérieure, donnant la sensation d'une corne d'Ammon

absente. Cette opinion est d'autant plus légitime que ce rudi-

ment d'organe rejoint par une de ses extrémités le trousseau

défibres nerveuses (cité supra), surlebordpostérieurdes hémis-

phères. Mentionnons enfin une différence de volume entre la

paire antérieure des tubercules quadrijumeaux et la paire pos-

térieure, tout au profit de la première, une prédominance

anormale du vermis cérébelleux, comparé aux dimensions des

hémisphères cérébraux, une réduction peu prononcée des pé-

doncules du cerveau et du pont de Varole alors que les corps

restiformes et les olives dépassent par leur masse les pyra-

mides.

Rapprochant le détail des altérations osseuses et nerveuses

de la conservation intégrale de l'appareil oculaire et du nez, le

Dr Wille se rattache à la dénomination de cébocéphale (classif.

d'Isid. -Geoffroy Saint-IIilaire). La vésicule des hémisphères

une fois sortie de la vésicule cérébrale antérieure (sens de

Virchow) n'a pas subi dans le cas présent la division anatomi-

que, qui normalement résulte de la pénétration delà dure-mère

dans son intérieur. Cette uniformité s'est par suite opposée

à la production de tous les, organes du cerveau et du crâne

qui émanent des hémisphères (absence de cloison transpa-

rente, de corps calleux, etc.), et réciproquement leur défaut a

nui à la genèse de ceux des éléments qui à leur tour en dépen-

dent ; telle l'absence de lobes occipitaux causée par celle du

corps calleux (Reichert). L'époque à laquelle s'est produit cet

arrêt de développement, indiquée par le rapprochement entre

l'état à peu près parfait des organes visuels et le, manque de

lobes olfactifs (quatrième à sixième semaine après la fécon-

dation), entraîne aussi à tenir compte dans une certaine me-

sure delà synostose prématurée. Celle-ci bientôt effectuée par

des troubles collatéraux dans le feuillet du blastoderme aurait

contribué, de concert avec une hydropisie ventriculaire fatale,

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 217

signalée en : de pareilles conditions (Dareste), à arrêter l'évolution

des régions cérébrales internes (paroi postérieure de la vésicule

des hémisphères ettrigone) par compression. L'auteur rejette en

conséquence l'origine atavique et la pathogénie encéphalitique

de semblables perturbations ; les émotions maternelles, si

tant est qu'elles doivent être incriminées, agiraient, pour lui,

en modifiant la pression intra-utérine et vasculaire de l'em-

bryon et provoquant ainsi des déviations dans l'activité histo-

génétique (expériences de Dareste). Dans l'espèce d'ailleurs,

ni hérédité, ni malformations du coeur ou des gros vaisseaux.

Il ne faudrait imputer la mort du monstre qu'aux difficultés de

l'alimenter provenant du bec-de-lièvre et de la gueule-de-loup ;

delà, les phénomènes généraux, les symptômes d'anémie céré-

brale, l'hypothermie, la pneumonie lobulaire. Une observation

récente de Turner (Journal of Anatomy and Physiology, XII,

2, 1878) démontre en effet qu'une cyclope privée de corps cal-

leux, de trigone, de cloison transparente, de commissure anté-

rieure et postérieure, et présentant en leur lieu et place une

grande cavité intérieure remplie de liquide cérébro-spinal, a pu

vivre, sans autre affection que de l'idiotie, jusqu'à l'âge de

vingt-trois ans. P. K.

IV. INFLUENCE DE NOTRE civilisation PRÉSENTE SUR LE DéVIE-

LOPPEMENT DES MALADIES MENTALES ET NERVEUSES ; 1)ar.T.-S.

JEWELL. (Journ. ofnervous < : HmeH<aMC<M6,janv. 98S I , p.l.)

L'auteur développe ce thème bien connu que le développe-

ment des maladies du système nerveux est en rapport direct

avec le progrès de la civilisation. Il montre l'influence du sur-

ménage intellectuel des enfants dans les écoles, se produisant

surtout chez les jeunes filles par l'épuisement général du

système nerveux et en particulier du cerveau par les mélan-

colies, l'hystérie, les congestions cérébrales, les insomnies, les

névralgies, etc. Dans le commerce, aussi bien que dans les

différentes professions libérales, l'attention et l'effort quotidien,

continu, dépassent les forces individuelles. L'usage et l'abus

de l'alcool, du café et du thé aggrave encore l'excitation ner-

veuse et par suite l'épuisement rapide. La transmission hérédi-

taire aux enfants de la faiblesse nerveuse acquise par les

parents est une cause générale nouvelle qui perpétue et multi-

plie le nombre des maladies mentales. C. T.

218 REVUE DE pathologie mentale.

V. DES psychoses dans l'ergotisme; par Fritz Siemens.

(Arch. f. Psych. te. lIeî,veîzk., t. XI.)

Ce mémoire, rédigé à l'occasion d'une épidémie d'ergotisme

ayant sévi à l'automne, aussitôt après la récolte des seigles, sur

une douzaine de villages ( ! ,5u0 habitants), relate deux

séries d'observations. Les unes empruntées en partie au

Dl Heinemann sont caractérisées par des manifestations

délirantes pures. Telle une femme de trente ans, indemne de -e

'tout antécédent psychique, traumatique ou héréditaire, qui, à

la suite des symptômes typiques de l'intoxication, est prise de

folie systématique religieuse accompagnée d'impulsions génési-

ques et d'hallucinations de la vue. Deux autres faits concernant

une'jeune fille et une femme consistèrent, dans le premier cas,

en de la mélancolie ; chez la seconde, en de l'hébétude compli-

quée d'accès maniaques. La guérison demanda trois mois pour le

premier exemple, un mois pour les deux autres. Un garçon de

6 ans, qui guérit également, fut atteint, au cours de l'ergotis-

me, d'leyd'oplaobzé pendant deux jours. Une seconde catégorie

d'observations a trait également à des individus auparavant bien

portants et sans prédisposition névropathique ou héréditaire;

l'obtusion profonde du sènsorium, l'affaiblissement général de

toutes les fonctions psychiques, l'apparition de convulsions

épileptiformes permettent de les ranger sous le diagnostic

commun de forme sluporo-épileptique d'ergotisme spasmodique

épidémique. Relevons parmi lessymptômes, l'apparence cachec-

tique et misérable, la persistance des réflexes cutanés et, par

contraste, l'absence de réflexes tendineux ( ne reparaissant que

bien aprèsleretour des fonctions nerveuses des accès d'épilepsie

complets ( myosis et inertie pupillaire au début mydriase

dans leur seconde moitié et généralement aussi dans l'inter-

valle ), l'hypérémie papillaire (un cas mortel), quelquefois des

troubles de la sensibilité (tensions, élancements, démangeai-

sons), de la contracture des fléchisseurs (griffe), de l'analnésie

accompagnée d'ataxie (signe de Romberg), de l'hésitation de

la parole avec bredouillement Un seul exemple de gangrène

circonscrite à un doigt. Intégrité de deux femmes jadis aliénées,

au milieu de cette épidémie. La suppression des règles notée

dès les premiers stades prouve, au sens du DP S ? qu'une telle

manifestation est non la cause, mais l'effet des psychoses en

général (mélancolies graves, démences paralytiques) et le signe

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 219

d'une profonde perturbation nerveuse. L'analyse psychique met

en évidence au début : vertiges, étourdissements, voire céphalal-

gies, angoisse précordiale-bientôt de l'agitation maniaque in-

consciente, laissant derrière elle de l'amnésie accompagnée

d'hallucinations visuelles et auditives (un fait) ; enfin de

l'hébétude persistante, avec mutisme, méconnaissance, stupidité

parfois accompagnée de conceptions enracinées et de réponses

stéréotypées (forme de mélancolie hypocondriaque); un cas

ayant présenté pendant quelques jours le tableau de la démence

paralytique. Intégrité de la santé générale, courbes sphygmiques

comme dans l'épilepsie vraie; à la suite des accès, abaisse-

ment de la tension et dicrotisnie prononcé. Le poids du corps

décroit au moment de l'accès des manifestations nerveuses. A

part deux cas de mort soudaine, guérison. Les deux nécropsies

démontrent, ,en un cas, de la congestion cérébrale et de la

réplétion des vaisseaux méningés; dans l'autre de la congestion

et du ramollissement des hémisphères cérébraux, des macules

d'hypérémie et des ecchymoses dans les noyaux lenticulaires et

les couches optiques; tout le long de la moelle, prolifération cel-

lulo-granuleuse localisée, surtout aux cordons postérieurs, à

l'exclusion des faisceaux de Goll, mais atteignant principale-

ment les racines postérieures dans la région lombaire'

.. ' i u c Jln tl( il 1r,

En résumé, les onze cas traités à l'asile (six hommes et cinq

femmes de onze à cinquante ans) offrent, pour l'auteur, tous

les attributs d'une intoxication cérébrale; angoisse extrême des

prodromes, marche impétueuse, hallucinations, états exta-

tiques, justifieraient la comparaison avec les effets de L'opium,

du haschisch ou de l'atropine, d'autant qu'il existait des

vertiges. L'immédiate succession des vésanies aux symptômes

ergotiques, la disparition des troubles nerveux périphériques

avant l'explosion des psychoses, les allures normales du

pouls en dehors des accès d'épilepsie malgré les autres pertur-

bations neuropsychiques servent de base au D' Siemens pour

affirmer la pathogénie des phénomènes psycho-médullaires

par tr2ns/'ertlent du poison de la périphérie aux centres.

Les au'opsies en indiqueraient le substratum anatomique,

l'évolution témoignant en même temps de la guérison des

lésions; c'est à la suite de leur résolution que l'épilepsie et

l'ataxie disparaîtraient, le phénomène du genou revenant.

Quant à déterminer le principe de l'ergot qui agirait spéciale-

ment en pareille occurrence, et la part qui doit incomber

220 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

aux mauvaises conditions climatériques et hygiéniques, ce

sont autant de questions à étudier. De fait, pronostic favo-

rable, médication tout entière dans les toniques et les forti-

fiants (K. Br. à la dose de 6 gr. par jour est resté sans effet).

L'enseignement de police sanitaire que M. S... croit devoir

tirer de sa description, c'est qu'il serait très facile à l'État d'é-

changer, par décret, aux producteurs, leur grain infesté contre

de bon seigle et d'enjoindre simultanément aux meuniers de

ne moudre ou rendre aux particuliers aucune semence malade.

Cette marchandise accaparée par l'État serait affectée sur-le-

champ au commerce pharmaceutique. P. K.

VI. LE procès LAROS AU point DÉ VUE psychologique ; par

Édouard-C. MANN. (y7<67oM ? 'Ma/o/'PsyeAooy<ea/meK'M ! 6<M</

mental Palhology. New séries, vol. VI, part. 2, p. 222.)

Il s'agit d'un jeune homme de vingt-six ans, nommé Allen

Laros qui fut arrêté et passa en jugement pour avoir le 31 mai

1876, empoisonné avec de l'arsenic son père, sa mère, ses frères

et soeurs et un commensal habituel de la maison ; ses frères et

soeurs furent seuls sauvés ; les trois autres personnes moururent.

Le crime n'avait aucun mobile apparent. L'enquête et les

efforts de la défense établirent les faits suivants : il y avait

dans la famille de l'inculpé des faits antécédents d'aliénation

mentale et d'affections nerveuses, remontant à plusieurs géné-

rations. Lui-même, qui était de moeurs douces et régulières,

était depuis plus de quatre ans sujet à des attaques d'épilepsie,

qui avaient été presque quotidiennes durant les trois semaines

qui avaient précédé le crime. Il fut prouvé que des accidents

convulsifs étaient survenus chez Laros le samedi, le dimanche,

le lundi, le mardi (jour de l'achat du poison) et enfin le mer-

credi, jour du crime ; ces accidents s'étaient en outre reproduits

le lendemain (jeudi) et le surlendemain (vendredi) ; la durée

des symptômes convulsifs variait de quelques minutes à plu-

sieurs heures pendant lesquelles il était inconscient et insensi-

ble, et à la suite desquelles son esprit restait obscurci : ces der-

niers faits furent scientifiquement constatés pendant la déten-

tion de l'inculpé, durant laquelle les crises reparurent encore ;

les experts se mirent à l'abri de toute cause d'erreur sur ce

point, prenant en particulier contre une simulation possible les

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. IZI 1

précautions les mieux conçues. L'expert du tribunal. le Dl Cur-

wen déclare cependant qu'en l'absence de l'écume des lèvrps, du

gonflement des veines du cou et de la lividité de la face, qu'il

considérait comme des symptômes essentiels, l'authenticité de

l'épilepsie était contestable : réinterrogé, il finit par admettre

que ces signes pouvaient manquer dans l'épilepsie vraie.

L'accusé fut condamné à mort.

Appel ayant été fait, de nouveaux experts furent commis, et

après des travaux qui durèrent un mois, déposèrent un rapport

dans lequel, à l'unanimité, ils concluaient à l'épilepsie et à l'irres-

ponsabilité. L'accusé tut en conséquence interné dans un asile,

d'où il s'échappa au bout de deux ans; il fut repris, ou plutôt

se constitua prisonnier, et demanda à être renvoyé chez lui

pour y être pendu, ne voulant pas retourner à l'asile ; il y fut

néanmoins réintégré, mais, six mois plus tard, il s'évada de

nouveau; on ignore ce qu'il est devenu. ' ' ·

Les deux points sur lesquels l'auteur insiste le plus, en

dehors des faits même du procès, sont les suivants : 1" les

troubles des facultés intellectuelles et affectives, manifestés

immédiatement après les paroxysmes, peuvent persister pen-

dant la plus grande partie de l'intervalle qui sépare les crises ;

2° on peut observer des attaques épileptiformes avortées,

sans convulsions, sans perte complète de connaissance, sortes

de vertiges durant lesquels le malade peut subitement se livrer

à des actes de violence dont il n'a ni la conscience, au moment

même, ni plus tard, le souvenir. R. DE M. C.

VII. Amélioration marquée CHEZ UN paralytique général,

A la suite D'UN anthrax grave ; par Geo-H. SAVAGE. (7*/<e

Journal of mental Science, n° de janvier 1881, p. 566.)

Il s'agit d'un homme de cinquante ans qui présentait, lors de

son entrée à l'asile, la plupart des symptômes de la paralysie

générale, et qui ne tarda pas à les présenter tous : idées de

grandeur, agitation, inégalité pupillaire, embarras et lenteur

de la parole, tremblement de la langue et des lèvres, etc. Sur

ces entrefaites, le malade fut pris d'un anthrax à la nuque, qui

devint rapidement très volumineux et envahit profondément

les tissus (pas de glycosurie). Pendant la guérison de l'anthrax

on put remarquer une amélioration considérable de l'état intel-

lectuel, et en particulier de la mémoire : cette amélioration

: M2 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

s'accusa de plus en plus pendant trois mois et demi au bout

desquels le malade fut rendu à sa famille. Depuis ce moment,

il continue à y avoir chez lui un peu d'inégalité pupillaire, une

certaine hésitation de la parole, et du tremblement des yeux

et de la langue, mais l'amélioration intellectuelle a persisté.

R. DE M. C.

VIII. Démence aiguë chez UNE JEUNE femme. MORT par

PUTHISIE PULMONAIRE, DEUX ANS PLUS TARD, SANS GUÉRISON

DE la maladie mentale; par G. Mackensie Bacon. (Tlle

Journal of mental Science, n° de janvier 1881, p. 554.)

Les cas de démence aiguë paraissant toujours participer plus

ou moins de l'hystérie, on croit volontiers qu'ils se terminent

presque nécessairement par la guérison ; l'observation suivante,

intéressante surtout par ses phases variées, vient à l'appui

d'une manière de voir tout opposée. Il s'agit d'une jeune fille

de vingt-trois ans, sans antécédents héréditaires, de constitu-

tion faible, très malheureuse dans sa famille, présentant depuis

quinze jours des troubles intellectuels, et qui avait été internée

dans un asile après s'être présentée à dix heures du soir, par

une pluie battante, au presbytère de sa paroisse, entièrement

nue et en se donnant pour la vierge Marie. Très excitée à son

entrée, elle fut calmée par une douche, bientôt suivie d'acci-

dents hystériformes. Bientôt elle refuse de manger et se livre

à des actes violents sur une infirmière; après une semaine

d'alimentation artificielle, elle mange et parle un peu. L'amé-

lioration continue, mais bientôt elle retombe plus bas; il faut

l'habiller, la faire marcher, l'alimenter avec la sonde. Plus

tard encore, elle va mieux, parait plus intelligente, mais ne

veut pas parler. Six mois plus tard, amélioration progressive,

sauf en ce qui touche la conversation. Enfin (deux ans après

son admission), aggravation, retour à l'alimentation artificielle,

refus de parler, même à sa mère. Elle ne tousse pas, mais elle

a l'aspect des phthisiques. Elle va de plus en plus mal, et meurt

sept mois après de gangrène pulmonaire, sans que, durant ce

temps, ni à l'approche de la mort, on ait constaté le moindre

réveil intellectuel. Pas d'autopsie. R. DE M. C.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 223

IX. NOTE SUR QUELQUES cas observés a l'asile DES aliénés DE

CEYLAN; parJ.-W. PLAXTON. (7%c7oM)')Mo/'me ? ! tacM ? ! ce,

n° de janvier 1881, p. 559.) z

L'auteur, en prenant la direction de l'asile de Ceylan, a

d'abord été très étonné de ne pas trouver dans l'établissement

un seul cas de paralysie générale; depuis ce moment, il a pu

observer trois malades qu'il est porté à considérer comme pa-

ralytiques. Tous trois sont morts après un court séjour. L'un

des malades étant mahométan, deux autopsies seulement ont

été faites.

Dans les trois cas, il y a eu simultanément affaiblissement

musculaire et affaiblissement intellectuel. Pendant la vie, il y

a eu démence simple, et finalement idiotie dans un cas, et,

dans les deux autres, excitation continuelle. Des deux derniers

malades, l'un était encore sensible au stimulus des impressions

externes, l'autre ne l'était plus.. -

Les deux autopsies ont montré dans le cerveau des points de

sclérose miliairé, surtout dans la substance blanche. Dans un

cas, il y avait de la pachyméningite, avec un hématome;

d'autre part, le cerveau ne présentait pas les caractères de la

paralysie générale; dans le second cas, au contraire, on trouva

un cerveau type de paralytique. A défaut de l'autopsie, les

symptômes, dans le troisième cas, ne laissent pas de doute sur

le diagnostic. Au point de vue étiologique, on sait que l'un des

malades était un buveur, un autre un fumeur de haschisch;

sur le troisième, il n'y a pas de renseignements.

R. DE M. C.

X. HYPNOSIS REDIVIVUS; par D. Hack TutiE. (Tlae Journal of

mental Science, janvier 1881, p. 531.)

On sait que les recherches de Braid sur l'hypnotisme

n'eurent, il y a près d'un demi-siècle, d'autre résultat apparent

que de causer à leur auteur les plus amers déboires. La foule

de ceux que les faits nouveaux impatientent parce qu'ils

troublent leur sereine somnolence scientifique eut bientôt

fait d'accabler sous les arguments a priori la doctrine du no-

vateur : quant à la vérifier, il n'en fut pas question. Tel était

l'état des choses en Angleterre, en la4z, relativement au

braidisme. En 1880, la « British Médical Association » invi-

32t I· REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

tait le professeur Preyer (d'Iéna) à faire une conférence sur

l'hypnotisme et la neuro-hypnologie, et à éclairer l'Angleterre

sur les travaux de l'Anglais Braid.

C'est l'histoire de ce revirement, tout en faveur de Braid, et

qui ne remonte pas à une date bien éloignée, que M. Hack

Tuke s'est proposé de tracer d'une façon sommaire. Il rappelle

les expériences de MM. Charcot, Preyer, Heidenhain, Lépine,

et les siennes propres. Sans doute, l'hypnotisme n'a pas jus-

tifié, jusqu'ici, la confiance que Braid en se basant sur les

résultats obtenus plaçait dans son avenir thérapeutique ;

mais s'il ne réalise pas, au point de vue curatif, les brillantes

espérances qu'on a entretenues au début, et qu'il n'est pas in-

terdit d'entretenir encore, il fournit du moins à la psychologie

et à la physiologie cérébrale une précieuse méthode d'investi-

gation.

Le principal mérite de Braid, dit, en se résumant, M. Hack

Tuke, a consisté à démontrer : z

- le Que le sommeil ou coma mesmériquc, la rigidité muscu-

laire et la catalepsie, l'anesthésie, l'analgésie, les hallucina-

tions et les illusions qui surviennent daus le cours de ce som-

meil anormal, sont des phénomènes réels et non simulés;

2° Que ces phénomènes peuvent être provoqués dans des

conditions telles, que, pour les expliquer, il n'est nécessaire de

recourir ni'à. la présence d'un fluide magnétique, ni même

d'une influence ou force matérielle quelconque passant de

l'opération au sujet;

3° Que ces phénomènes sont, au contraire, le résultat de

l'action individuelle, de la concentration de l'attention sur un

objet à l'exclusion de tous les autres, aidée de la tension des

muscles oculaires en haut et en dedans ;

4° Que la suggestion joue un rôle remarquable dans le cou-

rant des pensées ou des idées qui sont excitées dans l'esprit du

sujet par l'intermédiaire soit des muscles, soit des paroles;

5° Que des changements d'une rapidité remarquable peuvent

être provoqués dans la circulation et l'innervation de la région,

et, qu'à l'aide de ces changements, on peut arriver à un mode

de traitement, non pas magnétique, mais relevant de principes

physiologiques connus. R. de M. C.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 225 5

XI. Trépanation du crâne CHEZ un aliéné (dix-neuf mois après

un coup sur la tête). Guérison complète; par G. MAC-

kensie Bacon. (Flic Journal of mental Science, n° de jan-

vier 1881, p. 551.)

L'observation de ce malade peut se résumer de la façon sui-

vante : homme de trente-huit ans, d'une santé ordinaire : en

août 1878, il reçoit sur la tête un marteau tombé d'une hauteur

d'environ six pieds : pas de perte de connaissance; pas de

symptômes graves immédiats ; cependant le malade se ressent

toujours du traumatisme. Vers janvier 1879, étourdissements,

fourmillements et engourdissement dans les jambes ; en octo-

bre 1879, bruits anormaux dans les oreilles, douleurs dans la

tête, les bras et les jambes ; en décembre, irritabilité, tristesse,

idées de suicide, insomnie, pupilles inégales (la gauche dilatée);

le malade porte souvent la main à la cicatrice laissée par le

coup. Le 1 Il janvier 1880, deux tentatives de suicide, à la suite

desquelles il est interné dans un asile : là, il se plaint d'être

nerveux, de ne pouvoir résister à des impulsions subites ; il

est agité, ne dort pas ; il se plaint toujours de la tête : il y a

sur le pariétal gauche une légère dépression.

Dans ces conditions, la trépanation fut proposée par l'au-

teur, et adoptée et exécutée par l'un des chirurgiens de l'hôpi-

tal de Cambridge, M. Wherry ; un petit fragment du pariétal,

mesurant environ les trois quarts d'un pouce, fut enlevé au

point qui avait été le siège de la lésion. La portion d'os enlevée

n'était pas fracturée ; la dure-mère était violacée, mais parais-

sait saine. La plaie guérit rapidement et parfaitement. L'opé-

ration avait été faite le 12 mars : le 28 juin, le malade put

sortir et reprendre son travail habituel, qu'il n'a pas cessé

depuis.

Bien que l'opération n'ait pas révélé la cause d'irritation

cérébrale que l'on supposait exister, et que l'on se proposait

de supprimer, il n'en est pas moins vrai et ce point est plus

digne de remarque que facile à expliquer que l'apparition

des symptômes a eu pour point de départ le traumatisme, et

que leur disparition a eu pour point de départ l'opération. Il

ne parait donc pas excessif d'attribuer à celle-ci une part im-

portante dans la guérison. R. DE M. C.

45

SOCIÉTÉS SAVANTES

SOCIÉTÉ MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE

Séance du 28 novembre 1881. Présidence de M. Luys.

Suite de la discussion sur les aliénés criminels. M. CHRISTIAN,

se plaçant sur le terrain clinique, ne veut pas revenir sur les

objections qui ont été déjà soulevées contre la construction d'un

asile spécial pour les aliénés dits criminels, car M. FalreL, dans' une

magistrale communication faite en 1866 sur cette question qui

n'est pas nouvelle, a fourni déjà de nombreux arguments contre

cette proposition. Il veut seulement démontrer que l'asile de

Broadmoore n'est pas, comme parait le penser M. Motet, la preuve

la plus éclatante de l'utilité de ce système qui a prévalu en An-

gleterre et qu'on voulait introduire en France.

M. Christian repousse ensuite la qualification de criminel qu'on

applique à certains malades : au point de vue du Code, en effet,

le crime ne peut exister pour l'aliéné ; il ne doit donc être

question ici que de malades plus ou moins dangereux, comme

peuvent, l'être à un moment donné tous les aliénés, qui fort heu-

reusement ne sont pas toujours jusqu'à la réalisation de l'acte dont

ils sont capables.

En se plaçant à un autre point de vue, ne voit on pas d'ailleurs

dans la statistique de Broadmoore la condamnation même de ce

projet. En effet, pour peupler cet asile, on dû y enfermer des

aliénés dits criminels qui avaient commis des vols d'objets dont la

valeur ne dépassait pas 42 pence, ou bien encore les déments ou

les paralytiques généraux ayant accompli un de ces actes délic-

tueux, mais à vrai dire insignifiants, qui leur sont habituels.

Nos adversaires trouvent, dit M. Christian, que mélanger ces

sortes d'aliénés aux aliénés ordinaires, c'est blesser la famille de

ces derniers dans ses sentiments les plus honorables. Mais la pra-

tique nous apprend que les familles, loin de raisonner ainsi,

pensent tout autrement et s'estiment au contraire beaucoup trop

heureuses que leurs malades n'ait commis aucun acte délictueux,

pour aller reprocher d'être criminel à ceux moins surveilllés qui le

SOCIETES SAVANTES. 227

sont devenus, et à plus forte raison pour songer à se plaindre de

leur voisinage. Tous les aliénés quels qu'ils soient peuvent trouver

place dans nos asiles, et c'est au médecin seul qu'il appartient de

déterminer les soins et la surveillance nécessaires à chacun

d'eux.

Examinant ensuite un autre côté de la question, M. Christian

passe en revue un certain nombre de malades qui, rendus à la

liberté après un premier crime, en ont commis un second, et se

demande s'il ne serait pas bon de conserver pour toujours à

l'asile tout individu qui dans un accès de délire aurait commis un

homicide, ou tout au moins d'entourer la sortie de semblables

malades de garanties spéciales, à déterminer, à la condition tou-

tefois, qu'on le traitera toujours avec les aliénés ordinaires.

M. Motet. Je n'éprouve aucun embarras à être de l'avis de

M. Christian au point de vue clinique, mais en me plaçant comme

le fait le magistrat au point de vue social, je ne puis en bonne

conscience considérer un aliéné qui a commis un crime comme

un aliéné ordinaire. En général, tout homme qui commet une

offense contre les lois de son pays doit compte de cette offense.

S'il est irresponsable de son acte, il ne doit pas être puni, mais il

doit être mis dans l'impossibilité de nuire sans cependant être

assimilé aux malades inoffensifs.

Je voudrais aussi que le médecin de province qui actuellement

reçoit ses malades de Paris, par convoi de 20 ou 30, ne soit pas

exposé à recevoir parmi eux des aliénés homicides qu'il pourrait

méconnaître; d'autre part, je crois qu'il faut conserver à nos

asiles leur caractère, faire tomber les murs, si c'est possible, sans

cependant pour cela négliger de sauvegarder les intérêts de la

société.

Pour arriver à ce résultat, il suffirait d'une modification bien

simple de la loi de 1838 : décider que les aliénés criminels ne

seront plus à la charge de la commune, mais bien à celle de

l'Etat, et construire près des prisons des annexes destinées à rece-

voir ces catégories de malades, ou bien encore créer un asile

d'Etat central; car s'il est admis que ces individus seront à la

charge de l'Etat, il deviendra difficile de les faire soigner dans des

établissements départementaux. Comment d'ailleurs le médecin

ferait-il pour conserver ces malades qui, pouvant être guéris de

leur délire, exigent leur sortie et commettent ensuite de nouveaux

crimes ?

M. CHRISTIAN. Il me semble que dans un asile on peut

prendre des précautions suffisantes pour ne pas rendre inopi-

nément à la liberté un de ces êtres malfaisants ; l'Etat pourrait,

par exemple, les maintenir à l'asile sans demander l'avis du méde-

cin, qui lui-même n'a en général a répondre que ceci : Il est guéri

de son accès, mais rien ne me prouve qu'il n'aura pas un autre

228 SOCIÉTÉS SAVANTES.

accès : Je m'appuie pour condamner la création d'un asile central

sur ce fait, qu'à Broadmoore, on trouve des malades ayant volé des

objets insignifiants, d'autres ayant commis un crime de lèse-ma-

jesté, un autre ayant dérobé un cheval.

M. LuNiEH. 11 y a un contraste absolu entre les prémisses et

les conclusions de M. Christian ; il pense que ces deux mots aliénés

et criminels jurent de se trouver réunis, et malgré cela il n'est pas

éloigné d'admettre qu'on les détienne pendant presque toute

leur vie. J'accepte cependant sa conclusion et je lui dirai alors que

c'est aller à l'encontre des progrès qu'on lente d'introduire dans

les asiles, que de vouloir y mettre les criminels. Si l'on crée au

contraire un asile d'État, avec les criminels on pourrait y mettre

tous ces malades qui sont un danger permanent pour le per-

sonnel ; j'ajouterai d'ailleurs qu'au point de vue théorique je ne

puis partager l'opinion de MM. Christian et Motet, quand ils

pensent qu'il n'y a aucune différence entre celui qui a commis un

crime et l'aliéné simple ; je crois au contraire que la différence est

grande, car ce sont en général les incurables qui deviennent dan-

gereux.

Il est bien entendu que je laisse de côté les individus devenus

aliénés après leur entrée en prison, bien que dans plusieurs cas

leur délire soit antérieur à l'acte qni a maintenu la condamnation,

mais il serait trop difficile d'en faire le triage. Je crois donc qu'on

doit continuer à les mettre comme on le fait actuellement, à la

prison de Gaillon.

M. CHRISTIAN. Vous confondez les aliénés criminels avec les

aliénés dangereux. Chacun de nous a dans son service un certain

nombre de malades dont il ne serait pas fâché de se débarrasser;

mais alors si ce sont eux que vous voulez mettre dans votre nou-

vel établissement, il ne lardera pas à être rempli ; de plus, tel qui

profère aujourd'hui des menaces de mort contre le médecin ou le

personnel et deviendrait même réellement dangereux, s'il n'était

surveillé, sera calme et inoffensif demain. L'enverrez-vous à l'asile

central ? 2

. M. Motet. Presque tous nos malades en sont là. Il est évident

qu'on ne devrait mettre dans cet asile d'État, que les individus

exceptionnellement dangereux, dont beaucoup n'ont pas commis

de meurtre, uniquement parce qu'ils n'en ont pas trouvé l'occa-

sion.

M. FOVILTR. Il résulte pour moi de cette discussion unfait cer-

tain, c'est que le médecin est souvent très embarrassé et se trouve

obligé de trancher des questions fort délicates, quand il s'agit de

rendre à la liberté un homme ayant déjà tué un autre et qui

pourra recommencer. C'est celle responsabilité que je voudrais

faire cesser en mettant les aliénés criminels dans un asile spécial.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 229

Je dois cependant avouer que l'article 39 la loi de 1838 nous offre

un moyen de tourner cette difficulté, moyen auquel j'ai déjà eu

recours un certain nombre de fois. Voici comment :

Pour qu'un aliéné sorte de l'asile, il faut que le médecin le déclare

guéri ; quand celui-ci ne croit pas devoir faire cette déclaration à

cause de la crainte d'une rechute qui pourrait s'accompagner d'un

nouveau crime, il n'a qu'à engager le malade à demander sa

sortie au tribunal qui statuera alors par un arrêt non motivé, et

dégagera la responsabilité du médecin. Je crois que, loin de craindre

l'intervention du tribunal, nous devons la provoquer le plus souvent

possible. J'avais autrefois dans mon service à Quatre-Mares un

homme qui avait commis un meurtre ; après quelque temps, il

ne présentait plus aucun délire et demandait sa sortie avec insis-

tance'. Je l'ai adressé au tribunal qui plusieurs années de suite le

remit à l'année suivante ; enfin, un jour, la mise en liberté fut

ordonnée par un arrêt, et quelques jours après cet homme frappait

sa soeur de douze coups de couteau. Depuis le tribunal a toujours

été très circonspect et, maintenant, il est de tradition, au tribunal

de Rouen, qu'avant de prendre un arrêt, on doit tenir le plus

grand compte de l'opinion du médecin.

AI. DALLY demande qu'on nomme une commission chargée de

recueillir toutes les observations d'aliénés qui, mis en liberté après

un premier crime, en auraient commis ou tenté de commettre un

second.

M. lnLnEr pense qu'on doit attendre la fin de la discussion pour

étudier cette proposition. M. B.

SOCIÉTÉ DE PSYCHIATRIE ET MALADIES NERVEUSES

DE BERLIN

Séance du 10 janvier 1881. 1. - PIIÉSIDRNCE de M. WESTPHAL.

Le bureau est renommé par acclamation pour l'année 1881.

M. SENATOR ouvre la séance par la communication annoncée sur

un cas d'apoplexie bulbaire avec paralysie croisée de la sensibilité ' . 1.

Il s'agissait effectivement, ainsi qu'en témoignent les dessins et

les préparations soumises à l'examen de la Société, d'un foyer de

ramollissement dans la moitié externe gauche de la partie posté-

1 Voir les Archives de Neurologie, aux Revues analytiques.

230 SOCIÉTÉS SAVANTES.

rieure et inférieure de la moelle allongée, conformément au

diagnostic porté. C'est une thrombose qui a déterminé cette lésion

dans le domaine du corps resliforme gauche.

Discussion :

M. KnoNECKER demande comment se comportait la respiration.

A quoi M. Senator répond qu'en dehors d'un emphysème sénile et

de ses attributs symptomatiques, il ne se passait rien d'anormal.

M. REMAK, rappelant le cas décrit par lui dans la séance

de novembre (hémianesthésie analogue à la paralysie alterne de

Gubler du facial et des extrémités) qu'il considère comme en rap-

port avec une lésion de la protubérance (travail de Couty dans

la Gazette hebdomadaire de 1877 et 78), fait ressortir les différen-

ciations cliniques de ces deux observations. Elles ont de commun

l'hémianesthésie croisée limitée à la face par le bord du

maxillaire inférieur. Chez son malade il n'y avait ni dysphagie, ni

dyspnée, ni fréquence exagérée du pouls ; mais on notait une

kératite neuro-paralytique, une parésie du facial gauche. Appuyant

surlemyosis et la paralysie du crico-aryténoidien postérieur droit,

M. Remak insiste sur la valeur de cette paralysie partielle en

faveur d'une lésion nucléaire de la moelle allongée.

Au cours de la discussion, à laquelle prennent part MM. Moeli,

Vfernicke et Bernliardt, 111. i'erniclse expose méthodiquement les

rapports anatomiques qu'affecte la région en question avec la

moelle allongée (trajets des fibres nerveuses).

Séance du 14 mars 4 88 Présidence DE M. Westphal.

M. BENNRARDT décrit un cas d'hémiathétose chez une jeune fille de

vingt ans. Le principal intérêt de cette observation réside dans la

marche de la maladie, l'affection se présentant au début (il y a

trois ans) sous la forme d'hémichorée posthémiplégique. C'est

graduellement qu'elle se tiansforma, en quelques mois, en hé-

miathétose, laquelle persista exactement avec les mêmes carac-

tères qu'elle revêt aujourd'hui. Par conséquent, concurrem-

ment avec la première publication faite par l'orateur sur ce sujet

(Virchow's, arch. t. 67), ce fait confirme l'opinion de M. Bernhardt

que l'hémiathétose doit être considérée comme une modification de

l'hémichorée.

M. Bernhardt présente en outre deux malades, une femme de

vingt-cinq ans et un homme de ving-sept, atteints, la première aux

deux mains, le second à la main droite et aux doigts de l'ensemble

symptomatique d'ordre vaso-moteur, désigné par les Français sous

le nom d'asphyxie locale des extrémités '.

Nous en donnerons l'analyse dans les Revues analytiques.

SOCIÉTÉS savantes. 231

A ce propos, M. Blumenthal rapporte un cas semblable qui se

résume ainsi : Un homme de quarante-sept ans, indemne d'anté-

cédents pathologiques héréditaires ou diathésiques, simplement

sujet à des migraines, voit se développer en 1869 une ulcération

sur le bord de la lèvre supérieure qui se prolonge jusqu'aux con-

fins de la muqueuse. Considérée par Wilms comme un lupus, elle

gagne par-ci, tandis qu'elle guérit par là, sans traces de cicatrices,

et cède facilement aux médications locales. Dès lors chaque jour

trois ou quatre accès de troubles vaso-moteurs, selon l'expression de

M. Bernhardt, caractérisés par des taches bleues, roses, rouges, ou

d'un blanc de neige, avec réfrigération glaciale des régions

atteintes : ce sont les phalangettes des doigts et des orteils, les

oreilles, le nez, les lèpres ; au bout de cinq à six mois ces manifes-

tations gagnent la deuxième puis la troisième, phalange et durant

davantage s'accompagnent de lipothymies. Induration, anesthésie,

du tact, sensation permanente de froid dans les parties les premières

affectées. Les doigts donnent la sensation de bougies stéariques.

Intégrité des fonctions et de la santé générale. Le processus en-

vahit bientôt symétriquement les quatre extrémités, le visage,'le

tronc; sueurs profuses des téguments lésés; durée deux ans. Pendant

deux autres années, stade d'induration cutanée ; coloration sombre,

jaunâtre ou bronzée; exfoliation superficielle; nodosités intra-

cutanées très douloureuses, dures, semblables à des exostoses,

symétriques ; en même temps douleurs articulaires dans les

extrémités, le long de la colonne vertébrale, qui immobilisent

le malade. La peau et le panicule adipeux s'amincissent de sorte

que les téguments, très mobiles en tel endroit (thorax, abdomen)

semblent en telle autre région collés sur les os (doigts, articu-

lations, omoplate, clavicule, pieds, aponévrose crânienne). Enfin

complication de l'atrophie musculaire qui fixe les mains dans

l'abduction, permet à peine l'ouverture de la mâchoire, s'oppose à

la marche ; langue étroite et pointue, dysphagie. Intégrité des

fonctions. Une pleure-pneumonie, de concert avec les accidents du

décubitus, enlève le patient après six ans de maladie. Aucune

espèce de traitement n'avait produit d'amélioration.

M. Senator mentionne avoir vu assez souvent chez des enfants

atteints d'hémiplégie spasmodique infantile (Benediktl des mani-

festations motrices ressemblant à celles de la chorée posthémi-

plégique. En deux cas les extrémités qui se mouvaient involontai-

rement étaient également en proie à des raideurs tétaniformes.

Communication de M. Hirschberg touchant la fixité pupillaire et

la mensuration exacte de la diplopie paralytique. Il s'agit, dit

l'orateur en commençant, d'un cas-type de rigidité pupillaire

réflexe : la pupille rétrécie ne se contracte plus sous l'excitation

lumineuse tandis qu'elle répond à la provocation de l'accommoda-

232 SOCIÉTÉS SAVANTES.

tion. Ce phénomène découvert par Arg3,11 Robertson, d'Edimbourg,

(Edimbg. méd. j., 1869), contrôlé par Knapp, Leber, Wernicke,

Hempel (tabes dorsal), a été l'objet de la sollicitude de M. Charcot.

Sur quatre-vingt-deux cas relatifs au tabès et à la paralysie

progressive (thèse de Vincent 1 877) , on note : absence de myosis

au début du tabès, mais plus lard, la tendance au myosis étant

fréquente, l'impression lumineuse fait disparaître la contraction

pupillaire. Au bout de dix ans, pupilles immobiles, dilatées,

rétrécies ou de moyenne dimension. Au début de la paralysie

progressive, pupilles inégales obéissant moins à la différence

d'éclairage qu'à l'accommodation. Déjà Remak, en 1864 (Berl.

Klin. Wochensch. p. 396), attribue aux formes insidieuses du tabès

cervical, selon sa propre expression, la réduction des pupilles au

diamètre d'une tête d'épingle, ajoutant qu'à ce symptôme corres-

pond une lésion très ancienne. En effet, les pupilles déplus de un

millimètre et demi s'observent et chez des adultes indemnes de

toute manifestation tabétique, et chez ceux qui tout à fait au

débutdu tabès ne se considèrent pas comme malades. M. Ilirseliberg

présente, à l'appui de son thème à la Société, une dame de qua-

rante-quatre ans qui est venue le consulter simplement à raison de

l'étroitesse de ses pupilles ; elle accuse des céphalalgies surtout

depuis huit deuils éprouvés en très peu ce temps. Absence du phé-

nomène du genou ; pupilles mesurant à peine 2 millim., ne réagis-

sant pas à l'impression lumineuse, mais se dilatant dès qu'on force

I'oeil à se mettre au punctum remoturn. Atrophie bilatérale des N. 0 ;

elle est tout à fait au début. (Coloration blanc verdâtre du nerf) :

l'oeil droit lit encore les plus fins caractères, l'oeil gauche, l'impres-

sion habituelle. La vision centrale est réduite à droite d'un tiers,

à gauche d'un sixième; le champ visuel et la perception des cou- "

leurs, normaux à droite, commencent à décroître à gauche. S'en

référant aux opinions de Erb, Hempel, Wciss, Huglililigs-Jacksoii,

Mtiller de Graz, sur la fréquence relative et absolue des deux

symptômes, myosis et fixité pupillaire, isolés ou concomitants

dans le tabès ou la paralysie progressive, M. H... pense que l'im-

mobilité de la pupille est due à l'interruption de celle portion de

l'arc réflexe qui lie le nerf optique à l'oculo-moteur, c'est-à-dire

qui est intermédiaire aux noyaux de chacun de ces nerfs (Erb,

Hempel), tandis que le myosis dériverait d'une lésion du centre

dilatateur de la pupille dans la moelle ou des nerfs qui en dépen-

dent (Erb).

Le syndrome en question completpeut aussi dans le tabès s'accom-

pagnerdeparésie bilatérale del'oculo-moteur. Telslesdeux exemples

suivants. Un homme de cinquante-neuf ans éprouve des élancements

dans les jambes, de la faiblesse des extrémités inférieures; on

observe l'absence du phénomène du genou, l'atrophie des deux N. 0.

avec rétrécissement du champ visuel. Diplopie ; divergence de l'oeil

SOCIÉTÉS SAVANTES. 233

gauche bientôt suivie de celle de 1'oeil droit. Myosis excessif ; immo-

bilité complète de la pupille à la lumière, tandis qu'elle se dilate

dans la vision au loin. Bientôt amaurose totale. L'autre fait

concerne un homme de trente-six ans ayant des antécédents véné-

riens sinon syphilitiques ( ? ), se plaignant de douleurs dans les

membres, de céphalalgies frontales, surtout nocturnes. Il existe

de l'anesthésie dans la moitié droite de la face et de la diplopie.

Pas de phénomène du genou. Acuité visuelle normale ainsi que

le fond de l'oeil. L'hémianesthésie comprend aussi la langue, et la

surface du globe oculaire. Parésie de l'oculo-moteur droit; l'oeil

droit est dévié en dehors. La diplopie tient à la parésie du droit

interne droit; les autres branches de l'oculo-moteur sont peu

atteintes, car la pupille de ce côté est plus étroite que l'autre : pas

de réaction à la lumière, mais dilatation dès que l'oeil fixe un

point éloigné. L'iodure de potassium à hautes doses n'agit point,

car trois mois après le malade présente une pupille droite mesu-

rant de '),5 à 2 millim. se dilatant du double pour la vision de

loin, se contractant dans l'exercice de la vision rapprochée*

(accommodation normale) ; une pupille gauche de 5 millim/de

diamètre se contractant bien pour la vision de près, mais restant

immobilepour lavision auloin (parésie de l'accommodation); enfin

la fixité des deux pupilles absolue à l'approche d'une source éclai-

rante. Léger ptosis a droite; mobilité de l'oeil de ce côté limitée

surtout en dedans. Les frictions mercurielles employées jusqu'au

ptyalisme diminuent la divergence de l'oeil droit (diplopie presque

disparue), mais la parésie accommodative de l'oeil gauche aug-

mente, l'organe étant limité dans sa motilité interne. Les

deux yeux arrivent à converger sur un objet placé à 1'2", mais la

fatigue ou la suppression physiologique de l'un d'eux entraîne

la divergence rapidement; même observation pour la vision bino-

culaire à distance. Quoi qu'il en soit, M. H.. croit avoir affaire au

groupe tabétique ; pour lui l'altération des cordons- postérieurs

remonterait environ jusqu'à la moelle allongée. Il termine en

proposant, pour mesurer l'écartement des deux flammes vues par

le diplopique, d'adopter une carte construite par lui ; elle repré-

sente la projection d'une sphère du champ visuel de un mètre de

rayon divisée en degrés angulaires, et contient les notations men-

surales de plusieurs centaines de faits semblables recueillis dans

diverses paralysies oculaires où dans le strabisme avant et

après l'opération ; de là des comparaisons exactes touchant les

phases de la même affection et différentes affections donnant lieu

au même symptôme, un diagnostic certain, et le contrôle du

traitement plus facile par la détermination quantitative du degré

de la déviation de l'ceil quelle qu'en soit la cause.

La discussion qui s'engage permet à M. WESPIIAL d'insister sur

ce fait que tandis que des aliénistes connaissaient dèslongtemps la

234 SOCIÉTÉS SAVANTES.

non réaction de la pupille à la lumière chez les paralytiques, ils

étaient moins au fait des allures de cette membrane sous l'influence

de l'accommodation.

M. SENATOR appuie l'opinion de Râhlmann pour qui, dans le

tabes, la paralysie des fibres oeulopupillaires de la moelle cer-

vicaleassure la prééminence du nerf oculo-moteur.

M. Hirschberg maintient qu'il y a une double interrup-

tion de la conductibilité, le myosis résultant de la paralysie des

centres, source desfibres pupillo-dilatatrices, alors que la fixité de

la pupille dépend de l'interruption des voies qui unissent les noyaux

du nerf optique et de l'oculo-moteuiv

M. REMAK insiste sur cette fixité réflexe même quand il y a

dilatation pupillaire chez le tabétique; l'observation lui paraît

plus difficile quand les pupilles sont étroites.

M. WESTpHALfait observer que des pupilles fortement contractées

naturellement peuvent se resserrer encore si l'on force les yeux à

converger et à accommoder.

L'ordre du jour estépuisé par la communication de M. Westphal

sur un cas de psychose réflexe ' du moins en apparence. (Archiv. f.

Psych. ii. iYe2-veizk ? XII, 2.) P. K.

VIA CONGRÈS DES NEUROLOGUES ET ALIÉNISTES

DE L'ALLEMAGNE DU SUD-OUEST

SESSION DE BADE

Séance du 21 mai 1881.

A deux heures et demie de l'après-midi, M. le premier curateur

Baumler (professeur à Fribourg) ouvre la séance par des paroles de

bienvenue. La présidence est ensuite décernée par acclamation

à M. le professeur RcvEC6Ea. M. le professeur JOLLY est désigné

pour présider la seconde séance. Secrétaires : MM. MoMMsEN et

TuczFK.

Après le tribut de regrets payé par M. Bauniler l'absence du

second curateur, M. FisciiER, le président donne lecture des noms

de collègues qui s'excusent de ne pouvoir prendre part aux travaux

1 On en trouvera l'analyse dans les Revues analytiques.

SOCIÉTÉS SAVANTES.- 235

de la réunion. L'assemblée reçoit en distribution le programme

du Congrès International de médecine de Londres, le rapport du

professeur BUNSEN touchant l'analyse de la source de la galerie

principale de Bade, ainsi que ses entrées à la promenade et au

casino mises comme toujours gracieusement à sa disposition par

la Commission des Eaux.

On passe ensuite à la série des communications qui suivent :

Professeur FÜRSTNER et Dl Zacher (d'Heidelberg) : sur une anomalie

de formation particulière du cerveau et de la moelle. Cette observation

qui sera publiée in exteîîsol concerne une défectuosité prononcée

du lobe frontal gauche; l'insula se trouve notamment à découvert

de ce côté; absence d'aphasie. La moelle est double à la région

lombaire, bien que le canal vertébral soit unique.

Le professeur Fùrstner fait une nouvelle communication relative

à la destruction unilatérale du bulbe. Les quinze expériences prati-

quées sur des animaux qui ont survécu jusqu'à un an et demi après

la lésion, seront intégralement publiées 2.

M. le professeur Schûltze (d'Heidelberg) présente au Congrès une

couturière de trente-trois ans atteinte de tétanie, chez laquelle son mé-

decin, leDr Dusch, a rencontré l'/tpo'eoeMtaMHMmecmH'ue des deux

nerfs facial, tout récemment signalée par Chwostek. La démonstra-

tion en est très nette sur les branches inférieures du nerf; il ne s'agit

pas là de manifestations d'ordre réflexe puisque ni le chatouillement

de la peau ni de légers coups frappés à côté des troncs nerveux

et en dehors des zones électro-motrices n'entraînent de contrac-

tions dans les muscles correspondants. Parallèlement, hyperexci-

tabilité électrique. Mêmes phénomènes dans les nerfs du bras.

Longue durée, absence de réflexe patellaire, sans symptômes du

tabès au début. La pression permanente exercée sur le tronc du

facial n'engendre pas celte réaction qui n'est d'ailleurs pas spéciale

à la tétanie. Chez les gens bien portants presque toujours un coup

porté sur la partie inférieure de l'os malaire détermine une con-

traction du grand zygomatique, qui ne doit être considérée

comme le fait ni d'une excitation nerveuse directe, ni d'une

réflexe, mais bien d'une excitation musculaire. Même observation

dans la paralysie faciale alors que, l'excitabilité électrique du nerf

ayant totalement disparu , l'excitabilité musculaire est encore

conservée.

Du Paramyoklonus multiple par M. le professeur Friedreich.

Il s'agit d'un cas spécial de convulsions cloniques de certains

muscles symétriques des extrémités supérieures et inférieures, qui

se sont manifestées à la suite d'une frayeur chez un homme de

1 Nous l'analyserons alors.

1 Nous en donnerons l'analyse à ce moment.

236 SOCIÉTÉS SAVANTES.

cinquante ans. Elles ont rétrocédé spontanément. La publication

en sera effectuée dans les archives de Virchow.

Des modifications dans le poids du corps, qui suivent les accès

d'épilepsie ; par le professeur dully (de Strasbourg). Par les recherches

entreprises sur ce sujet à la clinique du professeur, M. Lehmann se

proposait de contrôler les indications de Kowalewsky1. Vingt-huit

malades, tant hommes que femmes, en ont été l'objet pendant

quatre semaines. On a bien constaté çà et là pendant les premières

vingt-quatre heures une diminution de une à trois livres après

l'accès, mais il ne s'agissait que d'une coïncidence fortuite, car : 1

1° Chez un même épileptique d'autres accès non moins graves,

loin d'être suivis d'une perte de poids, ont été parfois en relation

avec une augmentation ;

3° La plupart des épileptiques ne subissaient aucune modification

pondérale, que la maladie fût récente ou ancienne, que les accès

fussent forts ou faibles. On observa même un cas d'état de mal

sans perte de poids;

3° L'ensemble des malades examinés en dehors des accès présen-

tèrent, toutes choses étant égales d'ailleurs, très fréquemment des

oscillations pondérales variant d'une demie à une livre en plus ou

en moins. Il en est de même pour des gens bien portants.

Par conséquent les conclusions de M.Iomalemsk3·constitueraient

autant d'illusions.

Le Dr ROLLER (de Strasbourg) recommande au Congrès un

appareil à placer des coupes de cerveau et de moelle dans leur ordre

sériaire respectif : il s'agit de faire pratiquer par un potier dans des

plaques en terre cuite une série de dépressions. Ces plaques de cinq

espèces, pourvues chacune de six à soixante -quatre compartiments

cellulaires, selon le nombre des coupes et leur volume, reviennent

au plus à 4 marks 50 ( 5 francs 65). Les micrographes réaliseraient

également une économie considérable en remplaçant les lamelles

couvre-objets en verre par des lamelles de mica. Extrêmement

transparentes, celles-ci s'appliquent hermétiquement sur les prépa-

rations et se taillent aisément selon les dimensions voulues : elles

conviennent surtout aux grosses coupes, mais sont encore utili-

sables pour celles qui exigent l'oculaire 3 et l'objectif 8 de Hart-

nack.

Le Dr STILLING (de Strasbourg) montre des préparations de Uiiusmu

et bandelette optique dans lesquelles les faisceaux non croisés sont

les plus nombreux ; puis viennent ceuv des deux commissures;

enfin le plus petit nombre a trait aux fibres entre-croisées. Celles-ci

reposent sur les non entre-croisées comme sur la concavité d'une

gouttière La commissure antérieure très nette chez le chien occupe

'Voyez les Archives de Neurologie, t. II, p. 1,78.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 237

principalement la face supérieure du chiasma, tandis que la commis-

sure postérieure se montre à sa face inférieure. On peut suivre les

fibres de cette dernière jusqu'au corps genouillé latéral, au corps

genouillé médian, aux tubercules quadrijumeaux et à la racine

descendante, où se rendent également des faisceaux croisés et non

croisés ; mais l'auteur n'a pu les poursuivre jusque sur le tectum

opticum de la couche optique. La racine descendante se divise en

deux branches : la plus forte passe au-dessous du corps genouillé

médian dans le ruban de Reil et gagne l'olive; l'autre, plus faible,

se dégage dans le pont de Varole. Dans le nerf optique les fibres

n'affectent nullement la disposition que divers schémas ont prétendu

leur assigner. Les fibres commissurales, les fibres croisées ou non

sont surtout juxtaposées à l'intérieur du nerf.

Remarques sur l'anatomie comparée du système nerveux central,

relatives principalement aux trois classes les plus inférieures de

vertébrés; par le professeur Wiedersheim. Cette communication en-

visage cinq questions différentes. A. L'origine du nerf acoustique.

Il serait chez les ascalabotes, tel l'hemidactylus verrucosus , cons-

titué presque de toute la masse des cordons postérieurs de la

moelle dont il formerait en même temps le prolongement antérieur

direct. B. Les variations dans la structure du cerveau chez une

seule et même espèce animale. Chez la rana esculenta, l'auteur ren-

contra deux fois sur treize sujets une anomalie de formation du

cervelet et de la moelle allongée, consistant pour le premier cas

en la fermeture presque complète de ce dernier organe par un

entonnoir de substance blanche, tandis que le cervelet réduit à un

bourrelet transverse y adhérait totalement; et pour le second fait,

en l'oblitération totale du quatrième ventricule par une hypertro-

phie cérébelleuse considérable. A l'état normal la moelle allongée

de la grenouille beye largement à la région dorsale, le cervelet

n'en formant que la limite antérieure. C. La phylogénie du nerf

vague. Chez le protoptère, représentant des dipnoiques, la ceinture

scapulaire est encore en rapport avec les nerfs de la tête ; les élé-

ments du nerf vague se prolongent jusqu'à l'extrémité libre de l'arc

de l'épaule, qui porte d'ailleurs trois branchies bien développées

et fonctionnant. Cette observation vient à l'appui de l'hypothèse de

Gegenbaur quela ceinture scapulaire des vertébrés proviendrait d'un

arc branchial. D. Un nerf 'olfactif quadruple. Chez les batraciens

anoures (rana esculenta et pipa dorsigera) ce nerf naît de deux

racines, l'une centrale, l'autre latérale, toutes deux originaires du

lobe olfactif, qui se réunissent en un tronc commun et gagnent à

travers un seul trou la capsule olfactive. Chez les batrachophides,

les coecilies ou les gymnopinons, de chaque côté partent du lobe

olfactif une racine ventrale et une racine dorsale, demeurant com-

plètement séparées et perforant isolément la lame criblée en deux

238 SOCIÉTÉS SAVANTES.

points ; en somme quatre nerfs olfactifs parviennent dans la cavité

olfactive au travers d'un nombre correspondant d'ouvertures.

Chaque cordon garde d'ailleurs son individualité en cet organe.

E. Cerveaux fossiles. Il s'agit de ceux d'amphibies fossiles (Laby-

rinthodon Rûtmeyeri), d'oiseaux et de mammifères fossiles de

l'Amérique du Nord. Planches nombreuses à l'appui. Voyez sur ce

sujet les travaux de O.-C. Marsh et Wiedersheim publiés en ces der-

nières années.

La séance est levée à cinq heures trois quarts.

Séance du 22 mai. Présidence du professeur JoLLY.

La parole est donnée à 51. le professeur Bêcher pour une commu-

nication sur la pathogénie de l'ophth(tlinie sympathique. Après avoir

repris les communications et observations de Knies etAlac-Gillavry

qu'il considère comme incomplètes au point de vue scientifique,

M. Becker raconte un fait qui, à son sens, témoignerait de la trans-

mission par les centres vasculaires d'une Meee à l'autre des accidents

inflammatoires. 11 concerne un garçon de dix-neuf ans qui s'étant

frappé à l'oeil droit avec un fouet, vit s'y développer une pan-

ophtalmie. On constatait le huitième jour, du trismus avec dévia-

tion du maxillaire inférieur à droite; le neuvième jour de la dys-

phagie avec paralysie de l'oculo-moteur de l'oeil gauche (sphincter

inen indemne) dans lequel l'examen ophthalmoscopique pratiqué

le dixième jour décèle de la dilatation des veines, de la tuméfac-

tion et un état trouble de la rétine en bas et en dedans. Ces phé-

nomènes allèrent en s'accentuant, s'accompagnant bientôt d'opis-

thotonos, de convulsions généralisées, jusqu'au moment de la mort

survenue le quatorzième jour dans le délire : température 38°,6 6

à 39°. L'autopsie démontre l'intégrité des centres nerveux; les fibres,

les cellules, les noyaux même de l'oculo-moteur sont demeurés

intacts. L'oeil blessé présente, outre les lésions de la panophthalmie

une névrite ascendante du N. 0. qui toutefois ne dépasse pas le

trou optique, la portion inlra-crânienne du nerf et le chiasma étant

sains. L'oeil gauche sympathiquement affecté est le siège d'une

choroido-névro-rétinite. Les nerfs ciliaires offrent bien à une dis-

tance de quelques millimètres une accumulation de noyaux se

colorant facilement, mais elle est purement locale. En consé-

quence, pour M. Becker, l'inflammation s'est transportée d'un sys-

tème uvéal à l'autre, la choroïdite communiquée dans l'oeil gauche

y ayant entrainé la neuro-rétinite, conformément aux récentes indi-

cations de Mooren, Rumpf, Berlin.

Des analogies entre la commotion rétinienne et cérébrale, par le

professeur BERLIN. Traçant d'abord une courte esquisse d'une obser-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 239

vation décrite par lui il y a neuf ans, dans laquelle à la suite d'une

blessure de l'oeil par un corps contondant était survenue une

légère diminution à l'acuité visuelle centrale, coïncidant avec un

état trouble de la rétine étendu, l'orateur rappelle que les deux

phénomènes ayant disparu brièvement, ils'agissait, croyait-il, d'une

commotion de la rétine ayant pour substratum anatomique l'état

local de cette membrane. Or, une grande série d'observations lui

ont depuis démontré que les perturbations fonctionnelles sont in-

dépendantes de l'obnubilation rétinienne ; elles tiendraient plutôt

à un spasme traumatique du muscle ciliaire compliqué d'un astig-

matisme cristallinien irrégulier et passager. Ces phénomènes n'ont

rien à faire avec la commotion ; il s'agit là d'une blessure de la

rétine. Des expériences faites sur l'animal nous apprennent, en effet,

que l'on rencontre toujours en ces faits un épanchement de sang

considérable entre la choroïde et la sclérotique ; or, la rétine

étant hygroscopique s'oedématie de ce chef par imbibition ; de là

l'état de trouble et de tuméfaction décelé par l'ophtalmoscope et le

microscope. Il est probable, ajoute M. Berlin, qu'immédiatement

après la lésion, par suite de la répartition uniforme de la pression

hydrostatique sur l'ensemble de la rétine et de la papille, il se pro-

duit toujours un obscurcissement passager de l'oeil, l'analogue delà

commotion cérébrale passagère, qui, éphémère, échappe à nos in-

vestigations cliniques. Quant aux troubles de la vue d'une durée

quelconque, prononcés et permanents, surtout lorsqu'ils intéressent

la vision excentrique, il faut les rattacher aux lésions intra-oculaires

de la rétine et de la choroïde ainsi qu'en certains cas à des altéra-

tions dans le tronc du nerf. Rien n'autorise donc à supposer une

commotion rétinienne, il s'agit simplement de la compression du

globe et des régions rétro-oculaires sur la portion orbitaire du nerf

optique. Les troubles optiques qui suivent les blessures du crâne

par un corps contondant dépendraient, eux aussi, des effets d'une

compression de la calotte et des revêtements membraneux et non

de la commotion cérébrale optique ou rétinienne.

De l'occurrence des accès épileptiques pendant le sommeil chloro-

formique, par le Dl BnjMSARTNER (de Bade). Les observations

de l'auteur concernent deux individus. C'est ainsi qu'un travailleur

vigoureux de vingt-six ans, obligé à plusieurs reprises de se faire

réduire une luxation sous-coracoidienne qui s'était produite

pendant un accès d'épilepsie, fut pris en pleine narcose chlorofor-

mique, cinq fois d'une crise convulsive soudaine durant à peu près

trois quarts de minute; la crise passée on lui remettait le bras.

Une seule fois, les convulsions se montrèrent tandis qu'on tirait

sur le membre ; en tous les cas elles consistèrent en une courte

raideur suivie de mouvements cloniques, accompagnés de ferme-

, ture des poings, quelque écume blanche à la bouche, et terminés

240 SOCIÉTÉS SAVANTES.

par un sommeil réparateur de vingt minutes. A la dernière

séance, au moment où l'on en avait fini avec la réduction, l'accès

cessait. L'autre épileptique dont il s'agit avait son accès tous

les deux jours. On le chloroformise à plusieurs reprises le jour où

suivant toutes présomptions il ne devait pas l'avoir. Mais voici

qu'au milieu du calme le plus complet, soudain il est soulevé de

la table d'opération, et doit être placé à terre en proie aux

convulsions les plus violentes pendant quatre minutes. Absence

d'écume à la bouche. Cet incident, qui avait paru provoqué la

première fois par le contactd'une cicatricequelemaladeportait au

front, se renouvelait aux autres séances en dehors de toute espèce

de cause occasionnelle. M.'B... attribue à la narcose chlorofor-

mique la genèse d'une ischémie cérébrale possédant les mêmes

propriétés que celle qui détermine l'accès épileptique classique.

Seulement tandis que l'anémie épilel)togëize ordinaire procède d'un

spasme vasculaire préalable , l'anémie épileptogèîze chlorofor-

mique émanerait d'une anoxhémie pulmonaire.

Contribution à l'étude de la paralysie ascendante aiguë, par le

professeur SCHULTZE (d'Heidelberg). Le cas rapporté par M. Se.

comprend des modifications de l'excitabilité électrique, il lui a été

communiqué parle Dl Schultz (de Brunswick). La publication en

sera effectuée.

De l'action de la lymphe sur les organes centraux, par le Dr Th. Rumpf.

La double série d'expériences envisagées ici a trait a la moelle et

au cerveau. Elles démontreraient qu'une double section de la moelle

pratiquée transversalement à la région cervicale et à la région

lombaire entraîne la résorption quasi complète du segment

intermédiaire, si l'on a soin de le séparer de toute connexion

nerveuse par la scission des racines antérieures et postérieures,

en cinq à sept jours. Déjà au bout de vingt-quatre heures on

observe de la tuméfaction del'ensemble des éléments anatomiques

qui finissent par se morceler comme dans les dégénérescences et

disparaître. Une seule section transversale effectuée aussi haut que

possible, en même temps que l'on coupe les racines antérieures sur

les trous intervertébraux, n'entraîne presqu'aucune dégénéres-

cence, même si l'on mutile à la fois le système des fibres de la

queue de cheval auxquelles la disposition topographique et l'expé-

rience permettent d'attribuer la sensibilité. Inversement l'interrup-

tion des faisceaux moteurs, la moelle segmentée conservant, dans les

mêmes conditions, ses attaches sensibles, détermine la destruction

de l'organe, mais cette dégénération est plus lente que dans le

premier mode d'expérimentation. Que devient le cerveau

traité de la même façon ? En sectionnant chez la grenouille les

nerfs olfactifs et les pédoncules cérébraux dans la cavité crânienne,

SOCIETES SAVANTES. 241

' les nerfs optiques dansl'orbite, on observe la disparition totale de ce

centre. Au bout de cinq à sept jours, la cavité crânienne est vide,

on n'y rencontre que quelques restes de tissu conjonctif à la base,

comprenant entre eux des détritus médullaires et des cloisons.

La même opération exécutée chez des pigeons engendre, en plus

de ces processus, des abcès profonds, causant une prompte

mort. L'auteur résume ainsi les résultats de ses recherches :

9° Pour conserver les organes centraux, il ne suffit pas de leur

assurer une circulation normale, il faut en outre qu'ils demeurent

en connexion constante avec les voies systématiques dont ils sont

les origines;

2° L'interruption absolue de cette continuité détermine la des-

truction des organes centraux, effectuée en partie par l'action de

la lymphe ;

3° L'interruption partielle, qui ne porte que sur certains cordons,

met en évidence la suppléance fonctionnelle temporaire et même

persistante des autres systèmes ;

4° La conjonction de la moelle avec les cordons moteurs suffit

pour en conserver l'intégrité, du moins pendant un temps assez

long. Cette action conservatrice exclusive des faisceaux nerveux

moteurs, émanerait des plaques terminales de ces organes dont

se dégagerait constamment un courant nutritif centripète; aussi

M. Rumpf, par opposition avec le tonus centrifuge du muscle,

propose-t-il de la désigner sous le nom de rétrotoncs.

Le Dr vorr HOFFMANN (de Bade) décrit au Congrès deux cas

d'élongation de nerfs céphaliques et deux observations de ligature de

l'artère carotide dans i ! 'M ! Op/t</t(tb7Ke pulsatile. Le premier fait

regarde un impaludique, souffrant de douleurs fulgurantes dans

la moitié gauche de la face, accompagnées de rubéfaction, saillie

des veines fronto-temporales, tremblements musculaires, claquement

des dents, trismus, incessants en dépit de toute sorte de traite-

ments. La guérison eut lieu progressivement, mais on dut pratiquer

successivement l'élongation du nerf sous-orbitaire, et celle du nerf

maxillaire inférieur, qui fut même déchiré à son entrée dans l'os

du même nom. Le second exemple, du même ordre, est relatif à

une femme de trente-cinq ans, ayant eu dix grossesses, chez

laquelle, à la suite d'un accouchement gémellaire heureux, s'était

établie une fièvre ressemblant à celle de la malaria. Les accès

persistent trois ans et s'aggravent à mesure que les grossesses se

succèdent; ils ne disparaissent que pour être remplacés par des

contractions convulsives de la moitié droite du visage et notam-

ment des contractures de la paupière. Les trois enfants nés

pendant cette période et nourris par la malade sont morts vingt,

trente-six, quarante-trois semaines après l'accouchement, de

phthisie. Augmentation de volume et parésie de la face du côté

f6

242 sociétés savantes.

atteint. La pression exercée sur le nerf sous-orbitaire faisant

disparaître momentanément les accès, on procède à une première

élongation avec déchirure de ce cordon qui'détermine une amélio-

ration passagère. Une seconde opération identique effectuée

sur le facial semble jusqu'à présent avoir affirmé les résultats

premiers. Les deux autres malades concernent l'oculistique :

une exophthalmie, consécutive pour l'auteur à des efforts exagérés,

fut guérie par la ligature de l'artère carotide ; il semblait évident

à M. H... qu'il s'agissait ici d'une rupture de la carotide dans le

sinus caverneux. La même pratique, usitée dans un cas d'exoph-

thalmie congénitale chez un enfant de huit mois, ne réussit pas

aussi heureusement ; car après une amélioration de quatorze

jours le globe occulaire était de nouveau projeté par une tumeur

dure, d'accroissement rapide, probablement un sarcome.

Contribution à la connaissance de la manie aiguë, par le Dr Wrr-

sowsax (de Strasbourg). Sous ce nom, l'orateur englobe simplement

les faits caractérisés par la profusion des conceptions, l'exagération

de la personnalité, la multiplicité des mouvements automatiques

et l'excitation de l'humeur. Il en exclut les états d'agitation qui,

par exemple, se montrent dans les psychoses chroniques, ainsi que

les délires proprement dits, avec leur cortège habituel (troubles de

perception, hallucinations). Aussi doit-il avouer que le symptôme

clinique en question est extrêmement rare à l'état de pureté, ren-

voyant pour la description détaillée qu'il envisage, au n° 24 de la

Berliner Klinische Wochenschrift.

Le Dr TuczEK (de Marbourg), désireux de compléter en quelque

sorte le travail publié par le De Siemens dans les Archives de West-

phal1 communique à l'assemblée, sous ce titre : Action de l'ergot de

seigle sur le système nerveux central, le résultat de l'examen pratiqué

par lui sur la moelle des individus morts. Il a trouvé et montre aux

assistants une lésion des cordons postérieurs, le processus était

essentiellement limité aux cordons de Burdach. Mais il était facile

de le suivre dans toute la hauteur de la moelle jusque parmi les

vestiges des cordons cunéiformes à la région du bulbe. Prolifération

du tissu interstitiel (grandes cellules araignées en nombre), atrophie

desfibres nerveuses, développement de cellules granuleuses en amas,

tels en sont les caractères micrographiques. Des expériences en ce

moment entrain sur les animaux avec le seigle ergoté, l'ergotine

et l'acide sclérotinique feront l'objet d'un travail ultérieur qui sera

publié.

Enfin, après avoir entendu la lecture de deux observations inté-

ressantes des D6 KAST (de Fribourg) et Schwaab (de Werneck) au

' Nous en donnerons le résumé dans la Revue analytique.

BIBLIOGRAPHIE. 24X

sujet de la névrite et des psychopathies imputables à la guerre de

1870-71 le Congrès choisit de nouveau Bade pour lieu de sa

réunion l'année suivante, désignant comme curateurs organisateurs

AI11. Füerstner et Fischer.

Remerciant en dernier lieu les curateurs de cette année, le prési-

dent clôt la séance à onze heures et demie.

(Archiv. f. Psych. u. Nervenk., XII, 1.) .) P. K.

BIBLIOGRAPHIE

Il. D'une névrose convulsive et rythmique déjà nommée forme de

chorée dite électrique; par A. GUERTIN. Thèse de Paris, 1881.

En 1846, Dubini avait décrit sous le nom de chorée électrique,

une maladie convulsive bornée à l'un des côtés du corps, s'accom-

pagnant d'un sentiment d'affaiblissement, puis de fourmillement,

puis de paralysies presque complètes et dans les derniers jours le

malade tombait dans le coma avec dilatation des pupilles. A peu

près constamment, cette maladie, qui a été observée depuis par plu-

sieurs auteurs italiens et allemands, se terminait par la mort, sans

que l'autopsie ait jamais révélé sa nature. Un autre élève de M. Ber-

geron, M. Berland, avait déjà appelé l'attention sur une autre

forme de chorée électrique, que M. Guertin étudie de nouveau.

Cette affection dont l'étiologie est encore fort obscure débute brus-

quement, et il n'existe pas de période durant laquelle on observe

des désordres pouvant être mis sur le compte de la maladresse.

Le spasme envahit en même temps tous les muscles qui doivent

être atteints et présente dès le début ses caractères distinctifs qu'il

conserve, sans modifications, pendant tout le cours de la maladie.

Les mouvements ont pour caractères propres la brusquerie qui

rappelle une secousse électrique, et le rhythme ; ils sont continuels

et indépendants de la volonté; ils intéressent toujours, du commen-

cement à la fin, les mêmes groupes de muscles; assez souvent les

secousses électriques sont limitées à l'extrémité céphalique. Les

'Voyez les Archives de Neurologie, aux Revues analytiques.

244 BIBLIOGRAPHIE.

convulsions sont à peine exagérées quand les malades font effort

pour dominer l'agitation; elles n'empêchent pas le sommeil et

cessent toujours lorsqu'il est arrivé. Pas de phénomènes généraux,

pas de troubles intellectuels. Cette affection se distingue de la cho-

rée vulgaire par l'absence des troubles psychiques du début, de ces

gesticulations non rhythmées, désordonnées, indescriptibles qui ca-

ractérisent la danse de saint Guy. La chorée électrique, au lieu de pro-

céder par accès, est uniforme pendant toute sa durée et en outre

se manifeste complètement du premier coup et ne se développe pas

progressivement comme la chorée vulgaire. Ces caractères de la

marche la différencient encore des chorées rhythmiques des hysté-

riques (Charcot) ou des épileptiques (Parrot). Mais ce qui la dis-

tingue surtout, c'est son pronostic constamment favorable, en ce

sens que la guérison a toujours été radicale et immédiate par une

seule administration de tartre stibié à dose vomitive ou par

l'application de l'électrisation avec les courants induits. CH. F.

III. De la conservation des réflexes tendineux dans l'ataxie locomotrice

progressive; par C. Tauus. Thèse de Paris, 1881.

Le réflexe rotulien qui est le seul auquel on puisse attribuer une

véritable valeur peut manquer chez certains sujets; son absence

n'est donc pas une preuve qu'il existe une affection quelconque du

système nerveux. Il existe un certain nombre de cas d'ataxie loco-

motrice dans lesquels les réflexes tendineux ne sont pas abolis. La

persistance des réflexes peut s'observer non seulement dans la pre-

mière période de l'affection, mais jusqu'à une période très avancée

lorsqu'il existe déjà des troubles trophiques du côté des articula-

tions des extrémités supérieures. Il parait certain que les réflexes

ont pu être abolis chez certains ataxiques et reparaître ensuite.

D'autres fois, lorsque les deux membres inférieurs sont également

atteints d'incoordination motrice, le réflexe n'est aboli que d'un

seul côté. 11 peut même arriver que les réflexes, au lieu d'être

abolis, soient exagérés. Le signe de Westphal n'a donc qu'une

valeur relative, qu'il tire surtout de son association avec d'autres

troubles tabétiques. M. Charcot a fait remarquer qu'il peut y avoir

erreur sur la nature même du réflexe persistant dans l'ataxie. Il

peut se faire que la percussion de la région sous-rotulienne pro-

voque un réflexe du triceps sans qu'on doive attribuer cette réac-

tion à l'excitation mécanique du tendon, l'extension de la jambe

sur la cuisse serait due dans quelques cas à un réflexe cutané pro-

voqué par l'excitation portée sur une plaque d'hyperesthésie. Ce

qui paraît distinguer ce réflexe cutané du réflexe tendineux, c'est

un certain retard dans la production du'mouvement d'extension

de la jambe Cn. F.

BIBLIOGRAPHIE. 245

IV. Essai sur le béribéri au Brésil; par Tamssau. Thèse de Paris, 1 88 1 .

Cette étude ne contient pas de faits nouveaux, elle est surtout

basée sur des recherches historiques. Malgré les exceptions qu'on

en a cité, l'auteur pense que le béribéri est une maladie propre

aux pays situés entre les tropiques. Toutes les circonstances phy-

siques ou morales, qui tiennent à produire un appauvrissement de

l'organisme, une anémie plus ou moins profonde, sont les causes

prédisposantes de la maladie. La cause déterminante du béribéri

est spécifique, mais d'une nature inconnue; l'origine palustre est

inadmissible. La forme mixte est la plus grave. Pour obtenir la

guérison, le changement de localité est un moyen souvent efficace.

Ch. F.

V. Des accidents réflexes survenant après l'opération de l'empyème;

par G. lllnnrm. Thèse de Paris, 1881.

lloffiiiann, Sauvages, Bosquillon signalent la paralysie des

membres supérieurs ' dans le cours de l'empyème ; en 1875,

M. Raymond fit connaître un fait dans lequel des convulsions

épileptiformes étaient survenues dans les mêmes circonstances,

M. Brouardel et Vallin citèrent des cas analogues. M. Lépino rap-

porte deux faits d'empyème, l'un avec monoplégie, l'autre avec

hémiplégie. MM. Leudet, Goodhart, Williams, Butlin, Cayley,

Aubouin, J. Simon ont publié des cas semblables. Ces accidents

nerveux réflexes se montrent toujours après l'intervention, mais à

une époque très variable, ordinairement dans le premier mois,

mais dans le cas de Leudet, ils ne se sont produits qu'après plus

d'un an. On les a surtout rencontrés de vingt à trente ans, mais

ils peuvent se présenter chez des enfants. Sur quatorze cas, deux

fois seulement il s'agissait de femmes. La nature du liquide injecté

paraît sans influence, mais il n'en est pas de même de son

abondance et de la force de projection.

Ces accidents varient par leur mode d'apparition; tantôt ils sur-

viennent brusquement, d'une manière foudroyante, tantôt ils se

produisent lentement, d'une manière insidieuse. Quand il s'agit

d'un accès épileptique, le malade revenu à lui-même, n'a aucun

souvenir de ce qui s'est passé. Dans un cas, une contracture de

tout le côté opposé à la pleurésie, a rapidement disparu et a été

remplacée par une hémiparésie de l'autre côté. Les accidents à

forme lente ne s'accompagnent point de phénomènes généraux, ni

de troubles de l'intelligence ou de la parole qui caractérisent la

forme brusque : ils consistent en des phénomènes de paralysie

plus ou moins étendus qui siègent le plus souvent du côté de l'em-

2't6 ' BIBLIOGRAPHIE.

pyème. Il s'agit ordinairement d'une paralysie incomplète qui pré-

sente des alternatives d'augmentation et de diminution, et qui ne

s'accompagne point de troubles de la sensibilité. A quoi sont dus

les accidents réflexes ? Est-ce à l'irritation du phrénique ou des

rameaux centripètes du pneumogastrique ? Est-ce à l'anémie du

bulbe ? Ca. F.

VI. Etude clinique sur la névralgie iléo-lombaire symptomatique des

affections des organes génitaux chez la femme; par A. Le Bailly.

Thèse de Paris, 1881.

AprèsBassereau, Axenfeld, Beau, Marrotte, l'auteur étudie la rela-

tion qui existe entre les névralgies iléo-lombaires et les affections

des organes génitaux; il rapporte plusieurs observations d'affec-

tions aiguës de la vulve du vagin de l'utérus, et d'affections chro-

niques de l'utérus et de ses annexes accompagnées de névralgies.

Il appelle l'attention sur ces mêmes névralgies dans la grossesse.

Il insiste en outre sur la coïncidence fréquente de l'hypersécrétion

vaginale et utérine et des névralgies iléo-lombaires. CH. F.

VII. Etude expérimentale sur l'état du pouls carotidien pendant

le travail intellectuel ; par E. GLEY. Thèse de Paris, 1 881 .

Pendant le travail intellectuel, on observe une augmentation du

nombre des battements du coeur qui parait être en raison directe

de l'intensité de l'attention. En même temps, il existe une dilata-

tion de l'artère carotide et un dicrotisme plus marqué du pouls

carotidien; à la radiale, on trouve des phénomènes inverses. Ces

caractères sont d'autant plus marqués que l'attention est plus forte,

et ils persistent un certain temps après que l'activité cérébrale a

cessé. Ces modifications ne dépendent pas de changements soit de

l'activité cardiaque, soit de la respiration; ils sont dus à une

influence vaso-motrice. Cn. F.

VIII. Essai sur La paralysie diphthéritique du nerf pneumogastrique;

par L.-E. GULAT. Thèse de Paris, 1881.

Dans la convalescence de la paralysie diphthéritique, on observe

quelquefois des troubles cardio-pulmonaires se traduisant par un

état syncopal, avec ralentissement, puis accélération et petitesse du

pouls, et par de la dyspnée avec irrégularité des mouvements res-

piratoires, ordinairement associés à des douleurs abdominales et

à des vomissements alimentaires. Ces troubles succèdent d'habitude

à une paralysie du voile du palais consécutive à une angine diphthé-

BIBLIOGRAPHIE. 247

ritique. Ils peuvent guérir tant qu'il n'y a que du ralentissement

du pouls ; dès qu'il y a de la dyspnée la mort est inévitable. Ordi-

nairement troubles cardiaques et troubles pulmonaires vont en-

semble, mais exceptionnellement on les trouve isolés. Ces accidents

sont rarement subaigus. Le seul traitement efficace est la fara-

disation méthodique et prolongée de la région précordiale et de

la partie postérieure du thorax. Il paraît certain que les caillots

trouvés dans le coeur n'ont rien de spécial à la diphthérie et que

d'ailleurs ils se forment après la mort. La théorie de l'endocardite

et de la myocardite ne rend pas non plus complètement compte

des phénomènes. L'auteur pense qu'une lésion bulbaire n'explique-

rait pas les troubles isolés ; il croit que si la théorie bulbaire était

vraie, on devrait rencontrer quelquefois la paralysie des nerfs dont

les noyaux d'origine sont près de la dizième et de la onzième paires.

Il admet que la mort subite ou rapide dans la convalescence de la

paralysie diphthéritique est le résultat d'une altération d'une ou de

plusieurs branches terminales du nerf vague. CH. F.

IX. Hallucinations dans la paralysie générale (Observations);

par J. Girma. Thèse de Paris, 1881.

Les hallucinations, très fréquentes dans la paralysie générale,

s'observent à toutes les périodes de cette affection, mais principa-

lement dans la période de démence. Dans la première période,

elles peuvent revêtir le caractère psychique ; plus tard, après les

congestions cérébrales épileptiformes ou apoplectiformes, qui sem-

blent avoir sur leur production une véritable influence, elles sont

plutôt psyclio-sensorielles. Tous les sens peuvent être affectés suc-

cessivement ou simultanément ; quelquefois les hallucinations ne

sont que la reviviscence d'anciennes sensations normales. Fugaces

dans les formes expansives, elles sont assez souvent persistantes, et

identiques à elles-mêmes dans les formes dépressives, dans les

rémissions incomplètes et dans la démence. Elles entraînent quel-

quefois des actes impulsifs, mais il est bien rare qu'elles soient.

comme chez les hallucinés simples, le point de départ de déduc-

tions logiques, de délire systématisé. Cu. F.

X. Pseudo-paralysie générale d'origine saturnine; par A. Mnvm.

Thèse de Paris, 4881.

11 existe une pseudo-paralysie générale d'origine saturnine, sur-

venant ordinairement chez des sujets qui ont été atteints à plu-

sieurs reprises d'accidents saturnins. Elle apparaîtrait le plus sou-

vent de quarante à cinquante ans. C'est ordinairement pendant

248 BIBLIOGRAPHIE.

qu'ils sont soumis au traitement de l'intoxication qu'ils sont pris

d'un accès de délire : ils ont alors constamment des hallucinations

de la vue et des terreurs, puis des conceptions délirantes orgueil-

leuses. Cette période de début ou d'excitation, qui peut durer de

trois à douze jours, s'accompagne d'une certaine faiblesse muscu-

laire, avec embarras de la parole ; les malades n'ont aucune cons-

cience de leurs actes, ils ont de l'insomnie, quelquefois un délire qui

ressemble à s'y méprendre au delirium tremens. La deuxième

période est une période de dépression ; quelques-uns ne peuvent se

tenir debout, d'autres sont hémiplégiques, la plupart sont gâteux ;

leur parole est tellement embarrassée qu'elle ne constitue plus qu'un

bredouillement inintelligible, ils ont du tremblement de la langue ;

on croirait de vrais paralytiques généraux arrivés à la dernière

période. Les pupilles restent égales. Cette période dure en moyenne

deux mois. Enfin survient une période d'amélioration graduelle et

progressive, se terminant par une guérison complète. Au début de

cette période, on peut observer des vertiges épileptiques, la para-

lysie diminue progressivement en commençant, par les membres

inférieurs et en même temps la parole devient plus distincte. L'in-

telligence est toujours troublée ; mais au lieu d'un délire accom-

pagné des accès violents de la période de début, le malade est dans

la torpeur ; la guérison demandera deux ou trois mois à s'accomplir.

En résumé, cette pseudo-paralysie générale d'origine saturnine

dure cinq à six mois et se termine constamment par la guérison ;

elle peut laisser toutefois un léger affaiblissement de l'intelligence

Cette pseudo-paralysie a souvent été confondue avec la vraie para-

lysie générale et surtout avec la paralysie générale survenant chez

un saturnin ; mais elle s'en distingue par quelques-uns de ses symp-

tômes, et surtout par sa marche et sa terminaison. Cil. F.

XI. Le délire des grandeurs n'est pas un signe exclusif de la paralysie

générale progressive ; par E.-A. Lautar. Thèse de Paris, 4881. 1.

Le délire des grandeurs peut se rencontrer à peu près dans

toutes les maladies mentales, sauf l'idiotie et la démence. On l'ob-

serve en dehors des asiles dans un certain nombre d'affections

aiguës ou chroniques, dans la convalescence de la fièvre typhoïde,

dans l'encéphalopathie rhumatismale, le choléra, l'insolation, les

suites de couches, l'ataxie locomotrice, etc., etc. ; dans certaines

intoxications, l'alcoolisme aigu et chronique, le saturnisme.

(Vingt-deux observations.) Cn. F.

VARIA

LE SABBAT'

Si les Sorcières vont en ame au Sabbat.

Il y en a d'autres qui tiennent que les Sorcières vont le plus

souuent au Sabbat en ame feulement, ce que l'on vérifie par

plufieurs exemples de quelques Sorcières, lefquelles eftans de-

mourées comme mortes en leurs maifons par l'espace de deux

ou trois heures, ont enfin coiifeffé que pour lors elles eftoient

en esprit au Sabbat, rapportant particulièrement tout ce qui

s'eftoit faift & pane au mefme lieu : George Gandillon la nuiùl

d'un Ieudy SainEt demeura dans son lift comme mort par

l'espace de trois heures, & puis retourna à foy en furfaut;

il a du depuis efté bruflé en ce lieu auec son père & une

fienne foeur 2.

Il y a quelque temps qu'vn certain du village d'Vnau au

reffort d'Orgelet amena sa femme en ce lieu, & l'accufoit

d'eflre Sorcière, difant entre autres chofes qu'à certaine nuict

d'vn Ieudy, comme ils eftoient couchez enfemble, il se donna

garde que sa femme ne bougeoit, ni fouffloit en façon quel-

conque, sur quoy il commença à l'espoinçonner sans neant-

moins qu'il la peuft iamais faire efueigler, & à celle occasion,

il tomba en vne peur, de manière qu'il se voulut leuer pour

appeller ses voifins : mais quelque effort qu'il fift, il ne luy

fut pas poflible de sortir du lift, & luy sembloit qu'il eftoit

entrappé par les iambes, mefme qu'il ne pouuait pas encor

crier : cela dura bien deux ou trois heures, & iusques a ce

que le coq chanta : car lors la femme s'efueigla en furfaut,

'Voir le ? 7, p. 115.

2 Boguet (H.). Discours exécrable des Sorciers, etc. Rouen, 1606.

250 VARIA.

& sur ce que le mary luy demanda qu'elle auoit, elle respon-

dit qu'elle eftoit si latte du trauail, qu'elle auoit eu le iour

précèdent, qu'eftant preffee du fommeil, elle n'auoit rien

fenty de ce que son mary luy auoit fait : alors le mary eut

opinion qu'elle venoit du Sabbat, pour ce mefme que delïa

auparauant il soupçonnoit quelque peu, à raifon qu'il eftoit

mort du bcffail a quelques fiens voifins qu'elle auoit mena-

cez précédemment.

Et certes il y a grande apparence que cette femme auoit efté

en esprit au Sabbat, par ce premièrement que l'ecftafe dont

nous auons parlé luy aduint au Ieudy, qui est la nuiet ordi-

naire du Sabbat.

D'aduentaige comme le coq chanta elle s'efueigla enfurfaut,

fcelon que nous auons dift : or le Sabbat qui se fia nuietam-

ment dure iufques à tant que le coq chante, mais depuis qu'il

a chanté tout vient à disparoiilre.

Troifiemement l'excufe qu'elle print monstre bien qu'il y

auoit de la malice de son codé : Car quel homme a-t-on

iamais veu si endormy d'vn trauail & labeur précèdent que

l'on n'ait peu facillement efueigler ? George Gandillon s'excu-

foit de la mefme façon, lors que l'on luy demanda pour quoy

il ne s'eftoit point efueiglé, encore que l'on l'euft pouffé rude-

ment plufieurs fois.

En quatriefme lieu il se recongnoift qu'il y auoit du forti-

lege, en ce que le mary se fentoit entrappé par les iambes, &

qu'il ne pouoit crier.

Finallement les Efcheuins d'Vnau, qui affiftoient le mary,

aueroyent que celte femme eftoit defcenduë de parens que l'ô

fuspeetoit défia de Sorcellerie. Voyla comme l'on peut dire

que les Sorciers vont au Sabbat en ame& esprit.

D'autres fois y vont reallement & corporellement, lainant

en leur place quelque fimulachre ou effigie a leur reflem-

blance, par quoy foit leur mary defceu, s'il vient à s'es-

ueigler. Le Démon a bien fouuent aussi couftume, ayant

prins un corps, de foy fubftituer on lift de la Sorcière partie

au Sabbat; & par ainfi a commerce charnel auec le pauure

mary. Ou bien elles vfent d'vn aultre artifice, endormant

iceluy d'un fommeil magicque. Bertrande Tonftrix a confefle

l'auoir faift fouuentes fois & auoir bien fouuent endormy

son mary en lui frottant l'aureille de sa main dextre oingte

premièrement de l'onguent, dont elle mefme se greffoit pour

VAItlI. 251 1

aller au Sabbat. Eller, femme du doyen d'Ottingen, aduoua

qu'elle fuppofoit en sa place un aureiller d'enfant, après

auuoir prononcé le nom de son démon ; d'autres duppaient

leur mary auec des balays. Marie, femme du raccommodeur

de Metzer Efch, se feruoit d'une botte de fouarre qui dispa-

roiffoit si toft qu'elle reuenoit à la maifon'. 1.

77 j a au Sabbat plus de femmes que d'homes.

Interrogez en iustice, des Sorciers ont dict eftre vrayment

aux affemblées nocturnes grande multitude de gens des deux

sexes; Jehanne de Banno, Nicole Ganat de Mayner en Lor-

raine, ont asceüré auoir veu au Sabbat, toutes & quantes fois

elles y eftoient, si grande mefnie de Sorciers que plus ne les

eftonnoit la mifere des hommes, à qui font par tant d'enne-

mis tant d'embufches dreffées; ains s'esbahiffoient moult que

ne feuffent plus grandes les calamitez humaines. Catherine

Ruffa a dift auoir veu cinq cents Sorciers, à tout le moins, la

première nuift qu'elle feut au Sabbat. Pourtant atteste Bar-

bellina Raiel de Blainville es eaux que les femmes s'y treuuent

en nombre maieur.

La raifon pour quoy il y a au Sabbat plus de femmes que

d'homes est que en icelles est plus grande fuiperflitiofité,

dont les caufes font : la prime, que les femmes font par na-

ture plus facillement m'eues à recepvoir des reuelations : fai-

fant de ces reuelations bon vfaige font grandement bonnes ;

mauluois deviennent fuppellativement mefchantes. La féconde

que les femmes font crédules à merueille : le Diable s'eftu-

diant principalement à furprendre la créance les hante &

affaille de meilleur gré. La tierce que les lemmes font natu-

rellement loquaces & bauardes, ne fçavent garder un fecret

& racontent aux aultres femmes tout ce qu'elles Içavent.0ultre

font choléricques & ne pouant par deffaut de forces se venger,

ont recours aux maléfices, faifant au prochain par art diabo-

licque le mal que faire ne peuuent par force ouuerte. La

quarte et vltime, que les femmes, comme dit Terentius, font

en leurs idées aussi muables qu'enfans; par quoy la femme

mefchante abiure plus facilement sa foy, que par auant auoit

1 Compendium .41alefica-uiii, etc., per Fratrem Francisc. Mariam

Guaccium, 161bj p. 69.

252 VARIA.

en degré exceffif. Et ce est en forcellerie raifon fondamentale

pour ne s'eftonner si les femmes iuiuent le Diable plus que

les homes. Ne faut celer pourtant que Satan se efforce d'atti-

rer à foy autant les homes que les femmes 1.

De ce qui se faiét au Sabbat, & mefme de l'Offertoire des

chandelles , du Baifer, des Danfes, de l'Accouplement du

Démon auec les Sorciers, des Feflins, dit Conte que rendent

les Sorciers à Satan, du battement d'eau pour la grefle, de

la Meffe que l'on y célèbre, de l'eau benoifte que l'oiifaiél,

ue comme Satan se coz fonzzne enfeu & reduiâ en cendre.

« Le Sabbat est comme vne foire de marchands méfiez,

furieux et transportez, qui arriuent de toutes parts. Vne ren-

contre & meflange de cent mille subiefts foudains & tranfi-

toires, nouueaux à la vérité, mais d'vne nouueauté effroyable

qui offence l'ceil, & foubfleue le cuoeur. Parmy ces mefmes

fubieE2s, il f'en voit de réels, & d'autres preftigteux & illu-

foires : aucuns plaifans (mais fort peu) côm font les clochettes

& inftrumens mélodieux qu'on y entend de toutes fortes, qui

ne chatouillent que l'aureille, & ne touchent rien au coeur :

confiftant plus en bruit qui e(lourdit & eftonne, qu'en harmo-

nie qui plaife & qui refiouiffe. Les autres desplaifans, pleins

de difformité & d'horreur, ne tendant qu'à diffolution, priua-

tiô, ruine & deftruction. Où les perfonnes s'y abbrutiffent

& trâsforment en belles perdant la parole tant qu'elles font

ainfi. Et les beftes au contraire y parlent, & semblent auoir

plus de raifon que les perfonnes chacun eftant tiré hors son

naturel. » (de Lancre, loc. cit., p. 119.)

Les Sorciers eftans affemblez en leur Synagogue, adorent

en premier lieu Satan, qui apparoift là tantoft en forme d'vn

grand homme noir ou rouge, géhenne, tourmenté & flamboyât

comme vn feu qui fort d'vne fournaife ardente, et tantoft en

forme d'vn bouc barbu, pour ce que le bouc est vne befte

puante, falace et lasciue qu pour luy faire un plus grand

hommaige, ilz luy offrent des chandelles, qui rendent vne

1 Guaccius, loc. cit., p. 74.

- Les catholiques, en ceci, ont copié les Grecs, qui représentaient les

Démons « en figures de Satyres paillards, moytié boucs & moytié

hommes ».

VARIA. 253

flamme de couleur bleue, & puis le baifent aux parties hon-

teufes darrière' (Fig. 7) : quelques-vns le baifent sur l'ef-

paule : à d'aultres fois encor, il tient vne ymaige noire qu'il

fai<3 : baifer aux Sorciers. Vray eu' que adorant Satan ilz ne se

tiennent toufiours en mefme pofture; tantoft le fuppliant à

deux genoilz; tantoft se renuerfant sur le dos; tantoft tenant

les iambes en hault, ne baiffant la tefte fus la poitrine, ains

la releuant de façon que le menton foit tourné vers le Ciel.

(Fig. /2.)Aultres fois ilz s'approchent du Démon le dos tour-

né, & aduancent lentement vers lui à l'inftar des ecreuiffes

& les mains ioinc`tes par derrière ; lui parlant, ilz fixent leurs

oeilz en terre; brief, ilz font tout au rebours de la couftume

ordinaire.

Puys ilz danfent tantoft auant, tantoft après leur re-

pas, & font leurs danfes en rond doz contre doz : les boi-

1 1 Mais quel mespris, quel deshonneur, quelle villanie plus deteftable

peut on imaginer, que celle que fouffrent les Sorciers eftans contrains

d'adorer Satan en guii'e de Bouc puant, et le baifer en la partie, qu'on

n'ofe efcrire, ny dire honneftement ? » (Bodin, loc. cit., p. 134)

« Tum candelis piceis oblatis, vel vmbilico infantuli : ad fignum

homagij eum in podicem ofculantur.»(Co» : pendium ilaleficarum, &c.,

p. 71.) .)

Fig. 11.

254 VARIA

teux y vont plus dispoftement que les aultres. Or, ilzdiinteiit

ainfi doz contre doz affin de n'eftre pas congneuz : mais pour

le iourd'huy ilz ont vne autre inuention au mefme effed, qu

est de se mafquer. (Fig. 7.3.)

F''tg', 12.

Fig. 13.

VARIA. 255

Il y a encore des Démons, écrit Boguet, qui affilient à

ces danfes en forme de boucs, ou de moutons, fcelon qu'il a

efté vérifié par les prénommez, & plufieurs aultres; & mefme

par Anthoine Tornier, ayant recogneu que lors qu'elle dan-

foit vn mouton noir la tenoit appenduë par la main auec ses

pieds, qui eftoient comme elle difoit, bien haireux, c'eft-à-

dire rudes et reuefches. »

Les haulx boys ne manquent pas à ces efbats : Car il y en

a qui font commis à faire le debuoir de meneftrier & ne font

toufiours forciers profez. La mère de Jehan de Hembach le

mena un jour au Sabbat pour ce que encore qu'à poine ado-

lefcent il iouoït moult bellement du violon. Là pour eftre

mieulx ouy le feit monter en vn arbre voifin & lui commanda

de iouer (Fig. 4). Luy cependent regardoit les Sorciers dan-

sans & s'eftonnoit de leurs geftes (car tout est au Sabbat ridi-

cule & à contre fens), ne se peut tenir de crier : « Bon Dieu,

d'où viennent tous ces gens affolez & desordonnez. » Et tout

foubdain cheut en terre, les Sorciers disparoiffant, où feut le

lendemain trouué feul le bras defmis & se lamentant bien

fort. Satan y iouë mefme de la flutte le plus souuent, & à

d'aultres fois les Sorciers se contentent de chanter à la voix :

mais ilz difent leurs chanfons pefle mefle, & auec vne con-

Fig. 14.

256 VARIA.

fufion telle qu'ils ne s'entendent pas les vns les aultres.

« Les Sorciers de Longny difoient en danfant : Har, har,

Diable, Diable, faute icy, faute là, iouë icy, iouë là; et les

autres difoient : Sabbath, Sabbath, c'est-à-dire la fefte & iour

de repos, en hauffant les mains & ballets en hault, pour tef-

tifier & donner vn certain tefmoignage d'alaigreffe, & que

de bon coeur ilz seruent & adorent le Diable'. » Quelques

fois, mais rarement, ilz danfent deux à deux, & par fois l'vn

cà & l'autre là, & toufiours en confufion : eftans telles danfes

femblables à celles des fées vrays Diables incorporez qui re-

gnoient il n'y a pas longtemps. Les filles et femmes tiennent

chafcune leurs démons par la main, lefquels leurs apprennent

des raids & geftes si lafcifs & indecens, qu'ilz feroyent

horreur à la plus effrontée femme du monde. Auec des chan-

fons d'vne compofition si brutale, & en termes & mots si

licencieux & lubricques, que les yeux se troublent, les oreilles

s'eftourdiffent, & l'entendement s'enchante, de voir tant de

chofes monftrueufes qui s'y rencontrent à la fois. Et font

toufiours ces danfes & tripudiations fuiuies de fatigues & laf-

fitudes moult griefves. Barbelline, défia nommée, & autres

Sorcières ont aduoué eftre retournées à la maifon si haraffées

que souuentes fois il leur falloit refter au lift par deux iours

entiers. Mais ce qui efl chofe bien horrible & très iniufte, il

n'eft licite à nully de soy excufer & si quelqu'vn alléguant

son aage, sa fatigue ou sa fanté, refufe de danfer ou s'enfuid,

auffitoft il est frappé à coups de piedz & à coups de poings

& n'eft autrement traifté que n'eft le cuir affoupli par le

martel.

Les danfes finies, les Sorciers viennent à s'accoupler : le

fils n'espargne pas la mère, ny le frère la foeur, ny le père la

fille : les inceftes y sont communs : car aussi les Perfes auoient

opinion que pour eflre bon Sorcier & Magicien, il falloit

naiftre de la mère & du fils. (Fig. 15).

« Françoise Secretain aduouait que le Diable l'auoit con-

gneuë charnellement quatre ou cinq fois, tantoft en forme de

chien, tantoft en forme de chat & tantoft en forme de poule,

& que sa femence eftoit fort froide. » (Boguet, loc. cit., p. 8.)

ci Marguerite Bremont', femme de Noël Laueret, a dift que

lundy dernier, après iour failly, elle feut auec Marion sa mère

« Bodin, loc. cit., p. 88.

= Bodin, loc. cit., p. io4.

- VARIA. 25

à vne affemblée, près le moulin-Franquis de Longny en vn

pré, & auoit fadide mère vn ramô entre ses iambes disant : le

ne mettray point les mots, & foudain elles furent transportées

toutes deux audiét lieu, où elles trouuerent Iean Robert,

Ieaune Guillemin, Marie femme de Simon d'Agneau, et Guil-

lemette femme d'vn nommé le Gras, qui auoient chafcun vn

ramon. Se trouuerent aussi en ce lieu six Diables, qui eftoient

en forme humaine ', mais fort hideux à veoir, &c. Apres la

danfe finie, les Diables se couchèrent auec elles, et eurent leur

compagnie : & l'vn d'eux, qui l'auoit menée danier, la print,

& la baifa par dux fois, & habita auecques elle l'espace de

plus de demie heure : mais dérailla aller la femence bien fort

1 « Il (Cardan) dit aussi que les esprits malings font puants, & le

lieu puant là où ils fréquentent, & croy que de la vient que les anciens

ont appelle les Sorciers/oefeHf. & les Gafcons fetillei-es, pour la pitali-

teur d'icelles, qui vient comme ie croy de la copulation des Diables,

lefquels peut eftre prennent les corps des pendus, ou autres femblables

pour les actions charnelles & corporelles : comme auNi Vier a remarqué

que les perfonnes démoniaques font fort puantes. u (Bodin, .'oc. cit.,

Pt33) .)

Ce passage montre que, depuis longtemps, on a remarqué deux

phénomènes cliniques souvent signalés par nous, à savoir l'haleine

forte des hystériques et l'odeur qu'elles exhalent dans leurs états de

mal /i))'o-<7)M.

47

Fig. 15. ,

258 VARIA.

froide. Ieanne Guillemin se rapporte aussi au dire de celle-cy,

& did qu'ilz furent bien demie heure enfemble, et qu'il lafcha

de la femence bien fort froide. »

« Pour l'accouplement, Ieannette d'Abadie, aagee de feize

ans, dépose qu'elle a veu tout le monde se méfier inceftueufe-

ment & contre tout ordre de nature,... s'accufant elle mefme

d'auoir efté depucellée par Satan & congneuë vne infinité de

fois par un fien parêt & autres qui l'en daignoient femondre :

qu'elle fuyoit l'accouplement du Diable, àcaufe qu'ayant son

membre faift en efcailles il faid fouffrir vne extrefme douleur;

outre que sa femêce est extrefmement froide, si bien qu'elle

n'engroiffe iamais ni celle des autres hommes au Sabbat, bien

qu'elle soit naturelle... » (de Lancre, loc. cit., p. i ? 2.)

les autres especes de lubricité du monde : mais ce qui en :

encore plus effrange, c'eft que Satan se met là en Incube pour

les femmes, et en Succube pour les hommes. »

Les Sorciers après feftre veautrez parmy les plaicirs im-

mondes de la chair bancquetent & se feftoyent. Il y a diffé-

rentes tables, trois ou quatre, où chafcun se feoid félon sa

dignité ou sa richeffe; tantoft chafcun à collé de son démon,

tantoft en face, les Diables eflanttous d'un collé & les Sorciers

de l'autre. La benediftion ne fait deflaut à ces repas, mais

condigne à l'affemblée, eftant de parolles blasphefmatrices par

lesquelles ilz confeffent Beelzebub pour leur Créateur, Dateur

& Seruateur. Pareille est l'action de grâces qu'ilz difent au

leuer des tables. Leurs bancquets font compofez de plufieurs

fortes de viandes fuppeditées par Satan ou apportées par

chafcun, fcelon les lieux & qualitez des perfonnes : par deçà

la table eftoit couuerte de beurre, de froumage, & de chair.

(Fig. 16.)

L'on y boit aussi tantoft de l'eau & tantoft du vin. Le vin

semble à de l'ancre ou du sang gafté & n'eft verfé qu'en

vaiffeaux fort ignobles. Mais il n'y a iamais de fel : ce qui

se faiet pour ce que le fel est vn symbole de l'immortalité,

que le Diable a extrefmement en haine.

Il y en a qui ont efcript que de mefme l'on ne s'y feruoit

point de pain; mais certaines Sorcières ont rapporté le con-

traire & did qu'elles auoient mangé au Sabbat du pain, de la

chair, & du froumage.

Dépendent tous les Sorciers accordent qu'il n'y a point de

VARIA. 259

guouft aux viandes qu'ilz mangent au Sabbat, & que la chair

n'eft aultre chair que de cheual. Tous ceulx que le Diable a

faid affeoir à sa table confluent que les mets y font si très

deguouftants, foit à la veue, foit à l'odorat qu'ilz donneroient

naufées à l'eftomac d'vn pauvre famélique aboyant de maie

faim. Barbelline defià nommée & Sybille Morel disent qu'on

fert au Sabbat des mets de toute forte, mais tant vils, tant

fordides & mal apprêtiez qu'ilz valent à peine eflre mangez.

Nicolas Morel feut, pour leur guouft mauluois,aspre &amer

obligé de les vomir auflïtoft par grand deplaifir. Ce que voyant

le Démon entra en viue indignation & le faillit battre.

Dominique Isabelle adioude qu'on feruoit aussi de la chair

humaine ; ce que Belleforeft diet eftre en vfage fréquent dans

les maléfices des Scythes.

Hz adiouflêt quafi tous, que lorsqu'ilz fortêt de table, ilz

font aussi affamez que quand ilz y entrent. « Antide Colas,

d'après Bocquet (loc. cit., p. 111), rapportoit que les viandes

eftoient froides : Clauda difoit que ce qu'on mangeoit au

Sabbat n'eftoit que vent : Chriftofle difoit aussi à ce propos

qu'il lui fembloit qu'elle ne mangeoit rien : d'où il se veoid que

.e Diable efl toufiours trompeur puis qu'il repaiftles fiens de

Fig. 16.

260 VARIA.

vent au lieu de viandes folides, comme s'ilz eftoient des

chameleons. »

Le bancquet paracheué l'on rend conte à Satan de ce que

l'on a faiet dés la dernière auemblée, et ceux là font les mieux

venus qui ont faift mourir le plus de perfonnes & de beftes,

qui ont baillé le plus de maladies, qui ont guaflé le plus de

fruias, bref qui ont commis le plus de mefchancetez & abho-

minations : les autres qui se font comportez vn peu plus

humainement font Sifflez & mocquez de tous : l'on les fait

mettre à l'efcart, & font encore le plus fouuent battus, & mal

traiftez de leur maiftre : & de là eu venu commun prouerbe

qui court entr'eux : Fay du pis que tit pourras le Diable

nefcaura que te demander.

Car entre les Démons & les Sorciers, il est faift paet que

toufiours doibvent avoir accompli nouveaulx mesfais par

auant que de venir au Sabbat. Et pour que ilz n'ayent ex-

cufe d'ignorance leur mefchant maiftre leurs tient efchole &

donneleçons de maléfices. Il leurs apprend à deftrui're les trou-

peaux ; ce qu'ilz font foit en répandant du poifon, foit en

enuoyant les diables on corps des animaux. Auffi à perdre les

moiffons & les fruifts de la terre & a rendre les champs Iteriles

en inuocquant le Diable. D'iceluy ilz recoipvent une poudre

bien fine & la répandant en font naiftre des fauterelles, des

limas, des papillons, charançons & aultres beftioles nocifves

& infeftes aux champs & aux iardins. De mefme font appa-

roiftre multitude de rats qui se muffant auffitoft en terre

deuorent germes & racines. Tantoft font fortir des loups d'un

arbre creux & les enuoient au bercail que ilz veulent dont

ces loups ne fortent sans auoir faiet grand carnaige. Vrayfem-

blablement font ces loups des démons foubs apparence d'a-

nimaulx.

Les Sorcières ont confeffé qu'elles faifoient la grefle au

Sabbat, ou à leur volonté, afin de guafter les fruifts de la terre :

elles battoient, félon qu'elles difoient, à ceft effeet l'eau auec

vne baguette, & puis ieetoient en l'aër, ou bien dedans l'eau

certaine poudre qu'elles auoient eu de Satan, & par ce moyen

il s'efleuoit vne nuée laquelle se convertiffoit par après en

grefle (Fig. 17), & tomboit la part ou il plaifoit aux Sor-

cières : quand l'eau fait deffaut, elles se feruent de leur vrine,

ainfi que l'avons dift. D'autres fois, impetrent par certaines

parolles on milieu des champs l'ayde de Lucifer prince des

VARIA. 261

démons, pour qu'il enuoye vn des fiens frapper de-malefices

qui elles veulent; puis luy immolent en vn carrefour vn

poulet noir & le ieaent en l'aër. Le démon s'emparedupoulet

& obéit excitant auffitoft une tempefte & faifant tomber grefle

& tonnoire, non toujours aux lieux defignez, mais scelon la

volunté & permifiion de Dieu.

Affin de faire périr les hommes de maie mort, les Sorciers

ont couftume d'exhumer des cadaures & notamment de ceulx

qui ont efté fuppliciez & pendus on gibet. De ces cadavres

ilz tirent la subflance & matière de leurs fortileges, comme

aussi des inftrumens du bourrel, des cordes, des pieux, des

fers, etc., lefquels sont douez d'une certaine force & puiffance

magicque pour les incantations. (Fig. r8.)

Les Sorciers peuuent aussi ardre et confumer les maifons,

comme il aduint en vne ville de Suéde en l'an de grâce

1433. (F'ig'. 19.)

Les Sorciers peuuent encore endormir aultruy par le moyen

de certaines potions, chants & rites diabolicques afin de prof

Merde leur fommeil pour infliller en eulx un poifon mortel,

enleuer ou tuer leurs enfants ou les defrober & les fouiller

charnellement, voyre par adultère. (Fig. 20.)

Quelques foys ilz vfent, pour prouocquer le fommeil de

Fig. 17.

262 VARIA.

certains cierges, ou des piedz & des mains des morts oingts

premièrement d'une huile donnée par le diable; ou bien de

chandelles fixées à chaque doigt ou de torches enchantées

Fig 18.

Fig. 19 -

VARIA. - 263

& d'une certaine greffe à eux congnuë. Et le fommeil dure

autant que bruflent ces lumières infernales. -

Souvent aussi les Sorciers rendent par parolles & fignes cabba-

lifticques l'homme froid, maleficié & impropre à l'acte conju-

gal en fept manières. La première en rendant un espouxodieulx

à l'aultre par calomnie, foubçon, maladie ou mauluoife odeur.

La féconde en empefchant le rapprochement des corps, les de-

tenant dans des lieux esloignez ou interpolant quelque chofe

entre eulx. La tierce par l'inhibition du partage des esprits

animaulx es membres genitaulc. La quarte par deffeicher &

tollir la licqueur prolificque. La quinte en rendant le membre

de l'homme mol & flafque toutes fois que veut accomplir

l'acte de mariage. La fexte, par l'application d'ingrediens

naturellement refrigerans. Enfin en procurant le refferre-

ment & coarctation extrefme des parties de la femme ou en

faifant le membre de l'homme retrait ! , abfcons & comme du

tout perdu. Ce n'eft à dire toutes fois que le membre viril

foit en vérité enleué du corps, mais par leurs preftiges le

cachent de telle façon qu'on ne le fçaurait plus veoir ny

mefme toucher. Et font les Sorciers tellement couflumiers

de ce genre de maléfice que par certains pays on n'ofe mie

célébrer les espoufailles en plein iour.

Fig. 20.

264 VARIA.

Il faut fçauoir encore qu'il est aux Sorcières en loy perpé-

tuelle quand elles ont entre elles refolu de nuyre à aultruy

& que la volunté de Dieu ne l'a permis, de faire retomber le

mal que elles auaient pourpenfé sur une que defigne le fort.

Car le Démon ne peut fouffrir que ses confeils & aduis tom-

bent en nullité & les force de fubir ce qu'elles auaient tenté

& proiedé contre les aultres. Ainfi feut de Catherine Preuoft

qui ne peut faire périr par le poifon la fille unicque de vn

fien voifin, nommé Michel Lecoq, pour ce que sa mère par

oraifons & luftrations quotidianes la pTceferuait de toute in-

cantation ; le Démon l'accufant asprement & lui reprochant

de le fruftrer de sa proye, elle empoifonna sa propre fille

Odille encore au berceau.

C'eft après ce conte rendu des Sorciers que Satan se bande

auec ses fuppofts contre le Ciel, & qu'il conspire la ruine du

genre humain : il faict renoncer de nouueau à ces miferables

Dieu, Chrefme & Baptefme : il leur faid rafraifcliir le ferment

folemnel, qu'ils ont faift de ne iamais parler de Dieu, de la

Vierge Marie, ny des saines & saineles, si ce n'eft par moc-

querie & derifion : il leurs faict quitter leur part de Paradis :

il leurs faift promettre qu'ilz le tiendront au contraire à iamais

pour leur feul maiftre, & qu'ilz luy feront toufiours ridelles :

Fit. 2 1. ·

VARIA. 265

il les exhorte par après de faire le plus de mal qu'ils pourront,

de nuire à leurs voifins, de les rendre malades, de faire

mourir leur beflail, de se venger de leurs ennemis, vfant de

ces notions : Venge\ vous ou vous mourre; il leurs faift de

plus promettre de perdre & gitter les fruits de la terre, &

leurs baille de la poudre & de la greffe propre à cela, du

moins il leurs faiet ainfi croire. (Fig. 21).

Il leurs faid encore bien folemnellement iurer qu'ilz ne

s'accuferont point les vns les aultres, & qu'ilz ne rapporteront

aulcune chose de ce qui se fera paffé entre eulx.

Les Sorciers en tixiefme lieu font la greffe. « Quelques

Sorciers après auoir facrifié au Diable et s'eftant oinds font

tournez en loups courant d'une légèreté incroyable (Fig. 22),

& fouuent rerhangez en loups font couplez aux louues auec

tel plaifir qu'ils ont accouftumé auec les femmes' ». Les

autres sont transformés en chats Q.

Bodin, loc. cit., p. 96.

2 « De noftre temps vn nommé Charc.. du bailliage de Gez, fut

affailly nuitamment en vn bois par \ne multitude de chats; mais

comme iteuftfaiMte figne de la croix, tout disparut. Et de plus

fraifche mémoire vn home de cheual panant fous le cliafteau de Ioux,

apperceut plufieurs chats sur vn arbre, il s'auance, & delafche vne

Fig. 2 2.

266 VARIA.

Quelques fois encore l'on dift la Meffe au Sabbat : mais,

adioute Boguet, ie ne puis efcrire sans horreur la façon auec

laquelle on la célèbre, pour ce que celuy qui est commis à

faire l'office est reueftu d'une chappe noire sans croix, & après

auoir mis de l'eau dans le calice, il tourne le doz à l'autel,

& puis efleue vn rond de raue teinte en noir au lieu de

l'hoftie & lors tous les Sorciers crient à haute voix : Maiflre

ayde nous. ,

A cède cérémonie, dift Llorente, succède une aultre qui est

imitation diabolicque & derifoire de la méfie. Tout fubitement

s'apparoiffent Six ou fept diables de moindre rang & font par

eux dreffé l'autel & apportez les chalice, patène, miffel, bui-

rettes & aultres tous obiets defquels befoing eft. Hz dispofent

efcoppette, qu'il portoit, & fait tomber de deffus l'arbre au moyen de

son coup vn demicin, auquel pendoyent plufieurs clefs, il prend le

demicin & les clefs, & les emporte au village : eflant defcendu au logis

il demande à difner, la maitrefle ne se trouve point, non plus que les

clefs de la caue. Il monitre le demicin, & les clefs qu'il portait : l'hotte

recogneut que c'eftoit le demicin & les clefs de sa femme, laquelle

arrive sur ces entrefaites eftant bieflée à l'hanche droitte : le mary la

prenant par rigueur, elle confeffe qu'elle venoit du Sabbat, et qu'elle

y auoit perdu son demicin et ses clefs, après auoir receu vn coup def-

copette en l'vne des hanches. » (Boguet, loc. cit., p. 269.)

Fig. 23.

VARIA. 267

& arrangent le dais ou chapelle es quelz se voient figures &

ymaiges demoniacques femblables à celles que Satan a prinfe

pour la cérémonie. Ces diables l'aydent comme diacres asoy

veftirde la mitre, delà chafuble & aultres ornemens : &font

iceux tous noirs comme aussi ceulx de l'autel. Le diable com-

mence la meffe, laquelle il defifle vn temps de continuer

pour prefcher les affiftans (Fig. 23). Il les exhorte à ne iamais

retourner au Chrifl, leur promettant paradis bien meilleur que

n'eft celuy des chriflians. Il les afceùre que ilz le gaigneront

d'autant mieulx que auront mis plus de foing à faire chofes

défendues aux chriflians.

Puis receoit l'offerte trofnant sur un liège noir; à sa dextre

est lors feante la principale forciere qui est appelée Royne des

forcieres, tenant en main vne paix en laquelle est engrauée la

figure du Démon ; à son coflé fenefire se tient le premier des

forciers qui est le Roy portant vn baffin. Les principaux

affiflans & aultres profez font hommaige de leur offrande,

petite ou grande, fuyuant leurs moyens & intention : les

femmes à l'ordinaire prefentent des gaffeaux de froment.

Ensuite vn chafcun ayant baifé la paix, on adore le Démon

à genoilz luy baifant encore vne foys le fondement dont fort

exhalaifon & odeur punaife. Ce pendent par vn des diables

fervants lui est tenue la queue leuée. Par après la meffe est

continuée; le Diable alors confacre une chofe ronde femblant

femelle de foulier, marquée de son ymaige; ce faifant prononce

les parolles de la confecration du pain. Enfuite confacre le

chalice auqueleit contenue licqueur deguouflante. Satan ayant

lors communié diftribue aux forciers la communion foubs les

deux espèces. Bien est ce que il donne à manger chofe noire,

atpre, fort difficile à mascher & aualler; aussi est la licqueur

noire, amère & grandement efcoeurante.

Le Diable aussi pour faire l'eau benoifte piffe dans vn trou

à terre & par après les autftans font arrofez de son vrine auec

vn asperges noir par celuy qui faift l'office.

Finablement Satan prenant la figure d'un bouc se con-

fomme en feu, & se reduia en cendre, laquelle les Sorcières

recueillent & cachent, pour s'en feruir à l'exécution de leurs

deffeins pernicieux et abhominables.

BOURNEVILLE et E. TEINTURIER.

FAITS DIVERS

Faculté DE médecine DE Paris. Chaire de clinique des maladies

nerveuses. Par arrêté, en date du 2 janvier 1882, rendu sur le

rapport du Ministre de l'instruction publique et des cultes, il est

créé, à la Faculté de médecine de Paris, une chaire de clinique des

maladies du système nerveux. Par un autre décret de la même

date, M. Charcot, professeur d'anatomie pathologique à la Faculté

de médecine de Paris, est transféré, sur sa demande, dans la chaire

de clinique des maladies du système nerveux.

Faculté de médecine de LYON. Par arrêté ministériel, en date

du 12 janvier 1882, M. Lacassagne, professeur de médecine légale,

est nommé directeur du laboratoire de médecine légale.

Asile d'aliénés de la SEINE. Par arrêté du 30 décembre, ayant

effet du le, janvier, il sera accordé, à titre de haute paie, une in-

demnité mensuelle de 10 francs aux gardiens et gardiennes des

quartiers des agités et des gâteux dans les asiles publics d'aliénés

de Saint-Anne, Ville-Evrard et Vaucluse. Cette allocation ne sera

acquise qu'aux employés dont le service et la conduite auront, pen-

dant toute la durée du mois, donné complète satisfaction au direc-

teur de l'établissement. Les crédits nécessités par cette mesure

seront inscrits au budget rectificatif de chaque asile. De plus, il est

créé dans chacun des asiles publics de Ville-Evrard et de Vaucluse,.

appartenant au département de la Seine, un deuxième emploi

d'interne en pharmacie.

Commission de surveillance. Par arrêté préfectoral, en date du

26 décembre 1881, ont été nommés membres de la commission de

surveillance des asiles publics d'aliénés, pour une durée de cinq

années, à dater du Ier janvier 4882, MM. Barbier et Pelletier,

membres sortants.

Concours de l'internat. Le concours s'est terminé à la fin de

décembre par la nomination de MM. Ileulz, Vétauet, Béraud et

Boucher, internes titulaires; MM. Gaudry, Fourneau, Manière,

internes provisoires. Les épreuves orales ont pris deux séances ;

les candidats ont eu à traiter les questions suivantes : 1° Signes et

diagnostic de la pleurésie ; Signes' et diagnostic des fractures de

l'extrémité inférieure du radius. 2° Rougeole ; Fracture de la

rotule. Les autres questions déposées dans l'urne étaient :

FAITS DIVERS. 269

10 ° Erysipèle de la face ; fracture de la clavicule ; 2° Insuffisance

aortique; plaies pénétrantes de la poitrine ; 3° Signes et dia-

gnostic de la péritonite aiguë ; anthrax; 4° Névralgie faciale;

signes et diagnostic des fractures du rocher. Il y avait quatre places

vacantes; 21 candidats s'étaient fait inscrire, 17 ont répondu à

l'appel, lors de la composition écrite ; dix seulement ont lu leur

composition. Si l'on compare les résultats de cette année avec ceux

de l'année dernière, on trouve que les résultats sont notablement

meilleurs. Les épreuves ont été généralement bonnes.

Par arrêté préfectoral, en date du 23 janvier 4882, M. le Dl

Schits, médecin adjoint à l'asile public d'aliénés de Saint-Yon

(Seine-inférieure), est nommé médecin adjoint de l'asile public

d'aliénés de Ville-Evrard, en remplacement de M. le Dr Gallopain,

appelé aux fonctions de directeur- médecin de l'asile public de Rodez.

Asile Sainte-Anne. Par arrêté duMinistre de l'intérieur, en date

du 25 janvier 1 882, M. Llanta, adjoint au maire du XIV° arrondisse-

ment, est nommé directeur de l'asile Sainte-Anne, en remplacement

de M. Prieur.

Asile DE Villejuif. Le 6 décembre 1879, le Conseil général de

la Seine a voté un crédit de 500,000 fr., dont 494,493 fr. pour

l'acquisition des terrains nécessaires à l'établissement d'un asile-

hospice d'aliénés à Villejuif et 15,508 fr. pour frais divers. Le 30 no-

vembre 4880, le Conseil général a approuvé les plans et devis du

nouvel asile s'élevant à 4,211,383 fr. 47 et alloué un nouveau crédit

de G7G,5 : iG fr., dont 200,000 fr. pour complément d'acquisition de

terrains et 476,456 fr. pour commencement d'exécution des travaux.

Enfin, le Conseil général avoté une nouvelle somme de 885,936 fr. 53

pour les travaux (30 novembre 1881).

Les indemnités allouées par le jury d'expropriation ayant dépassé

de 430,73p fr. les prévisions de l'Administration, M. le préfet a

demandé au Conseil général, qui a consenti sur le rapport de

M. Bourneville l'autorisation de compléter le crédit de 500,000 fr.

primitivement volé, par le prélèvement de la somme supplémen-

taire de 430,i3 : i fr. I;i sur les 476, 5 : iGfr., alloués par la délibéra-

lion du Conseil, en date du 30 novembre 1880, pour commencement

d'exécution des travaux. Après ce prélèvement, l'Administration

aura à sa disposition, pour commencer les travaux, une somme de

1,231,757 fr. 38. Espérons que l'Administration, tenant compte

des voeux si souvent exprimés par le Conseil général, poussera les

travaux avec la plus grande rapidité.

Hospice DE la SALPÈTRthRE. Maladies mentales. M. LEGRAND du

SAULLE, médecin de la Salpêtrière, a commencé un cours public sur

les maladies mentales, avec applications à la médecine légale et à

la pratique professionnelle, le dimanche 29 janvier 1882, à neuf

270 FAITS DIVERS.

heures et demie du matin, au grand amphithéâtre de la Salpêtrière,

et le continuera les dimanches suivants, à la même heure.

Asile d'aliénés D'AURILLAC. Par arrêté, en date du 3 décembre

1881, M. le Dr Joseph Girou, ancien interne des hôpitaux de Paris,

a été nommé médecin adjoint de l'asile départemental d'aliénés

d'Aurillac.

Asile de BONNEVAL. M. le Dl Hildenbrand, directeur de l'asile

de la Charité (Nièvre), est nommé directeur de l'asile de Bonneval

(Eure-et-Loir), en remplacement de M. le Dl Cortyl.

Asile d'aliénés de Bron. Concours pour l'internat. MM. les

étudiants sont informés qu'un concours pour trois places d'internes

en médecine et deux places d'internes suppléants à l'asile public

d'aliénés de Bron (Rhône) aura lieu au commencement du mois

d'avril 1882. Des affiches feront connaître prochainement la

date exacte et le programme de ce concours.

Asile DE la CHARITÉ. - M. le DT Gallopain, nouvellement promu,

est nommé directeur de l'asile de la Charité (Nièvre), en remplace-'

ment de M. le Dl Hildenbrand.

Asile d'aliénés D'ORLÉANS. Meurtre commis par un infirmier.

Un de nos confrères nous communique les faits suivants, dont

nous croyons pouvoir garantir l'authenticité absolue : Vers la fin

du mois de novembre dernier, un aliéné aurait été battu par un

gardien d'une façon si brutale, que le malheureux en serait mort

quelques jours plus tard. La mort résultait manifestement des

coups et blessures donnés par le gardien. Un des administrateurs

de l'hospice, ancien avocat général et actuellement président du

tribunal d'Orléans, ayant appris ces faits, a fait arrêter le gardien

qui est actuellement en prison et qui sera jugé prochainement.

Asile DE Quatre-Mares. M. le Dr Cortyl, directeur de l'asile de

Bonneval, est nommé directeur de l'asile de Quatre-Mares, en rem-

placement de M. le De Broc, admis à la retraite.

Asile DE Rodez. M. le DT Longeaud, médecin-adjoint à l'asile

de Montdevergnes, est nommé à l'asile de Rodez.

Société d'Anthropologie. -Cette Société vient de renouveler son

Bureau pour 1883. Il est composé ainsi qu'il suit : Président :

M. Thulié ; Vice-Présidents : MM. Proust et Hamy ; Secrétaire

général adjoint : M. Girard de Rialle ; Secrétaires annuels :

MM. Chervin et Zaborowski ; Conservateur des collections : M. Col-

lineau ; -Archiviste : M. Dureau ; Trésorier : M. Leguay;- Com-

mission de publication : MM. de Quatrefages, Parrot et Auburtin.

Congrès médical DE Séville. Un congrès médical s'ouvrira à

Séville le 9 avril 1882. La langue officielle sera l'espagnol; mais,

BULLETIN bibliographique. 271

les membres étrangers pourront parler latin -et français. Les mé-

moires, les communications et les autres travaux destinés au Con-

grès seront dans les mains de la Commission organisatrice avant

le 31 mars prochain; on ne recevra aucun travail après ce jour,

s'il n'y a pas un accord unanime de la Commission. Les actes

seront publiés à la Gaceta Iledica de Séville, organe du Congrès.

Extrait du programme des questions proposées. Physiologie :

Relations de la calorification animale avec le système nerveux.

Electrothérapie. Faradisation et galvanisation dans la paralysie

du nerf facial. De l'efficacité des courants constants dans le

traitement des engorgements parenchymateux. Chirurgie : Le

tétanos, sa nature et son traitement. Du virus de la rage, sa

prophylaxie et sa méthode curative.

Nécrologie. M. Robert Christian, associé étranger de l'Aca-

démie de médecine de Paris, est décédé à Edimbourg, à l'âge de

quatre-vingt-quatre ans. Il professa pendant de longues années la

médecine légale à Edimbourg, et il était considéré comme une des

célébrités médicales du Royaume-Uni.

Le DT J.-W. DRAPERS vient de mourir le 4 janvier dernier. Il

était né à Liverpool, le 5 mai 1 SU. Drapers commença ses études

à l'Université de Londres et les compléta à l'Université de Pensyl-

vanie, en 1836. Au début, il enseigna à Hampden-Sydney-College,

mais de 4839 à 1873, il occupa la chaire de chimie et de physio-

logie à l'université deNew-York. C'était un littérateur doublé d'un

philosophe et d'un grand savant. A part ses ouvrages de physiologie,

il a publié des ouvrages universellement connus sur le « Dévelop-

pement intellectuel de l'Europe ».

Nouveau 70URNAL. - Neurologisches Ceaatralblatt, publié par le

D'E. iIlENDI3L, privat-docent à l'Université de Berlin. Ce journal, dont

le premier numéro a paru le 27 janvier, est bimensuel. Il comprend

des travaux originaux et surtout des revues portant sur l'anatomie,

la physiologie et la pathologie du système nerveux, la médecine

mentale et les questions médico-légales qui s'y rapportent.

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE

Babéty. Des propriétés physiques d'une force particulière du genre

humain (force neurique rayonnante) connue sous le nom de magnétisme

animal. Une brochure m-8" de 40 pages. Paris, 1882, chez 0. Doin et

J. Lechevalier. Prix : 2 fr.

3Î9 ' BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

`l3snnn (G ? 1.). - The asylunzs of Europe. Broch.in-16, 1881, Cambridge.

BENEDtKT (M.). Weitere voohiufige Mittheilungen icber 1'ez·ue>deh-

nung. Broch. 111-16, 1881. Gistel et C'e, Wien.

. Berger (0.). Zur Nervexzdehzzxtzrg Gei tabès dorsalis. Broch. in-8^,

1881, Barth et C"=. Breslau.

Bourneville et d'Ouïr. Recherches cliniques et thérapeutiques sur

l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie. Compte rendu du service des épileptiques

et des enfants idiots et arriérés de Bicêtre, pendant l'année IS80. Un

vol. in-8' de 128 pages avec 3 figures dans le texte. En vente au bureau

des Archives de Neurologae. Prix : 3 fr..

Pour nos abonnés, prix : S fr.

CIIAIILTON Bastias. Le cerveau, organe de la pensée chez l'homme et

les animaux. Deux vol. in-8" avec 184 figures dans le texte. Cartonnage

anglais. Prix : 12 fr. Paris, 1881, librairie Germer-Barlhere et C^.

Dnroun ,E.). Compte rendu du service médical de l'asile public de

Saint-Robert (Isère) pendant l'année 1880. Broch. in-8° de 32 pages,

Grenoble; F. Allier, 1882.

AGENO (L.) et BEISSO. Del sistenza commissurale centrale dell' erzce-

fale Mniano. Un vol. in-4", Gènes 1881; chez Yerardo frères.

Kahlfii (0.) et PICK (A.). IVestei-e l3eitrCtge z2t2- pcilliologi'e ? z21(l pa-

thologischen Anatomie clei, Centralnervensystems. Broch. in-8° de 39 pages

avec 2 planches en chromo. 1881, Prague, imp. A. Haase.

KAHLER (0.).-Beftrageur patlaologischerz Axzatonzze der mit cerebralen

synzptonzezz verlaufenderz tabès dorsalzs. Broch. in-8° de 24 pages. 1881,

Prague, imp. A. Ilaase.

Jany (L.). Ueber Einwazederuxrg der C< ! ce)'CMS cellulosw 17z's mens-

chliche Auge. Broch. in-8" de 24 pages. 1881, Breslau, imp. Gen, Ursuli-

nerstrasse, iiù 1.

LELOIR (H.). Recherches cliniques et anatomo-palhologiques sur les

affections cutanées d'origine nerveuse. Un vol. in-8° de 220 pages, avec

4 planches et plusieurs figures intercalées dans le texte. Paris, 1882,

librairie du Progrès médical, G, rue des Ecoles. Prix : 5 fr.

Pour nos abonnés, prix : 3 fr. 50.

Mazzotti (L ). - Emorragie solto-mucose in casi di alterazioni del

ce),vello et delle nzerzingi. Broch. in-16, 1881, Gamberini, Bologna.

Bichet (Cn ). Physiologie des muscles et des nerfs. Leçons professées

à la Faculté de médecine en 1881. Un gros vol. in-8^ de 924 pages avec

100 ligures dans le texte. Prix : 15 fr. Paris, 1881, librairie Germer-

Badiiere.

GowEns (W.-R.). - A Manual and Atlas of médical oplitlial2zoscopy. Un

gros vol. in-8° de 414 pages avec 16 planches chromo et 28 figures dans

te texte. 1882, Londres, J. et A. Churchill, New-Burlmgton street.

SALVIOLI (G. ). Alcurze ricerche sul cosi detto sonno msyMe'co. Brocli.

in-80, 1881, Bertolero à Turin.

Tamburini (A.) et Scppirau (G.). Contribuzioni allô studio syeri-

mentale dell' ! pMO<iS)HO. Broch. grand in-8° de 40 pages, avec 4 planches

de tracés respiratoires, 1881. Stefano Calderini à ileggio-Emilia.

'Wmr (E.) Contribution à l'étude de l'élongalion des nerfs. Un vol.

grand in-8^, avec quinze figures dont quatre hors texte. Pnx : 4 fr. 1882,

Paris, librairie Germer-Baillière.

Le rédacteur-gérant, BouRrEvm.e.

Evreux, CL. tltumsx, imp. -382.

Vol. III. Mai 1882. ? 9

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

CLINIQUE NERVEUSE

UN CAS D'IIG111LÈSION DE LA MOELLE ÉPINIÈRE;

Par A. GILBERT, interne des hôpitaux.

En 1863, dans le Journal de la Physiologie de

l'hnîme et desanimaux, M.Brown-Séquard déterminait

le trajet suivi dans la moelle épinière par les différents

conducteurs sensitifs, et résumait de la façon suivante

le tableau symptomatique des hémilésions de la

moelle : « Ou observe les particularités suivantes chez

l'homme, à la suite d'une lésion altérant toute l'épais-

seur transversale d'une petite portion d'une moitié

latérale de la moelle épinière :

« Du côté correspondant : 1° paralysie du mouve-

ment volontaire ; 2° hyperesthésie au toucher, au cha-

touillement, à la douleur, et à la température dans les

parties paralysées ; 3° zone d'anesthésie peu considé-

rable dans les parties dont les nerfs naissent immédia-

tement au-dessous du siège de la lésion ; 4° hyperes-

thésie plus ou moins étendue au-dessus de la zone

18

27t CLINIQUE NERVEUSE.

anesthésique ; 5° élévation absolue ou relative de tem-

pérature dans les parties paralysées ; 6° phénomènes

de paralysie des origines du nerf grand sympathique

cervical, quand la lésion siège au renflement cervico-

brachial. Du côté opposé : 1° anesthésie complète,

absolue au toucher, au chatouillement, à la douleur,

et à la température dans les parties correspondantes

à celles qui sont paralysées de l'autre côté; 2° conser-

vation parfaite des mouvements volontaires et du sens

musculaire ; 3° zone peu étendue d'hyperesthésie à un

faible degré au-dessus des parties anesthésiées. »

Les conclusions du mémoire de M. Brown-Séquard

étaient déduites de l'étude et de la comparaison, de

vingt-quatre observations. A celles-ci bientôt vinrent

s'en ajouter d'autres publiées par divers auteurs et par

M. Brown-Séquard lui-même ; et en J876, dans une

thèse intitulée Contribution à l'étude clinique des lésions

unilatérales de la moelle épinière, Vinot pouvait réunir

quarante-neuf cas d'hémilésion de la moelle.

Les causes qui sont susceptibles d'engendrer le ta-

bleau clinique tracé par M. Brown-Séquard sont très

variées ; les plus fréquentes sont : les fractures et luxa-

tions des vertèbres, les tumeurs et épanchements intra-

rachidiens, les plaies, hémorrhagies, tumeurs et sclé-

roses de la moelle, en résumé toutes les causes qui,

par un mode quelconque, peuvent annihiler unilatéra-

lement les fonctions médullaires.

Dans cette étiologie des hémilésions de la moelle,

les plaies prennent une part importante, puisqu'il en

existe à notre connaissance treize observations rappor-

tées par Boyer, Hutin, Maunder, Wood, Viguès,

Brown-Séquard (trois cas), Joffroy et Salmon, Aurran, z

UN CAS D'HÉMILÉSMN DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 275

Riegel, 11W ller, Rosenthal. A côté de ces faits vient se

ranger le suivant que M. le professeur Richet nous a

engagé à publier.

Observation. - Iléniil)a7-aplégie avec troubles de la sensibilité,

dans les deux membres inférieurs, d'origine traumatique.

Dans la nuit du 13 mars 1881, le nommé C... (Gustave),

ouvrier couvreur, âgé de dix-sept ans, est frappé dans le dos

d'un coup de couteau. A l'instant même, le blessé sent ses

jambes se dérober sous lui et tombe ; il est transporté à l'Hôtel-

Dieu, salle Saint-Landry, n° 31, dans le service de M. Richet.

Le lendemain 1 ? mars, il offre les symptômes suivants :

à la partie supérieure du dos, entre la première et la deuxième

vertèbre dorsale, à droite de la ligne médiane, existe une plaie

large de trois centimètres. Il nous est impossible d'en appré-

cier la profondeur et la direction ; mais il ne parait pas douteux

qu'après un trajet oblique, le couteau ait sectionné la moitié

gauche de la moelle épinière : c'est ce que démontre l'examen

de la motricité, de la sensibilité, de la vaso-motricité et des

diverses fonctions. Les troubles paralytiques se réduisent à

une hémiparaplécie. A gauche, le membre abdominal est tota-

lement paralysé, il ne peut être soulevé et détaché du plan du

lit ; les orteils seuls ont conservé quelques légers mouvements

de flexion et d'extension. A droite, la motilité est intacte, et le

membre abdominal a conservé toute sa force. Il en est de

même des membres supérieurs.

Les réflexes offrent une remarquable asymétrie. A gauche,

ils ont subi une diminution d'intensité considérable : les

piqûres, le chatouillement ne déterminent que de faibles

contractions musculaires. La trépidation du pied ne peut être

provoquée; le réflexe rotulien a totalement disparu. A droite,

les réflexes semblent présenter leur intensité normale ; peut-

être l'oscillation de la jambe, après percussion du tendon

rotulien, est-elle plus ample qu'à l'état ordinaire. La contrac-

tilité faradique est conservée à gauche et à droite. -

La sensibilité n'est pas moins atteinte que la motilité. A

gauche, le membre inférieur, l'abdomen, le thorax jusqu'au

mamelon sont hyperosthésiés : la piqûre superficielle d'une

276 CLINIQUE NERVEUSE.

épingle est douloureusement ressentie, un simple contact, un

léger chatouillement, le froid, le chaud, déterminent une vive

sensation de brûlure. A droite, l'hyperesthésie n'occupe qu'une

bande de quelques centimètres de large, qui partant en arrière

de la colonne vertébrale au-dessous de la plaie, vient, après

un trajet spiroïde, aboutir en avant, entre la clavicule et le

mamelon. Au-dessous de cette zone étroite d'hypcresthésio,

l'anesthésie s'étend, à peu près absolue, sur la partie droite du

thorax en dehors du sternum, sur la partie droite do l'abdomen

en dehors des muscles droits, et sur le membre inférieur :

dans toutes ces régions l'analgésie est complète, et l'on peut

sans éveiller la moindre douleur transpercer de part en part

avec des épingles la peau du malade. Dans toutes ces régions

aussi, la sensibilité aux températures est absolument abolie ;

mais il n'en est pas tout à fait de même des sensibilités au tact

et au chatouillement, qui persistent quoique extrêmement

affaiblies.

A gauche, le sens musculaire est diminué, et le malade ne

peut rapporter avec certitude et précision les positions variées

que l'on donne à sa jambe : tantôt et par hasard, il reconnaît

la situation de son membre, tantôt et le plus souvent il commet

de grossières erreurs, et, par exemple, croit sa jambe fléchie

alors qu'elle est dans l'extension complète. A droite, au con-

traire, le sens musculaire est entièrement conservé. Il n'existe

pas de retard appréciable dans la transmission des sensations.

A ces troubles sensitifs, se joignent des douleurs et sensa-

tions subjectives. A gauche, le malade a ressenti pendant la

nuit, et ressent encore par intervalles, des éclairs et des élan-

cements qui occupent surtout le genou et le cou-de-pied. A

droite, il éprouve une sensation continuelle de fourmillement.

En outre, il signale une sensation de constriction thoracique,

de pesanteur épigastrique, de chaleur dorsale.

Les troubles vaso-moteurs sont très marqués, et ont entraîné

des modifications dans la température et la coloration respec-

tives des deux membres. Au simple palper, le membre abdo-

minal gauche parait plus chaud que le membre droit ; et plusieurs

explorations thermométriques révèlent une différence de tem-

pérature déplus d'un degré. La coloration des deux membres

est identique quand le malade est couché, mais sitôt qu'il est

placé dans la position verticale, le membre gauche devient

pourpre du haut en bas, et se sillonne de veines dilatées. Il

UN CAS D IIEMILÉSION DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 277

est juste d'ajouter qu'avant son accident le blessé avait des

varices de la jambe gauche.

L'examen des diverses fonctions ne nous révèle que des

modifications peu importantes, si ce n'est du côté de l'appareil

génito-urinaire : le pénis est perpétuellement en semi-érection.

La miction est fréquente, difficile, douloureuse, et peu abon-

dante. L'urine offre la réaction acide ; elle ne renferme ni

albumine, ni sucre, ni indican.

La température est normale (37 ? a) ; le pouls est régulier

et d'une fréquence ordinaire (75). La respiration est facile et

non troublée. La langue est sale, l'appétit diminué ; il y a de

la constipation. Rien du côté de la pupille.

Le lendemain 15 mars, nous notons dans l'état du malade

les modifications suivantes : la paralysie a très légèrement

diminué. L'insensibilité au tact, au chatouillement, à la dou-

leur s'est un peu atténuée : la piqûre d'une épingle donne une

sensation de fourmillement d'autant plus distincte qu'elle est

faite plus haut vers la racine du membre. L'insensibilité ther-

mique seule demeure entière. Les troubles génito-urinaires

présentent à peu près les mêmes caractères que la veille;

l'urine des vingt-quatre heures est alcaline ; sa quantité est

de 300 grammes. La constipation persiste.

Le 16 mars, la paralysie et l'insensibilité ont encore un peu

diminué, sauf l'insensibilité aux températures qui est toujours

absolue. La rétention d'urine est complète, et le cathétérisme

est devenu nécessaire , 250 grammes d'urine seulement sont

rendus dans les vingt-quatre heures. Il y a toujours constipa-

tion. La température est normale, le pouls est remarquable

par sa lenteur (65 puis.) et surtout par son irrégularité, son

inégalité, ses intermittences ; l'on dirait le pouls d'un malade

atteint d'insuffisance mitrale.

Le t mars, la rétention d'urine disparaît ; mais la miction

reste embarrassée. La quantité d'urine des vingt-quatre heures

est de 700 grammes ; elle offre la réaction alcaline. Le pouls

est comme la veille lent (70 puis.), inégal, irrégulier, intermit-

tent. Comme la rétention d'urine, la constipation cède tout à

coup spontanément, et le malade a dans la journée quatre ou

cinq selles abondantes.

Le 18 mars, la paralysie continue à s'améliorer. L'hyperes-

thésie disparait à peu près complètement. La quantité d'urine

est normale (1,500 gr.). Le pouls est toujours irrégulier.

278 CLINIQUE NERVEUSE.

Le 20 mars, le retour des fonctions motrices s'accentue de

plus en plus, et le malade peut presque soulever sa jambe.

Le 21 mars, les urines sont troubles, muco-purulentes.

Le 23 zzzazs, survient une hydarthrose légère du genou

gauche, accompagnée de douleurs continues, mais sans chan-

gement de coloration de la peau. Le pouls est presque régu-

lier.

Du 23 au 31 mars, le malade commence à se lever avec des

béquilles. Les réflexes, et en particulier le réflexe tendineux,

ont reparu dans le membre paralysé. Les sensibilités à la dou-

leur, au tact, au chatouillement sont de plus en plus distinctes.

La sensibilité aux températures commence à renaître. La

perte incomplète du sens musculaire dans le membre gauche

persiste encore et se reconnaît à une ataxie manifeste des

mouvements. L'hydarthrose s'est résorbée. La miction est

facile : les urines sont normales comme quantité et comme

qualité. Le pouls est tout à fait régulier.

Le 10 avril, le malade peut marcher sans béquilles, mais en

traînant fortement la jambe.

Le 29 avril, le malade quitte 1'llôtel-Dieu dans l'état suivant :

le membre abdominal gauche reste très notablement parésié.

Les réflexes sont normaux. L'hyperesthésie a disparu. Les

sensibilités à la douleur, au tact, au chatouillement demeurent

un peu obtuses. La sensibilité aux températures est encore

presque totalement abolie. Les troubles vaso-moteurs se sont

très atténués. Le membre inférieur gauche est très légèrement t

atrophié. Il n'existe plus m trouble génito-urinaire, ni trouble

circulatoire ou digestif.

Comme on le voit, l'observation que nous venons

de rapporter ne diffère que par le détail des observa-

tions antérieures d'hémilésion, dont elle reproduit

fidèlement les traits fondamentaux. La paralysie s'est

présentée ici avec ses caractères ordinaires. Comme

dans tous les cas où la lésion médullaire est exacte-

ment unilatérale et siège au-dessous de l'émergence

du plexus brachial, elle a revêtu la forme hémipara-

plégique. Pendant les premiers jours elle s'est rapide-

UN CAS D'HEMILESION DE LA MOELLE ÉPINIÈRE. 279

ment atténuée, si bien qu'on a pu croire un moment à

sa prompte guérison ; puis bientôt elle est restée

stationnaire, menaçant, comme dans les cas de Boyer,

Rosenthal et autres, de persister indéfiniment. Les

réflexes étaient peut-être légèrement exaltés du côté

anesthésié, certainement diminués et presque abolis du

côté paralysé, où le réflexe tendineux avaitentièrement

disparu. Ce fait vaut la peine d'être noté, car il est en

contradiction avec les faits antérieurs dans lesquels on

trouve ordinairement signalée au-dessous de la lésion

une exagération bilatérale des actes réflexes (Brown-

Séquard, etc.).

L'hyperesthésie, comme c'est la règle, portait à la

fois sur les différents modes de sensibilité, et occupait le

siège habituel ; elle avait à peu près complètement dis-

paru le cinquième jour, et n'existait plus lorsque le

malade quitta l'hôpital, ce qui contredit la formule sui-

vante d'Oré et Poiusot : « L'hyperesthésie est toujours

de longue durée, elle persiste alors que les autres

symptômes ont disparu. »

L'anesthésie était unilatérale et croisée, comme dans

tous les cas d'hémilésions ; elle ne portait pas à un

même degré sur les différentes sensibilités : le tact, le

chatouillement n'étaient point absolument éteints; la

douleur, le froid, le chaud au contraire, n'étaient plus

perçus. Dès les premiers jours, l'insensibilité au tact, au

chatouillement, ladouleur,diminuarapidement; seule,

l'insensibilité aux températures était encore entière dix

jours après l'accident. Ces faits sont assez fréquents, et

s'expliquent aisément, si l'on admet avec M. Brown-

Séquard qu'il existe dans la moelle des conducteurs

spéciaux pour chaque mode spécial de sensibilité.

280 ' CLINIQUE NERVEUSE.

La paralysie vaso-motrice avait les mêmes limites

que la paralysie motrice; elle était très accentuée, puis-

qu'il y avait d'un côté à l'autre une différence de tem-

pérature de plus d'un degré, et que l'inertie capillaire

etveineuse se traduisait, lorsque le malade était debout,

par une vive rougeur et de nombreuses varicosités du

membre inférieur gauche.

L'érection du pénis avait déjà été notée par Aurran,

dans un cas d'hémilésion de la moelle dorsale; notre

observation prouve une fois de plus que ce trouble

génital n'est point spécial aux lésions de la moelle

cervicale, comme l'out cru beaucoup d'auteurs.

Les troubles de la miction n'ont présenté aucune

particularité importante; ils ont porté à la fois sur

l'excrétion et sur la sécrétion urinaire. Pendant les

deux premiers jours, en effet, il y a eu dysurie accom-

pagnée de douleurs et de ténesme. Le troisième jour,

la dysurie a fait place à la rétention absolue. Le qua-

trième jour enfin, la rétention a cédé, et la dysurie a

reparu pour diminuer ensuite progressivement d'inten-

sité jusqu'à la guérison complète. L'hypurie a été très

manifeste au début, puisqu'avant d'atteindre le faux

normal, la quantité des urines a été successivement de

300, 250, puis 700 grammes. Le premier jour seule-

ment l'urine avait conservé la réaction acide, dès le

deuxième jour elle était alcaline, le septième jour

muco-puruleute.

D'après Hutchinson, le pouls reste toujours régulier

dans les lésions de la moelle, contrairement à ce qui

aurait lieu s'il s'agissait de commotion cérébrale.

Nous avons cependant observé une lenteur, une irré-

gularité, une inégalité et une intermittence du pouls

DE L'A1STÉR0-1',PILEPSIE. 281

que la plaie de la moelle peut seule expliquer, car

cette lésion a été absolument isolée. Ces troubles du

pouls ont duré une semaine à partir du troisième jour

de l'accident. Il semble donc probable que le centre

cardiaque n'a point été directement intéressé par le

traumatisme, mais secondairement, soit par conges-

tion, soit par inflammation.

L'arthropathie du genou gauche que nous avons vue

survenir le neuvième jour, n'a- différé ni par ses carac-

tères cliniques, ni par sa localisation, des arthro-

pathies relatées dans les observations de Viguès et de

Joffroy et Salmon. C'est du reste le seul trouble tro-

phique qu'il nous a été permis de constater, à part

l'atrophie du membre inférieur gauche qui était légère

encore quand le malade quitta l'hôpital, mais qui

depuis cette époque a dû notablement s'accentuer.

NOTES POUR SERVIRA L'HISTOIRE DE L'lilS'CI;RO-L,P1LBPS11 ?

Par Ci. FÉRÉ.

IV. SUR QUELQUES PHÉNOMÈNES OBSERVÉS DU CÔTÉ DE

L'OEIL CHEZ LES IIISTÈI10-$l'ILI : PTIQUES, SOIT EN DEHORS

DE L'ATTAQUE, SOIT PENDANT L'ATTAQUE.

A. Phénomènes observés en dehors de l'attaque.

Dans l'hémianesthésie des hystériques, l'insensibilité

'Voir le n° 8, p. 160.

La malade qui fait le sujet (le la dernière observation (p. 170) a suc-

combé à une nouvelle attaque de rhumatisme compliqué de pleurésie

2812 CLINIQUE NERVEUSE.

s'étend non seulement à la peau et aux muqueuses,

mais ordinairement aussi aux organes des sens : la vue,

l'odorat, l'ouïe, le goût sont également diminués du

même côté; il s'agit, en un mot, en général, d'une

hémianesthésie sensitivo-sensorielle. Toutefois, les

organes des sens peuvent être respectés ou peu atteints;

]'oei), par exemple, qui dans les cas d'anesthésie com-

plète, offre des troubles caractéristiques, allant quel-

quefois jusqu'à la perte totale de la vision, mais con-

sistant le plus souvent en un rétrécissement concen-

trique du champ visuel, coïncidant ordinairement avec

une achromatopsie plus ou moins marquée.

L'achromatopsie est quelquefois complète, mais fré-

quemment elle est partielle ; certaines malades n'ont

perdu que la sensation du violet, par exemple ; et en

général il y a corrélation entre le degré du rétrécisse-

ment du champ visuel et le degré de l'achromatopsie.

Il est un fait qui a peu frappé l'attention, c'est que la

sensibilité générale de I'oeil, la sensibilité de la con-

jonctive et de la cornée, est en rapport avec la sensi-

bilité spéciale de l'organe. Les hystériques hémianes-

thésiques qu'il nous a été donné d'observer, et qui ne

présentaient ni rétrécissement du champ visuel, ni

achromatopsie, conservaient la sensibilité de leur con-

jonctive; celles qui ont perdu la vision d'une ou de

plusieurs couleurs, et ont un rétrécissement plus ou

régulièrement proportionnel du champ visuel, ont

perdu la sensibilité conjonctivale ; celles enfin, qui ont

une achromatopsie complète, avec un champ visuel

double et d'endocardite v6getante,sans que son anestlasie ! tit6tem0()if[ee

jusqu'à la mort. Les centres nerveux n'ont présenté à l'ceil nu aucune

lésion, particulière.

DE L'HYSTÙRO-PILUPSTE. 283

presque nul, ont perdu non seulement la sensibilité de

la conjonctive, mais encore celle de la cornée. Dans

ce dernier cas, si, pendant que la malade regarde

fixement un objet, on fait avancer au contact de la

conjonctive et de la cornée une bandelette de papier,

on voit l'oeil et les paupières rester immobiles, tant que

le corps étranger n'est pas arrivé dans le champ pu-

pillaire. Le réflexe oculo-palpébral est obtenu aussi

vite si, au lieu de faire avancer le papier au contact

des membranes, on le fait avancer à une certaine dis-

tance ; il est donc déterminé exclusivement par l'exci-

tation de la rétine qui a perdu la perception des cou-

leurs, mais qui distingue encore le clair de l'obscur.

Chez les hémianesthésiques pures ou chez les anesthé-

siques totales avec prédominance d'un côté, on peut,

par l'aimantation ou par l'électrisation statique ou les

autres procédés connus, provoquer un transfert qui

permet de faire une contre-épreuve donnant des ré-

sultats constants. Il y a donc dans l'hémianesthésie

hystérique un rapport constant entre l'insensibilité

cutanée et l'insensibilité sensorielle. Et ce rapport

constant existe non seulement lorsque l'anesthésie

est étendue à toute la moitié du corps, mais encore

lorsqu'elle est plus ou moins limitée. Lorsqu'on

a fait disparaître l'anesthésie hystérique par l'élec-

trisation statique , on voit au bout d'un certain

temps reparaître l'anesthésie, qui commence à se

reproduire par une région localisée variable avec

les sujets, et n'ayant aucun rapport d'ailleurs avec les

distributions nerveuses '. Chez une de nos malades,

1 Les différentes patties reperdent leur sensibilité dans un ordre chrono-

logiquement inverse de celui suivant lequel elles l'ont recouvrée; mais le

28 il CLINIQUE NERVEUSE.

l'insensibilité revient d'abord sur une zone limitée qui

entoure )'oei), comprenant la conjonctive et la cornée,

et l'anesthésie sensorielle se reproduit en même temps

que cette insensibilité limitée de la peau. Ce que nous

venons de dire pour ici) peut d'ailleurs être vérifié

également pour l'ouïe, pour l'odorat, pour le goût.

Sur plusieurs hystériques hémianesthésiques que nous

avons examinées à ce point de vue, nous avons pu

constater que, lorsque l'ouïe est plus ou moins intacte,

la sensibilité générale du conduit auditif (qu'il ne faut

pas confondre avec celle de la membrane tympanique)

est également conservée, ou inversement. Ces faits

semblent indiquer qu'il existe dans des régions indé-

terminées de l'encéphale des centres sensitifs communs

aux organes des sens et aux téguments qui les re-

couvrent.

Ce point de l'histoire de l'hystéro-épilepsie a par

lui-même un certain intérêt, mais en prendra un plus

grand encore, si, suivant en cela l'exemple de notre

maître, nous cherchons à appliquer les données de

retour de l'anesthésie est beaucoup plus facile il suivre parce qu'il est

moins rapide. Chez E. P..., l'anesthésie repayait d'abord autour de t'oeii et

à ses membranes, et l'ambljopic se reproduit en même temps; puis

l'insensibilité envahit l'oreille, la narine, la bouche, et la scnsihdltë spë-

ctale de ces organes s'altère parallèlement. L'anesthésie descend progres-

snement, et quand elle arrive vers le genou droit, la partie supérieure

de la face commence a se prendre L gauche. L'invasion continue, mais

ce sont les oileils du pied gauche qui perdent les derniers leur sensibilité.

Chez D.... les phénomènes se passent en sens inverse; sous l'influence de

l'électiicité statique, l'insensibilité disparaît d'abord il la face; quand

elle repatatt, elle se manifeste d'abord au pied, puis z la main, remon-

tant progressivement des membres a la face; ce n'est qu'en demie ! lieu

que la face et les sens spéciaux perdent leur sensibilité. Che P... t'anea-

thésie se reproduit en commençant par l'avant-bras et par la cuisse; la

dernière partie qui reste sensible est une plaque située en dehors de

'ombilic.

DE L'HYS'l'liRO-FFILliI'S11 : . 285

l'hystérie, cette maladie si éminemment suggestive, à

l'étude des affections cérébrales. M. Charcot, se basant

sur ce que les hystériques ne pouvaient avoir une

physiologie à part, a peusé que les phénomènes qu'on

observe sur elles doivent se retrouver dans les autres

maladies, et c'est ce qui lui a permis de mettre en

lumière l'amblyopie croisée dans certaines lésions cé-

rébrales. Cherchant à notre tour des analogies nou-

velles entre l'hémianesthésie des hystériques et l'hé-

mianesthésie par lésion cérébrale, nous avons pu voir

que, comme les hystériques, les hémianesthésiques

cérébraux qui ont des troubles de la sensibilité des

membranes extérieures de l'oeil, ont également des

troubles visuels, soit achromatopsie, soit rétrécisse-

ment concentrique ou rétrécissement latéral '.

Certaines hystériques, au lieu d'offrir une diminution

de la sensibilité cutanée, paraissent présenter au con-

traire une exagération de la sensibilité au contact et

à la piqûre du côté de l'ovaire douloureux ; mais, à

tout bien considérer, on s'aperçoit bientôt que cette

soi-disant hyperesthésie n'est qu'une exagération de

la sensibilité à la douleur, et que le simple contact est

moins senti qu'il ne l'est du côté sain. Il s'agit alors

d'une hémidysesthésie 2 ; mais dans ce cas encore, s'il

existe des troubles de la sensibilité spéciale, ils sont

eu tout analogues à ceux qui accompagnent l'hémia-

nesthésie, c'est-à-dire que l'acuité des divers sens

1 Clt. ler5. - Hémihypcrcsthésie sensitive et hémianeslhcsie senso-

rielle. (Société de biologie, 4 novembre 1881.)

si Ch. Férié. Contribution à l'étude des troubles fonctionnels de la

vision par les lésions cérébrales. Paris, 18S9.

286 CLINIQUE NERVEUSE.

est diminuée. Cette dysesthésie peut, comme l'anes-

thésie, se limiter à la partie supérieure d'un côté de

la face, et s'accompagner de troubles analogues des

sens.

Le rapport qui existe entre la sensibilité spéciale de

l'oeil et la sensibilité de la conjonctive, nous paraît

encore trouver une preuve dans une observation que

nous avons pu faire récemment à la Salpêtrière sur

trois hystériques hypnotisables. On peut distinguer

dans la catalepsie deux phases diverses en ce qui con-

cerne l'organe de la vision. 1° Dans la catalepsie pro-

fonde, celle qu'on obtient, par exemple, par un bruit

soudain, les yeux restent fixes, sans clignement de

paupières ; dans cet état, on peut toucher impunément

la conjonctive, sans provoquer de réflexe. 2° En agi-

tant plusieurs fois un objet devant les yeux de la cata-

leptique, on arrive à fixer son regard et à lui faire

suivre les mouvements que l'on fait, et on peut lui

donner des suggestions. Si alors on touche la conjonc-

tive, les paupières réagissent immédiatement comme

chez un sujet sain, tandis que la sensibilité géné-

rale reste abolie sur tout le corps. On peut, en

replongeant la malade dans la catalepsie profonde, ré-

péter l'expérience autant de fois qu'on le veut; le

résultat est toujours le même : sitôt que l'oeil perd sa

fixité, la sensibilité de la conjonctive reparaît. L'objet

mis en mouvement devant l'oeil excite la sensibilité

spéciale de l'organe comme, dans d'autres circons-

tances, une forte excitation locale ramène la sensibilité

cutanée ; et, avec la fonction visuelle, la sensibilité de

la membrane externe de l'oeil a reparu.

DE il111YSTPI',O-ÉPILEPSIE. 287

B. Phénomènes observés pendant l'attaque. Pas-

sons maintenant à l'étude de quelques phénomènes

observés du côté de l'oeil pendant l'attaque d'hystéro-

épilepsie. L'exploration de l'oeil pendant l'attaque

présente une grande difficulté, en raison des batte-

ments des paupières, de la convulsion des yeux qui se

portent souvent vers un des angles de l'orbite, et des

mouvements plus ou moins précipités du corps et de

la tête. Cependant, en répétant l'épreuve un nombre

suffisant de fois, il m'a été permis, à un certain mo-

ment, dans chaque période et pour chaque malade, de

constater que la pulpe du doigt posée au contact de la

cornée, dans le champ pupillaire, ne fait point changer

la direction de I'oeil. Chez quelques malades, ce con-

tact provoque une sécrétion lacrymale exagérée, chez

d'autres l'aeil reste sec. Non seulement l'aeil ne tourne

point, soit pendant la phase épileptoïde, soit pendant

la phase des grands mouvements, mais, chez certains

sujets qui, dans la phase du délire, regardent en face,

]'ceH largement ouvert, on peut constater que les pau-

pières ne bougent pas, malgré un contact de la cornée

durant plusieurs secondes. Les membranes externes de

l'oeil sont donc insensibles pendant l'attaque.

L'état de la pupille pendant l'attaque a été peu

observé : on trouve la dilatation notée dans les obser-

vations de M. Bourneville'; M. Bicher 2 dit que

dans la période épileptoïde la pupille est tantôt ré-

trécie, tantôt dilatée ; 31. Gowers, dans son traité tout

Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'leystéro-épileysee et l'hys-

téi-ie, 1876, p 120, 157; et Iconogi-. de la Stilpét-zèi-e.

2 Etudes cliniques sur ? ty<M;'0-3 ! p ? e, 1881, p. 38.

288 clinique nerveuse.

récent, manque de clarté et de précision quand il dit

que les pupilles sont généralement contractées pen-

dant la convergence des yeux et quelquefois sans con-

vergence par un spasme de l'accommodation'. En

somme, c'est un point qui ne paraît pas avoir été le

sujet d'une étude bien détaillée et qui nous semble

cependant digne d'attention.

Pendant l'attaque, la pupille n'est que peu influencée

par l'action de la lumière, qui provoque cependant un

rétrécissement très net dans certains cas. Elle est le

siège de mouvements spontanés très intéressants à ob-

server, mais qu'on ne voit pas avec la même facilité

chez toutes les malades et pendant toutes les attaques ;

cependant, cette étude est grandement favorisée par la

répétition de ces attaques, dont les différentes phases

se succèdent avec une régularité prévue, et que l'on

peut interrompre à volonté par la compression ova-

rienne, ou reproduire par l'excitation des points hys-

térogènes. Tel est, en résumé, le résultat de nos

observations. Au début de la première phase, de la

phase épileptoïde, la face se convulsé, se tourne d'un

côté, les yeux deviennent fixes, les membres se rai-

dissent et restent un moment fixes, puis la trépidation

commence. Au moment où la face commence a se figer

par la contraction tonique qui précède la torsion de la

tête, on voit la pupille se rétrécir rapidement, puis

rester immobile. Pendant toute la première partie de

cette première phase, pendant la période tonique, la

pupille reste contractée. Sitôt que les mouvements

cloniques se produisent, la pupille se dilate fortement,

1 L7pileps ! l cascl ollter chrouic convulsive cliacases; London, 1881, p. 155

DE l hystero-épilepsie. 289

et la dilatation persiste pendant la seconde partie de

la phase épileptoïde et pendant toute la durée de la

phase des grands mouvements. Quand arrive la phase

du délire et des attitudes passionnelles, on voit des

oscillations très remarquables de la pupille, des alter-

natives de dilatation et de rétrécissement qui varient

avec l'attitude du sujet, et qui paraissent dues à la

nécessité du mouvement d'accommodation provoquée

par les différences d'éloignement des objets ou des

personnes qui figurent dans l'hallucination. Certaines

malades sont sujettes à des attaques incomplètes, qui

augmentent les difficultés de l'observation de l'état de

la pupille, surtout pour la contraction du début, qui

est souvent extrêmement brève. Cependant on s'y re-

trouve assez facilement, par un examen prolongé. Ces

irrégularités offrent même quelquefois un intérêt par-

ticulier. Ainsi, chez une de nos malades qui, dans ses

états de mal, a des attaques incomplètes constituées

seulement par une période de grands mouvements avec

arc do cercle, j'ai observé plusieurs fois, avant le début

de l'attaque, sans aucune trace de contraction tonique,

une contraction pupillaire très énergique, constituant

une sorte d'épileptoïde larvée ; de sorte que ses

attaques sont plus incomplètes en apparence qu'en

réalité.

Nous avons insisté sur ces signes fournis par la sen-

sibilité oculaire et par l'état de la pupille, qui nous

paraissent avoir une grande importance, pour établir

l'absence de simulation ; car, à ce point de vue, ils ont

une grande valeur, même à l'état d'isolement. En

outre, ces phénomènes oculo-pupillaires paraîtront

tout à fait caractéristiques dans l'hystéro-épilepsie,

19

290 CLINIQUE NERVEUSE.

quand j'aurai dit qu'ils sont nettement inlluencés par

compression ovarienne. Pendant la dilatation pupillaire

inséparable des mouvements, la compression ovarienne

ramène instantanément le petit cercle de l'iris à ses di-

mensions normales. Chez les malades qui, au début de

la période tonique, offrent une contraction pupillaire

de quelque durée, on peut, par une compression

brusque de l'ovaire, ramener brusquement la pupille

à la dilatation normale, en même temps que l'on arrête

l'attaque.

Il serait très important de pouvoir comparer l'état

de la pupille pendant l'attaque dans l'épilepsie et dans

l'hystéro-épilepsie. Cela est facile pour la période clo-

nique, dans laquelle l'épileptique offre une dilatation

pupillaire comme l'hystérique ; mais le début de l'at-

taque est beaucoup plus difficile à observer chez l'épi-

leptique, qui n'est point prévenu. Malgré des tentatives

nombreuses, nous n'avons jamais pu arriver dans les

attaques isolées à constater la contraction du début

que M. Gowers a quelquefois observée ; dans plusieurs

cas d'épilepsie partielle, il n'existait rien de semblable.

Mais ces faits diffèrent de l'épilepsie véritable à plu-

sieurs égards, et on n'en peut tirer de conclusions.

Dans l'état de mal épileptique, on semblerait se trouver

dans de meilleures conditions : mais les attaques

subintrantes rendent encore l'observation très difficile.

Cependant, dans un de ces cas, nous avons pu cons-

tater, dans quelques accès, une contraction de la pu-

pille au début de la période tonique ; mais il s'agit là

d'un fait isolé, auquel nous ne pouvons attacher une

grande importance; d'autant moins que dans une cir-

constance analogue, M. Charcot a observé un phéno-

DE L'HYSTÉRO-ÉPILEPSIE. 291

mène tout opposé, c'est-à-dire une forte dilatation

dès le début des accès.

V. MOUVEMENTS DE LA PUPILLE ET PROPRIÉTÉS DU

PRISME DANS LES HALLUCINATIONS PROVOQUÉES DES

HYSTÉRIQUES '.

Une des choses qui ont le plus retardé l'étude

scientifique de l'hystérie, c'est, avec la bizarrerie de cer-

tains phénomènes qui semblaient en opposition avec

les lois physiologiques, la crainte de la fourberie, qui

est pour ainsi dire un des symptômes de la maladie.

Pour se mettre à l'abri des erreurs qui peuvent être

attribuées à la prédisposition au mensonge que l'on

accorde à toutes ces malades, il était bon d'étudier,

dans les manifestations spontanées ou provoquées de

l'hystérie, les modifications que peuvent éprouver cer-

tains organes, qui, à l'état normal, ne sont pas sou-

mis à la volonté. La pupille peut fournir à cet égard

un utile champ de recherches, soit dans l'étude des

phénomènes spontanés de l'hystérie, soit dans les expé-

rimentations sur les phénomènes que l'on peut provo-

quer chez certaines hystériques. Les modifications

pupillaires, aux différentes phases de l'attaque d'hys-

téro-épilepsie, viennent d'être étudiées. Rappelons

qu'à la période des attitudes passionnelles, ou observe

dans la pupille des alternatives de dilatation et de

rétrécissement, qui ont semblé en rapport avec la dis-

tance à laquelle se trouve l'objet qui figure dans

l'hal lueination.

1 Ch. Féré. Société de biologie, décembre 1SS1.

292 CLINIQUE NERVEUSE.

Nous sommes parti de cette idée pour rechercher

si, dans les hallucinations provoquées, on peut amener

dans la pupille des modifications qui obéissent à une

loi physiologique. Chez deux hystériques avec les-

quelles on peut entrer en communication par la parole

pendant la catalepsie , voici ce que nous avons

observé : lorsque nous leur ordonnons de regarder un

oiseau au sommet d'un clocher ou s'élevant tout en

haut dans les airs, la pupille se dilate progressive-

ment jusqu'à doubler, ou peu s'en faut, son diamètre

.primitif; si nous faisons redescendre l'oiseau, la pu-

pille se rétrécit graduellement ; et on peut reproduire

le même phénomène autant de fois que l'on évoque

l'idée d'un objet quelconque qui se meut.

Ces modifications de la pupille que l'on provoque

ainsi chez une cataleptique, qui ne cesse pas d'ailleurs

d'offrir tous les phénomènes propres à la catalepsie,

montrent que, dans celte hallucination, l'objet fictif est

exactement vu comme s'il existait, et provoque par ses

mouvements des efforts d'accommodation suivant les

mômes lois que si c'était un objet réel. Il s'agit donc

bien d'une hallucination véritable, qui n'a rien à faire

avec la supercherie. On peut objecter, cependant, que

quelques individus peuvent contracter volontairement

leur pupille. -

Il faut convenir toutefois, avec Leeser dont nous

rappelons les études critiques, que ces mouvements de

la pupille, qui se produisent à vrai dire sous l'in-

fluence de la volonté, ne sont pas pour cela des mou-

vements volontaires; ce sont des mouvements associés

1 Leeser. Die pupillar bemegung. Wlesbatlen, 1881. 1.

de l'hystéro-épilepsie. 293

à des mouvements volontaires. Ces mouvements soi-

disant volontaires de la pupille, on les observe dans

les grands mouvements respiratoires, dans la dégluti-

tion, la mastication, mais surtout dans les grands

efforts musculaires (R. Vigoureux)' qui S'accoiii-

pagnent de dilatation pupillaire. Dans ces cas, la

volonté n'agit que d'une manière indirecte, par exci-

tation des centres volontairement excitables.

Seitz-Zehender 2 raconte le cas d'un étudiant en mé-

decine qui pouvait dilater sa pupille de 3 millimètres,

quand il inspirait profondément, puis arrêtait sa respi-

ration en même temps qu'il contractait les muscles du

cou. Lorsqu'il fixait un point rapproché, l'expérience

réussissait encore mieux. Ce cas est peut-être le môme

que celui que Kùgel3 rapported'unD'Szonta. Celui-ci,

ayant sa pupille large de 4 à 5 millimètres à un éclairage

moyen, pouvait la dilater jusqu'à 9 millimètres, c'est-

à-dire jusqu'au maximum ou à peu près, quand il fai-

sait une inspiration lente et contractait en môme temps

les muscles du cou et de la nuque ; l'inspiration lente

et profonde pouvait, à elle seule, déterminer une dila-

tation appréciable.

Cette dilatation de la pupille, comme celle qui se

produit dans tout effort musculaire, est tout à fait in-

dépendante de la volonté, mais seulement associée à

des mouvements volontaires. D'après tout ce que nous

savons sur les mouvements associés de la pupille,

ajoute Leeser, le phénomène s'explique en admettant

' Comptes-rendus de l'Académie des sciences, 1863, t. VIII, p. 581.

Uundbuch .luyetehetll ? p. 314.

3 Uber (lie IViliit-liche (lei, plipiliceigl-âsse. il, 1('ieuer med.

1l'oclemsck., 1J60, u 3 : .> ct 33.

2M se CLINIQUE NERVEUSE.

une irritation du centre oculo-pupillaire vaso-moteur,

en même temps que celle du centre respiratoire, vrai-

semblablement sous l'influence de l'acide carbonique

accumulé dans le sang. Kùgel admet d'ailleurs que

l'anémie -et l'anoxémie correspondante, déterminées

dans le cerveau par l'inspiration profonde et la con-

traction musculaire énergique, déterminent une para-

lysie du centre constricteur pupillaire. Leeser admet

que, dans les cas de ce genre, il y a excitation du

centre dilatateur, tandis que, dans les cas d'effort

respiratoire et musculaire, l'anoxémie s'y surajoute,

amenant une paralysie du centre constricteur permet-

tant la dilatation extrême de la pupille.

Le cas rapporté par Budge (beweqztngeii de ? * iris,

p. 163) semble propre à faire admettre des mouve-

ments volontaires de la pupille ; ainsi, le professeur

Béer (de Bonn), pouvait volontairement contracter et

dilater sa pupille, en faisant naître en lui certaines

idées ; quand il se représentait un lieu très éclairé, sa

pupille se contractait; elle se dilatait au contraire

quand il imaginait un endroit très obscur. Budge, qui

a rencontré plusieurs personnes dont la pupille se dila-

tait par l'évocation de l'idée d'un lieu obscur, remarque

ce qui suit : « On ne devra pas conclure de ces obser-

vations que les mouvements de l'iris sont volontaires;

le phénomène est comparable à la sécrétion de salive

qui se fait dans la bouche à l'idée de certains mets. »

Ce dernier fait prouve au moins que, dans certains

cas, la pupille peut se contracter sous l'influence de

l'imagination. Si quelques sujets peuvent contracter

ou dilater leur pupille eu s'imaginant des objets rap-

prochés ou éloignés, ils sont rares. Nous avons soumis

DE L'HYSTàPO-LPILEPSIE. 295

nos malades à l'expérience à l'état de veille, mais sans

succès.

Une autre expérience, d'ailleurs, servira à prouver

encore que, dans ces hallucinations provoquées, l'objet

est bien vu comme un objet réel et qu'il est vu des

deux yeux suivant les lois physiologiques ordinaires.

Sur les deux malades déjà étudiées et sur plusieurs

autres, nous avons observé ce qui suit. Pendant le

sommeil hypnotique ou pendant la catalepsie, on leur

inculque l'idée qu'il existe sur une table de couleur

sombre un portrait de profil ; à leur réveil, elles

voient distinctement le même portrait. Si alors, sans

prévenir, on place un prisme devant un des yeux,

immédiatement le sujet s'étonne de voir deux profils,

et toujours l'image fausse est placée conformément

aux lois de la physique. Deux de ces sujets peuvent

répondre conformément dans l'état cataleptique ; ils

n'ont aucune notion des propriétés du prisme ; d'ail-

leurs, on peut facilement leur dissimuler la position

précise dans laquelle on le place ; et il est aisé de les

rapprocher assez de la table pour que celle-ci ne soit

point elle-même doublée, ce qui pourrait servir d'in-

dice ; nous avons répété la même expérience avec

succès sur un mur à surface uniforme. Si on presse

latéralement sur un globe oculaire de façon à déranger

l'axe optique, on provoque la même diplopie, qui a

déjà, du reste, été notée par ce procédé dans les hallu-

cinations spontanées chez certains aliénés (Brewster) '.

M. Despine a a pu constater, par la pression latérale

1 C'té par Despine. '

' P. Despine. Etude scientifique sur le somnambulisme, etc., 1880,

p. 328. - 1liéoiie physiologique de l'hallucination, 1881, p. 8.

296 CLINIQUE NERVEUSE.

du globe oculaire, ce même dédoublement de l'objet

fictif dans les hallucinations spontanées d'un hystérique

mâle ; M. Bail ' a observé un autre fait semblable.

Un point intéressant à remarquer, c'est que, pour

une distance donnée, le prisme provoque ou ne pro-

voque pas un dédoublement de l'image, suivant qu'on

le place devant l'oei) le plus près de l'état normal, ou

devant l'oeil le plus amblyope. Du reste, à l'état de

veille, on observe le même phénomène dans la vision

des objets réels. Une de nos malades, complètement

achromatopsique d'un oeil, ne peut avoir d'halluciua-

tions colorées de cet eeil ; et, si on lui suggère l'idée

d'une figure géométrique colorée en rouge , par

exemple, cette image ne peut pas être dédoublée par

le prisme. Il n'y a aucune contradiction entre tous ces

faits.

Les expériences de MM. Schiff, Foa, Vulpian, ont

montré que, des excitations portées sur un nerf sen-

sitif peuvent produire la dilatation de la pupille, et

Mosso a pu considérer la pupille comme un véritable

aesthésiomètre.

Il existe donc certains moyens efficaces de faire

mouvoir la pupille indirectement sous l'influence de la

volonté; mais il est facile de s'assurer que rien de

semblable n'intervenait chez nos malades ; on peut

s'assurer qu'il s'agit, non de phénomènes simulés,

mais d'hallucinations en tout analogues à celles qui

se produisent spontanément. Les hallucinations provo-

quées des hystériques peuvent donc servir à l'étude

des hallucinations spontanées.

1 B. Bail. Théorie des hallucinations. lu Revue scientifique, 1880,

p. 1881.

DE l'hystéro-épilepsie. 297

Ces divers faits, mouvements de la pupille et dédou-

blement de l'image par le prisme, peuvent être cités

à l'appui de la théorie psycho-sensorielle des halluci-

nations.

VI. LA. DOULEUR DITE OVARIENNE DES HYSTÉRIQUES

A POUR SIÈGE L'OVAIRE

Nous ne reviendrons pas sur les anciennes discus-

sions au sujet du siège de la douleur hypogastrique

des hystériques, que les uns considéraient comme cu-

tanée, que d'autres localisaient dans les muscles, etc.

C'est surtout sur des idées théoriques qu'on s'est basé

tout d'abord pour rattacher cette douleur à l'ovaire,

qui, cependant, avait pu quelquefois être atteint par

la palpation abdominale (Charcot'). Toutefois, on

n'avait point assez nettement constaté la coïncidence

de la douleur ovarienne avec l'existence de la tumeur

formée soi-disant par l'ovaire, et, d'ailleurs, certains

accoucheurs, et en particulier M. Duncan2, avaient

pu contester que l'ovaire pût être atteint par la palpa-

tion abdominale, et qu'il occupât le siège habituel de

la douleur hypogastrique des hystériques. La question

devait donc rester pendante, d'autant plus que le tou-

cher vaginal et rectal qui, combinés à la palpation

abdominale, auraient pu donner des résultats plus

précis, ne pouvaient guère être mis en usage chez ces

1 Charcot. - Leçons sur les maladies du système nerveux, 4e édition

1880, p. 320 et suiv.

* Duncan. l3riti.sh. med. Assoc. in Cambridge, 1878. (Bi-ilish. med

Journ. August 28, 1878, p 329.

298 CLINIQUE NERVEUSE.

sujets, dont le caractère particulier rend ces manoeuvres

délicates ou même dangereuses.

Une circonstance s'est présentée, qui a favorisé la

solution de la question : nous avons pu suivre la gros-

sesse de deux hystériques. Rappelons tout d'abord que,

pendant la grossesse, les ovaires se déplacent avec ?

fond de l'utérus, et que, dans les derniers temps de

la gestation, ces organes deviennent accessibles et fa-

cilement reconnaissables par le palper abdominal. Il

est rare, toutefois, que les deux ovaires puissent être

sentis en même temps; mais, la pression sur les points

qu'ils occupent détermine une sensation spéciale. Ces

détails ont été mis en lumière par M. Budin', et dé-

veloppés par son élève M. Chaignot dans sa thèse$.

Premier cas. La nommée B..., dont l'histoire se trouve

en détail dans Y Iconographie photographique de la Salpêtrière1

est hystéro-epiteptique. Elle était sortie guérie du service de

M. Charcot, au mois de juin 1880. Elle n'avait plus alors ni

anesthésie, ni attaques convulsives, ni points hystérogenes, et

résistait à tous moyens d'hpynotisation. Quelques mois après

sa sortie, elle redevint hémianesthésiquo droite et hypnoti-

sable. Elle se trouva enceinte, et, pendant toute la durée de sa

grossesse, elle resta hémianesthésique et hypnotisabte, mais

les attaques ne se reproduisirent pas, et on ne pouvait pas les

provoquer par la pression sur les anciens points hystérogenes.

Pendant les quatre premiers mois de la gestation, elle fut

sujette à des vomissements, qui se répétaient quelquefois

jusqu'à dix fois dans les vingt-quatre heures et qui amenèrent

un amaigrissement notable. Elle n'éprouva rien de particulier

pendant le reste du temps : les symptômes permanents de

l'hystérie persistaient seuls.

1 Bull. Soc. biol., 1879.

8 Etude sur l'exploration de la sensibilité de l'ovaire et en particulier

de la douleur ovarique chez la femme enceinte. Th. de Paris, 1 S79.

3 Bourneville et Regnard. Iconographie photographique de la Salpé-

trière, t 11, p. 187 et t. III, p. 300.

DE L'HYSTEI20·EPILEPSIE. 299 9

A la fin du huitième mois, elle rentra à la Salpêtrière. Le

jour même de son entrée, on se livra à l'exploration des ovaires,

la malade déclarant elle-même que ses points douloureux étaient

remontés. Ces manoeuvres déterminèrent le lendemain des

coliques utérines, qui firent craindre un avortement, mais

cédèrent à des lavements laudanisés : 1\ous fûmes alors frappés

de ce fait que la malade, qui était facilement hypnotisable le

jour de son entrée, ne le fut plus par aucun procédé pendant

toute la journée que durèrent ses coliques ; elle le redevint

dès que ces douleurs eurent cessé. C'est là un fait intéressant

à noter, parce que nous le verrons se reproduire au moment

du travail.

30 octobre. Le fond de l'utérus remonte jusqu'à quatre

travers de doigt au-dessus de l'ombilic. L'ombilic lui-même,

porté en haut et en avant, est distant de 205 millimètres de

chaque épine iliaque antéro-supérieure et de 18 centimètres

du pubis.

Si on mène, de chaque côté, une ligne, fictive de l'ombilic

à l'épine iliaque antéro-supérieure, on constate que le point

douloureux, qui a à peu près 2 centimètres de diamètre de

chaque côté, se trouve du côté gauche, à 55 millimètres au-

dessus de la ligne indiquée et à 85 millimètres en dedans de

l'épine iliaque ; du côté droit, le point douloureux est à 35 mil-

limètres au-dessus de cette ligne, et à 70 millimètres en dedans

de l'épine iliaque. ·

On hypnotise la malade à plusieurs reprises, et on peut se

convaincre que ce n'est qu'au niveau des petites régions dou-

loureuses, que nous venons de localiser, que la pression peut

provoquer le réveil. Le doigt, introduit dans le vagin, peut

comprimer autant que possible de chaque côté du col sans pro-

duire rien qui ressemble aux phénomènes qui accompagnent

la pression sur le point douloureux abdominal.

En cherchant à constater directement la présence des

ovaires par la palpation abdominale, M. Budin ne peut y par-

venir. On n'arrive point à les sentir sous les doigts ; les parois

utérines sont molles, dépressibles, il n'y a pas de plans

résistant sur lequel on puisse les comprimer et les isoler.

M. Budin reconnaît, toutefois, que les points douloureux

correspondent au siège des ovaires à cette période de la gros-

sesse.

Le travail a commencé dans la nuit du t9 au 20 novembre,

300 CLINIQUE NERVEUSE.

vers neuf heures et demie du soir. Quand nous sommes arrivé,

à deux heures du matin, avec M. Budin, l'orifice utérin était

dilaté et mesurait 2 centimètres environ de diamètre. L'enfant

se présentait par le sommet, en position occipito-iliaque gauche

antérieure; le travail marchait normalement. Le point doulou-

reux ovarien gauche se trouvait sur une ligne allant de l'épine

iliaque antérieure et supérieure à l'ombilic, à 9 centimètres de

l'épine et à 12 centimètres de l'ombilic. Le point droit était à

un centimètre au-dessous de la même ligne, et seulement a

8 centimètres de l'épine iliaque. On voit donc que. depuis

le 30 octobre, les points ovariens se sont notablement abaissés,

en suivant le fond de l'utérus.

Pondant toute la durée du travail, l'hypnotisalion a été

absolument impossible, soit par la fixité du regard, soit par la

pression oculaire ; le bruit du tam-tam, la lumière du magné-

sium n'ont eu aucun effet. Cependant, à l'aide des inhalations

d'éther, de chloroforme ensuite, on détermine l'analgésie, mais

les mêmes moyens d'hypnotisation ne réussissent pas alors

davantage, malgré la bonne volonté du sujet. La malade, qui

a conservé son intelligence et qui auparavant gémissait presque

continuellement, déclare qu'elle ne souffre plus. Il semble

donc que si, en ayant recours aux différents procédés qui réus-

sissent habituellement, on ne peut pas obtenir le sommeil

hypnotique, ce n'est pas seulement à cause de la douleur.

Nous n'avons donc pas pu, pendant le travail, contrôler par le

réveil le siège des points ovariens ; mais la pression sur ces

points provoque toujours une sensation de boule qui remonte

à l'épigastre et à la base du cou, en déterminant des mouve-

ments de déglutition.

On pousse plus loin l'administration du chloroforme, on

arrive à l'anesthésie complète, la malade ronfle, puis on cesse

le chloroforme. A aucun moment, entre l'anesthésie totale et

le retour à l'état normal, on ne peut, par aucun moyen, déter-

miner le sommeil hypnotique.

Toutefois, une constatation plus importante a pu être faite

au moment des contractions utérines. M. Budin a pu nous

faire toucher, à plusieurs reprises, du côté gauche, une petite

tumeur ovoïde, grosse comme la phalangette du pouce, mobile

, et glissant sur la surface de l'utérus qui formait alors sous les

doigts un plan résistant. La pression sur cette petite tumeur

provoquait les phénomènes ordinaires de la pression sur le

DE L HYSTUITO -ÉPILEPSIE. 301

point douloureux dit ovarien (sensation de boule qui remonte,

mouvements de déglutition, etc.). Cette tumeur, dont le siège

est celui de l'ovaire au moment de l'accouchement, a pu seule-

ment être sentie à gauche.

A sept heures et demie, la dilatation était complète ; on

rompit les membranes. La malade, souffrant davantage, récla-

ma avec insistance le chloroforme. On la plongea de nouveau

dans l'analgésie, et elle accoucha d'une fille bien constituée à

huit heures quarante-cinq, sans en avoir conscience. Aussitôt

après l'accouchement, on chercha, mais en vain, à sentir

l'ovaire ; au moment de la contraction utérine, on sentait le

ligament rond qui formait sous le doigt une corde dure ; mais

le corps globuleux formé par l'ovaire n'était pas perceptible.

A neuf heures, le placenta était expulsé. L'hypnotisation était

encore impossible à ce moment.

A neuf heures vingt-cinq, la malade est hypnotisée par la

fixité du regard, mais péniblement. La lampe au magnésium

n'avait produit aucun effet cinq minutes auparavant.

L'ovaire gauche n'est plus senti ; mais, à neuf heures et de-

mie, il est possible de déterminer la position des deux ovaires

par la sensibilité spéciale que l'on constate sur une petite

région de 2 centimètres de diamètre environ de chaque côté.

Le fond de l'utérus, fortement incliné vers la droite, dépasse

le pubis de 19 centimètres. Le corps a une largeur de 11 cen-

timètres. L'ombilic s'est abaissé, n'est plus qu'à 1 4 centimètres

du pubis et à 13 centimètres des épines iliaques antérieures et

supérieures. Le point ovarien gauche est à 2 centimètres au-

dessous de la ligne qui va de l'ombilic à l'épine iliaque et à

5 centimètres en dedans de cette épine. Le point droit est

à 1 centimètre au-dessous de la même ligne et à centimètres

en dedans de l'épine iliaque. On voit donc que, bien que la

ligne ilio-ombilicale prise pour point de repère se soit notable-

ment inclinée vers l'horizontale, les points ovariens ont encore

subi, par rapport à cette ligne, un mouvement'de descente

très appréciable. '

Ce mouvement de descente s'est encore accentué les jours

suivants. Le 25 novembre, l'ovaire gauche se trouvait à 30 mil-

limètres en dedans de l'épine iliaque et à 35 millimètres au-

dessous de la liânc bi-ilialuc ; l'ovaire droit était à 5 centi-

mètres en dedans de l'épine et à 2 centimètres en dessous de

la ligne bi-iliaque.

302 CLINIQUE NERVEUSE.

Le 20 décembre, les points douloureux sont devenus plus

profonds et par conséquent moins faciles à bien limiter ; ils

paraissent à peu près symétiiquement placés à G centimètres

au-dessous de la ligne passant par les deux épines iliaques

supérieures et 5 centimètres en dedans de ces épines. Si, après

avoir cataleptisé la malade, on pratique le toucher vaginal, et si

l'on presse fortement à gauche du museau de tanche, on pro-

voque le réveil, tout comme si on pressait sur l'abdomen dans

la région ovarienne. On ne peut pas produire le même phéno-

mène du côté droit. (Notons que, pendant tout le travail, nous

avons pu constater la persistance de l'anesthésie toutes les fois

que nous l'avons cherchée quand la malade n'était pas sous

l'influence du chloroforme.

Deuxième cas. La nommée Y..., dont l'observation est

rapportée en détail dans l'Icoîzogi,ariltz»e photographique de la

Salpêtrière1, n'avait plus d'attaques quand elle est sortie de

l'hospice il y a un an ; mais elle avait conservé son anesthésie

totale. Elle s'est mariée depuis et rentra à la Salpêtrière à la

fin de novembre ; elle était alors au neuvième mois de sa gros-

sesse. '

Les attaques ne se sont pas renouvelées depuis qu'elle est

enceinte, mais l'état de la sensibilité ne s'est pas modifié.

Elle déclare spontanément que ses points ovariens ont

remonté, et quand on lui demande de montrer avec le doigt le

siège de la douleur, elle désigne deux points symétriques, situés

sur un plan horizontal passant par l'ombilic et situés environ

à 15 centimètres en dehors (l'ombilic se trouve alors à 20 cen-

timètres au-dessus du pubis). La pression sur ces points pro-

voque une douleur vive et la sensation de quelque chose qui

remonte vers la gorge. La malade, interrogée à différentes

reprises pendant le dernier mois de la gestation, a toujours

fait des réponses identiques, et la position des deux points

douloureux n'a pas varié. Toutefois, comme elle n'est pas

hypnotisable, nous n'avons pas pu faire les expériences de con-

trôle qui donnent tant de netteté au fait qui précède.

26 décembre. Les premières douleurs se sont manifestées

à trois heures du matin, mais éloignées et peu intenses jusqu'à

1 Buutneville et liegnard. Iconographie photogi aphique de la Salpci-

trière, t. 11, p. 93.

de L'flYS1'131tU-131'lL ! ·;L S1L. 303

dix heures. A partir de ce moment, elles sont venues plus

fortes et presque continues. A onze heures et demie, lorsque

nous pratiquons le toucher, la tête est déjà très engagée dans

l'excavation, le col est effacé ; mais son orifice laisse à peine

pénétrer la phalangette de l'index.

A deux heures, les douleurs augmentent d'intensité, mais

se sont espacées. De trois à quatre heures, bain tiède. A

quatre heures, l'orifice utérin offre un diamètre de 3 centi-

mètres environ : position occipito-iliaque gauche antérieure.

Depuis que les douleurs sont devenues un peu fortes, c'est-à-

dire depuis dix heures, la malade éprouve de temps en temps

des crampes très douloureuses dans le membre inférieur droit

et exclusivement dans sa partie externe. Rien de changé dans

l'état de la sensibilité.

Depuis le bain, les douleurs se rapprochent ; à sept heures

et demie, elles reviennent toutes les cinq minutes, la malade

se met au lit.

A sept heures cinquante-cinq, au moment d'une douleur, la

malade est prise d'une attaque de contracture avec perte de

connaissance et ronflement, les bras sont en croix, les

jambes dans l'extension, la malade geint et la résolution se

produit, en commençant par le côté gauche, à huit heures

deux minutes. Deux minutes après, deuxième attaque de con-

tracture, le bras droit étendu, et le gauche en flexion sur la

poitrine, les jambes étendues ; la malade ronfle, mousse et

geint ; la contracture a duré trois minutes, et a cessé encore

par le côté gauche d'abord. Une minute après, nouvelle attaque

analogue à la seconde. Depuis le commencement de la pre-

mière attaque jusqu'à la fin de la troisième, la malade n'a pas

repris connaissance. Alors, la malade se plaint, geint, ne peut

se tenir en place, sans pouvoir déterminer cependant où elle

souffre.

A huit heures et quart, elle se plaint de nouveau de crampes

très vives dans la jambe droite; puis elle s'assoupit..

A partir de huit heures et demie, chaque fois qu'elle a une

douleur un peu forte, elle éprouve en môme temps une sensa-

tion de compression au-dessus du sein gaucho ; elle sent quel-

que chose qui lui remonte à la gorge en déterminant une vive

anxiété et une dyspnée considérable.

A neuf heures et demie, une douleur, qui s'est accompagnée

des sensations dont nous venons de parler, est suivie d'une

30t clinique nerveuse.

attaque de contracture analogue aux précédentes et qui dure

trois minutes.

A neuf heures quarante-cinq, nous faisons respirer à la ma-

lade quelques gouttes de chloroforme et, à partir de ce mo-

ment, les douleurs ne se' sont plus accompagnées d'aucun

phénomène particulier. La malade réclame, du reste, le chlo-

roforme avec insistance à chaque fois qu'on suspend quelque

temps les inhalations, qui ont toujours été faites à faible

dose. -

Les deux points douloureux, dits ovariens, sont situés envi-

'ron 2 centimètres au-dessous d'une ligne passant par l'om-

bilic et symétriquement à 15 centimètres en dehors de ce

point. Pendant une forte contraction, j'ai pu sentir, du côté

gauche, un petit corps ovoïde du volume d'un marron environ,

s'échappant dès que je pressais un peu. Je n'ai pas pu obtenir

une sensation analogue du côté droit.

L'anesthésie n'a pas été modifiée un instant.

A partir de dix heures, nous avons augmenté un peu le

chloroforme, la malade ne sentait plus ses douleurs ; mais,

vers onze heures un, quart, il survint une nouvelle attaque de

contracture, le chloroforme fut suspendu. Nous pûmes cons-

tater quelques minutes après que l'insensibilité n'était pas

modifiée. Les douleurs étant devenues très fortes, nous avons

donné le chloroforme jusqu'à résolution, et la malade accoucha

sans en avoir conscience, à onze heures trente-cinq minutes,

d'une fille bien constituée. A minuit dix, le placenta était

expulsé.

Après la délivrance, la malade s'est plainte pendant plu-

sieurs heures de douleurs vives dans tout le ventre. Ce n'est

qu'à cinq heures du matin que nous avons exploré la position

des points douloureux, qui étaient redescendus : le gauche, au

niveau de la ligne bi-iliaque, et 4 centimètres en dedans de

l'épine ; le droit, à 1 centimètre au-dessous de la même ligne

et à 5 centimètres en dedans de l'épine iliaque.

Les deux points douloureux ont continué leur descente, et,

six semaines après l'accouchement, nous avons pu vérifier

qu'ils avaient repris leur position primitive dans le petit bas-

sin, au voisinage du point où on sent battre l'artère iliaque.

Eu somme, nous avons pu constater deux fois, pen-

dant la grossesse, un déplacement des points doulou-

DE L'HYSTÉRO-ÉPILEPSIE. 305

reux, qui subissaient un mouvement d'ascension pro-

portionnel au développement de l'utérus gravide.

Dans ces mêmes cas, nous avons pu, après l'accou-

chement, constater la descente des mêmes points doulou-

reux, encore proportionnelle à l'évolution utérine. Dans

ces différents moments, les points douloureux conser-

vaient une situation qui est précisément celle qu'oc-

cupe l'ovaire, puis au terme de la grossesse, après

l'accouchement et à l'état de vacuité. Aussi nous nous

croyons fondé à considérer comme établi que le siège

de la douleur iliaque des hystériques est bien l'ovaire,

comme le soutient depuis longtemps M. Charcot.

Ces deux faits sont en outre intéressants, en ce

qu'ils montrent que les perturbations les plus violentes

peuvent ne pas modifier les phénomènes permanents

de l'hystérie et particulièrement l'anesthésie.

VII. Compression DE l'ovaire.

Depuis que M. Charcot a remis en honneur la com-

pression ovarienne pour arrêter l'attaque d'hystérie,

on a tenté, à différentes reprises, de remplacer la com-

pression manuelle, qui ne peut être longtemps main-

tenue, par la compression mécanique dont la durée ne

peut être limitée que par la tolérance des malades.

Le premier appareil a été imaginé par M. Poirier '.

Cet appareil, qui présente une grande analogie avec

les compresseurs de l'aorte, remplissait le but qu'on se

proposait d'atteindre, en ce sens qu'il permettait d'ar-

1 Progrès médical, 1878, p. 993.

20

306 CLINIQUE NERVEUSE.

rèter l'attaque aussi longtemps que la malade pouvait

le supporter; mais il n'était applicable que dans le

décubitus dorsal, et, au bout de peu de temps, la

patiente, fatiguée du séjour au lit, préférait enlever le

compresseur et laisser partir son attaque.

L'appareil de M. Ballet, constitué par une ceinture

formée intérieurement d'armatures en fer, mobiles,

supportant des'tampons également mobiles, présente

l'avantage d'être portatif, mais il est compliqué et un

peu coûteux.

Le compresseur que nous avons fait construire par

M. Aubry est beaucoup plus simple. Ce n'est pas un

appareil nouveau ; il consiste en un bandage à ressort

très analogue au bandage français pour la contention

des hernies; mais le ressort est plus résistant, élargi et

fortement rembourré à la partie postérieure où il repose

sur la colonne vertébrale qui sert de point d'appui. En

avant, il est tordu de haut en bas et d'avant en arrière,

de sorte que la pelote qui s'applique du côté qui sup-

porte le ressort est dirigée obliquement en bas et en

arrière, vers la partie externe de l'excavation où l'on

sent battre l'artère iliaque. Du reste, on jugera mieux

Ftg. 24. Compresseur ovarique simple, pour le côté droit. - A, Pelote

de caoutchouc répondant à la région ovarienne. B, Point d'appui

dorsal, bien garni. - C, Courroie d'attache, se fixant au bouton de la

pelotte.

DE L'HYSTÉRO-àPlLEPSIE. 307

de la forme générale de l'appareil par la figure 24,

que par une longue description.

La pelote A a la forme d'un cône émoussé, de quatre

centimètres et demi de hauteur environ, et elle est

constituée par une sorte de godet en caoutchouc, de

un centimètre d'épaisseur; de sorte que, bien qu'elle

soit assez résistante pour donner une pression suffi-

sante, elle conserve une certaine mollesse qui permet

de la supporter longtemps sans douleur. Comme on le

voit dans la lîg. ,5, le ressort peut s'appliquer comme

celui d'un bandage herniaire; il peut se placer facile-

ment au-dessous de la crête iliaque, de sorte que les

malades ont la possibilité de porter un corset, de se

vêtir et d'agir sans plus ,de gêne que si elles avaient

une hernie contenue.

Bien que la compression obtenue par cet appareil

ne soit pas très forte, elle est toujours suffisante. On

sait d'ailleurs que, s'il faut un effort de pression assez

Fig. 25. Compresseur ovarique gauche, en place. (D'après une

photographie de M. Loreau.)

308 clinique nerveuse.

considérable pour se rendre maître d'une attaque com-

mencée, les malades peuvent ordinairement, lors-

qu'elles la sentent venir, éviter elles-mêmes sa produc-

tion par l'application d'un ou deux doigts sur la région

ovarienne. Il-n'était donc pas nécessaire de rechercher

un appareil très énergique; on pourrait, d'ailleurs,

faire varier la force du ressort, suivant les sujets.

Pour quelques cas spéciaux, nous avons fait cons-

truire un appareil un peu plus compliqué permettant

de déplacer la pelote dans tous les sens et de modifier

à volonté la pression ( Ifig 26).

Pour les rares malades qui ont besoin d'être com-

primées des deux côtés, M. Aubry nous a construit un

bandage double qui s'applique aussi très facilement

('g. 27), et qui est susceptible des mêmes perfection-

nements que le bandage simple.

Ces compresseurs, qui sont très simples et d'un prix

modique, ont l'avantage non seulement d'être porta-

tifs, mais encore de comprimer sans serrer le ventre

qui est généralement ballonné quand les malades sont

Fig. 26. Compresseur simple modifié. A, Pelote mobile. B, Tou-

rillon permettant d'incliner plus ou moins la pelote. - C, Coulisse

permettant d'allonger ou de raccourcir le bandage et de faire avancer

la pelote vers la ligne médiane ou de la rapprocher de l'épine iliaque.

- D, Brisure du bandage, munie d'une vis de pression permettant de

fermer plus ou moins le ressort, et d'augmenter ou de diminuer à

volonté la pression.

de L'HISTI : .RO-FI'ILRPS1E. 309

sous le coup d'une attaque. Nous avons pu constater,

depuis six mois que nous les expérimentons dans le

service de M. Charcot, à la Salpêtrière, qu'ils sont sup-

portés sans aucune gêne, et nous avons vu des malades

suspendre leurs attaques pendant des périodes inouïes

auparavant; l'une d'elles, par exemple, a pu garder le

compresseur pendant trois semaines.

Nous ne voulons pas dire que la compression puisse

arriver à supprimer les attaques. Cependant, nous

devons enregistrer un fait important : une de nos ma-

lades, après avoir, sous les menaces permanentes de

l'attaque, gardé le compresseur pendant plus de vingt

jours, put l'enlever sans avoir d'attaque; mais, au lieu

de rester deux semaines ou plus sans éprouver de

nouvelles menaces, comme cela lui arrivait lorsqu'elle

avait été déchargée par une attaque, il lui fallut re-

prendre le bandage au bout de cinq jours. Ce fait

montre que l'action de la compression est surtout sus-

pensive ; toutefois, la possibilité de la suspension des

attaques chez les hystériques qui vivent de la vie com-

mune est assez importante pour qu'on doive chercher

à rendre aussi pratiques que possible les moyens qui

la produisent.

Fig. 2% Compresseur double. A, A7, Pelotes en caoutchouc répondant

aux deux régions ovariennes.

PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE

CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE L'HYPNOTISME CHEZ LES

HYSTÉRIQUES; DU PHÉNOMÈNE DE L'HYPEREXC1TABILIT

NEURO-MUSCULAIRE {Suite) < ;

Par MM. CHARCOT et PAUL RICHER.

État catalepti forme.

Il est des cas dans lesquels l'hyperexcitabilité neuro-

musculaire donne naissance à une sorte de catalepsie

qu'il importe de ne pas confondre avec la catalepsie

véritable et que pour cette raison nous avons proposé

de désigner sous le nom d'état catalepti forme. Pour

l'intelligence de ce qui va suivre, il est nécessaire de

rappeler ici les caractères de la véritable catalepsie,

tellequ'elle se présente chez nos malades pendant une

des phases du sommeil nerveux désigné sous le nom

d'hypnotisme.

L'état cataleptique survient d'emblée à la suite de

l'impression brusque d'une vive lumière sur la rétine

(lumière électrique, lampe Bourbouze, etc.), sous l'in-

fluence des vibrations d'un grand diapason, ou bien

encore à la suite d'un bruit violent inattendu (coup de

gong)-

' Voir le n° 5, p. 32 ; n° 6, p. 173 ; n° 8, p. 129.

ÉTUDE DE L'HYPNOTISME CHEZ LES HYSTERIQUES. 311 1

Il succède également à la léthargie hypnotique ob-

tenue le plus souvent directement par la fixité du re-

gard. Il suffit, dans ce cas, de soulever les paupières

d'une malade léthargique pour la rendre immédiate-

ment cataleptique. Les caractères de cet état catalep-

tique sont les suivants : '

1° Les yeux sont ouverts, et le regard possède une

fixité sur laquelle nous insistons comme un des signes

les plus importants. La physionomie est impassible et

expressive à la fois, la malade paraît absorbée. Ce vi-

sage est très vraisemblablement celui de l'extase cata-

leptique des auteurs ;

2° Le clignement a disparu. La conjonctive estrouge,

les larmes coulent quelquefois sur la joue. L'anesthésie

a envahi, le plus souvent, la conjonctive et jusqu'à la

cornée. L'état de la pupille varie;

3° Les membres gardent les positions qu'on leur

communique. Ils paraissent d'une grande légèreté,

lorsqu'on les soulève ou qu'on modifie leurs attitudes.

La 17exibilitas cerea ou la roideur des mannequins de

peintre n'existe pas. On modifie l'attitude des membres

avec la plus grande facilité et sans le moindre effort.

Les attitudes ainsi communiquées sont gardées par les

sujets pendant fort longtemps et le massage ou la fric-

tion des masses musculaires ne les modifient pas. En-

fin cet état cataleptique est uniformément développé

sur tous les membres et le tronc;

4° L'hyperexcitabilité neuro-musculaire n'existe pas.

Les réflexes tendineux sont complètement abolis;

5° L'anesthésie cutanée est complète. Persistance

partielle des sens ;

6° Suggestion. Influence du geste sur la physionomie.

312 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

Phénomènes psychiques sur lesquels nous n'avons pas à

insister ici : automatisme, hallucinations provoquées,.

L'état cataleptique dont nous venons d'indiquer les

principaux traits constitue un des modes du sommeil

nerveux, bien distinct de cet autre mode que nous

avons décrit sous le nom de léthargie hystérique provo-

qitée dont l'hyperexcitabilité neuro-musculaire cons-

titue un des principaux caractères.

L'on sait comment ces deux modes du sommeil ner-

veux peuvent se succéder chez un même sujet, ou

même s'y montrer simultanément en n'affectant cha-

cun qu'une moitié du corps (hémi-iéthargie, hémi-ca-

talepsie). Mais il n'en est pas toujours ainsi ; à côté des

cas que l'on pourrait appeler les cas types et réguliers

dans lesquels tous les symptômes offrent le caractère

de précision sur lequel nous venons d'insister, il en est

d'autres moins parfaits dans lesquels le sommeil hyp-

notique n'est plus susceptible 'd'être divisé en deux

périodes distinctes : état léthargique avec hyperexcita-

bilité neuro-musculaire, et état cataleptique. C'est

une sorte d'état mixte qui paraît tenir des deux à la

fois, et qui compte au nombre de ses manifestations

les symptômes cataleptiformes dont il est question.

Dans l'exemple suivant l'hypnotisme est caractérisé

par un délire spontané ou provoqué. Il s'y joint l'état

musculaire spécial sur lequel nous insistons ici.

1 En résumé cet état cataleptique, à cause de la fixité du regard, de

la légèreté et de la souplesse des mouvements, de l'harmonie qui existe

entre Ips gestes et l'expression de la plysomomie, pourrait être désigné

sous le nom de catalepsie plastique. Elle permet d'imprimer aux sujets

les attitudes les plus variées, susceptibles même de satisfaire aux lois de

l'esthétique et si les sculpteurs de l'antiquité ont fait poser, comme mo-

clèles, des femmes cataleptiques, ainsi que le prétendent quelques auteurs,

bien certainement il s'agissait de la catalepsie que nous venons de décrire.

ÉTUDE DE L'HYPNOTISME CHEZ LES HYSTÉRIQUES. 313

H..., hystéro-épileptique, anesthétique totale et achroma-

topsique excepté pour le violet; a des grandes attaques con-

vulsives dans lesquelles le spasme laryngé se montre à un degré

peu ordinaire. Les réflexes tendineux sont manifestement

exagérés aux genoux, ils offrent même une légère tendance à

la généralisation. Par contre, aux coudes et aux poignets, ils

sont très peu marqués.

9 féa·air 9881. Tentative d'hypnotisme par le procédé de la

fixité du regard, en convergence supérieure. Au bout de cinq

minutes environ, les yeux se ferment tout à coup, la tête se

renverse, le cou se gonfle et la respiration devient laborieuse.

Il se produit un spasme laryngien analogue à celui qui se mon-

tre pendant ses grandes attaques convulsives, avec cette

différence toutefois, qu'il est ici bien moins violent. Bientôt le

spasme cesse, et sans ouvrir les yeux, ni reprendre connais-

sance, la malade se met à divaguer, en proie à un délire qui ne

tarde pas à être interrompu par une nouvelle crise de spasme

laryngien. L'état de sommation ainsi produit se compose de

deux phases distinctes qui se succèdent alternativement à la

façon de ce qui a lieu dans ses grandes attaques convulsives.

La phase délirante présente ceci de particulier : le délire sur-

vient bien spontanément comme il arrive dans la grande at-

taque, il est parfois incohérent, d'autres fois il roule sur des

sujets variés se rapportant aux incidents qui ont marqué la vie

de la malade ; mais de plus il peut être provoqué par l'observa-

teur et conduit dans une direction déterminée. Les sens de la

malade ne sont pas complètement fermés au monde extérieur.

Elle entend les questions qu'on lui adresse, y répond d'une

façon plus ou moins juste, et il est facile de provoquer chez

elle des hallucinations variées.

Pendant tout ce temps l'état musculaire est intéressant à

noter et c'est sur lui que nous appelons particulièrement l'at-

tention. Il persiste avec les mêmes caractères pendant la phase

de spasme ou celle de délire, et que la malade ait les yeux

ouverts ou fermés. En premier lieu nous constatons une

exagération très marquée des réflexes tendineux aux coudes et

aux poignets. Aux genoux, le choc sur le tendon rotulien, en

outre de la secousse de la jambe, provoque un soubresaut dans

les deux bras. Mais les manifestations de l'hyperexcitabilité

neuro-musculaire ne se bornent pas là.

La percussion répétée ou la friction des tendons du poignet

314 4 PIIYSIOI,OGIE PATHOLOGIQUE.

amènent la contracture de la main soit en flexion, soit en

extension, suivant les tendons excités.

La malaxation des masses musculaires de l'avant-bras pro-

duit également la contracture ; la même chose se produit aux

cuisses.

Le sterno-mastoïdien se contracture aussi sous l'influence

de l'excitation mécanique, mais les muscles de laface demeurent

inexcitables. L'excitation du nerf cubital en arrière de l'épi-

trochée provoque la contracture du poignet et de la main dans

la flexion; la griffe cubitale est imparfaite. Ces contractures

diverses cèdent par la friction des muscles antagonistes.

Jusqu'ici nous voyons que l'hyperexcitabilité neuro-mus-

culaire présente, à peu de chose près, la plupart des caractères

que nous avons décrits précédemment; mais nous constatons

en outre une aptitude spéciale des membres à conserver les

attitudes communiquées. Il semble que l'état cataleptique et

l'état d'hyperexcitabilité neuro-musculaire soient ici confondus

et existent en même temps. Avec un peu d'attention cependant

il est facile de se convaincre qu'il ne s'agit pas ici de l'état

cataleptique véritable ; mais d'une sorte d'état' cataleptique

déjà décrit par l'un de nous, et qui ne saurait être considéré

que comme une nouvelle manifestation de l'hyperexcitabilité

neuro-musculaire.

En effet les membres sont toujours lourds à soulever; ils ne

conservent qu'imparfaitement les attitudes communiquées, et

la friction amène toujours la détente du membre, et la résolu-

tion musculaire complète. En soulevant les paupières de la

malade et en maintenant ses yeux ouverts, l'état cataleptique

véritable ne saurait être obtenu. Les réflexes tendineux persis-

tent, et si les membres gardent les attitudes communiquées,

c'est avec les mêmes caractères que précédemment. De plus la

contracture par excitation mécanique directe est toujours

possible.

Que les yeux soient ouverts ou fermés, la motilité, chez

cette malade, présente les mêmes modifications. Nous avons

remarqué que les yeux maintenus ouverts présentaient tou-

jours un certain degré de convergence.

Nous avons pu observer cet éta4beataleptiforme chez

plusieurs de nos malades, les caractères qu'il présente

ÉTUDE DE L'HYPNOTISME CHEZ LES HYSTÉRIQUES. 315

se sont montrés identiques et il est inutile d'en multiplier

les exemples. Il ressort des faits que nous avons pu

étudier que cet état, qui paraît tenir à la fois et de la

léthargie et de la catalepsie, caractérise pour ainsi dire

un degré inférieur de l'hypnotisme. Il se montre chez

les sujets peu aptes à ce genre de recherches, ou bien

s'il se rencontre chez les sujets bien prédisposés, ce

n'est que dans les premières expériences, avant que

l'état hypnotique, par la répétition des séances, se soit

pour ainsi dire perfectionné. En effet, les malades

chez lesquelles on l'observe ne présentent générale-

ment ni l'hyperexcitabilité neuro-musculaire dans son

état complet de développement, tel que nous l'avons

décrit, ni l'état cataleptique parfait, dont nous avons

rappelé les caractères. L'occlusion ou l'ouverture des

paupières ne le modifient pas sensiblement. Nous

avons pu noter que le plus souvent, dans ce cas, les

yeux ne se laissent pas ouvrir facilement ; un spasme

maintient les paupières fermées, la pupille fuit la lu-

mière en se cachant soit sous la paupière supérieure,

soit sous la paupière inférieure; lorsque néanmoins

on arrive à la découvrir on constate un degré des tra-

bisme plus ou moins accusé , ou bien si le regard

paraît direct, il est sans fixité et les paupières ont

une tendance invincible à se fermer. Cependant nous

avons pu remarquer quelquefois que lorsque les yeux

étaient ouverts, quelqu'imparfaitement que ce soit,

l'aptitude des membres à conserver les attitudes com-

muniquées augmentait, sans que la tendance à la con-

tracture provoquée fut pour cela diminuée.

En résumé, les caractères de l'état cataleptiforme

sont les suivants :

316 H PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

1° Les yeux sont le plus souvent fermés, s'ils sont

ouverts la convulsion des globes oculaires empêche

toute fixité du regard.

2° L'aptitude des membres à garder une situation

communiquée présente les particularités suivantes :

a.) Souvent cette aptitude est inégalement déve-

loppée sur les différents segments du corps.

b.) Le membre est lourd à soulever et il existe dans

les articulations une certaine roideur(/ ? ejr ? ace ? 'e<7).

c). Pour que le membre garde la position dans la-

quelle on le place, il faut insister quelque peu, et le

maintenir au moins quelques secondes avant de l'a-

bandonner.

d). Dans le plus grand nombre de cas, le membre

retombe bientôt de lui-même.

e). Enfin la friction et le massage cles rnasses muscu-

laires amènent toujours la résolution du membre qui

retombe inerte.

3° L'hyperexcitabilité neuro-musculaire existe à un

degré quelconque. Les réflexes tendineux sont exaltés.

4° Que les yeux soient ouverts ou fermés, l'état mus-

culaire reste le même, présentant toujours ce double

caractère d'hyperexcitabiiité et d'état cataleptiforme.

Il nous paraît facile de saisir de quelle manière l'état

cataleptiforme se rattache au phénomène de l'hyper-

excitabilité neuro-musculaire.

Le membre qui paraît cataleptique n'est, en somme,

qu'un membre contracture. La contracture s'y déve-

loppe sous l'influence des manoeuvres de l'expérimen-

tateur qui cherche à déplacer le membre. Nous avons

vu, en effet, qu'il est nécessaire d'insister un peu pour

faire garder au membre l'altitude communiquée. De

ÉTUDE DE L'HYPNOTISME CHEZ LES HYSTÉRIQUES. 317

plus, lorsqu'on cherche à modifier l'altitude du membre,

on constate une roideur, indice certain de contracture.

Enfin cette contracture cède sous l'influence de la ma-

laxation du membre.

Pour terminer, nous rapporterons l'observation sui-

vante qui met bien en relief et les différences qui sé-

parent l'état cataleptiforme de l'état cataleptique véri-

table et les liens qui rattachent cet état cataleptiforme

au phénomène de l'hyperexcitabilité neuro-musculaire.

31 janvier 188t. C.. s'endort facilement par la pression sur

les globes oculaires et sur les tempes. L'état de somniation ainsi

produit se caractérise par l'exaltation des réflexes tendineux

et par la tendance des muscles à la contracture, sous l'influence

de l'excitation mécanique soit des tendons, soit des nerfs, soit

des masses musculaires.

L'hyperexcitabilité neuro-musculaire n'est pas générale. Elle

n'existe pas à la face'.

Nous essayons de produire l'état cataleptique par l'ouverture

des yeux. Les paupières se laissent assez facilement soulever,

mais les globes oculaires sont convulsés en haut et à droite.

L'état cataleptique que nous obtenons ainsi est imparfait,

les membres conservent bien les attitudes communiquées ; mais

les frictions à la surface du membre les font cesser ; l'hyperexci-

tabilité neuro-musculaire est conservée, et les réflexes ten-

dineux persistent. Il est aisé de reconnaître là l'état catalepti-

forme. - En effet, en insistant sur l'ouverture des yeux, les

globes oculaires s'abaissent et le regard devient fixe. Dès lors

la catalepsie est parfaite. Les membres sont souples, légers

à mouvoir; les attitudes communiquées ne sont plus modifiées

par la friction du membre; plus de réflexes tendineux, ni

d'hyperexcitabilité neuro-musculaire.

Ce qui précède montre bien les différences qui existent entre

l'état cataleptique vrai et l'état cataleptiforme. Dans le cours

de la même séancenous avons fait sur cette même malade une

expérience destinée à mettre en lumière les connexions qui

1 L'hyperexcitabitité neuro-musculaire s'est développée plus tard à la

face chez cette malade.

318 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

relient cet état cataleptiforme au phénomène de l'hyper-

excitabilité neuro-musculaire.

Cette expérience consiste à produire sur un segment de

membre l'état cataleptiforme pendant la phase de léthargie.

Il suffit simplement pour cela de malaxer légèrement toute

la surface de ce segment de membre, pour obtenir au lieu d'une

contracture localisée, une sortederoideur généralisée, qui per-

met à cette partie du membre de conserver les diverses atti-

tudes communiquées. C'est alors qu'on observe, lorsque l'on

cherche à varier les positions, la véritable flexibilitas cerea,

ou bien encore la roideur des mannequins de peintre dont

parlent les auteurs.

Il semble alors que cette sorte d'état cataleptique est bien

due à un léger degré d'hyperexcitabilité neuro-musculaire

développée par la manoeuvre que nous avons dite ; car il suffit

d'exercer quelques frictions sur le membre pour faire cesser

toute roideur et en même temps toute apparence d'état catalep-

tique.

E. L'hyperexcitabilité neuro-nzusculaire qui se montre

à son plus haut degré de développement pendant le

sommeil hypnotique, peut exister à quelque degré

pendant la veille.

Enfin nous avons reconnu, dans le cours de nos

expériences, que l'hyperexcitabilité neuro-musculaire

pouvait être observée chez nos malades en dehors de

l'état hypnotique, pendant la veille.

. Ce n'est ordinairement qu'un premier degré de l'hy-

perexcitabilité neuro-musculaire que l'on observe

alors. Cela se borne, le plus souvent, à la transforma-

tion en contracture du réflexe tendineux. Mais parfois

le phénomène peut devenir plus complet : la contrac-

ture localisée peut être obtenue parla malaxation des

masses musculaires, et la pression des nerfs. D'ailleurs

les résultats que l'on obtient dans ces conditions n'é-

RECUEIL DE FAITS. 319 j

gâtent jamais ceux qui sont observés pendant l'état de

sommation. Nous ajouterons que ces phénomènes n'ont

rien de général. Ils ne s'observent pas chez toutes les

hystéro-épiteptiques, et telle qui, pendant la veille,

n'offre aucune tendance à la contracture musculaire,

peut n'en présenter pas moins, pendant l'état de som-

mation, les signes les plus complets de t'hyperexcitabi-

lité neuro-musculaire. (A suivre.)

RECUEIL DE FAITS

Note sur les altérations DE la moelle épinière RLNCON-

TRÉES dans un cas DE pied BOT VARUS équin; par le

Dl A. PITRES.

Le nommé B..., âgé de soixante-treize ans, mort de broncho-

pneumonie le 33 décembre 1879, était depuis plusieurs années à

l'hospice des incurables de Bordeaux (service de M. le Dr Solles).

Cet homme, d'une intelligence très bornée, presque idiot, était

atteint d'un tremblement général, sur le début duquel il n'ajamais

pu fournir aucun renseignement précis. Il avait en même temps un

pied bot varus équin du côté gauche. Le pied était fortement ren-

versé en dedans, et pendant la marche, ilreposait sur le sol par son

bord externe. Le malade affirmait qu'il était venu au monde avec

cette infirmité. Toutes les masses musculaires du membre inférieur

gauche étaient plus grêles que celles du côté opposé. La sensibilité

générale était parfaitement conservée.

A l'autopsie, les muscles de la jambe et du pied n'ont pas été

disséqués. Seuls le cerveau et la moelle ont été l'objet d'un

examen attentif qui a révélé les particularités suivantes :

L'encéphale est volumineux. Les vaisseaux de la base sont sains.

La pie-mère présente çà et là quelques adhérences avec la substance

320 RECUEIL DE faits.

corticale. Les ventricules latéraux sont très dilatés et remplis de

liquide séreux. L'épendyme ventriculaire est très épaissi, avec

une apparence chagrinée ou réticulée selon les points. Le septum

lucidum est ferme, résistant, satiné sur ses deux faces ; pas de

tractus fibroïdes réticulés, semblables à ceux qu'on observe dans

les autres points des parois ventrieulaires. Nulle part dans l'encé-

pliale on ne trouve de lésions en foyer. La moelle a été durcie

dans une solution à 2 p. 100 de bichromate d'ammoniaque. Après

durcissement, elle parait à l'oeil nu tout à fait normale, depuis son

extrémité supérieure, jusqu'à l'origine du renflement lombaire.

Au niveau de ce renflement et dans une longueur de cinq centi-

mètres environ, les racines antérieures du côté gauche sont

manifestement atrophiées. En pratiquant des sections transversales

dans la portion du renflement qui correspond aux racinesatrophiées,

on remarque une diminution de volume très appréciable de la

moitié gauche de la coupe. La corne antérieure de substance grise

est d'un bon tiers moins volumineuse à gauche qu'à droite. La

corne postérieure gauche parait également un peu moins développée

que la droite. ( ? 8.)

-Sur des coupes fuies colorées au carmin et montées dans le

baume de Canada par les procédés ordinaires, il est facile de

constater que la corne antérieure gauche est profondément alté-

rée dans sa structure. Elle présente une coloration rouge vif uni-

forme, son tissu dense fibroïde est traversé par de gros vaisseaux

sanguins à parois épaisses. Avec un grossissement de quarante

à cinquante diamètres, on y distingue une grande quantité de

fig. 28.

recueil DE faits. 32)

corps granuleux. Enfin les cellules nerveuses y font absolument

défaut.

La corne antérieure du côté droit présente au contraire toutes

les apparences de l'état normal, les cellules nerveuses y sont en

grand nombre, munies de beaux prolongements. Les vaisseaux qui

la traversent sont sains; on n'y aperçoit pas de corps granuleux.

Les commissures, les cordons de substance blanche, les cornes

postérieures ne paraissent pas altérées. La corne postérieure

gauche est un peu plus grêle que la droite, mais sa structure ne

parait pas sensiblement modifiée. Au dessus du renflement lombaire,

dans les régions dorsale et cervicale, ou ne trouve aucune altéra-

tion. Les cornes antérieures ont le même développement à droite

et à gauche et renferment la même quantité de cellules nerveuses

saines.

Réflexions. Autant qu'on peut en juger par les faits pu-

bliés jusqu'à ce jour, le pied bot est dans un certain nombre

de cas la conséquence des lésions limitées de la moelle épinière.

Michand en 15î0', M. Déjerine en 1875 en ont rapporté

chacun une observation très démonstrative. Le fait qu'on vient

de lire présente certaines analogies avec ceux qui ont été pu-

bliés par Michaud et par M. Déjerine. Dans notre cas cepen-

dant, les altérations sont plus exactement limitées à la corne

antérieure de substance grise. Il ne s'agit pas là d'un foyer

de myélite banale. Et s'il était bien démontré que dans ce cas

le pied bot fût réellement congénital, il faudrait en conclure

qu'une lésion nettement systématisée de la corne antérieure

peut se produire pendant la vie foetale et donner lieu à des pa-

ralysies atrophiques limitées, tout à fait semblables à celles

qui caractérisent les paralysies atrophiques spinales de l'en-

fant et de l'adulte.

11 est à peine besoin d'ajouter que tous les cas de pied bot

ne dépendent pas des mêmes conditions pathogéniques. Il

existe en ell'et des observations très régulières de pied bot

anciens, dans lesquelles la moelle méthodiquement examinée

a été trouvé tout à fait saine. 1\111. Coyne et Troisier3. M. Tho-

' Miehaud. Note sur la pathogénie du pied bot congénital à propos

d'un exemple d'une difformité de ce genre paraissant liée à une lésion

congénitale de la moelle épinière. (Archives de Physiologie, 1S74, p. 586).

' Déjerine. Note sur l'état de la moelle épinière dans un cas de

pied bol varus équin. (Archives de Physiologie, 1815, p. 253).

- Coyne et Troisier. Pied bot varus congénital double : examen de

la moelle épinière. (Archives de Physiologie, 1871-1872, p. 655).

' 21

322 RECUEIL DE FAITS.

rens ' ont rapporté des cas qui ne laissent aucun doute à cet

égard et qui démontrent la nécessité d'établir dans l'histoire

du pied bot un certain nombre de divisions correspondant à

des altérations anatomiques différant les unes des autres.

HÉMIPLÉGIE SPINALE AVEC ANESTHÉSIE CROISÉE DANS UN CAS

DE mal DE POTT sous-occipital ; par E. Troisier, Pro-

fesseur agrégé, et LETULLE, ancien interne des hôpitaux.

On connaît la théorie de M. Brown-Séquard sur la transmis-

sion des impressions sensitives dans la moelle épinière; cet

éminent physiologiste soutient que les éléments sentitifs s'en-

trecroisent d'une façon complète au niveau des commissures,

de sorte qu'une impression produite sur la moitié gauche du

corps, se transmettrait à l'encéphale par la moitié droite de la

moelle, et réciproquement. M. Brown-Séquard cite à l'appui

de cette hypothèse un certain nombre de faits observés chez

l'homme, où la paralysie du mouvement existait d'un côté

du corps avec conservation de la sensibilité, taudis qu'il y

avait une anesthésie plus ou moins complète du côté opposé.

L'observation suivante est un exemple très net de cet

ensemble symptomatique si curieux, sur lequel M. Brown-

Séquard a le premier attiré l'attention s.

Ferdinand F..., âgé de dix-neuf ans, ouvrier relieur, fut admis

le 2 ! ) avril 1880 à l'hôpital de la Charité, dans le service de

M. Vulpian (suppléé par M. Troisier).

Ce jeune homme fait remonter le début de sa maladie au mois

d'octobre de l'année précédente ; a cette époque il commença à

ressentir au niveau de la nuque une douleur sourde qui s'accompa-

gnait d'élancements vers la région occipitale; les mouvements de

1 Thorens. -- Documents pour servir à l'histoire du pied bot varus

congénitale (Thèse de doctorat, Paris, 1873, Obs.III'.

' Brown-Séquard. Journal de la Physiologie de l'homme et des

animaux, vol. Yt. Archives de Physiologie normale et pathologique,

t. Il, 1869. Voyez également à ce sujet les Leçons sur les maladies du

système nerveux de 5 ! . Charcot (7e leçon) et le remarquable article de

M. Vulpian sur la physiologie de la moelle épinière dans le Dictionnaire

encyclopédique des sciences médicales. -

RECUEIL DE faits. 323

la tête s'exécutaient avec une certaine gêne. Cet état s'aggrava

insensiblement et quelque temps avant son entrée à l'hôpital,

F... s'aperçut que sa force musculaire diminuait notablement du

côté droit. Depuis huit jours, il existe une véritable paralysie du

'membre supérieur droit; le membre inférieur est atteint, mais à

un moindre degré; F... peut marcher et, le 29 avril, il vient à pied

à la Charité.

Etat actuel. La tête est immobile, légèrement inclinée à droite ;

cette attitude s'accompagne d'un certain degré de torsion du cou,

de sorte que le menton est rapproché de l'épaule droite. Les mou-

vements volontaires de la tête sont très gênés : la rotation à gauche

est presque impossible, la rotation à droite est très limitée. La

flexion s'exécute d'une façon à peu près complète, la tête restant

inclinée à droite; mais le mouvement d'extension est si limité, que

c'est à peine si le malade peut relever le menton de la position

qu'il occupe. Les mouvements communiqués ne sont pas plus éten-

dus que les mouvements volontaires. Dans l'exécution de ces

mouvements, il se produit une vive douleur au niveau de la nuque.

La partie postérieure du cou présente une déformation très

accusée, qui est en rapport avec la torsion que nous venons de

décrire; cette région présente, à la palpation, un empâtement

profond. La pression y est douloureuse. Les ganglions cervicaux ne

sont point engorgés. Le toucher de la gorge ne révèle rien

d'anormal.

Le malade éprouve de temps en temps des douleurs lancinantes,

qui s'irradient de la nuque vers le crâne en suivant la direction des

branches sous-occipitales.

11 existe une paralysie incomplète des membres du côte droit.

Les mouvements volontaires du membre supérieur sont encore

possibles, mais très limités. La force musculaire est considérable-

ment diminuée; mesurée au dynamomètre, elle est de cinq

divisions, tandis qu'elle est de vingt-huit à gauche. La parésie est

moins prononcée au membre inférieur; la jambe traîne à peine

pendant la marche, le malade peut même se tenir debout sur le

pied droit pendant quelques instants. Il n'a pas d'hémiplégie

faciale.

La sensibilité est conservée à droite au niveau des membres, du

tronc et de la face. 11 n'en est pas de même à gauche; de ce côté

elle est diminuée au simple contact, à la piqûre, au pincement et

au froid, dans toute l'étendue du membre supérieur, du membre

inférieur et du tronc, jusqu'à cinq centimètres environ au-dessous

du mamelon. L'anesthésie se retrouve sur le côté gauche du scro-

tum, de la verge, du gland, de la marge de l'anus. Elle s'arrête

exactement, en avant et en arrière, à la partie médiane du corps ;

mais elle ne dépasse pas en hauteur le mamelon gauche ; elle

n'existe ni au cou, ni à la tête.

324 RECUEIL DE FAITS.

Les mouvements réflexes provoqués par le chatouillement de la

plante des pieds sont à peu près les mêmes à gauche et à droite ;

le réflexe rotulien est un peu plus prononcé à droite qu'à

gauche.

La peau du côté droit est plus chaude que celle des parties liomo-«

logues du côté gauche; cette différence est très appréciable à la

n).>in. Avec le thermomètre on obtient les résultats suivants :

RECUEIL DE FAITS. 325

d'une façon moins nette qu'adroite; la sensibilité à la température

n'est point encore revenue, l'application d'un corps froid ne donne

lieu qu'à une sensation de contact, sauf en quelques régions (au

niveau des dernières côtes, sur les fesses) où elle produit des four-

millements.

La paralysie du 'côté droit tend t diminuer, les mouvements

du membre supérieur sont un plus étendus, mais la force muscu-

laire ne dépasse pas encoie cinq divisions au dynamomètre; la

marche est plus facile.

Les phénomènes locaux ne s'amendent point beaucoup. On con-

tinue les cautérisations ponctuées tous les huit jours.

VA juillet. Du côté gauche, l'état de la sensibilité au contact, à

la piqûre et au pincement s'est encore amélioré, sans être normal

cependant; le froid détermine toujours une sensation de fourmille-

ments. Du côté droit, la force musculaire ne s'est point accrue,

mais les mouvements volontaires du bras sont plus étendus. Les

mouvements de rotation de la tête sont un peu plus faciles; le cou

est moins raide, la nuque est moins large, moins empâtée. L'état

général est excellent, le malade engraisse visiblement. Il pèse

quarante-huit kilogrammes.

26 août. La sensibilité au contact et à la douleur est encore très

légèrement émousséc à gauche; la sensibilité au froid est revenue-

La paralysie du bras droit diminue de jour en jour.

5 octobre. L'anesthésie complètement disparu du côté gauche.

A droite la sensibilité tactile de la main a subi une modification

singulière ; le malade sent bien qu'il tient quelque chose, mais il ne

sait apprécier la forme de l'objet qu'il touche. Les mouvements

d'extension et d'élévation du bras droit se font très facilement ; la

force musculaire donne au dynamomètre vingt-cinq divisions pour

la main droite et quarante-cinq pour la gauche. Il s'est produit un

peu d'atrophie de la main droite, l'éminence thénar est moins

saillante que du côté opposé. Il n'y a plus de claudication, seule-

ment le malade ressent encore de la faiblesse dans la jambe droite

lorsqu'il a marché pendant un certain temps. La rotation de la

tête à gauche s'exécute un peu plus facilement qu'au début ; la

pression sur les apophyses épineuses des deux premières vertèbres

cervicales ne détermine presque plus de douleur ; l'empâtement du

cou diminue.

^'novembre. L'exploration de la force musculaire donne

quarante-trois divisions à droite et quarante-six à gauche. Le poids

du malade est de 12 kilogrammes.

La sensibilité tactile est toujours modifiée à la face palmaire de

a main droite et des doigts, le malade ne se rend pas compte de

la forme et de la nature des objets qu'il louche; il a cerendan

conservé la sensation de contact et la notion du poids. Il lui arrive

326 RECUEIL DE FAITS.

lorsqu'il n'est pas guidé par la vue, de laisser tomber ce qu'il a

dans la main, comme son assiette, sa cuiller.

27 novembre. F... se sent en état de reprendre son travail ;

M.Vùlpian.qui a repris son service depuisle 13 octobre, l'autorise à

quitter l'hôpital. A cette époque, l'hémiplégie droite avait pour

ainsi dire disparu, et il n'y avait plus d'anesthésie à gauche. L'ob-

tusion de la sensibilité tactile de la main droite persistait avec les

mêmes caractères, mais à un moindre degré.

Les mouvements delà tête étaient presque normaux, à l'exception

de la rotation à gauche. Ils n'étaient accompagnés d'aucune douleur;

même lorsque le malade les exécutait brusquement.

Nous avons revu ce malade pour la dernière fois le 10 décembre

1881, c'est-à-dire plus d'un an après sa sortie de l'hôpital. La rota-

tion de la tête à gauche se faisait toujours d'une façon incomplète ;

les autres mouvements de la tête sur le cou étaient faciles et non

douloureux. L'axis présentait surtout du côté droit un épaississe-

ment très appréciable à la palpation, sans empalement des parties

molles.

La force musculaire était peut-être un peu moins prononcée à la

main droite qu'à la maingauclie; c'étaitle seul vestige del'hémiplé-

gie dont il avait été atteint. Quant à la sensibilité, elle était

conservée dans tous ses modes, à droite comme à gauche.

L'observation qui précède nous paraît remarquable à plusieurs

titres. L'hémiplégie spinale avec anesthésie croisée qui s'est

produite lentement et progressivement dans le cours du mal de

Pott sous-occipital dont notre malade était atteint depuis plu-

sieurs mois, ne pouvait dépendre que d'une compression de la

moelle épinière au niveau de la région cervicale; et l'on peut

supposer que la compression était due, comme dans la plupart

des cas de ce genre, àunépaississementlimité de la dure-mère.

Mais dans quelle étendue la moelle a-t-elle été comprimée ? à

quel degré était-elle altérée ? C'est ce que nous ignorons,

puisque ces accidents ont été transitoires et que l'affection ver-

tébrale elle-même a subi un temps d'arrêt qui permet d'espérer

une guérison définitive du mal. Il est probable que la pachy-

méningite caséeuse était peu étendue, qu'elle siégeait princi-

palement à droite et qu'elle atteignait la moelle épinière de ce

côté. Mais la lésion était-elle exactement limitée à la moitié

droite de la moelle, et la compression ne s'exerçait-elle que sur

cette moitié ? Quoiqu'il en soit, cette observation démontre une

fois de plus la disposition de la paralysie motrice et de l'anes-

thésie par suite d'une compression ou d'une altération partielle

RECUEIL DE FAITS. 327

de la moelle épinière ; et il est permis, avec les réserves que nous

avons faites, de la présenter en faveur de la théorie de M. Brown-

Séquard sur la transmission des impressions sensitives dans la

moelle épinière.

Nous avons exploré bien souvent l'état de la sensibilité du

côté droit ; jamais nous n'avons constaté la zone transversale

d'anesthésie qui, d'après M. Brown-Séquard, limiterait par en

haut la paralysie motrice.

La paralysie du mouvement était plus prononcée au membre

supérieur qu'au membre inférieur, tandis que l'anesthésie

était égale en intensité et présentait les mêmes caractères dans

toute la partie du côté gauche qu'elle occupait. Quant au

retour de la sensibilité, il s'effectua progressivement et pour

ainsi dire parallèlement au retour du mouvement du côté

opposé. La sensibilité au simple contact et la sensibilité aux

excitations douloureuses (piqûre, pincement) reparurent d'abord

. peu à peu et devinrent de moins en moins obtuses ; lasensibilité

à la température fut la dernière à se montrer et à redevenir

normale. Pendant plusieurs jours, l'application d'un corps

froid ne donnait lieu qu'à une sensation de contact ou pro-

voquait une sensation de fourmillements; ce sont là des parti-

cularités qui se retrouvent dans un grand nombre d'observa-

tions.

Notons en terminant la terminaison favorable du mal verté-

bral chez un malade d'ailleurs indemne de tuberculisation

pulmonaire ou autre. Nous ne croyons pas nous abuser en

attribuant aux cautérisations ponctuées une grande part de

l'amélioration qui s'est produite.

1'IÉ ? IINGO-EVCÉPIIALITE CHRONIQUE GÉNÉRALISÉE CHEZ UN ENFANT ;

- par BOURNEVILLE et WUILLAMIÉ.

Un examen attentif des idiots permet de distinguer un cer-

tain nombre de classes différant les unes des autres par des

symptômes cliniques et par des lésions anatomo-patho-

logiques. A côté des idioties par hydrocéphalie, par micro-

eqoAa/M, il y en a qui reconnaissent pour cause tantôt une

sclérose atrophzque (atrophie cérébrale), tantôt une sclérose

328 RECUEIL DE faits.

hypertrophique ou tubéreuse ? D'autres idioties enfin sont dues

à une méningo-encéphalile chronique généralisée, rappelant

tout à fait par ses caractères antomiques les lésions de ]apM)'a-

lysie générale. C'est à ce dernier groupe qu'appartient le cas

suivant. -

OBSERVATIO,N. - 1(liOtiC, épilepsie. Abcès de la marge de l'anus.

Mère : convulsions dans l'enfance, migraines. Grand-père ma-

ternel : excès de boisson, crises convulsives. Dc : <a; coïMM.f :

aliénés. Pas de consanguinité. Premières convulsions ci trois

mois; prédominance à gauche, paralysie ci gauche, contracture.

Affaiblissement progressif : mort. Autopsie : méningo-encépha-

lite ; ablation presque totale de la substance grise.

Dub... (Cliarles-Antonin), âgé de douze ans, est entré à Bicêtre

(service de M. Bourneville), le 21 janvier 4881.

Antécédents. (Renseignements fournis par la mère de l'enfant.)

Père, 38 ans, marin, puis comptable. Bien portant, mais sujetà des

maux de tête depuis quatreans; doux quoique colérique , pas de trace

de syphilis, a chiqué autrefois dans ses voyages; aurait eu des con-

vulsions jusqu'à l'âge de six ou septans. [Son pére eslmorl subitement

(' ! ); il était sobre. Sa mère, mariée à quinze ans, mère à seize, « de

caractère volage », s'est séparée de son mari et a disparu. Ni frère

ni smtr; pas d'antécédents héréditaires nerveux dans la famille.]

Mère, 34 ans, couturière, a eu des convulsions jusqu'à l'âge de sept

ou huit ans; elle est nerveuse et sujette, depuis la puberté, à des

palpitations et à des migraines au moment et à la suite des règles;

elle a des cauchemars depuis quelque temps : rêve qu'elle court, qu'elle

cherche son enfant, etc. Elle n'a jamais eu d'attaque de nerfs, ni

de syncope ; elle est fortement marquée d'une variole contractée en

1780 ; pas de trace de scrofule, de dartre, ni d'herpétisme. [Son père

a toujours fait de nombreux excès de boisson (vin); il est très

nerveux et a tous les cinq ou six mois, depuis une dizaine d'années,

des crises convulsives dans lesquelles il se mord la langue. Sa mère est

bien portante, un peu nerveuse. Un frère est mort d'une fièvre

cérébrale à trois ans ; deux cousins de la troisième génération ont

été aliénés. Pas d'autres cas d'hérédité dans la famille.]

Pas de consanguinité.

Un seul enfant, notre malade. Grossesse agitée, antérieure au

mariage des parents : a J'aipleuré pendant les neuf mois et mon père

m'a battue plusieurs fois. » Au sixième mois peur, mais sans sjn-

1 Voir : Bourneville. - Notes sur l'idiotie (Archives de neurologie, t. 1,

p. 69, 391), et Recherches cliniques et </tn'6). sur l'epilepsie, l'hystérie

l'idiotie, p. 72-73.

RECUEIL de faits. 339

copc, à la vue d'un lion dans l'étalage d'un marchand de four-

rures ; accouchement naLurel à Lerme; Duh ? a été élevé au sein

par une nourrice jusqu'à un an. Les premières convulsions sont sur-

venues vers ou 3 mois et se sont renouvelées tous les mois. Dub...

a marché à un an. A partir de là, après chaque crise convulsive, il

était un ou deux jours sans pouvoir marcher. Il a été propre quinze

mois : la dentition a été régulière. 11 a eu à dix-huit mois un abcès

derrière l'oreille qui a suppuré si longtemps, que la nourrice,

« sur la recommandation d'un saint », est allée promener l'enfant,

'tête nue, dans « un champ de seigle au moment de la rosée ». Pas

de résultat immédiat à la suite de ce traitement. Sa mère le reprit

avec elle à l'âge de quatre ans. Il n'a pas eu de convulsions, durant

cet intervalle (18 mois-2 ans); il parlait bien et prononçait distincte-

ment tous les mots; il apprenait convenablement à lire, était très

caressant.

Les convulsions reparurent à quatre ans, sous forme d'Linét(it de mal

qui dura cinq ou six heures et daiislequel elles cl(ilis 1(t

moitié gauche du corps et de la face. Dub... se rétablit au bout de

deux jours et put marcher sans traîner la jambe. Comme par le

passé, les crises convulsives redevinrent mensuelles. Vers l'âge de

huit ans, il eut un autre état de mal qui dura 67 heures, dans lequel

on constata encore la prédominance des convulsions v gauche. Il dut

garder le lit pendant un mois et nous n'avons pu savoir s'il y eut

de la paralysie à la suite de ces convulsions; seulement, quelque

temps après, on remarqua «qu'il laissait tomber les objets de la main

gauche ». Bientôt les crises devinrent plus fréquentes ( plusieurs

par mois) et chacune durait trois ou quatre heures. Il les sentait

venir, et, dans les ingt minutes qui les précédaient, il disait sans

cesse : « Ma petite mère,je suis étourdi; ma petite mère,j'ai mal au

coeur », et à chaque fois sa ligure devenait jouge ; puis, à la suite

d'un étourdissement ultime. il poussait un cri sourd, plaintif, pro-

longé et était pris de convulsions. Un jour la crise débuta par une

sorte d'hallucination : « Oh ! ma petite mère, toutes ces couron-

nes ! » .

Ce fut le 12 juin 1880, que, après une crise de six heures, avec

prédominance des convulsions à gauche, on nota une paralysie du

bras et de la jambe de ce côté. L'enfant eut alors beaucoup de fièvre

pendant assez longtemps et on dit aux parents qu'il avait une

méningite. 11 ne vomissait pas, mais gâtait dans son lit. 11 put

se relever au bout de deux mois, mais ce ne fut que dans le troi-

sième mois qu'il put commencer à marcher en traînant la jambe.

Dans lasuite, la paralysie de la jambe a diminué, mais il la traîne

encore et le pied s'est déformé. Vers le même moment, le bras

paralysa s'est contracture. Durant les trois ou quatre mois qui

suivirent cette crise, pas d'autres accès, mais le malade se plaignait

souvent de la tête, des oreilles et criait. Enfin, il amoisenviron

330 RECUEIL DE faits.

que les accès sont revenus; ils sont presque quotidiens, durent

20 ou 30 minutes et sont identiques à ceux que nous avons décrits.

Depuis la crise de juin 1880, modification considérable de l'intel-

ligezzce, parole difficile, écriture presque impossible. Dub... est devenu

méchant, s'agace facilement, secoue les meubles, casse, déchire; une

fois il a voulu s'en aller et on a dû l'enfermer. Pas de gourmandise,

de kleptomanie, de pyromanie. Dès sa première enfance, son

sommeil était agité; il faisait des bonds dans son lit, mais n'avait pas

de peurs. « Avant sa dernière maladie, il n'avait peur de rien ;

maintenant, il est craintif comme il ne l'a jamais été. » 11 est rede-

venu propre depuis deux mois ; parfois encore il urine au lit, la

nuit. La mère ne signale pas d'onanisme.

État actuel. Le crâne offre une saillie spéciale de l'occipital

qui est divisé en deux plans par une crête transversale siégeant à

sa partie moyennne ; les apophyses mastoides sont très développées.

De la bosse occipitale externe à la racine du nez, en passant par

le vertex, on mesure 38 c.; d'une oreille à l'autre, 30 c. La circon-

férence de la base du crâne donne 52 c. La face est régulière,

symétrique, profondément émaciée. Le front est large ; la suture

médiane des deux moitiés du frontal est saillante; les bosses fron-

tales sont peu saillantes; aplatissement des arcades sourcilières;

excavation cachectique des fosses temporales; nez aquilin;- yeux

profondément excavés, cils bruns, pupilles égales, pas de strabisme ;

bouche moyenne, lèvres fines ; oreilles bien ourlées, lobules

bien détachés ; maxillaires réguliers, dents bien rangées, com-

plètes, mauvaises, petites, espacées; voûte palatine, voile du palais,

piliers normaux; luette rudimentaire, amygdales normales.

Le eoM est long et grêle. Le thorax offre une incurvation

générale de la colonne vertébrale avec concavité gauche, il est très

amaigri. Aucune malformation congénitale ni aux membres

supérieurs, ni aux inférieurs, qui sont longs et grêles. Le bras

gauche est contracture dans la demi-flexion, le pied gauche est

médiocrement déformé, et ne repose que sur la pointe dans la

marche.

Peau : cheveux noirs, clair-semés', sourcils et cils noirs, longs,

plus épais ; pas d'adénites. - 4rgn,rzes génitaux : verge petite, peu

développée ; testicules descendus.

Intelligence. A son entrée, le malade a été envoyé à l'école, mais

on n'a rien pu en faire. Il est donc resté soit à la petite école, soit

à l'infirmerie. Il passait parfois toute la journée sans rien dire;

d'autres fois il faisait avec la main signe d'approcher, et quand on

était près de lui : « J'ai faim, disait-il, j'ai soif, du pain, du chocolat,

maman va venir. » Son vocabulaire était excessivement restreint.

D'autres fois, il cherchait à donner des soufflets, 1 mordre ; il re-

connaissait sa mère, mais ne lui faisait aucune caresse. Il mangeait

seul, assez proprement, se servant d'une cuiller tenue de la main

RECUEIL DE faits. 331

droite; pas de voracité, ni de salacité; pas de bave. Il ne suce

pas, ne grince pas des dents. Il demande le bassin le jour, et

gâte la nuit; il n'aide pas à s'habiller.

28 février. Trois accès hier; le soir T. R. 38° ; nuit tranquille.

Ce matin, abattement, refus de manger. Cet état est la règle chez

lui à la suite des accès.

13 avril. Depuis deux jours, diarrhée à laquelle a bientôt suc-

eédé de la dysenterie, selles fréquentes, peu abondantes, pas de

ténesme. Décoction de poudre d'ipéca et 414 lavement avec 0,50 de

nitrate d'argent. T. R. 38", 4. Soir : T. R. 39°. Deux accès.

14 avril. T. R. 39°. Soir : T. R. 39°, 4.

45 avril. T. R. 39°. Soir : T. R. 39", 8. Trois accès.

16 avril. T. R. 38°,4. Les selles dysentériques et glaireuses per-

sistent, le sphincter est comme paralysé et laisse couler une certaine

quantité de liquide; langue humide, saburrale, pas de vomisse-

ments, ventre non ballonné. Donner 4 gr. d'ipéca comme vomitif,

continuer la décoction d'ipéca et les lavements au nitrate d'argent ;

eau albumineuse pour boisson; lait comme aliment.

17 et 18 avril. T. R. 38°. - Soir : T. R. 39°,4.

19 avril. T. R. 38°. Soir : T. R. 38°. Pas de sang dans

les selles. Continuer le régime.

20 avril. T. R. 37°,8. Soir : T. R. 37°,8.

21 avril. T. R. 37°,8. Soir : T. R. 39°,4. Cinq accès.

22 avril. - T. R. 38°. Apparition sur la marge de l'anus d'une

rougeur érysipélateuse, qui empiète surtout sur la fesse gauche

sous forme d'un bourrelet rouge, induré, large de trois travers de

doigt ; elle intéresse moins l'autre fesse. A son niveau on sent un

noyau d'induration. Application de compresses d'eau de sureau;

bouillons, potages, lait. Soir : T. R. 4G°,4.

23 avril. La verge n'est pas envahie; le scrotum se dégage :

disparition de la rougeur et du gonflement. T. R. 40°. Soir. T. R.

40",2.

24 avril. T. R. 39°,8 ? Soir : T. R. 39°, 8.

5 avril. - T. R. 39°. - Soir : T. R. 38°,8. La limitation de

l'érysipèle s'est bien effectuée et il ne persiste un peu d'induration

qu'a la marge de l'anus. Potion de Todd et julep avec extrait de

quinquina, 3 gr.

26 avril. T. R. 38°,8. Soir : T. R. 39°.

27 avril. T. R. 39°. Soir : T. R. 38°,8.

28 avril. T. R. 38°,4. Diarrhée persistante. Pendant qu'on

nettoyait D..., il s'est ouvert un petitabcès dans le pli interfessier, un

peu à gauche. -1 gr. 50 d'ipéca; bouillon et lait.

29 avril On sonde la plaie avec un stylet ; il existe un décolle-

ment considérable à gauche du périnée s'étendant en avant, mais

332 recueil de faits.

surtout en arrière; le stylet glisse en avant sur les téguments jus-

qu'à la racine des bourses; en arrière il glisse entre les téguments

et l',tpoiiévros-- jusqu'au coccyx. Débridement des clapiers en de-

dans et en arrière; pansements avec des mèches; injections phéni-

quées deux fois par jour. T. R. 38",4. Soir : T. R. 39°.

30 avril. L'écoulement du pus se fait très incomplètement vu

la profondeur du clapier; on fait une contre-ouverture avec le

trocart courbe, et on passe un drain de moyen calibre. Le malade

est très faible. Traitement : Sulfate de quinine 0,0. Julep avec 3

gr. d'extrait de quinquina et HO gr. de rhum. Vin de quinquina.

Café. Deux pansements par jour. T. R. 381,6. Soir : T. R. 39",8.

1°r mai. T. R. 391,&. Dans la nuit un frisson suivi de convul-

sions internes ( ? ). - Ce matin, D... est prostré, pâle, les yeux

caves; le pouls est à I ? 0. Nouvelle dose de 0.20 de sulfate de quinine ;

sirop d'éther 40 gr. ; sinapismes. - Soir : T. R. 39°, 2.

2 mai. T. R. 391,2; l'état local esL excellent, la plaie a bon

aspect, le pus est bien lié; état général médiocre. Soir : t. R. 39".

3 mai. - T. R. 381,6. Soir : T. R. 38°,G.

4 mai. - T. R. 38",2 2 la plaie est belle, peu d'inflammation au

pourtour; un peu moins d'abattement; appétit médiocre. Côte-

lette. Soir : T. R. 38",2.

3 mai. T. R. 38°. Malgré son aspect cachectique, le malade ne

tousse pas; tout état inflammatoire a disparu autour de la plaie.

Soir : 38°.

6 mai. T. R. 38°. - Soir : 381.

7 ? n(ti. T. IL 38°. - Soir : 3S°,2.

8 moi. T. R. 38°. On enlève le drain ; la plaie est devenue un

peu fongueuse ; on la pansera au vin aromatique. Sirop d'iodure

de fer et viande crue : ;0 gr. -Soir : T. H. 38°.

9 mai. T. R. 38°,8. Soir : T. R. 38",8.

10 mai. T. R. 38°, i. Soir : D... a eu un accès dans l'après-

midi ; T. R. 39°.

1 mai. T. R. 381,6. Constipation : limonade purgative.

Soir : T. R. 38°,8.

il mai. T. R. 38°,2. Soir : T. R. 38".

13 mai. T. R. 38°. La plaie marche vers la cicatrisation com-

plète. - Soir : T. R. 38°,h. Le I 4, deux accès, etc.

30 mai. Depuis quinze jours la température oscille entre 38°

et 38°,8 ; la plaie est presque fermée ; mais le décubitus prolongé

a provoqué des eschares qui, bien que superficielles, vont en s'é-

largissant. Panser avec de la poudre de quinquina et coucher le

malade sur un matelas à air.

9 juin. La température oscille toujours autour de 38°. La ci-

atrisation est presque complète ; les escharres persistent et bour

RECUEIL DE faits. 333

geonnent : on les cautérise au nitrate d'argent. Bain salé tous

les deux jours. Même prescription et même régime reconstituant.

T. R. 3 î°,S. - Soir : T. R. 38°.

33 août. La plaie est depuis longtemps absolument cicatrisée ;

néanmoins Dub... est trop affaibli pour être levé ; il reste au lit,

recoquevillé sur lui-même, indifférent à ce qui l'entoure ; pas de

fièvre ; depuis hier la diarrhée, arrêtée à grand'peine, a reparu avec

assez d'intensité ; peu d'appétit. Julep avec 4 gr. de sous-nitrate de

bismuth.

4 totit. Moins de diarrhée ; l'état cachectique s'accentue de

jour en jour : pas de fièvre; pouls petit et misérable ; bouche et

langue sèches, pas de muguet, pas de vomissements, refus de man-

ger ; le ventre est rétracté en bateau; amaigrissement profond,

saillie des apophyses malaires, excavation des joues et des tempes,

yeux creux, cernés, ternes, rictus sardonique, saillie des côtes, du

sternum, des reliefs du bassin, des ischions; les membres montrent

les reliefs musculaires et les fosses iscliio-rectales sont comme évi-

dées. 'Traces de duvet cachectique à la lèvre supérieure et au niveau

des branches du maxillaire inférieur; quelques poils aux membres,

sur le dos, le sacrum, au pubis ; rien aux aisselles. Ulcérations ca-

chectiques : le sur la tête du troisième métacarpien gauche ; 2° à

la jonction du pouce droit et de l'index; 3° sur le tendon d'Achille

gauche ; 4° sur le bord externe du pied gauche; 50 sur la crête

iliaque, sur le sacrum. D... affectionne le décubitus latéral gauche,

les genoux presque collés au menton. Rien au coeur, rien dans la

poitrine, respiration faible. L'auscultation est difficile. C'est un

affaiblissement progressif. T. R. 38° ,2. Soir : T. R. 39 ? ? .

2 : ! août. T. R. 38°. Soir : T. R. 38°,2.

26 août. T. R. 39°. Pas d'amélioration, ajouter au bismuth

2 gr. de diascordium, et donner un lavement avec un blanc

d'oeuf et douze gouttes de laudanum de S3 deiillain. - Soir : T. R.

38°, 6.

2-1 T. R. 38°,8. D... est mourant, il respire à peine ; al-

gidilé des extrémités; diarrhée continuelle, selles involontaires.

Soir : T. R. 39o. Décès à 10 h. du soir. T. R. post nzortcnz :

411,6.- Les accès ont eu la marche suivante : janvier, 4 ; février»

27; mars, 14; avril, 2 1 ; mai, 3 et 4 vertiges; juin, 20;

- juillet, 5; - août, 14. Les accès ont été suspendus durant la

période aiguë de l'éiysipéle.(22 avril 4 mai).

Autopsie le 27 août 1 î 8 1.- Lavotitecmtlniemze est très épaisse, le

tissu osseux est dense : la dure-mère est épaissie, adhérente çà et

là à la boite osseuse ; la base du crâne est régulière et symétrique.

L'encéphale pèse 1210 grammes ; les artères de la base, les nerfs, le

chiasma, les pédoncules paraissent symétriques. Les hémisphères

ne paraissent pas égaux; du côté droit les lobes frontal et occipital

3 a se RECUEIL DE faits.

sont en retrait sur ceux du côté gauche. L'hémisphère droit ne me-

sure que 17 c. dans sa plus grande longueur, et paraît moins large

aussi que le gauche qui mesure 17 r. 1/2 de longueur ; de même

l'hémisphère droit pèse 170 gi. de moins que le gauche.

HnHSF/tët'edt'Ott.Lorsqu'on essaie d'enlever lapie-mérequi n'est

guère plus épaisse que d'habitude, mais qui est finement vasculari-

sée, on entraîne avec elle la substance grise ; après plusieurs essais,

et malgré le plus grand soin, on constate que c'est toute la couche

de substance grise qui suit la pie-mère, laissant ainsi ci nu le squelette

de substance blanche des circonvolutions. Ceci se produit sur toute

la face convexe de l'hémisphère, hormis au niveau du lobule de

l'insula, et des 2/3 antérieurs du lobe temporal. La même chose se

reproduit sur la face interne, où nous dépouillons successivement

la première circonvolution frontale, le lobule I)cii@(tceîzt7-(tl, 1'tivait-

coin, le coin, le lobe occipitahde toute leur substance grise, la-

quelle ne résiste, mais incomplètement, que sur la circonvolution

du corps calleux, et sur la moitié antérieure du lobe temporo-occi-

pital. La substance blanche, ainsi mise à nu, est indurée, ferme, et

est hérissée de petites crêtes, rendues plus visibles par l'immersion

dans l'eau. Il nous reste, d'autre part, dans la main, une véritable

coque résultant de la soudure de la pie-mère ci la substance grise, et

reproduisant par ses reliefs et ses dépressions le dessin des circonvo-

lutions dépouillées. (PI. VII.)

Le ventricule latéral est un peu dilaté, la corcte d'Elmmon est

indurée.

Hémisphère gauche. On constate aussi des adhérences à peu près

généralisées de la pie-mère, sauf au niveau des deux circonvolu-

tions ascendantes du lobule paracentral/ de l'extrémité du lobe

occipital, et de la face interne du lobe temporal. Mais on n'en-

traîne que des fragments de substance grise et non la totalité

comme du côté opposé. La corne d'Ammon est aussi indurée, le

ventricule latéral paraît normal. Le corps calleux et les corps

ohto-striés des deux côtés ne présentent pas d'altération.

Le cervelet et l'isthme réunis pèsent z0 gr. ; les plis du cervelet

offrent au toucher une dureté assez notable, surtout à gaucho ; la

, décortication de la pie. mère est facile. La protubérance, le bulbe

ne présentent aucun asymétrie, aucune trace de sclérose descen-

dante.

il y a quelques adhérences antéro-Iatérales au sommet du pou-

mon droit qui est liépatisé dans son lobe inférieur ; le gauche n'est

que congestionné et oedématié ; les sommets sont sains. Le coeti7,

pèse 170 gr. et n'est le siège d'aucune lésion valvulaire ; quelques

caillots cruoriques dans l'oreillette et le ventricule droits, du sang

fluide dans le gauche, rien à l'aorte. Aucune lésion de l'sopz7eaye,

de l'estoznac ni de l'intestin la muqueuse du gros intestin est,

surtout vers l'extrémité inférieure, boursoufflée, épaissie, marbrée;

RECUEIL DE FAITS. 335

pas de cicatrice d'ulcérations. Le foie, jaunâtre, gras au toucher,

friable, pèse 800 gr. ; la rate, 40 gr.; les reins, dont la substance

corticale est décolorée, pèsent l'un 80 gr. et l'autre 60 gr.

I. L'histoire pathologique de cet enfant comprend trois

phases bien distinctes. -

a) La première est marquée par des convulsions qui se

reproduisent presque tous les mois, jusqu'à un an et demi,

sans avoir, en définitive, affecté d'une manière notable soit

le mouvement, soit l'intelligence. En effet, de dix-huit mois à

quatre ans, Dub... se développe, marche librement, parle sans

difficulté, est propre, apprend à lire, etc.

b) La seconde phase débute par des convulsions, revêtant

la forme d'un état de mal et prédominant dans la moitié gauche

du corps. A partir de là, on note le retour des convulsions

mensuelles; puis un autre état de mal, offrant les mêmes carac-

tères que le précédent, suivi d'une parésie à gauche et d'une

augmentation des crises convulsives. Durant cette phase, les

facultés intellectuelles, parait-il, n'auraient été que médiocre-

ment affaiblies.

c) La troisième phase commence en juin 1880. De même

que la seconde, elle s'annonce par un état de mal. Les convul-

sions prédominent toujours à gauche. Autrefois, quelques

jours après les états de mal, D... se levait, semblant revenu

à sa situation habituelle. Après celui-ci, il se plaint de douleurs

de tête, a de la fièvre, etc. ; et, tandis que le premier état de

mal n'avait pas intéressé la motilité, que le second n'avait

produit qu'une parésie elle-même transitoire, ce dernier état

de mal se termine par une hémiplégie gauche et par une déchéance

intellectuelle si accusée que, à l'entrée de l'enfant à l'hospice,

nous sommes amenés à porter le diagnostic : idiotie, probable-

ment consécutive à une méningo-encéphalile, plus avancée à

gauche, en raison de la paralysie.

La débilité intellectuelle a continué de progresser; il est

survenu une diarrhée abondante, un érysipèle phlegmoneux,

un abcès avec des délabrements considérables : tous ces acci-

dents graves ont guéri. Mais, bientôt, la diarrhée a reparu ;

l'amaigrissement s'est accentué de plus en plus ; des ulcé-

rations se sont formées de tous les côtés et l'enfant a suc-

combé avec une hépatisation terminale d'une partie du pou-

mon droit.

336 RECUEIL DE FAITS.

II. Disons de suite que l'autopsie n'a révélé aucune lésion

tuberculeuse, que la diarrhée n'a laissé aucune trace ' et pas-

sons aux lésions cérébrales qui, à notre avis, méritent tout

particulièrement d'attirer l'attention.

Elles consistaient en une znézziz7go-ezzcéltalite à peu près

généralisée des deux hémisphères et parvenue à des degrés

divers. Çà et là, principalement sur Y hémisphère gauche, en

enlevant la pie-mère, on entraînait des portions plus ou moins

larges et plus ou moins profondes de la substance grise. Il en

était de même sur le lobe temporo-sphéno'idal droit. (PL. VIL)

Mais, et c'est là le point le plus important, sur les trois

quarts environ de la face convexe et de la face interne de l'hé-

misphère droit, la pie-mère entraînait avec elle toute l'épais-

S,WR DE la substance grise, mettant ainsi à nu le squelette de

la substance blanche atrophiée et indurée. (Dans la Pal. VII,

M. Leuba a rendu avec une scrupuleuse exactitude et avec un

remarquable talent, l'aspect des lésions que nous avons dé-

crites.)

C'est, croyons-nous, la première fois que l'on signale des

lésions de ce genre chez un enfant de douze ax ; tout le monde

sait, en effet, qu'on les rencontre, sinon aussi étendues, du

moins aussi intenses dans la paralysie générale progressive. Et,

depuis que nous avons communiqué notre observation à la So-

c/e<e<MM<om ? <e (novembre 1881), M. Baillarger a publié dans

les Annales médico-psychologiques (janvier 1882), une note

dans laquelle il rappelle trois cas de paralysie générale où il a

trouvé la même lésion, caractérisée par la séparation de la

substance grise et de la substance blanche 1. Mais, dans ces trois

cas, cette séparation était circonscrite etn'aifectait paslapresque

totalité de l'hémisphère comme nous l'avons observé 1.

1 Nous avons observé plusieurs cas, de diarrhée idipathique chronique

chez, des enfants idiots des deu\ sexes, se terminant, au bout de plusieurs

semaines ou de plusieurs mois, par la mort, et dans lesquels nous n'avons

relevé aucune lésion macroscopique. Nous publierons prochainement une

note sur ce sujet.

2 Note sur une altération du cerveau, caractérisée par la séparation de-

la substance grise et de la substance blanche des circonvolutions. Voir

aussi : Cabuoit, Traité des maladies inflammatoires du cerveau, etc.

3 Dans plusieurs cas, chez des enfants idiots, également, nous avons

constaté la même lésion, mais circonscrite à quelques circouvolu-

tionsde même que dans les cas de M. Baillarger.

REVUE CRITIQUE

AMBLY0P1E CROISÉE ET IIÉMIANOPSIE

D'ORIGINE CÉRÉBRALE;

ParCB.FÉRÈ.

De GMFE. Comptes rendus de la Société de biologie, 1860, p. 151-154.

CHARCOT. Leçons sur les localisations dans les maladies cérébrales,

4873. Scaôn. Die Leh ? ,e vo2n Gesichtsfelde uiidsie7zen A ? : cma : 6n,

1 874. 13rr,r.ouann. De l'hémianopsie, précédée d'une étude d'analomic,

sur l'origine et l'entre-croisement des nerfs optiques. Thèse de 1880.-

Gille. De l'lvémiopie avec hémiplégie ou héiiiiaîzesthésie. Thèse de

1880. Alora ! ven. Oehii-ii und Azige. 1881. - II. Wilbrand. Weber

Ilenciazzopsie zczzd ihr Verhaltniss zu topischen Diagnose der Gehii)1-

t ! '(tnA7te : <e ? t, Berlin, 4881. Ch. FËRE. Contribution a l'étude des

troubles fonctionnels de la vision par lésions cérébrales, 1882.

Lorsque de Groefe émit l'opinion que dans les lésions céré-

brales, le seul défaut visuel qui pût être observé était l'hémia-

nopsie, il ne trouva pas de contradicteurs. L'hémianopsie d'o-

rigine cérébrale fut acceptée universellement comme une sorte

de dogme. Ce ne fut qu'au boutade quinze ans, que M. Char-

cot, se livrant à une critique serrée des faits observés, arriva à

conclure que non seulement l'hémianopsie n'était pas exclusive-

ment la conséquence d'une lésion cérébrale, mais encore que son

existence n'était nullement démontrée par l'examen anato-

mique, tandis qu'il existait un autre défaut visuel, l'amblyopie

croisée, dont la relation avec certaines lésions cérébrales parais-

sait hors de doute. Mais cette opinion ne fut pas acceptée sans

contestation.

L'étude anatomique des nerfs optiques, du chiasma, des

bandelettes et du faisceau sensitif de la capsule interne ne

' 22

338 REVUE CRITIQUE.

fournit pas de données assez précises pour trancher la ques-

tion. Les rapports de la bandelette, comme on le voit sur la fi-

gure suivante, montrent seulement la possibilité de sa com-

pression par des lésions très diversement situées du cerveau

et de la base du crâne.

Lorsqu'on étudie isolément les résultats obtenus par les au-

teurs qui ont étudié la question par l'expérimentation, on croit

y trouver la solution du problème ; mais si on compare leurs

conclusions on n'y voit plus que contradiction. En ne consi-

Ftg. 9. - Coupe transverso-verticale de l'hémisphère gauche, un peu en

ai nere de la commissure grise. On voit au-dessous de l'expansion pédon-

culaire, sur une ligne verticale passant en dehors de la couche optique,

a coupe irrégulièrement triangulaire de la bandelette optique. (Fere.

Contribution à l'étude des troubles fonctionnels de la vision, etc., p. 5.)

AMBLYOPIE CROISÉE ET HÉMIANOPSIE. 339

dérant que les résultats obtenus sur le singe, par exemple,

nous voyons MM. Ferrier et Yeo placer leur centre visuel à la

fois dans le lobe occipital et dans le gyrus angulaire, tandis

que M. Munk le limite dans le lobe occipital seul. M. Munk,

MM. Lucianni et Tamburini produisent l'hémianopsie exclu-

sivement. M. Couty, au contraire, n'a jamais provoqué que

l'amblyopie croisée, mais il l'a provoquée aussi bien par des

lésions frontales, que pariétales et qu'occipitales. Comment

comprendre que dans les expériences de Ferrier et Yeo,

l'ablation d'un gyrus angulaire peut déterminer une amblyopie

croisée temporaire, que l'ablation d'un lobe occipital peut ne

produire aucun trouble visuel, tandis que la destruction de

ces deux régions ensemble provoque l'hémianopsie du côté

opposé, c'est-à-dire la paralysie de la moitié des deux rétines

du côté correspondant.

En somme, les résultats obtenus par la physiologie expéri-

mentale ne sont pas de nature à entraîner une conviction. Si,

en outre, on tient compte de la difficulté qu'on doit éprouver

pour constater chez un animal l'étendue d'un défaut visuel,

déjà si difficile à préciser chez l'homme, on reste très sceptique

sur l'hémianopsie et l'amblyopie des singes et sur les moyens

de les provoquer.

D'ailleurs ces résultats fussent-ils aussi nets qu'on a voulu

le dire, ils ne prouveraient rien pour l'homme, car rien ne

démontre que l'entre-croisement des fibres optiques est le

même chez le singe que chez l'homme. M. Munk ne dit-il pas

qu'il a constaté que les mêmes lésions produisaient des

troubles divers chez des chiens de race différente.

Il n'y a donc que les faits de pathologie humaine qui

puissent éclairer la question ; l'expérimentation ne peut que

servir à guider et à corroborer l'observation clinique.

Les faits tirés de la pathologie humaine sont loin d'avoir

tous la même valeur; la plupart en effet manquent de contrôle

anatomique et, dans bon nombre de faits où l'autopsie a été

faite, la localisation de la lésion manque de précision.

Si nous considérons l'ensemble des faits cliniques dans les-

quels nous trouvons des défauts visuels coïncidant avec des

troubles imputables à une lésion unilatérale du cerveau ; nous

voyons que ces troubles visuels répondent à deux types bien

distincts, l'amblyopie croisée et l'hémianopsie.

340 REVUE CRITIQUE.

L'amblyopie est caractérisée par un rétrécissement concen-

trique du champ visuel avec achromatopsie absolue ou partielle

et diminution de l'acuité visuelle. Cette amblyopie prédomine

du côté opposé à la lésion cérébrale, mais elle existe ordinai-

rement à un certain degré du même côté.

L'existence de cette amblyopie en relation avec les lésions

cérébrales était déjà mise en lumière par ce fait qu'on la ren-

contre à l'état typique, pour ainsi dire, dans l'hémianesthésie

des hystériques, qui semble bien due à un trouble unilatéral

du cerveau. Ce trouble visuel est le seul que l'on puisse ren-

contrer chez les hystériques, malgré les faits en apparence

contradictoires cités par 1M. Bellouard et Rosenthal; il n'existe

pas d'observations prouvant l'existence de l'hémianopsie

d'origine hystérique. Mais l'amblyopie des hystériques peut

présenter des variations dans la forme et l'étendue du rétré-

cissement concentrique. ,

Toutefois, en l'absence d'autopsie, l'amblyopie hystérique

pourrait n'être pas considérée comme suffisante pour démon-

trer l'existence d'une amblyopie liée à une lésion cérébrale dé-

terminée : une observation de M. Charcot concernant une hé-

miplégique hémianesthésique, non hystérique, constituait une

preuve qui n'avait pas été considérée par tous comme irré-

futable. Mais, depuis lors, les observations de Pitres, de Muiler,

de Bernhardt, de Petrina et les nôtres sont venues démontrer la

relation qui existe entre l'amblyopie et certaines lésions céré-

brales ; et, sauf le fait de Petrina dans lequel le trouble visuel

est en rapport avec une lésion corticale du lobe occipital, tou-

jours il s'agit de lésions siégeant à la partie postérieure du

pied de la couronne rayonnante ou dans son expansion. Cette

localisation confirme pleinement l'opinion émise tout d'abord

par M. Charcot. Cette amblyopie d'origine cérébrale est toujours

associée à un certain degré d'hémianesthésie ou, comme nous

l'avons montré, d'hémidysesthésie. Toutefois, et c'est encore un

point sur lequel nous avons insisté particulièrement, l'anesthé-

sie cutanée peut être limitée à la région qui avoisine l'oeil.

Quand une lésion cérébrale détermine des troubles seusitifs

des téguments de l'oeil, il faut chercher les troubles sensoriels

de l'organe et on les trouve ; ces troubles sensoriels manquent

au contraire lorsque l'hémianesthésie n'atteint pas la face,

comme nous en avons rapporté un exemple. Cette relation

des troubles sensoriels et des troubles sensitifs des téguments

AMBLYOPIE CROISÉE ET HÉMIANOPSIE. 341

qui recouvrent l'organe atteint se retrouvent d'ailleurs avec la

plus grande netteté chez les hystériques, comme nous l'avons

indiqué ailleurs '.

Lorsqu'il s'agit d'amblyopie cérébrale, les faits cliniques

purs ont presque la même valeur que les faits suivis d'autopsie,

car le trouble visuel ne peut guère être déterminé à distance

parla lésion qui produit les autres symptômes cérébraux. Les

faits purement cliniques d'hémianopsie qui peuvent, comme

l'amblyopie, se trouver associés à l'hémiplégie, à l'hémianes-

tésie, etc., sont loin d'avoir la même valeur; car on peut, pour

la plupart des cas, être autorisé à soupçonner une action à

distance sur la bandelette optique, et un grand nombre de faits

anatomiques que nous avons rapportés montrent bien que

cette action à distance n'est pas rare et qu'elle peut se rencon-

trer dans des circonstances très variées. Aussi doit-on. rejeter

comme peu démonstratifs les faits de traumatismes, de tu-

meurs, d'abcès, de vastes foyers hémorrhagiques, car dans ces

cas il n'est guère possible d'apprécier réellement l'action de la

lésion. Toutefois, certains faits d'hémorrhagie assez bien limi-

tés, comme ceux de MM. Baumgarten et Dreschfeld, méritent

considération, surtout si on les rapproche des faits de ramol-

lissement, dans lesquels l'action à distance ne peut jouer aucun

rôle ; ils semblent prouver qu'une lésion limitée du carrefour

sensitif peut déterminer une hémorrhagie associée à l'hémia-

nesthésie. Mais les faits de ramollissement, rapportés

par MM. Curcshmann et Westphal nous paraissent sur-

tout péremptoires, et démontrent nettement qu'il existe une

relation entre l'hémianopsie et les lésions très étendues^du lobe

occipital. D'autre part, un fait de M. Hujuenin, dans lequel

l'hémianopsie était en rapport avec une lésion située au voisi-

nage de la partie inférieure du sillon de Rolando semble indi-

quer que si les larges pertes de substances observées dans les

faits de MM. Curschmann et Westphal ont déterminé les mêmes

symptômes, ce pourrait bien être parce qu'ils touchaient en ar-

rière la même région, c'est-à-dire la limite postéro-inférieure

de la zone motrice. Cette localisation du centre de l'hémianop-

sie dans la partie postéro-inférieure du domaine de l'artère

sylvienue pourrait encore s'appuyer sur certains faits de

migraine ophtalmique dans lesquels, on voit coïncider l'hémia-

1 Archives de Neurologie, 11- 9, p. 281 et suiv.

3V2 REVUE CRITIQUE.

nopsie, avec l'aphasie un engourdissement avec parésie de la

moitié de la face et du bras, etc., phénomènes qui peuvent être

attribués à un trouble circulatoire de la sylvienne par irrita-

tation du plexus carotidien.

AMBLYOPIE CROISÉE ET HEMIANOPSIE. 313

Mais un fait important et sur lequel nous avons appelé l'at-

tention, c'est que dans les cas d'hémianopsie avec hémianes-

thésie, lorsque le champ visuel a été pris d'une façon régu-

lière, on semble avoir presque constamment noté l'existence

d'un certain degré de rétrécissement concentrique prédominant

du côté de l'hémianesthésie. Ce pourrait bien être là la carac-

téristique de l'hémianopsie d'origine cérébrale(rir.30)'. I. Fer-

rier avait observé que l'intégrité de la vision centrale et de la

région avoisinante semblait spéciale aux hémaniopsies d'ori-

gine cérébrale, mais nous ferons remarquer que dans le cas

de M. Westphal en particulier, le défaut atteint la vision cen-

trale.

En somme, il parait démontré aujourd'hui que l'amblyopie

et l'hémianopsie peuvent résulter d'une lésion cérébrale avec

intégrité des nerfs optiques et des bandelettes ; il est bien

prouvé que l'amblyopie est en rapport avec les lésions de la

@partie postérieure de la capsule interne ; mais elles semblent

aussi pouvoir être déterminée par certaines lésions du lobe

occipital (fait de Petrina). Quant à l'hémianopsie, elle semble

aussi pouvoir être déterminée par des lésions soit corticales,

soit centrales : les lésions corticales ne peuvent qu'être grossiè-

rement localisés en arrière de la région motrice ; les lésions

centrales siègent aussi au voisinage du carrefour sensitif, mais

il n'est guère possible, dans l'état actuel, de la différencier de

celles qui produisent l'amblyopie. Cette difficulté de différen-

ciation tient-elle à ce qu'il existe des variétés d'entre-croisement

de fibres optiques analogues aux variétés d'entre-croisement que

l'on observe dans le bulbe pour les fibres motrices ? La chose

est possible mais non démontrée.

Si on considère qu'une lésion cérébrale produisant l'amblyo-

pie croisée détermine en même temps un certain degré d'am-

blyopie du côté correspondant, que d'autre part une lésion

cérébrale peut déterminer la paralysie des fibres rétiniennes de

la moitié externe de l'oeil correspondant, et de la moitié interne

de l'oeil opposé, la vision centrale étant presque toujours res-

pectée dans tous les cas, on est forcé d'admettre que chaque

oeil a une relation bilatérale avec les hémisphères cérébraux,

qui ont surtout des relations multiples avec le centre physio-

logique de la rétine.

1 réré, loc.cit., p. 84.

34le revue d'anatomie.

Il faut convenir, toutefois, que les connexions du cerveau et

de l'oeil ne peuvent pas être établies d'une façon assez claire

pour qu'on puisse en faire une construction théorique, une

schématisation qui vaille beaucoup plus qu'un moyen mnémo-

technique.

REVUE D'ANATOMIE

I. SUR QUELQUES POINTS DE l'anatomie ET la. physiologie DU

cerveau ET LEURS applications pratiques; par Ambrose-L.

RANNEY. (7%eM;-ym ? ? nMM/OM)'Ha/, mai 1881, p. 5t3-

546.)

Ce travail, rédigé d'après un ouvrage de l'auteur, n'est qu'une

compilation, d'ailleurs intéressante, des recherches antérieures

sur le même sujet.

II. Du ciiiasma des nerfs optiques; par le Dl Stilling (de Strasbourg).

(Congrès de Bade, 1880. Arch. f. Psychiatrie.)

Les deux corps quadrijumeauxsont des noyaux du nerf optique,

celui-ci, aux termes de ces recherches, ne possédant pas moins de

10 racines cérébro-médullaires. P. K.

III. DE la DISTRIBUTION DU NERF OPTIQUE dans la rétine DU

lapin; par le D1 Bum,i, de Munich. (Congrès de Bade, 1880.

Archiv. f. Psychiatrie.)

Déjà Gudden (A ? ,ch. f. oplatlealmol., XXVI) avait démontré

que l'entre-croisement des fibres du nerf optique dans le chiasma

n'est que partiel ; le Dl Bumm fournit la preuve expérimentale

et ophthalmoscopique que le faisceau non croisé de ce système

REVUE d'anatomie. 3t5

vient s'épanouir sur la surface temporale de la rétine ; il montre

en outre, par les mêmes procédés, que l'expansion du nerf

optique est indépendante des autres couches de la rétine, y

compris celle des cellules nerveuses. P. K.

IV. Anatomie des tubercules antérieurs des corps quadrijumeaux; par

le Dr Causer, (de Munich.) (Congrès de Bade 1880. Archiv. f.

Psychiatrie.)

Cette étude faite chez la chauve-souris, la taupe et le lapin,

entraine la conviction que la couche moyenne des fibres de ces or-

ganes contient le système de projection centrale du sens de la vue,

entre autres parties constituantes. P. K.

V.Du FAISCEAU LONGITUDINAL POSTÉRIEUR DE LA CALOTTE ' DANS

la moelle allongée; par le Dl ROLLER, de Strasbourg.

(Congrès de Bade, 1880. Arch. f. Psyclaziztrie.)

M. Roller confirme en partie les vues de Meynert et, suivant le

trajet de ces fibres dans les noyaux du 4° ventricule, il conclut

en disant que le faisceau en question représente un trajet

direct entre la base du cerveau et les noyaux du plancher du

ventricule cité ; qu'il constitue en outre un trait d'union direct

avec la moelle, plus direct sans nul doute que les pyramides

perdues dans la protubérance. P. K.

VI. DÉCUSSATION DES FIBRES INHIBITOIRES DE LA MOELLE ; par OTT

et SniITH. (7oM'Kao/'7Ve ? 'uoMS,aH ? en<a7)M<'sse. Chicago

Janvier 1880.)

On observe chez certains animaux paraplégiques une con-

traction rhythmique du sphincter anal : Gluge et Goltz sont

les auteurs qui les premiers ont observé ce phénomène.

MM. Ott et Smith ont été amenés par des travaux antérieurs

au présent mémoire à admettre, dans les couches optiques, des

centres inhibiloires empêchant les contractions rhythmiques

des sphincters anal et vaginal ; les fibres émanées de ces cen-

1 On peut, à propos de la terminologie allemande, se reporter au

livre de Huguenin sur les centres nerveux. (Traduction française, 1879.)

3t6 revue d'anatomie.

très seraient contenues dans les cordons latéraux de la moelle.

D'après ces notions, c'est à la solution de continuité de ces

fibres que serait due l'apparition des contractions spasmo-

diques des sphincters. MM. Ott et Smith ont entrepris une

série d'expériences dans le but de déterminer si ce faisceau

subissait la décussation, et dans ce cas où celle-ci avait lieu.

Ces expériences, dans le détail desquelles nous ne pouvons

entrer ici, ont été faites d'après la méthode suivante : les ani-

maux sont trachéotomisés, chloroformisés et la respiration

artificielle est établie ; on pratique alors par une fenêtre de

trépan la section d'un hémisphère cérébral immédiatement eu

arrière de la couche optique, puis une hémi-section de la

moelle ou seulement du cordon antérn-latéral, tantôt du côté

correspondant, tantôt du côté opposé; cette section est faite

au-dessus ou à la limite de la région lombaire, de manière à

laisser le centre ano-spinal en dehors de l'expérience.

Les examens histologiques pratiqués à la suite de ces vivi-

section, ont conduit MM. Ott et Smith à conclure que les fibres

inhibiloires arrêtant les contractions rhythmiques des sphinc-

ters, prennent naissance dans les couches optiques, puis des-

cendent dans l'axe gris, et, à leur extrémité inférieure, subissent

la décussation pour rejoindre le cordon latéral du côté opposé,

dans lequel elles continuent leur route vers le centre ano-spi-

nal. H.D'O.

VII. STRUCTURE DU PIED DU PÉDONCULE cérébral ET DU noyau

lentiforme ; par J. PASTËRNATZKY, 1881.

Les recherches de M. Pasternatzky ont été faites au moyen

de coupes transparentes très étendues sur lesquelles il a pu

suivre à la loupe ou même à l'oeil nu le trajet de certains

groupes de fibres. C'est par erreur que l'auteur dit que ces

coupes sont pratiquées suivant une direction oblique de haut

en bas et d'arrière en avant, c'est en sens inverse qu'elles sont

faites, c'est-à-dire parallèlement, ou à peu près, aux fibres du

pédoncule cérébral. Du lobe occipital du cerveau on voit

partir quatre groupes de fibres : 1° les unes se dirigent vers la

capsule externe ; 2° d'autres vont former en partie les tractus

blancs antéro-postérieurs qui séparent les segments du noyau

lenticulaire du corps strié; 3° d'autres se jettent dans la couche

revue d'anatomie. 34Î

optique et les corps genouillés; 4° d'autres enfin vont former

la partie externe du pied du pédoncule, le faisceau sensitif de

Tiirck. Ce dernier faisceau peut être suivi dans la partie externe

et inférieure du pont de Varole; il se distingue des faisceaux

moteurs en ce que ses fibres au lieu d'être rectilignes sont on-

dulées. Il existe des fibres, très fines qui paraissent naître

des cellules pigmentées de la substance de Soemmering et qui

se rendent dans la partie interne du pied du pédoncule.

D'autres fibres partent du noyau rouge pour se diriger aussi

vers la partie interne du pied du pédoncule. Du tubercule

quadrijumeau postérieur sortent des faisceaux qui vont dans

la partie externe du pied du pédoncule, immédiatement en

dedans du faisceau de Tiirck. Presque toute la partie interne

du pied du pédoncule est constituée par des fibres venues de la

capsule interne et du noyau lenticulaire du corps strié.

Tous les faisceaux qui passent du tegmentum dans le pes du

pédoncule s'entrecroisent dans le noyau lentiforme (noyau de

Luys), qui reçoit des fibres venant : 1° du noyau rouge, 2° de

la substance de Soemmering, 3° du tubercule quadrijumeau

postérieur, 4° du pied du pédoncule. Le faisceau de Türck est

tout à fait libre de toute connexion avec ce noyau ; il est tou-

jours situé en dehors.

D'après l'examen de ces préparations, l'orateur dit que le

noyau lenticulaire du corps strié est divisé en quatre segments

au lieu de trois comme on l'admet généralement. Nous avons

recherché cette disposition sur des cerveaux frais, en prati-

quant des coupes parallèles à la direction du pédoncule et pas-

sant par la commissure blanche antérieure et par le locus niger,

'et nous nous sommes assuré qu'en effet, à ce niveau, le segment

interne du noyau lenticulaire est divisé par un tractus blan-

châtre a direction oblique d'avant en arrière et de dedans en

dehors, et le segment moyen est divisé de la même manière ;

mais les subdivisions sont beaucoup moins marquées que les

divisions déjà connues. Ou. F.

VIII. Variétés des circonvolutions cérébrales DE l'homme ;

par C. Giacomini, Torino, Ermano Loescher, 1882.

L'auteur pense que les variétés si fréquentes dans la dispo-

sition de l'écorce cérébrale, ne sont pas des déviations du type

3 4s REVUE d'anatomie.

normal, mais plutôt de légères modifications survenues dans

l'exécution de celui-ci; d'ailleurs, le type normal serait encore

bien loin d'être fixé, à tel point qu'on ne pourrait reconnaître

actuellement les caractères ethniques que doivent présenter

les cerveaux des différentes races. Un grand nombre des

variétés relevées sur les cerveaux humains peuvent se retrouver

comme en germe dans les cerveaux des animaux. Dans l'état

actuel de nos connaissances, il est impossible d'affirmer que

la disposition de l'écorce cérébrale soit en connexion avec le

degré du développement intellectuel.

L'auteur a recherché quelle était la fréquence des sillons

anormaux ou des circonvolutions anormales sur l'un et l'autre

hémisphères. Sur 164 cerveaux examinés, il a trouvé

93t sillons surnuméraires à droite, et 1,005 à gauche ; 617 plis

de passage et d'anastomose à droite et 621 à gauche ; de

cette statistique, il résulte que les variétés des sillons sont un

peu plus fréquentes que celles des plis de passage ; la moyenne

pour les sillons est de 6,12 pour l'hémisphère gauche, et de

5,67 pour l'hémisphère droit, celle des plis serait de 3,76 égale

pour l'un et l'autre hémisphère.

L'auteur fait les plus entières réserves au sujet de la disposi-

tion qu'auraient, d'après Benedikt, les circonvolutions chez les

criminels; d'après ses statistiques, loin de dire qu'ils constituent

un type à sillons confluents, on devrait plutôt les considérer

comme ayant des plis anastomotiques plus fréquents; mais en

somme il est plus juste de ne pas leur reconnaître de type

spécial.

Quelque asymétrique que paraisse être la disposition de

l'écorce dans les deux hémisphères, on peut cependant, en

général, retrouver dans un des hémisphères, l'indice des varié-

tés nettement caractérisées dans l'autre ; cependant il est cer-

taines variétés dans les lobes pariétaux et temporaux qui

semblent rester tout à fait unilatérales.

L'auteur ajoute que l'étude des variations dans l'arrange-

ment de l'écorce cérébrale ne doit pas porter seulement sur

la disposition extérieure, mais aussi sur la structure de celle-ci

et qu'il est indispensable de persévérer dans la voie tracée par

les travaux deBetz. P. M.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE

XIX. NOTE SUR la relation ENTRE la SYPHILIS ET l'ataxie

locomotrice; par J. Althaus, (TVte Laîteit, 17 septembre

1881.)

Sur trente-deux hommes atteints d'ataxie locomotrice,

M. Althaus eu a trouvé vingt-huit qui avaient des antécédents

syphilitiques. L'ataxie s'était manifestée de dix-huit mois àvingt

ans après l'apparition de la syphilis ; mais ils ne prouvent pas

qu'il y ait relation de cause à effet entre les deux maladies

pour-des raisons très diverses. Le tabes existait certainement

en Europe longtemps avant l'apparition delà syphilis. L'ataxie

n'est pas une conséquence inévitable ou commune de la syphi-

lis ; elle parait se développer chez les syphilitiques qui ont

une constitution névropathique, à lasuite d'accidents, d'excès,

etc. L'iodure de potassium, même à haute dose, n'est qu'ex-

ceptionnellement utile aux syphilitiques ataxiques qui se

trouvent soulagés comme les autres par des remèdes qui n'ont

aucune action sur la syphilis. Il est possible que la syphilis

puisse imiter l'ataxie; mais les symptômes cliniques du tabes

syphilitique ou non syphilitique sont identiques. Que l'ataxie

soit si souvent associée à la syphilis, cela peut tenir à la dété-

rioration de la constitution déterminée par la diathèse.

Ch. F.

XX. Contribution A l'étude DES crises laryngées tabétiques ;

par CHERCHEWSKY. {Revue de médecine, 1881.) .)

L'auteur, après avoir rapporté dix-huit cas de crises laryn-

gées tabétiques, passe à l'analyse de ces faits signalés pour la

première fois par M. Féréol et qui, d'après M. Charcot, se-

raient beaucoup plus fréquentes qu'on ne le croit générale-

ment. Le caractère général des troubles laryngés tabétiques,

3b0 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

consiste essentiellement dans une toux spasmodique, analogue

à celle de la coqueluche, apparaissant par attaques et s'ac-

compagnant parfois de spasmes de la glotte, d'étouffements

plus ou moins forts, d'asphyxie et quelquefois même de con-

vulsions. Ces attaques présentent une intensité variable qui a

permis à M. Cherchevsky de les classer en trois catégories :

faibles, moyennes, fortes. Elles surviennent tantôt subite-

ment, soit au milieu d'une conversation, interrompant un mot

commencé, soit pendant le sommeil, tantôt après des pro-

dromes, qui consistent en une sensation de brûlure ou de

corps étranger ; elles peuvent être déterminées par un rhume,

un effort, un courant d'air, etc. Leur durée peut varier de

quelques secondes à une demi-heure ; quelquefois même elles

se prolongent plusieurs heures. Leur apparition n'est soumise

à aucune règle ; elles paraissent cependant plus fréquentes

pendant le jour; elles peuvent se répéter jusqu'à cinquante

fois dans les vingt-quatre heures. Dans les quelques cas où

l'examen laryngoscopique a été fait, on a pu s'assurer qu'il

s'agit de phénomènes purement spasmodiques. Quelquefois

cependant, on a constaté des paralysies ou des parésies limitées :

M. Krishaber explique cette existence simultanée de la paralysie

avec les spasmes, en disant que la paralysie d'un muscle pro-

voque facilement le spasme de son antagoniste. Quant à la

physiologie pathologique de ce spasme, M. Charcot pense

qu'il s'agit d'une hyperesthésie de la muqueuse du larynx et

d'une byperexcitabilité des centres nerveux, par suite de

laquelle l'irritation du larynx provoque une action réflexe con-

sidérable. L'anatomie pathologique se résume dans les deux

autopsies de Cruveilhier et de Jean : dans la première, il y

avait une dégénération grise des cordons postérieurs et des

corps restiformes ; dans le second, on trouva un amincissement

considérable des origines des nerfs pneumo-gastrique et spi-

nal, dégénération grise des pyramides etdes cordons postérieurs

et un petit foyer de ramollissement dans le corps restiforme

gauche. Ces phénomènes, qui appartiennent bien nettement à

l'ataxie, peuvent apparaître dès le début de l'affection et rester

longtemps isolés ; mais souvent même lorsqu'ils se sont asso-

ciés les autres troubles pathognomoniques du tabes dorsal,

leur intensité leur fait conserver une importance prédomi-

nante dans le tableau symptomatique. C. F.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 351

XXI. DE la paralysie DU nerf MOTEUROCULAIRE EXTERNE CONSÉ-

CUTIVE aux traumatismes du crâne ; par F. Panas. {Archives

d'ophthalmologie, nov. et déc. 1880.)

Frappé depuis longtemps de la fréquence de la paralysie

traumatique de la 6° paire et peu satisfait de l'explication don-

née par son élève Chevallereau, M. Panas étudia minutieuse-

ment le trajet intra-crànien du nerf.

Dans la fosse cérébrale postérieure, l'arachnoïde et la dure-

mère le séparent de la paroi osseuse. Parvenu au niveau du

rocher, il perfore la dure-mère qui l'applique directement

contre le sinus pétreux inférieur, puis contre la face postérieure

de l'os. Au moment où il se réfléchit sur son bord supérieur,

il passe sous le sinus pétreux supérieur qui contribue à le fixer

encore plus solidement. Dans le sinus caverneux, un mince

feuillet celluleux le sépare seul de la face externe de la caro-

tide, rapport important. Au-delà de la fente sphénoïdale, la

dure-mère l'enveloppe et l'isole si bien qu'exceptionnellement

les fractures de l'étage antérieur peuvent l'intéresser. Quant à

la troisième et la quatrième paires, elles sont parfaitement iso-

lées du rocher et de la carotide. - La fréquence des fractures

du rocher, les rapports particuliers du nerf moteur oculaire

externe avec cet os, son bord tranchant surtout, et sa fixité,

tout est réuni pour faciliter sa lésion dans les fractures du

crâne. Une remarquable observation de Jacobi corrobore

par l'autopsie l'opinion de M. Panas. A la production de la pa-

ralysie, la rupture du nerf n'est pas nécessaire. Sa compres-

sion, sa contusion, son inflammation par propagation suffisent.

Cette dernière éventualité explique l'apparition tardive de la

paralysie. D. BERNARD.

XXII. CONTRIBUTION A l'étude de la migraine ophthalmique ;

par Ch. 1 >JRS. {Revue de médecine, 1881.)

L'auteur se propose d'établir l'autonomie trop souvent mé-

connue de cette affection, décrite d'ailleurs depuis longtemps

sous des noms divers, en mettant en lumière et les traits prin-

cipaux de la maladie et certaines particularités de son évolu-

tion importante pour le pronostic, d'après les observations

prises surtout à la consultation de M. Charcot à la Salpêtrière.

352 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

Maladie de l'âge adulte et de l'âge mûr, plus fréquente chez

les goutteux, les anémiques, les nerveux, la migraine ophthal-

mique, atteint souvent des sujets de bonne santé habituelle,

et à peu près également les deux sexes. Spontanément ou

à la suite du travail intellectuel prolongé, d'un excès, de trou-

bles gastriques, l'affection apparaît d'emblée avec tous ses ca-

ractères. Exceptionnellement les troubles oculaires s'entent

sur une migraine habituelle simple. Obnubilation passa-

gère de la vue, hémiopie transitoire homonyme, rarement

croisée, supérieure ou inférieure, cécité complète, tels sont les

divers phénomènes qu'on peut observer du côté de la vision et

que domine par sa spécialité le scotome scintillant, isolé ou

combiné à eux, sous ses diverses formes. C'est un scotome

latéral limité par un bord étincelant. Le malade ne le dit

externe que parce qu'il prédomine dans l'oeil affecté du côté

externe ; il est véritablement hémiopique. Il faut plusieurs atta-

ques pour que les malades se rendent bien compte d'un symp-

tôme qui ne fait d'abord que les éblouir. Pareil à un globe

de feu, à une zone dentée rouge ou blanche, phosphorescente,

vibrante et tournante qui s'élargit et s'ouvre d'un côté, tandis

que son centre s'obscurcit et que ses bords se découpent de plus

en plus, il ne consiste plus finalement qu'en une ligne verticale

brisée et irisée qui disparaît. Durant l'attaque, on a constaté

avec la dilatation ou le rétrécissement de la pupille, une ané-

mie papillaire, origine de plusieurs théories pathogéniques.

Des accidents névralgiques, une sensation de tension oculaire

ont fait croire à un glaucome aigu. Après un temps variable

de quelques minutes à une heure et plus, éclate la douleur

céphalique frontale, temporale, ou pariétale. Très limitée

d'abord, elle envahit tout un côté du crâne, tout le crâne même

et s'accompagne de vertiges, qui ont pu être constatés dès la

période précédente. Des nausées et des vomissements ter-

minent l'accès.

Tel est le syndrome type, complet, à, côté duquel l'auteur

étudie les migraines apthalmiques frustes. Alors les troubles

oculaires constituent seuls, pendant longtemps, toute l'affection.

Une migraine légère les suit ou au contraire, ils sont si fugaces

qu'on croit à une migraine simple. Les divers symptômes sont

dissociés, séparés dans leur apparition par plusieurs jours.

L'aphasie dans ces diverses modalités est l'accident qui se

surajoute le plus fréquemment aux phénomènes décrits plus

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 353

haut, celui qui impressionne le plus fâcheusement le malade.

Puis viennent par ordre de fréquence les troubles de la sensi-

bilité (fourmillement, endolorissement, sensations de froid) et

beaucoup plus rarement ceux de la motilité (parésies ou para-

lysies). Ils occupent le membre supérieur, tout un côté du corps,

le corps entier parfois. En outre, la migraine ophthalmique

coïncide avec des attaques épileptiformes, peut se substituer

à de véritables attaques d'épilepsie. Serait-elle alors de l'épi-

lepsie larvée ? On ne devra pas confondre ces cas avec les trou-

bles oculaires prémonitoires de l'attaque d'épilepsie qui ne

ressemblent aucunement à ceux de la migraine ophthalmique.

Si le caractère de ces symptômes et de ces accidents est

d'être transitoires, de courte durée, M. Charcot a montré qu'ils

peuvent , l'hémiopie, les scotomes, l'aphasie surtout, persister,

s'établir même définitivement; ce qui, non moins que les rela-

tions de la maladie avec l'épilepsie, rend fort incertain l'avenir

d'une migraine ophthalmique.

Quant à la physiologie pathologique, fort obscurcie par ces

accidents, M. Féré, s'appuyant principalement sur les travaux

de M. Reynaud, sur l'aphyxie locale des extrémités, pense que

la migraine ophthalmique dépend d'une anémie cérébrale con-

sécutive elle-même à une excitation du sympathique. Des con-

gestions, de la nécrobiose même pourraient la suivre et ainsi

s'expliqueraient les troubles permanents. D. BERNARD.

XXIII. CONTRIBUTION A l'étude DES phénomènes NERVEUX,

nommés réflexes tendineux ; par J.-L. Prévost. {Revue

anéd. de la Suisse Romande, 1881, nos 1, 2, 3.)

Le travail très intéressant de M. le professeur Prévost est

divisé en deux parties. La première est en quelque sorte une

revue, ayant pour objet les réflexes tendineux ; la seconde,

contient les expériences et les conclusions de l'auteur.

Pi entière partie. M. Prévost rappelle les expériences par

lesquelles Brown-Séquard, en lésant la moelle, obtint l'épilep-

sie spinale (1858) ; puis les travaux de Charcot et Vulpian

(1866) et de leurs élèves (Bouchard, P. Dubois, 1868), sur la

trépidation épileptoïde des membres (phénomène du pied, clonus

du bras). En 1874, Erb et Westphal rapprochent de ces faits,

23

354 REVUE DE pathologie NERVEUSE.

la contraction du triceps crural qui suit la percussion de son

tendon (phénomène du genou). Mais, tandis que le phénomène

du pied n'apparaît que dans les cas pathologiques, celui du

genou est physiologique. Berger n'a constaté son absence que

dans 1,56 cas sur 100. L'absence de ce phénomène est consi-

dérée comme un symptôme important du début de l'ataxie

locomotrice, quand la sclérose atteint la région lombaire

(Westphal, Erb, Erlenmeyer). Le réflexe patellaire fait égale-

ment défaut dans les polyomyélites antérieures aiguës ou

chroniques. Au contraire, les phénomènes tendineux sont

exagérés dans tous les cas où l'on observe une certaine rigidité

musculaire (scléroses du faisceau pyramidal primitives ou con-

sécutives, contracture hystérique).

L'interprétation physiologique de ces phénomènes a été

diversement donnée. Westphal admet qu'il s'agit d'une con-

traction directe, produite par les vibrations du tendon. Erb en

fait un réflexe déterminé par l'excitation de fibres nerveuses

tendineuses (Tschiriew a démontré l'existence de ces fibres);

Schulze et Furbringer, ayant constaté que la section du crural

abolit la contraction du côté correspondant, et que la percus-

sion détermine quelquefois un mouvement qui se propage

jusqu'au membre du côté opposé, se rangent à l'idée qu'il

s'agit d'un phénomène réflexe.

Quelques auteurs ont cherché à résoudre la question en

étudiant les phénomènes tendineux par la méthode graphique.

Le temps qui s'écoule entre l'excitation du tendon et la contrac-

tion du muscle a servi particulièrement d'argument ; mais les

divers observateurs sont arrivés à des opinions absolument

discordantes. G. Burckhardt pense que les phénomènes tendi-

neux sont des réflexes, dont les ganglions spinaux sont le

centre ; Brissaud en fait des réflexes médullaires ; Gowers

pense que le clonus du pied résulte de l'excitation directe,

tandis que le phénomène du genou est de nature réflexe ; enfin,

A. Waller rejette l'idée d'un réflexe et pense que la moelle

n'agit qu'en maintenant le tonus musculaire qui est néces-

saire à la production du phénomène.

Par des sections méthodiques portant sur la moelle et les

racines, Tschiriew pense avoir démontré que les phénomènes

tendineux sont des réflexes qui utilisent pour se produire la

6° paire lombaire chez le lapin, probablement la 3° et la 41

chez l'homme. '

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 355

Deuxième partie. -Ici M. Prévost rapporte trois séries d'ex-

périences qu'il a entreprises dans le but d'élucider la question

de la nature du réflexe tendineux.

Par la première série de recherches, il a confirmé les faits

suivants : Il la section du crural abolit le réflexe du genou

(Schulze et Fùrbringer) ; 2° la section de la racine postérieure

de la 6° paire lombaire, chez le lapin, abolit le réflexe du genou

(Tschiriew) ; celle des racines postérieures voisines n'a pas

d'inflence sensible, à moins que l'on n'atteigne les racines du

sciatique; dans ce cas on obtient une augmentation du réflexe,

de même façon que lorsque, ainsi que l'a fait Tschiriew, on

sectionne le sciatique lui-même.

Dans la seconde série d'expériences, M. Prévost étudie l'effet

du curare et des anesthésiques. Le premier de ces corps abolit

le réflexe, ainsi que l'ont démontré Schulze et Fùrbringer.

L'anesthésie par le chloroforme aboutit au même résultat,

quand elle est très profonde ; il semble en être de même pour

l'éthérisation ; mais la morphine n'agit nullement dans le

même sens, peut-être même exa,ère-t-elle le phénomène ;

c'est ce dernier effet qui s'est également produit à la suite d'une ! injection intraveineuse de chloral.

Enfin dans la troisième série de ses expériences, M. Prévost,

emploie un procédé nouveau pour l'étude du réflexe tendineux :

l'anémie médullaire obtenue par la compression de l'aorte. On

sait, par les travaux de Brown-Séquard, Schiff, Kùsmaul,

Vulpian, etc., que l'anémie abolit rapidement les propriétés

physiologiques de la moelle, tandis qu'elle laisse persister assez

longtemps celle des muscles et des nerfs. Or, la compression

de l'aorte produit d'abord l'exagération des phénomènes tendi-

neux ; mais bientôt (i-0-45 secondes) elle les abolit, et cet état

d'inertie persiste d'autant plus longtemps après rétablissement

de la circulation, que l'espace de temps pendant lequel celle-ci

est resté interrompue, a été plus considérable. De ces faits,

M. Prévost conclut que le phénomène du tendon est bien un

réflexe, lequel est provoqué par l'excitation du tendon lui-

même, et non par celle de la peau ; ce réflexe use pour se

produire de la 6° paire lombaire chez le lapin (3e ou 4° de

l'homme).

Cependant on pourrait, dit-il, « se demander, avec M. A.

Waller, si le phénomène du genou, tout en ayant besoin de

l'intégrité de la moelle pour se produire, n'est pas dû à l'exci-

356 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

talion directe du muscle. » La transmission du réllexe du

côté opposé lui semble un fait incompatible avec cette manière

de voir. Mais dans un mémoire ultérieur, publié avec la colla-

boration de M. A. Waller ', M. Prévost reconnaît que le mou-

vement du côté opposé est un mouvement d'ensemble du

membre, et non une contraction du triceps crural seul. En

effet, lorsqu'on a sectionné toutes les racines postérieures d'un

membre, et même, en outre, tous les nerfs de ce membre, on

abolit bien le réflexe de ce côté, mais sans détruire le mouve-

ment du côté opposé. Celui-ci serait produit par la transmission

directe des vibrations auxquelles donne lieu la percussion. Ces

faits sont de nature à faire subsister le doute entre la théorie

du réflexe et celle de M. Waller. A. MAYOR.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE

XII. SUR LA CONNEXIONQUI EXISTE ENTRE L'ÉTAT MENTAL ET L'INÉ-

GALITÉ DES PUPILLES DANS LA PARALYSIE GÉNÉRALE ; par

Francis WYAT-THURNAIL (M. B.), médecin à l'asile de Bristol.

Analyse du Dl Ch. Guyot, de Tirlemont. ( Bulletin de la

Soc. de Iléd. mentale de Belgique, 1880.)

D'une statistique établie sur soixante-treize cas, il résulte que

la dépression mentale est généralement associée, dans la para-

lysie générale , à la dilatation de la pupille droite et à la contrac-

tion de la gauche. Par contre, une certaine exaltation s'accom-

pagne d'une contraction de la pupille droite avec une légère

dilatation de la gauche ; proportion, 67. p. 100 ; cas opposés, 25 ;

cas douteux, 11 p. 100. Voici les déductions qu'en tire l'au-

teur :

1 Rev. med. de la Suisse Romande, t. I", 1881, il- 6. '

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 357

1° La dépression précédant ordinairement l'exaltation dans

la paralysie générale, la maladie était probablement à une pé-

riode initiale quand il trouvait la pupille droite dilatée avec la

dépression mentale; à une période plus avancée, quand il

rencontrait les phénomènes opposés.

2° De la relation entre les phénomènes pupillaires et le fonc-

tionnement de la troisième paire, de la connexion de la troi-

sième paire avec les corps quadrijumeaux (le centre de

l'expression réflexe des émotions d'après Ferrier), l'auteur

passe à la connexion supposée qui, existant entre l'état de l'in-

telligence et celui de la pupille en général, remplace l'impres-

sion sensitive du nerf optique par l'impression d'une idée mentale,

et considère les lobes optiques comme le centre réflexe com-

mun à ces deux ordres d'impressions.

3° Rappelant le siège particulièrement à gauche du centre

du langage, s'en référant à Ferrier qui appelle l'attention sur

le pouvoir volitionnel moindre et sur le pouvoir automatique

plus considérable de l'hémisphère droit; se rangeant à la sup-

position de M. Voisin sur l'existence d'un centre de grandeur,

l'auteur signale la possibilité de l'existence dans l'hémisphère

droit « d'un centre d'exaltation » dont l'initiative produit les il-

lusions de grandeur, les idées exaltées, et dans l'hémisphère

' gauche d'un « centre de dépression » dont l'initiative provo-

querait les états intellectuels qui se dessinent dans la mélan-

colie.

4° Enfin poursuivant l'existence de ces centres, s'appuyant

sur Austin, qui avait remarqué, sauf deux cas exceptionnels,

la dépression mélancolique avec la dilatation de la pupille

droite, et l'excitation, l'exaltation avec la dilatation de la pu-

pille gaucho, l'auteur admet des noyaux celluloïdes, présidant

au plaisir d'un côté du cerveau, àla peine, dans l'autre. En dé-

finitive, il localise les émotions tristes dans les couches optiques

droites, et les gaies dans les couches optiques gauches. Le tra-

ducteur admet les opinions de l'auteur sur l'existence de ces

centres dans leurs hémisphères respectifs sans les localiser

davantage. A notre avis, il serait prudent de ne pas cher-

cher à les localiser, d'autant qu'en saine physiologie, la dé-

pression et l'exaltation ne constituent pas des fonctions, mais

bien des modes de fonctionnement : point besoin n'est de cher-

cher des organes pour remplir des fonctions qui n'existent

pas. E. ClIAPENTIER.

358 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

XIII. LETTRE médicale sur GHEEL ET LE patronage familial ,

adressée au comte DE Bêla (de K,,tlnoicy), membre de la

diète de Moravie ; par le Dl J. Peeters, médecin inspec-

teur de Gheel. (l3ull. de la Soc. de AIéd. mentale de Belgique,

1880.) - ,

Gheel, dans le département des Dcux-Nèthes, est une colonie

d'aliénés, composée d'un village avec de nombreux hameaux,

habités par des paysans, dits nourriciers,chez lesquels sont placés,

moyennant une faible rétribution, les aliénés. Cette colonie

comprend de plus une infirmerie où sont transportés les aliénés

malades ou en proie à un paroxysme, et où sont mis en obser-

vation les malades amenés à Gheel, pour être répartis après un

séjour aussi court que possible dans les hameaux. Pour seize

cents aliénés, l'infirmerie, n'en contient jamais plus de trente-

cinq. Le chiffre des guérisons parait peu élevé, à cause du

grand nombre d'incurables et d'idiots inoffensifs, dont se débar-

rassent les hospices encombrés. La proportion des décès di-

minue chaque année; les évasions y sont fort rares, malgré

l'emploi restreint des moyens de coercition. Depuis la création

delà colonie, il n'y a eu que trois crimes commis; les sui-

cides sont exceptionnels, un seul cas en cinq ans. En prenant

le chiffre des aliénés entrés avec des chances favorables ou

douteuses de curabilité, soit 103 de cette catégorie, la propor-

tion des terminaisons heureuses sera de 83 p. 100.

L'auteur termine ainsi sa lettre : « Notre colonie peut mon-

trer les bienfaits de la vie de famille et de la liberté octroyée

à des milliers de malheureux, et cela sans charges pour le trésor.

En effet, au lieu d'un établissement qui devait recevoir qua-

torze cents aliénés, et qui à trois mille francs par malade coûte-

rait plus de quatre millions, nous avons une infirmerie qui a

coûté deux cents mille francs et des finances qui se soldent

chaque année par un boni considérable. » E. C.

XIV. LETTRE médicale SUR GHEEL ET LE patronage familial,

adressée à M. le Dr INGELS, médecin de l'hospice Guislain,

à Gand;par le DIJ.-A. PFETERS, médecin inspecteur à Gheel.

La première lettre insérée dans le numéro des Bulletins,

année 1880, était adressée au comte Bêla (de Kalnolcy), qui vient

de mourir. Le docteurPeeters, dans cette deuxième lettre, insiste

' revue de pathologie mentale. 359

surtout sur les avantages du patronage familial et tout d'abord au

point de vue du traitement moral, sur l'isolement tout parti-

culier dans la colonie, isolement répondant à l'idée que s'en

faisaient Esquirol, Griesinger, Lowens,bien différent de l'isole-

ment par séquestration dans un établissement fermé. -A Gheel

le malade est isolé, mais jouit de la liberté et de la vie de

famille. En-décembre 18f ? à la Société médico-psychologique,

M. Jules Falret reconnaissait à la colonie les avantages sui-

vants : grande liberté de circulation laissée aux aliénés, le bien-

être moral plus grand résultant pour eu\' d'une manière de

vivre moins monotone et de la vie de société, enfin le travail

rendu plus attrayant et plus facile. La création à Gheel d'un

asile au petit pied, il est vrai, n'a rien changé à ses conditions

fondamentales; car sur 1,600 aliénés à Gheel, 35 seulement

sont à l'infirmerie. Toutefois il ne faut pas exagérer, et tous les

aliénés ne peuvent être admis à Gheel : exemple les aliénés

dangereux, et encore parmi ceux-là faut-il distinguer et ne les

considérer comme tels que lorsque le délire implique chez eux

une tendance expresse aux agressions contre les personnes et

les choses (suicide, homicide, blessures, coups, destruction,

vol, incendie), aux actes propres à troubler la tranquillité

publique (cris, tapage nocturne, vagabondage), et aux offenses

à la morale publique (actes et paroles obscènes, atteintes aux

moeurs). Ces aliénés, non plus que ceux dont les évasions

auraient été trop fréquentes, ne peuvent être conservés à Gheel.

L'auteur examine ensuite les avantages de Gheel pour les

aliénés incurables et inoffensifs,et montre que la colonie répond

aux indications que demandait pour eux M. Moreau (de Tours)

dans son étude sur la colonie en 1862. « Il suffit de placer le

malade dans les conditions d'hygiène les plus avantageuses,

et de lui créer une existence qui s'éloigne le moins possible de

celle dont il jouissait avant que la maladie l'eût frappé, exis-

tence à laquelle tout aliéné a un droit absolu, il ne faut pas

l'oublier, et qu'on ne peut léser sans injustice. » Quant à a

valeur thérapeutique du patronage familial, elle est indiscu-

table en raison des avantages qu'il présente sur les établis-

sements fermés. Pour la question de dépense, M. Lunier

a dit que l'isolement dans une maison de santé est le mode

d'existence des aliénés le moins dispendieux en France; cela

est vrai, dit en terminant le Dr Peeters, pour la France ; mais ne

l'est pas pour la Belgique. E. C.

360 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

XV. Rapport médico-légal concernant l'état mental DU

SIEUR M. K. B., ACCUSÉ DE TENTATIVE DE MEURTRE SUR LA

personne DE M. W...; par M. le Dl RAMAER. (Bull. de

la Soc. de Méd. mentale de Belgique, 1 S80.)

Folie morale se transformant graduellement en folie raison-

nante, puis en folie caractérisée par l'idée fausse d'être la victime

d'autrui, pour aboutir à la folie persécutive. Le méfait a été

commis sous l'influence de la maladie. Acquittement. Séquestra-

tion dans une maison de santé. E. C.

XVI. UN cas d'atrophie DU cervelet; par le Dl SEPPILI.

{Bulletin de la Société de Médecine mentale de Belgique. Année

1880, il, fascicule, p. 91.)

Conclusions : 1° les altérations microscopiques qui consti-

tuent généralement l'atrophie du cervelet sont : le développe-

ment considérable du tissu conjonctif interstitiel et l'atrophie

des cellules de Purkinje. Celles-ci disparaissent complètement

ou sont petites de volume, irrégulières de contour, à contenu

granuleux, à noyaux ou nucléoles peu ou point apparents, à

prolongements rares et grêles. Les fibres nerveuses ont aussi

diminué en nombre et en épaisseur ;

2° Le principal phénomène morbide qui accompagne l'atro-

phie du cervelet est l'incoordination des mouvements. Elle ne

constitue pourtant pas un phénomène constant, mais elle peut

manquer dans quelques cas ;

3° La circonstance que l'ataxie demeure latente dans l'atro-

phie du cervelet peut s'expliquer par la structure normale de

l'organe, quoique celui-ci soit devenu plus petit, ou par l'aug-

mentation de l'activité fonctionnelle de ces parties du cervelet,

non sujettes à l'atrophie, ou bien par l'intégrité des veines, ou

enfin par un effort conscient, volontaire et répété, par suite

duquel le cerveau supplée à l'activité coordinatrice du cer-

velet ;

4° Il ne se présente pas de désordres delà sensibilité cutanée

dans l'atrophie du cervelet;

5° C'est une erreur de localiser l'appétit vénérien dans le

cervelet. E. C.

sociétés svvantes. 361

XVII. Des altérations DU pigment choroïdien chez les aliénés ;

par le Dl Riva. {Bulletin de la Société de Médecine mentale

de Belgique. Année 1880, 1 ? fascicule, p. 91-92.)

Dans les maladies mentales, et de préférence dans les formes

intermittentes, paroxysmatiques, quand bien même elles

dépendent de la cachexie pellagreuse, l'aspect du fond de l'oeil

présente certains caractères spéciaux consistant en une dépig-

mentation de la choroïde et de l'épithélium pigmenté de la

rétine, ainsi qu'en une décoloration et un état trouble de la

rétine. , E. C.

SOCIÉTÉS SAVANTES

SOCIÉTÉ 111 : DICO-PSYCOLOGIQLiE

Séance du 12 décembre 1881. Prlsidence de M. DErASlAUVE.

M. Dally offre à la Société un travail sur l'ethnologie considérée

au point de vue sociologique.

Siiite de la discussion sur les aliénés criminels. M. FALRET

n'avait pas l'intention de revenir sur cette question, qu'il a déjà

traitée en 1869. Cependant comme elle vient d'être remise sur le

tapis par M. Motet, il ne croitpas inutile de rappeler les arguments

qui aujourd'hui, aussi bien qu'en 18 9, s'opposent à la création

d'un asile d'Etat. La question, dit l'orateur, n'a pas avancé d'un seul

pas. Partisans et adversaires font valoir les mêmes arguments.

Néanmoins comme elle est actuellement à l'ordre du jour des pou-

voirs publics, au point de vue de l'étude et non pas, je l'espère, au

point de vue delà réalisation, je crois qu'il est bon de la développer

devant la Société, qui pourra se prononcerensuite avec connaissance

de cause. Je ne reviendrai pas sur l'historique de la proposition que

nous a faite M. Motet, à la suite de son voyage à Londres. Je

362 sociétés savantes.

rappellerai seulement que l'idée de traiter dans les asiles spéciaux,

régis par des lois spéciales, des aliénés dits criminels, a germé

pour la première fois en Angleterre en 1801, el la suite d'une ten-

tative d'assassinat, commise sur le roi par un aliéné ; elle a donné

lieu à la construction, en Irlande, de Broadmoore, que vous

connaissez. Les difficultés pratiques, rencontrées dans l'exécution

de cette nouvelle organisation, ont motivé un grand nombre de

lois très complexes sur lesquelles il serait trop long d'insister.

Quand cette même question a été soulevée en France, la plupart

de nos confrères, je dois le dire, se sont prononcés en faveur de

l'asile spécial ; je me suis donc trouvé dans une situation très

difficile, car je suis encore presque seul à lutter contre cette créa-

tion. Mais quellelue soit l'autorité de mes adversaires, je suis loin

d'être convaincu par les raisons qu'ils mettent en avant. Elles se

divisent en trois groupes qu'on peut ainsi résumer : motif de sécu-

rité, motif moral et motif législatif.

C'est le premier qui frappe le plus; tout le monde, en effet, se

montre très effrayé des actes violents auxquels se livrent les aliénés,

et il vient naturellement à l'esprit de chercher à préserver la

société par une loi spéciale, de plus en plus nécessaire. Les ten-

dances actuelles, par l'extrême liberté qu'elles laissent aux malades

dans les asiles, enlèvent toutes les garanties de sécurité. Ce motif

parait d'abord puissant; mais quand on y regarde de près, on

s'aperçoit qu'il n'est d'aucune valeur dans l'argumentation, car les

aliénés dangereux, auxquels ils pourraient s'appliquer, ne sont

pas des aliénés criminels, et ne seront nullement atteints par la loi

qui placerait ceux-ci dans l'asile dont nous nous occupons.

Le motif moral ne doit pas nous arrêter davantage. II est pénible,

nous dit-on, de voir mélanger à des malades calmes des aliénés

condamnéspour des actesinfamants ou violents. La grande notoriété

de certains crimes rend impossible à cacher aux familles cette

promiscuité.

Je comprends à la rigueur cet argument, qui peut s'appliquer à

quelques cas très rares. Pour ceux-là, je crois que Gaillon suffirait

largement. D'ailleurs, nous avons dans nos asiles des malades tur-

bulents, bien plus ennuyeux pour les autres, que ne le sont les

criminels, passant le plus souvent inaperçus; leurs compagnons les

supportent très bien.

D'après ceux qui invoquent le motif social, les malades con-

damnés par les tribunaux devraient être soumis comme tels à une

certaine législation, différant de celle qui régit les aliénés ordinaires.

Le médecin seul ne devrait pas être responsable de leur sortie dont

les conséquences peuvent être fort graves, et partant de ce principe

on en arrive à proposer la séquestration perpétuelle de tout aliéné

homicide.

Il yalà, en effet, une difficulté énorme au point de vue de lapra-

SOCIÉTÉS savantes. 363

tique, et tous les médecins aliénistes se sont trouvés souvent en

présence de cas très embarrassants; mais la loi spéciale, à laquelle

on voudrait soumettre les malades dont je parle, ne, résoudrait

aucunement cette difficulté. En fin de compte, ce sera toujours

le médecin qui sera appelé à décider si tel aliéné peut sans danger

être rappelé à la liberté. Si vous craignez que des aliénés crimi-

nels et dangereux ne parviennent a s'échapper des asiles, faites

dans chaque établissement ce qu'on a fait Bi,oLLlinoore : augmentez

dans un quartier le nombre des gardiensetvous vous trouverez dans

les mêmes conditions, puisque M. Motet nous a dit que cet asile

d'Etat était tout à fait semblable aux autres asiles. Parchappe, du

reste, n'a-t-il pas demandé depuis longtemps qu'on organisât un

service spécial pour les mélancoliques à idées de suicide et les

malades violents ?

En agissant ainsi, nous éviterons de traiter en criminels dangereux

des malades absolument inoffensifs, comme il y en a tant à Broad-

moore. Autrement nous ferons un pas en arrière, nous ramenant

vers l'époque où les aliénés étaient considérés comme des pri-

sonniers.

M. Lunier, qui ne partage pas la manière de voir de M. Motet,

voudrait qu'on soumît ces malades a une législation spécialeet qu'on

installât une commission qui en ferait le classement.

M. Motet se défend d'avoir considéré Broadmoore absolument

comme un asile ordinaire. Broadmoore ne relève que de l'Etat, qui

l'entretient; c'est le ministre et non plus le préfet qui signe l'entrée

ou la sortie des individus qui y sont séquestrés suivant le bon plaisir

de Sa Majesté, pour employer l'expression consacrée. M. B.

Séance du 26 décembre 1881. Présidence de M. Lors.

M. Motet raconte l'histoire d'un malade mort d'étranglement

interne dans le service de M.D.tg'ui]et,,et, que le directeur de Sainte-

Anne, surla simple dénonciation d'un délirant persécuté, soupçonnait

d'avoir été étranglé... par un interne. Cette idée plaisante provoqua

une enquête. On devine quel en fut le résultat, mais on s'étonnera

sans doute d'apprendre qu'elle fut commencée à l'insu de M. Da-

gonet, et que le parquet était déjà saisi alors qu'on cachait

soigneusement l'affaire au chef de service.

M. Dally s'élève avec indignation contre de semblables procédés

et tous les membres, s'associant à cette protestation, décident de

l'insérer au procès-verbal. Un extrait en sera remis officiellement à

M. Dazotiet comme un témoignage de sympathique considération.

3fi'a 4 SOCIÉTÉS SAVANTES.

La Société passe ensuite au renouvellement de son bureau, qui est

ainsi composé pour 1882 :

M. Dally, vice-président, devient président de droit.

Sont nommés : MM. Motet, vice -président ; RITTI, secrétaire

général; Charpentier et GAR,-41ER, secrétaires annuels ; VOISIN,

trésorier.

Comité de publication. MM. J. Falret, DAGONET, DUMESNIL.

Membres adjoints au bureau pour le conseil de famille.

II. LEGn.1\D DU SAULLE et LUIS.

Commission du prix lubi7zel. 11\I. DvGO\ET, Falret, Legrand

DU S.1ULLE, NES\GT, Gll.lltl'I ? rll : n.

Commission du prix Esquirol. 111. B.11LLAHGEn, illN.T1\'iEn,

LuKI. ! R,BLAKCnEetGARKIER.

M. Lumer lit une note de M. Baillarger, sur une lésion de la

paralysie générale, que l'auteur a rencontrée^ quatre fois. Quand

dans ces cas on essaie d'enlever les méninges, elles entraînent toute

la substance grise qui est sous jacente aux points attérésetamenent

ainsi une véritable décortication de la substance blanche '.

M. Dally fait ensuite une communication sur les contractures

qu'il divise en trois espèces, suivant qu'elles dépendent des muscles,

de la moelle ou du cerveau. Il s'étend plus longuement sur les

dernières et les désigne du nom de contracture par appréhension.

Elles surviennent chez les jeunes sujets dont on a remué un peu

violemment les articulations douloureuses, pour en explorer l'état.

Il rapporte l'observation d'une malade non hystérique offrant une

contracture de la jambe et qui refuse depuis de laisser examiner

son membre. M. Dally a employé ce qu'il appelle le traitement

moral. Il a engagé la malade à tenter de faire elle-même de petits

mouvements. Ce traitement semble vouloir donner de bons résultats.

M. Charpentier demande comment se comportent les muscles

pendant le sommeil en général et la cbloroformisation en parti-

culicr.

M. DALLY. - La jeune fille a été endormie une fois il y a fort

longtemps par un de nos confrères, mais il s'est produit de fols

accidents, que la famille n'a pas voulu consentir à une nouvelle

épreuve.

M. Charpentier rappelle que chez certains hémiplégiques l'appré-

hension devoir examiner leurs membres augmente la contracture.

1)1. B.

1 Voir plus haut, p. 336.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 365

Séance du 30 janvier 1882. - Présidence de M. Dalle.

M. Luys, après avoir retracé en quelques mots les principaux

travaux soulevés au sein de la Société dans le courant de 1881,

cède le fauteuil à M. Dally qui exprime à son tour, en paroles élo-

quentes, le légitime orgueil qu'il éprouve d'être appelé à la

présidence.

M. Motet remercie ensuite la Société des appuis bienveillants et

sympathiques que chacun de ses membres n'a cessé delui prodiguer

pendant qu'il remplissait les fonctions de secrétaire général; il fait

ensuite part de la mort du regretté Brierre de Boismont et donne

lecture du discours prononcé sur la tombe.

M. Rrru, avant de procéder au dépouillement de la correspon-

dance, prononce également quelques paroles de remerciement à

la Société qui l'a nommé secrétaire général.

La correspondance comprend les différents mémoires déposés

pour le prix Aubanel et pour le prix Esquirol.

Sept concurrents se sont présentés pour le premier de ces prix,

et ont envoyé les mémoires suivants :

Azam : Des troubles intellectuels consécutifs aux traumatismes

du crâne. Vennaue : D'une forme non décrite d'hallucinations

panoramiques. - DEBACHER : Des hallucinations et terreurs noc-

turnes chez les enfants. Régis : Etiologie de quelques formes de

paralysie générale. BERGERON Folie de la puberté. BRIAND :

Du délire aigu et de quelques altérations du sang dans le délire

aigu. Pu cacheté : De l'hérédité dans le crime.

Deux mémoires ont été déposés pour le prix Esquirol :

Il De l'évolution du délire dans les vésanies. 2° Des conges-

tions dans la paralysie générale.

M. LEGRrND du SAULLE donne lecture du rapport à la commission

des finances ; il fait appel aux membres de la Société qui ne sont

pas encore inscrits sur la liste de souscription dressée pour élever

une statue a Pmcl. Il annonce en terminant que, grâce à son

initiative, la famille de Belhomme vient de verser entre ses mains

une somme d'argent destinée à fonder un prix qui portera le nom

de prix Belhomme.

M. Foville communique à la Société quelques considérations

médico-légales sur la responsabilité des faibles d'esprit. M. B.

366 .SOCIÉTÉS SAVANTES.

Séance du 27 février 1882. Présidence de M. Dally.

Prix Belhomme. - La somme d'argent que la famille Belhomme

se dispose à verser à la Société, pour la fondation d'un prix, est

acceptée. Ce prix, d'une valeur de 900 francs, sera triennal et

portera le nom de Prix Belhomme. 11 sera décerné pour la preniièt e

fois en avril 1,883 à l'auteur du meilleur travail sur l'Idiotie. Les

conditions du concours seront fixées ultérieurement :

Hydrocéphalie. M. Christian présente les pièces anatomiques

d'un hydrocéphale dont l'histoire peut être ainsi résumée : Cet

homme mort à quarante ans a eu une enfance très tourmentée et ne

paraissait pas devoir vivre longtemps. Il se fit cependant remarquer

de. bonne heure par un goût spécial pour la musique et une aptitude

particulière à apprendre les langues étrangères. Son caractère a

toujours été un peu difficile, maisce n'est qu'à l'âge de trente-neuf ans

qu'il a donné des signes bien manifestes d'aliénation mentale : il

devint vers cette époque triste, maussade, emporté, violent, et pré-

senta même des impulsions à l'homicide et au suicide. Dans les

derniers mois de sa vie il eut, en outre, des attaques épileptiformes

auxquelles il finit par succomber.

L'encéphale pèse 1400 grammes et les ventricules contenaient au

moment de l'autopsie 1100 grammes de liquide. La substance grise

est amincie; tout le cerveau s'est étalé sous l'influence de la pres-

sion du liquide ventriculaire, de sorte qu'il semble avoir gagné en

étendue ce qu'il perdait en épaisseur. Le crâne est complètement

ossifié; il est symétrique; son diamètre autéro-postérieur offre

une longueur de 24 centimètres; la circonférence est de 70 centi-

mètres.

M. Charpentier demande si les ventricules communiquaient avec

a cavité aracbnoidienne par la fentecérébrale. Si la communication

existait, on ne voit guère comment le liquide comprimant le cer-

veau à la fois en dehors et en dedans aurait pu en accroître le

développement; il devait au contraire en diminuer le volume.

M. Christian n'a pu vérifier ce point de doctrine.

M. Faluet. J'ai observé autrefois, dit-il, ce malade qui m'a vive-

ment intéressé : c'était un véritable aliéne à forme mélancolique

avec impulsions dangereuses; il a de tout temps appartenu à cette

catégorie de faibles d'esprit qui présentant quelques facultés par-

tielles très développées peuvent en imposer tout d'abord et passer

aux yeux du monde pour avoir une certaine intelligence, mais ne

sont en réalité que des imbéciles.

M. LuNiER connaît quelques idiots qui passent pour être d'excel-

lents musiciens.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 367

Présentation de malade. M. Régis lit une note relative à un

malade présenté déjà par M. Bail à l'Académie de médecine. Le

sujet de l'observation est un jeune homme de dix-huit ans qui présente

des hallucinations unilatérales de l'ouïe, consécutives à une otite

moyenne. L'otite serait elle-même la conséquence d'un soufflet. Il

résulte de cette note deux points saillants : d'abord l'hallucination

se rattache à l'otite et en second lieu le malade ne serait pas aliéné.

M. Blanche demande si M. Bail n'a pas dit à l'Académie que le

malade avait des tendances et même des impulsions au suicide. Ce

serait alors un aliéné ordinaire.

M. BALL. C'est vrai, mais je ne le considère cependant pas comme

aliéné.

M. Blanche. Si je me suis permis de vous faire cette petite observa-

tion, c'est que vous avez aussi parlé de violences qui semblaient

constituer de véritables actes délirants, et de plus que vous avez

fait séquestrer le malade.

M. B\LL. 11 a en effet commis quelques actes qu'à la rigueur on

pe.ut qualifier de délirants; j'ajouterai m6mequ'ila,àdiSerentes re-

prises, manifesté l'intention de se tuer; mais je ne crois pas qu'il

y ait dans ces faits des éléments suffisants pour constituer un

véritable délire.

M. Blanche. Ne pensez-vous pas alors que ces impulsions au

suicide étaient déterminées par une certaine croyance en ses hallu-

cinations ? Enfin il était par moments très violent et a menacé dans

la rue des personnes dont il se croyait insulté.

M. BALL. Je ne le crois pas. Ses violences reconnaissaient pour

causes des choses futiles. Cet enfant a quitté l'école, débile, triste,

lypémaniaque, irritable, et depuis une fièvre tpliolde n'a jamais été

ce qu'il paraissait être auparavant. Ces faits justifient parfaitement

sa séquestration à l'asile.

M. Lunier. Il ne me semble pas absolument démontré que cet

individu soit aliéné; il offre des anomalies dans les actes et il lui

suffit d'avoir des impulsions pour entrer dans la catégorie de ceux

qu'on séquestre, parce qu'ils ne peuvent se soustraire à leur pre-

mier mouvement. 11 y a en somme de fortes réserves à faire sur ce

point. De plus, je considère les autres phénomènes présentés

par le malade comme des illusions et non pas des hallucinations.

L'hallucination a en effet son siège dans le centre même, l'illusion

au contraire dans l'organe du sens ou l'appareil de transmission.

L'otite ne peut donc déterminer que des illusions.

M. BALL place définitivement son malade dans la catégorie des

incorrects. S'il offre, dit-il, des troubles intellectuels, c'est dans

l'ordre de la volonté et non pas de la pensée qu'il faut les cher-

cher ; de plus, le véritable intérêt de l'observation porte sur la dis-

368 bibliographie.

tinctiou entre une hallucination et une illusion. Peut-être un jour

toutes les hallucinations ne seront-elles que des illusions.

M. BouMM, qui tient aussi pour les illusions, se demande s'il n'y

aurait pas, par hasard, une simple coïncidence entre l'otite et les

troubles intellectuels présentés par le sujet.

M. Régis répond que le phénomène, illusion ou hallucination,

tend à disparaître sous l'influence du traitement local.

14L112CLL Blll.\\D.

BIBLIOGRAPHIE

XII. liecllerches sur la localisation des fonctions dans le cerveau de

l'Ivonxme; par Sigismond Exner. Vienne, 1881. 1.

Cet ouvrage est certainement le plus considérable de tous ceux

qui ont été consacrés à une étude d'ensemble des localisations céré-

brales chez l'homme. Mais il ne faut pas s'attendre à y rencontrer

de nouveaux faits cliniques ou expérimentaux, attendu que

l'oeuvre entière ne renferme que des observations déjà publiées; et

encore l'auteur s'est-il arrêté dans ce travail de compilation, à

l'année 880, c'est-à-dire à une époque depuis laquelle une tren-

taine de cas importants sont venus s'ajouter aux autres. 11 n'est

pas non plus à dire pour cela 'que l'étude de M. Exner soit dé-

pourvue d'originalité, tant s'en faut. D'ailleurs cette seule qualité

pouvait justifier une tentative dans laquelle il s'agissait de tirer un

nouveau parti d'une matière déjà fructueusement exploitée.

Il faut convenir que certains Locvlisuteurs, impatients de fixer

avec la rigueur mathématique la topographie fonctionnelle de l'é-

corce cérébrale, ont péché par excès de précision, au risque de dis-

créditer la cause qu'ils voulaient servir. M. Exner a su éviter cette

tendance. Frappé du défaut de coïncidences des lésions dans un

certain nombre de cas, où les relations cliniques présentaient une

analogie étroite, sinon une identité parfaite, il s'est borné à con-

fronter tous les faits mis en circulation depuis l'origine de la doc-

trine localisatrice : on conçoit que la totalité des observations em-

ployées à une pareille enquête fournisse des conclusions plus

Bibliographie. 369

légitimes que celles qui ont été formulées sur l'examen d'une

quantité relativement restreinte de cas.

D'un autre côté, il n'était pas possible de cherchera utiliser dans

la même mesure les milliers de faits accumulés depuis tantôt uu

siècle dans les recueils médicaux. L'auteur n'a conservé de cet

immense dépouillement d'observations que celles qui concernaient

des lésions corticales ; et, qui plus est, parmi celles-là, il en a élagué

encore un grand nombre, pour la raison que l'indication du siège

des altérations à la surface des plis cérébraux ne présentait pas la

précision nécessaire.

Après avoir ainsi réduit le nombre des cas de localisations pu-

bliés jusqu'à janvier 1880 au chillre de IG7, M. Exner s'est livré à

un véritable jeu de patience, consistant à figurer sur des schémas

de l'écorce cérébrale les lésions mentionnées dans ces 167 obser-

vations en les superposant les unes aux autres. Or, de ce travail de

synthèse qui semblait devoir aboutir à la conclusion que l'aire mo-

trice est plus étendue qu'aucun auteur ne l'a dit, il est résulté ceci :

c'est qu'il existe en effet une très vaste région de la face externe et

de la face interne du cerveau, dont l'altération peut produire des

troubles de la motilité; mais aussi qu'il existe certaines circonvolu-

tions ou certaines portions bien circonscrites de la même région,

dont l'altération entraîne non pas éventuellement, mais fatalement,

des phénomènes de spasme ou de paralysie.

Il va sans dire que, parmi les 167 cas utilisés par ill. Exuer, un

bon nombre est relatif à des lésions sans symptômes. Ceux-là, qu'il

appelle cas négatifs, ont d'abord été employés tous seuls à la déli-

mitation de l'aire corticale, dont les modifications ne produisent

pas de troubles moteurs; mais ils ont du même coup servi à cir-

conscrire l'aire motrice, car sur les schémas où les lésions sont re-

présentées par une série de teintes superposées ou juxtaposées, le

champ moteur reste nécessairement incolore. En apportant le plus

grand soin à la collation et à la figuration de ces cas négatifs, l'au-

teur a donc été fort bien inspiré. De là résulte encore une notion

fort curieuse, à savoir que la région coiticale , dont les lésions ne

produisent pas de troubles de la motilité, et que l'on peut appeler

région latente, est beaucoup plus étendue dans l'hémisphère droit

que dans l'hémisphère gauche ; ou, en intervertissant les termes,

que les centres moteurs dans l'hémisphère gauche, ont une impor-

tance quantilive supérieure à celle des centres homologues dans

l'hémisphère droit. Si l'on rapproche ce fait de la localisation du

langage dans le lobe frontal gauche, on est en droit d'admettre,

d'une façon générale, la proéminence de cette moitié du cerveau

sur celle du côté opposé, du moins chez l'homme, l'hoiiio sapiens

de Cuvier.

Entrant ensuite dans le détail, M. Exner démontre que les cir-

convolutions peuvent être répaities physiologiquement en trois

24

370 bibliographie.

catégories, ou anatomiquement en trois régions qu'il appelle : ré-

gion latente, région relative et région absolue. La région latente

est celle dont les altérations pathologiques ne donnent jamais lieu

à des symptômes paralytiques. La région relative est celle dont

la destruction totale ou partielle entraîne quelquefois des troubles

moteurs. Enfin la région absolue est celle dont les localisations

morbides produisent toujours et fatalement ces troubles. A pre-

mière -vue, il peut paraître singulier qu'un territoire cortical soit,

suivant les cas, psycho-moteur ou indifférent. En d'autres tenue ?

on peut s'étonner qu'il existe une région relative. On comprend

néanmoins qu'ilensoitainsi quand on rélléclut qu'une altération pa-

thologique, si limitée qu'elle soit, détruit en même temps des por-

tions motrices de l'écorce et des portions non motrices. Or, dans

les régions cérébrales où siègent les centres de mouvement, la

destruction du tissu cortical empiète le plus souvent sur des parties

dépourvues de propriétés motrices, de telle sorte qu'il est fort dif-

ficile de déterminer, à l'aide d'un petit nombre de cas seulement,

quelles parties sont dévolues aux mouvements volontaires et quelles

parties ne le sont pas Mais en superposant une grande quantité

de lésions analogues, on arrive à circonscrire un département de

substance grise dont la lésion ne manque jamais dans tel ou tel cas

de paralysie localisée. Ce département relativement restreint re-

présente le champ absolu d'un centre moteur , le reste représente

le champ relatif. Il peut se faire que, chez un sujet, le champ rela-

tif soit seul intéressé, le champ absolu restant indemne, et que ce-

pendant une perversion de la motilité en soit la conséquence.

Chez un autre sujet, le même champ relatif peut présenter les

mêmes altérations et les fonctions motrices auront conservé in-

tactes leurs attributions physiologiques. La conclusion qui découle

nécessairement de la comparaison de ces faits, en appaience con-

tradictoires, est la suivante : la forme et les dimensions du champ

relatif varient suivant les individus. Autant le champ absolu est

fixe dans sa situation et dans ses propriétés fonctionnelles, autant

le champ relatif de chaque localisation est changeant dans son

étendue et dans ses rapports anatomiques. 11 va sans dire que le

champ relatif lui-même ne dépasse jamais certaines limites. ·

On doit savoir gré à tll. Exner d'avoir insisté sur les champs t'c-

latifs 'des centres moteurs, qui permettent de comprendre quel-

ques divergences d'opinion relatives iL la détermination exacte de

certaines localisations.

Les champs absolus, au dire de M. Exner, sont très rapprochés

les uns des autres, mais ils ne se confondent pas. Ils ne corres-

pondent pas non plus d'une façon rigoureusement exacte aux ter-

ritoires qui ont été délimités par MM. Charcot et Pitres : ainsi ces

auteurs placent le centre cortical des muscles de la langue dans la

partie la-plus inférieure et la plus postérieure du gyrus frontalis in-

BIBLIOGRAPHIE. 371 l

férieur et le font empiéter sur la partie inférieure du gyrus central

antérieur (circonvolution frontale ascendante). M. Exner localise ce

centre un peu plus haut.

De même, pour MM. Charcot et Pitres, les muscles du visage ont

leurs centres dans les extrémités inférieures des deux circonvolu-

tions rolandiques, tandis que toute la portion supérieure de ces

circonvolutions, avec le lobule paracentral, est affectée aux deux

membres; quant au tiers moi en des circonvolutions rolandiques,

il appartiendrait exclusivement au membre supérieur et même

seulement à l'avant-bras et la main. Exner, a rencontre de celte

opinion, signale douze observations de paralysie des membres sans

lésions du lobule paracentral ou des parties les plus élevées des

circonvolutions rolandiques.

Enfin, contrairement à l'opinion la plus généralement admise,

Exner prétend que la partie la plus élevée des circonvolutions cen-

trales renferme le champ absolu du membre supérieur et non pas

celui du membre inférieur, etc..

On pourrait, à notre avis, adresser un reproche à M. Exner.

Pour établir toutes ces localisations, d'après les cas si nombreux

qu'il a anal) ses, il s'est servi des schémas de Ecker. Ces schémas

sont sans doute très suffisants pour représenter une localisation,

dans sa forme générale et ses dimensions approximatives, mais

pour limiter les champs relatifs, ces figures sont par trop propices.

Le mieux eût été de prendre avec grand soin l'empreinte de

chaque hémisphère et d'y reproduire fidèlement le calaclère topo-

graphique de la lésion.

On conçoit qu'un travail si consciencieux ait permis à l'auteur de

se faire une opinion et de la proclamer : « Je ne croirai, dit

M. Exner, a l'uniformité fonctionnelle de toutes les circonvolutions

que lorsque une collection de faits analogues à celle-ci, aura dé-

montré que le champ absolu du membre supérieur siège a la face

inférieure du lobe sphénoïdal, celui de <'/t.)o<o&'6'(; dans le lobe occi-

pital cl celui de l'oeil dans le lobe frontal. » E. li.

XIII. Etudes cliniques sur ? M/4<d ! 'o-t'pepStC ou grande hystérie; par

P. IRcno. 1. éditeurs. I vol. iii-81. 1881.

Certainement depuis Carwvell jamais médecin M'a mis au service

de la science plus habile crayon que M. P. hucher. On n'estimera

pas moins que les planches z Le, gravées par lui-même, les

croquis qu'il a si libéralement répandus dans le texte et qui tra-

dutbeut, avec une exactitude à laquelle une desci iption écrite ne

saurait que difficilement prétendre, les divers et fugaces épisodes

de l'hystéro-épilepsie.

La première partie de cet ouvrage traite de la grande attaque

372 BIBLIOGRAPHIE.

hystérique complète et régulière. L'auteur étudie d'abord en détail

l'ovarie, les zones hysléro-épileptogènes, les hallucinations, les

divers prodromes.

Le myographe lui a permis de faire des deux premières périodes

é,pileptoide et de elowitisine, là où tout parait désordonné, une des-

cription très précise dans les moindres détails, de les différencier

exactement. Le retour incomplet de la sensibilité sensorielle, la

variété du délire distinguent de la troisième période (des poses

plastiques), la'quatrième (de délire), tandis que les hallucinations,

les soubresauts, les contractures rapprochent celle-ci de la pre-

mière, fait important. La température constamment normale,

la reprise rapide de la conscience, la fatigue légère qui suit l'at-

taque aussi bien que les états de mal hystéro-épileptiques les plus

prolongés ne permettent la confusion ni avec l'accès, ni avec

l'état de mal épileptiques.

Ces descriptions parfaitement exactes, quant aux malades de la

Salpêtrière peuvent-elles s'appliquer à celles qu'on observe en de-

hors ? M. Richer, qui ne nie pas l'influence de l'imitation sur le

mal hystérique et la démontre même, répond à cette objection

.souvent faite par des observations d'attaque hystéro-épileptique

prises, la première sur une malade même du service de M. Charcot

avant son entrée, les autres sur des malades de la clientèle civile à

Paris et ailleurs, enfin par des observations puisées dans les

annales de la science, auxquelles s'applique nettement la division

en périodes établies par le professeur de la Salpétiière. M. Richer

a pu en outre, dans ce long dépouillement, relever bien des

erreurs de diagnostic et rapporter à l'hystérie des faits attribués à

l'épilepsie. 11 faut d'ailleurs rapprocher la grande attaque de l'at-

taque d'hystérie vulgaire. Elle n'est que le degré le plus intense de

l'hystérie et son étude approfondie jette un jour singulier sur toute

la symptomatologie de la névrose.

En abordant, dans la deuxième partie, la description des princi-

pales variétés de la grande attaque hystérique, variétés dépendant

soit de l'extension, de la prédominance d'une période, soit de

l'immixtion d'éléments étrangers de somnambulisme, de cata-

lepsie, de léthargie, M. Richer déclare que c'est là la partie

la plus intéressante de sa tâche, la plus pratique et la plus

propre à éclairer certaines parties obscures do l'histoire. Sur

ce dernier point l'espoir du lecteur sera quelque peu déçu, ici

comme dans l'appendice. Qu'est devenu le projet d'un cha-

pitre dont le titre avait paru fort original : « De l'hystérie dans

l'art ? »

Dans la question difficile de la catalepsie, de la léthargie et du

somnambulisme hystériques provoqués, rien n'a été négligé pour

emporter la conviction du lecteur, pour le conduire sur un terrain

solide. Les faits les plus simples, les plus grossiers, les signes did-

BIBLIOGRAPHIE. 373

gnostiques physiques, et facilement appréciables des divers états

nerveux, ont été recherchées à la Salpêtrière. A l'appareil des ma-

gnétiseurs, on substitue la lumière Drummond, le bruit du gong,

les vibrations du diapason, etc... L'hyperexotabilité neuro-muscu-

laire caractérise, sans fraude possible, la léthargie hystérique pro-

voquée, la distingue de la catalepsie, du somnambulisme hystéri-

que. Ce dernier est une léthargie dans laquelle fuit défaut l'lryper-

excitabilité. Ces deux états si divers, léthargie et catalepsie, peuvent

d'ailleurs coexister chez le même sujet, comme l'a montré M. Des-

courtis le premier. Ce nom a été oublié par l'auteur si empressé à

rendre à chacun justice.

La troisième partie a rapport à des faits trop souvent exposés et

discutés en ces derniers temps pour y insister. Il s'agit de l'anes-

thésie hystérique et des agents oesthésiogènes, de la paralysie et de

la contracture hystériques.

Le phénomène du transfert pour l'anesthésie, 1'li-perexcitabilité

neuro-musculaire, pour la catalepsie mettront le médecin à l'abri

de la simulation. L'action d'arrêt de la compression de l'ovaire, des

interversions électriques, de l'excitation des zones bystéro-épilepto-

gènes, jointe aux signes déjà indiqués, distinguera 1'li,stéro-épilep-

sie de l'épilepsie. La quatrième et dernière partie se termine par

un exposé des divers traitements proposés. L'internement loin du

milieu habituel et l'hydrothérapie méthodique combinés, l'élec-

tricité statique sont les seuls dont l'expérience ait sanctionné la

valeur. D. Bernard.

XIV. Des lésions de la corne d'Ammon dans l'épilepsie ; par Georges

Coulrault. Thèse de Paris, 88't.

Y a-t-il une relation de cause à effet entre les lésions de la corne

d'Ammon et l'épilepsie ? Tel est le problème que se proposait de

résoudre l'auteur de ce travail, écrit sous l'inspiration éclairée de

M. Bourneville. A notre sens, doux sortes de facteurs peuvent con-

duire à la solution d'une aussi importante question. En premier

lieu, l'étude-clinique des malades apporte par les constatations s

anatomo-pathologiques un ensemble de probabilités en fa\eur

ou non d'une corrélation entre lès phénomènes cliniques et les

lésions. s'agissait,en second lieu, de dégager la notion de causa-

lité qui comporte un triple examen, savoir : Il l'altération a-t-elle

précédé ou du moins accompagné l'explosion des manifesta-

tions convulsives ? 2° par quel mécanisme doit-elle être considérée

comme génératrice des phénomènes ? 3" le même complexus symp-

tomatique ou une fraction de celui-ci peut-il être produit par l'ex-

périmentation ?

Tel est d'ailleurs le plan suivi par M. Coutbault. Apres avoir briè-

vement, mais d'une façon suffisante, résumé l'historique etl'étal

371 l BIBLIOGR.11`fIIE.

de nos connaissances sur l'anatomie et la physiologie de la corne

d'Ammon, il groupe par l'exposé concis de qu tre- ing t-treize obser-

vations les matériaux pathologiques Nous y comptons quatre-vingt-

sept faits tirés des auteurs et six appartenant à M. Bourneville. Un

semblable nombre, évidemment faible, si on le compare à l'im-

mense quantité des épileptiques quelconques, suffit déjà i affirmer

qu'il ne s'agit point làd'une coïncidence fortuite; d'autant, comme

le fait remarquer l'auteur, que tous les épileptiques autopsiés en

dehors de ceux-ci n'ont pas été examinés à ce point de vue, et

que beaucoup d'entre ceux qui ont été considères cornnu ayant

leurs cornes d'Ammon saines en eussent peut-être présenté des

dégénérescences si l'examen micioscopique avait été pratiqué. En

réalité, les recherches dirigées sur l'organe qui' nous occupe ont

déjà fourni quatre-vingt-treize résultats consistant, le plus habi-

tuellement, en l'induration scléreuse du tissu. On n'en possède

actuellement que trois analyses histologiques qui semblent établir

que le processus dans son intimité doit être considéré comme une

hyperplasie conjonctive aboutissant à la destruction granulo-grais-

seuse des vaisseaux et des cellules pyramidales. (\111. 13oucliard et

Sommer.)

La corrélation clinique avec localisation spéciale une fois établie,

l'auteur se demande si l'épilepsie a été dans l'espèce la consé-

quence de la maladie de l'hippocampe. La multiplicité des cas col-

1,LLioniiC, le fait qu'on avait généialement affaire a de l'épilepsie

acquise, l'intensité et l'âge des lésions rapprochés de l'époque du

début des symptômes, la haute valeur de l'opinion de M. Charcot

en pareille matière, tranchent pour lui on faveur de cet avis. Quant

aumécanisme,b)enquec)ie/cesmaladesonaitnotédestroubles

de la sensibilité générale confirmant les résultats expérimentaux

de Ferrier, quoique Sommer, en r111emagne, admette un rayonne-

ment de l'excitation de la corne sur le centre épiieptogéne vaso-

moteur, M. Coulbault incline à penser que toute décision concer-

nant la pathogénie doit être réservée.

En somme, c'est la un mémoire consciencieux qui délimite par

la condensation de tous les éléments d'une question, l'aire du ter-

rain gagncsans négliger de mettre en évidence les points obscurs

que les cliniciens de l'avenir auront a coeur d'éclaircir. P. K.

XV. Des hallucinations et des terreurs nocturnes chez les enfants

et les adolescents; par F. Debackeu. Thèse de Paris, 1881.

L'auteur divise les hallucinations et les terreurs nocturnes en

deux groupes distincts : les unes sont d'origine cérébrale, les autres

ont leur source ailleurs. Ces dernières sont le plus souvent pro-

duites par des indigestions gastro-intestinales, déterminées par une

dentition difficile et laborieuse, des vers intestinaux, la constipa-

BIBLIOGRAPHIE. 375

tion, la diarrhée, etc. Les autres dépendent quelquefois des mala-

dies guéries qui ont laissé dans les fonctions cérébrales un trouble

plus ou moins durable ; on les rencontre dans la convalescence de

la fièvre typhoïde, delà pneumonie ; on peut les rencontrer encore

chez les individus surmenés, où elles constituent une sorte de délire

d'inanition. D'autres fois, elles sont les symptômes de maladies

cérébrales actuelles, comme dans l'idiotie, etc.; elles sont alors

permanentes. D'autres fois, enfin, elles sont les prodromes d'affec-

tions cérébrales à venir ; c'est alors qu'on doit tenir compte de

l'hérédité : elles peuvent précéder la méningite tuberculeuse, l'épi-

lepsie, l'hystérie, l'idiotie. Plus rarement elles ont pour cause des

intoxications (belladone, opium, sulfate de quinine). Cil. F.

XVI. De la pseudo-paralysie générale alcoolique ; par A. LAC.IILLE.

Thèse de Paris, 1881.

Contrairement t ce qu'on a cru, l'auteur pense que l'alcoolisme,

non seulement n'est pas la cause la plus fréquente de la paralysie

générale, mais même qu'il paraît incapable de l'engendrer de

toutes pièces. L'erreur des anciens auteurs tient à quatre causes :

4° beaucoup de paralytiques généraux étaient considérés comme

alcooliques alors qu'ils ne l'étaient pas en réalité; 21 d'autres,

considérés comme paralytiques par alcoolisme, n'avaient commis

d'excès que depuis le début de la maladie, qui était en somme la

cause de l'alcoolisme; 3° certains cas d'alcoolisme chronique, res-

semblant plus ou moins à la paralysie générale ont été confondus

avec cette maladie, jusqu'à Magnus Iluss, Lasègue, J. Falret;

4° enfin certains cas, considérés aujourd'hui comme constituant la

véritable paralysie générale alcoolique, ne sont pas à proprement

parler de véritables cas de paralysie générale, et ils diffèrent des

autres cas par leur mode de début, leur symptomatologie, leur

marche et leur pronostic. Dans la pseudo-paralysie des alcoo-

liques, il n'est pas rare de voir les symptômes propres à l'affection

parah tique succéder à des attaques épileptiformes répétées, ou

encore à un accès d'alcoolisme subaigu. Cette pseudo-paralysie se

caractérise en outre : Il par des symptômes qui lui sont propres,

(embonpoint, coloration rouge de la face, troubles gastriques

divers, troubles visuels, attaques épileptiformes ou apoplecti-

formes, troubles intellectuels particuliers); 2° par des particularités,

des symptômes qui lui sont communs avec la paralysie générale.

L'inégalité pupillaire, qui manque une fois sur trois dans la para-

lysie générale, est la règle dans la pseudo-paralysie alcoolique, et

en outre, dans cette dernière affection, la pupille est presque tou-

jours immobile et plus ou moins déformée. Les troubles de la sen-

sibilité sont la règle dans la pseudo-paralysie, qui se distingue

'encore en ce que la paralysie y commence toujours par les extré-

376 BIBLIOGRAPHIE.

mités, qui sontplutôt engourdies, inhabiles, qu'affaiblies, tandis que

dans la paralysie générale, la paralysie est plus étendue d'emblée,

et en outre est progresssive. Dans la paralysie alcoolique, le trem-

blement est général, il est limité dans la paralysie générale et il est

fibrillaire. L'embarras de la parole est le plus souvent très marqué

dès le début de la pseudo-paralysie, etc. Au lieu d'être progressive,

la pseudo-paralysie arrive brusquement à son apogée, elle présente

en outre des rémissions tant dans son ensemble que pour plusieurs de

ses symptômes en particulier; ces rémissions sont quelquefois assez

longues, et assez complètes pour faire croire a une guérison. En

somme, la pseudo-paralysie des alcooliques se distingue autant par

sa marche que par ses symptômes; elle parait aussi distincte, autant

qu'on peut en juger, par son anatomie pathologique. Cu. F.

XVII..RM/iO'c/tes cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie ; par Martial

fIU13LÉ. Thèse de Paris. Aux bureaux du Progrès médical. 4831. 1.

S'il est dans les sciences un terrain dont le défricltement exige

une observation et une expérimentation opiniâtres autant que judi-

cieuses, c'est à coup sûr celui de la thérapeutique. On n'en saurait

aborder les problèmes si délicats sans compter sur un guide et une

méthode éprouvés, surtout lorsqu'il s'agit de maladies du système

nerveux. Ces conditions, M. Hublé les a réalisées grâce l'illiptil-

sion savante de M Bourneville. Il a eu soin d'ailleurs, limitant son

champ d'inquisition, de s'adresser à quatre médicaments d'une im-

portance capitale dans le traitement de la névrose, et l'on peut se

convaincre par la lecture des nombreuses observations du mémoire

que, malgré l'ancienneté de la maladie, en dépit de l'influence épi-

leptogène du milieu, selon l'expression de M. Bourneville, les suc-

cès ont répondu IL la persévérance du chercheur.

La scrutation des quarante-six faits, exposés en détail, peut seule

renseigner sur la mesure et l'individualité des résultats, les condi-

tions dans lesquelles a lieu l'intervention devant, à notre sens, tou-

jours guider le thérapeute. Nous nous proposons donc simplement

de retracer les grandes lignes de ce travail.

L'auteur le divise en quatre chapitres correspondant tout natu-

rellement aux quatre agents considérés : bromure de camphre, de

zinc, d'arsenic, de sodium. Chacun d'eux débute par l'histoire natu-

relle, chimique et médicale Ju médicament. En effet, a propos du

bromure de camphre notamment, la question de légitimité de

l'eiilité : cliiiiiique se posed'emblée. M. llublé la tranche dansl'espèce

en i appelant les travaux de Swartz dlehaud, de Ed. Dubois (1874)

et Clin (1873) qui ont obtenu des cristaux clinorhombiques (pro-

fesseur Friedel, de l'Ecole des mines) de la substance La bibliogra-

phie des premières recherches instituées avec elle se résume dans

les publications de M. Bourneville bientôt confirmées par Lawson.

BIBLIOGRAPHIE. 377 7

La thèse de M. Hublé apporte neuf cas nouveaux venant en majo-

rité à l'appui de l'action curative du camphre monobrome. L'inges-

tion de doses croissantes (de 0,10 à 6 grammes) et longtemps con-

tinuées fait d'abord diminuer puis disparaître les accès et vertiges;

2 grammes administrés en lavement (Obsetvation XX), a plusieurs

reprises (on a dû donner simultanément par les voies buccale et rec-

tale, 6 grammes), guérissent l'état de mal ou les accès graves en

ramenant la température de 42 à 40 puis de 40 à 38 en faisant dis-

paraître le coma. Plusieurs exemples de guérison maintenue après

cessation de l'ingestion médicamenteuse.

Le bromure de zinc, préconisé par 11. Harnmond, de Philadelphie,

aurait l'avantage d'éviter, môme employé à hautes doses, l'in-

toxication bromique et les éruptions cutanées. Sur les neuf obser-

vations présentées par M. Ilublé concernant des quantités graduel-

lement ascendantes de 0,20 à 4 gr. 30 par jour, nous notons quatre

exemples topiques d'amélioration considérable tant pour les accès

que pour les vertiges. Telle l'Observation XUX, caractérisée par

l'aggravation constante do l'épilepsie au moment où l'on commence

à administrer le bromure de zinc; au bout d'une année de traite-

ment, on note au lieu de trois cent quatre-vingt-six, cent soixante-

quatre accès. - De l'influence heureuse du bromure d'arsenic,

M. Hublé ne nous relate qu'un cas concluant dans lequel un double

essai aux doses progressives de 0,001 à 0,01, puis de 0,002a0,03.

déterminait chaque fois une amélioration aboutissant en dernier

ressort à la disparition des accès et vertiges pendant trois mois. Le

médicament semblerait convenir de préférence aux épileptiques

atteints de dermatoses.

Avec le bromure de sodium, nous abordons la grave question de la

sélection des agents chimiques basée sur le plus ou moins de rapports

physiologiques que possède le métal avec les humeurs de l'écono-

mie, l'alcalinité du sang, par exemple, dérivant de la soude. Est-il

plus actif et cependant moins dangereux que le bromure de potas-

sium ? Les indications bibliographiques émanées d'autorités telles

que IlosenLhal, Martin-Damourette et Pelvet, Trousseau et Pidoux,

Gubler, Dumont, Iluette, Bennett d'Edimbourg, W. Hammond, pa-

raissent affirmatives. Ainsi en est-il de la pratique deM. Hublé, qui

prescrit des doses croissantes (I gr. à 10 gr ) et se garde bien, l'ef-

fet thérapeutique obtenu, de diminuer graduellement les quotités ;

attendant, à l'exemple de M. Legrand du Saulle, que le bien-être

persiste quelques mois, il ne diminue pas la quantité mais l'admi-

nistre tous les deux jours la première quinzaine et tous les jours

pendant la seconde. Dès que l'épilepsie a disparu pendant dix-huit

mois, le bromure de sodium est donné tous les trois jours pendant

la première quinzaine, tous les jours durant la seconde, ceci peu-

dant deux ou trois ans encore après la rétrocession totale des

accès et vertiges. Suivent quinze observations dont la première

373 i BIBLIOGRAPHIE.

(Observation XXXII) équivaut à une guérison complète au moins

pondant huit mois chez une petite enfant de trois ans, les autres

témoignant, a l'exception des trois dernières, d'un effet très puis-

sant de la médication.

En somme, sans vouloir s'engager dans des considérations de

thérapeutique comparée au moins prématurées, l'auteur, tout en

maintenant au bromure de potassium sa suprématie, lui reproche

son inertie en certains cas, son action toxique à hautes doses. Il

n'en serait pas de même pour les trois autres bromures. Le mono-

bromure de camphre mériterait d'être choisi dans l'épilepsie verti-

gineuse, le délire postepitcptique, et l'état de mal. Au bromure de

zinc, il faudrait réserver les accidents convuisisssm vivant a l'ad-

ministration des bromures alcalins. Egalement inoffensif et bien

toléré, le bromure d'arsenic conviendrait chez les épileptiques af-

fectés concurremment de dermopathies. Enfin c'est le bromure de

sodium qui, se rapprochant le plus dans sa base de la constitution

chimique des éléments séreux de l'organisme, semblerait devoir

mériter la préférence. Et de fait, les arguments présentés nous

paraissent rationnnels. P. K.

INDEX BIBLIOGRAPHIQUE

Enseignement des sourds-muets par la parole; par L. Guyot ; thèse de

Paris, 1881.

De l'emploi de la Fève de Z dans le traitement du tétanos ; par

G. E. Cnantcn; thèse rle Paris, 1881.

De la coexistence de la méningite suppurce et de la pneumonie au troi-

sième degré ; par B. Sm.vx ; thèse de Paris, 1881.

Essai sur l'a n 711,sie l-ri iini(ili qîie 7.çolée; 1),ii- Il. Crnnt : ;thèsrtle Paris, issi.

De la révulsion iz la nuque dan* les affections chroniques du cerveau et

de ses enveloppes ; 1r Emm. 13c thèse de Paiis, 1881. 1.

Considérations cliniques sur la folie épileptique et particulièrement sur

l'aura; par P. A1119 ; thèse de Paris 188 1.

Contribution il l'étude de* modifications rl(, la sensibilité dit membre

supérieur consécutives aux lésions nerveuses; par G. 111mcnnt.r; thèse de

Paris, 1881 .

Des lésions syphilitiques du raclas; par L. LEtOT; thèse de Paris, 1881.

Contribution it l étude de la névrite trattnzalrtte; par J. 12cr-Dnnucnu;

thèse de Paris, 1881.

Description d'un nouvel excitateur électrique ; par Tunctuff (atec une

planche), (in La SI)ej,li ? e21tale, 1881, fasc. 9.)

Contribution an traitement de la gastralgie (nerveuse) par les courants

constants- par ]taffae ! eVt/.<0[i, 1, in // Morgagni, 1881, fasc. G.

De l'aphasie par t'. A. Cu.onnc; thèse, 1 882.

Elude. sur le traitement des fractures indirectes récentes du rachis; par

S ? M.CAXAD, thèse, 1881.

Les Eaux de Lanzalou et l'ataxie locomotrice; par A. CoT. ; thèse, 1SS2.

Etude sur les tumeurs malignes des os du crâne', par Mercieh-Yalen-

Tov; thèse, 1881.

Quelques observations derhiimalisme céreLrol; par\Lllnnntcox; thèse 1881. t.

Essai sur la diminution de l'urée dans l'atrophie musculaire progres-

sive ; conséquences qu'on peut en déduire au point de vue du siège de la

formation de l'urée dans l'organisme; par H. I'E4LEGnla; thèse, 1881.

FAITS DIVERS

Académie royale de -médecine de Belgique. Prix. Extrait du p ? 'o-

gramme des concours. foi2élé2)a, un anonyme. Elucider par des

faits cliniques et au besoin par des expériences la et

la thérapeutique des malidies des centres nerveux et principale-

ment de l'épilepsie. Prix : 8 000 francs. Clôture du concours :

31 décembre 1833. Des encouragements, de 300 à 1,000 francs,

pourront être décernés a des auteurs qui n'auraient pas mérité le

prix, mais dont les travaux seraient jugés dignes de récompense.

Une somme do 25,000 francs pourra être donnée, en outre du

prix de 8,000 francs, à l'auteur qui aurait réalisé un progrès capi-

tal dans la thérapeutique des maladies des centres nerveux, tel

que serait, par exemple, la découverte d'un remède curatif de

l'épilepsie.

Conditions des concours. Les mémoires, lisiblement écrits en latin,

en français ou en flamand, doivent être adressés, francs de 1)0 ? 'I,

au secrétaire de l'Académie, à Bruxelles. Seront exclus du concours :

1° les mémoires qui ne rempliront pas les conditions précitées;

2° ceux dont les auteurs se seront fait connaître directement ou

indirectement ; 3° ceux qui auront été publiés, en tout ou en par-

tie, ou présentés 1 un autre corps savant ; 4° ceux qui parvien-

dront au secrétariat de la Compagnie après l'époque fixée. L'Aca-

démie exigeant la plus grande exactitude dans les citations, les

concurrents sont tenus d'indiquer les éditions etles pages des livres

auxquels ils les emprunteront. Les mémoires doivent être revêtus

d'une épigraphe, répétée sur un pli cacheté, renfermant le nom et

l'adresse des ailleurs. Le pli annexé i un travail couronné est ouvert

en séance publique par le président, qui proclame immédiate-

ment le lauréat. Lorsqu'une récompense seulement est accordée

à un mémoire de concours, le pli qui y est joint n'est ouvert du';1

la demande de l'auteur, faite dans le délai d'un an Après l'expi-

ration de ce délai, la récompense ne sera plus accordée. Le

manuscrit envoyé au concours ne peut être réclamé ; il est déposé

aux archives de l'Académie. Toutefois, l'auteur pourra toujours,

après la proclamation du résultat du concours, en faire prendre co-

pie à ses frais, en fournissant au secrétaire de la Compagnie la

preuve que ce mémoire est son oeuvre. L'Académie accorde gratui-

Lement, aux auteurs des mémoires dont elle a ordonné l'impression

cinquante exemplaires de ces travaux tirés à part et leur laisse

la faculté d'eu obtenir un plus grand nombre à leurs frais.

383 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

l ota Les membres titulaires et les membres honoraires de l'Aca-

démie ne peuvent prendre part au concours.

Asile de Baox. Concours pour l'internat. A la suite de ce con-

cours, ont été nommés : internes titulaires : 111\I : I ouclierand, TaLi,

Roussel; - internes suppléants : MM. Domeck et Laurent. L.

Prix Hammond. Sous le litre de Prix Hammond, l'Association

neurologique de Kew-York propose un prix de ? i00 fr. à décerner,

au mois de juin 1882, à l'auteur du meilleur mémoire relatif aux

fonctions de la couche optique chez l'homme.

Les conditions du concours sont les suivantes : 41 le concours

est ouvert à toutes les nations ; 2° les mémoires doivent s'appuyer

surdos observations et des expériences originales recueillies sur

l'homme et sur des animaux inférieurs; 3° les mémoires doivent

être écrits en anglais, en français ou en allemand (dans ce der-

nier cas ils doivent être en caractère italien); 4° les mémoires

doivent être adressés, affranchis, avant le Il, février 1882, au

Dl E.-C. Seguin, 41, West, rue n° 20, cité de New-York; chaque

mémoire portera une devise, qui devra être répétée dans une en-

veloppe cachetée contenant la carte de visite de l'auteur ; 1° le

mémoire couronné sera la propriété de l'Association, qui se char-

gera de le publier.

Nominations M. rwcln : n, directeur-médecin de l'asile de

Rodez, est nommé directeur-médecin de l'asile de Limoges, en

remplacement de M. Bonnet, admis dans le cadre de disponibilité.

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE

Aliyoixe (J.). Traitement et delà 1)li th iicpii ln ? oiiai-e par

l'éleclricrté. Brochure de 19 pages, Paris, librairie .1. Delili[tye et

E. Prix : 1 fi. 50.

l3cwo (G.-M.). llie case of Guiteait a p<yc/)0<o.'y ! 'c< ! / study. Brochure

in-8" de 3G pages, Kew-Yoik. (Extrait du Journal o/ nervous and mental

flese(7.çe, 1882.)'

- 71-niipe muscle rcading. Brochure in-8^ cart. de 40 pages et

grauires intercalées dans le texte.

CnoTUens(1 ? D.). The trance stale ir7eLriety nieclico-legal-elatio71s.

Brochure m-8 de 39 pages, Hartford, Conn., The case Loclwvoodet-Brw-

nard company.

Durand (.M.). De l'écritureea miroir (étude sur l'écriture de la main

gauche dans ses rapports avec l'aphasie). Brochure in-8^ de -)5 pages.

l'ati,, librairie A. Dt,i,iliae. et E. Lecrosnier. Prix : 1 fr.

Fini fih.). Contribution à l'cliulc des troubles fonctionnels de la

vision par lésions cerébiales (Anibljopie croisée et hémianopsie). Un vo-

lume in-8" de 240 pages .née 49 figures dans le texte. Anx bureaux des

3rchicesder\'eurologie. Prix : 3 h'.bû. Pournosabonn6s,pux : 2fr.50.

TABLE DES MATIERES

/Esthésiogènes, par VigOLII-011X, 86.

Aliénés criminels, 226.

Amaurose consécutive aux lésions

du sourcil ou de la région orbi-

tawe, par Santos Fernandez, 98.

Amblyopie croisée et hémianopsie

d'origine cérébrale, par Ch, Féré,

338.

Anatomie comparée du système

nerveux central, 237.

Anomalie de formation particulière

du cerveau et de la moelle, 233

Anthrax rave (améboration chez

un paraij tique général a la suite

d'un), 221.

Antonomasie, 106.

Aphasie (coutrib. à l'étude de 1'),

par Raymond et I)re51'uus, 80.

Apoplexie bulbaire avec paralysie

croisée de la sensibilité, 229.

Asile d'aliénés de Ceylan (cas ob-

senésà l'), 1)il Pltxtoli, 223.

Asiles d'aliénés de la Seine, 121,

268.

Asile (le Yillcjuif, 269; - de Sir-

reguenniies,108; pourles aliénés s

criminels, 107; - Sailite-Anne

(scandale à 1'), 363.

Asphyxie locale des extrémités,

230.

Ataxie locomotrice (et syphilis),

par Althaus. 3'9 - (conservation

des réflexes tendineux dans l'),

par Tlnème, S'il.

Béribéri au Brésil , par Tarlssan,

245.

Cachexie z par

Biaise, 60, 15t.

Cerveau (sur quelques points de

l',watomie et de la physiologie

du), har Bauney, 3r"i.

Cervelet (atrophie du), 360.

Chaire de clinique des maladies du

système nerveux, 268.

Cloree dite électrique, 213.

Choroidien (altérations du pig-

ment) chez les aliénés, 361.

Circomolutions cérébrales (variétés

des), par Giacomiui, 318.

Commotion rétinienne el commo-

tion cérébrale, 238.

Congrès médical tle Sévillc, 270

des neurologistes et dcaaliémstes

de l'Allemagne du sud-ouest,

23'). i.

Contractures, 361.

Corne d'Anunoii (chez 1'lioiiiiiie et

quelques singes) , par M.

Ducal, 1 ; (lésions de la) dans

l'épilepsie), par Coulbault, 373.

Crâne (fractures non iiioilelles de

la base du), 99 ,-(trél : ,maLOn du),

chez un aliéné, guérison complète

par Mackensie Bacon, 225.

Délire chronique, 10'i.

Délire des grandeurs (il n'est pas

un signe exclusif de la paralysie

générale par Lau-

tac, 21s.

Démence aiguë chez une jeune

femme, moi par phttiisic pul-

molaire deux ans plus tard,

sans guérison de la maladie

mentale, par Z

222.

Diplopie paralytique, 931.

Eczéma chronique âué : i par les

courants galvaniques, par 11,1111-

inotil], 93.

Elongation désuets, partit-

l.ovohi, 96 (les cépliali-

ques, 211 L - du nerf sciatique

pour une névralgie, par Mac-

intosh, 93.

382 TABLE DES MATIÈRES.

Empyème (accidents reflètes ala

suite de l'), 2115.

Epilepsie (lésions de la corne

(l ? 111111pn ClallS l'), 373 ;-(mnl ifi-

cation du poids du corps à la

suite des acci;s), 23fi;-(accèsd')

pendant le sommeil clilorofor-

micpie, 239; - (roclierclles cll-

niques et thérapeutiques sur l'),

376.

Ergot de seigle (action (10 l') sur

le système nerveux central, 242.

Er«onsme (psclioses claus l'), 1>ar

Siemens, 218.

Galvanomètre (question du), par

ltem;tl., 9 ? - tar l3cruli.tnlt, 93.

Gcullal (iwersion du sens), par

Chiircot et Magnan, 53.

"Gheel (lettres sur), 358.

Hallucinations (et terreurs noc-

turnes chez les enfants et les

adolescents), par Debacker, 371 ;

- (dans la Sie

par Ginna, 217.

116mianopam d'oriiue ci·rébrale,

338.

Iléniiathétose, 230.

Hémiplégie spasmodique infantile,

231.

llbmorrliayes pwmitles, immé-

diates ou (litectes des ei)tti-

cules cérébraux, par Sanders,

tOO.

Hydrocéphalie, 366.

it\pefe\cttabitttéiieuro-muscutai-

1-29, 310.

Hypnosis reliviv·u, liar'l'ul.e, 223.

Hypnotisme chez les hystériques

(contribution à l'étude de l'), par

Charcot et Richer, L ? 9, 310.

Hystériques (caractères, moeurs,

état mental des), par Hucbard,

187.

111'SLet'O-i'1111el1Sle (étmlcs cliniques

suri'),par Richer, 371 ; - (notes

llour servir à l'histoire de l'),

par Féré, 160, 2SI.

Insula (lésiou ancienne du lobule

de l'), par Bourneville et Boit-

naire, 176.

Laryngées (crises) tabétiques, par

CliercLewshi, 319.

Localisation dans les fonctions du

cerveau, par Seguin, 105 par

Exner, 368.

Magnétisme animal (nouvelles exl)é-

riences sur le), par Grutzuet, 91. 1.

Maladies mentales (leçons de Guis-

laiu sur les), 110.

Maladies mentales et nerveuses (in-

fluence de notre civilisation pré-

sente sur le développement des)

par Jewell, 21 î. î.

Manie aiguë, 212

Métalloscopie, métallotbérapie, a;s-

1),Ir \'iâuurou, 8G.

Alet11ti,c (rapport 11l(-(IICO-Iégal sm

un cis de tentative de), 360.

Microcéphale (crâne et cetveau

d'une), Jeiiseli, 211. 1.

Mmrninc ophthalmique, liar Cli.

Féré, 331.

Moelle allongée (faisceau longitu-

tlmnl postérieur de la calotte

dans la), par Rollei, 345.

Moelle épinière (décussation des

fibres inbibitoires de la), par Ott

et Smith, 31 ? i ; - (lésions de

l'axe gris de la), dans un cas de

syphilis pil' .1LI-ISCII, 103 ;

- (un cas (le la),

par Gilbert, 273. (altération de

la), clans un cas de pied bot va-

rus équin, par Pitres, 319.

Moteur oculaire externe (paralysie

tiainnatique du), par Panas.

331.

Neil' atitlitit' (structure du), par

Eihtzky, 36.

lwCa (élongation des), 93, 96, S'il.

Ne\ra)gieuah0-orh]tijn'eiutcruut-

tente, par Seciginuller, 91.

\cvralgie il(·o-lomb;nrc syptuma-

ti(illo (les affections des organes

génitaux de la femme, 216.

Nominations : JIM. Bavle, Bergeron,

Bui,tlierail(l, Billoti, Boudin, Boii'

teiller, l3riaud, 127 ; - Caryle

270; - Faucher, 380; Faure,

127; Gallulain, ('ii-oLi, 270 ;

lltllcnr,uul, 27U; - l.t ? ras,

127 Laborde, Llautn. 26) »

Longaud, 270 ; Marchant,

l'uus, 1 ? 7;-Scluti, ? B.

Novau lenU(urttte (structure du),

6.

Oculaires (ipiclques points de la

pathologie des lésions de la sy-

1)1)ilis céi-él)rale et spinale), par

Stelll,Lll Bull, 95.

Olilitlialntie sympathique, 238.

Ophthalmique ( 1 i..Izllllc), 351.

TABLE DES MATIÈRES. 383

Optique (bandelette, chiasma),936.

.( ? (distubution du nerf

dans la tétme). 311.

Organes centraux (action de la

lymphe sur les), 210,

Paralysie agitante guérie, etc., par

Mann, 95.

Paralysie ascendante aiguë, 'i0,

Paralysie du nerf

pnuiimogastiiqiie, par Gulat,

2'ili.

Paralysie générale (Hallucinations

dans la), 217 ; - (état mental et

pupille dans la), 356 ; - Décoiti-

cation de la btil)-3taiitle blanche

dans la), 36n; - (lr.emlo-)rvr.tly-

sie, d'oiigiue saturnine), 217; -

( Iseu<lo-puraly sie alcoulutue,, 376.

l'.u.uny'olclunu, multillu; v3S,

Patronage familial (lettres sur le),

358.

Pédoncule cérébral (structure du

pied du et du noyau leuti-

lonne), par Pasternatzky, 316.

Pied bot varus équin (altération de

la moelle dans un cas de), 310.

Piacidia crythrina, par Ott, 9.

Pneumogastrique (paralysie diph-

thérique du), 216.

Pouls carotidien (étude expérimen-

tale sur l'état du - pendant le

travail intellectuel), par Glcy,

216.

Prix 3611 - de l'Aca-

démie de médecine de Belgique,

379; Ilannnund, 380.

Procès Laros (le) au point de vue

psychologique; par Mann, 220.

Psychoses (les) dans l'ergotibille, ! )8.

Pupille (fixité de la', 231; - dans

la paralysie générale, 336.

Quadrijuineaux (anatomie des tu-

bercules antéiieurs) par Gan-

sor, 3 iJ.

réflexes tendineux (élude sur les',

par Prévost, 353; - (conserva-

tioii des dans locolilo-

hic['),2t ?

1LIleaca (accidents survenant après

l'opération de l'cil] 1) par J.

.Martin, 215.

Sabbat (le`, par etteiii-

tuiet',t,9't9.

S;ttormnc (pseudo-paialysie géné-

ralC, d'myiuo', 217. *

Sens génésique (inversion du), par

Charcot et Magnan, 53.

Sclérose cliltidie (contubution à

l'étude de la), par Eikholt, 86.

Sci,ttl(ltl(3 ,Iléiie

longation, 93.

Société nW lico-ls5cltulogiyuc, 10>, >,

226, 361. - (10 la

I)LOVIII(;(3 du Lilnn, IOS. - de 1 ?

cliiiitiie et des maladies nerveuses

de Berlin, 529. d'anthropolo-

iC ? 7J.

Syphilis (et ataxie locomotiice),

3'iU; - (lésions de l'axe glis de

la moelle épinière dans un cas de

récente), 103.

Système noivuux central (action

de l'ergot de seigle sur le), 212.

Tabès dorsal (sur cei laines phases

peu connues du), par Blizzard,

103. - (crises laryngées du), 3b9

Terreurs nocturnes chez les Cu-

Inuta et les adolescents, 37 i.

Tétanie, 23 j.

Travail intellectuel (pouls ctioti-

(licii pendant le', 216.

Trépanation du crâne chez un

aliéné, goW amt complète, par

Mackintosb, 223.

Ventiiciilcs cérébraux (étude sur

les héinorihagies primitives, im-

médiates ou directes des), par i-

E. Sanders, 100.

TABLE a

DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS

Althaus, 319.

Bacon (Mackcnsie), ? 3, ? 5.

Baillarger, 361.

Bail. 307.

Baumgartner, 239.

Becker, 238.

l3crliu, ? 3S.

Bernard ID.), 331, 333, 373.

Benibardt, 93, 230.

Bosser, 109.

Biaise, 60, lil. l.

Blanchard, 93.

Blanche, 367.

lilumenthal, 231.

Bonnaiic, 176.

Bourdon, IOG, 107, 3(i8.

Bourneville, 115, 176.

Briand, 107, 229, 363, 361.

lîrissaud, 371.

(Steman), 95.

Bumm, 344.

Buzzard,103.

Causer, 345.

Charcot, 53, 120, 310.

Charpentier, 107,357, 358,359,360,

3G1, 3G1, 3GG.

Cberchevvskv, 319.

1'J : i, WG, 227, 228, 366.

Coullrmlt, 371.

Dally, 229,361, 363,361.

Delwher, 's74.

Delasiauve, 106.

Drevlbus, 80.

Duval, 1.

Eickholt, 86.

Erlitzkv, 36.

Exner, '368.

Falret, 106 929, 361, 366.

léré(Ch.), 103, 101, 160, 241, 213,

246, 247, 248, 281, 337,347,3'.9,

350, 331, 375, 376.

Foville, 107. 228.

Friedjeich, 233.

Z

Carnicr, 114.

Giacomini. 347.

Gilbert, 273.

Girnm, 247.

Gley, 216.

Grutzner, 91.

Gucrtin, 213.

('tiislitiii, 110.

Gulat, 216.

tl,iminoii, 93.

Ilirscliberg, 231.

llotimatiii (con), ? 2'il. t.

Hublé, 376.

Huchard, 187.

Jarislt, 103.

Jensen, 21 1.

Jevvell, 217.

Jolly, 236.

I raval (l'.). 91, 9S, 110 217, 220,

3,i, 345, 374, 378.

Kronecker, 230.

Lacaille, 375.

I,acassat;ne.26S.

Lautar, 218.

TABLE DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS. 38à

Le Bailly, 246.

Legrantl du Saulle, 106.

Léo, 109.

Lidell, 99.

Limier, 22S, 363, 3(;1.

Luys, 103, 106, 365.

Mackintosh (Norman), 93.

Jfaun (L.-C.), 95, 220.

Magnan, 53, 106, 107.

\Iarie (l'.), 3nS.

llat'L t (G.), N43.

\Iay'or, 3.>G.

(A.), 247.

Motet, 107, 227, 3G3, 3G. ,

Musgrave-Clay (R. de), 96, 100,

103, 221, 222, 223, 22'1, 2'- ? i.

Nasse, 108.

Olier (H. d'), 346.

Ott (J.), 9l, 3-i.

Panas, 331.

Z

Pignol, 93.

Pitres, 319.

Plaxton, 223.

Prévost, 353.

Ramier, 341.

Raymond, 80.

Ileinak, 01,230, 234.

Richard, 101.

Richer, 129, 310, 369.

Ripping, lOS.

Roller, 236, 313.

Rumpf, 250.

Sanders, 100.

Savage, 221.

Schuchanlt. I OS.

Schultze, 210.

Seeligmuller, 91.

Seônin, 104

Senator, 229, 231, 231. i.

Scemens, 21s.

Smith, 345.

Stilling, 236, 311. i .

Talamon, 93, 91, 93, 96, 217.

Tarissait, 233.

Teinturier, t[5. 249.

Tiiieme, 21#4.

Tuczek, 242.

(tiacl.), 23.

Viuurou, Si. 91, 92.

Voisin, lOi, 106.

Westphal, 233. 231. «

Wie(leislie,iiii, 2.37.

Wilkowski, 96, 212.

Zaeher, 235.

EXPLICATION DES PLANCHES

EXPLICATION DES PLANCHES

LANCI1E PREMIERE

Fig. 1. Coupe Site de l'encéphale de l'homme au nireau des

corps genouillés; - C0, couche optique; CC, corps genouiIIGs; - V, ca-

N lié du rliverUcule sphénoidal du vennicule latéral H, saillie blanche

mtra-ventriculaue de la corne I'-lmmon; - CH, circonvolution de l'hip-

pocampe (2 circonvolution temporu-occipitale). Crossisc. 3 fois.

Fig. 2. - La corne d'Ammon de la ligure précédente grossie 10 foi3.-

Il, saillie intra-rentriculaire de la coine; - CB, corps bordant; PC,

plexus choroïdes, - 1, entrée de la pie mère dans le repli mésentén-

forme; - 0, subiculum; e, entrée du sillon qui sépare la circonvolu-

tioii de l'hippocampe de la circonvolution godroimée; a, couchedesubs-

tance amorphe; - b, stratum yanulosum ; - c, stratum radiatum; -

z couches des cellules nerveuses étoilées; ? couche de substance

blanche médullaire.

390 EXPLICATION' DES rLNC11r ?

PLANCHE Il

Fil. 3. Coupe transversale de la corne d'Ammon d'un singe cynocé-

pltale (Grossiss. 12 fois). - Lettres comme pour la figure 2.

Fig. 4. Idem chez un singe cébien (Grossis ? 6 fois). Lettieç

comme précédemment; de plus : Cp, corps calleux; CC, circonvo-

lolion du corps calleux ou gyrus fomicatus; h, bandelette du tiigone.

7 ? y. 5. Coupe de la moitié iiiféiteiii,e, et figure 6 coupe (le la moi-

lit, supérieure (sous-calleuse) de la corne (lit mouton. Let-

tres connue ci-dessus.

EXPLICATION' DES P7.\\C1TI : C. 39) 1

PLANCHE III

Fey.7. - Rat; coupe lioricontale; roc51se. 8 fois; lettres comme ci-

dessus.

Fig. S. Rat; coupe verticale; idem.

Fy. z coupe transversale. Gi-osmss 5 fois et demi. Les por-

tions sous-calleuses des deux cornes d'Ammon sont «ondées sur la ligne

médiane; 1', cavité de l'hémisphère; - CC, partie coiticale homologue

du gyrus furmcatus; - CI), corps calleux; C ? cncon\olution de 1 hip-

pocampe ; /i, b, stratum graiiulosum do la ciiconvolulion godronnée; -

e, sillon qui sépare la circonvolution godronnée d'avec la circonvolution

de l'hippocampe; C13, coips bordant.

Fig. 10. Taupe; cmpe horizontale, rssiss.7 7 fois. Lettres comme

ci-dessus.

11 1 1 . Cliaiive-souiis; coupe horizontale. 16 fois. Lettres

comme ci-dessus.

392 EXPLICATION DES PLANCHES.

'LANGUE 1\'

Développement de la corne d' luuuon et des plerus rhorniiles.

Fig. 12. - Coupe 110li70lltllC de l'encéphale d'un embryon de mouton

long de 16 millimètres. - cavité des hémisphùies (ventricules laté-

iau\) ; 2, cavité de la couche optique (3e ventricule); 3, cavité des

tubercules quadrijumeaux; CS, corps strié; pm, pie-mcie en \oie

de formation, - P, plexus choioides.

Fig 13. - Même coupe, mouton long de SI millimètres. Lettres comme

ci-dessus, de plus F, fente de Monro.

Ilig. il. - Coupe homoutale de l'encéphale d'un emlnyon de lapin,

long du 17 millimètres; lettres comme ci-dessus, A', licti de la forma-

tion de la corne d'Ammon.

Fiq. 13. - rmlyon de lapin, long de 36 millimètres ; ? vaisseaux

placés dans le sillon qui sépare deux plis, lesquels vont former les deux

circonvolutions de la corne d'Aimnon.

Fig. 16. - Lapin presque à terme, et figure 17, lapin a terme. Lettres

comme dans les figures de la Plaxuic 111. (Comparez notamment avec la

figu, e 8.)

EXPLICATION DES PLANCHES. 393 ? ,

PLANCHE V

Fig. I. - 3/7 Ilart. - Coupe transversale du tronc du neif auditif

traitée par le picro-carnmaate. Faisceau postétteur supérieur montrant des

tubes nerveux à myéline volumineuse et presque égale avec des cylindres

d'axes larges et colorés vivement.

Fig. ? 3/711art. : Trois tubes nerveux à myéline du faisceaupostétieur

supérieur du nerf auditif soumis a l'action de l'acide osmique à 1/2 pour

100.

Fig. 3. z Hart. : Coupe transversale du tronc du nerf auditif trai-

tée par le hicro-carmmate. Faisceau iiloiitrliit des tubes

nerveux de diverse dimension avec des cylindres d'axes sous l'aspect de

petits points qui ne se colorent pas par le picro-carmin.

Fit. fi. 3/7Hart. : Deux tubes nerveux à mvéline du faisceau antéro-

inférieur du nerf acoustique soumis l'action de l'acide osmique. Sur

toute la longueur de ces libres se présentent beaucoup de rendements de

diverse forme. On ne reconnaît pas les noyaux de la gaine de Sclmanu

et des étranglements.

Fig. 5. 3/1 Ilirt. : Coupe transversale du tronc du nerf auditif titi-

ée par le picro-carniiu montrant au milieu une large cloison conjonctive.

A, Tubes nerveux avec (les cylindres d'axes larges et colorés. Il, Tubes

nerveux avec des cylindres d'axes fins qui ne se colorent pas.

Fig. 6. 3/1 Hart. : Coupe transversale du tronc du nerf auditif trai-

tée par le picro-cainmiate. Faisceau postéro-supéiieur montrant parmi

des tubes nerveux volumineux un îlot de la substance grise avec beau-

coup de cellules ganglionnaires vivement colotées. Il s'échappe de la

substance grise des conjonctifs jusqu'au boni du nerf.

171g. 7. 3/1 Hait. : Coupe transversale semblable de l'autre individu

montrant deux îlots de la substance grise avec des cellules ganglion- 1 -

naires.

rit. 8. 3/9 Hart. : Trois cellules ganglionnaires de la substance grise

des îlots mentionnés. On voit la membrane propre autour des cellules,

protoplasma finement grenu, un grand noyau ovale avec un nucléole

et des prolongements protoplasmatiques.

394 EXPLICATION DES PLANCHES.

l'I,ATCIIL '1

L, 1, l'ojer ancien .y,mV ilIruV le loblile de l'insula.

F2, atrollW de la tloiièllie circonvolution frontale.

F u, cuconvoliition Iroutaie ascendante dont l,t 1),ti'lle niléiieuie Clt

atrophiée

l' (1, ciicomoluliun pariétale ascendante dont niléiieuie est

atrophiée.

1 ? lésion de la preniioie Lulli I)OI'O-b [)Il é il 01

T=, deuxième cireomolution temporale dont est

lésée

-, lobule du pli combe.

0, lobe orbitaire (face intérieure du lobe frontal).

.1/, membrane résultant . des repli» de la pie-inèie qui enveloppaient

entte inities la 1)1.elllièie. ureomolution temporale (L le lulmle panétal

inférieur; ^° des débris de ces même» circonvolutions.

EXPLICATION DES PLANCHES. 195

PLANCHE VIS

.llcainyo-eie : éphalile chronique gèncraliséc.

Séparation de la substance (le la substance blandie sur toute la

face convexe de 1'liéiiiibl)llèic droit, excepté sur le lobe teniporo-sphé

nudal, au imeau duquel il n'existait que des adhéiences partielles.

1, I.L ItlhUahY, .my. - 582